(Neuf heures trente minutes)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte et je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir fermer vos téléphones cellulaires ou de les mettre en mode vibration, s'il vous plaît.
La commission est réunie afin de tenir des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 50, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Mme Roy (Lotbinière) est remplacée par M. L'Écuyer (Saint-Hyacinthe) et M. Cloutier (Lac-Saint-Jean) est remplacé par M. Côté (Dubuc).
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, l'ordre du jour pour aujourd'hui. Nous allons débuter par des remarques préliminaires de cinq minutes par chacun des groupes qui sont représentés ici; par la suite, nous entendrons l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec; ce sera suivi de l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation et des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec; et nous terminerons l'avant-midi avec l'Ordre des psychologues du Québec. Il y aura une suspension à 12 h 45.
Nous reprendrons les travaux à 14 heures, et là nous aurons le plaisir d'entendre l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, qui sera suivi de l'Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec, de la Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement; et nous terminerons la journée avec la Confédération des syndicats nationaux et la Fédération de la santé et des services sociaux CSN.
Remarques préliminaires
Donc, sans plus tarder, nous passons aux remarques préliminaires, cinq minutes maximum par groupe. M. le ministre, à vous la parole.
M. Jacques P. Dupuis
M. Dupuis: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi d'abord d'exprimer ma satisfaction à ce que nous nous retrouvions, encore cette semaine, devant la Commission des institutions pour entendre des groupes sur un projet de loi particulier, de saluer évidemment mon collègue de l'opposition officielle, le député de Saint-Hyacinthe, de même que son collègue le député de Joliette et souhaiter la bienvenue au député de Dubuc dans cette commission-ci, puisque, la semaine dernière, nous étions avec votre voisin, le député de Chicoutimi, pour ce qui concerne un autre projet de loi.
Les gens qui sont dans la salle et ceux qui viendront au cours des trois prochaines journées savent très bien ce que nous faisons ici, au cours de cette commission. Je serai donc bref.
Simplement pour situer le projet de loi n° 50 dans son contexte, en 1999, un groupe a été formé, sous l'égide du Dr Roch Bernier, qui devait étudier les activités professionnelles dans le domaine de la santé. Le rapport Bernier a été déposé, si je me souviens bien, en 2004. Il a donné lieu à ce qu'il est convenu d'appeler le projet de loi n° 90, qui a envisagé la réglementation de certaines activités dans le domaine physique de la santé. L'Office des professions a créé un groupe, sous l'égide du Dr Jean-Bernard Trudeau, en 2004. Ce groupe a travaillé fort avec certains des ordres professionnels que nous entendrons au cours de cette commission, et ça a donné lieu au projet de loi qui a été déposé par notre gouvernement lors de la dernière session, qui est le projet de loi n° 50, celui sur lequel nous entendrons des représentations.
Moi, j'ai l'habitude, vous le savez ? je parle évidemment à mes collègues de l'opposition et à mes collègues ministériels, que je salue aussi: le député de Laval-des-Rapides, le député de Chomedey, le député de Robert-Baldwin, qui est présent, et se joindra à nous le député de LaFontaine dans quelques minutes ? mes collègues le savent, j'ai l'habitude de mettre la table pour qu'on puisse faire des travaux qui sont profitables. Je veux donc donner lecture et je vais déposer tout de suite, d'entrée de jeu, à la commission une lettre que j'ai fait parvenir au président de l'Office des professions, Me Dutrisac, qui m'accompagne, à ma gauche, aujourd'hui, que je salue, qu'il a reçue le 30 janvier 2008 et qui s'exprime de la façon suivante, puis ça va mettre la table pour les discussions que nous aurons.
«En lien avec la présentation, à l'automne 2007, du projet de loi n° 50, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines, je confie à l'Office des professions les mandats suivants:
«Entreprendre les démarches nécessaires auprès des criminologues et des sexologues afin de les intégrer au système professionnel et de leur réserver les activités proposées dans le rapport Trudeau, [premièrement].
«[Deuxièmement,] entreprendre les démarches nécessaires afin que soient mises en place les mesures nécessaires en regard de l'activité d'évaluation de la recevabilité d'un signalement concernant un mineur afin d'éviter une rupture dans l'offre de service.
«[Troisièmement,] entreprendre l'analyse de la situation des activités de l'ensemble des techniciens oeuvrant dans le domaine de la santé et des services sociaux, en collaboration avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport ainsi qu'avec les représentants de leurs réseaux respectifs, et ce, après que les travaux parlementaires concernant la modernisation de la pratique professionnelle en santé mentale et en relations humaines auront été complétés.» Et je vais déposer, Mme la Présidente, des copies, cette lettre avec des copies pour chacun des membres de la commission. Il est entendu évidemment que, si les ordres professionnels qui sont représentés au cours de cette commission ou d'autres groupes souhaitent en avoir une copie, ça me fera plaisir.
Simplement pour dire que, le monde idéal, quand on est en politique, on cherche à l'atteindre. Mais les élections évidemment nous ramènent à la réalité que, même si on cherche à atteindre le monde idéal, c'est rare qu'on l'atteint. Mais il faut toujours essayer. Si on n'essaie pas, il faut aller faire d'autre chose dans la vie, et je pense que vous allez être d'accord avec ça.
Donc, le projet de loi n° 50, il n'est pas dans l'intention du gouvernement de retarder l'adoption du projet de loi n° 50, pas du tout, mais nous sommes conscients qu'il y a encore des travaux à effectuer pour faire un portrait qui soit peut-être un meilleur portrait éventuellement. Et donc je voulais simplement, là, indiquer cette intention en début de commission. Et nous vous entendrons avec plaisir, et ça commencera tantôt avec les travailleurs sociaux... qui a déjà le sourire, M. Leblond. C'est de bon augure. Merci.
Document déposé
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. Donc, le document est déposé.
Sans plus tarder, je me tourne vers le porte-parole de l'opposition officielle, le député de Saint-Hyacinthe. La parole est à vous, cinq minutes.
M. Claude L'Écuyer
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour à toutes et à tous. Je suis très heureux de retrouver mes collègues, ce matin, pour cette consultation particulière sur le projet de loi n° 50 et je salue tous les membres de la Commission des institutions de même que tout le personnel.
Nous aurons l'occasion, au cours des prochains jours, d'entendre des groupes qui ont des réflexions à faire sur ce projet de loi qui se veut une réponse au rapport Trudeau remis par le Comité d'experts sur la modernisation de la pratique professionnelle en santé mentale et en relations humaines. Nous insistons pour préciser que les objectifs que nous visons lorsque nous participons à ces travaux parlementaires qui discutent des services offerts à la population... Nous voulons avant tout que cette consultation nous informe que les services qui sont rendus sont conformes à la réalité qui se vit quotidiennement afin que nous puissions, à titre de législateurs, renforcer la protection du public et améliorer la qualité des services offerts à la population.
Nous arrivons enfin au bout d'un long processus de consultation qui a débuté en l'an 2000. Nous sommes confiants que cette législation va dans ce sens, à savoir régler les problèmes multiples qui se vivent dans l'exercice de ces champs de compétence. Voici pourquoi nous allons étudier le projet de loi n° 50 dans cette perspective. Les intervenants doivent compter sur notre collaboration.
L'exercice de consultation pour en arriver à ce projet de loi a été assez long, et bien des avis ont été donnés. Cependant, nous avons demandé des consultations particulières. C'est parce que de nombreux groupes nous ont contactés au cours de l'automne dernier pour nous faire part de leurs appréhensions. Il y a des inquiétudes face au projet de loi tel que rédigé, et nous croyons que certains groupes ne se sont pas sentis suffisamment consultés. Voici pourquoi il était impératif qu'ils viennent en commission parlementaire pour nous donner leur avis.
D'ailleurs, ces inquiétudes sont nombreuses et touchent des points très importants qui font l'objet de critiques et d'oublis dans le projet de loi. Notamment, tout ce qui concerne la réserve de certaines activités est questionnée. Nous savons que les travailleurs sociaux, les éducateurs spécialisés, les intervenants auprès de la jeunesse et ceux au niveau de la toxicomanie, les ergothérapeutes ainsi que bien d'autres ne sont pas tout à fait satisfaits de la présentation du projet de loi.
Aussi, des demandes d'intégration au système professionnel reformulé ne datent pas d'hier. Bien, on peut quand même dire, avec l'invitation du ministre auprès de l'Ordre des professions, que c'était le cas des sexologues et des criminologues de même que pour les techniciens en travail social et ceux en éducation spécialisée, qui, eux autres, ont encore des réserves. Nous y apporterons une attention particulière en regard encore une fois du respect des principes fondamentaux à la base de notre système professionnel, c'est-à-dire la protection du public.
De même, plusieurs groupes semblent craindre une dévalorisation de leur travail et de la formation collégiale technique qu'ils ont reçue au profit d'une formation universitaire et des ordres professionnels. À la lumière des présentes consultations, j'espère que nous pourrons apaiser ces inquiétudes et trouver des aménagements pour que tous y trouvent une aire d'intervention interdisciplinaire et interprofessionnelle sans remettre en cause le projet de loi n° 50, qui globalement constitue une avancée importante. Nous tenons à rappeler qu'il est fort important d'assurer d'une part la qualité du service et la protection de la population afin que le professionnalisme et la rigueur soient toujours la base du système professionnel.
n(9 h 40)n Dans la présente consultation qui nous intéresse, c'est d'être informés le plus adéquatement possible de vos activités quotidiennes tout en recherchant le partage des champs d'exercice professionnel dans le domaine de la santé mentale et de l'encadrement de la pratique de la psychothérapie. Cependant, dans un souci de trop vouloir définir, il ne faut pas se priver de précieuses ressources qui dispensent des services très importants pour la population et qui émanent bien souvent du milieu communautaire. Il ne faut pas, comme le soutiennent quelques groupes que nous entendrons, que cela se traduise par des réductions de services, des pertes d'expertise précieuse et une déstabilisation du milieu. Dans le contexte actuel, nous n'avons certainement pas les moyens de perdre des ressources dans le domaine de la santé mentale.
Il faut tout de même souligner, d'entrée de jeu, qu'il y a des consensus assez forts dans ce projet de loi. Le fait d'introduire la prévention du suicide parmi les activités de prévention communes à l'exercice de certaines professions de la santé est tout à fait justifié et souhaitable. De même, l'encadrement de la pratique de la psychothérapie était devenu une nécessité, et les intervenants, bien qu'ils ne s'entendent pas tous sur toutes les modalités d'application, viendront nous en témoigner. Nous sommes d'ailleurs impatients d'entendre leurs propositions à ce sujet.
En conclusion, je tiens à rappeler encore une fois qu'en tant qu'opposition officielle nous ne chercherons qu'à bonifier ce projet de loi, et à apaiser toutes les inquiétudes, et à trouver des moyens de satisfaire toutes les demandes dans la mesure du possible. C'est pourquoi des consultations constituent la tribune idéale autant pour les groupes intéressés que pour nous, les parlementaires. Nous l'avons vu et vécu à plusieurs reprises dans le passé, des consultations peuvent nous être salutaires et nous aider énormément dans notre travail.
Nous vous remercions, Mme la Présidente, et nous terminons ces remarques préliminaires au sujet du projet de loi n° 50, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines. Alors, merci, et j'espère que nous allons avoir des travaux très formateurs. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Donc, pour les troisièmes remarques avec le deuxième groupe formant l'opposition, M. le député de Dubuc, la parole est à vous.
M. Jacques Côté
M. Côté: Merci. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, chers collègues, mesdames et messieurs, nous entreprenons, aujourd'hui, des consultations particulières sur un projet de loi dont le sujet est d'une très grande importance, la santé mentale et les relations humaines. Ce projet de loi a nécessité, avant d'être déposé, un travail que l'on peut qualifier de colossal. En effet, l'Office des professions, dès l'an 2000, a entrepris des travaux afin de moderniser les champs d'exercice des professions liées à la santé et aux relations humaines.
Suite à une première phase des travaux, le gouvernement du Parti québécois a concrétisé ces travaux pour les intervenants en santé physique par la loi n° 90. Par la suite, le processus s'est continué pour les professions de la santé mentale et des relations humaines, processus qui avait été confié à un groupe de travail présidé par le Dr Bernier. En juin 2002, il a produit un rapport qui recommandait la redéfinition des champs d'exercice et la mise en place d'activités réservées pour les professions de psychologue, travailleur social, thérapeute conjugal et familial, conseiller d'orientation, psychoéducateur, ergothérapeute, infirmière et médecin, et c'est finalement en 2004 que le gouvernement a mandaté un comité d'experts, présidé par le Dr Jean-Bernard Trudeau, pour poursuivre dans la continuité du groupe de travail présidé par le Dr Bernier.
Ce comité d'experts devait produire des propositions concrètes concernant les champs d'exercice des professions concernées. Il devait amener des solutions rassembleuses concernant les activités que l'on devait réserver et partager. Il avait également pour mandat de voir à l'intégration de certains groupes extérieurs au système professionnel et il devait aussi se pencher sur l'encadrement de la psychothérapie. Il devait enfin revoir les recommandations du groupe de travail présidé par le Dr Bernier et en actualiser la portée. Cela a donné comme résultat la rédaction d'un rapport que l'on a appelé le rapport Trudeau, rapport intitulé Partageons nos compétences, et c'est à partir de ce rapport que nous a été présenté le projet de loi n° 50 dont débutent, aujourd'hui, les consultations.
Je suis extrêmement fier de pouvoir participer à ces consultations au nom de ma formation politique. Je peux dès lors assurer les membres de cette commission et tous ceux et celles qui se présenteront devant nous que nous serons attentifs aux mémoires qui nous seront présentés. Déjà, j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de certains mémoires, et force est de constater que des questions demeurent entières pour certains groupes. J'avise le ministre que nous serons cependant intraitables quant à certains grands principes, soit la protection du public, l'imputabilité des ordres professionnels, la continuité dans les soins et services donnés à la population de même que leur accessibilité.
N'oublions jamais que, particulièrement dans le domaine de la santé mentale, les clientèles sont plus vulnérables et ont davantage besoin d'être protégées. Ces personnes ont donc droit à un service approprié fourni par une personne compétente au moment opportun, à l'endroit souhaité et pour la durée requise. C'est ce que le rapport Trudeau appelle l'accessibilité compétente.
Permettez-moi, Mme la Présidente, de rappeler que c'est un dossier qui ne date pas d'hier. Rappelons que le rapport Trudeau fut remis au ministre d'alors en 2005, et on a dû attendre jusqu'au 28 février 2006 pour que le gouvernement autorise l'Office des professions à le rendre public. C'est un dossier que nous avons suivi d'année en année. D'ailleurs, nous avons, à chaque année, questionné le ministre responsable des lois professionnelles à ce sujet lors de l'étude des crédits budgétaires. Qu'il suffise de rappeler au ministre la problématique de la psychothérapie, profession qui faisait et qui fait encore l'objet de beaucoup d'inquiétude auprès d'intervenants du milieu de la santé mais aussi auprès de la population.
Alors, Mme la Présidente, nous entreprenons ces consultations avec ouverture d'esprit, en espérant qu'elles seront salutaires et que les groupes ou associations qui craignent certains effets pervers de ce projet de loi seront rassurés par le ministre. Nous lui offrons d'ailleurs toute notre collaboration. Merci.
Auditions
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, M. le député de Dubuc. Donc, nous allons pouvoir entreprendre les auditions avec nos groupes. Nous avons M. Claude Leblond qui est avec nous, qui est accompagné de M. Richard Silver, si je ne me trompe pas ? c'est bien ça? ? de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec. Vous êtes un habitué des commissions. Donc, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire, et par la suite il y aura des échanges avec les groupes parlementaires. La parole est à vous.
Ordre professionnel des travailleurs
sociaux du Québec (OPTSQ)
M. Leblond (Claude): Je vous remercie, Mme la Présidente. Mme la Présidente, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, Mmes les députées et MM. les députés membres de la commission, mesdames et messieurs, alors, au nom des 7 100 travailleuses sociales et travailleurs sociaux et thérapeutes conjugales et familiales et thérapeutes conjugaux et familiaux regroupés au sein de l'ordre que je représente, c'est avec fierté que nous venons vous présenter nos observations, nos commentaires et nos recommandations relativement au projet de loi n° 50. Alors, que nous soyons parlementaires, représentants syndicaux, employeurs, professionnels, enseignants ou autres, nous aurons la rare opportunité, aujourd'hui et au cours des prochains jours, de mettre de côté la partisanerie et les considérations corporatistes ou organisationnelles afin de faire triompher ensemble et solidairement, je crois, l'un des plus nobles objectifs qui soient, la protection du public en général et la protection des clientèles à haut risque de préjudice en particulier.
Présentement, au Québec, des centaines d'intervenants peuvent exercer les tâches d'un travailleur social sans en posséder ni la formation ni l'expertise. Ces personnes exercent la profession mais ne peuvent utiliser le titre. C'est le lot des professions à titre réservé par opposition aux professions à exercice exclusif. D'autres, et ils sont fort nombreux, détiennent une formation en travail social, interviennent auprès du public mais ne sont pas membres de l'ordre. Le public est ainsi privé des recours prévus par le système professionnel en cas de mauvaise pratique ou de faute professionnelle. Certains autres vont adhérer à l'ordre pour satisfaire à une condition d'embauche sans renouveler leur adhésion l'année suivante. Il existe des cas même documentés où des travailleurs sociaux à qui le comité de discipline a imposé des sanctions pour faute professionnelle aient tout simplement décidé de ne pas renouveler leur adhésion, se plaçant ainsi à l'abri de toute poursuite de la part de l'ordre, pour continuer d'exercer, entraînant impunément les mêmes lacunes avec tous les risques que cela suppose pour leur clientèle présente et future, et ceci, dans nos réseaux de la santé et des services sociaux et de l'éducation.
Le projet de loi n° 90 vient corriger cette situation, du moins en partie, et c'est pourquoi nous l'endossons avec confiance et enthousiasme. Cette volonté de voir le projet de loi n° 50 adopté dans les meilleurs délais, nous la partageons également avec cinq autres ordres professionnels: l'Ordre des conseillers et conseillères en orientation et des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, l'Ordre des psychologues du Québec, l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et le Collège des médecins, et bien sûr l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux, qui regroupe à la fois les travailleurs sociaux et les thérapeutes conjugaux et familiaux. Ensemble, nous représentons huit professions et un peu plus de 110 000 professionnels de la santé physique et mentale, des services sociaux et des relations humaines.
n(9 h 50)n Tout comme le rapport Trudeau, le projet de loi n° 50 reconnaît et précise l'apport spécifique de chacune des professions concernées, notamment celle de travailleur social. Cela dit, il est important de rappeler que le champ d'exercice ne prévoit pas couvrir l'ensemble d'une discipline mais plutôt en énoncer les principales activités afin d'en saisir la nature et la finalité. L'Ordre des travailleurs sociaux est en accord avec la définition du champ d'exercice du travailleur social tel que défini par les experts du comité Trudeau et tel que repris mot à mot par le projet de loi n° 50. Et je me permets de vous relire cette définition. Alors: «Évaluer le fonctionnement social, déterminer un plan d'intervention et en assurer [sa] mise en oeuvre ainsi que soutenir et rétablir le fonctionnement social de la personne en réciprocité avec son milieu dans le but de favoriser le développement optimal de l'être humain en interaction avec son environnement.» De la même façon, nous endossons la définition du champ d'exercice du thérapeute conjugal et familial ainsi décrit dans le projet de loi n° 50: «Évaluer la dynamique des systèmes relationnels des couples et des familles, déterminer un plan de traitement et d'intervention ainsi que restaurer et améliorer les modes de communication dans le but de favoriser de meilleures relations conjugales et familiales chez l'être humain en interaction avec son environnement.» Au moment de définir le fonctionnement social, le rapport Trudeau, duquel est issu le projet de loi n° 50, en réfère à la définition qu'en fait l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux, et je le cite: «Le fonctionnement social, [c'est] la capacité [d'une] personne ? d'un groupe ou d'une collectivité ? à jouer son rôle dans la société. Il réfère à l'accomplissement [des] divers rôles sociaux, à la capacité de la personne d'organiser sa vie quotidienne, à la gamme [des] comportements observés, aux processus mentaux, aux modèles appris, aux perceptions construites, aux valeurs reçues et choisies dans l'univers propre à chaque personne et dans sa recherche de réciprocité avec son environnement. Le travailleur social [ainsi] cherche à rétablir le fonctionnement social d'une personne ? d'un groupe ou d'une collectivité ? quand la réciprocité [environnement-personne] est en déséquilibre ou devenue dysfonctionnelle; il cherche à améliorer le fonctionnement social lorsqu'une personne ? un groupe et une collectivité ? désire rendre plus satisfaisante une situation selon ses aspirations individuelles ou celles de sa collectivité. Croyant en la valeur intrinsèque de la personne, en son droit [de] s'autodéterminer et son aspiration à l'autonomie, le travailleur social vise, par ses activités professionnelles, à mettre en place des conditions [qui favorisent la capacité] des personnes, des groupes et des collectivités à réaliser leurs potentialités et aspirations et [ainsi] répondre à leurs besoins psychosociaux et communautaires par des interactions sociales satisfaisantes.» Voilà ce qu'en est et ce qu'en sera toujours le travail social.
La formulation des neuf activités que le projet de loi réserve aux travailleurs sociaux reprend l'esprit du libellé soumis par le comité Trudeau. Nous y adhérons donc. Par ailleurs et toujours en conformité avec les recommandations du comité, le projet de loi n° 50 prévoit la réserve de trois activités professionnelles aux thérapeutes conjugaux et familiaux, activités qu'ils partagent avec d'autres professionnels. Ainsi, cette jeune profession possède maintenant son propre champ d'exercice, lequel apparaîtra dorénavant au Code des professions. Il y a tout lieu pour nous d'en être fiers.
Deux activités réservées et partagées, identifiées par le comité Trudeau, ne sont pas reprises dans le projet de loi. Tout en réitérant notre appui au consensus, nous souhaitons néanmoins proposer des amendements au libellé de deux activités réservées aux travailleurs sociaux dans le but d'en préciser le sens, la portée et la finalité.
La première activité visée est décrite à l'article 1.1.a du projet de loi, à savoir évaluer une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant. Ce libellé diffère de celui proposé par le rapport Trudeau. Vous vous souvenez, le rapport Trudeau formulait l'activité en termes de recommander l'ouverture d'un régime de protection dans le cadre d'une évaluation psychosociale ou d'une évaluation médicale. Or, l'article 270 du Code civil du Québec, qui traite de l'ouverture du régime de protection, stipule que le rapport effectué au Curateur public doit être constitué, entre autres, d'une évaluation médicale et psychosociale. Ainsi, par souci de concordance avec l'article 270 du Code civil et en accord avec les cinq autres ordres professionnels impliqués, nous proposons le libellé suivant pour cette activité. Alors, ça pourrait se lire: «Procéder à l'évaluation psychosociale d'une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant.» La deuxième activité visée est décrite à l'article 1.1.1°i du projet de loi. Alors, elle se lit: «Décider de l'utilisation des mesures de contention ou d'isolement dans le cadre de l'application de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris.» L'expérience terrain des travailleurs sociaux et des autres professionnels concernés par le projet de loi nous porte à croire que cette formulation est trop restreinte. Étant donné la vulnérabilité des personnes assujetties à ces interventions d'urgence, nous croyons que la portée de cette activité devrait être élargie de façon à ce que seul un professionnel exerçant dans ces lieux puisse décider de l'utilisation de ces mesures dans un contexte thérapeutique planifié. Une avenue intéressante pourrait être de se référer à l'approche retenue dans le cadre de la loi n° 90 en ce qui concerne l'isolement et la contention.
Concernant la psychothérapie, l'encadrement de la pratique de la psychothérapie représente un élément fondamental du projet de loi. Nous avons tous à l'esprit les histoires d'horreur rapportées par les médias, faisant état de l'absence totale de protection du public dans ce domaine. Nous croyons de plus que le législateur a vu juste en demandant à ce que, par voie réglementaire, les activités qui s'apparentent à la psychothérapie mais qui n'en sont pas soient énumérées et définies dans un avenir prochain, et ce, en collaboration avec les ordres professionnels concernés. En ce qui concerne les thérapeutes conjugaux et familiaux, pour qui l'intervention thérapeutique constitue l'essence de leur pratique, nous avons bon espoir que la mise sur pied d'une formation universitaire en thérapie conjugale et familiale amènera les instances concernées à se prononcer à nouveau sur la pertinence de leur réserver de facto la pratique de la psychothérapie.
Contrairement au rapport Trudeau, le projet de loi n° 50 n'aborde pas la question de la reconnaissance de nouveaux groupes d'intervenants par le système professionnel, tels les criminologues, les sexologues et les techniciens en travail social. J'ai bien entendu, là, l'annonce du ministre ce matin, mais je tiens à redire qu'en ce qui nous concerne nous réitérons, aujourd'hui, notre volonté d'accueillir dès maintenant les techniciennes et techniciens en travail social au sein de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec.
La mise en oeuvre de la loi devra se faire de façon à garantir la continuité, l'accessibilité et la disponibilité des services de qualité dans toutes les régions du Québec, et ce, pour tous les citoyens, en particulier pour les clientèles vulnérables. Alors, l'Ordre des travailleurs sociaux du Québec s'engage à jouer un rôle actif dans la recherche de solutions en conformité avec le Code des professions et le pouvoir réglementaire du bureau, en permettant notamment à des intervenants non admissibles au système professionnel qui possèdent les compétences nécessaires et qui seront à l'emploi d'un établissement visé au moment de l'adoption de la loi de pouvoir exercer, le cas échéant, certaines activités réservées aux travailleurs sociaux conformément à l'article 94h du Code des professions.
Nous adhérons au principe voulant que le Code des professions soit modifié de façon à inclure une disposition visant à éviter les problèmes d'interprétation. Cette disposition prévoirait que la réserve d'activités n'ait pas pour effet notamment d'empêcher les travailleurs sociaux et les thérapeutes conjugaux et familiaux d'exercer leurs activités professionnelles conformément à l'article 37 du Code des professions. Tout comme les autres ordres professionnels concernés, nous croyons qu'il serait également opportun que l'Office des professions produise, en collaboration avec les ordres visés et les milieux d'emploi, un cahier interprétatif pour faciliter la mise en oeuvre de la loi.
En conclusion, nous réitérons notre appui au projet de loi parce que celui-ci offrira au public une meilleure protection dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines tout en garantissant la pérennité des professions de travailleur social et de thérapeute conjugal et familial. Le gouvernement du Québec, le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, le ministre de la Santé et des Services sociaux, toutes les instances concernées ainsi que nos collègues des autres ordres professionnels, des organismes et des regroupements touchés par ce projet de loi peuvent compter maintenant, comme toujours, sur l'entière collaboration de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec. Je vous remercie.
n(10 heures)nLa Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, M. Leblond. Donc, sans plus tarder, nous allons débuter le premier bloc d'échange avec le parti ministériel. On a 17 minutes devant nous. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Dupuis: Oui. M. Leblond, je vous remercie. M. Silver, bienvenue aussi. Me Silver, j'imagine. Bienvenue aussi.
J'ai l'habitude de bien écouter ce qui se passe dans une salle où je suis en commission parlementaire, non seulement évidemment les groupes qui viennent faire des représentations, mais aussi mes vis-à-vis de l'opposition, des deux oppositions, et honnêtement, après avoir entendu les représentations du député de Saint-Hyacinthe, le représentant de l'ADQ, j'avais peur de me faire chicaner par vous ou que le gouvernement se fasse chicaner parce que, vous avez entendu, dans son discours ? d'ailleurs, je vous ai vu prendre une note, M. Leblond ? dans son discours, il a dit que vous faisiez partie de gens qui s'opposent au projet de loi n° 50. J'ai compris que ce n'est pas vrai du tout, là, ça ne représente pas la réalité. Vous ne vous opposez pas au projet de loi n° 50, je pense que vous l'avez bien dit dans votre discours. Alors, il faudrait peut-être demander à la personne qui a écrit le discours du représentant de l'ADQ de biffer cette page, ce n'est pas vrai.
Une voix: ...
M. Dupuis: Il faut faire attention, il faut faire attention à ce qu'on dit, toujours faire attention à ce qu'on dit.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre, pas d'interpellation.
M. Dupuis: Alors, M. Leblond, j'ai bien pris note des représentations que vous faites en ce qui concerne les remarques que vous avez faites sur certaines définitions qu'on retrouve dans le projet de loi. Ce que je note surtout, c'est que vous êtes un bon politicien parce que vous avez dit que vous étiez prêt à accueillir immédiatement les techniciens. Vous accueillez donc le mandat qui a été donné à l'Office des professions comme étant quelque chose de positif, c'est-à-dire travailler au sujet de toute cette question, là, dont les techniciens vont venir nous parler en commission parlementaire. Ils se sentent un peu laissés de côté, là, dans l'élaboration du projet de loi n° 50. Donc, vous allez travailler en collaboration avec l'office sur ces questions-là. C'est ce que je comprends?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Vous êtes un fin politicien, M. le ministre. Alors, ce que je tenais à dire, c'est: concernant les techniciens en travail social, ça fait longtemps que nous reconnaissons, l'Ordre des travailleurs sociaux, la compétence et l'importance de l'apport des techniciennes et des techniciens en travail social au Québec. Nous avons eu l'occasion de le dire lors des consultations du groupe Trudeau. Nous avons été en accord avec les recommandations du comité d'experts à l'effet de les reconnaître maintenant, les travaux étant assez avancés concernant les techniciennes en travail social, contrairement, semble-t-il, à l'avancée des travaux sur les techniciennes en éducation spécialisée et en intervention en délinquance.
Donc, en travail social, on sait ce que les techniciennes font. Le comité d'experts a fait une recommandation à l'office, qui vous l'a présentée. Alors, nous croyons que les techniciennes en travail social devraient être reconnues dès maintenant dans le système professionnel. Le comité d'experts recommandait qu'il partage le champ d'exercice des travailleurs sociaux, qui deviendrait ainsi le champ d'exercice du travail social, et ce qui nous permettrait, au niveau effectivement de la protection du public, d'avoir une vue d'ensemble sur l'ensemble des services donnés en travail social au Québec, dans un esprit de cohérence. Mais semble-t-il que ça pourrait se faire dès maintenant.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: Juste pour les fins de la discussion, pour permettre aux gens qui nous écouteraient et qui connaissent moins le champ ? comme celui qui vous parle, d'ailleurs ? démystifiez-moi donc ça, là. Les techniciens, ils font quoi par rapport aux travailleurs sociaux? Donnez-moi une situation, donnez-moi un exemple d'une situation qui pourrait exister, où le technicien travaille en collaboration avec le travailleur social, puis donnez-moi, là, ce que l'un et l'autre font dans un cas particulier, s'il y en a un qui vous vient à l'esprit.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Je ne pensais pas que c'était l'objet de la commission parlementaire, M. le ministre, mais, écoutez, c'est une des difficultés que le projet de loi permettrait de résoudre. Vous savez, je vous disais tantôt: N'importe qui à la limite peut exercer le travail social au Québec, qu'on ait une formation universitaire en travail social ou en d'autres choses, des sciences humaines, là, aller jusqu'à toutes sortes de choses, là, je vous dirais, en privé, ou qu'on soit de niveau technique. Donc, il y a des établissements qui n'ont pas fait nécessairement le choix de différencier l'apport des travailleurs sociaux versus l'apport des techniciennes en travail social. Il y a d'autres établissements qui ont fait le choix et qui ont clairement identifié... Donc, je pourrais vous donner des exemples, mais qui ne sont pas nécessairement représentatifs de l'ensemble de la pratique.
Le projet de loi, si on y ajoutait l'inclusion immédiate des techniciennes, techniciens en travail social, permettrait effectivement de mieux délimiter l'apport de ces deux professions, qui, dans notre système... Je vous rappelle, hein, une formation nous mène à développer des compétences qui nous amènent ensuite à exercer. Ça ne devrait pas être l'exercice qui nous ramène ensuite à l'inverse, hein, c'est la formation qui permet l'acquisition des compétences. Alors, j'ose présumer que deux formations différentes, une au niveau technique et l'autre au niveau universitaire, nous amènent à des compétences différentes, devraient nous amener à une différenciation des tâches et à un apport plus juste et équitable à la fois des professions de technicienne en travail social et des professions de travailleuse sociale.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais vous entendre, M. Leblond, particulièrement dans le secteur de la protection de la jeunesse parce que, là, on parle des techniciens puis on parle des travailleurs sociaux. Quel serait votre point de vue, le point de vue de l'ordre, là, relativement aux interventions des techniciens en travail social, particulièrement dans la dispense des services sociaux en général et particulièrement dans le secteur de la protection de la jeunesse, là, ce que vous êtes prêts à leur reconnaître comme évaluation dans ce secteur-là?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Alors, le comité d'experts avait été clair là-dessus, il recommandait que l'étude de la recevabilité d'un signalement soit partagée avec les techniciennes en travail social. On sait également que, dans l'organisation du travail... Et ça pourra vous être mieux présenté, là, par les représentants de l'Association des centres jeunesse du Québec, mais, dans leur plan, dans leur plan de livraison de services, c'est davantage des techniciennes qui font ce rôle-là donc spécifique d'évaluation de la recevabilité des signalements, de façon générale, là, au Québec, et c'est une orientation donnée. Donc, on est en accord avec ça. On n'a pas de difficulté avec cet élément-là, là.
À savoir: Est-ce qu'ils doivent partager les autres activités réservées?, là je pense qu'il faut distinguer ceux qui le font maintenant de ce qu'on crée pour le futur. Je pense que le projet de loi met la table pour l'avenir, corrige des éléments dans le présent mais met la table pour l'avenir. Il n'est pas de l'intention... et au contraire il est de... Nous sommes conscients de l'importance du maintien des services, de la continuité. Il ne faut pas qu'il y ait de rupture de services non seulement pour la population, mais pour les travailleurs sociaux puis les travailleuses sociales, qui devraient, si on appliquait à la lettre le projet de loi sans clause de type crépusculaire, assumer une quantité de travail, là, qu'ils ne pourraient pas accomplir.
Donc, il y a une nécessité de poursuivre les services, donc il faudrait voir aussi avec les techniciennes, les techniciens qui exercent actuellement et qui exerceront, au moment de l'adoption de la loi, des activités réservées aux travailleurs sociaux la possibilité de poursuivre ces activités-là. Mais dans l'avenir ça nous amènerait à organiser le travail en fonction davantage des compétences acquises par les niveaux de formation et ainsi mieux protéger le public. On veut l'imputabilité aussi des professionnels, donc ils doivent être en mesure de prendre des décisions ou de fournir des recommandations en fonction de leurs compétences précises. Et on sait que le projet de loi ne vise pas non plus l'application des mesures, donc il y a un grand secteur...
Vous savez, le projet de loi, là, on a découpé le travail des professionnels pour le spécifier, et uniquement dans ces cas précis là ça devra être un professionnel. On aurait pu le voir autrement. On aurait pu aller davantage, comme proposait le groupe Bernier, sur une adhésion obligatoire pour tous les professionnels qui exercent et qui ont la formation requise pour être membres de l'ordre. Ça aurait été plus simple et à la fois une protection du public, là, intensifiée. Mais ce n'est pas le virage qu'a pris le comité Trudeau et c'est correct aussi. On va y aller avec ce pas-là.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
n(10 h 10)nM. Dupuis: Moi, je veux simplement faire écho à ce que vous venez de dire au sujet de la rupture de services. Je sais qu'il y a des craintes de la part de certains groupes au sujet de la rupture de services. Je veux tout de suite dire, M. Leblond, et aux gens qui nous écoutent, qu'il y aura des dispositions transitoires qui permettront qu'on évite cet écueil de la rupture de services. Je suis d'accord avec vous, pour la protection du public, pour la protection des clientèles aussi, il faut que l'offre de services soit maintenue. Et dans le fond, vous-même, vous faites écho à ce que je disais en début de commission quand je disais: Le monde idéal, c'est ce vers quoi il faut tendre. Moi, je ne prétends pas que le projet de loi n° 50 ? puis vous non plus ? fait un monde idéal, mais il faut tendre vers le monde idéal. On va continuer les travaux, mais, pour la rupture de services, ne soyez pas inquiet, il y aura des mesures transitoires qui vont être proposées, qui feront en sorte qu'on va éviter cet écueil-là.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. J'ai maintenant le député de Robert-Baldwin.
M. Marsan: Merci, Mme la Présidente, et merci à vous, M. Leblond et Me Silver, pour la qualité de votre présentation.
Moi, je voudrais vous parler davantage d'un encadrement de la pratique comme tel. Vous avez fait allusion à juste titre qu'il y a peut-être des gens qui... Vous avez qualifié ces personnes-là de charlatans ou de gens qui pourraient s'approprier le titre de travailleur social mais qui finalement n'ont pas les qualifications requises, et vous suggérez que le législateur, dans sa grande sagesse... Et c'est vous qui le dites, là. Je vais dire ça à notre confrère le ministre. Vous suggérez que, par voie réglementaire, les activités qui s'apparentent à la psychothérapie mais qui n'en sont pas soient énumérées et définies dans un avenir prochain, et ce, en collaboration évidemment avec les ordres professionnels.
Est-ce qu'il n'y a pas un danger? Puis, lorsqu'on veut faire une législation comme celle qu'on va faire... Et on espère qu'on va réussir avec le projet de loi n° 50. Tous les partis, on est unanimes, là, puis on veut, comme vous, protéger de la meilleure façon possible le public. À partir du moment où on veut énumérer certaines actions ou certains travaux qui sont faits par de prétendus travailleurs sociaux, est-ce qu'il n'y a pas un danger d'en oublier ou de laisser porter des fois l'interprétation de certains qu'on pourrait clarifier? Et je vous rappelle que le souci de ma question, c'est le même que vous, comment mieux protéger le public à travers le projet de loi n° 50.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Si je comprends bien, sur l'élément... dans le chapitre en tout cas qui concerne davantage la psychothérapie, bon, il y a une définition qui vous est proposée, qui fait consensus. Mais ce qui concerne la... Il y a beaucoup d'interventions thérapeutiques, donc d'interventions qui sont aidantes pour les individus et les familles, les couples, les groupes, les collectivités, qui, tout en n'étant pas de la psychothérapie, s'en rapprochent, là. On a lu tantôt la définition de ce que serait le champ d'exercice du travailleur social ou du thérapeute conjugal et familial: il y a un aspect de traitement, il y a un aspect d'aide. Ce que je fais, moi, comme travailleur social n'est pas de la psychothérapie, moi, en tout cas, dans ma pratique de Claude Leblond, là, mais est certainement aidant, là ? sinon, j'espère que je ne serais pas là ? donc est aidant et est aidant dans le mieux-être des personnes, est aidant dans l'adaptation aux difficultés.
Alors, parfois, ça peut sembler proche de la psychothérapie, donc c'est sage qu'on puisse aussi définir ce qui n'est pas de la psychothérapie et ce qui regarde davantage l'exercice de chacune des professions pour que ces professions-là puissent continuer à exercer. Moi, je ne voudrais pas, demain matin, recevoir une poursuite d'un autre ordre disant: M. Leblond, vous exercez la psychothérapie, alors que j'exerce ma profession. Donc, qu'on puisse définir davantage les termes va être aidant dans l'actualisation du projet de loi, dans sa mise en place et également dans le contrôle que devra faire l'Ordre des psychologues quant à la pratique illégale de la psychothérapie. Alors, ils auront des balises sur lesquelles se baser. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question, M. le député.
M. Marsan: Oui, mais il y a comme... Est-ce qu'il n'y a pas quand même un danger à partir du moment où nous avons une énumération? C'est ça qui m'inquiète.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Il y a peut-être un danger, mais le danger est moindre que de ne pas en avoir...
M. Marsan: Ça, c'est correct.
M. Leblond (Claude): ...parce que, s'il n'y en a pas, là, effectivement, il y a un risque d'interprétation et là on risque d'arriver aussi en rupture de services.
Je fais parfois de la pratique conjointe... ou je faisais parfois de la pratique conjointe avec une collègue psychologue. Son intervention est de la psychothérapie. Moi, c'est autre chose en fonction de mon cadre. Et là, à ce moment-là, c'est important que, moi, je puisse continuer aussi à exercer ma pratique, là. Donc, les définir permet de davantage le préciser.
M. Marsan: Merci. J'avais une autre question, et cette fois c'est lorsque vous parlez de la promotion de la santé, prévention du suicide. Vous considérez comme un gain important pour le public que l'information, la promotion de la santé, la prévention du suicide, et des accidents, et des problèmes sociaux fassent désormais partie de l'exercice de tous les professionnels. Ça, j'aimerais vraiment que vous nous disiez quelques mots là-dessus parce que c'est... Bien, je pense que je vais souscrire à ce que vous dites. Encore une fois, c'est vraiment intéressant et très important pour toute la communauté québécoise.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Effectivement, moi, je trouve que non seulement ça nous rappelle, comme professionnels, notre responsabilité citoyenne et notre responsabilité par rapport aux citoyens, là, de les éclairer davantage, mais que nous partagions mutuellement, les professionnels de diverses professions et les ordres de ces professions-là, cette responsabilité d'information du public par rapport à ces problèmes qui sont nommés fait en sorte que nous serons mutuellement imputables du fait de le faire. Alors, je trouve qu'on a un beau défi, là, à ce moment-là, et un rappel de l'importance de notre contribution par rapport à nos concitoyens dans ces dimensions-là et, en ce qui nous concerne, particulièrement concernant la prévention du suicide et des problèmes sociaux. Mais il y a une invitation, là aussi, me semble-t-il, de travailler en interordres et en interprofessions pour effectivement en arriver à combattre ces grands problèmes là, et, moi, je trouve ça intéressant qu'on le retrouve dans notre champ d'exercice puisque nous le lirons régulièrement, que nous aurons à l'expliquer et que nous aurons aussi à agir en fonction de ces éléments-là à la fois comme les 110 000 professionnels visés mais aussi les six organisations, là, qui sont actuellement visées et les autres qui l'ont déjà dans leur champ d'exercice.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Il reste une minute. M. le député de Chomedey, une minute, question et réponse.
M. Ouellette: Une minute? J'aurais le goût, M. Leblond, de vous en poser une toute petite, en espérant que la petite question va avoir une petite réponse. Vous avez une ouverture d'esprit relativement aux techniciens en travail social. Est-ce que ça va impliquer de nouvelles mesures d'organisation de travail, là, si vous avez à interagir avec les techniciens ou est-ce que ça... Est-ce que ça réimplique toute une réorganisation, là, dans le travail de l'un et de l'autre pour arrimer...
M. Leblond (Claude): À plus long...
La Présidente (Mme Thériault): Il vous reste 30 secondes.
M. Leblond (Claude): Oui. À plus long terme, probablement, là. Mais je n'ai pas toutes les réponses à ça. Il faut s'asseoir... Il faut d'abord que vous statuiez en fonction du Code des professions. Est-ce que les techniciennes en travail social répondent à l'article prévu au code pour en faire des professionnelles? Le comité d'experts vous disait oui. Bon.
Ceci étant fait, si vous nous demandez de les intégrer à l'ordre, ce à quoi on vous a dit oui, nous aurons à travailler mutuellement, dans un esprit d'ouverture, à mieux définir, à partir du champ d'exercice qui est commun, quelles sont à la fois les zones ? et là je verrais des cercles ? alors quelle zone est commune, quelle zone est plus spécifique à chacune des deux professions, et ensuite on aura à porter, avec les deux professions dans ce même secteur, auprès de l'organisation du travail... à échanger avec eux aussi, à les entendre: voici maintenant ce que pourrait être l'organisation du travail et une meilleure façon de livrer les services sociaux, au Québec, en fonction de deux professions dans un même secteur, au sein du même ordre.
Mais je n'ai pas de réponse toute faite pour demain. Il faut s'asseoir pour pouvoir le faire, et nous pourrons nous asseoir pour pouvoir le faire quand il y aura un message clair non seulement d'étudier la chose, mais de reconnaître cette profession-là, de dire: C'est chez nous qu'elle sera, et ainsi nous aurons à travailler ensemble, avec le support de l'Office des professions, j'en suis assuré, sur effectivement les autres mécanismes à mettre en place.
M. Ouellette: Merci de votre courte réponse.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Merci, M. Leblond. Donc, ceci met fin au premier bloc d'échange, et nous en sommes rendus à l'opposition officielle avec le député de Saint-Hyacinthe pour 15 minutes.
n(10 h 20)nM. L'Écuyer: 15 minutes. Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, M. Leblond. En fait, je dois, au début de cette consultation, remercier en fait tous les groupes qui ont à se présenter en commission parlementaire, comme je l'avais dit antérieurement, et aussi tous les gens qui ont travaillé de près ou de loin à l'étude, l'analyse. Et aussi c'est depuis 2000, je pense, que ce projet de loi là était, on peut dire, en incubateur, et, à un moment donné, on voulait quand même aller de l'avant dans ce domaine-là.
Ensuite aussi, corriger un petit peu les propos du ministre. Je vais simplement vous rappeler: dans votre mémoire, à la page 16, lorsque vous dites que le projet de loi n'aborde pas la question de la reconnaissance de nouveaux groupes d'intervenants par le système professionnel alors que les experts du comité Trudeau proposaient l'intégration au système professionnel des criminologues, des sexologues et des techniciens en travail social, suggérant même, pour ces derniers, l'adhésion à votre organisme, à votre ordre, alors que nous avons eu, dès ce matin, dans le fond, un voeu pieux en fait du ministre, un voeu qu'on peut dire plus formaliste, qui s'est traduit par une lettre qu'ils ont déposée ce matin, alors, nous, c'est dans ces propos que nous avions formulé nos inquiétudes selon la lecture de votre rapport. Et aussi nous pensions qu'il était quand même opportun de le souligner au ministre, que les criminologues et les sexologues...
Et il y a une partie quand même qui n'a pas été traitée, les techniciens en travail social, dont j'aimerais quand même vous entretenir. Les techniciens en travail social, en fait pour ma compréhension du dossier, je pense que ces gens-là sont assez bien... sont ce qu'on appelle le premier niveau d'intervention au niveau d'un plan d'intervention. Vous me corrigerez si je me trompe. Peut-être qu'à un moment donné mon analyse va être un peu boiteuse. Mais par contre le premier niveau, c'est les techniciens en travail social qui se présentent en premier contact avec les personnes qui ont besoin de l'aide, assez souvent.
Alors, moi, ce que j'aimerais quand même savoir de votre part: Où la limite se situe entre votre intervention avec activités réservées et aussi l'intervention du travailleur, le technicien en travail social? Alors, j'aimerais un peu être capable de délimiter en fait ce champ d'exercice, si vous êtes en mesure de me fournir cette information-là pour la compréhension. Je sais que vous voulez... Dans votre mémoire, vous, quand même, faites une invitation d'accueillir les techniciens en travail social, et il faudrait peut-être m'informer davantage, là, de la limite. Et puis, premièrement, est-ce que cette invitation-là est reçue de la part des techniciens en travail social?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Vous me placez dans une situation un peu délicate de parler au nom de quelqu'un d'autre. Alors ça, je ne serai pas en mesure de le faire. Il est clair pour moi... Bon. Effectivement, en première ligne, il y a des techniciennes en travail social, il y a beaucoup de travailleurs sociaux, il y a aussi d'autres professionnels, dont les psychoéducateurs, dont les... Bon. Alors, il y a vraiment beaucoup de professionnels en première ligne, là.
