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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Tuesday, March 24, 1987 - Vol. 29 N° 46

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi 104 - Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse


Journal des débats

 

(Quinze heures quinze minutes)

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des institutions entreprend ses travaux. Je rappelle notre mandat: procéder à une consultation générale et publique sur le projet de loi 104, Loi concernant le Conseil permanent de la jeunesse.

Nous en sommes à la 8e ou 9e journée d'audition de groupes intéressés et cette journée sera la dernière. Je demanderais à la secrétaire de bien vouloir annoncer les remplacements.

La Secrétaire: M. Després (Limoilou) est remplacé par M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Johnson (Anjou) par Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Kehoe (Chapleau) par M. Hamel (Sherbrooke), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Vallières (Richmond) par M. Thérien (Rousseau).

Organisation des travaux

Le Président (M, Filion): Notre ordre du jour pour aujourd'hui est le suivant. Nous avons déjà devant nous les représentants du Regroupement des maisons de jeunes du Québec; ensuite, nous entendrons le qroupe Mauve-Rose-Vert Inc. Enfin, à 17 heures, nous recevrons le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse.

Je remarque que les représentants du Regroupement des maisons de jeunes sont déjà parmi nous. Pour les fins du Journal des débats autant que pour le bénéfice des parlementaires, je demanderais à ces personnes de bien vouloir s'identifier.

Auditions

Regroupement des maisons de jeunes du Québec

M. Papin (Denis): Merci, M. le Président. Tout d'abord je voudrais identifier, à ma droite, M. Germain Gagné, travailleur à la Maison des jeunes de Rimouski et, à ma gauche, M. Régimbald, travailleur à la Maison des jeunes de Roxboro. En ce qui me concerne, je m'appelle Denis Papin, je suis coordonnateur au Regroupement des maisons de jeunes du Québec.

Le Président (M. Filion): D'accord, je vous remercie M. Papin et je vous invite à présenter votre mémoire.

M. Papin: Merci. Si vous le permettez, au préalable, on voudrait remercier la commission de bien vouloir nous entendre. On sait que le document qu'on vous a remis, qui n'est pas en tant que tel un mémoire mais plutôt un document qui fait état d'une réflexion et de réactions à l'intérieur du Mouvement des maisons de jeunes concernant le Conseil permanent de la jeunesse, est arrivé dans les dernières minutes, la semaine dernière. Tout d'abord on voudrait quand même présenter un peu le Regroupement des maisons de jeunes dans ce qu'il est, dans ce qu'il représente et dans ses aspirations pour passer, dans un second temps, au document de réflexion.

Pour aller brièvement, au niveau du Regroupement des maisons de jeunes, disons qu'il a une existence léqale depuis 1980. Il a été fondé par la demi-douzaine de maisons de jeunes existant à l'époque et qui s'est donné trois grands axes de travail.

Le premier axe, vous le comprendrez assez rapidement, c'est bien sûr le financement. On peut le diviser en deux, c'est-à-dire la consolidation des maisons de jeunes existantes, mais aussi le développement des maisons de jeunes là où le besoin s'en fait sentir. Dans l'idée des initiateurs et des promoteurs des maisons de jeunes, dès le départ, si l'idée d'une maison de jeunes était bonne à Rimouski, elle devait l'être aussi à Chicoutimi, à Rôuyn-Noranda et cela a été un plan sur lequel on a continuellement oeuvré.

L'autre étape, c'est de permettre l'échange de réflexions entre les différentes maisons de jeunes. C'est le volet qui est devenu, avec le temps, ce qu'on appelle chez nous le volet formation. Le regroupement est devenu, avec les années aussi, un agent de formation auprès des maisons de jeunes et un agent aussi qui permet l'échange de réflexions entre les maisons des différentes régions.

Et, l'autre volet, c'est un peu ce qu'on fait ici aujourd'hui, c'est la représentation, soit permettre à une réalité et aussi à une perception de la réalité jeunesse, qui est différente mais non moins valable pour autant, d'avoir un écho et un rayonnement un peu plus large que ce qu'elle pourrait avoir si les maisons de jeunes demeuraient

isolées chacune dans leur milieu.

C'est difficile aussi de parler du regroupement des maisons de jeunes sans parler des maisons de jeunes. Quelques mots aussi pour situer le projet "maisons de jeunes" tel que le regroupement en est promoteur.

Avant d'embarquer, j'aimerais quand même préciser, concernant la représentativité du regroupement, que ce dernier est composé, à l'heure actuelle, de 80 maisons de jeunes, membres en règle, éparpillées aux quatre coins du Québec. Le regroupement n'est pas non plus un syndicat de maisons de jeunes, c'est un promoteur d'un projet, d'une conception de ce que doit et de ce qu'est une maison de jeunes.

Ce projet, on peut le décrire sous plusieurs aspects. Premièrement, une maison de jeunes c'est, bien sûr, un lieu physique, un lieu de rencontre pour des adolescents où on retrouve beaucoup plus que cela. On y retrouve, particulièrement, un effort de permettre aux jeunes de se prendre en charge è travers différents projets. On parle chez nous de valorisation, du pouvoir du jeune à l'intérieur de son environnement. On parle d'une notion de prévention dont on ne parle plus tellement aujourd'hui. On parle d'une notion de prévention qui ne se résume pas à une présomption de culpabilité par rapport aux jeunes, on parle d'une présomption de prévention qui ne se résume pas à la répression par rapport aux jeunes, mais on parle d'une prévention qui est mise, d'abord et avant tout, sur les pouvoirs des jeunes de modifier un environnement qui ne leur donne pas nécessairement toujours des outils adéquats de développement.

Il y a aussi un volet qui se situe au niveau des grands axes d'animation, toute cette philosophie derrière la prévention; il y a une phrase qui la résume assez bien quand on dit que, chez nous, l'animation doit permettre à des jeunes d'accéder à un statut de citoyen critique, actif et responsable à l'intérieur de la communauté.

Je pense que derrière cet énoncé, on voit clairement que les maisons de jeunes s'inscrivent dans un grand projet de société démocratique.

Si vous me permettez maintenant, je passerai au document en tant que tel. Comme je le disais tantôt, ce n'est pas un mémoire, c'est un état de réflexion, c'est un état des préoccupations qui existent à l'intérieur des maisons de jeunes actuellement. Le document s'appelle d'ailleurs "6 remarques à propos du Conseil permanent de la jeunesse". Si vous le permettez, on va le reprendre: 1, 2, 3, 4, 5 et 6, encore là, brièvement.

La première remarque est intitulée "Pour se situer". Pour se situer, c'est pour donner un écho un peu de la première réaction par rapport au Conseil permanent de la jeunesse. Dans un premier temps, effectivement, comme beaucoup d'organismes, on peut se sentir attiré par l'idée d'un Conseil permanent de la jeunesse, une structure où les jeunes auraient une place plus inscrite, plus formalisée, d'où un outil supplémentaire. Par contre, quand on observe la réaction qui a été suscitée par le dépôt du projet de loi 104, par la démarche du secrétariat de la jeunesse qui accompagnait cela, par différents articles qu'on a pu voir, et aussi par la réflexion qui s'est enchaînée dans cela, bien souvent, au sein des maisons de jeunes, cela a provoqué énormément de réserve et énormément même de tiédeur par rapport au projet lui-même.

Tout d'abord la première raison, j'y reviendrai un peu plus loin, c'est que cela est bien difficile pour nous de parler d'un organisme visionnaire de l'avenir quand, dans le fond, ce qu'on aimerait c'est peut-être que les gens s'attachent un peu plus à notre présent à nous. Notre présent, qui est composé de toutes sortes d'embûches, de toutes sortes de difficultés, qui constitue à notre sens un véritable anacronisme en 1987 et que les maisons de jeunes en soient encore rendues à ce point...

L'autre raison, celle qui nous arrête par rapport à l'élan qu'on a spontanément d'acquiescer et d'embarquer par rapport à un projet semblahle. Au bout du compte, quand on regarde les problèmes d'adéquation entre certains projets de loi, entre certaines politiques et l'espèce de mouvement jeunesse, l'espèce de volonté de jeunes, on est convaincu que ce problème n'est pas tellement parce que les jeunes ont des problèmes d'expression, parce que les jeunes ont des problèmes de réflexion, mais c'est plutôt que l'appareil gouvernemental bien souvent se refuse à faire certains choix. On donne un exemple très concret par rapport à cela. On se réfère au forum jeunesse de Compton organisé en 1985 par le Secrétariat d'État à la jeunesse au niveau fédéral, où il y avait un document qui contenait un véritable projet de société, et le terme est tout à fait approprié. On y passait au crible différentes mesures, différentes législations. On y considérait les juridictions provinciales et les juridictions fédérales. Finalement, notre classe politique fédérale par rapport â ce projet a carrément reculé et a annulé le forum pancanadien qui était prévu par rapport à cela. Donc, quand on dit: Et le Conseil permanent de la jeunesse dans sa conception même véhicule cette idée qu'il faut permettre aux jeunes de s'exprimer. D'ailleurs, dans les documents du secrétariat, on dit: Donner une voie forte et crédible aux jeunes, comme si elle ne l'était pas actuellement. On dit: On ne vient pas de mettre le doigt sur le bobo; je pense qu'il faut, à un moment donné, que la classe politique se regarde et dise: Est-ce que nous, par rapport

à cela, avons véritablement été sensibles à ce qui nous était amené?

Enfin, un troisième point, toujours dans la première remarque, ce sont des structures consultatives, c'est du partenariat, c'est tout cela, on en demande depuis longtemps. On en demande depuis longtemps. On parle en particulier de notre exemple au ministère de la Santé et des Services sociaux, cela ne nous est pas accordé. On fait allusion à des difficultés de retour d'appels au cabinet. On fait allusion à ces difficultés. On a une lettre de refus de la ministre de nous rencontrer. On sait qu'elle a rencontré des organismes jeunesse à Drummondville, qu'elle leur a parlé du Conseil permanent de la jeunesse comme étant peut-être un espace où on pourrait discuter du financement des organismes jeunesse. Quand on voit tout cela, finalement, on a une réaction. On dit: On en demande avec les responsables politiques, ils ne nous les accordent pas, mais ils nous accordent quelque chose à l'extérieur. On a une réserve. En bout de ligne, on finit la première remarque en disant que, finalement, si on croit ou non au Conseil permanent de la jeunesse, ce n'est pas vraiment important, ce qu'on sait, c'est qu'il va y en avoir un.

À la deuxième remarque, on revient sur un des éléments, on l'appelle "La charrue avant les boeufs". Bien sûr, encore là, c'est sur le financement des organismes jeunesse. On attire l'attention ici des commissaires et des autres personnes qui seront, on l'espère, appelés à consulter le document sur un aspect important, quand on parle des organismes jeunesse et des associations. C'est justement cet aspect associatif. C'est justement cet aspect de la légitimité de représentation des organismes de jeunes. Que l'on ait un membership. Que l'on ait une crédibilité dans le milieu. Que l'on ait une assise. Que l'on ait une légitimité dans cela. Si le gouvernement est vraiment soucieux de l'expression de sa population, il doit nous assister, dans cela. Il doit y avoir une ouverture, qu'on sente concrètement en termes de financement, d'aide et d'écoute des organismes jeunesse; ce qui n'est pas nécessairement ce que l'on sent tout le temps. En ce sens-là, on dit à un moment donné: Cette question du soutien financier aux organismes jeunesse nous apparaît indissociable et même préalable à la démarche qui nous intéresse actuellement. Sinon, comment accorder une crédibilité à la mise sur pied d'une structure voulant favoriser l'expression des jeunes, si on coupe les jambes aux associations d'où cette expression peut émaner? Je pense que la question est très actuelle au moment où nos budgets viennent à échéance le 31 mars. Il y a là une question très importante à savoir comment donner une crédibilité à ce projet. On fait cette remarque. Que ce soit pour les handicapés, que ce soit pour les femmes ou pour les personnes âgées, le discours de ces groupes s'est toujours développé à l'intérieur des associations. Ce n'est pas dans les "hot lines" que ces discours se développent. C'est à l'intérieur des associations en fonction de l'ancrage que ces groupes ont dans le milieu. Je pense donc qu'il y a une démarche, une attention particulière à apporter par rapport aux groupes qui sont là.

Je vais passer à la troisième remarque, si vous le permettez: la question de la représentativité. Je pense que vous avez eu plusieurs commentaires en ce qui concerne la représentativité, comment on pourrait la déterminer sur la base des secteurs, sur la base des associations, sur la base des organismes. Effectivement, il y a plein de questions que les gens soulèvent et brassent à droite et à gauche à l'intérieur du mouvement des maisons de jeunes. Ce qu'on voudrait vous faire remarquer, par contre, c'est qu'il n'y a aucune de ces possibilités qui sont inscrites formellement à l'intérieur du projet de loi, tel qu'il nous est présenté actuellement. Les seuls moments où l'on en parle, c'est à l'article 19 et aussi, très légèrement, à l'article 20. À l'article 19, le législateur a pensé inventer un système où, finalement, une personne devrait avoir une reconnaissance d'au moins quatre secteurs différents pour avoir celle du ministre responsable. Nous nous questionnons fortement sur cela. En quoi quelqu'un qui a une expertise relativement aux maisons de jeunes doit quémander une expertise de sa reconnaissance auprès de personnes, d'associations étudiantes? À ce sujet, nous disons qu'on devrait demander aux personnes, si on cherche une représentativité par secteur, d'être représentatives d'un secteur. C'est alors qu'on dit: Nous craignons qu'à chercher des gens représentatifs en tout, on trouvera des qens représentatifs en rien. Je pense qu'il serait juste et raisonnable d'aller demander à chaque personne d'apporter son expertise. Même dans le cas où une personne aurait une reconnaissance ou un extrait de procès-verbal de quatre secteurs, elle aurait quand même une dominance d'un de ces quatre secteurs. Fort probablement, elle aurait fait ses armes ou son expérience dans un de ces secteurs. À ce moment-là, on reporte l'équilibre sur les épaules de chacun des candidats tandis que, pour nous, on devrait chercher en termes de représentativité générale du conseil, en termes d'équilibre dans les postes disponibles au conseil, au lieu d'aller chercher cet équilibre dans chacun des individus, ce qui nous semble à peu près impossible.

La quatrième remarque, c'est la question de la consultation en tant que telle. C'est bien sûr que le Regroupement des maisons de jeunes ne s'est pas véritablement senti consulté par rapport au projet de loi 104 cet hiver ou cet automne, et surtout par

rapport au Conseil permanent de la jeunesse. Par rapport au projet de loi 104, oui, mais par rapport au Conseil permanent de la jeunesse, pas vraiment, dans le sens où on ne nous demande pas si on doit, oui ou non, avoir un Conseil permanent de la jeunesse? On nous demande: Comment le souhaiterîez-vous, étant donné qu'il y en a un? Dans ce sens-là, c'est nous mettre devant une solution et vouloir l'aménager comme cela; tandis que, pour nous, la consultation aurait été de remettre la question du projet de loi sur le tapis, de remettre la question du conseil permanent sur le tapis et de faire une consultation sur la base de cette réponse.

On s'attarde aussi à un document qui a été produit par le module de recherche du Secrétariat à la jeunesse. C'est un document qui a soulevé à plusieurs moments et à plusieurs endroits de vives réactions à l'intérieur des maisons de jeunes, particulièrement au conseil d'administration du Regroupement des maisons de jeunes. Ce qui nous blessait dans ce document, c'était la facilité que le Secrétariat à la jeunesse avait de parler au nom de tous et chacun. Quand on nous dit: "La présence d'un organisme visionnaire de l'avenir est fort attendu par les organismes jeunesse", on trouve cela charrié un peu. On trouve qu'on n'a pas encore parlé et qu'on parle en notre nom à ce moment-là. Quand on dit: "Enfin, nul ne doute qu'une telle structure réponde à des besoins exprimés par la jeunesse", là encore, on trouve qu'on n'a rien dit par rapport à ce conseil permanent: "Nul ne doute." Donc, ce n'est pas cela. Il y a aussi d'autres moments. Il y en a un qu'on peut souligner à votre attention et c'est une question qu'on pose aussi en même temps: Les organismes jeunesse sont des associations dont le champ d'activité est exclusivement local ou régional, est-ce que cela veut dire que tous les organismes provinciaux sont exclus en tant qu'organismes jeunesse? Je pense que c'est une question importante à laquelle on doit répondre clairement à un moment donné. (15 h 30)

Ce qui nous a le plus choqués, c'est la description que l'on fait des jeunes. On dit: "L'époque actuelle leur a forgé des traits de caractère qui les distinguent... pas de discours: de l'action; pas de mots: de l'image, du son." Je pense que c'est réduire la réalité des jeunes à quelque chose d'inacceptable, c'est séparer la pensée de l'action, c'est finalement une division des classes qui, telle que mentionnée, est socialement dangereuse.

Enfin, on voudrait terminer cette quatrième partie en disant que toute la démarche et le rôle que le Secrétariat à la jeunesse a joué dans la diffusion des documents de propagande - car on les qualifie ainsi - relatifs au Conseil permanent de la jeunesse nous apparaissent tout à fait déplacés. Quand, dans une des lettres qu'on a adressées au commissaire, on parlait de réaction négative face au Conseil permanent de la jeunesse à la suite de pressions, elle provenait en grande partie de là. Cela n'a pas aidé du tout tes maisons de jeunes à faire une démarche saine avec un minimum de distance des appareils gouvernementaux.

La cinquième remarque concerne la question de l'attrait du Conseil permanent de la jeunesse. Avant de passer à l'attrait en tant que tel, on apporterait deux ou trois clarifications. La première, contrairement à ce qui est encore dit dans ces documents, le Conseil permanent de la jeunesse ne sera jamais notre porte-parole. Le Conseil permanent de la jeunesse devra porter sa parole et nous devrons porter la nôtre. Je pense qu'il faut être clair à ce sujet. C'est notre ancrage par rapport à la population qui se refuse de permettre à un organisme créé par l'appareil gouvernemental de jouer le rôle de porte-parole dans un réseau associatif. Je pense que c'est rêver. Pour nous, c'est très clair. Le conseil devra porter sa parole, et, nous porterons la nôtre.

Le conseil ne sera pas non plus notre interlocuteur privilégié par rapport à l'appareil gouvernemental. On va continuer, comme on le fait depuis 1980, à s'adresser, premièrement, aux ministres et aux députés qui ont été élus par la population. On respecte le système électoral et on respecte la détermination des ministres. C'est à eux qu'on s'adresse et on continuera de s'adresser à eux.

Ce qu'on dit relativement au conseil permanent et ce qui nous intéresse quelque part dans tout ce projet, c'est le caractère... c'est que, quelque part, le conseil reconnaît la nécessité d'une approche politique - car c'est une structure politique - pour apporter certaines réponses aux problèmes des jeunes. Cela nous apparaît une avenue intéressante.

Ce qu'on soulève immédiatement par rapport à cela, c'est qu'il ne faut pas chercher à dépolitiser le Conseil permanent de la jeunesse, tel que nous l'avons entendu lors de certaines rencontres régionales, mais il faut chercher à le politiser davantage. Expliquons-nous à cet égard. Il faut permettre à ce conseil de promouvoir des choix qui s'inscrivent dans un projet de société valorisant pour les jeunes. C'est un geste politique et on n'a pas à se conter des peurs ou à diminuer ou à dévaloriser cet aspect.

Une sixième remarque. À partir du même pied, on pose finalement, par cette remarque, la question qui nous semble assez importante relativement au projet de loi, car il existe une ambiguïté. Le conseil permanent prend forme un peu comme si on voulait lui donner la légitimité d'un

regroupement d'organismes jeunesse, tandis qu'il n'en est pas un. On se dit que, si le gouvernement veut créer un groupe sélect de jeunes, qu'il veut les nommer comme cela un après l'autre, qu'il le fasse. Il a le droit de le faire. Qu'il le fasse. On jugera l'arbre à ses fruits, mais qu'il te fasse. Qu'on ne procède pas à des cueillettes d'extraits de procès-verbaux; qu'on ne demande pas à des organismes de produire des choix et des choses dans le genre, si, en fin de compte, c'est le ministre qui décide. Que le ministre décide et qu'il fasse finalement ses choses "comme une grande personne" - entre guillemets.

