(Neuf heures trente-trois minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions
publiques dans le cadre de la consultation générale sur le rapport quinquennal 2016 intitulé Rétablir
l'équilibre —
Rapport sur l'application de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels et de la Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé.
Mme la secrétaire, il y a des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Montpetit (Crémazie) est remplacée par M. Plante
(Maskinongé); M. Rousselle (Vimont) est
remplacé par M. Girard (Trois-Rivières); et M. Marceau (Rousseau) est
remplacé par Mme Léger (Pointe-aux-Trembles).
Le
Président (M. Ouellette) : Bonjour, Mme la ministre. Bonjour, chers collègues. Bon début de
semaine. Nous entendrons cet avant-midi les organismes suivants :
la Promutuel Assurance, le Conseil du patronat du Québec et l'Association pour
la défense des personnes et des biens sous curatelle publique.
Document déposé
Avant de débuter nos travaux, vous vous
souviendrez, la semaine dernière, lors de la venue en commission de la Fédération québécoise des sociétés de
généalogie, on nous avait promis un document qui nous est arrivé, qui est
toutes les démarches faites par la société
auprès du Directeur de l'état civil. C'est un document qui est très à propos ce
matin. Je le dépose publiquement pour les
besoins des membres de la commission et pour que les gens qui nous suivent
puissent effectivement obtenir réponse à certaines interrogations qu'ils
avaient.
Auditions (suite)
Nous allons
dès maintenant débuter par M. Jean-Denis Morin — je ne me trompe pas? — qui est le vice-président de la Promotuel Assurance, qui va nous présenter
les gens qui l'accompagnent. Et j'ai bien compris que nous aurions une présentation de 10 minutes qui sera
tripartite ce matin, là. Et on va voir si, effectivement, vous avez répété pour
rentrer dans notre 10 minutes. Mais ça,
ce n'est pas plus grave que ça. Par la suite, il y aura un échange avec Mme la
ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Morin, à vous la
parole.
Groupe Promutuel,
fédération de sociétés
mutuelles d'assurances générales
M. Bouchard (Omer) : M. le
Président, c'est Omer Bouchard, le président du groupe.
Le Président (M. Ouellette) :
Oui?
M. Bouchard
(Omer) : Parce que, sur votre ordre du jour, il y avait Jean-Denis, mais il y a eu une compréhension qui n'a
pas été faite. Jean-Denis était le substitut. Je ne veux pas perdre plus de
temps que ça.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci.
M. Bouchard
(Omer) : Omer Bouchard, président du conseil d'administration du Groupe Promutuel. Mme la ministre, M. le
Président, MM. Mmes les membres
de la commission, Mmes et MM. membres des fonctions
publiques, d'entrée de jeu, nous vous remercions pour nous donner
l'opportunité de venir s'exprimer sur le rapport quinquennal 2016
portant notamment sur l'application de la Loi de la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé.
Les modifications proposées sont dans la bonne direction. Nous réintégrons notre disponibilité et notre intérêt à participer à cet important chantier, de concert
avec la responsabilité des dossiers. Notre présence, ce matin en
commission parlementaire, nous permet de
parler au nom de 640 000 membres qui souhaitent recevoir des services de
qualité. Nos assurés, qui ont fait le
choix du modèle mutualiste, l'ont fait au nom de l'économie régionale. Ils ont
aussi choisi de se regrouper et de faire valoir
leur spécificité régionale. Ils encouragent par le fait même l'emploi dans la
région et le financement des activités
régionales. Il y a un fort sentiment d'appartenance, et c'est ce qui fait la
force de nos services.
Le Groupe Promutuel est présent dans le paysage
québécois depuis 165 ans, et emploie 1 925 personnes dans 17 sociétés, et ont une centaine de points de
service dans la province. Notre volume de chiffre d'affaires est de
778 millions, et nous avons un actif de 1 milliard au fonds de
Promutuel. L'un qui nous donne... un des plus grands assureurs de dommages au
Québec. Bien que Promutuel soit ancré dans la communauté et qu'elle soit
reconnue dans chacune des régions comme
étant un partenaire important, elle fait face à des grands défis reliés aux
lois actuelles en raison de son modèle mutualiste. Or, c'est cet aspect
qui est inconnu du public.
Afin de bien illustrer, dans un premier temps,
M. Simon Girard, vice-président, Affaires corporatives et gouvernance, fera un retour sur le contenu de
notre mémoire. Il fera un survol de notre modèle d'organisation et
mettra emphase sur la nécessité d'arrimer la
réglementation du modèle mutualiste. Par la suite, M. Fauchon, Sylvain
Fauchon, chef de la direction, viendra
conclure en exposant la demande effectuée au Conseil exécutif récemment quant à
la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé. Aussi, je suis accompagné ce matin de Mme France Beaudry, responsable des services juridiques, et
de M. Jean-Denis Morin, vice-président du conseil. Je remercie de
votre intention. Je cède la parole à M. Girard.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Girard.
• (9 h 40) •
M. Girard
(Simon) : Merci,
M. Bouchard. Merci, M. le Président. Le Groupe Promutuel, qui s'est taillé
une place de choix dans le monde de
l'assurance, regroupe 17 sociétés mutuelles d'assurance, soit
17 assureurs distincts considérés comme des tiers les uns par
rapport aux autres, qui opèrent principalement sur un territoire qui leur est
exclusif. Il n'y a pas d'autre organisation,
dans le marché de l'assurance, qui possède une structure similaire à la nôtre.
Nous sommes le seul regroupement de sociétés mutuelles régi par la Loi
sur les assurances.
Nous le savons tous, l'industrie de l'assurance
est hautement concurrentielle, réglementée et en profonde transformation. Les exigences des clients sont de
plus en plus élevées. Ces derniers demandent un service rapide, au-delà des heures traditionnelles, et ce, au meilleur
coût possible. Notre mission est de répondre aux besoins de nos membres,
d'offrir un service personnalisé qui
encourage les valeurs mutualistes tout en priorisant la sécurité des données,
la gestion des risques technologiques, et nous croyons que le cadre
réglementaire devrait supporter cette volonté en tenant compte de l'unicité de
notre modèle.
C'est
pourquoi nous espérons que les modifications proposées à la loi sur le privé
nous permettront de mettre en oeuvre
des stratégies pour demeurer concurrentiels dans un marché en constante
évolution tout en maintenant la nécessité évidente de protéger les
renseignements personnels. Notre mémoire et la demande présentée au Conseil
exécutif ont comme trame de fond deux
aspects cruciaux pour les activités de Promutuel : premièrement, la
considération du cadre réglementaire actuel s'appliquant à l'industrie
de l'assurance et, finalement, la reconnaissance du modèle mutualiste.
Ces deux
aspects ont un lien direct avec l'équité concurrentielle que nous souhaitons
avoir et qu'il devrait y avoir dans
notre industrie. Sous les mêmes titres que le rapport quinquennal de 2016, nos
commentaires ont été rédigés dans un esprit constructif et collaborateur
et ont pour objectif de bien arrimer la réglementation au modèle mutualiste.
Premièrement, un caractère prépondérant à
réaffirmer.
La Commission d'accès à l'information propose de réaffirmer la prépondérance de la loi
sur le privé et de la loi sur l'accès à l'information. Nous sommes
d'avis, comme la commission, que les dérogations à ces lois devraient être faites avec parcimonie. Nous croyons que le
législateur dispose actuellement de tous les outils pour statuer sur la
pertinence de déroger à la loi sur le privé. Considérant que très peu de lois
dans le domaine privé contiennent des dispositions dérogatoires à la loi sur le
privé, le fait d'assujettir toute nouvelle dérogation à un processus de
consultation publique obligatoire ne
viendrait, à notre avis, qu'alourdir ce processus. Le législateur est bien au
fait de l'importance de ces lois et il possède la légitimité pour
évaluer chaque dérogation et pour statuer sur leur pertinence.
Deuxièmement, pour une plus grande transparence
des organismes publics.
Nous sommes à
nouveau d'accord avec la commission sur le fait que des renseignements
personnels parfois banals sont assujettis aux règles de confidentialité
et ne sont pas communiqués puisqu'ils constituent des renseignements personnels concernant un tiers. De tels
renseignements devraient plutôt être désignés dans la loi sur le privé comme
n'étant pas des renseignements personnels.
L'ajout d'une telle précision dans cette loi serait, selon nous, suffisant pour
permettre que des renseignements banals sur des tiers soient communiqués à une
personne concernée.
Cependant,
l'ajout, dans la loi sur le privé, du critère d'atteinte déraisonnable au droit
à la vie privée des tiers, comme le
propose la commission, générerait davantage de difficultés. En effet,
l'interprétation et l'application de ce critère alourdiraient grandement le processus de gestion de demande d'accès à
des renseignements personnels. C'est pourquoi nous réitérons notre
position, qui stipule qu'une modification à la loi sur le privé pour y préciser
ce qui ne constitue pas un renseignement
personnel serait plus efficace que l'assujettissement à un critère plutôt
subjectif d'atteinte déraisonnable au droit à la vie privée.
La commission suggère également d'adopter un
cadre réglementaire pour protéger le droit des personnes faisant l'objet de vérification d'antécédents
judiciaires. Promotuel souscrit complètement à ce principe
d'encadrement, mais celui-ci ne devrait pas
empêcher d'effectuer les vérifications qui s'imposent, particulièrement dans un
domaine comme le nôtre, où de
nombreuses fonctions requièrent un haut degré de probité et de confidentialité.
L'équilibre entre la protection de la
vie privée et la protection du public doit primer dans ces cas. De plus, la
Charte des droits et libertés de la personne encadre déjà l'utilisation d'informations relatives aux antécédents
judiciaires dans le cadre de l'emploi. Si cet encadrement devait être
revu, il devrait être fait dans le cadre de la révision de la charte et non
dans la loi sur le privé.
Finalement,
pour un renforcement de la protection des renseignements personnels dans le
secteur public et privé.
L'industrie
de l'assurance est déjà assujettie à de nombreuses lignes directrices publiées
par l'Autorité des marchés financiers.
Les obligations de gestion saine et prudente auxquelles nous sommes assujettis,
combinées aux attentes de l'autorité
à cet égard, sont suffisantes pour assurer la protection des renseignements
personnels. L'ajout de règles dans la loi pourrait porter à confusion
pour des industries déjà hautement réglementées.
En terminant,
pour ma part, j'aimerais souligner le fait que la Loi sur les assurances et la
loi sur le privé ne prennent pas en
considération notre modèle mutualiste, engendrant ainsi un débalancement dans
la concurrence dans l'industrie de l'assurance.
Enfin, pour
bien illustrer cette question, prenons le cas fictif de M. Tremblay, dont
le véhicule est actuellement assuré
chez Promotuel Vallée du St-Laurent, en Montérégie. Il souhaite contacter son
assureur pour une soumission en assurance habitation. Après une
recherche sur le Web, il contacte par inadvertance une autre société mutuelle,
soit Promotuel Vaudreuil-Soulanges, et
demande une soumission pour son assurance habitation. Puisqu'il ne mentionne
pas être déjà assuré à Promotuel Vallée du
St-Laurent et que l'agent de Promotuel Vaudreuil-Soulanges n'a pas accès au
dossier de M. Tremblay, ce dernier
procède à une nouvelle soumission. Si la transaction est conclue, en plus
d'avoir deux contrats avec deux
assureurs différents, M. Tremblay ne profitera pas du rabais accordé aux
assurés qui ont deux produits avec Promotuel. M. Tremblay a
contacté Promotuel en croyant confier ses deux assurances au même assureur.
Cet exemple
démontre bien les situations ambiguës qui peuvent survenir dans notre groupe.
Cela nous amène à la demande adressée
par Promotuel au Conseil exécutif, demande que nous nous sommes permis de
soulever dans la lettre de transmission de notre mémoire au secrétaire
de la commission, étant donné que celle-ci porte sur une demande d'amendement à
la loi sur le privé. M. Fauchon sera en mesure de vous en dire davantage
sur la demande formulée récemment.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Fauchon.
M. Fauchon (Sylvain) : Merci,
M. le Président. Donc, en effet, dans un souci d'amélioration du service à la clientèle, nous avons, depuis 2014, entrepris des
démarches auprès du ministère des Finances et du Conseil exécutif afin
de faire reconnaître notre modèle mutualiste. Le point central de notre demande
au Conseil exécutif porte sur un amendement
à la loi sur le privé afin que les sociétés du Groupe Promotuel ne soient pas
considérées des tiers les unes à l'égard
des autres pour la communication et l'utilisation des renseignements personnels
entre elles. Cela permettrait des gains importants en matière de qualité
de service, de diminution de frais d'exploitation et d'adaptation aux nouvelles
technologies.
Le
décloisonnement ne nécessite aucun investissement gouvernemental. Il ne fera
que tenir compte du modèle mutualiste,
qui est désavantagé actuellement par une loi qui est mal adaptée à son mode
d'organisation. Cette demande de décloisonnement est importante pour
notre organisation car elle bénéficiera à l'ensemble de nos 640 000 membres.
Tel que mentionné dans notre demande
adressée au Conseil exécutif, un tel amendement serait, de plus, cohérent
avec la demande d'un ajout à la Loi sur les
assurances qui a été faite dans la réponse de Promutuel à la consultation à la
suite du dépôt du Rapport sur
l'application de la Loi sur les assurances et de la Loi sur les sociétés de
fiducie et les sociétés d'épargne.
Nos mutuelles
ont aussi entamé le processus de rencontre des députés de leurs territoires
pour expliquer en quoi cela nuit au
développement du modèle mutualiste, de l'économie régionale, tout en étant
désavantageux pour nos membres.
En résumé, on
parle ici d'un changement mineur pour le législateur, mais qui serait majeur
pour notre organisation. Il est clair, comme l'ont mentionné mes
collègues, que nous poursuivrons et nous déploierons tous les efforts pour protéger les renseignements personnels dans le
respect des lois actuelles. Nous pourrons bonifier le service à nos
clients en répondant davantage aux nouvelles
exigences et à leurs nouveaux besoins dans un contexte où les technologies
évoluent très rapidement et dans une industrie en changement constant. Je vous
remercie de votre attention. Nous sommes disposés à répondre à toutes vos
questions ou à tous vos commentaires.
Le Président (M. Ouellette) :
Mot de la fin, M. Bouchard?
M. Bouchard (Omer) : Pardon?
Le Président (M. Ouellette) :
Avez-vous un mot de la fin avant qu'on commence avec Mme la ministre, en
conclusion?
M. Bouchard (Omer) : Non. Il
reste les questions.
Le Président (M. Ouellette) :
Ça va? O.K. Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Bouchard,
M. Girard, Mme Beaudry et M. Fauchon. Nous sommes très
heureux de vous recevoir ce matin, et aussi merci de votre mémoire.
J'aimerais
comprendre un petit peu plus votre dernière demande. Nous avons
17 assureurs distincts, O.K.? Et le modèle est un modèle mutualiste. Est-ce qu'il y a un contrat qui gère
tous les 17? Comment fonctionne l'autorité à l'intérieur de ce modèle mutualiste? Parce que vous voulez partager les
renseignements personnels, et, pour moi, je regarde ça, il y a 17 entités différentes. Et pourquoi vous
devriez être traités différemment que les autres compagnies d'assurance?
Alors, c'est cette gestion et gouvernance que j'aimerais mieux comprendre.
M. Girard
(Simon) : Rapidement, Mme la
ministre, comme je le disais en introduction, on a un modèle qui est unique au Québec, donc on est les seules sociétés
mutuelles au Québec. Et, de par la Loi sur les assurances, les sociétés
mutuelles doivent être regroupées en fédération. Donc, nous, à Québec, on
travaille à la fédération, qui encadre et surveille l'ensemble des
17 sociétés mutuelles.
Donc, depuis 160 ans,
la fédération a déployé certains processus, certains mécanismes qui font que,
de plus en plus, à l'intérieur du
groupe, l'ensemble des sociétés mutuelles fonctionne à peu près de la même
façon. Donc, on travaille beaucoup
sur l'harmonisation, les processus sont les mêmes, les systèmes sont les mêmes,
toutes les politiques émanent de la fédération et sont transmises aux
sociétés mutuelles.
De plus, pour
les assurés, la différence... Très peu de nos assurés sont conscients du fait
que, quand ils parlent à une société
mutuelle, ils ne sont pas nécessairement conscients qu'il existe d'autres
sociétés mutuelles. Eux, ils sont assurés chez Promutuel Assurance et
ils ne sont pas nécessairement conscients de la différence de ces entités-là.
Mme de Santis : Alors, ils sont
assurés par Promutuel.
M. Girard (Simon) : Par une des
17 Promutuel. Et il y a un organisme fédéré, donc, qui encadre.
Mme de Santis : O.K. Mais, eux,
quand ils prennent l'assurance, ils le prennent avec qui?
M. Girard (Simon) : Avec une
des 17 sociétés mutuelles.
Mme de Santis : Alors, eux, ils sont
assurés. Ils savent avec qui ils font affaire parce qu'ils ont un numéro de
téléphone, etc.
M. Girard (Simon) : Tout à
fait.
Mme de Santis : Et c'est ces gens-là
que vous communiquez avec.
M. Girard
(Simon) : Donc, si un assuré
prend sa police d'assurance, il va prendre le numéro qui a dessus, il va
contacter la bonne société mutuelle.
Mme de Santis : O.K.
M. Girard
(Simon) : Mais, par exemple,
s'il est chez le concessionnaire automobile un vendredi soir, il
s'achète une nouvelle voiture, il essaie
d'appeler Promutuel, on a seulement quelques sociétés mutuelles qui sont
ouvertes le soir. Donc, il va
peut-être essayer d'appeler, tomber sur une société mutuelle qui est ouverte,
qui n'est pas nécessairement la sienne, et c'est là où la confusion peut
être engendrée.
Mme de
Santis : Je comprends. Vous voulez résoudre une question de confusion.
Mais, si je regarde comment vous êtes
gérés, quand même, vous êtes indépendants, vous ne partagez pas tout, vous ne
partagez pas vos profits, vous ne partagez pas des renseignements quant
à votre propre gestion avec les autres. Vous voulez simplement partager les
renseignements sur vos assurés.
M. Girard (Simon) : Bien,
actuellement, chacune des sociétés mutuelles partage son information de gestion
avec la fédération et avec les autres
sociétés mutuelles dans un contexte d'entraide et d'amélioration continue.
Donc, on partage nos façons de faire.
• (9 h 50) •
M. Bouchard (Omer) : Vous
l'avez dit, Mme la ministre, il y a juste les profits qu'on ne partage pas. Il
faut qu'ils restent en région, parce qu'on
est tous en région, les profits restent dans les régions, mais le reste, on a
des processus de partage de toutes nos opérations.
Mme de Santis : Parfait. Alors, vous
partagez vos secrets industriels...
M. Girard (Simon) : Tout à
fait. Il n'y a pas...
Mme de Santis : ...O.K., vos secrets
commerciaux. Mais vous ne partagez pas vos profits.
M. Girard (Simon) : Oui, tout à
fait.
Le
Président (M. Ouellette) : ...les réponses. Ça va vite pour les gens de l'audio à matin. Je sais
qu'on serait dans une conversation de
salon... Mais je veux lui donner la chance de pouvoir... si on veut être
capable de se relire, là. Ça fait que prenez un petit respir entre deux
réponses. Merci. Mme la ministre.
Mme de Santis : Je m'excuse, c'est
ma faute. Alors, je m'excuse, ce n'est pas vous. J'aimerais maintenant regarder la recommandation 21, qui est :
«Modifier la loi sur le privé afin qu'elle prévoie la désignation d'un
responsable [d']accès», et etc. Vous dites que vous êtes
d'accord avec cette disposition, mais pas pour vous parce que vous êtes
assujettis à des lignes directrices publiées par l'AMF. C'est des lignes
directrices. Si vous ne le faites pas, quelles sont les conséquences? Alors, parlez-moi un petit peu des lignes
directrices qui portent sur la saine pratique commerciale, qui prévoient
que la politique de la protection de confidentialité des renseignements
personnels adoptée par vous permet d'assurer la conformité aux dispositions de
la loi... privé.
M. Girard (Simon) : Deux
choses. L'Autorité des marchés financiers procède à des inspections de façon
périodique chez les différents assureurs, dont Promutuel. Donc, au moment où
l'autorité fait des inspections chez Promutuel,
ils vont regarder de quelle façon nous répondons aux attentes de l'autorité par
rapport à l'ensemble des lignes directrices et ils vont émettre des
recommandations, qui sont déposées au comité de vérification ou au comité
d'audit de l'assureur pour émettre des
recommandations sur des pistes à améliorer, ou des points qui ne sont pas
nécessairement respectés ou qui ne rencontrent pas les attentes de l'autorité.
Ceci dit,
dans notre groupe, ce pouvoir d'encadrement là et de supervision de l'autorité
est délégué à la fédération. Donc, moi, comme responsable de la
conformité chez Promutuel, je fais cette même vérification là auprès de mes
17 sociétés mutuelles et je m'assure que mes 17 sociétés mutuelles
respectent les attentes de l'Autorité des marchés financiers établies dans
leurs lignes directrices.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : Et, s'il y a un manque, par exemple, de nommer un responsable
à l'accès, qu'est-ce qui se passe? C'est quoi, les conséquences?
M. Girard
(Simon) : L'autorité va
émettre une recommandation, qui va être déposée au comité de
vérification de l'assureur, et ils vont
faire un suivi pour voir... Ils vont demander un plan d'action pour nous
demander quelles actions on va mettre en place pour répondre à ce
manquement-là et corriger la situation qui est problématique.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : Et, si ce n'est pas
corrigé?
M. Girard
(Simon) : Normalement, si
les recommandations reviennent avec l'autorité, l'autorité fait un
suivi, il pourrait, à la limite, y avoir des
pénalités administratives, là, imposées par le régulateur. Donc, c'est le
régulateur qui va avoir la
responsabilité de déterminer de quelle façon il va imposer des pénalités ou il
va faire le suivi auprès de l'assureur.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : O.K. Si on regarde
la recommandation 19, c'est «...les régimes d'accessibilité aux rapports d'enquête de harcèlement en milieu de travail...»
Maintenant, la commission, dans leur rapport, fait note que, parce qu'il
n'y a pas d'encadrement, les renseignements
auxquels... Les personnes qui sont les victimes ou qui sont des présumés
harceleurs n'ont pas les mêmes droits. Si
c'est dans le public ou le privé, c'est différent. Si c'est dans une situation
où la personne est syndiquée ou pas
syndiquée... Donc, les personnes ne sont pas traitées exactement de la même
façon partout.
D'après vous,
à la page 6 de votre rapport, vous dites qu'«à notre avis, les mécanismes
mis en place pour dénoncer des actes
répréhensibles devraient en tout temps être confidentiels, et ouvrir une brèche
dans cette confidentialité mettrait un frein
à l'utilisation par les travailleurs du droit de dénoncer qui a été consenti
par le législateur relativement au harcèlement psychologique», O.K.? Alors, vous dites que tout, en tout temps, devrait
être confidentiel. Donc, vous êtes vous-mêmes en train de faire une
recommandation qui propose une modification parce qu'aujourd'hui il n'y a pas
vraiment un encadrement. Est-ce que je comprends que tout devrait être
confidentiel, et, si tu es la victime ou tu es le proposé... harceleur, tu n'as
pas droit à aucun de ces renseignements-là?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Girard.
M. Girard
(Simon) : En fait, le fait
qu'on voulait faire valoir à la commission, c'est simplement d'être
prudent dans les modifications qu'on pourrait apporter à la loi pour être certains que le droit ou le
privilège des plaignants ne soit pas
enfreint et qu'il n'y ait pas un frein à ce que les plaignants pourraient
faire comme démarches pour se plaindre d'un comportement de harcèlement. Donc, c'est simplement de s'assurer que, s'il y a
une ouverture auprès de certains éléments qui pourraient ne plus être confidentiels, que ça ne fasse pas en sorte que ça
fasse un frein pour que certains employés fassent des démarches auprès
de son employeur pour dénoncer une situation de harcèlement.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : Je ne sais pas si vous vous rappelez les exemples qu'ils ont
donnés de la situation au Nouveau-Brunswick
et à Terre-Neuve. Au Nouveau-Brunswick, la victime ou le présumé harceleur
aurait droit à vérifier le dossier, mais... sur un site, à un endroit
précis, mais il ne pourrait pas prendre une copie, et donc serait capable
simplement de s'informer qu'est-ce qu'il y a dans son dossier. Est-ce que cela
vous semble être acceptable?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Girard.
M. Girard
(Simon) : Je n'ai pas pris connaissance de cet exemple-là particulier,
mais c'est certain que ce qu'on fait
valoir à la commission, c'est que, s'il y avait une ouverture, à ce moment-là,
ça devrait être fait de façon à ce que le droit des plaignants soit
respecté. Donc, je vais laisser à la commission le soin de juger si cette
ouverture-là permettrait de conserver ce droit-là.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : Les recommandations 38 et 39 touchent les incidents de
sécurité, O.K.? Revenons aux lignes directrices
de l'AMF sur les saines pratiques commerciales. Elles prévoient notamment que
«les consommateurs [doivent être]
avisés en temps opportun de tout bris de confidentialité susceptible de nuire à
leurs intérêts ou à leurs droits» et que «les personnes responsables au
sein de l'institution sont avisées en temps opportun de tout bris de confidentialité».
Êtes-vous en mesure d'indiquer s'il y a des modalités ou des conditions à
respecter lorsqu'un incident de sécurité est déclaré à l'AMF?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Girard.
M. Girard
(Simon) : Dans le fond,
nous, ce qu'on a fait valoir à la commission, c'est que, si... La
déclaration obligatoire, elle est déjà en
place dans l'industrie de l'assurance de par les lignes directrices sur la
conformité réglementaire et la ligne
directrice sur les saines pratiques commerciales. Donc, au sein de Promutuel,
on a déjà une politique de bris de confidentialité
ou d'atteinte à la vie privée qui est en place, qui nous oblige à déclarer à
l'Autorité des marchés financiers tout bris de confidentialité où des
renseignements personnels auraient été transmis à un tiers sans le consentement
d'un assuré.
Par contre, à
la lecture du rapport de la commission, ce qu'on dénotait, c'est qu'ils
voulaient ouvrir cette obligation de divulgation là à l'ensemble des
incidents de sécurité. Et, pour nous, cette ouverture-là ferait en sorte qu'il
y aurait énormément d'incidents de sécurité qui seraient déclarés, et, pour la
plupart d'entre eux, il n'y a pas nécessairement d'incidence sur le public ou
sur le consommateur. Donc, il peut y avoir des situations où une brèche de
sécurité est découverte dans nos systèmes
informatiques, mais on a la confirmation que cette brèche-là n'a pas été
exploitée. Donc, on peut mettre en place les correctifs nécessaires pour
corriger la brèche.
À la lecture
du rapport, ma compréhension est que cet événement-là devrait être déclaré à la
commission, alors que, pour nous,
s'il n'y a pas d'impact sur le citoyen ou sur le membre assuré, cet élément-là
ne devrait pas être rapporté à la commission pour simple raison
d'efficacité.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : J'ai plusieurs
choses qui me... questions que je me demande suite à votre réponse. Combien de brèches y a-t-il? Est-ce que vous avez fait une
étude là-dessus? Parce que vous dites : Il faudrait en... Ils sont
tellement que, «you know», tout le réseau va
être brisé parce qu'il y en a tellement. Est-ce que vous avez fait une étude
quelconque pour déterminer combien de brèches il y a actuellement?
• (10 heures) •
M. Girard (Simon) : Je peux
vous répondre pour Promutuel, donc, qui est un assureur au Québec. Nous, actuellement, on a un registre de matérialisation
de risques. Donc, à toutes les fois qu'il y a un incident de sécurité, il
y a un registre qui est mis en place. Ce
registre-là comporte peut-être une quarantaine ou une cinquantaine d'incidents
par année.
Donc, si on
extrapole à l'ensemble de l'industrie de l'assurance, donc simplement pour
l'industrie de l'assurance, ça veut
dire probablement plusieurs centaines d'incidents
qui seraient rapportés à la commission sur une base annuelle simplement pour
l'industrie de l'assurance.
Mme de Santis : Est-ce que pour vous
c'est un fardeau, rapporter 40 par année?
M. Girard
(Simon) : Non, parce qu'on a déjà les mécanismes à l'interne pour
avoir un registre de ces événements-là. Donc, de les rapporter, ce que
ça veut dire, c'est l'effort de transmettre l'information, mais l'information,
elle est déjà récoltée ou colligée chez nous.
Mme de
Santis : Est-ce que ce n'est pas une bonne pratique qu'à l'intérieur
de chaque entité on ait un tel registre, comme vous l'avez?
M. Girard (Simon) : Tout à
fait. Ça fait partie des bonnes pratiques.
Mme de Santis : C'est une bonne
pratique.
M. Girard (Simon) : Oui.
Mme de Santis : Donc, on ne devrait
pas encourager cette bonne pratique partout?
M. Girard (Simon) : Cette pratique-là, elle est déjà encouragée par
l'Autorité des marchés financiers via ses lignes directrices. Donc, elle devrait être en place chez la majorité des
assureurs. Où, pour moi, ça devient plus compliqué ou problématique, où ça alourdit inutilement le
processus, c'est l'obligation de transmettre l'information à la
commission d'accès.
Mme
de Santis : Mais vous venez de dire que faire cette... «that
additional step», ça ne devrait pas être tellement compliqué parce que
vous faites le rapport à l'AMF, vous le faites maintenant aussi à la CAI.
M. Girard
(Simon) : Tout à fait. Mais là, à ce moment-là, ça devient la responsabilité
d'un tiers, qui n'a pas nécessairement toute l'information, de juger l'importance relative de cet
incident-là. Donc, on pense que cette incidence relative ou cette importance relative là devrait être évaluée chez
l'assureur et seulement les incidents qui sont majeurs ou qui ont
une incidence sur les consommateurs qui devraient être rapportés.
Mme
de Santis : Qui détermine
qu'est-ce qui est majeur? Et comment c'est déterminé? Et la détermination,
est-ce que c'est... «you know» à 100 % proof?
M. Girard (Simon) : Chez nous, c'est une politique, dans le fond, qui
a été déposée au conseil d'administration où les critères d'évaluation
sont déterminés, et, normalement, c'est aux dirigeants, là, de l'assureur qui
va faire cette évaluation-là, qui a un rôle, là, de supervision ou
d'encadrement au sein de l'assureur.
Mme
de Santis : Mais est-ce qu'il y a des moyens exigés actuellement pour
informer les personnes concernées qu'il
y a eu un incident de sécurité? Je crois que moi, si c'est quelque chose
d'important, j'aimerais bien savoir que mes renseignements personnels
peuvent être quelque part dans, «you know»...
M. Girard (Simon) : ...actuellement, cette disposition-là existe chez
Promutuel et probablement chez la majorité des assureurs actuellement.
Mme de
Santis : Est-ce que c'est...
Le Président
(M. Ouellette) : Woup! Vous allez trop vite. Mme la ministre.
Mme de
Santis : Est-ce que c'est une exigence de l'AMF?
Une voix :
Oui.
Mme
de Santis : Alors, c'est une exigence de l'AMF. Maintenant, si on fait
abstraction et vous n'êtes pas dans une compagnie d'assurance, est-ce que vous ne croyez pas que ces mêmes
règlements devraient s'appliquer aux entreprises qui collectent des
renseignements personnels?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Girard.
M. Girard (Simon) : Je croirais que oui. Par contre, ce que je veux
faire valoir à la commission, c'est que, dans la situation où on se retrouve, avec deux régimes qui s'appliquent aux
assureurs, donc on aurait des exigences dans la loi sur le privé et des exigences qui émanent de
l'Autorité des marchés financiers, c'est là où ça créé de la confusion et ça
apporte, notamment dans les services de conformité et les services juridiques
des assureurs, des complexités d'interprétation pour savoir quelle loi devrait être appliquée. Et généralement les lois
ne sont pas tout à fait rédigées de la même façon. Donc, c'est là où ça
devient complexe, quand il y a deux régimes qui s'appliquent chez le même
assureur.
Donc,
ce qui serait souhaitable, ça serait que les dispositions de l'autorité aient
préséance sur les dispositions de la loi sur le privé, donc de la loi
sur le privé... s'appliquent simplement s'il n'y a pas d'autres dispositions
qui sont déjà applicables à une industrie comme l'industrie de l'assurance.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : Combien de temps il reste, s'il vous plaît?
Le Président
(M. Ouellette) : Cinq... Oh! cinq minutes.
Mme de Santis :
Je crois que mon collègue aimerait poser une question.
Le Président
(M. Ouellette) : Celui de Maskinongé ou celui d'Ungava? Celui de
Maskinongé? Nous allons à Maskinongé.
M. Plante :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour, bienvenue.
J'ai écouté votre
présentation avec attention et, à la lecture un petit peu de votre mémoire,
j'ai une question assez existentielle pour moi parce que vous parlez
d'équilibre entre la protection du public et la protection du privé, et aussi vous nous demandez
de définir c'est quoi, pour nous, un renseignement privé. Vous dites : Ça
serait beaucoup plus simple si on définissait c'est quoi, un
renseignement privé.
Alors,
je vous transfère la question. Pour vous, c'est quoi, un renseignement qui doit
rester privé, et quel serait l'équilibre parfait pour vous entre le
public et le privé?
M. Girard (Simon) : En fait, ce qui est difficile dans le rapport de
la commission, c'est le concept d'évaluation. Je vais reprendre...
Une voix :
Atteinte déraisonnable.
M. Girard
(Simon) : Atteinte déraisonnable, là, au tiers. C'est difficile pour
quelqu'un, par exemple chez un assureur, d'évaluer quel pourrait être le
préjudice à un tiers. Donc, il y a beaucoup d'informations qui ne sont pas nécessairement disponibles au moment de
l'évaluation pour faire cette évaluation-là. Et ce que ce concept-là amène,
c'est la possibilité que le tiers ne fasse pas la même évaluation que nous sur
le préjudice qui pourrait lui être causé si le renseignement personnel est
transmis à un tiers.
Donc,
pour nous, si la loi prévoit une définition exhaustive ou une liste des
renseignements qui sont considérés ou qui
ne sont pas considérés comme des renseignements
personnels, c'est beaucoup plus
facile pour les personnes qui sont responsables
de transmettre ces informations-là à des tiers de faire l'évaluation des
dossiers, et ça exclut le fait que ces personnes-là
devraient, entre guillemets, se mettre dans la peau du tiers pour essayer
d'évaluer le préjudice qui pourrait lui être causé.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Maskinongé.
M. Plante : Merci,
M. le Président. Je comprends bien
l'utilité puis le pourquoi, là. J'aimerais savoir, pour vous, quels seraient les critères ou qu'est-ce que mettriez
dans le renseignement privé et qu'est-ce que vous n'incluriez pas, pour vous. Et ça... Parce que vous répondez de
l'importance, mais vous ne me répondez pas, pour vous, qu'est-ce que
c'est, un renseignement privé. Oui ou non... c'est lequel, puis quels sont les
éléments?
Une voix :
Me Beaudry.
Le Président
(M. Ouellette) : On va avoir un appel à tous. Mme Beaudry.
Mme Beaudry
(France) : Bien, c'est sûr que vous faire une liste exhaustive comme
on vous demande de faire dans notre mémoire ce matin, ça va être difficile. On
pourrait vous soumettre une proposition, bien entendu, si c'est votre désir,
mais ce qu'on voyait beaucoup dans notre réflexion lorsqu'on lisait votre
mémoire, c'est que la personne qui va être en mesure d'évaluer qu'est-ce qui
est une atteinte raisonnable ou ce qui ne l'est pas, la vie privée d'un tiers,
ça va être très difficile d'interprétation. On a à peu près 30 jours pour
répondre à une demande d'accès et on voyait difficilement comment on pouvait répondre
à cette demande-là dans les 30 jours.
J'ai vu, dans vos
commentaires ou dans le rapport, que vous aviez l'intention de mettre des
exemples. Si ces exemples-là sont assez probants puis sont suffisants pour nous
permettre de donner une interprétation à ce qui est une atteinte raisonnable, ça pourrait être satisfaisant, mais de
répondre à votre question précisément ce matin, c'est difficile parce que j'aurais besoin de vous donner des
propositions après réflexion. Puis ça me fera plaisir de le faire, si
jamais c'est le désir de la commission.
Le Président (M. Ouellette) : ...l'intérêt de la part de la ministre ou de M.
le député de Maskinongé pour demander à Mme Beaudry de préparer des
propositions? Bien, vous le regarderez. S'il y a un intérêt...
M. Plante :
Ça serait bien.
Le Président (M. Ouellette) : ...bien, on va demander à Mme Beaudry de le
regarder et de le faire parvenir au secrétariat
de la commission dans les meilleurs délais, là, je ne vous dis pas avant midi,
mais dans les meilleurs délais, effectivement, parce que je pense que ça
aidera à la réflexion de tous les membres de la commission. M. le député de
Maskinongé.
M. Plante :
Il reste combien de temps, M. le Président?
Le Président
(M. Ouellette) : Ah! il reste 40 secondes, à moins que Mme la
ministre veuille clore.
Mme de
Santis : C'est trop long, ma question, alors continue.
M. Plante : Bon, alors ça va être simple. Tantôt dans le cas
d'exemple que vous nous avez donné, il me semble que c'est simple à régler. Si la première question de la personne quand
on appelle chez Promutuel, on demande : Êtes-vous assurés déjà chez
Promotuel?, puis je suis sûr que tous les clients vont répondre oui, alors il
n'y a pas vraiment de problème. Et j'avais un petit peu de difficulté à
comprendre comment quelqu'un voudrait cacher qu'il est déjà assuré dans une
compagnie quand il appelle à la même compagnie, là.
M. Girard (Simon) : Vous avez entièrement raison. Là où ça peut
devenir problématique, c'est que, des fois, on va demander à cette personne-là : Vous êtes
assurée avec qui? Elle va dire : Je suis assurée avec Promutuel. Mais
encore? Donc, des fois, ils ne savent pas le
nom complet de leur société mutuelle. Des fois, ils sont chez le
concessionnaire, ils n'ont pas leur
contrat d'assurance avec eux. Des fois, ils vont nous répondre : Je suis
assuré avec J.A. Lemieux, qui est le nom
de leur courtier. Puis, pour l'agent, c'est impossible de faire une recherche
dans l'ensemble de la base de données pour aider le consommateur à
trouver avec quelle société mutuelle il est assuré.
Donc,
tout ça part du fait que les sociétés mutuelles sont considérées des tiers les unes par rapport aux autres. Donc, ce qu'on
veut, c'est d'ouvrir ça pour permettre aux agents d'aider les clients et de
répondre à leurs questions malgré le fait qu'ils soient assurés avec une
autre société mutuelle.
Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Girard. Merci, M. le député de Maskinongé. Vous comprendrez que l'intervention du
président est dans le but de vous rendre justice et de rendre justice à vos
réponses pour qu'on soit capable de nous démêler. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Oui, bonjour. Bonjour, madame, bonjour, monsieur.
Merci d'être ici, à la commission
parlementaire. Et, d'entrée de jeu,
j'aimerais comprendre un peu plus la
réalité de votre Groupe Promutuel. D'abord, toute l'industrie de l'assurance, vous le dites dans votre mémoire, au
début, qui est en profonde transformation depuis les années 2000, et les
exigences des consommateurs sont donc de plus en plus élevées. Ceux-ci désirent
obtenir un service rapide au-delà des heures
traditionnelles de bureau et au meilleur coût possible. L'ensemble des actions
mises de l'avant par le Groupe Promutuel lui permet d'être aujourd'hui
un leader en assurance de dommages.
Si
je comprends comment est organisé le groupe mutuel, est-ce qu'on peut faire la comparaison avec la Fédération des caisses
Desjardins? Est-ce que c'est un peu la même façon de fonctionner, donc un
groupe et différentes...
• (10 h 10) •
Le Président
(M. Ouellette) : M. Girard.
M. Girard (Simon) : Si on fait abstraction du fait qu'il y en a un qui est du côté bancaire et l'autre est du côté des assurances, il y a une certaine similitude, là, entre le fait qu'il y a
des caisses populaires qui doivent être membres d'une fédération, et cette fédération-là a des pouvoirs
d'encadrement et de surveillance auprès de ses membres. C'est un peu le même principe, là, chez
Promutuel.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée.
Une voix :
...
Le Président
(M. Ouellette) : M. Bouchard, en complément.
M. Bouchard
(Omer) : Promutuel a
165 ans. On est un modèle de ce que c'est qu'est devenu Desjardins parce
que c'est nos fondateurs qui ont créé Desjardins. Et, Simon l'a très bien dit, il
faut faire la différence entre les assurances Desjardins
et Desjardins, les caisses. On est pareil à Desjardins, les caisses. Il y a
des conseils d'administration dans chaque région ou dans chaque municipalité. Nous, bien, on est 17 maintenant.
On était 160 voilà 25, 30 ans.
Voilà 10 ans, on était 30, bon. Mais on veut rester une fédération
qui comporte plus de 12 sociétés mutuelles dans la province.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Oui, merci, ça se comprend bien. J'ai assisté, en
1997, comme députée à toute la refonte. Ça avait été tout... Je ne sais pas si
vous vous rappelez, sûrement, parce
que ça a été toute une année assez
complexe, je pourrais dire.
Je veux revenir à ce
que vous avez répondu à la ministre par rapport à vos 17 compagnies, je
pense que vous pouvez dire le terme, et l'information qui est partagée ou pas. Ça revient un peu aux renseignements personnels, là, puis les renseignements privés, lesquels sont partagés. Vous avez
dit : Ce qui se partage, ce sont les informations de
gestion. Pouvez-vous préciser?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Girard.
M. Girard
(Simon) : Moi, je travaille à la fédération à Québec, donc je
travaille à l'entité qui a un pouvoir d'encadrement
et de surveillance auprès de ses membres. Donc, moi, j'ai accès à l'information des 17 membres. J'ai un rôle
de supervision, notamment en
termes de conformité, en termes d'actuariat au sein de la fédération,
donc j'ai accès à l'information des
17 sociétés mutuelles. Où c'est compliqué, c'est que chacune des
17 sociétés mutuelles est un assureur à part entière, et c'est la transmission de l'information personnelle sur
les assurés entre les différentes sociétés mutuelles qui est complexe.
Ce
qu'on partage aussi, c'est les informations de gestion, les résultats, les
processus, les politiques. Donc, tout ce qui est plus au niveau
commercial, au niveau opérationnel, ça, c'est partagé entre les différentes
sociétés mutuelles puisque ce n'est pas considéré comme étant des
renseignements personnels au sens de la loi.
Mme Léger :
Et, pour vous, vous voyez quelle difficulté? Parce que ça peut être un avantage
pour l'assureur de s'assurer que ces
informations soient vraiment à la filiale où il est assuré, pas nécessairement
que d'autres filiales ou d'autres assureurs aient ces informations-là.
Alors, quand vous voyez la difficulté, elle est quelle, vous, comme
gestionnaire?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Girard.
M. Girard
(Simon) : La difficulté
n'est pas nécessairement au niveau de la gestion ou de la bonne conduite
des opérations de l'assureur. La difficulté est vraiment quand on s'en va vers
le client ou vers le membre assuré. Donc, le membre assuré, pour offrir un
service de qualité et être capable de répondre à l'ensemble de ses demandes, il
serait important pour nous que chacune des
sociétés mutuelles puisse savoir et avoir accès au dossier du membre assuré,
peu importe dans quelle société mutuelle il
est membre ou qu'il est assuré. Donc, ce n'est vraiment pas au niveau de la
gestion, mais au niveau du membre et de nos clients que la problématique est
plus importante.
Mme Léger : Et qu'est-ce
qui vous en empêche?
M. Girard
(Simon) : Actuellement, les
17 assureurs, c'est des personnes morales indépendantes, donc c'est
des assureurs, des entités qui sont, au sens
de la loi, considérées des tiers les uns par rapport aux autres. Donc, pour
transmettre l'information sans le
consentement de l'assuré, ce n'est pas permis par la loi actuellement. Donc, ce
qu'on voudrait, c'est un assouplissement ou une dérogation par rapport à
ça pour qu'on soit, comme groupe, considéré... qu'on ne soit pas considérés des
tiers les uns par rapport aux autres.
Mme Léger : Mais, d'un
certain côté, l'assureur peut, par consentement, la faire partager.
M. Girard (Simon) : Oui.
Mme Léger : Et,
probablement, l'assureur, lorsqu'il est assuré avec un assureur, s'il n'a pas
donné son consentement, je pense que c'est
par protection aussi pour lui-même, de voir que ces informations-là ne sont pas
envoyées ad vitam aeternam à n'importe qui.
Même si vous vous considérez comme un groupe malgré tout, vous vous
dites : On est régis par des
règles qu'on s'est données ensemble. Bien, pour l'assureur, c'est sûr que c'est
inquiétant de dire que j'ai donné mes renseignements ou bien mon consentement
sur ce que je crois que je dois donner en lien de confiance avec l'assureur, et là, envoyer ça un peu partout,
c'est sûr que... Alors, c'est sûr qu'il
y a une inquiétude à ce niveau-là. Vous la comprenez, cette inquiétude-là?
Le Président (M. Ouellette) : M. Girard.
M. Girard
(Simon) : Tout à fait. Par contre, ce que nous, on voit ou ce qu'on vit au quotidien quand on parle avec nos assurés puis qu'on leur explique ces
différences-là, donc vous n'avez pas appelé dans la bonne société mutuelle,
vous devriez... je vais transférer votre
appel à une autre société mutuelle, pour eux, ils ne saisissent pas ces différences-là. Donc, pour eux, ils sont assurés avec Promutuel
assurance, ils ne font pas de distinction entre les différentes sociétés.
Et il y a même de
nos membres assurés qui déménagent de la province, donc ils sont appelés à
transférer les dossiers d'un assureur à l'autre, et, de par la loi, on a bâti nos systèmes informatiques de façon à ce que ça soit des tours
de Babel, chacune des bases de
données. Et nos membres assurés demandent de transférer les dossiers d'un
assureur à l'autre, et c'est quelque chose
qui est impossible présentement. Et ça crée de la frustration auprès de nos
membres assurés. Ils ne comprennent pas pourquoi qu'on n'est pas capables
de faire ce genre de transactions là.
Donc, c'est vraiment...
je comprends exactement ce que vous dites, puis, si on se fie à la loi, effectivement, par consentement, ça se gère. Par contre, pour nos assurés, ce n'est pas un
concept pour eux qui est palpable ou qui est concret. Donc, ils ont de la difficulté à comprendre ça. Ça
fait que, quand on leur demande un consentement, ils ont de la misère à
comprendre pourquoi qu'on leur demande ce consentement-là, alors qu'ils ne sont
pas capables de le placer dans un contexte qui est pertinent.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Oui, je comprends très bien. C'est aussi le concept de votre organisation et de
la structure que vous êtes aussi qui engendre ce mélange-là chez
l'assuré.
Pour le
responsable d'accès à l'information, vous avez dit... Je vais revenir un peu
sur ce que vous avez dit dans votre
mémoire, mais est-ce que vous en avez un, vous, un responsable d'accès à l'information?
Ce n'est pas obligatoire, mais, vous, en avez-vous un?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Girard.
M. Girard
(Simon) : On n'a pas de
personne explicitement identifiée comme étant un responsable de l'accès
à l'information. Par contre, ce qu'on a vu
dans les dernières années, c'est que les demandes d'accès à l'information
sont souvent... entrent par un agent en
société mutuelle ou par un directeur ou une personne responsable en société
mutuelle et suivent le même canal, qu'on
peut dire, pour le traitement des plaintes. Donc, ça passe par une équipe à la
fédération qui est
responsable de gérer ça. L'équipe des services juridiques est aussi mise à
contribution pour répondre à l'ensemble de ces demandes-là. Et on a, à l'interne, des critères de réponse pour
donner une réponse à nos membres assurés qui font des demandes d'accès à l'intérieur de 30 jours.
Donc, on n'a pas de personne spécifiquement identifiée. Par contre, on a
des processus et des procédures à l'interne
qui nous permettent de répondre aux clients et on a des standards, là, pour
répondre dans un délai qui est prescrit ou qui est prédéterminé à l'interne.
Mme Léger : Quel est le
genre de demandes d'accès à l'information que vous recevez?
M. Girard (Simon) : France.
Mme Beaudry (France) : La
plupart qui sont portées à ma connaissance, c'est des clients insatisfaits d'un
règlement de sinistre et qui veulent avoir accès à leur dossier complet. Alors, à ce moment-là, on traite la demande, soit l'équipe dédiée, la même équipe qu'aux
plaintes, ou une équipe en société mutuelle qui est déjà habilitée à faire le
traitement de la demande d'accès.
Mme Léger : Donc, c'est le client lui-même.
Pourquoi le client lui-même n'a pas facilement
accès à son dossier?
M. Girard (Simon) : Bien, le
client...
Le Président (M. Ouellette) :
Oup! M. Girard.
M. Girard
(Simon) : Dans le fond, ce que le client veut avoir, c'est les informations qu'on a à
l'interne sur les décisions qui ont
été prises ou le raisonnement qui a été fait en arrière de la demande d'indemnisation qui a généralement été refusée. C'est pour ça qu'il y a une demande
d'accès qui est faite. Donc, l'assuré a accès à l'information qui lui
est transmise dans le cours normal du
règlement de sinistre. Par contre, quand ça se solde par un refus de paiement
pour une raison x, généralement, l'assuré va vouloir savoir, en arrière,
c'est quoi, les rapports à l'interne qui ont été faits ou les analyses qui ont été faites à l'interne qui ont
mené à la décision. Donc, l'assuré, sur une base normale, n'a pas accès
à ce genre d'information là, et la demande d'accès vise spécifiquement de voir
le contenu de ces dossiers-là.
