(Quinze heures quatre minutes)
La Présidente (Mme Thériault): Nous avons le quorum. Nous allons débuter les travaux. Je déclare donc la séance ouverte.
Consultations particulières
sur le projet de loi n° 50
Et j'aimerais rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives eu égard au statut des juges de paix.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Gabias (Trois-Rivières) est remplacé par M. Morin (Montmagny-L'Islet) et M. Létourneau (Ungava) est remplacé par M. Bédard (Chicoutimi).
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, l'ordre du jour: aujourd'hui, nous débuterons par les remarques préliminaires. Par la suite, nous entendrons le Barreau du Québec et, à la suite des échanges, nous procéderons à l'étude détaillée du projet de loi, pour ajourner à 18 heures.
Remarques préliminaires
Donc, sans plus tarder, M. le ministre, la parole est à vous, pour vos déclarations.
M. Jacques P. Dupuis
M. Dupuis: Oui. Mes remarques préliminaires vont être brèves, Mme la Présidente. D'abord, je me permettrai, puisque les gens du Barreau sont présents, de saluer mon bon ami Pierre Gagnon, M. la bâtonnier sortant ? malheureusement ? mais je suis certain qu'on aura l'occasion d'avoir de nombreuses rencontres à l'avenir encore, mon bon ami Denis Mondor, bâtonnier entrant. Je dis «mon bon ami» parce qu'en plus on a la même vocation: il exerce en droit criminel, Denis Mondor, particulièrement en défense, et j'ai commencé ma carrière en défense. Alors, bienvenue en commission parlementaire. Madame, bienvenue aussi.
M. Turp: C'est une vocation?
M. Dupuis: Oui, c'est une vocation. On vous expliquera ça au cours de l'étude article par article, M. le député de Mercier. Je veux saluer bien sûr le député de Mercier, comme je viens de le faire, et le député de Chicoutimi, de même que la recherchiste de l'opposition, le député de Groulx, le député de Montmagny, le député de Marguerite-D'Youville qui est l'adjoint parlementaire du ministre, M. Jacques Mercier, Mme Julienne Pelletier, M. Breton, procureur de la couronne, M. Michel, procureur de la couronne aussi, M. Lauzier et le député de l'Acadie... qui est où, donc?
Une voix: Il vient de nous quitter temporairement.
M. Dupuis: Je pense qu'au niveau des remarques préliminaires on peut... Moi, je veux entendre le Barreau rapidement. Je veux dire que... Nous savons tous pourquoi nous sommes ici. Le projet de loi n° 50 bien sûr fait suite d'abord à un jugement de la Cour suprême du Canada, un jugement qui originait de la Cour d'appel d'Alberta, le jugement Ell, qui a traité du principe d'indépendance de certains fonctionnaires qui exerçaient des fonctions judiciaires et des critères que leur nomination devrait revêtir pour que ces gens-là puissent accomplir les actes qu'ils accomplissent. Le projet de loi, bien sûr, fait suite à ces deux jugements et cherche bien sûr à rencontrer les exigences constitutionnelles qui avaient été établies dans l'arrêt Ell de même que suivies par la Cour d'appel du Québec dans l'arrêt Pomerleau en ce qui concerne les principes constitutionnels.
Je veux dire tout de suite qu'il sera fait mention ? en tout cas en ce qui me concerne ? au cours de l'étude article par article non seulement des représentations, parce que nous aurons l'occasion de discuter avec les membres, avec le bâtonnier... avec les bâtonniers ? permettez-moi l'expression ? puisque nous aurons l'occasion de discuter un petit peu plus tard avec les bâtonniers représentant le Barreau du Québec sur des représentations qu'ils vont nous faire verbalement, mais qu'ils ont eu la gentillesse de nous proposer par écrit.
Mais j'aurai aussi l'occasion, si vous me le permettez, de traiter d'un certain nombre de représentations aussi qui nous ont été faites par l'Association des avocats de défense qui m'ont fait parvenir une communication écrite. Je pourrai vous la fournir, Me Gagnon, si vous voulez. On pourrait la fournir peut-être à Me Gagnon, la lettre qui a été déposée par l'Association des avocats de défense, de même que ? vous en avez eu... en avez-vous eu une copie? ? des représentations qui ont été faites par le président du Conseil de la magistrature, le juge en chef de la Cour du Québec, le juge Gagnon, de même qu'une lettre du juge en chef de la Cour d'appel... le juge Gagnon qui a fait certaines représentations en ce qui concerne le projet de loi n° 50.
Je ferai référence aussi à l'occasion à une résolution qui a été déposée par le Barreau du Bas-Saint-Laurent?Gaspésie?Les Îles sur des représentations particulières, en fait simplement pour qu'on puisse regarder, là, un certain nombre de problèmes qui sont soulevés par ces gens qui nous ont fait des représentations. Mais, à peu près essentiellement, il s'agit évidemment d'une différence d'opinions, entre les gens qui vont nous faire des représentations et le projet de loi qui est déposé, sur le pouvoir des juges de paix magistrats en ce qui concerne l'enquête sur remise en liberté contestée. Le Barreau, l'Association des avocats de défense et le juge en chef nous feront les mêmes représentations à ce sujet-là et un certain nombre d'autres représentations auxquelles on fera référence.
Alors, moi, comme j'ai la réputation, et que j'essaie de la maintenir, d'être le plus efficace possible, moi, je serais prêt, après que le député de Chicoutimi ait fait ses remarques préliminaires, à entreprendre l'écoute attentive des représentants du Barreau.
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(15 h 10)
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La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. M. le député de Chicoutimi, représentant du... porte-parole officiel en matière de justice.
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: Merci, Mme la Présidente. Alors, heureux de me retrouver parmi vous encore pour un important projet de loi, parce qu'il touche des domaines qui sont au coeur même, je dirais, de notre ordre judiciaire, soit l'indépendance, soit son indépendance, d'où, je vous dirais, la précaution que nous aurons dans l'étude du projet de loi, d'où aussi la demande que j'ai faite au ministre d'entendre différents groupes, évidemment dont le Barreau et dont l'Association des avocats de province, pour avoir, je vous dirais, un oeil et surtout un éclairage de gens très compétents dans le domaine, ayant voué... Moi-même, n'étant pas un grand spécialiste dans le domaine du droit criminel mais connaissant ses bases, j'ai souhaité cet éclairage.
Je tiens aussi, bon, évidemment, à saluer tous les membres de cette commission: vous, Mme la Présidente, en premier, pour bien mener nos travaux, mon collègue aussi. J'ai souhaité la présence, mais évidemment il vient toujours mais... mon collègue de Mercier, vu aussi son souci quant aux textes législatifs et aux bons choix, tant au niveau des vocabulaires mais aussi et surtout dans l'application des différentes lois. Donc, on a eu à travailler ensemble dans divers projets de loi avec beaucoup de bonheur, pas notre bonheur personnel, mais pour une gradation de, je pense, de l'amélioration, contribuer à l'amélioration des projets de loi. Remercier le ministre, aussi ceux qui l'accompagnent, les juristes de l'État qui nous font valoir certaines de leurs problématiques actuelles auxquelles nous compatissons, les remercier de leur collaboration ainsi que ceux qui accompagnent le ministre.
On a eu l'occasion d'avoir des discussions avec... avoir un briefing, alors ? en termes français ? je vous dirais, de la part du cabinet donc, qui nous a permis en même temps, dès le départ, d'indiquer au ministre les éléments sur lesquels nous avions des réticences. Et c'est sans surprise d'ailleurs qu'on les retrouve même, là, sans avoir discuté avec les gens du Barreau, principalement au niveau de la régionalisation, les impacts que cela pourrait avoir sur la justice en région.
Dès que j'ai eu à regarder les fondements du projet de loi, sur les textes en tant que tels et, je vous dirais, ce qu'ils visent, nous sommes très ouverts et nous pensons effectivement que, dans l'ensemble, il correspond à ce que le ministre doit faire pour corriger ce qui faisait ombrage et ce qui contrevenait à la règle de l'indépendance dans les jugements Bell et Pomerleau surtout.
Donc, sur les principes, nous sommes d'accord. Bien que nous aurons à l'étude, là, quelques questions et peut-être même quelques ajustements à apporter, il reste que, sur le fond, je crois que nous aurons des discussions fructueuses et que tout devrait bien se dérouler.
Et, quant à la régionalisation, nous avisons tout de suite le ministre évidemment que les dispositions nous laissent songeurs, et à cela s'ajoutent les commentaires que nous avons reçus, tant du Barreau que de l'Association des avocats de province, qui nous amènent à croire que cette précaution que nous avons est justifiée dû entre autres au nombre assez limité de personnes qui vont être maintenant juges magistrats, juges de paix magistrats. On parle d'environ... seulement de 30 personnes sur tout le territoire du Québec donc et de l'importance d'avoir cette justice de proximité. Autrement dit, que ceux et celles qui sont appelés, dans des procédures parfois contestées, à se retrouver devant ces juges de paix magistrats, qu'ils puissent bénéficier de la même qualité de justice. Selon nous, cette qualité implique, dans la plupart des cas, que la présence de visu, donc sur place et non par des moyens électroniques, soit privilégiée.
Donc, nous considérons que, oui, la justice doit utiliser ces moyens du mieux qu'elle le peut pour rendre justement cette justice plus accessible, mais dans des procédures contestées qui pourraient appeler le juge, le juge de paix dans ce cas-ci, ou le juge tout court, juge de la Cour du Québec, à déterminer, je vous dirais... la crédibilité même par rapport aux argumentaires peut influer sur la qualité de la justice.
Donc, nous avons beaucoup de... nous aurons beaucoup de précautions, nous questionnerons beaucoup, nous profiterons de l'expertise des gens qui sont ici, aujourd'hui pour nous éclairer à ce niveau-là, d'autant plus qu'on me dit que le futur bâtonnier est aussi... donc est un praticien dans le domaine du droit criminel, donc nous avons l'avantage de bénéficier de ses conseils à un tarif très réduit. Alors, ça nous fera plaisir d'avoir ses éclairages. Et, si vous avez une facture à produire, M. le prochain bâtonnier, vous l'enverrez directement au ministère de la Justice ou à son adjoint parlementaire. Alors, heureux d'accueillir...
M. Gagnon (Pierre): ...déjà suggéré de vous assurer. Ça vous prend des assurances juridiques à un moment donné, là. Vous auriez pu avoir tout ça gratuitement.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bédard: Oui. Alors, je ne veux pas être plus long, et en souhaitant, et sans le moindre doute d'ailleurs, que ces travaux se passeront dans une ambiance excellente et que notre but est de collaborer. Nous avons pris le principe du projet de loi, nous conservons, après avoir étudié et bénéficié de l'éclairage des gens du ministère de la Justice et des différents mémoires... de cet appui sur le principe, avec les bémols que nous avons mentionnés.
Alors, souhaitons que les travaux que nous aurons, aujourd'hui et pendant la semaine prochaine, seront profitables et feront en sorte que la législation correspondra aux attentes que le ministre expose et que nous, membres de l'opposition, avons aussi. Alors, Mme la Présidente, je vous cède la parole.
Auditions
Barreau du Québec
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Chicoutimi. Me Gagnon, puisque vous êtes un habitué de nos... Excusez-moi, M. le bâtonnier, M. Gagnon, puisque vous êtes un habitué de notre commission, avant que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent, j'aimerais tout simplement vous préciser que nous devrions être appelés sous peu à avoir un vote. Donc, malheureusement, nous allons fort probablement suspendre les travaux de la commission. Allez-y, la parole est à vous.
M. Gagnon (Pierre): D'accord. Alors, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, nous vous remercions de nous avoir permis de faire des représentations du Barreau du Québec. Je suis accompagné, comme vous l'avez mentionné, du vice-président et qui maintenant se trouve à être le bâtonnier élu qui prendra la succession à notre congrès qui aura lieu la semaine prochaine, en passant, ici, à Québec. Et, à ce moment-là, Me Mondor qui est effectivement un criminaliste, qui, bien qu'il n'a pas exercé depuis un an, je pense qu'il connaît encore assez bien son droit criminel, nous sera d'une aide précieuse. Et je suis accompagné également de Me Renée Lemoine. Renée Lemoine est la présidente de l'Association des avocats et avocates de province. Elle est elle-même une praticienne qui fait plus que 50 % de sa pratique dans le domaine du droit criminel, en Abitibi. Donc, j'ai pensé que ce serait d'une aide précieuse qu'elle soit ici, avec nous, parce qu'elle est vraiment au fait des situations des régions et en même temps elle nous apportera le support et la position de son Association qui est vraiment intéressée au premier chef, vu les questions de régionalisation dans ce dossier-là.
Alors, notre présentation que vous avez eue par écrit... donc je ne relirai pas tout ça. Et j'ai eu le loisir de lire rapidement, là, le texte de l'Association des avocats de défense. Naturellement, Jean-Claude Dubé était sur notre comité et signataire de notre rapport à nous, et je vois de dangereuses similitudes d'un texte à l'autre. Naturellement, il est de ceux qui ont reçu deux, trois projets de notre texte et on voit bien que ça a été bâti parallèlement, mais je suis content de voir qu'il n'y a pas de distinctions sensibles.
M. Moreau: ...
M. Gagnon (Pierre): Pardon?
M. Moreau: Aviez-vous enregistré le droit d'auteur?
M. Gagnon (Pierre): On ne l'avait pas enregistré, mais on est bien généreux de nos conseils, vous le savez. On est venus souvent les prodiguer ici, alors... Non, blague à part, ce que ça signifie, ce qui est bien finalement, c'est que l'Association des avocats et avocates de défense ? et Me Lemoine va vous le confirmer tout à l'heure ? aussi l'Association des avocats et avocates de province sont tous d'accord avec les représentations que nous allons faire, si ça peut vous indiquer qu'on a une belle unanimité entre nous, là, sur les solutions que nous allons vous proposer.
Alors, les remarques seront faites dans deux blocs, si on veut: une première partie, qui seront les remarques générales, est vraiment axée sur la question des problèmes de régionalisation, et, deuxièmement, je ferai des remarques au sujet de cinq articles précis du projet de loi.
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(15 h 20)
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Alors, sur la première partie, je peux dire d'abord que le Barreau se déclare satisfait du projet de loi. Alors, d'emblée, nos comités regroupent un grand nombre d'experts, et je peux vous dire qu'on a eu à notre comité... Il y a une vingtaine de membres qu'on convoque systématiquement lorsqu'on veut traiter d'une question, et je crois qu'il y en a 18 qui se sont présentés à la rencontre. Donc, on avait une véritable diversité et une très, très belle expertise. Et notre comité est clairement d'avis que le projet de loi satisfait là à la problématique soulevée dans Pomerleau. Donc, sur le principe même, le Barreau est d'avis que le projet de loi comme tel fait le travail qu'il a à faire dans le sens de remédier à ce qui avait été soulevé par la Cour d'appel. Cependant, les...
La Présidente (Mme Thériault): Malheureusement, M. le bâtonnier, je me dois de vous interrompre. Nous allons aller en Chambre pour un vote puis nous allons revenir. Donc, je suspends les travaux. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 21)
(Reprise à 15 h 38)
La Présidente (Mme Thériault): Puisque nous avons le quorum, nous allons reprendre la suite des travaux. Donc, M. le bâtonnier, excusez-nous de vous avoir interrompu durant votre intervention. La parole est à vous.
M. Gagnon (Pierre): Merci, Mme la Présidente. Alors, comme je le mentionnais, le Barreau est satisfait du projet de loi dans son ensemble et croit qu'il corrige les lacunes soulignées dans les décisions Ell et surtout Pomerleau. Maintenant, il y a une problématique spécifique pour la justice en région qui fait en sorte que les juges de la Cour du Québec... il y a des endroits où il n'y a pas de juge de la Cour du Québec résidents ou encore que le juge résident doive siéger dans d'autres districts, et, par conséquent, il y a des moments de l'année où il n'y a pas de juge dans certains districts, dans certains centres de services. Alors, avant le 30 janvier, avant Pomerleau, c'étaient les juges de paix qui réglaient ce problème-là, on le sait.
Maintenant, le projet de loi n° 50 malheureusement ne solutionne pas cette problématique parce qu'actuellement le choix qui a été fait, c'est de ne pas accorder aux juges de paix magistrats le pouvoir de présider des enquêtes sur remise en liberté provisoire contestée, de telle sorte que, pour pallier à cette situation, les juges de la Cour du Québec auront de plus en plus recours au téléphone ou à des systèmes de vidéoconférence pour présider à des comparutions ou tenir des enquêtes pour remise en liberté. On me dit qu'il y a même eu des requêtes pour remise en liberté contestée qui se sont faites par téléphone. C'est réellement, là, à l'extrême limite au point de vue de la qualité de la justice qui peut être rendue.
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(15 h 40)
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Alors, le Barreau du Québec considère que les justiciables des régions ont le droit à des services équivalents à ceux du reste de la province. Et les juges, déjà débordés, ne doivent pas être indûment surchargés, de telle sorte que de... Également, procéder fréquemment et systématiquement à des auditions à distance par la technologie du téléphone ou de la vidéoconférence risque de porter atteinte non seulement à l'image, mais aux garanties minimales d'une audition juste et équitable. Ce sont des techniques qui doivent quand même demeurer des choses plutôt exceptionnelles. On sait que l'absence d'un contact visuel atténue sensiblement la capacité d'apprécier la preuve et notamment la crédibilité des parties et des témoins. Alors, le Barreau du Québec refuse d'accepter une justice dans les grands centres et une autre en région. Le projet de loi n° 50, dans ce sens-là, risque d'amplifier cette problématique à moins que des solutions soient apportées.
Quelles sont les solutions? La meilleure, la reine de toutes les solutions, naturellement, ce serait d'avoir des juges additionnels de la Cour du Québec, et ce, en nombre suffisant dans toutes les régions. Ça, ce serait vraiment, disons, la solution vraiment meilleure, de l'avis du Barreau. Par ailleurs, cette solution-là risque peut-être de ne pas se produire dans la réalité, et il faut penser à d'autres alternatives, d'une part. Le deuxième élément... Alors, premier élément, nommer des juges de la Cour du Québec de façon suffisante pour qu'ils puissent y en avoir dans toutes les régions.