Maintenant, si c'est le contraire qu'il veut, qu'il nous en reconnaisse les moyens et la capacité et qu'il nous donne un cadre pour l'actualiser. C'est finalement là-dessus qu'on se permet de conclure que, dans toutes ces discussions, il ne faut jamais perdre de vue que, lorsqu'on parle de structures et lorsqu'on parle au niveau où on parle actuellement et dans l'espace dans lequel nous sommes actuellement, pour l'adolescente qui va voir son docteur car elle se pense enceinte, le plus important pour elle, c'est de savoir si le "doc" va appeler sa mère ou son père ensuite. Ce qui est important pour un jeune au moment où il s'apprête à entrer sur le marché du travail, c'est ce à quoi il peut s'attendre du marché du travail. Il y a la question de la discrimination sur la base de l'âge et il y a la question de la qualité de vie en milieu scolaire. C'est tout cet aspect qu'il faut conserver. On l'adresse ici comme on l'adresse dans nos milieux ou comme on l'adresse à plein de personnes: une approche qui privilégie le fait de regarder les choses sous l'angle des jeunes en premier Heu. Je vous remercie.

Le Président (M. Filion): Je voudrais vous remercier, M. Papin, et, en même temps, vous féliciter autant pour la qualité du mémoire que vous avez déposé à cette commission que pour l'excellence de la présentation verbale que vous venez d'en faire.

Donc, tel qu'entendu, selon nos règles, le temps qui est maintenant à notre disposition est partagé à part égale entre les représentants du groupe ministériel et ceux du groupe de l'Opposition. D'entrée de jeu, je laisse la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Merci, M. le Président. M. Gagné, M. Régimbald, M. Papin, je vous souhaite la bienvenue. Au nom de ma formation politique, je voudrais vous remercier pour avoir participé à la commission et pour l'excellence de votre mémoire. Cependant, il est bien évident que j'aurais préféré qu'il soit peut-être plus favorable au Conseil permanent de la jeunesse. C'est quand même te jeu de la démocratie. Vous avez essayé de démontrer que ce n'était peut-être pas une urgence quant à vos préoccupations, en tout cas.

D'entrée de jeu, le fait que je reproche à votre mémoire, c'est d'avoir manifesté certaines craintes quant à vos priorités et à vos préoccupations, comme je le mentionnais. Là où je suis un peu moins d'accord, c'est quand vous dites: Bon, le Conseil permanent de la jeunesse va être là. Dans cette optique, j'aurais préféré une vision beaucoup plus optimiste dans le sens où vous auriez pu faire des recommandations pour bonifier le projet de loi. Vous parliez de représentativité tantôt. Vous sembliez être en désaccord. De quelle façon pourrait-on faire cela? Les moins de 18 ans, peut-être, les hommes, les femmes, les organismes et le reste et le reste... J'aurais aimé vous entendre dire ce que l'on pourrait mettre dans le projet de loi pour justifier vos propos.

M. Papin: II est vrai qu'à l'intérieur de nos structures, on a commencé une démarche. On doit avouer que faire un travail de présentation d'un texte de loi qui nous semblerait convenable, on n'en a pas les moyens. D'accord? La situation actuelle par rapport aux maisons de jeunes... On n'a pas les moyens de travailler sur un texte de loi. Le gars de Bell Canada est en train d'enlever le téléphone dans le poteau. Je pense que c'est une donnée fondamentale par rapport aux maisons de jeunes, on n'a pas les moyens de faire "la job" du gouvernement là-dessus. Par contre, je suis d'accord avec vous quand vous dites que ce n'est pas clair, quels sont les changements qu'on souhaiterait et tout cela. Mais, je voudrais attirer votre attention, et vous allez très bien le sentir dans tout le texte, sur ce qui se dégage dans et entre ces lignes. Je pense que quelqu'un qui a une certaine habileté par rapport à un texte de loi voit très bien où on veut en venir, en termes de représentativité, de pouvoirs du ministre responsable ou de choix à faire au préalable par rapport à cela. C'est sûr, on n'a pas les ressources pour le faire en concertation avec nos membres. Il y a 80 maisons de jeunes à consulter sur un territoire comme le Québec. On n'a pas les ressources pour le faire en concertation avec nos membres comme tels. À un moment donné, on s'est dit: Passons la réaction et donnons-la aux commissaires qui, eux, la recevront et, ensuite, la géreront. Si vous nous demandez de réécrire le texte de loi, on ne peut pas. On va faire fonctionner la maison de jeunes avant.

M. Farrah: Non, mais, M. le Président, je veux vous dire que si on prend la peine de tenir une commission parlementaire, ce n'est pas juste "pour la frime" - entre guillemets - et pour démontrer qu'on peut

consulter, mais qu'en fin de compte tout est "paqueté" à l'avance. C'est bel et bien pour pouvoir bonifier le projet de loi, pour qu'il ait une retombée plus importante chez les jeunes. Je pense qu'à ce sujet, le ministre a confirmé à maintes reprises, à la suite de propos tenus pas d'autres groupes - par exemple, une polyvalente de Sherbrooke, dont un jeune de peut-être douze ou treize ans qui est venu ici et qui se préoccupait à savoir comment il serait représenté - qu'il faudra s'attarder là-dessus pour justement essayer de trouver le mécanisme afin que ces gens soient représentés. C'est peut-être une vision plus optimiste que celle de votre mémoire, quoique ce soit quand même légitime de votre part, j'en suis conscient. Qu'est-ce que je peux constater sur les maisons des jeunes? Il y a quand même des représentants de maisons de jeunes ou de regroupements régionaux qui sont venus nous voir. Je pense qu'ils se sont servi de cette tribune pour manifester plus qu'autre chose ou peut-être plus pour expliquer leur situation que, en fin de compte, aider à bonifier le projet de loi. Ce n'est pas pour autant le but de cette commission. Cela peut être légitime de votre part, je vous le répète. En tout cas, pour ma part - c'est personnel, je ne veux pas relier les membres de la commission à cela - c'est plutôt pour dénoncer la situation que pour aider à bonifier le projet de loi. j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus. Si je fais un lien avec les autres organismes, en ce qui concerne les représentants des maisons de jeunes qui sont venus nous voir...

M. Gagné (Germain): On n'est pas venu ici pour valoriser ni pour détruire. Je pense que si on prend connaissance des six remarques - comme on l'a expliqué, ce n'est pas un mémoire qu'on a déposé, mais six remarques - il y a beaucoup de critiques constructives dans ce document. Ce sont des éléments de réflexion. C'est vrai qu'on ne vous donne pas des pistes de solution toutes faites, forgées, démocratiques: orientez-vous ainsi, on aimerait mieux. Par contre, on considère qu'il y a beaucoup d'éléments dont on doit tenir compte et, à notre avis, dont on n'a pas tenu compte jusqu'à ce jour. Donc, on ne vient pas ici dans le but de manifester, on vient ici pour dire que le conseil permanent, pour nous, dans la réalité et, sans être optimistes, on essaie d'être réalistes par rapport aussi à ce qu'on vit comme maisons de jeunes... pour apporter le message de 80 maisons de jeunes qui ont manifesté des craintes et des remarques par rapport à la venue d'un Conseil permanent de la jeunesse. Il y a peut-être des éléments qu'on n'a pas dit tout à l'heure, mais qui sont écrits dans le mémoire, des choses comme: Quelle est la représentativité des femmes? Je pense que c'est constructif des éléments semblables.

On ne vous dit pas: Mettez six femmes, cinq hommes; mais ce sont des éléments sur lesquels, par rapport au projet de loi, on n'a pas été consultés.

M. Farrah: Au cours de votre présentation, vous dites que la majorité des regroupements de jeunes ne semble pas être d'accord, en tout cas, ce n'est peut-être pas la priorité pour elle, la création du Conseil permanent de la jeunesse.

Une voix: ...

Une voix: C'est cela.

M. Farrah: Je veux vous dire, à la lumière des mémoires qu'on a reçus ici, que c'est quand même une bonne majorité d'entre eux qui est relativement favorable à ta création du Conseil permanent de la jeunesse, à la loi 104; d'autre part, c'était quand même une promesse au cours de la campagne électorale. En faisant abstraction de cela, si les jeunes étalent venus nous dire, parce que les jeunes savaient que cette chose s'en venait, par une manifestation, que cela ne valait pas la peine, je pense qu'on en aurait fait notre deuil; le ministre m'en faisait part tantôt avec raison et justesse.

Mais, honnêtement, on n'a reçu aucune revendication à l'effet de ne .pas concrétiser cette chose; alors, je ne pense pas qu'il y ait lieu de croire que les jeunes sont, nécessairement, contre cela et que, pour eux, ce n'est pas important.

M. Papin: Ou je me suis mal exprimé, ou vous m'avez mal compris. Ce n'est pas du tout ce que voulait révéler notre représentation ici. Ce qu'on disait par contre, c'est que si sur le fond, effectivement, cela soulève des réactions diverses et à différents degrés un peu partout, il y a quand même des réserves par rapport à la démarche, mais nulle part dans le document on ne vous dit de mettre cela à la poubelle.

Maintenant, si on ne saute pas comme des gazelles derrière, en train d'applaudir, c'est peut-être décevant; si on n'applaudit pas en choeur derrière cela, c'est peut-être décevant à certains points de vue, mais nulle part dans le texte, on ne jette le projet à la poubelle. Par contre, on passe à une série de commentaires et on vous en fait part. C'est la contribution qu'on peut apporter, honnêtement. Si vous la jugez insuffisante ou... je le regrette.

M. Farrah: Mais je ne veux pas mal vous interpréter non plus. Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n'avez pas dites. C'est la perception que j'ai eue lors de votre présentation en disant: Cela n'était peut-être pas voulu de la part des

jeunes, nécessairement... mais, passons, je vous laisse le bénéfice du doute. Je ne suis pas ici pour lancer un débat et m'obstiner, au contraire; on est ici pour bonifier.

À la page 2 de votre document, vous dites au 3e paragraphe: Enfin, il faut savoir que le Regroupement des maisons de jeunes du Québec et ses membres réclament, depuis belle lurette, la création de structures consultatives entre le MSSS et les maisons de jeunes. Alors, pourriez-vous me dire quand ces revendications ont été faites?

M. Papin: En 1978.

M. Farrah: En 1978, et pourquoi?

M. Papin: Je pense que c'est une question de démocratie. Je pense que les maisons de jeunes ont un savoir et une expertise concernant le dossier des maisons de jeunes, les besoins par rapport à cela, ce que l'on retrouve juste, aussi, qui interviennent dans le processus de décisions au ministère de la Santé et des Services sociaux, ne pas se substituer au ministère en tant que tel mais, qu'à travers une participation à des structures établies et reconnues les maisons de jeunes puissent se faire entendre. Je pense que c'est au niveau d'une gestion plus démocratique du dossier.

M. Farrah: Alors, vous dites que dans le passé vous avez eu de la difficulté à vous faire entendre. Plus loin, à la page 2, 3e paragraphe vous dites: "...une brisure avec l'expérience qui a été la nôtre au cours des dernières années. C'est peut-être suffisant pour nous interpeller, mais pas encore pour nous faire revivre l'esprit du temps des fêtes."

Alors, je me demande, étant donné que le passé n'était pas très reluisant, en tout cas, au niveau des revendications, comme vous venez de le mentionner, si la création du Conseil permanent de la jeunesse ne peut pas être un outil additionnel, parce qu'on ne parle pas d'enlever les autres.

Dans le coffre à outils peut-être pour vous aider à être reconnus d'une meilleure façon. (15 h 45)

M. Papin: Écoutez, on a entendu la ministre Lavoie-Roux, à Drummondville, dire clairement à des organismes communautaires jeunesse qui l'interrogeaient sur la question des organismes communautaires jeunesse et de leur financement, que le conseil permanent serait peut-être un bon endroit pour discuter tout cela et prendre la porte de côté. Si c'est cela l'utilisation, il faudrait peut-être attendre au moins qu'il soit créé, ce conseil, pour s'en servir. Mais si c'est cela, l'utilisation, je pense que vous comprendrez que si c'est une façon de "déresponsabiliser" chacun des ministères qui ont des responsabilités à l'égard des jeunes, on n'est pas d'accord. Si, par contre, effectivement, le conseil s'inscrit dans une dynamique où il voit des organismes qui sont quelque part en train de demander des choses, qu'il est capable d'ajuster - et on en parle dans ces termes dans le document - sa vitesse de croisière à celle des organismes, c'est une autre dynamique. Mais si, par contre, les politiciens et politiciennes profitent de ce conseil pour nous envoyer sur Une voie de garage, je pense que vous comprendrez qu'on ne peut pas entériner, endosser... Donc tout dépend beaucoup du type d'utilisation que vous allez en faire.

M. Farrah: J'en conviens, sauf que je pense qu'il aété démontré très clairement à la commission, ici, à maintes reprises, que ce n'est pas la volonté des membres de la commission et du gouvernement... En tout cas, je parle pour moi, personnellement, et je pense que de ce côté, vous pouvez avoir confiance. Sauf que, comme vous le dites si bien, peut-être qu'il faudrait attendre de voir le Conseil permanent de la jeunesse fonctionner, lui donner la chance de voir le jour et de fonctionner, puis le juger. En fin de compte, je peux vous le dire, personnellement, et je pense, l'ensemble de mes collègues également, que l'on met notre crédibilité là-dedans également. Si on part quelque chose juste pour "la frime" comme je dis - entre guillemets - pour démontrer qu'on fait un show aux jeunes, comme vous le disiez, et qu'en fin de compte... Voulez-vous votre document? Excusez-moi. Un instant, je vais aller vous le chercher.

M. Papin: Le show de "lipsing"?

M. Farrah: C'est ce que je veux dire. D'accord. Quelquefois, je saute au document mais, en tout cas, ce que je veux vous dire, c'est que nous mettons toutes nos énergies ià-dedans ainsi que nos convictions. À un moment donné, dans le projet de loi, il est dit que c'est le ministre qui va demander des avis au conseil et, avec des représentations de plusieurs groupes qui sont venus ici, le ministre a même mentionné qu'il faudrait voir à modifier peut-être cet article pour qu'il y ait un double sens qui se crée au niveau du Conseil permanent de la jeunesse et du ministre responsable, soit qu'il y ait des avis qui soient demandés par le ministre responsable ou l'inverse également, qu'il ne soit pas manipulé, en fin de compte. Je ne sais pas si vous me suivez?

M. Papin: Très bien.

M. Farrah: Alors, en terminant, pour ma part, M. le Président, ce que je veux vous dire, c'est qu'on met toute notre confiance éqalement là-dedans nous aussi. On a une crédibilité également. Ce que je vous

demanderais, si possible, c'est peut-être de donner la chance au Conseil permanent de la jeunesse d'être créé, de voir le jour et peut-être qu'on le jugera au mérite, à ce moment-là.

M. Papin: Vous savez que cela a toujours été notre attitude. Quand le Secrétariat à la jeunesse a été mis sur pied, on lui a donné de la corde. Notre problème, c'est qu'il s'est pendu avec. À ce moment-là, on a laissé les choses aller. Je pense que le gouvernement prend une décision légitime en créant un conseil en fonction de l'histoire de son parti, des élections et de tout cela, tel que vous le mentionnez. Je pense que ce n'est pas notre genre de dénigrer quelque chose qui n'existe pas. On va laisser les gens aller et je pense que ce n'est pas notre genre non plus d'être mauvais joueurs. Par contre, je pense que vous conviendrez que par rapport à la démarche, on est plutôt bons joueurs dans le sens où on marque les réserves. Si on ne tient pas compte de ces réserves, on ne pourra pas dire qu'on ne les a pas exprimées. Si on s'en sert comme voie de garage, on ne pourra pas dire qu'on ne leur a pas exprimé cette crainte. À ce moment-là, par contre, je peux vous assurer de notre honnêteté par rapport à cela, pour l'intérêt des jeunes.

M. Farrah: Cela me sécurise beaucoup. Juste pour faire un petit parallèle avec le Secrétariat à la jeunesse dont vous venez de parler. Vous en êtes-vous servis dans le passé, du Secrétariat à la jeunesse?

M. Papin: Mon Dieu!

M. Gagné: On a eu à collaborer avec le Secrétariat à la jeunesse, peut-être principalement durant l'année internationale. Si le secrétariat s'est servi de nous ou si on s'est servi du secrétariat, je pense qu'on a collaboré dans la mesure du possible. J'aimerais aussi clarifier quelque chose. Ce n'est pas nous, en tout cas dans le document que j'ai devant moi, qui avons parlé d'un show de "lipsing". C'est justement le Secrétariat à la jeunesse qui caractérise les jeunes de cette façon, disant que ce ne sont pas des paroles qu'il faut pour les jeunes, ce ne sont pas des discours, c'est de la musique, du son, et envoie, c'est un show. C'est le Secrétariat à la jeunesse qui a caractérisé les jeunes et qui a défini les jeunes comme cela. Ce n'est pas nous qui définissons le Conseil permanent de la jeunesse dans cette volonté.

M. Farrah: Je ne veux pas vous imputer des choses qui ne sont pas les vôtres. C'est que je me souvenais d'avoir lu cela, et le show... C'est qu'en fin de compte, moi, je pense à une chose qui est peut-être "frimée" entre guillemets - à l'avance, pour démontrer qu'on fait quelque chose et que, dans le fond, on ne veut pas. Ce n'est pas la volonté du gouvernement et c'est ce que je voulais vous dire, en tout cas.

M. Gagné: Concernant aussi la chance au coureur, c'est ce que l'on dit dans ce document. Je pense que si l'on vient ici, la meilleure façon de "blaster" - entre guillemets - quelque chose, c'est de ne pas aller se prononcer en faveur ou en défaveur et, à ses premiers pas, de peut-être faire des "moves" pour "blaster". Je pense que ce n'est pas notre intérêt et ce n'est pas notre volonté. C'est, d'ailleurs, une fois de plus, ce qu'on écrit dans le document. Le Conseil permanent de la jeunesse va avoir à faire ses armes. Dans ses premiers pas, comme Denis le disait tout à l'heure, le Secrétariat à la jeunesse, on lui a laissé de la corde aussi et il s'est pendu avec. Par exemple, les travaux Jeunes volontaires, le programme a mal passé. Le Secrétariat à la jeunesse est encore perçu comme le MLCP. Je pense que cela vaut la peine de le regarder sous tous ses angles parce qu'il est quand même complet.

M. Farrah: Cela me va bien. Si vous êtes d'accord, comme vous venez de le confirmer, de laisser la chance au CPJ de voler de ses propres ailes, je pense que j'en conviens. Je peux vous assurer que le Conseil permanent de la jeunesse fonctionnera peut-être de la façon la plus autonome et ta plus indépendante possible pour être le plus efficace quant aux jeunes sur le terrain. Je pense que c'est ce qui est important. Cela va pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Messier): Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. J'ai peut-être une question d'information. J'ai eu le plaisir de rencontrer l'ensemble des groupes de la Montérégie, il y avait peut-être une dizaine de maisons de jeunes hier, mais il y a une question que j'ai oublié de leur poser. Vous êtes 80 dans le regroupement provincial sur les 120, les 40 maisons manquantes, est-ce que c'est à cause de la cotisation, un manque d'intérêt, qu'est-ce que c'est?

M. Papin: M. Messier, cela me fait plaisir de vous parler aujourd'hui. Je voudrais vous féliciter d'être le seul député présent parmi les quinze invités en Montérégie. Vous parlez des maisons manquantes, je pourrais peut-être vous demander où sont les quatorze autres députés libéraux manquants de la Montérégie qui étaient invités, où sont-ils en ce moment?

À propos des 40 maisons de jeunes qui ne sont pas dans le regroupement des maisons de jeunes, je pense qu'il y en a qui définissent le projet autrement. Je pense

qu'il y en a aussi qui sont en démarrage et qui sont dans une position où elles ne se sentent pas aptes à investir dans un niveau plus large, régional ou local. Elles s'occupent plutôt à ouvrir la maison, à tenir les murs, à avoir une certaine animation et une certaine intervention auprès des jeunes. Je pense qu'il y a toutes sortes de raisons.

Il y a aussi, à un moment donné, des maisons très éloignées avec lesquelles on a des contacts. Je pense justement à la maison de jeunes des Îles-de-la-Madeleine avec laquelle on a plusieurs contacts. Elle a participé à certaines activités, mais une participation effective serait quasi matériellement impossible. Celle de Fermont, c'est un gros problème de la faire participer, ainsi que celle de Matagami. Il y a des efforts qui se font, mais il y a ce problème. Le Québec est un territoire complexe à gérer.

Le Président (M. Messier): Vous communiquez quand même avec elles, vous leur envoyez leur mémoire, sauf que l'éloignement régional fait en sorte qu'elles ne peuvent pas participer aux délibérations.

M. Papin: II y a cet aspect par contre, c'est que le regroupement se veut une structure participative des maisons de jeunes. Ce qui explique dans le document, quand on dit: On aurait peut-être pu mettre une personne pendant 80 heures ou 100 heures sur une rédaction d'un document plus complet, mais le regroupement se veut une structure participative où les maisons sont interpellées sur l'ensemble des représentations qu'elles doivent faire.

