(Onze heures trente-quatre minutes)
Le
Président (M. Iracà) : ...Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de poursuivre l'étude
détaillée du projet de loi n° 101, Loi donnant suite aux recommandations
de la Commission Charbonneau en matière de financement politique.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Montpetit (Crémazie) est remplacée par Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger);
M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé par M. Iracà (Papineau);
Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Drainville (Marie-Victorin);
M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par Mme Léger (Pointe-aux-Trembles);
et Mme Roy (Montarville) est remplacée par M. Charette (Deux-Montagnes).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Iracà) :
Merci, M. le secrétaire. Alors, lors de l'ajournement de nos travaux,
hier soir, nous discutions d'un sous-amendement proposé par le député de Deux-Montagnes à un amendement proposé par la ministre à l'article 32.
Alors, dès maintenant, M. le
député de Deux-Montagnes, la parole est à vous. Je vous cède la parole sur votre sous-amendement.
Il vous reste un temps de 11 min 20 s.
M.
Charette : Oui. C'est bien
gentil. Merci, M. le Président. Pour bien illustrer les notions de prescription,
j'aurais peut-être des questions à poser à Mme la ministre. En toute fin de journée, hier,
avant l'ajournement, elle a mentionné qu'elle avait reçu copie de la
lettre du Directeur général des élections et que son chef avait reçu copie de
la lettre du Directeur général des élections
uniquement hier. Peut-être lui demander comment peut-elle avoir été informée
uniquement hier si la lettre a été envoyée en mai 2015.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, là-dessus, si la ministre juge à propos
de répondre, elle pourra vous répondre. Je cède la parole à la ministre.
Mme de Santis : Je ne travaille pas
au Parti libéral du Québec, je n'ai jamais reçu copie de la lettre. J'ai eu connaissance de la lettre quand ça a été présenté
hier à la Commission des institutions lors de l'étude article par article
du projet de loi n° 101. Alors, c'est de cette façon-là que j'ai eu
connaissance de la lettre.
Le Président (M. Iracà) : Alors,
voilà. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : C'est gentil, merci. Vous avez évoqué aussi la connaissance
du premier ministre, comme quoi elle remontait
à hier uniquement. Si vous ne travaillez pas pour le Parti libéral, le premier
ministre, lui, est chef du Parti libéral. Comment se fait-il qu'il aurait été informé uniquement hier d'une somme
demandée ou réclamée par le Directeur général des élections?
Le
Président (M. Iracà) : Alors, si la ministre souhaite répondre, elle
peut le faire, là, mais je vous rappelle qu'on est à l'étude du
sous-amendement que vous avez présenté hier, là.
M. Charette : Tout à fait. C'est le
contexte de l'amendement, effectivement.
Mme de
Santis : Bien, vraiment, je trouve la question un peu simpliste.
J'aimerais savoir si le chef de votre parti reçoit toute la correspondance qui est reçue par Brigitte chez vous. Je
doute ça fortement, c'est... Donc, hier, quand on a eu connaissance de la lettre, je l'ai portée à
l'attention du cabinet du premier ministre, qui l'a portée à l'attention du
premier ministre. C'est de cette façon-là que ça a fonctionné.
Et j'aimerais aussi souligner une chose à mon
cher collègue. Les sept demandes de 500 $, c'est pour des contributions illégales faites en 2009. D'après la
loi existante, la loi actuelle, ces sept demandes de 500 $ pour
3 500 $ seraient
prescrites. En vertu de la proposition faite dans le projet de loi
n° 101 — parce
que j'ai appris aujourd'hui que c'était
suite à des enquêtes ou des vérifications faites en 2014 — le projet de loi n° 101 rouvre la
prescription quant aux demandes de remboursement de ces sept demandes.
Vous voyez,
ce qu'on fait avec le projet de loi n° 101 donne au Directeur général des
élections le pouvoir de faire des
choses qu'il ne peut pas faire aujourd'hui. Donc, en vertu de ce qu'on propose,
trois ans de la connaissance, la prescription se terminerait quelque part en 2017.
Alors, ce qu'on propose est vraiment... est positif, une grande amélioration
de ce qui existe présentement, et j'espère
que vous allez procéder et nous aider à adopter le projet de loi dans les plus
brefs délais.
Le Président (M.
Iracà) : Alors, M. le député de Deux-Montagnes.
• (11 h 40) •
M.
Charette : Oui. La ministre me pose à son tour une question, à
savoir : Si le Directeur général des élections avait fait parvenir une lettre semblable à la
Coalition avenir Québec, est-ce que notre chef, François Legault, en aurait
été informé? Je peux vous assurer que oui.
Pour nous, les questions d'éthique, pour nous, les questions de financement
illégal, pour nous, les demandes formulées
par le Directeur général des élections demeurent une priorité. Donc, je peux
vous assurer que, si, éventuellement, notre
directrice générale reçoit une lettre semblable, François Legault va exiger
d'en être informé séance tenante. Donc, voilà pour la question qui a été
posée par la ministre.
Au niveau de la
prescription, parce que c'est encore ça qui est au coeur de l'amendement qu'on
a déposé tout à l'heure en Chambre, la
ministre a mentionné qu'il y aura remboursement en vertu de la loi. Le premier
ministre a dit pareille chose lorsque
le chef de la Coalition avenir Québec lui a posé une question. Donc, il y a
quelque temps et à travers plusieurs,
plusieurs motions déposées en Chambre au fil des trois dernières années, on
s'était tous entendus, main sur le coeur,
pour dire : Peu importe qu'il y ait prescription ou pas, toutes les
formations politiques s'engagent à rembourser les montants que nous
réclamerait le Directeur général des élections.
Or,
autant le premier ministre que Mme la ministre, dans leurs réponses, ont changé
de discours. Maintenant, ce n'est plus un engagement de rembourser les
sommes réclamées par le Directeur général des élections, qu'elles soient prescrites ou pas, mais la condition, aujourd'hui,
semble : on va rembourser les sommes uniquement si elles ne sont pas
prescrites. Donc, ça ajoute à l'importance de l'amendement qu'on a déposé.
Donc, malheureusement, c'est un recul majeur
de la part et du Parti libéral, et du premier ministre, et de la ministre.
Maintenant, on dit : Si la somme, elle est prescrite, on ne la remboursera pas. Et c'est pour ça que l'on tient, de
notre côté, à faire adopter un amendement de cette nature-là.
L'exemple
qu'a donné Mme la ministre peut s'appliquer lorsque ça fait son affaire, mais
je peux vous illustrer une autre situation. Si les cas des sept personnes en
question avaient soulevé un doute dans l'esprit du Directeur général des élections, il y a quelques années de cela,
mais qu'il n'avait pas tous les éléments nécessaires pour faire la réclamation
contenue dans la lettre du 15 mai 2015, là,
la situation pour laquelle on se bat avec notre sous-amendement s'appliquerait
pleinement.
Il
est possible que le Directeur général des élections ait des bribes
d'information incomplètes pour lui permettre de faire une réclamation à ce jour. Mais toujours dans les cartons, dans
l'espoir que les informations ramassées ici et là lui permettent, un jour, de soit porter des
accusations ou soit procéder à une réclamation auprès d'une formation politique
visée par ce financement illégal, donc
l'amendement prend tout son sens parce que, dans le cas présent, le directeur
général, dans la même situation,
aurait été obligé d'admettre que c'est une somme ou des sommes prescrites, et,
encore une fois, le Parti libéral aurait pu se permettre d'évoquer la
prescription pour ne pas rembourser les sommes exigées.
Et
moi, je le disais hier, et vous allez m'entendre le dire à plusieurs reprises
aujourd'hui si besoin est, mais les sommes
amassées de façon illicite l'ont été en 2009 pour ce qui est de la lettre qui a
été partagée hier. Ça veut dire que, pour
les élections de 2012 et 2014, le Parti libéral avait dans ses coffres de
l'argent sale ou de l'argent amassé de façon illicite, et c'est ce que l'on veut empêcher, pas uniquement pour le
Parti libéral, mais pour toutes les formations politiques dignes de ce nom. On veut que le financement se
fasse selon les règles de l'art pour que, lorsqu'il y a rendez-vous électoral,
les citoyens, les citoyennes puissent se
convaincre que ces campagnes électorales sont dirigées au Québec dans le
respect des lois qu'on a votées à l'Assemblée nationale.
Donc,
la ministre nous a partagé un souhait, à savoir de voir adopter le projet de
loi le plus rapidement possible. Moi,
je veux dire à la ministre — et je serais très, très intéressé à ce
qu'elle m'écoute : On pourra procéder dans la mesure où les
questions de prescription seront réglées. Pas uniquement à la satisfaction de
la Coalition avenir Québec, la question a
été posée par mon collègue de Marie-Victorin hier, on a eu l'occasion de poser
la question également, de notre côté,
au Directeur général des élections. L'amendement que l'on présente et que l'on
débat depuis, malheureusement, trop longtemps, compte tenu de
l'obstination de la partie gouvernementale, cet amendement-là constituerait un
outil précieux pour le directeur général, pour lui permettre de bien
s'acquitter de son mandat.
Donc,
oui à l'adoption rapide du projet de loi dans la mesure où toutes les questions
de prescription seront réglées. Sinon,
c'est notre intention de travailler à bonifier le projet de loi. Si cette
version-ci de l'amendement ne convient pas à la ministre, nous en trouverons une autre, une autre ensuite, une autre et
une autre jusqu'à temps qu'on trouve le libellé qui puisse mettre en
confiance la ministre et qui lui permettra de dire... C'est vrai, ce
n'est pas la répondante du Parti
libéral, mais c'est la ministre de tous les Québécois
et de toutes les Québécoises en
matière de réforme des institutions démocratiques, et, si on ne
se donne pas cet outil-là, ma foi, je ne vois pas comment elle pourra se
proclamer responsable de cette loi-là si elle refuse un souhait exprimé
par le Directeur général des élections.
Donc,
vous comprendrez, M. le Président, que les questions que je posais à la ministre
mettaient clairement en contexte l'amendement que l'on débat présentement,
et je ne suis, malheureusement, pas rassuré. Je vous dirais, à travers les réponses qu'elle a fournies et à
travers les réponses que le premier
ministre a fournies en Chambre ce
matin, on a toutes les raisons d'être
encore plus inquiets aujourd'hui parce
qu'ils ont dit... En fait, pas indirectement, ce qu'ils ont dit directement en Chambre, c'est que les motions qu'on a adoptées
et qu'on a appuyées ne valent plus rien. Dorénavant, c'est uniquement
les sommes non prescrites que le Parti
libéral s'engage à rembourser dans
l'éventualité où le Directeur général des élections formulera d'autres demandes. Et on a eu l'occasion
hier encore d'en discuter, à l'automne le Directeur général des élections s'est engagé, et c'est un geste
que l'on salue...
Le
Président (M. Iracà) : 30 secondes, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Si vous me
permettez, je reviendrai à travers les prochains échanges parce que
la question est encore d'importance. Donc, je
reviendrai.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Alors, sur le sous-amendement déposé par le
député, est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Borduas, ce
que j'ai comme information, c'est que vous n'avez plus de temps, vous l'avez
tout pris hier. Donc, je suis désolé, est-ce que...
M.
Jolin-Barrette : Je comprends, M. le Président. Je pensais que nous
étions un autre jour.
Le Président (M.
Iracà) : Non, non, non, c'est toujours sur le même sous-amendement.
M.
Jolin-Barrette : Je me sens bâillonné, là, M. le Président.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, est-ce qu'il y a, sur le sous-amendement
déposé par le député de Deux-Montagnes, d'autres interventions? Sinon,
nous allons procéder aux voix. Alors...
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, je vais vous demander le vote par
appel nominal, s'il vous plaît.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, M. le secrétaire, un vote par appel
nominal sur le sous-amendement déposé par le député de Deux-Montagnes.
Le Secrétaire :
Pour, contre, abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette :
Pour l'amendement.
Le Secrétaire :
Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?
Mme Léger :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme de Santis (Bourassa-Sauvé)?
Mme de
Santis : Non.
Le Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Rousselle (Vimont)?
M. Rousselle :
Contre.
Le Secrétaire :
M. le Président?
Le Président (M.
Iracà) : Abstention.
Le Secrétaire :
C'est rejeté.
Le
Président (M. Iracà) :
Alors, le sous-amendement est rejeté. Nous allons revenir à l'amendement qui avait été déposé par la ministre à l'article 32. Alors, sur cet amendement, alors, s'il y a
des interventions... M. le député
de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, vous me permettrez de déposer un sous-amendement.
Le Président (M.
Iracà) : Je m'y attendais. Alors, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Je vous le lis. L'amendement de l'article 32 du projet
de loi est modifié par le sous-amendement suivant, qui vient ajouter,
après le premier alinéa, l'alinéa suivant :
«Malgré le premier alinéa, la connaissance par
le Directeur général des élections d'une information relative à toute contribution
ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux articles 5, 29
et 31 pendant la période comprise entre 1996 et 2016 débute avec la sanction de la présente loi,
même si le Directeur général des
élections avait eu connaissance
du fait avant la sanction du présent projet de loi, et ce pour une période de
trois ans.».
Le Président (M. Iracà) : Alors, merci,
M. le député de Borduas. Pour des questions logistiques, nous allons suspendre quelques
instants pour nous permettre de faire des photocopies et les distribuer. Alors,
je suspends.
(Suspension de la séance à 11 h 49)
(Reprise à 11 h 51)
Le
Président (M. Iracà) : ...reprendre.
Alors, à cet instant, je vais donner la parole immédiatement au député de Borduas pour qu'il puisse expliquer peut-être
un petit peu plus en profondeur le sous-amendement à l'article 32 qu'il désire déposer.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Donc, concrètement, l'amendement vise — et je pense que le libellé vient l'énoncer — à ce que les contributions qui ont été
faites illégalement aux partis politiques entre 1996 et 2016, donc la période qui a été couverte par la commission
Charbonneau... Donc, la commission a été déclenchée en 2011, M. le Président,
mais on vise à avoir une période
contemporaine jusqu'à aujourd'hui, jusqu'en 2016. Donc, on vise à ce que les
contributions illégales qui ont été
versées aux partis politiques durant la période de la commission Charbonneau
puissent être récupérées par le Directeur général des élections.
Donc,
concrètement, M. le Président, ce que ça veut dire, c'est la possibilité, pour
le Directeur général des élections, d'aller
récolter une contribution déjà prescrite parce que c'est ça, l'élément
important. Et puis on va pouvoir y revenir tout à l'heure, il y a des avancées avec le projet de loi n° 101,
mais il reste quelques failles à colmater, puis l'amendement vise à colmater l'une de ces failles-là. Donc, la
période de connaissance commencerait à partir de la sanction de la loi.
Donc, même si le Directeur général des élections avait déjà eu une information,
avait déjà eu la connaissance d'une contribution
illégale et, pour x, y raison, que le délai pour entreprendre une poursuite
civile serait prescrit, bien, nous, ce
qu'on vient dire avec l'amendement, c'est que, pour la période couverte par la
commission Charbonneau, on permet au
Directeur général des élections, pour une période transitoire de trois ans, de
pouvoir s'adresser aux partis politiques de nouveau afin de pouvoir récupérer cette somme versée illégalement, somme
qui aurait déjà été prescrite. Donc, ce qu'on vise par l'amendement, M.
le Président, c'est vraiment de parer à toutes les situations juridiques
possibles pour éviter toute forme de contestation, comme le Parti libéral l'a
fait en 2015 sur une réclamation qui est déjà prescrite. Donc, l'essentiel de
l'amendement, M. le Président, on pourrait le résumer ainsi.
Sur le
contenu et puis sur l'objectif, l'opportunité de l'adopter, M. le Président...
Et je veux m'adresser à la ministre parce
que je trouve que, jusqu'à ce jour, les travaux de la commission ont
relativement bien été. On s'est réunis en comité consultatif, il y a des avancées majeures qui ont été réalisées, et, à
ce titre-là, je souhaite l'en féliciter. Cependant, M. le Président, les arguments présentés par la
ministre, qui nous dit : Avec le projet de loi n° 101, on retourne à
l'origine, avant la modification du
10 décembre 2010, c'est une avancée, c'est une bonne chose. Donc, l'article 5,
l'article 32 font en sorte, par une
disposition déclaratoire... fait en sorte que ça remet les partis dans l'état
du 10 décembre 2010. Donc, lorsque la prescription
n'est pas acquise, M. le Président, ça, c'est une avancée majeure. Ça va
couvrir les situations où le Directeur général
des élections, dans le cadre de ses enquêtes, dans le cadre de ses
vérifications, obtient une information, enquête et réalise qu'il y a des sommes qui ont été versées
illégalement à un parti politique
et là, avec la nouvelle disposition proposée par
la ministre, il a tout le loisir maintenant de poursuivre. Donc, supposons, une contribution illégale qui a été faite en 2008,
M. le Président. Actuellement, c'est prescrit. Avec la proposition législative de la ministre, le Directeur général des élections, s'il
l'apprend cette année, il va pouvoir poursuivre.
Donc, ça,
c'est la première des choses, puis on est d'accord, la ministre et moi,
sur ce point, c'est une bonne chose d'éliminer
le délai de cinq ans — qui
était prévu à l'article 100 — à
partir de la perpétration de l'infraction. Puis c'est une bonne avancée, on l'admet. Cependant, pour
éviter que des partis politiques puissent opposer la prescription, M. le Président, des situations concrètes,
comme c'est arrivé hier, où on a appris qu'en 2015 le Parti libéral avait
opposé la prescription... Puis je conviens
avec la ministre que c'est un régime juridique différent qui s'applique, hein, parce que c'était
prescrit, parce qu'on était avec le
délai de cinq ans. Cependant, ça pourrait arriver, M. le Président, qu'il y a
déjà des réclamations... Et le
Directeur général des élections nous l'a dit hier soir, ça pourrait arriver
qu'il y a des réclamations déjà
prescrites pour lesquelles il n'aurait pas l'habilitation pour poursuivre, pour
entreprendre une poursuite devant les tribunaux
dans l'éventualité où un parti politique refuserait de rembourser cette
contribution illégale pour le motif de la prescription.
Et
certainement, M. le Président, les parlementaires qui sont ici, en cette
Chambre, j'espère qu'ils ne souhaitent pas
que les partis politiques opposent la prescription à une demande du Directeur
général des élections parce qu'à l'Assemblée tout le monde s'est engagé — les chefs de parti se sont engagés, le
premier ministre du Québec s'est engagé, le chef du Parti libéral s'est engagé — à rembourser toutes les sommes sur
présentation d'une lettre, d'une demande du Directeur général des élections. Malheureusement, en 2015,
ce n'est pas ce qui est arrivé au Parti libéral, malheureusement. Mais comment est-ce qu'on fait, M. le Président, pour
éviter qu'une telle situation se reproduise? Vous et moi, M. le Président,
on veut que le Parti libéral rembourse les sommes qui ont été collectées
illégalement. J'imagine que la majorité de la députation
libérale aussi souhaite la même chose. La ministre nous dit : Je ne le
savais pas, je l'ai appris hier soir. On se fie à sa parole, M. le
Président...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ce
que le règlement prévoit, M. le député de La Prairie.
Une voix : ...
Le Président (M. Iracà) : Excusez,
la parole est au député de Borduas.
Une voix : Ah! bien, ce
serait bon que tu précises.
Le Président (M. Iracà) : La parole
est au député de Borduas, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Et donc la ministre nous
dit : Je n'étais pas au courant. Le premier ministre nous a dit, il n'était pas au courant non plus. Manifestement,
il y a quelqu'un au Parti libéral qui était au courant parce qu'ils ont reçu la lettre et ils l'avaient
en leur possession hier. Partant de là, M. le Président, comment est-ce qu'on
fait pour s'assurer d'avoir une certitude
que les partis politiques n'opposeront pas la prescription? C'est un peu le
principe, M. le Président, des
pouvoirs et des contrepoids, hein? Il y a plusieurs systèmes politiques qui
sont basés comme ça. Les États-Unis
ont développé leur système politique avec des pouvoirs et des contre-pouvoirs.
Quel serait le contre-pouvoir, M. le Président, dans la présente
situation pour qu'un parti politique ne refuse pas de rembourser pour le motif
de la prescription?
• (12 heures) •
Nous, on a une solution très claire et on a une
solution qui est également modérée eu égard à notre corpus législatif, M. le
Président. Pourquoi elle est modérée, notre proposition? Parce qu'on dit :
Écoutez, la commission Charbonneau avait un
mandat qui a été donné par un gouvernement libéral entre 1996 et 2011 pour voir
quel est le lien entre le financement
des partis politiques et l'industrie de la construction. Suite aux conclusions
de la commission Charbonneau, le
gouvernement a adopté un projet de loi pour que les entrepreneurs en
construction qui avaient contribué illégalement
à la caisse électorale du parti gouvernemental puissent rembourser. On a créé
un régime d'exception pour eux. Pourquoi
ne faisons-nous pas la même chose avec les partis politiques, M. le
Président? Parce que l'argent qui a été versé illégalement par les
entrepreneurs en construction, par les firmes de génie-conseil, par tout le
milieu sectoriel, bien, il est sorti
de leurs poches puis il s'est retrouvé au sein des partis politiques, de
l'argent qui a été donné en contravention à la Loi électorale.
Il y a une
expression, M. le Président, qui dit : Ce qui est bon pour pitou est bon
pour minou. Dans ce cas-ci, ça pourrait s'appliquer, M. le Président. Et
pourquoi la position, elle est modérée, M. le Président? Elle est modérée en ce sens où on prévoit un délai, avec le
sous-amendement que nous proposons, un délai de trois ans. Un délai de trois
ans où la prescription... En fait, la
connaissance, pour le Directeur général des élections, d'une réclamation déjà
prescrite en vertu des règles
pourrait revivre pour une période de trois années, M. le Président. Une période
de trois années où on dit : Bien,
le Directeur général des élections, dans le cadre de ses enquêtes, va pouvoir,
même si un parti politique aurait pu opposer
la prescription, avoir un levier pour demander à ce que cet argent soit
remboursé, l'argent illégal, l'argent sale.
Parce qu'on
ne veut pas faire des campagnes électorales avec de l'argent qui a été collecté
illégalement, M. le Président. Bien,
en tout cas, nous, de notre côté, ce n'est pas ce qu'on veut faire. Si les
partis politiques ici, assis autour de
la table, nous disent qu'eux ça ne leur dérange pas de faire de la politique
avec de l'argent sale, ça leur appartient, mais la population les jugera. Mais, dans la perspective du jugement de la
population aussi, M. le Président, le fait de se cacher derrière la prescription, derrière cet argument
juridique là, moi, je pense personnellement, M. le Président, que ça n'a pas sa
place. Puis l'attitude du Parti libéral en
2015 pour ne pas rembourser le 3 500 $ pour le motif qu'il y avait prescription
acquise, c'est inacceptable, intolérable,
d'autant plus que le premier ministre, que l'ancien député de Beauce-Sud,
ancien ministre de la Sécurité
publique, avaient clairement exprimé, en appuyant une motion unanime de
l'Assemblée nationale, que les partis politiques s'engageraient à
rembourser.
Donc, sur la
question de la prescription, M. le Président, je reviens à ce que la ministre
nous a dit tout à l'heure, d'entrée
de jeu, elle nous a dit : Écoutez, oui, il y a une avancée majeure. C'est
vrai lorsqu'on se retrouve au 10 décembre 2010, mais il existe toujours une faille dans son projet
de loi, et on vise à colmater cette faille. Et la ministre le sait très bien,
les seules parties qui pourront invoquer la
prescription dans ce dossier-là seront les partis politiques. Comme ministre
de la Réforme des institutions
démocratiques, c'est son rôle de protéger la démocratie, c'est son rôle de
s'assurer que les partis politiques, les formations politiques
n'utiliseront pas cet argument-là.
M. le Président, hier, la ministre nous a
dit : Je ne représente pas le Parti libéral à cette table. D'accord, elle représente le gouvernement. Le gouvernement nous a
dit qu'il voulait avoir les plus hauts standards en matière d'éthique. Comment faire en sorte de parer à toute brèche en
matière d'éthique? Comment s'assurer de le faire? C'est en adoptant la proposition d'amendement. Et, je vous le répète,
la proposition d'amendement, elle est très raisonnable, elle a une clause
crépusculaire, un délai de trois ans. On
couvre la période de la commission Charbonneau pour que toute l'influence de
l'argent indu en politicien soit bannie et qu'il soit remboursé.
Et, vous
savez, à la période des questions, aujourd'hui, la ministre nous a dit
également que ce n'était pas illégal d'invoquer
la prescription. C'est vrai que ce
n'est pas illégal, mais ce n'était pas légitime. Puis d'ailleurs,
M. le Président, vous me permettrez de citer un de vos
anciens collègues et un de vos prédécesseurs qui était assis dans cette chaise,
il n'y a pas si longtemps, l'ancien bâtonnier du Québec,
ancien député de Fabre, hein, qui nous dit, par le biais des médias
sociaux : Il faut faire la différence
entre légalité et légitimité. Et il a bien raison, l'ancien bâtonnier, et
l'ancien député de Fabre, et l'ancien président de
la Commission des institutions. Et il indique également, au niveau de
l'éthique, qu'il y a une problématique parce
qu'on peut bien avoir un moyen de défense au point de vue légal, et nous en
convenons avec la ministre,
dans l'état des choses actuel, dans l'état de la législation,
dans l'état du droit actuel, c'est vrai que le Parti libéral pouvait invoquer la
prescription pour dire : C'est déjà prescrit.
D'ailleurs,
le Directeur général des élections l'avait indiqué dans sa lettre, et la ministre
l'a soulevé, elle a dit : Le
directeur l'avait indiqué dans sa lettre. C'est vrai, mais, par contre, déjà en
2013 le Parti libéral avait dit : Si on reçoit une réclamation du Directeur général des
élections, nous allons rembourser. À la première occasion, quand c'est venu le
temps de rembourser, qu'est-ce qu'ils ont
dit? On invoque la prescription. Là, vous conviendrez, M. le Président, qu'il
y a dichotomie entre ce qu'on dit puis ce
qu'on fait, au Parti libéral. Là, on a l'ancien député de Fabre, président de
la Commission des institutions, qui nous dit : Écoutez, légalité,
légitimité...
Moi,
M. le Président, j'entends bien la ministre lorsqu'elle nous dit : On fait
une avancée majeure avec la disposition de l'article 100, on revient au 10 décembre 2010. Ça va là-dessus,
je la suis. Par contre, ce que je lui dis : Pour éviter que les partis politiques invoquent le motif de la
prescription, il y a un gros trou, gros comme ça, dans sa loi, et puis elle le
sait, elle le sait très bien. Puis la
meilleure illustration que nous avons, M. le Président, c'est le cas concret du
Parti libéral qui a invoqué le motif
de la prescription pour ne pas rembourser en 2015. Il a fallu qu'on l'apprenne
ici, à la Commission des institutions,
pour que le premier ministre dise : Bon, finalement, on va rembourser. La
ministre le sait. Et, vous savez, même les enfants le savent aussi, la
distinction entre le bien et le mal. On peut respecter les lois, les règlements,
les utiliser à son avantage, mais on peut
savoir que notre comportement, en faisant ces actions, ne répond pas aux
standards d'éthique qu'on devrait avoir en politique.
Et
comment est-ce qu'on fait pour ramener l'éthique avec une règle de droit? Bien,
c'est ce qu'on vous propose, M. le
Président, aujourd'hui, on offre la possibilité au Parti libéral de s'amender
et de dire : Écoutez, c'est vrai, pour les réclamations qui sont déjà prescrites, on a dit qu'on allait les
rembourser. On vous a dit, là, la main sur le coeur : Nous allons rembourser les sommes. Qu'est-ce que le
Parti libéral a fait à la première occasion? Il ne les a pas remboursées,
les sommes. Comment est-ce qu'on fait, M. le
Président, pour faire en sorte que le Parti libéral rembourse les sommes
maintenant, et que tous les partis
politiques remboursent les sommes, et qu'ils n'utilisent pas la prescription
comme motif d'exonération? Bien, on
vient modifier l'amendement proposé par la ministre, notre amendement, qui est
un amendement qui vise à s'assurer
que le Directeur général des élections, lorsqu'il va venir cogner à la porte
des partis politiques, il va leur
dire : Vous avez reçu une contribution illégale, je vous demande de la
rembourser, et, en passant, vous ne pourrez plus utiliser le motif de la
prescription pour la période prévue entre 1996 et 2011.
• (12 h 10) •
Parce
que la commission Charbonneau, M. le Président, l'a très bien démontré, le
financement illégal avait été instauré
en système dans certaines formations politiques, et les gens veulent que l'on
lutte contre ça, et les gens veulent que
chaque dollar de contribution illégale qui a été versé dans la caisse
électorale d'un parti politique soit remboursé et se retrouve dans les coffres de l'État québécois
parce que ce ne serait pas acceptable
qu'un parti politique utilise de l'argent des contributions illégales. Il ne serait pas
acceptable qu'un parti politique utilise des contributions illégales pour faire
une campagne
électorale, pour faire la promotion de ses idées parce que les règles du jeu doivent être les mêmes pour tout le monde, et on doit les respecter, M.
le Président. C'est le principe de la
Loi électorale, c'est un principe d'équité.
Et, vous savez, tout
au long de nos travaux, M. le Président, le Directeur général des élections
nous a dit à de multiples reprises :
Pour une question d'équité entre les partis — et, au début de nos travaux, il l'a mentionné — même
si je n'ai pas le pouvoir de réclamer ces
sommes — au tout début de nos travaux — je vais informer les partis politiques
des contributions illégales qu'ils ont reçues, même si c'est déjà prescrit, et
je vais informer la population.
Pourquoi est-ce qu'il
a...
Le
Président (M. Iracà) : M. le député de Borduas, il vous reste 30
secondes. Simplement pour vous en aviser, là.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Mais, je vous dirais, M. le Président, que
c'est fondamental. On a un sous-amendement qui est très balisé, qui
propose une voie d'accompagnement, pour le gouvernement, qui est très légitime,
et j'invite tous mes collègues de la partie gouvernementale à se rallier à la
proposition de sous-amendement parce que ça
nous permettrait de progresser et d'arriver à une autre étape pour faire
adopter le projet de loi, M. le Président.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. le député de Borduas. Sur le
sous-amendement déposé par le député, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, simplement, je veux m'assurer,
par principe d'alternance, est-ce que... Ça va, Mme la députée de
Pointe-aux-Trembles? Alors, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Merci, M. le Président. J'écoutais avec intérêt mon
collègue de Borduas, mais, en même temps, je ne pouvais pas m'empêcher de regarder quelques titres d'articles qui
sont maintenant en ligne à travers différents médias, que ce soit Le Journal de Montréal,Journal
de Québec : Dons illégaux non remboursés par le Parti libéral en
2015 : De Santis défend
la décision. Sur le site de La
Presse, on peut lire comme titre De Santis juge normal que le PLQ ait
refusé de rembourser des dons...
Une voix :
...
Le Président (M.
Iracà) : Oui, excusez-moi, M. le député de Deux-Montagnes...
M.
Merlini : ...rappelle au collègue qu'il faut désigner la ministre par
son titre, et non par son nom, s'il vous plaît.
Le Président (M. Iracà) :
Effectivement, M. le député de La Prairie, vous avez raison. Même si vous
évoquez une citation dans le journal ou vous faites référence à un
document, vous devez appeler la ministre par son titre.
M.
Charette : C'est bien vrai, vous m'en excuserez. En fait, ce n'est pas
un manque de respect, c'était réellement une lecture intégrale, là, des titres que l'on peut voir à travers
différents médias, et d'autres aussi sont en ligne présentement. Donc, j'essaie toujours de comprendre le refus du
Parti libéral, de la ministre en particulier, d'assumer le rôle qui est le
sien. On a eu l'occasion de le
mentionner, elle-même a pris la peine hier, à plusieurs reprises, de distinguer
ses responsabilités.
Ce matin encore, elle
a précisé qu'elle n'était pas la répondante du Parti libéral. Je veux la
croire. En même temps, elle ne peut pas
faire fi de la couleur politique, là, qu'elle porte et qui lui permet d'agir
comme ministre actuellement. Mais
surtout, sa responsabilité de ministre, elle doit l'assumer pour tous les
Québécois et toutes les Québécoises. Donc, il n'est pas question, dans le sens qu'on veut bien donner à la fonction,
de servir uniquement les intérêts de sa formation politique.
Et
le débat que l'on tient aujourd'hui, M. le Président, n'est pas un procès à
l'encontre du Parti libéral, je veux qu'on
soit bien clairs là-dessus. Si c'était le cas, on n'exigerait pas un amendement
comme celui débattu actuellement parce
que cet amendement, ultimement, va concerner l'ensemble des formations
politiques. Donc, toute formation politique qui serait prise en défaut aurait à répondre d'une demande du Directeur
général des élections. Donc, je veux rassurer la ministre, je veux
rassurer peut-être les gens qui nous écoutent, le débat que l'on tient ne vise
pas à faire le procès du Parti libéral du
Québec. En même temps, les faits sont têtus, et la lettre dont on a eu copie
hier fait, elle, référence au Parti libéral
du Québec. En même temps, je peux vous mentionner et vous assurer, pour avoir assisté aux
échanges du caucus de notre formation politique, que, lorsque vient le temps de questions d'intégrité et
d'éthique, vous pouvez être assuré que,
si le parti, hein, notre directrice
générale avait reçu pareille lettre,
le chèque aurait été posté dans la journée. Donc, non, ce n'est pas un procès du Parti libéral, mais, en même temps, ce qui est malheureux, au fil des ans, c'est le refus
du Parti libéral de changer les pratiques.
On
a beaucoup parlé des avancées du projet de loi n° 101. On en convient, on a eu l'occasion
de le mentionner à plusieurs reprises. D'ailleurs, le sous-amendement que l'on débat actuellement est le sous-amendement de l'article 32 d'un projet
de loi qui en comporte 33, donc on a quand même
bien cheminé. Il y a eu, naturellement, des éléments avec lesquels on aurait aimé un
petit peu plus de mordant. N'empêche que ces articles-là ont, tout de même, été
adoptés.
Moi, je souris,
quoique c'est un petit peu lassant lorsque la ministre, encore en Chambre ce
matin, répétait qu'il y a consensus.
Il y a eu consensus
sur certains principes, oui, mais, dès le départ et dès le tout, tout début,
les éléments sur lesquels on avait
des réserves ont été communiqués. Donc, d'aucune façon, la ministre
ne peut sembler surprise de ces
prises de position que nous défendons, là, avec un petit peu plus d'insistance
depuis hier. Parce qu'on pourrait
remonter aux toutes premières étapes
de l'étude du projet de loi. Que ce soit même à travers le vote sur le principe
du projet de loi, ces réserves
avaient été exprimées. Si on souhaitait remonter encore davantage dans le
temps, dès le dépôt du rapport de la commission
Charbonneau la Coalition avenir Québec, la CAQ, a exprimé des réserves, et on a
dit : Il y a lieu d'aller plus loin.
Donc, oui au consensus sur certains éléments, sur une majorité d'éléments même,
mais non, on n'était pas d'accord sur la totalité de ce qui était
proposé.
Et
moi, je vais saluer — et je
n'aurai pas de mal à le répéter — l'esprit de collaboration qui prévaut depuis
le début. Cependant, sur les questions plus sensibles, malheureusement,
cette collaboration-là ne semble plus tenir, il n'y a pas d'ouverture de la part de la ministre. Et je vous
le dis d'emblée, M. le Président, mon souhait et notre souhait, au niveau
de la deuxième opposition, n'est
certainement pas de faire du temps pour faire du temps. Chose certaine, par
contre, on va continuer tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas trouvé
le bon libellé pour régler la question de la prescription. Et, à ce niveau-là,
la ministre pourrait elle-même nous être d'un précieux secours. Si elle
souhaite que l'on procède rapidement, nous
sommes ceux qui, actuellement, déposons des amendements, mais un amendement de
la part de la ministre serait
particulièrement le bienvenu pour que l'on puisse régler la question de la
prescription. Et, si cet amendement-là ne vient pas de sa part, bien, nous, de notre côté, on va essayer de
continuer à trouver les bons mots pour réussir à trouver ce consensus.
Et maintenant, M. le
Président, je vais aussi invoquer un élément du règlement qui me permet
d'interpeler un collègue. On est ici depuis
quelques heures. Je serais très, très intéressé d'entendre, par exemple, le
député de La Prairie sur les
amendements que nous débattons actuellement. Je serais curieux de voir s'il est
à l'aise à ce que la question de la prescription ne soit pas réglée à
travers le projet de loi n° 101. Donc, la position du collègue là-dessus
me serait d'un éclairage intéressant.