Mme Léger :
Et est-ce que vous avez des demandes par rapport à un tiers ou c'est
normalement celui qui est assuré qui demande son dossier?
M. Girard (Simon) : Je crois
que c'est généralement les assurés qui demandent.
Mme Léger : Eux-mêmes.
M. Girard (Simon) : Oui. Mais
les demandes d'accès ne sont pas très nombreuses.
Mme Léger : Comme, dans
une année, vous en avez combien à peu près?
M. Girard (Simon) : C'est
difficile à dire. Je ne pourrais pas vous répondre.¸
Mme Léger : O.K.
Mme Beaudry (France) : Peut-être
que je pourrais juste ajouter.
Le Président (M. Ouellette) : Mme Beaudry.
• (10 h 20) •
Mme Beaudry
(France) : Je ne sais pas le nombre, puis ce serait difficile
parce qu'il y a des demandes d'accès qui sont traitées directement en société mutuelle et dont on n'a pas la
connaissance lorsque ça se règle facilement, puis ils n'ont pas besoin nécessairement du service juridique.
C'est un peu comme les plaintes, il y en a qui sont traitées en société,
puis on ne voit pas nécessairement toutes les plaintes ou toutes les demandes d'accès. Mais ce n'est pas
nombreux, là, on n'est pas tant sollicités que ça pour les demandes
d'accès.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Merci. Est-ce
que vous êtes prudents par rapport à avoir dans la loi privée... qu'on puisse instaurer qu'il y ait
un responsable d'accès à l'information dans les institutions privées?
M. Girard (Simon) : Notre position ressemble beaucoup
à celle-là du Bureau d'assurance du
Canada, à l'effet que, pour Promotuel Assurance et probablement pour la majorité des assureurs, cette fonction-là existe déjà au
sein des assureurs. Où on est plus sensibles, c'est l'obligation de
désigner une personne comme étant responsable de l'accès à l'information. Pour nous, le fait de désigner une
personne, ça alourdit le processus et ça met l'imputabilité sur une
seule personne, alors que, généralement,
quand c'est une équipe qui gère ces éléments-là, c'est plus facile et c'est
plus efficace. Et
je fais le parallèle comme j'ai fait tantôt avec les plaintes, on n'a pas de
personne spécifique qui est dédiée aux plaintes, c'est une équipe, c'est un processus à l'interne, et ça fait que la
réponse est généralement beaucoup plus rapide, là, quand c'est une
équipe qui est responsable d'un processus.
Mme Léger :
O.K. Je veux revenir sur les communications, d'une part. Vous considérez que
l'article 8 de la loi sur le privé
assure une communication adéquate au client de l'information qu'il est en droit
de recevoir, et la CAI considère que, depuis 2011, le législateur doit
renforcer cette obligation d'information. Et vous êtes plus ou moins... Est-ce
que vous pouvez m'expliquer davantage?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Girard, 45 secondes.
M. Girard (Simon) : En fait, notre position, puis, Me Beaudry, vous
pourrez compléter, on est conscients et on est confortables avec les exigences actuelles de la loi. Où on est moins à
l'aise, c'est le moment où l'information doit être transmise au client.
Ce qu'on comprend du rapport, c'est que le moment où l'information devrait être
transmise, la commission souhaiterait
devancer ce moment-là, et, pour nous, il est difficile de voir de quelle façon
on pourrait demander le consentement
au client avant d'entamer les processus. Pour nous, il est relativement facile
de présumer que le client qui appelle
ou qui fait une demande de soumission pour une assurance consent à ce qu'il y
ait un dossier qui soit constitué pour récolter des informations pour
être en mesure de lui fournir une soumission pour son assurance.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Juste à titre d'information, Mme Beaudry, est-ce que c'est Me Beaudry ou
Mme Beaudry?
Mme Beaudry
(France) : Oui, c'est Me Beaudry, notaire.
Le Président (M. Ouellette) : Merci. C'est bon. Ah! bien, c'est aussi bon que
Me Beaudry, l'autre contrepartie.
M. le député de
Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Beaudry, bonjour.
M. Bouchard, M. Girard, M. Fauchon, merci de participer aux
travaux de la commission.
J'aimerais
continuer sur les derniers propos de la collègue de Pointe-aux-Trembles
relativement à l'article 8 au niveau
de la... Dans le fond, quand vous demandez le consentement, vous nous
dites : Bien, dès le départ de la relation, on trouve ça trop chargé de demander déjà le
consentement? Je ne comprends pas, dans le fond, parce que, moi, si
j'appelle, supposons, chez Promotuel pour
faire une soumission, théoriquement, je vais m'attendre à ce que vous demandiez
mon consentement, non? Dans la séquence des
événements, on va me demander mon nom, qu'est-ce que je veux faire
assurer, ensuite c'est quoi, mon risque
d'assurance, tout ça, est-ce que j'ai eu des x, y, z. Puis là ça ne serait pas
le temps de le demander à ce moment-là?
M. Girard (Simon) : Quand qu'on fait une soumission d'assurance,
généralement, il y a passablement de questions auxquelles il faut répondre. Notre prétention, c'est que le fait
d'entamer ce processus-là est un consentement implicite sur le fait de
constituer un dossier pour fins de soumission d'une police d'assurance. Donc,
pour nous, le fait d'ajouter l'explication
du consentement, donc, ce que ça veut dire, c'est que l'agent devrait expliquer
la nature du consentement, ça alourdirait le processus de façon, selon
nous, qui n'est pas nécessairement appropriée.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Et, quand vous dites «expliquer la nature du consentement», donc l'agent
d'assurance au téléphone dirait à la
personne qui souhaite souscrire à une assurance : Monsieur, madame, sachez
que, si vous nous donnez cette
information... les informations que vous nous donnez vont nous permettre de
constituer un dossier d'assurance sur vous,
et on retiendra ces informations dans nos dossiers éventuellement pour vous
recontacter ou pour faire l'analyse de votre dossier. C'est un peu ça
que l'agent d'assurance dirait.
M. Girard
(Simon) : Mais ce qu'on...
Le Président (M. Ouellette) : M. Girard, vous dites oui depuis tout à
l'heure, là, vous allez me le dire au micro.
M. Girard (Simon) : Ce qu'on pense, c'est que ça pourrait générer des
questions supplémentaires au niveau de l'assuré qui demande, bon, c'est
quoi, la portée du consentement, et alourdir le processus, là, de façon importante.
M. Jolin-Barrette : Mais juste actuellement, lorsque vous nous
dites : Pour nous, il s'agit d'un consentement implicite, ça veut dire que, bien, moi, comme
personne qui appelle chez vous, bien, dans le fond, par le fait
d'appeler, je consens à le faire. Dans le
fond, je ne suis pas mis au fait que vous constituez un dossier sur moi, on le
prend pour acquis, c'est ça?
M. Girard (Simon) : Vous n'êtes
pas mis au fait a priori. Par contre, au moment de conclure la transaction, il
y a une confirmation de la constitution de dossier qui est envoyée à l'assuré
pour l'informer, dans le fond, des informations qui ont
été récoltées, la nature des informations et l'objectif dans lequel elles ont
été récoltées. Donc, c'est confirmé, mais un peu plus tard dans le processus.
M. Jolin-Barrette : Ça, on
reçoit ça par écrit.
M. Girard (Simon) : Exactement.
M. Jolin-Barrette : Quand j'ai
ma soumission d'assurance, dans le fond, je dis : O.K., bien, j'y vais
avec Promutuel, et là, à ce moment-là, pour
n'importe quelle autre compagnie d'assurance, c'est la même chose, je reçois,
dans le fond, cette information par la poste.
M. Girard
(Simon) : Je ne pourrais pas
me prononcer pour les autres assureurs, mais, chez nous, c'est comme ça
que ça fonctionne.
M. Jolin-Barrette : O.K., mais je donne un exemple. Dans le cadre de
la conversation avec l'agent, souvent ils vont nous demander : Est-ce que vous acceptez qu'on accède à votre
dossier de crédit? Là, à ce moment-là, bien, souvent, bien, le futur assuré va dire oui. Ils vont
demander une foule d'informations. Donc, vous pensez réellement que ça
alourdirait tant que ça le processus, de spécifier à l'assuré qu'on va
construire un dossier sur lui?
M. Girard
(Simon) : Le consentement pour
l'accès au dossier de crédit, c'est un point qui est très spécifique, donc, généralement, ça génère, selon moi, moins de
questions auprès de nos membres assurés. Par contre, la notion de
consentement au niveau de constitution de dossier, selon moi, ça pourrait
engendrer des questions, là, qui ne sont pas nécessairement pertinentes au
moment de la soumission.
M. Jolin-Barrette : Je veux juste qu'on revienne à votre modèle
d'affaires, là. J'ai bien compris votre comparatif avec les caisses Desjardins puis pas avec
Desjardins, assurances générales. Vous me dites, dans le fond : On est
partis de 130 sociétés, on est arrivés il y
a quelques années à 30, maintenant on est à 17. Donc, vous avez fusionné
certaines entités pour arriver avec
17 personnes morales. Qu'est-ce qui vous empêche... parce que, tantôt, on
disait : Par consentement, on peut transférer les informations
d'une société, supposons, la société chez nous, Verchères, vers d'autres au
Québec. Qu'est-ce qui vous empêche de le
demander dès le départ, ce consentement-là, pour faire, dans le fond, un
système de passeport entre les 17 différentes sociétés?
M. Girard (Simon) : Comme je le
disais tout à l'heure, il n'y a rien qui nous empêche. Par contre, pour nos
assurés, ce qu'on constate sur le terrain, c'est que les assurés ne comprennent
pas pourquoi qu'on demanderait ce consentement-là
parce qu'ils ne sont pas au fait de notre modèle et ne sont pas nécessairement
au fait qu'il y a différents assureurs.
Et, quand on parle de consentement, ça implique d'enregistrer ce
consentement-là, d'être capable de le retirer, de vérifier, au moment... pour savoir si j'ai eu ce
consentement-là. Donc, c'est des étapes supplémentaires qui, selon nous,
ne sont pas nécessairement nécessaires.
M. Jolin-Barrette : Elles ne sont pas nécessaires, ces étapes-là,
mais, dans le cadre de votre modèle d'affaires, je comprends que vous êtes en démarche pour faire la
modification législative parce que ça entraîne des difficultés. Puis,
j'imagine, ça entraîne aussi des difficultés de nature commerciale aussi au
niveau de la rétention de la clientèle. Puis l'objectif,
dans le fond, d'une mutuelle, bien, c'est d'en faire bénéficier les membres en
soi. Mais, entre-temps, là, je vous soumets ça, ça ne serait peut-être
pas plus facile de solliciter ce consentement-là dès le départ? Est-ce que ça
vous prend un consentement écrit ou ça peut être un consentement verbal dans le
cadre d'un tel consentement?
M. Girard (Simon) : Ça peut
être un consentement verbal dans la mesure où on est capables de démontrer qu'on a obtenu ce consentement-là. Et c'est sûr
que, de gérer les consentements, ça se fait, mais c'est un processus qui
est assez lourd. Et, de le faire pour
l'ensemble de nos membres assurés, ça veut dire des coûts, donc ultimement une
prime d'assurance qui est plus élevée pour
nos membres. Donc, a priori, on préférerait procéder par une demande de
changement législative pour empêcher d'implanter ce processus-là, qui serait
relativement lourd, et ce qui se traduirait, là, par des coûts supplémentaires
pour notre organisation, donc pour nos membres assurés.
M. Jolin-Barrette : J'aimerais juste ça que vous nous spécifiez, tout
à l'heure, la notion de profit. M. Bouchard, vous l'avez affirmé
tout à l'heure, c'est quoi, la distinction entre une entité centralisée puis
une société comme Promutuel avec les 17 sociétés relativement au profit?
Qu'est-ce que ça a comme impact, ce modèle d'affaires là?
• (10 h 30) •
M. Girard
(Simon) : En fait, chacune
des 17 sociétés mutuelles a son conseil d'administration, a son
assemblée générale, a ses états financiers,
a ses propres fonds propres. Donc, c'est vraiment géré comme un assureur particulier ou un assureur distinct. Ce qui est partagé ou ce qui
est mis en commun, c'est vraiment les fonctions de système informatique,
de ressources humaines, d'actuariat, qui
sont gérées par la fédération, puis c'est les services qu'on offre à nos
membres.
Quand M. Bouchard faisait référence aux
profits qui sont conservés dans chacune des entités, les conseils d'administration, M. Bouchard, pour Promutuel du Lac au Fleuve, a des comptes à
rendre à son assemblée générale,
donc il doit justifier les résultats qu'il a obtenus à l'assemblée générale de
façon annuelle.
M. Jolin-Barrette :
Puis peut-être juste une sous-question avec M. Bouchard. Combien de
personnes vous embauchez dans les régions du Québec, grosso modo, le groupe?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Bouchard.
M. Bouchard (Omer) : On est
dans toutes les régions du Québec. Comme chez nous, au Lac au Fleuve, on a 170 personnes qui travaillent pour nous, et
notre principe est de rester... notre force est de rester dans la région. Vous
allez trouver peut-être ça drôle, mes mots,
mais on ne veut pas suivre l'autoroute de l'assurance, nous. On veut être dans
un chemin qui se démontre qu'on veut rester
proche des gens. On ne veut pas devenir des géants de l'assurance, on veut
donner le service en région, avec des conseils d'administration qui rencontrent leur monde à tout bout de champ,
une fois par année, une assemblée
générale. On veut que les sous servent aux communautés dans les régions,
puis c'est ça qui se fait à l'heure actuelle. Redonner aux communautés,
c'est ça qu'on fait. Puis on ne donne pas de ristourne, nous, mais on redonne aux communautés directement, aux organismes à but non
lucratif, à toutes les municipalités qui ont besoin d'un petit terrain de soccer parce que le grand terrain,
il est pris par d'autres. C'est notre vocation. La première vocation,
c'était ça, de nos fondateurs, puis on veut
y rester. Ça fait que notre demande, si... On ne veut pas devenir une entité au
Québec, on veut rester une fédération partout dans la région du Grand Québec
puis un peu développer Québec et Montréal en même temps.
Le Président (M. Ouellette) :
...mot de la fin, M. Bouchard.
M. Bouchard (Omer) : Pardon?
Le Président (M. Ouellette) :
J'ai dit : Sur ce bon mot de la fin, M. Bouchard...
M. Bouchard (Omer) : Ah oui?
C'est le mot de la fin?
Le Président (M. Ouellette) : ...merci
de votre présence en commission. M. Omer Bouchard, Simon Girard, Sylvain Fauchon et Me France Beaudry, représentant
la Promutuel Assurance, merci de vous être déplacés aujourd'hui. On
attend vos propositions, Me Beaudry.
Je suspends quelques minutes. Je demanderais au
Conseil du patronat du Québec de bien vouloir s'avancer.
Merci aussi à M. Morin, qui a accompagné
les personnes qui étaient à l'avant.
(Suspension de la séance à 10 h 33)
(Reprise à 10 h 35)
Le
Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant
le Conseil du patronat du Québec, M. Guy-François Lamy, qui est
vice-président, Travail et affaires juridiques. Et on m'a dit que vous étiez
accompagné Jean-René Lafrance. Donc, M. Lamy, vous avez 10 minutes
pour faire votre présentation, et par la suite il y aura un échange avec Mme la
ministre et les porte-parole des deux oppositions. À vous la parole.
Conseil
du patronat du Québec (CPQ)
M. Lamy
(Guy-François) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous et à toutes. Merci de nous accueillir ce matin dans le cadre de cette consultation publique sur le rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information. Comme le président l'a mentionné, mon nom est Guy-François Lamy. Je suis vice-président, Travail et affaires juridiques du Conseil du patronat du Québec, accompagné de Jean-René Lafrance, Me Jean-René
Lafrance, qui est conseiller juridique au sein de notre équipe également.
Avant
d'entrer dans le vif du propos, je pense peut-être pertinent de mettre
sur la table quelques informations au sujet
de notre organisation, notre
organisme, le Conseil du patronat, et un peu peut-être vous présenter le lien
entre la raison pour laquelle nous sommes ici et les commentaires que
nous allons formuler dans quelques instants.
Le CPQ est
d'abord et avant tout une confédération patronale, c'est-à-dire qu'il regroupe
la plupart des associations sectorielles
d'employeurs au Québec, mais également la plupart des principaux employeurs qui
sont également membres du CPQ en tant
que membres corporatifs. Et donc notre mission est de représenter les intérêts
des employeurs du Québec afin de
s'assurer que ces derniers puissent disposer des meilleures conditions possible
pour prospérer au Québec et que, conséquemment,
la société québécoise tout entière puisse bénéficier de l'amélioration de son
niveau de vie en conséquence.
Nous représentons un peu plus de
70 000 employeurs directement et indirectement. Et donc nous avons développé, pour atteindre notre mission,
différentes priorités d'action, différentes priorités d'intervention. Et je
vous les énumère brièvement, mais : une main-d'oeuvre qualifiée,
abondante et à coûts concurrentiels, des finances publiques saines pour une fiscalité concurrentielle, une
économie durable, un dialogue social sain et constructif et une
réglementation intelligente, c'est-à-dire
une réglementation fondée sur les objectifs plutôt que les moyens pour les
atteindre. Et c'est sur ce dernier
aspect que nos commentaires sont davantage orientés dans le mémoire que vous
avez entre les mains, également dans les commentaires que je veux vous
formuler aujourd'hui.
Comme
je le disais, bon, la réglementation intelligente est au coeur de nos
préoccupations. Nous ne nous sommes pas
attardés à l'ensemble des recommandations qui sont comprises dans le volumineux
mémoire qui a été... rapport, plutôt, qui a été préparé par la
Commission d'accès à l'information. Nous avons circonscrit sur là où étaient,
selon nous, les principaux enjeux dans le
cadre de la mission que nous accomplissons. À ce sujet, j'ai parlé du caractère
volumineux du mémoire, je tiens aussi à souligner le travail colossal
qui a été effectué par la Commission d'accès à l'information et toute son
équipe au niveau de la recherche et de la documentation, de la rédaction. C'est
un travail qui mérite d'être souligné à ce niveau-là.
Donc, le CPQ
croit, à l'instar de la Commission d'accès à l'information, qu'il serait
particulièrement pertinent de moderniser
la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé,
qui a été adoptée en 1994 dans un contexte
qui est quand même bien différent de celui d'aujourd'hui. Nous nous sommes
principalement, comme vous l'avez remarqué en lisant le mémoire,
attardés à la loi sur le privé, puisque c'est celle qui touche davantage
directement nos membres, bien que nous
représentons également des organismes publics, des employeurs du secteur public
et parapublic, comme les commissions
scolaires, les municipalités et la plupart des sociétés d'État. Mais nous
concentrerons davantage nos commentaires sur la loi sur le privé.
Un premier
point sur lequel nous nous sommes attardés en lisant le rapport de la
commission, c'est la question des antécédents judiciaires. Il fait
consensus que la vérification d'antécédents judiciaires peut être essentielle à
la qualification de certains emplois,
pensons notamment aux employés qui sont en contact avec des personnes
vulnérables. Et c'est un enjeu qui est majeur pour les employeurs qui sont dans
ce secteur d'activité ou dans ces secteurs d'activité particulièrement. Notre commentaire toutefois, c'est que, quand on
regarde le régime qui est constitué par l'article 18.2 de la charte québécoise des droits et libertés de la
personne, on observe pour nous qu'il s'agit d'un régime qui est complet
en soi, qui permet la vérification des
antécédents adéquatement, au cas par cas, tout en limitant la portée de cette
vérification aux antécédents qui sont reliés
à l'emploi et qui considère la nature de chaque poste dans chaque organisation
différente, comme chaque infraction aussi est différente.
Donc, le régime actuel, selon nous, permet de
maintenir un juste équilibre entre la protection qui est donnée à l'employé
contre la discrimination et le droit de l'employeur de faire les vérifications
nécessaires qui sont reliées à la protection
légitime de ses intérêts. Donc, nous croyons que le modèle actuel protège
contre la discrimination fondée sur les
antécédents judiciaires. Et nous craignons que de légiférer davantage en la
matière pourrait simplement alourdir les processus et peut-être même potentiellement entrer en contradiction avec
le régime qui est déjà prévu par la charte. Et nous avons inquiétude à ce niveau-là, toujours est-il,
comme je vous l'ai dit, dans une optique de réglementation intelligente.
• (10 h 40) •
Il y a aussi
la question des rapports d'enquête en matière de harcèlement psychologique,
qui, évidemment, comme vous le
comprenez... On représente des employeurs, donc c'est un enjeu significatif
pour les employeurs, cette question. Donc,
nous avons pris note à cet effet-là des commentaires de la Commission d'accès à
l'information et soulignons que, du régime
pour l'accès aux rapports d'enquête de harcèlement psychologique dans la mesure
où on continue de poursuivre les
objectifs ici, et cet objectif-là, c'est un équilibre à atteindre, c'est-à-dire
que l'employeur a une obligation de prévenir et de faire cesser le harcèlement psychologique. Qu'il soit du secteur
public ou du secteur privé, cet employeur, il a cette obligation de
prévenir ou de faire cesser le harcèlement psychologique. Et à travers ça, dans
le cadre d'un processus d'enquête, eh bien, il a plusieurs droits différents à
arbitrer, que ce soient ceux de la personne contre qui la plainte de
harcèlement psychologique a été dirigée ou encore ceux des témoins qui ont
rencontré les enquêteurs. Alors, à ce niveau-là, comme je vous le dis, notre
position est à l'effet que nous serions favorables à l'uniformisation des
règles applicables à l'égard de ces documents précis.
Il est
discuté dans le rapport de la notion de responsabilisation des entreprises. Et là-dessus un commentaire
peut-être que je voudrais formuler, c'est
que nous constatons que la position de la commission nous semble davantage
théorique, puisqu'on est dans un régime qui
prévoit déjà une succession d'obligations à l'égard des entreprises. Alors,
nous comprenons que la commission
souhaiterait voir poser un principe de responsabilisation des entreprises qui,
à notre avis, existe déjà de par le régime actuel et dans les faits à ce
niveau-là. Donc, ici, c'est davantage un questionnement sur la pertinence d'une
telle recommandation plutôt qu'un commentaire favorable ou défavorable à cet
effet, mais nous soulignons par contre que
nous comprenons l'importance de la responsabilité des entreprises en cette
matière puisque ce sont elles qui collectent, utilisent et conservent
les renseignements personnels.
Il y a la notion de responsable de l'accès à
l'information aussi qui est recommandée, par la commission, d'intégrer à la loi. À cet effet-là, évidemment,
notre préoccupation est que c'est une obligation qui est une obligation
de moyens davantage qu'un objectif à
atteindre. Donc, en termes de réglementation intelligente, nous avons une
réticence aussi face à cette
préoccupation-là dans la mesure où nous privilégions que chaque organisation,
chaque entreprise puisse être maître
de la façon appropriée de soumettre ou de se soumettre à ces obligations, que
ce soit en désignant au sein de son organisation un responsable de
l'accès ou en désignant un processus pour traiter les demandes. À notre avis,
il devrait y avoir une plus grande souplesse
à ce niveau-là pour atteindre les objectifs puisque la recommandation
proposée nous apparaît davantage comme un objectif de moyens plutôt qu'un
objectif de résultats.
À ce
sujet-là, toutefois, une modulation serait possible, à notre avis, si le
législateur décidait d'implanter une telle mesure, mais nous la verrions
limitée uniquement aux entreprises de 100 employés et plus. Considérant
qu'il s'agit d'une mesure qui demande une expertise, qui demande un poste
précis en soi, nous ne la considérons absolument pas adaptée à la réalité des
petites et des moyennes entreprises.
D'autres
points qui sont soulevés concernent l'actualisation des concepts dans le
rapport de la commission. Alors, comme
on l'a dit tout à l'heure, la loi sur le privé a été adoptée il y a plus de 20 ans.
En ce sens, au CPQ, nous réitérons qu'il
serait pertinent que le travail fait par la commission vise uniquement à
moderniser la loi et l'adapter aux nouvelles réalités, principalement en tenant compte de
l'évolution technologique. Et là-dessus un commentaire plus général que
je souhaiterais formuler, c'est qu'à la
lecture du rapport parfois relativement à certaines préoccupations on observe
que la commission émet certaines
craintes relativement à l'évolution technologique ou à l'évolution de la société
en général. Et, face à ces
craintes-là, elle préfère y mettre un frein plutôt que de proposer des
solutions d'adaptation, de modulation ou d'encadrement. Nous sommes
plutôt de la deuxième tendance, à notre avis. En matière d'évolution
technologique, en matière d'utilisation de
renseignements génétiques, par exemple, à notre avis, c'est davantage par
l'encadrement de ces mesures-là
plutôt que par une interdiction formelle fondée uniquement sur la foi de
craintes que l'action gouvernementale, l'action législative devrait être
dirigée.
Évidemment, pour aussi soutenir cette
préoccupation-là, je vous soulignerais qu'il est important pour les entreprises
de demeurer compétitives et performantes. Et, à ce sujet-là, les entreprises,
les employeurs ont recours à différentes
technologies. D'une part, bon, ils utilisent une multitude de nouvelles
technologies pour améliorer et adapter leur gestion interne, mais aussi pour satisfaire les besoins toujours
grandissants de leur clientèle. Donc, dans ce contexte-là, il est
particulièrement pertinent de moderniser le concept de consentement, puisque le
modèle actuel est peut-être moins adapté au
rythme aussi auquel les interactions entre les entreprises et ses clients
agissent. Donc, le caractère explicite du consentement lorsqu'il est requis, il y aurait lieu de tendre à la
simplification des formulaires de consentement, comme le souligne la commission, tout en rendant les
politiques de confidentialité disponibles en tout temps aux utilisateurs
s'ils souhaitent obtenir des précisions à un certain moment.
Quant au
consentement implicite, il serait pertinent de sensibiliser et d'éduquer
notamment les consommateurs à ce sujet,
mais nous ne voyons pas la pertinence de modifier la loi à ce niveau-là,
puisque ce type de consentement est tout aussi valable que le consentement explicite. Et donc, à ce niveau-là, nous
soulignons que la commission pourrait jouer un rôle particulièrement
pertinent, et ce rôle pourrait aussi être exercé en collaboration avec le
milieu, avec les entreprises au niveau de l'éducation des consommateurs.
Le CPQ reconnaît aussi que la collecte,
l'utilisation et la communication de renseignements génétiques sont de nature sensible et doivent bénéficier d'un
encadrement légal adéquat afin de protéger les individus. Donc, nous
aurons aussi... nous avons certains
commentaires dans notre mémoire sur l'utilisation des données génétiques, tant
en matière d'emploi qu'en matière d'assurance dans ce contexte-là.
Soulignons,
comme je l'ai dit tout à l'heure, que notre préoccupation n'est pas tellement
de nous assurer d'interdire de telles
utilisations, mais que l'encadrement soit adéquat et inapproprié. Et soulignons
d'emblée ici que le CPQ ne vient pas ici
non plus pour vous dire qu'il favorise l'utilisation de renseignements
génétiques, tant en matière d'emploi qu'en matière d'assurance, pas plus
qu'il ne l'encourage, mais qu'il constate que, dans un contexte d'évolution, un
encadrement adéquat est à privilégier par rapport à une interdiction formelle.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Merci beaucoup, M. Lamy et M. Lafrance.
Donc, maintenant, nous allons procéder à la
période d'échange avec les membres du gouvernement pour une période de
22 minutes. Donc, je cède la parole à Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue à Me Lamy
et à Me Lafrance. Merci de votre présence
ici aujourd'hui, merci aussi de nous avoir envoyé votre mémoire. À la fois,
vous dites que le monde a changé énormément
depuis 1982 et 1984, et aujourd'hui on se retrouve dans un monde numérique qui
n'existait même pas il y a une dizaine d'années, mais, d'un autre côté,
vous êtes plutôt «on veut le statu quo».
Alors, moi,
j'aimerais regarder vos commentaires concernant la recommandation 20. Et,
à la recommandation 20, on parle
d'inclure une obligation de responsabilité des entreprises dans la loi sur le
privé. Vous nous dites que vous n'êtes pas favorables à l'inclusion du
principe de la responsabilité des entreprises, car : «Il serait inutile
d'alourdir un texte législatif pour ajouter
ce principe et sa portée.» J'aimerais souligner qu'au fédéral on retrouve ce
principe à l'article 4.1 de la
Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents
électroniques. Et là on lit : «Une organisation est responsable des
renseignements personnels dont elle a la gestion et doit désigner une ou des
personnes qui devront s'assurer du respect des principes...» Et on énonce les
principes.
Est-ce que
vous ne croyez pas que le fait d'inclure une obligation de responsabilité des
entreprises et la création d'un
responsable de l'accès et la protection des renseignements personnels aurait
pour effet de favoriser le développement d'une culture — parce qu'ici on parle de changement de culture — de protection des renseignements personnels
au sein des entreprises? Parce que
c'est très, très important, particulièrement dans un monde numérique où, si on
perd contrôle sur nos renseignements personnels, on perd contrôle sur
notre vie privée, on perd contrôle sur la liberté des choix, on peut se faire
attaquer par le vol d'identité, etc. Alors, j'aimerais bien comprendre
qu'est-ce que vous voulez dire là-dedans.
Et ensuite
vous nous dites : Ah! mais, si vous allez nous obliger... Regardez les
entreprises de 100 employés ou plus, vous réalisez qu'au Québec presque
90 % des entreprises ont 10 employés ou moins et que, dans le monde numérique, la portée d'une entreprise dépend
beaucoup moins sur le nombre d'employés, qu'aujourd'hui les compagnies qui ont la plus grande capitalisation sur les
bourses ont très peu d'employés. Alors, je me demande comment vous
arrivez à votre recommandation.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Lamy.
M. Lamy (Guy-François) : Merci,
M. le Président. Alors, dans un premier temps, peut-être commencer, pour répondre à votre question, par expliquer que
notre position est bien sûr que, quant au principe de la responsabilité
des entreprises, et je l'ai dit en introduction, c'est une mesure à laquelle
nous sommes favorables parce qu'il va de soi, comme je vous l'ai dit... Puis c'est la
responsabilité des entreprises. Ça ne peut pas être la responsabilité de
personne d'autre que celui qui
recueille, collecte et utilise les renseignements personnels que d'en assurer
la protection et d'assurer la mise en oeuvre de la loi.
• (10 h 50) •
Ce qu'on vous
dit aussi, c'est que, lorsqu'on lit la loi, il y a une succession d'obligations qui sont assez précises, qui s'appliquent
aux entreprises, et donc qui viennent nous dire, quand on lit la loi, que les entreprises
sont responsables, ont donc cette responsabilité.
Alors, notre commentaire, c'est à l'effet qu'on trouve ça assez théorique. Maintenant,
et donc, ultimement, comme c'est
théorique, c'est ce que je vous dis, on ne voit pas la pertinence, mais vous
décideriez de l'intégrer dans la loi qu'on ne se retrouverait pas ici, devant vous, dans le cadre de l'étude d'un projet de loi qui modifierait la loi sur le privé pour vous expliquer pendant une heure qu'on n'est pas d'accord avec ça, puisque, sur le principe, on est
d'accord sur le fond de la question. On ne comprend simplement pas la
pertinence.
Au niveau de
la question de la culture, du changement de culture, puisque c'est l'argument
que vous avez soulevé, l'impression
et la lecture, en fait, que j'ai de la situation, c'est que, quand on observe,
pour la plupart des organisations qui
sont membres chez nous, lorsqu'on discute avec eux de ces enjeux-là et qu'ils
nous disent : Écoutez, on a procédé à des coupures budgétaires dans à peu près tous les services au sein de
notre organisation au cours des dernières années, sauf un qui est celui de la sécurité des
technologies de l'information, notamment en raison de l'enjeu de la protection
des renseignements personnels, j'ai l'impression
que cet élément de culture là, il s'installe beaucoup. Et il y a des
éléments qui ont amené ça, mais on a aussi
vu des situations qui sont arrivées dans certaines organisations, et ça a été
médiatisé, où il y a eu des failles, où il y a eu des fuites, et ça, ça
a entraîné aussi évidemment...
Vous savez,
ces situations-là, quand il arrive une crise, la première chose qu'un conseil
d'administration fait dans une organisation, même si ce n'est pas chez
elle qu'elle est arrivée, c'est de questionner son organisation, à savoir qu'est-ce qu'on fait pour s'assurer que ça ne nous
arrive pas, à nous, ça. Alors, c'est sûr que ces situations-là ont
entraîné aussi cette prise de conscience
importante au niveau de la culture de la protection des renseignements
personnels au sein des organisations.
Mais, si d'inclure un principe de responsabilité dans la loi pouvait avoir pour
effet d'accentuer ça, si ce n'est
qu'un principe qu'on veut inclure, comme on vous dit, on ne passera pas la
journée à en débattre parce qu'on est d'accord sur le principe à l'effet
que c'est la responsabilité des entreprises.
Quand on
arrive à la création d'une fonction de responsable de l'accès au sein des
entreprises, en même temps, ce que je
vous disais tout à l'heure, c'est qu'on parle de réglementation intelligente.
L'objectif à atteindre pour les entreprises, c'est la protection des renseignements personnels qu'ils recueillent,
c'est donc d'atteindre cet objectif-là et de prendre les moyens nécessaires pour y arriver. Lorsqu'on vient
dire dans la loi : Vous allez implanter une personne responsable de
l'accès qui va devoir faire ça, ça, ça, on
tombe ici dans une création d'obligation de moyens. On vient dire aux
entreprises comment faire pour atteindre
l'objectif, et c'est là où nous, on a une réticence parce que ça, ça semble
aller à l'encontre des principes de
réglementation intelligente. Et c'est dans ce contexte-là qu'on dit : Si
on devait y aller de l'avant quand même,
puisque, là, on nous demande de désigner une ressource, de peut-être former une
ressource ou de s'assurer qu'on a quelqu'un parce que ça prend des
compétences pour faire ça, on ne peut pas juste demander à n'importe qui d'être
responsable de l'accès. Ce qu'on vous dit,
c'est que ça va prendre des entreprises qui sont capables d'organiser leurs
ressources en conséquence. Et, pour
organiser les ressources en conséquence, bien, il y a un seuil critique
d'employés que nous, on vous suggère d'être
à 100. Là non plus, le chiffre 100 n'est pas un chiffre béton ou formel,
c'est la recommandation que nous, on
formule lorsqu'on analyse la situation. Et on se fonde sur des modèles qui
existent déjà, comme, par exemple, le
responsable de la francisation en vertu de la Charte de la langue française,
qui est rencontré à partir d'un certain seuil, comme l'implantation de comités dans certaines autres législations en
matière de travail, par exemple, qui se rencontre à partir d'un certain seuil d'employés aussi. C'est
simplement que ça prend une masse critique. Mais évidemment qu'une entreprise
de 10 employés, selon nous, n'a pas moins d'obligations envers la loi.
C'est juste qu'à 10 employés l'organisation,
la structure est évidemment plus difficile à accomplir qu'avec 100, et donc de
dégager une personne ou d'attitrer une partie des tâches de quelqu'un à
cette fonction-là à ce moment-là, pour nous, bien, ça prend une masse critique
minimale pour pouvoir accomplir cet objectif-là.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : Comment s'assurer
qu'il y a une préoccupation dans les entreprises qui ont 40, 50, 60, 90 employés, qu'il y a vraiment un intérêt
sûr pour la protection des renseignements personnels? Vous dites que ça
va de soi, cette... «you know», en principe,
vous êtes d'accord, mais vous ne voulez pas qu'on légifère là-dessus. Moi,
je veux comprendre comment on peut s'assurer
que quelque chose aussi important que la protection des renseignements
personnels de tous les Québécois et
Québécoises soit respectée. Alors, dites-moi parce que vous dites : On ne
va pas attitrer quelqu'un parce que c'est trop de travail. Alors, dans
le flou des personnes qui sont là, qu'est-ce qu'il se passe?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Lamy.
M. Lamy (Guy-François) : Merci.
Ce que j'entends, c'est que vous avez une préoccupation à l'effet que, s'il n'y a
pas un responsable de l'accès, les
entreprises ne mettront pas leurs obligations en oeuvre, même si elles les
ont dans la loi. C'est un peu ça que je comprends de votre préoccupation. À
moins que je fasse erreur.
À
ce niveau-là, ce que vous dirais, c'est que, comme c'est le cas avec beaucoup
d'autres encadrements normatifs, les
entreprises ont des obligations. Où qu'elles soient, elles doivent les
rencontrer, et il y a des mécanismes de mise en oeuvre, et de surveillance, et de contrôle. Et
vous avez notamment la Commission d'accès à l'information qui a un rôle d'information, d'accompagnement, de surveillance,
et de contrôle, et d'inspection aussi. Et, à ce niveau-là, ce que j'ai
envie de vous dire, c'est : Si telle
est l'importance, et je suis d'accord avec vous sur l'importance de cette
mission-là, la protection des renseignements personnels, la Commission
d'accès à l'information, surtout à l'égard des plus petites entreprises, puisqu'elles ont peut-être moins de ressources
internes pour accomplir ces objectifs-là, devrait avoir un rôle
d'accompagnement, et de soutien, et aussi d'inspection et de surveillance,
comme elle l'a déjà, là.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : S'il vous plaît, vous me dites quand il reste cinq ou six
minutes.
Le Président
(M. Ouellette) : Ah! ça va me faire plaisir de vous le dire.
Mme de
Santis : Merci.
Alors,
il y a une autre recommandation avec laquelle vous n'êtes pas nécessairement
d'accord, c'est la recommandation n° 38 qui parle de l'obligation de
déclarer à la commission les incidents de sécurité, etc. Maintenant, vous dites que la réalité de chaque
organisation est différente. Je suis d'accord, «one size does not fit
all». Et vous parlez... les femmes
connaissent une affaire là-dessus avec nos bas, c'est «one size does not fit
all». Alors, vous dites que vous êtes
d'avis que les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs devraient
être laissés aux organisations elles-mêmes.
O.K. Alors, vous me dites que vous êtes d'accord avec la situation telle
qu'elle existe aujourd'hui. On ne sait
pas s'il y a eu une brèche de sécurité. Rita peut-être a perdu ses
renseignements quelque part, mais elle ne le saura jamais, même si c'est très important. Vous croyez
que c'est normal de laisser la situation telle qu'elle est aujourd'hui?
M. Lamy
(Guy-François) : Je vous explique notre préoccupation.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Lamy.
M. Lamy (Guy-François) : Merci. Je vous explique notre préoccupation
relativement à cette recommandation-là. La déclaration des failles de sécurité, nous ne disons pas que nous ne
sommes pas d'accord avec l'idée de la déclaration des failles de sécurité, et je pense que vous l'avez
compris parce que vous avez dit : «One size does not fit all». Je n'ai
pas d'expertise en bas de nylon, mais il y a
beaucoup d'autres domaines dans lesquels «one size does not fit all», et je
peux aussi en attester. Alors, je comprends
votre préoccupation. Mais la nôtre ici, c'est qu'on ne voudrait pas se
retrouver devant une situation où on
a des obligations législatives qui, soit parce qu'elles sont trop générales ou
soit parce qu'elles ne sont pas assez
claires au niveau de ce qui doit être fait, font en sorte qu'on se retrouve
avec une situation où, chez des entreprises, on pourrait se faire taxer de ne pas avoir déclaré des failles de sécurité
qui n'en sont pas et, à l'inverse, une situation ou une entreprise
aurait pu se retrouver dans une situation où elle aurait dû déclarer une faille
de sécurité qu'elle a jugé ne pas être
pertinente. Et surtout ce qu'on ne veut pas, c'est qu'une entreprise se
retrouve à devoir déclarer chaque bogue informatique. Alors, l'importance ici, c'est de s'assurer... On entend
quoi par faille informatique, qu'est-ce qu'on doit faire dans cette situation-là et comment peut-on
s'assurer que ce soit adapté à la réalité de chaque entreprise? Alors, c'est
pour ça que je vous dis que la crainte,
c'est qu'à chaque fois qu'il y a un bogue informatique on soit obligé de
remplir un rapport.
Je vous parlais de
réglementation intelligente, de fardeau administratif. C'est ça, notre
préoccupation. C'est qu'on se dit :
Derrière ça, est-ce que ça veut dire que, si on prend cette recommandation-là
telle que rédigée actuellement, à
chaque fois qu'il y a un problème, un enjeu, l'ombre du doute d'un soupçon d'un
potentiel problème informatique, il faut
que je remplisse un registre, il faut que j'envoie ça à la commission pour
qu'il y ait une enquête qui soit faite? Ça va aller jusqu'où? Alors, c'est ça, la préoccupation qui est derrière ça.
Si on est capables de trouver une solution qui tient compte de cette préoccupation-là dans la matérialisation
d'une obligation pour les entreprises de consigner ou de déclarer ces
failles de sécurité, à ce moment-là,
probablement qu'on peut être capables de trouver une solution. Peut-être qu'on
pourrait parler de faille significative, de faille qui peut avoir une
incidence imminente.
Je
vais faire un parallèle avec la
santé-sécurité du travail. On parle de la notion de risque puis de la notion de
danger en santé-sécurité du travail. Ce
n'est pas la même chose. Alors, ici, on est quoi? On est devant des situations
de danger, ou devant des situations de risque, ou est-ce qu'on est en
principe de précaution, même, où, là, on limite encore plus là où on doit
aller? Elle est là, notre préoccupation ici.
• (11 heures) •
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : Alors, comme je vous ai dit, vous faites état que le
changement de culture apporté par l'apparition
de l'utilisation des nouvelles technologies nous amenait à de nouveaux modèles
d'affaires. Et vous apportez l'exemple
des mégadonnées, O.K., et vous dites que les mégadonnées sont l'objet d'une
saine gestion par les entreprises et qu'il importe de le reconnaître
dans les choix législatifs à effectuer.
D'abord,
peut-être vous pouvez prendre un instant pour expliquer aux gens qui nous
écoutent qu'est-ce qu'on veut dire par mégadonnées. Mais moi, j'aimerais
comprendre parce qu'encore là vous dites que, «you know», il y a une saine gestion. Moi, j'aimerais comprendre les
éléments qui constituent cette saine gestion. Et est-ce que l'expérience
récente permet de dégager quelles sont les meilleures pratiques dont il y
aurait lieu de s'inspirer?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Lamy.
M. Lamy
(Guy-François) : Merci.
Quand on parle de mégadonnées, premièrement, je pense que c'est... vous soulignez un bon point, qui est peut-être celui de
préciser de quoi on parle ici. Quand on parle de mégadonnées,
métadonnées, big data, il y a plusieurs façons de désigner ce type
d'information là, on parle d'informations qui sont colligées à différents endroits à partir d'une masse d'individus et qui
deviennent une donnée de façon plus générale. Dans le fond, on parle de plusieurs données
individuelles, et elles deviennent une grande donnée qui nous permet d'avoir
un renseignement particulier sur un type d'activité.
Par exemple,
une mégadonnée, ça peut être l'âge moyen dans un certain quartier donné, ça
peut être les habitudes de
consommation de l'ensemble des clients d'une entreprise à travers telle région
ou telle succursale, tel endroit. Ce genre de données là, qui partent effectivement
de plusieurs renseignements individualisés et qui n'en deviennent qu'un seul, qui lui, évidemment, n'est pas un renseignement
personnel, la mégadonnée n'est pas un renseignement personnel, mais
qu'elle part de plusieurs renseignements qui, tantôt, peuvent être, au sens de
la loi, des renseignements personnels, et d'autres, non.
Et ça, c'est
utilisé, évidemment, à des fins d'adaptation du service à la clientèle, de
création d'expériences clients qui
sont davantage personnalisées ou ciblées selon les profils de clientèle. Et les
données, les recherches, particulièrement dans le secteur du commerce de détail, tendent à démontrer que c'est
apprécié de la part des clients aussi, ces mesures-là qui sont
maintenant développées à partir de l'utilisation de ces informations-là.
Lorsqu'on parle maintenant de ce qui est fait,
bien, premièrement, comme je l'ai dit, il y a cette idée que la mégadonnée,
lorsqu'elle est utilisée, elle n'est pas un renseignement personnel.
Lorsqu'elle est utilisée en tant que mégadonnée,
il s'agit d'un renseignement qui est général, générique, qui est une donnée
statistique, essentiellement, dans le fond,
si on peut le regarder comme ça. La question, c'est de savoir comment gère-t-on
le transfert de ces informations-là que
nous recueillons petit à petit un peu partout pour construire cette
mégadonnée-là. Et c'est un peu dans l'esprit de ce que je vous disais tout à l'heure, quand je disais que
l'investissement est là, puisque c'est devenu... Les entreprises
comprennent qu'il y a une sensibilité à
l'égard de ces renseignements-là. Et, comme je vous ai dit tout à l'heure,
l'impact d'une faille de sécurité relativement à l'utilisation ou à la
conservation, surtout, de ces renseignements-là, pourrait être tellement important pour une entreprise, il pourrait même,
pour certaines, être fatal, dépendamment de l'ampleur ou de la taille
des entreprises, que c'est de là que vient
cette conscientisation et cette prise de données au niveau de la sécurité de
l'information pour assurer qu'on utilise les données au niveau technologique...
pas les données, mais les outils technologiques de protection et de sécurité
d'information qui sont les plus élevés dans ce domaine-là. Donc, c'est un peu
ça, le portrait, là, de la situation ici.
Le Président
(M. Ouellette) : Est-ce
que M. le député de Maskinongé ferait un petit bout, Mme la ministre?
Non?
Mme de Santis : Non. C'est...
Le Président (M. Ouellette) :
Ah! c'est M. le député de Trois-Rivières.
Mme de Santis : Oui.
Le
Président (M. Ouellette) : Bien, M. le député de Trois-Rivières, à vous la parole, en vous disant
qu'il reste 3 min 30 s.
M. Girard
(Trois-Rivières) : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, pour les
gens du Conseil du patronat, on a eu
le plaisir de travailler ensemble dans le passé. Ayant été ministre délégué aux
PME, à l'Allègement réglementaire, j'ai eu le privilège de créer ce
comité permanent sur l'allègement réglementaire et j'ai senti, tout à l'heure
dans vos interventions, un certain souci
parce que parle beaucoup d'allègement réglementaire, on exporte de plus en plus
au Québec, nos entreprises doivent
être performantes, nos entreprises doivent être productives, et j'ai senti un
souci d'augmenter une réglementation ou d'ajouter des tâches à des
entreprises qui peuvent avoir un impact sur notre productivité, etc.
Donc, est-ce
que... parce que, bon, tantôt on
parlait d'avoir vraiment un responsable d'accès à l'information pour les petites PME, je suis entièrement conscient que ça peut être extrêmement difficile. Vous avez parlé de 100 employés et plus. Avez-vous des propositions ou est-ce qu'il n'y a pas un organisme comme vous, soit Conseil du patronat ou
fédération de chambres de commerce, etc., quelque chose, un organisme qui pourrait venir en aide à nos PME pour pouvoir
gérer ce souci? Je comprends que le principe, vous êtes en accord avec le
principe que l'on parle aujourd'hui, mais c'est sur l'application au sein des
différentes entreprises. Est-ce
qu'il n'y aurait pas des organismes
présents, est-ce qu'il n'y a pas un moyen de faciliter le travail de nos PME afin de répondre aux
attentes du gouvernement, aux attentes de la ministre tout en
gardant le souci d'allègement réglementaire et le souci d'une certaine
flexibilité pour que nos entreprises puissent répondre aux attentes?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Lamy.
M. Lamy (Guy-François) : Merci, M. le Président. C'est une proposition qui
est fort intéressante, en ce sens qu'au Conseil du patronat, au CPQ, c'est un modèle qu'on a déjà adopté avec
d'autres organismes, puis je pense à l'Office de la langue française, particulièrement, où on a
développé des projets avec eux au niveau de l'accompagnement, de l'information, de la
sensibilisation des organisations, et je sais que je peux d'emblée vous dire
que vous auriez, en tout cas, à tout
le moins chez nous, une oreille très attentive à l'idée de développer des
projets comme ça, peut-être justement en partenariat avec la Commission
d'accès à l'information. Il pourrait y avoir certainement une matière. Et,
comme une organisation comme la nôtre
rejoint l'ensemble des employeurs du Québec, il y aurait certainement matière à
trouver ici une solution qui soit
pertinente. Je parlais tout à l'heure du rôle de la commission d'information et
de sensibilisation et je disais que
le milieu, les entreprises pouvaient collaborer à ça. Et ça vaut aussi pour les
organisations d'entreprises. Et je sais que ça fait partie de l'ADN du CPQ de développer des projets comme
ceux-là, effectivement. Il y aurait certainement matière à en discuter.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Trois-Rivières, une minute.
