(Dix-sept
heures dix minutes)
Le Président
(M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Je demande
à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 113, Loi
modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives en matière
d'adoption et de communication de renseignements.
M. le secrétaire, il
y a des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Merlini (La Prairie) est remplacé par M. Bourgeois
(Abitibi-Est) et Mme Montpetit (Crémazie), par M. Habel (Sainte-Rose).
Étude détaillée (suite)
Le Président (M. Ouellette) : Pour les gens qui nous écoutent et qui ne nous
verront pas pour la prochaine heure de
travail, lors de l'ajournement de nos travaux, hier soir, nous étions rendus à
l'étude de l'article 7. Et nous sommes dans la section adoption coutumière autochtone. C'était
Mme la députée de Joliette qui avait la parole. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon : Oui, merci, M. le Président. Donc, ma
première question, c'était que... «L'autorité compétente pour
délivrer un certificat d'adoption
coutumière autochtone est une personne ou un organe domicilié au Québec
désigné par la communauté ou la nation autochtone.» Donc, je voulais
savoir, une personne... J'étais un peu perplexe par rapport à une personne seule, genre un individu, il me semble que c'est
une large responsabilité à faire porter à une seule personne.
Donc, je voulais comprendre ce qui est envisagé puis pourquoi c'est libellé
comme ça.
Mme Vallée : Bien, en fait, ces libellés-là font suite aux discussions
qui ont eu lieu à l'intérieur du groupe de travail sur l'adoption
coutumière en milieu autochtone, et c'est les parties, lors des travaux, qui
ont convenu de l'importance d'identifier une
personne. Puis, lorsqu'on parle d'une personne, évidemment,
c'est une personne qui serait, ultimement, là, à l'emploi d'une organisation publique autochtone ou qui serait désignée par un organisme
public autochtone, donc il
y a quand même un caractère
officiel à la désignation de la personne, et donc ce serait le caractère qui nous
amènerait à déterminer... Bon. Et puis, lorsqu'on parle de l'organe,
bien, c'est une instance, là, c'est une personne publique.
Mais la personne
physique, ça pourrait être l'équivalent, je vous dirais, peut-être d'une personne
qui est le directeur de la protection de la
jeunesse, donc on aurait un ou une
individu... ou notre Directeur de l'État civil, qui est un individu qui est désigné. Alors là, ce serait une personne
désignée par soit le conseil ou soit par... qui est à l'emploi, par exemple, des services sociaux de la communauté
ou de la nation.
Mme Hivon :
Puis pour quelle raison on veut vraiment venir, par exemple, désigner une personne
plutôt que l'entité, mettons la commission des services sociaux ou...
Mme Vallée :
C'est vraiment... c'est dans le contexte des échanges qui ont eu cours. Pour
certains, pour certaines communautés,
pour certaines nations, ce sera une organisation, un organe, puis, pour
d'autres communautés ou d'autres nations,
ce sera une personne, au même titre... Et puis je fais le parallèle, là. Ici,
au Québec, on a notre Directeur de l'état civil, c'est une personne. Il a quand même un statut officiel, une
fonction officielle, mais ça ne demeure pas moins que c'est une personne
qui a la responsabilité, qui est le Directeur de l'état civil.
Mme Hivon :
Mais, au sens de la loi, est-ce que, le Directeur de l'état civil, on
l'appellerait «personne» ou on l'appellerait
«organisation»? Parce que c'est comme le Directeur général des élections, le
Vérificateur général; c'est des personnes, mais ce sont des
organisations. Je comprends ce que la ministre dit, là...
Mme Vallée :
C'est la personne.
Mme Hivon :
C'est la personne? Ah oui?
Mme Vallée :
Oui, c'est la personne. Comme le DPCP, c'est la personne, c'est la directrice...
Mme Hivon :
On dirait «la personne» dans une loi?
Mme Vallée : Oui.
M. Jolin-Barrette : Bien
non, mais... Excusez, est-ce que je pourrais intervenir? Dans la loi, on dit «le
Directeur d'état civil» ou «la Directrice des poursuites criminelles et pénales», on ne dit pas «la personne qui occupe la
fonction». C'est un titre.
Mme Vallée : Mais ici c'est l'autorité compétente. Donc,
l'autorité compétente, on ne peut pas lui donner de nom, parce qu'il y
aura autant d'autorités compétentes qu'il y a de nations. Donc, dire... insérer
au Code civil le nom de l'organisation, on ne peut pas le faire. Chaque nation
ou communauté va désigner l'autorité compétente. Mais cette désignation-là, ce sera... devra faire une
désignation en vertu des dispositions du Code civil, et ça deviendra la
personne. Donc, c'est, dans le fond, la personne qui est l'autorité
compétente.
M. Jolin-Barrette : Mais l'autorité compétente, là, dans toutes les
nations, là, c'est une institution en soi. Tu sais, ce que je veux dire,
là, l'attribut de l'autorité compétente, là, un coup qu'elle va devenir
autorité compétente, elle est l'autorité
compétente. C'est ça, l'institution. Ce n'est pas la personne parce qu'elle
n'est pas inamovible, cette personne-là, dans le poste, là.
Une voix : C'est le titre.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme Vallée :
Bien, en fait, il faut se garder de faire un peu le parallèle avec nos
institutions, ce n'est pas la même chose.
Il y a quand même une distinction, et c'est la raison d'être de cette
reconnaissance de l'adoption coutumière autochtone.
Donc, c'est
un individu qui est là, qui est désigné comme autorité compétente en raison de
sa connaissance de la coutume, en
raison de sa connaissance fine de ce qu'est la coutume de la nation ou la
coutume de la communauté qui lui permettra de déterminer si, dans les faits, la
situation qu'on lui présente est un cas d'adoption coutumière autochtone
ou n'en est pas un. Ce n'est pas tout le monde au sein de la communauté qui a
cette connaissance fine.
M. Jolin-Barrette : Bien, a contrario aussi, il peut y avoir deux
individus membres de la communauté qui auraient cette connaissance fine là ou même davantage de connaissances que la
personne désignée comme autorité compétente. Donc, ce qu'on vient qualifier, c'est l'autorité. Puis la personne qui
sera désignée dans la communauté pour être l'autorité compétente, bien,
elle ne sera pas là tout le temps, là, donc c'est vraiment le poste et non pas
la personne, c'est l'institution. Puis ça va
être les gens à l'intérieur de la communauté qui vont venir dire : Bien,
pour cette période de laps de temps là, c'est cette personne-là qui est
l'autorité compétente. Mais ce n'est pas la personne, c'est l'autorité.
