(Quinze heures douze minutes)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il
vous plaît, et veuillez vous assurer
que vos appareils électroniques sont
en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux. Je déclare la séance
de la Commission des
institutions ouverte. Bon après-midi à toutes et à tous.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Nichols (Vaudreuil) remplace M. Boucher (Ungava); M. Sklavounos (Laurier-Dorion) remplace M.
Rousselle (Vimont); M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Cloutier (Lac-Saint-Jean);
M. Bergeron (Verchères) remplace M. Lisée
(Rosemont); M. Bonnardel (Granby) remplace M. Martel (Nicolet-Bécancour); et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace Mme Roy (Montarville).
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Alors, bienvenue à tous les collègues
qui se joignent à la commission pour poursuivre l'étude du rapport sur la mise en oeuvre du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale. Nous recevons aujourd'hui le jurisconsulte de l'Assemblée
nationale, l'honorable Claude Bisson.
Vous me
permettrez, dans un premier temps, M. Bisson, au nom des membres de la commission,
de vous offrir nos excuses pour... Je
sais que vous vous êtes déplacé à Québec, à l'Assemblée
nationale, dans le cadre de l'audition qui était prévue
hier, mais le malheureux, le tragique événement, le décès de l'ancien premier ministre Jacques Parizeau a forcé le report de l'audition. Mais nous nous
excusons tout de même.
Et vous me
permettrez, pour le bénéfice des membres et de ceux qui nous écoutent, j'ai
appris récemment que notre visiteur,
le jurisconsulte de l'Assemblée
nationale, allait recevoir la semaine
prochaine, dans le cadre du congrès
du Barreau, la Médaille du Barreau du
Québec, qui est la plus haute distinction décernée par le Barreau du Québec.
Alors, je tenais à le souligner et vous offrir nos félicitations, M. le
jurisconsulte.
Et donc vous
disposez, M. le jurisconsulte, d'une période de 10 minutes pour faire votre
présentation. Il y aura par la suite échange avec les membres de la
commission. Je vous cède immédiatement la parole.
Exposé du jurisconsulte
de l'Assemblée nationale,
M. Claude Bisson
M. Bisson (Claude) : Alors, M. le
Président, Mmes, MM. les députés, au début de mes remarques, vous me permettrez bien de souligner le chemin parcouru
par le commissaire et son équipe au cours des quatre dernières années. La tâche était immense et elle a été accomplie
avec diligence, professionnalisme et grande rigueur, que ce soit sur le plan
des conseils et avis aux députés, aussi bien que relativement à la mise sur pied
du système des déclarations d'intérêt personnel ou encore à l'occasion des
vérifications et enquêtes entreprises par le commissaire.
Ayant été un
témoin constant de l'ardeur et du doigté de Me Jacques Saint-Laurent au cours
des dernières années, je le remercie
de sa contribution à cet élément primordial de la démocratie que sont l'éthique et la déontologie des parlementaires.
Ceci m'amène
à mon court exposé qui sera suivi de vos observations et questions.
D'abord, ce que ma présentation n'est
pas. Premièrement, mes propos, écrits ou verbaux, n'ont pas été et
ne sont pas dirigés à l'endroit de l'une ou l'autre des personnes présentement
assujetties au Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale. Deuxièmement, en matière de conflits d'intérêts, ces propos
n'entendent pas proposer une solution à la situation que pourraient présenter
l'un ou l'autre des membres de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas mon rôle de
le faire.
Ce que ma
présentation est. Premièrement, elle espère être une contribution à définir ce que le code n'explique pas, à savoir ce qu'est une fiducie
sans droit de regard constituée — et
je cite les textes de l'article 45 — de
«titres [...] transigés à une bourse ou pour lesquels il existe un autre
marché organisé». Fin de la citation.
Deuxièmement, cette contribution se veut être
basée sur des textes qui définissent la réalité de ce qu'est une fiducie sans droit de regard avec des caractéristiques qui lui sont essentielles. Le paysage législatif canadien donne, d'une province à l'autre et d'une assemblée législative
à l'autre, aussi bien à Ottawa que dans les provinces et également les territoires, les mêmes paramètres des éléments
essentiels d'un «blind trust» que peut ou doit créer un parlementaire :
d'abord, un fiduciaire sans aucun
lien de dépendance avec le constituant; deuxièmement, un patrimoine désormais
inscrit au nom du fiduciaire; troisièmement, aucun pouvoir de gestion ni
de contrôle par le constituant; quatrièmement, sauf au Commissaire à l'éthique et à la déontologie, le fiduciaire ne fournit
aucun renseignement; et ignorance du constituant quant aux
investissements faits par le fiduciaire, il n'en connaît que la valeur globale.
Ceci me
conduit à l'article 45 du code. Cette disposition, premièrement, ne s'applique
qu'aux membres du Conseil exécutif.
Deuxièmement, est la première de quatre ou cinq articles qui constituent le
chapitre intitulé Conflits d'intérêts.
La question : Au sens de la lettre et de
l'esprit du code, pour un membre du Conseil exécutif, ça consiste en quoi,
l'obligation de se prémunir contre les conflits d'intérêts vis-à-vis — et je
cite encore les mots de l'article 45 — «les entreprises dont les titres sont transigés à une
bourse et pour lesquels il existe un autre marché organisé»? Fin de la citation
de l'article 45.
Le
code donne une réponse claire à cette question. Ou bien ne détenir aucun
intérêt dans de telles entreprises ou bien,
au moyen d'une fiducie sans droit de regard, être ignorant de l'identité des
éléments du patrimoine que le fiduciaire peut décider de placer dans des titres transigés à la bourse. Défendre
au fiduciaire de disposer des titres qu'on lui confie ferait en sorte qu'on conserverait nécessairement
un droit de regard et qu'au lieu d'être ignorant du contenu de la fiducie
on en serait, au contraire, constamment au courant. Dans un tel cas, l'objectif
visé par le code pour éviter les conflits d'intérêts serait-il atteint? Poser
la question, c'est, à mon humble avis, y répondre. Une fiducie dont la
caractéristique fondamentale est d'être
figée et sur le contenu de laquelle se perpétue ainsi le droit de regard du
constituant ne peut être qualifiée de sans droit de regard.
L'absence
de droit de regard doit faire en sorte que le constituant n'a aucune
connaissance de la composition de son
portefeuille d'intérêt dans des entreprises dont les titres sont cotés à la
bourse. Ainsi, le membre du Conseil exécutif ne pourra pas être en conflit d'intérêts, ni dans l'exercice de
dirigeant du ministère dont il est titulaire ni à titre de membre du cabinet des ministres. En effet, premièrement,
ou bien il aura vendu les titres qui auraient pu causer problème, deuxièmement, ou bien il ne connaîtra rien de
l'identité des titres gérés par le fiduciaire, ce qui lui évitera de se trouver
en conflit d'intérêts ou de donner l'apparence de l'être lorsqu'il posera l'un
ou l'autre des gestes de son poste.
• (15 h 20) •
Pour
réaliser ce dernier objectif, l'acte de fiducie doit, évidemment, être rédigé
et administré de façon fort étanche :
premièrement, ignorance totale et constante par le constituant
des titres faisant partie de la fiducie; deuxièmement, attribution des pleins pouvoirs au fiduciaire, dont les nécessaires
relations avec le Commissaire à l'éthique et à la déontologie seront entourées de la plus grande confidentialité. Les
seuls renseignements que le fiduciaire pourrait communiquer au constituant
seront les chiffres nécessaires
aux déclarations fiscales, soit la valeur des actifs placés en fiducie, à
l'exclusion complète de l'identité de ces actifs.
Ce
qui distingue la fiducie sans droit de regard instaurée par le code de la
fiducie ordinaire, c'est qu'elle a été créée en tant qu'élément essentiel à la base de l'une des raisons d'être du
code, ce que j'appellerais son pivot, à savoir l'évitement des conflits
d'intérêts. C'est ainsi qu'à l'unanimité les parlementaires de 2010 l'ont
conçu, rédigé et adopté.
Je
me permets de souligner que, relativement à la déclaration que le membre du Conseil exécutif doit faire de ses intérêts financiers et au sommaire qui en est rendu
public par le commissaire, les articles 52.6 et 55.6 du code doivent
être appliqués en respectant la confidentialité à laquelle la fiducie sans
droit de regard est assujettie.
Un
mode particulièrement pertinent d'acte de fiducie sans droit de regard
est celui en usage à la législature de Colombie-Britannique et que j'ai
en ma possession depuis 2011. Je le dépose en annexe.
Je
conclus mes remarques sur la fiducie sans droit de regard en faisant humblement
deux suggestions. Premièrement,
une
première d'ordre législatif : préciser dans le code les éléments de toute
fiducie sans droit de regard; et, deuxièmement, l'élaboration d'un modèle de l'acte qui crée une telle fiducie et qui,
sans faire partie du code, pourrait être recommandé par le commissaire.
Et
vous avez en annexe le document de la Colombie-Britannique que j'ai depuis 2011. Alors voilà, M. le Président, MM. les députés.
Document déposé
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. Bisson. Tout
le monde a reçu copie du texte de
l'allocution et du document en annexe, alors je vais le déposer. Il sera
déposé sur le site de la commission.
Discussion générale (suite)
Nous
allons maintenant entreprendre la période d'échange avec les parlementaires. Je me tourne vers le député de LaFontaine pour le premier
bloc. M. le député, à vous la parole.
M. Tanguay :
Pour une période de 10 minutes, je crois, M. le Président?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : C'est bien ça.
M.
Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, vous me permettrez, évidemment,
de vous saluer, de saluer, évidemment, les collègues qui sont ici avec nous aujourd'hui et, bien sûr, de saluer M. Bisson, notre jurisconsulte, et vous
remercier, M. Bisson, de nous permettre, aujourd'hui — non
pas hier, mais aujourd'hui — de
vous poser des questions qui sont
importantes et qui sont au coeur du débat, et de la réforme, et des
bonifications que nous devons apporter à notre code d'éthique.
Première
question, M. Bisson, fiducie sans droit de regard. Une
personne qui, aujourd'hui, serait ministre ou premier
ministre, mais qui, en vertu d'une fiducie, se permettrait de donner une
directive telle que l'ordre de ne pas vendre le bloc d'actions, cette fiducie-là, pour un ministre
ou premier ministre, est-ce
que, oui ou non, à la lumière de
notre code actuel, elle serait illégale?
M. Bisson
(Claude) : D'après moi, oui.
M. Tanguay : Elle serait
illégale, cette fiducie-là.
M. Bisson (Claude) :
D'après moi, oui.
M. Tanguay : Vous liez cet élément important qui serait
illégal au pivot même de notre code, comme étant la pierre d'angle sur
laquelle, évidemment, les protections nécessaires contre les conflits d'intérêts reposent. Pouvez-vous étayer
en quoi cette illégalité, si elle était mise sur place, viendrait remettre en question
nos protections contre les conflits
d'intérêts?
M. Bisson
(Claude) : Oui. Écoutez,
l'article 45, il est, à mon avis, très clair, vous vous dessaisissez de tous
vos titres dans des entreprises où c'est traité en bourse. C'est très clair.
Ou, si vous voulez les garder, bien, vous avez la solution de la fiducie sans droit de regard. Mais
la fiducie sans droit de regard doit avoir le même effet que de se départir
de ses actions parce qu'il faut que le
membre du Conseil exécutif soit ignorant de ce que la fiducie contient, de
sorte qu'il peut se prononcer sur
différentes questions, comme il doit se prononcer comme ministre et membre du
Conseil exécutif aussi bien à son
ministère qu'aux réunions du Conseil des ministres, ne sachant pas que la
fiducie peut être actionnaire d'une
entreprise dont le problème est soumis à son ministère ou encore dont le
problème est discuté au Conseil des ministres.