Quand vient le temps d'interpeller ces maisons, le meilleur service à leur rendre c'est peut-être de les tenir au courant plutôt que de se promener dans la nature avec leur nom, mais sans qu'elles ne soient véritablement consultées. Donc, la participation est une condition d'adhésion au regroupement dans ce domaine.

Il y a des maisons, on pense aux plus jeunes, aux très jeunes maisons, pour lesquelles cela crée un problème. On pense aux maisons très isolées aussi. Il y en a aussi quelques-unes, on doit l'avouer, qu'on n'ira pas chercher et je pense qu'elles ne viendront pas nous chercher.

Le Président (M. Messier): Parfait. Merci beaucoup. Je vais céder la parole pour 20 minutes à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique et vous remercier d'avoir accepté de participer aux travaux de cette commission. Je dois dire qu'à l'opposé du député des

Îles-de-la-Madeleine, je pense que le choix pour les groupes de venir exprimer ici des divergences sur la nature des priorités, c'est un droit que respecte généralement la démocratie.

Si on n'avait dû entendre ici que les organismes favorables à la création du conseil permanent, on en a dénombré dix-sept. Ce qui est peu favorable avec modifications mineures, il y en a dix-sept. Pour les autres, c'était défavorable. Pour les autres encore, c'était avec des modifications telles que cela change la nature du projet de loi et possiblement cela demandait une réécriture totale du projet de loi. Juste pour dire au député des Îles-de-la-Madeleine que s'il avait fallu qu'on n'entende que ceux qui étaient favorables avec des petites modifications, on n'aurait pas passé huit jours en commission parlementaire. Je pense que c'est la neuvième journée aujourd'hui.

Je dois vous dire également que le député nous dit: Vous avez une vision pessimiste de la situation. Je dirais que vous avez peut-être une vision plus réaliste que celle du parlementaire de façon générale y incluant moi-même parce que vous vivez quotidiennement des situations qui nous sont, à quelques occasions près, assez étrangères. J'ai visité des maisons de jeunes, je suis là quelques heures. Evidemment, je vois quelques jeunes avec lesquels je parle, mais je suis loin de prétendre connaître pour autant la situation et les difficultés que vivent les jeunes.

Le député disait tout à l'heure qu'on avait surtout beaucoup de jeunes qui - et il avait raison là-dessus - avaient profité de cette tribune pour dénoncer certaines situations, pour nous tracer un portrait réaliste mais extrêmement sombre souvent de la réalité jeunesse. Je pense que c'était la place pour le faire parce que des tribunes de cette nature destinées aux jeunes, il n'y en a pas tant que cela. Il n'y en a pas tant que cela.

À présent, les jeunes, disait-il, n'ont pas demandé le retrait de ce projet de loi, alors que c'était dans le programme électoral du Parti libéral. Il faut se rappeler que dans le programme électoral du Parti libéral du Québec, cela venait en bout de liste des priorités. Les jeunes étaient en droit de s'attendre que les priorités soient traitées aussi dans cet ordre. On se rappellera que les priorités étaient l'emploi, le financement des organismes, la parité de l'aide sociale. La parité de l'aide sociale, l'emploi et ensuite le financement des organismes. Le conseil permanent venait tout à fait à la fin des priorités de ce gouvernement, de ce parti, ce qui fait que les jeunes étaient en droit de s'attendre que les priorités seraient traitées dans cet ordre.

Par ailleurs, ce qui me préoccupe et ce qui préoccupe aussi les jeunes, c'est que le

conseil n'est pas encore créé et que déjà, on évacue des problèmes en disant: Le conseil va régler cela. Je pense à la réponse que vous a faite la ministre de la Santé et des Services sociaux touchant le financement des organismes jeunesse en disant: Vous ne pensez pas que vous pourriez passer par le Conseil permanent de la jeunesse. On est en train d'étudier le projet de loi. Les maisons de jeunes attendent leur subvention. Il faut que ce soit décidé au 1er avril et déjà on réfère ces décisions au Conseil permanent de la jeunesse qui n'est pas encore créé. Je pense que l'inquiétude des gens, des jeunes en particulier, de voir que cet organisme constitue une espèce de fuite en avant, vient de trouver à tout le moins un fondement dans la réponse qui vous a été fournie.

J'aimerais poser un certain nombre de questions. D'abord, j'aimerais peut-être que vous me parliez un peu de la réalité des maisons de jeunes, de l'âge de vos clientèles. Vous avez un certain nombre d'années d'expérience. Est-ce que vous avez évalué ce que j'appellerais le taux de succès, quoiqu'on puisse difficilement parler de succès du moment où on ne sera jamais capable d'évaluer dans quelle mesure la maison de jeunes a évité à certains jeunes l'institutionnalisation, par exemple, mais en gros, est-ce que vous avez des jeunes qui reviennent, qui vous en parlent? Comment faites-vous cette évaluation?

M. Régimbald (Alain): Vous savez, habituellement, le nombre de jeunes qui fréquentent une maison de jeunes peut varier d'une région à l'autre. Encore une fois, il est question de distance et tout cela, mais si on prend le milieu urbain d'où je viens, Roxboro, c'est une quarantaine de jeunes dans une soirée. La moyenne d'âge est autour de 15-16 ans. Dans d'autres maisons, cela peut être plus jeune.

Pour ce qui est de la prévention comme telle et du taux de succès, effectivement, c'est dur à évaluer. On ne peut pas dire à la fin de l'année: J'en ai sauvé trois ou douze. C'est très difficile à évaluer. Par contre, il se développe un sentiment d'appartenance. Il se développe des liens très étroits avec ces jeunes. On vit leur quotidien, on vit avec eux autres les bons coups et les mauvais coups; on est avec eux autres. À un moment donné, justement, ce lien qui se développe permet, sans nécessairement arriver à "sauver un jeune" -entre guillemets - mais au moins à pouvoir communiquer avec lui et éviter le pire, souvent. Effectivement, c'est difficile à évaluer, par contre. On ne peut pas vraiment avoir de chiffres là-dessus. Mais il y a une chose intéressante, je remarquais justement à la Maison des jeunes de Roxboro que les jeunes qui fréquentent notre maison proviennent environ à 90 % de familles monoparentales. Et ce n'est pas par hasard. Cela répond à un besoin. Il y a des besoins précis auxquels on répond, que ce soit des besoins d'appartenance, des besoins d'identification, des besoins de communication, des besoins de valorisation; on répond à ces besoins. Au bout du compte, on peut mesurer des choses dans le quotidien, avec le temps, on peut le mesurer. Mais de là à pouvoir dire: On a un taux de succès de 90 %, comme certaines institutions le font, on ne peut pas se permettre cela. (16 heures)

Mme Blackburn: Oui.

M. Gagné: Si je peux me permettre. Bon, mesurer la prévention, d'abord les maisons de jeunes touchent les jeunes dans leur globalité. On ne touche pas les jeunes sur un volet de délinquance, sur un volet de sexualité ou simplement un volet, on touche les jeunes dans leur globalité. Les portraits sont très difficilement définissables. Alain disait que, chez lui, c'est à 90 % monoparental; chez nous, c'est très rare les jeunes dans le groupe actuel qui n'ont pas leurs deux parents et qui ne demeurent pas ensemble. Je ne sais pas ce qui fait la différence entre ces deux milieux. Une chose est certaine, c'est que l'efficacité des maisons de jeunes n'est plus à prouver et elle est encore à reconnaître, comme en 1979. Quand les maisons de jeunes ont de petites subventions et ont de petits moyens, à un moment donné, ces maisons fonctionnent avec les moyens du bord. C'est-à-dire, avec de petits salaires, avec des jeunes volontaires, avec des stages en milieu de travail, ce qui fait que la sélection des travailleurs et des travailleuses est beaucoup plus restreinte. Donc, la qualité des intervenants dans une maison de jeunes est plus difficile. On ne dit pas qu'il n'y a pas de qualité actuellement, sauf qu'on n'a pas les moyens pour nous faciliter la tâche.

En ce qui concerne la prévention, comment peut-on la mesurer? II y en a effectivement. Des fois, on passe en cour avec des jeunes, et nous, on connaît le jeune et on dit: Bon, je garantis... il y a des échanges avec le juge, etc. Qu'est-ce qui se passe à un moment donné? Dernièrement, je suis passé en cour et le juge a finalement changé son fusil d'épaule, mais le jeune s'en allait en dedans pour deux ans. Cela veut dire pour l'État, c'est 120 000 $ qui vient d'être épargné d'un coup. C'est mesurable et cela se vérifie. Quant au juge, c'est rare qu'il va dire que c'est à cause de l'animateur de la maison de jeunes. Par contre, l'animateur aussi risque de se casser la gueule en cour - excusez l'expression -c'est une chose.

Je vais vous citer un exemple qui s'est passé dernièrement à la maison des jeunes. On écoute un film: Mourir à tue-tête. C'est

une femme qui se fait violer. Le groupe de jeunes qui se tient à la maison étaient âgés de 15 à 16 ans. C'est une femme qui se fait violer et il y a un jeune au début qui lâche: Ah! elle aime cela. D'accord? Cela choque. On n'a pas passé un film de même pour passer un film. Là, il y a un souci derrière tout cela pour faire en sorte que le jeune soit plus conscient de ce qui en est. Là, le jeune, au début, lâche: Ah! elle aime ça. Qu'est-ce que veut dire ce message? Cela veut dire que peut-être que, lui, se perçoit comme homme, donc il se perçoit peut-être quelque part comme un violeur et que toutes les femmes aiment à être violées. Est-ce la réalité des femmes ou est-ce sa réalité, parce que là, il est en train de se chercher comme identité et individu aussi? Il y a eu une discussion. Il y a de l'auto-animation en ce qui a trait aux jeunes. Les jeunes changent leur fusil d'épaule et changent leur perception envers les femmes et envers eux-mêmes. C'est quoi qu'ils ont à livrer comme individus? Est-ce qu'on est en mesure de dire: Ce jeune aurait violé deux femmes ou trois femmes plus tard, ce jeune une fois devenu un homme serait incestueux? Ce sont des choses difficilement mesurables, quanti-fiables, mais vérifiables.

Mme Blackburn: Bien.

M. Papin: Poser cette question, c'est demander le prix de la vie d'un jeune. Combien cela coûte? Combien cela vaut un jeune qui apprend à communiquer? Cela tue d'avoir de la misère à dire bonjour au monde; cela tue de n'être pas capable de parler à ses parents. Il y a des gens qui en meurent. C'est la deuxième cause de décès chez les jeunes. Combien cela vaut cela? C'est un exercice auquel on se refuse. Ce qu'on dit, c'est que par rapport à ce qu'on nécessite comme ressources et même si on avait ce qu'on demandait, c'est ce dont on a besoin. On serait encore là très peu coûteux comparativement à tout ce que cela coûte au niveau institutionnel quand on attend que le jeune ait un dossier judiciaire gros comme la table pour être sûr de le rentrer en dedans. On parle de coût, ce sont des déclarations ministérielles, autour de 70 000 $ par année par jeune. On en a un point socialement et je pense que la population doit en être consciente, comme contribuable aussi. Les cheveux de mon père se dressent sur la tête quand je lui raconte cela. Un jeune coûte 70 000 $ par année pour le mettre à l'écart en centre d'accueil. À ce compte, si on fait de la démagogie, je fais de la démagogie, qu'on lui donne 20 000 $ à ce jeune et qu'on lui dise: Tu te loues un appartement et tu restes tranquille; d'accord. On vient d'épargner 50 000 $ par année à l'État. C'est cela le coût de l'institutionnalisation. C'est sur cela que le gouvernement doit se sentir interpellé. Quand on arrive avec des projets pour lesquels actuellement le gouvernement ne consent que 80 000 $ au maximum sur les 117 maisons, il n'en a que 8 sur les 117 qui ont les 80 000 $. On pose la question de la rentabilité, à savoir si cela vaut la peine, si c'est bon et tout cela. Ce qu'on fait là, a-ton d'autres alternatives actuellement? Y a-t-ii d'autres alternatives ou si on s'enfonce encore dans le système dans lequel on est? C'est un peu cela la question, la façon dont il faudrait le voir.

Mme Blackburn: Beaucoup de jeunes qui ont eu un regard assez critique sur la structure proposée demandaient un certain nombre de choses qui visaient à donner une plus grande légitimité à ce projet. Ils disaient entre autres: Cet organisme devrait avoir des pouvoirs réels, par exemple, touchant la reconnaissance et le financement des organismes communautaires jeunesse. Cet organisme ne devrait pas se substituer à la voix des jeunes, mais devrait davantage favoriser l'expression des besoins des jeunes. Ils ajoutaient également que cet organisme devait donner des services. Il faudrait qu'il prenne... Non pas qu'il s'approprie mais que cela intègre le Secrétariat à la jeunesse et qu'on donne plus de ces services en régions plutôt que de couper dans ces services. Ils recommandaient également qu'il y ait une large décentralisation, invoquant qu'on ne pouvait pas parler des jeunes de façon univoque, parce que c'est multiforme. On parle d'une définition de la jeunesse qui va de 12 à 35 ans. Vous voyez à peu près... Je résume, évidemment, les principales revendications des jeunes en disant: Si on devait se donner un organisme, c'est en gros ce qu'il devrait être en mesure de faire. Comment réagissez-vous devant...?

M. Papin: Sur les pouvoirs, Mme Blackburn, absolument contre. Par rapport aux pouvoirs, en ce qui nous concerne en termes de projet social, en termes de projet oeuvrant dans le cadre des responsabilités de la santé et des services sociaux, c'est à la ministre de la Santé et des Services sociaux à assumer ces pouvoirs et donc la responsabilité de ses gestes là-dedans. II faut s'entendre à savoir à quoi on fait référence au juste comme pouvoirs, mais nous, ce qu'on entend rebondir par en arrière, c'est une espèce de grande table où on gérerait, par exemple, certains projets qui sont actuellement gouvernementaux et certains financements de certains organismes, on est absolument contre, c'est la meilleure façon de s'entredéchirer éventuellement. Là-dessus, il y a une responsabilité que le ministre de l'Éducation doit avoir par rapport aux jeunes, de même que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le ministre de la

Justice et la ministre de la .Santé et des Services sociaux; les jeunes sont des citoyens.

On regarde à l'OPHQ. On est en train de revenir à l'autre sens et dire: On va responsabiliser chacun des ministères par rapport aux besoins des personnes handicapées. Je pense que c'est une voix à développer et que les jeunes par rapport à la situation ont aussi à interpeller chacune des sphères et à demander è chacun des ministres d'avoir et de développer une sensibilité par rapport au secteur jeunesse. Il est important de ne pas fermer l'angle par rapport à cela.

Il y a aussi la question de donner des services. Je ne vois pas très bien où on veut en venir avec la question de donner des services. Si le conseil permanent a un service à donner, ce n'est pas nécessairement en termes de services directs aux jeunes dans le sens où on peut l'entendre, nous, comme organisme communautaire. Je pense que c'est beaucoup - on le mentionnait dans le mémoire - en termes d'interpellation de l'appareil gouvernemental et du public aussi è certains moments donnés compte tenu de certains préjugés qui sont véhiculés par rapport aux jeunes.

Quant à la division par régions, on est très sceptique par rapport à un type d'approche dans le genre... On parle de division par régions et on sait que, à l'intérieur même d'une région, il y a des différences d'un coin à l'autre. Je me souviens vite du scanner qu'on veut acheter à Rouyn-Noranda, c'est rendu qu'il faut y mettre des roulettes parce qu'Amos en veut une partie, Val-d'Or, une autre et Rouyn-Noranda, une autre. Matagami se sent marginalisé par rapport à Rouyn-Noranda; il y a aussi la Gaspésie et le Bas-du-Fleuve et on peut redescendre par ville là-dedans. Ce qui est important par rapport à ce qu'on peut appeler les phénomènes régionaux, c'est de s'arranger pour que ce ne soit pas toute un gang de Montréal et de Québec. Que quelqu'un soit éventuellement du Saguenay— Lac-Saint-Jean ou qu'il soit de l'Abitibi, il est capable d'apporter, dans le cadre d'une structure comme cela, un intérêt par rapport aux problèmes propres aux régions éloignées qui se ressemblent même si elles ne sont pas toutes également les mêmes. On voit mal l'espèce de pyramide qui se divise et se divise pour aller dans chacune des régions, des sous-régions et des sous-sous-régions. Ce n'est pas le type d'approche qu'on trouverait intéressante en tant que tel parce qu'elle ne serait pas vraiment satisfaisante. Pour le Bas-du-Fleuve, la Gaspésie et la région 01, il faudrait que ce soit quelqu'un du Bas-du-Fleuve ou de la Gaspésie, ce qui ne veut pas dire qu'ils ne s'entendraient pas et ce qui ne veut pas dire que cela ne réglerait pas tous les problèmes par rapport à cela.

C'est important que ce ne soit pas uniquement montréalais. Je pense que c'est une préoccupation que ce ne soit pas Montréal, Québec ou les centres métropolitains qui accaparent cette structure.

Mme Blackburn: Pour parler des services, ce que les organismes demandent, c'est qu'il existe actuellement un service d'information et d'animation aussi, je pense bien, sur les principaux programmes gouvernementaux qui s'appelle le Secrétariat à la jeunesse. C'est davantage è ce type de services auxquels les gens faisaient allusion en disant qu'il ne faudrait pas les couper, mais qu'il faudrait peut-être les accroître.

Pour ce qui est de la décentralisation, c'est de ce type de services, entre autres, auxquels les jeunes faisaient allusion en disant: Ce dont on a besoin, ce n'est pas d'une structure centralisée, mais davantaqe quelque chose plus proche des régions et on a besoin d'un certain nombre de services. En même temps, je ne dis pas que c'est un guichet unique en matière de gestion des programmes, mais c'est au moins une porte où vous pouvez aller frapper pour avoir des informations sur les programmes existants et sur les façons d'y avoir accès. En gros, je pense bien, sans trop étirer l'interprétation que les jeunes nous ont fait de leurs besoins, qu'elle était de cette nature-là.

Pour ce qui est de la représentation, est-ce que les organismes...? Là-dessus, je les comprends un peu d'avoir mal interprété le projet de loi, car le projet de loi parle d'un collège électoral et d'une grande structure de consultation, ce qui fait que. les jeunes sont allés beaucoup plus loin et ont dit: II faudrait qu'on ait aussi des tables régionales et nationales, et que le collège soit permanent. Cela devient une structure lourde, je dois dire, et je ne suis pas sûre qu'elle soit rentable, mais c'est autre chose. Les jeunes demandent une décentralisation de ces activités, que l'expression des besoins, que l'expression de la parole des jeunes ne soit pas faite exclusivement par le biais du Conseil permanent de la jeunesse. En gros, j'essaie de revoir...

Pour ce qui est de la gestion des programmes, les jeunes nous disent: La priorité, c'est dans une politique de reconnaissance et de financement des organismes jeunesse. C'est une façon de reconnaître ce qu'il y a là-dedans. C'est une façon de s'assurer que tout autre organisme qui voudra parler au nom des jeunes ait une certaine crédibilité, car la crédibilité de ces organismes repose sur la vitalité des organismes jeunesse. C'était autour de cette approche que tournait toute la question d'une nécessaire reconnaissance et d'un financement adéquat des organismes communautaires jeunesse et des organismes jeunesse de façon générale.

M. Papin: II y a une bonne manière de s'assurer que le Conseil permanent de la jeunesse ne soit pas l'unique porte-parole. Chaque fois qu'il aura la prétention de le faire, il s'agira de le lui rappeler.

Mme Blackburn: Oui.

M. Papin: Je pense que, là-dedans, il y a une balle, une responsabilité qui revient aux organismes jeunesse. À un moment donné, il faudra le rappeler et être vigilant face à une structure semblable. On ne peut pas tout enfermer non plus dans une définition de départ et, ensuite, s'y fier et espérer qu'elle sera garante de l'ensemble de l'initiative.

Face aux craintes quant au Conseil permanent de la jeunesse, on dit que le jour où il aura même l'air de parler en notre nom, il le saura. Je pense qu'avec cela, il ne devrait pas le faire, s'il le lit et s'il le considère. S'il lit cela, qu'il ne le considère pas et qu'il le fait, ce sera une autre dynamique qui s'enclenchera, mais on aura laissé la chance au coureur à ce moment-là. Pour nous, beaucoup se jouera dans les premiers temps et, dans les premiers pas, il s'agira de ne pas s'enfarger.

