(Onze heures vingt-sept minutes)
Le Président (M. Descoteaux): Bonjour, M. le ministre, M. le porte-parole de l'opposition officielle, chers collègues. Donc, je constate que nous avons quorum. Je déclare donc la séance de la Commission des institutions ouverte. Je rappelle le mandat de la commission aujourd'hui: procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 133, Loi modifiant l'article 1974 du Code civil.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Simard (Richelieu) est remplacé par Mme Caron (Terrebonne) et M. Valois (Joliette) est remplacé par M. Bédard (Chicoutimi).
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Je vais brièvement vous donner une lecture de l'ordre du jour aujourd'hui. Donc, nous allons débuter par les remarques préliminaires du groupe parlementaire formant le gouvernement, puis celles de l'opposition. Nous allons entendre tout d'abord le Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale et la CORPIQ. En après-midi, nous devrions entendre la Fédération des femmes du Québec, le Regroupement québécois des CALACS, la Société d'habitation du Québec, puis nous procéderons aux remarques finales.
Remarques préliminaires
Donc, M. le ministre, pour vos remarques d'ouverture.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Alors, bienvenue aux membres de la commission, bienvenue également aux groupes qui viennent devant la commission, aujourd'hui. Et alors nous sommes ici pour accueillir et entendre des groupes sur le projet de loi n° 133, loi qui modifie l'article 1974 du Code civil.
D'autant plus, M. le Président, et c'est aujourd'hui, on l'a vu à l'Assemblée nationale, je pense que ce n'est pas terminé, se tient la Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes. Cette journée marque le triste anniversaire de la mort tragique de 14 jeunes filles de l'École polytechnique de Montréal en 1989, et qui avaient été assassinées simplement parce qu'elles étaient des femmes. Ce 6 décembre termine également, aujourd'hui c'est une coïncidence heureuse, je pense, les journées d'action contre la violence faite aux femmes. Donc, ça nous rappelle ce phénomène-là.
n
(11 h 30)
n
M. le Président, ce projet de loi, je voudrais le rappeler, s'inscrit dans la foulée du Plan d'action gouvernemental 2004-2009 en matière de violence conjugale, qui a été rendu public le 8 décembre 2004. Ce plan d'action contient 72 engagements. Huit ministères incluant trois secrétariats, ainsi que leur réseau d'intervention respectif d'aide et de protection sont imputables des engagements contenus au plan d'action.
Donc, évidemment, parmi les ministères, il y a celui du ministère de la Justice et Procureur général. Et, toujours en référence au Plan d'action gouvernemental 2004-2009 en matière de violence conjugale, on retrouve, dans l'avant-propos, que les 72 engagements qui sont contenus dans le plan s'articulent autour de quatre axes d'intervention, soit la prévention, le dépistage, l'adaptation aux réalités particulières et l'intervention sociojudiciaire.
Plusieurs de ces engagements sont déjà une réalité, alors que d'autres sont en voie d'être mis en oeuvre. À titre d'exemple, l'engagement de maintenir et d'accroître le soutien financier à SOS Violence conjugale, un service de ligne téléphonique d'urgence qui dessert l'ensemble du territoire québécois. Un autre engagement qui est celui d'augmenter de 30 %, en 2005-2006, l'enveloppe budgétaire des CAVAC, des centres d'aide aux victimes d'actes criminels, afin de développer et de consolider leurs services. Au nombre de 16 maintenant dans toutes les régions du Québec, les CAVAC se retrouvent dans... évidemment, offrent un soutien post-traumatique aux victimes et à leurs proches et les accompagnent également dans le processus judiciaire. Parallèlement à cela, nous avons également lancé, en octobre dernier, une campagne d'information dans les médias visant à sensibiliser la population à la présence et aux services des CAVAC afin de mieux faire connaître cette ressource spécialisée, de briser l'isolement dans lequel souvent se retrouvent confinées les victimes et également leurs proches.
Dans le domaine sociojudiciaire, d'autres mesures ont été concrétisées telle la mise sur pied de programmes de formation et de mise à jour des connaissances pour les substituts du Procureur général, qui sont appelés à intervenir en matière de violence conjugale. La possibilité de modifier le Code civil pour permettre la résiliation d'un bail résidentiel pour des motifs de violence conjugale et d'agression à caractère sexuel compte, M. le Président, parmi les engagements qui sont, je l'espère, en voie d'être réalisés.
Vous savez, au Québec, bien que des progrès très appréciables aient été accomplis pour contrer la violence conjugale, nous reconnaissons que la poursuite de nos actions demeure encore nécessaire. À noter qu'au Québec, pour la seule année 2003, les statistiques officielles du ministère de la Sécurité publique révèlent que 16 458 personnes de 12 ans et plus ont été victimes de crimes contre la personne commis dans un contexte conjugal, par un conjoint, un ex-conjoint ou un ami intime. De ce nombre, 15 855 étaient âgés de 18 ans et plus, et près du tiers des infractions recensés étaient de nature sexuelle. Quoique importantes, ces données ne nous donnent qu'une image partielle de la réalité puisque toutes les victimes ne dénoncent pas leur situation à la police.
Ce qu'on sait cependant, c'est qu'aucun groupe social, aucun statut, aucune situation financière ne permet d'être à l'abri de la violence conjugale. Des recherches récentes indiquent néanmoins que les jeunes femmes, les femmes autochtones, les femmes immigrantes et les femmes des communautés culturelles demeurent particulièrement vulnérables à cette forme de violence. La proposition de modification à l'article 1974 du Code civil répond ainsi aux demandes formulées par les organismes spécialisés en matière de violence conjugale des secteurs publics, parapublics, communautaires et de recherche, et marque la concrétisation de l'un des engagements du Plan d'action gouvernemental en matière de violence conjugale, qui accorde la priorité à la sécurité et à la protection des personnes victimes et de leurs proches.
Par ailleurs, M. le Président, je pense que la modification proposée encouragera aussi les victimes à demander l'aide des autorités judiciaires et contribuera, je le souhaite, à réduire le taux d'abandon des poursuites criminelles. C'est d'ailleurs là un des objectifs visés par l'engagement 46 du Plan d'action gouvernemental en matière de violence conjugale, en plus de celui d'assurer la sécurité et la protection des victimes et de leurs proches.
Actuellement, les situations de violence conjugale et d'agression à caractère sexuel ne sont pas des motifs qui permettent la résiliation d'un bail. Donc, si une victime est partie à un bail, soit comme locataire ou colocataire, elle veut quitter son logement pour assurer sa sécurité et celle de ses proches, et souvent de ses enfants, et ainsi échapper à cette violence, elle peut soit négocier avec son locateur pour tenter de le convaincre de résilier le bail, soit céder ou sous-louer son logement sous réserve du consentement du locateur.
Les modifications qui sont proposées à l'article 1974 permettront dorénavant à ces personnes qui sont locataires ou colocataires ? pardon ? de résilier leur bail si leur sécurité ou celle d'un enfant qui habite avec elle est menacée. La modification législative sous étude aujourd'hui vise donc à ajouter, M. le Président, comme motif de résiliation de bail les motifs de violence conjugale et d'agression à caractère sexuel à des cas qui sont déjà prévus à l'article 1974 du Code civil, et ces cas sont les suivants: par exemple, l'attribution d'un logement à loyer modique, le relogement dans un logement équivalent qui correspond aux besoins du locataire, l'impossibilité d'occuper son logement en raison d'un handicap et l'admission de façon permanente dans un centre d'hébergement et de soins de longue durée ou dans un foyer d'hébergement. Donc, dans ces cas-là, il est déjà possible de résilier le bail avec un avis de trois mois.
Donc, alors, de la même façon que pour les cas que je viens de vous énumérer, pour ce qui est de la résiliation de bail dans le cas de violence conjugale ou d'agression à caractère sexuel, l'effet prendrait... pour la résiliation, ça prendrait effet trois mois après l'envoi d'un avis au locateur ou un mois suivant l'avis lorsque le bail est à durée indéterminée ou de moins de 12 mois. Alors, l'avis devra être accompagné d'une attestation délivrée par un officier public désigné par le ministre de la Justice.
Nous pourrons reparler de ça durant la commission parlementaire, M. le Président. Le ministère de la Justice a déjà préparé un projet de procédure que nous avons fait parvenir aux groupes et également à l'opposition officielle. Je pense que c'est important qu'on puisse tous en prendre connaissance et, s'il y a moyen de le bonifier, je suis tout à fait ouvert à le faire.
Alors, M. le Président, le fait d'ajouter, comme motif de résiliation, la violence conjugale aux agressions à caractère sexuel à ceux déjà prévus par l'article 1974 du Code civil du Québec facilitera pour la victime, j'en suis persuadé, sa prise de décision de quitter son milieu de violence et d'assurer sa propre sécurité et celle des enfants qui habitent avec elle.
Alors, M. le Président, j'ajouterais en terminant... L'égalité entre les femmes et les hommes et l'élimination de toutes les formes de violence font appel à la solidarité de l'ensemble de la population du Québec. Déjà, beaucoup de personnes dans différents milieux, organismes, groupes communautaires, maisons d'hébergement, travaillent souvent à titre bénévole pour aider et supporter les personnes victimes de violence conjugale et leurs enfants. Je veux profiter de l'occasion pour les remercier très sincèrement pour leur travail qui est si essentiel et pour leur dévouement. Je tiens également à remercier toutes les personnes et tous les groupes que nous allons entendre ici, aujourd'hui, d'avoir accepté évidemment, dans un délai relativement court, de nous faire part de leurs commentaires.
Je voudrais vous dire, moi, je suis très, très ouvert, je pense, à considérer les commentaires et les suggestions qui pourront être faits par les groupes; c'est pour ça que c'est important de le faire en commission parlementaire. Et, en terminant, j'invite toutes les citoyennes et tous les citoyens du Québec à unir leurs efforts pour que nous puissions parvenir ensemble à faire du Québec une société qui est exempte le plus possible de toute forme de violence. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, M. le ministre. M. le député de Chicoutimi, porte-parole de l'opposition officielle, pour vos remarques d'ouverture.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, fort heureux d'être ici, aujourd'hui, pour étudier un article de loi qui, avec un seul article, constitue un élément important et une avancée importante, une réponse satisfaisante aux différentes représentations qui avaient été faites par des groupes de défense et de soutien. Et je me souviens encore en commission parlementaire, je l'ai mentionné au ministre lors de l'étude du principe, que ces gens étaient venus lors de l'audition du Directeur des poursuites publiques, pour rappeler l'importance de modifier le Code civil en cette matière. Et je tiens à souligner leur travail et aussi la réponse qu'a faite le ministre.
n
(11 h 40)
n
Vous comprendrez qu'à l'étude du principe nous avons appuyé sans réserve le principe de ce projet de loi, d'autant plus que les consultations coïncident avec une journée fort importante au Québec, soit le 6 décembre, qui commémore un des gestes des plus barbares qui nous a été permis de voir au Québec. Et j'étais d'ailleurs.... tous se souviennent... C'est une de ces journées où tous se souviennent où ils étaient présents, et j'étais moi-même étudiant à la Faculté de droit à l'Université de Montréal. Et on ne peut pas se remémorer ces événements sans avoir beaucoup d'émotion et en même temps souligner que, bien que ces morts étaient fort injustes, il faut le dire, qu'au moins cette journée nous permet de nous réconcilier avec ces événements en constatant qu'elles n'ont pas été inutiles et que nous avons permis de faire en sorte que cette journée soit soulignée, mais d'une façon beaucoup globale, et que ce n'est pas se rappeler strictement ces événements terribles mais l'importance de toute la société, du gouvernement, mais évidemment toute la société, de se préoccuper des questions de violence faite envers les femmes, et j'en suis fort heureux.
Et de rappeler aussi en même temps, bon, que ce projet de loi permet aussi de faire une autre avancée dans un domaine qui, on le sait, depuis 30 ans a permis de se sortir de la loi du silence qui existait dans le domaine. Dans le domaine de violence conjugale et d'agression sexuelle, on sait à quel point le Québec a évolué depuis 30 ans et ce qui, auparavant ? et là je réfère plus particulièrement en matière de violence conjugale; qui, auparavant ? appartenait malheureusement à une question d'ordre familial est maintenant traitée à son juste titre, soit de faire en sorte que ces victimes brisent le silence, dénoncent ces situations et épargnent finalement, tant à ces victimes et aux familles, des situations totalement intolérables. Donc, des avancées importantes ont été faites en ces matières, mais beaucoup reste à faire. Donc, le projet de loi permet, de façon un peu plus technique, de s'assurer finalement que ces personnes ne subiront pas ou ne seront pas pénalisées des situations pénibles qu'elles vivent.
On me souligne que c'était, à ce moment-là, le regroupement des... lors de l'étude du projet de loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales, c'était le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale qui nous avait fait des représentations à ce niveau et d'autres aussi, ainsi que le Regroupement des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel. Donc, je suis fort heureux que ces représentations ont trouvé écho dans ce projet de loi. Donc, nous assurons évidemment le ministre de toute notre collaboration pour bonifier le projet de loi, pour faire en sorte que les objectifs qui y sont énumérés soient rencontrés.
Aussi, nous rappellerons au ministre qu'un des éléments que plusieurs groupes attendent aussi en matière de révision de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, je l'ai dit lors du principe et je le répète au ministre... Cette loi fort importante, qui est une avancée pour le Québec, on peut constater aujourd'hui qu'elle a malheureusement... qu'elle n'est plus... qu'elle ne correspond plus aux attentes dans la définition des victimes mais aussi dans le support qu'elle leur accorde. Donc, je souhaite que le ministre entende les représentations qui lui ont été faites à ce niveau et je tiens là aussi à l'assurer que nous sommes tout à fait disposés à procéder rapidement à des consultations en matière de révision d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Que nous avons même des représentations personnelles de différents individus qui sont face à des situations injustes actuellement donc et que, s'il le souhaite, dès le mois de janvier, nous serions disposés à procéder aux consultations en ces matières.
Merci, M. le Président. Et, en terminant, évidemment remercier tous les groupes qui se sont présentés ici pour nous faire part de leurs commentaires, et en même temps de nous sensibiliser et aussi d'apporter, j'imagine, des modifications qui iront en faveur de bonifier le projet de loi, tel qu'il a été présenté. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, M. le député.
Auditions
Donc, j'invite le premier groupe, à savoir le Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale à se joindre à la commission, s'il vous plaît. Donc, est-ce que c'est Mme Farly qui sera la porte-parole?
Une voix: Les quatre.
Le Président (M. Descoteaux): Pardon? Les quatre. Donc, peut-être vous vous présentez, s'il vous plaît, pour la commission et puis, ensuite, nous débuterons une période d'échange. Vous aurez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, suivies de 15 minutes pour des échanges avec le côté ministériel et 15 minutes d'échange avec le côté de l'opposition.
Comité logement pour les droits
des victimes de violence conjugale
Mme Farly (Caroline): Alors, je vais commencer. Mon nom, c'est Caroline Farly, de la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec.
Le Président (M. Descoteaux): Merci.
Mme Riendeau (Louise): Bonjour, je suis Louise Riendeau, du Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale.
Mme Tremblay (Carole): Bonjour, je suis Carole Tremblay, du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec.
Mme Dionne (Nicole): Bonjour. Mon nom est Nicole Dionne. Je suis coordonnatrice au Bureau d'animation et information logement, qui est une association de locataires à Québec, mais aussi membre du Regroupement des comités logement, membre du conseil d'administration du Regroupement des comités logement.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Bonjour à nouveau et bienvenue devant la Commission des institutions. Donc, mesdames, nous vous écoutons.
Mme Farly (Caroline): O.K. D'abord, j'aimerais dire: Bonjour, M. le ministre, bonjour, M. le Président, mesdames et messieurs, bonjour. Ça nous fait un grand plaisir d'être avec vous aujourd'hui.
Dans un premier temps, on va expliquer la réalité et les défis des femmes qui sont victimes de violence conjugale, qui cherchent à assurer leur sécurité. Dans un deuxième temps, on va exposer pourquoi la modification de l'article 1974 du Code civil proposée par le projet de loi n° 133 constitue pour nous un moyen pertinent pour assurer leur sécurité. Et finalement on va se pencher sur les mécanismes nécessaires pour l'actualisation de cette modification législative.
Pour beaucoup de femmes victimes de violence conjugale, c'est essentiel de quitter le domicile familial. L'urgence se trouve dans la séparation de corps avec leurs conjoints violents. Pour en témoigner, chaque année, les maisons regroupées par les deux associations ici présentes hébergent quelque 8 000 femmes et 6 000 enfants. Vous comprendrez aussi que, quand une femme quitte son conjoint pour des motifs de sécurité, ce dont elle a besoin, c'est bien plus qu'un simple refuge. La femme se trouve dans une position où elle doit rebâtir sa vie à nouveau.
En fait, ces femmes font face à une course à obstacles qui est pavée de démarches juridiques, médicales, administratives ou encore en immigration. Si elles ont des enfants, parfois s'ajoutent les procédures avec la Direction de la protection de la jeunesse, sinon avec les écoles en vue de la relocalisation de ceux-ci.
Se refaire une vie, ça exige déjà bien des efforts pour elles et, disons-le, dans bien des cas, ça implique qu'elles doivent remeubler leur appartement et faire l'achat de tous les biens essentiels de base. Lorsqu'on considère les mères monoparentales, où l'indice de pauvreté est encore plus élevé, la situation devient plus complexe puisqu'il est impossible pour elle d'assumer le fardeau d'un double loyer.
On s'accorde maintenant à reconnaître que le danger ne s'arrête pas forcément quand les femmes quittent leur conjoint violent. Même si la violence conjugale est souvent expliquée sous forme d'une escalade, c'est important de savoir que le passage soudain à une violence potentiellement meurtrière peut se faire sans étape intermédiaire. Plusieurs études confirment par ailleurs que la période qui précède ou qui suit immédiatement une rupture de relation constitue un des moments où les risques de létalité sont des plus importants.
Au Québec, en 2003, 41 % des victimes ont été agressées par un ex-conjoint. En ce qui concerne l'homicide conjugal, au Québec, c'est environ 17 femmes qui sont tuées en contexte conjugal par année. Si on parle des tentatives de meurtres, le profil statistique sur la sécurité publique émis en 2002 par le ministère concerné révèle qu'on peut tripler ou même quadrupler ces chiffres selon les années.
Si on insiste autant sur des mesures additionnelles au réseau de soutien actuel, c'est que, dans 59 % des affaires qui ont entraîné l'homicide de la conjointe, la police était au courant des antécédents de violence conjugale entre l'accusé et la victime. Le danger n'est pas uniquement limité aux femmes qui sont victimes de violence physique. Au moment de la relation de couple ou suite à la rupture, le harcèlement et la prolifération de menaces constituent des facteurs de risque importants d'agression et d'homicide. Chez une victime, lorsque le harcèlement est accompagné par diverses menaces, il y a une peur qui se fait sentir: c'est la peur d'un passage à l'acte violent.
On dénote qu'au Québec, en 2003, plus de huit victimes sur 10 ont été agressées dans une résidence privée. 39 % d'entre elles occupent légalement un logement avec l'auteur présumé. Sans recours juridique pour rompre un bail, les femmes continuent à vivre dans des endroits où elles ne sont pas en sécurité et elles le font parce qu'elles doivent respecter leurs responsabilités juridiques et financières. Aujourd'hui, les femmes violentées ont le choix de porter plainte, de recourir aux services des maisons d'hébergement, de demander un divorce avec des visites supervisées, demander des limites restrictives, demander l'application de l'ordonnance de garder la paix, aussi appelée l'article 810.
Par contre, les ordonnances restrictives ne garantissent pas toujours la protection contre un conjoint violent. Si le conjoint ne sait pas où habite la victime, il y a moins de nouveaux incidents et moins de frais juridiques. Une femme qui a une adresse inconnue de son conjoint violent a franchi étape cruciale vers son bien-être mental et physique et celui de ses enfants. C'est pourquoi nous demandons l'ajout d'une mesure additionnelle, celle de la résiliation du bail lorsque la sécurité est compromise.
n
(11 h 50)
n
Mme Tremblay (Carole): Cette partie de notre intervention a pour but de vous éclairer sur les recours actuels pour résilier un bail. Nous espérons vous démontrer que la cession de bail ne peut être un recours utilisé par les victimes de violence conjugale et les victimes d'agression à caractère sexuel.
Sauf exception, une locataire ne peut pas résilier un bail en cours sans le consentement de son propriétaire. En temps normal, il y a trois avenues qui s'offrent à la locataire: soit négocier avec son locateur pour résilier le bail, soit céder son bail, soit sous-louer son logement. Dans le cas de violence conjugale ou d'agression à caractère sexuel, le temps est précieux. L'urgence de quitter le logement est prioritaire parce que la sécurité de la victime et ses enfants est menacée en raison de la violence d'un conjoint ou d'un ex-conjoint ou encore en raison d'une agression à caractère sexuel. Il est question ici d'urgence, de confidentialité et de sécurité pour la vie d'êtres humains.
C'est pourquoi, dès le début, le Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale demandait au gouvernement de prendre des mesures pour permettre aux victimes de violence conjugale et aux victimes d'agression à caractère sexuel de résilier leur bail avec un avis d'un mois, sans répercussions financières et légales. Après de longues démarches ? parce que, le comité, ça fait six ans qu'on travaille ensemble ? nous avons fait un compromis et nous avons accepté la modification à l'article 1974 pour permettre aux victimes de quitter avec un avis de trois mois. Nous sommes satisfaits du projet de loi n° 133 puisqu'il constitue le premier geste concret pour assurer aux femmes et aux enfants leur droit fondamental à la sécurité.
D'autre part, le fait de recourir à un article du Code civil du Québec pour se libérer des obligations résultant du bail, ça enlève un lourd fardeau sur les épaules des victimes parce que ces femmes-là ne doivent pas porter seules le fardeau de leur sécurité et celle de leurs enfants. De plus, elles ne se placent plus dans une situation d'illégalité en quittant un logement d'urgence, car, dans ces cas-là, les propriétaires peuvent les poursuivre pour non paiement de loyer. Ce qui signifie qu'elles se retrouvent avec une poursuite, une dette et le risque d'être fichées comme mauvaises payeuses. Quand viendra le temps de se rechercher un logement et se refaire une vie, elles risquent d'avoir beaucoup de difficultés à se reloger. Les trois autres exceptions à l'article 1974, à notre connaissance, n'ont jamais ouvert la porte à des abus, et toute supposition de cet ordre reste théorique.
Je vais vous dire un petit mot sur la cession de bail parce que les propriétaires nous l'ont proposée beaucoup, là. La cession de bail se fait lorsqu'on transfert un bail à un nouveau locataire. Contrairement à la sous-location, le locataire est dégagé de toute responsabilité vis-à-vis du propriétaire puisqu'il cède tous ses droits et obligations au nouveau locataire appelé «cessionnaire».
Il y a une longue démarche pour céder un bail, pour refaire... oui, pour céder un bail. C'est la victime qui doit chercher une nouvelle personne intéressée à occuper le logement. Elle doit envoyer un avis de cession de bail par courrier recommandé à son propriétaire. Elle doit l'informer du nom et de l'adresse de la personne qui prendra le logement et la date prévue de la cession de bail. Le propriétaire a 15 jours pour accepter ou refuser. S'il refuse une personne sans motif valable, le locataire doit faire une demande à la Régie du logement pour résilier le bail ou valider la cession. Et finalement, après acceptation du propriétaire, la locataire cédante, qui est la victime, elle va signer une entente de cession de bail avec le nouveau locataire.
Concrètement, une victime ne peut pas faire toutes ces démarches indispensables à la relocation de son logement. Considérant tous ces délais et les nombreuses difficultés à rencontrer. Comme elle quitte d'urgence le logement et doit se trouver un hébergement pour elle et ses enfants, elle ne pourra pas procéder à la location du logement et le faire visiter elle-même pour des raisons de sécurité. Deuxièmement, elle aurait beaucoup de difficultés pour recevoir plusieurs appels de candidats de l'endroit où elle sera réfugiée pour des raisons évidentes de confidentialité.
Dans toute cette démarche, ce qu'on dit, nous, dans le cas de la cession de bail, c'est que le locataire peut entreprendre un recours en résiliation ou en validation, mais cette démarche demande beaucoup de temps et de préparation dont ne dispose pas une victime de violence conjugale ou d'agression à caractère sexuel.
Pour terminer, un petit mot sur la sous-location pour vous dire que la sous-location n'est pas un bon recours pour les victimes, n'est pas finalement un recours pour les victimes de violence conjugale ni pour les victimes d'agression sexuelle parce que c'est utilisé que dans le cas où la locataire désire revenir dans son logement, et la locataire n'est pas libérée de la responsabilité du bail. Merci.
Mme Riendeau (Louise): Moi, je vais vous parler de l'actualisation du projet de loi n° 133. À l'article 1, 2°, le législateur prévoit un mécanisme d'attestation pour s'assurer que ce sont les bonnes personnes qui vont se prévaloir de cette mesure-là. On est tout à fait d'accord avec cette intention-là. Donc, on appuie tout à fait l'ajout d'un deuxième alinéa à l'article 1974.
Par ailleurs, ce qui nous préoccupe, c'est quel mécanisme sera mis en place. On a effectivement vu la politique préparée par le ministère, mais ça nous laisse quand même un certain nombre de questionnements. D'abord, nous, on pense que le mécanisme, comme on l'a déjà dit, doit permettre de distinguer qui doit s'en prévaloir ou pas. Et, pour rassurer les gens qui craindraient les abus, je pense qu'il est important de souligner que la connaissance scientifique sur l'évaluation de la sévérité du risque en violence conjugale commence à s'intégrer de plus en plus dans les pratiques au Québec comme ailleurs. Et d'ailleurs la Fédération de ressources a préparé un guide d'intervention et a assuré la formation de ses membres sur ce sujet-là.
Pour notre part, au regroupement, on participe très activement à la coordination d'un projet intersectoriel en Mauricie avec les policiers, les procureurs, la probation, les groupes pour conjoints violents. Le ministère de la Justice, la Sécurité publique participent à ces travaux-là. Notre objectif, c'est de faire que tout le monde pourra mieux évaluer le danger et agir pour le prévenir. Donc, il y a de la connaissance scientifique à ce niveau-là. Pour nous, le mécanisme doit évidemment être rapide et accessible. Donc, quand on parle de personnes autorisées, il est important pour nous qu'elles soient dans tous les districts judiciaires du Québec.
Il est également primordial d'éviter de poser des barrières systémiques à certaines femmes. Pensons... Si la personne... Si l'officier, la personne autorisée par le ministre est un policier, pensons à l'effet que ça peut faire pour une femme immigrante qui vient d'un pays totalitaire; elle n'ira certainement pas demander l'attestation. Même chose si on limite l'officier à un procureur. Une femme qui, dans un passé proche ou récent, aurait eu peur et n'aurait pas collaboré avec la couronne, qui essayait de traiter une plainte de violence conjugale, risque d'être assez gênée de se représenter au bureau des procureurs. Pensons aussi aux femmes autochtones qui ont des problèmes particuliers en matière d'habitation: Comment on va leur permettre de gérer ça? Alors, pour nous, le choix du professionnel est très important, et peut-être qu'il va falloir penser d'avoir plus qu'un type de professionnels pour s'assurer qu'on ne crée pas de barrières.
On pense qu'il faut aussi clarifier les attentes qu'on a face aux organismes qui rencontrent les victimes qui peuvent être partie de ce processus-là. Bien sûr, ces organismes-là ? pensons aux organismes qui ont plus d'expertises, les maisons d'hébergement, les CLSC ? peuvent accompagner la femme, ils peuvent l'aider à évaluer la situation, mais il va falloir qu'on ait un processus qui ne rompe pas le lien de confiance qu'on établit avec les victimes, parce que, si une victime ne se sent pas à l'aise avec nous dans cette démarche-là, elle risque de ne pas demander d'aide et d'être encore plus en danger. Donc, on a des préoccupations à ce niveau-là. On a aussi des préoccupations... on ne voudrait certainement pas qu'il y ait des frais pour les victimes, comme c'est le cas quand on demande un certificat médical à certains médecins. Donc, on veut que ce soit prévu.
