(Quinze heures cinquante-quatre
minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement
l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par Mme Lamarre (Taillon).
Auditions
(suite)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : la Table de
concertation des organismes au service des
personnes réfugiées et immigrantes, l'Ordre professionnel des technologistes
médicaux du Québec, l'Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec et
l'Ordre des médecins vétérinaires du Québec.
D'entrée de jeu, je veux souhaiter bonjour à
tous les collègues et je veux souligner...
(Consultation)
Le
Président (M. Ouellette) :
Donc, d'entrée de jeu, je veux m'excuser auprès de nos invités. Vous
comprenez que c'était cédulé pour un peu plus de bonne heure. C'est la rentrée,
donc la période a été un peu plus longue. Ça ne changera pas dans votre présentation, vous savez que vous allez avoir
une présentation de 10 minutes, et après il va y avoir un échange.
C'est dans l'échange avec Mme la ministre et les parlementaires que nous allons
compresser dans les quatre groupes de cet après-midi pour terminer à l'heure
convenue.
Donc, nous
recevons M. Yann Hairaud, qui est membre du conseil d'administration de la
Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées
et immigrantes, et Mme Pascale Chanoux. C'est M. Hairaud qui va faire la...
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) : Non,
c'est Mme Chanoux qui va faire la présentation. Je vous cède la parole.
Table
de concertation des organismes au service des
personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)
Mme
Chanoux (Pascale) : Merci.
Mesdames et messieurs de la Commission des institutions, rebonjour.
Donc, je m'appelle Pascale Chanoux et, au nom de la TCRI, je suis heureuse de
vous présenter nos réactions et positions relatives
au projet de loi n° 98, plus particulièrement aux articles 10 à 21 du
projet. Pour ce faire, donc, je suis accompagnée de M. Hairaud, du
CITIM, qui est un des organismes membres de la TCRI, et nous allons nous
partager le temps de présentation.
Pour rappel, la TCRI existe depuis 1979, et
c'est actuellement 139 organismes communautaires, à travers le Québec,
dédiés à l'accueil, installation et intégration des nouveaux arrivants. Par
ailleurs, cela fait déjà depuis plus de
15 ans que certains de nos membres accompagnent des personnes immigrantes
dans leur démarche d'admission aux ordres professionnels.
Nous savons
toutes et tous que les immigrants de la catégorie des travailleurs qualifiés se
heurtent à des problèmes de
reconnaissance des formations et expériences acquises à l'étranger et que, dans
le parcours d'insertion d'une personne immigrante,
il est impossible de dissocier la question de la reconnaissance des acquis et
compétences, que j'appellerais RAC, de l'accès à la formation manquante,
d'appoint ou d'actualisation.
Ce projet de loi nous interpelle à plusieurs
titres, car la problématique est importante pour les personnes immigrantes. Bon an, mal an, c'est près de
4 500 personnes immigrantes qui font des demandes d'admission aux
ordres professionnels, la moitié des demandeurs acceptés doivent suivre une formation
d'appoint ou un stage afin d'obtenir le
niveau de compétence équivalent à celui exigé des diplômés du Québec. Il faut
rajouter que 10 ordres
professionnels sur 46 reçoivent 80 % des demandes de reconnaissance et
que, parmi ces 10 ordres, le taux relatif d'acceptation totale ou
partielle varie grandement d'un ordre à l'autre.
Cette
problématique est importante et elle est aussi complexe et d'ordre systémique.
Les travaux de plusieurs
tables de travail sur l'accès aux professions
et métiers réglementés menés sous l'égide de ce qu'on appelle le MIDI aujourd'hui
nous l'ont dit dès 2004-2005. Suite à ces
travaux, le gouvernement et ses partenaires ont mis en oeuvre diverses
mesures, et les activités du commissaire aux plaintes ont été lancées.
En dépit de
ces avancées, la problématique est persistante, et, aujourd'hui encore, des acteurs multiples et divers s'entendent pour dire
que des difficultés importantes subsistent en matière d'accès à la formation
d'appoint et aux stages, ainsi que de
coordination entre les acteurs concernés. Je cite notamment
une recherche récente de l'OCDE LEED qui
parle de la nécessité de fournir une formation mieux adaptée aux besoins des
immigrants et à leur situation en offrant des programmes réactifs,
modulables et programmables à différents moments de l'année et pour de petits
groupes.
Pour un accès réel des professionnels formés à
l'étranger, qu'on appelle aussi PFE, aux formations d'appoint et aux stages — c'est vraiment ce qui nous intéresse — il
nous faut faire plus et faire mieux en nous attaquant aux chaînons manquants, adresser de front et systématiquement les obstacles et problèmes systémiques que rencontrent les PFE dans
leurs parcours d'admission aux ordres pour y apporter des réponses ou solutions
systémiques, structurantes et durables.
Comme la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse, qui s'est exprimée à plusieurs reprises sur ce sujet depuis 2007, la TCRI estime qu'une
instance indépendante de reddition de comptes doit veiller à ce que les normes
et pratiques des établissements d'enseignement et milieux de stage en matière
de reconnaissance des acquis n'aient pas d'effets discriminatoires, directs ou
indirects, sur les PFE.
• (16 heures) •
Nous sommes
donc extrêmement favorables à un élargissement de la compétence et des pouvoirs
du CPRCP. Cet élargissement va
permettre au commissaire d'avoir officiellement et directement un droit de
regard sur l'ensemble de la démarche
d'admission, qui est un tout cohérent — le
PFE est en effet dans un parcours d'insertion vers sa profession qui ne devrait pas subir de rupture d'une étape à
l'autre; auprès de l'ensemble des acteurs déterminants, incluant les
établissements d'enseignement et les milieux
de stage. Il sera désormais donc, ce commissaire, en mesure de recevoir et
d'examiner les plaintes individuelles
relatives aux formations d'appoint et aux stages et d'en vérifier les
mécanismes par une approche systémique. Cela lui permettra de développer
une connaissance large et fine des obstacles systémiques rencontrés par les PFE
à ces deux étapes et de proposer des solutions aux acteurs concernés pour les
contrecarrer.
Nous sommes
aussi favorables à une institutionnalisation par l'incorporation dans la loi du
pôle de coordination. Devant la
propension des acteurs à travailler et à demeurer en silo, à se rejeter les
responsabilités les uns sur les autres, et vu les limites du pôle actuel, cette institutionnalisation va exprimer une
attente claire du législateur quant à la coordination de tous les
acteurs déterminants, comprenant le ministère du Travail, de l'Emploi et de la
Solidarité sociale, qui soutient certains
PFE à travers ses mesures de formation MFOR, et aussi aux résultats qui
devraient en découler. Cela va engager ces acteurs plus clairement vers
la mission du pôle et les pousser à prendre leurs responsabilités en ce qui a
trait à l'offre de formation d'appoint et de
stage. Le pôle aura désormais un pouvoir formel en matière de cueillette
d'information, il verra aussi son
imputabilité se formaliser davantage et s'accroître, car il aura à faire des
redditions de comptes périodiques auprès des autres autorités de l'État.
Finalement, cette bonification du rôle et du
titre du commissaire aux plaintes concernant les mécanismes de reconnaissance
des compétences professionnelles et ce renforcement du pôle de coordination
devraient aboutir à un accroissement de
l'équité, de la transparence, de l'objectivité et de l'efficacité du processus
d'admission à une profession pour les PFE, objectifs, évidemment, que la
TCRI partage totalement.
Je laisse la parole à M. Hairaud.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Hairaud.
M. Hairaud
(Yann) : Oui, merci.
Bonjour. Donc, pour illustrer les propos de ma collègue, je vais vous
présenter l'exemple d'une démarche entreprise
pour aider les PFE en génie à obtenir le permis d'exercice de l'Ordre des
ingénieurs du Québec. Ce parcours a été mis
en place à la fin des années 90 pour préparer, donc, les PFE aux examens
d'admission prescrits par l'ordre, grâce à
une formation d'appoint qui a connu deux formes successives. On a commencé par
une formule de tutorat assuré par des
professeurs de Polytechnique Montréal, destiné, donc, à préparer les PFE aux examens
d'admission, et, à partir de 2004, un programme de certificat à temps plein,
mis en place par le même établissement, qui
combine des cours réguliers de deuxième et troisième année de baccalauréat en génie dans une dizaine de spécialités. Depuis sa création, un peu plus de
2 000 professionnels formés à l'étranger en génie ont pu
bénéficier de cette formule, et jusqu'à
85 % d'entre eux ont réussi les examens d'admission à l'Ordre des
ingénieurs. Cette formule a permis d'amener différents acteurs, tels que l'ordre professionnel, l'université,
Emploi-Québec et, en l'occurrence, un organisme communautaire,
à s'asseoir ensemble pour identifier comment faciliter l'accès à l'OIQ par le
biais de la formation d'appoint. Il ressort également clairement que
l'accompagnement des candidats par un organisme communautaire spécialisé auprès
des nouveaux immigrants facilite grandement le cheminement de la personne dans
l'ensemble du processus à l'ordre et durant la formation d'appoint, on parle
d'information, de suivi dans les démarches, de soutien psychosocial,
principalement.
Ces résultats
positifs ne doivent cependant pas occulter les limites d'ordre systémique de la
formation d'appoint mise en place. Je vais donc les présenter
successivement, il y en a cinq.
La première
limite qu'on constate, c'est le niveau de français, qui pose problème au niveau
de l'admission dans la formation pour
les PFE allophones, bien évidemment, mais également, aussi, pour certains PFE
francophones de l'Afrique du Nord, qui
doivent réussir le test de français international pour pouvoir prétendre suivre
le certificat offert par Polytechnique
Montréal. Ce qu'on constate, c'est que la francisation offerte par le MIDI
n'est pas suffisante pour permettre à ces
personnes d'entreprendre des études universitaires, et il n'existe actuellement
aucune autre offre de formation adaptée. Donc, ça peut être une contrainte
importante au niveau de l'accès à la formation d'appoint.
Autre
contrainte, au départ conçue pour préparer d'un à quatre examens de l'ordre, la
formation est désormais limitée aux immigrants ayant un seul examen par
Emploi-Québec, et ce, pour des raisons administratives liées à la performance de la mesure de formation. Comme la
majorité des professionnels formés à l'étranger ont, pour la plupart, deux à trois examens, nous avons constaté une
diminution drastique du nombre de personnes qui s'inscrivent au
certificat : moins de 20 personnes au cours de l'année écoulée, alors
qu'auparavant on parlait d'un volume pouvant aller de 100 à 150 personnes.
La question
des coûts, également, constitue un obstacle majeur dans cette démarche. En
effet, l'ensemble de la démarche peut représenter de 2 500 $ à
5 000 $ de frais pour le PFE, et aucun soutien financier n'existe en
dehors du prêt étudiant. Les PFE n'ont pas
accès, effectivement, à une bourse d'études. Le seul soutien provient d'Emploi-Québec,
qui continue de verser l'aide de dernier
recours aux personnes qui y ont droit durant la formation. Contraintes
d'assumer tous les frais, les
personnes immigrantes récemment arrivées au Québec et, de surcroît, sans emploi
hésitent beaucoup à s'endetter, car
ils ne savent pas si les démarches vont aboutir, et culturellement le crédit
n'est pas toujours bien perçu chez certains immigrants. L'absence de
soutien financier a pour effet de retarder l'accès des PFE à l'ordre et donc au
marché du travail, dans des postes d'ingénieur.
Autre
obstacle, qui réside, celui-ci, au niveau du contenu de la formation. En effet,
la nature de la formation pose et soulève
un certain nombre d'interrogations, puisque, dans la démarche proposée, aucune RAC
n'est offerte aux PFE en génie pour évaluer plus finement les écarts en
termes de compétence en lien avec un référentiel basé sur les besoins des employeurs — une minute? D'accord. Les PFE doivent
choisir les cours, dans l'offre régulière de Polytechnique, qui répondent le mieux possible aux examens de l'Ordre
des ingénieurs. Ils sont alors placés dans une logique académique qui les amène à devoir compléter et réussir des cours
pour obtenir un certificat, non créditable soit dit en passant, alors
que l'organisme de réglementation pose comme
condition d'admission la réussite d'examens destinés à valider les
connaissances techniques liées à une spécialité du génie.
En terminant, puisque je pense que le temps est
pratiquement écoulé, je pense qu'au-delà de la question de l'accès à la formation d'appoint il faut aussi
évoquer la question de l'accès au marché du travail, car, même si le
processus dont nous venons de parler
facilite l'accès en emploi, un suivi effectué auprès de plusieurs cohortes, en
2007-2008, montre que seulement 35 % des emplois occupés par les
PFE sont des emplois d'ingénieur. Et donc, par rapport à ça, il y a des interventions à faire bien évidemment auprès
des personnes immigrantes pour les outiller et les accompagner dans les démarches, mais il y a également des interventions
à faire auprès des employeurs, parce qu'on constate parfois, malheureusement, encore trop de résistance
d'employeurs vis-à-vis de l'embauche de personnes immigrantes, et la
formule des stages est, bien évidemment, également une formule à considérer.
J'avais d'autres éléments, que je pourrais
peut-être éventuellement aborder lors la période d'échange.
Le
Président (M. Ouellette) :
Vous allez sûrement avoir la possibilité, M. Hairaud, de les aborder dans
votre conversation que vous allez avoir avec Mme la ministre.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, je tiens à vous saluer, M. Hairaud,
Mme Chanoux. Merci pour votre présentation.
Dans un premier temps, je sais que le temps a été réduit, alors on va quand
même essayer d'y aller assez rondement.
Lors des
consultations, on a eu des représentations notamment de la part du CIQ et de
certains ordres qui nous disaient :
Il faut adopter une approche collaborative, on doit... c'est plus efficace
qu'une approche de surveillance. Et là on fait référence aux nouveaux
pouvoirs et aux pouvoirs accordés au commissaire aux admissions en nous
disant : Bien, écoutez, si on travaille
en collaboration, ça va être plus efficace que si on est assujettis au regard
d'une personne neutre, ni plus ni
moins, là. Est-ce que vous pensez... est-ce que vous partagez cette approche-là
ou est-ce que vous considérez qu'il est opportun d'avoir un regard externe qui puisse apporter des
recommandations, et non pas un pouvoir de sanction, mais un pouvoir,
comme vous le savez, de recommandation aux différents partenaires?
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Chanoux ou M. Hairaud? Mme Chanoux.
• (16 h 10) •
Mme Chanoux (Pascale) : Oui, je peux
commencer, puis Yann continuera.
Vous avez
compris, Mme la ministre, qu'effectivement nous trouvons plus intéressant
d'arriver à quelque chose qui est inscrit dans la loi, pour la bonne
raison, je pense... Parce que c'est vrai qu'il y a eu des approches
collaboratives qui étaient importantes, qui ont permis de faire avancer. On l'a
vu, hein, à travers les équipes, les groupes de travail, notamment sous l'égide du ministère de
l'Immigration. On peut dire que c'était de l'approche collaborative. Il y a eu,
par la suite, de façon plus ponctuelle, des
collaborations qui, comment dire, n'engageaient pas autant d'acteurs peut-être
que ces groupes ou ces équipes de travail.
Mais on se retrouve avec une persistance des problématiques. Donc, ça veut dire
que cette approche collaborative,
évidemment, est un bon départ mais est sans doute insuffisante pour régler, je
dirais, de façon urgente la situation.
Ça fait très longtemps que M. Hairaud et
moi-même travaillons sur le dossier de la reconnaissance des acquis et
compétences des immigrants en général. Ce dossier a connu plusieurs
avancements, mais on est en 2016, comme disent
certains, et on a toujours des problèmes de rupture. La personne, elle, elle est dans un parcours, et,
soit dit en passant, ce qui l'intéresse, c'est d'aller vers un emploi
dans sa profession, hein, donc c'est sa visée finale. Tout le reste, c'est des moyens, ce n'est pas des buts en soi. Et ça,
ça fait partie des difficultés que les gens rencontrent. Quand ils sont
dans le réseau de l'éducation,
c'est comme si le but devenait, admettons, le diplôme, vous voyez? Alors qu'en
fait, non, pour la personne qui est dans son parcours d'insertion vers
sa profession, c'est une étape indispensable et nécessaire.
Parce que je
pense que la plupart des gens ont actualisé leurs compétences d'une certaine
manière, hein? C'est rare qu'il y ait
une transférabilité totale des compétences d'un immigrant vers sa profession
ici, au Québec, mais il faut que ça puisse se faire, je dirais, dans des conditions raisonnables, c'est-à-dire qu'à chaque étape on ne se retrouve pas avec des ruptures, comme on le constate actuellement, soit parce que les critères d'admission ne sont pas... sont trop
pointus, soit parce que les coûts, comme le disait M. Hairaud, sont trop
élevés, soit parce que les délais sont trop longs. Ces problématiques se posent
toujours et persévèrent. Donc, je pense que, oui, la collaboration, c'est très
important, c'est la base de ce qu'on veut faire dans le futur, mais il faut
aller plus loin, et je crois que cette loi, ce projet de loi met les conditions
justement pour faire mieux et faire plus. Voilà.
Le Président (M. Ouellette) :
...complémentaire.
M. Hairaud (Yann) : Oui. Peut-être
pour compléter, je prendrais l'exemple, notamment, s'agissant du pôle de coordination, de ce mandat aussi de cueillette,
d'analyse et de recul nécessaire. Parce que, comme le mentionnait ma collègue, des initiatives, il y en a eu beaucoup.
On relisait, en prévision de cette journée d'aujourd'hui, la liste de
tout... les initiatives de tous les projets
qui ont été menés, beaucoup sous l'égide du ministère de l'Immigration. Donc,
oui, il y a des démarches de collaboration qui existent, qui ont existé.
Malgré tout, les difficultés d'accès au marché du travail demeurent pour ces professionnels diplômés à
l'étranger. Donc, je pense qu'il est plus que temps, effectivement, de
pouvoir prendre ce recul, de pouvoir analyser les choses en profondeur, de
façon, effectivement, à comprendre précisément pourquoi ça ne fonctionne pas véritablement comme on l'espérait, et, je
pense, dans un souci aussi d'avoir et de dégager la cohérence, hein,
pour éviter, comme le mentionnait ma collègue, parfois les ruptures dans les
parcours.
Mme Vallée : Est-ce que vous
croyez que le mandat du pôle, tel que défini, est suffisant et répond bien aux problématiques que vous avez pu identifier au fil
de votre implication ou est-ce que ce mandat-là devrait être bonifié?
Mme Chanoux (Pascale) : Moi, je
pense que le pôle, jusqu'à date, a existé, hein, dans une certaine formule, on le sait, qui n'a pas, semble-t-il, donné de
résultat probant. Déjà, le fait, sans doute, que le ministère de l'Emploi et
de la Solidarité sociale rejoigne le pôle,
ça me semble important, c'est devenu un acteur incontournable dans le domaine
depuis quelques années, dans le domaine de
l'intégration professionnelle des immigrants. Et je croirais que de formaliser
davantage va rendre aussi... va mettre les
conditions d'une plus grande responsabilité des acteurs. Là, je pense que
c'était davantage quelque chose de
formel, entre guillemets, et d'administratif, si vous voulez, il n'y avait pas
d'attente claire en termes... Parce
qu'on est maintenant dans un temps d'obligation de résultat, d'une part, et on
est aussi dans un temps d'imputabilité des
acteurs. Donc, je crois que, déjà, le pôle pourrait...la formule qui est
proposée pour le pôle va aller dans ce sens-là.
C'est sûr que
nous, organisme communautaire, on serait absent de ça, je pense que... M.
Hairaud parlait tout à l'heure aussi que l'accompagnement via le milieu
communautaire, par exemple des projets de formation d'appoint, peut faire partie des conditions de succès. On l'a
vécu depuis les années 90, au temps du CAMO-Personnes immigrantes, il
y a
eu plusieurs projets, si vous voulez, de formation d'appoint,
d'accès aux ordres, infirmières, infirmières auxiliaires, ingénieurs, qui étaient accompagnés par des organismes communautaires, et les évaluations qui en ont été faites étaient positives. On sait aussi par l'expérience que ça
fait partie des conditions de réussite. Alors, c'est sûr que nous, on
n'est pas dans le pôle, là, c'est le cas de
le dire, il y aurait peut-être moyen de... Je sais que le pôle va avoir la possibilité peut-être de faire
venir de façon ad hoc des ressources extérieures, alors ce serait peut-être
l'élément notamment à compléter par rapport à votre question.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci. Mme la ministre, c'est terminé. Je vais maintenant
du côté de notre nouvelle membre officielle de la Commission
des institutions, à qui je souhaite la bienvenue, parce qu'il fallait attendre
le retour de la session pour que ça soit officialisé. Et, Mme la députée de
Chicoutimi, à vous la parole.
Mme
Jean : Merci beaucoup. Alors, M. Hairaud, Mme Chanoux, bienvenue à
l'Assemblée nationale. Merci de venir
témoigner aujourd'hui pour le projet de loi n° 98. Votre point de vue, je
pense, au niveau de votre connaissance des nouveaux arrivants, est très
intéressant, pour nous, de l'avoir. Donc, je vous remercie d'être ici puis je
vous remercie de faire cette présentation.
Dans votre
présentation, je comprends que, selon vous, il y a des problématiques
systémiques dans, justement, l'accueil des... l'admission des nouveaux
arrivants dans les professions, que, ce problème systémique là, selon vous, d'étendre les pouvoirs du commissaire, qui est
actuellement le commissaire aux plaintes, qui deviendrait le commissaire
à l'admission, d'étendre ses pouvoirs lui permettrait de pouvoir faire
justement un diagnostic du système et où est le problème exactement.
Deuxième problématique que j'ai comprise est le
fait que les institutions touchées par l'admission travaillent un peu en silo.
Oui, il y a un pôle de coordination qui existe, qui est plus ou moins
fonctionnel, et, selon vous, la proposition de faire un pôle de coordination
officiellement pourrait aussi être une solution à cette problématique-là.
Donc, moi,
je vois deux problématiques. Ma question est celle-ci : Est-ce qu'entre
les deux... Quel est le lien que vous voyez entre le commissaire qui
serait le commissaire à l'admission et le nouveau pôle de coordination?
Le Président (M. Ouellette) : M.
Hairaud.
M. Hairaud (Yann) : Bien,
bon, le commissaire a pour mandat, en premier lieu, d'examiner, je dirais, plus
les normes d'admission, hein, utilisées par
les ordres professionnels, en lien avec un mécanisme de plainte. Je pense
qu'au-delà de ce mandat premier qui lui
avait été confié par la loi en 2009, à la lumière des démarches qui ont été
entreprises pour aussi mieux comprendre comment finalement des... à
partir d'un mécanisme de reconnaissance et des normes de connaissance utilisées par des ordres
professionnels, on pouvait concrètement faire le lien avec les recommandations
en termes de formation d'appoint et de
stage. Parce que c'est là aussi, hein, où tout l'enjeu se situe, finalement.
C'est une chose de dire que le diplôme est reconnu en partie ou jusqu'à
une certaine valeur et de recommander par la suite de compléter par une formation d'appoint ou un stage, mais faut-il encore
que tout ça puisse effectivement se réaliser, et tout ça dans un
contexte raisonnable. Et je pense que d'avoir cette vision sur l'ensemble du
processus par une instance indépendante des
acteurs, qui, eux, se retrouvent plus au niveau du pôle de coordination,
m'apparaît effectivement une dimension
intéressante, je vais dire, un regard supplémentaire qui ne peut que contribuer
à l'objectif d'essayer de trouver des solutions pérennes, finalement.
Mme
Jean : Donc, est-ce que je comprends que, selon vous, le commissaire,
en faisant son diagnostic, en faisant ses
analyses, en ferait le dépôt au pôle de coordination et qu'à ce moment-là le
pôle de coordination serait mieux outillé pour pouvoir dire : Ah!
si c'est ça, le problème, on peut le solutionner de cette façon?
Mme Chanoux
(Pascale) : On peut alimenter, que ce soit par les plaintes
individuelles ou par la vérification.
Mme Jean :
D'accord.
• (16 h 20) •
Mme Chanoux (Pascale) : C'est deux manières de fonctionner, en quelque
sorte, c'est ça, de façon très pointue. Il a commencé à faire, on l'a vu, des sessions... des activités
d'information sur l'offre de formation d'appoint au collégial et à l'université. Je pense qu'avec le projet de
loi il va pouvoir... Parce qu'on se disait, avec M. Hairaud, qu'on ne
savait pas qu'est-ce qui se passait de façon concrète pour les gens. Est-ce
qu'avec l'offre, par exemple, de formation d'appoint existante, parce qu'elle existe partiellement... Qu'est-ce qui se passe
pour les gens? Est-ce que tous les gens qui ont cette commande de
formation peuvent bénéficier réellement... C'est ça qui nous intéresse, si vous
voulez. Quels sont les parcours réels des
individus à l'intérieur de ça? Est-ce qu'ils persévèrent dans leurs formations
d'appoint? Est-ce que ça leur permet
de trouver un emploi dans leurs professions? Donc, tous ces éléments-là, on n'a
pas l'information, si vous voulez.
Alors, la cueillette d'information est quelque
chose vraiment d'urgent aussi pour
mieux documenter la problématique de façon fine et précise.
Mme Jean :
D'accord. Rapidement, on a 30 secondes.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci... Oui, parce qu'il vous reste 30 secondes.
Mme
Jean : 30 secondes. Les
ordres professionnels qui ont présenté ici mentionnent souvent
qu'il n'y en a pas, de problème. Selon vous, comment ça se fait que des
ordres ne voient pas de problème à l'admission? Rapidement, en
20 secondes.
Mme Chanoux (Pascale) : Moi, je crois que c'est sûr que, jusqu'à présent,
bon, les ordres ont fait un travail aussi d'autocritique, hein? Je veux
dire, il y a eu un travail aussi, on le sait, il y a quelques années, de
regarder un peu les processus, etc. Le commissaire aussi a interagi avec un
certain nombre d'ordres. Jusqu'à date, j'ai l'impression que la question
de comment la formation d'appoint est prise sortait de la responsabilité totale de l'ordre. Ce n'est plus nous, en quelque sorte, c'est à la personne, une fois qu'elle a sa commande en poche, de
continuer son parcours. Elle est comme laissée
à elle-même, si vous voulez, d'une certaine manière, et moi, je trouve ça problématique, parce que, si les gens, raisonnablement,
ne peuvent pas prendre leurs formations d'appoint, c'est que, sérieusement, ils ne peuvent pas accéder à leurs professions, donc, quelque
part, ça concerne aussi les ordres, d'une certaine manière, vous voyez?
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme Chanoux. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Merci. M. Hairaud, Mme Chanoux, bonjour, merci pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Peut-être pour
poursuivre sur ce point-là, vous dites... Bon, un coup qu'ils ont leurs
attestations de ce que ça leur prend comme équivalences
ou leurs parcours à suivre pour pouvoir accéder à l'ordre professionnel, vous
dites : Ils sont un peu laissés
à eux-mêmes. Est-ce que vous pensez que ça devrait être les ordres professionnels
qui les accompagnent? Ça devrait être l'État qui les accompagne?
Qu'est-ce que vous voyez, dans le fond, pour que le parcours de l'immigrant professionnel
soit couronné de succès, là, puis pour qu'il réussisse vraiment à pratiquer sa
profession rapidement? C'est le rôle de qui, là? Qui doit exercer le leadership,
là, là-dedans?
Mme Chanoux
(Pascale) : Il y a bien des acteurs qui sont concernés par ce que vous
êtes...
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais, dans le fond, concrètement, pour un immigrant, ça serait quoi, la procédure à
suivre?
Le Président (M. Ouellette) : M.
Hairaud.
M.
Hairaud (Yann) : Quand on
dit : Ils sont abandonnés à eux-mêmes, c'est qu'en fait, pour le nommer, en fait, le système d'éducation ne prend
pas en compte nécessairement et de manière satisfaisante les besoins en termes de
formation. Parce que vous avez, d'un côté,
un ordre professionnel dont c'est la mission d'évaluer, par rapport à des
normes, si le diplôme est suffisant pour
pouvoir exercer une profession, ça, c'est une chose, et, très souvent, cette
reconnaissance est partielle, donc il y a
des écarts à combler en termes de formation, ou ça peut être des stages. Mais
après ça il faut que le système d'éducation, lui, soit en mesure de
pouvoir proposer cette formation de manière adaptée, et c'est souvent là où il
y a comme une rupture importante qui peut se traduire, pour des personnes,
hein, puisqu'on travaille avec des personnes,
par des risques d'abandon importants, de démotivation, parce que, souvent, ils
sont contraints à reprendre des formations
qui ne répondent pas précisément à leurs besoins, ils doivent suivre beaucoup
plus que ce dont ils auraient besoin,
et donc, souvent, ils sont amenés... ça les met assez directement dans des
parcours d'échec. Donc, l'éducation,
je pense, a un rôle important à faire.
Et je pense qu'il y a... Je ne dis pas que ça ne
se fait pas. Je dis : Des démarches collaboratives, il y en a, mais est-ce qu'on a été jusqu'au bout? Est-ce que,
malgré tout... Parce que, nous, à travers l'exemple du projet des
ingénieurs, les obstacles systémiques demeurent, alors que, pourtant, tous les
secteurs sont dans une démarche de bonne foi et de collaboration. Mais, je veux dire, pratiquement 20 ans après, on a
fait des avancées, mais l'essentiel du problème demeure. Et donc,
finalement, le modèle ne donne pas finalement des résultats à la hauteur des
espérances.
Alors donc,
l'éducation, et puis ça a été mentionné, moi, je pense que le fait d'avoir
aussi pour des personnes, ne l'oublions pas, récemment arrivées, hein,
qui sont aussi en processus d'adaptation et d'intégration dans leur nouvelle
société d'accueil, un accompagnement nous apparaît également important.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Borduas.
10 secondes, juste pour leur dire merci. Merci, M. Yann Hairaud, Mme Pascale Chanoux, représentant la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et
immigrantes.
Je vais
suspendre quelques minutes. Je vais demander à l'Ordre professionnel
des technologistes médicaux du Québec de s'avancer.
