(Neuf heures quarante-six minutes)
Le Président (M. Simard): Nous allons entreprendre nos travaux malgré quelques retards. Nous allons donc ouvrir notre séance, et je rappelle, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, que la commission des institutions est réunie pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Létourneau (Ungava) est remplacé par Mme Lemieux (Bourget).
Le Président (M. Simard): C'est le seul changement?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président.
Décision de la présidence sur la recevabilité
de la motion proposant de procéder
immédiatement à l'étude détaillée du projet de loi
Le Président (M. Simard): Alors, au moment où nous nous sommes quittés lors de la dernière séance, une motion a été présentée par le député de Shefford demandant que nous passions immédiatement, je résume la motion sans la citer, que nous passions immédiatement à l'étude de l'article 1. J'ai entendu, lors de la fin de cette séance, des représentations tant du proposeur, le député de Shefford, que du représentant de l'opposition officielle et d'autres membres de la commission et j'ai donc ajourné nos travaux de façon à pouvoir prendre une décision éclairée sur la recevabilité de la motion qui nous était présentée. Alors, je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la motion du député de Shefford proposant de passer immédiatement à l'étude de l'article 1 et des articles suivants, évidemment, du projet de loi.
J'ai lu attentivement... Et ceux qui voudront avoir plus d'information pourront s'adresser à moi privément ou au secrétaire pour avoir les références bibliographiques à la jurisprudence, abondante dans ce domaine. J'ai lu attentivement les précédents. Le règlement ne précise pas, vous le savez, le nombre de motions préliminaires qui peuvent être présentées, et toute la jurisprudence est à l'effet qu'il appartient au président de juger si cette motion est recevable. C'est vraiment ce qui ressort le plus clairement de toutes les décisions antérieures. Alors, il est donc très utile, il était donc utile d'examiner les décisions antérieures rendues sur de telles motions. Je vais en citer quelques-unes, mais je vous renvoie évidemment à toutes les autres opinions émises par le passé.
Lors d'une décision qui a été rendue en 2000, il s'agit du député de Viau, c'était, à ce moment-là, M. Cusano qui était à ce moment-là président ou vice-président ou, en tout cas, qui présidait la commission, elle est au Journal des débats du 8 décembre 2000... dans sa décision rendue en 2000, un président fait état de positions plutôt divergentes dans la jurisprudence sur cette question. Réexaminant la jurisprudence, le président faisait allusion au fait qu'il est très difficile d'y trouver une ligne de conduite absolue, puisque les décisions antérieures sont plutôt, je ne dirais pas erratiques, mais plutôt différentes.
n
(9 h 50)
n
En effet, le 8 décembre 1997, et c'est une décision rendue par M. Camille Laurin, dont nous ne pouvons que regretter l'absence, en effet, le 8 décembre 1997, une motion pour passer à l'étude de l'article 1 avait été présentée après qu'une seule motion préliminaire eut été débattue et rejetée. Cette motion visait à entendre un des quatre organismes entendus la semaine précédente dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi ? le député de Shefford opine, j'imagine qu'il était peut-être même présent lors de cette séance. Non, il connaît ce cas-là. Compte tenu des circonstances, la motion a été jugée recevable.
Soulignons au passage que, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 4, aucun des individus ou organismes qui faisaient l'objet d'une motion préliminaire d'audition n'a été entendu, hein? Vous voyez bien que c'est deux cas très différents. Il s'agissait de réentendre, dans la motion de 1997. Ici, aucune des motions ne demandait de réentendre, mais c'étaient des organismes qui n'avaient pas été entendus lors des consultations particulières des 10 et 11 septembre 2003.
En 1992, il s'agit de Mme Madeleine Bélanger, alors députée de Mégantic, qui a été d'ailleurs une présidente illustre. Je peux vous le dire, en 10 ans dans cette Chambre, s'il y a une présidence que j'ai admirée... et j'ai toujours tenu à m'inspirer de Mme Bélanger. Elle a présidé d'ailleurs la commission de l'éducation, alors que j'étais ministre de l'Éducation, avec une adresse, et une élégance, et une expérience remarquables. Je pense que, les deux côtés de la Chambre, il y a eu toujours beaucoup d'admiration sur la façon dont elle travaillait. Alors, elle présidait la commission de l'aménagement et des équipements en 1992 et elle a refusé une telle motion après que trois motions préliminaires eurent été discutées. Dans cette décision, la présidence opérait une distinction entre la recevabilité dans la forme et la recevabilité dans le temps. Elle concluait que, malgré que la forme de la motion soit correcte, sa présentation était prématurée ? c'est la notion d'être prématurée ? et autorisait donc la présentation d'une nouvelle motion préliminaire en vertu du deuxième alinéa de l'article 244.
Par ailleurs, en juin 1986, et il s'agit du président Robert Thérien, qui était le député, je crois, de Rousseau à l'époque, en 1984... pardon, en 1986, après trois séances complètes... Hein, j'insiste là-dessus, après trois séances complètes ? la définition de «séance», vous la connaissez tous, il s'agit d'une journée complète de débat en commission ? après trois séances complètes, la commission de l'éducation en était toujours à l'étape des motions préliminaires lorsqu'un député ministériel a présenté une motion pour qu'elle passe à l'étude de l'article 1 du projet de loi. Le président a alors considéré que cette motion était recevable, après trois séances de débats sur des motions préliminaires.
En l'espèce, je vous rappelle que nous n'en étions qu'à la troisième séance lorsque le député de Shefford a présenté sa motion. J'estime donc que cette motion est irrecevable car prématurée. Nous en sommes maintenant à la quatrième séance, et je donnerai maintenant la parole à un de nos collègues de l'opposition pour la présentation, en vertu de l'alternance, d'une éventuelle motion préliminaire. Par la suite, il sera toujours loisible à un membre de la commission de présenter à nouveau une motion visant à passer à l'article 1. Voilà la décision que j'allais prendre.
En vertu de 41, je n'accepterai pas de remise en question de la décision. Donc, c'est surtout des... Si vous voulez intervenir à ce moment-ci, c'est sur des indications sur la marche à suivre. M. le député de Shefford.
M. Brodeur: Oui, M. le Président. Concernant les indications sur la marche à suivre, si j'ai bien compris votre décision, une motion déposée à quelques minutes de la fin de la troisième séance, même si c'est une question de quelques minutes, donc vous tenez compte non seulement du temps des séances, mais des minutes également, pour rendre votre décision. Vous avez bien dit que vous étiez... En fin de compte, vous usez de votre pouvoir discrétionnaire, qui est en quelque sorte un pouvoir discrétionnaire, lorsqu'on parle de motion pour passer à l'étude de l'article 1. Mais, si j'ai bien compris, M. le Président, votre message, vous permettez le dépôt d'une autre motion de la part du parti de l'opposition, et, si j'ai bien compris, une motion de la part du parti ministériel sera recevable dans les prochaines minutes, puisque nous sommes à la quatrième séance.
Le Président (M. Simard): Vous avez très bien compris mes propos.
M. Brodeur: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Je vous signale en passant que, si vous aviez plutôt laissé l'opposition, ce jour-là, faire une dernière motion, nous en serions ce matin à l'étude, probablement, de votre motion. M. le député de Mercier.
Motion proposant d'entendre
le sous-ministre de la Justice
M. Turp: Alors, M. le Président, j'ai l'intention de présenter donc une nouvelle motion préliminaire, qui se lirait comme suit:
«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la commission des institutions tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi ainsi qu'à tous les amendements déposés par le ministre et qu'à cette fin elle entende le sous-ministre de la justice et sous-procureur général.»Le Président (M. Simard): Alors, je vais d'abord recevoir par écrit la motion. Merci. Vous allez me permettre, puisqu'il s'agit d'un fonctionnaire, je vais vérifier auprès du secrétaire. Je vais suspendre deux minutes pour vérifier si la motion est recevable dans sa formulation.
(Suspension de la séance à 9 h 56)
(Reprise à 9 h 57)
Le Président (M. Simard): Écoutez, je déclare la motion recevable, ayant bien vérifié, ne voulant commettre aucun impair, puisque évidemment un sous-ministre est aussi l'extension du pouvoir du ministre, mais nous avons pu le constater au cours des dernières années avec la Loi sur l'imputabilité, ils sont reçus à titre personnel dans nos commissions pour être interrogés. La loi... le règlement est très clair, c'est: toute personne qui a une expérience particulière du domaine qui est examiné par la commission peut être invitée. Donc, de toute évidence, cette motion est recevable.
Sur la recevabilité, M. le député de Shefford, vous souhaiteriez que j'attende avant de la déclarer recevable?
M. Brodeur: Non. Tout simplement une suggestion à l'opposition. Ils veulent entendre le sous-ministre, nous avons ici le ministre lui-même. Donc, je suggère qu'on puisse l'entendre durant les 10 prochaines minutes et qu'on puisse passer à une étape subséquente dans nos travaux.
Le Président (M. Simard): M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Alors, je vous dirais que la proposition est fort intéressante, de mon collègue. Ce que je vous proposerais, c'est d'entendre le sous-ministre, et par la suite, je suis d'accord avec le député de Shefford, et, de consentement, nous sommes prêts à entendre le ministre ici, à cette Assemblée, pendant 10 minutes ou 20 minutes, le temps qu'il faudra pour comprendre les tenants et aboutissants du projet de loi. Alors, nous donnons notre accord à la proposition.
n(10 heures)nLe Président (M. Simard): Alors, nous en revenons à la motion, que j'ai évidemment jugée recevable et que nous allons maintenant étudier ensemble. J'imagine que le proposeur, le député de Mercier, voudra bien nous dire quelques mots sur le sens de sa motion.
M. Daniel Turp
M. Turp: En effet, M. le Président. Et d'abord j'aimerais vous féliciter pour la sagesse de votre décision, puisqu'elle vise, je le crois, comme la décision qu'avaient prise vos prédécesseurs, à respecter les droits de l'opposition puis à assurer que l'opposition puisse présenter des motions préliminaires, ce qui est tout à fait conforme au règlement de cette Assemblée. Et cette décision permet donc à l'opposition officielle de motiver la raison pour laquelle elle voudrait entendre le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général.
Et vous me permettrez de suggérer qu'il ne faut pas brûler les étapes en la matière. Le député de Shefford suggérait que nous entendions immédiatement le ministre, mais il serait probablement intéressant et utile pour cette commission d'entendre également son sous-ministre et cette personne qui, comme nous le savons, d'après la Loi sur le ministère de la Justice, le chapitre M-19 des Lois refondues du Québec, est un officier d'une très, très grande importance et dont le rôle est déterminant dans la vie publique au Québec, dans la vie de la justice au Québec, mais je dirais aussi, au delà de ça, dans la vie de la justice administrative au Québec.
Je vous rappellerai et rappellerai à ceux et celles qui nous écoutent que le sous-ministre est, d'après l'article 10 de la Loi sur le ministère de la Justice, celui qui «a la surveillance des autres fonctionnaires et employés du ministère»; il est celui qui «administre les affaires courantes et exerce les autres pouvoirs qui lui sont assignés par le gouvernement». C'est sous l'autorité du sous-ministre que des ordres sont donnés, qu'ils «doivent être exécutés de la même manière que ceux du ministre et du Procureur général, suivant le cas; sa signature officielle donne force et autorité à tout document qui est du ressort du ministère ou qui, en vertu d'une loi du Parlement, doit être signé par le ministre ou le Procureur général».
Le Président (M. Simard): Pardon, M. le député de... je vous interromps, j'ai une demande d'interruption du député de Marguerite-D'Youville. M. le député.
M. Moreau: Pour une question de directive, M. le Président. Puisque nul n'est sensé ignorer la loi et que le député de Mercier nous en fait lecture, est-ce qu'on pourrait passer cette étape et qu'il puisse continuer son propos sur un autre document?
Le Président (M. Simard): Je vous suggère à ce sujet de consulter votre voisin de droite, le député de Shefford, qui pendant des dizaines d'heures dans cette Chambre a cru bon d'informer ses concitoyens du contenu des lois en les lisant... que c'est une procédure tout à fait conforme et acceptable dans nos travaux.
M. Moreau: Mais, M. le Président, je l'avais consulté au préalable, et il m'a dit qu'une aussi intéressante suggestion que celle que je venais de vous faire n'avait pas été faite à l'époque.
