Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Neuf heures trente-huit minutes)
Le Président (M. Dauphin): Mesdames, messieurs, le quorum
étant constaté, je déclare donc ouverte la séance
de la commission des institutions, qui a pour mandat de tenir des auditions
publiques dans le cadre de l'examen du mandat, des orientations, des
activités et de la gestion du Protecteur du citoyen. Mme la
secrétaire, est-ce qu'il y a des changements ou des remplacements,
plutôt?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a un seul
remplacement: M. LeSage (Hull) est remplacé par M. Maltais
(Saguenay).
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Alors, je donne
lecture de l'ordre du jour pour fins d'adoption. Nous allons commencer nos
travaux avec l'Association des hôpitaux du Québec; ensuite, nous
poursuivrons avec l'Association des centres d'accueil du Québec et
l'Office des personnes handicapées du Québec. Cet
après-midi, nous aurons le centre hospitalier Douglas, la Commission des
droits de la personne du Québec, pour poursuivre avec le Conseil des
Atikamekw et des Montagnais; et enfin, pour terminer, le Comité de
bénéficiaires de l'hôpital Louis-il.-Lafontaine. Est-ce que
l'ordre du jour est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'aimerais
souhaiter la bienvenue à l'Association des hôpitaux du
Québec et je reconnais son président, M. Henri Favre. Je vous
demanderais, M. le président, de nous présenter les personnes qui
vous accompagnent et ensuite de procéder à votre exposé
qui sera d'une durée d'environ 15 minutes. Bienvenue.
Association des hôpitaux du
Québec
M. Favre (Henri): Merci, M. le Président, Mmes et MM. les
commissaires. Les personnes qui m'accompagnent: le Dr Krystyna Pecko, qui est
à ma droite; M. Jean-Yves Simard, directeur général de
l'hôpital Sainte-Anne-de-Beaupré, et Mme Huguette Blouin,
conseillère à l'Association des hôpitaux. Je vais
présenter le texte et mes collaborateurs se chargeront de
répondre à vos questions, étant vraiment des
spécialistes dans le domaine.
C'est avec intérêt que nous avons pris connaissance des
objets de la consultation initiée par la commission des institutions sur
le rôle du
Protecteur du citoyen, pius précisément sur son mandat,
ses orientations, ses activités et sa gestion. Le mandat du Protecteur
du citoyen portant sur le traitement des plaintes et, plus globalement, sur la
défense des intérêts des citoyens face à un
ministère ou organisme gouvernemental rencontre des similitudes
certaines avec des fonctions qui sont assumées à
différents niveaux dans le réseau de la santé et des
services sociaux, afin de garantir la protection des droits de nos
clientèles.
Dans le cadre de la présente consultation, l'Association des
hôpitaux du Québec n'entend pas se prononcer sur l'ensemble des
objets de la consultation proposée par la commission des institutions,
mais donne sa position relativement à l'extension de la juridiction du
Protecteur du citoyen au réseau de la santé et des services
sociaux. Notre position s'appuie d'abord sur un examen des procédures et
mécanismes en place dans nos établissements et dans notre
réseau pour assurer la protection des droits des
bénéficiaires et sur l'observation de contraintes ou limites
à l'application de ces procédures. Cet exercice de
réflexion et d'analyse était d'autant plus pertinent que le
réseau de la santé et des services sociaux s'apprête
à vivre une réforme qui nous invite à remettre en question
pratiquement l'ensemble de notre fonctionnement.
Je me permets ici un aparté par rapport au texte initial de notre
mémoire. Nous avons réglé cette question, M. le
Président, tout à l'heure. Notre mémoire modifié
tient compte du projet de loi 120 qui vient d'être déposé
et nous allons parler peut-être d'usagers ou de
bénéficiaires, dépendant de... Pendant des années,
nous avons eu des bénéficiaires; dorénavant, nous aurons
des usagers. La conversion n'est pas facile à faire, mais, pour nous, ce
sont les mêmes personnes qui doivent être protégées
de la même façon.
La protection des droits des personnes et le traitement des plaintes en
milieu hospitalier. Ainsi, la législation actuelle sur les services de
santé et les services sociaux précise des droits de base pour
tous les citoyens qui ont recours à ces services. Nos
établissements ont développé une tradition de traitement
des plaintes, mais plus encore de protection des droits et ce, à partir
de dispositions légales et de mécanismes internes mis en place
localement dans chaque centre hospitalier. Un mécanisme de protection
des droits qui figure dans la Loi sur les services de santé et les
services sociaux prévoit l'obligation, pour le centre hospitalier de
soins de longue durée, le centre d'accueil ou l'établissement qui
offre de tels services, de mettre en place un comité de
bénéficiaires et de prévoir
des normes de financement pour le fonctionnement de ce
comité.
Globalement, les fonctions de ce comité de
bénéficiaires sont de défendre les intérêts
collectifs des bénéficiaires ou, à la demande d'un de ces
derniers, de défendre ses intérêts propres auprès de
l'établissement ou de toute autorité compétente. Ce
comité peut assister un bénéficiaire qui désire
porter plainte. Il peut aussi conseiller le conseil d'administration sur toute
question relative aux activités de loisir ou aux conditions de
séjour des bénéficiaires. Incidemment, un ou deux des
membres de ce comité siègent au conseil d'administration des
centres hospitaliers. Le comité de bénéficiaires est
maintenu dans le projet de loi 120 sous le nom de comité d'usagers.
Pour le traitement des plaintes en tant que telles, la Loi sur les
services de santé et les services sociaux donne au conseil
régional la fonction de recevoir et d'entendre les plaintes des
personnes auxquelles un établissement de la région n'aurait pas
fourni les services que la loi donne droit de recevoir. En vertu de ces
dispositions de la loi, le conseil régional fait à
l'établissement concerné et au ministre les recommandations qu'il
juge appropriées à ce sujet. Le conseil des médecins, des
dentistes et des pharmaciens, qui existe dans tous les centres hospitaliers, en
vertu de la même loi, la loi actuelle, détient l'obligation, par
règlement, de former un comité de discipline sur réception
d'une plainte concernant l'acte médical, plainte en provenance de
l'organisation ou d'un bénéficiaire.
Les corporations professionnelles, celle des médecins, par
exemple, disposent aussi de leurs propres mécanismes d'évaluation
des plaintes. Finalement, le recours aux procédures judiciaires reste
toujours à la disposition des personnes qui se sentent
lésées dans leurs droits ou par rapport à la
qualité des services qu'elles ont reçus.
Il y a d'autres mécanismes internes. Au-delà des
obligations d'ordre légal et réglementaire, la protection des
droits des personnes, incluant le traitement des plaintes, a toujours eu sa
place dans le milieu hospitalier. En tenant compte de leur mission principale -
soins de courte durée, de longue durée ou psychiatrique - et de
leur volume d'activité, donc de leur taille, les centres hospitaliers
ont développé différents modèles pour s'acquitter
de cette responsabilité.
Dans plusieurs centres hospitaliers, une personne bien
identifiée, relevant de la direction générale ou
directement du conseil d'administration, est affectée de façon
exclusive au traitement des plaintes. Dans d'autres organisations, cette
responsabilité revient au directeur des services professionnels ou au
directeur général. Actuellement, une quinzaine de centres
hospitaliers ont créé ou auraient créé un poste de
type ombudsman portant, dans les faits, différentes appellations comme
porte-parole des malades ou représentant des usagers. Les fonctions
relatives à ce poste concernent évidemment le traitement des
plaintes. Son titulaire est également vu comme un agent de changement et
devrait jouer un rôle prépondérant lors de
l'élaboration des politiques et procédures internes pour veiller,
à titre préventif, à la protection des
intérêts et droits des bénéficiaires.
On pourrait énumérer plusieurs autres moyens connexes,
certains étant facultatifs, à la portée des centres
hospitaliers, pour appuyer les mesures directes de protection. C'est le cas de
l'accréditation des centres hospitaliers par le Conseil canadien
d'agrément des établissements de santé, des normes
d'appréciation de la qualité, de la gestion des risques, pour ne
citer que quelques-uns d'entre eux. Aussi, de plus en plus se
développent en milieu hospitalier des mesures d'évaluation
continue de la satisfaction de la clientèle.
Les limites des moyens qui existent actuellement. L'ensemble des moyens
et mécanismes décrits, si étendu soit-il, se heurte
à des limites dans son application. La limite la plus importante vient
des caractéristiques mêmes d'une partie de la clientèle,
faisant ainsi référence à la clientèle
hébergée à long terme, celle qui a le plus besoin de
protection et de l'assurance d'une saine qualité de vie. Les personnes
âgées, les malades chroniques, les malades psychiatriques et les
personnes atteintes de déficience intellectuelle sont souvent parmi les
plus démunies, incapables d'avoir recours aux mesures mises en place
à leur intention.
Tous les espoirs sont cependant permis de repousser cette limite,
notamment à cause des nouvelles dispositions de la Loi sur le Curateur
public, une loi centrée sur la personne et qui exige fondamentalement le
respect de ses droits et de sa protection. Les récentes politiques
ministérielles sur la santé mentale et sur la déficience
intellectuelle et, on le verra, le projet de loi 120 mettent un accent
sérieux sur les mesures d'aide et d'accompagnement.
Protéger les droits des bénéficiaires en milieu
hospitalier, c'est d'emblée devoir composer avec une multitude de lois,
principalement dans le cas des bénéficiaires
hébergés. Somme toute, peu de personnes dans nos milieux peuvent
se retrouver dans les dédales juridiques et administratifs lors d'une
situation complexe, mais pas nécessairement exceptionnelle.
Des limites sont aussi observées, en regard des conseils
régionaux et de leur obligation légale de recevoir et de donner
suite aux plaintes formulées par les usagers des services. Il
s'avère qu'ils s'acquittent de cette obligation avec une attention
variable d'une région à l'autre. De plus, à cause de leur
mandat d'organisation des services et de leurs pouvoirs de recommandation pour
certaines décisions d'ordre budgétaire, ils se retrouvent trop
souvent coincés
dans une position de juge et partie. N'oublions pas que leurs fonctions
sur le traitement des plaintes se limitent aux services non rendus et ne
touchent pas la qualité des services rendus.
Pour conclure sur les limites, mentionnons que dans certaines
situations, en dépit des mécanismes existants, les
bénéficiaires n'obtiennent pas un suivi adéquat de leurs
plaintes, même dans les cas où celles-ci ont entraîné
un correctif qu'ils trouveraient probablement satisfaisant. Il s'agit
principalement du cas des plaintes afférentes à l'acte
médical, où, souvent, le bénéficiaire n'est pas
informé du suivi, mais uniquement du fait que sa plainte a
été traitée. L'insatisfaction qui en découle
contribue probablement à une judiciarisation de plaintes et, dans
certains cas, aurait pu être évitée.
Les principes. Avant de présenter les dispositions du projet de
loi 120 qui, selon nous, contribuent à assouplir les limites que nous
venons de relever, nous énonçons quelques principes devant guider
les changements à venir dans les approches de protection des droits:
l'imputabilité, la transparence, l'efficacité. Ces termes sont,
disons, utilisés couramment et je n'ai pas besoin de les voir avec
vous.
Nous passons directement au projet de loi 120. Le projet de loi, donc,
et plus globalement toute la réforme annoncée par le ministre
Côté sont centrés sur le citoyen, et nous souscrivons
totalement à cette orientation. La procédure d'examen des
plaintes, articles 28 à 50, est beaucoup plus précise et
détaillée qu'elle ne l'est dans la loi actuelle. Comme nous le
souhaitions, le projet de loi pose de façon explicite l'obligation pour
un établissement de se doter d'une procédure d'examen des
plaintes et d'en confier la responsabilité à un cadre
supérieur. Le projet de loi précise aussi que l'usager sera
informé de l'existence de cette procédure et, dans le cas du
dépôt d'une plainte, il devra obtenir une réponse dans des
délais prescrits. L'usager sera de plus informé de ses
possibilités de recours au niveau de la régie régionale,
laquelle est aussi soumise à différentes dispositions
légales quant à sa procédure d'examen des plaintes.
La principale réserve exprimée par l'AHQ sur ces
dispositions relatives aux plaintes concerne l'article 36 obligeant
l'établissement à transmettre aux corporations professionnelles
concernées toute plainte portant sur un acte professionnel. Nous
considérons que l'établissement devrait effectivement acheminer
aux corporations concernées une telle plainte lorsque, après son
examen, il y a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction en regard du
Code des professions a été commise. S'ajoutent aussi certaines
dispositions relatives aux droits des usagers, comme l'obligation pour tout
établissement de se doter et de remettre aux usagers
hébergés un code d'éthique qui indique les droits des
usagers ainsi que les pratiques et conduites attendues des employés. Le
nouvel article 11, pour sa part, introduit formellement le droit pour l'usager
d'être accompagné et assisté de la personne de son choix
lorsqu'il désire avoir de l'information ou entreprendre une
démarche relative à un service dispensé. Enfin, la
régie régionale se voit dans l'obligation d'informer la
population de son territoire des services qui lui sont offerts de même
que des droits et obligations à cet égard.
Au sujet des obligations, je saisis l'occasion pour souligner que
l'Association des hôpitaux du Québec croit que la prochaine loi
devrait formuler les principales obligations qui reviennent aux usagers en
contrepartie des droits qui leur sont reconnus. On ne peut n'avoir que des
droits, les droits s'accompagnent en général d'obligations, et il
faut en parier dans la nouvelle loi.
Les obligations de l'usager se réfèrent à
l'utilisation judicieuse des services, compte tenu des services et ressources
disponibles en fonction de ses besoins et dans le respect des droits des autres
usagers. Aussi, l'usager doit-il, si possible, collaborer avec les
professionnels qui dispensent les services et, s'il y consent, participer aux
soins et services qu'il reçoit.
Ainsi, hormis le comité des usagers, toutes les dispositions que
je viens d'énoncer sont nouvelles. Ce sont donc des ajouts par rapport
à la loi actuelle en faveur des droits des usagers. Elles devraient
contribuer de façon significative à réduire les lacunes
que nous identifions dans notre système actuel à cet
égard.
Pour une implication efficace du Protecteur du citoyen, pour revenir
à l'objet même de cette audition, il faut dire que la
crédibilité du Protecteur du citoyen est hautement reconnue de
même que l'efficacité de ses moyens d'intervention. Mais il ne
nous semble pas réaliste ni opportun d'étendre sa juridiction au
traitement de l'ensemble des plaintes provenant de la clientèle du
réseau de la santé et des services sociaux. Il suffit
d'évoquer quelques paramètres, comme le volume d'activité
de notre réseau, la variété et la complexité des
clientèles et des situations, la diversité de l'organisation
régionale et locale des services pour comprendre qu'une telle extension
de mandat impliquerait un développement considérable de la
structure du Protecteur du citoyen et irait à rencontre des principes
précédemment évoqués.
À la suite de la réflexion et des consultations
menées auprès de l'ensemble de nos membres sur le projet de loi
120, l'Association des hôpitaux du Québec réitère sa
conviction qu'il serait opportun que notre système d'examen des plaintes
dispose d'un troisième niveau qui soit neutre. De ce fait, l'extension
de la juridiction du Protecteur du citoyen au réseau de la santé
et des services sociaux peut constituer ce troisième niveau en autant
qu'il agisse essentiellement comme une instance complémentaire dont
l'intervention directe serait de nature exception-
Plus précisément, un usager des services du réseau
de la santé et des services sociaux pourrait s'adresser directement au
Protecteur du citoyen, mais l'intervention de ce dernier devrait surtout viser
à s'assurer que les mécanismes prévus par la loi, les
règlements et les autres moyens relevant de l'organisation interne sont
bel et bien accessibles pour répondre à l'insatisfaction du
bénéficiaire. S'il s'avérait que ce n'est pas le cas, le
Protecteur du citoyen pourrait agir directement et même, à la
limite, user de son pouvoir d'enquête.
Il importe de préciser que l'intervention du Protecteur du
citoyen portera alors sur l'ensemble des plaintes incluant celles concernant
l'acte médical et tout autre acte professionnel. De ce fait, l'extension
de sa juridiction à un autre réseau devient conditionnelle
à ce que des modifications soient apportées à la Loi sur
les services de santé et les services sociaux et à ses
règlements, de façon à ce que le directeur
général du centre hospitalier ait le pouvoir de recevoir et de
traiter les plaintes de toute nature. Cette condition semble vouloir se
réaliser avec le projet de loi 120, toujours.
Le Protecteur du citoyen pourrait ainsi intervenir dans les cas
où un bénéficiaire, en besoin de protection de ses droits,
se retrouve dans une situation complexe, impliquant les dispositions de
plusieurs lois, comme la Loi sur le Curateur public, par exemple, faisant en
sorte que l'intervention d'une autorité comme le Protecteur du citoyen
est souhaitable et même nécessaire.
L'approche préconisée. Dans la suite des principes et des
propos avancés à la lumière des changements prévus
dans le projet de loi 120, la révision de notre système de
protection des droits et de traitement des plaintes impliquant maintenant le
Protecteur du citoyen se présenterait à trois niveaux. Le premier
niveau, c'est l'établissement. Nous en avons parlé. C'est un peu
ce qui existe aujourd'hui et ce qui est prévu dans la loi 120. Le
deuxième niveau, le conseil régional ou la régie telle que
décrite dans la loi 120. Le troisième niveau, ce serait celui du
Protecteur du citoyen. Finalement, le troisième niveau serait celui
d'une instance neutre, comme celle du Protecteur du citoyen, en fonction des
paramètres exposés précédemment. Son intervention
devrait viser à s'assurer que les recours de premier et de
deuxième niveau, dans l'établissement et au conseil
régional ou régie, sont bel et bien en place pour traiter
adéquatement la plainte du bénéficiaire. Aussi, le
Protecteur du citoyen pourrait intervenir dans des cas particulièrement
complexes où plusieurs lois sont en cause.
En conclusion, cette réflexion nous amène à
conclure que l'extension de la juridiction du Protecteur du citoyen à
notre réseau serait tout à fait pertinente, en autant qu'elle
s'inscrive en complément aux mécanismes éprouvés
qui sont déjà en place. Notre réflexion, qui se voulait
objective, nous a permis de mettre en lumière les forces et faiblesses
de nos moyens de protection des droits et de traitement des plaintes et, tout
en donnant notre appui à l'extension de la juridiction du Protecteur du
citoyen, nous énonçons des recommandations s'adressant à
notre réseau.
Le point central de notre réflexion porte sur la
nécessaire imputabilité des établissements comme niveau
principal d'intervention. Nous sommes profondément convaincus qu'il faut
miser d'abord sur la résolution des insatisfactions à leur
source. La réforme qui s'annonce pour le réseau, par le
dépôt récent du projet de loi sur les services de
santé et les services sociaux, nous donne l'occasion de
réitérer notre position et nos intentions pour une
amélioration des mesures et mécanismes de protection des droits
des bénéficiaires.
Voici, M. le Président, l'essentiel de notre exposé de ce
matin.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. Favre, pour
votre exposé qui est très clair. Je vais maintenant
reconnaître un premier membre de la commission, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier: Merci, M. le Président. Merci beaucoup, M.
Favre. À la lecture de votre document révisé, on n'a pas
tellement de petites modifications... Hier, on a eu plusieurs intervenants du
secteur psychiatrique, Robert-Giffard et aussi l'hôpital Sainte-Justine
en soirée. Vous souscrivez au projet de loi 120 et il a
été fait mention, principalement dans le secteur hospitalier
psychiatrique, que les plaintes formulées par écrit causaient
énormément de problèmes. Est-ce que vous souscrivez
à la même thèse?
M. Favre: Ça, c'est une question... Lorsqu'on écrit
des textes, et principalement dans une loi, il faut évidemment clarifier
un très grand nombre de points. C'est un peu le danger. Lorsque nous
parlons d'imputabilite au premier niveau, c'est-à-dire au niveau de
l'établissement, je pense qu'il est tout à fait clair que des
plaintes soient reçues, même si elles sont exprimées
autrement que par écrit. Lorsque, par contre, on entre dans des cas plus
sérieux, des cas qui méritent véritablement une
étude très approfondie où ce n'est pas une question de
plaintes à propos du bruit, à propos de la nourriture, donc, des
plaintes qui sont importantes, mais qui peuvent se régler sur place, ils
n'ont pas besoin d'aller en principe jusqu'au Protecteur du citoyen.
Lorsqu'on parie véritablement, disons, de plaintes plus
sérieuses, lorsqu'il s'agit de la qualité de la vie, surtout -
nous l'avons dit dans notre rapport - de bénéficiaires ou
d'usagers
hébergés qui doivent vivre dans les institutions,
là, la situation est plus complexe. Il ne faudrait pas que ce soit un
vice de forme. Disons qu'au début une plainte soit déposée
verbalement... Il faut, par contre, qu'elle soit mise par écrit
lorsqu'il y a vraiment enquête à faire. Je pense que, de ce
côté-là, nous sommes partagés. C'est évident
qu'une plainte doit être mise par écrit de façon à
ce que l'analyse puisse être faite d'une manière tout à
fait fouillée, et non pas tout simplement par rapport à une
présentation orale qui peut prendre toutes sortes de formes et souvent,
disons, est imprécise lorsqu'il s'agit de dates, de toutes sortes de
choses.
Donc, de ce côté-là, certainement qu'un formalisme
trop rigoureux pourrait nuire à certaines catégories d'usagers ou
de bénéficiaires. Et, lorsque nous parlons de
l'imputabilité au premier niveau, je pense que là on doit
accepter des plaintes verbales. M. le directeur général, vous
êtes vous-même confronté avec ces problèmes
régulièrement.
M. Simard (Jean-Yves): C'est ce que nous faisons au niveau de
l'établissement. C'est que dès qu'un usager nous signale quelque
chose, une insatisfaction ou une plainte, même si elle est verbale et
même si l'usager n'exige pas un traitement spécifique, nous la
traitons quand même. Et comme vient de le dire M. le président, il
est normal, si on va plus loin dans le traitement, si on utilise les
procédures prévues dans la loi ou dans un règlement, que
là, obligatoirement, la plainte soit écrite et, d'ailleurs, le
projet de loi 120 prévoit des mesures d'accompagnement pour les
bénéficiaires qui voudraient être assistés pour la
formulation et le cheminement de leurs plaintes. Je vous dirais même,
dans mon cas, pour un, que, si un bénéficiaire voulait faire
formuler sa plainte pour aller plus loin, rétablissement pourrait
même lui prêter son concours pour la formuler.
M. Messier: Merci. Hier aussi, on a eu la visite d'ombudsmans ou
d"'ombudspersons", comme il a été fait mention. Ces personnes se
retrouvaient un petit peu entre l'arbre et l'écorce. Certains relevaient
directement du directeur général, si on se réfère
à l'hôpital Sainte-Justine, et d'autres relevaient directement du
conseil d'administration. Dans le projet de loi 120, il est fait mention que
c'est un cadre supérieur du centre hospitalier qui doit gérer les
plaintes en question.
Cette personne qui doit recevoir les plaintes, d'après vous, se
retrouve-t-elle en conflit d'intérêts potentiel si c'est un acte
administratif, peut-être un petit peu moins qu'un acte médical?
J'ai vu quelque part que vous voulez extension-ner, au niveau des plaintes
aussi, l'acte médical, qui s'en va habituellement directement à
une corporation professionnelle. Est-ce que vous voulez aussi l'extension au
niveau du Protecteur du citoyen, en troisième étape, en ce qui
regarde les actes médicaux? Donc, deux questions: Le cadre
supérieur, qu'on retrouve dans le projet de loi 120, se retiouve-t-il en
conflit d'intérêts potentiel avec son administration? D'autre
part, s'il y a une plainte concernant un acte médical, est-ce que c'est
strictement l'Ordre ou le conseil des dentistes et médecins, ou peu
importe, qui doit résoudre le problème en question ou
l'exten-sionner jusqu'au Protecteur du citoyen?
M. Favre: Bon! Sur la première question, lorsqu'on parle
d'un cadre supérieur, évidemment, on peut imaginer qu'un cadre
supérieur qui dépend du directeur général peut se
trouver en réelle difficulté suivant la nature de la plainte.
Comme il est de l'interne, comme on dit en jargon d'hôpitaux, disons que
ceci pourrait créer certaines difficultés. C'est la raison pour
laquelle, si l'on veut, certains protecteurs du citoyen de type ombudsman, de
type interne, relèvent directement du conseil d'administration, un peu
comme le vérificateur, de façon à ce que, finalement, ce
soit le conseil d'administration qui, à l'intérieur de
l'hôpital, prenne en main toute cette situation de plaintes, de
manière à être informé, de manière à
dégager un peu l'administration de plaintes qui pourraient être
à son sujet. C'est toujours, évidemment, délicat de se
trouver dans cette situation-là. Voulez-vous élaborer sur ce
sujet-là?
M. Simard: M. le Président, en fonction du principe de
l'imputabilité que nous soutenons dans notre mémoire et que le
projet de loi 120 reprend également, il m'apparaît normal que le
directeur général, aussi bien que le conseil d'administration,
puisse se pencher sur les plaintes à un premier niveau en fonction de
leur rôle et de leur obligation que leur fait la loi concernant la
qualité des services qui sont dispensés dans leur
établissement.
Par ailleurs, le conflit d'intérêts que vous soulevez
m'apparaît disparaître dans la mesure - et c'est le sens de notre
mémoire - où on prévoit aussi dans le processus un
intervenant qui est neutre. Donc, il y a une espèce de balance,
d'équilibre, c'est-à-dire de pouvoir qui est sous-jacent à
tout le processus, c'est-à-dire que, d'une part, à l'interne, les
gens doivent traiter les plaintes parce que c'est leur rôle de
vérifier que les services qu'ils rendent sont de qualité. Si
quelqu'un s'en plaint, c'est encore leur rôle, et je dirais même
leur obligation, d'aller voir ce qui se passe. Par contre, si le traitement
n'était pas suffisant ou était, théoriquement, à
tout le moins biaisé, de là l'importance d'avoir un intervenant
neutre qui, lui, peut reprendre à tout moment le processus ou en
soulever certains aspects.
M. Messier: Merci. (10 heures)
M. Favre: Pour le deuxième aspect, M. le Président,
je demanderais au Dr Pecko d'élaborer sur ce sujet.
Mme Pecko-Drouin (Krystyna): Le deuxième aspect
étant, en fait, ce que vous avez mentionné au niveau du
traitement des plaintes concernant un acte professionnel. Je veux parler, entre
autres, de l'exemple d'un acte professionnel médical, d'un acte
médical tel quel. En ce moment, comme vous devez le savoir, lorsqu'il y
a une plainte concernant un médecin, d'emblée, si la plainte est
acheminée au CMDP, en fait, l'usager a l'impression de perdre la
plainte. Il n'a pas d'idée si la plainte est traitée ou si elle
n'est pas traitée et il a encore, évidemment, moins de
réponse, à savoir quel est le résultat du traitement de
cette plainte-là. C'est sûr qu'on voit, avec le projet de loi 120,
que, si les CMDP sont dorénavant rattachés au directeur
général et que le directeur général ou
l'établissement est impliqué aussi dans le traitement des
plaintes, peut-être qu'il y aurait une ouverture de ce
côté-là. D'un autre côté, lorsque la
plainte... Si elle doit être acheminée directement à une
corporation professionnelle, là encore, la plainte est perdue aux yeux
de l'usager tel quel. Ce qu'on voyait, c'est qu'il devrait y avoir,
malgré tout, une certaine transparence qui demeure. C'est sûr que
je ne m'attends pas nécessairement à ce que les corporations
professionnelles ouvrent entièrement leurs processus et leurs
résultats des traitements de plaintes lorsqu'il s'agit d'un
professionnel, mais, au moins lorsque la plainte est traitée localement
ou dans la région, que l'usager ait une réponse, à savoir
si la plainte a été traitée, où elle est rendue et,
peut-être en partie, en tout cas, une réponse sur le
résultat de la plainte, même si ça concerne un acte
professionnel. C'est un peu le sens de...
M. Messier: Vous demandez plus de transparence, mais pas
jusqu'à l'extension au niveau du Protecteur du citoyen de régler
la plainte, disons, une plainte d'ordre médical ou...
Mme Pecko-Drouin: Non. Je ne m'attendrais pas à ce que le
Protecteur du citoyen se prononce officiellement sur la qualité d'un
acte professionnel. Ce n'est pas dans ce sens-là.
M. Messier: C'est strictement sur les actes administratifs
ou...
Mme Pecko-Drouin: Exact. Oui. M. Messier: Merci.
Le Président (M. Dauphin): Juste avant de
reconnaître M. le député de Rouyn-Noranda, vous me
permettrez une petite question. Dans le système actuel, croyez-vous
qu'il y ait une bonne proportion d'usagers qui ne formulent pas de plaintes,
justement de peur de représailles, considérant que le responsable
des plaintes n'est pas nécessairement des plus indépendants face
à la direction, selon vous, avec l'expérience ou vos
contacts?
M. Favre: M. le Président, je ne suis pas, moi, un
professionnel de la santé. Je suis membre d'un conseil d'administration.
J'ai été président d'un conseil d'administration et c'est
un sujet qui est véritablement difficile à saisir, disons. C'est
évident que l'on nous dit que l'insatisfaction des
bénéficiaires actuels, des usagers ne se traduit pas toujours en
termes de plaintes. Premièrement, il y a une difficulté à
formuler des plaintes. Deuxièmement, c'est vrai qu'on entend parier de
difficultés, de représailles. On se dit: Si on formule des
plaintes, qu'est-ce qui va arriver? Tant que l'enfant ou tant que la personne
est à l'hôpital, les gens craignent, et on essaie, finalement,
disons, lorsqu'on évalue la satisfaction de la clientèle par des
questionnaires au moment où les personnes quittent, de leur demander et
même, dans certains cas, par rapport à la connaissance que l'on
peut avoir du dossier, de provoquer une discussion qui ne prend pas l'allure
d'une plainte, mais qui prend, pour nous, l'allure de l'évaluation de la
clientèle. Mais là, ce sont des plaintes... ce ne sont pas des
plaintes, je dirais, là, d'une gravité extraordinaire.
Si, par exemple, certains bénéficiaires se plaignent du
bruit la nuit, c'est un problème que nous devons régler. C'est un
problème technique et, disons, nous sommes au courant de ceci. Mais
c'est vrai qu'il y a une difficulté réelle à faire
formuler des plaintes. D'une part, à ce que la plainte soit
précise, disons, c'est toujours approximatif. Ça, ça peut
être relié également à la difficulté de
mettre tout ça par écrit. Donc, parfois, c'est plus facile de
dire: II s'est passé ci, il s'est passé ça, dans un
langage qui ne peut pas être très technique, mais il y a
réellement un problème de ce côté-là. Je dois
vous dire que le conseil d'administration dont je fais partie, à chaque
année, en recevant le rapport de satisfaction de la clientèle, se
penche particulièrement sur cet aspect du peu de plaintes en
général. Et ça ne veut pas dire que parce qu'il y a peu de
plaintes que tout va bien. Ça veut dire qu'il faut continuer de
travailler cette question tout à fait particulière. M. le
directeur général, dans votre hôpital, ça doit
être un peu la même chose.
M. Simard: C'est la même chose, mais nous recevons aussi...
Souvent, ça prend la forme d'un questionnement de la part des gens. Les
gens ne sont pas sûrs si le service dont ils sont plus ou moins
satisfaits, c'est normal qu'ils l'aient reçu ou que la prestation ait
été celle qu'ils ont reçue. Alors, ils vont faire d'abord
une première tentative verbale en essayant de rejoindre
quelqu'un de l'établissement ou, directement, le directeur
général pour vérifier, sous forme interrogative, si telle
prestation est normale ou non. Souvent, ils vont préciser qu'ils ne
veulent pas en faire une plainte, mais qu'on aimerait bien être
informés. Comme le dit M. Favre, à ce moment-là, pour
nous, ce doit être un indice qu'il faut absolument aller voir exactement
ce qui s'est passé et donner un suivi, une réponse aux gens.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Je vais
reconnaître maintenant M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord remercier l'Association des hôpitaux du Québec de cette
présentation. À ce moment-ci, il faut vous remercier d'une
présentation ajustée au projet de loi 120 qui a été
déposé, parce que, le ministre responsable de la
présentation du projet de loi 120 ayant refusé de donner des
auditions particulières, votre voix au chapitre, en particulier au sujet
des droits des usagers et des mécanismes de recours, a pu être
entendue ici, et c'est très important. Écoutez, on connaît
tous ce que vous représentez au Québec, dans l'ensemble du
Québec, et votre voix est très importante parce que vous
êtes, effectivement, sur la première ligne, si je peux m'exprimer
comme cela, du service aux personnes qui sont en situation de détresse
ou en difficulté de santé.
Votre présentation, ce matin, eu égard aux
mécanismes de recours des personnes qui sont au centre de vos
organisations, est extrêmement importante. Je dois noter, au
départ, que le député de Saint-Hyacinthe n'a pas entendu
la même prestation que celle que nous avons entendue ici. Le
député de Saint-Hyacinthe a débuté son intervention
tantôt en disant: Nous sommes heureux de constater que vous appuyez les
mécanismes du projet de loi 120. Là, c'est tout à fait le
contraire qui est dit dans votre texte et c'est tout à fait le contraire
de ce que nous avons entendu ici.
Là-dessus, il faut le préciser, parce que c'est majeur,
c'est l'Association des hôpitaux du Québec qui nous parle, vous
dites: Le mécanisme d'accompagnement - et je veux vérifier cette
position à savoir si, moi aussi, par ailleurs, j'ai le bon entendement -
c'est un renforcement qui est souhaitable et qui est jugé comme bienvenu
de la part de l'Association au niveau de l'accompagnement, mais ce
mécanisme n'est pas suffisant s'il n'est pas accompagné d'un
recours externe de troisième niveau. Il est bien précisé
de troisième niveau. C'est bien ça, la position qui est
exprimée par l'Association des hôpitaux?
M. Favre: C'est ça.
M. Trudel: Bon. Alors, je tenais à le rappeler, parce que,
si on s'en tient à ce que actuellement il est posé comme
mécanisme dans la loi 120, je pense que tout ce que vous nous avez fait
comme commentaires sur les possibles iniquités du système et le
fait qu'on traite toujours ça à l'interne par l'absence, en
troisième niveau, d'un mécanisme d'un recours externe, eh bien,
il n'y a aucune garantie dans ce projet de loi qui nous est présentement
présenté. Et, encore une fois, je le répète avant
de passer à une première question, quand c'est l'Association des
hôpitaux du Québec qui nous dit cela, il faut en prendre note de
façon majeure ici et dans d'autres commissions qui auront
éventuellement à étudier ce projet de loi.
Parlons maintenant de la procédure. Dans votre premier document -
et je ne vous en fais pas grief, vous l'avez ajusté sur la loi 120, je
vous l'ai dit tantôt en vous félicitant - vous nous
suggériez, et vous y faites allusion ici un peu également, la
procédure, le mécanisme de traitement des plaintes, en
suggérant que le Protecteur du citoyen ou l'institution, comme
mécanisme externe, soit appelé à valider le processus ou
la procédure de traitement des plaintes. Est-ce que vous en feriez un
objet formel d'inscription dans la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, c'est-à-dire l'obligation pour les
établissements de faire valider leur procédure par le Protecteur
du citoyen en ce qui concerne le mécanisme et le cheminement, la
procédure de traitement des plaintes aux premier et deuxième
niveaux, dans l'établissement et au niveau de la régie
régionale?
M. Favre: Me Simard.
M. Simard: Je vais essayer de retrouver ce que M. le
député nous souligne.
M. Favre: M. le Président, si je comprends bien ce que
vous nous demandez, la question que vous posez est: Est-ce qu'on ferait valider
les procédures par le Protecteur du citoyen avant, disons, toute
plainte, enfin, et que ceci serait inscrit dans la loi?
M. Trudel: Soyons plus précis. Le projet de loi
prévoit que chacun des établissements devra adopter une
procédure de traitement des plaintes. Je fais une allusion. Quelqu'un
nous disait hier, et même le Protecteur du citoyen nous disait avant les
fêtes, dans une réponse au ministre de la Santé et des
Services sociaux: On risque d'avoir 17 mécanismes, 17 façons
différentes au niveau du mécanisme de traitement des plaintes au
niveau régional, mais aussi au niveau des établissements. On
risque d'avoir autant de procédures qu'il y a d'établissements.
Est-ce que vous seriez d'accord que l'on mette dans la loi l'obligation des
établissements, non pas à l'occasion de chaque plainte, de faire
valider la
procédure de traitement des plaintes?
M. Favre: Écoutez, c'est très délicat parce
que, premièrement, une procédure, disons, à mon point de
vue, démontre son efficacité à l'usage. Il est
extrêmement difficile de dire sur papier: On a toutes les garanties. Ce
n'est pas certain que ça va fonctionner parce que les hôpitaux
sont très différents les uns des autres. Si vous prenez les
grands hôpitaux de 1000 lits et puis un hôpital tout aussi
efficace, mais, disons, dans une région plus petite, qui a une centaine
de lits, on ne peut pas traiter les plaintes de la même façon. Les
plaintes n'ont pas la même nature. Il faut une adaptation locale, une
adaptation à chaque établissement, et ça fait un peu
partie, disons, d'une part de la régionalisation qui s'annonce dans le
projet de loi et qui, je pense, est tout à fart nécessaire, et,
même dans la régionalisation, il y a des
sous-régionalisations, il y a des cultures. Chaque hôpital a une
sorte de culture. Et c'est ça qui fait qu'un hôpital rend des
services. Moi, je craindrais d'uniformiser. (10 h 15)
L'Association des hôpitaux a toujours prétendu qu'un
conseil d'administration doit gérer l'hôpital et que
l'imputabilité que l'on veut voir au niveau de l'établissement
est absolument essentielle. Si, par contre, il est prouvé, et que le
Protecteur du citoyen dit: Votre mécanisme n'est pas bon, alors
là, l'intervention du Protecteur du citoyen est efficace. Mais je ne
verrais pas véritablement, disons, d'un oeil favorable, une
homogénéisation où tous les hôpitaux de la province
devraient fonctionner selon le même modèle, le même
moule.
M. Trudel: Là-dessus, je peux vous dire que nous sommes
d'accord avec votre observation, pas d'uniformisation, pas de mur à mur,
pas d'homogénéisation de la procédure ou du processus dans
tous les hôpitaux, parce que, effectivement, une institution, un
établissement de Gaspé, un établissement de Rouyn-Noranda,
l'Hôtel-Dieu de Montréal, Notre-Dame, ce n'est pas la même
réalité et il faut que ce soit... Il y a cependant - je pense que
vous pourriez en convenir - des éléments fondamentaux dans tout
processus de traitement des plaintes pour en garantir un traitement
équitable qui doivent se retrouver.
Alors, ce que je suggérais dans ma question, ce n'est pas une
validation au niveau de l'uniformité des procédures, c'est une
validation pour s'assurer... parce que, vous le disiez tantôt,
l'institution du Protecteur du citoyen a une crédibilité reconnue
à un très haut niveau au Québec, une expertise en
matière de traitement de plaintes dans différents secteurs qui
pourrait probablement être très utile en termes d'aide. Je ne
parle pas de... Toujours en termes de recommandations, parce que gardons au
Protecteur du citoyen cette responsabilité et cette façon
d'exercer ses responsabilités sous forme de recommandations, la teneur
morale de la recommandation. Nous pourrions, je pense, appliquer
également le même raisonnement au niveau du traitement ou de la
procédure de traitement des plaintes dans les établissements, ou
nous pourrions tout simplement obliger à ce que le Protecteur du citoyen
ait un droit de regard sur la procédure, qui sera toujours sous la
responsabilité de l'établissement, compte tenu de ses
caractéristiques. Dans ces conditions, est-ce que, là, vous
seriez d'accord avec une telle recommandation?
M. Simard: M. le Président, d'abord, je voudrais juste
souligner que le projet de loi 120 prévoit déjà une
procédure beaucoup plus précise que celle à laquelle nous
étions soumis jusqu'à maintenant. Et, d'autre part, il y a
déjà aussi, dans le projet de loi 120, un mécanisme de
vérification au niveau de la régie régionale, à
l'article 165, qui dit que la régie doit s'assurer que chaque
établissement a établi et applique une procédure de
traitement ou d'examen des plaintes. D'autre part, le rôle que nous
voyons au Protecteur du citoyen, il nous apparaît plus important qu'il
sort joué au niveau de vérifier la qualité du traitement
que la procédure elle-même, ce qui permet, comme le disait M.
Favre tout à l'heure, aux établissements d'adapter leur
procédure à leur contexte particulier. Mais le Protecteur du
citoyen, peu importe la procédure écrite dans
rétablissement, a toujours le loisir de vérifier et même de
critiquer la procédure existante. Je ne crois pas, à moins qu'on
ne me corrige, que ce soit déborder son rôle ou sa juridiction que
de le faire.
Mme Harel: Actuellement, oui.
M. Simard: Et, à notre avis, ça devrait continuer
comme ça. C'est peut-être plus efficace comme ça que de le
faire intervenir d'une façon très administrative ou très
technocratique, d'aller vérifier des centaines de procédures, de
les ajuster, de les négocier et tout.
M. Favre: M. le Président, si je puis faire une
image...
Le Président (M. Dauphin): Oui, M Favre.
M. Favre: II ne faudrait pas tomber dans le défaut que,
parfois, disons par souci de clarté, de précision et tout,
lorsqu'un hôpital ou tout établissement, disons, a des
décisions majeures à prendre qui impliquent le budget, des sommes
considérables d'argent, etc., on consulte les vérificateurs
externes avant de prendre une décision. Imaginez... Ça veut dire
quoi? Ça veut dire que, quand la vérification externe se fart, le
vérificateur a pieds et mains liés à la
décision
ou à la recommandation qu'il a faite. Ça n'a aucun sens.
Alors, si on veut garder toute l'objectivité à un moment
donné au Protecteur du citoyen, il doit agir en toute
objectivité. J'aurais presque des doutes quant au Protecteur
lui-même qui dirait: Je veux aller d'abord voir si les procédures
sont bien en place et ensuite, si j'ai des plaintes, je vais trancher. Il est
un peu à part, il est au-dessus, c'est vraiment le dernier recours. Je
trouve que ce dernier recours, dans le fond, doit oeuvrer en toute
liberté, mais également dans le fond, sans trop de choses
écrites, sans quoi il n'y aura plus véritablement de Protecteur
du citoyen capable d'intervenir. Il faut que la loi lui donne toute la
souplesse pour travailler, mais il ne faut pas l'enfermer dans des
procédures qui risqueraient à un moment donné de se
retourner contre l'objectif que nous formulons qui est de garantir au citoyen
qu'il y a quelqu'un de très objectif qui peut examiner absolument toute
la cause, faire les recommandations. Ça, ça me paraît
essentiel.
Le Président (M. Dauphin): Merci. Sur le même sujet,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Mon Dieu! M. le Président, c'est juste une
remarque. Actuellement, le Protecteur du citoyen peut s'intéresser, par
exemple, à ce qui se passe dans les prisons, mais pas dans les
hôpitaux parce que, présentement - je ne sais pas si j'ai compris
à tort que vous pensiez qu'il pouvait le faire mais...
M. Favre: Non, il ne peut pas.
Mme Harel: ...il ne peut pas et vous, vous souhaitez qu'il le
fasse, c'est-à-dire qu'il exerce dans le fond, un pouvoir de
surveillance sur la qualité du traitement de la plainte. C'est ça
qu'il faut comprendre? Merci.
M. Simard: Dans la mesure où le citoyen ou l'usager va lui
soumettre...
Mme Harel: Évidemment...
M. Simard: ...lui demande de vérifier...
Mme Harel: D'accord.
M. Simard: ...pas de plein droit, là.
Mme Harel: Merci.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Les deux
formations politiques ont utilisé exactement le même temps
à date. Il y a deux députés ministériels qui m'ont
demandé la parole: M. le député de Chapleau, ensuite de
ça, M. le député de Nelligan, et nous reviendrons au
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Kehoe: Merci, M. le Président. Bien sûr, le fait
que vous représentiez la totalité des 200 centres hospitaliers du
Québec et d'autres organisations réliées au domaine de la
santé et des services sociaux, vos recommandations à l'effet que
la juridiction du Protecteur du citoyen devrait être extensionnée
au réseau de la santé et des services sociaux va être
considérée très sérieusement par la commission.
Je note que ce sera les trois niveaux: l'établissement, le
conseil régional, le Protecteur du citoyen. Ce que je veux savoir dans
l'ensemble, sur la manière que vous allez procéder ou sur la mise
en place de vos recommandations, quelles sortes de plaintes seront
considérées par rétablissement lui-même, lesquelles
par le conseil régional et lesquelles par le Protecteur du citoyen? Ce
n'est pas en appel, l'un après l'autre, ou... En première
instance, nécessairement, c'est rétablissement qui va être
appelé pour tenter de régler le problème. Et, à
partir de là, est-ce que ça va aller vers le conseil? Admettons
que le plaignant n'est pas satisfait du jugement rendu ou de la décision
prise par l'établissement. Est-ce le conseil régional qui sera
saisi du problème et après ça, en dernier lieu, le
Protecteur du citoyen?
Le Président (M. Dauphin): M. Simard, si vous voulez.
M. Simard: C'est bien ça, M. le Président. À
tout le moins ce que prévoit la loi 120, c'est que le plaignant
s'adresse d'abord à l'établissement en cause. S'il n'est pas
satisfait, la loi prévoit les délais et toute la
procédure... S'il n'est pas satisfait, il s'adresse au palier
régional et nous, notre recommandation de ce matin, c'est si le
plaignant n'est pas satisfait du traitement, appelons-le interne au
réseau, de sa plainte, il pourrait la porter auprès du Protecteur
du citoyen.
M. Kehoe: Effectivement. Mais quand vous parlez d'extensionner la
juridiction, c'est juste dans ce sens-là, de donner un dernier droit
d'appel au Protecteur du citoyen, en dernier lieu?