L'autre chose, l'évaluation de la victime doit se faire, comme on voit, à deux niveaux: auprès d'organismes qui travaillent avec les victimes, auprès d'une personne autorisée. Tout le monde n'a pas la même connaissance de la violence conjugale, et on ne voudrait pas que, par manque de connaissances, des gens aient un jugement personnel qui minimise le danger. Donc, il y a peut-être lieu de penser à des outils standardisés qui feront qu'on tiendra compte de: Y a-t-il un danger ou pas? Évidemment, on souhaite que ça s'applique de la même façon à travers le Québec, donc des directives du ministère de la Justice nous semblent tout à fait pertinentes.
Donc, pour tenir compte de l'ensemble de ces préoccupations-là, nous, on recommande que la loi n'entre en vigueur que le 1er avril 2006 et que, d'ici là, le ministre de la Justice forme un comité de travail formé des gens du ministère, formé de nos organisations qui ont l'expertise auprès des victimes et peut-être éventuellement de spécialistes de l'évaluation de la sévérité du risque pour qu'on arrive à bâtir un mécanisme qui soit efficace et qui permette aux femmes d'utiliser la mesure. Donc, on veut être sûres que ça rejoigne bien les femmes et que ça assure leur sécurité.
n
(12 heures)
n
Pour conclure, je vous dirais qu'en ce 6 décembre 2005, on tient à réitérer notre appui à ce projet de loi là qui est vraiment un pas concret et qui va être une mesure de plus qui va s'ajouter à ce qu'on a fait depuis 30 ans pour assurer la sécurité des femmes. On recommande évidemment que cette mesure-là, si on veut qu'elle soit utile, soit connue des femmes. Une des façons pourra être évidemment de l'inscrire sur le formulaire de bail. Et finalement je vous dirais que, comme c'est une mesure nouvelle, comme il faudra tester les mécanismes, nous, on recommande que le ministère de la Justice procède à l'évaluation, dans 12 à 24 mois, de l'application de cette mesure-là pour voir si on a des problèmes, s'il y a des effets pervers et s'il faut faire des modifications pour s'assurer que les femmes puissent en bénéficier.
Et pour terminer, je vous rappellerais que nous sommes tout à fait à la disposition des membres du Parlement et particulièrement du ministre de la Justice pour mettre à contribution notre expertise, pour s'assurer que les femmes soient plus en sécurité.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Riendeau. Mme Dionne? Non, ça va? Ça complète?
Donc, pour la période d'échange, M. le ministre.
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Alors, merci à tous les membres du Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale. Mme Farly, Mme Riendeau, Mme Tremblay et Mme Dionne, je vous remercie d'être présentes aujourd'hui. Je pense que c'est un sujet très important, nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter. Comme vous le mentionnez, ça fait un certain nombre d'années, d'ailleurs, que c'était proposé. Donc, l'objectif, c'est de pouvoir modifier le Code civil dans une perspective où ça donne vraiment une alternative aux personnes qui sont victimes de violence conjugale.
D'autre part, il est bien sûr que, du côté des propriétaires, il y a certaines hésitations, je pense que c'est compréhensible, quant au fait que ce doit être pour des raisons valables et non pas pour des raisons frivoles ou parfois même qu'il y ait, disent-ils, des possibilités de collusion, ce n'est pas ça qu'on veut. Donc, et c'est pour cette raison, je pense, que la façon de pouvoir attester de la situation est importante. Je pense que c'est important pour les femmes ou les enfants qui sont victimes, mais aussi pour les propriétaires afin que cette mesure-là soit bien appliquée et que, disons, ça se fasse correctement.
Vous suggérez un comité pour revoir la procédure, ce que nous avons... Puis je suis ouvert à ça, on pourra en discuter avec les autres membres de la commission. Nous avons voulu justement, au ministère, déjà avoir un projet pour permettre une discussion avec vous puis également avec les propriétaires pour justement voir comment on peut le mieux s'assurer que c'est bien reconnu, que c'est équitable.
Nous avions suggéré les substituts du Procureur, et même s'il n'y a pas de plainte de portée ou d'accusation de portée, parce qu'il ne faut pas que ce soit le cas, justement, et je reconnais avec vous qu'il y a des personnes, là, qui peuvent ne pas vouloir porter plainte. Est-ce que vous avez pensé à d'autres officiers publics qui pourraient être des personnes qui, selon vous, seraient appropriées, là, pour justement faire ce travail-là en plus des substituts du Procureur?
Mme Riendeau (Louise): Bien, en fait, au cours des discussions qu'on a eues dans les dernières semaines là-dessus, l'idée est d'ailleurs venue, dans des discussions avec votre ministère, que les greffiers puissent faire ça. Le greffier est une figure peut-être moins associée au droit criminel qui pourrait peut-être être quelqu'un en alternance... pas en alternance, là, mais également avec un procureur. Ça pourrait peut-être être une alternative qui permette à des femmes qui ne se sentiraient pas à l'aise d'aller voir un procureur de faire la demande.
Je profite du fait que vous me donnez la parole pour clarifier quelque chose. Il est certain que nos organisations, la mienne en particulier, travaillent très fort pour que les femmes portent plainte et travaillent à améliorer le système de justice pour que les femmes aient confiance dans le système de justice. Malgré ce travail acharné qu'on fait, en collaboration également avec le ministère, il faut se rendre à la réalité qu'il y a certaines femmes qui ont trop peur ou qui, pour différentes raisons, reculent au moment d'une plainte. Et c'est à elles qu'on pense en cherchant une alternative. On va continuer de les encourager à s'adresser à la police et aux procureurs, mais on ne voudrait pas qu'elles restent en danger parce que ça crée une barrière.
M. Marcoux: Merci. Je pense que j'avais d'autres collègues qui voulaient poser des questions.
Le Président (M. Descoteaux): Oui, M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, bienvenue, merci d'être là, ce matin. Vous avez mentionné, tout à l'heure, je ne sais pas si c'est vous, d'inscrire sur le formulaire de bail cet état de fait, là.
Ma question est: En ce qui regarde l'élément de confidentialité ou l'élément d'intrusion dans la vie privée, à ce moment-là, il n'y a pas crainte de croire qu'à ce moment-là, dans le cadre de la négociation ou de la signature d'un bail, que le propriétaire interroge, au niveau de la vie privée du couple par rapport aux relations et ces choses-là, le fait de l'inscrire sur le bail, dans le cadre d'une discussion? J'aimerais ça que vous m'éclairiez sur votre...
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Carole): Oui, merci. Je pense que Louise, qu'est-ce qu'elle voulait dire, c'était au niveau de la modification. La nouvelle modification à 1974 doit être inscrite dans le nouveau bail, pas le fait que la femme est en...
M. Bernier: O.K. C'est correct. Je comprends votre...
Mme Riendeau (Louise): Si je peux compléter, l'article 1974, la possibilité de résilier son bail en fonction de 1974 apparaît déjà sur le bail pour les autres motifs, donc il faudrait s'assurer que ce motif-là est ajouté.
Une voix: C'est ça.
M. Bernier: C'est le seul point que vous voulez mentionner?
Des voix: Oui.
M. Bernier: O.K. C'est parce que je comprenais mal votre précision sur ça. O.K. Merci.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Merci, mesdames, de votre présentation d'aujourd'hui, et surtout de votre travail qui dure depuis six ans.
J'ai deux questions pour vous. La première, en fonction d'une proposition qui est formulée par un autre groupe un petit peu plus tard, qui relie la modification au conjoint colocataire, ce qu'on ne retrouve pas actuellement dans le projet de loi. Donc, on parle à ce moment-là de... si on prend le texte du premier paragraphe, d'ajouter, après, bon, «de la violence d'un conjoint colocataire et/ou d'un ancien conjoint colocataire», alors c'est deux ajouts, plus le fait, lorsqu'on parle d'un tiers, dans la mesure où ce tiers-là, dans la mesure où les gestes ont été commis dans le logement en question. Alors, ma première question, c'est: Comment vous réagissez à cette demande-là?
Et la deuxième, quant aux délais, qui me préoccupe, moi, personnellement. Parce que peut-être, comme vous l'avez souligné justement tout à l'heure, très souvent, c'est une question d'urgence, et cette mesure-là peut faire en sorte que la personne qui voudrait en bénéficier est confrontée à la nécessité de quitter rapidement et l'insécurité financière que peut entraîner le fait qu'elle ait à payer un trois mois d'avis.
Alors, est-ce que, pour vous, ça pose un problème ou ça risque de poser un problème réel qui pourrait peut-être être corrigé par une imposition au locateur de démontrer que ce trois mois là serait payable dans la mesure où il aurait le fardeau de démontrer que le logement n'a pu être reloué avant? Autrement dit, d'éviter un paiement ou une obligation de payer de trois mois, alors que le logement a pu être loué trois semaines plus tard?
Parce que la personne qui est en situation de détresse, là, elle doit prendre une décision, et là c'est: Je suis prise avec trois mois de pénalité éventuellement ou trois mois de préavis que je ne peux pas... mais je dois quitter immédiatement. Alors, comment vous réagissez à ça?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Oui. Bien, pour la question du colocataire, pour nous, ça pose un problème parce que c'est mal connaître la dynamique de la violence conjugale, d'une part, de proposer ça; d'autre part, ça aurait un effet restrictif pour beaucoup de femmes. La violence conjugale, oui, ça s'exerce par le conjoint avec lequel on vit, mais ça s'exerce parfois par un amoureux avec qui on n'a jamais vécu et, comme on l'a dit, au moment de la rupture, ça peut devenir très dangereux. Et généralement, notre amoureux, même si on ne vit pas avec, il sait où on habite, hein? Alors, il peut très bien venir nous harceler, nous menacer, tenter d'entrer par effraction. Donc, pour nous, si on restreint ça au conjoint colocataire, vraiment on va laisser beaucoup de femmes dans le danger. Alors, non, on ne serait pas très favorables à ce genre de modification là.
Pour ce qui est de la question de la mesure d'urgence, vous avez raison sur le fait que les femmes sont en urgence, et c'est pourquoi, au départ, nous, on demandait que cette mesure-là soit disponible au bout d'un avis d'un mois. On a compris que ce n'était pas possible pour le moment, et on se dit... Bien, c'est pour ça qu'on propose une évaluation, en fait, pour voir est-ce que ça pose des freins aux femmes et est-ce que, dans un an ou deux, on pourra réviser.
Vous apportez la suggestion qu'effectivement, que la femme n'ait à payer trois mois que si le logement n'est pas reloué, moi, je trouve que c'est très intéressant, tu sais, parce que sinon on risque d'avoir un double paiement d'un loyer, puis c'est une femme au fond qui a beaucoup de choses à réorganiser dans sa vie qui aurait à assumer ça. Alors, c'est peut-être effectivement une solution qui peut être intéressante.
n
(12 h 10)
n
Une autre solution qui pourra peut-être être évaluée plus tard, le jour où il y aura une réforme de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, c'est de voir... bon nombre de ces victimes-là sont victimes d'actes criminels; peut-être que, comme l'IVAC peut contribuer, peut indemniser pour des déménagements, que ça pourra être là-dedans. Mais là, nous, on s'est bornés à réagir au projet de loi n° 133 et on se dit que, dans une période d'évaluation, on pourrait regarder ça.
M. Gabias: Si vous permettez, M. le Président?
Le Président (M. Descoteaux): Brièvement, M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: De votre expérience, est-ce que selon vous le fait pour une victime d'être confrontée à un trois mois d'avis peut la faire hésiter à profiter de cette mesure? C'est plus ça que le fait de payer. Mais est-ce qu'elle pourrait décider de ne tout simplement pas se prévaloir parce qu'incapable d'affronter ce préavis-là?
Mme Riendeau (Louise): Bien, écoutez, là, trois mois, c'est déjà beaucoup mieux que la situation actuelle; ça, c'est évident. Ça risque d'avoir des conséquences. On risque de, par exemple, voir des femmes qui vont rester beaucoup plus longtemps dans une maison d'hébergement parce qu'elles ne pourront pas assumer le trois mois ou on va voir des femmes qui vont s'endetter parce qu'elles vont avoir deux logements à faire, mais on se dit: C'est un pas, c'est un premier pas.
Mme Dionne (Nicole): Excusez-moi. Juste une petite...
Le Président (M. Descoteaux): Oui, Mme Dionne.
Mme Dionne (Nicole): ...précision par rapport à l'article 1974. Si effectivement la locataire donne un avis de trois mois au propriétaire et que celui-ci reloue dans le mois ou dans les semaines qui suivent, la locataire n'a pas à payer la totalité de ces trois mois. C'est déjà prévu dans l'application de l'article 1974. Je prends pour exemple la situation d'un ou d'une locataire qui obtiendrait un logement de type HLM par exemple, elle donne un avis de trois mois au propriétaire et elle peut quitter immédiatement pour aller habiter le logement HLM. Le logement étant disponible immédiatement, le propriétaire peut effectivement plus facilement relouer le logement. Alors, s'il reloue au bout d'un mois, la locataire qui a quitté n'a pas à payer les deux autres mois. Donc, le trois mois, c'est un maximum de trois mois de responsabilité.
Dans les situations où, par exemple, le taux de vacance est relativement bas, effectivement on peut supposer que le propriétaire réussirait à relouer plus facilement ou bien avant le délai de trois mois. Et c'est pour ça qu'on recommande aux locataires de payer mensuellement cette responsabilité-là et de ne pas le payer trois mois à l'avance, puisqu'effectivement le logement pourrait être loué après deux semaines ou un mois, par exemple.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Dionne. M. le député de Hull.
M. Cholette: Merci, M. le Président. M. le ministre, chers collègues. Mesdames, merci d'avoir participé à nos travaux aujourd'hui. Je veux bien comprendre dans le fond le message que vous nous lancez et j'ai une question concernant un point qui me semble un peu ambigu dans le libellé de la modification que l'on propose.
Vous nous dites que vous êtes heureuses avec les modifications que l'on propose; vous avez fait un compromis sur la question du délai, mais que, sur les libellés, notamment pour la désignation de qui serait visé par cette disposition, vous êtes heureuse. Et lorsque je la lis et que je lis: «En outre, un locataire peut résilier le bail en cours si, en raison de la violence d'un conjoint ou d'un ancien conjoint ? et là on ne le définit pas, "ancien" veut dire combien de temps ? ou en raison d'une agression à caractère sexuel même par un tiers, sa sécurité ou celle d'un enfant qui habite [...] est menacée.»
Est-ce que je comprends que, pour ce qui est de violence, la disposition que l'on propose se limite à un conjoint et à un ancien conjoint et, pour ce qui est d'une agression à caractère sexuel, ça s'adresse à un tiers?
Et si c'est le cas, pourquoi avons-nous par exemple évité d'associer la violence faite à une femme par un tiers... on a évité de le mettre comme motif de résiliation de bail? Puis pourquoi êtes-vous d'accord avec ça?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Alors, écoutez, nos revendications, sans être limitatives, se sont faites à partir des femmes pour lesquelles on travaille, c'est-à-dire les femmes victimes de violence conjugale. Certainement que des femmes peuvent être menacées par des inconnus et que c'est grave et qu'il y a un problème. Mais j'avouerai qu'on s'est bornés à parler de ce dont on connaissait. O.K.?
Et c'est donc pour ça, au niveau du conjoint ou de l'ex-conjoint, que pour nous ça répondait à la revendication et à la réalité qu'on voyait tous les jours. O.K.?
Et si une femme victime de violence était agressée sexuellement par son conjoint, pour nous, ça fait partie de la violence conjugale. Ça fait qu'on n'était pas mal à l'aise avec le fait qu'on parle d'agression sexuelle même par un tiers parce que, pour nous, on se disait, ça fait partie de la violence conjugale.
Et quand on évaluera la situation de la femme, certainement que ce sera pris en considération. Je ne sais pas si je réponds à votre question, là.
M. Cholette: Bien, en fait la question que je vous pose, c'est: Est-ce qu'une femme victime de violence par un tiers peut se prévaloir de la clause devant nous? À ma lecture, je ne suis pas expert, mais à ma lecture, la réponse, c'est non, mais sauf si c'est à caractère sexuel. Mais si elle est victime de violence de la part d'un tiers, elle n'a pas le droit de se prévaloir de la clause.
Mme Riendeau (Louise): Je pense que vous devriez poser la question à votre collègue législateur.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme Riendeau. Brièvement, Mme la députée de Matane.
Mme Charest (Matane): Oui, merci, M. le Président. En fait, pour rajouter aux propos de mon collègue, parce qu'ils sont très pertinents, je réfère à la notion de conjoint définie à la Loi d'interprétation, et on précise que la notion de conjoint requiert en fait des critères, là: un conjoint, c'est soit un conjoint sur union légale ou un conjoint de fait. Et, dans le cas de conjoint de fait, on exige une cohabitation, la preuve d'une cohabitation, et on présume une cohabitation lorsque la preuve est difficile à établir sur certaines prémisses et certaines hypothèses.
Donc, ce que le député de Hull précisait est très important, puisque, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, madame, si la personne est l'amoureux... ? vous l'avez nommé ainsi ? n'a pas cohabité nécessairement sur les bases continues ou selon les normes établies par la Loi d'interprétation, il n'est pas le conjoint. Donc, dans le cas de violence, il y a une problématique pour la dame violentée de pouvoir avoir un recours rapide. Alors, je rajoute aux propos de mon collègue pour dire que, si éventuellement il y a des éléments à considérer et analyser en profondeur, celui-ci en serait certainement un de poids.
Mme Riendeau (Louise): Bien, effectivement...
Le Président (M. Descoteaux): Mme Riendeau, on va considérer plutôt la question comme un commentaire, puisque nous avons amplement dépassé le temps. Je vais céder la parole du côté de l'opposition.
Des voix: ...
Le Président (M. Descoteaux): Est-ce que vous voulez... Allez donc, Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Vous soulevez un problème qu'on n'avait pas vu. Écoutez, la Loi d'interprétation, ce n'est pas quelque chose que, nous, on regarde tous les jours. Et, pour nous, un conjoint ou un ex-conjoint, ça incluait les amoureux parce qu'au sens où on définit la violence conjugale et au sens, je crois, où la politique d'intervention en matière de violence conjugale le définit, ça a un sens assez large. Si les lois qu'on a au Québec et leur interprétation posent une restriction, certainement qu'on serait d'avis de faire une modification qui nous permette d'englober plus l'ensemble de la réalité.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, merci, mesdames. Effectivement, la notion de conjoint au niveau juridique est plus limitée que sont vos intentions. Ça, ça se semble assez clair parce qu'on parle de conjoint de fait, donc qui fait référence à une certaine forme de vie maritale, du moins de cohabitation, c'est ça. Donc, il y a un questionnement à avoir à ce niveau-là.
De façon plus technique aussi, vous soulignez, dans votre mémoire, que vous souhaitez que le projet de loi entre en vigueur le 1er avril 2006. C'est très technique, mais pourquoi le 1er avril, pourquoi pas lors de l'entrée en vigueur... lors de l'adoption, lors de la sanction, effectivement?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Riendeau.
Mme Riendeau (Louise): Parce qu'on a voulu être conséquentes: on recommandait un comité de travail et on a voulu lui donner le temps de travailler. Et on s'est dit qu'en se mettant une échéance, ça nous obligerait à travailler. Donc, pourquoi une échéance, mais pourquoi quelques mois? Donc, pour être capable de travailler à définir un mécanisme qui va nous assurer que le projet va être utile.
M. Bédard: O.K. Mais, si vous n'avez pas de comité de travail, évidemment, vous souhaitez l'application immédiate de la loi?
Mme Riendeau (Louise): Bien, oui, mais, si on n'a pas de comité de travail, on va avoir un problème si on ne modifie pas la politique qui est proposée à l'heure actuelle parce qu'on pense que ça va éliminer de facto un certain nombre de femmes.
M. Bédard: Sur la politique, d'abord, je vois aussi qu'il n'y a pas de délai prévu ? je pense que vous avez abordé la question ? on dit que le Procureur doit traiter ces questions avec diligence. Avec diligence, pour quelqu'un qui a des accusations de meurtre de toute nature, on sait comment les substituts du Procureur sont des gens occupés qui... Est-ce que vous pensez... et là, au-delà de la personne, est-ce que vous ne pensez pas que simplement mettre avec diligence, ça va être de nature à faire en sorte que les délais peuvent s'allonger?
Mme Riendeau (Louise): Bien, je pense, effectivement, c'est quelque chose qu'il va falloir regarder. On parle d'un avis de trois mois; si ça prend un mois et demi avant de rencontrer la personne autorisée et d'avoir l'attestation, les femmes vont avoir un problème. Donc, notre souhait, c'est que tout vraiment soit mis en place pour que ce soit rapide, efficace, accessible, et c'est quelque chose qu'on devra considérer dans le choix de la personne autorisée. Tu sais, il faudra que la personne ait du temps libéré pour répondre à ça, et que son emploi du temps ne crée pas indûment des délais pour les victimes.
n(12 h 20)nM. Bédard: Et, bon, sur le Procureur, effectivement, je reviens un peu à la même chose, là, vous avez proposé le greffier. Je pense que ce serait peut-être important de voir aussi... Parce que le greffier, c'est assez technique, hein, un greffier, et ce n'est pas très sensibilisé à la réalité dont on fait mention actuellement, alors que les procureurs, l'avantage, c'est qu'ils le sont. C'est des gens qui ont à appliquer des politiques, ils ont de la formation continue dans ces matières, et le greffier, lui, pour en connaître quelques-uns, là, c'est des gens fantastiques, là, mais qui sont moins rompus à cette... et moins conscients, là, des problématiques en ces matières. Peut-être permettre, si ce n'est pas sur-le-champ, là, on siège pendant un petit moment, de toute façon la politique va s'appliquer plus tard, mais je pense qu'il y a lieu de réfléchir à une personne, à une autre personne.
Et vous disiez... des cas où la personne ne s'adresserait pas, bon, une personne immigrante, mais je vous dirais même une personne qui a déjà été confrontée à la justice, qui a déjà été accusée pour d'autres matières, je vous dirais, elle n'a pas une... elle n'est pas portée naturellement, je vous dirais, à aller consulter le procureur qui a déjà porté des accusations contre elle. Alors... Et c'est des gens qui ont les mêmes droits d'être absous, là, d'un contexte de violence. Donc, moi, je pense qu'il faut peut-être garder le procureur, mais peut-être l'étendre à un autre type d'individu, parce que le procureur pourrait convenir. Je pense, dans certaines régions, ce serait peut-être plus simple. Ailleurs, peut-être dans Montréal, ce serait peut-être un peu plus compliqué. En tout cas, on attend vos commentaires là-dessus.
Mme Riendeau (Louise): En fait, je pense qu'on est prêtes à continuer à réfléchir. On ne sait pas... Dans l'urgence, je vous dirais qu'on s'est davantage préparées pour regarder l'aspect législatif. Pour nous, ça faisait partie de l'aspect administratif qu'on pourrait, si le ministre accepte qu'il y ait un comité, discuter dans les prochains mois et effectivement trouver le choix le plus judicieux.
M. Bédard: Ce que vous dites, effectivement ça me semble nécessaire, et ça semble tout aussi nécessaire de mettre un délai aussi, si on veut, à ce comité, parce que sinon, vous savez, les travaux peuvent s'étendre quand même très longtemps et finalement ne pas aboutir. Donc, il y a un risque à ne pas faire appliquer immédiatement le projet de loi. Alors, je suis d'accord avec vous qu'il va falloir mettre dans le projet de loi pas par décret, mais à une date fixe, si le gouvernement fait le choix du comité, sinon j'ai vu des comités travailler très longtemps, hein, puis pas de mauvaise foi, mais qui finissent par ne pas aboutir.
Dernière chose, mes collègues auront d'autres questions, mais, sur l'amendement, j'ai compris aussi que ce que vous souhaitiez, c'est qu'à temps déterminé il y ait une évaluation de la mesure, donc qu'on fasse un amendement au projet de loi actuel. Le problème, c'est qu'il se trouve dans le Code civil. Alors... Et mon collègue de Mercier, qui est un éminent juriste, me faisait la remarque: C'est très difficile de mettre ce type de clause dans un article du Code civil effectivement qui affirme des principes. Peut-être qu'il y aurait lieu de modifier la Loi sur le ministère de la Justice, par exemple, dans le projet de loi actuel, et de prévoir qu'il y aurait un comité formé qui ferait rapport dans un délai de deux ans, de 24 mois, de façon à s'assurer que l'objectif de la mesure soit rencontré, bon, qui ferait état aussi du type de demande, les difficultés qu'ils ont rencontrées. Parce que ce qu'aussi on conçoit, c'est que peu importe les choix qu'on va faire, dans l'application, ça risque d'être compliqué, puis il va falloir améliorer le système. Donc, vous seriez d'accord avec une proposition de cette nature-là autrement que dans le Code civil, dans la Loi sur le ministère de la Justice, qui obligerait le ministre à faire rapport au gouvernement et à déposer un rapport à l'Assemblée nationale donc où les groupes pourraient le consulter?
Mme Riendeau (Louise): Oui. En tout cas, pour nous, ce qui est important, c'est qu'on trouve une façon de procéder à une évaluation dans un délai fixé qui nous donne le temps d'avoir de l'expérience, mais qui ne soit pas trop long.
M. Bédard: Merci.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Mercier.
M. Turp: Merci, M. le Président. Merci pour votre mémoire et vos présentations. Je dois dire que je suis assez aussi préoccupé par l'application aux tiers, là, de la partie relative à la violence. Il y a peut-être une raison qui justifierait que, si la violence est exercée même par un tiers, qu'il s'agirait d'un motif valable de résiliation du bail.
Une autre question que je me pose, c'est: Pourquoi limiter à la sécurité et celle d'un enfant? Parce que nos familles plurielles d'aujourd'hui, là, ce n'est pas seulement une femme et un enfant, c'est parfois une femme et sa mère, une femme et sa soeur, et est-ce qu'on ne devrait pas être plus large et penser que, si la sécurité d'une femme et celle d'une autre personne qui habite avec elle est en jeu, et non pas seulement un enfant, qu'il y a une raison pour résilier un bail? Et donc c'est une remarque qui peut être une suggestion pour la suite de nos travaux.
Mais moi, c'est la question du délai qui me préoccupe. Et je voudrais savoir pourquoi vous en êtes venus à ce compromis de trois mois. Moi, ça me semble, l'urgence commande à mon avis que ce ne soit pas trois mois. Et il me semble que c'est par commodité même législative qu'on a voulu que ce soit trois mois, parce qu'on a inclus le changement dans l'article 1974 du Code civil qui prévoit trois mois, puis qui prévoit effectivement un mois lorsqu'un bail est à durée indéterminée ou moins de 12 mois. Alors donc, c'est par commodité. Si on l'inclut dans 1974, c'est pour ne pas répéter le deuxième alinéa, tu sais.
Alors, il me semble que, dans ce cas-ci, vous auriez intérêt à maintenir votre revendication du un mois. Et peut-être qu'on devrait mettre même moins qu'un mois, là, si c'est un bail à durée indéterminée ou moins de 12 mois, à cause de l'urgence. Puis les trois mois de loyer, il faut les payer, hein. C'est une résiliation, mais il faut payer les trois mois. Si le locateur, même s'il l'a loué, exige que la personne paie, elle doit payer; elle a un contrat, il ne peut être résilié qu'après trois mois. Et donc un locateur qui, tu sais, insiste sur le contrat, là, il va dire: Bien, tu me paies, même si tu es partie, et même si je l'ai loué.