Je vais vous donner
un exemple. La fiducie contient des
actions... Je vais prendre deux entreprises bien connues qui ont sans doute des contrats avec le gouvernement par différents ministères, je vais nommer CGI puis IBM. Alors, il y a une
discussion au Conseil des ministres ou l'opportunité, pour une raison ou pour une
autre, de confier un contrat à l'une ou
l'autre de ces entreprises. Le ministre, qui a peut-être une fiducie sans
droit de regard, peut discuter librement parce qu'il ne sait pas que,
dans sa fiducie... et c'est à la vue du public qu'il ne sait pas, dans sa
fiducie, s'il y a des actions ou non
de CGI ou d'IBM. Autrement, s'il le savait, on pourrait lui dire : Bien,
monsieur, dans votre ministère, vous êtes en charge, vous n'avez pas le droit de prendre part à quoi que ce soit et
même que votre ministère donne un contrat. Même chose s'il y a une discussion au Conseil exécutif. Donc, c'est essentiel
que le membre du Conseil exécutif soit ignorant de tout et tout ce que contient la fiducie parce
qu'au départ il aurait dû en disposer, mais on lui donne la chance de les
placer dans une fiducie sans droit de regard à l'article 45.
M. Tanguay :
Et diriez-vous que cet état de fait là, qui est le droit actuel en vertu de
notre code, il était clairement établi
de cette façon-là dès son adoption en 2010? Parce que je vais vous citer le 5
juin 2009 dans le cadre du projet de loi
n° 48 qui allait donner unanimement suite, par le nouveau code, celui qui
nous régit aujourd'hui... Vous disiez, et je vous cite : «Alors,
une fiducie sans droit de regard, c'est celle où vous ne pouvez absolument rien
faire.» Seriez-vous d'accord avec
l'affirmation que ce que vous venez de dire était également très clairement
étayé dès 2009, notamment par ce que
vous veniez nous dire ici, à l'Assemblée nationale, le 5 juin 2009? Seriez-vous
d'accord avec cette affirmation-là?
M. Bisson
(Claude) : Oui, je n'ai pas
changé d'idée, je l'ai étayée de façon peut-être plus claire et plus en se
fondant sur des principes.
Et permettez
une digression, certains pourraient être tentés de plonger dans le Code civil
pour permettre... On a dit, par
exemple, ce que vous avez peut-être lu ou d'autres, bien, le constituant, il
peut bien dire : Vous ne vendrez pas la maison patrimoniale, bon,
probablement, mais ce sera en vertu du Code civil.
Je vais vous
lire un article qui démontre qu'il faudra faire très attention, lorsqu'on vous
invitera à examiner le Code civil, à certains articles. Alors, je vous
lis l'article, si vous permettez, l'article 1275 : «Le constituant — dans
notre cas, on s'entend que c'est le membre du Conseil exécutif — ou le
bénéficiaire — d'une
fiducie quand il y a un bénéficiaire — peut être fiduciaire...» Bon. Alors,
le constituant peut être fiduciaire. Donc, s'il peut être fiduciaire, il est au courant de tout ce qui se passe dans la
fiducie. Alors : «Le constituant ou le bénéficiaire peut être fiduciaire,
mais il doit agir conjointement avec
un fiduciaire» — il faut
qu'en plus de lui comme fiduciaire il y ait un autre fiduciaire, mais
évidemment que les deux vont agir conjointement — et qui n'est pas ni le
constituant ni le bénéficiaire. Il faut aller chercher
quelqu'un à l'extérieur, mais vous, constituant, vous pouvez être également
cofiduciaire. On voit que ça n'a aucun sens de faire appel à certaines
dispositions du Code civil qui n'ont rien à voir avec ce dont nous parlons
aujourd'hui. Parce que ce dont nous parlons
aujourd'hui, c'est que le constituant ne doit être absolument pas au courant de
ce qui la constitue, de la même
manière que, s'il avait vendu, bien, il ne serait pas au courant, il n'a plus
rien. C'est l'alternative que donne l'article 45.
M. Tanguay :
Et cette opinion, qui est très claire... Et je vous réfère au document que vous
écriviez le 10 mars 2015 qui fait
quatre pages, là, votre opinion écrite du 10 mars 2015 avec les autorités,
références à l'appui, ainsi de suite, est-ce qu'il y a place à l'interprétation
dans le droit actuel ou, selon vous, votre position... Puis, je veux dire,
comme ancien juge de la Cour
supérieure, juge à la Cour d'appel, vous avez vu passer dans des litiges
commerciaux et autres des actes de fiducie,
vous en avez vu un puis un autre, vous êtes capable de faire la distinction
entre les différents éléments, diriez-vous qu'aujourd'hui il y a place à l'interprétation sans droit de regard là
dans le contexte du code actuel ou, selon vous, votre expérience des nombreuses années, c'est très, très
clair que ce serait illégal d'avoir sans droit de regard, mais d'interdire la vente?
M. Bisson
(Claude) : Autrement, on
n'éviterait pas les conflits
d'intérêts. Et c'est ce qu'il faut
et qui est à la base, c'est d'éviter
des conflits d'intérêts, hein? Et c'est pour ça, l'article
45 est le premier article dans le chapitre des conflits d'intérêts, on s'adresse aux membres du Conseil
exécutif.
Et je
pourrais ajouter que, dans les autres provinces, dans la législation qui a trait aux... la législation soit sur le Commissaire à l'intégrité ou il
y a différents noms, on donne toujours
dans la législation les caractéristiques de ce que doit être ce qu'ils appellent un «blind trust»,
eux autres, et ce qu'on appelle, nous autres, aussi un «blind trust», fiducie sans
droit de regard. Alors, on donne les
différentes caractéristiques. On dit, par exemple, que, dans la déclaration que le fiduciaire fait au
commissaire, la déclaration, qui ne sera pas connue du public parce que,
si elle était connue du public, évidemment, le constituant serait mis au courant... On donne
la valeur globale, mais on ne parle pas de la nature du tout du contenu de la fiducie. Alors, ça, ça revient
périodiquement dans la législation des autres provinces et de la Chambre des communes
également.
M. Tanguay :
Merci beaucoup. Les règles parlementaires font en sorte qu'il me reste 1 min 15 s, mais je pense que, sur ce point-là, ça vaut la peine de vous
reciter. 5 juin 2009, projet de
loi n° 48, qui allait être notre
nouveau code, à l'époque, qui est le code actuel, vous étiez
jurisconsulte, vous disiez, et je vous cite : «Généralement, la personne conserve un droit de regard, va dire à son
fiduciaire : Tel placement, ça ne me convient pas, [changez-moi] ça. [...]La fiducie sans droit de regard dans le contexte qui nous
intéresse, [...]la personne qui crée [...] n'a aucun droit de donner des
directives[...]. Alors, une fiducie sans
droit de regard, c'est celle où vous ne pouvez absolument rien faire. Vous êtes
là, vous avez confié, et tout ce que vous recevez, c'est un rapport
annuel.»
Ça,
c'est vous, en juin 2009, et aujourd'hui, encore une fois, vous venez très
clairement de l'étayer et de nous le confirmer, comme vous
l'aviez fait dans votre lettre du 10 mars dernier, 2015.
Il
reste quelques secondes. On aura l'occasion de débattre de d'autres éléments,
mais je pense que, très clairement, il était important ici
de mentionner ce que vous disiez déjà dès 2009. Alors, M. le Président, ça
conclut ce bloc-là. Je reviendrai, M. Bisson.
M.
Bisson (Claude) :
Alors, on pourrait ne pas être d'accord avec moi, mais on serait d'accord que
je suis constant dans mes opinions.
M. Tanguay :
Tout à fait.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce
premier bloc d'échange. M. le leader de l'opposition
officielle et député de Chicoutimi, à vous la parole.
• (15 h 30) •
M.
Bédard : Merci, M. le Président. D'ailleurs, on va revenir
sur cette constance. Alors, Me Bisson, mes collègues, chers amis, M. le Président. D'abord, votre
mémoire, je vais faire seulement un petit commentaire, il dit que vous ne visez
personne. Or, je pense que personne n'est
dupe, vous visez quelqu'un en particulier. Puis je tiens à vous le dire,
d'autant plus que le rapport contient 23 recommandations du Commissaire
à l'éthique, et vous en parlez d'une seule.
Et vous êtes intervenu à plusieurs occasions, Me
Bisson, que ce soit lorsque le député de Saint-Jérôme a été candidat, à
l'époque où il était dans la course, à différents moments, vous avez émis des
opinions qui n'étaient pas sollicitées par
les membres de l'Assemblée. Donc, de dire aujourd'hui qu'on ne vise pas un
individu, je pense que c'est faire
abstraction — je vous
le dis amicalement — de la
réalité de ce que vous avez fait. Et je vais revenir sur la forme plus tard, quant au manquement à l'obligation de
confidentialité prévu à l'article 109 de la Loi de l'Assemblée nationale qui est la
base de la confiance qu'on doit avoir envers quelqu'un qu'on consulte et sur
lequel le commissaire a eu des mots très durs.
Quant à votre
position sur la fiducie, c'est une opinion, une opinion qui n'est pas partagée
par tout le monde, en tout respect.
Et de dire que c'est illégal, je pense que vous allez à l'encontre de la
réalité juridique, il y a différents cas de figure qui le permettent. Deuxièmement, ce que je constate... Et
j'élaborerai un peu plus loin, un peu plus tard sur ce que peut être une fiducie, mais je vois aussi que
vous n'abordez pas la question du mandat. On peut faire une fiducie ou un
mandat sans droit de regard. Pourquoi vous
n'avez pas regardé cette question du mandat? Pourquoi elle ne vous préoccupe
pas? Pourtant, elle est prévue au Code
civil, elle est conforme... D'ailleurs, elle est beaucoup plus conforme à nos
règles civiles, elle s'inspire du
droit civil, pourquoi vous n'y avez pas fait mention d'aucune façon ni
aujourd'hui ni dans les commentaires que je lis dans les médias?
M. Bisson
(Claude) : ...répondre très
simplement, parce que le mandat est beaucoup plus permissif que la fiducie
sans droit de regard.
M.
Bédard : O.K. Mais
la loi permet de faire un...
M. Bisson (Claude) : Oui.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Si vous permettez, M. le député.
Aviez-vous terminé votre réponse, M. Bisson?
M. Bisson (Claude) : Pardon?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Aviez-vous terminé votre réponse?
M. Bisson
(Claude) : Oui, j'ai répondu
ça, le mandat est un instrument juridique beaucoup plus permissif que
l'est la fiducie sans droit de regard.
M.
Bédard : ...que le
code d'éthique prévoit la possibilité de faire un mandat sans droit de regard
aussi.
M.
Bisson (Claude) : Bien oui,
mais, écoutez, si c'est plus permissif... si je pense, moi, que la fiducie sans
droit de regard ne permet pas de faire ce que j'ai dit, bien, le mandat,
encore plus, ne le permettrait pas.
M.
Bédard :
Mais, Me Bisson, notre but aujourd'hui, ce n'est pas d'être conforme à votre
opinion. Le but de tout député, ce
n'est pas être seulement conforme à votre opinion, c'est d'être conforme à la
loi. Et la loi prévoit le mandat sans droit de regard, il est prévu dans
la loi.
M. Bisson
(Claude) : Bien oui, mais
c'est deux choses distinctes, là. Je ne voudrais pas insister là-dessus, mais
c'est tout à fait deux choses distinctes.
Et, depuis quelques mois, on a toujours parlé de fiducie sans droit de regard,
et c'est ça, ce dont je parle, moi, dans mes représentations.
M.
Bédard :
Sur la fiducie, je ne suis pas d'accord avec vous. Mais il reste quand même
que, la loi, on est d'accord, tous les deux, elle prévoit la possibilité
de faire aussi un mandat sans droit de regard.
M. Bisson (Claude) : Oui. C'est
clair, c'est en blanc et en noir dans la loi.
M.
Bédard : Donc,
quelqu'un qui ferait un mandat sans droit de regard avec une condition
d'inhabilité serait conforme à la loi?
M. Bisson (Claude) : Bien, il
faudrait voir le mandat, hein, il faudrait voir le mandat.
M.
Bédard : Exact.
Mais ça serait conforme.
