(Quinze heures trente minutes)
Le
Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des institutions reprend ses travaux.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre et terminer les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 64, Loi sur
l'immatriculation des armes à feu.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Roy (Bonaventure) remplace Mme Hivon (Joliette); M. Bergeron
(Verchères) remplace M. Leclair (Beauharnois); et M. Spénard (Beauce-Nord)
remplace Mme Roy (Montarville).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : Tous contre un
registre québécois des armes à feu,
la Confédération des syndicats nationaux et la Fédération des pourvoiries du
Québec, qui sera notre dernier intervenant pour les consultations
particulières du projet de loi n° 64.
Revenons à l'organisme Tous contre un registre
québécois des armes à feu, représenté par M. Guy Morin et Mme Jessie McNicoll. On m'a informé que vous
prendriez la parole à tour de rôle dans votre 10 minutes, et après il y a
aura échange avec M. le ministre et les partis d'opposition. Donc, sans plus
tarder, M. Morin, je vous laisse la parole.
Tous contre un registre
québécois des armes à feu
M. Morin (Guy) : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, Mme, MM. les députés. Mon nom est Guy Morin. Je suis
vice-président de Tous contre un registre. Tous contre un registre, c'est
un regroupement de tous les citoyens du
Québec propriétaires ou non-propriétaires d'armes à feu contre le projet de loi
n° 64.
Nous sommes
un regroupement indépendant de tout financement de l'industrie et nous n'avons
aucun but financier dans cette
aventure. Le regroupement a vu le jour quand plusieurs personnes de tous les
milieux se sont réunies autour de la
question du coût versus le peu d'efficacité, voire l'inutilité d'un tel
registre, ainsi que le bris de confiance des propriétaires d'armes à feu
face à un gouvernement québécois qui vient, encore une fois, s'impliquer dans
la vie des propriétaires d'armes à feu.
Suite à la
rencontre, nous avons constitué un organisme sans but lucratif. Nous avons
déposé une pétition de près de
60 000 signatures, et la mobilisation est grandissante dans toutes les
régions du Québec. Les gens que nous rencontrons sentent qu'il y a un déni de démocratie grandissant dans une Assemblée
nationale qui utilise toutes ses branches publiques, parapubliques pour arriver à justifier l'argent
investi dans ce projet de loi, alors que certains de ces organismes souffrent
d'un sous-financement criant.
La tragédie
de la Polytechnique a marqué l'ensemble de la population du Québec. Elle a
aussi contribué à instaurer une
crainte et une peur reliées à un objet, son utilisation et à ses propriétaires.
Nous partageons entièrement la peine, la colère et l'incompréhension des gens qui ont perdu des êtres chers. Nous
ne pouvons pas être indifférents sur ce qu'ils ont vécu parce que nous sommes tous susceptibles d'être visés par la
mort d'un proche. C'est justement pour ça que l'on s'oppose au registre des armes à feu, car le
temps, l'énergie et l'argent pourraient être investis dans des ressources plus
utiles pour aider les gens pris avec des
problèmes de santé mentale. La santé mentale, qui est un problème de base de la
quasi-totalité des morts par armes à feu de chasse achetées légalement et
possédées légalement par des propriétaires d'armes
à feu qui ont déjà passé à travers tout le processus rigoureux et strict qui
fait partie de la loi canadienne sur les armes à feu.
Nous avons
tous à coeur la santé et la sécurité des gens. C'est pour cela que nous voulons
faire en sorte de sauver des vies, et
non de faire semblant pour se donner une bonne conscience, advenant quelque
chose qui arriverait, de toute façon, qui est inévitable.
Nous devons
considérer qu'un tel projet n'a jamais pu prouver son utilité à sauver une
seule vie dans le passé. Il est
possible qu'il puisse, au final, faire plus de tort par l'excès de confiance
des gens qui utiliseraient ce registre et le manque de confiance des propriétaires d'armes à feu envers l'utilisation
que les autorités pourraient en faire dans le futur. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
McNicoll.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Bonjour, Mmes, MM. les députés. Et merci de nous
recevoir. Je m'appelle Jessie McNicoll et
je suis responsable des communications pour Tous contre un registre québécois des armes à feu. J'aimerais préciser d'entrée de jeu qu'il s'est glissé une erreur à la
page 8 de notre mémoire. L'extrait tiré du site de la GRC, où on peut lire
que le cédant doit
vérifier que le cessionnaire détient un PPA, n'a pas été modifié récemment à
cause de la controverse, la modification a été faite en mai 2015.
Tous
contre un registre québécois des armes à feu reconnaît que toutes les armes à
feu, quelles qu'elles soient, représentent
un danger lorsqu'elles se trouvent dans les mains d'une personne mal
intentionnée, malade ou insuffisamment formée.
Nous reconnaissons que la violence commise à l'aide d'une arme à feu, bien que
très rare, a un impact spécialement très
grave sur les personnes qui en sont victimes. Nous estimons qu'il s'agit là
d'une raison supplémentaire pour bien évaluer
les effets pervers possibles que pourrait avoir le projet de loi n° 64 et plutôt envisager d'investir l'argent dans
des mesures plus à même de produire les effets recherchés tant sur la
santé que sur la sécurité publique.
Il convient de
mentionner que la culture québécoise des armes à feu est bien différente de
celle que l'on peut percevoir chez nos voisins du Sud. La culture québécoise en
matière d'armes à feu est de type communautaire. Les propriétaires d'armes à
feu sont très souvent réseautés entre eux. Les clubs de tir font office de club
social. C'est une microsociété où des règles particulières règnent, bien que
rarement mises en mots. Cette microsociété impose une importante pression des pairs pour se conformer à des standards de
sécurité liés à l'utilisation, au transport et à l'entreposage allant au-delà de ce qui est prescrit par la loi.
C'est de pratique courante chez les propriétaires d'armes à feu de s'entraider.
En
cas de période difficile, dépression, séparation, etc., c'est coutume d'offrir
à un confrère de prendre ses armes chez
nous. J'ai moi-même déjà confié mon arme à quelqu'un d'autre. Les
propriétaires d'armes à feu sont les dernières personnes à souhaiter
qu'il se produise une tragédie avec une arme à feu. Un argument massue qui convainc
les plus récalcitrants, c'est d'éviter que
son arme devienne une statistique de plus qui salirait les propriétaires
d'armes à feu si un malheur devait se
produire. Un propriétaire légitime qui ne se conformerait pas à ces pratiques
et dont une arme serait utilisée à
des fins criminelles commettrait, aux yeux de la communauté, l'équivalent d'un
crime de haute trahison, et ainsi pour quelqu'un qui achèterait une arme
pour l'introduire sur le marché illicite.
En raison de la
méfiance quant aux intentions du gouvernement, plusieurs de nos membres ont
affirmé qu'ils n'enregistreraient pas leurs
armes. Nous y voyons un risque important que nos membres se retrouvent en
position de rupture face aux
autorités. Pire encore, nous pressentons que plusieurs de nos membres auront
des réticences supplémentaires à demander de l'aide en période
difficile, de crainte de voir leurs armes saisies.
Or,
lorsqu'un propriétaire d'armes à feu ou un de ses proches traverse une période
difficile, ils sont les seuls à craindre
d'être privés de leur passion. Ils se sentent comme quelqu'un
au bord du précipice, qu'on pousserait vers le gouffre. Nous, sur le terrain, nous sommes les premiers
intervenants. Un réseautage informel s'est créé afin de sortir les armes
des maisons où ça ne va pas afin de
minimiser les risques de dérapage. Un bénéfice secondaire à cette mesure
informelle, c'est que, chaque fois
que le membre veut aller au club de tir, il devrait d'abord passer chercher son
arme pour ensuite aller la reporter
au domicile de son confrère. Ces moments sont privilégiés pour assurer un
certain suivi, bien que non professionnel, et constituent, en quelque sorte, une forme de soutien ou, à tout le moins, la confirmation d'une appartenance au groupe.
Avec
l'immatriculation des armes et les règlements d'application associés, il est
probable que les mécanismes mis en
place par la communauté à des fins de protection ne soient plus permis par la
loi. Les risques de faire saisir ses armes en demandant de l'aide
augmentent, engendrant ainsi des effets pervers. Et, pendant qu'on envisage de
mettre 17 millions pour créer un registre, des besoins criants se font
sentir à plusieurs niveaux.
Un
de nos membres a témoigné de sa crise suicidaire, et je cite : «En résumé,
devant le danger de l'irréparable : une pilule et de l'attente! Dans mon désespoir et mon état fragile, je
ne pouvais en venir qu'à une seule conclusion : le gouvernement
nous dit d'aller chercher de l'aide, mais il n'en met aucune à notre disposition.»
Et,
un peu plus loin, il renchérit : «On met de l'argent
dans des publicités pour dire d'aller chercher de l'aide là où il n'y en
a pas. Ironiquement, les centaines de milliers de dollars de ces publicités
auraient été mieux dépensés s'ils avaient
été investis dans l'aide elle-même! Aujourd'hui, je vois la même ironie avec le projet de créer un registre des armes à feu[...]. Récemment, à l'émission Tout le monde
en parle, on disait de cette
énorme dépense que, si elle sauve seulement
une vie... Par expérience, je réponds que
cet argent sauverait énormément de plus vies s'il
servait à offrir une aide aux gens en détresse suicidaire.» Fin de la
citation.
À
noter que les coordonnées des
personnes qui ont témoigné dans notre mémoire peuvent être disponibles sur
demande. Elles veulent juste ne pas être reconnaissables publiquement. Je vous
remercie.
• (15 h 40) •
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Merci pour votre présentation. Je vais peut-être aller tout
à l'heure dans quelques sections de votre mémoire, mais avant je voudrais vous poser une question peut-être un peu
plus générale. Les gens des corps policiers, puis là à la fois les
directeurs de police comme les associations qui représentent les policiers,
donc les syndicats de policiers — puis il n'y a aucune exception à ça,
là — ils sont
tous venus nous dire que ça rendrait leur travail beaucoup plus efficace et beaucoup plus sécuritaire en
matière de prévention, que ça soit la prévention de la violence conjugale,
que ça soit la prévention du suicide, que ça
soit des interventions qu'ils doivent faire sur appel dans les domiciles. Ils
nous ont tous dit que l'inexistence
d'un fichier d'immatriculation était une lacune à notre dispositif de sécurité.
On a déjà eu un tel fichier
d'immatriculation. Ils nous ont tous dit que c'était plus difficile de faire le
travail depuis qu'ils ne l'avaient pas. Ils sont tous en faveur.
Ma
première question, c'est : Est-ce que vous pensez que ces gens-là se
trompent royalement, qu'ils nous disent ça sans fondement?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme Mc Nicoll (Jessie) :
Je ne suis pas en mesure de parler du point de vue des policiers parce que je
ne connais pas suffisamment bien leur travail. C'est possible qu'ils le
perçoivent comme un avantage.
Maintenant,
ce que je trouve, c'est que, pour 17 millions, il faudrait que l'avantage
soit substantiel. Parce que, sur le
terrain, ce qu'on constate, c'est qu'il y a des besoins criants et que les
problèmes ne viennent pas des armes à feu, mais ils viennent des besoins criants des personnes qui sont en
détresse, puis qu'au lieu d'avoir de l'aide ils sont sur des listes
d'attente.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, je pense que, d'abord, le 17 millions,
effectivement, c'est un chiffre qui a été avancé pour le coût de la mise en place, mais pas les coûts
d'opération pour la suite des choses. Les coûts d'opération pour la suite
des choses sont beaucoup plus modestes que
ça. D'ailleurs, c'est un engagement qu'on prend de faire les choses à un niveau
de coût qui soit très faible parce qu'on
pense que c'est important aussi de contrôler les coûts. En tout cas, moi, j'en
suis. Je suis de ceux qui ont cette
préoccupation-là puis je l'ai certainement dans le cas de la mise en place d'un
fichier d'immatriculation. Donc, moi,
je ne pense pas que c'est un coût exagéré pour mettre en place un dispositif
qu'on a perdu, là, avec l'abandon du
registre fédéral, un dispositif qui est demandé par les gens de la Santé
publique, par les corps policiers, par une série d'intervenants.
Donc,
j'essaie de comprendre. Parce que, si on minimise le coût, finalement,
qu'est-ce qui vous indispose tant dans
la possibilité qu'on mette en place un fichier d'immatriculation? Si on était
capables de le faire à 15 millions, ou à 10 millions, ou à 8 millions, est-ce que vous continueriez
d'être aussi opposés? Est-ce qu'il y a un seuil de coût à partir duquel vous allez dire : Bien, on est
d'accord ou vraiment vous avez une opposition qui est beaucoup plus ancrée dans
autre chose que le seul coût?
Mme Mc Nicoll
(Jessie) : ...
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme Mc Nicoll
(Jessie) : Excusez, je suis trop vite, hein, je pense.
Le Président (M.
Ouellette) : Non, non, c'est beau.