Les groupes qui s'attendent à une reconnaissance de l'expertise des organismes, je pense qu'il est vrai que si vous appeliez dans l'ensemble des maisons de jeunes aujourd'hui, ils ont les yeux tournés vers la ministre, Mme Lavoie-Roux, pour savoir ce qu'elle va dire relativement aux maisons de jeunes, compte tenu du gel de l'an passé. Est-ce que cela veut dire que la dynamique qui était propre aux maisons de jeunes sera maintenant menacée? C'est là qu'elle est. Par contre, on ne regarde pas vers le Conseil permanent de la jeunesse pour apporter réponse à cette inquiétude fondamentale. C'est Mme Lavoie-Roux qui est la cible de nos regards à ce sujet. Je pense que cela va demeurer, conseil permanent ou pas conseil permanent. Au-delà de Mme Lavoie-Roux, il y a l'ensemble de la députation aussi qui siège à l'Assemblée nationale et qui a aussi son mot à dire dans tout cela et qui fait aussi l'objet de nos représentations. C'est finalement par respect pour la chose politique qu'on fait cela. (16 h 15)

Mme Blackburn: On estime à environ 850 le nombre de groupes de jeunes, d'organismes jeunesse au Québec. Il y a 117 maisons de jeunes. Il y a un nombre x d'associations étudiantes, parce que l'on compte généralement celles des collèges et des universités, et cela doit en donner environ une soixantaine. Pour le reste, ces organismes ne sont pas tous structurés de la même façon que les maisons de jeunes. Leur condition d'existence est beaucoup plus aléatoire. Je pense que c'est davantage dans cette perspective que la question était posée. On disait qu'une des façons de s'assurer que l'on puisse leur donner une certaine stabilité qui est un peu plus garante de vigilance, à l'instar de ce que l'on retrouve dans les collèges et dans les universités avec la loi 32 sur le financement des associations étudiantes, est-ce qu'il ne serait pas envisageable qu'une telle politique s'applique mais qu'elle soit connue, que ce soit vraiment une politique de prévoyance et qu'il y ait un programme rattaché à cela?

M. Papin: Par sensibilité de ce qu'on est et de ce qu'on fait comme travail, nos réseaux d'alliance naturelle sont beaucoup plus vers l'Association québécoise pour la défense des droits des retraités et des préretraités, les organismes de promotion des personnes handicapées, les centres d'hébergement pour femmes victimes de violence. Ce sont tous des organismes communautaires, finalement.

La réflexion que nous faisons actuellement est en termes d'organisation communautaire où les jeunes prennent leur place dans ce secteur d'organisation communautaire dans le champ de la santé et des services sociaux, comme les femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées sont là-dedans. Donc, historiquement et par essence, quand on aborde la question du financement des organismes sous l'angle jeunesse, chez nous, cela demande de se déporter un peu d'un côté. On est sympathique à ce qui se fait dans tous ces secteurs. Ce n'est pas par antipathie, loin de là. Mais par essence, ce qu'on est, c'est beaucoup plus rattaché à ces mouvements sociaux et communautaires qu'au secteur jeunesse nécessairement, même si on n'est pas antipathique à tout cela.

Mme Blackburn: Tout à l'heure, en parlant de l'Office de planification et de développement du Québec, vous disiez qu'il y avait de nouveau une tendance à la décentralisation...

M. Papin: Je parlais de l'OPHQ, l'Office des personnes handicapées du Québec.

Mme Blackburn: Oui, excusez-moi. Oui, l'Office des personnes handicapées du Québec. Vous dites qu'il y a une tendance au retour à la situation antérieure où ces services dépendaient de différents ministères. Ne pensez-vous pas que cela a été particulièrement utile et que si on a pu faire faire un grand pas à toute cette conception de l'approche des services aux personnes handicapées, c'est beaucoup parce qu'il y a un organisme qui a fini par brasser la cage un peu partout?

M. Papin: Est-ce que vous parlez des organismes de promotion des personnes handicapées ou de l'office?

Mme Blackburn: De l'office qui, finalement, a soutenu les... Non?

M. Papin: Je dois vous avouer un peu modestement que sur la question des personnes handicapées, je n'oserais pas m'avancer, mais je vais rapporter la question à des personnes que je côtoie chez les personnes handicapées et je vous ferai part de la réaction. Je suis pourtant convaincu que cette personne va attribuer beaucoup plus les pas en avant qui se sont faits aux...

Mme Blackburn: Aux associations?

M. Papin: ...aux associations de personnes handicapées, en me permettant de parler pour elle, qu'à l'office en tant que tel, malgré que l'office n'a pas été étranger à ces développements. Ce n'est pas ce que je veux dire non plus.

Mme Blackburn: Non. D'accord. Très bien. Je vous remercie parce que mon temps est écoulé et qu'on a encore deux autres mémoires à entendre. Je voudrais à nouveau, au nom de ma formation politique, vous remercier d'avoir accepté de participer aux travaux de cette commission.

M. Papin: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Je cède maintenant la parole au ministre du Revenu.

M. Gratton: Très brièvement, M. le Président, j'aimerais remercier les porte-parole, les représentants du Regroupement des maisons de jeunes du Québec de leur participation à cette commission parlementaire. Vous êtes venus nous dire des choses extrêmement intéressantes dont nous prenons note avec beaucoup d'intérêt. Vous avez tout à fait raison de dire qu'il n'appartiendra pas et surtout qu'il n'appartient pas au Conseil permanent de la jeunesse de régler les problèmes du financement des maisons de jeunes, par exempte. Tout gouvernement qui se replierait là-dessus pour refuser de prendre les décisions qui s'imposent, je pense, serait jugé très sérieusement non seulement par les gens qui oeuvrent dans un domaine semblable au vôtre mais également par les parlementaires eux-mêmes.

Je réitère donc ce que j'ai déjà dit. C'est que pour nous au gouvernement, il ne s'agit pas, en créant le Conseil permanent de la jeunesse, de remplacer qui que ce soit ou de prendre la place de qui que ce soit mais bien simplement de se doter d'un outil addi- tionnel qui permettrait au gouvernement de demander des avis auprès de personnes susceptibles de mieux éclairer le gouvernement que celles qu'on a consultées jusqu'à maintenant.

Je puis vous dire au départ que ce que vous êtes venus nous dire aujourd'hui rejoint en grande partie ce que d'autres sont venus nous dire. Tout ce que je me permets de souhaiter, en terminant, c'est que vous accepterez, si vous êtes sollicités, d'appuyer les candidatures au Conseil permanent de la jeunesse. Je pense pouvoir indiquer que le gouvernement procédera à la création du Conseil permanent de la jeunesse sans pour autant négtiqer de prendre les décisions extrêmement urgentes qui s'imposent. Je souhaite que votre regroupement, vos organismes, accepteront volontiers d'appuyer des candidatures de façon que ceux-ci soient également représentés, sinon au Conseil permanent de la jeunesse, du moins au collège électoral. Merci infiniment.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. MM. Gagné, Papin et Régimbald, du Regroupement des maisons de jeunes du Québec, nous vous remercions de votre participation à nos travaux.

M. Papin: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Nous suspendons maintenant 60 secondes pour permettre au groupe Mauve-Rose-Vert Inc., de se placer à l'avant, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Dauphin): À l'ordre, s'il vous plaît!

MM. les députés, Mme la députée, nous allons poursuivre nos travaux avec le groupe Mauve-Rose-Vert Inc. Est-ce que les personnes représentant cet organisme peuvent 3'avancer s'il vous plaît? Je vous demanderais de vous identifier pour les fins du Journal des débats.

Mauve-Rose-Vert Inc.

M. Rodrigue (Robert): Robert Rodrigue, étudiant à l'Université Bishop à Sherbrooke, Lennoxville plutôt, troisième année, en administration.

M. Beaudin (Daniel): Daniel Beaudin, je suis sans travail.

M. Babin (Gilles): Je m'appelle Gilles Babin et je travaille pour la Société d'entraide économique du Québec.

Le Président (M. Dauphin); Merci. Alors, vous connaissez les modalités de nos travaux, c'est-à-dire que vous avez une période de temps qui vous est allouée pour présenter votre mémoire, vos recommandations ou vos revendications. Ensuite, nous procéderons à une période de questions avec les deux formations politiques. Vous pouvez commencer, nous vous écoutons.

M. Babin: Avant de commencer, je ne sais pas s'il serait possible d'avoir de l'eau, s'il vous plaît.

Le Président (M. Dauphin): Certainement.

Une voix: Je vais vous en donner...

Une voix: C'est notre porteur d'eau officiel.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Une voix: Il n'y a pas de sot métier.

M. Babin: M. le Président, on aimerait vous remercier de nous accueillir ici et de nous permettre de nous exprimer sur le projet de loi 104. J'aimerais faire avec vous une lecture de notre document, de notre mémoire, en y faisant aussi certaines additions en cours de route.

L'été 1985 marqua le début d'une initiative personnelle visant à promouvoir le désir d'un développement régional. Ce goût, ce désir provoqua plusieurs rencontres, différentes approches, beaucoup de recherches ainsi qu'énormément de patience, quoique, en cours de route, beaucoup de choses aient été faites, parmi les premières, une demande d'incorporation le 8 octobre 1985. Depuis, cet espoir d'action, de concertation, d'initiative est devenu les Mauve-Rose-Vert Inc. Regroupant maintenant une dizaine de personnes, nous considérons les Mauve-Rose-Vert Inc., comme étant toujours un projet enclenché dans la voie de la réalisation. Si Mauve-Rose-Vert Inc., dépose aujourd'hui un mémoire, c'est que nous considérons le projet de loi 104 comme étant important pour la jeunesse québécoise. À cet égard, nous sommes heureux de voir le gouvernement s'impliquer davantage dans ce dossier. C'est pourquoi, nous nous sommes interrogés sur les raisons qui ont convaincu le gouvernement de présenter le projet de loi. Nous nous sommes également interrogés sur les moyens choisis pour solutionner les problèmes exprimés et identifiés. Enfin, nous vous présenterons certaines recommandations qui, on espère, mériteront votre attention.

Comme nous avons pu le constater, les années quatre-vingt auront été le théâtre de beaucoup de changements au niveau du marché du travail à cause, en partie, de la révolution technologique ainsi que de la récession économique. Au point de vue de l'environnement, nous avons été témoins de l'augmentation de la conscience publique vis-à-vis de l'importance de la préservation de celle-ci.

Tous ces phénomènes n'ont pas été sans toucher les jeunes. Tous ces changements vécus par notre société ne sont pas survenus sans avoir un effet sur les valeurs des gens. En ce qui concerne cette commission, des changements ont eu un effet certain sur les valeurs que se partage la jeunesse des années quatre-vingt.

Parmi ces changements de valeurs, celui de participer dans le processus de décisions sur les questions qui nous concernent. Je m'excuse.

Les années quatre-vingt auront aussi vu la jeunesse en général et la jeunesse québécoise en particulier s'exprimer en maintes occasions lors d'activités ponctuelles organisées à leur intention. Que ce soit lors du Sommet québécois de la jeunesse, lors des symposiums sur les jeunes et l'emploi ou lors des rencontres du Comité consultatif pour l'année internationale de la jeunesse, il en ressort toujours un voeu, un souhait pour la jeunesse d'augmenter sa participation, sa présence dans les débats qui l'entourent. D'ailleurs, on peut facilement comprendre que ce sont ces voeux qui sont à l'origine du projet de loi qui nous réunit.

I! devient donc évident que ces souhaits sont l'expression d'un besoin de structure. Donc, nous croyons que le projet de loi 104 cherche à créer une structure jeunesse manquante et nécessaire. Voyons donc si cette structure qui nous est proposée répond adéquatement aux attentes qui l'ont créée. Tel que présenté, le projet de loi nous propose une structure centralisée près du gouvernement. Sa fonction première étant de conseiller le ministre, il semblerait que le conseil ait à se préoccuper principalement des affaires concernant le gouvernement. C'est-à-dire que la jeunesse aura, lors de la formation du conseil, un forum pour s'exprimer sur les sujets pouvant intéresser le gouvernement provincial. Nous y voyons un problème, car cela semble limiter le champ d'action et d'intervention possible pour la jeunesse. Plus particulièrement, les domaines locaux et régionaux semblent l'oublier. Voilà, à nos yeux, la plus grande lacune de ce projet de loi.

Regardons ensemble la structure et les mécanismes qui sont proposés. Quant au conseil en particulier, il apparaît important pour ledit conseil que les rencontres soient mensuelles, itinérantes, ouvertes aux organismes qui pourraient aqir en spectateur et exposer leurs points de vue au moment de la plénière de chaque assemblée pour permettre une communication directe et régulière avec les membres du Conseil

permanent de la jeunesse, c'est-à-dire qu'on verrait un Conseil permanent de la jeunesse qui tient ses réunions en différents endroits.

Nous croyons que des rémunérations devraient être prévues aussi pour les membres non-officiels du conseil. Les salaires pourraient être versés en fonction des réunions et de trois à cinq heures par semaine. Cela permettrait un suivi intense et plus pratique.

En ce qui concerne le mode de nomination au conseil cela semble, à première vue, tenir compte des disparités régionales. Mais, au second regard, on s'aperçoit que la procédure perd de son charme au moment où il y a vacance au sein du conseil. Seul le ministre choisit le remplaçant. N'est-ce pas là perdre un peu beaucoup de son autonomie?

En ce qui concerne la durée du mandat de deux ans des membres, on considère que ce problème est minime mais reste constant dans le fait que le suivi des activités au conseil pourrait en être affecté. Nous croyons donc qu'il serait préférable de prolonger le mandat des officiers de façon à donner un peu de temps d'adaptation aux nouveaux membres dudit conseil. On fait ici allusion à la partie qui dit que les membres du conseil sont nommés pour une période de deux ans. Après, cela laisse la possibilité d'un vide à l'intérieur du conseil.

En ce qui concerne le collège électoral, nous croyons qu'il serait suffisant pour un candidat d'être soutenu par deux organismes jeunesse oeuvrant dans deux secteurs d'activité distincts. Deux raisons motivent cette position: faciliter l'accès au collège et permettre aussi un meilleur éventail de candidats possibles. De plus, un organisme jeunesse devra avoir le loisir d'appuyer au moins deux candidats. Nous croyons aussi inconcevable que le ministre sélectionne par sa seule personne le collège électoral et les membres qui occupent les postes laissés vacants. Il serait admis et très bien vu qu'un comité soit formé sans aucune tendance politique pour faire ce travail.

En ce qui concerne les secteurs d'intervention du conseil, nous ne croyons pas, quant à nous, qu'il devrait y avoir des limites face au secteur d'intervention, étant donné que les problèmes de la jeunesse sont aussi différents qu'il peut y avoir de valeur. Il est certain que plusieurs organismes voudront accaparer l'attention du conseil, mais, une fois les membres élus, il pourra déterminer ses propres priorités, en fonction de sa raison d'être, bien sûr.

En ce qui concerne les moyens, une peur persiste au sein de notre groupe è l'effet que le budget accordé ne soit pas aussi important que le projet de loi lui-même. Les questions pièges sont, sans contredit: y aura-t-il assez d'argent pour faire ceci ou cela? Y aura-t-il des antennes régionales? Y aura-t-il assez d'argent pour offrir des services adéquats? Y aura-t-il assez d'argent pour des structures efficaces?

En ce qui concerne les propositions, considérant que l'action qui doit être prise dans le but d'aider la jeunesse est de commencer par lui reconnaître une voix, il faut donc lui assurer un canal de communication. Ce canal de communication doit, pour être efficace, prendre la forme d'une structure. Car, si le Conseil permanent de la jeunesse est pour être un haut-parleur, il faut qu'il y ait des fils.

Nous endossons donc une recommandation du rapport sénatorial sur la jeunesse et nous vous recommandons que, localement, dans chaque municipalité, se forment des conseils locaux de la jeunesse qui se réuniront régionalement sur les territoires des MRC pour former des conseils régionaux de la jeunesse, pour, enfin, se rejoindre provincialement dans un Conseil provincial de la jeunesse où l'on retrouve aujourd'hui le Conseil permanent de la jeunesse.

De plus, nous croyons qu'une participation du secteur privé et du secteur municipal serait nécessaire pour le financement d'une telle structure. On ne pense pas que le gouvernement provincial devrait avoir à financer seul une telle structure. Nous recommandons donc qu'un mode de financement impliquant différents partenaires soit envisagé dans la mise en place de cette structure.

En ce qui concerne le projet de loi lui-même, nous aimerions partager certains points de vue sur son contenu. À la section I, l'article 5 qui décrit la durée du mandat d'un membre est tel qu'il créera un vide tous les deux ans. Nous proposons donc une formule évitant que cette possibilité soit instaurée.

En ce qui concerne la section II, le choix des membres présente à nos yeux une lacune importante, soit une représentation de toutes les régions. Nous recommandons qu'une représentation de toutes les régions soit incluse à l'intérieur du collège électoral et qu'au moins six membres du conseil proviennent des régions.

En ce qui concerne la section III, elle semble donner la possibilité au ministre d'empêcher la formation de comités spéciaux dans le but de solliciter des opinions, de recevoir et d'entendre les requêtes ou suggestions de personnes, de groupes, sur les questions relatives à la jeunesse. Nous ne voyons pas le pouvoir du ministre utile dans le fonctionnement du conseil et recommandons donc l'élimination de cette possibilité.

De plus, nous croyons que le conseil ne devrait pas avoir le loisir de solliciter ou pas des opinions, mais que cette fonction soit nécessaire. Nous recommandons donc que

l'article 26.3 devienne une obligation du conseil.

Enfin, à la section V décrivant les sommes requises pour l'application de la loi, nous croyons que cela doit permettre au conseil d'agir sur une échelle comparable au Conseil du statut de la femme, c'est-à-dire que les sommes de 800 000 $ qu'on a laissé ébruiter, nous ne considérons pas que c'est assez pour que le conseil effectue le travail à faire.

Enfin, à l'annexe II, nous avons inscrit les buts et les objets pour lesquels notre corporation fut constituée. Je ne vois pas l'utilité présentement de...

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. Babin, pour votre présentation. Nous procédons donc à une période d'échange de propos en reconnaissant tout d'abord le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Bonjour et merci de votre présence ici aujourd'hui. Je salue spécialement les gens de la Basse-Côte-Nord... Baie-Comeau, c'est cela?

M. Babin: Ce n'est pas la Basse-Côte-Nord.

M. Bélisle: Pourriez-vous m'expliquer si Mauve-Rose-Vert a un rapport avec les chemises que vous avez?

M. Babin: Non.

M. Bélisle: Expliquez-moi cela, parce que je vois une chemise rose, une chemise mauve et une chemise verte.

M. Babin: Non.

M. Bélisle: J'aimerais bien savoir ce que c'est, parce que c'est ce qui m'a frappé au départ. Je ne veux pas paraître loufoque, mais il doit y avoir une raison et j'aimerais la connaître.

M. Babin: II y a plusieurs raisons, mais cela a aussi rapport aux couleurs que vous portez, soit le rouge et le bleu. On dit qu'on n'est ni rouge ni bleu, mais plutôt mauve-rose-vert.

M. Bélisle: C'est une bonne réponse. C'est noté, c'est excellent. Vous avez dit que vous avez été incorporé en 1935 et vous avez dix...

M. Babin: On peut continuer. Nous croyons aussi que les couleurs sont aussi celles de la jeunesse, le vert pour l'espérance et le rose pour la paix, etc.

M. Bélisle: Je pensais que c'était plus cela qu'autre chose. Vous avez été incorporé le 8 octobre 1985. Vous dites dans votre mémoire que vous regroupez une dizaine de personnes qui travaillent chez vous. J'aimerais savoir quelles sont ces personnes, est-ce qu'elles représentent des groupes? Vous nous parlez également des actions faites jusqu'à maintenant. Vous dites: On en a fait quelques-unes et même beaucoup de choses ont été faites à ce jour. Dites-moi donc ce que vous avez fait?

M. Babin: Premièrement, c'est la demande d'incorporation qui a été faite le 8 octobre, On a finalement reçu notre incorporation au mois de janvier. Si je ne me trompe pas, c'est le 14 janvier.

M. Bélisle: C'est une très belle date.

M. Babin: Je suppose que c'est votre fête.

M. Bélisle: C'est cela.

M. Babin: Cela adonne. Depuis nos débuts, on peut dire qu'on a pris connaissance des activités qui se sont déroulées dans le domaine de la jeunesse. On a pris conscience de ce qui s'était passé au symposium sur les jeunes et l'emploi; on a pris connaissance du rapport sénatorial sur les jeunes et l'emploi; on a pris connaissance du comité consultatif pour l'Année internationale de la jeunesse; on est même allé les rencontrer lors du forum régional qui a eu lieu au domaine Saint-Laurent, à Compton, auquel on a fait référence tantôt. On a fait des démarches auprès du ministère de l'Emploi et de l'Immigration au gouvernement fédéral, voyant que si au gouvernement provincial la structure pour pouvoir recevoir l'initiative de la jeunesse ne semblait pas encore là, on est en train de la faire. On est allé du côté fédéral; on a présentement un projet pour le programme innovation qui est en révision: le programme national d'aide à l'innovation.