Le Président (M. Iracà) : Alors, M. le député de Deux-Montagnes, alors
c'est au loisir du député de La Prairie s'il considère qu'il est opportun de répondre ou non. Sinon, vous pouvez
continuer votre intervention. Alors, M. le député...
M. Merlini :
Non, M. le Président.
Le
Président (M. Iracà) : Non? Ça va? Alors, M. le député de Deux-Montagnes
vous pouvez continuer votre intervention.
• (12 h 20) •
M. Charette : C'est
gentil. C'est une décision qui lui
appartient. Dans ce cas, je vais tenter peut-être auprès de son collègue d'Argenteuil. Est-ce que le collègue
d'Argenteuil est à l'aise avec l'idée que le projet de loi n° 101 ne nous
permette pas de régler une question aussi fondamentale que le délai de
prescription?
Le Président (M. Iracà) : Alors,
c'est la même intervention. Je vous rappelle que...
M. St-Denis :
C'est la même réponse, M. le Président.
Le
Président (M. Iracà) : La même réponse. Je vous rappelle qu'on est sur
le sous-amendement du député de Borduas, alors c'est... Allez-y, si vous
voulez y aller de vos commentaires.
M.
Charette : Effectivement, c'est son droit, que je reconnais, une
décision qui lui appartient. Je vais poser la question à mon collègue de Vimont, ancien policier, dont la carrière a
été justement de combattre tout ce qui est problème lié à la loi,
combattre la corruption, combattre tout ce qui est non recommandable dans notre
société. Est-ce que...
Une voix : Combattre les
infractions.
M.
Charette : Les infractions, effectivement, c'est le cas,
malheureusement, dans le cas présent. Donc, est-ce que mon estimé collègue de
Vimont pourrait me dire si, par rapport à la prescription, un sujet qui est au
coeur de notre étude, au niveau de
l'amendement déposé... est-ce que notre estimé collègue de Vimont serait à
l'aise à ce que l'on adopte ultimement un projet de loi n° 101 qui
ne réglerait pas cette question centrale?
Le
Président (M. Iracà) : Alors, M. le député de Vimont, c'est la même
intervention, là, qui est demandée à vos collègues.
M.
Rousselle : Bien, écoutez, M. le Président, le moment que je
vais décider de parler, je vais parler. Je n'ai pas besoin d'un collègue pour m'inciter à parler.
Justement, avec l'expérience que j'ai, je n'ai pas besoin de cet incitatif-là.
D'ailleurs, c'est son sous-amendement, donc
qu'il parle de son sous-amendement, puis on pourrait en finir avec ça. Je
pense que, si on veut accélérer, si on veut
vraiment que cette loi-là devienne loi, je pense que c'est... il faudrait juste
activer un petit peu, là, puis sans
se chercher des gens pour... Je ne sais pas, là, je ne sais pas ce que mon
collègue cherche, mais, écoutez, non, je vais prendre parole quand je
vais décider.
Le Président (M. Iracà) : O.K.
Alors, je pense que la réponse est claire. M. le député de Deux-Montagnes,
allez-y sur vos éléments sur le sous-amendement que votre collègue apporte.
M.
Charette : Elle est, effectivement, très claire, mais la question
posée aux collègues visait, justement, à arriver à un compromis le plus
rapidement possible. C'est leur éclairage qui nous aurait peut-être permis de
trouver la bonne formulation. Ceci dit, on
aura un vote à tenir au cours des prochaines minutes sur le sous-amendement en
question, peut-être que c'est justement la bonne formulation.
Mais ce qui
est dommage, c'est que ce type de projet de loi... Et mon collègue de
Marie-Victorin l'a mentionné à
plusieurs reprises au cours des dernières semaines, pour ce type de projet de
loi on vise toujours une adoption unanime, en ce sens que le financement des partis politiques, les règles
d'éthique qui nous gouvernent, ultimement, sont des projets de loi importants où on souhaite lancer un message
ou un signal clair à la population. Donc, on vise cette unanimité-là.
Et ce qui est
dommage, pour ne pas dire désolant, depuis hier qu'on aborde la question de
l'article 32, nous avons l'appui de
l'opposition officielle, le collègue de Marie-Victorin a mentionné à plusieurs
reprises qu'il était de notre avis, qu'il
souhaitait l'adoption de cet article-là, vous avez la deuxième opposition qui,
par définition, en étant celle qui a présenté l'amendement, l'appuie également. Donc, vous avez les deux oppositions
qui manifestent le désir de bonifier un projet de loi et vous avez, face
à cette manifestation d'intérêt, une ministre qui, elle, se refuse à tout
compromis.
Donc, peut-être une question à ce moment-ci à la
ministre. Nous souhaitons accélérer le cours des choses, est-ce qu'elle entend, au cours de nos travaux
aujourd'hui, déposer un amendement qui nous permettrait d'avancer sur la
question de la prescription?
Le
Président (M. Iracà) : Alors, Mme la ministre, si vous voulez
répondre. Sinon, je redonne la parole au député de Deux-Montagnes.
Mme de
Santis : M. le Président, je procède avec le consensus qu'on a eu au
comité consultatif. On n'a pas eu l'unanimité
sur tout, mais on a eu un consensus au comité consultatif. On est allés au-delà
des recommandations de la commission
Charbonneau, particulièrement en ce qui touche l'article 100 et le remboursement
de contributions illégales. Le
Directeur général des élections est venu le 24 mai dernier pour nous dire
qu'il était satisfait du projet de loi
n° 101. C'est la même chose qu'il nous avait
dite lors de nos discussions au comité consultatif.
Si ce projet de loi n'est pas adopté avant la fin de la session, malheureusement des situations comme les réclamations dans la lettre de mai 2015 qui sont venues à la
connaissance du Directeur général des
élections seulement
en 2014, même si les contributions ont été faites en 2009, vont être
prescrites, et il n'y aura pas la possibilité de réouvrir parce que la connaissance
serait moins de trois ans à partir de la date de la mise en vigueur du projet
de loi.
En plus, l'argent
dit sale serait remis aux donateurs, aux contributeurs au lieu du ministre des Finances. En plus, le Directeur général des élections n'aurait pas
accès aux modifications que nous faisons à la Loi électorale en ce qui touche
son pouvoir de délégation, de vérification
et d'enquête, ce qui aiderait beaucoup dans ce que le directeur général veut
faire concernant les contributions
illégales. Et là je touche uniquement certaines des modifications qui ne vont
pas rentrer en vigueur si ce projet
de loi n'est pas adopté avant la fin de la session. Je crois que ma position
est claire et je peux dire que ma position est aussi ferme.
Le Président (M. Iracà) :
Merci, Mme la ministre. Alors, je redonne la parole au député de
Deux-Montagnes.
M.
Charette : J'aurais aimé une réponse, par contre, à la question posée.
Est-ce que je comprends à travers cette prise de parole qu'il n'y aura pas d'amendement déposé par la ministre
pour essayer d'arriver au compromis sur la question de la prescription?
Est-ce que c'est la réponse que je dois comprendre de l'intervention de la
ministre?
Le Président (M.
Iracà) : Mme la ministre.
Mme de
Santis : Suite à nos discussions au comité consultatif, on a eu un
consensus. Mon intention, c'est de procéder avec le consensus qu'on avait au
comité consultatif.
Le Président (M.
Iracà) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : J'entends les propos de la ministre. Mais, à ça, je suis
obligé de répéter ce que, malheureusement, j'ai déjà mentionné, il n'y a jamais eu de consensus sur la question de
prescription. Et je ne veux pas vous refaire l'historique que j'ai fait
tout à l'heure...
Mme de
Santis : ...consensus.
Le Président (M.
Iracà) : ...député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Ah! bien, c'est-à-dire l'amendement que nous défendons
actuellement est défendu aussi par l'opposition
officielle, il est défendu également par les propos du Directeur général des
élections. La ministre aime bien citer
une intervention du 24 mai dernier.
Moi, je l'invite à citer une intervention qui est encore plus récente, soit
celle d'hier, lorsque le Directeur
général des élections confirmait que
cet amendement-là lui donnerait des outils supplémentaires pour
bien s'acquitter de son mandat. Donc, c'est
bien de citer, mais encore faut-il y aller avec la citation qui soit la plus
juste possible dans le contexte où
elle est faite. Et, là-dessus, elle est toute récente, la déclaration ou la citation du DGEQ à
laquelle je me réfère.
Moi,
ce que j'aimerais faire comprendre à la ministre, c'est qu'elle est isolée.
Elle est isolée, vous avez l'opposition officielle, vous avez la deuxième opposition, vous avez le Directeur
général des élections qui, à travers son éclairage, nous dit que cet
amendement-là serait d'une utilité certaine pour s'acquitter de son mandat.
Donc, il faut que la ministre comprenne
clairement, à ce moment-ci, qu'elle est clairement isolée. Et je suis convaincu
que, si on élargissait le cercle davantage
à d'autres personnes qui ont intérêt dans ces dossiers-là, qu'on irait chercher
des appuis encore importants. Et, à
travers la réponse que nous a donnée la ministre, il y a quelques minutes à
peine, elle a confirmé... Et moi, c'est ce qui m'attriste dans tout ça. J'aime bien croire que les gens souhaitent, à
un moment donné, faire amende
honorable, mais, à travers la réponse
de la ministre, elle nous confirmait indirectement que, s'il y avait d'autres demandes de cette nature-là pour des sommes prescrites, la réponse du Parti libéral serait la même : Non, nous ne remboursons pas parce que
c'est prescrit et que la loi ne nous
y oblige pas. Alors, c'est quand même quelque
chose de désolant. Je pense
que c'est le meilleur qualificatif.
• (12 h 30) •
Mais on a la possibilité...
Et c'est ce que la ministre doit comprendre, à travers les amendements que nous
proposons on a la possibilité de permettre au Parti libéral de faire amende honorable. Je vais en convenir, lorsqu'il y a un financement qui est fait de façon illégale, ce n'est pas toujours
le fruit d'une mauvaise intention. Là, je ne connais pas l'historique des dons en question,
mais il y a des personnes qui peuvent avoir agi de bonne foi,
en méconnaissance... Même si on ne
doit pas ignorer la loi, mais il se pourrait que ces personnes-là n'aient pas
eu d'arrière-pensée ou une volonté d'enfreindre la loi. Mais n'empêche que le résultat
est le même et qu'on a la possibilité d'empêcher, à l'avenir, que des situations
semblables se reproduisent, et c'est ce que...
On
aime bien dire, en politique, que nous tendons la main. Bien, je pense
que c'est ce que nous faisons depuis le début à travers les amendements
que nous proposons, et j'aimerais... Au
niveau partisan, on s'entend. Parce
que je ne souhaite pas de mauvaises
choses à qui que ce soit, mais vous comprendrez que mon but premier, M. le Président, n'est pas de voir le Parti libéral progresser en politique. On est là pour défendre des idées, et j'estime
que ces idées-là sont mieux défendues
par le parti que je représente. Mais, en
même temps, j'aimerais voir le Parti libéral se soustraire de l'embarras dans
lequel il est présentement. J'aimerais voir le Parti libéral accepter de voir et d'anticiper les choses différemment qu'il ne l'a
fait au cours des dernières années, justement pour aider à redonner confiance en la politique
et en la chose publique.
Parce que,
mine de rien, l'attitude du Parti
libéral, elle est celle du Parti libéral. On a eu l'occasion, nous, de dire haut et fort qu'en pareille circonstance on agirait totalement
différemment. Mais, dans la population, malheureusement,
la perception reste la même. Souvent, on
fait un amalgame, on dit : Bon, c'est du pareil au même. Donc, le refus
d'avancer du Parti libéral, malheureusement, entache indirectement, mais quand
même entache la Coalition avenir Québec, entache le Parti québécois, entache, qui
sait, à sa façon, aussi Québec solidaire.
Donc,
j'aimerais que la ministre nous aide à démontrer à la population
qu'on est en mesure de s'affranchir de certaines façons de faire. On peut le reconnaître, on a sans doute tous... pas
forcément en lien avec la Loi électorale, mais, dans nos vies, on a, chacun à notre façon et à différents
degrés, fait des gestes dont on est moins fier aujourd'hui. Il y a possibilité de le dire. Et la plus belle façon d'illustrer notre sincérité, c'est
de prendre les moyens pour que ça ne se reproduise pas, et le projet
de loi nous offre cette possibilité-là aujourd'hui. L'article 32 nous offre cette possibilité-là aujourd'hui dans la
mesure où il est bien libellé, ce qui n'est pas le cas actuellement.
La
situation de la lettre transmise hier, je le mentionnais tout à l'heure, le fin détail, je ne le sais pas. Je ne sais pas si le Directeur
général des élections avait, pendant
un certain temps, sinon quelques années, des soupçons ou si c'est le fruit d'une découverte récente. Mais, s'il avait
des soupçons, c'est là où on est embêtés avec l'article 32 comme il est
libellé actuellement. S'il avait dans ses cartons une petite note au
dossier comme quoi, bon, c'était un dossier qui, espérons-le, va nous permettre d'en découvrir davantage
éventuellement, c'est là où la prescription, elle est drôlement
dommageable, et c'est malheureusement... Mme la ministre, je sais que
vous n'aimez pas l'entendre dire, mais c'est à travers cette fameuse prescription que votre parti a jugé bon...
ce qui, à mon sens, est une erreur fondamentale, mais c'est à cause de cette prescription que votre formation
politique a jugé bon de répondre au Directeur général des élections pour lui dire : Écoutez, les sommes
que vous nous réclamez, elles sont prescrites, nous n'avons pas l'intention de
les rembourser.
J'aurais une question
à la ministre, M. le
Président, si vous me permettez. On
sait que le Directeur général des
élections, à l'automne, va communiquer aux différentes formations
politiques — et
on est tous sujets et susceptibles d'être
touchés par cette communication-là — les chiffres qu'il estime, pour chacune des
formations politiques, avoir été amassés
de façon non conforme à la Loi électorale. Et, si on considère que, pendant des
années, le Parti libéral du Québec pouvait amasser des millions et
sinon... des millions de dollars...
Le Président (M. Iracà) : M. le
député de Deux-Montagnes, il reste 30 secondes. Pour vous aviser.
M. Charette : En fait, à chaque
fois que j'ouvre un sujet, vous me rappelez la triste réalité du temps à ma
disposition. Bon, 30 secondes, c'est malheureusement trop court, mais je vous
reviendrai.
Le Président (M. Iracà) : Vous
aurez l'occasion de vous reprendre.
M. Charette : C'est bien, bien,
bien gentil, merci.
Le
Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. le député de
Deux-Montagnes. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la
ministre.
Mme de Santis : J'aimerais
simplement souligner qu'il y a une différence entre avoir un soupçon et avoir
la connaissance. Un soupçon ne suffit pas.
La prescription extinctive ne commence pas à partir d'un soupçon, c'est à
partir d'une connaissance. Et il y a plusieurs décisions de la cour, y
compris de la Cour d'appel du Québec, dans Dufour contre Havrankova, de 2013, qui parlent de cela et disent qu'il faut
plus que simplement un soupçon pour que la connaissance existe et que la
prescription extinctive commence à partir.
Le
Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors,
est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sous-amendement du député de Borduas? Alors, je pense qu'il ne reste
plus de temps, M. le député de Borduas, pour vous. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Alors, à ce moment-ci, puisqu'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons
procéder aux voix. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Je vais
vous demander, M. le Président, d'appeler un vote par appel nominal.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, M. le secrétaire, nous allons
procéder par vote nominal sur le sous-amendement déposé par le député de
Borduas.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette : Pour.
Le Secrétaire :
Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)?
Mme Léger : Pour.
Le Secrétaire : Mme de Santis
(Bourassa-Sauvé)?
Mme de Santis : Contre.
Le Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire :
M. Rousselle (Vimont)?
M.
Rousselle : Contre.
Le Secrétaire :
M. le Président?
Le Président
(M. Iracà) : Abstention.
Le Secrétaire :
C'est rejeté.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, le sous-amendement est rejeté. Nous
allons revenir à l'amendement initial qui avait été déposé par la ministre
à l'article 32 pour discussion. Est-ce qu'il y a des interventions? Sinon,
nous allons procéder aux voix. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. J'aurais un sous-amendement à l'amendement de la
ministre.
Le Président
(M. Iracà) : Alors, on va écouter votre sous-amendement.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président, c'est très gentil de
votre part. L'amendement de l'article 32 du projet de loi est
modifié par le sous-amendement suivant, qui vient ajouter, après le premier
alinéa, l'alinéa suivant :
«Malgré le premier
alinéa, la connaissance par le Directeur général des élections d'une
information relative à toute contribution ou partie de contribution qui a été
faite en contravention aux articles 5, 29 et 31 pendant la période comprise entre 1996 et 2016 débute avec la
sanction de la présente loi, même si le Directeur général des élections avait
eu connaissance du fait avant la sanction du présent projet de loi, et ce pour
une période de quatre ans.»
Le
Président (M. Iracà) : Alors, merci, M. le député de Borduas.
Nous allons faire les photocopies et les distribuer.
Nous allons suspendre
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à
12 h 39)
(Reprise à 12 h 42)
Le
Président (M. Iracà) :
Nous allons reprendre les travaux de la commission. M. le député de Borduas avait déposé
un sous-amendement à l'amendement à l'article 32. Je vais laisser la chance au député de
Borduas d'expliquer son sous-amendement en long et en large. M. le
député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Bien, M.
le Président, l'idée, c'est de bien
expliquer l'amendement, mais surtout de réussir à convaincre les collègues d'adopter le sous-amendement. Parce que, vous savez, s'il y a une chose que la vie
m'a apprise, c'est d'être persuasif,
hein? Puis vous le savez, M. le
Président, que, lorsqu'on
fait de la politique, lorsqu'on brigue les suffrages, bien, il faut convaincre chacun des électeurs que nos idées,
ce qu'on veut faire, notre formation
politique, c'est celle qui répond le mieux aux aspirations puis aux
besoins de notre population, puis, je pense, c'est ce qu'on fait, tous et chacun, dans notre comté à toutes les semaines par
nos actions, par nos gestes, par les votes qu'on prend à l'Assemblée nationale aussi, M. le
Président.
Et
le sous-amendement, c'en est un bon exemple. C'est un exemple où on
vise à outiller le Directeur général
des élections et on vise à modifier la Loi électorale, modifier
l'amendement de la ministre pour s'assurer que les contributions illégales qui se retrouvent dans les coffres des partis politiques soient remboursées, qu'on ait la certitude, la plus grande certitude
qu'il n'y aura pas de moyens de défense pour les partis politiques au niveau
de la prescription. Si jamais il y a
une erreur, M. le Président, là... J'ose
espérer que le Directeur général des
élections ne fasse pas d'erreur et je ne crois pas qu'il en fait. Mais supposons que le Directeur
général faisait une erreur sur une contribution et allait voir un parti
politique, le parti politique
pourrait dire au Directeur général des élections : M. le Directeur général
des élections, il me semble que cette
contribution est légale pour tel et tel motif. Et là le Directeur général des
élections étudierait la communication du parti politique et évaluerait
les arguments du parti politique. Ça va pour ces échanges, pour ces
arguments-là.
Par
contre, ce que l'on ne souhaite pas, M. le Président, c'est qu'un parti
politique vienne dire au Directeur général des élections : Je ne vous rembourserai pas cet argent sale, cet
argent illégal, cette contribution illégale parce que vous auriez dû me la réclamer avant. L'écoulement du
temps — M. le
Président, c'est un parti politique qui parle, qui parle au Directeur général des élections — M.
le Directeur général des élections, fait en sorte que je n'ai plus à vous rembourser.
Moi, là, à cause de la prescription, j'ai le
droit d'utiliser cet argent illégal là parce
que la loi prévoit qu'il y avait
un délai de prescription, ça serait
légal. Et la ministre nous a très
bien fait la distinction et nous l'a
dit, c'est ce qui s'est passé au Parti
libéral. Dans sa réponse en Chambre à
la question de mon collègue de
Deux-Montagnes, elle a dit, à la principale : «Dans la lettre de 2015, le Directeur général des
élections lui-même a dit que les montants étaient prescrits, quand ça a été
prescrit, et donc légalement pas dus. Quand ça a été reçu, ça a été envoyé aux
avocats, et ils ont répondu.»
Donc,
concrètement, Mme Ringuette, directrice générale du Parti libéral, dans la
conception de la ministre, elle a fait la bonne chose, de ne pas
rembourser parce que c'était légal. Est-ce que c'était légitime? La réponse,
c'est non, et là on se retrouve dans une situation où on n'a aucune garantie,
aucune garantie que le Parti libéral...
M. St-Denis : M. le Président.
Le Président
(M. Iracà) : Oui, M. le député d'Argenteuil.
M. St-Denis :
Question de pertinence. Question de pertinence, il y a un sous-amendement qui
est déposé, là, le seul changement,
c'est «période de trois ans», «période de quatre ans». Tout, tout, tout
l'argumentaire, là, vous l'avez dit,
M. le député de Borduas, tantôt parce que ça fait quatre, cinq fois pour le
même libellé. Mais là moi, je veux savoir la pertinence, là, entre le «trois ans» et le «quatre ans». J'aimerais ça
entendre le député là-dessus, là, pourquoi nous convaincre de passer de trois à
quatre ans, là, pour peut-être voter pour son amendement. Mais là je n'entends
rien là-dessus, là. La seule différence, c'est trois ans versus quatre
ans. Alors, j'aimerais ça qu'il argumente là-dessus, là. Son but, c'est de nous
convaincre, là. Ça fait qu'à date il répète
les mêmes choses qu'il a répétées depuis les cinq, six derniers amendements.
Tu sais, juste nous tabler là-dessus, s'il vous plaît.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. le député d'Argenteuil. Alors, sur la question de pertinence, je
vous invite, M. le député de Borduas, à, effectivement, là, vous prononcer davantage
sur la modification qui a été faite au sous-amendement en lien avec le changement, là, sur le nombre
d'années. Peut-être, je vous invite sur la pertinence du sous-amendement.
M. Jolin-Barrette : Bien, sur la question de règlement,
M. le Président, sur la question de la pertinence, vous savez que notre règlement et la jurisprudence
prévoient que la pertinence doit être interprétée très largement. Et d'ailleurs vous m'avez vous-même invité, au début de mon intervention, à expliquer
très largement mon amendement. Donc là, j'ai un peu de la misère à suivre, là, du côté du gouvernement, du côté du Parti
libéral parce que,
d'un côté, le président de la Commission des institutions, député de Papineau, député libéral,
m'invite à expliquer largement mon propos et, de l'autre côté, son
voisin, député d'Argenteuil, me dit : Soyez précis.
Donc là, M. le Président, en fonction de nos règles, je sais que j'ai le droit, au niveau
de la pertinence, de bien expliquer
les tenants et aboutissants, d'autant plus, M. le Président, que je vais y
venir pour la question du quatre ans aussi. Mais je tiens véritablement, M. le Président, à convaincre, à vous convaincre, à convaincre mes collègues de
l'opportunité et de la pertinence
d'adopter le sous-amendement que nous proposons parce que c'est fondamental, pour faire progresser le projet de loi, c'est nécessaire que ce sous-amendement-là
soit adopté.
Le
Président (M. Iracà) :
Alors, la question était de savoir... Puis je vais clarifier, vous
avez raison, M. le député de Borduas, d'expliquer largement votre sous-amendement. Pas celui d'avant, alors le sous-amendement que vous venez de déposer, en lien avec celui-là, d'où la question
de pertinence du député d'Argenteuil. Alors, je vous invite à y aller avec... C'est vrai qu'il faut interpréter
largement lorsqu'on dépose un sous-amendement, mais on vous invite quand même... Et c'est pour ça que je le
fais avec courtoisie, M. le député de Borduas, je vous invite à faire vos explications en lien
avec votre sous-amendement. Alors, la parole est à vous.
• (12 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Mais, M.
le Président, c'est l'objectif.
Mon sous-amendement, c'est un bloc, et tous mes propos sont rattachés au sous-amendement. Et, d'ailleurs,
si le député d'Argenteuil a bien noté ce que je disais avant sa question de
règlement, M. le Président, il aura pu noter que ce que je disais, c'étaient des faits nouveaux,
hein, je n'avais pas encore parlé de
ce que la ministre nous avait dit ce matin en Chambre, et je pense
que tout le monde ici, dans la salle, a constaté que ce n'était pas du tout la même chose que je disais par rapport à la première intervention de ce matin, M. le Président.
Mais, ceci
étant dit, on revient quand même à la question de l'amendement, la période 1996 à 2016 et la période
de quatre ans. La ministre, tout à l'heure, n'a pas semblé réagir à notre amendement, sur le contenu même de l'amendement, à savoir est-ce qu'elle était d'accord avec la période de trois
ans comme clause crépusculaire. Bon, il y a un principe, M. le Président, qui dit d'habitude : Qui ne dit mot consent. Manifestement, nos
règles ne s'appliquent pas comme ça ici, malheureusement. J'aurais aimé
que ça soit ça cette fois-ci.
Ce qu'on propose à la ministre maintenant, c'est
d'avoir une clause crépusculaire de quatre ans. Peut-être ne s'est-elle pas prononcée sur le trois ans parce qu'elle voulait une période plus large pour
le Directeur général des élections, pour
que celui-ci puisse avoir encore plus de moyens, une durée plus longue dans le
temps pour prendre des recours civils devant
la Cour supérieure ou la Cour du Québec si le montant est de moins de
x milliers de dollars — je pense que c'est rendu à 85 000 $, M. le Président — donc pour donner les moyens au Directeur
général des élections d'entreprendre une réclamation pour des sommes
pour lesquelles la prescription est déjà acquise.
Alors, pour
le quatre ans — et pour
le député d'Argenteuil — le propos, véritablement, est concentré sur ce délai-là,
sur cette question-là. Et d'ailleurs peut-être pourrions-nous savoir, du côté
du gouvernement, est-ce que l'ajout d'une clause
crépusculaire dans notre amendement est vu d'un bon oeil parce qu'on pourrait
peut-être déjà avoir un commencement de
positionnement du Parti libéral par rapport à notre sous-amendement pour savoir
quelles sont les voies de passage. Est-ce
qu'on peut travailler ensemble pour avoir un sous-amendement qui va contenter
le gouvernement, qui va contenter la première opposition, qui va
contenter la deuxième opposition? Est-ce que la ministre est à l'aise avec une
clause crépusculaire au niveau de la prescription déjà acquise?
Le Président (M. Iracà) :
Alors, Mme la ministre.
Mme de
Santis : Je répète ce que
j'ai déjà dit : Nous procédons avec ce qu'on a eu
comme consensus au comité consultatif. Le projet de loi n° 101 représente ce consensus. Même mon collègue le député de Marie-Victorin a dit que
c'est une grande amélioration de ce qui existe aujourd'hui et que même il
voterait pour les amendements proposés, il voudrait retenir le consensus qu'on
a établi au comité consultatif au final.
Le Président (M. Iracà) :
Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Je vous dirais qu'il
faudrait peut-être, un petit peu, raisonner. Dans le sens où la ministre nous dit : C'était le consensus,
c'était le consensus, c'était le consensus. Écoutez, j'ai assisté aux réunions, M. le Président, et
l'article 100 est un article évolutif, si je puis dire, parce qu'au fil
des discussions que nous avons on se rend compte que l'article 100
peut être bonifié. Si la ministre veut absolument passer par le comité
consultatif, on pourrait le réunir, M. le Président, si c'est pour se rendre à
nos arguments, si c'est ce qu'elle veut.
Ceci étant
dit, l'ensemble des formations de l'opposition sont d'accord avec le sous-amendement,
M. le Président. Le Directeur général
des élections nous a dit hier qu'il était ouvert à notre sous-amendement.
Alors, les seules personnes qui
bloquent le sous-amendement, c'est le gouvernement, M. le Président, puis le
Parti libéral, la permanence du Parti libéral.
Parce que les personnes qu'il reste à convaincre sur le comité consultatif,
c'est la ministre et le Parti libéral. Alors, peut-être qu'ils peuvent s'entendre ensemble, peut-être qu'ils peuvent
communiquer aussi ensemble parce que, manifestement,
hier on a vu un grand problème de communication entre le parti et l'aile
parlementaire, il n'y a personne qui était au courant que le DGEQ avait
fait une réclamation de 3 500 $.
Puis l'autre
élément qui me choque un peu, M. le Président, la ministre nous a dit : On
a envoyé ça aux avocats, hein, et
donc, légalement, ce n'était pas dû. Quand ça a été reçu, ça a été envoyé aux
avocats, et ils ont répondu. D'habitude, les avocats, avant de répondre, ils vont consulter leurs clients puis
ils les informent. Déontologiquement, là, c'est ce qu'il faut qu'ils fassent, M. le Président, la ministre
le sait très bien, elle-même étant membre du Barreau. Moi aussi, je suis
membre du Barreau, M. le Président, je déclare mon conflit. Ceci étant dit, on
ne peut pas prendre une décision sans informer
notre client, sans lui recommander quelque
chose. Donc, on comprend que
l'opinion juridique que le Parti libéral a reçue, ça a été de dire : Bien, c'est prescrit, vous ne devez pas
rembourser légalement. Soit, tout le monde est d'accord là-dessus, sur le point de vue légal de la chose, mais c'est justement ce qu'on
veut changer avec notre sous-amendement,
M. le Président, c'est justement ce qu'on
veut changer, on ne veut pas que les partis politiques utilisent la prescription
comme moyen de défense.
Il me semble
que ce n'est pas compliqué, M. le Président, on a un cas concret. Souvent, on
est en commission parlementaire...
Puis je me souviens, dans la présente commission parlementaire, la ministre
nous a dit : Ah! ce que vous soulevez,
c'est des cas hypothétiques : si jamais, peut-être, on ne sait pas trop.
Là, M. le Président, c'est un cas concret, un exemple flagrant d'une réclamation qui était déjà prescrite où le
Parti libéral a donné un avis de non-recevoir au Directeur général des élections lui disant : C'est
prescrit, je ne te rembourse pas malgré les engagements que le Parti libéral
avait pris de rembourser les sommes que le Directeur général des
élections lui réclamerait.
Puis surtout,
M. le Président, la ministre le sait, lorsqu'on fait les lois, on pense aux
situations éventuelles. Ici, on a un
exemple de ce qui pourrait se produire dans le futur. Je ne souhaite absolument
pas que ça se produise, M. le Président, mais comment est-ce qu'on fait pour prévoir le comportement des partis
politiques, pour l'encadrer, pour s'assurer qu'ils prendront la bonne
décision? Ça aurait été quoi, la bonne décision dans ce dossier-là? Est-ce que
ça aurait été que le Parti libéral, la
permanence avise le premier ministre qu'ils avaient refusé, contrairement à ses
paroles, à ses engagements publics, aux engagements publics du premier
ministre?
Il y a une chose qui est très importante, M. le
Président, avec le projet de loi, c'est qu'on vient donner des pouvoirs
d'enquête et de vérification au Directeur général des élections, des pouvoirs
supplémentaires. On est venus modifier
l'article 100 pour donner un recours nommé. Puis il y a quelque chose que
je ne m'explique pas, M. le Président, parce qu'à chaque fois que notre
formation politique, dans le cadre de l'étude du présent projet de loi, a voulu
faire progresser le projet de loi pour donner des pouvoirs supplémentaires au
Directeur général des élections pour pouvoir sécuriser
juridiquement sa position aussi... Parce que, l'article 100, au niveau du
recours nommé et du recours innommé, M.
le Président, la ministre nous disait : 2.20.46 dans le Code de procédure
civile, ça me convient. Le Directeur général des élections nous avait dit : Écoutez, il y a des risques de
contestation de mon recours. Il a fallu convaincre la ministre de déposer un amendement sur ce point-là. Elle l'a
fait, et je l'en remercie. Et je l'en remercie parce que c'est une avancée.
M. Merlini : M. le Président.
Le Président (M. Iracà) : Oui,
M. le député de La Prairie.
Question de règlement sur la
recevabilité d'un sous-amendement
M. Merlini :
J'aurais une question de règlement sur la recevabilité de la motion de mon
collègue de Borduas. En vertu de l'article 198, une motion
d'amendement qui, sur le fond, est identique à une motion déjà débattue par la commission doit être déclarée irrecevable. Alors,
je vous demanderai une question de directive en vertu de l'article 198
sur ladite motion présentée par le député de Borduas.
Le Président
(M. Iracà) : Parfait. Merci beaucoup, M. le député de
La Prairie. Écoutez, je vais prendre votre intervention en
délibéré.
Et nous
allons, de toute façon, à ce stade-ci, suspendre les travaux, compte tenu de
l'heure, et nous reviendrons avec une
réponse. Nous étudierons la jurisprudence en lien avec votre questionnement, et
les travaux seront suspendus jusqu'à 15 heures. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise
à 15 h 10)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
Je vous rappelle que
la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi
n° 101, Loi donnant suite aux recommandations de la Commission Charbonneau
en matière de financement politique.
Décision de la présidence
Lors
de la suspension de nos travaux cet avant-midi, nous discutions d'un
sous-amendement introduit par M. le député de Borduas à l'amendement de la
ministre à l'article 32. Le sous-amendement avait été déposé, et le député de
La Prairie avait soulevé une question
de règlement, et je pense qu'il a hâte d'avoir des nouvelles de sa question de
règlement. Donc, je vais maintenant
rendre ma décision sur la question de règlement soulevée par M. le député de
La Prairie avant la suspension
de nos travaux cet avant-midi concernant la recevabilité d'un sous-amendement
présenté par M. le député de Borduas.
M. le député de Borduas a présenté un sous-amendement à un amendement de la
ministre à l'article 32 du projet de loi afin d'ajouter, après le
premier alinéa, l'alinéa suivant :
«Malgré
le premier alinéa, la connaissance par le Directeur général des élections d'une
information relative à toute contribution
ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux articles 5, 29
et 31 pendant la période comprise entre
1996 et 2016 débute avec la sanction de la présente loi, même si le Directeur
général des élections avait eu connaissance du fait avant la sanction du
présent projet de loi, et ce pour une période de quatre ans.»
M. le député de La Prairie a soulevé une
question de règlement concernant la recevabilité de ce sous-amendement
en indiquant qu'il était, selon lui, identique à un sous-amendement
précédemment rejeté. Le sous-amendement rejeté proposait d'ajouter à l'amendement l'alinéa suivant : «Malgré le
premier alinéa, la connaissance par le Directeur général des élections d'une information relative à toute
contribution ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux
articles 5, 29 et 31 pendant la période
comprise entre 1996 et 2016 débute avec la sanction de la présente loi, même si
le Directeur général des élections
avait eu connaissance du fait avant la sanction du présent projet de loi, et ce
pour une période de trois ans.»
Selon
la jurisprudence, un sous-amendement identique à un sous-amendement déjà rejeté
par la commission est irrecevable. Toutefois, la jurisprudence indique
également qu'un sous-amendement est recevable si son objet diffère suffisamment d'un sous-amendement précédemment
rejeté. En l'espèce, le sous-amendement présenté par M. le député de Borduas
est suffisamment différent du sous-amendement précédemment rejeté par la
commission, puisqu'il prévoit une
durée de quatre ans au lieu de trois ans. La présidence peut concevoir qu'un
membre pourrait être en désaccord avec une période de trois ans, mais en accord
avec une période de quatre ans. Et la présidence vous informe — et c'est hors du texte — que
j'ai rendu une décision similaire sur un sous-amendement similaire hier.
Donc, le
sous-amendement est donc recevable. M. le député de Borduas, pour vos
commentaires.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Bien, en fait, je dois vous dire que c'est
une excellente décision. C'est très
bien argumenté, très bien rédigé. Fidèle à votre habitude, M. le Président,
c'est factuel, très factuel. Donc, je pense que votre décision fait état
de l'objectif de l'amendement. Puis, comme on l'a exposé, je vous dirais, avec
des arguments soutenus, dont votre prédécesseur... M. le Président, dans cette
Chambre ce matin, le député de Papineau m'invitait
également à expliquer largement l'amendement pour que les collègues puissent
bien comprendre la portée et l'importance
d'adopter un tel sous-amendement à l'amendement qui est proposé par Mme la
ministre de la Réforme des institutions démocratiques.
Et,
simplement pour rappeler aux collègues, M. le Président, ce que l'on propose,
c'est quatre ans avec une clause crépusculaire
pour les réclamations qui seraient déjà prescrites et que le Directeur général
des élections pourrait se faire opposer.