Le Président (M. Simard): Nous en tiendrons compte dans nos réflexions. Et je repasse la parole au député de Mercier.
M. Turp: M. le Président, j'apprécie cette remarque du député de Marguerite-D'Youville, elle permet de rappeler l'importance non seulement de la loi, mais de ce principe voulant que nul n'est sensé ignorer la loi. Ce qui, je pense, devrait aussi nous amener, nous, les parlementaires, à rappeler le contenu des lois non seulement aux parlementaires que nous sommes, réunis ici en cette commission des institutions, mais à ceux et à celles qui s'intéressent aux lois en général, à la Loi sur le ministère de la Justice, qui crée l'institution de ministre de la Justice et de Procureur général.
D'ailleurs, cette loi... peut-être certains ne le savent pas, même peut-être que le député de Marguerite-D'Youville ou le député de Shefford ne le sait pas, que «le ministre de la Justice est d'office le Procureur général du Québec». Beaucoup de gens le savent, mais certains et certaines, et je suis certain que c'est la plupart des gens, ignorent qu'il est aussi le Notaire général du Québec. Saviez-vous, mesdames et messieurs, mes chers collègues, qu'il est aussi le Notaire général du Québec? Il est aussi, le ministre de la Justice, le registraire du Québec. Toutes ces fonctions sont cumulées en la personne du ministre de la Justice, de là l'importance de cette fonction. Mais j'ajouterais, M. le Président, qu'il se pose parfois la question: Est-ce que le ministre de la Justice devrait aussi être Procureur général du Québec?
Vous savez qu'il y a dans certains pays du Commonwealth une distinction entre ces fonctions, et, dans certains pays, le Procureur général n'est pas membre du Conseil des ministres, est un officier d'État qui est élu par l'Assemblée législative, pour assurer sa neutralité et pour assurer qu'il puisse exercer, comme cela peut pouvoir être le cas, des responsabilités de Procureur général à l'égard de ministres qui siègent au même conseil que celui-ci, lorsqu'il est Procureur général du Québec et à la fois le ministre de la Justice. Alors, peut-être devrait-on se pencher sur cette question, comme commission des institutions, aujourd'hui ou dans un avenir rapproché: Est-ce qu'un ministre de la Justice devrait aussi être Procureur général du Québec ou est-ce que les fonctions ne devraient pas être scindées?
Je rappelle aussi que le ministre de la Justice est aussi le président du Comité de législation et que c'est une fonction éminemment importante, puisque cela lui permet d'examiner l'ensemble des lois, de leur conformité aux autres lois, et notamment à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Je souhaiterais personnellement, M. le Président, que l'on institue un système visant à assurer la conformité des lois non seulement à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, et vraisemblablement aussi à la Charte canadienne des droits et libertés, mais aussi aux traités internationaux relatifs aux droits et libertés de la personne. Je ne crois pas que, dans l'état actuel des choses, un examen de conformité des lois se fasse à la lumière de nos engagements internationaux.
Et un tel examen s'impose pourtant, puisque le Québec s'est déclaré lié par plusieurs engagements internationaux relatifs aux droits et libertés en s'engageant par des décrets à respecter de tels engagements. Je pense, par exemple, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, à la Convention internationale sur les droits de l'enfant, à la Convention d'interdiction de la torture et combien d'autres conventions internationales encore, sur lesquelles le président du Comité de la législation, donc le ministre de la Justice, devrait assurer le respect par le biais de la législation québécoise.
Tout cela pour vous dire que le ministre, que nous entendrons lorsque le temps viendra, lorsque cela sera opportun, dans le respect des droits de l'opposition officielle, a des fonctions importantes. Mais son sous-ministre a des fonctions aussi importantes, comme étant le ministre titulaire de ce ministère de la Justice. Et, M. le Président, chers collègues membres de cette commission, lorsqu'il s'agit de la justice administrative et de la Loi sur la justice administrative que l'on veut amender, c'est bien le sous-ministre de la Justice qui, en mars 2003, a signé une lettre transmettant le fameux rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur la justice administrative et qui a fait part au ministre du mode de préparation ou des organes du ministère qui ont préparé ce rapport.
Dans une lettre qui est présentée dans ce rapport, on apprend de la part du sous-ministre de la Justice et du sous-procureur général, qui était à l'époque Michel Bouchard, que ce rapport sur la justice administrative avait été préparé en collaboration avec la Direction générale de la planification et de la coordination des activités ministérielles, de la Direction générale des affaires juridiques et législatives et de la Direction de la vérification interne et du traitement des plaintes. C'est le sous-ministre qui transmettait donc ce rapport, et, en le transmettant, on s'imagine bien qu'il en connaissait le contenu, qu'il avait examiné très, très attentivement les nombreuses recommandations qui étaient formulées dans ce rapport, un rapport dont je vous rappelle qu'il a 145 pages. Et voilà une raison parmi tant d'autres pour examiner et faire entendre le sous-ministre et le sous-procureur général dans le cadre de l'étude de ce projet de loi n° 4.
n(10 h 10)n Et le sous-ministre pourrait vraisemblablement nous informer, nous commenter ce projet de loi n° 4. Bien qu'il ne s'agirait plus du même sous-ministre. Le 31 mars 2003, Michel Bouchard était le sous-ministre, et nous savons maintenant que le nouveau sous-ministre est en poste depuis peu, il remplace quelqu'un qui était en poste depuis plus de 10 ans, qui avait été un grand serviteur de l'État québécois, une personne extrêmement respectée, extrêmement professionnelle, un très, très grand administrateur de l'État québécois, tout le monde le reconnaissait. Et nous souhaitons entendre le nouveau sous-ministre, le nouveau sous-procureur général. Peut-être a-t-il des choses nouvelles, différentes à nous dire au sujet de la justice administrative. Il est l'administrateur des lois sous la gouverne de laquelle la Loi sur la justice administrative va se déployer, donc une raison importante d'entendre le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général.
Et une personne qui a une telle fonction pourrait aussi réveiller l'intérêt des membres du parti majoritaire, susciter l'intérêt du parti majoritaire et de ses membres, aujourd'hui ou demain, si on devait l'entendre demain. L'opposition officielle est disposée à prendre tout le temps qu'il faut, donner tout le temps qu'il le faut au sous-procureur général et au sous-ministre pour qu'il puisse présenter de façon pédagogique, de façon conviviale, je dirais, la teneur de ce projet de loi, de son contenu, celui que son ministre veut nous faire adopter ici. Et il pourrait, du fait de sa nomination récente, nous présenter des vues originales, des vues nouvelles, des vues inspirantes pour les membres de cette commission. Et voilà, voilà pourquoi l'opposition officielle insiste pour qu'il soit entendu.
Et je vois le député de Shefford qui semble être d'accord, là, je l'ai vu faire un petit signe laissant entendre qu'il pensait que sans doute ce serait là une idée intéressante. On verra tout à l'heure s'il arrive à cette conclusion, lorsque le vote sera pris, mais...
M. Brodeur: Question de règlement, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Ah, je vois que vous avez mordu à l'hameçon, M. le député de Shefford, je vous écoute.
M. Brodeur: Oui. Le député de Mercier tente de prêter des intentions à un autre député, en l'occurrence moi, M. le Président, et je vous demanderais de le rappeler à l'ordre.
Le Président (M. Simard): Vous voulez bien être clair, vous n'avez pas d'intentions?
M. Brodeur: Exactement, j'opinais du bonnet sur un autre texte que j'avais devant les yeux, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Alors, M. le député de Mercier, vous êtes prié de ne prêter aucune intention au député de Shefford et de reprendre votre argumentation.
M. Turp: M. le Président, je n'osais prêter d'intention, c'est la raison pour laquelle j'ai rappelé que le député de Shefford pourrait vouloir, comme il l'a fait et ses autres collègues l'ont fait, voter contre une motion visant à faire entendre quelqu'un devant cette commission, pour que les membres de cette commission soient plus éclairés, mieux éclairés.
Je nous rappelle, là, collectivement que les membres du parti gouvernemental ont voté contre toutes les motions visant à faire entendre des institutions pourtant, pourtant importantes dans l'État québécois, qu'il s'agisse de la Protectrice du citoyen, ou de la Curatrice publique, ou du Vérificateur général. Alors, on comprend mal que les députés du parti gouvernemental ne veulent pas donner la parole à des personnes qui pourraient véritablement nous éclairer sur cette réforme partielle, il est vrai. Tellement partielle qu'il y a des gens et des personnes qui ont fait parvenir des mémoires à cette commission qui sont d'avis qu'elle devrait être retirée au profit de cette réforme globale dont le ministre a parlé dans ses remarques préliminaires, une réforme globale de la justice administrative qui démontre jusqu'à quel point cette réforme très partielle ? quelques articles à peine de la Loi sur la justice administrative sont amendés ici ? vise peut-être à régler un problème qui est un problème qui n'existe pas ou qui n'existe que dans les yeux du ministre et de certains de ses conseillers.
D'ailleurs, je rappelle aux gens que, pour l'essentiel, cette réforme vise à réduire la participation de gens qui ne sont pas avocats et notaires aux travaux du Tribunal administratif du Québec, à réduire l'importance de la participation de médecins, de psychologues, de travailleurs sociaux qui jusqu'à présent ont pu participer à la justice administrative, ont pu accompagner des citoyens et des citoyennes qui prenaient des recours, et qui pouvaient très bien comprendre les dossiers, les comprendre peut-être et sans doute même mieux que des avocats et des notaires. Ici, le projet de loi vise à priver ces citoyens et citoyennes de la possibilité de présenter leurs vues et leurs causes devant des bancs du Tribunal administratif qui seraient composés de personnes compétentes.
Alors, le sous-ministre et le sous-procureur général pourrait venir nous dire pourquoi il faudrait priver les citoyens et les citoyennes de cette expertise. Pourquoi priver le Tribunal administratif du Québec de cette expertise? Il a certainement, comme l'un des grands commis de l'État, comme un des grands administrateurs de l'État, des idées sur cette question-là. Je crois qu'on pourrait profiter collectivement de sa sagesse, mais aussi... Et j'imagine qu'il est sage, s'il a été choisi par le ministre actuel, il a été choisi pour ses compétences... ou par le premier ministre, devrais-je dire. Sans doute ses compétences seraient bien mises à contribution.
Et j'ai toujours ce plaisir de revenir au mémoire de ma collègue France Houle, cette administrativiste de l'Université de Montréal, où il y a aussi des internationalistes, des constitutionnalistes, des familialistes...
M. Brodeur: ...50 000 mots, en fin de compte.
M. Turp: Ce qui me permet... La remarque du député de Shefford me permet de rappeler une réalité qu'il vient de souligner. La langue française est une langue très belle, vous le savez comme moi, M. le Président. Je sais que vous l'appréciez beaucoup, que c'est une langue dont... vous l'appréciez à ce point que vous enseigniez sa littérature, même, dans une vie antérieure. Je sais d'ailleurs, ici... Et je me permets de le dire en présence d'une personne qui était jadis ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. La députée de Bourget a assumé ces fonctions tout à fait importantes dans les gouvernements précédents. La langue française, c'est une belle langue, mais qui a à peu près 25 000 mots, 25 000 mots. Et tout à l'heure nous discutions de d'autres langues, et notamment de la langue anglaise, qui a quant à elle 50 000 mots, deux fois plus que la langue française ? deux fois plus que la langue française; elle n'est pas plus belle pour autant, mais elle est aussi belle.
Quand on lit Shakespeare et Milton, quand on lit Michael Ondaatje ou quand on lit Yann Martel, par exemple... Je suis en train de lire Life of Pi, la vie de Pi, je suis rendu à peu près au milieu; c'est extraordinaire, je vous invite à le lire. D'ailleurs, Yann Martel, c'est un romancier québécois qui vient de gagner le prix Booker, un prix prestigieux, et sa maîtrise de la langue anglaise est excellente. Son livre, soit dit en passant, a été traduit en français par son père et sa mère, qui maîtrisent très bien la langue française aussi. Son père est un ancien diplomate et sa mère est une traductrice, et je crois que...
n(10 h 20)n Tout cela pour dire qu'il y a des langues qui sont très belles, et une langue française qui a ajouté à son vocabulaire des mots comme «administrativiste». Et le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général connaît des administrativistes, il y en a dans son ministère. Il a eu et il a encore aujourd'hui la possibilité de les consulter, de leur demander leurs opinions. Et il pourrait donc, et il pourrait donc, en préparant une séance de la commission, il pourrait faire appel à eux pour préparer une prestation devant cette commission et nous éclairer sur le sens et la portée du projet de loi n° 4 sur la justice administrative, amendant cette loi, et ses huit articles, qui peuvent paraître pour certains ou certaines anodins, mais c'est des articles qui changent l'économie générale de la justice administrative ou en tout cas du fonctionnement de la justice administrative à travers le Tribunal administratif du Québec, puisque l'article... l'un des articles importants en est un qui vise à modifier la composition du Tribunal.