Deuxièmement, le nombre et la répartition des juges de paix magistrats doit tenir en compte cette problématique-là, et on a entendu certains chiffres. On comprend que ce n'est pas définitif, mais on est inquiet quant au nombre de juges de paix magistrats qui pourraient être en nombre insuffisant dans certaines régions, notamment. On parle de quatre, par exemple. On a entendu ce chiffre-là, de quatre, dans tout l'Est du Québec, incluant la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie?Les Îles. C'est assez risqué, pensons-nous, d'avoir un nombre aussi limité.
Par ailleurs, la solution qu'on peut proposer serait qu'exceptionnellement on puisse accorder le pouvoir aux juges de paix magistrats de présider les requêtes sur remise en liberté provisoire contestée. Alors, ce n'est pas le premier choix, ce n'est pas même un choix intéressant dans la mesure où le Barreau ne croit pas qu'on doive diminuer la qualité de la justice en général pour des auditions aussi importantes que la remise en liberté d'une personne qui est détenue. Cependant, on sait qu'il va y avoir des problèmes qui vont se produire et il faut vraiment les prévoir. Une bonne façon serait de baliser ce pouvoir-là pour qu'il ne soit exercé que dans les cas où le juge est absent ou incapable d'agir et sur le consentement des parties. On croit même par exemple que, dans le décret de nomination, certains juges de paix magistrats pourraient avoir à la pièce, si on veut, là, ce pouvoir-là en plus de ses autres pouvoirs, de telle sorte que ce soit vraiment exceptionnel. Et on pourrait tous se souhaiter qu'ils n'aient pas à utiliser ce pouvoir-là dans la vie de tous les jours, mais ce serait une solution qui serait intéressante selon nous et qui pourrait être acceptable.
Alors, voilà pour la question de la régionalisation. Première solution: des juges à la Cour du Québec; deuxième élément de solution: un nombre et une répartition de juges de paix magistrats suffisants et, subsidiairement ou de façon exceptionnelle, des pouvoirs additionnels à des juges de paix magistrats.
Deuxième partie, le traitement de certains articles particuliers. Alors, je vous réfère à la page 3 du document qui a été déposé. L'article 181 prévoit que le gouvernement peut, par règlement, modifier les annexes IV et V pour y modifier les attributions des juges de paix magistrats. Alors, en principe, nous avions l'impression que le législateur modifiait une loi par une autre loi et non par un règlement. Ça nous apparaît un peu surprenant que ça puisse se faire de cette façon-là, on vous le souligne. Également, il y a le délai de 181, là, de 45 jours qui serait ramené à 15 jours. Est-ce que cette disposition d'exception est vraiment justifiée? Est-ce qu'il y a quelque chose qui dit que ça doit être exclu de la règle usuelle? On pose la question sans y répondre, mais on pose la question.
L'article 183. Je n'ai pas lu la lettre de M. le juge en chef Guy Gagnon, mais je présume qu'il vous a parlé de cette question-là. L'obligation qu'on fait au juge en chef de la cour de faire un rapport heurte à quelque part le principe de l'indépendance. J'imagine qu'il y a moyen d'obtenir des informations ou des statistiques par collaboration sans imaginer qu'un jour le juge en chef de la cour contreviendrait à la loi pour ne pas avoir fourni son rapport. Ce serait un peu curieux. Alors, je suis porté à penser que c'est un problème qui n'avait peut-être pas été vu au début et qui pourrait être corrigé assez facilement.
Également, les articles 29 et 30 du projet de loi. De l'avis du Barreau, il ne doit pas y avoir de différences de traitement à l'intérieur d'une même catégorie de juges de paix.
Et enfin je reviens à l'annexe V où on parle du pouvoir de présider des enquêtes contestées sur remise en liberté provisoire. Alors, on parle de cas d'absence ou d'incapacité du juge et sur le consentement des parties. Finalement, il y a la remarque, là, quant à 488.1 du Code criminel pour le cas des perquisitions, eu égard au secret professionnel. Alors, actuellement il y a des modifications en cours et on pense qu'il faudra en tenir compte.
Alors, je m'arrête ici, et je laisserais quelques minutes à Me Renée Lemoine pour faire part de la position de son Association.
La Présidente (Mme Thériault): Me Lemoine, il vous reste environ cinq minutes pour nous exposer votre position.
Mme Lemoine (Renée): Merci. Alors, je voudrais vous remercier de me permettre de vous transmettre la position, le point de vue des avocats et avocates de province. D'abord, je ne reprendrai pas les propos du bâtonnier. La position qu'il vous a exposée, c'est exactement la position que prend l'Association des avocats de province.
Ce que je veux faire ressortir, c'est principalement que la situation idéale évidemment, ce serait que les enquêtes sur remise en liberté contestée soient entendues par des juges de la Cour du Québec. Pour nous, c'est une évidence. Maintenant, il y a un constat en région, à cause des distances, à cause de l'absence de juges de la Cour du Québec dans certains districts judiciaires, il n'y en a pas en nombre suffisant, de telle sorte qu'actuellement, depuis l'arrêt Pomerleau, on vit des situations assez problématiques.
J'ai recueilli les commentaires des bâtonniers et je vous dirais qu'à première vue on pourrait penser que seulement les régions éloignées sont touchées, mais, dans les commentaires que j'ai recueillis, j'ai pu constater que des districts comme le district judiciaire d'Arthabaska, des districts qui sont peut-être plus près de Montréal ou Québec sont également touchés par la situation. Alors, ce n'est pas exclusivement dans les régions éloignées.
Moi, je pratique en Abitibi-Témiscamingue, un très grand district en termes de superficie. On a également le Grand Nord dans notre district judiciaire. Donc, vous comprendrez que la distance est très importante chez nous. Ce qu'on a constaté... et, suite à l'arrêt Pomerleau, on a vécu des situations assez difficiles. Nous n'avons pas eu, comme dans certains districts judiciaires... Et, lors du dernier conseil général, à l'initiative du Barreau du Bas-Saint-Laurent? Gaspésie?Les Îles, il y a eu une résolution du Barreau du Québec pour dénoncer des situations telles que les enquêtes sur remise en liberté contestée par téléphone, des enquêtes sur remise en liberté qui ne respectaient pas de toute façon... qui, à mon point de vue, étaient illégales, même avec le consentement des parties. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le consentement des parties, dans des situations de détention, l'individu qui est détenu, qui est privé de sa liberté, pour avoir une enquête sur remise en liberté, il va accepter l'inacceptable. Alors, je pense que c'est ce genre de situation là qu'on a pu voir dans certaines régions.
Chez nous, ça ne s'est pas passé comme ça. Ce qu'on a vécu par ailleurs, c'est qu'on demandait aux avocats, à leurs témoins et aux accusés de se déplacer. Par exemple, je vous donne un exemple, à Rouyn-Noranda, un accusé a dû se déplacer parce que le juge siégeait à Val-d'Or. Pour vous donner, en termes de distance, c'est comme si on demandait à un accusé à Montréal de se déplacer à Saint-Jérôme pour aller subir son enquête sur cautionnement. Je pense bien que ce ne serait pas acceptable, ce genre de situation là. Maintenant, c'est ce qui s'est produit.
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(15 h 50)
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Évidemment, le juge qui siégeait avait des causes qui avaient été fixées depuis longtemps et il a fini sa journée ? c'est un terme régulier de la cour ? il a fini sa journée de cour à 6 heures. Les gens ont attendu du matin, 9 h 30, jusqu'à 6 heures pour être entendus, et la cour ? et c'était un vendredi, je le précise ? s'est terminée à 8 h 30. Après, il y avait deux enquêtes sur cautionnement qui ont été entendues par la cour. Alors, c'est ce genre de situation là. Et je vous dis, là, je vous parle d'un déplacement entre Rouyn et Val-d'Or, mais il y a des déplacements qui sont encore plus importants, Témiscamingue?Val-d'Or ou ce genre de situation.
Ce qui est très clair pour les avocats et avocates de province, c'est que la justice par vidéoconférence, c'est une catégorie différente de justice et que, pour les avocats de province, ce n'est pas acceptable. Je suis, moi-même, une utilisatrice de la vidéoconférence pour la Cour d'appel. Je vous dirais que je ne me déplace pratiquement plus pour aller à la Cour d'appel, à cause des frais. On utilise la vidéoconférence. Donc, je connais bien cette technologie-là. Et, pour ce qui est de plaider en droit devant des juges, d'abord, ça crée une distance. Il n'y a pas nécessairement... On n'est pas à proximité, là, lorsqu'on est en vidéoconférence. Deuxièmement, je vous dirais que la technologie fait en sorte qu'il y a beaucoup de bruit dans la vidéoconférence. Les gens bougent leurs papiers, et là on est distraits par toutes sortes de bruits, là.
Alors, moi, je vous donne mon expérience de la vidéoconférence et j'essaie de transposer ça dans le cadre d'une enquête sur cautionnement contesté, et je vous dis: J'ai beaucoup de difficultés avec ça. L'enquête sur remise en liberté, c'est une étape extrêmement importante du processus judiciaire. Dans l'arrêt Ell, on s'est prononcé sur l'importance de cette étape-là en regard de l'indépendance judiciaire, et ce qu'on a dit, c'est: C'est la liberté d'un individu, ça a des effets sur sa situation personnelle et familiale, et ça peut même avoir un effet sur l'issue du reste des procédures dans un dossier. Donc, on est en présence d'une situation extrêmement sérieuse quand on se prononce sur la remise en liberté d'un individu, et l'évaluation de la crédibilité est extrêmement importante.
Un autre aspect que je trouvais important de vous souligner, c'est qu'on évalue aussi la dangerosité, la sécurité du public. Évidemment, on a le passé criminel d'un individu, on a également le crime qu'il a commis pour l'évaluer, mais la crédibilité, la confiance qu'on a envers un individu, ça s'évalue par l'appréciation et par l'aspect, je dirais, visuel aussi, là. Je pense que c'est un tout et on ne peut pas... Enfin, moi, mon expérience de la vidéoconférence, je ne crois pas que ce soit opportun qu'on puisse fonctionner dans des enquêtes sur remise en liberté contestée.
Par ailleurs, on est tout à fait d'accord avec l'utilisation de ces technologies-là pour des enquêtes non contestées, pour des comparutions et pour tout ce qui concerne des situations urgentes et non contestées.
La Présidente (Mme Thériault): Malheureusement, Me Lemoine, je vais devoir... je vais vous demander de conclure.
Mme Lemoine (Renée): Oui. Alors, je vais terminer ici. Je vous remercie.
M. Dupuis: Je vais intervenir là-dessus, si vous me permettez, Mme la Présidente. Je vais vous suggérer...
La Présidente (Mme Thériault): Je vais vous permettre, M. le ministre.
M. Dupuis: Merci beaucoup. Je vais vous suggérer, Mme la Présidente, que... Moi, j'aime bien que Me Lemoine, Me Gagnon ou Me Mondor expriment leur point de vue complètement et repartent en étant certains qu'ils ont bien exprimé leur point de vue. De toute façon, on va en discuter entre nous. Vous pourrez rester ensuite, s'il manque de temps. Moi, je n'ai pas d'objection de verser dans l'enveloppe du Barreau...
La Présidente (Mme Thériault): Du temps qui vous est alloué.
M. Dupuis: Oui. Du temps, oui, qui me serait alloué.
La Présidente (Mme Thériault): Vous savez très bien, M. le leader, que, sur consentement, on peut faire ce qu'on veut.
M. Bédard: Ils peuvent avoir plus de temps, il n'y a aucun problème, parce que comme ça va être les seuls groupes... puis en vrai, c'est deux groupes. Alors, moi, je n'ai aucun problème.
M. Dupuis: Même ce que je vais suggérer, entre vous et moi, là, ce que je vais suggérer...
M. Bédard: Avec plaisir.
M. Dupuis: Parce que les problèmes qui nous sont exprimés là, c'est de ça dont on va discuter. Alors, moi, je vais même suggérer qu'on fasse un échange, là, qui soit très informel là-dessus, qu'on se pose des questions, qu'on se réponde, qu'on fasse des commentaires. Honnêtement, là, je serais assez... Je pense que ça va faire avancer, M. le député de Chicoutimi, M. le député de Mercier, si on fait ça de cette façon-là. Alors, allez-y, continuez.
La Présidente (Mme Thériault): Me Lemoine.
M. Dupuis: On va vous garder jusqu'à six heures, peut-être.
Mme Lemoine (Renée): Il y avait peut-être un autre aspect. Évidemment, on n'a pas eu beaucoup de temps, je n'ai pas eu la possibilité de vérifier, mais je ne suis pas convaincue que, dans les régions, dans la région de chez moi, la vidéoconférence, je pense qu'il y a trois palais de justice qui en sont munis. Il y a des palais de justice qui n'en ont pas. C'est la même chose sur la Côte-Nord; c'est probablement la même chose dans Gaspésie?Les Îles. Alors, ça ne règle pas tout, là, l'aspect technologique, mais, encore une fois, on est en désaccord complet avec cette façon de fonctionner là. On considère que la justice ne serait pas servie ou rendue de la même façon dans les régions qu'à Montréal et à Québec si on avait accès à cette technologie-là.
Je pense que j'ai pas mal fait le tour des principaux points que je voulais vous soulever. Évidemment, je vous dirais que des situations, là, il m'en a été rapportées quelques-unes, et c'étaient des situations difficiles dû à l'arrêt Pomerleau. Et, nous, la façon dont on voit qu'on peut régler cette situation-là, c'est en donnant des pouvoirs d'exception aux juges de paix en région pour leur permettre d'entendre les enquêtes sur remise en liberté contestée.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, Me Lemoine. Donc, M. le bâtonnier, est-ce que vous voulez rajouter quelque chose?
M. Gagnon (Pierre): Bien simplement, je voulais terminer la présentation en disant que la crainte du Barreau et des régions, c'est d'avoir ce qu'on peut appeler une justice de télévision, bonjour, puis il n'y aura, dans certains districts, qu'une télévision. Alors, ce sera un peu malheureux d'avoir une justice de télévision dans des régions.
Et ça peut être tentant lorsqu'on parle de modernisation de l'État et de redéploiement des ressources. Et le plus bel exemple qu'on a eu ? M. le ministre est au courant, il a été sensibilisé à cette question-là, M. le député de Chicoutimi aussi, sur la question de la Commission des relations de travail ? on n'en est pas encore revenus, il y avait 32 lieux où il y avait des auditions puis ils ont réduit ça à 12 pour des raisons essentiellement budgétaires et, dit-on, d'efficacité. Et on a reçu une lettre, hier, là, où on va en récupérer à peu près trois sur les 20 qui ont été coupés. C'est un peu triste de penser à ça.
Alors, on nous donne toutes raisons de craindre que la justice en région va s'amenuiser, s'appauvrir, et je peux vous dire que ça va être très présent dans les deux prochaines années au Barreau du Québec et pas uniquement au niveau de l'Association des avocats et avocates de province. Le Barreau du Québec est très, très sensible à cette question-là et on a un beau message à envoyer ici, dans ce cas-ci, où quand même on peut régler la question, croyons-nous, assez aisément. Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le bâtonnier. Donc, sans plus tarder, M. le ministre, nous allons entreprendre les échanges.
M. Dupuis: Oui. Oui. Ça ne m'étonne pas beaucoup que Me Mondor ne se soit pas exprimé sur cette question-là, bien que j'aie suffisamment de respect pour lui pour savoir qu'il est tout à fait d'accord avec les représentations qui ont été faites par son collègue Me Gagnon et très certainement Me Lemoine. Mais Me Mondor, qui pratique à Montréal, n'a évidemment pas ce problème-là parce qu'à Montréal et dans les grands centres, si je ne me trompe pas, Me Mondor, ce n'est pas un problème qui se pose parce que ce sont des juges de la Cour du Québec qui entendent les enquêtes sur remise en liberté contestée...
M. Mondor (Denis): Absolument.
M. Dupuis: ...et donc c'est vraiment Me Lemoine, vous en convenez avec moi, un problème qui est un problème pour les avocats qui pratiquent en région, particulièrement.
M. Gagnon (Pierre): D'ailleurs, M. le ministre, c'est tellement vrai que la solution qu'on présente ici est à quelque part une solution de compromis au niveau du comité où un bon nombre de membres du comité disent: Bien, il faut faire attention pour ne pas réduire le niveau de la justice en général et que toutes les enquêtes sur remise en liberté contestée soient entendues, par exemple, au niveau d'un juge de paix magistrat.
Mais l'ouverture qu'on fait est vraiment exceptionnelle, limitée et balisée aux cas de certaines régions, à des cas où on a un consentement des deux parties et où le juge est absent ou incapable d'agir. Parce qu'on ne voudrait pas non plus que cette situation-là fasse en sorte qu'on diminue la qualité de la justice criminelle au Québec qui est, croyons-nous, de bonne... d'excellente qualité.
M. Dupuis: Moi là, je veux vous dire toute de suite, parce que je ne vous cacherai pas qu'on en a discuté, de vos représentations déjà entre nous... Je n'ai pas eu l'occasion d'en discuter avec le député de Chicoutimi parce qu'on n'a pas eu le temps de le faire, là, on va le faire à l'occasion évidemment de la commission parlementaire. Mais on a eu l'occasion de discuter entre nous ? quand je dis «entre nous», c'est au ministère ? de votre proposition en ce qui concerne les pouvoirs au sujet des enquêtes sur remise en liberté contestée. Je veux vous dire tout de suite que, sans aller jusqu'à tout de suite décider qu'on donnerait suite à vos recommandations dans le sens où vous le souhaitez, je ne suis pas prêt à le faire tout de suite, mais je n'ai pas non plus l'esprit complètement fermé à le considérer éventuellement.
