(Onze heures quatorze minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder à
l'audition du Commissaire au lobbyisme sur le rapport intitulé Étude sur l'assujettissement de tous les organismes à but non lucratif aux règles d'encadrement du lobbyisme,
tel que prévu au projet de loi n° 56, Loi sur la
transparence en matière de lobbyisme.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Leclair
(Beauharnois) est remplacé par Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).
Le
Président (M. Ouellette) : Je souhaite la bienvenue à Me François Casgrain, Commissaire au
lobbyisme, et Me Jean Dussault, adjoint au commissaire, qui
est le secrétaire général et directeur de l'administration.
Je vous
rappelle que vous disposez de 30 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission.
Me Casgrain, à vous la parole.
Exposé du Commissaire
au lobbyisme, M. François Casgrain
M. Casgrain
(François) : Merci, M. le
Président. Mme la ministre, MM. et Mmes les membres de la Commission des institutions, je vous remercie de m'avoir
invité ce matin à venir discuter avec vous, échanger sur le rapport que j'ai
déposé à l'Assemblée nationale sur
l'assujettissement des organismes à but non lucratif par le projet de loi
n° 56. Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagné de mon
adjoint, M. Jean Dussault.
D'entrée de
jeu, mentionnons que je suis d'avis, à la suite de l'étude que j'ai menée, que
le projet de loi n° 56 ne peut
être adopté dans sa forme actuelle en ce qui a trait à l'assujettissement des
OBNL. Certaines dispositions afférentes à cet assujettissement méritent d'être revues, clarifiées ou nuancées. J'y
reviendrai. Toutefois, il m'apparaît important de revenir sur le
contexte d'adoption de la loi ainsi que sur celui de la présentation du projet
de loi n° 56.
En adoptant, en 2002, la Loi sur la transparence
et l'éthique en matière de lobbyisme, le législateur québécois s'inscrivait dans un mouvement déjà lancé par
d'autres législateurs canadiens. La loi québécoise était cependant considérée
comme étant la plus complète et la plus
englobante puisqu'elle visait également plusieurs actes administratifs et
s'appliquait aussi au secteur
municipal. En encadrant les activités de lobbyisme, le législateur québécois
convenait de l'importance du phénomène inhérent au fonctionnement de
l'État.
Tout en
reconnaissant la légitimité du lobbyisme, le législateur reconnaissait
également le droit pour les citoyens de
savoir qui tente d'influencer les titulaires de charges publiques et ce que ces
personnes désirent obtenir. En ce faisant, l'État québécois a fait le pari qu'un citoyen mieux informé des choix
auxquels sont confrontés les décideurs publics prendrait une part plus active à la vie démocratique plutôt
que de s'en distancer et que la transparence favoriserait une meilleure imputabilité des dirigeants en plus d'accroître le
consensus social autour des décisions qui sont prises. Le droit de savoir
qui cherche à exercer une influence auprès des titulaires de charges publiques
constitue donc la pierre angulaire de la légitimité des activités de lobbyisme.
Dans le but de s'assurer que la loi réponde bien aux objectifs qu'elle visait, le législateur
a prévu l'obligation que soit produit, cinq ans après son adoption,
un rapport sur la mise en oeuvre de la loi et du Code de déontologie des lobbyistes de même que sur l'opportunité, le cas
échéant, de les modifier. En 2007, le ministre de la Justice a donc produit
ce rapport. Il y recommandait notamment que des modifications soient apportées à la loi en vue d'en assurer
une meilleure application. Dans son propre rapport, intitulé Bâtir la
confiance, le Commissaire au
lobbyisme faisait ressortir des
constats quant aux limites et aux carences de la loi et il recommandait
que plusieurs modifications soient apportées à celle-ci.
J'ai réitéré,
dans mes rapports
d'activité 2009‑2010 et de 2010‑2011, la nécessité d'apporter des
modifications à la loi afin
d'atteindre pleinement les objectifs de transparence et de saine pratique du
lobbyisme. Afin de faire avancer les
choses, j'ai déposé, à l'Assemblée nationale en mai 2012, un rapport sur
les modifications à apporter à la loi. J'ai proposé 105 recommandations pour améliorer la Loi sur
la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme et en assurer une meilleure application. Les modifications proposées
dans le rapport avaient pour objectif de simplifier la loi, de la clarifier
et d'y apporter des précisions, de permettre
une application plus uniforme et plus complète de la loi à tous les
acteurs, de fournir au commissaire, finalement, des outils
complémentaires pour lui permettre de remplir plus efficacement son mandat.
En avril 2013, j'ai comparu devant la Commission
des institutions, qui étudiait alors mon rapport et les recommandations qu'il
contenait. À cette occasion, j'ai pu rappeler aux parlementaires les lacunes et
les difficultés d'application de la loi,
parmi lesquelles j'ai identifié les suivantes : la notion de partie
importante permettant de qualifier une personne de
lobbyiste d'entreprise ou d'organisation, les modalités d'inscription au
Registre des lobbyistes et les renseignements
exigés, le partage de responsabilité entre la conservatrice du Registre des
lobbyistes et le Commissaire au lobbyisme,
la non-application de la loi à certains lobbyistes d'organisations, le libellé
de certains articles, le vocabulaire utilisé ainsi, évidemment, que les
délais de prescription.
• (11 h 20) •
Le
12 juin 2015, c'est donc
avec enthousiasme que j'ai accueilli le dépôt du projet de loi n° 56, qui
faisait écho à la plupart des recommandations du rapport que j'avais
déposé à l'Assemblée nationale. Si l'on a beaucoup parlé des dispositions relatives à l'assujettissement des
OBNL au projet de loi n° 56 sur la place publique, il est important de
rappeler que ce projet de loi vise
avant tout à renforcer l'actuelle Loi sur la transparence et l'éthique en
matière de lobbyisme. Certains éléments
proposés réaffirment les objectifs de transparence de la loi, alors que
d'autres facilitent son application ainsi que sa compréhension.
Le plus
important élément de simplification contenu au projet de loi constitue sans
aucun doute la fin du partage de
responsabilités entre le Commissaire au lobbyisme et l'officier de la publicité
et des droits personnels et réels mobiliers à titre de conservateur du Registre des lobbyistes. Ce partage des
responsabilités, où celle d'interpréter et de faire appliquer la loi est confiée au Commissaire au lobbyisme et
celle de tenir le Registre des lobbyistes est confiée à l'officier de la
publicité des droits personnels et
réels mobiliers, n'est pas optimal et engendre des problématiques qui
compliquent inutilement l'application de la loi en plus de créer de la
confusion et parfois une incohérence dans l'action. En outre, une telle modification
est nécessaire non seulement pour répondre à des problèmes d'ordre
fonctionnels, mais également pour permettre au commissaire d'assumer
pleinement, de façon autonome, son mandat de surveillance et de contrôle des
activités de lobbyisme.
Un autre élément
important du projet de loi consiste dans les précisions apportées quant à
l'obligation qu'ont les titulaires de
charge publique de s'assurer que les lobbyistes qui exercent des activités de
lobbyisme auprès d'eux respectent leur
obligation de déclarer au Registre des lobbyistes les mandats qui les
concernent. Cette clarification du rôle des titulaires de charge
publique est essentielle à l'atteinte de l'objectif de transparence visé par la
loi.
Le projet de
loi établit également des modifications importantes en lien avec l'inscription
des lobbyistes et à la transparence
ou à l'inscription des lobbyistes préalable à l'exercice de leurs activités de
lobbyisme et le bilan trimestriel des activités de lobbyisme réellement
exercées.
On y retrouve
aussi des modifications pour assurer une application plus uniforme et plus
complète de la loi. Elle revoit les
dispositions relativement aux sanctions pénales et à la prescription, prévoit
un régime de sanctions administratives pécuniaires
pour assurer le respect des délais dans les cas où les avis et les
avertissements ne suffisent pas. Enfin, elle instaure des règles resserrées lors d'appel d'offres, des règles
d'après-mandat plus englobantes et plus étendues dans le temps ainsi que
des modifications relatives aux responsabilités et pouvoirs du Commissaire au
lobbyisme.
Par ailleurs, le projet de loi n° 56 propose
d'assujettir tous les organismes à but non lucratif, contrairement à la situation actuelle où seuls les organismes à but
non lucratif constitués à des fins patronales, syndicales et professionnelles
ou ceux formés de membres dont la majorité
sont des entreprises à but lucratif ou des représentants de telles entreprises...
donc, de les assujettir... qui sont
actuellement assujettis à la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme.
L'élargissement de l'application de la loi à tous les OBNL a
suscité de vives réactions et des inquiétudes de la part de plusieurs représentants d'OBNL non actuellement
assujettis. Ces inquiétudes ont eu des échos auprès des parlementaires, notamment au regard de la capacité des petits
organismes à répondre correctement aux exigences proposées. C'est dans la foulée des discussions que les groupes
parlementaires et les députés indépendants ont eues en vue de déterminer les
modalités de la consultation parlementaire
précédant l'étude du principe du projet de loi n° 56 qu'il m'a été demandé de mener une étude sur cet assujettissement en
échangeant avec les représentants de divers OBNL, cela afin de bien saisir les difficultés qu'ils identifient et d'être en mesure de
formuler, à l'intention des parlementaires, des pistes de solution.
Dans le cadre
de mon étude, j'ai consulté des représentants de 58 OBNL de divers secteurs d'intervention et
lu l'ensemble des documents
qui m'ont été acheminés afin de bien cerner les difficultés appréhendées par
les OBNL. À la lumière de l'information ainsi recueillie et analysée, j'ai pu réaliser l'étude qui fait l'objet
de la présente comparution. Au plan
institutionnel, la réalisation de cette étude a mobilisé plusieurs
membres de mon personnel. Sans l'octroi de ressources supplémentaires, la réalisation de cette étude a
représenté un défi de taille. Pour la réalisation de cette étude, j'ai estimé
important de m'adjoindre, en plus des membres de mon personnel, des personnes de
l'extérieur de l'institution pour me conseiller.
J'ai ainsi choisi une personne pour sa connaissance fine du milieu et de la
réalité des OBNL, M. Daniel Jean, directeur
général de la solidarité et de l'action
communautaire au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. J'ai
également sollicité la collaboration de M. Éric Montigny, professeur en
sciences politiques de l'Université Laval et directeur
exécutif de la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires, laquelle s'intéresse aux questions
de lobbyisme et de son encadrement. Je tiens à les remercier chaleureusement d'avoir accepté de m'accompagner dans ce mandat.
Comme il était impossible de rencontrer tous les
OBNL, des choix ont dû être faits. Ainsi, les regroupements désignés pour
représenter leurs membres ont été privilégiés. Certains OBNL ont été invités à
se concerter avec leur regroupement afin de participer aux auditions à leurs côtés.
Il m'apparaissait toutefois important et nécessaire
d'entendre des groupes provenant de secteurs diversifiés d'intervention. Ainsi, des groupes ont été retenus
dans les secteurs suivants : l'action et le développement communautaire
et bénévole, les aînés, la culture, la défense des droits, l'économie sociale, l'environnement,
le droit des femmes, la jeunesse, le milieu
coopératif, les personnes handicapées, la philanthropie, la santé, le sport et
les loisirs. Par ailleurs, une attention a été portée au type et à la
représentativité des groupes. Des organismes
communautaires ou organismes
d'action socioéconomique exerçant leurs activités au niveau national, régional
ou local ont ainsi été identifiés.
