Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Dauphin): Bonjour, mesdames et messieurs.
Je déclare donc la séance de la commission des institutions
ouverte. Le mandat de la commission pour cette séance est de
procéder à l'interpellation adressée au premier ministre
par le chef de l'Opposition officielle sur le sujet suivant: Les propositions
d'offres constitutionnelles du gouvernement fédéral.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Fradet
(Vimont) est remplacé par Mme Pelchat (Vachon); M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), par M. Bélisle (Mille-Îles); M. LeSage
(Hull), par M. Rémillard (Jean-Talon); M. Beaulne (Bertrand), par M.
Chevrette (Joliette) et M. Claveau (Ungava), par M. Brassard
(Lac-Saint-Jean).
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, Mme la
secrétaire. Alors, je vous signale qu'il y a eu une entente entre les
formations politiques. Donc, nous pouvons procéder immédiatement
avec le début de cette interpellation. Tout d'abord, je vais
reconnaître M. le chef de l'Opposition officielle qui pourra adresser des
remarques préliminaires pour une période de 10 minutes. M. le
chef de l'Opposition officielle.
Exposé du sujet M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: Merci, M. le Président. Nous allons donc, ce
matin, examiner les offres constitutionnelles, ou les propositions
constitutionnelles plutôt, que le gouvernement fédéral a
déposées il y a maintenant six semaines. Je veux remercier le
premier ministre d'avoir accepté cette interpellation parce que je pense
qu'il était temps qu'ici, à l'Assemblée nationale, nous
discutions de ces propositions. On en a discuté un peu partout dans la
société québécoise, comme au Canada, depuis
déjà un certain temps. Beaucoup d'avis ont été
exprimés. Une sorte de gêne, même chez les
fédéralistes les plus convaincus, règne au Québec
autour de ces propositions et, dans l'ensemble, on s'en rend compte, la plupart
des Québécois considèrent que ces propositions sont
inacceptables. Mais il s'en faut de beaucoup qu'ici, où les
Québécois, après tout, doivent tirer l'essentiel de leurs
réponses, à l'Assemblée nationale, nous ayons vraiment
abordé ces questions, et bien qu'un certain nombre de
députés, un certain nombre de ministres, même, se soient
prononcés sur tel ou tel aspect de ces propositions, le premier ministre
est resté jusqu'à maintenant évasif.
J'ai l'intention d'examiner trois grands sujets dans ces propositions
constitutionnelles du gouvernement fédéral. Il y en a d'autres,
mais il y en a trois qui me paraissent fondamentaux, qu'il faut
éclaircir.
D'abord, les propositions fédérales, à
l'égard du Québec, est-ce qu'elles sont en dessous de Meech,
à peu près égales à Meech, ou supérieures
à Meech? À peu près tous ceux qui se sont prononcés
parmi les constitutlonnalistes reconnaissent que c'est en dessous de Meech, et
même assez nettement en dessous. Je pense ici à des gens aussi
différents comme constitution-nalistes, comme politicologues, que Daniel
Proulx, Woehrling de l'Université de Montréal, Henri Brun,
Léon Dion, Alain Gagnon de McGill, Claude Morin, Patrice Garant, dans la
présentation écrite qu'il a présentée au
comité sur les offres.
Le sujet, ici, est important. Je vous rappelle, M. le Président,
ce que le premier ministre disait, il n'y a pas si longtemps, au sujet de cet
accord du lac Meech et des clauses qu'il comportait. Par exemple, le 17 mai
1990: Je ne vois pas comment, à la lumière de tout ce qui a
été dit et à la lumière des résolutions qui
ont été adoptées en cette Assemblée nationale, je
pourrais accepter une diminution des pouvoirs que nous avons obtenus avec
l'accord du lac Meech. La Presse, le 10 novembre 1989: Le premier
ministre du Québec a prévenu le Canada anglais que, même
dans un avenir lointain, jamais un gouvernement du Québec ne pourrait
consentir à revoir à la baisse les exigences minimales contenues
dans l'entente constitutionnelle. D'où l'importance de la question.
Les propositions sur la table, est-ce qu'elles sont inférieures
à Meech ou pas? J'aurai l'occasion de chercher à démontrer
tout à l'heure, dans une intervention subséquente, que c'est
nettement moins que Meech. Nettement. Deuxième grande question... Et je
vais ajouter ici un mot à l'égard de Meech. Moi, comme
souverainiste, que les conditions de Meech soient satisfaites, vous comprendrez
que ça ne me secoue pas. J'ai toujours trouvé, à bien des
égards, que le projet d'accord du lac Meech était plus un hochet
qu'autre chose. Mais enfin, puisque le gouvernement actuel a fait son lit
à l'égard de Meech, a cherché à convaincre les
Québécois que c'était important de ne pas négocier
en dessous de Meech, on comprendra que je pose la question.
Deuxième question. Depuis très longtemps, les
Québécois demandent a Ottawa, et divers gouvernements du
Québec ont demandé à Ottawa, d'abord, qu'Ottawa
reconnaisse l'exclusivité des pouvoirs du Québec dans certains
domaines et,
d'autre part, accepte de transférer les pouvoirs d'Ottawa
à Québec. Les deux versions les plus récentes à cet
égard sont le mémoire de la Chambre de commerce du Québec
à Bélanger-Campeau, qui demandait un transfert massif de pouvoirs
du gouvernement fédéral au gouvernement du Québec et,
évidemment, le rapport Allaire, qui est maintenant la base
constitutionnelle officielle du Parti libéral et qui a été
signé par le premier ministre du Québec, et qui demande vraiment
une dévolution massive de pouvoirs d'Ottawa vers Québec.
Là encore, sur le fond de la question, ce n'est pas ma grille
d'analyse comme souverainiste. J'ai eu l'occasion de dire que je ne vois pas
comment un pays pouvait accepter qu'une province ait les pouvoirs que veut lui
reconnaître le rapport Allaire. Mais enfin, puisque c'est devenu la base
officielle du programme du Parti libéral, il faut bien qu'on se pose la
question: Dans les propositions fédérales, qu'est-ce qu'il y a
qui rejoint le rapport Allaire ou qui rejoint les demandes de la Chambre de
commerce du Québec, d'ailleurs?
Ma conclusion, c'est qu'il n'y a rien ou à peu près. La
formation de la main-d'oeuvre transférée à Québec?
Oui, mais le gouvernement fédéral veut garder un pied dans la
porte, et, depuis quelques |ours, on volt la dimension du pied.
Reconnaître les pouvoirs exclusifs du Québec sur les mines et les
forêts? Mais il me semblait que tous les Québécois savaient
depuis toujours qu'on avait compétence exclusive dans le cas des
richesses naturelles. Reconnaître une compétence exclusive du
Québec à l'égard des municipalités? Oui, ça,
c'est depuis 1867. En fait, il n'y a rien dans ces propositions
fédérales ou à peu près rien qui rejoigne le
rapport Allaire. Et au fond, les libéraux ne sont pas dupes.
Mario Dumont, président des Jeunes Libéraux, 25 septembre
1991. "Le document d'Ottawa ne contient à peu près aucune
correspondance avec le rapport Allaire. Même avec le minimum
qu'était Meech, les correspondances n'y sont pas." Michel Bissonnette,
le 25 septembre, exprésident de la Commission-Jeunesse et membre du
comité Allaire: "Dans ce que proposait le rapport Allaire,
Bélanger-Campeau et même Meech, il y avait un fil conducteur, la
nécessité d'un nouvel ordre de gouvernement. Or, Ottawa propose,
au contraire, une vision centralisatrice. Ils n'ont visiblement pas compris le
message. M. Fernand Lalonde, ancien ministre - et à bien des
égards, eminence grise de bien de choses qui se sont passées dans
le Parti libéral - le 25 septembre aussi, dans Le Journal de
Québec, comparait, et je le cite: "...le rapport Allaire et le
projet fédéral, sur le plan des propositions, c'est très,
très loin. Sur le transfert de pouvoirs, le projet fédéral
n'offre pas grand-chose."
Troisième ordre de questions que je voudrais aborder: la
centralisation des pouvoirs économiques. Le gouvernement
fédéral, dans ses propositions, se donne des pouvoirs nouveaux
d'une ampleur telle qu'en fait on a soutenu - je pense à juste titre -
dans à peu près tous les milieux du Québec, et
singulièrement dans les milieux d'affaires, qu'il s'agissait là
d'une forme de centralisation qui est susceptible de faire courir des risques
sérieux à un certain nombre d'institutions
québécoises dans leur fonctionnement et des risques
sérieux au caractère dis-tinctif des politiques
économiques du gouvernement du Québec. Et ce n'est pas un droit
de retrait pour trois ans, par exemple, qui est susceptible de corriger ce qui
est vicié à sa base. Je reviendrai aussi là-dessus tout
à l'heure, M. le Président.
Nous nous trouvons donc face à une situation où, moins que
Meech, à peu près rien d'un transfert de pouvoir et, d'autre
part, une tentative de centralisation économique par Ottawa qui peut
vouloir dire la fin de cette originalité des politiques
économiques dont Québec s'est doté au fur et à
mesure du passage des années. Ce sont les principes mêmes de ces
propositions que je soulève. Qu'on me dise, à l'heure actuelle,
comme le premier ministre le disait il n'y a pas très longtemps: Les
principes sont acceptables, mais ce sont les modalités ou l'expression
qui est inacceptable. M. le Président, je soutiens que ce sont les
principes mêmes de ces propositions qui sont viciés et je pense
qu'il faut en tirer, ce matin, un certain nombre de conclusions.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le chef de
l'Opposition, pour vos remarques préliminaires. Alors, je signale aux
membres que j'avais l'intention d'être très rigoureux sur le
temps. Vous avez pris 10 minutes et 50 secondes au lieu de 10 minutes mais,
à tout événement, je vais maintenant reconnaître M.
le premier ministre également, pour ses remarques préliminaires,
pour une période de 10 minutes. M. le premier ministre.
Réponse du premier ministre M. Robert
Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, j'ai été
heureux d'accepter l'invitation du chef de l'Opposition à cette
interpellation, même si on peut facilement constater que, pour le
gouvernement, à l'étape actuelle des discussions avec nos
partenaires canadiens, nous ne pouvons pas proposer la position
définitive du gouvernement.
On me permettra de dire un mot d'historique, pourquoi nous en sommes
là, pourquoi, ce matin, le chef de l'Opposition et moi-même
discutons de propositions constitutionnelles qui ont été faites
par le gouvernement fédéral, le plus brièvement possible.
(10 h 15)
On sait que, historiquement, le gouverne-
ment du Québec a toujours refusé le rapatriement de la
Constitution canadienne à moins qu'on actualise, si on peut dire, la
Constitution de 1867. Les Québécois et ses gouvernements
jugeaient que cette Constitution, qui avait été acceptée
en 1867, un siècle plus tard à toutes fins pratiques, exigeait
d'être modernisée, de relever les nouveaux défis des
sociétés contemporaines ou des sociétés
modernes.
C'est donc pourquoi, en 1964, le gouvernement qui m'a
précédé, l'un des gouvernements qui m'a
précédé, le gouvernement de M. Lesage, n'avait finalement
pas accepté une entente visant cette question. C'est pourquoi
également MM. Johnson et Bertrand adoptaient la même attitude.