(Suspension de la séance à 16 h 25)
(Reprise à 16 h 27)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre professionnel
des technologistes médicaux du Québec,
représenté par sa présidente, Mme Doris Levasseur Bourbeau, et Me Alain
Collette, qui est directeur général et secrétaire de l'ordre. Mme Levasseur, c'est vous qui allez faire la
présentation, 10 minutes. Après, il va y avoir des échanges avec Mme
la ministre et les porte-parole des deux oppositions. À vous la parole.
Ordre professionnel des
technologistes
médicaux du Québec (OPTMQ)
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Alors, merci beaucoup, M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs
de la commission. Nous vous remercions de nous donner l'occasion de nous
entendre.
Au nombre de
plus de 4 750, les technologistes médicaux sont les professionnels de la
santé qui effectuent sur le corps
humain ou à partir de spécimens des analyses et des examens dans le domaine de
la biologie médicale et qui assurent la validité technique des résultats
à des fins diagnostiques ou de suivi thérapeutique.
L'ordre est
généralement favorable aux dispositions du projet de loi n° 98. Cependant,
nous tenons à vous faire part de certains commentaires et
recommandations.
Concernant la
transformation du commissaire aux plaintes en commissaire à l'admission. De
prime abord, la mise en place de la
fonction de commissaire aux plaintes répondait à une préoccupation du
gouvernement du Québec suivant la commission
Bouchard-Taylor. Le projet de loi, tel que libellé, élargit le rôle et les
fonctions du commissaire aux plaintes concernant les mécanismes de
reconnaissance des compétences professionnelles à tout processus ou activité
relatif à l'admission, incluant celui des diplômes québécois, et propose de le
renommer commissaire à l'admission.
Nous n'avons
pas d'information pertinente nous permettant de croire que cette orientation
repose sur des problèmes identifiés et documentés relatifs à l'admission
à un ordre, notamment celle des personnes formées au Québec.
Il faut
considérer que le processus d'admission à la profession des personnes formées
au Québec est régi par des règlements
adoptés par l'Office des professions et par le gouvernement, d'autant plus que
le commissaire à l'admission n'aura
qu'un pouvoir de recommandation. À cet égard, l'ordre estime que
l'élargissement du mandat et des pouvoirs du commissaire ne résoudra pas les problèmes relatifs à l'intégration
professionnelle des personnes immigrantes, qui exigent des solutions concertées entre les acteurs
concernés. De plus, ceci générera des coûts additionnels pour les
professionnels, dont les technologistes
médicaux, sans garantir la mise en place de solutions concrètes aux problèmes
connus et exprimés, tels que l'accessibilité à une formation adaptée et
la disponibilité de places de stage en milieu clinique.
• (16 h 30) •
Concernant le pôle de coordination, le projet de
loi propose d'insérer au Code des professions le Pôle de coordination pour
l'accès à la formation. Le mandat proposé du pôle sera centré sur
l'identification des problèmes et des
besoins en données statistiques et ne liera ni l'office ni les autres acteurs
en regard des solutions que le pôle pourrait recommander.
Il est donc nécessaire d'orienter le mandat vers la mise en oeuvre de mesures
ciblées, de l'axer sur les résultats et l'engagement des partenaires visant l'accessibilité
à la formation.
Quant à nous, les problèmes sont déjà bien
connus depuis plusieurs années par l'Office des professions et les différentes instances, mais peu d'actions
concrètes ont été mises en place permettant d'améliorer l'accès à la
formation d'appoint et aux stages pour les personnes formées à l'étranger. Au
cours des 10 dernières années, l'ordre a émis 427 prescriptions de
formation d'appoint à la suite de la reconnaissance d'une équivalence
partielle. De ce nombre, seulement 78 candidats ont complété la formation
prescrite et obtenu un permis. La difficulté d'accès à la formation d'appoint
n'est pas étrangère à cette situation.
Et je porte à votre attention la situation
suivante. En 2014, le cégep de Rosemont a dû suspendre l'attestation d'études collégiales dite «intégration à la
profession des personnes formées à l'étranger». En conséquence, les
personnes immigrantes qui reçoivent une
prescription personnalisée de formation de l'ordre doivent s'inscrire dans le
programme régulier pour la réaliser, ce qui implique un parcours académique de
trois ans au lieu de 18 mois.
Cette situation
a également un impact sur l'entente de reconnaissance
mutuelle entre le Québec et la France. Les personnes formées en France doivent aussi s'inscrire dans le cursus
régulier de formation collégiale pour réaliser la mesure
compensatoire convenue avec l'autorité française, ce qui allonge de façon non
négligeable le temps requis pour leur intégration à la pratique au Québec.
À défaut
d'orienter le mandat vers la mise en
oeuvre de mesures ciblées, de l'axer
sur des résultats et l'engagement des partenaires visant l'accessibilité à la formation, nous estimons que le pôle aura peu d'effets sur l'ensemble
des défis systémiques liés à l'objectif de l'intégration professionnelle
des personnes immigrantes. Il est nécessaire d'assurer un leadership fort et
rassembleur.
En ce qui concerne la gouvernance des ordres
professionnels, nous sommes favorables
à la réduction de la taille du conseil d'administration et la gestion
des conflits d'intérêts.
Pour ce qui
est du code d'éthique et de déontologie, le projet de loi prévoit que les
ordres devront adopter, par règlement, un code d'éthique et de déontologie applicable
aux membres du C.A. L'ordre s'est déjà doté d'un tel code. Aussi, nous nous
questionnons sur l'utilité pour les ordres d'adopter un règlement, alors que
l'Office des professions déterminera au
préalable, par règlement, les normes d'éthique et de déontologie
applicables aux administrateurs d'un
ordre professionnel, d'autant plus que le
projet de loi ajoute un article au Code des professions énonçant le contenu du
code d'éthique et de déontologie. Ceci nous
apparaît lourd et redondant. Nous estimons qu'il serait plus simple de
permettre aux ordres d'enrichir ces normes
par résolution du C.A. Et, de plus, il serait pertinent de prévoir dans le Code
des professions quelle instance sera chargée de l'examen et de l'enquête
concernant les comportements susceptibles de contrevenir aux normes édictées.
Concernant la présidence, nous recommandons de
conserver au président un droit de surveillance générale de l'ordre. À cet égard, nous nous expliquons
difficilement pourquoi délester le président de son droit de surveillance
générale sur les affaires de l'ordre au
profit du C.A. Retrancher le droit de surveillance du président, c'est le
priver du moyen qui lui permet d'assumer pleinement son imputabilité à
titre d'élu, compte tenu qu'il peut requérir toute information d'un membre d'un comité formé par le C.A., d'un employé
de l'ordre ou de toute autre personne qui exerce au sein de l'ordre.
En ce qui
concerne le directeur général, le projet de loi prévoit, à l'instar du
secrétaire de l'ordre et du syndic, qu'un
vote des deux tiers des membres du C.A. sera requis pour destituer de ses
fonctions le directeur général. Quant à nous, cette disposition ne devrait pas s'appliquer au directeur général,
et je m'explique. L'article 85 du Code des professions a pour but d'assurer l'indépendance du syndic et
du secrétaire de l'ordre et de les protéger contre toute ingérence
politique, compte tenu des fonctions qu'ils occupent et des responsabilités
qu'ils assument. La fonction du directeur général est tout autre, elle ne nécessite pas une telle protection. Et, d'autre
part, un ordre qui voudrait offrir ce type de protection au directeur
général pourra toujours le faire par règlement adopté en vertu du paragraphe a
de l'article 94.
Maintenant, concernant l'obligation des candidats
à la profession de réussir une formation en éthique et en déontologie, nous sommes favorables à l'objectif.
Cependant, cette nouvelle obligation fera peser sur l'ordre
un fardeau supplémentaire. Telle que libellée, elle pourrait contribuer
à déresponsabiliser les instances qui sont responsables des programmes d'études dont les diplômes donnent
ouverture aux permis professionnels. Nous croyons que, lorsqu'il est constaté qu'un programme d'études conduisant à
l'obtention d'un permis ou d'un diplôme donnant ouverture aux permis de l'ordre ne comprend pas d'activité d'apprentissage
relative à l'éthique et à la déontologie, le ministère de l'Enseignement
supérieur devrait prendre les mesures pour modifier le programme de manière à
combler le manque constaté.
Et, comme
dernier point, ça concerne l'adresse électronique des professionnels. Le projet
de loi prévoit que le tableau des
membres contiendra une adresse électronique professionnelle établie à son nom.
Nous recommandons à la place que le membre puisse fournir une adresse
électronique valide établie à son nom, compte tenu que nos membres exercent
principalement dans le réseau public de la santé et n'ont pas tous accès à une
adresse électronique professionnelle. C'est pourquoi nous jugeons pertinent de
permettre aussi une adresse électronique valide à son nom, établie à son nom.
Et voilà. Je
vous remercie de votre écoute, et Me Collette et moi-même sommes maintenant
disponibles à répondre à vos questions. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée : Bonjour, c'est
un plaisir de vous retrouver. Donc, malheureusement, notre temps d'échange est un peu restreint, donc on va y aller quand
même assez rondement. Pour ce qui est de la gouvernance des ordres, vous
proposez que le code d'éthique soit adopté
par résolution du conseil d'administration des ordres plutôt que par
règlement. Est-ce que vous ne croyez pas que ça vient un
petit peu porter atteinte au pouvoir de surveillance, justement, de la réglementation, qui est prévu par l'office? Parce
que la résolution du conseil d'administration, elle... Et je comprends,
là, c'est une recommandation qui est
formulée par d'autres ordres professionnels. Mais, si on adoptait un règlement
par voie de résolution, on vient, d'une certaine façon, contourner le
pouvoir de surveillance que détient l'Office des professions sur l'ensemble de la réglementation, alors que,
lorsque le règlement est adopté par règlement qui est assujetti au
contrôle de l'office, il y a évidemment cette cohérence avec l'ensemble des
règlements adoptés pour chacun des ordres.
Alors, je
voudrais vous entendre, parce que vous proposez une voie, je le comprends, qui
est plus simple à vos yeux mais qui vient, d'une certaine façon, mettre
de côté le pouvoir de surveillance. Alors, comment on pourrait peut-être venir
concilier ces deux enjeux-là?
Mme
Levasseur
Bourbeau (Doris) : Ce que j'aurais à dire à ce sujet, c'est de... Ce
qu'on aimerait, nous, c'est de laisser
aux ordres la latitude de donner une couleur à son ordre professionnel, qui est
particulière à son ordre professionnel. Mais, pour élaborer plus longuement sur le dossier, j'aimerais
transmettre la parole à mon collègue Me Alain Collette, s'il vous plaît.
Le Président (M. Ouellette) : Me
Collette.
M. Collette(Alain) : Alors,
notre compréhension du projet de loi est à l'effet que l'Office des professions
va adopter un code de déontologie qui va
s'appliquer à tous les ordres professionnels, au même titre, finalement, qu'il
y a un règlement sur les rapports annuels. Alors, l'ordre va être... et
les ordres vont être tenus d'appliquer ce règlement-là.
Là où nous
nous questionnons, c'est le fait que l'ordre va devoir, en plus du règlement de
l'Office des professions, adopter un
règlement. Finalement, on va faire un copier-coller du règlement de l'Office
des professions. Est-ce que c'est pertinent de travailler de cette
façon-là? Nous, on se dit : On va appliquer le règlement adopté par
l'Office des professions, qui va, compte
tenu qu'il a adopté un règlement, avoir le pouvoir de contrôler son application
au sein de l'ordre, et nous, on
pourra l'enrichir en ajoutant des couleurs particulières ou des points
particuliers qui seraient plus pertinents ou qui s'appliqueraient
davantage à notre ordre.
Donc, il ne s'agit
pas de dire que le code de déontologie du conseil d'administration sera
uniquement une question de résolution, mais bien : Il y aura
l'application du règlement adopté par l'Office des professions, et nous, on
pourra établir certains éléments supplémentaires.
• (16 h 40) •
Mme Vallée :
Donc, ce que je comprends, c'est que vous dites : D'adopter un règlement
additionnel, c'est lourd, alors qu'il y aurait lieu d'adopter... d'assurer
que chaque ordre puisse prévoir des dispositions propres à son champ de pratique, propres à ses particularités sans pour autant passer par un
processus qui est long et laborieux. Donc, ce que vous proposez, à votre avis, tient compte des grands
paramètres de... qui seraient mis de l'avant par l'office sans pour
autant devoir assujettir le tout à une lourdeur.
M. Collette (Alain) : Exact.
Mme Vallée : D'accord. Pour
ce qui est de l'admission aux professions, vous avez longuement élaboré sur l'élargissement du rôle du commissaire. Vous
dites : Bien, l'élargissement ne va pas résoudre certains problèmes
auxquels on est confrontés. On perçoit des
commentaires de certains ordres, parce que vous n'êtes pas les premiers à nous
formuler cette préoccupation-là, on craint le pouvoir de recommandation du
commissaire. On semble craindre le pouvoir de recommandation du commissaire.
Est-ce que, plutôt qu'un pouvoir de recommandation, on devrait donner un autre pouvoir, peut-être plus contraignant, au
commissaire? Qu'est-ce qui vous fait craindre du pouvoir de
recommandation du commissaire, qui, selon nous, était une façon tout indiquée
pour respecter aussi l'autonomie des ordres?
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
En fait, le commissaire, on le sait bien qu'il a un rôle à jouer dans
l'admission des personnes formées à l'étranger, parce qu'on le sait qu'il peut
y avoir un risque potentiel, et je dis bien
potentiel et non réel, de problèmes systémiques. Mais les problèmes sont déjà
connus. Ils ont été déjà soulevés dans le rapport du commissaire, alors ils sont connus, du moins en ce qui
concerne notre ordre professionnel. Donc, de savoir quel... son
élargissement dans le rôle ou le mandat qui lui est donné... Ce qu'on ne
comprend pas, nous, c'est pourquoi l'élargir
aussi pour les diplômes québécois. Alors, on peut comprendre pour les personnes
formées à l'étranger, mais, les diplômes québécois, les processus sont
déjà connus, ils sont déjà sanctionnés et par l'Office des professions et par
le gouvernement. Alors, c'est plus là qu'on
ne voyait pas en quoi le commissaire pouvait apporter de plus dans la
situation actuelle. Ce qu'on veut, nous,
c'est d'avoir des solutions, puisque les problématiques vont au-delà des
problèmes ou des prescriptions que l'ordre émet à ces candidats-là.
Mme Vallée :
Est-ce que vous ne croyez pas que... Parce que l'élargissement vise à assurer
une équité aussi de traitement, avoir un regard sur l'ensemble de
l'oeuvre, plutôt qu'avoir un regard en silo, pour permettre de comparer, pour permettre d'évaluer aussi et d'assurer que,
peu importe l'origine ou peu importe le bagage d'une personne, l'analyse
se basera sur des critères équitables. On
nous disait la semaine dernière, un ordre professionnel nous disait : On
ne veut pas de passe-droit. Bien,
non, ce n'est pas une question de passe-droit, mais c'est de s'assurer que,
lorsque vient le temps de regarder le
profil de quelqu'un eu égard notamment à la protection du public, bien, le
regard sera le même et la force de ce regard-là de la part de l'ordre
sera le même peu importe l'origine ethnique de la personne qui formule la
demande, peu importent
les origines de la personne et la formation, c'est-à-dire l'objectif :
Est-ce que l'individu a les connaissances requises? Est-ce que l'individu maîtrise ce qui doit être maîtrisé pour
assurer au sein de l'ordre professionnel que cette personne souhaite
intégrer la protection du public? Et donc, en élargissant, bien, on a des
profils, on a des situations parfois,
également, pour des citoyens qui ont fait leur formation au Québec, qui
méritent aussi un questionnement, parce que certains traitements
pourraient s'avérer ou être considérés comme étant inéquitables.
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Je vais prendre... donner la parole encore une fois à Me Collette, si vous
permettez.
Le Président (M. Ouellette) : Me
Collette.
M. Collette (Alain) : Alors, au
départ on n'a pas de crainte par rapport au pouvoir de recommandation par le commissaire aux plaintes. Cependant,
tout le processus d'admission des candidats qui sont formés au Québec,
c'est un processus qui est réglementé. Alors, les diplômes sont
établis. Le ministère de l'Éducation établit les programmes avec une participation
de l'ordre à un certain niveau, et les cégeps enseignent le programme. Donc, on
peut penser que les Québécois sont... passent à travers un processus
très réglementé, organisé et contrôlé. Il
y a une différence par rapport aux immigrants, où là il y a
des possibilités de problèmes systémiques.
Mais,
concernant l'élargissement des pouvoirs du commissaire aux plaintes, ce qui
nous préoccupe davantage, en plus du
fait qu'une recommandation ne solutionnera pas nécessairement les problèmes, c'est
l'élargissement important des
pouvoirs qui lui sont donnés. Alors, il ne fera pas uniquement des enquêtes sur
plainte, mais il peut établir lui-même des projets d'enquête avec les
pouvoirs d'un commissaire d'enquête, avec les immunités qui s'y rattachent.
Même un syndic n'a pas toutes ces
protections-là. Il va pouvoir aller chercher des documents dans tous les
ministères impliqués, obtenir toute
l'information requise. Il va pouvoir désigner des personnes de son bureau pour
faire ces enquêtes-là, et qui vont
être dotées des mêmes protections, des mêmes pouvoirs. Alors, on pense que ces
éléments-là devraient être mieux balisés.
Et il n'y a pas rien... enfin, nous, on n'a pas identifié, là, qu'il y avait un
processus de reddition de comptes qui était prévu concernant ces
éléments-là et surtout l'utilisation de ces pouvoirs-là, qui sont assez
importants.
Le Président (M. Ouellette) : Merci.
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bonjour, Mme Levasseur Bourbeau, bonjour, M.
Collette. Bienvenue à l'Assemblée nationale et merci pour votre
participation à cette commission parlementaire.
Concernant
l'admission, donc il y a un pôle de coordination qui existe déjà et qui ne
fonctionne pas. Tout le monde s'entend pour dire qu'il y a des
problèmes, puis vous semblez préciser que les problèmes se situent au niveau de
la formation, de l'accès aux stages, et,
malgré le pôle de coordination, le problème perdure. Ne pensez-vous pas que
d'avoir un commissaire qui pourrait avoir la
possibilité d'avoir une vue d'ensemble, par les pouvoirs qui lui seraient
octroyés, pourrait permettre d'avoir
justement un diagnostic qui aiderait un pôle ou un groupe à trouver une
solution à une problématique qui pourrait être identifiée parce qu'il
aurait eu la vue d'ensemble? Voyez-vous une utilité à ça?
Mme
Levasseur
Bourbeau (Doris) : Moi, ce que je trouve, c'est que les problèmes sont
connus et sont déjà... ils ont déjà
été soulevés. Alors, ça prend de l'engagement des partenaires, pas uniquement
d'avoir un groupe de personnes qui s'assoient ensemble et qui reparlent
encore des mêmes problématiques, puisque les problèmes sont vers les maisons d'enseignement, vers les plages de stage, la
disponibilité des places de stage. Alors, ça relève de plusieurs groupes,
pas seulement des groupes qui travaillent en
silo, ça prend plus que ça. Il faut travailler à trouver la solution et les
mettre en place, pas seulement juste
les écrire, et les soulever, et dire par la suite, après : Il n'y a plus
de solution, il n'a... on n'en trouve pas, de solution. Il faut les
trouver, les solutions, et les mettre en place.
L'ordre n'est
pas là pour dire non aux personnes qui sont formées à l'étranger. On est là
pour les accueillir. Mais en même
temps il faut s'assurer que les compétences de ces gens-là sont les mêmes que
celles qu'on exige pour nos diplômes québécois. Alors, c'est plus pour
ça.
Alors, par la
suite, s'ils ont tous les acquis et les compétences requis pour avoir l'accès à
la profession, tant mieux, c'est correct. Mais il faut que la formation
d'appoint suive aussi et que les places de stage soient disponibles aussi. Dans le réseau actuel, le réseau de la santé actuel,
qui est désorganisé — je
m'excuse, mais il est désorganisé — les places de stage sont plus
difficiles à obtenir. Alors, c'est une cascade d'événements.
Mme
Jean : À ce moment-là, je comprends que ça prend, justement, un
processus, une plateforme qui permettrait peut-être de briser les silos auxquels vous faites référence. Selon
vous, comment ça se fait que le pôle de coordination ne répondrait pas à
ce besoin-là, justement, de briser les silos?
• (16 h 50) •
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Je te laisse la parole, s'il vous plaît.
M.
Collette (Alain) : Oui. Alors, en fait, le pôle de coordination, ce
qu'on voit dans le projet de loi, il va ramasser de l'information
statistique, il va documenter des situations, mais nulle part on voit que les
participants s'engageront formellement à trouver des solutions, qu'elles soient
des solutions communes où chacun doit apporter... faire son apport au projet ou encore que ça touche davantage
un ministère en particulier. Alors, on ne voit pas cet
élément-là dans le projet de loi.
Alors,
nous, ce qu'on dit, c'est : Il faut qu'il y ait un engagement
ferme de tous les partenaires impliqués dans le processus à mettre en
place et à trouver les correctifs nécessaires.
Mme Jean : Je comprends que vous aimeriez que ça aille
encore plus loin, qu'il y ait des obligations de la part des participants à un pôle de
coordination, par exemple, possiblement, là.
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Ce qu'on voudrait, c'est l'engagement, comme Me Collette vient de le signifier, c'est l'engagement des partenaires
et de mettre en place... et pas juste soulever la problématique et
attendre que tout se règle par eux-mêmes.
Vous savez,
les immigrants ou les personnes formées à l'étranger se découragent par rapport au processus qui est...
actuel puisque les compétences dans les maisons d'enseignement sont déclinées
parmi plusieurs cours, et c'est pour ça que le parcours dure trois ans. Et la formation d'appoint, la formation
d'appoint accélérée qui était l'attestation d'études collégiales, elle n'est plus disponible pour ces personnes-là. Alors, ils sont
obligés de suivre les cohortes régulières et de faire le cours régulier
en trois ans au lieu de 18 mois.
Mme Jean : Rapidement,
30 secondes, peut-être une chose, vous parlez du danger ou du risque que
pourrait occasionner d'étendre le pouvoir du commissaire aux plaintes, qui
deviendrait le commissaire à l'admission. Quels seraient les risques de donner
autant de pouvoir, selon vous, à une personne comme ça?
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Alors, je redonne la parole à Me Collette.
Le Président (M. Ouellette) : Me
Collette, en 10 secondes.
M.
Collette (Alain) : Alors, nous, ça nous apparaît un risque parce que
ce n'est pas balisé. Jusqu'où ces pouvoirs-là vont-ils être utilisés, surtout qu'il n'y a pas de reddition de comptes
qui est prévue? Alors, peu importe la personne qui occupe la fonction,
il demeure que cette fonction-là pourrait abuser, dans certaines mesures, de
ses pouvoirs.
Mme Jean : Merci.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Mme Levasseur, M. Collette, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.
On parlait de
la prescription personnalisée. La formation d'appoint, là, au collège de
Rosemont, maintenant ce n'est plus disponible. Pourquoi cette
formation-là n'est plus disponible?
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Alain, je vous donne la parole.
Le Président (M. Ouellette) : Me
Collette.
M.
Collette (Alain) : Alors, la formation d'appoint a été interrompue
parce qu'il y a un manque de places de stage. Les étudiants, lorsqu'ils terminaient la portion théorique et pratique,
le cégep avait beaucoup de difficultés à trouver des places de stage
pour placer ces étudiants. Parce qu'il fallait comprendre que... il faut
comprendre que ces étudiants-là faisaient des stages, et il y a les étudiants
réguliers aussi qui font des stages. Alors, il y a une dynamique... il y a une
problématique à trouver un nombre de places de stage suffisant. On parlait,
dans le cadre de la cohorte de l'A.E.C., de
20 étudiants qui devaient faire des stages, plus la cohorte du cégep, qui
pouvait être de 60 à 80 personnes. Donc, trouver des places de stage dans un milieu, il faut bien
comprendre, un milieu apprenant... Donc, les stages de nuit, ce n'est
peut-être pas la bonne place pour faire un
apprentissage des pratiques et des relations interprofessionnelles. Alors,
c'était difficile de trouver des places de stage. C'est la justification
qu'on a eue de la part du cégep de Rosemont.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais ce que
je comprends, dans le fond, c'est que la personne qui a besoin d'une formation d'appoint pour devenir professionnel
dans votre ordre, il s'adresse à vous, vous évaluez son profil de
compétence, ça, vous dites : Bien,
écoute, tu as besoin d'aller faire un A.E.C. Le système d'éducation dit :
Parfait. Nous, on a un A.E.C. pour t'intégrer sur le marché du travail
rapidement, pour éviter que tu refasses toute la «loop» de trois ans. Et là
c'est au niveau de la santé qu'il y a un problème : il n'y a plus de
places de stage. Ça fait que, concrètement, deux des trois partenaires,
supposons, pour le cheminement, pour que la personne devienne un professionnel,
ça va, mais c'est le ministère de la Santé qui ne répond pas.
Mme
Levasseur Bourbeau (Doris) :
Mais c'était là le goulot d'étranglement... Mis à part la prescription de formation personnalisée de ces gens-là, ils
rentraient dans le système, mais par la suite le goulot d'étranglement était
aux places de stage qui étaient disponibles.
Par exemple, l'an dernier... en 2014-2015, il y a eu des retards de
diplomation. Ça, ça veut dire que toute la partie théorique du candidat, elle
est complète, elle est faite. Lorsqu'il arrivait en stage, ils étiraient le stage ou c'était retardé. Alors, en 2014-2015, c'est 19 étudiants sur 55 qui ont eu un
retard de diplomation. Ça, ça veut
dire 37 %. Cette année, si je prends le cégep de Rosemont — je le prends en exemple parce que c'est le
cégep qui accueille le
plus d'immigrants dans les cohortes par rapport aux autres cégeps — cette année, ils ont 83 étudiants à
placer en stage. En 2014-2015, c'était 55,
l'année passée, 43. Et, à chaque année, c'est des retards de diplomation.
Alors, c'est sûr que ça décourage ces
gens-là ou cette clientèle-là. Et nous, on émet les prescriptions de formation, mais ça n'aboutit pas, malheureusement.
M. Jolin-Barrette : Alors, merci.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Borduas. Mme Doris Levasseur Bourbeau et Me Alain Collette, représentant
l'Ordre professionnel des technologistes médicaux du Québec, merci d'être venus
déposer à la commission.
Je suspends quelques minutes. Je demande à
l'Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec de bien vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à 16 h 56)
(Reprise à 16 h 58)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre professionnel de la
physiothérapie du Québec et son président, M. Denis Pelletier, ainsi que son directeur
général, Me Claude Laurent — directeur général et secrétaire, bien important. M. Pelletier, vous
avez 10 minutes pour faire votre présentation. Vous pouvez en
prendre moins, mais vous ne pourrez pas en prendre plus. Et après il va y avoir
des échanges avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je
vous laisse la parole, M. Pelletier.
Ordre professionnel de
la physiothérapie du Québec (OPPQ)
M.
Pelletier (Denis) : Alors, je vous remercie, M. le Président et
distingués membres de la commission. Je
me nomme Denis Pelletier, donc, président de
l'Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec, et je suis
accompagné de Me Claude Laurent, directeur général et secrétaire. Nous vous remercions de nous accueillir aujourd'hui pour nous permettre de vous livrer les grandes lignes du mémoire
que nous avons déposé la semaine dernière.
D'entrée de jeu, j'aimerais vous mentionner que l'ordre est favorable aux mesures
prévues concernant notamment la
gouvernance des ordres ainsi que le Pôle de coordination pour l'accès à la
formation. Donc, dans son ensemble, pour nous, le projet de loi n° 98 est très,
très bien reçu, et nous croyons que
ce projet de loi là nous permettra de mieux faire notre
travail de protection du citoyen à l'intérieur du système professionnel.
Aujourd'hui, nous allons aborder avec vous trois
sujets très brièvement, et nous les avons développés dans le mémoire que nous avons déposé. Tout d'abord, nous allons nous intéresser à l'augmentation des pouvoirs de l'office qui sont prévus dans le projet de loi. Nous allons
aussi, comme plusieurs autres ordres avant nous, nous interroger sur
l'intérêt de l'élargissement du rôle du
commissaire aux plaintes. Et nous terminerons par une proposition... c'est moins commun, on voit ça moins souvent, mais une proposition de
programme d'évaluation de la qualité du travail des ordres
professionnels.
• (17 heures) •
Alors, lorsque l'on regarde la révision des
pouvoirs de l'office, nous considérons que l'office, notamment par l'article 12 du présent Code des professions,
bénéficie déjà de beaucoup
de pouvoirs, et ces pouvoirs-là lui permettent de faire son rôle de superviser le travail des
ordres, donc de surveiller le travail des ordres, ainsi que d'assurer la
protection du public. À notre avis, l'office n'a peut-être pas utilisé ou a
utilisé avec timidité parfois tous les pouvoirs qui lui étaient dévolus, et on croit qu'à certains moments il
aurait été avantageux pour l'ensemble du système professionnel, et
ainsi pour l'ensemble du public, que
l'office puisse être un petit peu
plus agressif dans l'utilisation des pouvoirs qui lui étaient dévolus.
Autre élément qui nous préoccupe un peu, c'est
qu'avec le projet de loi n° 98 l'office pourrait entamer une enquête auprès d'un ordre professionnel mais sans
obtenir au préalable l'autorisation de la ministre responsable et
sans non plus, évidemment, mettre au courant le gouvernement en place. Donc,
les élus ainsi que la ministre ne seraient pas au courant qu'une démarche très
sérieuse est entreprise par l'Office des professions à l'égard d'un ordre
professionnel. À notre avis, ça serait plus
sage que les mécanismes qui permettent d'abord à l'office d'agir en documentant
son cas le soient, finalement, seulement après avoir avisé la ministre
responsable et, évidemment, les élus de la situation.
Alors, comme
c'est possible de le faire dans un contexte relativement favorable et que,
jusqu'à présent, à tout le moins à
notre connaissance, les ordres se sont montrés très collaborateurs en ce
sens-là, on ne voit pas pourquoi de passer outre l'avis que l'on devrait
faire à la ministre serait une nécessité.