M. Bisson
(Claude) : Bien, écoutez,
là, je ne veux pas me prononcer sur le mandat sans droit de regard. C'est
une question que je n'ai pas étudiée à fond
parce que j'ai étudié à... Je pense avoir étudié à fond la fiducie sans droit
de regard.
M.
Bédard : Allons sur
la fiducie maintenant. Il y a eu des fiducies de constituées depuis plusieurs
années.
M. Bisson (Claude) : Il y a eu quoi?
M.
Bédard : Il y a eu
plusieurs fiducies de constituées.
M. Bisson (Claude) : Oui.
M.
Bédard :
Je vais aborder celle de M. Whissell. M. Whissell a créé une fiducie
sans droit de regard à l'époque où il
était président de caucus et il l'a refait en 2009 lorsqu'il a quitté le
Conseil des ministres avec votre approbation. Est-ce que c'est vrai?
M. Bisson
(Claude) : Bien, écoutez,
là, si on parle d'une fiducie antérieure au code — et, dans
le cas dont vous parlez, c'est antérieur au code, hein? — c'est d'autre chose, hein? Bon, dans le
code, là, c'est évident que l'une des caractéristiques,
il va falloir que le commissaire accepte les termes d'une fiducie sans droit de
regard qui lui est présentée. D'ailleurs, l'article 45 le dit, il peut
mettre des conditions, ainsi de suite. La fiducie créée avant le code, bien, il
n'y a personne qui avait juridiction pour
l'examiner, hein? Personne ne donnait son approbation, dire : Oui, je
l'accepte comme une fiducie qui
répond à quoi, il n'y avait pas de code à l'époque, hein? Alors, qu'est-ce qui
s'est fait à l'époque? Je ne le sais pas.
M.
Bédard :
Non. Là, je vous parle... À l'époque, il n'y avait pas de code pour le Conseil
des ministres, c'était le premier
ministre qui était responsable pour les ministres. Et là il a baissé les règles, souvenez-vous, c'est ce qui a amené
le cas Whissell. Mais les députés, eux,
avaient parfois l'obligation — ils l'ont fait — de créer une fiducie sans droit de regard
avec votre avis. M. Whissell a sollicité
cet avis de votre part pour créer cette fiducie sans droit de regard à
l'époque, en 2009. Je sais qu'il l'a fait aussi en 2005, mais prenons le cas de
2009. Je sais qu'il l'a fait en sollicitant votre avis, et vous l'avez même... vous l'avez conseillé à différentes
occasions concernant la gestion de sa fiducie. Est-ce que c'est vrai, ça?
M. Bisson
(Claude) : Oui,
définitivement, il m'a consulté, hein? Mais, encore une fois, on est dans
un tout autre monde, là. Bon...
M.
Bédard : Bien, on est dans le monde des fiducies sans droit de regard, là. Le code n'existait pas, parce qu'à l'époque on n'avait pas de code, mais c'était une fiducie sans droit de
regard, là. Tout le monde le dit, vous l'avez dit à l'époque. Je vous donnerai les journaux, tout le
monde disait que c'était une fiducie sans droit de regard. On est d'accord?
M. Bisson (Claude) : Oui, oui.
M.
Bédard :
Bon. Ce que je constate, à l'époque, M. Whissell, vous avez donné votre
approbation pour une fiducie sans droit
de regard. Or, M. Whissell avait clairement dit qu'en aucun temps le
fiduciaire ne pouvait vendre ses actions parce que c'était un héritage familial. Ça, il l'a
dit spécifiquement, il l'a dit dans les médias. Je ne veux pas vous le montrer...
Ça, je pourrai vous le montrer un peu plus
tard parce que le temps imparti ne m'est pas donné. Mais donc vous saviez à l'époque que lui ne voulait pas vendre cet
héritage familial, c'est ce qu'il avait clairement dit en conférence de presse. Est-ce que c'est
exact, ce que j'ai dit?
M. Bisson (Claude) : Écoutez, là, il faudrait que je revoie mon
dossier, c'est un dossier d'il y a une dizaine d'années. Je peux vous
dire positivement que M. Whissell m'a consulté. À un moment donné, même,
il a distribué, je pense, six ou sept de mes
opinions que je lui avais données dans un espace de quelques semaines, là, ou quelques... de peu de mois, là. Bon, écoutez, il faudrait que je revoie mon
dossier. Mais qu'il m'a consulté, oui. Mais, encore une fois, on n'était
pas sous le code de 2010.
M.
Bédard : Et voilà
on était... Parce que, le code, on l'a modifié par la suite, on a prévu la fiducie et le mandat sans droit de regard. Mais, à l'époque, il a constitué cette fiducie parce qu'elle existait en dehors. C'est un principe de common law que vous connaissez très
bien, d'ailleurs. Et vous avez
certifié à l'époque que c'était une fiducie, ah! sans droit de regard, mais ce qui est clair aussi,
c'est que lui avait donné ordre de ne pas vendre ses actions. Mais, à l'époque,
ça ne posait pas de problème ni à moi ni à
personne à l'Assemblée, c'est drôle, et là c'était conforme à la fiducie sans droit de regard.
Aujourd'hui, c'est différent. C'est là-dessus, moi, que je me demande pourquoi une fiducie sans
droit de regard, à une certaine époque, était conforme alors qu'il y avait un
ordre de ne pas vendre, et, dans ce cas-ci... puis c'était une compagnie privée. Là, on est dans le cadre d'une compagnie publique, et là ce principe-là
ne s'applique plus. Je veux savoir comment
nous qui devons assurer une prévisibilité pour ceux et celles qui arrivent en
politique, comment on peut interpréter ça.
• (15 h 40) •
M. Bisson (Claude) : Écoutez, vous venez de mentionner des mots qui sont exacts, ce n'était
pas une entreprise cotée en bourse, hein?
M.
Bédard :
Exact.
M. Bisson (Claude) : Bon, alors qu'aujourd'hui on parle d'entreprise cotée en bourse, oui,
c'est ça, pour laquelle la fiducie
sans droit de regard doit être appliquée. Bon, écoutez, je voudrais bien vous
répondre, mais je ne peux pas en dire
plus. Je vous dis que mon opinion est donnée sur le code actuel. Ce qui s'est
passé avant et les opinions que j'ai pu donner n'étaient pas des opinions basées sur un texte écrit de code, il
n'y en avait pas, de code, et la Loi de l'Assemblée nationale ne
parlait, évidemment, pas de fiducie, encore moins de fiducie sans droit de
regard.
M.
Bédard :
Oui, mais vous l'avez autorisée comme une fiducie sans droit de regard. Je vais
aller plus loin. À l'époque, vous aviez même, selon les documents qu'il a
déposés...
M. Bisson
(Claude) : Pardon?
M.
Bédard : Selon les documents qu'il a déposés, les différents
avis que vous lui avez donnés, il a maintenu sa fiducie, qui était dans le cadre d'une compagnie privée qui faisait affaire
avec l'État, vous lui avez demandé d'intervenir auprès de son fiduciaire
pour éviter les contrats de gré à gré. C'est exact?
M. Bisson (Claude) : Bien, si vous le dites... Que j'ai dit ça? Bien, vous l'avez devant
vous, je ne renierai pas ce que j'ai dit.
M.
Bédard : Et vous voyez la constance, c'est là-dessus, là.
Moi, j'ai un cas de figure, là j'en ai un autre et je veux comprendre
c'est quoi, les différences entre les deux, à part ce que vous me dites, à part
votre affirmation forte. Or, à l'époque, le
principe de la fiducie... Vous savez, la common law, la fiducie sans droit de
regard, ça existe depuis... le «blind trust», ça existe depuis
longtemps. Puis, le mandat sans droit de regard, vous n'avez pas pris la peine
de le regarder.
M. Bisson
(Claude) : Non.
M.
Bédard : C'est ça qui m'étonne dans le cadre... Bon, l'avis
non sollicité d'un député, je reviendrai plus loin, c'est une chose. Mais de ne pas le faire
aujourd'hui dans le cadre de nos travaux, là c'est sûr que... Est-ce qu'on veut
éviter cette question du mandat sans
droit de regard, qui est prévu à la loi, qui est conforme aux objectifs qu'on
s'était donnés quand on a fait le code, d'assurer la prévisibilité des
règles de conflit d'intérêts pour...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : En conclusion.
M.
Bédard :
...tous ceux et celles qui viennent en politique?
M. Bisson (Claude) : Je vais être obligé de vous répéter que le mandat sans droit de regard
est plus permissif que la fiducie. Alors, voilà, hein?
M.
Bédard : Merci.
M. Bisson
(Claude) : Si la fiducie ferme la porte, on la ferme encore plus pour
le mandat.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, ça complète ce premier bloc d'échange. Je me tourne maintenant
vers le député de Deux-Montagnes. Vous disposez de sept minutes, M. le
député.
M.
Charette : Merci, M. le Président. Un plaisir de vous retrouver cet
après-midi, M. Bisson. Un gros merci de votre disponibilité. Le président a évoqué tout à l'heure votre parcours
professionnel. On peut s'estimer chanceux, comme Assemblée nationale, de pouvoir compter sur votre éclairage, de pouvoir
compter sur votre expertise. Un gros merci, encore une fois, de vous rendre disponible pour répondre
à nos questions. Et peut-être vous mentionner qu'au niveau de la deuxième
opposition, soit la Coalition avenir Québec,
vous avez toute notre confiance, et c'est avec plaisir que l'on prend ce temps,
là, pour échanger avec vous cet après-midi.
J'ai suivi
les échanges, au niveau notamment de la fiducie sans droit de regard. C'est un
thème qui est certainement très
important, et je comprends que votre rôle est beaucoup d'éviter qu'un élu se
place en conflit d'intérêts. J'ai un cas de figure à vous présenter, celui d'un élu qui est propriétaire d'un
conglomérat, qui, à travers les différentes entreprises qu'il possède, intervient dans une multitude de champs
d'action. Ce même élu, à travers ses corporations, a jugé bon de faire inscrire tout près de 77 lobbyistes auprès de
différents ministères pour défendre ses intérêts, pour défendre les intérêts
de ses compagnies.
Comment un
élu, qui aspire, on peut le deviner, à diriger éventuellement à travers sa
formation politique le Québec, peut
s'assurer de ne pas se placer en conflit d'intérêts alors qu'il a tout près
d'une centaine de lobbyistes qui, au quotidien, s'activent à défendre, justement, les intérêts de sa corporation?
Comment s'assurer qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts dans pareille
circonstance?
M. Bisson
(Claude) : Bon, écoutez, il
faut bien faire attention de ne pas confondre les règles de conflits d'intérêts
pour les membres du Conseil exécutif des
règles de conflits d'intérêts pour les parlementaires qui ne sont pas membres
du Conseil exécutif, hein? Il faut bien
faire attention. L'article 18, qui traite des parlementaires qui ne sont pas
membres du Conseil exécutif, hein, ne
défend pas à un parlementaire d'avoir des actions où il veut en avoir.
Qu'est-ce que l'article 18 défend? Il
défend que personnellement parce que... Je dis personnellement parce que je
veux en venir à autrement que personnellement
le député ne peut directement ou indirectement participer à un marché... On ne
dit pas : Il ne peut pas avoir
des actions, il ne peut avoir ci et ça, il ne peut pas participer à un marché
avec le gouvernement, un organisme public. Et c'est vaste, un organisme
public, hein? Ce sont les hôpitaux, les cégeps, tout ce que vous voulez.
Et,
toutefois, un député peut avoir un intérêt dans une entreprise. Là, ce n'est
plus lui personnellement, là, il a un intérêt
dans une entreprise — c'est
l'article 18, hein — qui
participe à un marché avec le gouvernement, un organisme public. D'accord? Alors là, on fait une
distinction entre l'entreprise dont les titres sont cotés en bourse ou
l'entreprise dont les titres ne sont
pas cotés en bourse. Alors, l'article 18 dit : Pour les entreprises qui ne
sont pas cotées en bourse, là, c'est le
Commissaire à l'éthique qui donne la permission, le O.K., hein? Par exemple,
Mme ou M. le député est actionnaire d'une
entreprise qui a un contrat avec le gouvernement. Il s'adresse au commissaire,
et le commissaire décide s'il peut garder
l'intérêt dans l'entreprise quand elle a un contrat avec le gouvernement. Ou,
dans le cas d'une autre entreprise, celle
cotée en bourse, c'est l'importance de l'intérêt ou les circonstances entourant
la conclusion du marché qui permettent au député d'aller de l'avant ou
non.