Actuellement, juste peut-être pour fins d'éclairage au plan statistique, les données du ministère de la Santé et des Services sociaux nous disent qu'il y a un peu moins, là, de 2 000 techniciennes et techniciens en travail social dans le réseau de la santé et des services sociaux. Je vous ai dit tantôt que nous sommes 7 100 membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et je vous disais également qu'il y avait un nombre important de bacheliers en travail social admissibles à l'Ordre des travailleurs sociaux qui exercent dans le réseau sous un titre d'emploi différent et qui ne sont pas membres. Donc, globalement, probablement qu'en première ligne il y a davantage de travailleuses sociales et de travailleurs sociaux, juste au niveau statistique, mais peut-être que je n'ai pas la bonne information.
Maintenant, délimiter les champs de l'un et des autres, ça, je ne suis pas en mesure de vous le faire. Moi, je ne suis pas technicien en travail social, je n'ai pas cette formation-là. Je n'ai pas non plus, comme président de l'Ordre des travailleurs sociaux, à avoir eu la préoccupation de le faire et ainsi déterminer quelle est l'apport de l'un et de l'autre. Alors, ça relève... Quand la décision sera prise, quand vous aurez pris la décision, les parlementaires, là on sera davantage en mesure, avec nos collègues techniciennes et techniciens, en fonction de leur formation et de la différence de la formation avec les travailleuses sociales, de, là, mieux voir quel est l'apport de chacun.
Il y a aussi une pratique dans les milieux. Comme je vous disais tout à l'heure, il y a des établissements qui l'ont faite, la distinction, qui utilisent davantage les techniciens pour tel type de services, et qui utilisent davantage les travailleurs sociaux pour tel autre type de services, et qui utilisent l'un ou l'autre selon les problématiques ou selon le niveau d'analyse qui est demandé par la situation présentée.
Je vous donne un exemple. En protection de la jeunesse, de façon générale, on va retrouver des techniciennes et des techniciens à l'étude de la recevabilité d'un signalement, qui est une démarche plus... je ne dirais pas plus structurée mais avec des modalités, là, d'application de la démarche plus...
Une voix: ...
M. Leblond (Claude): ... ? en tout cas, oui, bon, en tout cas, mon collègue vous le dira tantôt, plus tac, tac, tac, là ? et discussion, bon, alors que l'évaluation de la compromission d'un enfant fait entrer en perspective, mais en perspective davantage d'éléments au plan de l'analyse multifactorielle des liens, à ce moment-là, avec les dimensions théoriques, les concepts d'attachement, les concepts de résilience, l'impact de la pauvreté, l'impact des différents caractères sociaux dans l'analyse globale. Donc, pour ça, on utilise habituellement davantage des travailleurs sociaux qui ont une formation universitaire davantage axée sur l'analyse multifactorielle et qui en arrivent à produire une évaluation, une opinion professionnelle et un plan d'intervention.
Dans l'actualisation du plan d'intervention, on peut avoir à la fois des travailleurs sociaux si les processus sur lesquels on intervient sont davantage complexes. On va avoir davantage des techniciens en travail social ou dans d'autres types de techniques sur des dimensions plus techniques, dans l'intervention plus directe. Bon, ça, c'est des exemples, mais les travaux sont à poursuivre à ce niveau-là. L'apport, et nous l'avons toujours affirmé, et je le dis, moi, comme président, depuis l'an 2000, dans tous les lieux auxquels je vais, l'apport des techniciennes en travail social est nécessaire au Québec, nous le reconnaissons et nous voulons poursuivre les discussions.
Si vous retournez dans les commentaires du Regroupement des techniciennes et techniciens en travail social, Regroupement national des techniciennes et techniciens en travail social, suite au rapport Trudeau, vous allez voir qu'effectivement il y avait une ouverture, qu'ils étaient en accord avec l'intégration à l'Ordre des travailleurs sociaux et à poursuivre les discussions. Si c'est différent maintenant, il faudrait peut-être voir avec eux ce qui suscite leur différence. Moi, je ne suis pas en mesure. J'ai lu des choses qui m'ont un peu étonné. Comme exemple, j'ai lu que l'Ordre des travailleurs sociaux voulait l'exercice exclusif du travail social, ce que nous n'avons jamais demandé, jamais dit, jamais écrit. Et vous vous l'avez réentendu ce matin, ce n'est pas notre orientation, au contraire. Nous ne sommes pas assez nombreux, au Québec, à exercer dans les services sociaux pour pouvoir effectivement donner l'ensemble des services nécessaires, on ne se privera d'une masse de travailleuses et de travailleurs compétents dans la poursuite de l'exercice auprès de la population.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. L'Écuyer: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Leblond, c'est parce que vous dites dans votre mémoire: «En effet, l'individu est indissociable de son environnement», et je pense quand même que, dans votre démarche, l'individu doit faire partie de son environnement, et étudier son environnement vous permet quand même d'apporter des correctifs, si nécessaire, là, à sa façon de faire.
Mais je reviens toujours un peu à cette question-là du technicien en travail social, et plus particulièrement, si je prends au niveau du suicide, là, au paragraphe g de l'article 5: «Déterminer le plan d'intervention pour une personne atteinte d'un trouble mental ou présentant un risque suicidaire qui est hébergée dans une installation d'un établissement qui exploite un centre de réadaptation pour les jeunes en difficulté d'adaptation.» Alors, dans ce processus-là de plan d'intervention ? et c'est ça que je veux quand même travailler avec vous ? au niveau de la délimitation, alors je ne sais pas si les travailleurs sociaux sont présents à tous les endroits. J'ai l'impression que oui, ils sont présents dans tous les endroits où il y a des gens qui peuvent requérir des services, des soins ou des... pas des soins mais des activités professionnelles, mais c'est le technicien en travail social. Alors, moi, c'est cette petite démarcation là que je veux voir.
Est-ce qu'effectivement le technicien en travail social va faire partie du processus de consultation avant de déterminer un plan d'intervention ou bien, dans votre esprit, c'est le travailleur social qui va être simplement le seul à déterminer un plan d'intervention?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): D'abord, juste pour replacer cette activité-là dans un contexte plus large... Et, vous voyez, c'est la seule activité de... c'est-à-dire le seul contexte dans lequel il y aurait une réserve d'activités pour la détermination du plan d'intervention. On ne le voit pas dans les autres contextes, c'est uniquement par rapport à un jeune qui est placé en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse ou de la Loi sur les jeunes... les jeunes contrevenants. Ça a changé de nom, là, puis je ne l'apprends pas. Mais je vais finir par l'apprendre. Donc, c'est dans ces deux contextes de loi là... et qu'il est placé dans un centre de réadaptation ? on vient de réduire encore ? et qu'il, en plus, présente un risque suicidaire ou un trouble de santé mentale. Or, on est face à une portion d'individus qui, bien qu'importante dans les centres de réadaptation, est quand même marginale par rapport à l'ensemble des jeunes et des familles qui reçoivent des services sociaux au Québec.
n(10 h 30)n Alors, si le comité d'experts et le ministre nous présentent cet élément-là pour nous dire: Dans ces cas si pointus, il faut réserver la détermination du plan d'intervention, moi, je comprends, à ce moment-là, que ça doit être parce que c'est des situations à haut risque de préjudice, et à tellement haut risque de préjudice et pour lesquelles c'est tellement complexe qu'il faut assurer que la détermination du plan d'intervention soit faite par un professionnel de formation universitaire, et même universitaire de deuxième cycle dans le cas des psychoéducateurs.
Je comprends également que, dans l'articulation de ça dans les lieux de travail, c'est dans la détermination du plan d'intervention, qui, lui, est révisé aux trois mois par le DPJ, donc c'est le plan global. Dans le journalier, l'apport de chacun des employés ou des professionnels d'un établissement dans la vie quotidienne d'un enfant, le plan d'action journalier, c'est sûr que, là, c'est ceux qui sont le plus près de ce jeune-là qui vont continuer à l'agir, mais le plan global, lui, devra avoir été déterminé par une personne, un professionnel qui a le niveau de connaissance et de compétence requis à la gravité, à la complexité, à la lourdeur de cette situation-là parce qu'on sait qu'il est arrivé des drames. Ce n'est pas arrivé pour rien, là, il me semble, en tout cas, cette activité réservée, là, dans le projet de loi. C'est parce qu'on a su, on a vu des choses, vous les avez vues aussi comme moi. Mais, dans le quotidien, des techniciennes en éducation spécialisée, des techniciennes en travail social vont continuer d'agir leur plan d'action, qui, lui, va s'inscrire à l'intérieur d'un plan d'intervention, qui, lui, devra avoir été élaboré par le travailleur social, le psychoéducateur, éventuellement le criminologue, mais avec l'apport de chacun des individus de l'équipe interdisciplinaire dans la lecture plus globale.
Moi, j'ai besoin de savoir... ou j'aurais besoin de savoir, si j'étais travailleur social dans un centre de réadaptation et que j'avais à produire un plan d'évaluation, j'aurais besoin de savoir au quotidien et de recevoir l'apport des collègues techniciennes en éducation spécialisée, en travail social ou en délinquance dans ma lecture globale et dans l'analyse que, moi, je dois faire et dont je serai imputable.
La Présidente (Mme Thériault): Il vous reste une minute.
M. Leblond (Claude): C'est certain qu'ils ont un apport.
La Présidente (Mme Thériault): Il reste une minute au bloc d'échange, M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Je vais quand même vous amener aux propos que vous teniez dans votre mémoire lorsque vous demandiez quand même un cahier interprétatif pour faciliter la mise en oeuvre de la loi. Alors, ce cahier interprétatif là va dans le sens, dans le fond, de la délimitation des champs d'expertise dans lequel chacun devra exercer. Est-ce que vous pouvez en fait informer davantage... Parce que, dans votre propos préliminaire, c'est ce que vous dites. Vous dites: «Cette disposition prévoirait que la réserve d'activités n'ait pas pour effet d'empêcher notamment les travailleurs sociaux et les thérapeutes conjugaux et familiaux d'exercer leurs activités professionnelles conformément à l'article 37 du Code des professions.» Alors, vous souhaitez qu'il y ait un cahier interprétatif pour être en mesure de cibler davantage votre champ d'activité et être en mesure de cibler davantage le champ d'activité des autres qui gravitent autour de votre profession.
La Présidente (Mme Thériault): Et je vais vous demander de répondre rapidement, M. Leblond, parce qu'on...
M. Leblond (Claude): Oui. D'accord. Ce n'est pas tant de cibler le champ d'exercice que davantage faciliter le passage dans la vraie vie quotidienne après; alors, dans le concret, comment ça va s'appliquer. Et ça s'est fait aussi pour la mise en place de la loi n° 90 qui a amené un changement dans l'organisation du travail, un partage davantage d'actes. En santé mentale et relations humaines, on inscrit des activités nouvelles, donc il faut aider à la fois les professionnels et également les milieux de travail à faire en sorte qu'on comprenne bien la portée de chacun des éléments et qu'on s'assure, à ce moment-là, de ne pas s'enfarger mutuellement. Il ne faudrait pas en arriver, à cause du projet de loi n° 50, de faire en sorte qu'il y ait des barrières qui s'érigent dans la livraison de services, donc s'assurer à la fois qu'on respecte l'esprit de la loi, qu'on s'assure de sa mise en place dans un esprit aussi d'ouverture par rapport à l'apport de chacun, là. Donc, c'est pour davantage délimiter ces éléments-là.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Leblond. Ceci mettra fin à ce bloc d'échange. Donc, maintenant, avec le deuxième groupe de l'opposition, en la personne du député de Dubuc. 13 minutes pour vous, M. le député.
M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Leblond, M. Silver, bienvenue à cette commission. Merci pour votre présentation.
Comme vous êtes le premier groupe qui se présente devant nous, c'est à vous que je vais envoyer les fleurs. Moi, je voudrais d'abord vous féliciter pour avoir, avec les autres ordres professionnels, réussi ce consensus sur un projet de loi, sur les grands principes d'un projet de loi qui est très important. Alors, je pense que c'est... Compte tenu de ce qui se passe au sein d'ordres professionnels ? je sais que ce n'est pas toujours facile ? alors, le fait que vous ayez travaillé en collaboration les uns avec les autres, je pense que ça mérite d'être souligné.
Je sais que vous avez eu l'Office des professions qui vous a aidés énormément puis je m'en voudrais de ne pas souligner, là, ce que j'ai fait tout à l'heure... Je regrette infiniment, mais je voulais souligner la présence du président de l'office, Me Jean-Paul Dutrisac, qui est avec nous, qui est le nouveau président de l'office. Mais je sais que Me Dutrisac a travaillé également avec vous sur ce projet de loi, compte tenu qu'il était, avant d'être président de l'office, le président du Conseil interprofessionnel du Québec et qu'il a mis toute son ardeur et son talent à vous aider dans ce processus.
Ma première question, M. Leblond, et je vais revenir un petit peu sur ce que le député de Saint-Hyacinthe vient de vous poser sur le guide. Vous dites que vous voulez avoir un cahier interprétatif pour faciliter la mise en oeuvre de la loi. Est-ce que vous avez déjà entrepris des démarches avec l'office à ce sujet-là? C'est un genre de guide de pratique, j'imagine. Est-ce que l'office a déjà donné son aval à cette proposition?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Il y a une ouverture convenue avec l'office effectivement de poursuivre dans cette avenue-là. Sans ça, ce serait difficile dans les milieux de travail, on laisserait à chacun des individus, professionnels ou gestionnaires, la responsabilité d'interpréter la loi.
Je vous donne un exemple. On réserve aux psychologues, aux médecins et à certains conseillers... non, aux psychologues, à certains conseillers d'orientation et à certaines infirmières l'évaluation des troubles mentaux. Tout ce que font les travailleurs sociaux auprès des individus et des familles pourrait se lire sous le DSM-IV. Moi, je rencontre, par exemple, une dame qui vit le décès de son conjoint, qui a à s'adapter. Ça peut se retrouver, ça, sous le DSM-IV. La volonté, ce n'est pas d'empêcher les travailleurs sociaux de faire leur propre évaluation dans leur champ d'exercice et ainsi donner les services à la population. Alors ça, c'est un exemple de ce qui devrait et devra être écrit dans le guide explicatif pour permettre aux établissements de bien comprendre la portée de la loi, de ne pas placer leurs professionnels non plus en pratique illégale mais également de ne pas paranoïer non plus sur la portée éventuelle de la loi, parce qu'actuellement il circule et vous avez lu probablement des choses qui viendraient dire que ça empêche tout ce qui n'est pas professionnel d'exercer. Ce n'est pas ça que ça veut dire, là. Donc, c'est dans ce sens-là qu'il me semble que c'est intéressant, le cahier explicatif.
M. Côté: Au sujet des techniciens en service social, ils sont combien au Québec? Est-ce que vous savez le nombre?
M. Leblond (Claude): Bien, je disais tout à l'heure que les statistiques du ministère de la Santé et des Services sociaux nous disaient que c'était un peu moins de 2 000 dans le réseau du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il y en a probablement dans d'autres réseaux, mais c'est probablement le principal employeur, là.
M. Côté: Merci.
M. Leblond (Claude): Mais je ne sais pas le nombre exact dans l'ensemble du Québec.
M. Côté: Lorsque vous parlez...
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. Merci, Mme la Présidente. Lorsque vous parlez d'activités réservées aux travailleurs sociaux, vous en énumérez neuf, à part les trois qui sont réservées aux thérapeutes conjugaux et familiaux. J'imagine que la plupart de ces activités-là sont partagées avec d'autres professionnels, j'imagine, les neuf que vous avez là.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): La plupart, oui. Il y en a une qui n'est pas partagée.
M. Côté: Qui n'est pas partagée.
M. Leblond (Claude): Alors, c'est l'évaluation... Bien, c'est l'article... Celui sur lequel on vous propose une modification, là, c'est l'évaluation d'une personne...
M. Côté: De la personne, oui... de protection du majeur, mandat donné en cas d'inaptitude, là.
M. Leblond (Claude): Oui. C'est ça.
M. Côté: O.K. C'est l'activité n° 6.
Bon, je vais revenir justement avec cette activité, où, dans votre mémoire, vous proposez justement de modifier, d'apporter un amendement à la loi en disant justement que le projet de loi dit «évaluer une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur» et, vous, vous dites, pour vous conformer à l'article 270 du Code civil du Québec, vous demandez qu'il y ait un amendement pour «procéder à l'évaluation psychosociale d'une personne». L'article 270 du Code civil dit «est constitué, entre autres, de l'évaluation médicale et psychosociale». Moi, je voudrais savoir: Écoutez, je ne suis pas un spécialiste en santé mentale, mais quelle sorte d'autres évaluations qu'il y a à part l'évaluation médicale et psychosociale?
n(10 h 40)nLa Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Il peut y avoir d'autres éléments versés au dossier, là, qui pourraient être, par exemple, sur la question des biens, ces éléments-là, mais les deux pièces qu'il doit nécessairement y avoir pour que le tribunal puisse se prononcer sur l'inaptitude et sur le besoin de protection ou le mode d'encadrement de la personne, c'est l'évaluation médicale et l'évaluation psychosociale, et on trouvait qu'il y avait une richesse dans notre Code civil.
M. Côté: ...ces deux mots-là dans le projet de loi actuel.
M. Leblond (Claude): Et on aurait ainsi une cohérence plus grande, nous semble-t-il, entre le Code des professions et le Code civil. Ça s'inscrit à l'intérieur d'une démarche qui est précisée dans le Code civil et c'est difficile, me semble-t-il, de changer le Code civil pour biffer le terme «psychosociale» pour le remplacer par «fonctionnement social», par exemple.
M. Côté: Donc, c'est plus justement par souci de cohérence, pour être conforme avec ce qui existe dans le Code civil actuel.
M. Leblond (Claude): J'inviterais peut-être mon collègue...
La Présidente (Mme Thériault): Me Silver.
M. Silver (Richard): Exactement. C'est ça, l'objectif de notre recommandation.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. Côté: L'autre chose que je voulais vous parler justement, c'est que le ministre nous a parlé tout à l'heure qu'il y aura des dispositions transitoires pour éviter la rupture de services. Je vous la pose à vous, la question, peut-être que le ministre tantôt pourra répondre à ma question. Est-ce que ces dispositions transitoires là vont être ? j'imagine ? apportées par amendement au projet de loi? Est-ce que vous avez des délais prévus pour ces dispositions transitoires? Est-ce que vous pensez que... déjà, dans votre tête, vous pensez que ce sera six mois, que ce sera un an, que ce sera 18 mois?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Moi, je ne suis pas un légiste, hein, je suis un travailleur social, je suis le président de mon ordre, je suis là pour la protection du public. Je vais vous dire mon gros bon sens, là; ensuite, vous essaierez de le traduire. Il me semble que le principe, c'est que les services doivent se poursuivre. Il y a des gens qui ne se qualifieront pas à un des ordres professionnels et qui exercent, et ce sera la majorité des gens qui exercent ce travail social. Donc, on est probablement l'ordre qui sera principalement visé par ces... à autoriser ces types de clauses là. Nous ne voulons pas de rupture de services, nous reconnaissons qu'il y a des gens qui sont à l'emploi, qui doivent continuer à le faire, qui également le font avec compétence, là, puisque les établissements les gardent à leur emploi et les maintiennent à l'emploi. Donc, ces gens-là doivent poursuivre. Alors, nous, on pensait qu'en vertu de l'article 94h du code, qui autorise le bureau à, pour des individus ou des groupes d'individus, leur permettre d'exercer des activités qui seraient normalement réservées aux travailleurs sociaux... bien d'y aller avec ce système-là, à ce moment-là, à la fois pour la durée d'emploi de ces gens-là dans le type d'établissement dans lequel ils exercent, donc pas quelque chose qu'on revoit annuellement.
On souhaiterait par contre que ce soit assorti d'une obligation de formation continue, et je vais vous expliquer pourquoi, la différence entre ne pas avoir d'obligation du tout et celle d'en avoir. Ne pas avoir d'obligation du tout, ça pourrait vouloir dire que des individus sont autorisés à exercer l'activité concernant la contention et l'isolement, décider de la contention et de l'isolement du simple fait qu'actuellement ils peuvent le faire, alors que l'assortir, en vertu de 94h, d'une clause de formation continue les oblige, eux aussi, tout comme tous les autres professionnels nommés en fonction de cette activité-là, à avoir de la formation continue. Le projet de loi prévoit que, pour contention et isolement, les professionnels exercés devront suivre la formation continue, compte tenu de l'impact de cette décision-là qu'ils peuvent prendre. Donc, on souhaiterait que les gens que nous autorisions à exercer nos activités puissent aussi avoir une obligation de formation continue mais qu'à ce moment-là ils maintiennent ensuite le droit d'exercice pour toute leur durée d'emploi. Donc, il me semble qu'on favorise à la fois le maintien de l'emploi, le maintien des services et une grande ouverture à la fois aux organisations de travail, à la fois aux milieux syndicaux dans le fait de la poursuite des services offerts par les gens qui ne sont pas admissibles à un ordre.
La Présidente (Mme Thériault): Il vous reste un peu moins de trois minutes, M. le député.
M. Côté: Oui, ça va. J'ai une dernière question: En ce qui concerne l'encadrement de la pratique de la psychothérapie, avec ce projet de loi qui impose certaines normes, certaines obligations pour ceux qui veulent pratiquer la psychothérapie, est-ce que vous... Bien, c'est certain que vous ne pourrez pas me donner une réponse affirmative, mais comment vous voyez que ça va améliorer la situation en ce qui concerne justement ces pratiques-là de personnes qui se disent psychothérapeutes, qui font de la consultation auprès d'une clientèle qui est souvent vulnérable, qui chargent des honoraires, puis qui n'ont pas de permis, puis qui ouvrent une boutique un peu, là, n'importe où, à n'importe quel endroit? J'aimerais ça avoir votre idée. Comment on va pouvoir, là, justement mettre fin à ces pratiques-là qui sont illégales?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond, deux minutes.
M. Leblond (Claude): Alors, avec le type d'encadrement... Ce qui est prévu au projet de loi, nos collègues psychologues auront du travail d'information à faire, là, par rapport à cet élément-là, mais auquel nous participerons avec joie également. Moi, je pense que le projet de loi, avec l'adoption des dimensions concernant la psychothérapie, va permettre et donner des outils nécessaires aux ordres pour pouvoir encadrer cette pratique-là et s'assurer davantage de la protection du public. Mme Charest pourra vous répondre plus longuement, mais je pense qu'à ce moment-là il sera intéressant d'informer le public clairement que, pour exercer la psychothérapie ou porter le titre de psychothérapeute au Québec, il faut maintenant être psychologue ou médecin ou détenir un permis d'exercer cette psychothérapie qui sera délivré par l'Ordre des psychologues, là, en fonction des compétences de nos professionnels, aussi des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux.
M. Côté: Oui, encore un petit peu.
La Présidente (Mme Thériault): Une minute.
M. Côté: O.K. C'est parce que ce que j'ai peur, c'est que, si on encadre la psychothérapie de façon, là, correcte, c'est qu'il arrive d'autres personnes qui vont prendre d'autres titres, qui vont dire: Bien, moi, je suis un relationniste d'aide ? je ne sais pas trop, là, quelque chose du genre de même ? puis qui vont quand même exercer, là, contrairement à ce que la loi permet de faire. Et vous connaissez des gens, vous connaissez comment ça fonctionne, c'est qu'on essaie toujours de trouver une porte de sortie pour faire d'autre chose que ce qui est permis.
La Présidente (Mme Thériault): M. Leblond.
M. Leblond (Claude): Ça, je ne suis pas sûr que c'est moi qui peux donner une réponse à ça, là, et je pense que nos tribunaux auront à trancher.
M. Côté: Je vais sûrement poser la question.
M. Leblond (Claude): Mais me semble-t-il que la chaise... D'ailleurs, je ne sais pas trop quelle couleur elle est, là.
Une voix: Elle est brune.
M. Leblond (Claude): Alors, elle est brune? D'accord. Alors, je ne peux pas dire, moi, que, parce que ça ferait mon affaire, elle est blanche. La réalité, c'est qu'elle est brune. Donc, si une personne exerce ce qui est de la psychothérapie tout en disant: C'est du relationnisme, bien il y aura probablement une prise. Il faudra voir, à ce moment-là, la réponse de nos tribunaux dans la démonstration. Actuellement, là, par rapport à l'utilisation illégale du titre de travailleur social, l'apport de nos tribunaux n'est pas le plus fonctionnel sur le respect de nos titres.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Merci, M. Leblond. Merci, Me Silver. Merci à l'ordre d'avoir accepté de travailler avec nous ce matin.
Nous allons suspendre quelques instants pour pouvoir permettre à l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation et des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 49)
(Reprise à 10 h 51)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission des institutions poursuit ses travaux, et nous entendrons maintenant l'Ordre des conseillers et conseillères d'orientation et des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec. Je vais demander au président, M. Laurent Matte, de bien vouloir nous présenter les gens qui l'accompagnent, et par la suite vous avez une quinzaine de minutes pour pouvoir...
Des voix: ...
La Présidente (Mme Thériault): Je m'excuse, dans la salle, je m'excuse, nous avons repris les auditions. Je vais vous demander de vous asseoir et, si vous avez des discussions, de les poursuivre à l'extérieur, s'il vous plaît. Merci.
Donc, M. Matte, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire ainsi que les gens qui vous accompagnent. Bienvenue à l'Assemblée.
Ordre des conseillers et conseillères d'orientation
et des psychoéducateurs et psychoéducatrices
du Québec (OCCOPPQ)
M. Matte (Laurent): Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous permettre de nous exprimer et d'apporter notre appui au projet de loi.
Alors, je suis accompagné par M. Denis Leclerc, qui est membre du comité administratif et représente le secteur Psychoéducation de l'ordre ? je représente le secteur Orientation de l'ordre ? et Mme Renée Verville, qui est directrice générale et secrétaire de l'ordre. Notre ordre regroupe donc deux importantes communautés professionnelles distinctes, soit environ 2 300 conseillers et conseillères d'orientation et à peu près 3 100 psychoéducateurs et psychoéducatrices, et nous avons un programme d'accréditation en psychothérapie depuis 1980.
Alors, si vous permettez, nous allons partager entre nous notre temps de présentation pour respecter notre dualité. C'est une chose qu'on a faite également dans le cadre des travaux du comité expert, où il y avait les deux professions qui étaient représentées, à ce moment-là.
Les conseillers d'orientation sont surtout connus dans le milieu de l'éducation, mais ça ne représente que la moitié de nos membres. Il y en a 19 % qui pratiquent dans le milieu de l'employabilité et de la réadaptation, 14 % en pratique privée à temps plein, 5 % dans les entreprises et les autres dans d'autres domaines. On associe souvent... au milieu scolaire, mais ce n'est que la moitié. C'est une profession qui intègre l'importance de la santé mentale sur la relation entre la personne et le travail, autant dans le sens de l'impact de la situation de travail sur la condition mentale de la personne et qui peut l'amener à requestionner son choix professionnel que dans le cas où une personne qui a un problème de santé mentale consulte en orientation pour revoir qu'est-ce qui lui conviendrait le mieux. Alors donc, c'est quelque chose dans lequel on est déjà impliqués dans notre travail régulier.
Concernant les psychoéducateurs...
M. Leclerc (Denis): Bonjour. À mon tour de saluer les personnes ici présentes.
Donc, l'autre profession représentée par l'ordre, donc la psychoéducation, sans aller dans les détails, globalement près de la moitié des membres de l'ordre qui sont psychoéducateurs oeuvrent dans le réseau de la santé et des services sociaux et près du tiers oeuvre dans le secteur de l'éducation. Donc, il reste encore quelques autres professionnels, un certain nombre, mais globalement ça nous permet de situer...
Si on prend tout particulièrement les centres jeunesse, les centres de réadaptation, mais tout particulièrement les centres jeunesse, où une bonne proportion de notre membership oeuvre... D'ailleurs, la profession de psychoéducation est née dans les centres de réadaptation, et actuellement un grand nombre de nos professionnels oeuvrent dans les centres jeunesse, qui est très touché, ce secteur-là, par le projet de loi n° 50.
Ce qu'on veut souligner d'entrée de jeu, c'est que, dans ce secteur, on observe une non-reconnaissance officielle de la profession dans plusieurs cas, ce qui fait en sorte que le psychoéducateur est peu reconnu officiellement en tant que psychoéducateur mais est amalgamé au titre d'éducateur, éducateur qui peut correspondre à des psychoéducateurs, qui peut correspondre à des éducateurs, donc des techniciens en éducation spécialisée, ou même à d'autres professionnels ou d'autres intervenants universitaires ou autres qui ont tous le même titre. Et donc ça met, d'entrée de jeu, la pertinence d'un projet de loi comme le projet de loi n° 50.
La Présidente (Mme Thériault): M. Matte.
M. Matte (Laurent): Merci. Concernant le projet, le processus de modernisation, on a parlé beaucoup, ce matin, là, de tous les travaux qui ont constitué ce processus de modernisation là. Je voudrais souligner à quel point pour nous autres, c'est une chose qu'on appuie sans réserve. C'est un changement de paradigme carrément. M. Leblond l'a beaucoup exprimé, dans le même esprit où, nous, on le prend tout à l'heure, et je le dirai en disant qu'on part d'une approche où, par exemple, des actes sont réservés à des groupes de professionnels, et la réflexion part plutôt d'une approche centrée sur la personne vulnérable. De là, on se demande: Quelles sont les activités qui sont à risque de préjudice? Et ensuite on se demande: Quels sont les professionnels compétents qui partagent ces activités-là, mais chacun dans leur champ d'exercice? Je dirais que, quand on le regarde avec cette lunette-là, on est moins inquiets en partant.
Et l'autre chose qui permet d'être moins inquiet, c'est la notion d'interprétation dont on va reparler tout à l'heure, c'est-à-dire ce que ça n'empêche pas et ce que ça délimite. Ces principes-là ont créé ce qui a constitué le consensus dont on a parlé tout à l'heure, l'appui mutuel qu'on s'est donné, les six ordres directement concernés, qui ont été nommés tout à l'heure, et qui repose sur cette même compréhension de ce qu'est le projet. Alors, pour nous, étant donné le changement de paradigme, c'est important de l'adopter pour le bénéfice de ce qu'il contient mais aussi pour la nouvelle vision du système professionnel qu'il amène.
À propos des champs d'exercice qui sont nommés, selon nous les champs de pratique qui sont attribués à nos deux professions, ils sont actuels, ils éclairent bien le public, ils précisent la finalité de nos interventions, et le libellé réussit à éviter les listes détaillées de personnes, groupes, entreprises, organisations, etc. Puis, on utilise l'expression «l'être humain en interaction avec son environnement». Ça rend bien compte du travail qu'on fait.
Concernant les activités réservées...
M. Leclerc (Denis): Oui. La notion d'«actes réservés» a été inscrite, en 2002, dans l'article 37.1 du Code des professions. Notre compréhension est que les activités réservées doivent toujours s'exercer dans le cadre des activités professionnelles prévues à l'article 37 du Code des professions. Cela permet d'interpréter lesdites activités en fonction du champ d'exercice, ce qui favorise l'interdisciplinarité, permettant ainsi de dispenser les meilleurs soins et services possible, tel que le mentionnait le rapport Trudeau. Cela permet également de mieux distinguer, dans le cas des activités qui sont partagées entre plusieurs professionnels, l'apport de chacun d'eux.
Nous croyons cependant qu'il y aurait lieu d'ajouter une disposition interprétative prévoyant que le droit d'exercer une activité professionnelle réservée en vertu de l'article 37.1 ne devrait pas être interprété comme interdisant aux membres d'un ordre d'exercer des activités professionnelles en conformité avec les dispositions de l'article 37.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Leclerc. M. Matte.
M. Matte (Laurent): Concernant les activités réservées aux conseillers d'orientation, on considère qu'elles reflètent bien notre pratique. On a trois commentaires concernant les activités réservées. Le premier: on est d'accord avec l'activité évaluer les troubles mentaux. Nous croyons que la condition, là, liée à la formation continue, une attestation émise par l'ordre, ça permettra d'assurer une pratique compétente. Mais on est d'accord avec l'Ordre des infirmières et des infirmiers que, dans leur cas, ce n'est peut-être pas le moyen qui convient le mieux. Elles auront l'occasion de vous en parler davantage, mais on est en appui avec leur point de vue là-dessus.
Concernant la réserve d'activités évaluer un enfant qui n'est pas encore admissible à l'éducation préscolaire et qui présente des indices de retard de développement dans le but de déterminer des services de réadaptation et d'adaptation répondant à ses besoins, pour les conseillers d'orientation, on était un peu étonnés, bien qu'on a su après coup d'où venait cette préoccupation-là, mais ça ne correspond pas aux critères ni aux recommandations du rapport Trudeau, ça ne correspond pas à une demande de notre ordre et ça ne reflète pas notre pratique. Donc, on demanderait qu'elle soit retirée du projet de loi pour conserver la logique du projet.
n(11 heures)n Finalement, le rapport du comité d'experts prévoyait la réserve d'une activité consistant à évaluer une personne dont le diagnostic implique des contraintes sévères à l'emploi dans le but de déterminer un plan d'insertion professionnelle. On ne la retrouve pas dans le projet de loi. Selon nous, les personnes qui vivent des problèmes de santé mentale sont vulnérables aussi sur le plan de l'employabilité, et actuellement, compte tenu du contexte de la main-d'oeuvre québécoise, il y a une pression qui est mise pour que toutes les personnes participent au marché du travail et, même avec de la bonne volonté, il y a toujours la possibilité que ces personnes-là soient dirigées dans des projets mal adaptés à leur condition, avec des risques d'échec, des risques de détresse, voire de dégradation de leur état. Il y a des activités plus globales dans le projet de loi qui pourront les couvrir, mais on pense que c'est regrettable dans le fond que des personnes aient pu croire que ça empêcherait, par exemple, du personnel dans le réseau de l'emploi de faire des parcours ou des plans de réinsertion, alors que tout ce qu'on voulait, c'était assurer la part d'une évaluation compétente en santé mentale, évaluation dont on devra se passer.
Concernant la psychoéducation...
M. Leclerc (Denis): Concernant la psychoéducation, donc, d'entrée de jeu, je refais le lien avec notre introduction sur les activités réservées et je réitère ici la préoccupation qui a également été soulevée par M. Leblond dans la présentation précédente, c'est-à-dire que, si une activité réservée n'est pas attribuée en partage à une profession, ce fait ne saurait l'empêcher d'exercer une activité énoncée dans son champ d'exercice. À titre d'exemple, même si les psychoéducateurs n'ont pas obtenu en partage l'évaluation des troubles mentaux, cela ne saurait les empêcher de procéder à l'évaluation des difficultés d'adaptation par ailleurs répertoriée dans le DSM-IV, qui est à la base de l'activité d'évaluation des troubles mentaux. De même, le fait de ne pas avoir attribué l'évaluation du retard mental ne saurait les empêcher d'évaluer les capacités adaptatives. Donc, nous réitérons par ce fait l'importance de ne pas avoir une lecture fermée des actes réservés mais une lecture davantage un peu ouverte.
J'ai des commentaires sur deux articles en particulier, deux activités. Pour ce qui est de l'activité réservée évaluer un élève handicapé ou en difficulté d'adaptation dans le cadre de la détermination d'un plan d'intervention en application de la Loi sur l'instruction publique, nous aimerions ici apporter quelques précisions. Le libellé de l'activité précise que l'évaluation se fait auprès d'un élève handicapé ou en difficulté d'adaptation. Cela sous-tend que le handicap ou la difficulté d'adaptation a déjà été identifié chez l'élève pour lequel on demande une évaluation au psychoéducateur. Or, dans la pratique du psychoéducateur et d'autres professionnels en milieu scolaire, c'est l'évaluation de la difficulté d'adaptation qui amène la détermination d'un plan d'intervention. Il n'y a pas, dans les faits, une deuxième évaluation qui est faite de l'élève qui a été identifié comme présentant des difficultés d'adaptation. C'est donc dire que l'évaluation d'un élève qui présente des indices de difficulté d'adaptation ne serait pas réservée, avec les préjudices que cela pose lorsqu'une telle évaluation n'est pas faite par un professionnel compétent. Le libellé de cette activité, tel que proposé par le comité d'experts, nous apparaît plus pertinent, même en y ajoutant la référence de la Loi sur l'instruction publique.
Autre commentaire au sujet d'une autre activité, celle-ci: décider de l'utilisation des mesures de contention ou d'isolement dans le cadre de l'application de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris. Celle-ci nous apparaît restrictive. Ce que nous voulons souligner, c'est qu'il peut y avoir, même si c'est de façon moins fréquente, on en convient, mais il peut y avoir, dans le secteur de l'éducation, des clientèles très vulnérables qui peuvent parfois... et qui actuellement nécessitent parfois des interventions de contention ou d'isolement. Pensons, dans le cas de l'isolement, à des locaux particuliers pour travailler, dans un contexte où des écoles auraient des classes de jeunes en troubles importants de comportement et qu'il puisse y avoir, à ce moment-là, de façon très bien encadrée, des locaux d'isolement et, de la même manière, pour certains jeunes, notamment des clientèles telles que les jeunes en troubles envahissants du développement, qu'il puisse y avoir parfois des interventions de contention. Donc, nous considérons qu'il serait important qu'il y ait une extension, pour cet article-là, cette activité-là, au milieu scolaire, pour les situations d'exception dont je viens de vous parler.
M. Matte (Laurent): Concernant la psychothérapie... Il nous reste du temps?
La Présidente (Mme Thériault): Il vous reste deux minutes.
M. Matte (Laurent): D'accord. De toute façon, il y a des sujets sur lesquels je sens que vous allez nous poser des questions, alors on les couvrira certain.
Tout à l'heure, on parlait du fait de distinguer ce qui est de la psychothérapie de ce qui n'en est pas. Il faut savoir que, dans le monde anglo-saxon, il n'y a pas une grosse différence entre «psychotherapy» et «counseling», et il y a beaucoup de gens qui font du counseling d'orientation. On nous a fait le commentaire que c'était bien proche, mais la définition qui est donnée à «psychothérapie» dans le projet de loi, elle est claire. Ça va déjà être bien. Mais ce sera mieux encore quand on aura précisé ce que ce n'est pas, par exemple le counseling d'orientation.
Je voulais dire aussi qu'on a des personnes qui sont déjà accréditées chez nous. On voudrait que l'office puisse faire les règles. Le rapport Trudeau recommandait qu'elles soient reconnues. On aimerait que les règles transitoires viennent le plus vite possible pour que ces personnes-là puissent continuer d'exercer la psychothérapie.
On a deux commentaires concernant les groupes d'intervenants intégrés au système professionnel et la continuité dans les soins de service.
M. Leclerc (Denis): Oui. Donc, nous sommes d'accord avec la recommandation du comité d'experts d'intégrer les techniciens en travail social à l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec. Pour ce qui est maintenant des techniciens en éducation spécialisée et des techniciens d'intervention en délinquance, nous sommes également favorables et nous accueillons avec plaisir l'annonce du ministre donc de vouloir travailler sur cette question-là. Dans le fond, ce que nous réitérons ? puis nous le disons ici de façon officielle ? c'est notre disponibilité et intérêt à collaborer à toute cette question-là, qui, on s'en doute bien, est assez complexe, ne serait-ce que par le nombre mais également la diversité des lieux où ces intervenants oeuvrent dans l'ensemble des réseaux. Et donc j'en resterai là pour ce volet-là.
Pour ce qui est de la continuité dans les soins et services, également ça a été soulevé autant en introduction par les représentants des trois partis, également beaucoup par M. Leblond, qui nous a précédés. Nous sommes évidemment très soucieux et très solidaires avec cette intention de travailler étroitement avec l'ensemble des intervenants et des organisations pour éviter toute rupture de services. À ce titre-là, nous affirmons être très disposés et très disponibles pour travailler sur cette question-là, que ce soit pour ce qui est, dans notre cas plus particulier, de la reconnaissance des bacheliers, puisque le diplôme d'entrée chez nous est maintenant la maîtrise, mais des bacheliers en psychoéducation d'avant 2004, donc autant de ce côté-là que pour trouver des mesures, trouver des solutions pour les intervenants qui ne se qualifient pas dans le système actuel.
M. Matte (Laurent): Pour terminer, je dirais tout simplement, si vous permettez, que nous appuyons résolument le projet de loi n° 50 et que, s'il y a des inquiétudes qui vous sont présentées, nous sommes tout à fait ouverts à contribuer à y répondre. Nous voulons assurer la continuité de services et nous croyons que ce projet de loi là contient suffisamment de bénéfices pour la population, et même pour le système professionnel comme tel, que ça vaut la peine d'aller de l'avant, et rapidement. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup. Donc, sans plus tarder, nous allons entreprendre les échanges avec les parlementaires. Donc, M. le ministre, la parole est à vous. Je fais remarquer aux gens que je vais retrancher deux minutes de chacune des formations politiques pour reprendre le retard que nous avons. M. le ministre, 15 minutes.
M. Dupuis: Oui. Alors, Mme Verville, M. Matte et M. Leclerc, merci de votre présentation. Moi, d'abord, je veux vous dire que j'ai vu M. Matte, j'ai vu Mme Desrosiers, j'ai vu Mme Charest, j'ai vu M. Leblond, hier, à une importante rencontre qu'on a eue avec le premier ministre, et donc, si ce projet de loi ci peut servir à mieux identifier des activités réservées pour l'autre dossier dont on a parlé hier, tant mieux. Je veux simplement mentionner ça en début d'intervention.
Moi, il faut que je dise, M. Matte, à tout le monde qui est dans la salle et à ceux qui choisiraient de nous écouter, qui sont membres d'ordres professionnels concernés par ce projet de loi, ou même ceux qui voudraient y entrer, ou même ceux qui ont des représentations à faire, que je suis particulièrement impressionné par l'ouverture d'esprit que chacun des ordres professionnels a manifestée dans l'élaboration de ce que je considère être l'unanimité entre les six ordres professionnels et l'ouverture d'esprit que vous manifestez, pas seulement vous, M. Matte et M. Leclerc, mais que les ordres professionnels manifestent à l'égard des autres personnes qui exercent des activités qui souhaiteraient être incluses soit dans le projet de loi ou qui souhaiteraient ne pas être empêchées d'exercer leurs activités par le projet de loi.
n(11 h 10)n Moi, j'aime bien cette idée d'un projet de loi qui réserve des activités qui sont fondamentalement conformes à l'acquisition d'une compétence particulière mais qui n'est pas prohibitif à l'égard des autres activités. Moi, j'ai pratiqué le droit criminel, en défense et en poursuite, comme procureur de la couronne pendant 20 ans. Pour avoir été près du milieu de la santé mentale à certaines occasions, parce que j'ai représenté des gens qui étaient évidemment, certains, malheureusement affublés d'une maladie mentale dont la description était plutôt juridique que de santé, à ce moment-là, mais pour avoir fréquenté le milieu de la santé mentale en corollaire, je dirais que ? et c'est ce que je disais tantôt au président de l'office ? les policiers à l'occasion font une job de psychologues, de travailleurs sociaux, de psychoéducateurs, les avocats en font, les notaires en font à moindre degré. Mais je le taquine toujours quand je dis ça.
Simplement pour vous dire que j'accueille avec beaucoup, beaucoup de plaisir d'abord votre ouverture d'esprit, les uns entre les autres, et que, c'est certain, je m'engage, et Jean-Paul Dutrisac et tous les gens de l'office qui sont ici font la même chose, on s'engage à vous faciliter les choses. On va vous les faciliter, les choses, le plus possible, de telle sorte que ça me permet de dire... Là, je fais une remarque générale, M. Matte ? vous me permettrez, je prends un petit peu de votre temps, mais surtout des ministériels ? pour dire qu'il y aura une clause interprétative qui sera incluse dans le projet de loi au moment où on fera l'étude article par article. On s'en parlera entre parlementaires, puis on va vous en parler à vous autres aussi, mais il y aura une clause interprétative qui permettra d'éviter les difficultés.
L'office s'est déjà engagé, me dit-on, et donc je le confirme, l'office s'est déjà engagé à travailler avec vous, avec les ordres et même avec les orthophonistes, même avec les diététistes pour faire une espèce de guide explicatif qui fera en sorte qu'encore une fois ça deviendra encore, si c'est possible, plus limpide. Vos professions, vos différentes professions et vos différentes activités sont tellement, de temps en temps, interreliées qu'on n'a pas le choix de faire autrement. Donc, on va vous faciliter les choses, on ne vous empêchera pas de travailler, on va essayer de vous faciliter les choses.
Je voulais, à ce moment-ci, faire cette remarque-là et, avec votre permission, je vais demander à la présidente de passer la parole à mes collègues députés qui ont des questions à vous poser. Excusez-moi de ce petit aparté, M. Matte.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, M. Matte, Me Verville, M. Leclerc, merci de votre participation à nos travaux.
Vous avez fait allusion effectivement de l'importance de préserver ou d'assurer une continuité de services, et je pense que c'est extrêmement important. Mais en même temps vous avez souligné un des éléments, c'est relatif ? vous avez ouvert la porte ? à la question des bacheliers en psychoéducation, et je l'élargirais aux intervenants qui ne se qualifient pas nécessairement encore pour être admissibles à l'ordre professionnel.
Quelles pistes de solution ou solutions auxquelles avez-vous songé ou avez-vous commencé à réfléchir, en tant qu'ordre, pour répondre au rôle que pourraient jouer, là, ces bacheliers et autres intervenants?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leclerc.
M. Leclerc (Denis): Vous comprendrez que cette question-là nous amène à un questionnement justement face à une réalité nouvelle qui va avoir plusieurs implications. J'essaie de les simplifier.
La question donc que vous soulevez par rapport aux bacheliers en psychoéducation devient, de façon incontournable, reliée à la reconnaissance éventuelle ou non des techniciens en éducation spécialisée et de leur intégration éventuelle au système professionnel. Il serait un peu... Bon, parmi les hypothèses qui ont été soulevées, que ce soit par nous ou par d'autres, une éventualité, supposons, de l'intégration des techniciens en éducation spécialisée à un éventuel ordre de la psychoéducation ne saurait laisser en plan les bacheliers en psychoéducation puisqu'il y aurait des techniciens en éducation spécialisée à cet ordre et puisqu'il y aurait des psychoéducateurs qui ont un niveau de maîtrise, donc où devraient être situés les bacheliers en psychoéducation.
Il y a également actuellement la possibilité, pour les bacheliers qui ont été diplômés avant 2004... Initialement, lorsque l'ordre a été mis en place, il y a eu une clause grand-père pour les bacheliers antérieurs, jusqu'en 2004, pour pouvoir adhérer à l'ordre puisque c'était nouveau que le diplôme de maîtrise était demandé. Cette clause grand-père là est terminée, mais il y a l'article 6 chez nous qui permet à des gens qui ne s'en seraient pas prévalus à l'époque de pouvoir le faire maintenant. Donc, encore là, il y aura la possibilité, de notre côté, de pouvoir faciliter ça pour les bacheliers antérieurs à 2004, donc de pouvoir adhérer à l'ordre, et éventuellement au système professionnel, et au contenu notamment du projet de loi n° 50.
Pour ce qui est également des intervenants qui ne sont pas qualifiés, à ce titre-là, nous ne sommes pas les seuls interpellés, M. Leblond en a parlé également au niveau des travailleurs sociaux qui vont être grandement interpellés. Mais l'intention, puis le ministre l'a soulevé, l'intention des ordres est d'éviter toute rupture de services, et d'éviter toute rupture donc, je me répète, de services auprès des clientèles vulnérables, et, à ce titre-là, nous sommes très, très disposés à travailler dans ce sens.
Donc, vous voyez que nous avons certaines hypothèses. J'ai soulevé la question d'un éventuel ordre de la psychoéducation, donc un ordre disciplinaire qui aurait les impacts dont je vous ai parlé mais qui pourrait éventuellement, on l'a soulevé dans notre mémoire, avoir un impact de la cohabitation entre nos deux professions. Et évidemment vous comprendrez que les conseillers d'orientation auraient de la difficulté à se situer dans l'ordre de la psychoéducation, un ordre disciplinaire, puisque leur discipline est différente. Donc, je ne sais pas si ça répond adéquatement à votre question.