Alors, vaut mieux alors réduire le plus possible, dans des cas d'urgence comme celle-là, l'avis, et je vous suggère d'insister pour le mois plutôt que nous annoncer le compromis, parce qu'ici on peut proposer des amendements.
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Carole): On est tout à fait d'accord avec vous. Le problème, c'est qu'on en a encore pour six ans, parce qu'on a travaillé fort, on a revendiqué le un mois pendant au moins quatre ans ? au moins quatre ans. On a rencontré tous les ministres concernés, on a passé deux gouvernements. On a commencé à revendiquer le un mois sous le gouvernement péquiste, et on a recommencé avec le Parti libéral. On a rencontré...
Là, ce que vous me dites, nous, là... C'est sûr que la revendication initiale et ce qu'on aurait préféré, c'est le un mois, avec un avis d'un mois sans répercussions légales. Ça veut dire: la femme donne un avis d'un mois, elle quitte, s'en va pour sa sécurité puis celle de ses enfants. On recommence. Si vous dites... On recommence notre revendication au début, parce qu'on a travaillé fort pour le faire passer, le un mois, on l'a pas eu, et ce qui nous a été proposé par le gouvernement libéral, c'est puis... par M. Marcoux surtout, c'est la modification à 1974. Donc, entre la femme qui n'est pas libérée de son bail puis qui est engagée pour huit mois ou neuf mois ou 12 mois avec une dette ou une poursuite mauvaise payeuse, on aime autant avoir la modification à 1974.
M. Turp: Le débat est lancé, là.
Mme Tremblay (Carole): Oui.
M. Turp: M. le ministre, vous voyez qu'il y a des gens de votre côté de la table comme de ce côté-ci qui pensent peut-être que le trois mois, ça pourrait mettre en danger la sécurité de la femme, là.
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Carole): J'ai oublié un point bien important.
Le Président (M. Descoteaux): Oui.
Mme Tremblay (Carole): Je vous parle du travail du Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale, mais je ne vous ai pas parlé du lobby des propriétaires. Vous pourrez en reparler avec... parce qu'il y a eu un gros lobby. Les propriétaires étaient contre le un mois, tout à fait contre.
Le Président (M. Descoteaux): Autres questions? Ça va? M. le ministre, peut-être avec le consentement que vous avez eu. Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup de votre présentation puis de votre action. Moi aussi, je suis un petit peu déçue, là, de la présentation du texte, parce que je crois, moi aussi, que la définition, violence d'un conjoint ou d'un ancien conjoint, n'est vraiment pas dans l'optique, là. Ce n'est pas un amoureux, là, tu sais, ce n'est pas... on ne vient pas protéger, là, la femme victime de violence à moins qu'il ait vraiment été conjoint ou ex-conjoint de fait, là, mais sinon j'ai l'impression qu'on risque de passer à côté.
n(12 h 30)n L'importance du comité de travail, oui, parce qu'au niveau du mécanisme... Moi, c'est le délai aussi qui me fait le plus peur, parce que non seulement le trois mois, c'est parce que c'est le délai qui s'ajoute à la personne qui va donner l'attestation, puis ça, là, est-ce qu'il n'y aurait pas un moyen de mettre un délai là justement pour la personne qui doit donner une attestation? Qu'il y ait un délai dans la loi qui vous permette de limiter, parce que, s'il n'y a pas de délai au niveau de l'attestation, on risque que le trois mois se transforme en six mois, puis au même temps qu'on a présentement, là? Donc, la personne ne serait pas plus avantagée, je pense.
Puis moi, j'aurais souhaité, puis je sais qu'au moment où on l'avait travaillé puis que les comités ont effectivement recommencé tout le travail à chaque fois, on s'entend: changement de ministre, on recommençait le travail, changement de gouvernement, on recommençait le travail, changement de ministre, on recommençait le travail. Donc, on l'a fait toutes ces années-là, mais on l'avait presque toujours lié, en tout cas nous, à l'indemnisation au niveau de l'IVAC, justement pour pas que ça amène de problèmes à la victime puis qu'il n'y ait pas de pénalité non plus du côté des propriétaires. Donc, on se disait, oui, on est d'accord, mais, pour pas que ni l'un ni l'autre soit pénalisé, il faut que l'indemnisation arrive, et on voyait seulement par l'IVAC, là, à ce moment-là, et on souhaitait pouvoir le faire avec la modification de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. C'est-u aussi pertinent?
Le Président (M. Descoteaux): ...en une seule minute.
Mme Riendeau (Louise): Oui, bien c'est tout à fait pertinent, et, dans les discussions qu'on a eues avec le ministre, on a annoncé nos couleurs. Il est clair que c'est un premier pas et c'est comme ça que, nous, on voit cette mesure-là, que les femmes n'ont pas... en tout cas, beaucoup de femmes, on va avoir de la difficulté à payer trois mois. Donc, on va continuer à travailler pour demander que la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels soit amendée et permette d'indemniser au moins deux mois, tu sais? Puis certaines parlaient de trois, là. Tu sais, c'est des victimes d'actes criminels, alors c'est clair. Là, on travaille ce premier pas là. On va continuer à travailler. Vous savez, on a travaillé six ans, on est patientes. On est pragmatiques, mais on est patientes.
Le Président (M. Descoteaux): Merci beaucoup, mesdames, de votre présence devant la commission. Merci pour vos lumières.
M. le ministre, est-ce que vous aviez un commentaire ou...
M. Marcoux: Oui, peut-être un seul commentaire, parce qu'on parlait du comité, là, et, moi, j'ai indiqué que je suis tout à fait d'accord pour le comité, parce que ce n'est pas évident de trouver un officier public pour attester. Je peux vous dire qu'on a cherché beaucoup avec les gens du ministère, et tout ça... Pardon?
Une voix: Juge de paix, peut-être?
M. Marcoux: Un juge de paix, écoutez... Alors... Et donc, à ce moment-là, moi, je suis tout à fait ouvert, et je pense que c'est important que ça puisse être bien fait et, à ce moment-là, qu'on le travaille en comité puis qu'on puisse l'appliquer et que ce soit bien efficace.
Le Président (M. Descoteaux): Merci à nouveau, mesdames.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Descoteaux): Donc, bienvenue, messieurs, devant la Commission des institutions. Si vous voulez, s'il vous plaît, vous présenter. Par la suite, vous aurez 15 minutes pour présenter votre mémoire, suivies de périodes d'échange du côté ministériel et de l'opposition officielle.
Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec inc. (CORPIQ)
M. Courtemanche (Luc): Mon nom est Luc Courtemanche, je suis président de la CORPIQ, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec.
M. Simard (Patrick): Bonjour, mon est Patrick Simard. Je suis à la fois membre de CORPIQ et le procureur de CORPIQ.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, messieurs. Donc, nous vous écoutons.
M. Courtemanche (Luc): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. députés ministériels et de l'opposition, je tiens à vous remercier sincèrement, au nom des 277 000 propriétaires au Québec, d'avoir accepté de nous entendre. Vous avez déjà en main notre mémoire, et j'attirerai votre attention sur son contenu un petit peu plus tard.
J'aimerais d'emblée vous présenter, prendre quelques secondes de mon temps pour vous présenter l'organisation que je présente, à savoir la CORPIQ, et surtout qui sont les citoyennes et les citoyens que nous représentons ici, ce matin. La CORPIQ, brièvement, a été fondée en 1980, est le plus important organisme à but non lucratif représentant les propriétaires d'immeubles à logements de partout au Québec. Je vous rappelle que le parc de logements compte environ 1,3 million d'unités, dont 90 % sont détenues par des propriétaires privés.
Et j'attire votre attention sur la donnée suivante: la grande majorité des propriétaires au Québec, soit 88 % d'entre eux ? je vous rappelle que nous sommes 277 000 ? possèdent six logements et moins. Donc, je répète: 88 % des propriétaires au Québec possèdent six logements et moins. Donc, ce sont eux qui sont directement touchés par les modifications législatives que vous souhaitez apporter aujourd'hui.
Le propriétaire joue un rôle important dans notre société en fournissant des logements de qualité et en acceptant actuellement que, dans des cas bien précis, des locataires puissent résilier leur bail. Par exemple, pour les ménages à faibles revenus à qui on attribue un logement social ou pour les personnes âgées dont le logement ne correspond plus à leurs besoins. Les propriétaires subissent déjà certains préjudices dans l'application de l'article 1974 du Code civil, mais, tout en étant conscients du rôle social qu'ils doivent assumer, ils acceptent ces préjudices.
Notre démarche aujourd'hui s'inscrit dans un souci d'équité envers les propriétaires investisseurs et des clientèles qu'ils desservent, dont celles qui peuvent être victimes de violence conjugale. Les propriétaires d'immeubles à logements du Québec souscrivent au principe de protection que souhaite mettre en place le projet de loi n° 133, mais ils sont préoccupés par le libellé proposé modifiant l'article 1974 du Code civil.
Nous avons deux préoccupations: la première, nous souhaiterions que le libellé soit précisé dans le premier alinéa, afin de rencontrer les objectifs du gouvernement en matière de violence conjugale; et notre deuxième préoccupation, nous avons de sérieuses inquiétudes sur la mise en application du deuxième alinéa.
Pour ce qui est de notre première préoccupation, le libellé proposé au premier alinéa ne respecte pas, selon nous, les règles particulières au bail d'un logement, tel que défini dans la section Louage du Code civil du Québec, ouvrant ainsi la voie à une large application de la résiliation du bail.
n(12 h 40)n Par exemple, vous savez qu'on ne peut résilier une partie d'un bail, le bail doit être résilié dans sa totalité. Donc, on peut légalement, aujourd'hui, résilier une partie d'un bail. Donc, une personne ne peut résilier sa portion applicable au bail. Chaque article du Code civil dans la section Louage a un lien direct avec le logement et/ou un événement qui a un lien direct encore une fois avec le logement. Plus tard, mon collègue vous expliquera la modification du libellé que nous vous proposons.
En regard du deuxième alinéa, le libellé actuel qui concerne la mise en application ne précise pas selon nous suffisamment les mécanismes qui vont permettre à une victime de résilier son bail. On estime que, compte tenu de la nature exceptionnelle de la problématique, soit la violence conjugale et/ou l'agression à caractère sexuel, nous voulons nous assurer que l'attestation sera délivrée par des personnes qui auront les compétences nécessaires pour évaluer le risque réel.
Actuellement, l'article 1974, comme je vous le mentionnais précédemment, permet à un ménage à faibles revenus, par exemple, à qui on attribue un logement à loyer modique de résilier son bail sur simple présentation d'un document que lui fournit la Régie du logement, qu'il doit remplir et donner à son locateur. C'est simple. La même chose pour les personnes âgées: sur simple présentation d'un document et d'une copie d'un bail qu'elle aura signé avec un autre locateur, elle peut résilier son bail. Le processus est simple.
Rien par contre nous confirme actuellement que, dans le cas qui nous préoccupe aujourd'hui, une autorité compétente en la matière sera impliquée dans le processus. Nous aimerions avoir la garantie de la part du ministre de la Justice que les services policiers et les services du Procureur général du Québec vont être impliqués dans la procédure parce qu'on estime que c'est la seule façon d'atteindre les objectifs du plan d'action du gouvernement en matière de violence conjugale.
Vous savez, à notre association, on reçoit régulièrement des téléphones de propriétaires qui hébergent des personnes qui subissent de la violence ou autres problématiques dont on parle ce matin. Ils nous demandent comment réagir parce qu'ils sont pris entre deux feux. Vous savez, le petit propriétaire, lui, qui héberge une victime, lui aussi... lui, son principal objectif est de protéger la victime. Il veut que l'agresseur puisse quitter le logement pour pouvoir protéger la victime. Mais on comprend bien que, pour différents groupes, ce n'est pas la façon idéale de protéger la victime. Mais, actuellement, les propriétaires offrent d'emblée aux victimes de quitter le logement et de remettre le logement en location par un processus qu'on appelle la cession de bail. Évidemment, encore là, les délais, dépendamment de la période dans l'année où le logement est remis en location, les délais peuvent être longs, on en convient.
Mais vous devez tenir compte... Avant de passer la parole à mon confrère, je tiens à vous dire que nous sommes d'accord encore une fois, et je le réitère, avec les objectifs qui sont recherchés, soit la protection des victimes de violence ou d'agression à caractère sexuel. Nous ne sommes pas contre, bien au contraire, mais nous voulons simplement nous assurer que le libellé final corresponde à la réalité que vivent les propriétaires d'immeubles à logements et que son application surtout soit suffisamment encadrée pour ne pas laisser place à l'arbitraire.
Et je vais passer la parole à mon confrère qui va vous expliquer les modifications que nous aimerions proposer au niveau du premier alinéa.
Le Président (M. Descoteaux): M. Simard.
M. Simard (Patrick): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, alors vous aurez compris dans quel cadre se situe l'intervention qui est faite aujourd'hui. Vous savez, il faut bien comprendre, le parc immobilier du Québec est pourvu de très petits propriétaires immobiliers. Alors, il faut assurer un juste équilibre entre les intérêts des uns, les victimes de violence ou d'agression, et aussi ceux et celles qui fournissent le logement à ces gens-là et qui, eux aussi, ont besoin d'une mesure d'atténuation ou de protection de leurs intérêts.
Je vais tout de suite vous référer au mémoire qui a été présenté à la commission, je suis en page 7, c'est la modification qui est proposée. Il faut bien comprendre que la modification, elle s'insère dans le cadre ? la commission l'a noté dans les travaux juste avant que nous arrivions à cette table ? d'une modification à un article bien précis qui se retrouve dans le livre Du louage du logement. Alors, c'est dans ce cadre-là que se situe notre intervention pour bien cerner, dans le respect de la mesure adoptée par le projet de loi, l'intervention et les modalités de cette intervention-là sur la résiliation du bail.
Alors, ce qui vous est proposé, c'est de restreindre, voire même plutôt d'encadrer l'exercice de la résiliation par l'ajout de la notion de colocataire. À la lecture du libellé tel que présenté devant cette commission de la modification proposée à l'article 1974, il nous apparaissait là qu'elle était excessivement large et laissait place à un paquet de situations qui n'étaient pas, nous en sommes convaincus, visées dans le plan d'action en matière de violence conjugale. Parce que de ne pas le limiter, ça laisse place à des situations ? et je ne veux pas pousser jusqu'à rendre loufoque; mais des situations ? qui nous apparaissent excessivement déraisonnables, pour lesquelles vous allez une victime de plus qui est le propriétaire de l'immeuble, qui, lui, a peut-être deux ou trois logements. Il devra vivre avec une problématique financière excessivement importante qui peut être ? je me permets d'aller jusque-là ? la mort de sa vie financière, puisque ce n'est pas tous les jours qu'il y a un parc de logements qui est dans une situation telle qu'on la connaît actuellement.
Alors, la modification qui est présentée, c'est de restreindre ou de limiter, ou d'encadrer l'intervention pour que le locataire puisse résilier le bail en cours si, en raison de la violence d'un conjoint qui est son colocataire, ou d'un ancien conjoint qui est son colocataire, ou en raison d'une agression à caractère sexuel même par un tiers, mais dans la mesure où elle est commise dans le logement. Alors, voici la modification qui vous est proposée. Je ne veux pas en ajouter davantage.
Il faut bien comprendre que notre intervention se situe dans le cadre du plan d'action qui vise justement à contrer la violence qui est conjugale, contrer évidemment de façon beaucoup plus large la problématique d'agression sexuelle. Et c'est dans ce cadre-là qu'effectivement nous sommes devant vous pour vous dire: Oui, on souscrit au principe, mais assurez-vous de bien l'encadrer dans la mesure où il est lui-même dans une démarche spécifique du Code civil du Québec qui est attachée au logement et aux situations propres à la vie à logement. Et il nous apparaissait important de bien cerner cette problématique-là et de l'encadrer de façon à lire l'article tel que nous vous le présentons aujourd'hui, avec la proposition que nous vous faisons.
Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre, est-ce qu'on pourrait, puisque nous allons dépasser l'heure retenue, avoir le consentement pour prolonger au-delà? Ça va? Merci, M. le ministre.
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Alors, merci, M. Courtemanche et merci à M. Simard d'être là, aujourd'hui, et merci pour votre présentation également et pour votre mémoire. Je reconnais aussi, et je pense que c'est important de le faire, comme vous le dites, que nous avons beaucoup de propriétaires au Québec qui sont de petits propriétaires. Parfois, nous l'oublions parce qu'on pense aux tours à bureaux qu'on voit à Montréal ou à Québec, là, mais, même à Montréal ou à Québec, dans certains quartiers en particulier, puis notamment en région, en tout cas c'est le cas dans mon comté, moi, il y a beaucoup de petits propriétaires. Je pense que ça, là-dessus, là, il faut le reconnaître et parfois il faut le dire, parce que des fois on peut être porté à l'oublier.
Je suis content d'abord de votre énoncé de principe où vous dites: Nous sommes d'accord avec l'objectif qui est poursuivi. Et simplement pour peut-être rappeler ce qu'il y avait dans le plan de violence conjugale, l'engagement 46 qui était le suivant: Étudier la possibilité de modifier le Code civil du Québec pour permettre la résiliation d'un bail résidentiel pour les motifs de violence conjugale et d'agression sexuelle lorsque la sécurité d'une victime ou celle de ses enfants est menacée. Je pense que ça, c'est un plan qui avait été d'ailleurs rendu public suite à beaucoup de consultations qui s'étaient faites, là, avec différents intervenants.
Donc, je pense... C'est ça, je jugeais important de rappeler l'objectif. J'ai une question ou deux et, subséquemment, je vais laisser mes collègues... je pense qu'ils voulaient également intervenir, M. le Président.
n(12 h 50)n Quand vous mentionnez, M. Courtemanche, qu'on ne peut résilier une partie de bail, ça, je comprends, mais ce que je crois comprendre aussi, c'est qu'il y a plusieurs baux qui sont déjà conjoints et solidaires. Il y a des baux où il y a des colocataires, mais c'est signé conjointement et solidairement. Alors, j'imagine que, dans le cas où il y a une solidarité, il n'y a pas de problème, c'est-à-dire que l'ensemble des obligations du bail, et vous me corrigerez, mais demeurent à la charge d'une des personnes qui a signé si l'autre quitte ou, pour d'autres raisons, ne remplirait plus, ne satisferait plus aux obligations. Dans le cas où c'est simplement conjoint, là c'est peut-être un peu plus compliqué, malgré que ce que je comprends, ce n'est pas clair, clair, ce que nous dit la Régie du logement.
Alors, j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus, là, parce que ce semble être un point important.
Le Président (M. Descoteaux): M. Courtemanche ou Simard. M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Oui, je vais laisser, si vous permettez, la parole à Me Simard à ce sujet-là.
Le Président (M. Descoteaux): Me Simard.
M. Simard (Patrick): Oui. M. le ministre, je vais simplement vous énoncer ce que la Régie du logement a établi comme décisions qui font maintenant jurisprudence; c'est fort clair. Je vous rappelle même le libellé de la modification proposée: «Un locataire peut résilier le bail.» Dans tous les cas, le Code civil parle du bail, il n'y en a qu'un seul, et jamais la régie n'a résilié qu'une partie de bail. Ça, ça me paraît l'évidence.
Je vous dirais, dans la mesure où le bail est uniquement conjoint, la fiction juridique ? je me permets de l'appeler ainsi ? est de dire: Bien, dans la mesure où je n'en ai qu'un seul qui veut résilier le bail... On le verra notamment dans les cas où on se retrouve dans les avis de modification. Alors, le propriétaire envoie un avis de modification de bail. L'un des deux locataires dit: Non, moi, je ne veux plus l'habiter à partir de juillet, alors je vous envoie un avis de non-renouvellement de bail quant à moi. Le colocataire demeure là.
Alors, la fiction juridique qui est établie par la Régie du logement, c'est de dire: Dans ce cadre-là, on va donc arriver à la conclusion qu'il y a une session en faveur de celui ou celle qui demeure. Et là, à ce moment-là, il pourrait y avoir une analyse dans la mesure où le propriétaire d'immeuble faisait une démarche auprès de la régie en disant: Bien, écoutez, je refuse cette cession-là qui est maintenant présumée ? c'est la fiction juridique ? ou tout simplement: Parfait, on l'accepte, vu que ce sont des gens que nous avons déjà chez nous. Et je vous dirai qu'autant que j'en connais il y a peu de dossiers de cette nature-là, puisque les propriétaires d'immeubles connaissent déjà leurs locataires et l'acceptent volontiers, que le bail soit cédé de cette fiction-là en faveur de l'un des deux.
Mais la modification proposée, elle indique fort bien, encore une fois, qu'il s'agit du bail; c'est le bail qui est résilié. Et, dans l'application de 1974, pour les avis qui ont déjà été adressés, je n'ai jamais vu, là, en 11 ans, de décision, à la Régie du logement, qui dise: Bien, parfait, je vais résilier uniquement en faveur de celui ou celle qui peut bénéficier de cette ouverture-là à la résiliation de son bail. Dans les faits, ce qui se passe, c'est uniquement que le bail proprement dit, il se termine, ça s'arrête là. Alors, l'impact est donc excessivement grand pour le propriétaire de l'immeuble, notamment des petits immeubles.
M. Marcoux: Mais ça m'amène une sous-question. D'abord, s'il y a solidarité, si c'est signé conjointement et solidairement, il n'y a pas de problème. C'est dans le cas où c'est seulement conjoint, signé seulement conjointement que vous dites: Il y a peut-être un problème.
M. Simard (Patrick): Oui, tout à fait, M. le ministre, tout à fait.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le ministre. M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, merci de votre contribution. Tout comme l'a mentionné le ministre tout à l'heure, je pense que tout le monde ici sommes très conscients de la nature économique des propriétaires au Québec, et il ne faut pas conclure que, parce qu'on est propriétaire, qu'on est nécessairement très riche.
Mais, à l'intérieur de ce qui est modifié, je veux revenir sur les questions que j'ai posées tout à l'heure aux groupes qui vous ont précédés peut-être de façon différente. Parce que je dois vous dire que ce que vous proposez me semble assez juste en ce sens que le remède pour un... puis là je reprends le terme qui a été exposé tout à l'heure d'un amoureux qui se présente sans droit, là, c'est-à-dire qu'il n'est pas locataire, n'est pas la résiliation de bail. Je pense qu'on doit faire appel à autre chose que la sanction d'un droit avec un propriétaire.
Et tellement que, lorsqu'on lit la proposition telle qu'elle est formulée actuellement ? et c'est ma question, ma première question, vous me direz si vous interprétez de la même façon que moi ? si je suis le conjoint violent colocataire et que mon ex-conjointe obtiendrait une résiliation sur la base de ce qui est proposé, je pourrais, six mois plus tard, me représenter à son nouveau logement et possiblement proférer des menaces, et elle pourrait encore demander une modification, une résiliation sur la base que son ex-conjoint a proféré des menaces. Alors, ce serait sans fin. Moi, c'est l'interprétation que j'en fais tel que c'est là, alors que, si on ajoute, tel que vous le proposez, «colocataire», on vient régler cette deuxième situation là. Bon. Ça, c'est ma première question, à savoir si vous interprétez ça de la même façon.
Et ma deuxième question, qui est peut-être un petit peu plus difficile pour vous, quant au délai, parce qu'on a parlé tout à l'heure d'un mois, trois mois, j'ai posé la question: Si, au deuxième paragraphe de l'article 1974, on ajoutait dans le texte qui commence en disant «à moins que les parties n'en conviennent autrement», si on ajoutait «ou que le locateur démontre l'impossibilité de relouer avant»? Et évidemment vous comprendrez que ça pourrait s'appliquer à toutes les situations prévues par 1974, premier paragraphe. Est-ce que vous seriez confortable avec ça?
C'est-à-dire qu'on comprend que la résiliation effective après le trois mois d'avis dans la mesure où la personne dont on parle dans cet amendement-là, à savoir celle qui a été victime de violence ou celle dont on parle dans le premier paragraphe de 1974, il y a quand même une notion d'urgence. Et, si elle quitte immédiatement et que le locateur reloue dans le mois qui suit, il n'y a pas de raison que le deux mois supplémentaire soit exigé.
Alors, s'il y avait ce que j'appellerais un certain renversement du fardeau, c'est-à-dire que la personne peut quitter et ce serait au propriétaire de démontrer qu'il n'a pas pu relouer ? et ça peut arriver, ça peut arriver ? et qu'à ce moment-là il soit tenu que le locataire qui a quitté, qui a résilié soit tenu aux trois mois. Mais, dans les situations où très facilement, et ça arrive, et particulièrement dans la période qu'on connaît aujourd'hui, il n'y a pas de raison que le propriétaire soit davantage protégé en pouvant exiger, dès le départ, un trois mois qu'on appelle des fois trois mois de pénalité ou trois mois de résiliation, prenons les termes qu'on voudra. Alors, est-ce que vous seriez confortable avec cette modification-là? Alors, c'est mes deux questions.
Le Président (M. Descoteaux): M. Simard, M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Oui. Concernant votre première interrogation sur l'interprétation de notre proposition. Effectivement, nous, on a rajouté la notion colocataire pour que la problématique du conjoint, l'ex-conjoint provienne du logement; donc, on s'entend que c'est deux personnes qui habitent ensemble. Et, pour ce qui est du tiers, on a rajouté que la problématique provienne d'un tiers qui pourrait être un ex-conjoint, un ex-colocataire qui n'habite plus avec la personne, mais la problématique aurait lieu dans un logement. Comme vous le mentionnez, deux ans plus tard, il va la voir dans son nouveau logement, il recommence la problématique, et on accepterait à ce moment-là, si ça a lieu dans le logement. Nous, on veut encadrer ça au niveau du logement, donc colocataire.
Et notre deuxième proposition, c'est encore plus avantageux, on le considère peut-être pour peut-être le nombre de victimes, que ça ait lieu dans le logement même à... je veux dire deux, trois ans plus tard, là. Ça, je pense qu'on...
M. Bernier: Juste une précision sur ce que je vous demande...
Le Président (M. Descoteaux): Juste un instant, M. le député de Montmorency. Mme la députée de Matane. Alors, bien, il y avait deux questions, M. Gabias, vous avez une deuxième interrogation.
M. Courtemanche (Luc): Sur le délai de trois mois. Mais là je vous demande de m'écouter comme il faut, s'il vous plaît...
Une voix: Je vous écoute toujours.
M. Courtemanche (Luc): Oui. Le délai d'avis de résiliation de trois mois effectivement prend effet la journée où le propriétaire reçoit la lettre, actuellement je parle, le 7, le 8, le 15 du mois. Le délai court à partir du moment où le propriétaire reçoit la lettre. Jamais un propriétaire n'est autorisé à percevoir les trois mois de loyer si le logement est reloué. C'est tout à fait illégal et, si vous connaissez des cas où les propriétaires encaissent les trois mois, même si le logement est reloué, je vous invite à les poursuivre à la Régie du logement. La législation est claire, nette et précise: le loyer est payable à tous les mois et, si le logement, à partir du moment où le logement est reloué, le locataire n'a plus l'obligation d'assumer le loyer relié à son logement. C'est clair dans la Loi sur la Régie du logement, dans l'article, et jamais un propriétaire encaisse des sommes si son logement est reloué. S'il le fait, c'est tout à fait illégal, et le locataire peut exiger d'être remboursé comme certains d'entre vous le savent.
Le Président (M. Descoteaux): La commission vous a écouté religieusement. Mme la députée de Matane.
n(13 heures)nMme Charest (Matane): Oui, merci, M. le Président. Ma question, Me Simard, est relative aux prémisses, là, qui sont à la base de votre demande de modification. J'imagine que, lorsque vous référez aux conjoints colocataires, vous envisagez deux possibilités: c'est-à-dire la possibilité où le conjoint agressé est le seul locataire du bail, et là vous vous dites que, comme il est le locataire, il devrait normalement avoir contrôle sur le bien qu'il a loué et exiger l'expulsion du conjoint agresseur; ou bien l'autre possibilité où le conjoint agresseur est l'unique locataire et, dans ce cas-là, la conjointe agressée peut quitter sans aucune autre circonstance.