M. Simard: Oui, à titre d'intervenant neutre...
M. Kehoe: Oui.
M. Simard: ...mais aussi moins expert, parce que les deux
premiers niveaux sont les niveaux où l'expertise est la plus
concentrée. Le dernier niveau, le Protecteur du citoyen,
évidemment, n'a pas toute l'expertise qu'on retrouve dans le
réseau et c'est normal. Mais, de fait, nous voyons son rôle comme
étant plus d'aller vérifier si les deux premiers paliers ont
joué leur rôle, si la plainte a été bien
traitée, si la procédure
était juste et équitable, etc.
M. Kehoe: Une autre de vos recommandations est à l'effet
de donner au directeur général de l'établissement le
pouvoir de recevoir et de traiter les plaintes de toute nature, y compris une
plainte contre l'établissement lui-même. À ce
moment-là, est-ce que le directeur n'est pas juge et partie? Comment son
impartialité peut-elle être acceptée à ce
moment-là si lui-même traite une plainte contre son
établissement?
M. Simard: C'est une question à laquelle nous
répondions tout à l'heure, M. le Président. Je peux
rappeler d'abord que, si on se réfère toujours au projet de loi
120, c'est le projet de loi 120 qui établit cette façon de
procéder, le directeur général ou un cadre
supérieur. Mais je mentionnais tout à l'heure qu'en apparence
ça peut apparaître comme étant un conflit
d'intérêts, mais c'est pour ça que, pour éviter ou
pour équilibrer ce pouvoir-là, nous proposons l'intervention du
Protecteur du citoyen comme intervenant neutre et, d'autre part, je rappelle
qu'il est du devoir et dans les fonctions premières, autant du directeur
général que du conseil d'administration, de voir à la
qualité des services et également à la quantité des
services qui sont dispensés dans son établissement. Donc, c'est
plus qu'une simple fonction de traitement. Ça a à voir avec son
devoir et ses fonctions premières. Mais c'est équilibré
par l'intervention du Protecteur du citoyen comme intervenant neutre. Si jamais
il ne traitait pas bien, il sait qu'il y a quelqu'un d'autre qui peut
intervenir, même la régie régionale qui,
déjà, est plus dégagée du contexte très
particulier.
Le Président (M. Dauphin): Merci M le député
de Nelligan.
M. Williams: Merci, M. le Président, et merci à
l'Association des hôpitaux du Québec. Juste clarifier un peu notre
intérêt gouvernemental sur cette question. Nous avons
rencontré l'Association des hôpitaux sur les questions de la
réforme. Nous allons continuer les discussions. Demain matin,
moi-même, je vais aller rencontrer votre directeur général
sur cette question. Nous sommes complètement ouverts à avoir des
discussions ici et à la commission des affaires sociales sur cette
question certainement.
Je voudrais...
M. Trudel: ...des auditions? M. Williams: Pardon?
M. Trudel: Y compris des auditions particulières au
niveau...
M. Williams: C'est bien intéressant. Souvent, nous avons
avec l'Opposition un débat sur une structure avant que nous ayons
vraiment le débat sur ce que nous voulons. Avec ça, nous allons
avoir une bonne discussion sur le fond bientôt. Article par article, cela
va nous donner une chance de discuter cette question.
Je voudrais demander un peu... Nous avons entendu le besoin d'avoir
recours, nous avons entendu les mots "imputable", "efficace",
"indépendant", la "perception d'indépendance" et aussi, j'ajoute,
les "délais raisonnables". Vous vous êtes prononcés
favorablement à l'extension de la juridiction du Protecteur du citoyen.
Il me semble que la santé est un tiers de notre budget
québécois. C'est un vaste domaine. Si nous avons donné
trop, avec toute la bonne volonté de corriger les questions que,
j'espère, les deux côtés veulent corriger, est-ce que nous
sommes en train de créer un autre problème, d'avoir un Protecteur
du citoyen trop grand, trop loin, peut-être pas efficace, pas touchable?
Et est-ce que ça va être mieux de créer une présence
régionale imputable, indépendante, efficace, humaine, qui peut
répondre a votre besoin d'une façon raisonnable et dans un
délai raisonnable? Peut-être un Protecteur du citoyen. Avez-vous
les commentaires de... Il n'y a aucun doute sur le problème et les
choses que nous voulons corriger. Mais pourquoi voulez-vous privilégier
juste ajouter: sous la juridiction du Protecteur du citoyen, sans
privilégier d'essayer de faire la même chose dans un autre
modèle? (10 h 30)
M. Favre: M. le Président, je peux répondre
à ceci dans le sens que nous trouvons que, puisqu'il y a un Protecteur
du citoyen au Québec, qu'on nous demande s'il faut étendre sa
juridiction, nous disons: Oui, dans le sens que nous souhaitons une instance
neutre quelque part dans le système des plaintes par rapport au
réseau. Autrement dit, les établissements sont les premiers
concernés. On peut avoir des craintes que le directeur
général soit juge et partie. Il reste quand même que le
conseil d'administration représente la population et est là comme
garantie que justice sera rendue. Ce qui est important, c'est l'apparition d'un
niveau neutre, qui serait en troisième niveau, neutre; c'est ça
qui est essentiel pour nous, voyez-vous? La garantie, autant pour le citoyen
qui formule une plainte que pour ceux qui doivent juger ces plaintes, recevoir
et juger, c'est de dire qu'à un moment donné l'arbitraire ne peut
pas s'installer parce que quelqu'un en haut va dénoncer
l'arbitraire.
Il faut rendre justice, et c'est ça qui est délicat,
là. C'est qu'une plainte demande, dans le fond, d'être
traitée avec équité. On ne parle pas d'un tribunal. On
n'est pas encore au tribunal. Mais on est vraiment au niveau où on doit
sentir, d'une part, quand on formule une plainte, d'autre part, quand on
répond à la plainte, qu'il y a quelqu'un qui observe, quelqu'un
de l'extérieur. Alors, que ce soit le Protecteur du citoyen, que ce soit
autre chose, pour nous, ce
que nous disons, c'est que, dans le cas de cette commission, nous allons
dire: Ça serait très bien s'il était possible d'aller plus
loin quant au Protecteur du citoyen. C'est évident que, si finalement le
Protecteur du citoyen est chargé de toutes les plaintes de la province
de Québec, il n'arrivera peut-être plus à fonctionner.
Et on va régionaliser le Protecteur du citoyen et on va... Alors,
on peut imaginer dans le système, mais ce n'est pas ça...
L'idée, actuellement, pour nous, c'est de défendre un
troisième niveau neutre.
M. Williams: La question pour vous est la neutralité.
Hier, nous avons entendu le Curateur public et le président de la
Commission de protection des droits de la jeunesse. Pour vous, ce n'est pas
nécessairement de privilégier l'extension de Protecteur du
citoyen. C'est de protéger la neutralité.
M. Favre: C'est ça. C'est d'avoir un niveau...
M. Williams: Merci beaucoup.
M. Favre: ...qui n'est pas prévu dans la loi 120, qui
n'existe pas à l'heure actuelle...
M. Williams: Non, je comprends.
M. Favre: ...puisque le Protecteur du citoyen n'a pas cette
juridiction. On se comprend bien. Et, comme il y avait une occasion de venir
présenter une extension possible pour le Protecteur du citoyen, nous le
faisons, mais nous ne prétendons pas imposer cette solution.
M. Williams: Une autre façon. Merci.
Le Président (M. Dauphin): Maintenant, je vais
reconnaître M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Maintenant, je pense qu'il faudrait toucher tout le
secteur des plaintes en ce qui regarde tout acte médical ou tout acte
professionnel dans le système. Vous dites dans votre texte que vous nous
présentez ce matin, à la page 15, qu'il vous semble que le texte
du projet de loi 120 permettrait dorénavant au directeur
général de recevoir les plaintes de toute nature. J'aimerais
ça que vous nous précisiez ça parce que je vous avoue que
je n'ai pas vu le "semble" que vous nous indiquez ici, et c'est pour ça
que je voudrais avoir l'éclairage, parce que ce que nous avons
plutôt lu jusqu'à maintenant, c'est qu'il n'y a pas de
modification quant au cheminement de la plainte en ce qui regarde un acte
professionnel d'un professionnel dans l'établissement, le centre
hospitalier, le cas échéant ici.
Alors, qu'est-ce qui vous fait affirmer ici...
À partir de quoi trouvez-vous qu'il vous semble que le directeur
général pourra recevoir les plaintes de toute nature?
M. Favre: Alors, l'article 36. Il faut arriver là, je
pense que c'est ici, si vous prenez ces textes... Vous vous souvenez. Je vais
laisser Me Simard. Là, on est dans des points de droit.
M. Simard: Alors, premièrement, dans le projet de loi
120... La situation actuelle, c'est reproduit dans le projet de loi 120, le
Conseil des médecins et dentistes a déjà un premier
mécanisme d'évaluation de l'acte médical, de même
qu'un mécanisme de comité de discipline. Pourquoi on
ramène ça maintenant au directeur général? C'est
aussi que, dans le projet de loi 120, le conseil des médecins, des
dentistes et des pharmaciens relève du directeur général
et non plus du conseil d'administration. Or, c'est la concordance,
finalement.
Par ailleurs, ce que nous soumettons au niveau des plaintes qui
pourraient toucher à la qualité de l'acte professionnel par
rapport à une disposition de la loi 120, l'article 36 dit
qu'automatiquement toutes les plaintes qui sont reçues par
rétablissement et qui concernent un acte professionnel doivent
être référées à la corporation
professionnelle. Ça nous apparaît un peu - je mets le mot entre
guillemets - excessif dans le quotidien. Il nous semble qu'on devrait rester
plutôt dans le régime actuel où on peut faire fonctionner
les mécanismes internes à l'établissement. Il doit y avoir
une première analyse. S'il nous apparaît que la plainte vise
véritablement la qualité d'un acte professionnel qui tombe sous
le coup du Code des professions, là, on va référer, mais
qu'on puisse avoir une marge de manoeuvre et non pas un automatisme, parce
qu'il y a plusieurs plaintes qui, en apparence, peuvent toucher la
qualité de l'acte professionnel - le Dr Pecko peut vous en parler mieux
que moi - mais ce n'est pas toujours le cas.
M. Favre: M. le Président, si vous me permettez, c'est un
peu technique, mais ça veut dire ceci. L'article 36 du projet de loi
120, actuellement, se lit comme suit: "Lorsque la plainte porte sur un acte
professionnel sur lequel une corporation professionnelle a compétence,
rétablissement doit acheminer la plainte de l'usager vers la corporation
professionnelle concernée. S'il y a dans l'établissement un
conseil des médecins, dentistes et pharmaciens ou un conseil des
infirmières et infirmiers, la plainte doit également être
acheminée vers le conseil concerné."
La modification que nous proposons, c'est ceci: Lorsque la plainte porte
sur la pertinence, la qualité ou l'efficacité d'un acte
professionnel et s'il y a dans l'établissement un conseil des
médecins, dentistes et pharmaciens, un conseil
des infirmières et infirmiers ou tout autre conseil de
professionnels, la plainte doit être acheminée vers le conseil
concerné et l'établissement doit en informer l'usager.
Ensuite, si, après examen de la plainte, rétablissement a
des motifs raisonnables de croire qu'une infraction visée à
l'article 122 du Code des professions a été commise par un
professionnel, l'établissement doit en saisir sans délai la
corporation professionnelle concernée et en informer, par écrit,
l'usager.
Actuellement, c'est évident que les corporations, de par le Code
des professions, sont habilitées par leurs comités de discipline,
les comités d'inspection professionnelle d'être saisies de toute
plainte, non seulement d'une institution, mais par un citoyen qui veut se
plaindre d'un acte professionnel. Il y a une garantie - la loi a
été modifiée - maintenant, les auditions deviennent
publiques dans certains cas, mais même encore, même encore,
voyez-vous, il ne faut surtout pas que cet article 36 devienne une
échappatoire pour renvoyer à des corporations professionnelles,
sans examen, en disant: "nous pensons que", et, ensuite, on n'entend plus
jamais parler de rien.
Donc, il y a là une jonction à faire, certainement avec
une autre loi, et d'examiner ça avec l'Office des professions par
rapport au Code des professions, à ce qu'il dit réellement. Il
faudra peut-être mettre des délais, il faudra peut-être
parce que, tel que c'est formulé, on l'envoie, et il n'est pas certain
qu'il y ait une réponse.
M. Trudel: Surtout que je pense qu'il faut bien noter que,
dès le moment où c'est acheminé au comité de
discipline ou au CMDP, le plaignant est dessaisi de sa plainte, ce n'est plus
à lui; la plainte ne lui appartient plus. En termes de droit, il est
dessaisi de sa plainte. C'est pourquoi on se plaint fréquemment, dit-on,
de l'absence de suivi ou d'information, entre autres là-dessus.
Parce qu'il reste très peu de temps, M. le Président, il y
a une question importante aussi qui se pose. Fort bien, quant à vous,
pour le Protecteur du citoyen, troisième niveau, on s'entend bien sur la
mécanique. Dans la mécanique actuelle, les CRSSS peuvent faire
appel... la machine régionale peut faire appel d'une décision
à la Commission des affaires sociales pour obtenir jugement sur un
litige d'un tribunal quasi judiciaire. Là, on irait, comme
troisième niveau, vers le Protecteur du citoyen, qui n'agit qu'en termes
de recommandation.
Est-ce qu'il ne vous apparaît pas nécessaire
également qu'à quelque part on conserve un recours possible
à un tribunal quasi judiciaire pour trancher sur des objets de litige de
ce qui se passe dans l'ensemble des institutions? Parce qu'on est dans un
très gros réseau, très vaste, et il y a des objets sur
lesquels il faut, à quelque part, que l'on tranche sur qui a raison.
Est-ce que l'on ne devrait pas aussi conserver, pour certaines
catégories de plaintes, la possibilité d'en appeler à la
Commission des affaires sociales ou à un autre tribunal de même
type au niveau des activités dans le réseau? Est-ce que vous avez
regardé ça aussi?
Le Président (M. Dauphin): Me Simard.
M. Simard: M. le Président, on n'a pas vraiment
regardé l'aspect qui nous est soulevé, de la Commission des
affaires sociales particulièrement, en fonction du projet de loi 120. Je
ne pourrais pas vous donner d'opinion vraiment éclairée
là-dessus, mais votre question demeure très pertinente,
cependant.
M. Trudel: II semble que vous ayez encore quelques jours pour
apporter une réponse, et je pense que ça serait très
important que l'Association des hôpitaux nous communique son opinion
là-dessus, et au ministre et aux membres de la commission parlementaire,
que vous fassiez parvenir à la présidence de la commission
parlementaire des affaires sociales votre opinion là-dessus, parce que
c'est un point... C'est très important dans l'ensemble de la
mécanique et c'est important qu'on ait votre opinion là-dessus.
Malheureusement, je pense que mon temps est écoulé.
Le Président (M. Dauphin): Peut-être une
dernière question...
M. Trudel: Je m'excuse...
Le Président (M. Dauphin): ...si vous me permettez,
même si le temps est terminé.
M. Trudel: ...c'est parce qu'il y avait quelqu'un qui
avait...
Le Président (M. Dauphin): Ah! excusez-moi. M. Trudel:
...un complément de réponse.
Le Président (M. Dauphin): Me Simard, allez-y.
M. Simard: Tout simplement une petite information,
peut-être juste pour situer la question de M. le député.
C'est que la Commission des affaires sociales, dans le régime
légal actuel, intervient quand même sur des points très
précis. Effectivement, comme tribunal quasi judiciaire, elle ne peut pas
se prononcer sur n'importe quoi.
Le Président (M. Dauphin): Merci. Une dernière
question, si vous me permettez, qu'on a travaillée. Puisque la
régie régionale prévue dans le projet de loi 120 est
appelée à statuer sur les plaintes des usagers et aussi de voir
à l'organi-
sation et à l'évaluation des services, ne trouvez-vous pas
que ces deux rôles risquent de s'opposer au détriment des
usagers?
M. Favre: C'est évident que plus on va écrire de
textes de loi, M. le Président, plus on risque d'avoir des conflits ici
et là. Lorsque nous avons parlé des droits du citoyen, nous avons
parlé également des obligations, d'une certaine façon,
qu'il a envers le système. Disons que ceux qui sont chargés de
faire fonctionner le réseau, que ce soit les établissements, que
ce soit le conseil régional actuellement ou les régies,
évidemment, n'ont pas des sources de revenu inépuisables. Donc,
à un moment donné, il y a des limites au système et, tant
qu'on conçoit qu'il y a des limites au système, je pense que,
moi, je ne vois pas de difficulté réelle. Il n'y a pas de conflit
entre deux aspects, mais ça peut créer des problèmes
certainement pour l'avenir, disons, si les plaintes commençaient
à faire des jonctions très subtiles entre la quantité de
services donnés, le temps pris par les établissements à
répondre aux différents besoins et, disons, là, le
sentiment qu'un citoyen est lésé. Je pense que ce sont là
des choses très très subtiles, mais, pour le moment, disons, je
ne pense pas qu'on soit véritablement à ce niveau-là. Moi,
j'ai l'impression, à ce moment-là, que la présence de ce
troisième degré neutre est une garantie, finalement, qu'on sera
équitable et qu'on essaiera, et même ça serait souhaitable
qu'il y ait ce. troisième niveau, de façon à pouvoir
recommander à qui de droit, c'est-à-dire, eh fait, au
gouvernement, de faire des changements s'il y a lieu. (10 h 45)
Une voix: Excellent!
Association des centres d'accueil du
Québec
Le Président (M. Dauphin): Alors, c'est tout le temps qui
nous était alloué. M. le président, M. Favre, D Pecko, Me
Simard, Mme Blouin, merci beaucoup d'avoir participé à nos
travaux. Ce fut très intéressant, et bon retour. Je demanderais
maintenant à l'Association des centres d'accueil du Québec de
s'avancer.
Alors, maintenant, nous aimerions souhaiter la bienvenue à
l'Association des centres d'accueil du Québec, représentée
par trois personnes. Est-ce que c'est vous, Me Clair, qui allez faire
l'exposé? M. le président, d'abord. Alors, M. le
président, Me Dolan, si vous vouiez présenter les personnes qui
vous accompagnent, et je vous signale que nous avons prévu une
période d'une heure, dont environ 15 minutes pour la présentation
de votre exposé.
M. Dolan (Mario): Merci, M. le Président. Mesdames et
messieurs, je suis accompagné ici, aujourd'hui, pour cette
présentation, de M. Gilles Proulx, qui est membre du comité
exécutif de notre Association et trésorier de celle-ci. Il est
aussi directeur général du centre de réadaptation
Mont-Saint-Aubert de Charlesbourg, qui est un centre de réadaptation
pour personnes présentant une déficience intellectuelle. Je suis
aussi accompagné de quelqu'un qui n'a vraiment plus besoin de
présentation dans cette enceinte, M. Michel Clair, qui est directeur
générai de l'Association, qui vous présentera la position
de nos membres.
J'aimerais vous rappeler que l'Association des centres d'accueil du
Québec représente 380 établissements publics de services
à la population, créés en vertu de la Loi sur les services
de santé et les services sociaux. Les centres d'accueil membres de
l'ACAQ prodiguent leurs services auprès de six groupes de citoyens et
citoyennes parmi les plus vulnérables de notre société:
les mères en difficulté, les personnes alcooliques et
toxicomanes, les personnes atteintes d'une déficience physique, les
personnes atteintes d'une déficience intellectuelle, les jeunes en
difficulté d'adaptation et, enfin, les personnes âgées en
perte d'autonomie. Au total, nos établissements desservent environ 90
000 personnes. Plusieurs dizaines de milliers d'entre elles sont
hébergées en institution, alors que les autres reçoivent
des services sur une base externe.
La nature même de notre mission est de promouvoir le
bien-être des bénéficiaires. Nous avons donc le devoir de
participer à tout débat visant l'amélioration de leurs
conditions, et c'est ce que nous faisons ici ce matin. Parmi les questions
étudiées par la commission parlementaire, il en est une qui
interpelle particulièrement les centres d'accueil. En effet, les
députés s'interrogent sur la pertinence d'étendre la
juridiction du Protecteur du citoyen à de nouveaux secteurs, notamment
à l'ensemble des établissements du réseau de la
santé et des services sociaux. Le Protecteur du citoyen relève
des lacunes parmi les mécanismes actuels qui garantissent aux
bénéficiaires la jouissance de leurs droits. L'essentiel de notre
mémoire portera donc sur la description des mécanismes actuels de
protection des droits des bénéficiaires des centres d'accueil
d'hébergement et de réadaptation, et sur une proposition
susceptible d'améliorer cette protection. Nous commenterons aussi, si
vous le permettez, fort brièvement toutefois, l'extension
proposée de la juridiction du Protecteur du citoyen à l'univers
des relations du travail. Je demanderais, à ce moment-ci, à notre
directeur général, M. Clair, de vous présenter notre point
de vue.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Me Clair.
M. Clair (Michel): En étudiant l'extension du mandat du
Protecteur du citoyen aux centres d'accueil, on voudrait d'abord que les
députés qui étudient cette question-là soient
conscients, dans
le réseau des centres d'accueil, de trois choses que je pourrais
résumer ainsi: d'une part, la complexité de la situation dans les
centres d'accueil du Québec; d'autre part, qu'ils tiennent compte d'une
tradition humaniste extrêmement importante en centre d'accueil au
Québec, qu'il est important de protéger, que celle-ci dure; et,
troisièmement, l'existence de multiples recours déjà
existants pour nos différentes clientèles.
Traitons d'abord de la complexité. S'il fallait que la protection
des droits des bénéficiaires des centres d'accueil ne repose que
sur la contrainte d'un règlement, d'une loi ou d'une menace de
décision de tribunaux, nous pensons que ceux-ci seraient rapidement
surchargés. Nous sommes heureusement très loin de cette
situation, car le bien-être des bénéficiaires, de nos
clients, est le souci premier des administrateurs, des employés et de
tous ceux qui oeuvrent en centre d'accueil. Au-delà des contraintes et
des obligations du système de santé et de services sociaux, la
réalité des centres d'accueil est celle du contact quotidien de
personnes ayant besoin de services, en grande difficulté, avec d'autres
personnes qui font profession, voire vocation d'aider leurs semblables. Ainsi
donc, la sincérité des efforts, le sens de l'humanisme et le
respect des personnes sont les seules bases réalistes sur lesquelles on
peut travailler, on peut construire, pour améliorer le sort des
bénéficiaires, et c'est cette philosophie qui est mise en oeuvre
dans nos établissements.
Cela étant dit, ça n'empêche pas qu'on puisse
connaître des problèmes. Les systèmes étant ce
qu'ils sont, la grandeur du réseau de la santé et des services
sociaux étant ce qu'elle est, il est certain qu'on doive se doter de
mécanismes appropriés pour articuler le traitement des plaintes
de ces personnes. Mais, dans le contexte des centres d'accueil, il faut bien se
rendre compte que, par définition, un centre d'accueil est un endroit
où certaines libertés peuvent être restreintes et où
employés et bénéficiaires vivent
régulièrement des situations tendues.
Deux exemples très fréquents dans nos
établissements permettront d'illustrer ce point. Celui des adolescents
admis contre leur gré, sur ordre du tribunal, et celui des conflits et
des rejets quasi inévitables entre un thérapeute et son patient
à certaines phases de la psychothérapie, notamment en
toxicomanie. Quand une plainte est-elle justifiée et quand sert-elle
d'exutoire ou d'échappatoire normal, fréquent dans le processus
du traitement? L'évaluation de ces situations par un intervenant
extérieur est, il faut le dire, extrêmement difficile et demande
une expertise consommée. Ajoutons aussi la complexité des
juridictions que doit démêler le bénéficiaire pour
savoir qui est responsable de quoi. Le conseil d'administration, le conseil
consultatif du personnel clinique, les corporations professionnelles, le
ministère, le conseil régional, beaucoup de monde se partage par
tranches fines la responsabilité des actes qui façonnent le
vécu quotidien du bénéficiaire. Et lui, bien souvent, n'a
pas beaucoup de moyens de savoir quel acte engage la responsabilité de
quelle personne.
Enfin, je vous donne un exemple là-dessus assez fondamental.
Souvent aussi, on se retrouve avec des contraintes, des décisions ou des
instructions un peu contradictoires. Notons un cas, par exemple. Les centres
d'accueil ont reçu l'avis de la Commission des droits de la personne et
celui de la Commission de protection des droits de la jeunesse, à
l'effet qu'il est irrespectueux des droits de la personne d'installer des
caméras aux fins de protéger la vie de ces personnes au moment
d'une tentative de suicide, comme cela s'est déjà produit dans
certains cas. D'un côté, une commission de protection des droits
de la jeunesse et des droits de la personne qui interdit aux
établissements d'utiliser des moyens électroniques pour
protéger la vie des gens et, de l'autre, des coroners qui blâment
régulièrement les centres d'accueil de ne pas procéder
à l'installation de tels équipements.
Complexe. Il faut aussi considérer le nécessaire
équilibre entre les droits des bénéficiaires et ceux des
employés. Le respect intégral des droits des uns se heurte
à celui du droit des autres et, parfois, à des situations
contradictoires. Par exemple, il n'est pas rare qu'un adolescent en
difficulté frappe ou injurie un éducateur, ce qui,
inévitablement, peut et doit conduire l'établissement à
prendre des mesures à cet égard. Un autre exemple classique, le
conflit entre la volonté de la majorité des personnes
âgées de recevoir des soins corporels par un employé de
leur sexe. On sait que la clientèle des centres d'accueil
d'hébergement, notamment, est à plus de 80 % des femmes qui
demandent d'être traitées, sur le plan des soins d'hygiène,
des soins corporels, par des femmes, alors que l'interdiction de la
discrimination selon le sexe dans l'attribution des postes est également
une autre préoccupation qui est valable. Ce sont quelques exemples pour
démontrer la complexité de notre situation.
Quelques mots sur la tradition humaniste des centres d'accueil, qui nous
semble être un acquis extrêmement important à
protéger. Les centres d'accueil ont comme raison d'être
fondamentale le bien-être des bénéficiaires et, de tout
temps, à l'époque où c'était des institutions
charitables, ou encore aujourd'hui que ce sont des établissements
publics, ce sont des considérations humanistes qui guident l'action des
établissements. Nous avons développé une approche
psychosociale qui considère l'ensemble de la personne et non pas
uniquement son problème spécifique. Nous ne traitons pas des cas
ou des dossiers, mais des personnes aux besoins multiples, et nous recherchons
constamment des moyens d'améliorer notre prise en compte, si vous
voulez, de la globalité de la personne.
Quelques réalisations des centres d'accueil à cet
égard-là, la désinstitutionnalisation des personnes ayant
une déficience intellectuelle n'est pas d'abord une réalisation
gouvernementale, politique, de quelque formation que ce soit. Ça a
été d'abord une initiative des centres de réadaptation
concernés. Le développement d'un protocole type de garantie
minimale de protection pour les jeunes en difficulté d'adaptation,
notamment à l'égard des abus sexuels, voilà un autre
développement qui est né de cette tradition humaniste. Même
chose en ce qui concerne les protocoles d'entente en vigueur dans les centres
d'accueil pour les cas de sida ou d'hépatite type B. Même chose en
ce qui concerne l'implantation graduelle initiée localement de chartes
des droits des bénéficiaires.
J'ai déjà parlé des recours multiples qui existent,
qui est un autre élément dont on pense que vous devez tenir
compte en étudiant l'extension du mandat du Protecteur du citoyen. Aux
pages 10 et 11, on en fait une enumeration. J'attire votre attention
au-delà de ce que prévoit la loi actuelle ou de ce qu'il y aurait
advenant l'adoption du projet de loi 120, en ce qui concerne les
établissements à un niveau régional. En ce qui concerne
notre réseau, vous avez une annexe à la fin. Je les nomme. Il y a
le ministère de la Santé et des Services sociaux, qui a des
possibilités d'action dans notre secteur, de traitement de plaintes, le
ministère de la Justice, la Commission des affaires sociales, la
Commission des droits de la personne, la Commission de protection des droits de
la jeunesse, l'Office des personnes handicapées du Québec, la
Commission d'accès à l'information, le Curateur public.
En fait - je ne dirai pas en fait - en théorie, il n'existe
à peu près aucun sujet pour lequel le bénéficiaire
ne dispose pas déjà d'un recours formel. Malgré tout, le
nombre de plaintes reçues par les instances habilitées demeure
relativement peu élevé. On a essayé de faire un
décompte, nous, pour évaluer la situation en ce qui concerne
notre réseau; en faisant le tour de tous ceux qui sont susceptibles de
recevoir des plaintes à l'égard du fonctionnement de nos
établissements, il s'avère que, si on fait le grand total, on
arrive à un peu moins d'une plainte par établissement par
année. Est-ce donc à dire qu'il n'y a pas de problèmes,
que les choses tournent rondement dans les établissements et qu'il n'y a
aucune difficulté, ou si c'est parce qu'il n'y a pas de recours encore
assez adéquat pour permettre l'expression des plaintes? Nous, on pense,
néanmoins, que, de la façon dont nous fonctionnons, c'est
davantage la première hypothèse qu'il faut retenir, à
savoir que l'immense majorité des plaintes trouvent leur solution de
façon informelle, localement, et qu'il est extrêmement important
de protéger cette façon-là de procéder.
Avant d'arriver à nos propositions, nous, de l'analyse de la
situation actuelle et de tout changement éventuel, on pense qu'on doit
retenir six grands principes qui sont déjà appliqués dans
les centres d'accueil et qui doivent continuer de l'être. Le premier,
c'est que les droits des bénéficiaires doivent primer sur toute
autre considération. On pense à ça en cas de conflit de
travail; on pense à ça en cas de traitement des plaintes; on
pense à ça en cas de répartition des budgets. C'est un
principe premier. Le droit des bénéficiaires, le respect de la
personne, c'est le principe fondamental de fonctionnement de nos
établissements, et ça doit demeurer.
Deuxièmement, la notion de ce qu'est un droit doit être
appliquée avec largesse et générosité dans le
contexte des centres d'accueil. Toute approche un peu trop légaliste
à l'égard de l'application des chartes dans nos
établissements conduit à des aberrations, parce qu'on pourrait
adopter une attitude tellement restrictive, tellement légaliste qu'elle
deviendrait très rapidement inhumaine, même si, au sens de la loi,
on pourrait éventuellement être à l'abri de critiques. (11
heures)
Troisième élément extrêmement important,
troisième principe. La protection des droits des
bénéficiaires doit trouver son assise première à
l'intérieur même de l'établissement. La seule garantie
viable à long terme du respect des droits réside dans les
valeurs, les attitudes, les comportements à l'intérieur de
l'établissement, tout aussi bien par les administrateurs, les cadres que
les employés. C'est là qu'il faut que le
bénéficiaire puisse se faire entendre, obtenir justice,
être traité humainement et non pas miser d'abord et avant tout sur
quelque procédure judiciaire, quasi judiciare ou recours autre que ce
soit. C'est là qu'est d'abord et avant tout le fondement sans nier qu'il
soit utile qu'il existe d'autres mécanismes comme deuxième
recours. Mais la communication en direct au niveau local, c'est ce que nous
privilégions.
Quatrième principe. Les bénéficiaires qui
s'estiment lésés doivent avoir accès à un recours
simple, efficace, rapide, accessible financièrement et offrant des
garanties adéquates d'impartialité et de justice, parce que c'est
certain que les questions non résolues ou mal résolues
empoisonnent les relations interpersonnelles, et il faut qu'il y ait une
mécanique qui permette de disposer de ça.
Cinquième principe. Il faut tenir compte de la
réalité particulière de chaque catégorie
d'établissements, voire même de chaque établissement. M.
Favre, qu'on a entendu tantôt, en a parlé en ce qui concerne les
hôpitaux. J'oserais dire que c'est encore plus vrai dans le cas des
centres d'accueil parce que... Comprenons bien que le fonctionnement et le
nombre de plaintes qu'on est susceptible d'avoir, dans un centre de
réadaptation pour personnes toxicomanes, est complètement
différent de ce qu'on peut avoir dans le cas d'un établissement
de déficience
intellectuelle ou pour l'hébergement des personnes
âgées.
Sixième élément, sixième principe, c'est que
les autres instances dont on dépend, nous, les centres d'accueil,
principalement, le ministère, les conseils régionaux sur le plan
budgétaire, le Conseil du trésor sur le plan de la
négociation des conventions collectives, tout ça, comme je l'ai
dit tantôt, les consignes sont souvent contradictoires, et notre
encadrement légal, qu'on nous donne, financier, juridique,
conventionné, est souvent assez distant des objectifs nobles qu'on nous
fixe par ailleurs.
Venons-en maintenant à l'approche qu'on propose. Disons
d'entrée de jeu, aux pages 21 et suivantes, que nous pensons qu'une
intervention généralisée du Protecteur du citoyen en
première instance, sur toute plainte provenant de notre réseau,
est inadéquate. On ne croit pas en ça pour plusieurs raisons:
d'abord, nous sommes convaincus que ce serait la meilleure façon qu'on
puisse imaginer de déresponsabiliser les personnes au niveau local.
Deuxièmement, il faudrait, pour faire un bon travail, notamment au
niveau, comme je vous disais, de la connaissance intime sur le plan clinique du
cas, que le Protecteur du citoyen s'équipe d'une véritable armada
de professionnels pour venir juger de la pertinence de l'acte posé dans
tel ou tel cas. Et, troisièmement, j'oserais même dire
peut-être même surtout en fonction de l'intérêt du
plaignant, l'intervention du Protecteur du citoyen, qui arrive de
l'extérieur comme ça, n'apporterait, à notre avis, aucune
réponse satisfaisante à l'argument maintes fois
évoqué de la crainte de représailles qui restreint le
bénéficiaire dans l'exercice des recours disponibles. Nous, on
pense que c'est à l'intérieur même de
l'établissement que le bénéficiaire doit trouver la
protection requise pour l'exercice confiant de son recours.
Une solution adaptée au contexte particulier des centres
d'accueil. Je vais faire quelques ajustements, tenant compte du projet de loi
120 adopté en deuxième lecture, au mémoire qu'on a
présenté. Dans un premier temps, probablement que c'est normal,
mais plus que toute autre catégorie d'établissements, on est
habitués de vivre avec des comités de bénéficiaires
et on en souhaite le développement. Là-dessus, je dois dire que
le projet de loi 120, en prévoyant un renforcement du comité de
bénéficiaires, vient permettre, à notre avis, en lui
prévoyant un financement régulier, à cette
instance-là, de contribuer à prévenir des problèmes
en facilitant la communication avec l'administration et les employés de
l'établissement. C'est extrêmement important que, localement,
encore une fois, de manière naturelle, sans formalisme, un comité
de bénéficiaires, qui est en bonne relation avec la direction et
les cadres de l'établissement, puisse au fur et à mesure des
événements, par une bonne communication bidirectionnelle, je
dirais, entre la direction de l'établissement et le comité de
bénéficiaires, prendre en compte les plaintes des personnes et
les corriger, même si elles ne sont pas identifiées à la
plainte de M. Untel dans tel cas, mais que ça contribue à
régler ou même à prévenir beaucoup de situations
inacceptables.
Deuxième chose qu'on propose, nous, comme approche au Protecteur
du citoyen, non pas de venir valider dans chacun de nos établissements
un protocole, mais on pense que si le Protecteur du citoyen veut travailler
avec les associations d'établissements, en tout cas, la nôtre
serait ouverte à travailler conjointement, avec le Protecteur du
citoyen, à l'élaboration d'un protocole type pour le traitement
des plaintes au niveau local. Ce protocole établirait les règles
garantissant l'accessibilité, l'impartialité, la justice et la
rapidité. Il établirait les bases d'un contrôle des
plaintes par la communauté, par exemple, par la formation d'un
comité réunissant des représentants de
l'établissement, du comité des bénéficiaires et une
majorité de représentants d'organismes communautaires.
Alors, nous, on dit: Dès le niveau local, on pense qu'il devrait
y avoir, en termes de formalisme minimal, un protocole type qu'on
développe avec le Protecteur du citoyen. Pour disposer des plaintes qui
auront besoin d'aller au delà du directeur général,
au-delà du directeur des services professionnels, que, localement, on
puisse avoir un petit comité composé majoritairement de personnes
de l'extérieur qui peuvent venir trancher. On pense qu'il y aurait
plusieurs avantages à ça. Premièrement, le
bénéficiaire trouvera dans l'établissement le recours dont
il aura besoin. Deuxièmement, et surtout, la protection contre des
représailles éventuelles, la crainte de ces
représailles-là. Si on veut lutter contre ça, on pense que
ce n'est pas en éloignant le recours du citoyen qu'on va lui
éloigner cette crainte-là parce que le Protecteur du citoyen, de
venir enlever la crainte dans le coeur de la personne qui est
hébergée en centre d'accueil d'hébergement, ça
n'apparaît pas comme étant un rempart bien, bien solide. Mais des
gens de la communauté, du village ou de la ville qui sont
déjà bien connus, qui sont des gens qui s'intéressent
à l'établissement, on pense que ça pourrait rassurer les
gens à cet égard-là. Troisièmement, la distance
entre l'établissement et les représentants du milieu serait juste
assez grande pour garantir l'impartialité et juste assez courte pour
assurer une connaissance directe et immédiate de l'établissement,
de la culture et du contexte dans lequel il opère.
Au niveau régional, quant à nous... Alors ça, au
premier niveau, ce n'est pas incompatible avec ce qu'il y a dans le projet de
loi 120, mais nous, on dit: on ne veut pas le faire valider par le Protecteur
du citoyen dans chacun des cas, mais on est prêts, pour le rassurer quant
à l'impartialité de la mécanique, la rapidité et
tout ça, à développer un protocole type, comme on l'a
fait quant à certaines autres problématiques, notamment,
par exemple, avec la Commission de protection des droits de la jeunesse, mais
on va développer un protocole type, on va assurer une application
locale. Quand il y aura des problèmes, on va essayer de les
régler au niveau local avec un comité. Qu'on crée une
instance régionale d'appel, elle aussi neutre, à notre avis, ce
serait préférable. C'est deux approches totalement
différentes. Le ministre préfère une approche, je dirais,
hiérarchique, qui a ses avantages en termes d'autorité de la
régie sur l'établissement. Nous, on aurait une
légère préférence encore pour le modèle
qu'on met de l'avant, à savoir qu'au niveau régional la personne
qui est là soit formée par le Protecteur du citoyen, que ses
conditions de rémunération, d'emploi, le contexte dans lequel
elle opère assurent une certaine impartialité et
neutralité.
Et on ne réserverait, parce que je vois que mon temps est
déjà écoulé dans le fond, l'intervention du
Protecteur du citoyen que dans le cas suivant. C'est qu'il s'assure, qu'il soit
responsable davantage d'un bon fonctionnement général, d'une
mécanique crédible, efficace, rapide, impartiale de traitement
des plaintes au niveau local et au niveau régional et qu'il ne puisse
intervenir que dans les cas où, manifestement, la personne se plaint
qu'il n'y a pas eu de véritable mécanique objective et qu'il n'y
a pas eu respect de cette mécanique-là. Autrement dit, je
m'exprime plus clairement, le Protecteur du citoyen interviendrait dans deux
cas: lorsqu'un établissement récalcitrant refuse à mettre
véritablement sur pied une mécanique crédible de
traitement des plaintes ou, encore, lorsque le citoyen, en appelant devant lui,
a comme motif d'appel auprès du Protecteur du citoyen, pas qu'il est
insatisfait de la décision, mais que la mécanique aux niveaux
local et régional, passez-moi l'expression, c'est de la bouillie pour
les chats, et seulement dans ces cas-là. Et nous, on pense que ce serait
suffisant pour améliorer le fonctionnement régional et j'ajoute
le fonctionnement du traitement des plaintes.
J'ajoute qu'au niveau régional, à notre avis, la personne
qui agirait à ce niveau-là devrait constituer en quelque sorte un
greffe pour être certain qu'au niveau local les plaintes ne demeurent pas
sans suite, que toute plainte soit acheminée automatiquement au niveau
régional afin que le cadre régional chargé d'assurer
l'appel puisse, dans tous les cas, savoir, être informé
directement de ce qui se passe dans chacun des établissements.
Finalement, on pense que, si le Protecteur du citoyen voulait jouer un
rôle de développement, de formation et de service conseil
auprès des établissements et auprès des régies
régionales, il serait bienvenu de le faire.
Une phrase à propos des relations de travail. Simplement pour
dire que nous ne voyons aucune pertinence à la création d'un
nouveau recours qui viendrait dédoubler ceux qui existent
déjà en matière de relations de travail. C'est
déjà bien suffisamment... Il y a probablement plus de textes qui
régissent les droits des travailleurs, dans le contexte des conventions
collectives, qu'il n'y en a qui concernent les clients, les
bénéficiaires, et on pense que la protection qu'offrent le Code
du travail, les conventions collectives et tout ce qui en découle est
suffisante. Merci de votre attention.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Messieurs, nous
allons maintenant débuter la période d'échange, et je vais
reconnaître en premier lieu M. le député de
Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter
la bienvenue et remercier l'Association des centres d'accueil du Québec
de cette présentation aujourd'hui. C'est une excellente
présentation parce que la mécanique, entre autres, que vous nous
suggérez, elle repose sur des principes. Il n'y a pas seulement des
objectifs de service dans ce que vous nous proposez ou dans votre travail
quotidien. Il y a, oui, effectivement, la plus belle garantie qu'on puisse se
donner, c'est d'abord d'asseoir notre travail, notre intervention auprès
de clientèles qui sont probablement les plus vulnérables dans
tous les sens de la définition du mot, dans les centres d'accueil du
Québec. Et vous fixez un certain nombre de principes qui, me
semble-t-il, vont nous être extrêmement utiles au moment de
rédiger nos recommandations et qui, à prime abord, vont devoir
aussi être examinés comme éléments fondamentaux de
tout système de recours d'exercice des droits dans les systèmes
de santé et de services sociaux, au niveau de la loi qui s'apprête
à être examinée, article par article.
Alors, pour cela, il faut vous remercier et vous nous donnez une
réponse extrêmement précise aux questions que nous nous
posions. La mécanique que vous nous proposez, en termes de traitement
des plaintes et d'exercice des droits dans votre réseau à vous...
Vous nous dites, M. le directeur général: Nous n'irions pas
jusqu'à faire valider chacune des procédures des
établissements par le Protecteur du citoyen. Nous
préférerions fonctionner par protocole type. Tout en
reconnaissant que, de notre côté, en tout cas, la mécanique
que vous proposez s'approche de très près, sensiblement, de notre
position, avec quelques petites différences, j'aimerais quand même
examiner la possibilité que les personnes qui seraient chargées
du traitement des plaintes, de recevoir, de traiter, peu importent les gens aux
alentours qui aideraient à ce mécanisme-là, puissent
dépendre directement du Protecteur du citoyen.
Je pousse la question assez loin parce que, hier, nous avions quelqu'un
- c'était dans un
autre contexte, un contexte d'un centre hospitalier, le centre
hospitalier régional de Lanaudiè-re - qui nous disait: Dans mon
travail, évidemment, c'est extrêmement difficile parce qu'on
m'accuse, d'une part, de la part des usagers, d'en faire trop peu, et
généralement, du côté de l'administration des
établissements, d'en faire trop. Point à la ligne. (11 h 15)
Et cette personne a vécu un bon nombre d'années sous une
espèce de double régime de salarié de
l'établissement, dépendant du conseil d'administration, mais
relevant ou ayant des pouvoirs par un protocole du Protecteur du citoyen du
Québec. Il nous disait que cette façon d'être dans son
établissement l'a énormément appuyé, l'a
énormément supporté pour réaliser effectivement son
travail de réception et de traitement des plaintes. En particulier - je
vais revenir à la question plus précise tantôt - c'a
été étonnant de constater ça sur une année
dans ce centre hospitalier. Je sais, encore une fois, que c'est un milieu
différent. Sur 643 plaintes qui avaient été reçues,
plaintes au sens large, signalements, 36 % originaient du personnel de
l'établissement. J'ai comme l'impression que c'est souvent le cas dans
le type d'établissements qui sont regroupés au sein de votre
association, parce qu'encore une fois c'est les clientèles les plus
vulnérables que vous trouvez et qui sont les plus en situation de
détresse dans tout notre réseau.
Alors, est-ce que c'est totalement impensable pour vous que, dans votre
secteur en particulier, compte tenu de la particulière
vulnérabilité des personnes avec lesquelles vous travaillez en
termes d'usagers, on puisse penser que ça aille au-delà du
protocole de service ou du protocole avec le Protecteur du citoyen, mais que
ces personnes, par une formule quelconque, soient des représentants du
Protecteur du citoyen, à la base, dans l'établissement, dans le
traitement local des plaintes qui sont adressées?
M. Clair: Je pense qu'il y a une certaine confusion dans les
rôles de l'un et de l'autre. Nous, on pense qu'au niveau local le premier
responsable du traitement des plaintes, ça doit être le conseil
d'administration de l'établissement, le directeur général,
en ce sens que ce serait quand même un peu loufoque que le directeur
général ait beaucoup de responsabilités et le conseil
d'administration aussi, mais que, s'il y a une plainte qui puisse s'en
dégager, ça, ce n'est pas de son ressort. Nous, on dit qu'il y a
une responsabilité administrative, inhérente au fonctionnement
même de l'établissement, que l'employé, le salarié,
le cadre intermédiaire, le cadre supérieur, le directeur
général, du bas en haut de la pyramide, entre guillemets,
même si elle n'est pas très grosse, de l'établissement, au
niveau local, doit assumer quotidiennement, d'heure en heure, une
responsabilité à l'égard du traitement des plaintes. Parce
qu'une plainte en centre d'accueil d'hébergement, ça ne se
définit pas toujours avec un long document de cinq ou six pages pour
expliquer des choses extrêmement compliquées; c'est des choses
simples, la plupart du temps. Nous, on pense qu'il ne faut pas qu'on
éloigne l'employé, le cadre intermédiaire, le cadre
supérieur et ie directeur général de cette
responsabilité-là qui doit demeurer.