Et là, M. le Président, on revient à la base même, là, du projet de loi, on
revient à l'argumentaire de la ministre à l'effet que les sommes qui ont été versées illégalement aux partis
politiques doivent être remboursées. Là, M. le Président, la ministre, ce matin, nous a dit, à la période
des questions puis lorsqu'elle a été questionnée par les journalistes, que
c'était légal de faire ce que le
Parti libéral a fait, soit de refuser de rembourser une contribution qui avait
été versée illégalement au parti. C'est le noeud de l'affaire, M. le
Président, puis c'est vraiment là-dessus qu'on insiste parce qu'on a un cas d'exemple précis aujourd'hui même. Et le cas ne
remonte pas aux calendes grecques, M. le Président, comme on dit, c'est en 2015, 2015, là, ça fait tout
juste 13 mois, mai 2015, on est en juin 2016.
Et
ce qu'on dit à la ministre avec la
proposition d'amendement, c'est que, dans sa loi, présentement, il y a un trou,
il y a une faille. Nous souhaitons l'aider à colmater cette brèche, à
colmater cette faille en proposant que le Directeur général des élections puisse faire son travail durant une période de
trois ans pour des réclamations qui seraient déjà prescrites. Parce que ce qui est arrivé hier, M. le Président,
où le Parti libéral s'est opposé à une réclamation déjà prescrite, ça pourrait
arriver dans le futur. Il y a plusieurs cas
qui pourraient survenir, M. le Président. On ne le sait pas, ça va être à la
lumière des enquêtes que le Directeur général des élections va faire.
Pourquoi ne
pas donner la latitude au Directeur général des élections durant une période de
trois ans et, pour la période prévue par la commission Charbonneau, pour
lui, de ne pas se soucier de la prescription pour cette période entre 1996 et 2016 et d'envoyer un message clair à
la population, d'envoyer un message clair au Directeur général des élections pour appuyer son travail, pour lui
dire : Écoutez, si jamais vous avez constaté et vous aviez eu de
l'information pour laquelle vous n'aviez pas entamé de recours
judiciaire en fonction des ressources de l'époque, en fonction des orientations de
l'époque... et que, là, par la bande, dans le cadre de ses enquêtes, il
découvre de la preuve qui mène à un système,
pourquoi ne pas lui donner la possibilité, M. le Président, d'aller récupérer
cet argent illégal qui a été versé aux partis politiques?
Et
ceci fait en sorte que l'ordre social est également maintenu. Parce que la
ministre fait souvent un argument sur la question de l'ordre social,
mais l'ordre social peut être beaucoup plus affecté, M. le Président, si on
permet aux partis politiques de s'exonérer
de rembourser des sommes qui ont été versées illégalement. Comment la
population réagit face à l'utilisation
de sommes versées illégalement dans une campagne électorale par un parti
politique? Moi, je mets beaucoup plus
en doute le maintien de l'ordre social lorsqu'il y a des gestes aussi choquants
qui sont posés par des formations politiques et, surtout, qu'ils
décident de ne pas rembourser en invoquant la prescription, même s'ils
s'étaient engagés à rembourser sur présentation d'une simple lettre du
Directeur général des élections.
Alors,
l'amendement qu'on propose, M. le Président, ça porte à réflexion. Ça porte à
réflexion, et je le répète : Ici,
dans le cadre des travaux de la commission, du côté de ma formation politique,
on est prêts à trouver une voie de passage avec la ministre. Si le libellé du sous-amendement que nous proposons ne
lui convient pas, on est prêts à travailler avec elle pour trouver un libellé qui va lui convenir, mais tout en
maintenant l'objectif que le délai de prescription ne puisse pas être
invoqué pour la période entre 1996 et 2016 par un parti politique pour
s'exonérer de payer.
Parce
qu'ultimement, M. le Président, là, si on part ça du début, là, l'argent qui a
été versé illégalement à un parti politique,
le parti politique, là, il ne devrait pas l'utiliser, puis peut-être qu'il l'a
utilisé à son corps défendant, M. le Président, parce qu'il n'était pas au courant. On donne le bénéfice du doute. Mais,
à partir du moment où il est informé, là, le parti politique sait qu'il a eu un avantage indu par
rapport aux autres partis politiques et qu'il n'aurait pas dû utiliser cet
argent-là. Donc, M. le Président,
j'invite vraiment mes collègues à adhérer au sous-amendement que nous proposons
et je sollicite l'adhésion des collègues au sous-amendement que nous
proposons.
Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas. Sûrement que M.
le député de Deux-Montagnes veut alimenter notre réflexion.
M.
Charette : Oui. Bien, c'est bien gentil. Merci, M. le Président. En
votre absence, ce matin, je me suis permis un petit... non pas que vous
étiez... Comment je pourrais dire?
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je vais peut-être faire une question de règlement, je
pense qu'on n'a pas le droit de soulever l'absence d'un collègue.
Le Président (M.
Ouellette) : Non, non, mais je n'étais pas absent, j'étais juste hors
champ de la caméra.
• (15 h 20) •
M.
Charette : Effectivement, vous étiez occupé dans d'autres activités, on n'en doute pas un instant. Mais, ce
matin, je me suis permis un petit tour de
table auprès des collègues pour voir un petit peu leur degré de
confiance par rapport à l'amendement
discuté, et là je constate que le député d'Ungava s'est ajouté à nous. Donc,
vous allez me permettre, M. le Président, de lui poser une question.
En
fait, à vos collègues, M. le
député d'Ungava, j'ai posé la question
suivante, à savoir s'ils étaient à l'aise qu'un projet de loi, le projet de loi n° 101, soit adopté sans qu'on ait clarifié la question
de la prescription, sans que l'on se soit donné tous les outils nécessaires pour se convaincre qu'on a maintenant
une loi qui remplisse ses fins, en
quelque sorte. Donc, j'ai posé la
même question à vos collègues et je serais maintenant bien curieux
d'avoir votre réponse à vous à cette question.
Le Président (M. Ouellette) : C'est sûr que Mme la ministre ne semble pas
avoir de commentaire pour vous, M. le député de Deux-Montagnes.
Ça fait que je vais vous laisser continuer votre argumentation.
M. Charette :
Est-ce que le collègue d'Ungava souhaite répondre à la question?
M. Boucher :
J'ai les mêmes commentaires que la ministre.
M.
Charette : Ah! Voilà. Voilà,
bon, c'est son droit. C'est son droit, mais j'étais curieux de voir, là, quelle
était sa position dans le dossier. Sinon, ce que j'allais mentionner
aussi ce matin, le Directeur général des élections, cet automne, va se livrer à un exercice fondamental, c'est-à-dire il va communiquer avec l'ensemble des formations
politiques pour les aviser de son
calcul des sommes qui auraient pu être amassées de façon illicite. Et chaque formation politique va être visée par cette communication, donc ce n'est pas le Parti libéral plus que la Coalition avenir
Québec ou le Parti québécois.
Mais ce sont des communications qui
seront de la plus haute importance, et il est très possible que les sommes
qui seront réclamées par le Directeur général des élections à ce moment-là
soient prescrites, un petit peu comme les montants
qui sont en cause dans la communication qui a été publiée hier, communication
qui date du mois de mai 2015.
Donc, dans cette
perspective-là, j'étais curieux d'entendre la ministre, quelle sera la réaction
de sa formation politique à des réclamations qui pourraient de nouveau
concerner des montants prescrits.
Le Président (M.
Ouellette) : Bien, je pense qu'il n'y a pas de réponse non plus de Mme
la ministre. Oui?
Mme de Santis : Ce que je vais dire,
c'est qu'on est ici pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau quant au financement politique. On va au-delà
des recommandations quand on
propose de faire des
modifications à l'article 100. Les modifications à l'article
100 se retrouvent dans le projet de loi suite à des discussions qui ont eu lieu au comité consultatif, présidé par
le Directeur général des élections. Il y a eu un consensus. Quand il est
venu devant nous, le 24 mai, il a dit
qu'il était satisfait avec ce qu'on a fait avec l'article 100. Je demande au
parti de la deuxième opposition de
nous aider à adopter ce projet de loi pour que les recommandations de la
commission Charbonneau quant au financement politique soient mises en
oeuvre. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M. Charette : Malheureusement, je
n'ai pas senti de réponse à la question posée, à savoir s'il y avait des
montants prescrits qui étaient réclamés à l'automne, quelle allait être la
position du Parti libéral. Et pourquoi je pose la question, M. le Président, c'est qu'en Chambre ce matin, à la
question posée par le chef de la deuxième opposition au premier ministre
et à la question que je posais, moi, à la ministre, on s'est plutôt rabattu sur
le respect de la loi. Cependant, la loi, on le voit bien avec l'échange que
nous avons présentement, comporte une lacune au niveau de la prescription.
Est-ce que je dois comprendre, Mme la ministre, que, si des montants prescrits
vous étaient de nouveau demandés l'automne prochain, que vous refuseriez de
rembourser les sommes en question?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : Si on allait procéder avec l'adoption du projet de loi
n° 101, les sommes réclamées dans la lettre de mai 2015 ne seraient pas
prescrites parce qu'actuellement les
sommes, c'est des contributions illégales de 2009 qui ont été réclamées en 2015. D'après la loi
actuelle, la prescription, c'est cinq ans à partir de 2009. Si vous allez nous
aider à l'adoption de ce projet de
loi, la prescription devient trois ans à partir de la connaissance. Le
Directeur général des élections a connu
que ces montants ont été réclamés, c'étaient des contributions illégales, en
2014. Donc, il n'y aurait pas de possibilité de dire que les sommes seraient prescrites. En effet, en adoptant la
modification à l'article 100, tel que proposé par le projet de loi
n° 101, la prescription a un effet rétroactif.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Merci, M. le Président. J'entends bien la réponse de la
ministre. Naturellement, nous n'avons pas tout le détail par rapport à l'enquête menée par le Directeur général
des élections pour les montants réclamés, là, dans la lettre de mai 2015. Il peut y avoir un scénario
différent de celui que vous présentez, Mme la ministre. C'est-à-dire oui,
des contributions illicites faites en 2009,
le Directeur général des élections aurait très bien pu avoir un soupçon quelque
part en 2010, quelque part en 2011, avoir eu
une information, information cependant incomplète pour lui permettre de réclamer un remboursement. Donc, peut-être qu'il y
a eu connaissance quelque part entre 2006 et 2011. Et, si c'est le cas, les sommes seraient aussi prescrites, nonobstant
que le projet de loi n° 101 soit adopté dans la formule ou dans la mouture
que vous proposez ou non. Donc, il vous
faudrait, je pense, Mme la ministre, admettre la faille que contient le projet
de loi n° 101 sur cet aspect bien, bien particulier.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre, commentaire?
Mme de
Santis : Cette affaire de soupçon, soyons clairs, un soupçon, ce n'est
pas la connaissance. Je cite l'affaire Mennillo
contre Intramodal, de 2014, où la cour a dit ce qui suit : «Notre cour a
réitéré à plusieurs reprises que la connaissance
des éléments de la responsabilité pour établir le début de la prescription
doit, avant toute chose, reposer sur un fondement sérieux qui dépasse la
simple crainte, les soupçons ou encore la conjecture.» Merci.
• (15 h 30) •
M.
Charette : On peut avoir une lecture semblable suite à la lecture que
vous faites du jugement en question. J'ai
évoqué le mot «soupçon». Je pourrais plutôt indiquer «un élément d'information
sérieux», mais sans que ce soit une preuve
convaincante pour demander la réclamation. Donc, sans jouer avec les mots, on
dit essentiellement la même chose, Mme
la ministre. Dans le cas qui nous concerne, encore une fois j'ignore le détail
des réclamations elles-mêmes. Mais, si on y allait avec les mêmes dates,
sans dire que ce sont les mêmes dossiers, si on y allait avec les mêmes dates,
une sollicitation ou, à tout le moins, une
contribution illicite faite en 2009, en 2010 le Directeur général des élections
a une information qu'il qualifie de
sérieuse, mais insuffisante pour réclamer des sommes, on en arriverait à la
même lacune que nous tentons de vous
exprimer, c'est-à-dire une prescription qui pourrait servir de sauf-conduit,
que ce soit au Parti libéral, que ce
soit... peu importe la formation politique. Dans le cas présent, oui, c'est une
lettre qui visait spécifiquement le Parti libéral, mais cette même situation pourrait très bien s'appliquer à une
autre formation politique, y compris la Coalition avenir Québec.
La différence
entre le Parti libéral et la CAQ, c'est la suivante : on s'est engagés,
nous, de notre côté, formellement à rembourser
toute somme que le Directeur général des élections nous réclamerait, que cette
somme soit prescrite ou pas. Et on
est même allés plus loin dans notre engagement. Vous connaissez l'historique de
la Coalition avenir Québec, on a un noyau
de nos députés qui proviennent d'une ancienne formation politique qui est
l'Action démocratique du Québec. On a même
pris l'engagement d'assumer les erreurs qui auraient été commises par l'Action
démocratique du Québec alors qu'on n'était nullement tenus de le faire.
Donc, cette
prescription, elle est interprétée de façon bien différente, que l'on soit du
côté du Parti libéral versus du côté
de la Coalition avenir Québec. Et c'est cette impasse-là, bien simplement, que
nous devons parvenir à dissiper pour une raison fort simple. On est à
essentiellement 48 heures de la fin de la session parlementaire, je suis
convaincu qu'on pourrait tous être
très fiers si ce projet de loi pouvait être adopté avant la fin de la session.
Mais, en même temps, il faut pouvoir exprimer cette fierté-là devant les
Québécois et les Québécoises et leur dire : Voici le projet de loi que nous adoptons, c'est un projet de loi qui nous
permet d'avancer, et non pas uniquement de donner encore une fois des sauf-conduits à un parti politique qui ne voudrait
pas reconnaître une somme réclamée par le Directeur général des élections.
Bref,
on vous tend de nouveau la main. Et j'ai le goût de vous faire une autre
proposition, Mme la ministre. En fait, je réponds, tout simplement, à
votre invitation lancée hier. Hier, lors de nos échanges, vous avez évoqué le
supposé consensus sur cette question-ci,
mais vous nous avez invités, vous nous avez proposé de retourner en comité
consultatif pour que l'on puisse
aborder et éclaircir cette question-là. Donc, Mme la Présidente... Mme la
ministre, plutôt, je vous fais la
proposition suivante...
Le Président (M.
Ouellette) : Deux impairs en 20 minutes.
M.
Charette : Suspendons, que
ce soit quelques minutes, ou quelques heures, ou quelques jours, pour qu'en
comité consultatif nous puissions
vider cette question-là et, ensuite, revenir avec ce qui pourrait être un
véritable consensus. Bref, je vous propose la proposition que nous... que
vous nous faisiez hier en espérant que ça puisse nous permettre de dénouer
l'impasse, là, dans laquelle, manifestement, on se retrouve.
Une voix :
...
Le
Président (M. Ouellette) :
Il ne nous reste pas 10 minutes pour vrai? Oui? Mme la ministre, avez-vous une
réponse à l'offre de notre collègue de Deux-Montagnes?
Mme de
Santis : C'est son offre et ce n'est pas la mienne. Je ne me souviens
pas...
Le Président (M.
Ouellette) : Je suis d'accord. J'ai bien dit l'offre de notre collègue
de Deux-Montagnes.
Mme
de Santis : Je ne me
souviens pas avoir fait cette offre. Il
y a eu un consensus. Le Directeur général des élections,
le 24 mai, est venu nous dire qu'il était satisfait avec le projet de loi n° 101 tel que présenté. Moi, je crois qu'on
devrait procéder et compléter l'étude article par article du projet de loi.
Merci.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
C'est ce que nous faisons actuellement, c'est-à-dire...
Mme de
Santis : Alors, allons-y.
M.
Charette : ...l'étude article par article du projet
de loi. Continuons si c'est la
volonté de la ministre. Ce qui m'amène
à développer un argument en partie
utilisé par mon collègue de Borduas, c'est-à-dire l'utilisation de sommes
mal recueillies. On est en présence de sommes qui sont réclamées parce que...
Mme
de Santis : Je m'excuse, M. le Président. Les sommes n'ont pas été mal
recueillies, elles ont été contribuées illégalement. Il y a une nuance
là qui est très importante.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Dans les faits, on ne le sait pas. Donc, je vais laisser
entendre ce doute, effectivement. La ministre, pas plus que moi, ne sait comment cet argent a été recueilli. Donc,
j'admets que l'hypothèse est là sans voir la démonstration complète à ce moment-ci. N'empêche qu'à ce jour
vous avez dans vos coffres des sommes qui ne devraient pas s'y retrouver,
des sommes qui, si elles n'ont pas été mal recueillies, constituent, tout de
même, des contributions illégales.
Mme de
Santis : M. le Président, c'est des accusations, des présomptions qui
sont en train d'être faites.
Le
Président (M. Ouellette) :
J'étais pour, effectivement, rappeler à notre collègue de Deux-Montagnes que
les informations contenues sur la lettre adressée à Mme Ringuette sont
factuelles et font état de prête-noms en vertu de l'article 90 de la Loi électorale. Ça, c'est factuel. Tout le restant,
il faudrait juste être prudent dans toute spéculation. Votre collègue de Borduas a employé le mot «factuel»,
c'est un mot qui est très cher à mon coeur. Si vous voulez référer à la
lettre du 15 mai, je vais vous permettre...
Une voix :
...
M.
Charette : Non, effectivement. Et, pour que nous en ayons la même lecture, je vais juste lire, tout de même, des passages, là, qui sont pertinents dans le cas présent : «À la suite
d'une enquête — donc,
on parle d'une enquête — effectuée par la Direction des affaires juridiques du Directeur général des
élections concernant certaines contributions politiques versées par des électeurs au Parti libéral du
Québec, une preuve convaincante — et on ne parle pas d'allégations, mais bien d'une preuve convaincante — est détenue...» Donc, «une preuve», on
laisse entendre par ça que le Directeur général des élections est en mesure de démontrer de façon convaincante qu'il y a
eu, effectivement, manquant, puisque — pa, pa, pa — «est détenue, indiquant que les donateurs
mentionnés ci-dessous ont servi de prête-noms puisque leurs contributions leur
ont été remboursées par les Entreprises Guy Desjardins inc. et Louisbourg
SBC.»
Donc, on parle d'éléments factuels. Ça semble
démontrer, dans l'enquête menée par le Directeur général des élections, que ces contributions ont été
remboursées par des entreprises. Donc, je ne sais pas si ces sommes ont été mal
recueillies, comme je le mentionnais...
Mme de Santis : ...pas mal
recueillies, c'est la contribution est illégale.
M. Charette : En fait, c'est...
Mme de Santis : Ce n'est pas la...
M. Charette : Bien, si vous
m'écoutez, Mme la ministre...
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre, on va laisser terminer le député de Deux-Montagnes.
M. Charette : ...c'est bel et bien
ce que j'ai dit, on ne sait pas si...
Le
Président (M. Ouellette) :
Je le suis à la trace et je suis son raisonnement à la trace, ne soyez pas
inquiète.
M.
Charette : Donc, on ne sait pas, effectivement, si elles ont été mal
recueillies. Ça ne veut pas dire qu'elles ne l'ont pas été, mais c'est une démonstration qui n'est pas faite à
travers la présente lettre. Mais on parle, tout de même, d'éléments très, très factuels. Et la partie qui,
moi, m'interpelle davantage ou qui m'interpellerait davantage si j'étais dans
vos souliers, Mme la ministre, le
2 octobre 2013, une motion a été adoptée. Et, hier, on a pu faire les
vérifications nécessaires, et vous
avez voté en faveur vous-même, Mme la ministre, en faveur de cette motion-là,
et je la lis pour demeurer dans des
éléments ou dans des arguments purement factuels. L'Assemblée nationale a
adopté à l'unanimité, donc, la «motion proposant que l'Assemblée
nationale demande au gouvernement — qui était un gouvernement du
Parti québécois à l'époque — de légiférer afin de prolonger le délai de
prescription concernant les infractions à la Loi électorale et aux partis
politiques de rembourser des sommes reçues [dans] cette période».
Et, toujours
pour rester factuel, le Directeur général des élections nous rappelle à juste
titre une prise de position, qui est
celle de votre ancien collègue, M. Robert Dutil, qui avait alors pris
l'engagement, au nom du Parti libéral du Québec, de rembourser toute somme versée illégalement auprès du... c'est-à-dire
au parti après une enquête du Directeur général des élections.
Donc, ça, ce
n'est pas jouer avec les mots, ce n'est pas des spéculations, mais réellement
des faits purement factuels, Mme la ministre. Donc, on revient à l'argument que je voulais
vous présenter, l'utilisation des sommes — le choix des mots peut être important, des
sommes qui ne devraient pas, je vais le dire comme ça — qui ne devraient pas se retrouver
dans un compte de banque associé au Parti libéral parce que jugées illégales.
Donc, quel est, Mme la ministre, votre sentiment
par rapport à l'idée de faire quelque action politique que ce soit ou même
mener une campagne électorale avec des argents que l'on sait amassés de
façon illégale?
Le Président (M. Ouellette) : Vous
avez des commentaires, Mme la ministre?
Mme de Santis : M. le Président,
d'abord, j'aimerais souligner que les modifications à l'article 100 de la Loi électorale, les modifications proposées vont
prolonger le délai de prescription. Si ce projet de loi est adopté, les
3 500 $, les prescriptions
seraient réouvertes vis-à-vis ces 3 500 $. Parce que le Directeur
général des élections a connu en 2014, a fait sa demande en 2015, les modifications à l'article 100, la
prescription serait de trois ans à partir de la date de connaissance. Cela étant en 2014, ça nous amène en
2017. Donc, les montants de 3 500 $ ne seraient pas prescrits. En
plus, hier, après avoir su que le
montant n'avait pas été remboursé, le premier ministre s'est engagé à ce que le
parti le fasse. Donc, ces 3 500 $ vont être repayés. Merci.
• (15 h 40) •
M.
Charette : Juste avant de continuer mon argumentation, peut-être juste
faire un commentaire par rapport à cette
réponse de la ministre. Encore à ce jour et à l'instant même, la ministre nous
dit : Nous n'avions pas à rembourser cette somme, mais nous le faisons malgré tout. Essentiellement, c'est la
réponse de la ministre. La ministre doit savoir qu'en politique il y a la loi ou le règlement, auxquels on doit tous se
conformer, mais il y a également tout ce qui peut être afférent aux
questions éthiques. Peut-être que la loi, parce qu'elle comporte une faille,
n'obligeait pas le Parti libéral à
rembourser cet argent-là, ce qui permet de dire à la ministre : Nous avons
agi de façon légale en refusant de rembourser une somme réclamée par le Parti libéral. C'est une défense, dans un
domaine autre que la politique, qui pourrait se faire, qui pourrait se valoir. Mais nous sommes en
politique, et la politique repose sur la confiance que la population porte
envers ses élus. Et, lorsque la population entend la ministre
dire : Dans le fond, on a été bien, bien généreux d'accepter de rembourser
ces sommes-là parce que, dans les faits, on n'était pas du tout obligés de le
faire, on comprend que la population peut
remettre en question le sens éthique, que ce soit de la ministre, que ce soit
du gouvernement, que ce soit du Parti libéral. On est dans une notion
éthique et, sinon, de perception de la population.
Mais,
ceci dit, M. le Président, c'est peut-être moi qui ai une mauvaise lecture du
projet de loi, je vais donner, dans
ce cas, à la ministre l'occasion de me dire que j'ai tort. Je vous expose un
scénario. Et c'est peut-être moi qui ai mal compris depuis le début, et, si c'est le cas, on va pouvoir passer à
l'article suivant assez rapidement. Donc, j'expose un cas, Mme la ministre, et vous me dites si ma lecture
est bonne. En 2009, donc il y a sept ans de ça, le parti... Bien, tiens, pour
ne pas donner l'impression que c'est le procès du Parti libéral, je vais donner
l'exemple de l'Action démocratique du Québec,
qui n'existe plus, mais dont on assume le passif au niveau du Directeur général
des élections. Le scénario est le suivant. En 2009, donc il y a sept ans
de ça, l'Action démocratique du Québec encaisse, que ce soit sciemment ou
involontairement, une contribution qui est illégale parce que remboursée par
l'employeur du donateur. Donc, on est en
2009, il y a sept ans de ça. Le Directeur général des élections ouvre, sans
dire une enquête... a une information en 2010 de cette contribution illégale. Le Directeur général des élections ouvre
une enquête, a connaissance d'un fait, mais n'a pas toute la preuve nécessaire pour réclamer dans les temps auprès de
l'Action démocratique du Québec la somme qui aurait été, à ce moment-là,
amassée. On est en 2010.
Aujourd'hui,
nous sommes en 2016. Selon votre projet de loi, celui qui est sur la table
actuellement, avec l'article 32 actuel, est-ce que la somme serait considérée
prescrite aujourd'hui s'il était démontré de façon convaincante... Je vais
prendre le même vocabulaire que le Directeur général des élections, si,
en 2016, le Directeur général des élections arrivait à recueillir une preuve
dite convaincante, est-ce que cette somme-là serait, oui ou non, prescrite?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre, est-ce qu'il y a un commentaire?
Mme de
Santis : M. le Président, je réitère : Des suspicions sont insuffisantes pour constituer le
point de départ de la prescription.
Le délai commencera uniquement à courir lorsque le demandeur prendra connaissance des éléments de
la responsabilité. Ça, c'est Bolduc contre Lévis. En plus, dans
Mennillo contre Intramodal, on dit que «la connaissance des éléments de la responsabilité pour établir le
début de la prescription doit, avant toute chose, reposer sur un fondement
sérieux». Si le fondement sérieux, c'est uniquement en 2016 ou 2015, d'après le
projet de loi n° 101, la prescription commence à courir à partir de 2015‑2016.
M.
Charette : Le temps file, M. le Président, et je vais reprendre
exactement vos mots : En 2010, le Directeur général des élections a
un fondement sérieux, mais n'a pas tous les éléments nécessaires pour faire une
réclamation à l'Action démocratique. Est-ce que cette somme-là, en 2016, serait
prescrite, oui ou non?
Mme de Santis : Si le fondement
sérieux existait en...
M. Charette : 2010.
Mme de
Santis : 2010, c'était la responsabilité du Directeur général des
élections de procéder parce que c'était à l'intérieur de la période prescriptive, qui était de cinq ans à partir
de l'action. Donc, votre exemple n'est pas correct parce que, s'il y
avait la preuve en 2010, ou 2011, ou 2012, le directeur général avait le choix
de procéder.
Rappelons-nous
que, quand, en 2010, il y a eu la modification à l'article 100 de la Loi électorale
qui a fait que la période de
prescription soit cinq ans à partir de l'acte, ça, ça a été fait à la demande
non d'un parti politique, mais à la demande
du Directeur général des élections. Et donc, si la preuve existait en 2010,
c'était la responsabilité du Directeur général des élections d'agir, et vous
êtes en train de me dire qu'il n'a pas agi.
M. Charette : Mme la ministre, vous
êtes en train de me dire que l'amendement est, au contraire, tout à fait
pertinent parce que preuve convaincante versus preuve au fondement sérieux,
c'est deux éléments différents. Il peut y
avoir un fondement sérieux sans qu'il y ait preuve convaincante. Donc, Mme la
ministre, je suis rassuré en même temps. L'amendement que l'on dépose se
défend tout à fait, et votre réponse illustre parfaitement la faille contenue
dans le projet de loi n° 101 que vous nous présentez.
Le
Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Taschereau, bienvenue à notre commission. Ça faisait
longtemps que je ne vous avais pas vue. Donc, je vous reconnais pour
intervenir sur le projet de loi n° 101.
Mme
Maltais :
Je n'aurais jamais cru, M. le Président, après les heures que nous avons
passées ensemble, que vous vous ennuyiez déjà de ma présence.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Ouellette) : Je
n'émettrai pas aucun autre commentaire pour ne pas que ça soit retenu contre
moi.
Mme
Maltais :
M. le Président, écoutez, évidemment, je viens ici parce que j'ai un collègue
qui, malheureusement, ne peut pas
prendre la parole. Mais je veux vous dire ceci, changement de porte-parole, pas
changement d'opinion, nous sommes d'accord tout à fait avec
l'amendement.
Toutefois, la question que nous nous posons,
c'est que cette loi va accorder des pouvoirs accrus au Directeur général des élections. En ce sens, elle est
importante, c'est la loi qui est le suivi de la commission Charbonneau, et je
pense qu'il
serait intéressant de l'adopter avant la fin de la session pour une raison
toute simple, que peut-être qu'il y a déjà des enquêtes en cours actuellement et que les pouvoirs accrus que nous
accorderions, en les accordant maintenant, avant la fin de la session,
pourraient, d'ores et déjà, être utilisés par la Direction générale des
élections. Si, par inadvertance ou si on en arrivait à ne pas l'adopter — ce
qui est possible, là, c'est dans le jeu parlementaire, puis ça se peut, c'est possible — ça retarderait d'autant l'utilisation de ces
pouvoirs accrus. En ce sens, je fais juste dire une opinion personnelle,
que ce serait un peu dommage. Maintenant, je
comprends tout à fait l'opinion, on est d'accord avec l'amendement en ce
sens-là. Je tiens juste à sonner une cloche
sur l'adoption et les pouvoirs qui sont accrochés à cette loi, que nous
aimerions, un jour, voir atterrir dans la cour du DGE. Merci.
Mme de
Santis : J'aimerais ajouter quelque chose, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, avant qu'on passe au vote. Mme la ministre.
Mme
de Santis : O.K. J'aimerais aussi souligner qu'il y a des causes...
d'abord, les tribunaux où on remet en cause les pouvoirs du Directeur
général des élections. Et le projet de loi n° 101 est déclaratoire quant
au pouvoir d'enquête, vérification et de délégation du Directeur général des
élections. Donc, je crois que c'est important, c'est une raison additionnelle
pour qu'on procède à l'adoption du projet de loi n° 101.
Le Président (M.
Ouellette) : On n'a plus de temps, je mets...
Une voix :
...
Le Président (M. Ouellette) : On n'a plus de temps. Ça sera sur le prochain
sous-amendement, si jamais il y a un prochain sous-amendement.
Donc,
je mets aux voix le sous-amendement introduit par M. le député de Borduas. Et
je présume que vous allez demander un vote nominal, M. le député?
Mme
Maltais :
Vote par appel nominal.
Le Président (M. Ouellette) : Oui, je le sais. Donc, il va y avoir un vote par
appel nominal, Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Je suis revenue...
• (15 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) : Je le sais,
vous êtes revenue. Bon, je me garde de mon commentaire. Et, M. le secrétaire...
Le Secrétaire :
Pour, contre, abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme Maltais (Taschereau)?
Mme Maltais :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme de Santis (Bourassa-Sauvé)?
Mme de
Santis : Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Boucher (Ungava)?
M. Boucher :
Contre.
Le Secrétaire :
M. St-Denis(Argenteuil)?
M. St-Denis :
Contre.
Le Secrétaire :
M. le Président?
Le Président (M.
Ouellette) : Je m'abstiens.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Ouellette) :
Donc, le sous-amendement introduit par M. le député de Borduas
à l'article 32 est rejeté. On continue la discussion
sur l'amendement de la ministre. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : ...le Président,
j'aurais un sous-amendement à présenter.
Le Président (M. Ouellette) : Vous
allez nous le dire, M. le député de Borduas?
M.
Jolin-Barrette :
Certainement. L'amendement à l'article 32 du projet
de loi est modifié par l'ajout, après
le premier alinéa, de l'alinéa suivant :
«Malgré le
premier alinéa, la date de la prise de connaissance d'un fait concernant toute contribution ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux articles
5, 29 et 31 pendant la période comprise entre 1996 et 2006 ne peut
empêcher le Directeur général des élections d'entreprendre un recours civil.»
Le Président (M. Ouellette) : Je
suspends quelques minutes.
(Suspension de la séance à 15 h 51)
(Reprise à 15 h 54)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous travaillons sur un sous-amendement à l'article 32, à l'amendement de la ministre, introduit par M. le député de Borduas.
Et je vais donner raison à M. le
député de La Prairie, je crois avoir compris aussi que, M. le député de Borduas,
quand vous en avez fait la lecture, vous nous aviez parlé de la période comprise entre 1996 et 2016, et il
semblerait que c'est 2006 que vous avez prononcé. Donc, pour votre sous-amendement, c'est 2016?
M. Jolin-Barrette : Effectivement,
mes excuses, M. le Président. C'est, effectivement, 2016.
Le Président
(M. Ouellette) : Et votre sous-amendement est recevable, M. le député de Borduas. Vos commentaires.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Donc,
concrètement, M. le Président, on en a fait la lecture, mais vous pouvez le
constater également, donc, ce que l'on souhaite faire, c'est qu'à
partir du moment de la prise de connaissance d'un fait concernant toute contribution
ou partie de contribution qui a été faite en contravention des articles 5, 29
et 31... Et peut-être, ça, M. le Président, je ne l'ai pas expliqué
précédemment, pour les articles 5, 29 et 31 du projet de loi, que visent-ils,
ces trois articles-là? On vise notamment
les recours au niveau provincial, au niveau municipal
et au niveau scolaire. Donc, les lois qui gouvernent la joute électorale, si je puis dire, M. le Président, sont visées par le projet de
loi que nous déposons et le sous-amendement que nous déposons, et donc on vise la période
prévue entre 1996 et 2016 pour faire en sorte que le fait de connaître une information d'une contribution illégale, ça ne pourra pas empêcher le Directeur général des élections
d'entreprendre un recours civil.
Qu'est-ce qu'un recours civil, M. le
Président? C'est lorsqu'on
s'adresse au tribunal compétent. Et vous l'avez vu, à l'article 5, on l'a modifié pour donner au Directeur général des élections un recours nommé, hein, dans sa loi constitutive
pour s'adresser soit à la Cour du Québec — en fonction du montant — soit à la Cour supérieure de façon à ce
qu'il puisse réclamer à un parti politique les sommes qui ont été
versées illégalement.
Donc, ça,
c'est pour l'explication, M. le Président. On veut donner la latitude au
Directeur général des élections d'entreprendre
un recours civil sans avoir à se soucier d'une prescription acquise par un
parti politique entre 1996 et 2016.
Tout à
l'heure, M. le Président, j'entendais la ministre nous dire, et nous redire, et
encore nous redire : Nous avons mis en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau, nous sommes
ici pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau. Vous savez ce que je trouve dommage un
peu, M. le Président? C'est qu'on dirait qu'au Parti libéral, si ça ne vient pas d'une entité externe, bien, on ne
légifère pas, hein, on est obligés de prendre les recommandations de la commission Charbonneau. Au
lieu du prendre du leadership, de resserrer les règles électorales par eux-mêmes, on souhaite uniquement se limiter à
ce qu'il y a eu à la commission Charbonneau. Des bons travaux qui ont été réalisés à la commission Charbonneau,
cependant on constate un peu un manque de leadership d'aller plus loin puis d'aller colmater les brèches dans la Loi
électorale. Le meilleur argument pour ça, M. le Président, quel est-il? La
ministre elle-même l'a dit, cet argument-là. Elle nous a dit un peu plus
tôt dans nos travaux : La commission Charbonneau, la commissaire Charbonneau, le rapport de la
commission n'ont jamais abordé l'aspect civil d'aller récupérer les sommes
qui ont été versées illégalement aux partis
politiques. La ministre nous l'a dit, elle nous a dit : La commission
Charbonneau s'est penchée sur
l'aspect pénal, comment poursuivre les individus pour une période allant
jusqu'à sept ans, trois ans de la connaissance, sept ans après...
Mme de Santis : Trois, maximum, et
sept...
M.
Jolin-Barrette : C'est ça.
La ministre me souffle la réponse. Ça fait beaucoup de chiffres de
prescription. Ceci étant dit, la
commission Charbonneau est allée véritablement sur la question pénale, pas sur
l'aspect civil. Et là on a bonifié le projet de loi à l'article 100, on l'a bonifié
par nos travaux dans le cadre des consultations que nous avons eues ici avec
cette commission. Par les réponses que le
Directeur général des élections nous a données, on a bonifié l'article 100, on
est venus insérer un recours nommé.
Et, par la force des choses, dans le cadre de nos travaux, encore une fois,
hier soir, on a appris que c'était
possible que certaines formations politiques ne remboursent pas les sommes
versées illégalement lorsque le Directeur général des élections informe
les partis politiques.
Une chose
qu'il faut établir très clairement, M. le Président, c'est que notre formation
politique est en faveur de pouvoirs
accrus pour le Directeur général des élections, des pouvoirs de vérification,
des pouvoirs d'enquête, des pouvoirs de
pénétrer dans les lieux, dans les permanences des partis politiques, d'obtenir
copie de tout document. Nous sommes en faveur et nous militons pour que
le Directeur général des élections ait le plus rapidement possible ces
pouvoirs.