La Présidente (Mme Thériault): Oui. Ça va? Alors, M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci. Merci pour votre réponse. Pour ce qui est d'évidemment lorsqu'on va mettre en application... Pour implanter harmonieusement les dispositions éventuelles du projet de loi, il y aura vraisemblablement lieu d'avoir une période de transition, une période transitoire. Alors, comment évaluez-vous quelle serait une période transitoire qui serait, entre guillemets, suffisante et comment vous justifieriez cette période-là?
La Présidente (Mme Thériault): M. Matte.
M. Matte (Laurent): Je n'ai pas l'expérience de ce genre de changement législatif là, mais il y a... Tout à l'heure, M. le ministre disait que la réalité n'est pas toujours parfaite mais qu'on tend vers la perfection. Il peut y avoir des étapes, c'est-à-dire que, tout à l'heure, on parlait de la reconnaissance des personnes déjà habilitées à la psychothérapie, par exemple. Il y a des choses qui peuvent venir plus vite, il y a des choses qui peuvent se travailler à plus long terme. Des choses comme la mise en place des normes pour la psychothérapie et le titre de psychothérapeute, c'est quelque chose qui peut se faire relativement vite. L'intégration des techniciens au système professionnel, c'est une chose qui pourrait prendre plus de temps. Mais, en horizon de temps, là, précisément je ne me risquerais pas à donner un chiffre là-dessus, là. En fait, on souhaiterait que ce ne soit pas trop long.
M. Paquet: Pas trop long, effectivement. Donc, l'idée d'avoir un processus... Peut-être que leurs étapes pourraient être définies sur dans un premier temps, deuxième temps, troisième temps, mais de définir, ce serait quelque chose qui pourrait être utile de faire, si je comprends bien. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Robert-Baldwin, il vous reste 5 min 30 s.
M. Marsan: Merci, Mme la Présidente, et merci à vous, Mme Verville, M. Leclerc, M. Matte, pour la qualité de votre présentation. Il n'est pas arrivé souvent qu'un ordre professionnel s'est présenté devant nous puis qu'il nous a demandé d'être scindé. C'est assez particulier, mais je pense savoir, en relisant votre mémoire, que vous avez de très, très bonnes raisons. Vous avez commencé à en discuter un petit peu tantôt, mais est-ce qu'on peut aller un petit peu plus loin? Qu'est-ce que vous voulez scinder vraiment, là? Qu'est-ce que vous voulez séparer ou créer? Vous voulez créer un autre ordre, je pense. Pourquoi vous voulez créer un autre ordre aussi? Je pense que ce seraient des informations qu'on aimerait savoir.
M. Matte (Laurent): D'accord. C'est quand même un dossier qui est assez complexe. Je ne veux pas prendre trop de temps, mais disons qu'en 2000 le fait, pour les psychoéducateurs, d'intégrer l'ordre qui existait déjà, là, des conseillers d'orientation, c'était le moyen qui était présenté comme l'unique moyen, à ce moment-là, même d'intégrer le système professionnel, alors qu'il y avait longtemps qu'il était recommandé qu'ils intègrent le système professionnel. On les a accueillis. Maintenant, ce qui arrive, c'est qu'on se retrouve avec deux communautés professionnelles importantes avec des disciplines... et on se rend compte, dans des situations comme dans celle-ci, là, autour du projet de loi n° 50, où possiblement que la pensée d'un groupe puis la pensée de l'autre groupe ne vont pas dans la même direction exactement. On s'en va ensemble, mais on ne prend pas nécessairement les mêmes chemins. Par exemple, l'intégration multiniveau qu'évoquait M. Leclerc tout à l'heure, c'est une situation qui ne s'applique pas du tout, du tout à la communauté des conseillers d'orientation. Donc, si eux faisaient un ordre disciplinaire ? et on est quand même deux communautés professionnelles assez importantes, je dirais, chez nous; on est à peu près 2 300, ils sont environ 3 100; ça rentre dans la moyenne... pas dans la moyenne mais dans un chiffre qu'on voit souvent pour les ordres professionnels ? ça permettrait une meilleure continuité.
Il y a d'autres arguments, on les a présentés à l'Office des professions, donc ça pourrait être étudié en temps et lieu, mais il y a d'autres éléments, entre autres la confusion auprès du public. Si vous saviez les problèmes qu'on a à expliquer qui on est! Et ça, ça n'aide pas à la protection du public.
M. Marsan: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: Oui, simplement, M. Matte, confirmer que l'office a reçu les représentations sur ce sujet-là puis qu'on va continuer de les... Ce serait une première, mais pourquoi pas?
L'autre chose que je voulais vous dire: vous avez mentionné que, pour le préscolaire, vous ne souhaitiez pas que cette activité vous soit réservée. On va donner suite à votre souhait.
n(11 h 20)nM. Matte (Laurent): Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de LaFontaine, vous avez trois minutes.
M. Tomassi: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bienvenue à vous aussi de ma part.
Je veux faire un peu un suivi de ce que mon collègue de Laval-des-Rapides vous a mentionné tantôt concernant les éducateurs spécialisés. On parlait de continuité de services. On a entendu tantôt l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et vous aussi, la même chose, et je crois que même les autres groupes vont nous parler de pénurie de main-d'oeuvre, une pénurie de main-d'oeuvre. Au Québec, la formation professionnelle collégiale n'a jamais été portée dans le coeur des jeunes. Je crois que ça va devoir être changé, parce que de plus en plus de jeunes vont dans cette direction.
Et j'ai eu le plaisir d'avoir, à mon bureau de comté... Des fois, on est député, on touche à pas mal de choses, puis des choses que tu ne te rends même pas compte. Il arrive une jeune fille qui étudie actuellement en éducation spécialisée, qui était venue me voir puis qui me dit: Écoute, elle dit, là, vous allez changer une loi où est-ce que ma formation ne vaudra plus rien parce que je vais perdre le pouvoir de pratiquer. Alors, je vous ai entendu répondre à mon collègue, disant que vous voulez avoir une continuité de services. Il y a raison d'être où est-ce que les éducateurs spécialisés, à ce que je comprends, font un travail qui est nécessaire dans le système de santé, actuellement. Ils font des propositions dans leur mémoire, qu'on va avoir le plaisir d'écouter demain. Est-ce que c'est des propositions qui vous semblent aller dans la bonne direction ou est-ce que c'est un service qui, vous pensez, est essentiel dans le domaine de la santé, actuellement, pour le service qu'ils rendent à la population? Comment vous voyez ça?
La Présidente (Mme Thériault): M. Leclerc, un peu moins d'une minute.
M. Leclerc (Denis): Un peu moins d'une minute. C'est une question assez vaste pour si peu de temps. J'ai pris connaissance rapidement du mémoire de la coalition. D'abord, si je prends les éléments rapidement, nous croyons effectivement à l'importance du travail et de l'apport des techniciens en éducation spécialisée. Nous ne l'avons jamais remis en question. Les prétentions de la coalition, plusieurs sont pertinentes. Je ne les ai pas analysées à fond, j'en conviens. Mais, l'impression que vous soulevez, notamment de la jeune fille avec qui vous avez parlé, de penser que le projet de loi n° 50 va créer tout à coup l'incapacité de faire le travail, nous ne pensons pas que ce soit le cas.
D'abord, nous avons dit notre intérêt et notre souhait qu'il n'y ait pas de rupture de services, incluant donc le travail des techniciens. Ensuite de ça, le comité d'experts a essayé d'établir, puis ça se reflète dans le projet de loi n° 50, des actions qui sont d'une complexité, pour l'essentiel, une complexité de niveau universitaire, et, pour l'essentiel, ce que nous recommandons, c'est que, dans la réflexion qui pourrait suivre et qui pourrait éventuellement amener l'intégration des techniciens en éducation spécialisée, il y ait détermination et précision de certains actes réservés qui seraient davantage axés sur leur travail actuel.
Nous pensons qu'actuellement, bien qu'il y aura des ajustements, mais non pas des ajustements sur le plan de la pertinence, sur le plan professionnel, mais des ajustements au niveau des employeurs, il y aura des ajustements à savoir qui justement, quel niveau d'intervention devrait faire quoi. Mais nous pensons qu'à ce moment-là le projet de loi n° 50 permet une meilleure protection du public dans un cadre où chacun aura son rôle, et un rôle qui sera reconnu, et éventuellement, espérons, également pour les techniciens en éducation spécialisée, qu'on précise des contributions dans la loi pour eux.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Matte. Ceci mettra fin au premier bloc d'échange. Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole au député de Saint-Hyacinthe avec un temps de 13 minutes. M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, merci, Mme Verville, M. Matte et M. Leclerc d'être ici présents ce matin. D'entrée de jeu, je me réjouis de l'annonce du ministre, de l'annonce d'une clause interprétative, de la rédaction d'un guide explicatif et aussi le retrait de l'article e à l'article 1.3.1°, comme vous demandiez quand même pour les conseillers en orientation.
J'aimerais quand même amener votre réflexion au sujet d'une évaluation concernant les travailleurs. «Évaluer une personne dont le diagnostic implique des contraintes sévères à l'emploi dans le but de déterminer un plan d'insertion professionnelle.» Vous avez quand même, dans votre mémoire, élaboré assez de façon... vous avez donné une bonne explication de cette volonté-là, en fait de cette évaluation-là. Alors, j'aimerais quand même, à la suite des expériences que vos membres ont sûrement vécues, que vous nous fassiez part de vos réflexions en rapport avec cette demande d'ajout de cette activité réservée.
M. Matte (Laurent): Oui. Merci. Il nous a semblé que la réflexion qui était faite à partir de tout le domaine de la santé mentale et des relations humaines et qui était particulièrement articulée à l'intérieur du rapport du comité expert permettait, comme j'ai dit tantôt, de partir d'une clientèle vulnérable et ensuite des activités qui sont préjudiciables, et ensuite qu'on dise quelles activités on va partager plutôt que de partir d'à qui ça fait l'affaire et à qui ça ne fait pas l'affaire de l'organiser de cette manière-là, et, nous, on souscrit à cette approche-là. C'est une approche de principe, mais on y souscrit. À ce moment-là, qui le fait, comment, dans quel contexte, ça, on va trouver les solutions. Mais le fait de dire: parce qu'il y a un risque que des gens ne puissent plus faire, par exemple, des plans de réinsertion socioprofessionnelle en réadaptation, ou des plans de développement de l'employabilité, ou des parcours... Mais ce n'était pas ça qui était l'objet de l'activité. Ce qui était l'objet de l'activité, c'était d'évaluer une personne dont le diagnostic, et ainsi de suite, pour élaborer...
Dans le fond, c'est que l'élaboration d'un plan de réinsertion professionnelle inclut une évaluation compétente des aspects de santé mentale de cette personne-là par une personne couverte dans les activités du projet de loi. Nous, il nous a semblé que ça aurait été, à ce moment-là, une façon de compléter. On a des choses qui concernent l'éducation, les services sociaux, la justice même dans certains aspects, et, au niveau de l'emploi, actuellement la pression est telle sur les gens pour intégrer le marché du travail qu'on pense que cette protection n'aurait pas été superflue.
M. L'Écuyer: Toujours dans la même ligne, M. le Président ? bonjour ? alors toujours dans la même ligne de pensée, dans ce processus d'approche là, aussi d'intervention de votre part, à titre de conseil, est-ce que vous pouvez nous dire comment se ferait le signalement ou comment vous en viendriez à travailler avec cette personne-là qui serait en difficulté dans le milieu du travail?
M. Matte (Laurent): Bien, il y a déjà beaucoup de conseillers d'orientation dans le secteur de l'employabilité, que ce soit dans le réseau institutionnel ou dans le réseau communautaire. L'idée est de dire que, dans le cas où une personne a un diagnostic, on fait appel... On fait déjà beaucoup appel à des évaluations en orientation dans le cas de plans de développement d'employabilité ou de réinsertion professionnelle. L'idée est de dire que, dans le cas où... D'ailleurs, ce n'était pas exclusif aux conseillers d'orientation, cette activité-là, hein? Mais, dans le cas où il s'agit d'une personne qui a cette contrainte-là, on s'assure que l'évaluation est demandée. Alors, ces évaluations-là demandées à des professionnels dans le cadre de plans de réinsertion, elles existent déjà, ce n'est pas quelque chose de nouveau, c'est juste de s'assurer que, dans ces cas-là, on fait appel à cette expertise-là.
M. L'Écuyer: M. le Président, dans cette démarche, est-ce que vous avez eu l'occasion de consulter d'autres ordres professionnels dans le cadre de cette réflexion-là ou bien vous êtes les seuls à vous être interrogés sur cette question-là?
M. Matte (Laurent): Ça n'a pas fait l'objet d'échanges entre nous. Je dois avouer que je n'y suis que depuis mai dernier, mais ça n'a pas fait l'objet d'échanges récents, là, par rapport à ça. Mais, quand on a présenté nos points de vue dans le passé à six ordres, c'est une chose qu'on a ramenée fréquemment, que notre groupe professionnel aurait jugé pertinent que ce soit maintenu. Peut-être que, dans notre perspective, on était peut-être le groupe qui était davantage touché par cette activité-là.
M. L'Écuyer: Et le libellé dans le fond que vous suggérez, «évaluer une personne dont le diagnostic implique des contraintes sévères à l'emploi dans le but de déterminer un plan d'insertion professionnelle», pourrait satisfaire des exigences de votre activité réservée?
M. Matte (Laurent): Absolument.
n(11 h 30)nM. L'Écuyer: Vous me permettrez de discuter maintenant avec vous de la question de la psychothérapie. Vous, présentement est-ce que vous avez une connaissance des membres, soit des conseillers en orientation, des psychoéducateurs, qui exercent présentement de la psychothérapie?
M. Matte (Laurent): Je demanderais à Mme Verville de répondre à cette question.
Mme Verville (Renée): Il y a environ 400 membres qui disent pratiquer la psychothérapie, et, sur ces 400 membres là, on a 80, 90 personnes qui sont accréditées à la pratique de la psychothérapie, donc qui ont été... Il y a eu une forme de reconnaissance par rapport à leur formation qu'ils ont suivie et la supervision.
M. L'Écuyer: De ces 80, M. le Président, de ces 80, 90 personnes qui ont reçu une accréditation, je crois que l'ordre a établi des critères de formation, des critères de compétence ou des critères de formation sur mesure pour être en mesure...
Mme Verville (Renée): Oui.
M. L'Écuyer: Et c'est sur quel... en fait sur quel... Pouvez-vous en fait nous donner un peu les formations, ou les formations supplémentaires, ou les compétences que vous avez prises plus en relief ou en éclairage pour être en mesure de qualifier ces gens-là comme étant des psychothérapeutes?
Mme Verville (Renée): La première des choses, bien on sait que, pour les conseillers d'orientation et les psychoéducateurs, on demande la maîtrise, parce que, dans notre ordre, il y a certains membres qui sont soit des bacheliers ou, pour les conseillers d'orientation, des gens qui ont une licence. Donc, on demande la maîtrise. On demande également 100 heures de formation dans une approche qui est reconnue au niveau de la psychothérapie. Il faut dire aussi que, dans les formations de base et des conseillers d'orientation et des psychoéducateurs, il y a des éléments, là, qui touchent la formation par rapport à la psychothérapie, que ce soit au niveau de la psychopathologie, de différentes compétences, là, qui permettent d'exercer la psychothérapie. Et on demande 100 heures de formation supplémentaire et 60 heures de supervision pour ces gens-là et trois ans de pratique de la psychothérapie. Ils doivent avoir pratiqué pendant trois ans, le temps de la formation et la supervision.
M. L'Écuyer: Et ces gens-là ? M. le Président, avec votre permission ? ces gens-là sont reconnus dans votre ordre comme étant des conseillers en orientation, psychoéducateurs qui sont présentement des psychothérapeutes.
Mme Verville (Renée): On les appelle accrédités à la pratique de la psychothérapie.
M. L'Écuyer: Accrédités à la...
Mme Verville (Renée): À la pratique de la psychothérapie. C'est une accréditation qu'on leur donne. Il y en a quelques-uns qui portent le titre de psychothérapeute parce qu'il n'était pas réservé jusqu'à présent.
M. L'Écuyer: Madame, vous avez sûrement vu les cours de connaissance et de compétence proposés dans le rapport Trudeau. Vous en avez fait une analyse?
Mme Verville (Renée): Oui.
M. L'Écuyer: Est-ce que les domaines ou les heures et nombre de cours correspondent à ce que vous souhaitez au niveau des formations pour que des gens puissent en fait procéder, en fait professer à titre de psychothérapeutes?
Mme Verville (Renée): Tout à fait.
M. L'Écuyer: Oui?
Mme Verville (Renée): Oui.
Le Président (M. Lévesque): Merci, Mme Verville. M. le député de Saint-Hyacinthe, il vous reste trois minutes.
M. L'Écuyer: Simplement, au niveau de l'encadrement prévu, à la suite croyez-vous... En fait, c'est sûr que je me propulse dans l'avenir. Croyez-vous qu'il y a beaucoup de vos membres qui seraient intéressés à exercer en psychothérapie ou bien si c'est simplement pour maintenir la qualification ou l'accréditation des gens que vous avez déjà présentement? À votre connaissance, est-ce que plusieurs ont déjà démontré ou exprimé qu'ils seraient intéressés à pratiquer en psychothérapie?
Mme Verville (Renée): Je dirais qu'une bonne proportion des 400 que je vous ai mentionnés, là, serait intéressée à obtenir le titre de psychothérapeute. C'est mon estimé, là, mais ça reste à confirmer auprès des membres.
M. L'Écuyer: Et, concernant la continuité au niveau du travail, est-ce que ces gens-là selon vous sont qualifiés pour avoir une possibilité de continuer à pratiquer en psychothérapie sans formation supplémentaire?
Mme Verville (Renée): C'est sûr que, pour les gens qui sont accrédités, là, je pense que ça, ça avait déjà été reconnu, dans le rapport Trudeau, comme pouvant continuer, là, à avoir des droits acquis. Pour les autres, c'est difficile à dire parce qu'il y a des gens qui peuvent avoir suivi des formations supplémentaires et ne pas avoir nécessairement fait le processus d'accréditation. Ça fait que c'est difficile à moi de le dire, là. On sait que, dans les cours qui sont... Les compétences qui sont requises, dans le rapport Trudeau, pour les conseillers d'orientation et les psychoéducateurs avec une maîtrise, disons que les cours qui pourraient manquer ne sont pas très importants. Donc, ils auraient quelques cours à faire, là, pour compléter. Donc, selon nous, il pourrait y avoir des gens qui pourraient être intéressés, là, à poursuivre.
M. L'Écuyer: Merci beaucoup. Merci beaucoup de votre intervention.
Le Président (M. Lévesque): Merci beaucoup au député de Saint-Hyacinthe. Maintenant, nous passons au deuxième parti de l'opposition. M. le député de Dubuc.
M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, c'est difficile, quand on est en troisième place, là, d'essayer d'avoir des questions souvent qui sont originales, mais je vais quand même essayer de trouver, là, une façon de vous questionner.
Je vais revenir un petit peu sur la psychothérapie. Dans votre mémoire, vous dites que, depuis 1980, vous avez quand même un programme, là, spécifique pour superviser la pratique de la psychothérapie. Les gens qui se déclarent psychothérapeutes ou qui exercent, qui sont accrédités psychothérapeutes, vont avoir un droit acquis suite à l'adoption de la loi n° 50, vont avoir un droit acquis, donc ils vont pouvoir continuer d'exercer. Par contre, vous savez que le rapport Trudeau recommande... et je pense que c'est ce qui va arriver aussi. C'est que la gestion des permis de psychothérapeute appartiendra désormais à l'Ordre des psychologues. Est-ce que je me trompe quand je vous dis ça? Non, je ne pense pas, hein? Non. Alors, ce sont les psychologues qui vont gérer le permis des psychothérapeutes pour les prochains qui vont être accrédités.
Mais, en ce qui concerne ceux qui ont des droits acquis, est-ce que leurs permis vont être gérés par les psychologues également? Ça veut dire que vous allez... Ces gens-là qui ont des droits acquis, mettons, les 400 personnes qui sont accréditées chez vous vont se trouver automatiquement à être gérées par deux corporations professionnelles?
M. Matte (Laurent): En tant que membres de notre ordre, ils vont être encadrés par notre ordre comme conseillers d'orientation.
M. Côté: Ou psychoéducateurs.
M. Matte (Laurent): Ou psychoéducateurs. Excusez, c'est l'habitude. En tant que psychothérapeutes, c'est sûr que la loi va amener un nouvel encadrement où ce ne sera plus l'accréditation de notre ordre. Ce sera, à ce moment-là, le permis. Et ce qui était proposé par le comité d'experts, c'était que, pour l'accession au permis, les gens que nous avons déjà accrédités puissent y aller. Mais ce sera le permis qui sera géré par l'Ordre des psychologues, effectivement.
M. Côté: Puis les cours de formation que vous aviez établis depuis 1980, là, ça va s'éliminer?
Mme Verville (Renée): C'est-à-dire que ce n'étaient pas des formations que, nous, on donnait, c'étaient des formations que les gens suivaient à l'externe par souvent des psychologues et d'autres....
M. Côté: Des reconnaissances.
Mme Verville (Renée): ...c'est ça, des gens qui étaient reconnus, là, au niveau de la pratique.
M. Côté: Merci. Sur les règlements qui vont encadrer, là, le projet de loi n° 50, est-ce que votre ordre professionnel a commencé déjà à travailler sur ces règlements ou si vous attendez que le projet de loi soit adopté? Parce qu'il y a quand même des choses qu'il va falloir qu'elles soient faites, là.
Mme Verville (Renée): On n'a pas commencé à travailler sur les règlements.
M. Côté: O.K. Dans le rapport Trudeau, en ce qui concerne les mesures de contention dans le cadre de l'application de l'article 118.1 de la Loi sur les services de santé, on parle «qu'une obligation de formation continue soit associée à la décision d'utiliser une mesure de contention». Vous êtes d'accord avec ça?
M. Leclerc (Denis): Nous sommes favorables à bien encadrer cette activité réservée là, et donc le rapport Trudeau semblait donc présumer qu'il y avait ce besoin-là. Il faudra voir sur le terrain la pertinence effectivement de maintenir cette recommandation-là.
M. Côté: Bien, je vous remercie.
Le Président (M. Lévesque): Merci au député de Dubuc. Mme Verville, M. Leclerc, M. Matte, merci beaucoup de votre présence. Ceci met fin à la période des questions.
J'inviterais maintenant l'Ordre des psychologues du Québec à prendre place. Nous suspendons pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 39)
(Reprise à 11 h 42)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux et nous avons le plaisir de recevoir l'Ordre des psychologues du Québec. Donc, Mme Charest, qui est la présidente, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire. Je vais vous demander également de nous présenter les gens qui vous accompagnent, et ce sera suivi par un échange avec chacune des formations politiques. La parole est à vous. Bienvenue à l'Assemblée.
Ordre des psychologues du Québec (OPQ)
Mme Charest (Rose-Marie): Merci. Donc, je suis accompagnée de Me Édith Lorquet, qui est conseillère juridique à l'Ordre des psychologues, et de M. Pierre Desjardins, qui est un psychologue clinicien mais qui actuellement est directeur de la qualité et du développement de la pratique à l'Ordre des psychologues.
Mme la Présidente, M. le ministre, MM. et Mmes les parlementaires, merci beaucoup de nous accueillir ce matin pour nous donner l'occasion non seulement de vous aider à comprendre le contenu de notre point de vue à nous, mais, je pense, de vous sensibiliser sur l'importance de ce projet de loi pour le public québécois. Ça vient rétablir une chose, une lacune qui existe depuis toujours. Et vous savez pourquoi? Parce que définir une activité en santé mentale, c'est plus difficile qu'en santé physique.
J'écoutais vos questions depuis ce matin, et, vous savez, si vous regardez ce que fait une infirmière qui est en train de donner une injection puis ce que fait un physiothérapeute qui est en train de faire faire un exercice, c'est assez évident. En santé mentale, on a tous l'air d'être du monde qui parle à du monde. À l'oeil, de l'extérieur, on a tous l'air de faire la même chose. De l'intérieur, pour celui qui est concerné, il ne reçoit pas le même service, quel que soit ce qui lui est dit et quelle que soit la compétence de celui qui lui parle.
Maintenant, la gamme des services à offrir en santé mentale est très vaste. Nous appuyons le projet de loi n° 50, à l'Ordre des psychologues. Nous l'appuyons en consensus avec nos collègues des cinq autres ordres professionnels concernés pour une raison, et elle a déjà été bien abordée par M. Matte, qui est que la procédure, la méthodologie qui a mené à ce projet de loi est très crédible. Elle est déjà crédible, cette procédure-là, auprès du milieu, auprès de la population. Dans la population québécoise, quand on dit «le rapport Trudeau», les gens savent déjà, pour plusieurs, ce que c'est et ont déjà confiance en ce qui s'en vient. Donc, je remercie le ministre de l'avoir déposé, ce projet de loi. Je pense que ça va dans l'intérêt, dans la protection du public et que ça correspond aux attentes du public aussi.
Le consensus, on n'y a pas adhéré comme ça. On reconnaissait des principes importants, le premier étant l'accessibilité compétente. J'entends bien sûr des inquiétudes, de dire: Oui, mais là il y a des gens qui ne pourront plus faire telle chose. Ça a préoccupé les membres du comité Trudeau et des comités qui l'on précédé, parce qu'il y a eu plusieurs comités, comme vous le savez, qui ont travaillé pour mener à ça. Et il faut se souvenir de ces deux mots: «accessibilité», mais «accessibilité compétente». Si on veut que tout le monde fasse de tout en santé mentale, on n'a pas besoin de légiférer, c'est ça, le cas actuel. Tout le monde fait de tout en santé mentale.
Actuellement, et ça a été bien démontré par une journaliste, en 2003, à l'émission d'Enjeux, que sûrement plusieurs parmi vous aviez vue, actuellement quelqu'un va s'acheter une plaque, fait écrire «Marie Tremblay, psychothérapeute», met ça sur le boulevard Saint-Joseph, se met... n'importe qui peut aller la consulter, et le public québécois, dans 85 % des cas ? nous avons fait faire l'enquête, à l'Ordre des psychologues ? dans 85 % des cas, lorsque le public québécois entend le mot «psychothérapeute», il croit que c'est un psychologue. Il a donc la perception que ce psychothérapeute qu'il consulte est encadré par le système professionnel. C'est donc très important, ce qu'on vient faire au niveau de la réglementation de la psychothérapie.
Il n'y a pas que la psychothérapie, il y a d'autres activités réservées sur lesquelles j'aimerais dire quelques mots. Premièrement, je salue l'annonce du ministre à l'effet que la clause interprétative sera incluse, la clause interprétative selon laquelle ce n'est pas parce que, par exemple, l'activité d'évaluation des troubles mentaux est réservée aux psychologues que les orthophonistes ne pourront plus évaluer les troubles du langage. Cette clause interprétative vient rassurer les orthophonistes. Je ne peux pas voir quelle assurance supplémentaire on peut donner que de dire à des gens: Écoutez, tout ce qui est dans votre champ, vous pourrez continuer de le faire. Nous, en tout cas, on est même rassurés par cette clause interprétative, bien que notre champ soit plus vaste, parce qu'on sait que certaines personnes pourraient prétendre qu'on n'a pas le droit de poser certains gestes. Donc, je pense que cette clause interprétative peut rassurer les orthophonistes, les diététistes et tout autre professionnel, bien que personne d'autre à ma connaissance ne se soit manifesté. Donc, c'est une excellente nouvelle.
L'évaluation des troubles mentaux, qui est... actuellement, dans le milieu, ce qui est reconnu quand vous avez à faire évaluer un trouble mental, ce qui est reconnu par les gens du milieu, c'est: les médecins savent faire ça, puis les psychologues. Ce qu'on vient faire ici en réservant cette activité, ce n'est pas réduire le nombre de professionnels qui pourront évaluer les troubles mentaux, c'est augmenter le nombre de professionnels, parce qu'il y aura aussi les conseillers d'orientation détenteurs d'une attestation, il y aura aussi les infirmières reconnues pour le faire. L'évaluation des troubles mentaux, c'est à risque élevé de préjudice parce que, que ce soit vous ou un de vos proches qui reçoit, un jour, un diagnostic de trouble mental, vous savez comme moi que ça peut avoir une implication importante sur sa vie. Et donc qu'on vienne assurer le public que seuls des professionnels bien encadrés pourront le faire, c'est une avancée importante.
Maintenant, les conseillers d'orientation avec une attestation, les conseillers d'orientation ont déjà une formation de maîtrise, ont tous une formation de maîtrise et ont déjà une formation en évaluation psychologique qui est très solide. Donc, l'attestation vient confirmer la formation supplémentaire demandée.
Pour ce qui est des infirmières, on peut devenir infirmière à partir du D.E.C., du bac, de la... Alors, les infirmières vont vous demander que ce soit le niveau maîtrise en santé mentale et que ce soit inscrit dans la loi. Nous appuyons fortement leur demande, parce que, si on n'avait pas eu l'assurance que seules les infirmières détentrices d'une maîtrise en santé mentale pourraient procéder à l'évaluation des troubles mentaux, nous nous serions opposés à ça.
L'évaluation des troubles neuropsychologiques crée des inquiétudes chez les orthophonistes en particulier, et je pense que j'ai répondu, tout à l'heure, à ces inquiétudes. Lorsque la clause interprétative sera adoptée, on ne peut pas imaginer pourquoi les orthophonistes continueraient d'être inquiets.
n(11 h 50)n Maintenant, si on vous dit que les psychologues ne peuvent pas évaluer ça, les troubles du langage, je vais vous dire, si on veut savoir de quoi souffre un enfant qui ne va pas bien à l'école, il faut regarder son intelligence. Il faut donc procéder à l'évaluation de l'intelligence, il faut procéder à l'évaluation de l'adaptation, il faut procéder aussi à l'évaluation... Même pour évaluer l'intelligence, il faut évaluer le langage. Donc, on ne peut pas empêcher les psychologues d'évaluer les troubles du langage. Ceci dit, on doit reconnaître aux orthophonistes la capacité d'évaluer certains troubles spécifiques du langage et surtout l'activité qui leur est réservée, c'est-à-dire de l'évaluer en fonction de l'établissement d'un plan de soins. Nous ne contestons pas ça du tout et nous croyons qu'avec l'annonce du ministre tout le monde devrait être rassuré.
Maintenant, pour ce qui est du retard mental, vous pouvez procéder à l'évaluation des troubles mentaux par différents moyens: l'entrevue, l'observation et la psychométrie, les tests psychologiques. Pour procéder à l'évaluation du retard mental, vous devez absolument posséder la psychométrie, les tests psychologiques. Or, l'utilisation d'un test psychologique est une activité à risque de préjudice. Pourquoi? Parce que généralement on prête au test un pouvoir qu'il n'a pas. Vous savez, le test donne un score, puis on dit: Je suis assez content, je sais de quoi il souffre, le test m'a... Les seules personnes qui vont être très prudentes dans l'utilisation et dans l'analyse des tests sont celles qui, en plus d'avoir appris l'utilisation des tests, auront acquis les bases scientifiques de la psychométrie, et ceci fait partie de la formation initiale des psychologues et des conseillers d'orientation. C'est pourquoi nous recommandons, avec l'accord de l'Ordre des infirmières, que l'évaluation du retard mental ne soit pas donnée aux infirmières puisqu'elles ne possèdent pas cette formation de base en psychométrie.
Je vais prendre le temps qu'il me reste pour vous parler de la psychothérapie. La psychothérapie, d'abord c'est une activité qui m'est très chère, je la pratique depuis près de 30 ans. Ce que je connais de l'être humain, je le connais beaucoup pour avoir lu mais encore plus pour avoir fait de la psychothérapie. Je peux vous assurer que la vulnérabilité d'une personne qui vient demander de l'aide en psychothérapie est réelle, et ce n'est pas visible à l'oeil nu. Quand les personnes entrent dans mon bureau, vous savez, ils sont aussi chics que vous autres, là, ils ont l'air... La majorité des gens, là, ils sont aussi solides que vous autres, que moi. Et quand ils entrent et quand ils nous parlent de quoi ils souffrent, si je me limite juste à les écouter puis à dire ce que je crois, y aller de par mes croyances, je peux leur faire un tort énorme, et c'est ce qui est fait actuellement, pas partout, les psychothérapeutes, et c'est là qu'était le défi, c'est là qu'était l'enjeu.
Ça fait longtemps, ça fait depuis 1992 qu'on veut régler la psychothérapie, qu'on dit: On ne peut pas laisser le public comme ça, avoir recours à n'importe qui. Mais comment y arriver? Comment faire en sorte que non seulement les psychologues et les médecins qui ont la compétence pour le faire, mais les membres d'autres ordres professionnels dont certains ont la compétence pour le faire... Comme vient de vous le dire Mme Verville, il y en a aussi chez les travailleurs sociaux, il y en a chez les ergothérapeutes, il y en a chez les infirmières. Comment reconnaître ces gens-là? Comment aussi reconnaître ceux qui ne sont pas membres d'un ordre professionnel actuellement et qui ont des compétences?
Ce ne sont pas tous des charlatans, là, les gens qui ne sont pas dans les ordres professionnels actuellement. Il y en a, de ces gens-là, qui ont des compétences réelles. Je pense que le rapport Trudeau a réussi, à l'aide des rapports aussi qui avaient précédé, à établir les compétences nécessaires. Et donc on n'est plus à dire: Il faut accorder le titre de psychothérapeute à telle personne parce que, elle, elle aime beaucoup ça faire ça puis que le monde l'aime. Ça, j'espère que, quand on fait de la psychothérapie, on aime le monde puis le monde nous aime. Mais c'est une donnée essentielle et non suffisante.
M. Dupuis: C'est la même chose pour un député, Mme Charest.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Charest (Rose-Marie): C'est ça. Et, vous avez raison, ce n'est pas suffisant.
Donc, qu'est-ce que le rapport Trudeau est venu faire? Le rapport Trudeau est vraiment venu nous aider à rendre concret, autant que faire se peut, dans un domaine comme celui-ci, à rendre opérationnel, en tout cas... parce que, vous savez, ce n'est pas parce que la santé mentale, c'est difficile à définir que c'est impossible à définir. La psychologie existe depuis plus de 100 ans. La psychologie, c'est une science, et la science, c'est d'arriver à définir et à prédire, arriver à mettre des mots sur une réalité qui va faire en sorte que les gens vont savoir la différence entre deux choses. Nous endossons totalement... Et, après consultation de nos membres...
Et j'ai oublié de le dire en début de présentation, mais il y a plus de 8 000 psychologues au Québec. La majorité d'entre eux travaillent dans le secteur clinique, la très grande majorité d'entre eux pratiquent la psychothérapie. Donc, la définition qui est proposée dans le rapport Trudeau et qui est celle qui est proposée dans le projet de loi nous convient bien et vraiment a été très bien reçue chez nos membres. Nous croyons que cette définition-là nous permettra de faire la différence entre ce qu'est la psychothérapie et ce qu'elle n'est pas.
Il est de plus prévu, comme vous le savez, qu'il y aura des activités définies à l'avance comme n'étant pas de la psychothérapie. Je sais que ça peut apparaître troublant. Vous vous dites: Mon Dieu! une liste d'activités, comment on va arriver à faire ça? Il y a un mot qu'il faut retenir, qui est dans la définition de l'activité de psychothérapie, et c'est le mot «traitement».
Une autre chose que je peux vous dire vraiment à partir de mon expérience clinique, c'est qu'il y a toute une différence entre un patient ou un client qui vient voir quelqu'un en disant: Vous savez, j'ai des problèmes amoureux, j'aimerais ça en parler ? et ça, ça s'appelle de la relation d'aide ? et quelqu'un qui vient vous voir parce que systématiquement cette personne-là crée des problèmes, dans ses relations avec les autres, qui créent de la détresse, et laquelle détresse peut entraîner de la dépression chez elle et quelquefois chez ceux qui l'entourent. Bon, cette personne-là, à ce moment-là, a besoin d'être évaluée, de recevoir une vraie évaluation, et elle a besoin d'un traitement.
Vous savez, on avait des données sur le coût des médicaments utilisés au Québec actuellement, récemment, dans La Presse. Il y a une hausse de la consommation de médicaments. Et mon propos ici n'est pas de dire que les médicaments sont inutiles, absolument pas. D'ailleurs, ça n'irait pas dans le sens de ma pensée scientifique. Les médicaments sont utiles à ceux qui en ont besoin et qui ont été évalués pour ce faire. Mais, en santé mentale, un traitement autant reconnu dans la littérature scientifique que la médication, c'est la psychothérapie, mais lorsqu'utilisée à bon escient, et très souvent les deux. Or, une évaluation doit permettre à quelqu'un qui souffre d'un problème de santé mentale de recevoir une indication de ce qui peut l'aider comme traitement, y inclus la médication, y inclus la psychothérapie. Maintenant, si vous avez droit à un traitement, vous avez droit au fait que ce traitement-là soit appliqué par un professionnel imputable, et c'est ce que le projet de loi n° 50 vient recommander.
La Présidente (Mme Thériault): Et je vais vous demander d'aller à la conclusion, Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Je vais aller à la conclusion en rappelant pourquoi le guichet unique devrait être à l'Ordre des psychologues. Premièrement, les critères de compétence, nous les endossons. Ils sont suffisamment élevés, ils sont très bien. Pourquoi? Parce que, depuis près de 40 ans, c'est ce que l'Ordre des psychologues fait, encadrer la psychothérapie. Pourquoi? Parce que le public québécois, je vous l'ai dit, s'attend à ce que le psychothérapeute... Il y a une confusion. Ça permettrait de briser la confusion. Pourquoi? Parce qu'un guichet unique, c'est la meilleure façon d'informer clairement et rapidement le public. Nous ne croyons pas que, dans ce domaine, nous allons plus aider le public par des poursuites que par de l'information. Un guichet unique va nous permettre d'informer rapidement et efficacement. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, Mme Charest. Donc, sans plus tarder, nous allons entamer le premier bloc d'échange avec le ministre de la Justice, responsable des lois professionnelles.
M. Dupuis: Oui. Brièvement, Mme Charest, d'abord je suis certain que Mme Lorquet et M. Desjardins auraient eu beaucoup de choses à dire également. Je vous taquine.
J'ai fait la boutade pendant votre intervention quand vous avez dit: J'espère, quand on fait de la psychologie, qu'on aime le monde et que les gens nous aiment. Je faisais la boutade parce que souvent je dis, moi, aux gens qui souhaitent être candidats dans une élection, qui me demandent: Qu'est-ce que ça prend comme... qu'est-ce qu'il faut? qu'est-ce qu'il faut pour être candidat?, je leur dis une seule chose: il faut aimer le monde. Si vous n'aimez pas le monde, vous n'êtes pas dans la bonne profession. Et je suis certain que le cas est exactement semblable pour tous les ordres professionnels qui sont concernés par le projet de loi n° 50. Il faut d'abord aimer la personne humaine. Si on n'aime pas la personne humaine, on n'est pas dans la bonne... Alors, c'était de là que venait ma boutade.
n(12 heures)n Et je ne vous apprendrai rien, Mme Charest, en disant que vous le dites avec beaucoup d'éloquence et vous le dites avec beaucoup de compétence aussi, et ça me permet de... J'ai eu cette pensée, pendant que vous faisiez votre présentation, qui était pertinente, de dire: Il va falloir qu'au moment où le projet de loi sera adopté, avec les amendements qu'on pourra y apporter, s'il doit y avoir des amendements ? il y en aurait un certain nombre; on a parlé de la clause interprétative, entre autres ? il va falloir que tous ensemble nous collaborions pour lui donner une publicité, à ce projet de loi là. Ça va être extrêmement important que ce projet de loi là ait une publicité parce que, vous l'avez dit, et j'en suis, ce projet de loi protège le public face à des personnes qui exercent une activité sans avoir la compétence de l'exercer, et votre collaboration entre les ordres professionnels, votre ouverture d'esprit avec les orthophonistes, les diététistes, les sexologues, les criminologues, la clause interprétative, le guide vont permettre qu'il y ait une espèce de fraîcheur dans ce domaine-là. Mais il va falloir la publiciser, cette fraîcheur-là.
J'ai entendu M. Matte à date, j'ai entendu M. Leblond, je vous ai entendue, vous êtes tous des gens qui avez une facilité d'élocution, une facilité de communication, et je vous exhorte à vous en servir, une fois que le projet de loi sera adopté, pour le publiciser pour que le public en soit conscient. Nous, on peut faire des efforts dans ce sens-là aussi, on fait des efforts dans ce sens-là. Mais, quand on est en politique, la première qualité qu'il faut avoir, c'est celle de l'humilité, et pas sûr que, quand, nous autres, on le dit, ils nous écoutent tant que ça. Mais il faut continuer à tendre vers ça.
Donc, pour ce qui me concerne, moi, je vous remercie de vos remarques et je remercie les gens qui vous accompagnent aussi, qui ont probablement travaillé très fort à la présentation du mémoire et à la présentation de votre prestation. Et je vais, avec la permission de la présidente, laisser la parole à mes collègues, qui souhaitent vous poser des questions. Mais merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Charest, Me Lorquet, M. Desjardins, merci beaucoup de votre participation. Et, comme y faisait allusion le ministre il y a quelques instants, effectivement un élément fondamental, puis c'est le rôle évidemment qu'a un ordre, c'est de protéger le public, et on a une occasion, là, et on le voit par les consultations depuis ce matin, puis on va le voir aussi dans les débats qui entoureront éventuellement, on l'espère, l'adoption du projet de loi, on a une occasion de moderniser le cadre d'exercice du psychologue, et de réserver en même temps des évaluations cruciales qui vont permettre d'oeuvrer en première ligne ? c'est un élément important parce que, les besoins, vous ne les inventez pas, ils existent, ils sont là dans notre société ? et en même temps de reconnaître la pratique de psychothérapie comme étant un élément clé au coeur de la profession.
Alors, comment est-ce que... Ma première question est plutôt générale, c'est: Comment l'ordre envisage-t-il de soutenir ses membres relativement, entre autres, à l'évaluation du trouble mental? Quels éléments vous voyez qu'ils sont nouveaux, des nouvelles façons que vous auriez besoin peut-être d'adresser à cet égard-là, et justement à soutenir les autres professionnels de la santé en regard de la pratique de la psychothérapie? Parce qu'il y a une complémentarité bien sûr d'exercice, là, quand on adresse des questions de psychologie.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Bien, écoutez, pour ce qui est de soutenir nos membres au niveau de l'évaluation des troubles mentaux, il s'agira d'utiliser les mécanismes de protection du public qu'on a déjà. Une évaluation des troubles mentaux est déjà dans la formation initiale des psychologues. Ceci dit, les mêmes mécanismes d'inspection professionnelle mais surtout la formation continue ? je n'en ai pas parlé ? c'est vrai pour l'évaluation des troubles mentaux comme pour toutes les activités et c'est vrai particulièrement pour la psychothérapie, où, là, ce sera inscrit comme étant obligatoire, la formation continue. Or, la formation continue offerte par un ordre professionnel est une formation continue axée sur les besoins et non seulement sur les intérêts, et c'est ce qui la différencie.
J'aimerais peut-être laisser la parole à mon collègue Pierre Desjardins, qui, à l'Ordre des psychologues, est responsable aussi de la formation continue. Il a peut-être quelque chose à ajouter.
La Présidente (Mme Thériault): M. Desjardins.
M. Desjardins (Pierre): Oui. Merci. En regard de la formation continue, il faut dire d'abord qu'il y a déjà des dispositions dans notre code de déontologie, comme dans beaucoup de codes de déontologie, qui obligent le psychologue à développer et à maintenir ses compétences, et c'est ce qui fait l'objet des visites d'inspection professionnelle. Par exemple, on demande à nos membres qu'est-ce qu'ils ont fait pour maintenir ou développer leurs compétences dans le cadre de leur pratique. Alors, un psychologue qui fait l'évaluation des troubles mentaux, évidemment on va vérifier: Est-ce qu'il est au fait des développements en matière... On parlait tantôt du DSM. Pour ceux qui ne le savent pas, le DSM, c'est un répertoire nosographique, c'est-à-dire qu'on a l'ensemble des pathologies qui sont classifiées, qui sont décrites, et tout ça. Donc, est-ce qu'on est au fait des derniers développements dans ce domaine-là? Qu'est-ce qu'on fait par rapport à ça? Est-ce qu'on est allé dans des activités récentes?
Il y a des nouvelles nomenclatures qui se développent à l'Ordre des psychologues, notamment dans le cadre du congrès qui vient. On pense offrir des activités de formation continue pour s'ouvrir sur ces nouvelles nomenclatures là. Alors donc, certainement qu'on va faire des choses dans ce domaine-là. Et, à travers l'inspection professionnelle notamment, en fin d'année, on a un bilan et on répertorie quels peuvent être les besoins de nos membres en regard effectivement de ce qui leur est demandé dans leur pratique, et, se basant là-dessus, on offre des activités de formation continue, mais on monte un programme d'activités de formation continue qui vient répondre à ces besoins-là. Dans le cadre du projet de loi n° 50, évidemment que, là, on identifie les activités qui sont à risque et qui sont réservées aux psychologues. Certainement qu'on va s'orienter là-dessus. On va être particulièrement vigilants pour assurer à tous nos membres d'avoir ces compétences-là et de les développer, de les maintenir et de les développer également.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci. Sur un autre ordre de questions, le rôle important des ordres professionnels, on le disait tout à l'heure, c'est pour la protection du public. Mais parfois, nos commettants, il y a des exemples à l'occasion, puis, même nous, comme parlementaires, on a vu d'autres cas où est-ce qu'il y a parfois la tendance à avoir des chasses gardées qui se développent, en quelque sorte. Et l'idée n'est pas de reconnaître n'importe qui n'importe comment, c'est bien sûr, mais en même temps, bien, dans d'autres dossiers, là, vous savez, qui font beaucoup les manchettes ces temps-ci, ce qui est une priorité pour le gouvernement, c'est effectivement d'accueillir des gens compétents, puis tout en ayant un encadrement qui soit souple, qui soit réel mais qui soit souple aussi, et peut-être plus souple, certainement plus souple parfois que dans le passé, dans d'autres contextes.
Je pense que, ce matin, ce que j'entends des différents intervenants d'abord... souligner de saluer l'ouverture qu'on entend, là, qui est réelle, qui est importante à cet égard-là, et une des questions relève justement du fait qu'il existe des personnes qui sont compétentes mais qui ne sont pas admissibles, ne pourraient être admissibles à un ordre professionnel, d'où la question ? et là il faut sortir un peu parfois des sentiers battus: Comment est-ce qu'on peut avoir un encadrement plus souple et qui protège le public et comment accueillir et favoriser l'accueil de ces personnes compétentes là dans l'exercice, par exemple, de la psychothérapie? Ma question reste plus à ce point-ci.
Mme Charest (Rose-Marie): Je peux répondre?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, allez-y, Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Bon, écoutez, c'est clair que ça, c'est une grosse difficulté qu'est venu résoudre le rapport Trudeau en nous donnant des critères. Donc, plutôt que de dire «tel groupe de personnes», on a dit: Pendant la clause transitoire, voilà les critères à partir desquels on pourra accueillir les personnes qui actuellement sont compétentes en psychothérapie mais qui ne sont pas admissibles à un ordre professionnel. Nous, on a regardé ces critères-là, et on nous trouve très adéquats, et on a des bonnes raisons de croire qu'avec de tels critères appliqués avec souplesse ? je reprends votre terme ? je pense que ce n'est pas juste...