Maintenant, on est conscient que, si cette mécanique-là ne
donne pas satisfaction, que vient immédiatement dans la tête du
bénéficiaire une interrogation quant à
l'impartialité de la décision, nous, on dit: Si on ne veut pas
faire les choses trop trop compliquées, on pense qu'au niveau local, en
mettant sous l'autorité d'un comité formé de personnes
majoritairement de l'extérieur de l'établissement, qui
viendraient en quelque sorte représenter sinon le Protecteur du citoyen,
du moins l'esprit de neutralité, de simplicité,
d'impartialité et de rapidité qui est poursuivi par le Protecteur
du citoyen... Nous, dans la communauté, tous nos établissements
ou à peu près oeuvrent avec plein d'organismes communautaires
autour d'eux. Ils sont impliqués, ils ont des échanges avec la
communauté et ce serait facile de s'entendre sur une mécanique
qui permettrait, en incluant un représentant du conseil d'administration
ou deux, un représentant ou deux du comité des
bénéficiaires et une majorité de personnes provenant de
l'extérieur, au niveau local, de disposer de l'immense majorité
des plaintes.
Quel devrait être le lien avec le Protecteur du citoyen? Nous, ce
qu'on proposait, c'est que le Protecteur du citoyen pourrait être
responsable du développement, pour ces personnes-là, de
programmes de formation, qu'il puisse, comme je dirais, s'assurer non
seulement, au niveau du protocole type, que les grandes lignes sont
respectées, mais aussi que dans l'application - ça, on avait mis
ça, je peux vous l'indiquer, à la page 25... On dit: "Le
Protecteur du citoyen mettrait au point des outils de formation afin d'appuyer
les établissements dans l'application du protocole type: formation de
base pour les membres des comités d'établissement, formation plus
poussée pour les responsables régionaux. Il pourrait aussi mettre
sur pied un service d'expertise-conseil auquel les responsables locaux ou
régionaux feraient appel pour éclaircir les situations
particulièrement complexes du point de vue des droits."
Il faut bien que vous compreniez toute la portée et toute la
conviction qu'on met derrière l'affirmation de dire: II faut que les
solutions soient trouvées au niveau local. Ça, c'est
extrêmement important parce qu'autrement on craint la
déresponsabilisation et, entre vous et moi, on te voit aussi. Les
établissements où ça fonctionne extrêmement bien, ce
n'est pas à cause de l'existence d'un ombudsman ou d'un "ombuds-person"
qui vient un petit peu jouer sur les deux
tableaux en conflit d'intérêts, effectivement. Ce n'est pas
ça. Les établissements où ça va extrêmement
bien, c'est que ces établissements-là ont depuis longtemps
développé des attitudes auprès du personnel, une charte
des droits du bénéficiaire et une attention locale à la
personne, avec une petite mécanique simple qui fait en sorte que
ça devient normal, et non pas un geste de provocation pour un
bénéficiaire de dire au comité: Écoutez, telle
affaire, ça n'a pas de bon sens, ça ne marche pas, regardez ce
qu'on me fait, moi. C'est ça qu'on veut. Nous, on en a contre le fait de
compliquer les choses et de leur donner un formalisme et une envergure tels
que, finalement, ça va rendre le citoyen, le bénéficiaire
encore plus craintif d'utiliser le recours que ce qui est le cas
présentement.
M. Trudel: Oui.
M. Clair: Pour terminer, dans la mesure où, nous, on ne
voit pas que c'est une personne qui est désignée localement par
le Protecteur du citoyen - si c'était ça, imaginez - dans notre
réseau, ça voudrait dire 380 mini-petits protecteurs du citoyen
qui s'installeraient dans nos établissements. Je ne suis pas sûr,
d'abord, qu'il y a le volume de travail pour ça, premièrement.
Deuxièmement, ça formaliserait les recours en s'il vous
plaît et, finalement, c'est que ça ne responsabiliserait pas
localement. Nous, ce qu'on voit, c'est beaucoup plus un comité de
bénévoles qui s'intéresse à l'établissement,
qui a une certaine autorité pour dire à l'établissement:
Écoute, ça, ça n'a pas de bon sens.
M. Trudel: Très bien. Je pense que nous partageons ce
souci de la simplicité et de la responsabilité première au
niveau des établissements, effectivement, parce qu'il faut bien baliser
la notion de plainte. Vous avez absolument raison là-dessus: il faut
faire attention. Un signalement d'un apparent "malfonctionnement" administratif
peut s'appeler plainte à la limite, mais, dans le cadre de
l'administration ou des responsabilités de services que vous avez
à dispenser, ça s'appelle de l'organisation des services.
Parfois, ça peut se traduire par la négation d'un droit. Parfois!
Oui, effectivement, il faut que l'accueil soit fait à un premier niveau
qui responsabilise l'établissement sur la base d'un certain nombre de
principes que vous énumérez dans votre mémoire.
Je reviens encore un peu en disant que je comprends bien la
réponse au niveau du Protecteur du citoyen, nomination de la personne.
Au niveau régional, vous suggérez l'agrément de cette
personne, du mode de nomination de cette personne. Ça me semble, pour ma
part, une voie extrêmement instructive à regarder très
attentivement parce qu'on retrouve, encore là, votre principe de la
responsabilisation, peu importe le niveau, sauf que reconnaissant l'expertise
de la fonction ou de l'institution qui s'appelle Protecteur du citoyen au
Québec et du rôle-conseil, vous dites, au niveau régional,
dans la cascade, au niveau de l'appel, pour la mécanique: Celui-ci
devrait aussi agréer le mode de nomination et de
rémunération, il serait responsable du fonctionnement, etc.
Ça vaut pour le niveau régional, mais ça ne pourrait pas
valoir pour vous autres, ça, l'agrément? L'agrément
du...
M. Clair: C'est parce qu'au niveau local on ne voit pas une
personne, on voit un comité. Encore une fois, au niveau local, nous, on
dit: On est prêts à discuter des grandes lignes d'un protocole
type. Comment ils devraient être constitués, ces
comités-là? Quelle sorte de délai? Quelle sorte de
mécanique de fonctionnement qui devrait être prévue? Mais
on ne voit pas la nécessité... Nos établissements n'ont
pas, en général, la taille, ne sont pas d'une telle taille qui
nécessiterait la présence, en permanence, de quelqu'un, et nous,
on croit beaucoup à l'approche des bénévoles, des pairs,
des gens de la communauté...
M. Trudel: Oui, mais si...
M. Clair:... et au niveau régional... Ça, oui, mais
peut-être que je ne vous comprends pas.
M. Trudel: Si vous me permettez, monsieur... Le
Président (M. Dauphin): M. le député.
M. Trudel: Tout à fait. Une petite remarque. Je pense
qu'il faut exclure de notre raisonnement, M. le directeur
général, le fait que ce soit obligatoirement une personne
à temps complet qui ne fasse que cela dans l'établissement.
Évidemment, compte tenu de la grandeur, de la grosseur des
établissements, ce serait de la folie furieuse de prévoir cela,
mais la loi va vous faire obligation, là, de nommer un cadre
supérieur responsable de l'accueil et de la procédure de
traitement des plaintes. Vous, vous nous dites: Nous préférerions
- je prendrai cette expression - une mécanique encore plus douce, plus
communautaire faisant appel aux bénévoles et aux personnes de la
communauté. Il faudra toujours, au niveau de chacune des institutions,
des établissements, qu'il y ait une personne qui soit responsable. Moi,
ce que je vous demande tout simplement, c'est le mode de nomination, tel que
vous le suggérez au niveau de la régie régionale. Est-ce
qu'on ne pourrait pas retrouver ce mode aussi au niveau des
établissements, puisque vous aurez l'obligation d'avoir une personne
dans chacun des établissements? Là, il est dit cadre
supérieur, mais j'élimine ça au niveau théorique.
Il faut qu'il y ait une personne pour s'assurer que la mécanique, que la
procédure puisse en arriver à bénéficier, ce que
vous dites comme principe, à privilégier les droits des
bénéficiaires.
M. Clair: Pas nécessairement au niveau local parce que
nous, foncièrement, ce qu'on volt dans le projet de loi 120, c'est une
responsabilité administrative et non pas, je vous dirais, des
dispositions - je sais que ce n'est pas le terme - quasi judiciaires de la
plainte. Alors, de désigner un cadre supérieur qui est
responsable administrativement, de s'en occuper, c'est une chose. S'il ne
solutionne pas le problème et que ça doit être
considéré, s'il y a une plainte qui est portée au
directeur des services professionnels de rétablissement et que le
directeur des services professionnels règle le cas à la
satisfaction du bénéficiaire, c'est une situation, c'est
réglé, mais si le directeur des services professionnels constate
que, finalement, il ne s'entend pas, entre guillemets, avec le
bénéficiaire et qu'il doit en saisir le comité local,
à ce moment-là, il cesse d'être l'autorité.
L'autorité de disposer de la plainte, ce n'est plus lui.
L'autorité de disposer de la plainte, dans notre modèle, c'est le
comité local. Alors, c'est pour ça qu'on ne propose pas qu'au
niveau local la personne qui serait désignée en vertu de la
future loi 120 ait besoin d'être agréée, parce qu'elle
remplit un rôle administratif, à notre avis. Ce n'est pas elle
qui, en dernière instance locale, si je peux employer cette
expression-là, dispose de la plainte.
Le Président (M. Dauphin): M. le député
d'Anjou.
M. Trudel: Très bien. Merci.
M. Larouche: J'aime beaucoup votre approche, M. Gair. Ça
fait deux fois au moins qu'on entend la question, le fait que ça
dépende d'une attitude. C'est une attitude, alors, si je vous comprends
bien, c'est une approche client que vous avez.
M. Clair: Oui.
M. Larouche: On le voit, mettons, autant dans le secteur public
que dans le secteur privé. C'est une approche client et tout le monde,
en fin de compte, est concerné par son bénéficiaire. C'est
dans ce sens-là que vous le prenez quand vous parlez d'une question
d'attitude des employés. S'il y a une plainte, bien, en fin de compte,
tout le monde est concerné. Alors, est-ce que je m'égare si je
vous dis que ça devrait peut-être être une question
d'éducation du personnel et de tout le personnel à une approche
client?
M. Dolan: II faut bien comprendre que la clientèle que
l'on dessert dans les centres d'accueil, que ce soit les centres d'accueil
d'hébergement ou de réadaptation, c'est une clientèle,
très souvent, qui va être en centre d'accueil pendant toute sa
vie. Les personnes âgées vont entrer en institution vers
l'âge de 75 ans. Je vous rappelle que la moyenne d'âge, dans nos
centres d'accueil, est de 83 ans. Donc, elles peuvent rester 10, 15 ou 20 ans
dans le centre d'accueil. Les jeunes qui présentent une
déficience intellectuelle... ou la personne qui présente une
déficience intellectuelle était souvent dans nos centres
d'accueil, avant la politique d'intégration sociale, toute sa vie, 54
ans, 55 ans, 60 ans, tout dépendant de l'âge où elle
décédait. Donc, il faut bien comprendre que cette approche, nous,
on la vit. Moi aussi, je ne suis pas un professionnel du réseau, je suis
un président de conseil d'administration. C'est quotidien, les relations
que l'on a avec nos usagers ou nos requérants de services. Nous ne
voyons pas un client pendant 15 jours, le temps d'une hospitalisation, ou
pendant un mois. Si c'est nous autres qui mangeons froid chez nous, il va
manger froid pendant 10 ans. Vous comprendrez qu'on va le savoir. À
partir de ce moment-là, l'approche que vous avez décelée,
qui est une approche client, et la responsabilisation du personnel en place,
c'est pour le conseil d'administration auquel je siège, mais aussi au
niveau des instances de directeur général, par exemple, de cadre
supérieur, c'est une préoccupation quotidienne et, très
souvent, qui s'échelonne à très long terme. (11 h 30)
M. Clair: Pour vous donner un peu... Pour vous faire comprendre
toute notre philosophie de pensée, prenez le cas de -
l'intégration sociale des déficients intellectuels. 67
établissements de réadaptation de personnes présentant une
déficience intellectuelle au Québec sont en train de mener une
opération dite simplement de désinsti-tutionnalisation ou de
réintégration sociale de ces personnes-là. Vous
imaginez-vous à quel point - et j'aimerais ça que M. Proulx vous
en parle - le respect de ces personnes-là, ce n'est pas d'abord et avant
tout une question de droit, mais c'est beaucoup plus toute l'approche à
l'égard des familles, du bénéficiaire, des travailleurs,
des cadres? J'aimerais que M. Proulx vous en parle un peu.
M. Proulx (Gilles): Effectivement, quand vous parlez d'attitude,
ce n'est qu'une question d'attitude, parce qu'il y a place dans ce
contexte-là à des milliers et des milliers de plaintes. Si,
effectivement, on n'a pas une approche client dans cette optique-là de
désinstitutionnalisation, on fait face immédiatement, à
chaque coin de rue, à chaque tournant, à une possibilité
de multiples plaintes.
M. Larouche: II y a 90 000 personnes dans votre
réseau.
M. Dolan: Qui reçoivent des services à un
niveau...
M. Larouche: Alors, une plainte par année
par personne, ça vous ferait tout de suite 90 000 plaintes.
M. Clair: C'est pour ça qu'on dit que c'est
extrêmement important. Ce n'est pas rien. On a une tradition, comme je
vous dis, humaniste. On sait qu'on a encore des améliorations à
faire dans certains secteurs d'activité ou encore dans certains
établissements, mais là où les problèmes se
règlent, ça n'est pas d'abord et avant tout à cause d'un
encadrement juridique, structurel, légaliste, c'est d'abord et avant
tout... Bien sûr que ça ne nuit pas, que ça crée une
certaine pression, mais je dis: dans les faits...
M. Larouche: Mais ça ne s'oppose pas. M. Clair:
Non, ça ne s'oppose pas.
M. Larouche: Vous semblez, je pense, créer une opposition entre
ces deux choses-là. Vous pouvez avoir une approche client et vous pouvez
avoir un recours au cas où, ce recours pouvant être situé
au niveau de votre association, d'ailleurs, sans que ce soit l'ombudsman au
niveau du Québec. Il peut y avoir un recours sans... Prenons au niveau
des journaux comme The Gazette, il y a un ombudsman, je crois. Bon.
Alors, c'est au niveau d'une petite unité, tout comme tu peux avoir le
Conseil de presse. Alors, tout en louant votre approche client, je pense qu'il
n'y a pas nécessairement d'opposition avec le fait qu'il pourrait y
avoir un ombudsman au niveau du réseau ou au niveau d'une unité.
Je ne vols pas d'opposition, moi.
M. Clair: Je ne vois pas ça en termes d'opposition, pas du
tout, mais nous, notre point, simplement, c'est de dire: II y a un
équilibre à maintenir et il ne faudrait pas s'illusionner quant
à l'efficacité des recours, on le constate. Il y a une Commission
de protection des droits de la jeunesse. C'est bien. On collabore avec elle, on
en tient compte, mais il ne faut pas que le développement de ces
recours-là puisse être perçu par les travailleurs à
la base, les cadres, les directeurs généraux, les
établissements, quoi, comme étant source de
déresponsabilisation parce qu'un tiers va s'en occuper. C'est juste
ça.
M. Larouche: C'est que ce que je...
M. Clair: C'est une question d'équilibre entre les
deux.
M. Larouche: Alors, moi, ce que je comprends, pour terminer,
c'est que ce n'est pas parce qu'il y aurait un ombudsman que ça va faire
une approche client.
M. Clair: Non. M. Larouche: O.K.
M. Dolan: Un point, on croit aussi que vous devrez avoir dans
votre niveau de réflexion la possibilité de faire en sorte que
les politiques contradictoires que nous recevons quotidiennement dans les
centres d'accueil soient de plus en plus diminuées. On vous donnait un
exempie des personnes âgées qui demandent des soins corporels,
mais la liste pourrait être très longue. Nous n'avons qu'à
penser présentement que les coroners tentent de dire, à la suite
d'incendies dans les centres d'accueil, qu'il devrait être strictement
défendu pour une personne âgée qui est
institutionnalisée chez nous de fumer. Alors, plus le droit d'avoir
même une allumette pour cette personne. C'est des coroners. On a des
rapports ça d'épais qui nous le disent. Vous imaginez bien que la
Commission des droits et libertés de la personne va s'opposer
strictement à cette approche-là en disant: Ce n'est pas parce
qu'une personne a 75 ans que vous allez l'empêcher de fumer. Alors, vous
vous imaginez que ce genre de politiques contradictoires, on en a
quotidiennement. Alors, on souhaiterait faire en sorte de ne pas mettre un
niveau qui va venir encore compliquer la vie de nos établissements.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Nelligan.
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président, M. Clair et
toute l'Association des centres d'accueil du Québec. Je voudrais
débuter en disant merci. Je pense que vous avez certainement
précisé les questions que nous voulons étudier. Et je
pense qu'aujourd'hui nous avons reçu une voix assez claire de 380
établissements publics dans notre réseau sur votre philosophie.
Je voudrais féliciter l'Association pour la priorité qu'ils ont
mise sur le client, sur la résolution des problèmes pratiques,
sans créer d'autres niveaux. Vous avez peur de la duplication de
réseaux et tout ça. Je pense que c'est un peu dans la même
direction que nous avons commencé le projet de loi 120. Peut-être
que nous pourrons avoir différentes opinions sur comment faire
ça, mais je pense que ce sont exactement les choses que nous voulons
faire.
Vous avez utilisé, je pense, à la dernière
remarque, le mot "philosophie". Aussi, je voulais faire quelques remarques sur
ça, parce que je pense que vous avez privilégié une
philosophie de médiation plutôt que de confrontation. Je pense que
nous sommes en train de privilégier cette approche, peut-être,
dans le monde légal aussi, parce que nous avons trouvé l'approche
légale quelquefois, et souvent trop sèche, trop froide, et pas
assez proche du peuple. Je pense que nous avons besoin des deux.
J'arrive à ma première question. Je comprends beaucoup vos
interventions, mais aussi nous avons entendu de plusieurs groupes que, si la
protection est juste à l'établissement, ses droits n'ont pas
semblé assez bien protégés. Je
vous le demande, avec l'idée du projet de loi 120 de
subventionner les comités d'usagers directement du gouvernement... Nous
avons parlé d'entre 5000 $ et 70 000 $. Avec ça, ce n'est pas les
sous. Aussi, avec peut-être un sujet un peu "touchy" entre nous, les
conseils unifiés des établissements. Est-ce qu'à ce
moment-là peut-être nous pourrons trouver un compromis entre votre
question de créer un double réseau, une duplication, et tu veux
garder dans un niveau les responsabilités au niveau de
l'établissement? Mais il y a l'autre côté de la
médaille que nous avons entendu, que le peuple veut avoir plus de
neutralité. Est-ce que, à ce moment-là, peut-être
avec les conseils unifiés, nous pourrons mettre une place là pour
bien protéger les citoyens dans les établissements qui sont
unifiés?
M. Clair: Écoutez, une chose est certaine, nous n'avons
aucune objection à ce que le projet de loi 120, aux articles 28 et
suivants, vienne faire obligation aux établissements, par exemple, de se
doter d'une mécanique de traitement des plaintes et de venir formaliser
ça, de s'assurer que les établissements, au-delà de ce
qu'ils font spontanément présentement, en aient une obligation.
Nous, on n'a pas de difficulté avec ça. Deuxièmement, en
ce qui concerne le comité des usagers, on est la catégorie
d'établissements sans doute la plus concernée par ça, et
on pense que le développement du comité d'usagers peut, non pas
en lui confiant un rôle d'arbitre, parce qu'il deviendrait juge et partie
lui aussi, mais que, par son simple développement et son sain
fonctionnement, il peut assurer une communication constante avec la direction
de l'établissement et être un outil extrêmement important
pour éviter la naissance de situations à plaintes, si vous
voulez. Dans ce sens-là, sans aucun doute qu'on est favorables, nous, au
renforcement. C'est un des points qu'on a mentionnés dans notre
mémoire que de favoriser le développement du comité des
bénéficiaires, le comité des usagers.
En ce qui concerne les conseils d'administration unifiés, on
aurait beaucoup de choses à dire. D'abord, je vous indique que notre
association n'a pas une opposition de principe, au contraire. Dans le
mémoire qui a été présenté à la
commission parlementaire, il y a déjà, quoi, tout près
d'un an, sur l'avant-projet de loi, nous nous étions prononcés
favorablement à un certain regroupement des conseils d'administration
sur un même territoire. Maintenant, cela étant dit, comme position
de principe, il est certain que l'unification des conseils d'administration au
niveau régional pour certains types de centres, ou au niveau local pour
d'autres, ne contribuera pas à rapprocher le citoyen consommateur, pour
employer les mots du ministre, du citoyen décideur. Il faut être
bien conscients qu'avec les conseils d'administration unifiés il y aura
moins de personnes qui vont siéger sur des conseils d'administration.
Dans notre réseau, il y a 5000 personnes qui siègent
présentement sur les 380 conseils d'administration ou à peu
près que nous représentons. Si on passe à environ 150 ou
200, c'est évident que ça fait moins de gens qui sont
impliqués, moins de bénévoles, si vous voulez, qui sont
impliqués dans la gestiqa. de l'établissement.
C'est sûr aussi qu'en regroupant des établissements qui ont
des cultures différentes, deux centres d'accueil d'hébergement,
à moins de 25 kilomètres de distance... Ils peuvent avoir une
culture et une tradition différentes et, entre guillemets, très
bien, tous les deux, offrir une bonne qualité de service, mais
fonctionner, pour différentes raisons historiques, différemment.
C'est sûr que, par l'inclusion de ceux-ci sous un seul et même
conseil d'administration unifié, on ne peut pas prétendre que,
pour la proximité entre le membre du conseil d'administration et
l'usager, c'est un plus. Maintenant, on ne dit pas qu'il ne faut pas ie faire
pour autant, l'unification des conseils. Mais, sur ça, on ne peut pas
prétendre que ça va être mieux. C'est...
M. Williams: Merci pour votre réponse franche sur
ça. Mais, sur les questions que nous étudions aujourd'hui, est-ce
que ça va être peut-être la place de bien protéger,
sans dire de commentaires sur le principe de l'unification ou non, mais si nous
avons une douzaine d'établissements qui sont moins grands qu'une chose
unifiée, est-ce que ça va être la place d'avoir... Ma
question est... J'ai peur d'établir un protecteur du citoyen en
santé ici, à Québec. C'est trop loin. O.K. Mais aussi, je
ne suis pas certain s'il doit y en avoir un dans chaque établissement.
Je demande la question simple comme ça: Au niveau d'un conseil
unifié, pensez-vous que le principe, sans discuter le principe de
l'unification, peut être réglé à ce niveau?
M. Proulx: À partir du moment où, dans le fond,
dans les conseils unifiés, ce sont surtout les citoyens et peu de
fonctionnaires, je pense qu'effectivement le traitement de la plainte va
être beaucoup plus important. Au moins, les gens... Il y a
peut-être plus d'impartialité, compte tenu que c'est des citoyens,
ce qu'on appelle les "outsiders" du système, qui vont siéger sur
ce conseil d'administration là. À partir du moment aussi
où ils vont en faire une préoccupation en vertu du projet de loi,
parce qu'on doit nécessairement, nous, comme directeur
générai, déposer tout genre de plainte au conseil
d'administration et, à partir du moment où il y a des citoyens
qui ne sont pas membres de réseaux, qui vont recevoir cette
information-là, je pense que ces gens-là vont s'assurer que les
plaintes soient davantage traitées et non pas, excusez le mot
camouflées.
M. Williams: Oui. O.K. Merci.
M. Clair: Si vous permettez, il y a cependant une distinction
à faire entre les centres d'hébergement de soins de longue
durée, qui ont comme territoire une municipalité régionale
de comté, et les centres de réadaptation qui auront une vocation
régionale. Je pense - écoutez, c'est une question
d'évaluation - que chacune des municipalités régionales de
comté, probablement qu'effectivement ce n'est pas un territoire
suffisamment grand que, même s'il y a deux ou trois centres d'accueil
d'hébergement qui sont regroupés, une seule mécanique, un
seul comité du type de celui qu'on propose pourrait être suffisant
au niveau local.
Maintenant, au niveau de grandes régions où il y aura la
réunion de plusieurs... Prenons la déficience intellectuelle.
Théoriquement, le modèle proposé par le ministre pourrait
conduire de 67 à 17 centres de réadaptation. Prenez l'île
de Montréal où il existe, si ma mémoire est bonne, 16
centres de réadaptation en déficience intellectuelle. Je
trouverais que, s'il n'y avait qu'une seule mécanique pour toute
l'île de Montréal, ça risquerait d'être pas mal loin.
Donc, j'ai tendance à faire une distinction entre ceux qui
opèrent au niveau d'un territoire de MRC et ceux qui opèrent au
niveau d'un territoire de grande région.
M. Williams: Merci. La dernière question.
J'interprète mon rôle comme député un peu comme
protecteur du citoyen, et je pense qu'avec ça nous avons
déjà commencé avec 125 protecteurs et protectrices des
citoyens. Dans votre expérience dans les 380 établissements, quel
est le rôle jusqu'à date de la deputation? Est-ce que vous avez...
Quels étaient les types d'intervention? Avez-vous une intervention
typique d'un député ou... Comment avez-vous établi le
rôle dans cette question?
M. Clair: Je laisserai un directeur général
répondre à la question. Moi, je peux vous donner mon
expérience personnelle...
Une voix: Oui, oui, c'est M. le ministre. (11 h 45)
M. Dolan: Voulez-vous qu'on soit francs ou qu'on soit gentils
pour les députés?
Une voix: Francs.
M. Clair: Je vais vous donner mon expérience personnelle.
J'ai quand même été...
Le Président (M. Dauphin): Alors, vous pouvez être
francs.
M. Williams: Bien. Nous sommes ici pour les réponses.
M. Clair: J'ai été quand même
député dans un contexte rural d'une ville de province pendant
huit ou neuf ans. Je vais vous dire - et je suis sensible au Protecteur du
citoyen quand il souligne ça - que les gens qui venaient me voir pour se
plaindre, souvent des personnes âgées, parfois des familles de
déficients intellectuels, quand ils venaient se plaindre à
l'égard de quelque chose, c'était très souvent la
nourriture, mais il faut dire qu'il y a un gros changement dans la philosophie
des centres d'accueil d'hébergement au cours des dernières
années. Je pense aussi que dans les hôpitaux de longue
durée on continue de faire attention à la
diététique et d'avoir des repas qui sont
équilibrés. Mais mettons qu'on s'est un peu convaincus, avec le
temps, qu'avec une moyenne d'âge de 83 ans, parfois 85 ans dans nos
établissements, bien, même si les habitudes alimentaires des
personnes âgées n'étaient peut-être pas ce qui
était de plus pertinent sur le plan de leur qualité de vie, de
leur santé théorique, ils avaient des habitudes alimentaires un
peu différentes de notre génération et qu'il faudrait
peut-être respecter ça un peu plus. Donc, on a essayé de
s'ajuster là-dessus. Sans doute qu'il y a moins de plaintes.
J'allais vous dire que beaucoup des plaintes concernaient ça,
l'alimentation ou encore les heures de l'alimentation, les heures de souper,
les heures de repas, ou encore, du côté de la déficience
intellectuelle, le manque de services. C'était souvent ça.
Mais je vais vous dire, savez-vous le souvenir que je garde? C'est
qu'à peu près à chaque fois, quand la famille ou la
personne âgée venait me voir, elle venait se plaindre et me
disait: Parlez-en surtout pas. Pourquoi parlez-en surtout pas? Parce que, vu
que je suis hébergée, je suis peut-être une vieille
personne, mais je ne suis pas assez vieille ou je suis assez lucide pour savoir
que, si je vais me plaindre dans l'établissement, peut-être que je
vais avoir des représailles. Et ça, c'est vrai. Le Protecteur du
citoyen le soulève, et c'est vrai que c'est présent.
Et nous, on dit: Si on veut se sortir de ça, on pense que la
meilleure façon, c'est ce que j'appelais tantôt de rendre naturel,
pas compliqué, abordable, fonctionnel, simple, le recours à un
comité local. Parce que quand la personne a fait le déplacement
pour venir voir son député ou pour aller voir l'ombudsman, en
soi, elle a fait une démarche qui lui a demandé beaucoup
d'énergie, beaucoup de conviction et, au dernier moment, elle dit: Je
vous le dis à vous, mais ne faites surtout rien. Hein? Alors, c'est un
peu contradictoire parce qu'elle a peur des représailles. Alors nous, on
dit qu'il faut sortir de ça.
M. Williams: Le député et le Protecteur du citoyen,
dans ce contexte, c'est le même, c'est en dehors de
l'établissement.
Je pense que les deux autres membres veulent faire une réponse
à la question aussi. Franche.
M. Clair: Moi, je vous ai donné mon expérience.
M. Williams: Non, non. Merci beaucoup pour ça.
M. Proulx: Non. Effectivement, les interventions qu'on peut
avoir, c'est de voir s'il y a de la place, parce qu'on est en liste d'attente.
Beaucoup d'interventions sur les listes d'attente. Je regarde la
déficience intellectuelle. Au niveau des externes, des fois, ça
va jusqu'à trois ans en liste d'attente. Et on peut avoir une
intervention, à savoir s'il est loin en liste d'attente, dans les deux
ans ou les trois ans ou s'il peut monter. Bon. Ça, on a ce genre
d'intervention là ou, carrément, l'intervention dans les
processus de désinstitutionnalisation où le père a
appelé directement. En tout cas, j'ai le ministre comme
député. Le père ou le parent a appelé directement
au bureau du ministre, et le bureau du ministre m'a appelé et a dit:
C'est vrai que telle personne va être
désinstitutionnalisée? Et là, effectivement, on explique
le contexte de la désinstitutionnalisation.
M. Clair: Parce qu'il faut bien comprendre, dans ce contexte
particulier, que, bien souvent, par méconnaissance du processus
d'intégration sociale, les premiers qui s'opposent à la
désinstitutionnalisation d'une personne à qui, pourtant,
ça profite énormément, bien souvent, c'est la famille.
Le Président (M. Dauphin): Merci. Alors, même si le
temps est presque terminé, deux petites questions. Une de moi-même
et une du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Le
rôle que vous souhaitez au Protecteur du citoyen s'apparente un peu au
rôle de la régie régionale prévue dans le projet de
loi 120, aux articles notamment 48 et 265. C'est un rôle de surveillance.
Alors, j'aimerais savoir comment vous départagez le rôle des
deux.
M. Clair: Je connais bien les articles, mais je ne les ai pas en
tête par coeur. Écoutez, la différence qu'on voit, nous,
par rapport à la mécanique qui est proposée... les deux
théories sont valables. Le ministre, dans son projet de loi 120, dit,
dans un premier temps, comme nous, la première responsabilité,
ça doit être au niveau local. Et on dit la même chose. Nous,
on ajoute au niveau local de dire: Oui, mais, si on veut disposer de la
dimension de l'impartialité du recours, on pense qu'il faut que,
dès le niveau local, il y ait une mécanique qui permette que le
traitement de la plainte garantisse, rencontre des critères
d'impartialité, de neutralité, d'efficacité et de
simplicité. Donc, ça, c'est une différence. On ajoute.
Au niveau régional, là, il y a une différence
majeure. Le ministre propose, suivant la même logique de
responsabilisation de la structure décisionnelle, opérationnelle,
normale, qu'un cadre supérieur, au niveau régional, soit en
autorité pour disposer de la chose. À ça, nous, on dit:
Là, il y a un choix à faire. On pense que la mécanique
qu'on proposait, à savoir que la personne qui soit là ne soit pas
une personne qui puisse agir sur les établissements, pas tellement
à partir de son autorité administrative régionale, mais
beaucoup plus à partir d'un pouvoir moral, à cause de son
caractère d'impartialité, de neutralité et qui est
reconnue par le Protecteur du citoyen, qui est accréditée, en
quelque sorte, par le Protecteur du citoyen... Alors, là, on change le
rôle au niveau régional.
Ça n'ajoute pas tellement. Sur le plan financier, ça ne
coûte pas plus cher. C'est juste la façon de désigner les
personnes. Est-ce qu'on compte plus sur une autorité hiérarchique
administrative de la régie à l'égard de
l'établissement, ou si on compte plus sur un pouvoir moral d'une
personne au niveau régional, qui est dans un contexte de
neutralité et qui peut dire aux établissements: Tu corriges
ça, sinon ça va aller dans le public et sinon, bon, les mesures
que le Protecteur du citoyen... s'assimilent à celles que le Protecteur
du citoyen peut prendre? Et le seul pouvoir qu'on réserve au niveau du
Protecteur du citoyen, au niveau national, c'est quand visiblement il n'y a pas
de mécanique de traitement des plaintes digne de ce nom qui est
établi dans un établissement et qu'un bénéficiaire,
qu'un usager s'adresse directement, à ce moment-là, au Protecteur
du citoyen... ou s'il prétend que les règles de justice, ou les
règles établies en vertu des protocoles types et l'esprit de la
loi générale, si on veut, ça n'a pas été
respecté, ni au niveau local, ni au niveau régional, et qu'il
puisse, à ce moment-là, en appeler.
Est-ce que ça s'apparente aux pouvoirs prévus à
l'article 48? Sans aucun doute, en ce qui concerne certains d'entre eux. Mais
on pense, nous, qu'il y a une distinction à faire entre, je dirais, le
traitement administratif, sous l'autorité hiérarchique, normale
d'un établissement, et un tiers indépendant, impartial qui vient
porter un jugement quand la plainte ne se résout pas à la
satisfaction de l'usager.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. Merci beaucoup.
Alors, une dernière question pour M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: C'est justement, M. le Président,
complémentaire à ce que vous venez de demander, parce qu'il faut
essayer d'établir la position clairement. On comprend la
mécanique que vous nous proposez, mais me plaçant dans ce qui
nous est présenté comme mécanique dans le projet de loi
120, est-ce que vous nous dites qu'avec des ajustements il y a là une
progression, il y a là une mécanique qui est acceptable - les
ajuste-
merits, vous nous les donnez au niveau local et régional; c'est
plus que des ajustements, là - sauf que ce n'est pas suffisant? Il faut
y ajouter le recours externe dans les conditions que vous venez de
décrire. C'est important.
C'est que les deux premières étapes, les deux premiers
niveaux, c'est correct, on adhère à ça, mais à la
condition qu'il y ait un troisième parce que c'est tout à fait
différent si ça impute le raisonnement sur les deux premiers
niveaux, si le troisième n'est pas là. Est-ce que c'est juste, ce
que je dis là, quant à votre position?
M. Clair: À la condition que c'est ces mots-là avec
lesquels j'ai peut-être de la difficulté. Je vous dis: Oui, nous
sommes favorables à ce qu'il y a de proposé au niveau local par
le projet de loi 120. On pense qu'on peut l'enrichir. Au niveau
régional, nous sommes d'avis qu'il y a lieu de modifier le rôle de
la personne. Et, au niveau du Protecteur du citoyen, on n'a pas de bons
arguments, si vous voulez, pour dire qu'on s'opposerait à ce que le
Protecteur du citoyen puisse avoir, comme le soulignait Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve tantôt, des
responsabilités que je ne connais pas très bien au niveau des
prisonniers, et qu'il ne puisse pas y en avoir au niveau de nos
bénéficiaires.
Alors, prenez le pas... Ce n'est pas tant à la condition... Ce
n'est pas tant qu'on pose une condition parce qu'on pourrait se contenter des
deux premiers niveaux, mais nous, on dit: Si on veut faire un travail complet
de revoir la mécanique de traitement des plaintes, il faut qu'on traite
ça à trois niveaux: au niveau local, au niveau régional et
qu'il y ait un rôle précis, déterminé pour le
Protecteur du citoyen, qu'on accepte volontiers.
M. Trudel: Très bien, merci.
Le Président (M. Dauphin): Dans des cas bien
spécifiques, comme vous le mentionnez dans votre mémoire.
Alors, au nom de tous les membres de la commission des institutions, Me
Dolan, M. Clair et M. Proulx, nous tenons à vous remercier
sincèrement de votre participation à nos travaux et vous
souhaiter un bon retour.
M. Clair: C'est nous qui vous remercions.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Dauphin): Je demanderais à
l'Office des personnes handicapées du Québec de s'avancer
à l'avant. Nous débuterons dans deux minutes. Je suspends pour
deux minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 56)
(Reprise à 12 h 6)
Le Président (M. Dauphin): Nous reprenons nos travaux et
nous souhaitons la bienvenue à l'Office des personnes handicapées
du Québec, qui est représenté par son président, M.
Gaston J. Perreault. Je vous demanderais de nous présenter la personne
qui vous accompagne, et vous avez environ 15 minutes pour nous présenter
votre exposé.
Office des personnes handicapées du
Québec
M. Perreault (Gaston J.): D'accord. Merci, M. le
Président. Premièrement, j'aimerais présenter Mme Lise
Constantin, qui est avec moi, qui m'accompagne et qui est chef du Service des
analyses aussi à l'Office des personnes handicapées.
Tout en commençant, j'aimerais que vous me pardonniez si je ne
prends pas les 15 minutes que vous m'allouez. J'aimerais mieux échanger
avec les membres de la commission sur plusieurs sujets en ce qui regarde le
mémoire que nous avons présenté. Mais j'aimerais quand
même, au tout début, rappeler aux membres de cette commission que
c'est à la fin des années soixante-dix que le législateur
a cru utile et nécessaire de créer l'Office des personnes
handicapées du Québec, auquel il donna comme mission de
promouvoir les droits et les intérêts des personnes
handicapées, de veiller à la coordination des services et de
favoriser leur intégration scolaire, professionnelle et sociale.
À ce moment, il ne lui sembla pas opportun de doter ce nouvel organisme
de pouvoirs d'enquête ou de recommandation. C'est à ce titre que
l'Office s'associe à des partenaires sociaux et autres pour
réaliser dans le temps cette intégration scolaire,
professionnelle et sociale des personnes handicapées.
Le Protecteur du citoyen est, pour l'Office, un de ces partenaires
importants avec qui nous travaillons, et c'est pourquoi nous sommes heureux de
faire connaître notre point de vue aux membres de cette commission en ce
qui concerne l'indépendance de son action, l'accessibilité
à ses services et l'efficacité du recours qu'il peut avoir,
à un moment surtout où l'Office des personnes handicapées
s'apprête à transférer bon nombre de ses programmes
vis-à-vis des ministères ou dans le réseau même de
ces mêmes ministères.
Le mémoire de l'Office est succinct en ce sens qu'il recommande
que les pouvoirs du Protecteur du citoyen soient étendus au
réseau du ministère de la Santé et des Services sociaux
ainsi qu'au réseau du ministère de l'Éducation. L'Office
ne s'est pas attardé aux moyens et à la façon de faire,
mais je serais très heureux d'en discuter avec les membres de cette
commission ou, si vous me permettez un plagiat, si vous voulez, en terminant,
en me référant au ministre responsable de J'Office, on s'est
attardés sur le
quoi, mais on n'a pas perdu trop de temps sur le comment.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le
président. Est-ce qu'il y a un membre de la commission qui désire
débuter la période d'échange? M. le député
de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
M. Trudel: Assez simplement, vous êtes d'accord avec ce
qu'on appelle généralement un recours externe.
M. PerreauK: Oui.
M. Trudel: ...au Protecteur du citoyen. Est-ce que vous souhaitez
qu'il soit balisé, ce recours externe, en quelque sorte, je dirais
à la manière suggérée par l'Association des
hôpitaux du Québec et, jusqu'à une certaine limite,
l'Association des centres d'accueil, en disant: C'est de troisième
niveau, il faudra d'abord que ça s'exerce au niveau des
établissements, ajusté au niveau régional, et ce ne serait
qu'au troisième étage ou en dernier recours que nous devrions
aller au Protecteur du citoyen, ou si vous dites: Laissons ça
complètement ouvert?
M. Perreault: II m'apparaît important qu'on puisse avoir un
système ou des moyens qui favorisent les échanges et les
communications entre le client et le fournisseur de services. En d'autres mots,
on pense que ce qu'on souhaite à l'Office, c'est que ce soit
réglé au plus bas niveau possible. En cas d'insatisfaction, la
cascade qui serait établie, nous aimerions justement que le Protecteur
du citoyen soit la dernière instance. Même si, par hasard, la
personne handicapée se rendait au Protecteur du citoyen en
première instance, le Protecteur du citoyen aurait la
responsabilité, à ce moment-là, de la conseiller, de
l'amener à retourner à la première instance. Il ne s'agit
pas de créer de l'ingérence additionnelle dans les
établissements ou dans les réseaux, mais de s'assurer que ces
réseaux qui sont mis en place pour donner des services à des
clients québécois ne mélangent pas leurs
responsabilités administratives et leur raison d'être, et
qu'à la fin on puisse trouver quelqu'un qui est neutre pour être
capable d'apporter un peu de lumière la où il y a du conflit.
M. Trudel: Votre réponse, ce que vous venez de nous dire,
je veux le répéter, est importante parce que vous êtes,
à la base, un organisme de défense et de promotion des droits. On
reviendra tantôt probablement sur tous les transferts, mais il faut
toujours accoler à la réponse que vous venez de nous donner votre
définition, ce que vous êtes dans le système. Pour cette
commission et aussi pour d'autres commissions qui auraient à examiner,
par exemple, le projet de loi 120 sur l'organisation des services de
santé et des services sociaux, votre jugement prend une
particulière importance. Dans ce contexte aussi, votre rôle de
défense et de promotion des droits, des intérêts des
personnes handicapées, vous l'avez mentionné très
brièvement dans votre présentation, touche également le
monde scolaire.
M. Perreault: Absolument.
M. Trudel: C'est le premier organisme avec lequel nous pouvons
ici discuter de l'extension du mandat du Protecteur du citoyen dans un autre
secteur que celui de la santé et des services sociaux.
Évidemment, on questionne plus là-dessus aujourd'hui, parce qu'il
y a une mécanique qui est en marche au niveau de la
réorganisation. Sauf erreur, M. le Président, on n'a eu d'opinion
encore, ici, d'aucun organisme sur l'extension du mandat du Protecteur du
citoyen au monde scolaire. Dans toute la politique d'intégration des
personnes handicapées au milieu naturel, je pense qu'il est juste
d'affirmer que l'endroit où il semble y avoir le plus de
difficultés, hormis l'aide matérielle qui, là, est une
question de subventions, de disponibilité de fric, c'est le monde
scolaire. Probablement que les autres députés, ici, vont
être d'accord pour dire qu'ils reçoivent un bon nombre de plaintes
de parents, de familles, d'amis quant à l'intégration scolaire
des personnes handicapées. La question est simple, à partir de
là, et je vous demanderais d'être très clair
là-dessus, s'il vous plaît, est-ce qu'il faut aussi étendre
la responsabilité du Protecteur du citoyen, dans la même
philosophie que vous venez de nous énoncer, au monde scolaire?
M. Perreault: Oui. Ma réponse à ça est
courte et précise. Oui, nous le croyons. Il existe aussi, avec la loi
107 qui a été mise en place, un modèle qui est celui que
le monde scolaire s'est donné. Là-dessus, l'Office, dans le
temps, lorsque cette loi a été présentée à
la commission parlementaire, a présenté un certain nombre de
représentations. La loi 107 donne un recours, donne le système de
plaintes qui, à la fin, peut même aller au niveau des commissaires
qui doivent trancher le jour où ça leur arrive, mais ça
arrête là. C'est là, à mon avis, que le bât
blesse dans un certain sens, dans cette façon de faire, un peu comme on
pourrait retrouver dans le système de la santé et des services
sociaux. Ça arrête à la régie régionale. Il
m'apparaît important qu'il y ait une instance additionnelle qui soit
dégagée, qui ait une responsabilité.
Je me permets de le mentionner, le Protecteur du citoyen ne
relève pas d'un ministre, ne relève pas d'un ministère, il
relève de l'Assemblée nationale, des élus, des élus
qui ont voulu se donner, à l'étendue du Québec, quelqu'un
qui, avec un oeil de l'Assemblée nationale, regarde la façon dont
les citoyens sont traités la façon dont ils sont reçus,
parce qu'à ce moment-
là ils sont seuls. C'est à ce titre-là, je crois,
que l'ombudsman, le Protecteur du citoyen devrait être aussi
présent dans d'autres réseaux qui, eux aussi, vivent des deniers
publics et pour lesquels il y a des citoyens. Il me semble qu'il faut qu'il
aille dans ces endroits-là. À titre de président de
l'Office, je trouve parfaitement incorrect que des citoyens soient
laissés à eux-mêmes et qu'ils n'aient que des cours de
justice, avec tout ce que ça peut comporter, et qu'ils doivent fouiller
dans leur propre portefeuille pour donner des honoraires à des avocats,
payer des frais et aller se défendre, si vous voulez, présenter
leur point de vue de façon légale à des juristes, à
des juges qui doivent trancher quand la partie, appelons-la adverse - quand on
est rendu à ce niveau-là, ça devient une partie adverse -
elle, puise dans les fonds publics pour présenter sa position.
Je pense que le Protecteur du citoyen, s'il avait été
présent dans ces milieux-là, on n'aurait pas retrouvé au
cours des dernières années, je crois, dans les journaux, autant
de causes sur lesquelles les parents se doivent de prendre eux-mêmes leur
affaire en main et aller devant les cours de justice. Il y a des cas que vous
connaissez et qui durent depuis des années, qui ne sont pas encore
réglés et même, à ce moment-là, quand les
représentants publics perdent devant des juges, on va en appel.
M. Trudel: Réponse extrêmement claire. Merci
là-dessus. Il y avait Mme Constantin, qui opinait du bonnet...
Mme Constantin (Lise): Ah bon!
M. Trudel: En parlant, en particulier, je posais ma question sur
le nombre de plaintes, entre guillemets, adressées au monde scolaire.
D'abord, je veux faire confirmer ça pour les membres de la commission,
si l'appréciation que je donnais dans mon préambule est
exacte.