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(16 heures)
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D'abord, je vous dirai, Me Gagnon, une première réserve que j'ai sur ce que vous venez de mentionner, c'est la suivante: c'est que, dans le fond, ce que vous êtes en train de nous dire, c'est: Donnez à certains juges de paix magistrats ? on va les appeler juges de paix magistrats, là, c'est l'appellation sur laquelle on pourrait s'entendre ensemble pour aujourd'hui ? donnez à certains juges de paix magistrats ce pouvoir-là, ceux qui seraient appelés à pratiquer en région ou en tout cas à statuer en région et à d'autres, non. Ça, honnêtement, j'ai une énorme réserve là-dessus parce que, là, je créerais une troisième catégorie de juges qui seraient des juges de paix magistrats avec le pouvoir d'entendre des enquêtes sur remise en liberté contestée, puis d'autres qui auraient le pouvoir de juges de paix magistrats sans avoir cette possibilité-là, et les juges de la Cour du Québec. Ça, honnêtement, j'ai une énorme réserve là-dessus.
D'autre part, ce qu'on m'indique... D'abord, vous avez été gentil, vous avez dit que ça faisait un an que je n'avais pas pratiqué le droit criminel, ce n'est pas tout à fait ça, depuis...
M. Gagnon (Pierre): Ce n'est pas vous. J'ai parlé de Me Mondor, là, à la blague. Non, je...
M. Dupuis: Ah! O.K. Me Mondor. Ah! O.K., correct. Ça fait un petit peu plus longtemps que ça, de telle sorte que... Ah! O.K. Excusez-moi, j'avais mal entendu. Ça fait un petit peu plus longtemps que ça que je n'ai pas pratiqué le droit criminel; en fait depuis 1998, donc ça me ramène un peu au niveau du député de Chicoutimi qui, lui, dit: Moi, j'ai moins d'expérience en droit criminel, mais, moi, la mienne est suffisamment longue que ça nous rapproche vous et moi. C'est une façon de voir les choses. Moi, j'essaie de voir les choses toujours positivement plutôt que négativement.
Ce qu'on me dit, moi, c'est que, sur le nombre d'enquêtes sur remise en liberté contestée qui étaient entendues par les ante Ell ? appelons-les les ante Ell ? les personnes qui entendaient ces enquêtes sur remise en liberté là, quand on fait le total du travail qui a été dépensé par ces gens-là pour entendre des enquêtes sur remise en liberté contestée, ça ne fait même pas à peine une année-personne. Donc, j'en conclus qu'il n'y a pas tant d'auditions qui ont été entendues par ce qu'il est convenu d'appeler ces fonctionnaires de justice sur des enquêtes en remise en liberté contestée. Est-ce que je me trompe ou est-ce que... Je suis sûr qu'on ne me trompe pas. Ça, je suis certain de ça. Mais, est-ce qu'on a une mauvaise vision de la réalité quand on prétend ça? Ou peut-être Me Lemoine...
M. Gagnon (Pierre): Je crois qu'effectivement il n'y en a pas en grand nombre. Le problème, c'est que, s'il y en a une, par exemple ? pour dire quelque chose ? à Port-Cartier, puis que, le lendemain, il y en a une à Arthabaska, puis, le surlendemain, ça se passe à La Baie, là, on a un problème parce que notre pourcentage de juges qu'on doit libérer, il n'est pas... On ne peut pas en envoyer un petit morceau un peu partout.
C'est que, statistiquement, c'est bon, mais, dans la vraie vie, la configuration de certains districts fait en sorte qu'on a beau libérer, par exemple, un juge du pénal, mettons, à Baie-Comeau, qui va avoir une demi-journée peut-être à lui de libre, ça ne veut pas dire qu'en après-midi il peut être à Blanc-Sablon ou être à Forestville en même temps. Tu sais, c'est toute une question de répartition.
C'est un peu pour ça qu'on vous suggérait que, dans certaines régions où on sait que des problèmes comme ça vont se poser, puisqu'ils se posent déjà, ça aurait pu ? je ne sais pas si c'est vraiment en faire une catégorie autre... mais ça pourrait être un certain nombre de pouvoirs qu'ils ont ou qu'ils n'ont pas, et l'idée de les limiter était, pour nous, de bien indiquer qu'il n'est pas de notre intention, quant à nous en tout cas, de recommander que ce soit vraiment «at large», là, que tous les juges de paix magistrats puissent avoir ce pouvoir-là.
M. Dupuis: En toute transparence, je vous dirai que la réserve que je vous exprime sur la question d'en faire une troisième catégorie, c'est-à-dire une catégorie de juges de paix magistrats qui pourraient entendre des enquêtes sur remise en liberté contestée, j'ai encore la même réserve après vous avoir non seulement entendu, mais écouté, j'ai encore la même réserve. Autrement dit, ce que je suis en train de vous dire c'est: Je garde l'esprit ouvert; je ne suis pas prêt à y aller encore.
Mais, si on y allait, à première vue, là, aujourd'hui, je vous dirais: Ils vont tous avoir les mêmes pouvoirs ou ils ne les auront pas du tout. Il m'apparaît difficile de trancher puis de permettre à un certain nombre... d'autant plus que ça, ça présuppose... C'est-à-dire, ça, ça entraîne toutes sortes d'autres conséquences d'autres natures que d'avoir trois catégories. Je pense que ce ne serait pas sage, pour le législateur, d'entrer dans une catégorisation comme celle-là.
L'autre chose que je veux vous dire, puis là, Me Lemoine et Me Mondor... Me Gagnon, avez-vous pratiqué en criminel plus...
M. Gagnon (Pierre): Non, non. Écoutez, je suis le moins criminaliste de nous tous ici, probablement, mais j'ai assisté naturellement à tous ces...
M. Dupuis: C'est pour ça probablement que vous êtes le moins en conflit d'intérêts.
M. Gagnon (Pierre): Absolument. Et je suis probablement celui qui a écouté le mieux lors des rencontres au niveau du comité et... Mais il n'y a pas de problème, on a... s'il y a quelque chose qui me dépasse, je ne suis pas gêné de l'admettre.
M. Dupuis: Non, non, il n'y a pas de problème. J'entendais... j'entendais... Là, je ne veux pas faire l'avocat, là, vraiment, j'essaie de cerner les problèmes pour essayer qu'on apporte les meilleures solutions, mais je vous entendais, Me Lemoine, argumenter au sujet de votre prétention et, moi, je vous écoutais dans l'esprit suivant: voilà évidemment une décision ? la décision de remettre quelqu'un en liberté ou non ? voilà une décision qui est au coeur des préoccupations qu'avait la Cour suprême dans l'arrêt Ell et qui était au coeur des préoccupations qu'avait la Cour d'appel dans l'arrêt Pomerleau et que de toute façon on n'a pas besoin... on n'a pas besoin de se chicaner là-dessus: c'est clair que la question de remettre ou non en liberté quelqu'un, c'est la question... c'est une des questions centrales, importantes en droit criminel. Et c'est la raison pour laquelle les juges ont dit: Quand quelqu'un prend cette décision-là, il faut que ce soit quelqu'un qui a vraiment... qui est...
Une voix: ...
M. Dupuis: Exactement, et dont la nomination revête ce caractère d'indépendance, de telle sorte que c'est une décision majeure que doit rendre un juge. Et, dans ce sens-là, il y a une logique dans la foulée de Ell, dans la foulée de Pomerleau, il m'apparaît qu'il y a une logique inéluctable à faire en sorte que, en tentant de proposer une solution, on se dise: Pour ce qui concerne cette décision-là qui est centrale en matière de droit criminel, la liberté ou non d'un individu, on laisse ce pouvoir-là à un juge de la Cour du Québec.
Sur le plan des principes, je pense bien qu'on ne se chicanera pas là-dessus. Est-ce qu'on est d'accord là-dessus, Me Lemoine?
Mme Lemoine (Renée): Oui.
M. Dupuis: Sur le plan des principes, on est d'accord, mais nous, là, on pousse la logique, on la pousse en incluant dans le projet de loi bien sûr, à l'annexe V, le fait que les juges de paix magistrats n'auront pas ce pouvoir-là, en y ajoutant un certain nombre d'autres considérations, certaines sur lesquelles vous avez des objections, c'est-à-dire, on dit, au fond... Au fond, on dit: La vidéoconférence, vous, vous n'avez pas une belle expérience avec la vidéoconférence. Par contre, le législateur fédéral, lui, a considéré ? puis peut-être que le député de Mercier était à la Chambre des communes à ce moment-là, ils ont dû en discuter, vous ne vous souvenez pas...
M. Turp: ...
M. Dupuis: ...O.K. ? par contre, le législateur fédéral a dit: Bien, la vidéoconférence, c'est permis, c'est dans le Code criminel, c'est permis, c'est... et il faut s'en servir. Nous, on pense: il faut s'en servir. De toute façon, dans la logique... dans la logique financière, dans la logique aussi de l'accessibilité à la justice puis du fait qu'un individu a le droit qu'une décision soit prise le plus rapidement possible à son sujet, la vidéoconférence est un instrument. Ce ne sera toujours qu'un instrument. La...
Une voix: ...
M. Dupuis: Non, mais je n'ai pas de problème avec ça. Ce ne sera toujours qu'un instrument, mais c'est un instrument effectivement qui est appelé à se développer. Moi, au ministère, on me dit: Les points de services vont tous être équipés éventuellement de vidéoconférence. Mais c'est un instrument, ce n'est pas... ce n'est pas porteur de droit, la vidéoconférence: ça sert à ce qu'on puisse exercer des droits.
Est-ce que, quand je vous parle comme ça, Me Lemoine, ça vous réconcilie un peu avec le concept? Vous n'avez pas l'air... Là, je n'ai pas l'air à être bien bon dans mon affaire, là.
M. Lemoine (Renée): Pas vraiment. Pas vraiment. Parce que je comprends que c'est un instrument, mais c'est un instrument qui ne permet pas de rendre la justice de la même façon, et, à partir de là, je ne peux pas être d'accord avec l'utilisation de cet instrument-là dans un contexte contesté d'évaluation de crédibilité de témoins et d'évaluation de témoignages.
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(16 h 10)
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M. Gagnon (Pierre): En fait, la position du Barreau aussi sur cette question-là, c'est que la vidéoconférence ne doit pas être quelque chose de systématique. J'ai donné l'image d'une justice de télévision, là. Il ne faudrait pas que tout ce qui se fait dans un lieu, par exemple, se fasse par... se fasse à distance et qu'on se serve de ça pour ne pas nommer de juges, par exemple, dans certains lieux. Il faut avoir encore quelqu'un de vivant qui rend justice dans les districts.
M. Dupuis: Mais me permettez-vous une question, M. le député?
Une voix: ...
La Présidente (Mme Thériault): C'est parce que, M. le ministre, ce n'est pas M. le député qui permet les questions, c'est Mme la Présidente.
M. Dupuis: Mme la Présidente, me permettez-vous une...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dupuis: Je m'excuse.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, il n'y a pas de problème. Si vous voulez continuer votre temps, ça va.
Une voix: ...
M. Dupuis: Non, non, non. Non, mais vous allez voir, à mesure que les jours vont avancer, ça va se régler. Par contre, par contre, dans l'hypothèse où on donnait le pouvoir d'entendre des enquêtes sur remise en liberté contestée aux juges de paix magistrats, il reste, Me Lemoine, qu'on n'aurait pas des juges de paix magistrats présents dans chacun des points de services. Ce n'est même pas possible d'y penser. La vidéoconférence demeurerait toujours un instrument. Autrement dit, votre argument, votre argument que je peux accepter en logique, en pratique, même si je l'acceptais, ne changerait peut-être pas grand-chose dans les faits parce qu'on continuerait de se servir de cet instrument-là, la vidéoconférence.
Dans un monde idéal ? moi, j'ai pratiqué le droit ? dans un monde idéal, on veut être devant un juge physiquement, etc. Dans un monde idéal, c'est ça, là, on se comprend. Mais le monde idéal, je le cherche encore; j'ai 55 ans puis je sens que je ne le trouverai pas de ma vie. Vous, vous êtes beaucoup plus jeune que moi, mais je pense que vous ne le trouverez pas, vous non plus.
Mme Lemoine (Renée): C'est possible, mais je pense que...
M. Dupuis: Dans un monde idéal, on ne veut pas aller devant le juge, nous dit le sous-ministre.
Mme Lemoine (Renée): Je vous dirais qu'on est... Là où c'est problématique, où on voit... parce que, là, le monde idéal, si vous voulez, on l'atteint en matière de... on l'atteint à Montréal, on l'atteint à Québec, dans le sens que les citoyens de Montréal et de Québec, eux, ont la possibilité d'être entendus par un juge en personne, et c'est... La situation que vous proposez va être différente pour les citoyens de régions, et c'est là que...
Et, quand on vous dit: cet instrument-là ne permet pas une justice de même catégorie, une justice de qualité, puis c'est... Encore une fois, quand on regarde le projet de loi, il y a des conditions. L'indépendance judiciaire a été assurée. Dorénavant, c'est des avocats de plus de 10 ans, je crois, là, d'après... Alors, toutes les conditions sont là pour rehausser...
M. Dupuis: Combien d'années de pratique, en passant?
Mme Lemoine (Renée): ... ? vingt ? pour rehausser le niveau, mais on ne donne pas le pouvoir. Alors là, moi, j'ai beaucoup de difficultés avec ça.
M. Gagnon (Pierre): De fait ? en tout cas, pour résumer notre position ? c'est qu'on sait que, dans le monde dans lequel on vit, la vidéoconférence on va l'utiliser, on l'utilise dans nos bureaux, on l'utilise au Barreau, on l'utilise pour une série de réunions qu'on fait, mais il reste que, quand on veut une vraie réunion très importante où il y a, par exemple, beaucoup de monde, on veut être, par exemple, face à face, alors, ce qu'on vous dit finalement, c'est qu'il ne faut pas quand même dire: on va avoir moins de juges présents ou de juges magistrats dans des régions parce qu'on va utiliser la vidéoconférence. Il faut vraiment que ça demeure un outil d'appoint mais qui ne serait pas systématisé. C'est ce que nous affirmons.
M. Dupuis: Mme la Présidente, me permettez-vous une question?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le ministre.
M. Dupuis: Est-ce qu'il n'est pas toujours possible pour l'avocat qui prétend que le juge doit être présent, pour évaluer la crédibilité par exemple, d'exiger la présence... Évidemment il faut que le client accepte quand c'est l'avocat de défense. Il faut que le client accepte qu'il peut y avoir un délai, là, pour être entendu, mais ce que je veux dire, c'est: Quand le coeur du débat, c'est la crédibilité des témoins, sur l'enquête sur remise en liberté, il est toujours possible avec le consentement, même si c'est... de demander. Alors, dans le fond, c'est une évaluation qu'il y a à faire par l'avocat, là, avec son client, au moment où le procédé est... Non, je comprends parce que vous dites: Le client, des fois il est bien pressé, puis il veut l'avoir tout de suite, puis il veut avoir sa décision.
M. Gagnon (Pierre): Souvent, il n'aime pas ça, demeurer en prison aussi. Alors...
M. Dupuis: Non. Ça, je comprends ça.
Mme Lemoine (Renée): Ça a des impacts dans sa vie, là: il a une famille, il travaille. Alors, ce n'est pas nécessairement juste parce qu'il n'aime pas ça, là. C'est parce que c'est... Peut-être qu'il va perdre son emploi, là, s'il n'est pas remis en liberté, peut-être qu'il a des enfants puis que ses enfants vont être placés en protection de la jeunesse, là. C'est toutes ces considérations-là qui...
M. Dupuis: Oui. Et, à ce moment-là, autant que je me souvienne de mes années de pratique en défense ? ça, ça fait pas mal plus longtemps ? là on évalue la balance des inconvénients avec le client.
M. Gagnon (Pierre): C'est ça. Mais l'idée, c'est de...
La Présidente (Mme Thériault): Me Gagnon.
M. Gagnon (Pierre): ... ? excusez ? c'est de ne pas se mettre systématiquement dans des positions où on va être toujours, et tout le temps, et régulièrement dans des cas... Ça doit vraiment être quelque chose d'appoint et non pas systématique. En fait, je pense que ça pourrait se résumer comme ça.
M. Dupuis: Regardez bien, là. Je vais laisser évidemment le député de Chicoutimi vous poser des questions ou commenter. Peu importe l'issue de la discussion que nous avons aujourd'hui sur ce sujet-là ? et dans le fond, quand je dis «peu importe l'issue», c'est possible que l'issue ne soit pas dans le sens de vos représentations, à l'issue de l'étude article par article; je dis «c'est possible» parce que, dans la vie, il n'y a rien qui est immuable ? il reste que... il reste que je n'ai pas l'esprit fermé, que les gens au ministère non plus n'ont pas l'esprit fermé, mais il y a des discussions à intervenir avec la Cour du Québec aussi. La Cour du Québec va avoir à distribuer ces ressources-là sur le territoire. La Cour du Québec... Il y a des discussions avec le ministère de la Justice où on discute avec la Cour du Québec de la tâche des juges, de, bon, un certain nombre de dossiers qui sont ouverts avec la magistrature. Par exemple, l'institution des juges de paix magistrats va faire en sorte que les juges de la Cour du Québec, là, depuis le 31 janvier 2004, vont avoir des tâches... ils vont se voir être délestés d'un certain nombre de tâches. Alors, évidemment, ils pourront consacrer plus de temps peut-être aux enquêtes sur remise en liberté contestée.
Il y a des discussions à intervenir. Moi, je vous dis, là: on n'a pas l'esprit fermé. J'estime cependant qu'il faut l'évaluer, il faut le regarder aller, il faut l'évaluer. C'est ce que j'estime aujourd'hui. Encore une fois, je ne veux pas que vous repartiez, vous, pour Rouyn puis, vous, pour Montréal... vous, pour Québec puis, vous, pour Montréal en disant: On est venus ici pour rien. Ce n'est pas vrai. Vous n'êtes pas venus pour rien, d'une part. D'autre part, vous n'avez pas écrit vos documents pour rien, ils restent là. Mais, pour l'instant, moi, je me dis: Il faut le regarder aller un petit peu, allons-y avec ça puis regardons comment ça fonctionne, puis on va voir. Mais vos prétentions n'ont pas été... ne sont pas vaines et ne seront pas non plus oubliées.