M. Girard
(Trois-Rivières) : Donc, le défi est vraiment de répondre à la
sécurité de l'information dans nos entreprises
au niveau du privé, mais de la façon, je dirais, la plus simple possible pour
nos entreprises. Mais le défi va être vraiment de trouver une façon
efficace, soit informatique, etc., de sorte que nos PME vont pouvoir répondre à
notre demande de sécurité d'information sans
pour autant générer des coûts énormes supplémentaires, sans générer du
temps supplémentaire non plus dans ces entreprises-là et voir comment on peut,
avec les outils actuels, avec ce qui existe, comment
on peut mettre tout ça ensemble pour que nos entreprises demeurent productives,
demeurent efficaces, demeurent des
bons exportateurs, etc., mais en ne perdant pas de vue la sécurité de
l'information. Donc, il y aura peut-être un travail à faire
éventuellement, si je comprends bien, là.
M. Lamy (Guy-François) : Vous avez absolument bien compris notre point.
Tous les objectifs qui sont visés par le
régime actuel, nous les partageons. Nous comprenons que l'évolution
technologique fait en sorte qu'il y a de nouvelles préoccupations au
niveau de la protection de l'information, mais ce que nous disons, et je tiens
peut-être à préciser certains commentaires
que la ministre a faits tout à l'heure à cet effet-là, nous ne disons pas que
nous sommes pour le statu quo, nous disons que nous avons des réticences
face à certaines recommandations qui sont formulées par la commission pour atteindre ces objectifs-là. Mais
nous sommes tout à fait ouverts à travailler avec la commission et le gouvernement, et le législateur pour essayer de
tenter de trouver les solutions qui sont les plus adéquates pour
atteindre ces objectifs-là.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
• (11 h 10) •
Mme Léger :
Merci, M. le Président. Vous avez fait une belle... Ce serait presque votre
conclusion, avec la réponse au
député. Bienvenue, monsieur, ici, en commission parlementaire. Je me suis
demandé : Qu'est-ce que le Conseil du patronat va venir nous dire
en commission? On lit votre mémoire, on voit que vous avez quand même
sélectionné vraiment des éléments, que vous
êtes en accord dans le sens qu'il faut moderniser la loi, avec les informations
que vous... les commentaires que vous
avez... que vous venez juste de dire, entre autres. Les nouvelles technologies,
il faut se mettre au goût du jour
quand même malgré tout, on évolue, mais, en même temps, effectivement, on voit
certaines réticences sur certains éléments parce que, dans le fond, on
ne peut pas être contre la vertu de vouloir moderniser la loi.
Je
veux revenir sur le principe de responsabilité des entreprises. La commission,
la CAI, dit, entre autres, que la loi
sur le privé prévoit quand même des responsabilités aux entreprises, d'avoir
des obligations pour les entreprises parce qu'elles... entre autres : «...elles recueillent, utilisent,
communiquent [et] détruisent des renseignements personnels, [et] la mise en oeuvre de telles obligations requiert des
mesures concrètes par lesquelles elles sont intégrées à la gestion quotidienne
de leurs activités...» Vous, vous dites que
c'est plutôt théorique, ça, parce qu'en général, normalement, les
entreprises prévoient... savent quoi faire
ou font ce qu'il faut pour s'assurer de ça. Mais, au point de vue, dans le
fond, du rapport tel quel,
quinquennal, qu'on est en train d'étudier, pourquoi vous pensez que la CAI
croit que c'est pertinent de ramener ça? Parce que vous avez l'air à dire que ce n'est peut-être nécessaire, ce
qui est actuellement en cours est suffisant. Mais on s'interroge sur,
quand même, cette recommandation du commissaire, de la CAI, par rapport à... et
que c'est pertinent pour eux. Alors, je veux comprendre pourquoi vous ne le
trouvez pas pertinent.
M. Lamy (Guy-François) : Comme je disais, je ne dis pas que ce n'est pas
pertinent, hein, on dit surtout qu'on trouve que c'est théorique. Donc,
on se demande, dans le fond, dans l'éventail des mesures qu'on peut prendre,
quelle est la véritable valeur ajoutée de celle-là. Autrement dit, ce qu'on
dit, c'est : Moi, je suis une entreprise, j'ai des obligations dans la Loi sur le privé, j'ai des obligations en vertu
de la Loi sur les normes du travail, j'ai des obligations en vertu de la Charte de la langue française, j'ai
une multitude d'obligations qui s'appliquent à moi. J'ai la
responsabilité de mettre en oeuvre ces
obligations-là. J'ai des obligations, donc je suis responsable, donc j'ai cette
responsabilité-là. Alors, c'est
peut-être qu'on a de la difficulté à saisir ici la portée, l'essence,
justement. Alors, malheureusement, j'ai peut-être moi-même envie de poser la question à la
commission : Pourquoi souhaitez-vous mettre de l'avant cette mesure-là,
puisque nous, on a de la difficulté à la comprendre lorsqu'on la lit? On a de
la difficulté, on se demande pourquoi. Donc, je trouverais ça périlleux de m'avancer et de prêter des intentions à la
Commission d'accès à l'information sur la raison de cette intégration, de ce principe-là qu'elle
souhaite pourtant... Je me pose la question : Si je suis commissaire à
l'accès à l'information, qu'est-ce que ça me donne de plus quand je rends mes
décisions? C'est un peu ça, la question qu'on se pose ici, en fait.
Mme Léger : Oui. Là, je
comprends que c'est plus un questionnement maintenant, mais dans le sens que,
pour le législateur, bien, particulièrement pour le rapport qu'on a devant
nous, c'est dans la section Renforcement de la
protection des renseignements personnels dans les secteurs public et privé.
C'est dans cette section-là. Donc, la recommandation,
dans le fond, c'est d'inclure une obligation de responsabilité des entreprises.
Donc, ils trouvent nécessaire qu'il y
ait une obligation parce que la modernisation de ce qu'on est aujourd'hui,
l'évolution... je pense qu'on peut tous être à même de le dire, que vous ne savez pas vous-même aujourd'hui vos
propres renseignements personnels, votre propre situation personnelle,
c'est où.
Si on regarde 30 ans, 40 ans, 50 ans avant, on
n'avait pas les réseaux sociaux qu'on a là, on n'avait pas le numérique qu'il y a là aujourd'hui, on n'avait pas
tout ce qui est des nouvelles technologies. Évidemment, on
s'interrogeait moins à ce niveau-là. Mais,
depuis plusieurs années, on s'y interroge, évidemment, et il y a une
responsabilité du législateur de
s'assurer qu'on protège les renseignements personnels. Alors, vous
considérez... parce que vous représentez quand même 70 000 employeurs, c'est quand même beaucoup d'employeurs. Je
comprends l'idée de ne pas alourdir, de ne pas avoir une bureaucratie à n'en plus finir pour les entreprises parce
qu'effectivement on veut alléger les choses, mais, en même temps, il y a
une interrogation sur la pertinence, dans le fond, d'ajouter ça. Je ne sais pas
si... Vous avez l'air à vouloir rajouter quelque chose.
M. Lamy
(Guy-François) : Bien, en
fait, c'est que j'ai envie de formuler la préoccupation qu'on a de la
façon suivante. Je vous l'ai formulée en
disant... Je me suis mis dans la peau d'un commissaire à l'accès à
l'information pour dire : Comment
je mets ça en oeuvre quand je rends une décision? Mais je vais... C'est la
deuxième étape parce que la première question
qu'on se pose, nous, c'est : Si on avait une disposition dans la loi sur
le privé qui vient dire : Les entreprises sont responsables, ont la responsabilité, là, un
article 1, là, qui dit que l'entreprise a la responsabilité de protéger, de
prendre les moyens nécessaires pour assurer
la protection des renseignements personnels, ma question serait la suivante, et
comme employeur, et comme conseiller
juridique, et comme gestionnaire, ce serait de dire : Alors, qu'est-ce que
je fais maintenant pour rencontrer
cette obligation-là autre que de commencer par lire l'article 2, 3, 4, et 5 et
6, et suivants, qui, dans le fond, viennent la mettre en oeuvre? C'est
pour ça qu'on vous dit qu'on la qualifie de théorique. À moins que vous nous disiez — et ça, ce serait de la réglementation
intelligente poussée au maximum, mais je ne suis pas sûr qu'on soit
rendu là — que de dire qu'on va garder juste un
principe, qui est la responsabilité des entreprises, puis après ça on va laisser toutes les obligations, les laisser se
mettre en oeuvre, là. Comme je vous dis, ça, c'est de la réglementation intelligente poussée au maximum,
là, et je ne pense pas que ce soit là non plus que la commission souhaite aller
non plus.
Alors, c'est ça,
notre question, c'est de se dire : Qu'est-ce qu'il y a de différent là-dedans, dans
ce principe-là, que toutes les
autres? Puis je fais encore la comparaison avec d'autres lois. Je vous ai parlé
de santé-sécurité, c'est un autre domaine
avec lequel je suis assez familier. Effectivement, dans la Loi sur la santé et
sécurité du travail, on commence en disant
que l'objectif de la loi, c'est d'assurer la protection de la santé et de la
sécurité des travailleurs dans les milieux de travail et de déterminer
les mécanismes, les moyens de participation des employeurs et des travailleurs
pour atteindre cet objectif-là. On comprend ça, mais après ça on découle aussi
le reste de la loi pour comprendre nos obligations.
Alors, c'est un peu ça, la question qu'on se
pose. C'est pour ça que je vous dis : Pour nous, ce n'est pas une objection, c'est davantage, vous l'avez souligné
en disant un questionnement, mais c'est davantage une préoccupation de dire un peu : Mais quelle est la valeur
ajoutée de ce principe-là puisque, pour nous, il apparaît évident que c'est
exactement ce que c'est actuellement,
qu'actuellement il n'y a pas vraiment d'autres responsabilités? Contrairement à
la santé-sécurité du travail, je ne peux même pas vous dire que c'est
une responsabilité partagée, ici, en matière de protection des renseignements
personnels, alors que la santé-sécurité du travail, c'est une responsabilité
partagée entre l'employeur et le travailleur,
alors qu'ici c'est l'entreprise qui collecte, utilise, et conserve, et
ultimement détruit les renseignements personnels, qui est la seule à
avoir la responsabilité. Alors, c'est un peu ça, notre question.
Mme Léger :
Je comprends bien. Maintenant, au niveau du responsable de l'accès à
l'information, vous l'avez abordé un peu tout à l'heure, vous dites que
chaque entreprise est maître de son organisation puis doit gérer cette situation-là, bien, en tout cas, organiser sa
structure en fonction de comment elle voit pour répondre à cette demande-là.
Vous parliez un peu plus tôt de
100 employés et plus. Pourquoi 100? Pourquoi pas 50? Pourquoi pas 25?
Pourquoi vous dites 100?
M. Lamy
(Guy-François) : En fait, on
s'est inspirés un peu de ce qu'on voit ailleurs, donc, dans d'autres
pièces législatives, là où on a des
obligations, par exemple, d'avoir des responsables, comme en francisation,
entre autres, Charte de la langue
française. Il y a différents niveaux de responsabilité qui cheminent, hein?
Vous savez que, si je prends la Charte de
la langue française, par exemple, là, donc, à 100, on va avoir un comité, on va
avoir un responsable, bon, et puis, si on est 100, on va avoir un programme à mettre en oeuvre, etc. Alors, c'est
un peu ce modèle-là qu'on a pris. Alors, pourquoi pas 50? Bien, parce que ça ressemble plus à ce
qu'on voit. Je vous dis, vraiment, notre source d'inspiration ressemble beaucoup à la Charte de la langue française parce
qu'on considère que c'est des lois qui ont peut-être des statuts qui se ressemblent quand même, là, au niveau de leur
place, là, dans le portrait, dans le catalogue législatif, si je peux le
dire comme ça. Donc, c'est pour ça qu'on s'est arrêtés à ce seuil-là. Donc,
c'est pour ça qu'on l'a ciblé à 100. Le principe derrière ça étant, comme je
l'ai expliqué tout à l'heure, de s'assurer qu'on a une certaine masse critique
de ressources pour pouvoir mettre cette obligation-là en oeuvre.
Mme Léger : Mais si je
me mets dans la peau du citoyen, où il y a une responsabilité gouvernementale
de s'assurer que le citoyen, ses renseignements soient protégés et, en même
temps, qu'il ait accès à l'information, donc qu'il
y ait un responsable de l'accès à l'information dans les entreprises, là n'est
pas si on devrait en avoir un dans chacun, malgré que c'est ça, la recommandation, puis on pourrait en rediscuter
avec aussi d'autres groupes et la CAI elle-même, il n'en reste pas moins qu'il faut se soucier autant
qu'il y a d'entreprises autant qu'il y a peut-être des façons d'organiser.
Ce qui est important, je pense, dans la
recommandation, c'est de s'assurer que le citoyen, peu importe le citoyen x, y,
z, puisse avoir accès à des informations et puisse être protégé par les
renseignements personnels.
Donc, je
crois qu'il faut voir les choses aussi de l'autre sens, pas juste dans le sens
de l'entreprise qui dit : Bon, bien,
100 employés et plus, on va mettre un responsable d'accès à l'information.
Peut-être que 100 employés et plus, c'est peut-être correct d'avoir
un responsable, il y a assez de monde puis il y a assez... c'est normalement
une plus grosse entreprise, en tout cas, une
moyenne entreprise, puis c'est peut-être important d'avoir un responsable
d'accès pour le citoyen ou pour la
personne qui a à faire affaire avec l'entreprise en question, mais il n'en
reste pas moins que le gouvernement n'a pas à s'adapter nécessairement à chacune de ces entreprises-là. Je
comprends qu'on ne peut pas avoir tout le monde égal, tout le monde la
même chose, mais, dans la peau du citoyen, il faut être capable, comme
législateur, de répondre à sa protection et à l'accès à l'information. Alors,
je vous le mets de l'autre bord, là.
• (11 h 20) •
M. Lamy
(Guy-François) : Je pense
que, dans des situations comme celle-là, si le citoyen sait qu'il a un
droit d'accès... Ça, c'est une autre chose,
c'est important aussi qu'il sache qu'il a ce droit-là. Et là je reviens sur le
rôle de la commission aussi au niveau
de la sensibilisation auprès du citoyen, là, mais, si le citoyen sait qu'il a ce droit-là puis qu'on est devant une entreprise de cinq employés, comme
on prenait comme exemple tout à
l'heure, il y a de fortes chances
que le responsable de l'accès, par
définition, va être une de ces cinq personnes-là au moment où la demande va
rentrer dans le sens que, si j'ai
deux personnes au service à la clientèle, ça va peut-être être le président de
l'entreprise qui va s'en occuper.
Vous savez, on dit souvent, quand on parle des
PME, que le président, c'est aussi le directeur des ressources humaines,
c'est aussi le chef des finances. Bon, il serait peut-être aussi par défaut, de toute façon, le responsable de l'accès s'il y a ce genre de demande là qui rentre ou, comme je vous dis, ça
sera une des personnes qui est là parce que, dans le fond, la nature de
l'entreprise va faire en sorte qu'ils vont devoir la traiter, la demande. Ça,
c'est une obligation. On veut avoir accès. On va devoir la traiter, la demande.
Donc, est-ce que ça ne serait pas une procédure
à implanter au sein du service à la clientèle, par exemple, de s'assurer que... Comme j'entendais nos
prédécesseurs, là, qui disaient qu'eux, ils ont un processus à ce niveau-là qui passe généralement par le service à la clientèle. Dans les cas plus
complexes, ça peut aller aux services juridiques. Donc, est-ce qu'une entreprise ne pourrait pas simplement se doter d'un processus, si elle a
cette obligation-là, et que la clientèle, par exemple, qui est visée sache, par exemple, à travers le site Internet, à
travers les démarches... parce que, quand on appelle, s'il y a une réponse interactive qui nous
dit : Bon, si vous voulez accéder à votre dossier, appuyez sur tel bouton,
il y a différentes façons de
s'assurer qu'on atteint cette mission-là, puis qu'on l'adapte, puis qu'on
agisse. Puis c'est un petit peu la
discussion qu'on a eue, la brève discussion qu'on a eue avec le député de
Trois-Rivières quand on disait : Bien, il y a peut-être aussi des façons de s'assurer de
procéder à l'accompagnement dans la mesure où l'objectif ultime, c'est
que le citoyen, lui — parce que votre question porte sur le regard
du citoyen — que le
citoyen, lui, sait qu'il a le droit d'accès à ces renseignements et qu'il peut formuler une demande. Après ça,
l'entreprise, elle a l'obligation, elle a l'obligation, de répondre à
cette demande-là. Donc, elle va prendre les mesures nécessaires pour le faire.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Parce qu'on...
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. Bonjour, messieurs.
Merci d'être présents aujourd'hui pour participer aux travaux de la commission. J'aimerais qu'on aborde la question
des renseignements génétiques. Dans le fond, dans votre mémoire, c'est sur deux volets. Premier volet, c'est au niveau de l'emploi puis deuxième volet, c'est au niveau des assurances. Ça fait que j'aimerais ça qu'on
décortique tout ça pour avoir la position du Conseil du patronat, dans un
premier temps, au niveau de l'emploi. Donc,
vous voulez avoir un certain accès aux renseignements génétiques. Les employeurs pourraient
avoir un certain accès sous réserve des chartes. C'est ce que je comprends.
M. Lamy
(Guy-François) : Ça résume
bien notre position, sauf peut-être une nuance que je voudrais apporter face à l'affirmation comme vous la formulez. C'est que
c'est davantage ici une préoccupation, comme je l'ai mentionné en commentaire d'introduction, à l'effet qu'on a un
régime assez serré avec les chartes. Même si la charte, ce n'est pas une
pièce législative volumineuse, on a un
régime très serré ici sur les questions, et les formulaires, et tout ce qu'on
peut faire à l'embauche. Donc, actuellement les employeurs sont très restreints. Test génétique ou pas, là, actuellement les employeurs sont très restreints dans ce qu'ils peuvent faire
au niveau de la cueillette d'informations de renseignements de nature médicale,
là, on va parler au sens large, là. Et donc c'est très, très limité, ce qui se
fait.
Donc,
l'examen total complet de santé, là, ce n'est pas légal dans la très vaste
majorité des cas. On peut spécifier certaines
demandes au niveau médical, souvent on va faire un examen qui va avoir lieu
préembauche, mais souvent suivant une offre conditionnelle d'embauche
où, là, on va être vraiment, vraiment très limités dans ce qu'on fait. Et, de
façon générale, ce qu'on observe, la
recherche qu'on a faite, nous, la consultation ici, auprès de nos membres,
qu'on a faite, c'est qu'à l'heure actuelle il n'y a pas vraiment
d'employeurs qui sont dans des situations où ils passeraient le test pour obtenir les résultats de tests génétiques
dans les faits, là, avec ce qui est actuellement en cours. Est-ce que l'évolution de la science ne fera pas qu'un jour on ne réussira pas à avoir, par un simple
test génétique, par exemple, un échantillon de salive ou un
échantillon de tissus, être capables de cibler précisément si le travailleur
potentiel est porteur de tel gène, telle pathologie qui a un lien avec l'emploi? Et, à ce moment-là, on passerait le même test. Mais, pour l'instant, on est
encore... Et ce serait d'ailleurs
moins intrusif à ce moment-là que si on allait vers l'examen médical, comme ça
peut être parfois le cas, ou le questionnaire médical, comme on
l'utilise actuellement.
Donc, pour
nous, ce qu'on voit, c'est que le régime de la charte, il passe assez bien le
test, si bien que, dans la plupart
des cas, les renseignements génétiques, les employeurs ne sont pas en mesure
de le faire. D'ailleurs, c'est ce qui est écrit dans le rapport aussi parce que, quand on lit le rapport de la commission,
ce qu'on comprend c'est que la commission fait, elle, une crainte qui a été soulevée que des employeurs pourraient
utiliser ça pour procéder à des mesures relatives à l'embauche ou au congédiement. Mais on parle ici
vraiment... on légifère sur une base de craintes. Alors, nous, le
Conseil du patronat, légiférer sur la base de craintes comme ça, qui sont
simplement des craintes formulées un peu en l'air comme ça, on n'est pas certains que ce soit nécessairement
adéquat puis approprié dans les circonstances actuelles quand on regarde
l'état de la situation puis l'état des choses. Donc, c'est davantage ça.
Alors, on aurait l'impression un peu ici qu'on
viendrait, excusez-moi l'expression, mais mettre un plasteur par-dessus le
plasteur, là. Et, pour nous, comme on a une préoccupation d'avoir une espèce
d'efficience, d'effectivité législative, bien, on considère que ce ne serait probablement pas aller dans la bonne direction que de procéder ainsi, alors qu'on a déjà un cadre complet à ce niveau-là qui davantage
relève de la question de la
discrimination, évidemment, que de la question de la protection des
renseignements personnels à ce niveau-là. C'est un peu ça, la préoccupation.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, puisque la situation n'a pas encore
cours, il n'y a pas de nécessité nécessairement de légiférer là-dessus?
On est dans une crainte hypothétique, selon le Conseil du patronat?
M. Lamy
(Guy-François) : La
situation non seulement elle n'a pas encore cours, mais, à notre avis, même
si elle se présentait, le cadre législatif
actuel serait suffisamment restrictif pour faire en sorte qu'on ne se
retrouverait pas devant une situation où on devrait réagir face à une
situation qui serait outrageuse ou outrageusement intrusive.
M. Jolin-Barrette : O.K. Pour
la question du domaine des assurances, là, vous émettez aussi certains commentaires relativement à l'utilisation... bien,
en fait, des tests génétiques relativement aux assurances, ça a fait
couler beaucoup d'encre, notamment à Ottawa,
vous le mentionnez aussi dans votre rapport. Je voudrais connaître la
position du Conseil du patronat là-dessus.
M. Lamy
(Guy-François) : Il y a deux
éléments principaux à l'égard de la question de l'utilisation des renseignements génétiques en matière d'assurance.
La première, c'est qu'il y a actuellement des discussions qui ont cours sous la responsabilité du ministre des Finances,
qui est responsable, dans le fond, du secteur de l'assurance, et qu'il y
a un comité qui a été créé, auquel les gens de l'industrie participent aussi,
et qui se penche notamment sur cette question, particulièrement dans la foulée
de ce qui se passe à Ottawa, considérant que la question de la
constitutionnalité de cette mesure-là aussi,
au niveau du gouvernement fédéral, est en jeu aussi dans ce débat-là, et donc
que ça risque de se retrouver peut-être dans votre cour à vous, ici, à
Québec. Donc, ça, c'est un premier impact.
Alors, nous,
ce qu'on dit, c'est : Il y a déjà des travaux qui se font à ce niveau-là,
on devrait laisser cours à ces questions-là
puisque le secteur de l'assurance a son encadrement propre, qui est assez
complet en soi. Donc, il y a des travaux
qui sont là, cette préoccupation-là, elle est sur la table. Donc, on devrait la
laisser aller ici pour éviter d'avoir des contradictions à ce niveau-là,
d'une part.
D'autre part,
ce qu'on dit, c'est, quand on observe maintenant sur le fond de la question, ce
qu'on remarque, c'est qu'il y a des mesures qui ont été prises dans
d'autres juridictions. On cite le Royaume-Uni dans notre mémoire, mais il y en a plusieurs autres à travers le monde qui
ont différentes mesures sur cette question-là parce que c'est une
question qui préoccupe tout le monde dans
toutes les juridictions. Donc, notre autre commentaire, c'est : Prenons le
temps d'analyser ce qui se fait
ailleurs parce que le rapport de la commission, encore une fois, ici, je trouve
qu'il coupe court, il coupe l'herbe sous
le pied très court en disant : Pour nous, c'est quelque chose qu'on
devrait simplement interdire. Nous, on prend un pas de recul puis on
dit : Attention, il y a des mesures qui ont été prises dans d'autres
juridictions et qui sont des mesures d'atténuation.
Autrement dit, on n'a pas été noir ou blanc. On n'a pas tout interdit, mais on
n'a pas non plus tout permis tous azimuts.
On s'est donc ciblés sur là où il y avait réellement un enjeu, là où ça
comptait, alors on devrait faire l'effort ici aussi de procéder à cette
analyse-là avant de prendre une décision. On trouve que le rapport est trop
tranché sur cette question-là, est trop catégorique, trop vite surtout.
M. Jolin-Barrette : O.K. À la page 8 de votre mémoire, vous
dites : Il faut éduquer relativement au consentement, puis, lors des précédentes journées d'audition, il
y a plusieurs personnes qui sont venues nous dire aussi : Les gens,
quand qu'ils consentent en matière d'accès
ou en matière de contrat, bien, est-ce que c'est véritablement un consentement
libre et éclairé? Quand vous dites
«éduquer», de quelle façon on fait ça? Parce qu'on nous le disait à juste
titre, la ministre fait une tournée des écoles, mais elle ne peut pas
voir toutes les écoles du Québec, malheureusement. Comment on fait ça?
• (11 h 30) •
M. Lamy (Guy-François) : À ce
niveau-là, je vous dirais, je fais un lien avec ce qu'on écrit aussi dans le mémoire sur la simplification du texte et du
langage. Et je pense qu'une bonne façon de favoriser cette éducation-là,
c'est d'abord et avant tout de simplifier le
langage des consentements. Je suis un fervent adepte de la simplification du
langage juridique. Je suis avocat, j'ai
pratiqué. Avant d'être au Conseil du patronat, j'ai été procureur en accès à
l'information, entre autres, et en droit du
travail pour un organisme public. J'ai été en cabinet privé aussi, mais j'ai
aussi été au sein d'un organisme public. Il m'a pris un trip, si je peux
me permettre l'expression, à un moment donné, de commencer à dire qu'en tant qu'avocat puis
en tant que gars qui travaille dans le domaine ça vaudrait peut-être la peine
que, moi aussi, quand j'achète, quand
je télécharge une application sur mon téléphone intelligent, je prenne le temps
de lire les termes et conditions, et je me suis moi-même
essoufflé dans cette démarche-là. Alors, je n'ose pas imaginer mes petits
cousins de 15 ans qui utilisent des applications, comment ils reçoivent
et conçoivent ça.
Et pour moi
la solution, très sincèrement, elle passe d'abord par la simplification du langage et des concepts.
Et c'est une recommandation qu'on fait dans
notre mémoire, c'est la première étape, la clé à l'éducation, parce
qu'effectivement faire des tournées d'écoles
puis faire des campagnes publicitaires à la télévision ou sur les médias
sociaux, c'est une chose et c'est une
bonne chose. Mais, d'abord et avant tout, si on rejoint chaque personne
individuellement, premièrement, puis qu'on
est capables d'attirer leur attention, d'avoir des mesures qui font en sorte
qu'on attire l'attention sur le consentement et qu'on le comprend
clairement, le consentement, ce serait déjà une très, très, très grande
première étape.
M. Jolin-Barrette : Mais est-ce que le Conseil du patronat considère
que nous, on devrait légiférer sur les formules de consentement utilisées? Parce que c'est ça, une des problématiques. À
partir du moment où on laisse ça dans la sphère privée, bien, l'entreprise, ou l'organisme, ou tout ça va établir, dans
le fond, lui-même les modalités contractuelles du consentement, et ça ne
sera pas nécessairement de la plus grande clarté pour la population.
M. Lamy (Guy-François) : C'est
intéressant. La question de légiférer sur la question, ça dépend vraiment
comment c'est fait aussi, évidemment. Tu sais, dans le sens que, comme je vous
parlais tantôt de modulation puis de s'assurer
que chaque entreprise s'est adaptée à sa réalité, il faudrait s'assurer d'atteindre
cet objectif-là, évidemment. Mais, potentiellement,
si on allait sur le terrain, de prévoir, là, là-dessus, ça serait un principe
que je comprendrais un peu plus, là.
On parlait
tantôt de la responsabilité, mais de prévoir que... On a certains objectifs
précis au niveau de la clarté, au niveau
du fait... je lance ça, par exemple, là, que la question du consentement doit
être mise de l'avant lorsqu'on est dans un téléchargement ou qu'on est sur un site Internet, par exemple, d'avoir
des paramètres comme ça au niveau... puis peut-être... puis après ça de s'entendre. Moi, je verrais plus
au niveau de s'entendre sur la façon de clarifier le consentement, il y
aurait beaucoup de travail à faire.
Alors, est-ce
qu'on serait plus sur le terrain des politiques puis de la réglementation? Je
ne le sais pas parce qu'il me semble
que je verrais... dans ma tête, là, j'assoirais peut-être des gens du Barreau,
j'assoirais peut-être... parce que, souvent, c'est les juristes dans les
entreprises aussi qui rédigent ça, là. Je vais aussi prendre ce blâme-là
moi-même, là, mais j'assoirais peut-être les
gens du Barreau, j'assoirais peut-être les gens de la commission, évidemment,
puis peut-être qu'on serait capables de travailler ensemble à trouver
une façon et des pistes de solution.
Là, leur mise
en oeuvre après ça, est-ce que ça serait législatif, réglementaire? Est-ce que
ce serait : meilleures pratiques poussées par la commission? Il
faudrait peut-être en discuter. Comme je dis, je ne ferme pas la porte à cette
mesure-là, mais ça dépend de la façon que c'est fait.
Le
Président (M. Ouellette) : Bien, merci. Merci, Me Guy-François Lamy et Me Jean-René Lafrance,
représentant le Conseil du patronat du Québec.
Je suspends
quelques minutes. Je demanderais aux gens de l'Association pour la défense des
personnes et des biens sous curatelle publique de bien vouloir
s'avancer, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 11 h 33)
(Reprise à 11 h 38)
Le Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Association pour la
défense des personnes et des biens sous curatelle publique et son directeur
général, M. Ura Greenbaum. Vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation, M. Greenbaum. Par la suite, il y aura un échange avec Mme la
ministre et les porte-parole des deux oppositions. À vous la parole.
Association pour la défense
des personnes
et biens sous curatelle publique
M. Greenbaum (Ura) : Merci, M. le
Président, de l'invitation, d'abord. Vous avez déjà présumément notre mémoire. On peut procéder, au fond, à la
substance. Le thème du mémoire, c'est, brièvement ou en résumé :
Quoiqu'un organisme public, le Curateur public ne divulgue pas ces
dérapages, c'est un problème qu'on rencontre constamment, nous, les gens que nous représentons, c'est-à-dire les personnes inaptes, et surtout leur entourage et le milieu, et le
Curateur public n'est pas tenu à les
divulguer. Au contraire, il utilise la confidentialité afin de camoufler les
écarts de conduite. Je suis pas mal certain, vous avez entendu ces mêmes
idées exprimées par d'autres organismes, c'est récurrent.
• (11 h 40) •
En invoquant
la confidentialité qui touche tous les dossiers des personnes inaptes sous la
curatelle publique, les gens ne sont pas informés de ce qui se passe,
des personnes inaptes, et surtout ceux qui ont de la parenté, la famille, ça
les inquiète. Et toute cette information est sous le contrôle d'une agence publique, ce que l'histoire nous
enseigne répétitivement, pour ceux
qui ont de la mémoire... est une situation très dangereuse. Je vous rappelle l'historique, d'ailleurs,
des asiles d'aliénés du passé, et là tout le monde connaît comment les gens vivaient, comment ils étaient traités dans ces
institutions. Si
quelqu'un meurt sous curatelle publique, comment allez-vous savoir, surtout si
vous êtes un membre de la famille, à moins
qu'on vous informe? Comment est-ce que le gouvernement, ou le Protecteur du
citoyen, ou ceux qui ont le droit d'enquêter et de voir ce qui se passe
vont savoir quand tout est confidentiel? Si quelqu'un sous curatelle publique
se fait blesser gravement, comment
allez-vous savoir? Si un accident grave arrive, comment allez-vous savoir quand
le dossier et toute l'information sont confidentiels? Ici, je vous
rappelle, il y a 13 500 personnes sous curatelle publique, et cet
organisme gère, et cela, c'est méconnu, 500 millions de dollars de leurs
avoirs, un demi-milliard.
Pourtant, le
Curateur public n'aborde jamais ce sujet. Si vous lisez et regardez les
rapports annuels à travers toutes les
années, vous allez remarquer qu'il n'y a aucune discussion. On ne rapporte pas
à l'Assemblée nationale, on ne rapporte pas au public ce qui se passe, à moins que ça ne provienne du Curateur
public et sa version. Mais nous, nous sommes le seul endroit vraiment dans la province, le seul organisme, qui peut vous
donner l'autre côté de la médaille, ce qu'éprouvent les personnes
inaptes, leur parenté et le milieu, et c'est ce que nous avons fait état dans
notre mémoire que vous avez lu. Il y a toute
une stratégie, un processus. Nous avons donné en détail, et ce n'est pas
complet, c'est exhaustif sur le plan... des échantillons de comment les
affaires sont gérées.
Maintenant,
ce que je voudrais faire sortir, vu que tout était présenté dans notre mémoire,
qui est accessible, de toute façon,
des exemples concrets des conséquences de cette situation-là. Dans un mémoire
au Conseil des ministres, déposé et
rédigé, déposé et présenté par Michelle Courchesne, ancienne ministre à
l'époque, en 2008, on a fait sortir, on a rapporté que le Curateur public n'était pas en mesure de répondre à sa
mission déjà en 2008. Et, quand on a demandé... moi, notamment j'avais demandé une copie de ce mémoire,
la réponse que j'ai reçue : C'est confidentiel. Le public ne peut
pas savoir ce qui est dedans et pourquoi
cette mission-là ne répond pas. Et pourtant, tous les ministres, tous les
ministres, les représentants des citoyens, sont tous au courant de ce mémoire-là
et en ont obtenu une copie, et c'est gardé secret.
Autre
exemple. Vous allez m'arrêter quand j'arrive à mon temps, mais vais faire
exemple, par exemple, pour laisser sentir
et voir ce que les gens vivent dans ce domaine particulier. Une dame dont la
mère avait été sous curatelle publique, après qu'elle est décédée, la fille a demandé au Curateur public d'avoir
accès au dossier comme héritière et liquidatrice de la succession. Elle a eu le droit parce que c'est
prévu dans la loi. Mais, quand elle a demandé copie de certains
documents qu'elle avait besoin pour ses
propres fins et pour régler la succession, il avait retranché à peu près
200 pages de son dossier. Elle
est héritière, le dossier, maintenant, appartient aux héritiers et la
liquidatrice représentant la succession, et pourtant on lui a refusé les documents qui lui appartiennent
maintenant, après le décès. 200 pages et évidemment on peut
présumer que ces pages sont des documents
soit embarrassants, soit sensibles pour le Curateur public parce que toute
l'information est dévolue à la
liquidatrice comme représentante de la succession. Alors, pourquoi et sous quel
droit refuser ces documents? Elle n'a
jamais eu ces documents à date, à jour, et sa mère est décédée en 1999. Ça fait 20 ans qu'on retient l'information qui lui
appartient.
Autre exemple. Ça, c'est rapporté dans Le Soleil,
ici, à Québec, un incident qui est arrivé dans Charlevoix, ici, à côté. Un résident sous curatelle publique
souffrant de problèmes intellectuels habitait... a été placé par le
Curateur public dans une résidence. Il s'est
fait agresser sévèrement, entre autres, 10 côtes brisées, ainsi de suite. Son
frère, quand il a appris ce qui
s'était passé, a demandé au Curateur public d'avoir accès au dossier. Le frère,
on a refusé au frère... aucun renseignement, tout accès... l'accès entier au dossier.
Pourquoi? Quel est le motif? C'est le frère, ce n'est pas... Le Curateur
public... Pourtant, ce n'est pas l'hôpital
ou la résidence... le Curateur public qui a refusé à la famille l'accès au
dossier.
Je continue. Il y a
une dame dont le père était sous curatelle publique aussi, et ça, c'est arrivé il y a
trois ans. Elle a demandé d'avoir
accès à son dossier, et elle a réussi à aller voir les dossiers, et elle a
remarqué dans un document une référence
à un autre document très crucial pour ses besoins qui impliquait les employés
du Curateur public. Ça parlait d'une résolution
à cet effet. Mais, quand on a essayé de trouver la résolution dans le dossier,
le document n'était pas là, c'était retranché
aussi, caché. Alors, six mois plus tard, elle a fait une deuxième demande de
revoir le dossier par curiosité, si, la première visite, elle a manqué quelque
chose, parce qu'elle avait fait
plainte au Protecteur du citoyen. Tout d'un coup, quand on arrive revoir la deuxième fois le dossier, la première page
dans le dossier épais de même, c'est le document qui avait été retiré et caché. Et c'était un document nécessaire
et incriminant pour les employés du Curateur
public. Alors, voilà un autre exemple,
ce que la confidentialité cache.
Cette même
dame, ça, c'est important aussi, son père est décédé d'une pneumonie il y a
un an, même pas un an, six mois. Il
avait été dans un CHSLD et atteint d'une pneumonie. Le Curateur public et les employés ont décidé de ne pas l'envoyer à l'hôpital pour se faire soigner. Elle est obligée d'aller elle-même,
de son propre... Ça, quand ça vient à la cour, elle a obtenu un jugement ordonnant au Curateur public de transporter
le monsieur à l'hôpital pour se faire soigner. On ne meurt pas, normalement,
d'une pneumonie ces jours-ci, ces temps-ci. Quand elle est arrivée avec le
jugement à la résidence avec une ambulance et l'a transporté à l'Hôpital
général de Montréal, bien, c'était trop tard déjà parce qu'il y avait trop de temps passé. Il est mort à l'hôpital,
et la dame avait pourtant un jugement qui a reconnu son droit d'avoir l'information
sur sa santé.
Alors, ça va ainsi de suite, je pourrais répéter
et répéter des histoires.
Le
Président (M. Ouellette) : Sûrement, M. Greenbaum, que vous aurez d'autres exemples
à donner à Mme la ministre,
qui va débuter son échange avec vous à l'instant.
• (11 h 50) •
Mme de Santis : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Greenbaum. Bienvenue. Merci de votre présence ici aujourd'hui en comité. Je crois que les personnes
derrière vous sont là pour vous appuyer, et merci pour votre mémoire.
Maintenant, au
Québec, l'article 2.2 de la loi sur l'accès prévoit que l'accès aux documents
qui sont contenus dans un dossier du
Curateur public et que le Curateur public détient sur une personne est régi par
la Loi sur le curateur public. Si on va maintenant à la Loi sur le
curateur public, on prévoit que le dossier d'une personne physique que le curateur représente est
confidentiel et que personne ne peut y avoir accès, sauf pour les personnes
dont les noms sont listés à l'article
52. Et, parmi ce groupe de personnes, il y en a qui pourraient avoir accès,
mais avec l'approbation du Curateur public.
Maintenant, il faut que... Au tout début, on dit le suivant : Le Curateur
public est nommé en dernier recours, O.K.? Le Curateur public n'agira que si l'urgence de la situation l'exige.
Donc, le Curateur public est mis dans une situation où il n'y a personne
d'autre pour s'occuper de l'administration des biens d'une personne qui serait
incapable.
Première
question que j'ai, c'est : Vous n'êtes pas satisfaits avec les
dispositions de la loi telles que j'ai citées, les dispositions. Est-ce que vous avez des exemples
ailleurs au Canada où ces renseignements sont traités différemment et comment sont-ils traités? Est-ce que vous pouvez
me référer à une autre juridiction que vous pouvez me dire : Moi,
cette juridiction-là, on utilise des lois et des procédures qui seraient
acceptables?
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : M. Greenbaum.
M.
Greenbaum (Ura) : D'après nos recherches que nous avons faites...
Premièrement, je dois faire... le principe général de la confidentialité des renseignements personnels, cela, on ne
met pas en cause comme principe général. Ce que nous reprochons ou nous
trouvons... où se trouvent les lacunes, c'est dans l'interprétation de cette
section de la loi. La loi, l'article 52... 51 de la... enfin, la loi sur
l'accès à l'information dit que ce sont les renseignements personnels uniquement de la personne inapte ou sous curatelle
publique, dans l'occurrence... sont confidentiels. Mais le Curateur public traite tout ce qui se trouve dans le
dossier, y compris les documents administratifs de sa gestion, comme si
c'étaient des renseignements personnels de la personne, ce qui est faux. Ce
n'est pas ce que la loi dit, mais le Curateur public l'interprète ainsi pour
couvrir tous les documents. Et il se sert de la confidentialité qui s'applique
aux renseignements personnels uniquement de
la personne inapte pour couvrir sa propre administration, et ce n'est pas ce
que la loi dit. Sa propre administration, comme organisme public, n'est
pas confidentielle. Moi, je maintiens.
Maintenant,
pour arriver à votre question, à l'intérieur de ce contournement de la loi ou
mauvaise interprétation, à mon avis, il y a... et ça, c'est dans les
recommandations, ce doit être peaufiné ou cette distinction doit être prise en considération, mais, pour arriver... Est-ce qu'il
y a une autre juridiction ou est-ce qu'il y a un autre domaine où il y a
des tempéraments? Nous avons vu, la loi sur
la santé là-bas, en Angleterre, avait
été plus récemment modifiée, amendée. Mais je ne me rappelle pas quand. Je n'ai pas les détails devant moi, mais on
l'avait discutée antérieurement. Et là, pour les gens qui sont sur la
gestion de l'administration de l'État, ils ont dit qu'il n'y a plus de silence
quand il y a des abus. Quand il y a des dérapages, des dérives, le principe
est : plus de silence.
Alors,
pour répondre à cette question-là, dans un pays, une juridiction, où la loi
gérant la gestion des personnes inaptes
sous l'État, par l'État, là, on a changé, modernisé, et le principe
était : plus de silence quand il
y a des abus, des dérives, des écarts, peu importe la façon que vous
voulez catégoriser ou classifier, qualifier cette situation.
Pourtant, au Québec, tout est confidentiel, qui se trouve dans le
dossier.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de Santis :
O.K. M. Greenbaum, comme j'ai dit au tout début, le Curateur public est nommé
en dernier recours. Une inquiétude que le Curateur public a, c'est qu'il y a des personnes qui voudraient profiter des
personnes qui sont sous l'autorité du
Curateur public. Comment est-ce
qu'on peut baliser le droit d'accès
en permettant au curateur de
refuser l'accès à cette catégorie de
personnes? Rappelons-nous encore une fois : le Curateur public est nommé
en dernière instance.
M.
Greenbaum (Ura) : C'est une situation qui est inquiétante quand ça
arrive, je l'avoue, c'est évident, et ça, c'était plutôt une question de surveillance. Le rôle du Curateur public
est d'administrer les personnes qui n'ont pas d'autre curateur. Mais,
rappelez-vous, il y a des curateurs privés aussi, il y a des curateurs privés
par des organismes, par des individus, la
parenté ou des amis avec un intérêt spécial. Et, quand ces personnes exploitent
ou profitent, comme vous avez dit, de
la personne inapte pour quelque motif ou même abusent de d'autres façons, le
Curateur public surveille l'administration des curateurs privés. Le
problème, c'est, quand le Curateur public est en charge des personnes inaptes
ou incapables, il n'y a personne qui surveille son administration.
Mais votre question,
c'est quand il y a des abuseurs. Bien, le Curateur public est là pour
surveiller et se faire nommer ou faire
nommer quelqu'un d'autre. Alors, il y a des situations où ça arrive dans le
domaine privé, et il y a une façon...
des modalités prévues. Le Curateur public doit surveiller le fonctionnement des
curateurs publics. Alors, c'est pareil,
s'il y a un abuseur qui se présente sur la scène, le Curateur public est là,
justement, pour agir, mais à titre de surveillant, pas à titre de
curateur. Et je le laisse là.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : M. Greenbaum, vous, vous recommandez qu'on libéralise
l'accès au dossier de la personne inapte sous Curateur public en permettant au tiers ayant un intérêt
particulier. Maintenant, un tiers ayant un intérêt particulier, comment
on fait la distinction entre un réel intérêt envers la personne inapte et ceux
qui ont un intérêt financier uniquement ou
un intérêt qui n'est pas l'intérêt en faveur de la personne inapte? Parce que
vous voulez que ce soit ouvert un peu
à tout le monde. Vous n'avez pas nécessairement répondu à ma question
précédente. J'aimerais savoir quelles sortes de balises vous voulez que
le Curateur public utilise pour déterminer quand, oui ou non, il devrait donner
accès?
M. Greenbaum (Ura) : Mais,
justement, c'est une bonne question, je vais vous dire pourquoi, parce qu'il n'y en a pas, de balise. Le Curateur public a
entière discrétion, entière liberté d'agir dans ce domaine. Il a trop de
pouvoir, et, quand il
y a pouvoir étatique sur tout, il doit toujours y avoir, dans notre système,
c'est fondamental, une surveillance externe
indépendante qui n'existe pas dans le cas du Curateur public. C'est
extraordinaire et très, très, très spécial. Tout organisme public, tout
ministère ne doit pas seulement faire des rapports, mais il y a d'autres
instances où on peut se diriger s'il y a des
problèmes. Pourtant, dans le cas du Curateur public, il n'y en a pas, c'est le
maître de son propre domaine.
Maintenant,
comment est-ce qu'on détermine s'il y a un abuseur ou une personne avec une
mauvaise intention, là, quand il y a
un tiers qui demande de l'accès à l'information? Premièrement, quand une
personne est mise sous curatelle publique
ou est déclarée inapte, toute cette décision est basée sur les rapports qui
viennent, premièrement, de l'hôpital ou de médecins, des professionnels,
et, deuxièmement, obligatoirement aussi, un deuxième rapport ou évaluation par
travailleuse sociale ou travailleur social, selon le cas. Donc, le Curateur
public se fie sur ces rapports-là.
Alors, c'est
sur la base de ce rapport que le Curateur public est capable, premièrement, en
amont, de déterminer s'il y a une
personne qui met la personne inapte à risque, premièrement, et, un deuxième
cas, le Curateur public surveille tous ces
champs, comme j'ai dit tout à l'heure, et donc, s'il fait son travail bien, il
va avoir ses indices s'il est dans le portrait, s'il agit consciencieusement, ce qui n'est pas le cas.
Nous avons... Il ne voit jamais les personnes inaptes. Il les voit
maximum... Vous avez vu, dans les journaux,
il l'avoue, d'ailleurs, qu'il voit les personnes inaptes sous sa gestion une
fois par an au maximum, et pas toutes
les personnes. Donc, il ne fait pas son travail de surveillance. On ne peut pas
blâmer un tiers ou soupçonner un tiers d'avoir de mauvaises intentions
quand le Curateur public délaisse sa responsabilité, ne fait pas sa job, son
devoir de surveillance dans le domaine.
Alors,
comment... c'est par le rapport et l'évaluation faits périodiquement par les
gens dans le domaine, comme les travailleurs
sociaux, travailleuses sociales et par une surveillance, son rôle de
surveillant dans le domaine. Alors, il y a des structures et des responsabilités, sauf... ils ne sont pas suivis
rigoureusement parce qu'il n'y a personne qui surveille le
fonctionnement du Curateur public.
• (12 heures) •
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : M. Greenbaum, est-ce que les biens que vous détenez et
la valeur des biens que vous détenez ne sont pas des renseignements
personnels?
M. Greenbaum (Ura) : Est-ce que vous
pouvez répéter?
Mme de
Santis : Je vous pose la question à vous. Vous avez des propriétés,
vous avez des biens, etc. Ces choses, cet actif-là a une valeur. Est-ce
que ce n'est pas un renseignement personnel concernant M. Greenbaum?
M. Greenbaum (Ura) : Oui.
Effectivement. C'est privé.
Mme de Santis : Alors, quand on...
Pardon?
M.
Greenbaum (Ura) : C'est privé. S'il s'agit d'un immeuble, c'est
enregistré, et tout le monde peut avoir une copie de l'acte.
Mme de
Santis : O.K., mais il y a... Tous les biens que vous avez, ce n'est
pas publié quelque part, et les tiers n'ont pas accès à ça, O.K.? Votre
rapport d'impôt n'est pas connu par tout le monde.
Maintenant,
une personne dont l'administration des biens est détenue par le Curateur
public, c'est bien... de la personne
inapte, ça, c'est un renseignement personnel de la personne inapte. Est-ce que
le Curateur public ne devrait pas s'assurer que ces renseignements-là ne
soient pas donnés à des tiers? Parce que c'est un renseignement personnel. Et,
rappelons-nous, je répète toujours : Le Curateur public est nommé en
dernière instance.
M. Greenbaum (Ura) : Je suis
d'accord, sauf qu'il y a une distinction à faire. Moi, je suis présumément une personne apte, alors je peux exercer mes propres
droits et me protéger. Mais, pour une personne déclarée inapte, toute la
situation bascule et change parce que ses
biens, sous curatelle publique, sont administrés par un organisme public.
Moi, je peux me défendre, comme j'ai dit
tout à l'heure, et donc mon droit de confidentialité doit être respecté. Mais
une personne inapte, il ne gère pas
ses biens. C'est le curateur, un organisme public. Et ici l'organisme public
s'occupe de la gestion, il est
redevable. À qui va-t-il, l'organisme, être redevable, alors qu'il... curatelle
publique? Si la personne, le bénéficiaire, est inapte, il ne peut pas ni surveiller ni voir ce qui se passe, il
faut qu'il y ait des tiers qui aient droit de vérifier ce qui se passe. La personne inapte est par définition
incapable. Il ne peut pas le faire. Alors, il y a une distinction à faire. Moi,
je peux me protéger, mes biens sont privés, mais une personne inapte est gérée
par un organisme public, et la gestion doit être ouverte.
D'ailleurs,
la loi prévoit... Le Curateur public doit rendre compte par des bilans, par un
inventaire, avec la présence, et à la
personne, à une tierce personne quand même, quelqu'un, un membre de la famille
ou un proche. C'est prévu dans la loi.
Alors, il n'y a pas de confidentialité absolue pour les gens sous curatelle
publique. Alors, c'est cette distinction à faire.