En ce qui concerne les membres du conseil, quelques-uns peuvent appartenir à d'autres groupes de jeunes, mais on est plutôt des gens qui travaillent à bâtir ces Mauve-Rose-Vert. On retrouve des gens de Baie-Comeau, de la Côte-Nord et aussi des gens de Sherbrooke et des Cantons de l'est.

M. Bélisle: Quand je lis dans votre mémoire qu'il y a eu une structure jeunesse manquante et nécessaire et je lis d'autres passages: "Nous sommes heureux de voir le gouvernement s'impliquer davantage dans ce dossier". Je dois comprendre qu'à la lecture de votre position, vous semblez être d'accord grosso modo avec l'idée d'un Conseil permanent de la jeunesse.

M. Babin: On est d'accord avec le

principe même.

M. Bélisle: Le principe est bien bon.

M. Babin: On est d'accord avec le principe qu'il y ait un conseil. Reste qu'on trouve qu'il devrait y avoir plusieurs modifications quand même.

M. Bélisle: C'est ce que j'ai lu dans votre texte. Quand vous parlez de la pyramide régionale dans vos recommandations, dans vos propositions, les conseils locaux dans chaque municipalité, les conseils locaux de la jeunesse regroupés dans le domaine des MRC et tout le reste, il me semble que c'est une recommandation de base dans votre rapport.

M. Babin: On pense que les jeunes devraient être en mesure de s'exprimer et il devrait y avoir un forum, une structure qui serait mise en place qui permettrait aux jeunes d'agir dans ces conférences. Cela veut dire que, à l'intérieur de la municipalité, on voudrait que les jeunes soient capables d'être plus actifs, de pouvoir exprimer leurs opinions sur l'affaire municipale et concernant le développement de la région. On pense que cette structure est inexistante présentement. On ne la voit pas. Il me semble que ce serait la base normale d'une structure provinciale qui permettrait aux jeunes de parler sur une échelle provinciale.

M. Bélisle: D'abord, selon vous, c'est de créer la structure au niveau local, l'action concrète au niveau local dans une municipalité chez vous, à Baie-Comeau, et ensuite on s'en va une marche plus haute dans la pyramide. Est-ce cela?

M. Babin: Présentement, le Conseil permanent de la jeunesse arrive du gouvernement. Ce qu'on voudrait, c'est faire une structure qui partirait à même la base, le concept serait différent et, à partir de ce moment, on pense qu'on pourrait être beaucoup plus près des jeunes. C'est certain.

M. Bélisle: Une des recommandations, la première de ce genre dans les mémoires que j'ai vus au cours des huit journées précédentes, je l'ai trouvée grandement originale, porte sur le financement. Quand vous dites: Une participation du secteur privé et du secteur municipal serait nécessaire dans le financement de cette structure, surtout au niveau de celle-ci, nous recommandons qu'un mode de financement impliquant différents partenaires soit envisagé dans la mise en place de la structure.

Je suis prêt è vous suivre là-dessus, mais je veux savoir de votre part, parce que vous parlez de cents, de financement, d'une action concrète sur le plan local, comment vous voyez cela. Est-ce que cela devrait être imposé par le niveau provincial? Est-ce que cela devrait être sur une base volontaire, cette nouvelle structure de financement, pour susciter des actions concrètes et vous donner l'occasion de faire les choses sur le terrain, dans une ville ou une localité quelconque?

M. Rodrigue: Cela pourrait facilement être indépendant, c'est-à-dire sur une base volontaire, mais avec des incitatifs au niveau du gouvernement qui pourraient donner une chance à des entreprises, par exemple, de s'impliquer. On pourrait parler de déductions fiscales ou des choses comme cela qui pourraient leur permettre de dire: Aujourd'hui on a besoin de jeunes et on a un incitatif qui nous le permet pour l'été, sans que ce soit à titre de subvention, un genre de partenership qui pourrait exister entre les jeunes, le gouvernement et l'entreprise privée.

M. Bélisle: Et les municipalités là-dedans?

M. Rodrigue: Au même niveau, les municipalités doivent s'impliquer pour ce qui est des jeunes. Il n'y a pas seulement les gouvernements. On veut créer un ensemble, on ne veut pas juste s'en tenir au gouvernement provincial ou fédéral. On se dit: La municipalité est encore plus près des gens donc, on pourrait se permettre de se faire entendre à ce niveau.

M. Bélisle: Est-ce que vous sentez que les municipalités, dans votre région, sont désireuses d'entrer dans ce partenariat que vous souhaitez?

M. Rodrigue: Sur le plan économique, vous parlez du financement?

M. Bélisle: Quant à l'appui sur le terrain...

M. Rodrigue: Quant au financement... (16 h 45)

M. Bélisle: ...soit de vous fournir des ressources, ou mettre des sommes à votre disposition, y a-t-il une volonté, voyez-vou3 des intentions?

M. Rodrigue: On a des appuis moraux à Sherbrooke, à venir jusqu'à maintenant, il n'y a pas de problème.

M. Bélisle: II n'y a pas de danger financier sur la table.

M. Rodrigue: Financier, il faudrait soumettre des projets. On a l'impression, nous, qu'en créant un conseil comme cela au niveau provincial, on pourrait se permettre

par la suite de dire: Il y a des chases qui ont été faites à ce jour, à votre tour maintenant de vous occuper de vos jeunes dans les municipalités. S'il y a un pas qui est fait et il semblerait que ce soit l'intention du gouvernement de le faire, on pense bien qu'après les autres pourraient suivre.

M. Bélisle: D'accord. Vous exprimez une réserve ici, c'est la dernière partie de mon intervention quant à la section III qui porte le titre: Fonctions et pouvoirs du Conseil permanent de la jeunesse, les articles 25, 26, 27 et suivants. Vous nous dites à la page 9 de votre mémoire: "Cette section semble donner la possibilité au ministre d'empêcher la formation de comités spéciaux dans le but de solliciter des opinions, de recevoir, d'entendre les requêtes ou suggestions de personnes," etc. Je vois à l'article 29: "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux pour l'étude de questions particulières..." Selon vous, l'interprétation de l'article 29 peut paraître une sorte d'empêchement probable et éventuel.

M. Babin: Si le ministre ne donne pas son autorisation, qu'est-ce qui arrive si le Conseil permanent de la jeunesse veut faire de la consultation? Si on regarde dans l'exercice de cette fonction, à l'article 26.3: II peut solliciter des opinions, recevoir et entendre les requêtes et les suggestions de personnes, de groupes et d'organismes sur les question... etc. Il peut le faire, mais il faut qu'il aille demander au ministre responsable et si le ministre responsable dit non, là il semblerait que cela pourrait être non. On ne pense pas que le ministre responsable devrait avoir le loisir de dire ainsi non. Ce n'est pas que le conseil "peut" solliciter des opinons, on pense que le conseiller "doit" solliciter des opinions et c'est la raison d'être...

M. Bélisle: Cela se lirait plutôt à l'article 29: "Le conseil peut former des comités spéciaux pour l'étude de questions particulières", en éliminant "avec l'autorisation du ministre", c'est cela?

M. Babin: Le conseil doit solliciter des opinions, et enlever "avec l'autorisation du ministre".

M. Bélisle: Vous voulez dire l'article 26, troisièmement, dans l'exercice de ses fonctions, le conseil doit solliciter des opinions. C'est cela que vous voulez dire, M. Babin?

M. Babin: Pardon. M. Béiisle: C'est cela.

M. Babin: Oui.

M. Bélisle: L'article 26.3 auquel vous vous référez.

M. Babin: "Doit" au lieu de "peut".

M. Bélisle: D'accord, au lieu de l'article 29 qui est à l'autre page. L'article 29 c'est: "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux..."

M. Babin: On dit que la section III semble laisser la possibilité au ministre de décider. Nous, à l'intérieur de cela, on n'aime pas cela. Cela veut dire qu'à l'article 29 on enlève "avec l'autorisation" et à l'article 26.3 on met "doit".

M. Bélisle: Je voulais seulement vous faire préciser votre pensée. En terminant, je veux vous dire qu'il y a un nombre de groupes qui sont venus devant nous. Le but de la consultation avec vous c'est de savoir ce que vous pensez. Il y a d'autres groupes qui ont exprimé la même réserve. Je pense que l'intention du gouvernement, en ce moment, c'est de modifier le projet de loi dans le sens d'éliminer la réserve ou le doute que vous avez dans votre esprit. Ce n'est pas dans notre intention du tout d'avoir un élastique par en arrière et de tirer sur l'élastique quand on veut et de le laisser aller quand on ne veut pas ou quand cela ne fait pa3 notre affaire. Je pense que c'est bien important que le Conseil permanent de la jeunesse soit très crédible. Plus il y aura de liberté, plus il y aura une grande crédibilité. Je vous remercie de votre présentation.

M. Babin: Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci M. le député de Mille-Îles. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M, le Président. Au nom de ma formation politique, je voudrais vous souhaiter la bienvenue, messieurs et M. Babin. Je voudrais vous remercier d'avoir accepté de participer aux travaux de cette commission en rappelant, pour le bénéfice des membres de cette commission, que prendre la peine de participer, consacrer le temps et l'énergie qu'il faut pour rédiger un mémoire, pour faire la réflexion et se déplacer, c'est beaucoup demander à des organismes qui sont, si j'ai bien compris, pour ainsi dire, bénévoles.

Une voix: Surtout.

M. Babin: On ne travaille pas, personne ne travaille ni n'est payé pour faire ce qu'on

fait.

Mme Blackburn: Le mémoire que vous présentez reprend, comme le soulignait tout à l'heure le député, pour l'essentiel, beaucoup d'éléments qu'on retrouve dans les autres mémoires qui touchent à la fois à l'autonomie de ce futur conseil, sa capacité de mener ses études, les difficultés que cela poserait si le pouvoir du ministre était laissé tel que prévu dans la loi. Je pense que, pour ces grandes questions, vous reprenez pour l'essentiel des recommandations qu'on a entendues ici. Celle qui est tout à fait nouvelle, c'est celle qui porte sur la création de conseils locaux: former des conseils locaux de la jeunesse. Je pense, par exemple, à Baie-Comeau, à Hauterive, à Sept-Îles, à Montréal et à Québec qui pourraient déléguer des représentants dans une structure qui reprendrait celle des MRC, donc se donner une structure un peu régionale. Je crois que les MRC, c'est semi-régional, elles ne couvrent pas toute la région et, ensuite, un conseil provincial de la jeunesse. Cela ne vous apparatt-ii pas un peu lourd? C'est la première et la seconde: N'y a-t-il pas un danger d'utilisation de nivellement de la parole, du discours des jeunes?

M. Babin: Non, on ne pense pas que ce soit trop lourd. On pense, en fin de compte, que c'est une façon d'assurer une participation de la jeunesse dans plusieurs secteurs. C'est intimidant pour un jeune ou cela peut l'être de participer à des débats de nature provinciale, mais s'il le peut, on pourrait l'impliquer dans la municipalité, que ce soit dans un parc, ceci ou cela, quelque chose qui a affaire avec lui, qui est près de lui et lui donner cette expérience que, par son implication, il peut faire changer des choses près de lui. Et, après cela, si cela peut prendre une dimension régionale, cela donnerait une plus grande assurance à la jeunesse vis-à-vis de la province ou du pays. Et faire en sorte qu'on veuille recevoir cette participation de la jeunesse, que ce soit dans le secteur local ou régional, on pense que ce serait important.

Le Président (M. Doyon): Mme la députée.

Mme Blackburn: Vous parlez d'une participation éventuelle du secteur privé, du secteur public et de la municipalité. Je trouve cela intéressant, c'est la première fois qu'on reçoit une telle proposition. Mais, déjà, les municipalités ne participent-elles pas un peu de façon indirecte en offrant des services ou des locaux et, à l'occasion, certaines petites subventions pour ces organismes? N'y a-t-il pas un danger d'essayer de les organiser plutôt que de les laisser s'organiser?

M. Babin: II est certain qu'on peut émettre cette possibilité, mais on pense que cela pourrait faire qu'on ait une position vis-à-vis des municipalités et qu'elle ait un effet. On veut que notre jeunesse s'implique et on est prêt à recevoir cette participation de la jeunesse et on fait telle action pour y arriver. De la même façon que, dans le secteur provincial... Le gouvernement provincial semble dire sur le projet de loi 104: On s'aperçoit que la jeunesse veut participer et on n'a pas les moyens de recevoir cette initiative, là on crée quelque chose pour recevoir cette participation. C'est la même chose un secteur plus bas, le secteur municipal.

Mme Blackburn: D'accord. Je dois dire que les mémoires qu'on a entendus nous ont beaucoup défini la jeunesse en termes de problématique. Si on essaie de résumer cela, ce serait à peu près les 12-35 ans, plus particulièrement ceux qui sont en difficulté et dépendants économiquement: jeunes chômeurs, jeunes assistés sociaux, jeunes délinquants, jeunes toxicomanes, ceux qui menacent de se suicider, on a vraiment défini les décrocheurs, les sous-scolarisés, on les a définis par ce que j'appellerais la négative. Vous êtes-vous penchés sur ce qui pourrait être la jeunesse? Comment définirait-on la jeunesse au Québec?

M. Rodrigue: Comme des personnes qui veulent tenter quelque chose ou qui veulent se donner des possibilités. C'est ce qu'on essaie de faire. Quand on parle de participation du secteur privé, on veut essayer d'intégrer le jeune sur le marché du travail, on veut essayer de créer une transition qui ne soit pas négative justement, leur donner la possibilité de s'ouvrir. C'est ce qu'on s'attend des jeunes, il n'y a pas seulement la problématique. Ils sont pleins de potentiel, beaucoup sont très ambitieux et on ne leur donne pas tellement les moyens. On veut faciliter la tâche des jeunes à s'intégrer au marché et dans la société. C'est le principe de base pour nous; dans notre formation, c'est surtout cela qu'on vise. Il y a des problèmes, c'est évident, mais on ne touche pas les problèmes, on veut foncer et avoir les moyens de le faire.

Mme Blackburn: Vous avez préparé un mémoire qui, je le rappelle, est intéressant parce que c'est une critique assez juste du projet de loi. Est-ce que vous avez des organismes jeunesse dans votre coin, que ce soit des maisons de jeunes, des maisons communautaires, des maisons d'hébergement ou des associations étudiantes, et les avez-vous consultés? Est-ce que vous avez eu leur avis là-dessus ou si vous avez davantage essayé d'examiner ce projet en rapport avec la lecture que vous avez faite du texte du

Secrétariat à ta jeunesse ou par rapport à votre propre expérience? Sur quelle base vous êtes-vous appuyés pour faire ces recommandations?

M. Babin: On a fait des démarches auprès de certains groupes qui ont refusé de participer ou de mettre de l'énergie dans la préparation d'un mémoire. Toutefois, on ne s'est pas attardé là-dessus et on n'a pas rencontré tous les groupes de jeunes. Dans le cas de la maison des jeunes, elle n'était pas intéressée non plus à participer. On a fait des démarches mais on ne s'est pas attardé à cela. Nous étions intéressés à présenter un mémoire. Ce qui fait qu'on s'est organisé pour te produire nous-mêmes, avec les connaissances qu'on avait.

Mme Blackburn: D'accord. Est-ce que les groupes qui ont refusé de participer vous ont donné les raisons qu'ils invoquaient pour ne pas le faire ou si...

M. Babin: Je ne sais pas. C'est une question de ressources, je suppose, pour eux. On n'a pas insisté. On leur a offert de le présenter. On leur a dit que nous étions en train de travailler sur un mémoire et qu'on voulait te présenter. On leur a demandé: Est-ce que cela vous tente d'embarquer avec nous autres? On pourrait peut-être le faire ensemble. Non. On a autre chose. C'est pas mal comme ça que cela s'est passé.

Mme Blackburn: Ce que vous appelez votre initiative personnelle en vue de donner un lieu de concertation, d'initiative, est-ce que vous avez la collaboration ou l'appui du CRCD, par exemple, ou de la MRC? Est-ce que vous avez eu des contacts avec ces organismes?

M. Babin: On a eu des contacts avec le CRD Côte-Nord, avec la MRC, avec l'ATRM, avec la ville. Tous ces contacts ont été faits finalement.

Mme Blackburn: Quelle a été la réaction ou quel accueil a-t-on donné à votre projet? Comment a-t-on réagi?

M. Babin: Prenons la réaction du maire, par exemple. Quand on pense qu'il y a eu un symposium sur les jeunes et l'emploi à Baie-Comeau, le maire de Baie-Comeau nous a dit: On dirait que le gouvernement est en train de nous passer une patate chaude dans les mains. On a un problème. Là, il est en train de nous le refiler. On ne veut pas trop y toucher. Aller là... On nous a envoyés d'une place à l'autre. Finalement, on s'est promené pas mal dans toutes les institutions qui existent. On s'est retrouvé au fédéral avec ça.

M. Rodrigue: À Sherbrooke, on a eu des entretiens avec M. Charest, qui se trouve à être notre député et qui est aussi le ministre de la Jeunesse au fédéral. On est aussi présentement en contact avec M. Roch Fortin qui, lui, est le conseiller politique de M. Charest. On est passé du ministère de la Jeunesse au ministère de l'Immigration et du Revenu, parce que ce sont des ministères conjoints. On est présentement dans un programme qui s'appelle Innovation. M. Charest, lui, nous appuie fortement quant à nos initiatives, par exemple, d'impliquer le secteur privé, de ne pas toujours attendre après la bourse du gouvernement, parce que dans notre charte, on inclut aussi le fait qu'on aimerait être autosuffisant d'ici à trois ans. Cela intéresse certainement le gouvernement fédéral. On nous appuie. On a des rencontres prévues avec M. Cormier, à Montréal, justement. Il est un haut fonctionnaire du ministère de l'Immigration et du Revenu. Il s'occupe des projets et du programme Innovation.

Jusqu'à maintenant, au niveau fédéral -peut-être parce qu'on est chanceux à Sherbrooke d'avoir ce ministre - on a de bonnes réponses à ce sujet.

Mme Blackburn: D'accord. Quand vous parlez d'autosuffisance, je voudrais que vous m'expliquiez si c'est en partant de programmes de subventions statutaires ou si vous pensez vendre votre expertise, avoir un membership?

M. Rodrigue: Vendre notre salade en premier, peut-être. Surtout quand on parle du secteur privé, par exemple, pour faire participer les jeunes à des réunions de conseil ou des choses semblables. Dans le secteur privé, il y a moyen d'aller chercher des choses. On parle aussi de coopératives. On parle de membership à l'intérieur d'un regroupement local, d'un regroupement régional, d'un regroupement provincial, faire partie de notre organisme qui s'appelle les Mauve-Rose-Vert Inc., avoir accès en même temps à toute l'expertise qu'on pourrait avoir ou les choses qu'on pourrait pousser, les dossiers qu'on pourrait pousser. Il y aurait un certain membership qui pourrait se prendre à ce niveau. Les compagnies pourraient être intéressées aussi à s'impliquer financièrement dans un membership comme celui-ci pour profiter aussi du potentiel des jeunes. En gros, cela tourne autour de cela.

Mme Blackburn: Bien, écoutez, le temps presse. Je voudrais vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission, et vous dire que ces recommandations, qui finalement reprennent plusieurs des recommandations d'autres mémoires, viennent sensiblement modifier la nature de l'organisme consultatif. J'espère

que la partie ministérielle prendra en considération ces recommandations. On devrait voir dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, comment et jusqu'à quel point on aura tenu compte de la présente consultation. Je voudrais vous remercier pour l'effort que vous avez consacré, de même que pour le souci que vous avez de venir en aide aux jeunes.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la députée. M. le ministre, à vous la parole.

M. Gratton: Oui, M. le Président, pour enchaîner avec ce que disait Mme la députée de Chicoutimi, je peux vous assurer d'abord que certaines des recommandations que vous nous faites regroupent les représentations qu'on a reçues de plusieurs autres groupes. Maintenant, nous terminons nos travaux avec l'audition d'un dernier groupe immédiatement après vous. Nous en aurons entendu quelque 45. Effectivement, le député de Mille-Îles vous a dit tantôt que nous avions indiqué, et je le réitère, que nous avions l'intention de modifier les articles 26 à 29 de façon qu'il n'y ait aucune méprise sur l'autonomie qu'on veut voir le Conseil permanent de la jeunesse exercer. Il n'est pas question pour le gouvernement, par le libellé, si c'est l'interprétation qu'on en fait présentement, d'avoir une mainmise du gouvernement, du ministre responsable sur le Conseil permanent de la jeunesse. On veut que le Conseil permanent de la jeunesse nous fournisse des avis sur demande, bien sûr, mais également de sa propre initiative et on verra à ce que le texte de la loi reflète cela.

