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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Dauphin): Mesdames et messieurs, le
quorum étant constaté, je déclare donc la séance de
la commission des institutions ouverte; elle a pour mandat d'entendre les
intéressés et de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
224, c'est-à-dire la Loi concernant la succession d'Alain Morin.
Me Giguère, secrétaire de la commission, est-ce qu'il y a
des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Brassard
(Lac-Saint-Jean) est remplacé par M. Chevrette (Joliette) et Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve) par M. Paré (Shefford).
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup. Alors, comme
vous pouvez le constater, nous n'avons à l'ordre du jour qu'un seul
projet de loi d'intérêt privé, comme je le mentionnais
tantôt. C'est le projet de loi 224, Loi concernant la succession d'Alain
Morin.
J'invite les requérants à prendre place, ce qui est
déjà fait. Me Savoie est assis à la table des
invités. Et, à ce stade-ci, je demanderais peut-être au
parrain du projet de loi de faire quelques remarques préliminaires, tel
qu'il est d'usage ici en cette commission.
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Ce sera
seulement quelques commentaires préliminaires et très rapides
pour remercier les gens de la commission d'avoir reçu ce projet dans
l'espoir, et j'en suis convaincu, de le passer rapidement et souhaiter la
bienvenue à Me Savoie en disant qu'étant donné que ce
projet de loi a été étudié et qu'il semblerait
qu'il n'y ait pas d'objection, tout ce que j'espère, c'est qu'on le
passe rapidement, étant donné que ça répond
à une situation tout à fait particulière. Comme c'est une
cause plutôt humanitaire, pour aider des gens qui sont dans le besoin,
tout simplement pour de l'argent qui est là. À la suite d'une
étude qui a été faite par les gens du ministère, on
se rend compte que c'est la seule avenue pour nous permettre de régler
le cas particulier de gens qui sont dans le besoin. Je ne veux pas être
plus long. Je veux tout simplement qu'on procède de façon que mon
ami de Granby puisse retourner et exécuter par la suite ce que la loi va
lui permettre de faire.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le
député de Shefford. M. le chef de l'Opposition officielle,
c'est-à-dire l'ex-chef de l'Opposition officielle?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Dauphin): On est tellement
habitués avec vous, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Dans ce titre-là, je ne dis même pas
l'ex-futur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Non, je pense que...
Le Président (M. Dauphin): Pas de remarques
préliminaires?
M. Chevrette: Non.
Le Président (M. Dauphin): Alors, pour le
bénéfice des membres de cette commission, le ministre de la
Justice m'a demandé d'agir à sa place ce matin. Alors, j'agis
comme président et comme représentant de l'exécutif. Et
comme seule remarque, le ministère de la Justice a étudié
le projet de loi privé. Les informations qu'on m'a transmises sont que
le ministère de la Justice, en principe, n'a aucune objection à
l'adoption de ce projet de loi. Par contre, nous aimerions peut-être vous
entendre quelques minutes, un petit résumé rapide de votre
requête ou de votre demande de projet de loi privé.
Auditions
M. Savoie (Jean-Marc): D'abord, je vous remercie de la
rapidité avec laquelle le projet de loi privé parvient
jusqu'à vous.
M. Chevrette: C'est grâce à l'Opposition. Des
voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: C'est tout à fait vrai. Dans une fin de
session, c'est l'Opposition qui mène. Demandez-leur!
Le Président (M. Dauphin): C'est parce que nous sommes
gentils avec l'Opposition. C'est la raison pour laquelle... Allez-y, Me
Savoie.
M. Savoie (Jean-Marc): Chose certaine, si on est ici devant vous
ce matin, c'est qu'on a épuisé, en fait, tous les moyens
juridiques disponibles aux fins de faire reconnaître le droit de madame,
en fait, à un minimum pour ses trois enfants. Pour résumer
très rapidement... Au moment du décès de M. Morin, madame
venait tout juste de divorcer et avait trois enfants à charge et
recevait une pension alimentaire, l'équivalent de ce qui est
demandé dans le projet de loi, qui est 90 $ par semaine.