Mme de
Santis : Là-dessus,
il y a deux questions. D'abord, numéro
un : «Les livres et [les] comptes relatifs aux biens administrés par le Curateur public sont
vérifiés par le Vérificateur général — pas
à chaque cinq, six ans, c'est : chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement.» Ça, c'est
l'article 66 de la Loi sur la curatelle publique. Donc, le Vérificateur
général vérifie les livres et comptes chaque année. Alors, ce n'est pas vrai qu'il
n'y a pas un regard sur ce
que le Curateur public fait. Aussi, le Curateur public peut être
appelé devant la Commission de
l'administration publique, mais je ne sais pas quand c'était, la
dernière fois qu'on l'a appelé devant la commission.
Vous ne
croyez pas... Est-ce que vous avez un problème avec cet article
66? Et qu'est-ce que vous suggérez en plus? Parce que vous me dites que le Curateur public est responsable pour une personne
inapte. Mais il est là de façon extraordinaire. Et pourquoi un tiers
pourrait venir maintenant dire : Moi, je veux savoir qu'est-ce qu'il y a
dans le patrimoine de cette personne inapte? Quel intérêt a cette personne?
M.
Greenbaum (Ura) : En
réponse, premièrement, cette personne peut être une... comme exemple,
je dirais, une femme, une épouse en communauté de biens. Cette personne
a tout le droit d'avoir accès à l'information parce que l'information la vise ou la
concerne directement et personnellement. Cette personne peut être un héritier potentiel, à un moment
donné être très intéressée à la bonne
gestion, n'est-ce pas, parce
que tous les biens vont, à un moment donné, dévoluer aux héritiers
de cette personne. Enfin, il y a un paquet de raisons pourquoi une personne, un
tiers peut avoir intérêt à l'information de la gestion.
Mais vous avez soulevé que la gestion du Curateur
public de 500 millions de dollars — je dois répéter, des
milliards — est
déjà vérifiée par le Vérificateur général. Alors, on présume, tout est bien et
tout est correct. Mais, premièrement, primo, vous savez comment ça marche, la
vérification par le Vérificateur général. Il ne vérifie pas les
13 500 dossiers chaque année. Il prend quelques échantillons. Le
vérificateur, sa vérification est basée sur quelques échantillons qu'il examine, et il fait son rapport. Donc, il n'y a pas,
en réalité, une vérification rigoureuse de toute cette gestion.
Le
Président (M. Ouellette) : On va continuer, M. Greenbaum, avec Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Probablement que vous aurez l'opportunité de compléter les préoccupations de
Mme la ministre. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Oui. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, monsieur, bienvenue à la
commission. Et permettez-moi de
saluer votre mission, qui est de protéger et veiller aux personnes sous
curatelle publique. En tout cas, c'est l'association que vous défendez.
Vous avez un mémoire assez dur, je dirais.
Peut-être avec raison, je ne remets...
M. Greenbaum (Ura) : C'est basé sur
l'expérience, comme c'est dit dans ce mémoire...
Mme Léger : C'est ce que
vous dites.
M. Greenbaum (Ura) : ...uniquement
sur les faits.
Mme Léger :
Quand je vois votre résumé, vous dites : «Pour les personnes composant
avec l'organisme étatique qu'est le Curateur public, le système de
l'accès à l'information s'avère un échec abject à ses deux niveaux, les lois
pertinentes sont contradictoires et systématiquement contournées par le
Curateur public et le fonctionnement de la Commission
d'accès à l'information est inefficient et inefficace. Le système ne répond pas
aux attentes et aux besoins des personnes inaptes et leur entourage au
point où les citoyens touchés sont devenus cyniques et décrochent.»
Et vous dites
un petit peu plus loin aussi, vous dites en conclusion : «Une longue
expérience sur le terrain et de nombreux cas nous indiquent que des
failles existent au niveau de la loi et au niveau de la Commission d'accès à l'information qu'ont permis au Curateur public de
façonner le mécanisme de l'accès à l'information premièrement à ses propres
fins au lieu de [le] gérer strictement dans l'intérêt des personnes inaptes.»
Et vous dites plus loin : «Quant à la commission, une nouvelle
mentalité et éthique de travail doivent être instaurées. Des correctifs et
remèdes majeurs s'imposent afin que les
personnes vulnérables soient servies rigoureusement par l'État
comme citoyen à part entière.»
C'est un dur
constat que vous apportez dans votre mémoire. Ça suscite beaucoup
de questions. Vous ne croyez pas que
le curateur ou la Commission d'accès
à l'information, ces deux organismes, font leur travail correctement. C'est
ce qu'on comprend de ce que vous dites, exact?
• (12 h 10) •
M. Greenbaum (Ura) : Oui,
effectivement, et c'est basé pas seulement sur notre expérience et les centaines
dossiers que nous avons — nous
avons les écrits, les dossiers, les documents — mais également sur ce que j'ai cité tout à l'heure,
le rapport qu'avait déposé l'ancienne ministre Michelle Courchesne au Conseil des ministres, qui est confidentiel, et secret, et caché aux citoyens. Alors, ça ne
vient pas seulement de moi et de notre organisme. C'est connu au gouvernement depuis huit ans maintenant, neuf ans. Alors, ce n'est pas un secret de
Polichinelle, si vous voulez, maintenant, vu que nos élus, nos représentants
sont au courant de cette situation déplorable. Et nous avons les cas, les cas
et les cas.
Mme Léger : Je peux
comprendre toutes les expériences que vous avez sur le terrain et que vous
donnez ce constat-là et cette conclusion-là,
mais c'est sûr que, là, vous me permettrez de questionner quand même
parce que, quand une
personne est rendue inapte et qu'elle est sous la curatelle publique, c'est parce que
le Curateur public est comme le dernier
recours, est comme le dernier recours d'un appareil gouvernemental où on veut protéger les personnes. Et on est tous protégés par des lois et on fonctionne par des
lois, tous les citoyens. Mais, lorsqu'on se retrouve sous la curatelle publique,
c'est comme le dernier recours de protection de la personne.
Alors, généralement, il y a peut-être un tuteur qui aide la personne vulnérable, mais il n'y a
plus grand famille, plus grand
personne autour. J'ai eu beaucoup de dossiers, moi, qui touchent, là, même
comme députée... avec le Curateur public, qu'il
n'y a plus personne qui est là autour
de cette... Alors, c'est sûr que qui a intérêt... Une fois que tu es
sous la curatelle publique, qui a intérêt
à vouloir avoir des renseignements et
avoir accès à la personne qui est sous la curatelle? Qui peut y avoir
accès? Après tout ce processus-là, que la personne se retrouve vulnérable,
seule et sous la curatelle publique, qui
veut maintenant, après toutes ces années-là, avoir accès? C'est sûr que c'est
une question qui est importante, là. Puis vous, vous avez l'expérience
sur le terrain. Qui peut avoir accès?
Tout à l'heure, vous avez dit : Un héritier
ou... Bon, c'est sûr, qu'on a une... on se questionne sur un héritier. Pourquoi
que là, rendu que la personne est rendue vulnérable et seule dans tout son
cheminement, qu'un héritier arrive, là? Alors, c'est évident que...
Alors,
essayez de me démêler ça, là, pourquoi que toute votre... je pourrais dire
votre mission, votre travail fait que
vous avez des contraintes régulièrement, mais ces contraintes-là ne sont-elles
pas pour protéger la personne, et pour ça que le curateur est là pour
protéger ces personnes-là? Expliquez-moi, là.
M.
Greenbaum (Ura) : Oui. Premièrement, vous avez débuté avec la
présomption que l'intention de la loi et du législateur, et ça, on est
d'accord, que le Curateur public agit en dernier recours quand il n'y a
personne disponible à assumer ses
responsabilités et ce rôle. Mais ça, c'est une fausse impression. Il y a
souvent plein, plein de cas où les familles ou quelqu'un, un membre de la parenté, demande soit d'homologuer un
mandat en cas d'inaptitude et se faire nommer ou agir comme curateur ou
curatrice privé au lieu de faire nommer le Curateur public.
Mais, quand
il... Et ça, c'est prévu dans la loi, on est d'accord là-dessus, sauf que la
famille et les personnes qui ont un lien spécial ont une priorité.
Pourtant, cependant, souvent, ce qu'il arrive, très souvent, d'ailleurs, plus
que des cas exceptionnels, quand le Curateur
public lui-même... Quand vous faites la vérification de l'historique
jurisprudentiel, le Curateur public a
soumis à la cour, et ça a été adopté par les juges, que, quand il y a conflit
entre les membres de la famille, les
juges, maintenant, écartent les membres d'une famille et ils nomment le
Curateur public pour régler la situation. Mais cela n'est pas prévu nulle part dans la loi. La loi dit et veut,
l'article 15 de la Loi sur le curateur public, que le Curateur public doit sortir aussitôt qu'il y a quelqu'un
qui veut agir ou peut agir. Donc, cette théorie, qui a été proposée et
soumise à la cour et que les cours et juges ont... que, quand il y a conflit,
malgré...
Mme Léger : Mais
permettez-moi...
M.
Greenbaum (Ura) : ...entre les membres de la famille, rien à voir...
aucun danger pour la personne inapte...
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : O.K. Mais
pourquoi le juge prend cette décision-là? Pourquoi vous croyez qu'il prend
cette décision-là? Qu'est-ce qui l'amène à prendre ce type de décision?
M.
Greenbaum (Ura) : Parce
qu'ils ont confondu ou fait une équivoque entre conflit de la parenté et un
danger à la personne inapte, ce qui est deux concepts tout à fait différents.
S'il y a une grande famille de 12 personnes, il n'y a jamais
harmonie, il n'y a jamais la paix. Il va y avoir quelqu'un
qui est mécontent ou va avoir des griefs à soulever. Et nous avons vu où des personnes ont profité de
cette situation — cette
interprétation erronée ne se trouve nulle part dans la loi — pour
soulever devant un juge, par hargne, simplement pour se venger contre un autre
membre de la famille et éviter que... et imposer la curatelle publique. Mais
ça, ça n'existe pas dans la loi.
Mme Léger :
Mais est-ce que vous trouvez pertinent le rôle du Curateur public? Est-ce que
vous trouvez que, dans la société québécoise, on doit avoir un curateur
public?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Greenbaum.
M. Greenbaum (Ura) : Complètement.
Nous n'avons jamais mis en question même l'existence du Curateur public. Ce que nous mettons en question, et ce
doit être... Ce que nous proposons, ce doit être amélioré, ce doit être
peaufiné, l'administration doit être surveillée, il doit être rigoureusement
transparent. Et c'est pourquoi nous sommes ici : il n'est pas transparent.
Mme Léger : Et vous
trouvez que...
M. Greenbaum (Ura) : Et imputable.
Mme Léger : Et vous
trouvez que, malgré le Vérificateur général, malgré la Commission de
l'administration publique que la ministre
vous disait, et malgré aussi, aux crédits, parce qu'à chaque année on passe aux
crédits, vous trouvez que tous ces mécanismes-là mis en place par la
société québécoise ne sont pas suffisants pour vérifier le travail du Curateur
public.
M. Greenbaum (Ura) : Effectivement.
Effectivement, justement.
Mme Léger : O.K. Je
comprends.
M. Greenbaum (Ura) : Et je
vous ai tout à l'heure dit, à la réponse de la ministre, que le Vérificateur
général, deuxième opportunité, fait l'examen seulement des échantillons, des
échantillons. Il ne fait pas une vérification chaque année. D'ailleurs, c'est
pourquoi, dans la loi, c'est prévu que quelqu'un de la famille peut toujours
exiger un bilan annuel du Curateur public parce qu'évidemment le Vérificateur
général ne peut pas vérifier tous les dossiers, premièrement.
Deuxièmement,
ça, c'est important, et je n'ai pas eu le temps de répondre à Mme la ministre,
dans le dernier rapport annuel, le
Curateur public a dit, a laissé savoir que le Vérificateur général a soulevé
quelques écarts dans la gestion du Curateur
public. Alors, moi, j'ai envoyé une lettre au Vérificateur général de me faire
part de cette correspondance sur laquelle est basée cette
information-là, et au Curateur public, aux deux. Les deux organismes m'ont
répondu : Cette information est confidentielle. On ne peut pas vous
laisser savoir.
Donc,
on dit, dans le rapport annuel du Curateur public, qu'il y a des écarts que le
Vérificateur général a trouvés dans l'administration, dans la gestion de
Curateur public, mais personne, le public, la...
Mme Léger :
Il ne me reste que...
M. Greenbaum
(Ura) : ...parenté n'a pas le droit d'avoir accès à cette
information-là.
Mme Léger :
Il ne me reste que 20 secondes, j'aurais voulu partager encore plus longuement,
mais, en fin de compte, dans le fond, c'est la possibilité... Vous demandez la possibilité
que le Curateur public puisse vous donner davantage
d'accès ou d'avoir la possibilité d'avoir des renseignements personnels. Donc,
il faut modifier la loi, selon vous?
M.
Greenbaum (Ura) : Libéraliser l'accès, justement. C'est ce que nous
avons proposé dans notre mémoire. Nous avons
dit... Nous n'avons pas proposé d'abolir le Curateur public, de le mettre à la
poubelle, non, jamais dans aucun de nos mémoires que nous présentons et avons présentés. Mais nous voulons et
nous cherchons que ce soit balisé d'une certaine façon, que les tiers, j'ai catégorisé en général, mais la parenté,
évidemment, et d'autres personnes qui ont un intérêt aient le droit,
premièrement, d'exercer les recours, comme vérifier les bilans, l'avoir, le
recevoir annuellement, comme c'est prévu,
d'assister à la confection de l'inventaire de début. On n'invite jamais les
membres de la famille, et ça, c'est prévu dans la loi, pourtant. Alors,
on veut que les droits existants...
Le Président
(M. Ouellette) : On continue, monsieur...
• (12 h 20) •
M.
Greenbaum (Ura) : ...soient renforcés
et, deuxièmement, que l'accès soit libéralisé. C'est ça, le point de vue que nous avons exprimé.
Le Président
(M. Ouellette) : On continue les échanges, M. Greenbaum,
avec M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. Bonjour,
M. Greenbaum. Bonjour à toutes les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui
en commission parlementaire. Merci d'être présents.
À la lecture de vos recommandations,
il y a plusieurs questionnements qui sont soulevés. Notamment, là, à la recommandation 34, dans votre mémoire, vous dites : «Empêcher le Curateur public d'exercer des représailles contre les délateurs qui divulguent les dérapages ou abus à l'endroit des personnes
inaptes et d'adopter des pénalités sévères pour toute violation.» J'aimerais que vous nous expliquiez, dans le fond, cette affirmation-là. Est-ce
que, selon votre expérience,
le Curateur public exerce des représailles? Puis sous quelle forme le
sont-elles, ces représailles-là?
M.
Greenbaum (Ura) : Je peux
vous donner la version et l'aperçu, l'angle des personnes qui composent
avec le Curateur public, les gens que nous représentons, que venons
chercher l'aide ou racontent leur histoire. Je vous l'ai dit, dans les... Meilleur exemple, un cas concret :
juillet 2015, ça fait deux ans maintenant, un monsieur dont le frère avait été battu
sévèrement, sauvagement, on me dit, a demandé d'avoir accès à l'information. Le Curateur public lui a refusé accès au dossier pour voir qu'est-ce qui est arrivé dans cet incident. Et le monsieur, je l'ai ici,
avait trop de peur de se faire photographier et de s'identifier parce
qu'il avait peur qu'il y aura des répercussions, que, s'il insiste trop, fait
trop de trouble, il va y avoir des
représailles, l'accès, davantage, ou voir, visiter son frère victime, ainsi de
suite, sera restreint ou réduit...
M. Jolin-Barrette :
Vous voulez dire...
M.
Greenbaum (Ura) : ...d'une façon ou d'une autre. Ici, vous l'avez ici,
toute l'histoire de ce monsieur ici, dans ce quartier. Alors, voilà un
exemple dans Charlevoix, ici.
Autre
exemple. Une dame qui a travaillé vient de prendre sa retraite. Elle était
travailleuse sociale pendant 35 ans dans un hôpital majeur, un grand
hôpital. Et sa mère avait été mise sous curatelle publique parce que le frère a
fait un conflit entre la famille, comme je vous ai dit. C'est un motif dont on
se sert souvent. Et elle a demandé d'avoir accès au dossier de sa mère, sous curatelle publique maintenant. Et qu'est-ce
qui est arrivé, quelle a été la réponse? Le Curateur public lui refuse
accès au dossier. Elle a été travailleuse sociale, la fille, pendant 35 ans
dans un hôpital majeur de Montréal, et le Curateur public lui refuse l'accès au
dossier parce qu'elle s'obstine, parce qu'elle n'est pas contente, elle veut savoir
qu'est-ce qui se passe avec la gestion de sa mère. Il y a des raisons pour
lesquelles elle cherchait cette information...
M. Jolin-Barrette :
Mais, sur la question, M. Greenbaum...
M.
Greenbaum (Ura) : ...mais, avec toutes ces qualités-là, a été refusé
accès au dossier dernièrement, hein, ça arrive... récemment.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais, plus précisément sur la question des
représailles, est-ce que vous avez, supposons, des situations concrètes? Je comprends le monsieur qui disait, dans le
fond : Bien, écoutez, moi, je ne veux pas me faire photographier
pour avoir dénoncé le curateur par rapport à sa gestion du dossier ou par le
non-accès du dossier, mais, concrètement, au
niveau des représailles, est-ce qu'il y a plusieurs cas parmi votre association
qui sont répertoriés où il y a des représailles lorsque les gens
dénoncent une situation inacceptable de la part du curateur?
M.
Greenbaum (Ura) : Mais les représailles ne marchent pas de façon aussi
évidente. Ça marche subtilement, sournoisement.
On vous a empêché d'avoir accès à l'information parce que vous n'êtes pas un
bon joueur, parce qu'on a... vous
dénoncez dans les journaux ou aux autorités. Et ces cas-là, je vous l'ai donné,
c'est ce qui est arrivé. Une a parlé à un journaliste, l'autre dame a fait des plaintes au Protecteur du citoyen,
et ainsi de suite. Et les représailles sont de cet ordre-là, mais on ne
vous laisse plus avoir aucune information parce que vous parlez trop, vous
mettez au grand jour une insatisfaction ou
ce que vous trouvez insatisfaisant. Alors, ça joue de cette façon-là. Ce n'est
pas aussi évident ou manifeste. C'est plus sournois, plus subtil, comme
les organismes de tout ordre, pas seulement le Curateur public, c'est toute la bureaucratie. Vous savez, ça arrive. Je ne dis pas
que c'est généralisé. Je ne fais pas cette accusation. Il ne faut pas détourner mes mots. Mais par contre
c'est la façon que ça fonctionne. Vous savez très, très bien. Vous avez,
j'imagine, des citoyens dans votre
comté, des électeurs qui vous racontent, dans votre bureau de comté, des
histoires avec d'autres organismes publics et la façon que ça marche.
M. Jolin-Barrette : Sur la question de la Commission d'accès à
l'information, sur la question des délais, vous l'abordez, dans le fond,
dans votre mémoire.
M. Greenbaum
(Ura) : Oh oui! C'est épouvantable.
M. Jolin-Barrette :
Pouvez-vous nous en parler, de la question des délais? Puis aussi vous parlez
aussi de l'indépendance des commissaires.
C'est quoi, votre position, par rapport aux délais et par rapport à
l'indépendance des commissaires?
M. Greenbaum
(Ura) : Quant aux délais, bien, tout a été déjà dit par le président
de la Commission d'accès à l'information là-dessus. Dernièrement, les derniers
jours, il l'a dit : L'attente, maintenant, pour l'audition, pas pour demander les documents, attendre les délais de
refus, ensuite faire une demande d'accès, demande de révision et tous
ces préliminaires, juste le délai d'attente, M. Chartier l'a dit lui-même,
c'est deux ans, maintenant. Donc, c'est ridicule, ça ne vaut rien.
Si,
comme j'ai dit dans le mémoire, j'ai fait état, si un délai pour recours civil
est trois ans, et vous devez attendre au moins deux ans pour avoir droit à une audition uniquement, pas attendre
le délai de jugement ensuite, juste l'audition, bien, vous risquez de
perdre votre recours en attendant l'audition pour voir si vous avez droit de
recevoir un document ou non, premièrement.
Deuxièmement,
et j'en ai fait état dans le mémoire également, un journaliste très reconnu,
vous connaissez tous son nom, un journaliste d'enquête d'un quotidien
majeur m'a dit quand je me suis assis avec lui, en 2005, on faisait une enquête
ensemble à ce moment-là, ça a fait un énorme scandale dans les journaux...
enfin, je ne dis pas son nom. Mais, en
parlant de l'accès à l'information, j'ai demandé : Est-ce que, quand on
vous refuse un document, vous allez à la commission pour insister parce
que vous faites des enquêtes sur des situations publiques, d'ordre public? Il
m'a dit : Je ne vais jamais, jamais à
la commission à cause des délais. Ce n'est plus d'actualité, si je dois
attendre un an et demi — à l'époque, maintenant deux ans — pour
avoir une information. Et peut-être que je ne l'aurai même pas.
Alors,
ça ne sert à rien, ce n'est pas pratique. Et ça, il sert les intérêts de la
société. C'est un journaliste d'enquête, le plus renommé au Québec, comme je dis. Et pourtant, lui, il s'en lavait
les mains. Il ne va jamais à la commission si un document lui est
refusé. Comment peut-il faire ses enquêtes sur les organismes publics, quand il
y a des scandales, s'il y a mur, ce mur de confidentialité...
Le Président
(M. Ouellette) : Merci...
M. Greenbaum
(Ura) : ...ou des empêchements par les délais ensuite?
Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Greenbaum, représentant l'Association
pour la défense des personnes et des biens sous curatelle publique.
La commission suspend
ses travaux jusqu'à 14 heures dans cette même salle, où elle continuera
son mandat.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
(Reprise
à 14 h 6)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
Nous poursuivons la consultation
générale et les auditions publiques sur le rapport quinquennal 2016 intitulé
Rétablir l'équilibre — Rapport sur l'application de la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la
Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
Nous
entendrons cet après-midi les organismes suivants : l'Association
canadienne des compagnies d'assurances de personnes, la Fédération des
chambres de commerce du Québec, la Commission des droits de la personne et de
la jeunesse et le Barreau du Québec.
Nous
recevons maintenant l'Association canadienne des compagnies d'assurances de
personnes, représentée par sa présidente, Mme Lyne Duhaime.
Mme Duhaime, c'est vous qui allez faire la présentation. Vous allez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent.
Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Après, il y aura un
échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je vous
laisse la parole.
Association
canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)
Mme Duhaime
(Lyne) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, mesdames messieurs,
membres de la commission, merci de nous
donner l'occasion de vous faire part de nos réactions aux recommandations de la
Commission d'accès à l'information et de nos commentaires en vue d'une
éventuelle modernisation de la Loi sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé.
Mon nom est
Lyne Duhaime, je suis présidente de l'Association canadienne des
compagnies d'assurances de personnes. Nous
représentons les sociétés offrant une protection sur la vie, la santé,
l'invalidité, ainsi que des régimes d'épargne-retraite
à 7,4 millions de Québécoises et de Québécois. Je suis accompagnée
aujourd'hui par Mme Suzanne Morin, de la Financière Sun Life, ainsi
que par M. Michel Paquet, de Manuvie.
Nous tenons d'entrée
de jeu à saluer le travail de la Commission d'accès à l'information du Québec
dans son rapport quinquennal 2016. Ce
rapport, à notre avis, témoigne de l'expertise de la commission en matière de
protection des renseignements personnels. Bien que nous ne soyons pas forcément
d'accord avec l'ensemble des propositions de la commission, nous reconnaissons
que certains changements proposés visent résolument à moderniser la loi, ce que
nous souhaitons aussi.
L'exercice
mené aujourd'hui est très important et d'une grande valeur pour nos membres.
Notre industrie accorde une
importance capitale à la protection des renseignements personnels de leurs
millions de clients et porte une attention toute particulière à la cybersécurité. D'ailleurs, la firme Moody's a
publié un sondage, en février 2017, qui démontrait que les compagnies d'assurance canadiennes et
américaines ont fait de la cybersécurité l'une de leurs priorités. Cela se
traduit par une augmentation des
investissements dans ce secteur et une intégration de plus en plus marquée de
la cybersécurité dans la gouvernance des sociétés d'assurance.
La
protection des renseignements personnels est au coeur de la relation entre les
assurés et les assureurs. Ceci s'explique,
entre autres, par le fait que les compagnies d'assurance gèrent une quantité
considérable de renseignements personnels
d'ordre financier et médical. Ces renseignements constituent la matière
première pour offrir des produits et services en assurance vie et
maladie ainsi qu'en matière de placement et de retraite.
• (14 h 10) •
Comme
le reconnaît la commission, le cadre législatif doit se moderniser et ne pas
freiner l'innovation qui permettra aux
entreprises de développer une offre personnalisée conforme aux nouvelles attentes des consommateurs.
Dans notre mémoire, nous faisons neuf recommandations, mais, compte tenu du temps qui nous est alloué, nous allons mettre l'accent sur
trois recommandations que nous jugeons plus importantes, soit la modernisation
de la loi, des précisions quant à la notion de consentement express ainsi
qu'une exclusion des tests génétiques à des fins d'assurance de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le
secteur privé. Par ailleurs, il nous fera plaisir d'élaborer davantage sur les autres améliorations que
nous proposons durant la période de questions.
Je
vais maintenant vous faire part de notre première recommandation, celle ayant trait à la modernisation de la loi. Lorsque
la Loi sur la protection des renseignements personnels a été adoptée,
en 1994, elle était novatrice. Aujourd'hui, plusieurs acteurs et intervenants, dont la commission, s'entendent pour dire qu'elle n'est pas adaptée
aux nouvelles réalités technologiques
et aux attentes des consommateurs. L'ACCAP estime que cette modernisation doit
notamment s'inspirer de ce que nous
observons dans certains pays dont la réalité est similaire à la nôtre. Elle
devrait aussi être en harmonie avec certaines
notions de la loi fédérale et des autres lois provinciales en matière de
protection des renseignements personnels.
Par
exemple, la Loi sur la protection des
renseignements personnels du Québec atteindrait mieux ses objectifs si elle était fondée sur une approche par principe
plutôt que prescriptive, comme c'est le cas à divers degrés pour les
autres lois de ce type au pays. De plus,
comme la loi fédérale, la loi québécoise devrait être neutre sur le plan technologique.
Cela permettrait à la loi de mieux s'adapter aux réalités technologiques
actuelles et, encore plus important, aux technologies du futur.
L'exemple
le plus éloquent qui témoigne du besoin de modernisation de la loi sur le plan
technologique est la notion de
dossier. Actuellement, la loi impose des obligations aux entreprises qui
constituent ou détiennent un dossier à proprement parler concernant une personne. Cette notion de
dossier est inadaptée à la réalité d'aujourd'hui. Dans le contexte
actuel, plusieurs organisations ne détiennent pas nécessairement un dossier sur
un client mais collectent tout de même des renseignements personnels.
C'est pour cette raison
que nous sommes d'accord avec la recommandation 24 de la Commission
d'accès à l'information, qui suggère de remplacer la notion de dossier par
celle de la finalité de la collecte des renseignements personnels. Ce changement ferait en sorte que la loi s'appliquerait aux
organisations qui obtiennent des renseignements personnels sur des
utilisateurs ou des acheteurs qui ne sont pas nécessairement des clients. Cela permettrait
aussi une harmonisation avec les règles en vigueur au pays et assurerait une
meilleure protection des consommateurs.
Notre mémoire
aborde aussi la notion de consentement manifeste, qui est le deuxième sujet que
nous souhaitons aborder avec vous.
Et, sur ce, je cède la parole à ma collègue Mme Suzanne Morin, qui est
chef de la protection de la vie privée à l'échelle mondiale pour Sun
Life.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Morin.
Mme Morin
(Suzanne) : Merci bien.
Deuxièmement, nous constatons qu'il existe une véritable ambiguïté quant
à l'interprétation de la notion de
consentement manifeste dans la loi au Québec. En effet, les interprétations de
la commission et du commissaire à la
protection de la vie privée, au niveau fédéral, divergent à savoir si la loi
québécoise prévoit ou non qu'un
consentement peut être exprimé de façon implicite au Québec. En effet, dans son
rapport quinquennal, la commission soumet que le consentement manifeste
peut être explicite ou implicite. La pierre angulaire, selon la commission, est
qu'il n'y ait pas de doute quant à la volonté exprimée par l'individu, quel que
soit le moyen utilisé.
Nous tenons à rappeler que la notion de
consentement implicite se trouve également dans d'autres lois, par exemple la loi fédérale antipourriel, la loi sur
les renseignements personnels au niveau fédéral ainsi que les lois en
Alberta et en Colombie-Britannique.
Cependant, pour éviter toute ambiguïté sur cette question, nous recommandons donc
que la loi sur les renseignements
personnels au Québec précise justement qu'un consentement manifeste puisse être
exprimé de façon soit implicite soit explicite. Ainsi, la collecte,
l'utilisation et la communication des renseignements personnels seront conformes aux attentes raisonnables de la personne
lorsqu'elle exprime son consentement, peu importe de façon implicite ou
explicite, et qu'est-ce qui viendra renforcer ce que fait plusieurs entreprises
au Québec maintenant.
Cette
précision au consentement permettra clairement aux entreprises de continuer
leur utilisation de mégadonnées, qui est essentielle au métier
d'assureur ainsi qu'à l'innovation dans notre industrie. Effectivement, lorsque
l'objectif poursuivi par l'entreprise est
légitime, on pourrait se fier sur le consentement implicite de façon... on
pourrait se fier sur le consentement
exprimé de façon implicite, pardon, explicite ou implicite, dépendant de la
situation, et le tout enveloppé dans un encadrement adéquat.
Alors, enfin,
nous avons fait des commentaires au sujet de la recommandation d'interdire
l'accès aux renseignements de nature génétique aux fins d'assurance, et
je vais passer la parole à mon collègue M. Paquet.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Merci. Au sujet
de l'interdiction d'accès aux renseignements de nature génétique, nous sommes d'avis que cet élément soit exclu du
contexte général de la révision de la
loi sur le privé pour les raisons suivantes.
Comme vous le savez sans doute, plusieurs
développements ont pris forme concernant l'encadrement de l'utilisation des tests génétiques depuis les
derniers mois. En mai dernier, le projet de loi fédéral S-201, la Loi visant
à interdire et à prévenir la discrimination génétique, est devenu loi. Cette
loi interdit aux entreprises d'exiger que le consommateur
subisse un test génétique ou qu'il fournisse les résultats d'un tel test avant
de conclure un contrat. Elle a été
adoptée malgré l'opposition du cabinet du premier ministre du Canada et de
plusieurs provinces, dont le Québec. On jugeait, avec raison, que cette
législation empiète sur la compétence provinciale puisque l'assurance est de
juridiction provinciale, et donc sous la
responsabilité du ministre des Finances du Québec. Depuis, le gouvernement du
Québec a pris l'initiative, en juin
dernier, de référer la loi à la Cour d'appel du Québec pour obtenir son avis
sur sa constitutionnalité.
Parallèlement
à ce renvoi, la ministre responsable de l'accès à l'information, Mme Rita
de Santis, a mis sur pied un groupe
de travail interministériel. Ce comité a pour mandat de réviser l'encadrement
juridique existant à la lumière des changements
technologiques et scientifiques. Il pourrait aussi compter sur la contribution
des représentants du ministère des Finances,
qui connaît très bien la pratique d'assurance et qui proposerait alors un
encadrement approprié, tel qu'il s'est engagé à le faire dans le dernier
dépôt du budget.
L'ACCAP salue
les démarches entreprises par le gouvernement du Québec afin de bien cerner les
enjeux relatifs à l'utilisation des
tests génétiques. Notre industrie est très sensible aux inquiétudes soulevées
par les Québécois quant à l'utilisation
des tests génétiques, et nous avons pris acte des récents débats sur cette
question. C'est pour cela que, dans l'éventualité
où les tribunaux déclareraient la loi fédérale inconstitutionnelle, l'ACCAP
s'engage à trouver une solution, en collaboration avec le gouvernement,
qui viendra renforcer le cadre juridique existant.
D'ailleurs,
l'ACCAP Québec s'engage déjà à élargir son code d'industrie sur l'utilisation
des résultats des tests génétiques,
et nous vous le présenterons au cours des prochains mois. Il va sans dire que
ce code permettra au plus grand nombre
de Québécois de subir des tests génétiques tout en bénéficiant des protections
d'assurance. Déjà, nous nous sommes engagés
dans le code actuel à ne jamais demander à une personne de subir un test
génétique pour obtenir de l'assurance.
Nous nous
sommes engagés à continuer de protéger scrupuleusement les renseignements
médicaux qui nous sont confiés, comme
nous le faisons depuis des centaines d'années, de s'inspirer des meilleures
pratiques existantes à l'international qui
ont fait leurs preuves depuis plusieurs années, par exemple au Royaume-Uni, et
de demander les résultats des tests génétiques simplement pour prévenir
les situations d'excès où les autres assurés seraient pénalisés.
Cette façon
de faire assure un meilleur accès à l'assurance au plus grand nombre de
personnes possible à des prix raisonnables tout en décourageant les
personnes qui auraient obtenu des résultats positifs lors d'un test génétique
de se procurer une assurance de trop grande valeur, ce
qui nuirait aux autres assurés et ferait augmenter les prix pour la majorité
des gens assurés.
Cela dit,
comme des démarches sont en cours au Québec pour contester la loi fédérale,
l'ACCAP réclame que la question de
l'utilisation des tests génétiques soit exclue de la révision de la loi sur le
privé. Nous souhaitons continuer à collaborer
avec le gouvernement, notamment par l'entremise du groupe de travail
interministériel et plus particulièrement avec le ministre responsable
de l'assurance et son ministère, pour renforcer l'encadrement existant au
Québec.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci.
Mme Duhaime (Lyne) : En
terminant, je vous remercie de nous permettre aujourd'hui de contribuer à cette
réflexion, et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci. Mme la ministre.
• (14 h 20) •
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Mme Duhaime, Mme Morin et
M. Paquet, bienvenue. Merci beaucoup pour votre mémoire. Et on est
très contents de vous avoir avec nous aujourd'hui, pouvoir pendant quelques
instants échanger avec vous.
Vous n'êtes pas favorables à la
recommandation 33, qui touche la collecte, utilisation et communication
des renseignements génétiques, et vous
faites valoir les engagements de l'industrie à cet égard. Pouvez-vous nous
parler un petit peu sur ces
engagements? Pouvez-vous nous dire
quelle est la valeur juridique de ces engagements-là et comment vous arrivez à la proposition que, pour des tests génétiques, on n'utiliserait
pas les renseignements issus des tests génétiques pour les propositions
d'assurance de 250 000 $ ou moins? Pourquoi 250 000 $? Et
est-ce que 250 000 $, c'est une police d'assurance ou c'est le cumul
de polices d'assurance qu'une personne pourrait prendre?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Alors, il y a
trois questions, je vais essayer de me souvenir des trois questions.
Alors, pour commencer, pour les
montants d'assurance, ce qui est le plus facile, c'est que la valeur moyenne
d'une police d'assurance au Québec
est de 145 000 $ ou dans ces eaux-là. Alors, en partant de cela, à
250 000 $, dans la version actuelle du code, ça couvre
85 % des polices d'assurance vendues au Québec. Et c'est à partir de ce
montant-là, de ce chiffre-là, que le montant a été établi.
Mme de Santis : En police
d'assurance.
M. Paquet (Michel) : C'est ça,
le nombre... la valeur moyenne d'une police d'assurance...
Mme de Santis : D'une police
d'assurance.
M. Paquet (Michel) : D'une
police d'assurance.
Mme de Santis : Parce qu'une
personne peut en avoir plusieurs.
M. Paquet
(Michel) : Absolument,
peut avoir une police, trois, quatre polices de 25 000 $ pour
différentes raisons, peut en avoir
une d'un montant de 250 000 $, 300 000 $, mais la valeur
moyenne des polices vendues est de 140 000 $.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la ministre.
Mme de Santis : ...
Le Président (M. Ouellette) :
Ah! non, je vais vous laisser terminer, M. Paquet.
M. Paquet (Michel) : Oui.
Alors, voulez-vous me rappeler, s'il vous plaît, la première partie?
Mme de Santis : O.K.
Le
Président (M. Ouellette) : Bon, ce n'est pas parce que je voulais vous couper, je veux qu'on soit
capables de suivre.
M. Paquet (Michel) : Absolument.
Le
Président (M. Ouellette) : Vous avez... Mme la ministre a tendance à avoir des échanges de salon avec
ses invités, ça fait que... Donc, Mme la ministre.
Une voix : ...
Le Président
(M. Ouellette) : Non,
bien, elle va vous rappeler la première question qu'elle voulait vous
poser.
Mme
de Santis : Oui, on parlait des engagements de l'industrie. Je vous
demandais quelle était la valeur juridique de ces engagements-là.
Le Président
(M. Ouellette) : M. Paquet.
M. Paquet (Michel) : Je vous remercie. Alors, ce qu'on suggère ou ce
qu'on offre, c'est l'adoption de notre code d'industrie. La valeur juridique, si vous me parlez d'être devant les
tribunaux, à un moment donné, ça devient aussi une relation qui devient
contractuelle. Si on prend un engagement à ne pas faire quelque chose, c'est
public. L'ensemble des assureurs adhèrent à ce code en étant membres de
l'ACCAP.
Maintenant,
le code lui-même, si on prend l'exemple des meilleures pratiques au
Royaume-Uni, par exemple, ils n'ont
pas de loi, c'est une entente qui est en place depuis 2001 entre l'association
des assureurs du Royaume-Uni et le gouvernement
et qui est renouvelée à tous les trois ans depuis 2001. Et ça ne semble pas
causer de problème. Alors, sur la base
de cette entente-là, qui semble être une pratique qui fonctionne, c'est ce
qu'on suggère, c'est l'approche que l'on suggère là-dedans, dans ce
dossier-là.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Quand je suis malade, je suis malade. Quand vous avez des
résultats d'un test génétique, c'est la possibilité qu'un jour peut-être je vais avoir une certaine maladie, ce
n'est pas nécessairement une réalité. Je pense à mon père, qui a 98 ans. Lui, il devrait avoir une
prédisposition pour le cancer de la prostate qui ne s'est jamais manifestée.
Là, il y a une différence entre être malade et une possibilité qu'un jour
peut-être je serai malade. Est-ce que vous êtes en mesure de transformer les
informations génétiques en informations actuarielles?
M. Paquet
(Michel) : Bien, je suis content que vous me posiez la...
Le Président
(M. Ouellette) : M. Paquet.
M. Paquet (Michel) : Pardon, merci. Je suis content que vous me posiez
la question parce qu'effectivement le débat
qu'on a en ce moment au niveau des tests génétiques, c'est un débat qui est
très émotif. La façon dont l'assureur fonctionne, c'est vraiment
pragmatique, c'est vraiment une question de probabilités, de chiffres.
Alors,
dans la préparation d'une souscription d'assurance, dans la préparation d'un
taux, c'est vraiment basé sur des probabilités.
Alors, ce n'est pas parce que quelqu'un va avoir un marqueur quelconque sur un
gène qu'automatiquement la personne
va être refusée. Avant de refuser les gens, les assureurs sont dans le marché
d'offrir de l'assurance, on souhaite assurer le plus grand nombre de
personnes possible. Alors, si les recherches, les données actuarielles
permettent de déterminer qu'à un moment
donné quelqu'un qui a ce gène-là a x % de chances d'avoir une telle
maladie, mais, en même temps, que les
avancées médicales sont capables de minimiser le risque, tout ça est pris en
considération, et ça devient une question de probabilités uniquement qui
va déterminer un taux de prime.
Alors,
la question que vous me posez, c'est : Si quelqu'un a un marqueur
quelconque qui indique une possibilité d'avoir une maladie à un moment
donné, bien, on tombe exactement dans le champ des calculs actuariels et des probabilités. Et c'est à partir de ce moment-là qu'il
est intéressant de noter que l'assureur va viser à vouloir
assurer les gens.
On regarde, par
exemple, il y a plusieurs années, en matière de maladie grave, par exemple,
pour ne pas le nommer, le sida, c'était
difficile de s'assurer. Maintenant, les gens qui ont le sida sont assurables.
Pourquoi? Parce qu'il y a eu
des avancées médicales dans le domaine qui font que les gens sont capables de
vivre une vie relativement
normale avec cette condition-là.
Alors,
le but, c'est de trouver des façons d'assurer les gens. Si on ne nous permet
pas d'avoir ces renseignements-là, ce
qu'on fait, c'est qu'on augmente le risque que quelqu'un qui a de l'information vienne nous voir, souscrit à une police d'assurance, ne le dit
pas et souscrit un montant beaucoup plus élevé. Et, à partir de ce moment-là,
bien, ça crée un risque pour tous les autres assurés.
Il y avait un article
récemment dans The Economist, qui a paru le 3 août dernier, où un
chercheur de Harvard est venu mentionner que
les gens qui ont connaissance d'une condition quelconque, un test positif, sont
cinq fois plus susceptibles de souscrire à une assurance maladie grave
qu'une personne normale qui n'a pas cette information-là. Alors, on voit que le
risque est là. Alors, c'est toute une question de gestion du risque.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : C'est un peu comme me demander si je fume ou je ne fume pas parce
que, si je fume, vous assumez que peut-être je serai plus à risque pour
certaines maladies.
M. Paquet
(Michel) : Encore une...
Le Président
(M. Ouellette) : M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Oui. Encore une
fois, c'est intéressant, mais ces données-là ont changé récemment. Je
pense que les taux n'ont plus de distinction
au niveau des fumeurs, non-fumeurs, chez certains assureurs parce que les
données statistiques accumulées au fil des années font qu'on arrive à un risque
qui est gérable pour tout le monde. Alors, c'est vraiment une question
d'équilibre entre l'information qu'on reçoit, l'information médicale.
Il y a un
paquet de facteurs qui viennent... qu'on doit prendre en considération dans
l'établissement d'un taux de prime. Et ne pas permettre ce genre de
renseignements là, c'est comme si on permet aux gens de mentir lors de la souscription d'une police d'assurance vie. Et
l'impact que ça a, c'est : ça augmente le risque, ça augmente les taux de
prime, ça risque à un moment donné de faire que les assureurs vont se retirer
de certaines couvertures aussi, là.
Alors,
l'idée, ce qu'on cherche là-dedans, c'est avoir ce qu'on appelle la symétrie
d'information, déjà, dans le code, c'est
prévu, mais que les gens doivent divulguer tout ce qu'ils savent, tout ce qui
est matériel, tout ce qui est de nature à influencer le risque. Et, à partir de ce moment-là, le taux de prime est
déterminé. L'objectif n'est pas de refuser les gens, c'est de trouver
comment on peut les assurer, à quel taux.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : Dans votre
engagement, vous avez entrepris de ne jamais demander aux proposants à l'assurance de subir un test génétique. Alors,
comment vous établissez votre information actuelle? Basé sur la base de
quels renseignements?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Oui. Alors, bien, c'est une série de questions dans un questionnaire
basé sur l'historique médical, les
rencontres, les prises de sang, dépendant des montants. Alors, il y a une
panoplie d'informations de nature médicale où on pose ce genre de
questions là. Et, à partir de ce moment-là, bien, on va établir le taux de
prime. Si la personne n'a pas l'information
au niveau génétique, on n'est pas intéressés à le savoir. Par contre, à partir
du moment où elle a de l'information, c'est là que ça peut devenir
matériel ou important de le dénoncer.
Mme de Santis :
Si je comprends bien, alors, vous n'allez pas demander un test génétique, mais
vous allez obliger quelqu'un qui connaît les résultats d'un test
génétique de vous les donner.
M. Paquet (Michel) : Pas si le
montant de couverture est sous le seuil qui est prévu dans le code.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
• (14 h 30) •
Mme de
Santis : O.K. Allons au prochain point, qui est maintenant la
recommandation n° 38, les incidents de sécurité. Ici, vous dites qu'un
mécanisme formel qui obligerait les entreprises à déclarer à la CAI n'est pas
nécessaire, que l'aide-mémoire de la CAI à
l'intention des organismes et des entreprises est suffisant puisqu'il indique
déjà les étapes à suivre lors d'une
perte ou d'un vol de renseignements personnels. Donc, c'est dire, si je
comprends bien, le statu quo
est acceptable, quand je ne suis pas
certaine que c'est le cas parce qu'il
y a, rapporté, plusieurs
incidents de sécurité. Deux ans après
ou un an après, si j'étais une des personnes qui a perdu des renseignements personnels, personne ne me dit quoi que ce soit. Alors, s'il vous plaît, expliquez-moi
qu'est-ce que vous voulez dire, que, simplement, l'aide-mémoire est suffisant.
Et l'aide-mémoire, ça sert à quoi? Si on ne respecte pas l'aide-mémoire, c'est
quoi que la commission ou une autorité quelconque peut faire?
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Duhaime, c'est vous qui allez répondre ou ça va être Mme Morin?
Mme Duhaime (Lyne) : Ça va être
Mme Morin.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Morin.
Mme Morin
(Suzanne) : Oui. Merci, Mme
la ministre, pour la question. Effectivement, il y a deux standards. Il
y a un standard pour communiquer avec l'individu impacté ainsi qu'un standard
séparé pour divulguer l'incident de sécurité à la commission.
Prenant le
premier, un des principes de la protection de la vie privée, c'est bien d'aller
bien protéger l'information. Si
jamais il y a un bris, un incident, les entreprises, on va absolument informer
l'individu pour que cet individu-là peut connaître et aussi se protéger.
Ce qu'on
parle de l'autre côté, l'autre standard, c'est à quel point est-ce qu'on est
censé de communiquer avec la commission
qu'il y a eu un incident de sécurité. Il y a déjà beaucoup d'entreprises qui,
volontairement, partagent avec la commission lorsqu'ils ont des
incidents de sécurité. Habituellement, ça sera des choses plus matérielles,
mais c'était expliqué que, pas seulement
dans notre industrie, mais pour toutes les entreprises, il y a, si je peux les
appeler, des petits bris, des petits
incidents que, peut-être, ce n'est pas vraiment nécessaire d'informer la
commission. Cependant, lorsqu'il y a un impact sur l'individu,
l'individu va être... on va divulguer, on va leur laisser savoir.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de Santis : Vous dites
que l'obligation de tenir et de conserver un registre de tous les incidents
aurait des effets néfastes : lourdeurs administratives sans
bienfaits supplémentaires ou proportionnels pour les consommateurs. J'aimerais
comprendre les effets néfastes, parce que combien d'incidents y a-t-il pour que
ça devient aussi lourd?
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Morin.
Mme Morin (Suzanne) : D'accord. Oui, merci bien. Alors, pour des
grandes entreprises, comme mon collègue, Manuvie, ou bien ici, chez la
Financière Sun Life, peut-être les impacts ne sont pas aussi néfastes que dans
d'autres entreprises. Mais ce qui nous
préoccupe, c'est que, lorsqu'on parle de chiffres, de nombre d'incidents, il y
a des petits bris, si on peut les
appeler, là, où est-ce que, par exemple, on envoie une police à l'ancienne
adresse parce que notre client ne nous a pas informés qu'il ou elle a
changé d'adresse. Et la personne dans la maison peut ouvrir l'enveloppe. Alors,
techniquement, on pourrait dire que c'est un
bris, c'est un incident de sécurité. Sûrement, ce n'est pas à ces types
d'incidents que la commission est intéressée.
En plus, souvent,
c'est nos gens en première ligne qui vont répondre à ces questions-là lorsque
l'individu va appeler. Il va dire :
Aïe! J'ai reçu la police de mon collègue ou d'un individu que je ne connais pas.
Alors, ceux-là, on les traite, on les
fait dans le centre d'appels, on les fait dans nos centres financiers,
peut-être. Alors, c'est ces choses-là. S'il fallait garder des records très, très détaillés de tous ceux-là... que
ça peut avoir des effets néfastes pour certaines entreprises.
Mme de
Santis : Je peux?
Le Président
(M. Ouellette) : C'est sûr.
Mme
de Santis : Merci. Vous me donnez un exemple, là, auquel je ne pensais
absolument pas. Si on définit plus clairement
c'est quoi, un manque de sécurité, un incident de sécurité, maintenir un
registre en soi n'est pas une mauvaise chose
parce que... Et je ne vois pas que ça apporterait des effets néfastes. Vous
parlez d'un certain quotidien dans ce qui vous touche, mais je ne crois pas qu'on parle d'incident de
cybersécurité, «you know», qui a éclaté. Ce n'est pas à ça qu'on fait
référence.
Mme Morin (Suzanne) : C'est justement ça, Mme la ministre, parce
qu'effectivement, malheureusement, on ne définit pas c'est quoi, un incident de sécurité. Et des fois c'est
défini de façon tellement large que c'est n'importe quel bris de vos procédures de sécurité, qui peut être très
vaste comme définition. Alors, si c'était quelque chose beaucoup plus restreint, où est-ce que c'étaient les incidents les plus importants,
où est-ce qu'il y avait vraiment eu une vraie chance qu'il y aurait un
mal, alors ce serait une liste, un registre beaucoup plus petit. Alors, c'est
beaucoup plus raisonnable, mais malheureusement ce n'est pas toujours défini de
cette façon.