Mme Hivon :
J'imagine qu'on utiliserait... La personne, en fait — je veux comprendre, là — c'est qu'on désignerait une personne qui occupe... pas nécessairement la
personne elle-même, là, Mme Awashish, là, mais on désignerait le poste,
par exemple, dans une organisation. Est-ce que c'est ça, dans le fond? Plutôt
que de dire : L'organisation en elle-même est l'autorité compétente, ça pourrait être telle
personne qui occupe tel poste, sans nommer la personne, mais que ce soit une
responsabilité, par exemple, fixe dans une
organisation, comme la DPJ, là, la directrice, mettons, de la protection de la
jeunesse et non pas l'institution, mettons
qu'on voulait rendre très personnel un poste en particulier. Je ne sais pas si
c'est ça qu'on veut refléter.
• (17 h 20) •
Mme Vallée :
Bien, en fait, on a utilisé un libellé qui était large, qui permettait une
flexibilité parce que, dans le cadre
du groupe de travail, s'il y a un constat qui a pu se dégager, c'est que, selon
les nations, la réalité n'était pas la même,
et la vision de ce à quoi ressemblerait l'autorité compétente n'était pas la
même. Donc, pour certains, par exemple, on a déjà... On sait déjà, là, que, dans le milieu inuit, on envisageait
que l'autorité compétente serait le Bureau d'inscription du Nunavik. Ça, ça avait été identifié comme étant
potentiellement l'autorité qui serait désignée comme étant l'autorité
compétente. Mais, dans d'autres communautés, si on pense peut-être à une petite
communauté qui n'a pas toute cette structure-là en place, la communauté pourra
désigner une personne, comme je le mentionnais tout à l'heure, qui a les connaissances de la coutume et qui pourra indiquer
que l'autorité compétente, elle est exercée par M. ou Mme Untel qui
agit en sa qualité de représentant de l'autorité compétente.
Puis, c'est
ça, évidemment, dans notre corpus législatif, on en a aussi, des références à
des personnes. Dans la loi sur l'administration gouvernementale, donc, à l'article 3 : «Est
considérée comme un organisme, une personne [qui est] nommée ou désignée par le gouvernement ou par un ministre, avec le personnel qu'elle dirige, dans le cadre
des fonctions qui lui sont attribuées
par la loi, le gouvernement ou le ministre.» Mais évidemment c'est un exemple, là, peut-être pour donner, dans notre réalité à nous...
Et on prévoit...
M. Jolin-Barrette : ...la
personne a un titre.
Mme Vallée : Elle est
désignée.
M. Jolin-Barrette : Mais c'est
ça, elle a un titre.
Mme Vallée : Mais, dans le cas qui nous occupe, la personne,
elle est désignée aussi, ce n'est pas autoproclamé, là, puis elle va
avoir un titre.
M. Jolin-Barrette :
Mais c'est juste... Moi, je vous dis, là...
Mme Vallée : C'est que, là, on utilise le terme «autorité
compétente», qui est un terme large, mais chaque nation, comme je le
mentionnais tout à l'heure, va la désigner, cette autorité compétente là, dans
le sens que, oui, ça va être l'autorité
compétente qui va porter telle désignation dans... je ne sais pas, au sein de
telle nation ou au sein de telle communauté.
M. Jolin-Barrette : Mais sa
désignation, c'est d'être l'autorité compétente. C'est ça, sa désignation.
Mme Vallée : Oui. Oui,
mais le titre...
M. Jolin-Barrette : Mais ce que je veux dire, c'est elle qui délivre
le certificat d'adoption aussi. Donc, ce n'est pas monsieur X
qui délivre le certificat, c'est l'autorité compétente, puis le poste...
Mme Vallée :
Monsieur X en sa qualité d'autorité compétente.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme Vallée : C'est ça.
M. Jolin-Barrette : Mais ce
n'est pas monsieur X.
Mme Vallée : Non, c'est monsieur X en sa qualité
d'autorité compétente qui pourra porter le nom de, je ne sais pas, moi... Mais, au même titre que notre Directeur de l'état civil, lorsqu'il signe les
registres, il les signe en sa qualité de
Directeur de l'état civil. Lorsque je signe des documents officiels en ma
qualité de registraire officielle, je signe mais en ma qualité de registraire officielle. Donc, c'est la même chose pour
l'autorité compétente, qui va signer, qui va attester en sa qualité d'autorité compétente et non pas en
sa qualité de Stéphanie Vallée ou de Simon Jolin-Barrette. Et là je sais
que je viens de commettre un impair.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Le
Président (M. Ouellette) : Tout un impair, Mme la
ministre! Une chance qu'il n'y a pas
de TV! Bon, on ne vous en tiendra pas rigueur.
Mme Vallée : Scandale!
Le Président (M. Ouellette) :
Oui. Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Bien, en fait, moi, ma question,
là, pour «personne», c'est : Est-ce que, par exemple, ça peut être,
comme je disais tantôt, Mme Awashish, qui n'est reliée à aucune institution,
pas reliée au conseil, pas reliée à... vous comprenez, juste parce qu'elle est
une sage, par exemple, dans la communauté, elle connaît la coutume — ça,
ça m'apparaîtrait peut-être complexe — ou si c'est Mme Awashish
parce que, par exemple — je
dis n'importe quoi, là — elle est greffière du conseil ou elle est la
personne en charge, là, vous nous disiez, des inscriptions? Donc, c'est ça
que je veux savoir comme nuance.
Mme Vallée :
Oui, bien, Mme Awashish va signer en sa qualité d'autorité compétente
dûment désignée par le conseil.
Mme Hivon : Oui,
ça, ça va.
Mme Vallée :
Alors, elle sera l'autorité compétente une fois qu'elle aura été désignée en
cette qualité par le conseil, le conseil tribal, par le conseil de
bande.
Mme Hivon :
Oui, ça, je comprends. C'est qu'une fois qu'elle est désignée, évidemment, elle
devient, au sens de l'article, l'autorité compétente. Ça, je comprends.
Pour qu'on
choisisse quelqu'un... Ce que je veux dire, c'est qu'on ne choisit pas,
j'imagine, un simple membre de la
communauté, là, qui n'a pas de titre, qui n'a pas de fonction particulière. Je
ne sais pas si vous me suivez. Ça peut être une personne dans une
institution ou dans une organisation mais pas une simple citoyenne, là.