Donc, dans la deuxième hypothèse, je vois très bien qu'il est facile pour le conjoint agressé de pouvoir quitter. Dans le premier, toutefois, et c'est soulever les inquiétudes que nous ont fait part le premier groupe, on ne règle pas à mon avis le cas du conjoint agresseur qui, bien que n'étant pas locataire et n'ayant aucun droit dans le bail, puisse continuer à causer préjudice au conjoint agressé. Et votre proposition, dans ce cadre-ci, ne semble pas offrir de solution aux cas d'agression.
Le Président (M. Descoteaux): M. Simard ou M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Je vais répondre.
Le Président (M. Descoteaux): M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Écoutez, pour votre inquiétude, je l'ai mentionné tantôt, le conjoint qui n'habite plus avec la victime depuis deux ans ou trois ans devient le tiers. Pour nous, dans notre esprit, l'ex-conjoint, s'il n'est pas colocataire, devient le tiers.
Mme Charest (Matane): Il devient le tiers comme l'avait soulevé mon collègue le député de Hull. Il devient le tiers, et la disposition est applicable dans le cas uniquement d'agression sexuelle mais non pas dans le cas de violence. Seriez-vous...
M. Courtemanche (Luc): Nous...
Mme Charest (Matane): Seriez-vous d'accord avec une modification qui couvrirait également les cas de violence?
M. Courtemanche (Luc): Effectivement. Écoutez, nous, on s'est fiés au libellé actuel du projet de loi, mais si le tiers profère de la violence, là, à une victime dans un logement et que sa sécurité est entachée et celle de ses enfants, oui, on est d'accord.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Hull.
M. Cholette: Merci. Merci de participer à nos travaux. On a tous, si j'ai bien compris, le même objectif. Vous êtes d'accord avec le principe de ce qu'on poursuit aujourd'hui. On discute dans des détails présentement, et, au niveau des détails, j'aurais trois questions. Je veux juste m'assurer, premièrement, lorsque vous utilisez à escient le mot «colocataire», vous avez en tête la situation où il y aura deux personnes qui signent le bail. Ce n'est pas deux occupants, dans votre tête, c'est à escient que c'est deux personnes qui signent le bail. Dans votre expérience, si j'exclus tous les baux où il n'y a qu'une seule personne qui vit dans le logement, donc je parle particulièrement des baux où il y a deux personnes dans le logement, quel est le pourcentage de ces baux qui sont signés par les deux personnes?
Le Président (M. Descoteaux): M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): ...je ne peux pas vous répondre, l'inventaire des 1,3 million de baux au Québec...
M. Cholette: Mais est-ce que c'est exceptionnel que ce soient des colocataires ou est-ce que la pratique fait en sorte que c'est habituellement un seul des conjoints qui signe? Parce que... Est-ce que, en faisant volontairement la référence à colocataire, vous êtes en train de d'exclure 60 % des baux au Québec? C'est ça, ma question, mais vous n'avez pas à cette question-là.
M. Simard (Patrick): Si vous me permettez. Alors, M. le Président, je voudrais répondre à cette question-là. Je vous dirai que, dans la pratique, là, de ce que l'on voit, là, c'est qu'il y a deux personnes dans le logement, les baux sont signés par les deux. Personne ne veut justement se faire expulser par son colocataire. Donc, je vous dirai que, dans la pratique, les gens veulent être sur le bail pour justement s'assurer d'une présence continue dans leur logement. Alors, je vous dirai qu'on n'exclut pas d'une façon systématique un nombre important de locataires, loin de là, ou d'occupants des lieux.
Ça nous apparaissait important parce que, si on le pousse jusqu'au bout, là, O.K., faisons le jeu ensemble. Alors, j'ai un ancien conjoint, une ancienne conjointe qui habite la Saskatchewan, mais malheureusement elle se présente à mon logement et je suis victime soit d'une agression ou d'une violence.
Le Président (M. Descoteaux): Je m'excuse de vous interrompre, je vais vous demander de conclure rapidement toutefois, le temps est écoulé.
M. Simard (Patrick): Oui. Simplement pour vous dire qu'il faut voir, là, jusqu'où la limite va parce que, tel que la modification a été proposée, il nous apparaît clair que des gens qui vivent à l'étranger et qui pourraient être ceux et celles qui sont les agresseurs vont servir, dans cette mesure-là, à résilier un bail. Ce serait possible. Et aussi il faut être très prudent, lorsqu'on va analyser la notion de conjoint, pour la rendre... en fait pour ajouter à la notion de conjoint aussi le tiers en toute matière, même en violence. Il faut aussi bien se rappeler qu'il y a souvent des gens qui vont pouvoir utiliser ce libellé-là.
Alors, si jamais un tiers, violence d'un tiers, hein? Alors, je suis sur la rue, je suis victime d'une violence, je suis donc violenté par un tiers et je pourrais me servir de cette disposition-là pour résilier mon bail. Ça veut donc dire qu'il y a des gens qui pourraient utiliser à mauvais escient cette modification-là si la commission allait en ce sens-là.
Alors, il faut voir jusqu'où il faut aller dans cette limite-là. Ça paraissait important de bien cerner la notion à l'utilisation du logement.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. Simard. M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, peut-être pour pousser un peu plus loin vos représentations ? là je veux bien comprendre parce que, ce qu'on veut, finalement, c'est limiter l'application aux fins qu'on souhaite qu'elle s'applique, et pas bénéficier non plus à des personnes qui n'y auraient pas droit ? dans le cas de baux qui sont signés par les deux conjoints ? ce qui est, j'imagine, assez fréquent quand même, là, de plus en plus parce que, bon, auparavant, c'était... auparavant, il y a quelques dizaines d'années, il y avait un... une personne était responsable d'apporter le revenu mais maintenant, bon, les deux sont en situation, donc j'imagine, par mesure de protection, les propriétaires font signer les deux conjoints solidaires, c'est ce qui existe? ? l'application du projet de loi, et là je veux bien comprendre votre argument, là, la modification, évidemment ça a pour effet, lorsqu'arrivent des événements, agression ou violence conjugale, attestation, là, à ce moment-là, le bail tombe au bénéfice des deux, les deux sont libérés de leurs obligations.
Ce que vous avez représenté tantôt, si j'ai bien compris, est-ce que vous en avez parlé, ou peut-être que j'ai mal saisi, à une réponse du ministre, ce que vous souhaitez, c'est que normalement ça devrait s'appliquer seulement à la victime et pas à l'autre locataire? Autrement dit, que l'autre personne reste... qu'une disposition de cette nature serait strictement au bénéfice de la victime? Et donc qui n'entraînerait pas une résiliation mais bien une extinction des obligations de la victime?
Le Président (M. Descoteaux): M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Mais comme Me Simard vous expliquait tantôt, lorsqu'un bail est résilié, il est résilié dans sa totalité.
M. Bédard: Oui, mais si on modifie, M. Courtemanche, la... Par exemple, si on prévoyait l'extinction des obligations de la... Là je discute avec vous, je ne suis pas un spécialiste en cette matière.
M. Courtemanche (Luc): Oui, mais, vous savez, pour le propriétaire, lui, qui est conscient d'une problématique dans un logement, là, de violence ou autre, là, c'est pour ça que je vous dis qu'on est d'accord avec le principe du projet de loi; on veut bien accepter que le bail soit résilié après trois mois et que les deux parties quittent, là. Vous comprenez? On ne veut pas que le propriétaire ait l'obligation de conserver l'agresseur dans le logement, là.
M. Bédard: Non, mais, lui, il peut être tenu à ses obligations? Ah, O.K.! Vous souhaitez vous aussi qu'il quitte, le sacrer dehors parce qu'évidemment, pour votre bloc, c'est un problème d'avoir quelqu'un qui a agressé. Bien oui, effectivement.
M. Courtemanche (Luc): Bien, c'est pour ça qu'on est d'accord avec l'adoption de principe de ce projet de loi là.
M. Bédard: Oui, oui, oui, oui. Non, non.
M. Courtemanche (Luc): Tu sais, les propriétaires, eux...
M. Bédard: Mais, elle, elle bénéficie de la même...
M. Courtemanche (Luc): Oui, c'est ça.
M. Bédard: Oui, O.K. Alors, on ne peut pas prévoir non plus... Parce que le problème, en vrai, au-delà de tout ça, puis vous êtes d'accord avec le principe, je le vois. Puis, tu sais, on se pose la question: Qui doit payer aussi, là? Tu sais, il vient un moment, et là je comprends vos représentations, la société dit: On prévoit un mécanisme particulier, ça, tout le monde est d'accord, et c'est pour ça que, bon, je pense que c'est ma collègue qui y faisait référence, ce dossier a toujours évolué en fonction de s'assurer que les fonds d'indemnisation accordent, entre guillemets, un soutien à la victime. Autrement dit, que ces obligations-là, qu'il y en ait une partie qui soit prise en compte et qui soit supportée par la société, c'est ce que ça veut dire, que ça ne repose pas strictement sur les épaules de quelqu'un qui, dans 99,9 % des cas, a loué de bonne foi, sans se douter de quoi que ce soit. C'est ce que vous souhaitez.
Est-ce que, comme il risque d'y avoir un délai à l'application du projet de loi, est-ce que vous seriez en faveur de modifications à la Loi sur l'indemnisation qui permettraient justement cette indemnisation ou ce transfert?
Le Président (M. Descoteaux): M. Courtemanche.
M. Courtemanche (Luc): Oui, effectivement. Écoutez, si la victime peut bénéficier d'une aide quelconque pour assumer son obligation qui va se limiter à trois mois, oui, on est en faveur de ça. Nous, le délai de trois mois, bien, vous comprendrez que c'est un maximum, pour nous, qu'on peut accepter, hein? Parce que le propriétaire, lui, oui, il est assuré d'être payé pour les trois mois subséquents, mais il n'y a personne qui va lui dire qu'il va relouer après trois mois, ou quatre mois, ou cinq mois. Lui, il a à assumer encore deux, trois ou quatre mois de vacance, là.
n(13 h 10)n Parce qu'on a traversé de bonnes années, mais ce n'est pas toujours comme ça. Et si les avis sont donnés en septembre et que le locataire quitte en décembre, c'est évident que le propriétaire va avoir son logement vacant tout l'hiver. Mais socialement, il se dit: Regardez, je vais faire ma part, donnez-moi mon avis de trois mois, payez-moi les trois mois de loyer et j'assumerai la balance. Comme on fait avec les personnes âgées ou autres. Je pense qu'on joue un rôle social important. On démontre de la bonne volonté. On est venus ici, ce matin, pour vous dire: Oui, on est d'accord avec le principe, mais limitez la portée au logement, comme on vous a proposé, là.
M. Bédard: ...en s'assurant... Parce que, si on ouvrait cette application-là, donc pas... on s'assurerait finalement que la victime, elle, n'a pas à payer de sa poche, n'a pas une obligation financière additionnelle puis, vous, en même temps, bien vous êtes un citoyen raisonnable. Parce que vous avez le mauvais rôle ce matin, c'est clair, hein? Je comprends que c'est dur, puis vous voyez tout le monde, est on est tous d'accord et vous aussi, alors. Mais là c'est de trouver une façon en même temps que cette exception à la Loi sur les contrats ne vienne pas finalement trop alourdir. Parce qu'elle alourdit, elle va l'alourdir, puis c'est normal, vous me dites: On est prêts à le faire. Alors, c'est peut-être un pas que le ministre pourrait faire pour s'assurer que ce fardeau-là soit supporté aussi par l'ensemble de la société.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Mercier.
M. Turp: J'ai quand même un petit peu de difficulté avec votre projet d'amendement, là, colocataire-colocataire parce que... Écoutez, je comprends que ce que l'on vise, c'est une situation où la femme victime de violence est locataire. Elle est locataire. Donc, elle a signé un bail ou il a été signé avec son conjoint. Mais comme nous l'ont dit ceux qui vous ont précédés, une femme victime de violence peut l'être d'un conjoint qui n'est pas locataire ou colocataire. Et l'objet de ce projet de loi, c'est de protéger la femme.
Je le sais qu'il y a un conflit entre la sécurité de la femme et les droits du propriétaire ici, mais il me semble que l'objet du projet de loi, c'est de donner préséance à la sécurité de la femme sur les droits du propriétaire.
Et, tu sais, déjà que des lois comme celle-là doivent être interprétées restrictivement parce que c'est des exceptions aux droits de nos contrats, là on a la responsabilité, comme législateurs, de décider qu'est-ce qui est le plus important, là, dans ce contexte-ci: est-ce que c'est la sécurité de la femme ou le droit du propriétaire?
Et il me semble que, si on ne met pas «colocataire», là, c'est parce qu'on a décidé politiquement de donner de l'importance davantage à la question de la sécurité de la femme, en élargissant sa protection dans le cas où son conjoint n'est pas, n'a jamais été son colocataire. Et ça arrive. Et ça arrive de plus en plus, des couples qui ne vivent pas ensemble. Dans une société moderne, dans une société où il y a une mobilité, où la femme ne vit pas avec son mari et vice-versa parce qu'ils travaillent dans des lieux différents, la situation qui est celle-là ne serait pas couverte. Si on met «colocataire», comme vous le souhaitez, elle ne serait pas couverte. Si on met «un tiers», peut-être, là, mais il faudrait être assurés qu'en incluant le tiers, là, on soit bien conscients que ça comprend le conjoint, là. Alors ça, c'est le sens de ma préoccupation.
Et je crois qu'il ne faut pas... Je le sais qu'il faut être conscient des difficultés qu'ont les propriétaires, mais peut-être que, comme l'a dit mon collègue, une façon de tenir compte de vos droits et des prérogatives qui sont les vôtres, là, c'est qu'il faudrait que, dans des lois de victime d'indemnisation, là, il y ait une possibilité de remboursement du propriétaire. Mais ça ne suffit pas parce que, dans certains cas, les femmes n'ont pas été victimes d'actes qui sont assujettis à la compensation. Alors, il ne faudrait pas lier la question de la résiliation à une compensation parce que, dans certains cas, il n'y en aura jamais parce qu'il n'y a pas eu d'actes criminels qui peuvent faire l'objet d'une compensation.
Alors, je vous demande juste de réfléchir, là, et de nous rappeler que ce projet de loi, M. le ministre, si je comprends bien, vise à mettre en oeuvre un plan d'action qui est relatif à la protection de la femme et de la sécurité. Puis on devrait s'en rappeler aujourd'hui, le 6 décembre 2005.
Le Président: M. Simard.
M. Simard (Patrick): Oui, merci, M. le Président. Pour vous énoncer simplement. On ne vous le dira jamais suffisamment, on souscrit évidemment à ce que vous dites et à la problématique bien précise qui est visée, et on est aussi bien emphatiques de ces situations-là. Simplement pour vous dire dans quel cadre nous avons fait cette réflexion-là. Nous nous sommes dit: l'objectif fondamental est d'assurer, au moins à la victime, qui est un homme ou une femme, là, j'ose croire qu'on ne limitera pas nos débats, que la victime soit déchargée de son fardeau financier pour pouvoir quitter son nid de violence ou son nid d'agression. Dans cette mesure-là, il nous apparaissait opportun de vous présenter cette modification-là puisque la victime est aux prises avec une situation qui est financière engageante. Elle est colocataire; elle est là, dans son logement, et elle n'a pas le choix que d'y être parce qu'elle est liée par bail, à moins de quitter et d'assumer un double fardeau. Dans cette mesure-là, nous nous sommes dit: soit nous sommes d'avis qu'effectivement elle puisse quitter dans la mesure où elle ait cette obligation-là. Si elle n'est pas elle-même au bail, nous nous sommes dit: elle peut, d'une part, si elle n'est pas locataire, quitter purement et simplement. La solution est fort simple. Si, cependant, elle est l'unique signataire du bail, il existe, à notre avis, d'autres mécanismes aussi qui ne sont pas contraignants pour le locateur mais d'autres mécanismes qui permettent à la victime qui doit demeurer dans son logement, pour le fardeau financier qu'il suppose, de cesser ses comportements d'agression ou de violence, des mécanismes qui sont de nature pénale.
Alors, pour éviter que quelqu'un se présente chez elle, c'est possible de le faire. C'est elle qui, en vertu de la loi et des devoirs qui lui sont conférés et aussi des attributs qu'elle a, elle a le pouvoir de dire: Non, je ne permets plus à quelqu'un d'entrer dans mon logement. Il n'y a pas de droit de l'agresseur d'être présent parce qu'il a signé un bail. C'est dans cette limite-là, dans ce cadre-là que nous avons effectué cette réflexion-là et, évidemment, s'il advenait que des mécanismes soient trouvés pour éviter qu'un fardeau soit imposé et qu'on ajoute une victime supplémentaire sur le plan financier qu'est le locataire, bien, on pourrait souscrire à d'autres principes évidemment. Mais, dans le cadre de ce qui a été présenté et ce qui est toujours devant nous aujourd'hui, il nous apparaissant important de prévoir cette limite-là puisqu'il existe d'autres mécanismes qui sont peut-être sous-utilisés ou totalement inutilisés. C'est dans ce cadre-là que notre intervention a été montée.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, messieurs, M. Courtemanche, M. Simard. Merci bien de votre présence devant la commission.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 18)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Descoteaux): Donc, la Commission des institutions va reprendre ses travaux. Je demanderais au prochain groupe de se joindre à nous, à savoir la Fédération des femmes du Québec. S'il vous plaît, approchez-vous.
Rebonjour, Mme Farly. Simplement pour nos enregistrements, si vous voudriez quand même, mesdames, vous présenter, s'il vous plaît. Vous allez avoir 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, puis 15 minutes, de part et d'autre, d'échange avec les groupes parlementaires. Bienvenue devant la Commission des institutions.
Fédération des femmes du Québec (FFQ)
Mme Hébert (Danielle): Alors, merci. Mon nom est Danielle Hébert, et je suis coordonnatrice à la Fédération des femmes du Québec.
Mme Boissinot (Lyne): Mon nom est Lyne Boissinot, je suis présidente de L'R des centres de femmes du Québec et aussi coordonnatrice du Centre des femmes de la Basse-Ville et également ? c'est comme ça, j'ai plusieurs chapeaux aujourd'hui ? membre de la Fédération des femmes.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien.
Mme Farly (Caroline): Caroline Farly, de la Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec et membre du conseil d'administration de la FFQ.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, mesdames. La parole est à vous.
Mme Hébert (Danielle): Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, merci beaucoup de nous avoir invitées, de nous entendre aujourd'hui, dans le cadre de cette consultation sur le projet de loi n° 133. Notre intervention veut saluer le geste concret posé par le ministre Marcoux et vient appuyer la position du Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale. Alors, c'est vraiment une intervention en appui au comité qui s'est présenté ce matin, d'ailleurs. Nous sommes satisfaites que les mesures proposées visent aussi les victimes de violence à caractère sexuel.
Quelques mots sur la Fédération des femmes du Québec. Alors, fondée en 1966, nous célébrerons son 40e anniversaire en 2006. Elle compte environ 140 associations membres, dont les deux associations que représentent mes collègues et environ 700 membres individuels. La FFQ est une organisation féministe autonome qui vise l'atteinte de l'égalité entre les hommes et les femmes et dont l'activité, l'action s'inscrit dans le cadre de la défense des intérêts et droits des femmes. C'est pourquoi nous luttons contre toutes les formes de violence à l'égard des femmes et plus spécifiquement, depuis la Marche mondiale des femmes en 2000, nous portons une revendication précise à ce sujet.
Il y a un an jour pour jour, Amnistie internationale et la Fédération des femmes du Québec déposaient une pétition qui avait recueilli plus de 140 000 signatures demandant au gouvernement de financer une vaste campagne de sensibilisation et d'éducation afin de contrer toutes les formes de violence faite aux femmes. Dans ce sens, la FFQ appuie toute mesure concrète visant à accroître la sécurité des victimes de violence conjugale et d'agression à caractère sexuel. C'est le cas, il nous semble, des mesures découlant des modifications proposées au Code civil.
Je cède la parole à ma collègue Lyne Boissinot, qui va nous faire part d'un certain nombre d'observations.
n(15 h 10)nLe Président (M. Descoteaux): Mme Boissinot.
Mme Boissinot (Lyne): Merci. D'entrée de jeu, je vais vous dire que, dans les centres de femmes, nous travaillons sur quatre grandes problématiques qui sont la santé, l'isolement, la pauvreté et la violence faite aux femmes. Nous appuyons ce projet de loi et nous croyons en ses mesures. Trop souvent, dans notre réseau, que je vous rappelle regroupe 100 centres de femmes à travers la province, on a rencontré des femmes avec des difficultés financières importantes, et la violence conjugale et ce qui en découle en est souvent la source.
Il faut se rappeler qu'on retrouve des femmes victimes de violence dans toutes les couches de la société, mais les femmes qui vivent avec peu de revenus, comme celles qu'on rencontre dans nos centres de femmes, se retrouvent souvent dans des situations précaires et sans pouvoir économique pour pouvoir négocier avec un propriétaire si elles doivent quitter leur logement pour assurer leur sécurité et surtout celle de leurs enfants, parce que c'est souvent... L'exemple que je donne, les femmes, elles disent: Moi, ce n'est pas grave, mais il ne touchera jamais à mes enfants, puis je tiens à vous le souligner.
On me relatait que des femmes sont retournées dans leur logement parce qu'elles ne pouvaient pas assurer deux paiements de loyer. Elles doivent, dans ces cas-là, appliquer des mesures de sécurité qui sont, entre autres, un bouton de panique, faire changer les serrures, et, comme je dis souvent, c'est des femmes qui marchent avec la tête dans le dos. Elles ont toujours peur d'être reconnues par leur ex-conjoint violent.
Les femmes me disaient également qu'il n'était pas question qu'elles partent sans payer leur loyer parce qu'elles seraient aux prises avec un dossier de mauvaise payeuse, parce qu'il y a toujours une enquête, hein, quand on signe un bail: Qui était votre ancien propriétaire? Et si elles partent sans payer, bien, leur nom ne sera pas bon.
Il y a aussi des femmes qui vont rester avec leur conjoint violent parce qu'elles ne voient pas d'autres solutions. Elles n'ont aucune idée comment est-ce qu'elles vont faire pour rejoindre les deux bouts et elles ont peur. Et c'est certain que le manque d'argent est un facteur important, surtout quand ils sont les deux signataires du bail. Vous l'avez peut-être entendu depuis le début de la commission, mais je tiens à vous le rappeler: la période qui précède ou qui suit immédiatement la rupture de la relation est un des moments où la victime est en danger de mort. Elle doit quitter le logement et souvent ce n'est pas juste le logement qu'elle doit quitter: elle quitte l'école des enfants, son travail, puis bien souvent sa ville aussi.
Avec le projet de loi, on entrevoit des pistes de solution intéressantes pour les femmes victimes de violence, qui pourront mieux assurer leur sécurité et la sécurité de leurs enfants. Je laisse la parole à Caroline.
M. Descoteaux: Mme Farly.
Mme Farly (Caroline): Bonjour. Bon, c'est clair, pour nous, qu'il s'agit d'une avancée qui est importante, qui va contribuer à renforcer les moyens dont s'est dotée la société québécoise pour venir en aide aux victimes de violence, dans la mesure où son application sera facilement accessible dans toutes les régions administratives du Québec et de manière uniforme.
Aussi, c'est important qu'elle soit mise avec le souci de n'imposer aucun obstacle systémique à son utilisation. Je vais en profiter pour réitérer un peu la conversation qu'on a eue ce matin, pour dire que le problème, ce n'est pas juste où l'agression a eu lieu, mais quand l'agresseur ou le conjoint violent connaît le lieu où se trouve la victime, sait où il peut la retrouver, bien il y a des dangers justement qu'il retourne là où elle habite, qu'il lui fasse des menaces, qu'il continue de la harceler ou qu'il pose des... Bon, il y a quand même des dangers d'homicide, comme on a soulevé aussi ce matin et comme on vient de souligner, et c'est important de garder ça en tête.
La FFQ tient donc aujourd'hui à réitérer son appui aux recommandations qui sont portées par le Comité logement, qui s'est prononcé devant vous ce matin, c'est-à-dire pour s'assurer que les mesures d'application de ce projet de loi seront efficaces et qu'elles rejoignent bien les personnes visées, dont la recommandation selon laquelle le ministère de la Justice évalue les mécanismes d'application de cette loi dans les 12 à 24 mois de son entrée en vigueur.
Par ailleurs, nous pensons qu'il incombe au ministère de la Justice de prévoir des moyens pour diffuser l'information aux victimes dont la sécurité est menacée afin qu'elles se prévalent de leur droit de résilier leur bail. Tel que suggérée encore ce matin, cette possibilité devrait apparaître sur le nouveau formulaire du bail pour 2006.
Enfin, nous sommes d'avis que la loi n° 133 entre en vigueur le 1er avril 2006 et recommandons la création d'un comité de travail réunissant le ministère de la Justice, les représentantes des organisations membres du Comité logement et éventuellement les personnes qui disposent d'une expertise particulière sur la question de la sévérité du risque associé à la violence conjugale et sexuelle. Le mandat du comité serait de définir les mécanismes qui permettront l'actualisation de ces modifications législatives et l'atteinte de son objectif, c'est-à-dire offrir un outil de plus aux victimes qui tentent d'assurer leur sécurité. Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Ça va? Merci bien, mesdames. Donc, nous allons procéder à une période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre.
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Merci, Mme Farly, Mme Boissinot et également Mme Hébert, de votre présence, et puis également des commentaires que vous avez formulés. Je vous remercie aussi pour évidemment l'appui que vous accordez au projet de loi qui est déposé. C'est sûr, sans doute, qu'il ne répond peut-être pas, d'un côté comme de l'autre, à toutes les préoccupations, mais qui, je pense, constitue un premier pas dans la bonne direction.
Je voudrais, je vais faire quelques commentaires puis poser une question, M. le Président. Je sais que j'ai des collègues aussi qui veulent également intervenir. Quand vous parlez d'un comité pour prévoir, je dirais, la politique de mise en oeuvre, ce qui est important, je pense, important parce qu'il faut que ce soit clair et également il faut que ce soit rigoureux. Je pense que ça doit être rigoureux à la fois pour les propriétaires aussi de logements ? et on se rappelle qu'au Québec il y a une grande majorité de logements qui sont la propriété de petits propriétaires et non pas nécessairement des grandes tours à appartements, et c'est vrai dans toutes les régions du Québec ? donc, d'avoir une procédure qui soit rigoureuse et qui permette de bien évaluer la situation.
Alors, moi, je suis tout à fait ouvert à mettre sur pied un comité. D'ailleurs, c'est un peu dans cette perspective-là que nous avions, au ministère, élaboré un projet de politique ou de directive dont nous avons transmis copie à tout le monde d'ailleurs, parce que ce n'est pas évident de déterminer, là, qui pourrait accomplir ce travail-là. Dans certains cas, il y a des réserves sur les services policiers, je comprends, donc, les officiers publics... en tout cas. Donc, nous étions arrivés à une proposition, mais on peut... on est ouverts à examiner diverses hypothèses.
Donc ça, le comité, je suis tout à fait d'accord, et je suis également d'accord pour effectuer, dans deux ans, une évaluation de l'application. Et je pense que ça peut servir, ça, donc, à voir comment ça s'est appliqué, et puis est-ce qu'il y a parfois des changements à apporter. Ça, je pense que c'est souhaitable de le faire. Vous parlez d'accessibilité dans toutes les régions. D'accord, je pense qu'il faut une formule qui permette ça.