Exemple, un député, par exemple, a 50 actions de
Rio Tinto Alcan, qui a des contrats avec le gouvernement, j'imagine, hein? Il a 50 actions sur je ne sais
pas combien de 100 000 actions qu'il peut y avoir en circulation, 50
actions donc qui valent, disons,
1 000 $ pour les fins de la discussion. Tout ce qu'il a à se
demander, ce député-là, là : Est-ce que ça me met dans une position... Non, parce que l'importance de l'intérêt,
50 actions dans une entreprise comme ça, ce n'est pas beaucoup. Ou encore les circonstances
entourant la conclusion du marché, ça peut être, les circonstances, les appels
d'offres, ainsi de suite. Alors, ça, c'est
pour le député. Il a des actions comme il veut, où il veut, tandis que le
membre du Conseil exécutif n'a pas des actions où il veut et quand il
veut. Alors, c'est ça, la distinction.
M.
Charette : Effectivement, la distinction est importante. Mais, dans le
cas de figure que je vous illustrais, si le député n'est pas simple détenteur d'actions, mais il est bien
actionnaire de contrôle d'un conglomérat, la nuance, elle est toute là. Et d'ailleurs le Commissaire à
l'éthique, dans l'une des recommandations qu'il nous fait, c'est justement,
lorsque la situation, elle est
exceptionnelle, d'étendre à un non-membre du Conseil exécutif, mais également
député à l'Assemblée nationale
certaines dispositions plus contraignantes. Est-ce que vous êtes d'accord avec
cette proposition-là faite par le Commissaire à l'éthique?
M. Bisson
(Claude) : Oui, mais, encore
une fois, l'article 18 concerne non pas la possession de ce qu'a le député,
il concerne les contrats, hein? S'il n'y a
pas de contrat, l'article 18 ne s'applique pas, hein? Il y a toujours ça. En
premier lieu, il ne peut pas avoir de
contrats personnellement. Deuxièmement, avoir un tel intérêt dans une
entreprise qui participe à un tel
marché, c'est le reste de l'article. Alors, toujours le député, en vertu de
l'article 18, est en relation avec un contrat qu'il aurait personnellement ou un contrat avec une
entreprise soit cotée en bourse ou non, mais toujours dans l'optique d'un
contrat.
M.
Charette : Je complète l'illustration du cas de figure. Le député
n'est peut-être pas membre du Conseil exécutif, mais aspire à le devenir. Il est actionnaire de contrôle d'un
conglomérat qui, lui, est justement coté en bourse. Donc, on parle d'une entreprise publique, et ses
entreprises font quotidiennement pression de façon tout à fait légale à travers
différents lobbyistes inscrits auprès d'une
multitude de ministères, non pas un en particulier, mais d'une dizaine, sinon
d'une quinzaine de ministères. Donc, est-ce
que ça peut correspondre à la situation exceptionnelle que le Commissaire à
l'éthique nous invite à revoir, et
situation exceptionnelle qui rendrait justifiable et légitime une modification
de notre code d'éthique actuel?
M. Bisson (Claude) : Bien,
écoutez...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
En 20 secondes.
M. Bisson
(Claude) : ...il faudrait
que je voie les amendements qui seraient proposés au code, autrement je ne
peux pas me prononcer.
M. Charette : C'est gentil. Merci.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Merci. M. le député de LaFontaine, à vous la parole.
M. Tanguay : Pour neuf
minutes, je crois, M. le Président?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
On ne peut rien vous cacher.
M. Tanguay :
Neuf minutes? Oui. Bon, parfait, merci. M. Bisson, Me Bisson, vous avez été
juge pendant 25 ans, de 1969 à 1994.
M. Bisson (Claude) : 1996. 1996.
M. Tanguay : 1996, pardon.
M. Bisson (Claude) : Vous me
rajeunissez, là, 1994. 1996.
• (15 h 50) •
M. Tanguay :
Alors, que d'expérience! On parlait un peu plus tôt sur ces contrats, ces actes
juridiques qui sont la fiducie, le
mandat. Vous en avez vu passer, vous avez dû en interpréter et appliquer le
Code civil du Bas-Canada, qui est devenu le Code civil par la suite en 1994. On vous
a cité des exemples, on a parlé du cas du député David Whissell avant le code actuel, qui a été adopté en 2010. Au
niveau de la pertinence quant à l'interprétation d'un texte qui allait être
mis en application dans l'année qui suit,
comment jugez-vous la pertinence de ce débat-là, quant à essayer de débusquer
l'intention du législateur un an avant par
un cas de jurisprudence quand la loi n'était pas encore en vigueur? Comment
qualifieriez-vous cette façon de fonctionner?
M. Bisson
(Claude) : Bien, je ne veux
pas me prononcer là-dessus, hein, je souligne qu'il y a une loi qui est entrée
en vigueur en partie le 1er janvier... non,
même au mois de décembre, là, certains articles, hein? Avant ça, il n'y avait
pas de loi, il y avait la Loi de l'Assemblée nationale qui était très
squelettique sur la question des conflits d'intérêts.
M. Tanguay : Alors, seriez-vous d'accord avec moi que le fait
de reprendre cette jurisprudence-là — appelons-la
ainsi — pour essayer d'interpréter un texte qui a été mis
en application, mais après, est, sur le plan juridique, pour rester
poli, extrêmement questionnable et injustifiable?
M. Bisson (Claude) : Alors, je ne me
prononce pas.
M. Tanguay : Bon. Me Bisson, on parlait de fiducies et mandats
sans droit de regard. Les termes sont importants ici.
On dit : Soit par le véhicule de la fiducie soit par le véhicule du
mandat, dans les deux cas sans droit de regard. Le Commissaire à
l'éthique — et
vous avez sûrement lu sa note d'information de février 2014 qui a été publiée
le 3 mars 2014, avant le déclenchement
des élections, février 2014 — précisait
cette expression, «fiducie et mandat sans droit de regard», l'appliquait aux deux véhicules, fiducie ou mandat
sans droit de regard, et disait, je le cite : «Dans tous les cas, il est interdit de s'adresser au membre
de l'Assemblée nationale pour obtenir des directives ou des conseils sur
la gestion des biens qui ont été transportés ou leur aliénation.»
Dans votre
opinion que vous avez écrite le 10 mars 2014, vous parlez, une année
après, de l'expression «sans droit de
regard». Donc, indépendamment de la fiducie ou du mandat, vous nous dites — et
j'aimerais vous entendre là-dessus, et
je vous cite : L'application intégrale du qualificatif — et
là vous le mettez entre guillemets — «sans droit de regard» est la seule façon d'atteindre cet objectif.
Alors, êtes-vous d'accord avec moi que ce qui est important, que ce soit tantôt
la fiducie ou tantôt le mandat, ce qui est
important, c'est que ce soit sans droit de regard dans le code actuel et qu'en
ce sens-là d'interdire de vendre ce
serait avec droit de regard, donc ce qui ne tiendrait pas la route en vertu de
l'article 45?
M. Bisson (Claude) : Bien, oui, sans
droit de regard, c'est sans droit de regard.
M. Tanguay : Et, si c'est un
mandat, il a-tu plus le droit de regard ou il a... Non, non, c'est la même
chose.
M.
Bisson (Claude) : Bien,
laissons faire le mandat pour le moment, là, il a toujours été question de
fiducie sans droit de regard, hein?
Et le mandat, encore une fois, comme je vous dis, c'est plus permissif qu'une
fiducie. Alors, bon, ce qui vaut pour la fiducie, à plus forte raison,
vaut pour le mandat.
M. Tanguay : Pourquoi vous
dites à plus forte raison?
M. Bisson
(Claude) : Bien, parce que
c'est plus permissif, un mandat, c'est plus large, là. Pour comment le
fiduciaire peut naviguer avec le mandat, c'est beaucoup plus large
que...
M. Tanguay : O.K. Je
comprends votre point, le mandat est beaucoup plus large que la fiducie au
départ.
M. Bisson (Claude) : Oui.
M. Tanguay : La fiducie, au
départ, est plus restrictive que le mandat.
M. Bisson (Claude) : Oui.
M. Tanguay :
Quand on dit «fiducie sans droit de regard», on fait un pas qui est moins loin
que de dire «mandat», qui est plus
permissif. Mais «sans droit de regard», là on exige un pas — sans droit de regard — qui est plus long à faire dans le cas
du mandat. C'est ça que vous dites.
M. Bisson (Claude) : Oui.
M. Tanguay :
Je viens de comprendre. Parce que vous avez dit un peu plus tôt : Le
mandat est plus permissif, comme si
un mandat sans droit de regard, ah! là, il peut dire : Vous ne vendrez pas
mes actions. Vous, vous dites : Non, a fortiori, si, dans le cas du mandat, qui est plus permissif, on dit
«sans droit de regard», là il est clair qu'il ne pourra pas interdire la
vente. C'est ce que vous dites.
M. Bisson (Claude) : Bien, enfin,
c'est ça, c'est le «sans droit de regard» qui fait foi de tout, hein?
M. Tanguay :
Merci beaucoup. Sur, maintenant, la nature, la nature médiatique, qui est
importante, ça fait partie de la
recommandation 23 du Commissaire à l'éthique, vous parliez d'un concept un peu
plus tôt, et j'ai eu l'occasion de vous lire dans une entrevue que vous donniez
au niveau de l'influence. Prenons pour acquis qu'une personne est dans
la légalité. Il est ministre, il a de nombreuses actions de différentes
compagnies, dont médiatiques. Il a mis en place un mandat ou une fiducie sans
droit de regard. Dans les deux cas, ça veut dire qu'il ne peut pas interdire de
vendre. Alors, le ministre, fiducie ou
mandat sans droit de regard, mais là
vous ajoutez l'importance aussi de se questionner, même si les actions sont dans une fiducie
sans droit de regard, vous
dites : Quand vous êtes propriétaire — et je vous cite, ça, c'est le 11 mars
2014 — d'une
majorité d'actions, vous exercez toujours une certaine influence, ne serait-ce
que morale.
J'aimerais
vous entendre là-dessus pour éclairer nos travaux, sur... Même prenant
pour acquis que la personne est
légale, sans droit de regard, il ne demeure pas moins — et
c'est un concept, j'imagine, sur lequel vous nous invitez à réfléchir — que,
s'il est propriétaire — et
je vous cite — «d'une
majorité d'actions», vous exercez toujours une certaine influence, ne serait-ce
que morale, et j'aimerais vous entendre là-dessus, sur cet aspect-là de votre
réflexion.
M. Bisson
(Claude) : C'est un aspect,
ça, qui peut être assez subjectif, hein, et j'aime mieux, pour les fins de ma
présentation et de mes discussions aujourd'hui, de m'en tenir au texte du code et ce qui est inscrit là. Alors, le
rayonnement ou l'atmosphère que ça
peut créer, là, je préférerais ne pas entrer dans ce domaine-là parce que
ce n'est pas de ma compétence comme peut l'être la question juridique.
M. Tanguay : O.K. Et...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. le député.
M. Tanguay : Une minute?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Deux minutes.
M. Tanguay : Deux minutes.
Oui, merci beaucoup. Vous avez lu, évidemment, le rapport du Commissaire à l'éthique... pardon, oui, le Commissaire à
l'éthique, 23 recommandations. Il parlait de certains cas exceptionnels et il
nous invitait, nous, parlementaires,
là, les 125 parlementaires... 123, bientôt 125, à se questionner sur ces 23
recommandations. C'est ça, l'objet du
débat aujourd'hui pour lequel on vous demande de nous donner votre opinion.