Mme Constantin: Tout à fait exacte, M. le
député. Ce qui nous apparaît évident, c'est que le
monde scolaire est organisé pour administrer des choses selon une
formule collective. On établit des groupes-classes composés
d'enfants qu'on réduit assez à l'homogénéité
et auxquels on applique des formules horaires, des formules pédagogiques
qui sont très bonnes dans la plupart des cas, parce que les enfants
s'adaptent, mais nous avons affaire à des personnes qui sont
différentes, et une personne handicapée, une personne qui a une
déficience est très différente d'une autre personne qui
pourrait avoir des déficiences comparables, mais ces déficiences
se traduisent par des incapacités, des façons de faire qui sont
très variables d'une personne à une autre. Je dis que c'est dans
l'appréciation de cette différence et des moyens de pallier aux
conséquences de cette différence que nous éprouvons des
problèmes. Il m'apparait que l'intervention éducative que peut
avoir le Protecteur du citoyen ne peut être que bénéfice au
niveau des commissaires d'écoles qui, malheureusement, n'ont pas tout le
temps à consacrer à des recherches, pour apprécier la
différence dans chacun des cas qui leur sont
présentés.
M. Perreault: Les gens qui nous ont précédés
ici, les gens de l'ACAQ avec lesquels nous sommes en accord avec cette attitude
client qui doit exister, qui doit persister, qui doit être
présente à tous les niveaux, je crois que le Protecteur du
citoyen, comme Mme Constantin l'a mentionné, ne serait pas seulement
quelqu'un à qui on pourrait nécessairement référer
des plaintes, il pourrait être ce trait d'union qui aide aussi à
amener la compréhension et la formation, justement pour éviter
des plaintes. Et ce serait une façon extraordinaire de mesurer comme
indicateur de succès un ombudsman non occupé qui ne reçoit
pas de plainte du réseau. On pourrait, à ce moment-là,
concevoir que les plaintes se règlent au plus bas niveau possible.
Lorsqu'on parle de désinstitutionnalisation, lorsqu'on parle
d'intégration dans le milieu et lorsqu'on parle d'intégration, on
parle des personnes, des adultes. Dans le milieu scolaire, lorsqu'on parle
d'écoles spéciales et même de classes spéciales,
comment est-ce possible d'amener des personnes qui vont aller à
l'école pendant 15 ans, 14 ans, 16 ans, de les garder
ségréguées pour que, lorsqu'elles vont arriver à
l'âge de 21 ans, leur dire: c'est l'âge où tu
t'intègres, quand toute sa vie, l'apprentissage qu'on lui a fait, c'est
d'être à part, et tout à coup il a l'âge adulte
d'être avec les autres?
À l'école, dans la classe, on apprend aussi, pas seulement
des personnes handicapées, les élèves non
handicapés aussi apprennent que dans le milieu, dans la
société, ce n'est pas tout le monde qui est fait de la même
façon. Il y a des gens qui ont des différences, et c'est ce qui
fait une société de gens avec des capacités, des
potentiels différents, mais qui vivent ensemble, pas à part les
uns des autres. Ce qui crée une société difficile, qui ne
se comprend pas et où il existe beaucoup de désordre, ce sont les
groupuscules qui développent leur propres intérêts.
L'apprentissage à l'école, c'est aussi l'apprentissage social et,
à ce titre-là, je pense que les personnes handicapées ont
le droit d'être présentes dans leur milieu.
M. Trudel: Merci beaucoup, c'est... Je vous demanderais...
M. Perreault: J'ajouterais, par contre, si vous me permettez, que
la présence du Protecteur du citoyen et le travail de l'Office...
Lorsqu'on parle d'intégration, le dernier moyen que l'Office favorise,
c'est l'obligation, c'est la menace, c'est la loi... De l'intégration,
il s'agit
de faire de l'intégration par la base, il faut les
mentalités et les attitudes. Il est faux de croire qu'on peut faire de
l'intégration parce qu'on le décide. De l'intégration,
ça se fait par la société et par le milieu, et ça
fait partie du travail de l'Office, justement, d'amener la compréhension
et cette communication de réflexion, pourquoi on refuse l'autre.
M. Trudel: Je vous demandais une réponse franche et
claire. Je dois vous dire que je l'ai obtenue, et c'est très clair. La
même chose, je n'ai pas besoin de faire un grand préambule, je
vais enchaîner sur ce que vous nous répondez... et après 21
ans, pour faire une situation... Le monde municipal, parce qu'on se pose la
question aussi, ici, par rapport aux groupes de personnes pour lesquelles vous
existez, en termes de défense et de promotion des droits... Est-ce qu'on
doit aussi, tout en vous disant que l'extension couvrirait
éventuellement d'autres secteurs d'activité que,
évidemment, les droits des personnes handicapées... Est-ce qu'on
doit aussi, toujours dans le même esprit - on ne touche pas à la
fine mécanique - ouvrir le champ, le mandat d'exercice du Protecteur du
citoyen au réseau des affaires municipales ou au réseau des
municipalités, toujours dans l'optique de vos personnes pour lesquelles
vous travaillez?
M. PerreauH: Je vous avoue qu'au niveau du principe
peut-être qu'on pourrait, à un certain moment, dire oui. On
pourrait le favoriser parce que voilà aussi des instances publiques qui
fournissent des services à des personnes, qui ont des
responsabilités, et il pourrait aussi y avoir des citoyens qui, à
un certain moment, sont non satisfaits, puis ils n'ont pas de recours ou ils
n'ont pas de dernier recours. Mais je vous avoue que l'expérience de
l'Office, au cours des 10 dernières années, avec le monde
municipal, a été qu'il y a une volonté, du
côté des élus municipaux, d'avancer et de faire de la place
aux personnes handicapées. J'oserai même dire que, à
certains moments, on a des représentations où ils vont trop loin
pour les aider. Lorsqu'on dit, par exemple, qu'une résidence pour
personnes handicapées - ils peuvent en avoir cinq ou six - puis, au nom
de leur protection, on pourrait exiger qu'ils aient toutes sortes d'appareils
pour s'assurer de leur sécurité, au nom du feu, au nom de toutes
sortes de choses, pour les protéger... L'intention est bonne, mais, en
voulant créer peut-être une plus petite institution, les personnes
handicapées, finalement, ne trouvent plus de locateurs, parce que
ça coûte trop cher, maintenant, tout équiper une maison
où on reçoit des personnes handicapées. Donc, le principe
qu'on a au niveau des personnes handicapées, c'est
l'égalité des opportunités, l'égalité des
chances et, à partir de la, chacun vit dans sa société
avec ses capacités, ses limitations, ses moyens et tout ça. Donc,
pour vous dire qu'au monde municipal il n'y a pas de réflexion profonde
à l'Office d'étendre, en ce qui regarde le Protecteur du citoyen,
parce qu'il n'y a pas eu de causes ou de raisons à ce stade-ci qui nous
a amenés à nous pencher beaucoup là-dessus.
M. Trudel: Très bien. Si M. le président me
permet...
Le Président (M. Dauphin): Oui, une autre question.
M. Trudel: Sur un autre sujet, bon. L'Office, donc, dans la
volonté du gouvernement actuel - et je note au passage que l'Opposition
est absolument d'accord avec cette philosophie - c'est de retourner, j'allais
employer l'expression, comme rôle à l'office promotion et
défense des droits. Et les programmes d'aide seront dans les secteurs,
les ministères concernés. Est-ce que vous avez
réfléchi sur comment vous allez exercer ce mandat qui sera
dorénavant redevenu le vôtre, de promotion et de
défense?
Dans ce sens-là, à la limite, je dirais, pour faire une
image, il pourrait y avoir techniquement confusion ou duplication avec le
Protecteur du citoyen. Est-ce que vous avez réfléchi beaucoup
à cette nouvelle mission à laquelle vous allez être
retournés, de promotion et de défense des droits, eu égard
toujours au Protecteur du citoyen, puisque c'est la question ici et, bien
sûr, par rapport aux personnes que vous représentez et que vous
êtes chargés de défendre institutionnellemenr?
M. Perreault: L'Office est justement à
réfléchir sur ce que certains appelaient, à un moment
donné, les rôles futurs de l'Office, et que nous avons
tenté de faire évoluer en parlant plutôt d'actualisation
des rôles de l'Office. On est rendus en 1990, au début des
années quatre-vingt, avec l'aide matérielle, le pouvoir qui a
été donné à l'Office. On se devait d'innover un peu
en tant qu'un laboratoire, essayer de trouver des nouveaux moyens. Avec son
aide matérielle, l'Office a fait ce laboratoire-là, un peu comme
je le dis à certains moments, comme un laboratoire qui recherche quelque
chose pour une maladie nouvelle, que les gens ne connaissent pas. On
découvre des choses. Il y a des groupes contrôles, il y a des
choses. On a développé des services que, maintenant, les autres
ministères s'apprêtent à prendre parce qu'ils ont
réellement les responsabilités sectorielles. Dans l'actualisation
des rôles demeure toujours la mission de l'Office qui est de faire la
promotion, la coordination et de veiller à l'intégration.
Ça doit se faire dans le partenariat, avec les responsables sectoriels
autant qu'avec le milieu. L'Office, c'est un organisme de changement. Donc, il
doit se promener et faire comprendre qu'il y a des changements d'attitudes;
souvent, les gens ne réalisent même pas qu'ils ont cette
attitude
jusqu'au moment où ils sont confrontés à une
situation. Et l'Office a ce mandat de le faire. Je pense que ça va
devenir le plus grand mandat qu'on va avoir à travers les
années.
Dans l'actualisation des rôles, nous recherchons l'une des choses
à laquelle nous réfléchissons actuellement, c'est
l'obligation pour l'Office, qui n'existe pas actuellement, de conseiller le
gouvernement dans toutes sortes de dossiers qui pourraient impliquer les
personnes handicapées. Ça pourrait demander, à un moment
donné, un changement à notre loi à cet effet-là,
mais c'est une réflexion qu'on tente de faire dans ce
sens-là.
M. Trudel: Très bien. Je reviendrai tantôt sur
d'autres sujets...
Le Président (M. Dauphin): D'accord. M. Trudel:
...si j'ai le temps.M. le Président.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Oui, M. le Président. Comme l'Association des
hôpitaux et l'Association des centres d'accueil ce matin, votre Office
préconise l'extension de ta juridiction du mandat du Protecteur du
citoyen. Mais les autres, ce matin, l'Association des hôpitaux a dit: Ce
sera à trois niveaux... l'établissement d'un réseau
régional et, finalement, le Protecteur du citoyen. Actuellement, le
système que vous avez pour le traitement des plaintes, l'Office des
personnes handicapées actuellement, est-ce que ça fonctionne?
Est-ce que les plaintes sont dirigées à votre Office
immédiatement ou si elles sont dirigées vers
l'établissement pour commencer?
Une voix: Est-ce que vous pourriez répondre?
Mme Constantin: L'Office n'a pas de service de plaintes. L'Office
n'a pas de pouvoir d'enquête et de recommandation en vertu de sa loi.
L'Office doit favoriser la coordination, mais ce qui lui permet d'avoir une
fonction diagnostique, c'est l'article de sa loi qui prévoit que toute
personne handicapée au Québec a droit à un plan de
services et qu'elle peut s'adresser à l'Office pour en avoir un et que
l'Office peut intervenir, au moyen d'une aide matérielle, pour combler
les lacunes des ressources, quand il s'agit de construire le plan de services
dont la première fonction est de planifier avec la personne quels sont
ses choix en fonction de ses capacités, en vue d'une intégration,
de faire une analyse des ressources disponibles dans le milieu, de mettre
ensemble les fournisseurs de ressources, et nous avons été
amenés à combler les carences de ressources qui existaient.
Nous n'avons pas examiné tellement sur le fond ce qu'on pourrait
qualifier de plaintes ou les revendications que les gens avaient et la nature
des faits qui ont amené cette absence de ressources dans le cas d'une
personne à la fois. Nous avons été amenés à
développer des interventions et des programmes, mais non pas à
chercher à corriger des situations cas par cas, quoique, en faisant cet
effort de planification, les distributeurs de ressources aient
été amenés à justifier les choix qu'ils avaient
faits et, souvent, à rectifier, à améliorer le type de
décisions qu'ils avaient prises.
M. Kehoe: Et, comme tel, il n'y a pas de plaintes dirigées
vers l'Office actuellement. Il y a des revendications, mais il n'y a pas
de...
Mme Constantin: Dans le cadre du plan de services, oui, ça
peut être une plainte si hier je n'ai pas reçu les services
auxquels j'avais droit. (12 h 30)
M. Perreault: L'Office a une responsabilité dans sa loi
qui est une responsabilité d'accompagnement. À ce
titre-là, il a donné la main très souvent à des
personnes handicapées et il cherchait, de l'autre main, la personne
contre laquelle on se plaignait ou l'organisme contre lequel on se plaignait.
Mais c'était strictement une responsabilité d'accompagnement. On
l'a fait dans tous les milieux, que ce soit le réseau de la
santé, le milieu scolaire, le milieu travail. C'est une chose qui a
été faite de ce côté-là.
En ce qui regarde l'ombudsman, si vous me permettez, j'aimerais
peut-être ajouter un peu à la simple réceptivité
d'une plainte, à une enquête possible et à un rapport
possible. Il me semble que lorsqu'on est responsable d'un milieu donné
comme tel, et le Protecteur du citoyen le sait... il devrait aussi se
questionner s'il ne reçoit pas assez de plaintes. Il devrait tenter de
voir si c'est parce que le système qui est instauré, de
première instance et de deuxième instance, va très bien et
qu'on atteint les objectifs qu'on recherche. Au nom de l'indépendance et
au nom de son efficacité, je le comparerais, si vous le voulez, au
Vérificateur général que le Québec s'est
donné. Le Vérificateur général peut se donner un
plan d'action à un moment donné, puis aller vérifier dans
certains ministères, dans certains organismes publics, à certains
moments, si les fonds sont bien administrés. Il n'y a pas de plaintes
nécessairement, il n'y a aucun doute, mais il va voir, il s'enquiert
à savoir: Est-ce que ce que je ne sais pas est la
vérité?
Et dans un certain sens, lorsque vous parlez de personnes
vulnérables qui vivent dans une institution, qui dépendent d'une
institution ou d'un travailleur ou tout ça, mais qui n'osent pas,
à un moment donné, à cause de leur grande
dépendance, faire connaître ce qu'ils vivent, le Protecteur du
citoyen, sans s'annoncer, à certains moments, pourrait jeter un regard
et tirer ses conclusions. Ça m'apparaît que ça ferait
la
boucle. Il me semble que notre gouvernement devrait se donner,
vis-à-vis des personnes, au moins les mêmes moyens qu'il se donne
vis-à-vis des équipements, des biens, ce qu'on fait pour
l'argent.
Ça m'amène peut-être aussi à faire le pas sur
l'indépendance, qui n'est pas couverte dans le mémoire. Il serait
peut-être plus selon la volonté de l'Office des personnes
handicapées si le Protecteur du citoyen, son budget venait de
l'Assemblée nationale et non directement du Conseil du trésor
qui, dans un certain sens, est une forme de contrôle. Le
Vérificateur général, à ce que je sache, son budget
est voté par l'Assemblée nationale. Au nom de
l'indépendance, il me semble que ce serait un pas dans la bonne
direction.
M. Kehoe: Si on prend pour acquis que la juridiction du
Protecteur du citoyen sera exten-sionnée dans le réseau des
services sociaux, comment cela va-t-il spécifiquement affecter l'Office
chez vous? Actuellement, vous dites comme tel que vous n'avez pas de plaintes,
certaines revendications. Il ne semble pas y avoir de problème en ce qui
concerne l'Office. Actuellement, ça semble bien fonctionner. Quand vous
dites que vous préconisez que ça devrait être
extensionné au réseau des services de santé, en
général, ce n'est pas spécifiquement pour vous autres.
Ça devrait être extensionné pour vous autres aussi. Mais
l'Office, actuellement, est-ce qu'ils ont des problèmes majeurs en ce
qui concerne le traitement des plaintes ou des revendications par des
usagers?
Mme Constantin: Je pense qu'il ne faudrait pas prendre par les
réponses qu'on a pu vous donner qu'il n'y a pas de problèmes.
L'Office, actuellement, ne peut rien faire avec une plainte. Nous n'avons pas
dans notre loi, si quelqu'un vient se plaindre chez nous, le pouvoir de faire
une enquête et de tirer une conclusion. Notre seul pouvoir est qu'une
personne qui se plaint de son intégration scolaire ou du service qu'elle
n'obtient pas, c'est de dire à cette personne-là: On va y aller
avec toi, on va t'accompagner. Mais c'est un pouvoir d'accompagnement. Et je
peux vous dire qu'à plusieurs endroits où nous allons
actuellement les gens, très souvent, ne veulent même pas nous
recevoir.
Ils ne veulent pas nous recevoir parce qu'ils disent: De quel droit
êtes-vous ici avec la personne? Et on refuse notre entrée. On
tente de discuter et, très souvent, on réussit à se
trouver une chaise et être capable de discuter. Mais on n'a pas le
pouvoir comme tel. On ne le recherche pas comme tel non plus. On pense que,
dans un organisme de promotion, un organisme de partenariat, un organisme qui
veut amener les individus à comprendre qu'ils ont une
responsabilité, un administrateur d'un centre hospitalier, un directeur
général d'une commission scolaire, tout comme, je dirais, un
gérant général chez Steinberg, a une responsabilité
déléguée.
Il se doit d'administrer le département, rétablissement,
les différents établissements selon la volonté qui lui est
donnée d'en haut, pas selon sa perception à lui. Et c'est
à ce titre-là que l'Office des personnes handicapées veut
amener les gens à comprendre que oui il y a des limitations, oui il y a
un manque de ressources, oui il y a des instruments qui sont déjà
en place et qu'il faudrait... Mais il s'agit d'utiliser tout ce
bagage-là et de comprendre qu'il y a des personnes handicapées
à qui on veut donner des services et quels sont les plans pour le faire
dans le temps. C'est d'organiser le dialogue et la démarche vers le
futur.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Nelligan.
M. Williams: Merci. Je veux resoulever cette question, votre
manque d'intérêt d'avoir le pouvoir du Protecteur du citoyen. Je
voudrais peut-être plus de clarifications parce qu'il me semble que vous
êtes bien placés pour avoir ce type de pouvoir, de suivre les
plaintes si nous donnons ça légalement. Si ce n'est pas bon pour
vous, si vous voulez avoir tout ça encadré au niveau du
Protecteur du citoyen, est-ce que vous pensez qu'il serait mieux de
lâcher les autres commissions, comme la Commission de protection des
droits de la jeunesse ou le Curateur public, et donner tout ça au
Protecteur du citoyen?
M. Perreauit: Non, non, je ne crois pas. M. Williams: Moi
non plus.
M. Perreauit: La volonté de l'Office des personnes
handicapées, je pense qu'elle est très bien exprimée dans
le transfert des programmes qu'elle veut faire actuellement. Lorsque l'Office a
été créé, au début des années
quatre-vingt, une des choses qui avaient été mentionnées
par tous les organismes de promotion et les personnes handicapées
elles-mêmes, à ce moment-ià, à la commission
parlementaire - à laquelle j'assistais aussi à titre de
présentateur pour des organismes de promotion - c'est que les personnes
handicapées ne voulaient pas d'un organisme ou d'un ministère qui
deviendrait celui des personnes handicapées. Elles voulaient un
organisme qui serait palliatif pour un temps donné et qui
amènerait ce virage et ce changement-là dans lequel on se trouve
actuellement.
L'Office ne veut pas accaparer des pouvoirs; il ne veut pas aller
chercher d'autre chose qui, normalement, dans une intégration, est fait
par d'autres. Si, habituellement, un citoyen du Québec, pour faire
valoir ses droits, va à la Commission des droits de la personne, bien,
une personne handicapée, qui est un citoyen, devrait aller là.
Si, dans un temps donné, un citoyen du
Québec va au Protecteur du citoyen pour faire valoir certains
besoins par rapport à un traitement qu'il a eu, la personne
handicapée devrait aller là. Elle ne devrait pas dire: Moi, je
suis handicapée, donc moi, c'est à l'Office. On ne peut pas
continuer à marginaliser en voulant intégrer. La volonté,
c'est d'envoyer dans les milieux où normalement les choses sont
réalisées. Ce n'est pas un manque d'intérêt de
l'Office; c'est une volonté d'intégration, je dirais.
M. Williams: Oui. Avec ça, peut-être, vous pouvez
privilégier...
M. Perreault: Le partenariat, le travail de concert puis...
M. Williams: Mais si je prends la même philosophie,
peut-être que nous n'avons besoin des autres commissions et de
créations de l'État qui protègent les personnes. Avez-vous
des commentaires sur ça?
M. Perreault: Non. Il faudrait demander à Mme Lachapelle
ou à M. Dowie.
M. Williams: Ou les autres. Nous avons entendu la curatrice
publique, hier...
M. Perreault: Mme Fontaine.
M. Williams: Oui. J'essaie de comprendre la différence. Je
pense que vous avez dit qu'il serait bon d'avoir ce type de protection
ciblée pour les personnes comme ça, mais ce n'est pas bon pour
vos clientèles.
M. Perreault: Le problème que vous avez, par exemple, avec
le Curateur public ou la situation, c'est que le Curateur public est le
mandaté pour des personnes jugées inaptes ou qui sont sous
curatelle. Il a le mandat complet. Le seul mandat que l'Office a, ce n'est pas
un mandat de défense des droits des personnes handicapées.
M. Williams: Pas maintenant.
M. Perreault: Pas maintenant. La défense des droits des
personnes, c'est la Commission des droits de la personne. Le mandat du
Protecteur du citoyen, ce n'est pas un mandat que la Commission des droits de
la personne a aussi, ce sont des mandats très différents. Le
mandat de l'Office, c'est de faire la promotion des intérêts des
personnes handicapées et de s'assurer que, dans les différents
milieux où il existe des citoyens, des personnes handicapées ne
sont pas laissées en arrière. Donc, nous, c'est d'aller leur
tendre la main, de les amener en avant avec les autres et dire... L'une des
réponses que je pourrais vous mentionner, pour servir d'exemple, c'est
qu'on mentionne que, dans la loi sur la réforme de la santé et
des services sociaux, les CLSC seront ouverts, pour certains, 24 heures par
jour; ça va être le premier endroit, par téléphone
et tout !e reste. L'une des responsabilités de l'Office qu'on fait
valoir à ce niveau-là, il faut que tous les citoyens y aient
l'accessibilité. Donc, il faut que tous ces CLSC soient
équipés avec des équipements pour recevoir les
malentendants. Il y en a qui communiquent oralement; il y en a qui communiquent
par écrit. L'accessibilité... Donc, c'est l'une des fonctions de
l'Office de surveiller les développements, les créations et de
s'assurer qu'on fait toujours de la place pour les personnes qui sont
différentes.
M. Williams: Merci beaucoup. Il n'arrive pas souvent que nous
trouvons des offices qui sont satisfaits des mandats que nous leur avons
donnés. Je voudrais juste dire que, dans mon expérience
personnelle comme député de mon comté, votre Office a
joué un rôle très efficace et je voudrais vous
féliciter.
M. Perreault: Merci.
Le Président (M. Dauphin): Peut-être juste une
petite question, parce que vous y avez pas mal répondu tantôt, M.
le président, quand vous avez parlé de la Commission des droits
de la personne. Quel est son rôle dans l'éventualité d'un
élargissement de la juridiction du Protecteur du citoyen, les cas
où la Commission des droits de la personne a également
juridiction en matière d'exploitation ou de discrimination face aux
personnes handicapées? Comment voyez-vous le rôle des deux
à ce moment-là? Est-ce que le Protecteur a plus de pouvoirs que
la Commission? Est-ce que les deux ont juridiction? Est-ce que les deux peuvent
travailler de pair? Je ne sais pas si vous avez réfléchi à
cet aspect-là.
M. Perreault: Allez-y donc, Mme Constantin.
Mme Constantin: Nous n'y avons pas tellement
réfléchi, mais je pense que ce qui apparaît, c'est que les
instances peuvent être distinguées selon les motifs de la plainte.
Il y a beaucoup de plaintes sur lesquelles on ne peut pas vraiment utiliser la
Charte des droits. À ce moment-là, le Protecteur du citoyen a un
rôle important.
Le Président (M. Dauphin): Quelle a été
votre expérience à date avec la Commission des droits de la
personne?
M. Perreault: L'expérience a été excellente.
Je dois quand même vous faire savoir que, qu'on parle de la Direction de
la protection de la jeunesse, du Curateur, de la Commission des droits ou du
Protecteur du citoyen, ces quatre organismes-là et l'Office des
personnes handi-
capées, nous nous rencontrons sur une base
régulière, quelques fois par année, justement pour
échanger et sur nos mandats et sur nos clientèles, de
façon à faire connaître ensemble au citoyen que tous les
organismes qui sont là pour l'aider, le supporter ou le défendre
travaillent réellement ensemble et ne sont pas intéressés
à prendre des responsabilités que l'autre a, mais qu'on est
complémentaires. À ce titre-là, le citoyen ne se sent pas
seul.
Le Président (M. Dauphin): J'aimerais, si vous me
permettez, revenir sur les recours préalables. Vous avez entendu les
organismes qui vous ont précédés, l'Association des
hôpitaux, l'Association des centres d'accueil du Québec. Je pense
que les deux, vous également, je pense, tenaient quand même
à des recours A, que j'appelle, avec l'établissement. Le projet
de loi 120 prévoit d'ailleurs l'obligation pour chaque
établissement de se créer un mécanisme, même en
nommant un des directeurs, un cadre supérieur. Deuxièmement,
appel à la régie régionale, ce qu'on appelle aujourd'hui
le conseil régional, parce que nous autres, on va avoir des
recommandations à faire, à un moment donné, à
l'Assemblée nationale et on veut quand même être
éclairés le mieux possible. Vous êtes entièrement
d'accord avec ça qu'au début c'est le recours local,
possibilité d'appel, mais prévoir également un autre
recours à quelqu'un de neutre, d'impartial, qui serait le Protecteur, en
matière de santé et de services sociaux. Ça, c'est clair
dans...
M. Perreault: Les principes que nous mettons de l'avant, c'est
que vous avez un citoyen consommateur et vous avez un producteur, à un
endroit quelconque, d'un service quelconque. Il apparaît important que
tous les mécanismes qu'on peut mettre en place, ce sont des
mécanismes qui devraient aider à la continuité de la
relation entre ces parties-là, une fois que l'enquêteur est parti.
C'est beau de régler une plainte à un moment donné, mais
des fois la vie est plus difficile après, et c'est dans ce
sens-là qu'il y en a qui n'osent jamais se plaindre, au nom du principe
du règlement de la situation. Et souvent c'est strictement un manque de
communication. Ce qui devient une plainte, c'est tout simplement que les gens
ne se sont pas parlé. Donc, si on oblige ce dialogue-là à
un endroit donné, une écoute de la part de quelqu'un qui,
habituellement, fournit un service, une écoute de son client et qui
pourrait, à un moment donné, comprendre ce que l'autre vit,
ça pourrait se régler là et, espérons-le, ça
devrait être la majorité qui devrait se faire là.
Et dans ce sens-là, considérant que les permanents, les
directeurs généraux, les professionnels sont quand même des
gens de bonne foi - c'est des gens comme vous et moi - eux, à partir de
plaintes, ils peuvent aussi améliorer leurs propres services.
Très souvent, si vous voulez, l'orgueil professionnel fait que, quand on
veut faire venir quelqu'un de l'extérieur pour regarder trop vite, on
crée la réticence, on crée la défense. On veut
avoir raison. Le producteur de services, le contremaître veut avoir
raison par rapport à... et souvent un intervenant de l'extérieur
qui vient trop vite gâche les choses, à mon avis, plus que d'autre
chose. Donc, plus bas niveau possible et une escalade dans
l'établissement, dans le milieu, mais à la fin je pense qu'il
faut quelqu'un qui est neutre et qui n'est pas en conflit.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. M.
Perreault: Et qui n'est pas judiciaire.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, et je reviendrai pour une petite
dernière tantôt.
M. Trudel: La loi 120 va faire obligation au plaignant, dans le
système de santé et des services sociaux - et ça vous
regarde particulièrement au niveau des personnes handicapées -
à faire la plainte par écrit. Qu'est-ce que vous pensez de
ça, vous autres? Vous êtes habitués, vous travaillez dans
ce secteur-là.
M. Perreault: II y a un certain nombre de personnes qui vont
avoir de la misère à écrire parce que...
M. Trudel: Par hasard, hein?
M. Perreault: Mme Constantin, allez-y donc.
Mme Constantin: Je pense que c'est effectivement un vice. Je
crois qu'on devrait prévoir d'autres mécanismes de communication,
qu'on devrait recevoir les choses de façon verbale. Je pense qu'on dit
quand même, dans la loi, que toute personne, tout
bénéficiaire peut se faire accompagner d'une personne de son
choix pour le représenter. Bon. Mais, quand même, on enlève
un peu de l'autonomie du citoyen, qu'il ait des limitations ou non.
Par ailleurs, l'Office subventionne les organismes de promotion et de
défense des droits et intérêts des personnes
handicapées. Alors, nous pensons nous prémunir de cette
façon-là en offrant des services d'accompagnement et
d'éducation des bénéficiaires par nos organismes de
promotion éventuellement.
M. Perreault: II n'y a pas de doute qu'au niveau des moyens de
communication que l'Office préconise et qui est dans "À part...
égale" aussi il est important que toutes les communications avec les
citoyens du Québec se fassent par un moyen qu'ils peuvent comprendre.
Certaines personnes ne savent pas écrire. D'autres sont
aveugles, ne peuvent pas lire. Il faut que ce soit en braille. Il y a
tous les moyens et les médias substituts qu'il faut utiliser.
M. Trudel: Bref, là-dessus, ça vous semble excessif
dans la loi que l'on mentionne même si, oui il faut le dire, il y a des
mécanismes d'accompagnement... Il faut être honnête sur la
présentation, la lecture complète de la situation, là, il
y a des mesures d'accompagnement qui sont prévues à la loi
même. Ça vous semble excessif.
Dernière question pour ma part. Puisque vous êtes un
organisme et des personnes, encore une fois, qui oeuvrez
particulièrement au niveau de la promotion et de la défense des
droits - c'est plus une opinion personnelle que je vais vous demander, mais
venant de personnes éclairées de par leur travail
professionnel... Quant à la procédure, aux procédures au
pluriel, de traitement ou aux mécanismes de plaintes, premier et
deuxième niveaux, tel que vous l'avez établi, en
général, comme principe...
Le Protecteur du citoyen a dit à l'Assemblée nationale et
au ministre que nous risquons de nous retrouver avec 17 justices, puisqu'il y
aura 17 régies régionales, 17 justices, 17 façons
d'approcher le traitement des plaintes et que, de cette façon, nous
risquons d'amenuiser, évidemment, le résultat en termes
d'équité dans les décisions. Qu'est-ce que vous pensez de
cette affirmation? C'est-à-dire qu'à partir du moment où
chacun des établissements sera tenu d'élaborer sa propre
procédure, chacune des 17 régies régionales sera
appelée à définir sa propre procédure et de nommer
son cadre supérieur - pas besoin de revenir là-dessus,
l'indépendance, vous la réglez par le troisième niveau -
est-ce qu'au niveau de la procédure même, une façon
différente de poser la question, nous ne pourrions pas inclure, par
exemple, l'obligation de faire agréer cela par le Protecteur du citoyen
qui est, comme vous le disiez tantôt par rapport à votre
équipe, l'expertise dans le domaine en quelque sorte?
M. Perreault: Oui. Je pense que l'oeil du Protecteur du citoyen,
sans être inquisiteur, pourrait être une façon d'aider
à ce que les choses se fassent en pensant toujours au citoyen. Donc, au
niveau de l'agrément, de la procédure des plaintes, de
l'élaboration, parce que ça va se faire en quelque part, vous
pouvez être sûr que, de la consultation dans le milieu, entre les
régies, entre les fédérations, au niveau des
établissements, des associations, il va y avoir une certaine, comment
dirais-je... on va se consulter pour être capable d'avoir des choses qui
se ressemblent. Il est même possible qu'à la fin on ait presque
tous les mêmes papiers parce qu'il y aura eu une consultation du
côté administratif. Pour aider encore, dès le
départ, qu'on le soumette au Protecteur du citoyen qui, lui, pourra
apporter ses commentaires, ça m'apparaît être dans la forme
qui est non inquisitive, mais encore là qui est collaboratrice en
fonction des objectifs qui sont poursuivis. Les gens sincères dans la
poursuite d'objectifs n'hésitent pas, habituellement, à avoir
quelqu'un qu'ils peuvent consulter pour améliorer ce qu'on tente de
produire. Les gens qui refusent toujours la consultation, bien souvent, ils ont
des idées arrêtées.
M. Trudel: Pour ma part, merci beaucoup, madame et monsieur, de
votre prestation. Votre mémoire est extrêmement éclairant;
il est clair aussi. Merci beaucoup.
Le Président (M. Dauphin): Merci. Peut-être juste
une petite dernière question. C'est une question d'information
peut-être. Lorsque vous nous dites, à la page 4 de votre
mémoire, que les parents d'enfants présentant des
déficiences rencontrent des difficultés multiples dans les
démarches qu'ils entreprennent pour obtenir des services non
ségrégués pour ces élèves, la Loi sur
l'instruction publique prévoit évidemment un recours au conseil
des commissaires. De mémoire, c'est à l'article 9. Et vous dites
qu'il serait plus équitable de prévoir l'intervention du
protecteur, ça j'en suis. Mais est-ce que la Commission des droits
n'intervient pas dans ces cas-là aussi? On m'informe qu'il y a
même des causes devant les tribunaux actuellement où la Commission
intervient dans ces cas-là.
Mme Constantin: Non, nous avons des causes devant les tribunaux,
mais ce n'est justement pas le type de rapport que nous voulons instaurer avec
les enseignants, les syndicats d'enseignants, les directions d'école et
les commissaires d'écoles.
Le Président (M. Dauphin): Vous préféreriez
évidemment...
Mme Constantin: ...la négociation et l'implication
commune.
Le Président (M. Dauphin): ...un intervenant comme le
Protecteur?
M. Perreault: Pour votre information, justement les causes devant
les tribunaux, du moins celles qu'on vit, celles qu'on voit, selon les
renseignements que nous avons, ne peuvent jamais réellement être
une cause type. L'élève est toujours différent, la
situation est toujours différente, son année scolaire est
différente. Donc, il est très difficile... Si au moins on pouvait
avoir une cause type... comme on peut retrouver dans d'autres domaines. Mais,
dans le milieu scolaire, la cause est toujours très individuelle, et on
nous dit qu'on ne peut pas bâtir dessus.
Le Président (M. Dauphin): C'est clair, je comprends
très bien. Alors, au nom de tous les membres de fa commission, nous
aimerions remercier l'Office des personnes handicapées du Québec,
représenté par son président, M. Per-reault, et par Mme
Constantin, qui est chef du Service de l'analyse et de l'évaluation de
l'intégration - c'est long, comme titre - pour avoir participé
à nos travaux, et vous remercier sincèrement de l'excellent
témoignage que vous nous avez apporté, et bon retour. Merci
beaucoup.
La commission des institutions suspend ses travaux, et nous reprendrons
à 14 heures avec le centre hospitalier Douglas.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 14 h 8)
Le Président (M. Dauphin): Mesdames, messieurs, la
commission des institutions va reprendre ses travaux sur le mandat de la
commission, qui consiste à tenir des auditions publiques dans le cadre
de l'examen du mandat, des orientations, des activités et de la gestion
du Protecteur du citoyen. Nous avons maintenant comme invité le centre
hospitalier Douglas, qui est représenté notamment par Mme Bishop.
Alors, je vais vous demander, Mme Bishop, de présenter les personnes qui
vous accompagnent et vous avez une quinzaine de minutes environ pour
présenter votre exposé.
Centre hospitalier Douglas
Mme Bishop (Martha): Notre porte-parole, c'est M. Aucoin. Il fera
les "introductions", si vous voulez.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. C'est parce que,
habituellement, c'est toujours la personne au centre qui présente
l'exposé, mais ça ne dérange absolument rien, il y a
d'autres micros. M. Aucoin, bienvenue.
M. Aucoin (Patrick J.): Bonjour. Je désire commencer en
remerciant le président et les commissaires de nous avoir donné
l'opportunité de nous faire entendre. Mme Bishop est secrétaire
du comité de bénéficiaires. Elle va vous parler du
rôle que le comité a joué dans le passé ainsi que
dans le présent. Mme Francine Bourassa, l'ombudsman à notre
hôpital, va vous parier du rôle qu'elle joue comme ombudsman
à l'hôpital. Dans le passé, ce rôle était
détenu par le président du comité d'éthique. Il y a
environ six ans, le conseil d'administration de l'hôpital a
décidé de créer le poste d'ombudsman, qui se rapporterait
directement à lui. Donc, je vais vous parier un peu de la structure de
l'hôpital, comment ça fonctionne.
L'hôpital Douglas est un hôpital universitaire
spécialisé et ultraspéciaiisé en psychiatrie, de
732 lits. Il y a quatre pavillons externes, qui se trouvent un peu partout:
Rawdon, Mascouche, Verdun, Pointe-Saint-Charles. Il y a un centre de recherche,
d'où l'importance d'avoir un ombudsman parce qu'on fait beaucoup de
recherche et ça prend des patients. Le rôle premier de
l'hôpital est dans son secteur: Côte-Saint-Paul, Émard,
Verdun. LaSalle. Il joue aussi un rôle secondaire régional et
suprarégional pour les anglophones en dehors de notre secteur principal.
Les services sont rendus en anglais et en français à travers
l'ensemble des services de l'hôpital. Nous avons aussi des cliniques de
secteur pour la population, nos patients externes qui sont au nombre d'environ
3000, ainsi que des ateliers pour la réadaptation de nos patients.
La structure est composée de 19 bâtiments majeurs ainsi
qu'une dizaine de maisons de type familial sur un ensemble de 163 acres, donc
assez éparpillés sur l'ensemble du terrain. Les soins sont
fournis par le biais de cinq types de programmes. On a les programmes de
services aux enfants et adolescents, le centre de psychiatrie communautaire et
le service de traitements spécialisés à long terme et en
réadaptation. Nous avons les services en psychogériatrie ainsi
qu'un centre de réadaptation. Dans ce centre de réadaptation,
près de 80 % des patients sont externes et la balance vient de
l'intérieur de l'hôpital.
Je pourrais dire que l'ensemble du monde qui a travaillé sur le
mémoire, ce sont tous des intervenants qui travaillent directement et
indirectement avec les patients et qui doivent collaborer
énormément avec l'ombudsman pour s'assurer de la protection des
bénéficiaires. Je vais maintenant passer la parole à Mme
Bishop.
Le Président (M. Dauphin): Mme Bishop.
Mme Bishop: Je vais essayer de parier français, mais je
vais peut-être faire un peu de fautes et j'espère que vous
m'excuserez. Vous dites que je suis la personne en charge. Je trouve ça
intéressant et amusant, parce que vous avez, dans la nouvelle loi, le
citoyen au centre, et peut-être que je représente les citoyens.
Mais nous sommes aussi un exemple de partenariat dans l'hôpital entre
l'administration, l'ombudsman et moi qui suis élue comme membre du
comité de bénéficiaires.
Dans notre mémoire, nous faisons un peu l'histoire de la
défense des droits dans l'hôpital. L'hôpital a juste un peu
plus que 100 ans et, en 1911, il a fait un code d'éthique pour les
employés. Dans le code d'éthique, il est dit: "Agissez envers les
autres comme vous souhaitez les voir agir envers vous." La plus grande
règle, je pense qu'on... En 1955, nous avons commencé à
avoir un conseil des patients dans l'hôpital et ça, c'est le
grand-père, si vous voulez, de notre
comité de bénéficiaires. Peut-être que nous
sommes un des premiers au Québec, au Canada, je ne sais pas, à
avoir un conseil des patients. Nous avons fait des activités pour les
patients, comme des colloques deux fois par année, mais nous avons
commencé à faire traiter les plaintes systémiques. Alors,
nous avons une longue histoire, plus de 35 années à essayer des
traitements de plaintes systémiques dans l'hôpital. La chose
importante, c'est que tout le temps nous avons le support de l'administration
et nous travaillons, comme je dis, dans un partenariat. Nous avons le
comité d'éthique et de droit des patients que M. Aucoin a
mentionné et, parmi les membres, il y a l'ombudsman, un des
aumôniers de l'hôpital, un représentant du Centre de
médecine d'éthique et de droit de McGill et, peut-être le
plus important, un bénéficiaire qui a été choisi
par les bénéficiaires pour siéger à ce
comité.
Le conseil d'administration de l'hôpital a fait une charte des
droits et responsabilités des patients et c'est sur une grande affiche
sur le mur, dans les deux langues, dans chaque unité de services dans
l'hôpital. Nous avons un petit livre que nous appelons le livre bleu.
Ça fait partie des droits et responsabilités des
bénéficiaires. Chaque fois qu'un bénéficiaire est
admis à l'hôpital, il reçoit ce livre. S'il est admis une
fois, il reçoit un livre; si, malheureusement, il est admis cinq ou
plusieurs fois, il reçoit une copie chaque fois. Nous essayons de faire
en sorte que les personnes sachent leurs droits et aussi leurs
responsabilités. Vous savez, ça marche ensemble.
Nous avons, vous voyez, l'ombudsman qui est employé par
l'hôpital. Nous avons fait beaucoup de démarches avec l'ombudsman.
Nous avons signé une entente avec l'ombudsman dans l'année 1989 -
j'ai un problème avec les numéros français - et
l'ombudsman a fait les plaintes individuelles et nous continuons dé
faire les plaintes systémiques, et nous travaillons aussi ensemble s'il
y a des problèmes pour lesquels nous voulons l'expertise l'un avec
l'autre.
Quand je pense aux choses que je veux dire à la commission
aujourd'hui, c'est comme une balance de justice. De temps en temps, c'est
peut-être un peu plus lourd de ce côté ou un peu plus lourd
de l'autre côté, mais nous avons essaye avec bonne volonté,
avec patience de faire un équilibre. Quand je parle de la balance de la
justice, je pense aussi qu'il y a la justice qui tient la balance. Nous n'avons
pas eu de problème dans les temps passés. Nous sommes
arrivés à des solutions entre le comité de
bénéficiaires et l'hôpital. Mais s'il y a une chance dans
le futur, que nous voulons une personne comme justice qui serait impartiale,
neutre, avec compétence, avec sincérité et tous les mots,
pour le comité de bénéficiaires, cette personne, c'est le
Protecteur du citoyen de la province de Québec.
L'autre petite chose que je veux dire. Pour ce mémoire, nous
avons commencé, avec le comité de bénéficiaires,
à faire un premier "draft", je ne sais pas le mot en français,
une première version. Après, nous avons travaillé avec
l'hôpital; il y a eu d'autres versions. Ça, c'est lu par tous les
membres du comité de bénéficiaires et c'est accepté
par les membres du comité de bénéficiaires, d'une
façon unamime.
Mme Bourassa (Francine Y.): Moi, je vais vous entretenir...
Le Président (M. Dauphin): Mme Bourassa.
Mme Bourassa: Merci, M. Dauphin. Je vais vous entretenir plus
spécifiquement de ce qui nous amène aujourd'hui à nous
positionner favorablement face à l'extension du rôle du Protecteur
du citoyen. Mme Bishop a tenté de faire la démonstration que,
même si au coeur de notre établissement, avec notre
clientèle, nous avions développé, au cours des
années, des outils, une attitude positive, des projets et des programmes
de sensibilisation, nous croyons tout de même nécessaire d'avoir
un recours externe au réseau, de façon à garantir le plus
d'équité possible. Quand on parle du Protecteur du citoyen, il
est protecteur de chaque citoyen. Pourquoi ferait-on une différence
entre un citoyen qui est hospitalisé, qui peut être
vulnérable et un autre citoyen qui se verrait protégé s'il
a des difficultés avec d'autres ministères?
Nous croyons, on en a discuté ce matin, que si le tiers du budget
du Québec est consacré aux services de santé et aux
services sociaux il est d'autant plus important que la qualité de ces
services et le respect des droits des usagers soient garantis par un
mécanisme externe au réseau en place.
Par ailleurs, pour ce faire, le Protecteur du citoyen aurait,
malgré l'expertise qui lui appartient... Il faut penser à sa
connaissance des règlements, des politiques, en même temps
connaissance au niveau de l'art de savoir faire des médiations. Nous
préconisons, avec une approche humaniste... Je suis d'accord avec Michel
Clair qui disait: On doit respecter le rythme de chaque établissement,
on doit respecter les différences, mais, en même temps, on doit
garantir... Et je pense que les connaissances, l'expertise, même la
compétence du Protecteur du citoyen pourraient très bien
s'adapter à un nouveau champ qui est celui de la santé et des
services sociaux sans que ce soit trop compliqué ou trop coûteux.
Mais, pour ce faire, il va sans dire que ça va lui prendre un budget et
aussi des personnes-ressources.
Pour ce qui est des interrogations qui ont été
soulevées dans les questions des députés par rapport au
rôle des ombudsmans spécialisés, vous en avez longuement
discuté hier, mais je serais
ouverte à répondre à vos questions par la suite.
Pour l'instant, le conseil d'administration de l'hôpital Douglas,
à qui je me rapporte au niveau de l'autorité formelle, a cru bon
d'enchâsser dans les règlements internes le rôle, les
obligations et les pouvoirs de l'ombudsman.
Avec le nouveau projet de loi 120, j'aimerais porter à votre
attention que, malgré le fait que la loi nous apporte des garanties qui
étaient inexistantes dans le passé, il faudrait travailler
à bonifier les articles portant sur les droits des usagers. On a
parlé d'une plainte par écrit. Est-ce qu'on ne pourrait pas
plutôt parler de consigner la plainte? Qui rédigera la plainte,
c'est peu important. Parlons de délai. Dans notre protocole actuel de
traitement de plaintes, notre délai pour traiter une plainte est de un
mois. Regardons le texte de loi. Ici, nous parlons de 60 jours, en plus du
cumul de délais qui vont s'étirer avec le niveau
régional.