Alors... Mais je reviens à l'administrativisme, que j'avais en tête lorsque je commençais cet exposé. Je pense à Me France Houle, cette jeune professeure de l'Université de Montréal, qui est une professeure depuis une dizaine d'années, peut-être, peut-être un petit peu moins, qui a d'ailleurs été mon ancienne étudiante. C'est une personne que j'ai beaucoup appréciée, à qui j'ai enseigné le droit international, pas le droit administratif ni le droit constitutionnel, mais le droit international. Mais elle a choisi un créneau tout à fait intéressant: le droit administratif.
D'ailleurs, ceux qui s'intéressent à l'administration publique pourraient songer à une carrière d'administrativiste. Il y a encore dans nos universités très peu, trop peu de gens qui s'intéressent au droit administratif. Encore aujourd'hui, il y a trop peu d'ouvrages en droit administratif. C'est toujours les mêmes: M. Borgeat, M. Ouellet et Pépin, jadis. Et donc, un petit conseil à ces étudiants, à ces étudiantes en droit qui nous écoutent et à ceux qui voudraient les conseiller: il y a de très belles carrières en droit administratif qui s'annoncent, il y a une relève à faire dans nos universités, lorsqu'il s'agit de l'enseignement du droit administratif. Et je vois là, dans ce contexte-là, mon collègue le député de Shefford hocher ? comment dire? ? du bonnet et être en accord avec cette proposition, et, comme juriste distingué, j'imagine qu'il serait disposé à appuyer cette suggestion à des jeunes juristes de penser à une carrière dans le domaine du droit administratif.
D'ailleurs, quand on constate la composition de cette commission et des gens qui sont autour de cette table, des juristes, mon collègue, ici, à ma droite, il est plutôt un pénaliste, n'est-ce pas? Un criminaliste?
M. Bédard: Non, en relations de travail.
M. Turp: Oh! Un travailliste, un travailliste.
M. Bédard: Première fois que je l'entends, là.
M. Turp: Un travailliste. On a dit tellement...
Le Président (M. Simard): Il se rapproche de Tony Blair, là.
M. Turp: On utilise généralement cette expression quand on pense au Parti travailliste britannique, au Labour de Tony Blair, ou aux travaillistes néo-zélandais, australiens, les Labour Party de la Nouvelle-Zélande ou d'Australie.
Une voix: Le NPD.
M. Turp: Ici, non, on ne parle pas des gens du NPD comme étant des travaillistes, bien qu'il y a une parenté. D'ailleurs, ils sont ensemble dans l'Internationale socialiste. Ça pourrait s'appeler l'Internationale travailliste, mais c'est plutôt l'Internationale socialiste.
Je crois comprendre que notre collègue de Marguerite-D'Youville est un municipaliste, municipaliste, un spécialiste de droit municipal. D'ailleurs, il nous en a fait la preuve lors de nos séances antérieures, quand il m'a très, très bien expliqué ce qu'était une municipalité locale. Je dois avouer et admettre que je croyais que c'était une expression nouvelle, qui n'était pas usitée dans nos lois. Mais c'est une expression qui est usitée puis qui se distingue des municipalités régionales de comté, des villes, des cités.
Bien que, là encore, si on veut être respectueux de la langue française, vous savez, le mot «cité»... Le mot «cité» n'est peut-être pas tout à fait approprié, dans la langue française, hein? Le mot «cité» est un mot qu'on utilise moins ou qu'on n'utilise plus. À une époque, il y avait la cité de Montréal, mais maintenant c'est devenu partout la ville de Montréal. Il semble que c'est un anglicisme, le mot...
M. Bédard: La Loi sur les cités et villes, aussi.
M. Turp: Mais la Loi sur les cités et villes existe encore, bien que l'on reconnaisse maintenant que le mot «cité» est vraisemblablement un anglicisme. Alors, peut-être qu'on devrait changer le nom de la loi, et la Loi des cités et villes devrait devenir la Loi sur les villes et villes, la Loi sur les villes et villes ou la Loi sur les villes. Ou on devrait remplacer ce terme par «les municipalités». J'ai toujours cru qu'on devrait simplifier les choses, puis on devrait avoir un Code des municipalités et, ensemble, fondre le Code municipal et la Loi des cités et villes, et nous assurer qu'il y a une certaine cohérence dans le vocabulaire et dans l'aménagement législatif, là, ou l'infrastructure législative nécessaire à la bonne gestion des villes.
Et notre porte-parole, d'ailleurs, aux affaires municipales pourrait réfléchir à cela, dans le cadre de nos chantiers de modernisation et dans notre programme, parce que l'on pourrait vouloir poursuivre les réformes audacieuses qu'a faites le gouvernement précédent en matière municipale, une réforme que le parti gouvernemental est en train de remettre en cause, M. le Président, ce qui suscite dans la population et auprès des élus des remous considérables. Tellement considérables qu'on sent très bien maintenant que le gouvernement s'apprête à reculer, à reculer dans une direction qui devrait être la bonne, qui est celle d'accepter l'idée que des grandes villes doivent continuer d'exister et que ces grandes villes doivent pouvoir participer au développement économique de Montréal et d'autres grandes villes.
Mais je rappelle, je rappelle que ma collègue France Houle, France Houle, l'administrativiste, elle a émis des opinions très, très, très critiques à l'égard de ce projet de loi, sur lesquelles nous aimerions, nous, de l'opposition officielle, entendre le sous-ministre, le sous-ministre et le sous-procureur général. Le sous-ministre et le sous-procureur général pourrait, par exemple, commenter une des premières constatations faites par France Houle, la professeure de l'Université de Montréal, selon laquelle le problème des délais, qu'on veut résoudre d'une façon assez curieuse dans ce projet de loi, n'est pas engendré par un mode de fonctionnement déficient du Tribunal, mais par l'inventaire des dossiers qui lui ont été transférés au moment de sa mise sur pied et les retards de l'administration gouvernementale dans la transmission des dossiers au TAQ, le TAQ, le Tribunal administratif du Québec.
D'ailleurs, M. le Président, j'espère que pendant la présente législature nous aurons le soin de toujours dire ce que veulent dire ces acronymes. Il y a une certaine... Il y a une certaine ? comment dire? ? tendance, complaisance dans l'utilisation des acronymes. Beaucoup de gens utilisent des acronymes en pensant que les gens en connaissent la signification, et parfois les gens sont perdus dans ce langage acronymique.
M. Brodeur: ...
M. Turp: Et le TAQ, c'est le Tribunal administratif du Québec.
Le Président (M. Simard): Du tac au tac.
M. Turp: Le député de Shefford me montre, là, un autre acronyme qui est utilisé dans un article du journal de ce matin, qui permet de démontrer cette utilisation outrancière, comment abusive: La PDG de l'AMT saute. La PDG. PDG? La PDG, donc, présidente-directrice générale, si je ne me trompe pas. L'AMT. Qui sait que l'AMT est l'Agence métropolitaine...
Une voix: Transport.
M. Turp: Des ou du transport?
M. Brodeur: De transport.
M. Turp: De transport. Alors, vous voyez, l'Agence métropolitaine de transport. Qui savait, d'ailleurs, que c'était «de transport»? Ça aurait été mieux de mette un D, Agence métropolitaine de transport, AMDT. Mais la pratique veut généralement que l'on ne mette pas le D...
Le Président (M. Simard): Une minute pour nous parler d'acronymes.
M. Turp: Il reste une minute?
M. Moreau: M. le Président, est-ce que, pendant cette minute, il pourrait nous parler de la difficulté de trouver sur les acronymes des accents, comme dans «UQAM»?
Le Président (M. Simard): Oui, l'exemple classique est l'UQAM, hein.
M. Moreau: Parlez-nous de ça. Il vous reste une minute. J'aimerais vous entendre.
n(10 h 30)nM. Turp: Bien, merci, M. le Président, ça me donne l'occasion de compléter ma prestation, là. Effectivement, l'UQAM ? l'UQAM ? dont le beau bâtiment, je crois que ce n'est pas le Département des mathématiques, mais c'était le département des... qui est derrière la Place des Arts, la très belle Place des Arts à Montréal, l'esplanade de la Place des Arts... Alors, vous avez, à une certaine époque, vu cet édifice s'ériger, et c'est un édifice de l'UQAM, c'était U-Q-A-M en majuscules, mais il n'y avait pas d'accent, et l'UQAM a mis un accent sur le A.
M. Moreau: Qu'en dites-vous?
M. Turp: J'en dis du bien, parce que c'est respectueux des règles de l'Office de la langue française qui veulent que les capitales doivent être accentuées, contrairement à la pratique en France, par exemple, où les lettres capitales ou majuscules ne sont pas accentuées.
M. Moreau: Mais les capitales acronymiques?
M. Turp: Bien, l'UQAM, je crois, comme le chef de l'opposition officielle le dit régulièrement, est une institution qu'on respecte beaucoup et dont certains professeurs donnent parfois des conseils aux libéraux, pour dire plus tard que c'étaient des conseils qui étaient mal avisés. Mais c'est une institution qui a tout notre respect, et, là-dessus, M. le Président, je rappelle que nous souhaitons entendre le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général pour avoir son avis sur le projet de loi n° 4, la Loi modifiant la Loi sur la justice administrative. Et je vous remercie.
Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, M. le député de Mercier. Nous avons appris des choses absolument fort utiles sur notamment les acronymes. Et nous entendrons maintenant la députée de Mercier... pardon, excusez-moi, Mme la députée de Bourget.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. D'abord, je suis heureuse de vous retrouver à l'occasion de l'étude d'amendements au sujet du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative. Je me rends bien compte que, malheureusement, si je me réfère aux derniers propos que j'ai entendus lorsque j'ai siégé, il y a quelques jours, à cette commission, la pensée du ministre et du gouvernement n'a visiblement pas évolué encore dans le bon sens. Je voudrais donc appuyer cette motion à l'effet...
M. Turp: Elle n'a pas reculé dans la bonne direction.
Mme Lemieux: M. le Président, mes collègues sont taquins ce matin. Alors, je voudrais donc appuyer cette motion à l'effet que la commission des institutions tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 4, des consultations particulières et qu'elle entende donc le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général.
Le député de Mercier vient, de manière très éloquente d'ailleurs, imagée à certains moments, d'exposer un certain nombre d'arguments en faveur d'une rencontre entre les membres de la commission et le sous-ministre de la Justice et sous-procureur général. J'aimerais plaider d'autres éléments qui à mes yeux s'ajoutent aux arguments du député de Mercier et qui justifient tout à fait le débat autour de cette motion et qui en justifieraient certainement son adoption.
M. le Président, vous le savez, parce que j'ai eu l'occasion d'intervenir il y a quelques jours sur la pertinence du projet de loi n° 4, vous savez à quel point j'ai dit et j'ai indiqué qu'à mon avis, humblement mais tout de même à mon avis, le ministre faisait l'erreur de prendre le dossier par le mauvais bout, puisqu'il nous propose des amendements, très limités en nombre d'ailleurs, mais qui soulèvent un tas de questions, des amendements qui ne sont pas mis dans un contexte, et surtout il nous a privés de la compréhension et de... de la compréhension fine et approfondie des pas que nous avons faits collectivement en regard de la justice administrative au Québec. Et, ce matin, cette motion visant à entendre le sous-ministre de la Justice et le sous-procureur général du Québec va tout à fait dans ce sens-là.
Je vous rappelle, M. le Président, que nous avons une pièce majeure, qui s'appelle le Rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur la justice administrative, qui est un... qui est le résultat d'un examen minutieux, je le crois, et voilà pourquoi nous devrions parler avec le sous-ministre de la Justice et sous-procureur général, qui est donc un examen minutieux de la mise en oeuvre de la Loi sur la justice administrative.