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : En fait, vous avez un bon point, dans ce sens que
l'argent est un irritant, mais ce n'est pas le seul. Nous, ce qu'on craint,
c'est que... De notre point de vue — et puis j'ai quand même beaucoup fouillé
le dossier, là — on
n'a pas trouvé de preuve de l'efficacité de ce registre-là. Alors, nous autres,
on est extrêmement suspicieux sur les
motivations d'implanter ce registre-là, d'une part. Et puis ce que nos membres
craignent énormément, c'est des
saisies arbitraires. Et puis c'est au point que les gens craignent de demander
de l'aide en période difficile, de crainte que leurs armes soient
saisies. C'est à ce point-là.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Oui. Bien là, vous m'y amenez, justement, parce que je voulais vous entendre
là-dessus, parce qu'il y a un passage de
votre mémoire, justement, qui parle exactement de ça, là, cette crainte-là. Je
lis tel quel, là, c'est écrit à la
page 21 : «Or, lorsqu'un propriétaire d'arme à feu — ou un de ses proches — traverse une période difficile, ils sont les seuls à craindre d'être privés de leur
passion, comme quelqu'un au bord du précipice qu'on pousserait vers le gouffre. Nous sommes les premiers intervenants. Un
réseautage informel s'est créé afin de sortir les armes des maisons où
ça ne va pas afin de minimiser les risques de dérapage.»
Dans
le fond, vous me dites que vous avez mis en place un mécanisme parallèle aux
forces de sécurité publique pour intervenir puis saisir les armes?
Est-ce que c'est ça que je comprends? Vous avez comme une espèce de milice parallèle aux services policiers dûment constitués
et autorisés dans notre société pour faire le travail des policiers à leur
place? Est-ce que c'est ce que je dois comprendre de ce paragraphe-là?
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : Votre question est très bonne. Je pensais que mon
point était clair, mais je constate qu'il
ne l'était pas. Non, ce n'est vraiment pas une milice. En fait,
essentiellement, ça se passe au club de tir. Comme je vous disais, c'est beaucoup plus un club social
qu'autre chose, donc on sait forcément ce qui se passe dans la vie des gens.
Puis, quand on sait que quelqu'un est
en période difficile, soit en situation conflictuelle, en période de rupture,
dépression, peu importe, bien, c'est
qu'on va offrir aux gens de prendre leurs armes chez nous. Et puis ça se fait
sur une base volontaire, mais il y a
comme un genre de culture de pression des pairs qui fait que ce serait très mal
vu que quelqu'un refuse d'entreposer ses armes ailleurs quand ça ne va
pas bien.
M.
Coiteux : D'accord. Bon, admettons, que, dans les clubs où vous êtes
impliqués, les membres de ces clubs acceptent volontairement de se
départir des armes lorsqu'ils passent des moments difficiles de leur vie et que
ça fonctionne dans le cas de clubs précis,
là, dans lesquels vous êtes impliqués, mais est-ce que vous pouvez intervenir
dans tous les autres cas ou c'est plutôt la police qui a ce travail-là à
faire?
Mme Mc Nicoll (Jessie) :
Bien, en fait, c'est que ce n'est pas un travail, c'est vraiment une culture.
Et puis vous laissez entendre que
c'est dans certains clubs, là, mais je vous dirais qu'on a des membres partout
au Québec. Puis j'ai vérifié assez largement,
voir si c'était une culture qui était répandue, puis on m'a confirmé que
c'était comme ça que ça se passait.
Alors, s'il y a un club où ça ne se passe pas comme ça, j'aimerais le savoir,
là. Mais c'est vraiment dans un soutien. Et puis ce n'est pas que la personne se départisse de ses armes, c'est
vraiment qu'elle les entrepose en dehors de sa maison. Mais le choix de
la personne chez qui elle va entreposer ses armes va être en fonction des
disponibilités qui soient compatibles. Pour
que la personne puisse aller tirer chaque fois qu'elle veut, elle a juste à
passer chez son copain, aller chercher ses armes, elle va au club de tir
puis elle les ramène après.
M. Coiteux :
Donc, que les armes puissent se déplacer d'une résidence à une autre, tout ça,
bon.
Mme Mc Nicoll
(Jessie) : Oui.
M.
Coiteux : Mais, si la police n'est pas au courant, puis qu'elle a à
faire une intervention à un domicile, puis qu'elle ne sait pas que l'arme x qui était à Paul a été donnée à Julie,
qui est à une autre adresse, puis qu'on intervient chez Julie pour une autre raison, il y a eu un appel de
détresse, je ne sais pas, et on ne sait pas qu'il y a des armes, est-ce que
ce n'est pas un problème?
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : Bien, en fait, c'est que, si les armes de Paul
sont entreposées chez Julie, c'est que Julie détient un permis de possession et d'acquisition. Donc, la police peut
déjà savoir qu'il est susceptible d'y avoir des armes à cet endroit-là. C'est certain que ça ne donne
pas l'information précise sur le nombre d'armes, mais elle sait qu'il peut
y avoir des armes à cette adresse-là.
M.
Coiteux : Paul, en détresse, membre d'un club de tir, connaissant
Julie, va s'assurer que Julie, évidemment, a un permis de possession et va dire : Julie, je te confie mes armes
parce que... J'ai l'air d'être un petit peu ironique, puis je ne voudrais pas que vous le pensiez ainsi, là.
C'est juste que ça me semble être comme une méfiance, une très grande méfiance de votre part. Puis j'y arrive dans un
instant, vous me semblez avoir une grande méfiance à l'égard des forces de l'ordre, là, vous pensez que les services
policiers ne sont pas fiables. C'est un petit peu ça que vous dites, puis vous
dites : On va faire le travail à leur place, on va faire un travail qui
est, normalement, celui de la police.
C'est
ça qui m'intrigue beaucoup dans votre mémoire, c'est cette vision-là. Parce
que, si on devait l'appliquer à toutes sortes de choses, là, honnêtement,
dans une société organisée, si tout le monde fait le travail de la police puis qu'il n'y a plus de police, bien, ça fait partie
de la définition de l'anarchie, là, honnêtement, là. Donc, c'est ça qui
m'inquiète un petit peu dans votre
position, puis c'est pour ça que j'insiste tant avec mes questions sur est-ce
que ce n'est qu'une question de coût.
Finalement, ce que vous me dites : Non, c'est une question de philosophie
sociale. C'est très différent. Est-ce que je me trompe?
Le Président (M. Ouellette) : M. Morin, oui. On va revenir à Mme Mc Nicoll.
M. Morin, vous aviez un commentaire depuis tantôt, puis je veux vous
donner la parole.
• (15 h 50) •
M. Morin
(Guy) : Bon, bien, écoutez, juste à titre d'information, j'ai au moins
cinq personnes à qui j'ai, justement, fait
ça, moi. Nous, dans ce temps-là, quand on intervient, ce qu'il faut comprendre,
c'est que, des fois, avant de se rendre à des gens qui fassent des... qu'il y ait
des drames familiaux, des suicides, souvent ça peut partir par une perte
d'emploi, problème familial, problème
d'argent. Tout ce qui se cumule, et cumule, et cumule va peut-être
finir par un suicide ou un drame
familial. Bien, nous, souvent, quand on rencontre des amis, etc., et on voit
que woups! mauvaise période, problèmes
d'argent, problèmes avec la famille, bien, souvent, on leur demande :
Regarde, en attendant, règle tes choses, donne-nous tes armes, on va les mettre en sécurité. Et, quand ça te
tentera de faire ton sport, de faire ton loisir, bien, on va y aller avec toi puis on va tirer avec toi.
Mais, tant et aussi longtemps que tu n'auras pas réglé ça, regarde, on va
rester dans cette situation.
Puis
ce qui arrive, c'est que souvent, quand les policiers vont intervenir, c'est
que souvent il est déjà trop tard, on est déjà rendu à l'extrême, on est déjà
rendu au suicide, on est déjà rendu au drame familial. Ça fait
que nous, présentement, on agit toujours en amont des policiers là-dessus.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Oui, mais ça
n'exclut pas qu'en agissant en amont puis en étant en contact vous puissiez
contacter les forces policières lorsque le besoin se fait sentir d'une
saisie préventive des armes parce que c'est leur rôle, là, les forces policières, ce n'est pas le rôle de la
société civile que de faire ça à la bonne franquette, là, à sa propre manière.
C'est pour ça qu'il y a
des corps policiers, c'est pour qu'en quelque part l'ordre soit assumé par une
force qui est neutre et qui répond à des lois et à des règles.
La raison pour
laquelle j'insiste tant là-dessus, puis je pousse un petit peu plus loin dans
la question de la philosophie, je pense
que vous confirmez par vos réponses que ce n'est pas le coût. Vous préférez que
ce ne soit pas trop cher, c'est
parfait puis c'est bien, je suis pareil, j'ai la même disposition que vous par rapport au coût, mais vous me dites : Finalement, ce n'est pas une question
de coût, c'est une question de philosophie.
Regardez, il y a un autre passage de votre
mémoire, toujours à la page 21, qui a attiré mon attention, vous dites — puis
c'est ça, là, c'est comme une espèce de méfiance à l'égard des forces de l'ordre, de l'État, hein, en général, du rôle d'un État
organisé, là — vous dites :
«En raison de la méfiance quant aux intentions du gouvernement, plusieurs
de nos membres ont affirmé qu'ils
n'enregistreront pas la majorité de leurs armes.» Donc, ils vont être illégaux,
ils vont se rebeller contre les lois.
«Les collectionneurs qui possèdent une centaine d'armes se retrouveraient
littéralement dépossédés de leurs biens dans le cas où un gouvernement
ultérieur — ce
dont nous avons l'absolue certitude et ce sur quoi le ministre Coiteux n'a
aucun pouvoir, quoi qu'il en dise — utiliserait l'immatriculation
comme bras de taxation. Nous y voyons un risque que nos membres se retrouvent
en position de rupture face aux autorités.»
Et
donc vous nous dites : Nous, on se méfie tellement, dans le fond, de
l'État, hein, qui organise la vie sociale puis qui a des lois, puis tout le monde doit respecter les lois... Mais
on vit en démocratie, Dieu soit loué! Donc, ce n'est pas un État avec des pouvoirs absolus, là. Si un
État commet des choses illégales, il y a des cours pour s'occuper de ces
questions-là. Mais vous dites : Non,
non, non, nous, on n'a tellement pas confiance là-dedans qu'on veut s'organiser
tout seuls. On ne fait tellement pas
confiance en l'État qu'on pense qu'il n'appliquera même pas sa propre loi, et
donc on va appliquer les lois, puis
même on va se rebeller contre les lois que va voter l'Assemblée nationale. Je
trouve que c'est une position... En
tout respect, là, je vous le dis, je respecte que vous ayez des idées
différentes des miennes là-dessus. Mais, en tout respect, je trouve que ça fait un peu anarchiste comme position,
puis nous, ici, on est plus dans le domaine des lois qui encadrent la
vie en société dans une société démocratique.
Alors,
je suis un petit peu surpris par l'insistance sur les coûts parce que, quand on
creuse le mémoire, on voit bien que
c'est plus une philosophie politique qui vous anime plus qu'une question de
contrôle de coûts. Est-ce que je me...
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : M. Coiteux, j'ai déjà assisté à une
conférence que vous avez donnée dans le cadre du Réseau Liberté-Québec,
vous parliez de l'État tentaculaire et de la responsabilité individuelle, et ce
que je déplore... Peut-être que mes mots
étaient maladroits, mais ce qu'on déplore, c'est essentiellement la même chose,
c'est qu'actuellement on s'est
responsabilisés par rapport à nos armes à feu, par rapport à notre groupe et on
craint que la loi serve ultérieurement d'outil de taxation.
Et
puis, pour répondre à votre interrogation de tantôt, vous disiez qu'on se
substituait à la police, alors que ce n'est vraiment pas le cas. Je vous
dirais que, nous autres, le niveau où on intervient, c'est le niveau où on sait
que c'est conflictuel. On n'attend pas que
la personne soit désespérée, là, dès qu'il y a des signes de peut-être que, on
intervient. Dans le cas où on verrait qu'une personne a un comportement
erratique — exemple,
la personne sent la boisson au club de tir,
un comportement violent, des propos désorganisés — c'est sûr et certain qu'on le signalerait à la
police. Et on ne se substituerait pas à la police parce qu'un membre qui
agirait comme ça, il contreviendrait à toutes les règles de fonctionnement du
groupe.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme Mc Nicoll. M. le député de Verchères.
M.
Bergeron : Merci, M. le Président. Merci, M. Morin, Mme Mc Nicoll, d'être des
nôtres aujourd'hui. Votre témoignage
nous importe beaucoup parce
que vous représentez un point de vue dans notre société qui mérite d'être entendu.
M.
Morin, je ne vous tiens pas rigueur des propos peu élogieux que vous avez tenus
à mon égard suite à la visite que
j'ai faite pour le 40e anniversaire du club chasse et pêche de Contrecoeur sur Twitter. Sachez que je ne vous en veux pas outre mesure de ces propos.