Donc, quand une personne est lésée dans ses droits en
établissement de santé, je pense qu'il faut réagir
promptement, rapidement et avec beaucoup de tact et de connaissances du
réseau. Pour ça, nous insistons sur le rôle important
d'avoir, de conserver les mécanismes locaux de traitement des
plaintes.
Il est sans doute possible que l'on voie apparaître au niveau du
traitement des plaintes, si on le réserve à des cadres
supérieurs, des conflits d'intérêt potentiels ou
réels. Advenant qu'il faudrait préciser à qui devrait
répondre un ombudsman en milieu hospitalier, je pense qu'il faut garder
la marge de manoeuvre nécessaire. En établissement de
santé, vous devez vous assurer de la collaboration d'un directeur
général pour faire avancer le dossier, pour faire valoir le droit
des usagers. Mais il est important que l'ombudsman ait la marge de manoeuvre,
après discussion, négociation, débat ouvert, s'il n'y a
pas satisfaction, d'aller présenter son point de vue ainsi que celui du
directeur général devant une instance différente qui est
celle d'un conseil d'administration.
Je pense que, si on laisse les ombudsmans ou on développe le
traitement des plaintes, il faut s'assurer qu'il y a cette marge de manoeuvre.
Aussi, dans le projet de loi 120, le traitement des plaintes est
réservé aux responsables du traitement des plaintes. Si vous avez
pu constater les textes qu'on vous a fait circuler par rapport à plus de
technicalité, sur le nombre de plaintes reçues, etc., vous
pourrez voir qu'au niveau des 717 plaintes et demandes les deux tiers
relèvent des demandes. Mais, vous savez, répondre à une
demande, c'est éviter des conflits futurs. C'est assurer une
défense proactive. À ce moment-là, dans mon rôle
actuel, j'ai le rôle de promotion et de défense de droits, tout en
travaillant très étroitement avec le comité de
bénéficiaires.
Advenant qu'il y ait scission dans le rôle, le traitement de
plaintes seulement, il faut s'assurer que le volet promotion des droits sera
fait de manière adéquate et efficace, que nous poursuivions
l'éducation, l'information des employés et, de façon
systémique, que nous fassions circuler l'information dans
l'établissement. Si vous voulez bien, M. Dauphin, je crois qu'on pourra
répondre à vos question.
Le Président (M. Dauphin): Alors, merci beaucoup, à
tous les trois. Nous allons maintenant procéder à la
période d'échanges. J'ai constaté également, les
membres ont constaté que, du fait d'avoir assisté aux autres
auditions, vous avez touché les points qui préoccupaient
énormément les membres de la commission. Alors, qui est
prêt à débuter? M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, vice-président de la commission.
M. Trudel: Merci beaucoup, M. le Président. Merci de cette
présentation, d'avoir fait l'effort de répondre aux questions que
la commission avait consignées dans son document. Vous le faites avec
une clarté qui va certainement servir la commission au niveau de ses
recommandations, et surtout sur la base d'une expérience qui, à
la description qui nous en a été faite quant à l'ampleur
du centre hospitalier Douglas, de la collaboration des
bénéficiaires et de la protectrice du citoyen ou
Pombudsperson"... Nous sommes en présence de recommandations qui sont
fondées donc sur l'expérience.
J'aimerais avoir d'abord un peu plus de précisions quant à
votre opinion sur les dispositifs du projet de loi 120 qui prévoit que
ce sera un cadre supérieur qui, formellement, devra assumer la
réception et le traitement des plaintes. Vous en avez touché
quelques mots en disant qu'il est important qu'il puisse aller également
au conseil d'administration. Est-ce que, là-dessus - je vais poser ma
question comme ceci - nous pourrions faire confiance, en quelque sorte, aux
établissements? Parce que nous sommes d'accord, je le souligne au
passage, sur le traitement de premier niveau dans le sens où vous venez
de le mentionner, que ce soit l'établissement qui soit responsable de
nommer cette personne, qui ne soit pas nécessairement un cadre
supérieur et qu'elle réponde, cependant, obligatoirement au
conseil d'administration, ce qui n'empêcherait pas, je le note au passage
en terminant, ce contact essentiel au niveau de la direction
générale de l'établissement. Alors, quant à cette
disposition, que ce soit automatiquement un cadre supérieur, j'aimerais
que vous précisiez un peu plus votre opinion là-dessus.
Mme Bourassa: Bien, je pense qu'on devra attendre un peu les
clarifications - on a le projet de loi - à savoir: Est-ce que la
responsabilité du traitement des plaintes sera confiée, par
exemple, à une personne au sommet de la pyramide hiérarchique
d'un établissement et cette
personne déléguera le traitement des plaintes à un
ombudsman? Question! À ce stade-ci, on ne peut y répondre. Pour
votre information, il existe 18 ombudsmans hospitaliers dans la province de
Québec sur à peu près 900 établissements de
santé, ce qui est très peu. Je pense que c'est 2,75 % de
représentativité. Donc, notre expérience, malgré
qu'intéressante - c'est pour ça qu'on vous la présente
aujourd'hui - si je veux répondre à la question de M. Trudel,
c'est: Est-ce que.. Finalement - je pense que Mme Lynch en a parlé hier
- nous ne savons pas ce qu'il adviendra des ombudsmans en place. Est-ce qu'ils
seront automatiquement reconnus comme responsables du traitement des plaintes?
La plupart des ombudsmans, je pense que c'est 50-50, 50 % sont
déjà cadres et les autres 50 % sont reconnus comme
professionnels, soit à contrat soit comme professionnels non
syndiqués syndicales. Donc, à ce moment-là, nous avons
quand même, au sein des établissements où on a des
ombudsmans hospitaliers de très grandes divergences. Donc, qu'est-ce que
l'avenir nous réserve? Quel est l'esprit des textes? On nage un peu,
c'est à deviner. Je pense qu'il faut faire attention. Actuellement,
l'ombudsman, au centre hospitalier Douglas, répond directement au
conseil d'administration et la personne de référence au niveau du
quotidien est le directeur général. Je pense que c'est
nécessaire, on sait fort bien qu'un conseil d'administration se
réunit à quelques reprises, que ce sont des
bénévoles, que l'agenda est très lourd, très
compliqué. Donc, pour faire débloquer des dossiers, en tant que
levier, le directeur général est vraiment la personne la mieux
placée pour appuyer et faciliter le rôle de l'ombudsman et
reconnaître les droits des usagers. (14 h 30)
Le Président (M. Dauphin): Merci.
M. Trudel: Toujours au sujet de ce mécanisme, je constate
donc que vous dites qu'il faut qu'il y ait un traitement local, avec cette
précision extrêmement intéressante dans la fiche
signalétique qu'on nous a remise suite aux communications qu'il y a eu
avec vous, que, sur le total du nombre de plaintes que vous avez reçues,
les deux tiers à peu près étaient, dans le fond, des
demandes d'information ou des consultations ou de la référence,
et ça, c'est important de le rappeler...
Mme Bourassa: 67 %.
M. Trudel: La définition de ce qu'est une plainte varie,
dans le fond, et c'est très difficile de catégoriser tout
cela.
Il y a un autre type de plaintes, entre guillemets toujours, qui doit
nous intéresser, eu égard au projet de loi 120, c'est les
plaintes en ce qui regarde les actes professionnels, les actes médicaux,
dans l'établissement donné. On va soit au CMDP, actuellement,
soit à la corporation directement pour certaines autres plaintes. Est-ce
que vous pensez que, dans le nouveau système de plaintes que nous serons
à élaborer avec le projet de loi 120, nous devrions très
clairement permettre que toutes les plaintes soient adressées, je prend
ça théorique, à la personne responsable, le cadre
supérieur, je pense, qui est là, le cadre supérieur
responsable de l'application de la procédure et de la réception
des plaintes, même pour les plaintes qui concernent les actes
professionnels, les actes médicaux plus spécifiquement? Bien
sûr, qu'elle soit acheminée, mais que la personne responsable dans
l'institution ne soit pas dessaisie de la plainte comme c'est le cas
actuellement? J'aimerais ça avoir votre éclairage
là-dessus, parce que certainement que, compte tenu du travail que vous
effectuez, vous avez eu à vivre avec, j'appellerai ça ainsi pour
l'instant, cette difficulté.
Mme Bourassa: Disons que dans la transmission il faudrait plus
que n'agir que comme une boîte aux lettres, à savoir que la
plainte entre par le service ou le département du responsable du
traitement de plaintes et est orientée vers le président du
conseil des médecins, pharmaciens et dentistes, et on attend un
résultat. Je pense que, comme mes collègues qui se sont
exprimés hier, j'aurais les mêmes expériences à
partager avec vous. On demeure avec très peu de résultats et,
très souvent, les plaignants ne sont pas intéressés
à paraître ou à être entendus par le CMDP. Ça
devient trop fastidieux pour eux.
M. Trudel: Encore une fois, de la part d'une personne qui a
l'expérience pratique sur le terrain, il faut noter cette
réponse, qui est basée sur le travail sur le terrain.
Une autre dimension sur laquelle j'aimerais bien avoir votre opinion ou
votre expérience. Mme Lynch, du centre hospitalier de Lanaudière,
nous indiquait, hier, que sur les quelque 800 plaintes annuelles qu'elle
enregistrait ou qu'elle recevait, encore une fois avec une définition
large de "plaintes", 36 % lui parvenaient du personnel. Ce n'est pas
négligeable et on comprend assez facilement pourquoi. Ça traduit
d'ailleurs un très bon sentiment de responsabilité, de
professionnalisme de la part de ces personnes qui s'aperçoivent que dans
l'établissement on ne rend peut-être pas les services auxquels
cette personne a droit ou aurait droit de s'attendre. Quelle est la situation
par rapport à votre expérience, par rapport à cette
dimension du travail?
Mme Bourassa: J'avais peut-être prévu votre
question, M. Trudel, et j'ai vérifié dans mon rapport annuel. Si
on regarde, et avec toutes les différences - le centre hospitalier
régional de Lanaudière est un centre hospitalier
"multi-vocationnel"; nous sommes un établissement à
vocation psychiatrique... Donc, avec ces nuances, je vous dirai que pour
les bénéficiaires admis 35 % des plaintes originent des
bénéficiaires qui sont hospitalisés, 20,8 % - donc le
cinquième - des plaintes proviennent du personnel et, ensuite, 20,2 %
des plaintes vont venir des patients qui sont traités en externe. Donc,
vous voyez que ça suit, mais de très près, à
proximité des lieux encore probablement, les gens qui sont
hébergés à l'hôpital, le fait que l'ombudsman est
facilement accessible à l'hôpital, de même que pour le
personnel en place, mais j'ajouterai aussi une façon d'interagir avec le
personnel. Nous croyons à développer des mécanismes
d'information, d'éducation. Systématiquement, chaque nouvel
employé me rencontre et, si vous voulez, la présentation de
l'ombudsman se fait tout de suite après le mot d'introduction, pour
montrer l'importance du respect des usagers dans notre établissement.
Donc, ça, ça se fait systématiquement en anglais ou en
français et ça se fera à répétition pour
rafraîchir les gens, quand les syndicats offrent des formations, de
façon à améliorer leurs contacts avec la clientèle.
À ce moment-là, je pense que le rôle de l'ombudsman est
expliqué non pas comme un chien de garde, mais comme une personne qu'on
peut appeler, consulter, de façon à s'assurer que les options qui
s'offrent à nous sont respectueuses des personnes à qui on donne
des soins.
De plus en plus, si on regarde, il y a plus de plaintes, mats aussi il y
a plus de demandes. Les gens, donc, consultent et ce qui ne paraît
peut-être qu'une demande d'information ne peut venir que dans une
pratique de défense proactive, à savoir qu'il n'y a pas besoin de
correctifs parce qu'on a utilisé la solution adéquate lorsqu'on a
examiné les options qui s'offraient à nous. Donc, à ce
moment-là, je pense que ce rôle de promotion, il est important, et
j'en pariais tantôt.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. M. Trudel:
Merci beaucoup.
Le Président (M. Dauphin): Je vais maintenant
reconnaître M. le député d'Iberville, ensuite M. le
député d'Anjou.
M. Lafrance: Merci, M. le Président. J'aimerais tout
d'abord vous remercier pour votre mémoire et toute la documentation qui
l'accompagnait. C'est très complet. Je vous en félicite et soyez
assurés que ça va sûrement nous aider dans notre travail de
réflexion et aussi, éventuellement, dans nos recommandations.
Moi, ce qui m'a frappé principalement, c'est à la page 3
de votre mémoire. Vous dites que le système actuel, par votre
présence d'ombudsman, s'est avéré efficace,
c'est-à-dire qu'avec votre présence sur les lieux le
système fonctionne bien, si j'ai bien compris. Par contre, vous amenez
la recommandation d'une intervention d'une instance supérieure, qui est
celle du Protecteur du citoyen. Bien que vous ayez peut-être
partiellement répondu à ma question dans vos derniers propos,
puisque vous avez dit que c'était surtout dans un sens de consultation
que vous le verriez arriver, j'ai un peu de peine à m'imaginer la
façon dont ça fonctionnerait. Parce que vous réalisez que
le Protecteur du citoyen, par son mandat, se veut un intervenant en ligne
directe avec la plainte et non pas à un palier supérieur. Alors,
j'ai peine à comprendre comment vous verriez son intervention puisque
vous traitez déjà les plaintes au premier palier.
Mme Bourassa: Si je peux répondre à la question, je
pense qu'on reconnaissait le Protecteur du citoyen en recours ultime. Je pense
que c'est important de responsabiliser les cadres en place, les gens en place.
Les dispensateurs de services doivent examiner ce qu'ils offrent à leurs
usagers et répondre de leurs actes. Ça, je pense que nous ne
préconisions pas que le Protecteur du citoyen vienne comme seul
recours.
M. Lafrance: Non, d'accord. Mais, si je comprends bien, vous le
verriez intervenir lorsque des plaintes n'auraient pas été
suivies par votre centre hospitalier ou lorsque vos conclusions de plaintes ne
seraient pas correctes. Alors, il viendrait, en quelque sorte, vous
rectifier.
Mme Bourassa: Dans le sens que, moi, je peux présumer que
ma décision est équitable, mais peut-être que le plaignant
se sent justement ou injustement toujours insatisfait. À ce
moment-là, je crois important de garantir au plaignant un recours
extérieur au réseau. On peut très bien se
référer à différentes instances, tel le conseil
régional, le service d'audition des plaintes du conseil régional,
mais, par expérience, nous savons que des clients insatisfaits vont
frapper à plusieurs portes. Donc, ce que nous disons, c'est que nous
devons offrir une expertise, un lieu hors du réseau capable de
répondre à ces plaintes.
M. Lafrance: Alors, si je comprends bien, dans le cas d'une
plainte qui n'aurait pas reçu satisfaction, vous diriez à la
personne: Votre plainte est référée dans le réseau,
à un échelon supérieur. Et vous diriez aussi,
parallèlement: Si vous voulez, vous pouvez aller au Protecteur du
citoyen. C'est bien correct?
Mme Bourassa: Si vous lisez un petit peu le protocole de
plaintes, en tant qu'ombudsman maison, entre guillemets, je peux aller jusqu'au
conseil d'administration pour demander correction. Si, pour une raison ou une
autre, le conseil d'administration ne supportait pas mes recommandations,
à ce moment-là, je devrais ou le
conseil d'administration devrait informer le plaignant de la
décision qu'il a prise en tant que dernière instance locale.
Mais, dans le protocole de traitement de plaintes, il est clairement dit que
l'ombudsman, à ce moment-là, pourra orienter le plaignant vers un
recours approprié. Vous savez, le rôle d'un ombudsman maison a des
limites. Donc, à ce moment-là, pour donner l'information
nécessaire, quel est le recours adéquat après le
traitement local des plaintes? Il faut s'assurer que cette information soit
transmise et que le client insatisfait puisse aller frapper à une autre
porte.
M. Lafrance: Avec le projet de loi 120, vous réalisez
qu'il y a des instances au point de vue régional qui vont être
mises en place pour donner accès justement à ces recours non
satisfaits sur le plan local.
Mme Bourassa: II y a des choses qui, même au niveau
régional, avec le projet de loi 120, on pense à l'accès au
dossier... J'aurais la même remarque par rapport au traitement des
plaintes locales, à savoir que la loi ne parle pas d'accès au
dossier dans le traitement des plaintes. Et ça, je pense que c'est un
manque important. Comment pouvez-vous, si votre conseil d'administration n'a
pas fait les démarches nécessaires avec la Commission
d'accès à l'information, faire votre travail pleinement si vous
n'avez pas accès à tous les documents pertinents pour traiter une
plainte? Dans le projet de loi 120, je vous suggère de nettement
étudier cette question, elle est très importante. Pour ce qui est
des régies régionales, elles ont fait les mêmes
recommandations et il n'y a aucune mention pour qu'elles aient accès aux
dossiers. On dit que la régie régionale devra déterminer
un organisme régional qui, lui, aura pouvoir d'enquête. À
ce moment-là, quel sera cet organisme régional? Il lui reste
à le développer très certainement.
M. Lafrance: Merci.
Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le
député d'Anjou.
M. Larouche: Bienvenue. Je n'ai pas pu entendre votre rapport,
mais j'ai quand même lu le résumé que vous avez ici. Je
vous en félicite. Alors, moi, je présume que votre position est,
telle qu'écrite, que vous accueillez favorablement
l'élargissement du mandat. J'aurais une question qui touche
l'hôpital Douglas, peut-être dans un cas qui a égard
à une chose similaire qui pourrait se rapporter à des questions
d'ombudsman. Le cas des activités passées du Dr Cameron, est-ce
que c'était bien à Douglas Hospital?
Mme Bourassa: Non.
M. Larouche: C'était au Royal Victoria?
Mme Bourassa: C'était au Allan Institute.
M. Larouche: Au Allan, mais le Allan Institute, est-ce qu'il OGt
affilié...
Mme Bourassa: Au Royal Victoria. M. Larouche: Au Royal
Victoria.
Mme Bourassa: Qui, comme nous, est affilié au
réseau de McGill.
M. Larouche: Ah, O.K. parce que ça aurait pu être un
cas. Je pense qu'if traîne encore, ce cas-là. II y a eu des
récriminations.
Mme Bourassa: Peut-être que Mme Bishop pourrait vous parler
de la mise en place du comité d'éthique et de droit des patients,
justement pour garantir...
M. Larouche: Est-ce que vous pouvez peut-être nous en
parler un peu? (14 h 45)
Mme Bishop: Oui, oui. Le comité d'éthique et de
droit des patients a le rôle de faire l'investigation d'éthique de
toutes les recherches dans l'hôpital. Les recherches, c'est sur un papier
et, premièrement, ça passe - je ne sais pas le mot en
français - au "scientific" conseil. Après, ça arrive au
comité d'éthique et de droit des patients. C'est environ 13
personnes, ça inclut les personnes que je mentionnais: l'ombudsman, un
membre de la communauté, un patient de l'hôpital et aussi un
avocat, qui est envoyé par le Centre de médecine d'éthique
et de droit de McGill. Nous avons lu le protocole avec le pouvoir de voir s'il
y a quelque chose qui ne serait pas d'éthique, de questionner. Nous
avons mis ensemble toutes les 13 personnes avec leurs recherchistes; ça
appelle beaucoup de questions. Si elles ne sont pas satisfaites, elles nous
disent de faire des corrections ici et ici. C'est nécessaire d'avoir la
signature de la présidente de l'éthique et droit des patients. Et
nous avons pris beaucoup de temps pour lire les documents et, aussi, pour lire
les documents externes. Dans mon sac, j'ai une chose sur l'éthique, une
recherche des États-Unis. Nous allons aux colloques et aux choses comme
ça. Nous ne sommes pas parfaits, parce que c'est culturel, tout le temps
les idées changent. Peut-être que, malheureusement, dans le temps
du Dr Cameron, il y avait une autre éthique, je ne sais pas. Mais, pour
moi, je pense que ça, ce n'était pas acceptable au temps du Dr
Cameron et ce n'est certainement pas acceptable maintenant.
Nous voyons particulièrement ce que sont les choses physiques et
mentales qui se passent dans la personne. Est-ce qu'il y a une chose positive
pour le sujet? Est-ce qu'il y a... Nous voyons aussi... Elle était
passée par le comité
de-Une voix: ...le comité scientifique.
Mme Bishop: Nous voyons et nous pensons qu'il y a des choses
médicales, physiques qui soulèvent une question. Nous avons
arrêté des recherches, on recommence encore... Mais, aussi, il y a
le Scientific Committee, je ne sais pas si M. Aucoin siège à ce
comité, il arrête beaucoup de recherches avant d'arriver au
comité d'éthique. Mais nous travaillons bien fort pour
éviter de grands problèmes.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Merci. Si vous
me le permettez, je vais vous poser quelques questions. Vous nous avez dit
tantôt, Mme Bourassa, que c'est à peu près 2,67 % des
établissements au Québec qui possèdent un "ombudsperson"
ou une personne comme ça. Sans me porter à la défense
complète et entière du projet de loi 120, est-ce qu'on doit
reconnaître cependant que c'est une nette amélioration
comparativement au système actuel, ne serait-ce que d'obliger les
établissements à prévoir un mécanisme de plaintes?
J'ai peut-être des doutes sur le cadre supérieur, mais voyez-vous
ça comme une bonification, une amélioration du système
actuel?
Mme Bourassa: C'est certainement une bonification. Mais, à
mon avis, il y manque certaines précisions d'importance, comme je disais
tantôt: l'accès aux documents, l'accès aux dossiers de
l'usager, la possibilité de circuler librement dans
l'établissement, les délais qui m'apparaissent trop longs par
rapport au type de plaintes, au type de difficultés qu'on va tenter de
solutionner, le bénéficiaire a besoin d'une intervention beaucoup
plus rapide. Il ne faut pas, malgré le fait qu'on le dise dans le
projet, je pense que l'esprit est là, mais on doit vraiment amener plus
de précisions, plus de clarifications.
Le Président (M. Dauphin): Je suis entièrement
d'accord avec vous, sauf que vous admettrez avec moi que 98 % des
établissements où il n'y a presque rien...
Mme Bourassa: C'est ça.
Le Président (M. Dauphin): ...c'est quand même un
pas en avant. Je suis d'accord avec vous qu'il y a beaucoup de choses à
améliorer. Vous dites à un moment donné, à la page
4, que le Protecteur du citoyen devrait être la seule instance
extérieure à l'établissement concerné pour traiter
les plaintes de première ligne dans un hôpital psychiatrique. Si
je comprends bien, c'est strictement au niveau des malades psychiatriques.
Quand vous parlez de première ligne, ce n'est pas à l'ensemble du
réseau. C'est strictement en faire une exception pour les maladies
mentales.
Mme Bourassa: Je pense qu'hier soir Mme Charbonneau nous a
parlé de ses préoccupations. Je pense que, étant
donné que c'est très difficile pour notre clientèle de
venir porter plainte, lorsqu'elle porte plainte, malgré qu'on lui offre
assistance, elle se décourage facilement si on lui dit: II faut aller
à l'autre porte et à l'autre porte. Donc, à ce
moment-Jà, je pense que c'est important, dépendamment de la
nature du problème... Si on est devant une plainte avec des motifs
sérieux, je pense que si, à ce moment-là, le Protecteur du
citoyen avait juridiction dans le domaine... Vous savez, même le conseil
régional a les mains liées dans plusieurs dossiers.
Je vous parlerai d'un jeune adulte souffrant d'autisme qui arrive
à l'urgence de notre établissement et qui habite dans un autre
secteur, la Montérégie - peut-être qu'il y a des
députés de la Montérégie - où on n'offre
aucun service en pédopsychiatrie pour ce genre de problème
psychiatrique. Donc, la mère, ne sachant plus quoi faire, décide
de prendre un taxi, d'arriver à l'urgence et de nous apporter ce jeune
désorganisé. Mais vous voyez, de par la nature des services que
nous offrons dans notre secteur enfants-adolescents, nous n'avons que deux
unités d'admission, 31 lits, et où nous n'admettrons que des cas
électifs. Donc, à ce moment-là, on a beau trouver la
plainte fondée, il n'y a pas d'accès de services, il n'y a pas de
services. Le conseil régional, lorsque appelé, va nous
répondre: Nous le savons, nous allons rajouter son nom sur une liste.
Est-ce que c'est acceptable pour un parent? Est-ce que c'est acceptable pour un
jeune qui a besoin de soins? À ce moment-là, le conseil
régional dit: Bien, on va référer le cas, on va prendre le
nom, mais on n'a pas plus de services. À ce moment-là, je pense
que, si on avait recours au Protecteur du citoyen, on pourrait régler
cette iniquité pour un individu. On peut appeler un CLSC, on peut
appeler la CPJ, etc., mais qui, en bout de ligne, va faire débloquer le
dossier? Je pense que ça prend une possibilité hors du
réseau qui a en même temps un pouvoir moral sur le
réseau.
Le Président (M. Dauphin): Autrement dit, si je comprends
bien, ce ne serait pas un recours ultime au Protecteur. C'est qu'on pourrait y
aller directement sans passer par le réseau.
Mme Bourassa: C'est ça.
Le Président (M. Dauphin): Spécifiquement dans les
cas qui nous concernent. Qu'on se comprenne bien là-dessus.
Mme Bourassa: Complexes...
Le Président (M. Dauphin): Alors, on m'indique qu'il reste
seulement deux minutes,
mais j'avais promis à mon collègue de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue de les lui laisser. Non?
Peut-être une petite dernière. Évidemment, le
recours au Protecteur du citoyen, hormis ce qu'on vient de discuter dans les
cas spécifiques - c'est la première fois, je pense, qu'on en
parle depuis deux jours - est accessible aussi à l'institution,
étant donné que le protecteur est impartial, neutre, recours
externe. Ce n'est pas juste lorsque l'usager n'a pas gain de cause. Ça
s'applique aussi à l'institution.
Mme Bishop: Oui, parce que, comme comité de
bénéficiaires, nous traitons de temps en temps une plainte qui
est... Juste, par exemple, malheureusement, il y a beaucoup de temps que les
hommes entraient dans les salles des femmes. Ce n'est pas l'autre face, mais
ça, c'est des plaintes qui commencent de la part de patients
vis-à-vis d'autres patients. Nous essayons de faire ce traitement de
plaintes qui sont d'un côté à l'autre côté.
Nous n'avons pas reçu de plaintes qui sont que les femmes entraient dans
les salles des hommes. C'est intéressant!
Le Président (M. Dauphin): Une dernière question
à M. le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
M. Trudel: Mme Bourassa, Mme Lynch, hier, nous mentionnait
qu'elle avait senti le besoin, au niveau de son travail, avec un protocole
particulier avec le Protecteur du citoyen du Québec, j'appellerai
ça comme ça, de moduler sa tâche, en particulier pour ses
rapports avec le Curateur public du Québec, d'être
déléguée de l'ombudsman. J'imagine qu'avec la
clientèle de votre centre vous êtes appelée à avoir
des rapports assez fréquents avec la curatelle publique, mais vous
n'avez pas senti le besoin, ce n'était pas nécessaire, ce
n'était pas utile d'avoir ce que j'appelle cette qualification
supplémentaire au niveau de votre travail, en particulier dans vos
rapports avec la curatelle publique?
Mme Bourassa: Je ne pense pas que ce soit par manque de besoin
parce que je pense que les ombudsmans hospitaliers, lors de nos rencontres, ont
exprimé le besoin d'encadrement, de supervision, etc. Mais en groupes de
soutien, si vous voulez bien. Mais je pense que le projet-pilote qui
émanait du bureau du Protecteur et du centre régional
Lanaudière était particulier. Je ne crois pas qu'elle-même
elle a été sollicitée, la délégation. Je
pense que ça s'est fait à un certain moment donné.
C'était un projet-pilote. Ça veut donc dire que s'il est
en voie - peut-être est-il terminé à ce moment-ci -
d'évaluation, quelles seront les recommandations suite à ce
projet-pilote? Je pense que c'est une idée intéressante.
Faudrait-il porter deux chapeaux?
M. Trudel: Qu'en pensez-vous?
Mme Bourassa: Eh bien, ce que Mme Lynch nous a dit, c'est que
ça semblait compliqué à certains moments. Mme Lynch avait
possiblement plus de marge de manoeuvre dans sa position de
déléguée du Protecteur du citoyen, mais ne nous a pas
vraiment éclairés par rapport à la marge de manoeuvre - il
semblait avoir une bonne collaboration - mais par rapport aussi à ses
pouvoirs dans son centre hospitalier. Je ne crois pas qu'elle avait
accès aux dossiers, par exemple. C'est comme très
différent portant l'un ou l'autre chapeau. Donc, devrait-on faire en
sorte comme le modèle ontarien, que l'ombudsman hospitalier soit
affilié à un office indépendant, mais travaillant
localement au sein d'un établissement?
Avant de terminer, j'aimerais attirer votre attention sur la
recommandation que nous faisions dans le mémoire. Que si jamais
l'ombudsman hospitalier devait relever d'une instance neutre, à ce
moment-là, le choix de l'ombudsman devrait être fait de
façon tripartite, à savoir le comité des usagers, le
Protecteur du citoyen, par exemple, et le conseil d'administration, de
façon à déterminer le mandat et l'évaluation de
l'ombudsman qui sera mis en place. Je pense que c'est important.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Alors, au nom
de tous les membres de la commission, Mme Bourassa, Mme Bishop, M. Aucoin, nous
tenons à vous remercier sincèrement de votre grande participation
à nos travaux, et bon retour.
Je demanderais maintenant à la Commission des droits de la
personne, Me Jacques Lachapelle, de s'avancer. (15 heures)
Alors, j'aimerais souhaiter la bienvenue à la Commission des
droits de la personne. Me Jacques Lachapelle, président, si vous pouviez
nous présenter la personne qui vous accompagne, et je vous signale que
vous avez environ une quinzaine de minutes pour nous présenter votre
exposé et, ensuite, on procédera à une période
d'échange.
Commission des droits de la personne
M. Lachapelle (Jacques): Alors, merci, M. le Président, de
nous donner non seulement ces 15 minutes, mais probablement ces trois quarts
d'heure, car nous pensions même ne pas venir devant cette commission des
institutions, nous n'avions envoyé que quelques notes brèves pour
vous rappeler certaines questions. Mais, écoutez, ça nous fait
extrêmement plaisir d'être devant vous, d'autant plus que, dans le
passé, nous avons eu aussi le plaisir d'être devant cette
commission des institutions, mais plutôt, cette fois-là, comme
examinée.
Le Président (M. Dauphin): Oui, exact.
M. Lachapelle: Je pense que c'a donné de bons
résultats, n'est-ce pas? On a vu que le Tribunal des droits de la
personne, suite à la commission des institutions et bien sûr
à l'acte du Parlement, de l'Assemblée nationale, a
été institué. Alors, je pense que c'est dû au
travail de cette commission.
Je voudrais vous présenter M. Marc Bilocq qui est directeur du
bureau de Québec. M. Bilocq est également intéressé
par cette question. Il a déjà été responsable d'un
service de plaintes sur la Côte-Nord dans un CRSSS, alors il pourra
peut-être vous faire bénéficier de ses compétences
dans le sujet.
Alors, comme je le mentionnais tantôt, bien sûr, nous
n'avions pas préparé de mémoire formel, nous voulions tout
simplement vous faire quelques représentations très larges, mais,
puisque vous nous invitez, on voudrait quand même préciser un peu
certains passages de ce bref document que vous nous aviez envoyé.
Toutefois, avant de passer à l'examen des trois ou quatre points que
nous avions mentionnés dans cette lettre, nous aimerions peut-être
brièvement vous soumettre quelques considérations d'ordre
général qui ont trait aux interrelations entre nos deux
organismes.
Les interventions du Protecteur du citoyen doivent, bien sûr,
s'appuyer sur les principes de la Charte des droits et libertés. Mais,
étant davantage préoccupé par la défense des
intérêts des citoyens et des citoyennes face à l'appareil
gouvernemental, il doit, je pense, aller beaucoup plus loin et s'assurer non
pas seulement de la Charte des droits et libertés, mais que les services
sont de qualité et conformes aux prescriptions de la loi. C'est un peu,
si vous voulez, le pendant du Vérificateur général qui,
lui, doit s'assurer des données plus comptables, et l'autre doit
s'assurer de la qualité, de l'adéquation des services.
D'autre part, il revient à la Commission des droits de la
personne de recevoir et de traiter des plaintes portées en
matière de discrimination contre le gouvernement, ses ministères
et organismes. Signalons en passant que le nombre de plaintes portées
contre l'administration publique - et l'on doit dire que c'est l'administration
publique en général qui peut consister en des hôpitaux, des
municipalités et aussi, bien sûr, le gouvernement du Québec
- est important puisqu'il constitue 36 % des plaintes logées à la
Commission des droits de la personne. Sur ce point, les deux
législations sont précises, le Protecteur du citoyen doit
référer à la Commission des droits de la personne les
plaintes relevant de sa compétence et la Commission des droits de la
personne doit faire de même à l'endroit des plaintes qu'elle
reçoit et qui sont du ressort du Protecteur du citoyen. Je dois dire
ici, en passant, que ce mécanisme fonctionne de façon très
adéquate et que les plaintes sont échangées dans les deux
organismes de façon régulière et de façon
précise.
Eu égard à la Charte des droits et libertés, le
Protecteur du citoyen vise au plus haut point à faire en sorte que se
réalise, dans l'administration publique, le deuxième
considérant de la Charte: Tous les êtres humains sont égaux
en valeur et en dignité et ont droit à une égale
protection de la loi." La Commission des droits de la personne est heureuse de
signaler que nos deux organismes collaborent à plusieurs projets qui
touchent la défense des principes de la Charte. Qu'il suffise de
mentionner nos interventions communes sur les directives et les pratiques du
ministère de la Sécurité du revenu à l'endroit des
bénéficiaires de l'aide sociale.
La Commission, du strict point de vue du respect des principes de la
Charte des droits et libertés, n'avait donc pas cru nécessaire de
faire de commentaire sur l'accomplissement même du mandat du Protecteur
du citoyen. Toutefois, nous aimerions reprendre les trois questions que nous
vous avions soumises dans notre lettre du 5 octobre dernier. Ces questions
touchent des groupes de citoyens particulièrement vulnérables et
qui, à notre avis, devraient faire l'objet d'une attention toute
spéciale de la part du Protecteur du citoyen: les membres des
communautés culturelles et ethniques, les autochtones et les
anglophones; les personnes vulnérables: les personnes
âgées, les personnes présentant une déficience
intellectuelle, les itinérants; les élèves ainsi que leurs
parents.
Donc, sur le premier thème, l'accès des membres des
communautés culturelles et ethniques, des autochtones et des anglophones
aux services du Protecteur du citoyen. C'est là un point majeur
soulevé dans le document de consultation, et nous déplorons, tout
comme le Protecteur du citoyen, que les membres des communautés
culturelles et ethniques, les autochtones et les anglophones ne fassent appel
que très rarement aux services du Protecteur du citoyen. Pourtant, cette
population, et là je parle ici des membres des minorités visibles
et ethniques, est numériquement très importante. Lors du dernier
recensement, on voyait que 8 % de la population ont déclaré
être nés à l'étranger, et 16 % se sont
identifiés comme étant d'origine autre que française ou
britannique. Il est surprenant et symptomatique à la fois qu'une si
faible proportion de ces personnes s'adresse au Protecteur du citoyen. La
hausse graduelle des niveaux d'immigration accroîtra cet écart. Si
on ne fait rien pour y remédier, une partie importante de la population
n'aura pas accès à ce service de première ligne.
Une étude de la Commission des droits de la personne
réalisée en 1987 démontre que les membres des
minorités visibles et ethniques s'adressent aux services publics qui
touchent les services de la santé, les services sociaux, les
services d'éducation, d'aide sociale, de police, etc., tout
autant que les membres de la majorité blanche anglophone ou francophone.
D'ailleurs, il y a un petit tableau à la fin, en annexe, qui vous
indique un peu ces pourcentages de services et de références des
diverses populations. Toutefois, ils ont moins tendance à s'adresser
à l'aide juridique et aux autres services publics, dont le Protecteur du
citoyen, que les membres de la majorité blanche francophone ou
anglophone. Il importe donc que le Protecteur du citoyen se rapproche de ces
populations. À cet égard, certaines mesures pourraient être
prises qui aideraient à améliorer les rapports avec ces groupes.
L'une de ces mesures serait d'avoir une publicité mettant en relief le
rôle du Protecteur du citoyen auprès de cette partie de la
population, en recourant, au besoin, aux membres des groupes ethniques, aux
groupes voués à la défense de leurs droits, et de faire
ainsi mieux connaître la nature et les services dispensés par le
bureau du Protecteur du citoyen.
D'autre part, nous constatons que le bureau du Protecteur du citoyen,
dont les effectifs ne relèvent pas de la fonction publique et donc ne
sont pas soumis à l'obligation décrétée par le
gouvernement de mettre en place un programme d'accès à
l'égalité, n'a pas procédé à l'implantation
de programmes d'accès à l'égalité.
Là-dessus, je voudrais peut-être faire une petite
parenthèse sur laquelle on reviendrait. Tantôt, j'ai eu une
discussion avec le Protecteur du citoyen adjoint. Il me faisait part qu'on
avait à tout le moins annoncé des intentions de mettre en place
des programmes d'accès à l'égalité. Si vous voulez,
on pourrait y revenir pour que je puisse préciser ce qu'on m'a
communiqué tantôt. Le Protecteur du citoyen, je l'indique et on
l'avait indiqué à l'époque, devrait donc sans tarder
procéder à l'implantation d'un programme d'accès à
l'égalité qui permettrait, entre autres, de recruter des
représentants des groupes concernés et de faire en sorte que ses
effectifs reflètent mieux la diversité ethnique de notre
population.
Les personnes vulnérables: personnes âgées,
personnes ayant une déficience intellectuelle et les itinérants.
La Commission des droits de la personne désire également attirer
votre attention sur Un groupe de personnes particulièrement
vulnérables: les personnes âgées et les personnes
présentant une déficience intellectuelle. Selon la Charte des
droits et libertés, toute personne âgée ou toute personne
handicapée a le droit d'être protégée contre toute
forme d'exploitation, et fa Commission a mandat de faire enquête à
la suite d'une plainte qui lui est adressée. La Commission a fait
enquête à plusieurs reprises dans ce domaine, entre autres, elle
est intervenue devant la commission d'enquête sur le fonctionnement de
l'hôpital Rivière-des-Prairies. Elle soumettait à la fin de
cette enquête la conclusion suivante: "Pour éviter la
répétition d'autres violations inaceptables, il faudra s'as-
surer de l'impact objectif des mécanismes de protection juridique,
administratifs et des structures de surveillance et de contrôle. Si la
loi est énonciatrice d'un consensus majoritaire qui lui assure son
autorité, la structure administrative se veut la traduction
concrète des principes qui y sont énoncés. Il est donc
important de prévoir dans la cohérence du système le
rôle de chaque élément afin que se réalise
harmonieusement l'exercice des droits prévus par le législateur".
La Commission recommandait alors: "Que soit évaluée la
possibilité d'étendre la juridiction du Protecteur du citoyen aux
hôpitaux et aux centres asilaires". Tout récemment, je dois dire
hier, la Commission des droits de la personne, à la suite d'une longue
enquête dans un centre d'accueil pour personnes handicapées
intellectuelles, a estimé que ces personnes avaient été
victimes d'exploitation de la part du propriétaire de l'entreprise. La
Commission s'inquiétait qu'un tel système ait pu perdurer pendant
des années et que le permis du centre d'accueil ait été
maintenu jusqu'à tout récemment. La Commission des droits de la
personne aujourd'hui même, a adressé des mesures de redressement
visant à dédommager les personnes, on a réclamé des
dommages moraux, des dommages exemplaires, et on indique également dans
cette décision de la Commission qu'elle s'adressera
éventuellement, si les dommages n'étaient pas payés, au
Tribunal des droits de la personne. La réclamation que nous avons
adressée aujourd'hui se chiffre à 1 000 000 $. Devant cette
constatation, il n'est pas impossible, ajoute la Commission dans le document
que nous avons émis hier, que de semblables situations existent dans
d'autres centres d'accueil privés pour personnes âgées ou
handicapées sur l'ensemble du territoire du Québec, et elle
demandait aux autorités gouvernementales, au besoin avec l'intervention
du Protecteur du citoyen, de mettre sur pied des mécanismes qui assurent
à l'ensemble des bénéficiaires le respect de tous les
droits que leur reconnaît la Charte des drafts et libertés. On le
comprend, le degré de vulnérabilité des personnes
hébergées est généralement plus
élevé, compte tenu de leur état de santé
précaire. Leur vie se déroule dans l'univers clos de la
résidence. Les abus possibles sont donc plutôt circonscrits
à l'intérieur de cet univers.
En 1988, un sondage Gallup faisait ressortir qu'au Québec 11 %
des personnes âgées interrogées avaient "eu personnellement
connaissance de cas qui se seraient produits dans leur voisinage et qui
pourraient être qualifiés d'abus exercés envers une
personne âgée, c'est-à-dire négligence
délibérée ou abus physique de personnes âgées
par leurs enfants ou par les personnes qui s'en occupent." Quand nous savons
que les personnes âgées constituent plus de 12 % de la population
actuelle et que cette proportion pourra atteindre 27 % en l'an 2031, on ne peut
prendre que très
au sérieux l'ampleur des problèmes à venir et
préparer dès maintenant les ressources requises à la
protection des droits des personnes. Par ses enquêtes, la Commission peut
donc intervenir dans les cas d'exploitation ou lorsque la personne
exploitée est une personne âgée ou handicapée,
qu'elle se trouve, de ce fait, dans un état de dépendance, qu'on
lui cause un préjudice moral ou matériel en mettant à
profit cette situation de dépendance. Même avec une
définition aussi large de l'exploitation, tout le domaine de
l'adéquation des services et de la qualité des services
échappe, on le comprendra, à la Commission. Si les abus sont
présents, nous avons tout lieu de croire que la qualité des
services n'est pas toujours à la hauteur des standards établis
par la loi, les règlements ou l'usage. On a reconnu qu'il était
nécessaire de mettre en place des mécanismes de contrôle.
Signalons quelques développements récents dans le domaine. Le
Curateur public est à mettre en application les nouvelles dispositions
de la loi 145 qui modifiait la Loi sur la curatelle publique. Ces changements
sont, entre autres, d'avoir institué trois régimes de protection:
conseil aux majeurs, la tutelle et la curatelle, d'élargir la
possibilité de présenter une demande de curatelle, de rendre
obligatoire pour un directeur général d'établissement le
signalement au Curateur d'un cas nécessitant un régime de
protection.
Par ailleurs - j'imagine que cette commission l'étudié
très minutieusement - le ministre de la Santé et des Services
sociaux vient de rendre public un projet de réforme du système de
santé et des services sociaux. Les centres de services sociaux, tels
qu'ils existent actuellement, seront remplacés par des centres de
protection de l'enfance et de la jeunesse. Ce sont les centres locaux des
services communautaires qui seront responsables en matière de services
aux personnes âgées. La réforme touche également le
système des droits des bénéficiaires et propose, dans ce
nouveau contexte, trois paliers de recours pour une personne se croyant
lésée dans ses droits: un premier recours auprès d'un
cadre supérieur nommément désigné par le conseil
d'administration de l'établissement, un deuxième recours
auprès d'une régie régionale, un troisième et
dernier recours en la personne du ministre lui-même, qui se
reconnaît le pouvoir d'audition des litiges non résolus à
la satisfaction du requérant. Je dois dire là-dessus qu'on a un
peu de difficulté à retrouver dans le projet de loi 120 les
pouvoirs exacts du ministre, mais on comprend qu'en commission parlementaire ou
à l'Assemblée nationale le ministre dit lui-même qu'il a
ces pouvoirs-là, alors, on prend pour acquis qu'il les a, sans les avoir
trouvés dans le projet de loi lui-même. (15 h 15)
Nous croyons que le troisième et dernier recours devrait
échoir à un Protecteur du citoyen local plutôt qu'au
ministre qui risque d'être en conflit d'intérêts puisqu'il
est le responsable du réseau des services de santé. Dans une
optique de régionalisation, ce protecteur du citoyen local ou
régional n'est pas nécessairement le Protecteur du citoyen du
Québec. Il pourrait, cependant, avoir des liens fonctionnels avec le
Protecteur du citoyen qui verrait à lui fournir l'aide et le
support-conseil nécessaire au bon accomplissement de ses
tâches.
Enfin, le dernier thème que nous avons abordé. Dans le
domaine scolaire, lors de la présentation du projet de loi 107 portant
sur la Loi sur l'instruction publique, la Commission des droits de la personne
proposait l'inclusion, dans la loi, d'une disposition permettant un recours au
Protecteur du citoyen accessible aux élèves et à leurs
parents. Reconnaître les droits est une chose. D'ailleurs, la Loi sur
l'instruction publique en reconnaît une multitude aux parents et aux
élèves, mais, encore une fois, en garantir le respect est une
autre chose. Le temps, d'ailleurs, passe très vite à
l'école. La privation de quelques semaines de classe peut faire la
différence entre le succès ou l'échec. C'est pourquoi les
droits, aussi clairement définis soient-ils, n'ont aucune
réalité et ne protègent pas si l'on ne peut soumettre les
conflits rapidement à l'arbitrage d'une personne ou d'un organisme
impartial.
Pour la solution à des conflits survenant dans l'application de
la Loi sur l'instruction publique ou l'éducation, on le comprendra, les
tribunaux sont de peu d'utilité, les délais y sont trop longs et
les coûts élevés les rendent inaccessibles à une
grande partie de la population. De plus, la plupart des conflits scolaires
trouvent plus facilement des solutions dans une formule plus souple de
négociation et d'arbitrage plutôt que dans des procédures
judiciaires formelles et contraignantes qui définissent un gagnant et un
perdant.