M. Gagnon (Pierre): Mme la Présidente, juste une réaction. Je...
M. Dupuis: Non, mais allez-y. On peut regarder...
M. Gagnon (Pierre): Oui. Alors, ma réaction, ma crainte est la suivante, c'est que, là, le projet de loi... la loi est ouverte, et je sais que ce n'est pas facile d'ouvrir une loi et d'avoir l'occasion de la modifier. On a obtenu... M. le ministre, vous avez présenté le projet de loi n° 41 où on nous redonne, après 15 ans qu'on le demande, le pouvoir qu'on avait dans l'article 115 de la Loi du Barreau en matière disciplinaire. Mais ça a pris 15 ans avant de convaincre quelqu'un de boucher ce petit trou là, là, qui nous posait un important problème disciplinaire. Alors, je me dis: le jour où on aura adopté la loi sans y mettre ce pouvoir-là, comment réussira-t-on en disant...
Je regarde là comment... le peu d'écoute qu'on a eue dans un autre ministère sur la question de la Commission des relations de travail, où on leur dit que ça passe de 32 à 12, et ça ne dérange personne là-bas. Alors, je me demande comment on fera pour réouvrir. C'est un peu, beaucoup ça, là. Mais ça m'apparaît plus facile d'avoir un pouvoir dans la loi qui ne sera pas utilisé, et on vous suggérera avec plaisir dans deux ans de l'abroger, cet article-là, s'il n'a pas servi. On va faire un test, et ce serait mieux comme ça que de dire: Bien, on aurait dû l'avoir parce que, regarde, on a tel cas, on a tel cas qui se produit. Mais ça va en prendre combien, de cas de personnes, là, qui demeurent en prison, qui ne devraient pas, pour réouvrir la loi? Je trouve ça difficile. Mais voilà, je m'arrête ici.
M. Dupuis: Avec votre permission, Mme la Présidente, simplement pour répondre à la question. Mais vous avez noté l'article 181 du projet de loi qui permet que, par règlement... d'ailleurs, vous avez une recommandation là-dessus dans votre mémoire. Vous vous demandez pourquoi, pourquoi on s'est donné le pouvoir de prépublier une modification au règlement en 15 jours plutôt que 45 jours. Je suis prêt à répondre à ça, si vous voulez, mais c'est beaucoup moins compliqué d'ajouter un pouvoir par règlement que de le faire en ouvrant la loi. Vous, vous dites: Vous devriez ouvrir la loi. Moi, je vous dis: L'article 181 nous permet de le faire par règlement.
Pourquoi 15 jours plutôt que 45 jours? C'est parce que, advenant le cas où il y aurait un jugement dans un tribunal qui ferait en sorte que l'un des pouvoirs qui est prévu aux annexes ne pourrait plus être exercé par l'une de ces personnes-là, si on veut le changer, il faut le changer rapidement pour ne pas évidemment provoquer de délai inutile dans les causes semblables qui pourraient être entendues au sujet d'un même pouvoir. On essaie de le faire le plus rapidement possible. C'est pour ça, le 15 jours, ce n'est pas pour s'enlever des obligations au gouvernement; c'est pour permettre, s'il devait y avoir une décision qui fasse en sorte qu'on doive modifier l'annexe, qu'on puisse le faire plus rapidement. C'était pour ça. Merci.
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(16 h 20)
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La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, je vais passer la parole au porte-parole de l'opposition officielle. Nous aurons certainement l'occasion de revenir en échange avec le ministre, puisqu'il y a eu consentement pour continuer l'échange.
M. Bédard: Oui. Avec plaisir, d'ailleurs.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci, Mme la Présidente. D'abord, simplement un commentaire à l'endroit de mon bon ami le ministre de la Justice, simplement de ne pas faire l'erreur...
M. Dupuis: C'est une expression, dans le parlement.
M. Bédard: Bien, que vous connaissez bien.
M. Dupuis: Qui est consacrée maintenant...
M. Bédard: Et voilà. Et normalement, c'est...
M. Dupuis: ...et qui est considérée comme étant suspecte.
M. Bédard: Oui. Elle était souvent suivie d'une mise en garde.
M. Turp: D'un pot.
M. Bédard: Et la mise en garde sera la suivante: Ne présumez pas de l'adoption du projet de loi dans son contenu tel qu'il est. Ici, nous sommes là d'ailleurs pour les modifier. Chacun des parlementaires ici, c'est ce que nous faisons depuis que je suis à cette commission, et c'est ce que nous entendons faire encore pour l'améliorer. Avec M. le bâtonnier ou sans M. le bâtonnier, nous allons regarder comment on peut effectivement améliorer ce projet de loi, dans la préoccupation qui nous a été mentionnée, et moi... qui demeure très présente, là, celle des conséquences de la justice en région.
Et vous comprendrez que je suis particulièrement préoccupé par ça étant donné que je viens d'une région et, deuxièmement, parce que j'ai fait ce combat dans la Loi sur la justice administrative, vous le savez, de veiller effectivement à ce qu'il y ait cette régionalisation. Et actuellement, c'est sûr que telles que sont indiquées les dispositions actuellement, j'ai des inquiétudes qui demeurent. Et le monde parfait ? et en toute amitié, je le dis encore ? effectivement, il existe. Le problème, c'est qu'il n'existe pas en région.
Alors, comment on peut l'améliorer? On ne peut pas arriver exactement à la même chose. Mais comment on peut tendre vers ça? Et moi, ce que j'ai peur dans le projet de loi actuel, c'est qu'il y ait un recul. Effectivement, l'utilisation de la vidéoconférence à Montréal est peut-être... dans des procédures contestées, doit être assez rare, là. Alors, c'est le lot de praticiens... Et, moi-même, j'ai été dans les premiers à l'époque, devant la Cour d'appel, à l'utiliser, puis, effectivement, c'est différent. Et les justiciables en général, et surtout les praticiens, ne sont pas très chauds à... Ils le font pour des raisons pratiques, effectivement, mais quand on peut les enlever, bien on le fait, on peut le faire.
Alors, j'en reviens à vos propositions. Évidemment, il y a des coûts. La vraie chose, il faut se le dire, c'est une histoire de coûts, là. Comment on peut améliorer la qualité de la justice? Jusqu'où on est prêts à payer pour l'améliorer? C'est aussi simple que ça. Puis on est conscients qu'on ne peut pas avoir un juge par personne ou un juge par cause qui...
Alors donc, je regardais les solutions, et sans en exclure, et sans dire que je suis d'accord sur chacune d'elles. Là vous dites: La première, le monde idéal: on augmente le nombre de juges ? c'est ce que j'ai compris ? donc de juges résidents en région. Si on dit ça, là, en termes de conséquences, avez-vous évalué à peu près ça veut dire combien de juges environ qu'il faudrait ajouter?
M. Gagnon (Pierre): Moi, je n'ai pas de chiffres. Je sais qu'il y a bien des années qu'il est question de vouloir des juges additionnels, notamment sur la Côte-Nord, notamment en Abitibi, à Arthabaska. Je sais que, dans le district de Saint-François... Alors, combien ça peut faire au total? Je ne le sais pas, là, mais il faudrait le vivre. Mais on est quand même conscients que la loi limite le nombre de juges disponibles, et le juge en chef fait la répartition de son mieux, mais il ne peut pas non plus vider une région pour... Alors, je ne sais pas le nombre.
Je sais cependant que ce qu'on a regardé quant à des juges de paix magistrats, dans l'optique où ils auraient ? uniquement un certain nombre ? auraient ce pouvoir-là, on pensait qu'à sept ou huit juges magistrats ayant ce pouvoir-là, ça pourrait couvrir, là, peut-être les principaux endroits où de tels problèmes peuvent se soulever.
M. Bédard: O.K. Et là les endroits, là... Pour être plus clair, là, c'était ma deuxième question.
Sur les juges magistrats, ça, c'est la deuxième possibilité: ajouter les pouvoirs. Et ce que vous me dites... Qu'est-ce qui empêche d'accorder ces pouvoirs à l'ensemble des juges de paix magistrats si on met la condition que... on les conditionne finalement à la disponibilité d'un juge? Autrement dit, ça va être seulement dans les endroits... on n'a pas à créer une catégorie particulière. À partir du moment où on met la condition que c'est dans les endroits où les juges ne sont pas disponibles, finalement, ça va s'appliquer principalement dans les régions. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Gagnon (Pierre): Écoutez, l'idée était de ne pas consacrer cette solution-là comme devant s'appliquer partout et faire en sorte qu'un beau jour on dise: Bien, coudon, ça nous coûte moins cher finalement un juge magistrat qu'un juge de la Cour du Québec, et faisons donc faire ces enquêtes-là par les juges magistrats.
M. Bédard: Si on assortit la condition, comme vous le proposez ? c'est votre proposition, si j'ai bien compris, de l'assortir à la disponibilité des juges ? à ce moment-là, on rencontre... donc on n'a pas à créer une autre catégorie de juges magistrats avec des pouvoirs plus grands? Tout simplement, ça va s'appliquer dans les régions administratives qui ont des juges qui... bien, des endroits où effectivement les juges ne sont pas disponibles. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Gagnon (Pierre): Peut-être, oui, peut-être. L'idée était de le limiter, là, surtout de lancer un message qu'on ne veut pas que la qualité globale de la justice, dans des gestes aussi importants que des enquêtes sur remise en liberté, soit diminuée de niveau par rapport à ce qu'elle est actuellement et que la règle continue à être un juge de la Cour du Québec.
M. Bédard: Mais pourquoi vous me dites «peut-être»?
M. Gagnon (Pierre): Peut-être?
M. Bédard: Dans le sens... Je vous pose la question suivante, simple, là. On n'a pas à créer d'autres catégories, c'est des juges magistrats avec... on ajoute le pouvoir que vous demandez, on l'assortit...
M. Gagnon (Pierre): ...tout le monde.
M. Bédard: ...on l'assortit de la condition que ce juge de paix magistrat ne pourra entendre qu'à la condition qu'il n'y ait pas de juge disponible, donc on ne crée pas de nouvelles catégories, on s'entend? C'est ça, votre représentation?
M. Gagnon (Pierre): Notre représentation était, à la base, l'idée d'ajouter ce pouvoir-là. Mais, puisque ça ne semble pas intéresser grand monde et qu'on est là pour discuter...
M. Dupuis: Ce n'est pas vrai, là. Ce n'est pas vrai.
M. Gagnon (Pierre): Non, mais... Oui. Non. Ce que je dis, ce qui n'est pas vrai, c'est que... Bien, ce que j'en comprends, puis je ne suis pas offusqué de ça du tout, c'est qu'on hésite à dire: On va donner ce pouvoir-là uniquement à certains. Nous, le message qu'on voulait envoyer en présentant ça, c'était de ne pas en faire une règle et que dorénavant ça se fasse comme ça.
Maintenant, quant à moi, là, je n'ai pas reparlé à mes gens, là, on est à vif, ici, là, et enregistrés, et tout, et tout, et je crois que ça pourrait être vivable de le faire tout simplement pour l'ensemble des juges magistrats et qui effectivement...
M. Bédard: Avec la condition.
M. Gagnon (Pierre): Avec les deux conditions ? les deux conditions, nous, on y tient ? le consentement des parties et aussi l'autre condition qui est l'incapacité ou l'absence du juge. Disons que... Oui?
M. Bédard: Puis ça, ça rencontrait... C'est votre proposition, purement et simplement.
M. Gagnon (Pierre): C'est notre proposition.
M. Bédard: Ce n'est pas la meilleure. La meilleure, vous dites: Plus de juges. Ça, je le comprends, dans la meilleure des justices, comme c'est le cas à Montréal, dans ces procédures-là contestées.
M. Gagnon (Pierre): Bien, je dis: Plus de juges ou répartis de telle sorte que ça ne se produise pas, des situations comme ça, là. Mais ça, je ne sais pas comment les répartir.
M. Bédard: O.K. Donc, si le ministre adoptait, et si, nous, comme commission, on adoptait votre deuxième proposition finalement, qui n'est pas votre première, je le comprends, mais de ne pas créer une nouvelle catégorie, mais plutôt d'étendre le pouvoir, tout en limitant avec la condition, vous ne seriez pas l'homme le plus heureux, mais ce serait mieux que ce qu'on a actuellement?
M. Gagnon (Pierre): Je passerais une belle fin de semaine quand même.
M. Bédard: Bon! C'est bon.
M. Gagnon (Pierre): Surtout que vous me donnez l'occasion de venir dans ma ville, à Québec, un vendredi après-midi, là. Je suis comblé.
M. Bédard: Mon but n'est pas de briser votre fin de semaine, rassurez-vous.
M. Dupuis: Me permettez-vous, M. le Président...
M. Bédard: Non, non, non, tantôt!
Le Président (M. Bordeleau): C'est le temps de parole de l'opposition.
M. Dupuis: Je connais Me Gagnon suffisamment bien pour savoir qu'il va passer une belle fin de semaine, de toute façon.
M. Gagnon (Pierre): Non, mais quand on me fait de la peine, des fois, ça me fait mal un petit peu. C'est plus dur.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député.
M. Bédard: Vous êtes enregistré, Me Gagnon. Faites attention. L'autre question, moi, qui m'inquiétait ? mais, comme j'ai des spécialistes devant moi, je vais en profiter: le nombre, 30, qui me semblait très peu en termes de répartition sur le territoire. Et là je me disais: même si on donnait suite à votre proposition, on arrive avec un nombre de 30 qui fait en sorte que ? j'ai l'impression, mais vous pouvez me détromper, ceux qui pratiquent dans le domaine, peut-être Me Lemoine ? finalement on va manquer d'effectifs. Je veux dire, il n'y a pas de... On risque même de créer le... On risque plutôt d'avoir la même problématique en termes de répartition qu'on a actuellement au niveau de la disponibilité des juges. Est-ce que j'ai une bonne lecture?
Mme Lemoine (Renée): C'est certain que le nombre, pour nous, c'était une préoccupation, la répartition également, là. Évidemment, on ne la connaît pas, la répartition, le nombre et la répartition, c'est une préoccupation importante.
n
(16 h 30)
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Je regardais dans l'arrêt Pomerleau, on donnait... enfin, je crois que c'est... les anciens juges de paix, les ante Ell, là, ils étaient 400, d'après ce que j'ai lu dans l'arrêt Pomerleau.
M. Bédard: Il y en avait 400, plus d'autres au niveau municipal, mais ils étaient 400 seulement dans les différents palais de justice et ministères, alors... Et d'où mon inquiétude. Est-ce que vous avez évalué... Parce que, là, regardez, j'ai deux préoccupations finalement, là: la première, c'est le nombre, et la deuxième, c'est la répartition. Est-ce que vous pensez qu'on ne doit pas imposer une répartition sans, je vous dirais... évidemment ayant toute la précaution nécessaire de ne pas intervenir dans le pouvoir judiciaire et dans le pouvoir administratif au niveau, je vous dirais, des fonctions qu'ont les juges au niveau administratif. Mais ne doit-on pas plutôt prévoir directement des juges magistrats résidents dans des endroits précis, en nombre suffisant? C'est... Jusqu'où on doit aller finalement pour s'assurer qu'en région on ne se retrouve pas avec une justice de deuxième zone? C'est tout simplement ça, ma préoccupation. Est-ce que vous pensez que mes préoccupations sont justifiées?
Mme Lemoine (Renée): Bien, vos préoccupations finalement sont les nôtres. On ne s'est pas questionnés, d'ailleurs on n'a pas vraiment eu le temps, je vous dirais, de se questionner sur cet aspect-là, sauf que ce qui est évident, c'est qu'il y a des régions où il y a des territoires plus grands à couvrir et, dans la répartition, ça va devoir être pris en considération. Est-ce que ça... Oui?
Le Président (M. Bordeleau): Me Gagnon, je crois que vous vouliez intervenir.
M. Gagnon (Pierre): Pardon?
Le Président (M. Bordeleau): Me Gagnon, vous vouliez intervenir, je crois.
M. Gagnon (Pierre): Oui, parce que j'ai eu, moi, des discussions là-dessus avec le juge en chef de la cour, avec les bâtonniers de différentes sections, notamment de la Côte-Nord et celles du Bas-Saint-Laurent et Gaspésie. Et, pour prendre un exemple, là, ce qu'on appelle l'Est du Québec, on entend parler de quatre juges de paix magistrats, par exemple; ça nous apparaît nettement insuffisant. Nous avons l'impression qu'il devrait y avoir, par exemple, pour faire un travail qui serait correct, là, et ne pas avoir une justice, une sous-justice en région, on pense qu'il devrait y avoir... par exemple, je sais qu'il doit y avoir ajout de juges de la Cour du Québec, notamment sur la Côte-Nord ? ça a été demandé depuis longtemps ? et on croit, par exemple, dans cette région-là, qu'il faudrait en avoir six pour faire le travail, donc assumant qu'il y aurait six juges magistrats dans cette région-là. Le seul problème, je pense, c'est qu'il faut en avoir en nombre suffisant pour permettre au juge en chef d'être capable d'en mettre suffisamment et de ne pas être obligé de restreindre partout à cause du nombre.