Hier, j'assistais justement à la rencontre du premier ministre, et, cette ouverture sur le monde, cette ouverture, on la sent, vous la sentez, aujourd'hui, entre les professions. C'est ça, l'avenir du Québec, là. Ce n'est pas une fermeture, c'est une ouverture, et je pense que tout le monde le veut dans tous les domaines. On le veut, nous aussi. Donc, il va y avoir une souplesse dans l'application parce qu'on ne veut pas de rupture de services, ni maintenant ni plus tard, c'est-à-dire qu'on veut que les personnes compétentes soient réellement reconnues. Mais on veut aussi que les personnes qui ne sont pas compétentes ne puissent plus dire aux Québécois: Je suis psychothérapeute. Ça, c'est le but. Il faut quand même garder ça en tête, que c'est l'objectif qu'on s'est fixé au départ.
M. Paquet: Juste avant de terminer... Bien, d'abord, merci. Puis effectivement j'étais aussi, hier, à la rencontre extrêmement importante qui a eu lieu sur la question d'élargir l'espace québécois, hein, et c'est un élément extrêmement positif et constructif et qui appelle, qui interpelle, et c'est l'invitation du premier ministre et du gouvernement, à voir un peu les choses un petit peu différemment et d'avoir, comme vous dites, souplesse et en même temps protection du public. Ce n'est pas en contradiction, mais ça nous force et, dans ce sens-là... que le premier ministre et le gouvernement essaient de mettre de l'avant, de dire: Bien, il faut penser un peu différemment du passé pour intervenir. Alors, encore une fois, je vous salue pour l'ouverture dont vous faites preuve à cet égard-là et puis je pense que le gouvernement certainement, là, voit ça du même oeil, et on va toujours être là pour aller dans cette direction-là.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député. Maintenant, au tour du député de Chomedey, en vous indiquant qu'il vous reste six minutes.
M. Ouellette: Amplement. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Charest, Me Lorquet, M. Desjardins. En plus d'aimer le monde, on sent beaucoup de passion dans vos propos.
M. Dupuis: Elle est heureuse.
M. Ouellette: Ah! Non, ça transpire, ça, puis je pense que c'est...
Mme Charest (Rose-Marie): Je vais vous dire très honnêtement, je suis devenue présidente de l'ordre avec une idée en tête, que je participerais au fait que les Québécois aient accès à des services de qualité en psychothérapie, et, ce matin, pour moi c'est un moment important, vous devez le sentir dans ma passion. Vous êtes très sensible, monsieur.
M. Dupuis: Ce n'est pas toujours ce qu'on dit de lui.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Chomedey.
n(12 h 10)nM. Ouellette: Une chance que publiquement je considère le ministre comme mon ami!
J'aurais aimé que vous partagiez avec nous, parce que j'ai une préoccupation, moi, par rapport au permis de psychothérapie, comment vous voyez ça ou comment vous voyez votre ordre, comment vous voyez ça, la gestion des permis de psychothérapie, là, avec les autres groupes, parce qu'effectivement la protection du public, c'est important, et ça va être important aussi par la publicité que vous allez en faire pour enlever tous ceux qui n'ont pas d'affaire là. Mais comment on va envisager ça? Je veux connaître votre point de vue là-dessus.
Mme Charest (Rose-Marie): La première chose que je peux vous dire, c'est que je pense qu'on l'illustre ce matin, notre capacité, entre les six ordres concernés, de travailler ensemble à trouver des solutions lorsque les problèmes se présentent. J'ai beaucoup plus confiance aujourd'hui qu'on pourra réussir la mise en oeuvre de ça, j'ai même confiance tout court, que je l'aurais eue il y a sept, huit ans. Depuis sept, huit ans, on a beaucoup cheminé, on a beaucoup travaillé ensemble, on est maintenant des alliés en vue de la protection du public.
Maintenant, pour ce qui est du permis, vous savez, à l'Ordre des psychologues, on étudie des dossiers d'équivalence, on fait ça depuis 30 ans, donc de recevoir un permis, un dossier de quelqu'un qui n'a pas exactement la même formation que nous mais de dire qu'est-ce qui manque à cette personne-là, et là, en plus, on nous donne des critères précis. Ça fait qu'il y a beaucoup de travail à faire, mais je ne suis pas inquiète, et je compte sur la solidarité de mes collègues.
Bon, maintenant, pour ce qui est du public, la raison pour laquelle il y a un système professionnel, c'est que le public doit être protégé par nous, il ne doit pas être constamment obligé de se protéger lui-même. Alors, ce qui est caractéristique de la psychothérapie, c'est qu'en général les gens ne le disent pas au monde, qu'ils vont en thérapie, c'est un geste assez secret. Ils sont seuls avec quelqu'un pendant qu'ils sont en thérapie, donc il n'y a personne qui observe pour dire: Est-ce qu'il fait bien ça ou non? Les conséquences de la psychothérapie, parce qu'elle est efficace, la psychothérapie ? donc, tout ce qui est efficace peut l'être dans différents sens, hein ? donc les conséquences, lorsqu'elles sont négatives, la personne n'ose pas facilement... Mais je peux vous dire que très souvent, à l'Ordre des psychologues, on reçoit des appels du public qui dit: Je suis allé en psychothérapie avec un tel, puis, bon, il s'est passé telle chose, et actuellement, s'ils ne sont pas membres chez nous, on ne peut rien faire.
L'information du public, c'est toujours un défi, mais je peux vous dire que la première chose en information, c'est d'ouvrir les oreilles. Je peux vous dire qu'actuellement, au Québec, sur ce sujet-là, les oreilles sont déjà grandes ouvertes. Je suis régulièrement invitée dans les médias à parler de ça, et très souvent, sur des tribunes, le public a demandé: Mais pourquoi ce n'est pas l'Ordre des psychologues qui règle ça? Genre, prenez donc vos responsabilités. Je pense que ce qu'on vient faire ce matin, c'est de vous offrir de prendre cette responsabilité-là, et on a tout lieu de croire, un, qu'on va y arriver et, deux, que le public va être satisfait et mieux protégé.
M. Ouellette: Merci, Mme Charest.
La Présidente (Mme Thériault): C'est beau? Merci. Donc, ceci met fin à l'échange avec le groupe formant le gouvernement. Nous allons maintenant passer du côté de l'opposition officielle, avec le député de Saint-Hyacinthe, pour une période de 15 minutes. M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, Mme Charest. Bonjour, Me Lorquet, Et bonjour, M. Desjardins. J'ai... en fait je suis toujours quand même impressionné de voir en fait deux principes de base, c'est-à-dire une espèce de collégialité qui a amené toute cette réflexion-là au niveau de la psychologie et aussi de la santé mentale. Aussi, il y a un autre point ? puis je pense que vous l'avez très bien défendu ? l'accessibilité compétente, et je dois vous dire que, quand j'ai pris des notes, je marquais «accessibilité et compétente», et, à un moment donné, j'ai dit «et compétence» et enfin j'ai marqué «accessibilité compétente». Alors, pour moi, c'est certain que c'est une corde qui est très intéressante pour ma formation politique et mon groupe parlementaire et aussi pour l'ensemble des Québécois parce que présentement, au Québec, on a quand même beaucoup de records, des records dans le fond que je trouve difficiles à gérer et difficiles à accepter. On a beaucoup de suicides, on a beaucoup de décrochage scolaire, et je pense qu'aussi on a beaucoup... on a, on doit avoir l'apport de tous les gens dans le domaine de la santé mentale pour aider cette population-là, surtout, des fois, jeune population, qui est présentement en détresse.
J'aime bien quand même, puis je pense que ça a été réglé rapidement dans votre mémoire, lorsque vous parlez: «La réserve d'une activité à une profession ne doit jamais avoir pour effet d'empêcher un autre professionnel d'exercer la sienne à l'intérieur des paramètres déterminés par son champ d'exercice.» Vous avez assisté comme moi à l'annonce du ministre au sujet d'un... en fait d'un guide interprétatif, et j'aimerais quand même savoir, dans la réalité de tous les jours, comment vous seriez en mesure d'être un peu le précurseur de cette discussion-là ou de cette information-là. Où voyez-vous des tensions entre différentes interventions dans le champ d'activité de certaines professions face aux psychologues ou... surtout face aux psychologues, bien entendu?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Oui. Écoutez, je dirais que, pour la clause que vous venez de lire, ça va même au-delà du guide interprétatif. Ce que je comprends, c'est que le ministre a l'intention de le mettre dans la loi, donc ça aura force de loi. Tout le système professionnel depuis toujours est basé sur le fait que le champ d'exercice d'un professionnel, ça dit ce qu'il a le droit de faire, pour les ordres comme infirmières ou médecins qui avaient des champs d'exercice exclusifs. Donc, à partir du moment où on dit ce qu'une personne, les activités qui découlent de son champ d'exercice, elle sera autorisée à les pratiquer, on continue à faire finalement ce qu'on fait depuis toujours dans le système professionnel.
Maintenant, et là-dessus je vous remercie de me donner l'occasion de parler de l'entente qu'on a eue avec l'Ordre des ergothérapeutes, que j'avais oubliée de mentionner, c'est que c'est sûr que, entre ce qu'on voit, nous, entre ordres et ce qui se passe sur le terrain, il y a quelquefois une différence. On a voulu, l'Ordre des ergothérapeutes et nous, s'assurer que ce ne soient pas nos membres qui soient en conflit sur le terrain mais nous qui prenions la responsabilité de travailler ensemble à un guide explicatif qui va permettre aux ergothérapeutes et aux psychologues de savoir quelle est la limite de l'activité de chacun, ce qui ne signifie pas qu'il n'y a aucune zone commune. En santé mentale, et je pense que M. le ministre l'a mentionné tout à l'heure, il y a des zones communes, il y a énormément de zones communes. Mais, si on a pris la peine de créer des professions et surtout d'avoir des formations de base différentes, c'est que ça, ça nous indique quelles sont les compétences de la personne et qu'est-ce qu'elle peut faire. Et le rapport Trudeau s'est beaucoup orienté pour répondre à la question: Qu'est-ce que le professionnel peut faire?, et non pas: Qu'est-ce qu'il a le droit de faire? Et je pense qu'on va continuer de s'inspirer de cette philosophie qui nous a menés où on est.
Peut-être Me Lorquet a quelque chose à ajouter sur ça.
Mme Lorquet (Édith): C'est bien. En fait, la clause interprétative...
Une voix: ...
Mme Lorquet (Édith): Non, mais, je veux dire, c'est parfait, mais ce que je veux dire, c'est que la seule chose que je préciserais, en fait, c'est qu'on le sait depuis 1990, qu'une activité réservée ou partagée entre plusieurs doit toujours se lire en fonction du champ d'exercice. Mais ce qui est nouveau, une nouvelle problématique qui a fait surface, c'est: Quelle est l'interrelation entre une activité qui est réservée, lorsqu'elle rentre un petit peu en contradiction avec ce qui est dans un champ d'exercice mais qui par ailleurs n'est pas réservé... Ce que ça vient dire, c'est: ce n'est pas parce qu'une activité était réservée à toi qu'elle empêche un autre d'exercer une activité qui n'est peut-être pas réservée mais qui découle de son champ d'exercice. En gros, là, c'est ça que ça vient faire, et ça va venir régler des problèmes peut-être à venir mais également du passé, découlant de l'application de la loi n° 90. Donc, ça règle beaucoup de problèmes du passé et de l'avenir.
Mme Charest (Rose-Marie): J'aimerais ça donner un exemple concret de ça parce que, nous, on est dans ça dans le quotidien, pas vous autres, là, peut-être. Par exemple, l'évaluation des troubles mentaux, c'est tous les troubles mentaux. Maintenant, un psychoéducateur, par exemple, quand il évalue la capacité adaptative de quelqu'un, il est aussi... mais, lui, il n'a pas d'activité réservée comme telle, mais c'est dans son champ. Donc, avec cette clause-là, ça vient rassurer tout le monde que jamais l'Ordre des psychologues ou un psychologue ne pourrait dire au psychoéducateur, par exemple: Écoute, tu n'as pas le droit de faire ça, c'est dans mon champ. Non. La clause dit bien: C'est dans son champ. Donc, il a le droit de le faire, même si ce n'est pas une activité réservée.
Et je pense qu'ici on parle beaucoup des activités réservées, et on a l'impression que finalement l'ensemble de notre pratique va être une activité réservée. Or, ce n'est pas le cas, là, c'est quelques activités qui sont réservées à chacun des professionnels. Alors, je peux vous dire qu'un psychologue, par exemple, peut travailler à faire une multitude d'activités qui ne sont pas réservées, en plus ou incluant celles qui le sont.
M. L'Écuyer: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Allez-y, M. le député.
n(12 h 20)nM. L'Écuyer: Je dois comprendre quand même que la clause interprétative et aussi la réserve que le ministre annonce, c'est une clause nécessaire au projet de loi comme tel, d'après ce que vous dites. C'est nécessaire.
Mme Charest (Rose-Marie): C'est une compréhension nécessaire.
M. L'Écuyer: D'accord. J'aime bien vous l'entendre dire. Concernant... parce que je lis votre mémoire justement au niveau des ergothérapeutes, et il y a un autre mot clé aussi qui a capté mon attention: «...appelés à travailler en complémentarité [pour le] bénéfice de la clientèle qu'ils desservent, d'intervenir dans les limites des activités qui leur sont réservées selon la finalité propre à chaque profession.» Je pense à ce que Me Lorquet vient de nous définir, c'est cette zone grise que j'appelle dans le fond l'empiètement de cette... Mais ce que je vois... Et j'essaie d'actualiser cette complémentarité qui va se faire dans la vie de tous les jours, et c'est ce que vous m'avez interprété, vous m'avez donné un exemple au niveau de la complémentarité. Est-ce que vous avez la même chose au niveau de certains autres ordres professionnels? On a parlé des ergothérapeutes, un dossier quand même qui a fait couler beaucoup d'encre, à mon avis, les audiologistes-orthophonistes. Alors, est-ce que vous avez la même complémentarité en rapport avec cet ordre-là?
Mme Charest (Rose-Marie): De façon...
La Présidente (Mme Thériault): Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Oups! Excusez. Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Thériault): Non, c'est beau. Allez-y, Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Je ne suis pas politicienne, mais j'ai un peu l'habitude de présider. Je m'excuse.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Charest (Rose-Marie): Écoutez, prenons l'exemple d'un psychologue, et même mon collègue Pierre Desjardins pourra ajouter, là, si... Un psychologue qui est dans une école, il procède à l'évaluation d'un trouble d'apprentissage. C'est complexe, un trouble d'apprentissage, il peut y avoir des éléments qui sont intellectuels, affectifs, et tout ça. Il dit: Oui, mais il a l'air d'avoir quelque chose au niveau du langage. Il a le droit selon nous de dire: Il a un problème au niveau du langage. Mais c'est son devoir, s'il pense que cet enfant-là a réellement un problème et donc a besoin d'un traitement, de le référer à un orthophoniste qui, lui, va procéder à l'évaluation du trouble du langage en vue d'établir le plan de traitement.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. Desjardins.
M. Desjardins (Pierre): Oui. Bien, je voudrais ajouter: si on reprend cet exemple-là, à l'école, ils sont tout à fait complémentaires, l'orthophoniste et le psychologue, au sens où il pourrait y avoir un trouble du langage que l'orthophoniste aurait à préciser ou à spécifier dans le cadre de ses compétences propres, mais c'est important, pour le psychologue qui travaille dans une école, d'être capable de voir s'il n'y a pas un autre problème qui viendrait expliquer le trouble du langage ou qui viendrait potentialiser le trouble du langage. Est-ce qu'il y a un retard mental? Est-ce qu'il y a un retard de développement? Est-ce qu'il y a un trouble de mémoire? Est-ce qu'il y a un trouble visuo-oculaire, de coordination visuo-oculaire? Est-ce qu'il y a un trouble affectif? Est-ce que l'enfant est dépressif? Est-ce qu'il y a un trouble attentionnel? Alors, si on arrivait à la conclusion que le psychologue devrait être étranger à tout ce qui est de l'ordre des troubles du langage ou des troubles d'apprentissage, bien je pense qu'on vient de se priver d'un pan extrêmement important dans les écoles et on vient de se priver d'une expertise qui est là depuis à peu près tout le temps.
Si on prend la Société canadienne de psychologie, si on prend la National Association of School Psychologists aux États-Unis, qui sont deux grosses sociétés qui balisent cette pratique-là depuis très longtemps, et il y a des façons de faire, un psychologue est capable, à l'école, de dire: Voici, il y a un problème de dyslexie, mais il n'est pas capable d'aller de façon très pointue et, s'il le voit, il le réfère à l'orthophoniste, et on peut penser que l'orthophoniste qui a vu ça, si ça a été le premier à le voir, va le référer au psychologue pour dire: Est-ce qu'il y a un problème concomitant? Est-ce qu'il y a d'autres difficultés? Est-ce que ça entraîne des difficultés d'intégration dans son groupe scolaire? Comment tu vas manoeuvrer avec le professeur, et tout ça?
Alors, la complémentarité, c'est comme ça qu'il faut la voir. Si on fait des batailles pour faire des chasses gardées, tout le monde va être privé de services, et on veut éviter ça, et on veut régler ça au niveau des ordres, pas le laisser sur le terrain entre les orthophonistes et les psychologues à se chicaner, à s'arracher un morceau de quelque chose que personne ne devrait s'arracher mais que tout le monde devrait se partager.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député.
M. L'Écuyer: Je dois comprendre dans un sens que c'est une finalité différente dans chaque ordre professionnel, et cette finalité-là n'est pas nécessairement... l'audio-orthophoniste a quand même une finalité bien précise qui est axée sur le langage, et le psychologue a une finalité qui est quand même plus axée sur peut-être une évaluation mentale qui pourrait quand même être décelée, à ce moment-là. Merci.
En psychothérapie, vous avez... en fait je pense que vous avez été assez bien précise sur la définition de «psychothérapie». J'ai peut-être quand même une question. Ce qui m'inquiète le plus au niveau de... c'est la période, ce que j'appelle, postloi, c'est-à-dire cette période qu'on... Il va y avoir un flottement au niveau de l'application de la loi, et je pense que les personnes qui ont travaillé dans le cadre du projet de loi n° 50 ont sûrement des discussions, des réflexions en rapport avec après, ce que j'appelle le post, après l'adoption du projet n° 50, comment les psychologues ont analysé cette suite-là. C'est certain que, pour les psychologues, vous avez l'application de la loi. Pour l'ensemble des autres membres des autres ordres professionnels, il va y avoir quand même des ajustements et, je pense, des longues discussions avant d'arriver à une application directe de la loi, c'est-à-dire que, demain matin, je puisse voir un ergothérapeute, un psychothérapeute ou un... on l'a vu tout à l'heure, le débat des travailleurs sociaux qui... les conseillers en orientation qui ont des psychothérapeutes. Alors, j'aimerais quand même avoir des précisions sur cette question-là.
La Présidente (Mme Thériault): ...deux minutes pour le faire, Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): O.K. Je vais prendre juste 30 secondes et je vais passer la parole à une avocate pour répondre de l'échéancier. Maintenant, les accords avec les ergothérapeutes, les travailleurs sociaux, les conseillers d'orientation, psychoéducateurs, infirmières, c'est déjà fait, ça. Ça, c'est fait. C'est ce que vous entendez ce matin, et nous sommes d'accord. Maintenant, quelle procédure on va établir? C'est pour ça qu'on a des avocats, elle va vous l'expliquer.
La Présidente (Mme Thériault): Me Lorquet.
Mme Lorquet (Édith): Bien, si je comprends bien...
M. L'Écuyer: ...avec votre permission, Mme la Présidente, préciser ma question. C'est fait, mais est-ce que les gens demain matin qui font présentement... qui exercent en psychothérapie vont pouvoir continuer à le faire le jour 1 après l'adoption de la loi? Alors ça, c'est plus inquiétant pour certaines personnes qui pourraient quand même avoir des services de professionnels, qu'on peut dire, qui sont dans une zone grise de non-compétence.
La Présidente (Mme Thériault): Me Lorquet.
Mme Lorquet (Édith): Sans doute, les avocats de l'office sont plus au fait de la façon de mettre en vigueur des dispositions législatives, mais, si je me fie à ce qui est arrivé avec le projet de loi n° 90, il y a eu une mise en vigueur retardée de six mois, il y a eu deux parts de mise en vigueur différentes. Dans un premier temps, ce qui ne suscitait pas de problème avec la question de ceux qui pratiquaient hors normes, ils sont rentrés en vigueur immédiatement, et on a laissé ensuite six mois.
Ce qu'il faut comprendre au niveau de la psychothérapie, c'est qu'il va falloir d'abord que l'office adopte un règlement. Ça ne nous apparaît pas très compliqué puisqu'à notre avis les conditions sont essentiellement déjà prédéterminées dans le rapport Trudeau. Donc, il faut mettre en place un règlement. Il faut ensuite laisser le temps aux gens d'en être informés. Et par la suite, habituellement, lorsqu'on fait une clause grand-père, on peut laisser habituellement une période de un an ou deux ans pour laisser le temps aux gens de se manifester, non pas aux gens d'aller commencer à prendre une formation, c'est vraiment une clause de droit acquis. C'est pour ceux qui pratiquent à l'heure actuelle, mais souvent ils en sont informés plus tard. Alors, habituellement, on laisse un temps aux gens pour réagir. Mais, le lendemain matin de l'adoption de 90, les dispositions sur la psychothérapie ne seront pas en vigueur...
Une voix: 50.
Mme Lorquet (Édith): ...pardon, en vigueur, on n'ira pas commencer à poursuivre les gens. Ça va être un processus qui va peut-être s'échelonner sur une ou deux années. Mais ça, c'est plus les avocats de l'office qui vont voir, en collaboration, ultérieurement, une fois le projet de loi adopté, évidemment...
La Présidente (Mme Thériault): Merci, Me Lorquet. C'est ce qui met fin à l'échange avec l'opposition officielle. Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole au député de Dubuc pour votre bloc de 13 minutes. M. le député.
M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Charest, Me Lorquet, M. Desjardins, bienvenue à cette commission. Merci pour la présentation de votre mémoire, qui a été très bien rédigé, et merci surtout, Mme Charest, pour la netteté de votre présentation et surtout la conviction avec laquelle vous nous avez présenté ce mémoire.
J'ai trois petites questions qui ne seront pas bien longues, vous allez voir. Lorsque vous parlez de l'évaluation du retard mental, vous dites qu'un professionnel apte à évaluer les troubles mentaux n'est pas nécessairement en mesure d'évaluer le retard mental, et vice versa. Expliquez-moi ça un petit peu, là, parce que pour moi les troubles mentaux puis le retard mental, c'est pareil.
M. Desjardins (Pierre): C'est-à-dire que...
La Présidente (Mme Thériault): M. Desjardins.
n(12 h 30)nM. Desjardins (Pierre): Oui. Merci. C'est-à-dire que le retard mental, ça fait partie d'un ensemble de diagnostics, là, qui peuvent être regroupés sous l'appellation des troubles mentaux. Mais, comme Mme Charest le disait au début, pour l'évaluation des troubles mentaux de façon générale, on peut aller chercher de l'information de diverses sources et on peut ajouter à ces sources d'information là le testing psychométrique, les tests. Alors donc, ça peut être ajouté. Et c'est souvent parce que cet ajout-là, il est porté par les psychologues qu'on fait référence aux psychologues pour avoir un diagnostic plus fin, plus raffiné. Mais ce n'est pas nécessaire en général pour l'évaluation des troubles mentaux.
En ce qui concerne l'évaluation du retard mental, non seulement c'est nécessaire, mais c'est incontournable et essentiel, c'est-à-dire qu'il faut nécessairement, entre autres, évaluer le niveau de fonctionnement cognitif, et pour ça il faut être capable d'utiliser des tests de QI et être capable d'en dire autre chose que ce que tout le monde à peu près peut savoir, que, s'il a 100, il est à peu près moyen, puis, s'il a 80, il n'est pas trop fort, puis, s'il a 70, on se pose des questions. Il faut être capable d'aller au-delà de ça. Il faut avoir donc des compétences, acquérir des compétences pour utiliser ces tests-là, savoir ce que c'est qu'une moyenne, savoir ce que c'est qu'un écart type, savoir où on se situe quand on est à moins de deux écarts types en dessous, c'est quoi, un intervalle de, etc.
On parle pour le fonctionnement cognitif mais aussi pour le fonctionnement adaptatif parce que, pour conclure à un retard mental, il faut aussi avoir un déficit significatif sur le plan des comportements adaptatifs. Pour ça, il faut aussi utiliser des tests. Ils sont d'un tout autre ordre que des tests cognitifs. Alors donc, il faut connaître ces tests-là, il faut être capable de les adapter, les ajuster. Il n'y a pas beaucoup de ces tests-là qui existent en français, qui sont faits au Québec, donc il faut avoir une pensée fine autour de ça pour être capable de les utiliser, et de les mettre en perspective, et de les interpréter de façon adéquate et non pas abusive. Donc, ça devient relativement complexe, et il faut avoir un apprentissage en psychométrie. Donc, on devrait ajouter aux connaissances qu'on a pour faire l'évaluation des troubles mentaux. Donc, il y a quelque chose qui se distingue là et qui amène notre réserve.
M. Côté: Merci. Une autre petite question: Qu'est-ce que c'est que la maladie démyélinisante?
M. Desjardins (Pierre): Écoutez, ça, ce sont des termes de neuropsy. Je ne sais pas si... On en a une dans la salle.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Desjardins (Pierre): On pourrait faire appel...
M. Dupuis: ...pour le ministre.
M. Desjardins (Pierre): C'est ça.
Une voix: La sclérose en plaques.
M. Desjardins (Pierre): Oui, c'est la sclérose en plaques en fait puis des maladies de... En fait, quand on parle de ça, on parle de toutes les maladies du système nerveux central puis qui peuvent être évaluées. Vous comprendrez que, n'étant pas neuropsychologue, je ne vais pas revendiquer l'activité évaluation des troubles neuropsychologiques.
M. Côté: Merci. Et ma dernière question, c'est une question d'ordre général: Tout ce changement dans le système, dans la santé mentale, dans les rapports des relations humaines, dans les compétences que vous avez partagées avec d'autres ordres professionnels, est-ce que ça aura un impact, les compétences, sur l'immigration, sur l'ouverture vers l'immigration, vers des immigrants qui voudront arriver au Québec et qui voudront pratiquer différentes techniques ou différentes professions? Est-ce que vous avez fait une réflexion sur ça ou si ça va continuer comme c'est là présentement, c'est que les personnes qui veulent être psychologues, qui veulent exercer la profession de psychologue au Québec devront subir des examens, une formation? Est-ce qu'il y a quelque chose de spécial pour l'immigration qui a été prévu sur ça?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Charest.
Mme Charest (Rose-Marie): Il nous apparaît que c'est les mêmes règles qui vont s'appliquer, mais je pense que justement il y a une volonté en tout cas que, nous, on a, à l'ordre, qui est d'augmenter nos outils de mesure des compétences de façon à pouvoir évaluer plus facilement les gens qui viennent de l'étranger, l'idée n'étant pas de les bloquer mais de bien faire le tri entre ceux qui ont les compétences et ceux qui ne les ont pas, de façon juste et équitable. Et, le fait d'avoir des activités réservées, ce que ça fait, c'est que ces activités-là sont définies. Je dois vous dire, par exemple, que ce n'est pas tous les psychologues, par exemple, qui pratiquent, et c'est vrai pour toutes les professions, qui pratiquent toutes les activités. Moi, je me considère assez compétente pour faire l'évaluation des troubles mentaux puis la psychothérapie, mais je ne ferais pas une évaluation en dérogation scolaire, je ne connais pas ça. Alors, ça va même à l'intérieur d'une profession, il y aura des gens qui pourront pratiquer des activités et d'autres pas.
As-tu quelque chose à ajouter pour l'immigration? Mais je peux vous dire que le message est bien reçu, que, si on veut intégrer des nouveaux arrivants, il faut trouver des nouvelles méthodes d'évaluation et de reconnaissance des compétences.
M. Côté: Merci beaucoup, madame.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, Mme Charest, M. Desjardins, Me Lorquet, merci de votre comparution en commission parlementaire.
Mme Charest (Rose-Marie): Merci beaucoup de nous avoir reçus.
La Présidente (Mme Thériault): Je vais suspendre les travaux jusqu'à 14 heures. Bon appétit!
(Suspension de la séance à 12 h 34)
(Reprise à 14 h 1)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions va reprendre ses travaux. Je demanderai encore une fois aux personnes présentes dans la salle de bien vouloir fermer vos téléphones cellulaires ou de les mettre en mode vibration, s'il vous plaît.
Donc, je vous rappelle que la commission est réunie afin de tenir des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 50, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines.
L'ordre du jour cet après-midi: nous entendrons l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, qui ont déjà pris place; ce sera suivi de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec; par la suite, la Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement; et nous terminerons la journée avec la Confédération des syndicats nationaux et la Fédération de la santé et des services sociaux CSN.
Donc, sans plus tarder, je vais vous demander, Mme Rollin, de vous présenter et nous présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez vu ce matin, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Ce sera suivi par des échanges avec les différentes formations politiques. Donc, bienvenue à l'Assemblée. La parole est à vous.
Ordre des ergothérapeutes du Québec (OEQ)
Mme Rollin (Françoise): Merci, madame. Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, je suis Françoise Rollin, présidente de l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, et je suis accompagnée de Mme Louise Tremblay, directrice des affaires externes et du développement de la profession.
L'ordre remercie les membres de la Commission des institutions pour lui avoir donné l'occasion d'exprimer son avis sur le projet de loi n° 50. L'intérêt de l'ordre pour ce projet de loi tient à l'exercice même de la profession d'ergothérapeute. Les ergothérapeutes oeuvrent en effet dans de multiples secteurs d'activité, tant dans le domaine de la santé physique que dans celui de la santé mentale et des relations humaines. L'ordre compte près de 3 800 ergothérapeutes dont 85 % offrent des services directs aux enfants, aux adultes, aux personnes âgées pour qui la recherche et le maintien de l'autonomie représentent un défi quotidien. Les ergothérapeutes travaillent en grande majorité dans le secteur public, réseau de la santé et services sociaux et réseau scolaire, pour 85 % d'entre eux, mais également dans le secteur privé, pour 13 %.
L'ordre croit à la valeur des deux grands principes qui ont guidé les travaux ayant conduit à la présentation de ce projet: assurer la protection du public eu égard au risque de préjudice lié à l'exercice de certaines activités professionnelles et reconnaître les compétences distinctives et complémentaires des divers professionnels tout en favorisant l'interdisciplinarité et l'accessibilité aux services de santé et aux services sociaux. Nous voulons toutefois attirer l'attention des membres de la commission sur quelques dispositions du projet de loi, exposer les réserves que l'ordre entretient à l'égard du libellé de certaines de ces dispositions et surtout indiquer comment des amendements pourraient contribuer efficacement à leur application harmonieuse. Il regrette cependant que des dispositions ne soient pas suffisamment explicites quant à la finalité de l'activité professionnelle réservée dans certains cas, et je vous en entretiendrai en premier lieu.
L'expérience vécue depuis l'entrée en vigueur du projet de loi n° 90, en 2003, nous amène à appréhender l'application de dispositions législatives lorsqu'elles ne sont pas suffisamment explicites. C'est pourquoi des demandes ont été faites à l'Office des professions afin que certaines dispositions soient modifiées dans le but de clarifier leur nature ou leur finalité. Une demande avait été faite afin qu'une règle interprétative soit ajoutée. Nous saluons la décision du ministre parrain du projet de loi, qui a donné suite à cette demande et qui en a fait l'annonce dès l'ouverture des travaux. L'ajout d'une telle règle garantira que la réserve d'activités aux membres de certains ordres, parfois en exclusivité, n'aura pas pour effet d'empêcher les membres d'autres ordres d'exercer des activités découlant du champ descriptif de leur profession.
La mise en oeuvre des dispositions législatives qui seront adoptées représentera en soi un défi. L'ordre sait qu'un guide d'interprétation sera produit ultérieurement par l'office, et nous ne nions pas la valeur et l'utilité des explications nécessaires à la bonne compréhension de la loi qu'il fournira. Nous croyons néanmoins qu'un tel document ne peut pas remplacer la clarté d'un libellé d'une disposition de la loi. La loi est évolutive et s'interprète de manière contemporaine, en concordance avec les autres lois et en tenant compte de l'interprétation jurisprudentielle qui en sera faite. Le guide explicatif initial, lui, correspond à une image de l'exercice des professions dans un contexte professionnel, légal et organisationnel particulier, c'est-à-dire celui qui a cours actuellement. J'en viendrai, dans quelques minutes, à des commentaires plus spécifiques qui concernent directement certains articles du projet de loi.
Permettez-moi de terminer cette première partie en soulignant une recommandation qui était contenue au rapport du comité Trudeau et qui n'a pas été retenue dans le projet de loi. L'ordre trouve regrettable que l'activité d'évaluer une personne dont le diagnostic implique des contraintes sévères à l'emploi dans le but de déterminer un plan d'insertion professionnelle ne soit pas réservée, compte tenu de la vulnérabilité des personnes visées et des impacts pour leur intégration sociale. Nous en avons parlé ce matin, ce sujet-là a été soulevé par l'Ordre des conseillers d'orientation et des psychoéducateurs. Les ergothérapeutes étaient également nommés dans le rapport du comité Trudeau comme étant l'une des professions qui pouvaient avoir cette activité réservée là.
Par ailleurs, l'ordre trouve également regrettable que le projet de loi n° 50 ne prévoie aucune disposition visant l'intégration des divers groupes d'intervenants: les sexologues, les criminologues, les techniciens en service social et les techniciens en éducation spécialisée. Plus particulièrement à l'égard de ce dernier groupe, l'ordre disait déjà, dans ses commentaires à l'office, suite au rapport du comité Trudeau, regretter qu'il ne fasse pas l'objet d'une analyse plus poussée, essentielle à statuer sur la pertinence de les intégrer au système professionnel.
J'en viens maintenant à quelques éléments du projet de loi n° 50 sur lesquels l'ordre désire tout particulièrement attirer l'attention des membres de votre commission.
Par rapport au champ de l'exercice de l'ergothérapie, le champ d'exercice de l'ergothérapie a été révisé en 2002, dans le cadre du projet de loi n° 90. Le projet de loi n° 50 viendra modifier légèrement la description en mettant l'accent sur l'évidente interaction qui existe entre l'humain et son environnement. L'ordre souscrit à cette nouvelle description de son champ ainsi qu'au libellé des champs d'exercice des autres professions tels qu'ils apparaissent au projet de loi n° 50.
Dans les commentaires que nous adressions sur le rapport du comité Trudeau, nos commentaires à l'office en avril 2006, l'ordre exposait des réserves à l'égard de certaines conclusions contenues au rapport, notamment celles qui visaient l'évaluation des troubles mentaux et l'évaluation des troubles neuropsychologiques. L'ordre manifestait son inquiétude à l'égard de la portée très large de ces activités parce que la finalité de celles-ci n'était pas précisée dans le libellé et qu'une interprétation restrictive pourrait avoir pour effet de limiter indûment l'exercice des activités faisant partie du champ d'exercice de l'ergothérapeute.
Permettez-moi ici quelques précisions de vocabulaire concernant les troubles neuropsychologiques. Les professionnels de la santé et les gestionnaires des établissements utilisent couramment les termes «troubles neuropsychologiques», «troubles cognitifs», «troubles des fonctions mentales supérieures» pour désigner une altération de certaines fonctions cérébrales. Cette interchangeabilité des termes engendre la confusion quant à la nature et la finalité de l'évaluation qui sera réservée aux seuls psychologues habilités. Veut-on réserver l'évaluation qui a pour but de préciser la nature et le site de la lésion cérébrale? Veut-on plutôt réserver toute forme d'évaluation des fonctions mentales supérieures? Une telle interprétation pourrait avoir pour effet d'empêcher les ergothérapeutes de procéder à l'évaluation des fonctions mentales supérieures dans le cadre de l'évaluation des habiletés fonctionnelles, et ce, auprès de multiples clientèles, tant dans le secteur de la santé physique que dans celui de la santé mentale. Pensons, par exemple, aux exigences de la conduite d'un véhicule automobile au plan des fonctions cognitives qui sont requises.
n(14 h 10)n Le comité Trudeau a reconnu les effets indésirables potentiels de l'imprécision du libellé mais sans autant le modifier. C'est pourquoi il a précisé dans son rapport, et je cite: «Bien que l'évaluation des troubles neuropsychologiques ne soit pas réservée à l'ergothérapeute, ce processionnel ne doit pas être empêché de procéder à l'évaluation des fonctions mentales supérieures dans le cadre de l'évaluation des habiletés fonctionnelles, et ce, dans tous les contextes de soins.» Soucieux d'éviter des bris de service ou des tensions interprofessionnelles, l'Ordre des psychologues a pris un engagement formel à l'effet de définir la nature et la finalité de l'évaluation des troubles neuropsychologiques alors que cet ordre et le nôtre travailleront conjointement à distinguer cette activité réservée de l'évaluation des fonctions mentales supérieures réalisée par les ergothérapeutes. Cette distinction se reflétera dans les documents d'interprétation et d'application qui seront ultérieurement produits, conjointement ou séparément, sur ce sujet. L'acceptation par l'Ordre des ergothérapeutes de cette disposition du projet de loi n° 50 repose donc sur cet engagement formel de l'Ordre des psychologues.
L'ordre est en principe favorable à la réserve d'une activité qui porte sur l'évaluation d'une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant. Afin d'éviter toute équivoque quant à la nature et la portée de cette évaluation, il considère toutefois, à l'instar des autres ordres concernés, que le projet de loi devrait être modifié comme suit: «Procéder à l'évaluation psychosociale d'une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur et du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant.» Cette activité serait, à ce moment-là, réservée aux travailleurs sociaux.
Ce besoin de précision tient notamment au fait que la réserve de l'activité évaluer une personne ? telle qu'elle apparaît actuellement au projet de loi ? potentiellement inapte va à contre-courant des bonnes pratiques actuelles en matière d'évaluation de l'inaptitude, tel que rapporté dans la littérature des 15 dernières années en ce domaine et de plus récentes dispositions réglementaires en la matière ailleurs au Canada, notamment en Ontario. Dans ce sens, si le libellé demeure celui qu'il est actuellement, selon nous ça devrait constituer une activité réservée partagée avec d'autres professionnels, dont les ergothérapeutes, qui l'exerceraient en application de leur champ d'exercice respectif. L'ordre croit également que, du fait que le libellé actuel ne précise pas la nature de l'évaluation, il pourra être interprété comme excluant tout autre professionnel de l'évaluation de l'inaptitude, dont l'ergothérapeute. Aussi, ne peut-il que réitérer sa demande que soit qualifiée l'évaluation qui sera réservée aux travailleurs sociaux, à défaut d'être réservée en partage pour s'inscrire dans le courant législatif actuel.
Le projet de loi n° 90 avait déjà réservé l'activité décider de l'utilisation des mesures de contention à certains groupes de professionnels du secteur de la santé, dont les ergothérapeutes. L'ajout du volet mesure d'isolement dans le projet de loi n° 50 a pour effet d'inclure les interventions réalisées davantage dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines, ce avec quoi notre ordre est d'accord. Toutefois, l'ordre s'interroge sur le fait que cette réserve s'appliquera uniquement aux établissements de santé et de services sociaux et non aux résidences privées, aux ressources intermédiaires pour personnes âgées ou handicapées ou aux écoles, comme cela se devrait, selon nous. L'ordre a compris que l'intention du législateur est d'empêcher que la réserve de cette activité s'applique dans certains contextes particuliers, plus précisément dans le cas des interventions policières ou dans des milieux carcéraux. Il souligne cependant que cet objectif pourrait être atteint d'une façon autre.
Concernant le permis de psychothérapeute, l'encadrement de la psychothérapie est discuté depuis une dizaine d'années. L'ordre a toujours favorisé le modèle où la gestion du permis aurait été faite par chacun des ordres habilités. Toutefois, à la suite de l'analyse des avantages et des limites des modèles discutés, il apparaît que celui qui optimise le contrôle de l'exercice de la psychothérapie est celui dans lequel la gestion du permis se fait par un seul ordre, en l'occurrence l'Ordre des psychologues. Ces principes ont été acceptés par les ordres concernés. Il reste cependant des inconnues qui devront faire l'objet de discussions et d'ententes après l'adoption du projet de loi n° 50. Tous les mécanismes de concertation, de collaboration et de communication entre les ordres habilités, l'Ordre des psychologues et le Collège des médecins du Québec devront être définis. De même, la règle de fonctionnement du conseil consultatif interdisciplinaire reste à être entièrement définie afin qu'il puisse jouer le rôle attendu de manière véritablement interdisciplinaire et en assurant l'équilibre entre les professions représentées en son sein. L'ordre insiste sur l'importance que le règlement de l'office établisse clairement ce que ne constitue pas l'exercice de la psychothérapie et qu'il reconnaisse des droits acquis aux professionnels qualifiés qui exercent actuellement la psychothérapie.
En conclusion, l'Ordre des ergothérapeutes du Québec est favorable à l'adoption de ce projet de loi avec des amendements. L'Ordre des ergothérapeutes se réjouit de l'annonce faite par le ministre responsable de la loi à l'effet d'introduire une clause interprétative qui précisera la portée des activités réservées afin d'éviter des interprétations ou des effets non désirés. L'ordre croit que des modifications devraient être apportées au libellé de certaines activités pour en préciser la nature et la finalité, la disposition interprétative ne pouvant pallier à toutes les difficultés d'interprétation d'ailleurs appréhendées par plusieurs acteurs. De la sorte, l'implantation de la loi sera d'autant facilitée et l'application des dispositions législatives conforme à l'esprit de la loi, lequel vise à assurer l'accès à des services de qualité à la population du Québec.
En résumé, les principales recommandations de l'Ordre des ergothérapeutes sont les suivantes: que l'activité d'évaluer une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant, à défaut d'être une activité réservée partagée, soit reformulée afin de préciser qu'il s'agit uniquement de l'évaluation psychosociale de la personne; deuxièmement, que la portée de l'activité visant la décision d'utiliser les mesures de contention et d'isolement ne soit pas limitée aux seuls établissements assujettis par la LSSSS. Et, afin de permettre une application la plus harmonieuse possible du projet de loi n° 50, l'ordre est d'avis que les sexologues, les criminologues et les techniciens en service social ou en travail social devraient être rapidement intégrés au système professionnel. Il est également d'avis que l'Office des professions du Québec devrait entreprendre l'analyse approfondie de la situation particulière des techniciens en éducation spécialisée aux fins de statuer sur leur intégration dans le système professionnel, et ce, en collaboration avec tous les ordres concernés, dont l'Ordre des ergothérapeutes, et les autres acteurs impliqués. Nous saluons les remarques préliminaires qui nous indiquaient que des travaux en ce sens seraient menés à court terme. Alors, je vous remercie beaucoup de votre attention.
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, Mme la présidente. Donc, sans plus tarder, je vais me tourner vers le ministre pour le premier bloc d'échange. M. le ministre.
M. Dupuis: Bien, Mme Rollin, Mme Tremblay, merci beaucoup de la présentation et du travail que vous avez mis à travailler le mémoire que vous nous présentez. Vous étiez dans la salle, ce matin, je pense, parce que, je le vois, vous avez adapté votre présentation à un certain nombre de discussions qu'on a eues ce matin. Moi, je veux simplement ajouter à ce que j'ai déjà dit, que, pour ce qui nous concerne, on n'a pas l'intention de mettre de bâtons dans les roues. Les demandes que vous faites, on va les regarder, là, avec ouverture d'esprit. Je ne peux pas vous donner de réponse sur les précisions que vous demandez dans le libellé d'un certain nombre d'articles aujourd'hui. Si je pouvais le faire, je le ferais avec plaisir, mais je ne peux pas le faire aujourd'hui, les gens vont regarder ça, vont nous aviser.
Pour ce qui concerne le guide, je suis parfaitement conscient que la clause interprétative... Ça, je vous le dis, là, il va y avoir un papillon. On va en discuter avec les oppositions, on va en discuter avec vous autres, mais il va y avoir... De toute façon, vous en connaissez pas mal le libellé, de la clause interprétative, j'ai vu ça ce matin. Ça, ça va être un papillon dans le projet de loi, donc vous allez avoir satisfaction là-dessus rapidement.
Pour ce qui concerne le guide explicatif, après consultation lors de l'ajournement et tôt cet après-midi... J'hésite toujours à donner une échéance parce qu'un ministre qui donne une échéance puis qui ne la rencontre pas, c'est un ministre qui manque le bateau. Mais je peux vous dire que ça va se faire très rapidement, là, le guide explicatif. Évidemment, il faut que le projet de loi soit adopté. Je m'attends à ce qu'il y ait le concours des gens de l'opposition pour adopter le projet de loi. Je ne pense pas qu'on va se chicaner beaucoup, beaucoup, beaucoup sur ce projet de loi là. Donc, le guide explicatif, là, les gens de l'office vont travailler avec célérité, avec vous, avez célérité et avec vous ? je parle des ordres professionnels ? pour que ce soit prêt le plus rapidement possible, sans donner de temps, mais que ce soit prêt le plus rapidement possible.
n(14 h 20)n Pour ce qui concerne votre demande au sujet des criminologues, des sexologues, vous avez entendu ce matin, un mandat est donné à l'office. Là aussi, ça va être travaillé avec célérité, et pour ce qui concerne les techniciens aussi. On m'avait sensibilisé à la crainte, à la demande et à vos représentations sur toute la question des techniciens ? de vous; je parle de vous, les ergothérapeutes, mais vous, les ordres professionnels; je m'adresse un peu à tout le monde. L'unanimité est trop belle pour que je cherche à... pour que j'essaie de faire des différences entre les ordres. On m'avait parlé de cette question-là. Plus je vous entends, plus je réfléchis à l'intérêt, pour les clientèles, à ce qu'il n'y ait pas d'interruption de services, à ce qu'il n'y ait pas de rupture de services. Plus j'apprends à connaître le milieu dans lequel vous travaillez, plus je suis convaincu qu'il faut regarder cette question-là avec beaucoup d'attention. Et là, évidemment, je le dis, cet après-midi, de façon un petit peu égoïste parce que je sais que la CSN est présente dans la salle, qu'ils ont des représentations à faire particulièrement sur ce sujet-là, de même que la fédération, qui va témoigner tantôt, mais c'est quand même quelque chose qu'on va regarder, là, le plus rapidement possible, et on est parfaitement conscients de l'obligation qu'il n'y ait pas d'interruption de services, qu'il n'y ait pas de rupture de services.
Alors, je vous remercie de votre présentation. Comme je le fais d'habitude, je vais, avec la permission de Mme la présidente, lui demander de reconnaître mes collègues ministériels, qui ont des questions à vous poser. Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci, Mme la Présidente. Mme Rollin, Mme Tremblay, je voudrais que vous m'éclairiez un petit peu, là. J'ai eu l'impression, à la lumière de votre mémoire et de votre introduction, que vous étiez satisfaites des dispositions du projet de loi n° 50 mais qu'il y avait comme une zone grise relativement... Les compétences des ergothérapeutes, vous auriez aimé peut-être qu'on aille un petit peu plus loin dans certaines choses. J'aimerais ça juste que vous m'éclairiez, là, parce que ce n'est pas un domaine dans lequel je suis très spécialisé, puis j'ai eu cette impression-là qu'on avait fait une partie du chemin, mais il restait des choses qui n'étaient pas comme claires ou comme définies, là.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, allez-y, Mme la présidente... Oui, c'est ça. Allez-y.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Je pense qu'il faut indiquer que, lorsqu'on a participé aux travaux du comité Trudeau, tout au cours de ces travaux-là, il est vrai qu'on avait l'impression que les compétences des ergothérapeutes, dans ce domaine-là, n'étaient pas pleinement reconnues.