Recommandation 23, il disait :
La nature, faites attention, nature médiatique, il y a un élément, un
astérisque, là, qui devrait nourrir votre réflexion. Et l'importance, un député qui est actionnaire
d'une compagnie versus un autre député qui est actionnaire de 100 compagnies.
Alors, «médiatique», «importance», pour
vous, là, bientôt 19 ans jurisconsulte, quel éclairage avez-vous à donner
aujourd'hui avec votre expertise aux parlementaires qui doivent aborder
cette importante question?
M.
Bisson (Claude) : Bien,
écoutez, il faut toujours faire attention — vous le savez, vous êtes le
législateur — toujours
attention à des situations qui peuvent être
hors de l'ordinaire et de légiférer généralement pour ces situations-là. Je
n'irai pas plus loin à dire ça, mais il faut faire attention avant de
légiférer sur des situations exceptionnelles.
M. Tanguay :
Et, dans ce contexte-là, de façon plus précise, pouvez-vous nous dire si votre
expertise, justement, les cas que
vous avez eu à rencontrer... Parce que, lorsque l'on parle d'un actionnaire,
corrigez-moi si j'ai tort, mais un actionnaire
majoritaire, évidemment ce n'est pas comme d'être actionnaire minoritaire. Ça,
vous l'avez constaté, il y a une différence nette, n'est-ce pas, en
termes d'influence que l'on a sur la compagnie.
M. Bisson
(Claude) : On revient à ce
que je vous ai dit tout à l'heure, je préférerais m'en tenir aux textes
juridiques et aux arguments que j'ai développés que de parler
d'atmosphère ou d'influence.
M. Tanguay : Merci. Je
reviendrai, M. le Président — mon temps est terminé — sur
le prochain bloc.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Effectivement, ça complète. M.
le député de Mercier, à vous la parole. Vous disposez de
4 min 30 s.
Une voix : ...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Oh, pardon! M. Bisson?
M. Bisson
(Claude) : ...parce que
j'avais peur de l'oublier. Vous avez mentionné que je n'avais pas parlé d'autre
chose que des fiducies sans droit de regard.
Je vais vous mentionner une chose, c'est dans un tout autre ordre d'idée, je
suis parfaitement d'accord avec le
commissaire sur l'article 25, qu'un député qui a un intérêt personnel et
financier soit tenu non seulement de
dévoiler son intérêt... soit tenu de ne pas parler et de sortir de la Chambre,
je trouve ça excessif. J'aime
beaucoup mieux ce que la Loi de l'Assemblée nationale disait avant :
Dévoile son intérêt, mais peut participer. Et, avant, il pouvait même voter. Je serais d'accord pour ne peut pas
voter, mais au moins participer. Parce que la personne qui a un intérêt peut avoir des arguments très
intéressants à dire, et je ne vois pas pourquoi on la mettrait à la porte de la
salle. Ça, c'est un article avec lequel je
suis d'accord entièrement avec le commissaire, un des articles. Il y en a
d'autres, mais celui-là, ça m'a frappé. Excusez cette digression-là,
mais je ne voulais pas oublier de vous le dire. Excusez.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Je vous remercie. M. le député de Mercier, à vous la parole.
• (16 heures) •
M. Khadir : Je veux vous
saluer, M. le Président, mes collègues, mais également M. Bisson. Merci de
votre présence. Le leader de l'opposition, quand il mentionne que personne n'est dupe, que l'essentiel, disons,
de nos interrogations depuis deux
semaines sur les questions d'éthique et de déontologie visent quand même...
Il ne faut pas l'oublier, il y a le rapport,
oui, du Commissaire à l'éthique et à la déontologie, mais l'essentiel des
interrogations du public, des parlementaires, des médias, c'est le conflit d'intérêts
éventuel du député de Saint-Jérôme.
Maintenant,
le cas de M. Whissell a été évoqué par mon collègue. Je veux lui rappeler ce
que disait sa collègue de Taschereau
et qui est ici présente : «La
fiducie que plaide M. Whissel entre lui et son entreprise comme étant un écran,
un pare-feu[...]. C'est un écran de fumée en
fait», puisqu'il dit bien qu'il tient à reprendre sa compagnie quand il sortira
de sa vie publique. Il a ordonné à sa
fiducie de ne pas se départir de ses intérêts dans sa compagnie, alors il y a
un problème sérieux. Ou bien qu'il se
démette... Il n'est pas obligé de vendre son entreprise, il suffit de céder son
siège au Conseil des ministres.
Je pense qu'elle avait raison de dire ça parce que la question du conflit d'intérêts,
malheureusement, même, à mon avis,
n'est pas évitée par une fiducie sans droit de regard tant et aussi longtemps
que la fiducie ne s'est pas complètement départie des intérêts à l'intérieur de cette fiducie. Et prenons
l'exemple, le cas de figure du député de Saint-Jérôme parce que la chose qui préoccupe le plus la population,
c'est que l'entreprise que possède le député de Saint-Jérôme, c'est un immense conglomérat médiatique qui a un impact
permanent, quotidien avec tout ce qui est fait au Québec, notamment à l'Assemblée nationale, les décisions politiques.
Alors, ça pose une contrainte intolérable sur la tête de tous les journalistes
qui oeuvrent dans son conglomérat quand il
vient de commenter les comportements de l'opposition du Parti québécois ou du chef de l'opposition, et les commentaires,
la chose politique, tant et aussi longtemps qu'ils seront à tout moment,
avant que cette entreprise ne soit vendue à
un autre intérêt... qu'à tout moment, pour différentes raisons, dans deux ans,
dans trois ans, le chef de cette entreprise peut revenir.
Est-ce qu'il
y a d'autres moyens d'éviter ce conflit d'intérêts? Parce qu'il me semble que,
même à sa face même, dans le contexte
exceptionnel, exceptionnel, dans le cas très particulier du député de
Saint-Jérôme, même une fiducie sans droit de regard présente un problème
de conflit d'intérêts permanent, potentiel.
Mme
Maltais : M. le
Président...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Est-ce qu'on a une question de règlement?
Mme
Maltais :
...collègue à la prudence. Il a parlé de conflit d'intérêts. Qu'il parle de
possibilité ou d'éventualité, c'est une chose, mais là il est allé
beaucoup trop loin dans ses propos.
M. Khadir :
...qu'en matière de conflit d'intérêts, dans toutes les réglementations et les
codes de déontologie occidentaux, l'apparence de conflit d'intérêts est aussi
grave que le conflit d'intérêts lui-même, la possibilité...
Mme
Maltais :
M. le Président, je lui demande de retirer ce qu'il vient de dire, là, ce qu'il
a dit tout à l'heure. Qu'il change de termes.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, ça va aller. J'ai compris
l'intervention, la précision du député de Mercier, qui est techniquement exacte. Ce que demande
l'opposition officielle, c'est de ne pas affirmer que le député de Saint-Jérôme
est en situation de conflit d'intérêts. Pour les fins de la discussion, je
pense qu'on peut s'en tenir à cette possibilité.
M. Khadir : Ce que j'ai mentionné, c'est que ça
peut le placer... Si on ne le protège pas, ça va le placer forcément
dans des situations de conflit d'intérêts graves, là.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Et voilà. Je pense qu'avec cette
précision l'opposition officielle est... M. Bisson, à vous la parole.
M. Bisson (Claude) : Alors, ce n'est
pas mon intention de parler de quoi que ce soit au sujet du député de
Saint-Jérôme.
M. Khadir : ...fiducie sans droit de regard. Le
député de Mercier — là, vous
êtes autorisé quand même de parler de
moi, si je vous pose la question, d'accord? — j'ai une fiducie sans droit de regard dans
laquelle j'ai des intérêts, par exemple,
d'une grande entreprise minière. D'accord? Minière. Et tout le monde sait que,
tant et aussi longtemps, donc, que
cette entreprise n'est pas vendue, j'en suis le patron. Comment est-ce que je
peux éviter des conflits d'intérêts, même si je n'ai aucun droit de regard, en le plaçant uniquement dans une
fiducie sans droit d'intérêt si, à titre de ministre ou chef de l'opposition, si, un jour, je le deviens,
chef de l'opposition, je suis appelé tous les jours à prendre des décisions
économiques qui ont un impact sur le secteur
minier au Québec, puisque c'est un des secteurs d'activité d'importance?
M. Bisson
(Claude) : On va parler de
votre cas si vous voulez. On va parler de votre cas, hein? Bien, évidemment,
c'est sûr que, si vous êtes propriétaire
d'une entreprise minière importante, là, et que vous placez sans droit... une
fiducie sans droit de regard, ça
prendra probablement un bon instant avant que les gens oublient que vous étiez
et que vous ne l'êtes peut-être plus parce que personne ne le sait, qu'est-ce
qu'il y a dans la fiducie sans droit de regard, hein? Bien, ça peut
prendre un certain temps avant que les gens oublient que vous étiez
propriétaire de vastes terrains miniers.
M. Khadir : Vous êtes en train de dire, là,
jusqu'à ce moment arrive, je suis en situation où je pourrais être en
conflit d'intérêts.
M. Bisson (Claude) : Bien...
M. Khadir : ...
M. Bisson (Claude) : Non, écoutez,
là...
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, le gouvernement offre que
vous puissiez répondre sur le temps de... M. Bisson, vous pouvez
répondre à la question.
M. Bisson
(Claude) : Écoutez, vous parlez de choses qui sont excessivement
subjectives, hein? Bon, qu'est-ce que la population peut penser, pendant
combien de temps, on ne le sait pas, hein? Mais c'est évident que, si vous êtes
propriétaire puis vous placez dans une
fiducie sans droit de regard... bien, avant que ça s'étiole, là, puis qu'on
oublie ce qu'il peut y avoir dans la fiducie, ça peut prendre du temps,
c'est évident.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça complète ce bloc d'échange. M. le député de Chomedey, à vous la parole.
M.
Ouellette : Merci,
M. le Président. Me Bisson, bienvenue. Ça fait toujours plaisir d'avoir
l'opportunité de vous recevoir en ce
salon rouge. Parce que je pense que c'était à La Fontaine la dernière fois
qu'on vous a vu, et c'était dans le cadre des auditions particulières,
et ça aurait fait six ans vendredi. Et on avait suivi avec beaucoup d'intérêt
votre participation à nos travaux, et, dans
les différentes discussions que nous avons eues lors de cette audition
particulière là, vous aviez fait mention... Parce que c'est quelque chose qui
nous intéresse, parce qu'on aura, par rapport au rapport qui nous a été
présenté par le commissaire, à se pencher sur un ensemble de
recommandations — et
il n'y a pas juste la recommandation 23, il
y en a 22 autres aussi — de façon à moderniser notre code qui a été adopté en décembre
2010, et vous nous aviez fait part
lors de votre présence que vous aviez à l'intérieur du Canada... bon, comment
c'est qu'on s'était actualisés, nous
aussi, par la loi n° 48, on était les derniers à joindre les rangs des
différentes législatures touchant... que ce soient les membres de la Chambre des communes ou que ce soit l'ensemble
des députés des différentes législatures et territoires, et que vous aviez, annuellement, à vous rencontrer, disons,
les experts ou, disons, les gens qui étaient placés dans la même situation que vous qui aviez à donner
des avis aux membres de la législature québécoise en vertu de la Loi de
l'Assemblée nationale.
Ça m'avait
suscité à l'époque... Parce que votre opinion de 2009, vous nous l'avez
mentionné, par rapport à celle de
2015, par rapport à vos positions, elle est la même que celle que vous aviez en
2009. Et, dans un souci d'actualiser le code actuel et dans un souci de faire un bon travail qui touche
l'ensemble des 125 députés, si vous aviez à nous faire... Bien, dans un premier temps, je vais vous demander
un commentaire suite à l'adoption du code, tel qu'il a été adopté en décembre, qui est le fruit de longs travaux qui se
sont échelonnés sur plus d'une année. J'avais l'impression, en 2010, que nous avions la mouture la plus actuelle à ce
moment-là par rapport aux autres législatures. Je présume que les autres
ont dû s'actualiser aussi depuis que nous avons adopté notre code. Et, si vous
aviez à nous faire des suggestions sur différentes
personnes que nous devrions entendre dans la poursuite de nos travaux, dans le
but d'actualiser notre code actuel,
quelles suggestions vous nous feriez pour être en mesure de le rendre plus
actuel et de remplir les besoins pour lesquels il a été adopté
unanimement en 2010?