C'est pourquoi, en 1971, lorsqu'il a été jugé que le
partage des pouvoirs qui accompagnait le rapatriement de la Constitution,
même si à ce moment-là - on se souvient - on accordait le
droit de veto au Québec, aux différentes régions, lorsque
nous avons jugé que le partage des pouvoirs n'était pas suffisant
pour satisfaire les demandes traditionnelles du Québec, nous nous sommes
opposés à ce rapatriement unilatéral. En 1976, ça a
été l'un des thèmes de l'élection, comme vous vous
souvenez.
Le Parti québécois a été élu et s'est
engagé à faire un référendum. Il a fait son
référendum sans être assuré de le gagner. Il l'a
perdu. Le résultat a été le rapatriement unilatéral
de la Constitution contre le consentement de l'Assemblée nationale,
presque unanimement, et, même si ce rapatriement avait été
l'oeuvre d'éminents Québécois, le gouvernement du
Québec était le seul dont on n'avait pas tenu compte
vis-à-vis de la décision qui avait été prise.
La défaite référendaire a abouti au rapatriement
unilatéral, plaçant le Québec dans une position de
faiblesse, et quelle illustration plus éloquente de cette position de
faiblesse où se trouvait le Québec à la suite de la
défaite référendaire que l'offre qui a été
faite par le gouvernement du Québec, à ce moment-là, de
négocier le droit de veto politique qu'il possédait. Le
Québec possédait un droit de veto politique puisqu'il l'a
exercé en 1964 et en 1971.
Lorsque nous avons pris le pouvoir en 1985, nous avons
décidé de tenter de normaliser la situation. Alors que les
défis économiques étaient particulièrement
exigeants, alors que mon parti avait été élu sur la
priorité à accorder aux questions financières et
économiques, alors que la pression de l'opinion publique, à
toutes fins pratiques à ce moment-là, n'était pas
très forte pour aborder les questions constitutionnelles, mon
gouvernement a décidé que, historiquement, il devait assumer ses
responsabilités et faire tout en son possible pour que l'injustice de
1982 soit réparée.
Il a donc fait des propositions, les cinq propositions du lac Meech, qui
dérivaient en partie, en très bonne partie, des propositions qui
avaient été adoptées par l'ensemble des militants du Parti
libéral; pas la totalité - nous n'avions pas pu accepter en
totalité les propositions du Parti libéral - mais ça
reflétait en très bonne partie ces propositions. Et nous avons
négocié durant plusieurs années pour faire accepter ces
propositions. Nous avons réussi, dans une première étape,
à les faire accepter, en 1987, de nouveau en 1990 et, finalement, le
processus constitutionnel nous a empêchés de les faire ratifier et
qu'elles deviennent la loi du pays.
Comme en 1971, j'avais refusé d'accepter le rapatriement de la
Constitution parce qu'à mon point de vue, au point de vue du
gouvernement et de mon parti, ça n'allait pas dans le sens de
l'histoire. En 1990, j'ai agi de la même façon,
c'est-à-dire que je n'ai pas accepté qu'on rejette ainsi des
propositions qui avaient été ratifiées à deux
reprises. Nous essayons donc maintenant, à la suite de la loi 150 qui a
fait presque l'unanimité au Québec, de pouvoir obtenir
réparation de l'injustice de 1982, de même que de l'injustice de
1990.
Je me permettrai, M. le Président, de souligner que la
crédibilité de mon honorable ami, le chef de l'Opposition, quand
il invoque l'accord du lac Meech et quand il invoque le rapport Allaire, n'est
pas particulièrement impressionnante. Son parti, lorsque nous avons
proposé l'accord du lac Meech, l'a dénoncé en disant que
c'était moins que rien. Aujourd'hui, il en fait un point de
référence, admet-il pour fins de discussion, mais il le juge
suffisamment important pour en faire un point de référence. Pour
ce qui a trait au rapport Allaire, le chef de l'Opposition se souvient
très bien que, lorsque le rapport Allaire a été rendu
public, il l'avait interprété comme une agression sournoise
vis-à-vis le Canada anglais et, aujourd'hui, il en fait une
référence pour évaluer les propositions qui pourraient
être acceptées par le gouvernement du Québec. Je pose
simplement cette question parce que je trouve que les prémisses du chef
de l'Opposition, dans sa discussion, me paraissent quelque peu
vulnérables. Mais là n'est pas le fond du débat. Le fond
du débat, c'est: est-ce que les propositions fédérales
peuvent servir de base de discussion, peuvent permettre au gouvernement du
Québec de poursuivre le dialogue?
Nous avons dit dans une première évaluation, en septembre
dernier, c'est-à-dire le 25 septembre, que le document nous paraissait
très incomplet, que dans le cas, notamment, de l'union économique
nous ne pouvions pas accepter le libellé tel qu'il était - on
aura l'occasion d'en discuter plus en détail - qu'il était
possible d'arriver à la concertation nécessaire entre les
différents partenaires du Canada, qu'il était possible d'arriver
à cette concertation sans changement constitutionnel et que cette forme
de fédéralisme autoritaire qui se trouve implicitement
exprimée dans les propositions ne paraît pas très
convaincante quand, on l'a dit, on examine la gestion économique du
gouvernement
central depuis 20 ou 25 ans. Plus d'un tiers du service des revenus
fédéraux est affecté au service de la dette. C'est deux
fois plus que le Québec et beaucoup plus que la plupart des autres
provinces.
M. le Président, je crois que nous ne pouvons pas - et je
termine, on m'avise qu'il reste quelques secondes - alors que nous avons
adopté la loi 150, donner d'opinion définitive sur des
propositions préliminaires, alors que ceux qui ont fait ces propositions
ont dit clairement qu'elles étaient préliminaires. On dit
clairement qu'elles seraient vraisemblablement modifiées, lesquelles
propositions ont été faites, dans plusieurs cas, sans
libellé juridique qui nous permette d'avoir une opinion sur leur
portée réelle. Nous avons dit que, sur le plan des principes, il
y avait des progrès où il y avait des éléments qui
permettaient une discussion utile, mais le gouvernement ne respecterait pas une
loi de l'Assemblée nationale, la loi 150, s'il prenait position d'une
façon finale sur des propositions qui sont là pour être
discutées.
Le Président (M. Dauphin): Alors, je vous remercie, M. le
premier ministre, pour vos remarques préliminaires, tout en vous
signalant que vous avez rééquilibré les choses sur le
temps. Vous avez pris 10 minutes et 45 secondes. Alors, nous allons maintenant
débuter la période du débat et je vais dès
maintenant reconnaître M. le chef de l'Opposition officielle pour une
période de cinq minutes.
Argumentation M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, le premier ministre, en
somme, dit: Je ne peux pas me commettre sur ces propositions, à l'heure
actuelle, parce qu'il y a un comité de la loi 150, créé en
vertu de la loi 150, qui doft examiner ça. M. le Président,
puis-je rappeler que vous-même, en tant que président de ce
comité, avez dit qu'il n'y aurait pas de recommandations à
l'Assemblée nationale, faites à l'égard de ces
propositions constitutionnelles fédérales puisque le mandat de
votre comité prévolt que vous ne pouvez pas faire de
recommandations s'il ne s'agit pas de propositions qui lient le gouvernement
fédéral et les provinces.
Donc, si le premier ministre se sert de ce prétexte pour ne pas
se commettre, bien, il risque d'attendre longtemps puisque, de toute
façon, il est entendu que ce comité créé en vertu
de la loi 150 ne fera pas de recommandations. Il va bien falloir qu'à un
moment donné le premier ministre fasse, lui, des recommandations quant
à ce qu'il veut trouver ou pas dans la formulation des propositions
fédérales.
À cet égard, est-ce que le premier ministre convient qu'en
restreignant la portée de la société distincte - on
revient à Meech - à la langue, la culture et au Code civil,
même en ajoutant le mot "notamment", la portée de la
société distincte est considérablement diluée et,
en fait, n'a à peu près plus de portée quant à la
Charte et plus aucune portée quant aux autres dispositions de la
Constitution. Est-ce que le premier ministre continue de penser qu'il lui faut
un droit de veto qui n'apparaît pas dans les propositions
fédérales? Il y a quelque chose qui vient de...
Le dernier numéro de la Société de droit
international économique du Canada comporte une citation, une entrevue
du premier ministre du Québec dont on tire la phrase suivante: "On
comprendra donc pourquoi le Québec, État français dans le
marché commun canadien, doit - doit - disposer de tous les pouvoirs
nécessaires à la protection et à la promotion de son
caractère distinct, tel un veto en matière
constitutionnelle."
Ce n'est pas moi qui le demande, le veto! Qu'est-ce que vous voulez?
Moi, je veux que le Québec devienne un pays. C'est le premier ministre
qui dit: Je veux un veto, puis les propositions constitutionnelles disent: Vous
n'en aurez pas. Est-ce qu'il est prêt à signer des propositions
constitutionnelles, des offres fédérales qui ne comporteraient
pas un droit de veto? Mais qu'il le dise si, pour lui, c'est fondamental.
Ça veut donc dire que s'H n'y a pas de droit de veto dans ces
propositions, il ne signera pas. Est-ce que je l'interprète
correctement?
Qu'est-ce qu'il pense de ces dispositions de l'accord du lac Meech qui
n'apparaissent pas dans les propositions fédérales comme, par
exemple, la nomination des trois juges de la Cour suprême sur laquelle il
devait faire des recommandations? Spécifiquement, comme gouvernement du
Québec, c'est disparu. Qu'est-ce qu'il pense de cette disparition? Pour
le Sénat, l'accord du lac Meech prévoyait que les nominations
seraient faites sur des recommandations du gouvernement du Québec.
Maintenant, on nous dit que ça sera élu et que la
répartition des sièges sera plus équitable. Actuellement,
le Québec a 25 % des sièges au Sénat. Plus
équitable, ça veut dire moins. Qu'est-ce que le premier ministre
pense de ça, d'avoir un poids au Sénat, un poids du Québec
relativement plus faible? (10 h 30)
Là, nous parlons de Meech. Tout ça est nettement
au-dessous de Meech et, pourtant, le premier ministre a dit: Je ne
négocierai pas en bas de Meech. C'est un principe majeur, c'est un
principe qui apparaît. Ottawa dit: Vous allez avoir moins que Meech.
Est-ce que le premier ministre dit toujours: Je veux au moins autant que Meech?
S'il le pense, mais qu'il le dise. J'allais dire: C'est important, même
pour les gens à Ottawa, de savoir que le premier ministre tient toujours
à négocier au niveau de Meech et
n'acceptera rien en bas de Meech. Mais je pense que c'est une
responsabilité qu'a le premier ministre du Québec de dire
ça à Ottawa, lui qui veut que le système
fédéral fonctionne.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Je vais maintenant reconnaître M. le premier ministre en
réponse, pour une période également de cinq minutes.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, je comprends très
bien que le chef de l'Opposition mette l'accent sur les éléments
dans les propositions qu'on ne retrouve pas dans le lac Meech. Le chef de
l'Opposition sait fort bien que le gouvernement fédéral, dans ses
propositions - et admettons au passage que le gouvernement
fédéral a respecté la loi 150. Je veux dire qu'il y en a
plusieurs au Canada anglais qui auraient pu dire: Bon, si ça ne
fonctionne pas, nous, nous allons fixer notre propre agenda. Que le
Québec fasse son référendum sur la souveraineté ou
sur une autre formule, et on verra après.