Mme de
Santis : Maintenant, votre approche par principes, j'aimerais mieux
comprendre qu'est-ce que vous voulez dire
par ça. J'aimerais avoir des exemples parce que vous dites... vous
préférez qu'on approche les modifications par principes plutôt que par une approche prescriptive. Alors, c'est
quoi que ces mots veulent dire? C'est quoi, ce principe?
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Duhaime.
Mme Duhaime (Lyne) : Je vais faire l'introduction, et ensuite, pour le
côté plus pratique, j'ai les deux experts de chaque côté. Bien, en fait, ils pourront vous donner des
exemples. Mais ce qu'ils ont remarqué, ce qu'on a remarqué, c'est que, lorsque...
une approche par principes est beaucoup plus flexible...
Mme de
Santis : ...exemples.
Mme Duhaime (Lyne) : Oui, ils vont vous donner des exemples. Et ce que
je voulais vous mentionner, c'est que ce qu'on a remarqué, c'est que, lorsque nous avons une approche plus prescriptive, eh
bien, les entreprises ont plus tendance à regarder : O.K.,
coché, je l'ai fait. Et finalement le résultat est souvent que le consommateur
ou l'individu est moins bien protégé. Alors, je vais passer la parole à
Suzanne, si elle a des exemples, ou à Michel.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Morin.
Mme Morin (Suzanne) : Oui, bien
sûr. Alors, un exemple est que, lorsqu'on
parle d'approche par principes, on se réfère
à la loi fédérale, c'est la protection des renseignements personnels, qui est
basée sur 10 principes. Et le premier est la responsabilité de l'organisation
pour les renseignements qu'elle recueille des individus. Ensuite, on continue
avec la finalité de la collecte, on continue
avec expliquer la rétention, la conservation. On parle aussi de la
transparence, on parle de la sécurité
des données. Alors, c'est des principes qui peuvent guider soit une entreprise
très grande ou une petite entreprise. Et les principes nous permettent, parce que
c'est assez flexible... on peut ajuster nos procédures en fonction de la
taille et du modèle d'affaires qu'on a.
Au lieu de dire qu'on
doit, par exemple, conserver les données pour telle période de temps, on nous
dit qu'on doit conserver les renseignements
personnels seulement jusqu'au point où est-ce qu'on en a de besoin pour une fin
légale, ou de contrat, ou judiciaire. Alors, c'est une approche qui est
flexible, qui est technologiquement neutrale, et puis qui change avec le temps
et peut répondre aux attentes des individus.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre. 1 min 30 s.
Mme de Santis : Mégadonnées :
vous proposez une approche fondée sur le risque. On l'a défini ce matin,
«mégadonnées». Est-ce que vous pouvez nous expliquer qu'est-ce que c'est, cette
approche fondée sur le risque?
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Morin.
Mme Morin
(Suzanne) : Alors, lorsqu'on
parle de mégadonnées et une approche fondée sur le risque, l'idée, c'est
de s'assurer de l'expression de consentement soit explicite, implicite. Ça dépend des circonstances. Et, dans notre métier, les mégadonnées, c'est vraiment notre métier, c'est ce qu'on fait. Alors,
lorsqu'on parle d'une approche fondée sur le risque, une des bonnes
pratiques commerciales qu'on a dans des entreprises pour la vie privée, c'est
de faire une analyse de l'impact, sur la vie privée, d'une initiative, par
exemple, qui peut se servir de certaines mégadonnées.
Alors, quand
c'est basé sur le risque, on regarde, on fait la balance avec l'avantage ou le
désavantage pour l'entreprise, pour
l'individu, pour la société. Alors, lorsqu'on parle d'une approche basée sur le
risque, c'est de prendre des démarches pour vraiment s'assurer qu'à la
fin de la journée, s'il va avoir des impacts négatifs, on va dire, sur un
individu, alors peut-être qu'on devrait
revenir, avoir d'autres facteurs à considérer, aller chercher un autre
consentement plus explicite. Alors, c'est ça, basé... Alors, si vraiment
il n'y a pas de risque pour l'individu, alors on peut se fier peut-être sur un
consentement implicite.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
• (14 h 40) •
Mme Léger :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Bonjour, monsieur. Intéressant
de vous recevoir. On a reçu, la
semaine passée, les assureurs en dommages, et là, des personnes, c'est une
autre discussion qu'on peut avoir.
Je voudrais poursuivre sur les tests génétiques.
Ce n'est pas parce que je suis une spécialiste de ça, là, mais l'échange que
vous avez eu, vous dites, entre autres : «...les compagnies d'assurance de
personnes sont sensibles aux inquiétudes
soulevées par la CAIQ — par la Commission d'accès à l'information, pas la CAQ,
excusez-moi — dans
son rapport quinquennal concernant l'utilisation des tests génétiques à des
fins d'assurance.»
Et là vous dites pourquoi vous avez
bonifié : «...ne jamais demander aux proposants à l'assurance de subir un
test génétique;
«À ne pas demander ni utiliser les
renseignements issus de tests génétiques pour les propositions d'assurance de 250 000 $ ou moins. Le nouveau
plafond de 250 000 $ garantira que 85 % des proposants
[d'assurance] vie n'auront pas à communiquer leurs renseignements
génétiques.»
Vous donnez un exemple, là. Mais ensuite vous
poursuivez : «Cette façon de faire assure un meilleur accès à l'assurance
tout en décourageant les personnes qui auraient obtenu des résultats positifs
lors d'un test génétique de se procurer une
assurance de grande valeur, ce qui nuirait aux autres assurés et ferait
augmenter les primes pour la majorité.»
Et tout à
l'heure vous nous avez parlé, parce qu'on a reparlé que quelqu'un qui
mentirait... Et ma question est : Pourquoi
mentir augmenterait, dans le fond, le taux de prime? Donc, pour les gens qui
nous écoutent, quel est le lien cause et
effet de ça, du fait que... vos façons de faire la symétrie de données, là, je
ne sais pas comment vous l'appeliez tout à l'heure, là, qui fait que ça a un impact sur l'ensemble des autres
assurés de ne pas donner des données exactes, dans le fond? Bon, je vous
laisse l'expliquer davantage, là.
Le Président (M. Ouellette) :
Oui. M. Paquet.
M. Paquet (Michel) : Oui.
Alors, merci. L'assurance ou l'établissement des taux de prime sont basés sur
des données actuarielles. Alors, c'est basé
sur le risque. Normalement, quelqu'un qui se présente pour avoir une
proposition d'assurance vie a un besoin qui
est un besoin quelconque. Les gens qui savent que leurs risques augmentent
parce qu'ils ont obtenu les résultats
d'un test génétique vont non seulement aller s'assurer ou peuvent... en tout
cas, cinq fois plus probable qu'ils aillent s'assurer, mais en plus de
demander une couverture qui est plus élevée.
Quand on fait
ça, ce que ça fait, c'est que l'assureur reçoit les propositions et
l'information. Il pose sa série de questions,
mais il n'a pas l'information, par exemple, d'un diagnostic quelconque. La
personne, elle ne le divulgue pas. Ça change la donne dans l'évaluation
du taux de prime. Si ça change la donne et que le risque se réalise, au lieu de
se réaliser dans 20 ans, 30 ans,
il se réalise dans cinq ans, bien, il faut payer le capital décès. Si on le
paie, à ce moment-là, il n'y a pas eu
de provisionnement nécessaire pour tout le monde. Alors, qu'est-ce qu'on fait,
on va chercher l'argent ailleurs, des
autres assurés, qui ont tout payé puis qui ont tout déclaré d'une façon
volontaire l'information adéquate, pour payer nos dettes à long terme,
payer la dette de cette police-là.
Alors, ce que
ça fait, c'est qu'à un moment donné, s'il y a de plus en plus de monde qui ont
l'information qu'ils ne déclarent pas,
il y a de plus en plus de réclamations, les montants sont plus élevés, bien, à
quelque part, l'argent vient à quelque
part. Ça fait que ce qu'il va arriver, c'est : le montant que les gens
vont devoir payer parce que ce risque-là n'est pas déclaré par un nombre de personnes qui vont aller
souscrire l'assurance... il va falloir augmenter les primes parce que
c'est un nouveau risque qui fait qu'on sait que, dans, je ne sais pas,
20 %, je dis n'importe quel chiffre, les gens ne nous déclareront pas toute l'information, le risque est
plus élevé, il va falloir aller chercher l'argent au niveau des primes
que les gens, les nouveaux assurés, vont payer.
Et, si on fait ça, bien, ce que ça fait, c'est
que ça limite l'accès à l'assurance. C'est que les gens de la classe moyenne... Les gens qui ont de l'argent, qui ont
beaucoup d'argent vont toujours avoir les moyens de payer une prime. Les gens de la classe
moyenne, à un moment donné, ça devient trop élevé. Bien, ils vont avoir de la
misère ou ne souscriront peut-être
pas à l'assurance parce qu'ils n'ont peut-être plus les moyens. Mais ça, c'est
causé par les gens qui ne divulguent pas
assez d'information. Le risque est augmenté, les paiements sont augmentés,
alors c'est un peu... tout est relié avec ça. Alors, d'où l'importance d'avoir un équilibre d'information, et c'est à
la base même de l'assurance dans le Code civil. Le code prévoit, là...
l'information, qui est le matériel de nature à influencer le risque, doit être
divulguée. Alors, si on enlève ça...
Mme Léger : ...
M. Paquet (Michel) : Oui.
Mme Léger : Je
comprends, je comprends qu'est-ce que vous nous donnez, mais je suis sûre que, quand on
se met à la place des personnes qui veulent
avoir une assurance, c'est évident que, s'ils ont... Tout à l'heure, vous avez donné l'exemple du
VIH ou peu importe, là, n'importe
quelle maladie. C'est sûr qu'ils
seraient peut-être plus portés à mentir parce qu'ils
savent qu'en général les assurances n'assureront pas parce qu'ils ont des maladies. Tout à l'heure, vous avez dit : Ce n'est
pas vrai qu'on refuse nécessairement des gens. Puis pourtant on a l'impression
que, parce qu'une personne a un diagnostic
d'une maladie chronique ou d'une certaine maladie, on a l'impression que les
assureurs ne les assureront pas. Alors,
qu'est-ce qui fait que c'est ce que vous... parce que, dans le fond, vous nous donnez l'impression que ce n'est
pas ça, votre but, ce n'est pas ça,
l'objectif que les compagnies d'assurance auraient. Mais, pour la personne...
Je suis convaincue que ceux qui nous
écoutent puis qui vivent des situations similaires, ils n'ont pas cette
impression-là. Ils ont l'impression que... Gardons le plus d'information
possible parce qu'ils vont nous refuser.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Alors, même, je
suis content, vous utilisez l'expression «impression», puis c'est effectivement...
Ce qu'on entend parler, c'est toujours,
souvent, les pires scénarios. Mais les assureurs souhaitent assurer les gens au
taux qui convient aux risques qu'ils ont. Et
c'est simplement ça, là. Je sais qu'au niveau de la perception c'est vraiment...
c'est un problème, puis c'est un problème de perception qu'on a aussi avec la
question des tests génétiques, là. Mais la réalité, c'est que les assureurs
souhaitent assurer au bon taux, c'est juste ça.
Les gens qui
vont mentir au niveau de la souscription, pour avoir de l'assurance, bien, ces
gens-là, ultimement, au moment de la
réclamation, les assureurs vont faire des recherches, ils ne seront pas non
plus avantagés avec ça. Alors, c'est
pour ça que la façon d'éviter les problèmes en assurance, c'est d'être vraiment
ouvert et de tout divulguer dès le départ. On a le bon taux, on est sûr
d'être payé au moment de la réclamation.
Mme Léger :
Vous nous dites ça d'une façon très calme et qui pourrait nous rassurer, mais
je fatigue quand même, je vous le
dis, je fatigue quand même. Mais je ne mets pas en doute du tout ce que vous me
dites, là, ce n'est pas du tout, tu sais... Bien, moi, vous savez, j'ai
vécu personnellement un cancer, hein, alors c'est sûr que, quand tu...
Il y a
tellement des milliers de personnes comme moi qui vous écoutent, et puis je
suis sûre qu'ils sont un peu... ils
ne sont pas rassurés, évidemment, parce qu'en général on nous refuse, on nous
refuse les assurances de personnes parce qu'on a subi une grosse
maladie, là. Mais, bon, peu importe, je ne veux pas en faire un cas personnel
sur ça, pas du tout. Ma question était plutôt de tout ce qu'on entend d'un bord
et de l'autre.
Je voudrais
revenir sur l'approche par principes et l'approche plutôt prescriptive.
Voulez-vous me l'expliquer, là? Parce que je vous ai entendu, mais, pour
moi, ce n'était pas clair. Qu'est-ce que c'est, une approche par principes, et
qu'est-ce que c'est, une approche prescriptive?
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Morin...
Mme Morin (Suzanne) : Alors, on
va reprendre.
Le
Président (M. Ouellette) : ...sécurisez Mme la députée de Pointe-aux-Trembles comme M. Paquet
l'a fait.
Mme Léger : Oui,
reprenez.
Mme Morin (Suzanne) : Une
deuxième chance. Alors, j'ai mentionné, par exemple, le premier principe qui
s'applique au niveau fédéral et qui s'appelle la responsabilité de
l'organisation. C'est un principe qui s'applique aux organisations, aux entreprises. On ne dit pas exactement ce qu'on doit
faire pour être responsables, mais on nous dit qu'on est responsables, par exemple, pour le transfert
de renseignements à un tiers. Ça nous donne des exemples où on peut
utiliser des contrats ou quoi que ce soit.
Mais la responsabilité est la nôtre à défricher, à décider pour notre
entreprise de quelle façon est-ce qu'on veut être responsable. Alors, on
va introduire des contrats, on va faire des analyses de la sécurité, peut-être,
de l'entreprise avec la tierce partie avec qui on va contracter.
Mme Léger : C'est «par
principes», ça? Tout ça...
Mme Morin (Suzanne) : Alors,
oui...
Mme Léger :
...c'est une approche par principes que vous nous...
Mme Morin
(Suzanne) : Ça, c'est une approche par principes.
Mme Léger :
O.K., d'accord.
Mme Morin
(Suzanne) : On nous dit qu'on est responsables pour le transfert au
tiers, mais on ne dit pas exactement quoi faire afin de s'assurer... Un autre
exemple, peut-être?
Mme Léger :
...plutôt : Qu'est-ce que c'est, le prescriptif, d'abord?
Mme Morin (Suzanne) : Oh! mais quelque chose de prescriptif pourrait
être... L'approche par principes serait : conserver les
renseignements personnels seulement jusqu'au moment où est-ce que vous en avez
de besoin pour vos affaires. Une approche
prescriptive dirait : Pour certains renseignements personnels, on peut
seulement les garder pour sept ans, puis après ça on doit les détruire.
Un,
c'est... Principes, ça s'applique de façon flexible à n'importe quelle industrie,
l'autre était prescriptive. Et, si on
n'arrive pas à avoir le moment, bien, ça vient compliquer pour les individus
ainsi que pour les entreprises. Alors, par principes, c'est plus large. C'est plutôt des directives, et puis ça
laisse aux entreprises à décider qu'est-ce qui fonctionne pour leur
taille et puis pour leur sorte d'entreprise.
Mme Léger :
Et cette approche-là permet, en comparaison avec d'autres juridictions, dans le
fond, a un avantage...
Mme Morin
(Suzanne) : Oui.
Mme Léger :
...de pouvoir s'adapter à toute nouvelle réalité, pour vous.
• (14 h 50) •
Mme Morin (Suzanne) : Je pourrais même vous donner un troisième
exemple. On parlait avec Mme la ministre sur les incidents de sécurité. Un des principes, n° 7,
c'est la protection des renseignements personnels. C'est la protection. On nous dit qu'il y a certaines façons qu'on peut
faire ça, mais on ne nous dit pas exactement qu'est-ce qu'on doit faire.
Et puis, avec cette approche de principes, dès le début, les entreprises
qui étaient assujetties à cette loi-là, lorsqu'il y avait un incident de sécurité, ont volontairement divulgué aux individus qui étaient impactés parce qu'ils n'avaient pas pris soin de leurs
informations, ils avaient eu un bris. Alors, on communique avec
les individus et on a commencé à communiquer aussi avec la commission de
la protection de la vie privée au niveau fédéral, encore une fois une approche
par principes.
Alors,
si, dans la loi, on n'inclut absolument rien sur le côté de sécurité et de protection, je
ne veux pas dire toutes les
compagnies, mais il se peut qu'il y aurait des entreprises qu'eux autres, ils diraient : Ah! mais ce
n'est pas prescrit dans la loi, alors
peut-être que je ne le fais pas. Alors, encore une fois, une approche par principes donne la flexibilité, mais
aussi, on dirait, augmente la responsabilité de l'entreprise parce que l'entreprise
doit prendre, doit faire des décisions.
Mme Léger :
Je comprends beaucoup mieux.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, je vous
rappelle qu'il vous reste deux minutes.
Mme Léger :
Oui. Je voudrais revenir sur les mégadonnées...
Une voix :
...
Mme Léger :
Effectivement, c'est...
Une voix :
...
Mme Léger :
Oui, c'est ça parce que, dans le fond, vous, vous dites que «dans le contexte
de l'assurance des personnes, l'utilisation des mégadonnées est au coeur de nos activités, et ce, depuis aussi
longtemps que l'assurance
existe». Et : «L'utilisation des
mégadonnées [pour] les assureurs se traduit souvent en bénéfices pour le
consommateur». Alors, j'aimerais
savoir quel est le bénéfice pour le consommateur.» Vous l'abordez, mais je veux
vous donner plus de temps de l'exprimer parce que c'est quand même au
coeur, tu sais, des renseignements qui peuvent se transmettre, là.
Mme Morin (Suzanne) : Alors, «mégadonnées», c'est un nouveau terme pour
dire : beaucoup d'information qui est analysée beaucoup plus vite,
et les sources, peut-être, sont différentes ou il y a plus de sources. Alors,
le fait que nous avions plus de technologies
veut dire aussi qu'on a plus de données. Mais, même juste dans notre industrie,
on a, comme les assureurs,
naturellement beaucoup de renseignements personnels sur nos clients. Alors, ça
fait des années et des années, des
années. C'est partie de notre métier de bien analyser ces données-là, comme
M. Paquet expliquait, pour être capables... pour la tarification et
puis de fournir une politique d'assurance, à la demande de l'individu, au bon
taux.
Une
autre approche avec les mégadonnées, c'est de s'assurer que, lorsqu'on fait une
offre à un individu, qu'ils sont éligibles.
Alors, si on parle de faire du marketing, on ne veut pas faire une offre à quelqu'un
s'ils ne sont pas éligibles. Mais, en
analysant les données, on va savoir plus que l'individu est éligible pour un
produit avant de leur offrir.
Alors,
les mégadonnées nous permettent d'être de
plus en plus personnalisés. Et puis
c'est les individus qui nous le
demandent, c'est les clients. Ils veulent que, lorsqu'on les appelle, lorsqu'ils
nous appellent dans les centres d'appels, qu'on les connaisse, ils veulent qu'un produit est visé pour eux et est
là pour leurs besoins. Alors, beaucoup plus personnalisé, et puis la seule façon
de faire ça, c'est d'être capables d'analyser et d'utiliser les données ou bien
les mégadonnées.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. M.
le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. Mme Duhaime, Mme Morin, M. Paquet,
bonjour, bienvenue à la commission.
Je
vais retourner sur la question des tests génétiques. Donc, pour vous, à la
lecture de votre mémoire, c'est clair que c'est de juridiction provinciale puis qu'une loi du Parlement fédéral,
c'est ultra vires, c'est hors la juridiction du Parlement fédéral. O.K. Sur cette question-là, vous dites dans votre
mémoire : Nous, en tant qu'assureurs, on n'obligera personne à subir un test génétique. Donc, si je soumets une proposition d'assurance chez vous, vous n'allez pas me dire : Simon, va
faire ton test génétique, puis là ensuite on va voir si on va t'assurer avec
tel taux pour ça. Par contre, si mes parents m'avaient fait faire un test
génétique quand j'étais plus jeune ou même, supposons... Prenons mon cas. Je
suis un nouveau papa, je fais faire un test
génétique à ma fille. À ce moment-là, si jamais je souscris de l'assurance, je vais être
obligé de divulguer l'information à l'assureur. C'est ça?
M. Paquet
(Michel) : Dépendant du montant...
M. Jolin-Barrette :
Dépendant du montant.
M. Paquet
(Michel) : ...de couverture.
Le Président (M. Ouellette) : M. Paquet, votre réponse, c'est : Dépendant
du montant, pour qu'elle soit enregistrée au vidéo? Oui?
M. Paquet (Michel) : Oh! pardon. Oui, c'est ma réponse :
Dépendant du montant, exactement, selon le code actuel.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Donc, sous 140 000 $ ou 145 000 $?
M. Paquet
(Michel) : 250 000 $.
M. Jolin-Barrette :
250 000 $.
M. Paquet (Michel) :
Et...
Le Président
(M. Ouellette) : Oui. Pas trop vite.
M. Paquet (Michel) : Oui? Et j'aimerais ajouter qu'on est en train de
regarder justement le code, s'il y a une raison de bonifier le code. Et ça fait
partie des discussions qu'on souhaiterait avoir avec nos représentants du gouvernement parce qu'on a vraiment compris que les gens sont préoccupés de ça.
Alors, le montant, pour l'instant, est fixé à 250 000 $. Si,
en fait, après des discussions, on évalue
que le montant a raison ou devrait changer, bien, on peut en discuter. Mais
l'idée, c'est de trouver un seuil ou un
montant qui fait qu'on prévient... qu'on essaie de prévenir les gens qui vont
vouloir s'assurer à un montant qu'ils ne devraient pas ou trop élevé.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Est-ce qu'en établissant... Puis j'ai très bien compris l'argument que vous faisiez
tout à l'heure sur la notion
d'équité. Dans le fond, pour les gens, dans le fond, qui n'ont, supposons, pas
de maladies génétiques et qui s'assurent,
qui paient leur cotisation, vous dites, dans le fond : Bien, écoutez, ces
gens-là vont venir compenser. Leur taux d'assurance va augmenter si
nous, on n'a pas l'information génétique des gens qui ont subi leurs tests puis
qui viennent se faire assurer.
Ça fait que, dans le
fond, c'est une question... Vous, vous le présentez comme une question d'équité
pour les payeurs qui disent : Bien,
nous, on n'avait pas cette information-là ou on n'a pas de test génétique avec
des pathologies probables versus ceux
qui en ont et qui souscrivent quand même à une assurance, cinq fois plus, et
d'un montant plus élevé.
Ma
question que j'ai par rapport à ça : Avec votre plafond à
250 000 $, où vous n'exigez pas de test génétique, est-ce que
ça a un impact pour les autres cotisants au niveau du taux de cotisation?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Alors, c'est...
Vous avez mentionné «équité». Nous, on parle principalement
d'accessibilité. Alors, l'idée, c'est de maintenir l'assurance. Puis on parle
d'assurance vie individuelle, on ne parle pas d'assurance collective, là, mais
d'assurance vie individuelle, de maintenir l'accessibilité.
Ça n'aura pas
un impact sur le taux pour les polices qui sont en vigueur, mais ça va avoir un
impact sur les taux futurs. Alors,
si, avec l'expérience, on se rend compte, ce qui est très probable, que le
risque est plus élevé, le taux pour une
même police... à partir du moment où l'interdiction entre en vigueur, le taux
risque d'augmenter pour tout le monde pour
le futur. Ceux qui ont déjà souscrit, le taux est établi par contrat. On le
respecte, on vit avec. Mais c'est pour le... on parle du futur à ce
moment-là.
M. Jolin-Barrette : Et puis la
conséquence, supposons, à autoriser le fait de prendre en compte les tests génétiques, vous ne pensez pas que les gens vont
décider de souscrire à une assurance sans avoir subi un test génétique,
ou même, dans le fond, décourager le fait de passer un test génétique, ou même
de mettre les gens devant un fait, à savoir : Est-ce qu'on choisit de
passer un test génétique ou on va s'assurer en premier?
M. Paquet (Michel) : Bien,
encore une fois... Pardon.
Le Président (M. Ouellette) :
Allez, M. Paquet.
M. Paquet
(Michel) : Oui. Encore une
fois, je vais retourner en arrière. C'est que le seuil... Si on regarde,
85 % des polices, en ce moment, sont
déjà en bas du 250 000 $. On touche 15 % des gens. Ce n'est pas
un montant qui est énorme. Si, après
des discussions, on se rend compte qu'il y aurait peut-être intérêt de
regarder, de rehausser ce seuil-là, bien, ça va toucher encore moins de
monde. Alors, la petite tranche de personnes qui va rester devient la tranche
qui va être à risque, et on parle probablement d'une minorité de personnes.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je
vous remercie.
M. Paquet (Michel) : Oui.
Merci.
M. Jolin-Barrette : J'ai une
autre question sur les transactions commerciales. Dans le fond, là, c'est... Lorsqu'il y a des fusions, acquisitions
d'entreprises, vous dites, dans le fond : On devrait pouvoir échanger les
données, partager les données?
Mme Duhaime (Lyne) : Oui. M. le
Président...
Le Président (M. Ouellette) : Mme Duhaime.
Mme Duhaime
(Lyne) : ...en fait, cette
question-là, elle transcende toutes les industries. Et il y a deux
problèmes particuliers. Il y a, lors d'une
transaction commerciale, particulièrement lors de l'achat d'actif, lors de la
transaction, lorsque l'acheteur veut
évaluer la valeur et la solidité... bon, de faire une vérification diligente de
la cible, à ce moment-là, souvent, bien, ça pose problème, puisqu'il faut dénominaliser l'information concernant
les clients, concernant les employés. Et, en pratique, c'est très, très
difficile à faire. Ça, c'est un problème.
Le deuxième,
c'est lorsque la transaction a eu lieu et, par exemple, lorsqu'une
entreprise a des milliers de clients. S'il
s'agit d'un achat d'actions, ça va bien, c'est la même entité juridique. Mais,
lorsqu'il y a un achat d'actif, il
faudrait techniquement demander à chaque client de donner à nouveau son consentement,
le consentement qu'il avait donné lorsqu'il avait commencé à faire affaire avec
l'entreprise en question. Et c'est des choses qui sont déjà prévues à
l'extérieur du Québec, là.
Donc, à notre
avis, c'est finalement d'adapter la loi à la réalité des affaires
d'aujourd'hui. Et le client lui-même ne comprend pas pourquoi il doit
donner un consentement à nouveau, alors qu'il l'avait déjà donné lorsqu'il
avait commencé sa relation d'affaires.
• (15 heures) •
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Borduas, deux minutes.
M. Jolin-Barrette : O.K. Oui. Peut-être préciser sur qu'est-ce que
vous voulez dire par «manifeste». Dans le fond, le consentement manifeste, on a «explicite», «implicite». Pour vous, là,
qu'est-ce que ça représente, puis qu'est-ce que vous voulez comme
clarification?
Mme Duhaime
(Lyne) : Oui. En fait, on
aime bien la façon que c'est fait. Par exemple, on revient à l'approche
par principe, là, au niveau fédéral. Nous
sommes d'accord, comme industrie, que le consentement doit toujours être
manifeste. Donc, la personne, elle doit
comprendre qu'elle donne son consentement pour certaines choses. Ce
consentement, par contre, et c'est le
problème que nous avions, est que nous sommes d'avis qu'il peut être valable,
il peut être manifeste, qu'il soit donné de façon implicite ou
explicite, selon les circonstances. Donc, dans certaines circonstances, pour
que le consentement soit manifeste, ça
prendra un consentement explicite, alors que, dans d'autres circonstances, le
consentement sera manifeste. Donc, la
personne comprend qu'elle donne son consentement à la collecte de données ou à
l'utilisation de données. Dans certaines
circonstances, ça peut être fait de façon implicite, et la personne comprend
bien ce à quoi elle consent.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Mais le critère qu'on fait, c'est une analyse
subjective dans la tête de la personne de «elle comprend bien» ou c'est un critère objectif fixé par... parce que, dans
le fond, on réfère au principe, là, parce que, si la loi dit : Bien, c'est ça, le critère, le
consentement, la compréhension manifeste du consentement, c'est ça, mais, si on
prend un critère subjectif, bien là, on prend la personne raisonnable pour
dire...
Mme Duhaime
(Lyne) : ...la personne
raisonnable, mais, en fait, c'est l'attente raisonnable de la personne,
du consommateur, dans les circonstances particulières, la situation à laquelle
on fait face parce que, dans chaque... une situation...
Un renseignement pourrait ne pas être particulièrement sensible pour la
majorité des gens, mais, avec certains facteurs, certaines
circonstances, l'information pourrait devenir de l'information sensible, et
c'est à l'entreprise, à ce moment-là, en
appliquant le principe de décider que, non... pour que ce consentement-là soit
manifeste, ça me prend un consentement qui est explicite. Je ne peux pas
me fier à un consentement implicite.
Le Président (M. Ouellette) :
10 secondes, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie d'être venus à la commission témoigner. Merci.
Le
Président (M. Ouellette) : C'est un commentaire très pertinent. Mme Lyne Duhaime,
Mme Suzanne Morin, M. Michel
Paquet, représentant l'Association canadienne des compagnies d'assurances de
personnes, merci d'être venus déposer à la commission.
Je vais suspendre quelques minutes, demandant à
la Fédération des chambres de commerce du Québec et son président-directeur
général, Stéphane Forget, de s'avancer.
(Suspension de la séance à 15 h 3)
(Reprise à 15 h 6)
Le
Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant
la Fédération des chambres de commerce et son président-directeur
général, M. Stéphane Forget, un habitué de nos commissions.
M. Forget,
vous connaissez les us et coutumes : 10 minutes pour votre exposé, vous
allez nous présenter les gens qui vous accompagnent, et après il y aura
échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je vous
laisse la parole.
Fédération des chambres de
commerce du Québec (FCCQ)
M. Forget
(Stéphane) : Alors, merci
beaucoup, M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs les membres de la commission. Alors, je suis
accompagné, à ma droite, de Pierre-Yves Boivin, qui est vice-président,
Stratégie et affaires économiques, à la
fédération, et, à ma gauche, de Me Raphael Girard, qui est avocat-conseil à la
fédération dans ce dossier-ci. Alors,
heureux de vous retrouver. Et, tristement, quand on débute les commissions
parlementaires, à la fin d'août, on
réalise que l'été tire à sa fin. Alors, c'est triste de le dire, mais ça nous
fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui.
Alors,
brièvement, vous rappeler, vous le savez pour la plupart d'entre vous, la
fédération porte deux chapeaux. Tout
d'abord, comme fédération, nous regroupons et fédérons les 140 chambres de
commerce à travers le Québec, et, comme
chambre de commerce provinciale, il y a plus de 1 200 entreprises qui sont
directement membres de la fédération, ce
qui fait que, globalement, on représente tout près de 60 000 entreprises
au Québec. Donc, nous sommes très heureux d'être ici aujourd'hui dans le
contexte de cette consultation.
Nous
souhaitons vous faire part de nos observations et nos suggestions en prévision
d'une éventuelle révision de la Loi
sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Une loi
à laquelle nous croyons et dont le Québec
peut certainement être fier, mais, plus de 20 ans après son entrée en vigueur,
force est de constater qu'elle ne répond plus adéquatement aux réalités économiques d'aujourd'hui. D'une part,
elle n'est plus adaptée aux avancées technologiques des deux dernières décennies, et, d'autre part,
nous croyons qu'elle souffre d'un certain manque de cohérence, si je
puis dire, vis-à-vis ses équivalents au fédéral
et dans certaines autres provinces canadiennes qui ont des lois qui sont
contemporaines à la nôtre. Tout cela, aussi
curieux que cela puisse paraître, a pour effet de compliquer, dans une
certaine mesure, certains échanges économiques entre le Québec et les autres
provinces canadiennes, d'affecter, dans certains cas, leur compétitivité et
assurément d'alourdir leur fardeau.
Nous
souhaitons donc aujourd'hui, au-delà de la nécessaire modernisation de la loi,
vous sensibiliser tout d'abord à l'importance
d'une meilleure harmonisation de cette dernière avec les lois ailleurs au
Canada, évidemment les lois qui concernent
le secteur privé, la mise à jour de la notion de consentement, la déclaration
obligatoire d'incidents de sécurité, la nécessité d'une exception au
principe de consentement en matière de transactions commerciales et enfin au
transfert de renseignements personnels à l'extérieur du Québec.
D'un point de
vue global, nous croyons que la révision éventuelle de la loi offre une
occasion d'actualiser le cadre législatif dans un contexte de
globalisation accéléré des échanges commerciaux, ce à quoi nous croyons tous,
et de révolution technologique, ce qui peut, à notre avis, n'être que positif
en matière de développement économique.
Concernant l'harmonisation avec les
autres lois canadiennes au pays, la loi québécoise a fait figure de
pionnière en matière de législation visant
la protection de renseignements personnels dans le secteur privé. Or,
aujourd'hui, elle comporte des différences par rapport à la loi fédérale
ainsi qu'à certaines lois d'autres provinces, tant au niveau de la terminologie employée que de la structure. La
fédération propose que les prochains amendements qui seront apportés à
la loi québécoise tiennent compte de ces différences terminologiques afin notamment
de s'harmoniser avec la loi fédérale.
Devant
l'importance des échanges commerciaux entre les provinces canadiennes,
la fédération croit aussi qu'une meilleure harmonisation entre les différentes lois permettrait
d'améliorer la fluidité des échanges et des liens économiques, en plus de supprimer les barrières qui existent, notamment
en matière de transactions commerciales et de renseignements
personnels d'employés. La fédération est également d'avis qu'il sera important que le législateur québécois puisse soupeser et anticiper les effets que pourrait avoir le nouveau cadre juridique en matière de protection des renseignements
personnels qui entrera prochainement en vigueur en Europe. Ce nouveau cadre
juridique sera plus contraignant que le nôtre.
Devant
l'importance grandissante des échanges commerciaux avec l'Union européenne et particulièrement
avec l'entrée en vigueur de l'Accord économique et commercial global, pour
lequel nous avons énergiquement milité, la fédération estime qu'il sera important que soient évalués
les impacts de ce cadre juridique, notamment en vue de déterminer le caractère adéquat de la loi québécoise
face à ce nouveau cadre européen. Il ne serait pas souhaitable de pénaliser
les entreprises d'ici qui souhaiteraient développer ces marchés ou, à l'inverse,
empêcher des investissements étrangers de s'établir au Québec pour des
raisons de cette nature.
• (15 h 10) •
M. Boivin
(Pierre-Yves) : Quelques
mots sur la notion de réforme de la notion de consentement. Contrairement
aux lois d'autres provinces canadiennes, la
loi québécoise entretient un flou juridique à propos de la notion de
consentement et offre actuellement très peu
de flexibilité quant à la forme que peut prendre ce consentement. Dans son
rapport quinquennal 2016, la Commission d'accès à l'information
précise que cette notion ne doit faire l'objet d'aucune interprétation, et ce, quel que soit le moyen utilisé pour l'exprimer.
La FCCQ est d'avis que le législateur québécois devrait clarifier sans
équivoque que l'obtention d'un consentement implicite est permise lorsqu'il
s'agit de renseignements qui ne sont pas de nature sensible.
À
l'inverse, lorsqu'il s'agit de communiquer des renseignements sensibles ou de
leur utilisation à d'autres fins qu'à celles
de leur collecte, la FCCQ ne s'oppose pas à la proposition de la Commission
d'accès à l'information de modifier la loi
de sorte que la communication ou l'utilisation de renseignements personnels ne
soit possible qu'avec le consentement explicite de la personne
concernée. Cette exigence se trouve déjà dans d'autres législations
canadiennes. Une telle modification aurait
pour avantage d'harmoniser la loi québécoise avec ces dernières, ce qui réduira
les risques d'ambiguïté.
En ce qui concerne
les renseignements personnels des employés, la fédération propose de créer une
catégorie différente de renseignements personnels d'employés. Il nous apparaît,
en effet, irréaliste de s'attendre à ce que les employeurs obtiennent le consentement manifeste de leurs employés avant
toute collecte ou utilisation de leurs renseignements personnels dans le
contexte de la gestion.
En
matière de publicité ciblée, le cadre juridique québécois n'est plus adapté à
la réalité d'aujourd'hui. Dans un contexte
où les outils analytiques permettent de plus en plus de cibler spécifiquement
les individus selon leurs intérêts à des fins commerciales ou
publicitaires, la fédération est d'avis qu'une révision de la loi doit
notamment tenir compte de ce nouveau type de prospection commerciale.
Enfin,
la Commission d'accès à l'information recommande de modifier la loi de sorte
que le consentement puisse être
retiré en tout temps, sous réserve d'un préavis raisonnable et de restrictions
contractuelles et légales. La FCCQ ne s'oppose pas à l'ajout d'une telle
disposition qui aurait pour effet d'harmoniser la loi québécoise avec les
autres lois canadiennes en matière de renseignements personnels, en s'assurant
néanmoins de restrictions qui empêcheraient des individus d'échapper à leurs
obligations contractuelles de façon unilatérale.
Quelques mots maintenant sur la déclaration
obligatoire d'incidents de sécurité. Dans son rapport quinquennal 2016, la Commission d'accès à l'information
recommande de modifier la loi afin d'y ajouter une obligation de lui
déclarer les incidents de sécurité portant sur des renseignements personnels et
de définir les conditions des modalités de cette obligation de déclaration. La fédération ne s'oppose pas à cette
recommandation dans la mesure où celle-ci ne soit pas plus contraignante
que celle qui entrera bientôt en vigueur dans la loi fédérale. Comme nous
l'avons déjà mentionné, l'harmonisation de
la loi québécoise avec la loi fédérale est pour nous un enjeu d'importance,
d'autant plus que plusieurs entreprises
québécoises et canadiennes ont déjà commencé à modifier leurs pratiques pour se
conformer à la loi fédérale qui entrera bientôt en vigueur.
M. Forget (Stéphane) : Concernant les exemptions en matière de
transactions commerciales, de façon générale, le consentement des personnes concernées est requis lorsque des
renseignements personnels sont recueillis, utilisés ou divulgués. Or, lorsque des entreprises envisagent
de conclure une transaction commerciale comme l'achat, la fusion ou la vente de la totalité ou d'une partie d'une
entreprise ou encore la cession de certains actifs, il est souvent difficile
d'obtenir le consentement des personnes concernées par une telle transaction.
En
effet, il est impossible pour une entreprise d'obtenir le consentement de tous
ses clients ou de tous ses employés avant de divulguer leurs renseignements
personnels, que ce soit au stade de la vérification diligente ou au stade de la
clôture de la transaction.
C'est dans ce
contexte et afin de pallier à cette difficulté que les législateurs de la Colombie-Britannique
et de l'Alberta, et plus récemment
le gouvernement fédéral, ont prévu des exceptions en matière de transactions commerciales. Puisque
le Québec se trouve présentement être la
seule juridiction au Canada à ne pas avoir de telles exceptions dans
sa loi, nous proposons, nous sommes d'avis que les entreprises régies par la
loi québécoise devraient pouvoir procéder de la même façon qu'en vertu des lois
en vigueur dans les autres provinces ainsi qu'au fédéral.
Maintenant,
pour le transfert de renseignements
personnels à l'extérieur du Québec, dans sa forme actuelle, la loi oblige les
organisations à s'assurer que, si des renseignements personnels sont transférés
hors du Québec, ceux-ci bénéficient de la même protection
que s'ils étaient demeurés au Québec. Or, en l'absence de critères clairement définis à vérifier, il est très difficile pour les organisations appelées à communiquer des renseignements
personnels à des tiers à
l'extérieur du Québec d'évaluer l'équivalence du droit des juridictions
auxquelles sont soumis les tiers qui reçoivent les renseignements personnels.
La fédération
souhaite que soit mieux défini et clarifié le concept d'analyse des impacts et
des risques et ce qu'il implique dans la loi québécoise, de sorte qu'un équilibre
puisse être trouvé entre la protection des renseignements personnels
et la nécessité d'un cadre
réglementaire agile et efficient pour les entreprises. Dans la même veine et
suivant les mêmes objectifs, la FCCQ est
d'avis qu'il serait souhaitable que le législateur québécois confirme qu'il est
possible pour une entreprise de transférer des renseignements personnels
à l'intérieur du Canada sans devoir prendre des mesures supplémentaires de protection. En effet, nous croyons que l'obligation
de conclure une analyse des impacts et des risques lors d'un transfert à l'intérieur du Canada n'est
pas nécessaire pour les entreprises, particulièrement lorsqu'il s'agit
de renseignements gérés par une même entreprise qui a des activités à travers
le pays.
Donc, voici,
brièvement résumées, certaines de nos propositions visant la modernisation de
la loi. En terminant, je veux
conclure là-dessus, nous rappelons aux membres de cette commission qu'il nous
apparaît essentiel aussi que tout changement visant la modernisation de
la loi actuelle fasse l'objet d'une évaluation du fardeau administratif pouvant
découler de ceux-ci en vertu de la Politique
gouvernementale sur l'allègement réglementaire et administratif parce
que, vous le savez comme nous, vous avez la
loi qui est la vôtre, et, en parallèle, il y a beaucoup d'autres lois qui se
votent. Donc, je pense qu'il faut avoir une
sensibilité à l'égard de l'impact sur l'allègement réglementaire et
administratif. Je vous remercie.
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : Merci beaucoup, M. Forget. M. Boivin, M. Girard. Merci
d'être avec nous. Donc, maintenant,
nous allons passer à la période d'échange avec la partie gouvernementale, et je
cède la parole à Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci beaucoup, M. le Président. S'il vous plaît, m'aviser
quand il reste cinq à sept minutes.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Pas de problème.
Mme de
Santis : Merci. Alors, bienvenue, M. Forget, M. Laureti et
M. Girard. Nous apprécions votre présence ici aujourd'hui, d'avoir
l'occasion d'échanger avec vous. Merci de votre mémoire aussi.
À la recommandation 27, avec laquelle vous
êtes d'accord, on fait référence à des renseignements sensibles. Maintenant, ceci est un concept un peu nouveau ou
étranger à la loi québécoise. Définissez pour moi c'est quoi, un droit
sensible et comment c'est... parce que vous voulez le traiter différemment que
des renseignements personnels? Alors, renseignements sensibles vis-à-vis renseignements
personnels, à quoi on fait référence?
M. Forget (Stéphane) :
Excellent! Je vais tout de suite, dans ce cas précis, céder la parole à mon
collègue Me Girard, qui sera évidemment très heureux de discuter parce qu'au
quotidien il travaille avec des entreprises qui s'interrogent sur l'application de la présente loi. Alors, peut-être
que, Me Girard, vous pouvez répondre à cette question.
M. Girard
(Raphael) : Tout à fait.
Merci. Donc, vous l'avez mentionné, il n'y a pas de définition de «renseignement
sensible» dans la loi québécoise en ce
moment. Dans la loi fédérale, il n'y en a pas non plus, par contre il y a un
principe à la fin qui dit qu'essentiellement un renseignement de nature
sensible dépend des circonstances.
Par contre,
il y a certains renseignements qui vont toujours être considérés comme étant
sensibles, par exemple des
renseignements de nature médicale, et on pourrait en rajouter d'autres, par
exemple un numéro d'assurance sociale, qui
est toujours considéré comme étant sensible. En Europe, il y a une définition
un peu plus spécifique qui mentionne : opinions politiques,
opinions religieuses, tout ça. C'est un peu plus spécifique. Mais, au Québec...
bien, en fait, au Canada, dans la loi fédérale, c'est vraiment selon les
circonstances.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Mme la ministre.
• (15 h 20) •
Mme de
Santis : Vous nous donnez là
une définition où il y
a beaucoup de subjectivité. Et
une personne et une autre peuvent déterminer que le même renseignement
soit sensible ou pas sensible, particulièrement si on dit : Il faut regarder les circonstances, etc., on ne va pas avoir la même appréciation de tout ça.
Est-ce qu'on veut introduire dans la loi un concept qui est tellement
flou?
M. Girard (Raphael) : Bien, je
pense qu'il y a un équilibre à atteindre. Je vais laisser...
Une voix : Vas-y, vas-y.
M. Girard (Raphael) : ...un
équilibre à atteindre entre avoir une loi qui est trop rigide, qui mentionne
plein de types d'information, de
renseignements personnels, qui vont toujours, en toute circonstance, être
considérés comme étant sensibles. À
l'inverse, c'est vrai que peut-être il faudrait laisser la place à... il faut
qu'une personne soit capable de déterminer si ces renseignements-là vont
être de nature sensible ou non. Et c'est pour ça qu'un compromis, c'est de déterminer... c'est dire
que certains renseignements de nature médicale et le numéro d'assurance
sociale, par exemple, vont toujours, peu importent les circonstances,
être considérés comme des renseignements de nature sensible. Je pense qu'il y a
un équilibre à atteindre entre les deux, mais je vais laisser M. Forget en
rajouter un petit peu plus.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Forget.
M. Forget
(Stéphane) : Vous avez tout
à fait raison, l'objectif n'est certainement pas que ça soit plus flou
dans l'avenir. Au contraire, ce qu'on
souhaite, c'est que ce soit justement plus précis. En même temps, on a
constaté, avec des discussions avec plusieurs membres sur... comment on
fait pour atteindre l'équilibre entre la flexibilité nécessaire dans l'exercice des affaires courantes,
évidemment, toujours en protégeant les renseignements personnels, là, je mets
ça en... toujours en exergue, là, mais
comment on peut faire pour être capables au quotidien d'avoir une certaine
flexibilité dans les affaires
courantes en ayant une balise plus précise sur des renseignements qui
pourraient faire l'objet d'un large consensus sur le fait que ce ne sont
pas des données sensibles versus des données qui sont extrêmement sensibles?
Évidemment,
on n'a pas fait une grande analyse, renseignement par renseignement, savoir
lequel est de nature sensible ou pas, jusqu'où on peut aller dans le
fait qu'on autorise la transmission d'information ou de renseignements
personnels, mais, jusqu'à quel niveau de renseignements personnels on peut
aller, je pense que c'est là où il faudra s'interroger
et, comme vous l'avez bien dit, ne pas rendre ça plus flou, mais évidemment
rendre ça plus simple. Donc, en étant plus précis, ça risque d'être
beaucoup plus simple pour les entreprises par la suite. Je ne sais pas si je
suis plus clair dans la réponse ou pas du tout.
Mme de Santis : On va aller à la
prochaine question, vous permettez?
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Allez-y. Encore 16 minutes.
Mme de
Santis : 16, merci. Le consentement implicite, O.K.? J'aimerais
savoir : Les entreprises aujourd'hui, actuellement, entendent quoi
par un consentement implicite?
M. Girard
(Raphael) : Bien, un
consentement implicite est l'opposé d'un consentement explicite. C'est-à-dire
que, dans certaines circonstances, un
consommateur ou une personne va s'attendre raisonnablement à ce que ses
renseignements soient transférés à une autre personne. C'est ça, un
consentement implicite, c'est que ça ne va pas choquer l'esprit de quelqu'un de
savoir que ses renseignements ont été transférés à quelqu'un d'autre.
Mme de
Santis : Alors, pouvez-vous me donner des exemples où les entreprises
croient qu'il y a un consentement implicite
qui est donné? Donnez-moi des exemples. Ça, c'est des mots. Maintenant, je veux
qu'on soit un peu plus précis.
M. Girard (Raphael) : Parfait.
Il peut avoir des exemples, des transferts entre différents paliers d'une même entreprise ou même à un fournisseur de services,
par exemple. Je sais qu'il y a l'article 20 de la Loi sur la protection
des renseignements personnels qui parle de
cette éventualité-là. Mais, par exemple, justement, que les renseignements
soient transférés à un tiers, à un
fournisseur de services, par exemple, en matière de «payroll», je pense que
tout le monde qui travaille pour une
entreprise s'attend à ce que ces renseignements soient transférés à un
fournisseur qui s'occupe de la paie. Essentiellement, c'est un exemple
que je pourrais donner.
Mme de Santis : Il ne... Je peux?
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Allez-y, Mme la ministre, oui.
Mme de
Santis : Dans la situation où il y a une fusion ou un achat d'entreprise
et il y a la vérification diligente, est-ce
que les employés et les fournisseurs ne s'attendent pas que c'est entendu
implicitement que certains renseignements soient transférés? Parce que, si je suis le raisonnement que vous me
donnez là, je vois que vous nous demandez, dans la situation d'une
transaction commerciale, particulièrement quand il y a la vérification
diligente et ensuite la clôture, qu'il y ait
une disposition précise dans la loi qui touche ce sujet-là. Mais, si je
continue dans le même raisonnement que vous
me présentez, est-ce qu'un employeur ou...
pardon, un employé ou un fournisseur n'a pas consenti implicitement que,
s'il y a une transaction, les renseignements soient transférés?
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Girard. M. Forget.
M. Forget (Stéphane) : Bien,
tout d'abord, je dirais : Dans le cas des transactions, on note aussi au
mémoire l'importance qu'il y ait une entente de confidentialité parce que c'est
peut-être implicite qu'il y ait un certain nombre d'informations qui soit transmis dans le cas d'une vérification
diligente ou dans une transaction. Mais, dans le cas, par exemple,
où la transaction achoppe, qu'est-ce qui arrive avec ces informations-là? Donc,
il y a tout d'abord l'importance pour
nous qu'il y ait clairement une entente de confidentialité dans
l'exercice de la vérification diligente ou dans l'exercice de la transaction, mais je pense que ce n'est pas
implicite pour l'employé, ou pour le client, ou pour le fournisseur, ce
qui va arriver avec ses renseignements dans le cas où ça achoppe, par exemple.