M. Bédard: Bien non, mais c'est sûr. Bien là...
M. Gagnon (Pierre): Alors, là-dessus, il faut, je pense, là, lui faire confiance.
M. Bédard: Regardez, si vous prenez 30, si on prend 30 actuellement, là ? moi, je fais la répartition sur le territoire, grosso modo ? on va l'avoir, j'imagine, éventuellement. C'est ce qu'on s'était dit. Mais il est évident qu'à 30, là, on ne couvre pas tout le territoire, c'est sûr là, ou très partiellement certains territoires. Alors là, je me dis... Parce qu'il y a du volume, il y a beaucoup de volume dans les grands centres, ce qui fait qu'ils en ont besoin aussi, là, dans les différentes autres fonctions, alors, ce qui fait qu'il n'en reste pas beaucoup, là, à répartir sur le reste du territoire, là. Il y a plus de juges que ça, là, sur le territoire à répartir. Alors là, je me dis: Comment on peut avoir la précaution de mieux les répartir?
Vous savez, j'ai ? avec tout le respect que j'ai pour la fonction judiciaire ? j'ai eu à discuter avec les juges administratifs, souvenez-vous, en commission. Puis, quand on leur parlait de régionalisation, ils n'avaient pas, sans être contre ça... mais eux, d'avoir le statut, par exemple, de résidence comme on a pour la Cour du Québec, au départ, je peux vous dire qu'ils n'étaient pas très chauds à l'idée, là. Puis on a eu un petit... une petite discussion un peu respectueuse, gentille, en même temps de leur dire: Écoutez, oui, tout le monde peut se déplacer, là, mais, en vrai, c'est important pour une population que les gens aient un territoire attitré, soient résidents donc. Et sans prêter de mauvaises intentions à personne, moi, je me dis: quelles précautions qu'on doit se donner pour faire en sorte que ces juges magistrats soient mieux répartis sur le territoire et soient... Est-ce qu'on doit les... mieux encadrer finalement cette répartition-là?
M. Gagnon (Pierre): Notre compréhension des juges de paix magistrats, c'est qu'ils seront de fait des résidents des régions, là. Il n'y aura pas un pool de 30 ou 40 juges magistrats à Québec ou à Montréal qui vont aller éteindre des feux un peu partout, là. J'ai compris qu'ils seraient dans les régions, distribués dans certains palais de justice selon les besoins. Et c'est dans ce sens-là qu'on vous dit, d'après les informations qu'on a pu avoir et certaines discussions préliminaires, qu'un nombre... par exemple, si on prend une région témoin, là, celle où j'ai eu les discussions, ce que j'appelle l'Est, le Bas-Saint-Laurent et la Côte-Nord, on a parlé de quatre, et tout le monde s'entend pour dire que ça devrait, par exemple, être un nombre de six, si l'on assume qu'il y aurait en plus certains ajouts d'un nombre de juges de la Cour du Québec, notamment sur la Côte-Nord.
M. Bédard: Mais peut-être... le ministre me dit qu'il a la répartition.
M. Dupuis: M. le Président, avec votre permission, je demanderais peut-être à la commission de faire une photocopie...
M. Bédard: Avec plaisir.
M. Dupuis: ...d'un document qui n'est qu'un document de travail.
M. Bédard: Oui, oui. On est conscients.
M. Dupuis: Évidemment, le projet de loi ? j'ai bien compris votre remarque préliminaire ? le projet de loi n'est pas adopté, mais on est ici pour en discuter.
M. Bédard: Et voilà.
M. Dupuis: Et avec toute l'ouverture d'esprit que je manifeste, vous savez bien que je vais le faire. Mais il y a, au ministère... Il y a eu un travail qui s'est fait sur la répartition. C'est un document de travail. C'est une proposition. Ça doit se faire en consultation avec la Cour du Québec, mais je le déposerais, le document.
Le Président (M. Bordeleau): Déposez, puis on va en faire faire des copies...
M. Dupuis: ...à tous les membres de la commission et au Barreau, je n'ai pas de problème. Maintenant, je vous dirai ? puis je vais laisser ensuite le député de Chicoutimi continuer ? M. le député de Chicoutimi, je vous dirai que le juge en chef de la Cour du Québec a évidemment déposé une lettre auprès du ministre avec ses remarques sur le projet de loi. L'avez-vous eue? Parce que... Non? O.K. On va donner une copie.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, je veux juste vérifier une chose: Le document, c'est pour les fins de distribution aux membres de la commission ou c'est un document que vous déposez à la commission, qui sera rendu public?
M. Dupuis: Oui. C'est pour fins de distribution aux membres. C'est-à-dire que c'est pour fins de discussion au cours de la commission. Rendu public, ça peut laisser présumer que je commets un outrage au tribunal puis jamais... un outrage à l'Assemblée.
Le Président (M. Bordeleau): Ça va. Alors, le document sera distribué dans les minutes qui suivent.
M. Dupuis: O.K. Je vais ajouter une donnée puis ensuite je vous laisse continuer. Le juge en chef de la Cour du Québec a fait des représentations au sujet du projet de loi n° 50 et, lui, suggère 35, 35. Nous, on a comme chiffre 31. Alors là, on n'est pas très loin les uns des autres. Ce n'est pas comme si on suggérait 15 puis qu'il suggérait 32 ou... Bon. Alors, on verra.
M. Bédard: Bien moi, pour aider la négociation, M. le ministre, moi, je vais partir à 40, ça fait qu'on devrait trouver un terrain d'entente.
M. Dupuis: On l'a fait... on a fait...
M. Gagnon (Pierre): J'ai entendu 40. Qui dit mieux?
M. Dupuis: Non, simplement pour situer la discussion comme il faut, pour ne pas qu'on...
M. Bédard: Non, non, mais c'est bien, je n'avais pas ces informations-là.
M. Dupuis: Et on l'a fait. Et, nous, on a fait la répartition. Le document de travail a été fait en tenant compte des distances, en tenant compte de la charge de travail par région. Donc, il y a des données objectives qui ont été calculées pour en arriver à cette répartition. Ça va?
M. Gagnon (Pierre): ...par votre document, M. le ministre, que probablement les quatre qui manqueraient, selon le juge en chef, ce sont probablement les deux de plus qui devraient être dans le Bas-Saint-Laurent puis deux autres probablement dans une autre grande région du Québec, et on se rejoindrait pas mal à ce moment-là.
M. Dupuis: C'est la théorie du verre à demi plein ou à demi vide. En tout cas, peu importe.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le député de Chicoutimi, si vous voulez poursuivre votre question.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, est-ce que je peux avoir aussi, tant qu'à y être, la lettre du juge en chef?
M. Dupuis: Oui.
M. Bédard: Merci. Alors, bon, le nombre va... Peut-être aussi, dans le cours de nos travaux, parce que ce projet de loi risque de ne pas être adopté ? pas parce que nous sommes contre, encore une fois, je le répète, mais parce qu'on va faire un travail sérieux ? ne sera pas adopté sûrement aujourd'hui, c'est clair, alors, peut-être à la lumière des informations, nous dire aussi à la commission... parce que le ministre et, je suis convaincu, les autres membres de la commission ont les mêmes préoccupations; ce n'est pas une histoire de comté ni de partisanerie, c'est de s'assurer que la justice se donne avec une qualité comparable et la plus haute qu'on peut avoir dans les différentes régions du Québec. Donc, au niveau de la répartition, j'aimerais peut-être avoir vos commentaires, peut-être particulièrement Me Lemoine, au niveau de l'Association des avocats de province, ça me serait très utile. Bon.
Donc, d'autres questions plus... J'aimerais peut-être en attendant... Il y a mon collègue aussi, le député de Mercier, qui aurait une question. Bien, peut-être que je vais le laisser, puis je vais revenir après ça parce que, sinon, je vais prendre tout le temps encore, là. Alors, M. le député de Mercier.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député, c'est beau.
M. Turp: J'ai la parole, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, vous avez la parole, M. le député de Mercier.
M. Turp: Merci, Mme la Présidente. C'est sur la question des articles 181 et 183 parce que vous faites des représentations sur ces deux articles-là dans votre mémoire également. Et, puisqu'on est ici pour régler un problème d'indépendance judiciaire, je crois que vous laissez entendre que le projet de loi pourrait en créer d'autres si l'article 81 est adopté...
Une voix: 181.
M. Turp: ... ? 181, pardon ? puisque vous considérez que la modification des attributions qui seraient données aux nouveaux juges de paix ne doit pas être faite par le biais d'un règlement mais plutôt par le biais d'amendements législatifs. Alors, j'aimerais peut-être que vous alliez un petit peu plus loin là-dessus. Est-ce que donc vous êtes d'avis et êtes convaincu que le pouvoir réglementaire que veut s'octroyer le gouvernement poserait des problèmes d'indépendance judiciaire?
n
(16 h 40)
n
Et le nouvel article 183, qui est celui qui veut qu'il doive y avoir un rapport du ministre de la Justice sur les activités des juges de paix ? sur une base mensuelle, d'ailleurs ? que ce rapport aussi poserait des questions d'indépendance judiciaire. D'ailleurs, c'est un rapport qui, à ma connaissance, n'existe pas dans l'état actuel de la Loi sur les tribunaux judiciaires. Alors, là-dessus, vous semblez être d'avis que l'obligation de faire ce rapport ne devrait pas exister. Alors, j'aimerais peut-être vous entendre davantage là-dessus. Est-ce que vous souhaitez donc le retrait de cet article 183 et, pour l'article 181, une modification législative fondamentale?
M. Gagnon (Pierre): Pour 183, nous pensons que ça touche vraiment à l'indépendance judiciaire, et je pense que c'est le rôle du Barreau de vous souligner l'importance et de soutenir l'autorité du pouvoir judiciaire, et il nous apparaît qu'effectivement ça heurte assez directement. On n'a qu'à imaginer le juge en chef qui déciderait qu'il ne fasse pas ce rapport-là une année. Vous allez faire quoi? Allez-vous le citer ou allez-vous prendre une plainte pénale pour ne pas avoir respecté la loi? Alors, on voit un peu que c'est comme... J'ai plutôt l'impression que ça a été peut-être calqué sur un autre projet de loi, là, de style plutôt administratif où des rapports comme ça... C'est un peu mon impression.
Le premier élément touche moins... forcément là je ne pense pas qu'on parle d'indépendance judiciaire, c'est plutôt que, de modifier une loi par un règlement, ça nous apparaît un peu surprenant parce que d'habitude je pense qu'on modifie une loi par une loi, et on s'interrogeait. Peut-être que dorénavant ça pourra se faire, mais il ne nous semblait pas que c'était la règle, de modifier une loi par un règlement.
M. Turp: Mais, dans des cas exceptionnels, le gouvernement se donne parfois le pouvoir de modifier des lois par règlement, mais c'est très, très exceptionnel. Et, dans ce cas-ci, il s'agit effectivement de l'attribution de compétences à des juges et alors peut-être que ça, ça ne remplit pas du tout le caractère exceptionnel, là, puisqu'il peut s'agir là d'indépendance, même entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. Alors, je pense que votre référence aux garanties constitutionnelles d'indépendance et d'impartialité, dans le mémoire, à la page 3, est juste, et peut-être pourrions-nous vous inviter à insister davantage là.
M. Gagnon (Pierre): Nous, naturellement, c'est une remarque que notre comité a faite de façon assez spontanée. Vous comprendrez aussi qu'on reçoit ce projet de loi là, là, quelque chose comme jeudi dernier; nos gens se réunissent vendredi et se réunissent à nouveau lundi, et on n'a pas écrit de thèse là-dessus, là. Mais, prima facie, comme on dit, ou à sa face même, il nous apparaît qu'il y a ces deux problèmes-là, et on allume un feu rouge ou un feu jaune, en disant: Attention, il y a quelque chose ici. On pourrait par exemple creuser plus sur cette question-là, mais on pense qu'il faut y faire attention.
M. Turp: Juste une dernière question sur l'article 183. Donc, je comprends que vous êtes d'avis... cet article-là ne passerait même pas le test du principe constitutionnel d'indépendance judiciaire qui pourrait même être contesté au plan constitutionnel?
M. Gagnon (Pierre): Bien, je ne dis pas qu'ils le contesteraient nécessairement, là, mais si, de fait... Ça pourrait. Je pense que ce serait embêtant, ce serait embêtant de le maintenir là. Mais c'est plus, nous, quant à l'idée... Parce qu'on se doute bien qu'il y a une collaboration ? d'ailleurs, j'espère, puis je sais qu'il y a une collaboration entre la cour et le ministère de la Justice parce qu'ils s'échangent des informations statistiques régulièrement, ce qui est correct aussi ? mais d'en faire une obligation et de faire un rapport, c'est surtout ça qui heurte finalement.
M. Turp: Juste une question de terminologie, et, puisque vous êtes là, on en profite, là: Comment vous avez réagi aux nouveaux termes qui sont proposés là, «juge de paix magistrat», «juge de paix fonctionnaire de justice»? Est-ce que ça vous paraît des termes appropriés? Est-ce qu'il y a des alternatives qu'on pourrait envisager? Je pense surtout à juge de paix fonctionnaire de justice, c'est assez... ça me semble un peu contradictoire, la notion d'un juge fonctionnaire, même s'il est fonctionnaire de justice. Est-ce qu'il n'y aurait pas une terminologie plus appropriée pour décrire les juges de paix qui n'ont pas les pouvoirs que ceux que l'on veut conférer aux juges de paix dits magistrats?
M. Gagnon (Pierre): Je dois admettre très humblement que nous n'avons pas eu le temps de nous rendre dans notre analyse... Il faut que vous compreniez ? prenez-nous en pitié un peu ? qu'on en a eu huit ou neuf, de ces projets-là qui nous sont tombés dessus la semaine passée, et on y va jour et nuit pour aller le plus rapidement possible. On n'est pas arrivés à ce niveau de détail, mais ça pourrait se... si on avait un petit peu de temps ou si on nous demande de regarder ça, on pourrait demander à notre comité d'aller... de faire une recommandation sur la terminologie parce que ça fait lourd. En tout cas, là, ça commence... M. le juge magistrat fonctionnaire, avec pouvoirs étendus ou non étendus, c'est long à dire.
M. Turp: Voyez-vous, moi, ce que j'apprécierais pour les fins des travaux de notre commission, surtout sur la notion de juge de paix fonctionnaire de justice, là, ça m'apparaît lourd comme vous le dites et ça m'apparaît un peu contradictoire... Un juge fonctionnaire, là, ça ne me paraît pas très compatible au plan de la terminologie, là.
M. Gagnon (Pierre): Malgré que des juges de paix fonctionnaires, ça fait quand même assez longtemps qu'on est habitués d'en voir. C'est peut-être passé dans notre... dans nos moeurs et puis on s'en offusque moins. Mais si la commission apprécie que nous fassions la démarche, on peut demander à notre comité de nous revenir sur ce point-là. On pourrait vous envoyer une note, au président... à la présidente de la commission, madame.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, s'il vous plaît, à la commission.
M. Turp: Bien, en tout cas, les députés de l'opposition officielle pensent que ce serait utile, n'est-ce pas?
M. Gagnon (Pierre): On va l'envoyer... on va l'envoyer à tout le monde.
La Présidente (Mme Thériault): Vous l'envoyez au secrétariat de la commission, M. le bâtonnier, ça nous fera plaisir.
M. Turp: Voilà. Au Procureur général.
M. Gagnon (Pierre): On repart toujours d'ici avec des devoirs, vous savez, puis on les fait toujours.
La Présidente (Mme Thériault): Merci.
M. Turp: Le ministre va vous donner du temps, je pense, aussi.
La Présidente (Mme Thériault): Merci.
M. Dupuis: Mme la Présidente, me permettez-vous une remarque?
La Présidente (Mme Thériault): Non, pas du tout, puisqu'il reste deux minutes au député de Chicoutimi, et je vais le laisser terminer son temps, M. le ministre, merci.
M. Dupuis: Ah! O.K. Vous êtes durs avec moi.
M. Bédard: Non, au contraire, au contraire.
M. Turp: Nous autres, on respecte nos...
M. Bédard: Non, mais je suis à la veille d'être dur tout court. Oui, effectivement, là, mais pas avec vous. Je lisais un des articles qui est là, je lisais rapidement l'avis, là, des juges, là. Ça me réconforte. Je garde certains réflexes. L'article 168 ? un des aspects a été soulevé par les juges ? avait la même problématique. Si vous prenez l'article 168 du projet de loi... qui modifie l'article 168 plutôt, donc l'article... le premier... le deuxième article, je crois, là, donc l'article 1 qui fait les modifications. Allez à l'article 168. Deux choses m'interrogeaient là.
J'ai une première réponse en lisant l'avis de la cour, du juge en chef de la Cour du Québec. Bon, le fait que, si le juge de paix recouvre... on parle des problématiques relativement à quelqu'un qui est atteint d'une incapacité, un juge magistrat qui est atteint d'une incapacité physique, mentale permanente, ou physique plutôt, ou mentale permanente, où dans le deuxième paragraphe on prévoit que, si le juge de paix recouvre la santé, le gouvernement peut lui permettre de reprendre ses fonctions. Ce qui me surprenait, là. Et là ce que je comprends... Pourquoi il y aurait une discrétion gouvernementale à quelqu'un qui... à qui on a déclaré qu'il était inamovible, qu'il ne pourrait pas reprendre? Ça, je trouvais qu'il y avait une problématique évidente, mais les juges semblent d'accord avec moi. Donc, j'imagine que vous le partagez aussi.
L'autre... et même l'autre, et là j'ai... Les juges, peut-être que ça existe dans la loi, mais, même dans les cas d'incapacité, on dit: «...qui, de l'avis du gouvernement», «le juge de paix magistrat atteint d'une incapacité physique ou mentale permanente qui, de l'avis du gouvernement ? et là ? de l'avis du gouvernement, l'empêche de remplir ses...» Est-ce que ça vous a heurté, vous, une telle disposition ou une telle rédaction ou c'est une rédaction qu'on retrouve dans d'autres types, au niveau des... bon, que ce soient les juges administratifs, mais je vous dirais même au niveau de la Cour du Québec et de la Cour supérieure?
M. Gagnon (Pierre): Je pense que ça m'apparaît... puis je ne sais pas, là, les personnes qui ont rédigé le texte, peut-être que ce sont nos amis les juristes de l'État qui ne sont pas loin d'ici et que je salue en passant, mais, à quelque part, j'ai l'impression que c'est un peu peut-être un texte de tribunal administratif. Ça m'apparaît des notions de tribunal administratif tout comme la question de faire des rapports, tout comme... Alors, j'ai l'impression qu'on devrait enlever, pour une question...