Je ne suis pas sûr que le climat de stabilité politique qui
est essentiel au Québec pour sa stabilité économique aura
été amélioré. Le gouvernement fédéral
a accepté le processus de la loi 150. C'est vrai que la formulation de
la société distincte est différente. Mais c'est
également vrai que les interprétations sont aussi
différentes. Il y en a qui disent d'un côté - il y en a
même qui ont témoigné à la commission parlementaire,
et je ne suis pas pour m'introduira dans toutes les distinctions qui peuvent
être apportées là-dessus, puisque le débat n'est pas
terminé... Il y en a qui ont dit que c'était plus fort que dans
le lac Meech. Il y en a même qui ont dit que ça pouvait conduire
hypothétiquement à des gestes dramatiques de la part du
gouvernement du Québec. Il y en a d'autres qui ont dit que c'avait moins
de portée que dans l'accord du lac Meech.
Nous ne sommes pas ici ce matin, M. le Président, pour analyser
d'une façon juridique alors que la commission a
précisément pour objectif d'examiner ce concept-là. Je
pense bien que le chef de l'Opposition, s'il est sérieux, ne s'attend
pas à ce que le premier ministre aujourd'hui donne, s'improvise expert
juridique et donne un avis final sur le concept comme tel, sur la portée
du concept qu'on a largement débattu durant l'accord du lac Meech et qui
continue d'être débattu de part et d'autre.
On doit admettre que malgré une opposition au Canada anglais sur
ce concept-là, quelle que soit sa formulation, on le retrouve dans
l'application de la Charte. On doit admettre que ceux qui s'opposaient à
ce concept... Je pense au premier ministre de Terre-Neuve qui disait, l'an
dernier, qu'il n'était pas question qu'on tienne compte des droits
collectifs dans l'interprétation des droits individuels sur le
territoire du Québec, que jamais il accepterait qu'on tienne compte des
droits collectifs. On admet aujourd'hui qu'il dit qu'il est d'accord pour qu'on
tienne compte des droits collectifs. Nous pourrions parler très,
très longtemps sur cette question de la signification juridique de la
société distincte.
Le droit de veto que nous devons récupérer, M. le
Président, pas en raison d'une erreur de mon gouvernement... Quand je
vois des doctes savants venir nous faire la leçon sur la perte du droit
de veto, il y a quelques jours, alors que c'est eux qui ont conseillé le
chef du gouvernement pour le mettre sur la table, ça prend tout un
culot! On a beau avoir le goût de la publicité, il faut quand
même rester un peu cohérent.
Alors, dans la question du droit de veto, il est quand même
important de réaliser de part et d'autre, surtout de la part de ceux qui
ont commis la tragique erreur de le rendre négociable, que notre
gouvernement essaie de le récupérer. Il en avait
récupéré une partie sur les institutions. Ça
demeure, comme je l'ai dit, M. le Président, un objectif fondamental du
gouvernement du Québec. Mais, dans une première étape,
étant donné que ça suppose l'unanimité, et,
d'ailleurs, dans les propositions, on s'y réfère comme à
un objectif, nous insistons sur d'autres aspects qui nous paraissent
également importants pour l'avenir du Québec: le transfert des
pouvoirs, la question du pouvoir de dépenser. Le chef de l'Opposition,
curieusement, n'a pas parlé des propositions sur le pouvoir de
dépenser. Ça fait 30 ans qu'on demande, au Québec, tous
les gouvernements, une limitation du pouvoir de dépenser. Il y en a une
qui est offerte. Peut-être qu'elle n'est pas parfaite, mais pour la
première fois et d'une façon élargie - ça avait
été également proposé dans le cas du lac Meech - on
a, de la part du gouvernement fédéral, formellement,
juridiquement, la reconnaissance de limiter son pouvoir de dépenser, qui
a été à la source de combien de chevauchements et de
combien de gaspillages de fonds publics. Alors, ça, c'est un aspect des
propositions que, curieusement, n'a pas signalé le chef de l'Opposition.
L'immigration...
Le Président (M. Dauphin): M. le premier ministre, je vous
signale que c'est termine, que les cinq minutes sont terminées.
M. Bourassa: Alors, je termine par une phrase, M. le
Président. L'immigration, pouvoir fondamental pour l'avenir culture! du
Québec, on retrouve cela dans les propositions. Ça aussi, on n'en
a pas parlé, de l'autre côté.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Maintenant, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je ne comprends pas le
premier ministre de venir nous dire que les avis sont partagés quant
à la signification de la société distincte dans les
propositions fédérales. J'ai lu à peu près tous
ceux qui ont pu écrire là-dessus, et on n'arrête pas les
citations. Il ne va trouver qu'une seule exception, je pense, parmi les
constitutionnalistes dont je parlais tout à l'heure, c'est M. Patrice
Garant - j'imagine que c'est à ça qu'il faisait allusion. Dans
son témoignage devant votre commission, M. Patrice Garant a contredit le
texte écrit qu'il avait déposé devant la commission. C'est
à peu près tout ce qu'on peut trouver. Pour le reste, tout le
monde est d'accord que c'est réduit.
Ça fait six semaines que le premier ministre nous a dit qu'il
attendait des avis juridiques; j'imagine qu'il les a reçus. Mais, qu'il
me donne donc un cas de constitutionnaliste - un cas! -qui dit que le concept
de société distincte, tel qu'il apparaît dans les
propositions fédérales, est plus large que ce qui apparaissait
dans le lac Meech. Au contraire, c'est restreint. C'est tellement restreint que
je voudrais, à cet égard, citer - et je vais le faire en anglais,
je n'ai pas de traduction - une intervention du sénateur MacEachen au
comité Castonguay-Dobbie, qui cherche à faire indiquer par le
sous-ministre de la Justice, M. Tait, à Ottawa, le sens de la
société distincte. Il lui dit ceci - c'est M. MacEachen qui
parle: "Mr Chairman, I take it from the answer that it is the view of officials
that the inclusion of the distinct society clause in this particular section or
part of the Constitution would not affect the scope - l'étendue -or
content - le contenu - of any right currently guaranteed in the Charter. That
is the clarification and it is very helpful." Et M. le sous-ministre de la
Justice, M. Tait, dit: "I would accept that way of putting it", ce qui veut
dire qu'on comprend que M. Clyde Wells l'ait acceptée, la
société distincte, ça ne veut plus rien dire! On comprend
fort bien la réaction que M. Clyde Wells donnait à la presse le
23 octobre, en disant - et là, c'est traduit en français: "Je
n'ai jamais rejeté le concept de société distincte pour le
Québec, mais le fait qu'on pouvait interpréter toute la
Constitution par cette particularité." Ça n'existe plus. Ah! il
est d'accord. Bien sûr, il est d'accord. C'est à ça que le
premier ministre se range? Mais il a accordé une telle importance
à cette clause de la société distincte! Pensez, M. le
Président, que le premier ministre a déjà dit en cette
Chambre que si la clause de la société distincte ne primait pas
sur la Charte, ce serait pire que le statu quo. Mais, au moins, qu'il
répète ça, juste pour qu'on soit tout à fait
certains qu'il est toujours du même avis.
Sur le plan du veto, on n'a pas parlé de particularités,
c'est-à-dire de tentatives d'avoir un droit de veto. Moi je n'ai jamais
entendu le premier ministre dire ça. Encore une fois, qu'il ne s'appuie
pas sur nos attitudes pour se justifier. Nous, on veut avoir un pays. Vous
comprenez qu'un droit de veto, on ne sait pas quoi en faire. Dans cette
optique-là, je ne sais pas quoi faire avec un droit de veto. Un droit de
veto à l'égard de qui, quand on a son pays à soi? C'est le
premier ministre qui veut avoir un droit de veto, mais aujourd'hui, il a l'air
de dire que ça va être une tentative plutôt qu'une exigence?
Hé!
D'autre part, il mentionnait le pouvoir de dépenser. Attention!
le pouvoir de dépenser... Ce qu'il y avait dans Meech était assez
particulier. On recule par rapport à ça, parce que maintenant, il
y a la question des objectifs qu'il faut satisfaire les programmes nationaux.
L'immigration, mais l'immigration dans Meech, il y avait la possibilité,
par un vote du Parlement fédéral et de Québec, de pouvoir
régler le problème de l'immigration entre les deux gouvernements.
Et maintenant, nous apprenons, dans les propositions fédérales,
que ça va prendre sept provinces, le fédéral, sept
provinces et 50 % de la population. Il va me dire que ce n'est pas un recul par
rapport à Meech? Et ce qui apparaît ce matin, c'est que le
gouvernement est en pleine reculade, M. le Président.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition. M. le premier ministre.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition dit: Nous, on se bat pour
avoir un pays. Ils ont fait un référendum qu'ils ont perdu. Avec
quel résultat? Avec le résultat qu'il a fallu négocier en
position de faiblesse. Il faut faire la distinction entre les objectifs et les
risques qu'on assume en voulant les réaliser quand le peuple ne suit
pas. Et si nous devons aujourd'hui combattre pour récupérer le
droit de veto - et c'est pour ça que je ne vois pas pourquoi on ne peut
pas citer l'histoire pour préparer l'avenir - si on est obligés
de se battre aujourd'hui pour récupérer le droit de veto, c'est
parce que vous avez placé le Québec en position de faiblesse.
Ça, c'est une réalité qu'on ne peut pas éviter. (10
h 45)
Primauté de la Charte. Je ne crois pas que, dans la
période qui nous est accordée, on devrait discuter sur tous les
raffinements juridiques que peut comporter une clause constitutionnelle, mais
je retiens un point soulevé par le chef de l'Opposition quand il m'a
cité. Il a dit: Le premier ministre a dit que si on apporte un
amendement qui se trouve à atténuer d'une façon
spécifique l'application de la Charte, c'est pire que le statu quo. On
est obligés de constater que l'amendement qui est apporté vise
précisément à ce que l'interprétation de la Charte
tienne
compte que le Québec est une société distincte,
que, quand les juges auront à interpréter des lois du
Québec pour protéger la culture... Et nous avons pu faire adopter
des lois pour protéger la culture. Je ne pense pas qu'on puisse dire que
la menace que le Québec ne possède pas des pouvoirs pour
protéger la culture... Il l'a fait avec la loi 22, il l'a fait avec la
loi 101, il l'a fait avec la loi 178, sans que le Québec ne soit reconnu
comme société distincte. Mais là, nous avons une
protection additionnelle dans la mesure où l'application de la Charte
est considérée. Alors, je ne vois pas en quoi le chef de
l'Opposition ne peut pas admettre que, dans ce contexte-là, ceux qui
auront à interpréter les lois québécoises devront
tenir compte que le Québec est une société distincte. Et
c'est important, ça, c'est important parce que quand on a proposé
le livre bleu avec 23 demandes, mon prédécesseur, M.
Lévesque, avait dit: La plus importante, c'est la reconnaissance du
Québec comme société distincte. Quant aux autres, on
pourra négocier éventuellement, mais celle-là, elle doit
être très importante.
Alors, je dis au chef de l'Opposition qu'il y a des avis; ils ne sont
pas complets. Je ne vois pas l'utilité, alors qu'il y a toutes les
questions de nature économique et financière à aborder, de
prolonger un débat sur un concept juridique, alors que les avis, les
analyses juridiques ne sont pas encore complétés. Tout ce que je
dis au chef de l'Opposition, c'est quand il m'invoque, pour dire que ça
ne doit pas affaiblir l'interprétation de l'article 1 de la Charte, je
le réfère au texte qui mentionne que, dorénavant, non
seulement les juges devront tenir compte des limites raisonnables aux droits
des personnes, mais ils devront également tenir compte que le
Québec est une société distincte.