Mme Vallée :
Bien, c'est ça, c'est ce que je... D'entrée de jeu, on disait que cette
personne-là, c'est une personne qui
serait, ultimement, déjà à l'emploi d'une organisation publique autochtone ou
qui serait désignée par une organisation politique autochtone. Donc, ce n'est pas un coup du hasard, un coup de
dés, là, qui amène qu'une personne soit désignée comme autorité
compétente.
Mme Hivon : C'est
ça, ma question, en fait, là. Il faut qu'elle ait un lien...
Mme Vallée :
Il y a un lien.
Mme Hivon :
...par exemple, avec une entité pertinente pour ce genre, je dirais,
d'évaluation là dans la communauté,
là. Ma question, c'est... Tu sais, on
ne choisira pas, c'est ça, quelqu'un qui n'a aucun lien avec une entité juste parce
que, par exemple, elle a une grande connaissance de la coutume.
Mme Vallée : Ce n'est pas l'intention, mais évidemment
l'intention, c'est que l'autorité compétente ait une grande connaissance
de la coutume.
Mme Hivon :
Oui, oui, tout à fait.
Mme Vallée : Mais évidemment c'est clair, en tout cas, c'est clair,
c'était clair lors des discussions du comité de travail, puis c'est clair, dans notre esprit, que c'est quelqu'un
qui a soit un lien d'emploi ou qui est désigné par l'organisme politique.
Donc, il y a vraiment un lien entre les organisations. Et cette
personne-là, elle est désignée puis elle est désignée publiquement.
Donc, sa qualité d'autorité compétente, c'est de nature publique, c'est connu
de la communauté. Mais évidemment on laisse le processus de nomination
aux communautés, qui verront chacune à identifier le processus qu'elles choisiront. Il y a vraiment
une volonté aussi, là... Le libellé a été pensé en fonction de respecter la
diversité des réalités qui seront rencontrées.
Mme Hivon : O.K. Parce
que, moi, ça m'apparaît plus, je
dirais, stable de... ça peut être une personne, mais que quelqu'un soit
désigné, pas comme Mme Awashish — pauvre Mme Awashish, si
elle nous écoute, elle doit sentir un lourd
fardeau sur les épaules — mais,
ce que je veux dire, un poste, donc une personne, mais c'est un poste qu'on
désigne. Parce que,
si, par exemple, on désignait une personne vraiment
physique, cette personne-là tombe malade ou elle doit s'absenter pour une période donnée, là ça voudrait
dire qu'on doit refaire l'acte de désignation, puis tout ça, alors que, si
on désigne une personne mais au sens où un
poste, une fonction qui est occupée dans la communauté, il me semble que c'est plus pérenne, c'est plus stable que de désigner une
personne physique.
Mme Vallée :
Bien, c'est une personne physique qui occupe la fonction.
Mme Hivon :
Oui. Ça, je comprends.
Mme Vallée :
Puis, en cas d'incapacité, évidemment, cette personne-là est remplacée par une...
Mme Hivon : Puis il
faudrait refaire... C'est parce que, si on nomme... En tout cas, c'est
peut-être technique, mais ce que je
veux dire, c'est que, mettons qu'on dit... Le greffier — c'est n'importe quoi — bon, c'est une personne qu'on désigne, mais c'est par le titre qu'on désigne. Le
greffier du conseil, par exemple, bien là, si le greffier est malade, puis
on le remplace, bien, il y a encore un greffier, ce n'est pas monsieur X.
Mme Vallée :
Mais c'est ça. En fait, c'est l'autorité compétente...
Le Président
(M. Ouellette) : N'oubliez pas qu'on est juste en audio et que...
Je vois que...
Mme Vallée :
Oui. Oh! c'est vrai, on est beaucoup dans la gestuelle.
Le Président (M. Ouellette) : Et j'ai quelqu'un qui pédale en arrière de la
salle. S'il vous plaît, aidez-le. Merci.
Mme Vallée :
Désolée, désolée. En fait, oui, on va essayer de... Il y a une discussion ici.
Mais en fait c'est exactement le même principe que l'exemple de notre
collègue, c'est l'équivalent de notre greffier. Notre greffier, la fonction de greffier, elle est accomplie par un
individu. Si cet individu-là devient... est placé dans une incapacité d'agir,
la fonction de greffier demeure. Même chose
pour l'autorité compétente. C'est que l'autorité compétente, elle peut être
composée de plus d'une personne. Ça peut être un organe ou ça peut être une
personne, au même titre, comme je le mentionnais...
comme le Directeur de l'état civil. Mais il n'en demeure pas moins que, si la
personne vient qu'à être en incapacité
d'agir, c'est le conseil qui va voir à son mode de remplacement en fonction des
critères que le conseil aura établis, dont la connaissance de la
coutume.
Mme Hivon :
Moi, pour ce bout-là, je pense que ça va. Je ne sais pas si...
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Juste là-dessus, là, vous dites «personne ou
organe domicilié». Votre terme, «personne», ça comprend la personne
morale?
Mme Vallée :
Oui, en fait, organisme, organe...
M. Jolin-Barrette : Mais «organe», c'est comme la personne morale,
puis «personne», c'est comme votre personne physique.
Mme Vallée : C'est ça.
M. Jolin-Barrette : O.K. Ça va
aller.
Le Président (M. Ouellette) :
Ça va?
Mme Hivon :
Mais ce n'est pas... Hier, j'avais demandé... Je ne sais pas, vu que, là, on
parle encore de l'autorité compétente,
là... Vous nous avez donné l'exemple, par exemple, du Bureau d'inscription du
Nunavik. Donc, ça, ça pourrait être un exemple. Je demandais à la
ministre si elle avait des exemples. Je comprends que tout ça, c'est...
Mme Vallée : Puis, pour
le milieu cri, l'exemple, c'est le Conseil cri de la santé et des services
sociaux de la Baie-James. Parce qu'il y a quand même eu plusieurs discussions,
alors...
• (17 h 30) •
Mme Hivon :
O.K. Puis là la ministre me corrigera, mais je comprends qu'à l'origine tout le
travail, le rapport, tout ça, c'était essentiellement la réalité de
l'adoption coutumière chez les Inuits et les Cris. Est-ce que c'est bien ça? C'étaient les deux nations qui étaient concernées
par la réalité de l'adoption coutumière, puis là il y a
un élargissement, à la suite des
auditions qu'on a eues, mais l'adoption coutumière, là, dans, je dirais, sa réflexion de
base, c'était beaucoup pour...
Il me semble, là, quand on l'avait travaillé sous notre gouvernement, que
c'étaient les Inuits et les Cris.