Alors, ça, là, pour nous, là, il y a un élément important à cet égard-là. Je ne
sais pas si tu veux ajouter à ça.
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : Me Girard.
M. Girard
(Raphael) : Bien, je suis tout à fait d'accord. En fait, dans les autres provinces, en Colombie-Britannique, en Alberta, qui ont
une loi similaire, ils prévoient...
Mme de
Santis : ...ne remets pas en
question ça. Ce que je ne comprends pas, c'est le consentement implicite, O.K., parce que
vous dites : Dans certains cas, il
y a un consentement implicite que
certaines choses soient faites parce que c'est dans le cours normal des
affaires. Mais, dans le cours normal des affaires, dans ma tête, je dis :
Toute personne qui travaille pour l'entreprise
peut imaginer qu'un jour l'entreprise soit vendue ou qu'il y ait une fusion parce qu'on vit dans ce monde-là. Mais là on ne dit pas qu'il y a un
consentement implicite, et je vois... J'ai encore de la misère à
comprendre comment on détermine c'est quoi, un consentement implicite. Le
«payroll», ça semble être évident, mais est-ce qu'il y a des circonstances où
ce n'est pas aussi évident? Je ne sais pas. Peut-être on devrait aller à une
autre question.
Une voix : ...
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Girard.
M. Girard
(Raphael) : Bien, je suis
d'accord avec vos considérations, avec vos craintes, puis, justement, le
but d'une exception en matière de transactions commerciales, c'est justement de
palier à ça, c'est qu'on veut faire une exception
au principe qui est le consentement. Donc, effectivement, je suis d'accord avec
vous qu'il y a plusieurs employés qui
sont totalement au courant, qui sont conscients que leurs renseignements pourraient
être transférés, mais en ce moment, dans
l'état actuel de la loi, comme il n'y a pas d'exception définie, explicite, je
ne veux pas utiliser le mot, c'est un peu mélangeant, là, mais il n'y a pas d'exception claire, dans la loi en ce
moment, en matière de transactions commerciales. Mais les entreprises, souvent, elles ne savent pas trop qu'est-ce qui se
passe, qu'est-ce qu'on doit faire en cas de vente, qu'est-ce qu'on doit faire aussi... Là, on a parlé
beaucoup en cas de vente potentielle, là, en cas de vérification
diligente avant de vendre l'entreprise, mais qu'est-ce qui se passe aussi
lorsqu'on veut vendre, disons, un actif, par exemple, une liste de client?
Aujourd'hui,
dans l'économie numérique, il y a beaucoup de sites Web que leur actif principal,
c'est une liste de clients. S'ils
veulent vendre cette liste de clients là, qu'est-ce que ça prend? Est-ce que ça
prend le consentement? Si oui, quel
type de consentement? En ce moment dans la loi, c'est le consentement manifeste
qui est plus ou moins clair pour plusieurs
acteurs, alors que, dans d'autres provinces, c'est clair. Bien, d'autres
provinces, je veux dire expressément ce que la loi... les provinces qui sont couvertes par la loi fédérale, et la
Colombie-Britannique, et l'Alberta, mais eux, c'est clair, ils peuvent faire, suivant certaines balises, c'est
balisé, quand même, là... Il faut qu'il y ait, vous l'avez mentionné, une
entente de confidentialité, tout ça, entente
de confidentialité. C'est très strict, mais il y a une possibilité de le faire.
Les gens, ils savent, c'est clair.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Mme la ministre, il vous reste encore
10 minutes.
Mme de
Santis : O.K. En matière de publicité ciblée, vous dites que le cadre
juridique québécois n'est pas adapté à la
réalité d'aujourd'hui et vous nous dites que vous êtes d'avis que le
législateur devrait assurer que ce nouveau type de prospection commerciale soit visé par la loi
privée. Maintenant, j'aimerais avoir vos suggestions là-dessus, vos
propositions ou recommandations là-dessus
parce que le point est important, mais j'aimerais savoir où vous êtes situés
là-dessus parce que vous représentez les entreprises, et c'est un jeu
qui est joué par les entreprises.
Le Président (M. Girard, Trois-Rivières) :
M. Girard.
M. Girard (Raphael) : Comme
plusieurs autres enjeux et comme le titre du rapport de la commission, c'est
toujours trouver un équilibre. Nous, on pense que la publicité ciblée, c'est
quelque chose de désirable. Il y a plusieurs personnes
qui désirent avoir de la publicité qui est ciblée à leurs intérêts. Les gens
sont contents. Ils sont satisfaits de recevoir une publicité comme ça. Ce n'est pas tout le monde, je suis d'accord,
j'en conviens, puis, justement, une façon de permettre de trouver cet équilibre-là tant désiré, ce serait
de faciliter les moyens de se sortir, de «opt out» de cette publicité ciblée là.
En ce moment,
c'est un peu flou. On reçoit ces questions-là parfois de clients, puis ce n'est
pas tout à fait clair, qu'est-ce
qu'ils doivent faire, et il y a des entreprises privées qui... des organismes
en privé qui régulent ça, mais ce
n'est pas tout à fait clair. Si on permettait de façon
explicite ou, en tout cas, de
façon relativement claire dans la
loi de faire de la publicité ciblée,
mais qu'on balisait ça avec des moyens, par exemple, comme j'ai dit,
d'«opt out» plus faciles, ça serait un
équilibre intéressant à atteindre. Et, comme je l'ai dit, la publicité
ciblée a quand même certains avantages par rapport à l'innovation et par rapport aux besoins de chacun
et chacune des consommateurs aussi.
• (15 h 30) •
Mme de
Santis : ...ces démarches à
l'amont avant que la publicité ciblée se fasse que je trouve un peu
inquiétantes parce que, là, on ramasse des renseignements de différentes sources et on les croise. Et la plupart des citoyens
ne savent pas que, chaque fois qu'ils
cliquent «j'accepte», ou qu'ils cliquent «j'aime», ou qu'ils font n'importe quoi avec le Net, tous ces renseignements sont en train d'être
croisés pour créer une Rita virtuelle à qui on veut cibler la publicité. Ça,
c'est le moindre de mes soucis parce que
c'est à la fin de tout le processus. Comment vous voulez gérer tout ce qui
vient avant que la publicité soit faite?
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : M. Forget.
M. Forget
(Stéphane) : Écoutez, la
première question, je n'ai pas la réponse claire. Je suis le premier
coupable de ça, vous allez me dire. Quand je
deviens membre de Facebook ou quand je... Prenons cet exemple-là. Est-ce
qu'implicitement je consens à ce
qu'il y ait des données qui soient accumulées et que ce soit soumis...
Honnêtement, je n'ai pas lu en détail quand je suis devenu membre de
Facebook, alors la première question, je ne sais pas si c'est déjà là. Ça,
peut-être que Me Girard pourrait répondre ou même vous. Ça, c'est à la
première question.
La deuxième,
évidemment je ne sais pas si on est capables, en amont, de le faire. C'est pour
ça que, nous, ce qu'on suggère, c'est l'«opt out», le droit de
dire : Oupelaïe! On arrête ici, et je demande un «opting out».
Mme de
Santis : Même
quand je fais uniquement une recherche, O.K., où je n'ai pas dit que
j'acceptais quoi que ce soit, c'est des renseignements qui existent vis-à-vis
Rita qui fait encore... qui est ajouté pour créer cette Rita virtuelle.
M. Forget (Stéphane) : Absolument,
absolument.
Mme de
Santis : O.K.
Alors, je n'ai pas dit oui ou non, c'est là. Mais maintenant
j'ai utilisé trop de mon temps, mon collègue voulait poser des questions.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. le député de Maskinongé, il vous reste
6 min 10 s.
M. Plante : Bien, vous n'êtes pas chanceux, messieurs, parce que
c'est exactement sur ce sujet-là que je voulais poser des questions parce
que, je vais vous avouer, moi aussi,
ça me panique un petit peu. Puis je
comprends que, puis ma collègue l'a bien mentionné, c'est en amont, le problème,
bon, quand tu cliques «j'aime», quand tu cliques «j'accepte», quand tu dis «oui». Par contre, puis étant, moi
aussi, dans mon passé, issu d'une chambre de commerce, et là, vous allez
voir, à cette commission-là, on va
s'entendre mieux qu'au dernier passage qu'on s'avait rencontrés, je sais que,
pour les entreprises, ces données-là, c'est important,
là, parce que, veux
veux pas, il n'y a
pas une entreprise demain matin qu'on peut dire : Tu vas faire une publicité, puis ça va
correspondre à 80 % de ton public cible, là. C'est mieux qu'une
publicité télé, ou journalistique, ou n'importe quoi, parce c'est une publicité
ciblée sur des gens qui ont un gros potentiel d'achat, en tout cas, ou du moins
que le produit correspond à leurs besoins.
Ce qui est un
peu paniquant pour nous, puis j'aime bien quand Mme la ministre dit... et je
n'aurai pas le droit de prendre son exemple, je vais juste dire un Marc
virtuel parce qu'on n'a pas le droit de se nommer par nos prénoms, là, mais, quand on crée un être virtuel, qui est
notre être, parce qu'on a fait une recherche sur Internet, parce qu'on va
sur Facebook ou Twitter, etc., et que ces
données-là, accumulées, peuvent servir, et on va être francs, c'est à quel
point qu'on peut s'arrêter, et ça a
une valeur là. Demain matin, je suis convaincu que l'ensemble de vos membres
aimerait avoir ces données-là pour dire : On va pouvoir cibler des
gens puis vraiment enligner notre publicité juste aux personnes parce que le
travail est déjà tout fait.
Et quand vous dites : Bien, vous devez
encadrer, c'est facile à dire, mais ce n'est pas très facile à faire.
M. Forget (Stéphane) : Ce n'est
pas facile à...
M. Plante :
Alors, moi aussi, comme Mme la ministre vous l'a mentionné, j'aimerais savoir
quel serait le type d'encadrement, mais comment on peut faire. Un coup
que la publicité est faite, il est un peu trop tard. Et, tu sais, comme nous, les politiciens, je dois vous avouer
que, si on clique, même entre nous, là, entre nos pages, mais c'est mon collègue de Borduas qu'à toutes les fois que
j'allume mon Facebook m'apparaît sa page pour que je l'aime. Et,
écoute... Et je me dis : Bien, il est bien gentil, là, mais pas à ce
point-là. Vous comprenez?
M. Jolin-Barrette : J'attends
toujours qu'il se compromette...
M. Plante :
Il attend que je dis, «j'aime». Mais vous comprenez que ce type de publicité
là, tout ça, bon, on sait qu'il est
trop tard parce que l'algorithme dit que j'aime la politique puis je
m'intéresse à la politique. Mais, pour vous, quel serait l'encadrement
optimal qui ne va pas trop loin pour nuire au développement des entreprises,
mais qui va quand même assez loin pour protéger les renseignements personnels
des citoyens?
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Girard.
M. Girard (Raphael) : Moi, je pense que la solution réside vraiment par
la transparence, simplement, là. C'est vraiment
de... si les gens ne le savent pas en ce moment, ce n'est pas tout le monde qui
le sait, il y a seulement les gens qui sont les plus informés qui le
savent. Déjà, la commission a déjà émis un rapport, c'est un bref rapport, je
ne sais pas combien, il a deux ou trois
pages de long, mais essentiellement ce qu'il dit, c'est que le fait qu'une
entreprise recoure à la publicité
ciblée ne peut pas être caché dans une politique de vie privée parce que, c'est
vrai, on ne se le cachera pas, ce n'est pas tout le monde qui lit ces politiques-là sur les sites Internet. Je
suis poli, là, ici, là. Donc, c'est ça, on ne peut pas juste le cacher puis dire : On recourt à la publicité
ciblée, ce n'est pas suffisant. Il faut que ce soit plus clair que ça, mais ce
n'est pas clair en ce moment qu'est-ce que
ça prend pour être plus clair, qu'est-ce que ça prend pour respecter cette
obligation-là de transparence. Il y a
l'alliance digitale canadienne dont les membres peuvent ajouter un logo sur
leur site qui leur permet de divulguer, en quelque sorte, en tout cas, de faire preuve d'un
certain niveau de transparence, de dire : Ah! nous, on fait de la publicité ciblée. Mais ce n'est pas tout le
monde qui sait c'est quoi, ce n'est pas tout le monde qui est au courant
de ça.
Donc,
moi, je pense que la solution, ce n'est pas nécessairement de demander un
consentement explicite, je ne pense
pas que ça soit vraiment réaliste de toujours accepter ça, mais au moins de
faciliter l'«opt out», au moins, à tout le moins d'être plus
transparent, trouver des mesures de transparence.
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : M. le député de Maskinongé, il vous
reste 1 min 15 s.
M. Plante :
Merci, M. le Président. Mais vous n'avez pas peur, parce que, là, on vient en
lien avec l'allègement réglementaire,
vous n'avez pas peur que, si on impose dans nos entreprises québécoises ou à
des personnes qui peuvent utiliser
ces choses-là ou qui peuvent se servir des données, ça va être nos entreprises
parce qu'on a une légifération sur nos entreprises, que ça impose
surtout un surplus de paperasserie, etc., ce que vous parliez tantôt, et que ça
mette comme une espèce de concurrence ou même pas, mais une espèce de fardeau
supplémentaire aux autres entreprises qui ne sont pas assujetties?
M. Boivin
(Pierre-Yves) : Je pense que c'est là où la question de consentement
implicite, peut-être, revient un peu
dans la question dans le sens où, lorsqu'on utilise Internet, on utilise une
architecture qui est conçue et qu'on peut difficilement changer si on veut qu'elle continue à faire ce qu'elle
peut faire. Nous, ce qu'on propose, c'est que, dans le cadre d'informations, disons, qui ne sont pas
sensibles, donc le fait d'aller consulter la page de collègues ou autres,
bien, c'est implicite avec notre utilisation que cette information-là peut être
utilisée. Alors la notion de dire : En cas où, là, il y aurait transfert
ou utilisation d'informations sensibles, bien là c'est de trouver le moyen, et
là je pense que c'est effectivement
peut-être plus complexe de trouver exactement le bon moyen. Mais c'est là qu'on
pourrait circonscrire. Même chose
pour les publicités. On ne peut pas empêcher le fait qu'en utilisant l'Internet
on crée un historique. Par contre, on peut demander de mettre en place
un processus ordonné pour se retirer de cette situation-là, qui va être plus
facilement vérifiable.
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : Ah! allez-y, M. Forget.
M. Forget (Stéphane) : Je pense que vous avez raison. Comment on fait
pour trouver l'équilibre entre plus de transparence
et pas plus de lourdeur administrative, si on veut? Je pense qu'on pourrait se
donner comme devoir de faire l'exercice
d'essayer de voir, de vous suggérer des choses qui feraient en sorte que ça
serait avantageux pour le consommateur, donc plus de transparence, et en même temps sans que ça soit plus lourd
pour l'entreprise. Je suis certain qu'on peut se donner le devoir
d'essayer de vous éclairer à cet égard-là. Ça me ferait plaisir de le faire.
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : Ceci met fin au bloc du côté du
gouvernement. Nous allons maintenant passer du côté de l'opposition officielle
avec Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. À vous la parole.
Mme Léger :
Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Forget. Ce n'est pas votre
première venue ici, au parlement. Alors, M. Boivin, M. Girard,
bonjour.
Vous
dites d'entrée de jeu dans votre mémoire que l'importance... d'ailleurs, vous
dites : «Or, plus de 20 ans plus tard,
et après l'entrée en vigueur de trois autres lois canadiennes en matière de
protection des renseignements personnels dans le secteur privé, force
est d'admettre que la Loi sur [les] renseignements personnels [et privés] ne
répond plus adéquatement aux réalités d'aujourd'hui.»
Donc, ce qu'on en
déduit, c'est qu'il est important pour vous que la loi, particulièrement sur la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé, puisse être
modernisée.
M. Forget
(Stéphane) : Modernisée en... Ce qu'on souhaite surtout, c'est qu'elle
soit harmonisée aussi avec, notamment, la
loi fédérale et les autres lois canadiennes pour simplifier aussi la vie et le
travail des entreprises, au quotidien, qui doivent jouer ou gérer
chacune de ces lois-là, là, tout dépendant où elles exercent leur marché.
• (15 h 40) •
Mme Léger :
Ce qu'on remarque, ce qu'on a devant nous, c'est le rapport quinquennal de la
Commission d'accès à l'information
qui nous dit quand même clairement que la commission... Il exprime, dans le
fond, que l'approche prise par le gouvernement
consiste à exclure le secteur privé des orientations gouvernementales, d'une part, parce qu'on voit, dans
les orientations gouvernementales du gouvernement, que le secteur privé, il n'est pas nécessairement touché, et là on fait la loi sur
l'accès à l'information, mais on
pense que les deux doivent être travaillées nécessairement ensemble. Qu'en
pensez-vous?
Le Président
(M. Girard, Trois-Rivières) : M. Forget.
M. Forget (Stéphane) : Bien, en fait, l'opportunité nous est donnée aujourd'hui, évidemment, avec le rapport de la CAI, de rappeler un
certain nombre de préoccupations du milieu des affaires, qui dit : Il y a
des lois canadiennes qui sont plus récentes
que la nôtre, qui sont contemporaines. Au quotidien, quand j'ai eu des
discussions avec Me Girard, il nous a dit : Les entreprises se
posent des questions parce qu'elles ne font pas affaire seulement toujours
juste au Québec. Il y a l'enjeu avec l'Europe sur le fait que notre loi
doit être adéquate, et, en ce moment, elle ne l'est peut-être pas.
Il y a
des entreprises qui se préparent à investir les marchés
européens. Donc, on pense qu'il y a une opportunité
avec le rapport de la commission
de se dire : Harmonisons, modernisons. C'est ça, dans le fond, nous, qui est notre... Il y
a une opportunité là
qui nous apparaît importante à saisir, d'autant plus que, dans le contexte
européen, la loi québécoise sera
réévaluée à quelque part entre 2018 et 2022. Donc, on sait déjà
qu'on a un certain nombre de lacunes. On souhaite développer les marchés
européens. Alors, voilà une occasion de réfléchir à comment on peut harmoniser
le tout et moderniser le tout.
Mme Léger : Mais on va... Je veux revenir sur la Commission européenne, là, mais, juste avant, vous
dites aussi d'entrée de jeu l'effet
de la compétitivité des entreprises québécoises puis nos échanges économiques
entre le Québec et le reste du Canada, avec tous les impacts, là, de
l'infonuagique, multiplication des cyberattaques, le vol d'information, l'intelligence artificielle. On pourrait en nommer
plusieurs. Quels seront les effets qui peuvent nuire si on n'agit pas?
Quels sont les effets qui peuvent davantage
nuire à la compétitivité québécoise? Est-ce que c'est... D'entrée de jeu, c'est
ce que vous indiquez, et vous
représentez beaucoup d'entreprises au Québec qui vivent certaines difficultés à
ce moment-ci, là.
M. Forget (Stéphane) : Donnons
des exemples actuels, peut-être, là, Me Girard, avec le reste du Canada, par
exemple.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Girard.
M. Girard
(Raphael) : Les questions
qui reviennent souvent, c'est : Comment on fait? Disons, une entreprise
étrangère ou canadienne veut s'établir au Québec, c'est quoi, le cadre
juridique? Puis là, souvent, il y a toujours des enjeux différents au Québec, évidemment,
avec la Charte de la langue française.
Juste un exemple
précis que je donne des fois, c'est les règles en matière de concours
publicitaires. C'est différent au Québec.
C'est un petit peu plus rigoureux. Mais c'est des enjeux, disons,
pas mineurs, mais ils sont différents de ceux en matière de protection des renseignements personnels. Là, les gens, ils veulent vraiment
savoir : O.K., qu'est-ce
que je fais? Je m'installe, qu'est-ce qui se
passe? Puis, étant donné que le cadre juridique est différent, puis on a donné
plusieurs exemples, un exemple, c'était en
matière d'exception commerciale, bien, qu'est-ce qui arrive si je m'installe au
Québec, mais je veux céder une partie de mes actifs ou je veux vendre
l'entreprise au complet? Est-ce que j'ai le même cadre juridique ou je dois dealer, si vous voulez, avec un cadre juridique
complètement différent? Puis souvent c'est ça qui arrive, c'est que ça
leur fait peur.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Mme la députée.
Mme Léger :
J'aimerais que vous précisiez davantage parce que c'est normal qu'une
entreprise qui veut venir s'installer
au Québec pose des questions de ce genre sur la langue française, sur la
publicité. Chaque pays a ses règles, puis, quand on est à travers le monde puis on veut venir s'installer quelque
part, c'est sûr qu'il y a des exigences. Mais, selon l'expérience que
vous avez et probablement différentes situations très pratiques, au-delà de
juste quelques lois ou de s'ajuster, quel
est, pour vous, l'enjeu majeur ou certains enjeux majeurs qui interpellent nos
entreprises de l'extérieur qui veulent venir s'installer au Québec?
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Forget.
M. Forget
(Stéphane) : Je dirais que
l'enjeu principal, c'est justement qu'on a un cadre qui soit différent au
Québec du reste du Canada, et ça, ça cause
certaines préoccupations. Tout d'abord, je ne dirais pas que ça ferait en sorte
qu'une entreprise va s'installer ou pas. Je
ne pense pas que ce soit le premier critère de choix, là, à savoir si je
m'installe au Québec ou pas, mais il
y a une préoccupation à cet égard-là sur un cadre qui est différent au Québec
du reste du Canada, surtout pour des
entreprises qui, parfois, veulent aussi évoluer au Québec, mais ailleurs aussi
au Canada. Alors, ça, c'est un enjeu qu'on entend plus souvent.
Mme Léger : Est-ce que
l'enjeu est aussi vers nord-sud, donc avec les États-Unis?
M. Forget
(Stéphane) : Là, moi, je ne
sais pas si on peut répondre à cette question-là. Moi, je ne pourrais
pas.
Mme Léger : Parce que,
là, vous faites est-ouest, là, mais nord-sud, j'imagine...
M. Forget (Stéphane) : Oui,
oui. Mais là je parlais du Canada comme entité, comme pays, là.
Mme Léger : O.K.
M. Girard
(Raphael) : Bien, tout à
fait, c'est juste que c'est dans le même pays. Évidemment, il y a des
différences juridiques, puis il y a d'autres
avocats sur la table, tout le monde est au courant, il y a un Code civil au
Québec, tout ça, puis des fois ça peut être un frein, mais ce n'est pas
un frein majeur. Mais, dans certains cas, ça peut être un frein majeur, notamment
en protection des renseignements personnels.
On a eu un
exemple récemment d'un client qui voulait vendre une liste d'actifs, puis il
s'est rendu compte qu'on ne savait
pas trop c'était quoi, le consentement requis pour les clients ou les
consommateurs qui résidaient au Québec. Est-ce que ça leur prenait un consentement explicite? Implicite, c'est
suffisant? On ne savait pas trop. Compte tenu du risque, ils ont décidé qu'ils ne vendaient pas les
actifs qui étaient au Québec. Puis ça, ça peut être majeur pour les entreprises, de devoir juste laisser tomber le
Québec au complet, là. Donc, c'est des exemples de cette nature-là,
disons.
M. Forget (Stéphane) : Mais on
n'a pas d'exemple nord-sud, je suis désolé, Mme la députée.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Mme la députée.
Mme Léger : Mais
revenons à la Commission européenne. Alors il y a l'entrée en vigueur, dans le
fond, de l'entente, et je pense que la date,
c'est 25 mai 2018, et le cadre juridique serait plus contraignant. Alors,
quelle harmonisation qu'il
faudrait faire pour s'assurer que... donner suite à l'accord?
M. Forget (Stéphane) : Bien, tout
d'abord, pour une raison un peu particulière, la loi fédérale est considérée comme adéquate à cette étape-ci, alors que celle
du Québec ne l'est pas. Donc, déjà, une harmonisation avec la loi fédérale aurait certainement un avantage de notre
côté. Alors, ça, c'est le premier élément. Je ne sais pas si Me Girard voulait
ajouter des choses à cet égard-là.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : M. Girard, allez-y.
M. Girard
(Raphael) : Oui. En 2014, le
groupe de travail l'article 29 de la Commission européenne a émis
des recommandations et, essentiellement, n'a pas dit que le Québec
était inadéquat, mais a proposé de suspendre l'évaluation du statut du Québec. Donc, en
ce moment, on n'est pas inadéquats,
mais on n'est pas non plus adéquats, contrairement
à la loi fédérale en ce moment. Donc, ça, c'est d'une part.
Là, la loi européenne va changer en 2018, va
être plus contraignante. Des exemples de qu'est-ce qui est plus contraignant, c'est qu'il va y avoir une
obligation en matière d'incident de sécurité, de notifier les personnes
concernées qu'il y a eu un incident de sécurité, un bris de sécurité, là, si
vous voulez. Puis je pense que la fédération n'est pas contre cette idée-là non
plus de le faire au Québec aussi dans la mesure où la loi fédérale va bientôt
l'exiger.
Là, il y a eu
des amendements au projet de loi S-4 en 2015, qui va rendre obligatoire
les... 2015, c'est passé, mais c'est
que l'amendement n'est pas encore entré en vigueur en ce qui concerne ce
règlement-là. Il n'y a pas de règlement qui est entré en vigueur. Donc, ça va venir, ça pourrait venir cet
automne, peut-être cet hiver, mais il va y avoir bientôt une notification obligatoire en cas de bris de
sécurité, puis c'est quelque chose qui pourrait aider à harmoniser à la
fois avec la... Si le Québec se dotait d'une
telle obligation de notification, bien, ça pourrait aider l'harmonisation à la
fois avec la loi fédérale, mais aussi avec le cadre juridique européen,
et on pourrait argumenter aussi que ça pourrait faciliter ou augmenter les chances que la loi québécoise soit
jugée comme étant adéquate par la Commission européenne,
l'article 29, le groupe article 29.
Mme Léger :
Pour suivre comme il faut, là, qu'est-ce que ça veut dire? Qu'est-ce que vous
voulez dire, que le Québec devra davantage notifier? Qu'est-ce que vous
voulez dire par là?
M. Girard
(Raphael) : C'est qu'en ce
moment au Canada il y a une seule province qui force les entreprises à avertir ou notifier les personnes concernées qu'il
y a eu un bris de sécurité, donc si les renseignements ont été
transférés par erreur, ou il y a eu un
hackeur, ou peu importe les situations. Il y a juste l'Alberta en ce moment qui
a une obligation. Avec l'entrée en
vigueur du projet de loi S-4, il va y avoir une obligation de déclarer au
commissariat fédéral, le Commissariat à
la protection de la vie privée, s'il est raisonnable de croire, dans les
circonstances, que l'atteinte présente un risque réel de préjudice grave à l'endroit d'un individu.
Donc, en ce moment, il n'y a pas d'obligation, donc on ne sait pas trop.
Les personnes s'attendent souvent à être
notifiées, mais elles ne le sont pas toujours. Là, on aimerait ça clarifier, on
aimerait ça que le Québec suive, emboîte le pas du fédéral.
D'un autre
côté, il y a un risque, il y a un risque qui est de notifier tout le monde en
toutes circonstances de tout type de
bris de sécurité. Les représentants qui étaient là avant nous en ont discuté.
Il y a un risque que, si, par exemple, une
lettre qui est envoyée avec la mauvaise adresse ou à une adresse précédente
parce que la personne en question a oublié d'avertir qu'elle changeait
d'adresse, ça, techniquement, ça peut être un bris, s'il y a trop de bris, s'il
y a trop de notifications, les gens ne prendront plus ça au sérieux puis ils
vont juste les laisser de côté.
Il y a eu une
expérience, je pense que c'est en Californie, je ne suis pas sûr de la
juridiction, mais je pense que c'est en
Californie, où les gens étaient notifiés cinq, six, sept fois par semaine de
bris de sécurité. Ils ne prenaient plus ça au sérieux à la fin. Donc là, le critère, c'est un critère effectivement un
peu flou, mais qui devra être clarifié par règlement, mais, en ce moment, c'est le risque réel de
préjudice grave à l'endroit d'un individu. On pense que ça pourrait être
un bon modèle à utiliser pour le Québec aussi.
Le Président (M. Girard,
Trois-Rivières) : Mme la députée.
Mme Léger :
Quand vous parlez aussi du cadre différent du fédéral, quel est selon vous
l'ajustement prioritaire qui devrait se faire pour répondre, dans le
fond, aux préoccupations des entreprises pour harmoniser avec le fédéral?
• (15 h 50) •
M. Girard (Raphael) : Bien, ce serait... la première qui me vient en
tête, c'est de vraiment de clarifier de façon claire que le consentement
implicite est accepté dans certaines circonstances parce que, comme on en a
discuté, en ce moment,
c'est le critère de consentement manifeste qui n'est pas tout à fait clair et
qui est aussi très rigide. On n'est pas contre. En fait, c'est utile,
c'est nécessaire que le consentement explicite soit obtenu dans certaines
circonstances, particulièrement quand c'est des renseignements sensibles étant
à définir, effectivement, mais des exemples clairs : renseignements de nature
médicale, le numéro d'assurance sociale. C'est clair que ça prend un
consentement explicite, puis tout le monde
est d'accord avec ça. Mais, dans d'autres circonstances, ça peut être très
lourd, c'est un fardeau très lourd à
remplir, d'obtenir un consentement explicite ou manifeste, peu importe ce que
ça veut dire, manifeste, là. Mais, par
exemple, comme je le mentionnais en cas de transmettre des renseignements,
fournisseurs de services ou autres, dans certaines circonstances, une personne s'attend raisonnablement à ce que
ses renseignements peuvent être transférés. Donc, c'est un consentement
explicite... implicite.
Mme Léger : Pour des échanges commerciaux, c'est
compréhensible, la préoccupation que vous avez. Chez le citoyen,
on peut comprendre aussi ses inquiétudes de ne pas vouloir donner tous ses renseignements, mais en même temps on voit qu'il
y a plein de renseignements qu'on étale sur les réseaux sociaux puis partout puis qu'on a quand même presque plus de vie personnelle, nécessairement. Alors, ce n'est pas simple de régler la question,
mais, en tout cas, apporter des solutions qui peuvent répondre à ce que les entreprises
québécoises peuvent fonctionner puis les aider et les
soulager, mais en même temps le consentement de la personne... parce que, souvent, comme la ministre
disait, on cochette «je consens» ou, tu sais, même pas, «j'accepte», la
plupart des gens n'ont même pas lu qu'est-ce qui est demandé, mais en même
temps c'est inquiétant aussi de ne pas donner un consentement éclairé. Vous
conviendrez avec moi qu'il y a comme une problématique à ce niveau-là, malgré
tout.
M. Forget
(Stéphane) : Absolument.
Le Président (M. Girard, Trois-Rivières) : Malheureusement, je vais devoir vous arrêter.
Ceci met fin au bloc de l'opposition
officielle. Nous allons maintenant continuer avec M. le député de Borduas pour
une période de neuf minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Forget, M. Laureti, Me Girard,
bonjour. Merci d'être présents
aujourd'hui avec nous.
J'aimerais
qu'on poursuive sur ce que la députée de Pointe-aux-Trembles vous questionnait,
relativement, là, à la déclaration
obligatoire d'incident de sécurité. Vous faites référence à S-4 pour avoir une
harmonisation, dans le fond, puis vous
disiez : Bon, bien, c'est un critère de préjudice grave pour la personne
qui a subi cet incident-là. Est-ce qu'on est venus définir, dans la loi fédérale, la notion de
préjudice grave pour la personne? Parce que, dans le fond, c'est ça qui est au
coeur... Puis on a eu plusieurs intervenants, à savoir est-ce qu'on divulgue
tous les incidents de sécurité, les bris, tout ça, précédemment à vous, le groupe précédent l'a mentionné aussi. Mais
est-ce que le fédéral est venu nous le définir pour le préjudice grave?
M. Girard
(Raphael) : Le fédéral ne l'a pas fait encore. Comme j'ai dit, ça va
venir bientôt. Il va avoir probablement des
règlements, ou peut-être des lignes directrices, là, ou peut-être les deux qui
vont venir clarifier ça, mais, en ce moment, ce n'est pas défini. Donc,
on ne sait pas encore exactement qu'est-ce que ça va donner. C'est un peu difficile en ce moment de dire : On aimerait
que la loi québécoise soit de telle manière, alors qu'on ne sait pas de
quelle manière exactement la... de quoi ça
va ressembler, la loi fédérale. Mais on aimerait que ça soit enligné, là, pas
nécessairement exactement pareil, mais que ça soit enligné pour
faciliter l'harmonisation.
M. Jolin-Barrette : Puis, pour vous, là, pour vos membres dans les chambres
de commerce, là, il y a plusieurs membres
qui sont, supposons, des entreprises de services, notamment, qu'est-ce que ça
représente pour eux, dans le fond, s'il
y avait une obligation de notifier ces incidents de sécurité là? Parce que tout
à l'heure vous parliez, dans le fond, de la lourdeur bureaucratique,
parfois, qu'il y a. Comment ça se traduit, là, pour le membre type que vous
avez chez vous, à la fédération?
M. Forget (Stéphane) : Bien, je vous dirais, tout d'abord, vous l'avez
bien dit, là, c'est toujours l'équilibre parce que, comme regroupement, on regarde la lourdeur administrative, on
essaie de ne pas le faire par dossier, mais de regarder l'ensemble de
l'oeuvre. Vous connaissez l'ampleur au Québec.
Cela
dit, je pense qu'il y a la divulgation auprès de la personne qui... Je vais
prendre l'exemple qu'on utilise depuis tantôt,
là, la mauvaise enveloppe à la mauvaise adresse, je pense qu'il faut que la
personne soit informée de cette situation-là. Par la suite, à qui est-ce
qu'on doit déclarer ça? À la CAI, par exemple? Est-ce qu'on doit aller
jusque-là dans un cas comme celui-là?
Personnellement, je pense que ça serait abusif. Je pense au 90 % des
petites entreprises au Québec, ça demanderait
beaucoup. Ce n'est pas toutes les entreprises de services qui transfèrent des
informations personnelles, j'en conviens,
là, mais je pense qu'à l'opposé d'une cyberattaque d'envergure ou même de
moyenne envergure, là, je pense qu'il faut être très précis à cet
égard-là.
Alors,
où on se trouve entre les deux, je pense que ce n'est pas simple. Il y a la
taille de l'entreprise, la capacité de le faire. Est-ce que ça doit toujours aller vers la Commission d'accès à
l'information? Est-ce que c'est nécessaire? Puis l'autre question qu'on va tous se poser : Qu'est-ce
que la commission va faire avec ça?
Est-ce qu'elle va faire quelque
chose? Je pourrais vous donner de nombreux exemples dans d'autres domaines où
on transmet de l'information à des instances gouvernementales
qui ne sont jamais regardées ou utilisées. Donc, je pense qu'il va falloir
qu'on ait une grille d'analyse en se
disant : Jusqu'où on doit aller? Jusqu'où ça a un impact réel? Et jusqu'où
aussi le fait de divulguer peut nous permettre de poser des gestes pour
essayer de corriger les situations dans l'avenir?
M. Girard
(Raphael) : Ajouter
là-dessus, dire qu'en ce moment on reçoit souvent des appels : Il y a
des bris de sécurité, qu'est-ce qu'on
fait? Est-ce qu'on notifie, et tout ça? Je ne suis pas un spécialiste de la loi
albertaine, mais je sais que, dans la
loi albertaine, il y a un formulaire à remplir, puis ce formulaire-là
tient en considération le nombre d'individus affectés et le type de renseignements concernés. Donc, encore là, c'est
du par cas, mais c'est certain que, quand on parle d'un bris qui touche
plus de 100 personnes, c'est certain que c'est sensible, et donc je ne pense
pas que ça soit un fardeau trop grand pour
une entreprise de notifier les personnes concernées et/ou la commission,
là, selon les balises qui vont être déterminées.
Donc, je
pense que les consommateurs ou les personnes s'attendent à être notifiés de
toute manière quand il y a un bris de sécurité. Donc, il y a
la question aussi d'attente raisonnable et aussi qu'est-ce que les entreprises
font déjà. Il
y en a beaucoup qui notifient déjà. Le principe, c'est de clarifier, de baliser
tout ça pour qu'on soit clairs, on soit certains que, dans telle circonstance,
il faut le faire, dans d'autres circonstances, on n'est pas obligés de le
faire. Même, dans certaines circonstances,
c'est peut-être de ne pas le faire parce qu'on va faire peur aux gens, alors qu'il n'y a pas
vraiment de doute réel. Comme je dis, il y a
toujours le risque d'aviser trop de monde puis que les gens ne prennent plus ça
au sérieux, là.
M. Jolin-Barrette : Puis, en Alberta, qu'est-ce qu'ils font avec le
formulaire? Ils font une déclaration étatique ou ils l'envoient...
M. Girard
(Raphael) : Ils avisent les
personnes concernées puis après ils l'envoient à l'agence
gouvernementale, là, la Information Agency...
M. Jolin-Barrette : Qui est responsable.
M. Girard
(Raphael) : Oui. Comme je
dis, je ne suis pas spécialiste du droit d'Alberta, mais je sais qu'il y a
ça.
M. Forget (Stéphane) : Vous
avez ça en page 11, notes de bas de page de notre mémoire.
M. Jolin-Barrette : Parfait, je
vais aller voir ça.
Sur la
question du responsable d'accès, l'obligation d'imposer un responsable d'accès
à l'information dans les entreprises
privées en vertu de la loi sur le privé, qu'est-ce que vous en pensez de ça
pour vos membres à la fédération?
M. Forget
(Stéphane) : Moi,
honnêtement, je n'ai pas de réflexion là-dessus. Je ne sais pas si, Me Girard,
vous avez une chose à ajouter. Ce n'est pas quelque chose qu'on a beaucoup
discuté entre nous, là. Allez-y.
M. Girard
(Raphael) : Bien, encore là,
en se fiant au principe d'harmonisation, c'est une exigence qu'il y a
dans le cadre juridique européen. Donc, je
présume que c'est quelque chose qui serait quand même bien vu. Ce n'est pas
trop demandant administrativement.
Je pense que,
dans chaque politique, presque chaque politique, déjà, en ce moment, quand vous
allez sur un site Web ou sur une politique de vie privée en général, il
y a déjà une personne, un responsable de la... Ils ne l'appellent peut-être pas
nécessairement comme ça, là, mais il y a toujours quelqu'un à qui envoyer ses
questions ou numéro de téléphone à contacter. Donc, je ne pense pas que ça soit
trop demander.
Et en plus,
comme j'ai dit, c'est ce que la loi européenne prévoit ou va prévoir. Donc, il
n'y a pas... Je pense que ça serait assez bien vu d'harmoniser en ce
sens-là.
M. Jolin-Barrette : Sur
l'entreposage de données, dans le fond, là, c'est le stockage. Il y a une
obligation d'informer les gens à savoir où
sont stockées les données. Là, dans l'univers dans lequel on est, il peut y
avoir certaines problématiques, là.
M. Forget
(Stéphane) : Bien, tout
d'abord, le «où c'est stocké», qu'est-ce qu'il veut dire? Première
question. Est-ce que c'est physiquement une
adresse? C'est un espace? Est-ce que c'est sur des serveurs versus
l'infonuagique? Bon, là, il y a un flou à
cet égard-là dans un premier temps. Puis, deuxièmement, évidemment, il y a
toute la question qui est difficile à
répondre au quotidien, à savoir : Si je suis en infonuagique, où sont
entreposées mes données au quotidien? C'est des choses qu'il évalue.
Alors là, il
y a un véritable enjeu sur lequel il faut se pencher, et nous, ce qu'on
propose, c'est dire : Est-ce qu'on devrait dire que nos données
sont entreposées ici, en sol canadien, versus en sol étranger? Parce qu'après
ça en sol étranger il y a aussi toute la
législation étrangère par rapport à la sécurité et à la protection des
renseignements personnels.
Donc,
effectivement, il y a un enjeu à cet égard-là, un, de clarifier le «où» puis,
deux, comment on traite maintenant l'infonuagique où on se retrouve au
quotidien avec des données qui peuvent se retrouver à différents endroits. Et, dernier point à considérer, bien, il y a un
intérêt au Québec aussi dans le développement des centres de données.
Donc, il y a aussi une réflexion économique à se faire à l'égard d'où,
justement, sont entreposées les données.
M. Jolin-Barrette : Je comprends que vous les faites sous forme de
questionnement, mais l'organisation comme telle que vous représentez, est-ce qu'elle favorise l'établissement des
bases de données? De l'entreposage sur le territoire québécois ou, à
tout le moins, au Canada? Est-ce que c'est une prise de position que vous
mettez de l'avant?
• (16 heures) •
M. Forget
(Stéphane) : Mais on n'est pas en train de dire qu'on devrait faire en
sorte que les entreprises canadiennes
doivent entreposer leurs renseignements personnels au Canada, ce n'est pas du
tout ce qu'on dit. On dit qu'on doit
avoir une responsabilité de dire que nos données en infonuagique sont peut-être
en sol canadien versus en sol étranger. On n'est pas en train de dire qu'on devrait imposer aux entreprises
canadiennes que les données soient nécessairement basées, là, en sol
canadien. Ce n'est pas ce qu'on dit du tout, là.
M. Jolin-Barrette :
O.K.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas.
Une voix :
...
Le Président
(M. Ouellette) : Ah! oui. Ah! bien, un petit complément.
M. Girard (Raphael) : J'allais juste ajouter que, dans le fond, c'est
l'article 17, les entreprises interprètent déjà cet article-là
comme leur permettant de transférer des renseignements personnels à l'extérieur
du Québec pour autant qu'il y ait une
entente, un contrat qui est signé avec le fournisseur qui s'assure que les
renseignements vont être sécurisés, vont être protégés.
Le Président (M. Ouellette) : Merci beaucoup, M. Stéphane Forget,
M. Pierre-Yves Boivin et M. Raphael Girard, représentant la Fédération des chambres de commerce
du Québec.
Je suspends quelques minutes pour recevoir la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.
(Suspension de la séance à
16 h 1)
(Reprise à 16 h 4)
Le Président
(M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et nous
recevons sa présidente, dont c'est le baptême de feu en commission parlementaire. C'est votre première présence.
Permettez-moi de vous féliciter, Me Tamara Thermitus, de votre poste. On
est très heureux.
Vous allez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent, et je vous rappelle que vous
allez avoir 10 minutes pour faire votre
présentation, et après il y aura des échanges avec Mme la ministre et les deux
porte-parole... c'est-à-dire les porte-parole des deux oppositions.
Donc, Me Thermitus, je vous laisse la parole.
Commission
des droits de la personne et des
droits de la jeunesse (CDPDJ)
Mme Thermitus (Tamara) : Alors, bonjour, M. le Président. Bonjour,
Mme la ministre, mesdames
messieurs les députés. J'ai déjà été présentée, il ne me reste qu'à présenter
mes collègues. Vous trouverez à ma gauche la directrice adjointe de la recherche, Me Claire Bernard, et, à ma droite, la
conseillère juridique à la recherche, Me Marie Carpentier.
Alors, je vous
remercie de votre présentation, qui est digne de ce que vous m'aviez mentionné.
Puis je vous remercie également
pour l'invitation que vous m'avez faite, que vous avez faite à la CDPDJ, que je
représente aujourd'hui, à participer
aux consultations particulières sur le sixième rapport quinquennal
de la Commission d'accès à
l'information, intitulé Rétablir l'équilibre.
Rappelons
ici que la CDPDJ a pour mission d'assurer le respect et la promotion des
principes énoncés par la Charte des droits et libertés de la personne.
Elle assure aussi la protection de l'intérêt de l'enfant ainsi que le respect
de la promotion des droits qui lui sont
reconnus en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse. Elle
veille également, comme vous le savez, à l'application de
la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics.
Conformément
au mandat qui lui incombe, la CDPDJ a examiné le rapport de la CAI à la lumière
des dispositions pertinentes de la charte. Notons que les lois qui font
l'objet de ce rapport tirent leur caractère quasi constitutionnel de la reconnaissance
des droits garantis par la charte, tel que le droit au respect de la vie
privée.
Notre
objectif aujourd'hui est de souligner le cadre juridique des droits de
la personne auquel le législateur devrait se référer s'il entend suivre les recommandations de la CAI. Aujourd'hui, nous toucherons aux thèmes suivants : le secret professionnel,
les antécédents judiciaires et les renseignements génétiques. Vous noterez qu'il y a
d'autres thèmes qui ont été mentionnés dans notre mémoire qu'on ne
couvre pas aujourd'hui pour des questions de temps.
La
CAI formule trois recommandations qui ont trait au secret professionnel.
Son premier objectif semble viser à limiter les cas où un organisme public peut invoquer son droit au respect du
secret professionnel pour restreindre l'accès à un document
préparé par un employé membre d'un ordre professionnel. Le second objectif vise
les situations où un organisme public ou un organisme
privé détient des informations sur une personne transmises par un professionnel et à l'égard
desquelles l'organisme invoque le secret professionnel. Enfin, la
troisième recommandation vise à éviter qu'un organisme public
invoque son droit au respect du secret professionnel à l'encontre d'une demande
d'accès visant les montants des honoraires
versés à un avocat, sauf dans certains cas. Il s'agit, dans ces trois
propositions, de droits garantis par la
charte, soit : le droit au respect du secret professionnel, le droit au
respect à la vie privée ainsi que le droit à l'information.
Les
tribunaux ont élaboré des principes directeurs quant à la façon de résoudre un
conflit entre des droits tout en respectant
l'équilibre prévu par la charte. À titre d'illustration, la Commission ontarienne des droits de la personne a
résumé certaines règles juridiques applicables :
aucun droit n'est absolu; il n'y a pas de hiérarchie entre les droits; il ne
saurait être question d'établir une primauté d'un droit fondamental sur un
autre; l'examen doit tenir compte du contexte dans son ensemble ainsi que de tous les faits et les valeurs constitutionnelles
en jeu; l'objectif est de respecter les deux catégories de
droit en jeu. Ces principes devraient servir à la conciliation des droits
contradictoires que recommande la CAI.
Ainsi, la
CDPDJ est d'accord avec la CAI que ce ne sont pas toutes les communications
entre les membres du public et les professionnels
qui sont sujettes au secret. Elle désapprouve cependant la proposition de la CAI de limiter la prépondérance
du secret professionnel aux cas exceptionnels où la relation entre le professionnel
et son client repose sur un besoin
impérieux de confiance et qu'il est démontré que la divulgation du document visé par la demande d'accès risque de porter préjudice à cette relation. En effet,
aucune limite au droit au respect du secret professionnel n'est prévue par
la charte. Cette proposition aurait l'effet d'augmenter le fardeau de
preuve de la personne qui revendique son droit au secret professionnel.
La commission réitère que le droit au respect du
secret professionnel devrait être concilié avec le droit au respect de la vie privée et au droit à l'information suivant les principes de la résolution de conflits de droits et des
règles régissant l'interprétation des droits de la personne.
La CAI
formule une série de recommandations visant à moduler la protection des
renseignements personnels en fonction
de l'atteinte au droit au respect de la vie privée des tiers. Elle suggère de
limiter les exceptions à la communication des renseignements personnels
aux situations où elle constituerait une atteinte déraisonnable à la vie
privée.
• (16 h 10) •
Nous
convenons avec la CAI que ce ne sont pas tous les renseignements personnels qui
relèvent du droit au respect de la
vie privée garanti par la charte. Du point
de vue de la CDPDJ, l'exercice
consiste à concilier le droit au respect de la vie privée du demandeur
et le droit à l'information avec le respect de la vie privée du tiers. Cette
opération devrait se réaliser suivant les règles de la résolution de conflits
des droits.
La CDPDJ
considère que l'approche préconisée par la CAI dans son rapport
converge en grande partie avec ces règles,
spécialement quant à la nécessité de
prendre en compte l'ensemble des circonstances avant de trancher,
souvent une approche contextuelle, la
pertinence de ne pas préciser à l'avance ce qui constitue une atteinte ou non
ainsi que l'importance de donner aux tiers dont les droits sont
potentiellement affectés la possibilité de présenter leurs observations.
La CAI aborde
la question de la vérification des antécédents judiciaires par les employeurs
ou associations bénévoles et les
difficultés d'accès à ces renseignements qu'éprouvent les personnes concernées
par ces vérifications. La CDPDJ
partage l'avis de la CAI à l'effet que toute personne doit bénéficier d'un
droit de regard sur les renseignements qui la concernent et qui ont
servi à prendre une décision à son égard et que la connaissance de ce
renseignement par la personne est possible sans que la sécurité publique ou
l'administration de la justice ne soit compromise.
La CDPDJ rappelle que la vérification des
antécédents judiciaires est susceptible de compromettre des droits protégés par la charte, soit le droit à la
réputation et le droit au respect à la vie privée. Retenons également que
l'encadrement légal régissant la vérification des antécédents judiciaires en
emploi repose avant tout sur l'article 18.2 de la charte et doit y être conforme. Rappelons que la Cour suprême a
défini quatre conditions. Il doit donc s'agir d'un cas de congédiement, ou d'un refus d'embauche, ou une
pénalité quelconque décidée dans le cadre d'un emploi du fait qu'une
personne a été déclarée coupable d'une infraction pénale ou criminelle et qu'il
n'y ait aucun lien entre l'emploi et l'infraction.