Je donne un exemple, des fois c'est ce qui est le plus simple. Vous avez entendu, ce matin, des gens dire que, pour certains, ils vont être autorisés à pouvoir évaluer les troubles mentaux moyennant le fait que leur ordre va adopter un règlement ou une clause de formation continue obligatoire. Notre ordre aurait aimé pouvoir bénéficier de cela, étant donné qu'on a des ergothérapeutes, comme on a dit ce matin, qui vont être des psychothérapeutes. Ce sont des gens qui ont les compétences actuellement pour pouvoir évaluer les troubles mentaux, mais ce n'est pas la majorité des membres. Donc, on aurait aimé avoir l'option de cela. Nous ne l'avons pas eue et, quand le projet de loi arrive, nous n'y apparaissons pas.
Mais ça, on a accepté ce volet-là puisqu'il y a eu tout un travail, et ça a été bien dit également ce matin, où le consensus, ce n'est pas de croire tous exactement la même chose sur tout mais de dire: La protection du public doit avoir préséance. C'est un domaine complexe, le domaine de la santé mentale, et on a mis de côté certains volets où on aurait cru que certaines expertises auraient pu être davantage mises de l'avant au profit de l'objectif d'avoir un projet de loi sur le domaine santé mentale-relations humaines. Donc, il y a ça.
Je dirais, dans un deuxième temps, que, par rapport au projet de loi lui-même, si on pense à l'activité où on parle de l'évaluation, dans le cas d'évaluer une personne en vue de juger si elle inapte ou pas, tel que libellé, pour nous, on ne trouve pas que c'est satisfaisant. On dit: Si on choisit de réserver cette activité-là aux seuls travailleurs sociaux, elle devrait être précisée, l'évaluation, et dire que c'est l'évaluation psychosociale qui l'est, réservée.
Donc, à certains endroits, on peut vivre très bien avec le fait que certaines recommandations du comité Trudeau n'étaient pas telles qu'on l'aurait souhaité. Par contre, par rapport au projet de loi, il y avait quelques demandes très particulières qu'on vous a adressées ce midi.
M. Ouellette: Donc, après avoir écouté Mme Charest ce matin ? elle nous parlait avec passion de son ordre puis de ce qui la préoccupait, là ? vous devez être quand même rassurées suite aux modalités qui ont été énoncées par rapport à l'Ordre des psychologues. Dans l'activité réservée de l'évaluation des troubles neuropsychologiques, là, ça a dû, à un moment donné, vous rejoindre à un certain niveau, là, ce que Mme Charest nous disait ce matin.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Ça a fait partie des discussions antérieures à l'effet que les deux ordres se sont engagés à clarifier, au bénéfice non seulement de leurs membres respectifs, mais des gestionnaires et de tous ceux qui vont travailler à partir de ce nouvel encadrement du système professionnel, clarifier ces notions-là. Tel que je le disais, le rapport Trudeau indique clairement que les ergothérapeutes effectuent des évaluations des fonctions mentales supérieures mais à des finalités différentes et que l'évaluation de l'ergothérapeute des fonctions mentales supérieures peut être complémentaire de l'évaluation des troubles neuropsychologiques. Donc, il va falloir que nos documents conjoints ou respectifs indiquent clairement quelles sont les balises ? et, comme on le disait ce matin, il y a des zones communes ? et clarifier cela.
La Présidente (Mme Thériault): Ça va, M. le député de Chomedey?
M. Ouellette: Oui, madame.
La Présidente (Mme Thériault): Oui? M. le député de Robert-Baldwin.
M. Marsan: Merci, Mme la Présidente. Et merci à vous, Mme Rollin, Mme Tremblay, merci de votre excellente présentation.
Moi, je regardais... ou je reviens plutôt au niveau des permis des psychothérapeutes. Vous avez entendu, ce matin, ce que l'Ordre des psychologues nous a dit, et je voulais savoir si vous êtes un peu ou passablement satisfaites de l'encadrement qui pourrait être donné par les psychologues à cette fonction. Et je voudrais vous demander, parce que vous nous dites... Dans votre mémoire, vous parlez ? je suis obligé de mettre mes lunettes: Les principes du modèle qui ont été acceptés par les ordres concernés... mais il reste encore beaucoup d'inconnues, et j'aimerais ça que vous nous parliez de ces inconnues-là. Vous parlez surtout après l'adoption de la loi n° 50.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Donc, c'est sûr que notre ordre participe, depuis au-delà d'une quinzaine d'années, à toutes les tables qui ont eu lieu autour de la psychothérapie, et, au cours des années, il y a eu plusieurs modèles qui ont été mis de l'avant. Un modèle a souvent des avantages et des inconvénients. Le modèle qui est actuellement retenu aurait pu être différent de celui qui nous est présenté, mais il y avait certainement beaucoup d'avantages avec ce modèle-là.
Nous avons participé, tout au long des travaux autant du comité Trudeau que par la suite des travaux entre l'Office des professions et les six ordres concernés, à définir quelles seraient, là, les modalités d'application, donc quelles seraient les compétences à retenir pour être psychothérapeute. Ça, c'est très documenté. Ce qui est moins documenté est vraiment les mécanismes parce que ça ne s'est pas vu, hein? C'est un modèle unique et un modèle innovateur que de nos membres détiendront un permis décerné, géré et suspendu, le cas échéant, par un autre ordre. C'est un modèle qui est innovateur pour faire face à des situations qui sont complexes. Donc, c'est dans le modèle d'application des interfaces entre deux ordres par rapport à des professionnels et comment les mécanismes du système professionnel ? inspection, discipline, enquête du syndic ? vont-elles se jouer par rapport au fait que nos membres qui seront des psychothérapeutes, ergothérapeutes... Ces gens-là auront à être gérés, si on peut dire, par deux ordres différents. C'est dans ce sens-là, les inconnues dont on parle.
M. Marsan: Et ça ne vous fait pas peur?
Mme Rollin (Françoise): J'ai confiance.
M. Marsan: C'est ça.
Mme Rollin (Françoise): J'ai confiance parce que ça a été...
M. Marsan: Vous avez fait un bon bout de chemin ensemble, vous êtes capables d'en faire un autre encore.
n(14 h 30)nMme Rollin (Françoise): Oui. Je crois que ça a été bien soulevé. Il y a eu des années où on a eu à travailler ensemble, partager la compréhension commune de l'interprétation des activités, également comment ça se vivrait au quotidien par nos membres qui sont sur le terrain et qui travaillent... Les ergothérapeutes travaillent en grande majorité en équipes interdisciplinaires, pour ceux qui ne sont pas en pratique privée. Donc, c'est tout cet apprivoisement de mieux connaître l'autre et le respecter. Je dirais qu'on a confiance qu'on va trouver dans le domaine qui va devoir travailler ces mécanismes de concertation là, et avec le conseil.
Vous savez, il y aura un conseil consultatif interdisciplinaire qui sera utilisé par les représentants de l'office qui ont un règlement à mettre de l'avant. Alors, ce comité-là va également... C'est un comité aviseur à l'Ordre des psychologues, mais ce comité-là pourra apporter les ressources et l'expertise des différentes disciplines impliquées. On a confiance.
M. Marsan: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault): C'est beau? Merci. Donc, nous allons aller du côté de l'opposition officielle. C'est au tour du député de Saint-Hyacinthe, maintenant. M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Rollin. Bonjour, madame. Merci de venir éclairer la commission parlementaire.
Remarquez que je lisais votre mémoire, et il y a longtemps quand même que vous travaillez à cette étude-là. Je voyais même des documents que vous avez présentés. Je pense que vous avez été très impliquées au niveau du projet de loi n° 90, et vous avez eu à vivre aussi le projet de loi n° 50... et vous vivez le projet de loi n° 50.
D'entrée de jeu, au niveau du projet de loi n° 50, je voudrais simplement que vous nous fassiez un petit peu le parallèle que vous avez vécu, parce que je pense que vous l'avez vécu, dans l'application du projet de loi n° 90 au niveau de... en fait l'interdisciplinaire, si je peux m'exprimer comme ça, ou les relations qui existaient avec les ergothérapeutes et avec d'autres ordres professionnels, comment s'est vécue cette période-là d'adaptation au niveau de l'application du projet de loi n° 90. Et est-ce que vous pensez que cette adaptation-là peut vivre avec ce que vous lisez dans le projet de loi n° 50, peut vivre en fait de la même façon, peut revivre en fait cette expérience-là du projet de loi n° 90?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Le projet de loi n° 90, lorsqu'il a été adopté en juin 2002, n'est pas entré en vigueur tout de suite pour les ergothérapeutes, il est entré en vigueur six mois plus tard pour un certain nombre de professions parmi les 11 professions qui étaient visées, et, dans notre cas, il est entré en vigueur une année après, donc en juin 2003. Donc, durant cette période-là ? on le mentionnait aujourd'hui, c'est très important que l'information soit communiquée ? nous, pendant cette période-là, il y a un certain nombre de personnes qui se seraient qualifiées à notre ordre mais qui avaient opté pour ne pas appartenir à l'ordre antérieurement. Donc, ces gens-là, dans certains cas, travaillaient, pour la plupart, et là devaient redemander leur admission à l'ordre. Donc, ça a permis, à notre niveau à nous, de faire nos devoirs pour être prêts à accueillir ces personnes-là.
Vous posez la question par rapport au lien avec les autres ordres. Vous avez raison, on a eu plusieurs rencontres, dans ce temps-là, avec notamment l'ordre... Dans le temps, c'était l'Ordre professionnel des physiothérapeutes, qui est devenu l'Ordre professionnel de la physiothérapie parce que, vous le savez, l'activité réservée doit être interprétée en fonction du champ. Je vous donne un exemple concret: les ergothérapeutes partagent, notamment avec les physiothérapeutes, l'évaluation neuromusculosquelettique pour certaines clientèles. Alors, il a fallu s'expliquer mutuellement qu'est-ce qu'on concevait que ça voulait dire comme activité professionnelle posée au quotidien, à l'intérieur de leur champ d'exercice, qu'est-ce que ça peut vouloir dire, à l'intérieur de notre champ d'exercice, qu'est-ce que ça peut vouloir dire.
Mais nous n'avons pas eu uniquement des contacts avec des membres de d'autres ordres, on a eu des groupes qui sont venus nous voir. On a eu des gens qui croyaient que leur activité professionnelle pouvait être en interface avec une des activités «labellées» puis venaient nous voir en disant: Est-ce que vous allez concevoir que ce que, nous, on fait risquerait d'être une pratique illégale, et tout ça? Donc, il fallait s'expliquer les uns les autres ce qu'on concevait.
M. L'Écuyer: Merci, madame.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, allez-y, M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Vous étiez présentes ce matin lorsque l'Ordre des psychologues a abordé ce qu'ils ont qualifié «appelés à travailler en complémentarité [pour le] bénéfice de la clientèle qu'ils desservent, d'intervenir dans les limites des activités qui leur sont réservées selon la finalité propre à chaque profession». Alors, c'est un travail, je pense, en collégialité ou en complémentarité. Cependant, vous sembliez, dans... vous semblez, dans votre mémoire, en fait, invoquer peut-être qu'effectivement vous auriez aimé qu'en fait l'évaluation neurologique, neuropsychologique vous soit un peu plus reconnue ou qu'on vous reconnaisse un peu plus dans cette intervention-là.
Alors, comment voyez-vous justement, dans la vie de tous les jours, cette implication-là des ergothérapeutes versus les psychologues ou avec les autres ordres professionnels lorsqu'on est en contact direct avec une personne ou un être qui a besoin de votre aide?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Je vais préciser au niveau de la finalité de notre champ d'exercice et je demanderais à Mme Tremblay de compléter peut-être avec un exemple en réponse à votre question.
La finalité du champ de notre profession, c'est de favoriser l'autonomie optimale. Mais ce qu'il faut se rappeler, c'est que les ergothérapeutes évaluent les habiletés fonctionnelles d'une personne. Les habiletés fonctionnelles, si on veut rendre ça plus compréhensible et facilitant, c'est des aptitudes d'une personne dans son fonctionnement physique mais également dans son fonctionnement cognitif et social. Donc, c'est de s'assurer que, cette personne-là, on en fait le tour au plan sensorimoteur, perceptif, cognitif pour être capable, dans la vie de tous les jours, d'évaluer leurs habitudes de vie et juger de leur performance dans ces habitudes de vie, à savoir: Est-ce qu'ils peuvent prendre soin d'eux-mêmes et être indépendants, administrer leurs biens, et tout ça?
Donc, les clientèles qu'on voit ? et ça, on l'a expliqué au comité Trudeau dès le départ quand on parlait d'évaluation de troubles mentaux ou de troubles neuropsychologiques ? on ne s'adresse pas, en ergothérapie, uniquement aux clientèles de santé mentale. Si on intervient ? on en parlait ce matin ? avec des personnes qui ont la sclérose en plaques ou des personnes qui ont eu un traumatisme crânien, des personnes qui ont fait un accident vasculocérébral, ces personnes-là ont eu des fonctions atteintes à d'autres niveaux, et, lorsqu'on intervient auprès de ces personnes-là, on se doit d'évaluer leurs fonctions mentales supérieures afin de pouvoir établir le plan d'intervention avec ces personnes-là.
Je vais demander à Mme Tremblay peut-être d'aller plus... avec un exemple.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, Mme Tremblay, allez-y.
Mme Tremblay (Louise): Merci. Oui, les exemples sont toujours parlants, beaucoup plus parlants que de décrire un champ d'exercice. Je vais vous donner l'exemple d'une personne qui peut souffrir d'une maladie bipolaire, puis on peut faire exactement le même exercice avec une personne qui aurait subi un traumatisme craniocérébral. Ses habitudes de vie comprennent évidemment un emploi. Alors, prenons un exemple d'un emploi comme technicien en électronique ? il n'y a personne qui est visé ici, c'est bien; oups! peut-être monsieur; oh! je m'excuse ? et aussi qui voudrait également avoir ses activités de loisirs, ses activités de loisirs qui pourraient être, par exemple, chasser à l'arc. Alors, en ergothérapie, on va analyser quelles sont les composantes de l'habitude de vie, que requiert comme aptitudes, au plan cognitif, au plan moteur, au plan comportement, que requiert l'activité courante de technicien en électronique, de même qu'on va analyser qu'est-ce que ça prend pour chasser à l'arc de manière sécuritaire pour tout le monde autour; peut-être pas pour l'animal, mais certainement pour les personnes.
Alors, à ce moment-là, il s'agit de faire le lien entre l'exigence de la tâche et ce que la personne a comme capacités optimales. Alors, un ergothérapeute, au niveau de la réadaptation, par exemple, va travailler à récupérer, à faire récupérer des fonctions, mais, à un moment donné, peut-être que ça s'arrête là, et il faut, à ce moment-là, trouver les moyens compensatoires pour permettre à la personne de poursuivre ses activités en modifiant des fois l'environnement pour lui permettre de continuer l'activité ou en modifiant des fois la façon de faire l'activité. En gros, ça ressemble à ça, l'intervention en ergothérapie, ce qui fait que, pour une personne, par exemple, qui souffrirait de dépression persistante et qui se trouve à avoir des difficultés dans l'exercice de ses habitudes de vie, l'ergothérapeute va intervenir à ce niveau-là autant que, par exemple, en santé physique pour une personne qui a une sclérose en plaques, pour une personne qui a eu un traumatisme crânien.
Peut-être que ça vous éclaire un petit peu plus, là, sur notre intervention, et donc d'où l'importance de procéder à l'évaluation des fonctions mentales supérieures comme à d'autres types de fonctions.
n(14 h 40)nM. Dupuis: Et le spécialiste en électronique arrive.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Tremblay (Louise): Ce n'était vraiment pas voulu, hein, j'y ai pensé juste après.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Thériault): Il n'y a pas de problème. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. L'Écuyer: Toujours en rapport avec vos propos, tout à l'heure, lors de votre premier volet, votre premier jet d'intervention, vous avez quand même, au niveau de... Les troubles neuropsychologiques, si je regarde la complémentarité ? je reviens à cet exercice-là ? qui se joue avec les psychologues, en fait qui s'est vue auprès des psychologues, est-ce que vous êtes ? comment je pourrais dire? ? en autorité ou en relation égal à égal avec le psychologue au niveau du traitement? Comment ça se traduit dans les faits, dans tous les jours de votre intervention, avec la relation psychologue et ergothérapeute? Est-ce que collégialement vous travaillez en disant: J'ai une clientèle ou un client qui a tel ou tel symptôme, je travaille avec ce client-là, et vous arrivez avec un plan d'intervention conjoint? Est-ce que vous pouvez quand même m'éclairer sur cette façon-là d'agir?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Les ergothérapeutes ne travaillent pas sous supervision des psychologues, ils travaillent vraiment, comme vous le dites, au sein d'une équipe où ils sont des collègues à part entière, ainsi que les autres membres de l'équipe interdisciplinaire, que ce soient des orthophonistes, des infirmières, des travailleurs sociaux. Alors, ce sont des professionnels autonomes redevables et imputables de leur activité.
Alors, au niveau de l'évaluation des fonctions neuropsychologiques, ce que, nous, on avait demandé à l'époque au comité Trudeau, on disait: Si vous voulez, réservez aux psychologues habilités l'évaluation neuropsychologique quand on appelle la batterie de tests qui va déterminer de quelle lésion cérébrale s'agit-il. Nous, on leur recommandait de réserver l'évaluation neuropsychologique et non pas l'évaluation des troubles neuropsychologiques puisque plusieurs professionnels interviennent au niveau des troubles neuropsychologiques. On trouvait que c'était une définition qui risquait d'être interprétable, comme je le disais tantôt, parce que qu'est-ce que nous allons appeler troubles neuropsychologiques versus troubles cognitifs, versus fonctions mentales supérieures, ce n'est pas évident.
Alors, nous demandions que le libellé soit formulé soit pour inclure la finalité ou la nature de cette évaluation-là ou de la nommer évaluation neuropsychologique et non pas évaluation des troubles neuropsychologiques. Ce n'est pas ce qui a été retenu, d'où le fait que, dans mon intervention, j'expliquais que ce sera très important que des textes documentent de quelle façon l'un agit, de quelle façon l'autre agit et où sommes-nous complémentaires pour certaines clientèles, parce que, nous, on croit que l'évaluation de l'ergothérapeute, dans des situations concrètes d'application, est importante pour aider à contribuer à l'identification du trouble lui-même.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député, il vous reste environ deux minutes.
M. L'Écuyer: Une question quand même concernant... Dans le milieu de travail, au niveau de l'emploi, vous avez quand même exprimé qu'il y avait une évaluation potentielle que vous aimeriez avoir dans votre champ d'activité, et j'aimerais quand même que vous précisiez davantage ce point-là pour qu'on puisse quand même évoluer très progressivement dans ce peut-être amendement futur.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): Merci. Quand on parle des secteurs d'habileté fonctionnelle dans lesquels les ergothérapeutes évaluent et interviennent dans le cadre de l'autonomie d'une personne, on parle notamment des soins personnels, des loisirs ainsi que du travail. Donc, un très, très grand nombre de nos ergothérapeutes travaillent pour l'évaluation des capacités au travail. Donc, les gens travaillent soit pour le bénéfice de clientèles... J'en ai fait moi-même pendant plusieurs années, intervenir auprès de personnes en réadaptation professionnelle pour le traitement, que ce soit au niveau de la force, de la tolérance, évaluer: Est-ce que l'individu peut retourner à son travail, avec ou pas d'adaptation à son poste de travail? Et notamment ici on est dans un secteur où on parle des clientèles de santé mentale. C'est la même chose. Lorsqu'une personne a eu une incapacité de travail, était à l'extérieur du travail et subitement se sent mieux mais doit reprendre un travail à raison de sept heures par jour, on doit retravailler avec cet individu-là, analyser ce qu'il fait et voir à augmenter sa tolérance, sa capacité, sa concentration, sa sociabilité pour reprendre et répondre aux exigences du travail. Alors, autant en santé physique qu'en santé mentale, le secteur de la réadaptation professionnelle, comme nous l'appelons, est très, très présent chez des centaines de nos ergothérapeutes.
La Présidente (Mme Thériault): Merci.
M. L'Écuyer: ...Mme Tremblay.
La Présidente (Mme Thériault): Cela mettra fin aux échanges avec l'opposition officielle. Donc, je me tourne maintenant vers le député de Dubuc, porte-parole du deuxième groupe de l'opposition, pour une période de 13 minutes.
M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Rollin, Mme Tremblay, bienvenue. Merci pour votre mémoire.
Je voudrais revenir sur l'évaluation des troubles neuropsychologiques. Vous avez un engagement formel de la part de l'Ordre des psychologues, qui ont pris un engagement pour définir la nature et la finalité, là, de l'évaluation. Naturellement, cet engagement-là n'est pas dans le projet de loi, c'est un engagement de l'Ordre des psychologues.
Advenant le cas où cet engagement n'était pas respecté, quelle serait votre position? Est-ce que pour vous c'est un engagement qui doit absolument se concrétiser? S'il ne se concrétise pas, ça pourrait mettre en péril le consensus que vous avez accordé aux négociations qu'il y a eu suite au rapport Trudeau?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
Mme Rollin (Françoise): D'une part, nous, on demeure très confiants que la clarification va se faire, et pour nous, évidemment, avec la clause interprétative, dont on nous parle, qu'il y aura d'ajoutée au projet de loi, c'est une garantie supplémentaire à l'effet que nos membres, lorsqu'ils seront dans leur activité professionnelle, pourront ne pas être empêchés d'agir dans ces catégories-là. Parce que, les psychologues dits habilités, il y en a un certain nombre et il y en aura peut-être plus aussi dans l'avenir, mais on ne les compte pas en termes de centaines, et de centaines, et de centaines, alors que l'évaluation doit se faire de clientèles qui sont en soins de longue durée, qui ont des problèmes cognitifs pour lesquels également on doit apporter une évaluation des habiletés fonctionnelles même lorsqu'on est dans le cadre où c'est considéré de faire l'évaluation de l'inaptitude de ces clientèles-là.
Alors, nous, on croit que ce sera précisé dans nos documents explicatifs et qu'on pourra, là, à partir des besoins de la clientèle ? c'est ce qui nous préoccupe le plus ? et pour l'accessibilité compétente, on pourra éclaircir la contribution et les balises de chacun.
M. Côté: Merci. Lorsque vous parlez de l'activité réservée d'évaluer une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat donné en prévision de l'inaptitude du mandant, j'aimerais que vous nous donniez un petit peu comment ça fonctionne, parce que, le mandant qui donne un mandat d'inaptitude, qui donne un mandat en cas d'inaptitude à quelqu'un, il faut qu'il soit dans le réseau de la santé, j'imagine, la personne qui... Parce qu'évaluer l'aptitude du mandant, c'est celui qui donne le mandat. C'est ça? C'est bien ça?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
M. Côté: Parce que le mandat en cas d'inaptitude... Parce que, moi, je suis notaire de profession puis, des mandats en cas d'inaptitude, je ne sais pas si de c'est ça que vous parlez, j'en ai fait. J'en ai fait plusieurs. Mais ça ne s'applique pas pour moi, là, ça s'applique pour ceux qui sont dans le domaine de la santé, j'imagine, qui sont dans des résidences pour personnes âgées, qui sont dans des hôpitaux, qui sont sur des soins prolongés, pour les soins prolongés. C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, Mme Rollin.
M. Côté: Comment ça va fonctionner?
Mme Rollin (Françoise): Je demanderais à Mme Tremblay peut-être de répondre. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): À Mme Tremblay? Certainement. Mme Tremblay.
n(14 h 50)nMme Tremblay (Louise): Oui. Merci. Alors, bien sûr, ici on parle de l'évaluation de l'inaptitude. Lorsque, comme notaire, vous... vous écrivez un mandat en cas de l'inaptitude, mais la question vient dans le domaine de la santé, au moment où, la personne, on a des doutes sur son aptitude, et donc là il y a une évaluation qui comporte, selon le... Pour le bureau du Curateur public, là, dans le Code civil, on parle d'une évaluation médicale et d'une évaluation psychosociale. Et l'ergothérapeute intervient beaucoup, parce qu'on est dans les habiletés fonctionnelles, intervient, fait son évaluation: Est-ce que la personne, elle est capable de prendre une décision réelle qui... Parce qu'on comprendra que l'inaptitude, c'est une perte totale de droits, alors donc c'est un risque de préjudice énorme. Et l'évaluation de l'inaptitude ne se résume pas à un diagnostic médical non plus qu'à une évaluation neuropsychologique, non plus qu'à l'évaluation du fonctionnement social, c'est...
Tantôt, je pense que c'est ce matin, je crois que c'est vous, M. Côté, qui vous interrogiez c'était quoi, entre autres, l'évaluation médicale et psychosociale. C'est à ce niveau-là que l'intervention de l'ergothérapeute se fait, c'est-à-dire: Quelles sont les aptitudes de la personne? Est-ce qu'elle est capable de comprendre les décisions qu'elle a à prendre, sans égard au fait que peut-être qu'on est... sans égard à nos propres croyances sur les... que ça devrait être une bonne ou une mauvaise décision? Mais c'est vraiment, donc, les fonctions cognitives, les fonctions exécutives et comment ? et c'est là qu'est le propre de l'ergothérapie ? ça se traduit dans les faits, dans son environnement, à cette personne-là, comment peut-elle arriver à prendre... le degré de l'inaptitude, comment arriver à prendre des décisions ou la nature des décisions qu'elle a à prendre. Est-elle apte ou inapte? C'est différent, être capable de s'occuper de sa personne, de prendre des décisions sur est-ce que je devrais subir une chirurgie, par exemple, et avoir des atteintes, des atteintes cognitives telles que, par exemple, si vous êtes multimillionnaire et que vous avez beaucoup de placements, de biens, etc. Ça ne demande pas la même chose, comme décision, pour ça que pour décider, par exemple, d'où on veut habiter.
Alors, toutes ces nuances-là doivent transparaître par l'évaluation de l'inaptitude, et il est peut-être compris habituellement, là, il est peut-être compris que, dans le cadre de l'évaluation médicale, l'évaluation en ergothérapie s'inscrit très souvent... Elle n'est jamais nommée, là, mais elle est partie intégrante de l'évaluation de l'inaptitude dans beaucoup de cas. Je ne dis pas dans tous les cas, parce qu'il y a des fois où ce n'est pas approprié, mais, lorsque c'est approprié, c'est là que le rôle de l'ergothérapeute est important.
M. Côté: J'espère que je ne dirai pas d'hérésie, là, mais je vais essayer d'aller plus loin, vous donner un exemple pratique, puis vous me direz si j'ai raison ou pas. On est dans une résidence pour personnes âgées. L'infirmière vient assez régulièrement visiter les usagers et elle constate qu'une personne âgée, par exemple, commence à être atteinte d'Alzheimer, hein? C'est une maladie qui n'est pas rare mais qui est assez fréquente également chez les personnes âgées. Donc, elle va à l'hôpital, au centre hospitalier de la ville, elle rencontre l'ergothérapeute. Puis, elle lui dit: J'aimerais ça que tu viennes au foyer, j'ai une personne qui commence à être un peu affectée par la maladie d'Alzheimer. J'aimerais ça que tu viennes l'évaluer. Si ce n'est pas ça, vous me le direz après. Alors, l'ergothérapeute se rend à la résidence, évalue la personne âgée et effectivement elle s'aperçoit que la personne n'a plus les capacités intellectuelles pour décider elle-même des choses qu'elle devrait faire, comme vous avez dit tantôt, s'occuper de ses affaires, etc. Bon.
À ce moment-là, l'ergothérapeute a-t-il l'obligation d'avertir les proches de la famille, par exemple les enfants, pour dire: Écoutez, votre mère ne pourra jamais signer un mandat en cas d'inaptitude parce qu'elle n'est plus capable, elle souffre de la maladie d'Alzheimer, donc, si jamais elle devient inapte complètement, ce sera la curatelle privée, la curatelle publique ou la curatelle privée, un régime de protection sous curatelle qui devra être prescrit pour cette personne? Est-ce que j'ai raison?
La Présidente (Mme Thériault): ...Desjardins... Tremblay, pardon. Excusez-moi.
Mme Tremblay (Louise): Bien, c'est un petit peu plus... Bien oui, je suis obligée de dire: C'est oui et non, dans le sens où c'est beaucoup plus complexe que ça. On ne va pas se... Il n'y a pas personne qui... C'est toujours dans... Habituellement, la question de l'inaptitude se pose lorsqu'il y a certaines évidences ou il y a un consentement qui est requis, et là où on met en doute l'aptitude d'une personne.
La plupart du temps, les ergothérapeutes ? je prends pour les personnes qui vivent à domicile ? les ergothérapeutes qui travaillent en CLSC, qui sont très, très, très nombreuses, vont être impliquées auprès d'une clientèle âgée ? parce que vous prenez l'exemple d'une personne âgée ? qui est en perte d'autonomie, et là il y a toute la question de la capacité de vivre à domicile. Quel est le soutien que les aidants naturels... Ou l'assistance qui est offerte par le CLSC peut être offerte. Et ce n'est pas quelque chose qui est subit, c'est quelque chose qui arrive progressivement, là. C'est différent, cette situation-là d'une personne âgée, d'une personne qui subit un accident, un traumatisme craniocérébral ou un accident vasculaire cérébral, qui est un événement subit. Là, la maladie d'Alzheimer, ça s'installe tranquillement. Ce n'est pas nécessaire de déclarer une personne inapte lorsque tout son environnement supplée à ses besoins sans que la personne soit abusée. Et c'est là que ça reste qu'une évaluation de l'inaptitude, c'est une intervention pluridisciplinaire, parce qu'il n'y a pas une seule discipline qui à elle seule peut dire: Je suis capable de trancher sur: voici, la personne est apte ou elle est inapte. Parce que, moi, comme ergothérapeute, ma spécificité va être d'intervenir, plus de voir: Comment la personne est-elle en mesure de prendre certaines décisions dans un contexte? Mais, tout le réseau social, c'est effectivement le travailleur social qui est en mesure d'évaluer ça, et, le diagnostic, c'est le médecin qui pose le diagnostic. Alors, c'est beaucoup plus interdisciplinaire que ça.
M. Côté: C'est ce que vous appelez le courant nord-américain.
Mme Tremblay (Louise): Oui, oui, parce que le courant... Oui, effectivement. La littérature est orientée vers ça, vers l'intervention multidisciplinaire et envers aussi la reconnaissance. C'est plus une activité partagée, si on prend l'exemple de l'Ontario ? je pense qu'ils l'indiquaient dans le mémoire ? où, en Ontario, c'est une activité qui est réservée en partage à différents membres d'ordre professionnel, dont les travailleurs sociaux, les ergothérapeutes, les infirmières, les psychologues. Si j'en oublie, je m'en excuse.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. Côté: Merci. Mme la Présidente, quelques minutes? Encore une question?
La Présidente (Mme Thériault): ...de quatre minutes?
M. Côté: Oui. J'aimerais peut-être, Mme la présidente, Mme Rollin, que vous me donniez peut-être une définition. Qu'est-ce que c'est qu'un technicien en éducation spécialisée?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin.
M. Côté: Parce que vous dites, dans votre mémoire, que vous êtes d'avis que l'Office des professions doit entreprendre l'analyse approfondie de la situation particulière des techniciens en éducation spécialisée aux fins de statuer sur leur intégration dans le système professionnel.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Rollin, vous avez...
M. Dupuis: Ça allait bien, jusque-là.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Thériault): ...vous avez trois minutes pour répondre à cette question.
M. Dupuis: Alors... pour répondre à la question.
Mme Rollin (Françoise): Non, le technicien en éducation spécialisée, je sais qu'au niveau des conventions collectives il y a plusieurs niveaux. Plusieurs groupes de personnes peuvent avoir ce titre d'emploi là soit parce qu'ils ont complété leur formation collégiale en éducation spécialisée, ou soit par expérience, ou d'autres formations peuvent les qualifier pour un titre d'emploi comme celui-là.
Nous, au niveau de l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, la raison pour laquelle nous demandons d'être impliqués dans les discussions, c'est que nous travaillons actuellement avec des personnes comme ces techniciens-là mais également comme des techniciens en loisirs, des techniciens en orthèses-prothèses, des techniciens en éducation de petite enfance. Nous travaillons souvent dans un modèle pour que les compétences, l'expertise, les ressources professionnelles soient maximisées.
Alors, nous avons développé, à l'ordre, des lignes directrices pour nos membres pour évaluer: À quels moments, dans quelles circonstances, pour quelle clientèle est-ce utile qu'on partage certaines activités professionnelles en termes de... le service d'ergothérapie donné aux individus? Alors, afin de mieux connaître l'expertise de ces gens-là, nous nous sommes penchés pour voir: Est-ce que leur formation les habilitait à être des personnes avec lesquelles on peut travailler pour faire une offre de services d'ergothérapie plus large? Et notre réponse a été positive, d'où le fait qu'on a fait, avec des associations d'employeurs, plusieurs projets pilotes dans ce cadre-là.
Et on sait qu'ils interviennent souvent comme une ressource complémentaire au niveau des traitements que nous donnons. Ils ont leurs interventions comme éducateurs spécialisés, mais ils peuvent aussi être une ressource dans certains milieux, lorsque c'est à propos, pour soutenir nos interventions, que ce soit dans la généralisation des acquis... Lorsqu'on fait de l'entraînement, admettons, au transport, l'ergothérapeute peut avoir évalué les capacités de l'individu, mais, s'il faut le faire quatre fois avec l'individu, cette expérience-là, ça n'a pas besoin que ce soit l'ergothérapeute qui la fasse. Donc, Donc, c'est dans ce sens-là, monsieur.
La Présidente (Mme Thériault): Et c'est tout le temps qu'on avait. Donc, je vous remercie beaucoup, Mme Rollin et Mme Tremblay, de votre présence en commission.
Nous allons suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place, soit l'Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec.
(Suspension de la séance à 15 heures)
(Reprise à 15 h 2)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la commission va poursuivre ses travaux, et nous recevons l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Nous avons la présidente, Mme Gyslaine Desrosiers, qui est avec nous. Donc, bienvenue à l'Assemblée nationale. Vous êtes une habituée des commissions parlementaires. Je vais vous demander, comme à l'habitude, de nous présenter les gens qui vous accompagnent, et vous avez une quinzaine de minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Bienvenue.
Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec (OIIQ)
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, merci, Mme la Présidente. Je suis accompagnée de Carole Mercier, qui est secrétaire générale par intérim de notre ordre; à l'extrême gauche, j'ai France Laflamme, qui est infirmière experte, qui siégeait sur le comité Trudeau et qui est également infirmière-conseil à l'Ordre des infirmières et...
Une voix: Donc, c'est de sa faute.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, on va... Bien, non, mais on va vous expliquer ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Desrosiers (Gyslaine): N'anticipons pas trop. Donc, et Me D'Anjou, ici, à ma droite, qui est l'avocate au dossier.
Donc, d'entrée de jeu, je remercie la commission pour nous donner l'occasion d'exprimer notre compréhension du projet de loi et l'importance de ce projet de loi là. Je rappelle à la commission que nous avons 70 000 infirmières au Québec, dont un peu plus de 4 000 exclusivement dans le domaine de la santé mentale, psychiatrie, puis probablement plus que ça parce qu'il y en a d'autres qui sont en toxicomanie, dépendamment... mais qui déclarent vraiment oeuvrer exclusivement dans ce domaine-là. Plus de 4 000.
Donc, on a devant nous un projet de loi, le projet de loi n° 50, qui est une pièce à notre avis législative très importante et qui était très attendue, et nous nous sommes impliqués beaucoup, avec les autres ordres, à soutenir les travaux autant de la psychothérapie, depuis 15 ans, que les travaux pouvant mener à l'adoption de l'équivalent, si on peut dire, de la loi n° 90 mais applicable aux professions de santé mentale, psychiatrie, et ça devient de plus en plus urgent parce que, tant que les professions de santé mentale, comme les psychologues, les psychoéducateurs, les CO, tous ceux qui finalement n'avaient pas été visés par la loi n° 90... Ça garde une asymétrie, ça fait un groupe qui n'a pas les mêmes privilèges ou les mêmes... leur contribution professionnelle n'est pas protégée par un cadre législatif. Donc, c'est important d'aller au bout de ce processus.
Donc, nous, pour ce qui est de ce qui est sur la table, c'est clair que l'ordre endosse de façon, je dirais, globale le projet de loi, et sa pertinence, et son contenu. Le partage des activités professionnelles données à chacun des groupes, nous, on avait déjà, avec la loi n° 90, l'évaluation de la condition mentale des personnes symptomatiques. Donc, on avait déjà un certain privilège d'exercice qui était déjà reconnu. Mais, pour ce qui est de tout le reste du partage d'activités professionnelles, non seulement ça a fait l'objet d'un consensus, mais ça nous apparaît porteur au niveau de la réorganisation des services, les objectifs du ministre de la Santé d'appliquer son plan d'action en santé mentale.
Vous avez vu que le partage d'activités peut être prometteur aussi d'une collaboration interprofessionnelle plus adéquate, et je pense également que l'élargissement de la possibilité de faire de l'évaluation de troubles mentaux à deux autres professions, autres que celles des psychologues et des médecins nous apparaît améliorer l'accessibilité éventuellement aux services et sûrement d'améliorer la continuité. Donc, vous voyez qu'on fait un endossement très large.
Concernant la psychothérapie, bien, là aussi, ça a pris quand même un certain consensus, et il a fallu mettre beaucoup l'épaule à la roue, les différents ordres concernés, et s'entendre sur les mécanismes qui, je le signale... Il faut comprendre que le cadre réglementaire de la psychothérapie est très innovateur, pour ne pas dire un précédent. Et je prends la peine de le dire parce qu'on m'oppose le fait qu'il y aurait un précédent sur une de mes demandes. Alors, précédent pour précédent, n'est-ce pas, on pourra s'entendre.
M. Dupuis: Vous avez le tour.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Hein?
M. Dupuis: Vous avez le tour.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, ça commence bien, hein? Bon.
Alors, évidemment, on appuie complètement l'hypothèse d'avoir une clause interprétative qui va rassurer d'autres professions qui oeuvrent plus ou moins en marge de la santé mentale et la psychothérapie. Et l'idée de faire des travaux donnant des lignes directrices ou des explications concernant les champs d'exercice ou les activités réservées nous apparaît aussi des plus pertinentes, et ça avait été fait pour la loi n° 90 et ça avait beaucoup favorisé la mise en oeuvre.
Nous, vous avez vu notre mémoire, on a trois points. Donc, au-delà de l'endossement général, on a trois points sur lesquels on demande des modifications. Alors, d'abord, on demande le retrait, pour les infirmières... On ne tient pas à faire l'évaluation du retard mental. Ça nous a été octroyé, mais c'est trop en dehors de notre champ d'exercice. Nous, on oeuvre en psychiatrie, santé mentale, et, dans ce cadre-là, l'évaluation des troubles mentaux, c'est suffisant pour nous pour dépister ou être très alertés par rapport à une déficience mentale éventuelle, mais c'est clair qu'on ne veut pas être ceux et celles qui allons la mesurer et on ne tient pas à garder cette réserve d'activités là.
Deuxièmement, vous avez vu à la fin du mémoire qu'on est, concernant la... on n'est pas en accord avec la décision de restreindre l'application des mesures de contention. Nous, on a déjà le droit de décider de l'usage de contention pour toutes sortes de clientèles et on pense que les citoyens qui... les enfants qui, dans les écoles, dans une colonie de vacances ou dans certaines résidences où il y a beaucoup de démence sénile... S'il y a une décision, mais qui n'est pas une décision à caractère ad hoc d'urgence mais une décision de contention ou d'isolement à plus ou moins long terme, ça devrait prendre l'avis d'un expert, et ce n'est pas ce que votre projet, là, propose. Alors, on est un peu... on est tout à fait d'accord avec les autres ordres ainsi que le Collège des médecins pour dire que cette restriction-là que vous amenez dans le projet de loi ne nous apparaît pas acceptable.
Et finalement le point majeur que nous venons vous signifier, c'est le fait qu'on prévoit, pour la profession infirmière, la possibilité d'évaluer les troubles mentaux, donc une activité qu'en termes techniques, là, on appelle quasi-diagnostic, et que les médecins ont justement, via le diagnostic médical, et les psychologues, via le... C'est au coeur même de leur expertise. Le fait que deux autres professions pourraient évaluer les troubles mentaux... On nous donne un levier juridique qui de toute évidence n'est pas le bon. On nous donne comme levier juridique que l'infirmière pourrait évaluer les troubles mentaux en obtenant une attestation de son ordre, attestation qui, en vertu de l'article 94o, est un règlement de formation continue. Il faut que je vous rappelle que l'accès à la profession d'infirmière, c'est le D.E.C, c'est le D.E.C., et, pour pouvoir évaluer les troubles mentaux, tous les experts, que ce soient Trudeau ou autres, les autres professions, tous considèrent qu'on s'inscrit dans une formation de deuxième cycle. Alors, entre le D.E.C. et la maîtrise, il y a cinq ans de différence. Je pense qu'on n'est pas dans la formation continue, on est carrément dans la formation spécialisée dans un domaine clinique.
Alors, c'est pour ça que notre mémoire établit largement tous les motifs pour lesquels on demande un amendement à l'effet que, l'évaluation des troubles mentaux étant une activité à haut risque de préjudice, ça exige une formation de deuxième cycle, qui est une recommandation ferme du comité d'experts, et qu'à cet égard-là ça nous prend une disposition législative qui soit plus convenable. Présentement, au Code des professions, il n'y a que le permis, l'émission d'un permis ou l'émission d'un certificat de spécialiste qui permet au législateur d'exiger un diplôme. Alors, nous, on ne pourra pas faire indirectement ce que le législateur ne veut pas faire directement, à savoir exiger une maîtrise en sciences infirmières, en soins psychiatriques, dans le cadre d'une attestation de formation continue. Ça ne fait comme aucun sens, d'autant plus que c'est un privilège décisionnel qui est de haut niveau. Le législateur s'est réservé ce pouvoir-là.
n(15 h 10)n Alors, je suis un peu surprise que l'Office des professions nous dise qu'on va pouvoir exiger une attestation de formation continue aux infirmières qui ont déjà une maîtrise. Mais vous voyez bien que ça n'a pas la même portée, ça n'établit pas le fait que la profession infirmière... qu'on puisse éventuellement se spécialiser dans ce domaine-là, et ça ne permettrait pas non plus à l'infirmière de pouvoir être reconnue comme infirmière experte dans le domaine. Donc, il y a beaucoup d'éléments autant à caractère juridique qu'à caractère, je vous dirais, d'opportunité quant au fait que nous voulons absolument que l'évaluation des troubles mentaux, cette activité-là qui serait octroyée aux infirmières, doive s'inscrire dans une formation clinique spécialisée qui conduit à l'obtention d'un diplôme, d'autant plus que jusqu'à maintenant les attestations de formation qui ont été demandées en vertu de la loi n° 90, c'étaient des attestations de formation très courte, genre 21 heures ou sept heures pour quelque chose, et qui retombent dans la formation initiale après.
Alors, quand les infirmières auxiliaires ont obtenu le droit d'installer des cathéters ou de faire un prélèvement veineux, leur ordre a dit: On vous prescrit une formation de sept heures pour l'apprendre, mais après ça c'est fini, ça retombe dans la formation initiale. Vous avez tous compris qu'on ne pourra pas mettre la maîtrise en sciences infirmières dans le D.E.C., c'est comme une évidence.
Alors, ça met beaucoup en jeu ce que vous avez beaucoup entendu parler ce matin, l'enjeu d'accessibilité compétente pour les infirmières qui... Je le répète, on est déjà impliquées dans le domaine de la santé mentale, psychiatrie, mais on serait d'accord de faire plus ou de faire mieux dans ce domaine-là, dans la mesure où on nous donnerait la bonne plateforme de spécialistes de... la bonne plateforme juridique.
Par ailleurs, je vais vous dire qu'il n'y a pas de problème au niveau de l'accessibilité aux études parce que toutes les universités qui offrent déjà la maîtrise en sciences infirmières sont prêtes à développer une option dans le domaine et répondent à tous les éléments parce que le rapport Trudeau est assez prescriptif sur les compétences ou les cours qu'on doit aller chercher en vue de pouvoir faire cette activité-là.
Enfin, je vous signale que notre demande n'entraîne aucune rupture de services parce que les 4 000 infirmières déjà impliquées en santé mentale, psychiatrie vont pouvoir continuer à faire de l'évaluation de la condition mentale et faire du suivi de patients, mais elles ne pourront pas aller plus loin que ça. Donc, je vous dirais que...
Je vais revenir très rapidement sur la notion de «précédent». Je veux rappeler à M. le ministre ainsi qu'aux parlementaires qu'actuellement, dans la Loi sur les infirmières, l'article 36 établit toutes les activités réservées aux infirmières, et c'est pour l'ensemble des infirmières. Il y a également l'article 36.1 présentement qui donne cinq activités médicales à des infirmières sous réserve d'avoir un certificat de spécialiste. Et on pense que l'évaluation des troubles mentaux est pas mal de la même nature, même si, pour ce qui est des cinq activités médicales, ça prend non seulement un certificat de spécialiste de l'ordre, mais ça prend aussi un règlement du Collège des médecins qui vient spécifier de façon plus précise, par exemple dans le domaine de la cardiologie ou de la première ligne, les médicaments que l'infirmière pourrait véritablement prescrire. Mais on est dans un contexte apparenté.
Et je vous dirais même que sincèrement ce qui va arriver, c'est qu'il n'y en a pas une, infirmière qui va vouloir aller s'investir dans le domaine de la psychiatrie parce que, maîtrise en sciences infirmières pour maîtrise en sciences infirmières, celle d'infirmière praticienne avec reconnaissance pleine et entière devient tellement plus intéressante que d'aller faire une attestation quelconque de formation.
Donc, je vous dirais en conclusion que, oui, on fait partie des ordres qui avons énormément poussé pour que se règle la question des champs d'exercice dans le domaine de la santé mentale, psychiatrie. Par ailleurs, on voudrait que la profession d'infirmière reçoive un traitement respectueux et équitable et qu'on ait la reconnaissance pleine et entière des infirmières qui contribuent dans le domaine de la santé mentale et on espère que vous avez été sensibles à nos propos. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, Mme Desrosiers. Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole au ministre de la Justice, responsable des lois.
M. Dupuis: J'ai vu que vous étiez présente depuis le début de la matinée, donc vous savez que nous sommes sensibles à toutes les demandes qui nous sont faites.
Mme Desrosiers (Gyslaine): ...à vous découvrir.
M. Dupuis: Ça ne veut pas dire qu'on va dire oui à tout, mais on est sensibles à tout, ça, il n'y a pas de doute là-dessus.
Mme Desrosiers, j'ai cherché, pendant que vous témoigniez, en vous écoutant, à essayer de savoir depuis combien de temps vous êtes présidente de l'ordre. On me dit: Peut-être 1993. Est-ce que c'est exact? Je ne veux pas vous vieillir, là.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Vous savez, les questions d'âge, là... Mais, non, moi, je...
M. Dupuis: Non, non, non, je ne vous demande pas votre âge.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, mais, moi, c'est parce que...
M. Dupuis: Non, mais ça se peut que vous ayez été élue présidente pubère, à peine pubère.
Mme Desrosiers (Gyslaine): ...j'étais une très jeune, très, très jeune présidente. Donc, j'ai été élue en novembre 1992.