Nous, après le décès, on a demandé à
la
succession, vu qu'il y avait des sommes importantes qui provenaient des
polices d'assurance, de maintenir le montant alimentaire à un montant
équivalent. La succession, elle, n'avait pas d'objection comme telle
à cette demande-là sauf qu'elle a dit: Écoute, pour se
protéger légalement, pour éviter que les mineurs, une fois
devenus majeurs, ne fassent des problèmes, on veut absolument avoir une
espèce de jugement d'une cour autorisant cette
démarche-là.
Nous sommes allés en Cour supérieure sur une demande de
pension alimentaire. Le juge de la Cour supérieure a dit:
Écoutez, je pense que ce serait contrevenir à la volonté
du testateur que d'agir de cette façon-là. C'est
éminemment sympathique sauf que, légalement parlant, ça ne
se fait pas. Sauf que nous, on a dit: II me semble que c'est un peu illogique,
vu que la dame a quand même trois enfants à charge, que les
enfants sont bénéficiaires quand même d'un montant
important, qu'il n'y ait pas un sou qui aille aux enfants jusqu'à ce
qu'ils atteignent 21 ans.
On s'est adressé à la Cour d'appel du Québec qui a
entendu notre cause et qui a évidemment trouvé encore le cas
très sympathique. La Cour d'appel avait à se prononcer, je pense,
sur un beau principe de droit. Elle a considéré qu'en droit,
ça ne se faisait pas, encore une fois, parce que, justement, ça
contrevenait à la volonté du testateur. Cependant, sur le banc -
et c'est la raison pour laquelle je suis ici - un des trois juges de la Cour
d'appel m'a suggéré que s'ils ne pouvaient pas me donner raison,
la seule façon, - et ce serait sûrement très sympathique, -
serait de présenter un bill privé pour régler cette
situation. À la suite du jugement de la Cour d'appel, j'ai
évidemment entrepris les démarches pour présenter
ça devant vous.
En fait, ce qu'on demande dans cette loi-là, c'est très
simple. C'est d'avoir un montant alimentaire pour les trois enfants, que ce
soit rétroactif à la date où on a entrepris les
premières démarches aux fins de faire reconnaître ce
montant-là. Les exécuteurs testamentaires, là-dedans, ne
se sont jamais opposés, à aucune étape, aux
démarches qu'on faisait, parce qu'ils trouvaient ça,
évidemment, sympathique. Sauf que le seul problème qui
accrochait, c'est de savoir que s'ils donnaient de l'argent, ils pourraient se
faire poursuivre par les mineurs devenus majeurs. Et ça les
embêtait un peu. Ils disent: Écoutez, la minute qu'on a quelque
chose qui nous dit qu'on peut le faire, il n'y a pas de problème, on va
le faire.
En fait, ce qu'on vous réclame maintenant, c'est un peu quelque
chose qui a été reconnu par la nouvelle loi sur le patrimoine
familial. Il y a dans cet article-là...
M. Chevrette: ...se sont soustraits...
M. Savoie (Jean-Marc): Pardon?
M. Chevrette: II y en a qui se sont soustraits.
Le Président (M. Dauphin): M. le député de
Joliette, à l'ordre!
M. Chevrette: Excusez, vous avez raison.
M. Savoie (Jean-Marc): Dans cette nouvelle loi-là...
Ça fait partie de la même loi. Il y a un article maintenant qui
dit que, advenant un décès, l'obligation alimentaire peut
perdurer, pourvu qu'on fasse une demande dans les six mois suivant le
décès. Dans notre cas, on pensait que cette loi aurait pu
s'appliquer à nous et qu'on aurait pu marcher devant la Cour
supérieure. Malheureusement, de la façon dont elle a
été rédigée, on ne pouvait pas se prévaloir
de cette loi-là parce qu'on avait dépassé les six mois
prévus dans la loi que vous avez adoptée en juin cette
année.
Donc, je pense que le principe qu'on vous demande d'adopter dans cette
loi-là, dans ce projet de loi privé, c'est un principe que vous
avez déjà reconnu par la loi 146.
M. Chevrette: 146, amendée, 19 très
bientôt.