Alors, à la
lumière de cette brève énumération, nous croyons que la proposition relative à la possibilité pour l'Office des professions d'enquêter
sans une autorisation préalable de la ministre devrait être retirée.
Maintenant,
en ce qui concerne le rôle du commissaire aux plaintes, alors le projet de loi propose, comme vous l'avez
entendu à maintes reprises, d'élargir, en fait, le spectre d'activités, c'est-à-dire que le commissaire aux plaintes ne se concentrerait plus seulement
uniquement sur les candidats issus de l'immigration, mais sur l'ensemble du
processus d'admission à un ordre.
Alors, encore
une fois, l'article 12 du Code des professions offre à l'office beaucoup
de pouvoirs, qui lui permet, en fait,
de vérifier le processus d'admission à un ordre. Il ne faut pas oublier
que, lorsque ce processus d'admission à un ordre là est conçu, eh bien, il doit recevoir par
la suite l'autorisation de l'Office des professions, et c'est sanctionné
ensuite par le Conseil
des ministres. Donc, c'est un processus
qui est relativement robuste, relativement solide, relativement fort, et nous croyons que ces éléments-là permettent de faire un excellent travail de
supervision du processus d'admission aux ordres.
Lorsque l'on
regarde l'élargissement de ce pouvoir-là que l'on donne au commissaire, qui
s'appliquerait, à ce
moment-là, à l'ensemble du processus d'admission, tant des candidats québécois,
canadiens ou étrangers, eh bien, on considère
que c'est un peu fort. Notamment, quand on regarde, par exemple, que ce
commissaire-là pourrait avoir le pouvoir d'enquêter sur les ordres, pourrait avoir le pouvoir d'enquêter sur
l'office et pourrait même avoir le pouvoir d'enquêter sur le gouvernement,
eh bien, déjà, en partant, c'est quand même
étonnant. Et il peut évidemment faire tout ça sans qu'aucune plainte préalable n'ait été déposée. Donc, de son
propre chef, il peut décider d'enquêter sur un ordre, sur l'office, sur
le gouvernement sans qu'il n'y ait eu un seul signalement. Et ce
qui est le pire, à notre avis, c'est que tout ça peut se faire sans
qu'il n'y ait de comptes à ne rendre à personne.
On comprend
cette réalité-là, dans les ordres
professionnels, nous avons quelqu'un
qui s'appelle le syndic. Le syndic
peut enquêter, mais, avant d'enquêter, le syndic va devoir d'abord
avoir un signalement. Et il y a une imputabilité, parce que, si le syndic ne
fait pas notre affaire ou qu'il fait un travail vraiment qui dépasse les
bornes, eh bien, un vote du deux
tiers du conseil d'administration peut, à
ce moment-là, destituer un syndic,
mais ce qui n'est pas du tout le cas ici, avec le commissaire aux plaintes, qui deviendrait le commissaire à
l'admission, qui pourrait commencer une enquête sans aucune plainte et signalement, regarder les
ordres, le travail des ordres, le processus d'admission, le processus de l'office
et même ce qui touche le gouvernement sans avoir de comptes à rendre à personne, alors sans imputabilité
particulière, et en bénéficiant d'une immunité complète.
Alors, pour nous, c'est excessivement
préoccupant parce qu'il n'y a aucune balise qui va encadrer le travail de ce commissaire aux plaintes là et c'est là
surtout que nous, on a un certain malaise, je dirai même : Un malaise
assez considérable. Alors, notre recommandation serait à l'effet de retirer
l'ensemble des propositions législatives liées à l'élargissement des pouvoirs
du commissaire aux plaintes.
Notons, en terminant, ici, ce point-là, que,
depuis 2010, notre ordre a eu à travailler avec le commissaire aux plaintes dans trois dossiers. Ces trois
dossiers-là se sont réglés très facilement avec les mécanismes actuellement en
place, et on n'a pas eu de difficulté à rendre ça opérationnel très rapidement.
Voilà.
Enfin, la partie un peu plus innovatrice de
notre présentation d'aujourd'hui, c'est que nous sommes d'avis que le système professionnel doit se doter d'un
mécanisme reconnu permettant d'assurer la qualité du travail fait par
les ordres. Alors, l'OPPQ, l'Ordre
professionnel de la physiothérapie du Québec, à titre d'ordre initiateur,
souhaite profiter de l'occasion qui
lui est donnée ici lors de cette commission parlementaire pour vous faire part
d'une initiative qui a cours actuellement
et qui rencontre une belle réception notamment de la part de l'office et
notamment de la part de plusieurs ordres
professionnels qui ont déjà été contactés, et c'est la mise en place d'un programme de reconnaissance qualité des ordres
professionnels.
Alors, la
finalité espérée dans un processus comme celui-là, c'est que l'ordre, quel qu'il
soit, de concert avec le Conseil québécois
d'agrément, qui est une institution tout à
fait respectable à l'intérieur de la société québécoise, puisse travailler de concert pour
permettre à l'ordre d'obtenir, s'il remplit bien ses fonctions, un certificat.
Et ce certificat-là pourrait, à ce
moment-là, lui être accordé en reconnaissance ou en reconnaissant la validité
du processus ou des processus qui ont cours à l'ordre.
Et non
seulement on croit qu'un mécanisme semblable pourrait être excessivement
profitable, mais nous souhaitons aussi
que ce soit quelque chose qui nous permette de rendre publics ces rapports-là
qui seront émis par le Conseil québécois d'agrément. Et, bien entendu, c'est un document que l'on va partager
avec l'office d'entrée de jeu, car ça nous apparaît être la première
instance qui aurait intérêt à prendre connaissance du fonctionnement des ordres
qui sont, évidemment, désireux de se prêter à ce résultat-là.
Mais on serait même prêts à aller plus loin et
on serait d'avis que ce programme d'évaluation là et de reconnaissance de la qualité devrait être imposé à l'ensemble des ordres
par l'office, donc géré par l'office. Et on croit que cela devrait faire
partie du projet de loi n° 98.
Ainsi, comme recommandation, et je vous en fais
la lecture, c'est : Que soit modifié le Code des professions afin d'y introduire une disposition habilitante
permettant à l'Office des professions d'adopter un règlement obligeant
les ordres professionnels à obtenir un
certificat de reconnaissance de la qualité des services qu'il offre ainsi que
de la gestion de leurs ressources. Et ici on introduit la notion d'un
partenaire tiers indépendant, reconnu au Québec, avec une bonne notoriété, qui
agit de façon concertée et en travail collaboratif avec les ordres pour
témoigner du travail qu'ils font.
Alors, en
conclusion brièvement, l'ordre est très favorable avec les grandes lignes du
projet de loi n° 98. Nous avons
deux réserves. Nous vous les avons partagées un peu plus tôt, au début de la
présentation. Et on croit sincèrement que les ordres bénéficieraient d'un programme structuré, crédible et
performant d'évaluation de la qualité de la gestion et des services que nous offrons, tout ça pour,
évidemment, être capables d'en témoigner ultimement à l'office d'une
manière objective et en même temps d'assurer la protection du public. Alors, je
vous remercie.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée :
Merci beaucoup. D'entrée de jeu, j'aimerais revenir... Parce qu'il y a deux
ordres, là, cet après-midi, qui ont parlé des craintes de dérive compte
tenu des nouveaux pouvoirs accordés au commissaire. Et vous avez mentionné lors de votre présentation... Vous
dites : Le commissaire n'a pas de comptes à rendre, n'a pas... On craint
une dérive de l'utilisation de ses pouvoirs.
Je voulais simplement vous rassurer, parce qu'actuellement, dans notre Code
des professions, il est déjà prévu... Parce que le commissaire existe déjà,
hein? Et il est déjà prévu à l'article 16.19 que le commissaire doit quand même rendre des comptes à
l'office, qui intègre le tout à l'intérieur de son rapport annuel. Donc,
le commissaire rend des comptes actuellement et
continuera de rendre des comptes, parce que 16.19 n'est pas abrogé par le projet de loi. Et, de plus, le commissaire,
il est également nommé en vertu de la Loi sur la fonction publique, et
ça, c'est en vertu de l'article 5 du
code. Donc, il y a des obligations qui découlent de cette nomination-là. Alors,
j'essaie de comprendre, est-ce que vous avez d'autres craintes au-delà
de ce que vous avez formulé?
M.
Pelletier (Denis) : Bien en
fait, le fait que l'on puisse donner à une personne la possibilité d'enquêter sans avoir nécessairement l'autorisation de la ministre
responsable et sans avoir à en faire état aux
parlementaires, de le faire autant au niveau de l'ordre,
de l'office et du gouvernement, et ça, tout en n'ayant obtenu autorisation de
le faire, ça nous fait quand même un peu peur.
• (17 h 10) •
Mme Vallée : En fait, là, on
a deux dossiers. Moi, je vous parle du commissaire aux plaintes, et non pas du président de l'office. Parce que là-dessus je vais vous revenir, parce
que le projet de loi prévoit, pour le
président de l'office, qui est quand même
une notification qui est faite au
ministre responsable, à la ministre en l'occurrence... on prévoit cet
avis qui est donné, et donc une information. Donc, l'enquête est initiée, mais
le président de l'office doit également informer
la ministre. Donc, ça ne se fait pas de façon cachottière, de façon insidieuse.
Au contraire, ça se fait de façon très transparente.
Par contre, l'autorisation n'est pas nécessaire, parce qu'il peut... parfois,
les vérifications peuvent permettre de clore
un dossier sans pour autant devoir monter tout un dossier au préalable, là.
Parce que quelques vérifications peuvent parfois réussir... permettre de comprendre une problématique portée à
l'attention du président de l'office sans nécessairement devoir
enclencher tout le processus de demande d'autorisation.
Ça, c'est une
chose, et on peut y revenir, mais, moi, la question que je vous posais
concernait le commissaire aux admissions,
qui est actuellement le commissaire aux plaintes, qui est déjà investi de ces
pouvoirs-là et qui a déjà un devoir de
rendre des comptes à l'Office des professions via l'article 16.9. Cet
article 16.9 là, on ne le modifie pas dans le projet de loi, donc on ne vient pas soustraire le
commissaire, maintenant nommé aux admissions, de ce devoir de rendre
compte. Donc, ce n'est pas un
supercommissaire n'ayant aucune reddition de comptes à faire, au contraire, la
reddition qui est prévue, elle demeure. Alors, est-ce que vous avez
d'autres craintes quant à ça?
M.
Pelletier (Denis) : Bien, en fait donc, il en fait état dans son
rapport annuel, mais, pendant tout le processus, par contre, il n'a pas de compte à rendre à personne,
il va en faire seulement un état de la situation à la toute fin de son
année, j'imagine, d'activité. Alors donc,
pendant toute la réalisation de ces différentes étapes là où il enquêtera, eh
bien, il n'a pas à aller chercher
l'aval ou il n'a pas à témoigner d'aucune autre façon que par la finalité de
ses activités dans le rapport annuel que l'office dépose. C'est ça?
Mme Vallée : Bien, écoutez, actuellement, c'est comme ça. La seule... la distinction,
c'est qu'on élargit les pouvoirs du
commissaire, mais, actuellement, le commissaire, lorsqu'il est saisi d'un enjeu,
il a quand même un certain nombre de pouvoirs, et il fait enquête, il émet des recommandations, et il est assujetti à une reddition
de comptes auprès de l'office.
M.
Pelletier (Denis) : Bien,
l'autre problématique qu'on voyait aussi, c'est à quel problème que ça
répondait. En fait, on regarde depuis le
début cette situation-là puis on se demande... Bon. Pour nous, évidemment,
à l'ordre, quand ça va bien, on ne voit peut-être pas les difficultés,
mais, de votre côté, j'imagine qu'on a dû sûrement
porter à votre attention des
problématiques particulières pour que, soudainement, on puisse vouloir élargir
le spectre de travail du commissaire aux plaintes pour devenir le
commissaire à l'admission et à vouloir s'intéresser à tous les aspects de
l'admission d'un candidat à un ordre
professionnel. Et finalement notre exemple est un exemple isolé, mais, quand
on regarde les autres ordres qui nous ont précédés, personne ne comprend
réellement à quel problème ça répond.
Et c'est sûr qu'il y aura toujours un intérêt de
documenter une situation. Mais nous, si on regarde à l'ordre les exemples que
nous avons eus, on a reçu des recommandations pour la couleur des pages de
notre site Web, ajouter un bouton ici et là,
mais on n'a réellement pas eu de difficulté jusqu'à présent. Et, comme je vous
dis, peut-être que c'est une réalité
qui est plus pointue ou présente dans d'autres ordres, mais, jusqu'à
maintenant, les situations que nous avons eues se sont réglées
facilement. Nous avons un processus qui est analysé à la fois, évidemment, par
l'office et par le gouvernement, nous avons une mécanique de résolution de
problème qui fonctionne très bien, et là, soudainement, il y a un désir, que je comprends, qu'on entend très
bien de la part du gouvernement, de vouloir s'assurer de répandre ou d'élargir ce rôle-là du commissaire aux plaintes à
l'ensemble du processus d'admission. Et, de l'extérieur, on se dit :
Bon, qu'est-ce qui manque ou qu'est-ce qui
fait défaut pour que, soudainement, ce désir-là s'exprime d'une façon aussi
nette à l'intérieur du projet de loi n° 98?
Et, à l'opposé, on regarde puis on se dit :
Comment ça se fait que 46 ordres professionnels ont trouvé cette
démarche-là très difficile? D'ailleurs, c'est très rare que l'on a... Moi, ça
fait deux ans que je suis dans le système professionnel
à titre de président, puis c'est la première fois que je vois une unanimité
aussi grande de la part des membres du
système professionnel à l'idée que ce genre de démarche là alourdirait le
système, créerait une couche supplémentaire de vérification qui ne semblerait pas apporter grand-chose de plus. Et, cette
lourdeur administrative, bureaucratique là, nous, on ne la voit pas à
l'intérieur de nos réalités.
Alors, si
j'avais une question à vous poser, c'est : À quoi ça répond, cet ajout-là
du projet de loi n° 98? À quel problème est-ce que ça nous permet
de trouver une solution, dans le fond?
Mme Vallée :
Je pense que j'ai répondu abondamment à cette question-là puis je vous dirais : S'assurer
d'une équité de traitement d'abord
pour l'ensemble des candidats qui souhaitent intégrer une
profession, que cette équité-là, que ce désir d'assurer la protection du public,
d'assurer que les candidats et candidates aient les compétences requises
soit la même, peu importe l'origine du
candidat ou de la candidate. Si vous n'avez pas de problème,
moi, je vous retourne la question, que craignez-vous?
M.
Pelletier (Denis) : En fait,
ce n'est pas une crainte plus que l'alourdissement du processus
qui vient avec. Vous savez, quand on
gère un ordre professionnel et qu'on reçoit des demandes parfois, notamment,
du commissaire aux plaintes pour des
choses qui nous apparaissent relativement banales, parfois on se demande : Mon Dieu! Est-ce qu'il se cherche du travail? Ça,
c'est la... Si vous me demandez la question, très franchement c'est ce que je vous réponds, parce que
les réalités auxquelles on a eu à
faire face ont été des réalités qui nous amenaient à se demander vraiment
où est la difficulté. Alors, manifestement,
ça n'ajoutera pas nécessairement de complexité, au sens où il y a des choses
qu'on ne sera pas capables de répondre, mais on se dit : Est-ce
qu'on doit se doter d'un mécanisme supplémentaire qui amènerait évidemment une
certaine lourdeur bureaucratique? Et c'est cette lourdeur bureaucratique là
qui, entre autres, nous questionne.
Alors, foncièrement, pour le reste, vous avez
entendu aussi ce que les gens des universités ont mentionné, ça, là-dessus,
bien, qu'est-ce que vous voulez, ça repose sur un principe, là, qui va toucher
l'ensemble du processus d'admission. Alors,
pour nous, c'est certain que ça ne pose pas de problème jusqu'à maintenant. On
verra ce que le temps nous dira, mais on espère que ça n'alourdira pas
plus le travail que nous avons à faire actuellement.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jean : Merci. Alors, bonjour, M.
Pelletier, M. Laurent. Bienvenue à l'Assemblée nationale et merci de participer
avec nous à l'exercice d'étude du projet de loi n° 98.
Vous avez
dans votre mémoire une proposition originale, que vous appelez... on pourrait
mettre : un programme de reconnaissance
de la qualité des services des ordres professionnels. Juste pour être certaine
d'avoir bien compris, est-ce que c'est
en remplacement de la proposition, dans le projet de loi, pour qu'un code
d'éthique et de déontologie soit proposé et mis en oeuvre dans les
ordres? Est-ce que c'est pour remplacer cette partie-là, votre proposition?
M. Pelletier (Denis) : Alors, je
vais demander à Me Laurent de vous donner les détails à cet effet.
Le Président (M. Ouellette) : Avec
plaisir. Me Laurent.
M. Laurent
(Claude) : En fait, c'est une couche supplémentaire de reconnaissance
et ça n'a rien à voir avec la déontologie.
Nous, on est tout à fait d'accord avec le projet de loi qui porte sur toute la
question de la déontologie. En fait, ce qu'on veut, c'est donner aux ordres une certaine crédibilité, au niveau
du public, quant à leur gestion, et on est convaincus que... On veut se doter d'outils justement pour
évaluer cette gestion-là et on veut obtenir cette reconnaissance de la
part d'un organisme tiers qui nous permettrait justement d'expliquer aux gens
ce qu'on fait et comment on le fait.
Mme Jean : D'accord, on bonifie,
dans le fond, le processus qui est déjà proposé.
M. Laurent (Claude) : Absolument.
Mme
Jean : D'accord, merci. Concernant le commissaire à l'admission, on
semble tous entendre... en tout cas, j'entends beaucoup comme quoi il y
a des problématiques à l'admission des nouveaux arrivants, que ce soient des problématiques de stage, de formation, et il y a
un pôle de coordination qui existe déjà mais qui ne donne pas les
résultats escomptés, du moins la problématique demeure. D'avoir une personne,
un commissaire à l'admission, qui aurait les pouvoirs
d'enquêter, ou de s'informer, ou d'aller questionner sur différents... dans
différents organismes pour pouvoir faire peut-être un diagnostic ou identifier quel est le problème, est-ce qu'il
est systémique, où est-ce qu'il se situe, ça n'aurait pas quelque chose
d'intéressant pour solutionner la problématique que tout le monde s'entend
qu'on a?
M.
Pelletier (Denis) : O.K. Bien, cette problématique-là qui est évoquée,
on la voit beaucoup surtout quand vient le temps de former les candidats. Alors, si on parle de chez nous, les
candidats reçoivent une prescription, dans la grande majorité des cas
ils sont tous munis d'une prescription à la fin du processus, ils font honorer
cette prescription-là par l'Université de
Montréal ou le cégep Marie-Victorin, en ce qui nous concerne. Par la suite, les
stages suivent, et, comme je vous dis, nous n'expérimentons pas de
difficulté là-dessus. Alors, on peut comprendre qu'il y a certains ordres qui pourraient expérimenter des difficultés, notamment
dans certains secteurs plus névralgiques où les places de stage sont moins disponibles, mais, en ce qui nous concerne,
ce n'est pas une difficulté, alors, à ce moment-là, c'est difficile pour
moi de vous dire : Oui, ça pourrait aider à documenter, documenter un
problème qu'on n'a pas actuellement.
Mme
Jean : D'accord. Vous avez des réserves quant à l'ampleur des pouvoirs
qui seraient donnés au commissaire à
l'admission. Si ces pouvoirs-là étaient plus balisés ou qu'il y aurait une
contrepartie pour la reddition de comptes plus précise, est-ce que c'est
quelque chose qui vous rendrait plus confortables?
• (17 h 20) •
M.
Pelletier (Denis) : Bien, c'est certain que ça rendrait la situation
plus confortable, mais le simple fait de dire qu'il en fait état à la fin de son... dans son rapport annuel à la fin
de l'année, pour nous, c'est largement insuffisant, parce qu'à ce
moment-là, si dégâts il y a eu, bien, on les a vécus auparavant. Alors, il nous
apparaîtrait sage qu'il y ait un mécanisme qui permettrait,
durant le courant des travaux que cette personne-là aurait à faire, d'avoir une
certaine surveillance, tout comme le syndic
d'un ordre a. Vous savez, un syndic, on n'attend pas son rapport à la fin de
l'année, quand on dépose notre rapport
annuel à l'office, pour s'intéresser aux travaux qui sont conduits par notre
syndic. Alors, je pense qu'à cet
égard-là on devrait avoir des mécanismes qui nous permettraient de faire un
suivi plus étroit sur le travail qui serait fait par le commissaire aux
plaintes, qui deviendrait le commissaire à l'admission, et, à ce moment-là, on
saurait un peu plus ce qui se cache dans cette boîte noire là à laquelle on n'a
pas accès durant l'année. Alors, c'est toujours
intéressant de lire le rapport annuel à la toute fin, mais, à notre avis, ce
serait peu révélateur de ce qui s'est passé durant l'année, ou, à tout
le moins, on l'apprendrait à la toute fin de l'année.
Mme
Jean : Est-ce que, selon vous, il y a... Dans le projet de loi, il est
prévu un pôle de coordination. Est-ce que, selon vous, le pôle de
coordination pourrait jouer un rôle à ce niveau-là, au niveau de la reddition
de comptes d'un commissaire à l'admission?
M.
Pelletier (Denis) : Je ne sais pas si c'est dans la reddition de
comptes du commissaire à l'admission que le pôle aura son... si vous voulez, les fruits de son travail seront les
plus tangibles. Cependant, on croit beaucoup qu'en ayant un pôle de coordination efficace, permettant
aux... et nous, on considère que ce problème-là est particulièrement vrai
pour les candidats issus de l'immigration, eh bien, on pense qu'on serait en
mesure, avec un pôle doté de plus de moyens, d'arriver
à une finalité qui permettrait aux candidats étrangers de franchir l'ensemble
des séquences permettant l'obtention d'un permis.
Maintenant, est-ce
que c'est par le biais de ce pôle-là que l'on pourrait encadrer ou gérer un
petit peu plus le travail du commissaire à
l'admission? Ça, je ne crois pas. Je pense que ce sont des mécanismes qui
seraient plus intrinsèques à l'office qui permettraient ce genre de
choses là.
Mme Jean :
Merci.
M. Pelletier
(Denis) : Je vous remercie.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci. M. Pelletier, M. Laurent, bonjour. Merci pour votre
contribution aux travaux de la
commission. Merci pour votre mémoire. J'aimerais ça qu'on discute un peu plus
largement de la physiothérapie puis notamment
des actes que les physiothérapeutes peuvent poser. Je crois savoir qu'un
physiothérapeute, ça peut référer un patient à un médecin spécialiste
lorsqu'il fait un diagnostic. Est-ce que c'est le cas?
M. Pelletier
(Denis) : Lorsqu'il fait...
M.
Jolin-Barrette : Bien, lorsque le physiothérapeute constate une
problématique chez un patient, il peut le référer directement chez un médecin
spécialiste?
M. Pelletier
(Denis) : Oui. Exact.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Est-ce que ça arrive souvent, ça, qu'un
physiothérapeute réfère vers un médecin spécialiste un patient?
M.
Pelletier (Denis) : C'est une réalité qui est quand même fréquente.
Parce que, souvent, les médecins traitants, les médecins de famille vont nous référer les patients, et ces
patients-là vont parfois, dans le cadre de leur éducation, obtenir la finalité que l'on souhaite, c'est-à-dire un
rendement fonctionnel optimal, et aucune autre intervention ne sera
requise. Parfois, cependant, il va être
nécessaire que ce patient-là pourrait ou devrait être référé à un médecin spécialiste.
Alors, prenons l'exemple de certains
enfants, par exemple, que l'on voit en clinique avec des problèmes de
plagiocéphalie — on
parle de déformation de la boîte
crânienne — c'est
souvent le physiothérapeute qui va déterminer le besoin d'obtenir un casque qui permet de remodeler la position des os
crâniens. Alors, ces jeunes patients là sont généralement, ensuite,
référés à un pédiatre, qui, lui, va faire la prescription du casque, notamment
pour des fins de remboursement.
Dans
certaines situations, malheureusement, le médecin pédiatre refusera de voir le
patient, non pas parce qu'il ne peut
pas le voir, mais parce que sa facturation serait plus importante s'il
retournait le patient au médecin traitant, qui, lui, ferait la prescription, pour ensuite aller voir le
pédiatre. Alors, ça peut parfois faire en sorte que les honoraires du
pédiatre, par une démarche semblable,
passent du simple au double. Alors, en plus de surtaxer le système, de surtaxer
évidemment l'enfant et son accompagnateur qui doit faire ces démarches-là, eh
bien, on a une accessibilité qui est plus difficile pour les soins. Alors, oui,
vous avez raison.
M. Jolin-Barrette : Donc, concrètement, ce que vous nous dites,
c'est : Quelqu'un peut aller voir un physiothérapeute, puis le physio peut référer directement au médecin
spécialiste, mais parfois le médecin spécialiste refuse de prendre une
référence directement d'un physiothérapeute parce que son code de facturation
est moins élevé que si le patient vient directement du médecin omnipraticien.
C'est ça?
M. Pelletier (Denis) : C'est exact.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Est-ce que vous avez chiffré ça, à quelle
hauteur?
M.
Pelletier (Denis) : Non, on ne connaît pas des chiffres avec
précision. La seule chose, c'est que nous en avons fait état au Collège
des médecins du Québec, qui ont tout à fait donné raison à l'ordre, en fait,
dans la mesure où un médecin spécialiste ne
peut refuser un patient sur la base de la facturation, et le syndic du Collège
des médecins a invité les physiothérapeutes
qui étaient témoins d'une telle pratique d'en faire état au syndic du Collège
des médecins, qui, lui, interviendra directement auprès des médecins
spécialistes fautifs.
M. Jolin-Barrette : Mais est-ce que
vous avez déjà évalué, dans le fond, la qualité du diagnostic par le physiothérapeute versus, supposons, un médecin
spécialiste, par rapport à la problématique du patient, lorsqu'on le
réfère au médecin spécialiste?
M. Pelletier (Denis) : O.K. Alors,
le physiothérapeute ne pose pas de diagnostic, il va simplement regarder s'il y a des motifs de consultation qui sont
suffisants. Alors, par exemple, dans l'exemple de la plagiocéphalie que je vous donnais tantôt,
le jeune patient arrive avec un diagnostic au physiothérapeute, c'est-à-dire
qu'il a un diagnostic de plagiocéphalie. Les
interventions du physiothérapeute vont voir... voit la nécessité d'un casque
pour remodeler la boîte crânienne. Alors, à ce moment-là, c'est un
diagnostic qui est déjà posé.
C'est sûr
que, dans cet exemple-là, je dois dire, c'est simplement la prescription du
casque qui est en jeu. Cependant,
si on regarde du côté de l'orthopédie, où il y a plusieurs
études faites à travers le monde là-dessus, notamment dans les pays industrialisés, où... le
diagnostic, si vous voulez, du physiothérapeute — et je le mets entre
guillemets parce que le physiothérapeute ne pose pas de diagnostic — a une
concordance, à peu près, d'environ 90 % avec le diagnostic de l'orthopédiste, alors que, si on regarde le
diagnostic du médecin traitant et sa concordance avec le médecin
orthopédiste, on parle de 68 %,
70 %. Alors, généralement, la pertinence du diagnostic, et la justesse du
diagnostic, du physiothérapeute, même
s'il n'en pose pas, est suffisamment élevée pour que celui-ci oriente
adéquatement le patient vers le bon spécialiste.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. Pelletier.
M. Pelletier (Denis) : Je vous
remercie.
Le
Président (M. Ouellette) :
M. Denis Pelletier, Me Claude Laurent, représentant l'ordre des
professionnels de la physiothérapie du Québec, merci d'être venus déposer en
commission.
Je vais
suspendre quelques minutes. Je demanderais à l'Ordre des médecins vétérinaires
du Québec de s'avancer à l'avant, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 17 h 26)
(Reprise à 17 h 28)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des médecins
vétérinaires du Québec. Et je pense que ça va être le Dr Joël Bergeron, qui est
le président, qui va prendre la parole. Vous allez nous présenter la personne
qui vous accompagne, 10 minutes de présentation, et après un échange avec
Mme la ministre et les porte-parole de chacune des oppositions. Dr Bergeron, à
vous la parole.
Ordre des médecins
vétérinaires du Québec (OMVQ)
M.
Bergeron(Joël) : Oui, M. le Président. Mme la ministre, chers
membres de la commission, M. le président de l'Office des professions, bonjour. Je me présente, Dr Joël Bergeron,
président de l'Ordre des médecins vétérinaires du Québec. Je suis
accompagné aujourd'hui de Mme Suzie Prince, directrice générale et secrétaire
de l'ordre.
Nous vous remercions, bien entendu, de
l'invitation que vous nous avez faite de pouvoir prendre part à ces
consultations particulières que vous consacrez... et de vous consacrer à la
lecture de nos mémoires et l'écoute de nos représentations.
L'Ordre des
médecins vétérinaires se réjouit du dépôt du projet de loi n° 98 qui vise
à améliorer la gouvernance des ordres professionnels et ultimement, bien
sûr, la protection du public. Nous saluons cette initiative, car plusieurs
changements importants sont attendus.
Nous ne pouvons prétendre à une saine gestion
des ordres professionnels et de l'Office des professions sans l'implantation des pratiques reconnues en matière
de gouvernance, sans un suivi diligent des opérations de tous les ordres
professionnels et sans, bien entendu,
également une reddition de comptes complète et transparente. L'Ordre des
médecins vétérinaires du Québec a d'ailleurs
implanté les meilleures pratiques en matière de gouvernance de 2010 à 2013 dans
un vaste chantier dont vous pourrez trouver
la liste des politiques qui ont été adoptées, les actions réalisées à la
page 3 de notre mémoire. Et, à ce moment, l'ordre était... faisait
figure de pionnier en cette matière.
• (17 h 30) •
Nous
accueillons donc très favorablement la très grande majorité des modifications
qui sont proposées dans le projet de loi et nous saluons, bien entendu,
le courage et l'action de la ministre dans ce dossier.