• (16 heures) •
Quand
j'entends la ministre nous dire : Il s'agit d'une raison additionnelle
d'adopter le projet de loi le plus rapidement possible, pour donner des pouvoirs supplémentaires au Directeur général
des élections, je suis d'accord avec elle. Je suis d'accord avec la députée de Taschereau, ce sont
des acquis qui se retrouvent dans le projet de loi, et c'est important de
l'adopter. Par contre, ce n'est pas une
raison pour faire la job à moitié. Parce qu'il y a un trou gros comme ça dans
la loi présentement, M. le Président,
puis le rôle de la ministre, M. le Président, c'est de colmater cette brèche et
de venir corriger la situation.
L'important — et ça
devrait être le souci de la ministre — c'est d'avoir le projet de loi le plus
complet possible.
Les collègues
de l'opposition officielle nous ont dit tout à l'heure : On est d'accord
avec l'amendement de la CAQ, on est
d'accord avec l'amendement de la deuxième opposition. Québec solidaire aussi,
je pense qu'ils vont être d'accord avec
cette proposition-là. Alors, autour de la table, le seul parti qui est en
désaccord avec notre position, c'est le gouvernement libéral, le gouvernement libéral qui se bute à
répéter toujours les mêmes arguments, à nous dire : Écoutez, ce n'était
pas dans Charbonneau, ça fait qu'on
ne le fait pas. Mais je vous réitérerais, M. le Président, qu'on a fait des
propositions dans le projet de loi
qui s'y retrouvent et que ce n'était pas dans Charbonneau. Et il y a certaines
recommandations de la commission Charbonneau
qui n'ont pas été incorporées dans le projet de loi de la ministre. Donc, de
dire qu'on fait uniquement ce qui se trouve dans Charbonneau, c'est
faux.
Et les
travaux que l'on tient ici aujourd'hui nous permettent de bonifier le travail
qui est effectué. Donc, j'indique encore
à la ministre : Si c'est une question de libellé, nous sommes ouverts à
travailler avec elle pour trouver une voie de passage. La ministre nous dit depuis tout à l'heure : C'est à la
demande du Directeur général des élections que l'on a modifié la prescription en 2010. Le contexte était
différent, M. le Président, mais on ne peut pas de dédouaner de cette
réalité-là aujourd'hui. Et
d'ailleurs, même si on retourne à 2010, si on a des dispositions déclaratoires
pour retourner en 2010, même si le
Directeur général des élections, en 2010, n'avait pas demandé de modifier la
loi pour insérer un délai de prescription de cinq ans à partir de la perpétration du geste, bien, la loi, elle
aurait été quand même perfectible. Donc, c'est important d'adopter
l'amendement.
Et le fait de
dire : Écoutez, on a fait des acquis, et il faut absolument adopter le
projet de loi d'ici la fin de la session, je vous dis : C'est une avenue
intéressante, mais pourquoi n'adopte-t-on pas le projet de loi d'ici la fin de
la session, mais un projet de loi
bonifié, un projet de loi complet? Je demande à la ministre pourquoi ne
fait-elle pas preuve d'ouverture. On attend
un signal fort de sa part, une élue qui est nouvellement ministre, qui a la
chance de laisser sa marque, de marquer son mandat, de dire : Moi,
en tant que ministre de la Réforme des institutions démocratiques, je vais
m'illustrer et je vais me joindre aux
oppositions afin d'avoir la meilleure Loi électorale possible et afin que le
Directeur général des élections puisse
faire son travail et, surtout, redonner confiance aux Québécois dans la
politique, dans le financement politique.
Parce que le
fait de contribuer à un parti politique, c'est une bonne chose, M. le
Président. Il ne faut pas que les contributions
politiques soient perçues comme étant négatives parce que ça fait partie de la
démocratie de s'engager pour un parti politique, de contribuer
politiquement, financièrement par ses idées à un parti politique, mais le tout
dans le respect des lois, le tout dans le
respect des normes qui sont développées. Et, manifestement, ce qu'on
constate — et mon
collègue de Deux-Montagnes l'a bien fait et
l'a bien exposé — c'est
qu'il y a un risque, M. le Président, qu'un parti politique refuse de rembourser des sommes en raison de la
prescription acquise. Est-ce que c'est ça qu'on veut comme système, M.
le Président? Je pense que non. C'est gros comme un ballon de plage, M. le
Président, ça semble évident.
Et on a un
peu une problématique lorsque la ministre nous dit : Écoutez, le Parti
libéral, par rapport à la réclamation de
2015, c'était légal de ne pas rembourser. Il faut changer ces mentalités-là, M.
le Président. Il faut réaliser qu'entre la légalité et la légitimité il y a une distinction, M. le Président, et
surtout sanctionner le comportement des gens à la permanence du Parti libéral. Je pense que le
premier ministre l'a fait hier, de son propre parti, en annonçant qu'il allait
rembourser, mais j'espère aussi qu'il y a eu une réunion au sommet, du côté du
bureau du premier ministre, de son organisation
et de la permanence de son parti pour dire, un : Comment ça se fait que je
n'avais pas été informé? Si je n'ai pas
été informé... Encore faut-il savoir est-ce que ça intéresse le premier
ministre ou c'est comme les autres dossiers du gouvernement.
Deuxièmement, M. le Président, il faudrait avoir des suites à cela, il faudrait
savoir quelles seront les actions que le
Parti libéral entreprendra pour qu'une telle situation ne se reproduise plus.
Et la voie toute tracée, M. le Président,
c'est l'adoption du sous-amendement proposé par la CAQ. Pourquoi? Parce que ça
ferait en sorte, M. le Président, que,
si la situation se reproduit de nouveau, il n'y aura même pas de question à se
poser. Le Parti libéral ne pourra pas dire :
J'invoque la prescription, il va être obligé de rembourser ou il présentera une
défense à la cour, mais qui ne sera pas basée sur la prescription.
La prescription ne doit pas constituer une
barrière à la récupération des sommes versées illégalement, M. le Président. Et je pense que vous seriez très mal à
l'aise, M. le Président, de savoir qu'un parti politique fait une campagne
électorale avec des contributions qui n'ont
pas été faites dans le respect de la Loi électorale. Je pense que vous seriez
mal à l'aise. Moi, je serais mal à
l'aise. Je pense que mes collègues d'Argenteuil, d'Ungava, de La Prairie,
ma collègue de Bourassa-Sauvé, ma
collègue de Taschereau, mon collègue de Deux-Montagnes seraient tous très mal à
l'aise de savoir ça. Et là on est assis, tous ensemble, autour de la table puis on a une
opportunité, aujourd'hui, hein, le 8 juin, 16 h 5, de faire
un pas en avant, tous ensemble, et de modifier
la loi à l'unanimité, M. le Président, à l'unanimité. Et ça, c'est beaucoup
plus fort que le consensus, vous en
conviendrez avec moi. Ça permettrait d'envoyer un message clair aux Québécois
puis aussi, pour le Parti libéral
aussi, de dire : Écoutez, j'ai compris. Vous savez, on dit : Faute
avouée, à demi pardonnée. Je pense que ça serait déjà un bon début.
Mais,
M. le Président, vous savez, je ne peux pas parler pour le gouvernement.
J'essaie de les convaincre. Je le sais que mes arguments résonnent et
qu'ils sont sensibles à mes arguments, mais il manque juste un petit peu de
volonté, M. le Président, un petit peu de volonté. Et je pense qu'on pourrait
trouver une solution tous ensemble pour réussir à s'assurer qu'une somme versée illégalement déjà prescrite ne se
retrouvera pas dans les poches d'un parti politique et ne sera pas utilisée en plus pour faire de la
politique. Parce que, vous savez, il y a des individus qui ont contribué à ce
système-là. La police doit s'en
charger. Il y a des crimes prévus pour ça. Le Directeur général des élections
peut s'occuper du volet pénal, à
notre corps défendant, pour le futur parce que vous savez qu'on a proposé des
amendements pour le passé. Mais là on
est en matière civile, M. le Président, et les seuls défendeurs qui pourraient
perdre ce moyen de défense là, ce sont les partis politiques.
Et le Directeur
général des élections nous l'a mentionné lorsqu'est venu le temps de modifier
la loi en 2010... Parce que la ministre se rattache souvent à cet argument-là pour
dire : Le Directeur général des élections est venu le 24 mai dernier. Par ailleurs, M. le
Président, vous me permettrez, lorsque le Directeur général des élections est
venu le 24 mai dernier pour nous
parler, il nous a parlé pendant 1 h 30 min environ, avec
une présentation de 30 minutes, avec des questions avec un bloc majoritaire du gouvernement, plus de temps
pour l'opposition officielle, un certain temps pour la deuxième opposition et un temps pour Québec
solidaire également. Mais est-ce qu'on est capable de faire le tour de toutes
les questions que nous avons durant cette
commission? La réponse, c'est non parce qu'on a obtenu de l'information
dans le cadre de nos travaux.
• (16 h 10) •
Donc,
je veux être très clair avec la ministre, M. le Président, le fait que nous
avons le texte, la loi devant nous et que
nous pouvons l'amender et la bonifier, c'est une opportunité en or que nous
avons. Pourquoi nous ne la saisissons pas?
Et l'élément qu'il faut rajouter, M. le Président, c'est qu'en 2010, quand la
loi a été modifiée, le Directeur général des élections nous a dit : Écoutez, il y avait une inquiétude,
notamment, au niveau de la viabilité financière des partis. C'était une
des raisons qui étaient invoquées.
Depuis
la réforme effectuée par le député de Marie-Victorin, ancien titulaire du poste
de Mme la ministre — une
très bonne réforme, d'ailleurs, où on a
diminué l'influence de l'argent, M. le Président — à l'intérieur de la politique le
financement des partis politiques a changé parce qu'il y a une plus grande part
du financement public. Donc, de dire que c'est le Directeur général des
élections qui avait demandé en 2010 de modifier la loi et d'en faire un
argument, M. le Président, c'est un peu
faire abstraction des faits nouveaux qui sont survenus en 2012 avec l'adoption
de la nouvelle loi. Ça change les paramètres, M. le Président.
Et,
vous voyez, la loi a été renforcie en 2012, renforcie, faisant passer la
contribution de 1 000 $ à 100 $. Pourquoi on a fait ça? Parce qu'il y avait des lacunes dans
la loi. Parce qu'à 1 000 $ on pouvait encore avoir des prête-noms,
des prête-noms pour lesquels le Parti
libéral a été informé par le Directeur général des élections que sept individus
avaient constitué des prête-noms pour
l'entreprise de Tony Accurso. Alors, le député de Marie-Victorin resserre la
loi, l'amène à 100 $ en matière de financement politique, et là on
est rendus à une étape, M. le Président... on est encore en train de resserrer
la loi puis de la bonifier.
Donc,
moi, j'aimerais ça, M. le Président, me retrouver dans quelque temps, lorsqu'on
modifiera de nouveau la Loi électorale pour la bonifier, peut-être dans
un an, dans deux ans, dans trois ans, dans quatre ans, qui sait, si on est encore là, puis de dire : Écoutez, l'ancienne
ministre de la Réforme des institutions démocratiques avait fait un pas de
géant, puis je souligne son travail, je
souligne son travail parce qu'elle a eu l'audace puis l'ambition de donner
davantage de pouvoirs au Directeur
général des élections et, surtout, de s'assurer que les partis politiques ne
pourront pas invoquer la prescription durant un certain délai, la
prescription acquise. Il me semble que je serais content, M. le Président, de pouvoir dire ces paroles-là, puis ça me rendrait
fier d'avoir pu contribuer à ce travail-là, comme je le fais avec le collègue
de Marie-Victorin, qui a fait une avancée majeure au niveau du financement des
partis politiques.
Je
vous le dis, M. le Président, on n'est pas loin. On n'est pas loin, il faut
travailler ensemble. Mais, si on n'est pas deux pour danser, comme on
dit, c'est plus dur, et j'invite la ministre à danser avec nous.
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, M. le Président, comme le suggère
le collègue d'Argenteuil, on peut danser en ligne. Je dois vous dire que, depuis deux ans, j'ai développé mes
habiletés de danse en ligne d'une façon que vous ne pourriez pas
soupçonner, M. le Président.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, monsieur...
Une voix :
...
Le Président
(M. Ouellette) : Ah! on finit-u sur les danses en ligne ou vous
avez...
M. Jolin-Barrette : Bien, simplement vous dire que c'est un art qui
demande beaucoup de pratique et beaucoup d'apprentissage.
Le
Président (M. Ouellette) : Oui. Je pense que tous les collègues peuvent vous en parler alentour de
la table.
Je me
permettrai juste un commentaire. Parce que vous avez l'habitude d'être factuel
de plus en plus, M. le député de
Borduas, quand vous avez parlé des sept contributions de gens qui ont servi de
prête-noms, je ne voudrais pas que les gens pensent que c'est uniquement
pour l'entreprise de M. Accurso. Parce que, sur la lettre du Directeur
général des élections, il n'est pas fait
mention de combien sont pour l'entreprise Guy Desjardins et combien sont pour
Louisbourg, ça fait qu'il ne faudrait
pas que les gens pensent que c'est tout un ou tout l'autre, et justement pour
encourager leur réflexion à être encore plus factuelle. M. le député de
Deux-Montagnes.
M. Charette : Merci, M. le
Président. Vous allez me permettre de saluer le commentaire de ma collègue de Taschereau
lors de son intervention, commentaire qui nous permet de bien mettre en
contexte le défi, pour ne pas dire le dilemme
qui est le nôtre à ce moment-ci. Le dilemme, il est le suivant. On a une loi
qui permet des avancées majeures à bien
des égards avec des propositions du Directeur
général des élections pour renforcer
son autorité, mais également son pouvoir
de vérification, son pouvoir d'enquête, propositions qui ont été dûment,
dans la majorité — pour
ne pas dire, dans la totalité — des
cas, intégrées au projet de loi à travers des articles qui sont adoptés à l'heure
où on se parle. Un projet de loi, donc, oui, des avancées majeures. Un projet de loi qui comporte
33 articles, et on en est à l'article 32, les autres ayant été
adoptés.
Bref, il y a un chemin colossal qui a été
accompli, et il est vrai qu'il est possible, à ce moment-ci, d'anticiper l'adoption du projet de loi au cours de la
présente session qui, dois-je le rappeler, se termine dans à peine
48 heures. Mais dans les faits,
de façon factuelle — parce que ce qualificatif plaît bien au président — c'est possible d'anticiper ou d'imaginer l'adoption
du projet de loi. Mais, en même temps, je pense qu'on faillirait à notre tâche
si on adoptait un projet de loi qui comporte une lacune excessivement importante,
lacune qui vient miner, en quelque
sorte, la volonté qui semble
être exprimée par les différentes formations politiques de revoir un petit peu
nos façons de faire en matière de financement.
Et, à cet égard, j'aurais une question pour la ministre.
Mme la ministre, est-ce que vous êtes en mesure de m'indiquer si des réformes majeures de la loi telles que celles que nous
propose le projet de loi n° 101... Est-ce que des réformes majeures comme celles-ci, c'est chose
courante? Est-ce qu'on a régulièrement l'occasion de revoir en
profondeur notre loi sur le financement des partis politiques?
Le Président (M. Ouellette) :
Commentaires, Mme la ministre, ou...
Mme de
Santis : Je me demande c'est
quoi, le but de la question. On a fait une majeure réforme avec le Code
de procédure civile, sur laquelle plusieurs ministres
de la Justice ont travaillé et qui, finalement, a été adoptée au moment que M. St-Arnaud était ministre
de la Justice. Oui, il y a des moments où il y a des majeures réformes
des lois, comme il y en aura sur le
lobbyisme, comme il y en aura sur la loi à l'accès à l'information. Alors, ça arrive plus souvent que vous le prétendez.
M. Charette : En fait, je ne
prétends rien, Mme la ministre, c'est une question que je posais. Mais, en même
temps, vous conviendrez qu'on n'a pas, à tous les ans ou à toutes les sessions
parlementaires, l'occasion de revoir de façon majeure notre loi. Oui,
il peut y avoir des ajustements ici et là, mais une réforme majeure comme celle
qui nous est proposée, ce n'est pas chose
courante. C'est peut-être une fois aux deux, trois ans, sinon à espace plus
grand. Mais ce n'est pas quelque chose qui est commun, qui se vit à chaque session parlementaire. Est-ce que je me trompe, Mme la ministre?
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la ministre.
Mme de
Santis : Le projet de loi n° 101 propose des modifications importantes
à la Loi électorale. Il y a des lacunes présentement qui touchent les pouvoirs du Directeur général des élections
et qui n'ont pas été soulevées par la commission
Charbonneau, mais que nous, au comité
consultatif, on a déterminé que c'était le moment d'apporter ces modifications à la Loi électorale. C'est
un projet de loi où on met en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau. Je crois qu'on fait un très beau travail avec ce projet de loi, sur lequel il y avait un consensus. Alors, je dis qu'on est prêts à
procéder à l'adoption de ce projet de loi.
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Deux-Montagnes.
• (16 h 20) •
M. Charette : Vous ne répondez pas directement à la question, et je ne vous en veux pas parce que je la
connais, la réponse, et je vais vous
la donner, la réponse. Il arrive, effectivement, que l'on revoie les grands principes de cette loi.
Il y a eu une belle occasion — d'ailleurs, qu'on a tous appuyée — lors
du mandat du Parti québécois, lorsque les montants maximums de contribution ont été revus à la
baisse. Donc, ça, c'est quelque chose de majeur parce qu'en peu de temps on
est passé à un maximum de 3 000 $ à 1 000 $ et, ultimement,
à 100 $. Donc, c'est ce que je peux appeler des réformes majeures de notre loi sur le financement des
partis politiques. Mais, en même temps, c'est l'espace-temps qui doit être
considéré. Des réformes de cette nature-là,
ça survient, quoi, aux deux ans, trois ans, quatre ans, peut-être? Donc, si on
devait adopter le projet de loi n° 101 avec l'immense faille qu'il
contient, on devra vraisemblablement vivre avec cette faille-là pendant
quelques années, et c'est pour ça qu'il est fondamental de bien faire le
travail à ce moment-ci.
Et, je dois
vous avouer, on tente et on ne renonce pas à trouver le bon libellé. On a
encore deux jours pour y parvenir au
besoin. Mais, à ce moment-ci, je ferai remarquer à la ministre que nous sommes
les seuls à tenter de trouver le juste compromis. On n'a aucune proposition qui vient de
la partie gouvernementale. Donc, ultimement, si le projet de loi ne devait pas être adopté avant la fin de la session
parlementaire, il n'y aura qu'une seule responsabilité à assumer, et c'est
celle du gouvernement. À moins que vous nous
disiez : On veut à ce point l'adoption du présent projet de loi parce
qu'il comporte de belles avancées, on
va travailler avec vous pour trouver les bons mots pour corriger cette faille,
qui, actuellement, est importante. On
l'a relevé de différentes façons. Je pourrai refaire l'exercice avec vous au
besoin pour démontrer, justement, les
lacunes, mais c'est au gouvernement, à ce moment-ci, de tenter de se rapprocher
de la position et de l'opposition officielle et de la deuxième opposition.
Moi, je
pourrais passer en revue le cahier que vous nous avez soumis — d'ailleurs, c'est un exercice intéressant,
et on apprécie l'effort de transparence qui
a été le vôtre — un
cahier qui reprend essentiellement tous les articles du projet de loi avec une colonne qui permet d'illustrer les
dispositions de la loi telle que modifiée par le projet de loi et une troisième
colonne commentaires. Donc, un superbe
tableau qui démontre, justement, les impacts de chacun des articles par rapport
à la loi avant sa modification. Moi,
je pourrais reprendre article par article et vous mentionner que, pour la très,
très, très grande majorité de ces
articles-là, l'adoption s'est faite excessivement rapidement parce qu'il y
avait une volonté partagée d'avancer,
et de notre côté, et tout comme l'opposition officielle, on n'a pas voulu
ajouter des commentaires inutilement pour nous permettre d'avancer plus
rapidement.
Nous, jusqu'à
maintenant, jusqu'à l'adoption de cet article 31, qui est le dernier
adopté en date, il y a un autre article,
pour nous, qui était excessivement problématique, qui est l'article 5.
Pour l'article 5, on a argumenté de façon un petit peu plus longue parce que, bon, encore là,
je pense qu'on avait des préoccupations qui étaient légitimes, et on a fini
par l'adopter, l'article 5. Sur division, vous vous en rappellerez, mais on a,
tout de même adopté...
Une voix : ...
M. Charette :
Oui, c'est sur division, l'article 5. On avait signifié notre division à
ce moment-là, mais l'article a, tout de même, été adopté...
Une voix : ...
M. Charette : 26, qui
comportait peut-être les... Oui, vous avez raison, mais avec
l'article 100. Je confonds l'article 100
avec l'article 5 du projet de loi. Mais, dans les deux cas, l'article a
été adopté. Et nous, notre espoir, étant donné que c'est l'article 100 qui était en cause de l'actuelle loi,
et non pas du projet de loi qui est étudié, c'était de dire : Il
nous reste encore l'article 32 pour corriger cette fameuse faille relative
au délai de prescription.
Donc, sur
l'essentiel des articles, on a limité au possible nos interventions pour
permettre, justement, une adoption rapide.
On a été de bons compromis à tous les niveaux. Je pense qu'à ce moment-ci, à
l'heure où on se parle, compte tenu qu'on
échange sur l'article 32 depuis quelque temps, le compromis ou la
manifestation de compromis qui est attendue, elle est attendue de votre part, Mme la ministre, si vous souhaitez,
effectivement, que l'on puisse adopter ce projet de loi là.
Et je me répète peut-être, mais, à la fin de la
session, soit dans 48 heures, si le projet de loi n'est pas adopté, dites-vous qu'il y aura une seule responsabilité,
et ce sera la vôtre, compte tenu de l'absence de contreproposition qui ne... enfin, on n'a pas de contreproposition de
votre part. Et je pense que l'illustration que je faisais, il y a quelques
minutes, à mon tour de parole
précédent, avec les dates que je vous mentionnais, avec exactement les mêmes
mots des jugements que vous avez
cités, illustre clairement la faille devant laquelle on est confrontés
actuellement. Donc, moi, je me demande, à travers ce refus de compromis de votre part, quelle est la véritable
intention du Parti libéral dans les circonstances. Le Parti libéral sait
que, sans la correction que nous proposons, il pourra évoquer à plus d'une
reprise — et
spécialement à l'automne, je
l'anticipe — la
fameuse prescription des montants réclamés pour ne pas réclamer les sommes, et
ça m'agace. Ça m'agace, bien honnêtement.
Et, moi, ce
qui me désole encore davantage, c'est que, la situation qui a concerné le Parti
libéral en mai 2015, nous l'avons apprise de façon totalement fortuite.
Si, hier, cette question-là n'avait pas été soulevée et si nous n'avions pas eu de réponse à cette question, donc le Parti
libéral, peut-être, aujourd'hui, continuerait à dire : Nous rembourserons
toutes les sommes que le Directeur
général des élections nous réclamera, et on en prend l'engagement sur
l'honneur. Peut-être que, si cette
révélation-là n'avait pas été faite hier, le Parti libéral pourrait continuer à
répéter cet engagement-là sur l'honneur en cachant le fait qu'il y avait déjà eu une réclamation faite par le
Directeur général des élections, et réclamation qui avait été refusée
par le Parti libéral.
Donc, c'est une
possibilité qui, moi, me désole au plus haut point parce qu'au cours des
derniers mois... On a un gouvernement
qui est relativement jeune encore, un gouvernement qui a deux ans, qui peut
espérer être au pouvoir pour les deux
prochaines années et demie, ou à peu près. On a un gouvernement qui est dirigé
par un premier ministre qui est en fonction
aussi depuis peu de temps, qui est chef du Parti libéral depuis relativement
peu de temps, mais qui, malgré tout, dès sa prise de position comme
chef, a dit : Le Parti libéral, sous ma gouverne, ne fera aucun, aucun
compromis sur l'éthique. Et cette
citation-là, on a vérifié, on l'a autant... en fait, au moment de prendre
possession de sa responsabilité comme
chef, mais c'est des propos qu'il a retenus et répétés sur de nombreuses
tribunes. Donc, c'est à se demander dans quelle mesure ce Parti libéral souhaite,
effectivement, faire peau neuve et faire amende honorable, comme mon collègue
de Borduas le mentionnait.
Moi, je
crains que le Parti libéral, encore aujourd'hui, peine à se départir de
mauvaises habitudes et peine à réellement souhaiter un changement de moeurs au niveau du financement des partis
politiques. Autrement, jamais il n'accepterait d'avoir dans ses coffres... comme il l'a très bien assumé, la présence
de 3 500 $ au cours des dernières années dans ses comptes, sachant clairement que ces sommes étaient
le fruit de contributions illégales. Pendant un an, le Parti libéral du Québec a très bien vécu avec la connaissance... On parle de
connaissance, là. Et là je ne fais pas référence du délai de connaissance contenu dans le Code civil, mais,
depuis un an, le Parti libéral du Québec sait, pour avoir reçu une lettre du
Directeur général des élections, il sait
qu'il a dans ses coffres 3 500 $ d'argent amassé de façon illégale,
il a très bien dormi.
• (16
h 30) •
Je ne pense
pas que ses dirigeants en aient été embêtés, ce qui me fait dire aujourd'hui
que peut-être, peut-être que les remises en question ou que les serments sur l'honneur
qui étaient faits ne l'étaient pas
avec la sincérité que l'on pouvait
espérer d'un premier ministre, d'un chef de parti, d'un caucus. Moi, je serais
très curieux, tout à l'heure... Et je connais
très bien le règlement, là, je sais bien que les collègues
ne sont pas tenus de répondre à une question lorsqu'elle
est posée par le député d'une formation adverse, je connais le règlement, mais
je serais sincèrement curieux de savoir l'état
d'âme de tous les membres du caucus du Parti libéral à ce moment-ci parce
qu'eux aussi... Et j'en connais plusieurs, et j'en compte de très bons amis, Mme la ministre, et, pour en avoir
discuté avec plusieurs d'entre eux, plusieurs voulaient se convaincre — parce qu'élus à l'élection de 2014, donc des
nouveaux députés — plusieurs
voulaient se convaincre que le Parti libéral avait changé.
Donc, je serais curieux de savoir, aujourd'hui,
quelle est la perception de ces nouveaux députés qui, à chaque occasion, lorsqu'ils rencontrent leurs
concitoyens, leurs concitoyennes qui émettent des doutes sur la probité du
Parti libéral, qui, je n'en doute pas
un instant, ont répété : Ah! vous savez, le Parti libéral a changé. Je
suis convaincu qu'ils le savaient, mais
je serais curieux de voir comment ces mêmes députés, qui répètent ce discours-là
depuis deux ans maintenant, ont réagi
à la révélation qui a été faite hier et, surtout, au fait que la lettre envoyée
par le Directeur général des élections a été rendue publique.
Cette lettre-là, elle est maintenant du domaine
public. On a pris bien soin, naturellement, de camoufler les informations nominatives, mais cette lettre-là,
elle est du domaine public maintenant. Et je n'aurai vraisemblablement pas la réponse aujourd'hui, Mme la ministre, parce
que les collègues députés gouvernementaux se sont prévalu de leur droit entier, que je reconnais, de ne pas prendre
la question que je leur posais, mais je serais très curieux de voir,
aujourd'hui, s'ils se sentent un
petit peu floués des discours qu'ils ont eux-mêmes entendus, que ce soit de
leur chef, que ce soit de leurs instances, et c'est la déception que
j'anticipe à ce niveau-là. Et cette discussion, je souhaite pour vous, Mme la ministre, que vous la vivez au niveau de votre
caucus. Et, si votre caucus est hermétique, c'est bien tant mieux pour vous,
mais j'espère que le questionnement, chez
vos députés, chez vos membres se vit. Et j'espère que l'attitude que vous
retenez dans l'étude de l'actuel projet de loi fera aussi l'objet de
discussion pour voir dans quelle mesure le Parti libéral peut véritablement changer ou c'est celui qui a amassé
des millions et des millions de façon, on l'apprendra peut-être un jour,
de façon questionnable. C'est une démonstration qu'il reste à faire.
Mais chose
certaine, si on se fie aux argents réclamés par le Directeur général des
élections au fil des années, on voit
que, et encore de loin, c'est le Parti libéral du Québec qui se fait réclamer
les sommes les plus importantes. Et je ne sais pas, je n'ai jamais été militant libéral, je n'ai aucune idée du
raisonnement qui peut se faire. J'ai une bonne idée du Parti québécois parce que, dans mon ancienne vie,
que j'assume totalement, j'ai participé à des échanges au Parti québécois,
mais au Parti libéral...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Charette : Et je prends
l'engagement de ne jamais connaître de l'interne un raisonnement de caucus du Parti libéral, c'est l'engagement que je prends.
Mais n'empêche que la question, elle est sérieuse, Mme la ministre. Vous avez des réflexions à conduire de votre côté qui,
à défaut d'être faites, vont permettre à ce nuage sombre qui vole au-dessus
de la tête du Parti libéral depuis des
années, mais des années, de continuer de flotter au-dessus de sa tête parce que
c'est des questions qui...
manifestement, vous vous refusez de poser. Vous vivez très bien avec le fait
que, depuis un an — et je
parle de connaissance de faits — vous savez de façon manifeste que vous avez
des argents qui ne devraient pas être dans le compte du parti et qui s'y
trouvent, et vous n'avez posé aucun geste pour le retourner, cet argent. Et, là-dessus je vais peut-être
me répéter, sans en prendre l'habitude, mais je suis drôlement inquiet pour
l'automne. Et c'est ce qui me fait demander
si c'est pour ça que vous voulez à tout prix adopter le projet de loi tel qu'il est présenté dans son article 32, pour ne pas avoir à répondre à des requêtes qui vous
seraient acheminées par le Directeur
général des élections au cours de la
saison d'automne et qui pourraient...
Le
Président (M. Ouellette) :
M. le député de Deux-Montagnes, vous savez qu'on est debout sur la clôture, là.
On reste prudents dans nos procès d'intention.
M.
Charette : Oui, je suis de
grande prudence. Donc, en fait, je ne veux pas prêter d'intentions, et c'est là
où l'appel à la prudence est de mise,
mais j'ai cette crainte-là. Et je ne tiens pas personnellement à ce que le Parti libéral se refasse une virginité et
regagne la confiance de la population, mais je le mentionnais ce matin, parce que
le Parti libéral se refuse de poser ce geste, dans la population il y a, malheureusement, cette mentalité qui veut que tout le monde est pareil, que la classe politique,
c'est du pareil au même. Donc, ce refus du Parti libéral déteint sur la
perception que la population peut avoir
des autres formations politiques, et ça, malheureusement, ce n'est pas quelque chose que je souhaite
assumer de notre côté. Mon temps est déjà écoulé?
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
M. Charette :
Alors, c'est malheureux.
Le
Président (M. Ouellette) :
Oui. Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Mais, juste pour votre information et pour garder notre terme «factuel», sur la lettre du DGEQ adressée à
Mme Marie-Ève Ringuette, les adresses ont été caviardées. C'est le terme «factuel», je suis correct, oui? Et on
n'utilisera pas le mot «camouflé» parce
que ça a un tout autre sens.
M. Charette : Tout à fait. Tout à
fait. C'est le bon terme.
Le Président (M. Ouellette) : Donc,
ça va être caviardé. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais : Oui, M. le Président.
D'abord, je sais que le collègue n'a jamais été militant libéral, il a été militant péquiste. Et moi, je prends un engagement
à ne jamais traverser la Chambre ou à courtiser un autre parti pendant
que je suis membre d'un parti. Ça, c'est un engagement que moi, je prends.
Alors, nous sommes toujours d'accord avec
l'idée, sauf qu'il y a une question sur cet amendement-là qui est celle-ci. Là, il n'y a plus de clause
crépusculaire sur cet amendement-là. Alors, est-ce que c'est une volonté
de ne plus avoir de clause
crépusculaire? Tout à l'heure, il y
avait une clause crépusculaire de
quatre ans. Maintenant, il n'y en a
plus. Or, je sais que mon collègue de
Deux-Montagnes n'a plus de temps, mais peut-être que l'autre peut juste
répondre à ma question.
Le Président (M. Ouellette) : Il
n'en a plus non plus. Il n'en a plus non plus, ça va aller à la prochaine.
Mme
Maltais : Alors, probablement que je vais devoir m'abstenir, ne
pouvant avoir de réponse à ma question, si jamais il y a un vote. Je
vous l'annonce tout de suite.
Le
Président (M. Ouellette) :
C'est beau? On met le sous-amendement de M. le député de Borduas aux voix.
Vote par appel nominal?
M. Jolin-Barrette : Par appel
nominal, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette : Pour.
Le Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme Maltais : Abstention.
Le Secrétaire : Mme de Santis
(Bourassa-Sauvé)?
Mme de Santis : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. le
Président?
Le Président (M. Ouellette) : Je
m'abstiens.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Ouellette) :
Donc, le sous-amendement introduit par M. le député de Borduas à l'amendement
de la ministre à l'article 32 est rejeté.
On continue
l'étude de l'amendement de la ministre. M. le député de Borduas, je sens que
vous allez être factuel de nouveau.
M.
Jolin-Barrette : Oui, M. le
Président. J'aurais un sous-amendement à présenter pour l'amendement qui est
proposé par Mme la ministre :
L'amendement de l'article 32 du projet de loi est modifié par le
sous-amendement suivant, qui vient ajouter, après le premier alinéa, les
deux alinéas suivants :
«Malgré le premier alinéa, le délai de
prescription sur la connaissance par le Directeur général des élections d'une
information relative à toute contribution ou partie de contribution qui a été
faite en contravention aux article 5, 29 et 31 pendant la période comprise
entre 1996 et 2016 est éliminé et ce, pour une période de trois ans.
«Dès lors que
le Directeur général des élections envoie une lettre demandant un remboursement
à un parti politique qui aurait reçu toute contribution ou partie de
contribution en contravention à l'article 5, une copie de cette lettre doit obligatoirement être envoyée à l'adresse de la
permanence des autres formations politiques représentées à l'Assemblée
nationale.»
Le Président (M. Ouellette) : Je
suspends quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 40)
(Reprise à 17 h 6)
Le
Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous allons reprendre nos travaux. Suite
au dépôt du sous-amendement, j'invite le député de Borduas
à nous expliquer son sous-amendement à l'article 32. M.
le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci,
M. le Président. Vous aurez noté, dans le fond, que le sous-amendement comporte deux alinéas, donc
le premier étant que le délai de prescription sur la connaissance par le Directeur général des élections d'une information relative à toute contribution ou partie de
contribution qui a été faite en contravention aux articles 5, 29 et 31 pendant la période comprise entre 1996 et 2016
est éliminé, et ce, pour une période de trois ans. Donc, concrètement,
on vise à ce que le Directeur général des élections ne puisse pas se faire
opposer la prescription. La prescription acquise, M. le Président. J'ai eu
l'occasion, tout à l'heure, de parler de la prescription à titre de moyen de
défense et de vous mentionner à quel point
je trouvais ça dommage qu'un parti
politique utilise la prescription pour refuser de rembourser une somme,
une somme qui a été versée en contravention de nos lois.
Le deuxième
alinéa que nous proposons d'insérer : «Dès lors que le Directeur général
des élections envoie une lettre demandant un remboursement à un parti
politique qui aurait reçu toute contribution ou partie de contribution en contravention à l'article 5, une copie de cette
lettre doit obligatoirement être envoyée à l'adresse de la permanence des
autres formations politiques représentées à l'Assemblée nationale.»
Donc, ce
deuxième alinéa s'inscrit dans un souci de transparence, M. le Président, un
souci de transparence où le gouvernement
libéral nous a dit dans le cadre de son mandat, depuis le 7 avril
2014 : Nous serons le gouvernement de la transparence. Donc, ce que
nous proposons, c'est que l'ensemble des formations politiques soient informées
des contributions que le Directeur général
des élections réclame à ces partis politiques de façon à ce que la population
puisse connaître, puisse savoir les partis politiques qui ont reçu ces
sommes. Parce que, je vous le répète, M. le Président, il ne faut pas que les partis politiques puissent
utiliser de l'argent qui se retrouve dans leurs coffres et qui a été collecté
en ne respectant pas les lois
électorales. D'autant plus, M. le Président, qu'une des façons d'assurer la
confiance du public dans nos institutions, c'est la circulation de
l'information.
Sur la
question de la transparence, M. le Président, vous aurez noté que le
gouvernement dit qu'il est transparent. Il y a certains efforts qui sont faits en ce sens, je dois le souligner.