Enfin,
certains OBNL ou groupes ont été invités ou retenus en fonction de leurs caractéristiques spécifiques qui les distinguaient des groupes qui avaient par ailleurs été retenus.
Chaque audition durait en moyenne 1 h 15 min. Après une brève mise en contexte de la consultation par le commissaire, les porte-parole disposaient de 15 minutes pour présenter leur OBNL et les enjeux relativement à leur assujettissement au projet
de loi n° 56. Ensuite, une
période d'échange se tenait afin de bien comprendre leurs préoccupations.
Dans le but d'assurer la transparence des
auditions tenues auprès des OBNL, les enregistrements de celles-ci ont été
diffusés sur notre site Web et y sont toujours disponibles. D'autre part, tous
les OBNL pouvaient faire valoir leur position
en déposant un document ou un mémoire à cet effet. Tous les documents reçus
dans le cadre de cette étude ont été rendus publics sur le site Web de
l'institution au fur et à mesure de leur réception. Ils s'y trouvent toujours.
Après avoir
lu tous les documents reçus ainsi que la synthèse préparée par la chaire, mes
collaborateurs et moi avons procédé à
l'analyse de l'information. Des constats et des pistes de solution relativement
à l'assujettissement des OBNL aux règles d'encadrement du lobbyisme, tel
que prévu au projet de loi n° 56, ont ensuite été dégagés.
Une des
questions adressées aux groupes venus témoigner s'attardait à la nature des
communications qu'ils font auprès des
titulaires de charge publique. La grande majorité d'entre eux ont admis
d'emblée faire des communications d'influence,
que l'on pense à des communications écrites ou à des rencontres, visant à faire
modifier des lois, des politiques, des
règlements, ou pour obtenir des subventions, ou d'autres avantages pécuniaires,
ou encore la transmission de textes et de
communiqués ou, évidemment, publications appuyant une position donnée. Il n'y a
pas de doute que les OBNL utilisent, avec
plus ou moins d'intensité, divers moyens pour faire avancer leur cause, pour
susciter des débats ou pour obtenir des décisions en faveur des intérêts qu'ils représentent. Ces mêmes groupes
ont cependant dit haut et fort qu'ils n'étaient pas des lobbyistes mais plutôt des citoyens engagés.
L'un n'empêche toutefois pas l'autre. Tout est une question de perception
ou de point de vue, bien sûr.
Force est
d'admettre que les actions que les groupes rencontrés nous disent faire sont
des activités de lobbyisme ou des
communications visant à influencer les décisions des titulaires de charge
publique, comme ils préfèrent le mentionner. Du coup, il faut en conclure que la personne qui les réalise exerce,
conformément à la définition qu'en donne la loi, une activité de
lobbyisme auprès d'un titulaire d'une charge publique.
Puisque la
pratique tout à fait légitime de communiquer avec les titulaires de charge
publique pour tenter d'influencer les décisions apparaît répendue dans
le milieu des OBNL, il ne fait aucun doute qu'un grand nombre d'organismes
seraient concernés par les nouvelles dispositions si elles devaient être
adoptées. Ils devraient ainsi se soumettre
aux nouvelles règles sur le lobbyisme, notamment celle de l'inscription au
Registre des lobbyistes et le respect des dispositions du Code de
déontologie des lobbyistes.
• (11 h 30) •
Compte tenu
de la forte réaction engendrée par l'inclusion proposée de tous les OBNL au
champ d'application de la loi et des
avis partagés que peuvent avoir les parlementaires sur le sujet, la question de
la pertinence et des impacts d'aller de l'avant avec cette proposition
se pose d'emblée. Bien que les principes de base qui animent toute intention d'assujettir les lobbyistes à des règles
d'encadrement des communications d'influence soient tout à fait louables,
encore faut-il éviter que les
efforts, les exigences ou les contraintes qu'imposent de telles règles
atteignent un tel niveau que le bénéfice qu'on compte en retirer ne
parvienne pas à contrebalancer les inconvévients qu'elles occasionnent.
Encore
faut-il aussi éviter la recherche de la pureté dans le modèle d'encadrement
souhaité en perdant de vue l'utilité ultime
de soumettre les groupes visés, à savoir la transparence des communications
d'influence au bénéfice réel des citoyens.
En outre,
au-delà de ces considérations fondamentales, il faut, dans tout changement,
prendre la précaution d'éviter ou, à
tout le moins, de minimiser tout impact collatéral non désirable, prendre en
compte le contexte dans lequel s'imposera ce changement et appliquer des
mécanismes adéquats à sa gestion.
C'est dans
cette perspective que nous avons abordé cette étude, en tentant de dégager de l'information que nous avons récoltée
auprès des OBNL au cours de notre consultation, les principaux éléments
pertinents à inclure dans la réflexion sur
l'élaboration des pistes de solution. Ainsi, pendant la phase de consultation
des OBNL que nous avons tenue au cours des
derniers mois, nous avons eu l'opportunité d'entendre plusieurs
groupes représentatifs des milliers d'OBNL venus porter le message de leurs membres quant à leur assujettissement au projet de loi n° 56. Nous avons entendu des commentaires,
des arguments et des suggestions, notamment au regard de la lourdeur
administrative, de la question identitaire, de la participation citoyenne ou de
la transparence en lien avec les mesures déjà existantes.
Certains points
soulevés par les organismes relèvent,
il faut le dire, de l'incompréhension de certaines parties du projet de loi déposé par le gouvernement. D'autres
points sont la manifestation d'une résistance normale à un changement non demandé et certainement non désiré. D'autres
points, encore, expriment des inquiétudes réelles des OBNL quant à leur capacité à faire face aux nouvelles exigences
qu'imposerait leur assujettissement aux règles d'encadrement du lobbyisme
ou quant à l'utilité d'assujettir tel ou tel groupe à la loi.
Au terme de
ces travaux de consultation et d'analyse de l'information recueillie dans le
cadre de la consultation des OBNL,
j'en suis arrivé à la conclusion que l'approche retenue dans le projet de loi
n° 56 était difficilement applicable. Cette approche, qui prône la transparence des communications d'influence
pour l'ensemble des personnes intervenant pour le compte d'OBNL, présente des inconvénients certains, surtout pour
les petits organismes communautaires de base, particulièrement ceux
composés uniquement ou essentiellement de bénévoles, alors qu'elle exige des
inscriptions au registre des lobbyistes qui,
dans certains cas, apporteraient peu au débat public. C'est pourquoi je suis
d'avis qu'il n'est pas approprié de poursuivre dans la voie tracée par
le projet de loi n° 56 et que ni l'une ni l'autre des cinq pistes de solution proposées ne reprend cette avenue. L'une
des pistes de solution présentées prévoit tout de même l'inclusion de tous les OBNL, mais elle prévoit aussi des allègements
significatifs au regard des exigences d'inscription pour tenter de
contrer les impacts administratifs non désirés.
À
l'autre bout du spectre se pose la possibilité de maintenir les statu quo,
c'est-à-dire de transposer, dans la nouvelle loi sur le lobbyisme, la partie du règlement relatif au champ
d'application de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme, lequel fait en sorte que les organismes qui ne sont pas constitués à
des fins patronales, syndicales ou professionnelles ou formés de membres dont
la majorité sont des entreprises à but lucratif ou des représentants de telles
entreprises ne sont pas visés par la loi.
Entre les
deux positions, d'un bout à l'autre du spectre, il aurait été possible de
décliner plusieurs variantes qui trouveraient
toutes plus ou moins de justifications. Aux fins de l'exercice et de la
réflexion éventuelle des parlementaires, nous nous sommes toutefois quelque peu restreints. Nous avons ajouté
trois autres pistes de solution aux deux pistes de solution ci-dessus mentionnées, lesquelles se
distinguent suffisamment l'une de l'autre et réfèrent à une logique certaine.
Bien évidemment, certains aménagements pourraient être apportés à chacune
d'elle.
La première
piste consiste à assujettir tous les OBNL avec des allègements significatifs
par rapport à ce qui est prévu au
projet de loi n° 56. Cette piste de solution n'imposerait qu'une seule
inscription par organisme et non pas une inscription pour chacune des personnes faisant une communication
d'influence pour le compte de l'organisme. De plus l'inscription d'un
regroupement vaudrait pour tous les membres du regroupement. Elle présenterait
aussi l'avantage d'être facile à appliquer
pour le titulaire d'une charge publique qui voudra s'assurer que les communications
d'influence faites auprès de lui sont
bien indiquées au Registre des lobbyistes en ce que tous les OBNL soient
révisés par la loi. Enfin, l'objet de
toutes les activités de lobbyistes serait porté au registre, et des règles
claires de transparence et de saines pratiques des activités de
lobbyistes s'appliqueraient à tous sans distinction.
Par contre,
même en éliminant du registre les
noms des personnes qui exercent des activités de lobbyisme et en
limitant le nombre d'inscriptions là où il y a une action collective, le
Registre des lobbyistes contiendrait dorénavant beaucoup plus d'informations sur diverses activités de lobbyisme faites
par beaucoup d'organismes, et ce, à divers paliers. On y retrouverait des informations pas toujours
utiles pour le public à qui elles seraient destinées, sur des actions à portée
parfois très locale ou aussi très limitée.
Il y aurait des impacts administratifs pour nombre de petits organismes et pour
le Commissaire au lobbyisme. Ceci est
sans compter les risques évidents que les OBNL, tout comme plusieurs
titulaires de charge publique et institutions publiques, adhèrent peu à
cette solution somme toute très englobante.
La deuxième piste de solution consiste à exclure
les OBNL rendant des services directement aux personnes, notamment
en matière de santé, de lutte à la pauvreté, d'hébergement,
d'aide alimentaire, d'autonomie et de bien-être, de famille,
de sport, de loisir et de culture. Pourraient également être exclus les
services rendus aux collectivités locales ainsi que les associations étudiantes. De plus, les allègements proposés à
la piste de solution n° 1 s'appliqueraient à cette piste de
solution.
Cette piste
de solution limiterait de façon importante le nombre d'organismes à qui
s'appliquerait le projet de loi. Elle
serait relativement facile à appliquer pour le titulaire d'une charge publique,
bien que celui-ci serait obligé de faire une distinction entre les différents organismes qui seraient évidemment
assujettis ou non à la loi. Le registre contiendrait encore passablement d'informations sur les activités
menées par des groupes d'OBNL. Toutefois, un grand nombre de données jugées moins pertinentes seraient d'un seul coup
éliminées. Les impacts administratifs seraient dans l'ensemble
nettement amoindris pour un grand nombre d'organismes.
Malgré une
certaine atténuation de la résistance des OBNL quant à leur assujettissement au
projet de loi n° 56, cette
piste de solution couvrirait encore tous les organismes qui ne rendent pas de
services directement aux personnes ou encore
à leur communauté locale. Ainsi, l'adhésion ne serait sûrement pas acquise de
la part de bon nombre d'entre eux, évidemment
surtout de la part de ceux qui demeureraient visés. Les craintes d'atteinte à
l'image et de diminution de la participation citoyenne pourraient
continuer d'être évoquées avec toutefois, disons-le, beaucoup moins de prise.