Nous
sommes toutefois d'avis que la réforme proposée est trop timide à plusieurs
égards et n'aura pas nécessairement l'effet escompté ou du moins pas assez
d'effet pour régler les problèmes qui minent actuellement la confiance du public et nuisent à la capacité des
ordres professionnels d'assumer pleinement leurs mandats. Nous sommes convaincus que le message doit être plus fort. Il
ne faut pas craindre d'aller un peu plus loin dans nos actions. Les
ordres professionnels sont prêts, et le
public le demande. Nous ne devons pas glisser sous le tapis les problèmes qui
sont déjà connus, nous devons être
visionnaires et surtout tenter de les résoudre. Ce projet de loi est une
formidable opportunité que nous devons saisir.
Nous
sommes en parfait accord avec plusieurs modifications apportées au code, soit
16 au total, dont nous vous référons
à la page 4 de notre mémoire pour en connaître la liste, mais notamment
tout ce qui a trait à l'accroissement de la surveillance exercée par
l'Office des professions; les modifications de la structure de l'office;
l'accroissement de la contribution et
surtout de l'imputabilité des membres du conseil d'administration, qui doivent
veiller à la surveillance des affaires
de l'ordre; au rôle du président et la limitation de son mandat; et
l'augmentation du nombre d'administrateurs nommés. L'ordre suggère toutefois des ajouts et des modifications,
qu'elles soient apportées au projet de loi, qui ne va, à notre avis,
définitivement pas assez loin pour assurer une saine gestion des ordres.
J'invite à ce
moment-ci Mme Suzie Prince à vous formuler quelques-unes de nos
recommandations.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Prince.
Mme Prince
(Suzie) : Merci. L'Ordre des médecins vétérinaires suggère donc des
modifications et des améliorations au projet
de loi n° 98, mais en tout respect pour le travail qui a été fait à la
fois par le gouvernement, par la ministre
et par l'Office des professions. Donc, bien humblement, nous suggérons que
l'Office des professions entame un dialogue
plus soutenu avec les ordres professionnels en multipliant les actions
préventives et d'accompagnement, parce que, les dérapages qui ont eu lieu dans le système professionnel, les ordres
connaissaient déjà les problématiques. Donc, d'agir en amont, agir en prévention nous apparaît
extrêmement important. Les problèmes sont connus, et nous pensons, là, que
c'est ensemble qu'on sera capables d'avoir une action concertée pour éviter les
crises.
L'amélioration du
contrôle et de l'analyse des ordres... des activités des ordres nous apparaît
extrêmement importante. Me Laurent
précisait plus tôt une suggestion. Des directeurs généraux travaillent
actuellement à analyser les opérations
des ordres, et je pense que c'est... nous pensons, en tout cas, que c'est
extrêmement porteur. Que ce soit non pas seulement que dans l'analyse des rapports annuels, mais quels sont les
délais, quels sont les... quelle est la diligence des ordres professionnels à assumer leurs fonctions,
quels sont les délais du syndic, combien d'inspections professionnelles,
la nature, tous ces éléments-là méritent une attention plus soutenue.
Nous
souhaitons que le projet de loi n° 98 ajoute trois responsabilités qui
nous apparaissent très stratégiques pour un conseil d'administration. L'adoption des états financiers et veiller à
la santé financière de l'organisation doivent relever non pas d'un comité exécutif, mais d'un conseil
d'administration. La gestion des risques, le projet de loi est muet sur la
gestion des risques, alors que c'est un élément extrêmement important de vigie,
une responsabilité stratégique d'un conseil d'administration.
Que ce soit par l'adoption d'une politique ou d'une matrice de gestion des
risques, on doit s'en préoccuper, de même que l'analyse de
l'environnement externe. Ces éléments-là vont être porteurs d'une meilleure
gouvernance pour les ordres.
La
modification de la durée des mandats du président et des administrateurs, nous
souhaitons que... Le projet de loi précise
entre deux et quatre ans. Nous considérons qu'il y a trop d'écart et nous
suggérons de deux et trois ans, ce qui va permettre de réduire l'écart
entre les ordres professionnels.
La
nomination d'administrateurs nommés est salutaire. Une plus grande
représentation des administrateurs nommés était très souhaitable pour
l'organisation. Nous en comptons quatre dans notre... sur notre conseil
d'administration. Par contre, on souhaite
que le projet de loi aille plus loin, les administrateurs nommés doivent
également être présents sur des comités. Nous pensons au comité de
gouvernance, au comité d'éthique, au comité d'admission, au comité de rémunération, au comité d'audit. Le public doit
être présent sur ces différentes instances là, ils ont une expertise
complémentaire et un regard externe.
L'implantation
d'un processus d'évaluation annuelle des administrateurs nommés est également
importante. Les ordres, en tout cas,
auraient avantage à pouvoir évaluer leurs administrateurs nommés. La même
chose, le conseil d'administration et
tous les comités des ordres professionnels devraient être assujettis à
l'évaluation annuelle. C'est une bonne
pratique qui permet d'évaluer le mode de fonctionnement et de contribution aux
activités. On ne peut pas mesurer... on ne peut pas améliorer ce que nous
ne mesurons pas, et ça nous apparaît extrêmement important.
Le
jeune administrateur, sa présence est souhaitable, mais son mandat et ses
fonctions devraient être les mêmes que les autres administrateurs. Tous
les administrateurs devraient être égaux.
Le processus de recrutement des administrateurs
nommés, aussi, nous suggérons que les ordres soient consultés pour identifier les profils et les besoins, cet
élément-là est manquant actuellement, et de pouvoir discuter lorsqu'il
y a des problèmes ou l'évaluation d'un administrateur nommé, qu'on
puisse contacter l'office puis avoir un suivi.
Révision
du montant des jetons de présence aussi, chez nous, nous avons convenu que tous
les administrateurs devaient bénéficier des mêmes jetons, donc, même
s'ils ont un ordre de petite taille avec des ressources financières limitées.
Cette mesure-là est importante.
La
possibilité de vacance, s'il y a vacance au poste de directeur général, ça nous apparaît important que le président puisse effectuer
l'intérim.
Et
ajouter aux responsabilités du président toute la gestion et l'encadrement des comités. Le
projet de loi est assez muet sur les comités. Les
comités jouent un rôle extrêmement important au sein des ordres professionnels,
ils sont nombreux, ils ont un pouvoir d'influence extrêmement important sur
toutes les questions des ordres professionnels.
Il
faut les former, donc la formation qui est dispensée sur le code d'éthique, la
déontologie doit l'être aussi pour les comités et doit l'être aussi pour les
employés de l'ordre. Et un code d'éthique et de conduite nous apparaît extrêmement
important pour non seulement le C.A., mais tous les membres des comités et le
personnel des ordres.
Le
directeur général doit pouvoir cumuler des fonctions, les ordres à
ressources limitées doivent pouvoir compter sur une ressource qui peut
accomplir plusieurs mandats.
De même, nous
souhaitons... nous trouvons ça extrêmement intéressant que le projet de loi,
là, traite de gouvernance, mais il manque un mécanisme qui nous apparaît extrêmement essentiel. L'adoption d'un code d'éthique est nettement insuffisante, il doit y avoir la
nomination des comités obligatoires qui soutiennent la gouvernance, on parle
d'un comité de gouvernance, un comité d'audit, un comité d'éthique et un comité de ressources
humaines, sans quoi ça sera du cosmétique, parce qu'il faut des comités
mandatés de l'application de la surveillance de tous ces processus-là.
Et la résolution des
litiges nous apparaît extrêmement importante.
Enfin,
nous souhaitons que, dans le Code des
professions, soit ajoutée une disposition qui permet de suspendre temporairement ou de destituer un administrateur.
Et la possibilité de recourir à la suspension provisoire d'un membre
lors d'accusations au criminel nous apparaît
salutaire. Par contre, on doit obligatoirement identifier un lien avec
l'exercice de la profession. Et, pour ce qui est des lanceurs d'alerte, on
considère que le comité de... le conseil de discipline doit être impliqué dans
ça.
Enfin,
le projet de loi est muet sur deux aspects qui nous apparaissent extrêmement
importants, et nous attirons l'attention
des parlementaires sur ces deux éléments-là : la réalisation et le
financement d'activités qui ne soutiennent pas le mandat d'ordres professionnels par des ordres
professionnels. Nous sommes préoccupés par les campagnes promotionnelles
qui promouvoient les professions,
promouvoient des campagnes médiatiques et des campagnes télévisuelles et
radiophoniques qui... des coûts qui se
chiffrent à des millions, et qui, à notre avis, confond le public et alimente
le public à l'effet que les ordres professionnels protègent leurs
membres et non le public. Hebdomadairement, ils reçoivent des messages
contradictoires de la part du système professionnel, et on considère qu'une
action est requise.
Et
enfin l'absence de dispositions visant à accroître le contrôle des ordres professionnels
sur les tiers qui exercent une influence sur les professionnels nous
désole. Nous pensions retrouver dans le projet de loi n° 98 des mesures conformément aux demandes de la commission
Charbonneau. C'est une préoccupation chez nous comme dans bon nombre d'ordres professionnels, et on aurait souhaité que
le projet de loi adresse cette question-là de façon beaucoup plus
détaillée et directe. Le projet de loi est muet sur cette question-là.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant
débuter les échanges, et, pour une période de neuf minutes d'échange, je
cède la parole à Mme la ministre.
Mme Vallée :
Bien, bonjour, M. le Président.
Le Président (M.
Tanguay) : Bonjour.
Mme
Vallée : La voix était soudainement différente. Mme Prince et
M. Bergeron... Dr Bergeron, je vous remercie pour votre présentation.
Votre mémoire, il est très étoffé, il comprend plusieurs enjeux, on va essayer
d'y aller en rafale un petit peu.
D'abord,
concernant votre préoccupation sur l'absence de dispositions qui visent à
accroître le contrôle des ordres sur
les tiers exerçant une influence sur les professionnels, j'aimerais vous
entendre tout particulièrement, parce que je l'ai annoncé, j'en ai parlé, on est... il y a une
réflexion qui est amorcée sur cette question-là, l'objectif étant évidemment
d'aller chercher une vision commune. Et je profite de l'opportunité pour vous
entendre sur cet enjeu.
• (17 h 40) •
M. Bergeron
(Joël) : Je peux peut-être commencer, puis ensuite je pourrai céder la
parole à Mme Prince, si nécessaire. Mais
tout le processus qui a mené à l'exercice en société pour la profession de
vétérinaire, mais, comme on le voit aussi, dans plusieurs autres
domaines du système professionnel, a entraîné une séquence, pour nous, qu'on a
pu observer, du côté de la médecine vétérinaire, quand même
assez marquée, qui nous amène des interrogations importantes, donc tout ce qui touche l'indépendance professionnelle
et le jugement professionnel, donc. Et, bien entendu, dans le
contact qu'on a avec les différents
partenaires de l'industrie ou de la profession, les points sont fréquents, sont
nombreux où ça devient tentant pour
les gens de l'industrie d'amener une pression supplémentaire, d'amener... faire
des interventions, donc.
Et,
du côté de la création de regroupements et de grandes corporations basées sur le
fondement de l'exercice en société, qui a stimulé cette chose-là très marquée chez
nous, mais également dans l'intervention au niveau
de l'utilisation de certains produits, certains médicaments, les
nourritures animales et ces choses-là, donc, c'est à ce moment-là que l'industrie peut amener une influence qui nous
apparaît, à certains égards, indue, qui met les professionnels... malgré,
j'ose espérer, leur bonne volonté d'être
protégés et d'assurer leur intégrité, qui
met souvent les professionnels face à des situations très délicates, parce que le professionnel se
trouve, à ce moment-là, dans notre cas à nous, à être pris entre l'industrie
qui fait une pression et le consommateur, qui va être le client, qui va être le
producteur également.
Alors,
l'influence du tiers crée des problèmes, et, sur ces tiers-là, comme on le
sait, un ordre professionnel n'a pas,
sinon très, très peu d'influence. Donc, si ce n'est pas quelque chose qui est
au sein du projet de loi, comme on le voit là, vous nous annoncez qu'il
y aurait quelque chose qui s'en viendrait, ce serait certainement grandement
apprécié.
Mme
Vallée : Est-ce que vous avez des idées, des pistes de solution
sur lesquelles vous souhaitez apporter notre attention, qu'il s'agisse d'une obligation additionnelle incorporée au
Code des professions... Est-ce qu'il y aurait, selon vous, des éléments
sur lesquels il est important de se pencher au sein du code?
M. Bergeron
(Joël) : À notre compréhension, il y a déjà des pistes de solution qui
ont été apportées durant la commission Charbonneau. Je pense que, déjà là, si
on est en mesure d'asseoir des fondements bien précis sur ces angles-là, ça aura des répercussions,
définitivement, pour nous également, là. Alors, je pense qu'il y a déjà des
pistes de solution intéressantes.
Mme Vallée : Donc, vous voyez
de façon favorable la mise en oeuvre de cette recommandation du rapport?
M. Bergeron (Joël) : Ce serait
grandement important, grandement important.
Mme Vallée :
D'accord. Pour ce qui est des mandats, des rôles additionnels que vous
souhaiteriez voir ajoutés au code, en
fait vous souhaitez ajouter trois responsabilités additionnelles au conseil
d'administration : identifier, gérer les risques et analyser l'environnement externe. Ça, on retrouve ça à la
page 10 de votre mémoire. J'aimerais que vous puissiez peut-être
élaborer un petit peu davantage sur ces éléments-là, qui sont quand même fort
intéressants.
M. Bergeron (Joël) : Vous voyez, ce
sont des éléments de base dans tout le processus, où on souhaite que le conseil d'administration puisse davantage être
conscient et les administrateurs davantage conscients des pouvoirs qu'ils
ont par rapport aux devoirs qu'ils doivent
assumer au sein de la société. Ce sont des ajouts, pour nous, qui nous
apparaissent non seulement importants, mais absolument essentiels.
Mme Vallée :
Donc, ils auraient un pouvoir didactique en plus d'ajouter des responsabilités
aux administrateurs.
M.
Bergeron (Joël) : Certainement au début, puisque, bon, ce serait
nouveau et ça amènerait une compréhension supplémentaire.
Mme Vallée : Pour ce qui est
des administrateurs nommés, vous demandez que puisse être mis en place un
processus d'évaluation des administrateurs nommés, s'assurer que les
administrateurs nommés aient les compétences requises
pour siéger au sein du conseil d'administration. Est-ce que vous avez un
mécanisme, une suggestion de mécanisme à intégrer au projet de loi, qui
pourrait permettre d'assurer également que les administrateurs aient toutes les
qualités requises pour assurer la protection du public?
M.
Bergeron (Joël) : Ce qui serait important, c'est que, dans le projet
de loi ou dans le Code des professions, il y ait cette mention-là, qu'il y ait une coordination qui doive se faire
entre l'office et l'ordre professionnel. À cet égard, notre expérience nous a démontré qu'on a d'ailleurs eu
quelques exemples de cet ordre-là avec les représentants de l'office au moment où on devait soit renouveler le mandat d'un
administrateur nommé ou encore remplacer. Et c'est cet exemple-là, et ce qu'on a pu vivre dans cette expérience-là, qui
nous amène à dire : Ça doit être présent dans le Code des
professions parce que c'est... On le
mentionnait tantôt, Mme Prince le disait : Le complément de compétences et
de connaissances que ces gens-là
apportent au sein d'un conseil d'administration, il est incroyable. Il est d'une grande importance, dans la
notion de protection du public, pour s'assurer de remplir notre mandat, que les
administrateurs qui auront à se joindre à nos administrateurs
élus puissent justement apporter ces compléments de connaissances et de
compétences là. Ça donne au conseil d'administration encore un meilleur
pouvoir pour remplir son mandat.
Mme Vallée : Il y a eu
différentes propositions, qui ont été formulées au cours des auditions, sur le
profil des administrateurs nommés. Certains
nous suggéraient que ces administrateurs proviennent d'associations de
consommateurs, d'autres organismes suggéraient que les administrateurs soient vraiment
nommés en fonction du profil du conseil d'administration,
c'est-à-dire assurer que l'administrateur nommé pourra venir ajouter une
plus-value, sans pour autant provenir,
par exemple, d'associations de consommateurs. Est-ce qu'il devrait y avoir une
référence précise quant au profil des administrateurs nommés à
l'intérieur du code?
M. Bergeron (Joël) : Je ne crois pas
que ce soit nécessaire. Qu'il y ait une référence de cette interaction-là... interrelation-là, qui est extrêmement importante,
je crois que c'est d'abord ça qui doit être mis de l'avant. Il
appartiendra par la suite et à l'office et à
l'ordre concerné de déterminer, sur les trois, quatre ou selon le nombre
d'administrateurs nommés, qui sera inscrit, quelles seront les
compétences, quels seront les profils en particulier qui devraient être ciblés.
Et, à l'occasion, ça peut être pour des
compétences, à l'occasion, ça pourrait être pour des secteurs en particulier
qui pourraient être représentés. On
peut penser... Par exemple, nous, de notre côté, du côté de la profession
vétérinaire, ça pourrait être intéressant,
par exemple, d'avoir quelqu'un qui est en production, production agricole, pour
nous apporter un élément d'information
qui est extrêmement important. C'est une part majeure du travail qui est fait
par le médecin vétérinaire, comme exemple.
Mme Vallée :
Vous recommandez d'élargir le niveau de responsabilités du directeur général
sur l'administration de l'ordre. On a
eu certaines représentations nous disant : Il ne faut pas inclure au code
la fonction de directeur général, pour toutes sortes de raisons, et
j'aimerais vous entendre sur la façon dont vous concevez la fonction de
directeur général à l'intérieur de l'ordre.
Le Président (M. Tanguay) : Quelques
instants encore.
Mme Vallée :
Et les motifs, là, qui vous amènent à dire : Bien, cet encadrement, il
doit apparaître.
M.
Bergeron (Joël) : L'encadrement, pour nous, il est important qu'il
soit au Code des professions, c'est un rôle majeur au sein d'un ordre professionnel pour la gestion et la
gouvernance. Et c'est un rôle qui est complémentaire et qui doit être
prévu complémentaire, et c'est ce qu'on exprime dans le... pas dans le code,
bien sûr, mais dans notre mémoire, complémentaire,
et non se suppléer au rôle du président, au rôle du comité exécutif et... ni au
rôle du conseil d'administration.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Alors, maintenant, je cède la parole pour une période de
5 min 30 s à notre collègue de Chicoutimi.
Mme Jean : Merci. Alors, bonsoir, M.
Bergeron, Mme Prince, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci de participer
avec nous à l'exercice d'étudier le projet de loi n° 98.
Donc, ma
première question serait concernant votre opinion sur le pôle de coordination.
On est tous... En tout cas, ça semble
unanime ou assez généralisé qu'il y a des problématiques au niveau des
admissions aux ordres professionnels, problématiques
de formation, de stages ou d'autres niveaux. Il y a déjà un pôle de
coordination qui existe, et on a comme témoignages que les résultats
sont un tant soit peu faibles.
Alors, avoir
une plateforme qui permettrait d'évaluer, d'analyser ou de trouver des
solutions, est-ce que... Si on ne fait pas de pôle de coordination,
quelle autre solution vous voyez?
• (17 h 50) •
M.
Bergeron (Joël) : Bien, on voit, l'admission est un des enjeux
importants qui est soulevé dans le projet de loi. Au-delà du pôle de coordination, où nous, on croit
que c'est peut-être... il peut avoir un rôle intéressant, jusqu'à
présent qui semble avoir été mitigé. De l'enchâsser
dans le Code des professions, on ne croit pas que ce soit la solution. De la
même façon, quand on perçoit ou on entrevoit
des difficultés du côté de l'admission, quand on considère ce qui se produit
du côté de l'admission des candidats
québécois, on ne voit pas non plus, nous, l'intérêt... Et d'ailleurs, même,
l'ordre s'oppose à l'élargissement,
notamment, du rôle du commissaire aux plaintes. Alors, d'ajouter des structures, d'ajouter davantage de couches, que
ce soit par le pôle de coordination, que ce soit par le commissaire aux plaintes, le commissaire à
l'admission, particulièrement par cet élargissement où actuellement on n'a pas... on ne vit pas de problème du côté
de l'admission des candidats québécois,
on n'y voit pas d'intérêt.
L'admission problématique semble ressortir davantage
du profil des gens formés à l'étranger, et là toute la coordination des stages, formation
d'appoint, et ces choses-là a son importance. Il y a déjà des
instances aussi qui y travaillent :
les comités d'admission, les comités de formation, les conseils d'administration se penchent, bien entendu, sur les difficultés qui sont rencontrées lorsque
des candidats nous reviennent à cet
égard-là, et là le rôle du
commissaire aux plaintes a toute son
importance. C'est d'ailleurs pour ça qu'il avait été formé. Mais de l'élargir à ce moment-ci, d'enchâsser le pôle de coordination dans le Code des professions, d'élargir les pouvoirs du commissaire aux
plaintes, on n'y voit pas, pour nous, du moins...
Écoutez, les candidats québécois sont admis à
plus de 99 % et sur le marché du travail et... Du côté du travail qui est fait dans leur formation, s'il n'y a pas
de problème, quelle solution on doit trouver? On a un principe en
médecine, on dit : Premièrement, ne pas nuire. Et cet aspect-là, pour
nous, du fait également qu'il n'y a pas eu de concertation, du moins de ce que nous, on a pu recevoir dans nos
échanges, concertation préalable avec les ordres professionnels, ça
devient, pour nous, un élément qui est certainement grandement surprenant et
préoccupant.
Mme
Jean : Merci. Vous parlez d'augmentation de... l'encadrement ou le mandat du directeur général devrait être le
plus large possible pour ne pas qu'il
y ait de tâches orphelines ou de
fonctions orphelines. Quels genres de fonctions orphelines pourraient se
retrouver dans un poste tel que défini?
M. Bergeron (Joël) : Mme Prince.
Mme Prince
(Suzie) : Ce n'est pas une
fonction comme un niveau de responsabilité. Le directeur
général ne peut pas faire fi de son niveau de responsabilité. Donc, ce n'est pas des fonctions comme un niveau d'imputabilité. On le rend imputable de l'ensemble
des opérations de l'organisation, donc ce n'est pas des fonctions qu'il fait, mais
c'est un niveau de responsabilité.
L'article 101.1
précise : «Ressources humaines, ressources financières», mais nous trouvons que c'est... il y a une possibilité d'avoir des...
orphelines, et quelqu'un doit être imputable pour l'ensemble
de l'organisation. Donc, ce n'est pas du tout des fonctions supplémentaires, c'est un niveau de responsabilité et d'imputabilité. Et, si jamais il y a un problème dans une opération, ou un
service, ou quoi que ce soit, cette personne-là doit être imputable, et ce
n'est pas le comité exécutif ou ce n'est pas
le président qui doit avoir ce niveau de charge là d'imputabilité. Donc, c'est le rendre plus imputable mais pas lui donner plus
de fonctions nécessairement.
Mme
Jean : Merci. Vous semblez
avoir réfléchi beaucoup sur, justement, la gouvernance pour donner confiance au
public par rapport aux ordres professionnels. On a eu une proposition, la
semaine dernière, à l'effet que les ordres professionnels pourraient être obligés ou commis de proposer un plan stratégique et de même déposer le niveau d'avancement du plan stratégique en
question. Est-ce que c'est quelque chose que vous trouvez qui serait intéressant?
M. Bergeron (Joël) : Définitivement.
Mme Jean :
Définitivement?
M. Bergeron (Joël) : Définitivement.
Ce serait important. C'est une question de transparence, c'est une question
aussi de démontrer quels sont les objectifs, quelles sont les actions qui sont souhaités
dans le plan stratégique, et je
crois que ça doit être connu. Et l'évolution de ce plan-là doit être connue également.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Alors, nous poursuivons nos échanges pour une période de
3 min 30 s. Je cède la parole à notre collègue de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Dr Bergeron, Mme Prince, bonjour. Merci pour
votre contribution aux travaux de la commission.
J'aimerais qu'on revienne sur les tiers. Donc, d'entrée de jeu, dans la
présentation de votre mémoire, vous avez dit : Bon, bien, il y a
des réalités particulières, puis là le projet
de loi n'en traite pas spécifiquement.
Peut-être qu'on va avoir un papillon d'ici la fin de l'étude détaillée. Ceci
étant dit, dans la réalité concrète, là, d'un vétérinaire,
pouvez-vous l'illustrer, qu'est-ce
que ça représente? Je comprends, des fois ils sont en société. Est-ce
que, des fois, ils se retrouvent dans des grandes entreprises? C'est quoi, la
réalité d'un vétérinaire par rapport aux tiers?
M.
Bergeron (Joël) : Ça peut être effectivement assez vaste. Il y a ce
que je mentionnais un peu plus tôt, toute la question d'influence du
côté des échanges d'exercice en société, des échanges avec des partenaires de
l'industrie. Mais certains de nos membres
vont oeuvrer au sein, effectivement, de grandes entreprises, et la pression
pour effectuer certains actes, ou déléguer certains actes, ou encore
utiliser certains produits n'est certainement pas non négligeable. Et, à certaines occasions, on parle d'entreprises
qui ont des pouvoirs très grands en
termes de pouvoirs financiers,
pouvoirs d'influence.
M. Jolin-Barrette : Là, vous parlez d'entreprises
dans le domaine alimentaire, supposons?
M. Bergeron (Joël) : Entreprises
alimentaires, intégration agricole au niveau de la production de certaines denrées alimentaires : la volaille, le porc,
le boeuf particulièrement. Bien entendu, ce genre d'influence là, on le
verra moins du côté des
animaux de compagnie, néanmoins encore du côté des partenaires et du côté des
pharmaceutiques, l'influence d'utilisation
de certains produits, l'influence de tout ce qui rentre en ligne de compte dès
qu'on pense à conflit
d'intérêts, perception de conflit d'intérêts, qui amènent beaucoup de pression sur les médecins vétérinaires. Et, à
cet égard-là, le Code de déontologie donne des directives, mais, si on
pouvait avoir des éléments encore supplémentaires, à la limite à titre
éducatif, pour l'ensemble des partenaires, ce serait grandement apprécié, c'est
sûr et certain.
Mme Prince (Suzie) : Parce que, les
ordres professionnels, tout ce qu'on peut actuellement... en tout cas, à l'ordre, chez nous, on envoie des avis, on envoie
des lettres aux tiers, mais on ne peut pas les contraindre, on ne peut
pas donner des sanctions, on ne peut pas publier. C'est extrêmement difficile.
M. Jolin-Barrette : Donc,
concrètement, le professionnel qui se retrouve dans une grande entreprise comme
ça, puis il y a des pratiques d'entreprise qui sont contraires à ce qu'un
professionnel doit respecter dans son code de déontologie,
dans son code d'éthique, il se retrouve, dans le fond, entre l'arbre et
l'écorce, où il a son employeur, d'un côté, qui dit : Tu vas faire
ça, puis lui, il ne peut pas le faire, puis là il se retrouve à cheval entre
les deux aussi pour ne pas... O.K.
Est-ce que
vous avez des individus qui ont des parcours atypiques chez vous, dans le fond,
que... Présentement, le commissaire
aux plaintes couvre les gens qui viennent de l'étranger, mais est-ce que vous
avez des gens... ou vous avez eu des
cas de gens qui avaient un parcours de formation atypique puis qui voulaient
intégrer l'ordre professionnel au cours des dernières années?
M. Bergeron (Joël) : Vraiment pas, à
ma connaissance. Le processus pour intégrer la profession vétérinaire est quand même assez précis, assez bien encadré,
que ce soit pour nos candidats québécois ou des candidats étrangers.
Donc, parcours atypique, à ma connaissance, non, on n'a pas eu de ce type-là.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Donc,
il n'y a pas d'individus qui contestent le fait qu'ils n'ont pas été admis à
l'ordre professionnel sur la base d'il leur
manquait une équivalence ou il leur manquait un diplôme. Il n'y en a pas eu au
cours des dernières années?
M. Bergeron (Joël) : Pas à cet
égard-là, non. Pas à notre connaissance, du moins.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous remercions
représentante, représentant de l'Ordre des médecins vétérinaires du
Québec. Je vous remercie donc pour votre contribution à nos travaux.
Et la commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30.
(Suspension de la séance à 17 h 58)
(Reprise à 19 h 35)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des institutions reprend ses travaux. Je
demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de vos téléphones cellulaires.
Nous poursuivons les consultations particulières
et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses
dispositions concernant principalement l'admission aux professions et la
gouvernance du système professionnel.
Ce soir, nous
entendrons les organismes suivants : l'Ordre des psychoéducateurs et
psychoéducatrices du Québec, l'Ordre des psychologues du Québec et
l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du
Québec.
Alors, dans un
premier temps, nous sommes heureux d'accueillir les représentante, représentant
de l'Ordre des psychoéducateurs et
des psychoéducatrices du Québec. Vous disposez d'une période de présentation de
10 minutes. Par la suite, vous
aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. Pour les fins de
l'enregistrement, je vous demanderais de bien vouloir préciser vos noms
et fonctions, et, sans plus tarder, la parole est à vous.
Ordre des
psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec (OPPQ)
M. Leclerc (Denis) : Merci. Alors,
M. le Président de la commission, Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, M. le président de l'office,
mesdames et messieurs, l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices
du Québec remercie la commission de l'invitation qui lui a été faite de
commenter le projet de loi n° 98.
Je suis Denis
Leclerc, président de l'ordre, et je suis accompagné de Mme Dominique Auger,
directrice générale et secrétaire de l'ordre.
L'ordre a été
créé en 2010, et les psychoéducateurs font partie du système professionnel
depuis 2000. À ce jour, notre organisation compte plus de
4 500 membres, dont plus de 85 % travaillent dans le secteur
public.
L'ordre est
en accord avec plusieurs propositions du projet de loi n° 98, tout
particulièrement celles touchant la gouvernance
des ordres. Nous souscrivons aux intentions du gouvernement visant
l'amélioration du système professionnel en octroyant aux ordres les conditions leur permettant d'encore mieux
remplir leur mission de protection du public. Nous partageons également
le souci d'améliorer la confiance de la population à l'endroit des ordres
professionnels.