Des exemples tirés de nombreuses situations ont été
portés à notre connaissance au cours des dernières
années. Au mois de mai, à la fin de la maternelle, un enfant
présentant une déficience intellectuelle est classé en
école spéciale. Les parents contestent ce classement. La
commission scolaire refuse de reconsidérer le classement. Au mois
d'avril, deux mois avant la fin de l'année, un élève du
secondaire IV formule à un copain, dans la cour de
récréation, une critique sur un cours. La remarque parvient aux
oreilles de l'enseignant qui exige des excuses. L'élève refuse et
est suspendu du cours pour le reste de l'année. Apres un mois de classe,
fin septembre, un jeune de 16 ans abandonne son secondaire V. Fin octobre, il
revient sur sa décision et demande d'être réinscrit. Le
directeur de l'école refuse en disant qu'il est trop tard. La commission
scolaire refuse de changer la décision.
Voilà des situations dont la solution ne peut attendre et qui
exigeraient un mécanisme de
recours neutre et indépendant. Le ministre de l'Éducation,
faisant confiance aux structures administratives des commissions scolaires et
de son ministère, croit que de tels recours multiplient inutilement les
instances. Notre expérience et celle de nombreux élèves -
élèves handicapés, élèves à qui l'on
reproche leur comportement, élèves en difficulté
d'apprentissage, élèves de condition sociale
défavorisée - nous convainquent du contraire. De nombreux litiges
doivent être tranchés par un intervenant extérieur au
système scolaire. Il en va de la crédibilité même du
système et de l'efficacité des recours. Le jeune suspendu ou
expulsé, qui ne peut faire appel qu'à rétablissement ou
à la commission scolaire qui aura à décider de son
expulsion, peut mettre en doute la neutralité du mécanisme. Le
parent d'un enfant handicapé qui ne peut contester une décision
de classement en classe spéciale qu'auprès de la commission
scolaire qui l'aura autorisé peut soupçonner des collusions
préjudiciables au respect des droits de son enfant.
À l'époque, trois organismes avaient fait ensemble une
intervention publique en ce sens, la Commission des droits de la personne, la
Commission de protection des droits de la jeunesse, l'Office des personnes
handicapées, pour que la solution retenue en décembre 1984, dans
le projet de loi sur l'enseignement primaire et secondaire, le projet de loi 3,
soit le recours au Protecteur du citoyen. Cette solution avait fait consensus
à l'époque, mais, bien sûr, n'a pas retenu l'attention du
législateur.
Or, en conclusion, je me permets de vous résumer les
recommandations de la Commission des droits de la personne: Que le Protecteur
du citoyen examine les moyens de faire connaître ses services aux membres
des communautés culturelles et ethniques, aux autochtones et aux
anglophones. Que le Protecteur du citoyen mette en place les mécanismes
qui lui permettront d'implanter un programme d'accès à
l'égalité. Que le Protecteur du citoyen ait juridiction sur les
écoles pour recevoir les plaintes des parents et des
élèves. Qu'un protecteur du citoyen soit nommé sur une
base locale ou régionale pour entendre et décider des plaintes
des bénéficiaires du réseau des affaires sociales. Or,
voilà en susbstance, M. le Président, les quelques commentaires
et recommandations de la Commission des droits de la personne.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, Me Lachapelle,
pour votre exposé. Je vais maintenant reconnaître un des membres
de la commission, à commencer par Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, pouvez-vous me dire de combien
de temps on dispose dans l'échange?
Le Président (M. Dauphin): De 25 minutes.
Mme Harel: Pour l'ensemble?
Le Président (M. Dauphin): Pour l'ensemble.
Mme Harel: C'est ça. Alors, Me Lachapelle, je suis
très contente de vous accueillir à la commission, ainsi que, je
crois, le directeur du contentieux de la Commission. C'est bien le cas?
M. Lachapelle: Directeur du bureau de Québec.
Mme Harel: Du bureau de Québec. Bon. L'examen que nous
faisons à la commission des institutions n'aurait évidemment pas
été complet sans la participation de la Commission. J'aimerais
reprendre avec vous chacun des aspects que vous avez choisi de
développer, le premier étant l'accès des membres des
communautés culturelles et ethniques, des autochtones et des anglophones
aux services du Protecteur du citoyen. Vous nous dites, et vous le
démontrez d'ailleurs avec un tableau, que pourtant les services de
nature publique comme les services sociaux ou autres services
d'éducation sont utilisés, sauf ceux où il y a finalement
reconnaissance des droits, comme si ces membres des minorités
culturelles utilisaient les services publics mais pas celui où ils ont
à faire reconnaître un droit. Je ne sais pas si c'est là la
conclusion que vous en tirez. Je trouvais en quelque part assez faibles - vous
allez m'en excuser, vous connaissez l'estime dans laquelle je porte la
Commission - les recommandations. Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est
que si on fait de la. publicité, si le Protecteur fait mieux
connaître ses services, ça va se régler. Est-ce que c'est
comme ça qu'il faut comprendre votre recommandation?
M. Lachapelle: C'est une partie de la réponse. Oui, je
pense que le Protecteur du citoyen doit faire un effort pour faire
connaître ses services auprès de ces communautés.
Mme Harel: Est-ce que c'est suffisant? Est-ce qu'il y a quelque
chose de systémique? Vous êtes un peu le spécialiste,
l'expert de la discrimination systémique, n'est-ce pas? Est-ce qu'il y a
quelque chose de cette nature-là dans le fait que les membres de toutes
ces collectivités-là n'utilisent pas les services de
reconnaissance des droits?
M. Lachapelle: Je pense, madame, que vous reconnaissez aussi le
sérieux que la Commission des droits de la personne met dans ses
études et surtout, avant de parler de discrimination systémique,
je pense qu'il faudrait pousser les études un peu plus loin. Je regarde,
par exemple, une qui m'inquiète beaucoup concernant l'aide juridique
où on note que pour... Oh, mon Dieu, j'espère la retrouver.
L'aide juridique a trois points.
Mme Harel: Vous voyez, le Groupe contrôle/français
et anglais, c'est 5.17...
M. Lachapelle: Oui.
Mme Harel: ...et les membres, les MVE, ça signifie
quoi?
M. Lachapelle: Minorités visibles et ethniques. Oui, c'est
ça.
Mme Harel: C'est 1.61. Donc,...
M. Lachapelle: Alors, vous voyez qu'il y a une très grande
disproportion à l'aide juridique. Il faudrait peut-être donc aller
plus loin et aller voir à l'aide juridique comment il se fait que
contrairement, par exemple, au service policier où il y a une proportion
quasi égale et même plus importante des minorités visibles
qui s'adressent à la police, malgré toute l'appréhension
que les gens des minorités visibles peuvent avoir vis-à-vis la
police... Il y a là des indices. De là à conclure qu'il
pourrait y avoir de fa discrimination systémique, c'est peut-être
un petit peu dangereux, et on indique là certaines avenues, certaines
inquiétudes, mais, pour conclure à de la discrimination
systémique, il faudrait aller voir: Est-ce qu'il y a la des
définitions, les principaux éléments de la discrimination
systémique, des mécanismes que l'on dit apparemment neutres qui
ont effet sur les groupes des minorités, de sorte que finalement ils ne
se présentent pas devant ces instances?
Mme Harel: D'accord. En somme, là vous recommandez le
programme d'accès à l'égalité.
M. Lachapelle: Oui.
Mme Harel: Et vous nous faites savoir que c'est sans doute
bientôt que ce sera mis en vigueur et vous recommandez des campagnes de
publicité. Quand vous dites: programmes d'accès à
l'égalité, est-ce que vous entendez aussi, vous souhaitez qu'il y
ait l'offre de services dans la langue de la minorité?
M. Lachapelle: Bien, je pense qu'il faudrait, lors d'un programme
d'accès à l'égalité et c'est pour ça que je
suis content que vous reveniez sur cette question... J'ai eu tantôt une
conversation avec M. le protecteur adjoint, qui m'indiquait que le Protecteur
du citoyen lui-même avait indiqué son intention de mettre en place
des programmes d'accès à l'égalité. À mon
sens, it ne suffit pas, bien que ce soit là le premier moteur, si on
veut, d'indiquer l'intention, il faut véritablement faire toute cette
démarche planifiée, articulée: faire une
évaluation, faire un diagnostic, faire l'évaluation de tout le
système à l'intérieur, le système
d'embauché, le système d'approche, le système
d'information auprès des communautés culturelles, toute la
question de la langue utilisée chez le Protecteur du citoyen. Il faut,
dans un programme d'accès à l'égalité, faire toute
cette démarche et non pas seulement se dire: Je dois recruter tant de
personnes. Ce n'est pas suffisant que de faire ça. Malgré ce
qu'on m'a dit tantôt, qu'on a l'intention de faire ce programme et de
recruter des personnes des communautés culturelles, ce n'est pas assez.
Il faut véritablement faire toute la démarche jusqu'au bout et
regarder chacun des systèmes et des sous-systèmes chez le
Protecteur du citoyen, y inclus les systèmes d'information auprès
des groupes des minorités visibles et j'imagine que c'est vrai pour ce
qui est des autochtones et des anglophones aussi. Je comprends qu'il n'y a pas
de... Là, je pense que le Protecteur du citoyen nous le dit
lui-même dans son document, que les anglophones accèdent peu
à ses services.
Mme Harel: On a tellement malheureusement un temps qui nous est
compté. Je sais que vous traitez de questions assez importantes, mais,
en vous écoutant, je me suis dit qu'il serait peut-être
nécessaire ou intéressant de vous entendre sur le fait qu'il y a
une juxtaposition de recours. Certains parlent d'une sorte de
multiplicité, mais vous avez vous-même parlé du Curateur
public, vous avez parlé également de la Commission de protection
des droits de la jeunesse, de vous-même, la Commission des droits de la
personne, et du Protecteur; j'aimerais savoir si, pour vous, sur le terrain,
tout ça a un sens, finalement, ces recours, et si chacun sait comment
cohabiter, d'une certaine façon. Et aussi vous entendre
particulièrement sur la question autochtone. Vous aviez vous-même,
à la Commission, demandé de tenir une enquête publique, je
crois, notamment sur les relations entre les corps policiers et les nations
autochtones. Je crois comprendre que cette enquête n'a pas
débuté du fait que vous n'avez pas eu les fonds
nécessaires pour l'entreprendre. Est-ce que vous envisagez un mandat
spécifique au Protecteur du citoyen sur des cas particuliers parce que,
finalement, vous voulez mener cette enquête, mais à partir de cas
particuliers qui s'étaient produits?
M. Lachapelle: Pour ce qui est de la question autochtone, oui.
Les dernières informations sont à l'effet que notre demande est
encore à l'étude au bureau du ministre de la Justice et qu'il n'y
a pas encore de réponse ni favorable ni défavorable, alors je
n'en sais pas plus. La Commission tient toujours à mener cette
enquête. Nous croyons que les récents événements
à Kahnawake comme à Kanesatake démontrent encore une fois
des difficultés de relations entre la police et les groupes autochtones.
Nous insistons encore pour cette enquête.
Mme Harel: Dans ce cas précis, pouviez-vous nous dire,
pour le bénéfice des membres de
la commission ce que serait la différence d'intervention, par
exemple, entre la Commission des droits et le Protecteur?
M. Lachapelle: C'est évidemment... Vous mentionniez
tantôt la diversité des recours: Protecteur du citoyen, curatelle
etc., et c'est là un point extrêmement important. Je ne sais pas
si un jour on pourra se pencher sur cette question. En même temps qu'il y
a beaucoup de recours, il se produit aussi souvent l'effet de ce qu'on appelle
la porte tournante, quelqu'un est pris dans la porte, il ne sait pas quand
sortir, il ne sait pas à quel moment et quand la porte s'arrête,
ce n'est jamais à la bonne place, il doit aller à l'autre et,
malheureusement, il arrive très souvent qu'il n'y a aucune porte qui
s'ouvre devant lui parce qu'on lui dit: Vous savez, ce n'est pas chez nous, ce
n'est pas chez nous, ce n'est pas chez nous, c'est nulle part, sauf qu'il y a
souvent un problème de déni de justice très important.
Alors il faudrait un jour qu'on puisse se pencher sur cette question d'arrimage
des différents organismes. Nous avons initié, avec le Protecteur
du citoyen, la curatelle publique, la Commission de protection des droits de la
jeunesse, la Commission des droits de la personne et l'OPHQ également,
une concertation où nous nous rencontrons de façon
régulière pour essayer justement de pallier au
phénomène de la porte tournante. (15 h 30)
D'autre part, il n'est évidemment pas facile de détecter,
par exemple en matière d'exploitation, à quel moment commence la
juridiction, ça va bien, à quel moment elle arrête, ce
n'est pas facile, et à quel moment pourrait intervenir de façon
efficace le Protecteur du citoyen si jamais il avait une juridiction sur les
personnes âgées dans les centres d'accueil et dans les centres
hospitaliers. Ce n'est pas facile à tailler, je m'en remets un peu
à la sagesse de votre commission pour essayer de tailler des lignes qui
vont faire en sorte que les organismes vont s'entraider plutôt que se
nuire. Là-dessus, il nous faudrait peut-être nous réunir
pour démarquer chacune des juridictions des organismes. Pour moi, c'est
difficile de vous dire cet après-midi la Commission arrête
là et le Protecteur du citoyen devrait commencer à tel
endroit.
Nous avons justement, sur ce plan, initié avec le CSS de
Québec un comité sur les cas d'exploitation justement, où,
très souvent, on assistait au phénomène de la porte
tournante et on ne savait pas à qui s'adresser. Chacun des cas
d'exploitation qui nous sont soumis est examiné par un petit
comité, de manière que la bonne instance agisse au bon moment.
C'est un minimum de concertation que nous avons mis en place. Peut-être
que cette expérience-là pourrait nous servir justement à
délimiter avec les autres organismes la juridiction de chacun.
Mme Harel: À l'égard du réseau de
santé et services sociaux, vous recommandez que le responsable de
troisième recours, dites-vous... Quand vous dites, vous l'appelez
délégué local ou régional, je crois, hein?
protecteur du citoyen local ou régional. Local, est-ce que ça
signifie pour vous rétablissement?
M. Lachapelle: Non, non. Ça signifiait... Mme Harel:
La région.
M. Lachapelle: Je pense que Montréal est peut-être
local ou régional, je ne sais pas trop comment l'appeler. Il y a
peut-être des grandes...
Mme Harel: Ah! Au niveau de la régie régionale?
M. Lachapelle: C'est ça.
Mme Harel: C'est ça.
M. Lachapelle: Oui. Oui, oui.
Mme Harel: Alors vous, vous recommandez aussi, un peu comme l'a
fait l'Association des centres d'accueil, que la régie régionale,
ce soit finalement un protecteur délégué du Protecteur du
citoyen qui soit ce recours. Mais vous maintenez les deux autres. Vous
maintenez la régie régionale aussi, le recours interne.
M. Lachapelle: Oui. Je pense que l'expérience a
démontré qu'à l'interne - je ne sais pas, peut-être
M. Bilocq pourrait nous en parler davantage - il y a intérêt
à ce que des problèmes soient réglés localement,
soient réglés au niveau même de l'institution. Il y a
sûrement de nombreux problèmes qui peuvent être
réglés à ce niveau-là.
Mme Harel: J'ai une petite controverse avec mon collègue,
là, sur l'interprétation de votre recommandation.
M. Lachapelle: Vous allez la régler, j'imagine.
Mme Harel: Oui, oui. C'est vous qui...
M. Lachapelle: Ou bien c'est moi qui vais la régler.
Mme Harel: C'est vous qui allez l'arbitrer... M. Lachapelle:
Oui.
Mme Harel: ...à l'instant même. Donc, le premier
recours est un recours local, dans l'établissement, pour s'entendre sur
les mots.
M. Lachapelle: C'est ça.
Mme Harel: Le deuxième, c'est la régie
régionale, c'est le CRSSS. Vous maintenez ça?
M. Lachapelle: Oui.
Mme Harel: Et vous dites que, ensuite, ça devrait
être un délégué du Protecteur du citoyen au niveau,
si vous voulez, pour s'entendre, régional.
M. Lachapelle: C'est-à-dire qu'on dit qu'il devrait y
avoir là un Protecteur du citoyen. Est-il un
délégué du Protecteur du citoyen? Peu importe. Il devrait
y avoir là un Protecteur du citoyen et non pas le ministre.
Mme Harel: Et, à ce moment-là, totalement, pour en
assurer l'impartialité, l'indépendance, qu'il ne soit pas un
salarié, j'imagine, du CRSSS.
M. Lachapelle: Bien, ce serait évidemment un
problème que ce soit un salarié. C'est un problème
également, à notre avis, que ce soit le ministre, malgré
toute la bonne foi qu'on peut lui prêter. On imagine un problème
où il pourrait y avoir des poursuites importantes intentées
contre une institution, et que le ministre soit pris pour trancher ce genre de
débat, ça nous apparaîtrait un peu périlleux que de
lui confier cette tâche-là.
Mme Harel: Et vous recommandez, de façon
particulière, pour les personnes hébergées, celles qui
sont plus vulnérables, vous avez une sorte de recommandation qui est
plus articulée, je pense, les concernant. Vous dites: "Que soit
évaluée la possibilité d'étendre la juridiction du
Protecteur du citoyen aux hôpitaux et aux centres asilaires." Ça,
ça veut dire, finalement, les centres d'accueil où les personnes
hébergées sont en perte d'autonomie complète.
M. Lachapelle: Oui.
Mme Harel: Là, vous voyez le délégué
du Protecteur du citoyen.
M. Lachapelle: Je vous mentionnais tantôt le cas que nous
avons examiné hier à la Commission qui est un centre d'accueil
privé et qui, pendant des années et des années, a
fonctionné, selon nous, sur un système d'exploitation des
personnes qui étaient présentes. Et, pendant des années,
on a laissé le permis se perpétuer et on vient, il n'y a que
quelque temps, de l'enlever. On pense qu'il y a lieu d'instaurer un
système qui puisse permettre de faire des vérifications plus
adéquates et qui soit un protecteur du citoyen.
Il y avait déjà tout le système du réseau
des affaires sociales qui était, à notre connaissance,
présent dans ce dossier-là, qui a vu évoluer pendant des
années cette situation et qui n'a pu apporter de correction.
Mme Harel: Oui. La différence entre les deux, c'est que
vous, vous avez le pouvoir de faire des recommandations, de faire plus encore,
vous avez le pouvoir de faire des mises en demeure.
M. Lachapelle: Et de poursuivre, bien sûr, devant le
Tribunal des droits de la personne, le cas échéant.
Mme Harel: Et de poursuivre aussi devant le Tribunal des droits
de la personne, ce que n'a pas le Protecteur du citoyen.
M. Lachapelle: C'est ça.
Mme Harel: Et, en termes scolaires - mon collègue veut que
j'insiste, avec raison - vous aviez déjà fait la recommandation,
vous nous illustrez par des exemples concrets l'intérêt,
finalement, d'étendre la juridiction du Protecteur aux droits des
enfants ou des élèves. Ça va nous permettre de mieux
échanger avec, entre autres, le Conseil scolaire de l'île de
Montréal qui vient, je pense, de décider de ne pas recommander
l'extension. Mais, ceci dit, c'est important. Vous, la Commission des droits,
vous avez enquêté dans ces cas-là. Vous aviez juridiction
aussi?
M. Lachapelle: Nous avons enquêté dans les cas,
entre autres, d'intégration scolaire. Évidemment, la Commission
enquête sur la base de la discrimination. Et ce n'est pas toujours facile
de démontrer que c'est par discrimination qu'un élève est
placé dans une classe spéciale. Nous avons, justement, avec
l'Office des personnes handicapées, travaillé sur tout un dossier
concernant cette question-là. Bien sûr, la juridiction de la
Commission est très limitée à la question de la
discrimination.
Et il faudrait peut-être que quelqu'un puisse aller enquêter
sur chacun des cas qui pourraient lui être soumis, sur une
classification, sur le mode de classement, sur la façon de faire d'une
commission scolaire ou d'une école. Et c'est différent de la
discrimination.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Messier: Merci, M. le Président. C'était sur le
réseau scolaire, parce que vous êtes le premier intervenant
à parler du monde scolaire, et j'ai encore en mémoire deux cas de
comté où on n'a pas été capable de contester, un
petit peu, la classification où les parents demandaient que l'enfant
s'en aille en classe régulière malgré que la commission
scolaire dise: Non, il doit aller à une classe
spécialisée. Après maintes démarches, même si
on peut, comme député, être considéré quand
même aussi comme protecteur du citoyen, on n'a été capable
de rien faire. Et je n'ai été capable de retrouver aucun
recours
possible.
Et là vous me dites que vous travaillez avec l'OPHQ sur un
comité conjoint. Je trouve ça formidable. Et, dans ce
sens-là, vous demandez un petit peu l'extension, soit à vous,
peut-être, soit au Protecteur du citoyen de regarder aux niveaux
scolaire, primaire et secondaire, des cas, peut-être pas de
discrimination, mais des cas comme ça, de plaintes de parents demandant
à réintégrer les enfants, pas dans des classes
spéciales, mais dans des classes régulières.
M. Lachapelle: Sur ce chapitre, il y aurait deux façons
d'intervenir. Bien sûr, un organisme qui intervient et qui reçoit
les plaintes. Mais à notre avis, avant tout cela, il y aurait lieu que
le ministère de l'Éducation établisse de façon
claire et précise qu'en principe les écoles
séparées ou les classes séparées, ça
n'existe plus et que le principe, c'est l'intégration de tous les
enfants dans le système régulier, sauf vraiment de très
rares exceptions, et que le fardeau de la preuve n'appartienne pas aux parents
- ce qui est une tâche épouvantable, de démontrer que son
enfant devrait aller en classe régulière. C'est le cas
actuellement. Les parents doivent se battre pour faire cette
démonstration-là - mais plutôt aux commissions scolaires.
Alors, d'ici peu, nous déposerons un document sur cette
question-là, mais, encore une fois, à notre avis, il faut
commencer par ça. Qu'on établisse clairement ces
principes-là, que c'est la classe régulière qui est la
classe où devraient aller tous les enfants, sauf démonstration
par les commissions scolaires du contraire, ou une école devrait
démontrer le contraire.
Ensuite, bien sûr, une fois qu'on aura établi cette
mécanique et ces principes, il devrait y avoir une Commission des droits
de la personne ou un Protecteur du citoyen qui irait s'assurer que les
mécanismes ont été suivis de façon adéquate
et, lorsqu'il y a une classification, qu'elle a été faite de
façon très conforme, si vous voulez, aux principes qu'on aura
d'abord établis.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Nelligan.
M. Williams: Merci, M. le Président. Juste un petit
commentaire avant que je demande les questions. Je suis heureux que vous ayez
soulevé, M. Lachapelle, l'importance des communautés
linguistiques, la communauté d'expression anglaise, les
communautés culturelles et la question des autochtones, parce que je
pense, ici, que peut-être nous avons besoin d'une longue discussion sur
cette question. Quand on parle d'accessibilité des services, avec le
projet de loi 120 que nous sommes en train d'étudier, sur la question de
la santé, nous avons discuté cette question et j'espère
que nous allons mettre notre système québécois le plus
accessible possible, parce que, quand on parle de la question des droits de la
santé, on parle de personnes vulnérables.
Les chiffres, quand j'ai relu le rapport du Protecteur du citoyen
1989-1990, avec toute la bonne volonté du Protecteur du citoyen, j'ai vu
un chiffre, sur 21 703 personnes qui ont utilisé ses services, juste 14
% parlent une langue autre que le français ou l'anglais et 5 % parlent
l'anglais. Je pense qu'il n'y a aucun doute de la bonne volonté de la
Commission, du Protecteur du citoyen et de tous les autres. Il y a du travail
à faire, je pense, dans cette direction.
J'ai deux questions pour vous. Je pense qu'en vertu de la Charte des
droits et libertés vous avez le droit et la responsabilité de
faire des recommandations au gouvernement québécois sur nos lois.
Quand on parle de la possibilité d'une extension du mandat du Protecteur
du citoyen, est-ce que vous envisagez le même statut et les mêmes
responsabilités pour le Protecteur du citoyen? Dans son rapport, il a
fait quelques commentaires sur le projet de loi. Est-ce que vous pensez que
c'est mieux de l'enchâsser dans notre Charte
québécoise?
M. Lachapelle: Je dois vous avouer qu'en tant que Commission des
droits de la personne, pour ce qui est des principes d'application de la
Charte, je suis un peu neutre par rapport à cette question.
Peut-être qu'en tant qu'administrateur public je pourrais vous formuler
certains commentaires, mais, encore une fois, ça ne relève pas de
la Charte des droits et libertés, je pense, cette question.
J'ai l'impression que si le Protecteur du citoyen était
consulté avant le dépôt d'un projet de loi, bien sûr,
il se sentirait peut-être lié par l'opinion qu'il donnera sur un
projet de loi et il serait peut-être ensuite embêté, voyant
les effets réels et en étant en contact, des fois, avec les
groupes, de voir comment l'acquiescement qu'il aurait pu donner à un
projet de loi est acceptable et tout à fait réaliste. Nous, on a
pu le constater, à la Commission des droits de la personne; nous ne
sommes pas consultés avant que les projets de loi soient
déposés. Je dois vous dire que ça nous donne passablement
plus de marge de manoeuvre que d'être consultés après, bien
sûr. Évidemment, comme tous les projets de loi ou une très
grande majorité des projets de loi concernent finalement les citoyens -
là, c'est le réflexe de l'administrateur public plutôt que
du président de la Commission des droits de la personne - ça va
être un sacré boulot pour le Protecteur du citoyen que d'examiner
toutes ces lois, d'en vérifier les impacts et de s'assurer qu'elles sont
conformes à quels standards, je ne sais pas. Enfin, il va falloir qu'il
se donne des standards, parce qu'il pourra toujours discuter de
l'à-propos d'un projet de loi, il sera probablement bien
embêté dans beaucoup de cas.
II faudrait peut-être baliser ce pouvoir. Je pense que la
Commission des droits de la personne est là pour donner... Elle doit
faire des commentaires sur la conformité d'une loi à la Charte.
Donc là, la Commission des droits de la personne, normalement,
intervient quand il s'agit de principes de la Charte. Alors il faudrait
peut-être, si un tel pouvoir était donné au Protecteur du
citoyen, baliser un peu ce pouvoir, de sorte qu'il ne soit pas obligé de
se prononcer chaque fois qu'il y a une loi qui concerne l'ensemble des
citoyens, parce qu'alors il va être obligé d'établir quasi
à côté une l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: Oui, M. le Président. Vous recommandez dans
votre mémoire l'extension de la juridiction du Protecteur du citoyen
dans différents domaines ainsi que plus d'accessibilité. Pour ce
faire, pensez-vous qu'il serait nécessaire que le Protecteur du citoyen
ait des bureaux dans les régions? Pour remplir ce futur mandat, est-ce
qu'il serait nécessaire - là, c'est concentré ici à
Québec - pour qu'il soit accessible et pour l'extension de sa
juridiction, d'ouvrir des bureaux ailleurs, en province?
M. Lachapelle: Ça ne me paraît pas
nécessaire, ça me paraît essentiel et, en même temps,
ça me permet de repasser le message de la Commission des droits de la
personne qui, malheureusement, n'est présente que dans quatre
régions du Québec, qui voudrait bien être présente
dans toutes les autres régions du Québec. Je pense que c'est
aussi vrai pour le Protecteur du citoyen que c'est vrai pour la Commission des
droits de la personne. C'est essentiel; sur les principes
d'égalité de la Charte, en tout cas, chacun des citoyens devrait
au moins avoir un minimum de services égal. (15 h 45)
Le Président (M. Dauphin): Alors, merci beaucoup.
D'ailleurs, c'est une des rares recommandations qui n'a pas encore
été entérinée entièrement par le
gouvernement, la commission des institutions...
M. Lachapelle: J'imagine que ce sera bientôt.
Le Président (M. Dauphin): C'est une question... Comme
vous dites, ce sera pour bientôt. J'aurais deux courtes questions, avant
de se laisser. Vous nous avez dit tantôt que 36 % des plaintes qui
étaient logées à la Commission des droits de la personne
avaient trait à l'administration publique. Est-ce que vous avez des
statistiques sur le taux de règlement, justement, des plaintes qui ont
été réglées après enquête et
recommandations, par rapport à la judiciarisa- tion?
M. Lachapelle: Je n'ai pas sous la main le taux de
règlement, je pourrais peut-être vous le faire parvenir.
Malheureusement, je ne sais pas.
Le Président (M. Dauphin): À Mme la
secrétaire, parce que, comme vous savez, dans notre document de
consultation, nous avions une question sur la possibilité d'ester en
justice pour le Protecteur du citoyen. Et puis ce serait intéressant
pour les membres de la commission d'avoir ces statistiques-là. Puis la
dernière question a trait à la Commission des droits de la
personne. Évidemment, comme vous savez, son personnel n'est pas
nommé et rémunéré selon la Loi sur la fonction
publique, donc exclu de la juridiction du Protecteur du citoyen. Comment
entrevoyez-vous une juridiction du Protecteur sur la Commission des droits de
la personne?
M. Lachapelle: Je pense que, en principe, la Commission des
droits de la personne étant un organisme public, même si elle
n'est pas régie par la loi, bien sûr elle pourrait, j'irais
jusqu'à dire, bénéficier des services du Protecteur du
citoyen. Je ferais peut-être cependant certains bémols.
D'abord, je dois vous dire que, à la Commission des droits de la
personne, nous avons désigné, à l'intérieur de nos
effectifs, ce qu'on a appelé un responsable de la qualité des
services. Ça nous apparaît peut-être plus positif qu'un
protecteur et un préposé aux plaintes, alors on l'a appelé
le responsable des services à la clientèle. Donc, je disais que
oui, bien sûr, la Commission des droits de la personne, comme d'autres
organismes publics, devrait être soumise à la juridiction du
Protecteur du citoyen. De la même manière, d'ailleurs, que le
Protecteur du citoyen, s'il y avait des plaintes contre son organisme, doit
répondre devant la Commission des droits de la personne. Je ferais
peut-être une distinction toutefois, quand il s'agit des décisions
mêmes de la Commission, qui sont les décisions de saisir ou pas le
tribunal, de rejeter ou pas une demande, à mon avis, ces
questions-là ne devraient pas être soumises à
l'autorité du Protecteur du citoyen. On voit un peu quelle sorte de
conflits ça pourrait apporter, si nous autres on décide de saisir
le tribunal ou de ne pas saisir, que le Protecteur du citoyen intervienne lui
aussi dans ce même processus. Ça créerait, je pense, des
embêtements qu'on comprendra facilement. Toutefois, sur le processus
administratif qui mène à une telle décision, sur la
question des délais, sur la question du traitement des citoyens, de la
clientèle, je pense que la Commission n'a pas d'objection
à...
Le Président (M. Dauphin): En terminant, une minute, M.
Bilocq, vous vous êtes occupé de traitement de plaintes dans un
conseil régional.
Étant donné que le temps, évidemment, nous est
très très calculé, limité, pouvez-vous nous dire en
une minute comment a été l'expérience? Puisque plusieurs
groupes nous ont dit qu'au conseil régional ils étaient souvent
juge et partie, ils avaient à déterminer la qualité des
soins, la qualité des services, et en même temps avaient à
juger des plaintes contre les mêmes services, en une minute, est-ce
vrai?
M. Bilocq (Marc): Oui, je pense que s'il y a quelque chose que je
retiens de cette expérience-là, même si elle date de
quelques années, et même si le problème était loin
d'être quotidien, il y a tout de même des situations où on
devait prendre des positions qui allaient compromettre l'harmonie
nécessaire au fonctionnement du réseau. Je pense que ce n'est pas
à dédaigner du tout, et c'est pour ça, je pense, que la
Commission était favorable à avoir une instance externe
indépendante. Je pense qu'il faut que quelque part, dans le
système, il y ait cette indépendance-là, mais que, d'une
manière antérieure à tout ça, il y ait
possibilité que dans le réseau certaines plaintes puissent
être traitées par le réseau, parce que les décideurs
qui peuvent corriger les situations doivent être informés des
situations problématiques; ça, c'est tout à fait sain,
aussi. Il doit y avoir des deux, c'est-à-dire une possibilité de
corriger administrativement les choses qui peuvent l'être, mais il y a
des choses ou des situations qui se développaient qui donnaient droit,
je pense, à des réparations ou à des compensations, et
ça, ça doit sortir de ce système-là, je pense.
Le Président (M. Dauphin): D'accord, merci beaucoup.
Alors, Me Lachapelle, M. Bilocq, au nom des membres de la commission, merci
beaucoup de votre participation à nos travaux et bon retour.
Je demanderais maintenant au Conseil des Atikamekw et des Montagnais de
s'avancer.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au Conseil des Atikamekw et
des Montagnais et je crois qu'au centre c'est M. Picard, alors je vais demander
à M. Picard de présenter les personnes qui l'accompagnent et de
procéder ensuite à l'exposé d'une durée d'environ
15 minutes:
Conseil des Atikamekw et des Montagnais
M. Picard (Ghislain): Merci beaucoup. Bonjour, M. le
Président, bonjour, Mmes et MM. membres de la commission. A ma droite,
j'aimerais présenter M. Ernest Ottawa, qui est vice-président
pour les communautés attikameks qui sont représentées par
notre Conseil, et, à ma gauche, Me Alain Bissonnette, qui remplit le
rôle d'aviseur légal pour notre organisation également.
Évidemment, le mémoire que notre Conseil a
déposé est quand même assez élaboré. Donc, ce
qu'on va se permettre de faire plutôt, c'est un peu de fouiller au
travers du mémoire, puis essayer de ressortir pour vous, pour votre
bénéfice, lessentiel de notre message.
Bien que notre organisation fonde sa raison d'être d'abord sur un
objectif ultime, qui est la conclusion d'une entente satisfaisante relative
à nos revendications globales, nous avons accepté de
répondre à l'invitation de la commission des institutions en vous
présentant le mémoire que vous avez devant vous.
Évidemment, on peut être plus ou moins apparenté
avec le rôle du Protecteur du citoyen et, évidemment aussi, ce
rôle peut aller en s'accentuant dans le futur, dépendamment de la
conclusion des discussions que nous avons avec les deux niveaux de gouvernement
actuellement. Ce que nous avons voulu relever surtout dans notre
mémoire, c'est qu'il comprend deux parties qui, à nos yeux, sont
importantes. La première touche directement le rôle du Protecteur
du citoyen et, à ce chapitre, notre organisation propose de créer
une nouvelle fonction, celle de vice-protecteur du citoyen et de nommer
à cette fonction au moins une personne qui ait une bonne connaissance
des langues et des cultures autochtones. Nous proposons également que le
Protecteur du citoyen embauche, soit à titre d'adjointes, soit à
titre d'employées, des personnes ayant une semblable connaissance du
mode de vie des populations autochtones. À notre avis, c'est là
la meilleure façon pour le gouvernement du Québec de s'assurer
que les services du Protecteur du citoyen seront offerts et fournis en toute
égalité à nos membres, aux membres des peuples et nations
autochtones résidant au Québec.
La deuxième partie de notre mémoire traite surtout de
l'obligation particulière du Protecteur du citoyen envers les peuples ou
nations autochtones vivant au Québec ou utilisant une partie du
territoire du Québec. Cette obligation découle, à notre
avis, du caractère particulier ou distinct des peuples ou nations
autochtones du Canada. Un long exposé sur l'état de la
jurisprudence la plus récente en matière de droits ancestraux et
issus de traités des peuples autochtones du Canada cherche à
dégager les traits caractéristiques de l'obligation de fiduciaire
envers les peuples autochtones qui, à notre avis, incombe à tous
les gouvernements, qu'ils soient fédéral, provinciaux ou
territoriaux.
Donc, je vais tout de suite sauter à la conclusion de notre
mémoire qui résume assez bien nos positions. Nul n'est besoin de
rappeler les tristes événements de l'été dernier
pour faire comprendre qu'il y a lieu de favoriser au maximum une approche
systémique et concertée dans le domaine encore si mal connu des
droits des peuples autochtones du Canada. Non seulement faut-il assurer une
étroite collaboration entre toutes les instances gouvernementales
susceptibles d'être responsables, à un titre ou à un
autre, d'une situation où les droits des peuples ou nations
autochtones sont en cause, mais il faut également assurer de la part des
divers ombudsmans, fédéral ou provinciaux, une approche qui
tienne compte de la situation globale des peuples autochtones. Il est, en
effet, impossible de vraiment protéger les droits de ces peuples si on
ne procède que cas par cas. Il faut plutôt veiller à agir
en fonction des droits collectifs des autochtones vis-à-vis l'ensemble
des lois, règlements, directives et politiques des gouvernements.
Tous en conviendront, la tâche à accomplir est
énorme, compte tenu du fait que plusieurs lois, tant
fédérales que provinciales, peuvent porter atteinte à un
moment ou à un autre aux droits ancestraux ou issus de traités
des peuples ou nations autochtones du Canada. Elle risque également
d'être difficile à accomplir dans la mesure où il s'agit
d'un domaine entièrement nouveau du droit public canadien, susceptible,
par conséquent, de susciter d'inépuisables controverses.
Le recours souple, généralement efficace et gratuit que
constituent, au Québec, les interventions du Protecteur du citoyen
auprès de l'administration publique québécoise, devrait
permettre d'éviter la commission d'injustices ou d'iniquités
envers les peuples ou nations autochtones, et ce, tout en échappant
à la judiciarisation excessive de ce nouveau domaine du droit public
canadien. Afin d'assurer que cet objectif soit atteint dans les meilleurs
délais, nous réitérons notre suggestion,
déjà exprimée dans la première partie de notre
mémoire, de veiller à ce qu'au moins une personne ayant une bonne
connaissance des langues, des cultures et des droits des autochtones soit
nommée à la nouvelle fonction de vice-protecteur du citoyen et
qu'au moins quelques personnes possédant ces mêmes connaissances
soient embauchées à titre d'employés ou d'adjoints au
Protecteur du citoyen.
Quant à toutes les autres suggestions que nous avons
formulées dans la première partie du mémoire relativement
au mandat, aux orientations, aux activités et à la gestion du
Protecteur du citoyen, elles s'appliquent également à cette
suggestion que nous faisons maintenant de nommer un vice-protecteur du citoyen
ainsi que des employés ou adjoints au Protecteur du citoyen
chargés d'assurer, au sein de l'administration publique
québécoise, le plein exercice des droits existants ancestraux et
issus de traités des peuples ou nations autochtones en rapport
privilégié avec l'État québécois. (16
heures)
La volonté exprimée, en 1985, par l'Assemblée
nationale du Québec de poursuivre un dialogue ouvert avec les peuples ou
nations autochtones se voit aujourd'hui interrogée. Va-t-elle, oui ou
non, se concrétiser et assurer, notamment grâce aux possibles
interventions du Protecteur du citoyen, la pleine reconnaissance des droits des
autochtones? Une réponse négative à cette question,
fondamentale pour nous, ne serait certes pas sans conséquence. En effet,
comment serait-il alors possible de croire qu'au Québec les peuples ou
nations autochtones sont mieux traités que partout ailleurs, comme on se
plaît si souvent à l'affirmer à certaines tribunes
publiques québécoises? Comment serait-il permis d'accorder du
poids à la motion adoptée en 1985 par l'Assemblée
nationale du Québec, si celle-ci n'estimait utile de créer un
mécanisme souple et gratuit, permettant de veiller aussi efficacement
que possible, et de façon préventive, aux éventuelles
atteintes, par son administration publique, ses fonctionnaires et ses
sociétés d'État, aux droits fondamentaux des peuples ou
nations autochtones?
Et, enfin, comment les représentants de ces peuples
pourraient-ils accorder foi, confiance et énergie aux
négociations entreprises avec le gouvernement du Québec afin de
conclure soit des ententes globales, soit des ententes sectorielles visant
à assurer, au Québec, l'exercice de leurs droits fondamentaux, si
ce même gouvernement tergiversait sur son obligation constitutionnelle
d'agir, dans ses propres domaines de compétence, en qualité de
fiduciaire à l'égard des peuples ou nations autochtones?
Chose certaine, il est clair pour nous que la volonté du
gouvernement du Québec à cet égard aura des
répercussions immédiates sur notre projet de
société. Comme nous l'indiquions en introduction, notre projet de
société vise à assurer l'existence et le maintien de notre
rapport privilégié à notre territoire ancestral ainsi
qu'à protéger notre culture dans un contexte contemporain. Nous
sachant voués au changement, nous estimons encore
préférable jusqu'à maintenant de moins nous comparer
à notre récent passé, où de multiples injustices et
iniquités ont été commises contre nous, qu'à nous
mesurer à nos ambitions profondes. Nous acceptons encore de juger, selon
ce même critère dynamique et ouvert, les gouvernements et les
peuples avec qui nous cherchons à conclure des ententes mutuellement
satisfaisantes. Mais, si nous devions en arriver à la conclusion que le
gouvernement du Québec, par exemple, n'entend pas respecter nos droits,
satisfaire nos besoins ni partager nos ambitions, nous serions alors
placés devant une obligation incontournable, celle de devoir
reconsidérer nos stratégies et nos alliances.
Si, jusqu'ici, nous avons toujours agi en espérant le mieux de ce
gouvernement, représentant, comme nous, d'une minorité dont
l'existence demeure toujours menacée en Amérique du Nord, nous
nous estimons, aujourd'hui, en droit d'exiger de sa part des signes concrets de
sa solidarité.
En terminant, nous nous permettons de lui rappeler une vieille maxime
qu'il ne peut ignorer: "L'égalité exige que la loi aide le plus
faible."
Merci.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup pour votre
exposé. Nous allons maintenant débuter la période
d'échanges. Je vais reconnaître Mme la députée de
Hochelaga-Maison-neuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi
un commentaire sur votre mémoire pour vous dire que c'est
définitivement le mémoire le plus complet que nous ayons
reçu depuis le début de nos travaux hier matin. Je crois que vous
êtes le douzième groupe que nous entendons. C'est
définitivement le mémoire qui aborde le plus exhaustivement
toutes les questions que la commission vous avait transmises.
D'autre part, un commentaire également pour vous dire que c'est -
tantôt, on a eu le président de la Commission des droits de la
personne qui vous précédait, et on retrouve ça très
souvent, je ne lui en fais pas grief, il est ici avec nous d'ailleurs. Je suis
contente qu'il y soit pour entendre mon commentaire - très
fréquent de retrouver sous le même vocable, sous la même
tête de chapitre ou de paragraphe, communautés culturelles,
anglophones, allophones et autochtones, comme si ça participait de la
même problématique. En lisant votre mémoire, j'ai compris,
et j'aimerais le partager avec mes collègues, qu'il est très
important de bien distinguer, par exemple, que la minorité anglophone a
à l'appui de sa culture et de sa langue je ne sais trop combien de
canaux de télévision et de radio, etc., et que, d'autre part, les
membres des minorité» culturelles - et là je ne parle pas
des nouveaux arrivants à qui on peut offrir, au moment de l'accueil, des
services dans leur langue, mais des membres des minorités culturelles
qui sont des Québécois résidents - ont un droit absolument
égal à ceux des Québécois de souche d'obtenir des
services de qualité, mais non d'obtenir des services de qualité
dans leur langue. Ça je pense qu'il en est ainsi lorsqu'on souhaite que
le français soit la langue d'usage et la langue officielle pour tous les
Québécois, et que, finalement, les seuls qui peuvent invoquer le
droit strict de recevoir non seulement des services de qualité, mais des
services de qualité dans leur langue, en fait, ce sont les nations
autochtones.
Et, parce que vous nous le rappelez, d'ailleurs, dans votre
mémoire, à la page 9, quand vous dites: "Les rapports entre les
populations autochtones et l'administration publique vont en s'amplifiant
depuis quelques années et; ils devraient même
s'accélérer..." Alors, c'est un peu comme la toile de fond de la
problématique, une sorte d'accélération des rapports entre
l'administration dans toutes ses composantes et les nations autochtones. Vous
nous dites, à la page 7: II ne faudrait pas que la leçon de ces
relations plus importantes entre nous et l'admi- nistration publique, ce soit
qu'il faille parler français, donc, que ce soit une sorte
d'accélération de l'assimilation. Si on est pour avoir plus de
contacts, ce n'est pas pour accélérer l'assimilation. Alors,
c'est un peu ce que je retiens de la toile de fond de la proposition que vous
faites, qui est celle de la nomination d'un vice-protecteur du citoyen. Alors,
est-ce que je comprends bien que c'est là la problématique qui
vous anime?
M. Picard: Je pense que vous venez justement de cerner le point
fondamental de notre présentation, qui concerne justement, entre autres,
les services équitables dans nos langues autochtones. Et, d'ailleurs,
à titre d'exemple, nous assurons nous-mêmes déjà,
par le biais de transfert de responsabilités du gouvernement
fédéral, entre autres, des services qui sont extérieurs
aux communautés et qui sont assurés aux membres de nos
communautés dans leur langue. Il en va ainsi, par exemple, pour fa
justice où on a un service d'interprète, de gens qui oeuvrent au
niveau du parajudiciaire et dont le rôle est de justement, comment
dirais-je, rendre moins difficile le lien entre la justice
québécoise, par exemple, et nos membres.
Et on a des services également au niveau de la santé et
des services sociaux où, évidemment, parce que les
infrastructures sont inexis-tances dans les communautés, bien souvent
les gens doivent aller à l'extérieur pour avoir des services plus
spécialisés. Donc, à ce niveau-là, notre
organisation fournit déjà des services.
Mme Harel: Et ça, c'est financé à même
les subventions du fédéral?
M. Picard: Actuellement, oui, c'est ça. C'est des
transferts de responsabilités, disons. C'est notre organisation qui est
allée chercher une certaine prise en charge de certains programmes
initialement administrés par le fédéral, et qui sont
maintenant administrés... De plus en plus, on est aussi en charge des
orientations de ces programmes-là.
Mme Harel: Et ce sont des programmes dans des secteurs comme la
santé, par exemple, ou les services sociaux?
M. Picard: La santé, l'éducation, la justice et les
services sociaux également.
Mme Harel: Alors ce sont des programmes de juridiction
québécoise.