Pour ce qui a trait à la question du pouvoir de dépenser,
je répète ce que j'ai dit tantôt. Au moins, nous avons
là, pour la première fois - et Dieu sait comment le chef de
l'Opposition, comme conseiller de M. Lesage et d'autres premiers ministres, et
comment nous-mêmes, durant des décennies et des décennies,
nous nous sommes efforcés d'obtenir une limite à ce pouvoir de
dépenser qui a déséquilibré le partage des pouvoirs
entre les niveaux de gouvernement.
Si, aujourd'hui, nous devons nous battre pour récupérer
des pouvoirs qui nous ont été accordés par la Constitution
de 1867, c'est à cause du pouvoir de dépenser. Alors, admettons
franchement que la formule est perfectible, mais que la volonté de
limiter le pouvoir de dépenser, pour la première fois, d'une
façon aussi précise, se retrouve dans des principes d'une
proposition fédérale.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Je vais donc maintenant reconnaître de nouveau M. le chef de l'Opposition
officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, limiter le pouvoir de
dépenser... Je commence par la fin de la dernière intervention du
premier ministre. S'il vous plaît, qu'il ne s'appuie pas sur M. Lesage.
Qu'il n'ose pas prendre comme illustration M. Lesage. M. Lesage, lui, pour
limiter le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, il
a sorti le Québec de 29 programmes conjoints fédéraux d'un
coup. Ah oui! Ça, pour brimer et pour rendre plus difficile le pouvoir
de dépenser du fédéral, ça a été
remarquable. On en a senti les effets pendant 15 ans. C'était autre
chose, autre chose que cette clause qu'il y a, à l'heure actuelle, dans
les propositions fédérales et qui, à toutes fins
pratiques, va permettre à une province de se retirer à la
condition qu'elle satisfasse les objectifs des programmes
fédéraux, et les cours vont interpréter ça d'une
façon telle qu'il va falloir avoir des programmes identiques.
Cela étant dit, j'aimerais en venir maintenant au deuxième
point, le deuxième grand sujet que je voulais aborder, qui est celui du
programme officiel du Parti libéral en matière constitutionnelle,
plus souvent décrit comme étant le rapport Allaire. Le rapport
Allaire que - encore une fois, je le souligne, M. le Président - le
premier ministre a signé et dont il a dit beaucoup de bien
jusqu'à un fameux dimanche après-midi où il a fallu qu'il
mette le poing sur la table.
Qu'est-ce que c'est, l'esprit du rapport Allaire? Il s'agit
essentiellement d'amener entre les mains du gouvernement du Québec un
certain nombre de pouvoirs exclusifs, ceux qui lui ont été
donnés par la Constitution de 1867 sans doute, mais d'autres. Et, parmi
ces autres, on n'y va pas avec le dos de la cuillère. Je donne la liste
rapidement: l'agriculture; l'assurance-chômage; les communications - les
communications -avis au ministre des Affaires culturelles, les communications
au complet; le développement régional dans sa totalité;
énergie; environnement au complet, plus de ministère de
l'Environnement; industrie et commerce; langue, compétence exclusive, la
langue; recherche et développement; sécurité publique;
sécurité du revenu.
Ce n'est pas rien, ça, M. le Président. C'est une
façon de voir les choses qui, comment dire, donnerait au Québec
une ampleur d'action qui, à bien des égards, moi, ne me satisfait
pas, mais dont je dois reconnaître que c'est quand même, par
rapport à un certain nombre de tentatives timides, dans les
années passées, du Parti libéral, une certaine ouverture
vers un plus grand degré d'autonomie du Québec. En fait, on ne
laissait que cinq pouvoirs exclusifs au gouvernement fédéral:
défense et sécurité du territoire, douanes et tarifs,
gestion de la dette commune, monnaie et péréquation.
Quelle est la réponse des propositions fédérales
à cet effet? Eh bien, la réponse du
gouvernement fédéral, c'est, en un certain sens, que
Québec, si vous me passez l'expression, aille se faire cuire un oeuf. On
consacrera le fait que ce qui est dans la Constitution de 1867 sera maintenu
comme pouvoirs exclusifs des provinces. On indique qu'on acceptera que la
formation professionnelle soit laissée aux provinces, encore qu'au nom
de l'exclusivité dans le domaine de l'éducation on aurait pu
penser que c'était de compétence exclusive provinciale depuis
longtemps. Mais on dit tout de suite: Mais le gouvernement
fédéral déterminera quel rôle il jouera
là-dedans.
On reconnaît, comme je le disais plus tôt, qu'il y aura des
discussions sur certains autres sujets pour voir comment les compétences
pourraient être partagées. On annonce simplement... La bonne
volonté va jusqu'à dire: On tiendra des discussions. Oui, eh
bien, des discussions de ce genre-là, ça fait 30 ans qu'il y en
a. Pour des discussions de ce type qui sont prévues dans les
propositions fédérales, il doit y avoir quelque chose comme 200
comités fédéraux-provinciaux pour discuter.
Le Président (M. Dauphin): C'est terminé, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Et, dans ce sens, je conclus seulement par une
phrase, M. le Président. Vous comprendrez que... Au nom, au nom, en un
certain sens, simplement de l'intégrité des gens que nous avons
devant nous, ça ne vous déplaît pas de voir le gouvernement
fédéral vous dire d'aller...
Une voix: Vous faire cuire un oeuf.
M. Parizeau: ...vous faire cuire un oeuf?
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Maintenant, au premier ministre.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: Je réplique immédiatement au chef de
l'Opposition qu'au nom de l'intégrité intellectuelle qu'il doit
essayer d'assumer comme chef de l'Opposition, ça ne lui
déplaît pas d'invoquer un rapport pour critiquer le gouvernement
que lui-même a décrit comme totalement irréaliste, comme
une injure au Canada anglais? Est-ce que, au nom de l'intégrité
intellectuelle, il ne devrait pas faire preuve d'un peu plus de
modération quand il demande au gouvernement d'appliquer ou de rechercher
l'application totale d'un rapport qu'il a dénigré avec virulence
lorsqu'il a été rendu public?
Ce que nous avons dit sur le rapport Allaire, c'est qu'il
reflétait, pour nous, la volonté d'un changement en profondeur et
qu'il représentait un changement en profondeur, mais qu'on doit quand
même, comme gouvernement - le parti a sa responsabilité; il
l'assume très bien, mais le gouvernement a aussi la sienne - examiner
les implications financières des propositions qui sont faites. Si on
récupère l'assurance-chômage, ça veut dire combien
de dépenses additionnelles? Si on récupère l'assistance
publique? Puisqu'il a cité la Commission-Jeunesse du Parti
libéral, je réfère le chef de l'Opposition au plus
récent document de la Commission-Jeunesse du Parti libéral, qui
exprime clairement qu'on doit avoir une approche pragmatique, qu'on doit tenir
compte de l'impact sur les finances publiques. C'est fondamental pour un
gouvernement responsable, pas pour un gouvernement électoraliste.
Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que nous nous
efforçons, dans le nouveau partage des pouvoirs, et on en retrouve un
certain nombre... Je me référais tantôt au pouvoir de
dépenser. Ah! Le chef de l'Opposition fait mine de s'indigner. Oh! J'ai
osé citer le rôle qu'il jouait comme conseiller de M. Lesage au
début des années soixante. Mais est-ce que le chef de
l'Opposition ne peut pas faire la différence entre des changements
administratifs et des changements constitutionnels? Dans les programmes
conjoints qui ont été récupérés, il sait
fort bien... L'honnêteté du débat en lui-même
m'incite à faire cette mise au point il sait fort bien qu'il n'y a pas
de garantie pour l'avenir qu'un nouveau gouvernement qui voudrait centraliser,
qui aurait des politiques centralisatrices, pourrait vouloir
récupérer cela, alors que nous parlons dans les propositions de
changements constitutionnels. Est-ce que le chef de l'Opposition est incapable
de faire une différence entre l'aspect administratif et l'aspect
constitutionnel? Je m'étonne. Et ceci met en relief la faiblesse de son
argumentaire.
M. le Président, nous nous efforçons, dans le contexte qui
est le nôtre, dans une situation très exigeante sur le plan
économique et financier, qui demeure pour nous la priorité, de
dénouer cette impasse constitutionnelle. J'ai dit, le ministre des
Affaires intergouvernementales canadiennes l'a exprimé également,
les autres ministres qui ont eu à parler l'ont fait également,
que nous ne sommes pas satisfaits des propositions telles que formulées.
Il y a trop d'ambiguïté, trop d'ambiguïté dans
l'interprétation qu'on peut apporter à ces propositions. Mais au
niveau des principes, restreindre le pouvoir de dépenser, nous donner ta
sécurité culturelle, on verra ce que ça veut dire
concrètement, mais le principe est là: on veut donner les
pouvoirs culturels. On a plusieurs mois pour évaluer le sérieux
des propositions, mais qu'on ne vienne surtout pas confondre l'administratif
avec le constitutionnel.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Je vais maintenant reconnaître, pour un temps maximum de cinq minutes, M.
le
député de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Mr. Chairman, in the
brief time that I have at my disposal, I think I would like to ask to the Prime
Minister if he might like to tell us a little bit about the future and how he
sees the relations with other Premiers and other governments over the next few
months. One of the things, I think, that was very productive was his meeting
with Premier Rae, in Toronto, the other day, and one of the things I would like
to have the Premier tell us is how he sees his . future relations with the
other Premiers and with the other governments in Canada.
M. le Président, je ne demande pas au premier ministre de nous
dévoiler dans les détails sa stratégie constitutionnelle,
mais je crois que les Québécois et bien d'autres Canadiens dans
le reste du pays aimeraient savoir si on peut envisager une possibilité
d'éviter le référendum envisagé dans la loi 150.
Pour ma part, M. le Président, je crois qu'il y a un moyen de le faire.
(11 heures)
Ever since thé failure of Meech Lake, we have watched the
"souverainistes" pushing for a referendum on their terms and I submit you, Mr.
Prime Minister, that the mood In Québec has moderated. I do not see why
we have to be steamrolled any longer. To me, it is obvious that
Bélanger-Campeau was controlled by "souverainistes" and, in fact, on l'a
vu clairement, l'autre jour, quand M. Campeau a montré ses vraies
couleurs. Mr. Prime Minister, it is up to you to slow down the bulldozer.
Si le rapport Allaire est la position de base de votre gouvernement,
alors, demandez aux Québécois un mandat pour négocier
là-dessus. Je ne suis pas un ardent supporteur d'Allaire, mais c'est
quand même mieux que la souveraineté. J'ose croire qu'avec les
négociations, il y aurait des modifications. Alors, je recommande au
premier ministre: Donnez-vous du temps, M. le premier ministre. Faites votre
référendum sur un mandat pour négocier. Cette fois, je
crois que la question pourrait être beaucoup plus simple et je crois que
la réponse des Québécois serait oui.