M. Bisson (Claude) : Alors, vous
voulez que je me prononce sur quoi au juste?
M.
Ouellette : Je veux que vous nous fassiez... si vous avez des
suggestions à nous faire parce que vous nous dites
qu'annuellement vous vous rencontriez en
2009, vous vous rencontriez une fois par année pour discuter des... peut-être pas
des différents dossiers, mais des différentes situations qui se traduisaient
au niveau des législatures et des territoires à
l'époque. Vous nous aviez fait cette remarque-là, et je regardais que, dans la
lettre que vous avez transmise le 10 mars 2015, vous faites référence à
ce qui se passe en Alberta, en Colombie-Britannique et en Ontario, et je suis
intéressé de vous entendre, si on avait, aujourd'hui, à soumettre des noms de personnes qui pourraient venir nous actualiser
ou nous faire part de leurs
réflexions d'experts dans différentes autres législatures, quelles suggestions
vous seriez en mesure de nous faire.
• (16 h 10) •
M. Bisson (Claude) : Bien,
justement, là, l'annexe que j'ai faite à mon exposé d'aujourd'hui, ça vient
d'une discussion qui était à l'ordre du jour
de notre réunion de 2011 qui avait lieu à Victoria, et j'avais trouvé à
l'époque que c'était un document, si on prend le temps de l'examiner, là,
qui était très complet sur la fiducie sans... le «blind trust», comme on les
appelle, hein? Alors, cette année, la réunion... aura lieu ici, à Québec — elle est organisée par le commissaire — au début
de septembre, oui. Alors, on discute des différents sujets établis à l'avance,
et c'est très intéressant, mais je ne peux pas vous pointer sur quelque chose, là... «Blind trust» c'est très
clair, puis j'ai les références dans les législations des autres
provinces où on établit les caractéristiques de ce qu'ils appellent un «blind
trust».
M.
Ouellette :
M. le Président, est-ce que c'est des... Le «blind trust», je regarde que, dans
votre opinion à vous, ce n'est pas
quelque chose qui a évolué dans l'étude du code qu'on avait, dans l'étude de la
loi n° 48 qu'on faisait en 2009, vous avez la même opinion en 2009
qu'en 2015. Je présume que... Dans les discussions que vous avez eues avec les collègues des autres législatures ou des
territoires, est-ce que leur notion... ou l'évolution dans les autres provinces
est différente ou on est encore au
même point qu'on était en 2009 sur le «sans droit de regard», les fiducies ou
les mandats?
M. Bisson
(Claude) : Bien, écoutez, la
dernière revue de la législation que j'ai, moi, c'est de 2014, hein? Et, bon,
si on prend connaissance du texte de... oui,
de... on va voir, là, que cela se répète pratiquement mot à mot dans les autres
provinces, là. Je n'ai pas d'exemple de
d'autres provinces, mais j'ai les législations d'autres provinces. J'ai la
législation, évidemment, de la
Colombie-Britannique et le texte qui ne fait pas partie de la législation, mais
qui est recommandé par le commissaire là-bas.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
...M. le député.
M.
Ouellette : D'où la suggestion que vous nous faisiez d'entrée
de jeu dans votre commentaire du début où vous nous faisiez humblement la suggestion de regarder un changement d'ordre
législatif ou qui pourrait être l'élaboration d'un modèle de l'acte qui crée une telle fiducie et
qui, sans faire partie du code, pourrait être recommandé par le commissaire.
Vous basez votre suggestion sur ce qui se
passe en Colombie-Britannique. Je présume qu'entre 2009 et 2015 ça a été un
sujet d'actualité pour que, présentement, en Colombie-Britannique, vous basiez
vos commentaires là-dessus.
M. Bisson
(Claude) : ...surtout parlé
en 2011 parce que c'était à l'ordre du jour de la réunion, hein? Et
on en a parlé en long et en large à ce moment-là, et ce que j'ai fait depuis ce temps-là, c'est simplement
concrétiser et mettre des textes sur l'opinion que j'avais et que j'ai toujours
eue depuis 2009. Ce qui me semble important, c'est que, si vous décidiez d'établir des caractéristiques de la
fiducie sans droit de regard, pour qu'il n'y ait pas de doute... Parce que,
là, on est laissé un peu dans le
vague, hein, on interprète, mais, évidemment, l'inspiration que vous pourriez prendre des
autres provinces, les différentes
caractéristiques qui reviennent pratiquement toujours à la même chose,
bien, soient étudiées par vous autres, les législateurs, pour les
inclure dans des amendements au code.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce bloc d'échange. Je me tourne vers le député de Chicoutimi. À vous la parole.
M.
Bédard : Merci. Rebonjour, Me Bisson. Donc, je reviens sur
l'avis que vous avez donné à Me Whissell le 16 septembre 2009. Vous y faites référence, il faut tenir compte de deux aspects de votre
situation dans ABC Rive-Nord. Là, il était redevenu
député. Là, vous avez appliqué le principe de la fiducie sans droit de regard,
vous y mentionnez : Il faut
tenir compte de deux principes, votre position d'actionnaire minoritaire et que
vos intérêts dans cette entreprise ont été
placés dans une fiducie sans droit de regard. Donc, à ce moment-là, vous avez constaté qu'il y avait une fiducie
sans droit de regard.
M. Bisson
(Claude) : ...soumis un
texte, tu sais, que l'avocat de M. Whissell m'avait soumis, un texte, hein?
Bon, je n'ai pas revu ce dossier-là
depuis ce temps-là, mais je ne renie pas ce que j'ai pu dire, hein?
M.
Bédard :
Parce qu'à ce moment-là, c'est ce que je disais tantôt, lui avait clairement
dit qu'il ne pouvait pas vendre les
actions, c'était un héritage familial. Mais, malgré cela, c'était une fiducie
sans droit de regard. C'est pour ça que,
pour nous, c'est une fiducie, là,
puis ce n'est pas une fiducie dans d'autres occasions. Et je reviens à l'article
dont mentionnait mon collègue, je
l'ai lu au complet. Vous avez donné une entrevue à La Presse, à Denis Lessard et Paul Journet, le 11 mars — jour
de ma fête, d'ailleurs — 2014,
pendant la campagne électorale. Quant à la question sur les problèmes...
Une voix : ...
M.
Bédard : 2014, pendant la campagne électorale. Là, je le
cite au texte : «Quand on lui demande s'il voit un problème au fait qu'un élu soit propriétaire de la
majorité des actions d'une société, le juge Bisson répond sans hésiter: "Cela
dépend. Si c'est le cas d'une société comme Bombardier Produits récréatifs,
c'est bien différent que l'ancien patron et l'actionnaire majoritaire
d'une entreprise de communications, d'une entreprise de presse."»
Donc, ce que je comprends de votre avis, c'est que, si un député ici avait des actions
majoritaires de Bombardier Produits récréatifs et qu'il les plaçait soit
dans une fiducie ou avec mandat sans droit de regard, il serait, selon vous, conforme parce
qu'il ne possède pas une entreprise
dans le domaine des communications. C'est ce que je comprends de ce que
vous avez dit dans l'entrevue. Est-ce que c'est exact?
M. Bisson
(Claude) : Non, pas du tout.
Pas du tout. C'est que la population du Québec, hein — vous
êtes élus pour représenter la population du Québec — ils
ne s'intéressent pas beaucoup à savoir qui est actionnaire de Bombardier
Produits récréatifs, hein, tandis que, dans des entreprises autres, ça intéresse
beaucoup plus la population.
M.
Bédard :
O.K. Mais c'est là où on a un problème, Me Bisson, c'est que c'est votre
opinion. Et votre opinion dit :
Une entreprise de presse, même si je fais une fiducie, on ne peut pas. Mais,
dans le cas d'une entreprise aussi importante que Bombardier Produits récréatifs qui fait affaire avec le... qui
demande, bon, qui a des subventions, qui peut avoir, des fois, des négociations avec Investissement Québec,
là il n'y a pas de problème parce que la population, elle, peut avoir un
avis différent. Mais, entre vous et moi, ça, ce n'est pas une question de
conflit d'intérêts, ce n'est pas une question d'éthique,
c'est une question de perception du public, d'appréciation. Là, on sort de
votre domaine — en tout
respect — de
compétence.
M. Bisson
(Claude) : Bien, écoutez, il
faut que, dans un code comme celui que vous avez adopté en 2010, là... il
faut faire tous les efforts possibles, et
vous les avez faits à l'époque, il n'y a pas de doute là-dedans, mais pour
tenir compte comment la population va réagir, hein, comme pour toutes
les lois, hein? Bon.
M.
Bédard :
Permettez-moi de dire : Si c'était ça, laissons la population choisir
d'abord, effectivement. Mais là on
n'est plus dans l'éthique, on est dans autre chose, et effectivement... Et M.
le député de Saint-Jérôme, lui, a gagné son élection. Donc, la population, elle, a mis son imprimatur là-dessus,
elle a dit : Oui, il n'y a pas de problème en ce qui nous concerne.
Je vais aller
plus loin, et, encore là, en tout respect, M. le juge Bisson, vous avez un code
d'éthique, à l'article 127, on
dit : «Le règlement sur le conflit d'intérêts du jurisconsulte, adopté le
23 novembre 1983 par la décision n° 57 du Bureau de l'Assemblée
nationale, s'applique au jurisconsulte nommé en vertu de l'article 108 du
présent code.»
M. Bisson
(Claude) : Si vous
permettez, là, subséquemment à ça, le bureau a adopté un code d'éthique à la
fois, dans un cas, pour le
commissaire et, dans un autre cas, pour le jurisconsulte. J'ai un code
d'éthique. En plus de l'article 70 du
code, auquel réfère l'article 111, l'article 70 dit — et c'est l'article très général, je pense
que ça vaut la peine de le lire, hein — on dit : «Le commissaire — mais lisons le jurisconsulte parce que
l'article 111 dit que ça s'applique au jurisconsulte, le jurisconsulte — ne peut se placer dans une situation où il y
a un conflit direct ou indirect entre son intérêt personnel et les devoirs de sa fonction.» Bon, c'est un
énoncé de principe, définitivement. Quant au reste, il y a, pour le
jurisconsulte, un règlement adopté
par le bureau le 1er mars 2012, hein, qui détermine plus de détails, là, sur le
code d'éthique et de déontologie. Bon, je ne peux pas être l'avocat
de... ainsi de suite, hein?
M.
Bédard :
Je vais aller plus loin. Je vais aller plus loin. Autrement dit, le
commissaire, lui, vous savez, évite de se présenter ou de faire des
commentaires, comme vous le faites, sur les cas particuliers en disant que,
lui, ça va à l'encontre... Et il emploie des
mots très durs, il compare la relation tant du jurisconsulte que du commissaire
à l'éthique, il dit : Moi, je ne
peux pas donner d'avis sur d'autres députés quand on me le demande. Je ne peux
pas non plus rendre publics des avis
qu'un député m'a demandés. Pourquoi? Parce qu'il dit : Ça briserait le
lien de confiance des députés. Et il compare même cette relation de
confiance à celle qui existe entre un patient et son médecin.
Or, ce qu'on a devant nous, en tout
respect, c'est qu'on a plusieurs déclarations et même une demande d'avis sur
un autre collègue fait par le leader du
gouvernement à laquelle vous avez donné suite, ce qu'a refusé de faire le
commissaire à l'éthique. Et là je
vais même plus loin, il nous a confirmé que, lorsque vous avez donné cette
opinion, vous ne l'avez pas informé
que vous alliez donner une opinion. Vous l'avez informé lorsque ça a été fait,
lorsque ça a été rendu public. Est-ce que c'est vrai?