Alors, M. le Président, ce rapport ? d'ailleurs première remarque qui saute aux yeux ? ce rapport est signé non seulement du ministre, mais d'abord du sous-ministre de la Justice. Pourquoi est-il signé et présenté par le sous-ministre de la Justice? Parce que c'est sous sa gouverne, c'est au sein du ministère de la Justice qu'ont été déployés des efforts, que se sont faits les travaux d 'évaluation de la mise en oeuvre de la Loi sur la justice administrative.
Alors, c'est un rapport ? mon collègue de Mercier le soulignait ? qui est substantiel en termes de pages, mais en termes de contenu également...
Une voix: 145 pages.
Mme Lemieux: ... ? 145 pages, me rappelle-t-on avec beaucoup de gentillesse ? un rapport qui est substantiel et, d'autant plus, un rapport qui était prévu, c'est-à-dire qu'au moment où la Loi sur la justice administrative a été adoptée on a prévu, il y a un article dans cette Loi sur la justice administrative qui prévoyait, et c'est l'article 200, et je cite, que le ministre de la Justice procède à l'évaluation de la mise en oeuvre de la loi et en fait état dans un rapport d'abord présenté au gouvernement au plus tard le 1er avril 2003 puis déposé devant l'Assemblée nationale pour qu'elle en fasse l'étude et entende sur le sujet les observations des personnes et des organismes concernés. Fin de la citation.
M. le Président, comment se fait-il que le ministre de la Justice, qui est le gardien du respect de nos lois, transgresse de manière aussi nonchalante une loi dont il a la responsabilité? La loi dit: Il faut évaluer... La Loi sur la justice administrative a indiqué qu'il fallait évaluer les résultats de l'application de cette loi; qu'il fallait un rapport, nous avons le rapport; qu'il fallait déposer ce rapport au gouvernement, ce rapport a été visiblement déposé au gouvernement; et qu'il soit déposé devant l'Assemblée nationale, pas juste pour fins de dépôt, pour qu'on ajoute ces 145 pages à la liste de papiers qui sont déposés à l'Assemblée nationale, ce rapport devait être déposé afin que l'Assemblée nationale en fasse l'étude et entende sur le sujet les observations des personnes et des organismes intéressés. Comment ça se fait, M. le Président, que le ministre passe à côté de quelque chose d'aussi simple et limpide? Et c'est dommage, M. le Président, parce que...
M. Moreau: Question de directive, M. le Président.
Mme Lemieux: C'est dommage...
Le Président (M. Simard): Excusez-moi, Mme la députée de Bourget. M. le député de Marguerite-D'Youville veut...
M. Moreau: Oui, j'ai une question de directive. Évidemment, c'est... Ça fait deux fois que la députée de Bourget vous pose les questions, et je note que vous ne répondez pas. Est-ce que la procédure de la commission prévoit que vous devez répondre aux questions qui vous sont posées par les parlementaires?
Le Président (M. Simard): Une question qui peut sembler candide, qui peut sembler un peu naïve, mais, étant donné l'arrivée récente dans nos murs du député de Marguerite-D'Youville, je veux simplement lui indiquer que, lorsqu'une parlementaire ou un parlementaire s'adresse à la présidence pour poser des questions, il respecte parfaitement nos règlements, puisqu'il ne peut pas vous interroger... ou on ne peut pas poser les questions sans l'intermédiaire de la présidence. Mais tout le monde aura compris que ces questions ne s'adressent pas spécifiquement à la présidence mais se font par l'intermédiaire de la présidence. Je redonne donc la parole...
Une voix: ...
Le Président (M. Simard): Est-ce que ma... Question de directive, M. le député?
M. Moreau: Mais, bien que la question s'adresse à la présidence par intermédiaire, est-ce que le règlement prévoit quand même que la présidence est investie des pouvoirs de répondre à cette question par intermédiaire également?
Le Président (M. Simard): Je vous répondrai là-dessus que non, puisque, par exemple, vous avez pu observer à la période des questions, le président reçoit toutes les questions, y compris du chef de l'opposition, mais qu'il n'y a pas de précédent où le président ait répondu lui-même. Mais, si ? je me réfère à une phrase entendue de la bouche du député de Shefford hier ? si, par consensus, par consentement, une commission peut à peu près tout faire, s'il y avait un consentement pour que je réponde à toutes les questions lorsqu'on s'adresse au président, je pourrais essayer de le faire, mais je pense que ce serait vraiment aller très loin dans les pouvoirs du président, et je préfère en demeurer à l'état actuel des choses et considérer que l'on s'adresse à moi en respectant le règlement, par politesse, de façon à ne pas interpeller directement des collègues ou le ministre, de façon à permettre à nos débats de se dérouler, comme ils se déroulent d'ailleurs, avec toute la sérénité nécessaire.n(10 h 40)n J'invite, si le député de Marguerite-D'Youville est satisfait de mes indications, j'invite la députée de Bourget à poursuivre son exposé encore pendant... Madame?
Une voix: ...
Le Président (M. Simard): Quatre minutes.
Mme Lemieux: M. le Président, écoutez, ce qui me désole le plus, ce n'est pas que vous ne répondiez pas à mes questions, c'est le fait que le ministre n'y réponde pas. C'est ça qui est désolant dans l'exercice.
M. le Président, je vais vous relire l'article 200 de la Loi sur la justice administrative, adoptée, de mémoire, en 1996, mise en vigueur en 1998. Cet article dit la chose suivante ? j'ouvre les parenthèses pour les fins de la transcription:
«Le ministre doit, au plus tard le 1er avril 2003, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi et sur l'opportunité, le cas échéant, de la modifier.
«Ce rapport est déposé dans les 15 jours suivants devant l'Assemblée nationale si elle siège ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux.» Troisième alinéa: «Dans l'année qui suit la date de ce dépôt, la commission compétente de l'Assemblée nationale procède à l'étude du rapport et elle entend à ce sujet les observations des personnes et ? des ? organismes intéressés.» M. le Président, le ministre a déposé le rapport, visiblement. Pourquoi n'a-t-il pas respecté l'esprit et la lettre de l'article 200? Plutôt que de nous présenter des amendements échevelés, M. le Président, nous aurions dû faire le travail, ce travail, de manière méthodique, c'est-à-dire prendre acte, prendre connaissance, s'approprier l'information qui ressort de ces travaux d'évaluation de la mise en oeuvre sur la Loi sur la justice administrative, le faire comme parlementaires, le faire avec des gens experts, concernés, qui ont expérimenté la mise en oeuvre de cette Loi sur la justice administrative, et par la suite développer un diagnostic et surtout essayer d'imaginer des mesures législatives qui nous permettraient d'aller encore plus loin dans cette réforme de la justice administrative. Or, le ministre a mis la charrue avant les boeufs. Et je dois dire que, dans sa charrue, il n'y a pas grand-chose. Il y a des petits articles ici et là, puis on se demande d'où ça vient, puis... Une espèce de lubie, là, un matin. Bon, voilà.
Une voix: Il y a des boeufs puis rien.
Mme Lemieux: Alors, il n'y a que les boeufs, effectivement, M. le Président. Alors, M. le Président...
Le Président (M. Simard): Le député de Marguerite-D'Youville désire une précision à ce moment-ci, vous me permettrez d'écouter sa question. J'espère que c'est un rappel au règlement, puisqu'il serait quand même dommage...
M. Moreau: C'est un rappel au règlement.
Le Président (M. Simard): Quel article, M. le député?
M. Moreau: Écoutez, je vous le citerai dans un instant, laissez-moi faire mon introduction.
La députée de Bourget indique qu'il n'y avait pas grand-chose dans la charrue du ministre. Je lui rappellerai qu'il s'agit d'une méconnaissance...
Le Président (M. Simard): Que tout était sur le boeuf.
M. Moreau: ...une méconnaissance de l'art aratoire, puisque...
Une voix: ...
M. Moreau: ... ? aratoire ? parce que la charrue ne contient généralement absolument rien. C'est un instrument de culture et qui, par son propre poids, permet de retourner la terre. Alors, il n'y a pas de contenu dans une charrue, et, dans la mesure où celle du ministre ne contiendrait rien, ce serait une charrue parfaitement normale.
Le Président (M. Simard): Sur ces précisions de nature aratoire, nous allons revenir à l'art oratoire et écouter la députée de Bourget conclure, dans les deux prochaines minutes, son intervention.
Mme Lemieux: Alors, M. le Président, c'est une expression populaire bien connue: Mettre la charrue avant les boeufs. En fait, cette expression désigne le fait de ne pas travailler de manière ordonnée. Et là on... Voilà. Et, selon le dictionnaire, mettre la charrue avant les boeufs signifie «faire d'abord ce qui devrait être fait ensuite, après». Je ne suis pas tellement inspirée par cette expression!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'espère que les gens qui nous...
Le Président (M. Simard): Donc, vous allez maintenant conclure dans cette dernière minute,
Mme Lemieux: Oui. Alors, M. le Président, j'espère que les gens...
Le Président (M. Simard): Dans le comté de Bourget, il n'y a pas beaucoup de boeufs, je pense, hein?
Mme Lemieux: Non, mais enfin je suis la petite-fille de fermiers. M. le Président, les gens qui nous écoutent trouveront peut-être que nous avons un petit côté de bonne humeur ce matin. Il faut dire que plusieurs de mes collèges avons siégé plusieurs heures sur cette commission, et on cherche toutes sortes de manières de faire comprendre au ministre qu'il faudrait agir de manière rigoureuse, méthodique, pas obsessive, là, hein, on se comprend, mais on a devant nous un rapport qui a de la substance, qui nous permettrait de guider les interventions futures de ce Parlement et du ministre en matière de justice administrative.
La clé de ce rapport, elle est au sein du ministère de la Justice, puisque c'est le ministère qui a piloté les travaux, qui a dirigé les travaux. On aurait pu attendre des choses très pertinentes sur la méthodologie, sur les conclusions que le ministère de la Justice tire de cet exercice. Alors, j'appuie donc cette motion à l'effet que la commission entende le sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Québec.
Le Président (M. Simard): Je remercie la députée de Bourget pour son intervention et je vais maintenant inviter le député de Chicoutimi... À moins qu'à ma droite il y ait une demande d'intervention. Alors, le député de Chicoutimi souhaite intervenir sur cette motion, et nous allons l'écouter.
M. Bédard: À moins d'avoir un consentement, évidemment, de mes collègues pour que nous puissions l'entendre. Je tends la main au député de Shefford, main qui est encore tendue.
M. Brodeur: Comme vous disiez auparavant, on peut tout faire de consentement, et on disait, en droit, même changer un homme en... sauf changer un homme en femme, et maintenant on le peut. La question, c'est: Qui? Vous pouvez continuer.
Une voix: Que les volontaires s'avancent.
M. Bédard: Qui peut le faire?
Le Président (M. Simard): Alors, le député de Shefford ne se présentant pas comme volontaire...
M. Stéphane Bédard
M. Bédard: La collaboration va s'arrêter, M. le Président, évidemment à l'échange de bons procédés. Et je vois que, malgré la pertinence de nos propos et le nombre quand même, je pense, pas encore assez suffisant de motions que nous avons déposées, nous... quand même, le mur s'est affaibli, qui était devant nous. Je le sens... je sens que mes collègues, tranquillement, nous réussissons à faire des gains, des gains en termes de réflexion. Donc, je nous invite, nous, comme opposition, à continuer le travail entrepris, qui a été fort bien fait jusqu'à maintenant, vous l'avez dit, et qui consiste à convaincre le ministre, mais aussi nos collègues, de la non-pertinence du projet de loi actuel. Et pas de l'impertinence, bien qu'il peut quand même à certains égards être impertinent, puisqu'il... comme le projet de loi et la façon que nous avons déposé le projet de loi, je vous dirais, a été fait sans tenir compte des avis des différents intervenants dans le domaine et aussi, évidemment, comme le faisait avec beaucoup d'à-propos ma collègue la députée de... la députée de Bourget ? je partais pour dire Mercier encore, la députée de Bourget, bien, oui, je ne veux pas prêter des intentions à Mme la députée ? comme ma collègue le disait, sans tenir compte d'un rapport fort important qui est celui du rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur la justice administrative.
Donc, bien que le projet de loi soit non pertinent, nous pouvons, nous, comme membres de la commission, considérer que, oui, il a une forme d'impertinence, ce projet de loi, puisqu'il ne tient pas compte de l'ensemble des avis exprimés.