Quant
à Mme Mc Nicoll, je dois dire que j'apprécie beaucoup le ton posé,
équilibré de vos interventions. Je vous ai entendue, notamment ce matin, sur les ondes de Radio-Canada et je dois dire que c'était un plaidoyer raisonnable de la
position que vous défendez. Je me permets simplement de faire une petite mise
au point. Lorsque vous avez corrigé l'animateur
de l'émission en disant que l'étude à laquelle vous faisiez référence, tous les
deux, ne faisait pas référence au
fait qu'il y a cinq fois plus de risques de se suicider dans une maison où il y a
une arme à feu, ça ne s'applique pas qu'aux suicides par arme à feu. L'étude est très claire, ça parle du fait que
les risques sont quintuplés lorsqu'il y a présence dans le domicile d'une arme à feu. Et les spécialistes
nous disaient qu'il y a probablement un gain en termes de responsabilisation
quant à la mise en application des dispositions fédérales quant à
l'entreposage, et ainsi de suite, dû au fait que chaque propriétaire est
conscient que l'État peut faire un lien entre l'arme et le propriétaire.
Cela
dit, j'ai beaucoup apprécié un certain nombre d'éléments dans votre
mémoire et je dois dire que vous mettez le doigt, quant à moi, sur une problématique réelle. Moi, je suis de
ceux qui pensent qu'on est capables de mâcher de la gomme et de marcher en même temps, c'est-à-dire qu'on est capables de mettre en place le registre puis on est capables
de mettre en place les ressources pour
soutenir les organismes, par exemple, qui luttent contre le suicide, et ainsi de
suite. La difficulté, c'est qu'on se
retrouve dans une position ou une situation budgétaire qui fait en sorte que,
loin d'ajouter des ressources, on en enlève par les temps qui courent.
Or,
je pense qu'on a été convaincus du fait qu'il y a
des avantages économiques à la mise
en place d'un registre ou d'un fichier
d'immatriculation. Peut-être, devrions-nous avoir une certaine assurance quant
au fait que ces économies — appelons-les comme ça — puissent éventuellement être réinvesties,
justement pour répondre à votre voeu, être réinvesties dans les
organismes qui viennent en aide, entre autres, aux personnes suicidaires et
autres. Alors, que pensez-vous de cette idée?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Je suis très sceptique quant à vos économies. Si
c'était possible, ce serait très intéressant, mais je n'y crois vraiment pas. Quand on regarde au niveau du registre
fédéral, quand il était en vigueur, le nombre de policiers tués en service a augmenté après
l'implantation du registre, et puis les taux de résolution de tous les crimes
ont augmenté, sauf pour les crimes par armes à feu, qui ont décliné
pendant la période d'application du registre. Alors, peut-être qu'il y a des cas où ça aide, mais disons que, dans ce que
j'ai trouvé, je n'ai trouvé aucune documentation qui démontrait une
efficacité à un registre ni même un cas où le registre avait permis
d'identifier l'auteur d'un homicide. Alors, je pense qu'il faut miser sur les
valeurs sûres.
• (16 heures) •
M.
Bergeron : Bien, puisque vous parlez de statistiques, il me semble que
les statistiques indiquent également qu'il
y a eu, pendant la période durant laquelle le registre a été mis en opération,
une diminution du nombre d'homicides au
moyen d'une arme à feu, du nombre de blessés au moyen d'une arme à feu, du
nombre de crimes commis au moyen d'une
arme à feu, du nombre de suicides commis au moyen d'une arme à feu. Ça
m'apparaît, effectivement, corroborer l'idée
qu'il y aurait éventuellement des économies par la mise en place de... Parce
qu'il y a des coûts associés à un
crime, à un suicide, à un meurtre,
ainsi de suite, il y a des coûts importants. Puis les policiers
sont venus nous dire que le fait qu'ils
n'aient pas accès aux fichiers leur complique considérablement la vie et fait
en sorte qu'ils doivent déployer des trésors
d'ingéniosité pour parvenir aux mêmes résultats que ceux auxquels ils
parvenaient quand ils avaient le registre. Ça aussi, ça implique des
coûts. N'êtes-vous pas d'accord avec ça?
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Bien,
certainement, que ça implique des coûts. Mais le problème, c'est que tout ce
que vous me décrivez de décès par
armes à feu a décliné dans la continuité de la tendance qui était déjà en
place. Pour attribuer une efficacité
à ce mécanisme-là, il aurait fallu trouver un changement de tendance qui soit
significatif. Or, les études qui sont bien faites ne trouvent pas de
corrélation significative.
Le
Président (M. Ouellette) : M. le député de Bonaventure, je veux juste informer les collègues
et les gens qu'on reçoit aujourd'hui que ça pourrait arriver qu'on soit obligés de traverser au salon bleu
pour le vote sur le budget. Ce n'est pas qu'on ne vous aime pas, quand les cloches vont sonner, ça veut dire
que la récréation est finie, il va falloir traverser l'autre côté, puis
on va revenir vous voir. M. le député de Bonaventure, trois minutes.
M. Roy : Merci, M. le Président. Bonjour. Écoutez,
nous sommes extrêmement conscients des enjeux et critiques venant d'une partie de la population. En tant que porte-parole de la faune,
j'entends beaucoup les propriétaires d'armes et les chasseurs. Ceci étant dit, vous nous proposez, au cas où, des
amendements au projet de loi. J'aimerais vous entendre là-dessus. Je
l'ai lu, mais j'aimerais vous entendre parler pour l'expliquer, ce que vous
entendez par faire un registre volontaire et négocié, créer un droit de
réseautage puis être capable d'enregistrer à d'autres adresses. Pouvez-vous
argumenter là-dessus?
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Mc Nicoll, deux minutes.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : En fait, le droit de réseautage puis de pouvoir
enregistrer à d'autres adresses, c'est ce que je vous ai décrit, de
permettre de pouvoir continuer de faire ce qu'on fait sans que les autorités
soient alertées du changement d'adresse. Et
puis, pour l'autre point, là, c'est qu'il y a des cas où des armes sont
reclassifiées, et puis ça, c'est un des
points qui créent beaucoup de méfiance chez les propriétaires d'armes à feu. Tu
sais, on fait des parallèles avec l'immatriculation des autos, mais on
n'a jamais vu une auto être saisie pour ses qualités intrinsèques sans que le propriétaire ait commis de faute, alors que, pour
les armes à feu, c'est toujours une menace qui plane que nos armes soient
reclassifiées et saisies sans compensation.
Alors,
aujourd'hui, mettons, une arme qui est reclassifiée prohibée, moi, je suis
obligée d'aller la porter pour qu'elle soit
détruite puis je ne peux même pas aller chercher ma classe requise pour
conserver l'arme que j'ai acquise légalement, sur laquelle j'ai payé des taxes et pour laquelle je n'ai commis aucune
faute. Alors, si le fait d'enregistrer une arme nous donnait une protection, qu'on puisse accéder à la
classe appropriée dans le cas où il y a une reclassification, c'est que, là,
les propriétaires de certains types d'armes
qui sont plus contestés, disons-le comme ça, seraient intéressés à enregistrer
leurs armes parce qu'il y a un bénéfice qui viendrait en retour.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Bonaventure, 30 secondes.
M. Roy :
C'est un genre de droit acquis sur des armes qui deviendraient prohibées, mais
ça ne touche pas l'ensemble des armes
de chasse. Parce que, théoriquement, bon, une arme de chasse, on n'a pas plus
de quatre ou cinq balles, je ne me souviens
pas, là, quatre balles, je pense, etc. Si vous me parlez de quelque chose qui a
un chargeur de 50 balles, là, c'est autre chose, là. Mais
donnez-moi donc un exemple là-dessus, là.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Mais un exemple, il y a eu la CZ qui a fait beaucoup
parler au cours des dernières années, la
CZ-858 Swiss Arms. Elle avait été reclassifiée par la GRC, et puis les gens qui
en possédaient devaient rendre leurs armes
pour être détruites sans aucune compensation. Et puis, ça, ça a créé un état de
choc, un peu, dans la communauté des
propriétaires d'armes à feu parce qu'on ne reprochait rien aux propriétaires,
mais on reprochait quelque chose à l'arme, on la reclassifiait sans que
la personne puisse, d'aucune façon, se qualifier pour conserver son arme.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Bonaventure. On commence, M. le député de Beauce-Nord,
mais je vous indique qu'on va vous couper...
M.
Spénard :
Est-ce que ça sonne? Non?
Le Président (M. Ouellette) : C'est
à veille de sonner, je sens ça.
M.
Spénard :
O.K. Bien, d'entrée de jeu, je veux réagir un peu aux propos du ministre — bienvenue, M. Morin, Mme Mc Nicoll — mais qui disait que, dans le fond, vous
jouez le rôle de la police, vous saisissez... Je pense, M. le ministre, il ne faut pas le voir comme ça. On prend bien les
clés de notre chum qui est chaud pour l'empêcher de conduire, puis on ne saisit pas son véhicule, là, tu sais, c'est
à peu près ce genre d'interférence là qu'il peut y avoir quand qu'on parle d'une
entraide communautaire. Quand ton
chum est chaud à côté de toi, puis il a ses clés, tu dis : Regarde, là, donne-moi
tes clés, là, on se reverra demain
matin, puis on verra ce qu'on fait avec ça, là. Alors, je pense, tu sais, que
c'est faux de dire qu'il se substitue
à la police pour saisir des armes. Je pense que ce n'est pas un fait qui est
prouvé hors de tout doute.
L'autre
chose, moi, j'ai bien aimé votre rapport parce qu'il situait, évidemment, très
bien... Parce qu'on a entendu toutes
sortes de statistiques, et les statistiques, si ça peut sauver une vie, il y a
même... Et moi, je reviens à vous poser...
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Beauce-Nord...
M.
Spénard : Pardon?
Le Président (M. Ouellette) :
...gardez vos...
M.
Spénard : ...du
temps quand qu'on va revenir?
Le
Président (M. Ouellette) :
Oui. Bien, il va vous rester 4 min 30 s, M. le député de
Beauce-Nord, quand on va revenir.
Bon,
M. Morin et Mme Mc Nicoll, ne bougez pas, on va aller faire
notre devoir de parlementaires, on va aller voter sur le budget pour que
les crédits puissent être appliqués et on va revenir vous voir dans quelques
secondes.
On suspend.
(Suspension de la séance à 16 h 6)
(Reprise à 16 h 52)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Et on s'excuse du délai. Je pensais que ça
prendrait une couple de minutes, mais, finalement, il y avait 16 votes
sur le budget et... M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors,
pour continuer, j'ai eu des statistiques, et vous n'en parlez pas dans votre mémoire, mais je ne sais pas
si... J'ai eu des statistiques sur les saisies préventives effectuées par la Sûreté du
Québec ou un corps policier, là. Il
me semble que c'était 1 140 — qu'on
m'a dit la semaine dernière — saisies
préventives l'an passé. Sur les
1 140 saisies préventives l'an passé par la Sûreté du Québec, je n'ai pas
entendu parler d'un seul cas où des armes avaient été laissées sur place
ou un seul cas où qu'il y aurait eu des accidents après ces saisies
préventives. Pourtant, l'an dernier, il n'y
avait pas de registre pour effectuer ces saisies préventives là. Alors, comment
pensez-vous que la Sûreté du Québec s'est organisée, vous, Mme Mc Nicoll
ou M. Morin, pour saisir ces armes-là?
Le
Président (M. Ouellette) : Mme Mc Nicoll, je ne sais pas si vous êtes capable de répondre pour la Sûreté du Québec.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Bien, je
serais portée à croire spontanément qu'ils procèdent de la même façon qu'ils procèdent
pour saisir la drogue qui n'est pas enregistrée.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : C'est une
bonne réponse. C'est court, moi, je pensais qu'on partait...
L'autre
chose, j'ai remarqué, à la page 18 — et
ça, ça a été cité souvent, et l'Institut national de la santé publique du Québec l'a cité ici aussi — que,
souvent, on se dit que le registre des armes à feu a sauvé la vie d'au moins
300 Canadiens par année, dont 50
homicides. Et ça, c'était un mémoire de maîtrise d'une étudiante que le monde cite, et
ça, vous défaisez ça. Pouvez-vous m'en parler brièvement, de ça?
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Oui. Bien
là, je n'ai pas mes notes devant moi, alors j'ai peur que ça soit moins précis,
là. Moi, ça ne me dérange pas du tout que ce
soit une étudiante en maîtrise parce que je pense que ce n'est pas le titre qui
fait la qualité du travail. Par contre, là où ça me préoccupe, c'est qu'elle
arrive à la conclusion que les 300 décès en moins
sont attribuables au resserrement de la loi dont faisait partie le registre. Et
puis elle prend quand même la peine de
mentionner qu'étant donné l'année des données avec lesquelles elle
travaillait elle ne pouvait pas déterminer si le registre avait eu un
impact.