• (16 h 20) •
M. Bisson
(Claude) : Que je n'ai pas informé le commissaire?
M.
Bédard : Lorsque
la demande est venue, que vous n'avez pas informé le commissaire que vous
alliez rendre cet avis-là, vous l'avez informé lorsque cet avis a été
rendu.
M. Bisson (Claude) : Bien, c'est probablement le cas si le commissaire l'a dit, là. Je ne
me souviens pas. On se parle
régulièrement, le commissaire et moi.
Si le commissaire a dit qu'il n'avait pas été informé, je l'accepte sans aucun
doute, hein? Mais juste un instant, si vous
permettez, là, je vais vous lire l'article 108 du code :«Le Bureau de
l'Assemblée nomme, à l'unanimité de
ses membres, un jurisconsulte chargé de fournir à tout député qui lui en fait
la demande des avis en matière d'éthique et de déontologie.» D'accord?
Je
vais vous amener maintenant à l'article 87. Vous allez voir la distinction,
puis le législateur n'est pas censé avoir,
dans une même loi, parlé différemment sans l'avoir voulu, de parler
différemment. «87. Sur demande écrite d'un député, le Commissaire à l'éthique et à la déontologie lui donne un avis
écrit motivé, assorti des recommandations qu'il juge indiquées, sur
toute question concernant les obligations du député aux termes du présent
code.»
Vous
voyez la distinction? Est-ce que ça a été voulu? On va présumer que oui, là,
que ça a été voulu de faire l'article concernant le jurisconsulte
beaucoup plus largement que celui du commissaire. Bon. Ça a été une loi qui a
été votée, puis est-ce qu'on a voulu que les
deux textes soient différents ou... Bien, je ne me prononcerai pas, là,
écoutez, mais les textes sont
différents. Moi, je donne avis à tout député qui lui en fait la demande, des
avis en matière d'éthique et de déontologie.
M.
Bédard : Parfait. Votre avis, le commissaire, il dit que ce
n'est pas vrai, ça, il n'est pas d'accord avec vous. Il dit, au contraire, qu'on ne doit jamais donner
d'avis sur un autre député. Jamais, parce que ça briserait la relation de
confiance. Ça détournerait ce qui est
l'institution et ça ferait en sorte que les députés n'auraient plus confiance
ni dans le jurisconsulte ni dans le
commissaire à l'éthique. J'irais même plus loin, je ne vous demanderais pas,
par exemple, votre avis sur la situation du premier ministre par rapport
à ce qu'il a vécu parce qu'on détourne de sa finalité...
Le
but, et vous étiez lors des auditions... Pourquoi on a gardé le jurisconsulte?
C'est pour s'assurer que les députés, en
dehors du commissaire, puissent être capables d'avoir une relation
confidentielle, privilégiée avec le jurisconsulte, pas qu'il donne des avis un peu partout selon la
demande. Et je vous rappelle l'article 109, que le commissaire, lui, interprète
comme très restrictif : «Les avis
donnés par le jurisconsulte sont confidentiels, à moins que le député n'en
permette la divulgation.»
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : C'est une question de règlement, M. le député
de Mercier?
M. Khadir :
J'implore, M. le Président, votre propre, je dirais, connaissance du règlement
pour se demander si, lors de ces commissions, on est ici pour faire le
procès de ceux qu'on invite ou du sujet en débat.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, ce n'est pas une question
de règlement. Ceci dit, je pense qu'il est important, en toute équité pour le témoin ou la personne qu'on reçoit,
de lui présenter les faits tels qu'ils sont. J'avoue que j'ai moi-même une question à savoir si
l'affirmation du commissaire était aussi claire qu'elle a été faite par le
député de Chicoutimi. Je ne suis pas
convaincu, mais, en tout respect pour le témoin, j'aimerais ça qu'on mette les
faits clairement.
M.
Bédard :
Le rôle du commissaire pour les députés et les ministres, si vous me permettez
cette métaphore, ressemble, en termes de confidentialité — ce
que je pense que le député de Mercier va bien comprendre que j'essaie d'exprimer — ressemble au rôle d'un médecin par rapport à
un patient. Et ce que j'explique parfois aux journalistes qui me disent : Comment ça se fait que vous ne
voulez pas nous parler des dossiers?, bien, je leur dis : Écoutez, si je
veux bien conseiller le ministre ou le député, il faut que j'aie tout le détail
de la situation sans filtre. Et c'est la même chose pour le médecin qui a besoin d'un conseiller et de
traiter son patient sans filtre. Alors, j'omets de dire à mon médecin que
j'ai consommé toutes sortes de... le médecin
en question ne pourra pas me traiter équitablement. Et là est-ce que ça brise
le lien de confiance lorsqu'on brise ce lien
de confidentialité? Il dit textuellement : «Ça brise le lien de confiance,
d'où l'idée d'insister autant sur la confidentialité de la relation
député, ministre, commissaire. Et la même chose avec le jurisconsulte.» Je vous
dis ça et...
M. Khadir : ...M.
le Président, parce que nous
sommes à la Commission des
institutions pour examiner le rapport
du commissaire relativement à la mise en oeuvre du Code d'éthique et de
déontologie des membres de l'Assemblée nationale, pas du Commissaire à...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Ça va. M. le député de Mercier, ce n'est pas
une question de règlement. Maintenant, je le souligne, parce que, pour moi, c'est important,
par respect pour les personnes qu'on reçoit, de présenter les faits tels
qu'ils sont, vous avez raison de souligner que ce n'est pas le procès de
personne. Alors, M. le député de Chicoutimi, vous pouvez continuer, il reste
une minute.
M.
Bédard : Moi, Me
Bisson, ancien juge, je le respecte, là. C'est simplement qu'on est face à un
cas où il y a un député qui ne peut plus vous consulter
suite à ça. Il y a eu un bris par rapport à la loi que vous deviez respecter,
la confidentialité. Imaginez-vous — je
vais vous permettre de répondre à la question — si
on demandait des avis sur tout et chacun ici, à l'Assemblée, par exemple,
est-ce qu'un fiduciaire... Vous me dites qu'il est indépendant, est-ce que ça pourrait être... Exemple, un ancien agent
officiel, est-ce que ça pourrait être un fiduciaire indépendant selon
vous? Je pourrais vous poser ces questions-là.
M. Bisson
(Claude) : Mais le député
qui reçoit l'avis... D'accord, c'est confidentiel entre celui qui donne l'avis,
le commissaire ou le jurisconsulte, et lui.
Mais lui, il a la latitude de le rendre public, l'avis. Il n'y a
plus de confidentialité, il est le
propriétaire de l'avis. Et, dans le cas de mon avis du 10 mars, je l'ai donné à
un membre du Conseil exécutif et j'ai bien
spécifié dans mon avis que ça s'appliquait à des membres du Conseil exécutif,
et il n'y a pas eu de particularités faites sur
l'autre parlementaire.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce bloc d'échange avec l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine?
M. Charette : M. le Président...
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, je m'excuse, M. le député
de Deux-Montagnes, c'est à vous la parole.
M.
Charette : M. le Président, il ne me reste que quelques minutes,
quelques petites questions. Vous avez fait la distinction entre la fiducie sans droit de regard et le mandat sans
droit de regard. C'est une distinction, pour nous, qui est très précieuse. En même temps, il faut
comprendre l'objectif qu'on s'est fixé comme parlementaires en adoptant un
code d'éthique. Ce que l'on souhaitait avec
l'adoption d'un code d'éthique, c'était de se donner les plus hauts standards
d'éthique pour gagner, ou regagner, ou
maintenir la confiance de la population envers ses institutions. Donc, on se
souhaitait un code d'éthique qui soit
le plus contraignant possible. Là, vous venez de nous dire que le mandat sans
droit de regard est plus permissif
que la fiducie sans droit de regard. Donc, si, nous, on souhaite avoir les plus
hauts standards, être certains d'avoir les mesures les plus
contraignantes possible, la fiducie demeure préférable au mandat sans droit de
regard.
M. Bisson (Claude) : Oui, la fiducie
est plus contraignante que le mandat sans droit de regard.
M.
Charette : Donc, si on veut se donner les plus hauts standards
d'éthique, on doit viser, d'abord et avant tout, la fiducie sans droit
de regard plutôt que le mandat.
M. Bisson (Claude) : Il y a une
raison pour laquelle, en 2010, vous avez associé, là, dans un même article la fiducie sans droit de regard et le mandat. Bon, ça
vous a été expliqué à l'époque, j'imagine, hein, qu'est-ce que c'était, la
distinction entre une fiducie et un mandat,
pourquoi parler d'une fiducie et parler d'un mandat au lieu de parler seulement
d'une fiducie. Bon, là, il faudrait
retourner à ce qui s'est discuté là-dessus lorsque vous avez discuté et adopté
le code.
M. Charette : Je retiens, tout de
même, la préférence pour une fiducie versus le mandat.
Je reviens
sur d'autres propos que vous avez mentionnés un petit peu plus tôt. Vous avez
mentionné que l'élu qui plaçait
ultimement ses avoirs dans une fiducie sans droit de regard, l'objectif, c'est
qu'à terme il ne soit plus du tout au courant de ce qu'il advient de la
valeur de ses avoirs, mais également la nature de ses avoirs.
M. Bisson (Claude) : La valeur, oui,
pas la nature.
M. Charette : La valeur,
effectivement.
M. Bisson (Claude) : La valeur, au
courant.
M.
Charette : Donc, ultimement, l'élu ne doit pas savoir quelle est la
valeur résiduelle ou la valeur réelle de ses avoirs au moment où il pourrait récupérer son droit de regard.
Qu'advient-il d'un cas où les avoirs sont à ce point médiatisés, compte tenu de la nature de ces mêmes avoirs là,
que, même s'il n'a pas de contact avec son fiduciaire, à travers ce qu'on
peut lire dans les médias, à travers ce que
l'on peut voir dans les bulletins d'information, ce même député là trouverait
à savoir si ses avoirs ont été vendus, si
ses avoirs ont perdu de la valeur? Donc, il y a des distinctions dans des types
d'entreprises. Il y a des entreprises
où, effectivement, la confidentialité peut être assurée, mais il y a d'autres
types d'entreprises qui, par leur
nature même, sont à ce point médiatisées que, même si l'élu n'a pas de contact
avec son fiduciaire, il sera, de par la nature de ses avoirs ou de la
compagnie qu'il possède, informé à travers ne serait-ce que les médias, par
exemple.
• (16 h 30) •
M. Bisson
(Claude) : Bien, s'il y a un
remède à une telle situation, bien, ça va être au législateur, s'il veut
apporter des amendements, de les étudier, ces remèdes-là.
M.
Charette : Donc, actuellement, ces remèdes-là n'existent pas ou, à
tout le moins, ne sont pas contenus dans l'actuel code d'éthique.
M.
Bisson (Claude) : Écoutez,
ce qu'on a dans le code d'éthique, c'est que ce qui est dans la fiducie n'est
pas connu du tout, est connu par le fiduciaire et le commissaire, hein?
Bon. Quant au reste, qu'est-ce que vous voulez...
M.
Charette : Donc, je vous
invite peut-être à la réflexion suivante. Peut-être
que le cas de figure que je vous illustre réfère à la situation
exceptionnelle qu'évoque le Commissaire à l'éthique dans son rapport. On
comprend qu'il y a différents types d'entreprises, mais que, pour
certains types d'entreprises, le mur ou le pare-feu devient pratiquement
impossible, d'où des modifications qui sont maintenant nécessaires au code
d'éthique.
M. Bisson (Claude) : Alors, si on
est d'accord avec ça, il s'agit de trouver le remède.
M.
Charette : Donc, on est tous
en quête d'un remède, c'est ce que vous me dites. Donc, c'est le mandat ou le
défi que l'on a à ce moment-ci. Certains l'ont peut-être oublié,
l'exercice que l'on conduit aujourd'hui, il est prévu depuis l'adoption
même du code d'éthique. Donc, on ne conduit pas une commission parlementaire pour répondre à la situation d'un nouvel élu,
cette commission-là, elle est prévue depuis cinq ans. Il était
entendu à l'époque qu'on devait faire l'examen des premières années du
code et voir comment l'améliorer. Bref, on a non seulement une belle obligation
d'améliorer selon l'expérience des dernières
années, mais aussi de trouver un remède — et
je reprends vos mots — à
la situation très, très particulière qui se présente à nous avec la
présence et l'élection du député de Saint-Jérôme.