Mme Vallée : En fait, il
y a certaines... Il y a notamment
les Inuits et les Cris. Je pense qu'ils ont été les premiers, là, à manifester l'intérêt, mais si... parce que
le concept de l'adoption, avec rupture du lien de filiation, était majoritairement là. Puis c'est d'ailleurs pour ça qu'hier on a annoncé notre volonté
d'élargir à la tutelle coutumière autochtone, parce que, dans plusieurs
autres communautés, c'est une autre réalité qui est vécue, qui n'est pas celle
de l'adoption.
Mme
Hivon :
La raison pour laquelle j'amène ça, c'est que, dans le fond, on se casse la
tête à savoir quelle nation, quelle
communauté, quelle autorité, mais, dans le fond, si c'est essentiellement pour
les Inuits et les Cris, et que, là, la ministre
nous dit déjà ce qui est prévu... Je comprends qu'il pourrait y en avoir
d'autres, parce qu'il y a peut-être d'autres communautés qui ont de l'adoption
coutumière, mais de ce qu'on a entendu lors des auditions, les autres qui sont
venus nous faire part, donc Uashat, les Attikameks, ils venaient nous parler beaucoup
plus d'une notion de garde coutumière ou sans rupture du lien.
Donc, on va
le voir plus tard, mais, de ce que je comprends, en fait, des travaux que vous
avez faits, qui ont été faits, c'est beaucoup l'adoption coutumière liée
aux nations cries et inuites. C'est ça?
Mme Vallée : Beaucoup, oui,
mais on...
Mme
Hivon : ...mais ça
n'exclut pas qu'il pourrait y avoir...
Mme Vallée :
Exactement. On ne veut pas fermer la porte parce qu'il peut y avoir... un,
parce que la coutume est évolutive,
ça, c'est déjà là, et il peut se développer des pratiques... compte tenu qu'on
reconnaît maintenant que l'adoption coutumière
autochtone est reconnue, bien, est-ce qu'on ne souhaitera pas, dans les
communautés, établir... dans certains cas,
avoir recours à l'adoption coutumière autochtone? Et on ne veut pas fermer la
porte aux communautés qui souhaitent se
prévaloir de cette disposition-là, au même titre qu'on ne veut pas fermer la
porte aux communautés qui voudront se prévaloir des dispositions de la
tutelle.
Mme
Hivon :
O.K., sauf que, M. le Président, en théorie, puisque les travaux ont été faits,
ça fait un certain moment, de ce que
je comprends, puis tous ces travaux-là avaient pour objectif de documenter la
réalité de l'adoption coutumière, c'est
un peu comme si, à ce jour, ce qui a été documenté, comme réalité de l'adoption
coutumière, ça relève beaucoup de ce
qui se passe dans les communautés cries et inuites. Parce que la question que
je me pose, c'est, vu qu'il y a eu ces travaux-là de faits, un rapport puis,
là, projets de loi 1, 2, 3, on l'aurait su s'il y avait vraiment une
pratique d'adoption coutumière
différente de la garde, là — ça, on comprend que ça nous a été
soulevé — qui
existait ailleurs dans d'autres communautés, compte tenu, j'imagine, de
la connaissance de ces travaux-là.
Mme Vallée :
Mais parfois... Puis, on m'indique, la garde coutumière, elle se transforme en
adoption, tu sais...
Mme
Hivon : Donc, avec
rupture du lien.
Mme Vallée :
Exact. Et donc les deux... Dans le fond, on pourrait comprendre que, dans une
situation familiale x, on débute
avec une tutelle et, pour des raisons particulières, on pourra boucler la
boucle avec une adoption. Ce n'est pas exclu.
Mme
Hivon : Il y
aurait des communautés où les deux notions coexistent.
Mme Vallée :
En effet.
Le Président (M. Ouellette) : Ça va?
Mme
Hivon : Oui, ça
va. Pour le deuxième alinéa, moi, ça me va. Ça me semble clair.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui, juste
deux questions, là. Dans le projet de loi n° 81, là, on transmettait la
liste au ministère de la Justice pour
la liste des autorités compétentes, puis là, dans le 113, on enlève le
ministère de la Justice. Pourquoi?
Mme Vallée : On l'envoie au
Directeur de l'état civil. On simplifie la démarche.
M.
Jolin-Barrette : Avant, on
faisait les deux, là, on l'envoyait au Directeur de l'état civil puis au
ministère de la Justice. Parce que
vous disiez, là : Nous, on va établir des rapports avec les communautés,
avec les nations autochtones, le ministère va travailler en collaboration
avec eux.
Mme Vallée : Mais ça, c'est plus... Parce que
le ministère n'a pas à intervenir dans la nomination de
l'autorité compétente. Alors, ça, c'est, disons...
M. Jolin-Barrette : Bien, pas tant sur l'intervention au niveau de la
nomination, mais, vous, là, en tant que ministère, ce n'est pas
pertinent de savoir qui sont responsables...
Mme Vallée : Bien, l'information,
elle est transmise au Directeur de l'état civil. Donc, la possibilité pour le ministère d'avoir l'information, elle demeure.
Même s'il n'y a pas une transmission au ministère et au Directeur de l'état
civil, en transmettant l'information au Directeur de l'état civil,
l'information, elle demeure, et c'est une information publique aussi, qui est
l'autorité compétente.
Donc, ce
n'est pas quelque chose... Je pense que ça amène une lourdeur additionnelle. On
tente aussi de simplifier tout ça. Et, comme le ministère n'a pas à
intervenir dans la désignation, outre le fait de communiquer l'information, il n'y a pas de raison d'être, là. Et cette
communication d'information, elle est possible en transmettant l'information au
Directeur de l'état civil.
M. Jolin-Barrette : C'est juste que, comme ministre de la Justice,
c'est vous qui êtes responsable du Directeur de l'état civil.
Mme Vallée : Non, ce
n'est pas...
M. Jolin-Barrette : C'est qui?
Mme Vallée :
Non. C'est le ministère de la Famille... non, Emploi et Solidarité,
excusez-moi, je mélange avec la curatelle, oui.
M. Jolin-Barrette : Ah! Je
croyais que c'était... O.K.
Le Président (M. Ouellette) :
Et l'argent, ça vient aux Finances.
M. Jolin-Barrette : Oui. C'est
un bon point, ça, M. le Président.