Ce matin, on a eu aussi, et du côté des propriétaires et de la CORPIQ qui se dit d'accord en principe, je pense, sur le projet de loi et sur ce qui est proposé comme principe, mais qui avait des réserves sur l'application du projet de loi en disant: Bien, on vise, il me semble, une clientèle assez large surtout sur le plan de l'agression sexuelle lorsqu'on parle d'un tiers. Est-ce que ça ne peut pas mener à certains abus, là? Comment... Ça peut arriver n'importe où, pas uniquement dans le logement, et là ça deviendrait une cause d'annulation ou en fait de résiliation de bail.
Alors, je ne sais pas comment vous réagissez à ça. On proposait même, en ce qui a trait à l'agression sexuelle, on disait même: «par un tiers, dans la mesure où elle est commise dans le logement ou dans l'édifice concerné». Comment... Quelle est votre réaction sur ce commentaire-là?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Boissinot.
Mme Boissinot (Lyne): Oui, je peux lancer quelque chose et, après ça, je pense que Caroline est peut-être plus... Pour répondre à cette question-là... Mais ce qui me posait... J'étais là ce matin, quand la CORPIQ a présenté son mémoire, puis ce que ça me disait, c'est que ça m'embêtait un petit peu, cette partie-là qu'il fallait que ça se passe dans le logement. Parce qu'avec les exemples que je vous ai présentés, ça n'a pas rapport, là, ça n'a vraiment pas rapport. Si une femme quitte son logement parce qu'elle est victime de violence par son conjoint puis elle déménage, puis il finit par la retrouver, ça ne veut pas dire qu'il va y avoir eu quelque chose dans ce nouveau logement-là, là. Ça fait que j'avais de la misère à le situer un petit peu ce matin, les tiers. Puis ce que j'entendais par «tiers», ça pouvait aussi être l'ex-conjoint, ce que m'entendais, moi, ce matin, par les gens qui présentaient. Puis je pense qu'au comité ils se sont penchés plus largement sur cette question-là.
n(15 h 20)nLe Président (M. Descoteaux): Mme Farly.
Mme Farly (Caroline): On s'est penchés effectivement sur cette question, mais je dois rappeler que le Regroupement québécois des CALACS va suivre cet après-midi. Ils vont pouvoir beaucoup argumenter sur cette question en ce qui a trait aux agressions à caractère sexuel.
Mais on dirait... Il y a un point que je tiens vraiment à rappeler, parce que, bon, on a eu beaucoup à discuter sur cette question et on se rappelle que ce n'est pas toutes les victimes de violence conjugale, ce n'est pas toutes les victimes qui sont victimes de violence sexuelle: c'est celles dont la sécurité est compromise et celle de leurs enfants. Et c'est prévu, dans votre projet de loi, d'avoir des mécanismes d'application, et d'autant plus si on met un comité composé d'experts pour s'assurer que celles qui en ont le besoin, celles qui vont avoir vraiment le besoin d'avoir cette mesure-là, de s'en servir, bien qu'elles vont pouvoir le faire. Donc, je pense qu'il y a lieu d'encadrer le projet de loi, puis on n'a plus lieu de parler d'abus, quant à moi.
Puis il faut se rappeler que ce n'est pas une mesure que toutes les femmes vont vouloir se prévaloir. Ce n'est pas quelque chose de plaisant, de déménager, ce n'est pas quelque chose de plaisant. Quand tu es victime de violence conjugale sexuelle, ce n'est pas facile de quitter ton logement. Puis des fois, tu veux changer de ville, puis c'est lourd, comme processus. Puis, excusez-moi, mais, même quand tu n'es pas victime, c'est quelque chose qui est lourd en soi, là. Ça fait que... Bon. Je pense que c'est ça que j'avais à dire.
Le Président (M. Descoteaux): M. le ministre.
M. Marcoux: Moi, je ne sais pas s'il y a des collègues, je pense, qui voulaient intervenir.
Le Président (M. Descoteaux): Monsieur...
M. Marcoux: Le député de...
Le Président (M. Descoteaux): Non. Ça va? Ça va.
M. Marcoux: Alors, moi, je n'ai pas d'autre question. Je pense que ça répond, là, à la préoccupation que j'avais. On a déjà eu une bonne discussion cet avant-midi, sur divers aspects. Donc, merci.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, merci, mesdames, de votre présentation. C'est bien, parce que, autour du projet de loi, ça fait une belle unanimité de tous ceux qui viennent. Alors, c'est beau de voir, ça, hein.
Des éléments par contre retiennent notre attention. On l'a souligné au groupe... le premier groupe qui est venu, le Comité logement pour les droits des victimes de violence conjugale, au niveau du délai, et je sais pas si vous avez les mêmes inquiétudes, mais, comme vous avez la même personne de votre comité, elle risque d'avoir la même inquiétude... Mais ça rejoint aussi surprenamment, et c'est pour ça que... On vient de recevoir un mémoire de l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal. Alors, eux, ils vont encore plus loin. Ils souhaitent même que la radiation se fasse dans des délais plus rapides encore, mais évidemment en disant: On ne veut pas être les seuls à payer la facture, dans le sens qu'il faut répartir, entre guillemets, le risque avec ceux et celles qui sont appelés à compenser, donc ça fait partie d'une forme de compensation. Donc, on sent une ouverture, ils ont pris la peine d'écrire pour le dire.
Et, quant à la diligence, eux, ils nous faisaient référence ? et là je l'ai eu en diagonale ? eux faisaient référence, je crois, dans les loyers à prix modique ? c'est ça, hein? Ah! c'est la Société d'habitation, excusez-moi, où, eux allaient plus loin même où ils faisaient une référence quant au délai d'attente pour le relogement. Eux disaient que la période de priorité variait entre 24 heures et une semaine. C'est quand même un délai assez court, hein, quand on sait que les gens sont pris en charge souvent dans les... Alors, ça permet à la personne d'être dans un centre et d'attendre très peu de temps. Ce qui m'inquiète, c'est que le projet de loi, lui, prévoit... pas le projet de loi, mais dans la politique, que le Procureur général ou le substitut du procureur ou ça peut être quelqu'un d'autre, là, on voit l'officier, là, mais il doit procéder avec diligence. Là, je me questionnais: «diligence», là, c'est une obligation de moyens qui s'évalue par rapport aux autres obligations qu'on a là, et donc ça peut aller à des délais qui peuvent s'allonger.
Est-ce que vous voyez pertinent d'inclure un délai plus strict, une indication très claire, là, quant à.. je ne sais pas, un délai d'une semaine maximum, pour s'assurer finalement que ces demandes soient traitées de façon, entre guillemets, prioritaire mais qu'elles aient toute l'attention pour qu'il y ait décision lorsque la preuve est faite dans des délais très courts?
Mme Farly (Caroline): ...puis je pense que, par votre intervention, vous avez résumé le gros des discussions ce matin. Si on est arrivé à dire qu'on voulait un délai de trois mois, comme il a été dit, c'est un peu un compromis. Ça fait longtemps que les comités travaillent pour la modification. On veut que cette mesure-là soit accessible bientôt, donc c'est pour ça qu'on défendait le trois mois. Le un mois, c'est sûr, c'est la première revendication qui était soumise pour le Comité logement. C'est sûr que, si vous êtes prêts à ouvrir le débat autrement pour réduire le délai, c'est aussi envisageable.
M. Bédard: Et là je vous parle aussi d'un autre délai, parce qu'évidemment, cette représentation-là qui était faite, était faite en, je vous dirais, en parallèle, à partir aussi de l'idée que les propriétaires doivent aussi être indemnisés finalement par une autre organisation, puis, écoute, ce n'est pas non plus... Je pense que ça se défend bien comme idée de dire: Écoutez, là, nous aussi, on veut d'ailleurs sortir ces gens-là, ces agresseurs-là. On est les premiers à vouloir les sortir aussi, mais, en même temps, on aimerait ça que le risque, qu'on soit indemnisés. Ça, c'est une chose.
Le deuxième, c'est que, dans la politique que le ministre a proposée, le Procureur général... le substitut du procureur plutôt, reçoit le dossier. C'est plus par rapport à ces délais-là, où on indique une simple diligence, ce qui n'est quand même pas... ce n'est pas mauvais non plus, diligence, là. Mais en même temps, si ça reste les substituts ou même si on l'étend à d'autres officiers publics, ça peut peut-être poser problème.
Est-ce que vous voyez l'opportunité de clairement identifier un délai de rigueur, une semaine, quatre jours...
Le Président (M. Descoteaux): Mme Farly.
M. Bédard: ...qui permettrait finalement à la personne qui, elle, prend la décision, là, où on lui a fait les représentations tel qu'il est prévu, il y a un rapport qui a été déposé, soit avec une copie du bail qu'on... bon, il y a d'autres choses, rapport de police aussi. Tout ça est dans les mains du fonctionnaire. Alors, comment on peut s'assurer que la décision se prenne rapidement?
Mme Farly (Caroline): Savez-vous, je comprends votre propos. Seulement, je pense que c'est important que les délais soient courts à ce niveau-là. Mais je vous avoue, je ne suis pas en mesure de vous donner une réponse, à savoir une semaine, est-ce qu'on devrait à ce stade-ci vraiment... Ça n'a pas été discuté de ce délai-là, ça fait j'ai un peu un malaise à répondre à cette question-là pour l'instant. C'est sûr qu'il y a une ouverture, puis l'importance, c'est qu'effectivement la décision qui sera prise par la procureur, que soit pris très rapidement, effectivement, si je réponds bien à votre question.
M. Bédard: Oui, oui, non, non, c'est ça, parce qu'on essaie, parce que cette indication-là, elle est... moyen, là, avec diligence, et je veux m'assurer qu'elle se prenne finalement dans des délais qui sont, eux, acceptables. Parce que les gens qui vont être amenés, si c'est le substitut, comme je le disais ce matin, il y a beaucoup de dossiers importants aussi. Les cas d'accusation de meurtre, des cas, des procès criminels, des... alors, c'est des gens qui ont quand même... qui ne jouent pas dans la fioriture, là, qui sont mêlés dans des choses qui sont très lourdes. Alors, en mettant un délai de rigueur, on s'assure finalement que ce soit traité dans des délais qui sont beaucoup plus stricts, là.
Mme Farly (Caroline): Si je peux ajouter aussi, si on parle aussi de délai, on parlait aussi de trouver d'autres personnes qui pourraient être des personnes clés. Donc, je pense que c'est tout un débat qu'il est nécessaire d'avoir si on impose des délais. Il s'agit aussi d'avoir un mécanisme d'attestation qui soit rapide aussi, donc c'est tout un ensemble d'éléments qu'on doit discuter ensemble, que ce serait important de discuter dans le comité par ailleurs, j'imagine.
Le Président (M. Descoteaux): Merci. Votre collègue du...
M. Bédard: Oui. Une dernière chose mais qui s'intéresse moins au projet de loi, mais au principe du projet de loi. Je me posais la question ce matin. Là, c'est une avancée par rapport à ceux qui sont à logement, là. Évidemment, on a tous ceux et celles qui ne le sont pas, là. Elle est où, votre réflexion là-dessus, de façon plus générale? On a ceux qui partagent une hypothèque avec quelqu'un, je veux dire, qui sont... tu sais, et ça c'est quand même important aussi. Je me disais: Avez-vous une réflexion là-dessus, là? C'est plus global, je comprends, mais on est encore dans le principe, là. Avez-vous réfléchi à cette question?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Farly, Mme Boissinot.
Mme Boissinot (Lyne): Moi, je pourrais peut-être m'avancer un petit peu, parce qu'avant de venir ici, comme on l'a su un petit peu à la dernière minute, j'ai fait appel à tous les centres de femmes à travers la province puis je leur ai dit: Donnez-moi des exemples, s'il vous plaît. Puis j'ai justement un exemple comme ça, mais ce n'est pas un «happy ending» du tout, du tout. C'est super triste comment ça finit, là.
Il y a des femmes qui sont prises des fois, dans leur logement, ou qui paient chacune... que les deux conjoints paient une partie de l'hypothèque, par exemple, puis la femme, des fois, elle n'ose pas s'en aller. Puis l'exemple que j'ai, c'est qu'ils ont décidé de... la dame occupait le premier étage, puis le monsieur habitait le sous-sol. Mais, tu sais, ils essaient de s'organiser comme ils pouvaient, mais plus ça va, plus la violence est forte. Puis là la dame, elle essaie de s'en aller, mais elle est comme prise à la gorge, là, c'est...
M. Bédard: Puis la pression financière est encore plus grande. C'est ce que je me disais ce matin.
Mme Boissinot (Lyne): C'est ça, c'est ça.
M. Bédard: Là, tu as des cas de condo maintenant, de plus en plus, là...
Mme Boissinot (Lyne): Oui.
M. Bédard: ...il fait... je regarde les...
n(15 h 30)nMme Boissinot (Lyne): Moi, j'ai vu des femmes au Centre des femmes de la Basse-Ville qui avaient perdu leur maison, leur voiture, tout, là. Elles perdent tout, puis elles se retrouvent après ça sur l'aide sociale, là, puis elles viennent auprès de nous pour avoir une ressource pour briser leur isolement parce qu'elles n'ont même plus d'amis, elle n'ont même plus de réseaux parce que la violence a fait que le conjoint a tout, tout, tout coupé, là.
M. Bédard: En moyenne... Une dernière question un peu plus technique qui concerne justement ces centres, parce que j'en connais chez nous, dans la région. Mais en moyenne, les personnes victimes d'agression sexuelle ou de violence conjugale, lorsqu'elles sont prises en charge dans les centres d'hébergement, c'est quoi, la moyenne à peu près, où elles demeurent dans le centre?
Une voix: Dans les maisons d'hébergement?
M. Bédard: Oui, dans les maisons...
Mme Farly (Caroline): Ça peut aller jusqu'à deux mois. Et plus ça va et plus les séjours sont longs.
M. Bédard: Ils sont longs. Bien, c'est ça, on me disait, hein?
Mme Farly (Caroline): Il y a un manque de logements, premièrement; les séjours deviennent plus longs, donc ça crée des listes d'attente pour les maisons d'hébergement. Et aussi, par exemple les membres de la fédération, c'est des maisons d'hébergement pour femmes violentées et aussi en difficulté, et il y a de plus en plus de femmes qui sont en situation de pauvreté, à risque d'itinérance, qui ont des problèmes de santé mentale, de toxicomanie. Et les maisons donc... et il y a des débordements, notamment par les manques de logements, du moins à loyer abordable. Il y a beaucoup de femmes de Montréal qui s'en vont sur la Rive-Sud. Il y a un débordement des ressources à Montréal, qui s'en vont sur la Rive-Sud. Donc, c'est tout un ensemble de problématiques. Exactement comme vous venez de le dire, les séjours s'allongent. Ça va jusqu'à deux mois aujourd'hui, avant ce n'était pas ça.
Le Président (M. Descoteaux): Ça va?
M. Bédard: Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup d'être avec nous. Peut-être... On se retrouve finalement avec quelques délais à décider, hein? Le délai, bon, pour quitter, là, le trois mois, en se disant qu'effectivement, si le délai était plus court, ce serait encore mieux; le délai de l'entrée en vigueur de la loi, parce que vous souhaitez aussi avoir le temps que le comité puisse travailler; puis le délai pour l'attestation, et ça, ça m'apparaît capital. Il faut qu'il y ait un délai parce que, s'il n'y a pas de délai, on va venir dépasser le trois mois, là, assez rapidement, là. Ça ne coïncidera pas.
Au niveau du comité de travail, vous souhaitez être associés. Quel organisme précis devrait être sur le comité de travail avec le ministère de la Justice? Moi, je pense qu'il devrait aussi y avoir, outre les organismes de représentation des femmes, qu'il devrait y avoir absolument le Secrétariat à la condition féminine ? je regarde bien devant moi ? parce qu'elles ont l'expertise au niveau de la violence conjugale, et je pense que normalement, habituellement, elles se retrouvaient toujours sur les comités tripartites où on a fait les différentes politiques pour contrer la violence conjugale ou les orientations en matière d'agression sexuelle. Alors, je pense que ce serait important que le secrétariat soit là. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça? Puis quel organisme vous souhaitez qui soit sur le comité?
Mme Farly (Caroline): Bien sûr, on pense aux groupes qui sont membres du Comité logement, par exemple, une membre du RCLALQ, qui est le Regroupement des comités locataires... des associations des... des associations locataires du Québec, une représentante des CALACS ou du Regroupement des CALACS, bien entendu; que les ressources soient représentées, les maisons d'hébergement, que ce soit par les associations provinciales et aussi des maisons; qu'il y ait des intervenantes terrains qui soient là, qui sont en contact avec les femmes; les centres de femmes aussi, ce serait important qu'elles soient représentées. Donc, l'ensemble des ressources qui accueillent les femmes qui sont victimes de violence finalement, pour que vraiment l'expertise soit transcendante.
Mme Caron: Merci.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Mercier.
M. Turp: D'abord, je ne sais pas... C'est intéressant, l'exercice qu'on fait avec ce projet de loi, M. le ministre, parce qu'en fait ce qu'on est en train de faire, c'est d'amender le Code civil qui, d'après son article premier, doit toujours être en harmonie avec notre Charte des droits et libertés. Et quel article de la Charte des droits et libertés est en cause ici? L'article premier de la Charte des droits et libertés, là: «Tout être humain a droit à la vie ainsi qu'à la sûreté.» C'est le mot «sûreté», c'est intéressant, qui a été... Le mot «sûreté» a été utilisé plutôt que «sécurité» comme dans d'autres instruments, là, notamment les instruments internationaux qui sont cités dans certains mémoires.
Et donc cet exercice, là, d'harmonisation est vraiment important, et ça suggère d'ailleurs que c'est le droit à la sûreté qui devrait l'emporter dans nos délibérations. Tu sais, parce qu'on a le devoir que ce Code civil que vous nous invitez à modifier soit en harmonie avec cette charte dans ce domaine particulier de la sécurité de la femme qui est menacée par la violence conjugale ou l'agression sexuelle. Et je pense que c'est ça qui doit nous guider, notamment sur des questions qui paraissent peut-être un peu plus procédurales comme les délais, notamment le délai de résiliation et le délai d'attestation. Et je pense que notre collègue, là, de Chicoutimi, notre porte-parole, avait raison de parler de la diligence, mais vous vous rendez compte que la notion de diligence, elle n'est pas dans la loi. Elle est dans un projet de politique de poursuite, et ce serait peut-être une meilleure idée que ce soit dans la loi, dans la loi même, la notion que l'attestation soit, dans ce cas particulier, délivrée dans un délai ou avec diligence. Et peut-être, là encore, ça supposera qu'on amende les dispositions de telle sorte que, dans le cas particulier de la violence conjugale ou des agressions à caractère sexuel, l'attestation, il y ait un délai qui lui soit rattaché, pas seulement dans la directive ou dans la politique, mais dans la loi elle-même.
Alors, ça c'était surtout de la nature d'un commentaire. J'ai une question sur les fonctionnaires ou officiers qui délivreraient l'attestation, puis je pense que ce serait intéressant d'avoir l'opinion de la Fédération des femmes du Québec. Vos collègues, ce matin, nous ont dit: Il y a des résistances, des difficultés avec des policiers, avec d'autres officiers publics, on a parlé des greffiers, vous avez vu l'objection de mon collègue. Le président de la Société d'habitation du Québec, là, qu'on va entendre, là, je crois, tout à l'heure, il suggère plutôt que ce soit quelqu'un des centres de service de santé et de services sociaux.
Est-ce que vous verriez ça? Est-ce que vous verriez qu'une personne qui est habituée de recevoir des femmes, de recevoir, d'examiner des cas de violence conjugale à un autre niveau, au niveau plutôt des services sociaux, soit la personne qui serait peut-être mieux placée pour délivrer une attestation qu'un policier ou un autre officier. Est-ce qu'on devrait envisager cette hypothèse-là ou comprendre qu'un officier public, ça doit inclure quelqu'un de cette nature-là? Étant entendu que ce qui est important, c'est que, et je pense que vous le soulignez...
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Mercier, votre temps est écoulé. Nous allons peut-être conclure et avoir une brève réponse.
Mme Boissinot (Lyne): Moi, je n'ai pas consulté mes collègues, mais, avec l'expertise que j'ai avec les femmes victimes de violence, avec le peu d'estime, des fois, quand on les rencontre, sur une échelle de 10, leur estime d'elles-mêmes est à moins quatre. Si elles rencontrent un policier, ça ne marchera pas. Elles vont se sentir insécures parce que des fois elles auront été trompées par un policier. Ils ne sont pas tous pas corrects, là, mais il y en a peut-être quelques-uns qui ont... peut-être qu'ils manquaient d'expérience, O.K. Puis, il y a aussi... on voyait aussi dans les fonctionnaires... est-ce que c'étaient les gens de la DPJ ou travailleurs sociaux? Parce que, si on dit aux femmes de voir, entre autres, un travailleur social ou une travailleuse sociale, pour eux autres, ce sont des gens qui enlèvent les enfants, O.K. Dans leur mentalité, dans leur culture, c'est comme ça. C'est qu'il faut faire bien, bien, bien attention que le choix qu'on va prendre pour le fonctionnaire...
Moi, je pense que quelqu'un d'un CSSS, ça pourrait être intéressant parce que c'est quelque chose qui est plus près d'elles, c'est dans le quartier souvent, les CSSS... J'ai de la misère à le dire parce que je suis vraiment encore CLSC, là, mais...
Mme Hébert (Danielle): Si je peux me permettre d'ajouter là-dessus. Il me semble qu'il faut chercher l'expertise, et l'expertise en termes d'aide aux femmes victimes. Alors, quel officier effectivement ce sera? Mais il me semble qu'il faut chercher l'expertise en termes d'aide pour mieux comprendre les situations en question.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, mesdames. Et vous, M. le ministre, du côté ministériel, il y avait quelques minutes encore si...
M. Marcoux: Bien, moi, je n'ai pas d'autre question. Je pense qu'on a fait le tour, à moins que mes collègues en aient. Moi, je voudrais remercier la Fédération des femmes d'être venue devant la commission et vous remercier une autre fois, Mme Farly, Mme Boissinot et Mme Hébert, de votre contribution. Merci beaucoup.
n(15 h 40)nLe Président (M. Descoteaux): Merci beaucoup, mesdames.
J'inviterais donc, pendant les quelques minutes à venir, que le prochain groupe, le Regroupement québécois des CALACS prenne place, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Descoteaux): Donc, bienvenue au Regroupement des CALACS. Mme Tremblay, Mme Brigit Côté, s'il vous plaît, vous présenter respectivement, là, pour les fins de notre enregistrement. Vous avez, comme vous savez, 15 minutes la présentation de votre mémoire, suivies d'une période équivalente pour les échanges.
Regroupement québécois des centres d'aide et de
lutte contre les agressions à caractère sexuel
(Regroupement québécois des CALACS)
Mme Tremblay (Carole): Bonjour, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission. Merci de nous avoir invitées à participer à vos travaux concernant le projet de loi n° 133. Je vous présente Brigit Côté, qui est intervenante au CALACS de l'Estrie. Mon nom est Carole Tremblay. Nous représentons le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel. Comme son nom l'indique, notre organisation travaille à la défense des droits des victimes d'agressions sexuelles et à les soutenir. L'intervention des CALACS se fait principalement auprès des femmes et adolescentes qui ont vécu des agressions sexuelles récentes ou qui ont vécu l'inceste.
Nos commentaires sur le projet de loi n° 133 ? d'abord, on tient à s'excuser à ne pas avoir déposé de notes écrites, mais on va le faire ultérieurement ? seront présentés en quatre volets. Le premier va porter... je vais revenir sur chacun d'entre eux, je fais juste présenter le canevas ici. Le premier volet, on va parler du bien-fondé des principes qui sous-tendent le projet de loi; le deuxième volet, pourquoi la solution proposée dans le projet de loi n° 133 et les autres solutions légales disponibles sont insuffisantes lorsque la sécurité est menacée; troisièmement, quand et comment aborder la question des modalités d'application; et quatrièmement, tout ça va être ramassé dans les suggestions d'ajouts au projet de loi.
Je vais passer la parole à Brigit qui va vous entretenir du bien-fondé des principes et plus particulièrement des situations dans lesquelles les femmes victimes d'agressions sexuelles se trouvent régulièrement.
Le Président (M. Descoteaux): Mme Côté.
Mme Côté (Brigit): Alors, bonjour, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Vous me verrez un peu impressionnée d'être ici pour la première fois.
Le Président (M. Descoteaux): C'est nous qui sommes impressionnés par votre présence.
Mme Côté (Brigit): Ah! D'accord. Donc, je vais tenter de vous présenter quelques exemples de situations qui pourraient faire en sorte qu'une femme victime d'agression sexuelle souhaiterait quitter son logement: d'abord, pour des raisons de sécurité, ce qui aurait pour effet une meilleure prise en charge de la femme dans sa situation puis des effets positifs évidemment sur sa santé mentale aussi.
Alors, prenons l'exemple d'une femme qui reçoit l'avis de la Commission nationale des libérations conditionnelles dans lequel elle apprend que son agresseur sera remis en liberté et ira habiter dans le même secteur qu'elle. Vous comprendrez qu'à ce moment rien ne peut lui assurer sa sécurité mis à part le fait de déménager.
Elle repère son agresseur dans le même quartier où elle habite, voire dans le même édifice, ou elle constate que son locataire consulte régulièrement de la pornographie infantile sur Internet et qu'elle-même, elle a une fillette de quatre ans.
Imaginez qu'elle a été agressée dans ce logement par une connaissance ou un collègue de travail qu'elle a invité chez elle. Pensez à la femme qui a été violée et séquestrée par un individu qui s'est introduit chez elle par infraction. L'obliger à demeurer dans son logement serait comme demander à une victime de prise d'otage ou de vol de banque de dormir sur les lieux du crime.
Et si c'était une jeune fille de 14 ans qui a été agressée par deux jeunes mineurs qui habitent la même rue qu'elle.
Les femmes qui ont vécu des agressions à caractère sexuel, donc ces situations, doivent composer avec les conséquences des agressions subies puis, en plus, les conséquences reliées à la crainte, l'insécurité, la peur de demeurer dans son logement.
Cette situation d'insécurité physique peut provoquer elle aussi des problématiques propres au stress post-traumatique, sachant que les violences interpersonnelles sont au premier rang des traumatismes. Donc, on parle d'insomnie, de cauchemars, de flash-back, de fatigue, de perte d'estime de soi, d'anxiété, de dépression, d'abus de substances et même de phobie sociale. Donc, ces problématiques-là peuvent entraîner une perte d'emploi dans certains cas, donc une perte de revenus et l'impossibilité même de payer son logement.
Donc, j'insiste sur le fait que ces situations-là ne sont que des exemples, des exemples qui ont été vécus ? ce n'est pas fictif ? c'est des circonstances où des victimes pourraient souhaiter résilier leur bail pour assurer leur sécurité. Cette possibilité de résiliation, c'est un seuil plancher qui est essentiel de leur accorder, puisqu'elles ont déjà à composer avec les conséquences des agressions, et ce, durant toute leur vie, et pas de façon momentanée. Merci.
Mme Tremblay (Carole): Le deuxième volet de notre intervention: Pourquoi la solution proposée dans le projet de loi n° 133 et les autres solutions légales déjà existantes et disponibles sont insuffisantes. Dans ce volet-là, je vais aborder la question du délai de trois mois, la question de la cession de bail, de la sous-location du bail, des ordonnances d'interdiction de contact et des ordonnances de garder la paix. Je vais faire ça succinctement.