M. Bédard: ...d'indépendance.
n
(16 h 50)
n
M. Gagnon (Pierre): ...d'indépendance de la magistrature, je pense qu'on devrait enlever ce membre de phrase là, «de l'avis du gouvernement»...
M. Turp: Bien oui.
M. Bédard: Ça vous heurte aussi.
M. Gagnon (Pierre): ...et aussi remplacer le «peut» par le «doit».
M. Bédard:
«Doit». Ça...
M. Gagnon (Pierre): Je suis... J'avoue qu'on a moins porté d'attention, mais je le vois dans le texte de M. le juge en chef, et je pense que ce sont des évidences, là, que des corrections devraient être apportées.
M. Bédard: Là, je n'ai plus de temps malheureusement, hein?
La Présidente (Mme Thériault): Vous allez voter bientôt.
M. Bédard: On va aller voter? Peut-être simplement, là, l'article 162, vous l'avez évalué, là. Deux choses...
M. Dupuis: Page...
M. Bédard: ... ? 162, excusez ? l'article 162 qui prévoit les nominations, là. On dit au départ, bon: «Les juges de paix magistrats sont nommés parmi les avocats ayant exercé[...] ? 10 ans de pratique ? au moins 10 ans.» Et là, après ça, on dit: «Peuvent être considérées les années au cours desquelles une personne a acquis une expérience juridique pertinente après l'obtention d'un diplôme d'admission au Barreau...» Ça, j'imagine qu'un diplôme d'admission au Barreau du Québec... C'est après avoir passé son Barreau ou avant?
M. Gagnon (Pierre): Oui, c'est quelqu'un qui est admis au Barreau.
M. Bédard: C'est seulement l'inscription?
Une voix: Oui.
M. Bédard: O.K.
M. Turp: C'est quoi, la différence?
M. Bédard: Bien oui, c'est ça. «Ou d'un certificat d'aptitude à exercer la profession d'avocat». Et là, bon... On n'a pas beaucoup de temps, c'est ça qui est malheureux, là.
M. Dupuis: ...certificat de bonnes moeurs et...
M. Bédard: Oui, oui.
M. Turp: C'est inclus là-dedans.
M. Bédard: Mais là, moi, ce que je voudrais savoir: Est-ce que vous ne pensez pas qu'un tel type de disposition... Je comprends peut-être la volonté, celle de permettre à ceux qui le sont actuellement de pouvoir être admissibles à certains concours, tout ça. Mais est-ce que vous ne pensez pas que ça devrait faire l'objet d'une clause crépusculaire? Dans le sens que les premiers peut-être qui ont l'expérience, qui ont été juges de paix... deux juges de paix qui peuvent exercer, à qui on... qui ont démontré, dans le temps, leur compétence, peuvent être admissibles à des concours qui vont être prévus. Mais vous ne pensez pas que dorénavant, après avoir passé ce premier bassin de 35, on devrait garder strictement: Les juges de paix magistrats seront nommés parmi les avocats ayant exercé 35 ans de pratique?
M. Gagnon (Pierre): C'est une bonne...
M. Dupuis: Ayant exercé combien?
M. Turp: 10 ans.
M. Bédard: 10 ans.
M. Gagnon (Pierre): Autrement dit, l'idée serait de pouvoir protéger ceux qui sont déjà là actuellement, ce qui est correct aussi, mais pour l'avenir, ça m'apparaît correct, oui.
M. Turp: Ce serait transitoire.
La Présidente (Mme Thériault): Merci.
M. Dupuis: Je sais qu'il faut suspendre. Me permettez-vous vraiment une très courte... Ce que je veux vous dire, M. le député de Chicoutimi, et madame, et messieurs, c'est qu'à la fois l'article 168 et à la fois l'article que vous venez de citer, 162, sont des copies conformes d'articles au même effet pour la Cour du Québec, qui sont inclus dans la Loi sur les tribunaux judiciaires, de telle sorte que je ne discute pas de la pertinence de les modifier comme vous l'entendez, mais, s'il fallait le faire, il faudrait le faire dans la Loi sur les tribunaux judiciaires. Je ne me permettrais pas, je pense, de les modifier dans le projet de loi n° 50 sans les modifier dans la Loi sur les tribunaux judiciaires. C'est simplement ça que je veux donner comme remarque.
M. Turp: Mais le projet de loi n° 50 modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires.
M. Dupuis: Oui, mais pas là-dessus.
M. Turp: Oui, mais on pourrait donc l'ajouter...
Document déposé
La Présidente (Mme Thériault): Donc, je m'excuse, je dois suspendre les travaux, sauf qu'avant de suspendre les travaux je vais déposer en commission la correspondance qui nous est parvenue de l'Association québécoise des avocats et avocates de la défense, et nous allons suspendre les travaux. Et, au retour, nous entreprendrons l'étude détaillée. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 54)
(Reprise à 17 h 18)
La Présidente (Mme Thériault): Puisque nous avons quorum, je déclare la séance ouverte.
Étude détaillée du projet de loi n° 50
J'aimerais rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives eu égard au statut des juges.
Donc, sans plus tarder, je vais passer la parole au ministre pour la présentation du projet.
Loi sur les tribunaux judiciaires
Des juges de paix
Les juges de paix fonctionnaires
M. Dupuis: Alors, l'article 1, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Thériault): L'article 1, M. le ministre.
M. Dupuis: Alors, la partie III.1 de la Loi sur les tribunaux judiciaires est remplacée par la suivante:
«Partie III.1. Des juges de paix.
«Section I. Les juges de paix fonctionnaires de justice.» Alors, la partie III.1. Cet article remplace la partie III.1 de la Loi sur les tribunaux judiciaires concernant les juges de paix par une nouvelle partie instituant deux types de juges de paix, soit les juges de paix fonctionnaires de justice et les juges de paix magistrats.
Cette nouvelle partie se divise en trois sections. La première porte sur le mode de nomination bien sûr et les pouvoirs attribués aux juges de paix fonctionnaires de justice, la deuxième partie contient les règles applicables aux juges de paix magistrats, et la troisième section contient des règles communes qui leur sont applicables et qui concernent notamment la prestation de serment et le pouvoir du gouvernement de modifier leurs attributions respectives.
La section point I, Les juges de paix fonctionnaires de justice, cette section contient trois articles qui portent, comme l'intitulé l'indique, sur les juges de paix fonctionnaires de justice. Ça va?
La Présidente (Mme Thériault): Oui. Oui, ça va? M. le député de Chicoutimi, avez-vous des questions?
M. Bédard: Là, on est sur l'article 1. Excusez-moi, Mme la Présidente, j'étais en train de... Alors, nous sommes... Quelle disposition, actuellement, là?
M. Dupuis: L'article 1, M. le député. C'est peut-être là que vous voulez discuter l'appellation des juges de paix.
n(17 h 20)nM. Bédard: Oui, exactement, là, et je laisse plus ça à mon collègue le député de Mercier qui est un spécialiste en matière d'utilisation des termes juridiques, des bons termes, là, effectivement, puis qui nous a été de bonne...
La Présidente (Mme Thériault): De bon conseil.
M. Bédard: De bon conseil pour cette commission.
M. Turp: Jurilinguiste.
M. Bédard: Oui, juridicolinguiste.
M. Turp: Ce serait peut-être bon de faire appel à des vrais jurilinguistes, là, sur ces questions-là. Mais je lisais dans le jugement de la Cour suprême, dans l'affaire Ell, que c'est une appellation du... même du XVIIIe siècle, qui nous vient d'Angleterre, là, «justices of the peace», et on a de toute évidence repris ça dans nos lois, dans les lois fédérales, le Code criminel. Le Code criminel... d'ailleurs, l'article 2 définit «juge de paix» de façon assez curieuse et un juge de paix est un juge de paix, et là c'est les pouvoirs qui le définissent.
Mais je crois qu'on devrait avoir la préoccupation de faciliter le travail des plaideurs, comme le laissait justement entendre le bâtonnier, et le souci d'une certaine simplicité là, d'une certaine innovation dans le choix des termes. Alors, peut-être que, lorsqu'il s'agit du juge de paix aux pouvoirs étendus, là, donc celui de la section II, peut-être qu'on pourrait tout simplement limiter ça à la notion de magistrat. Pourquoi devrait-on utiliser la notion de juge de paix magistrat pour évoquer l'idée d'un juge qui n'est pas tout à fait un juge parce qu'il a moins de pouvoirs qu'un juge de la Cour du Québec, mais quand même qui a un statut plus élevé que le juge de paix fonctionnaire de justice? Et peut-être qu'on pourrait trouver une autre façon de simplifier l'appellation «juge de paix fonctionnaire de justice» parce que, là, ça me paraît totalement contradictoire. Le juge et le fonctionnaire, même s'il y a une certaine pratique, ça me paraît trop long et...
M. Bédard: Pourquoi ne pas garder «juge de paix»?
M. Turp: Garder «juge de paix», j'y ai pensé, mais la notion de juge de paix dans le code pénal, le Code criminel, est une notion plus vaste que serait celui que l'on retrouverait à la section I. Je pense qu'on devrait un petit peu s'interroger, peut-être se donner un petit peu de temps pour y réfléchir, là, et ne pas adopter cette terminologie immédiatement. Mais je crois qu'il y a un problème. Je crois que les appellations ne sont pas appropriées.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: Je vais être bien transparent avec vous. Il y a des susceptibilités, particulièrement chez les juges ? mais je ne le dis pas avec préjudice à leur égard ? sur les appellations. Vous pouvez ne pas aimer cette appellation-là. Je vous dirai que j'ai eu un commentaire depuis le dépôt du projet de loi n° 50 sur les appellations, c'est le juge en chef de la Cour du Québec qui, lui, a une objection à ce que ? la section II ? à ce que les juges de la section II ou les catégories de la section II soient appelés juges de paix magistrats. Il préférerait que ce soit «juges de paix à pouvoirs étendus». Sans compter qu'on me souffle à l'oreille à ma gauche que ce n'est pas français, «juges de paix à pouvoirs étendus». C'est ça?
(Consultation)
M. Dupuis: C'est ça, c'est une appellation commune. Si le juge en chef était avec moi ? et je vais le rencontrer sous peu pour d'autres sujets, y compris celui-là ? peut-être que je lui dirais qu'actuellement il y a l'appellation... actuellement, dans le langage qu'on utilise, il y a «juges de paix à pouvoirs étendus». Alors, si on veut faire une différence avec cette nouvelle catégorie de juges et celle qui existait jusqu'à maintenant, il faut qu'il y ait une différente appellation.
Ceci étant dit, sur l'appellation «juges de paix fonctionnaires de justice», tantôt je disais au sous-ministre: Peut-être qu'on pourrait les appeler des fonctionnaires de justice, mais il me répond avec justesse: Nous sommes des fonctionnaires de justice.
M. Turp: Des officiers de justice.
M. Dupuis: Exact, des officiers de justice, exactement. Donc, il faut vraiment trouver une appellation qui soit différente de celle-là. Je vous dirai, M. le député, que je n'ai eu aucun commentaire négatif, sauf le vôtre, et il est important, mais je n'ai eu aucun commentaire négatif sur l'appellation «juges de paix fonctionnaires de justice». J'aurais tendance à, pour l'instant, le garder, mais ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas continuer. Je pense qu'on ne terminera pas l'étude article par article du projet de loi ce soir, là. Ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas continuer à nous faire part de vos commentaires à ce sujet-là puis même à faire une recherche imaginative, mais, encore une fois, je vous dirai que, pour l'instant, je préférerais la garder, cette appellation-là, à moins d'en avoir une meilleure, éventuellement. Ça va?
M. Turp: Ça va. Je vais vous faire une petite recherche, M. le ministre, pour vous proposer une alternative.
M. Dupuis: C'est bon. Parfait.
La Présidente (Mme Thériault): Donc, ça va pour l'article 16?
M. Bédard: Voulez-vous le suspendre ou l'adopter?
M. Dupuis: Adopté sur division.
M. Turp: Oui, mais si... Je ne ferai pas ma recherche pour rien, M. le ministre, là.
La Présidente (Mme Thériault): Non. Mais on peut revenir, là.
M. Dupuis: O.K. Bien non, mais pensez-vous vraiment que, si vous arrivez avec une bonne suggestion, parce qu'on l'aurait adopté sur division, je refuserais de le réouvrir? Mais suspendu, si vous voulez. Ça ne me dérange pas.
M. Bédard: Bon, bien, écoute, on reprendra le débat.
M. Turp: On reviendra.
M. Bédard: Parce que ça nous heurtait tous mais, en même temps, la difficulté de l'utilisation de «juges de paix», on sait c'est quoi... Compliqué.
M. Dupuis: Très honnêtement, très honnêtement avec vous, ça peut heurter, ne pas heurter. C'est quand on cherche la solution que souvent on arrive à un cul-de-sac. Mais ça n'empêche pas qu'on puisse la rechercher. Ça va? Vous avez le mandat.
M. Turp: Merci.
La Présidente (Mme Thériault): Donc, l'article 1 est suspendu. Nous allons passer à l'article n° 2. M. le ministre.
M. Dupuis: Alors, c'est l'article 158. C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, excusez-moi.
M. Dupuis: Ça va, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Thériault): Oui, ça va. L'article 158, à l'intérieur...
M. Dupuis: Vous voyez que je m'adapte à vos diktats, n'est-ce pas? J'avais même un doute sur le numéro de l'article parce que vous n'aviez pas le même que moi, là.
La Présidente (Mme Thériault): Mais je trouve que vous faites d'excellents progrès, M. le ministre.
M. Dupuis: Alors, l'article 158 se lit comme suit: «Le ministre de la Justice nomme, par arrêté, les juges de paix fonctionnaires de justice.
«L'arrêté ministériel peut leur conférer compétence sur tout le territoire du Québec ou sur les districts judiciaires ou les territoires qu'il indique.
«Ces juges de paix exercent leurs fonctions auprès de la Cour supérieure et de la Cour du Québec d'une part, ou auprès d'une cour municipale, selon ce qu'indique l'arrêté.» Est-ce que vous souhaitez que je lise la note ou c'est clair?
M. Bédard: Allez-y. Oui, oui.
M. Dupuis: Oui, c'est beau? O.K.
M. Bédard: Vous pouvez lire la note.
M. Dupuis: Alors, cet article prévoit que les juges... D'abord, avez-vous... Vous avez ce document-là, n'est-ce pas?
M. Bédard: Oui, oui, je l'ai devant moi. C'est ça.
M. Dupuis: O.K. Je constate que ce que je demandais au ministre de la Sécurité publique de l'époque, ce que j'exigeais qu'il me produise, qu'il me refusait toujours, je mets ma demande en pratique et je la fournis d'avance maintenant.
M. Bédard: Je l'apprécie, mais c'est peut-être dû à mon esprit de collaboration.
M. Dupuis: Je voulais avoir ces cahiers-là. Je voulais avoir ces cahiers-là puis je ne les avais jamais.
M. Bédard: C'est peut-être dû à mon esprit de collaboration qui fait en sorte que j'y ai accès, et je tiens à remercier le ministre aussi.
M. Dupuis: Cet article prévoit...
M. Turp: Votre prédécesseur à la justice le faisait, par exemple. Lorsqu'on a étudié les projets de loi sur la justice administrative, nous avions ces cahiers.
M. Dupuis: Non, non, à l'occasion, le ministre de la Sécurité publique de l'époque, Serge Ménard, le faisait, mais à l'occasion seulement. Alors, je m'en plaignais quand il ne le faisait pas.
M. Bédard: Est-ce que vous me dites que vous allez toujours le faire?
M. Dupuis: Moi, je n'ai pas de problème avec ça.
M. Bédard: Parfait.
M. Dupuis: Je pense que ça facilite l'étude.
M. Turp: Ça permettra une meilleure collaboration de l'opposition officielle.
M. Bédard: On l'apprécie.
M. Dupuis: Cet article prévoit que les juges de paix fonctionnaires de justice sont nommés par arrêté du ministre de la Justice, avec la compétence territoriale prévue dans leur acte de nomination. Il prévoit de plus, comme c'est le cas actuellement pour les juges de paix à compétence restreinte, que les juges de paix fonctionnaires de la justice exerceraient leurs attributions à la Cour du Québec, à la Cour supérieure et dans les cours municipales, tout en conservant leur statut de fonctionnaires rattachés au ministère de la Justice ou, selon le cas, à la municipalité concernée.
Cet article s'inspire en partie de l'article 158 de la Loi sur les tribunaux judiciaires. Il s'en distingue toutefois en ce qui a trait aux juges de paix fonctionnaires de la justice, étant donné que leurs compétences d'attribution seraient désormais établies dans la loi ou un règlement plutôt que dans leur acte de nomination.
Cet article, au surplus, doit être lu de concert avec les dispositions communes prévues aux articles 180 à 182 de la Loi sur les tribunaux judiciaires introduits par l'article 1 du présent projet de loi. Ces articles portent sur la prestation de serment, sur les pouvoirs du gouvernement de modifier les attributions des juges de paix et les fonctions de greffier des juges de paix. Et plus de 400 fonctionnaires ont actuellement le statut de juge de paix à pouvoir restreint dans les divers 52 points de service de la Direction générale des services de justice. S'ajoutent à ce nombre les quelque 200 fonctionnaires municipaux exerçant les fonctions de juge de paix dans les cours municipales. Ça va?
La Présidente (Mme Thériault): Ça va.
M. Dupuis: Adopté.
M. Bédard: O.K. Peut-être...
M. Turp: Moi, j'ai une question.
La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le député de Mercier.
M. Turp: Alors, pourquoi a-t-on senti le besoin de qualifier l'arrêté au paragraphe 2, à l'alinéa 2, d'«arrêté ministériel»? Dans l'état actuel de l'article 158, il est question d'un arrêté. Là on ajoute la notion d'arrêté ministériel. Je voudrais comprendre pourquoi on qualifie l'arrêté de ministériel.