M. Bisson
(Claude) : Alors, écoutez,
le remède, il faut le trouver, hein? C'est évident qu'il y a des circonstances
où l'avoir est tellement considérable qu'il va rester connu pour un certain
temps, hein?
M. Charette :
Et je reprends encore une partie de vos affirmations, la fiducie est préférable
au mandat. Donc, une véritable
fiducie sans droit de regard est un début de traitement au mal qu'on doit
soigner ou, à tout le moins, au remède qu'on doit identifier.
M. Bisson
(Claude) : Pour le moment,
là, c'est le cadre légal. Et c'est ça, c'est le cadre légal qui entoure la
fiducie sans droit de regard pour le moment, tant qu'il n'y aura pas
d'autre précision à donner dans le code.
M.
Charette : C'est bien gentil. Et, à ce moment-ci — et je reviens à une question que j'ai posée
au Commissaire à l'éthique la semaine
dernière — c'est
nécessaire d'apporter... nonobstant les fameux remèdes, c'est nécessaire de
procéder à une mise à jour du code d'éthique à ce moment-ci? C'est
légitime que de le faire à ce moment-ci?
M. Bisson
(Claude) : Bien oui,
certainement. Vous avez 23 recommandations. Il y en a que vous allez adopter,
ces recommandations-là, d'autres, pour une
raison ou pour une autre, que vous n'adopterez pas, mais il y a quelque chose
à faire sûrement dans les prochains mois.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste quelques secondes. Ça va?
M. Khadir : Est-ce qu'on peut
l'applaudir durant ces quelques secondes?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Ce n'est pas terminé. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Pour huit
minutes, M. le Président?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Oui.
M. Tanguay : M. le juge Bisson, je ne sais pas combien de temps
je vais être député. Ça fait trois ans que je le suis, puis, comme
député, je dis toujours que, demain matin, il faut être prêt à perdre son
emploi. Comme député, on représente sa population,
on le fait à la mesure de ses capacités, il faut se tenir debout, il faut
se tenir droit. Et ce qui s'est passé
il y a quelques minutes, l'échange que vous avez eu avec le leader de l'opposition officielle, m'a troublé. Et ce n'est pas arrivé souvent dans les trois dernières
années, et j'ose espérer que, dans les, je ne sais pas, quelques mois, années,
que j'aurai à siéger ici à l'Assemblée nationale, c'est des choses qui
ne se répéteront pas. Comme député, moi, député de LaFontaine, en vertu de l'article
6 de la Loi sur l'Assemblée nationale, je dois respecter les institutions. M. le juge
Bisson, vous avez été juge à la Cour
supérieure, vous avez été juge à la Cour d'appel, vous avez été juge en chef de
la Cour du Québec...
Une voix : Cour d'appel du
Québec.
M. Tanguay : Cour d'appel du Québec. Et vous avez été juge,
donc, pendant 26 ans et une institution pendant 19 ans, à savoir notre
jurisconsulte. Pendant toutes ces années, vous avez siégé comme juge, vous avez
agi comme jurisconsulte. En 2009, vous disiez
que vous donniez à peu près une vingtaine d'avis par année, bon an mal an, et,
aujourd'hui, on vient de vous dire que le chef de l'opposition, il n'a plus confiance en vous. C'est la première fois, je suis certain, qu'on vous dit ça en pleine face, M. le
jurisconsulte. Depuis quelques mois, on remet en question votre intégrité
et on remet en question votre exercice de votre devoir, vous auriez manqué à la
confidentialité.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Est-ce une question...
Mme
Maltais : M. le
Président, question
de règlement. Ici, le député nous prête des intentions qui ne
sont pas du tout les nôtres.
Alors, je pense...
M.
Bédard : ...attaqué
son intégrité.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, je comprends le point.
M.
Bédard : Je n'ai
pas attaqué l'intégrité.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Je peux demander peut-être au député de LaFontaine de... en fait, pour reprendre l'expression de votre collègue, d'être
plus factuel plutôt que d'éviter de laisser entendre qu'on a prêté des...
M. Tanguay :
Bravo. M. le juge Bisson, on vous a dit que le chef de l'opposition officielle
n'avait plus confiance en vous — ça, c'est factuel, on l'a tous entendu — que vous n'auriez pas respecté votre devoir
de confidentialité. On vous dit que
vous avez donné un avis qui touchait le chef de l'opposition officielle et
qu'en ce sens vous ne bénéficiez plus de sa confiance. Vous êtes une institution, on doit respecter
l'institution, et c'est le devoir du député de faire en sorte, dans ses
actes et dans ses paroles, de respecter les institutions.
M. Bisson, Me
Bisson, M. le juge Bisson, jurisconsulte, j'aimerais vous donner l'occasion de
répondre à cette accusation qui, avec
les nombreuses années comme juge et comme jurisconsulte... C'est la première
fois qu'on vous lance ça au visage,
je ne peux pas faire autrement que de vous donner l'occasion de répondre à la
question : Avez-vous, dans votre
âme et conscience, l'impression que vous avez trahi à votre fonction par
l'opinion que vous avez rendue le 10 mars 2015?
M. Bisson
(Claude) : Alors, ce que je
peux vous dire, c'est que ça fera 19 ans le 19 juin que je suis
jurisconsulte, on n'aura pas à m'endurer encore pour un autre
19 ans. Je vais rien que simplement répondre ceci.
M. Tanguay :
J'aimerais, M. le Président... On veut être factuel, j'aimerais déposer, avec
le consentement des collègues, la
lettre du leader du gouvernement du 26 février 2015,qui demandait
l'opinion à notre jurisconsulte. J'aimerais la déposer, M. le Président, pour y constater... Y a-t-il consentement?
Je ne sais pas si on doit demander le consentement. 204?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Non. C'est une des rares
prérogatives du président de la commission de décider seul du dépôt d'un
document.
M. Tanguay : Alors, j'en fais
le dépôt, M. le Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, on va la déposer. Je
pense que c'est un document qui a été diffusé...
M. Tanguay : Et, évidemment,
ce sera rendu public, M. le Président, on désire que ce soit rendu public.
M. le
jurisconsulte, pouvez-vous nous préciser, dans cette lettre-là et dans
l'opinion qu'on vous a demandée en vertu
de l'article 108, est-ce qu'il est fait mention, et, dans votre rédaction de
l'opinion, faites-vous mention du député de Saint-Jérôme, d'un député en
particulier?
M. Bisson (Claude) : Aucunement.
M. Tanguay : Pardon? Je n'ai
pas...
M. Bisson (Claude) : Aucunement.
M. Tanguay :
Est-ce que vous aviez... Parce qu'on vous a lu le devoir de confidentialité du
commissaire, lorsqu'il donne une opinion à un collègue sur son cas
particulier, de respecter la plus haute confidentialité. Est-ce que vous, M. le juge Bisson, jurisconsulte, est-ce que, dans
le cas de l'application de l'article 108, où on ne vous demande pas une
opinion sur un collègue... aviez-vous une telle obligation de confidentialité?
M. Bisson
(Claude) : Bien, c'est une
obligation de confidentialité, oui. Encore une fois, le propriétaire de l'avis,
c'est celui qui l'a demandé et reçu. Alors, c'est lui qui peut le rendre
public, et c'est ce qui s'est produit.
M. Tanguay :
Et l'éclaircissement que vous donniez le 10 mars 2015, qui participe
évidemment de la note du commissaire
un an plus tôt sur les fiducies et mandats sans droit de regard, pensez-vous
que c'est un éclaircissement qui peut être valide pour les
125 députés ou ça ne touche réellement qu'un seul député?
M. Bisson
(Claude) : Bien, c'est
valide pour tous les députés qui seraient dans la position qui a été définie,
là, dans la lettre qui a été demandée. D'ailleurs, que je recite dans ma
lettre, je dis ce qui m'a été demandé, hein, bon, c'est valide pour tout
le monde.
M.
Tanguay : Vous avez dit un peu plus tôt que vous parliez
régulièrement au commissaire. On a cité un extrait du commissaire un peu plus tôt laissant entendre
que, probablement, le commissaire — et ça, c'est ce qui est sorti un peu plus
tôt — aurait
mis en question, justement, ce devoir-là de confidentialité. Avez-vous eu une
conversation avec le commissaire quant à ce devoir de confidentialité appliqué
à votre lettre du 10 mars 2015?
M. Bisson
(Claude) : Non. Non. Je dis
bien dans ma lettre que mon opinion ne lie pas le commissaire, hein, dans
la lettre que vous avez, du 10 mars,
que mon opinion, comme la loi le prévoit, ne lie pas le commissaire. Mais on en
a sûrement parlé, sans aucun doute.
Pas avant l'opinion, parce que, l'opinion, je la donnais à un membre du Conseil
exécutif, mais par la suite, oui.
• (16 h 40) •
M. Tanguay :
Et vous aviez noté que, dans l'opinion du commissaire publiée le 3 mars
2014, il disait à la fin : «Le
jurisconsulte et le commissaire peuvent être consultés sur toute question
concernant la présente note d'information», donc qui touchait les
fiducies et mandats sans droit de regard.
Monsieur...
J'allais dire M. le jurisconsulte, je vais peut-être dire M. le juge, en vertu de la règle de la pertinence, quand une partie traite d'un sujet et
qu'il n'y a pas d'objection quant à la pertinence, évidemment l'autre partie
peut aborder le sujet. Je vous demande
d'appliquer cette logique. Lorsqu'on a cité, de l'autre côté, l'article
du 11 mars 2014 de La Presse et qu'on a cité vos propos, 11 mars 2014, où vous disiez notamment — et
j'aimerais vous entendre là-dessus
parce que vous avez répondu à mon collègue,
alors j'aimerais que vous puissiez
répondre à ça aussi — qu'une
entreprise médiatique n'est pas comme une entreprise
de petits pois, une entreprise également de fruits en conserve, vous le disiez dans une autre entrevue en octobre 2014, en quoi
une entreprise médiatique est un défi particulier par rapport à tout autre type d'entreprise dans le contexte qu'on connaît?
M. Bisson
(Claude) : Bien, les médias
intéressent toute la population du Québec, tandis que les entreprises de
conserves, bien, ça n'intéresse pas grand monde, sauf pour les manger.
M. Tanguay : Et vous...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
45 secondes, M. le député.
M. Tanguay : 45 secondes. M. le jurisconsulte, on a dit que
lui, le commissaire, devait éviter tout sujet qui ne le touchait pas. Par contre, j'aimerais vous
entendre sur les... Vous l'avez entendu, son témoignage où il parlait de la
nature médiatique et il disait :
«On peut, par la nature médiatique, tenter de dorer son image ou de nuire à
l'image d'autrui.» Vous avez entendu le commissaire faire ce
commentaire, qu'en pensez-vous?
M. Bisson (Claude) : Entendu, moi,
le commissaire?
M. Tanguay : Ou l'audition du
commissaire lorsqu'il a affirmé cela, la semaine passée.
M. Bisson
(Claude) : Non, non, pas du
tout. J'ai entendu des bribes que nous donnait la télévision, mais pas plus que
ça.
M. Tanguay : O.K. Je vous
remercie beaucoup, M. le jurisconsulte.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Ça complète. Je vous remercie. Alors, ceci complète nos travaux pour aujourd'hui. Je vous rappelle, je rappelle aux
membres de la commission que nous devrons nous réunir pour la suite de nos travaux. Avant de conclure, je tiens à
remercier le jurisconsulte de l'Assemblée nationale, l'honorable Claude Bisson,
de même que tous les membres pour avoir participé à nos travaux.
Je lève la séance, et la commission ajourne ses
travaux.
(Fin de la séance à 16 h 42)