Et ma collègue fait bien ressortir l'importance pour les membres de cette Assemblée, et plus particulièrement lorsque nous occupons des postes ministériels au gouvernement, d'agir de façon méthodique et avec rigueur. Et je ne pense pas qu'il y ait une personne mieux placée en cette commission que ma collègue la députée de Bourget pour rappeler à l'ordre le ministre quant à la rigueur qui doit animer ceux et celles qui ont à prendre des décisions, à modifier les lois. Oui, la députée de Bourget est un exemple à ce niveau-là, et je me souviens même d'avoir travaillé avec elle dans divers dossiers, et nous avions l'habitude d'écouter, d'entendre, et pas simplement d'entendre, de comprendre effectivement et d'assimiler les principes qui nous étaient véhiculés par les groupes qui viennent nous voir.
M. Moreau: ...
M. Bédard: Peut-être.
Le Président (M. Simard): ...de ne pas interrompre le député de Chicoutimi, M. le député de Marguerite-D'Youville, que je rappelle délicatement à l'ordre.
M. Moreau: Merci, M. le Président. Je ne le ferai plus.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, j'en reviens à cette absence de rigueur qui a animé les travaux de notre commission. Malheureusement, nous avons été contaminés par un peu la façon de faire du ministre qui a été celle de mettre cette charrue vide avant les boeufs. Maintenant, nous le savons, elle est maintenant consacrée.
M. Turp: ...
M. Bédard: Oui. Je vais y revenir, M. le député de Mercier.
Le Président (M. Simard): Vous oubliez notre ex-collègue Guy Chevrette.
n(10 h 50)nM. Bédard: On en aura plusieurs autres, citations, vous allez voir. D'ailleurs, je tiens aussi à exprimer tout le plaisir que j'ai à siéger avec la députée de Bourget ? et évidemment vous l'avez entendue ? qui assimile très bien et rapidement les concepts parfois complexes que requiert la justice administrative, mais aussi et surtout mon collègue le député de Mercier qui, en plus de la pertinence de ses propos, fait en sorte que nous ayons une meilleure connaissance des mots que nous employons. Et il fait en sorte d'enrichir, je pense, tant la présidence que nous, membres de la commission, de termes bien connus en termes juridiques. Et ce que j'ai compris de ses propos, c'est que effectivement nous pouvons maintenant parler... comme nous parlons de constitutionnaliste, nous pouvons aussi parler d'administrativiste. C'est le cas? Oui, effectivement. Donc... Et c'est un terme que j'aurais hésité à employer, mais, comme mon collègue, en plus, a enseigné à la faculté de droit, dans les facultés de droit, donc on peut se permettre maintenant de parler d'administrativiste. Et, si l'on se trompe, je me sens en bonne compagnie avec le député de Mercier, si l'emploi de ce terme ne convient pas à notre belle langue française.
Par contre, il y a un fond à cet exercice que nous faisons aujourd'hui, et je profite du fait que nous sommes devant les caméras et au salon rouge, qui est, je vous dirais, chargé de symbolique en cette Assemblée, qui, vous le savez, auparavant, l'ancienne Assemblée... plutôt, les lieux contenaient l'ancienne Assemblée législative, l'ancien Sénat...
Une voix: Conseil législatif.
M. Bédard: ...Conseil législatif, pardon, effectivement, qui est finalement le Sénat québécois, et qui maintenant sert aux activités plus protocolaires et aussi aux travaux de cette commission, et profiter de cette occasion pour rappeler à ceux et celles qui nous écoutent que l'exercice que nous faisons n'a rien de futile. Il est un des principes et, je vous dirais, des armes que détient l'opposition, qui est celle de tenter, parfois, oui, avec une certaine persistance, de faire entendre raison au gouvernement et en même temps de permettre à des groupes de participer au débat et de, je vous dirais, eux aussi, comme ils ne peuvent se faire entendre ici, à cette Assemblée, de pouvoir aussi contribuer au fait que nous souhaitons faire entendre raison au gouvernement et au ministre. Donc...
Et les raisons sont simples, vous les savez, je les ai expliquées à plusieurs occasions, mais elles se résument en différents points, le premier étant celui de l'absence ou, du moins, l'absence d'écoute et de consultation dans l'étude du projet de loi, le fait que les groupes qui sont venus se faire entendre à cette commission, et qui ne sont pas les moindres! Souvenez-vous, M. le Président, vous étiez présent à chacune des étapes: l'Ordre des évaluateurs agréés, l'Ordre des médecins... le Collège des médecins, plutôt, le Barreau, la Chambre des notaires, l'Association des juristes en droit social, l'Association, aussi, de protection... ou de défense des assistés sociaux, et d'autres mémoires d'administrativistes maintenant reconnus et dont faisait mention mon collègue le député de Mercier, Me France Houle, qui ont invité le ministre, d'une façon, je vous dirais, très polie et très respectueuse des pouvoirs qu'il détient, de ne pas aller de l'avant avec le projet de loi actuel.
Et pourquoi? Tout simplement pour des raisons qui sont... que nous avons assimilées, je vous dirais, assez rapidement après une journée. Parce que je vous rappellerais encore, M. le Président, que nous étions en faveur du principe du projet de loi. Nous avons écouté les groupes; ils nous ont convaincus, sans malice et sans aucune arrière-pensée, que ce projet de loi ne rencontrait pas les objectifs que le ministre s'était donnés. Et à cela j'ajoute aussi encore, et je le répète, la Conférence des juges administratifs, qui est venue nous dire la même chose, donc qu'aucune des attentes exprimées par le ministre lors de l'adoption de principe n'est rencontrée par le projet de loi actuel. Pire, pire, il contrevient à un principe de la justice administrative qui est celui de la spécialisation du Tribunal. Donc, c'est quand même...
Un des principes que sous-tend la création de la justice administrative, c'est de faire en sorte effectivement qu'elle développe cette spécialisation et qu'elle fasse en sorte que les gens qui se trouvent devant elle n'aient pas à se trouver devant les tribunaux de droit commun, parce qu'il faut que je le rappelle, il faut le rappeler, M. le Président ? et j'ai eu une belle discussion dans un autre contexte avec le député de Marguerite-D'Youville ? que les décisions de l'administration sont révisables. Les décisions qui sont de nature évidemment... qui modifient des droits des administrés sont appelables et... sont révisables, plutôt, devant les tribunaux de droit commun. C'est un pouvoir inhérent et constitutionnel des tribunaux supérieurs de réviser ces questions. Or, pourquoi le législateur a jugé à propos de créer ces tribunaux administratifs? C'est justement pour éviter, en termes de coûts et en termes de lourdeur, d'éviter à nos concitoyens et concitoyennes du Québec de se retrouver devant les instances qui appliquent des règles de preuve qui sont beaucoup plus sévères, qui aussi font en sorte que les coûts sont beaucoup plus élevés pour ceux qui y font valoir leurs droits, et qui font en sorte finalement que les gens ont peu accès, et qui bloquent l'accessibilité à l'exercice des droits de nos concitoyens et concitoyennes.
Or, le projet de loi... Et la Conférence des juges administratifs était très dure dans ses commentaires, mais d'autres aussi, qu'agir de cette façon, en modifiant la composition du Tribunal finalement, ferait du Tribunal administratif du Québec un tribunal, je vous dirais, qui serait épuré de sa qualification, de ses bases, qui est celle de la multidisciplinarité, qui est celle finalement de la spécialisation, et qu'on en ferait finalement un pâle, un pâle tribunal de droit commun, et tant les juges que les groupes intéressés se sont montrés en défaveur.
Ils ont aussi demandé... D'autres groupes ont aussi demandé de conserver, pour la simple raison que les gens qui... et, vous le savez, c'est près de 40 %, dans certains cas, des concitoyens et concitoyennes qui n'ont pas d'avocat ou de représentant, d'être bien écoutés et d'être compris par le Tribunal et, lorsque nous ne disposons pas d'experts, que le Tribunal administratif puisse comprendre la preuve qui est présentée. Alors, bien malheureusement, en écartant les membres spécialistes, donc en laissant simplement les membres juridiques, avocats ou notaires, devant le Tribunal, nous faisons en sorte que ces gens ne se retrouvent pas dans une position à obtenir justice, tout simplement, et ça, c'est bien malheureux, bien malheureux.
Pourquoi? Pour la simple raison que, lorsque nous présentons... Par exemple, lorsque nous avons besoin d'un médecin, il y a une preuve médicale à faire ? et, vous le savez, c'est fort coûteux, engager des médecins, M. le Président, comme experts ? eh bien, que ces personnes qui n'ont ni avocat ni médecin puissent quand même être entendues et que la preuve qui est présentée par l'administration, qui est le ministère, souvent, concerné, et qui se fait souvent, et même en presque totalité dans ces cas-là, avec une preuve médicale... puisse être appréciée et aussi, je vous dirais, contestée même par le membre de ce Tribunal qui jouit d'une compétence particulière dans ce domaine, et ça, pour la saine protection des droits des administrés.
Je vous dirais, le même cas se produit au niveau des travailleurs sociaux. Un avocat ou un notaire n'a pas, je vous dirais, toute la compétence nécessaire à évaluer le côté social que peuvent contenir certains dossiers qui sont présentés devant elle. Au-delà des personnes qui viennent plaider devant elle, il y a des cas individuels de personnes qui vivent dans une réalité qui est connue par ces travailleurs sociaux, qui est souvent même documentée. Ils participent à de nombreux séminaires, font partie d'ordres professionnels qui se mettent à jour sur les différentes problématiques de notre société. Donc, ces travailleurs sociaux, ces évaluateurs agréés, ces psychologues amènent une expertise qui est souhaitable, souhaitée, souhaitable pour la saine administration de la justice administrative, souhaitée par les groupes organisés et souhaitée aussi évidemment par l'administré qui, lui, se présente devant elle. Donc, il est important de conserver cette multidisciplinarité. Or, le projet de loi, vous le savez, y fait obstacle, bien malheureusement.
L'autre point qu'il est fort important de soulever, c'est que les modifications actuelles contreviennent aussi à des principes d'ordre juridique, qui est celui du principe de l'indépendance, et constitutionnel, là, je dois dire, celui de l'indépendance judiciaire, principe qui à tous égards doit être, je vous dirais, préservé, conservé, choyé et ne faire l'objet d'aucune...
M. Turp: Concession.
n(11 heures)nM. Bédard: ...d'aucune concession, voilà ? merci, M. le député de Mercier ? d'aucune concession. Or, le projet de loi attaque de front ce principe sacro-saint, comme dirait un de nos ex-collègues, mais qui, lui, est véritablement un principe juridique, constitutionnel ancré, et qu'il sous-tend d'ailleurs à cette confiance qu'ont nos concitoyens et concitoyennes envers la justice... qu'est celui de la non-intervention du pouvoir politique dans l'administration de la justice.
Or, le Barreau nous a mis en garde. D'ailleurs, c'est la première lettre que j'ai reçue. Le premier projet de loi déposé par le ministre, nous avons une lettre du Barreau qui se résumait en deux pages et qui disait simplement qu'il demandait le retrait, si ce n'est que pour cette seule raison qu'il était une attaque à ce principe fondamental de la séparation des pouvoirs. Donc, vous savez, ça n'a rien de léger, là, je vous dirais, comme refus de notre part de donner notre accord à la poursuite actuelle de l'étude du projet de loi. Et nous demandons donc, comme nous n'avons pas eu d'éclairage de la part du ministre par rapport, je vous dirais, à ce qui sous-tend et ce qui l'anime à l'intérieur de ce projet de loi, nous avons demandé, nous redemandons à nouveau que des groupes soient entendus à cette commission pour faire en sorte que, nous aussi, nous ayons l'occasion, et les autres membres de cette commission aient l'occasion de disposer de toute l'information pertinente.