M. Dupuis: O.K. Bien, je le dis pour la raison suivante, Mme Desrosiers, parce que, loin d'être un fin observateur de la chose médicale, et particulièrement du métier d'infirmière, j'ai suffisamment de connaissances pour savoir que vous avez, avec vos gens, j'imagine, mais vous personnellement avez fait progresser la profession d'infirmière énormément, particulièrement dans les dernières années, toute la question de la pratique avancée, et je voulais vous rendre hommage parce que, moi, je suis beaucoup, beaucoup, beaucoup plus vieux que vous, et donc j'ai connu les infirmières, il y a plusieurs années, pour avoir été hospitalisé, et vous avez vraiment fait avancer la profession d'infirmière de façon considérable, et je pense que, ne serait-ce que de le mentionner aujourd'hui, je pense que c'est vous rendre justice que de le faire, et donc je vous félicite de votre travail.
Maintenant, vos représentations... Non, vos représentations sont entendues. Sur le certificat de spécialiste, de ce que je comprends de votre représentation, parce que je ne connais pas le milieu, loin de connaître le milieu aussi bien que vous, je comprends qu'il y a deux façons d'être admise à la profession d'infirmière ou d'infirmier, c'est de faire le D.E.C. et/ou d'aller à l'université ensuite pour faire un bac en sciences infirmières, ce qu'on appelait, je pense, à l'époque le nursing. Est-ce que c'est exact?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): M. le ministre, le diplôme qui donne accès à la profession présentement, c'est le D.E.C. Donc, la majorité des infirmières deviennent infirmières via le D.E.C. On en a à peu près entre 300 et 400 qui, eux, ne font pas ce cheminement-là, ils font les sciences de la nature au cégep, donc le deux ans préuniversitaire, ils vont faire un baccalauréat trois ans. Les deux diplômes donnent accès à la profession. Par ailleurs, ça peut être des cursus de carrière qui peuvent être différents. Depuis 2002, il a été introduit le D.E.C.-bac. Ça veut dire qu'on a rehaussé les prérequis pour entrer au D.E.C., et les infirmières font toujours leur D.E.C., mais elles ont obtenu 30 crédits de reconnaissance avec l'université parce que les programmes ont été harmonisés. Donc, elles font le D.E.C.-bac. Mais le premier diplôme qui donne accès à la profession, c'est le D.E.C.
M. Dupuis: Quand vous dites que vous souhaiteriez que l'accession à l'évaluation du trouble mental soit réservée, pour employer un mot qu'on a beaucoup employé aujourd'hui, soit réservée à quelqu'un qui détiendrait un certificat de spécialiste, est-ce que vous avez eu ces discussions-là avec le Collège des médecins et avec le ministère de la Santé et des Services sociaux? Je vous le demande parce que vous comprenez très bien que ce n'est pas le ministre de la Justice qui va décider... C'est le ministre de la Justice qui pourrait décider d'introduire dans la loi n° 50 un amendement qui ferait droit à votre demande, mais c'est clair que c'est une demande qui doit être considérée par, j'imagine, à la fois le Collège des médecins et le ministère de la Santé. Avez-vous eu des discussions sur ce sujet-là?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui. Merci. Bien, écoutez, tous conviennent qu'il faut que les infirmières puissent faire l'évaluation des troubles mentaux parce que c'est dans les plans ministériels d'avoir davantage d'infirmières en première ligne qui vont faire plus que de détecter un état dépressif mais qui pourraient aller jusqu'à faire une évaluation au sens strict du terme ? ça veut dire un premier diagnostic. Donc, la notion de la pertinence, elle est là.
Bon, pour ce qui est du Collège des médecins, le Collège des médecins, eux, ce qu'ils craignent, c'est qu'ils ont... Je ne veux pas parler pour eux, mais ils vont vous le dire. Ils ont 32 spécialités et eux ne veulent pas, d'aucune manière, que pour la médecine puisse être accolée une activité réservée à une spécialité genre, je ne sais pas, moi, les omnipraticiens peuvent faire un peu d'esthétique puis les plasticiens aussi peuvent en faire. Donc, c'est sûr que tout le monde surveille parce que tout le monde ne veut pas de précédent. Donc, cet enjeu-là, en fait ce qui est compliqué...
Parce que la pertinence que les infirmières fassent de l'évaluation des troubles mentaux n'est pas remise en question, mais on ne nous donne pas le bon levier. Sincèrement, on m'a dit: Bien, vous aurez juste à exiger que... Si par hasard une infirmière fait une maîtrise, vous lui donnerez une petite attestation après. C'est impossible, dans un contexte de pénurie, d'intéresser les infirmières à aller dans un domaine clinique si elles ne savent pas d'avance qu'elles vont être reconnues.
n(15 h 20)n Bon, pour ce qui est du ministère de la Santé, le ministère de la Santé est plus préoccupé de l'usage des infirmières, je dirais, bachelières en général, là, dans le domaine de la santé mentale, puisqu'on a beaucoup d'infirmières vieillissantes dans ce domaine-là, mais c'est comme si tout le monde joue à la balle. Il y en a qui me disent: Bon, ça prend le deuxième cycle? On est d'accord. Mais disons qu'on ne s'entendrait que là-dessus. On oublierait le certificat de spécialiste. Quel est le mécanisme qui peut nous permettre d'exiger un deuxième cycle? Bien là, on retombe encore à la case départ, c'est seulement le permis. Il faudrait que je crée un permis ? mais ça, il faudrait que vous soyez d'accord aussi; donc, on en ferait comme une classe de membres différente ? ou le certificat de spécialiste. C'est pour ça que je ne sais plus par quel bout le prendre, parce qu'il y en a qui ont peur au précédent sur le certificat de spécialiste, mais, nous, on en a un, précédent dans notre loi, avec 36.1, là-dessus. Parce que, nous, la profession, on est investis dans tellement de domaines que, si on veut amener un certain nombre d'infirmières sur une plateforme beaucoup plus spécialisée, il faut qu'on ait un levier juridique qui soit satisfaisant.
M. Dupuis: Moi, je suis capable de vous dire aujourd'hui qu'avec l'Office des professions... L'Office des professions va le regarder, va regarder cette question-là, mais je ne peux pas vous cacher, Mme Desrosiers, puis vous le savez de toute façon ? vous diriez que je suis un menteur si je ne vous l'avouais pas ? qu'il y aura aussi des discussions avec le Collègue des médecins et avec le ministère de la Santé. Mais on va le regarder de façon attentive puis on va vous parler à vous aussi, là, vous allez être impliquées là-dedans.
Mme Desrosiers (Gyslaine): O.K. Merci. Mais je veux quand même insister sur le fait que nous ne sommes pas complètement asservies au Collège des médecins, n'est-ce pas, et que le Collège des médecins peut avoir des réserves sur le fait qu'il ne veut pas d'effet tache d'huile sur sa propre, comment je dirais, hiérarchie de la profession médicale. Mais j'insiste sur le fait que, nous, dans le moment, on a dans le moment quatre spécialités qui sont accessibles après un deuxième cycle et que là-dessus il n'y a pas de précédent.
M. Dupuis: Loin de moi l'idée que vous reteniez de notre discussion sur ce sujet-là que j'ai des velléités quelconques de prétendre que vous êtes asservies à qui que ce soit et à quelque profession que ce soit. La seule chose que je vous dis, Mme Desrosiers, puis vous le savez, vous êtes d'accord avec ça: il va falloir avoir des discussions. Un jour, on prendra une décision, puis, quand on prend une décision, bien on la prend. Mais c'est simplement pour vous dire qu'on va regarder cette question-là.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Merci, M. le ministre. Moi, j'étais tellement déçue de voir ça qu'à la limite on était presque prêtes à y renoncer. Pourquoi qu'il n'y aurait que les infirmières? Je vais aller très loin dans mon propos, là, mais, vous savez, nous autres, les infirmières, nous sommes presque des génies dans la société. Vous savez, on peut remplacer les médecins en région éloignée, on peut remplacer les médecins dans les dispensaires et on pourrait, tout d'un coup, faire l'évaluation des troubles mentaux sans avoir à obliger le deuxième cycle ou la reconnaissance qui vient avec. Je ne veux pas que la profession soit marginalisée et soit l'objet d'un cas d'exception.
Les 4 000 infirmières impliquées en santé mentale, psychiatrie présentement qui voudraient faire plus, bien elles vont nous demander des garanties. Moi, je vais rester prise avec attestation de formation. Je peux vous prédire tout de suite qu'elles ne voudront pas y aller parce que ce n'est pas une reconnaissance qui va leur permettre... Même dans une équipe interdisciplinaire, il va y avoir, dans la même équipe, une infirmière qui n'a pas le droit d'évaluer puis l'autre qui a le droit. Comment on va le distinguer? Elle va dire: J'ai mon attestation. Mais non, celle avec un certificat de spécialiste, elle va dire: Moi, je suis spécialisée en psychiatrie, point à la ligne, et j'ai les privilèges qui viennent avec.
M. Dupuis: Donc, c'est aussi une question d'attirer des gens, d'attirer des infirmières ou des infirmiers qui...
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui. On leur fait un plan de carrière dans ce domaine-là. Mais il y a aussi une question de protection du public. Moi, je suis ouverte à toute proposition venant de votre part ou de l'office pour me dire comment, au plan législatif, on va pouvoir exiger un deuxième cycle sans le reconnaître formellement. Je vous assure que c'est un peu la quadrature du cercle.
M. Dupuis: On va le regarder, Mme Desrosiers. On va le regarder.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Merci.
M. Dupuis: Maintenant, pour ce qui concerne le retard mental, vous souhaiteriez qu'on vous retire de cette activité-là. Peut-être que ce n'est pas à vous que je devrais poser la question, mais j'ai compris que «retard» est compris dans l'expression «trouble mental», hein, donc il faudrait apporter...
Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, non. Bien, sincèrement, non, là, parce que ça va dépendre de... Au plan de la classification des maladies dans la grande famille des troubles mentaux, il y a, au niveau de la DSM-IV, la notion de la déficience intellectuelle, sauf que, dans la pratique, nous, on veut l'évaluation des troubles mentaux tel que signifié. Est-ce qu'il faut que ce soit marqué «excluant les retards»? Les avocats nous disent non. Mais ce n'est pas ça qu'on a fait avec nous, ils nous ont dit: Vous allez évaluer les troubles mentaux ou le retard mental. On vous dit: Le «ou le retard mental»...
M. Dupuis: ...besoin.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, on n'en a pas besoin parce que ça nous amène en dehors de notre champ d'exercice, qui est vraiment les soins psychiatriques ou le dépistage de troubles mentaux en première ligne, et c'est clair que l'infirmière qui va soupçonner un retard mental, elle va référer. Et je ne veux pas qu'on laisse croire que les infirmières sont des spécialistes dans l'évaluation du retard mental. De façon concertée, avec l'Ordre des psychologues, on a dit, nous: Enlevons toute ambiguïté, on n'est pas dans ces eaux-là.
M. Dupuis: Et finalement, et je m'excuse de prendre beaucoup de votre temps ou du temps de mes collègues, finalement expliquez-moi votre représentation sur toute la question de la contention, qui est une question pour nous, les politiciens, qui est une question hautement sensible, litigieuse. Et, quand on va là-dedans, nous autres, là, on n'aime pas ça aller là-dedans. Alors, expliquez-moi donc votre représentation.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, la représentation, c'est que dans le moment, en vertu de la Loi sur les infirmières, à l'article 36, on peut décider de l'usage de contention, il n'y a pas de restriction de lieux, et là vous amenez une modalité qui va restreindre la possibilité de prendre cette décision-là seulement à l'intérieur des établissements publics du réseau de la santé. Alors, si on est dans une... on appelle ça une ressource intermédiaire, ou dans une colonie de vacances, ou dans une résidence...
Une voix: Un milieu scolaire.
Mme Desrosiers (Gyslaine): ...un milieu scolaire ? peut-être que Me D'Anjou pourrait vous l'expliquer mieux ? bien ça n'exigera plus d'être un professionnel pour prendre la décision. Ça pourrait être la monitrice qui décide de contentionner. Donc, on dit: Peut-être que oui, qu'elle peut contentionner, mais il faudrait que ce soit de façon très ad hoc. Le moindrement qu'il faut contentionner un enfant ou un adulte sur une longue période, pourquoi que, tout d'un coup, on n'a plus besoin de l'opinion d'un professionnel? Alors, on pense que vous avez introduit dans le projet de loi une restriction qui peut avoir des effets pervers. On nous a dit que c'était parce que vous voulez qu'en milieux carcéraux... et que les forces policières aient le droit de contentionner. Mais peut-être qu'il s'agit de... Peut-être que ce serait d'éclairer de façon juridique cette exception-là pour les policiers et les milieux carcéraux.
M. Dupuis: En milieu juridique ou judiciaire, parce qu'il y a une différence entre les deux, quand il y a une décision de contention, souvent c'est une décision qui est prise par un juge. Donc, il y a une protection là. Vous avez raison, il faut regarder ça.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien oui, parce que, là, ce ne serait plus une activité réservée à un professionnel, tout le monde pourrait décider ça en dehors des établissements publics du réseau de la santé. Donc, vous enlevez toute notion d'expertise par rapport à cette décision-là, tel que c'est libellé.
M. Dupuis: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Je crois que, Me D'Anjou, vous vouliez peut-être ajouter quelque chose.
Mme D'Anjou (Hélène): Non, ça a été bien expliqué, je n'avais rien à ajouter.
La Présidente (Mme Thériault): Parfait.
Mme Desrosiers (Gyslaine): C'est parce que vous avez bien compris ma leçon.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme D'Anjou (Hélène): C'est bon signe.
M. Dupuis: Et Me D'Anjou a l'instinct de conservation. C'est bon.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Thériault): Il reste encore un peu de temps, peut-être environ quatre minutes au groupe formant le gouvernement. Est-ce qu'il y a une question?
M. Ouellette: Juste une petite question.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: J'ai une petite question, Mme la Présidente. Mme Desrosiers, on ne peut pas dire que vous n'êtes pas articulée et que vos propos ne sont pas clairs dans les choses que vous voulez et celles que vous souhaiteriez voir modifiées. Juste pour ma compréhension du milieu, vous parlez qu'il y a au-dessus de 4 000 infirmières qui évoluent en santé mentale. Là-dessus, est-ce qu'il y en a qui ont des maîtrises? Avez-vous juste un chiffre? Parce que, si on allait dans le sens de la recommandation du rapport Trudeau, ce que vous ne voulez pas, là...
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, dites-les donc, les chiffres.
Mme Laflamme (France): 184 infirmières ont une maîtrise, présentement. Je peux vous dire qu'il y en a 272 qui ont des études de deuxième cycle. Ça comprend un diplôme d'études supérieures ou un doctorat.
La Présidente (Mme Thériault): C'était Mme France Laflamme, infirmière-conseil, qui parlait. C'est pour les fins d'enregistrement, évidemment.
Mme Laflamme (France): Je m'excuse.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui. Donc, nous en avons.
M. Ouellette: Donc, ce seraient beaucoup plus ces 184 là puis ces 272 là qui pourraient être touchées par la mesure du rapport Trudeau.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, oui, oui, mais éventuellement toutes les autres infirmières qui ont déjà un baccalauréat, qui disent: Bien, tiens, moi, ça m'intéresserait de faire carrière en psychiatrie, et qui iraient faire un deuxième cycle. Si elles le faisaient avec la spécialité psychiatrie, bien elles pourraient être reconnues avec la modalité qu'on vous a suggérée, là, d'être reconnues comme infirmières expertes spécialisées en psychiatrie.
Par contre, ces mêmes infirmières là qui présentement ont des maîtrises ou des doctorats, plusieurs d'entre elles vont peut-être vouloir aller se faire reconnaître sur le permis de psychothérapeute. Là, on ne connaît pas d'avance leur choix. Parce qu'il y en a là-dedans, qui ont fait des deuxièmes ou des troisièmes cycles, qui répondent parfaitement aux obligations pour le permis de psychothérapeute. Nous, c'est pour celles qui sont déjà là, mais aussi le certificat de spécialiste pourrait nous permettre, on appelle ça par études d'équivalence, de reconnaître peut-être des gens qui ont déjà un baccalauréat mais qui ont acquis, au fil des années ou au fil de la formation continue, des compétences dans le domaine.
n(15 h 30)n Puis, le certificat de spécialiste, c'est que c'est transparent, hein? Vous savez qu'il faut que ce soit publié, puis ça fait l'objet de discussions. Mais là, nous, nos infirmières, je le répète, de deuxième cycle, on ne connaît pas encore parfaitement le plan de carrière qu'elles vont choisir, ou la psychothérapie ou rester dans les soins psychiatriques comme tels.
M. Ouellette: Ma dernière question, là, pour...
La Présidente (Mme Thériault): Oui, c'est beau, il reste 1 min 30 s.
M. Ouellette: On a un peu fait allusion au fait que vous étiez là depuis 1992, donc vous étiez là pour la mise en oeuvre de la loi n° 90. Vos recommandations pour le succès de la mise en oeuvre du projet de loi n° 50, ce serait quoi?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, en fait, on en a un peu disposé lors des consensus interordres parce qu'on a pris... Après le rapport Trudeau... c'est-à-dire avant le rapport Trudeau, il n'y avait aucun consensus interordres, on ne s'entendait pas sur les mécanismes donnant accès à la psychothérapie, on ne s'entendait pas sur un partage des compétences. Donc, on a pris le taureau par les cornes et on a beaucoup travaillé. Et, même via des interventions qui ont été faites, via le rapport Trudeau, de s'entendre sur le guichet unique concernant l'émission du permis de psychothérapeute, il y a eu vraiment un travail... C'était ça ou jamais les professions de la santé mentale, psychiatrie ne réussiraient à avoir un cadre réglementaire. Donc, je pense qu'on a déjà fait la moitié du chemin pour garantir les éléments d'application.
Et l'autre bout de chemin, c'est vraiment le travail qui va être fait avec l'Office des professions, comme il avait été fait pour la loi n° 90. On s'était assis, les... Parce que, vous savez, une loi, c'est quand elle prend action sur le terrain... Et nos membres, comme les membres des autres professions, ils ont souvent des réflexes protectionnistes: Comment ça, cette activité-là, il n'y a pas juste moi qui ai le droit de la faire? Les autres, ils vont la faire. Bon. Par exemple, nous autres, on a le traitement des plaies en exclusivité, mais les physiothérapeutes ont le droit dans certains cas. Bon. Ou récemment les ergothérapeutes nous ont demandé de pouvoir intervenir au niveau de certains médicaments de soins de plaies. Mais là on a notre fameuse logique du champ d'exercice, à savoir que ce n'est pas la plaie qui conditionne qui va intervenir, c'est l'ensemble du traitement. Alors, quand on est dans un traitement de physiothérapie, on ne fera pas venir l'infirmière juste pour défaire le pansement puis le refaire. Peut-être que, là, dans ce contexte-là...
Donc, le fameux partage d'activités a déjà été pas mal établi, mais le fait de s'asseoir avec l'office après pour établir ce qu'on appelle les lignes directrices interprétatives qu'on distribue aux établissements... Puis il va falloir pas juste le distribuer. On a fait des rencontres provinciales avec les directeurs de soins infirmiers et les directeurs de services professionnels. Ça prend beaucoup de travail pour l'expliquer, parce que la loi n° 90, croyez-le ou non, là, malgré...
Nous, on a rencontré presque 15 000 infirmières dans la phase d'implantation, et, même à ça, aujourd'hui, vous allez des fois dans un établissement, puis il peut y avoir encore des médecins qui vont vous dire: Une ordonnance collective, qu'est-ce que c'est ça? ou encore... Vous savez, tout ne se déploie pas au même rythme, et nos propres infirmières, par exemple, sont dans le moment un peu sceptiques ou un peu déçues de voir qu'on vient d'octroyer aux infirmières auxiliaires le pouvoir d'installer des solutés, parce que, eux autres, ils pensaient que c'était une activité qui leur était exclusive. Donc, ce n'est pas si facile que ça de défaire le schème mental des professionnels sur le terrain. Mais, forts de l'expérience de la loi n° 90, vous avez raison, je pense que, les modalités, on les connaît.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, je me tourne maintenant du côté de l'opposition officielle avec le député de Saint-Hyacinthe. Vous avez 15 minutes, M. le député.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, merci, Mme Desrosiers. Merci, mesdames, d'être présentes ici, cet après-midi.
En fait, je suis à la page 12 de votre mémoire, et ça me semble quand même assez clair, là. Moi, je veux dire, j'ai une formation juridique, et, quand on dit, le 36, là, 15e alinéa: «Évaluer les troubles mentaux ou le retard mental, lorsqu'une attestation de formation lui est délivrée», vous voulez que cet article-là soit complètement retiré du projet de loi, c'est ce que je dois comprendre de votre intervention, et il y a une proposition d'amendement concernant 36.2, c'est-à-dire qu'à ce moment-là il y a une maîtrise en fait en sciences infirmières spécialisée dans le domaine qui peut être quand même, là, octroyée ou acquise par une de vos membres ou un de vos membres, sauf que ce que vous semblez...
Est-ce que vous voulez, à l'intérieur de ça, privilégier comme une spécialité à l'intérieur de l'ordre ou bien si vous voulez que... Parce que, là, on joue comme sur deux tableaux. Il y a quand même une première intervention, en fait vous êtes la première, au niveau d'une évaluation, qu'on reconnaît déjà dans la loi, vous avez déjà une évaluation. Lorsqu'on dit: «Évaluer [les conditions] physique et mentale d'une personne symptomatique», on voit cette évaluation-là, et là, ensuite, on arrive ici avec une maîtrise en sciences infirmières concernant des troubles mentaux: évaluer les troubles mentaux puis évaluer le retard mental. En fait, c'est les deux. Alors, moi, ma question est la suivante: Est-ce qu'effectivement vous réservez «évaluer les troubles mentaux» aux personnes qui auraient un diplôme en maîtrise en sciences infirmières et «évaluer le retard mental» à ces mêmes candidates là ou bien si... et la première, réserver ou garder quand même à l'ensemble des infirmières cette évaluation-là?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
M. L'Écuyer: Je voudrais que ce soit clarifié.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, c'est très clair.
M. L'Écuyer: Peut-être que pour vous c'est très clair.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Vous me donnez l'occasion de le repréciser.
M. L'Écuyer: Oui.
Mme Desrosiers (Gyslaine): L'évaluation de la condition physique et mentale des personnes symptomatiques, c'est dans l'article 36 et c'est une activité réservée aux infirmières en général. Alors, si elle oeuvre en pédiatrie, en obstétrique, quel que soit son domaine, elle peut faire de l'évaluation de la condition physique et mentale adaptée au domaine de pratique qu'elle exerce, et ça va l'amener à faire le plan thérapeutique infirmier, ça va l'amener à prendre différentes décisions, bon. Donc ça, c'est à caractère général, on ne touche pas à ça, mais...
Alors, dans le domaine de la psychiatrie, ça veut dire que toutes les infirmières qui oeuvrent déjà dans le domaine de la psychiatrie, et qui ne sont pas nécessairement de deuxième cycle, et qui n'auraient pas dans le futur un certificat de spécialiste vont pouvoir continuer à faire de l'évaluation de la condition mentale et oeuvrer dans le domaine. Mais ce qui arrive, c'est qu'il faut s'entendre sur le fait que le trouble mental... Et là vous avez entendu les différentes professions qui sont venues ce matin, là. On est obligées de prendre des précautions de style parce que c'est une activité quasi-diagnostic, donc seuls les médecins l'ont via le diagnostic. Mais là il s'agit carrément de...
Quand on parle de trouble mental, là, ce n'est pas juste de dire: Il me semble que cette personne-là est désorientée dans le temps et l'espace, c'est que tu es rendu à dire: Trouble bipolaire, état dépressif majeur, et là il y a toute une référence qui doit s'installer, donc ça peut même affecter les droits de la personne. Donc là, on est rendu dans la psychopathologie beaucoup plus avancée et on ne pense pas... non seulement on ne pense pas, mais on sait que nos infirmières ne sont pas formées pour ça dans le moment.
Et, concernant les psychologues, les conseillers en orientation et les médecins, alors ou bien on apprend beaucoup plus vite qu'eux autres, et on l'apprendrait très rapidement via une attestation de formation, ou bien il faut suivre le même cursus qu'eux autres et l'obtenir via une maîtrise spécialisée dans le domaine.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. L'Écuyer: Concernant le propos que vous avez tenu au sujet de la contention, j'aimerais quand même revenir sur cette question-là. Vous dites: «À part les mesures de contrôle qui doivent être appliquées dans les milieux carcéraux et par les forces policières, l'ordre considère que toute mesure de contention à long terme devrait obligatoirement être soumise à l'expertise d'un professionnel de la santé.» Quand vous exprimez ces propos-là, le «professionnel de la santé», est-ce que vous faites allusion à l'ensemble des cinq ordres, six ordres ou professionnels de la santé? J'aimerais avoir des éclaircissements sur ce point-là.
La Présidente (Mme Thériault): Oui. On va donner la parole à Mme Hélène D'Anjou.
Mme D'Anjou (Hélène): Oui. Dans le fond, ce qu'on veut dire par ça, c'est que les décisions devraient être prises par un professionnel à qui l'activité de décider des mesures de contention est déjà réservée par la loi ou va l'être par le projet de loi n° 50, pas par tout professionnel de la santé mais par ceux qui ont l'activité réservée.
M. L'Écuyer: L'activité réservée, et vous voulez qu'il y ait un amendement possible, en ce qui concerne... non pas dans le milieu de la santé, mais dans un milieu beaucoup plus large que la santé.
Mme D'Anjou (Hélène): Que la réserve de l'activité aux professionnels soit élargie à d'autres contextes que des établissements du réseau de la santé, par exemple en milieu scolaire, dans les ressources intermédiaires ou de type familial, peut-être dans certains milieux qui sont reliés aux centres jeunesse mais en dehors... en fait que ça déborde le cadre des établissements, là, du réseau de la santé.
M. L'Écuyer: Alors, à ce moment-là, avec un processus de consultation, d'évaluation et de signalement... d'évaluation, et après une décision est prise par le professionnel de procéder à...
Mme D'Anjou (Hélène): C'est ça. La décision est prise par le professionnel, mais le plan de contention peut être appliqué par quelqu'un qui n'est pas en fait un professionnel ou par une autre personne. Mais l'important, c'est que la décision d'utiliser des mesures de contention à long terme soit prise par un professionnel à qui l'activité...
Une voix: Habilité.
Mme D'Anjou (Hélène): Habilité. C'est ça.
M. L'Écuyer: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. L'Écuyer: Mme la présidente, est-ce que vous vous êtes penchée sur le volet psychothérapie?
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, oui.
n(15 h 40)nM. L'Écuyer: Et puis est-ce que vous avez quand même, au niveau de votre... Est-ce qu'il y a des membres de votre formation qui seraient intéressés à devenir ou... Présentement, est-ce qu'il y a des membres de votre formation, des infirmiers et infirmières qui pratiquent la psychothérapie présentement, au moment où on se parle?
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, tout à fait.
M. L'Écuyer: Il y en a combien, selon votre évaluation?
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, nous, elles n'ont pas l'obligation de le déclarer au tableau, mais on avait fait une enquête il y a quelques années, là, puis il y en avait... On pense qu'il y en a peut-être pas loin de 200 qui pourraient se qualifier, mais on ne sait pas si elles se qualifient entièrement, parce que, quand... Il va falloir regarder le règlement de l'office. En fait, il va falloir faire un appel à tous, à toutes les infirmières intéressées à se qualifier pour ce permis-là. Elles vont devoir envoyer leurs portfolios, etc. Mais on pense qu'on en aurait peut-être un... Moi, je serais surprise qu'on en ait plus que 100, là, mais sur papier il y en a au moins 272 qui ont déjà des études de deuxième ou de troisième cycle en partie qui correspondent à la psychothérapie. Mais ça se peut qu'il leur manque un 100 heures ou un 50 heures dans un aspect en particulier. On ne le sait pas parce qu'on n'est pas rendues là. Mais c'est clair qu'il y aura des infirmières psychothérapeutes.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. L'Écuyer: Je n'ai pas d'autre question, madame.
La Présidente (Mme Thériault): C'est beau?
M. L'Écuyer: Oui.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, on va aller du côté du deuxième groupe formant l'opposition. M. le député de Dubuc, la parole est à vous.
M. Côté: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, mesdames, bienvenue à la commission. Merci pour votre mémoire, que je trouve d'ailleurs un peu, je pourrais dire, original, novateur puisque non seulement vous... C'est rare qu'on voie que vous donnez... vous offrez au législateur d'en faire plus qu'il vous en demande. C'est rare qu'on voie ça. Et, dans le cas de l'évaluation des troubles mentaux, je pense que c'est ce que vous faites, vous voulez que vos infirmières soient vraiment des spécialistes et des personnes compétentes pour une plus grande naturellement protection du public ? ça, je le comprends ? et aussi pour justement permettre cette accessibilité-là compétente dont on a vu dans le rapport Trudeau qu'elle était très importante.
Vous avez parlé, Mme Desrosiers, tout à l'heure, de... Vous avez quatre spécialités. Pouvez-vous me les nommer, s'il vous plaît?
Mme Desrosiers (Gyslaine): En fait, actuellement, il y a quatre spécialités qu'on appelle d'infirmière praticienne, spécialité en néonatalogie, en néphrologie, en cardiologie, et infirmière praticienne de première ligne. C'est une classe d'infirmières qui obtiennent des certificats après...
M. Côté: Une maîtrise.
Mme Desrosiers (Gyslaine): ...une maîtrise. Mais l'originalité de ces maîtrises-là, c'est: les contenus de formation sont décidés mutuellement avec le Collège des médecins parce que ce sont des infirmières qui ont même un droit de prescrire des médicaments, ce sont des prescripteurs autorisés à la Régie d'assurance maladie. Donc, on est vraiment dans ce que M. le ministre tantôt parlait, de pratique avancée. Mais elles ont des privilèges de pratique liés à leur spécialité, seulement dans leur spécialité, ce n'est pas transportable dans d'autres spécialités.
M. Côté: O.K. Il y en a combien maintenant au Québec? Il n'y en a pas beaucoup, je pense, hein?
Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, non, on en a très peu, là.
Mme Laflamme (France): 17.
Mme Desrosiers (Gyslaine): 17? Bien non! Praticiennes spécialisées?
Mme Laflamme (France): Oui.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Ah! tu veux dire en psychiatrie?
Mme Laflamme (France): Non.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien non, on en a plus que ça.
Mme Laflamme (France): On en a 17 qui ont la certification, puis il y en a 30 qui sont à l'étude, présentement.
Le Président (M. Lévesque): Merci, Mme Laflamme. Mme Desrosiers, est-ce que...
Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, je pense qu'on ne s'entend pas sur nos statistiques. Moi, je pense que...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Desrosiers (Gyslaine): En tout cas, c'est plus ou moins 30, mais, vous voyez, ça rentre au compte-gouttes, là, parce que c'est des longues études et puis...
M. Côté: Oui, je sais.
Le Président (M. Lévesque): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui, M. le Président. Celles qui possèdent une maîtrise présentement ? vous avez parlé de 184 ou 84, là ? est-ce que ces infirmières-là, une fois, mettons, que le ministre se plie à votre demande et vous accorde la formation que vous demandez, est-ce que les infirmières qui possèdent déjà une maîtrise vont avoir un droit acquis sur la psychiatrie ou s'il va falloir qu'elles fassent une formation supplémentaire pour accéder justement, là...
Le Président (M. Lévesque): Mme Desrosiers.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, la beauté du mécanisme de certification spécialiste, c'est qu'on établit le niveau et la nature des études qui conduisent à l'obtention du certificat, mais on doit faire, au moment de l'introduction du règlement, les dispositions qu'on appelle transitoires ou de droits acquis ou encore un règlement d'équivalence. Donc, sur les 184 qui ont déjà une maîtrise en sciences infirmières, les 14 qui ont déjà un doctorat, lesquelles voudront obtenir le certificat? Bien, la plupart, j'imagine.
M. Côté: Il y aura un cheminement de prévu.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui. Il y a toujours un cheminement prévu, mais il pourrait y avoir une nécessité de complément de formation, mais je ne peux pas le présumer parce qu'on est obligées d'y aller au cas par cas quasiment.
Le Président (M. Lévesque): Merci, Mme Desrosiers. Le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. En ce qui concerne les mesures de contention, vous voulez étendre ça à d'autres milieux que le milieu de la santé, mais est-ce que, quand vous parlez de contention, vous incluez également l'isolement?
Mme D'Anjou (Hélène): Non. Je pense qu'on jugeait pertinent que les mesures d'isolement soient restreintes aux établissements du réseau de la santé parce que c'est souvent pour protéger la personne par rapport à autrui, là. Ça a une finalité un peu différente des mesures de contention.
Le Président (M. Lévesque): Merci.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Mais par contre, si, en milieu scolaire, pour certaines classes d'enfants qui sont jugés très difficiles, il y a de l'isolement, peut-être que le niveau de dangerosité peut être le même. En fait, on ne demande rien. Nous autres, dans le moment on a le droit de décider de l'usage de contention, et ce droit-là, ce privilège-là n'est pas limité. Et là le législateur dit: Vous allez continuer à avoir le droit mais seulement dans les établissements de santé publics.
Mme D'Anjou (Hélène): Ça va être réservé seulement dans les établissements du réseau.
Mme Desrosiers (Gyslaine): C'est ça, donc réservé seulement dans ces établissements-là, ce qui fait que n'importe qui d'autre pourra le décider dans les autres établissements, dans les autres milieux.
M. Côté: Présentement, vous dites qu'il y a 40 000 infirmières au Québec. Est-ce que vous...
Mme Desrosiers (Gyslaine): 70 000.
M. Côté: 70 000. Est-ce que vous considérez que vous êtes en pénurie, présentement? Est-ce qu'il y a une pénurie d'infirmières?
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, je pense que vous devriez faire une commission parlementaire juste là-dessus.
Une voix: Mais ça vient du bon bord pour la poser, la question, aussi, madame.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, écoutez, je vous dirais que presque toutes les professions de la santé présentement sont en pénurie, compte tenu du bassin démographique qui diminue et des départs à la retraite des baby-boomers. Pour vous dire bien honnêtement, nous autres, dans les cinq dernières années, on a donné presque 3 000 permis par année, donc on a rentré 15 000 nouvelles infirmières, puis on a eu des soldes positifs, sauf que les statistiques démographiques vont finir par nous rattraper, à savoir que, pour les 15 encore prochaines années, il va partir au moins 2 500 infirmières à la retraite. Il faut les remplacer et il faut s'assurer qu'elles aient les niveaux de qualification pour rencontrer les besoins. Mais ce n'est pas une pénurie... c'est une pénurie, je vous dirais, structurelle, liée à la structure des âges dans la société. Et aussi on a un problème de rétention, compte tenu que, dans certaines régions, il y a le problème de compétition avec l'Ontario, par exemple, qui paie beaucoup plus. Donc, je vous le dis, une grosse commission parlementaire juste là-dessus.
M. Côté: Vous voyez que ma question était bien posée. Merci beaucoup, madame.
Mme Desrosiers (Gyslaine): Merci beaucoup.
Le Président (M. Lévesque): Alors, merci, Mme Desrosiers, Mme Mercier, Mme Laflamme et Mme D'Anjou.
Nous allons devoir suspendre pour environ cinq à 10 minutes, le temps que le ministre puisse revenir. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
(Reprise à 15 h 54)
Le Président (M. Lévesque): Alors, bonjour, mesdames et messieurs. Nous allons recommencer la séance. Nous accueillons, aujourd'hui, la Fédération québécoise des centres de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement. J'aimerais vous inviter à vous présenter et présenter votre mémoire.
Fédération québécoise des centres de
réadaptation en déficience intellectuelle
et en troubles envahissants du
développement (FQCRDITED)
M. Bouchard (Jean-Marie): Oui. Merci, M. le Président. Mon nom est Jean-Marie Bouchard, président de la fédération; Mme Diane Bégin, qui est directrice générale; et Mme Brigitte Bédard, qui est la directrice des communications.
Le secteur de la déficience intellectuelle qui est devant vous aujourd'hui, c'est le secteur le plus sous-évalué de la société. Il ne fait pas beaucoup de manifestations devant le parlement. Alors, c'est considéré comme des sans-voix. Alors, nous sommes, aujourd'hui, le porte-parole de ce groupe devant vous, M. le ministre, MM. les membres de la commission.
Nous vous remercions d'abord de l'accueil et nous apprécions le fait de pouvoir contribuer, par les commentaires et les recommandations que nous vous faisons, à l'amélioration du projet de loi. Disons tout de suite que nous vous donnons un accueil favorable au projet de loi. Par ailleurs, nous avons des recommandations à faire parce qu'il y a des problèmes très sérieux qui se posent en pratique dans l'application de ce projet de loi.
D'abord, un mot pour vous dire qui nous sommes, rapidement, là, pour que vous puissiez nous situer. Nous représentons 22 centres de CRDI, qu'on appelle CRDI, dans la province de Québec, qui donnent des services de deuxième ligne... le ministère de la Santé, considérés comme étant de deuxième ligne par rapport à la première ligne, qui est le CSSS. Les CRDI desservent 28 000 personnes: 23 000 en déficience intellectuelle et environ 5 000 en troubles envahissants de développement. Pour ce faire, nous avons un total, et c'est important que vous le reteniez... 6 900 postes sont occupés par différentes personnes, évidemment. Le groupe des professionnels comme tels, au sens des conventions collectives et non pas du Code des professions, représente 10 % de l'ensemble des postes détenus, et, de ce nombre, la moitié seulement sont les ordres professionnels.
Comme nous l'avons mentionné, la fédération tient à souligner son accord sur les grands objectifs du projet de loi. Et par ailleurs nos commentaires vont porter sur deux points principaux: le maintien de l'offre de services disponibles actuellement dans nos centres ? si un projet de loi a pour effet d'empêcher ça, on a un problème sérieux ? et, deuxièmement, l'harmonisation des pratiques professionnelles au sens du Code des professions avec celles des intervenants non professionnels qui oeuvrent déjà dans les CRDI dans le cadre de la définition proposée au champ d'exercice des psychoéducateurs et des travailleurs sociaux. Nous souhaitons, tout comme le législateur, l'amélioration des pratiques professionnelles mais sans risque de rupture de services pour les usagers et sans limitation des fonctions actuellement exercées par ces personnes.
La fédération est favorable à l'adoption de l'ensemble des dispositions du projet de loi mais conditionnellement à l'acceptation par le législateur de certaines mesures transitoires et de clauses grand-père que nous allons vous proposer.
Nos préoccupations majeures portent sur deux points: l'impact que pourrait avoir le champ d'exercice tel que dévolu à la profession de travailleur social et de psychoéducateur ? c'est les deux principaux points ? et le regroupement des éducateurs dans un cadre professionnel, idéalement celui des psychoéducateurs. Il y a la difficulté que pose l'énoncé de certaines activités réservées attribuées à la profession de travailleur social et, je me permets de vous le dire, un oubli du législateur à l'égard des activités réservées à l'Ordre professionnel des psychologues. C'est les trois points que je voudrais développer rapidement avec vous.
D'abord, la pratique professionnelle et les effectifs dans nos centres. Rappelons que la pratique professionnelle dans nos centres s'exerce dans un contexte non institutionnel. Le personnel intervient localement, c'est-à-dire à l'endroit où vit la personne et où elle exerce des activités quotidiennes: travail, lieu de travail, résidence, etc., que ce soit au centre de la petite enfance, à l'école, dans les lieux de loisirs ou encore dans les milieux de travail, donc non institutionnels. Et la pratique professionnelle dans un centre diffère donc de celle exercée en cabinet privé, car le professionnel dans nos centres fait partie d'une équipe interdisciplinaire et bénéficie d'un encadrement et d'une supervision professionnels. Dans certains cas même, il exerce des activités d'encadrement.
n(16 heures)n Permettez-nous de vous rappeler que la notion de «professionnel» et de «non-professionnel» a une signification différente selon qu'il s'agit du Code des professions ou des conventions collectives en vigueur dans le réseau de la santé. En vertu du Code des professions, un professionnel est celui qui est membre en règle d'un ordre professionnel, tandis que le non-professionnel est la personne qui n'est membre dans aucun ordre. Dans les conventions collectives, ce n'est pas ça. Un professionnel est celui qui est titulaire d'un titre d'emploi dont l'une des exigences est de détenir un diplôme universitaire, tandis que le non-professionnel est la personne qui est titulaire d'un titre d'emploi mais qui n'a pas un diplôme universitaire. Il y a donc une dichotomie entre Code des professions et conventions collectives qui nous régissent dans le réseau de la santé.
Et mentionnons que les membres d'un ordre professionnel visé par nos propos représentent seulement 4 % de l'ensemble des effectifs de nos centres, soit, dans toute la province de Québec, 293 postes occupés par des psychoéducateurs, des psychologues et des travailleurs sociaux. Précisons enfin que, dans notre réseau, le personnel professionnel, les 293 ne sont pas répartis également dans l'ensemble des 22 CRDI de la province de Québec. Dans certains cas, il y a absence totale de professionnels dans certaines régions. Il faut tenir compte des conditions pratiques dans lesquelles nous vivons.
Voyons maintenant les obligations légales qui régissent les CRDI concernant le plan d'intervention, parce que nous allons revenir principalement sur cette notion de «plan d'intervention». La Loi sur les services de santé et les services sociaux stipule, aux articles 100 et 105, les dispositions que les établissements doivent respecter à l'égard de la prestation de certains services aux usagers, notamment le plan d'intervention et le plan de services individualisés. Ces articles mentionnent, entre autres, que les CRDI doivent élaborer, en collaboration avec chaque usager admis ou inscrit, un plan d'intervention individualisé, lequel plan doit être révisé aux 90 jours et doit contenir les besoins de l'usager, les objectifs de réadaptation, les moyens utilisés et la durée prévisible pendant laquelle ces services sont fournis. Actuellement, cette responsabilité légale qui nous échoit est principalement assumée par du personnel qui n'est pas membre d'un ordre professionnel, soit les éducateurs et les agents de relations humaines.
Considérant cette réalité qui nous régit, nous croyons que les amendements proposés dans le projet de loi n° 50 auront un impact majeur sur les obligations légales qui concernent les CRDI, cela principalement sur leur pratique actuelle parce que ces dispositions concernent la détermination de plans d'intervention et leur mise en oeuvre, préoccupation majeure pour les CRDI. Pourquoi? Parce que le législateur propose de modifier les paragraphes d et g de l'article 37 en les remplaçant par de nouvelles dispositions. Dans ces nouvelles dispositions, ce sont l'ordre professionnel des travailleurs sociaux et celui des psychoéducateurs et des psychoéducatrices qui devront dorénavant déterminer le plan d'intervention et en assurer le service.
L'ajout de ces dispositions au Code des professions: message clair qui est donné, à l'effet que le personnel actuel n'a pas le personnel clinique qualifié pour déterminer le plan d'intervention et en assurer la mise en oeuvre. Jusqu'à maintenant, dans les CRDI, c'est majoritairement ce personnel non professionnel qui élabore le plan d'intervention, le détermine, coordonne les divers services et en assure la mise en oeuvre. Il est important de vous préciser qu'un plan d'intervention est une démarche qui vise à définir l'offre de services de réadaptation et d'adaptation de l'usager. Elle peut nécessiter la participation de plusieurs types de professions et de techniciens afin de définir les interventions appropriées aux besoins de l'usager. L'élaboration d'un plan d'intervention ne peut donc être une activité réservée, elle doit forcément être une activité partagée, et ce, par sa nature même.
Pourquoi avons-nous cette crainte? Dans le réseau de la santé et des services sociaux, la nomenclature des titres d'emploi... Ça, c'est important. C'est la nomenclature des titres d'emploi qui détermine les attributions et les caractéristiques générales des emplois. Mais actuellement elle ne mentionne pas qui doit déterminer un plan d'intervention et en assurer la mise en oeuvre. Le législateur, en inscrivant, dans le champ d'exercice des professions de travailleur social et de psychoéducateur, qu'il doit déterminer le plan d'intervention et en assurer la mise en oeuvre, vient dorénavant de préciser dans les CRDI comment on pourra le faire. Le législateur risque donc d'écarter le personnel éducateur et possiblement les agents de relations humaines.
Quel est l'impact? L'impact est simple: 22 CRDI qui desservent 28 000 personnes et pour lesquels il n'existe que 121 postes de travailleur social et 101 postes de psychoéducateur, tâche impossible d'accomplir la loi, sinon abandonner les services. Donc, l'expérience nous indique que, si le projet de loi tel quel est maintenu, la mission pour nous ? et on fera le message au niveau du ministère de la Santé ? est impossible à réaliser sans la contribution expresse du personnel éducateur et des professionnels non membres d'un ordre professionnel.
Ceci étant dit, quelles sont les solutions possibles? C'est facile de critiquer, mais quelles sont les solutions possibles? À première vue, deux solutions sont possibles. Il y en a peut-être d'autres, mais on vous en suggère deux. La première, une solution législative, consiste à introduire dans le projet de loi une disposition pour permettre au personnel en place et au personnel qui sera engagé par la suite de continuer à déterminer un plan d'intervention, comme ils le font, et assurer la mise en place tant et aussi longtemps qu'un ordre professionnel regroupant les éducateurs ne sera pas créé. La deuxième, administrative celle-là, mandatait l'Office des professions pour effectuer les travaux nécessaires menant à la création d'un tel ordre.
La fédération recommande donc respectueusement au législateur de permettre au personnel en place actuellement dans les CRDI de continuer à le faire en attendant que le législateur ait complété sa réforme. Ces dispositions engloberaient ainsi le nouveau personnel qui sera engagé tant et aussi longtemps que la réforme ne sera pas complétée. Sinon, sinon il devra, à notre point de vue, injecter des budgets récurrents pour permettre l'embauche de travailleurs sociaux et de psychoéducateurs, soit au moins 20 millions récurrents pour l'embauche d'environ 445 personnes, minimum.
Toutefois, cette voie est couverte de pièges. Pourquoi? Parce que les travaux du ministère de la Santé, en 2004, indiquent qu'il sera impossible de combler ces postes avant 20 ans. Entre-temps, le problème demeure entier: d'une part, on aura l'obligation légale d'avoir des professionnels accrédités à telle tâche spécifique puis, de l'autre côté, impossibilité de les recruter parce que faute de possibilité sur le marché. Aussi, nous recommandons donc que, ce que je vous ai dit tout à l'heure, tant et aussi longtemps que la réforme ne sera pas complétée, nous puissions continuer à exercer tel que nous le faisons à l'heure actuelle.
n(16 h 10)n Mais nous comprenons également que c'est un peu la voie proposée par le législateur, alors nous ne sommes pas contre le but de la réforme. Donc, si, par exemple, le gouvernement décide de maintenir sa disposition, nous demandons au moins que, tant et aussi longtemps que l'ordre des professionnels ne sera pas créé, on puisse continuer à le faire, mais que, lorsque la loi entrera en vigueur, trois ans après... seulement pour donner le temps au personnel actuel de se qualifier, de pouvoir le faire. Donc, un délai additionnel de trois ans nous serait donné.
Dans les CRDI, actuellement, c'est dans le groupe des techniciens en éducation spécialisée que nous retrouvons le plus grand nombre d'emplois. Au 31 mars, nous en comptions 2 570, ce qui représente 36 % des effectifs de notre réseau. Nous voyons un intérêt certain à ce qu'ils puissent être membres d'un ordre professionnel, idéalement dans le même que celui des psychoéducateurs, et ce, en raison de la nature des activités de ces deux groupes. Dans cette perspective, il serait souhaitable que le gouvernement mandate l'Office des professions pour entreprendre une démarche afin de permettre la mise sur pied d'un ordre professionnel regroupant les psychoéducateurs... les éducateurs plutôt. À l'intérieur de cette démarche, l'Office de la protection du consommateur... pardon, l'Office des professions pourrait être mandaté pour identifier les activités pertinentes et distinctes qui pourraient faire l'objet d'activités partagées entre certains professionnels et les éducateurs.