Le
Président (M. Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : O.K. Et
vous mentionnez aussi un peu plus loin — et
ça, ça m'a surpris — que
le taux global de suicide par 100 000 habitants était de 12,9 % au
Canada, alors qu'il est de 11,5 % aux États-Unis. Donc, le taux de suicide
est plus faible aux États-Unis qu'au Canada, alors qu'il y a, toutes
proportions gardées, quatre fois plus d'armes par 100 000 habitants aux États-Unis qu'au Canada. Donc, si je vous
comprends bien, il n'y a pas de relation directe à établir entre le
suicide et les armes à feu.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme Mc Nicoll
(Jessie) : Bien, il y a plusieurs indicateurs qui suggèrent que la
relation est beaucoup moins directe que ce
qu'on croirait au premier abord. Premièrement, la présence d'une arme à feu
dans un domicile ou l'accès à une
arme à feu augmente le risque que la personne choisisse l'arme à feu quand il y
a un dessein terrible, que ce soit suicide
ou homicide. Par contre, dans les cas de suicide, ce qu'on remarque, c'est que
l'utilisation d'une arme à feu, ou de
la pendaison, ou de l'intoxication au monoxyde de carbone, qui sont des moyens
extrêmement efficaces pour se suicider, quand les gens utilisent ces moyens-là dans une première tentative, on
peut pratiquement déjà savoir que, même s'ils ratent leur coup la première fois, ils vont recommencer
et ils vont finir par réussir. La force de la méthode utilisée indique le
niveau de détresse et le niveau de décision d'en finir, d'une part.
Et
puis, d'autre part, c'est que, si la personne n'a pas accès à une arme à feu,
on le sait, au Canada, au Québec, c'est
beaucoup plus courant de se suicider par pendaison que par arme à feu.
Pourtant, on peut trouver des objets pour se pendre partout, et puis, tu sais... Bon. Donc, les moyens très
efficaces, on dit que c'est un petit peu moins efficace que les armes à feu, mais de pas beaucoup. Je n'ai pas
trouvé de chiffres très précis, là, mais, essentiellement, ce n'est pas
convaincant.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme Mc Nicoll. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonjour. Merci d'être là. Deux
minutes, vous allez voir, c'est très court. J'aurais deux questions. Je commencerais par une première question,
c'est... Ce que j'ai compris de votre intervention et de beaucoup des interventions qui sont venues
nous dire que, dans le fond, le registre, ça ne valait pas la peine, plusieurs
sont venus défendre ici que, dans le fond,
c'est déjà inscrit dans la loi comme quoi les vendeurs doivent vérifier le
permis, alors que, quand on lit le
texte, ce n'est pas ça qui est écrit. Mais, ceci étant dit, vous en êtes
convaincus, vous en faites la défense
sur votre site Internet, dans votre Facebook, etc. Si, donc, on retrouve dans
le projet de loi qui est là quelque chose qui dit que l'inscription est
obligatoire, vous n'aurez pas de problème avec ça, puisque vous croyez déjà...
pas l'inscription, pardon, la
validation du permis est obligatoire, puisque vous avez déjà cette conviction
que c'est là. Donc, si c'est écrit noir sur blanc, est-ce que je peux en
déduire que vous n'auriez pas de problème avec ça?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : Juste
pour être sûre que j'ai bien compris votre question, moi, j'ai l'intime
conviction qu'il faut demander à voir le permis de possession,
d'acquisition avant de voir une arme. Donc, si c'est inscrit dans la loi qu'il
faut demander le permis et vérifier que la date d'expiration n'est pas
expirée, je n'ai absolument aucun problème avec ça.
Mme
Massé : O.K. L'autre élément, on est allés visiter beaucoup votre Facebook,
et tout ça, et ce qu'on sent, c'est
que plusieurs de vos membres, mais porte-parole, dont M. Morin, M. Colgan, M.
Mira aussi... Mira, je le prononce mal,
son nom, Mara, pardon, lancent souvent des appels à... Si les femmes agressées
avaient été armées, elles s'en seraient sorties. Si cette femme-là avait une arme, elle pourrait dormir en paix.
Est-ce que ce n'est pas faire de la promotion des armes pour se
défendre, ça?
Le Président (M.
Ouellette) : Dernière intervention, Mme Mc Nicoll.
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : Bien, en réalité, certains de nos membres sont
des proarmes, comme vous le décrivez, mais
c'est une infime minorité de nos membres. La plupart de nos membres, c'est des
chasseurs, c'est des propriétaires d'armes à feu, c'est des gens comme
vous avez devant vous.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée d'Arthabaska.
• (17 heures) •
Mme
Roy (Arthabaska) : On a souvent fait le lien ici... puis je
veux vous entendre là-dessus parce que vous en parlez dans votre mémoire, qu'il y a un lien de cause à effet, que,
lorsqu'on immatriculerait une arme, on prendrait conscience que cette arme-là est dangereuse, puis le fait que le
registre — fédéral,
j'entends — a été
aboli, on envoie le message que les armes ne sont pas dangereuses.
Qu'est-ce que vous pensez de ces deux assertions-là?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Mc Nicoll.
Mme
Mc Nicoll (Jessie) : Bien, essentiellement, c'est que c'est à peu près
insultant. Les gens qui ne sont pas déjà conscientisés à ce propos-là ne
le seront pas plus par l'enregistrement.
Mme Roy (Arthabaska) : Bien,
vous en faites la promotion, vous, du maniement sécuritaire d'armes à feu?
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Bien, absolument. Absolument, on ne veut pas
d'accidents, on ne veut pas de suicides, on ne veut pas d'homicides, on n'en veut pas. C'est pour ça, d'ailleurs,
qu'on insiste sur le manque de ressources pour les personnes en
détresse.
Mme Roy
(Arthabaska) : Et puis votre principal argument, mis à part les
coûts, là, les coûts qui pourraient être mieux investis, c'est surtout le fait que, si une arme est immatriculée
à une adresse x, on ne peut plus la déménager à une autre adresse y. Mais, si c'était possible de le
faire, est-ce que vous maintiendriez la même objection contre le régime?
Mme Mc Nicoll (Jessie) : Si c'était
possible de le faire, oui, je serais contre parce que c'est une tracasserie
supplémentaire et que je ne vois pas l'utilité.
Mme Roy
(Arthabaska) : Maintenant, il y a un autre point de vue qui est
arrivé souvent, c'est la prévention du suicide
ou des drames conjugaux. Et, s'il n'y a personne qui lève le drapeau pour
dire : Il y a un problème ici, dans cette maison-là, de violence
conjugale, ou une personne dépressive, on ne peut pas intervenir. Mais, à
partir du moment où quelqu'un demande de
l'aide, il y a toujours moyen d'intervenir pour retirer les armes à feu si...
Quand une personne a un permis de possession et d'acquisition, on peut
présumer qu'elle a une arme à feu.
Mme Mc
Nicoll (Jessie) : Effectivement. Puis nous autres, de ce qu'on
constate de nos pratiques informelles, comme
je vous décrivais, c'est qu'en général les gens sont d'accord pour remettre
leurs armes. Peut-être pas à des policiers, mais...
Mme Roy (Arthabaska) : Oui.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Mme Mc Nicoll. Merci de votre patience,
Mme Jessie Mc Nicoll, M. Guy Morin,
représentant Tous contre un registre québécois des armes à feu.
On va
suspendre quelques minutes. Je demanderais à
Mme Véronique de Sève et Mme Anne Pineau, représentant
la Confédération des syndicats nationaux, de s'avancer.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 4)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la Confédération des syndicats
nationaux. Mme Véronique de Sève et Mme Anne Pineau,
je vous laisse la parole.
Confédération des
syndicats nationaux (CSN)
Mme de
Sève (Véronique) : Bonjour.
Merci à la commission de nous recevoir... en fait, pour l'invitation. Je pense qu'on
est la seule organisation syndicale
à prendre la parole à cette commission, donc on est très honorées de cette invitation-là. Eh bien, on va vous
faire la présentation de notre court mémoire, mais je pense que tout est dit en
peu de mots.
Donc, depuis
des années, la CSN se prononce en faveur d'un contrôle serré des armes à feu.
Nous avons soutenu l'adoption de la
loi fédérale sur les armes à feu, loi adoptée dans la foulée du drame de
Polytechnique de Montréal, et, chaque
année, la CSN participe aux cérémonies de commémoration de la tuerie de 1989 et
invite ses membres à porter le ruban blanc.
Nous avons,
par ailleurs, combattu le projet de loi du gouvernement Harper abolissant le régime
des armes à feu et soutenu la
création d'un régime québécois. C'est donc avec joie que nous accueillons le projet de loi n° 64.
Nous saluons de même l'engagement ferme du ministre de la
Sécurité publique d'en assurer
l'adoption. Nous croyons toutefois que le projet de loi devrait être modifié
pour assurer la vérification obligatoire du permis de possession d'armes lors
d'une transaction.
Le contrôle
des armes à feu nous interpelle à plus d'un titre. Il permet de réduire la
violence conjugale et les suicides, il
améliore la santé et sécurité au travail et il constitue un élément important
de sécurité publique. Les contrôles en
matière d'armes à feu mis en place
par le gouvernement fédéral à compter de 1971, et particulièrement la Loi sur
les armes à feu de 1995, ont, selon
plusieurs études, permis de réduire le nombre de décès par armes. D'ailleurs,
l'Institut national de santé publique
du Québec estime que ces mesures sont associées à une diminution moyenne de
50 homicides et de 250 suicides par armes à feu chaque année
au Canada.
Par ailleurs,
l'enregistrement des armes sans restriction rend possible la saisie des armes
en cas de danger pour le conjoint,
comme le prévoit la Politique d'intervention en matière de violence
conjugale : prévenir, dépister, contrer la violence conjugale. Toujours selon l'INSPQ, les statistiques révèlent
que les femmes constituent la majorité des victimes de violence conjugale. À titre d'exemple, les
13 victimes des homicides conjugaux survenus en 2013 étaient des femmes.
Cette même année, 26 des 30 victimes de
tentative de meurtre en contexte conjugal étaient aussi, encore, des femmes.
La CSN lutte au quotidien pour le droit à
l'égalité entre les sexes. Le contrôle des armes à feu est un moyen essentiel
de limiter la violence conjugale et
sexuelle et d'offrir un environnement plus sécuritaire pour les femmes, les
enfants et pour la société en général.
Le contrôle
des armes à feu constitue aussi un élément important de prévention en matière
de suicide, qu'il s'agisse de mesures
d'entreposage sécuritaire des armes ou la possibilité de retirer préventivement
les armes détenues par des personnes à risque. Au Canada, les fusils de
chasse sont responsables d'environ 85 % des suicides.
Le contrôle
des armes à feu soulève aussi un enjeu de sécurité au travail qui est très
important pour une organisation syndicale,
notamment pour les policiers, les ambulanciers ou les autres personnes
d'urgence et d'intervenants en situation de crise. Il garantit aussi des
milieux de travail et institutionnels plus sécuritaires en limitant le risque
d'agressions armées.
Le projet de
loi n° 64 rend obligatoire l'immatriculation de toute arme à feu sans
restriction présente au Québec. Un
numéro unique serait attribué à l'arme. En rétablissant un régime d'armes à
feu, le projet de loi québécois corrige en partie les modifications irresponsables apportées par le gouvernement
Harper à la Loi sur les armes à feu. Rappelons, en effet, qu'au-delà de
l'abolition du registre le gouvernement conservateur a aussi rendu facultative
la vérification des permis de possession
d'armes lors d'achats, tout comme il a éliminé l'obligation, pour les
commerçants, de tenir des registres de vente.
Évidemment,
le rétablissement du régime doit être salué haut et fort. La procédure
d'enregistrement est absolument nécessaire,
elle permet d'établir la chaîne de possession d'une arme spécifique et
d'identifier le propriétaire qui aurait cédé ou vendu illégalement une arme à quelqu'un qui ne possédait pas de
permis. Elle permet aux corps policiers de savoir combien d'armes et
quel type d'armes détient un individu en cas d'intervention policière.
L'enregistrement
responsabilise le propriétaire en établissant un lien avec son arme. Cela
favorise le respect de l'entreposage sécuritaire, assure la traçabilité
et limite le trafic d'armes. Cela facilite, entre autres, le retrait préventif d'armes détenues par une personne suicidaire ou
dangereuse, tout comme l'exécution d'ordonnances d'interdiction en cas de retrait de permis. Sans un registre,
comment savoir s'il y a des armes dans la maison ou à qui elles appartiennent?
Le projet de
loi n° 64 rétablit donc un élément fondamental du contrôle des armes à feu
ordinaires. Mais, pour assurer la
pleine efficacité du registre, il convient de restaurer aussi la vérification
obligatoire de l'existence d'un permis valide
de possession d'armes lors d'une transaction. C'est pour cette raison que nous
pensons qu'il est nécessaire que le projet de loi devrait être modifié
pour assurer la vérification obligatoire du permis de possession d'armes lors
d'une transaction.