D'ailleurs, vous aurez peut-être noté, M. le Président, que certains ministres indiquent leurs activités
dans leur agenda public sur le site Web du ministère du Conseil exécutif,
je pense. Bon, il y a un de vos collègues
qui ne rencontre pas grand monde, au Conseil des ministres, mais ça, c'est un
autre dossier.
Le
Président (M. Merlini) : ...M. le député, je vais vous ramener vers
l'aspect de transparence dont vous parlez par rapport à la lettre que vous souhaitiez, dans votre amendement, qui
soit envoyée aux autres partis politiques. Je ne crois pas que vous
faites référence nécessairement aux agendas des ministres.
• (17 h 10) •
M.
Jolin-Barrette : Non, mais
c'est pour illustrer, M. le Président, véritablement le fait que, lorsqu'on dit
qu'on est transparent, bien, on ne veut pas que ça soit à moitié. C'est
comme l'intégrité, ou comme l'éthique, ou comme la confiance, on ne veut pas que ce soit fait à moitié. Donc, c'est
important, lorsqu'on fait un choix, le choix d'être transparent, de
l'être complètement, M. le Président.
La même chose
au niveau de la loi. Lorsqu'on adopte une loi, bien, on est beaucoup mieux de
la faire au complet, puis pas à
moitié. Puis il ne devrait pas manquer d'éléments dans la loi. Vous direz
peut-être : Parfois, il faut être pragmatique,
il faut prendre ce qui passe. Mais, pendant qu'on peut influencer, bonifier,
travailler à améliorer la législation, je
pense que ça vaut la peine de mettre tous les efforts pour réussir à améliorer
la situation, améliorer la loi, améliorer le texte législatif. Et le sous-amendement que nous vous proposons, c'est
exactement ça, M. le Président, on vous propose d'améliorer la loi en
permettant, dans un premier temps, au Directeur général des élections de faire
fi de la prescription acquise pour
prendre l'argent versé illégalement, d'aller la récupérer et de la verser au
trésor public. Deuxièmement, que, lorsque
le Directeur général des élections a une information comme celle-là, eh bien,
qu'il la communique à l'ensemble des parlementaires par le biais de leur
permanence. Parce que vous savez que le Directeur général des élections est
désigné par l'Assemblée nationale, ça
prend un vote aux deux tiers des députés à l'Assemblée. Et, généralement, le
Directeur général des élections est choisi à l'unanimité, sa nomination
fait consensus.
On est assez matures, M. le Président, pour
choisir le meilleur candidat possible pour exercer la fonction de Directeur général des élections, pour lui donner
toute la légitimité pour agir, pour lui dire : Vous êtes le gardien de
notre démocratie. Vous avez une loi
électorale, nous vous demandons de l'appliquer. Peu importe le parti politique,
peu importent les individus, nous
vous demandons d'être équitable, nous vous demandons de prendre action, de
faire respecter les articles de la
loi. Donc, on est assez matures, M. le Président, pour choisir tous ensemble le
Directeur général des élections, même si la majorité requise dans notre
Chambre pour sa nomination, elle est aux deux tiers.
Généralement, la Loi électorale, lorsqu'elle est
modifiée, c'est la même chose, on souhaite la modifier à l'unanimité. Pourquoi? C'est pour envoyer un
message clair, pour dire : On est en accord tous ensemble avec des règles
dont on se dote pour les élections. Puis il
faut toujours avoir le souci, M. le Président, que la Loi électorale, c'est la
loi des citoyens qui participent au
processus démocratique. Il y a plusieurs intervenants, M. le Président. Il y a
les citoyens, il y a les partis politiques, il y a les candidats, il y a les
agents officiels, les représentants officiels, il y a les représentants
du Directeur général des élections dans chacune des 125 circonscriptions.
Mais il y a
une chose qui est sûre, M. le Président, c'est que, lorsqu'on choisit, on
désigne le Directeur général des
élections, on le mandate pour faire appliquer la loi, pour la faire respecter
puis pour s'assurer que les règles édictées par la loi sont respectées par l'ensemble des formations politiques.
Mais encore faut-il lui donner les moyens, M. le Président, pour qu'il puisse prendre action. Là, il y a une
avancée qui est faite au niveau de la vérification, au niveau des enquêtes,
on augmente ses pouvoirs. Mais il y a aussi
la question des réclamations, du pouvoir d'ester en justice, qu'on a réglée
par le fait d'avoir un recours nommé — auparavant, il était innommé — mais aussi au niveau de la prescription, M. le Président, parce que,
vous l'avez vu, il peut arriver que le Directeur
général des élections se rende compte
qu'il y a des contributions qui ont été versées illégalement et que certains
partis politiques nous disent : C'est prescrit, on ne
remboursera pas. On a eu un cas d'exemple concret hier.
Sachant cette
situation, M. le
Président, comment fait-on pour la
résoudre? L'amendement que vous avez devant vous, M.
le Président, et que vous étudiez attentivement vous propose de dire : Malgré
le fait que le Directeur général des
élections avait eu la connaissance à un certain moment donné entre 1996 et 2016
et que, par l'écoulement du temps, l'action,
l'intérêt, la possibilité pour le Directeur général des élections
d'entreprendre une poursuite civile s'est éteinte par le simple
écoulement du temps, M. le Président, donc nous, ce qu'on dit, c'est :
Durant une période transitoire de trois ans
à partir du moment de la sanction de la loi, donnons ce pouvoir particulier au
Directeur général des élections, gardien
de la Loi électorale, de pouvoir rectifier des situations illégales, des
situations où de l'argent qui n'aurait pas dû se retrouver dans les
coffres d'un parti politique va être remboursé aux Québécois, à l'État.
Ce que je dis
à la ministre, M. le Président, c'est : Faisons ce bout de chemin là. On
n'est pas loin de nous entendre, M.
le Président, on est très près. Est-ce que les modalités de l'amendement
peuvent être discutées? Très certainement. Mais, lorsqu'on étudie une loi, M. le Président, ça ne donne rien de
dire : Moi, je reste sur ma position, puis je ne bouge pas, puis je suis fermé, puis ce qui est ça, est
ça. Puis ce n'est pas de même qu'on résout des conflits, M. le Président, puis
qu'on réussit à avancer, puis je vous dirais
que ce n'est pas comme ça qu'ensemble on fait avancer le Québec, pour citer
quelques personnes de l'autre côté de la Chambre. Avec cette attitude-là, M. le
Président, on fait plutôt stagner le Québec,
mais on fait surtout stagner le travail du Directeur général des élections
parce que, oui, on lui donne des pouvoirs supplémentaires, mais il n'a
pas tous les pouvoirs requis pour mener à bien sa mission.
C'est comme
si on confiait au Directeur général des élections le rôle de chauffeur. C'est
comme si c'était votre chauffeur, M.
le Président, puis vous lui demandez de vous reconduire dans votre
circonscription de La Prairie en partant de Québec, on lui donne un beau véhicule de l'année, avec une bonne
garantie, sécuritaire, des coussins gonflables, avec le réservoir d'essence rempli, mais on lui dit :
Pour te rendre à La Prairie, tu ne prendras pas la 20, tu ne prendras pas
la 40, tu vas pouvoir appuyer sur l'accélérateur, mais, tout le long que
tu vas descendre à La Prairie, tu vas avoir le pied sur le «brake» aussi, sur le frein. Donc, il ne se
rendra pas vite à destination, M. le Président, puis ça se peut qu'en cours de
route il manque d'essence et qu'il brûle ses
freins aussi, M. le Président, et qu'il n'arrivera pas au résultat escompté,
puis ça se peut qu'il ne vous amène pas à destination, M. le Président,
comme vous l'aviez suggéré et souhaité. Et là on se retrouve dans une situation où
vous allez peut-être arriver à
un moment donné, mais avec beaucoup
de retard, et que vous lui aviez
demandé de vous reconduire à La Prairie parce
que vous aviez un événement
avec des gens, vous étiez attendu, mais
ça se peut, au moment où vous arriviez, que l'événement soit terminé, et
que vous n'ayez pas pu y participer,
puis que vous n'ayez pas eu le résultat escompté.
• (17 h 20) •
Donc, l'image que je donne, M. le Président,
c'est qu'il ne faut pas retenir le Directeur général des élections, l'empêcher de réaliser sa mission. Puis
l'amendement que nous proposons va en ce sens-là, M. le Président, on veut
qu'il puisse effectuer son travail,
on veut qu'il puisse vous conduire à
destination sans avoir un pied sur le frein. On veut lui donner les moyens pour que les sommes qui ont été
récoltées illégalement soient reversées au trésor public et qu'on ne
puisse pas, comme moyen de défense, opposer la prescription acquise.
Vous savez, M. le Président, ce qu'on propose,
c'est vraiment quelque chose de modéré, quelque chose qui permettrait de faire des gains pour les Québécois,
et j'invite encore une fois la ministre à étudier le sous-amendement que
nous proposons et à nous dire qu'est-ce qui
ne lui convient pas, à échanger avec nous. Je l'ai invitée à danser tout à
l'heure, je lui propose qu'on
s'assoie ensemble et qu'on trouve une voie de passage. M. le Président, c'est
trop important, le fait qu'il y ait
une faille dans la loi, le fait qu'on peut utiliser ce moyen de défense là,
pour une formation politique, pour ne pas
rembourser. Entre vous et moi, M. le Président, c'est comme si on protégeait
les formations politiques par rapport à de l'argent qui a été récolté illégalement. Vous
voyez, hein, là, on est vraiment dans la mécanique, M. le Président, on est
vraiment dans la procédurite. Mais
l'objectif principal, M. le Président, il ne faut pas le perdre de vue, c'est
de l'argent sale qui est utilisé pour les campagnes électorales...
Le
Président (M. Merlini) : Faites attention à vos propos, M. le député.
Vous avez utilisé une formulation qui était
plus appropriée précédemment, et je vous invite, à ce moment-là, à réutiliser
la même formule, qui est plus appropriée dans le cadre de nos échanges.
M.
Jolin-Barrette : Je
comprends, M. le Président, mais ce que je vous dis, c'est qu'une contribution
illégale, dans la langue de tous les
jours, c'est de l'argent sale, vous en conviendrez avec moi. De l'argent
illégal, ce n'est pas propre, c'est sale.
Le
Président (M. Merlini) : Je ne crois pas qu'on peut qualifier l'argent
d'illégal en tant que tel. Si vous faites référence aux contributions, comme le directeur général a mentionné dans
sa lettre, la contribution est illégale. L'argent elle-même, elle est ce qu'elle est. Alors, à ce
moment-là, on parle de contribution illégale. C'est pour ça que je vous
invitais à reprendre les propos que
vous avez utilisés précédemment, pour ne pas qualifier l'argent comme étant ce
que vous avez dit, mais plutôt que les contributions illégales... comme
elles le sont, en contravention, comme vous l'avez si bien dit, contravention
de la Loi électorale. Alors, allez-y, continuez, M. le député.
M. Jolin-Barrette : Je comprends, M.
le Président, qu'au niveau du qualificatif de l'argent parlons alors de contributions
sales. On est vraiment sur le point, M. le Président.
Le
Président (M. Merlini) : M. le député, vous savez qu'on ne peut pas
faire indirectement ce qu'il n'est pas permis
directement de faire. Alors, je vais vous le dire encore une fois d'éviter ce
qualificatif et de reprendre celui que vous avez utilisé précédemment,
qui est plus approprié dans le cadre de nos échanges.
M. Jolin-Barrette : Je comprends, M.
le Président. Je comprends.
Ceci étant dit, je pense que les Québécois savent
très bien de quel type d'argent on parle, de l'argent qui ne devrait pas se retrouver dans les coffres d'un
parti politique parce que cet argent-là s'est retrouvé en contravention des
lois électorales, on va s'entendre là-dessus.
Ceci étant dit, M. le Président, je pense que,
depuis quelque temps, nous proposons à la ministre différentes possibilités afin de bonifier le projet de loi,
bonifier même le consensus. Et je l'ai répété à plusieurs reprises, la ministre
nous dit : Je ne veux pas bouger de la
position du consensus. Je lui rétorque, M. le Président, qu'à la fois
l'opposition officielle, qu'à la fois
la deuxième opposition, qu'à la fois Québec solidaire seraient ouverts à
bonifier le projet de loi avec l'amendement
que la CAQ lui propose. Les seuls intervenants, M. le Président, qu'il reste à
convaincre, c'est le gouvernement libéral puis le Parti libéral.
Moi, je leur
suggère, M. le Président, de faire un meeting à deux tout à l'heure pour, un,
régler les problèmes de communication
lorsque le Directeur général des élections leur écrit, mais, deuxièmement,
aussi pour s'entendre sur une voie de
passage, une possibilité d'éviter que les partis politiques puissent utiliser
l'argumentaire de la prescription pour s'exonérer du remboursement de
sommes.
Le Président (M. Merlini) : Merci
beaucoup, M. le député de Borduas, pour votre intervention sur votre sous-amendement. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur le sous-amendement du député de Borduas? Je crois que
M. le député de Deux-Montagnes veut intervenir. Alors, à moins que... Mme la
ministre, vous aviez un mot à dire sur l'intervention du député de Borduas?
Mme de Santis : Non, merci, M. le
Président.
Le
Président (M. Merlini) :
Non. Alors, Mme la députée de Taschereau, en alternance, avez-vous quelque chose à dire sur le sous-amendement?
Mme
Maltais : Je n'ai
rien à ajouter... que nous n'avons pas de problème avec l'amendement.
Le Président (M. Merlini) : Le sous-amendement.
Mme
Maltais : Le sous-amendement,
voilà.
Le Président (M. Merlini) : Alors,
merci. M. le député de Deux-Montagnes, la parole est à vous.
M. Charette : Merci, M. le
Président. Content de pouvoir intervenir sur cet amendement-ci parce qu'il y a,
effectivement, une donne totalement nouvelle qui peut, comme le disait mon
collègue de Borduas, servir de voie de passage, et je fais davantage référence
au deuxième paragraphe de l'amendement proposé. On le sait tous, lorsque le Directeur général des élections émet des constats
d'infraction, il rend publique la chose à travers un communiqué de presse,
à travers une information, donc, qui se retrouve sur son site Internet. Donc,
c'est le cas pour des contraventions émises à l'endroit d'individus.
Donc, j'aime l'idée de mon collègue de Borduas de retenir une formule semblable
pour une communication qui serait faite à
l'égard ou à l'endroit d'un parti... j'allais dire parti fautif, ce n'est pas
forcément la bonne expression, en ce
sens que le parti lui-même peut ne rien avoir à se reprocher, même si de
l'argent amassé de façon illégale lui a été versé, mais j'aime l'idée de
ce parallèle.
Bref, lorsqu'un individu commet une infraction,
le Directeur général des élections émet un communiqué de presse, communiqué de presse qui est rendu public. Et là, dans le cas présent, lorsqu'un
parti politique se verrait invité — je
dis invité parce que, malheureusement, actuellement il n'y a pas de contrainte
possible — à
rembourser une somme prescrite,
l'information serait rendue publique. L'avantage de cette proposition-ci, ça
nous éviterait un petit peu l'embarras causé
par la révélation faite hier de cette lettre envoyée au Parti libéral du Québec
en mai 2015. Donc, on n'aurait pas à se lancer dans une chasse aux sorcières, on n'aurait pas à essayer de
trouver une information qui, autrement, n'est pas connue, elle serait
rendue publique, et le parti politique visé assumerait le poids du caractère
public de cette communication. Il aura beau jeu à ce moment-là d'invoquer la
prescription, si tel est son souhait, dans la mesure où on n'arrive pas à s'entendre sur cette fameuse question de
prescription, mais, ultimement, c'est la pression publique qui serait très,
très forte et qu'il aura à gérer dans l'éventualité où il ne souhaite
pas donner suite à la demande de remboursement.
Donc, c'est
certainement quelque chose à envisager, et, avec cet amendement-ci de mon
collègue de Borduas, clairement on rouvre la voie à une nouvelle
approche qui mérite considération. Et je ne sais pas, M. le Président,
avez-vous l'information? Savez-vous à combien d'amendements sommes-nous rendus
pour ce qui est de l'article 32? M. le
Président, une question
fort simple, mais je n'ai pas la réponse. Savez-vous à combien d'amendements sommes-nous rendus, de notre côté, sur l'article 32 en
particulier?
• (17 h 30) •
Le Président (M. Merlini) : Le
secrétaire va m'informer.
M. Charette : C'est gentil, merci.
Le Président (M. Merlini) : Nous
avons six sous-amendements qui ont été rejetés.
M.
Charette : Six sous-amendements. C'est le septième, donc, qui est à l'étude actuellement. Donc, ce sont autant de
tentatives d'arriver à un compromis, et celle-ci, compte tenu d'une application qui se rapproche de ce qui se fait déjà,
ma foi, risque, à mon sens, d'être la bonne. Il y a une application semblable
qui se fait auprès d'individus reconnus coupables
de financement illégal. Donc, il y a un parallèle qui me semble intéressant à envisager du côté de la ministre, et ça nous permettrait
enfin d'arriver à l'objectif recherché, c'est-à-dire passer à l'article
suivant. Et on peut, d'ores et déjà, assurer la ministre que, si nous finissons par
adopter l'article 32, la nature de l'article 33 nous permet
d'être très optimistes sur son adoption rapide. C'est un article qui se
réfère à l'application. Ce sont les mesures d'application et d'entrée en vigueur du projet de loi, donc ce serait une formalité que de l'adopter,
en autant, bien sûr, que l'on arrive à ce compromis tant
recherché pour la question de la prescription.
Je dis
compromis tant recherché, mais j'ai encore le sentiment, malheureusement, que nous sommes les seuls à le chercher,
ce compromis, étant les seuls à proposer des amendements et à tenter de
trouver une voie de passage. J'aime l'expression
de mon collègue de Borduas, mais, tout
de même, tout de même, on le reconnaît, c'est l'os qui nous empêche d'aller plus loin pour le moment. Mais soyons
optimistes, l'article 33, ensuite, risque de se voir adopter nettement
plus rapidement. Donc, je serais très curieux d'entendre la
ministre dans les prochaines minutes sur l'amendement proposé,
voir si elle souhaite le modifier à sa guise pour, effectivement, se rapprocher
d'une acceptation commune.
Mais clairement
c'est une avancée qui est majeure dans le cas présent, et, en même temps, ça nous permet de se rapprocher d'un objectif que l'on doit
tous viser — du
moins, je l'espère — celui
d'une plus grande transparence. Et le parti politique
qui se verrait intimé de la sorte par le Directeur général des élections, l'information étant connue, le parti
politique aurait la possibilité, à visière
levée, de défendre le financement en cause ou, au contraire, admettre l'erreur,
sinon la faute, pour procéder au remboursement par la suite. Et c'est un
traitement, naturellement, qui serait applicable à chaque formation politique.
Donc, pour celles et ceux qui craignent encore que nous sommes à procéder à une
chasse aux sorcières vis-à-vis le Parti
libéral, je rassure, la disposition serait applicable à tous. Donc, peu importe
la formation politique visée par une
communication de cette nature par le Directeur général des élections... aurait
à subir le poids de cette communication publique.
Donc,
encore une fois, très intéressé d'entendre la ministre dans les prochains
instants par rapport à cet amendement-là. Donc, objectif de transparence, oui. Ultimement, décision qui reviendra
aux partis politiques, mais surtout, surtout le fardeau de la preuve ou
le fardeau de vivre avec sa décision. Et moi, à chaque fois que l'occasion se
répète, j'aime rappeler l'engagement que
nous avons pris au niveau de la Coalition avenir Québec, c'est-à-dire de rembourser
toutes les sommes qui nous seraient réclamées par le Directeur général
des élections, que cette somme soit prescrite ou pas.
Et je le
mentionnais tout à l'heure, mais je pense que c'est un élément qui est encore
peu connu, la Coalition avenir Québec, formation politique relativement
jeune qui est née du regroupement avec une formation politique qui a cessé d'exister officiellement, soit l'Action
démocratique du Québec, mais nous
avons, bien que nous n'étions pas obligés de le faire, accepté et pris l'engagement d'assumer quelque réclamation que ce soit qui nous parviendrait de la part du Directeur
général des élections s'il était reconnu
qu'une faute a été commise ou qu'un financement encaissé ne correspondait pas
aux principes de notre Loi électorale.
Donc, cet engagement-là, je pensais que c'était
aussi celui du Parti libéral. Du moins, c'est ce que le premier ministre a eu l'occasion de répéter à plusieurs
reprises, c'est l'engagement que plusieurs députés libéraux ont répété sur
différentes tribunes. C'est l'engagement qui
a pris la forme d'une motion dûment adoptée à l'Assemblée nationale, donc
ça permettrait
d'assumer, en quelque sorte, nos propos et de poser un geste concret pour
démontrer le sérieux des affirmations
que l'on peut faire. Parce que c'est un petit peu ça, hein, qu'on nous reproche
dans la population. Lorsque l'on
questionne les gens sur leur perception de la chose politique, je le
mentionnais tout à l'heure, souvent on va nous dire : C'est du pareil au même. Les formations politiques, peu
importe laquelle, c'est du pareil au même. Mais une autre doléance que l'on entend souvent — et je suis entièrement convaincu que mes
collègues, peu importe la formation politique, l'entendent également — c'est de dire : Votre parole, une fois
l'élection passée, ne vaut plus grand-chose, en ce sens qu'on va tenter de nous convaincre à travers de beaux
engagements, mais, lorsque l'occasion se présente de donner une valeur à
cet engagement-là, du coup on renie notre engagement ou on trouve différentes
excuses pour ne pas s'y conformer.
Je ne dis pas
que c'est une excuse dans le cas présent, mais, étonnamment, il y a un
engagement de pris, et la réponse donnée
du Parti libéral — et je
fais référence à cette même lettre de mai 2015 — je ne la qualifie pas d'excuse, mais la
réponse du Parti libéral, tout de même, est
de dire : Malgré l'engagement que nous avons pris, non, on ne remboursera
pas parce que les sommes sont prescrites.
Donc, une ouverture que je pense satisfaisante dans le cas présent, qui
pourrait nous permettre d'adopter... Rappelez-moi l'heure, M. le
Président. On siège jusqu'à 18 heures avant l'ajournement?
Le Président (M. Merlini) :
18 heures, oui.
M.
Charette : Donc, il reste essentiellement 20 minutes. Donc, avec cette
main tendue, avec une réponse favorable de la part de la ministre, on pourrait très certainement, dans les
quelques minutes qu'il nous reste avant l'ajournement, procéder même à
l'adoption de l'article 33, ce qui compléterait l'étude article par article du
projet de loi n° 101.
Donc, je le
dis, je le répète tout simplement pour rappeler à la ministre qu'on est tout
près d'aboutir à cette ultime étape
en autant que la collaboration soit dans les deux sens, et non pas à sens
unique, comme c'est, malheureusement, le cas actuellement. Et si, à
travers le libellé lui-même, il y a quelques éléments qui ne conviennent pas à
la ministre, on sera très intéressés, de
notre côté, à entendre... et, surtout, très disposés à procéder à quelques
aménagements si le principe est
respecté. Le choix des mots et le choix des virgules dans un texte de loi est
souvent très, très important. Donc, si, selon la ministre, notre libellé peut être bonifié, on le fera volontiers. On
connaît la procédure dans pareille situation, on pourrait, tout simplement, ajourner pendant quelques
minutes, le temps qu'on fignole un texte et qu'on puisse ensuite le
redistribuer aux collègues. Donc,
c'est une procédure de quelques minutes, et on pourrait entièrement et
totalement compléter tout ça et l'adoption de l'article 33 avant
l'ajournement de 18 heures.
Donc, c'est
essentiellement ce que contient notre sous-amendement, et j'anticipe peut-être
des commentaires. Et on aura
certainement d'autres propositions à vous faire dans l'éventualité où celle-ci
n'est pas retenue, mais dans le même sens,
qui pourraient servir de compromis
acceptable. Mais déjà je tends la main à la ministre.
Est-ce que c'est un texte qui vous semble convenable à ce
moment-ci? Est-ce qu'il est pertinent de procéder à une bonification quelconque pour faciliter
l'adoption de l'article 32?
• (17 h 40) •
Le Président (M. Merlini) : Mme la
ministre.
Mme de
Santis : J'aimerais simplement
rappeler qu'on a collaboré ensemble lors du comité consultatif. Je crois
que, tout le monde, on a écouté, on
a discuté, on est arrivés à un consensus.
Lors de l'étude article par article, avant qu'on arrive à l'article 32, il y a des modifications qui ont été suggérées
par les partis d'opposition que, même sans beaucoup de discussion, j'ai dit : Oui, on va procéder
avec ces amendements. Si on veut rappeler le recours innommé, que je croyais
était clair dans la loi, mais que, pour
s'assurer qu'il n'y a aucun risque de discussion là-dessus, j'ai dit :
Voilà, vite, après très peu d'argumentaire, on va faire un amendement
pour avoir un recours nommé. La collaboration a été là.
Maintenant,
je demande au parti de la deuxième opposition d'arrêter de venir avec des
sous-amendements qui ne sont pas
acceptables, qui ne sont pas dans le même esprit que le consensus qu'on a eu et
qu'on puisse procéder à un vote sur le projet de loi n° 101. S'ils sont
contre l'article 32 et veulent voter contre le projet de loi n° 101, qu'ils
le fassent, mais on tourne en rond à
ce moment-ci, et je propose qu'on procède avec l'adoption du projet de loi
n° 101. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Merlini) : Merci,
Mme la ministre. M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
J'ai perdu le fil, et peut-être que le recours au secrétariat de la commission
sera utile. Combien d'amendements la
ministre a-t-elle déposés? Pas forcément par rapport à un article en
particulier, mais sur toute l'étude du projet de loi. Désolé de vous
embêter avec la question, là, sans préavis, mais je suis curieux de voir le
nombre.
Le Président (M. Merlini) : Les
amendements proposés par la ministre totalisent 28.
M. Charette : 28 amendements de
proposés.
Mme de
Santis : Mais combien par
les partis d'opposition? Parce qu'il y en a aussi qui ont été proposés et
adoptés, à part les sept dont on parle maintenant.
Le
Président (M. Merlini) : Nous allons faire la vérification. Alors, on
va prendre la réponse en... on va vous la donner en différé. Le secrétaire va
vérifier le nombre des amendements.
M.
Charette : Donc, 28 amendements déposés par la ministre. Elle va me
corriger si j'ai tort, les 28 ont été acceptés?
Mme
de Santis : Oui.
M.
Charette : Donc, je pense que la bonne volonté et la bonne foi des
oppositions, à travers cette réponse, est confirmée. Moi, le souvenir que j'ai, par contre... et peut-être que le
secrétaire de commission me corrigera au besoin, mais j'ai le souvenir qu'aucun des amendements que nous avons déposés
n'a été accepté. Peut-être qu'on me corrigera, mais je ne pense pas
que...
Mme
de Santis : L'amendement qui a été suggéré pour un recours nommé, on a
procédé là-dessus, c'était votre suggestion.
En plus, la plupart des amendements qui ont été proposés par la ministre
touchaient des sujets sur lesquels il
y avait eu consensus et sont en rapport aux pouvoirs de délégation, de
vérification et d'enquête du Directeur général des élections. On a eu
une belle coopération à date. Je ne mets pas ça en dispute, je dis simplement
qu'on n'a pas maintenant, avec vos
propositions de sous-amendement... On n'est pas d'accord avec ce que vous
proposez, mais vous avez tout le
droit au monde de faire ce que vous faites, et on va être patients, et j'espère
bien qu'à un moment donné on pourra voter sur le projet de loi
n° 101.
Le
Président (M. Merlini) : Pour répondre à votre question, il y a eu un
sous-amendement proposé par le député de Marie-Victorin qui avait été écrit en collaboration avec l'équipe de la ministre, en plus de vos sous-amendements que vous avez proposés. Ce
sont les seuls sous-amendements qui ont été proposés par les partis de l'opposition parce que les amendements apportés par la ministre étaient le fruit de
discussions entre l'équipe de la ministre
et les partis d'opposition.
M. Charette :
Et c'est exactement là où je voulais en venir...
Mme
de Santis : ...un des amendements était pour s'assurer un recours
nommé. La suggestion est venue de votre part, et j'ai dit oui. Et donc on a rédigé l'amendement, et donc c'est
pour cette raison-là, c'est nous qui l'avons présenté. Mais on a accepté
votre proposition, c'est...
M. Jolin-Barrette : Tout à fait d'accord. Et puis, M. le Président, vous me permettrez juste
une petite intervention...
Le Président (M.
Merlini) : Votre temps est écoulé, malheureusement.
M. Jolin-Barrette : Je le sais, mais c'est simplement, M. le Président, pour féliciter
l'ouverture de la ministre sur la question du recours nommé, M. le
Président.
Le Président (M.
Merlini) : Malheureusement, vous ne pouvez pas intervenir, votre temps
est écoulé sur ce sous-amendement.
M.
Jolin-Barrette : Elle a fait preuve d'une grande ouverture.
Le
Président (M. Merlini) : Je ne peux pas vous reconnaître le droit de
parole, c'est au député de Deux-Montagnes qu'il lui reste du temps,
malheureusement.
M.
Charette : Étant donné que les félicitations n'ont pas pu être saisies
au micro, je vais me permettre de répéter ce que mon collègue de Borduas a mentionné. Effectivement, le recours
nommé, c'est une idée et un débat qui a été lancé par mon collègue de Borduas,
qu'il a su très bien défendre, d'ailleurs. Mais la raison pour laquelle je
questionnais la ministre sur le
nombre des amendements adoptés est le fait qu'on ait pu, sans les déposer
nous-mêmes, influencer des amendements
présentés par la ministre. À travers cette question-là, je voulais démontrer
essentiellement une chose, c'est la collaboration qui a prévalu depuis
le tout début.
Donc, oui, il y a un
point d'achoppement, très, très clairement, qui nous empêche d'avancer, là,
depuis quelques heures, mais, depuis les
débuts, il y a des avancées tout à fait formidables qui ont été réalisées. Et,
peu importe que l'on réussisse à
adopter ce projet de loi ou non dans les délais, là, qui nous amènent à
vendredi, on pourra se féliciter des
avancées réalisées. Et, si jamais ce n'est pas vendredi qu'on parvient à
l'adoption, à la reprise des travaux, à l'automne, on pourra continuer
sur les avancées réalisées.
Et
la ministre s'inquiétait, à ce moment-là, de la possibilité de nouvelles
prescriptions qui puissent s'ajouter, étant donné que les délais nous séparant de l'adoption risquent de créer de
nouvelles prescriptions. À ça, on reprendra le même argumentaire que l'on défend depuis quelques mois,
sinon quelques heures très, très certainement, à travers l'article 32, à
l'automne, on pourra de nouveau faire valoir
cette nécessité de revoir la conception de prescription. Donc, les montants
prescrits qui auraient pu s'accumuler dans
le laps de temps entre vendredi et une adoption, par exemple, en octobre
pourront être réglés à travers un juste compromis sur, justement, les
questions de prescription.
Donc, une adoption à l'automne, pour nous, ne
signifie pas des recours perdus pour autant pour le Directeur général des élections d'aucune façon. Je ne sais
pas si c'est vous qui assumiez la présidence ou peut-être votre collègue
de Chomedey lorsque je le mentionnais tout à
l'heure, M. le Président, mais il est plutôt, je dirais, pas rare, mais une
refonte majeure de notre Loi
électorale, ce n'est pas quelque chose qui survient à toutes les sessions,
sinon à tous les ans, d'où l'importance d'avoir l'intime conviction,
lorsqu'on aura adopté le projet de loi... parce que je garde espoir que nous réussissions à l'adopter,
mais que nous ayons, à tout le moins, l'intime conviction que nous n'avons pas
fait de compromis sur sa portée, et c'est là toute la distinction.
• (17 h 50) •
Et, en toute franchise, je regarde les
titres — d'autres
se sont ajoutés depuis que j'en ai fait la recension ce matin — un
dernier article vient tout juste de paraître sur le site de La Presse,
ce sont des titres catastrophiques pour le Parti libéral. Ce sont des titres qui, au niveau de l'image, entachent
sérieusement la réputation du Parti libéral. Donc, si on devait adopter un projet de loi avec une faille
comme celle que nous relevons depuis quelques heures à travers l'étude de l'article 32, ma foi, ce serait encore plus
dommageable pour le parti gouvernemental. Donc, pour se refaire cette virginité
souhaitée au niveau de l'image, il faut faire en sorte que le projet adopté
ait, ma foi, la portée qu'il doit avoir.
Et, au coeur
de ces questions abordées, oui, on reconnaît les avancées, les pouvoirs qui
sont maintenant reconnus au Directeur
général des élections, les autres amendements qui ont pu être adoptés ou les
autres articles qui ont pu être adoptés,
mais, sans la fameuse question de la prescription, malheureusement, on pourra
dire qu'on n'est pas allés au bout de l'exercice.
On pourra même dire qu'ultimement la commission Charbonneau, dans tout ce
qu'elle a pu révéler, aura aussi été, malheureusement, sans dire une
perte de temps, mais aura aussi été un exercice qui ne sera pas allé au bout de
sa démarche. Là, vous m'indiquez que mon temps est, malheureusement, écoulé.
Le
Président (M. Merlini) : C'est exact. Je vous remercie pour votre
intervention, M. le député de Deux-Montagnes. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur le sous-amendement proposé par le député de Borduas? Mme la
députée de Taschereau, aucune intervention?
Alors, je
vais mettre le sous-amendement aux voix. Est-ce que le sous-amendement du
député de Borduas est adopté?
M. Jolin-Barrette : M. le Président,
on va vous demander...
Le Président (M. Merlini) : Oui, M.
le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : ...un vote par
appel nominal.
Le Président (M. Merlini) : Le vote
par appel nominal est demandé. M. le secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette : Pour.
Le Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme Maltais : Pour.
Le Secrétaire : Mme de Santis
(Bourassa-Sauvé)?
Mme de Santis : Contre.
Le Secrétaire : M. Rousselle
(Vimont)?
M. Rousselle : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. le
Président?
Le Président (M. Merlini) :
Abstention.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Merlini) : Alors, le sous-amendement du député de
Borduas est rejeté. Nous revenons donc à l'étude de l'amendement de la
ministre. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui, M. le
Président. Vous me permettrez de déposer un sous-amendement à l'amendement
de la ministre.
Le
Président (M. Merlini) : Avec plaisir.
M. Jolin-Barrette : L'amendement à l'article 32 du projet de loi est modifié par l'ajout,
après le premier alinéa, de l'alinéa suivant :
«Aux
fins de l'application des articles 5, 29 et 31, le Directeur général des élections
est réputé avoir pris connaissance de toute information pertinente à un
recours le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).»
Le
Président (M. Merlini) : Très bien. Alors, je vais suspendre quelques
instants pour la distribution en copie et la prise... de l'amendement.
(Suspension de la séance à
17 h 53)
(Reprise à 17 h 56)
Le
Président (M. Merlini) :
Alors, nous reprenons nos travaux pour les quatre minutes qu'il nous reste. L'amendement est recevable. Mme la ministre, vous
avez une intervention.
Mme
de Santis : Oui. D'abord, je
ne sais pas si, vraiment, c'est recevable, car on présume que tout recours
qui fait référence à ces articles...
Une voix :
...
Le Président (M.
Merlini) : Un instant. Je vais laisser Mme la ministre...
Mme
de Santis : Si quelque chose est connu en 2017, vous allez dire que
c'est connu en 2016. Ça n'a aucun sens. Si quelque chose qui touche l'application de ces articles est connu en
2018, c'est connu en 2016. Je crois que, vraiment, ce n'est pas recevable dans sa forme actuelle, et
ça enlèverait des droits au Directeur général des élections pour procéder
dans l'avenir. Alors, c'est pour cette
raison-là que je le soulève, parce que je trouve, sur la face même, ce n'est
pas possible à appliquer.
Le Président (M.
Merlini) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, comme je l'ai mentionné à plusieurs
reprises, M. le Président, on est très ouverts, avec la ministre, à trouver un libellé de texte qui va lui convenir.
Donc, je l'ai répété à de nombreuses reprises, et la pause du souper arrive, M. le Président, et vous
connaissez l'objectif, et l'on a très bien exposé à la ministre, comment
peut-on arriver à une adhésion de sa
part? Je comprends que, là, l'amendement a suscité son intervention. Peut-être
qu'on pourrait tabler sur cet intérêt pour travailler ensemble avec un
libellé commun pour un article, pour arriver à l'objectif qui est défendu par notre formation politique, qu'on ne
puisse pas opposer la prescription acquise, M. le Président, à une réclamation
du DGEQ.