La Présidente (Mme Thériault): ...demander d'aller à votre...
M. Bouchard (Jean-Marie): Conclusion?
La Présidente (Mme Thériault): ...conclusion, M. Bouchard. On a déjà dépassé...
M. Bouchard (Jean-Marie): Bon, écoutez, c'est parce que nous avons plusieurs autres recommandations dans notre mémoire. Vous les avez. Je me contente de vous donner la recommandation n° 4: de rajouter, par exemple... Le législateur propose par ailleurs d'ajouter, parmi les futures activités réservées aux membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux, l'activité qui était prévue... Alors, ça peut empiéter, ça, cette responsabilité-là, sur nos agents de relations humaines. Alors, nous faisons le même problème que tout à l'heure pour les travailleurs sociaux, il devrait y avoir une possibilité d'élargissement pour couvrir les agents de relations humaines.
Enfin, dernière proposition, concernant l'Ordre professionnel des psychologues, nous proposons en résumé ceci: la fédération propose d'ajouter au projet de loi n° 50 une disposition permettant aux psychologues de poser un diagnostic psychologique concernant les troubles psychologiques et mentaux chez un individu.
Alors, en un mot, si je résume, nous sommes en faveur avec les grands objectifs du projet de loi. Par ailleurs, ces dispositions idéales créent des problèmes d'application majeurs, ce qui a pour effet de nous empêcher de continuer nos activités sans ajout d'effectifs, qu'il est par ailleurs impossible de combler avant une vingtaine d'années, suivant les projections du ministère. Voilà.
La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup pour votre présentation de mémoire, M. Bouchard. Soyez assuré que, j'en suis convaincue, tous les parlementaires ici présents ont déjà lu et regardé avec beaucoup d'attention les recommandations que vous nous faisiez part. Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole au ministre.
M. Dupuis: Alors, M. Bouchard, Mme Bégin et Mme Bédard, merci de votre présentation. Je m'excuse, j'ai été obligé de m'absenter quelques instants pendant votre présentation pour donner une entrevue sur un autre sujet complètement. Donc, je m'en excuse. Mais je n'ai pas perdu le fil quand même de vos représentations parce que vous avez estimé bon de les mettre par écrit. Alors, on ne perdra pas le fil.
Je veux vous dire deux choses. La première, vous n'étiez peut-être pas ici ce matin, mais j'ai indiqué à quelques reprises déjà que nous étions préoccupés par l'importance de ne pas occasionner de rupture de services. Vous avez parlé de la rupture de services. Les clientèles que vous desservez et le travail que vous effectuez, on reconnaît l'importance du travail que vous faites et on reconnaît le fait que les clientèles que vous desservez ont besoin de vos services, et il n'est pas question d'interrompre le service. Il n'y aura pas de rupture, on va déposer des mesures transitoires qui vont faire en sorte qu'il n'y aura pas de rupture de l'offre de services.
D'autre part, moi, je ne suis pas au fait des gens qui sont à votre emploi. J'ai bien compris la distinction que vous faites entre professionnels et non-professionnels en vertu du Code des professions et professionnels et non-professionnels en vertu des conventions collectives ou des contrats de travail. J'ai bien compris ça. J'ai indiqué aussi ce matin que j'avais donné mandat à l'Office des professions de regarder toute la question des techniciens en santé. Donc ça, c'est aussi un sujet de préoccupation, et on va regarder ça.
Est-ce que j'ai des raisons de croire que les gens... J'ai bien compris que, dans vos établissements, il y avait à peu près 200 personnes qui sont des professionnels au sens du Code des professions. Ils sont probablement plus nombreux au sens où vous l'entendez, vous, dans vos centres, les professionnels, mais est-ce qu'il y a beaucoup de ces personnes-là, qui pourraient être qualifiées en théorie de techniciens en santé, qui travaillent dans vos centres?
La Présidente (Mme Thériault): M. Bouchard.
M. Bouchard (Jean-Marie): Mme Bégin.
M. Dupuis: Mme Bégin va répondre? C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin.
M. Bouchard (Jean-Marie): Oui, Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): Alors, comme professionnels, dans le sens plus large, on a près de 700 emplois, donc un peu plus, ce qu'on appelle des agents de relations humaines, qui sont des gens qui ont des diplômes universitaires mais qui ne font pas partie d'un ordre professionnel. Donc, il peut y avoir des criminologues, il peut y avoir des psychologues qui ont un bac mais qui n'ont pas de maîtrise, ou etc. Donc ça, c'est qu'on appelle la catégorie agent de relations humaines. Au niveau de...
M. Dupuis: Je ne veux pas vous interrompre à défaut mais... Ah! c'est ça, c'est le titre d'emploi qui est l'agent de relations humaines, mais ça peut être un psychologue qui a un bac mais qui n'a pas de maîtrise.
Mme Bégin (Diane): Oui. Voilà. Voilà.
M. Dupuis: O.K. Ça peut être... Ça va. O.K.
Mme Bégin (Diane): Et ça, c'est une catégorie d'emploi qui existe au ministère de la Santé et des Services sociaux officiellement, agent de relations humaines. Donc, c'est pour ça que les employeurs ont opté pour ce choix-là. Il y a aussi plusieurs psychoéducateurs qui ne font pas partie d'un ordre, et qui ont un bac, et qui occupent des postes techniciens aussi. Alors, il y a vraiment là une variété dans l'organisation et la détermination des postes. Et, comme autres techniciens de la santé, il y a des techniciens en assistance sociale aussi, pour un certain nombre. C'est très faible dans notre réseau. C'est plus important en centre jeunesse.
M. Dupuis: Dites-moi, Mme Bégin, exemple, les gens qui sont chez vous comme agents des relations humaines mais qui sont des psychoéducateurs et qui détiennent la formation pourraient adhérer à l'Ordre professionnel des psychoéducateurs? Ça, ça réglerait un certain nombre de problèmes.
Mme Bégin (Diane): Oui.
M. Dupuis: Est-ce que vous l'avez envisagé?
Mme Bégin (Diane): Oui, puis on a une recommandation à l'effet aussi, les gens qui sont actuellement qualifiés avec un bac, qu'ils aient une mesure transitoire pour leur permettre d'adhérer à un ordre professionnel, soit par un complément de formation, si c'est nécessaire... Vous savez qu'il y a des ordres professionnels qui demandent des maîtrises, entre autres l'Ordre des psychologues, donc on a des psychologues qui n'ont pas cette classification-là. Donc, on demande une mesure transitoire de trois ans pour leur permettre de se qualifier. On est donc d'accord avec ça. Et les autres pourraient aussi, ceux qui répondent déjà aux critères...
M. Dupuis: Je vois déjà M. Leclerc en arrière, là, qui commence à avoir un sourire, qui n'est pas un rictus. Il voit déjà la possibilité d'augmenter son ordre professionnel d'un certain nombre de membres.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dupuis: Continuez, je ne veux pas...
Mme Bégin (Diane): Non, je veux juste vous dire aussi que, le portrait que M. Bouchard vous fait, et c'est vraiment notre réalité, on le souhaiterait autrement, et on travaille très fort pour développer la spécialisation au sein de notre réseau d'établissements. Notamment, depuis trois ans, on a un programme de formation sur mesure qui qualifie les intervenants pour le secteur des troubles envahissants du développement, qui est un nouveau mandat qui a été confié par le ministère à notre réseau d'établissements, et on vient de mettre sur pied ? ça commence en septembre ? un programme sur mesure de certificat universitaire en déficience intellectuelle. Ça n'existait à peu près pas au Québec. Donc, c'est difficile aussi d'avoir non seulement les catégories de professionnels dont on a besoin, mais que ces gens-là possèdent aussi la formation nécessaire à l'égard de la déficience intellectuelle et des troubles envahissants du développement. On a un double défi, et c'est très difficile d'avoir de l'attraction et de la rétention quand les formations n'existent pas.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: Merci, Mme la Présidente. M. Bouchard, Mme Bégin, Mme Bédard, je suis un peu sensibilisé à votre discours d'aujourd'hui parce qu'hier soir, dans mon comté de Chomedey, dans une de mes activités, j'étais justement à la Résidence Louise-Vachon, du CRDI Normand-Laramée, et j'étais avec le comité des résidents, et j'étais avec le directeur général du CRDI, et on parlait justement des définitions, et on parlait des cadres d'emploi, et je peux effectivement témoigner du travail exceptionnel qui est fait par les gens à l'intérieur de ces établissements-là justement pour la clientèle. Et je pense qu'on prend bonne note de vos préoccupations par rapport aux cadres d'emploi.
Mais, si on prend le projet de loi n° 50 dans son ensemble, est-ce que vous pensez que... Par rapport à la protection du public, par rapport à la protection aussi des gens qui sont dans vos centres, est-ce que ça peut avoir des effets positifs? Est-ce qu'il y a des bonnes choses dans le projet de loi, là, nonobstant toute l'histoire de la reconnaissance des professions, etc.? J'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus.
n(16 h 20)nM. Bouchard (Jean-Marie): Sans aucune hésitation, je trouve que le projet de loi, il est magnifique. Si on le projette, là, comme objectif, il est magnifique. Mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, là, tenez compte de la réalité, ce n'est pas faisable.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dupuis: Ça met du baume sur mes plaies.
M. Bouchard (Jean-Marie): Oui, mais il n'est pas faisable dans notre secteur, M. le ministre. Vous avez compris, là, on ne peut pas l'implanter. Vous n'étiez pas là quand je l'ai dit tout à l'heure, mais souvent, les projections du ministère de la Santé, ça prendrait 20 ans pour qu'on ait le personnel requis. On ne peut pas, demain matin, dire: Parce qu'on veut être parfaits, là, bien on va réduire nos services à quelques personnes seulement. On ne peut pas faire ça, là, il y a une quantité de gens considérable qui recourt à nos services, puis on emploie des listes d'attente considérables. Imaginez-vous que, s'il fallait qu'on retourne, en plus de ça, dire: Écoutez, bien là on n'a pas le personnel requis, bien on va attendre le psychologue puis on va attendre le psychoéducateur... On ne peut pas le faire comme ça.
D'ailleurs, c'est tellement vrai qu'on appuie le projet de loi que, nous-mêmes, là, nous mettons sur pied des systèmes de formation universitaire de premier et de deuxième cycle tant en troubles envahissants du développement qu'en déficience intellectuelle. Donc, on n'est pas contre la valorisation, on n'est pas contre des services spécialisés parce que notre mission maintenant, de par le ministère des Affaires sociales, c'est d'être responsables de services spécialisés deuxième ligne. On la veut, la spécialisation, mais, de grâce, coupez-nous pas les jambes, donnez-nous le temps d'aller la chercher, puis entre-temps continuons de donner nos services à la population. C'est tout ce qu'on demande.
M. Ouellette: Mme la Présidente, c'est sûr que, pour nous, on est très, très, très sensibles à vos demandes, dans un but d'arrimage, parce que vous nous suggériez d'avoir une période de façon à ce que tout le monde et de façon à ce que l'Ordre des professions puissent se pencher sur l'arrimage des différentes professions, ou des techniciens, ou de tous les cadres d'emploi que vous avez à l'intérieur de vos établissements, parce que je pense que la rupture de service, c'est très important qu'il n'y en ait pas, et c'est très important que nos résidents, nos comités de résidents, les bénéficiaires qui sont là continuent d'avoir les mêmes excellents services ? vous savez, l'insécurité, c'est sûr que c'est ça qui est le plus néfaste ? et vous nous proposiez, dans un but constructif, d'avoir une période tampon, qui pourrait être de trois ans, de façon à arrimer tout ça.
M. Bouchard (Jean-Marie): Attention! Trois ans, là, c'est en plus de la recommandation première, qui est de... Parce qu'on a un problème d'éducateurs, là. Trois ans, on n'en a pas assez pour former les éducateurs, là, il va nous en manquer. Alors, si, par exemple, vous mettez des dispositions de travailleur social et de psychoéducation pour l'évaluation, le plan d'intervention, on a un problème qui est immédiat, là. Ce n'est pas dans trois ans qu'on va le régler. Alors, il faut rapatrier les éducateurs, soit en faire un ordre spécifique soit les incorporer dans celui des psychoéducateurs. De toute façon, souvent... que l'office pourrait étudier, là. Mais le problème, le gros bogue, il est là, parce qu'il y a 36 % de nos gens, là, qui font ça, ce genre d'activité là, donc on a besoin de ça. Puis en même temps on dit: Quand vous mettrez en vigueur cette loi-là, par ailleurs, après s'être assuré que les éducateurs ont été rapatriés d'une façon quelconque, là, bien donnez trois ans après pour permettre à ceux qui veulent se qualifier de pouvoir le faire ultérieurement. Mais nous avons un problème, là, immédiat d'application de la loi telle que proposée.
Alors, si on avait le personnel requis, on n'aurait absolument aucune difficulté à accepter les modifications pour le travailleur social et le psychoéducateur. Absolument pas. On est pour même de laisser ces deux ordres professionnels là. Mais on est pris avec un dilemme cornélien, c'est impossibilité de rendre des services parce que réservé à peu près à 200 personnes dans le réseau.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin, vous voulez ajouter quelque chose?
Mme Bégin (Diane): Oui, je voulais dire: Pour le personnel en place, dans le fond pensez que là-dedans il y a des gens que ça fait 10, 15, 20 ans qu'ils font ces activités-là. Et ce qu'on vous demande de prévoir par une disposition, c'est que, tant que ces personnes-là sont en place dans nos établissements, ils puissent continuer à le faire au-delà du trois ans de transition. Le trois ans est pour aller chercher la formation ou les conditions pour s'accréditer dans un ordre professionnel, peut-être même autre qu'un éducateur spécialisé, là, ça peut être... peu importe l'ordre professionnel, mais pourvu qu'ils fassent partie de l'ordre soit des psychoéducateurs, psychologues ou travailleurs sociaux.
Et peut-être une précision sur la nature du plan d'intervention. On a l'impression, quand on lit les articles de cette loi-là, que le législateur comprend que le plan d'intervention est une responsabilité d'un intervenant ou d'un type de profession, alors que le plan d'intervention, de la façon dont c'est orchestré dans la vie des établissements, c'est le clan de la personne qui met à contribution une multitude d'intervenants et de types de professions. Alors, c'est forcément une activité qui doit être partagée entre plusieurs professions. Et de le préciser pour certaines et pas pour d'autres peut nous amener des problèmes de gestion importants au détriment de la qualité des services aux personnes. Alors, c'est trouver la façon de dire: Les professionnels doivent être impliqués dans les plans d'intervention des personnes, ça appartient aux personnes et non pas à l'intervenant. Ce n'est pas des plans de traitement d'un clinicien uniquement dans sa bulle, c'est une démarche dans un établissement pour orchestrer les services autour des besoins d'une personne. On voudrait que la loi vienne au moins supporter l'idée que ce sont des services offerts en multidisciplinarité et idéalement en interdisciplinarité.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Chomedey.
M. Ouellette: C'était effectivement un des buts de la rencontre d'hier soir que j'ai eue à la résidence, c'est d'expliquer aux résidents, d'expliquer aux parents, au comité de résidents les rencontres individuelles qui vont avoir lieu avec la direction générale pour évaluer la condition justement de chacun des résidents et par la suite bâtir en fonction de ça. Si les programmes n'existent pas mais que la personne décide de rester à cette résidence-là, c'est à la direction générale du CRDI après ça de bâtir le programme approprié, parce qu'il y a des gens qui sont arrivés là, ils avaient 18 mois, aujourd'hui ont 25 ans, et leur situation a évolué. Je suis très sensible à ça, et soyez assurés que je ferai les représentations en conséquence relativement à ça.
M. Bouchard (Jean-Marie): Juste en terminant, pour vous donner une illustration, dans notre mémoire, on a fait une projection: si on prenait le projet de loi, là, tel quel, c'est-à-dire travailleur social et psychoéducateur, en ne faisant que le plan d'intervention et de suivi, pas d'autre activité, là, on ferait ça à plein temps, suivant les effectifs qu'on a, ça leur prendrait 270 jours pour le faire, puis une année de travail, c'est 227. Ils n'arriveraient même pas en ne faisant que ça, à réaliser l'objectif de la loi. C'est une démonstration par absurde que je vous fais, mais ça montre le sérieux de la situation que ça représente pour nous, ce projet de loi là, encore une fois, tout en reconnaissant le bien-fondé de la loi.
La Présidente (Mme Thériault): C'est beau. Merci. Merci, M. Bouchard. Donc, on va aller du côté de l'opposition officielle. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. L'Écuyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, M. Bouchard. Bonjour, Mme Bégin. Puis bonjour, Mme Bédard.
Lorsqu'on fait une lecture justement du cinquième article et du paragraphe g de l'article, on dit: «Déterminer [un] plan d'intervention pour une personne atteinte d'un trouble mental ou présentant un risque suicidaire», et l'article continue avec les propos que vous connaissez, les mots que vous connaissez. Est-ce que, dans une éventuelle approche qui pourrait être plus collégiale, c'est-à-dire un plan d'intervention comme en collégialité avec une équipe interdisciplinaire, on pourrait rassurer les gens de vos maisons, avec un amendement de cette nature-là, de permettre en fait aux gens qui ont un plan d'intervention... Parce que de prime abord on semble quand même...
Vous dites que vous êtes d'accord avec le projet de loi, vous êtes d'accord aussi pour donner beaucoup plus en fait de compétences, de protéger le public, votre public que vous aimez, avec lequel vous travaillez, et là vous semblez avoir une certaine réticence au niveau surtout du plan d'intervention. Les plans d'intervention, on sait que souvent, et je pense que vous l'avez très bien exprimé, il s'agit beaucoup de personnels qui ne sont pas membres d'un ordre professionnel qui vont faire le travail de tous les jours, le travail quotidien, ce que j'appelle le petit quotidien, à chaque jour, auprès de ces gens-là. Par contre, ces gens-là à mon avis, en voyant le projet de loi n° 50, doivent être dans une inquiétude à savoir si effectivement, demain matin, ils vont pouvoir poser ces gestes-là.
n(16 h 30)n Alors, ma question, c'est en ce sens-là: Croyez-vous qu'il y aurait une possibilité, avec une interrelation... Parce que, vous voyez, s'il y a une interrelation, en fait un plan d'intervention en collégialité avec une équipe interdisciplinaire, mais... J'aimerais quand même vous entendre sur ça, parce que ça ne règle pas tous les problèmes au niveau de la compétence. Mais peut-être que ça peut être réglé pour un temps qui pourrait être de trois ans ou de quatre ans. En tout cas, il y a au moins cette fenêtre-là qui pourrait être ouverte. J'aimerais vous entendre sur ça.
La Présidente (Mme Thériault): M. Bouchard.
M. Bouchard (Jean-Marie): Vous pouvez y aller, Mme Bégin, peut-être. Je compléterai s'il y a besoin.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, allez-y, Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): Ce qu'on peut vous dire, c'est dans l'esprit dans lequel on voit le plan d'intervention et, sur le terrain, ce que vous nous dites là est tout à fait dans l'esprit. Par ailleurs, les discussions qu'on a eues avec les professionnels de notre réseau... En passant, ils ont beaucoup analysé la loi, et, oui, l'inquiétude est importante au sein des établissements, pas uniquement du personnel éducateur, mais aussi des professionnels, qui se demandent comment ils vont faire leurs tâches demain matin. Alors, ce qu'ils nous disent, c'est que, quand on nous confie la tâche d'évaluer et de déterminer le plan d'intervention et d'assurer la mise en oeuvre, on me dit que je deviens imputable de cette responsabilité-là, alors que ce n'est pas moi qui l'applique au quotidien, c'est impossible. Votre notion d'interdisciplinarité devrait être balisée aussi pour dire que ce n'est pas nécessairement uniquement le professionnel qui le détermine, qui le met en oeuvre et qui en est imputable en bout de ligne. Vous comprenez, la nuance en termes de responsabilité, ce n'est pas évident. Il faut trouver une façon de mobiliser les gens autour d'un plan d'intervention parce que c'est l'outil de rendre des services individualisés tout en s'assurant qu'on a la bonne coordination et le bon niveau de responsabilité, autant pour le déterminer que pour le mettre en oeuvre, parce que mettre un plan d'intervention en oeuvre, ça veut dire donner les interventions à la personne. Ce n'est pas qu'un intervenant qui le fait.
M. Bouchard (Jean-Marie): Vous disiez, M. le député, que l'insécurité provoquée par le projet de loi sur le personnel, elle est très grande, mais j'ajouterais insécurité chez les parents et les usagers. Ils sont inquiets, là, M. le ministre, parce qu'ils se demandent qu'est-ce qui va arriver, là. Est-ce que ça veut dire qu'on tourne dans un vacuum alors qu'on sait que nous avons déjà les listes d'attente, qu'on demande des budgets du ministère de la Santé pour développer nos services puis que par ailleurs on se fait retirer des possibilités d'action? C'est un peu contradictoire, là. On a un problème sérieux, là. Vous l'avez compris, M. le ministre, puis vous avez dit que c'est un point qui est important. Mais la préoccupation des parents est énorme, vous allez peut-être le savoir, vous aussi, là.
M. Dupuis: Je compte sur vous pour les rassurer.
M. Bouchard (Jean-Marie): Parfait.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. L'Écuyer: On a reçu le mémoire, ce matin, des travailleurs sociaux concernant dans le fond une ouverture... peut-être pas une ouverture d'autorité, si je peux m'exprimer comme ça, mais une certaine ouverture à accueillir les techniciens, les travailleurs...
M. Bouchard (Jean-Marie): Les éducateurs?
M. L'Écuyer: Les éducateurs, oui, les éducateurs. Croyez-vous... En fait, ce serait en fait une...
Une voix: Ça doit être assistant social.
M. Bouchard (Jean-Marie): Ils sont assistants.
M. L'Écuyer: Est-ce que ce serait une possibilité ou une solution?
Une voix: Ça doit être assistant social.
M. L'Écuyer: C'est parce que je vois des non en arrière, là. J'ai peut-être mésinterprété... je vois des... Mais est-ce qu'il y a une collaboration? Cet avant-midi, on a parlé beaucoup de complémentarité et aussi de consensus au niveau des ordres professionnels. Est-ce que c'est une approche qui pourrait être faite avec des ordres professionnels versus des personnes, des agents qui sont en interrelation avec ces différents ordres professionnels là?
M. Bouchard (Jean-Marie): Écoutez, c'est l'Office des professions qui va avoir le rôle considérable d'arbitrer, là. Et, si vous êtes capables d'arriver à ce genre de consensus là pour tenir compte de nos préoccupations, peu importe dans quel ordre vous les rentrez, nous autres, là, on n'a pas de problème avec ça. Notre problème, c'est qu'il y ait une possibilité de récupérer des personnes qui actuellement sont qualifiées pour le faire et qui se verraient privées de la possibilité de le faire.
M. L'Écuyer: Mais, si effectivement on suit la ligne de pensée que vous avez quand même émise, avec un trois ans, ce que j'appelle un trois ans pour qualifier votre main-d'oeuvre et, à ce moment-là... bien, qualifier, je ne veux pas quand même dire qu'ils sont qualifiés, au contraire, mais pour détenir les compétences dans le fond réservées qu'ils peuvent obtenir dans chacun des champs de pratique à intervenir, est-ce que trois ans, ça vous paraît... Vous sembliez dire que vous aviez certaines réticences. Même avec trois ans, vous avez certaines réticences au niveau quand même de l'exercice qui pourrait être fait d'ici les trois prochaines années, une recherche de compétences au niveau des groupes qualifiés pour se qualifier en vertu de la loi n° 50.
La Présidente (Mme Thériault): M. Bouchard.
M. Bouchard (Jean-Marie): Il faudrait voir comme il faut là-dessus, là. On vous a dit que, par exemple, notre préoccupation la plus grosse, c'était concernant les éducateurs. Les éducateurs représentent 36 % des personnes qui seraient visées par principalement ce genre d'activités là, les travailleurs sociaux et psychoéducateurs. On vous a proposé que les éducateurs puissent être rapatriés dans un ordre professionnel quelconque de telle sorte qu'ils auraient la possibilité de continuer de faire ce qu'ils font à l'heure actuelle.
Par ailleurs, on a dit: Lorsque la loi entrera en vigueur, donnez une période de trois ans pour les personnes qui désireraient faire partie des ordres professionnels, soit travailleur social, soit les autres professionnels, un délai, une clause grand-père de trois ans pour des activités qu'on a déjà. Mais ça ne répond pas à l'objectif premier, qui est de ne pas abandonner les services. Trois ans, on n'en a pas assez pour qualifier assez de monde pour rencontrer les besoins immédiats dont on aurait...
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. L'Écuyer: J'ai été quand même un peu surpris par rapport à votre propos à la page 19 et votre chapitre 5: «Un oubli du législateur concernant l'ordre professionnel des psychologues.» Et vous concluez en disant: «Nous recommandons que le législateur ajoute aux amendements du Code des professions une disposition pour autoriser le psychologue à émettre un "diagnostic psychologique" concernant les troubles psychologiques et mentaux chez les individus et non seulement à les évaluer. D'ailleurs, partout en Amérique du Nord, sauf au Québec, le psychologue est autorisé à poser un tel diagnostic.» Ma préoccupation a été quand même... J'ai porté beaucoup plus attention... Quand je vois votre préambule, vous dites qu'«il existe actuellement un risque important de retard dans l'intervention pour les enfants qui présentent un trouble envahissant du développement». Alors, j'aimerais que vous précisiez la pensée de votre organisme sur cette question-là.
M. Bouchard (Jean-Marie): Mme Bégin, peut-être préciser.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): Alors, cette recommandation-là vient bien sûr de nos intervenants psychologues dans nos établissements, qui vivent une réalité très difficile, et surtout les parents et les enfants vivent cette réalité-là très difficilement. C'est que l'évaluation-diagnostic d'un retard mental ou d'un trouble envahissant du développement doit passer actuellement par un diagnostic médical. Il y a peu de médecins, semble-t-il, qui, en médecine générale par exemple, peuvent poser ce genre de diagnostic là. Donc, quand ce sont des médecins de médecine générale, ils réfèrent toujours à des psychologues pour se valider ou obtiennent des évaluations des psychologues, etc.
Il y a énormément de délais qui sont dus au fait que le parent n'a pas accès directement au psychologue pour avoir une évaluation et un diagnostic, confirmation du diagnostic, par exemple, d'un trouble envahissant du développement, ce qu'on appelle les TED, autisme et autres spectres de l'autisme, et il semblerait que partout ailleurs les psychologues sont autorisés à faire ce diagnostic, bien sûr en introduisant dans leur formation les éléments particuliers, ce qui a pour effet d'accélérer énormément l'accès à un premier service parce qu'on sait rapidement quelle est la problématique que l'enfant vit, et il se ballotte moins d'un médecin à un autre jusqu'à arriver à un pédopsychiatre. Et vous savez la rareté des pédopsychiatres, j'imagine, au Québec. Je pense que ça se compte sur pas beaucoup de doigts. Alors, il y a vraiment une problématique très souffrante, je vous dirais, qui amène des délais d'accès et des répétitions d'évaluation et de questionnement à des parents avec leurs enfants à cause de ce processus-là.
Donc, dans notre réseau, des fois ils en sont à leur troisième et quatrième évaluation, les enfants qui nous arrivent, ce qui fait qu'on commence une intervention, qui devrait commencer à 18 mois, 24 mois, à trois ans, trois ans et demi. Alors, il y a des fois un an de retard juste par les délais d'accès à une évaluation rapide de leur condition. Alors, notre personnel nous dit: Nous pensons que les psychologues seraient habilités très bien, comme ailleurs, à faire cette évaluation.
M. L'Écuyer: Mme la Présidente, si vous permettez une question supplémentaire justement sur ce volet-là, quelle est votre intervention avant justement qu'il y ait le diagnostic d'un médecin?
n(16 h 40)nMme Bégin (Diane): Présentement, le ministère de la Santé exige le diagnostic, par exemple, d'un trouble envahissant du développement pour avoir accès à un type d'intervention qui s'appelle l'intervention comportementale intensive, et je ne veux pas m'étendre trop, mais qui est une intervention précoce d'une certaine nature, qui demande 20 heures d'intervention par semaine, et, pour avoir accès à ce type d'intervention là, le parent doit absolument avoir obtenu le diagnostic de trouble envahissant du développement pour son enfant, notamment. Donc, c'est beaucoup, les exigences. Je vous dirais aussi que, pour un ensemble de réseaux, que ce soit la sécurité, que ce soit l'allocation pour enfant handicapé, pour avoir des services particuliers à l'école, on exige un diagnostic de déficience. Donc, tant que le parent n'a pas obtenu ce diagnostic-là, il n'a pas accès aux services. Alors, c'est très lourd comme conséquence.
La Présidente (Mme Thériault): Ça vous va?
M. L'Écuyer: Oui. Je souhaite quand même que les inquiétudes de tous les gens qui travaillent dans vos organismes soient quand même calmées et je souhaite qu'éventuellement on puisse trouver une solution ensemble ici pour régler ce problème d'insécurité. Alors, je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, nous allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition avec le député de Dubuc.
M. Côté: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Bouchard, Mme Bégin, Mme Bédard, bienvenue à la commission. Merci pour votre mémoire. C'est un mémoire qui me touche un peu parce que je trouve que vous êtes honnêtes dans ce que vous dites, puis vous êtes aussi sensibles, et vous avez une problématique. Mais, compte tenu de l'ouverture du ministre sur la non-rupture des services, là, moi, je suis convaincu que, lorsque la loi n° 50 aura été adoptée, vous allez en être fiers puis vous allez avancer avec cette loi-là, vous allez progresser, je suis convaincu de ça. C'est évident que, là, présentement, il y a des problèmes, effectivement.
Moi, je voudrais revenir sur les agents de relations humaines. Vous m'avez dit tout à l'heure... pas à moi, mais vous avez dit à la commission que la plupart de vos agents de relations humaines étaient soit des psychoéducateurs qui ne faisaient pas partie d'un ordre, ou des psychothérapeutes, ou des psychologues qui avaient un bac mais qui n'avaient pas la maîtrise. Mais est-ce qu'il y a d'autres personnes aussi, par exemple, qui sont simplement diplômées, qui ont simplement un D.E.C., par exemple, un diplôme d'études collégiales comme agents de relations humaines?
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): Non. Le critère d'emploi, au ministère de la Santé, pour agent de relations humaines, c'est d'obtenir un bac. Donc, ce n'est que des professions...
M. Côté: Donc, ce sont tous des gens qui ont un premier diplôme universitaire.
Mme Bégin (Diane): Oui.
M. Côté: Donc, ce sont tous des gens qui seraient aptes à subir une formation continue ou une formation supplémentaire pour accéder à un ordre professionnel concerné. Alors, déjà là, on vient de régler une bonne partie de votre problème.
Mme Bégin (Diane): On a besoin de temps.
M. Côté: C'est ça. Le problème se situe au niveau, comme vous dites, des éducateurs, des techniciens en éducation, et vous proposez un ordre professionnel. Alors, je pense que le ministre a bien répondu, tout à l'heure, à votre question, ils vont la regarder.
Je voudrais aussi vous demander: Lorsque vous parlez d'un plan d'intervention et que vous dites «un plan de services individualisés», c'est la même chose?
Une voix: Non.
M. Côté: Non? Bon, bien, expliquez-moi la différence.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): Alors, le plan d'intervention est une obligation légale qui interpelle l'établissement dans son champ d'intervention à lui. Par exemple, un centre de réadaptation va orchestrer les services à partir de ses propres ressources pour un plan d'intervention en adaptation, réadaptation. Il y a des plans d'intervention en services éducatifs, c'est à l'école. Il y a des plans d'intervention dans d'autres secteurs. Mais, nous, dans notre champ de réadaptation, c'est vraiment un plan d'adaptation, réadaptation. Le plan de services individualisés interpelle une multitude de partenaires. C'est un peu comme le projet de vie de la personne ou de l'enfant et de ses proches. Donc, dans le plan de services, on va retrouver des interventions convenues avec d'autres types de... soit d'autres types de réseaux... Comme le soutien aux familles qui est donné par les CSSS va faire partie du plan de services de l'enfant, du plan de services individualisés. Les interventions qui vont être complémentaires avec l'école, avec le CPE, avec le milieu de travail vont toutes faire partie d'un plan de services individualisés. C'est beaucoup plus large et c'est intersectoriel.
M. Côté: Et l'ergothérapeute peut participer à ce plan?
Mme Bégin (Diane): Oui, oui.
M. Côté: Le travailleur social également?
Mme Bégin (Diane): C'est ça, et le professeur de l'école...
M. Côté: Le psychologue, le professeur?
Mme Bégin (Diane): ...l'éducatrice de la garderie, le SEMO, qui est le service aux habitudes de travail, là, le service d'entraînement pour la main-d'oeuvre, etc. On a des interactions avec une multitude de partenaires.
M. Côté: Ce plan de services individualisés n'est pas touché par le présent projet de loi.
M. Bouchard (Jean-Marie): Non.
M. Côté: D'accord.
Mme Bégin (Diane): Ouf!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté: O.K. L'autre question que je voulais vous demander... Bon, je pense que je l'ai perdue. Le personnel... Bon, c'est ça, je l'ai perdue. Bon, je l'ai vraiment perdue. Excusez, Mme la Présidente. Je vais laisser aller, là, parce que j'ai un blanc de mémoire complètement.
La Présidente (Mme Thériault): Bien, il n'y a pas de problème. J'ai le ministre qui voudrait faire une remarque, et il restait un peu de temps du côté ministériel, ça fait qu'on pourrait laisser M. le ministre faire son intervention, et, si jamais vous retrouvez votre question, on pourra revenir à vous.
M. Côté: Oui. D'accord.
La Présidente (Mme Thériault): Parfait. M. le ministre.
M. Dupuis: O.K. Simplement vous dire que les gens de l'office me disent qu'ils ont contacté des membres de la fédération, pour préciser certaines dispositions du projet de loi, que sont M. Boivin et M. Cloutier. Et donc j'ai demandé, moi, à l'office... Et c'est Mme Lise Lafrance, qui est présente ici, à l'arrière, qui va vous contacter pour vous préciser un certain nombre de dispositions dans le projet de loi. Il peut y avoir peut-être une incompréhension sur toute la question du champ d'exercice, là. Ça va probablement apporter une lumière au bout du tunnel que vous voyez, cette explication-là. D'autre part, on a bien entendu les représentations que vous avez faites, particulièrement au sujet des dispositions transitoires, et, encore une fois je vous le dis, bien sûr il y a la préoccupation de la protection du public, mais il y a les services que vous rendez à cette clientèle, qui est particulièrement vulnérable, et donc on va avoir une préoccupation plus que bienveillante à l'égard de cette question-là. Ça va?
M. Bouchard (Jean-Marie): Je vous remercie, M. le ministre.
M. Dupuis: Je vous en prie.
M. Bouchard (Jean-Marie): Et vous avez très bien compris, hein, qu'à moins qu'on ait mal compris le projet de loi, dès le moment qu'on parle d'actes réservés, c'est clair qu'il y a un problème sérieux, là.
M. Dupuis: On va regarder ça. Avez-vous retrouvé votre question?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, le député de Dubuc a retrouvé sa question. Donc, allez-y.
M. Côté: Bien, c'était très court, c'est probablement pour ça que je l'avais perdue. Je voulais simplement que vous m'expliquiez votre recommandation n° 5, l'oubli du législateur concernant l'Ordre professionnel des psychologues, lorsque vous recommandez que le psychologue puisse porter un diagnostic psychologique. Peut-être m'éclairer un peu plus sur ça.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Bégin.
Mme Bégin (Diane): C'est un peu l'explication que je donnais tout à l'heure, c'est que le psychologue soit autorisé à, par exemple, poser le diagnostic d'un trouble envahissant du développement, qui est vraiment un trouble mental, selon le DSM, mais qui, dans notre législation actuelle, forcément passe par un médecin, et là pour nous ça occasionne des délais d'accès de façon très importante pour les parents.
M. Côté: Mais vous savez qu'en vertu de la Loi médicale c'est que le diagnostic n'est réservé...
Mme Bégin (Diane): Aux médecins.
M. Côté: ...qu'aux médecins.
Mme Bégin (Diane): Oui. Alors, on vous sensibilise à la question.
M. Côté: C'est un gros combat que vous entreprenez.
Mme Bégin (Diane): On vous sensibilise à la question.
M. Bouchard (Jean-Marie): On était conscients.
M. Côté: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): C'est beau? Donc, Mme Bégin, M. Bouchard, Mme Bédard, merci beaucoup de votre participation.
Nous allons suspendre quelques instants pour permettre aux deux derniers groupes de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 48)
(Reprise à 16 h 51)
La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, si vous voulez regagner vos places. Je vais demander aux gens qui sont dans le fond, dans la salle, puisque nous reprenons les travaux, de bien vouloir s'asseoir ou de poursuivre vos conversations à l'extérieur. On voit que ce sont quand même des sujets très passionnants. Merci de votre attention.
Donc, nous avons deux groupes devant nous pour la dernière parution en commission: la Confédération des syndicats nationaux et la Fédération de la santé et des services sociaux pour la CSN. Je vais vous demander de vous présenter. Peut-être la vice-présidente, si je ne m'abuse, peut-être se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent.
Et je vais vous signifier, pour les fins d'enregistrement, puisque vous êtes cinq, lorsqu'il y a quelqu'un qui voudra répondre à une question ou rajouter un commentaire, de me signifier votre intention d'un geste de la main pour que je puisse vous nommer afin que le technicien puisse ouvrir le bon micro, parce qu'il y a quatre micros et qu'il y a cinq personnes. Merci beaucoup.
Donc, Mme la vice-présidente, Mme Boucher, bienvenue à l'Assemblée. Vous êtes une habituée des commissions parlementaires. Donc, vous avez environ 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire, et par la suite il y aura des échanges avec les trois partis.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
et Fédération de la santé et des services
sociaux de la CSN (FSSS-CSN)
Mme Boucher (Denise): Alors, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, membres de l'opposition, bien vous avez pu remarquer qu'on est beaucoup, mais je pense que ça en valait la chandelle.
M. Dupuis: Nous autres aussi.
Mme Boucher (Denise): Oui, oui, c'est ça, ça fait que c'est équitable.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boucher (Denise): Mais je pense que ça en valait la chandelle parce que... On a donc décidé de faire une représentation de tous ceux qui sont interpellés directement ou indirectement par la loi n° 50.
Alors, à ma droite, Laurier Goulet, de la Fédération de la santé et des services sociaux; à ma gauche, Ginette Langlois, qui est de la Fédération des professionnèles; de la FEESP, à l'extrême gauche, Danielle Beaulieu. La FEESP, pour ceux qui ne savent pas, c'est les éducateurs, éducatrices en milieu scolaire. Alors, voilà. Alors, on en a chez nous. Et enfin France St-Amour, de la Fédération nationale des enseignantes, enseignants du Québec, qui enseigne auprès des personnes que l'on touche près du rapport.
Donc, on fait une présentation assez courte parce que les gens veulent bien exercer leur droit de parole et être capables de répondre le plus adéquatement aux questions qui seront posées.
M. Dupuis: Si vous permettez, Mme la Présidente, je veux simplement indiquer, puisque vous êtes aussi nombreux et que vous êtes deux... que vous vous êtes joints les uns aux autres, que, moi, je n'aurais pas d'objection à verser dans l'enveloppe du temps, si vous n'avez pas fini votre présentation au bout du temps qui vous est alloué...
Mme Boucher (Denise): Vous allez voir, on...
M. Dupuis: O.K.
Mme Boucher (Denise): C'est fait en fonction de ça.
M. Dupuis: Oui, oui. Vous, vous avez l'air à être assez... couper court, oui.
Mme Boucher (Denise): Oui, oui.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dupuis: Je peux être ça, moi aussi.
Mme Boucher (Denise): Mais là ne coupez pas trop court quand même, laissez-moi le temps de...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boucher (Denise): Alors, la CSN estime que le projet de loi n° 50 portant sur la modernisation de la pratique professionnelle en santé mentale et dans les relations humaines rate l'occasion de présenter une vision rassembleuse pour tout le personnel concerné. La confédération adhère cependant à l'objectif et aux modalités du projet de loi en encadrant la pratique de la psychothérapie et elle appuie l'ajout d'activités d'information et de prévention en matière de suicide. Nous rejetons l'approche de modernisation en deux temps, soit le rôle des cinq professions d'abord et puis le rôle des techniciens et des techniciennes plus tard, qui nous semble réductrice, voire dangereuse pour l'avenir des services et l'avenir professionnel des techniciens et des professionnels de la santé mentale et des relations humaines. En clair, ceci envoie un message brutal de dévalorisation et de disqualification pour le personnel.
Nous considérons que le gouvernement doit retirer du projet de loi tout le volet concernant l'introduction d'activités réservées à certains ordres professionnels, principalement des activités d'évaluation ? et je pense qu'on a entendu, tout à l'heure, exactement ou à peu près la même chose autour de ce volet-là ? faute de justification suffisante et d'une capacité d'appréciation des impacts qui en découlent, particulièrement dans le réseau de la santé et des services sociaux, déjà fragilisé par les récents changements de structures et par une rareté de main-d'oeuvre qualifiée. Je le sais, vous l'entendez souvent, mais, quand on parle des récents changements, je vous rappelle tout le volet de la loi n° 30 particulièrement qui a remodifié, recomposé et qui a créé les CSS.
Dans le secteur de la santé et des services sociaux, les deux fédérations concernées, soit la Fédération de la santé et des services sociaux et la Fédération des professionnèles, regrettent que le projet de loi amorce l'entreprise de modernisation en ne mobilisant que le quart du personnel, semant ainsi l'inquiétude auprès de trois quarts des autres professionnels du secteur. En actualisant les rôles de seulement cinq professions, l'approche laisse en rade le gros des effectifs et va à l'encontre des appels répétés à la valorisation de l'ensemble du personnel concerné.
En bref, que veut régler le projet de loi n° 50? Ce projet de loi survient dans un contexte où le personnel est surchargé et impatient de répondre adéquatement aux besoins souvent complexes de près de 1 million de personnes aux prises avec divers problèmes reliés à la santé mentale et aux relations humaines. J'étais contente de vous entendre tout à l'heure, M. le ministre, quand vous avez dit que vous entendiez bien et que vous n'aviez pas l'intention qu'il y ait des coupures de services, mais ça soulève cette question-là aussi.
Pour la CSN, il est inacceptable de moderniser l'activité de seulement quelques professions alors qu'elles font partie d'une dynamique regroupant de multiples prestataires de services. Alors que les pénuries de personnel causent déjà des problèmes, nous croyons que ce projet conduira à des conflits plutôt qu'à la collaboration souhaitée entre les professions et les disciplines. Et, comme cet accroissement du rôle et de la place des spécialistes coûtera plus cher, le sous-financement des divers secteurs s'accentuera.
Quant aux 5 000 techniciens et techniciennes d'éducation spécialisée travaillant présentement avec compétence dans les écoles auprès des élèves handicapés, en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, ils seront affectés dans leur capacité de faire du dépistage puisque l'évaluation des enfants sera réservée aux professionnels membres des ordres. Il est à craindre que ce changement freine le dépistage et retarde la prestation de services adaptés.
Du côté des collèges et des universités, le projet de loi n° 50 dévalorisera les formations techniques et modifiera substantiellement l'attrait des programmes et des carrières qui en découlent. Bien que la formation en techniques d'éducation spécialisée, entre autres, offerte, depuis plus de 35 ans, dans 24 cégeps, ait toujours donné satisfaction aux employeurs, elle sera remise en question. Des actes professionnels qui étaient jusqu'à maintenant posés par des éducateurs seront en effet réservés aux psychoéducateurs.
Le projet de loi a le même effet sur les techniciens en travail social et les techniciens en intervention en délinquance puisqu'il réduit considérablement leur champ d'exercice en rendant leur pratique tributaire de l'évaluation effectuée par d'autres professionnels. La formation au collégial s'en trouve discréditée au profit d'un modèle plus élitiste. Cette disqualification s'inscrit en outre à contre-courant de deux démarches gouvernementales récentes, soit l'équité salariale et la reconnaissance de la complexité des tâches.
Nous croyons de plus que ce projet de loi veut imposer une professionnalisation des services sociaux, de la santé mentale et des relations humaines selon le modèle médical en renforçant le rôle des professions appelées à encadrer d'autre personnel, ce qui faciliterait le transfert de services et de personnel des établissements publics vers les cliniques privées, comme cela s'est passé dans le domaine de la réadaptation. La confédération propose une autre vision, plus interdisciplinaire du travail, une approche plus sociale et communautaire dans les services.
Enfin et avant de présenter nos recommandations, je veux vous mettre en garde de répéter, à l'égard des techniciens et des professionnels, l'erreur coûteuse commise envers les infirmières auxiliaires, sur lesquelles on a dû d'ailleurs, d'après la loi n° 90, leur redonner des actes, revaloriser cette formation-là.
n(17 heures)n Alors, dans nos propositions, nous vous recommandons, entre autres, que la modernisation des pratiques professionnelles s'appuie sur la prévision des besoins futurs. On vous recommande aussi de mettre sur pied une table de travail réunissant des représentants de l'ensemble des personnels concernés par les activités et tâches actuelles afin de discuter d'une modernisation des rôles et de leur partage. On vous demande aussi de travailler à déterminer les besoins et modalités de formation soulevés par la modernisation professionnelle dans ce secteur. Alors, si on a demandé la table, c'est que cette fois-ci, contrairement à l'époque au rapport Bernier, on n'a pas été consultés. Alors, je pense que ça, c'est déplorable, parce qu'on aurait pu être un apport important. Alors, nous profitons donc de cette consultation pour vous faire part de nos commentaires.
Alors, voilà. On est prêts.
La Présidente (Mme Thériault): Vous êtes prêts? C'est bien pour un si grand groupe.
M. Dupuis: C'est bon, ça, aïe!
La Présidente (Mme Thériault): Numéro un. On va pouvoir passer aux échanges. M. le ministre.
M. Dupuis: Je ne sais pas si... Vous n'étiez pas présente ce matin, je pense, quand j'ai déposé une lettre qui fait état d'un mandat que je donne à l'Office des professions. Vous n'êtes pas au courant de ça? Je vais vous la lire, avec votre permission.
Mme Boucher (Denise): Vous avez du temps, je vous en donne.
M. Dupuis: Oui, c'est vrai, je le sais. Vous êtes bien fine. C'est rare que vous me donniez quelque chose, à la CSN, ça fait que je vais le prendre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boucher (Denise): ...à d'autres, qu'est-ce que vous voulez.
M. Dupuis: Ha, ha, ha! C'est une lettre que j'ai fait parvenir, en début d'année, au président de l'Office des professions, qui m'accompagne aujourd'hui, et lui-même l'a reçue le 30 janvier 2008. Je vais vous lire un seul paragraphe, là, parce que je vais vous en donner une copie, de toute façon. Je lui donne donc le mandat de faire trois choses. La première, c'est d'«entreprendre les démarches nécessaires auprès des criminologues et des sexologues ? mais vous n'en avez pas parlé, là ? afin de les intégrer au système professionnel».