Certes, la
gestion de la violence dans nos sociétés ne pourrait se résumer qu'à un
contrôle de permis de possession d'armes
et à l'enregistrement de celles-ci, il s'agit là d'un moyen parmi tant
d'autres. La violence est un symptôme de problèmes sociaux sous-jacents : l'inégalité entre les hommes et
les femmes, pauvreté, écart croissant de richesse. Les compressions systématiques imposées par le
gouvernement dans les programmes sociaux, notamment en santé publique,
ont des répercussions au niveau des violences sociales. Les groupes de
prévention du suicide ont subi des baisses de financement,
les ressources d'hébergement pour femmes violentées aussi. Les réductions de budget
affectent les services en santé
mentale, et les délais de traitement des signalements des jeunes en difficulté
s'allongent dangereusement à la suite de compressions imposées aux
centres jeunesse ces dernières années.
S'il convient
donc d'aborder les problématiques de la violence de façon globale, il n'en
demeure pas moins que certaines
mesures élémentaires s'imposent, telles que remplir un certain nombre de
conditions, dont la vérification des antécédents criminels, les références,
la notification au conjoint ou encore le cours de maniement. Ces mesures sont essentielles pour obtenir un permis de possession
d'armes, enregistrer une arme, vérifier si celui auquel on vend ou transfère
une arme est détenteur d'un permis valide, et nous pensons que le projet de loi
actuel répond à ces préoccupations.
• (17 h 10) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme de Sève. M. le ministre.
M.
Coiteux : Merci beaucoup, Mme de Sève. Merci aussi, Mme Pineau, d'être présente aujourd'hui. Donc, merci de nous avoir
présenté un mémoire. Écoutez, je n'aurai pas beaucoup de questions.
Puis ce n'est pas par manque d'intérêt
pour le mémoire que vous nous avez soumis,
c'est parce qu'il y a beaucoup de convergence que j'ai pu constater au cours
des heures que nous avons passées avec les
groupes, là, qui sont venus nous présenter... Et il y a une convergence qui est
assez grande entre votre mémoire et puis ce qui nous a été présenté par les
intervenants dans le domaine de la santé publique,
les intervenantes du côté des centres d'hébergement de femmes dans
toutes les régions du Québec et aussi, je vous dirais, les policiers, qui sont venus avec des arguments, évidemment, plus opérationnels dans certains cas, mais, pour l'ensemble de
la problématique, qui étaient très convergents.
Mais vous
êtes le seul syndicat qui est venu présenter un mémoire, et puis je vous en
remercie. Et ça serait ma question, essentiellement : Bon, comme organisation syndicale qui
représentez vos membres, en quoi le fichier est important pour vos membres, de votre point de vue, là? J'aimerais
juste vous entendre là-dessus.
Mme de
Sève (Véronique) : Bien, si
je peux me permettre, dans un premier temps, on le dit, c'est une question aussi...
lorsqu'on parle de l'égalité entre les hommes et les femmes, bien, on le voit,
hein, les statistiques sont parlantes, ça touche majoritairement des femmes. Donc, une organisation syndicale qui se dit égalitaire, qui travaille à cette égalité-là,
bien, nécessairement va se prononcer sur cette préoccupation-là.
Autre
chose... et peut-être que c'est peut-être une chose qui a moins ressorti dans les mémoires
que vous avez entendus dernièrement, mais, en termes de santé et
sécurité au travail, c'est aussi un élément qui, pour nous, comme organisation syndicale, est important. On l'a dit, évidemment,
on peut parler des policiers, qui sont souvent en ligne de front, les ambulanciers, qu'on représente de façon
très majoritaire, qui, souvent, sont pris avec des gens qui sont en situation de crise, et tout intervenant...
bien, je pense que cette question-là doit être prise en considération.
Autre élément — puis
on l'indique dans notre mémoire — il y a aussi eu des situations en milieu de travail où il est arrivé des... On prend juste Fabrikant, il y a plusieurs
années, bien, c'était une personne qui était en situation de crise, de vulnérabilité, et il s'en est pris à ses
collègues de travail. Donc, dans cette perspective-là, c'est sûr que c'est probablement des cas qui ne sont pas quotidiens, mais c'est des cas qui sont arrivés
quand même. Et, pour nous, cette question-là,
bien, on doit aussi la prendre en
considération. Ça fait que, comme organisation syndicale, on doit le prendre aussi sur cet
angle-là.
Donc, évidemment,
une question plus de société sur nos valeurs qui nous sont propres, à la CSN,
mais aussi une question très pratico-pratique lorsqu'on est dans une organisation syndicale, la question de la santé-sécurité au travail. Et, je vais vous le dire, on s'en va le 28
avril... c'est une journée importante qui s'en vient, de commémorer les personnes
blessées ou mortes en exercice de travail.
Bien, pour nous, ça fait partie aussi d'une préoccupation importante
comme organisation syndicale.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
ministre.
M. Coiteux : Peut-être un commentaire sur la fameuse convergence parce que, dans cette
convergence que j'ai constatée, vous
faites partie des organisations qui nous ont alertés sur le fait qu'il n'y a pas
eu seulement l'abolition en ce qui concerne les armes d'épaule dans les fichiers fédéraux d'immatriculation, mais il y a eu un changement à la loi sur la vérification de la validité des permis d'acquisition et de port d'armes. Et ce n'est
pas dans le projet de loi actuel parce que, bon, il y a une loi fédérale, etc. Ce que je veux dire à tous
les groupes, puis je vais vous le réitérer aussi, on va les étudier soigneusement, on va étudier toutes ces propositions d'amendement très soigneusement, de telle sorte qu'on sera
prêts à discuter avec nos collègues, là, des oppositions, le moment venu de
faire l'étude article par article.
Mais on va
faire cette étude-là avec mes gens au ministère, là, pour s'assurer qu'on puisse, le cas échéant,
bonifier le projet de loi. Donc, bien que cet argument-là ait été présenté... le fait qu'il soit
présenté souvent, ça dénote l'importance
qu'on fasse une étude très sérieuse de cette question-là. Alors, je vous en
remercie beaucoup.
Moi, M. le Président, moi, je n'ai pas d'autre question.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Verchères.
M.
Bergeron : Merci, M. le Président. Je serai bref. Simplement pour
saluer les témoins de la Confédération des syndicats nationaux. Merci, mesdames, d'être des nôtres. Vous apportez,
effectivement, un éclairage qui est un peu original, un peu différent par rapport à ce qu'on a entendu
sur l'importance pour vous de la mise en place de ce fichier dans une
perspective de santé et sécurité au travail. Donc, ça nous amène un éclairage
différent.
Si vous le voulez bien, M. le Président, je
passerais tout de suite la parole à mon collègue de Bonaventure.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Bonaventure, avec beaucoup de plaisir.
M. Roy : Merci, M. le
Président. Bonjour, mesdames. Écoutez, votre conclusion m'interpelle parce
qu'étant sociologue moi-même j'ai déjà fait
la corrélation entre l'augmentation de la violence dans une civilisation puis
son niveau de pauvreté. Et on sait
bien que l'évolution économique, dans nos civilisations, fait en sorte que la
violence a diminué, il y a eu une sécurisation des individus, etc.
Donc, ici, bon, vous argumentez sur les
compressions systématiques que nous vivons actuellement, bon, qu'il y a des compressions dans les programmes
sociaux, en santé publique, des questions que j'ai déjà posées aux gens
de la Santé publique, et ils ne se sont pas
trop avancés sur le dossier. Est-ce que vous pouvez, je ne dirais pas, prédire,
mais est-ce que vous pouvez affirmer,
à partir des lectures ou de ce que vous en savez, que nous allons assister à un
retour des inégalités sociales,
hommes-femmes et que, bon, ce que ça peut amener, c'est, je ne dirais pas, une
augmentation de la violence, mais, à
tout le moins, une certaine expression de celle-ci qui va se ramener dans notre
société, et que le registre est un élément de sécurisation, mais il doit
être aussi accompagné de réinvestissement en santé publique?
Mme de
Sève (Véronique) : C'est exactement ce qu'on indiquait parce que, oui,
un registre, c'est un moyen, hein,
puis on y croit. Mais, en même temps, la question des inégalités, qui amène les
gens d'être en survie, donc qui amène, des
fois, des comportements qui sont un peu, je dirais même, à la limite, des fois,
irrationnels parce que, quand on est en situation de survie, c'est vraiment le «day-to-day»... Puis, comme étant
psychoéducatrice de formation en centre jeunesse, je connais très bien ce dossier-là, bien, je pense
que certaines personnes pourraient arriver à des comportements qui ne
seraient pas ces comportements-là si on avait d'autres choix de société.
Donc, je dis
beaucoup de mots, mais, dans le fond, ce qu'on dit, c'est qu'il faut
nécessairement travailler sur la question
de la pauvreté, sur les inégalités, sur, justement, les services offerts à des
personnes qui sont vulnérables, qui ont
des problématiques. On parle de santé mentale, moi, je travaillais avec des
adolescents. Peut-être pour une anecdote, j'ai aidé une collègue de travail qui
a décroché une jeune qui s'était pendue dans sa chambre au centre jeunesse.
C'est très problématique.
Mais c'est
sûr que ce registre-là, ça va répondre à une préoccupation, ça ne répondra pas
à tout l'ensemble des problématiques qu'on doit adresser, notamment dans
les centres jeunesse. Puis ça, ça serait un autre dossier qu'on pourra discuter
une autre fois, mais, dans le fond, ce qu'on dit, c'est : Oui, un registre
parce que ça va aider puis ça... Puis, en même temps, ça n'aidera pas la planète, là, ce n'est pas un
registre miracle, que, soudainement, il n'y aura plus rien qui va se
passer avec des armes. Je pense qu'il y a aussi d'autres choses à faire, dont
de la prévention.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Bonaventure. 15 secondes.
M.
Roy : Merci pour votre témoignage. Et, si je vous entends bien,
il faut réinvestir en santé publique de manière significative.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Alors, on est un peu
écourtés dans le temps. Tout de suite, moi, je vais vous dire, là, que, lorsqu'on donne de la
désinformation... Vous êtes pratiquement passés maîtres là-dedans, là, moi, à
la page 7 de votre mémoire...
Le Président (M.
Ouellette) : Woups! Woups! M. le député de Beauce-Nord...
M.
Spénard :
Bien, écoutez, là...
Le Président (M.
Ouellette) : ...vous me parlez à moi, s'il vous plaît.
• (17 h 20) •
M.
Spénard : Bien, je vais vous le prouver, M. le
Président : «Au Canada, les fusils de chasse sont responsables d'environ 85 % des suicides...» Je vais vous
dire que les suicides, au Canada, au cours des 10 dernières années,
44 %, c'étaient des pendaisons,
25 %, c'était l'empoisonnement, 16 % étaient par armes à feu. Quand
on cite des statistiques globales
comme ça, j'aurais aimé ça, avoir au moins le souci... que vous disiez que,
dans les suicides par armes à feu, 85 % des suicides le sont avec des
armes de chasse. Mais, quand on lâche des affaires comme ça, je vais vous dire
que ça apporte... De toute façon, c'est faux, vous le voyez, de la
manière que c'est écrit là. Alors, il y a bien des rapports que c'est ça.
Ensuite
de ça, je me demande si vous n'êtes pas, ici, en train de faire... Je ne sais
ce que vous faites au registre d'armes
à feu, mais en train de faire la... Puis, écoutez, je ne veux pas défendre mon
ministre, là, mais vous êtes en train de
faire le procès du gouvernement. C'est tout ou rien dans votre conclusion,
là : La violence est le symptôme des problèmes sociaux sous-jacents : inégalités entre [les
hommes et les femmes], pauvreté, écarts croissants de [la] richesse.» Mais
c'est quoi que le registre vient
faire là-dedans? Expliquez-moi ça, c'est quoi, la relation qu'il y a entre le
registre des armes à feu... Moi, si
vous m'expliquez clairement que le registre des armes à feu va diminuer l'écart
croissant de richesse, va... En tout
cas, moi, je ne le sais pas, là. Puis vous me dites que tous les
sociologues — et mon
confrère de Bonaventure en est un — reconnaissent l'existence
d'une corrélation directe entre l'accroissement des inégalités et l'aggravation
de nombreux problèmes sociaux, violence et criminalité à la hausse, etc.
Comment expliquer que le taux de criminalité, depuis 1980, est en baisse?
Le Président (M. Ouellette) : Merci. Les deux dernières minutes vous
appartiennent, Mme de Sève, M. le député de Beauce-Nord a fait son
commentaire.
Mme
de Sève (Véronique) : Parfait. Vous avez pris une partie de notre
conclusion, je vais en prendre une autre pour peut-être expliquer pourquoi nous sommes là. Dans un premier temps,
on dit : «Certes, la gestion de la violence dans nos sociétés ne saurait se résumer au contrôle du
permis de possession d'armes, à l'enregistrement[...]. Il ne s'agit [...] que
de moyens parmi [tant] d'autres.» C'est pour
ça qu'on est là, parce qu'on pense qu'un registre des armes à feu, comme
il existait au fédéral, est une bonne chose. Et il faut souligner ça, hein?
Pour une fois, on souligne une bonne chose du gouvernement, vous devriez être
content.