Vous savez, M. le Président, que la communauté que je
représente est foncièrement fédéraliste, mais elle
est aussi réaliste. Les anglophones savent qu'entre le gouvernement et
l'Opposition, leurs espoirs sont beaucoup mieux servis par le Parti
libéral que par le Parti québécois. Pour cette raison, je
demande au premier ministre de nous assurer, aujourd'hui, qu'il y a de
l'espoir, qu'il y de la place pour les anglophones dans le Québec et
qu'il y a de la place pour le Québec dans un Canada
renouvelé.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député de Westmount. En réponse, M. le premier ministre,
toujours pour un temps maximum de cinq minutes.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: Oui. M. le Président, j'ai
écouté avec beaucoup d'attention les propos du
député de Westmount. Quand il demande d'aller devant le peuple
pour un mandat pour négocier, ça fait 40 ans que les
gouvernements obtiennent des mandats pour négocier avec le gouvernement
fédéral. Je crois que le Québec, durant les années
quatre-vingt particulièrement, a dû assumer deux échecs et
le Québec a décidé, après l'échec de
l'accord du lac Meech... Il ne faut pas oublier que cet échec suivait
trois années de négociations et qu'il avait été
ratifié à deux reprises - trois, si on tient compte d'avril 1990
et de juin 1990 - et que le Québec était arrivé à
la croisée des chemins. Légitimement, il se posait des questions
sur la volonté des partenaires canadiens d'accepter le Québec
comme il est.
Dans l'accord du lac Meech, il n'y avait pas de demandes exorbitantes.
Sur le plan historique, c'était des demandes très raisonnables et
qui avaient été acceptées. Donc, nous avons le mandat, je
crois, de procéder comme nous l'avons fait. Vous avez participé
à une commission constitutionnelle qui a rassemblé un large appui
dans la population. Le Parti libéral a changé son programme pour
une raison bien simple, à savoir que celui qu'il avait adopté en
1985 n'avait pas été accepté. Mais je crois que l'attitude
la plus sage, actuellement, ce n'est pas d'avoir une élection avec
toutes les conséquences que ça peut comporter pour avoir un
mandat de négocier.
L'attitude la plus sage, je crois, c'est celle que pratique le
gouvernement, c'est-à-dire d'arriver à avoir des offres qui
soient acceptables. On a respecté le processus, mais, par ailleurs, on a
fait des propositions qui, le moins qu'on puisse dire, sont incomplètes
et ne peuvent pas être acceptées telles que
présentées par rapport aux demandes traditionnelles du
Québec.
Alors, je crois que les pouvoirs et la volonté que nous avons,
actuellement, de dénouer l'impasse doivent s'orienter vers des
discussions et doivent s'orienter vers une solution constitutionnelle
acceptable et tenant compte de la tradition de l'histoire au Québec.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de
D'Arcy-McGee, pour une période maximale de quatre minutes comprenant la
question et la réponse. Alors, M. le député de
D'Arcy-McGee.
M. Robert Libman
M. Libman: Merci, M. le Président. Since the federal
propositions were tabled on September 24th, Quebeckers have witnessed a bizarre
spectacle. The Premier of Québec as well as the Leader of the Official
Opposition are eminent economists, both have always favoured economic union,
both have always favoured the dismantling of trade barriers to allow for freer
circulation of goods, services, people and capital, and both were staunch
supporters of the U.S. Free Trade Agreement. Yet, on September 24th, the
Government of Canada put on the table proposals for an economic union, for
freer trade in Canada. And what have we witnessed in Québec since? We
have seen nothing but bitter denunciations from the Government and from the
Official Opposition of an attempt by Ottawa to centralize economic power, a
power grabbed by Ottawa, yet at the same time completely ignoring the reality
of the propositions, proposition 15(3) for exemple, which allows a province to
opt out of some of the legislation passed by Ottawa on economic union. There
has been an ignorance of the fact that the provinces are given greater
participation in the decisions of the Bank of Canada in proposal 17.
My first question to the Premier is: How can he explain this
contradiction, this charade, this game, that when it comes to free trade with
the Americans, he acts like Captain Courageous, yet when it comes to freer
trade with the rest of Canada, with Prince Edward Island, for example, he acts
like a mouse and cries foul from Ottawa? That's question number one, M. le
Président.
Second question: I would like to have an opinion from the Premier on
whether he feels this game he's been playing of good cop, bad cop with the
Minister of Intergovernmental Affairs is beneficial to the negotiating process,
if he feels that it sends out the right message to the rest of Canada. He can
say as many times as he wants that they are saying the same thing, but this is
not the perception that is being sent out to the rest of Canada. This is
risking a deal and it is risking success of these negotiations. So, I would
like to ask him to consider very strongly inparting to the members of his
Cabinet to send out one clear message to the rest of Canada that these are
positive propositions on the table that must be negotiated in good faith and
that we have several months to get to the point where these proposals can be
acceptable to Québec. Ça, c'est deux questions, M. le
Président.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député. M. le premier ministre, en une minute et demie.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: Je crois que j'ai répondu à la
deuxième question à l'Assemblée nationale avant-hier. Je
ne crois pas qu'on puisse souligner la moindre contradiction entre les
différents porte-parole du gouvernement. On peut cher hors contexte,
c'est normal, ça fait partie des règles du jeu, mais si on
examine les déclarations de part et d'autre, il n'y a aucune
contradiction.
Concerning free trade, you know the situation. In rejecting free trade,
what will be the reaction of the United States? We are more dependent on our
export to the U.S. than they are dependent on their export to Canada. And we
all realize these days what can be done by the U.S. Congress in pulp and paper,
in magnesium and asbestos. So we have to be realistic when we are dealing in
free trade with the United States. We were talking a few moments ago about if
Québec becomes sovereign. What kind of bargaining power will we have in
free trade with the United States? That will be an interesting question to
debate with the Leader of the Opposition.
Concerning trade inside Canada, we signed an agreement last December to
reduce, in certain sectors, some barriers, but that has to be done in a gradual
way. With a rate of unemployment in some provinces of 18 %, of 15 %, of 20 %
and 5 % or 6 % or 7 % in other provinces...
Le Président (M. Dauphin): C'est terminé, M. le
premier ministre.
M. Bourassa: So, we have to live in the real world.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Je vais maintenant reconnaître M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, nous allons aborder,
maintenant, le troisième volet que j'avais annoncé,
c'est-à-dire celui des propositions constitutionnelles proprement
économiques. Je vous indique tout de suite, d'ailleurs, que dans ce
domaine à peu près tout est rédigé en termes
juridiques. C'est très précis. C'est très bien
défini dans le document fédéral.
De ces propositions économiques, je pense que celle qui en a le
mieux résumé la teneur, et d'ailleurs de l'ensemble de ces
propositions constitutionnelles du gouvernement fédéral, c'est la
vice-première ministre et ministre de l'Énergie et des Ressources
qui disait, le 27 septembre, et je la cite: "Le gouvernement
fédéral a laissé au Québec les aspects
émotifs, comme la société distincte, mais a
conservé ce qui est rationnel, comme l'économie. Je pense que ce
n'est pas acceptable. Le Québec a prospéré avec le
modèle
économique qu'on s'est donné et va en avoir besoin pour
continuer. "
C'est remarquable. Je pense que ça dit tout. Ça dit tout.
Le gouvernement fédéral se donne trois pouvoirs: celui de
légiférer en toute matière qu'il déclare utile
à l'efficacité du fonctionnement de l'union économique. Et
l'union économique est définie dans des termes tels qu'au fond
n'importe quelle politique du gouvernement du Québec qui voudrait
s'adresser au Québec, à des entreprises québécoises
par rapport à d'autres entreprises d'ailleurs, pourrait en pratique et
juridiquement être interdite. Ça couvre pas mal de choses, M. le
Président, ça.
Par exemple, je peux vous dire tout de suite qu'en vertu de ça,
la Société de développement industriel, la SDI, dont notre
ministre de l'Industrie et du Commerce bien-aimé chante les louanges
constamment, la SDI devient inconstitutionnelle parce que tout son mode
d'opérer consiste à favoriser des entreprises du Québec
par rapport à des entreprises qui ne sont pas du Québec, On peut
trouver une foule d'autres exemples de cet ordre.
Mais le gouvernement fédéral se donne aussi le pouvoir de
déclarer des lois fédérales ou provinciales
d'intérêt national. C'est-à-dire qu'il se donne le pouvoir
de faire tout ce qu'il trouve utile pour l'union économique, mais aussi
le contraire, tout ce qu'il jugerait utile et qui n'irait pas dans le sens de
l'union économique. Alors, vous voyez par exemple... On se souvient
peut-être de la ligne Border», de cette fameuse frontière
entre le Québec et l'Ontario, qui a amené la disparition de la
moitié du centre de raffinage pétrolier à Montréal
et qui a fait courir des risques épouvantables aux Centres
pétrochimiques, eh bien, ça serait constitution-nalisé,
ça. Le gouvernement fédéral peut faire une chose et faire
son contraire, s'il le juge bon.
Troisièmement, le gouvernement fédéral se donne le
droit d'adopter des lignes directrices destinées à
améliorer la coordination des politiques budgétaires et
financières. Le premier ministre ne s'est pas beaucoup prononcé
sur les deux premiers pouvoirs. En fait, il n'a pas dit grand-chose
là-dessus. Il a plutôt essayé d'en atténuer la
portée. Mais il est sorti sur le troisième et, là, je dois
dire que je ne le comprends pas parce qu'il dit: Non, non, ces lignes
directrices sur le plan budgétaire, ça peut aller trop loin. Je
dis que je ne le comprends pas pour la raison suivante: ça fait des
années que le premier ministre nous dit "quand il y a une monnaie
commune, il faut qu'il y ait une politique fiscale commune ou, en tout cas,
compatible, et c'est ça qui exige une structure politique commune".
Là, on a une monnaie commune au Canada. Le gouvernement
fédéral dit: Aïe! On va harmoniser les politiques
budgétaires, et je vais prendre les moyens pour les harmoniser, les
politiques budgétaires, et le premier ministre du Québec dit:
Non, non, non, je ne marche pas là- dedans. Je dis: Je ne comprends pas.
C'était, il me semble, dans la ligne de ses convictions à la fois
économiques et fédéralistes d'accepter cette initiative
fédérale comme jouant exactement dans le sens de ce qu'il entend
par une économie et une politique bien menée. (11 h 15)
II est clair que nous ne pouvons pas, comme Québécois,
tous ensemble - la plupart des hommes d'affaires qui se sont prononcés
sur cette question sont d'accord aussi - accepter ces propositions
fédérales sur l'économie, cette centralisation, ce geste
extraordinaire de centralisation économique par le gouvernement central.
Nous ne pouvons pas l'accepter. Est-ce qu'on peut demander au premier ministre
de le dire clairement, pas seulement au sujet de la troisième clause,
mais des trois pouvoirs dont je viens de parler?
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition. En réponse, au premier ministre.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, je suis très heureux,
enfin, qu'on aborde les questions économiques qui sont quand même,
à mon sens, prioritaires dans tout cela, même si les autres
aspects demeurent fondamentaux.
Il y a trois choix pour les Québécois. Il y a l'union
économique proposée par nos amis d'en face. On me permettra d'en
dire quelques mots. Il y a l'union économique proposée par les
autorités fédérales, dans une forme de
fédéralisme autoritaire que j'ai décrit comme
inacceptable. Il y a l'union économique qui met l'accent sur la
concertation intergouvernementale.