Parmi les
modifications proposées, nous saluons notamment les changements concernant les
modalités d'élection à la présidence
du Conseil interprofessionnel du Québec, les pouvoirs accrus octroyés aux
administrateurs nommés sur nos conseils
d'administration ainsi que les mesures qui prévoient attribuer certains
nouveaux pouvoirs au syndic. Ces mesures, et d'autres, contribueront, à
nos yeux, à mieux protéger le public.
Toutefois, le
projet de loi suscite également chez nous certaines questions et
préoccupations. L'élargissement du mandat
du commissaire aux plaintes à l'ensemble du processus d'admission et son
changement de nom en conséquence ont suscité
beaucoup de réactions chez les ordres professionnels, la plupart ayant exprimé
leur désaccord avec ces modifications. Comme plusieurs, nous considérons
que ce nouveau rôle attribué au commissaire aux admissions est trop vaste et non justifié. En effet, plusieurs acteurs, dont le
Conseil interprofessionnel du Québec, ont souligné que 95 % des
demandes d'admission de candidats issus de
l'immigration sont reçus favorablement par les ordres, ce qui correspond à une
amélioration notable depuis 15 ans.
Notre ordre
est peu touché par les problèmes rencontrés par d'autres professions lorsqu'il
est question d'admission. Notre profession étant spécifique au Québec,
nous recevons peu de demandes provenant de professionnels formés à l'étranger et jamais à partir d'une formation en
psychoéducation, puisqu'elle n'existe pas ailleurs. La grande majorité
des psychoéducateurs sont admis à notre ordre automatiquement à la suite de
l'obtention de leurs diplômes universitaires dans
l'une ou l'autre des six universités offrant le programme de maîtrise en
psychoéducation. Un grand nombre d'ordres ont des réalités similaires à
la nôtre.
Nous traitons
tout de même à chaque année un certain nombre de demandes de reconnaissance par
équivalence, dont la majorité sont issues d'un parcours atypique de formation
au Québec. Par souci d'équité, nous pensons que l'extension du mandat du commissaire aux plaintes à l'ensemble des
plaintes liées à l'admission par équivalence, que le candidat soit Québécois ou en provenance de l'étranger,
serait pertinente. Cependant, pour nous, l'extension du mandat du commissaire à l'ensemble du processus des
admissions ne résultera qu'en une augmentation des dépenses. Celle-ci
sera reliée tant à la croissance du bureau
du commissaire qu'à la reddition de comptes qui sera exigée annuellement à
l'ensemble des ordres. Nous considérons que
cette pression budgétaire supplémentaire qui incomberait aux ordres et à leurs
membres est inappropriée et inquiétante dans le contexte où les ressources
financières sont déjà limitées pour pouvoir répondre efficacement aux responsabilités immédiates de l'ordre, telles que la
formation, l'inspection, le bureau du syndic ainsi que la discipline. Nous nous questionnons à savoir en
quoi une telle extension du rôle du commissaire à l'admission améliorera
la protection du public, mission première du système professionnel.
• (19 h 40) •
Bien que notre processus d'admission soit relativement
simple, cela ne nous empêche pas pour autant d'être sensibles aux difficultés
rencontrées par plusieurs demandeurs pour l'une ou l'autre des professions
encadrées par un ordre. Ces
difficultés reposent sur des responsabilités partagées entre plusieurs acteurs
de la société, et nous considérons que les solutions passent également par la concertation entre ces différents
acteurs. Nous ne croyons pas que l'extension du rôle du commissaire aux plaintes, qui ne pourrait qu'enquêter et faire des recommandations sur le processus d'admission, soit la solution. Pour nous, un meilleur encadrement du processus de
concertation nous apparaît une piste de solution beaucoup plus porteuse et orientée vers la recherche de
solutions. Cela pourrait se faire par l'entremise du Pôle de coordination pour l'accès à la formation ou encore, comme le
propose le Conseil interprofessionnel
du Québec, en rendant permanent le comité des partenaires qui existe
déjà au sein du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
Sans cet effort de concertation, nous croyons
que le projet de loi n° 98 risque d'engendrer de la confusion et l'éparpillement des responsabilités entre les différentes instances impliquées. Ainsi, le
commissaire à l'admission pourrait enquêter
auprès des différents organismes impliqués dans le processus d'admission et
leur soumettre des recommandations. Le
pôle de coordination pourrait aussi solliciter des informations et inclure des recommandations dans le rapport qu'il doit remettre au gouvernement. L'Office des professions peut, lui aussi, soumettre des recommandations auprès des différents acteurs,
possiblement à partir d'informations recueillies par le commissaire à l'admission, et
le comité interministériel du MIDI peut en faire de même.
Dans un autre
ordre d'idées, le projet de loi n° 98
propose plusieurs modifications reliées à la gouvernance des ordres, et nous saluons la plupart d'entre elles.
Pour l'essentiel, nous constatons qu'elles correspondent aux règles
générales de gouvernance que nous avons mises en place au sein de notre ordre
et nous y souscrivons d'emblée.
Comme d'autres, nous questionnons les
implications des changements du rôle du président et souhaitons des éclaircissements à ce propos. Nous endosserons tout
de même la proposition voulant que l'un de ces rôles soit la surveillance des affaires du conseil d'administration.
À cet effet, pour lui permettre de bien assumer ce rôle et en conformité
avec les pratiques reconnues de bonne
gouvernance, que nous avons d'ailleurs implantées au sein de notre ordre,
nous proposons d'ajouter aux responsabilités du président celle de la mise en
place d'une procédure d'évaluation de la performance du conseil
d'administration.
Nous croyons
à la nécessité que les membres du conseil d'administration d'un ordre
respectent des normes élevées en
matière d'éthique et de déontologie. Pour cette raison, nous appuyons la
proposition d'exiger pour ces administrateurs une formation portant sur
la gouvernance et l'éthique.
Pour ce qui
est de l'obligation pour un conseil d'administration d'adopter un code
d'éthique et de déontologie applicable
aux administrateurs, nous sommes tout à fait en faveur. D'ailleurs, les membres
de notre conseil d'administration ont déjà adopté un tel code. Nous
croyons toutefois que cela devrait être encadré par une résolution du conseil d'administration plutôt que par un règlement. Cela
permettrait, en cas de nécessité de mise à jour, par exemple, une plus grande souplesse. Nous sommes d'avis que cet
ajustement ne compromettrait pas pour autant la portée du code d'éthique
et de déontologie, puisqu'il devrait respecter les éléments du règlement de
l'office.
Nous
endossons la proposition d'interdire le cumul des fonctions entre le président
et le directeur général. Nous croyons qu'il s'agit d'une bonne pratique
de gouvernance adoptée dans la plupart des organisations. Toutefois, nous recommandons de prévoir la possibilité d'un tel
cumul de façon transitoire et limitée dans le temps advenant un départ
subit du directeur général, de manière à ne pas compromettre la poursuite des
affaires de l'ordre. Une telle mesure serait particulièrement utile pour de
plus petits ordres où le directeur général est fréquemment le seul
employé-cadre de l'organisation.
Nous souscrivons à la nécessité d'inclure la
fonction de directeur général au Code des professions, car nous considérons
que, sans cette inclusion, l'interdiction du cumul entre le président et le
directeur général deviendrait pratiquement
impossible à encadrer. Nous sommes toutefois d'avis que la destitution du
directeur général ne devrait pas nécessiter un vote des deux tiers, mais
uniquement un vote à majorité des membres du conseil d'administration.
Nous apprécions avoir eu l'opportunité de
contribuer aux travaux en lien avec le projet de loi n° 98 et nous
espérons que nos réflexions seront utiles aux membres de la Commission des
institutions. Merci de votre attention, et il nous fera plaisir maintenant de
répondre à vos questions.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup pour votre présentation. Et maintenant s'ouvre une période d'échange avec les parlementaires, et, pour une
période de 15 minutes, je cède la parole à la ministre. Mme la
ministre.
Mme Vallée : Merci, M. le
Président. Alors, merci, M. Leclerc, Mme Auger, merci d'être avec nous.
Votre mémoire fait état de différentes prises de position.
Quant à la gouvernance de l'office, vous êtes préoccupés quant à la possibilité pour l'office de
pouvoir amorcer une enquête sans préalablement avoir obtenu l'autorisation de
la ministre ou du ministre responsable, parce que vous craignez que ça laisse
place à des abus, à des dérives et qu'actuellement... le système qui est en place actuellement permet d'éviter ces dérives-là. Alors, j'aimerais
ça vous entendre sur le type de
dérive, le genre de dérive, le genre d'abus auquel vous avez fait référence
dans votre mémoire. Qu'est-ce qui vous préoccupe? Quel pourrait être une
dérive ou un abus?
Parce que le projet de loi prévoit la possibilité
d'enquêter sans nécessairement préalablement avoir obtenu l'autorisation, mais
prévoit quand même que l'avis doit être donné, donc l'office ne peut faire
enquête sans en avoir informé la ministre,
et vous dites : Bien, malgré ça, nous, on a des craintes que ce pouvoir-là
soit utilisé à des fins abusives. J'aimerais vous entendre sur ce qui
pourrait être, à votre avis, une fin abusive.
M. Leclerc
(Denis) : D'accord. Merci, Mme la ministre, de la question. Écoutez, dans les faits, on ne prend pas position contre cette possibilité-là, puisque, d'entrée de jeu, on n'est pas totalement
opposés au fait que le président de l'office puisse avoir le pouvoir
d'enquêter sans nécessairement devoir passer par une formule beaucoup plus
rigide et encadrante, qui est celle de
demander l'autorisation de la ministre. Et honnêtement j'ajouterais que cela pourrait permettre également...
Vous savez, quand il y a une enquête demandée à une ministre
ou à un ministre, la situation est évidemment rapidement médiatisée, rapidement
connue, et ça prend une importance qui parfois peut peut-être être superflue. Alors, on ne s'est pas prononcés d'entrée de jeu
contre cela, tout ce qu'on a dit, c'est qu'on a l'impression que... la
manière dont le projet de loi est présenté actuellement, les balises ne nous
semblent pas très présentes. Et honnêtement je suis loin d'être un juriste, j'ai quand même entendu
certaines craintes soulevées par des juristes à ce niveau-là. Et donc on
est solidaires au niveau des craintes et des
balises à mettre, mais on n'est pas nécessairement, d'entrée de jeu, opposés à
cela.
Puis j'ajouterais que j'ai souvent dit que
nous-mêmes, comme ordre, on peut être excessivement intrusifs par rapport à nos membres, et on doit accepter qu'il y
ait un encadrement de nos pratiques. Mais les balises ne nous semblaient
pas très claires à ce moment-ci.
Mme Vallée : Donc, votre
préoccupation est plutôt à l'effet d'encadrer davantage cette mesure-là, et non
pas d'être en opposition avec le principe.
Le principe, vous comprenez le pourquoi, mais vous dites : Peut-être, il
mériterait d'être encadré, balisé de façon plus claire, à savoir dans quel
contexte une enquête peut-elle être enclenchée.
M. Leclerc
(Denis) : Notamment, et
quelles sont les mesures pour éviter qu'il y ait abus, sans
nécessairement, honnêtement, pouvoir vous
dire tel ou tel abus. Vous savez, quand on parle de gouvernance en général,
c'est beaucoup de la prévention de choses qui pourraient arriver sans
nécessairement toujours partir d'événements bien ponctuels, qu'on peut
illustrer.
Mme Vallée :
D'accord, merci. Vous avez également... Vous êtes probablement un des seuls
ordres à avoir abordé la gouvernance
du CIQ à l'intérieur de votre mémoire, notamment en lien avec les règles
d'élection de la présidence. Et, dans
le mémoire, vous dites qu'il y a actuellement un droit de veto de l'ordre
d'origine du candidat et un risque à la nécessité de neutralité de ce
candidat. J'aimerais vous entendre un petit peu plus sur cette affirmation.
• (19 h 50) •
M. Leclerc
(Denis) : Merci.
Effectivement, on l'a abordé, notamment parce que, dans mon implication au
sein du CIQ, j'ai été impliqué au niveau du
comité de gouvernance, où on a réfléchi à cette question-là. Je vais essayer de
bien le traduire, parce qu'on n'a pas nécessairement le temps de le développer
au complet, mais actuellement, pour devenir président du Conseil
interprofessionnel du Québec, il faut être un des représentants assis autour de
la table lors de l'élection. Et en même
temps, une fois que l'élection est faite, il y a un principe où la personne
devient dégagée et neutre par rapport
à son ordre d'origine. Tout ce qu'on a soulevé, c'est que, si on veut augmenter
au maximum la neutralité, justement, du
président ou de la présidente, on dit que l'obligation d'être un des
représentants de l'ordre, donc d'avoir l'assentiment de son ordre
d'origine pour avoir le droit de se présenter, puisque ça veut dire que le
président de l'ordre se lève symboliquement,
et c'est la personne candidate qui prend cette chaise-là... Mais, si l'ordre
refuse, bien, la personne ne peut pas
être candidate. Et toujours, on s'entend bien, hein, c'est des règles de bonne
gouvernance. Je ne soulève pas que ça soit
arrivé, et j'espère que ça n'est jamais arrivé, mais on sait qu'à ce moment-là
ce qui pourrait, supposons, se passer, c'est qu'un ordre ou un président pourrait dire à un membre de son ordre
intéressé à devenir président : Bien, on va appuyer ta candidature,
donc on va te permettre de te présenter, à condition de. Donc, c'est
strictement pour dire : Si on veut être certains d'une neutralité de la
personne, bien, l'obligation d'être un représentant ne devrait pas être là.
Et, en plus, on a soulevé, dans le mémoire,
qu'on reconnaît que les règles... le projet de loi prévoit que ça soit les règles des membres et du CIQ qui encadrent le
processus d'élection. Donc, on pourrait penser à une formule, supposons,
où un candidat devrait avoir trois signatures de trois ordres différents,
incluant ou non son ordre d'origine, ça serait un choix, mais ce n'est plus une obligation, et c'est là qu'on disait
que ça devient un certain droit de veto, à ce moment-là, qui nous semble
potentiellement problématique, et c'est tout.
Mme Vallée : Merci. Vous avez
aussi émis une certaine préoccupation à l'égard du cumul des fonctions. Le
projet de loi prévoit la possibilité de cumuler des postes de secrétaire, de
directeur général, mais je pense que vous aviez
quelques inquiétudes à cet effet-là, pour permettre de mieux gérer la situation
et de mieux encadrer. Mais vous aviez quand
même des préoccupations à l'égard du cumul des fonctions de président et de
directeur général. J'aimerais vous entendre.
Parce que je vous dirais qu'au sein des ordres c'est partagé. Certains nous
disent : Non, il n'y a pas d'enjeu, vous ne devriez pas séparer,
distinguer ces deux fonctions-là. D'autres formulent une préoccupation. Donc,
évidemment, j'aimerais vous entendre, parce que c'est quand même une question
qui a été abordée au cours des consultations.
M. Leclerc (Denis) : Je veux juste
repréciser, d'entrée de jeu... Parce qu'au début de votre question vous souleviez qu'on pouvait avoir des inquiétudes sur
le cumul de postes de directeur général et secrétaire. Là-dessus, on n'a
aucune préoccupation. Ça, ça va.
Mme Vallée : Je voulais juste
vous rassurer là-dessus, sur la possibilité de cumuler ces fonctions-là.
M. Leclerc
(Denis) : C'est ça. O.K.
Donc, ça, ça va. Effectivement, le poste de président et de directeur
général nous semble des postes incompatibles
principalement pour la bonne gouvernance de l'ordre et du conseil
d'administration. On considère que le conseil d'administration doit être en
mesure d'engager un directeur général en fonction de ses compétences, et ainsi de suite, et non en fonction
d'une élection. Il doit être en mesure de faire son évaluation. Il doit
être en mesure également d'avoir un certain
détachement entre la permanence, les opérations et la gouvernance. Donc,
quand le président, qui est responsable de la gouvernance, est la même personne
que le directeur général, qui est responsable de l'ensemble opérations, ça nous
semble être une mesure qui n'est pas compatible.
Donc, ce
qu'on a fait, ce qu'on a dit tout simplement, c'est qu'on est en accord avec
cette situation-là. On a ajouté, d'entrée de jeu : honnêtement, on
ne pense pas que ce soit une nécessité d'inclure le poste du directeur général
au Code des professions en fonction du rôle
du directeur général, mais c'est une nécessité pragmatique, puisque, si on
veut pouvoir dire que
le président ne peut pas jumeler... cumuler le poste de directeur général...
Bien, si le poste de directeur général
n'est pas nommé, n'est pas défini dans le Code des professions, on interdit le
cumul avec quoi? Donc, c'est une position plus de pragmatisme que de
l'inclure. Mais c'est un peu ça.
Mme Vallée :
Merci. Pour la question de l'admission aux professions, la question qui tue, je
vous dirais, je pense que c'est quand
même le coeur des enjeux formulés par les ordres, vous faites référence dans votre mémoire
au fait que 95 % des demandes d'admission des candidats qui sont
issus de l'immigration sont reçues favorablement par les ordres. En fait, il s'agit des demandes qui sont
acceptées en totalité ou partiellement. De ce 95 % là, est-ce que vous
avez une idée du nombre des demandes qui sont acceptées mais partiellement?
M. Leclerc
(Denis) : Nous n'avons pas
une idée sur cette situation-là, Mme la ministre, puisque cette réalité-là,
comme nous le précisons autant dans ma présentation que dans le mémoire, est
très... est quand même loin de notre réalité. Et nous convenons avoir pris les
chiffres tels qu'ils étaient, mais on n'est pas allés beaucoup plus loin dans
l'analyse telle que vous la faites.
Mme Vallée :
Mais ces demandes qui sont acceptées partiellement, ce sont quand même des
demandes qui vont entraîner une prescription de la part de l'ordre
professionnel, n'est-ce pas?
Mme Auger(Dominique) :
Dominique Auger, directrice générale de l'ordre.
Moi, je peux
répondre... je ne peux pas répondre par rapport au 95 % dans l'ensemble du
système professionnel, mais je peux
répondre à la question spécifiquement par rapport à notre ordre. Si on regarde
au cours de la dernière année, dans les demandeurs qui étaient du
Québec, on a eu 37 demandes qui ont été traitées, qui ont été analysées en
cours d'année, parmi...
M. Leclerc (Denis) : Par
équivalence.
Mme Auger
(Dominique) : Par équivalence, là, pas toutes nos demandes
d'admission, là, mais des demandes d'admission par équivalence. Parmi
ces 37 là, il y en a trois qui ont été acceptées en totalité puis il y en a 31
qui ont été acceptées en partie. Ça, c'est
pour des gens qui sont des gens formés au Québec mais dans un parcours de
formation atypique, qui n'est pas la maîtrise en psychoéducation. Au cours de
la même année, on a eu cinq... quatre demandes qu'on a analysées, qui sont en provenance de gens qui viennent d'en
dehors du Canada et qui faisaient aussi une demande de reconnaissance de la formation qu'ils avaient
acquise à l'étranger. Parmi ces quatre personnes, ces quatre
candidats-là, il n'y a eu aucune personne que la demande a été acceptée en
totalité et deux personnes que la demande a été acceptée en partie.
Mme Vallée :
O.K. Donc, évidemment, les candidats dont les demandes sont acceptées en
totalité, ça ne pose pas de problème,
ce n'est pas eux qui vont cogner à la porte d'une instance. Mais, pour les
candidats dont les demandes sont acceptées
en partie, évidemment il y a des enjeux, il y a potentiellement des enjeux à
vérifier et il y a potentiellement ce besoin
de cogner à une porte. Au sein de ces personnes-là, il y en a qui abandonnent
le processus. Est-ce que vous croyez que
ce ne soit que la disponibilité des places de stage qui est la cause des
abandons ou est-ce qu'il y a d'autres facteurs? Par exemple, au sein de
votre ordre, pour ceux qui ont un processus à suivre, quelles seraient les
causes d'abandon en cours de route?
Mme Auger (Dominique) : Donc, les
causes d'abandon peuvent être diverses. Nous, on n'a pas tellement de
difficulté avec la possibilité pour les gens de trouver des stages. De ce
côté-là, ça va relativement bien. Parfois, pour certaines formations, ça peut être un petit peu plus difficile. Donc, ça
pourrait être une cause d'abandon. Des fois, il y a des causes d'abandon
qui appartiennent aussi carrément aux candidats, là. Les gens arrivent, sont en
recherche d'emploi, peuvent avoir différentes avenues, font la demande chez
nous... Ça arrive des fois qu'il y a des gens qui peuvent faire la demande chez nous, puis ils ont peut-être fait
une demande de reconnaissance dans d'autres ordres aussi. Donc, il y a
des gens qui, pour des raisons personnelles aussi, peuvent décider d'arrêter le
processus.
Mme Vallée :
Vous admettez... En fait, dans votre mémoire, vous êtes pour une certaine forme
d'élargissement du pouvoir des commissaires,
mais pour le processus d'admission par équivalence, donc pas aussi largement
que le prévoit le projet de loi mais au niveau du processus d'admission
par équivalence. Pourriez-vous élaborer davantage sur cette position-là? Parce
que ce n'est pas... Au sein du CIQ, on ne sent pas... On s'objecte à
l'élargissement du pouvoir du commissaire,
mais certains s'objectent, et d'autres dont votre ordre avez quand même...
reconnaissez qu'il y a quand même un
certain bout de chemin additionnel qui devrait être fait, et j'aimerais vous
entendre sur ce bout de chemin additionnel là.
• (20 heures) •
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup. Pour les quelques instants qu'il reste. Par la suite, vous aurez l'occasion
d'étayer vos réponses avec les échanges avec les autres collègues. Oui, M.
Leclerc.
M. Leclerc (Denis) : D'accord. Je vais essayer de... On parle d'abord
de notre réalité, évidemment, comme chacun. Nous, nous demeurons soucieux de... puis contre, dans le fond, l'extension de... à l'ensemble du processus d'admission. Mais, au niveau du processus d'admission par
équivalence, Mme Auger soulevait qu'on se retrouve avec des demandes que
nos comités d'admission vont analyser, certaines en
provenance de candidats provenant de l'étranger, d'autres en provenance du Québec, dans des parcours
atypiques qui... et certains ont une base de formation en psychoéducation
qu'ils n'ont pas complétée jusqu'à la maîtrise. Bon...
Le
Président (M. Tanguay) :
Merci beaucoup. Je vais maintenant passer au bloc qui est dévolu à l'opposition officielle en cédant la parole
à notre collègue de Chicoutimi, et pour une période de neuf minutes. Vous aurez
l'occasion, M. Leclerc et Mme Auger, d'étayer vos réponses dans ce contexte.
Alors, la parole est à la collègue de Chicoutimi.
Mme Jean :
Merci. Alors, bonsoir, M. Leclerc, Mme Auger. Bienvenue à l'Assemblée nationale
et merci de participer à l'exercice de l'étude du projet de loi n° 98 et
de partager avec nous vos commentaires et vos suggestions.
Je
vais continuer à... Je vais parler du commissaire. Moi, je comprends, dans
votre mémoire, que, le commissaire tel que présenté, selon vous, ce
n'est pas justifiable, il n'y a pas de justification qui explique pourquoi on
étendrait les pouvoirs du commissaire aux plaintes, actuellement, que votre
conséquence est qu'il y aurait une bureaucratie qui s'ajouterait, une
problématique de reddition de comptes, ça coûterait plus cher, et vous en
concluez en disant que ça n'augmenterait pas la protection du public, qui est
l'objectif des ordres.
Par
contre, au niveau de l'admission, il y a un exercice qui est fait pour pouvoir
justement... ce que le... l'objectif de l'article est de démontrer ou de
s'assurer de l'équité des systèmes d'équivalence et/ou des systèmes
d'admission. Selon vous, est-ce que c'est
quelque chose d'utile? Lorsqu'on parle, par exemple, de ce côté-là d'équité,
est-ce que ça permettrait, justement,
de faire une analyse que les admissions sont traitées de façon équitable,
quelles qu'elles soient ou quelle que soit la provenance de la demande?
M. Leclerc (Denis) : Bien, dans le fond, ça va un petit peu dans le même sens,
effectivement, que la question de la ministre. Nous, nous considérons
que le processus d'admission par équivalence, qui est celui qu'on rencontre
avec un certain nombre de candidats... Ce qu'on réalise, c'est qu'il y a
différentes étapes, différents recours, et, selon les recours, les demandes, les formulaires, l'inscription, ce sont les
mêmes. Ensuite, le droit de se faire entendre, c'est le même. Le droit de demander, supposons, une audition au
comité exécutif si on est insatisfait des exigences, c'est le même. Tout
ce qu'on constate, c'est que, si la
personne, le demandeur est quelqu'un qui provient de l'étranger et qu'au bout du
processus il a une insatisfaction il existe
la possibilité de porter plainte au commissaire aux plaintes
actuel. Le demandeur qui a fait le même processus en parallèle mais
provient d'une formation atypique, de toutes sortes de manières, mais faite au Québec,
lui, cette dernière alternative là n'est pas possible. Alors, nous pensons qu'il y a
un souci d'équité, une pertinence d'équité, à ce titre-là, pour
l'admission par équivalence.
Pour ce qui est de
l'ensemble du processus d'admission, nous nous joignons à l'ensemble des ordres
qui ont considéré que les pouvoirs sont trop
vastes et, comme vous l'avez soulevé, qu'ils vont apporter, notamment
pour des ordres comme les nôtres, une pression notamment financière et
une reddition de comptes qui est indue, selon nous, qui est non justifiée. Et on revient à dire que, selon
nous, encore une fois, sans avoir analysé tous les enjeux d'une option,
ou d'une autre, ou d'une autre, de façon globale on pense que la solution, elle
demeure... elle devient au niveau de la concertation entre les acteurs
potentiels. On pense que beaucoup d'éléments que le commissaire irait vérifier,
ils sont connus, ils sont notamment connus par nous, les ordres, les
46 ordres, avec leurs réalités, et, de faire le point avec ces
personnes-là qui connaissent la réalité, avec les acteurs qui ont le pouvoir de
faire changer les choses, notamment les différents
ministères, on pense que ça, ça va être beaucoup
plus porteur que d'essayer, encore
une fois, d'identifier les coupables et les problèmes, qui sont connus, et
tout ça dans un contexte très vaste, avec des pouvoirs très larges
qu'on... On n'a pas le sentiment que c'est la solution.
Mme
Jean : Donc, en conclusion, le commissaire à l'admission, tel que présenté dans le projet de loi actuellement, le pouvoir est extrêmement large, et ça
devient inquiétant, ce grand pouvoir là. S'il était encadré pour pouvoir augmenter son pouvoir, actuellement, mais que ce soit dans un encadrement
d'équivalence, vous seriez beaucoup plus confortables.
M. Leclerc (Denis) : Pour les candidats à l'admission par l'équivalence. Pour nous, on pense
que... D'ailleurs, on dit : Une
option pourrait être de parler du commissaire aux plaintes... aux admissions
par équivalence, donc, et non pas aux admissions de façon générale.
Mme Jean :
Parfait, merci. Pour ce qui est de la concertation, je comprends que vous êtes
d'accord à ce qu'il existe une plateforme de
concertation pour pouvoir coordonner les actions qu'on a à prendre lorsqu'une
problématique a été soulevée. Il y a un pôle
de concertation... de coordination qui existe actuellement, dont l'efficacité
ne semble pas très élevée. Il y a une
nouvelle formule qui est proposée dans la loi, qui s'appellerait, encore une
fois, un pôle de coordination. Vous semblez... ou, ce que j'ai compris
dans votre mémoire, vous, vous n'êtes pas... Vous êtes d'accord avec un pôle de
coordination mais plus sous la forme du comité intersectoriel, qui est proposé
par le comité interprofessionnel.
M. Leclerc (Denis) : En fait, madame, ce que nous soulevons, c'est que la cible, pour nous,
c'est d'essayer de trouver une structure qui va être la meilleure pour
favoriser la concertation, et on se dit : Est-ce que ce serait le pôle de concertation? Pour être bien honnête, on n'a
pas pu analyser suffisamment l'ensemble de ce mandat-là, d'autant plus
que, on vous l'a expliqué, notre réalité des
admissions nous amène peu à connaître cet organisme-là. Donc, on ouvre
simplement la porte à dire : Peut-être
que ce serait une bonne instance, peut-être que le comité interministériel du
MIDI, soulevé par le CIQ, pourrait être une bonne instance. Mais notre
principale recommandation, si on peut dire, c'est de miser sur la concertation
plutôt que sur une structure bien précise.
Mme
Auger (Dominique) : J'ajouterais aussi... Dominique Auger, la
directrice générale.
J'ajouterais
qu'il y a aussi... que ce soit le pôle ou que ce soit le comité du MIDI, à
quelque part dans le projet de loi,
tel qu'il est actuellement présenté, il y a vraiment un risque de duplication
des rôles, là. Quand on regarde ça, il y a possibilité que le commissaire aux admissions fasse des recommandations
au ministère de la Santé, mais le pôle peut, dans son rapport, faire des recommandations qui touchent aussi le
ministère de la Santé. L'office peut faire des recommandations aux mêmes organismes, le comité du MIDI peut,
possiblement. Donc, on se dit : À un moment donné, si tout le monde fait des recommandations, est-ce que
ça va tout aller dans le même sens? Est-ce que ça va vraiment favoriser l'action, au fond, pour que les problèmes qui
existent, d'admission aux professions, qui existent vraiment, se règlent?
Nous, ça nous semble un petit danger à ce niveau-là.
Mme
Jean : Question rapide. Vous avez des gens qui font des demandes et
vous dites qu'il y a des acceptations partielles.
Et ces gens-là vont se retrouver à avoir besoin de la formation ou d'avoir des
stages. Et vous ne semblez pas avoir
de problématique à ce niveau-là, pour trouver des stages à tout votre monde.
Est-ce qu'il y a une particularité? Est-ce qu'il y a un financement spécial? Parce qu'en général on s'aperçoit...
ou ce qu'on a comme témoignages des autres ordres, ils se retrouvent
avec des problématiques assez importantes à ce niveau-là. Si vous, vous n'en
avez pas, avez-vous un partage de solution à partager avec nous?