C'est un peu la même chose en ce qui a trait à votre recommandation quant à la durée du mandat. Nous sommes fort conscients qu'il faille assurer une continuité parmi les membres du conseil permanent. Je pense que je puis vous dire qu'il y aura probablement des modifications au libellé du projet de lot qui iront dans le sens de vos recommandations. C'est dire que, sans nécessairement m'engager au nom du gouvernement à reprendre chacune de vos recommandations, l'exercice que nous avons fait ensemble et l'effort que vous avez fait pour venir nous faire connaître votre point de vue, n'auront pas été inutiles. Je vous laisse simplement le soin d'en juger vous-mêmes au moment où le gouvernement, après l'analyse des travaux de la commission parlementaire, déposera les amendements au projet de loi.

Je vous remercie de votre participation et vous souhaite un bon voyage de retour, surtout pour ceux qui retournent à Baie-Comeau. Je souhaite que nous puissions continuer l'échange amorcé à cette commission parlementaire au cours des mois à venir. Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. Alors, au nom de tous les membres de la commission, je remercie les trois représentants de Mauve-Rose-Vert Inc., pour leur participation à nos travaux.

Nous suspendons nos travaux éO secondes, pour permettre au Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse de venir prendre place à Pavant.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(Reprise à 17 h 6)

Le Président (M. Dauphin): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des institutions reprend ses travaux. Mme la députée de Chicoutimi, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux pour permettre au Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse de nous présenter son mémoire.

Je demanderais à nos invités de s'identifier.

Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse

M. Aumont (Jean-Pierre): Jean-Pierre Aumont, président du conseil d'administration du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse.

M. Boisvert (Jean-Claude): Jean-Claude Boisvert. Je suis directeur général du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse.

Mme de Grandmont-Fortier (Nicole): Nicole de Grandmont-Fortier. Je suis présentement secrétaire du conseil d'administration.

Le Président (M. Dauphin): Nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous écoutons.

M. Aumont: M. le Président, vous avez en main notre projet de mémoire. Je débuterai en vous remerciant, dans un premier temps, de nous accueillir et de nous entendre au sein de cette commission.

Le Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse où nous oeuvrons depuis plus de 25 ans était mieux connu sous le nom du Conseil québécois pour l'enfance exceptionnelle. Nous avons changé son nom récemment, mais nous avons nos assises au Québec depuis 25 ans et nous oeuvrons auprès des jeunes plus particulièrement en difficulté depuis longtemps. Nous avons élargi notre mandat il y a deux ans pour faire une ouverture au sein de différentes clientèles.

La mission du CQEJ, comme je viens de vous le dire, le Conseil québécois pour l'enfance exceptionnelle, est de favoriser la

meilleure qualité possible des services aux enfants et aux jeunes du Québec. Il entend continuer à appuyer les différents acteurs, parents, jeunes, professionnels enseignant, professionnels non enseignant, travailleurs sociaux, éducateurs, etc., qui oeuvrent auprès de ces jeunes, enfants et adolescents. De plus, il entend influencer les politiques, les programmes et le choix des priorités des gouvernements et des institutions. Ces actions prennent leur source dans l'ensemble des problématiques qui touchent l'enfance et la jeunesse du Québec. Le CQEJ est un forum privilégié où des intervenants dans les réseaux de services, des parents et des jeunes partagent leurs perceptions des besoins, définissent les problématiques prioritaires sur lesquelles il faut agir, et entreprennent les actions appropriées.

Nos buts. Le CQEJ vise en premier lieu à fournir un soutien original et adéquat aux acteurs sociaux impliqués dans les interventions auprès des jeunes, quels que soient leur statut et leur milieu. Pour ce faire, le CQEJ poursuit les buts suivants: fournir un lieu de regroupement pour ces acteurs; établir des relations entre parents, jeunes et professionnels; offrir divers programmes de formation et de perfectionnement adaptés aux problématiques du jour; favoriser la recherche et le transfert des connaissances; soutenir l'expression des acteurs impliqués dans les interventions; diffuser l'expertise de ces acteurs.

L'action du CQEJ réside dans son implication dans les débats autour des problématiques, des programmes et des services qui concernent les jeunes. Dans ce volet, le conseil poursuivra les buts suivants: Promouvoir des solutions innovatrices pour répondre aux besoins des enfants et des jeunes; établir des relations entre jeunes, parents et responsables des programmes politiques; participer à l'évaluation des programmes d'intervention et influencer les politiques d'intervention.

Peut-être, pour faire une petite capsule, le CQEJ a la prétention d'être un organisme qui est non corporatif, dans le sens qu'il est un lien entre l'expression et les personnes qui sont membres du CQEJ. Ce sont des personnes qui ont développé une expertise sur le plan du décodage des besoins des jeunes, ceux qui ne peuvent pas exprimer clairement leurs besoins ou qui sont en difficulté.

Nous avons la prétention de pouvoir traduire et de ne pas nous associer à des groupes bien précis qui revendiquent ou présentent des besoins précis, mais plutôt d'apporter un appui concret aux intervenants et aux jeunes directement. M. Boisvert va vous présenter les objectifs du mémoire.

Le Président (M. Dauphin): M. Boisvert.

M. Boisvert: Vous pouvez suivre les mots clés de notre présentation. La première chose que les membres du conseil voulaient faire, c'était de venir vous dire qu'ils appuyaient les jeunes dans leur démarche de chercher une voie dans notre société québécoise. Le fait que vous mettiez de l'avant la formation d'un Conseil permanent de la jeunesse atteint cet objectif.

La première chose qu'on venait vous dire, c'est que nous appuyons cette démarche. La deuxième chose, ce sont les jeunes sans voix. C'est évident que depuis 25 ans, les membres du conseil, les 5000 intervenants, par exemple, qu'on a rejoints l'an passé par nos services connaissent des jeunes qui ont des difficultés de toutes sortes.

Je pense, par exemple, à des jeunes de 15 à 30 ans qui sont dans un centre de réadaptation pour adultes, etc. Ces jeunes sans voix, nous croyons que les intervenants que sont nos membres les connaissent bien et sont capables de traduire, en grande partie, non seulement avec des jeunes, leurs besoins propres, mais aussi des critiques, des suggestions positives sur l'ensemble des modes d'intervention qui devraient être mis de l'avant, corrigés, améliorés, etc.

Donc, le deuxième objectif ou notre deuxième préoccupation majeure, c'est de vous dire que ce serait peut-être important qu'il y ait non seulement des jeunes au Conseil permanent de la jeunesse, mais aussi des intervenants, quel que soit leur âge -moins de 30 ans, plus de 30 ans; cela n'a pas d'importance - et d'avoir des gens qui connaissent les interventions, les programmes, les problèmes reliés à l'intervention et qui soient capables, dans le fond, d'en faire foi et de faire des suggestions autour de la table avec les jeunes. Cependant, il faudrait, bien sûr, conserver la majorité du conseil.

Notre troisième préoccupation, c'est notre expertise à nous. Nous sommes un organisme assez original, puisque depuis 25 ans, comme le dit le président du conseil d'administration depuis tantôt, nous sommes là à rejoindre plusieurs milliers d'intervenants chaque année dans les réseaux de la justice, des affaires sociales et de l'éducation, en particulier. Nous transcendons l'ensemble des interventions.

Dans le fond, nous avons une crédibilité, nous pensons, et une efficacité qui a été expérimentée jusqu'ici. Nous offrons aux gens du futur Conseil permanent de la jeunesse et au gouvernement cette expertise et nous disons que nous sommes intéressés aux prochains travaux qui seront menés par ce conseil.

Nos réactions au projet de loi, vous les avez aux pages 6 et suivantes. Bien sûr, après avoir répété l'appui sans réserve que nous faisans à la création du Conseil permanent de la jeunesse, nous faisons

quelques remarques ou suggestions. D'une part, nous pensons que le projet de toi pourrait être amendé de façon positive, afin d'y inclure trois fonctions plutôt qu'une: Une fonction conseil, celle qu'on retrouve généralement dans les autres conseils au Québec; une fonction subventionnaire, qui permettrait au Conseil permanent de la jeunesse d'aider des groupes de jeunes à faire exprimer leur voix dans les régions, en particulier, en relation avec les travaux du futur conseil et une fonction de coordination interministérielle sur le modèle de ce qui se fait déjè au Secrétariat à la jeunesse. Ce qui suppose - ce que nous disons plus loin - que les travaux, le personnel, les fonctions de l'actuel secrétariat soient introduits dans les ressources du futur conseil. (17 h 15)

Nous suggérons la nomination d'un ministre responsable du dossier de la jeunesse. Nous croyons que ce serait important qu'il y ait une personnalité politique attachée à ce dossier, à l'exemple de ce qui se fait au gouvernement fédéral ou dans le cas de la ministre responsable du Conseil du statut de la femme.

Nous ne le suggérons pas nécessairement è l'intérieur de la loi, mais que le gouvernement puisse penser à la création de postes de responsables de la condition des jeunes, un peu sur le modèle de ce qui s'est fait à la condition féminine, pas tellement à la défense des droits, mais beaucoup plus pour inciter le trait d'union d'information entre les fonctionnaires, les gens responsables des différents programmes entre eux, entre les jeunes eux-mêmes.

Nous pensons que la mécanique comprise dans la loi est suffisante et souple pour faire en sorte que les jeunes puissent proposer eux-mêmes un certain nombre de personnes. Le gouvernement pourrait y faire des choix. Nous pensons que c'est plutôt au Conseil permanent de la jeunesse à se donner ses propres racines dans les régions et de faire en sorte qu'il puisse se donner sa crédibilité auprès des jeunes.

Nous croyons, en relation avec ce que nous avons dit préalablement, que le conseil devrait cependant être composé non seulement de jeunes, mais d'intervenants, quel que soit leur âge, tout en conservant une grande majorité des sièges du futur conseil aux jeunes mêmes.

Nous suggérons d'intégrer les activités et les ressources du Secrétariat à la jeunesse à la structure du futur conseil. Nous disons que, lorsque viendra le temps d'élaborer une politique concernant la jeunesse, nous aurons des choses à dire et que nous offrons notre expertise.

Je demande à Mme de Grandmont-Fortier de conclure.

Mme de Grandmont-Fortier: En guise de conclusion, parce que je voudrais que cette conclusion soit ouverte dans le futur, j'aimerais souligner que le CQEJ, de par notre action des intervenants, touche l'ensemble de la province de Québec pour tous les praticiens qui touchent à l'enfance et à la jeunesse. Ce qui nous met en contact direct avec tous les jeunes, même ceux que nous avons appelés dans ce présent document les sans-voix.

Tous ces praticiens se réunissent chez nous pour partager leurs connaissances et non pas pour en faire des cheptels. Or, ceci nous permet d'affirmer aujourd'hui que nous avons une expertise bien cambrée et bien présente de plus de 25 ans sur la connaissance de la jeunesse.

Nous avons aussi envie de vous dire qu'il est temps que la jeunesse ait une place, une place égale pour tous ces jeunes, non pas des places partagées selon leur facilité ou leur non-facilité à s'exprimer. Par ce moyen que vous nous proposez aujourd'hui, nous pensons que c'est l'idéal pour tous les jeunes du Québec qui pourraient vivre une vie active et productive dans notre société. Avoir une place, permettez-moi l'expression, "marginale", mais marginale juste parce qu'ils sont jeunes et à cause de leur jeunesse, tout en étant des frères et des collaborateurs pour s'aider entre eux. Voilà.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, madame, pour votre présentation. Nous allons maintenant procéder à la période d'échanges de points de vue. M. le ministre.

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je désire, en tout premier lieu, vous remercier de votre participation à la commission parlementaire. Vous êtes, par l'effet du hasard et des circonstances peut-être, le dernier groupe que nous entendons ici à la commission parlementaire; ce qui n'en fait pas le moindre, bien au contraire. D'ailleurs, compte tenu du caractère inédit d'une de vos recommandations, j'aurais préféré que vous passiez en premier pour que l'on puisse demander des réactions de tous les autres qui sont venus nous voir, mais on y reviendra.

Je voudrais commencer par le troisième objectif de votre mémoire qui est de sensibiliser le gouvernement à l'existence de votre organisme. Pourriez-vous nous dire de quelle façon, parce que cela m'intéresse hautement - et je vous avoue très candidement qu'avant de prendre connaissance de votre mémoire cet après-midi, mes connaissances quant à votre organisme étaient plutôt limitées, sinon inexistantes -on devient membre de votre conseil? Est-ce que l'on travaille en région, outre l'organisation de votre congrès annuel des colloques régionaux, etc.? Comment devient-on actif dans votre conseil?

M. Boisvert: II y a une cotisation. Nous avions en 1986, 631 membres actifs. C'est une cotisation, pour l'an passé, de 70 $ par année qui donne droit pour les membres à un rabais sur les activités que je vous décrirai tantôt. Cette cotisation est amendée à la baisse pour les parents. Nous avons des membres parents qui paient 25 $ par année pour être membres. Nous avons une cotisation pour des organismes affiliés qui paient 300 $ pour être membres. Ce sont des centres d'accueil ou des écoles qui deviennent des membres. Si je regarde les chiffres de 1986, il y avait 17 institutions membres affiliées. Il y avait une soixantaine de membres étudiants, une trentaine de membres parents, des intervenants du milieu de la justice, des affaires sociales dans environ un tiers des cas, et dans les deux autres tiers, ce sont des gens du milieu de l'éducation; que ce soient des enseignants, des professionnels non enseignant ou des cadres des commissions scolaires ou des écoles.

Les activités, maintenant. Nous sommes connus d'abord et avant tout par le congrès de trois jours qui se tient chaque année, è Montréal ou à Québec. L'an passé, il a regroupé 1200 personnes; 55 ateliers ont porté sur différents sujets reliés aux difficultés des jeunes et des intervenants pour les rejoindre dans différents domaines: déficience mentale, handicapés physiques, mésadaptation socio-affective, le suicide chez les jeunes, etc. Nous avons tenu, Pan passé, un premier colloque sur la question de la prévention du suicide chez les jeunes. On a eu 450 personnes. Cette année, dans la documentation que j'ai donnée à Mme Giguère, c'est-à-dire trois feuillets, on va avoir le 8 mai prochain un colloque sur la question des enfants des communautés culturelles de Montréal qui sera suivi d'une session qui va être offerte aux commissions scolaires et aux établissements. L'an passé, nous avons tenu 56 journées de perfectionnement en régions. Cette année, nous pensons atteindre 75 journées. Cela a permis de rejoindre environ un groupe autre de 500 personnes, l'an passé. Cette année, nous avons neuf stages provinciaux de deux jours. L'an passé, les stages ont rejoint 250 personnes. Il y a la revue Apprentissage et Socialisation EN PISTE qui existe depuis dix ans. Elle paraît quatre fois par année. Elle est financée par le FCAR et CRSH et autofinancée en partie par les abonnés. Nous avons 1900 abonnés. C'est une revue scientifique mais de transmission d'information aux praticiens qui est bien cotée semble-t-il à la FCAR et qui nous permet dans le fond de prendre le matériel qu'on ramasse à l'intérieur de nos colloques, de nos congrès et de nos stages provinciaux et régionaux. La connaissance de nos intervenants permet de faire le pont avec les milieux universitaires et de donner cette information aux praticiens. Chaque année, pour nos membres, il faut quand même que pour 73 $ les membres puissent recevoir des services. Ils sont abonnés automatiquement à la revue. Ils ont un rabais sur les frais d'inscription de nos événements. De plus, on leur donne chacun deux dossiers techniques que nous fabriquons pour les aider, comme chez celui-ci, et faire fasse au phénomène d'agressivité. Les intervenants peuvent devoir faire face à des jeunes agressifs; que ce soient des déficients mentaux, des handicapés physiques, des mésadaptés ou autre. Ce sont des différents services que nous offrons soit à des gens qui ont cotisé chez nous et qui sont membres, soit à des intervenants, qui, sans être membres, assistent à l'une ou l'autre de nos activités.

M. Gratton: Je vous remercie. D'ailleurs, je voudrais vous dire que Mme Giguère, la secrétaire de la commission, nous a bel et bien transmis la pochette d'information. Je n'ai pas eu le loisir encore d'en prendre connaissance, mais je le ferai sûrement très prochainement.

Cela m'amène a vous parler ou a vous demander de préciser un peu plus la recommandation que vous faites. Vous êtes le premier groupe à nous suggérer que le Conseil permanent de la jeunesse devrait ne pas exclure des personnes qui ne sont pas jeunes. C'est dans ce sens que je disais tantôt que cela aurait peut-être été intéressant qu'on puisse poser des questions aux groupes de jeunes qui sont venus nous entretenir au cours de nos travaux, à savoir sur leur perception à eux de la présence, par exemple, d'adultes au sein du Conseil permanent de la jeunesse à titre de membres du Conseil permanent de la jeunesse. La question qui m'est venue tout de suite à l'esprit, quand j'ai pris connaissance de votre mémoire, a été de me demander si cela ne pourrait pas risquer d'avoir un effet négatif à l'endroit des membres. Je suis sûr que vous allez m'expliquer pourquoi tel n'est pas le cas. Cela a été ma réaction instinctive de me demander si on associe ou si on donne le même statut è des adultes au sein même du Conseil permanent de la jeunesse avec la condition que vous posez que la majorité soit composée de membres ou de personnes considérés comme jeunes, ne craignez-vous pas que cela puisse en quelque sorte limiter la participation des moins bien expérimentés par exemple? Quelle est votre réaction là-dessus? Cela ne vous inquiète pas?

M. Boisvert: Si vous me permettez, la discussion que les membres du conseil ont eue, et peut-être qu'ils voudront compléter, tournait autour du fait suivant. Si on regarde les conseils existants au Québec présentement, comme le Conseil du statut de la

femme et les autres conseils, le Conseil des affaires sociales et de la famille, les gens qui y sont nommés, on cherche généralement - et pour les avoir côtoyés dans le passé -des gens qui représentent les gens concernés et qui veulent manifester leurs besoins et leurs préoccupations et des gens qui connaissent les interventions qui sont déjà faites. Je pense, par exemple, à M. Boyer de l'Université Laval qui était dans le Conseil de3 affaires sociales et de la famille, comme à M. Léo Cormier et compagnie, des gens qui connaissaient l'autre côté des interventions et qui étaient capables, dans un dialogue avec les représentants des familles, de dire si on fait des suggestions, qu'elles tiendront compte de ce qui existe comme programmes, de ce qui peut être amélioré de ces programmes et de traduire autour de la table des informations sur cela.

Dans ce cas-ci, ce qui est différent, c'est que vous mettez une marge quant à l'âge. Nous ne disons pas que les intervenants experts doivent être de plus de 30 ans, ce que nous disons, c'est qu'il y aurait comme deux rationalités à développer. Allons chercher des gens qui sont dans le conseil pour traduire les préoccupations et les besoins des jeunes, mais ayant aussi autour de la table des gens qui sont des "experts" - entre guillemets - et des intervenants expérimentés étant capables aussi de véhiculer des informations de ceux qui font la pratique, y compris des intervenants et des experts qui peuvent avoir moins de 30 ans, mais ce ne serait pas le critère. Donc, ces gens-là, ensemble, voulant faire les meilleures suggestions possible au ministre responsable tiendront déjà compte des difficultés des intervenants. Je ne sais pas si...

M. Gratton: Remarquez bien que je suis tout à fait d'accord que l'expertise dont vos membres pourraient faire preuve pourrait être extrêmement utile au conseil permanent. La seule question que je me pose est la suivante: est-ce que cela ne pourrait pas risquer, le fait justement que cette expertise puisse créer un sentiment - passez-moi l'expression - d'inhibition chez les jeunes, que les adultes aient tendance à exercer un certain dirigisme à l'égard des moins expérimentés que sont les jeunes au sein du conseil?

Mme de Grandmont-Fortier: Je pourrais peut-être vous dire qu'en fait nous sommes tous des gens préoccupés par les problèmes des jeunes avec qui on travaille tous les jours et que notre formation dans notre association du CQEJ est une formation d'aide, de relation d'aide et il n'y a personne chez nous qui n'est pas présent à ce dilemme de l'autoritarisme par rapport à la relation d'aide. Je pense, au contraire, que nous sommes les mieux placés par notre formation, qu'elle soit au niveau de la justice, des affaires sociales ou de la pédagogie, nous avons une formation qui nous permet d'aller contrecarrer cette espèce de peur ou de crainte qu'il pourrait y avoir d'une part et, d'autre part, d'apporter une forme d'aide qui puisse resituer le débat entre personnes qui sont intéressées à régler une problématique et non pas entre moi, l'adulte, et vou3, les jeunes. On a déjà dans nos rangs des gens qui sont formateurs dans ce sens.