Brièvement, tantôt, j'ai signalé que la
crédibilité du gouvernement fédéral pour imposer
ses objectifs économiques était faible. Quand je parle du
gouvernement fédéral, je ne m'adresse pas uniquement à
celui qui nous dirige actuellement. On pourrait même s'adresser davantage
à ceux qui l'ont précédé parce que c'est eux qui
ont déclenché cette spirale de l'endettement. Alors, ils ne
peuvent pas dire aux provinces qui ont réussi, avec beaucoup de
sacrifices dans plusieurs cas, à gérer d'une façon plus
fructueuse: Vous allez nous donner les pouvoirs pour vous dire de faire ci et
de faire ça. La concertation budgétaire, elle peut se faire entre
les gouvernements avec, c'est évident, des propositions, une
intervention ou un rôle fédéral.
On a les mêmes lectures, le chef de l'Opposition et moi. On
rapportait, dans une revue économique qu'il connaît bien,
qu'actuellement, on discute, entre l'Italie et le Marché commun, de
réduire le déficit de l'Italie, en disant: Si on a une monnaie
commune, on ne peut pas avoir des niveaux de déficit qui soient trop
disparates, trop importants. Alors, nous, nous croyons en une union
économique canadienne. On a posé des
gestes. Tantôt, je l'ai dit en répondant au
député de Westmount et au député de D'Arcy-McGee.
Nous avons posé des gestes, comme gouvernement, entre nous, pour
réduire les barrières tarifaires, et c'est ce que nous
privilégions comme union économique. J'ai, là-dessus,
l'appui de tous les milieux d'affaires et des milieux des travailleurs, non
seulement du Québec, mais de l'extérieur.
Mais parlons de l'union économique de nos amis d'en face, qui est
le troisième choix, cette union économique par traité,
où on est prêt à abdiquer totalement ou à asssumer
un rôle minoritaire. Parce que la monnaie, les taux
d'intérêt, c'est quand même un élément vital.
On est prêt même à utiliser la monnaie canadienne contre la
volonté de nos partenaires. C'est ce qu'a dit le chef de l'Opposition.
Il a dit: Le Libéria le fait. Vous avez cité M. Laidler qui
citait le Libéria.
Des voix:...
M. Bourassa: M. le Président...
Le Président (M. Dauphin): S'il vous plaît,
messieurs, mesdames.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition a
cité plusieurs pays qui acceptaient, Panama et d'autres. Alors, Je dis
au chef de l'Opposition: Comment peut-il rester crédible... Parce que
là, on parle du bien-être de tous les citoyens. Une union
économique boiteuse, ça a des effets, ça peut avoir des
effets désastreux, il le sait fort bien. Comment peut-il demeurer
crédible dans sa critique de l'union économique, alors qu'il
propose une formule qui ne peut fonctionner en aucune façon d'une
façon acceptable? Comment peut-il penser... Parce qu'il voit tout en
rose: Ils vont accepter, il n'y aura pas de problème, ça ne
coûtera rien, les Américains vont se ranger. Comment peut-il
demeurer crédible?
Mais je suis quand même heureux que pour ce qui a trait à
des propositions fédérales, il ait décidé d'appuyer
le gouvernement du Québec de manière à empêcher
d'avoir cette forme de fédéralisme qui irait contre
l'intérêt, à mon sens, de la grande majorité des
Canadiens.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Nous revenons avec le chef de l'Opposition officielle. Toujours pour cinq
minutes. Question.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je pense que, là, le
premier ministre vient d'ouvrir une nouvelle porte en voulant discuter de la
forme que peut prendre la souveraineté-association. Il est clair que ce
n'est pas en fin de débat et en quelques minutes qu'on va passer
à travers ces questions. Mais s'il est prêt à un autre
débat comme celui-ci, ça, je l'accepterai volontiers et je lui en
fais la proposition.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Parizeau: Oui, ce serait intéressant de voir comment va
fonctionner le système monétaire dans un Québec souverain.
Oui, ce serait intéressant de faire confirmer ici que, dans la mesure
où un Québec qui devient souverain veut garder la monnaie
canadienne, il peut garder la monnaie canadienne, et que la décision lui
appartient. Tout le monde le reconnaît à l'heure actuelle. C'est
fini les peurs qu'on pouvait faire aux gens autrefois avec ça. Oui,
c'est vrai, c'est comme ça. Et, au fond, tous les techniciens qui ont
été consultés ont tous conclu de cette façon. Oui,
ce serait intéressant de discuter du maintien de l'espace
économique canadien, comme l'ont souhaité à peu
près tous ceux qui se sont présentés devant
Bélanger-Campeau. Je pense que ça faisait l'unanimité de
tout le monde. Oui, il est important, je pense, dans l'hypothèse de la
souveraineté du Québec, que les liens existants avec le Canada
demeurent. Il est important de dégager que beaucoup de ces liens vont,
en fait, être maintenus de façon à peu près
automatique.
Je pense ici à la libre circulation des capitaux, par exemple.
Récemment, une étude du CD. Howe Institute était
très claire à ce sujet. Il n'y a vraiment aucun moyen, enfin
raisonnable, par lequel le gouvernement canadien pourrait empêcher la
libre circulation des capitaux. Dans d'autres cas, sur le plan de la
liberté des produits, des services, de la circulation des produits et
des services, là, il y a un certain nombre d'exigences de notre
époque qu'on appelle le GATT, qu'on appelle l'entente
canado-amé-ricaine de libre-échange, qui vont faire en sorte que,
oui, ces liens économiques de l'espace actuel vont être maintenus.
Mais de là à reconnaître constitutionnellement - parce que
c'est de ça dont nous parlons ce matin - des pouvoirs économiques
au gouvernement fédéral absolument exorbitants qui, en pratique,
permettraient - auraient permis, s'ils avaient existé dans le
passé - d'empêcher une bonne partie de ce qui a fait
l'originalité des politiques économiques et financières du
Québec depuis des années... pas sous un gouvernement, le
nôtre, sous tous les gouvernements, depuis celui de M. Lesage, et quel
carcan ça représenterait pour l'avenir!
Et on répond souvent à Ottawa: Nous allons être
raisonnables dans l'application de ces pouvoirs. Bien oui, on est raisonnables
une journée et on ne l'est pas la journée suivante. Et, d'autre
part, il n'y a pas de droit sur l'éternité en politique, les gens
changent. On nous répond aussi: Ces pouvoirs pourraient être
aménagés, arrangés.
Mais je reviens à ce que disait le premier ministre en parlant
des propositions fédérales encore hier: Les principes sont
acceptables, c'est la formulation qui est inacceptable. Les pouvoirs que le
fédéral veut se donner, ces pouvoirs-là sont, dans leur
principe même, inacceptables pour nous. Il y a une foule de choses qu'on
n'aurait jamais pu faire si ces pouvoirs-là avaient existé.
Ça va de la déréglementation des Institutions
financières à Mon taux, mon toit, Corvée-habitation ou
à toute une série de politiques d'aide aux entreprises; ça
en couvre très large. C'est dans ce sens que je demande encore au
premier ministre: Vous comprenez ces choses aussi bien que moi; vous comprenez
quel effet ces pouvoirs auraient sur les offices de commercialisation des
produits agricoles au Québec, sur le lait en particulier, vous le savez
très bien. Pourquoi ne dites-vous pas non?
Le Président (M. Dauphin): C'est terminé.
M. Parizeau: Pourquoi ne dites-vous pas au fédéral:
II n'est pas question de manger de ce pain-là?
Le Président (M. Dauphin): C'est terminé, M. le
chef de l'Opposition. En réponse, M. le premier ministre, toujours pour
cinq minutes.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, je vais être
très bref parce qu'on est d'accord, finalement, sur l'union
économique. On comprend que le fédéral puisse vouloir
favoriser une union économique plus forte, mais on n'est pas d'accord
avec les moyens, notamment l'utilisation de la Constitution pour arriver
à cette fin-là. Donc, on est d'accord. Revenons aux autres choix.
Ça ne donne rien de prolonger le débat quand on est d'accord.
Mais on peut parler de l'union économique, parce que le chef de
l'Opposition, curieusement, propose une monnaie, mais deux
citoyennetés.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: Alors là, M. le Président, il faut
examiner cela. Il faut voir comment on peut avoir une union économique
qui puisse fonctionner, qui puisse être crédible. Comment on peut
avoir une union économique par traité? Et ça, c'est une
différence fondamentale. J'admets que le chef de l'Opposition et
moi-même, on travaille dans l'intérêt du Québec, on
est de vieux complices dans la défense des intérêts du
Québec, mais on n'a pas les mêmes méthodes de calcul. On
n'a pas les mêmes méthodes de calcul.
Et je dis au chef de l'Opposition que s'il veut, "les yeux dans les yeux
des Québécois", pour prendre une expression, les assurer de la
viabilité de l'union économique, il ne peut pas,
honnêtement, sur le plan intellectuel, dénier qu'il faut, pour
appuyer cela, une structure politique. Et je pourrais citer plusieurs
personnalités qu'il respecte, je pourrais citer le chancelier de
l'Allemagne qui, encore ces récentes semaines - et ça va se
discuter dans quelques jours à la conférence de Maëstricht,
qui va parler de l'union monétaire et des liens avec l'union politique
et qui a pour objectif de faire le lien avec l'établissement d'une
monnaie commune, avec l'union politique... Le chancelier lui-même le
disait clairement: Si nous voulons avoir plus de pouvoirs communs, il nous faut
accroître les pouvoirs du Parlement qui est déjà élu
au suffrage universel. (11 h 30)
Et ça, ce n'est pas une question d'État nation, ce n'est
pas une question de patriotisme, nous sommes d'accord, c'est une question
simplement d'efficacité de la gestion. Si nous voulons garder... Comment
voulez-vous... D'ailleurs, c'est le rapport CD. Howe qui... Le chef de
l'Opposition a cité imprudemment le rapport CD. Howe, parce que dans le
même rapport, on mentionne que cette union monétaire commune
à deux pays souverains risquerait de ne pas être crédible,
risquerait de laisser prévoir une monnaie différente, avec une
fuite de capitaux. Le chef de l'Opposition a été ministre des
Finances, il sait que le Québec doit emprunter 10 000 000 000 $ à
12 000 000 000 $ par année, incluant HydroQuébec. Il sait, s'il y
a un climat d'incertitude et d'Instabilité, les taux
d'intérêt qu'il faut payer, la prime. Il sait aussi, comme
ex-ministre des Finances, que le revenu par tête des Canadiens est
inférieur à la moyenne canadienne, donc, automatiquement, il y a
des transferts fiscaux qui sont faits au Québec. Il sait tout cela,
i'ex-ministre des Finances. Qu'est-ce qu'il attend pour se convertir? Il s'est
déjà converti à la monnaie commune; il était pour
la monnaie québécoise. Qu'est-ce qu'il attend pour se convertir
à l'union politique de manière à réaliser l'union
sacrée?
Des voix: Bravo!
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Il nous reste donc un dernier bloc de cinq minutes entre le chef de
l'Opposition et le premier ministre, avant de procéder aux remarques
finales. Donc, M. le chef de l'Opposition, pour cinq minutes.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: Alors, M. le Président, juste une chose en
passant, pour déplorer un peu que le premier ministre ne soit pas
davantage-enfin, mieux renseigné. Je ne demande pas, comme il le dit, la
double nationalité, dans l'hypothèse où le Québec
devient pays souverain. C'est dans la loi canadienne.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parizeau: Si je peux citer au premier ministre cette petite
brochure du Secrétariat d'État du Canada: "Contrairement à
la Loi sur la citoyenneté en vigueur au Canada jusqu'en 1977, la loi
actuelle permet l'acquisition d'une nationalité étrangère
par un citoyen canadien sans perte automatique de la citoyenneté
canadienne.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parizeau: ...rien, moi. Qu'il se renseigne, le premier
ministre!