La troisième
piste de solution consiste à n'assujettir à la loi que les entreprises
d'économie sociale et les regroupements. En plus des OBNL constitués à des fins patronales,
syndicales ou professionnelles ou des OBNL formés de membres dont la
majorité sont les entreprises à but lucratif ou des représentants de telles entreprises,
les entreprises d'économie
sociale et les regroupements seraient assujettis à la loi. Les entreprises
d'économie sociale le seraient parce
qu'elles produisent des biens et
services dans une optique entrepreneuriale et une viabilité économique,
les regroupements seraient assujettis
parce qu'ils agissent auprès des institutions publiques comme instance de représentation des organismes de
base.
Cette piste de solution limiterait de beaucoup
l'éventail d'organismes à qui s'appliquerait la loi. Les impacts administratifs seraient dans l'ensemble encore
davantage amoindris et, pour des organismes comptant parmi les plus fragiles,
totalement éliminés. Le milieu des OBNL
aurait sans doute encore certaines réserves. Les craintes d'atteinte à l'image
et de diminution de la participation citoyenne ne pourraient plus être
évoquées.
Cette piste
de solution élèverait par contre quelque peu le niveau de difficulté pour le
titulaire d'une charge publique qui
voudra s'assurer que les communications faites auprès de lui sont bien
indiquées au Registre des lobbyistes puisqu'il faudrait faire une distinction entre différents organismes. Le registre
contiendrait moins d'informations sur les activités menées par des
groupes d'OBNL, tout un pan de données jugées moins pertinentes serait cependant
éliminé.
La quatrième
piste de solution consiste à assujettir, en plus des OBNL actuellement visés, les entreprises d'économie
sociale. Avec cette piste de solution, les
impacts administratifs seraient dans l'ensemble encore davantage amoindris et, pour les organismes comptant parmi les plus fragiles, totalement
éliminés. Le milieu des OBNL pourrait vraisemblablement bien accueillir
cette piste de solution puisqu'elle rejoindrait en partie le discours qui trace
une démarcation entre la représentation
d'intérêts dans une optique économique ou pécuniaire et celle d'intérêts pour
la défense des droits ou l'action collective.
Par contre,
cette solution limiterait de beaucoup l'éventail des organismes à qui la loi
s'appliquerait. Seules les entreprises
d'économie sociale s'ajouteraient à la situation actuelle. On y perdrait, bien
sûr, à cet égard. Le registre contiendrait moins d'informations sur les activités
menées par des groupes d'OBNL. Tout un pan de données jugées moins pertinentes serait encore une fois éliminé. Cette
piste de solution ferait en sorte de priver le public et les titulaires de
charge publique d'informations susceptibles de leur être utiles sur des
questions d'intérêt public.
• (11 h 40) •
Finalement,
la cinquième piste de solution consiste à maintenir le statu quo avec la loi
actuelle sur l'assujettissement,
que des OBNL constituées à des fins
patronales, syndicales ou professionnelles ou encore formées de membres dont la
majorité sont des entreprises à but lucratif. Les impacts administratifs de
cette piste de solution seraient évidemment totalement évités pour les OBNL actuellement
non assujettis. Le milieu des OBNL accueillerait très certainement favorablement cette position. Par contre,
le registre contiendrait encore moins d'informations sur les activités menées par des groupes d'OBNL. On y
perdrait beaucoup à cet égard. Un grand nombre d'informations relatives aux activités
de lobbyisme réellement faites auprès des
titulaires de charge publique demeurerait absent du registre. Cette piste de
solution ferait en sorte de priver le
public et les titulaires de charge publique d'informations susceptibles de
leur être utiles sur des questions d'intérêt public.
Avec
l'étude que j'ai déposée à l'Assemblée
nationale le 9 juin dernier, je suis
d'avis que les parlementaires disposent de tous les éléments d'analyse nécessaires à leur réflexion et à une prise de décision sur l'application ou non des règles d'encadrement du lobbyisme aux OBNL qui ne sont pas présentement assujettis. Il ne tient plus maintenant qu'à eux d'en décider.
En
terminant, j'estime que le projet de
loi n° 56 doit être rapidement
mis à l'agenda législatif. Si on a beaucoup parlé des
dispositions relatives à l'assujettissement des OBNL au projet de loi n° 56 sur
la place publique, il m'apparaît important de rappeler, pour les raisons mentionnées au
début de mon allocution, l'importance de réviser l'actuelle Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Des
constats sur la nécessité de modifier la loi sont depuis longtemps connus. Il est essentiel que le projet
de loi soit adopté rapidement afin d'atteindre les objectifs de transparence
qu'il sous-tend.
M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la Commission des institutions, je
vous remercie de votre attention et je suis disponible pour répondre à
vos questions.
Discussion générale
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre, pour un premier bloc de
11 minutes.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. M. Casgrain, M. Dussault,
membres de l'Assemblée nationale.
J'aimerais
rappeler que le projet de loi
n° 56, en effet,
reprend beaucoup des recommandations qui se trouvaient dans votre rapport de 2012 et ensuite. J'aimerais aussi rappeler que c'était
en novembre que le ministre, l'actuel leader du gouvernement, qui occupait mon poste à l'époque vous a donné
un mandat pour faire une étude quant à l'assujettissement
des OBNL à la loi sur le lobbyisme. On a
reçu votre rapport le 9 juin, et ici nous sommes la deuxième semaine de retour
à l'Assemblée nationale, et immédiatement on vous demande de venir devant la commission
pour que... vous pouvez présenter votre
rapport et on peut vous poser des questions. Donc, je crois qu'effectivement nous agissons
assez rapidement, O.K.?
Et le fait qu'on est là aujourd'hui démontre cela. Ça démontre une volonté
qu'on veut procéder.
J'aimerais retourner
à la lettre de mandat qui vous a été envoyée, c'était le 25 novembre. Dans
cette lettre, on demandait certaines choses et on demandait une analyse de
l'utilité et de la pertinence de l'assujettissement, tel que proposé, des OBNL au projet de loi n° 56. On demandait des exemples
de situations qui devraient être visées concernant les OBNL et on vous demandait aussi des problèmes
concrets soulevés par le non-assujettissement des OBNL à la loi actuelle.
Est-ce que
vous pouvez brièvement répondre un peu à cette demande qui a été faite
dans la lettre du 25 novembre? Alors,
d'abord avec l'utilité, ensuite exemples de situations qui devraient être visées et des problèmes
concrets soulevés.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Bon, au départ, Mme la ministre, l'idée d'indiquer l'urgence
qu'on procède à des modifications législatives ne visait pas d'aucune façon à émettre des
reproches auprès du gouvernement ou des parlementaires. C'est
un constat que je fais, que, depuis maintenant 2007‑2008,
il y a des constats qui ont été faits que des modifications devaient
être apportées, et donc je réitère l'importance que des modifications soient
apportées à la loi afin d'atteindre pleinement
les objectifs de transparence qu'elle vise. Donc, de nombreuses difficultés ont
été identifiées. C'est la raison pour laquelle je réitérais, évidemment,
le souhait que l'on a que l'on procède le plus rapidement possible.
Maintenant,
pour reprendre votre question, donc, évidemment, nous avons, au départ,
rencontré les OBNL pour voir les
difficultés que représentait l'assujettissement. Les OBNL sont venus beaucoup
nous parler de ces difficultés-là. Donc,
l'utilité de... Et je pense que ça prend l'ensemble du rapport si ce n'est pas
questions-réponses. Je pense que le rapport doit être pris de façon globale, et on répond à la question de
l'utilité. On dit qu'effectivement ce qu'on a constaté, c'est une des raisons pour lesquelles on a posé des
questions précises à cet égard-là, on a échangé, et l'avantage de la façon dont on a procédé, c'est qu'on a pu avoir des
échanges véritablement constructifs avec les OBNL, vraiment comprendre leurs problématiques, et, évidemment, ce qu'on a
pu voir, c'est qu'effectivement il y avait, de la part de plusieurs OBNL,
des communications et qui étaient souvent,
comme ils disaient, dans leur ADN ou leur mission de pouvoir pousser pour
obtenir des changements.
Donc,
évidemment, il y a une utilité au niveau de la transparence et à ce qu'on
puisse aller plus loin que ce que la loi prévoit actuellement. Donc,
l'utilité, elle est là. L'utilité, c'est de permettre, comme dans... les
solutions, je l'ai mentionné.
Dans certains inconvénients, si on revient plus proche du statu quo, on
s'éloigne de la transparence nécessaire. Quelle est l'utilité? C'est de permettre aux titulaires de charge
publique, aux décideurs, au public de pouvoir avoir une information sur
des sujets qui sont susceptibles de faire avancer les choses au niveau du débat
public.
Donc, il y a
une question d'utilité. L'utilité, lorsqu'on dit, évidemment, dans la solution
qui va... Tous les OBNL ont
dit : C'est une solution qui est très englobante et pas nécessairement
toujours une information qui est utile pour des enjeux très locaux, des demandes très précises qui pourraient rentrer
dans la définition quand même englobante de ce que sont des activités de
lobbyisme.
Deuxièment, à
part de l'utilité, est-ce qu'il y a des exemples concrets? Effectivement, je
pense qu'on n'est pas... donné
d'exemple. Ce qui est difficile d'arriver, c'est... Les exemples, je n'ai pas
la lettre, là, je m'excuse, devant moi. J'aurais dû l'avoir ce matin. Des exemples de situations concrètes où le
manque de transparence pourrait nuire à la loi, je pense que des exemples en soi, on pourrait en
multiplier, mais il n'y aurait pas nécessairement un intérêt de... C'est pour
ça qu'on a fait une analyse plutôt globale.
Est-ce qu'il y a des exemples? C'est sûr que des
représentants qui demandent des modifications à la loi, il est nécessaire, à mon avis, que cette information-là
puisse éventuellement être publique. On représente souvent beaucoup d'organismes de base, et c'est la mission même,
normalement, des regroupements de faire ces activités-là. Donc, tous les
exemples qui pourraient être relativement à
des demandes de modification à la loi, de réglementation, de politique, et
c'est ce que je mentionnais dans mon allocution, à mon avis, sont des
cas qui nécessiteraient une plus grande transparence.
Maintenant,
est-ce que... La façon d'agir, ce qu'on a voulu faire ressortir aussi dans
notre rapport, c'est que la façon
d'agir des OBNL est différente. On utilise beaucoup... Dans les OBNL, c'est
très différent. C'est une action qui va
utiliser un grand nombre de personnes, hein, des citoyens souvent engagés, qui
vont s'engager dans des organismes et
qui, par la loi du nombre, par la loi du nombre, vont tenter de faire valoir
les positions des organismes à but non lucratif.
La façon dont
on y va dans le projet de loi n° 56, puis vous avez raison de dire que...
Vous n'avez pas tort de dire qu'en
2012 notre rapport n'a pas fait une analyse très exhaustive de tous ces
points-là. C'est d'ailleurs l'utilité de l'étude que l'on a faite, c'est d'arriver à dire : Est-ce qu'on a besoin de
multiplier la même information plusieurs fois pour avoir la transparence que recherche la loi? Ce qu'on arrive à la
conclusion, c'est non. Donc, on dit : Je pense que les exemples de difficulté
ressortent du rapport. Je pense que ce n'est pas souhaitable de le faire.