La commission formule plusieurs remarques à ce
sujet, à propos du lien nécessaire entre l'infraction et l'emploi. Elle retient que c'est à l'employeur de
prouver l'existence d'un lien objectif entre l'infraction commise et le
poste convoité. Il ne s'agit pas de porter un jugement moral, mais bien de
s'interroger sur la faculté réelle de l'employé à exécuter son travail.
La CDPDJ
s'interroge quant à l'affirmation de la CAI voulant que certaines infractions
en elles-mêmes n'ont aucun lien avec l'emploi... peuvent être jugées
pertinentes si elles sont commises à répétition. L'analyse doit donc être particularisée, et le caractère répétitif d'une
infraction ne pourrait être pris en compte, à moins que celle-ci n'ait un
lien avec l'emploi. L'employeur doit donc démontrer en quoi l'exigence de ne
pas avoir certains antécédents judiciaires est rationnel... est
raisonnablement, pardon, nécessaire pour accomplir les fonctions de l'emploi
convoité.
Il faut
également distinguer la nécessité d'établir un lien entre l'infraction et
l'emploi convoité et l'obtention d'un pardon.
En effet, la Cour suprême a confirmé que, peu importe l'existence d'un tel
lien, du moment que la personne a obtenu le pardon, la protection de la
discrimination est absolue.
Cela dit, la
CDPDJ salue la recommandation de la CAI visant à ce que le législateur et le
gouvernement adoptent un cadre
législatif ou réglementaire imposant certaines balises en regard des
vérifications d'antécédents judiciaires ou de toute vérification de même nature. Ce cadre devra être
conforme à la charte. En effet, la CDPDJ souhaite rappeler que le
stigmate associé à la présence d'un
antécédent judiciaire touche encore plus particulièrement certains groupes de
la population. Retenons à cet égard le profilage racial et le profilage
social qui visent certains groupes de personnes, notamment les personnes racisées, autochtones, en situation de
pauvreté ou encore itinérantes, de même que les personnes qui cumulent plusieurs caractéristiques personnelles. De ce
fait, la vérification des antécédents judiciaires a un impact
disproportionné sur les groupes.
Permettez-moi de vous parler de la... les
renseignements génétiques. La CDPDJ accueille favorablement la recommandation de la CAI de légiférer en vertu
d'interdire la collecte, l'utilisation et la communication des
renseignements génétiques à des fins autres
que médicales, scientifiques ou judiciaires. Toutefois, l'exercice doit
s'inscrire dans le cadre d'analyses
établies par la charte, car l'usage d'informations qui découlent de l'administration
de tests génétiques peut avoir un effet sur les droits qui y sont garantis. D'une
part, les informations génétiques relèvent du droit au respect de la vie
privée, d'autre part, leur utilisation peut compromettre l'exercice en pleine
égalité des droits de la personne.
Si l'offre
croissante des tests de dépistage génétique constitue une avancée clinique
appréciable sur le plan médical, ce développement sans précédent de la
médecine prédictive soulève plusieurs enjeux éthiques, sociaux et juridiques lorsque les résultats de ces tests sont utilisés à
d'autres fins. Au regard des droits
de la personne, l'utilisation des tests de dépistage, notamment dans le domaine des assurances et dans celui de
l'emploi, peut, s'il n'est pas soumis à un régime normatif suffisant,
ouvrir la porte à des pratiques discriminatoires.
Les informations génétiques peuvent comporter
une dimension collective quand on les retrouve agrégées en banque, par exemple,
aux fins de génétique de population. Ainsi, la CDPDJ croit que certains
groupes, en raison des corrélations qui pourraient être faites entre leur
génétique et la prévalence de certaines maladies génétiques, seraient susceptibles de faire l'objet de pratiques
discriminatoires. La charte protège les personnes contre toute forme de
discrimination fondée sur des motifs énumérés qui compromettraient
l'exercice de leurs droits et de leurs libertés.
Le Président (M. Ouellette) :
Vous êtes rendue à votre conclusion, là?
Mme Thermitus
(Tamara) : Oui. Selon la
CDPDJ, les renseignements génétiques sont inclus dans le motif de discrimination qu'est le handicap. La charte
prévoit cependant une exception au principe de non-discrimination
qui rend ces renseignements susceptibles d'être utilisés comme facteur de détermination
au risque en matière d'assurance et d'avantages sociaux sans qu'il ne
soit nécessaire de recourir aux données actuarielles pour justifier.
En
conséquence, la CDPDJ recommande d'assurer que la charte et la législation
québécoise offrent une protection suffisante contre
toute pratique discriminatoire reliée aux renseignements génétiques. Merci de
votre écoute.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la présidente. Je soulignerais, Mme la ministre, que Mme la présidente a sauté une couple de
pages parce que je l'ai pressée pour qu'elle puisse rentrer dans son
10 minutes. Ça fait que, si, effectivement, vous voulez lui permettre de couvrir le ou les
deux sujets pour lesquels elle a sauté, là, bien, je fais juste vous le
mentionner, Mme la ministre, lors de vos échanges. À vous la parole, Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Alors, Mme Thermitus, Me Bernard, Me Carpentier, merci d'être
avec nous aujourd'hui, de nous permettre
cet échange. Merci de votre mémoire. Est-ce que vous avez beaucoup
à ajouter à ce que vous avez déjà déclaré ou je peux poser une question?
Mme Thermitus (Tamara) : Vous
pouvez poser des questions, Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci beaucoup. Alors, j'aimerais parler de la recommandation n° 33, qui concerne l'interdiction de la
collecte ou l'utilisation et la communication des renseignements génétiques.
Vous dites, à la page 26 de votre mémoire,
que vous êtes d'avis qu'il «est nécessaire de s'assurer que la législation
québécoise, y compris la charte, offre une protection suffisante contre
toutes les pratiques discriminatoires liées à l'obtention de renseignements
génétiques».
Maintenant,
il y a l'article 20.1 de la charte. Je vais lire l'article pour que les
gens qui nous écoutent savent de quoi on
parle. L'article 20.1 de la charte se lit comme suit : «Dans un contrat d'assurance ou de rente,
un régime d'avantages sociaux,
de retraite, de rentes ou d'assurance ou un régime universel de rentes ou
d'assurance, une distinction, exclusion ou préférence fondée sur l'âge,
le sexe ou l'état civil est réputée non discriminatoire lorsque son utilisation
est légitime et que le motif qui la fonde constitue un facteur de détermination
de risque, basé sur des données actuarielles.
«Dans
ces contrats ou régimes, l'utilisation de l'état de santé comme facteur de
détermination de risque ne constitue pas une
discrimination au sens de l'article 10 [de la charte].»
Est-ce que l'on doit comprendre de votre
position que vous recommandez une modification à l'article 20.1?
Mme Thermitus
(Tamara) : Aujourd'hui, on
ne recommandera pas directement au législateur quoi que ce soit, mais la question se pose si l'article devrait être
modifié. Nous sommes en train d'y réfléchir, en ce qui a trait à la modification de l'article 20.1. Et, puisque
nous ne sommes pas ici pour faire des propositions précises, l'idée
d'exclure les caractéristiques génétiques de la notion d'état de santé fait
partie de nos réflexions.
Mme de
Santis : Et est-ce que même une interdiction basée sur des données
actuarielles, est-ce que ça fait partie de votre réflexion, même ça
devrait être interdit?
• (16 h 20) •
Mme Carpentier
(Marie) : Bon, la réflexion, en fait, se base sur la valeur, à l'heure
actuelle, des tests génétiques. On
sait que la valeur est essentiellement probabiliste. Le résultat d'un test
génétique est rarement... en arrive rarement à ce qu'on appelle l'état
de santé, qui est la situation effective de la personne. Les tests génétiques,
pour l'instant, arrivent rarement à déterminer de façon assurée la survenance
d'une maladie. Il s'agit de probabilités. Donc, l'idée que les assureurs puissent baser leur détermination du
risque sur une probabilité, qui est donc un fait qui est non certain, non
avéré, non assuré dans cette circonstance-là, nous apparaît être arbitraire.
C'est d'ailleurs ce qui a été décidé dans d'autres législatures.
C'est
ce qui a été décidé par le gouvernement fédéral, qu'il y avait une
problématique avec le fait d'avoir recours à des tests génétiques pour évaluer l'état de santé de quelqu'un. Ça peut
être utile d'un point de vue médical, d'un point de vue judiciaire, par ailleurs, mais, en termes
prédictifs au niveau des assurances, il y a un problème d'arbitraire. Il y a
des législations qui ont été adoptées dans ce sens-là,
entre autres en Europe, pour contrer l'effet, je dirais, problématique du fait de baser l'évaluation de l'état de santé
de quelqu'un sur des tests génétiques. Est-ce que ça répond à votre
question?
Mme
de Santis : Oui, mais il y a quelque chose que j'aimerais ajouter.
Dans le passé, on nous demandait si on fumait
ou on ne fumait pas, et c'était une probabilité là aussi qui était prise en
considération, et le risque était basé sur cette probabilité.
Maintenant, vous me répondez en disant : C'est une probabilité et pas une
«certaineté». Quelle est la distinction à
faire entre les deux? Parce que... Et ce n'est pas seulement si je fume, si, je
ne sais pas, si je bois ou je... je ne sais pas, il y a d'autres
éléments qui sont des possibilités, probabilités, mais pas nécessairement des
certitudes.
Mme Carpentier
(Marie) : Bien, je vous répondrais là-dessus, et je trouve que votre
question est vraiment très intéressante,
c'est qu'en fait à l'époque je ne pense pas qu'on reliait le fait d'être fumeur
ou non avec un des motifs de discrimination
qui était dans la charte, donc il ne pouvait pas s'agir de discrimination. Par
contre, je pense qu'aujourd'hui la jurisprudence a énormément évolué
autour de toute la question des addictions, et l'addiction est considérée par
les tribunaux comme faisant partie du motif
de discrimination qu'est le handicap. Donc, je pense qu'aujourd'hui
quelqu'un pourrait éventuellement invoquer le fait qu'il s'agit de
discrimination sur la base de son handicap.
Ceci dit, c'est
vraiment spéculatif, ce que j'avance, mais, oui, je pense qu'il y a des
questions à se poser sur... Effectivement,
je pense que le... puis là c'est d'un point de vue personnel, je pense qu'il y
a plusieurs questions à se poser sur
effectivement ce que le législateur a entendu quand il a créé l'exception de
20.1. Ce qui est clair, c'est que le législateur... puis ça, si on retourne aux débats parlementaires
ayant entouré l'adoption de cet article-là, c'est que le législateur n'a
pas voulu que l'état de santé équivaille au
handicap, c'est-à-dire qu'il n'a pas voulu que les assureurs puissent se baser
sur le handicap pour déterminer les primes d'assurance.
Mme
de Santis : Merci. Maintenant, j'aimerais aller à la recommandation
n° 10. D'après la charte, on retrouve à l'article 9 que chacun a droit au respect du secret professionnel.
À l'article 5, on parle du droit au respect de la vie privée. Et c'est à l'article 44 qu'on parle du droit à
l'information dans la mesure prévue dans la loi. Les deux premiers droits
sont des droits de liberté fondamentaux. Le
troisième droit, c'est un droit économique et social. Quel est l'équilibre qui
est joué entre ces droits-là? Est-ce qu'ils sont traités de la même
façon? Est-ce qu'ils ont la même...
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Bernard.
Mme Bernard
(Claire) : Juridiquement, vous avez raison qu'ils n'ont pas la même
prépondérance. Cela dit, notre position, c'est que tous les droits ont
la même importance. Et la commission a d'ailleurs recommandé dans son bilan de 2003, puis elle a appuyé une recommandation au
même effet de la Commission d'accès à l'information, qu'il faudrait renforcer le caractère fondamental du droit à
l'information parce qu'on reconnaît de plus en plus le caractère
fondamental du droit à l'information, et nous-mêmes, on a donc recommandé qu'on
renforce et qu'on donne cette prépondérance, notamment
à l'article 44, de... l'information, mais vous avez raison qu'actuellement
l'article 44 fait partie des droits qui n'ont pas la même
prépondérance que les articles 1 à 9, qui ont une portée juridique un peu
plus importante.
Mme de
Santis : Est-ce que cela fait aussi partie de votre réflexion quant à
des modifications à la charte à un moment donné dans l'avenir?
Mme Bernard
(Claire) : Bien, absolument. Comme je vous dis, nous les avons déjà
recommandées et nous les avons
réitérées à maintes reprises, y compris en commission parlementaire quand on a
commenté le... je crois que c'était le quatrième
rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information. On avait
développé une position pour renforcer le caractère fondamental du droit
à l'information. Donc, on vous invite à vous y référer.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Thermitus. Ah! non, O.K. Me Carpentier,
excusez.
Mme Carpentier
(Marie) : Si je peux me permettre d'ajouter à la réponse donnée par ma
collègue, il faut voir aussi que le
droit à l'information participe du droit à la vie privée dans la mesure où une
personne, pour pouvoir contrôler l'état de sa vie privée, le traitement
de sa vie privée, doit avoir accès à l'information la concernant. Donc, le
droit à l'information participe aussi du droit à la vie privée, juste pour
préciser.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme
de Santis : Vous mentionnez aussi dans votre mémoire que,
contrairement à la recommandation de la CAI, la prépondérance du droit
au secret professionnel ne devrait pas se limiter aux «cas exceptionnels où la
relation entre le professionnel et son client repose sur un besoin impérieux de
confiance et qu'il est démontré que la divulgation du document [...] risque
vraisemblablement de porter préjudice à cette relation de confiance».
Pouvez-vous expliquer votre commentaire?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Thermitus.
Mme Thermitus
(Tamara) : Oui. Alors, le
besoin impérieux, alors, on en parle, là, dans notre mémoire, comme vous le soulignez. En effet, en ce qui a trait au
droit au secret professionnel, il n'y a pas de limite de prévue par la
charte. Donc, de
prévoir un besoin impérieux irait à l'encontre de qu'est-ce que la charte
prévoit. La charte prévoit qu'il n'y a aucune
limite en ce qui a trait au secret professionnel, la jurisprudence interprétant
ce droit comme n'ayant pas de limite. Alors, de venir dire que ça prend
un besoin impérieux, c'est d'ajouter un critère que la charte ne prévoit pas.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : Il y a beaucoup de jurisprudence en ce qui concerne le secret
professionnel entre l'avocat et son client.
L'article 9 parle du respect du secret professionnel, toutes les
professions, et on en a plus que 40. Pouvez-vous me donner une définition de qu'est-ce qui est
protégé? Par exemple, la relation entre un client et l'ingénieur quand on
parle de secret professionnel, là, de quoi on parle?
Mme Thermitus
(Tamara) : Alors, le droit
au respect du secret professionnel comporte trois limites
intrinsèques : n'y sont astreintes que
les personnes tenues par la loi, les prêtres et les autres ministres du culte;
la personne qui fait les confidences
peut autoriser la levée du secret, donc, si on était dans une relation couverte
par le secret professionnel, comme client, vous pourriez décider de
lever ce secret; et l'obligation de respecter le secret professionnel peut être
levée par une disposition expresse de la loi.
Mme de
Santis : Je comprends, mais ce que je pose comme question,
c'est : C'est quoi, le secret professionnel? Est-ce que toute la relation entre un ingénieur et
son client est sujette au secret professionnel? Qu'est-ce que ça inclut?
De quoi parle-t-on?
Mme Thermitus
(Tamara) : ...c'est parce qu'il y a les... C'est parce que
moi, je suis plus dans le cadre juridique. Il y avait les quatre critères de Wigmore, il y a la notion de
confidentialité, c'est-à-dire que vous rencontrez votre ingénieur, c'est
une chose, mais il y a une zone dans laquelle vous allez demander une certaine
confidentialité pour lui faire des confidences pour qu'il puisse mieux vous
servir. Et c'est dans un cadre comme celui-là que le secret professionnel va s'appliquer. Il ne s'appliquera pas nécessairement
à toute la relation. Il en va de même aussi pour les avocats. Ce n'est
pas toute la relation qui est nécessairement couverte.
Mme Carpentier (Marie) :
Effectivement.
Mme de
Santis : Est-ce que tout ce qu'il y a dans un dossier chez l'ingénieur
est sujet au secret professionnel?
• (16 h 30) •
Mme Thermitus (Tamara) :
Probablement pas, mais il faudrait quand même voir le dossier. C'est un cas hypothétique. Mais, je veux dire, il y a des
parties de la relation qui sont couvertes par le secret professionnel parce
que, dans le fond, le but, c'est de protéger
la notion de confidence qui fait que vous pouvez avoir les conseils dont vous
avez besoin. Marie, Me Carpentier voudrait ajouter quelque chose.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Carpentier.
Mme Carpentier (Marie) : Bien,
si je peux me permettre, effectivement, il faut qu'il y ait eu une intention,
que les informations qui aient été transmises l'aient été sous le sceau de la
confidentialité dans le cas d'une relation professionnelle avec son client.
Ceci dit, on
peut mentionner que c'est le législateur qui décide qui est astreint au secret
professionnel. Donc, ce que la charte
prévoit, c'est que le secret professionnel est sauvegardé à l'égard des gens
qui y sont tenus par la loi. Donc, si le législateur décide qu'une catégorie n'est pas tenue au secret
professionnel, les gens ne bénéficieront pas de l'article 9. Donc,
ça, c'est pour les personnes qui sont tenues au secret professionnel.
Ceci dit, la
relation avec une personne, il y a certains des éléments qui ont été révélés
sous le sceau de la protection du
secret professionnel, mais d'autres éléments, effectivement, qui ne devraient
pas être considérés comme étant couverts par le secret professionnel.
Mme de
Santis : O.K. Mais vous avez dit que vous n'êtes pas d'accord que le
secret professionnel soit limité entre le
secret où il y a un besoin de confiance, de garder la confiance entre le
professionnel et le client ou le consommateur.
Mme Carpentier (Marie) : Si vous
me permettez, madame...
Mme Thermitus (Tamara) : ...il
n'y a pas de problème
Mme Carpentier (Marie) :
...c'est que le...
Le Président (M. Ouellette) :
...Carpentier.
Mme Carpentier
(Marie) : Vous me permettez? Merci. C'est un critère, le besoin
impérieux que propose la CAI, qui n'existe pas dans la charte. L'idée,
c'est que ça ajouterait un élément de preuve supplémentaire à la personne qui
bénéficie du secret professionnel, de devoir démontrer que c'est impérieux.
L'idée,
c'est que ce n'est pas tant la nature des informations qui sont révélées qui
est importante, mais c'est qu'il existe
un espace, excusez l'anglicisme, mais qui est un «safe space» où le client peut
s'adresser au professionnel à qui il a affaire
et où il sait que ces informations-là ne seront pas révélées. Cet espace-là...
C'est l'intention qui compte que l'espace, dans lequel il y a une relation qui s'établit qui permet de dévoiler les
informations qui vont être nécessaires au professionnel pour exercer sa
profession et dans lequel le client est à l'aise de le révéler parce qu'il sait
qu'il ne pourra pas être contraint... elles
ne seront pas dévoilées, par ailleurs. Donc, ce n'est pas tant la nature comme
telle des informations, mais l'espace dans lequel elles sont dévoilées.
Donc, s'il s'agit d'une conversation... Par
exemple, effectivement, une facture d'un professionnel peut ne pas contenir
aucune information qui est gardée par le secret professionnel, une conversation
qui a lieu de façon amicale entre un
professionnel et son client peut ne pas être couverte par le secret
professionnel, mais c'est important qu'il y ait cet espace-là. Et c'est pour ça que c'est un droit qui
est protégé par la charte. C'est important qu'un client soit en mesure
de dévoiler tout ce qui peut être utile au professionnel pour réaliser sa
mission.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci. Est-ce que
vous êtes favorables à la proposition de limiter l'étendue du secret
professionnel dans le cas des honoraires payés par un organisme public à
un avocat? Parce que ça, c'est une des recommandations.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Carpentier.
Mme Carpentier (Marie) : En
fait, la position de la commission est à l'effet que ça ne devrait pas être un automatisme. C'est qu'on devrait appliquer les
mécanismes de conciliation de conflits de droits fondamentaux contradictoires.
Donc, il y a le droit fondamental à la protection de la vie privée qui s'oppose
éventuellement au droit à la vie privée d'une autre personne ou au droit à
l'accès à l'information d'une autre personne. Donc, il y a lieu de réfléchir.
Mais, dans
chaque cas, de façon individuelle, est-ce que ces informations-là devraient
être gardées sous le sceau du secret professionnel ou si elles ne présentent
pas d'atteinte au droit au respect du secret professionnel?
Mme de
Santis : D'une certaine façon, ça, c'est déjà le cas. Sauf que «the
burden of proof»... comment on dit ça en français?
Des voix : ...
Mme de
Santis : Le fardeau de la preuve, maintenant, c'est sur celui qui
demande les frais, les honoraires totaux. Ce qu'il faudrait faire, c'est
de renverser le fardeau de la preuve. Est-ce que vous êtes en faveur de ça?
Parce qu'en effet c'est ça.
Mme Carpentier
(Marie) : Je pense que la commission voudrait se pencher sur une
législation qui propose ça pour voir les mécanismes, effectivement, comment les mécanismes se mettent en marche. Ceci dit, je ne pense pas
qu'il y ait une opposition
fondamentale au fait de renverser le fardeau de preuve. Ce qui est important,
c'est que chacune des parties dont les droits fondamentaux sont en
conflit ait l'occasion de présenter ses arguments pour arriver à une
décision... pour que le décideur puisse arriver à une décision éclairée.
Ce que je
lisais du... Ce qu'on lit du mémoire de la CAI, c'est que ce n'est pas le cas, effectivement, en ce moment. C'est
que ce n'est pas toutes les parties qui ont nécessairement l'occasion de
présenter leurs arguments à l'effet de sauvegarder le secret professionnel ou
d'exclure une information du seau du secret professionnel.
Mme de
Santis : Alors, pour vous,
ce n'est pas une question de qui a le fardeau de la preuve parce qu'à la
fin quelqu'un va devoir être responsable pour faire la preuve d'un fait ou du
contraire.
Mme Carpentier
(Marie) : En fait, il serait
important, effectivement... En fait, j'ai de la difficulté à
m'avancer sur le renversement du fardeau de
preuve en dehors d'une législation spécifique. Je ne suis pas certaine de l'effet
que ça aurait. Mais ce qui est important,
c'est qu'on n'ajoute pas de conditions, je dirais, nouvelles par rapport à la garantie qui est offerte par la charte, qui est celle du
droit au respect du secret professionnel.
Donc,
d'exiger un niveau... La charte est... Ce qui est couvert par le secret
professionnel est déjà balisé amplement par la jurisprudence. Il ne faudrait pas aller avec une exigence
supérieure, par exemple, c'est les termes qui sont utilisés, un besoin impérieux de confiance. Ça pose un fardeau
de preuve supplémentaire à la personne qui essaie de démontrer son droit au respect du secret professionnel, et ce
critère-là n'existe pas dans la charte. Donc, on ne devrait pas l'ajouter
par une autre législation.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Oui. Merci,
M. le Président. Bonjour, mesdames.
Très contente de vous recevoir parce qu'on est dans d'autres types de sujets qu'on n'a pas tout à fait abordés. Effectivement, je vais poursuivre sur le secret professionnel, parce qu'il y a quand même... Je pense que
ceux qui vous suivent sont en arrière, là, le Barreau du Québec aussi. Ça
fait que, préparez-vous, il va y avoir des questions sur le secret professionnel.
D'abord,
vous faites allusion... dans votre mémoire, vous faites le lien avec, dans le fond, la décision de la Cour
suprême, particulièrement sur : «La Commission ontarienne des droits de la personne a publié une Politique
sur les droits de la personne
contradictoires dans...»
Lorsqu'il y a conflit, là, un conflit de droits, là. Et il y a certains
éléments, donc, un, aucun droit n'est
absolu, deux, il n'y a pas de hiérarchie entre les droits, bon, puis vous avez
exprimé aussi dans ce sens-là.
La CAI, elle,
recommande également de «modifier [par contre] la loi afin que le secret
professionnel ne puisse être invoqué par les organismes publics pour
empêcher la divulgation du montant total des honoraires d'un avocat, sauf dans le cas où cette divulgation est clairement
susceptible de [révéler] une information autrement protégée par le
secret professionnel». Là est la volonté de la CAI. Et, dans Rétablir
l'équilibre, parce que c'est vraiment son... le titre du rapport est sur ça
et...
«Depuis
quelques années, la commission constate que les organismes publics et les
entreprises invoquent, de plus en
plus, le secret professionnel pour refuser de divulguer des documents préparés
par [les] avocats et [...] autres professionnels...»
Et là il donne la problématique : «Le
secret professionnel constitue un droit fondamental enchâssé dans la charte, de sorte que la commission est tenue
d'assurer d'office le respect du secret professionnel, comme tout autre tribunal administratif ou judiciaire. Toutefois,
sa mission et les lois qu'elle applique visent la transparence, alors que
le cadre juridique régissant l'application
de la notion du secret professionnel, fondé sur une valeur de protection du
public sous-jacente à l'adoption du Code des professions, prévoit la
confidentialité de certaines communications. Dans les deux cas, le législateur
a expressément énoncé qu'il souhaitait que ces législations aient préséance sur
d'autres lois.»
Alors, c'est
sûr que, lorsqu'on demande l'accès à des informations et que, de plus en plus,
les organismes invoquent le secret
professionnel, c'est, je pense, naturel que la CAI demande, dans le fond, de le
faire, mais d'une façon... Lorsque, je dirais,
qu'il y a quand même... Ils donnent quand même l'opportunité d'avoir une
situation exceptionnelle. Et vous, dans votre mémoire, vous écrivez que vous les désapprouvez totalement. C'est écrit : «[On] désapprouve cependant
la proposition de la CAI de limiter
la prépondérance du secret professionnel aux "cas exceptionnels où la
relation..."», tatata, dadadam. Alors, on a un problème.
• (16 h 40) •
Le Président (M. Ouellette) :
Bon, qui va régler le problème? Me Carpentier?
Mme Carpentier (Marie) : Est-ce
que vous...
Le Président (M. Ouellette) :
Oui?
Mme Carpentier (Marie) : Bien
oui.
Le Président (M. Ouellette) :
Bien, commencez, Me Carpentier, puis Me Thermitus complétera.
Mme Carpentier
(Marie) : Je vais y aller.
Je voudrais juste, comment je pourrais dire, éclaircir la position de la
commission. Donc, le paragraphe auquel vous faites référence, c'est que la CDPDJ
convient avec la CAI que ce ne sont pas toutes les communications entre les membres du public et les
professionnels qui sont sujettes au secret. La commission est très à
l'aise avec cette conception-là.
Ce qu'on
voulait mentionner dans ce paragraphe-là, c'est qu'à notre avis ce n'est pas
souhaitable ni même... Ça serait en
contravention avec la charte d'ajouter un critère, pour recevoir la protection
du secret professionnel, qui n'existe pas
à la charte. Les critères de cas exceptionnels où la relation entre le
professionnel et son client repose sur un besoin impérieux de confiance,
ce n'est pas un critère qui est exigé par la charte pour avoir le droit au
respect du secret professionnel. Donc, c'est
à cet aspect-là que la charte s'oppose, pas au fait qu'on tranche entre le fait
qu'une information appartient ou non
au secret professionnel. La commission est à l'aise avec l'idée que ce n'est pas toutes
les communications entre un professionnel et son client qui sont
couvertes. Est-ce que c'est clair?
Mme Léger : Peut-être.
Le Président (M. Ouellette) :
Bon.
Des voix : ...
Le Président (M. Ouellette) :
Oups! Est-ce qu'on a besoin d'un éclaircissement ou deux?
Mme Léger : Peut-être, parce
que c'est sûr que c'est un... Comment
vous percevez que les organismes
publics refusent, en tout cas, d'une façon assez importante pour que la CAI
propose cette recommandation-là?
Le Président (M. Ouellette) :
Bon, Me Thermitus, ça va être vous qui allez répondre, là.
Mme Thermitus
(Tamara) : La question,
c'est : Comment pensez-vous que les organismes publics refusent...
Mme Léger :
Non, c'est que la CAI... lorsque la CAI arrive avec cette recommandation-là,
c'est parce qu'elle a le souci de la transparence et de l'accès à
l'information, d'une part, et la pratique fait qu'elle se bute... par les
organismes publics qui refusent en
invoquant le secret professionnel. C'est pour ça que la CAI arrive avec cette
proposition-là, entre autres.
Mme Thermitus
(Tamara) : Ce que je me
souviens du rapport en tant que tel, là, que je n'ai pas sous les yeux, c'est que c'était un refus catégorique. Je pense
que la question se pose, à savoir est-ce qu'il ne doit pas y avoir une
analyse un peu plus poussée au lieu d'avoir
un refus catégorique parce que, si je me souviens bien, selon ce que la
proposition qui était avancée dans le rapport... Ça s'appelle comment, ça?
Une voix : ...
Mme Thermitus
(Tamara) :
Rétablir l'équilibre,
excusez-moi. Dans Rétablir l'équilibre, c'est qu'ils disaient qu'il y avait une obstruction, d'une certaine
façon. Donc, on répondait de façon quasi automatique : Secret
professionnel. Donc, la réponse, pour moi, c'est : Dans le fond, il faut faire
une analyse, puis ça recoupe un peu une question que la ministre a posée tout à l'heure, à savoir que... Est-ce que le secret
professionnel s'applique de façon automatique ou encore doit-on faire
une analyse pour regarder que tous les critères sont respectés? Donc, à partir
de ce moment-là, cette analyse-là doit être
faite au lieu d'agir selon un automatisme, qui a été contesté effectivement par
la CAI dans le rapport dont nous traitons aujourd'hui.
Donc, je pense qu'au lieu de dire «secret
professionnel» parce qu'il y a un avocat ou encore, par exemple... je connais plus la situation des avocats, puis vous
m'en excuserez, mais il faut regarder vraiment : Est-ce que tous les
critères sont là pour pouvoir déterminer si, oui ou non, l'information doit être
remise? Parce qu'on ne peut pas agir de façon automatique. Puis ce que je
comprends du rapport et ce que déplore la CAI, c'est qu'il y a un automatisme
qui s'est développé sans qu'il y ait une
analyse sous-jacente et que l'analyse sous-jacente est importante pour
déterminer effectivement est-ce qu'il
y a des informations qui peuvent être révélées, est-ce qu'il y a des
informations qui ne peuvent pas être révélées.
Puis
peut-être que la question, puis je m'avance un peu, la question des fonds
publics, parce que c'est ça, puis on parle
de questions d'intérêt public ici et de fonds publics, peut-être que cette
question-là devrait être analysée de façon plus pointue. Et je vais me
limiter à cela aujourd'hui.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Mais, quand même, la CAI propose quand même, dans ses recommandations, de
modifier quand même la loi et que le
secret professionnel ne puisse être invoqué. C'est la recommandation que la CAI
fait. Là, vous dites : On pourrait regarder les critères. Mais,
pour la CAI, c'est une recommandation qu'ils font d'une façon claire.
Mme Thermitus
(Tamara) : Bien, à partir...
bien, à 9.1, là, elle prévoit aussi que le législateur peut intervenir.
Je veux dire, si le législateur considère
qu'il y a matière à intervenir ici puis qu'il y a une justification... Puis, je
veux dire, je pense que, tu sais, on
parle de fonds publics ici. Je m'avance un peu, peut-être qu'il y a une
justification. Puis ce que je me rappelle
du rapport, c'est effectivement : Une utilisation de la défense...
c'est-à-dire du secret professionnel pour empêcher la divulgation est
problématique.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Carpentier, vous vouliez peut-être rajouter quelque chose.
Mme Carpentier
(Marie) : Oui. Comme Me Bernard le mentionnait tout à l'heure, le droit à l'information fait partie des
droits garantis par la charte. Et, pour la commission, c'est un droit
qu'on interprète au même titre que les autres droits. Donc, notre préoccupation, c'est qu'il n'y ait pas une hiérarchie qui soit créée entre les différents droits par
une autre législation parce
que ce n'est pas ça qui est l'esprit
de la Charte des droits et libertés,
où les droits doivent être conciliés au cas par cas, suivant les
circonstances. Donc, la préoccupation de la commission est à l'effet qu'il n'y
ait pas une hiérarchisation entre les
différents droits garantis par la charte qui soit créée par une autre loi, tout
simplement. Mais on convient que le droit à l'information fait partie
des droits garantis par la charte, comme le droit au respect du secret
professionnel.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Et c'est l'équilibre à trouver parce que c'est ça, le terme est vraiment Rétablir
l'équilibre entre la transparence,
l'intérêt public de tout ça, la prépondérance d'une loi, la primauté d'un
droit. C'est tous des termes qu'il faut...
Dans un autre
ordre d'idées, je veux revenir sur la recommandation 19 quant au rapport
d'enquête sur le harcèlement en milieu de travail aux universités.
Considérez-vous... Parce que vous vous avancez sur les universités. Pourquoi, d'abord? Et pourquoi on n'ajoute pas les cégeps et
les écoles professionnelles, qui ont aussi des adultes de 18 ans et
plus?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Bernard. Oui, on va à Me Bernard.
Mme Bernard (Claire) : Donc, on
a abordé deux points, d'une part, qu'on était en faveur, effectivement, de l'éclaircissement des balises sur l'accès aux rapports
d'enquête en milieu de travail. Et on trouvait qu'il fallait... Ce
n'était pas une limite, mais le contexte
actuel qui était, au moment où on a écrit, les cas de harcèlement en milieu
universitaire. C'est pour ça qu'on l'a...
bien, on a proposé que les balises ne s'appliquent pas seulement aux
situations en milieu de travail. Ce n'était pas une limitation de notre part.
C'était une invitation d'y aller de façon plus large.
Mme Léger : Et
seriez-vous d'accord à ajouter cégeps et écoles professionnelles?
Mme Bernard
(Claire) : Il n'y a pas de... Mais après il faudrait voir de quoi on
parle, mais, comme principe, il n'y a pas d'objection, au contraire.
Le Président (M. Ouellette) :
Deux minutes, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Je veux revenir aux vérifications d'antécédents judiciaires. Et vous dites en
quoi certaines balises précises seraient... ou que vous considérez qui
seraient salutaires au Québec.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Bernard.
Mme Léger : À la
page 17 de votre rapport.
Le Président (M. Ouellette) :
Oups! Oui, Me Bernard.
Mme Bernard
(Claire) : C'est qu'actuellement on voit que l'application de
l'article 18.2 manque d'uniformité, manque de clarté, et, outre le besoin de guides, on pense
qu'effectivement il faut des critères qui soient plus clairs pour définir d'abord qu'est-ce qu'on veut dire par
«emploi» parce que, quand on voit le libellé de la charte, c'est très
restrictif. Et nous, par exemple, dans
l'interprétation de la commission, on inclut aussi les emplois bénévoles, mais
ça pourrait aussi être contesté à
cause du libellé de la charte. Et par ailleurs toute l'analyse doit se faire
sur : Quel est le lien entre l'emploi et les antécédents judiciaires? Et c'est une analyse qui est difficile à
faire pour des employeurs quand... Par exemple, est-ce qu'il y a un lien entre une infraction qui a été
commise il y a 10 ans, 15 ans. Est-ce qu'on devrait définir un peu
plus quelle est la gravité des faits? Et c'est vrai qu'il y a certaines
balises jurisprudentielles, mais la jurisprudence continue de... il n'y
a pas encore de critères très clairs qui ont été donnés par les tribunaux
supérieurs sur ça.
Et la commission, d'ailleurs, a travaillé avec
des comités pour encourager à ce qu'il y ait une meilleure compréhension aussi de l'application de... en
fait, du critère 18.2 parce que, tout en reconnaissant que, pour certains
emplois, la présence d'antécédents
judiciaires pose effectivement un risque par rapport à certaines clientèles, il
faut aussi rappeler que l'article 18.2 est là pour éviter qu'il y
ait un jugement moral ou des préjugés beaucoup plus larges par rapport à une situation, alors que la personne ne pose plus de
risque par rapport à des gestes qu'elle a commis ou au type de geste
qu'elle a commis. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on est en faveur, effectivement,
de balises plus claires.
• (16 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. Me Thermitus, Me Bernard, Me
Carpentier, bonjour. Merci
d'être présentes aujourd'hui à la commission pour présenter votre mémoire.
Et j'aimerais
qu'on revienne à la question du secret professionnel que vous avez
abordée, là, avec mes collègues précédemment. On a eu un cas d'exemple la semaine dernière où le Centre québécois du
droit de l'environnement venait nous
dire : Écoutez, nous, on fait des demandes en matière d'accès à l'information pour connaître
combien un ministère ou un organisme
dépense en frais d'avocat. Et donc ça peut nous indiquer l'importance ou la
volonté du dossier, la volonté politique
du dossier ou la volonté de l'organisme de défendre, de consacrer des
ressources importantes. Actuellement, c'est les honoraires professionnels, les honoraires extrajudiciaires qui sont
consacrés à un dossier comme tel qui sont protégés par le secret
professionnel.
On peut
prendre ce même exemple-là avec un dossier personnalisé d'un individu, un
individu, et là la commission et la charte rentrent en ligne de compte,
où un individu a un litige avec un organisme public, avec un ministère ou un organisme. Et là lui souhaiterait savoir quelles
sont les sommes investies par le biais de cet organisme-là vers,
supposons, des honoraires extrajudiciaires
en frais d'avocat. Donc, comment est-ce qu'on... Bien, en fait, c'est quoi, la
position de la commission? Comment est-ce qu'on réconcilie ça?
Puis j'ai
très bien compris, tout à l'heure, ce que vous disiez. Vous disiez : Bien,
écoutez, ça ne doit pas être un automatisme,
parce qu'on voit qu'il y a une relation avocat-client, automatiquement le
secret professionnel s'invoque. Théoriquement,
les ministères et les organismes doivent faire l'appréciation, à savoir est-ce
qu'il y a un secret professionnel, donc
les critères doivent être remplis de toute façon. Mais, sur l'aspect, vraiment,
comment est-ce que la commission se positionne sur une information qui
peut avoir un effet sur un individu qui a un dossier litigieux avec un ministère
ou un organisme?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Carpentier.
Mme Carpentier
(Marie) : Oui. Si je ne me trompe pas, la recommandation de la CAI est
à l'effet que ce soit une donnée sur
le montant total qui est donné à un conseiller juridique, par exemple.
D'emblée, suivant la jurisprudence, le montant
total d'honoraires, ce n'est pas une information qui est couverte par le secret
professionnel. Tant qu'il n'y a pas des informations qui sont divulguées
à l'intérieur de l'honoraire, qui détaillent ce qui a été rendu comme service,
ce montant-là... Il faudrait que la personne
qui est protégée par le secret professionnel démontre que ce montant-là, au
total, devrait bénéficier du secret professionnel. En tout cas, c'est dans ma
connaissance de la jurisprudence pour l'instant.
Je sais qu'il
y a éventuellement des litiges autour de ça, c'est quand la facture est
détaillée et que c'est le contenu du détail
qui, là, peut dévoiler des informations, quelle procédure a été entamée, par
exemple. Ça, ça divulgue de l'information qui est couverte par le secret professionnel. Mais, en soi, il n'y a pas
un automatisme à l'égard de l'ensemble des frais. Ça fait que je ne pense pas que la commission,
comment je pourrais dire, est opposée en soi, par essence, à ce qu'un
montant total d'honoraires puisse être
divulgué. Cependant, si la personne qui bénéficie du secret professionnel
arrivait à démontrer qu'il y a une
atteinte à son droit au respect du secret professionnel par la divulgation de
ce montant-là en raison de ce que ça donne
comme information puis l'importance qui est accordée au litige, je ne pense pas
que ce soit une information qui est protégée par le secret
professionnel. Est-ce que ça répond à la question?
M. Jolin-Barrette : Bien non.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Non, parce que, supposons qu'on est face à une
situation d'un dossier individualisé avec un ministère ou un organisme.
Le ministère ou organisme qui est en relation professionnelle, c'est lui, le
client, là. C'est lui, le client de
l'avocat, là. C'est lui qui peut invoquer le secret professionnel. Donc, c'est
le ministère ou l'organisme qui va
renoncer à son secret professionnel ou qui va dire : Oui, je le maintiens
ou, non, je ne vous donne pas accès parce que c'est couvert par le
secret professionnel.
Est-ce que la
Commission des droits de la personne considère qu'on devrait faire une
exception dans la loi par rapport au
secret professionnel pour permettre à des individus qui font des demandes
d'accès de savoir combien l'organisme a consacré en matière d'honoraires
extrajudiciaires par rapport aux frais d'avocat?
Mme Carpentier
(Marie) : La position de la commission est à l'effet que, quand il y a
des droits qui s'opposent, comme un
droit d'accès à l'information en l'espèce et le droit au respect du secret
professionnel de l'organisme qui est concerné, il devrait y avoir... on
devrait trancher le débat suivant les règles qui concernent les conflits.
Donc, il ne
devrait pas y avoir d'automatisme ni d'un côté ni de l'autre. Il ne devrait pas
être automatiquement exclu et il ne
devrait peut-être pas être automatiquement inclus non plus. Il peut y avoir
éventuellement un renversement du fardeau
de preuve. Je ne pense pas que, ceci dit, on préfère se pencher sur une
législation spécifique qui nous propose un modèle, et puis là on
arriverait avec une opinion là-dessus, mais, comment je pourrais dire, en
l'absence...
L'idée, c'est
qu'il y ait... Notre position est à l'effet que c'est important qu'il n'y ait
pas d'automatisme ni d'un côté ni de l'autre. C'est qu'il y ait une
occasion pour chacune des parties de présenter leurs arguments sur le fait que ça devrait être conservé sous le sceau du secret
professionnel ou sous le fait que ça ne devrait pas être concerné sous
le seau... Ceci dit, en soi, un renversement
de fardeau de preuve, par exemple, que ce serait à l'organisme public de
démontrer que ça devrait être protégé plutôt
que la situation actuelle, qui est plutôt à l'inverse, où il y a un automatisme
envers le droit au respect du secret
professionnel. Bien, un renversement de fardeau de preuve en soi, je pense, ne
serait pas nécessairement contradictoire avec les dispositions de la...
mais sous toutes réserves, ce ne serait pas en soi contradictoire avec les
dispositions de la charte.
M. Jolin-Barrette : Parce que, dans le fond, actuellement, quelqu'un
qui fait une demande d'accès à l'information puis qui se fait opposer le secret professionnel peut aller en révision à
la Commission d'accès, puis lui a son fardeau de preuve. Je comprends
sur l'aspect que vous dites : On n'est pas contre le renversement du
fardeau de preuve où, là, l'organisme va devoir démontrer que, oui, ça respecte
les critères du secret professionnel. Par contre, la question, elle est vraiment : Est-ce que, dans ce cas-là,
vous mettez une brèche, dans le fond?, pas sur la question : Est-ce que
c'est protégé ou non par le secret
professionnel? Est-ce qu'on vient faire une exception, supposons, pour les
honoraires consacrés à la défense d'un dossier? C'est ça, la question,
dans le fond.
Mme Carpentier (Marie) : Bien,
je pense...
Mme Thermitus (Tamara) : La
question est très intéressante, mais...
Le Président (M. Ouellette) :
Me Thermitus.
Mme Thermitus (Tamara) :
Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) :
Non, non, ça va. Vous voulez répondre?
Mme Thermitus
(Tamara) : Votre question
est intéressante, mais, je veux dire, à savoir si la commission s'est
penchée directement sur cette question-là, la réponse est négative. On ne s'est
pas penchés. Ça devient pour nous une question hypothétique, intéressante,
sujette à réflexion parce qu'il y a plusieurs enjeux. Je vous entends, je comprends vos préoccupations puis je comprends
qu'elles sont multidimensionnelles, mais, pour pouvoir vous répondre
aujourd'hui de façon concise et transparente, je ne suis pas en mesure de vous
répondre.
Puis je vois bien la dynamique qui s'installe,
là, je comprends. Puis là-dessus vous êtes un peu comme votre collègue qui a parlé précédemment, la députée de
Pointe-aux-Trembles. C'est le même genre de question. Mais, je veux dire, être en mesure de vous répondre aujourd'hui,
ce n'est pas... Puis donc vous alimentez nos réflexions, on va partir avec
des devoirs. Ça fait partie de la vie.
Le Président (M. Ouellette) :
Allez-vous nous envoyer vos devoirs quand ils vont être faits?
Mme Thermitus
(Tamara) : Ça, bien,
Marie... Me Carpentier va réfléchir, mais, je veux dire, ça fait
partie... Je comprends l'angle de la
question, puis ce n'est pas sous cet angle-là qu'on a regardé ça. Puis, je veux
dire, on va y réfléchir, c'est sûr. Je veux dire, les questions sont
posées par l'Assemblée, c'est important. Donc, on va y réfléchir puis on va
regarder ça sous cet angle-là. Je pense que c'est raisonnable pour la
commission de faire un tel engagement.
Le
Président (M. Ouellette) : Si, effectivement, il y a un intérêt de la part du député de Borduas,
bien, on pourra peut-être... Pouvez-vous nous partager le fruit de votre
réflexion, Me Carpentier?
Mme
Carpentier (Marie) : Si vous permettez, la commission a l'habitude de
se prononcer... n'a pas l'habitude de proposer
aux législateurs sa façon de fonctionner, elle a l'habitude de se prononcer sur
une législation qui est présentée. Donc, c'est notre façon de
fonctionner habituelle. En l'espèce, je pense que ça pourra fonctionner comme
ça. Ça nous fera plaisir de nous pencher sur une proposition législative.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Me Carpentier, des informations. M. le député de Borduas,
puisque j'ai pris 30 secondes de votre temps, je vous laisse
30 secondes.
M. Jolin-Barrette : Merci. Sur le dossier des antécédents en matière
criminelle, bon, vous ramenez la primauté de la charte. Il y a des gens ou des groupes qui sont passés précédemment à
vous, et ils nous disaient : Écoutez, nous, on est satisfaits de la
façon dont c'est, l'état actuel du droit. Est-ce que vous pensez qu'on devrait
aller plus loin au niveau des antécédents, la protection des antécédents, ou ce
qui est prévu dans la charte, ça satisfait la commission?
• (17 heures) •
Mme Thermitus (Tamara) :
C'est-à-dire que je pense que je vais reprendre les propos de Me Bernard,
qui expliquait la problématique avec la
définition d'antécédent judiciaire telle que formulée en ce moment. Donc, il y
a quand même des spécifications qui
doivent être faites. Et d'ailleurs la CAI, dans son rapport, soumet
effectivement qu'ils doivent être
mieux balisés parce que la notion d'emploi, comme le disait Me Bernard,
pouvait s'appliquer. Aussi, nous, on en fait une interprétation généreuse pour parler d'emplois bénévoles, mais
est-ce qu'un emploi bénévole est un emploi? Là est la question. Alors,
je pense que je vais vous référer aux propos de Me Bernard, qui a répondu à une
question antérieure là-dessus.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Me Thermitus. Merci, M. le député de Borduas, Me Tamara
Thermitus, Me Claire Bernard, Me Marie Carpentier, représentant la commission
des droits de la personne et de la jeunesse. Merci, Me Thermitus, pour votre
première fois à la commission. On espère vous revoir très souvent.
Nous allons
suspendre quelques minutes et nous allons demander aux gens du Barreau de bien
vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à 17 h 1)
(Reprise à 17 h 3)
Le Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le Barreau du Québec et son vice-président, Me Marc Lemay. Me Lemay,
vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent. J'ai compris qu'il y aurait une présentation peut-être double
de votre part. Vous avez 10 minutes pour la faire, et par la suite il y
aura échanges avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. À
vous la parole, Me Lemay.
Barreau du Québec
M. Lemay
(Marc) : Bonjour, Mme la
ministre, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission. Mon nom est Me Marc Lemay, je suis maintenant
vice-président du Barreau du Québec. Je suis accompagné à ma droite par Me Raymond Doray, membre du groupe de travail
sur l'accès à l'information du Barreau du Québec, et de Me Nicolas Le
Grand Alary, avocat au Secrétariat de l'ordre et Affaires juridiques du Barreau
du Québec.
Le Barreau du
Québec a pris connaissance du rapport quinquennal de la Commission d'accès à
l'information du Québec, intitulé Rétablir
l'équilibre — Rapport
sur l'application de la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé, et remercie la Commission des institutions de
pouvoir lui faire part de ses commentaires et observations.
Le Barreau du
Québec considère que le droit d'accès à l'information est intimement lié à la
liberté d'opinion et à la liberté
d'expression. Il est donc essentiel à la vie démocratique. Au sein d'une
société libre et démocratique comme la nôtre, la transparence de l'administration publique et le droit à la protection
de la vie privée constituent des valeurs fondamentales, lesquelles sont, par ailleurs, consacrées par nos
chartes des droits et notre Code
civil. L'accès à l'information gouvernementale et la protection de la vie privée sont des principes auxquels le Barreau
du Québec attache donc la plus haute importance. Le Barreau du Québec appuie le caractère prépondérant de la loi sur
l'accès. Nous vous exposerons donc notre point de vue général sur les enjeux soulevés par le rapport
de la commission. Bien entendu, le Barreau du Québec formule dans le présent
mémoire ses observations et commentaires à la lumière de son mandat général de
protection du public.
Premier point,
revenir à la mission première de la Commission d'accès à l'information. La
commission doit décider des demandes de
révision et d'examen de mésententes dans un délai raisonnable et selon une
procédure souple et dépourvue autant que possible de judiciarisation. La commission doit
pouvoir compter sur les ressources nécessaires à la pleine réalisation de son mandat. Les délais de
traitement actuel des dossiers minent la crédibilité de la loi sur
l'accès.