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.
M. Dupuis: Peut-être que M. Mercier peut répondre.
n(17 h 30)nLa Présidente (Mme Thériault): Oui, Me Mercier peut répondre. Me Mercier.
M. Mercier (Jacques): Tous les arrêtés ministériels qui sont pris par le ministre de la Justice et par les autres ministres portent en en-tête «arrêté ministériel». Alors, le premier alinéa de 158 proposé parle d'un arrêté qui est pris par le ministre de la Justice. Alors, un arrêté qui est pris par un ministre, c'est un arrêté ministériel. C'est la formule consacrée, je pourrais dire.
M. Dupuis: Ah! O.K.
M. Turp: Est-ce que la formule...
M. Dupuis: Donc, ça n'ajoute rien, c'est ça que je comprends.
M. Mercier (Jacques): Ça ne rajoute rien.
M. Dupuis: C'est... Quand le premier paragraphe dit: «Le ministre de la Justice nomme, par arrêté...», au fond, dans le deuxième paragraphe, on aurait pu dire «l'arrêté pris par le ministre de la Justice» mais au contraire on dit «l'arrêté ministériel».
M. Mercier (Jacques): C'est ça.
M. Dupuis: C'est ça.
M. Turp: Mais qu'est-ce qui faisait que l'article 158, qui est maintenant abrogé par celui-ci, ne référait pas à la notion d'arrêté ministériel?
Une voix: Le dernier mot du deuxième alinéa de 158 actuel.
M. Turp: L'article 158 actuel: «Le ministre [...] peut, par arrêté, nommer des juges de paix avec compétence sur tout le Québec [...] sur les districts ou [...] territoires qu'il indique», il est de toute évidence scindé en deux avec les deux premiers alinéas du nouvel article 58. Et là on a senti le besoin d'ajouter la notion d'arrêté ministériel. Alors, je veux vraiment comprendre. Est-ce que c'est une nouvelle technique de rédaction législative? Est-ce qu'on ajoute dorénavant, dans les lois, le mot «ministériel» quand on utilise le mot «arrêté»?
M. Mercier (Jacques): Il faut dire que l'actuel article 158 est excessivement vieux, ça... À mon avis, c'est antérieur à la refonte des lois de 1964. On ne rédige plus les lois comme on le faisait dans ce temps-là.
M. Turp: Mais il a été amendé en 2002.
M. Mercier (Jacques): Oui, mais pas sur...
M. Turp: Mais pas sur cette question?
M. Mercier (Jacques): Pas sur ça.
M. Turp: Et est-ce qu'il y a d'autres exemples alors où on utilise le mot «arrêté ministériel», dans des lois récentes?
M. Mercier (Jacques): Je pourrais essayer de vous en trouver. Je n'en ai pas ici, mais il y en a certainement.
M. Bédard: Peut-être une question...
M. Mercier (Jacques): Certainement.
M. Bédard: ...plus technique.
M. Mercier (Jacques): Oui.
M. Bédard: Ça, là, évidemment ça fait référence plus aux juges de paix actuels, là, c'est ça? On confirme le statut des juges de paix qu'on retrouve dans tous les palais de justice, qui sont au nombre de tout près de 400, c'est ça?
M. Dupuis: C'est ça. Ça, c'est ceux qui ne prennent pas de... n'ont pas de fonctions judiciaires qui affectent le droit des citoyens, de telle sorte qu'ils n'ont pas besoin... On n'a pas besoin de...
M. Bédard: De garantie.
M. Dupuis: ...garantir ce principe d'indépendance.
M. Bédard: Donc, ceux qui étaient là.
M. Dupuis: Ils vont effectuer des fonctions que vous avez notées dans l'annexe, là: ils vont émettre des sommations, des choses comme ça.
M. Bédard: Est-ce que c'est le même nombre, simplement? Est-ce que c'est le même nombre? Je pense que oui. C'est ça? C'est ça qu'on m'avait dit.
M. Dupuis: Ce sont les mêmes personnes, d'après moi, hein?
M. Bédard: Les mêmes personnes, c'est ça.
M. Mercier (Jacques): Les mêmes, oui.
M. Dupuis: D'après moi, c'est les mêmes personnes, sauf qu'elles vont se voir être délestées...
M. Bédard: Clarifiées.
M. Dupuis: ...d'un certain nombre de pouvoirs.
M. Dionne (Louis): Non, on a retiré leurs actes de nomination, puis on les a repris, avec les pouvoirs restreints, de façon à ce qu'il n'y ait plus de problème en regard de Ell et Pomerleau au niveau de l'indépendance, en ne leur conservant que des pouvoirs qui n'affectent pas, au sens de Ell et Pomerleau, les libertés des individus. Alors, d'émettre des sommations, ça ne posait pas de problème, d'émettre des dénonciations, de renvoyer de consentement, des choses comme celles-là. Mais il a fallu quand même leur retirer ce qui était problématique. Donc, ça a pris d'autres actes de... bien, d'autres décrets, d'autres actes de nomination.
M. Turp: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault): Et pour les fins d'identification, c'était Me Louis Dionne, sous-ministre.
M. Dionne (Louis): Louis Dionne, sous-ministre de la Justice et sous-procureur général.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député.
M. Turp: Je veux juste faire remarquer aussi que, dans le troisième alinéa, on ne réfère qu'à un arrêté. Alors, je ne sais pas... Pour les fins du débat, là, moi, je pense qu'on pourrait adopter cet article-là, mais je voudrais qu'on réserve l'adoption de l'alinéa deux après que la vérification ait été faite que c'est une pratique maintenant de rédaction législative de qualifier les arrêtés de ministériels.
M. Dupuis: On en prend note. On en prend note.
La Présidente (Mme Thériault): D'accord? Donc...
M. Dupuis: Alors, adopté sous réserve de...
La Présidente (Mme Thériault): De vérification.
M. Dupuis: ...de vérification au sujet du deuxième alinéa.
M. Turp: De l'alinéa deux. C'est ça.
M. Dupuis: Ça va?
M. Bédard: Adopté.
La Présidente (Mme Thériault): Adopté. M. le ministre, 159.
M. Dupuis: Alors, l'article 159 prévoit que «les juges de paix fonctionnaires de justice exercent leurs fonctions à titre amovible».
Alors, cet article prévoit que la nomination de juges de paix fonctionnaires de justice est effectuée de façon amovible, à l'instar des dispositions prévues actuellement dans la Loi sur les tribunaux judiciaires. L'amovibilité répond à un besoin d'efficacité institutionnelle et respecte les arrêts rendus dans l'affaire Ell et dans l'affaire Pomerleau, compte tenu des fonctions qui seraient attribuées aux juges de paix fonctionnaires.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. Bédard: Donc, ce que je comprends, c'est qu'évidemment ça rencontre les conditions. Est-ce qu'on a réfléchi à la... J'imagine que ces gens-là sont des gens qui vont gravir dans la fonction publique... bien dans leurs postes; ils n'occupent pas toute leur vie ces postes-là. J'imagine aussi qu'ils sont appelés à occuper d'autres fonctions.
M. Dupuis: Non, mais ils occupent effectivement d'autres fonctions que celles qui vont être prévues à l'annexe.
M. Bédard: C'est ça, pas seulement juges de paix.
M. Dupuis: Absolument. Ils sont greffiers dans les... Ils sont greffiers auprès de la Cour supérieure, Cour du Québec, cour municipale. Ils exercent...
M. Bédard: D'où l'importance de...
M. Dupuis: ...des fonctions de cette nature-là aussi.
M. Bédard: Merci.
M. Turp: Et, au plan de leur statut, est-ce qu'il va s'agir vraiment de fonctionnaires avec un lien d'emploi avec l'Administration?
M. Dupuis: Oui. Oui.
M. Dionne (Louis): Ce sont des fonctionnaires qu'on a présentement à tous les jours dans nos palais de justice, dans nos greffes, qui travaillent auprès de la magistrature ou à recevoir la clientèle au comptoir. Ce sont des queues de tâche qu'on appelle, hein? Il y a peut-être un pourcentage d'un ensemble de tâches qui pourrait représenter peut-être 2 %, 3 % ou 4 % d'une tâche juge de paix fonctionnaire, alors qu'ils ont d'autres fonctions, là: tenir les rôles, recevoir les gens au comptoir, paiement d'amendes, des choses comme ça.
M. Turp: D'accord.
La Présidente (Mme Thériault): D'accord. Donc...
M. Dupuis: C'était, pour les fins de l'enregistrement, Me Louis Dionne, sous-procureur général.
La Présidente (Mme Thériault): Lorsque l'enregistrement est fait une première fois, M. le ministre, ça va, on peut prendre l'intervention, il n'y a aucun problème.
M. Dupuis: Excusez-moi. J'en apprends, des choses, Mme la Présidente, de vous.
La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, l'article 159 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
La Présidente (Mme Thériault): Adopté. M. le ministre, 160.
M. Dupuis: L'article 160: «Les juges de paix fonctionnaires de justice n'exercent que les attributions déterminées à l'annexe IV, selon la catégorie qui leur est attribuée dans leur acte de nomination.» Alors, cet article renvoie bien sûr à la nouvelle annexe IV de la Loi sur les tribunaux judiciaires, tel qu'introduite par l'article 17 du présent projet de loi. L'exercice de fonctions purement administratives, c'est-à-dire support à la magistrature et service au public dans les greffes des palais de justice ? c'est ce qu'on disait tantôt ? ou de fonctions judiciaires n'ayant pas une incidence importante sur les droits et libertés des citoyens, par exemple l'assignation de témoins, l'émission de sommations, ne requiert pas l'octroi d'un statut d'indépendance et d'impartialité. Ces fonctions peuvent donc être exercées par les juges de paix fonctionnaires de justice, comme le font actuellement les juges de paix à compétence restreinte.
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Bien, on avait... on discutait de la problématique qui est, elle, plus relative à 181 et qui permet de modifier les annexes, les différentes annexes. On aura l'occasion d'y revenir lorsqu'on étudiera plus l'article 4 parce que, lui, il a seulement pour effet de les définir, donc de les attribuer. C'est ce que je comprends. Donc, ça ne pose pas...
M. Dupuis: Mais celle-là... En fait, celle-là ne causera pas beaucoup de problèmes, j'ai l'impression, l'annexe IV... parce que, comme vous l'aurez noté si vous avez lu l'annexe IV, et je suis certain que vous avez lue, ces gens-là évidemment exercent des fonctions qui ne sont pas de nature à affecter le droit des citoyens ? ça, c'est toute l'essence du jugement Ell et du jugement Pomerleau ? de telle sorte qu'à première vue il apparaît plutôt peu probable qu'on vienne jouer dans l'annexe, sinon pour ajouter des pouvoirs ou pour en... mais surtout pour en ajouter, qui seraient de même nature. Donc, ce n'est pas tellement dans l'annexe IV que pourraient se poser des problèmes éventuels.
M. Bédard: Surtout le pouvoir plus technique de modifier par règlement une loi. C'était plus dans ce sens là...
M. Dupuis: Ah! O.K. D'accord, oui. O.K. O.K. Oui, O.K.
M. Bédard: C'est pour ça que la liste des pouvoirs, elle, je comprends que ça aurait plus ou moins d'effet.
M. Dupuis: Il modifie de la même façon, hein, que pour l'annexe V...
M. Bédard: La même chose. IV et V, c'est la même chose.
M. Dupuis: Il se modifie... Oui. Voulez-vous qu'on en discute tout de suite, de ça?
M. Bédard: Non, non. On va y revenir. 181, ça s'en vient.
M. Turp: Mais, moi, je voudrais... Peut-être qu'on en discutera plus tard, mais il faudrait aussi se demander, là, si, dans l'exercice des fonctions du juge de paix fonctionnaire de justice, il n'y a pas une possibilité, dans cet exercice-là, de porter atteinte aux droits reconnus par la Charte canadienne, parce que ça semble être un critère qui justifierait qu'on doive protéger l'indépendance, et que l'on doive peut-être protéger le mode d'attribution de ces compétences, et que ce soit plutôt la loi que le règlement qui modifie l'attribution des compétences.
Donc, est-ce que, dans les pouvoirs de catégories 1, 2 et les autres, là ? il y en a quand même plusieurs ? il y a une possibilité pour un juge de paix fonctionnaire d'affecter et de porter atteinte à un droit fondamental? Si tel était le cas...
n(17 h 40)nM. Dupuis: Je vous réponds tout de suite qu'il y a plusieurs actes dans cette nomenclature qui affectent les droits des citoyens. Par exemple, quand on assigne quelqu'un ou qu'on assigne un témoin, on affecte ses droits jusqu'à un certain point: il n'a pas le choix, il faut qu'il vienne. Mais, selon les critères qui ont été considérés par la Cour suprême dans l'arrêt Ell, par la Cour d'appel dans l'arrêt Pomerleau, ils n'affectent pas de façon déterminante les droits, c'est la catégorisation de l'affectation du droit qui est importante. Ils n'affectent pas de façon importante les droits des citoyens, je pense que c'est l'expression du jugement, là.
Alors, regardez bien. Dans le fond, là, pour les gens qui pourraient nous écouter, parce que je sais que vous êtes familier plus avec ces choses-là, mais assigner quelqu'un à venir témoigner, c'est certain que ça affecte ses droits parce que c'est un ordre de comparaître devant la cour, mais ça n'affecte pas le droit de façon importante. Par contre, délivrer un mandat de perquisition et permettre qu'on entre chez vous pour aller perquisitionner, ça, ça affecte les droits de façon importante. C'est ça, la différence.
M. Turp: Donc, la nomenclature qui est retenue dans l'annexe IV...
M. Dupuis: Excusez-moi, droits et libertés.
M. Turp: La nomenclature retenue dans l'annexe IV en est une... et la distinction d'avec celle qui est dans l'annexe V cherche à respecter les critères énoncés dans l'affaire Ell. Et donc les actes, là, que vous avez énumérés dans l'annexe IV à votre avis ne portent que sur des actes qui ne justifieraient pas, là, que ces compétences soient exercées par les juges de paix magistrats, par exemple.
M. Dupuis: La réponse à votre question, c'est oui. Et la réponse à votre question, encore plus fouillée, c'est: chaque nomenclature qu'il y a dans l'annexe IV a été regardée en ayant en tête les jugements dont on a déjà parlés. Et tous ces droits qui sont dans l'annexe IV sont... V, c'est-u V?
Une voix: IV et V...
M. Dupuis: IV. Non, mais IV. Moi, je parle de ceux du pouvoir IV. Tous les pouvoirs qui sont mentionnés à l'annexe IV ne sont pas des pouvoirs de la nature d'un envahissement des droits et libertés, là, dans le sens d'un droit important.
M. Turp: J'ai juste une question de portée générale. Je l'avais posée à votre prédécesseur; je ne crois pas avoir obtenu une réponse à cette époque-là. Est-ce que, dans la préparation de ce projet de loi comme dans les autres et au Comité de la législation, vous faites une vérification systématique de la conformité du projet de loi avec les normes de la Charte canadienne des droits et libertés?
M. Dupuis: La réponse, c'est oui. Et non seulement le fait-on au ministère avant de proposer l'adoption du projet de loi aux différents comités ministériels et au Conseil des ministres, mais le Comité de législation et les membres du Comité de législation ? j'en suis le président ? exigent, l'ont exigé auprès de la sous-ministre à la législation que, dans plusieurs cas de projets de loi qui sont présentés au Comité de législation, il y ait un avis juridique qui soit écrit, déposé... bien, déposé ou enfin proposé aux membres du Comité de législation sur le sujet... sur les sujets dont vous... que vous soulevez.
M. Turp: O.K. Ils ne sont pas nécessairement infaillibles parce que je vois un problème à l'article 83, là... 183.
M. Dupuis: Non, c'est entendu. Ah! non, non, c'est entendu, c'est entendu. Il y a de temps en temps... Il y a de temps en temps, pour l'avoir vécu, des dispositions dans un projet de loi où bien sûr on a un avis juridique qui nous dit, par exemple, à la limite, là, un avis juridique qui nous dit: Il y aurait peut-être une possibilité de contestation devant les tribunaux de cette disposition-là, cependant, dans l'état actuel de la jurisprudence, dans l'état actuel du droit, dans l'état... selon les avis qu'on a, cette disposition-là serait maintenue, ne serait pas déclarée ultra vires, par exemple.
Alors, c'est certain que le Comité de législation ne peut pas prendre d'obligation de résultat. Le Conseil des ministres ne peut pas prendre non plus d'obligation de résultat sur la légalité de chacune des dispositions. Il doit prendre cependant une obligation de moyen et déposer devant l'Assemblée nationale des projets de loi qui revêtent tout le caractère, si vous voulez, reconnu par la loi et la jurisprudence qui font en sorte que les projets de loi seraient maintenus devant les tribunaux. Une obligation de moyen. Cette obligation de moyen là, elle est exercée à travers le ministère de la Justice, les légistes et les avocats qui y travaillent.
La Présidente (Mme Thériault): Ça va? Donc, est-ce que l'article 160 est adopté? Adopté. M. le... Vous avez d'autres précisions?
M. Dupuis: J'ajoute, parce que le député de Mercier est préoccupé par cette question-là, que les pouvoirs qui sont mentionnés dans l'annexe IV et qui concernent les pouvoirs des fonctionnaires de justice ont passé le test de la Cour suprême, qui a considéré le jugement Ell, qui venait de la Cour d'appel d'Alberta. Alors, il y a un test qui a été passé, là.
Une voix: C'est inspiré de ça.
M. Dupuis: C'est inspiré de ça.
M. Turp: C'est tellement détaillé comme position, on peut difficilement penser que l'affaire Ell a régi toutes les questions qui sont visées par là, là.
M. Dupuis: C'est-à-dire que les principes...
M. Dionne (Louis): Elle avait les documents, là, de la législature de l'Alberta devant elle. C'était l'objet de la problématique.