Sur la question du délai de trois mois, ça tombe sous le sens, je pense que ça a été dit aussi par plusieurs personnes avant nous, que plus court sera le délai pour permettre la résiliation, le mieux ce sera pour la sécurité des femmes. Et j'ai assisté à quelques représentations antérieures, et, s'il y a lieu de mettre de l'avant une solution, par exemple, telle la réforme de l'IVAC pour aider les personnes à s'en sortir et ultérieurement compenser les propriétaires, on pense que le délai d'un mois dans un cas comme ça serait de nature à satisfaire tout le monde: la sécurité des femmes, l'État qui, lui, va verser des montants d'IVAC, et que ce serait vraiment une solution à envisager, quant à nous.
Je ne vais pas aborder la question de la cession de bail très amplement parce que ma collègue de ce matin l'a fait. Alors, la cession de bail et la sous-location sont des moyens utiles dans d'autres circonstances, mais, lorsque la sécurité est en jeu, ce sont des moyens qui imposent des délais, des tracas et qui pourraient être considérés comme autant d'obstacles de plus pour les personnes victimes. Or, lorsqu'une victime se décide à agir pour préserver son droit à la sécurité, elle est déjà aux prises avec plusieurs démarches: trouver un autre logement où se loger, changer les enfants d'école, trouver d'autres sources de revenus, même quelquefois changer d'emploi.
La qualité du nouvel article 1974 tel que proposé a pour avantage de rendre sa situation moins lourde, c'est vrai, en permettant un allégement de son obligation contractuelle après 3 mois. C'est déjà un premier pas, mais un mois serait préférable.
Si 1974 est modifié tel que proposé, les victimes verront une lumière au bout du tunnel, et ça aura pour effet de les rassurer et de motiver leurs décisions d'opter pour leur sécurité. Quant à l'ordonnance de l'interdiction de contact émise par le tribunal, c'était une solution qui était, je pense, proposée par des représentants des propriétaires. Elle repose sur deux prémisses qui sont souvent fausses dans les cas des victimes d'agression sexuelle: la première, c'est que toutes voudront s'adresser aux tribunaux ou porter plainte à la police, ce qui relève de l'utopie; et la deuxième prémisse qui est fausse là-dedans, c'est que les personnes victimes connaissent toujours leur agresseur. C'est vrai dans la très grande majorité des cas en agression sexuelle, mais ce n'est pas toujours le cas. Il y a encore des victimes qui se font agressées chez elle par des personnes qu'il est impossible d'identifier.
Et en ce qui concerne donc... Sur ce volet-là, je vais terminer là-dessus: les ordonnances de garder la paix ou les 810 Code criminel, elles sont souvent... quelquefois mais aussi souvent transgressées par les personnes qui choisissent d'agresser.
n(15 h 50)n Le troisième volet de notre intervention: Quand et comment aborder la question des modalités d'application? J'ai entendu tout à l'heure M. le ministre, en introduction, qui disait qu'il était d'accord avec l'idée de créer un comité de travail pour aider à l'élaboration de ces modalités-là. Ça me rassure. Je vais quand même présenter des éléments critiques qu'on avait par rapport à la directive qui a été proposée.
Alors, l'alinéa 2 du projet de loi soulève beaucoup de questions pratiques et, selon nous, il sera nécessaire de mettre en place des mécanismes de consultation pour élaborer des modalités d'application. Voici quelques questions et commentaires que nous avons.
La première série de questions porte sur: Qui sera habile à délivrer l'attestation? Est-ce que seul un substitut du procureur de la couronne ou de la poursuite sera habile à délivrer une attestation? Si c'est le cas, ça pose un problème. Certaines personnes refuseront toujours de se présenter devant un représentant de la poursuite pour obtenir cette attestation-là. De plus, les personnes qui vivent très au nord de la province, est-ce qu'elles vont avoir facilement accès à un substitut ou si ceux-ci sont-ils présents dans les communautés autochtones quelques jours par mois seulement? Les personnes qui s'adressent à la DPJ et pas à la police, on rencontre beaucoup ça dans les agressions à caractère sexuel intrafamiliales, alors les personnes qui s'adressent à la DPJ et pas à la police, pourquoi n'obtiendraient-elles pas l'attestation d'un directeur de la Protection de la jeunesse? Et les délégués du Protecteur du citoyen, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager de les inclure aussi dans les personnes déléguées par le ministre?
La deuxième série de questions qu'on avait en regard de la directive qui était proposée, c'était: Quelle preuve sera exigée? La plainte à la police deviendra-t-elle un prérequis pour que les victimes puissent recevoir l'attestation et quitter leur logement? Si le but est d'en arriver à ça, on trouve que c'est un peu le monde à l'envers puisque la personne victime portera plainte plus facilement si elle se trouve en sécurité. Par ailleurs, est-ce réaliste de penser qu'une personne immigrante, provenant d'un pays où la répression policière est fréquente, voudra s'adresser à la police? Et une mère qui s'adresse à la DPJ et qui se fait dire que son signalement n'est pas retenu, ce qui est très, très fréquent, est-ce qu'elle va avoir envie de s'adresser à la police?
Donc, dans ce même ordre d'idées, le rapport de police ne doit pas devenir le document principal à fournir en appui à la demande de résiliation. Suite à une plainte déposée à la police, souvent en matière d'agression sexuelle, il arrive que les enquêtes soient très longues. Par exemple, lorsque les policiers doivent analyser le contenu d'un ordinateur pour y retrouver quelqu'un qui fait des cueillettes d'information sur les sites de pornographie infantile, donc lorsque les policiers doivent analyser le contenu d'un ordinateur ou rechercher un agresseur inconnu de la victime, dans ces cas, le rapport de police sera produit tardivement et ne pourra pas être utile pour valider le besoin immédiat de sécurité des femmes. Ce document ne peut donc pas être considéré comme le document ultime à déposer au soutien de la demande de résiliation.
En conclusion sur ce volet, ces quelques questions sont des exemples d'une série plus longue que nous avons. C'est pourquoi nous demandons un mécanisme de consultation qui nous permettra de participer à l'élaboration des modalités pratiques. Cette demande n'empêche pas l'adoption du projet de loi. Nous estimons qu'en laissant un délai entre l'adoption et l'entrée en vigueur il sera possible d'élaborer et de clarifier ces modalités pratiques nécessaires à l'entrée en oeuvre, à la mise en oeuvre.
Alors, je termine avec les quatre suggestions d'ajouts. Je pourrais en rajouter une concernant le délai que le procureur supposément aurait pour donner l'attestation. Je le ferai peut-être dans la période de questions. Alors, j'y vais avec nos quatre propositions d'ajouts.
La première, ce serait d'ajouter un préambule au projet de loi pour faciliter son interprétation après l'adoption. Ce préambule pourrait référer aux obligations internationales du gouvernement du Québec en vertu du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels. Ainsi, le préambule pourrait rappeler que le droit au logement, tel qu'il a été interprété par le comité d'experts de ce pacte, doit se comprendre dans son sens large, c'est-à-dire: le droit au logement ne se limite pas à un abri ou à un toit au-dessus de sa tête, c'est aussi le droit à un lieu où l'on puisse vivre en sécurité dans la paix et la dignité. C'est notre première proposition d'ajout.
La deuxième, c'est de réduire le délai de trois mois à un mois pour les motifs que j'ai exposés tout à l'heure.
Le troisième, c'est de prévoir une évaluation des effets du projet de loi dans une période qui n'excède pas deux ans après son entrée en vigueur, en obligeant le ministre à faire rapport devant l'Assemblée.
Et enfin, je passe vite dessus, c'est de prévoir une période entre l'adoption du projet de loi et son entrée en vigueur pour que les groupes de défense puissent participer à l'élaboration des mécanismes.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, mesdames, pour vos représentations. M. le ministre.
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président, merci, Mme Tremblay et Mme Côté. Quand vous disiez: On n'a pas de mémoire écrit, je pense que ce n'est pas ça qui est important; les témoignages et ce que vous pouvez nous indiquer de votre expérience, c'est encore plus précieux que d'avoir des mémoires écrits. Je pense que ça, c'est très, très important, et je voudrais vous remercier, donc, de votre présence et puis, également, de votre présentation.
Quelques commentaires et, pour ce qui est de la question de tout ce qui touche les abus sexuels avec les enfants, ce qu'on m'indique, c'est qu'en raison de l'entente multisectorielle qui existe actuellement c'est que, dans le cas d'un abus sexuel qui touche des enfants, il y a automatiquement, évidemment, la DPJ, la police et la couronne qui interviennent. Alors, dans ces cas-là, les trois interviennent, ce qu'on m'indique, de façon, là, c'est la pratique, alors... ce qui est différent dans d'autres cas d'abus sexuel chez les adultes.
Pour les suggestions, pour ce qui est de l'évaluation du projet de loi, je suis d'accord; on verra comment il semble préférable de déterminer ça. Pour également la mise en place d'une procédure, je vous ai déjà indiqué que je suis tout à fait d'accord. D'ailleurs, si nous avons, comme je vous mentionnais, préparé un projet que nous avons distribué, bien, c'est justement pour avoir des commentaires, parce que je vous dis que ce n'est pas évident de trouver des personnes appropriées pour le faire de façon rigoureuse, rapide et correcte. Alors, moi, je suis tout à fait ouvert là-dessus, puis c'est à dessein d'ailleurs qu'on a fait circuler le projet. Puis, également, je peux vous dire que le Secrétariat à la condition féminine sera impliqué, s'ils le veulent. Nous avions déjà discuté aussi à l'intérieur du gouvernement avec d'autres ministères. Alors, je pense que ça, je voulais le souligner, c'est important de le faire.
Pour ce qui est du délai d'un mois, après discussion, et bien sûr que ça peut ne pas avoir des avantages dans l'un ou dans l'autre, ce que nous voyons comme avantage, c'est déjà un délai qui est prévu dans le cas d'un loyer à logement modique de personnes qui s'en vont dans un centre d'hébergement, donc ça existe déjà, premièrement. Deuxièmement, le fait que l'avis soit de trois mois, si je comprends, n'empêche pas une personne de quitter plus tôt, là, puis c'est pour ça que c'est important que l'attestation aussi puisse se faire rapidement. Elle pourrait toujours quitter avant aussi, dans un cas grave qui semble évident. Alors, ça ne veut pas dire que la personne doit demeurer, est obligée de demeurer pendant trois mois; elle pourra partir peut-être deux semaines après.
Et toute la question de la diligence qui a été soulevée, là, pour l'attestation est importante dans cette perspective-là. Et puis, savoir la personne qui est habile, ça fait partie du projet de directives. Les services policiers, vous avez raison, je pense que ça... il y a des gens qui nous ont dit: Bien, écoutez, ce ne sont pas toutes les personnes qui sont prêtes à aller rencontrer les services policiers. Il y a beaucoup de cas où il n'y a pas de dénonciation justement, actuellement, il n'y a pas d'accusation de portée, puis je trouve ça dommage parce que... mais on peut comprendre les personnes de dire: Bien, on ne veut pas parce que on a des craintes, etc. Mais je pense que plus on pourra les accompagner puis qu'il y aura des accusations de portées, mieux ce sera aussi mais ça, c'est à essayer d'améliorer. Et donc, pour le délai d'un mois, je vous indique un peu ce qui était notre raisonnement et je pense que c'est un premier pas.
n(16 heures)n Et dans le cadre du plan d'action, là, ce qui avait été discuté et, tout à l'heure, vous avez soulevé, le député de Chicoutimi, la question d'hypothèque. Ça, c'est vrai, c'est une autre situation, ça, mais, dans un premier temps, ce qu'on indiquait, c'est de permettre la résiliation du bail. Je pense qu'on pourra continuer de réfléchir là-dessus, parce que c'est vrai qu'il y a d'autres situations, pas nécessairement le loyer, mais ça peut être une hypothèque, puis ça cause un problème. Alors, ça, je pense que c'est une réflexion, là, qu'on devra poursuivre à cet égard-là.
Alors, pour la réforme de l'IVAC, et on l'a abordé, oui, je vais proposer des solutions, des pistes de solution pour l'IVAC, je l'ai indiqué. Ce n'est pas la première d'ailleurs que c'est tenté ça, ça fait 10 ans qu'il y a eu des tentatives de réforme de l'IVAC. Et je m'adresse à tous les membres de la commission à cet égard-là, mais on va essayer d'arriver avec des ajustements. Alors, on ne peut pas vous faire des promesses sur ce qui sera dedans, là, mais sur les ajustements à cet égard-là, parce que je pense que c'est important.
Donc, alors moi, ce sont plus peut-être des commentaires, parce que vous avez soulevé des questions intéressantes et tout à fait pertinentes. Alors, je voudrais vous remercier. Je ne sais pas s'il y a des collègues qui veulent... Oui, je pense que le député de Montmorency voulait intervenir. Alors, je lui laisse la parole avec votre permission, M. le Président.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci, M. le ministre, ou merci, M. le Président.
Le Président (M. Descoteaux): Ou vice-versa.
M. Bernier: Les deux. Premièrement, merci d'être venues, hein. C'est fort intéressant, votre présentation. Vous avez soulevé d'excellents points, excellentes réflexions.
Moi, j'ai... Suite au dépôt du mémoire présenté par l'association des propriétaires de logements ce matin, il y avait une proposition, puis ça vous l'avez soulevée, mais j'aimerais que vous puissiez présenter davantage sur ça, où on demandait dans le cadre d'une agression à caractère sexuel, même par un tiers, dans la mesure où elle est commise dans le logement, tu sais. Vous avez élaboré quelque peu là-dessus. J'aimerais vous entendre sur ça, par rapport à cette proposition-là qui a été faite. Vous avez commencé à en parler un peu tout à l'heure, là. Mais le fait d'arriver avec une restriction semblable, là, parce que ça...
Une voix: Que c'est le fait de...
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
M. Bernier: Le fait d'arriver avec une restriction semblable, qu'est-ce que ça implique?
Mme Tremblay (Carole): O.K. Bien, dans les exemples que tout à l'heure Brigit présentait, je pense que ça enlèverait beaucoup de la teneur de ce qui est recherché, je pense, par 1974 tel que modifié. Parce qu'il ne faut pas perdre de vue que le besoin de sécurité des personnes qui ont vécu une agression sexuelle par un tiers, souvent, il est attribué au fait que justement cette personne-là, elle ne vit pas avec son agresseur et qu'à la limite elle peut avoir été agressée... Prenons l'hypothèse qu'elle a été agressée dans son lieu de travail, que la personne a été mise en prison pour un certain temps et qu'elle reçoit l'information qu'à sa sortie de prison cet homme-là va s'en aller dans le même secteur qu'elle, on pense que c'est des motifs qui pourraient faire qu'un officier public délégué par le ministre regarde sérieusement ces considérations-là pour voir s'il y a lieu de résilier le bail.
Avant de terminer là-dessus, je voudrais réagir à... parmi les commentaires, M. le ministre, que vous avez faits, on en convient, les victimes, même s'il y a un délai de trois mois, elles peuvent décider de quitter au préalable. Mais il faut non plus ne pas perdre de vue qu'ici on parle des victimes d'agression à caractère sexuel et que ça présuppose, ça, que ces personnes-là aient un bon réseau social, ce qui n'est pas toujours le cas, ou qu'il y ait de la place en maison d'hébergement, ce qui n'est pas toujours le cas non plus, parce qu'ils n'interviennent pas principalement auprès des femmes victimes d'agression sexuelle par un tiers ou par une personne connue qui n'est pas le conjoint, là. Donc, il y a aussi ça qu'il faut moduler en fonction des deux problématiques.
Le Président (M. Descoteaux): Ça va? M. le député de Robert-Baldwin.
M. Marsan: Oui, merci. À mon tour de vous remercier pour votre excellente présentation. Une petite question. Tantôt, vous avez mentionné que l'autorité, dans le projet de loi, c'est prévu, c'est un fonctionnaire ou un officier public. Vous avez mentionné peut-être que ça pourrait être une autre personne, notamment un représentant des services sociaux de la DPJ. Auparavant, juste le groupe avant vous, la Fédération des femmes nous ont dit: Bien, faites bien attention si vous identifiez quelqu'un des services sociaux parce qu'on les perçoit, à tort ou à raison, comme des personnes qui peuvent enlever les enfants en certains moments. Alors, j'essayais simplement de concilier la suggestion que vous faites avec la recommandation de la Fédération des femmes. Je ne sais pas si vous pouvez m'aider.
Mme Tremblay (Carole): Bien, en agression sexuelle, le message social qu'on envoie quand il est question de protéger les enfants ? les parents retiennent ce message-là ? c'est: Adressez-vous aux DPJ, adressez-vous à la Direction de la protection de la jeunesse, c'est le premier intervenant dans le dossier. C'est vrai que maintenant les ententes multisectorielles font qu'ils travaillent étroitement avec les services policiers, et tout ça, ce qui peut être notamment un frein aussi à s'adresser à la DPJ. Et on pense que ces personnes-là, ça pourrait être, dans certaines circonstances, plus facile pour les mères de s'adresser à un directeur de la protection de la jeunesse que d'aller directement auprès des policiers. Mais je ne veux pas invalider ce qui a été dit au préalable, et c'est vrai que quelquefois, à cause de l'approche de la DPJ et de son orientation sur bonne famille, bonne mère, et tout ça, il peut y avoir des craintes que les personnes se fassent enlever leur enfant et que ça implique des réserves sur le fait d'aller s'adresser à un directeur de la protection de la jeunesse. C'est tout à fait vrai. Et c'est des considérations qu'on va regarder dans le projet de loi sur la DPJ, là, qu'on va traiter après les fêtes.
M. Marsan: Est-ce que je pourrais juste terminer?
Le Président (M. Descoteaux): Allez-y, M. le député.
M. Marsan: Je comprends de votre suggestion qu'il n'y aurait pas seulement qu'une seule personne, je veux dire, comme un fonctionnaire en titre, mais qu'il pourrait y avoir plusieurs types de personnes en autant qu'on poursuit l'objectif de bien assurer la protection des gens qui peuvent être sur ce genre d'actions.
Mme Tremblay (Carole): Une autre de ces personnes-là, ça pourrait être, par exemple ? mais là on parle vraiment des cas où il y a eu judiciarisation ? ça pourrait très bien être la personne qui est à la Commission nationale des libérations conditionnelles. Qu'est-ce qui empêcherait qu'une personne, qui est aussi un officier public, de donner son point de vue par rapport à ça? Et là je suis consciente que je parle des situations où il y a eu judiciarisation, que ce n'est pas la majeure partie des cas. Mais en même temps, il faut regarder tout cet éventail-là d'où l'idée intéressante, si M. le ministre retient l'idée d'un comité de travail, je dirais d'urgence, parce qu'il ne faut pas que l'entrée en vigueur soit reportée trop loin, parce que, encore là, on se tire dans le pied. Parce qu'on veut agir rapidement pour que les femmes puissent s'en sortir pour leur sécurité, mais, si l'entrée en vigueur est repoussée dans un an et demi, ça ne fait plus de sens, là.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député. M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci. Alors, merci, Mmes Tremblay, Côté, de votre présentation. On va peut-être finir où vous avez commencé... commencé plutôt où vous avez fini. Sur la date, le premier groupe nous recommandait la mise en vigueur le 1er avril: Est-ce que ça vous donne un délai acceptable pour...
Mme Tremblay (Carole): Oui, c'est des consoeurs de travail par ailleurs sur beaucoup de dossiers. Et, oui, on n'avait pas de date à suggérer, comme tel, mais, oui, ça conviendrait.
M. Bédard: Ça donne le temps de former le comité puis de proposer les... Allez-y donc.
Mme Tremblay (Carole): Et si je peux me permettre, parce que je sais que tout à l'heure la question a été posée. Sur ce comité-là, il devrait aussi y avoir des représentantes de femmes autochtones du Québec qui...
M. Bédard: C'est ça. C'était mon autre question. Oui.
Mme Tremblay (Carole): ...ont une préoccupation particulière en violence. Et, si je peux me permettre une autre suggestion, les représentantes des organismes Espace du Québec, qui travaillent beaucoup en prévention auprès des tout-petits en matière d'abus sexuel et d'agression sexuelle, et qui auraient sûrement des situations de fait qu'on n'est pas en mesure de rapporter aujourd'hui mais qui seraient éclairantes sur cette question-là.
M. Bédard: Oui. Donc, au niveau des Innus, je regarde aussi... parce que ça prend une proximité de la personne responsable, et là on a un problème. C'est clair. Même le substitut du Procureur, c'est clair que, dans les régions du Grand Nord, ce n'est pas quelqu'un qu'on doit voir régulièrement, là. Donc, la proposition de la SHQ, je crois, eux proposaient quelqu'un des services de santé et des services sociaux. Il semble effectivement... en tout cas, du moins c'est peut-être le canal introductif. Lui peut avoir des obligations de consulter d'autres, le substitut du Procureur, par exemple. Mais il faut s'assurer de la proximité; s'il n'y a pas de proximité, le mécanisme ne sera pas approprié. Sur la diligence raisonnable, j'ai compris que vous aviez une réponse à me donner? C'est une proposition?
n(16 h 10)nMme Tremblay (Carole): Bien, en fait je trouve ça intéressant que ça ait été soulevé comme question. Vraiment, je ne l'avait pas vue passer. On a été plus préoccupés du fait que le substitut soit la seule personne habilitée, et c'est comme si on avait un peu perdu de vue les autres éléments qui étaient contenus dans la directive. Et je trouve ça extrêmement important... Autant qu'on a des fois des délais de rigueur qui peuvent nous apparaître moins pertinents, je ne sais pas, moi, je tombe sur le trottoir puis je veux poursuivre la municipalité, j'ai des délais de rigueur, et là il n'y en aurait pas dans ce cas-là. Je n'ai pas de suggestion à faire sur quel serait le délai lui-même, mais ça pourrait très bien être une question qu'on aborde dans le cadre des travaux du comité de travail. Mais il faut que ce soit court.
M. Bédard: Oui. C'est parce que le fait...
Mme Tremblay (Carole): Je pense que ça tombe sous le sens pour tout le monde.
M. Bédard: Effectivement. Moi, je le pense aussi. Le problème... Mon collègue de Mercier proposait de le mettre dans la loi, mais, comme le projet de loi doit être adopté rapidement, ce sera peut-être plus compliqué. On est peut-être mieux de le laisser dans le cadre de la politique et...
Mme Tremblay (Carole): Même si c'est préoccupant effectivement que ça apparaisse plus dans une modalité administrative qu'au coeur même du projet de loi, alors que l'essence même du projet de loi repose sur l'urgence d'intervenir.
M. Bédard: Oui, et voilà.
Mme Tremblay (Carole): Mais, si on veut aller vite...
M. Bédard: C'est pour ça que j'essayais d'avoir des suggestions, mais évidemment il faut faire vite et bien, là. Des fois, c'est peut-être compliqué.
Mme Tremblay (Carole): Oui. Exactement.
M. Bédard: L'autre élément, j'ai compris aussi que vous souhaitiez... Vous aussi, vous trouvez important qu'il y ait un comité d'évaluation de la mesure, de la portée de la mesure. C'était un des amendements qu'on souhaitait amener, là, à l'effet qu'un comité soit chargé d'évaluer la portée, l'application, est-ce qu'il y a d'autres modifications à faire, est-ce qu'on a atteint nos objectifs comme on a en d'autres matières. Et ça, vous tenez aussi à ce comité.
Mme Tremblay (Carole): Oui. Entre autres, on remarque qu'après une certaine période où il y a eu une mise en application et qu'on évalue, souvent ce qu'on va se rendre compte, c'est, bon, la mesure en soi semble bonne pour celles qui l'ont utilisée, mais pourquoi si peu l'utilisent? Est-ce que c'est parce qu'il y a un manque de formation dans la communauté? Est-ce que c'est parce que ce n'est pas suffisamment diffusé? On s'est rendu compte souvent, entre autres avec IVAC, que c'est un problème de connaissance de la disponibilité. Et c'est pour ça, c'est avec ces exemples-là en tête qu'on se disait: Ça serait bien percutant qu'il y aurait une période d'évaluation après un certain temps.
M. Bédard: Tout à fait d'accord. Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Ça va? M. le député de Mercier.
M. Turp: D'abord, juste deux commentaires. Je pense que c'est vous qui avez évoqué le Protecteur du citoyen, là. Je ne suis pas sûr que c'est une autorité, là, qui pourrait délivrer des attestations, en raison du fait qu'il n'y a pas partout des représentants des personnes qui travaillent pour la Protectrice du citoyen. Alors, dans la recherche des fonctionnaires et des officiers publics, là, il faut continuer, mais je ne crois pas que, pour des motifs de proximité, faire appel à la Protectrice du citoyen puis à ses fonctionnaires serait approprié.
Pour ce qui est de votre suggestion de faire appel ou de faire référence aux instruments internationaux, moi, j'aime bien ça, là, comme professeur de droit international, mais le Code civil qu'on amende, là, dans le préambule, il y a un petit préambule, là, mais je ne pense pas qu'on veut nécessairement amender le préambule. Mais, vous voyez, ce que je trouve intéressant, c'est que vous situez cette préoccupation dans un ordre international où la question de la sécurité, le droit à la sécurité des femmes, notamment dans la Convention internationale sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, là, est quelque chose de si important que nous, là, le travail qu'on fait aujourd'hui, là, c'est un travail qui vise à mettre en oeuvre cette convention internationale puis à assumer convenablement nos obligations internationales. Et nos tribunaux, s'ils le voulaient, pourraient tenir en compte cette convention pour interpréter la loi qu'on va adopter, là, l'amendement du Code civil qu'on adopterait pour, tu sais, s'assurer que c'est bien en conformité avec nos engagements internationaux.
Mais ma question porte sur les délais, là. Qu'est-ce que, vous, vous souhaitez? Est-ce que... Parce que le projet de loi est là maintenant, puis c'est trois mois. C'est trois mois, là. Si on ne le change pas, là, aujourd'hui, ça va rester là trois mois. Si on ne met pas dans la loi quelque chose qui concerne la diligence, là, pour la délivrance de l'attestation ou un délai précis, il n'y en aura pas, de délai. Il n'y aura même pas d'indication qu'il faut le faire avec diligence. Ça pourrait venir dans une politique de poursuite, là, mais il n'y a aucune garantie. Il y a peut-être... Tu sais, on a confiance au ministre de la Justice qui a la courtoisie de nous présenter un document, là, comme celui-là où il est question de la diligence, mais il n'y a pas de garantie.
Alors, moi, j'aimerais savoir: Votre groupe, là, qu'est-ce que vous souhaitez sur les délais?
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Carole): Merci. Bien, vous posez une question à deux volets. Tout à l'heure, on s'est attardés que, nous, le projet de loi devrait être modifié pour prévoir un délai d'un mois pour la résiliation du bail, pas juste pour les victimes d'agressions à caractère sexuel mais aussi pour les victimes de violence conjugale. Là, j'ai oublié qu'est-ce que je voulais dire par rapport à ça.
M. Turp: Et pour l'attestation?
Mme Tremblay (Carole): Bien, et pour l'attestation, je pense qu'on... je ne sais pas si c'est possible de modifier le projet de loi pour inclure un délai de rigueur pour l'émission de l'attestation. Je ne sais pas. Peut-être que oui. Tout à l'heure, dans... sous-entendu aux propos de votre confrère, c'était plus que ça devait rester dans les directives. Je ne sais pas. C'est sûr que, si on peut le modifier pour l'inclure, un délai de rigueur, dans le projet de loi, ce serait ce qui serait le plus souhaitable.
En même temps, je fais confiance au gros bon sens. C'est un projet de loi qui dit que c'est pour favoriser la sécurité des personnes. Si ce n'est pas écrit dans le projet de loi, le premier tribunal qui va regarder cette disposition-là de l'extérieur va imposer un délai de rigueur, d'après moi. Mais je suis peut-être trop naïve ou je fais peut-être trop confiance à la justice. Mais c'est sûr que, si on pouvait l'inclure, ce serait préférable de...