M. Gratton: Oui, monsieur.

M. Aumont: J'ajouterais qu'il ne s'agit pas de cristalliser la différence entre... Si on s'intéresse à la problématique des jeunes, il faut avoir moins de 30 ans. La problématique des jeunes concerne l'ensemble de ceux qui s'intéressent aux jeunes, je veux dire, en tant que parents, en tant que chaque acteur dans la société qui s'intéresse à la problématique des jeunes. Donc, qu'on donne une voix privilégiée, qu'on donne une écoute particulière aux jeunes, c'est notre métier que d'écouter la problématique des jeunes pour être capables d'intervenir. Les cris qu'on entend, les efforts de toutes les associations et les regroupements de jeunes au Québec sont pour dire continuellement: Écoutez, on a un problème, comment pouvez-vous nous aider? A qui viennent-ils dire cela? Ils viennent vous le dire à vous, ils viennent le dire aux gens dans les écoles, dans les centres d'accueil, donnez-nous une écoute pour qu'on puisse sortir un peu ce qu'on a à faire. C'est nous le Québec de demain, les entreprises, notre façon d'agir. (17 h 30)

Donc, je pense que le fait de cristalliser cela et de dire que c'est 12 à 30 ans... Des problématiques des jeunes ou le devenir des jeunes au Québec, cela concerne tout le monde. Il s'agit de doser cela et je ne pense pas que cela va accentuer des différences. Il y a plusieurs jeunes qui reconnaissent des personnes qui ont plus de 30 ans. Je ne pense qu'il faille tracer cela à la ligne. C'est un peu dans ce sens-là qu'on disait que ce n'est pas qu'une question d'âge; c'est une question d'intérêt et de priorité dans ce qu'on fait.

On a des personnages au Québec qui ont agi auprès des jeunes sans mesure et ce n'est pas leur âge qui fait qu'ils ne s'intéressent pas aux jeunes ou qu'ils n'ont pas véhiculé les problématiques des jeunes. C'est un peu dans ce sens-là; c'était d'ouvrir un peu la perception.

M. Gratton: Je comprends et je pense très bien cerner le sens de votre intervention. Vous avez mentionné que vous avez, au sein de votre conseil, des membres

qui sont des étudiants. Est-ce que ce sont des gens qui disposent de cette... parce que s'ils sont étudiants, on doit présumer qu'ils sont probablement qualifiés comme jeunes âgés de moins de 30 ans. Est-ce qu'ils font partie de ceux qui ont l'expertise dont vous parlez et qui pourraient être utiles au conseil permanent?

M. Aumont: Peut-être que ce qui définit l'ensemble de nos membres et les retombées de l'action du CQEJ, c'est de ne pas être représentatif ou associé à des groupes ou à des façons de penser. Oui, il y a des jeunes dans les universités; il y a des jeunes enseignants. Si on prenait la balise du 30 ans, on a des gens qui travaillent et qui sont devenus experts et qui ont développé des compétences dans le domaine intervention et qui sont chez nous pour augmenter leur degré d'expertise pour être capables de mieux intervenir.

Il y a une tranche de notre clientèle membre qui s'inscrit très bien dans ce processus ou dans le processus qui est identifié dans le projet de loi. Mais je ne pense pas que ce soit la préoccupation première qu'on avait en venant ici. C'était d'être capable de traduire, de donner une écoute, de permettre aux jeunes d'avoir une écoute pour tous ceux qui ne peuvent pas l'articuler.

On dit aux jeunes: Écoutez, les jeunes vivent des difficultés. Il y a une question de décodage de l'information dans les problématiques et on a la prétention de dire que nous pouvons décoder certains messages. On a parlé des jeunes qui ont des difficultés et on dit que ce sont des problématiques de jeunes. Mais si on prend la question du suicide chez les jeunes, il y a un message qui est passé là-dedans.

Ce message est difficile à comprendre et pour ceux qui sont proches et pour ceux qui sont éloignés. Mais qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse veut se donner comme moyen? C'est d'avoir une meilleure écoute, pour être capable d'apporter des solutions à ces jeunes qui présentent des difficultés. Donc, c'est cela, notre clientèle, c'est cela, nos gens. On a cette prétention-là aussi.

M. Gratton: Est-ce que, par exemple, à titre d'information, il y a, parmi les membres de votre conseil d'administration, ce qu'on pourrait appeler des gens de moins de 30 ans, des jeunes?

M. Aumont; Oui. Mme Suzanne Boulet, par exemple, qui est étudiante à l'Université du Québec à Montréal. Il y en a d'autres aussi, Danielle Poirier. Danielle Poirier a moins de 30 ans.

M. Gratton: Je n'étais pas surpris de...

M. Aumont: Les qens du conseil d'administration proviennent... Il y a le juge Oscar d'Amours qui est juge au Tribunal de la jeunesse. Il y a des gens qui viennent des centres d'accueil pour mésadaptés socio-affectifs ou déficients mentaux. Il y a des gens qui viennent de l'éducation, comme Mme de Grandmont-Fortier. Il y a des universitaires; il y a des jeunes; il y a Guy Boisjoli qui est DSP dans un centre d'accueil. Il y a quelqu'un du Conseil supérieur de l'éducation. C'est très diversifié.

M. Gratton: Je dois vous dire que parmi toutes les personnes qu'on a accueillies ici au cours des huit jours de nos travaux, on en a identifié un très grand nombre qui semblent avoir toutes les qualités dont vous parlez et qui sont peut-être membres de votre conseil, de toute façon.

Chose certaine, l'objectif de donner, entre autres, une voix à ceux que vous appelez les sans-voix au sein du conseil permanent, c'est sûr que ce sera très difficile de l'assurer par une représentation concrète. Donc, il faudra imaginer les moyens d'associer les organismes comme le vôtre, sinon à titre de membre - je n'en indique pas pour autant une décision gouvernementale à ce moment-ci - tout au moins, trouver un mécanisme qui permettra de mettre à contribution l'expertise que vous représentez.

Une dernière question, M. le Président, puisque le temps passe. Vous semblez insister sur la nécessité de fusionner le Secrétariat de la jeunesse avec le Conseil permanent de la jeunesse. Est-ce que vous pouvez expliciter un peu pourquoi vous pensez que cela est souhaitable?

M. Boisvert: Je pense qu'il faut le mettre en relation avec notre suggestion de faire en sorte que le futur conseil soit plus qu'une fonction conseil, mais que le futur conseil puisse combiner les aspects conseil, les aspects subventionnaires et les aspects de coordination interministérielle.

Alors, la façon de le faire, c'est de prendre l'équipe du Secrétariat à la jeunesse et de l'introduire directement à l'intérieur des cadres du futur conseil. Un conseil avec une fonction conseil - je suis membre du Conseil québécois pour la recherche sociale -c'est un organisme qui, relié à Mme Lavoie-Roux, a à lui donner des conseils sur le développement de la recherche sociale au Québec.

Mais on a une fonction subventionnaire, que vous connaissez, et aussi je pense que l'expérience, c'est quand on combine différentes fonctions de ce type-là, on est à même d'influencer les choix qui sont faits. Nous pensons qu'il serait difficile pour les groupes de jeunes, les intervenants, de démêler l'écheveau entre ce qui est le

conseil, ce qui est le secrétariat, les rôles de chacun. Pourquoi ne pas en faire un seul . organisme qui joue les trois rôles?

M. Gratton: Dans le fond, ce qui nous inspire dans l'élaboration du projet de loi, tel qu'il existe, c'est le modèle du Conseil du statut de la femme. Essentiellement, on perçoit que le Secrétariat è la jeunesse peut continuer à faire le travail de coordination interministérielle.

C'est d'ailleurs un élément sur lequel nous avons insisté depuis un an maintenant, soit cet aspect du travail de Secrétariat à la jeunesse de faire en sorte qu'il y ait une présence de l'élément jeunesse à tous les niveaux, ce qui, à notre avis, a manqué dans le passé.

De même, quant à la dissémination des informations des services gouvernementaux, nous pensons qu'il est peut-être plus efficace de faire venir le secrétariat. Je présume qu'en faisant cette recommandation à l'égard du Conseil permanent de la jeunesse et du Secrétariat à la jeunesse, vous ne la faites pas nécessairement en ce qui a trait au Conseil du statut de la femme.

M. Aumont: On n'a pas considéré cela.

M. Gratton: Non, d'accord. M. le Président, je souhaiterais et, d'ailleurs, on pourrait peut-être y revenir mais, pour le moment, je cède la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le ministre. Maintenant, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mesdames et messieurs, je voudrais vous souhaiter la bienvenue et vous remercier d'avoir accepté de vous présenter devant cette commission. Je dois dire qu'on a eu finalement peu de mémoires qui nous sont venus, je dirais, d'organismes adultes, en tout cas, qui regroupaient majoritairement des adultes.

On a surtout reçu des mémoires qui venaient de jeunes. J'ai eu l'occasion de mieux prendre connaissance des activités de votre organisme, surtout à l'occasion de votre dernier congrès auquel, malheureusement, je n'ai pas assisté. Mais j'avais reçu toute la documentation et j'ai été impressionnée par l'ampleur et la qualité des travaux qui sont réalisés chez vous.

Pour autant que je prenais connaissance des activités de votre organisme et de la qualité des travaux, je me demandais sérieusement s'il y avait une nécessité de se donner une structure pour faire à nouveau des études, des recherches et ainsi de suite. Là, vous nous dites que ce serait important. Vous le dites pour différentes raisons.

J'aimerais peut-être revenir sur vos recommandations et essayer de développer les propositions que. vous faites. D'abord, vous commencez en parlant de - au volet 3.3 en page 5 - l'importance du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse, les deux premières lignes.

Vous dites: "La situation des jeunes de quinze à trente ans est grandement tributaire des interventions qui ont été faites avant l'âge de quinze ans". En somme, vous nous parlez beaucoup de la jeunesse en termes de problématique. Vous dites: Si on veut vraiment, ce que j'appelle fermer le robinet, il faut intervenir beaucoup avant quinze ans. Il n'y a rien qui prévoit que dans le Conseil permanent de la jeunesse, il y ait une action qui, précisément, sait davantage de portée préventive.

Au moment où l'on commençait les travaux de cette commission, je disais que le conseil aurait eu des chances d'une plus grande efficacité si on avait attaché à ce conseil deux commissions permanentes. Est-ce que vous connaissez certains organismes-conseils qui ont en leur sein des commissions permanentes? Cela permet au gouvernement d'identifier des priorités et de dire au conseil qu'ils peuvent traiter de toutes les questions mais celle-là de façon prioritaire.

Je disais, pour ma part, que des deux commissions, il devrait y en avoir une sur l'adolescence parce que l'essentiel des problèmes que connaissent les jeunes trouvent leur origine dans l'enfance et dans l'adolescence. Une seconde commission pourrait être sur l'emploi. Egalement, parce qu'il y a beaucoup de problèmes qui sont vécus par des jeunes de plus en plus nombreux et qui viennent du fait qu'ils n'ont pas de travail. Comment réagissez-vous, premièrement, par rapport au rôle qu'un conseil consultatif pourrait jouer en matière de prévention, donc d'une meilleure connaissance des phénomènes de l'adolescence et deuxièmement, par rapport è ce que je pensais, comme beaucoup d'autres, être une priorité, c'est-à-dire l'emploi?

M. Boisvert: Si vous me permettez, je vais amorcer un début de réponse. Peut-être que mes compagnons et compagnes voudront la prolonger.

Quand on a écrit cela, ce que disaient les membres du conseil, c'est que si on est professeur dans le secteur régulier primaire, secondaire ou collégial, si on est dans un centre d'accueil pour déficients mentaux légers, moyens, etc., enfin, quel que soit le niveau où l'on est, lorsqu'on voit les problèmes que les jeunes de quinze à trente ans ont, tout cela est relié à des situations économiques, bien sûr, à cause du manque d'emploi, etc. Mais je pense, par exemple, pour les 15-18 ou les 15-25, qu'il y a plusieurs situations qui se sont détériorées à

cause de la famille qui s'est séparée, des jeunes qui ont quitté l'école tôt, des jeunes dont les problèmes n'ont pas été dépistés assez tôt, des interventions qui ont été mal menées à un niveau ou l'autre, donc, il est difficile de couper et de dire que si on préparait des politiques au Québec pour les jeunes de 15 à 30 ans, d'oublier toutes les interventions qui ont été faites avant. D'où l'importance pour nous qu'il y ait des gens qui soient des intervenants qui portent ces interventions avec les jeunes qui penseront à proposer des mesures pour les 15-30 ans.

Par exemple, je pense à un jeune qui aurait 19 ou 20 ans dans le centre d'accueil de Jean-Pierre. J'imagine difficilement comment on peut couper cette intervention de ce qui se fait au chapitre des adolescents déficients ou de ce qui se fait dans leur scolarisation au niveau primaire. Tout est relié.

C'est pourquoi il était intéressant pour nous de proposer qu'il y ait des intervenants qui connaissent ces champs et qui sont donc capables de faire la relation entre la situation des 15-30 ans et ce qui s'est fait auparavant et ce qui se fait présentement. Par ailleurs, pour ce qui est des suggestions que vous faites, c'est la première fois dont on en entend parler. J'ai l'impression que s'il y avait la formation de commissions particulières, cela permettrait d'étudier un certain nombre de questions particulières en rapport avec les adolescents ou... Mais, au fond, je pense que c'est une formule qui permettrait, un peu comme au Conseil supérieur de l'éducation avec ses quatre commissions, une ouverture à des problématiques particulières. Je ne sais pas si Jean-Pierre ou...

M. Aumont: Je serais d'accord là-dessus dans le sens que peu importe l'angle sous lequel on aborde les problématiques, je pense que ce qu'il faut avoir comme préoccupation de base, c'est que tout est relié ensemble finalement. Qu'on mette le focus sur les adolescents ou sur l'emploi, je pense que ce sont des problématiques qui sont vécues et débattues quotidiennement dans l'ensemble de nos médias et qu'elles sont au centre des préoccupations de tout le monde. (17 h 45)

Je pense que ce qu'il faut garder en tête, c'est que cela fait partie du quotidien. Les éléments de réponse à ces deux problématiques font que c'est souvent le résultat de ce qu'on dit qui est difficile pour les jeunes. Les difficultés au chapitre de l'emploi sont tributaires de tout un passé ou de tout un réseau d'activités, tant au plan familial que social ou culturel. L'ensemble des éléments est toujours présent. Je pense qu'il faut toujours fermer la boucle et rassembler tout le monde là-dedans. Je pense que ce sont deux volets intéressants si on les regarde par rapport au rôle du conseil permanent.

Mme Blackburn: Beaucoup de jeunes étaient sceptiques devant la structure. Je dois dire que mon scepticisme vient davantage du fait... Un peu comme vous le faites présentement, on finit par définir la jeunesse en fonction d'une problématique des jeunes en difficulté, essentiellement et vous n'êtes pas les seuls. Je vous dirais que c'est ce qui m'a le plus frappée. On n'a pas eu un seul mémoire qui est venu nous parler des jeunes au travail, à l'exception des jeunes travailleurs de ce que j'appellerais la culture. On sait qu'ils sont plus souvent chômeurs que travailleurs, ils éprouvent des difficultés réelles.

On n'a eu aucun mémoire qui est venu ici nous exprimer la situation que vivaient les jeunes en emploi. On finit par définir la jeunesse au Québec en fonction de ses difficultés ou de sa dépendance économique. Je dois dire que je trouve cela préoccupant. Si c'est cela la jeunesse au Québec, est-ce qu'il ne faut pas davantage investir dans la prévention, dans une meilleure connaissance des phénomènes qui nous amènent la problématique qu'on connaît? Je me dis: Un Conseil permanent de la jeunesse, dans cette perspective, me laissait sceptique.

La seconde chose, c'est qu'un groupe de jeunes en particulier nous disait: Vous savez, la jeunesse, cela passe. Ce n'est pas comme le sexe. Les femmes sont généralement femmes de la naissance à la mort et la jeunesse, cela passe. On a de la difficulté à saisir c'est quoi la jeunesse, est-ce que c'est de 12 à 35 ans, est-ce que c'est de 15 à 24? Il y en a qui disaient que c'est de 18 à 35 ans. On a eu ici à peu près toutes les définitions, mais exclusivement en termes de dépendance financière et d'âge.

C'est pourquoi je reste sceptique par rapport à l'outil qui est proposé parce que, premièrement, il ne définit la jeunesse qu'en fonction de difficulté, et, ensuite, il y a peu ou pas de prises ou d'orientations qui soient davantage en vue d'une prévention.

M. Aumont: II y a deux réactions que j'ai à ce que vous nous présentez.

Mme Blackburn: J'ajouterais peut-être: Est-ce que cela ne vous inquiète pas qu'on définisse la jeunesse au Québec en fonction des difficultés, vous qui êtes intervenants?

M. Aumont: C'est que nous, on la pense en termes de santé. On travaille toujours en termes de santé, de devenir. En tout cas, si vous parlez du Conseil québécois pour l'enfance et la jeunesse, c'est qu'on pense une enfance et une jeunesse en santé. C'est ce vers quoi on se dirige quotidiennement. Notre action, on agit auprès de jeunes qui

nous disent que leurs besoins c'est: J'ai une difficulté.

Nous, on intervient dans le sens de faciliter le passage, de résoudre les problématiques. Je pense que parmi nos membres, nous pouvons définir une jeunesse en santé. Je vous dirai simplement: Quand on n'a pas mal, on ne consulte pas. Les jeunes qui ne s'expriment pas aujourd'hui, ce sont des jeunes qui sont en santé, qui ont résolu le problème du chômage, ils travaillent, ils ont résolu le problème d'ordre familial, émotionnel et Us ont réussi à se tailler une place dans notre société.

Je pense qu'il faut regarder cela positivement et se dire: II y a quand même une majorité de jeunes au Québec qui est en santé, qui travaille et qui fait les choses dans un certain ordre; qui n'a pas de difficulté. Les jeunes qui ont de la difficulté à se faire entendre, ce sont ceux qui vivent des problématiques. C'est toute la dimension émotionnelle ou critique où au plan de l'argent les jeunes ne Pont pas, ou ils n'ont pas la santé mentale ou psychologique pour le faire.

Ce qu'on vient dire, peut-être qu'on a un moyen d'avoir une écoute. C'est là que je vois le rôle important du conseil permanent. C'est d'avoir une écoute constante pour être capable, d'une part, prévenir et, d'autre part, apporter des solutions à ces personnes directement.

Je pense que la majorité des jeunes au Québec est quand même en santé. Ceux qui crient le plus fort c'est ceux qui ont mal et c'est ceux-là qu'on veut aider. Dans ce sens, le conseil permanent a un rôle bien précis à jouer. Il faut décoder tous ces messages et les traduire et les retourner.

Mme Blackburn: Les fonctions que vous attribuez au conseil - en page 6 de votre mémoire - dépassent assez largement ce que l'on confie généralement aux organismes consultatifs.

Quand vous dites: Entre autres fonctions, le soutien des interventions jeunesse au Québec, à quoi songez-vous en particulier? Symposiums, conférences ou encore regroupements? À quoi songez-vous?

M. Boisvert: Je pense que ce qui était sous-jacent à l'intérieur de la discussion des membres du conseil, c'était si le futur conseil permanent, pour se permettre d'avoir ses racines un peu partout, par les problématiques ou les régions, pouvait avoir un budget subventionnaire suffisant pour aider ces groupes à prendre la parole et à s'adresser à lui. Ce n'était pas pour remplacer les enveloppes budgétaires des ministères qui s'adressent déjè aux maisons de jeunes, etc., mais pour dire que, si on a à donner des conseils ou des avis au gouvernement sur l'une ou l'autre des interventions des ministères, etc., il ne sera pas facile d'avoir le point de vue des jeunes sinon qu'en les aidant à prendre cette parole. Cela peut être toutes sortes de moyens: rencontres, médias, études particulières en région qui permettraient à ces jeunes d'être reliés au conseil permanent.