L'autre argument, ma collègue la députée de Bourget l'a évoqué, l'a bien documenté, c'est celui... cet argument est que le processus dans lequel nous avons été lancés et amenés par le ministre a été vicié à la base, et c'est bien malheureux. En effet, en ne tenant pas compte du rapport sur la justice administrative et en négligeant chacune de ses recommandations, en ne faisant d'ailleurs aucune mention, si ce n'est qu'en termes même de recommandations, oui, mais même en termes de données qui étaient contenues dans ce rapport quant à la... je vous dirais, quant à l'administration même du Tribunal administratif, que ce soit par rapport aux délais, par rapport à l'explication des délais qui étaient contenus, eh bien, en ne tenant pas compte de ce rapport, eh bien, malheureusement, nous nous sommes retrouvés dans un contexte qui fait en sorte que le processus même d'adoption a été vicié. Nous avons privé la commission d'avis pertinents à cet égard. Et ce n'est que par la lecture que moi, personnellement, j'ai pu faire des constats qui allaient dans un sens tout à fait opposé que celui que nous propose le ministre dans son projet de loi.
Il a été vicié aussi, parce que c'est une façon de contourner la loi actuelle sur la justice administrative. L'article 200, vous savez, prévoit qu'il y a des rapports de mise en oeuvre, donc, des rapports d'évaluation des différents... de l'organisation de ce Tribunal et des améliorations que doivent faire le ministre responsable, évidemment, mais cette Assemblée quant au Tribunal administratif. Or, en ne tenant pas compte de ce rapport, nous faisons en sorte finalement que l'article 200 devient caduc, sans importance, nul et non avenu. Pourquoi? Parce que, lorsque justement nous sommes dans ce début de réforme du Tribunal administratif, nous n'avons pas entendu les principaux intéressés, ceux et celles qui ont à coeur le développement de la justice administrative et son amélioration. Donc, c'est fort malheureux, et c'est pour cela d'ailleurs qu'aujourd'hui nous demandons à nouveau que d'autres groupes soient entendus, et plus particulièrement le sous-ministre et sous-procureur général.
Cette demande est d'autant plus pertinente que le premier... que le premier qui a été là, qui a occupé les fonctions, M. Michel Bouchard, et qui était, je vous dirais, estimé par l'ensemble de la communauté juridique mais aussi par le monde judiciaire en général et par tous ceux et celles qui ont eu à le côtoyer, sous-ministre qui a été nommé, souvenez-vous, à une autre époque, à l'époque même où le gouvernement libéral, avant 1994, était présent, il était une sommité dans ce domaine, que nous avons renouvelé dans ce poste, que nous avons confirmé... Et, vous savez, on dit souvent: Les sous-ministres... les ministre passent et les sous-ministres restent. Dans le cas de la Justice, c'est un principe qui était préservé pour des raisons évidentes, qui est celle de la non-partisanerie totale de cet aspect de notre administration. Or, ce principe a été édulcoré pour le moins, je vous dirais, suite à l'ensemble des déplacements et du tassage, tout simplement, qui s'est produit dans le ministère, et je vous dirais, M. le Président, que c'est sûrement sans précédent dans l'histoire du Québec.
Donc, nous n'avons pu entendre l'ancien sous-ministre et sous-procureur général, qui était Me Michel Bouchard. Nous souhaitons aujourd'hui entendre l'actuel sous-ministre, qui est aussi quelqu'un de reconnu et dont nous estimons les qualités, et que nous souhaiterions aussi, puisqu'il n'était pas présent dans le ministère lorsque le ministre a décidé, de sa propre initiative personnelle, d'aller de l'avant avec ce projet de loi, nous souhaiterions l'entendre à cette commission pour qu'il puisse... En même temps, évidemment, nous échangerions, donc lui nous donnerait ses impressions, mais en même temps nous pourrions aussi le documenter par rapport à nos craintes que nous avons quant aux effets qu'aura ce projet de loi sur les administrés du Québec. Ce serait sûrement utile, parce que ce que j'ai compris de la façon de faire actuelle de notre ministre, c'est d'agir en catimini, derrière des portes closes, en ne tenant pas compte des avis extérieurs, et d'être mu par la seule ou presque la seule... je vous dirais, le seul moteur de ses interventions est celui de ses impressions personnelles et de ses...
Et ça, je pense que la justice administrative ne mérite pas qu'on adopte une telle attitude, qui ne sert sûrement pas le ministre, évidemment, mais qui ne sert pas non plus la justice administrative et, au-delà de tout ça, les administrés qui se retrouvent devant elle et qui souhaitent, eux, obtenir la reconnaissance de leurs droits qui n'ont pas été, malheureusement, dans certains, reconnus dans les premières instances, soit lors de la décision de l'organisme en cause ou un peu plus tard, lors de la révision de cette décision. Donc, le Tribunal est l'ultime recours de nos concitoyens et concitoyennes pour faire valoir leurs droits. Alors, il est important pour ces concitoyens et concitoyennes qu'ils se sentent appuyés, qu'ils se sentent entendus, qu'ils aient la conviction d'avoir obtenu justice lorsque la décision finale et sans appel est rendue par le Tribunal administratif.
Et ce projet de loi, tel qu'il est conçu actuellement, porte atteinte à ce principe et à ces attentes de nos concitoyens et concitoyennes. Donc, je ne pourrais en aucune façon, je vous dirais, être d'accord ou donner quelconque approbation au ministre s'il souhaite poursuivre dans cette voie tordue qui est celle de la... qui est celle de l'abrogation de la spécialisation du Tribunal. Et la conséquence est simple, elle a été exposée par tous ceux et celles qui sont venus devant vous et devant nous, qui est celle pour ces gens, finalement, dans certains cas, de ne pas avoir la certitude d'obtenir justice, ou peut-être justice pour ceux et celles qui en ont les moyens. Peut-être que c'est la voie que préfère le ministre.
Et c'est d'ailleurs ce qui nous a été représenté par les évaluateurs agréés: si vous enlevez les évaluateurs, mais je vous dirais la même chose si vous enlevez les psychologues, si vous enlevez les médecins, M. le ministre, si vous enlevez les travailleurs sociaux, vous faites en sorte qu'il y aura peut-être effectivement une justice différente pour ceux et celles qui en ont moins les moyens et qui n'ont pas la capacité de se payer des experts à grand renfort de frais, et vous le savez. Et c'est normal. Ceux qui viennent témoigner devant le Tribunal ont leur tarif horaire, et c'est légitime, ce sont des professionnels qui ont étudié pendant longtemps, qui disposent de compétences dans ce domaine, donc, lorsqu'ils sont appelés à témoigner, à préparer la preuve, à faire des rapports, ils demandent d'être payés en conséquence, et c'est normal, c'est légitime de leur part.
Malheureusement, pour quelqu'un qui a... qui se pourvoit d'une décision en matière d'accident automobile, dans le domaine du ministre, auparavant... Est-ce qu'on peut dire d'un «accidentaliste», monsieur... Est-ce que ça se dit, quelqu'un dans le domaine...
n(11 h 10)nM. Turp: Ce serait un mot qui viendrait enrichir la langue française, je crois: un «accidentaliste».
M. Bédard: Alors, peut-être dans ce domaine ou dans d'autres, dans le domaine de la Régie des rentes, vous le savez, où les gens ont peu de moyens, souvent. Et j'ai plaidé, d'ailleurs... Mon premier dossier, M. le Président, a été, oui, en matière de Régie des rentes du Québec, et je m'en souviens encore. Et c'était un dossier que quelqu'un... de quelqu'un, plutôt, une madame qui venait de Saint-Honoré et qui avait connu...
Une voix: ...
M. Bédard: ...mon père... Non, qui est une fort belle municipalité. Parce que mon père, vous le savez, a été élevé à Saint-Honoré, bien qu'il est né à Lac-à-la-Croix, au Lac-Saint-Jean, a grandi à Saint-Honoré, fort belle ville de notre belle région. Et cette personne avait un dossier qui, pour elle, était d'une importance capitale, mais qui, par mois, représentait des montants qui étaient quand même très peu, là, qui étaient... qui faisaient en sorte... Parce qu'elle avait un petit restaurant, et son conjoint était décédé, mais elle avait ? et je ne veux pas en parler publiquement, de ce dossier, parce que nous avons eu une décision ? ...et cette personne, le petit confort qu'elle allait chercher dépendait de ce régime des rentes. Alors, et j'avais un expert devant moi.
Imaginez-vous si ça n'avait pas été le cas et que j'avais dû préparer une preuve médicale, avec médecin, alors que la personne n'avait pas les moyens. Et c'était mon premier dossier, et je suis allé devant la cour... devant le Tribunal, plutôt, à l'époque, avec toute la conviction d'obtenir cette justice. Mon premier dossier. Il y avait beaucoup de témoins, et je m'en souviens encore...
Le Président (M. Simard): Première victoire, j'espère.
Une voix: Première victoire?
M. Bédard: Eh oui! Je dois le dire, et pas pour moi. Et c'est le seul dossier, je vous dirais, M. le Président, où j'ai eu une émotion, je vous dirais, qui n'est pas la satisfaction simplement d'avoir obtenu gain de cause, mais plutôt celle pour la personne que je représentais, qui, elle, a obtenu justice. Et je peux le vous dire, pour l'avoir entendu au téléphone lorsqu'il y a eu la décision, et j'étais, je vous dirais, plutôt... Je n'étais pas convaincu à tous égards que j'allais obtenir raison ? comme lorsque nous plaidons devant vous d'ailleurs ? et, lorsque est venue la décision, je peux vous dire que ça a été le plus beau moment de mes années en...
Une voix: ...
M. Bédard: ...au niveau ? non, non, non ? mais au niveau de ma courte carrière juridique, qui a duré, vous le savez, à peine huit ans. Donc, et j'ai été... Ça a été un des plus beaux moments, et j'ai eu par la suite à plaider des dossiers qui, en termes monétaires, avaient beaucoup plus d'importance, en termes, même, de certains droits, j'ai plaidé la Charte. Mais jamais je ne retrouverai... en tout cas je n'ai retrouvé, pendant les années subséquentes, la joie que j'ai eue à obtenir gain de cause pour cette personne.
Et nous étions devant une instance administrative où les règles de preuve étaient plus légères et qui faisaient en sorte que cette personne pouvait obtenir justice. Et nous devons le conserver. Parce que, imaginez-vous si cette personne avait dû aller devant les tribunaux de droit commun. Ou imaginez-vous pire: si, par l'application... et comme nous fait mention la Conférence des juges administratifs, la Commission des services juridiques, même la Chambre des notaires, s'il arrivait que par le biais des modifications nous ayons une problématique, M. le Président, quant au caractère final et sans appel des décisions rendues par le Tribunal, autrement dit que la barre d'intervention de la Cour supérieure s'en retrouverait abaissée, eh bien, bien que j'aie eu gain de cause, bien que cette personne ait eu gain de cause, bien que d'autres aient eu gain de cause devant le Tribunal administratif, ils devraient, M. le Président, aller devant la Cour supérieure et, à ce moment-là, défendre leurs points de vue, avec le critère de la quasi-rectitude de leur décision, au lieu de l'erreur manifestement déraisonnable. Alors, vous comprendrez les effets que cela aurait sur le contribuable qui, bien qu'ayant raison, pourrait aller devant la Cour supérieure, devant la Cour d'appel, peut-être même les payer à grands renforts de... à grands renforts de frais, plutôt, et qui finalement, peut-être, arriverait plutôt, bien qu'il ait raison, se désisterait parce que tous les frais engendrés ne réussiraient même pas à payer ? même pas à payer, M. le Président ? ses honoraires d'avocats. Alors, imaginez-vous les frais d'experts.
Donc, à l'étape où nous sommes, M. le Président, je vous demanderais une suspension de quelques minutes. Nous avons un élément fort important à regarder, nous souhaiterions quelques minutes simplement, et je compléterais dans les quelques secondes qui me resteraient par la suite, M. le Président.
Le Président (M. Simard): C'est inhabituel, mais je pense que, de part et d'autre, j'accueillerais favorablement une demande de suspension, à condition qu'elle soit courte, maximum de cinq minutes, de façon à ce que vous puissiez éclaircir le point que vous voulez éclaircir. Je suspends donc pendant quelques minutes nos travaux.
(Suspension de la séance à 11 h 15)
(Reprise à 11 h 22)
Le Président (M. Simard): Alors, nous allons reprendre nos débats, puisque nous avions eu une courte suspension de séance demandée par l'opposition. Nous en étions, madame, à combien de minutes de la fin du temps de parole du député de Chicoutimi? Il restait donc une minute au député de Chicoutimi pour finir sa motion.
M. Bédard: Avant de compléter, M. le Président, j'aurais une question de directive.
Le Président (M. Simard): Une question de directive.