Après 30 ans
d'existence de la loi, il faut mettre en lumière les difficultés suivantes. La Commission
d'accès à l'information a de la difficulté à procéder à l'audition des
demandes d'accès à l'intérieur d'un délai raisonnable. La Loi sur l'accès aux documents publics et la protection
des renseignements personnels a, contre toute attente, donné lieu à des problématiques d'interprétation nombreuses et
majeures. Sur le plan de l'interprétation du texte législatif, on doit
déplorer une culture du refus des organismes
publics face à ces demandes d'accès. Devant des demandes d'accès à des
documents publics, on doit constater que les
organismes publics ont perçu la Loi sur l'accès aux documents publics et à la
protection des renseignements personnels comme une intrusion dans leurs
activités ainsi qu'un fardeau susceptible de perturber le fonctionnement de
l'administration publique.
L'appel à la Cour du
Québec a été utilisé par les organismes publics comme un moyen efficace pour
freiner l'accessibilité aux documents recherchés ou pour gagner du temps. La
procédure d'appel à la Cour du Québec a été modelée
sur le processus suivi par la Cour d'appel du Québec, ce qui donne lieu,
dans la plupart des cas, à la production d'un mémoire écrit avec les frais afférents. Qui plus est, on constate
que les organismes publics dont les moyens financiers sont
disproportionnés par rapport à ceux des demandeurs d'accès exercent régulièrement
des recours en contrôle judiciaire puis des
appels à la cour d'appel lorsqu'ils n'ont pas eu gain de cause à la Cour du Québec.
Au final, les délais peuvent alors s'étirer sur cinq, sept, voire
10 ans. La procédure entourant ces appels et recours en contrôle
judiciaire est venue compliquer l'accès du demandeur et provoquer la
frustration des citoyens.
L'examen
de la dernière édition du rapport annuel de la commission suggère des difficultés
pour la commission d'entendre les
causes rapidement et selon une procédure souple et flexible.
L'examen de ce rapport nous amène également à conclure que la commission traîne derrière elle un retard important qui
empêche les citoyens d'être entendus rapidement. En effet, le délai
moyen de traitement des enquêtes est de 357 jours et le délai moyen pour
la section juridictionnelle de dossiers clos par décision est de
537 jours.
L'existence
d'un appel à la Cour du Québec a également expliqué certaines insatisfactions
des citoyens. En matière d'accès à l'information, la décision doit
souvent être rendue rapidement pour être utile et pertinente.
À la lumière de ces
considérations, nous estimons que le législateur québécois doit envisager les
mesures suivantes :
1. Imposer une date
butoir pour forcer les commissaires de la commission à respecter un délai
spécifié quant à l'audition des demandes;
2.
Instituer au sein de la commission une procédure accélérée similaire à une cour
de pratique pour entendre des demandes qui dénotent une urgence
particulière;
3.
Reconnaître aux commissaires une expertise particulière dans le domaine de
l'interprétation des lois d'accès;
4.
Autoriser les commissaires à imposer, au besoin et dans des circonstances qui
s'y prêtent, le remboursement des frais extrajudiciaires encourus par le
demandeur, notamment lorsque le refus de communiquer le document ou les
renseignements est mal fondé à sa face même;
5.
Prêter une oreille attentive et sensible aux demandes budgétaires de la commission
pour lui permettre d'avoir les moyens de remplir ses nouvelles
obligations; et
6.
Permettre à la commission de procéder au tri ainsi qu'au regroupement de
demandes d'accès susceptibles d'être entendues en même temps et capable
de justifier une décision dans les mêmes principes. La commission profiterait alors des vertus de la décision institutionnelle, que la Cour suprême du Canada a reconnues à deux reprises. Le libellé de
cette disposition pourrait s'inspirer de l'article 132.1 du Code des
professions.
• (17 h 10) •
Pour une consultation
publique sur les dérogations à la loi sur l'accès. Les lois du Québec
comportent plus de 150 dérogations à la loi sur l'accès. La multiplicité de ces
dérogations mine le caractère prépondérant de la loi et sa crédibilité. Le Barreau du Québec est favorable à
la mise en place d'une consultation publique par la Commission des institutions de l'Assemblée nationale pour revoir
l'ensemble des dérogations à la loi et déterminer celles qui doivent
être maintenues, abolies ou modifiées. Par
ailleurs, toute nouvelle dérogation de la loi sur l'accès devrait être soumise
à une consultation publique obligatoire.
Au
tout début des années 80, le Québec était un chef de file avec sa loi sur
l'accès. Aujourd'hui, comme l'affirme le rapport quinquennal, il est à
la queue de peloton, derrière le Honduras, la Roumanie et la Corée du Nord.
Toutes les dérogations à la loi la rendent forcément plus complexe, plus
difficile à appliquer et moins efficace. Cette situation commande un débat de société et vraisemblablement
une révision en profondeur du modèle actuellement en vigueur pour
redonner à la loi sur l'accès son caractère prépondérant dans une société
démocratique comme la nôtre. Un critère de primauté
de l'intérêt public devrait aussi s'appliquer à toutes les dérogations pour
obliger la divulgation des renseignements lorsque l'intérêt public
excède les préjudices susceptibles de découler de la divulgation.
Les nouvelles
technologies de l'information posent un réel défi en matière de protection des
renseignements personnels. Les risques de
détournement de finalité sont élevés. Par ailleurs, la notion de consentement
est insuffisante et désuète. Dans ce contexte, il est important de
revoir l'encadrement de la collecte et de l'utilisation de renseignements
personnels, en particulier pour protéger les jeunes.
La
notion de consentement est au coeur de la protection des renseignements
personnels et de la vie privée. Dans la vie concrète, que ce soit, par exemple, en matière d'assurance, de
crédit ou de commerce électronique, les citoyens sont appelés à
consentir sur la base de textes à peu près illisibles, complexes ou
incompréhensibles.
Dans
ce contexte, le Barreau du Québec recommande un meilleur encadrement de la
cueillette et de l'utilisation des renseignements personnels par la loi.
On pourrait, par exemple, envisager de prescrire par règlement les seuls renseignements personnels qui peuvent être
recueillis dans le cadre de contrats types d'assurance, prêt à la
consommation, ouverture de compte bancaire.
Pour
la protection du secret professionnel et de la confidentialité des honoraires
d'avocat, la Commission d'accès à l'information
propose aux recommandations 10 et 11 du rapport de modifier la loi afin de
limiter le droit des organismes publics
d'invoquer le droit au respect du secret professionnel, souvent utilisé pour
refuser des demandes d'accès. Le rapport rappelle qu'en common law et
suivant la jurisprudence de la Cour suprême le secret professionnel est un
privilège générique qui n'est accordé qu'au client de l'avocat et du notaire et
qui constitue, par ailleurs, un principe de droit fondamental protégé par les articles 7 et 8 de la Charte canadienne
des droits et libertés. Plus spécifiquement, la commission propose que les montants totaux des comptes
d'honoraires des avocats adressés à des organismes publics ne soient
plus confidentiels. Le détail ventilé des postes de facturation demeurerait
toutefois confidentiel.
Il est
important de rappeler que la Cour suprême du Canada a déjà jugé que les comptes
d'honoraires d'avocats, incluant le montant des honoraires facturés,
sont protégés par le secret professionnel avocat-client.
Le Barreau du
Québec recommande donc de ne pas modifier les règles actuelles concernant la
protection du secret professionnel et l'application de ces règles aux
comptes d'honoraires des avocats, incluant le montant des honoraires facturés. Le Barreau doute sérieusement, du reste,
de la validité constitutionnelle de la modification législative
souhaitée par la commission.
La commission propose, à la
recommandation 9 du rapport, de modifier l'alinéa 2° de
l'article 108.3 du Code des professions,
qui prévoit qu'«un ordre
professionnel peut refuser de confirmer l'existence ou de donner
communication d'un renseignement ou d'un
document dont la divulgation est susceptible de révéler le contenu d'une
enquête ou d'avoir un effet sur une enquête à venir, en cours ou sujette
à réouverture».
Dans les
faits, la commission constate que les ordres professionnels ne transmettent que très peu d'information
aux demandeurs, voire rien du tout. La modification viserait à arrimer le libellé de l'article 108.3 à celui de
l'article 28 de la loi sur l'accès, qui vise les organismes chargés en
vertu de la loi de prévenir, détecter ou réprimer les crimes et les infractions aux lois : services de police et
autres enquêteurs. En effet, le libellé de ces dispositions prévoit, entre autres, que ces organismes doivent refuser de divulguer les renseignements qu'ils obtiennent lorsque leur communication est susceptible
d'entraver une enquête à venir, en cours ou sujette à la réouverture.
Dans le cadre
de l'enquête du syndic d'un ordre
professionnel, la personne visée par
l'enquête est contraignable et a une obligation de collaboration avec le
syndic, contrairement aux poursuites criminelles où tout accusé a droit au silence. De plus, tout professionnel visé par une
enquête d'un syndic ne peut invoquer le secret professionnel afin d'éviter
de répondre à des questions qui lui sont posées.
Le Président (M. Ouellette) :
Vous êtes en conclusion, Me Lemay?
M. Lemay (Marc) : Exactement.
Le Président (M. Ouellette) :
Bien, c'est ce que j'ai pensé.
M. Lemay (Marc) : J'ai essayé
de rester dans le temps, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) :
Je vous laisse aller en conclusion, Me Lemay.
M. Lemay (Marc) : Ainsi, des
demandes d'accès aux dossiers d'enquête du syndic pourraient indirectement révéler des informations visées par le secret
professionnel. Il faut comprendre qu'il peut être difficile pour un syndic
de départager ce qui constitue et ce qui ne
constitue pas un renseignement protégé par le secret professionnel dans le
cadre du traitement d'une demande d'accès à son dossier.
En vous
remerciant pour votre invitation à participer à la commission parlementaire sur ce rapport quinquennal, nous demeurons disponibles pour toute question que
pourriez avoir concernant notre mémoire ou le rapport quinquennal de la Commission
d'accès à l'information. Merci.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Me Lemay. C'est sûr que Mme
la ministre a des questions, et
d'ailleurs elle va commencer à vous en poser dès maintenant.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Me Lemay, Me Doray, Me Le Grand Alary,
bienvenue, merci d'être avec nous aujourd'hui. On peut avoir une petite discussion
sur le rapport quinquennal et votre mémoire. Merci pour votre mémoire.
D'abord, j'aimerais commencer avec la recommandation 24.
La commission suggère qu'on retire la notion de
dossier de la loi et qu'on articule les obligations des entreprises autour de
la finalité de la collecte des renseignements personnels. La plupart des mémoires que nous avons reçus sont d'accord
avec cette recommandation de la commission, mais vous, vous vous dites défavorables. Vous avez une notion de dossier
qui signifie l'ensemble des renseignements personnels visant une personne
où qu'ils se trouvent dans l'entreprise. Donc, il n'y a pas lieu de l'enlever,
d'après vous, O.K.?
Je vois aussi dans le mémoire... pas le mémoire
mais, dans le rapport quinquennal, il y avait des suggestions de modifications
à la législation, par exemple à l'article 8 de la loi sur le privé, parce
qu'actuellement l'article 8 et chaque
fois qu'on parle de dossier, c'est des renseignements personnels collectés
auprès des personnes concernées. Mais on sait très bien qu'aujourd'hui il y a beaucoup de renseignements
personnels qui pourraient être détenus qui ne parviennent pas
nécessairement de la personne en question.
Alors, j'aimerais mieux comprendre
votre position sur le dossier et j'aimerais que vous explicitiez davantage
la définition que vous donnez à votre notion de dossier.
Le Président
(M. Ouellette) : Maître...
M. Lemay (Marc) : Si vous me permettez, M. le Président, je vais
laisser Me Doray répondre à cette question.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Doray, on vous attendait. À vous la réponse.
• (17 h 20) •
M. Doray
(Raymond) : M. le Président, Mme la ministre, pour ce qui est de la
question de dossier, je ne pense pas que
la position du Barreau soit très éloignée de celle mise de l'avant dans le
rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information. Je pense que la position du Barreau fait simplement
souligner que la jurisprudence de la commission a... sur la notion de dossier qui est présente dans le
Code civil du Québec, comme vous le savez, et qu'on a reprise dans la
Loi sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé, vise l'ensemble des renseignements concernant
une personne physique là où il se trouve au sein d'un organisme public.
Donc,
historiquement, et ça n'a jamais été remis en question, la commission a donné
une interprétation très large à la
notion de dossier qui englobe
l'ensemble des données visant un individu et qui sont détenues par une entreprise privée. On a la même chose dans le secteur public. Donc, je pense que la
position du Barreau n'est pas en porte-à-faux, elle fait simplement
souligner que cette notion de dossier a certains avantages, je dirais, d'un point
de vue pédagogique parce que les gens veulent avoir accès à leur dossier, à ce
que l'on sait ou ce que l'on a colligé à leur sujet. Et rien dans le
régime législatif actuel, tant dans le secteur public que dans le
secteur privé, ne fait en sorte que, par le biais de la notion de
dossier, on restreint ce droit d'accès et le droit de rectification qui est également
contenu dans les deux lois dont on parle.
Sur
votre deuxième point, l'article 8 et les règles relatives à la collecte de renseignements personnels dans le secteur privé, ce que prévoit l'article 8, c'est bien
sûr une certaine obligation d'information que doit mettre en oeuvre
l'entreprise privée qui recueille des
renseignements auprès de la personne concernée, notamment des finalités des
renseignements qui sont recueillis et du
droit d'accès, du droit de rectification, du lieu où les renseignements seront
détenus. Évidemment, on ne peut pas
fournir ces renseignements-là lorsqu'un organisme, privé ou public, du reste, recueille des renseignements auprès d'un tiers parce que, ce faisant, on
révélerait au tiers les raisons pour lesquelles on s'apprête à recueillir des
renseignements, violant ainsi un peu plus son droit à la vie privée.
Donc,
l'article 8 a été assez bien conçu, historiquement,
pour éviter qu'au moment de la collecte de renseignements personnels
auprès de tiers on ne révèle à ce tiers des renseignements, par exemple, de
dire : Écoutez, on est en train d'étudier
la candidature d'une personne qui a cogné à notre porte pour un poste de cadre
ou d'employé, et on veut savoir si cette
personne est intègre ou est compétente, et c'est ce pour quoi on vous appelle.
Dans certains cas, révéler les motifs de la collecte peut poser
problème. Alors, c'est un peu le sens de la position du Barreau à cet égard.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci.
Mme
de Santis : Je comprends moins la fin de votre présentation parce que
l'article 8, c'est des renseignements personnels qui sont collectés
de la personne, c'est ses renseignements. D'où vient le tiers là-dedans?
M. Doray
(Raymond) : Ce que je vous dis, c'est que l'article 8 a sa raison
d'être lorsque l'on recueille des renseignements auprès de la personne concernée, mais que, lorsqu'on
recueille des renseignements auprès d'un tiers, de révéler à ce tiers
les renseignements ou d'élargir la portée de l'article 8 poserait
problème.
Mme
de Santis : Mais, si on
collecte d'un tiers des renseignements
qui me concernent, vous n'avez pas à me dire que vous avez des
renseignements additionnels qui me concernent, non?
M. Doray
(Raymond) : C'est exact et c'est une bonne chose.
Mme de
Santis : Que vous ne me le dites pas, même si c'est de moi...
M. Doray
(Raymond) : Qu'on le dise, qu'on vous le dise...
Le Président
(M. Ouellette) : Woups! Woups!
M. Doray
(Raymond) : Qu'éventuellement... Pardon, M. le Président.
Le Président
(M. Ouellette) : Non, mais c'est parce que je veux juste que...
Des voix :
...
Le Président (M. Ouellette) : ...ce n'est pas personne. C'est que je veux
rendre justice à tous les gens qui ont des opinions aujourd'hui, puis
c'est très important. Me Doray.
M. Doray (Raymond) :
Que la personne concernée soit informée du fait que l'on recueille des
renseignements auprès d'un tiers me semble être une excellente chose. Si c'est
ça, votre...
Mme de
Santis : Parfait. O.K. Bien, alors, maintenant on se comprend.
M. Doray
(Raymond) : ...inquiétude, la réponse, c'est oui. Que le tiers soit
informé des motifs pour lesquels on recueille auprès de lui des
renseignements au sujet de la personne concernée peut poser problème.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Maintenant, concernant le secret professionnel et les
recommandations 10 et 11, vous, vous basez votre argumentaire sur
le secret professionnel de l'avocat, du notaire, O.K.? Mais ici on va au-delà
de ça, on parle du secret professionnel qui
est protégé en vertu de l'article 9 de la charte. Est-ce que, pour vous,
tous les secrets professionnels devraient être traités de la même façon?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Lemay.
M. Lemay
(Marc) : À première vue, oui, mais je vais laisser compléter par Me
Doray.
M. Doray
(Raymond) : En fait, M. le Président, Mme la ministre, la réponse à
cette question nous a été fournie par la Cour suprême du Canada à au
moins trois reprises, notamment dans des décisions que j'ai eu le plaisir de
plaider devant elle. La Cour suprême nous a
dit que, justement, bien que l'article 9 de la charte québécoise — c'était dans l'arrêt Foster
Wheeler — que
l'article 9 semblait mettre sur le même pied l'ensemble des secrets
professionnels des 37 ou 38 professions au Québec — ...
Mme de
Santis : ...
M. Lemay (Marc) : ...on est rendus à 40, merci de me rappeler à l'ordre — qu'il fallait tenir compte du
contexte particulier applicable à chacun des
secrets professionnels, et tout particulièrement que le secret professionnel
avocat-client ou notaire-client,
c'est-à-dire le secret professionnel du conseiller juridique, avait une
intensité qui n'était pas la même que les autres.
Pourquoi?
La raison en est très simple, parce que la Cour suprême a également dit dans
plusieurs décisions, et a répété
encore récemment dans l'affaire de la Chambre des notaires du Québec, que le
secret professionnel des conseillers juridiques
avait droit à une protection constitutionnelle non pas en vertu de la charte
québécoise et de son article 9, qui est rédigé en des termes relatifs puisqu'au deuxième alinéa de
l'article 9 au Québec il est prévu que le législateur peut, de façon express, déroger au secret professionnel,
mais... Pour le secret professionnel de l'avocat ou du notaire, le
législateur ne peut pas déroger au secret
professionnel puisqu'il s'agit d'un principe de justice fondamental au sens de
l'article 7 de la charte
canadienne et qu'une violation par l'État du secret professionnel du conseiller
juridique constitue prima facie une violation
du droit à la vie privée au sens de l'article 8 de la charte canadienne,
ce qui explique la position du Barreau de dire, en réponse aux recommandations de la Commission d'accès à
l'information : Nous doutons sérieusement que ce que vous recommandez à l'Assemblée nationale soit
constitutionnellement valide. Et, quand je dis constitutionnellement
valide, je veux dire par rapport à la Charte canadienne des droits et libertés,
qui fait partie de la Constitution du Canada.
La
charte québécoise est une loi qui a une valeur prépondérante. On l'a appelée
loi quasi constitutionnelle, mais ce n'est pas une loi constitutionnelle. Il
faut quand même replacer les choses dans leur juste perspective juridique.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Concernant les comptes d'honoraires, vous, vous citez la
cause à la Cour suprême de Maranda. J'aimerais
rappeler que, là, c'étaient les comptes honoraires d'un certain C, qui était
soupçonné de blanchissement d'argent et
de trafic de stupéfiants, et que la cour a dit : «Une demande
d'information sur les honoraires de l'avocat de la défense rattachée à une poursuite criminelle remet en
cause les valeurs fondamentales de la procédure pénale et du droit
criminel, telles que le droit au silence du prévenu et la protection contre
l'auto-incrimination.»
Et on peut comprendre
pourquoi la cour a décidé qu'on devait assujettir les comptes honoraires au
secret professionnel, mais, quand même, la
cour a dit que, si le ministre avait fait preuve que ça ne devait pas être
assujetti à cette restriction-là, ça
aurait été possible de dévoiler le montant total des honoraires. Donc, ça nous
laisse avec qui a le fardeau de la
preuve pour prouver que ça ne devrait pas être assujetti au secret
professionnel. Alors, vous, vous nous dites aujourd'hui qu'on devrait
garder le fardeau de preuve en... et c'est la personne qui demande pour avoir
les honoraires totaux qui devrait avoir le fardeau de prouver que ce n'est pas
un secret professionnel.
Maranda, c'est
criminel, c'est pénal. Nous, le public veut savoir combien nous dépensons pour
des services d'avocats qu'on engage de
l'extérieur, c'est l'argent du public, et je crois que peut-être c'est même
légitime qu'il nous demande combien
on dépense et combien on paie les personnes qu'on engage de l'extérieur. On
leur dit combien on paie pour nos consultants.
Pourquoi c'est tellement important
pour vous que, combien on paie des avocats à l'externe pour la
négociation de contrats, ça soit protégé par le privilège, le secret
professionnel?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Lemay ou Me Doray? Me Doray.
• (17 h 30) •
M. Doray
(Raymond) : M. le Président, Mme la ministre, revenons un petit peu en arrière, si
vous me permettez. Je pense que cette
commission doit comprendre le portrait d'ensemble
avant de prendre des décisions qui sont extrêmement importantes.
D'abord, on ne peut pas parler de l'arrêt Maranda, qui est effectivement une
décision rendue en matière criminelle, sans
parler des décisions subséquentes de la Cour suprême du Canada. La Cour suprême
a rendu trois décisions : la
décision Cunningham, dans laquelle il est mentionné que le montant des
honoraires, même dans un contexte civil et même dans un contexte de droit matrimonial, pouvait être protégé par le
secret professionnel, le montant des honoraires; la décision Chambre des notaires du Québec contre
Procureur général du Canada, dans laquelle la cour a écrit noir sur
blanc que le montant des honoraires d'un avocat ou d'un notaire, d'un
conseilleur juridique, est un renseignement prima facie, donc de prime abord
protégé, et qu'il appartient à celui qui veut renverser cette règle de
démontrer qu'elle est inapplicable,
c'est-à-dire qu'une des rares exceptions au secret professionnel s'applique. Et
il y en a très peu, d'exceptions au
secret professionnel. Et ça a été également dit par la Cour suprême du Canada
dans un contexte d'accès à l'information dans l'affaire Alberta
Information Commissioner.
Donc, tout ce
discours, qui voudrait que le législateur peut à sa guise, parce que la
transparence est une vertu et que la
confidentialité est un vice, mettre de côté la confidentialité de la relation
avocat-client, me semble manquer un peu de nuance, et cela dit avec le
plus grand des respects.
La
Cour suprême, dans l'arrêt Blood Tribe, a pris la peine de dire : Le
secret professionnel du conseiller juridique n'est pas une exception au
principe juridique de notre société, elle est une caractéristique positive de
notre système juridique parce que dans un
système juridique complexe, où les droits des citoyens sont mis en péril tant
au civil, qu'au pénal, qu'au criminel,
il est essentiel qu'une personne puisse consulter un avocat avec la conviction
profonde que toute cette relation,
que toutes ces confidences, incluant le compte d'honoraires et le montant des
honoraires, seront confidentielles pour
toujours. Pourquoi? Parce que ce montant d'honoraires révèle ou est susceptible
de révéler la nature de la relation, de révéler, entre autres, combien d'efforts ont été déployés pour préparer
un procès : Est-ce que des experts ont été embauchés? Combien l'avocat... sur quelle base
travaille-t-il? Est-ce qu'il travaille à forfait? De déséquilibrer la dynamique
entre la partie demanderesse et la
partie défenderesse — et les
organismes de l'État jouent les deux rôles, des fois, ils sont
demandeurs, des fois, ils sont défendeurs — de les obliger à révéler à la
partie adverse combien ils ont dépensé, alors que la partie adverse n'aura
jamais cette obligation...
Mme de
Santis : Je parle maintenant de...
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
de Santis : Je parle maintenant des organismes publics qui dépensent
l'argent du public. Et le public a droit à l'information. Et vous êtes en... Et ici les arguments que vous
utilisez, qu'on va savoir combien d'efforts on est prêts à mettre pour faire une action ou pour se défendre,
etc., ici, on parle d'organismes publics. Est-ce que ces mêmes arguments
sont applicables au gouvernement?
M. Doray
(Raymond) : Bien sûr, parce que la Cour suprême a dit, dans l'arrêt
Campbell il y a 15 ans, que les organismes
de l'État avaient droit à la même protection du secret professionnel parce que
l'État défend la collectivité. Quand l'État s'en va à la cour pour
défendre un principe, pour se défendre à l'encontre d'une poursuite de
plusieurs millions, il défend l'intérêt public, il ne défend pas des intérêts
privés.
Mme
de Santis : J'aimerais savoir pourquoi vous avez cité Maranda et vous
n'avez pas cité les autres causes. Si je les avais vues dans votre
mémoire, je les aurais vérifiées. Alors, dans tous les cas, merci.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Oui, merci. Je pense que... Bonjour, MM. Lemay, Doray et
Le Grand Alary. Au plaisir de vous recevoir.
On tombe dans un bon sujet qu'on aime, celui du secret professionnel, entre autres. Mais, juste avant, vous avez écrit,
dans votre mémoire, que «la commission doit pouvoir compter sur les ressources
nécessaires à la pleine
réalisation de son mandat. Les délais de
traitement actuel des dossiers minent la crédibilité de la loi sur l'accès» et
minent la crédibilité aussi de la mission et de la fonction du
commissaire à l'accès à l'information.
Je
pense qu'on ne pourra pas le dire assez souvent et je suis contente que vous
l'écriviez parce qu'il y en a, des... il y a beaucoup de causes, il y a
beaucoup de délais, il y a beaucoup de retards, et parfois ça vient même nuire
à cette demande-là à l'accès parce que tu
dis : Bien, ça me donne quoi, si je vais attendre dans deux ans? Alors, on
réitère... je suis d'accord avec vous
qu'il faut réitérer cette fonction-là
essentielle et ce mandat que le
commissaire doit avoir. Est-ce que vous trouvez que le nombre de
commissaires est suffisant à la Commission d'accès à l'information?
M. Lemay
(Marc) : La réponse : non.
Mme Léger :
Combien vous pensez qu'il devrait y avoir de commissaires?
M. Lemay
(Marc) : Il devrait au moins y en avoir une dizaine pour...
Actuellement, il y en a sept, dont un... oui,
dont le président. Selon nos souvenirs, selon les informations qu'on a eues, il
y en a... Là, il faut que je fasse attention parce que je ne veux pas...
Le Président
(M. Ouellette) : ...qui va pouvoir compléter.
M. Lemay (Marc) : Il y en a au moins deux qui... un ou une qui est
sur le point de partir, puis l'autre qui est malade ou... Je vais faire
attention, comme on dit. Donc, officiellement, là, il a cinq personnes.
Et
j'attire votre attention, M. le Président, si vous me permettez, sur notre
mémoire, et, pour moi, c'est... excusez, là, je vais le dire en français, là, mais ça n'a pas de bon sens, ça n'a pas
d'allure. Quand on dit que le nombre de décisions en surveillance rendues, 287, le délai moyen de
traitement des enquêtes, 521 jours, le délai moyen pour la section
juridictionnelle de dossiers clos par
décision, 494 jours, le nombre de dossiers inscrits au rôle d'audience,
1 520, le nombre de décisions juridictionnelles rendues, 340... Là,
je pourrais continuer comme ça parce que... Et, dans le rapport de 2015‑2016,
le délai moyen de traitement des enquêtes, 357 jours, délai moyen pour la
section juridictionnelle des dossiers clos par décision, 537 jours.
Alors,
Mme la députée, il n'y a non seulement pas une amélioration, mais il y a de
sérieux problèmes. Entre 2014 et 2016, deux ans seulement, là, il y a
une énorme différence. Nombre de nouvelles demandes reçues, tous secteurs
d'activité, 2 514, c'est...
Le Président
(M. Ouellette) : Je comprends, Me Lemay, que vous faites
référence à votre mémoire.
M. Lemay
(Marc) : Oui, oui, à notre mémoire, oui.
Le Président (M. Ouellette) : Et je comprends que la source des informations
que vous nous donnez aujourd'hui... Est-ce que vous pourriez juste la
préciser pour les membres de la commission?
M. Lemay (Marc) : Rapport
de gestion 2015‑2016 et rapport annuel de gestion de la commission, 2014‑2015.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Me Lemay. Mme la députée de
Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Merci. Merci de nous rappeler tout ça.
Je veux revenir sur
le secret professionnel, évidemment. Alors, j'ai entendu Me Doray nous
donner un peu l'importance, dans le fond,
que ça pourrait être, une violation constitutionnelle, si on légiférait dans le
sens de lever, dans le fond, le
secret professionnel. Là, vous invoquez... entre autres, vous dites que ce
serait une violation du droit privé et... bien, en tout cas, ce qui
pourrait être soulevé qui serait une violation du droit privé. Mais c'est sûr
qu'on s'interroge des honoraires d'un avocat
dans l'exercice d'une fonction d'un organisme public et le droit à
l'information, et le droit à l'accès à l'information,
et tout l'intérêt public d'avoir ces informations-là via, en contrepartie, les
honoraires professionnels qui seraient
protégés, comme vous le dites. Mais vous nous donnez en lien que ça mettrait en
cause la relation de confiance entre
l'avocat et son client, parce que c'est ça qui est soulevé régulièrement. Mais,
si on inscrivait dans la loi, on légiférait, outre votre recommandation, si on légiférait malgré tout, on saurait
qu'on pourrait lever le secret professionnel pour un organisme public
pour donner accès aux informations, on le saurait d'avance.
Donc,
où vous voyez la... C'est pour ça que je fais le lien avec la relation de
confiance. Quand le client saurait que... à cause de cette loi-là, il saurait qu'il y aurait des documents, il y
aurait... les honoraires pourraient être diffusés publiquement parce que, là, quand vous parlez, moi, je pense à
ce qui existe actuellement. Il y a le secret professionnel, il est établi,
il est là. Mais, si on légifère, le client
saurait qu'on pourrait évoquer le secret professionnel au-delà que ça pourrait
être... retourner en cour, etc., là. Je ne sais pas si vous comprenez ma
question.
• (17 h 40) •
Le Président
(M. Ouellette) : Me Doray.
M. Doray
(Raymond) : M. le Président, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, je
comprends votre préoccupation et j'y
suis tout à fait sensible. Le Barreau est certainement sensible à votre
préoccupation, et son mémoire, je pense, démontre sa sensibilité à la
question de la transparence.
D'abord,
peut-être une petite précision. J'ai parlé d'atteinte à la vie privée tout à
l'heure, au droit à la vie privée. C'est
parce que l'article 8 de la Charte canadienne considère que toute
intrusion dans la sphère protégée, que ce soit d'une entreprise, d'un organisme public ou d'un
individu, est susceptible d'être une atteinte à la vie privée au sens large du
terme. Donc, ce n'est pas la vie privée au sens de la vie intime d'un individu,
mais bien de cette sphère protégée contre les intrusions
de l'État, d'où un risque, et je pense que l'Assemblée nationale et cette
commission doivent en être conscientes, que des modifications législatives qui viendraient mettre de côté le
secret professionnel avocat-client... Pour les autres secrets professionnels des 39 ou 40 autres
professions, ça ne pose aucun problème parce qu'ils ne font pas l'objet
d'une protection constitutionnelle. Mais, dans le cas du secret professionnel
des conseillers juridiques, il y a un corpus jurisprudentiel dont on ne peut
pas faire abstraction.
Et la logique de la
Cour suprême, il faut essayer de la comprendre, c'est que la Cour suprême nous
dit : L'intérêt public... Parce que
vous parlez de l'intérêt public à rendre accessible le montant des honoraires
payés par un organisme
public. Mais la cour nous dit : L'intérêt public, c'est aussi de permettre
aux organismes de l'État d'avoir une sphère
de confidentialité pour se défendre devant les tribunaux. On a deux intérêts
publics qui sont en conflit ici. Tout n'est pas noir, tout n'est pas blanc, j'en conviens parfaitement, mais il faut
faire attention de ne pas renoncer aveuglément au secret professionnel.
Et la jurisprudence
de la Commission d'accès à l'information... Il est faux de dire que la
commission a procédé par automatisme.
C'était vrai il y a 10 ans, mais la jurisprudence de la commission est très
nuancée, elle applique maintenant le droit
tel que la Cour suprême l'a énoncé, c'est-à-dire : présomption que le
montant des honoraires est protégé par le secret professionnel avocat-client, à charge pour le demandeur d'établir que la
révélation de ce renseignement ne divulguerait rien de la relation entre
l'organisme public et ses procureurs.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Mais aujourd'hui on a eu un gain par rapport au Journal de Montréal, qui
a remporté une bataille. Je ne sais pas si vous êtes au courant.
M. Doray (Raymond) : J'ai
plaidé cette cause jusqu'à la Cour d'appel, Mme la députée.
Mme Léger : «Le Journal
a remporté en Cour d'appel sa bataille contre une commission...
M. Doray (Raymond) : Je l'ai
comme perdue ce matin, à 9 h 8.
Mme Léger :
... scolaire qui refusait depuis des années de révéler combien d'argent public
avait été versé à ses avocats dans un dossier.
«"La loi sur l'accès à l'information donne
le droit d'accéder aux documents", ont affirmé sans équivoque trois juges
du plus haut tribunal de la province.» Alors :
«Depuis 2014,
la commission scolaire des Grandes-Seigneuries, entre autres, s'opposait
toutefois à révéler les honoraires d'avocat engendrés lors d'une action
collective.»
Alors, on
voit aujourd'hui que le secret professionnel... ce qui est dit : «Le
secret professionnel permet — celle de Terrebonne, parce qu'il y avait la commission
scolaire, il y avait aussi un problème avec la ville de Terrebonne — à
la ville de pleinement se défendre contre ceux qui la poursuivent en justice,
mais il ne la dégage pas de son imputabilité vis-à-vis de ses administrés,
rappelle le plus haut tribunal de la province. Le total des honoraires ne
révélera rien de confidentiel.»
Alors, c'est sûr que ça vient de tomber
aujourd'hui, ça.
M. Doray
(Raymond) : J'en ai pris connaissance, Mme la députée, ce matin, avant
de venir faire le voyage de Montréal à Québec, avec beaucoup de
tristesse, mais je ne commenterai pas une décision. Mais je vous rappelle qu'il
y a une Cour suprême qui est là pour
entendre les causes lorsqu'il y a une controverse jurisprudentielle, et il en
existe une partout au Canada sur cette question de savoir si les
honoraires d'avocat des organismes publics sont protégés ou non et dans quelles
circonstances. Donc, la décision de la Cour d'appel n'est probablement pas la
dernière étape de cette réflexion très importante.
Mme Léger : Non, ça, je
comprends ça très bien, que la Cour suprême peut venir...
Le Président (M. Ouellette) :
...faire une annonce, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : ...mais, entre
autres, je vais quand même...
La Cour d'appel a quand même pris cette décision-là, sachant tout ce que vous nous avez quand même
dit auparavant, et ça a été quand même sa décision. Alors,
la cour, notre plus haute cour du Québec, n'entend pas la même chose que
ce que vous nous avez évoqué, malgré tout. Alors, sans rentrer dans celle-là, là, mais je parle... Moi, je reste toujours
dans l'idée du secret professionnel. Qu'est-ce qui est... en tout cas,
qu'on a à réfléchir comme législateurs, là?
M. Doray
(Raymond) : Sans vouloir
commenter plus à fond une décision dont mes clients ont pris
connaissance eux aussi aujourd'hui, simplement pour vous dire que la cour a quand même appliqué les
principes voulant que le montant des
honoraires soit prima facie protégés par le secret professionnel, mais elle a conclu que, dans les deux dossiers qui
lui étaient soumis, les montants d'honoraires ne révélaient rien de la relation
dans ce cas-là. Donc, dans une évaluation au
cas par cas et non pas de façon totale et automatique, dans ces cas-là, ça ne
révélait rien de la relation, d'autant plus que les litiges étaient terminés. Cependant, en matière d'accès à
l'information, faut-il le rappeler, les décisions sont rendues et
doivent être interprétées par la commission, analysées par la commission au
moment où la décision du responsable est rendue, ce qui n'est pas exactement ce
que la Cour d'appel a décidé en l'instance, avec respect, là.
Mme Léger :
Je peux comprendre qu'il peut y avoir beaucoup de nuances, mais ce que je
comprends aussi, c'est que le total
des honoraires, selon ce qu'a dit les juges, ne révèle rien de confidentiel.
Donc, il y a peut-être un espace entre ce
qui peut être confidentiel, ce qui ne l'est pas, selon les types de causes, il
y a peut-être un espace pour le législateur pour répondre aussi au fait que les organismes publics n'invoquent que le
secret professionnel pour ne pas donner accès aux documents. Je reviens toujours à l'idée qu'on veut
avoir accès aux documents, puis, quand, systématiquement, il y a une
réponse puis un refus catégorique de ne pas avoir accès, il y a comme... il
faut trouver l'espace pour... il faut trouver la solution, là.
M. Doray
(Raymond) : Vous avez parfaitement raison. Et d'ailleurs l'état du
droit, ce n'est pas que c'est automatiquement protégé, c'est que c'est prima
facie protégé. Mais, étant donné qu'il s'agit d'un principe de justice fondamental, bien, c'est celui qui veut démontrer
qu'on est dans un cas où la protection ne s'applique pas parce que ça ne
révèle rien de la relation avocat-client ou notaire-client qui a le fardeau
d'établir qu'on devrait lui donner accès à ces renseignements-là. Et c'est vrai que ça va à l'encontre des principes en
matière d'accès à l'information. D'habitude, c'est l'organisme qui doit démontrer la confidentialité,
et le demandeur a droit aux documents, l'article 9 de la loi sur
l'accès le dit expressément. Mais, puisqu'ici on a conflit entre deux droits
fondamentaux, et un qui est même une protection constitutionnelle... Le droit
d'accès à l'information, permettez-moi de le dire, n'a pas de protection
constitutionnelle. J'écoutais les gens de la
Commission des droits de la personne, tout à l'heure, dire que ces deux
droits-là étaient sur le même pied.
Que l'on lise l'article 44 de la Charte québécoise des droits et libertés
de la personne, on dit : «Toute personne a droit à l'information,
dans la mesure prévue par la loi.» C'est donc un droit relatif, ce n'est pas un
droit constitutionnel.
Le Président
(M. Ouellette) : Gardez-vous-en un peu pour la Cour suprême, Me
Doray.
M. Doray
(Raymond) : Pardon?
Le Président (M. Ouellette) : J'ai dit : Gardez-vous-en un peu pour la
Cour suprême. Vous allez probablement... On réentendra probablement
certains de ces arguments-là. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Lemay,
Me Doray, Me Le Grand Alary, bonjour. Merci d'être présents
aujourd'hui.
Donc, pour poursuivre
sur ce que ma collègue disait, dans le fond, avec vos propos, je comprends que
la Commission des droits de la personne, ce qu'elle affirmait devant nous tout
à l'heure, ce n'est pas exact en vertu de l'état du droit.
M. Doray
(Raymond) : Avec respect, je ne le crois pas.
M. Jolin-Barrette :
Parfait.
M. Doray
(Raymond) : C'est vrai que les droits doivent être interprétés les uns
par rapport aux autres, mais il y a des droits plus importants que d'autres.
• (17 h 50) •
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question du secret professionnel,
j'avais des questions, mais je pense que vous avez fait le tour pas mal,
puis on va suivre l'appel à la Cour suprême et le jugement, éventuellement.
Je
voulais vous poser une question par rapport au point 6.1 de votre mémoire,
les demandes abusives, à la page 10. Dans le fond, on a eu des
représentants qui sont venus, notamment le Centre québécois du droit de
l'environnement, qui nous donnaient un
exemple par rapport à 137.1 de la loi sur l'accès, qui dit : Quand on
présente une demande qui est volumineuse,
souvent, on peut être interprété comme un organisme public comme étant
quérulent. Dans le fond, ils vont nous dire : Écoutez, vous en demandez trop large, puis ce n'est pas
pertinent, ce que vous demandez, donc on refuse de vous transmettre
cette information-là. Eux, ils donnaient l'exemple des 150 forages puis ils
disaient : Bien, écoutez, il y a eu 150
forages, on veut avoir les relevés des 150 forages. Comment est-ce qu'on devrait interpréter cette disposition-là, puis s'il y a des modifications à
apporter?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Doray.
M. Doray
(Raymond) : Écoutez,
l'article 137.1, qui était antérieurement l'article 126 de la loi sur l'accès, qui permet aux responsables de l'accès de demander à
la commission l'autorisation de ne pas traiter une demande parce qu'elle est abusive en raison de la quantité de documents demandés, principalement, le caractère systématique des demandes pose effectivement problème.
Et je pense que la commission a très bien identifié, dans son rapport
quinquennal, une problématique qui requiert
une intervention de l'Assemblée nationale. À
l'heure actuelle, cette disposition sert trop souvent pour
empêcher des personnes d'exercer leur droit d'accès à l'information, et en plus, à cause des délais à la Commission d'accès à l'information, c'est dans deux ans qu'on vous dira que votre
demande est abusive. Il faut laisser beaucoup
plus de flexibilité.
La
proposition de la commission, comme d'ailleurs de nombreuses propositions dans son rapport
quinquennal... Ça fait plus de 30 ans que je suis les travaux de la commission,
et c'est le meilleur, et de beaucoup, le meilleur rapport que la commission a produit devant l'Assemblée nationale, qui va
très loin et qui est très bien articulé. Sur cette question-là, la commission a parfaitement raison, il
faut lui permettre de moduler les
décisions qu'elle peut rendre et, par
exemple, de dire à un organisme public : Bon, la demande est peut-être
très vaste, mais vous allez la traiter dans un délai de 60 jours ou de
90 jours. Mais, à l'heure actuelle, le régime ne permet pas ça. La
jurisprudence de la Cour du Québec dit : La commission doit déterminer
qu'une demande est abusive ou elle n'est pas abusive. Si elle est abusive, elle
doit autoriser le responsable à ne pas la traiter, alors que ça
mériterait une approche beaucoup plus nuancée.
Aujourd'hui,
les moyens techniques permettent aux organismes publics de répertorier des documents,
surtout ceux qui prennent la peine de bien
classer leurs documents. Et, deuxièmement, si on ne peut pas le faire en 20 jours...
Au fédéral, c'est usuel. Au fédéral, vous
faites une demande d'accès, et le responsable de l'accès vous appelle pour vous
dire : Écoutez, je ne serai pas capable, étant donné... j'ai évalué qu'il y a des centaines de boîtes de documents.
Qu'est-ce qui est prioritaire pour vous? Je vais le traiter d'abord,
et ensuite je traiterai ce qui est secondaire, et je devrais être en
mesure de le faire sur une période de trois mois.
Au Québec, le régime
est malheureusement, à cet égard-là, déficient, et on ne permet pas cette
flexibilité. À tout le moins, le responsable
peut toujours le faire, il n'y a rien qui lui interdit de le faire, mais la
façon dont la loi est conçue, la
commission ne peut pas imposer à l'organisme public, par exemple, un calendrier
de traitement des demandes, ce qui serait tout à fait opportun.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Donc, par vos propos, je comprends qu'on devrait
peut-être modifier la loi pour, dans certaines circonstances, éliminer le délai de 20 jours et le délai de 10 jours
supplémentaires pour permettre, lorsque les dossiers sont extrêmement
volumineux, de permettre au responsable de l'accès à l'information de
transmettre de l'information parce que ce
qui peut arriver aussi dans certaines circonstances, c'est que l'organisme va
dire non, et là va voir si la personne va aller en révision, et là, à ce
moment-là, avant d'arriver à la date d'audition, va rendre publics les
documents aussi. C'est des choses qui se font.
M. Doray
(Raymond) : On pourrait peut-être inverser le fardeau, et, si le
responsable pense qu'il n'est pas capable de traiter la demande dans un
délai de 20 jours, qu'il demande à la commission l'autorisation de pouvoir...
M. Jolin-Barrette :
Prolonger.
M. Doray
(Raymond) : ...procéder au traitement de la demande dans un délai de
60 jours. À ce moment-là, ce n'est
pas le citoyen qui a le fardeau de courir, c'est le responsable qui devra
s'expliquer, pourquoi il ne peut pas accéder à l'intérieur d'un délai de
20 jours, qui est un délai relativement court, il faut en convenir.
M. Jolin-Barrette :
Au point 6.7 de votre mémoire, «conformité des ententes
intergouvernementales et des traités à la
loi sur l'accès», la recommandation 59, donc, vous proposez d'exiger la
consultation préalable ou l'avis de la commission
avant la conclusion ou la ratification des ententes. Pouvez-vous nous
l'expliquer, qu'est-ce que ça signifie, dans le fond, lorsqu'on se retrouve avec des ententes intergouvernementales,
avec de la communication de renseignements qui sont de nature privée?
M. Doray
(Raymond) : Je dois vous
dire que je n'étais pas auteur de ce document-là, dont je partage l'essentiel du
contenu, mais, cela dit, je crois comprendre que le Barreau souscrit à la
position de la commission qu'avant que des ententes
ne soient signées, qui peuvent mettre en cause notamment la protection
des renseignements personnels, que la commission soit consultée. Et
on sait qu'à l'heure actuelle c'est de
plus en plus problématique. Il y a un
chapitre complet du rapport de la commission
qui traite notamment du principe d'équivalence et du risque que court
la loi québécoise de se voir reconnaître comme étant... n'offrant pas une protection
adéquate au regard des pays membres de l'Union européenne, d'où une importance
de consultation à tout ce qui a... j'allais dire un volet
transnational ou international, là. Bien, que ça ne relève pas de la
compétence juridictionnelle du Québec de prime abord, rien n'interdit que la commission
ne soit consultée, à tout le moins quand le gouvernement du Québec en est
informé.
M. Jolin-Barrette : Oui. Sur un autre point, le rôle du syndic, dans le fond, vous êtes préoccupés par le fait... par les recommandations de
la commission par rapport au rôle du syndic à l'intérieur d'un ordre
professionnel. Quelles sont vos préoccupations?
M. Doray
(Raymond) : Écoutez,
la position de la commission, que l'on peut très bien comprendre, c'est que
la disposition qui a été ajoutée en 2006
dans le Code des professions et qui prévoit que le syndic d'un ordre
professionnel peut refuser de communiquer un
renseignement ou un document qui révèle une enquête en cours, le contenu d'une
enquête en cours ou sujette à réouverture, est très large et, selon la jurisprudence,
fait en sorte que peu de renseignements en provenance d'un bureau de syndic
sont accessibles à l'heure actuelle.
La
position du Barreau, c'est de dire : C'est un domaine extrêmement délicat. La question des enquêtes menées par un syndic, c'est la protection du public qui est
en cause, et souvent les enquêtes se font à l'insu du professionnel. Le
syndic reçoit des plaintes. Il a une obligation,
dans le Code des professions, d'informer le demandeur d'enquête à tous les
30 jours de l'état d'avancement de son
enquête. Donc, il y a un régime de transmission de l'information. On n'en parle pas du tout, dans
le rapport de la Commission d'accès à
l'information, mais il y en a un,
régime. Pour le demandeur d'enquête, il doit obligatoirement être informé de l'état d'avancement de l'enquête. Et le
professionnel qui fait l'objet d'une enquête du syndic, lui, bien, il aura droit à une communication complète de la
preuve parce qu'on sait qu'en matière disciplinaire les mêmes principes
qu'en matière de droit pénal et criminel s'appliquent : c'est la
transmission de la preuve au moment où des plaintes disciplinaires sont
déposées.
Donc,
il faut faire attention de dire : Bien, écoutez, on devrait appliquer
aux syndics le même régime que l'article 28 de la loi sur l'accès puisque, dans
le fond, des syndics, c'est des
polices du monde professionnel. Il y a déjà un régime. Il faut tenir compte de ce
régime.
Et il y a
aussi la problématique du secret professionnel. Le professionnel qui
fait l'objet d'une enquête, qui est interrogé par son syndic, est tenu
de répondre, ce qui n'est pas le cas en matière pénale et criminelle, où on a
droit au silence. Et en plus il ne peut pas
invoquer le secret professionnel de sa relation avec son client. Il doit tout
fournir au syndic. Alors, de mettre en place un régime d'accès au
dossier du syndic pose de graves problèmes de respect du secret professionnel, de présomption, d'une certaine
manière, de protéger le professionnel avant qu'il ne soit interpellé
devant un comité de discipline. Et je pense que les règles de protection des
renseignements personnels et aussi de protection de l'individu qui exerce une
profession avant qu'il ne soit interpellé commandent que l'on ne divulgue pas
sur la place publique ce qui ne fait l'objet
que d'une enquête. Il n'est encore pas accusé. Et, pour le demandeur, bien, il
a déjà droit à un régime qui oblige le syndic à l'informer de l'état
d'avancement de l'enquête.
Donc, il faut
tenir compte de l'ensemble de ces facteurs-là avant de tirer la conclusion que
la disposition actuelle, 108.4, je pense, du Code des professions est
trop restrictive. C'est la position essentiellement du Barreau.
Le
Président (M. Ouellette) : C'est terminé. Me Marc Lemay, Me Raymond Doray, Me Nicolas Le Grand
Alary, représentant le Barreau du Québec, merci d'être venus déposer en
commission.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
demain, où elle continuera ses auditions. Merci.
(Fin de la séance à 18 heures)