Et vous me permettrez
de mentionner, M. le Président, que le Parti libéral ne réalise pas toute
l'importance d'éliminer ce moyen de défense
pour les partis politiques. Et, vous savez, le Parti libéral, lorsqu'il se
retrouve de nombreuses années au
pouvoir, parfois, M. le Président, il éprouve certaines difficultés avec la Loi
électorale, avec le financement. On
peut penser aux gouvernements de Gouin, Taschereau, Bourassa, Charest. Et là, M.
le Président, on a une occasion de
faire les choses différemment, j'invite la ministre à réfléchir durant la
période du souper pour trouver une voie de passage avec nous, pour avoir le meilleur projet de loi,
pour colmater les brèches. Je vous le répète, M. le Président, on est très
ouverts, du côté de ma formation politique, pour bonifier le projet de loi.
Mme
Maltais :
M. le Président.
Le Président (M.
Merlini) : Oui, Mme la députée de Taschereau, très rapidement.
Mme
Maltais : Très rapidement, je voudrais juste savoir si le
collègue, étant donné qu'il se trouve à réduire les pouvoirs du DGE, va retirer son amendement ou s'il
le conserve la table, étant donné l'opinion... avec laquelle je suis
d'accord. Jusqu'ici, je suis d'accord, mais réduire les pouvoirs du DGE, ça, je
ne suis pas d'accord.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, ce n'est absolument pas l'objectif, puis on pourrait
retirer l'amendement pour le remplacer par un autre bonifié si vous nous
permettez de modifier la rédaction.
Le
Président (M. Merlini) : Alors, vous pourrez profiter, à ce moment-là,
de la pause du souper pour réfléchir
si, oui ou non, vous désirez retirer l'amendement et en proposer un nouveau.
Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de notre commission
jusqu'à 19 h 30, où nous poursuivrons notre mandat à la salle
des Premiers-Ministres. Merci et bon appétit!
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise
à 19 h 48)
1171 <R>La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, bonsoir à tous. À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
Je vous rappelle que
la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi
n° 101, Loi donnant suite aux recommandations de la Commission Charbonneau
en matière de financement public.
Et,
lors de la suspension de nos travaux cet après-midi, nous discutions
sur le sous-amendement qui a été apporté par le député de Borduas. Alors, M.
le député de Borduas,
sur votre amendement, je peux comprendre que vous n'étiez pas
sûr si vous vouliez faire la discussion ou le retirer tout court. Alors, est-ce
que vous avez pris votre décision?
M. Jolin-Barrette : Oui. Bonjour, Mme la
Présidente. Ça me fait plaisir de
vous voir avec nous pour présider nos travaux. Avec le consentement des collègues,
nous allons retirer l'amendement et nous en déposerions un autre.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : O.K. Alors, on va retirer l'amendement, et vous allez en soumettre un autre. C'est ça?
M.
Jolin-Barrette : Exactement, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Parfait. Alors, on va suspendre...
Une voix :
Consentement.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Consentement. Merci.
On va suspendre
quelques minutes pour que vous... on peut faire la distribution de votre
sous-amendement.
(Suspension de la séance à
19 h 50)
(Reprise à 19 h 51)
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, allez-y, M. le député de Borduas, vous pouvez lire votre sous-amendement.
Par la suite, on peut ouvrir la discussion.
M. Jolin-Barrette : Oui. L'amendement de l'article 32 du projet de loi est modifié par
le sous-amendement suivant, qui vient ajouter, après le
premier alinéa, l'alinéa suivant :
Malgré
le premier alinéa, le délai de prescription sur la connaissance par le Directeur général des
élections d'une information relative à toute contribution ou partie de contribution qui a été faite
en contravention aux articles 5, 29 et 31 pendant la période comprise
entre 1996 et 2015 est éliminé et ce, pour une période de trois ans.»
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Parfait. Alors, la discussion est ouverte, M. le député de Borduas, vous pouvez expliquer votre sous-amendement,
s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la Présidente, ce que l'on vise ici par cet amendement,
c'est de couvrir la période de 1996 à
2015 au niveau de la connaissance par le Directeur
général des élections d'une information qui ferait en sorte que cette
information se serait trouvée dans les dossiers du Directeur général des élections, faisant en sorte que la prescription aurait pu être acquise, et, à ce moment-là, Mme la Présidente, on veut permettre au Directeur général des élections d'avoir toute
la latitude possible, pour une période de trois ans, d'entreprendre une
poursuite civile, d'avoir un recours civil et qu'un parti politique
ne puisse pas opposer la prescription, Mme
la Présidente, au Directeur général des élections.
Donc,
concrètement, Mme la Présidente, on est vraiment dans une approche où on vise à outiller le Directeur général des élections, on vise à ce
que celui-ci... Et je l'ai mentionné à plusieurs reprises à la ministre,
comment fait-on pour rétablir l'équité
entre les partis? Comment fait-on pour s'assurer que l'argent qui aurait été
utilisé ou qui n'a pas nécessairement été utilisé, qui se retrouve dans les coffres
d'un parti politique, comment cette contribution illégale là, qui
serait prescrite en vertu de la loi
et en vertu des modifications que nous allons apporter à la Loi électorale,
comment cette contribution-là pourrait
être recherchée par le Directeur
général des élections? Parce que
je ne sais pas si vous avez suivi nos travaux, Mme la Présidente, mais très certainement, hier, nous avons appris qu'il est arrivé dans le passé, en 2015,
qu'une formation politique
oppose la prescription pour ne pas avoir à rembourser un montant. Le Directeur général des élections avait informé cette formation politique, en l'occurrence le Parti libéral du Québec, et le Parti libéral nous
a dit : J'invoque la prescription. Comme la ministre l'a dit
aujourd'hui, c'était son droit d'invoquer la prescription. On a eu un débat
tout à l'heure, Mme la Présidente, sur la légalité et sur la légitimité.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : ...
M. Jolin-Barrette : Je suis très content de le savoir, Mme la Présidente. Et donc, sur
cette question-là — et c'est
fondamental, puis c'est tout l'objet du
débat que nous avons à cette commission — c'est la suivante : Acceptons-nous
que les partis politiques, dans le passé, dans le présent et dans le futur,
utilisent de l'argent qui...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Attention avec...
M. Jolin-Barrette : Avec le mot «argent»,
Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Non, je pensais que ça suivait avec quelque chose d'autre, mais continuez.
M. Jolin-Barrette : De l'argent qui
constitue une contribution illégale. Vous conviendrez avec moi, Mme la Présidente,
que je ne pense pas qu'il y a personne ici, dans cette pièce, qui souhaite
qu'une formation politique utilise de l'argent qui provient d'une contribution illégale. Parce
qu'ultimement, à partir du moment où un parti politique sait, il apprend
par la voix du Directeur général des élections que la contribution, elle est
illégale, il a deux choix, le parti politique,
il a le choix de la rembourser ou il a le choix de refuser de la rembourser
suite à une demande du Directeur général des élections pour un motif de prescription. À partir de ce moment-là,
le parti politique qui choisit de conserver la somme, Mme la Présidente, à partir du moment où le parti
politique choisit de conserver la somme et de l'utiliser, Mme la Présidente,
ça pourrait s'assimiler — et peut-être que le député de Vimont va
pouvoir nous le confirmer — à du recel. Parce que, lorsqu'on
sait qu'une somme provient de fonds illégaux, la contribution a été versée en
contravention de la loi, le parti en est
conscient, s'il décide de la garder puis de l'utiliser, ça crée une
problématique. Puis on peut faire le comparatif avec le recel parce que le recel, c'est l'utilisation
d'un bien infractionnel. Peut-être que le député de Vimont peut me corriger,
confirmer ce que je dis. Vous allez me corriger si...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : M. le député de Borduas, vous
parlez à la présidence, vous n'avez pas le droit d'interpeler les
députés. Alors, vous me parlez à moi.
M. Jolin-Barrette : Je vous parle à
vous, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, merci.
M.
Jolin-Barrette : Mais vous
comprenez que je faisais appel à l'expertise du collègue de Vimont parce qu'il
a oeuvré très certainement durant de
nombreuses années dans les milieux policiers, et vous savez que ces gens-là
parlent d'une façon factuelle.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Ça va me faire plaisir si mon
collègue de Vimont voulait prendre la parole tantôt. Mais, pour
l'instant, c'est vous qui avez la parole, et j'apprécierais beaucoup si vous
vous adressiez à la présidence.
M.
Jolin-Barrette : Très
certainement, je vais m'adresser à vous parce que, Mme la Présidente, on n'a
pas beaucoup l'occasion de se voir.
Ceci étant
dit, Mme la Présidente, le parallèle est quand même intéressant entre
l'utilisation d'une somme que l'on
sait illégale et un bien qui provient des produits de la criminalité et qu'on
sait que sa provenance est illégale. Et ça, ça s'applique pour tous les partis, Mme la Présidente, ça s'applique pour
tout le monde. Et le choix qu'on a à faire ce soir dans le cadre de
l'étude détaillée du projet de loi, c'est de dire : Est-ce qu'on veut
permettre l'utilisation par les partis politiques
de ces sommes-là? Et puis j'ai bien entendu les arguments de mes collègues de
la partie ministérielle qui me disaient :
Parfois, ça peut arriver que le parti n'était même pas au courant que la somme
était une contribution illégale. Ceci
étant dit, à partir du moment où il est informé, le parti, pourquoi est-ce
qu'on lui donnerait la possibilité de s'exonérer? C'est une porte qui
est ouverte, Mme la Présidente, c'est une brèche qui est présente.
Moi, je pense
très honnêtement qu'on devrait boucher ce trou-là, Mme la Présidente, s'assurer
qu'un parti politique ne puisse pas
utiliser cette brèche parce qu'ultimement le message qui serait envoyé aux
citoyens, ce serait un mauvais message,
de dire : Écoutez, on sait que la contribution n'a pas été faite
légalement, on se retrouve avec cet argent-là, on l'a utilisé, on l'a dépensé ou on l'a placé, on l'a
investi pour payer l'hypothèque d'un immeuble, on l'a mis à la banque, on a
tiré des fruits de ce placement-là et,
manifestement, on ne souhaite pas le
rembourser pour plusieurs raisons, notamment
pour l'argument très légaliste à l'effet que le parti politique n'a pas à le
rembourser.
Alors, Mme la Présidente, il y a vraiment un choix d'options ici. Vous avez deux
options : l'option qui est proposée par la CAQ, l'option de dire : Toutes les contributions illégales qui ont été versées durant la période de la commission Charbonneau... Parce que, vous savez, ça a occupé beaucoup les
Québécois, la commission Charbonneau, durant deux, trois, quatre ans,
Mme la Présidente? Trois ans?
• (20 heures) •
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Trois ans. Et, vous savez, la commission aussi
était dans l'actualité durant bien des années avant, elle a été réclamée dès 2009. Et, Mme la Présidente, cette commission
en est venue à certaines conclusions que nous avons étudiées pour l'objet du présent projet de loi, mais il ne
faut pas oublier, Mme la Présidente, que le but ultime était de faire le
lien entre le financement des partis politiques, le milieu de la
construction... et c'est important que les situations qui se sont produites et
qui ont été décrites à la commission Charbonneau...
Et, vous
savez, il y a plusieurs personnes qui ont comparu à la commission Charbonneau,
Mme la Présidente, des gens du monde politique, du monde municipal, du
monde provincial. Il y a même des gens qui avaient déjà fait de la politique
fédérale qui ont été témoigner à la commission Charbonneau ou qui ont organisé
des campagnes électorales fédérales puis qui ont récolté des fonds illégaux en ne respectant pas
la Loi électorale du Canada. Donc, il y a des gens du monde du génie-conseil, des entreprises en
construction qui ont témoigné à la commission Charbonneau pour parler de
l'influence de l'argent, pour dire qu'il y avait eu des contributions illégales
qui avaient été faites aux partis politiques, et les gens disaient : On le savait, que c'était illégal, mais ça
fonctionnait comme ça. Les Québécois ont été choqués, et sont choqués, et demeurent choqués, et je pense que
l'amendement qui est proposé permettrait à la fois de couvrir la période
visée par la commission Charbonneau et de permettre le remboursement des
sommes.
Parce qu'il
ne faut pas se mettre la tête dans le sable, Mme la Présidente, la question,
c'est toujours — et
j'utiliserai une expression : À
qui profite le crime? Ultimement, la résultante, c'est : Pourquoi y
avait-il des contributions illégales? Pourquoi y avait-il ce genre de
système là? Pour certains entrepreneurs, certaines firmes de génie-conseil,
c'était ultimement pour avoir des contrats.
Pour ceux qui collectaient illégalement ces sommes, Mme la Présidente, c'était
pour avoir de l'influence ou pour leur propre bénéfice.
Vous savez, Mme la Présidente, l'UPAC a fait un
travail dans ce dossier-là, et on verra au fil des procédures judiciaires, dans
certains dossiers, quelle sera la résultante en lien avec le financement
politique, est-ce qu'il y a eu utilisation
d'influence en échange de contributions politiques. Il y a une chose qui est
sûre, Mme la Présidente, c'est que, si
le Directeur des poursuites criminelles et pénales a décidé de porter des
accusations à l'endroit de certains individus, c'est qu'il est convaincu
hors de tout doute raisonnable qu'il y a eu la commission d'infractions
criminelles.
Donc, Mme la
Présidente, on disait que, ceux qui avaient participé à ce système, il y avait
les entreprises pour avoir des contrats, il y avait les gens qui
récoltaient l'argent pour leur propre bénéfice, ou pour le bénéfice d'un parti politique, ou pour leur zone d'influence, Mme la
Présidente. Et, ultimement, où l'argent était acheminé? La majorité de l'argent, elle était acheminée au bout de la
chaîne alimentaire, aux partis politiques. Parce que tout ce système-là, avec
les différents acteurs, c'était un tout, Mme
la Présidente, un tout, et les bénéficiaires ultimes de ces contributions
illégales là, du détournement de la loi, ça a été ultimement
certains partis politiques. Et les partis
politiques, lorsqu'ils
ont utilisé les sommes, même si, au départ, ils ignoraient, Mme la
Présidente... Vous conviendrez avec moi qu'on ne sait pas s'ils savaient ou ils ne le savaient pas, et c'est là
toute l'importance de la découverte de la preuve et de l'information. C'est pour ça, d'ailleurs, que c'est important d'entendre des
témoins, Mme la Présidente, quand vient le temps de faire des enquêtes, de poser des questions,
et que ceux qui dénoncent ces situations-là soient protégés. On parle souvent de lanceurs
d'alerte, Mme la Présidente, bien, les
gens qui parlent pour dénoncer ce genre de système là, ils doivent être
protégés.
Mais revenons
à ce que nous disions, Mme la
Présidente. Nous parlions des acteurs
ayant contribué au système, puis,
vous savez, dans le monde politique, c'est quand
même intéressant, ce soir, que le
leader du gouvernement ait choisi de nous faire tenir la commission à la salle
des Premiers-Ministres parce qu'on peut regarder... Mme la Présidente, pour
les gens qui nous écoutent à la maison, à la
salle des Premiers-Ministres, pour la décrire, sur les quatre murs qui
encadrent la salle, il y a la photo
de tous les anciens premiers ministres du Québec, Mme la Présidente. Et vous
voyez que les moeurs politiques, parfois — et c'est connu — ont
évolué au fil du temps, mais ont parfois régressé, Mme la Présidente. Et l'histoire du Québec, l'histoire politique,
l'histoire des financements politiques est très intéressante quand qu'on
l'étudie, Mme la Présidente, et vous noterez,
Mme la Présidente, sur votre droite, le tableau et la photo de l'ancien premier
ministre Taschereau, suivis de celle
du premier ministre Godbout, qui a remplacé M. Taschereau au mois de mai,
je crois, 1936, Mme la Présidente.
Ultimement, le gouvernement Taschereau et Godbout a été remplacé par celui de
Duplessis pour son premier mandat
entre 1936 puis 1939. Puis ce qui est intéressant, Mme la Présidente — puis vous en conviendrez avec moi — c'est lorsque Maurice Duplessis, hein,
Maurice Le Noblet Duplessis a remporté la victoire lors de sa première
élection contre les libéraux. Ça faisait 15 ans qu'il y avait un règne
libéral, Mme la Présidente, 15 ans d'un règne de Taschereau. Même, c'était plus longtemps que ça, ça faisait 35 ans
parce que son prédécesseur, c'était Lomer Gouin, entre 1905 et 1920.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : M. le député de Borduas,
j'aime beaucoup que vous relatez l'histoire, là, mais je voudrais juste que vous reveniez. C'est quoi,
la pertinence encore de qu'est-ce que vous dites avec le sous-amendement
que vous amenez? Parce que j'essaie de
trouver le lien puis j'ai de la misère moi-même à trouver ce lien-là. Alors, si
vous pouvez me l'expliquer.
M. Jolin-Barrette : Je vais vous l'expliquer très clairement, Mme la
Présidente. Ce que je vous dis, c'est que, pour l'adoption de l'article, il y a un lien très clair, Mme la
Présidente, entre la modernisation de la Loi électorale, l'article que nous souhaitons présenter et les modifications
qui se sont faites au cours des années. Et vous savez qu'en vertu de
notre règlement la règle de la pertinence doit être interprétée très largement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Mais je pense que je suis
assez patiente, mais je me demandais moi-même... j'aimerais ça comprendre le lien que vous faisiez avec l'histoire, avec
les anciens premiers ministres et votre sous-amendement. Vous venez de
l'expliquer. Merci beaucoup, vous pouvez continuer. Il vous reste
2 min 30 s.
• (20 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Parfait, Mme la Présidente. Alors, si on reprend,
Mme la Présidente, vous aurez noté que Duplessis
a gagné ses élections parce qu'il a fait convoquer le Comité des comptes
publics ici, en bas, dans les salles de commission parlementaire du parlement. Ça faisait des années et des
années que le Comité des comptes publics ne s'était pas réuni, et Duplessis a mis au jour les
scandales libéraux de l'époque, la mauvaise administration des fonds publics,
la caisse électorale, la caisse
occulte du Parti libéral à l'époque. Et c'est documenté, Mme la Présidente,
c'est documenté. D'ailleurs, ça se
retrouve dans le livre l'Histoire du Parti libéral du Québec, qui peut
être consulté à la bibliothèque ici, à l'Assemblée nationale.
Tout
ça pour vous dire, Mme la Présidente, que c'est important d'avoir des
institutions fortes. C'est important d'avoir
une loi électorale qui est forte, où toutes les brèches, dans une loi
électorale, sont colmatées. Parce que,
vous savez, malheureusement, il y a des individus qui peuvent graviter dans tous les
milieux, et parfois ça arrive qu'il y
ait des individus mal intentionnés
dans la sphère politique. Et, malheureusement, c'est l'ensemble de la classe
politique qui est éclaboussée par ce genre de comportement là, puis je
ne pense pas que c'est ce que les gens souhaitent, Mme la Présidente. Il faut
vraiment s'assurer que les partis politiques, les gens qui sollicitent les
fonds pour les partis politiques, les gens qui contribuent à la politique aient la plus grande probité. Puis un des meilleurs
outils pour avoir une grande probité, c'est d'avoir des règles claires, des règles qui vont permettre de s'assurer
que l'utilisation de fonds collectés illégalement... ne seront pas
utilisés par les partis politiques.
Donc,
l'amendement, Mme la Présidente, propose, très certainement, de donner au
Directeur général des élections, pour
la période entre 1996 et 2015, la latitude pour entreprendre une action contre
une entité politique pour une somme qui
serait déjà prescrite, Mme la Présidente. Et je vais inviter, Mme la
Présidente, la ministre et ses collègues à appuyer le sous-amendement, qui ferait en sorte de bonifier
le projet de loi, l'amendement et l'article 32, qui, par la bande, touche
l'article 100, Mme la Présidente, de façon à ce qu'on ait le meilleur
article 100 possible de la Loi électorale.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci beaucoup, M. le député
de Borduas. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui, M. le député de
Marie-Victorin.
M. Drainville : Merci,
Mme la Présidente. Content de vous voir parmi nous ce soir. Je m'excuse auprès
des collègues pour mon absence de cet après-midi, mais il survient parfois des
circonstances qui sont vraiment...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Hors de notre contrôle.
M. Drainville : ...pas mal hors de notre contrôle,
Mme la Présidente, et qui nous appellent à être présents ailleurs parce
que la nécessité nous y oblige.
Alors, Mme la
Présidente, les collègues qui étaient là hier et avant-hier ne seront pas
surpris de mon intervention, nous
reconnaissons le mérite de ce septième ou huitième amendement de la CAQ, qui
reprend essentiellement le même libellé.
Nous reconnaissons le mérite, nous adhérons, Mme la Présidente, à l'objectif
recherché. Dans le fond, ce que la CAQ
souhaite, c'est d'avoir une disposition qui ferait en sorte que le Directeur
général des élections ne serait plus assujetti à la prescription de connaissance pour... Bien, en fait, c'était trois
ans au départ, c'est passé à quatre ans. Maintenant, on parle d'une
prescription qui disparaîtrait pour toute la période entre 1996 et 2014, si je
ne m'abuse...
Une voix : 2015.
M. Drainville : ...ou 2015, et ce serait pour trois
ans. Alors, on comprend très bien, Mme la Présidente, ce que la Coalition avenir Québec essaie d'accomplir à
travers ses amendements successifs, et donc nous allons être constants et
cohérents avec nous-mêmes, et nous allons appuyer cet amendement-là.
Maintenant, Mme la Présidente, je dois, tout de
même, signifier que nous nous inquiétons que cette suite d'amendements finisse par nous faire perdre
l'essentiel. Et l'essentiel, c'est l'adoption du projet de loi n° 101, Mme
la Présidente. Oui, il faut chercher
le meilleur projet de loi possible, et je n'ai absolument aucun doute que c'est
l'intention sincère des députés de Deux-Montagnes et de Borduas lorsqu'ils
font cette proposition. Maintenant, Mme la
Présidente, il vient un moment où il faut bien gérer son risque,
et plus on repousse dans le temps l'adoption du projet
de loi en commission, plus on augmente le risque que le processus nous mène à un
cul-de-sac, nous mène à une situation où il serait de plus en plus difficile et problématique de faire adopter le projet
de loi avant la fin de la session.
Nous, on a la
conviction sincère, Mme la Présidente, que le projet
de loi n° 101 constitue une
amélioration extrêmement importante de la Loi électorale, notamment
parce que la prescription de cinq ans qui était prévue à l'article 100
est abolie. Et c'est d'ailleurs, Mme la Présidente... c'est, entre
autres, parce que le député de Borduas a plaidé avec une très grande efficacité lors du comité consultatif qu'on
a pu obtenir cette avancée. Bien sûr, la ministre a fait preuve d'ouverture,
nous avons appuyé cette requête et on n'a
pas trop mal plaidé non plus, je pense, Mme la Présidente. Mais il faut
reconnaître qu'il y a dans le projet
de loi n° 101, notamment sur la question de la prescription, une très
grande amélioration. Il y a aussi, Mme
la Présidente, toute une série de dispositions qui font en sorte que la Loi
électorale va s'en trouver bonifiée d'une façon, je dirais,
spectaculaire.
L'autre
chose, Mme la Présidente, qui est extrêmement importante et qu'il faut noter,
c'est que le Directeur général des
élections a déjà annoncé que, dans les prochains mois, il va signifier aux
partis politiques qu'il a terminé un certain nombre de vérifications,
sinon un certain nombre d'enquêtes qui l'amènent à conclure que des dons
illégaux ont été empochés par un certain
nombre de partis. On verra combien, on verra lesquels, mais chose certaine, il
va signifier aux partis politiques au
terme d'un processus qui est en cours que des dons illégaux ont été versés. Il
a l'intention de le faire cet automne
au plus tard — c'est ce
que j'ai compris, du moins, il me corrigera si je me trompe — et il a l'intention, Mme la Présidente, de rendre publics les dons en
question, les montants, les partis, et il va le faire par preuve prépondérante.
Et, Mme la Présidente, je reviens au
projet de loi, pour lui permettre justement, dans certains cas, de pouvoir
conclure qu'il y a preuve
prépondérante, il va, j'en ai bien l'impression, avoir besoin des nouveaux
pouvoirs qu'on lui confie en vertu du projet de loi n° 101.
Donc, si on veut — et c'est l'objectif,
je n'en doute absolument pas, de la deuxième opposition, et c'est très certainement le nôtre, et je n'ai pas de raison de
penser que ce n'est pas celui des autres parlementaires autour de cette table, Mme la
Présidente — si l'on
souhaite, comme parlementaires, que justice soit faite, que les dons illégaux
soient remboursés, bien, il faut
donner au Directeur général des élections tous les moyens dont il a besoin pour
pouvoir continuer et conclure les
enquêtes ou les vérifications qui sont en cours pour, justement, être en
mesure, l'automne prochain, de signifier
aux chefs de parti : Voici les dons illégaux que vous avez obtenus, et
donc voici les dons illégaux que je vous demande de rembourser.
• (20 h 20) •
Et donc, si
on veut aider le Directeur général des élections dans cette voie, si on veut
l'aider à bien s'acquitter de cette
responsabilité, notre responsabilité, Mme la Présidente, c'est de faire adopter
le projet de loi n° 101 d'ici la fin de la session. Il faut que le projet de loi n° 101 soit adopté d'ici la
fin de la session, c'est notre responsabilité, Mme la Présidente. Et ça ne nous dédouane pas de notre responsabilité
de chercher à améliorer le projet de loi, mais il faut, Mme la Présidente,
mesurer l'objectif d'améliorer par rapport au temps qu'il nous reste pour le
faire adopter, et notre niveau de risque, Mme la Présidente, est en train
d'augmenter à chaque heure qui passe. Et, franchement, la population québécoise
ne comprendrait pas qu'au terme de tout ce
travail que nous avons fait — et on a passé plusieurs heures en comité
consultatif à s'entendre sur un
projet de loi — qu'on
n'ait pas réussi à la fin à faire adopter le projet de loi n° 101. Et les
commentateurs, Mme la Présidente, ne
seraient pas tendres non plus sur le fait qu'on s'est tous engagés, comme
partis politiques, à donner suite aux
recommandations de la commission Charbonneau et qu'on n'a pas réussi à la fin à
y donner suite en faisant adopter le projet de loi n° 101. On
aurait un sacré problème, Mme la Présidente, à expliquer ça.
Et je tiens à
dire, Mme la Présidente, à mes collègues : Les dernières heures, je pense,
devraient nous rassurer sur — comment dire? — notre capacité, comme force politique et
comme partis politiques, à obtenir le remboursement des sommes illégales lorsque de tels constats sont
rendus publics. Je partage tout à fait, Mme la Présidente, la frustration
de mes collègues de la Coalition avenir
Québec lorsqu'ils ont constaté avec nous qu'une demande de remboursement
n'avait pas été acceptée par le Parti
libéral. Ils avaient raison, hier, de sortir et de dire : Ça n'a pas de
maudit bon sens! Et, d'ailleurs, on l'a fait, nous autres aussi.
Alors,
qu'est-ce qui s'est passé, Mme la Présidente? Il s'est passé qu'une fois que la
demande de remboursement refusée a
été rendue publique... Qu'est-ce qui s'est passé? Dans les heures qui ont
suivi, le chef du Parti libéral a annoncé que les contributions illégales allaient être remboursées. On aurait
préféré, Mme la Présidente, que ça se fasse sans qu'on soit obligés de le demander, sans que l'information
soit, comment dire, rendue publique et que le Parti libéral soit
obligé de réagir en corrigeant, mettons, la
première décision, qui avait été de refuser. Mais ce que l'épisode nous démontre, Mme la Présidente, ce que l'épisode nous
démontre, c'est que, quand l'information est rendue publique, c'est très difficile pour un parti politique... Dans ce
cas-ci, c'est le Parti libéral, ça pourrait être un autre parti à l'avenir.
Mais ça va être très difficile, Mme
la Présidente, pour quelque parti politique que ce soit, de refuser au DGE le
remboursement qui sera demandé par le
DGE. Et donc moi, je pense, Mme la Présidente, qu'avec le projet de loi
n° 101 on donne au DGE plus de
moyens pour arriver l'automne prochain et dire aux partis politiques :
Regardez, les amis, là, vous avez empoché des dons illégaux, et vous devez les rembourser, et l'information est
rendue publique. Et ça va être très compliqué, Mme la Présidente, pour
les partis politiques, de ne pas rembourser l'argent en question.
Alors, je suis d'accord avec la CAQ. Idéalement,
on aurait le trois ans qui permettrait au DGE d'enquêter, de demander des comptes sans devoir être pris avec le
trois ans, la prescription de connaissance qui est prévue au Code civil.
Idéalement, Mme la Présidente, on l'aurait, l'amendement. Le Parti libéral
voterait pour l'amendement idéalement. Sauf
qu'en neuf années et quelques mois de vie politique, Mme la Présidente, j'ai
appris que l'idéal n'est pas toujours du
monde de la politique, ce n'est pas toujours possible d'atteindre l'idéal.
Alors, à défaut d'avoir l'idéal, il faut avoir le meilleur possible, et je pense que le meilleur
possible qu'on a, là, pour le moment, là, c'est le 101, Mme la
Présidente. C'est très nettement une maudite belle progression vers l'idéal que
l'on vise.
Je redis
qu'on va voter pour l'amendement, je
redis que la CAQ a raison de mener ce combat-là, mais, à un moment donné, Mme la Présidente, il faut se dire : O.K. On est allés au bout de
ce combat-là. Pour le moment, on va prendre nos gains, on va les empocher et on va continuer le combat après qu'on aura
empoché nos gains. On ne veut pas prendre le risque, Mme la Présidente, de sacrifier nos gains parce qu'on n'a pas tout eu ce qu'on voulait. Et
je suis d'accord, on n'a pas tout eu
ce qu'on voulait, mais ce qu'on a dans le 101, c'est quand même très, très,
très bien, Mme la Présidente. Ce n'est pas
parfait, ce n'est pas tout ce qu'on voudrait, mais c'est vraiment un très, très
beau gain pour la démocratie québécoise et pour tous les partis
politiques.
Alors, Mme la Présidente, j'en appelle à notre
sens des responsabilités, là. On peut faire encore un bout, là, mais là on est rentrés dans l'univers des
consentements, Mme la Présidente. Pour faire adopter le projet de loi
n° 101, ça va prendre des
consentements, on est rentrés là-dedans, là. Mais, quand on rentre dans
l'univers des consentements, Mme la
Présidente, on augmente notre niveau de risque. On est fatigués, c'est la fin
de la session, le risque d'erreur est plus grand. Je le sais, je l'ai déjà vécu. Et tout ce que je dis, Mme la
Présidente, c'est qu'il va falloir, à un moment donné, que l'avion se pose. La piste d'atterrissage, elle est
où? La piste d'atterrissage, c'est l'adoption de 101, Mme la Présidente.
Puis ça prend des consentements, puis plus
on diminue le temps qui nous permet de retourner au bleu pour faire adopter
le projet de loi n° 101, plus on
augmente les chances de l'échapper, puis je ne veux pas qu'on l'échappe. Je ne
veux pas qu'on l'échappe, Mme la Présidente.
Puis je
termine sur une dernière chose. Le projet de loi n° 101, c'est le fruit
d'un consensus, Mme la Présidente. Pas toujours l'unanimité, mais un
très large consensus pour la très vaste majorité des articles. C'est précieux,
Mme la Présidente. Si vous saviez à quel
point c'est précieux, la règle du consensus, il y a seulement la Loi électorale
qui bénéficie de cette règle-là.
C'est une règle qui existe dans la coutume parlementaire des dernières
décennies, grosso modo depuis les années 70.
Il y a eu très peu de changements à la Loi électorale qui ont été faits en
dehors de cette règle-là du consensus, et
cette règle du consensus, Mme la Présidente, elle assure la légitimité à la Loi
électorale, elle donne aux partis d'opposition une prise sur le changement législatif. Mais, avec
cette prise-là vient également une responsabilité, Mme la Présidente, on a la possibilité d'influencer le contenu
législatif quand vient le temps de modifier la Loi électorale. C'est précieux,
quand tu es dans l'opposition, de pouvoir
influencer le contenu législatif, ça n'arrive pas souvent. Mais, avec ce
consensus-là, vient également à un
moment donné la responsabilité, le devoir d'être conséquents avec nous-mêmes,
puis, bien, d'assumer la responsabilité qui vient avec le pouvoir.
On a un
certain pouvoir d'influencer la Loi électorale, mais ce pouvoir-là vient avec
la responsabilité également d'assumer
la responsabilité ou l'obligation. On a une certaine obligation, Mme la
Présidente, à un moment donné, de dire : Bon, bien là on est allés aussi loin qu'on pouvait, il faut revenir au
consensus. Il ne faut pas sacrifier tout le travail qui a été fait, Mme la Présidente, parce qu'on ne peut
pas obtenir 100 %. Si on ne peut pas obtenir 100 % de ce qu'on veut,
Mme la Présidente, à un moment donné il faut
se replier sur les gains qu'on a et les consolider, les consolider, Mme la
Présidente. Alors, c'est là qu'on est
rendus, je pense, et puis je souhaite que nous votions sur l'amendement.
J'espère juste, Mme la Présidente, qu'on va, à
un moment donné, permettre au processus
législatif qui est en cours dans
cette commission d'aboutir.
• (20 h 30) •
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. le député de Marie-Victorin. Y a-t-il d'autres intervenants sur le
sous-amendement? Oui, M. le député...
M. Charette : Ce n'est pas un
sous-amendement supplémentaire, tout simplement intervenir sur le...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, allez-y, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : C'est gentil. Merci, Mme la Présidente. Peut-être, d'entrée
de jeu, étant donné que vous arrivez en cours de route sur nos travaux, préciser une chose très, très
clairement, on ne renoncera pas. Aussi bien le dire maintenant autant à la ministre qu'à nos collègues de
l'opposition officielle, on ne renoncera pas à défendre le principe qui nous
tient occupés, là, depuis quelques heures maintenant parce qu'il est au
coeur du projet de loi.
J'ai pris en
note quelques déclarations du collègue de Marie-Victorin. Il mentionne
notamment : Il ne faudrait pas
que le temps que l'on consacre à
débattre de ce sous-amendement nous fasse perdre l'essentiel, soit l'adoption du projet de loi. Pour
nous, au niveau de la Coalition avenir Québec, l'essentiel n'est pas d'adopter
un projet de loi, mais d'adopter un
projet de loi qui permette de colmater les brèches qui ont été dévoilées au
cours des travaux de la commission Charbonneau,
mais également, encore plus récemment, la brèche qui nous a été déclarée de
façon tout à fait fortuite hier, c'est-à-dire
le refus du Parti libéral de rembourser des sommes qui lui sont réclamées par
le Directeur général des élections. Donc,
faire perdre l'essentiel, pour nous, à la Coalition avenir Québec, ça voudrait
dire adopter un projet de loi qui ne nous permette pas de colmater cette
brèche-là.
Le collègue de Marie-Victorin mentionnait
également qu'on augmente nos chances de l'échapper. En toute franchise, Mme la Présidente, pour nous,
l'échapper, ce que ça voudrait dire, c'est de se présenter devant les
citoyennes et les citoyens du Québec et de dire : Écoutez, malgré tout ce
qu'on a pu vous révéler, on est prêts à laisser une formation politique, en l'occurrence le Parti
libéral, mais la situation pourrait s'appliquer à toute autre formation
politique... Mais c'est de dire à la
population québécoise : Écoutez, on a adopté un projet de loi, mais, pour
nous, qu'un parti évoque la prescription pour refuser de rembourser de
l'argent amassé de façon illicite, ce n'est pas conséquent, ce n'est pas
important.
Et au
collègue de Marie-Victorin, en toute amitié, je vais lui rappeler que la donne
a changé depuis 24 heures. L'étude
article par article, effectivement, se déroulait bien, et je pense qu'on peut
souligner le travail en toute collégialité qui s'est fait au cours des
dernières semaines et des avancées qu'il a permises, mais la donne a changé
hier lorsqu'on a appris que le Parti
libéral, après que son chef, le premier ministre Philippe Couillard, a, main
sur le coeur, dit sur toutes les tribunes
qu'il s'engageait à rembourser toutes les sommes que lui réclamerait le
Directeur général des élections... Après qu'on ait adopté nombre de motions sans préavis et même des motions du
mercredi avec des votes par appel nominal par moment, après tous ces
engagements fermes, on apprend que le Parti libéral, à la première occasion qui
se présente, c'est-à-dire une lettre, une
demande dûment signée de la main du Directeur général des élections exigeant un
remboursement, le Parti libéral se réfugie derrière une prescription des
montants qui seraient prescrits.