M. Picard: Non, il y a... C'est surtout dans l'application de ces
programmes-là où, par exemple, il peut y avoir des contrats avec
certains services du gouvernement du Québec en matière de
services sociaux, entre autres. Actuellement, c'est les programmes qui
étaient
administrés par le ministère des Affaires indiennes, au
niveau du fédéral. Et, évidemment, dans l'application des
programmes, dans la fourniture des services, à ce moment-là, nos
responsables au niveau des communautés sont souvent appelés
à conclure des contrats de services avec certaines institutions
québécoises.
Mme Harel: Bon, là, ce que vous demandez, c'est un virage
à 180° parce qu'à la page 10 du mémoire vous rappelez
que, dans son rapport annuel et celui de l'année
précédente, "le Protecteur du citoyen s'est vu refuser tout
budget pouvant lui permettre de mieux remplir son mandat en recrutant du
personnel émanant des populations autochtones". Et vous rappelez que le
seul recours du Protecteur, compte tenu du refus à sa demande de budget,
a été de faire part publiquement de cette situation, et ce sans
aucun résultat tangible. Alors on part, donc, d'une situation où
le Protecteur a l'air, en tout cas, d'être assez intéressé
à mettre en place un certain nombre de services pour les populations
autochtones. Vous nous dites qu'il faudrait un vice-protecteur nommé
spécifiquement pour l'ensemble de ces questions-là.
Moi, je voudrais bien vous entendre sur la proposition que les
protecteurs provinciaux avaient faite au premier ministre du Canada; ils
appelaient ça un ombudsman ou un commissaire parlementaire. Pour eux,
l'un était équivalent de l'autre. Ce poste, eux le souhaitaient,
finalement, dans une résolution adoptée à leur
congrès annuel d'ombudsmans provinciaux. Ils considéraient que
les multiples problèmes non encore réglés, qui demeurent
caractéristiques des relations entre les peuples autochtones et le
Canada - en l'occurrence, c'est une recommandation qu'ils faisaient à
Ottawa... Donc, ces multiples problèmes les amenaient à proposer
ta nomination d'un tel ombudsman ou commissaire qui contribuerait au
rapprochement et au dialogue des parties en cause. Cet ombudsman sectoriel
pourrait procéder à des enquêtes de façon objective
et impartiale et faire périodiquement rapport au Parlement, selon qu'il
le jugerait utile.
Je ne sais pas, M. le Président, si je peux déposer la
lettre, à moins que vous l'ayez déjà fait distribuer
à tous les membres de la commission. Est-ce que le vice-protecteur que
vous envisagez au Québec a un rôle différent à jouer
que celui qui était prévu dans cette résolution des
protecteurs provinciaux? Est-ce que vous envisageriez, par exemple, un
commissaire parlementaire chargé de faire enquête et,
également, de faire périodiquement rapport au Parlement, ou vous
distinguez les deux propositions?
M. Picard: Je vais laisser la parole à Me Bissonnette.
Le Président (M. Dauphin): Me Bissonnette.
M. Bissonnette (Alain): Bonjour, MM. les membres de la
commission. Dans la proposition qui est faite - messieurs et mesdames, pardon -
on vise essentiellement à faire en sorte que le Protecteur du citoyen
puisse, au Québec, vraiment s'assurer de rendre tous les services qui
sont actuellement offerts à l'ensemble de la population en toute
égalité, également aux populations autochtones. Le moyen
par lequel nous pensons qu'il sera possible d'y arriver, c'est la nomination
notamment d'un vice-protecteur du citoyen, mais également d'adjoints ou
d'employés au sein même de l'administration du Protecteur du
citoyen. À notre avis, la seule façon de corriger la
discrimination systémique, c'est de mettre en place des personnes qui
connaissent les communautés autochtones, qui peuvent s'adresser à
elles et à qui cette population peut s'identifier.
Cela étant dit, le rôle du Protecteur du citoyen, nous en
avons traité dans son ensemble. On parte de tout ce qu'il doit faire
comme Protecteur du citoyen, en assumant que le vice-protecteur, bien
sûr, va agir de façon particulière à l'égard
des autochtones. Lorsqu'on parie également de la nomination de
l'ombudsman fédéral chargé d'aider pour tout
différend concernant les autochtones, c'est tout à fait
complémentaire, dans la mesure où, comme vous le savez, c'est
d'abord le gouvernement fédéral qui est responsable, au plan
constitutionnel, des Indiens et des terres réservées aux Indiens.
Donc, il y a beaucoup de questions qui concernent directement le gouvernement
fédéral. Mais il y a également une situation que vous
connaissez bien, pour les personnes parmi vous qui sont juristes, c'est que
plusieurs des lois provinciales ont inévitablement des
répercussions sur les droits des populations autochtones. (16 h 15)
Dans ce sens, nous avons argumenté dans le mémoire que
l'obligation de fiduciaire, qui a été très clairement
identifiée dans l'affaire Sparrow, concerne non seulement le
gouvernement fédéral, mais également les gouvernements
provinciaux. Dans cette mesure, les provinces doivent s'assurer qu'en tout ce
qui concerne leurs propres lois, lorsque ça touche ou ça peut
porter atteinte aux droits des populations autochtones, elles doivent elles
aussi agir en qualité de fiduciaires, elles doivent donc protéger
les intérêts des autochtones. Et ce que nous disons,
essentiellement, c'est qu'il doit y avoir concertation dans ce domaine, aussi
bien du côté du fédéral que du côté des
provinces. Je ne vais pas vous rappeler les événements de
l'été dernier, tout le monde, vous êtes conscients qu'il
fallait, je pense, que les gens qui ont une responsabilité qui
découle jusqu'à présent, tant que nous sommes dans ce
régime constitutionnel, du fédéral, il devait, il aurait
dû y avoir un ombudsman au niveau fédéral, peut-être
pour obliger le fédéral à agir un peu plus dans ce
domaine, l'été dernier.
Comme il doit y avoir un ombudsman, un protecteur du citoyen ou un
vice-protecteur qui agit au sein des juridictions du Québec. Alors tout
ça est compatible, est tout à fait compatible, et le fait de
nommer un commissaire parlementaire, si on veut l'appeler ainsi, à
Ottawa n'enlève en rien l'obligation de fiduciaire ni le mandat
général du Protecteur du citoyen au Québec à
l'égard des populations autochtones au Québec.
Mme Harel: Est-ce qu'il serait compatible qu'il y ait
également un commissaire parlementaire à Québec,
même s'il y avait nomination d'un vice-protecteur du citoyen?
M. Bissonnette: Écoutez, l'esprit de notre mémoire,
c'est plutôt de veiller à ce que l'actuel Protecteur du citoyen
voie son mandat élargi. Je pense que dans la première partie du
mémoire on vous a indiqué qu'on a répondu à chacune
des questions que vous aviez soulevées, en le faisant de bonne foi, sans
être des experts sur ces questions. Ce qu'on pense, c'est que l'actuel
Protecteur du citoyen, comme institution, nous semble valable. Et nous visons
plutôt à élargir son mandat, à assurer une plus
grande indépendance, également, envers le Conseil du
trésor, notamment. Dans ce sens-là, on n'a pas pensé
à la création...
Mme Harel: D'accord.
M. Bissonnette: ...d'un nouveau mécanisme, mais on a voulu
élargir plutôt son mandat.
Mme Harel: Je ne voudrais pas, compte tenu du peu de temps
à notre disposition, qu'on n'en ait pas suffisamment pour aborder, donc,
l'obligation particulière que vous attribuez au Protecteur du citoyen.
Vous nous dites que la nomination d'un vice-protecteur, ce serait pour
faciliter le service aux populations autochtones. Mais est-ce que ce serait
également pour faire en sorte que l'obligation particulière que
vous attribuez au Protecteur du citoyen... Vous lui attribuez, finalement,
celle, si j'ai bien compris, de vérifier d'une façon assez
systémique, non seulement systématique, mais de vérifier
si les lois et règlements ont des effets du type d'extinction de droits
ou de traités de droits issus des traités, ou des droits
ancestraux. En fait, c'est un véritable cours de droit autochtone qu'on
peut lire de la page 16 à la page 35, avec toute la jurisprudence, puis
la démonstration que vous nous faite, c'est qu'il y a toujours deux
questions à poser. D'ailleurs, vous les spécifiez, vous indiquez
que... C'est au Protecteur que vous attribuez cette responsabilité de
poser ces deux questions, à savoir: Est-ce que la loi a pour effet de
porter atteinte à un droit ancestral existant? Et, deuxième
question: Est-ce que la loi constitue une réglementation légitime
d'un droit ancestral garanti par la Constitution? Est-ce que c'est bien
à ce vice-protecteur que vous confieriez cette
tâche-là?
M. Bissonnette: Ce que nous avons tenté de
démontrer le plus simplement possible dans le mémoire - mais je
comprends que ce n'est pas toujours facile - c'est la chose suivante: II nous
semble, d'après la loi, que les fonctionnaires ont entre autres comme
obligation, comme devoir, d'identifier des lacunes qui peuvent exister dans des
normes qui existent, que ce soit au Québec ou ailleurs. Prenons le cas
du Québec. Alors, à notre avis, il appartient d'abord aux
fonctionnaires de l'État québécois de veiller à ce
que l'obligation de fiduciaire concernant les peuples autochtones soit
respectée. En termes concrets, s'il existe une loi qui permet d'accorder
des contrats d'approvisionnement en produits forestiers, les fameux CAAF, je
pense, et c'est ce que nous plaidons, que les fonctionnaires de l'État
québécois doivent s'assurer que cette loi particulière ne
porte pas atteinte. C'est moins exigeant que de demander si cette loi
éteint. On ne dit pas... Ce n'est pas ça. Si ça porte
atteinte aux droits des peuples autochtones, d'abord les fonctionnaires doivent
veiller à bien analyser les lois québécoises et aussi
s'assurer que l'application de la loi ne va pas porter atteinte aux droits des
autochtones. C'est la première étape.
Mais s'il arrivait, malencontreusement, que les fonctionnaires de
l'État québécois ne remplissent pas bien ce rôle, ce
que nous prétendons, c'est que nous devrions pouvoir demander au
Protecteur du citoyen d'intervenir dans cette situation, comme ça se
fait ailleurs, pour veiller à assurer une qualité de service
à l'égard des autochtones. Voyez-vous, c'est tout simplement ce
qu'on demande.
Mme Harel: Et ça, c'est en vertu de l'obligation
fiduciaire que le Québec détient compte tenu des jurisprudences
récentes.
M. Bissonnette: Oui, d'après nous.
Mme Harel: Pour donner un exemple que je connais, à l'aide
sociale, on peut, non pas simplement demander un examen sur un cas particulier,
mais aussi faire valoir qu'il y a une mauvaise interprétation d'un
règlement ou qu'une directive n'est pas conforme à un
règlement. Alors, vous, vous dites, par exemple, qu'il pourrait y avoir
un examen du fait que tel règlement n'est pas conforme à
l'obligation fiduciaire de respecter les droits issus des traités ou des
droits ancestraux. C'est ça que vous dites?
M. Bissonnette: Oui. Nous disons que ça appartient
dorénavant, depuis l'affaire Sparrow, à tous les gouvernements.
Évidemment, je suis à peu près persuadé que les
procureurs du ministère de la Justice pourront un jour aller plaider
devant les tribunaux que ça ne s'applique pas au gouvernement
provincial. Mais nous pensons que nous pouvons, à partir de l'affaire
Sparrow, conclure que tous les gouvernements, non seulement le
fédéral, dès l'instant que c'est dans le cadre de leur
compétence, ont une obligation fiduciaire à l'égard des
droits des peuples autochtones et qu'à cet égard les
fonctionnaires de l'État québécois doivent veiller
à s'assurer que cette obligation soit respectée.
Mme Harel: Alors, une dernière question: Pourquoi le
Protecteur du citoyen et pas la Commission des droits de la personne?
M. Bissonnette: Parce qu'il ne s'agit pas nécessairement
d'un cas de discrimination. Il peut arriver qu'un fonctionnaire croie, de bonne
foi, que l'obligation de fiduciaire ne s'applique pas dans une situation, qu'il
n'ait pas conclu cela par discrimination démontrable à la
Commission des droits de la personne. Par contre, nous pensons que, du simple
fait des devoirs qui incombent à ce fonctionnaire, devoirs que le
Protecteur du citoyen, lui, veille à faire respecter, à ce
moment-là on dit: Ce n'est pas une question de discrimination en tant
que telle, c'est simplement que le fonctionnaire doit remplir sa tâche.
Dans sa tâche, à notre avis, il doit souligner les lacunes qui
peuvent exister, à un moment ou à un autre, dans le cadre de la
législation ou de la réglementation. S'il ne remplit pas ce
devoir, c'est au Protecteur du citoyen de veiller à ce que, comme
citoyens, les autochtones aient un bon service. Nous pensons que c'est à
lui d'intervenir auprès de l'administration publique
québécoise et de veiller à régler le conflit, parce
que sinon, vous le savez comme moi, ce qu'il faudra faire, c'est aller devant
les tribunaux et ça prendra sept à huit ans avant d'en arriver
à avoir un jugement de la Cour suprême nous disant que, non, on
n'a pas respecté l'obligation de fiduciaire. Alors, le recours efficace,
gratuit et rapide du Protecteur du citoyen sera drôlement
intéressant, et pour toutes les parties, je tiens à le
souligner.
Ce serait intéressant également pour l'État
québécois de bien démontrer à l'ensemble de la
société que son obligation est respectée.
Mme Harel: Mais le Protecteur du citoyen n'a qu'un pouvoir moral
et il n'a pas comme la Commission des droits de la personne le pouvoir de
poursuite devant le tribunal. Je sais que dans votre mémoire, j'ai bien
lu, vous proposez qu'il en soit autrement. Mais je me suis vraiment
demandé... Moi, je souhaite beaucoup que la commission, dans ses
recommandations finales, retienne cette idée d'un vice-protecteur aux
questions autochtones. Pour ce qui est de l'obligation particulière,
pour ce qui est de l'obligation générale que vous faites au
Protecteur, j'y souscris complètement, mais je me suis demandé si
c'était au Protecteur qu'on devait demander quelque chose comme
ça, ou bien si ce n'était pas à la Commission des droits,
en modifiant finalement son mandat.
M. Bissonnette: La réponse, c'est qu'aujourd'hui on
étudie le mandat du Protecteur du citoyen.
Mme Harel: Alors, c'est parce que c'est une occasion qui vous
était donnée de le...
M. Bissonnette: Non, mais je vous ai expliqué
l'argumentation. Je pense qu'elle se tient.
Mme Harel: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Vous mentionnez dans votre mémoire que les
autochtones n'utilisent pas les services du Protecteur du citoyen pour
différentes raisons, soit qu'ils ne sont pas informés, puis pour
des questions linguistiques, et ainsi de suite. Puis vos recommandations sont
à l'effet de créer une nouvelle fonction, soit le vice-protecteur
du citoyen ainsi que d'embaucher différents adjoints pour aider à
corriger la situation. Certains organismes ont également fait mention de
la barrière géographique qui limite l'accès des
populations autochtones au Protecteur du citoyen. C'est une question que j'ai
demandée à d'autres organismes et que je vous demande à
vous aussi: À ce moment-là, est-ce que vous recommandez que le
vice-protecteur ou les personnes qui seront embauchées s'installent
nécessairement dans les régions des autochtones? Qu'est-ce que
vous préconisez pour ça?
M. Picard: On n'a pas vraiment parte de ces aspects-là, je
pense, dans le mémoire, tes aspects géographiques ou les aspects
d'une meilleure accessibilité au service lui-même, mais ça
pourrait être envisageable dans certains cas, justement par rapport
à l'isolement de beaucoup de nos communautés. Puis,
évidemment, là encore, on dit que les autochtones ont plus ou
moins utilisé les services du Protecteur du citoyen justement à
cause d'une méconnaissance du service lui-même et peut-être
aussi à cause d'une certaine limitation au niveau des relations et des
liens entre l'administration publique québécoise et les membres
de nos communautés. Comme je le disais tout à l'heure, ça,
évidemment, ça risque de s'amplifier dans le futur
dépendamment des résultats que nous connaîtrons dans les
discussions que nous avons en ce moment avec le gouvernement du Québec.
À ce moment-là, nos membres, finalement, devraient au moins avoir
accès à un service minimum. Il y a peut-être certaines
innovations aussi qu'on peut apporter
au service même du Protecteur du citoyen en matière
d'accessibilité aux services. Est-ce qu'il ne serait pas pensable, par
exemple, de penser à un vice-protecteur qui aurait une certaine fonction
itinérante, par exemple dans son travail? On peut peut-être y
songer.
M. Kehoe: Quand vous parlez des employés, des engagements
des personnes, des différents employés qui parlent la langue, qui
comprennent les cultures ainsi de suite, bien sûr, j'imagine que
ça prend un programme d'information auprès des autochtones
eux-mêmes, qu'ils soient informés que ce service est maintenant
disponible dans leur langue et dans leur communauté. C'est dans cet
aspect que je me demande de quelle manière vous allez faire ça,
informer la population qu'à partir d'une certaine date... Admettons que
vos recommandations sont acceptées et que le vice-protecteur est
nommé, j'imagine que, pour mettre ces personnes en contact avec des
citoyens, des autochtones, il faut quand même qu'une certaine information
soit donnée aux autochtones que maintenant le service est disponible.
(16 h 30)
M. Picard: Oui, évidemment. Je pense qu'il est
évident que c'est un travail qui devra se faire. Je pense que notre
Conseil, à ce niveau-là, a toujours démontré une
ouverture de coopération pour ce type de relation là.
M. Kehoe: C'est bien évident que le besoin est là.
Les services du Protecteur du citoyen qui ne sont pas utilisés
maintenant, comme vous l'avez dit dans votre mémoire...
M. Picard: Exactement, oui.
M. Kehoe: Et, s'ils sont disponibles, il faut bien informer la
population autochtone qu'à partir d'une certaine date ils sont
disponibles dans leur langue.
M. Picard: Exactement, oui. M. Kehoe: C'est ça.
O.K.
M. Picard: Comme ça se fait déjà d'ailleurs
dans d'autres services.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le
député. Alors, je vais me permettre certaines questions. Tout
d'abord, je suis très heureux que vous ayez accepté notre
invitation de venir témoigner devant cette commission pour sensibiliser
davantage les parlementaires aux revendications autochtones en
général et plus spécifiquement au mandat que nous avons
actuellement relativement au Protecteur du citoyen. Pour un, je suis d'accord
évidemment non seulement avec vous, mais également avec le groupe
qui vous a précédés sur une façon de s'implanter
davantage comme institution, je parle du Protecteur du citoyen, auprès
des nations autochtones. Je sais pertinemment que c'est intimement relié
à la façon d'obtenir des budgets. D'ailleurs, vous vous
êtes exprimés là-dessus. C'est que le Protecteur du citoyen
doit faire ses demandes au Conseil du trésor plutôt qu'à
l'Assemblée nationale, contrairement aux deux autres... Parce que, comme
vous savez, le Vérificateur général et le Directeur
général des élections, dans le règlement de
l'Assemblée nationale, eux, ont recours à l'Assemblée
nationale. En pratique, c'est le Bureau de l'Assemblée nationale, pour
avoir des budgets, tandis que le Protecteur, lui, fait exception aux deux
autres et doit recourir au Conseil du trésor. Alors, c'est sûr
que, comme commission et comme recommandation, j'ai l'impression que non
seulement, parmi tous les groupes, ça fait l'unanimité sauf un,
de mémoire, mais je pense que, comme parlementaires également,
ça fait l'unanimité. Ça va permettre, j'en suis
persuadé, dans le cas qui nous est spécifique actuellement, au
Protecteur du citoyen de pouvoir percer davantage les nations autochtones, le
cas que nous avons devant nous aujourd'hui.
Ensuite de ça, je suis heureux aussi de voir que le Conseil se
sert beaucoup des instruments démocratiques, parce que Mme Harel et moi
siégeons sur une autre commission en parallèle, la Commission sur
l'avenir politique et constitutionnel. Je sais que le Conseil est venu devant
la Commission dans différents endroits du Québec.
Maintenant, pour revenir plus spécifiquement à notre
mandat, vous nous proposez d'élargir la juridiction du protecteur, non
seulement en matière de santé et de services sociaux, mais
également au niveau des municipalités, de tous les organismes
paragouvememen-taux. La question, peut-être pour Me Bissonnette: En
matière de santé et de services sociaux, depuis deux jours on a
parlé évidemment d'un recours au Protecteur du citoyen, un
recours externe, un recours neutre, impartial, mais d'un troisième
niveau dans la plupart des cas. Comme Conseil, vous autres, est-ce que vous
avez réfléchi là-dessus, est-ce que vous voyez ça
comme un recours de première ligne, le recours au Protecteur du citoyen,
ou à d'autres niveaux? Ou M. Picard, si...
M. Bissonnette: M. le Président, on vous a aussi
indiqué dès le départ que les réponses que nous
apportions à chacune des questions qui avaient été
soulevées par votre commission étaient des réponses faites
de bonne foi, sans que nous connaissions en détail certains des
mécanismes particuliers. Je dois vous indiquer tout de suite qu'en
matière de santé et de services sociaux nous n'avons pas
élaboré là-dessus. On a simplement dit: Écoutez, il
nous paraît essentiel d'étendre aux municipalités, à
toutes les institutions paragouvernementales la
juridiction du Protecteur du citoyen. Mais notre argument est simple,
c'est que, dans la mesure où ce mandat du Protecteur vise à
garantir à l'ensemble des citoyens l'exercice de leurs droits face
à l'ensemble de l'appareil étatique, bien, on s'est dit:
Écoutez, aussi bien l'étendre à tout ce qui vraiment
constitue l'appareil étatique. Mais je vous le souligne tout de suite,
on ne connaît pas en détail ce que vous connaissez mieux que nous,
j'imagine, à l'égard du système particulier du
réseau de la santé et des services sociaux. Et, à moins
que mes collègues, eux, aient une réponse plus précise, je
dois vous avouer que notre argumentation est d'ordre très
général à cet égard.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. Parfait.
J'aimerais...
M. Bissonnette: Si vous me permettez, M. le Président.
Le Président (M. Dauphin): Oui. Allez-y.
M. Bissonnette: J'aimerais simplement revenir à une
question qui a été soulevée par Mme Harel tout à
l'heure concernant... Je ne sais pas si elle a voulu référer
à l'idée de créer un comité spécial
parlementaire. Il y a une des questions où on a, tout en parlant du
recours qui devrait exister au niveau fédéral... Je voudrais
simplement vous souligner qu'à la page 12 de notre mémoire nous
considérons intéressante cette idée de créer un
comité spécial parlementaire qui devrait faire connaître
ses conclusions à l'Assemblée nationale concernant des dossiers
particuliers que le Protecteur du citoyen aurait pu lui pointer du doigt. Il
nous semble intéressant de créer ce mécanisme particulier
qui, au fond, aurait un rôle de vigilance important et, ceci dit, nous
pensons que, en plus de la création de ce comité spécial
parlementaire, le Protecteur du citoyen devrait, lorsqu'il l'estime utile,
pouvoir entreprendre des poursuites devant les tribunaux.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Dauphin): Oui, Mme la
députée.
Mme Harel: Étant donné qu'on a fait
référence à une question, est-ce que je peux intervenir?
Effectivement, vous en parliez dans votre mémoire, mais c'est
différent de la proposition d'un commissaire parlementaire, mais
ça me permet de vous poser la question quant à ce comité
spécial parlementaire. Vous le voyez composé de
députés et pourquoi "spécial"? Et puis sur les questions
autochtones, avec un mandat sur les questions... ou toutes celles relevant du
Protecteur du citoyen? Parce que, finalement, le Protecteur du citoyen doit
déposer chaque année son rapport annuel. La commission des
institutions devant laquelle vous êtes présentement entend le
Protecteur du citoyen et procède aussi à l'examen des engagements
financiers, des crédits budgétaires qui lui sont alloués.
Alors, vous pensez qu'il faudrait une autre instance que la commission des
institutions, ou bien si ça pourrait être la commission des
institutions qui se verrait confier le mandat de donner suite, comme vous le
précisez, aux dossiers, aux cas qui pourraient lui être soumis par
le Protecteur du citoyen? C'est comme ça que vous voyez?
M. Bissonnette: Très honnêtement, pour ce qui est de
la plomberie, la couleur des tuyaux nous importe peu. Ce que nous voulons,
c'est nous assurer que le public, que ce soit par le biais d'un comité
spécial parlementaire...
Mme Harel: Les trois quarts du temps pourtant...
M. Bissonnette:... ou de votre commission des institutions, que
le public sache ce que le Protecteur du citoyen considère comme
étant des anomalies dans l'administration publique
québécoise.
Le Président (M. Dauphin): Peut-être une
dernière question en ce qui me concerne, concernant... Je trouve
ça intéressant l'idée d'un vice-protecteur,
sensibilisé évidemment aux nations autochtones... On parle
beaucoup de publicité, de pénétrer le milieu. Avez-vous
des suggestions à nous faire là-dessus? Pour se rapprocher - on
parle du Protecteur du citoyen - davantage des nations autochtones.
M. Picard: Me Bissonnette parlait de plomberie, tout à
l'heure. C'est un peu à ça qu'on pourrait référer
la question de la publicité. Évidemment, comme on le disait tout
à l'heure, de plus en plus les relations entre l'État
québécois, l'administration publique québécoise et
nos communautés vont en s'amplifiant et ont des chances peut-être
de s'amplifier un peu plus dans le futur. Je pense qu'à ce
moment-là il sera de notre responsabilité à nous, en
coopération avec le Québec de faciliter justement la
compréhension et la publicité de la nature éventuelle de
nos relations entre gouvernements. Et je pense que c'est à ce
moment-là... Déjà, je veux dire, l'aspect
publicité, l'aspect communications, c'est un aspect qui prend de plus en
plus d'importance dans nos communautés par rapport aux démarches
que nous leur proposons en tant que conseil, en tant qu'organisation.
Donc, je crois que, éventuellement, c'est peut-être un
sujet de discussion qui pourra se faire mutuellement, entre nos deux
groupes.
Le Président (M. Dauphin): D'accord, merci
beaucoup. Alors, est-ce qu'il y a d'autres membres qui désirent
poser des questions? À ce moment-là, j'aimerais, au nom de tous
les membres de la commission, remercier sincèrement le Conseil des
Atikamekw et des Montagnais, en les personnes de M. Ottawa, M. Picard et Me
Bissonnette, de s'être déplacé pour venir enrichir notre
commission. Merci beaucoup et bon retour.
Nous allons suspendre deux ou trois minutes et ensuite nous allons
entendre le Comité de bénéficiaires de l'hôpital
Louis-il.-Lafontaine.
(Suspension de la séance à 16 h 39)
(Reprise à 16 h 43)
Comité de bénéficiaires de
l'hôpital Louis-il.-Lafontaine
Le Président (M. Messier): À l'ordre, s'il vous
plaît!
J'inviterais les représentants du comité de
bénéficiaires de l'hôpital Louis-il.-Lafontaine à
prendre place. Je crois que c'est M. Landry qui est le porte-parole officiel du
comité de bénéficiaires.
Mme Huard (Diane): Est-ce qu'on peut présenter les membres
du comité?
Le Président (M. Messier): Oui.
Mme Huard: M. Roger Trépanier, vice-président; M.
Lucien Landry, secrétaire-trésorier...
Le Président (M. Messier): Excusez-moi. Qui prend la
parole? Je pensais que c'était M. Landry. C'est Mme Huard?
M. Landry (Lucien G.): Oui, c'est Mme Huard au début,
comme présidente.
Le Président (M. Messier): O.K., présidente du
comité. Vous allez présenter les membres qui sont avec vous.
Mme Huard: Oui. Diane Huard, présidente du comité.
Je présente M. Denis Duval, vice-président, pas M. Denis Duval,
M. Roger Trépanier, M. Lucien Landry,
secrétaire-trésorier, moi-même, Diane Huard,
présidente du comité, et Denis Duval, absent, Andrée
Séguin, absente. Ils sont restés à l'hôpital
aujourd'hui pour des raisons médicales.
Le Président (M. Messier): Parfait. Merci beaucoup. Et
c'est M. Landry qui va présenter le mémoire. Vous avez une
quinzaine de minutes pour présenter le mémoire...
M. Landry: Oui.
Le Président (M. Messier): ...et après ça il
va y avoir un échange.
M. Landry: Oui. Très bien, M. le Président. Je
voudrais peut-être, avant de présenter un bref
résumé de ce qu'on appelle les différentes étapes
du mémoire, vous présenter les autres personnes qui nous
accompagnent, parce que vous avez dû remarquer que nous avons une forte
délégation de 10 personnes. Il va de soi que le comité de
bénéficiaires, depuis quatre ans, travaille en collaboration avec
la Faculté de droit de l'Université de Montréal et aussi
nous avons des contractuels qui participent avec nous et qui sont des
étudiants en droit. Alors, on a avec nous M. Jean-François
Primeau qui s'occupe, au sein du comité de bénéficiaires,
à titre de contractuel, de l'aide et de l'accompagnement. On a aussi
avec nous M. Alain Camirand et Mlle Paryse Labrie qui, eux, s'occupent aussi du
dossier de la désinstitutionnalisation, à titre de contractuels,
et qui ont participé à la rédaction du mémoire.
Nous avons avec nous aussi, en arrière, dans cette salle, Mlles
Catherine Sabou-rin et Lyne Latulippe; ces deux personnes agissent au sein du
comité de bénéficiaires comme stagiaires du Bureau des
services d'aide juridique de la Faculté de droit de l'Université
de Montréal. Et nous avons aussi avec nous Mlle Francesca Trop qui, elle
aussi, est étudiante en droit; elle participe avec un organisme
communautaire, Solidarité psychiatrique, dans la communauté,
à titre de personne, sur le même type de services d'aide
juridique, c'est-à-dire d'aide juridique si je ne me trompe pas, BAJ,
c'est ça. Alors, M. le Président, en deuxième lieu, je
voudrais aussi vous présenter Marie Côté, qui est avec nous
ici, du conseil général des usagers du CSSMM, le Centre de
services sociaux du Montréal métropolitain, dont le comité
de bénéficiaires est membre, mais c'est surtout, non pas dans les
établissements de santé, mais dans les services sociaux.
Au niveau de la présentation, nous avons pensé, M. le
Président, étape par étape, vous faire une
présentation surtout du volet des recommandations afin de ne pas
recommencer, d'une façon très claire, à relire tout le
mémoire, parce qu'on savait très bien que vous l'avez reçu
et que vous êtes prêts à échanger, à
participer avec nous. Par contre, nous voulons apporter certaines introductions
aux différents volets, ce qu'on appelle l'état actuel de
la situation, la première partie des recommandations, la deuxième
partie des recommandations subsidiaires et, par la suite, des recommandations
au niveau du conseil général des usagers. C'est une introduction
qu'on a l'intention de vous faire et, par la suite, M. le Président, si
vous le permettez, nous pourrions échanger avec vous sur les
différentes questions et commentaires, et on sera prêts à
répondre aux questions, s'il y a lieu.
Alors, je voudrais attirer votre attention à
la page 9, M. le Président, au paragraphe 4, pour que nous
puissions apporter une correction à notre mémoire. Ce que j'avais
spécifié au début, qu'on pourrait, nous, au lieu de
lire... M. le Président, à la page 9, un, deux, trois, quatre, au
quatrième paragraphe...
Le Président (M. Messier): ...
M. Landry: À la page 9 de notre mémoire, à
l'état actuel de la situation: 'Toutefois, ce processus de plainte n'est
pas énoncé dans la loi de la santé et des services sociaux
ou dans la loi du Protecteur du citoyen, mais II s'agit plutôt d'un usage
qui s'est développé pendant les années. Il existe trois
procédures de traitement de plaintes à l'hôpital
Louis-il.-Lafontaine, celui de la direction des services professionnels, celui
de l'ombudsman, celui du comité de bénéficiaires. Ces
trois niveaux de structure collaborent entre eux concernant les services de
plaintes. Des efforts immenses sont fournis pour sensibiliser les intervenants
ainsi que les familles des bénéficiaires au respect des droits de
ceux-ci." On devrait lire ça dans notre texte, au lieu du texte à
l'intérieur de la page 9.
Le Président (M. Messier): Est-ce que vous avez le texte
avec vous, monsieur?
M. Landry: Oui.
Le Président (M. Messier): Est-ce qu'il est possible de le
déposer?
M. Landry: Oui, officiellement, on pourrait vous le remettre.
Le Président (M. Messier): Merci.
M. Landry: Je vais laisser la parole à Paryse et Alain,
pour la première partie de l'introduction des recommandations.
Le Président (M. Messier): M. Alain Cami-rand et
Mme...
Mme Labile (Paryse): Paryse Labrie.
Le Président (M. Messier): Marie Côté?
Mme Labrie: Paryse Labrie.
Le Président (M. Messier): Paryse Labrie.
Mme Labrie: Oui.
Le Président (M. Messier): Bonjour, madame.
Mme Labrie: Bonjour.
Le Président (M. Messier): On vous écoute.
Mme Labrie: Merci. J'aimerais introduire et expliquer les
orientations que nous avons voulu donner à notre mémoire ainsi
que le contexte dans lequel nous avons élaboré nos
recommandations. Nous nous sommes moins préoccupés de
l'indépendance du Protecteur du citoyen ainsi que de son
accessibilité et son efficacité. Cette position est due au fait
que le Protecteur du citoyen est présentement absent des
établissements du réseau de la santé et des services
sociaux. Il nous est donc difficile d'évaluer ses critères
d'indépendance, d'accessibilité et d'efficacité par
rapport à ce réseau de la santé. Ce qui nous importe
davantage aujourd'hui, c'est l'extension de la juridiction du Protecteur du
citoyen. Ceci nous apparaît évident à la lecture de nos
recommandations. Dans un centre hospitalier à vocation psychiatrique
comme le nôtre, le besoin du recours au Protecteur du citoyen se fait
particulièrement sentir. En fait, si le recours au Protecteur du citoyen
est accessible aux citoyens qui ont souvent les moyens ainsi que la
capacité de prendre d'autres recours pour assurer le respect de leurs
droits, il devrait également être accessible aux
bénéficiaires qui n'ont ni les moyens ni la capacité de
voir au respect de leurs droits. Il est vrai qu'il existe déjà
certains recours de plaintes à l'intérieur de
l'établissement. Certains ont émis l'opinion voulant que le
recours au Protecteur du citoyen dans les établissements du
réseau de la santé aurait pour effet de créer une trop
grande multiplicité de recours à l'intérieur du
réseau, créant ainsi une confusion des plus totales.
Évidemment, comme le démontre d'ailleurs notre mémoire,
nous sommes d'avis contraire. Nous ne voulons pas que le recours au Protecteur
du citoyen ajoute au fouillis qui existe à l'heure actuelle dans les
divers recours accessibles aux bénéficiaires d'un centre
hospitalier. À notre avis, le représentant du Protecteur du
citoyen, en vertu de la recommandation 12 de notre mémoire, devrait
plutôt encourager et même aider le bénéficiaire qui
veut se servir d'un des recours existants. De plus, le représentant du
Protecteur du citoyen aurait un pouvoir de recommandation. Ce pouvoir nous
semble aussi efficace que les recours menant à des décisions
exécutoires. En effet, le Protecteur du citoyen est une personne dont la
crédibilité n'est plus à faire et dont les recommandations
sont généralement suivies. Nous n'avons pas uniquement
demandé dans notre mémoire l'intervention du Protecteur du
citoyen dans le réseau de la santé. Nous avons également
voulu proposer aux membres de cette commission un moyen de mettre en oeuvre
cette nouvelle fonction et d'appliquer ce recours dans le cadre de la vie
quotidienne d'un centre hospitalier. Ceci ressort plus particulièrement
des recommandations 12, 14, 15 et 16. Nous espérons que ce
mécanisme vous apparaîtra conforme aux orientations que le
législateur entend donner au rôle du Protecteur du citoyen.
En terminant, j'aimerais attirer votre attention sur la recommandation
9. Celle-ci mentionne la possibilité pour le Protecteur du citoyen
d'intenter des recours devant les tribunaux. Cette initiative nous semble
intéressante. Toutefois, nous vous demandons aujourd'hui de bien vouloir
porter une attention particulière à cette possibilité qui
nous tient particulièrement à coeur. Merci.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup, Mme Labrie. M.
Camirand, je crois, qui voulait poursuivre.
Mme Labrie: Jean-François Primeau.
Le Président (M. Messier): M. Primeau.
Mme Labrie: Oui.
M. Primeau (Jean-François): Merci. Est-ce que ça va
être correct si je m'adresse à vous comme ça?
Le Président (M. Messier): Oui, oui, ça va.
Très bien.
M. Primeau: C'est simplement pour introduire les recommandations
subsidiaires et attirer votre attention sur le caractère subsidiaire des
recommandations. Ce que je veux dire par là, c'est que, si le
comité devait opter pour l'un des deux régimes, ce serait
certainement pour le régime principal, c'est-à-dire les
recommandations principales. Mais, à titre subsidiaire, on vous a fait
certaines recommandations. Tout ce que Mme Labrie vient de vous dire s'applique
également aux recommandations subsidiaires. C'est tout simplement dans
l'application pratique que ça peut poser des changements; c'est
peut-être ce que certains ont appelé de la plomberie. Mais je
pense que, si on pouvait attirer votre attention sur ça et si on pouvait
en discuter, ça serait intéressant. C'est tout.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup.
M. Landry: Je voudrais peut-être, M. le Président,
si vous le permettez introduire Mme Marie Côté, du conseil
général des usagers du CSSMM.
Le Président (M. Messier): Parfait. Bonjour, Mme
Côté.
Mme Côté (Marie): Bonjour. Ça me fait plaisir
d'être ici pour, justement, donner la position du conseil
général des usagers qui représente les usagers au niveau
des services sociaux. Le conseil général des usagers existe
également ici, à Québec, au CSSQ, et nous, on
représente les usagers du CSSMM, la clientèle des usagers dont
font partie également les bénéficiaires de
Louis-il.-Lafontaine, dont une partie a 37 intervenants au niveau des services
sociaux. À l'hôpital Louis-il.-Lafontaine, on considère
qu'on représente une portion importante de la clientèle et nous
avons les mêmes buts. Nous avons principalement... Je veux simplement
résumer les principales recommandations, c'est surtout de dire que nous
sommes en faveur d'une extension de la juridiction du Protecteur du citoyen aux
organismes ou établissements du réseau des services de
santé et des services sociaux et du réseau de l'éducation
ainsi qu'aux organismes municipaux. Cette position s'inscrit à
l'intérieur même du mandat du CGU, qui est d'informer,
d'accompagner et de soutenir les usagers dans leur démarche.
Principalement, le CGU voit d'un bon oeil à certains niveaux
l'extension du mandat, d'autant plus que dans certains cas il n'y a aucun
recours possible au niveau des services sociaux. En principe, il y a le service
des plaintes du CSSMM, le CRSSS vient ensuite, et après c'est le
ministère, sauf que dans le cas des familles d'accueil il n'y a aucun
recours qui est possible à ce niveau-là. Le Protecteur du citoyen
pourrait intervenir directement. J'ai fait, grosso modo... S'il y a des
questions là-dessus, je serais...
Le Président (M. Messier): Merci, Mme Côté.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
M. Landry: C'est tout, M. le Président. Le
Président (M. Messier): Parfait.
M. Landry: Et on est prêts, nous, à répondre
aux questions, aux commentaires, s'il y a lieu.
Le Président (M. Messier): Nous allons débuter la
période des questions par M. Trudel, qui est le député de
Témiscamingue.
M. Trudel: Merci.
Le Président (M. Messier): Et Noranda.
M. Trudel: Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Le Président (M. Messier):
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: Ça, c'est aussi long que
Louis-Hippolyte-Lafontaine.
Le Président (M. Messier): C'est quasiment ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Merci, M. le Président, et merci à vous
de vous être déplacés en si grand nombre et d'avoir
préparé ce mémoire des usagers qui
nous présente leur vision quant aux questions que nous nous
sommes posées ici, à la commission, principalement, autour de
l'élargissement du mandat du Protecteur, mais c'est intéressant
aussi de savoir que vous vous êtes prononcés également sur
l'ensemble des autres questions. Nous recevons ces réponses avec grand
plaisir, encore une fois particulièrement parce que ça vient des
usagers du réseau et je note au passage les usagers du CSSMM. C'est le
seul mémoire, si je ne m'abuse, qui nous viendra d'usagers qui sont en
relations avec les CSS actuels.
Bon, sur l'extension du mandat du Protecteur, votre position sur la
base, je pense, est claire. Mais, à ce moment-ci, il faut vous demander
précisément, puisqu'il y a maintenant un projet de loi qui est
sur la table, qui s'appelle le projet 120, si votre recommandation tient
toujours, compte tenu de la proposition qui est dans le projet de loi 120 de
l'Assemblée nationale, et je le répète rapidement pour
faire confirmation: premier niveau, l'établissement qui traite les
plaintes avec un cadre supérieur nommément désigné
à cette fin; s'il n'y a pas satisfaction, deuxième niveau, c'est
la régie régionale. Bon. Est-ce que votre recommandation tient
toujours et, si oui, à quel niveau faudrait-il situer l'intervention
possible du Protecteur du citoyen? Alors, à l'un ou l'autre d'entre vous
qui voudrait répondre, mais j'aimerais bien avoir la vision des CSS en
particulier.
Le Président (M. Messier): M. Landry.
M. Landry: Je pense que je voudrais peut-être attirer votre
attention sur le fait que nous avons reçu le projet de loi tout
récemment. C'est clair que, pour nous, on a à créer
à l'intérieur des différentes structures des
comités, en collaboration avec d'autres organismes de défense des
droits, pour vérifier, regarder davantage, article par article, le
projet de loi, et au moment où on se parle, à Montréal, il
y a des groupes de travail qui regardent ce projet de loi et qui sont
appelés à faire des recommandations auprès de la
commission parlementaire qui va être appelée à
étudier article par article. Alors on fait le même travail, si
vous vouiez, parallèle, mais de sensibiliser les membres de la
commission sur cet article-là.
À votre question, à savoir si nous maintenons quand
même la présence du Protecteur du citoyen, il va de soi que
ça mériterait d'être examiné plus en profondeur, si
ça peut rentrer, parce qu'on a une idée très claire
qu'à l'intérieur on veut s'assurer une présence de
mécanismes de recours, de protection des droits, et laquelle est la
meilleure et la plus sûre, je pense que c'est en évaluant le
projet de loi qu'il faut regarder ça en profondeur. Mais c'est clair
que, pour nous autres, on a regardé prioritairement le projet, et
l'attention que vous avez attirée sur le rôle du
Protecteur du citoyen avant qu'on reçoive chez nous le projet de
loi 120... Alors, je pense qu'il y a des analyses en profondeur à faire,
mais ce qui est important pour nous, c'est l'intérêt du
bénéficiaire à avoir d'excellents recours et une
protection. Je pense que c'est là-dessus qu'il faut regarder ça.
Je vais laisser Alain aussi compléter. (17 heures)
M. Camirand (Alain): Oui. On a regardé les dispositions
et, à première vue, nous, on pense que les recommandations qu'on
a faites dans notre mémoire seraient toujours applicables avec les
nouvelles dispositions de la Loi sur la santé et les services sociaux.
Le mécanisme qui est dans la nouvelle loi est intéressant, il est
même bon, mais on pense que nos recommandations seraient tout de
même susceptibles d'être intéressantes à appliquer,
à première vue. Mais, comme M. Landry le disait, ça
demande une réflexion supplémentaire.
M. Landry: Peut-être que Marie pourrait en rajouter
aussi.
Mme Côté: Oui. Moi, je suis intéressée
justement à ajouter que le CGU s'est penché d'ailleurs sur
l'article 149 du nouveau projet de loi 120, en page 45 si vous l'avez.
Ça concerne les comités d'usagers, l'existence des comités
d'usagers, à savoir que tout établissement qui exploite un centre
d'hébergement de soins de longue durée, un centre de
réadaptation, un centre hospitalier de soins psychiatriques ou un centre
hospitalier dont plus de 10 % des lits-Bon, en tout cas. Là-dedans, on
omet de préciser les gens qui ne font pas partie de ça, le longue
durée, c'est-à-dire les établissements de courte
durée et les établissements qui n'ont pas de lits. Donc, on omet
des services sociaux d'autres types, dont les CPEJ, dont certains nouveaux
établissements. Je veux dire entre guillemets "nouveaux", parce que la
structure sera différente. Alors, on a comme mis de côté
les services sociaux. J'aimerais d'ailleurs attirer votre attention
là-dessus, à savoir que ce serait important qu'on pense que la
qualité des services sociaux est importante également, de s'y
pencher. Et, comme notre comité des usagers existe déjà,
qu'il y a déjà un réseau, qu'il y a déjà une
structure qui regroupe des gens, qui réussit à les rejoindre, ces
gens-là qui ne sont pas faciles à rejoindre, je pense que ce
serait important que la commission, en tout cas, s'il y a un lien avec la
commission qui va siéger justement sur le nouveau projet de loi, prenne
en considération l'importance qu'il y ait également des
comités d'usagers à l'intérieur de tous les
établissements qui offrent des services, et sociaux et de santé.
À ce moment-là... Oui?
M. Trudel: Ce message est bien noté. Vous faites bien de
le passer. J'allais revenir avec une question. Sauf que, dans votre
empressement à
passer ce message-là, n'oubliez pas de répondre à
ma question, est-ce que...
Mme Côté: Oui. J'y revenais. M. Trudel: Oui.
Parfait.
Mme Côté: Alors, on revient au niveau du Protecteur
du citoyen là-dedans. Écoutez, je vous ai soulevé tout
à l'heure le fait des familles d'accueil qui n'ont pas de recours.
L'auront-elles plus dans la nouvelle structure? Je n'en suis pas certaine. Il y
a des vides, là, qui sont laissés. Je pense qu'à ce
niveau-là il faudrait penser des structures. Bon, les comités des
usagers... Mais est-ce que la régie régionale... Un peu comme le
soulevait M. Landry, c'est important de repenser à voir à ce que
les différents partenaires se donnent une place. Je pense que le
Protecteur du citoyen pourrait justement combler les vides ou devenir un
partenaire dans ces situations-là où on n'a pas pensé
à une structure qui donne droit de parole aux gens qui reçoivent
des services.