Le paragraphe qui vous intéresse, vous autres, c'est: «Entreprendre l'analyse de la...» Ça ne va pas aussi loin que ce que vous voulez, là, de ce que vous venez de me dire. Mais: «Entreprendre l'analyse de la situation des activités de l'ensemble des techniciens oeuvrant dans le domaine de la santé et des services sociaux, en collaboration avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, le ministère de l'Éducation, [...] Loisir et [...] Sport ainsi qu'avec les représentants de leurs réseaux respectifs, et ce, après que les travaux parlementaires concernant la modernisation de la pratique professionnelle en santé mentale et en relations humaines auront été complétés.» La dernière partie du paragraphe que je viens de vous lire ne vous satisfait pas parce que, vous, vous voudriez que les techniciens soient tout de suite inclus dans le projet de loi puis qu'on règle cette question-là. On n'ira pas jusque-là, je vous le dis, là. Moi, je suis assez transparent de nature, quitte à ce que vous vous fâchiez contre moi, mais j'aime mieux que vous le fassiez devant moi, c'est plus facile à régler. Mais on est préoccupés...
Mme Boucher (Denise): Est-ce que j'ai une réputation d'être sévère?
M. Dupuis: Non, non, non, je vous taquine. Non, non, je vous taquine, Mme Boucher. Je vous taquine. Je vous taquine.
Mme Boucher (Denise): Il me semble qu'ailleurs, d'habitude, ça va bien dans les autres commissions.
M. Dupuis: Je vous taquine. Oui, oui. Non, c'est simplement pour vous dire qu'on est conscients de cette question-là, les techniciens, d'une part, donc on va travailler de façon importante là-dessus.
Deuxièmement, on a la préoccupation aussi ? qui devrait normalement vous satisfaire ? qu'il n'y ait pas d'interruption de l'offre de services, qu'il n'y ait pas de rupture. Il va y avoir des dispositions transitoires qui vont faire en sorte qu'on va s'assurer qu'il n'y ait pas de rupture d'offre de services.
Ce que je veux vous dire en terminant, Mme Boucher, parce que je vais laisser mes collègues qui veulent poser des questions pouvoir les poser, ce que je veux vous dire, c'est: voilà un domaine, Mme Boucher, où, vous le savez mieux que moi, voilà un domaine où, avant qu'on se penche sur cette question-là, il y avait ? j'emploierai un mot qui fait figure, là, qui est peut-être trop important ? mais il y avait une anarchie totale. Moi, là, j'ai eu des discussions avec Mme Charest, qui est la présidente de l'Ordre des psychologues, où elle me disait: Il fut un temps où Danielle Desrosiers puis moi, on ne se parlait pas, là, puis on ne voulait pas se parler non plus, alors qu'aujourd'hui ? ce n'était pas personnel, Mme Desrosiers, là, mais c'était professionnel ? alors que...
Mme Boucher (Denise): Elles ont même pris un café, tout à l'heure, ensemble.
M. Dupuis: ... ? oui, c'est ça ? alors, Mme Boucher, que, là, ils ont réussi, ces ordres professionnels là qui sont compris dans le projet de loi n° 50, ils ont réussi non seulement à se parler, mais ils ont réussi même à obtenir une unanimité, qui, j'en conviens, Mme Boucher, là, je ne conteste pas ça, ne vous satisfait pas totalement mais qui doit vous satisfaire en partie puisque voilà un champ d'activité, la santé mentale, où on commence à être capable de se parler, où on commence à être capable de faire les compromis suffisants pour être en mesure, oui, de desservir la clientèle qui doit être desservie par toutes ces professions-là, par ces techniciens-là mais aussi avec un souci de protéger le public de la meilleure façon possible.
Donc, la représentation que vous faites, je veux vous dire, là, on ne s'y rendra pas, à la représentation que vous faites, d'un seul coup, mais on va faire des avancées, on va faire des pas. On va protéger l'offre de services. On va avoir une préoccupation pour ce que vous appelez les techniciens, là, ce qu'il est convenu d'appeler les techniciens en matière de santé. On a une préoccupation pour ça. Et très honnêtement, entre vous et moi, Mme Boucher, je pense qu'il y a une avancée qui se fait là, là. Le projet de loi n° 50, moi, je le vois, le projet de loi n° 50, honnêtement comme une porte d'entrée, une grande porte d'entrée dans un domaine où auparavant, malheureusement, il y avait l'anarchie. Et là c'est une belle porte d'entrée. Un projet de loi, moi, je n'ai jamais pensé que c'était statique, j'ai toujours pensé que c'est dynamique autant que la société est dynamique elle-même. Alors, il y a de l'espoir, autrement dit, Mme Boucher.
C'est la seule remarque que je voulais faire. Je vais tantôt demander à la présidente de permettre à mes collègues de poser des questions.
La Présidente (Mme Thériault): Mme Boucher, oui, allez-y, certainement.
M. Dupuis: Oui, oui, vous... Bien oui.
Mme Boucher (Denise): Alors, je suis contente de voir qu'on n'est plus à l'ère des décrets.
M. Dupuis: Mme Boucher, ça va bien, là.
Mme Boucher (Denise): Ha, ha, ha! Oui, quand même. Non, mais je voulais juste vous dire...
Une voix: ...et des bâillons.
Mme Boucher (Denise): Ou des bâillons, oui, c'est ça, plutôt, oui.
Une voix: ...
Mme Boucher (Denise): C'est vrai.
M. Dupuis: Autres temps, autres moeurs.
Mme Boucher (Denise): Ah! que voulez-vous! Mais ce que je veux dire, c'est que, quand on parle de modernisation à deux temps, on ne veut pas nécessairement dire qu'il faut qu'il y ait intégration unilatérale des techniciens. Ce n'est pas dans ce sens-là qu'on le disait. Mais selon nous ce qu'il faudrait qu'il soit fait, c'est qu'on puisse évaluer les tâches des uns et des autres avant de pouvoir faire la modernisation pour éviter de créer des conflits à l'intérieur même des services. Alors, c'est dans ce sens-là que, nous, on le plaçait, sauf que, si vous m'invitez, là, ou nous invitez à participer à votre table, on va y aller, ça, c'est sûr.
M. Dupuis: Mme Boucher, je suis certain que pas plus le gouvernement que l'office ne refuse que votre rapport, qui peut être très positif, entre dans les considérations. Je veux juste vous dire, Mme Boucher, que mon réflexe à moi, là, quand vous me dites: On voudrait, nous autres, que tout le travail soit fait dans un... mon réflexe à moi, c'est de me dire: Commençons donc par le projet de loi n° 50, commençons donc par l'adoption du projet de loi n° 50, qui est une amélioration importante, très importante dans ce domaine de la santé mentale, commençons par ça, puis on va continuer le travail. C'est simplement ça qu'on dit, alors que, vous, vous dites: Attendez donc avant de l'adopter, puis faites donc tout, puis vous l'adopterez après. Nous autres, on dit: Bien, pourquoi on n'irait pas, là, dans un premier temps, puis continuer le travail ensuite? Mais le travail va se continuer, puis vous allez être consultés.
Mme Boucher (Denise): ...c'est pour ça qu'on mettait la table. Mais M. Goulet va faire un petit bout là-dessus.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, allez-y, M. Goulet.
M. Goulet (Laurier): Oui. Bien, c'est-à-dire que, nous, sur la question du projet de loi, il y a certains aspects du projet de loi, on l'a dit, qui sont intéressants. Au niveau de la psychothérapie, on est tout à fait d'accord avec ça. Toute la question de la prévention du suicide, on est aussi d'accord avec ça. Mais là s'arrête notre accord, parce que d'aller de l'avant puis d'être obligé de constater après que ça cause des préjudices, que ça cause des problèmes de fonctionnement... Nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'aller de l'avant avec le premier volet, ça va. Le volet des actes réservés, nous, on pense qu'il faut mettre un bémol là-dessus. Et il y a encore beaucoup trop de... Le réseau est assez fragilisé. On est en pénurie de main-d'oeuvre depuis quelques années, on va l'être encore pour un bon bout de temps. On n'est pas les premiers à mentionner cet élément-là, certainement pas aujourd'hui, puis il va y en avoir d'autres toute la semaine, j'imagine.
Alors, nous, toute la question des actes réservés puis du risque de rupture de services, du risque de dévalorisation pour les... on parle des techniciens en travail social, on parle des techniciens en éducation spécialisée, mais, moi, je veux aussi rappeler tous les agents de relations humaines. Et, demain, je pense que l'Association des centres jeunesse va aussi présenter un mémoire où ils ont une très grande préoccupation pour les agents de relations humaines, qui ne pourraient pas, demain matin, faire partie d'un ordre professionnel, qui ont différentes formations, qui ont différents bacs mais qui ne pourraient pas faire partie d'un ordre professionnel.
Alors, nous, pour nous, pourquoi aller de l'avant avec le projet de loi, avec les actes réservés, puis être obligé de faire des constats par la suite? Nous, on dit: Il faut d'abord faire une analyse en profondeur des impacts de ça. Et d'ailleurs l'ensemble des gens que je représente et que nous représentons nous disent souvent, et particulièrement depuis le rapport Trudeau: Pourquoi, moi, demain matin, je ne serais plus qualifié pour faire des actes que je fais depuis 10, 15 et 20 ans? Ça, c'est la première question. Et la deuxième question: Pourquoi je serais obligé d'adhérer à un ordre professionnel pour faire des actes que je fais maintenant? Est-ce qu'il y a panique en la demeure dans le réseau de la santé et services sociaux? Les gens, là, qui ne sont pas membres d'un ordre actuellement rendent les services à la population de façon très correcte. D'ailleurs, les sondages que vous faites auprès de la clientèle le démontrent à chaque fois, là.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: M. Goulet, deux choses, M. Goulet. La première, c'est: vous pouvez rassurer votre monde, il va y avoir des mesures transitoires qui vont faire en sorte qu'ils vont... Oui, oui, deux secondes.
Une voix: ...
n(17 h 10)nM. Dupuis: O.K. Mais ils vont pouvoir continuer à donner le service qu'ils donnent actuellement. Il va y avoir des mesures transitoires qui vont permettre ça.
L'autre chose que je veux vous dire, M. Goulet, c'est la suivante: là, il y a un équilibre... il y a un équilibre... excusez-moi, il y a unanimité, consensus. Il y a des gens qui appellent ça un consensus. Moi, de ce que je constate, c'est qu'il y a une unanimité sur un certain nombre de choses, dans le projet de loi n° 50, entre des ordres professionnels qui étaient à couteaux tirés, à hue et à dia, avant que le travail ne commence à s'effectuer. De la même façon que j'ai hésité quand il s'est agi de passer un projet de loi pour les comptables, les comptables agréés, de la même façon que je ne voulais pas aller jouer dans cet équilibre-là, actuellement, s'il fallait que je me rende à votre demande, j'aurais peur, M. Goulet, que cette belle unanimité ou ce consensus s'effrite et qu'on soit obligés de recommencer, de reculer en arrière. Excusez-moi, de reculer en arrière, c'est un pléonasme, mais de reculer.
Donc, dans le fond, là, on dépose un projet de loi qui est une porte d'entrée importante, qui est une ouverture, qui respecte une unanimité, un consensus qui est survenu, puis on va avancer là-dedans, puis on va faire en sorte qu'on puisse, comme j'ai dit ce matin, le monde idéal n'existant pas, là, on comprend ça, mais s'approcher le plus possible vers le monde idéal et permettre à vos gens et aux gens que vous représentez d'y trouver une certaine satisfaction.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. J'ai Mme Langlois qui veut faire une intervention, le député de Laval-des-Rapides par la suite. Il nous reste environ sept minutes. Mme Langlois, allez-y.
Mme Langlois (Ginette): Je voulais intervenir sur la notion d'anarchie totale. Vous avez nommé ça, M. le ministre. J'aimerais ça savoir où était l'anarchie totale. Sûrement pas dans le réseau public. Nous, la vision qu'on a du réseau, c'était un réseau où les gens se partageaient assez bien les rôles de chacun dans des équipes interprofessionnelles, comme le nommait le groupe avant nous.
Les problèmes qui sont vécus dans le réseau, parce que, oui, il y en a, des problèmes, mais les problèmes font référence davantage à des surcharges de travail, à des pénuries de personnel et non pas à des actes qui seraient dangereux pour la population, parce que nos organismes publics possèdent déjà suffisamment de mesures de contrôle avec justement la loi n° 83, avec les commissaires, les commissaires locaux aux plaintes, les comités d'agrément qui se font. Il y a des processus également de contrôle pour l'acte professionnel avec les conseils multis qui sont dans les établissements. Il y a des processus de probation, de formation continue. Les équipes de professionnels se font aussi de la formation continue entre eux pour améliorer la qualité de la pratique.
Donc, nous, là où on voyait le problème était davantage au niveau du réseau privé, et il me semble que le Dr Trudeau faisait mention de ça aussi, qui était à l'origine de son mandat, où il y avait un besoin de protéger au niveau de la psychothérapie dans le domaine du privé. Mais, dans le domaine du public, nous, on n'a pas vu de population en danger par des actes qui étaient faits par des personnes non qualifiées.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci beaucoup. Alors, Mme Boucher, M. Goulet, Mme St-Amour, Mme Beaulieu, Mme Langlois, Mme Lapierre, bien merci de votre participation à nos travaux. Et je pense qu'un élément qui ressort des délibérations que j'ai vues aujourd'hui, je pense que, lorsqu'on parle... Et l'intérêt de protection du public, là, tout le monde le partage. La protection évidemment, c'est la vertu. On aurait un problème si, autour de la table, les gens qui participaient aujourd'hui ne nous disaient pas qu'ils n'avaient pas cet intérêt-là, là. On aurait un sérieux problème. Je ne doute pas que vos représentations sont aussi issues du même souci de protection du public.
Et on parlait aussi, un peu plus tôt, de souplesse, c'est-à-dire qu'il faut... Vous parliez du manque de main-d'oeuvre auquel on va faire face, auquel on fait face déjà dans différentes disciplines, et il va falloir y faire face, tout le monde ensemble, et ça interpelle autant les ordres que l'organisation du travail dans le secteur privé mais dans le secteur public aussi, c'est-à-dire que souplesse ne veut pas dire d'abuser des gens, là, puis des travailleurs, loin de là, mais il va falloir sortir un peu de la façon dont on a conçu les choses dans le passé, à certains égards. Et ce que j'ai entendu aujourd'hui, d'une part, c'est...
J'ai posé la question un peu plus tôt, notamment à l'Ordre des psychologues ce matin, à savoir comment comptaient-ils favoriser l'accueil ? et l'accueil peut prendre différentes formes, là ? mais l'accueil de personnes compétentes qui ne sont pas nécessairement admissibles à un ordre. Et donc, dans ce sens-là, quand on parle... Et peut-être que la table que le ministre a demandé au président de l'Office des professions de mettre sur pied, ça va permettre justement de dire: Écoutez, là, il ne faut pas laisser des gens pour compte. Les besoins, ils sont là, on les reconnaît tous. Maintenant, c'est de s'assurer que tout le monde puisse contribuer, et en ayant en tête la protection du public pour pouvoir justement livrer des services en psychothérapie, en termes de psychologie puis tous les éléments, là, qui y sont reliés.
Mais une des questions... Et j'ai entendu ce que vous disiez il y a quelques instants, mais il y a une de vos recommandations qui m'a un petit peu... Peut-être que j'aimerais en savoir un peu plus, je suis un peu étonné. À la recommandation n° 3, vous faites référence au fait que la CSN recommande de retirer du projet de loi n° 50 tout le volet concernant l'introduction, pour certains ordres professionnels, d'une réserve d'activités à risque de préjudice, et j'avoue un peu mon étonnement. Peut-être que c'est moi qui ne comprends pas tout à fait, mais, lorsqu'on parle d'activités à risque de préjudice, c'est déjà quelque chose qui est assez cerné comme définition, il me semble.
Dans ce contexte-là, est-ce que vous ne croyez pas qu'il pourrait y avoir en tout cas un impact sur la protection du public si on retirait tout ce volet-là du projet de loi n° 50?
La Présidente (Mme Thériault): M. Goulet, vous avez deux minutes.
M. Goulet (Laurier): D'accord. Bien, finalement, ces actes à risque de préjudice, c'est ce qu'on appelle communément les actes réservés. Les gens les font aujourd'hui. Ils les font aujourd'hui, ces gens-là, les travailleurs, les travailleuses dans le réseau. Alors, qu'est-ce qui fait que, demain, ça éclaterait, que ce serait le bordel demain?
Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que pour le moment c'est prématuré. Il y a encore beaucoup de travail à faire à ce niveau-là. Donc, il faut retirer du projet de loi l'identification ou la détermination des actes réservés et il faut poursuivre les travaux par le biais d'une table de concertation, et par la suite on en fera l'évaluation. Mais pour le moment, nous, pour nous, on pense que c'est prématuré et même préjudiciable de faire ça.
Et d'ailleurs, sur la question de la protection du public, en passant, c'est comme l'idée de ceinture, bretelles et velcro. Les lois qu'il y a, existant actuellement, dont la loi sur la santé et services sociaux, protègent très bien le public au niveau des services qui sont rendus. Alors, pour nous, c'est vrai qu'on est préoccupés par la protection du public, mais on pense qu'on n'a pas besoin de rajouter le velcro à la ceinture puis aux bretelles.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, on va aller du côté de l'opposition officielle maintenant avec le député de Saint-Hyacinthe.
M. L'Écuyer: Alors, bonjour, Mme Boucher. Bonjour, Mme St-Amour, Mme Beaulieu, ensuite Mme Langlois, Mme Lapierre et M. Goulet.
En fait, ce que je vois dans vos propos, c'est que vous avez... et je pense que ça se voit dans vos propos, c'est que vous êtes quand même très émotivement chargés en rapport avec le projet de loi n° 50. Moi, où j'en suis, c'est que je pense que la préoccupation première, l'objectif, puis ce que j'ai entendu depuis le début de l'avant-midi...
Je reviens à l'accessibilité compétente au niveau... une accessibilité compétente. Alors ça, c'est le terme, moi, que j'ai retenu de ces préoccupations-là, et je pense que, vous, dans vos interventions de tous les jours, la compétence doit être quand même à la base même de vos interventions, surtout avec une clientèle qui est quand même plus ou moins... qui est plus vulnérable que les autres avec qui vous travaillez. Alors, moi, c'est ce but-là. Je veux dire, je suis peut-être euphorique dans mon interprétation, mais je pense quand même que, cette compétence-là, vous avez à mon avis aussi ce sens de la préoccupation de la compétence, autant l'ensemble des ordres professionnels que nous avons entendus ce matin et cet après-midi. Je comprends qu'il y a des inquiétudes, là, mais je voudrais quand même vous entendre au niveau de la compétence. Cette compétence-là se traduit des fois ? bien, il faut quand même l'admettre ? par des ordres professionnels, par de la formation continue, par aussi des interventions sporadiques pour vérifier les compétences. Et aussi je voudrais vous entendre sur cette question-là parce que pour moi c'est très important, au niveau de la compétence, compte tenu du service offert à une population ou à des clients qui sont vulnérables.
Mme Boucher (Denise): Avant de donner la parole à Mme St-Amour, je veux juste vous indiquer que le fait d'appartenir à un ordre professionnel ne fait pas de vous nécessairement quelqu'un qui peut être compétent. Alors, ça peut aider, mais, la question, on peut se la poser. Ce n'est pas là pour ça, les ordres professionnels, de toute façon.
M. L'Écuyer: ...votre opinion, quand même je...
Mme Boucher (Denise): Non, non, mais c'est parce que vous avez ouvert là-dessus. Alors, je vais demander à Mme St-Amour de répondre.
La Présidente (Mme Thériault): Allez-y, Mme St-Amour.
Mme St-Amour (France): Oui. Alors, c'est évident que nous nous sentons directement concernés quand on parle de compétence parce que, dans le milieu collégial, les techniciens reçoivent quand même une formation qui leur permet de faire, depuis plus de 40 ans, on l'a dit, depuis que les cégeps existent, ce pour quoi ils assument les compétences aujourd'hui, qui sont d'ailleurs reconnues par l'ensemble des milieux, là, de travail. On parle du niveau de satisfaction des employeurs, je pense que ça ne remettait pas en cause la formation... D'ailleurs, pour les trois techniques humaines concernées, techniques d'éducation spécialisée, techniques d'intervention en délinquance et techniques en travail social, ces compétences-là sont appuyées, sont basées suite à une analyse de la situation de travail qui a été effectuée dans le début des années 2000 et, pour la technique d'éducation spécialisée, qui a aussi été révisée en 2004, avec l'ajout d'une compétence pour les troubles langagiers.
n(17 h 20)n Donc, ce pour quoi, aujourd'hui, on établirait des actes réservés, ce sont les compétences pour lesquelles les milieux de travail, en 2000, nous ont quand même confirmé la valeur et la nécessité d'enseigner ces compétences-là telles que vous les nommiez tout à l'heure. Donc, c'est difficilement... en tout cas c'est questionnable, de notre côté, à savoir: Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui on ne pourrait plus enseigner ça parce que les gens ne sont pas compétents de le faire? Je vous dirais que, si le projet de loi passe, bien ça suppose une révision de l'ensemble des trois programmes, une révision importante parce qu'on revoit la finalité du programme et qu'on revoit même, je vous dirais, au-dessus du tiers et voire même des fois la moitié des compétences visées pour lesquelles présentement les étudiants sont formés.
Alors, quand on parle de l'accessibilité à l'enseignement supérieur via le collégial, bien je pense que ça remet même en question les fondements mêmes de l'enseignement supérieur au collégial parce que finalement les enseignements qui sont effectués, les compétences qui sont développées, bien, viendraient, à ce moment-là, à réduire à un rôle davantage d'exécutant... Il me semble que la formation collégiale n'a pas été envisagée, voilà 40 ans, sous cet angle-là. Il me semble qu'on remet encore en question fondamentalement la capacité de l'enseignement supérieur à offrir l'enseignement nécessaire au développement des compétences qui permet d'avoir accès à des emplois de qualité.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. L'Écuyer: Mme la Présidente, simplement pour un peu élaborer dans cette question-là, vous retrouvez, dans le projet de loi, au niveau en fait de l'apprentissage des compétences, là, que vous enseignez, vous trouvez quand même un empêchement à poser certains gestes futurs par certains techniciens. C'est ce que je dois comprendre dans votre intervention?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, Mme St-Amour.
Mme St-Amour (France): Tout à fait, toute la question de l'évaluation. À partir du moment où la... Dans les compétences qui sont enseignées dans l'ensemble des trois techniques humaines que je mentionnais tout à l'heure, il y a toute une question d'évaluation des besoins de la personne en difficulté qui s'effectue, parce qu'une intervention ne peut pas s'effectuer sans avoir préalablement évalué les besoins de la personne et par la suite la mise en place d'un plan d'intervention qui répond aux besoins de la personne. Et là, selon la technique dans le fond ou la formation du technicien, c'est soit à un plan plus individuel pour les techniciens en éducation spécialisée, ou à un niveau d'individu ou de groupe pour les techniciens en travail social, ou sous un angle davantage d'intervention en délinquance pour les techniciens en intervention en délinquance. Mais c'est clair que l'évaluation transcende plusieurs compétences, parce qu'on ne peut pas faire une intervention sans préalablement avoir évalué la personne, les besoins de la personne sous l'angle de son adaptation pour être en mesure de bien viser et de bien cerner des objectifs pour permettre à la personne de développer les ressources nécessaires pour être en mesure d'être davantage adaptée ou davantage être mieux qualifiée pour être capable de s'assumer dans la vie par la suite.
M. L'Écuyer: Croyez-vous qu'avec le projet de loi présentement qu'on a devant nous comme étude... pourrait, avec des amendements possibles, faire intervenir dans le fond ce processus interdisciplinaire avec les techniciens? Selon vous, est-ce que c'est possible, à l'intérieur de certains articles du projet de loi, au niveau des plans d'intervention, de faire intervenir un processus de collégialité ou de collaboration interdisciplinaire? Si je regarde comme le paragraphe g, je donne juste un exemple, au cinquième article, on dit: «[Détermine un] plan d'intervention pour une personne atteinte d'un trouble mental ou présentant un risque suicidaire», et l'article continue en ce sens-là. Est-ce qu'il y aurait lieu d'une collaboration interdisciplinaire avec d'autres intervenants qui ne sont pas nécessairement professionnels?
La Présidente (Mme Thériault): Mme St-Amour.
Mme St-Amour (France): Oui, bien je pense que ça dépend de l'angle de la collaboration dont vous le mentionnez. Pour nous, ça a toujours été une question de collaboration interdisciplinaire. On a toujours reconnu les compétences de chacun. Cependant, le projet de loi vise à réserver des actes, un peu ce que mon collègue mentionnait, vise à réserver des actes qui sont présentement assumés et effectués par l'ensemble des techniciens visés dans les trois techniques humaines.
Alors, le projet de loi, est-ce qu'il peut ouvrir les portes? Bien, moi, je pense qu'il doit considérer les techniciens dès le départ parce que ? je fais référence un peu à l'élément qu'on apportait ? le fait de le mettre en deux temps, bien ça suppose, à ce moment-là, inévitablement une hiérarchisation entre les deux secteurs. Alors, comment par la suite les techniciens pourront assumer une place qu'ils assument déjà, comment ils pourront partager les actes et collaborer si, au point de départ, on a réservé des actes à des professionnels et que les techniciens ont été d'autre part évacués dans un premier temps?
Alors, je comprends qu'il y a des mesures transitoires, mais est-ce que ces mesures transitoires là pourront, à ce moment-là, respecter la valeur des techniciens? Parce qu'éventuellement ce que je comprends, c'est qu'il y aurait quand même une deuxième phase où est-ce qu'il faudra revoir de toute façon le rôle des techniciens à partir de la formation. Et là je me dis: On arrive toujours à cette question-là sur la valeur systémique de la chose.
Moi, je pense qu'à partir du moment où on touche un aspect d'un système, dont un aspect de personnes, d'un groupe qui assume une responsabilité commune telle qu'elle est vécue présentement, bien ça suppose inévitablement un effet sur l'autre partie du système. Est-ce que le projet de loi présentement a des ouvertures? Moi, je trouve que, présentement, pas de la façon dont il est libellé. Mais, moi, je pense que ça va être important qu'on considère les techniciens et qu'on considère la valeur des compétences qui sont développées pour être en mesure de les mettre partenaires dans ces éléments-là. Mais présentement le projet de loi les évacue, ça fait qu'il est difficile de dire quelles sont les portes ouvertes. Et je ferais juste un lien en disant: C'est peut-être une porte d'entrée, mais je dirais que la vie, elle se vit dans la maison, elle ne se vit pas dans le vestibule, et c'est là qu'il y a une partie du problème, à mon avis.
La Présidente (Mme Thériault): Il y a Mme Langlois, je crois, qui veut rajouter aussi... Mme Langlois, vous voulez en rajouter sur la réponse?
Mme Langlois (Ginette): Oui. Bien, je voulais revenir sur la notion de compétence, pour éviter qu'on soit mal cités, en lien avec les ordres professionnels. Ce qu'on veut dire, c'est que, pour les travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux, nul besoin d'appartenir à un ordre professionnel pour maintenir un niveau de compétence. Les professionnels du réseau ont le souci d'aller se chercher des formations complémentaires aux nouvelles problématiques qui sont rencontrées au quotidien chez les usagers. Les établissements aussi sont soucieux d'apporter ces formations-là complémentaires aux besoins. Donc, c'était tout simplement ce qu'on voulait dire.
La Présidente (Mme Thériault): Ça va?
M. L'Écuyer: Je vais céder la...
La Présidente (Mme Thériault): Oui, le député d'Iberville.
M. L'Écuyer: ...enfin avec votre permission, le député de Saint-Jean.
La Présidente (Mme Thériault): Oui. Le député d'Iberville.
M. Riedl: Oui. Alors, Mme Boucher puis les autres membres de votre délégation, moi, j'ai un problème. Je vous écoute, là, puis j'essaie de clarifier la différence entre un professionnel qui a, par sa formation, la responsabilité de prendre des décisions importantes vis-à-vis de la santé des gens versus les compétences. Donc, ma question: j'essaie de clarifier, de faire la différence entre la responsabilité professionnelle des gens qu'on reconnaît comme professionnels pour avoir suivi une formation universitaire et faire partie d'un ordre puis un ordre qui n'est pas indifférent à notre système, parce que les ordres professionnels ont quand même des codes de déontologie, c'est des organismes responsables. Alors, j'aimerais que quelqu'un me réponde à cette question-là ou m'aide à clarifier ma compréhension de la responsabilité professionnelle versus les compétences.
La Présidente (Mme Thériault): Mme St-Amour.
Mme Boucher (Denise): Quoi de mieux qu'un prof?
La Présidente (Mme Thériault): Quoi de mieux qu'un prof, oui, Mme Boucher? Allez-y, Mme St-Amour.
Mme St-Amour (France): Bien, écoutez, les responsabilités professionnelles sont davantage estimées en lien avec le milieu d'intervention et, à partir de ce moment-là, sont balisées à l'intérieur quand même de différentes lois qui existent particulièrement, là, dans le réseau de la santé et services sociaux. Les compétences, c'est amener une personne à développer les connaissances suffisantes, le savoir-être, ce qu'on appelle donc les attitudes, ainsi que les habiletés pour effectuer un acte ou une tâche demandée. C'est ce qu'on appelle... quand on parle de compétences. Donc, l'étudiant que l'on forme pour par la suite être en mesure d'assumer ça, il a ces trois aspects-là et ces trois niveaux-là qui sont développés.
C'est sûr que pour nous il n'est pas question non plus de croire qu'un technicien de niveau universitaire... On comprend qu'on a chacun des champs respectifs, avec des tâches respectives, avec des compétences respectives qui sont davantage approfondies, puis il ne s'agit pas de penser qu'on veut se substituer. Cependant, le projet de loi présentement réserve des actes pour lesquels il est possible de former des techniciens pour être en mesure de les faire, d'autant plus que la réalité le démontre: depuis 40 ans, c'est ce qui se passe dans le réseau.
Alors, pourquoi, aujourd'hui, ça supposerait une compétence différente que celle qui était déjà enseignée pour être en mesure d'effectuer un acte? C'est ce qu'on pose comme question. On ne comprend pas le besoin d'aller réserver ces actes-là aujourd'hui, dans le contexte. Ça fait que donc pour nous ça distingue les deux aspects.
La Présidente (Mme Thériault): Et il y a M. Goulet avec un complément de réponse.
M. Goulet (Laurier): Oui. Bien, dans la suite de l'intervention de ma collègue, je repose la même question du départ, c'est-à-dire: Le projet de loi, il visait quoi? En fait, il vise quoi, le projet de loi? Alors, protection du public mais particulièrement au niveau de la psychothérapie, prévention du suicide, et particulièrement dans le volet privé. Mais c'est quoi, l'urgence? Est-ce qu'il y a une dénonciation de mauvaise, de malinintervention, de mauvaise intervention des intervenants? Que ce soient éducateurs, techniciens en travail social ou ARH, actuellement il n'y en a pas, de crise, actuellement. Alors, pour nous, il y a un danger de...
n(17 h 30)n On se faisait un parallèle, la semaine dernière: le projet de loi n° 90, il prenait les actes et il les redistribuait vers le bas, et le projet de loi n° 50, il fait l'inverse, il prend les actes réservés et il les remonte à cinq titres d'emploi. Alors, nous, on pense qu'il y a une sérieuse réserve à mettre sur la question des actes réservés, maintenant. Ce n'est pas mature, ce n'est pas prêt. Alors, nous, on pense qu'il y a trop d'impact pour l'ensemble des intervenants du réseau pour faire ça.
Et je veux ramener une chose sur la formation, la formation et les compétences formation. La formation, il y a des budgets qui sont prévus dans les conventions collectives, dans les dispositions nationales, et l'employeur ne doit pas seulement avoir la volonté, il a la responsabilité de voir à la formation. Les gens arrivent à l'emploi formés, mais il doit y avoir une mise à jour, et ce n'est pas par les ordres professionnels, cette formation-là, elle vient aussi et c'est aussi une responsabilité des employeurs de faire cette formation-là. Alors, pour nous, les gens qui travaillent, ce sont les gens compétents, et à preuve je rappelle qu'il n'y a pas une pléiade de plaintes contre les intervenants dans le réseau, comme quoi ils travaillent mal.
La Présidente (Mme Thériault): Bien. Le député d'Iberville pour une autre intervention?
M. Riedl: Oui. Bien, en réponse à la question de l'urgence, moi, ce que je constate, c'est que les ordres dans le passé étaient à couteaux tirés, et puis, moi, j'ai été fortement impressionné, ce matin, de voir la collaboration, la compréhension des ordres à clarifier leurs champs de compétence et leurs responsabilités. Et tout ça s'inscrit bien évidemment dans la protection des gens. Quand les ordres ne s'entendent pas à reconnaître les responsabilités individuelles d'un ordre versus un autre, l'enjeu, c'est le public ou les patients qui vont recevoir des traitements de personnes de compétences différentes. Alors, moi, c'est au niveau de l'urgence et de la pertinence de la loi n° 50, d'après moi. Ça commence là.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, Mme Boucher.
Mme Boucher (Denise): ...parce que ce n'est pas l'ordre qui va donner les services, c'est les travailleurs puis les travailleuses qui sont dans le réseau...
M. Riedl: Qui font partie de l'ordre.
Mme Boucher (Denise): ...c'est les techniciens, c'est les professionnels. Ces gens-là sont déjà habitués à travailler en interéquipes. On est après faire en sorte de hiérarchiser une pratique qui n'existait pas, puis tout le monde cherche à vouloir faire en sorte... Le mot «souplesse» a été dit, tout à l'heure, par vous, on cherche à faire la souplesse. Là, là, on est après complexifier la chose puis on est après faire en sorte que du monde, là, sont ultradévalorisés, se sentent ultradéqualifiés. Moi, je vous le dis, je suis allée dans des réunions syndicales...
M. Dupuis: ...
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre...
Mme Boucher (Denise): Je suis allée dans des réunions syndicales..
M. Dupuis: ...
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre... M. le ministre...
Mme Boucher (Denise): ...et les gens, ils se voient, ils se perçoivent, ils se sentent comme ça. Bien, vous ferez une tournée puis vous irez dans les assemblées faire le tour. C'est comme ça que les gens, ils se voient puis ils se sentent, en se disant: On n'aura plus à faire telle chose, telle chose, telle chose. Ça se faisait déjà. C'est quoi, le problème?
M. Dupuis: Mme Boucher, dites-leur: J'ai vu le ministre, le ministre a dit que vous ne serez pas empêchés...
Mme Boucher (Denise): Moi, je suis contente que les ordres se parlent...
M. Dupuis: ...que vous ne serez...
Mme Boucher (Denise): ...je suis contente de parler aux ordres aussi, mais ça n'empêche pas de faire...
M. Dupuis: Mme Boucher, dites-leur que vous avez vu le ministre en commission puis que le ministre vous a dit qu'il y aurait des dispositions qui feraient en sorte qu'ils ne seraient pas empêchés de faire le travail qu'ils font. C'est ça que vous devez leur dire. Vous ne devez pas les laisser s'insécuriser, ils n'ont pas de raison de s'insécuriser. L'office va travailler avec vous, va travailler avec les gens pour considérer leurs représentations, et il va y avoir des dispositions transitoires qui vont faire en sorte que, quand le projet de loi va être adopté, ils vont pouvoir continuer à donner l'offre de services. On va la régler, cette affaire-là, à un moment donné, on veut juste avoir le temps de le faire, puis il n'y aura pas de rupture de services. C'est ça.
Mme Boucher (Denise): Je vais vous dire une chose, ce n'est pas moi qui les ai inquiétés.
M. Dupuis: Je ne suis pas fâché, là, je vous aime beaucoup.
Mme Boucher (Denise): Un, ce n'est pas moi qui les ai inquiétés, il n'y a personne ici qui a inquiété ces salariés-là. Mais il y a quelques employeurs, par exemple, qui ont aimé ça et qui ont mis le bordel. Alors ça, là, on a du trouble, là aussi.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: Bien, moi, là, si je peux sortir de la commission puis dire que j'ai l'accord de Mme D'Amour, j'ai l'accord de Mme Boucher, j'ai l'accord de M. Goulet pour ne pas insécuriser ces gens-là, je vais être bien content.
Mme Boucher (Denise): C'est encore mieux, juste la CSN.
La Présidente (Mme Thériault): Brièvement, M. Goulet, vous m'avez manifesté votre intention, parce qu'on a déjà dépassé le temps un peu, mais je pense que c'est correct. Je vous permettrai un commentaire.
M. Goulet (Laurier): D'accord. Bien, je profite de l'ouverture de notre ministre...
La Présidente (Mme Thériault): Brièvement, brièvement.
M. Goulet (Laurier): D'accord. Juste vous dire: On parlait de pénurie tantôt puis on est tous confrontés avec la question de pénurie. La pénurie, ce n'est pas juste l'attraction du monde dans le réseau, c'est la rétention aussi. Et, la semaine dernière, dans le cadre d'une rencontre avec des gens du ministère, une rencontre de planification de main-d'oeuvre, on nous illustrait notamment que, pour les éducateurs, il y a un problème de rétention majeur pour les gens de moins de 30 ans. Il y a 44,3 % des éducateurs de moins de 30 ans qui quittent le réseau, qui s'en vont ailleurs. Il y a 31 % des éducateurs de 30 à 49 ans. Alors, nous, on ne pense pas que... Oui, on peut bien les sécuriser, mais on ne pense pas que la solution qui est amenée, qui est d'adhérer ou de faire partie d'un ordre professionnel, on ne pense pas que ça va régler le problème de rétention puis on ne pense pas que ça va améliorer les services dans le réseau, ils sont déjà très bien dispensés, les services dans le réseau.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, monsieur...
M. Dupuis: ...M. le député de Dubuc, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Thériault): Avec consentement, on peut tout faire.
M. Dupuis: Je veux tout simplement ajouter quelque chose: ça me ferait de la peine qu'on sorte de la commission... Et là je fais référence à des représentations que Mme D'Amour a faites tantôt. Ça me ferait beaucoup de peine qu'on sorte de commission et que vous ayez l'impression ? parce que ce n'est pas ça, notre conviction ? que les techniciens sont des gens de second ordre ou qui travaillent de second ordre. Pas du tout. Je peux comprendre la perception, je peux la comprendre, la perception, parce que, dans le projet de loi n° 50, évidemment on parle des ordres professionnels, les techniciens ne sont pas là. Je peux comprendre la perception, mais elle me fait de la peine, cette perception-là. Vous me direz, Mme D'Amour: Bien, réglez votre perception puis mettez-les dans le projet de loi, les techniciens. Ça, je comprends que c'est ça que vous voulez dire, là. Ça vous démange de le dire. Mais, moi, je veux simplement vous dire que ma conviction profonde, c'est que ces gens-là ne sont pas des travailleurs de second ordre, de deuxième zone, ils font un travail important, et on va considérer ces questions-là dans le travail que l'office va faire et dans le mandat que je leur ai donné. Je veux simplement dire ça, O.K., pour ne pas qu'il y ait une fausse impression qui se crée. Ça va?
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. Eh bien, j'ai Mme Langlois qui voulait faire une intervention, mais je suis sûre qu'avec le député de Dubuc vous allez pouvoir exprimer votre pensée. M. le député, je vais vous passer la parole.
M. Côté: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault): Merci.
M. Côté: Bien, écoutez, je ne veux pas répéter ce que mes collègues ont dit mais vous dire que je n'ai pas été surpris de votre recommandation 3, ce serait vous mentir, puisque vous nous demandez d'évacuer pratiquement, là, 75 % du projet de loi et surtout des recommandations du rapport Trudeau.
Il y a une chose que je suis certain, par exemple, c'est que votre recommandation 4 ? et là M. Goulet m'a volé ma question ? sur votre recommandation 4, quand vous parlez des incitatifs nécessaires pour favoriser l'attraction, la rétention du personnel, assurer un développement planifié et cohérent des services et des conditions de travail dans tous les milieux concernés, bien ça, je suis d'accord avec ça, pas à peu près, parce qu'effectivement c'est important parce qu'on voit actuellement qu'il y a des pénuries partout, et, les services, si on ne fait pas ça, c'est qu'on aura beau avoir le plus beau système au monde sur papier, mais en pratique on va rater notre coup.
Je voudrais revenir également sur la formation, un peu en relation avec la compétence. Mais ce n'est pas vraiment sur la compétence, sur la formation. Lorsque vous dites dans votre mémoire, entre autres, que tous ont droit à la formation, je suis bien d'accord avec ça. Que les travailleuses et travailleurs et leur syndicat doivent être associés aux choix en matière de formation et que les ordres professionnels n'ont certes pas la responsabilité exclusive de la formation continue de leurs membres, là je ne sais pas, là j'ai un petit problème parce qu'il me semble, d'après ce que je sais, que le Code des professions attribue cette responsabilité aux ordres professionnels de voir à la formation continue de leurs membres. Alors, comment allez-vous concilier cette recommandation du Code des professions et votre recommandation à vous? Et de quelle façon... M. Goulet a parlé tantôt que l'employeur est capable de donner la formation, mais il n'y a pas moyen de trouver une autre solution, là, pour concilier les deux?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, Mme Langlois.
Mme Langlois (Ginette): Bien, en fait, je ne sais pas quoi vous répondre, sauf que ce qu'on a dit tout à l'heure, c'est: les gens d'eux-mêmes vont... M. Goulet l'a mentionné, dans nos conventions collectives, on a des budgets pour le développement des ressources humaines. C'est des budgets qui sont utilisés, qui ont été augmentés lors de la dernière négo, qui augmentent d'année en année, et ils sont toujours utilisés, ils ne sont jamais laissés-pour-compte. Donc, la formation se fait, par le fait même, des besoins qui sont sur le terrain, des problématiques qui sont vécues par les usagers qui viennent chercher des services.
M. Côté: Mais, lorsque vous dites que les ordres professionnels n'ont pas la formation exclusive de leurs membres, ça veut dire que vous proposez que les ergothérapeutes, par exemple, les psychologues, les travailleurs sociaux puissent recevoir une formation continue de leurs employeurs et non plus de leurs ordres?
Mme Boucher (Denise): En fait, là, ce que l'on dit, c'est que les ordres peuvent donner de la formation. On n'est pas contre ça, mais ils n'ont pas l'exclusivité. C'est que l'employeur, là, s'il change... je ne sais pas, moi, il décide de faire une modification, je ne sais pas, dans le travail, dans n'importe quoi, c'est l'employeur qui va donner la formation, ce ne sera pas nécessairement rattaché à l'ordre. D'ailleurs, M. Dupuis participait, hier, à une activité flamboyante, le nouvel espace économique...
M. Dupuis: Vous me suivez?
n(17 h 40)nMme Boucher (Denise): Oui, oui, je vous suis, vous. J'ai l'oeil sur vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dupuis: Mme Boucher... Mme Boucher....
Mme Boucher (Denise): Je n'ai pas un oeil sur vous, j'ai l'oeil sur vous.
M. Dupuis: Mme Boucher, ne commencez pas à faire des confidences ici, là, vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Boucher (Denise): Non, j'ai fait la distinction. Non, mais, sur la question où on parle de qualification, de mobilité de la main-d'oeuvre, ça ne peut pas être exclusif. La question de la formation, c'est quelque chose qui doit toucher tout le monde. Tout le monde est en formation continue. Ça ne peut pas être exclusif, la question de la formation, qu'aux seuls ordres. Si on fait ça, on va échapper énormément de gens et d'autres personnes. C'est dans ce sens-là qu'on le dit, et ça, là-dessus, on a toujours été des fervents de ça.
On est après travailler sur le cadre des reconnaissances des acquis, des compétences. On est là-dessus. Les ordres sont après travailler là-dessus aussi. Tout le monde embarque là-dedans. Et, nous, on force aussi pour que nos salariés embarquent là-dedans parce qu'on a besoin d'une population qualifiée. Donc, ce n'est pas exclusif, la question de la formation, c'est dans ce sens-là qu'on le dit. C'est dans le sens qu'on dit: Oui, ça ne peut pas être exclusif aux ordres à donner de la formation, mais l'employeur a aussi une obligation dans sa formation continue, dans ce qu'il cherche à vouloir appliquer dans son institution. Alors, pour nous, c'est dans ce sens-là que c'est dit, donc ça doit être partagé, si vous aimez mieux le mot.
La Présidente (Mme Thériault): ...un commentaire supplémentaire à faire?
M. Goulet (Laurier): Oui. En complémentaire, la loi sur la santé et services sociaux, vous retrouvez, à l'article 231... L'article dit ceci: Tout établissement doit se doter d'un plan triennal de planification de main-d'oeuvre et de développement du personnel, puis ça comprend, entre autres, des mesures pour le maintien de la compétence de son personnel. Alors, ça va de soi que, oui, les ordres ont une responsabilité, les établissements, les employeurs ont aussi une responsabilité. Alors ça, c'est... Quand on dit que la loi, ça fait... la loi couvre assez largement, autant la protection du public que la question de formation et de compétence, là.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je voudrais peut-être demander à madame ? j'espère que je ne me tromperai pas, là ? Mme D'Amour...
Une voix: St-Amour.
M. Côté: ..St-Amour de me donner un exemple des craintes que vous avez qu'un technicien va perdre le droit de poser un acte au détriment d'un professionnel, d'un travailleur social ou d'un psychologue. Avez-vous un exemple concret, par exemple, si on adoptait le projet de loi tel qu'il est?
Mme St-Amour (France): Mais c'est...
La Présidente (Mme Thériault): Mme St-Amour.
Mme St-Amour (France): Oui. Je m'excuse. Alors, si je réfère en techniques d'éducation spécialisée, pour le prendre à titre d'exemple, il y a, dans l'ensemble des compétences, une des compétences qui s'appelle effectuer des interventions auprès des personnes, dans laquelle il y a, dans les éléments de compétence qu'on enseigne, un premier élément qui mentionne d'évaluer la capacité d'adaptation de la personne en fonction de la problématique posée.
M. Côté: Et ça, c'est un technicien qui fait ça?
Mme St-Amour (France): Et c'est un technicien qui fait ça. Et, à ce moment-là, ça voudrait dire que, selon ce qui est prévu dans le projet de loi, cet élément de compétence là ne pourrait plus être enseigné, et donc l'évaluation des compétences... l'évaluation, c'est-à-dire, des besoins, je m'excuse, serait faite par un autre, par le professionnel, qui par la suite serait acheminée au technicien, qui, lui, devrait mettre en place, selon l'évaluation du professionnel, les mesures nécessaires.
Et même toute la question de l'élaboration du plan d'intervention tel qu'il est prévu, ça s'appuie sur une évaluation de besoins. Par la suite, l'éducateur, après avoir évalué le besoin, établit un objectif d'intervention avec des moyens. Mais, si, à ce moment-là, l'évaluation, il n'a pas pu la faire, le projet de loi prévoit même que, dans certains contextes, ce serait la rédaction du plan d'intervention, donc ça voudrait dire que le technicien ne pourrait plus, à ce moment-là, rédiger un plan d'intervention auprès d'une personne qu'il accompagne au quotidien. Il faudrait donc que ce plan d'intervention là... Et donc l'évaluation des besoins sur laquelle s'appuie le plan d'intervention serait effectuée par un professionnel, ensuite transmise à l'éducateur, qui, lui, ne ferait qu'appliquer les mesures telles qu'elles ont été pensées et réfléchies par le professionnel, et c'est ce qu'il ne pourrait plus faire demain matin, ce qu'il fait aujourd'hui, depuis 40 ans.
M. Côté: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Ça vous va? Merci beaucoup à vous d'être venus en commission parlementaire. Donc, puisque nous avons épuisé l'ordre du jour pour aujourd'hui, la commission ajourne ses travaux au mercredi 5 mars, à 14 heures. Merci. Bonne soirée à tous.
(Fin de la séance à 17 h 44)