M. Savoie (Jean-Marc): C'est un principe que l'Assemblée
nationale a déjà approuvé et qui, je pense, est hautement
humanitaire et qui correspond bien à ce qui se vit dans la
société d'aujourd'hui. Donc, c'est à peu près ce
que je voulais vous présenter. S'il y a des questions,
évidemment, je suis prêt à y répondre.
Le Président (M. Dauphin): Merci, Me Savoie. Est-ce qu'il
y a des membres de la commission qui ont des questions à poser à
Me Savoie?
M. Chevrette: Juste par curiosité, l'âge des
enfants?
M. Savoie (Jean-Marc): Maintenant, il y en a un qui est majeur.
C'est pour ça que le projet de loi, avec l'aide des gens du
ministère de la Justice, a été modifié pour qu'il y
ait une partie des arrérages qui aiiie à l'enfant majeur. Il y en
a un qui a 19 ans, les autres 16 et 11.
M. Chevrette: O.K.
M. Benoît: Vous avez dit qu'il y avait une somme d'argent
importante qui était reçue au moment... Quelle est l'ampleur de
cette somme-là?
M. Savoie (Jean-Marc): Importante... Il faut
quand même, dans le contexte... Importante, par rapport à
ces gens-là, c'est 75 000 $.
M. Benoît: Qui est suite à une police
d'assurance-vie?
M. Savoie (Jean-Marc): Oui.
M. Benoît: Qui est le bénéficiaire, la
succession ou la dame?
M. Savoie (Jean-Marc): Les bénéficiaires, ce sont
les enfants.
M. Benoît: Ce sont les enfants qui étaient
bénéficiaires de la police d'assurance?
M. Savoie (Jean-Marc): Oui.
Le Président (M. Dauphin): Si vous me permettez, les avis,
évidemment, on a des preuves de signification au dossier. Tout est
réglé, à ce niveau-là. Puis, je pense que vous avez
également mis l'emphase tantôt sur l'impossibilité d'avoir
d'autres moyens de rencontrer l'objectif visé. C'est la raison pour
laquelle vous vous présentez à l'Assemblée nationale,
évidemment.
M. Savoie (Jean-Marc): Exactement.
Le Président (M. Dauphin): C'est un peu ce qu'un juge vous
avait conseillé, je pense, de la Cour d'appel, si j'ai bien lu?
M. Savoie (Jean-Marc): C'est ça, c'est en plein
ça.
Le Président (M. Dauphin): Juste à titre
d'information, combien peuvent rapporter les intérêts? Je
considère 90 $ par semaine, pour trois enfants, c'est quand même
assez raisonnable, très raisonnable.
M. Savoie (Jean-Marc): C'est même plus que raisonnable.
Moi, au départ...
Des voix:...
M. Savoie (Jean-Marc): ...Si vous voulez amender la loi pour
donner plus, évidemment, on n'aurait pas d'objection. C'est qu'on ne
voulait quand même pas exagérer. On s'est dit: Écoutez,
c'est le montant qui avait été fixé par un tribunal. Donc,
c'est le montant qui correspondait à la capacité de payer du
défunt au moment où il vivait. Nous, on s'est dit:
Écoutez, le juge avait analysé les besoins de madame à ce
moment-là et jugeait qu'à 90 $ par semaine, elle pouvait se
débrouiller avec ses trois enfants. Donc, les 90 $, tels
qu'indexés aujourd'hui, devraient permettre à madame d'au moins
com- bler certaines dépenses des enfants. Je comprends que ce n'est pas
un gros montant, sauf que nous, ce qu'on voulait viser, c'est d'essayer le
moins possible de toucher au capital de la succession. Actuellement, vous
voyez, depuis que la succession est ouverte, l'argent est placé et
ça rapporte des intérêts composés, parce que
ça n'a pas été dépensé d'aucune
manière depuis l'ouverture. Donc, je pense que la
rétroactivité qu'on demande ne touchera même pas au
capital, ou à peu près pas, avec les montants qu'on demande. Je
pense que même le montant de pension alimentaire va peut-être
toucher au capital, mais très légèrement.