Demande de directive concernant
l'incompatibilité de l'étude du projet de loi
et d'une disposition législative en vigueur
M. Bédard: J'interromps moi-même une question de règlement par le fait même, mais une question de directive aussi. Parce que nous avons fait référence à plusieurs moments à l'article 200 de la Loi sur la justice administrative, loi, vous le savez, qui est fort importante. L'article 200 prévoit ce qui suit:
«Le ministre doit, au plus tard le 1er avril 2003, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi et sur l'opportunité, le cas échéant, de la modifier.» Et je vous invite à lire chacun des mots une nouvelle fois, lorsque vous aurez à prendre une décision.
«Ce rapport est déposé dans les 15 jours suivants devant l'Assemblée nationale si elle siège ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux.
«Dans l'année qui suit la date de ce dépôt, la commission compétente de l'Assemblée nationale procède à l'étude du rapport et elle entend à ce sujet les observations des personnes et organismes intéressés.» Or, M. le Président, par le dépôt du projet de loi actuel et aussi par les intentions, je vous dirais, du ministre ? qui sont connues et qui apparaissent même au site du ministère de la Justice ? qui nous annonce une réforme, je vous dirais que cette façon de faire contrevient à l'article 200 de la Loi sur la justice administrative. Et de quelle façon? Il contrevient même dans... Il contrevient à nos droits et privilèges comme membres de cette Assemblée et aussi aux personnes et organismes intéressés qui veulent se faire entendre sur la Loi sur la justice administrative et ses modifications. Comment? En déposant un projet de loi qui modifie cette loi avant même que cette commission ait l'occasion d'étudier ce rapport et donc de faire en sorte que nous ayons cette information ? c'est ce que nous plaidons d'ailleurs depuis un petit moment ? que nous ayons l'ensemble de l'information relativement à la justice administrative. Et nous privons aussi et surtout toutes les personnes et organismes intéressés à faire valoir leurs arguments par rapport à une modification à la loi. Et l'article 200 est clair, il prévoit que «la présente loi [...] et sur l'opportunité, le cas échéant, de la modifier».
M. le Président, si nous adoptions ou si nous passions à l'étude du projet de loi actuel, nous contreviendrions à l'article 200 et nous mettrions cette commission, les membres de cette Assemblée et aussi les personnes et organismes, mais surtout nos membres de cette Assemblée, en contravention avec l'article 200 et nous ferions en sorte... Et imaginez-vous ? et je soumets à votre réflexion l'argument suivant ? imaginez-vous, si nous allons de l'avant avec ces articles de cette réforme, et si en plus nous allions de l'avant avec ce que clame le ministre sur tous les toits sur la réforme, et que, par la suite, et que par la suite nous étudierions le rapport, nous ferions en sorte que ce travail deviendrait totalement inutile...
Une voix: Caduc.
M. Bédard: ...et caduc, voilà, et nous ferions en sorte que l'article 200 s'en trouverait violé.
Et je peux vous dire que, s'il y a une chose que je mets en garde le ministre de la Justice mais aussi les membres de cette commission, avec tout le sérieux, M. le Président, c'est que nous ne pouvons placer cette Assemblée et cette commission dans l'illégalité. Alors, je vous demande, et c'est une question vraiment de fond, M. le Président, de réfléchir et d'en référer aux autorités de l'Assemblée pour que nous soyons convaincus, nous, membres de cette Assemblée, que nous ne ferions pas en sorte, par l'étude du projet de loi, de contrevenir à l'article 200 et, à partir de ce moment-là, de placer les membres de cette commission dans l'illégalité.
Alors, je vous demande respectueusement, M. le Président, de suspendre nos travaux. Et nous souhaiterions avoir toute les informations relatives aussi, évidemment, à cette question de règlement, mais aussi en même temps, vous le savez, a nos droits et privilèges comme membres de cette Assemblée et aussi ? je plaide pour autrui ? aux droits et privilèges des personnes et organismes intéressés, qui, par le biais de l'article 200, doivent être consultés quant à l'opportunité des modifications et à l'étude du rapport sur la justice administrative. Le législateur ne parle pas pour rien dire, et surtout quand il met une clause de cette nature dans une loi aussi fondamentale qui est la Loi sur la justice administrative.
Alors, M. le Président, j'ai résumé mes commentaires, et je pense... mes arguments, plutôt, mais je pense que cette question mérite d'être approfondie et mérite une décision qui sera motivée, M. le Président, avec toute la jurisprudence nécessaire. Et je ne crois pas qu'il y ait de précédents existants, je n'ai pas eu le temps de vérifier, je ne crois pas qu'il y ait de précédents; s'il y en a, ça me fera plaisir de les entendre, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Alors, sur cette demande, sur cette intervention sur un point de droit, un point d'ordre, un point formel, en même temps qu'une discussion sur le fond, je vais entendre le porte-parole... le député de Marguerite-D'Youville, qui va sans doute éclairer, lui aussi, la présidence quant à la conduite à tenir. Je vais donc l'entendre maintenant et je prendrai ensuite une première décision.
M. Moreau: Alors, M. le Président, je vous remercie. Le député de Chicoutimi vous présente une demande de suspension de nos travaux qui serait basée sur la violation présumée d'une disposition d'une loi, c'est-à-dire l'article 200 de la Loi sur la justice administrative. Je vous soumets respectueusement que cet argument n'est pas à la base d'une demande de suspension et que, si le député de Chicoutimi estime qu'il y aurait violation de l'article 200... En fait, ce qu'il vous demande, c'est l'équivalent d'une requête pour jugement déclaratoire devant un tribunal de droit commun. Alors, s'il y avait infraction à la loi, je pense que ce n'est pas au président de cette commission d'en décider, mais ça appartient effectivement aux tribunaux de droit commun ou, ici, à la Chambre, et non pas au président de la commission. Alors, ce n'est pas un motif de suspension, et nous nous objectons à cette demande.
Le Président (M. Simard): Ce qui est un motif de suspension, c'est l'étude de la demande, et ça, c'est le privilège du président de prendre le temps nécessaire avant de rendre toute décision. Je vais entendre maintenant d'autres membres pendant quelques minutes.
Une voix: ...
Le Président (M. Simard): Oui, mais j'ai le député de Shefford qui veut compléter, du côté de la majorité.
M. Brodeur: Je crois que le député de Chicoutimi utilise la mauvaise stratégie pour arriver à ses fins. Tout simplement, on peut l'inviter... le règlement, nous, ici, en commission parlementaire, nous permet d'invoquer l'article 165 pour l'ajournement du débat. On ne parle même pas de suspension, parce que suspendre nos travaux à cette heure-ci ? d'ailleurs, on ne siège pas cet après-midi ? équivaudrait à l'ajournement du débat. Donc, s'ils veulent ajourner le débat, M. le Président, qu'ils déposent une motion sur l'article 165 en temps opportun, et nous jugerons de la motion à ce moment-là.
Le Président (M. Simard): M. le député de Chicoutimi, maintenant, en réplique.
n(11 h 30)nM. Bédard: Très rapidement, et sur les arguments qui ont été soulevés, je n'en invoquerai pas d'autres. Simplement, non, ce n'est pas une demande d'ajournement. Je vous demande tout simplement de vous retirer, parce que je pense que cette question mérite qu'on se réfère aux autorités de l'Assemblée, parce qu'elle n'a rien de légère. Elle est assez fondamentale.
Deuxièmement, quant à l'argument de mon collègue de Marguerite-D'Youville, je vous dirais qu'il renforce mon argument, soit: s'il fallait qu'un de ces groupes, lors de l'étude du projet de loi ou lors de son adoption devant l'Assemblée, prenne un recours devant un tribunal de droit commun pour bloquer, imaginez-vous dans quelle position... et que le tribunal concluait que ces groupes auraient raison, nous aurions contribué à faire en sorte que, nous, membres de l'Assemblée, nous nous retrouverions dans une position d'illégalité. Et ça, je pense que, s'il y a quelque chose sur lequel nous devons être prudents, c'est bien ces questions, M. le Président. Alors, je vous invite à juger de la question avec tout le sérieux et tout l'à-propos qu'elle mérite.
Le Président (M. Simard): Bon. À ce moment-ci, évidemment, il n'est pas question d'ajourner, le député de Shefford a raison. Je vais suspendre pendant le temps nécessaire pour procéder à l'étude de cet appel au règlement et je reviendrai lorsque j'aurais terminé mon étude. Je ne peux pas présumer à ce moment-ci le temps qui sera nécessaire pour analyser les implications juridiques d'un tel appel. Alors, je suspends nos travaux.
(Suspension de la séance à 11 h 32)
(Reprise à 12 h 14)
Décision de la présidence
Le Président (M. Simard): Alors, nous allons reprendre nos travaux là où nous les avons laissés. Et, au moment de cette suspension, le député de Chicoutimi nous faisait valoir une argumentation... En fait, il interrogeait la présidence sur un point de droit. C'était un appel au règlement, mais une plaidoirie sur le fond afin d'attirer notre attention, je le rappelle, sur le fait que possiblement l'étude en commission du projet de loi n° 4 contreviendrait à la lettre et à l'esprit de la loi n° 200... de l'article 200 de la loi sur les tribunaux administratifs.
Je vous rappelle le contenu de cet article 200 de la loi: «Le ministre doit, au plus tard le 1er avril 2003, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi et sur l'opportunité, le cas échéant, de la modifier.
«Ce rapport est déposé dans les 15 jours suivants devant l'Assemblée nationale si elle siège ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise des travaux.
«Dans l'année qui suit la date de ce dépôt, la commission compétente de l'Assemblée nationale procède à l'étude du rapport et elle entend à ce sujet les observations des personnes et organismes intéressés».
Donc, je pense que la première chose que je tiens à dire, et c'est important: je ne considère pas du tout comme futile cette interpellation au président. Il y avait là un souci, il y a là un souci légitime d'avoir un éclairage de la part de la présidence. Mais, et là la jurisprudence est totale, constante, absolue, le président de la commission n'est pas là pour interpréter la loi, il est là pour vérifier l'application, s'assurer de l'application du règlement, de nos modes de fonctionnement et en aucun cas ne peut, dans aucune situation, interpréter la loi, voir si la loi actuelle qui est déposée est conforme à une loi déjà existante. Et c'est la même chose d'ailleurs pour le président de l'Assemblée.
Je vais vous citer à ce sujet une décision prise par le président Charbonneau ? je vais la retrouver, elle est ici ? lors de la séance du 28 mai 1998, où un député de l'opposition officielle demandait au président une directive sur la question de savoir si l'article 56 du projet de loi n° 441 ? peu importe le contenu, c'était l'Institut de la statistique ? était conforme. Bon. Alors, la réponse du président Charbonneau, et là-dessus, mettra fin d'ailleurs à tout débat subséquent sur cette possibilité que la présidence puisse interpréter la loi.
Tout d'abord, quant à la question de la cohérence juridique de l'article 56 du projet de loi n° 441 avec la procédure de nomination prévue à l'article 5 de la loi sur le régime de négociation collective, qui fait partie implicitement de la demande de directive, il importe ? et c'est là-dessus que je veux insister ? de rappeler le rôle de la présidence ? et, mutatis mutandis, ça s'applique parfaitement à la présidence d'une commission ? en matière d'interprétation législative. En droit parlementaire, la présidence est la seule compétente pour interpréter les règles de procédure qui régissent les travaux parlementaires. De même, elle a le pouvoir exclusif d'appliquer et d'interpréter les lois qui contiennent de la procédure parlementaire. Elle ne peut toutefois interpréter les lois sur un aspect qui n'a aucun rapport avec une règle de procédure parlementaire. En l'espèce, la présidence n'a donc pas à se questionner sur les conséquences de l'adoption d'un projet de loi sur les dispositions d'une loi. Par contre, la présidence a compétence pour décider de la nature des votes qui seront pris en commission, à l'Assemblée nationale.