Cependant,
un coup qu'on a dit ça, ça ne dispose pas qu'il y a aussi des problématiques,
et il faut s'attarder... et, en ce sens-là, le gouvernement et M. Coiteux, j'ai
déjà eu l'occasion de participer à d'autres commissions parlementaires où ils étaient présents, on a indiqué les éléments
qu'on pense qui pourraient être améliorés, et la question, justement, de
maintenir des sommes importantes pour la
prévention, pour la santé mentale, pour les centres jeunesse, c'est aussi des
choses qui nous préoccupent. On n'est pas du tout en contradiction, bien au
contraire.
Le Président (M.
Ouellette) : Le président est très heureux de votre réponse, Mme de
Sève. Sur ce...
M.
Spénard :
...
Le Président (M. Ouellette) : Le président, dans toute son objectivité, est
très heureux de votre réponse suite au commentaire de M. le député de
Beauce-Nord.
Sur
ce, Mme Véronique de Sève, Mme Anne Pineau, représentant la Confédération des
syndicats nationaux, on vous remercie d'être venues déposer en
commission parlementaire aujourd'hui.
On suspend quelques
minutes.
(Suspension de la séance à 17
h 23)
(Reprise à 17 h 25)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons, comme dernier groupe sur les
consultations particulières du projet
de loi n° 64, la Fédération des pourvoiries du Québec, représentée par M.
Marc Plourde, M. Alain Tardif et Me
Dominic Dugré. Donc, je pense que c'est M. Plourde qui va nous entretenir. Vous
avez 10 minutes pour faire votre
exposé. Après, il y aura période de questions avec M. le ministre et les
parlementaires. Vous comprenez qu'on
a été aussi compressés dans le temps, mais vous avez tout le temps pour faire
votre exposé, et à vous, M. Plourde.
Fédération des
pourvoiries du Québec inc. (FPQ)
M. Plourde
(Marc) : Merci, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, MM., Mmes les députés. Merci de nous accorder l'opportunité de venir vous
présenter notre point de vue sur le projet de loi n° 64. Je me présente,
donc, Marc Plourde,
président-directeur général de la Fédération des pourvoiries du Québec. Avec
moi se trouve à ma droite, M. Alain
Tardif, pourvoyeur dans la région du Nord-du-Québec, qui est également
président de l'association des pourvoiries du Nord-du-Québec et membre
du comité exécutif de la Fédération des pourvoiries. À ma gauche, j'ai Me
Dugré, Dominic Dugré, le secrétaire général de la fédération.
Je prendrai
d'abord quelques minutes pour vous présenter rapidement les pourvoiries du Québec.
Je ne manque jamais une occasion de
le faire, donc vous me permettrez, donc, de vous dire que les pourvoiries sont,
au sens de loi, des entreprises qui offrent contre rémunération de
l'hébergement, des services ou de l'équipement reliés à la pratique des activités de chasse, de pêche et de piégeage. Il y
a plus de 600 permis de pourvoirie au Québec en vigueur. Ensemble, elles constituent une industrie qui génère des
retombées économiques directes et indirectes de plus de 210 millions de
dollars annuellement. Environ 425 000
personnes séjournent chaque année en pourvoirie. De ce nombre, 80 000
environ proviennent de l'extérieur du Québec.
Le secteur de la pourvoirie constitue donc une
part non négligeable de l'industrie touristique des régions du Québec. Ce produit touristique spécialisé est
offert d'une manière continue année après année. Les retombées économiques
engendrées par les activités de pourvoirie
sont durables et se traduisent notamment par le maintien d'un nombre
significatif d'emplois d'autant plus
importants qu'ils sont offerts dans les régions rurales et/ou isolées du
Québec. Identifiées par le ministère
du Tourisme comme un secteur clé dans l'offre touristique faunique et de
tourisme de nature, les pourvoiries du
Québec ont investi des millions au cours des années dans les campagnes de
commercialisation à l'étranger, principalement aux États-Unis, au cours
des dernières décennies.
Je vais laisser M. Tardif vous présenter un peu
ce que représente l'industrie au niveau international.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Tardif.
M. Tardif
(Alain) : Merci. Bonjour, tout le monde. Moi, au niveau international,
là, il faut se dire que le Québec, on
n'est pas tout seuls, là, on a une compétition très vive, que ça vienne de
l'Afrique... ça vient de tous les pays du monde. Puis moi, ça fait 30 ans que je fais de la pourvoirie dans le Grand
Nord, puis là je m'aperçois que, de plus en plus, il y a des obstacles à franchir, et ça devient de plus en
plus difficile d'y gagner notre vie. Moi, j'essaie de passer ça à mes enfants,
mais je me demande si je vais être capable
de me rendre jusque-là parce qu'avec tout ce qui arrive présentement, là,
depuis... On va parler de 2011, là,
le fameux... pas le 2011, mais le 2001, le 11 septembre. Après ça, on a eu la
vache folle, on a eu le SRAS, on...
Là, on n'a pas d'inventaire sur le caribou à cause qu'il n'y a pas d'argent
disponible ou la température ne s'y prête pas.
Et là je vois
le registre arriver, puis, cet hiver, j'ai fait beaucoup de salons aux États-Unis...
Ça fait 30 ans que je me promène
l'hiver aux États-Unis pour vendre des forfaits de chasse et de pêche, puis là,
avec la venue du registre, c'est très
mal perçu au niveau des Américains. Pas par le coût, parce que le coût... Puis
elle est déjà enregistrée, l'arme, mais c'est le fait que le Québec vienne emmener cette forme de registre qui
va encore faire haïr, si vous voulez, là... Excusez l'expression, là, mais ça va faire le Québec comme
une destination qui ne sera pas trop, trop «friendly». On a déjà une vive compétition, très vive, c'est déjà dur, le
Québec va être la seule province au Canada qui va avoir ce registre-là. Donc,
nous, dans notre domaine, là, ça ne va pas nous aider, mais pas du tout.
Puis sans
compter, là... J'écoutais la madame qui a parlé avant moi, là, je l'écoutais,
puis je me demande, là, je suis rendu
à 70 ans, là, puis je me demande... Les femmes, là, qui vont être battues, qui
sont battues présentement, puis qui
vont être... les armes n'ont rien à voir là-dedans. Qu'elles soient
enregistrées ou pas enregistrées, ces armes-là, là, elles vont être là pareil. Le mari qui veut battre sa
femme ou qui veut la tirer avec une carabine, là, il ne prendra pas le temps
de penser si elle est enregistrée ou si elle ne l'est pas.
Moi, je pense
que, dans l'argent que vous voulez mettre là-dedans, là, vous seriez pas mal
mieux de l'investir en santé mentale,
dans des programmes sociaux où vous pourriez traiter les gens qui sont
susceptibles à utiliser des armes.
Que ça soit le suicide, le suicide, là, le
gars, ou la fille, ou l'enfant, le jeune homme qui va vouloir se suicider,
qu'il ait une arme enregistrée ou pas
enregistrée, là, ça ne changera rien dans sa vie, il va se suicider pareil.
Puis on a fait la preuve tantôt, là,
le député de Beauce-Nord a fait la preuve que les suicides, là, ce n'est quand même
pas astronomique, là, à cause des armes de chasse, il y a bien plus
d'armes illégales qui sont utilisées que des armes de chasse.
Donc, moi,
là, j'aimerais ça que vous y pensiez deux fois avant, ça va venir,
définitivement, nuire à notre économie,
qui est déjà très fragile. Moi, là, je
suis parti de 350 clients, là je suis rendu à 165 clients par année. Puis, si
ça continue de même, bien, on va être
obligés de fermer. On a parti de 26 pourvoiries dans le Grand Nord
du Québec, on est rendus à quatre. Ça fait que ça vous donne une idée qu'on n'est pas
en remontant, puis ce n'est pas une chose qui va nous aider à remonter la côte. On a toujours
espoir de la remonter, la côte, mais là, avec les embûches que vous mettez ou
qui sont apportées, là, on ne sera pas capables. Ça fait que je vous
remercie de m'avoir entendu.
• (17 h 30) •
Le Président (M. Ouellette) : Me
Dugré.
M.
Dugré (Dominic) : Bon, vous
avez entendu un cri du coeur d'un opérateur de pourvoirie du Québec.
Je rajouterais, bon, que, bien qu'une
arme à feu n'a pas besoin d'être immatriculée, là, en vertu du projet de loi, s'il est sur le territoire
pour une période de moins de 45 jours, ce
genre de détail risque fort de ne pas être retenu par la clientèle
internationale. La compétition, comme
le disait M. Tardif, est si forte qu'un chasseur décidera d'aller chasser ailleurs
plutôt que de prendre la chance
d'avoir à expliquer et à prouver à un agent de la paix ou à un agent de la
faune qu'il est ici pour une période de moins de 45 jours. Quelques détails seulement,
même une simple perception peut faire changer d'avis un client étranger qui s'apprête à dépenser 8 000 $, 10 000 $ pour un
séjour au Québec. On l'a vu, question de perception, par exemple, le passeport a été exigé par le gouvernement des
États-Unis il y a quelques années, on a constaté une baisse de clientèle ici,
les Américains pensaient que c'est nous qui
exigions un passeport, alors qu'ils en avaient besoin d'un pour retourner chez
eux. Perception.
Les
perceptions dans ce dossier-là sont omniprésentes. La perception que le fait
d'apposer un numéro sur une arme et
que ce numéro se retrouve dans un registre peut limiter le nombre de crimes
commis avec une arme à feu. La perception que, puisqu'une arme sert à tuer, on doit se méfier de quelqu'un qui en
possède une. La perception que plus un chasseur possède d'armes, plus il est dangereux. Ces perceptions sont
insidieuses. Le discours public — à ne pas confondre avec le discours du public — perpétue ainsi l'association des armes avec
la violence envers d'autres personnes. Nous en sommes rendus à un point où certaines personnes éprouvent
une gêne à dire qu'elles possèdent des armes pour la chasse. Cette association automatique des armes avec des gestes
criminels laisse un goût amer dans la bouche des actuels chasseurs et porte ombrage à l'activité de chasse elle-même. Il
devient d'autant plus difficile d'entraîner de nouveaux adeptes à pratiquer
cette activité. La sécurité du public repose
sur le contrôle des individus qui veulent posséder des armes, ce qui se fait
par la délivrance d'un permis de
possession et d'acquisition d'armes à feu ainsi que sur l'utilisation et
l'entreposage sécuritaire des armes. Elle ne repose pas sur la
numérotation de celles-ci.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Plourde, pour le mot de la fin, il vous reste 1 min 30 s.
M. Plourde (Marc) : En conclusion,
oui, bien sûr. Bien, pour ces raisons puis pour toutes celles qui ont été avancées, notamment dans le mémoire qui a été
déposé par la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, mémoire qu'on a approuvé, évidemment, on s'oppose, nous, à
l'adoption du projet de loi n° 64. C'est un projet de loi, selon nous,
qui, malheureusement, divise les Québécois
puis qui risque de nuire beaucoup à l'attractivité de notre destination pour
les chasseurs étrangers.
Enfin, considérant qu'un des buts d'une
commission parlementaire comme celle-ci est d'entendre différentes personnes, différents groupes ayant différentes
opinions à propos d'un sujet d'intérêt public, nous, on aurait souhaité que
l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale puissent s'exprimer librement,
faire valoir l'opinion des citoyens de leurs circonscriptions
respectives en n'étant soumis à aucune ligne de parti. Je me devais de vous
l'exprimer.
Et puis, en
terminant, bien qu'il ne soit pas vraiment évident de proposer des
bonifications à un projet de loi dont on
ne veut pas voir l'avènement, bien, on s'est quand même permis, dans le mémoire
qu'on a adressé à la commission, de
faire quelques suggestions, là, qui pourraient venir atténuer un peu les
impacts négatifs de cette nouvelle loi sur nos opérations puis sur nos
clientèles. Donc, je vous remercie.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. Plourde. M. le ministre.
M. Coiteux : Je dispose de combien
de temps, M. le Président?
Le Président (M. Ouellette) : 10
minutes, M. le ministre.
M.
Coiteux : 10 minutes. O.K.
MM. Plourde, Tardif, Me Dugré, merci, merci
beaucoup d'être venus nous présenter
un mémoire et, je dirais, aussi un plaidoyer, là, pour un
secteur d'activité économique important qui est celui des pourvoiries. Alors,
d'entrée de jeu, moi, ce que je veux vous dire, c'est qu'on a la même vision
sur l'importance économique des pourvoiries.
Il n'y a aucune intention dans ce projet
de loi de venir entraver cette activité,
de venir empêcher les chasseurs de
s'adonner à leur activité, leur loisir préféré et même, je dirais, là, parce
que c'est important pour vous puis c'est une dimension importante de la présentation que vous avez faite aujourd'hui, de nuire à la compétitivité des pourvoiries au Québec.
Alors, je suis tout à fait sur la même longueur d'onde que vous là-dessus.
Je comprends que vous préféreriez qu'il n'y ait pas un fichier d'immatriculation des
armes à feu, je comprends ça. Je comprends que, pour vous, c'est un...