Mme
Auger (Dominique) : Je ne suis pas certaine qu'on a la solution pour
l'ensemble des ordres qui peuvent être touchés
par des problématiques comme ça. La quantité... Nous, le nombre... Comme je
vous disais tantôt, le nombre est quand même beaucoup moins grand que
dans d'autres ordres professionnels.
Peut-être pour
partager le fonctionnement, nous, par rapport aux stages, le fonctionnement,
c'est que, les candidats à l'admission, on a
une banque de superviseurs, qui sont des gens qui sont membres de l'ordre et qui
sont en mesure de faire de la
supervision, puis on propose aux candidats de travailler avec un de ces
superviseurs-là. Puis, à ce moment-là, le financement... Nous, on paie
le superviseur, mais le candidat à l'admission rembourse l'ordre. Donc, c'est
le fonctionnement.
Puis,
comme ça, je vous dirais qu'au niveau des stages on a peu de problématiques,
parce que c'est vraiment une approche individualisée, où la personne
travaille avec un superviseur, puis, au fond, c'est le candidat qui assume le
paiement de la supervision qu'il doit recevoir.
Puis,
pour les cours, en général on n'a pas de difficulté. Parfois, ça peut être un
petit peu plus difficile parce que des cours,
ça implique souvent un apprentissage de groupe. Mais, en général, ce n'est pas
des problématiques majeures au sein de notre ordre.
Mme
Jean : Parfait. Il me reste 20 secondes, donc je veux vous
remercier pour les réponses. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Maintenant, pour un bloc
d'échange de six minutes, je cède la parole à notre collègue de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Leclerc, Mme Auger, bonjour. Merci pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Au niveau des membres, pour vous, au niveau de l'ordre professionnel, vous
souhaitez que la cotisation, maintenant, aille... bien, en fait, soit
déterminée par le conseil d'administration. C'est ça?
• (20 h 10) •
M. Leclerc (Denis) : En fait, nous endossons la proposition que ce soit le cas. Comme plusieurs ordres, on se retrouve parfois dans une situation
un peu problématique, où on a à justifier aux membres une augmentation de cotisation qui nous semble
essentielle pour la protection du public, et en même temps ces mêmes membres là
ont le pouvoir de dire oui ou non, et
ça peut nous sembler parfois problématique. En même temps, on souligne que ça peut avoir
l'air d'un processus démocratique, mais on n'est pas tout à fait dans un
concept d'association, mais bien à un ordre professionnel qui est voué à la protection du public, et ce n'est pas le public à qui on peut demander
s'ils acceptent ou non l'augmentation
de la cotisation, mais nos membres, et, à ce
titre-là, bien, on endosse la proposition. Ceci dit, on n'a pas milité en faveur au
départ, mais elle est proposée, et on pense
qu'elle pourra être aidante parfois pour s'assurer qu'on puisse adéquatement
remplir notre mission de protection du public.
M.
Jolin-Barrette : Au niveau du directeur général, vous soulignez :
Écoutez, si on va vers une majorité des deux tiers pour le destituer, ça
pourrait avoir... soulever une certaine problématique, parce que vous avez un conseil
d'administration qui est majoritaire, qui souhaite le départ du directeur
général, et là on se retrouverait, en fait, dans une situation cul-de-sac, un peu, où la majorité du conseil
d'administration souhaite le départ du D.G., et là on ne peut pas parce
qu'on n'obtient pas le deux tiers. Dans le fond, c'est la réalité que vous
soumettez, là.
M. Leclerc
(Denis) : Ce qu'on soumet, tout à fait, c'est qu'on considère qu'un directeur
général, sans avoir totalement l'unanimité du conseil d'administration, doit
avoir l'appui du conseil d'administration au moins dans sa majorité. Et on a de
la misère à concevoir qu'un directeur général, supposons, aurait 60 % des
membres du conseil d'administration qui souhaiteraient son départ, mais on
n'atteint pas tout à fait le deux tiers et, à ce moment-là, on se dit : Là, on est dans un cul-de-sac au niveau
organisationnel, on considère qu'on va être contre-productifs. On
comprend la nécessité du deux tiers pour le
syndic et pour le secrétaire, qui ont... ils doivent avoir une indépendance,
puisqu'ils peuvent avoir un impact
soit au niveau des enquêtes soit au niveau de l'organisation des élections avec
le conseil d'administration, et, à ce
titre-là, le deux tiers est une sécurité importante, qui nous semble même
inappropriée pour le directeur général.
M. Jolin-Barrette : Au niveau de votre recommandation 6,
pouvez-vous nous en parler? Ça semble intéressant, vous parlez d'une procédure d'évaluation de la
performance du conseil d'administration. En quoi ça consisterait, là,
cette évaluation de la performance?
M. Leclerc
(Denis) : Si je peux vous l'illustrer, nous avons mis en place une
telle procédure chez nous, et on considère,
comme président du conseil d'administration, et en concertation avec les
membres du conseil d'administration et
du comité de gouvernance, et en regardant l'ensemble des écrits, et tout ça,
sur la gouvernance... beaucoup vont suggérer la nécessité de mettre une évaluation. C'est sûr que ça va être
différent du conseil d'administration d'une banque versus un ordre, on va en convenir, mais, malgré tout, le
fait de regarder, de faire... d'avoir un regard sur la performance du
conseil nous semble important.
Nous,
on le fait sous quatre formules : une évaluation à la fin de chacune des
séances, sur laquelle on revient à la séance
suivante; une évaluation annuelle de la performance générale du conseil
d'administration; une évaluation annuelle de la performance du président, qui, elle, est anonyme; et une évaluation
annuelle... une autoévaluation annuelle qui permet une rétroaction avec chaque membre du conseil
d'administration sur sa contribution, sur l'efficacité qu'on peut avoir au
niveau du conseil d'administration. Et je
peux vous dire que ça a été très positif et pas de... on ne se déchire pas la
chemise, quoi que ce soit, mais très
constructif, et ça nous permet de constamment s'améliorer. Et ça se vit très,
très bien chez nous, et on pense que c'est des règles de bonne
gouvernance qui devraient être en place, tout comme un code d'éthique, ou autre chose. Donc, c'est pour ça qu'on ajoute cet
élément-là qu'il nous semblerait pertinent d'ajouter au rôle du
président, non pas que c'est lui qui évalue, mais bien il est responsable de
mettre en place un processus.
M. Jolin-Barrette : Puis ça fait combien de temps que vous utilisez
cette technique-là pour le conseil d'administration?
M. Leclerc
(Denis) : Nous, ça fait déjà deux ans.
M. Jolin-Barrette : Puis vous avez décidé de l'instaurer parce que vous aviez vu ça dans un
autre ordre ou vous avez pris vous-mêmes l'initiative d'instaurer ce
type d'évaluation là?
M. Leclerc
(Denis) : Comme président...
M.
Jolin-Barrette : D'où l'idée vous est venue?
M. Leclerc
(Denis) : Pardon? Excusez.
M.
Jolin-Barrette : D'où l'idée vous est venue?
M. Leclerc
(Denis) : Comme président, je suis élu... je suis en poste depuis
trois ans et demi, et c'est un des premiers
éléments que j'ai mis... que j'ai priorisé, c'est-à-dire la gouvernance. On a
eu une formation sur la gouvernance des
ordres professionnels pour l'ensemble du conseil d'administration. C'était une
des choses qui étaient soulevées. On a confié
l'analyse de ce processus-là à notre comité de gouvernance. Et c'est pour ça que ça fait deux ans, parce qu'on l'a commencé au tout début,
mais le temps de le mettre en place... C'est venu de moi un peu, mais des
membres puis de plusieurs autres sources qui ont apporté cette idée.
M.
Jolin-Barrette : O.K. À la recommandation 10, vous dites :
On doit avoir des... inclure dans le code de déontologie des termes qui
correspondent à la réalité professionnelle. Qu'est-ce que vous voulez dire par
là?
M. Leclerc (Denis) : Le projet de loi n° 98 propose de cibler des problèmes
particuliers au niveau des codes de déontologie des membres. Et
on y souscrit. Là où on a été un peu surpris, c'est avec l'obligation
d'utiliser des termes bien précis, tels que
«collusion», «corruption», je ne me souviens plus des autres exactement,
mais des termes qui se réfèrent beaucoup à des professionnels qui
seraient dans un contexte d'entreprise privée, et très lucratif, et tout ça.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci...
M. Leclerc
(Denis) : On a plus de 85 % de nos membres qui sont dans la
fonction publique. Et on a besoin d'avoir un
code de déontologie qui soit parlant pour eux. On n'est pas du tout contre. Si
on nous oblige à les mettre, on va les
mettre. Tout ce qu'on dit, c'est : En faisant ça, on diminue la portée,
puis la pertinence, puis le sens de notre code de déontologie, alors que, supposons, nous, on va
parler d'une proximité entre... une proximité à proscrire entre le
professionnel et son client, puis tout ça, réalités qui vont être bien
différentes pour un architecte ou un psychoéducateur, vous en conviendrez.
Donc, un code de déontologie doit aussi correspondre à la réalité de sa
profession.
Le Président (M.
Tanguay) : Je vous remercie beaucoup. Alors, là se terminent les
échanges. Alors, merci aux représentante et représentant de l'Ordre des
psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec.
Je suspends nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 17)
(Reprise à 20 h 20)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous poursuivons nos travaux et nous
accueillons les représentantes, représentants de l'Ordre des psychologues du Québec.
Bienvenue à votre Assemblée nationale du Québec. Vous disposez d'une période de 10 minutes
de présentation. Par la suite, vous aurez l'occasion d'échanger avec les
parlementaires. Pour les fins d'enregistrement, je vous prierais de bien
préciser vos noms et fonctions. Alors, la parole est à vous.
Ordre des psychologues
du Québec (OPQ)
Mme Grou
(Christine) : M. le Président,
Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, M. le président de l'office, je suis Christine Grou, présidente de l'Ordre des psychologues
du Québec, et je suis accompagnée, à ma droite, par M. Stéphane Beaulieu, secrétaire général de l'ordre, et, à ma gauche, par Me Édith Lorquet, responsable directrice
des affaires juridiques de l'Ordre des psychologues.
D'abord, je
voudrais remercier les membres de la Commission des institutions de nous donner l'occasion de nous faire entendre sur le projet de loi n° 98, qui porte
essentiellement sur l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel. Je tiens à souligner
d'entrée de jeu que l'Ordre des psychologues du Québec reconnaît le
travail accompli par l'Office des
professions pour améliorer le cadre législatif du système professionnel. Le
p.l. n° 98, c'est le résultat
d'une longue réflexion à laquelle nous avons pris part au cours des années, et
nous saluons les efforts qui ont été consentis à ce projet.
Maintenant, écoutez, moi, je suis
neuropsychologue, puis, en neuropsychologie, quand un patient vient nous voir puis qu'on fait un bilan auprès de lui, on a
l'habitude de lui dire : Écoutez, vous venez me voir parce qu'il y a
quelque chose qui ne va pas, mais il y a un
ensemble de fonctions qui vont bien, et moi, je vais vous parler uniquement des
choses qui vont moins bien, et c'est la
raison pour laquelle vous venez me voir. Donc, c'est ce que je ferai ici, alors
je vais passer sous silence tout ce
qui va et tout ce qu'on salue comme efforts, pour me concentrer sur trois aspects, ce soir, qui nous posent problème et qui sont : les pouvoirs accrus de l'Office des professions, l'admission aux
professions réglementées et la gouvernance des ordres professionnels.
Au regard de
ces trois éléments, l'Ordre des psychologues adresse quatre questions
fondamentales. Premièrement, est-ce
que la réforme proposée est proportionnelle à des problématiques réelles et
généralisées qui ont été rencontrées? Deuxièmement,
est-ce que cette réforme est nécessaire dans sa forme? Troisièmement, est-ce
que la réforme proposée sera efficace? Et, quatrièmement, est-ce que le
rapport coût-bénéfice a été adéquatement estimé?
Alors, au regard des pouvoirs accrus de
l'office, d'abord les pouvoirs d'enquête de l'Office des professions. Écoutez, actuellement, l'office doit obtenir
l'autorisation de la ministre pour faire enquête sur les pratiques d'un
ordre professionnel, et le projet de loi propose d'abolir cette autorisation.
Nous questionnons cette abolition possible et l'Ordre
des psychologues se demande en quoi le fait d'avoir recours à l'autorisation de
la ministre a posé problème en soi par le passé. Est-ce qu'il y a eu des
refus d'autorisation qui ont compromis le travail de l'office ou la protection
du public? Est-ce qu'il y a eu des cas où
les délais causés par l'autorisation requise ont été préjudiciables? Est-ce que
ça a été, par le passé, un facteur
d'inefficacité? En contrepartie, le fait de faire enquête sur les pratiques
d'un ordre professionnel, c'est une
action sérieuse qui a des répercussions importantes. Et nous sommes d'avis que
le recours transparent à cette autorisation, qui permettrait de préciser
les motifs qui justifient l'enquête, demeure important.
Au regard des normes d'éthique applicables aux
administrateurs. L'Ordre des psychologues est totalement en faveur de l'imposition d'un code d'éthique à ses
administrateurs. Et notre ordre s'est d'ailleurs doté d'un code de
conduite pour ses administrateurs en 2011. L'ordre a conséquemment constitué de
son propre chef un comité de gouvernance en
2014 et nous avons été accompagnés par un conseiller externe en gouvernance.
Par ailleurs, l'Ordre des psychologues est
en désaccord avec le fait de s'en voir imposer le contenu. Si les ordres sont
capables de réfléchir et d'élaborer des codes d'éthique pour encadrer les pratiques de leurs membres, de l'avis de
l'Ordre des psychologues, ils sont aussi capables d'élaborer des codes de conduite pour leurs
administrateurs. Nous, à l'Ordre des psychologues du Québec, sommes
d'avis qu'il vaut infiniment mieux inciter les gens à réfléchir à leurs
pratiques, tout en leur fournissant certaines balises au besoin, que de leur prescrire un cadre strict de
quoi faire ou ne pas faire, ce qui risque plutôt d'empêcher cette
réflexion éthique qui nous semble
indispensable à une saine gouvernance. Le règlement de l'ordre devra toujours
être approuvé par l'office de toute façon et sera toujours soumis aux
modifications demandées.
Deuxièmement, au regard de l'admission aux
professions réglementées pour les personnes formées hors Québec. Alors, écoutez, le projet de loi vise à
élargir les pouvoirs du commissaire pour lui permettre d'examiner
l'ensemble des processus appliqués par les
ordres. Nous sommes d'avis que le
processus est déjà très bien réglementé et très bien balisé
par un règlement d'équivalence. Ce règlement est avalisé par l'Office des
professions. Ce règlement nous permet d'appliquer
la règle de l'équité et nous assure que le processus comporte des exigences
égales pour tous les candidats, qu'ils proviennent
du Québec ou d'à l'extérieur du Québec.
Les décisions sont sujettes à révision. Et finalement, à l'Ordre
des psychologues, il y a,
sur 75 demandes que nous recevons environ annuellement, 3 % des
demandes qui sont refusées, et qui le
sont pour les bonnes raisons, c'est-à-dire que les demandeurs ne rencontrent
pas les qualifications requises, et ceci ne pourrait être compensé par
un programme de formation d'appoint.
Le projet de loi veut élargir les pouvoirs du commissaire à l'obtention de l'ensemble
des permis. Il y a
46 ordres professionnels et
54 professions, il y a donc une diversité de permis et de champs
d'exercice. Nous considérons que cela demande
une quantité de ressources compétentes qui sont actuellement au sein des
ordres et que les ordres détiennent l'expertise
en matière de champ d'exercice et d'activité réservé à leurs
membres. Les ordres sont non
seulement compétents, mais surveillés par l'office et par la ministre responsable de
l'application des lois professionnelles, et rendent des comptes à ces deux instances. De l'avis de l'Ordre des
psychologues du Québec, si des pouvoirs accrus sont dévolus au
commissaire, cela risque d'engendrer des
coûts importants pour les ordres sans nécessairement
répondre à une problématique
probante et sans nécessairement augmenter la protection du public.
Au regard de
la gouvernance des ordres et de la composition du conseil d'administration. L'Ordre des psychologues est tout à fait d'avis qu'il doit réfléchir à la composition de
son conseil d'administration. Toutefois, l'Ordre des
psychologues est d'avis qu'il doit conserver l'autonomie de sa réflexion au
sein de sa gouvernance et considère qu'il est le mieux placé pour déterminer de façon éclairée la composition qui
lui donne la compétence requise, compte
tenu de l'ensemble... de la diversité de nos
pratiques, de la diversité de nos clientèles, de la diversité des milieux, de
la diversité des contextes de pratique de nos membres et d'un ensemble
de cadres conceptuels.
Au regard des
cumuls des fonctions de président et directeur général. L'Ordre des
psychologues du Québec est contre
l'imposition d'un modèle unique pour plusieurs raisons. D'abord, il ne tient
pas compte des particularités et de la culture
organisationnelle de chacun des ordres. Mais surtout, de notre avis, il ne
constitue nullement une garantie d'une gestion
plus saine ni d'une meilleure gouvernance. Au contraire, l'histoire nous démontre
que certains ordres dotés d'une direction générale ont pu traverser des
crises importantes.
Et l'histoire nous démontre aussi que l'Ordre
des psychologues a joué un rôle important dans l'élaboration et l'implantation
du projet de loi qui a réformé le Code des professions dans les secteurs de la
santé mentale et des relations humaines. Ce
projet de loi a permis de mieux définir les différents champs d'exercice et de
réserver certaines activités,
notamment l'activité de la psychothérapie, par exemple. Ce projet de loi a
contribué significativement à une protection
accrue du public, et l'Ordre des psychologues est d'avis que cela n'aurait
jamais été possible si la présidente, Mme
Rose-Marie Charest, n'avait pu avoir un regard sur les opérations. L'ordre est
convaincu que le fait de cumuler les fonctions
politique et opérationnelle a permis de mener à bien le projet et est convaincu
que le fait de limiter ses mandats, à l'époque, n'aurait pas permis le
déploiement d'un tel projet.
Aussi, si un problème survient en raison du
cumul des fonctions, l'office et le gouvernement ont les leviers pour
intervenir.
Au regard de la fonction de la présidence.
L'ordre tient à souligner la contradiction dans le fait de retirer au président son rôle de surveillance générale des
affaires de l'ordre tout en lui laissant le pouvoir et la responsabilité
d'intervenir auprès de tout employé, le cas
échéant. L'Ordre des psychologues est d'avis que le président doit
conserver son rôle de surveillance générale
des affaires de l'ordre. Et, puisque dans la réforme proposée le président
deviendrait responsable du fonctionnement du conseil d'administration et
demeure représentant de celui-ci au sein de l'ordre, puisque le conseil d'administration deviendrait le responsable des
affaires de l'ordre, doit-on comprendre que le président demeurerait
investi du pouvoir de surveillance des affaires de l'ordre par délégation, de
toute façon?
En résumé,
l'Ordre des psychologues du Québec salue les initiatives d'amélioration du
système professionnel et est
totalement en faveur de la promotion d'une gouvernance éthique, s'oppose à
l'imposition d'un modèle de gouvernance unique, réitère qu'un modèle unique ne garantit en rien une meilleure
protection du public, s'oppose à l'imposition d'un code d'éthique ou de déontologie des
administrateurs prescrit par l'office, réitère que les balises existantes
soutiennent les administrateurs dans leurs
réflexions et leurs conduites, questionne les fondements de telles
modifications au Code des professions
et soutient qu'un cadre externe comporte des dangers de dérive tout aussi,
sinon plus importants qu'un cadre issu
d'une réflexion interne effectuée par les personnes concernées sur les valeurs
qui doivent guider leurs réflexions, leurs actions, leurs attitudes et
leurs conduites. Je voudrais vous remercier de votre écoute attentive.
• (20 h 30) •
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup, Mme Grou. Et maintenant, pour une période d'échange de
15 min 30 s, je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Ça nous
amène un certain nombre de
questionnements. D'abord, bon, je comprends votre message à l'effet que vous ne
souhaitez pas de modèle de gouvernance unique. Les positions sont
mitigées au sein des ordres. Certains ordres nous font valoir tout le bien de l'importance... et tout le bien qui peut découler
d'un modèle clair sur lequel chaque ordre pourrait s'inspirer et tout le
bien que peut apporter aussi une réduction du conseil... du nombre
d'administrateurs.
Vous avez
abordé la question du cumul des fonctions de président et de directeur général.
Vous vous êtes fondée sur l'expérience de Mme Charest, notamment, et sur
les enjeux, les grands chantiers sur lesquels elle a été appelée à travailler et à plancher au fil des ans. Moi,
j'aimerais vous entendre, parce qu'on a eu... Encore
une fois, les ordres juste avant vous, l'ordre juste avant vous venait...
nous ont fait une présentation à l'effet contraire. Comment l'ordre a concilié
ce cumul des fonctions là et le fait que, dans le fond, le directeur général
présidait le conseil d'administration et, d'une certaine façon, s'autoévaluait, évaluait sa performance, fixait sa rémunération, fixait les conditions d'embauche? Vous ne croyez pas qu'il puisse y avoir un certain
inconfort dans une situation similaire? Puis comment, au sein de l'ordre, ça
s'est vécu, ces différents... Ces différentes étapes là se sont vécues de
quelle façon?
Mme Grou
(Christine) : Écoutez, je
pense que, dans un modèle où autour de la table il y a 24 administrateurs dont
l'un est la présidence puis dans un modèle de saine gouvernance où la personne
concernée par la question qui lui est propre doit se retirer de la délibération, le problème ne se pose pas. On a un
comité de gouvernance qui réfléchit à ces questions-là, et, dans un contexte où, évidemment... Quand on parle, par exemple, de l'évaluation d'une présidence ou quand on parle de la rémunération de la présidence, bien, elle ne prend pas part au débat. Alors, il y a
des façons au niveau de la gouvernance
pour assurer cette saine gouvernance là. Le conseil d'administration,
c'est 24 individus, ce n'est pas un seul individu.
À
l'inverse, moi, je demanderais : Quelles sont donc les fonctions qu'un
président ne devrait pas faire ou quelles sont les actions qu'il ne devrait pas porter et qui risquent de poser
problème? Et, à cet égard-là, moi, je conçois très bien que le modèle d'une
direction générale soit un bon modèle pour certains ordres. Et je ne dis pas
que ce n'est pas un modèle viable, ce que je dis, c'est que ce n'est pas
une garantie... de l'avis de l'ordre, ce n'est pas une garantie d'une saine gouvernance. Ce qui est une garantie d'une saine
gouvernance, c'est d'avoir une réflexion sur les enjeux de gouvernance.
À l'Ordre des psychologues, il y a six directions. C'est ce comité de direction
qui fait office de direction générale.
Mme Vallée : Comment vous arrivez à concilier le rôle... la
direction générale avec la mise en place de ces comités de direction là? Parce que c'est quand même...
C'est assez unique comme façon de gouverner, comme façon d'organiser les
affaires de l'ordre, et je suis curieuse de vous entendre quant à la façon ou la
cohérence, la facilité d'en arriver à un consensus,
parce que vous êtes quand même un certain nombre d'individus à occuper les
fonctions de direction. Alors, comment
ça se passe chez vous? Puis comment
arrivez-vous à bien gérer les affaires de l'ordre avec un processus qui,
à première vue, peut paraître complexe?
Mme Grou
(Christine) : Actuellement, la façon de fonctionner, c'est que je préside, effectivement, le comité de direction, il y a
six directeurs, six directeurs qui ont des voix fortes et qui délibèrent entre
eux. Et donc on arrive à des décisions consensuelles, et parfois c'est
au terme d'un moment de réflexion et au terme de plusieurs discussions.
Cela dit,
quand Mme Charest a annoncé son départ, le comité de gouvernance s'est repenché sur le modèle et a réfléchi à nouveau le modèle, et, accompagnés d'un expert en gouvernance, ils ont recommandé au conseil
d'administration de l'époque de maintenir le modèle en place. Et le conseil
d'administration qui a fait cette réflexion, qui a fait cette délibération a
maintenu cette décision. Peut-être, M. le secrétaire général a des éléments à
ajouter?
M. Beaulieu(Stéphane) :
Stéphane Beaulieu, secrétaire général de l'ordre.
Bien, en
complément, en fait, c'est qu'il
s'agit, dans le fond, d'organiser le processus de gouvernance. Vous avez
parlé tout à l'heure de... Nous, on dit
qu'il y a un modèle unique qui sera imposé dans cette modification-là à la loi.
Vous avez parlé de modèle clair, je pense
que ce qui est le plus important, c'est la clarté. Notre comité de gouvernance,
depuis quelques années, a établi des
politiques qui sont très claires et qui définissent les rôles et les
responsabilités de chacun, tant du
C.A., du C.E. que du comité de
direction et de la présidente. Les choses sont écrites, elles sont votées par
le conseil d'administration, qui est souverain, qui donne les directives.
Elles sont publiques, chacun sait où commence son pouvoir et où s'arrête
son pouvoir.
Alors, le
fait d'imposer une direction générale, chez nous, avec notre culture, notre
façon de fonctionner, si on est obligés,
on va le faire, bien entendu, mais on voit comment ça a fonctionné pendant
17 ans avec Mme Charest et ce que l'on a accompli avec la réforme
du code en santé mentale et relations humaines, une petite équipe de direction
dont elle était responsable devant le conseil d'administration, très proche des dossiers, très proche des
décisions et éclairée par une équipe
de professionnels. Avec un intermédiaire, je ne vous dis pas que ça n'aurait
pas fonctionné, mais ça a très bien fonctionné
comme ça. Mme Charest se plaisait à dire, en blague à une réunion du Conseil
interprofessionnel récemment, qu'elle
ne croit pas avoir nui tant que ça au système professionnel pendant toutes ces
années-là, et on trouve que c'est un modèle qui est très viable.
Nous avons
des méthodes de contrôle interne qui sont publiques, et qui sont disponibles,
et auxquelles tous les membres de l'ordre peuvent avoir accès, et le
public en général. Il y a un comité de vérification pour s'assurer que nos politiques de comment on dépense l'argent,
comment on va en appel d'offres pour des services... comment tout ça, c'est mis en place et en branle, et est-ce qu'on respecte nos politiques ou pas. On a une politique salariale, on a un
comité de rémunération, qui est un comité indépendant, auquel les employés ne
participent pas lorsqu'il s'agit de déterminer la rémunération des employés.
Il n'y a pas une seule façon de gérer, puis on
ne croit pas que ce soit la solution miracle de dire que ça prend absolument un
directeur général. Et c'est écrit dans plusieurs livres et plusieurs... Il y a plusieurs
spécialistes en gouvernance qui ont plusieurs bonnes solutions pour avoir de bonnes pratiques
de gouvernance, qui sont justes, qui sont équitables, qui sont transparentes. Et nous, on
soutient que, notre modèle, on devrait avoir la possibilité de continuer
ça. On trouve que la loi, c'est une
loi-cadre, et, quand elle va dans ce niveau de détails là, c'est de la microgestion.
Et on pense que les ordres devraient conserver leurs marges de manoeuvre
par rapport à ça.
Mme Vallée : Le modèle actuel, il est en place, est-ce que
j'ai bien compris, depuis 17 ans ou il était en place préalablement
à l'arrivée de Mme Charest au sein de l'équipe?
M.
Beaulieu (Stéphane) : Nous
avons déjà eu un directeur
général et secrétaire — c'était le titre — en même temps, donc, qu'un président à l'époque. Alors, on a déjà eu ça à
l'Ordre des psychologues. Et, comme on a mentionné dans notre mémoire, on a vu des ordres qui fonctionnent
très bien dans un modèle avec président et direction générale séparés,
on a vu des ordres qui fonctionnent
probablement moins bien aussi, qui ont traversé des crises avec des directeurs
généraux. On ne croit pas que ce soit une garantie.
• (20 h 40) •
Mme Vallée :
Au sein de votre conseil d'administration, vous avez une représentation
régionale. Dans les échanges que nous
avons eus, il y a eu des représentations faites à l'effet qu'il ne devrait pas
y avoir de représentation régionale puisque
le conseil d'administration a comme mission première la protection du public et
non pas les représentations... ou la
protection d'une préoccupation régionale formulée par des membres. Ce n'est pas
une représentation des membres. J'aimerais vous entendre sur cet élément. Parce
que vous mentionnez que la représentation régionale, elle «est
enrichissante et nécessaire pour l'Ordre des
psychologues». Alors, qu'est-ce que... comment conciliez-vous ça et l'enjeu de
protection du public? Parce que je comprends que ce n'est pas pour vos membres, cette nécessité, mais bien pour le public que vous devez protéger.
Mme Grou (Christine) : Bien, je vais
répondre à la question, si vous permettez. En fait, la représentation régionale, si elle est nécessaire, c'est justement
pour mieux protéger le public. Puis je vais répondre avec un exemple.
Lors des journées de formation, l'an
dernier, je discutais avec un de nos membres qui travaille dans le Grand Nord
et qui travaille avec une population
inuite, et ce qu'il me disait, c'est : Moi, quand je rentre sur une
réserve, il faut que je me fasse accepter par la famille. Donc, quand je traite un enfant, j'ai le grand-père, la
grand-mère, les parents autour de moi. Donc, on ne conjugue pas de la même façon les enjeux de
confidentialité dans un contexte comme ça. N'eût été de cette
adaptation-là, évidemment, on ne peut pas
offrir le service. Alors, c'est fort utile pour l'ordre de savoir... puis là je
vous donne un exemple un peu extrême,
mais c'est fort utile de savoir quelle est la réalité des pratiques et quelles
sont les réalités populationnelles pour qu'on puisse dispenser les
services adéquatement.
Mme Vallée :
Pour vous, la représentation régionale, elle est tout aussi importante que, par
exemple, certaines compétences que pourraient avoir les membres du
conseil d'administration. Pour vous, c'est tout aussi important d'avoir une représentation régionale au sein du
conseil d'administration que d'avoir des membres autour de la table qui
vont avoir une vision plus gestionnaire, plus... alors, d'avoir des compétences
spécifiques autour de la table.