Or, si on
adopte le projet de loi tel qu'il est présenté, si on adopte l'article 32
tel qu'il est présenté, cette situation pourrait se reproduire de nouveau. Et, pour reprendre les mots de mon
collègue de Marie-Victorin, on perdrait l'essentiel si on permettait pareille faille de se maintenir. Le
collègue de Marie-Victorin le mentionnait à juste titre, c'est plutôt rare, des
occasions de collaborer à une refonte aussi majeure de notre Loi sur le financement
des partis politiques. Raison de plus pour
intégrer cette modification dès à présent. La prochaine occasion va peut-être
se présenter, qui sait, dans deux ans, dans
trois ans, dans quatre ans, et est-ce
qu'on est prêt à vivre avec cette
lacune-là sur une durée aussi longue? La réponse, du côté de la Coalition avenir Québec, c'est
non. On ne veut pas se présenter devant l'électorat en disant : Écoutez,
on l'a échappé, c'est vrai qu'il est
possible pour une formation politique d'invoquer la prescription pour ne pas rembourser
des sommes.
Et ce qui est
plus dramatique dans les révélations faites hier, depuis des semaines, au
niveau de la Coalition avenir Québec,
on admettait qu'il était possible que le Parti libéral ait, pour les
élections de 2012 et 2014, fait campagne avec de l'argent amassé de
façon illégale, on émettait l'hypothèse. Hier, on a eu la confirmation que ça s'est produit. Les sommes
qui étaient en cause ont été amassées en 2009...
Mme de Santis : ...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui. Oui. Oui, Mme la ministre. Un
instant, M. le député.
Mme
de Santis : Les
contributions illégales, ça ne veut pas dire que c'est amassé illégalement, il
faut faire une distinction. Les
contributions sont des contributions illégales, mais le parti, que ce soit
n'importe quel parti qui reçoit, ce n'est pas amassé illégalement, il y
a... Et, si on regarde l'article 100 de la Loi électorale, on parle de
contributions illégales, et c'est l'action
de celui qui donne, du contributeur. Donc, s'il vous plaît, utilisez les
expressions qui sont justes.
M.
Charette : Vous parlez de
contributions illégales. Moi, je vais parler de complicité tacite dans ce
cas-là. Le Directeur général des...
Mme de Santis :
Ça, c'est...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : M. le député de Deux-Montagnes. Allez-y, Mme la ministre. Vous ne
pouvez pas faire...
M. Charette :
Est-ce que vous permettez que je termine ma phrase, à tout le moins?
Mme de Santis :
Vous faites une accusation, là, qui est mal placée et ne devrait pas se faire
en commission.
M.
Charette : Peut-être
me laisser terminer, et vous jugerez ensuite si c'est déplacé ou pas. Quand je
parle de complicité...
La Présidente (Mme Rotiroti) : M. le député de Deux-Montagnes, je veux juste vous dire, là : Vous ne
pouvez pas faire indirectement qu'est-ce
que vous ne pouvez pas faire directement. Alors, je vais vous laisser la parole, mais, premièrement,
j'aimerais que vous vous serviez des bons termes. Soyez prudent. Alors,
continuez votre intervention.
M.
Charette : J'évoquais la
complicité lorsqu'il y a une demande de remboursement qui est faite et
que le parti refuse de procéder. Il y a
une complicité avec un geste qui, lui, est illégal. Donc, c'est à ce moment-là où le mot «complicité» prend tout son sens.
Mais
ultimement — et c'est là où j'invite mon collègue de
Marie-Victorin et l'opposition officielle à être prudents dans la suite des choses — la
donne, je le mentionnais, elle a changé hier et ce matin aussi au salon bleu lorsque
le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, a interrogé le premier
ministre et lorsque j'ai eu l'occasion moi-même d'interroger la ministre. Le discours a changé. La main sur le coeur, on ne
la retrouve plus. Le premier ministre et la ministre,
aujourd'hui, ont refusé de dire qu'ils rembourseraient toute somme réclamée par le Directeur général des élections. Leur réponse
dorénavant, c'est que nous rembourserons en vertu de la loi. Mais cette même loi, elle a une faille, et cette même loi là va permettre de nouveau au Parti libéral, lorsqu'une somme prescrite
sera réclamée, de dire : Nous ne sommes pas tenus.
Et
là je cite au mot la ministre, Mme la Présidente, on ne peut pas le reprocher, au mot. Il y a plusieurs
articles de journaux, d'ailleurs, qui évoquent ces propos-là. Donc, au mot, dorénavant, on a le chef d'un
parti politique, qui se trouve,
de surcroît, à être le premier
ministre, qui dit : Nous, non,
même si on sait que dans nos coffres on a des sommes qui ne sont pas légitimes — je vais le dire comme ça, je pense que la
ministre ne pourra pas me reprocher l'affirmation — lorsque l'on sait qu'on a des sommes illégitimes dans nos coffres, malgré tout
nous ne procéderons pas au remboursement. C'est contraire aux motions et
aux appels à l'honneur que nous avons tous faits au cours des dernières années.
Et
je reprends l'expression de mon collègue de Marie-Victorin, il ne faut pas
perdre l'essentiel. Effectivement, mais l'essentiel serait perdu si on
laissait passer un amendement qui, malheureusement, permet ce type de faille.
Et, puisqu'on a eu les autorisations par le
passé, j'aimerais poser quelques questions au Directeur général des élections, qui nous fait l'honneur de sa présence ce
soir.
• (20 h 40) •
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Ça prend le consentement de tous les membres si on
veut...
M. Charette : Mme la
Présidente, vous allez me permettre de défendre la demande. Tout au long de nos
travaux, à chacune des fois qu'on se référait au directeur des élections
pour des précisions...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Non, je n'ai pas le consentement, M. le député de
Deux-Montagnes.
M.
Charette : Et c'est extrêmement dommage. Et ça, c'est un précédent que
Mme la ministre crée. Depuis le début des travaux, à chaque fois qu'on
voulait se référer à l'expertise du Directeur général des élections, c'était
consenti. Si Mme la ministre ne souhaite plus bénéficier de cette expertise...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Ce n'est pas la ministre, M. le
député de Deux-Montagnes, c'est les membres. Et je n'ai pas de consentement,
alors vous pouvez continuer votre discussion.
M.
Charette : Bien, dans ce cas, si sa présence n'est plus souhaitée,
est-ce qu'on libère le personnel du Directeur général des élections?
Est-ce que vous jugez que sa présence n'est plus pertinente pour la conduite de
nos travaux?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Ça n'a pas rapport, M. le député. Continuez avec votre intervention, M. le
député de Deux-Montagnes. Le DGE, je pense qu'il est capable de se
gouverner. S'il décide que...
M. Charette :
...avant, Mme la ministre...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui.
M. Charette : ...vous allez me permettre de demander un vote
par appel nominal sur la demande que j'adresse d'entendre le Directeur général des élections pour pouvoir bénéficier de
son éclairage sur un article aussi important que l'article 32.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Bien, normalement, de qu'est-ce que
je viens de me faire dire, s'il n'y a pas de consentement des membres... Et il n'y a pas de consentement, on est sur
un sous-amendement. Alors, s'il n'y a pas de consentement, on n'entend... Pour que le DGE prenne la parole, c'est
suffisant, il n'y a pas besoin d'avoir un vote nominal. Alors...
M. Charette :
...s'oppose à ce consentement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, la présidence a déjà statué
là-dessus. J'ai dit, j'ai été très claire : Il n'y a pas eu de consentement, et je vous laisse encore... Il
reste encore du temps sur votre temps, alors continuez votre intervention,
M. le député.
M.
Charette : C'est un précédent qui est non seulement dangereux, mais
extrêmement malheureux, Mme la Présidente, que l'on refuse d'entendre le Directeur général des élections sur une
question aussi importante. Je vais vous dire la question que j'espérais pouvoir lui poser. Le Directeur
général des élections s'est engagé cet automne à transmettre aux différentes
formations politiques une liste contenant les réclamations qu'il juge
appropriées en tant que remboursement pour des sommes qui auraient été collectées de façon illégale ou des
contributions illégales si la nuance plaît à la ministre. Donc, c'est un engagement qu'a pris le Directeur général
des élections. Ce que j'aurais aimé savoir de sa bouche ce soir, c'est ceci. Je comprends qu'il ne peut pas nous révéler
l'entièreté du travail réalisé à ce moment-ci, mais j'aurais aimé qu'il nous dise dans quelle proportion les sommes qui
seront réclamées sont prescrites. Est-ce que c'est de l'ordre de 10 %?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Ça n'a pas rapport. Ça n'a rien à voir avec le...
M.
Charette : Est-ce que c'est de l'ordre de 30 %, de 40 % ou
de 50 %? Bref, c'est la question que j'aurais aimé poser au Directeur général des élections. Et
pourquoi poser cette question, Mme la Présidente? C'est que je soupçonne...
Vous allez me permettre d'évoquer mon soupçon, c'est que le Parti libéral
anticipe des réclamations excessivement...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : ...M. le député de Deux-Montagnes,
je n'accepterai pas votre commentaire parce que vous prêtez des intentions. Alors, vous pouvez soupçonner, mais
sans... Vous parlez en général, ça, j'en conviens, mais vous ne pouvez
pas faire ça. Je m'excuse, vous prêtez des intentions, et je n'accepterai pas
ça.
M.
Charette : Je ne prêterai pas d'intentions à un parti en particulier,
mais je soupçonne que celles et ceux qui s'opposent à ce que le
Directeur général des élections réponde...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Ah! vous prêtez des intentions, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, question de règlement.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui. Quel article, M. le député de Borduas?
M.
Jolin-Barrette : Si, Mme la Présidente, vous me permettez d'avoir
accès à la copie du règlement...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Je vous ai demandé,
M. Borduas, quel article vous faites référence pour que je puisse vous répondre en bonne et due forme. Alors,
vous avez fait appel au règlement, j'aimerais ça savoir à quel article
vous faites référence, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : Je vais vous dire l'article 35, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci. Les paroles interdites et propos non
parlementaires?
M.
Jolin-Barrette : Oui.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : C'est-à-dire?
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, j'ai entendu mon collègue de Deux-Montagnes,
je n'ai pas entendu de paroles blessantes ni de paroles interdites. Le
député...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Je n'ai pas dit que c'étaient des paroles interdites ni des paroles blessantes,
M. le député de Borduas, j'ai dit qu'il ne pouvait pas prêter des intentions.
M.
Jolin-Barrette : ...vous
présidez la commission avec une rigueur qui se veut importante et, dans le
cadre de nos travaux, qui se
déroulent très bien, je vous dirais un peu excessive ce soir. Le député de
Deux-Montagnes s'exprime très bien,
il est respectueux. Et vous savez que le député de Deux-Montagnes est quelqu'un
de très posé et qu'il respecte grandement
ses collègues. Donc, j'apprécierais qu'on le laisse s'exprimer sur le
sous-amendement que nous avons déposé. Et je pense que le député de
Deux-Montagnes fait très bien son travail, donc laissons-le faire son travail.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui. Parfait, M. le député de
Borduas. C'est moi qui préside la commission ce soir...
M. Jolin-Barrette : Ça, je le sais,
madame.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, effectivement. Alors, je cède
la parole à M. le député de Deux-Montagnes pour continuer dans...
M. Charette : ...je serai prudent.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, s'il vous plaît.
M. Charette : Je serai prudent, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci beaucoup, M. le député.
M.
Charette : J'évoque une éventualité parce que, malheureusement, je ne
peux pas poser la question au Directeur général des élections. Si jamais les listes qu'il rendra publiques à
l'automne constituent un exercice unique, en ce sens qu'il ne le fera qu'une seule fois, ça voudra
dire, pour les années à venir, pour les enquêtes qui sont en cours de
développement, on ne connaîtra jamais
l'aboutissement parce que, pour certains, dès qu'il y a prescription ça les
sauve de tout remboursement.
Ce que j'ai voulu faire savoir à la
ministre — et
j'invite également l'opposition officielle à réfléchir à ce principe-là — il y a la loi... Si, bêtement, on se fie au
texte de loi, le Parti libéral, effectivement, était en droit de refuser le
remboursement comme il l'a fait jusqu'à temps que le pot aux roses soit
dévoilé. Cependant, on ne régit pas nos actions
comme on... Comment je pourrais le mentionner, Mme la Présidente? On est dans
un domaine particulier où le public
nous observe. On ne défend pas des droits comme une entreprise privée le
ferait. Nos décisions vont faire en sorte que la population va accroître son cynisme à notre endroit ou, au
contraire, va pouvoir se dire : Les choses semblent changer
positivement, on s'en va dans la bonne direction.
Mais là la
voie qu'emprunte le gouvernement, pour ne pas dire le Parti libéral, elle est
contraire. La voie qui est empruntée
actuellement, c'est de se réfugier vers des articles de loi qui constituent une
faille en soi. On est devant un parti politique, un chef de gouvernement
qui, malgré la parole donnée, malgré — je suis prudent et je vois la
réaction, Mme la Présidente — la parole donnée, a agi de façon contraire
au cours de la dernière année, clairement. Clairement. Et c'est ce qui
est inquiétant, et c'est là où on a des chances d'échapper le ballon, et c'est
là où on risque d'être jugés extrêmement
sévèrement dans la population. On parle cette fois-ci d'un montant, somme
toute, petit, 3 500 $, mais qu'est-ce qu'il adviendra lorsque
les réclamations pourront peut-être — qui sait, c'est purement
hypothétique, mais tout de même — impliquer des montants de dizaines de
milliers de dollars, voire de centaines de milliers de dollars? Est-ce qu'on
va permettre à un parti politique de dire
non en se réfugiant derrière une faille de notre Loi électorale? C'est le
danger.
Et, comme je
le mentionnais cet après-midi, Mme la Présidente, malheureusement, dans la
population, il y a cette perception — qu'on travaille à changer, mais elle est
bien présente — qui veut
que c'est du pareil au même. Le cynisme est à ce point élevé dans la population que, pour bien des gens, que ce
soit le Parti libéral, que ce soit le Parti québécois, que ce soit la
Coalition avenir Québec, c'est du pareil au même. Donc, en défendant
l'indéfendable, comme le fait la ministre,
elle accentue ce cynisme-là et elle accentue, malheureusement, la perception
négative qu'a la population envers la
classe politique. 3 500 $, c'est un montant, somme toute, petit, mais
c'est tout l'argumentaire derrière la décision prise et défendue par la
ministre et par le premier ministre qui est vicié et qui, malheureusement,
entache notre classe politique, et on ne peut pas l'accepter.
• (20 h 50) •
Et, pour
cette raison-là, je vous le dis, Mme la Présidente, en toute franchise, on va
maintenir notre point, quitte à ce que ça retarde l'adoption ultimement
à l'automne. Et, à partir du moment où on s'entendrait à l'automne sur la définition de «prescription», les trois ou quatre
mois que se seront écoulés dans l'intervalle, on pourra les rattraper à travers
une conception entendue de la prescription.
Donc, Mme la Présidente, ce n'est pas
du temps que l'on perd ce soir. On essaie
de trouver les bons mots, on essaie de trouver les compromis nécessaires
pour faire entendre raison au gouvernement.
Et, je le mentionnais tout à l'heure, ce qui est malheureux, c'est que la main, elle a été tendue à de
nombreuses reprises. On est rendus à
notre huitième ou à notre neuvième sous-amendement. À chacune des fois, on invite la ministre
à apporter des modifications, à corriger ou à modifier notre texte, espérant arriver à ce
dénouement-là, et on n'a aucune contre-réaction de la part du gouvernement. J'ai demandé aux
députés ministériels tout au long de l'après-midi s'ils étaient à
l'aise avec l'attitude de leur parti, de leur gouvernement, et aucun n'a
voulu répondre à cette question.
Donc, il faut
briser ce cycle-là, qui est dangereux, qui est néfaste et qui ne fait
qu'alimenter le cynisme. Et je sens la ministre décontenancée, je le dis
comme ça, mais je tiens à réitérer que c'est l'image de la classe politique qui
va être ultimement affectée par les
compromis que la ministre pourrait accepter de faire au niveau
de l'article 32. Et ultimement — vous
me laissez entendre, là, que mon temps de parole était presque écoulé — le
principe à la base de notre opposition à l'article 32 tel que libellé, il est très, très
simple, ne pas permettre à un parti
politique, quel qu'il soit — ce
n'est pas une chasse aux sorcières à l'égard du Parti libéral, donc le parti
politique, quel qu'il soit — c'est
de ne pas lui permettre d'avoir dans ses
coffres de l'argent qu'il sait amassé de
façon non légitime. C'est le principe
que l'on défend à travers les sous-amendements. Et, sans cette modification-là, des partis
politiques... encore, peu importe
lequel, les partis politiques
pourraient toujours évoquer la prescription pour faire campagne, ou
pour s'acheter des immeubles, ou pour faire quelque investissement que
ce soit avec de l'argent qu'ils savent pertinemment non légitime.
Et c'est le
drame dans les révélations qui ont été faites ce matin au salon bleu, sinon
hier et aujourd'hui tout au long
de nos travaux. Il faut, à tout prix, rompre ce cycle-là et que les partis
assument leurs responsabilités. Si une demande est faite de la part du Directeur
général des élections, que le montant soit prescrit ou pas, il doit être
remboursé parce que cet argent-là n'est pas légitime, il n'est pas conforme à
l'esprit de notre Loi électorale, et ça donne des avantages indus — pour
ne pas dire indus et illégitimes — au parti politique qui aurait dans ses
coffres ces argents-là.
Et, peu importe le montant, qu'il soit de
l'ordre de 3 500 $ ou qu'il soit de quelques centaines de dollars ou ultimement — on aura peut-être des chiffres de cet ordre
de grandeur là à l'automne — de quelques dizaines de milliers de dollars, voire quelques centaines de milliers
de dollars, peu importe le montant, lorsque l'argent n'est pas légitime, cet argent-là ne peut pas se retrouver dans le
compte en banque d'une formation politique. Et, pour cette raison, Mme la
ministre, on va tenter, et on va continuer,
et on va persister surtout à trouver les bons mots pour convaincre la ministre
de changer cette position pour redorer un
petit peu l'image qu'elle donne à la classe politique par rapport à son
attitude.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député de
Deux-Montagnes. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de
Marie-Victorin.
M.
Drainville : Oui, Mme
la Présidente. Sur la demande qui a été faite d'entendre le Directeur général
des élections, moi, je veux juste
dire, Mme la Présidente, que je ne trouve pas que c'est une bonne idée que de
refuser le consentement. Je voulais que ce soit connu, là, que ce soit bien
clair, moi, je ne trouve pas que c'est une bonne idée de refuser qu'on continue d'entendre le Directeur général des
élections, je ne trouve pas que ça envoie un bon signal. Et je peux comprendre
qu'il commence à y avoir un petit peu de frustration autour de la table, là,
mais je ne pense pas qu'on s'aide, Mme la Présidente, à refuser le consentement
de continuer à pouvoir parler au Directeur général des élections.
Et, par
ailleurs, Mme la présidente, je veux juste ajouter par rapport aux propos que
vient de tenir le député de Deux-Montagnes — puis
je vais le dire comme je le pense, Mme la Présidente — le
parti politique qui va refuser de rembourser
les dons illégaux identifiés par le Directeur
général des élections et rendus
publics par le Directeur général des élections l'automne prochain, là, le parti politique qui va refuser de
rembourser les dons, là, va se faire arracher la tête politiquement.
Ce n'est pas compliqué, c'est ça qui va arriver. Et peut-être
qu'il va bloquer, puis peut-être qu'il va refuser, puis il va refuser, puis il va refuser encore, mais je vous le dis, Mme la Présidente, ce parti-là, peu importe lequel, va donner des munitions aux autres partis jusqu'à l'élection
de 2018. Ça va être intenable, on va vivre dans le même climat que celui dans lequel on vivait quand on a demandé à
répétition pendant deux ans la commission d'enquête. Ça va être exactement
le même climat où les partis politiques,
peu importent lesquels, vont pouvoir l'attaquer, ce parti-là qui refusera de
rembourser les dons, jour après jour. Puis on va pouvoir se rendre à l'élection avec ça, puis, à la rigueur,
ça pourrait devenir un enjeu déterminant de l'élection de 2018, sinon
l'enjeu le plus décisif de l'élection.
Y a-t-il un problème?
Une voix : Tu n'as plus de
temps.
M. Drainville : Bon, il faut
que je conclue.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Bien, vous pouvez toujours revenir sur le sous-amendement.
M.
Drainville : C'est ça que je veux dire, Mme la Présidente, donc, et je redis, et je redis que le DGE a besoin des pouvoirs de 101 pour pouvoir faire la job,
finir les enquêtes cet été, pour pouvoir rendre publique la liste des dons
illégaux l'automne prochain. Il a besoin de
ces pouvoirs-là, Mme la Présidente, si on veut pouvoir, après ça, réclamer...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. le député de Marie-Victorin. Merci beaucoup, M. le député de Marie-Victorin. Y a-t-il d'autres intervenants sur le sous-amendement? Oui, M. le député de Borduas. Il n'a plus de temps? Ah! vous n'avez
plus de temps, M. le député de Borduas.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Non? Oui. Alors, c'est ça. Oui, il reste
juste du temps du côté du gouvernement,
sinon l'opposition a écoulé son temps. Alors, est-ce que, Mme la ministre, vous
souhaitez intervenir?
Mme de
Santis : La seule chose,
c'est que je comprends que mon collègue de Marie-Victorin croit, comme
moi, que cet amendement n'est pas nécessaire. Nous avons un projet de
loi...
M. Drainville :
Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui.
M.
Drainville : J'ai dit que cet amendement-là était un bon amendement,
qu'il améliorait le projet de loi et que nous
allons l'appuyer. Je dis simplement que la recherche de cet amendement-là ne...
si on la continue, comme c'est parti, on
met à risque l'adoption du projet
de loi n° 101, et ça, je ne suis
pas prêt à le faire. Alors, on est pour l'amendement, mais pas au prix d'échapper le projet de loi n° 101
d'ici la fin de la session, Mme la Présidente.
Mme de Santis : J'aimerais dire
que...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, Mme la ministre.
Mme de
Santis : ...l'essence du projet de loi, c'était de mettre en oeuvre les recommandations de la commission
Charbonneau. Ça, c'était l'essence du projet de loi. Rappelons-nous pourquoi ce projet
de loi existe. Et c'était lors de nos
discussions au comité consultatif qu'on a
déterminé qu'on devrait considérer d'aller plus loin, ce qu'on a fait.
L'objectif, c'était, encore une fois,
la mise en oeuvre des recommandations de la commission Charbonneau. Si on ne procède pas en adoptant ce projet de loi, on va avoir
détruit l'objectif pour lequel on s'est rencontré les premières fois au comité
consultatif pour mettre en oeuvre les recommandations.
Alors, je ne
comprends pas la position qui est prise par le parti de la deuxième opposition
et je suis d'accord avec mon collègue de Marie-Victorin, les pouvoirs
qu'on donne dans le projet de loi au Directeur général des élections lui
permettent d'aller beaucoup plus loin dans ses vérifications et ses enquêtes.
Le fait qu'on a modifié — on
espère modifier — l'article 100
de la Loi électorale en éliminant la prescription de cinq ans à partir de
l'événement et remplaçant ça avec une
prescription de trois à partir de la connaissance, cela a un effet rétroactif. D'habitude, les périodes
de prescription n'ont pas un effet
rétroactif. On fait cela en modifiant la Loi électorale à l'article
100. On fait un pas d'avant. Comme a dit
le député de Marie-Victorin, il ne faut pas perdre l'essentiel. L'essentiel,
c'était d'adopter les recommandations de la commission
Charbonneau. Est-ce qu'on peut le faire, s'il vous plaît?
• (21 heures) •
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Y a-t-il
d'autres intervenants du côté du gouvernement? Alors, on est prêts à
passer aux voix sur le sous-amendement. Oui, M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Mme la
Présidente, je vais vous demander un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui. Alors, vote nominal, M. le secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette : Pour.
Le Secrétaire : M. Drainville
(Marie-Victorin)?
M. Drainville : Pour.
Le Secrétaire : Mme de Santis
(Bourassa-Sauvé)?
Mme de Santis : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Rousselle
(Vimont)?
M. Rousselle : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Je m'abstiens.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Alors, le sous-amendement est rejeté. Alors, y a-t-il d'autres...
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, on revient à l'amendement à
l'article 32. Oui, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je vais avoir un sous-amendement à présenter qui se lit comme
suit : L'amendement de l'article 32 du
projet de loi est modifié par le sous-amendement suivant, qui vient ajouter,
après le premier alinéa, l'alinéa suivant :
«Malgré le
premier alinéa, la connaissance par le Directeur général des élections d'une
information relative à toute contribution
ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux articles 5, 29
et 31 pendant la période comprise entre 1996 et 2015 débute avec la
sanction de la présente loi, même si le Directeur général des élections avait
eu connaissance du fait avant la
sanction du présent projet de loi, et ce pour une période de trois ans.»
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci. Alors, on va suspendre
quelques minutes pour qu'on fasse la distribution du sous-amendement.
(Suspension de la séance à 21 h 2)
(Reprise à 21 h 9)
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, la commission reprend ses travaux. Alors, on vient d'avoir un sous-amendement à l'article 32 qui a été déposé par le député de Borduas.
Alors, M. le député de Borduas, si vous voulez faire la lecture de votre sous-amendement,
et on pourrait ouvrir la discussion par la suite.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci,
Mme la Présidente. L'amendement de l'article 32 du projet de loi est modifié
par le sous-amendement suivant, qui vient ajouter, après le premier alinéa,
l'alinéa suivant :
«Malgré le premier alinéa, la connaissance par
le Directeur général des élections d'une information relative à toute
contribution ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux
articles 5, 29 et 31 pendant la période comprise
entre 1996 et 2015 débute avec la sanction de la présente loi, même si le
Directeur général des élections avait eu connaissance du fait avant la
sanction du présent projet de loi, et ce pour une période de trois ans.»
• (21 h 10) •
Donc, Mme la
Présidente, l'objectif du sous-amendement, c'est véritablement de s'assurer
que, les sommes qui ont été récoltées illégalement par un parti
politique et dont le DGE, le Directeur général des élections du Québec, a connaissance et qu'il informe le parti politique
concerné, que ce parti ne puisse pas opposer la prescription, avec une clause
crépusculaire, Mme la Présidente, de trois
ans, trois ans pour rembourser à partir de la sanction de la loi pour les
sommes qui sont déjà prescrites.
Vous savez,
Mme la Présidente, on a beaucoup parlé
de la prescription, on a beaucoup parlé du temps pour rembourser, des moyens de défense, mais je persiste et je reviens
là-dessus, Mme la Présidente, c'est vraiment l'objectif visé. Tout à l'heure, j'entendais mon collègue de Marie-Victorin dire : On a fait des avancées majeures dans
le projet de loi. C'est vrai. La ministre l'a dit également,
c'est vrai. Par contre, il manque encore un élément fondamental. Je vous
l'ai dit cet après-midi, Mme la Présidente, il y a un trou béant dans la coque du bateau, hein? Le
navire tangue, on essaie de faire les
réparations dans le bateau, mais l'eau continue de rentrer, Mme la Présidente. Puis on ne réussira pas, hein, comme le dit le premier ministre, à arriver vers des eaux plus calmes avec ce
navire-là parce que le navire, il prend l'eau, puis la tempête s'en vient. Et elle sera très forte, Mme la Présidente, parce que, vous savez, déjà il
y a tempête dans une autre salle de commission parlementaire pas loin
d'ici, Mme la Présidente. Vous savez que les...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
On va rester ici, à la Commission des institutions, M. Borduas.
M. Jolin-Barrette : Mais, vous
savez, Mme la Présidente, j'aime beaucoup mieux être avec vous ce soir à la
Commission des institutions parce que c'est ma commission préférée, et je dois
m'en confesser, Mme la Présidente.
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Surtout ce soir, M. le député de
Borduas, avec moi à la présidence, évidemment.
M.
Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, je trouve que vous devriez présider plus souvent nos travaux, je
trouve ça agréable. Et puis je ne voudrais
pas, par contre, créer un froid avec le président de la Commission des
institutions actuel. Donc, si vous voulez, je me porte en arbitre entre
vous et lui pour le siège.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci.
M.
Jolin-Barrette : Mon offre peut être faite sans contrepartie.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Je ne peux pas délaisser non plus la Commission de la culture et de l'éducation.
M.
Jolin-Barrette : Mais, vous savez, on a des débats fort intéressants
ici. Puis ce qui est plus intéressant, Mme
la Présidente, c'est que les acteurs
changent au gré des mandats de la commission, et c'est pour ça qu'on a l'honneur de travailler avec la ministre
de la Réforme des institutions démocratiques.
D'ailleurs, c'est la première fois qu'on travaille ensemble, et je lui ai assuré dès le départ de mon
entière collaboration lorsqu'on étudiera des projets de loi. Et je pense
que c'est ce qu'on fait ce soir, on vise à
l'accompagner, à l'aider à avoir le meilleur projet de loi possible, puis je
pense que, pour cette raison-là, elle
doit nous être reconnaissante, Mme la Présidente, de vouloir travailler avec
autant d'acharnement à bonifier le projet de loi, Mme la Présidente.
Ceci
étant dit, si je reviens à mon bateau, je vous disais que le bateau libéral
tanguait, hein? Puis ça ne serait pas une
très bonne idée de l'envoyer au ministère des Transports pour le faire réparer
parce qu'il y a de nombreux problèmes dans
ce ministère-là. Et vous savez, Mme la Présidente, que, dans l'objet du présent
projet de loi, je pense qu'il serait fort pertinent d'aller jusqu'au bout parce que, vous savez, Mme la
Présidente, avec ce qui se passe dans d'autres ministères, dans d'autres
commissions, je pense que les Québécois s'attendent à avoir la meilleure Loi
électorale en matière de financement
politique pour redonner confiance aux Québécois à l'intérieur de nos
institutions avec le Directeur général des élections.
Vous me permettrez de
faire un aparté, Mme la Présidente, relativement à la contribution que le
Directeur général des élections aurait pu
nous apporter ce soir. Parce que, vous le savez, Mme la Présidente, tout au
long de nos travaux, le Directeur
général des élections et son personnel ont été d'une précieuse aide et ils nous
ont éclairés sur plusieurs sujets, notamment sur l'article 100, et c'est
dans le cadre de leurs échanges, avec eux, que nous avons pu bonifier le projet de loi. Et, vous savez, Mme la Présidente,
lors des travaux réguliers d'une commission, lorsqu'on étudie un projet de loi, généralement, l'entité qui voit sa loi
modifiée, généralement, accompagne la ministre ou le ministre, assis à sa
droite ou à sa gauche généralement, parce que l'entité fait partie de
l'État, du gouvernement.
Pour
le Directeur général des élections, c'est différent parce que c'est une
personne désignée par l'Assemblée nationale,
et il ne s'assoit pas à côté de la ministre parce qu'il a toute son
indépendance. Nos règles de commission parlementaire
font en sorte que la ministre doit autoriser que le Directeur général des
élections puisse intervenir dans les travaux
de la commission. Cependant, je pense que l'expert de la Loi électorale, Mme la
Présidente, c'est véritablement le Directeur
général des élections, et je trouve ça très malheureux que, du côté
gouvernemental, on ne donne pas son consentement
pour entendre les opinions, les recommandations et les points de vue du
Directeur général des élections sur le projet de loi qu'on étudie et sur
la Loi électorale qu'on étudie.
Mme la Présidente, je
pense que le député d'Ungava veut parler.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui, M. le député d'Ungava, oui.
Question de règlement sur la recevabilité d'un
sous-amendement
M.
Boucher : Mme la Présidente, j'aurais un point à soulever quant à la
recevabilité de l'amendement en question. Si on compare, bon, la proposition n° 4, qui a été rejetée à
12 h 38, pas plus tard qu'aujourd'hui, et le sous-amendement qui est présentement à l'étude, si vous les lisez
en parallèle, ils sont identiques mot pour mot. La seule différence, c'est
que, ce matin, on parlait entre 1996 et 2016
et, maintenant, on parle entre 1996 et 2015. Alors, j'aimerais que le député
de Borduas m'explique pourquoi ce changement
d'un an là vient changer la donne complètement et faire que ce nouveau
sous-amendement-là est différent et apporte plus que ce que celui qui a déjà
été rejeté nous apportait.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député d'Ungava.
Alors, M. le député de Borduas, voulez-vous... avez-vous des...
M.
Jolin-Barrette : Bien, est-ce que le député d'Ungava attaque la
recevabilité du sous-amendement?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui, tout à fait.
M.
Jolin-Barrette : Certainement?
La
Présidente (Mme Rotiroti) : C'est ce qu'il fait, oui. Alors, je
vous laisse le temps de répliquer, si vous voulez, avant que je
suspende.
M. Jolin-Barrette : Oui, certainement, Mme la Présidente. Bien, écoutez, il y a déjà des
questions de règlement qui ont été
tranchées par rapport à ce genre de questionnement là dans le cadre de la
commission pour l'étude du présent projet
de loi, et votre collègue le président de la Commission des institutions, le
député de Chomedey, a très clairement indiqué qu'au niveau des années, lorsqu'on change
une année, ce n'est pas le même objet qui est visé par l'amendement, Mme
la Présidente.
Donc,
je vous invite à accepter la recevabilité de l'amendement parce qu'il ne s'agit
pas du même objet, et la période couverte
ne vise pas la même période. Et surtout il faut savoir qu'on ne donne pas au
Directeur général des élections le même pouvoir sur l'étendue que ce
pouvoir habilitant lui donnerait. Donc, concrètement, Mme la Présidente, entre
le 1er janvier 2016 et le
31 décembre 2016, ça se retrouve exclu, et on termine au 31 décembre
2015 pour l'habilité que le Directeur
général aura d'entreprendre des poursuites pour une infraction qui serait déjà
prescrite à la Loi électorale, donc au niveau de la prescription
générale, Mme la Présidente, du Code civil du Québec.
Concrètement,
ça fait en sorte que le Directeur général des élections, pour ce qui est du
provincial, la Loi électorale au
provincial, du municipal, hein... La Loi sur les élections et les référendums,
c'est la loi qui s'applique dans le domaine municipal. Et, lorsque,
supposons, vous avez, dans le fond, un référendum pour savoir si une
municipalité a le droit d'emprunter, hein...
Lorsqu'on fait un règlement d'emprunt, il y a un règlement, et les citoyens
doivent aller signer un registre
avant, et là la municipalité, si elle souhaite, tout de même, aller en
règlement d'emprunt, bien là il y a un référendum sur la disposition. Donc, c'est cette loi-là,
hein, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, qui
prévoit ces dispositions-là. Donc, ça, c'est l'article 29 du présent
projet de loi.
Et
31, je crois que le nom de la loi, c'est la Loi sur les élections scolaires,
mais je ne suis pas convaincu. Bon, pour ce qui est de la Loi sur les élections scolaires, vous savez, il y avait
un projet de loi, je pense que c'était le projet de loi n° 86, Mme
la Présidente...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Je vous demande de revenir sur la
recevabilité du sous-amendement, là, alors, s'il vous plaît, parce que
je dois moi-même statuer là-dessus. Alors, j'aimerais ça que vous terminiez
votre intervention rapidement, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bon, bien, concrètement, Mme la Présidente, notre règlement fait
en sorte que, lorsque ce n'est pas le
même objet qui est visé — en l'occurrence, on ne vise pas les mêmes périodes de temps — la présidence, généralement, juge
recevable un tel sous-amendement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Parfait. Merci beaucoup, M. le
député de Borduas. Je veux juste vous rappeler que... Oui, M. le député
d'Ungava.
M.
Boucher : Écoutez, j'ai compris les arguments de mon collègue
d'Ungava, puis je pense que, bon, la période de temps...
M. Jolin-Barrette :
Votre collègue d'Ungava?
M. Boucher :
Pardon.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Borduas.
M.
Boucher : Borduas, j'avais la syllabe «a» dans la tête. Tu sais, bon,
on exclut la période du 1er janvier 2016 à... Bon, en supposant qu'on adopte ça vendredi,
mettons, arrondissons les chiffres, là, que la sanction est le
1er juillet, donc on exclut une
période de six mois sur presque 20 ans. Je ne pense pas que ça fasse une si
grosse différence que ça puis que l'objet soit si... Il faut prendre ça,
selon moi, avec un gros bémol puis quatre gros grains de sel. Donc, tu sais, la
période de temps, là, c'est cosmétique, ce qui est changé, quant à moi.