La collègue
de Joliette me fait penser à ça. Dans le fond, vous, votre relation avec
l'autorité compétente, bien, vous
n'en aurez pas. Dans le fond, le Directeur de l'état civil, ça ne relève pas de
votre ministère. Ça fait que ça va être interministériel. Vous êtes
responsable du Code civil.
Mme Vallée :
Oui, mais, comme l'adoption, le ministère de la Justice, moi, je n'ai pas...
Lorsqu'une adoption a cours et que les registres de l'état civil sont
modifiés, le ministère de la Justice n'est pas notifié, même si ça relève de
l'application du Code civil. Alors, on a un peu le même miroir.
Pourquoi
exiger la transmission de l'information dans le cadre de l'adoption coutumière
autochtone, alors qu'on ne l'exige
pas dans le cadre de l'adoption? La direction de la protection de la jeunesse
relève du ministère de la Santé et des Services sociaux, ne relève pas
du ministère de la Justice. C'est un peu la même chose.
Alors, on
transmet au Directeur de l'état civil. L'information, elle est là, elle est
accessible pour le ministère de la Justice
si, dans le cadre des travaux ou, par exemple, si l'information est requise
pour voir, disons, les travaux de suivi de mise en oeuvre, comme on fait
dans... suite à la mise en oeuvre de grandes réformes, l'information est
présente. Mais il n'y a pas de nécessité,
parce que l'adoption... Ce n'est pas parce qu'un élément ou un acte est prévu
au Code civil que tout va dans la boîte à malle du 1200, de l'Église.
Le Président (M. Ouellette) :
Ça va?
M. Jolin-Barrette : Juste une dernière question sur l'acte de
désignation. Bon, on le transmet dans les 30 jours, il n'y a pas de période de vacance, là. Bien, en
fait, ce que je veux dire, supposons qu'il y a... l'autorité compétente, elle
est démise, supposons. Est-ce qu'elle a l'obligation de désigner une
autre autorité dès le moment?
Mme Vallée :
Elle est avisée...
M. Jolin-Barrette :
Tu sais, elle est avisée dans les 30 jours du changement.
Mme Vallée :
De la cessation.
M. Jolin-Barrette : Mais est-ce qu'il y a un «holding over» de sa
compétence durant le temps où le ministère reçoit la nouvelle autorité
compétente... l'autorisation?
Mme Vallée :
En fait, l'autorité compétente, elle demeure, mais sa représentation, la
désignation de la personne...
Une voix :
...
• (17 h 40) •
Mme Vallée :
C'est ça, c'est l'instance politique qui a la responsabilité de voir à venir
substituer la vacance, mais on ne
peut pas dire... Bien, il peut y avoir un... L'autorité compétente pourrait
substituer quelqu'un par intérim sans que ce soit officiel. À ce moment-là,
doit aviser le Directeur de l'état civil.
M. Jolin-Barrette : Donc, le Directeur de l'état civil, avant qu'il y
ait un acte, là, qui ait été délivré par l'autorité compétente, le Directeur de l'état civil n'a pas à
l'avoir signifié au Directeur de l'état civil. En fait, le conseil... bien, en fait,
les membres de la communauté n'ont pas à signifier au Directeur de l'état civil, avant qu'il délivre des actes... Il peut le faire, ça
va être ratifié après les
30 jours, supposons. Supposons, là, que le conseil désigne une autorité
compétente, jour 1, puis qu'elle
transmet son avis le 28e jour au Directeur
de l'état civil, tous les actes qui
vont avoir été faits entre le jour 1 puis le jour 28 vont être
valides?
Mme Vallée :
Oui, parce que...
M.
Jolin-Barrette : O.K. Puis ça va être ratifié par la suite?
Mme Vallée :
C'est ça.
M.
Jolin-Barrette : O.K. C'est beau.
Mme
Hivon :
Une forme de rétroactivité.
M.
Jolin-Barrette : Ça va.
Le Président (M.
Ouellette) : Ça va, oui? Est-ce que l'article 7 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M. Ouellette) : Avant qu'on aille à l'article 30,
Mme la ministre, juste vous mentionner que, dans l'amendement
à l'article 10 d'hier, il manquait un petit mot. Dans le deuxième paragraphe,
on aurait dû lire : Par la suppression,
là, de. Ça fait que rajoutez-le juste à la main sur votre amendement.
L'amendement est adopté, mais je veux juste qu'on puisse suivre, tout
le monde. O.K.?
Article 30. Mme
la ministre, pour lecture.
Mme
Vallée : Oui, je m'y
rends. L'article 581 de ce code est modifié par l'ajout, à la fin, de
l'alinéa suivant :
«La
reconnaissance d'une adoption coutumière autochtone réalisée hors du Québec, au
Canada, produit les mêmes effets qu'un certificat d'adoption coutumière
autochtone à compter de la date à laquelle l'adoption a pris effet dans l'État
d'origine de l'enfant.»
Le Président (M.
Ouellette) : Commentaires, Mme la ministre.
Mme
Vallée : Cette modification confère à la reconnaissance d'une adoption coutumière réalisée par l'autorité autochtone compétente les mêmes effets qu'un
certificat d'adoption coutumière qui est délivré au Québec,
et ce, au même titre qu'un jugement en reconnaissance d'une décision
étrangère, tel que prévu au premier alinéa de cette disposition. Ainsi, la reconnaissance d'une adoption prendra effet à la date à laquelle elle a pris
effet dans l'État d'origine de l'enfant.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Oui, oui, oui. Donc, j'essaie de comprendre. Il y a
l'existence d'une adoption coutumière
dans une communauté en Colombie-Britannique, mais,
évidemment, j'imagine qu'on est précurseurs et qu'il n'y a aucune...
Évidemment, ils n'ont pas de Code civil, dans les autres provinces, mais
comment... Est-ce qu'il y a d'autres endroits au Canada où on reconnaît,
dans le droit usuel, comme par exemple à l'équivalent du Directeur de l'état
civil ou tout ça, l'existence d'adoptions
coutumières autochtones? Parce que comment... Si on suit la même logique que
celle qu'on risque de nous plaider en adoption internationale, comment
on peut reconnaître ici une adoption...
Mme Vallée :
Peut-être que, Me Leroux, vous voudriez préciser.
Le Président (M.
Ouellette) : Ah! je le savais, je lui avais dit...
Mme
Vallée : Parce que je vois Me Leroux écrire, alors
peut-être qu'elle pourrait... ce serait plus simple, mais il y a
effectivement d'autres provinces qui reconnaissent des formes d'adoption
coutumière.