Des voix: Bravo!
M. Parizeau: Je suggère que s'il a des questions à
poser, il les pose à M. Mulroney, pas à moi.
Une voix: II ne le sait pas. M. Parizeau: Cela
étant dit... Une voix: ...bien renseigné.
M. Parizeau: Cela étant dit, le premier ministre veut
encore discuter de souveraineté, puis je le remercie pour
l'intérêt qu'il porte à cette question. Seulement, je pense
qu'il ne saisit toujours pas - et puis j'aimerais ça pouvoir discuter,
à l'occasion d'un autre débat, de ça, de façon
beaucoup plus approfondie, avec lui - il ne saisit toujours pas que ces
rapports entre une monnaie commune, une union économique et une
structure politique pour tout ça, que les rapports entre ces trois
éléments ne sont pas automatiques et, dans certains cas, ne sont
même pas souhaitables et, dans d'autres cas, sont franchement
impossibles.
Je vais lui en donner des exemples. L'Irlande devient
indépendante en 1922, et ces gens-là se sont tirés dessus
avec les Anglais pendant 100 ans, sinon davantage. L'atmosphère est
empoisonnée. Qu'est-ce que fait l'Irlande pour sa monnaie? Elle adopte
la livre sterling anglaise. Les Anglais sont furieux, mais ils ne peuvent rien
y faire, et ça va fonctionner comme ça pendant 20 ans. J'aurais
voulu voir, moi, le premier ministre du Québec, à cette
époque, si lui et moi étions nés, aller se promener
là-bas en leur disant: Vous savez, vous voulez avoir la même
monnaie que la Grande-Bretagne, mais il vous faut une structure politique
commune. Et ils cherchaient à s'en sortir justement.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parizeau: Les liens commerciaux, la libre circulation des
produits, des services. On vient de passer à l'entente de
libre-échange avec les États-Unis...
Une voix: Le Canada.
M. Parizeau: ...le Canada et les États-Unis. Est-ce que le
Canada a décidé de transporter Ottawa à Washington,
d'abolir le Parlement à Ottawa, puis de le déplacer
là-bas? Ou alors, est-ce que le Canada vise une superstructure
par-dessus le Congrès puis la Chambre des communes? Mais non. Mais non,
ils ont établi une grande zone de libre-échange à travers
l'Amérique du Nord, enfin, à travers les deux pays, puis,
maintenant, possiblement l'Amérique du Nord, puis, peut-être un
jour, l'Amérique latine. Mais il n'y a toujours pas de projet pour
mettre un gouvernement par-dessus ça.
Où est-ce que le premier ministre va chercher ces principes que,
d'ailleurs, soit dit en passant, il est le premier à violer, comme je
l'indiquais tout à l'heure, quand, le prenant aux mots, le gouvernement
fédéral lui dit: Vous avez toujours dit, M. le premier ministre
du Québec, qu'une monnaie commune voulait dire une sorte de structure
fiscale et budgétaire commune? Je vous la propose. Et là, on volt
le premier ministre du Québec dévoiler ses vraies couleurs. Il
dit: Je n'en veux pas! Je répète: Où est-ce que le premier
ministre va chercher certaines de ses Idées?
Mais Je reviens, pour terminer ce bloc de cinq minutes, sur ma question
originale. Et je pense, là encore, que le premier ministre doit nous
donner une réponse. Ces pouvoirs économiques que le gouvernement
fédéral veut prendre, est-il pour ou contre? Est-ce qu'il trouve
ça inacceptable ou non? Et s'il ne veut pas se prononcer aujourd'hui,
quand est-ce qu'il va se prononcer? Ecoutez, on parle du pain et du beurre, on
parle d'emplois, on parie d'implications sur le revenu des gens. Quand est-ce
que le premier ministre du Québec va dire que ces pouvoirs
économiques que le fédéral veut se donner sont
inacceptables?
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition. En réponse, le premier ministre, cinq minutes maximum.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition est quelque peu inattentif.
Il me semble que j'ai été clair sur la position du gouvernement
comme quoi les changements constitutionnels n'étaient pas
nécessaires, qu'on pouvait agir avec plus d'efficacité par une
concertation intergouvemementale. Pourquoi me demande-t-il de
répéter ce que j'ai dit à deux ou trois reprises?
Un mot sur la citoyenneté, M. le Président. Il cite la loi
canadienne. Je vois le député de Lac-Saint-Jean qui est perplexe.
Mais comment ça se fait que son ami, Lucien Bouchard, n'est pas au
courant de la loi canadienne puisqu'il n'a pas voulu être d'accord avec
le chef de l'Oppo-
sltion sur la double citoyenneté? Qui connaît mieux la loi:
Lucien Bouchard ou le chef de l'Opposition?
Des voix:...
M. Bourassa: M. le Président, c'est que le chef de
l'Opposition...
Le Président (M. Dauphin): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bourassa: ...sur cette question-là, a
créé une confusion et, le moins qu'on puisse dire, c'est que
demander la destruction du fédéralisme et le maintien du Canada
pour les citoyens n'est pas un exemple de cohérence facile à
comprendre.
Dés voix: Bravo!
M. Bourassa: L'autre point du chef de l'Opposition, c'est: Mais
on a un libre-échange avec les États-Unis, pourquoi on n'aurait
pas une union politique? On m'a posé la question. Le chef de
l'Opposition était absent à ce moment-là. Ça
m'étonne qu'on ne lui ait pas donné la réponse. Il ne faut
pas confondre le libre-échange avec l'union monétaire. Le
libre-échange est la forme minimaliste de l'union économique;
l'union monétaire est la forme maximaliste. Il y a le
libre-échange, il y a l'union douanière, il y a le marché
commun, il y a l'union monétaire, et c'est pour ça que ça
mène à une union politique, surtout des économies
Intégrées. Des économies intégrées comme
celles du Canada anglais et du Québec.
On cite l'Irlande dans les années vingt, qui constituait 5 %, 7 %
de la population britannique, et dont le commerce international n'était
pas dominant dans son économie. Mais, là, on parle du
Québec, en 1991, 25 % de l'activité économique, qui
exporte 40 % de sa production. Alors, c'est pourquoi j'ai toujours soutenu - et
ce n'est pas d'hier, dans les années soixante j'avais déjà
commencé à émettre ce point de vue - que si on veut avoir
une intégration économique aussi poussée qu'une union
monétaire, pour éviter ce que j'appelle le déficit
démocratique, il faut accepter une union politique. Parce que dans un
cas, c'est un régime politique où la démocratie a le
dessus. Dans l'autre cas, ce sont les technocrates qui se trouvent à
remplacer les élus du peuple. Alors, simplement sur le plan de la
gestion économique, simplement sur le plan de la sécurité
financière et de la légitimité démocratique, il
faut faire le lien entre l'union monétaire et l'union politique.
Autrement, à sa base même et comme chef politique des
Québécois, je ne peux pas accepter qu'on assume de tels risques.
Accepter une monnaie contre le consentement du Canada, c'est, dès le
départ, créer un climat d'instabilité monétaire, et
le chef de l'Opposition sait comment tout cela est très volatile ou peut
devenir très volatile. À cet égard-là, créer
un climat d'instabilité monétaire peut entraîner des
coûts financiers considérables pour la population
québécoise.
Des voix: Bravo!
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
La période de débat étant terminée, nous
procédons donc maintenant à la période des remarques
finales et nous commençons par vous, M. le premier ministre, avec huit
minutes pour les remarques finales. Ensuite de ça, M. le chef de
l'Opposition pour dix minutes et une réplique au premier ministre pour
deux minutes, à la fin. Alors, M. le premier ministre, pour huit minutes
maximum.
Conclusions M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, ce qui pouvait
paraître assez long - deux heures de débat - finalement,
paraît très court. Nous n'avons pas abordé avec autant de
profondeur que nous l'aurions souhaité tous les aspects des propositions
constitutionnelles. Sûrement qu'à l'occasion des différents
débats, des périodes de questions et de toutes les autres
occasions qui se présentent, surtout les débats des commissions
parlementaires sur la loi 150 et la commission sur les coûts de la
souveraineté, sur les offres fédérales... Parce qu'il faut
quand même, encore une fols et je le répète, constater que
nous sommes à l'étape d'offres préliminaires et que,
déjà, ceux qui les ont faites, comme je l'ai dit, annoncent
qu'ils sont prêts à accepter des représentations.
Il y a une commission itinérante - vous allez dire que ce n'est
pas la meilleure journée pour le souligner - présidée par
M. Castonguay et Mme Dobbie, qui doit examiner les propositions
constitutionnelles. Alors, attendons. Je crois que nous sommes en novembre; la
commission doit rendre son rapport à la fin de février, alors ne
concluons pas trop vite. Il y a cette commission-là qui va entendre les
partenaires des différentes provinces et fera des recommandations. Le
gouvernement du Québec aura à assumer ses responsabilités
lorsque les offres finales seront faites. On a été très
clairs sur le fait que ce qui avait été offert au Québec
permettait de maintenir le dialogue, mais guère plus. Mais il y a des
principes qui sont quand même intéressants par rapport aux
demandes traditionnelles. Le chef de l'Opposition se référait aux
programmes conjoints comme un exemple de progrès, mais je ne me souviens
pas... Ça a été une période bénie dans les
relations fédérales-provinciales, mais quand il a
été ministre des Finances, je ne me souviens pas s'il a obtenu
plusieurs "opting out",
comme on utilise l'expression couramment, plusieurs retraits de
programmes fédéraux. S'il en a obtenu, j'aimerais bien qu'il les
souligne.
M. le Président, pour résumer un peu les grands objectifs
du gouvernement dans cette discussion constitutionnelle, il est important de
dire le plus clairement possible que nous n'accepterons jamais que soient mis
en péril les pouvoirs de l'Assemblée nationale sans son
consentement. Nous insistons aussi, comme nous l'avons toujours fait - et ceci
est une demande traditionnelle du Québec depuis des décennies -
pour que le Québec soit reconnu comme une société
distincte et que le gouvernement et l'Assemblée nationale puissent avoir
le mandat de protéger et de promouvoir cette société.
Nous insistons également sur un nouveau partage des pouvoirs.
Ceci va dans le sens de l'efficacité du système politique, et
ceci va dans le sens des intérêts, non seulement du Québec,
mais également du Canada. On a pratiqué durant des
décennies ce qu'on appelle le fédéralisme
compétitif, où deux gouvernements concurrençaient pour
servir les citoyens. On pouvait admettre la noblesse de l'objectif, mais on est
obligé de se rendre compte, à l'aube de l'an 2000, que les
gouvernements n'ont plus les moyens d'avoir ce fédéralisme
compétitif où deux gouvernements concurrencent pour faire face
aux besoins des citoyens. Alors, nous, ce que nous disons, c'est qu'il vous
faut un nouveau partage des pouvoirs, de manière à ce que le
fédéralisme canadien soit plus efficace, plus fonctionnel. (11 h
45)
Nous avons insisté et nous insisterons, notamment - je donne un
exemple - dans celui de la formation professionnelle et de la main-d'oeuvre. M.
le Président, actuellement dans ce dossier-là, alors que deux
gouvernements chevauchent l'un sur l'autre, alors qu'il y a des centaines de
milliers de chômeurs et un certain nombre d'emplois vacants, nous
assistons à une perversion du fonctionnement du
fédéralisme. C'est pourquoi nous en faisons une priorité:
arriver à un partage des pouvoirs qui puisse faire en sorte que la
formation de la main-d'oeuvre et la main-d'oeuvre puissent être
clairement dans l'esprit, dans la lettre, dans les faits, dans la loi et dans
la Constitution de juridiction québécoise. Ça, c'est un
exemple absolument important, incontournable pour le gouvernement du
Québec, et ceci peut se réaliser. Ceci peut se réaliser -
je l'ajoute pour l'information de nos amis d'en face - sans le
démantèlement du pays.