Puis, encore
là, vous le voyez comme une tracasserie supplémentaire qui pourrait
nuire à votre domaine. Ce que je veux
dire, c'est qu'on a conçu ce projet-là... et, dans la pratique de la pratique,
de la pratique, comment ça va se réaliser, ce fichier-là, si le projet de loi est adopté, ça va être un minimum de tracasseries, au point
où j'ai vraiment confiance que le chasseur qui va immatriculer ses armes, il va trouver ça très simple,
très rapide et il va pouvoir le faire à un coût nul. Il va pouvoir le faire à un coût nul. Et donc, une
fois que l'habitude va être prise, les gens vont dire : Ah! ce n'était pas
si pire que ça, finalement. Donc, on a peut-être eu peur pour rien. C'est ma conviction. Je le
sais, que peut-être vous ne la partagez pas, mais c'est ma
conviction. Pourquoi c'est ma conviction? C'est parce qu'on a travaillé à
l'élaboration de ce projet de loi avec cet esprit-là,
dans cet esprit-là. Donc, tout a été conçu... y compris, là, dans
l'opérationnalisation de tout ça, on ne veut
pas faire quelque chose de compliqué. Alors, ça, je tenais à vous le dire parce
que je pense que c'est important.
Puis
j'aurai une question après, là, qui va être importante, mais je tiens à
dire un certain nombre de choses ici. D'autre
part, sachez que le ministère de la
Sécurité publique... puis moi, en
l'occurrence, comme ministre de la Sécurité publique, je ne travaille pas dans ce dossier-là en vase clos et j'ai eu
plusieurs discussions avec le ministre
de la Forêt, des Faunes et des Parcs sur les enjeux, justement, des agents qui sont
dans les pourvoiries, qui font les contrôles, et je suis très sensible à tout ce qui pourrait, dans la
formulation du projet de loi, faire en sorte que ça pourrait nuire, encore une fois, à votre activité. Donc,
il y a des gens qui sont venus au cours des dernières de ces consultations, au
cours des derniers jours, qui nous
ont fait des recommandations d'amendement. Sachez qu'on peut en avoir en tête, justement,
pour s'assurer, encore une fois, que ça se passe le mieux possible sur
le terrain parce qu'on a ce même souci.
Vous
savez, d'ailleurs, qu'il y a un délai, qui est prévu, de 45 jours
dans le projet de loi, justement,
pour faire en sorte que le touriste, notamment américain, qui vient
chasser au Québec dans l'une de vos pourvoiries et qui n'a pas l'intention de résider au Québec... Bien, ce délai
là fait en sorte qu'il n'aura pas besoin de le faire. Il n'aura qu'à faire ce
qu'il doit faire actuellement, c'est-à-dire
de déclarer son arme à la douane, là. Il ne peut pas rentrer sur le territoire
canadien sans déclarer ses armes.
Donc, cette déclaration-là, elle va continuer de se faire. D'ailleurs, je pense
que c'est une bonne idée que ça se
fasse, là, parce que, si on ne devait pas déclarer les armes aux douanes, on
aurait un sérieux enjeu. Alors, ça, c'est fait.
Mais
ces délais-là et d'autres considérations, ils sont prévus pour, justement,
s'assurer que le projet de loi puisse obtenir
les résultats qui sont attendus, qui sont d'améliorer la sécurité publique, de
faciliter grandement, nous ont dit les corps
policiers, grandement leur travail, notamment en matière de prévention du
suicide. Puis je le sais, on ne peut pas tout empêcher, puis vous avez
raison que... Je pense que c'est M. Tardif qui le disait, quelqu'un va prendre
une arme, est-ce qu'elle est immatriculée,
pas immatriculée?, c'est vrai que les drames comme ceux-là peuvent arriver puis
que ce n'est pas le fichier qui,
seul, en toutes circonstances, va faire la différence. Mais on nous a dit que, dans beaucoup de cas, les
policiers sont mis au courant.
Des
fois, ça peut être par des centres d'hébergement de femmes qui ont été victimes
de violence ou de menaces de
violence, qui ont eu des signalements en vertu de personnes qui... Vous savez,
la loi Anastasia a fait en sorte que des médecins peuvent signaler qu'il y a
des risques par rapport à une certaine personne qui passe une période de
sa vie difficile. Il peut y avoir différentes circonstances. Des fois, c'est
sur appel. Il se passe, dans tel quartier, un conflit, puis les voisins
disent : Bien là, je crains un peu ce qui va se passer.
Les
policiers nous ont dit, avec, je dirais, beaucoup de conviction, qu'ils
pouvaient mieux intervenir en prévention avec un fichier d'immatriculation
que sans fichier d'immatriculation. Alors, nous, on regarde ça, comment avoir
les bénéfices attendus en matière de
prévention tout en minimisant l'impact sur les activités des chasseurs, tout en
minimisant l'impact sur vos activités économiques.
La question que
j'avais, parce que M. le Président me dit que je commence à manquer de temps...
• (17 h 40) •
Le Président (M.
Ouellette) : Effectivement, je voudrais leur permettre de répondre, M.
le ministre.
M.
Coiteux : Oui. Alors, la question que j'aurais est la suivante :
Le touriste américain qui vient chasser au Québec, il vient pour combien
de temps au Québec lorsqu'il fait ça?
M. Plourde
(Marc) : Bien, en fait...
Le Président (M.
Ouellette) : M. Plourde.
M.
Plourde (Marc) : Permettez. Oui, un touriste américain qui vient
chasser au Québec, normalement, il ne vient pas passer six mois ici, là, évidemment. La plupart de temps, ce sont
des séjours soit d'une semaine... ça peut aller jusqu'à deux semaines.
M.
Coiteux : Deux semaines, d'accord. Bon. Alors, on avait ça en tête
lorsqu'on a écrit les articles du projet de loi. Donc, c'était important pour moi de confirmer qu'on allait dans la bonne
direction du point de vue du délai qu'on permettait.
Permettez-moi
une dernière intervention, M. le Président — puis ensuite je laisserai mes collègues
poursuivre — concernant le travail des députés parce que
vous avez dit : On aurait aimé que les députés jouent leur rôle d'une façon différente de celle qui est la
tradition dans notre système parlementaire britannique d'origine. En fait,
c'est ça, on n'est pas comme aux
États-Unis avec la Chambre des représentants, c'est d'autres traditions. Mais
sachez une chose, là — puis j'en parle du côté de mon groupe à moi,
là, du côté du caucus de mon parti — les députés jouent grandement et pleinement leur rôle dans ce dossier-là, comme ils
le font dans tous les autres dossiers. D'abord, ils sont à l'écoute de leurs
électeurs et ils amènent des enjeux qui sont
soulevés par leurs électeurs, des enjeux qui sont importants pour eux, et ils
contribuent, par ce fait même, à bonifier le
projet de loi par rapport à la version initiale et à clarifier un certain
nombre d'enjeux. Ils jouent pleinement leur rôle et ils sont à l'écoute
de leur population.
Alors,
une fois qu'on se rallie autour... On défend ce projet de loi, mais on va en
tenir compte, des consultations et
des représentations qui sont faites par nos collègues. Bien, une fois qu'on se
rallie, on se rallie à quelque chose qui tient compte de ce que vous avez
exprimé — dont
vous, les représentants des pourvoiries — sur le terrain, on en tient compte.
Le Président (M. Ouellette) : Je vous laisse les deux minutes qui restent, M.
Plourde, M. Tardif et Me Dugré, si vous avez des commentaires au
commentaire du ministre.
M.
Plourde (Marc) : Oui. Juste un mot pour répondre à ce qui n'était pas
une question, M. le ministre. En aucun temps,
on ne doute de la bonne foi des députés dans l'exercice de leurs fonctions, là
n'est pas l'idée. L'idée est simplement que, comme je l'ai dit, c'est un
sujet qui divise jusqu'à un certain point, hein? Vous le savez, vous le sentez
même à l'intérieur de certains groupes, tout
le monde n'est pas nécessairement d'accord là-dessus, puis, dans le fond, c'est
une question, je dirais, d'impression que ça laisse chez les citoyens de
sentir que leurs représentants ne sont pas libres de s'exprimer.
Nécessairement, M. Tardif voulait peut-être...
Le Président (M.
Ouellette) : ...
M. Tardif
(Alain) : J'avais une question pour M. le ministre Coiteux. Dans vos
plans de structure, là, est-ce qu'il va y
avoir des infractions de prévues? Mettons que le type en question, là, il n'a
pas son... Il va y avoir un permis attaché
à ça, à cette arme-là, il va falloir que le chasseur transporte ce permis-là
avec lui, je présume. S'il n'a pas son permis d'armes avec lui, là, ça
va faire quoi? Il va avoir une amende, il va avoir...
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Oui. Bien, on a soulevé la question des agents de la faune,
qui pourraient agir sur le territoire par rapport à ça. Moi, je pense plus qu'on est en mode vérification. Si
jamais quelqu'un avait omis d'immatriculer son arme, il va peut-être
recevoir un avis comme quoi il serait temps de le faire.
M. Tardif (Alain) : Sans une omission, là, M. le ministre, le gars,
il peut l'avoir... Parce qu'on le vit à tous les ans, là, le gars, il est rendu à Rivière aux Feuilles, là, puis
c'est le temps d'acheter son permis, mais il a oublié sa carte de chasseur à la
maison.
M.
Coiteux : Regardez, pour autant que ça soit immatriculé, là, puis il a
oublié sa carte à la maison, dans notre esprit, là, ce n'est pas une raison de pénaliser le chasseur, là. S'il a
immatriculé son arme, puis, une fois que la vérification a été faite, il
est immatriculé, pour nous, là, c'est ça qui est important.
M. Tardif
(Alain) : Il va y avoir une façon pour les agents de la faune de
vérifier sans que le gars, il soit pénalisé, là, qu'il ramasse un ticket, là,
sur...
M.
Coiteux : On a l'intention
de ne pas nuire à vos activités et de trouver la meilleure solution, puis je
suis en contact avec mon collègue ministre de la Faune, de la Forêt et
des Parcs pour s'assurer que ça soit le cas.
M. Tardif
(Alain) : Merci.
Le Président (M.
Ouellette) : ...M. Tardif. M. le député de Verchères.
M.
Bergeron : Merci, M. le Président. D'ailleurs, moi, je vais faire
très, très, très brièvement du pouce sur ce qu'a dit M. le ministre en
disant qu'on s'est fait dire que la ligne de parti, c'est un accroc, une tache,
un empêchement à la démocratie. Moi, je veux
simplement assurer tout le monde que la démocratie s'exerce à l'intérieur des
partis. Il y a des instances à
l'intérieur des différents partis où les gens peuvent s'exprimer, et où les
gens font les arbitrages, et où les points de vue sont exprimés, et ça, c'est important de le retenir. Il ne faut
pas s'imaginer que les députés sont là, là, eux autres, puis ils s'en vont la tête baissée, puis qu'ils
adoptent la position qui leur est imposée d'en haut. Ce n'est pas comme ça
que ça fonctionne dans les partis politiques en régime parlementaire
britannique.
Cela
dit, merci infiniment de votre participation, messieurs. Je dois dire que
j'apprécie particulièrement, là. On comprend
très bien que ce projet de loi là ne vous apparaisse pas opportun. Je comprends
les raisons pour lesquelles vous ne
le considérez pas opportun. Vous avez eu l'occasion de les exposer, vous les
avez réitérées aujourd'hui, puis je dois vous dire qu'un peu comme le ministre l'a évoqué, puis mon collègue va
élaborer là-dessus, là, moi, je reconnais volontiers l'importance économique de l'activité que vous
pratiquez. Moi-même, j'ai été client de pourvoiries puis j'ai toujours été
bien servi, apprécié les services, donc il
n'y a aucun doute là-dessus. Puis j'apprécie le fait que vous nous ayez signalé
que vous trouvez le projet de loi peu opportun, sinon pas opportun du tout,
mais que vous avez quand même fait des propositions qui m'apparaissent
importantes et intéressantes à examiner.
Je veux simplement
préciser, avant de passer la parole à mon collègue, les détenteurs d'armes, là,
ne sont pas nécessairement des gens plus dangereux que d'autres, là. Il y a des
gens bien dangereux qui vont utiliser autre chose qu'une arme pour faire ce qu'ils ont à faire. Puis le nombre d'armes ne
fait pas en sorte que les gens sont plus dangereux. On n'a qu'à penser aux collectionneurs qui ont 10,
12, 20, 30, 40, sinon 100 armes puis qui ne s'en servent absolument pas
pour commettre quoi que ce soit.
Je
veux également vous signaler, parce que, ça, je pense que c'est important que
vous le sachiez, il y a des témoins qui
nous ont sensibilisés au fait qu'il y a certains États américains, dont l'État
de New York, par exemple, qui exercent un
contrôle plus serré encore sur les armes qu'on ne le fait au Canada. Alors, je
pense que ça, c'est important à prendre en considération dans les
objections, les préoccupations légitimes que vous avez.
Et, sans plus tarder, M. le Président, je
passerais la parole à mon collègue.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Bonaventure.