M. Turp: Disons, là, que c'est vous l'aviez rédigé, ce projet de loi là, là, qu'est-ce que vous auriez mis comme délai pour la délivrance de l'attestation? Si on vous donnait la plume, là, puis c'est vous qui faites le délai?
Mme Tremblay (Carole): Bien, moi, je dirais entre cinq et sept jours.
M. Turp: Très, très court alors?
Mme Tremblay (Carole): Très court. En fait, c'est le temps que les personnes puissent aller chercher un support aussi, parce qu'on ne se présente pas... Quand on est victime d'agression sexuelle, là, puis qu'on vient d'apprendre que l'agresseur s'en vient rester dans le quartier, puis qu'on ne connaît pas comment ça marche, là, la première démarche qu'on fait, c'est d'aller chercher de l'aide puis de l'information. Puis là de trouver un temps avec une intervenante pour voir, bon, à qui on peut s'adresser, le temps d'y aller, de prendre rendez-vous, et tout ça, je pense que ce serait tout à fait raisonnable. Et je ne veux pas en référer à la question du délai raisonnable, parce que ça a été interprété de... mais ce serait tout à fait logique que d'imposer ça à un officier de justice dans un délai de cette nature-là.
M. Turp: Merci.
Mme Tremblay (Carole): De rien.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Trois-Rivières, vous aviez encore quelques minutes du côté ministériel, deux minutes.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Merci, mesdames. Je fais référence à votre expérience en termes d'accompagnement des personnes qui sont victimes d'actes criminels, et je reviens sur la question du délai parce que, pour moi... et je vois encore un problème encore plus important, malgré l'interprétation qu'on a entendue ce matin qui, je crois, n'est pas la bonne, là. Quand on regarde le deuxième paragraphe de 1974, on dit d'abord: «À moins que les parties n'en conviennent autrement, la résiliation [du bail] prend effet [...] après l'envoi d'un avis au locateur» de trois mois, là, bon. Première chose, «à moins que les parties n'en conviennent autrement», et compte tenu de cette possibilité-là d'exigence d'un trois mois de loyer clairement, la victime peut être portée à aller voir son locateur en premier, lui dire: Je suis victime d'une agression ou de menaces, et j'ai une ouverture pour vous envoyer un avis, mais on peut s'entendre autrement maintenant. Et la réponse risque fort d'être trois de pénalité, trois mois à payer, puis: Merci, vous pouvez quitter, sans avoir besoin de passer par le processus d'aller obtenir non pas l'autorisation, là, mais la reconnaissance par l'officier autorisé. Et on parle d'une personne, là, qui est dans une situation d'urgence.
Alors, moi, je reviens avec... ça me paraît très important de réduire ce délai-là, tout en reconnaissant qu'il ne faut pas mettre les propriétaires dans des situations économiques difficiles. Et ce que j'avais évoqué ce matin, c'était qu'on ajoute possiblement à côté: «à moins que les parties n'en conviennent autrement ou que le locateur démontre l'impossibilité de relouer avant». C'est-à-dire qu'au moment où la personne victime va rencontrer son propriétaire, elle peut très bien connaître la situation économique où se trouve son logement et savoir que, dans deux semaines, il va être facilement reloué. Et si cette phrase-là était présente, elle n'aurait pas de crainte, en tout cas de s'entendre plus rapidement, ou du moins de ne pas se voir obligée de payer éventuellement trois mois de pénalité.
n(16 h 20)n Alors, là on cherche une solution à peut-être raccourcir le délai et, quand on parle de délai, ça me semble difficile. Alors, dépendamment des endroits, des logements, du prix du logement, il me semble qu'avec une possible modification dans ce sens-là ça peut peut-être balancer les choses. Parce que, moi, je crains fort, là, que, si ça reste comme ça, il y ait peut-être même des personnes qui vont choisir de ne pas quitter pour ne pas passer par le processus et ne pas être pris à payer trois mois.
Le Président (M. Descoteaux): Mme Tremblay.
M. Gabias: Je ne sais pas ce que vous en pensez, là, mais le choix peut être de tout simplement laisser tomber.
Mme Tremblay (Carole): Mais je ne suis pas certaine de tout en saisir les nuances, et c'est sûr qu'on n'a pas coutume aussi d'aborder les choses avec l'angle du propriétaire non plus. Je ne dis pas que c'est ce que vous faites, mais j'ai peur que ce que vous dites soit beaucoup assimilable à la sous-location, en fait. Non, c'est pas ça du tout?
Et ma deuxième crainte, c'est qu'avec l'introduction que vous avez faite ça repose sur la bonne volonté du propriétaire. Non, mais je comprends, je suis complètement dans les patates. Je suis désolée, je n'ai pas bien compris.
M. Gabias: Non, ce que je veux dire c'est qu'actuellement, là, avec la possibilité d'avoir un trois mois de délai ou trois mois à payer, il y ait des personnes qui choisissent de ne pas s'en prévaloir, parce qu'économiquement elles sont très souvent dans une situation difficile.
Mme Tremblay (Carole): Ça, je suis d'accord avec vous. C'est pour ça qu'on...
M. Gabias: Et c'est très limitatif, et ça, ça m'inquiète, là. Ça m'inquiète parce que la conséquence peut être très, très grave.
Mme Tremblay (Carole): Oui.
M. Gabias: Si elle choisit de ne pas s'en prévaloir, alors...
Mme Tremblay (Carole): Si c'est ça, on est tout à fait d'accord à réduire le délai, parce que c'est vrai que des personnes mises dans une situation de trois mois de délai ne vont pas opter pour leur propre sécurité et celle de leurs enfants, parce que la pression va être trop forte économiquement.
M. Gabias: Oui... Pour moi, en ce qui me concerne, là, le délai de trois mois peut être trop long non seulement pour les personnes dans cette situation-là, mais pour les autres personnes visées par 1974, aujourd'hui en tout cas.
Mme Tremblay (Carole): Ah, O.K.
Le Président (M. Descoteaux): Merci. Le temps est écoulé. Merci, Mme Tremblay, Mme Côté, merci de votre présence. Nous allons inviter maintenant la Société d'habitation du Québec à prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Descoteaux): Donc, bienvenue, messieurs de la Société d'habitation du Québec. Je crois que nous avons M. Pierre Cliche. Si vous aviez la gentillesse de présenter vos collègues, s'il vous plaît.
Société d'habitation du Québec (SHQ)
M. Cliche (Pierre): Alors, à ma droite, Me Alain Bellefeuille, de la Direction des affaires juridiques de la société, et, à ma gauche, M. Hubert De Licolini, directeur du Développement des programmes.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien. Donc, comme vous savez, vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, suivies de deux périodes de 15 minutes d'échange avec les membres de la commission. On est à votre écoute.
M. Cliche (Pierre): Alors, je remercie les membres de la Commission des institutions de m'avoir invité à leur faire part des commentaires de la Société d'habitation du Québec en regard du projet de loi n° 133 destiné à modifier l'article 1974 du Code civil du Québec, afin d'y introduire un nouveau motif de résiliation de bail, soit l'atteinte à la sécurité d'un locataire pour le motif de violence conjugale ou d'agression à caractère sexuel. Avant d'aller plus loin sur l'analyse du projet de loi, il m'apparaît important de vous dresser un bref portrait des activités de la société dans la gestion du logement social au Québec de même que des dispositions législatives et réglementaires qui servent à gérer le logement social.
À l'heure actuelle, la société gère, par ses mandataires, au-delà de 73 073 logements à loyer modique destinés à loger les plus démunis de nos concitoyens. Ces logements sont répartis sur tout le territoire du Québec, y compris au Nunavik. Ces logements sont gérés, au niveau local, par un réseau de 545 offices d'habitation ainsi que par de nombreuses coopératives et organismes à but non lucratif. Ces logements sont l'objet d'une forte demande. Au 31 décembre 2004, 42 725 ménages étaient inscrits sur les listes d'attente des offices d'habitation du Québec.
Compte tenu des besoins importants de logement social et de l'offre qui est malheureusement limitée, des règles ont dû être établies afin de pourvoir à l'attribution des logements à loyer modique. C'est ainsi que la société a adopté, en 1990, le règlement sur l'attribution des logements à loyer modique qui établit une pondération de chacune des demandes en vue d'en déterminer l'ordre d'attribution. Le règlement sur les conditions de location des logements à loyer modique établit, quant à lui, le montant du loyer payé par chacun des ménages. Pour finir, les article 1984 et suivants du Code civil du Québec viennent compléter la liste des dispositions législatives propres à la gestion des logements sociaux. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans quelques minutes.
Abordons maintenant, si vous le voulez bien, l'article 1974, qui fait l'objet du projet de loi sous étude. Nous discuterons d'abord de l'impact de ce projet de loi sur le réseau de l'habitation sociale au Québec pour ensuite vous faire part de nos interventions reliées à la gestion des cas de violence conjugale à l'intérieur de notre réseau de logements. L'article 1974 constitue une exception au principe général de la force exécutoire des contrats. Son utilité principale, comme vous le savez mieux que moi, est de permettre à un locataire, dans certains cas que je qualifierais de sociaux, de résilier un bail en cours qui le lierait autrement jusqu'à son terme, qui est généralement de 12 mois. Cet article permet, entre autres, aux ménages qui se sont vus attribuer un logement à loyer modique, de mettre prématurément un terme à leur bail dans un autre logement, et ce, sans encourir de pénalité autre que les trois mois de loyer qui y sont prévus. En tant que tel, l'ajout proposé à l'article 1974 du Code civil n'aura donc aucun impact significatif pour le réseau du logement social puisque la possibilité de résilier un bail lors de l'attribution d'un logement à loyer modique existe déjà. En effet, il faut souligner que, bien qu'il soient tout à fait souhaitables, les ajouts à l'article 1974 du Code civil ne modifieront pas les critères d'attribution des logements à loyer modique et ne faciliteront donc pas davantage l'accès à un logement social. La pondération des demandes est déterminée par le règlement sur l'attribution des logements à loyer modique, et l'application de ce règlement est tout à fait indépendante de l'article 1974.
n(16 h 30)n Cela étant dit, ma présence devant vous aujourd'hui est une bonne occasion de vous faire part du fait que la société est extrêmement sensible à la question de la violence conjugale et que cette sensibilité se reflète tant dans sa réglementation que dans les directives de gestion qui sont données aux organismes locaux chargés de l'administration de ces logements, et ce, au bénéfice des victimes de violence conjugale, qu'elles soient requérantes ou locataires d'un logement à loyer modique. Ainsi, une personne qui présente une demande de logement à loyer modique et qui démontre qu'elle est victime de violence conjugale n'a pas à respecter ce que l'on appelle le critère de résidence, alors que, de façon générale, une personne qui demande un logement à loyer modique doit avoir habité 12 des 24 derniers mois dans la municipalité où se trouve le logement. Une victime de violence conjugale qui réside à Gaspé peut demander d'obtenir un logement à Gatineau, ce qui ne serait pas le cas d'un autre demandeur. De plus, l'article 28 du règlement sur l'attribution prévoit que la personne requérante d'un logement social qui démontre qu'elle est victime de violence conjugale peut obtenir jusqu'à 25 points additionnels dans la pondération de sa demande, ce qui lui assure, à toutes fins pratiques, l'attribution d'un logement à loyer modique dans un délai très court.
Il peut également arriver malheureusement qu'une victime de violence conjugale soit déjà locataire d'un logement à loyer modique. Dans ces cas, l'article 23, paragraphe 5° du règlement sur l'attribution prévoit qu'un locataire qui réside déjà dans un logement à loyer modique peut, lorsque sa santé ou sa sécurité l'exige, demander à être relogé dans un autre logement. De plus, cette demande acquiert un caractère prioritaire. La violence conjugale est évidemment l'un des cas couvert par cette disposition qui peut par ailleurs couvrir beaucoup d'autres possibilités. Ces personnes peuvent espérer trouver rapidement un foyer où elles pourront trouver paix et sécurité. Dans les cas de cette nature, une intervention rapide est nécessaire afin d'éviter la répétition et l'aggravation des gestes de violence.
Nous avons donc vérifié comment, dans les faits, cette disposition est appliquée dans notre réseau. Ainsi, l'Office municipal d'habitation de Montréal, qui gère 20 376 logements à loyer modique, considère les cas de violence conjugale comme étant une priorité absolue. Le délai d'attente pour un relogement d'une telle priorité varie de 24 heures à une semaine. Nous avons aussi communiqué avec la Fédération des locataires de HLM du Québec. Selon leur porte-parole, les offices d'habitation agissent avec diligence lorsqu'un tel cas se présente.
Je voudrais attirer votre attention sur le fait que nos directives de gestion permettent à une personne qui souhaite bénéficier des exceptions reliées à la violence conjugale de faire, par tout moyen approprié, la preuve qu'elle est victime de violence conjugale. Les deux méthodes les plus utilisées sont une lettre d'un CSSS ou d'un corps policier par exemple, cela afin de réduire les délais et éviter de compliquer davantage une situation qui l'est déjà amplement.
Cette remarque m'amène à vous faire part de certains commentaires par rapport à des aspects du projet de loi qui n'affecteront pas nécessairement notre réseau, mais qui selon moi méritent d'être soulignés. Par exemple, nous espérons que, dans la mise en oeuvre du nouvel article 1974, les moyens appropriés seront pris afin d'éviter que la preuve nécessaire à la démonstration de l'existence d'une situation de violence conjugale ou à caractère sexuel ne devienne un véritable dédale juridique ou administratif qui empêcherait une intervention rapide visant à mettre fin à la violence.
Nous comprenons qu'il faut éviter les faux cas de violence, mais j'estime qu'on doit s'assurer que les vrais cas seront traités avec toute la diligence requise. D'autre part, nous comprenons que l'article 1974 tel que rédigé n'est applicable qu'aux seules victimes de violence qui ont signé un bail. Dans le cas où les deux conjoints auraient signé un bail, nous comprenons également ? c'est l'interprétation que nous faisons de l'article tel qu'il est rédigé actuellement; dans le cas où les deux conjoints auraient signé un bail, nous comprenons également ? que seule la victime peut se prévaloir de l'article 1974, laissant à l'ex-conjoint la totalité de la responsabilité du bail. Nous sommes entièrement d'accord avec une telle façon de faire puisqu'à notre avis il serait odieux de permettre à l'auteur de la violence de bénéficier de ses gestes de violence.
En résumé donc, la Société d'habitation du Québec appuie le projet de loi, salue l'initiative du gouvernement dans ce domaine. Nous espérons également que la mise en oeuvre de cette disposition se fera en ayant à l'esprit la nécessité d'intervenir rapidement pour les victimes. Quant à lui, le réseau du logement social est peu touché par les modifications suggérées à l'article 1974 du Code civil du Québec puisque les dispositions qui lui étaient applicables existaient déjà.
Par ailleurs, le projet de loi ne modifie pas les critères d'admissibilité ou de pondération des demandes de logement à loyer modique. Cependant, la Société d'habitation a mis en place des mesures réglementaires et administratives qui rendent compte de la sensibilité de notre réseau à la question de la violence conjugale.
Bien que nous soyons conscients que cela ne règle pas la problématique en tant que telle, nous estimons que la société, dans la mesure de ses moyens d'intervention, fait le plus qu'elle peut en vue de permettre aux victimes de violence conjugale de trouver un foyer paisible et sécuritaire. Nous sommes certains que le nouvel article 1974 du Code civil du Québec contribuera à l'atteinte de cet objectif. Merci de votre attention.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. Cliche. Donc, au niveau des échanges, M. le ministre.
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Merci, M. Cliche, j'ai eu l'occasion de vous connaître d'ailleurs dans une autre fonction auparavant. M. Bellefeuille et M. De Licolini, je vous remercie pour votre mémoire, et je pense que vous démontrez très bien la sensibilité que la Société d'habitation du Québec a envers les personnes qui sont touchées par la violence conjugale. Je sais que, chez nous, dans Vaudreuil, par exemple, l'Office municipal d'habitation applique également ? je ne sais pas comment, je ne me suis pas informé ? mais je sais que c'est prioritaire: si quelqu'un, une personne est victime de violence conjugale, qu'elle a fait une demande pour accéder à un logement à loyer modique, elle va passer devant d'autres si c'est un cas, là, de violence conjugale. Alors ça, je trouve ça extrêmement intéressant.
Vous mentionnez, à la page 8, fin de la page 8 et page 9, vous faites état d'une interprétation. Alors, si, par exemple, la personne est signataire du bail ou est cosignataire, vous dites: «seule la victime peut se prévaloir de l'article 1974, laissant à l'ex-conjoint la totalité de la responsabilité du bail. Nous sommes entièrement d'accord avec une telle façon de faire.» Évidemment, c'est l'interprétation que, nous, nous avons. Il y a peut-être des interprétations différentes, mais c'est la même interprétation que celle que des gens du ministère de la Justice ont, c'est-à-dire que... oui. Je pense que... c'est pour ça que je voulais le souligner, là, on pourra en discuter, mais...
Une voix: ...
M. Marcoux: Alors, il y a une divergence, mais, vous savez, les avocats parfois ne sont pas toujours de la même opinion. Donc, les avocats... des avocats.
Une voix: Ils sont tous bons.
M. Marcoux: Ils sont tous excellents, d'ailleurs. Il y en a d'excellents, puis... Mais... Donc... Alors, nous sommes du même avis à cet égard-là.
Évidemment, dans les personnes qui font des demandes pour occuper un logement à loyer modique, il y en a qui ne sont pas signataires d'un bail. Par exemple, dans votre cas à vous, là, parce que ça peut être quelqu'un qui demeure avec un conjoint, elle n'est pas signataire, mais elle demande un logement à loyer modique. Vous n'avez pas de statistiques, hein, à savoir est-ce que les personnes qui font des demandes, pour la plupart, ne sont pas signataires d'un bail ou sont signataires d'un bail, parce que l'impact est différent à ce moment-là pour le propriétaire ou le locateur. Vous n'avez pas de statistiques?
M. Cliche (Pierre): Malheureusement, sur cet aspect-là, je ne crois pas qu'on ait de statistiques, non. De la même façon, pour ce qui est de l'article actuel qui permet à un prestataire, à quelqu'un qui se qualifie pour un logement à loyer modique de se dégager de son bail, je ne serais pas en mesure de vous dire, dans les cas où ça s'est fait, combien ont choisi de s'entendre avec le propriétaire ou ont pu s'entendre avec le propriétaire, combien ont accepté de payer, en tout ou en partie, une pénalité de trois mois pour quitter plus rapidement, et combien ont attendu à la fin de la période de trois mois pour occuper un logement social. Malheureusement, je ne dispose pas de ce type d'information.
n(16 h 40)nM. Marcoux: Donc, dans l'application de votre politique sur l'attribution, vous n'avez pas eu de réactions des propriétaires ou de certains propriétaires qui disaient: Écoutez, il y en a beaucoup, et on trouve que ça devient un fardeau? Vous n'avez pas eu de commentaires?
Le Président (M. Descoteaux): M. Cliche.
M. Cliche (Pierre): Bien, écoutez, j'ai eu certainement des commentaires de divers représentants des groupes de propriétaires à l'effet que c'était une disposition avec laquelle ils étaient peu à l'aise. Mais, moi, en ce qui me concerne, depuis que j'occupe mes fonctions, je n'ai pas... Donc, c'est une modification du Code civil qui est bien antérieure à ma prise de fonctions, et je ne suis pas en mesure de vous dire quel genre de problèmes ça a pu créer au moment de l'adoption et par la suite. Je constate, quand j'ai des discussions avec nos partenaires qui sont les associations de propriétaires, que cet élément-là revient périodiquement dans nos discussions.
M. Marcoux: O.K. Moi, je n'ai pas d'autre question. De mon côté, je ne sais pas si mes collègues ont des questions.
Le Président (M. Descoteaux): Autres questions du côté ministériel?
M. Marcoux: Je pourrai peut-être revenir après, là, mais...
Le Président (M. Descoteaux): Ça va. Donc, M. le député de Chicoutimi.
M. Marcoux: Merci.
M. Bédard: Merci. Alors, M. Cliche, ça fait plaisir de vous recevoir. Mes salutations aussi à M. Bellefeuille puis à M. De Nicolini ? c'est ça?
Revenir donc à... Au niveau de votre politique, au-delà de l'article 1974 tel qu'il existait auparavant, je comprends que l'organisme que vous représentez avait une politique très claire en matière de violence conjugale et d'agression sexuelle. C'est ça?
M. Cliche (Pierre): Oui.
M. Bédard: Je comprends aussi que, de cette politique, vous avez appliqué une tolérance zéro, vous avez appliqué le délai de, bon, de réaction entre 24 heures et une semaine?
M. Cliche (Pierre): Oui. Alors, c'est... Notre politique de tolérance zéro, ou minimale, ou d'accorder une priorité absolue est partagée par l'ensemble de nos offices d'habitation et de nos partenaires. Nous n'avons pu vérifier, pour nous présenter devant cette commission, que, pour l'office de Montréal, qui représente quand même près du tiers de nos logements...
M. Bédard: ...c'est ça?
M. Cliche (Pierre): Oui, 21 000 sur 71 000.
M. Bédard: ...oui.
M. Cliche (Pierre): Alors, ça représente un peu moins que le tiers, 30 % de nos logements.
M. Bédard: O.K. Donc, vous réussissez, avec quand même les difficultés de disponibilité de jugements, à appliquer ça... pas de jugements, de disponibilité de logements à appliquer une telle mesure dans des délais très stricts. Je ne remets pas en cause le vôtre, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bédard: Ce que je veux savoir en bout de ligne, et comme vous semblez avoir cette préoccupation-là, qui est partagée par ceux qui vous ont précédé aussi, avez-vous des ? et je ne sais pas si c'était la question du ministre, je parlais avec ma recherchiste ? mais est-ce que vous avez des statistiques sur ceux et celles qui ont utilisé une telle... sur les 23 000 à Montréal, les 21 000, là, combien ont demandé à appliquer une telle mesure ou se sont référés à la politique des logements à loyer modique?
M. Cliche (Pierre): Alors, en mai 2004 et sur une période qui couvre une dizaine de mois jusqu'à ce moment-là, il y avait eu 150 demandes de HLM faites par des personnes victimes de violence conjugale.
M. Bédard: De mai 2004 à aujourd'hui?
M. Cliche (Pierre): À Montréal.
Des voix: ...
M. Cliche (Pierre): Ça, donc, il ne s'agit pas des personnes qui habitaient des logements, on n'a pas été capables d'obtenir cette information-là. Donc, nos locataires, les locataires de l'office de Montréal, s'ils vivent une situation de violence conjugale et qu'ils la porte à l'attention des gestionnaires de l'office, à l'intérieur d'une semaine il va y avoir une prise d'action parce qu'on comprend bien qu'il nous faut soustraire ces personnes-là de la situation où la violence existe pour éviter qu'elle ne s'aggrave, qu'elle ne se perpétue, etc. Donc...
M. Bédard: Et 150, M. Cliche, là on parle strictement des cas de violence conjugale ou ça comprend aussi les cas d'agression sexuelle, de...
M. Cliche (Pierre): Ils nous sont présentés comme étant de violence conjugale.
M. Bédard: Strictement. Donc, à ça il faudrait ajouter aussi les cas d'agression sexuelle, ou ça, vous avez une politique différente?
M. Cliche (Pierre): On n'a pas d'information là-dessus, mais comme ils ne sont pas compris, s'il y en a, ils s'ajouteraient.
M. Bédard: Ils s'ajouteraient, O.K. Quant à votre politique... Vous savez, on cherche la meilleure façon d'appliquer l'article 1974 par... vous avez vu le texte, là, l'officier public qui délivre l'attestation. Plusieurs suggestions ont été faites, et on a de la difficulté à trouver vraiment la personne rêvée à ce niveau. Vous, vous avez, dans votre pratique, la méthode la plus souvent utilisée, et là je suis à la page 7 comme vous l'avez mentionné: la méthode la plus utilisée, c'est une lettre d'un centre des services de santé et services sociaux ou d'un corps policier, par exemple.
Vous dites «par exemple». Donc, ma première question, c'est que je comprends qu'il y a d'autres méthodes; pourriez-vous nous les mentionner? Deux, à quoi ressemble la lettre? Elle doit attester de quoi, cette lettre?
M. Cliche (Pierre): Oui. Alors, ce que notre directive indique, c'est que c'est par tout moyen approprié, et, parmi ceux qui sont mentionnés à l'intérieur de notre directive, on retrouve les suivants: une lettre d'un centre d'hébergement pour de telles personnes, donc ça peut venir... Souvent, quand les personnes qui sont à faibles revenus, des familles monoparentales, la plupart du temps victimes de violence, demandent un HLM alors qu'elles sont dans un centre de transition, un centre d'hébergement pour victimes de violence...
M. Bédard: La plupart des cas.
M. Cliche (Pierre): Dans la plupart des cas, et, à ce moment-là, comme je l'ai dit plus tôt, elles reçoivent considération particulière de leur situation par l'attribution d'un plus grand nombre de points, ce qui leur permet d'obtenir un traitement prioritaire et de passer avant beaucoup d'autres gens qui seraient normalement avant eux sur la liste d'attente pour un HLM. O.K. Donc, alors qu'est-ce qui... Ils sont donc la plupart du temps dans ces centres-là, ou presque tout le temps. Une lettre d'un centre d'hébergement, d'un service de police, d'un centre hospitalier, d'un centre local de services communautaires, mais c'est donné à titre d'exemple. C'est par tout moyen approprié, parce qu'on ne voulait pas exclure d'autres façons d'attester d'une situation de violence, notre objectif étant de nous assurer qu'il y en avait une réelle, attestée par des personnes crédibles, et puis de passer ensuite rapidement à l'action pour soustraire les personnes à la violence dont elles sont victimes.
M. Bédard: Bon, c'est ça. Et le processus est pareil, j'imagine, là, que ce soit quelqu'un qui est déjà en logement à loyer modique que quelqu'un qui veut un logement à loyer modique. C'est la même procédure que vous employez, la même attestation...
M. Cliche (Pierre): Quand il y a...
M. Bédard: ...la même...
M. Cliche (Pierre): C'est ça.
M. Bédard: ...la même politique qui est employée.
M. Cliche (Pierre): Exactement. Une attestation par tout moyen approprié, mais on constate que les deux plus fréquemment utilisés, c'est un rapport de police ou bien une lettre d'attestation d'un CLSC.
M. Bédard: D'un CLSC, c'est ça.
M. Cliche (Pierre): Quand que la situation de violence est vécue par un ménage qui est déjà locataire chez nous, et non résidente en attente d'une place dans un centre d'hébergement pour victimes de violence.
M. Bédard: O.K. Mais est-ce que c'est différent s'il est en attente.
M. Cliche (Pierre): Non, non. C'est la même...
M. Bédard: O.K. Excusez, parce que je vous...
M. Cliche (Pierre): ...façon de le démontrer, par tout moyen approprié, mais disons qu'une lettre d'un centre d'hébergement pour victimes de violence est plus fréquente dans les cas où les ménages sont en attente, dans cet établissement-là, d'une place dans un HLM.
M. Bédard: O.K. Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Mme la député de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, messieurs. Votre méthode, vos moyens, là, utilisés, je pense, pour reconnaître qu'il y a preuve de violence conjugale, moi, ça m'apparaît extrêmement intéressant. Moi, je veux vous questionner sur la référence que vous faites, en page 6, à l'article 28 du règlement, sur l'attribution, qui dit que la personne peut obtenir jusqu'à 25 points additionnels dans la pondération de sa demande. J'ai fait cette vérification-là auprès de mon office municipal dans mon comté, l'an dernier, et j'ai fait référence exactement à cet article 28, et on m'a dit que c'était une directive qui avait été adoptée à la discrétion des offices, donc qui avait été adoptée à Montréal, mais qu'ils n'étaient aucunement soumis à cette directive-là. Donc, qu'ils ne mettaient pas de points additionnels et que même, sur le formulaire pour les critères pour définir la pondération, les points, il n'y avait aucune petite case pour les victimes de violence conjugale.