Le
troisième point, qui était finalement des problèmes concrets, je pense que les problèmes,
lorsqu'on fait la synthèse, lorsque vous regardez la
synthèse de ce qui nous a été apporté, on retrouve évidemment
des problèmes concrets. Les petits organismes, hein,
ils n'ont pas de ressources. Les petits organismes, ils manquent d'argent. Les
petits organismes, beaucoup, beaucoup, parce
qu'il ne faut pas l'oublier, ont une
action locale. Et ce que l'on dit — puis
c'est ce qu'on ressort dans le
rapport — c'est
qu'effectivement on estime qu'il n'est peut-être
pas nécessaire d'aller aussi loin pour pouvoir avoir la transparence
qui est désirée par la loi.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) :
Deux minutes, Mme la ministre.
Mme de
Santis : La question
était les problèmes concrets soulevés par le non-assujettissement
des OBNL, pas par l'assujettissement.
M. Casgrain
(François) : Par le
non-assujettissement, bien, c'est ce que j'ai mentionné, là, juste un peu auparavant. C'est qu'effectivement c'est
une information non disponible pour le public ou les titulaires de charge
publique, une information qui peut être souventefois utile à la prise de
décision. Il s'agit de voir évidemment lesquelles informations sont utiles. Et ce qui est utile, je pense que
c'est celles qui vont toucher plus les grandes politiques, les lois et les règlements
que des informations de nature plus locale.
Mme de Santis : Est-ce que je peux
l'ajouter à ma prochaine...
Le Président (M. Ouellette) :
Ah! vous avez encore... Oui, oui. Ah bien, oui, mais c'est beau.
Mme de Santis : Oui, bien, c'est
parce que, sinon, je pose une question.
Le Président (M. Ouellette) :
Non, ça va. Je n'ai pas de trouble. Mme la députée.
Mme de Santis : Merci.
Mme Maltais : Il
n'y a pas de problème, si elle veut prendre tout son bloc tout de suite. On est
libre.
Le
Président (M. Ouellette) : C'est beau. Je réorganiserai le temps tantôt. Mme la députée de
Taschereau, à vous.
Mme Maltais :
O.K. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, les collègues. Bonjour,
M. Casgrain. Me Dussault, bonjour. Bienvenue à cette commission
parlementaire.
Je suis
contente de recevoir votre rapport et de voir qu'une des pistes de solution est
le statu quo. Je vais être honnête avec
vous, on en a débattu depuis un bout de temps, il faut chercher les vrais
problèmes. Quels sont les vrais problèmes?
Je dois dire
que j'étais du Conseil des ministres quand on a décidé d'adopter la loi sur le
lobbyisme et de créer le poste de
Commissaire au lobbyisme. Et ce débat que nous avons aujourd'hui, il a existé
dès le lancement de la loi, dès les premières rencontres que nous avons eues,
qu'est-ce qui devrait être le degré d'assujettissement des organismes et,
entre autres, la question des organismes
sans but lucratif, du travail, de l'action communautaire, et tout ça. Et nous
avons fait à l'époque les mêmes
constats où vous en arrivez un peu aujourd'hui, c'est-à-dire la difficulté de
contenir absolument tout ce qui bouge, grouille et grenouille au Québec
en matière d'échange avec les élus.
Quel était le
véritable fondement de la loi? Pourquoi on a créé la loi? On a créé la loi
parce qu'on voulait connaître les
activités de lobby, de discussion avec les élus qui pouvaient amener à des
bénéfices personnels, qui pouvaient amener, par exemple, des compagnies privées à faire changer une loi et qu'ainsi
quand arrive une loi on comprenne quels efforts avaient... qui avait mené des efforts pour faire un changement à la loi.
Mais c'était des bénéfices d'une compagnie dans laquelle, donc, automatiquement, il y avait des bénéfices personnels.
Une compagnie a soit des actionnaires, soit des... Donc, on cherchait le
bénéfice personnel.
Mais le
bénéfice public sociétal, on a décidé de le retirer de la loi à l'époque parce
qu'il n'y avait pas de problème vécu
au Québec de ce côté-là, parce que c'était beaucoup plus transparent de ce
côté-là et parce que les difficultés que vous énumérez dans vos pistes
de solution, les difficultés d'aller chercher tous les organismes
communautaires, par exemple, ou toutes les
entreprises d'économie sociale, les discriminer là-dedans, qui devrait être,
qui ne devrait pas être là-dedans, les difficultés sont énormes.
Je vais vous
donner un exemple. Vous dites, la piste 2, exclusion pour les organismes
de base rendant des services directement
aux personnes, c'est une chose. Mais la piste 4, assujettissement des
entreprises d'économie sociale, c'est votre
moins lourde avant le statu quo. Or, les trois quarts des entreprises d'économie
sociale que je connais donnent des services directement aux personnes.
Ça fait que comment... En tout cas, moi, je vous
le dis déjà, j'ai donné une couleur, là, nous croyons que, peut-être,
on devrait en rester au statu quo pour plusieurs raisons : difficulté de
discriminer, alourdissement du registre, qui est déjà assez lourd, et surtout, surtout, pour que vous
concentriez votre action au bon endroit parce qu'il y a un travail nécessaire
et fondamental que fait le Commissaire au lobbyisme, puis on veut qu'il se
concentre au bon endroit, surtout qu'à
ce que je sache hier vous avez fait une communication sur votre manque de
moyens. Alors, je pense qu'élargir sans... ce n'est peut-être pas le bon moment tant qu'on n'aura pas entendu
de nouvelles sur les moyens parce que ce serait diluer votre action,
diluer votre action nécessaire et fondamentale aux endroits où on veut qu'elle
agisse, aux endroits pour lesquels la loi vous a donné un mandat.
Alors, voilà,
c'est pour un peu une vision générale, mais je voudrais comprendre, par exemple, comment vous pouvez
distancier quatre de deux. Pourquoi, pour vous, les entreprises d'économie
sociale seraient différentes? Comment vous allez faire pour discriminer
les entreprises d'économie sociale avec les organismes de base rendant des
services directement aux citoyens à 10 %, à 15 %, à 20 %? Ça va
être infernal, d'après ma connaissance de ces deux types d'organisation.
M. Casgrain (François) : Mme la
ministre...
Mme Maltais : Députée.
M. Casgrain
(François) : Merci, Mme la
députée, je m'excuse. L'idée des
pistes de solution, ce n'était pas de rédiger
la loi. L'idée des pistes de solution, c'était de voir... parce que c'est ce
qui nous avait été demandé. Écoutez, là, nous, ce qu'on veut, là, c'est que vous analysiez et que vous nous donniez des
pistes de solution. Ce que j'ai compris, c'est : Nous, les parlementaires, on a la responsabilité de prendre les décisions. Puis quelles sont les possibilités qui
s'offrent à nous?
Donc, ce
qu'on a dit : Est-ce que celle du projet
de loi n° 56, c'est une
possibilité? On répond non. Maintenant, ce que
vous nous dites entre la distinction entre la 4 et la 2, évidemment,
on parle des groupes... la distinction qui avait été faite : Est-ce
qu'on va parler des groupes de base agissant au niveau local? C'est quoi, le
niveau local? Donc, l'idée générale de la
solution 4, c'était de dire : Ceux qui offrent directement des services aux personnes. Vous avez dit : Bon, évidemment,
les entreprises d'économie sociale, évidemment, sont là parce qu'elles ont une vocation sociale.
Ce que l'on dit dans la piste de solution, c'est de les inclure. C'est à
la piste 2. C'est d'inclure les entreprises d'économie sociale parce qu'elles ont une vocation entrepreneuriale.
Elles cherchent éventuellement à obtenir des contrats. Et est-ce qu'elles
ne doivent pas avoir la même transparence lorsqu'elles cherchent, par exemple,
à obtenir des contrats? Et là c'était la question, parce que ça nous a beaucoup
été soulevé, la question des intérêts économiques ou des intérêts éventuellement... Puis je comprends qu'il y a des organismes sans
but lucratif. Puis je n'essaie pas de défendre la solution 4. Ce que je
dis, c'est : Voici c'est quoi,
les possibilités que vous avez en tant que parlementaires. Donc, l'idée, évidemment,
ce n'était pas de rédiger en tant que
tel. C'était essayer de comprendre qu'il pourrait possiblement y avoir des
distinctions qui pourraient être
apportées. Puis une des pistes de solution, ça va du... Évidemment,
de ce qui était dans le projet de loi
n° 56, on dit non, mais, si vous voulez aller vraiment vers tous les OBNL, ça ne peut pas fonctionner si vous n'avez pas des
allègements administratifs très significatifs. Puis évidemment ça va
jusqu'à statu quo.
• (12 heures) •
Mme Maltais : M. le
Président, écoutez,
je vais juste aussi ajouter que, s'il n'y avait pas l'assujettissement des
OBNL, la réforme de la loi, la réforme de la
loi sur le lobbyisme serait probablement déjà adoptée. Il n'y a pas de problème majeur. Et nous voulons aider le Commissaire au
lobbyisme à mieux agir, à mieux intervenir et lui donner les moyens dont il dispose, bien sûr, en disant que, dans
l'étude article par article, on va débattre, on va discuter. Mais ce n'est
quand même pas le projet de loi
n° 59, pour faire sourire la ministre. On veut collaborer, mais cet
assujettissement nous met dans... nous
amène vers des délais parce que même la discussion sur les propositions va être
compliquée. Comme je le disais, assujettir, par exemple, l'économie sociale, qui a un objectif moitié économique, moitié social... Une entreprise
d'économie sociale a d'abord
un but social, mais utilise le milieu économique, utilise l'entrepreunariat
pour se faire valoir. Vous comprenez, là? On
va être quoi dans le pourcentage de chiffre d'affaires? On va être dans le pourcentage de la clientèle? Ça va être
intenable et ça nous amène, d'après moi, à se distraire de l'objectif.
Et l'objectif, pour nous, là, si on enlève l'assujettissement des OBNL, on va l'atteindre rapidement.
Je voulais vous dire ça, M. le commissaire. Nous désirons vous donner de meilleurs moyens d'intervenir et
nous croyons qu'on devrait s'attarder aux véritables problèmes. Vous
aurez notre collaboration de ce côté-là.
M. Casgrain (François) : Peut-être
que ce que je voudrais ajouter à ce que vous venez de dire, c'est :
Lorsqu'on a déposé notre étude, en
2012, c'est qu'elle a inspiré le gouvernement pour cette question-là, pour le projet de loi qui a été déposé. La question
de l'assujettissement a été soulevée, vous l'avez mentionné, en 2002, a été
resoulevée en 2007, en 2008. Il nous apparaissait difficile de ne pas
aborder cette question-là.
Évidemment,
nous, on cherchait à... Comment on relance ce dossier-là? Donc là, le rapport
de 2012, c'était un peu, puis je vais
le dire comme je le pense, un cri du coeur pour qu'il y ait une action, une
action qui va faire en sorte qu'on va
avoir une nouvelle loi. Le début de mon allocution fait clairement
référence au fait qu'il y a beaucoup d'enjeux et de dispositions qui doivent
être modifiés dans la loi actuelle et que, pour nous, ces enjeux-là sont
importants.