Mme Grou
(Christine) : Actuellement, au niveau des réflexions du comité de
gouvernance, ce qui est important, c'est
d'avoir une représentation de la réalité des régions. Est-ce que ça veut dire
d'avoir des régions qui sont découpées comme
elles le sont actuellement? La réflexion n'est pas faite. Et c'est
définitivement important pour nous d'avoir une représentation des différentes expertises puis des différents contextes
de pratique. Ce que je vous dis aujourd'hui, c'est que notre réflexion,
cette réflexion-là, elle est à faire, mais nous ne comprenons pas pourquoi nous
n'aurions pas l'autonomie pour la faire. Et nous croyons que nous sommes bien
placés pour la faire.
Mme Vallée :
Vous avez... Et j'ai entendu les commentaires formulés par Mme Charest au CIQ
au mois de mai dernier, je comprends
que vous considérez le projet de loi comme une certaine... un manque de
confiance, un désaveu envers les
ordres, ce qui n'est pas du tout le cas. En fait, ce n'est pas l'objectif. Ce
n'est pas ni mon objectif ni l'objectif du Conseil des ministres, lorsqu'on a donné des orientations nécessaires à
la préparation du projet de loi, mais, comme je le mentionnais à
d'autres ordres, il y a quand même... le responsable, ultimement, du système
professionnel demeure le gouvernement. Et le gouvernement a délégué certains
pouvoirs aux ordres.
Et il y a quand même des enjeux sensibles
lorsqu'il est question d'admission, lorsqu'il est... La question de l'évaluation des dossiers des candidats, par
exemple, à la profession, la décision de délivrer des permis, ce sont des
enjeux importants. Et ce n'est pas parce
qu'il y a eu un statu quo pendant x nombres d'années qu'il n'y a pas lieu de
revoir nos façons de faire, de revoir
un peu le portrait général des ordres professionnels et l'encadrement des
ordres professionnels pour les adapter à notre réalité, pour les
moderniser et amener un nouveau souffle, une nouvelle façon de faire. Et c'est pour ça qu'on est venus... qu'on a élargi le
mandat du commissaire, c'est dans ce souci-là de moderniser tout ça, mais... Parce
qu'actuellement on a un commissaire qui est présent, qui peut évaluer des
candidatures suite à des plaintes, on a
un commissaire aux plaintes, mais son regard ne va pas porter sur des tierces
personnes... des tierces parties, pas des tierces personnes, des tierces parties, qui ont parfois un rôle à jouer
dans l'admission aux professions. En élargissant le pouvoir du commissaire, on lui permet d'avoir un regard aussi
sur le rôle que ces tierces parties peuvent jouer, qui, parfois... Parce
que, vous le savez, on relance la balle. On
a l'impression, avec un regard externe, qu'entre les tierces parties, parfois,
et les ordres, on se relance la balle quant à un enjeu d'admission.
Est-ce que vous ne croyez pas que cet
élargissement-là du rôle du commissaire va permettre d'avoir une meilleure vision globale des enjeux, des défis et
permettre d'amener des recommandations qui vont être beaucoup plus
pointues et qui vont être beaucoup plus utiles pour la suite des choses?
Le Président (M. Ouellette) : On
est-u capable d'avoir une réponse dans deux minutes?
Mme Vallée : Ah! Vous êtes de
retour?
Le Président (M. Ouellette) : Bien,
c'est...
Mme Vallée : La voix a
changé.
Le Président (M. Ouellette) : Ah, la
voix a changé?
Donc, dans 1 min 30 s.
M.
Beaulieu (Stéphane) : Oui, bien, c'est ça, 1 min 30 s.
Écoutez, je pense que c'est une question d'équilibre. C'est sûr qu'on
est très conscients qu'il y a une délégation de pouvoirs, là, du gouvernement
envers les ordres, mais il y a aussi le
fondement du système professionnel, qui est la gestion des professions par les
pairs. Qui a la compétence pour déterminer qui va pouvoir exercer, ça
demeure encore les ordres, je pense, jusqu'à nouvel ordre.
En
ce qui a trait aux tierces parties, le commissaire a interpellé les ordres à plusieurs
reprises quant aux tierces parties au
cours des dernières années, et on a répondu à toutes les questions. S'il s'agit
de lui donner un pouvoir ou de donner
à l'office un pouvoir spécifique par rapport à ça, ça devrait être formulé
comme ça. Mais moi, je ne me souviens pas d'avoir même vu l'expression
«tierces parties» dans la loi, et la façon qu'on la lit, ça élargit
considérablement les pouvoirs du commissaire.
Je ne sais
pas s'il me reste 20 secondes, mais, en tout cas, par rapport à ce qui est
toute la question des permis pour les
formations du Québec, donc nos diplômes du Québec, dans nos universités, on ne
comprend absolument pas où est le problème.
Il y a déjà des mécanismes en place à partir de... regardez le code,
l'article 184 qui balise très bien comment l'accès aux professions
se fait pour les gens qui sont formés au Québec.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci. Puis sûrement que vos réponses aident nos collègues des oppositions.
Ça leur fait peut-être sauver des questions,
puis je pense que les réponses sont très pertinentes. Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bonsoir, Mme Grou, M. Lorquet et madame... Mme
Lorquet et M. Beaulieu. Bienvenue à l'Assemblée nationale et merci de
participer avec nous à cet exercice.
Concernant le
cumul du poste de directeur général et de président, je comprends que vous,
vous désirez garder le choix de
pouvoir cumuler les deux postes et que vous ne voyez pas de problème là-dedans.
Ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant dans la bonne gouvernance, c'était
de séparer, justement, ces deux postes-là, parce que tu as la diligence et tu as l'opérationnel, et de pouvoir séparer les
deux, ça permet ou, je dirais... ça permet une meilleure gestion d'un
conseil d'administration et de ne pas entrer
en conflit, justement, entre celui qui surveille et celui qui réalise. On peut
comprendre qu'à certains moments donnés
certains ordres peut-être plus petits, par manque de ressources ou pour des
raisons qui leur appartiennent,
peuvent trouver utile et que ça ne fasse pas de problème de cumuler les deux
postes, ce qui semble être ce que vous préconisez.
Est-ce que, dans ce cas-là... L'idée de base de
ce genre de directive là ou de loi là, c'est de pouvoir garantir la confiance du public envers les ordres
professionnels, donc d'assurer une gouvernance la plus honnête possible. Tout
en comprenant ce que vous apportez, est-ce
que si on pouvait ajouter au projet de loi actuel une certaine modulation ou
un certain... une possibilité de la part des
ordres professionnels de demander des dérogations, est-ce que c'est quelque
chose qui, pour vous, serait acceptable?
• (20 h 50) •
Mme Grou
(Christine) : Bien, écoutez, d'abord, oui, tout à fait. Mais, d'entrée
de jeu, je voudrais dire que la position
que j'amène ici ce soir, c'est la position du conseil d'administration de
l'Ordre des psychologues et du comité de gouvernance, qui a réfléchi à
ça. Donc, ce n'est pas exclusivement ma position personnelle. Je tiens à le
souligner, d'une part.
D'autre part,
si on nous impose un directeur général, on va vivre avec puis on va s'en
accommoder. Mais ce qu'on soutient,
et le fil conducteur de ce qu'on soutient, c'est que le modèle unique... il n'y
a pas de modèle unique qui garantit une
saine gouvernance. Ce qui garantit une saine gouvernance, c'est la réflexion
sur les enjeux, sur les pratiques et c'est une conduite éthique de la
part des administrateurs, quels qu'ils soient, que ce soit la présidence, que
ce soit le comité de gouvernance, ou que ce soit les autres administrateurs, ou
que ce soit, même, les directeurs ou le directeur général. Mais c'est une fausse sécurité que de penser qu'un
modèle qui est perçu comme étant le bon modèle va nécessairement être le
modèle de gouvernance éthique.
Mme
Jean : Est-ce que vous pensez que, pour l'office, qui a à travailler,
justement, avec 46 ordres professionnels, d'avoir une certaine uniformité lui permettrait de peut-être avoir un
oeil ou une analyse plus facile vis-à-vis les ordres qu'il a à
superviser?
Mme Grou
(Christine) : Je pense que les ordres professionnels demeurent avec
des réalités différentes, de toute façon.
Il y a des ordres où il y a quelques centaines de membres, puis il y a des
ordres où il y a 2 000 membres, puis il y a des ordres où il y a 73 000 membres.
Puis nous, on en a plus de 8 000. Il y a des ordres où il y a des comités
de direction, il y a des ordres où il n'y en a pas. Il y a des ordres où
il y a des D.G., il y a des ordres où il n'y en a pas. Est-ce que ça rend la
chose plus difficile pour l'Office des professions? Est-ce que l'uniformisation
va rendre la discussion ou les échanges plus faciles? Je ne sais pas.
Je pense
qu'on est assez près de l'office. Je pense que chacun des ordres est assez près
de l'office. Je pense qu'on rend des
comptes. Et je pense que l'office est bien soucieux de ce qui se passe dans les
ordres. Et les ordres sont soucieux de produire
les rapports qui doivent être remis à l'office. Alors, est-ce que d'avoir un
seul modèle de gouvernance va donner une meilleure idée ou une meilleure
vue de ce qui se passe dans les ordres? Je n'en suis pas convaincue.
Mme Jean : Ma consoeur de Taillon
aurait une question à...
Le Président (M. Ouellette) : Mais
je m'en allais là, là, justement. Mme la députée de Taillon.
Mme
Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonsoir à vous
trois. Vous faites référence, à la page 6 et 7 de votre mémoire, d'une expérience que vous avez
pu développer grâce à une subvention du ministère de l'Immigration et
des Communautés culturelles, en partenariat avec l'Université de Sherbrooke. Ça
semble intéressant. C'était une formation
d'appoint. Puis, quand on regarde la page suivante, là, on arrive à une
conclusion. Pouvez-vous nous parler concrètement
de cette expérience, qu'est-ce qui a marché, qu'est-ce qui n'a pas marché, puis
pourquoi ça n'a pas marché, selon vous?
Mme Grou
(Christine) : Ici, je vais laisser la parole à M. le secrétaire
général.
Le Président (M.
Ouellette) : ...M. Beaulieu. Excusez! Pardon.
M. Beaulieu
(Stéphane) : Oui, Stéphane Beaulieu.
Écoutez,
l'idée, au départ, était une excellente idée, puis on essaie de mettre des
choses en place justement pour faciliter
l'accès à la formation d'appoint. Vous dire rapidement que tous nos demandeurs
de permis par équivalence, la plupart,
là, 95 % et plus, sont détenteurs d'une maîtrise, puis, au Québec, ça
prend un doctorat pour exercer. La plupart, donc, ont des cours à suivre
et un internat à faire, un internat d'une année. Alors donc, l'idée de
favoriser l'accès, on endosse tout à fait.
Donc, avec la
subvention, on a monté un programme. Ce qui n'a pas fonctionné, c'est que, par
définition, un programme universitaire, il y
a un cadre dans lequel il faut que les candidats s'ajustent. Il faut que le
profil du candidat, dans le fond,
corresponde au cadre du programme. Or, il s'est avéré qu'on a monté le
programme s'appuyant sur une analyse de
10 ans d'étude de nos dossiers d'équivalence. On avait évalué qu'est-ce
qu'on demandait à ces candidats-là, en gros, et on a fait un programme
qui correspondait à ça. Quand est venu le temps de créer la première cohorte,
de remplir une première cohorte pour offrir
le programme, bien, la diversité de nos candidats, et avec leurs besoins spécifiques,
il n'y avait jamais un match parfait.
On a réussi à créer une première cohorte, mais, en cours de route, il y a des
gens qui suivaient des cours qui
étaient offerts dans ce programme-là, puis ils s'apercevaient qu'ils avaient
déjà suivi des cours semblables dans leurs
pays d'origine, ou encore, des gens, on leur demandait... dans la prescription
de formation d'appoint qu'on leur avait prescrite, on leur demandait un demi-internat, alors que, pour suivre le
programme, il fallait qu'ils fassent la totalité de l'internat. Ça a
créé des problèmes, à l'université, de gestion, gestion des cas individuels. Ça
s'est avéré très lourd. Évidemment, les ressources de l'université étaient quand
même relativement limitées.
Alors, l'année
suivante, ils nous ont dit : Bien, on est bien prêts à le faire à nouveau,
mais il faudrait que les candidats
correspondent mieux à l'offre de programme, ce qui n'a pas été possible. On a rendu des
comptes justement au pôle de
coordination puis on a proposé que la formation soit plus taillée sur mesure, dans le fond qu'on s'en aille plus vers des
programmes individualisés. Évidemment, il faut favoriser
l'accès, là, il faut que les cours soient moins contingentés, qu'il y ait
de la place pour ces étudiants-là. Ça prend une structure d'accueil. C'est
complexe. Les internats, c'est un enjeu aussi.
Mme
Lamarre : Je veux juste...
Donc, vous aviez quand même précisé une espèce de... une formation
d'appoint qui était presque du sur-mesure
pour des candidats étrangers. Mais ce que vous dites, c'est que le sur-mesure, il y avait besoin d'encore plus de subtilité, peut-être. Mettons-le simplement,
juste pour ne pas... Et donc le pôle de coordination vous a aidés dans
ce contexte-là.
Dans le projet de loi,
on parle d'un pôle de coordination. Le CIQ demande, dans le fond, plus un pôle interministériel, intersectoriel à tout le
moins. Quels sont... Qu'est-ce que vous déplorez? On va essayer de se dire les vraies choses, là. Qu'est-ce que vous déplorez du
pôle de coordination? Et qu'est-ce qui serait mieux? Qu'est-ce qu'on pourrait faire, soit dans
le pôle de coordination présenté par le projet de loi n° 98 ou par le pôle
intersectoriel?
Le Président (M.
Ouellette) : Une minute.
M.
Beaulieu (Stéphane) : Écoutez,
on n'a rien comme tel à déplorer. Je pense que les gens au pôle de
coordination ont fait le meilleur travail
qu'ils ont pu avec le mandat qu'ils avaient. Ils n'ont aucun pouvoir. La problématique, elle est beaucoup plus large que seulement l'arrimage entre les
ordres et les universités. Il faut travailler sur ce dossier-là,
c'est clair, mais c'est beaucoup plus large.
Mme Lamarre :
Qui a ce pouvoir?
M.
Beaulieu (Stéphane) : Bien,
plus on se rapproche des ministères et de l'endroit où les décisions se
prennent, je pense que plus on a des chances
d'avoir la possibilité d'engager les gens, d'engager les organisations pour qu'ils rendent cette possibilité-là, donc, d'avoir accès à
des stages et des internats. Chez nous, c'est un internat d'un an, qui est non rémunéré la
plupart du temps. Les gens arrivent
au pays. Ils n'ont pas d'emploi. Ils étaient psychologues dans leurs
pays. Ils ne le sont pas ici avant d'avoir complété ces exigences-là. C'est
difficile...
Mme Lamarre :
...dit qu'ils auraient un an d'internat à faire?
M. Beaulieu
(Stéphane) : Pardon?
Mme Lamarre :
Est-ce que le ministère de l'Immigration, Diversité, Inclusion leur a dit?
M. Beaulieu
(Stéphane) : Il y a une bonne information dans le site Internet. Oui,
de plus en plus il y a de l'information au niveau du ministère. L'ordre le fait
évidemment, aussi, dans son site, bien entendu. Mais les gens ne lisent pas
tout, puis il y en a encore qui nous disent : On apprend ça en arrivant
ici.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée.
M. Beaulieu
(Stéphane) : Alors, je pense qu'il y a un effort. On est conscient des
efforts, quand même, du gouvernement pour donner cette information-là à l'avance.
Mme Lamarre :
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, bonsoir. Merci d'être
présents et de contribuer aux travaux de la commission. On parlait des
stages d'internat. Présentement, je crois avoir lu que les étudiants en psychologie boycottent les stages en internat,
notamment parce qu'ils ne sont pas rémunérés. Est-ce que, pour l'ordre,
c'est un enjeu, ça?
Le Président (M.
Ouellette) : Woups! Dre Grou.
Mme
Grou (Christine) : Pour l'ordre, c'est un enjeu parce qu'évidemment
les étudiants, les doctorants sont des gens
qui sont formés, c'est-à-dire qu'ils sont généralement en sixième, septième
année doctorale, et ce sont des gens qui dispensent des soins et services de santé, généralement dans le réseau
de la santé. Alors, oui, l'ordre a une préoccupation, parce qu'on souhaite que ces services-là soient
dispensés. Cela dit, évidemment, ce n'était pas l'objet de notre
mémoire.
M.
Jolin-Barrette : Qu'ils soient dispensés avec rémunération ou non?
Mme
Grou (Christine) : ...la rémunération des internes, bien entendu,
puisqu'ils sont... Ce sont quand même des étudiants, comme je vous dis, qui sont très qualifiés et qui commencent
tardivement leur pratique parce que les études doctorales demandent beaucoup en temps. Alors, on ne peut pas ne pas
être en faveur de la rémunération des internes. Cela dit, on ne peut pas
appuyer le boycott.
M. Jolin-Barrette : Revenons au projet de loi maintenant — on a fait un petit aparté. Au niveau des
pouvoirs, des nouveaux pouvoirs du syndic,
vous souhaitez qu'ils soient balisés un peu comme ceux du conseil de
discipline. J'aimerais avoir, là, un petit peu plus de détails sur votre
position.
Une voix :
...
Mme Grou
(Christine) : Oui, Me Lorquet.
• (21 heures) •
Mme
Lorquet(Édith) : Bien, en réalité, dans la disposition des
nouveaux pouvoirs du syndic, lorsqu'une personne est accusée d'une infraction punissable de plus de cinq ans d'emprisonnement,
on lui dit qu'il peut présenter en urgence une requête... une ordonnance pour obtenir une suspension ou limitation. On
dit toutefois, en contrepartie, que le conseil de discipline va l'octroyer mais qu'il y a un élément
important : il faut qu'il y ait un lien entre l'infraction punissable de
plus de cinq ans avec l'exercice de la
profession. Alors, nous, on
dit : Puisque c'est un critère qui va faire en sorte que le
conseil de discipline l'octroie ou non, un
des critères, pourquoi, à la base, on ne viendrait pas baliser le
pouvoir du syndic? Ça ne lui donne
rien d'aller demander une ordonnance pour une infraction qui n'a pas de lien
avec l'exercice, puisque c'est un des critères
qui va faire en sorte qu'il va l'obtenir ou non. Comprenez-vous? Donc, si on
balise pour la décision, on devrait baliser avant de prendre l'action.
C'est notre position là-dessus.
M. Jolin-Barrette : Sur la question de l'immunité que le syndic peut accorder, je n'ai pas
vu que vous l'aviez abordée dans votre mémoire, là.
Mme Lorquet
(Édith) : Non.
M.
Jolin-Barrette : Mais est-ce que vous êtes en faveur du fait que le
syndic puisse accorder l'immunité maintenant?
Mme
Lorquet (Édith) : Oui. Maintenant,
est-ce que... Nous avons vu des recommandations passer, de le baliser davantage notamment
lorsqu'il s'agit d'infractions, on parle des 59.1, 59.2, là, des... Mais nous
sommes en faveur de l'immunité pour les
lanceurs d'alerte, mais j'ai vu également qu'il faudrait arrimer différentes lois qui
traitent de cette question-là. Donc,
nous, l'Ordre des psychologues n'est pas un expert sur ces questions, c'est la
raison pour laquelle on limite, là, on limite notre propos à ce sujet.
Mais j'ai vu les recommandations passer et puis je pense effectivement qu'il
faut regarder ce qui s'est dit là-dessus.
M. Jolin-Barrette : Au niveau de la recommandation 7, vous souhaitez qu'on vienne préciser les
associations et les organismes dont le but
est de défendre l'intérêt de leurs membres. Est-ce que, dans le domaine de
la psychologie, vous avez des associations qui sont présentes mais qui n'ont pas pour but de défendre l'intérêt
des membres? Est-ce que vous
avez des organismes liés ou des structures comme ça?
Mme
Grou (Christine) : En fait, il y a
différents regroupements qui se sont créés au fil du temps et qui n'ont
pas nécessairement pour objet de représenter leurs membres, mais qui vont avoir
pour objet, par exemple, de créer une communauté de pratique, ou encore de
créer un groupe de formation continue, ou d'adresser des enjeux qui sont plus théoriques ou plus scientifiques. Alors, il y a
toutes sortes de regroupements. Nous, on croit que, dans la mesure où
c'est dans leurs mandats de protéger leurs
membres, à ce moment-là l'exclusion pourrait tenir, mais il ne faudrait pas
nécessairement généraliser à tous les regroupements et il faudrait encore
examiner leurs mandats.
M.
Jolin-Barrette : Donc,
l'ordre souhaite que ça soit très limitatif, puis vraiment on vise uniquement
lorsque ça touche la défense des intérêts des membres.
Sur la question des frais d'enquête, c'est
nouveau, ça, on veut permettre, dans le fond, à l'ordre d'aller chercher les
frais d'enquête. Vous faites une liste de ce qui devrait être prévu. La
question qui se pose avec une telle disposition,
c'est de dire : Mais, supposons que le professionnel qui est poursuivi
souhaite plaider coupable rapidement, jusqu'où
on va pour lui attribuer les frais d'enquête? Parce que, oui, il y a les frais
d'audition, tout ça, mais supposons que le syndic veut faire vraiment
une bonne enquête et cherche la preuve, tout ça, et le professionnel aurait
plaidé peut-être coupable plus rapidement.
Comment vous voyez ça? Comment on réussit, là, à ce que ça ne devienne pas une
contrainte financière démesurée pour le professionnel?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Lorquet.
Mme Lorquet (Édith) : Bien, nous,
quand on regarde notre proposition, on s'éloigne des frais d'enquête, parce que, d'une part, on trouve que c'est
difficilement imputable à un dossier. Ce n'est pas comme ça que ça
procède... Lorsque les syndics font enquête,
ils ont un téléphone dans un dossier. Est-ce qu'on va devoir être en mesure de
facturer le personnel de soutien? Les frais d'avocat, combien de temps a-t-il
discuté de tel et tel dossier? Nous, on trouvait que ce n'était pas vraiment
réaliste. C'est une bonne intention, mais ce n'est pas vraiment réaliste, de
notre point de vue.
C'est pour ça
que nous, on a plutôt préféré suivre ce que le Collège des médecins a mis de
l'avant lorsqu'il vous a rencontrés
et d'aller avec une liste de déboursés qui ne sont pas récupérables à l'heure
actuelle et qui nous font mal. Par exemple, ce n'est pas nouveau, on a
des demandes de remise, mais, si, par exemple, on n'est pas capables de tenir l'audience dans nos locaux et on va à l'hôtel ou à
la Commission des lésions professionnelles, l'ordre perd ces frais-là,
et c'est quand même assez fréquent, qu'il y a des demandes de remise.
Alors, tout
ce qui est écrit là, là, à l'heure actuelle, on ne peut pas les récupérer.
Alors, nous, ce qu'on propose, c'est peut-être
d'y aller, dans un premier temps, avec des frais réels, concrets, on est
capables de les imputer. Et souvent, lors de la décision, c'est le
tribunal qui va déterminer s'il facture les frais à l'intimé, ou si c'est
moitié-moitié, ou etc., donc une certaine forme de justice là-dedans aussi.
M. Jolin-Barrette : Puis est-ce que
vous souhaitez que les frais soient laissés à l'appréciation du conseil de discipline qui rend la décision ou vous souhaitez
qu'on l'intègre vraiment dans le code
pour dire : Le syndic peut réclamer, et non pas laisser la
discrétion au conseil de discipline?
Le Président (M. Ouellette) : C'est
oui ou non.
Mme Lorquet (Édith) : Bien...
M. Jolin-Barrette : Ça ne se répond
pas par oui ou par non, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) :
...vous souhaitez, là, c'est oui ou non?
Mme Lorquet (Édith) : Oui, nous
souhaitons que les frais soient ajoutés à 151 et que les règles actuelles
prévalent, c'est tout.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Me Lorquet, Dre Grou et M. Beaulieu, représentant l'Ordre des
psychologues du Québec.
Je suspends
quelques minutes. Je demanderais à l'Ordre des travailleurs sociaux et des
thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec de s'avancer.
(Suspension de la séance à 21 h 6)
(Reprise à 21 h 8)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec,
représenté par sa présidente, Mme Guylaine Ouimette. Vous allez nous présenter
les gens qui vous accompagnent. Vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation, et après il y aura
un échange avec Mme la ministre et les porte-parole de chacune des oppositions. Mme Ouimet, à vous
la parole... Ouimette.
Ordre des travailleurs sociaux
et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)
Mme Ouimette
(Guylaine) : Ouimette, oui. Mme la ministre, M. le Président de la commission,
Mmes et MM. députés de l'Assemblée nationale, membres de la Commission des
institutions, M. le président de l'Office des professions, bonsoir.
C'est avec fierté
ainsi qu'un peu de fébrilité que je me présente devant vous pour la première
fois en tant que présidente de l'Ordre des
travailleurs sociaux et thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Notre
ordre représente deux professions et
compte plus de 13 000 professionnels de la santé mentale et des
relations humaines. Ces professionnels sont
compétents, dévoués et ont à coeur la qualité de vie des personnes auprès
desquelles ils interviennent quotidiennement.
Depuis
les 10 dernières années, notre ordre se fait un devoir de prendre part au
débat public en lien avec son mandat de
la protection du public dans les domaines où notre expertise est reconnue, tout
en s'appuyant sur nos valeurs-phares, qui sont la rigueur
professionnelle, la justice sociale, le respect, l'intégrité et la
collaboration.
Je
suis Guylaine Ouimette, la présidente de l'ordre. À ma gauche, il y a M.
Richard Silver, qui est travailleur social également et notre conseiller
juridique, et, à ma droite, travailleur social également et directeur général
et secrétaire de l'ordre.
• (21 h 10) •
Maintenant, en ce qui
concerne le projet de loi n° 98, je dirais d'entrée de jeu que, de façon
globale, nous y voyons un vent de fraîcheur
que nous saluons. Toutefois, et nous ne sommes pas les seuls, nous constatons
que plusieurs de nos attentes en lien
direct avec la protection du public ne sont pas comblées. Je reviendrai sur ce point un peu plus
tard.
Ce
vent de fraîcheur, nous le sentons principalement au niveau de la gouvernance des ordres. À ce chapitre, je suis fière du virage qu'a déjà pris notre ordre et qui va dans le sens
et le ton général des améliorations proposées par le projet de loi. En 2010, nous avons adopté un code
d'éthique pour les membres du conseil d'administration et en 2016 nous
sommes à mettre en place une formation en éthique, qui sera reprise
annuellement auprès des administrateurs. Nous avons
mis en place un comité de gouvernance et d'éthique ainsi qu'un comité d'audit
et de finances. Nous avons même entrepris
des travaux en ce qui a trait à la direction... à la diminution, excusez-moi,
de la taille du conseil d'administration dans le but ultime d'assurer
une gouvernance efficiente et qui répond à notre mission.
Je
reviens quelques instants sur le code d'éthique des administrateurs pour
souligner qu'à notre avis l'adoption de celui-ci doit appartenir aux ordres. Nous croyons donc qu'il n'est pas
nécessaire, comme le recommande le projet de loi, d'opter pour une approche mur à mur, qui ferait en
sorte que l'Office des professions impose un code d'éthique unique à l'ensemble des ordres professionnels. Les besoins
ne sont pas les mêmes, les approches doivent être respectées et
adaptées, flexibles et en réponse aux réalités des ordres.
D'autres dispositions
du projet de loi nous semblent fort pertinentes. Je pense ici à la capacité
pour le conseil d'administration de fixer le
montant de la cotisation annuelle. Au sein de notre ordre, nous consacrons plus
de 80 % de notre budget annuel à
des activités statutaires, réglementaires et au développement professionnel.
Ceci confirme notre souci constant d'une gestion budgétaire rigoureuse
qui répond pleinement à notre mandat.
À
propos du droit de surveillance général accordé à la présidence d'un ordre,
nous partageons l'avis exprimé par le
Conseil interprofessionnel du Québec à l'effet que le projet de loi semble
s'inspirer des fonctions dévolues à la présidence du conseil d'administration d'une entreprise. Or,
comme vous le savez certainement, la réalité est tout autre dans un
ordre professionnel où la présidence, par
exemple, a la capacité d'agir en dehors du conseil d'administration. Cette
latitude est essentielle afin que la présidence assume pleinement et
efficacement son rôle de porte-parole. Dans notre domaine, celui de la santé mentale et des relations
humaines, nous avons plus que jamais besoin de porte-parole forts qui
disposent de tous les outils nécessaires pour se faire entendre afin que nous
puissions nous acquitter pleinement de notre mandat de protection du public.
Abordons
maintenant la question de l'élargissement du rôle et des responsabilités du
commissaire à l'admission. Sur ce
point, nous faisons front commun avec la très grande majorité des ordres qui
ont défilé devant cette commission. Sans
vouloir questionner vos intentions, Mme la ministre, nous croyons néanmoins que
le projet de loi passe à côté d'un gros
problème. Faut-il répéter, le commissaire aux plaintes possède déjà les
pouvoirs nécessaires afin d'intervenir dans les dossiers concernant la reconnaissance des compétences professionnelles
pour les étudiants en provenance de l'étranger et ceux formés hors du Québec. Et c'est parfait. À ce
chapitre, en 2014-2015, nous avons traité huit demandes d'équivalence demandées par des personnes de l'étranger, 21 dans
le cadre de l'entente France-Québec et 24 des professionnels canadiens hors Québec, par rapport à 812 demandes en
provenance des personnes formées au Québec. Je vous réfère là-dessus au
tableau qui apparaît à la page 13 de notre mémoire.
Par
contre, la réalité confirme que la très grande majorité des demandes
proviennent de personnes ayant étudié dans des institutions du Québec.
Dans ces cas, les conditions d'admission sont encadrées par la réglementation gouvernementale, qui fait appel à des expertises
déjà largement maîtrisées par l'ensemble des ordres. Les ordres n'ont
donc pas aucune marge de manoeuvre sur ce point et appliquent avec rigueur la
réglementation.