Alors, est-ce une mauvaise interprétation de mon office municipal ou est-ce que c'est effectivement à la discrétion des offices?
Le Président (M. Descoteaux): M. Cliche.
n(16 h 50)nM. Cliche (Pierre): C'est à la discrétion des offices. Ce qui est reconnu dans le règlement, c'est cinq points automatiquement accordés pour couvrir cette situation-là. Mais la politique de gestion, les directives administratives qui encadrent cette situation-là incitent fortement les offices d'habitation à attribuer 20 points supplémentaires dans cette situation-là, de sorte qu'on se retrouve avec un total de 25 points. Tous les offices ne le font pas, mais la plupart des grands offices le font, hein? Alors, qui attribuent 20 points et plus? On va retrouver Longueuil, on va retrouver Québec, on va retrouver Lévis, on va retrouver Sherbrooke, on va retrouver Saguenay, on va retrouver Montréal, on va retrouver Laval. Donc, là, vous avez fait le tour d'environ 75 % du parc de HLM du Québec. Les autres, ce sont des petits offices avec un nombre très limité d'unités.
Et il se peut que, dans ces offices-là, la consigne, parce que vous avez raison de signaler que la partie des points qui est attribuée par le règlement, donc auquel aucun office ne peut se soustraire, c'est cinq, mais la directive qui concerne son application concrète rajoute 20 points, et la plupart donc des offices comprennent cette situation et ont choisi de suivre la consigne, et de reconnaître qu'il s'agit là d'une situation des fois désespérée, et qu'il faut trouver des moyens de répondre aux besoins de ces familles victimes de violence le plus rapidement possible.
Mme Caron: Il y aurait sûrement lieu, je pense, de la rendre obligatoire, je pense, cette directive-là. Et est-ce que c'est la même chose pour votre article 23, paragraphe 5° , qui permet, lorsque déjà une personne a un loyer à prix modique, si sa santé et sa sécurité est en danger, d'être relogée? Est-ce que c'est seulement un certain nombre d'offices municipaux qui le font ou si c'est obligatoire pour l'ensemble des offices?
M. Cliche (Pierre): La consigne existe pour l'ensemble des offices, mais je n'ai pas vérifié jusqu'à quel point le traitement qui en est fait dans tous les offices était comparable à celui de l'office de Montréal. Le temps qui nous a été octroyé pour préparer notre mémoire ne nous a pas permis une très longue vérification à ce niveau-là, mais je sais, pour avoir parlé à Québec, qu'ils font la même chose. Je n'ai pas parlé à Saguenay, je n'ai pas parlé à Longueuil, je n'ai pas parlé à Laval, mais je sais que Québec et Montréal ont la même pratique.
Mme Caron: Je souhaiterais qu'on le fasse, la vérification, pour l'ensemble des offices parce que la violence conjugale, ce n'est pas seulement à Montréal ou à Québec, c'est dans toutes les régions du Québec. et je pense qu'il faut qu'on puisse appliquer, là, le même soutien puis les mêmes directives partout. Je vous remercie.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, Mme la députée. M. le député de Mercier.
M. Bédard: J'aimerais peut-être... Pour compléter ce que ma collègue disait, on aimerait bien avoir la liste effectivement, qu'elle soit déposée à la commission, de ceux qui ne l'appliquent pas.
M. Cliche (Pierre): Ceux qui ne l'appliquent pas?
M. Bédard: Pour les deux articles, oui. Bah! ceux qui l'appliquent, on va les féliciter.
M. Cliche (Pierre): Sur les 545 offices.
M. Bédard: Oui, oui. C'est une liste informatisée, j'imagine.
M. Cliche (Pierre): Non. On va prendre contact avec chacun d'entre eux pour savoir quelle application ils en font.
Le Président (M. Descoteaux): Donc, la liste va être communiquée à la commission.
M. Cliche (Pierre): Aussitôt que l'information sera colligée, il nous fera plaisir de vous la transmettre.
M. Bédard: On ne vous demande pas l'impossible, mais, si vous êtes capable de recueillir 99,9, on ne vous en voudra pas s'il vous en manque quelques-uns.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cliche (Pierre): 99,7 peut-être.
Une voix: 99,9, c'est très près de la perfection.
M. Bédard: C'est une obligation de moyens, pas de résultat, M. Cliche.
M. Cliche (Pierre): On va faire en sorte de répondre rapidement à cette demande-là.
M. Bédard: Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. Cliche. M. le député de Mercier.
M. Turp: Écoutez, rendre ces directives obligatoires, là, ça, je l'imagine, contribuerait à la mise en oeuvre d'un plan d'action gouvernemental en matière de violence conjugale. À ma connaissance, la SHQ, c'est un organisme d'État, et je pense que cette mesure contribuerait à mettre en oeuvre le plan d'action pour que ce ne soit plus seulement de la nature d'un souhait et que ça s'applique ailleurs qu'à Montréal et à Québec, et ailleurs que ça s'applique.
Alors, je veux juste faire une remarque aux gens de la commission parce que, en examinant la jurisprudence d'application de l'article 1661, qui est l'article du Code civil du Bas-Canada, là, qu'a remplacé 1974, c'est vraiment intéressant. Il y a une décision de la Cour du Québec de 1994, Penta contre Edwig, qui dit ceci... En tout cas, les résumés dans Beaudoin Renaud, là, le Code civil du Québec annoté: À titre de bénéficiaire d'un logement à prix modique, l'épouse d'un locataire a l'intérêt et la qualité pour demander, en vertu de l'article 1661 ? donc 1974 maintenant ? la résiliation du bail signé par son mari. Alors, ce que ça voudrait dire, si on le transposait à notre cas, c'est qu'une femme victime de violence conjugale n'a pas besoin d'être la locataire pour résilier un bail dans le cas de violence conjugale.
Alors, est-ce qu'on devrait aller jusque-là? Il y a un arrêt de la Cour du Québec qui va jusque-là pour le loyer modique. Est-ce qu'on ne devrait pas aller jusque-là lorsqu'il s'agit de violence conjugale et d'agression sexuelle? Donc, c'est juste vous faire remarquer qu'on protège très, très bien la femme d'une personne qui est locataire lorsqu'on veut lui permettre d'avoir un logement à loyer modique; est-ce qu'on devrait protéger encore mieux la femme d'un locataire lorsque cette personne a été victime de violence conjugale? Il devrait permettre même de résilier le bail du mari qui est celui qui fait la violence conjugale. En tout cas, c'était juste une remarque, je soumets ça à votre attention, M. le ministre, là.
M. Marcoux: 1661, dans mon cours de droit, moi, c'était l'article 1661.
M. Turp: Mais vous voyez comment il est interprété, là.
Le Président (M. Descoteaux): M. le député de Mercier, le temps est presque écoulé. M. le député de Dubuc avait une question.
M. Côté: Oui, j'avais une courte question, c'était tout simplement une question de précision. C'est que ? ça touche un petit peu ce que le député de Mercier vient de mentionner ? lorsque le bail est signé seulement par le mari, par exemple, et que la femme dans le logement à loyer modique subit de la violence et qu'elle demande la résiliation du bail, même si elle ne l'a pas signé, elle demande de s'en aller, est-ce que vous lui accordez les mêmes droits, même si elle n'était pas signataire du bail? Est-ce que votre fameux, là... directives de gestion, les directives que vous avez pour qu'elle se qualifie s'appliquent, même si elle n'était pas signataire du bail antérieurement?
M. Cliche (Pierre): Oui, parce que notre règlement dit que c'est un demandeur et non un locataire. Si la femme le demande parce qu'elle est victime, qu'elle veut se soustraire, elle et ses enfants, à la violence, on va lui trouver rapidement un logement, indépendamment du fait que ce soit elle ou pas qui a signé le bail.
M. Côté: C'est beau. Si elle ne demande pas la résiliation du bail mais qu'elle demande d'avoir un nouveau logement tout simplement, qu'est-ce que vous faites avec le mari qui est responsable de la violence? Est-ce que vous le gardez comme locataire ou...
M. Cliche (Pierre): Si sa situation, en termes de revenus, continue de le qualifier pour occuper un logement, on va faire en sorte que cette personne-là occupe un logement d'une taille qui est liée à ses besoins. Alors, si cette personne-là avait un bail pour un logement de cinq pièces et demie et qu'elle devient seule mais continue d'être admissible en fonction de notre règlement, on va lui trouver un une pièce et demie.
Mais, encore une fois, dans ces situations-là, je voudrais signaler... Si vous permettez, Me Bellefeuille pourrait peut-être donner l'interprétation que nous donnons à l'arrêt qui a été mentionné tout à l'heure par le député.
M. Descoteaux: Vous pouvez faire très brièvement, le temps est écoulé.
M. Bellefeuille (Alain): Oui, je vais y aller brièvement. M. le député de Mercier, j'ai devant moi l'arrêt Penta contre Edwig puis, en fait, là-dedans, ce qu'on disait, c'est plutôt que la dame qui habite avec le locataire et qui, elle, est admissible à un logement à loyer modique, a l'intérêt de demander la résiliation. Mais, dans le cas de la violence conjugale, ce serait plutôt inutile parce qu'elle n'est pas locataire de toute façon, dans le cas où elle n'a pas signé le bail, elle n'est pas locataire, elle peut partir quand elle veut. C'est dans le cas où elle est signataire du bail que, là, ça prend un motif pour la faire quitter, la soustraire à son obligation.
M. Turp: Je me demandais s'il y aurait peut-être une circonstance dans laquelle ce serait justifié, même, de demander la résiliation du bail du mari, peut-être qu'il y en aurait une pour protéger la femme de la violence conjugale.
M. Descoteaux: M. le ministre, donc.
n
(17 heures)
n
M. Marcoux: Oui, M. le Président, tout en réfléchissant sur la suggestion du député de Mercier, j'avais une question à poser et qui s'en allait un peu de pair avec ça, que le député de Chicoutimi a posée. À Montréal, quand vous parliez qu'il y a à peu près 20 000 logements à loyer modique et vous dites qu'il y en a eu 150 personnes à peu près, là, qui en fait, ils ont fait une demande, mais c'était à l'intérieur du parc de logements à loyer modique, si je comprends? Ce ne sont pas, ces 150 là, des personnes ? en tout cas, elles ne seraient pas comprises là-dedans ? qui occupaient un loyer ailleurs et qui ont fait une demande d'occupation d'un loyer à logement modique. Est-ce que c'est exact?
M. Cliche (Pierre): C'est des demandeurs de logements HLM, donc ils proviennent du marché locatif privé.
M. Marcoux: Ah, bon! O.K. J'avais... Ah, bon. O.K. Parfait. Ça répond à ma question. Je n'avais pas saisi.
Le Président (M. Descoteaux): Oui, M. Cliche.
M. Cliche (Pierre): ...signaler que l'écart entre les obligations que fait notre règlement dans le traitement de ces situations-là et les normes administratives que nous appliquons dans l'ensemble du réseau, cet écart-là, nous en sommes conscients. Notre règlement d'attribution est en révision. On est en consultation avec l'ensemble des partenaires concernés par ce règlement-là, et c'est une des dimensions qui est abordée dans nos discussions quant à la révision du règlement.
Alors, un jour prochain, le gouvernement sera saisi d'une nouvelle version de ce règlement d'attribution qui comprendra un certain nombre de modifications, et peut-être celles que vous souhaitez.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, messieurs. La commission va suspendre, quelques minutes, ses travaux.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 8)
Le Président (M. Descoteaux): La commission reprend ses travaux.
Remarques finales
M. le porte-parole de l'opposition officielle, pour vos remarques finales.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Je suis content que vous respectiez l'ordre normal, M. le Président. Le président de la commission a pris la méchante habitude de me faire parler en dernier, ce qui n'est pas la bonne chose. Donc, malgré le peu d'expérience que vous avez par rapport au député de Richelieu, vous faites les choses dans l'ordre, donc j'en suis fort heureux.
Le Président (M. Descoteaux): C'est parce que j'étais présent lors de vos commentaires.
M. Bédard: Ah! O.K. lorsque je l'ai fait. Parfait. Alors, vous dire d'abord: très heureux de cette belle journée, il faut le dire, une journée qui... on connaît toute son importance au Québec maintenant, mais qui nous a permis, pour un projet de loi sur lequel, des deux côtés, on s'entendait sur le principe. Et nous avions dit, là, d'ailleurs, lors de l'étude du principe du projet de loi, que nous souhaitions d'ailleurs ces consultations dans le but de bonifier et d'améliorer le projet de loi, donc les représentations que nous avons eues sont allées dans ce sens. Et c'est pour ça que je suis fort heureux de cette journée tant en termes de sensibilisation de cette réalité vécue par celles qui sont victimes et surtout celles qui interviennent auprès de ces victimes. Nous en avons tous et toutes dans nos comtés, M. le Président, et savons à quel point c'est des ressources dont l'utilité est extraordinaire donc et qui sont dédiées... C'est ce qui fait en sorte que ces gens, par leur dévouement, contribuent à alléger les difficultés vécues par ces victimes.
n
(17 h 10)
n
Quant à nous, c'est de s'assurer que le projet de loi corresponde aux attentes qui nous ont été mentionnées. Donc, je retiens des éléments importants les délais. Je pense que ça demande une réflexion tant au niveau du délai de résiliation qu'au niveau du délai pour lequel le responsable de l'attestation doit avoir pour rendre sa délivrance, le délai aussi quant à l'adoption. Mais j'ai compris que le ministre avait aussi ouvert la porte à l'idée de créer ce comité qui permettra une mise en oeuvre qui correspondra aux attentes des groupes, et nous souscrivons à cette façon de faire. Mais, en même temps, ce que nous proposons au ministre, c'est d'inclure, dans le projet de loi, une date, donc une date butoir qui mettra fin aux négociations, entre guillemets, et qui assurera la mise en vigueur de la loi à une date fixe, et je crois que la date du 1er avril nous convient et, sans convenir à tous les groupes... donc ça, j'en suis fort heureux.
Autre amendement que nous souhaiterions voir apporter évidemment, c'est la possibilité d'inclure, dans le projet de loi, un délai de deux ans au cours duquel un rapport sera confectionné pour voir quelle est l'application. Est-ce que les buts qui ont été évoqués lors du principe ont été rencontrés? Est-ce qu'il y a lieu d'apporter d'autres modifications? Et, pour avoir discuté rapidement avec le ministre après, j'ai compris qu'il était tout à fait ouvert à cette possibilité. Elle peut faire l'objet d'une clause crépusculaire dans le projet de loi parce que ce n'est pas un rapport à tous les deux ans, mais un rapport après deux ans qui permettra de voir si les objectifs ont été atteints.
Autre élément de réflexion du ministre quant à qui devra payer. Je pense que c'est une question tout à fait légitime et j'ai compris que le ministre avait convenu d'aller de l'avant, j'en suis fort heureux, pour permettre l'ouverture au niveau de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Donc... Et ça, ça fera en sorte, je pense, que tout le monde serait gagnant finalement et que tous seraient disposés même à aller de l'avant. Et j'en prends pour preuve d'ailleurs même l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal qui nous ont écrit pour nous dire qu'ils étaient même prêts à la limite à raccourcir le délai, mais au moins à s'assurer que la responsabilité monétaire échouait à l'IVAC, du moins en partie. Et je prends aussi pour acquis les représentations qui nous ont été faites quant à l'application de cet article, à l'effet qu'on ne peut pas non plus faire en sorte que le paiement se fasse au-delà de la disponibilité du loyer, donc n'ait pas de paiement de l'indu lorsqu'il y a résiliation du bail dans les délais de trois mois.
Et je tiens à assurer le ministre, après discussion, on a convenu, je pense, de remettre... pas de remettre, mais d'attendre peut-être quelques jours afin de procéder à l'adoption finale, donc du... à l'étude, plutôt, article par article, de façon à ce que les amendements correspondent aux représentations qui nous ont été faites. Donc, je souscris à cette approche, j'en suis fort heureux, et je dis au ministre que nous serons prêts à procéder selon les convenances, là. Je pense que notre agenda législatif nous permet de prendre cette latitude aujourd'hui et que nous serons disponibles pour procéder à l'adoption finale le plus rapidement possible, après que les amendements et les possibilités d'amendements aient été évalués à leur juste mérite. Et il restera aussi... ça nous permettra de réfléchir sur... bien que ça fasse plus partie de la politique de qui sera en charge de cette responsabilité. Donc, nous aurons peut-être des suggestions aussi à apporter étant donné que le député de Mercier est parmi nous. Alors ça, normalement, ça nous garantit presque, M. le Président, d'avoir vraiment un éclairage... et la lumière jaillit souvent du député de Mercier. Donc, on va lui faire confiance encore sur cette question.
Et, en terminant aussi, strictement quant au délai d'application... pas au délai d'application, le délai de la délivrance, bien qu'il ne soit pas inclus au projet de loi actuel mais plutôt dans l'indication quant à un délai de diligence ou inclus dans la politique, je pense qu'il y a lieu de réfléchir à la possibilité de l'inclure dans le projet de loi et d'en faire un délai de rigueur pour s'assurer d'une application dans le temps rapide. Et je pense que c'est la meilleure façon de s'assurer que les délais sont respectés et qu'on ait une indication très claire de cette application, sans faire appel à un des concepts plus flous que je connais bien, celui de la diligence. Et donc on rejoindrait les objectifs du principe du projet de loi et aussi des commentaires que nous avons eus de l'ensemble des groupes.
Alors merci, M. le Président, et j'ai bien hâte de vous revoir sur ce projet de loi.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député de Chicoutimi.
Mémoire déposé
Avant de vous céder la parole, M. le député de Mercier, j'aurais besoin du consentement de la commission pour que le document, qui nous a été transmis par l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal, soit considéré comme un mémoire et soit déposé à cette fin devant la commission. Ça va? consentement? Merci.
Remarques finales (suite)
M. Bédard: Peut-être, M. le Président...
Le Président (M. Descoteaux): Oui.
M. Bédard: ...peut-être par le ministre aussi, il y avait en réflexion aussi conjoints et anciens conjoints, par rapport à ce qui nous a été représenté qui demande réflexion, là. On parlait d'amoureux; le sens de conjoint ne rejoint pas tellement, au niveau juridique, celui d'amoureux, ou de... non, mais où on a des liens, vous savez...
Une voix: Les conjoints ne sont pas toujours amoureux.
M. Bédard: Non, c'est ça. En termes juridiques...
Une voix: Pas toujours. Ça dépend des jours.
M. Bédard: ...il n'y a pas...
M. Marcoux: On ne demandera pas de détail.
M. Bédard: ...ce n'est pas une adéquation immédiate, surtout pour les nouveaux... ce qu'on... les nouvelles relations. Quand on parle d'amoureux, c'est des nouvelles relations. Alors, avant d'être un conjoint, vous savez, on a différentes étapes. M. le ministre, lui, est avec une conjointe depuis très longtemps, donc peut-être qu'il ne se souvient plus de toutes ces étapes...
M. Marcoux: Ça fait seulement 40 ans.
M. Bédard: ...mais on sait qu'on parle d'alliés, après ça, ça évolue jusqu'à, finalement, conjoints. Alors, peut-être qu'il y a lieu de préciser, en termes juridiques, l'aspect «conjoint», qui ne rejoint pas la réalité qui nous a été représentée par ceux et celles qui sont venus témoigner aujourd'hui. Merci.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député de Chicoutimi. M. le député de Mercier, vous avez quelques mots.
M. Daniel Turp
M. Turp: M. le ministre, juste une suggestion que j'ai faite ce matin, c'est que la sécurité est celle d'un enfant. Vous vous rappelez que j'avais suggéré peut-être qu'enfant c'était un peu trop restrictif à cause de ces familles plurielles, là. J'ai vu que dans le rapport, le plan d'action gouvernemental, c'est aussi sécurité de son enfant, mais j'aimerais ça que vous réfléchissiez à ouvrir cela. Ça pourrait tout simplement... «ou celle d'une personne qui habite avec lui est menacée», puis là ça pourrait inclure la mère ou la soeur. Et c'est un peu restrictif, je trouve, et nos familles sont différentes et plurielles aujourd'hui, et leur sécurité peut être menacée par quelqu'un qui fait de la violence conjugale ou des agressions.
Mais j'ai une suggestion assez technique, peut-être que ça devrait être un article distinct, 1974.1, parce qu'on l'inclut dans 1974 avec le loyer modique, avec le handicap, avec la situation de personne âgée, et j'ai le sentiment que, pour donner aussi de l'importance à la question, il ne faudrait pas nécessairement assimiler la question de la violence conjugale et de l'agression aux autres conditions ou contextes qui donnent la possibilité de résilier un bail. Alors, j'ai vérifié avec le Code civil, je pensais que ce n'était pas le cas, là, mais on a des articles 521.1 et suivants, et peut-être que ce serait mieux qu'on ajoute au Code civil un article distinct pour couvrir ce cas. Et il y a d'autres articles qui justifient la résiliation du bail, il y a une série d'articles dans ce chapitre du Code civil concernant la résiliation du bail, et je vous invite à réfléchir sur l'idée de prendre les amendements que vous voulez faire à 1974 et d'en faire plutôt un nouvel article 1974.1 qui est limité aux cas de la violence conjugale et de l'agression sexuelle.
Le Président (M. Descoteaux): Merci, M. le député. Mme la députée de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Oui, merci, M. le Président. Très brièvement, je souhaiterais qu'au moment où nous allons étudier le projet article par article le ministre puisse nous informer de la composition du comité de travail. Il y a eu plusieurs représentations au niveau des personnes, des organismes qui devraient se retrouver sur ce comité de travail là. Alors, je souhaite qu'on puisse avoir la liste que le ministre... les groupes avec qui il souhaite travailler. Et je rappelle que je souhaiterais, à cause de différents organismes, que s'ajoute également le Secrétariat à la condition féminine.
Le Président (M. Descoteaux): Merci bien, Mme la députée. M. le ministre.
M. Yvon Marcoux
M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Bien, je dois vous dire que, moi, je suis très, très heureux de la journée que nous avons passée et également des représentations qui ont été faites devant la commission parlementaire. Et nous disions, avant de commencer la commission, je pense que c'est une coïncidence, ce n'était pas prévu, mais que cette discussion-là se fasse alors que nous commémorons aujourd'hui, c'est un triste anniversaire évidemment, la mort tragique de 14 jeunes étudiantes de la Polytechnique il y a 16 ans. Et je pense que c'est assez... en tout cas, je trouve que maintenant c'est un contexte là qui est certainement... qui nous rapproche en tout cas de la discussion que nous avons eue aujourd'hui, et aussi qu'on termine dans le fond... Je pense qu'il y a deux semaines les journées d'action contre la violence faite aux femmes, qui découlent d'une initiative de l'AFEAS, je pense que c'était l'AFEAS de... je ne me souviens pas de quel endroit, là... oui, toutes, mais la première avec le ruban, là, donc je me demande si ce n'était pas de la région des Laurentides. Alors, je pense que c'est vraiment un contexte qui nous est favorable en tout cas pour discuter d'un sujet comme celui d'aujourd'hui.
n
(17 h 20)
n
Je vais reprendre certains éléments qui ont été évoqués aussi par le député de Chicoutimi et d'autres collègues de la commission parlementaire. Donc, il y a la question du délai, trois mois ou d'un mois, d'avis pour la résiliation d'un bail qui a été soulevée; question de délai aussi en termes d'analyse du cas pour fournir l'attestation requise. Et ça, je comprends très bien que c'est important. Nous avions parlé de diligence. En tout cas, on verra, là, si on doit l'inclure dans la loi, mais je pense que ça, tout le monde est bien conscient ? en tout cas je le suis, moi ? de l'importance que ça puisse être fait rapidement. Être bien fait cependant. Je pense qu'il faut que ce soit fait rigoureusement mais rapidement.
Il y a aussi, je dirais, la portée de l'article en termes de violence conjugale, parce qu'on parle de violence conjugale, de violence familiale. Donc, ce sont des concepts différents. Et, quand je parle de portée, notamment pour ce qui est de la violence, de l'étendre, là, la suggestion, le commentaire qui a été fait, de façon plus large que seulement un conjoint ou ex-conjoint, donc ça, on va en reparler, on va y réfléchir.
L'aspect de la désignation d'un officier. Et ça, je suis ouvert aux suggestions, je vous le dis, parce que ce n'est pas évident à trouver. Donc, on va le faire ensemble.
L'aspect aussi de l'évaluation après une période de deux ans, ce qu'on retrouve dans certaines autres lois: une disposition transitoire qui permet une évaluation d'une initiative qui est prise, une nouvelle mesure qui est mise en oeuvre. Je pense que c'est tout à fait approprié de vouloir le faire, et ça, je suis ouvert. On verra comment on peut le mieux le proposer.
L'aspect de la composition du comité de travail, on va le discuter avec les personnes concernées. Donc, est-ce qu'on aura la composition finale? Je ne le sais pas, mais je peux vous dire, moi, que, comme la consultation s'est faite aussi avant avec les groupes qui sont des intervenants, on va faire la même chose. Je pense que l'objectif, c'est que ça puisse, une fois que c'est en oeuvre, s'appliquer correctement. Alors, c'est l'objectif que nous poursuivons tous.
Pour ce qui est de l'IVAC, et je voulais y revenir, je pense que c'est important, ce que j'ai indiqué, c'est que, oui, je voulais proposer des avenues de changement à l'IVAC. C'est clair qu'on ne réglera pas ça pour le 1er avril 2006, là, final. Je pense que ça va prendre une discussion aussi. Mais en tout cas c'est le défi, là, que nous nous sommes lancé, d'en arriver avec des propositions qui permettront d'ajuster le régime, qui date de 1972. Donc, il y a des contextes, aujourd'hui, qui sont différents. Il y a peut-être des choses qui existaient dans le temps qui ont changé. Donc, il va y avoir... Nécessairement, il faut y apporter des ajustements. Alors, je pense que, M. le Président, ça fait le tour des principaux éléments.
D'abord, je voudrais remercier les membres de la commission pour leur participation active aujourd'hui. Je pense que c'est un sujet qui justement suscitait vraiment l'intérêt, parce que chacun des membres de la commission a participé aux discussions avec les groupes qui se sont présentés devant nous. Alors, ça témoigne, je pense, de la préoccupation que tous les membres de la commission ont à cet égard-là et de l'importance du sujet, de la question.
Alors, nous allons revenir à un moment approprié. Je suis heureux de voir que tous les membres de la commission sont d'accord sur le principe, et ça, le député de Chicoutimi l'a indiqué lors de l'adoption en deuxième lecture, là. Donc, on les remercie pour ça. Et c'est de trouver la meilleure façon maintenant d'apporter certaines modifications suite aux commentaires et aux présentations qui ont été faits, là, pour avoir le meilleur projet de loi qu'on peut trouver, là, pour... Je pense que c'est quand même un pas important. Ce n'est pas idéal, ça ne couvre pas tout, mais je pense que c'est un premier pas important et qui est significatif. Tout ce qui touche la violence conjugale faite aux femmes, aux enfants et les cas d'agression sexuelle. Alors, merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Descoteaux): Si vous me permettez, M. le ministre, de me joindre à vos paroles ainsi qu'à celles du député de Chicoutimi. Tout pas législatif qui permet justement de favoriser le bien-être et les droits des personnes les plus vulnérables, c'est un grand pas. Donc, je suis très fier d'avoir présidé cette commission aujourd'hui, où on est arrivé à ce consensus.
Puisque notre mandat, puisque le mandat de la commission de procéder à des consultations particulières est complété, nous ajournons donc les travaux sine die. Je comprends que l'étude article par article se fera ultérieurement. Merci bien.
(Fin de la séance à 17 h 26)