Le Président (M. Ouellette) : Me Leroux, vous identifier pour les besoins
de l'audio et répondre à la question de Mme la députée de Joliette.
Mme Leroux (Sophie) :
Oui. Sophie Leroux, du ministère de la Justice. Dans certains territoires
canadiens, il y a un processus, là,
d'adoption coutumière autochtone qui est mis en place. Donc, il y aura
possibilité, là, de procéder à une
adoption dans ces territoires, puis, rendu au Québec, pour donner effet à cette
décision-là, par respect pour les autorités et les autres territoires ou provinces, on va procéder comme on le fait en
matière d'adoption internationale, sauf que ça va être...
Le Président (M.
Ouellette) : Et on parle de quelles provinces?
Mme Leroux
(Sophie) : La Colombie-Britannique, si je ne me trompe pas.
Le Président (M.
Ouellette) : O.K. C'est la seule?
Mme Leroux
(Sophie) : Je pourrais vérifier, là, pour répondre plus précisément,
là.
Mme
Hivon : O.K. Pendant qu'ils vérifient... Mais admettons
qu'on est dans une province où il n'y a pas un tel processus. Il peut quand même y avoir des
adoptions coutumières parce qu'il y a la coutume qui existe pour les nations.
Donc, admettons que des gens... c'est ça, il
y a une telle adoption coutumière qui existe... Je ne sais pas si «réalisée»,
ça peut vouloir dire «existante», si
ça doit vouloir dire qu'elle est reconnue, donc, par l'État formellement ou si
ça pourrait aussi s'appliquer pour une
adoption, je dirais, coutumière qui est existante mais sans reconnaissance
formelle de l'État.
Mme Leroux
(Sophie) : ...les adoptions qui vont être reconnues sont celles qui
vont être réalisées dans les provinces ou territoires où il y a un encadrement
de l'adoption.
Mme
Hivon :
Où il y a un encadrement. O.K.
Mme Leroux
(Sophie) : Exactement.
Mme
Hivon : Donc, par exemple, je ne sais pas, des gens de l'Ontario ou des autochtones
d'une communauté en Ontario ne pourraient pas dire : On arrive ici,
nous, nous étions dans une logique d'adoption coutumière, mais ce n'était
pas reconnu par l'Ontario,
mais on demande au Québec de la reconnaître. Est-ce que... parce que
mettons que la nation ou la communauté n'est pas ici, là, je ne sais pas si...
C'est-u... parce qu'elle existe, elle existe au nom de la coutume de cette nation-là d'une autre province, mais elle
n'est pas reconnue formellement. Est-ce que nous, au Québec, on pourrait
la reconnaître formellement?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
Vallée : Je vais laisser Me Leroux chercher pour la dernière
question, mais je voudrais simplement... Je savais que j'avais la réponse dans certaines documentations. Dans le
rapport du groupe de travail sur l'adoption, on me dit que la Colombie-Britannique, le Yukon, les
Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ont légiféré en matière d'adoption
coutumière autochtone. Évidemment, ils n'ont
pas de Code civil, mais il y a quand même des législations. Donc, pour
la Colombie-Britannique, c'est des dispositions qui datent de 1996; le Yukon,
en 2008...
Mme
Hivon :
1996?
Mme
Vallée : 1996 pour la Colombie-Britannique. C'est des
dispositions particulières dans la loi générale qui permettent au tribunal de reconnaître une adoption
pour prévoir qu'elle produit les mêmes effets que l'adoption interne.
Le
Yukon, en 2008, a prévu qu'une personne peut requérir du tribunal,
éventuellement un tribunal autochtone, qu'il
déclare qu'une adoption a eu lieu suivant une coutume des Premières Nations.
Les effets sont déterminés par le tribunal par contre. Ce n'est pas
nécessairement les mêmes effets que l'adoption traditionnelle.
Aux
Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, les lois sont identiques, donc les deux
régimes d'adoption coexistent. Il y a un
régime qui est particulier aux enfants autochtones puis un régime général pour
les enfants. Puis, pour le premier
régime, il y a vraiment une procédure qui est plus simple de délivrance de
certificat par un commissaire qui produit à peu près les mêmes effets
qu'une ordonnance judiciaire.
Mme
Hivon : O.K. Donc, notre article 30 qui vient modifier
581 ne pourrait avoir effet que pour une adoption coutumière, donc, qui
provient d'une de ces provinces ou territoires là et reconnue comme telle
formellement par un mécanisme qui est prévu là-bas.
Mme Vallée :
Bien, on va voir, à l'article 19, la mécanique qui vient...
Mme
Hivon :
Ça va être la même que pour l'adoption internationale, c'est ça?
Mme Vallée :
Oui.
Mme
Hivon : O.K. Mais ma question ici, c'est ça, c'est juste de
savoir si on est donc limités, pour la reconnaissance au Québec d'une adoption coutumière, à celles qui
sont faites avec une reconnaissance de la province ou du territoire.
Mme
Vallée : En effet, mais on n'est pas limitatif, dans le sens
que, si d'autres provinces viennent reconnaître, bien, ce seront ces
dispositions-là qui s'appliqueront.
Mme
Hivon : Mais, par exemple, un couple viendrait s'installer
au Québec dans un territoire d'une autre nation. Je ne sais pas si c'est
quelque chose qui est possible, là. Disons qu'il déménage, je ne sais pas, là,
pour une raison x.
Mme
Vallée : Bien, ce serait... Techniquement, ça pourrait être
possible que des gens d'une nation qui chevauche deux provinces...
Mme
Hivon :
C'est ça, mettons, viennent... Mettons, c'est ça...
Mme
Vallée : Par exemple, les Algonquins, qui sont présents autant
sur le territoire ontarien que québécois... Vous, dans le fond, votre
question ce serait... Un couple, quelqu'un membre de la nation algonquine...
Mme
Hivon : Mettons ils changent de communauté, mais ils sont de
la même nation. Puis il y avait une adoption coutumière qui était comme existante, et puis les parents adoptifs
changent de territoire, mais ils sont toujours de la même nation. Ici, dans le fond, au Québec, ils
pourraient, j'imagine, s'adresser à l'autorité compétente, bien, pour faire
reconnaître ce qui était comme
existant, mais selon la coutume, mais ici, ça pourrait être reconnu pour
produire les effets en vertu de notre
loi une fois qu'ils vivent sur le territoire québécois. Je ne sais pas si vous
me suivez, là. C'est peut-être un cas vraiment hypothétique, là, mais
j'imagine que ça arrive quand même.