Bon. Évidemment, vous comprendrez qu'à ce moment-ci j'ai exprimé... j'ai, je pense, statué sur le fond de la demande. Cependant, j'ai bien dit au départ que j'ai bien reconnu que sur le fond c'était une question qui avait sa pertinence, et j'invite le député de Chicoutimi, s'il n'est pas satisfait de la réponse que je donne à sa question, d'interpeller la Chambre, puisque c'est la seule qui nous a donné mandat ici. S'il sent que... S'il a l'impression ou s'il juge que les privilèges des députés ont pu être... il y a pu y avoir une violation des privilèges d'un député ou des députés, il peut demander à la Chambre de se prononcer sur cette violation présumée de privilège. La Chambre est la seule qui pourrait le faire. Et il y a évidemment d'autres articles de notre règlement qui pourraient peut-être permettre d'atteindre cet objectif. Mais, à ce moment-ci, à partir de la question qui m'était posée, je ne peux que revenir à l'étude de la motion du député de Mercier et vous demander, M. le député de Chicoutimi, de terminer votre argumentation.
M. Bédard: Me permettez-vous simplement de bien comprendre votre décision en vous posant une petite question, M. le Président?
Le Président (M. Simard): Je vous en prie.
n(12 h 20)nM. Bédard: Le but... Parce que je n'ai pas lu la décision à laquelle vous faites référence, peut-être, si je pouvais en avoir une copie, ce serait bien. Mais qu'on me comprenne bien, là, ma requête évidemment avait pour but non pas de vous demander d'interpréter une loi mais était plutôt celui d'interpréter le règlement, et, dans vos pouvoirs, où vous avez à interpréter le règlement, évidemment vous devez tenir compte du contexte. Et vous assumez... D'ailleurs, lorsque vous agissez ici à titre de président, vous avez les mêmes pouvoirs et privilèges que si vous étiez président de l'Assemblée nationale. C'est ce que je comprends de nos règlements donc. Et, dans l'interprétation de ces règlements, est-ce que... Donc, vous devez éviter toute référence, je vous dirais, dans l'application des règlements, à l'application d'une loi. Et là je ne vous parle pas d'interprétation d'une loi mais d'application d'une loi. Et ça ne relève pas de l'interprétation mais bien de l'application de l'article 200. Et à aucun moment je ne vous ai demandé d'interpréter cet article. Ce que je vous ai demandé, M. le Président, c'est d'interpréter notre règlement face à l'application d'un article de loi et c'est pour ça que je veux bien comprendre. Parce que l'article est quand même clair, il ne souffre d'aucune, je vous dirais, d'aucune interprétation possible.
Le Président (M. Simard): De quel article vous parlez?
M. Bédard: L'article 200 de la loi. Je ne vous demande pas de l'interpréter. Il existe. Il fait partie de notre corpus législatif. Et l'effet qu'il a, c'est sur nos règlements. Alors, ce que je vous demandais, c'était d'appliquer finalement le règlement à la lecture et d'interpréter le règlement à la lecture de l'application, et jamais je ne vous ai demandé de l'interpréter. Et, bien que je suis convaincu que vous ayez des connaissances juridiques et la capacité d'interpréter l'article 200, le but de mon intervention n'était pas de vous demander d'interpréter l'article 200 mais plutôt d'interpréter le règlement face à l'application de cet article 200, qui est clair et qui ne souffre d'aucune ambiguïté.
M. Brodeur: M. le Président.
Le Président (M. Simard): M. le député de Shefford, maintenant, sur le même...
M. Brodeur: Oui, sur le même sujet. Vous venez de rendre votre décision. Je crois que présentement le député de Chicoutimi est en train d'argumenter sur la décision déjà rendue. Et je veux rappeler aussi à la commission, et particulièrement au député de Chicoutimi, la teneur de l'article 146, aussi, de notre règlement qui dit que «le mandat confié par l'Assemblée est prioritaire». Donc, l'Assemblée nous a confié un mandat clair, celui d'étudier le projet de loi n° 4. Et, M. le Président, je pense que nous devrions passer immédiatement, après que votre décision ait été rendue, à l'étape du vote. Je crois que le député de Chicoutimi avait terminé son exposé sur la motion déposée par le député de Mercier. Nous sommes prêts à voter, nous, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Alors...
M. Bédard: ...
Le Président (M. Simard): Non, M. le député de Chicoutimi, vous avez eu la...
M. Bédard: Je voudrais simplement vous... Comprenez que ça n'a rien de dilatoire, parce que, de toute façon, les quelques minutes n'ajouteront rien au débat actuel, mais, vous savez, la jurisprudence a un impact sur ce qui se passe en commission et ce qui...
Une voix: ...
M. Bédard: Non, mais, écoutez, et je ne crois pas que l'article 146...
Le Président (M. Simard): Je dois vous...
M. Bédard: M. le Président, simplement, je ne crois pas que l'article 146...
Le Président (M. Simard): Là je suis obligé de vous rappeler à l'ordre, M. le député.
M. Bédard: ...a pour effet de me priver d'obtenir des questions de directive et...
Le Président (M. Simard): On ne peut pas détourner une question de fond par une question de directive, là. La question de directive, c'est comment... vous demandez au président comment vous comporter à partir de sa décision. La décision, elle, elle est prise. Elle est exprimée. Je peux la reformuler: Seule l'Assemblée pourrait, si elle le jugeait, modifier l'ordre qu'elle nous a fait d'étudier le projet de loi actuel. Nous n'avons pas cette marge de manoeuvre de décider nous-mêmes si l'ordre de la Chambre est en conformité avec quelque article de loi que ce soit. Nous sommes ici en observance de l'ordre de la Chambre d'étudier le projet de loi n° 4, et, si vous souhaitez, je l'ai indiqué tout à l'heure, attirer l'attention de la Chambre sur ce qui pourrait ? je reprends vos expressions ? constituer une violation de vos droits et privilèges qui pourrait résulter d'une quelconque violation d'une loi existante, c'est à la Chambre, qui nous a ordonné de nous réunir pour l'étude du projet de loi n° 4, que vous devriez vous adresser pour qu'elle modifie cet ordre.
Alors, je passe sans plus tarder à la poursuite de nos travaux. Je dois à ce moment-ci constater que le temps du député de Chicoutimi était... Il lui restait une minute. Donc, je vais vous permettre de compléter votre intervention, M. le député de Chicoutimi, et ensuite nous poursuivrons nos travaux par évidemment... nous passerons au vote sur cette motion.
M. Bédard: Parfait. En terminant, simplement, et je vais prendre mon droit de parole par la suite, mais... Parce que je lis le précédent, et c'est pour ça que je suis réintervenu, parce que... et là je vous le dis, à la lecture... et je n'ai pas regardé la décision au long, mais, respectueusement, je vous dirais que ce précédent n'est pas applicable dans notre cas, et nous argumentions sur un domaine qui relève de votre compétence et qui est celui du mandat, et, en tout respect...
Le Président (M. Simard): ...il y a un rappel, ici, de M. le député de Marguerite-D'Youville.
M. Moreau: Vous avez, je pense, indiqué au député de Chicoutimi que votre décision avait été rendue et qu'il n'était plus le temps de l'argumenter. Donc, on doit passer à l'écoulement de son droit de parole.
Le Président (M. Simard): J'ai fait plus que ça, j'ai demandé au député de Chicoutimi de terminer son temps de parole sur la motion du député de Mercier.
M. Bédard: Je n'argumente pas votre décision, M. le Président, je veux seulement être sûr...
Le Président (M. Simard): Non, non, je ne...
M. Bédard: C'est que je veux être clair que la directive que vous avez donnée correspond aux arguments qui ont été soulevés. Et votre question de directive, nous la prenons...
M. Moreau: M. le Président, je pense que l'intervention...
Motion proposant d'entendre
le sous-ministre de la Justice
Le Président (M. Simard): J'inviterais le député de Chicoutimi, en toute sérénité, à ce moment-ci... Je connais son dévouement pour cette Chambre, je demanderais au député de Chicoutimi de bien vouloir répondre à l'appel du président à ce moment-ci et terminer son argumentation sur la motion du député de Mercier.
M. Stéphane Bédard (suite)
M. Bédard: Alors, j'aurai effectivement l'occasion de compléter, mais je souhaite que cette question soit tranchée, et j'aurais souhaité effectivement de votre part que, comme, je vous dirais, collègue émérite, avec une grande expérience, j'aurais été tout à fait... et je pense que ça aurait été pour le bien de cette commission que vous ayez juste eu à trancher cette question qui est fort importante et qui est celle... pas d'une contravention... entre les lois, mais d'une application. Alors, je vais poursuivre mon propos. Il me reste 1 min 20 s, je crois? C'est ça?
Des voix: Non!
Le Président (M. Simard): Non, il reste plutôt une minute.
M. Bédard: Une minute. Alors, vous savez, on est habitués, en cette commission, d'être bâillonnés, alors j'aurai 20 secondes de moins que mes attentes. Mon intervention était prévue pour 1 min 20 s, alors je vais tenter de la rescinder dans les quelques secondes qu'il me reste, malheureusement.
Le Président (M. Simard): De la résumer, mais certainement pas de la rescinder.
M. Bédard: Alors, M. le Président, donc, pendant les 30 dernières minutes, j'ai eu l'occasion avec mes collègues, et pendant les heures qui ont précédé, de faire état de nos demandes, qui sont simples, pour faire en sorte finalement que cette commission jouisse de toutes les informations nécessaires à la réalisation de son mandat et pour lequel vous agissez à titre de président et de gardien de ce mandat. Et, encore là, je ne conteste pas votre décision, mais je pense effectivement que, tant par l'attitude et la suite...
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Simard): Il y a toujours eu, de votre part comme de la part de l'opposition, une tolérance pour qu'on termine une phrase lorsqu'on termine son intervention.
M. Moreau: Mais faite avant la fin de l'intervention... dans les représentations du député de Chicoutimi.
Le Président (M. Simard): Non, je suis sûr que le député de Marguerite-D'Youville, qui est un plaideur émérite, a eu souvent l'occasion de s'impatienter devant la durée des arguments d'un adversaire, mais il a aussi compris que cela fait partie de nos us et coutumes. Terminez votre phrase, M. le député.
M. Bédard: Alors, et simplement pour veiller... et j'en étais au mandat, alors simplement de veiller à faire en sorte que notre commission et les membres qui avaient des connaissances juridiques ou autres puissent accomplir ce mandat avec toutes les...
Une voix: Sérénité.
M. Bédard: ...oui, avec la sérénité. Et je souhaite que, par votre intervention, vous ne m'imputiez pas de motif indigne ou de motif autre. Donc, vous savez, il faut prendre la bonne foi, et je crois que je fais preuve de sérénité. Donc, j'ose croire... et cette sérénité, je suis convaincu, est partagée par la présidence. Alors, oui, je souhaite effectivement que le mandat puisse se réaliser dans la sérénité auquel vous faites mention, mais aussi avec les connaissances qui se doivent à tout membre de cette assemblée. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Merci. Il est maintenant midi vingt-neuf et il y a le temps nécessaire pour le faire: Êtes-vous prêts à voter? Je constate que le temps est...
Une voix: Vote nominal.
Mise aux voix
Le Président (M. Simard): Vote nominal. M. le secrétaire, voulez-vous procéder au vote, s'il vous plaît?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bédard (Chicoutimi)?
M. Bédard: En faveur.
Le Secrétaire: M. Turp (Mercier)?
M. Turp: En faveur.
Le Secrétaire: Mme Lemieux (Bourget)?
Mme Lemieux: En faveur.
Le Secrétaire: M. Bellemare (Vanier)?
M. Bellemare: Contre.
Le Secrétaire: M. Moreau (Marguerite-D'Youville)?
M. Moreau: Contre.
Le Secrétaire: M. Brodeur (Shefford)?
M. Brodeur: Contre.
Le Secrétaire: M. Descoteaux (Groulx)?
M. Descoteaux: Contre.
Le Secrétaire: Mme Thériault (Anjou)?
Mme Thériault: Contre.
Le Secrétaire: M. Gabias (Trois-Rivières)?
M. Gabias: Contre.
Le Secrétaire: M. Bordeleau (Acadie)?
M. Bordeleau: Contre.
Le Secrétaire: M. le Président?
Le Président (M. Simard): Pour.
Le Secrétaire: Pour. Donc, 4 pour, 7 contre, aucune abstention, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Alors, la motion est...
Une voix: ...
Le Président (M. Simard): Non, il est trop tard pour déposer des motions. Je poursuis la phrase que j'avais commencée: Notre temps est écoulé, et nous devons, puisqu'il n'y a pas d'ordre de cour pour nous réunir plus tard aujourd'hui... d'ordre de la Chambre, pardon, nous devons ajourner nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 30)