M. Roy :
Merci, M. le Président. Écoutez, je comprends très bien votre état d'esprit,
entre autres pour le monde de la
faune, et je suis intervenu à plusieurs occasions, entre autres sur
l'augmentation des baux de villégiature, la hausse des permis de chasse et pêche, les coupures de
personnel en termes de techniciens de la faune, d'agents de la faune puis
de biologistes, fermeture de zones, et là,
pour le monde de la faune, on a la cerise sur le sundae, le registre des armes
à feu. Donc, il y a une augmentation
de la pression qui s'est faite de manière continue qui fait en sorte qu'il y a
une levée de boucliers.
Ceci étant
dit, je comprends aussi que les gens des régions se sentent attaqués, se
sentent, je ne dirais pas, diabolisés, mais,
à tout le moins, subissent un peu l'affre de toute cette discussion-là. C'est
important de faire des amendements parce qu'on est dans une situation où le projet va aller de l'avant, et c'est
là que notre devoir, c'est de faire en sorte, dans l'étude d'article par article, d'amener des amendements
pour faire baisser la pression et, peut-être même, intervenir auprès de
d'autres ministres pour que la pression baisse à d'autres niveaux aussi. Donc,
écoutez, j'aimerais juste savoir vos commentaires par rapport à l'avenir de la
relève. Vous avez le secteur pourvoiries, mais la relève faune au Québec,
globalement, ça ressemble à quoi?
Le Président (M. Ouellette) : M.
Tardif.
• (17 h 50) •
M. Tardif
(Alain) : Moi, je peux vous dire, à l'heure actuelle, là, pour la
partie du Grand Nord, là, il n'y en a pas, de relève. Il n'y en a pas parce que, de un, bon, il y a une chose, les
jeunes n'ont pas tout à fait le même intérêt que les parents, là, puis
on commence à le percevoir, là. Moi, j'ai eu beaucoup de monsieurs, là, dans la
soixantaine, là, qui venaient avec leur
garçon qui avait peut-être une vingtaine d'années, le père payait pour les
deux, puis il emmenait son garçon
faire une semaine chez nous, mais on en voit de moins en moins, de ça, parce que,
justement, je
crois que c'est ça, c'est devenu tellement compliqué, là, que,
les jeunes, je pense qu'ils vont, tranquillement, tranquillement, se
sortir de ça, ils vont aimer mieux jouer au Game Boy puis au
PlayStation, je pense, que de venir à la chasse.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Bonaventure, dernière minute. Ah! bougez pas, je pense que M. Plourde
a un commentaire additionnel.
M. Plourde
(Marc) : Oui. Si vous
permettez — merci, M. le Président — en
fait, la relève, pour nous, c'est un enjeu
important parce que c'est un enjeu de transmission, hein? C'est une
transmission, c'est aussi une transmission de valeurs, puis c'est la transmission d'un sentiment d'une certaine
communion avec notre territoire, notre ressource, notre nature.
Malgré qu'effectivement il y ait des enjeux, évidemment, on est sur une
cohorte générationnelle, là, qu'on a appelée baby-boom, effectivement, le gros volume de nos clients, ce sont des
boomers. Et, évidemment il y a un intérêt chez les jeunes.
D'ailleurs, la Fédération de la faune fait un très bon
travail et la fédération chasseurs, pêcheurs pour... puis, d'ailleurs, qui ont des programmes de formation
qui sont assez performants. Le nombre d'inscrits est en augmentation, ils ont probablement
même doublé depuis les 10 dernières années le nombre de jeunes et de nouveaux
chasseurs qui se font certifier, mais ça ne
viendra pas remplacer cette grosse cohorte là qui sort, là. Malgré qu'il y a
quand même encore une attraction pour la chasse chez
les plus jeunes, ça ne remplacera pas.
Et, évidemment, toutes les contraintes qui sont associées à la possession des armes, à
tout ce qui entoure l'image relative aux armes à feu, ce n'est pas de nature à
nous aider beaucoup dans le dossier de la relève. Puis finalement, face à ce baby-boom qui s'en
va, nous, on a besoin de remplacer ces clients-là par, notamment,
des non-résidents, d'où la grande sensibilité
qu'on a à l'égard de la perception de nos clients de l'extérieur du Québec, à
l'égard de comment, au Québec, on va
gérer le dossier des armes à feu. M. Tardif l'a évoqué tout à l'heure, nos
juridictions voisines n'auront pas ces contraintes-là.
Puis effectivement, souvent, le 45 jours va faire la job concrètement, mais,
comme Me Dugré l'a dit, quand est
venue l'exigence du passeport, les Américains, ils ont une bonne façon de
présenter ce genre de chose là. D'ailleurs, ils mettent des exigences, puis ils vont faire passer ça sur le dos d'un
autre. Bien, c'est exactement ce qui est arrivé dans le dossier du
passeport. Les Américains... Personnellement, moi, je suis allé aussi dans des
salons à l'extérieur, aux États-Unis, on se faisait interpeler pour dire :
Aïe! vous ne voulez plus qu'on aille chez vous, ça prend le passeport. Il n'y a pas 50 % des Américains qui ont un
passeport, il faut le savoir aussi. Ça fait que tout ça, c'est des éléments qui
sont venus rendre plus difficile notre recrutement de clientèle pour la chasse.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. Plourde. M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, MM. Tardif, Plourde et Dugré, Me
Dugré. Très intéressant parce que vous parlez d'un coût si on... Vous ne
parlez pas du coût du registre, mais vous parlez d'une perception qui pourrait entraîner des baisses d'achalandage dans
les pourvoiries du Québec dues à la perception qu'on aurait d'un registre
d'armes à feu. Et je trouve ça important
parce qu'on achève nos auditions, M. le président, et ça a été, la semaine
dernière, des perceptions, et des
perceptions, et des perceptions, et ça a été de dire que ça va responsabiliser
les chasseurs d'avoir un registre,
alors qu'on sait très bien que, depuis une quinzaine d'années, le taux
d'accidents de chasse des propriétaires d'armes à feu, c'est entre zéro et trois par année, là. On ne parle pas de
pourcentage, le maximum qu'il y a eu, c'est trois accidents de chasse.
Alors, je pense que la responsabilisation des propriétaires d'armes de chasse a
été faite.
Mais j'ai
juste trois minutes — parce
que je pourrais en parler longtemps — d'après vous, est-ce que ce registre-là
va améliorer la sécurité des personnes puis va améliorer votre sort en tant que
Fédération des pourvoyeurs?
Le
Président (M. Ouellette) : Me Dugré.
M. Dugré
(Dominic) : Non. Très simplement, non, on ne croit pas que c'est un
outil qui est nécessaire pour assurer plus
de sécurité. On n'a pas pris ces arguments-là, on ne vous l'a pas présenté en
début d'audience parce que ça vous a
déjà été amené par d'autres groupes. Puis, comme on le mentionne dans notre
mémoire, on appuie, de manière générale,
le mémoire qui a été déposé par la Fédération des chasseurs et pêcheurs, donc
on concourt à tous leurs arguments.
La
question que vous avez dite d'entrée de jeu, vous ne parlez pas des coûts du
registre, vous parlez de l'impact
que ça peut avoir sur la clientèle puis des
perceptions. On adresse la question des coûts puis on a des sérieuses
interrogations aussi sur les coûts.
On ne reprendra pas, encore une fois, tous les arguments, mais, si on mêle
registre, puis informatique, puis le gouvernement, on ne sait pas
jusqu'où ça peut aller.
M.
Spénard :
Il me reste encore un petit peu de temps, monsieur?
Le Président (M.
Ouellette) : Ah! il vous reste un petit peu, vraiment un petit peu de
temps.
M.
Spénard :
Merci. Je lisais — je
ne sais pas si c'est votre mémoire ou un autre — qu'on n'a pas pensé
aux travailleurs qui peuvent travailler dans
les pourvoiries. Et ça, c'est pour une longueur de, mettons, un huit, 10
semaines durant le temps de la
chasse, mettons, du mois de septembre au mois de novembre. Les guides dans les
pourvoiries qui viennent d'ailleurs,
bien, ils arrivent avec leurs armes. Alors là, le 45 jours n'est pas assez
long. Alors, si jamais la loi est
adoptée, il faudrait peut-être penser... Parce qu'il y a 25 % des employés
de la pourvoirie — j'ai
lu ça en quelque part — qui proviennent d'ailleurs, que ça soit au
Canada ou aux États-Unis. Alors, étant donné que ce ne sont pas des
résidents québécois, qu'ils n'auront pas d'armes enregistrées, au bout de 45
jours, vont-ils être obligés d'enregistrer l'arme? Ça, ça peut être un frein
aussi au recrutement des guides de chasse et de pêche qui rentrent avec des
armes.
Le Président (M. Ouellette) : Effectivement, un très bon commentaire dans
l'étude article par article. M. Tardif.
M.
Tardif (Alain) : Effectivement, là, M. Spénard, je l'ai, ce
problème-là, moi. J'ai des gens qui viennent de l'Ontario puis qui vont être, effectivement, plus que 45
jours, puis ces gens-là apportent leur arme pour... C'est une sécurité parce qu'on est dans un coin de... il y a des ours
polaires, il y a des ours noirs. Moi, je ne laisse pas partir un guide, là, que
ça soit pour aller à la pêche ou
aller à la toilette, là, dans le bord de la rivière, là, sans son arme parce
qu'on sait que ce n'est pas sécuritaire.
Ça fait que ces guides-là amènent leur arme, puis il va falloir, effectivement,
si vous faites une loi, que ça soit pris en considération.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
1 min 30 s.
Mme
Massé : 1 min 30 s. Merci, M. le Président. Bonjour,
messieurs. Désolée de mon absence, j'avais d'autres interventions à
faire.
Deux
éléments. Un premier élément, je ne suis pas encore arrivée à comprendre
pourquoi quelqu'un qui voyage va
prendre des assurances, va s'assurer que, là où il voyage, s'il a besoin de
vaccins, il va tout préparer son voyage en fonction de ça, et, si l'idée, c'est d'aviser qu'il rentre sur notre
territoire avec une arme, ça, ça pose un problème. Ça, je ne suis pas
encore arrivée à comprendre cette dimension-là.
Ceci
étant dit, ma question, c'est... Je pense que le travail qu'on est en train de
faire nous dirige tranquillement vers
l'adoption d'un projet de loi où on va mettre sur pied un registre ici, au
Québec, avec des données qu'on espère qu'on va pouvoir récupérer assez rapidement. Est-ce que le fait d'exiger, au
moment de la transaction d'une arme, de vérifier auprès de la GRC de la
validité d'un permis de possession, est-ce que vous avez un problème avec ça?
Le Président (M.
Ouellette) : M. Plourde, ça va être... ou Me Dugré, c'est la dernière
intervention.
M. Dugré (Dominic) : Bien, écoutez, c'est une question qui a déjà été posée, il y a eu
différentes réponses qui ont été
données, mais je ne sais pas si l'exemple du permis de conduire a été donné. À
sa face même, on est capable de savoir si
quelqu'un possède un permis de conduire, il y a une date de validité dessus. Le
locateur de voiture ne va pas appeler à
la SAAQ pour savoir si le permis a été retiré ou pas, on présente le permis.
Si, à sa face même, il n'y a pas de validité, il y a un problème.
Mme Massé :
Donc, le coup de téléphone... C'est parce que vous ne répondez pas, je vais
essayer de la faire simple, là. Est-ce que vous êtes d'accord à ce qu'on
téléphone la GRC pour dire : Est-ce que ce permis-là est valide?
Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Je vous laisserais 10 secondes,
M. Plourde.
M.
Plourde (Marc) : Bien, en fait, je parle simplement pour dire qu'on
pense que les contrôles actuels sont quand même importants, ils sont existants. Effectivement, on pense qu'il
faut... Je vais vous dire en deux mots, là, quelqu'un qui veut s'acheter une arme de façon mal
intentionnée n'aura aucun problème à le faire nulle part au Canada, nulle part
l'autre bord de la
frontière. Il va traverser à Ottawa, il va aller s'en acheter une ou bien donc
il va aller à d'autres endroits, aux frontières, puis il va s'en
procurer une. Moi, sincèrement, je pense que, pour nous, ce n'est pas un enjeu.
• (18 heures) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. Marc Plourde, M. Alain Tardif, Me Dominic Dugré, représentant la Fédération
des pourvoiries du Québec.
Mémoires déposés
Avant de
conclure nos auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas
été entendus lors des auditions publiques.
Donc, je souligne l'Association des sauvaginiers du Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Association québécoise plaidoyer-victimes, M. Guy Boivin, le
Conseil du statut de la femme, M. Dominique Corneau, M. Martin Poirier
Deschênes, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec,
M. Pierre Gauthier
La commission
ajourne ses travaux à demain le 13 avril 2016,
après les affaires courantes, vers 11 h 30, où elle entreprendra
un autre mandat, soit l'étude des crédits budgétaires 2016-2017, volet Institutions
démocratiques.
(Fin de la séance à 18 h 1)