Mme
Vallée : S'ils deviennent... S'ils sont ici et ils
s'établissent dans une communauté... Parce qu'on a vu, on ne peut pas
être de deux nations.
• (17 h 50) •
Mme
Hivon : On ne peut pas être de deux nations. Ça, ça va.
C'est juste de... J'imagine que l'adoption
coutumière. Comme ici, au Québec,
ça existe, ça existait, on reconnaît la coutume, dans le fond. Ça existe déjà,
puis tout ce qu'on fait, c'est le
reconnaître formellement pour pouvoir faciliter les effets puis que ça cadre
avec notre droit. Donc, je me dis, juste...
Admettons que, dans d'autres provinces où il n'y a pas le cadre formel
comme au Québec jusqu'à ce jour, mais il y en a, de l'adoption
coutumière... s'ils s'en viennent vivre dans une communauté au Québec, est-ce
qu'il pourrait y avoir une telle reconnaissance? J'imagine que oui, même si
l'adoption ne s'est pas développée sur le territoire québécois. Mais
elle répondrait aux critères de la coutume de la nation puisque c'est la même
nation.
En
tout cas, ce n'est pas urgent de répondre à ça là, là, mais, je pense, c'est
quand même une question... Ça arrive sans
doute, évidemment, qu'il y a des gens qui changent de communauté, pour toutes
sortes de raisons, là. Je ne sais pas si la ministre trouve que c'est
une question complètement... Je ne sais pas si elle comprend le sens de ma
question.
Mme Vallée :
Oui, je comprends le sens de la...
Mme Hivon :
Peut-être qu'elle trouve que ça n'a pas d'application, mais, je veux dire,
toutes les autres provinces qui n'ont pas fait le processus que nous sommes en
train de faire ou que les autres provinces et territoires ont fait, ça
ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'adoption
coutumière. Comme nous, au Québec, il y en a depuis longtemps, c'est juste
qu'on ne la reconnaissait pas formellement, donc, dans notre droit.
Donc, je me dis, la même chose doit exister ailleurs.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Leroux, vous allez donner l'information?
Mme Leroux
(Sophie) : Je veux seulement valider avec ma collègue à l'arrière puis
je vous reviens. C'est possible?
Le Président
(M. Ouellette) : Oui,
c'est possible. On va suspendre... Ah! À moins que... M. le député de Borduas,
le temps qu'on valide, vous auriez peut-être une question.
M. Jolin-Barrette : Bien, moi, j'ai une question. Bon, en
Colombie-Britannique, au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest, là-bas,
est-ce que l'adoption...
Le Président (M.
Ouellette) : Nunavut.
M.
Jolin-Barrette : Pardon?
Le Président
(M. Ouellette) : Nunavut aussi.
M. Jolin-Barrette : Au Nunavut aussi. Là-bas, est-ce que l'adoption
coutumière, ça entraîne une brisure du lien de filiation avec la
filiation d'origine?
Mme Vallée :
Oui, oui. Il y a vraiment...
M. Jolin-Barrette : Dans le fond, ma question, là, c'est :
Est-ce que c'est la même chose qu'au Québec? On ne se retrouvera pas...
Mme Vallée :
Pas exactement, dans ce sens qu'ils n'ont pas les dispositions du code, mais,
comme je le mentionnais, au Yukon, c'est le tribunal qui va déterminer
les effets de l'adoption.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Mais la sous-question, là, que je pose à la ministre...
Mme Vallée :
Vous, c'est la rupture des liens de filiation? C'est ça?
M. Jolin-Barrette : Mais est-ce que c'est une adoption ouverte là-bas
ou c'est une adoption plénière? Parce que, là, prenons le cas où, supposons, il y aurait une adoption coutumière sans
rupture du lien de filiation, O.K., dans un autre État... une autre province canadienne ou un autre
territoire, puis que, là, au Québec, nous, l'adoption coutumière autochtone,
c'est avec rupture des liens de filiation.
Mme Vallée :
En fait, l'adoption, il y a rupture des liens de filiation.
M. Jolin-Barrette :
Au Québec.
Mme Vallée :
Oui.
M. Jolin-Barrette : Non, non, mais c'est ça que je vous dis. Mais,
dans le fond, si, dans une autre province, là, eux, il n'y a pas de rupture du lien de filiation, puis qu'ici il y a
rupture du lien de filiation, quand ils sont rendus au Québec, là...
Dans le fond, nous, ici, on reconnaît la rupture du... Moi aussi, c'est une
grosse journée. Si ici, au Québec, là, on reconnaît, dans le fond, le jugement
de l'autre province, puis qu'ici, l'adoption coutumière, il y a rupture, puis
là-bas il n'y avait pas rupture, qu'est-ce
qui arrive — vous
comprenez ce que je vous dis, là — dans le fond, que là-bas il y a un
maintien des liens biologiques, là?
Mme
Vallée : Bien, en fait, on reconnaît, puis on va le voir, mais
que... on reconnaît la décision, on reconnaît la...
M. Jolin-Barrette :
On reconnaît que tu es...
Mme Vallée :
On reconnaît la décision de l'autorité, là, qui n'est peut-être
pas l'autorité compétente, mais qui est
l'organisme qui va avoir délivré le
certificat d'adoption au même titre qu'on reconnaîtrait un jugement. Donc, pour ce qui est des effets, ce seront les effets qui ont été déclarés, parce qu'il survient parfois... on va reconnaître ici des adoptions qui auront eu cours dans d'autres États, mais là
on reconnaît cette adoption-là avec les dispositions qui vont s'ensuivre.
M. Jolin-Barrette : Mais nous, là, ici, là, on ne reconnaîtra pas qu'il y a
toujours des liens de filiation qui sont maintenus
avec les parents biologiques de la personne.
Mme Vallée :
Nous, non.
M. Jolin-Barrette : Donc, l'acte du Québec ou de l'autorité compétente de la communauté, ça va
être de dire : Bien, à nos yeux
à nous, tes parents, ce sont tes parents adoptifs, puis tu n'as plus aucun lien
avec tes parents biologiques, malgré le fait que, dans ce territoire ou
cet État-là, bien là il y a un maintien des liens, supposons, là, qu'on avait
une adoption coutumière avec maintien des liens en Colombie-Britannique, ou dans
les Territoires du Nord-Ouest, ou du
Yukon. C'est pour ça que je posais, à
la base, la question : Est-ce que là-bas il y a... est-ce que, l'adoption
coutumière, il y a une rupture des liens?