M. Trudel: Très bien. Alors, ça nous situe bien par
rapport aux services sociaux. Effectivement, vous ajoutez une dimension
intéressante. C'est si, en quelque part, le législateur oubliait
ou ne prévoyait pas d'endroit où puisse s'exercer le recours, bel
exemple, les familles d'accueil, c'est un grand réseau, 9000 familles au
Québec, donc pour au moins autant d'usagers, vous dites: Ne serait-ce
que pour cette raison, il serait justifié d'étendre le mandat du
Protecteur du citoyen aux services de santé et services sociaux, ce
serait déjà une très bonne raison.
Allons rapidement, parce que le temps est limité, j'aimerais
aussi, et là je pense que nous avons les gens les plus qualifiés
pour le faire, qu'on réponde à la question soulevée par
l'article 31 de la nouvelle loi sur la santé et les services sociaux qui
fera obligation au plaignant de déposer sa plainte ou de formuler sa
plainte par écrit. Je n'ai pas besoin de raffiner ma question. Qu'est-ce
que vous pensez de cette disposition et de ses effets possibles, que la plainte
doive. être formulée par écrit? Pas déposée,
formulée par écrit.
M. Landry: M. le Président, je voudrais dire que, lundi
dernier, nous étions, nous, presque dans une autre commission
parlementaire, ce n'était pas parlementaire, mais entre les organismes
de défense des droits à Montréal, au chapitre des
personnes qui oeuvrent en santé mentale, ce qu'on appelle l'AGIDD. On
s'était penché sur cet article-là; par coïncidence,
on avait déjà des amendements à proposer aux
représentants qui sont appelés à siéger à
cette commission-là. Mais je voudrais peut-être attirer
l'attention, s'il y a des gens dans la salle qui vont faire partie
éventuellement de cette commission-là, qu'ils prennent note de
cette recommandation.
Spécifiquement en milieu psychiatrique, c'est très rare
que les personnes puissent rédiger et formuler leur plainte par
écrit uniquement. Je pense qu'il va do coi qu'il faut qu'elle soit aussi
verbale. Parce que dans la compréhension, dans l'attitude et, en grande
partie - je parle pour Louis-il.-Lafontaine - à cause de la
spécificité de cette clientèle-là, les
bénéficiaires ne prennent pas l'occasion, ils n'ont pas la
chance, ils n'ont pas non plus la compétence de transmettre leur plainte
par écrit. À tel point que nous, nous sommes à Louis-il.,
nous accueillons le bénéficiaire, nous l'écoutons, nous
l'aidons à formuler sa plainte, à l'articuler. Quand on voit,
dans l'article 31 du projet de loi 120, que les plaintes doivent être
formulées par écrit, nous, on dit qu'il faut qu'elles soient
aussi verbales parce que, souvent, la personne qui se plaint est tellement dans
un climat d'inquiétude, dans un climat d'insécurité que je
pense que c'est comme créer une espèce de bouclier avant qu'elle
puisse s'exprimer que de lui dire: Bien, écoute, si tu te plains, il
faut que ça se fasse par écrit; ça, c'est
déjà... Tu as comme une espèce de barrière qui se
crée.
Je pense que là-dessus c'est important que le
bénéficiaire se sente à l'aise de venir s'expliquer d'une
façon verbale et qu'il y ait des personnes qui l'aident alentour, qui
l'aident à s'exprimer, à l'actualiser par écrit par la
suite, mais que ça ne devrait pas être seulement par écrit,
mais qu'on devrait aussi l'écouter. Je pense que c'est important.
Le Président (M. Messier): Je veux juste vous rassurer,
l'Assemblée nationale, c'est un petit monde, on est juste 125, et il y a
un réseau de communication assez poussé; les messages vont se
passer.
M. Trudel: Et le député de
Rouyn-Noran-da-Témiscamingue est membre de la commission des affaires
sociales.
Le Président (M. Messier): Comme par hasard.
M. Trudel: Par hasard. Alors, dans le petit monde,
effectivement...
M. Landry: De toute façon, je pense que c'est sûr
que nous, on va s'adresser aux membres de la commission, parce qu'on a appris
assez rapidement que la commission va siéger à partir du 29.
C'est sûr qu'on écoutait, hier, le ministre Côté dans
sa tournée sur ses orientations. On suit de très près ce
dossier-là parce qu'il y a des choses qui nous concernent.
M. Trudel: Sauf que, M. Landry, vous n'aurez pas l'occasion de
vous exprimer puisqu'il n'y aura pas d'audition à cette commission.
M. Landry: Non, ça je le sais. C'est pour ça qu'on
va transmettre l'information aux membres de la commission seulement par
écrit.
M. Trudel: Très bien.
M. Landry: On en profite là, on fait les deux.
M. Trudel: C'est d'une habileté... C'est très
bien.
Peut-être une dernière question, M. le Président, si
vous me le permettez.
Le Président (M. Messier): Allez-y.
M. Trudel: Vous traitez également de ce qu'on appelle les
ombudsmans hospitaliers, la personne à l'intérieur du
système - Mme Labrie en a parlé un peu dans son intervention, je
pense. Vous savez aussi que, toujours en vertu de ce nouveau projet de loi, la
personne, peu Importe le nom, sera un administrateur de l'institution. Vous,
vous dites que ce devrait être quelqu'un qui relève du Protecteur
du citoyen. Est-ce que c'est exact, ça? C'est bien ça que vous
dites.
M. Landry: Nous, dans notre mémoire... M. Trudel:
Oui.
M. Landry: ...c'est quelqu'un qui relèverait du Protecteur
du citoyen et non de l'établissement. Quand je parle de
l'établissement, c'est l'administrateur...
M. Trudel: Oui.
M. Landry: ...ou un membre du conseil d'administration ou quelque
chose comme ça.
M. Trudel: O.K. Et dans ce contexte, ce ne serait pas un
employé de l'hôpital, parce qu'au fond - vous comprenez, je ne
veux pas entrer dans les détails techniques, là - on pourrait
être employé de l'hôpital et relever du Protecteur du
citoyen, son "boss" serait le Protecteur du citoyen. Vous autres, ce que vous
dites, c'est quelqu'un d'externe, disons a tous les points de vue, à
l'administration, aux services de l'établissement.
M. Camlrand: L'un des objectifs principaux qui ont fait qu'on a
demandé que ce soit un représentant du Protecteur du citoyen qui
s'occupe des plaintes, c'est justement la question de l'indépendance,
l'Indépendance institutionnelle. Pour nous, il est évident qu'il
faut que la personne qui s'occupe des plaintes soit indépendante
à tous points de vue, surtout du point de vue budgétaire, de
l'établissement hospitalier. Nous, ce qu'on voudrait, ce serait que le
repré- sentant du Protecteur du citoyen dépende directement du
Protecteur du citoyen.
M. Trudel: C'est très clair, c'est d'autant plus facile
d'apporter les messages. Alors, pour ma part, merci, M. le
Président.
Le Président (M. Messier): Merci, M. Camirand. Il y a le
député d'Anjou, M. Larouche, qui aimerait vous poser quelques
questions.
M. Larouche: Je vois dans l'addendum que vous avez passé
qu'il y a trois niveaux: la direction des services professionnels, l'ombuds-man
- alors, il y a un ombudsman à l'intérieur?
Une voix: Oui, oui.
M. Larouche: Et celui du comité de
bénéficiaires. Il y a eu combien de plaintes à ces trois
nrveaux-là? Est-ce que ce sont trois niveaux superposés ou
horizontaux?
M. Landry: Horizontaux, M. le Président, parce que, d'une
façon très claire, il y a certaines catégories de plaintes
qui ont plus trait à l'aspect médical; quand on parle de la
qualité de l'acte médical, quand on parle de toute la question
des services professionnels, c'est la direction des ressources professionnelles
qui s'en occupe, par le biais du conseil des... Les relations entre le DSP...
le DSP qui est le directeur des services professionnels, qui est en relation
avec le conseil des médecins et dentistes, et, à
l'intérieur du conseil des médecins et dentistes, il y a un
comité de discipline interne de l'établissement, et ça,
c'est au niveau du volet de l'acte médical, de la qualité des
services. L'autre volet, c'est le bureau de l'ombudsman, qui elle, en somme,
relève de la direction générale...
M. Larouche: Est-ce qu'elle est ici, actuellement?
M. Landry: Non, elle n'est pas avec nous. On l'a invitée,
malheureusement, elle ne pouvait...
M. Larouche: Elle n'a pas voulu venir?
M. Landry: Non pas qu'elle ne voulait pas, mais elle ne pouvait
pas. On l'avait invitée.
M. Larouche: Mais, vous autres, vous ne représentez que
les bénéficiaires?
M. Landry: Oui.
M. Larouche: O.K., alors... Savez-vous le nombre de plaintes
qu'il y a à chacun des niveaux?
M. Landry: Non, malheureusement, M. le
Président, seulement à notre niveau, on sait qu'on a
au-delà de 344 plaintes qui sont venues de l'année
dernière, 1989-1990. Cette année, on va présenter notre
rapport annuel. Mais, du côté du conseil des médecins et
dentistes, du directeur des services professionnels, de l'ombudsman, il n'y a
pas eu de rapport de présenté. Ça a été
posé à la direction générale, point.
M. Larouche: Moi, j'ai un cas qui m'a été soumis au
mois de décembre, je ne le nommerai pas, et la personne semblait
désespérée. Cette personne-là m'a appelé, a
appelé au bureau de comté, et moi, je lui ai parlé,
à cette personne-là. Je vais vous dire, je ne savais pas qu'il y
avait ces trois organismes, et je l'aurais sûrement
référée, si je l'avais su. Lui-même ne le savait
pas, puis il était à l'intérieur. Je ne sais pas quelle
sorte de publicité vous faites à l'intérieur de
l'institution?
M. Landry: Très bonne question, M. Larouche, que vous
posez. C'est clair que nous, le comité des bénéficiaires,
on représente l'ensemble des bénéficiaires, et on parle au
nom des bénéficiaires, puis on clarifie davantage dans notre
présentation qu'on ne parle pas pour l'établissement mais bien
pour les bénéficiaires. L'établissement, lui, suite
à la tutelle, suite à l'établissement d'un nouveau conseil
d'administration en novembre 1985, aux recommandations du ministère, on
avait dit: II faudrait établir à Louis-il., suite aux multiples
enquêtes et à la tutelle... Puis, à la refonte de
l'organisation de l'hôpital, en novembre 1985, début janvier 1986,
on a nommé un employé, un cadre supérieur, pour s'occuper
des traitements de plaintes, et on l'a nommé ombudsman. De l'autre
partie, du côté de la direction des services professionnels, le Dr
Deschamps a élaboré une procédure de traitement de
plaintes lorsqu'il y avait des dossiers plus à caractère
clinique, concernant son équipe médicale. Par rapport à la
connaissance vis-à-vis des bénéficiaires, il y a de
multiples démarches qui se font, sur le point de vue individuel, sur le
palier aussi des familles. Il y a des démarches qui se font aussi
à différentes soirées, l'existence du comité des
bénéficiaires... De plus en plus, le comité aussi, je
pense que ça fait depuis quatre ans... Puis il faut mentionner aussi
qu'à Louis-il.-Lafontaine on représente au-delà de 2000
bénéficiaires internes et 7000 à l'externe. Alors, c'est
une population qui est assez vaste, ça mérite presque trois
niveaux de structures auxquels les bénéficiaires peuvent
s'adresser, soit au service d'ombudsman, soit au service de la direction des
services professionnels, soit au comité de bénéficiaires.
Il faut dire aussi qu'au comité de bénéficiaires ce sont
des gens bénévoles qui travaillent, alors je pense que c'est un
aspect assez important. (17 h 15)
M. Larouche: Je suis tombé par hasard sur une revue puis
un texte qui est tiré de la revue Psychology Today. Je traduis un
petit bout ici, on dit: De plus en plus, les gens sont pris en charge par
l'État au niveau des différents programmes sociaux, au niveau des
institutions ou en dehors. Comme vous dites, il y a des soins externes, et
ça, ça arrive presque du berceau au cercueil, dans
différents programmes. On dit: En retour, il est demandé que les
bénéficiaires suivent les règles de l'institution,
habituellement des règles impersonnelles, mises au point pour s'assurer
que le comportement des bénéficiaires soit plus "manageable" ou
gérable par les dispensateurs de soins. Alors quand vous parlez du
traitement des plaintes, dans un hôpital comme Hippolyte-Lafontaine, il y
aurait le traitement des patients maintenant. Je ne sais pas quel type de
traitement... Remarquez, j'y suis déjà allé pour visiter,
je suis arrivé avec des cigarettes et j'en ai donné
quelques-unes... Remarquez, ça faisait un milieu qui n'est pas comme
à l'intérieur, mais je sentais qu'il y a un milieu de vie
à Hippolyte, ça faisait un peu comme un petit village, je suis
allé là peut-être il y a trois ans. Mais il me semblait que
certaines personnes recevaient des traitements et c'est là, c'est
à ce niveau-là que je pose la question: Est-ce qu'il y a un choix
au niveau des traitements? Dans la revue Psychology Today, toujours, on
parle encore des électrochocs, des médications. Si vous ne suivez
pas les règles, alors vous aurez tel traitement et ça vient de
s'éteindre, vous devenez un légume et on va vous "légumer"
pour 24 heures, 48 heures. Parlez-moi donc un peu de ça.
Une voix: Est-ce que je peux m'adresser à...
M. Larouche: Oui. Vous êtes sept, alors c'est un bon
chiffre pour me répondre.
M. Landry: On a un bénéficiaire qui est avec nous,
M. le Président. Je pense que ça serait bon de l'écouter.
Je pense que Roger peut s'expliquer, il vit à l'hôpital.
Le Président (M. Messier): Vous êtes monsieur?
M. Landry: Roger Trépanler.
Le Président (M. Messier): M. Trépanier. Merci. On
vous écoute, M. Trépanier.
M. Landry: Réponds à la question que
monsieur...
M. Trépanier (Roger): ...ça fait longtemps que
j'étais à l'hôpital aussi. Des traitements, j'en ai
passé pas mal. C'est dur. Comme moi, je suis peut-être perdu un
peu par l'hôpital, mais c'était dur parce que c'était
dû pour... Je suis un peu nerveux parce que c'est la première fois
que je
vois du monde là...
M. Larouche: Non, non, allez-y.
M. Trépanier: Je suis assez énervé,
là, même si c'est pas de ma faute.
M. Larouche: Non, non. C'est très bien, continuez.
M. Trépanier: Là, je suis rendu... Moi, je viens de
l'Abitibi, de Noranda. J'ai été transféré
à... Quand je suis allé à Montréal, je ne
connaissais pas ça, Montréal. J'ai fait beaucoup
d'hôpitaux, j'étais malade aussi. Mes parents sont
décédés et j'ai fait une rechute. Là, j'ai fait pas
mal d'unités aussi. Je suis parti entre ça, je suis revenu parce
que ça ne marchait pas en foyer. Parce qu'en foyer ils nous donnaient 1
$ pour prendre l'autobus et, pour le reste, ils ne te donnaient pas d'argent.
Là, ça va très très mal. J'ai dit: O.K. Moi, je
m'en vais à l'hôpital et je m'en vais. Le monsieur ne voulait pas
que je m'en aille à l'hôpital parce qu'il voulait avoir beaucoup
d'argent pour moi.
M. Larouche: Oui. Vous étiez en foyer, là?
M. Trépanier: C'est ça. Ça ne marchait pas,
je n'aimais pas ça. J'étais déçu un peu aussi.
M. Larouche: Là, vous êtes à
Hippolyte-Lafontaine.
M. Trépanier: C'est ça. Là, je suis à
Hippolyte-Lafontaine.
M. Larouche: Mais est-ce que vous avez le choix des traitements
ou si on vous dit: Toi, là... C'est ça que je voudrais
savoir.
M. Trépanier: II me met la jaquette. M. Larouche:
II vous met la jaquette. M. Trépanier: C'est ça.
M. Larouche: Quand est-ce qu'il vous met la jaquette?
M. Trépanier: Quand tu n'écoutes pas. M.
Larouche: Quand tu n'écoutes pas.
M. Trépanier: Quand tu n'écoutes pas, if te met la
jaquette. Et, quand ça ne fait pas, c'est dans la chambre d'isolement et
puis tu es attaché.
M. Larouche: Mais vous, si vous ne voulez pas avoir la jaquette,
pouvez-vous vous plaindre au comité de bénéficiaires pour
dire: Moi, je suis bien correct aujourd'hui, je ne veux pas avoir la
jaquette?
M. Trépanier: C'est ça. Je fais des plaintes
aussi.
M. Larouche: Vous faites des plaintes.
M. Trépanier: C'est ça, au comité de
bénéficiaires. Moi, je suis dans le comité de
bénéficiaires...
M. Larouche: C'est plus facile pour vous, vous êtes sur le
comité.
M. Trépanier: C'est ça. C'est facile pour moi.
C'est bon, ça, c'est une bonne question.
M. Larouche: Alors, ça répond à ma question
pour le moment.
M. Trépanier: Je n'ai pas fini.
M. Larouche: O.K. Allez, continuez.
M. Trépanier: Quand tu es dans la chambre d'isolement, tu
n'as pas le droit de crier. Si tu cries, ils te donnent une piqûre.
M. Larouche: Ah bon.
M. Trépanier: Ils donnent une piqûre.
M. Larouche: Pourtant, il y a la psychologie du cri primai. Vous
devriez crier à votre goût.
M. Trépanier: C'est ça.
M. Larouche: Et vous ne pouvez pas crier?
M. Trépanier: Non. Si tu cries, c'est une piqûre et
tu m'endors.
M. Larouche: La prochaine fois qu'ils vous feront ça,
voulez-vous, vous m'appellerez?
M. Trépanier: O.K.
M. Larouche: Je suis le député d'Anjou, M.
Larouche. Vous m'appellerez.
M. Trépanier: Oui. Avez-vous une carte?
M. Larouche: Oui, oui, je vous la laisserai ma carte.
M. Trépanier: Parfait. Pas de problème.
M. Larouche: Si vous avez des problèmes avec le
comité de bénéficiaires, parce que s'ils vous mettent dans
une chambre...
M. Trépanier: Tu es attaché. Tu ne fais rien, tu ne
peux pas aller aux toilettes. J'ai
envie, j'ai envie...
M. Larouche: Ah oui? Et vous ne pouvez même pas crier
à votre goût?
M. Trépanier: Non. C'est ça.
M. Larouche: Et c'est un psychiatre qui vous attache comme
ça?
M. Trépanier: Non, non. C'est des préposés.
M. Larouche: Des infirmiers.
M. Trépanier: Je n'aime pas ça. Il y a Maurice qui
est dur avec moi un peu.
M. Larouche: Et là, vous vous sentez
désespéré un peu, là.
M. Trépanier: Là, j'ai une blonde, puis ma blonde
m'a dit: Viens-t'en, on s'en va, on sort.
M. Larouche: Elle vient vous chercher à l'hôpital et
elle vous ramène chez vous.
M. Trépanier: Ma blonde est ici, à l'hôpital,
avec moi.
M. Larouche: Elle est à l'hôpital avec vous? M.
Trépanier: C'est ça.
M. Larouche: Et elle vient vous chercher, elle s'occupe de
vous.
M. Trépanier: J'ai dit: Viens-t'en, on sort, on s'en va
à l'unité... Va-t'en.
M. Larouche: Là, dans ce temps-là, vous vous sentez
mieux.
M. Trépanier: C'est ça. Là, ils me donnent
des médicaments, puis là, je me dis: O.K., c'est assez de
niaisage, il faut que tu prennes tes médicaments. Si tu ne prends pas
tes médicaments, en jaquette, à la chaise, puis, si ça
marche pas, dans la chambre d'isolement.
M. Larouche: Une dernière question, parce que je ne suis
pas un psychiatre, quand même. C'est que celui qui fixe votre diagnostic,
il dit: Vous devez prendre tel médicament tous les jours. Ensuite, c'est
un petit préposé qui dit: Ta pilule ou ton verre de pilules.
M. Trépanier: C'est ça. Ils veulent faire un cobaye
avec moi.
M. Larouche: Bon. Maintenant, deuxième sous-question, tu
me suis là?
M. Trépanier: Oui.
M. Larouche: C'est que si tu ne prends pas ton verre de pilules,
là, tu n'es pas correct, mais est-ce qu'on te réévalue
pour dire... Vois-tu le psychiatre assez souvsrrt?
M. Trépanier: Non, je ne le vois pas, le psychiatre.
M. Larouche: Tu ne le vois pas.
M. Trépanier: Je ne le vois pas. Le médecin, je ne
le vois pas.
M. Larouche: Tu l'as vu une fois, il te donne tes pilules et
après ça...
M. Trépanier: C'est ça. Puis il me donne des
piqûres et ça, ça fait mal. Quand tu es assis, ça
fait mal. Moi, je suis guéri, moi. J'attends une place pour m'en aller
de l'hôpital.
M. Larouche: Oui.
M. Trépanier: Je suis guéri. Ça fait
longtemps que je demande au médecin, je veux m'en aller de
l'hôpital. Je suis guéri, je suis correct. Et là, il ne
veut pas.
M. Larouche: Tu n'es pas violent?
M. Trépanier: Non, je ne suis pas violent. Avant, je
faisais des bêtises.
M. Larouche: Oui.
M. Trépanier: Là, c'est fini. J'en parle plus de
ça.
M. Larouche: Quel âge as-tu?
M. Trépanier: Moi? J'ai 29 ans, monsieur. J'ai eu ma
fête le 3 décembre, j'ai eu un cadeau là-bas. J'ai
été pas mal gâté.
M. Larouche: Es-tu heureux là-bas à
Louis-Hippolyte-Lafontaine?
M. Trépanier: Non, non, non.
M. Larouche: Tu n'es pas heureux.
M. Trépanier: Non. Où je travaille, je suis
heureux, parce qu'ils me donnent des affaires. Je travaille là-bas et je
suis commissionnaire. Je fais des commissions.
M. Larouche: O.K. Tu connais ça, à Anjou, il y a un
centre de travail de transition.
M. Trépanier: Je ne connais pas ça. C'est la
première fois que j'entends ça.
M. Larouche: Oui. Alors, au niveau du
comité de bénéficiaires, vous regarderez ça.
À Anjou, il y a un centre de transition, pour ne pas dire s'il y a de la
désinstitutionnalisation... Vous regarderez ça.
M. Trépanier: J'attends une place pour m'en aller de
l'hôpital.
M. Larouche: Tu veux sortir.
M. Trépanier: C'est ça. Et puis, le médecin,
je lui ai parlé, puis il a dit: Oui, oui, oui. Plus tard, plus tard.
Plus tard, plus tard.
M. Larouche: Comment s'appelle ton médecin?
M. Trépanier: Je ne me rappelle plus. Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Larouche: Tu ne dois pas le voir souvent, j'imagine.
M. Trépanier: Pas souvent.
M. Larouche: La dernière fols que tu l'as vu, c'est
quand?
M. Trépanier: Une fois...
M. Larouche: La dernière fois, c'est quand?
M. Trépanier: Je l'ai vu une fois, pas longtemps.
M. Larouche: Mais là, ça fait trois ans que tu es
là.
M. Trépanier: C'était la première
année que j'étais là, ça fait longtemps que je suis
ici.
M. Larouche: Tu l'as vu une fois. M. Trépanier: Une
fois.
Le Président (M. Messier): M. le député
d'Anjou, on déborde un petit peu. Il pourrait y avoir une...
M. Larouche: Non, non, non, mais tu sais, je veux dire, c'est un
bénéficiaire. On en a vu juste un, là. Alors, je termine
sur ça.
Le Président (M. Messier): II pourrait y avoir une
conversation. Est-ce que vous avez parlé de votre cas à Mme
Chanfreau, qui est I'ombudsman de l'hôpital?
M. Trépanier: Mme Chanfreau...
Le Président (M. Messier): Chanfreau.
M. Trépanier: J'veux pas lui parler, à elle. Le
Président (M. Messier): Non?
M. Trépanier: ...parler du comité de
bénéficiaires.
Le Président (M. Messier): Mais, Mme Chanfreau, qui est
l'ombudsman...
M. Trépanier: L'ombudsman... J'ai été
chercher ça et ça n'a rien amené pantoute.
Le Président (M. Messier): O.K.
M. Larouche: On voit nettement, M. le Président, qu'il y a
des problèmes. C'était juste pour ça. C'est
consigné au procès-verbal. C'est le comité de
bénéficiaires. Je pense que vous m'avez dit: On va parler avec un
bénéficiaire. C'est important. Alors, on voit, là, quand
ce sera analysé, qu'il y a des problèmes dans certaines
institutions. On a vu l'hôpital Douglas, ça va très bien,
etc., mais on voit qu'à Hippolyte-Lafontaine dans l'est de
Montréal, une institution qui est là quand même depuis
assez longtemps, il y a eu des problèmes et on voit qu'il y en a encore
et il y a le comité de bénéficiaires qui fait un excellent
travail.
M. Trépanier: C'est ça.
M. Larouche: L'ombudsman, sûrement, a fait...
M. Trépanier: L'ombudsman...
M. Larouche: Non, non. Certainement, je présume qu'ils
font aussi un bon travail, et ensuite la direction des services professionnels.
Il reste une coordination de tout ça. Je pense que le comité des
bénéficiaires, tu es déjà dessus, alors, c'est
à toi à continuer à travailler. Alors, merci beaucoup.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup. Il y a
peut-être un complément d'information par Mme Paryse Labrie.
Mme Labrie: J'aimerais seulement compléter la
réponse de M. Trépanier, à votre question, au sujet de...
Vous demandiez s'il y avait une certaine séparation entre les trois
recours de plaintes pour savoir à qui s'adresser. Effectivement, il y a
un problème de coordination. Le bénéficiaire ne sait
carrément pas, souvent, à qui s'adresser et, pour notre part, je
peux dire que le comité de bénéficiaires et l'ombudsman
traitent grosso modo le même genre de plaintes. Et, évidemment, il
faut s'attarder sur ce dossier pour séparer de façon plus... ou
créer une participation plus accrue. Et sur ce, je voudrais attirer
votre attention sur la recommandation 13,
qui renvoie à votre première question, qui justement
parlait du mécanisme de publicité.
Nous avons l'intention aussi de nous pencher sur le problème de
la publicité à l'intérieur du centre hospitalier.
M. Larouche: À l'intérieur. Mme Labrie:
Oui.
M. Larouche: Je pense qu'il veut continuer, M.
Trépanier.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup.
M. Trépanier: Je veux...
Le Président (M. Messier): Oui.
M. Trépanier: Monsieur, je voudrais avant de terminer
aussi... Moi, je parle pour l'hôpital, parce qu'il y a des patients qui
sont bien aptes à sortir de l'hôpital. Ils me disaient: Roger,
pourquoi tu ne t'arranges pas pour te faire sortir de l'hôpital? Moi, ce
n'est pas moi le médecin. Moi, je ne fais rien de mal. Moi aussi, je
veux sortir de l'hôpital. Ça fait longtemps que je demande
à l'hôpital. Je lui ai dit, au médecin: Donne-moi mon
congé, ça va bien, et tout ça, je ne suis plus malade. Je
ne peux pas rester tout le temps à l'hôpital si je ne suis pas
malade.
Le Président (M. Messier): De deux choses l'une. Soit
qu'il n'y a pas de place à l'extérieur soit, si le médecin
ne veut pas, il peut avoir une...
M. Trépanier: Non, non... Le médecin m'a dit, le
premier m'a dit: Tu vas sortir.
Le Président (M. Messier): D'accord.
M. Trépanier: Tu vas sortir. Tu es le premier sur la
liste. Tu vas sortir. Ça, c'est normal, tu vas sortir. Là,
après ça, il dit: O. K. Tu ne sors pas. Comprends-tu l'affaire,
là?
Une voix: Oui. Ça, c'est un cas flagrant, vous faites une
plainte...
M. Trépanier: Tu es dans la cabane, là, puis tu
n'es pas malade.
M. Landry: Je pense qu'à ce stade-ci, il faut
peut-être expliquer clairement, M. le Président, que,
actuellement, l'hôpital est sous tutelle. On parle de
réorganisation de l'hôpital et, actuellement, il y a un
comité de vigilance qui voit à l'application des orientations de
l'hôpital et il y a tout un processus de réorganisation. Je
voudrais peut-être spécifier aussi que l'importance que Paryse a
soulevée tout à l'heure du problème de coordination, bien
je pense que les intentions du fondé de pouvoir qui remplace le conseil
d'administration, l'intention d'une nouvelle équipe, de la nouvelle
direction générale qui est en place, c'est d'essayer d'amener un
correctif à cet égard-là au niveau de la coordination et
de la planification et de sensibiliser les parents, les
bénéficiaires pour qu'ils sachent très bien où
s'adresser lorsqu'ils ont des plaintes.
Le Président (M. Messier): II y a peut-être deux
autres interventions. M. le député de Beauce-Sud, M. Audet.
M. Audet: Beauce-Nord.
Le Président (M. Messier): Beauce-Nord. Mille excuses.
M. Audet: Bonsoir. Très brièvement. On a
reçu un organisme hier, le comité de bénéficiaires
du centre Robert-Giffard à Québec, qui me semble être un
centre un peu semblable à celui que vous avez, que vous
représentez. Eux, lors de leur intervention, ils ont souligné
l'importance que revêtait pour eux la Commission des affaires sociales
dans tes cas, par exemple, où certains spécialistes traitants
pouvaient abuser d'un mécanisme qui existe en vertu de la Loi sur le
Curateur public. Ça veut dire, par exemple, le droit d'isolement d'un
patient pour usage thérapeutique. Alors ils disaient que, par exemple,
il arrivait, lorsqu'il semblait pour eux qu'il y avait abus, qu'ils
référaient le cas à la commission des affaires sociales et
il semble que le mécanisme était très efficace pour faire
lever, par exemple, ces périodes d'isolement ou lever ce
mécanisme dont le médecin ou le traitant peut se servir en vertu
de la Loi sur le Curateur public. Est-ce que c'est un mécanisme que vous
utilisez, la Commission des affaires sociales?
M. Landry: À certaines reprises, M. le Président,
oui, on utilise et on apporte le support auprès du
bénéficiaire pour s'adresser à la Commission des affaires
sociales.
M. Audet: Est-ce que c'est efficace? Est-ce que ça va
bien?
M. Landry: Oui. Puis, à cet égard-là,
ça va relativement bien. Mais c'est très rare. C'est sûr
que c'est dans les cas plus spécifiques, dans les cures fermées,
où on attribue, au service de ce qu'on appelle le programme de courte
durée, l'évaluation et les admissions en courte durée, une
forte proportion de la clientèle fait appel aux ressources du
comité pour les aider à cheminer devant la Commission des
affaires sociales.
Et ce qui est assez bizarre aussi, c'est que tout récemment, au
comité de bénéficiaires, on a eu deux cas qui nous ont
été adressés de la
part des bénéficiaires pour s'adresser à la
commission d'examen qui est une tout autre chose, qui est ce qu'on appelle plus
spécifiquement pour les mandats de lieutenant-gouverneur en conseil.
C'est là tout un problème. D'ailleurs, on doit travailler
prochainement à ce dossier-là aussi.
M. Audet: D'accord, merci.
Le Président (M. Messier): M. le député de
Neiligan, M. Williams.
M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je vais
être court, parce qu'il commence à être tard. Je voudrais
vous remercier pour votre mémoire, mais aussi plus
particulièrement pour le travail que vous faites ensemble pour les
bénéficiaires de l'hôpital. Je pense juste à la
formation, le type de groupes que vous avez privilégié une
approche que j'aime beaucoup, c'est une approche multidisciplinaire. Vous avez
partagé les responsabilités entre le CSS, le comité, les
CRSSS. Je pense que dans l'avenir ça va être une des dés
pour trouver la solution.
Je suis un ancien membre du Conseil régional de la santé
et des services sociaux du Montréal métropolitain, hors
réseau, représentant des maires. Vous avez maintenant un recours
jusqu'au conseil régional, service des plaintes. Mais il me semble - et
peut-être que vous n'êtes pas capables de répondre tout de
suite... Nous allons discuter ça plus tard, peut-être pas à
la commission parce que la deuxième lecture, c'est une autre affaire,
mais comme je suis membre de cette commission-ci, comme M. Trudel, je vais
certainement suivre le dossier et aussi, comme adjoint parlementaire de M.
Côté, je vais certainement avoir une bonne chance de discuter
cette question. (17 h 30)
Mais il me semble que lorsque nous avons parlé des trois niveaux
de plaintes, l'institution, la régie et ici, l'Assemblée
nationale, il y a certainement la protection. Nous avons discuté de la
question de l'écrit, mais nous n'avons pas discuté de la
possibilité d'avoir une personne pour aider les usagers.
Mais il y a un autre changement qui s'en vient. Je voudrais avoir votre
commentaire. Je pense que, dans la loi actuelle, le Conseil régional du
Montréal métroplitain peut adresser une requête à la
Commission des affaires sociales. Ça n'arrive pas souvent;
peut-être que vous avez quelques expériences à discuter,
mais ça n'arrive pas souvent. Dans la loi proposée, cette
possibilité n'existe pas. Je voudrais avoir vos commentaires maintenant.
Quel est l'impact sur cette affaire? Je vous respecte, parce que
peut-être que vous voulez étudier ça plus tard, alors
ça ne sera pas votre réponse finale. C'est quoi l'impact de ce
changement pour votre clientèle?
M. Landry: Moi, je voudrais peut-être expliquer une
anecdote, une expérience vécue par rapport à ce qu'on
appelle le traitement des plaintes via le conseil régional, via la
Commission des affaires sociales ou via l'établissement. Par les
années passées, on a participé à différentes
commissions parlementaires. Je pense que ce n'est pas la première fois
qu'on vient s'adresser à différentes commissions, surtout pour la
politique de la santé mentale. On se disait, nous autres, que les
principaux acteurs qui jouent les différents rôles de structures
du réseau, c'est-à-dire le conseil régional, la Commission
des affaires sociales ou les établissements, je pense qu'il faut voir
à ce que dans la loi future, ce qu'on appelle la loi 120, il y ait
possibilité que ces acteurs-là n'aient pas les mêmes
intérêts en termes de dispensation de services. Parce que, exemple
concret, au conseil régional, quand le comité de
bénéficiaires s'y adressait pour défendre les droits et
les intérêts des bénéficiaires, on pointait nos
demandes au conseil régional, mais, quand le conseil régional se
retournait de bord et analysait cette plainte-là, il en faisait comme
une recommandation auprès de l'établissement. Mais nous, à
l'analyse de cette démarche-là, nous avons constaté
qu'à l'intérieur des structures du conseil régional et de
l'établissement c'étaient les mêmes acteurs. Exemple: notre
directeur général dans les années 1986 et 1987, il
siégeait au conseil d'administration du CRSSS et se trouvait, par
ricochet, vice-président du conseil d'administration. Alors, comment le
CRSSS peut-il actualiser un traitement de plaintes d'une façon efficace,
être un recours neutre, un recours assez évident pour permettre au
bénéficiaire d'avoir des droits et de défendre ses
services quand, au niveau de la structure et des nominations, les mêmes
personnes jouent les mêmes rôles à différents
endroits? Ça devenait comme des v?ux pieux.
Alors, nous autres, on disait qu'il était impératif que,
lors de l'étude du projet de loi, bien les acteurs qui font partie de
ces structures-là n'aient pas des intérêts propres à
différents niveaux. Parce que les recours, les mécanismes de
traitement de plaintes, les mécanismes d'appel de services, de promotion
et de défense des droits étaient mis en cause. Je pense qu'il
faut s'assurer que les acteurs puissent avoir un rôle complètement
indépendant du réseau.
M. Williams: Merci.
Mme Labrie: Est-ce que je peux ajouter quelque chose?
M. Williams: Oui.
Mme Labrie: J'aimerais seulement ajouter... Ce que je comprends
du mécanisme qui existe présentement, les plaintes qu'on peut
faire au CRSSS et les plaintes qui peuvent se rendre à la
Commission des affaires sociales, c'est que le CRSSS a un pouvoir de
recommandation aux autorités de l'établissement concerné
par la plainte du bénéficiaire. C'est ça? Je crois que le
CRSSS peut ensuite acheminer une requête à la Commission des
affaires sociales dans les cas où il estime que les droits du plaignant
risquent d'être en péril. Est-ce que je me... C'est ça,
bon!
À notre avis, les recommandations que la Commission des affaires
sociales peut faire à l'hôpital ou à la direction du
service en question sont certainement plus contraignantes que les
recommandations du CRSSS, sinon je crois que le recours n'existerait pas. C'est
ce que je comprends, en tout cas, du mécanisme. Alors, est-ce qu'en
éliminant le recours à la Commission des affaires sociales les
recommandations du CRSSS seraient contraignantes d'une autre façon?
C'est ça, parce que, si jamais les recommandations du CRSSS n'ont pas
l'effet contraignant des décisions de la Commission des affaires
sociales, je crois qu'à ce niveau-là ce serait difficile pour
nous d'accepter ça, parce que c'est important qu'il y ait un pouvoir
vraiment contraignant pour...
M. Williams: Nous ne réglerons pas toute cette question ce
soir. Ça va être très important de continuer cette
question, parce que, avec le projet de loi, cette relation change
complètement. Et je voudrais vraiment savoir, dans les semaines qui
suivent, vos commentaires sur l'impact de ce changement, et nous pourrons avoir
une chance de scruter cette question.
Je voudrais retourner à un autre mémoire que nous avons eu
ce matin. Si je me souviens bien, l'Association des centres d'accueil a
présenté un mémoire qui dit qu'elle a questionné la
possibilité que le rôle officiel du Protecteur du citoyen dans
leur établissement prenne les responsabilités de la protection
des droits, et elle veut garder cette responsabilité dans les mains des
usagers. Nous pourrions avoir un débat sur ça, sur comment le
mieux placer cette responsabilité. Mais il me semble que vous avez
vraiment commencé à mettre sur pied un programme de
responsabilisation dans votre institution. Avez-vous des commentaires sur
l'impact sur votre affaire, si nous avons une obligation, un droit légal
d'avoir le rôle de Protecteur du citoyen dans votre établissement?
Est-ce que ça va changer la façon dont vous allez marcher?
M. Landry: Je pense, M. le Président, peut-être pour
répondre à la première partie de cette
question-là... Il va de soi que, pour nous, qu'on renforce, qu'on donne
plus de responsabilités à ce qu'on appelle les comités de
bénéficiaires ou qu'on va appeler les comités d'usagers
éventuellement, et à quiconque, je pense, qui, mieux que les
comités, puisse actualiser la première partie du volet... Mais ce
qui est important, c'est qu'il y ait une collaboration avec la personne, entre
le comité des... Et le lien le plus significatif, le lien le plus
privilégié qu'aurait cette personne-là qui viendrait du
Protecteur du citoyen, c'est de travailler en étroite collaboration avec
le comité de bénéficiaires, et même de participer
constamment aux exercices de l'actualisation, de la promotion puis de la
défense des droits des bénéficiaires. Et, à cet
égard, il serait intéressant que le Protecteur du citoyen puisse
travailler main dans la main avec le comité, parce que nous, on les
connaît, les bénéficiaires, puis on est leurs
représentants. Nous sommes imputables aux bénéficiaires,
et éventuellement, M. le Président, le comité va tenir des
élections, puis c'est là que les bénéficiaires vont
nous évaluer, évaluer si on les a supportés, si on les a
défendus, si on les a aidés. Tout récemment, on a
actualisé un dossier sur l'augmentation de salaire, puis les
bénéficiaires sont contents, ils nous le disent, puis ils sont
heureux. Alors on devient comme imputables à eux à l'égard
de la défense de leurs droits... Il y a une autre
caractéristique, chez nous, qui est différente, c'est que, en
établissement psychiatrique, il y a un grand nombre de
bénéficiaires qui ne s'expriment pas, qui ne parlent pas, parce
que leur pathologie est profonde. Or, on devient comme leurs porte-parole, on
les représente. Sur l'aspect légal, c'est le bureau du Curateur
public, mais il va de soi qu'on est les plus significatifs au niveau des
bénéficiaires pour parler en leur nom, et on n'attend pas
souvent, quand il y a des injustices, des erreurs qui se commettent, que les
bénéficiaires s'expriment eux-mêmes. Comme je disais tout
à l'heure au député qui nous demandait s'il fallait que ce
soit fait par écrit, les plaintes, écoutez, ils ont de la
misère à s'exprimer, ils ont de la misère à voir ce
qui se passe alentour d'eux, si on leur demande de se plaindre par
écrit... Alors c'est pour ça qu'on devient comme leurs
représentants, pour parler en leur nom. Peut-être Roger...
M. Camirand: Si je peux me permettre... Le Président
(M. Messier): M. Camirand.
M. Camirand: Si j'ai bien compris le sens de votre question, vous
voulez savoir quels avantages on verrait à la venue du Protecteur du
citoyen dans le secteur de la santé mentale. Nous, on voit la venue du
Protecteur du citoyen comme deux gros avantages particuliers, comme on le
démontre dans notre mémoire. Le premier avantage, ce serait le
pouvoir de recommandation qu'aura le représentant du Protecteur du
citoyen. Tout le monde considère que le Protecteur du citoyen donne des
recommandations qui sont bienvenues. La plupart du temps, ces
recommandations-là, je pense, sont respectées par ceux qui en
font l'objet. Puis nous, on pense que, quand le représentant du
Protecteur du citoyen va faire des recommandations, elles vont être
prises en
compte, ça ne passera pas dans le vide. Puis, aussi, si jamais
c'étaient des gros points, puis qu'on voyait que ça ne bouge pas,
on espère que peut-être ça pourrait finir par se rendre au
Protecteur du citoyen lui-même, puis peut-être même à
l'Assemblée nationale, qu'on pourrait régler vraiment la
question. Ça, c'est un gros avantage.
Le deuxième avantage, c'est que, comme vous pouvez
peut-être le constater dans la recommandation 12 de notre mémoire
- c'est ça - le représentant du Protecteur du citoyen aura aussi
un rôle particulier dans les établissements psychiatriques, ce
serait de permettre au bénéficiaire, s'il constate que le
bénéficiaire a un recours légal qui existe
déjà et qu'il pourrait prendre, de l'aider à cheminer dans
ce recours-là. Tout cela se ferait en collaboration avec le
comité de bénéficiaires. Ce serait le deuxième
élément important. On ne veut pas ajouter au fouillis qui existe
déjà dans les mécanismes de traitement de plaintes, il y
en a quand même beaucoup, mais ce n'est pas tellement coordonné.
Nous, ce qu'on veut, ce serait comme faire une espèce de guide pour le
bénéficiaire; il pourrait se retrouver plus facilement. Ce serait
une caractéristique particulière du représentant du
Protecteur du citoyen. C'est les deux gros avantages qu'on voit.
M. Williams: Merci.
Le Président (M. Messier): Oui, M. Trépanier, je
pense.
M. Trépanier: Merci. Je veux ajouter aussi, la
première fois que je suis rentré à l'hôpital,
ça allait mal, c'était dur pour moi aussi. Moi, je parle au nom
de tous les bénéficiaires à Louis-il.-Lafontaine. C'est
dur, c'est pas mal dur. Le monde va me dire: Roger, tu as l'air en forme;
pourquoi tu ne sors pas de l'hôpital? Tu as l'air guéri, vas-t-en,
ce n'est pas ta place.
Une voix: C'est bien.
M. Trépanier: Comprends-tu? S'il n'y a pas
d'inconvénient... Quand je suis en foyer... En foyer, tu n'as rien
à faire, tu ne travailles pas, tu n'as pas d'activité, tu n'as
rien, tu n'es pas dans le centre. Là-bas, à l'hôpital, tu
as de la danse, des spectacles, des bingos. Va voir ça en dehors de
ça, il n'y en aura même pas. On s'ennuie, on est tout mal à
l'aise quand on est en foyer. Moi, je veux avoir un foyer qui s'occupe de moi
comme il faut, pour pas que je revienne à l'hôpital.
Comprends-tu?
Le Préskient (M. Messier): Oui, absolument. Je vous
remercie beaucoup de votre témoignage, M. Trépanier, Mme Huard,
Mme Côté, M. Landry, M. Camirand, Mme Labrie et - de
mémoire, M. Camirand. J'ai un blanc de mémoire. Je vous remercie
beaucoup de votre intervention, de la qualité de votre mémoire,
de la qualité de votre présentation. Au nom du
vice-président, M. Trudel, qui a dû s'absenter et au nom des
membres de la commission, on vous remercie beaucoup de votre témoignage.
Oui?
M. Landry: Je veux seulement rajouter un point, M. le
Président.
Le Président (M. Messier): Avec le plus grand des
plaisirs.
M. Landry: Avant de terminer, nous aussi, on vous remercie. Je
remercie aussi pour sa patience Mme Giguère qu'on a pu contacter
à plusieurs reprises. On a dû se déplacer. Je pense que la
compréhension qu'elle a apportée à notre égard, on
l'a appréciée beaucoup. On devait passer hier avec les autres
représentants et, à notre niveau, on avait d'autres
préoccupations qui nous sont arrivées à Louis-il. Par
contre, M. le Président, je tenais quand même à souligner
sa contribution et sa générosité à notre
égard, auprès du comité.
Le Président (M. Messier): Ça va être
publié dans le Journal des débats et, possiblement, on va
l'envoyer à son patron.
M. Landry: Parce qu'on oublie souvent les personnes qui
travaillent en arrière, mais je pense que, quand même, il faut
dire aussi, M. le Président, qu'on vous a sensibilisés sur
certains aspects de la future loi 120. C'est clair que, pour nous, on va
travailler très fort parce que, dans les objectifs, c'est très
clair pour nous de défendre l'intérêt des plus
démunis...
Le Président (M. Messier): Parfait.
M. Landry: ...une grande partie de notre clientèle
à Louis-il. Merci.
Le Président (M. Messier): Merci beaucoup. Je dois
ajourner les travaux au lundi 28 janvier, 10 heures.
(Fin de la séance à 17 h 44)