Nous souhaitons également le respect de l'intégrité
du territoire du Québec. Je rencontrerai cet après-midi des chefs
autochtones. Je suis disposé à discuter avec eux et je suis
très heureux de pouvoir les rencontrer. Je serai obligé de leur
dire, quand même, que le gouvernement du Québec et le peuple
québécois trouvent difficile à comprendre certains
événements récents, notamment qu'on ait contribué
à l'échec de l'accord du lac Meech - de bonne foi et avec de
bonnes raisons, mais le résultat est là - qu'également on
ait recouru aux armes l'été dernier pour faire valoir des
revendications territoriales, privant une centaine de milliers de citoyens de
pouvoir travailler normalement et, troisièmement, je leur soulignerai
que les Québécois n'apprécient guère les propos
diffamatoires qui se sont répandus sur le Québec, à
l'extérieur du Québec et du Canada, dans certains journaux. Nous
sommes prêts à les rencontrer. J'ai moi-même
été l'objet, de leur part, de propos assez durs puisqu'on se
souvient que l'été dernier, alors que je faisais tout avec des
risques personnels également pour éviter un bain de sang, je me
faisais traiter par les chefs autochtones de "dictateur sanguinaire".
J'ai tout oublié. Je suis prêt à discuter avec eux,
mais ils devront respecter l'intégrité du territoire
québécois. Voilà, M. le Président, les
paramètres pour l'évolution et le progrès du
Québec.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le premier ministre.
Je vais maintenant reconnaître M. le chef de l'Opposition officielle pour
ses remarques finales, à son tour, pour un temps maximum de 10 minutes.
M. le chef de l'Opposition.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, "l'histoire des
négociations constitutionnelles prouve qu'on n'obtient jamais rien de
plus que ce qui est sur la table au début des pourparlers". De qui est
cette citation? De M. Claude Castonguay. Il y a des années? Non, dans le
numéro de ce mois-ci de L'actualité. Ça promet. En
somme, le président de la commission qui doit réviser ces
propositions constitutionnelles avertit déjà le premier ministre
du Québec: il n'y en aura pas plus que ce qui est sur la table. Ce qui
est sur la table, on a vu depuis deux heures en quoi ça consiste: moins,
nettement moins que Meech; une société distincte ratatinée
et qui n'a à peu près pas de portée juridique; des reculs
dans bien d'autres domaines de ce qui constituait Meech; pas de droit de veto.
Par rapport au rapport Allaire, à la base constitutionnelle du Parti
libéral du Québec, signé par son chef, qu'est-ce qui est
suggéré? À peu près rien. Troisièmement, une
centralisation des pouvoirs économiques à Ottawa comme on ne l'a
pas vu depuis le début du Canada.
Le premier ministre ne nous a dit à peu près rien à
cet égard. Qu'est-ce qu'il pense de ça? Il dit: On peut continuer
les conversations. Eh bien, conversons, conversons. Mais, qu'est-ce qu'on fait?
On perd du temps. On dégage ce climat d'incertitude qui n'est pas
très bon, pour qui que ce soit, et en particulier pour ces hommes
d'affaires auxquels on se réfère telle-
ment souvent. Effectivement, ça fait baroque comme situation
présentée par le premier ministre. Il ne se dit pas contre ces
propositions fédérales. Il voudrait bien voir certaines choses
atténuées, un petit peu arrangées, mais il ne se dit pas
contre. Puis, d'un autre côté, il a toujours dans sa loi un
référendum sur la souveraineté prévu pour octobre
1992. Or, il vient de nous dire que, pour lui, une union monétaire,
ça implique une sorte d'union fiscale et une union politique. Bien, s'il
envisage même, actuellement, la possibilité d'un
référendum sur la souveraineté en octobre 1992, ça
veut dire qu'il accepterait un oui comme conclusion à un
référendum en octobre 1992. Mais il jugerait alors le
résultat incompatible avec le fait qu'on garde la même monnaie au
Canada. Est-ce qu'il est en train de demander une monnaie
québécoise, là, lui? Non, non, mais il faut quand
même être cohérent.
J'ai commencé, moi, cette interpellation de ce matin en me disant
que je ne comprenais pas très bien où allait le premier ministre
sur les offres fédérales, mais je commence à me poser des
questions, à savoir où est-ce qu'il s'en va sur pas mal d'autres
choses, y compris sur l'année qui vient, là!
En fait, je voudrais conclure certaines choses sur ces offres
fédérales, puisque c'est de ça qu'on parle ce matin. Vous
aurez noté, M. le Président, que ces propositions
fédérales sont, au fond, essentiellement destinées
à nous empêcher, nous, de bouger. On est en train de nous
fossiliser, avec ce genre de choses là. Sur le plan culturel, on sait
bien à quel point II nous faudrait disposer de nos propres instruments
d'épanouissement culturel, au Québec; on le sait depuis
longtemps. Eh bien, comme éteignoir, ces propositions, c'est quelque
chose! Ne demandons pas à la ministre des Affaires culturelles actuelle
ou au ministre des Communications de rêver du jour où, enfin, tous
les instruments culturels et de communication seraient dirigés dans le
meilleur intérêt des Québécois. C'est: Non, vous ne
l'aurez pas. Vous serez contrôlés d'ailleurs. Toutes les grandes
institutions culturelles, on nous avertit que ça échappera
à notre contrôle: Amusez-vous avec ce qui restera.
Sur le plan des compétences que le Québec veut avoir, sur
le plan du développement régional, M. le Président, il
faut qu'on puisse bouger. Sur le plan de la recherche et du
développement, il faut qu'on puisse bouger; sur le plan de la formation
de la main-d'oeuvre, il faut qu'on puisse bouger. Ces propositions consistent,
à toutes fins pratiques, à établir une sorte de statu quo.
On est paralysés, puis on va rester paralysés, avec des
propositions pareilles.
Sur le plan économique, c'est tellement tordu, cette proposition.
Le gouvernement fédéral légifère,, ça doit
être voté par le Sénat, ensuite à 7-50 par la
Fédération et, pendant tout ce temps, on peut - puisque c'est
constitution- nalisé - attaquer toutes ces politiques économiques
devant les tribunaux. Ça va être une machine qui va nous
empêcher de bouger complètement. Je ne sais pas exactement si elle
produira quelque chose. Ah, mais pour nous empêcher de bouger, ça,
ça va être efficace, par exemple!
Il faut, M. le Président, que le premier ministre dise non. Il
faut que le premier ministre aille aussi loin que son ministre des Affaires
intergouvernementales qui, tout à coup, pendant quelques minutes, devant
les journalistes, a eu comme une sorte d'éclair en disant: Mais ces
propositions sont inacceptables! Depuis ce temps, depuis deux jours, on fait de
l'exégèse de ce qu'il a vraiment dit. Mais il y a eu un moment de
grâce chez le ministre des Affaires intergouvernementales, il a
compris!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parizeau: II faut que, pour ces propositions
fédérales, on dise: Non, ça ne va pas. Il faut qu'on
puisse dire une bonne fois: C'est la fin des dernières chances du
fédéralisme. C'est la quatorzième, ou la quinzième
ou la seizième dernière chance. Il faut dire non. Et il faut dire
non pas pour dire: Et maintenant ouvrez une dix-septième dernière
chance du fédéralisme, mais pour dire: Ça suffit!
Ça ne nous convient plus.
Ce dont le Québec a besoin, à l'heure actuelle, c'est
d'être capable de bouger. Ce dont le Québec a besoin, à
l'heure actuelle, c'est de se sortir de ces interminables conflits qui
stérilisent et neutralisent tout ce qu'on cherche à faire. Ce
dont le Québec a besoin, à l'heure actuelle, c'est de gens qui
envisagent l'avenir avec optimisme parce qu'ils savent qu'ils seront
responsables de ce qui va leur arriver.
Vous êtes, M. le Président, devant une
société qui a tous les moyens de bouger, sait qu'elle peut
bouger, se fait répéter par tout le monde qu'elle a ce qu'il faut
pour bouger, mais se fait répéter aussi, par tout le monde: Mais
qu'est-ce que vous attendez? Ce qu'elle attend, cette société,
elle attend essentiellement qu'un gouvernement, un premier ministre,
ceux-là, maintenant, puisqu'ils sont au pouvoir, disent: Non, c'est
vrai, ça ne peut plus continuer comme ça. On ne peut pas
accepter, même amendées ou corrigées un peu, ces
propositions fédérales. Elles sont viciées à leur
base même, on ne peut pas accepter ça. Donc, dans ces conditions,
l'hypothèse qu'on avait soulevée dans la loi 150, en fait,
c'était presque une promesse, c'est-à-dire un
référendum pour octobre 1992. Je pense que le gouvernement du
Québec, à l'heure actuelle, doit dire: La loi prévoyait un
référendum sur la souveraineté entre juin et octobre,
disons non à ces propositions fédérales. Disons non
à un gouvernement à Ottawa qui, manifestement, ne comprend plus
rien de ce que nous voulons être, et préparons un
référendum sur la souveraineté
du Québec aussi rapidement que le prévoit la loi,
c'est-à-dire pour juin 1992. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le chef de
l'Opposition officielle. Toujours dans le cadre des remarques finales, il y a
un droit de réplique pour le premier ministre, d'une durée de
deux minutes. M. le premier ministre.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: J'aime toujours la concision, M. le
Président. Le chef de l'Opposition a cité M. Castonguay, je le
citerai. Au moment où je parlais d'union économique et d'union
politique, M. Parizeau - à ce moment-là, il n'était pas
chef de l'Opposition - disait: "L'idée du séparatisme n'est pas
forcément absurde dans l'ordre économique, mais les obstacles
seraient nombreux et redoutables". J'en arrive à l'essentiel. Au moment
où je parlais d'union politique et économique, à la fin
des années soixante, c'est à ce moment-là que...
Une voix: ...il change d'idée.
M. Bourassa: Oui. M. le Président, il est normal...
Le Président (M. Dauphin): M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...pour l'Opposition d'aller trop vite, trop loin.
Par rapport à l'histoire, il n'est pas bon d'être en retard, mais
il n'est pas bon d'être trop tôt.
Durant les années quatre-vingt, la fierté du Québec
a été blessée à deux reprises, en 1982 et en 1990.
Par ailleurs, à l'intérieur de la structure,
fédérale ou canadienne, au niveau de la paix, de la justice, de
la prospérité, le Canada et le Québec ont réussi
à obtenir l'un des meilleurs niveaux au monde. Comment concilier
l'honneur et le bien-être du peuple? C'est un combat, un combat
très dur, comme tous les vrais combats, mais nous sommes prêts
à l'assumer.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le premier
ministre. Je tiens à féliciter et à remercier autant le
chef de l'Opposition que le premier ministre et les deux députés
indépendants qui ont pris la parole pour le respect de l'entente et du
temps qui nous était alloué.
En terminant, j'aimerais vous dire que la commission des institutions a
accompli son mandat et ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 3)