Mme Vallée :
En fait, je ne pourrais pas vous dire, pour chacune des provinces, les faits
précis. Je n'ai pas l'information avec moi,
en fait, mais on reconnaît cette adoption-là, on lui accorde un certain nombre
d'effets. Par exemple, au Yukon,
c'est le tribunal qui en détermine les effets en fonction des traditions. Nous,
dans le fond, ce que l'article 30 vient introduire, c'est que le
Québec va reconnaître...
M. Jolin-Barrette : La nouvelle
filiation.
Mme Vallée :
...va reconnaître la nouvelle filiation, va reconnaître cette adoption-là pour
les provinces où il existe un
processus encadré, donc où il y aura l'équivalent d'une autorité compétente,
là. Donc, les provinces qui auront adopté un régime particulier où il y a reconnaissance de l'adoption coutumière
autochtone, bien, on pourra reconnaître ça par le biais de l'article 30 au même titre qu'on reconnaît un jugement
d'une de ces provinces-là en adoption. Dans le fond, c'est ce qu'on
vient dire, c'est que la reconnaissance par une autorité d'une autre province...
M. Jolin-Barrette : Mais, dans le
reste du Canada, c'est de l'adoption plénière aussi.
Mme Vallée :
Donc, écoutez, ce que l'on... Et vraisemblablement, les travaux... puis je ne
veux pas présumer, là, et avancer de
chaque province quels sont les effets de l'adoption coutumière autochtone, mais
ce que l'article 30 avance, c'est que le Québec va reconnaître
cette démarche-là comme...
M. Jolin-Barrette : Mais ça, j'ai
compris. Mais peut-être, durant la commission, ce serait intéressant d'avoir
l'information juste à savoir, les autres provinces, comment c'est.
Mme Vallée : Parfait.
Le Président (M. Ouellette) : Il y a
d'autres questions sur l'article 30?
Mme
Hivon :
Bien, j'imagine que, si cette adoption-là ne faisait pas de rupture des liens
de filiation, ce ne serait pas considéré comme de l'adoption au Québec.
Donc, ça ne s'appliquerait pas.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais, M. le
Président, s'il y a un jugement qui reconnaît... s'il y a un tribunal qui reconnaît qu'il y a de l'adoption coutumière,
supposons, au Yukon sans rupture du lien de filiation, nous, on va se mettre
à apprécier le jugement de la cour du Yukon, supposons, on va considérer ça
comme une tutelle?
Mme
Hivon : En fait,
c'est de savoir si l'adoption ouverte existe, à la base, dans les autres.
Mme Vallée : C'est ça. C'est
plutôt...
Mme
Hivon :
Parce qu'en fait ce serait cohérent avec leur régime à eux, puis ça pourrait ou
ça ne pourrait pas. Oui, c'est ça.
M.
Jolin-Barrette : Oui, parce
que nous, on aurait pu faire le choix d'avoir une adoption sans rupture des
liens de filiation. Tu sais, le concept juridique qu'on met là avec la
tutelle supplétive, bien...
Mme
Hivon : Mais, à
mon avis, là, quand on avait fait les autres travaux, il n'y avait aucun autre
endroit où il y avait l'idée d'une adoption
sans rupture du lien de filiation. C'était vraiment vu comme une révolution,
puis c'est pour ça d'ailleurs que ça
n'a pas perduré, de ce que je comprends, là. Ce n'est plus quelque chose qui
est là. Je ne pense pas qu'il y avait cette réalité-là dans les autres
provinces. Il y avait quelque chose en France qui pouvait ressembler un petit
peu, mais c'était plus de l'adoption avec communication de... Là, je parle de
quand on a fait les auditions de l'avant-projet de loi, là, ça fait que ça a
peut-être évolué depuis, mais ça me surprendrait que ça existe ailleurs.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce
qu'on a d'autres interrogations pour 30... ou on attend juste la réponse avant
qu'on procède à l'adoption puis qu'on s'en aille chez nous ce soir?
• (18 heures) •
M. Jolin-Barrette : On va chez vous,
M. le Président?
Le
Président (M. Ouellette) : Ah! vous pouvez venir... Oui, je vous inviterais
au premier étage, M. le député
de Borduas, juste pour que vous puissiez voir ce que ça a l'air.
Me Leroux,
pour les gens qui nous écoutent et qui attendent, là, on va... On est en train
de transmettre à Mme la ministre
la réponse qu'elle devait aller chercher avant qu'on procède à l'adoption de l'article 30
et qu'on ajourne jusqu'à demain.
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
Oui, mais c'est parce que je ne voudrais pas qu'elle revienne avec...
Mme
Vallée : Mais peut-être
que Me Leroux pourrait répondre à la première question,
puis, pour la deuxième question, quant à l'adoption ouverte, on pourrait
revenir demain, parce que je suis en train de lui transmettre...
Le Président (M. Ouellette) : C'est
beau. Donc, Me Leroux.
Mme Leroux
(Sophie) : Oui. Dans le fond, par rapport à l'article 30, deux choses à clarifier. La première,
quand on parle de reconnaissance de... je vais parler de décision étrangère, là,
d'adoption coutumière autochtone, on va les reconnaître seulement si dans
les provinces ou territoires il y a un mécanisme similaire ou différent du
nôtre mais qui reconnaît l'adoption
coutumière et ses effets. Puis, si l'enfant est domicilié au Québec...
Parce que, là, on parle d'adoption canadienne,
là, entre provinces ou territoire. Si l'enfant est domicilié au Québec,
le processus va être celui reconnu par le Code civil,
donc, pour répondre à votre question, oui.
Mme
Hivon : O.K. C'est
ça. Donc, à partir du... Par exemple, il pourrait y avoir un nouveau domicile, puis là, à partir de ce moment-là, évidemment,
s'il répond aux critères, il pourrait y avoir un processus. C'est bien logique.
Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce
qu'on attend d'autres réponses pour 30 ou est prêts à adopter 30?
M. Jolin-Barrette : On peut adopter
30, puis on reviendra avec...
Le
Président (M. Ouellette) : O.K. On
peut adopter 30, et on reviendra demain, à 15 heures, avec la réponse de
la ministre pour l'adoption ouverte. Donc, est-ce que l'article 30
est adopté?
Des voix : Adopté.
Le
Président (M. Ouellette) :
Sur ce, la commission ajourne ses travaux sine die, mais c'est
15 heures, demain après-midi, puis je vous dirai où. Ce sera sine
die pour le moment, à moins qu'on ait d'autre chose demain matin.
(Fin de la séance à 18 h 2)