Donc,
je suis très, très, très conscient de ce que vous avez mentionné, que
toute cette question d'assujettissement là, et ce qui a probablement expliqué beaucoup de débats qu'on a probablement eus en
préparation de commissions... de la Commission des institutions,
du nombre de groupes qu'on pourrait inviter en fonction de ce qui se retrouve
dans le projet de loi.
Mais vous comprendrez qu'il revient avant tout, là, tu sais, au gouvernement et aux parlementaires d'adopter la loi. Le rapport, je pense, l'étude que j'ai faite fait oeuvre utile dans le
sens qu'elle cherchait à répondre à des interrogations. Vous parlez des organismes d'action communautaire.
C'est la raison pour laquelle on a toute une partie de notre rapport qui touche toute cette distinction-là, comment on
doit voir la question des organismes communautaires, des entreprises d'économie sociale pour permettre d'avoir l'information nécessaire à la prise de décision. Mais ce n'est pas moi qui
peux prendre la décision.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, M. Casgrain. Mme la ministre.
Mme
de Santis : Merci, M. le Président. À la page 73 de votre rapport, sous la piste de
solution n° 1, vous écrivez : «Les impacts administratifs pour nombre de petits
organismes ayant déjà peine à trouver le financement pour réaliser leur
mission ajouteraient à la charge.» Alors, on parle ici des impacts administratifs
pour des petits organismes.
Vous
savez qu'au Québec 53 % des entreprises sont des petites, petites
entreprises où il y a moins de cinq employés, où les revenus annuels sont inférieurs à 500 000 $. Et il y a
des OBNL qui, soit, sont à caractère communautaire, qui gèrent des
montants beaucoup supérieurs à 500 000 $. Il y a des entreprises
d'économie sociale qui gèrent des budgets fort supérieurs à 500 000 $
et où il y a beaucoup plus que cinq employés.
Alors,
vous faites une déclaration vis-à-vis les OBNL concernant les impacts
administratifs. Qu'est-ce qu'il en est pour les petites, petites
entreprises, parce que je vois que vous les traitez différemment? Je ne parle
pas maintenant, you know, des grandes
entreprises, des Rio Tinto ou des compagnies de cette taille-là. Je parle de
53 % des entreprises au Québec.
M. Casgrain (François) : Ce que je vous dirais sur la question, c'est que,
et Mme la députée de Taschereau l'a mentionné un peu tout à l'heure,
lorsqu'il a été discuté, en 2002... puis il y avait une question de voir la
nature de ce qu'une entreprise, par exemple,
ou de personnes qui font des activités de lobbyisme recherchent. Il y a une
recherche, éventuellement, où il y a
des représentations qui sont faites, qui sont susceptibles d'avoir un intérêt
économique ou un intérêt privé. L'idée, c'était de mentionner que ces
organismes-là ou ces entreprises-là devraient être visés.
Ce
que nous, on dit, là, dans notre rapport et qu'on a dit en 2007, on a répété
dans notre rapport de 2012, c'est qu'il
est nécessaire de changer la façon dont on voit l'inscription au Registre des
lobbyistes, d'avoir une simplification importante de l'inscription, de ne plus
prendre les entreprises nécessairement par la main ou de leur imposer un
fardeau considérable. Et ça, c'est
une des choses que l'on mentionne dans notre rapport et la raison pour laquelle
il doit y avoir une fin du partage
entre la conservatrice et le Commissaire au lobbyisme, un système qui va
permettre une inscription plus facile des entreprises.
Je
crois que les entreprises qui font des représentations pour obtenir... et font
des communications pour influencer les
corps publics pour obtenir des contrats, des subventions, des avantages doivent
continuer d'être soumises à la loi. Et ce n'est pas une question uniquement de grosseur d'entreprise. Je pense
qu'il y a une question qui est philosophique mais qui doit trouver également une réponse dans une
simplification de l'inscription et de ce que l'on demande aux entreprises.
Mme de
Santis : En éliminant la référence à une partie importante, est-ce
qu'on est... maintenant va inclure beaucoup,
beaucoup plus de ces petites, petites entreprises ayant l'obligation de
s'inscrire? Parce que, peut-être, elles vont faire des pressions ici et
là, mais avec très peu... ce n'est pas une partie importante... quelque personne
que ce soit à l'intérieur de l'entreprise.
Maintenant, on va obliger beaucoup plus de ces petites entreprises à
s'inscrire. Et est-ce que ça, du mur-à-mur,
que ce soit quelqu'un qui fait 250 000 $ de revenus par année et quelqu'un qui
fait 500 millions, du mur-à-mur, ça vous va parce que c'est une
entreprise?
M. Casgrain (François) : ...question
de mur-à-mur. La question de la partie importante, là, je vais vous dire très
clairement que les échanges qu'on a eus avec les collègues des autres provinces
font en sorte qu'on... C'est une question qui rend l'application de la loi excessivement compliquée et
difficile. Ça permet à des personnes de ne pas avoir de transparence en
raison de la notion de la partie importante.
Quand
un président de compagnie fait un seul téléphone, est-ce qu'il peut prétendre
qu'il ne le fait pas pour une partie
importante lorsqu'il y a un résultat, au bout, qui peut être important? La
notion de la partie importante, c'est une des modifications les plus fondamentales, à mon avis, qu'il faut
apporter à la loi, c'est qu'il faut cesser de parler de la partie importante. Une activité de lobbyisme,
c'est-à-dire une communication qui vise à influencer les prises de décisions,
qui vise à influencer le fait de donner un
contrat, ce doit être clair que c'est une activité de lobbyisme qui doit être
déclarée.
Pour
moi, là, c'est fondamental et c'est un des éléments importants des
modifications qui sont demandées. Et le fait de conserver la partie importante, à mon avis, ça va contre
l'objectif de transparence visé par la loi et ça rend presque inapplicable, dans certains cas, ou ça donne aux
plus forts, ceux qui ont les meilleurs avocats, le fait de pouvoir se défendre à défaut de leur inscription au registre. Et, pour
moi, c'est, comme je le répète, une modification qui doit être apportée à la loi.
• (12 h 10) •
Mme
de Santis : Je ne suggérais
pas d'exclure ou de ne pas exclure, comme vous le proposez, une partie importante.
Je disais simplement que, maintenant, en faisant cela, avec lequel je suis d'accord,
d'éliminer une partie importante, on va inclure beaucoup, beaucoup
plus de petites entreprises, petites, petites, entreprises dans le rayon de
ceux qui doivent s'inscrire. Et personnellement j'ai un petit problème, quand je vois les petits organismes et des
petites, petites entreprises qui essaient de survivre. Je vois comme étant,
pour les deux, un fardeau assez important. C'est pour ça que je pose la question.
Mais
maintenant, peut-être, j'ai mes collègues, de mon côté,
qui voudraient aussi poser des questions, M. le
Président.
Le Président (M. Ouellette) :
Oui, M. le député de Vimont.
M. Rousselle :
Combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Ouellette) : Il vous reste amplement de temps pour poser une
très bonne question, M. le
député de Vimont.
M.
Rousselle : Merci. Merci beaucoup. Messieurs, collègues, écoutez, j'ai écouté attentivement. Je vois bien
que, oui, effectivement, il y a bien des sortes d'OBNL, vous savez, vous l'avez
dit, dans tout ça. Vous, dans votre analyse, dans votre expérience, parce que vous êtes une
personne d'expérience dans le domaine, est-ce que vous regardez la formation
des OBNL? Dans le sens que certains OBNL
vont être mélangés avec des gens bénévoles ou des gens vraiment
qui sont là pour aider les gens, mais
par contre il va y avoir des gens qui vont être là, qui vont
avoir un intérêt particulier, des gens qui vont avoir une compagnie ou
qui vont avoir des choses à... Est-ce que vous regardez l'analyse des OBNL, de
la formation qu'ils ont?
M. Casgrain (François) : Il faut dire qu'actuellement on s'occupe de ceux qui sont assujettis. Donc, il y a beaucoup d'OBNL
qui sont assujettis ou d'organismes à
but non lucratif. Bon, ce ne sont pas
tous des OBNL dans le sens souvent qu'on a dans notre tête, là, que ce
soient les associations professionnelles, des ordres professionnels, que ça
soit des syndicats, que ça soit éventuellement des regroupements d'employeurs, parce que tous les secteurs de
l'économie ont un OBNL
ou ont un organisme de représentation. Ces organismes-là sont visés à l'heure actuelle. Évidemment, ici, on parle des
OBNL non assujettis. Donc, je pourrais reprendre votre question : Est-ce qu'il serait compliqué, si on assujettissait les OBNL, à
leur donner la formation nécessaire à la bonne compréhension?
Il y a
un problème réel, là, parce que des petits
organismes, on l'a vu lorsqu'ils sont venus devant nous, ce qu'ils pensaient qu'ils seraient obligés de faire éventuellement si le projet de loi passait, souvent, il y avait une
incompréhension. Donc, vous avez
raison. Comme tout autre groupe qui devient assujetti à une loi, encore faut-il
que la loi soit suffisamment
compréhensible et que, facilement, on puisse leur donner des explications.
Puis
c'est sûr que, les petits OBNL, il y
a une problématique. La ministre a
raison de dire : Des fois, il y
a une problématique au niveau peut-être aussi des petites entreprises. C'est pour ça
qu'on va travailler avec les regroupements. On
va, par exemple, aller dans des congrès de l'Association de la
construction du Québec. Il y
en a beaucoup, de petites entreprises
qui ne font pas nécessairement du lobbyisme, dont certaines vont peut-être, à
un moment donné, faire du lobbyisme parce qu'ils ont un intérêt, hein, à obtenir des
changements des règlements d'urbanisme, de zonage, hein? Ils aimeraient bien mieux construire six étages qu'en
construire trois puis ils voudraient bien que le conseil municipal leur
donne la modification au règlement de zonage.
Est-ce
que le public n'a pas le droit de savoir qu'effectivement telle compagnie, même
si elle est une assez petite compagnie,
cherche à avoir une modification au règlement de zonage pour faire passer de
trois à six étages? La réponse est
bien évidemment, pour moi, oui, mais ça demande effectivement de la formation.
Et c'est la raison pour laquelle, au cours
des années, on a raffiné, on n'a pas pu prendre toute la bouchée d'un coup. Et
l'idée, ce n'était pas non plus de faire en sorte que, tout de suite, on
applique des sanctions. C'est de faire comprendre la loi, d'aller vers les gens
pour leur expliquer, puis ça, c'est important, ce que vous dites, c'est
d'agir avec les personnes.
Et,
quelle que soit la décision qui sera prise par l'Assemblée nationale, il va
falloir continuer d'agir de la sorte, c'est-à-dire s'assurer que les
gens, les nouvelles compagnies, les nouvelles associations ou groupes qui sont
assujettis à la loi aient l'information
nécessaire pour évidemment répondre aux exigences de la loi. Et ça, ça
s'applique, puis je rejoins là-dessus
aussi peut-être le propos, un peu, de
la ministre, au
niveau des petites entreprises.