À notre avis, le
principal problème se situe plutôt au niveau de l'accessibilité à des stages et
à de la formation d'appoint pour les
candidats qui présentent des lacunes à combler. Nous sommes interpelés
régulièrement quant à cette difficulté
croissante. D'ailleurs, le commissaire aux plaintes reconnaissait lui-même ces
enjeux dans un avis publié en juillet 2016
et repris par l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec lors de leur
passage à cette commission. Pourquoi, à titre d'exemple, la récente restructuration du réseau rend davantage
difficile pour les milieux de pratique d'accueillir des stagiaires? Nous ne sommes pas d'avis que la
création d'un poste de commissaire aux admissions répondra au défi
actuel. Cela risque plutôt d'alourdir les
processus et la charge financière de l'État sans apporter une vraie réponse au
besoin de protection du public.
Parlons maintenant de la
pertinence de créer un pôle de coordination pour l'accès à la formation. Nous
nous rangeons derrière le large consensus exprimé par un nombre important
d'ordres à l'effet de réclamer la création d'un comité ministériel permanent sous l'autorité du ministre
de l'Immigration, et de la Diversité, et de l'Inclusion pour que les personnes en provenance de
l'étranger aient accès aux services nécessaires pour accélérer la reconnaissance
de leurs acquis et de leurs compétences.
En terminant,
j'ajouterais que, de toute évidence, la protection du public est une
responsabilité partagée, ce concept ne
peut reposer que sur les épaules des ordres et de ses professionnels. Il est
essentiel que l'État employeur et les milieux de travail offrent aux professionnels les conditions nécessaires pour
qu'ils soient en mesure de déployer l'ensemble de leurs compétences et ainsi offrir des services
sécuritaires et de qualité. Pourtant, il appert que l'État tient un double
langage en encadrant les activités professionnelles sans s'assurer que ceux-ci
disposent de conditions de pratique leur permettant de rendre des services auxquels la population est en droit de
s'attendre. Souvenons-nous que le projet de loi n° 21, loi modifiant le Code des professions dans le domaine
de la santé mentale et des relations humaines, s'appuie notamment sur le
fait que le risque de préjudice que
représentent certaines activités justifie le fait qu'elles soient réservées à
des professionnels. S'il y a
effectivement risque de préjudice, pourquoi les conditions de pratique
font-elles en sorte que plusieurs professionnels n'arrivent plus à
déployer l'ensemble de leurs compétences? À cet égard, Mme la ministre, j'ai
avec moi la lettre qui vous avait été adressée le 13 juin dernier, qui
vous demande d'agir sur ces enjeux.
C'est
pourquoi nous réitérons notre demande de vous pencher sur une façon de
permettre aux ordres d'évaluer les milieux
de travail pour prendre en compte l'impact des conditions de pratique dans
l'intérêt de la protection du public et des personnes les plus vulnérables de notre société et, par le fait
même, assurer que tous les professionnels du domaine de la santé mentale et des relations humaines puissent
intervenir adéquatement tout en respectant les exigences déontologiques
et éthiques propres à leurs ordres. Nous sommes convaincus que c'est la
protection du public qui en dépend. Merci de nous avoir reçus.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme Ouimette. Mme la ministre.
Mme Vallée :
Merci. Merci, Mme Ouimette, bienvenue à l'Assemblée nationale. Probablement une
première présentation, mais qui va
s'inscrire dans une longue tradition de présence de votre ordre. Alors, c'est
un plaisir de vous recevoir.
Je vais
prendre la balle au bond parce qu'évidemment, la protection du public, vous en
avez fait votre conclusion. Dans
votre mémoire, en matière de justice disciplinaire, vous vous opposez à ce
qu'il y ait une immunité d'accordée aux lanceurs d'alerte. Pour vous, il y a la responsabilité individuelle de
chaque membre de l'ordre d'être responsable de ses gestes professionnels, de ses gestes
déontologiques également. Mais est-ce que vous ne croyez pas que, dans un
souci de meilleure protection du public, il
puisse être opportun d'accorder à certains moments, dans certaines
circonstances, ne serait-ce qu'une
immunité partielle à un délateur qui permettra au syndic de faire son enquête
rapidement, d'intervenir plus rapidement justement afin de protéger...
de mieux protéger le public? Est-ce que ce n'est pas là... Parce que je vous écoute, vous faites référence à votre
correspondance du mois de juin, vous faites référence à vos préoccupations en
lien notamment avec le milieu de travail,
mais est-ce qu'il n'y a pas là... Cette immunité qui est accordée ne
permettrait-elle pas justement, dans
certains milieux, à un membre de votre ordre, un membre d'un ordre
professionnel de pouvoir dénoncer des situations qui autrement ne
pourraient pas l'être?
Mme
Ouimette (Guylaine) : Merci de votre question. M. le Président, je
vais passer, justement, la balle au bond à M. Richard Silver, qui est
notre conseiller juridique.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Silver.
• (21 h 20) •
M. Silver (Richard) : Je trouve que
la question est très pertinente. Nous comprenons que la modification proposée au Code des professions
est tout à fait en lien avec... c'est la recommandation de la commission
Charbonneau. Nous constatons également
qu'à notre connaissance nous n'avons jamais eu l'occasion de gérer
une situation prévue au projet de loi. Règle générale
chez nous, la demande d'enquête reçue par le bureau du syndic vise une personne
qui exerce seule et n'exerce pas en concertation avec une autre personne
qui est également membre de l'ordre.
Le souci de
l'ordre et le souci du syndic également : Est-ce
que c'est équitable qu'un membre qui
manque à ses propres obligations déontologiques et professionnelles peut
se soustraire à ses obligations parce qu'il dénonce une autre personne qui
participe à la même infraction? Il nous semble que notre membre est imputable
de ses gestes. Je sais bien que la nouvelle disposition laisse une grande discrétion au syndic. Je ne vois pas la notion
d'immunité partielle dans la disposition, mais, peut-être, c'est faisable. Mais le souci de l'ordre,
c'est : Si la personne est imputable de ses gestes, est-ce qu'on peut se protéger parce qu'on dénonce une autre personne qui a participé à la
même infraction? C'est ça, le souci de notre ordre.
Mme Vallée : Donc, pour vous, ce serait une façon... c'est une
façon indirecte de protéger quelqu'un qui ne devrait pas l'être parce qu'il a ou elle a participé à une faute, peu importe la
gravité de la faute. Alors, pour vous, vous le voyez plutôt sous l'angle
de ne pas fermer les yeux sur une faute commise plutôt que sur l'opportunité
d'intervenir plus rapidement dans certaines circonstances et de permettre, dans
certains cas... Je comprends que vous n'avez peut-être pas... on n'a peut-être pas porté à votre attention des situations,
mais est-ce qu'il n'a pas lieu de croire que, dans certains
milieux hospitaliers, il puisse y avoir des enjeux qui pourraient éventuellement
toucher votre ordre professionnel?
Mme
Ouimette (Guylaine) : M. le Président, je vais passer la balle au bond à mon directeur général et
secrétaire, M. Sylvio Rioux.
Le Président (M. Ouellette) : Là, je
comprends pourquoi vous les avez amenés. M. Rioux.
Mme Ouimette (Guylaine) : Oui, vous
allez voir.
M. Rioux
(Sylvio) : Je pense qu'il y a
une question individuelle là-dedans, une question
de confiance du public également. Ça
fait que je... Il faut quand même aussi nuancer. Je suis d'accord quand vous
parlez : Il y a un large spectre de situations qui peuvent demander... Parfois l'alerte peut être considérée
comme correcte, mais en même temps il y a d'autres spectres où les situations sont beaucoup plus
graves, beaucoup plus complexes. Et, si un ordre, on raie de l'ardoise,
là, la situation de dérogation à ton code de
déontologie ou ton code d'éthique, comment l'ordre va garder, à quelque part,
la confiance du public et sa rigueur dans
l'application de ces codes, qui sont, je vous le dis, pour l'ensemble des
membres? Donc, il y a cette situation-là qui n'est pas facile à nuancer
parfois, mais il y a quand même aussi une question de protection du public, qui est notre mandat principal, et de confiance du
public également. Donc, il faut composer avec ces réalités-là également.
Mme Vallée :
Pour les enjeux de gouvernance, vous ne vous êtes pas vraiment prononcés, en
fait, sur l'impact de la réduction de
la taille des conseils d'administration. Vous avez un ordre qui est quand même
composé de 24 membres. Est-ce que vous avez envisagé des enjeux
particuliers suite à une éventuelle entrée en vigueur de la loi? Comment ça pourrait vous affecter? Parce que vous n'avez pas
commenté, je pense, comme telle, là, la réduction de la taille. Certains
nous ont dit clairement : Pour nous, ça ne fonctionne pas. D'autres ont
dit : On a déjà procédé à une réorganisation. Donc... ou on est en voie
de. Qu'en est-il de votre ordre?
Mme
Ouimette (Guylaine) : En fait, l'ordre a un comité de gouvernance et
d'éthique en place depuis 2010. Et nous
sommes actuellement à faire nos travaux de réflexion, très avancés, qui vont se
décider, là, avant le mois de décembre, sur la réduction de la taille de
notre conseil d'administration. Nous sommes d'avis qu'avec toutes, je vous
dirais, les études scientifiques et le
mouvement de diminuer le nombre de décideurs, mais de bien choisir les
décideurs selon des compétences qui sont déjà prévues selon les
différents mandats que nous avons à accomplir, nous allons totalement dans ce
sens-là. Et nous sommes d'avis que c'est une bonne décision.
Mme Vallée : Donc, pour vous,
ça n'emporte pas de contrainte excessive?
Mme
Ouimette (Guylaine) : Non,
le conseil d'administration est déjà... il y
a plusieurs discussions qui ont
eu lieu, je vous dirais que, ce qui reste à
vraiment statuer, les gens ont accepté que les gens ne représentent pas leurs
régions. Donc, cet enjeu-là a été, si
je peux dire, mis de côté pour aller plus vers : nous avons une
gouvernance, on décide des genres... différents comités qu'on a mis en
place. Actuellement, on a quand même audit et finances et le comité d'éthique
et de... excusez-moi, audit et finances, et
gouvernance et éthique qui sont en place. On a une vision de mettre d'autres
comités et de répartir les responsabilités des membres du conseil d'administration dans ces comités-là avec une réduction,
donc une implication plus grande des membres du conseil d'administration dans
les différents comités. Donc, d'avoir, je vous dirais, une gouvernance beaucoup plus serrée et une implication, selon les compétences
des membres, au niveau du... Pour nous, ça ne pose pas du tout de problème.
Mme Vallée : Vous avez actuellement,
au sein de votre ordre, des fonctions de D.G. et de président qui sont
distinctes. Par contre, à votre mémoire, vous mentionnez qu'en fait vous n'êtes
pas en accord avec un enchâssement à
l'intérieur du code de la fonction de directeur
général. Pourquoi tenez-vous à
préciser cette objection? Puis
qu'est-ce que ça peut avoir comme
effet, par exemple, chez vous, si on devait enchâsser le concept à l'intérieur
du Code des professions?
Mme
Ouimette (Guylaine) : Bien,
en fait, c'est déjà comme ça chez nous, on a déjà une
fonction de secrétaire... de directeur général et secrétaire et de
président. Nous avons une longue expérience, plus d'une décennie, avec un fonctionnement comme celui-ci, et les fonctions
sont déjà toutes déterminées dans une politique. On ne voit pas pourquoi
ce serait enchâssé dans la loi, alors que ça a déjà été décidé pour la bonne
gouvernance de l'ordre et que ça fonctionne très bien.
Mme Vallée :
Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est : Nous, on n'a pas de problème
avec la distinction qui est apportée.
On a adopté nos façons de faire, on ne voit pas la nécessité d'en ajouter sur
le plan législatif, c'est à peu près le message?
Mme
Ouimette (Guylaine) : De toute façon, on regarde l'ensemble des 46
ordres, il y a des spécificités propres à chacun. C'est pour laisser l'agilité et la flexibilité à chaque ordre
de décider comment faire leur gouvernance. En fait, nous ne croyons pas
que c'est nécessaire que ce soit enchâssé dans la loi.
Mme Vallée : Dans votre
mémoire, vous questionnez... en fait, vous soulevez plusieurs questions au
sujet du commissaire à l'admission, sur les
pouvoirs : Est-ce que notre commissaire va avoir les pouvoirs qui sont
nécessaires, il va
avoir les vrais pouvoirs qui vont lui permettre de s'attaquer aux enjeux
d'accessibilité, de l'accessibilité aux stages, à la formation d'appoint? Est-ce qu'il va être entendu
par les universités? Est-ce qu'il va être entendu par les ministres
aussi, ministre de l'Éducation, ministre de
la Santé et Services sociaux? Selon vous, parce que vous avez analysé les
pouvoirs qui seraient conférés au
commissaire, est-ce qu'il y a des pouvoirs additionnels qui devraient être
conférés au commissaire pour lui permettre justement... pour assurer une
réponse positive aux questions que vous soulevez à votre mémoire?
Mme Ouimette (Guylaine) : En fait,
je vous dirais que, nous, les chiffres sont assez éloquents au niveau de l'admission des membres qui viennent... On a eu
huit dossiers, en 2014-2015, sur 812 des gens du Québec. Et on regarde...
en fait, on s'appuie sur la réglementation qui existe déjà. On ne voit pas la
pertinence d'augmenter les pouvoirs du commissaire à cet effet-là puisque,
déjà, les ordres sont des experts dans le domaine et que tous les dossiers que
nous avons eus, les quatre dossiers
particuliers de l'année dernière, il y en a seulement un dont les décisions ne
sont pas prises encore. On dirait...
On se demande en quoi, ça, ça va ajouter une plus-value à la gestion des
équivalences et des admissions.
• (21 h 30) •
Mme Vallée :
Mais vous affirmez cela, mais, dans votre mémoire... C'est parce que, dans
votre mémoire, vous semblez
reconnaître, de par les questions que vous soulevez, qu'il existe des
problèmes, qu'il existe des enjeux. Quand vous mentionnez : Est-ce
qu'il va avoir le pouvoir nécessaire pour s'attaquer au problème
d'accessibilité aux stages, à la formation
d'appoint?, c'est parce que vous reconnaissez qu'il y a là un enjeu. Lorsque
vous dites : Sera-t-il entendu par les universités?, c'est que vous reconnaissez qu'il y a quand même un
enjeu. Sera-t-il entendu par les ministres responsables de l'Éducation, le ministre de la Santé et des
Services sociaux? Vous dites : Il y a là un enjeu. Alors, il y a des
acteurs autres que les ordres professionnels
qui interagissent dans cette question-là, et vous dites : Bien, comment le
commissaire, même avec les pouvoirs
élargis, va être en mesure d'amener ces intervenants-là autour de la table et
de poser les gestes requis? Alors,
c'est pour ça que je vous retourne la question : Bien, si vous considérez
qu'il n'a peut-être pas la capacité de... avec les pouvoirs que l'on prévoit lui accorder dans le projet de loi, quels
seraient les pouvoirs nécessaires qui permettraient au commissaire de répondre à ces questions-là? Quels
seraient les pouvoirs qui devraient être donnés au commissaire pour
attaquer ces enjeux-là si vous ne considérez pas ceux qui lui sont accordés
comme étant suffisants?
Le Président (M. Ouellette) : Es-tu
capable de faire ça dans une minute?
Mme Ouimette (Guylaine) : Je vais
passer la parole à mon secrétaire général, M. Rioux.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Rioux.
M. Rioux
(Sylvio) : On est à l'ère des pratiques collaboratives, on est à l'ère
de l'interdisciplinarité, de l'intersectoriel, moi, je pense que ce
qu'on a besoin entre la consultation, le dire et le faire, c'est l'objectif. Ça
nous prend des moyens d'action, ça nous
prend des pouvoirs qui vont permettre de rassembler les gens, de travailler
en... C'est ça qui est porteur de solutions.
On a
travaillé ensemble avec le ministère, vous-même, avec Mme la ministre, sur des
approches intersectorielles d'action qui sont porteuses de résultats.
Alors, nous, on pense qu'un commissaire, dans un mode consultatif... On les connaît, les enjeux. Il y a eu de longs, longs
débats, de longues recherches, et on est prêts maintenant à passer à
l'action. Donc, il faut qu'on soit capables
de mettre ensemble les acteurs pour qu'on soit capables de passer à l'action et
d'être imputables de résultats en bout de ligne.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. Rioux. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bonsoir, Mme Ouimette, M. Rioux, M. Silver,
bienvenue à l'Assemblée nationale et merci de participer à l'exercice
avec nous pour le projet de loi n° 98.
Je vais continuer, je vais faire du chemin avec
qu'est-ce qu'on était en train de... ce que vous étiez en train de discuter
concernant le pôle de coordination et le commissaire à l'admission. Vous parlez
que... Vous mentionnez directement que vous
êtes prêts à passer à l'action, ça nous prend des moyens d'action maintenant.
Le pôle de coordination, selon vous,
ne serait pas non plus la plateforme idéale, mais le comité intersectoriel
permanent pourrait l'être. Il y a déjà le pôle de coordination qui
existe, qui est peu efficace.
Selon vous, qu'est-ce que ça prendrait
réellement pour que vous puissiez passer à l'action? C'est quoi, l'environnement, les leviers, le pouvoir, les
options que vous aimeriez avoir pour pouvoir justement passer à l'action
et arriver avec des solutions concrètes sur le terrain?
Mme Ouimette (Guylaine) : D'accord.
Je vais passer la parole à M. Silver à ce sujet.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Silver.
M. Silver
(Richard) : Merci. Je crois
que, pour nous, le comité ministériel intersectoriel a une certaine souplesse qui nous permettrait peut-être
d'aller plus loin dans les enjeux qui nous préoccupent. Est-ce qu'on a besoin d'inscrire cette instance
au Code des professions? Peut-être pas. Peut-être qu'on a besoin de donner un statut permanent à
cette instance qui existe déjà, de
lui accorder des moyens pour faire avancer les enjeux déjà
identifiés, pas juste par nous, mais par les autres ordres également.
Et je
crois qu'on voit les mêmes enjeux qui
sont identifiés par quelques-uns de nos collègues également. On sait bien
que ce qui est préoccupant, c'est lorsque
les ordres accordent une reconnaissance partielle aux personnes qui
souhaitent obtenir un permis par voie
d'équivalence. Trouver des formations d'appoint ou des stages devient un enjeu
majeur pour nous. Ça veut dire qu'un
comité ministériel intersectoriel qui permet une consultation entre les
instances gouvernementales, ministères
Éducation, Santé et Services sociaux, ça pourrait être très aidant pour que les
personnes qui souhaitent devenir professionnelles
puissent avoir l'occasion de combler des lacunes identifiées par des ordres
professionnels. Parce qu'à l'heure actuelle ce n'est pas évident pour
ces personnes de respecter les exigences qui sont ordonnées par les ordres pour
devenir professionnelles.
Mme
Jean : Pour rendre le comité intersectoriel ou interministériel
efficace, pensez-vous que le fait de l'enchâsser dans la loi pourrait donner, justement, de l'impulsion pour avoir ce
pouvoir-là de mettre en oeuvre certaines solutions qui sont envisagées?
Est-ce que vous pensez que c'est un moyen pour le rendre plus efficace?
M. Silver
(Richard) : Je crois qu'il y a deux options : soit on le met au
sein du Code des professions, ça existe, mais effectivement, ça pourrait
alourdir l'application du code, ou lui accorder un statut permanent sans que ça
soit entériné à la loi.
Mme
Jean : Vous avez, à la
page 17 de votre mémoire, une recommandation où vous demandez de vous permettre d'évaluer les milieux de travail pour prendre en
compte l'impact des conditions de pratique et, par le fait même, vous
assurer que les travailleurs sociaux,
thérapeutes puissent déployer l'ensemble de leurs compétences et exercer le respect de
leurs exigences déontologiques. Pour moi, ce
n'est pas clair. Pourriez-vous expliquer ou donner des détails d'où est-ce que
vous désirez qu'on aille à ce niveau-là?
Mme Ouimette (Guylaine) : En fait,
c'est une alarme que nous avons lancée à la ministre de la Justice en juin — il
y a une lettre qu'on a rapportée ici — parce
qu'on constate qu'avec la restructuration dans le réseau, si on parle des travailleurs sociaux, les conditions... Je
vous dirais que, la pression qui est mise par la restructuration, les
coupures, les gens ne peuvent plus... Ils sont en conflit de loyauté, ils sont
incapables de faire leur travail en lien avec leur code de déontologie, les normes qui sont imposées par
l'ordre. Nous avons de la documentation scientifique à ce niveau-là, nous avons
les preuves qu'il y a vraiment une problématique très, très importante. Donc,
on se dit : Si on veut faire de la protection
du public et qu'on ne permet pas aux ordres ou à une autre instance de regarder
ce qui se passe dans le milieu de pratique
pour que les professionnels puissent respecter leurs codes de déontologie et
les normes, on s'en va où avec ça?
Donc, c'est
pour ça qu'on soulevait l'idée, pour des travaux futurs au niveau du Code des
professions. Parce qu'on sait que ce n'est pas nécessairement dans le projet
de loi actuel, mais on se questionne vraiment sur la fragilisation, actuellement, des milieux. Et ces milieux-là, lorsqu'on soulevait tantôt la
problématique de l'accès aux stages... est vraiment réelle. Les gens ont de la difficulté à accueillir
des stagiaires à cause du contexte actuel qui sévit dans le réseau de la
santé et des services sociaux, où sont la majorité de nos membres.
Mme Jean : Concernant la gouvernance
des ordres, vous êtes contre l'approche mur à mur, vous préconisez plus la flexibilité, flexibilité encadrée, c'est-à-dire... Est-ce que vous verriez quelque chose d'intéressant au niveau de
l'office qui proposerait des balises et
que... de gouvernance, sans préciser exactement, et que la flexibilité serait à
l'intérieur de ces balises-là? Est-ce que ça
serait un compromis ou une alternative qui, selon vous, vous permettrait
d'avoir la flexibilité que vous cherchez?
Mme Ouimette (Guylaine) : Je vais
laisser mon directeur général, M. Rioux, répondre à votre question.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Rioux.
M. Rioux
(Sylvio) : C'est une bonne
question. Nous pensons que de donner des balises générales et de laisser
au conseil d'administration décider des
éléments précis qu'ils veulent implanter, c'est la meilleure solution. D'aller
dans un enchâssement dans la loi ou de
mettre quelque chose de trop rigide, ça enlève, à quelque part, un peu le
pouvoir du conseil d'adapter selon sa
réalité, et Dieu sait comment chaque ordre a une réalité qui peut être
différente. Donc, dans ce cadre-là, on
pense que... oui à des balises plutôt générales, et de laisser vraiment
au conseil d'administration le choix de décider, là, des modalités qui
s'appliquent à sa réalité.
Mme Jean : Comme ça, à ce moment-là,
je comprends qu'on pourrait s'assurer que les ordres adoptent des codes de gestion, des codes de déontologie
minimums. Et ça permettrait aux ordres, à ce moment-là, de pouvoir
adapter ces codes-là à leur propre réalité
et peut-être aussi, ce que je comprends, de faire la fameuse
réflexion que plusieurs ordres ont demandé que cette réflexion se fasse
de l'interne, donc avoir cette flexibilité-là.
Mme Ouimette (Guylaine) : Et, pour
ajouter, on parle de code de déontologie, on parle de code d'éthique des
membres du conseil d'administration, nous avons adopté un code d'éthique,
depuis 2010, au niveau du sein de l'ordre.
Il y a des formations qui sont données aux administrateurs, aux nouveaux
administrateurs qui arrivent. Vous savez, c'est déjà dans nos pratiques.
Alors, quand on parle d'aller mur à mur, ce n'est pas nécessaire quand on
regarde déjà tout le mouvement qui se fait.
C'est
pour ça que, dans notre situation, on disait qu'on était vraiment dans le ton
et les enlignements de la loi par rapport
à une meilleure gouvernance. Nous sommes déjà dans ces réflexions-là. Nous
avons déjà mis en place des instances pour
faire ces suivis-là et prendre les bonnes décisions. C'est pour ça que, le
mur-à-mur, quand on regarde un peu l'état de situation chez nous et dans plusieurs autres ordres, on se questionne...
on se demande pourquoi ça, ce serait enchâssé dans une loi, alors que
c'est déjà comme de facto.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme Ouimette. M. le député de Borduas.
• (21 h 40) •
M. Jolin-Barrette : ...bonsoir. Merci
d'être présents puis de contribuer aux travaux de la commission.
J'aimerais
qu'on revienne sur la question de ma collègue de Chicoutimi relativement à
votre recommandation 12, lorsque
vous dites : La majorité de nos professionnels se retrouvent en milieu de
travail, et là le milieu n'est pas approprié pour respecter leurs obligations déontologiques. Pouvez-vous nous
l'illustrer, qu'est-ce que... Avez-vous une situation, là, factuelle?
Mme
Ouimette (Guylaine) : En fait, je pourrais vous en illustrer deux,
parce que, justement hier, j'étais avec l'ensemble des formateurs de l'ordre, qui rencontrent des centaines et
des centaines de travailleurs sociaux et de thérapeutes conjugaux et
familiaux de façon régulière. Ces gens-là m'ont sonné l'alarme en me disant un
exemple. Par exemple, un travailleur social
qui vient dans une formation qui s'appelle Codes de déontologie et normes de
pratique, et, dans la formation, il y
a un état de détresse qui est vraiment nommé par les travailleurs sociaux. Et
cette personne-là travaille au niveau
des soins à domicile, c'est une travailleuse sociale, et vous savez que les
responsabilités sont lourdes, ces clientèles-là sont vulnérables. Cette personne-là se met à pleurer dans la formation,
elle dit : Moi, j'ai 160 dossiers, je ne peux pas respecter mon code, je ne peux pas respecter mes
normes. Et cette alarme-là m'a été nommée à plusieurs reprises autour
des formateurs.
Il y a une personne qui est un gestionnaire dans
un programme à... Enfance et difficultés, alors qu'on est avec des enfants et des parents, et ce qu'on
m'expliquait, c'est que la restructuration du réseau est tellement
médicocentriste que, maintenant si un enfant n'a pas un diagnostic du pédiatre,
il n'aura pas accès à des services psychosociaux, il va être placé sur une liste d'attente. Eux sont en santé
mentale au niveau des adultes, qui nous donnent des exemples du
genre : une personne qui a des
problèmes de psychiatrie, si elle n'est pas vue par le psychiatre, n'aura pas
tout de suite accès à des services d'un travailleur social et va être
mise sur une liste d'attente. Ça, c'est la réalité actuelle qu'on me nomme au
niveau du réseau.
Alors, c'est pour ça qu'on soulève et qu'on est
assez au fait de ces réalités-là, parce que ça nous est ramené quotidiennement par des travailleurs sociaux qui
appellent à l'ordre pour avoir du soutien, pour savoir qu'est-ce qu'ils
vont faire pour se sortir de leurs conflits de loyauté. Donc, c'est quand même
assez alarmant comme situation.
Donc, c'est
évident que, dans le grand spectre de la protection du public, le Code des
professions, c'est vraiment un vent
de fraîcheur, ça fait 40 ans qu'on ne l'a pas réouvert. Cependant, le contexte
actuel est assez fragilisé au niveau des choix que le gouvernement fait. Alors, c'est pour ça qu'on vous soulève
cette idée-là que, si jamais... dans les prochains travaux, on veut voir comment on va protéger le
public tout en s'assurant que le milieu, l'organisation du travail
respectent ou donnent des espaces cliniques pour que les gens puissent
intervenir tout en respectant la loi. Alors, c'est pour ça qu'on voulait le
soulever ici ce soir.
M. Jolin-Barrette : Mais, dans le
fond, ce que vous nous dites, là, c'est qu'il y a des patients du réseau de la
santé qui pourraient voir un professionnel, travailleur social ou membre de
votre ordre, et qui ne peuvent pas le voir parce
qu'avec la réforme, le projet de loi n° 10 qui a été adopté, à cause de la
réforme libérale en matière de santé, il y a la nécessité absolument d'avoir un diagnostic qui passe par le médecin
nécessairement, avec la facturation associée, et les autres professionnels du réseau ne peuvent pas
accompagner, aider les gens tant que le médecin, il n'est pas passé
avant. C'est ça que je comprends, en gros, là.
Mme Ouimette (Guylaine) : En fait,
je n'ai pas fait l'analyse de ce point de vue là. Ce que je peux vous dire, c'est qu'actuellement il y a un transfert
massif de travailleurs sociaux en GMF, et on n'a pas reçu... Les
travailleurs sociaux sont inquiets parce
qu'ils ne savent pas comment ils vont pouvoir travailler dans... quelles seront
les balises. Et je l'ai demandé au ministre Barrette quand je l'ai
rencontré, quelles seront les balises qui seront données pour que les travailleurs sociaux puissent oeuvrer avec leur
jugement professionnel ainsi qu'avec leurs normes et leur expertise dans
les milieux des cliniques médicales.
Le Président (M. Ouellette) :
30 secondes, M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Et là,
actuellement, la perception des travailleurs sociaux, c'est : bien, je ne
peux pas exercer pleinement ma
profession, dans le fond, j'ai des compétences professionnelles, mais là, à
cause de la réforme du réseau, je suis un peu limité, je suis un peu
squeezé puis je vais être tributaire de ce que le médecin va me permettre de
faire. C'est un peu ça.
Mme Ouimette (Guylaine) : Il y a ces
questionnements-là et il y a aussi la détresse de ne pas pouvoir... d'avoir tellement de dossiers, d'avoir tellement
de pression des gestionnaires pour être performants qu'ils sont coincés
en conflit de loyauté.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci beaucoup, Mme Guylaine Ouimette, M. Rioux, M.
Silver, représentant l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.
Je vous remercie d'avoir participé aux travaux de notre commission.
La commission
ajourne ses travaux à demain, le
mercredi 21 septembre 2016, après les affaires courantes, soit
vers 11 heures, où elle poursuivra son mandat.
(Fin de la séance à 21 h 45)