M. Turp: Ah! c'est vrai.
M. Dupuis: Et avec le détail des pouvoirs, là.
M. Turp: Mais, pour aller au fond des choses, est-ce que le projet de loi albertain ou la loi albertaine était identique s'agissant des pouvoirs et de la répartition des pouvoirs, là?
M. Dionne (Louis): Je ne pourrais pas dire identique, parce que moi, je ne l'ai pas vérifié article par article, mais on s'est inspiré de.
M. Mercier (Jacques): Pas tout à fait identique. Toutes les provinces canadiennes, sauf le Nouveau-Brunswick, ont des catégories de juges de paix. En haut, les plus près des véritables juges, il y a les «sitting justices of the peace», qui ont des fonctions, je dirais, un peu équivalentes à celles de nos juges de paix magistrats, mais pas tout à fait équivalentes. Ça varie d'une province à l'autre parce que, chaque province, il ne faut pas qu'on oublie ça, chaque province, ces juges de paix-là sont sous l'autorité du juge en chef de leur cour provinciale, et les juges en chef, ils peuvent leur dire: Regardez, là, vous en faites moins parfois que dans d'autres provinces canadiennes. En autres termes, ça répond aux besoins de chaque province. Les besoins ne sont pas les mêmes partout.
Alors, certaines provinces ont plus de pouvoirs que d'autres, c'est le cas de l'Ontario puis le cas de l'Alberta. Et je ne peux pas vous dire qu'il y a une exacte symétrie avec les nôtres, parce qu'il ne faut pas qu'on oublie qu'en plus des droits fédéraux ces juges de paix là appliquent les lois provinciales, qui varient d'une province à l'autre, alors ce qui implique une série d'adaptations. Mais les pouvoirs les plus importants, je vous dirais, il y a un corpus assez stable d'une province à l'autre. On a vérifié les lois de toutes les provinces canadiennes pour faire ça.
La Présidente (Mme Thériault): Il y a le député de Marguerite-D'Youville qui voudrait intervenir.
M. Moreau: Oui, la... c'est une question que je vous adresse. En réalité, ce que vous dites c'est que, bien que les textes ne soient pas identiques ? c'est ce que vous entendez par symétrie ? vous vous êtes inspirés des textes qui avaient fait l'objet de l'examen de la Cour suprême dans l'arrêt Ell et, sur la base de ce qui existe dans les lois québécoises, soit par similitude ou soit par exactitude, vous en venez à la conclusion que ce qui apparaît à l'annexe IV passe le test de...
M. Mercier (Jacques): Tout à fait. Tout à fait.
M. Turp: D'ailleurs, c'est intéressant de voir leur terminologie pour leurs «justices», hein, des «sitting justices», des «fee justices». Ça va m'inspirer dans ma recherche.
M. Dupuis: Là, là, si vous m'arrivez avec une suggestion de les intituler «juges de paix assis», on va avoir des problèmes.
M. Dionne (Louis): Ou, comme en Europe, la «magistrature debout», la «magistrature assise».
M. Dupuis: On va avoir des problèmes tantôt. On va avoir des problèmes tantôt.
M. Turp: ...et, vous savez, j'ai regardé, les juges de paix en France, c'est en civil, c'est en civil. Dans le pays civiliste que nous sommes...
M. Dupuis: Oui. Oui, parce qu'il y a le juge d'instruction. Le juge d'instruction...
M. Turp: On devrait peut-être repenser tout ça. En tout cas, je vous ferai des propositions.
Les juges de paix magistrats
La Présidente (Mme Thériault): Donc, l'article 160 est adopté. M. le ministre, 161.
M. Dupuis: Oui, section II...
La Présidente (Mme Thériault): Section II, oui.
M. Dupuis: ...les juges de paix magistrats. Ça va? Alors, cette section contient 19 articles qui portent, comme l'indique son intitulé, sur la nouvelle institution des juges de paix magistrats.
Me permettez-vous de dire, au sujet de la section II, et en toute déférence pour le juge en chef de la Cour du Québec: il a fait une représentation dans sa communication, que vous avez eue, sur l'appellation «juge de paix magistrat». Il aurait souhaité que l'appellation soit une appellation de «juge de paix à pouvoirs étendus». Ma réaction à la lecture de sa lettre a été la suivante, et je vais la lui communiquer lorsque nous nous rencontrerons, c'est qu'évidemment actuellement on emploie cette expression de «juge de paix à pouvoirs étendus», de telle sorte que, pour bien différencier cette catégorie de juge que nous instituons par le projet de loi n° 50, il faut trouver, me semble-t-il, une appellation qui soit différente de l'appellation des «juges de paix à pouvoirs étendus», pour bien faire la distinction. Celle qu'on a trouvée, c'est «juges de paix magistrats». Est-ce que vous voulez ajouter à votre recherche, M. le député de Mercier, celle-ci?
n(17 h 50)nM. Turp: Tout à fait.
M. Dupuis: O.K. Parfait, alors on va le suspendre. Ça va?
M. Bédard: Mais on peut l'adopter sous réserve, ce n'est pas grave.
M. Dupuis: Adopter, vous suggérez, sous réserve?
M. Bédard: Bien oui, sous réserve...
M. Dupuis: O.K., c'est correct, c'est beau.
M. Bédard: ...parce que, en bref, c'est que, si on modifie... Ils sont presque dans tous les articles, alors, c'est ça, il faudrait...
M. Dionne (Louis): ...concordance partout.
M. Bédard: On n'adopterait aucun article d'ici la fin du projet de loi, là. Alors...
M. Turp: Sous réserve, je pense que...
M. Bédard: Sous réserve, c'est correct. C'est beau. Parfait, adopté.
La Présidente (Mme Thériault): D'accord, parfait. Adopté sous réserve. L'article 162, M. le ministre.
M. Dupuis: 161, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault): Ah! 161, excusez-moi.
M. Dupuis: À 161, Mme la Présidente, j'ai un amendement. J'ai un amendement à l'article 161, Mme la Présidente.
M. Bédard: M. le ministre, étant donné que... Dû à nos bonnes relations, que je peux invoquer encore...
La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre. M. le ministre, le député de Chicoutimi vous adresse la parole.
M. Dupuis: Je m'excuse.
M. Bédard: Je commençais par nos bonnes relations.
M. Dupuis: On me parlait d'un côté puis...
M. Bédard: Non, non, effectivement. Et, moi, vous savez, toute ma préoccupation est par rapport aux juristes de l'État, donc je leur laisse la priorité.
M. Dupuis: J'ai la même que vous.
M. Bédard: J'en suis convaincu.
M. Dupuis: J'ai eu le plaisir de leur communiquer.
M. Bédard: Je suis content de voir qu'ils ont un bon plaideur avec eux. Alors, souhaitons que vos plaidoiries seront entendues. Simplement, comme il va y avoir des amendements ? je comprends que ce n'est pas le dernier ? est-ce que ce serait possible...
M. Dupuis: Vous souhaiteriez les avoir? Bien oui.
M. Bédard: ...de les avoir en série, comme on fait normalement?
M. Dupuis: Oui, oui.
M. Turp: Qu'on étudie ça attentivement.
M. Bédard: Même quand on ne s'entend pas, on le fait. Alors...
M. Turp: Pour qu'on fasse bien nos devoirs.
M. Bédard: C'est ça.
M. Dupuis: Non, il n'y a pas de problème, là. En toute justice à l'égard de Me Pelletier, Me Julienne Pelletier, la raison pour laquelle vous ne les avez pas eus, c'est qu'elle est consciente que le ministre ne les a pas eus non plus.
M. Bédard: O.K.
M. Dupuis: Alors, c'est pour ça qu'elle vous les a...
M. Bédard: Le jour où on en aura avant vous, c'est que...
M. Dupuis: Elle a... M. le député de Chicoutimi, Me Pelletier, je le confirme, a l'instinct de conservation. Elle souhaitait que le ministre les voie d'abord.
M. Bédard: Je pense que c'est sage, et ça démontre beaucoup...
M. Dupuis: Je lui rends hommage.
M. Bédard: Oui.
Une voix: C'est qui, Mme Pelletier?
M. Bédard: Bien, c'est elle. Elle est avec vous.
Une voix: Elle est derrière vous.
M. Bédard: Elle est derrière nous...
M. Turp: Elle est derrière nous?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Turp: J'aurais dû le sentir. Il y avait un beau parfum qui se dégageait, là, de...
M. Bédard: Jamais insensible, hein?
M. Dupuis: Alors donc, ça pourrait être le dernier qu'on va avoir le temps de discuter, alors on pourrait peut-être procéder, avec votre permission.
La Présidente (Mme Thériault): Effectivement.
M. Dupuis: Alors, l'amendement se lirait comme suit:
Ajouter à la fin de l'article 161, tel que proposé par l'article 1 du projet de loi, l'alinéa suivant:
«Le gouvernement peut, conformément aux articles 108, 110, 112 et 113 et compte tenu des adaptations nécessaires, modifier l'acte de nomination d'un juge de paix magistrat quant à son lieu de résidence.» De telle sorte que... Excusez-moi, je vais lire le commentaire. Cet amendement vise à permettre au gouvernement de modifier, sur la recommandation du juge en chef, le lieu de résidence des juges de paix magistrats ? ça, ça va vous intéresser, vous. À cette fin, l'amendement rend applicable la procédure qui s'applique aux juges de la Cour du Québec, de telle sorte que l'article, tel qu'amendé, se lirait comme suit:
«Le gouvernement nomme, par commission sous le grand sceau ? s-c-e-a-u, M. le député de Mercier ? les juges de paix magistrats. Ils sont nommés durant bonne conduite.
«L'acte de nomination détermine notamment le lieu de leur résidence.
«Le gouvernement peut, conformément aux articles 108, 110, 112 et 113 et compte tenu des adaptation nécessaires, modifier l'acte de nomination d'un juge de paix magistrat quant à son lieu de résidence.» Ça va?
La Présidente (Mme Thériault): M. le député.
M. Turp: C'est pour favoriser la mobilité?
M. Dupuis: Et voilà. Et voilà. Alors donc, s'il devait y avoir, à l'usage, une obligation ou qu'on pouvait constater que, dans un lieu précis, il y a moins de dossiers, ou il y a moins de demandes, ou on a réglé, on pourrait modifier le lieu de résidence de l'un de ces juges-là.
M. Bédard: Avec l'assentiment...
M. Dupuis: Flexibilité.
M. Bédard:«Le gouvernement peut». Donc, avec l'autorisation du gouvernement.
M. Dupuis: Oui.
M. Bédard: C'est ça?
M. Dupuis: C'est ça. C'est ça. C'est ça.
M. Turp: Est-ce que c'est le... Juste une question d'information. Est-ce que c'est une nouvelle technique? Est-ce que c'est utilisé pour d'autres...
M. Dupuis: Ça existe à la Cour du Québec.
M. Turp: Est-ce qu'on utilise le même langage, là?
M. Mercier (Jacques): Pas tout à fait. Vous avez... Est-ce que je peux répondre?
M. Dupuis: Oui, oui.
M. Turp: Non, mais pour la Cour du Québec.
M. Mercier (Jacques): Vous avez, sur le texte...
M. Turp: Ah! O.K.
M. Mercier (Jacques): ...du projet d'amendement, les articles qu'on veut rendre applicables. Comme ils étaient assez longs, on les a rendus applicables, compte tenu des adaptations nécessaires, puisqu'ils s'appliquent aux juges de la Cour du Québec d'abord, mais ici on les transpose pour les juges de paix magistrats.
M. Bédard: Et là, moi, je comprends en même temps que, par rapport à l'autre article, à l'autre... quand je vous parle des juges de paix fonctionnaires de justice, là, où on prévoyait que l'arrêté ministériel peut leur conférer compétence sur tout le territoire du Québec ou sur le district judiciaire du territoire qu'il indique... Autrement dit, bon les... On ne retrouve pas une telle formulation, là. Donc...
M. Turp: Parce que ce n'est pas un arrêté, là.
M. Mercier (Jacques): Je m'excuse, mais, pour la compétence territoriale, on va voir plus loin qu'il y a un article qui précise que les juges de paix magistrats ont une compétence sur tout le territoire du Québec.
M. Bédard: C'est ça.
M. Mercier (Jacques): Parce que, étant donné qu'on veut qu'ils soient polyvalents, qu'ils puissent se rendre dans tous les districts du Québec, il faut qu'ils aient donc une compétence partout au Québec.
M. Bédard: Mais le ministre peut décider effectivement de son lieu de résidence.
M. Mercier (Jacques): Oui, mais c'est comme un port d'attache, ce n'est pas...
M. Bédard: Il peut exercer, c'est ça. Mais c'est important, on le sait.
M. Mercier (Jacques): ...de la compétence d'attribution, si vous voulez.
M. Bédard: Exactement, un peu comme, je l'ai dit, à la Cour du Québec. Ce que je comprends, c'est le même principe.
M. Mercier (Jacques): Tout à fait.
M. Bédard: Tu as un lieu de résidence, ça ne t'empêche pas d'aller entendre dans d'autres districts.
M. Mercier (Jacques): Ailleurs, tout à fait.
M. Dupuis: Voilà.
M. Mercier (Jacques): Voilà.
M. Bédard: Mais c'est ça, le principe. O.K.
La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier.
M. Turp: Dans le cas des juges de paix magistrats, là, à moins que ce soit dans un article ultérieur, il n'y a pas besoin, comme dans le cas des juges de paix fonctionnaires de justice, de parler de leurs fonctions auprès de la Cour supérieure, de la Cour du Québec ou d'une cour municipale ou... L'alinéa n'est pas nécessaire dans leurs cas?
M. Dupuis: Ils vont être affectés à la Cour du Québec.
M. Turp: Ils ne sont affectés qu'à la Cour du Québec.
M. Dupuis: Ils vont être affectés à la Cour du Québec, les magistrats, les juges de paix magistrats, alors qu'évidemment les fonctionnaires de justice, eux, rendent des services à toutes les cours, hein?
M. Turp: Et jamais donc ils ne seraient, ces juges de paix magistrats, au service d'une cour municipale, dans aucun cas?
M. Dupuis: Allez-y donc, Me Mercier, allez-y donc. Allez-y, Me Mercier.
M. Mercier (Jacques): On a actuellement un comité de travail formé avec des représentants du monde municipal...
M. Dupuis: Des cours municipales.
M. Mercier (Jacques): ...pour essayer de répondre à leurs besoins plus particuliers, qui ne seraient pas nécessairement au niveau des pouvoirs d'un juge de paix magistrat, pour une raison bien simple, c'est qu'ils ont déjà des juges de la cour municipale qui ont une compétence sensiblement analogue à celle de ces juges de paix là. Un peu plus grande mais pas considérablement plus. Alors, si on avait nommé des juges de paix magistrats dans les cours municipales, il y aurait à toutes fins utiles...
M. Turp: Dédoublement.
M. Mercier (Jacques): Voilà. Voilà. Alors, ce n'est pas ça, les besoins dans le monde municipal. On a un comité de travail sur ça, et vraisemblablement, au cours d'une prochaine session, il y aura peut-être un projet de loi sur ça, si on en arrive à une entente avec eux. Alors, pour...
M. Turp: Et donc c'est l'article 169, alinéa un, qui règle la question, qui est réglée pour les juges de paix fonctionnaires de justice, à l'alinéa trois de l'article 161, on dit qu'ils «exercent leurs fonctions auprès de la [...] Cour du Québec». C'est ça?
M. Mercier (Jacques): Voilà, c'est ça.
M. Dupuis: C'est ça.
M. Turp: C'est beau. Merci.
M. Dupuis: Souhaitez-vous, Mme la Présidente, qu'on passe à un autre article, malgré l'heure?
La Présidente (Mme Thériault): Non. Non, on va adopter l'amendement, ensuite l'article tel qu'amendé.
M. Dupuis: O.K.
M. Bédard: D'ailleurs, on fait l'erreur de ne pas lire l'article.
M. Dupuis: De ne pas lire l'article tel qu'amendé? Je l'ai lu.
M. Bédard: Ah oui?
M. Dupuis: Je l'ai lu.
M. Bédard: Il l'a lu?
M. Dupuis: Je l'ai lu, et, à la suggestion du député de Marguerite-D'Youville, adjoint parlementaire du ministre de la Justice, j'aimerais, pour que ce soit inscrit dans les notes, pour les fins de consultation ultérieure...
M. Bédard: De lire les commentaires, c'est ça?
M. Dupuis: ...lire le commentaire, oui.
M. Bédard: C'est pour ça que je ne l'avais pas entendu.
M. Dupuis: Ça va? O.K.?
M. Bédard: Parfait, allez-y.
M. Dupuis: Alors, cet article prévoit la nomination des juges de paix magistrats. Ces juges de paix seraient nommés par le gouvernement, par commission sous le grand sceau, comme c'est le cas pour les autres juges de l'ordre judiciaire. Ce mode de nomination aurait l'avantage d'accroître l'indépendance institutionnelle de ces juges. L'acte de nomination déterminerait le lieu de leur résidence. Ils auraient cependant compétence sur tout le territoire du Québec, sur lequel ils seraient appelés d'ailleurs à exercer leurs fonctions, tel que prévu à l'article 172 proposé. Et évidemment l'amendement fait en sorte qu'on ajoute le commentaire qu'au besoin le lieu de leur résidence pourrait être modifié.
M. Bédard: Parfait.
M. Dupuis: Ça va?
La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. Donc, est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix: Adopté.
La Présidente (Mme Thériault): Adopté. Est-ce que l'article 161 est adopté tel qu'amendé?
M. Dupuis: Adopté.
M. Bédard: Tel qu'amendé, adopté.
La Présidente (Mme Thériault): Adopté tel qu'amendé. Donc, compte tenu de l'heure, je vais ajourner les travaux sine die.
M. Dupuis: Je vous remercie, Mme la Présidente.
(Fin de la séance à 18 heures)