Il faut leur donner la possibilité
de bien comprendre. Et c'est l'optique toujours
que l'on a, c'est de faire connaître et faire en sorte que les gens comprennent
bien avant d'agir au niveau de la contrainte.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Vimont. On s'en va maintenant
à M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, Me Casgrain,
M. Dussault, bonjour. Merci de votre présence aujourd'hui à l'Assemblée nationale.
Dans votre
allocution, Me Casgrain, vous avez dit : On a besoin d'avoir un nouveau
régime qui va être simplifié, où il
va y avoir davantage de clarifications, notamment par
rapport à l'inscription. Vous avez également
parlé d'outils complémentaires. À quoi vous faites référence lorsque
vous dites : Ça nous prend des outils complémentaires qu'on
pourrait adopter, j'imagine, éventuellement dans la loi?
M. Casgrain
(François) : On a parlé notamment
des sanctions administratives
pécuniaires. Pourquoi c'est un élément
de simplification ou c'est un outil nécessaire? C'est qu'à l'heure actuelle il
faut savoir que toute infraction passe éventuellement
par peut-être des sanctions pénales. Les sanctions pénales, il y a toujours
quelque chose de plus grave qui est associé dans une sanction pénale.
Sanctions administratives pécuniaires, c'est de
travailler avec les organismes éventuellement pour qu'ils comprennent la loi
et, éventuellement, la respectent, donc qu'on aille vers éventuellement des
avis, des lettres, des communications, mais
éventuellement, quand ça ne fait plus, c'est de faire en sorte qu'on ait un
moyen d'agir rapidement. Ça, c'est, je pense, un outil qui est
intéressant pour voir à l'application de la loi.
Maintenant,
il y a également, on l'a mentionné dans le rapport qu'on avait produit en 2012,
il y a des dispositions qui, dans la
loi, nous permettraient d'être plus efficaces, hein, parce que la loi est plus
précise, parce que la loi nous permet d'aller
plus loin. Les outils qui, à mon avis, vont nous permettre de faire mieux
appliquer la loi, il y en a, entre autres, évidemment la question de
s'occuper directement du registre.
Actuellement,
là, il faut savoir que le partage de responsabilités nous oblige à faire des
demandes pour obtenir certaines
informations éventuellement au registre quand on ne les trouve pas nous-mêmes
ou quand on veut vérifier ce qui
s'est passé, donc faire des requêtes à un autre organisme pour obtenir de
l'information pour appliquer la loi. Cette bicéphalité-là ne peut pas
continuer. C'est un des outils importants dans notre action, c'est le registre.
Donc, depuis plus de deux ans, on est en
négociation pour obtenir des renseignements sous forme de bases de données pour être en mesure d'appliquer nous-mêmes
certains critères de recherche, pour être en mesure de mieux appliquer la loi. On attend encore la complétion de ces
échanges de renseignements là. On est à la toute fin, là, mais ça a pris quand
même presque deux ans avant qu'on l'ait. Puis c'est sans compter les demandes
qu'on formulait depuis des années pour soit
l'amélioration du registre, ou soit l'obtention d'informations, ou la façon
d'obtenir l'information. Donc, tout ça fait en sorte que ça, c'est un outil fondamental, c'est d'avoir le contrôle du registre
pour être en mesure de vraiment agir pour la raison pour laquelle on
est...
Évidemment,
la question des délais de prescription, ça, c'est fondamental. Hein, il y a une
époque... je pense qu'on n'a plus la
statistique en tant que telle, mais plus de 60 % des manquements que l'on
constatait étaient prescrits au moment de
la transmission de notre rapport au Directeur des poursuites criminelles et
pénales. Il reçoit le rapport, si c'est prescrit, c'est fini.
Ce qu'on
avait suggéré, qu'on ne retrouve pas dans la loi, c'est la possibilité de
prendre nos propres poursuites comme
d'autres organismes l'ont, notamment le Directeur général des élections, qui
est lui aussi une personne désignée par
l'Assemblée nationale, qui relève directement de l'Assemblée nationale, qui a
toute son autonomie, son indépendance pour
le prendre. Mais pas seulement le Directeur général des élections, on prend la
Commission des normes, de l'équité, de
la santé et de la sécurité au travail qui a ce pouvoir-là, l'Autorité des marchés
financiers a ce pouvoir-là. Puis il y a d'autres organismes qui l'ont.
Pourquoi le commissaire n'a pas le pouvoir de prendre ses propres poursuites,
ce qui simplifierait beaucoup les choses?
Je n'ai rien
contre le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Et, si on continue
d'agir avec le Directeur des poursuites
criminelles et pénales, je vais
continuer d'avoir des relations avec le Directeur des poursuites criminelles et
pénales, sauf qu'on est obligés d'intervenir à un moment donné pour dire, par
exemple, je donne juste cet exemple-là relativement
à un dossier... À un moment donné, écoutez, ça fait des années qu'on intervient auprès des
entreprises de ce secteur d'activités
là. Vous ne me direz quand même pas que, bien là on va en prendre juste une parce qu'on n'en prendra pas plusieurs.
Écoutez, là, on réussit à en prendre une, là, parce que, jusqu'à maintenant,
le plus possible, on cachait les choses. Bien là, il ne faut pas que vous
nuisiez à notre action. Donc, tous ces dossiers-là ont été, par la suite,
gagnés en cour après plusieurs années de débats, cependant, judiciaires.
Donc, il faut avoir les outils pour pouvoir agir.
• (12 h 20) •
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Donc, je
comprends que le Commissaire au
lobbyisme souhaiterait devenir un poursuivant autorisé. Là, vous nous avez dit d'entrée de jeu : On
souhaiterait avoir des sanctions administratives pécuniaires, ça serait un bon outil. Dans le cadre des sanctions
administratives pécuniaires, généralement, il y a une sorte de droit de révision à l'intérieur même de l'organisation, supposons en matière de droit de l'environnement, c'est souvent ça qui arrive, mais par contre, lorsqu'il y a une
poursuite pénale, ça va être le DPCP qui va s'en charger.
Là, dans
votre modèle, vous suggérez que ça soit le Commissaire au lobbyisme qui ait les
sanctions administratives pécuniaires et qu'également il y ait la
plainte pénale aussi, qu'il soit l'administrateur de cette plainte pénale là.
Ça va prendre des murs de Chine à l'intérieur de l'organisation, ça, c'est... Bien, c'est à réfléchir, là. Mais,
sur la question du délai
de prescription, vous nous dites : Souvent, lorsqu'on transmet la preuve,
c'est déjà prescrit ou c'est au niveau du DPCP qu'il laisse prescrire l'infraction?
M. Casgrain
(François) : Non, je dois
être honnête avec le Directeur des
poursuites criminelles et pénales, il
sait qu'on a un problème de prescription. Donc, quand il reçoit un
dossier puis une prescription qui est assez proche, il va regarder le dossier immédiatement pour ne pas en
laisser prescrire. C'est arrivé que, par le temps, il y en a
certaines qui se prescrivent, mais ce n'est pas du côté... le mauvais
service du côté du Directeur des poursuites criminelles et pénales.
Autre point,
c'est les poursuites. Quand même, dans la loi, on balise assez bien la question.
Ça se limite à la notion des délais.
Même si, dans d'autres provinces, ça va beaucoup plus loin, il y a
le pouvoir de demander une révision, de faire valoir son point de vue avant que la décision finale soit prise, et il y a
une possibilité, même, de droit d'appel au niveau du Tribunal
administratif si on n'était vraiment
pas d'accord. Je
pense que, là-dessus,
on a bien... vraiment cerné les choses. Et on dit : Écoutez, si ça fait l'objet d'une sanction administrative
pécuniaire, ça ne peut pas faire l'objet d'une sanction pénale. Il y a quand même
déjà des dispositions dans le projet
de loi. À cet égard-là, le projet de loi, à mon avis, est très bien fait, relativement à ces
questions-là.
Donc, évidemment,
c'est pour dire qu'on ne veut pas... on pense que, dans certains cas, le fait
de pouvoir ramener les gens, si on peut dire, dans le droit chemin, je
m'excuse d'utiliser ce terme-là, après plusieurs avis, avertissements, communications, etc., je pense
que ça devrait passer plus par la sanction administrative pécuniaire que par la
sanction pénale.
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, vous nous proposez cinq pistes de
solution, cinq scénarios pour, dans
le fond, apporter les modifications au projet de loi n° 56. Parmi les 58 organismes à but non lucratif, là, que vous avez rencontrés suite au mandat qui a été donné, là, par la ministre,
est-ce qu'il se dégage une préférence de la part des organismes à but non lucratif?
M. Casgrain
(François) : Écoutez,
depuis le dépôt du rapport, en 2012, il
y a une activité intense de
persuasion de la part des organismes à but non lucratif qu'il faut
conserver le statu quo.
Donc, si vous
me posez la question, ils sont tous venus nous dire, peut-être
à une exception près, qu'on doit retirer les dispositions relativement à l'assujettissement des OBNL non assujettis actuellement à la loi. Donc, c'est le message qui est venu... que l'on nous a donné était toujours
un message qui était relié à cette question-là pour des raisons identitaires,
hein? C'est-à-dire, nous ne sommes pas des
lobbyistes, mais des citoyens engagés. Généralement, ceux des organismes communautaires, particulièrement, là, qui sont venus nous dire ça, des questions
de lourdeur administratives en fonction de ce qui était dans le projet
de loi, la crainte, avec ce qui était
dans... qui est toujours dans le projet
de loi, à la participation citoyenne.
On dit : S'il y a des sanctions, et là, moi, je suis considéré
comme un lobbyiste, oubliez-moi. Si moi, je suis obligé de faire des démarches pour m'inscrire à la loi, oubliez-moi.
Donc, à cet égard, évidemment, il y
avait une crainte à cet
égard-là de la part des organismes à but non lucratif
C'est sûr
qu'ils sont venus, et, vous le voyez dans le rapport, à quelle hauteur — on a
les chiffres, là — les organismes
sont venus plaider la participation citoyenne ou sont venus plaider la question
identitaire. Dans le rapport, on a
tout ça. Mais, de façon générale, ce sont les principaux arguments qui nous ont
été avancés en plus de celui de dire : Nous sommes généralement assez transparents, on fait déjà de la
reddition de comptes. Mais la question de la reddition de comptes,
évidemment, c'est la reddition de comptes vis-à-vis le bâilleur de fonds, et ce
n'est pas le même type de reddition de
comptes, et ça se passe après. Donc, ce n'est pas, évidemment, le cas de la loi
lorsqu'on dit : Voici quelles sont
mes intentions pour influencer ou qu'est-ce que je vais chercher à influencer
au cours des prochains mois auprès des titulaires de charge publique.
Donc, ce sont des notions qui sont, à ce moment-là, évidemment, distinctes.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. En 2012 dans le rapport qui a mené, bon, à
la présentation et à la création du projet de loi n° 56, la recommandation 39, ça a fait beaucoup jasé par
rapport aux organismes à but non lucratif, celle qui disait : Bon, bien, si la valeur est de plus de
5 000 $, vous devriez vous enregistrer. Là, de ce que je comprends
maintenant avec ce rapport-là, c'est
qu'on arrive avec les cinq autres scénarios, qu'on ne fixe pas nécessairement
de montant. Tu sais, on vise vraiment les différents scénarios. Un, comment
étiez-vous arrivés à 5 000 $ au montant, au quantum? Et pourquoi
ne le retrouve-t-on plus dans vos pistes de solution?