Donc, c'est à peu près ça le but visé. On ne
veut pas enlever le capital aux enfants lorsqu'ils deviendront majeurs mais
quand même les aider financièrement entre-temps.
Le Président (M. Dauphin): D'accord. M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: Je comprends dans ça que les enfants sont
bénéficiaires en vertu de la police d'assurance. La femme est
bénéficiaire en vertu du testament. Est-ce ça?
M. Savoie (Jean-Marc): Non, non. M. Kehoe: Qui?
M. Savoie (Jean-Marc): Non, non, parce que, au moment du
décès, madame était divorcée.
M. Kehoe: Oui.
M. Savoie (Jean-Marc): Donc, ce n'est sûrement pas elle qui
était bénéficiaire du testament. Le testament donnait les
biens de la succession en parts égales entre les trois enfants.
M. Kehoe: C'est-à-dire que la seule personne qui peut,
légalement, avoir des chances de s'opposer à ça, ça
serait la femme. Est-ce qu'elle est au courant de vos démarches
aujourd'hui? Possiblement...
M. Savoie (Jean-Marc): Vous voulez dire... M. Kehoe:
L'ex-femme.
M. Savoie (Jean-Marc): L'ex-femme, c'est celle que je
représente.
Une voix: C'est elle qui fait la demande.
M. Savoie (Jean-Marc): C'est elle qui fait la demande.
M. Kehoe: C'est elle qui fait la demande, O.K.
M. Savoie (Jean-Marc): Et le défunt avait une conjointe de
fait qui vivait avec lui, au moment du décès. Et la conjointe de
fait est une des deux exécutrices testamentaires qui ne s'opposent pas
à ce que les enfants touchent...
M. Kehoe: Personne ne s'oppose? M. Savoie (Jean-Marc):
Non. Une voix: C'est le bonheur parfait.
Le Président (M. Dauphin): Est-ce qu'il y a d'autres
membres de la commission qui aimeraient questionner Me Savoie? Non? Juste avant
d'appeler l'article 1, le leader parlementaire de l'Opposition disait
tantôt qu'il avait concouru, effectivement... Je tiens à dire
aussi que le ministre de la Justice avait demandé aux légistes du
ministère de la Justice d'apporter une solution rapide, étant
donné le caractère humain et dramatique.
Étude détaillée
Cela étant dit, j'appelle maintenant l'article 1 du projet de
loi. L'article 1, adopté.
Juste avant, il faudrait adopter le préambule. Est-ce que le
préambule du projet de loi est adopté?
M. Chevrette: Oui, c'est ce qui explique pourquoi l'article 1
vient.
Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle
maintenant... C'est une question de forme, M. le député de
Joliette.
J'appelle maintenant l'article 2.
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): Adopté. J'appelle
maintenant l'article 3.
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): J'appelle l'article 4?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): J'appelle l'article 5?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): J'appelle l'article 6?
M. Chevrette: À l'article 6, est-ce que vous mettez la
date d'aujourd'hui? Parce que c'est marqué: "date à être
incluse".
Une voix: C'est quand c'est signé par le
Iieutenant-gouverneur.
M. Chevrette: Ah, c'est la sanction. Bon, parfait,
adopté.
Le Président (M. Dauphin): L'article 6 est adopté.
Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): Est-ce que le projet de loi
dans son ensemble est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Dauphin): Alors, Me Savoie, on vous
remercie de votre intervention. Je remercie les membres de la commission, son
personnel et les légistes du ministère de la Justice. Nous
ajournons nos travaux sine die, étant donné que notre mandat est
accompli.
M. Savoie (Jean-Marc): Je tiens à remercier les gens de la
commission et, comme je le soulignais aussi, je tiens à remercier les
avocats du ministère de la Justice qui ont donné une très
bonne collaboration dans l'amélioration du projet de loi, afin de vous
le présenter.
Le Président (M. Dauphin): C'est leur principale
caractéristique, d'ailleurs, Me Savoie. Merci beaucoup.
M. Savoie (Jean-Marc): Merci.
Le Président (M. Dauphin): Bonne fin de
journée.
(Fin de la séance à 10 h 24)