• (21 h 20) •
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Merci, M. le député d'Ungava.
M.
Jolin-Barrette : Est-ce que je peux avoir une réplique, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Rapidement, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez, six mois, et particulièrement dans notre
milieu, Mme la Présidente, en politique, vous devriez savoir que c'est très long, six
mois. Et je pense que tout peut changer à l'intérieur de six mois. Donc, il
y a véritablement une distinction
à faire entre les deux sous-amendements, et je ne peux me ranger aux arguments de
mon collègue d'Ungava.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, je veux juste vous rappeler qu'à chaque fois qu'il y a
un sous-amendement qui est déposé la présidence... s'il y a
une demande de recevabilité, chaque sous-amendement est analysé cas par cas. Alors, je comprends que vous avez fait référence à mon
prédécesseur, le président de la commission, mais je tenais à vous réitérer que chaque
sous-amendement est analysé cas par cas.
Alors, je suspends
les travaux quelques minutes.
(Suspension de la séance à
21 h 21)
(Reprise
à 21 h 48)
Décision de la présidence
1171
<R>La Présidente (Mme Rotiroti) :
Alors, la commission reprend ses travaux. Je vais rendre ma décision sur la recevabilité du sous-amendement à l'amendement à l'article 32. Alors, la présidence est là, évidemment,
pour favoriser le débat. Vous avez eu
beaucoup de marge
de manoeuvre jusqu'à maintenant. Je vous rappelle que c'est le 10e sous-amendement qui a été
déposé à la commission. Tous ces sous-amendements portaient sur
le même sujet, avec certaines variations, mais c'est toujours le même
débat qui se fait autour du sous-amendement.
Mon rôle, en tant que
présidente, est également de s'assurer que les travaux avancent. Je constate
que la commission a toutefois rejeté à neuf reprises des sous-amendements apportés à l'amendement de l'article 32 et portant sur le même sujet. Je déclare donc la recevabilité de ce sous-amendement-ci. Toutefois, je considère que la commission aura fait le tour de ce sujet
après l'étude de ce sous-amendement.
Alors, M. le député
de Borduas, la parole est à vous. Oui, M. le député d'Ungava.
M. Boucher :
...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, parce que c'est M.
le député de Borduas
qui a déposé le sous-amendement.
Alors, M. le député de Borduas.
• (21 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je prends note de votre décision, mais je vous
invite quand même, durant le débat sur le sous-amendement... Puis je suis sur une question de règlement. Je ne
suis pas sur mon temps relativement
au sous-amendement présentement, je suis sur une question de règlement. Mais il y a
une chose qui est certaine, vous ne pouvez pas statuer à l'avance sur
des sous-amendements futurs.
Et
d'ailleurs, d'ailleurs, Mme la
Présidente, il faut
dire que les sous-amendements qui sont présentés ne visent pas exactement le même sujet et le même objet, Mme la Présidente. Et d'ailleurs, si vous permettez, on va faire la recherche
aussi de notre côté, on pourra vous y
revenir demain, mais je dois vous dire que je note de la recevabilité de l'amendement. Mais les parlementaires ont le loisir de travailler et de bonifier le
projet de loi, et le fait que les amendements ne visent pas nécessairement les mêmes années, c'est fort
important, Mme la Présidente, fort important parce que... Pourquoi? Supposons,
dans un décret, on vise une certaine période de temps. Ce n'est pas pour rien,
Mme la Présidente...
La Présidente
(Mme Rotiroti) : ...je vous fais remarquer, M. le député
de Borduas, que vous êtes sur votre temps sur le sous-amendement parce que ce
n'est pas une question de règlement.
M. Jolin-Barrette : ...Mme la Présidente, c'est une question de
directive et de règlement. Et je vous l'ai mentionné au début de mon intervention, donc j'aimerais que
vous me confirmiez que je suis sur mon temps de demande pour le
règlement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui. Je vous fais remarquer
que la présidence a rendu sa décision, alors vous êtes libre de discuter de votre sous-amendement
sans problème. Vous avez le temps, vous avez 20 minutes pour parler de
votre sous-amendement. Sinon, je pourrais céder la parole à un autre
intervenant.
M. Jolin-Barrette : ...question de règlement, Mme la Présidente.
Est-ce que la Commission des institutions va statuer la recevabilité sous-amendement par sous-amendement et va
l'analyser à la lumière de chacun des sous-amendements?
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, toujours, M. le député de
Borduas. Chaque sous-amendement est analysé sur la recevabilité, oui,
effectivement, puis ce n'est pas nouveau, ça.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je vous en remercie, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Ça me fait plaisir. Alors,
est-ce que vous voulez continuer sur votre sous-amendement ou est-ce que
je peux céder la parole à un autre collègue?
M. Jolin-Barrette :
...céder la parole...
La Présidente
(Mme Rotiroti) : Parfait. On va revenir à vous, M. le
député d'Ungava.
M.
Boucher : Alors, Mme la Présidente, si on lit le sous-amendement
présenté par M. le député de Borduas, et non pas d'Ungava — ça me
fait penser à la chanson dans laquelle on dit «visa le noir, tua le
blanc» — ce
sous-amendement-là proposé n'augmente pas les pouvoirs du Directeur
général des élections, il les restreint, en ce sens que, si vous lisez attentivement le sous-amendement... Puis je vais
vous le lire, qu'on l'analyse comme il faut ensemble pour que tout le monde le comprenne de la même façon : «Malgré
le premier alinéa — on parle
du premier alinéa de l'article 32, ça, c'est bien — la connaissance par le Directeur général des
élections d'une information relative à toute contribution ou partie de contribution qui a été faite en contravention aux
articles 5, 29 et 31 [pour] la période comprise entre 1996 et 2015 débute
avec la sanction de la présente loi...»
Si vous arrêtez de lire
là, Mme la Présidente, ça, ce que ça veut dire textuellement, c'est...
Supposons qu'une infraction, peu importe par
quel parti politique, aurait été commise en 2014, puis le Directeur général des
élections en aurait eu connaissance
en 2017 parce qu'il a fait une enquête puis il a découvert ça ou peu importe la
raison, bien, ça vient remettre la connaissance au moment de la sanction
du projet de loi. C'est ça que ça dit. Donc, ça n'augmente pas la prescription,
ça la diminue. Puis après ça, si on continuait à lire, «même si le Directeur
général des élections avait eu connaissance du fait», ça, on parle d'autre
chose, on vient ajouter.
Donc,
présentement, les gens de la CAQ, bon, s'échinent et s'ingénient à essayer de
convaincre, par toutes les façons
possibles et impossibles, de dire qu'il y a un trou béant grand comme la terre
dans le projet de loi, puis il faut le bloquer,
sinon ce sera la fin du monde. Bien, avec ce sous-amendement-là, je vous
soumets que non seulement ils n'atteignent pas leur but, mais ils
viennent réduire la portée du premier alinéa de l'article 32.
La
Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, M. le député d'Ungava. Y a-t-il d'autres intervenants? Oui, M. le député
de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui,
certainement, Mme la Présidente. Vous savez, j'ai bien entendu les propos de
mon collègue d'Ungava et je vous dirais, Mme
la Présidente, que son interprétation, ce n'est pas l'interprétation que j'en
fais, et je serais prêt, Mme la Présidente, à ce qu'on travaille
ensemble pour avoir le meilleur libellé possible.
Ceci étant
dit, je n'ai pas vu beaucoup d'actions positives de la part de la partie
gouvernementale pour nous aider à
bonifier et à arriver au meilleur amendement possible pour viser l'objectif.
Parce que ce qu'il ne faut pas perdre de vue, Mme la Présidente, c'est l'objectif. Quel est-il, cet objectif? C'est de
s'assurer que les contributions illégales déjà prescrites dans le projet de loi soient remboursées par les
entités politiques. Donc, écoutez, moi, je n'en fais pas la même lecture,
de l'amendement, parce qu'il y a des
virgules, et c'est des ajouts. Donc, on doit lire l'intention du législateur
dans un tout cohérent. Et surtout que, lorsqu'on indique, à l'alinéa
deux, «malgré le premier alinéa», dans le fond, en fait, on vient ajouter au premier alinéa... Le premier alinéa,
c'est la règle générale. Et là, au premier alinéa, on permet au Directeur général
des élections de poursuivre pour la clause
générale, c'est-à-dire que c'est le délai régulier. Et, à l'alinéa deux, ce
qu'on vise et ce qu'on poursuit comme
but, Mme la Présidente, c'est de permettre au Directeur général des élections,
pour la période visée entre 1996 et
2015... c'est d'avoir la latitude, pour une somme qui est déjà prescrite, de
poursuivre les partis politiques et de leur réclamer la somme en
question.
Mme la
Présidente, vous savez que la ministre a invoqué à plusieurs reprises la question
de la prescription. Elle nous a
dit : Écoutez, la prescription, c'est important, ça assure la stabilité,
ça assure l'ordre social, et tout ça. Vous savez que, lorsqu'on regarde le Code civil du Québec, là, il y a plusieurs
prescriptions qui s'y retrouvent, Mme la Présidente, il y a plusieurs
prescriptions, et le législateur, à l'époque, a décidé d'y consacrer un livre
complet, le livre huitième du Code civil du
Québec. Donc, ça arrive parfois, Mme la Présidente, que le législateur fait des
choix, hein? Donc, on parle de la prescription acquisitive, de la prescription
extinctive. Le législateur fixe des temps distincts en fonction de sa volonté, en fonction de ses intentions, et même
parfois ça arrive qu'il fait des exceptions. Voulez-vous avoir un cas
d'exception, Mme la Présidente, un
cas d'exception récent, récent où le législateur a fait un choix, un choix
conscient, Mme la Présidente? Un choix conscient, pourquoi? Parce qu'il
répondait à une situation importante, criante et voulue par la population. En 2013, à la Commission des institutions, le
législateur a fait un choix, et je pense que, d'ailleurs, la députée et
ministre était présente.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : On parle de prescription, Mme la Présidente, et
le législateur a fait le choix, Mme la Présidente, pour les victimes d'agressions à caractère sexuel,
pour les violences subies pendant l'enfance, pour les violences subies par les ex-conjoints, d'amener la prescription à
30 ans à partir de la prise de connaissance. Il y avait déjà, pour ce genre
de recours là, Mme la Présidente... On
pouvait invoquer l'incapacité, en fait, d'agir pour la suspension de la
prescription. Je pense que c'était
l'arrêt Beaumont, contre ville de Bromont... ou Gauthier contre ville de
Bromont. Pour notre gouverne, Mme la
Présidente, l'incapacité, en fait, d'agir, ça a été défini aussi par la Cour
suprême par la suite. Mais je veux juste vous dire qu'est-ce qui avait
mené la Cour suprême à traduire ce critère-là pour l'incapacité, en fait,
d'agir. C'était, Mme la Présidente, des
policiers à la ville de Bromont qui avaient intercepté un suspect, qui
l'avaient interrogé, qui l'avaient déshabillé tout nu et qui l'avaient
attaché par un froid d'hiver à l'extérieur, sur un poteau. Vous comprendrez que
ces gestes-là n'étaient pas des gestes
admissibles, des gestes possibles, et, par la suite, M. Gauthier avait
voulu entreprendre une poursuite
contre la ville en question, contre le corps de police. Et, à mon souvenir, Mme
la Présidente, il s'était fait opposer la prescription parce que ça
faisait une période supérieure à trois ans, et la Cour suprême avait dit :
Écoutez, monsieur avait tellement peur, il
n'était tellement pas apte à entreprendre une poursuite qu'il avait développé
l'incapacité d'agir, qui amenait une suspension de la prescription.
• (22 heures) •
Mais, si nous
revenons à ce qui s'est passé en 2013, Mme la Présidente... Et c'est pertinent
parce que, d'ailleurs, j'ai proposé un projet de loi pour abolir la
prescription pour ces victimes-là et surtout pour le rendre rétroactif.
Parce que vous aurez noté quelque chose, Mme la Présidente, de très important,
hein, on est en train de mettre une prescription rétroactive dans le présent projet de loi, le projet de loi n° 101,
pour rendre déclaratoire... pour retourner au 10 décembre 2010,
on retourne dans le passé. Mais, par contre,
avec le projet de loi, en 2013, sur les victimes d'agression sexuelle et ce que
je propose, de retourner dans le passé, on
ne l'a pas encore fait. Donc, éventuellement, la Commission des institutions,
ça serait pertinent qu'elle se penche sur ce dossier-là de nouveau, Mme
la Présidente.
Mais,
pour revenir à la question de la prescription, Mme la Présidente, pour revenir
à cette fameuse question là, la
ministre nous dit : C'est pour préserver l'ordre social. Eh bien,
l'article 2926.1 nous dit que ça prévoit un régime particulier pour les victimes d'infractions criminelles et
d'agression à caractère sexuel ou pour les victimes de violence subie pendant
l'enfance ou conjugale. Et l'article se lit
comme suit : «L'action en réparation du préjudice corporel résultant d'un
acte pouvant constituer une
infraction criminelle se prescrit par 10 ans à compter du jour où la victime a
connaissance que son préjudice est
attribuable à cet acte. Ce délai est toutefois de 30 ans si le préjudice
résulte d'une agression à caractère sexuel, de la violence subie pendant
l'enfance, ou de la violence d'un conjoint ou d'un ancien conjoint.
«En cas de
décès de la victime ou de l'auteur de l'acte, le délai applicable, s'il n'est
pas déjà écoulé, est ramené à trois ans et il court à compter du décès.»
Bon, par la
suite, on explique, dans l'article de l'auteur Daniel Dumais, d'ailleurs
de l'École du Barreau, Mme la Présidente, on explique, dans le fond, ce
qui a mené le législateur vers cette codification-là.
Mais mon
propos est le suivant, Mme la Présidente. Je conviens avec la ministre que ce
n'est pas la même chose, on parle de
drames humains. Mais le législateur a fait un choix, il a fait un choix
d'amener une prescription trentenaire. Dans
le Code civil du Bas-Canada, ça existait, la prescription trentenaire, Mme la
Présidente. Lorsque la ministre se rabat sur la prescription générale du
Code civil du Québec, on remonte à 1994, donc ça fait...
Mme de Santis : 22 ans.
M.
Jolin-Barrette : 22 ans,
merci. Vous savez, je suis avocat, pas comptable. Et là, Mme la Présidente, le
législateur a fait un choix, il y a
22 ans, 23 ans, mais, par contre, il vient déroger, à certaines occasions, à sa
prescription générale. Et nous, ce
qu'on propose avec le sous-amendement, c'est de créer, dans une loi
particulière, dans la loi sur le Directeur général des élections, une disposition particulière au niveau de la
prescription, et ça, pour un temps très limité, pour une période de trois ans, Mme la Présidente, une
clause crépusculaire pour que le Directeur général des élections puisse faire
son travail, Mme la Présidente.
Alors,
j'invite la ministre à faire preuve d'ouverture sur ce point et à régler la
question du projet de loi une fois pour
toutes. Parce qu'il est de notre volonté de contribuer à l'adoption de ce
projet de loi, et, d'ailleurs, nos interventions, tout au long de la commission parlementaire et
lors du comité consultatif, ont visé à assurer que le Directeur général des
élections ait le plus de pouvoirs possible pour mener à bien ses enquêtes, Mme
la Présidente, pour mener à bien ses enquêtes,
et surtout pour s'assurer qu'il puisse obtenir les résultats qu'il souhaite
obtenir, Mme la Présidente, et qu'il ne soit pas limité dans le cadre de
ses actions à ce niveau-là.
Donc, au
niveau de la prescription, Mme la Présidente, à de nombreuses reprises, la
ministre nous a dit : C'est l'ordre
social. Je lui dirais : Qui sont les intervenants au niveau de l'ordre
social? Pourquoi craint-on l'ordre social du côté gouvernemental? Les seuls intervenants qui sont
touchés, Mme la Présidente, ce sont le Directeur général des élections et les formations politiques. Et j'ai une question
pour la ministre : Pourquoi craint-elle d'affecter l'ordre social si les
seuls intervenants en cause sont les
partis politiques et le Directeur général des élections? J'aimerais poser cette
question à la ministre.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député de Borduas. Y
a-t-il d'autres intervenants? Il n'y a pas d'autres intervenants sur le
sous-amendement?
M.
Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je comprends que la ministre ne souhaite pas répondre à la
question...
La Présidente
(Mme Rotiroti) : J'ai demandé s'il y avait d'autres
intervenants, et il ne semblait pas y en avoir, alors...
M. Jolin-Barrette : Bien, je vais
continuer, Mme la Présidente, à...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui, allez-y. Il vous reste deux minutes.
M. Jolin-Barrette : ...à persister
et à poser ma question à la ministre, à savoir pourquoi refuse-t-elle notre amendement? Parce que les arguments qu'elle a
invoqués à ce jour, ce sont ceux à la fois de l'ordre social, du respect de notre droit, mais je
vous ai démontré très clairement que le législateur, parfois, fait des choix.
Et d'ailleurs,
vous savez, Mme la Présidente, je reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure, la modification législative du Code civil du Québec en 2013, la Commission
des institutions s'était questionnée à savoir : Devrions-nous rendre rétroactive la prescription? Et devrions-nous
l'abolir? Et il y a un mandat qui avait été donné au juge Dussault,
qui a rendu son rapport. Et d'ailleurs
la ministre de la Justice a rendu récemment public son rapport suite à de
nombreuses demandes des victimes. Finalement, suite aux pressions de l'opposition,
elle a rendu public ce rapport.
Et le rapport
du juge Dussault évaluait les risques, il disait : C'est vrai que ce n'est
pas habituel, en droit civil, d'étendre
la prescription ou de la rendre rétroactive, mais il ne disait pas que c'était
impossible. Et j'invite les gens qui nous
écoutent à aller sur le site du ministère
de la Justice et à lire l'opinion du
juge Dussault, ça pourrait être fort instructif pour les travaux de la commission, Mme la
Présidente, fort instructif parce qu'on est un peu dans cette même situation,
et les arguments de la ministre pourraient trouver une réponse dans le rapport
du juge Dussault.
Et, Mme la Présidente, je pense que, vous savez, nos travaux ont avancé rondement
la plupart du temps, mais on se bute
à une fin de non-recevoir du gouvernement depuis un certain temps. Puis vous savez, moi, je
suis quelqu'un qui aime avoir des résultats, puis je dirais à la ministre : Allons-y, assoyons-nous ensemble sur cette question-là. Et, Mme
la Présidente, je voudrais savoir,
est-ce que c'est en raison des créanciers que la ministre bloque au niveau de notre amendement? Est-ce
que c'est en raison des créanciers
bancaires par rapport aux partis
politiques? Est-ce que
c'est ça, la question? Est-ce que c'est ça, la
finalité de la chose, Mme la Présidente? J'aimerais ça que la ministre nous
réponde.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, merci, M. le député de Borduas. Y a-t-il d'autres intervenants au sous-amendement?
Oui.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, pour terminer, je comprends que la ministre
ne nous répond pas, mais on souhaite engager un dialogue avec elle.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : J'ai demandé, M. le député de Borduas, s'il y avait
d'autres intervenants. Il n'y en avait pas. Alors, vous avez 18 secondes pour
continuer, sinon je peux céder la parole à un autre intervenant.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, j'invite, j'implore la ministre
à faire preuve d'ouverture. Ses collègues qui
sont avec elle, je suis convaincu qu'ils souhaitent participer au débat,
analyser ça sous un angle différent. Vous avez vu, le député
d'Ungava a un regard et une acuité qui permettent d'évaluer la pertinence d'un
projet de loi. Il faudrait faire appel à lui également.
Donc,
Mme la Présidente, il faut s'assurer que le meilleur projet de loi soit adopté.
L'amendement est nécessaire et requis, Mme la Présidente. Je pourrais
vous le dire...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député de Borduas. Y
a-t-il d'autres intervenants sur le sous-amendement? Oui, M. le député
de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Oui. Merci, Mme la Présidente. Je comprends que le temps a,
malheureusement, manqué à mon collègue
de Borduas, mais la dernière question qu'il posait, elle est toute pertinente
dans les circonstances. Donc, je vais offrir à la ministre aussi
l'occasion d'y répondre. Je comprends qu'il peut y avoir des inquiétudes, reste
à mieux les comprendre pour peut-être
adapter notre discours en conséquence. Donc, je vais, à mon tour, poser la
question à la ministre. Est-ce que,
parmi les différentes inquiétudes qu'elle peut avoir face à l'amendement ou au
sous-amendement que nous proposons,
est-ce qu'il y a une inquiétude à l'égard des créanciers des différentes
formations politiques? Et je nous inclus tous. Est-ce qu'elle craint, justement, pour l'éventuelle solvabilité ou
le rapport que pourraient avoir les créanciers des formations politiques à l'égard d'engagements pris
auprès d'eux? Donc, la réponse de la ministre serait appréciée à cette
question.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Est-ce que quelqu'un du côté
gouvernemental souhaite prendre la parole? Sinon...
Mme de
Santis : Je vais prendre la parole pour l'instant.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui. Alors, Mme la ministre.
• (22 h 10) •
Mme
de Santis : Je trouve absolument honteux qu'on compare une
prescription qui touche des réparations aux préjudices corporels suite à une agression à caractère sexuel, violence
subie pendant l'enfance, violence d'un conjoint ou d'un ancien conjoint. Qu'on compare ça à une prescription qui touche
des contributions politiques,
en tant que femme, je trouve ça honteux.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, une question de règlement.
Mme de
Santis : En tant que... et deuxièmement...
M. Jolin-Barrette :
Question de règlement, Mme la Présidente...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui. C'est en vertu de quel article, M. le
député de Borduas? En vertu de quel article?
M. Jolin-Barrette : En vertu de l'article 35.7°,
se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit. Et vous me permettrez un léger
commentaire, Mme la Présidente. La personne dans cette Assemblée qui a proposé
d'abolir la prescription pour les victimes d'agressions sexuelles, c'est moi,
Mme la Présidente. Le Parti libéral n'a pas eu le courage, depuis qu'il
est arrivé...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Monsieur...
M. Jolin-Barrette : Je m'excuse, Mme la Présidente, vous allez me permettre de terminer mon
intervention. Le Parti libéral, depuis 2014...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Je m'excuse, là, M. Borduas...
Des voix :
...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui. M. le député de Borduas...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui. On suspend les travaux, s'il vous plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 22 h 11)
(Reprise à 22 h 14)
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Alors, la commission reprend ses travaux, et je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Merci, Mme la Présidente. Juste pour revenir sur le dernier échange que nous venons d'avoir et
pour confirmer l'intention de mon collègue
de Borduas, lorsqu'il a parlé de prescription au niveau
de crimes à caractère sexuel, il ne comparait d'aucune façon l'actuel projet
de loi à des sévices de cette nature-là. Ce qu'il disait, c'est qu'il y a
des précédents, et, oui, la prescription peut être modifiée dans la mesure où
le législateur souhaite le faire. Donc, c'est la seule
chose et c'est la précision que je tenais à apporter, là, dans les circonstances.
Mais je
reviens à la question que j'ai posée à la ministre et qui en était une posée
par mon collègue, mais le temps lui a
manqué, là, pour avoir la réponse, au niveau des inquiétudes de la ministre,
pour mieux ajuster notre discours, pour mieux ajuster les contrepropositions que nous faisons maintenant depuis
quelques heures, on serait intéressés de mieux comprendre quelles sont ses inquiétudes pour rejeter systématiquement les sous-amendements que nous proposons. Et,
parmi les inquiétudes qu'elle pourrait avoir
et qu'il pourrait être légitime d'exprimer, ce serait par rapport à une crainte que pourraient avoir les partis politiques par
rapport à leurs créanciers, par rapport à des demandes de remboursement importantes
qui pourraient leur être formulées par leurs créanciers. Donc, j'étais curieux
de savoir si ça fait partie des craintes que la ministre a pour
manifester une réticence à l'adoption des sous-amendements que nous proposons.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Avez-vous quelque chose à ajouter à ça, Mme la ministre?
Mme de
Santis : Je crois que j'ai
amplement expliqué ma position. Et, si on se rappelle, c'était le Directeur général des élections, en 2006 et
2010, qui avait cette crainte.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Merci. Et, sans
parler d'impasse, parce qu'on ne
renonce pas, de notre côté, à faire valoir la justesse des sous-amendements que nous proposons, je
rappelle à la ministre l'offre qu'elle nous faisait — j'allais dire l'année dernière, hier, plutôt — par rapport à un retour au comité
consultatif. Je réitère... En fait, ce n'est pas mon offre, c'est l'offre
que faisait la ministre hier aux membres de
la commission. Est-ce qu'elle accepterait, dans les circonstances, de retourner
en comité consultatif, ne serait-ce que quelques instants, quelques heures tout
au plus, pour essayer, entre nous, de trouver un compromis à l'impasse dans laquelle, manifestement, nous semblons
nous retrouver? Donc, je fais mienne la proposition de la ministre de
retourner en comité consultatif.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
C'est une question, ça, M. le député?
M. Charette : Oui. Bien, en fait,
je...
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Oui. Mme la ministre, avez-vous quelque chose à ajouter?
Mme de Santis : J'ai déjà répondu à
cette question aujourd'hui, j'ai dit qu'on avait un consensus au comité consultatif. Ce consensus se retrouve dans le
projet de loi n° 101. J'aimerais bien qu'on procède à l'adoption du projet
de loi n° 101.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci, Mme la ministre. M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Est-ce que la ministre ne croit pas qu'un échange sur nos
préoccupations communes... Sans devoir passer
par des amendements, sous-amendements, est-ce qu'un échange en dehors de ce
contexte-là ne nous permettrait pas
d'avancer peut-être plus rapidement, et nous permettre de régler nos
différends, et ultimement adopter l'article 32? Parce qu'actuellement nos recours, Mme la Présidente, sont plutôt
limités. Pour faire valoir nos préoccupations, il faut forcément passer
par la défense d'amendements ou sous-amendements, alors qu'un travail en comité
consultatif nous permettrait de nous
exprimer plus librement sans toujours avoir à devoir composer, recomposer des
amendements. Bref, ça nous permettrait des échanges plus ouverts sur la
question et, possiblement, d'avancer plus rapidement.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Y a-t-il quelqu'un qui voudrait ajouter... Moi, de qu'est-ce que je comprends,
c'est qu'il y a déjà eu une consultation et
il y a eu un consensus autour de la question qui porte... Le consensus est dans
ce projet de loi qui est devant nous. Alors,
vous pouvez continuer à poser la même question, mais j'ai l'impression que
vous allez toujours avoir la même réponse, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Pour votre bénéfice, Mme la Présidente, je ne faisais pas
allusion à des consultations. Effectivement, les consultations ont eu lieu, mais la particularité du projet de loi
que nous étudions présentement, elle est la suivante. Elle fait suite, cette étude, à des rencontres en
comité consultatif. Donc, ce n'est pas des consultations comme telles, c'est
réellement, essentiellement les mêmes
personnes qui, au cours des dernières semaines, se sont rencontrées dans un
contexte qui est totalement détaché de
l'étude article par article. Ça permet des échanges plus ouverts, et c'est à
travers ces rencontres-là du comité consultatif qu'on a pu faire des
avancées remarquables, et c'est à travers ces rencontres-là qu'aujourd'hui on peut fièrement dire que, sur les
33 articles que contient le projet de loi, 31 ont été adoptés. Il ne nous en
manque que deux. Et, ultimement, le 33e et
dernier, ma foi, c'est une formalité. Donc, il ne reste qu'un seul article plus
litigieux, qui pourrait être abordé de façon
plus détachée qu'à travers le contexte actuel, là, de l'étude article par
article.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Continuez, M. le député.
• (22 h 20) •
M. Charette :
Et c'est la proposition que je fais à la ministre. Je ne sais pas si elle lui
convient.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Est-ce que, Mme la ministre, vous voulez...
Mme
de Santis : Je répète la même chose que j'ai dite tout à l'heure, le projet
de loi n° 101 est le résultat
d'un consensus qu'on a acquis au comité consultatif. Ce n'est
pas à ce moment-ci qu'on demande de faire un retour. Et, au comité
consultatif, il n'y avait pas seulement les élus qui étaient présents, il y
avait aussi les partis politiques. La Loi électorale touche aussi les partis
politiques.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : C'est parfait, Mme la ministre. Alors, M. le député
de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Je comprends... Bien, c'est-à-dire, je reçois la réponse de la ministre. Elle me déçoit, mais je la reçois, tout de même.
Bref,
maintenant, il
faut se dire un petit peu ce qui nous attend pour la suite des choses. On va ajourner, j'imagine,
dans les prochaines minutes, la séance d'aujourd'hui. On va, normalement, reprendre demain le même exercice. Nous serons alors à essentiellement 24 heures de
la fin de la session parlementaire. Il
faudra ultimement que l'on convienne de la marche à suivre pour
permettre l'adoption du projet de loi si tel est réellement l'objectif de la
ministre.
Tout
à l'heure, en après-midi, on a fait la recension des amendements qui ont été
déposés de part et d'autre. Il y a eu
une collaboration, on ne peut pas la nier. Cependant, malheureusement, depuis
deux jours, tous les amendements qui sont
proposés, qui ont, pour la plupart, été jugés recevables, à l'exception d'un
seul, si ma mémoire est fidèle, recevables, donc pertinents pour la poursuite
de nos échanges et pertinents pour la réflexion qui est la nôtre... Il faudra
éventuellement se dire qu'il faut
avancer. Il faudra se dire : Est-ce que demain sera une reprise de la
journée d'aujourd'hui? Est-ce que demain,
jusqu'en toute fin de journée, on débattra de la pertinence de modifier les
notions de prescription? Si oui, si c'est la journée qui nous attend
demain, là on pourra être inquiets, effectivement, pour l'adoption du projet de
loi.
Mais
j'attends de la ministre qu'elle assume ses responsabilités, j'attends de la
ministre qu'elle assume son rôle non pas
de répondante du Parti libéral — et ça, elle l'a très bien exprimé au cours
des derniers jours — mais
bien de ministre responsable de la Réforme des institutions
démocratiques. Donc, c'est à elle que revient la responsabilité.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Je vous demande d'être prudent dans
vos propos, M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Je sais.
La Présidente (Mme
Rotiroti) : C'est la ministre de l'institution démocratique.
C'est ça, son titre.
M. Charette :
De la Réforme des institutions...
La Présidente (Mme
Rotiroti) : De la réforme, exactement. C'est ça, son...
M.
Charette : Oui, tout à fait. Je pense l'avoir bien nommée. Sinon, vous
m'en excuserez. Je pense que c'est de cette façon-là que je l'ai nommée,
sauf erreur.
Bref,
c'est une responsabilité qui lui incombe que de s'assurer que nos règles
démocratiques, notamment la loi sur
le financement des partis politiques, puissent atteindre les objectifs que l'on
se fixe comme élus, comme formations politiques
et ultimement comme société. Et c'est une très, très lourde responsabilité qui
revient à la ministre, et elle se doit
de l'assumer complètement. Et l'assumer complètement doit vouloir dire faire
des compromis, chercher le consensus. On
l'a atteint à bon nombre de reprises, Mme la Présidente, mais cet objectif-là
doit demeurer le nôtre jusqu'à la toute fin de nos travaux.
Et on est
devant une impasse par rapport à l'article 32. Donc, sa responsabilité de
rechercher le consensus continue de s'appliquer pour l'adoption de
l'article 32, et c'est cette responsabilité-là qu'on... Comment pourrais-je le
dire? Je souhaiterais
qu'elle l'assume de façon plus affirmée. Je vais le dire comme ça. Et il y a de
la latitude... convaincu qu'elle a de
la latitude pour nous permettre de bonifier le projet de loi, et notamment
l'article 32, pour répondre aux préoccupations qui sont très légitimes, qui ont été exprimées à travers des exemples
bien précis hier et aujourd'hui, mais qui ont aussi été, en quelque sorte, cautionnées ou souhaitées par le
Directeur général des élections. On a pu lui demander si cet amendement-là
permettrait à son organisation, à son institution de mieux s'acquitter de son
mandat, et la réponse a été oui.
Donc,
à partir du moment où ceci a été dit,
la ministre doit assumer la responsabilité qui lui
revient. Et je m'attends, Mme la
Présidente, à ce que demain, après
les affaires courantes, lorsqu'on reprendra nos travaux pour l'étude article par article du projet de loi
n° 101, je m'attends et mon souhait serait que la ministre, d'entrée de
jeu, nous présente un amendement qui nous
permette, franchement, de passer à l'étape suivante que serait l'adoption de
l'article 33, et ça nous permettrait d'aller rapidement, avec
consentement, à l'adoption finale du projet de loi. Donc, on est tout près de
cet objectif-là, mais le peu qui nous
manque, c'est la ministre qui peut nous le donner. Et il n'y a pas d'autre
responsabilité en cas d'échec que
celle de la ministre ultimement. Donc, on va attendre des amendements lorsqu'on
se retrouvera demain pour la poursuite de nos travaux.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, M. le député de
Deux-Montagnes. Mme la ministre, voulez-vous ajouter quelque chose?
Mme
de Santis : Si le parti de deuxième opposition veut des amendements ou
des sous-amendements à l'amendement qui
est proposé, c'est à eux de proposer un amendement qui est acceptable. D'abord,
je regarde ce qu'ils proposent et je suis tout à fait d'accord avec mon collègue d'Ungava, que, quand on lit le
sous-amendement, ça enlève des droits au Directeur général des élections parce que ça dit clairement
que la connaissance du directeur général relative à toute contribution faite pendant une certaine période, 1996 à 2015,
débute avec la sanction de la présente loi. C'est ça que ça dit et ça veut
dire que, si quelque chose n'est pas connu à la date de la sanction et est
connu plus tard, c'est rétroactif à la date de la sanction. Alors, c'est clair. Alors, si c'est ça, les types de
sous-amendements qui sont présentés, ce n'est certainement pas quelque chose avec lequel on peut être
d'accord. Et ça s'ajoute à toutes les autres raisons que j'ai déjà données,
pourquoi on n'est pas d'accord avec l'essentiel de tous vos
sous-amendements qui se ressemblent un après l'autre.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Merci, Mme la ministre. Alors, y
a-t-il d'autres intervenants? Oui, en quelques minutes.
M.
Charette : ...quelques secondes. Oui, effectivement, je vois une lueur
d'espoir dans la réponse de la ministre. Elle dit qu'elle n'est pas d'accord avec l'essentiel. Donc, elle est
d'accord avec une partie de ce que l'on propose. Donc, je vais l'inviter, d'entrée de jeu, demain matin, à
la reprise des travaux, à nous proposer un amendement ou une modification
avec la partie avec laquelle elle est en
accord. Et là je reprends ses mots, tout simplement. Donc, on va attendre
l'amendement de la ministre demain matin, tout simplement.
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Avez-vous quelque chose à ajouter,
Mme la ministre? Non? Alors, il vous reste encore quelques minutes,
sinon...
Mme de
Santis : Est-ce qu'on peut voter?
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Non, le temps n'est pas écoulé, Mme
la ministre. Alors, tant et aussi longtemps que le temps n'est pas
écoulé, on ne peut pas voter sur le sous-amendement.
Une voix :
S'il n'y a pas d'autre...
La
Présidente (Mme Rotiroti) : Oui, s'il n'y a pas d'autre
intervenant, effectivement, oui. M. Borduas, vous n'avez plus de temps
alloué, malheureusement.
M.
Jolin-Barrette : Est-ce que mon collègue de Deux-Montagnes, il lui
reste du temps?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Quelques minutes, oui.
M.
Charette : Oui. Je lance l'invitation réitérée. On aura un vote à
tenir, j'imagine, pour l'amendement. Donc, est-ce qu'on peut procéder à
l'appel nominal pour ce qui est de l'amendement... le sous-amendement discuté?
La Présidente (Mme
Rotiroti) : Oui, tout à fait. Alors, M. le secrétaire.
Le Secrétaire :
Oui. Pour, contre, abstention. M. Charette (Deux-Montagnes)?
M. Charette :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Drainville (Marie-Victorin)?
M. Drainville : Pour.
Le Secrétaire :
Mme de Santis (Bourassa-Sauvé)?
Mme de Santis : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Rousselle
(Vimont)?
M. Rousselle : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger)?
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Je m'abstiens.
Le Secrétaire : C'est rejeté.
La Présidente (Mme Rotiroti) :
Alors, le sous-amendement est rejeté.
Alors, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux à jeudi le 9 juin 2016, après les affaires courantes, soit
vers 11 heures, où elle poursuivra son mandat. Merci pour votre
collaboration. Et bonne soirée à tous.
(Fin de la séance à 22 h 30)