M. Casgrain
(François) : Bon, ce qu'on
mentionne dans les pistes de solution au départ, c'est de voir qui va être
assujetti, hein? Après ça, il y a la
question des exclusions. Dans les exclusions, il ne faut pas oublier qu'il y a
une exclusion importante qui est dans
la loi, qui exclut tous les bénévoles. Évidemment, dans la loi, on prévoit les
membres des conseils d'administration, mais, dans la très grande
majorité, ce sont des bénévoles. Donc, on dit : Les membres du conseil
d'administration, c'est problématique.
Autre point,
la loi prévoit quand même l'exclusion pour tout ce qui est demande de
subvention pour... évidemment, pour
ce qui est de... pas de l'organisation, mais... excusez, je cherche mon terme,
là, mais qui est fonctionnement et tout ce qui est relié à la mission.
Donc, il y a déjà une exception pour les organismes à but non lucratif
relativement aux subventions. C'est pour ça
que je disais comment on avait établi le montant d'argent, c'est ce qu'on avait
dit, dans le fond, là, il faut se poser la question à l'égard de savoir
est-ce que, par exemple, tous les petits contrats, toutes les petites
subventions doivent... on doit avoir une obligation de s'inscrire au registre.
Donc, il faut établir un montant.
On suggère
éventuellement... On avait mis un montant de manière à ce qu'il puisse y avoir
une discussion sur ce montant-là. Il
n'y a pas d'explication autre que celle qu'on a dite. On veut susciter la
réflexion sur l'ensemble des modifications que l'on propose. Je ne sais quoi
vous dire. Il n'y a pas plus, à l'égard du montant, que ce que je viens de
vous mentionner. Susciter, savoir à quel
montant on devrait placer la barre. Est-ce que c'est 25 000 $? Est-ce
que c'est 5 000 $,
10 000 $? Bon. Les gens ont dit... La question qui se posait à un
moment donné, 25 000 $, c'était la... le montant, par exemple, pour tout ce qui se donnait en bas de
25 000 $ de contrats de gré à gré. Est-ce qu'on veut que toute
personne qui fait du gré à gré, hein,
qui peuvent persuader, surtout quand on arrive au municipal... Bien, il faut se
poser la question parce qu'on veut
que tout ça ne soit jamais du lobbyisme. Bon, ça, c'est une question qu'il faut
se poser : À quel niveau?
Le Président (M. Ouellette) : Merci, Me Casgrain. Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques,
quatre minutes.
• (12 h 30) •
Mme Massé :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Oui, je n'ai que quatre
minutes, alors nous allons aller droit au but.
Ce
que je comprends bien de cette loi, qui... il y a plusieurs années, on a décidé
collectivement de mettre sur pied, c'est
que le Québec ressentait le besoin d'avoir un pare-feu, d'avoir une protection
en rendant plus transparentes les relations entre, disons, des personnes, ou des entreprises, ou quoi que ce soit,
qui ont des intérêts privés et qui font des communications avec des gens de charge publique pour y trouver un
certain avantage. Alors, ce pare-feu-là m'apparaît bien différent de ce que le Québec a raison d'être fier. Ce que le
Québec a raison d'être fier parce que c'est unique au monde, c'est son réseau
communautaire, c'est son réseau d'action
communautaire. Il n'y a nulle part à travers le monde qui a ce type de réseau
là. Et je pense qu'on a raison d'en
être fiers. En fait, on a été plusieurs années à en être fiers. J'espère qu'on
n'en arrive pas à la fin de cet
épisode-là. Ce pourquoi je dis ça, bien, c'est parce que, pour nous, c'est
clair qu'il y a une différence de fond entre
est-ce que les citoyens viennent me voir dans un intérêt public ou dans un
intérêt privé. Ça m'apparaît très, très, très différent.
C'est sûr que ce qui
est mélangeant, et là je peux le comprendre, c'est que les OBNL, hein, qui sont
sous la partie III de la Loi sur les
compagnies, les OBNL, bien, il y en a différentes sortes. Et c'est ça qui est
compliqué. Économie sociale, au service
de, pas au service de, composé de ses membres, pas de ses membres, mené par ses
membres. Aïe! On a même une loi sur
l'action communautaire autonome tellement, collectivement, on a trouvé que
notre modèle québécois en matière d'organisation sociale, d'implication
citoyenne, était important.
Ce
que je comprends, donc, de ce que vous avez amené et grâce aux questions de mes
collègues, c'est que, dans le fond,
c'est le type d'OSBL qui est problématique. Par exemple, que ce soit un OSBL,
je vais parler de ce que je connais, d'un
centre de femmes qui est au service de la population, qui vient dire au
gouvernement : Bien, peut-être qu'on aurait besoin que la loi soit changée
de telle façon parce que, par exemple, au niveau de la violence faite aux
femmes, ça atterrit mal, ça, sur le
terrain, c'est une chose, hein, qui n'est pas de l'intérêt privé, oui d'une
certaine façon parce que les centres de
femmes, c'est toutes des femmes, mais on s'entend bien, je pense, versus, par
exemple, des groupes, et là je vais en nommer
quelques-uns, par exemple, qui sont formés sur mesure, qui sont créés sur
mesure par la même loi OBNL sur la partie III
des compagnies, par exemple. Et je pense notamment à des stations de ski, je
pense notamment au groupe de l'amphithéâtre
de Québec, je pense notamment à l'Association pétrolière et gazière du Québec,
qui sont toutes des OSBL.
Alors, ma question, en fait : Est-ce que ce n'est
pas pour régler ce problème-là... parce que vous comprendrez que, pour nous, le statu quo, c'est le seul chemin
possible. Pourquoi? Pas parce qu'on est méchants. C'est parce qu'on ne parle pas de la même affaire. Si on continue
d'envoyer dans l'espace public que l'implication citoyenne à travers les
groupes communautaires, c'est la même chose
que des entreprises privées, on va avoir un problème. Le monde va être mélangé là-dedans. Alors, dans ce sens-là, je me
demandais : Est-ce que vous croyez que la révision de la partie III
sur la Loi des compagnies ne serait
pas une façon qui pourrait nous aider à atteindre les objectifs que vous avez
quand même bien identifiés dans votre travail?
Le Président
(M. Ouellette) : Me Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Effectivement...
Le Président (M. Ouellette) : Me Casgrain! Me Casgrain! Il n'y a pas de temps
pour une réponse. Mme la ministre.
Mme de
Santis : On pourra laisser maître répondre.
Le Président (M. Ouellette) : Mais Mme la ministre va être magnanime, mais elle
pourra prendre sur son temps.
M. Casgrain (François) : Je vais être très rapide. Tout le monde nous a
parlé de la distinction, notamment, qu'on devrait faire entre un OSBL et un OBNL et la révision du droit
associatif qui est demandée depuis aussi des décennies pour faire cette véritable distinction là.
Évidemment, des groupes nous ont demandé quasiment d'attendre la modification
du droit associatif avant de pouvoir modifier la loi. Je pense qu'on peut sans
cela faire des modifications à la loi. Évidemment,
une décision doit être prise. Mais il est vrai qu'il y a une distinction entre
plusieurs organismes à but non lucratif,
tous formés généralement par la même loi, et qui ne fait pas toutes les
distinctions, peut-être, que l'on voudrait faire, et qui faciliterait
peut-être une certaine forme de distinction entre les différents organismes.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. Mme la ministre.
Mme de
Santis : Merci, M. le Président. Si je prends l'exemple de Greenpeace,
par exemple, est-ce que Greenpeace serait assujettie à la loi en vertu
de la piste de solution 2, 3 et 4?
M. Casgrain (François) : Juste... Excusez parce qu'on les a changés de
numéro à un moment donné, au moment de...
et je dois me replacer à chaque fois qu'on parle de numéros. Donc, Greenpeace serait visée en fonction de la solution 2, ne le
serait pas en vertu de la solution 3 et la solution 4.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : Seulement avec la solution 2.
M. Casgrain
(François) : Bien, ce n'est pas une entreprise d'économie sociale.
Mme de
Santis : Parce que vous considérez que ça rend des services
directement aux personnes. C'est ça?
M. Casgrain
(François) : C'est-à-dire que ce n'est pas une entreprise d'économie
sociale, ce n'est pas un regroupement. Donc,
ils seraient exclus des solutions 3 et 4. Par ailleurs, dans la
solution 2, est-ce qu'ils sont un OBNL dont la mission principale vise à accorder des services aux personnes?
Donc, je réponds non. Donc, à ce moment-là, à moins que, vraiment, on triture la notion des services directement aux
personnes, donc, à ce moment-là, effectivement, ils seraient visés par la solution 2, comme ils seraient visés par
la solution 1. Mais ils ne seraient pas visés ni par la 3, ni par
la 4, ni par la 5.
Mme de
Santis : Et c'est la même chose pour Coalition Priorité Cancer.
M. Casgrain
(François) : Là, vous m'obligez à faire une certaine gymnastique.
Mme
de Santis : O.K. Mais vous avez fait des recommandations en 2012 et
avant. Maintenant, vous nous présentez avec
cinq pistes de solution. Moi je vous demande à vous c'est quoi, la piste de
solution que vous recommandez après que vous avez fait votre étude.
M. Casgrain (François) : Bon, ce que je pourrais dire, puis ça ressort un
peu de mes propos de tout à l'heure, c'est
sûr que, pour moi, la solution n° 1, elle est beaucoup trop englobante. La
solution n° 5, le statu quo, on peut se reposer les questions pour certaines raisons qui ont été
évoquées. Peut-être qu'il faudrait éventuellement la peaufiner. Je veux dire, quand je dis les différentes solutions, il y
a des modalités qui peuvent être apportées. Maintenant, il y a celle du centre,
celle qui est la piste de solution
n° 2. Une des difficultés, même si on allait vers la... ça entraîne une
difficulté possiblement d'interprétation
et d'application. Qu'est-ce qui est un service directement, principalement une
mission directement de service aux
personnes? Bon, puis là les personnes vont se poser des questions. Et peut-être
qu'on ne règle pas la question.
La
question des entreprises d'économie sociale, évidemment, c'est plus facile.
Mais, encore là, pour plusieurs personnes,
c'est des OBNL. C'est quoi, l'économie sociale? Je ne suis pas sûr si tous les
titulaires de charge publique sont au
fait de ce que constitue une entreprise d'économie sociale, mais
éventuellement, si on les inclut, ce n'est pas très difficile à
comprendre. C'est avant tout des entreprises au niveau entrepreneurial. La 3,
évidemment, au niveau des regroupements,
c'est assez facile de savoir qui est un regroupement. Et c'est effectivement
les regroupements qui, le plus souvent, vont porter le message de
différents OBNL, vont faire des représentations auprès du gouvernement.
Attention!
Il y a quand même plusieurs exceptions dans la loi, plusieurs exceptions.
Lorsqu'en vertu, par exemple, de la
politique sur l'action communautaire on dit que certains groupes sont des
groupes auprès de qui le gouvernement insiste
pour aller faire des consultations, si c'est le gouvernement qui va faire des
consultations auprès de ces groupes-là sur
des questions, bien, évidemment, il y a des exclusions qui s'appliqueraient.
Donc, il y aurait donc des questions qui émergeraient au niveau du débat public. Il pourrait y avoir une
inscription. Et là on suggère, nous, qu'il y ait quand même des
allègements.
Donc,
probablement, celle qui représente le plus d'équilibre est probablement la
solution n° 3. Mais évidemment c'est
aux parlementaires avant tout de pouvoir discuter de ces questions-là. J'ai
compris, là, ici, de plusieurs interventions qui ont été faites, qu'il y a des discussions qui doivent avoir lieu,
des décisions qui doivent être prises. Je pense qu'au niveau des regroupements il y aurait, si on peut
dire, une transparence plus grande de demander à ce qu'on sache quels
sont les dossiers, quels sont effectivement les mandats qu'ils défendent pour
être en mesure d'influencer les lois, les règlements et les politiques
publiques.
Mme de
Santis : Je crois que mon collègue d'Ungava aimerait poser une
question.
Le Président (M. Ouellette) : Bien, votre collègue d'Ungava a la parole, Mme la
ministre, pour quatre minutes.
• (12 h 40) •
M. Boucher :
Merci, M. le Président. Bonjour. Écoutez, pendant qu'on discutait, tantôt, je
me suis... j'allais dire amusé, mais, en tout cas, j'ai fait
l'expérience d'aller sur le Registre des lobbyistes à voir un petit peu comment
ça fonctionne, qu'est-ce qu'on trouve
là-dessus, etc. Je vais vous avouer franchement que je ne suis pas un expert du
Registre des lobbyistes, je l'ai
rarement consulté, mais, de prime abord, ça ne m'a pas semblé être très, très
«user-friendly». Est-ce que je me trompe?
M. Casgrain
(François) :
Vous avez tout à fait raison. C'est un système qui a été imaginé pour les
droits personnels et réels mobiliers.
Donc, évidemment, il y a des... Puis c'est un système qui a été mis en place
antérieurement à l'adoption de la loi, en 2002. Il n'est pas «user-friendly»,
vous pouvez être sûr. Est-ce qu'on retrouve facilement toute l'information?
Non. Est-ce qu'il est en données ouvertes?
Non. Et là c'est la consultation, hein? Il n'y a pas de possibilité d'avoir des
alertes sur des nouveaux mandats qui nous
concernent. Il n'y a pas la possibilité de pouvoir plus facilement agir avec
des instruments mobiles. On est à une ère différente de celui dont avait
été imaginé ce registre-là.
Évidemment, depuis 2007‑2008, disons, probablement
quand il y a eu la commission parlementaire, il semble évident qu'on veuille... tous les intervenants
disent : Il faudrait que ce soit le commissaire qui ait le registre.
Qu'est-ce que vous pensez que ça a
comme conséquences? On n'investit pas beaucoup pour changer le registre. On
n'est surtout pas pour mettre de l'argent si on change la loi parce que
c'est de l'argent qui va être mis à l'eau.
Et ça, vous parlez de
la consultation, mais, pour nous, ce n'est pas plus facile. Puis demandez à
ceux qui ont à l'utiliser à l'heure actuelle
pour l'inscription, ils vont vous dire qu'on est... je ne dirais pas que c'est
l'enfer, mais, en tout cas, on n'est
pas loin de ça. Donc, c'est très, très, très difficile. Et là-dessus ce n'est
pas de la mauvaise volonté des gens qui l'appliquent. Un, il y a
peut-être la philosophie, là. On n'a pas la même philosophie, le commissaire et
la conservatrice. Et là-dessus je pense
qu'il y a un changement qui doit être apporté. Mais les outils, les outils sont
effectivement désuets. Mais je pense
que c'est pour ça qu'il faut avoir des modifications pour pouvoir
éventuellement investir dans un système
qui va être plus convivial, plus facile d'utilisation et beaucoup plus facile
pour le public et le Commissaire au lobbyisme.
M. Boucher :
La deuxième question qui m'est venue, bon, suite à cette difficulté qui me
semble... en tout cas, pour moi,
c'est difficile, là. Peut-être que quelqu'un d'autre pourrait me dire que c'est
facile. Mais quelle est l'acuité de ce qu'il
y a dans ça? Quelqu'un viendrait me voir cet après-midi, puis je lui
demande : Es-tu inscrit au Registre des lobbyistes? Oui, oui, pas de problème. Je serais obligé de le
croire sur parole parce que je ne suis même pas sûr que je serais capable
par moi-même de vérifier ça, là.
M. Casgrain (François) : Mais disons quand même... il y a quand même
une... On ne doit pas tout dénigrer du... Dans le mot-clé, là, si vous
mettez, par exemple, le nom d'une entreprise, normalement, vous allez le
trouver. La problématique que l'on a, si vous utilisez la recherche avancée
puis vous mettez le nom de l'entreprise, il faut avoir exactement le bon nom de l'entreprise, hein? Je vais vous donner juste
le nom... l'exemple, puis je ne veux pas prendre plus de temps, L'Union des producteurs agricoles. Si vous marquez «Union
des producteurs agricoles», ça va vous indiquer qu'il n'y a pas de résultat parce que c'est L'Union des producteurs
agricoles. Si vous mettez «L'Union des producteurs agricoles» dans «mot-s-clé-s», ça va vous le
sortir, mais il faut le savoir. Et c'est là qu'effectivement cet outil-là, pour
plusieurs raisons, n'est pas pleinement
adéquat, même pour les personnes qui font des recherches. Mais évidemment c'est
pour ça qu'on dit aux gens : Utilisez avant tout les mots-clés, c'est ce
qui est le plus facile.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. Merci. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Merci, M. le Président. M. le commissaire, vous avez dit quelque chose qui m'a
étonnée, là, puis je veux bien
comprendre. Vous avez dit : Plusieurs OBNL sont des... Plusieurs
entreprises d'économie sociale sont des OBNL. Toutes les entreprises
d'économie sociale sont des OBNL.
M. Casgrain
(François) : Peut-être que la langue m'a fourché. Effectivement, elles
sont toutes des OBNL.
Mme Maltais :
O.K. d'accord. Elles sont toutes des OBNL.
M. Casgrain
(François) : Elles sont toutes des OBNL, excepté... puis les
coopératives...
Mme Maltais :
Ah! le mouvement coopératif.
M. Casgrain (François) : ...qui est le mouvement coopératif, qui sont
considérées aussi comme dans l'économie sociale, mais qui, en vertu de la Loi sur les coopératives, en tout cas,
ont un statut éventuellement différent. Puis encore là il pourrait arriver des exceptions de coopératives
qui sont considérées comme des OBNL. Mais ça, c'est plus compliqué, la
question des coopératives.
Mme Maltais :
Oui, tout à fait.
M. Casgrain (François) : Mais vous avez raison de dire que les entreprises d'économie
sociale sont des OBNL. C'est
une condition.
Mme Maltais :
C'est ça, parce que probablement que la langue vous a fourché, mais l'oreille
m'a relevé.
L'autre
chose que je veux vous dire, écoutez, je comprends qu'on veut atteindre la
perfection, O.K., mais légiférer, c'est important, puis on veut légiférer pour régler de véritables
problèmes de la société. Je vais vous dire, par exemple, un OBNL comme PIPQ, Projet
d'intervention prostitution de Québec, sert directement des gens, mais fait des démarches auprès des députés parfois pour régler des
dossiers. Moi, si je me mets à inscrire ou à demander au monde d'inscrire à
chaque fois sur le registre, là, je vais vous grossir votre registre, là, d'une
façon exceptionnelle.
Les
entreprises d'économie
sociale viennent me voir. Vous allez
être étonné du nombre de personnes qui rencontrent tous les députés partout pour le bien public, pas
pour le bien privé, pour le bien public. Et, à ce que je sache, je n'ai jamais entendu
de scandale parce qu'une personne, un organisme, une entreprise d'économie sociale ou de services, OBNL, avait essayé d'introduire un changement social ou
d'aller chercher une subvention. La plupart d'entre elles, d'ailleurs,
ont des programmes normés extrêmement précis.
Sur les
changements de loi, bien, ça se fait publiquement. Et moi, je répète, là, je
n'ai pas besoin de faire un... je ne
prendrai pas tout le 10 minutes. M. le commissaire, il y a
des priorités dans la réforme de la Loi sur le lobbyisme, on a des priorités. Attaquons-nous aux vrais problèmes.
Réglons nos priorités. Oublions l'assujettissement, là. Je ne vois pas comment on va résoudre le casse-tête devant lequel
on va se retrouver. Ou bien on les assujettit tous ou bien on ne les assujettit pas, là. Le reste, ça va
être quelque chose, de légiférer et de réglementer. Puis je souhaite
qu'on aille au fond des choses dans
la réforme puis qu'on oublie cette mauvaise idée, à notre avis et à mon avis,
qu'est l'assujettissement des OBNL. C'est ce que j'avais à dire, M. le
Président, puis je vais écouter, si vous avez d'autres remarques.
M. Casgrain
(François) : Je voulais juste
mentionner quelque chose parce
que vous avez parlé de la pureté tout à l'heure. Si vous regardez le paragraphe
en milieu de la page 58, dans notre rapport, on dit quand même
quelque chose qui ressemble à ça, malgré que, là, il y a
une discussion, et c'est entre les parlementaires. C'est sûr que les intentions qui animent
d'assujettir les personnes qui font des communications d'influence sont
louables, mais il faut éviter, par les exigences,
les efforts et éventuellement les contraintes qu'impose cet encadrement-là, que ça ne vienne pas contrebalancer, évidemment, ce que l'on
recherche. Donc, évidemment, il ne faut pas rechercher la pureté, il faut
savoir qu'est-ce que l'on
veut, où est-ce qu'on se situe. Et là-dessus je suis d'accord.
Maintenant,
pour moi, dans les modifications à la loi, là, je n'ai jamais
dit que c'était une priorité. Évidemment, je ne nierai pas ce qui a été mis dans le rapport de 2012, qui crée probablement la problématique que l'on a aujourd'hui. Comme
je l'ai dit, on peut avoir des points
de vue... des personnes peuvent avoir
des points de vue différents. Il y a des choses qui peuvent avoir une certaine importance
pour des personnes, moins pour d'autres. Ce que je dis, on m'a posé la question tout à l'heure : Je pense qu'il y a des avantages
relativement au niveau des regroupements, mais ces avantages-là, est-ce
qu'ils sont suffisants pour faire en
sorte qu'on va les inclure? L'étude que j'ai menée m'a permis de voir qu'il
faut tenir compte évidemment
de la réalité et des contraintes propres aux OBNL, et c'est important de le
faire. Mais, après ça, il y a quand
même un travail de ciselage si on
veut aller plus loin qu'à l'heure
actuelle, et ce n'est surtout,
surtout pas du mur-à-mur.
Mme Maltais : Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Me Casgrain, merci, Me Dussault, pour votre participation à nos travaux. Je remercie également les membres de la
commission pour leur collaboration.
Je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux au
mardi 4 octobre, à 10 heures, où elle poursuivra un autre mandat, qui
sont les consultations particulières et auditions publiques relativement à
l'étude du rapport sur la mise en oeuvre du Code d'éthique et de
déontologie des membres de l'Assemblée nationale. Merci.
(Fin de la séance à 12 h 50)