Mme Blackburn: Beaucoup de jeunes nous ont réclamé qu'il y aurait un préalable à la création du Conseil permanent de ta jeunesse. C'était une politique de reconnaissance et de financement des organismes jeunesse. Cela nous a encore été répété tout à l'heure? Je voudrais vous poser une question, bien que je sache d'avance qu'elle n'a pas nécessairement été dans l'ordre de vos préoccupations et de vos interrogations. Les associations au Québec qui sont, je dirais, les plus vigilantes et les plus actives sont surtout les associations étudiantes pour lesquelles on a prévu un mode de financement qui leur laisse la totale autonomie à l'endroit du collège, à l'endroit de l'université et à l'endroit du gouvernement. C'est un peu la formule Rand qu'elles ont avec la loi 32. Est-ce qu'on peut penser qu'il serait souhaitable de se donner une formule semblable pour les autres organismes jeunesse dans les autres secteurs, cette espèce d'autonomie vis-à-vis du ministère responsable?

M. Boisvert: Spontanément, si je voulais réagir sur ce qu'est l'application d'une formule comme la formule Rand dans une université ou dans un collège, car on peut pointer les jeunes et être capable de dire que l'institution va fournir des budgets, c'est plutôt difficile de l'appliquer aux maisons de jeunes et aux organismes jeunesse en général, car à qui s'appliquerait la formule Rand? Ce serait difficile.

L'expérience qu'on peut avoir, ce sont les relations avec des organismes jeunesse financés par exemple par Mme Lavoie-Roux, par son programme des organismes communautaires. Je pense que ce que les groupes de jeunes demandent à ce niveau, c'est tout simplement lorsque nous avons une subvention de ce ministère pour une intervention jeunesse, que ce soit maison de jeunes ou centres communautaires à Montréal, dans les deux cas ou d'autres cas, bien sûr, nous acceptons de rendre des comptes au bailleur de fonds, mais laissez-nous libres de nos orientations et de vous les présenter avec nos projets chaque année.

Spontanément, je vois difficilement comment ce qui est applicable dans une institution où des gens sont inscrits, dans une université ou dans un collège, comment on pourrait l'appliquer dans la population en général auprès d'un groupe. Une formule serait difficile à trouver.

Mme Blackburn: Je ne pensais pas vraiment à l'application d'une formule Rand. Je pensais aux résultats que cela donne de façon concrète. Ce mode de financement laisse une totale liberté aux organismes, aux associations étudiantes. Us ne se sentent pas tributaires ni de l'université, ni de l'école et du collège, non plus que du ministère de l'Éducation. Ils ont donc toutes les latitudes pour présenter tantôt leurs revendications.

Ma question était simplement la suivante. Est-ce qu'on peut penser qu'il ne serait pas utile d'agir de la même façon pour les autres organismes? Vous faites allusion aux maisons de jeunes et aux centres communautaires. C'est la fin de leur exercice financier et ils sont absolument ignorants de ce qui va leur arriver au 1er avril. Ils vivent dans une insécurité permanente année après année. Il n'y a rien de récurrent là-dedans, parce qu'on n'a pas de politique. Dans ce sens, c'est l'insécurité. Une partie de leurs activités consiste à aller faire des levées de fonds, ainsi de suite. Tout ce que je me demandais, c'est s'il n'y aurait pas lieu d'envisager une formule qui donnerait une certaine stabilité à nos organismes jeunesse.

M. Boisvert: C'est différent. Si je peux faire appel à une expérience personnelle, j'ai été durant six ans cadre à Centraide Montréal. C'est sûr qu'on était rapidement le seul bailleur de fonds qui se compromettait pour plus d'une année. On avait même des contrats avec nos 188 organismes sur plus de trois ans. Pour avoir côtoyé les gens des différents ministères qui financent aussi ces organismes-là en général, il est certain que ce serait utile, mais pas juste pour les organismes jeunesse, d'avoir au Québec, à partir des ministères, des formules qui assureraient au groupe communautaire en général du financement sur plus d'une année. Une formule automatique risque d'être compliquée. Cela dépend des champs. Je pense, par exemple, aux OVEP, aux camps de jeunes. Cela s'est fait du côté des camps de jeunes. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche fournit une formule automatique aux gens pour ce qui est financé dans les immobilisations et des budgets de fonctionnement.

Oui, ce serait intéressant d'avoir une politique qui détermine des formules. On peut comprendre qu'en ce qui concerne le gouvernement, il faut attendre qu'un budget soit voté avant de l'annoncer au ministère qui l'annoncera au groupe.

Pour ce qui est du secteur jeunesse, oui, il serait intéressant d'avoir une formule qui compromette pour plus d'une année, mais je vois les difficultés à affronter pour définir une mathématique qui conviendrait de quel sceau on donne à quel groupe accrédité, etc. C'est une idée généreuse, mais je vois beaucoup d'embûches quant à la façon de la mettre en pratique.

Mme Blackburn: II y aurait peut-être une façon de le faire, c'est de ne pas attendre toujours à la fin de l'exercice financier pour informer ces organismes, à savoir s'ils auront les budgets nécessaires pour assumer leur survie l'année suivante. Donc, on pourra faire une évaluation au moins six mois ou huit mois avant et déjà faire connaître les politiques.

M. Boisvert: Ce qui pourrait être fait, c'est ce que vous faites pour vos propres établissements: les affaires sociales en particulier. Si je suis directeur général d'un CLSC, mon budget me sera connu quelques mois après le début de l'année financière, mais on m'autorise à dépenser le même montant que le budget de l'année d'avant.

Alors s'il y avait une formule qui disait: Jusqu'à preuve du contraire, vous fonctionnez sur le budget autorisé de l'année précédente; vous leur permettez au moins d'attendre d'avoir des budgets annoncés.

Mme Blackburn: Si vous me le permettez, j'ai une dernière question qui demanderait peut-être beaucoup d'élaboration, mais je sais que le temps coule et que mes amis d'en face ont un caucus tantôt. Vous dites en page 8 de votre mémoire que vous souhaitez que le Conseil permanent de la jeunesse puisse être appelé à l'élaboration d'une politique concernant la jeunesse au Québec. Ce qui nous a été beaucoup dit ici, c'est qu'il y aurait dû d'abord y avoir une politique et le conseil permanent aurait été le critique de cette politique, parce qu'une politique gouvernementale de la jeunesse traduit la philosophie du gouvernement au pouvoir, sa conception du développement de la société, de même que des priorités.

Une politique de la jeunesse est propre à un gouvernement et non pas à un conseil consultatif. Tout ce qu'il peut faire c'est proposer des éléments ou être critique sur des éléments. A l'instar de ce qui nous a été dit, n'aurait-il pas été préférable que le gouvernement arrête ses grandes orientations, les principaux éléments de sa politique et qu'ensuite, le conseil soit en réaction?

M. Boisvert: C'est toujours un peu la question de l'oeuf et de la poule, cela roule. On peut toujours souhaiter qu'il y ait quelque chose qui ait été fait avant, mais c'est qu'à partir du moment où on établit un peu les règles du jeu, je me dis que le projet du Conseil permanent de la jeunesse peut permettre d'apporter un éclairage qui permettra de définir une politique avec plus de substance, parce qu'on va s'être mis en ligne un peu partout au Québec pour ramasser de l'information pour peut-être la

définir avec plus de justesse, mais c'est dangereux aussi de le cristalliser, parce que, comme, vous le disiez tantôt, les jeunes changent d'une année à l'autre, cela évolue, les jeunes passent d'une génération à l'autre et il faut toujours demeurer à l'écoute.

Dans ce sens-là, je dirais que le rôle du conseil sera peut-être d'être toujours à l'écoute des jeunes et d'ajuster tous les programmes ou toutes les activités gouvernementales dans l'ensemble des programmes.

Mme Blackburn: Vous avez fait état des difficultés qu'éprouve la jeunesse qui, à mon avis, appelle des interventions d'urgence. Vous prenez comme exemple le Conseil du statut de la femme en disant: C'est une façon intéressante de centralisation et ainsi de suite. Je voudrais vous rappeler que le Conseil du statut de la femme qui a été créé en 1973 a réussi à produire sa première politique consistante... égalité et indépendance, quelque part en 1979, six ans après sa création et, c'est souvent celui qu'on cite en exemple comme ayant été le plus performant. Mais, la plupart des autres conseils consultatifs ont été créés après un livre blanc, un énoncé d'orientation, une ébauche de politique.

Écoutez, je ne voudrais pas faire patienter trop longtemps mes collègues, je sais qu'ils ont des engagements. J'aurais eu encore plusieurs questions. Je trouve cela particulièrement intéressant. Comme le ministre l'a dit, tout à l'heure, ce n'est pas parce que vous êtes les derniers que vous êtes les moindres. Cela nous a fait plaisir de vous entendre. Et, juste pour vous dire également que beaucoup de vos recommandations ont été retrouvées dans d'autres mémoires qui étaient signés par les jeunes, c'est-à-dire que vous traduisez bien leur réalité. Je vous remercie de votre participation.

Le Président (M. Filion): M. le ministre.

M. Gratton: Je veux dire à Mme de Grandmont-Fortier, à M. Aumont et à M. Boisvert que nous apprécions leur présence et le témoignage qu'ils nous ont apporté ici. J'ai noté avec intérêt les diverses suggestions et recommandations que vous nous faites et j'ai noté avec encore plus d'intérêt l'offre que vous faites au Conseil permanent de la jeunesse de se prévaloir de votre expertise. Nul doute que nous explorerons les moyens de mettre cette contribution à profit. Merci infiniment, on se retrouvera, M. le Président, quant à nous, à vingt heures pour les remarques finales.

Le Président (M. Filion): Juste auparavant, M. le ministre, il faudrait déposer certains mémoires, cela va prendre une minute. Donc, à mon tour de vous remercier.

M. Boisvert: Merci infiniment. Mémoires déposés

Le Président (M. Filion): La partie consultation de notre mandat est terminée. Avant de ce faire, je voudrais quand même attirer votre attention sur la liste des mémoires qui nous ont été distribués ou remis pour dépôt seulement, c'est-à-dire, des groupes qui n'ont pas demandé à être entendus ou n'ont pas voulu être entendus ou n'ont pas pu être entendus, mais qui se contentent de déposer un mémoire, je voudrais en faire la liste parce qu'il y a -certains changements.

Donc, le Centre apprenti-travail du Québec, le mémoire (52M); le Centre de recherche-action sur les relations raciales, le mémoire (41M)$ le Centre intersection jeunesse de Brossard, (19M); Des cliques et des gangs, (54M); Conseil régional de la santé et des services sociaux du Saguenay— Lac-Saint-Jean, (40M); Contact jeune entreprise Mirabel (CJEM) Inc., (18M); M. Harold Geltman, (17M); Groupes de soutien aux initiatives-jeunesse de la région Laurentides-Lanaudière, (45M) et Table de concertation jeunesse Îles-de-la-Madeleine -Module social communautaire, (13M).

Pour la fin de nos travaux, ces mémoires sont donc considérés comme étant déposés. Alors, je vous rappelle que tes travaux reprendront à vingt heures. Pour les remarques finales, 45 minutes, selon l'entente intervenue.

Une voix: Ce n'est pas obligatoire.

Le Président (M. Filion): Quarante-cinq minutes non obligatoires ont été prévues pour chacun des groupes parlementaires. Donc, nos travaux sont suspendus jusqu'à vingt heures.

(Suspension de la séance à 10 h 4)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Dauphin): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte. Nous sommes maintenant rendus à l'étape des remarques finales. Je vous souligne que la commission des institutions a entendu 45 groupes et a reçu 54 mémoires. Nous avons siégé durant 44 heures et 13 minutes précisément.

Sans plus tarder, je demanderais aux deux représentants des principales formations politiques, en commençant par l'Opposition et Mme la députée de Chicoutimi...

Mme Blackburn: Je croyais qu'il avait

été décidé que c'était comme l'inverse l'autre jour, au moment où on était ici.

M. Gratton: On m'informe que la pratique courante - je n'ai pas d'objection à commencer si c'est le cas - dans ce genre de consultation, c'est qu'on inverse l'ordre des interventions. Je ne sais pas si Mme la secrétaire de la commission peut confirmer que c'est le cas.

La Secrétaire: Je me suis informée et on m'a dit que c'était dans le même ordre que...

M. Gratton: Alors, allons-y.

La Secrétaire: ...avec consentement, vous pouvez changer, si vous le voulez...

M. Gratton: Est-ce que vous avez une préférence? Je n'en ai pas.

Mme Blackburn: Non, mais c'est ce qu'on avait dit la dernière fois.

M. Gratton: Alors, voulez-vous que je commence?

Mme Blackburn: Oui, je vous laisserai aller.

M. Gratton: D'accord.

Le Président (M. Dauphin): M. le ministre.

Remarques finales M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, je voulais dire, d'entrée de jeu, que je suis extrêmement heureux et satisfait, au terme de nos travaux, de la qualité de la participation à cette consultation sur le projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse.

Vous l'avez souligné, nous avons passé quelque 44 heures en commission à entendre les représentations. Nous avons reçu 54 mémoires - j'en avais compté 52, M. le Président, mais je suis sûr que Mme la secrétaire de la commission est beaucoup plus au fait que je ne puis l'être de ces détails - qui nous été présentés par des gens qui représentent, au chapitre des regroupements d'organismes, quelque 250 ou 275 organismes oeuvrant auprès de la jeunesse québécoise. Des jeunes, des adultes engagés dans le milieu des jeunes, des gens de toutes les régions et de tous les secteurs, y compris ceux que le projet de loi avait peut-être même oubliés, des femmes soucieuses de participation équitable, des jeunes de communautés culturelles, des jeunes de tous les groupes d'âge, des intervenants sociaux et communautaires auprès des jeunes très défavorisés, des intervenants économiques, des "concertationistes", des combatifs et même des jeunes représentants des partis politiques.

Il faut déplorer une exception, soit celle des jeunes militants du Parti québécois qui n'ont pas cru bon venir saisir la commission de leur point de vue, à cette commission parlementaire que la députée de Chicoutimi a d'ailleurs qualifiée à plusieurs reprises comme étant un exercice démocratique important, et j'en conviens. Bref, M. le Président, une quantité et une diversité impressionnantes de gens nous ont permis d'en apprendre beaucoup sur la situation des jeunes. C'est sûrement mon cas personnellement et je suis heureux d'avoir participé à ces travaux, car ils furent fertiles en renseignements et en sensibilisation sur une foule de choses que nos occupations quotidiennes nous portent trop souvent à oublier.

On s'est fait dire des choses en particulier sur les jeunes itinérants, sur les mutations qu'a subi le milieu jeunesse durant des années, sur les nouvelles formes d'engagement des jeunes et sur leurs préoccupations. Chose certaine, j'estime que j'aurai personnellement dorénavant une façon bien différente de percevoir les choses dans les prises de décision auxquelles je suis appelé à participer comme membre du gouvernement.

Certains mémoires n'ont pas fait l'objet d'audition ici à l'Assemblée nationale. Je crois qu'une dizaine n'ont pas été entendus pour diverses raisons, notamment qu'on ne souhaitait pas être entendu. Dans le cas d'au moins un organisme des Îles-de-la-Madeleine, c'était le facteur éloignement. Quant aux lettres que nous avons reçues, elles seront toutes analysées et considérées dans l'étude que nous ferons des représentations que nous avons reçues de façon globale relativement à ce projet de loi.

Je reconnais au passage que, de toute évidence, il y a eu un peu de confusion autour des délais entourant la tenue de cette commission. Je pense qu'il y a lieu de remercier, de façon très particulière, la secrétaire de la commission, Mme Giguère, pour le suivi serré qu'elle a fait de tous les organismes inscrits sur la liste maîtresse ce qui, à mon avis, a grandement contribué au déroulement ordonné et fructueux de nos travaux.

D'une façon générale, notre lecture des représentations qui ont été faites à la commission indique que la création du Conseil permanent de la jeunesse obtient l'appui assez général du milieu jeunesse, un appui inspiré certes par la sagesse de vouloir attendre de voir à l'usage plutôt qu'inspiré par la méfiance et la dénonciation gratuites.

Notre approche et celle du milieu

jeunesse en général semblent se rejoindre quant à l'opportunité de laisser la chance à cet organisme de faire ses preuves. Dans leur sagesse, les jeunes ne porteront leur jugement sur le conseil qu'après l'avoir observé un certain temps. Ils lui laisseront, probablement, peu de temps en comparaison avec d'autres organismes du genre, mais le positionnement adéquat et rapide du Conseil permanent de la jeunesse dans le monde gouvernemental sera une préoccupation importante du gouvernement et, cela, j'en donne l'assurance au nom du premier ministre.

Plusieurs ont suggéré des modifications qui auraient pour effet à leurs yeux de bonifier le projet de loi. Peu ont, cependant, relié radicalement leur appui à l'inscription de leurs recommandations dans le projet de loi et sont demeurés favorables au principe.

Je pense donc pouvoir indiquer qu'il est clair que le gouvernement ira de l'avant avec la création du Conseil permanent de la jeunesse.

Quant è la lecture que nous faisons, au gouvernement, des représentations faites en commission parlementaire, il y a d'abord les auditions qui ont été particulièrement intéressantes parce qu'elles ont souvent débordé le cadre strict du projet de loi 104. À cet égard, elles auront été une tribune fort appréciée, j'imagine, par les jeunes mais, sûrement, par le gouvernement qui ne dispose souvent pas de ces informations à caractère informel que seuls les contacts directs peuvent permettre de faire passer.

Donc, cet aspect des auditions fut très apprécié. Plusieurs recommandations ont débordé le cadre du projet de loi 104, notamment la question du soutien à l'action communautaire qui devient, inévitablement, à un moment donné, celle de leur image communautaire et de l'institutionnel; la question de l'itinérance chez les jeunes et l'interdépendance des différentes difficultés vécues chez les plus défavorisés; la question de l'emploi et plus fondamentalement celle de la participation effective des jeunes aux activités de base de la société québécoise; la question titulaire du dossier jeunesse au gouvernement.

Il faut noter aussi qu'un très grand nombre de recommandations ont trait, finalement, à la régie interne, au mode de fonctionnement et aux priorités du conseil et suggèrent que le gouvernement devrait produire un rapport consignant toutes ces recommandations de façon que les membres du Conseil permanent de la jeunesse en soient saisis dès leur entrée en fonction.

Quant aux propositions touchant directement la forme du projet de loi 104, il faut en distinguer deux catégories, d'abord, celle ayant trait au mode de sélection des membres, ce qui touche à la participation des organismes jeunesse, à la participation gouvernementale et à la question de la représentativité au conseil et, deuxièmement, celle ayant trait aux mandats et aux pouvoirs du Conseil permanent de la jeunesse.

D'abord, pour ce qui est des suggestions relatives au processus de sélection des membres du conseil, il faut constater la diversité des suggestions. Il faut, également, constater que la régionalisation du mode de sélection est une formule qui est revenue très souvent.

Un autre principe a souvent été évoqué, soit celui de laisser au gouvernement le simple rôle d'entériner des nominations faites au sein même du milieu jeunesse. Il apparaît clair, à la lecture de ces recommandations, qu'il était particulièrement opportun et important pour le gouvernement, dans la rédaction du projet de loi, de mettre de l'avant un mode de sélection des membres du conseil qui soit plus respectueux de l'input du milieu jeunesse que la formule traditionnelle de nomination des membres de conseil consultatif du genre. Nous n'excluons pas d'améliorer encore la formule prévue au projet de loi. (20 h 15)

II faut aussi constater que le projet de loi dans la définition d'un organisme de jeunesse pose un problème à un certain nombre d'organismes, dont la légitimité pour participer au processus de mise en candidature ne fait pas de doute, mais que l'exigence d'incorporation ne rend pas admissible. Le gouvernement devra se pencher sur cette question soulevée à plusieurs reprises et qui mérite, è mon point de vue, d'être améliorée.

Enfin, un certain nombre de mémoires nous ont fait valoir que la représentativité au collège électoral et au Conseil permanent de la jeunesse de certains groupes, hommes, femmes, communautés culturelles, groupes d'âge, minorités linguistiques, régions et secteurs, mériterait peut-être d'être un peu mieux qarantie dans le projet de toi. C'est aussi là une série de recommandations qui fera partie de notre analyse.

En ce qui concerne le mode de sélection des membres donc, beaucoup de suggestions à intégrer aux impératifs d'efficacité et de crédibilité du Conseil permanent de la jeunesse vis-à-vis de l'appareil gouvernemental. Nous retenons de façon très particulière l'importance pour ce conseil de se développer des racines dans le milieu jeunesse. Nous nous interrogeons cependant sur la pertinence de décrire dans le projet de loi la forme précise que devraient prendre ces liens. Peut-être serait-il plus opportun de donner au conseil la chance de les développer à sa façon plutôt que de lui imposer une formule qui pourrait avoir pour effet d'engendrer la confusion quant à ses véritables mandats.

L'autre série de recommandations concerne les mandats et les pouvoirs du Conseil permanent de la jeunesse. Nous avons déjà indiqué que nous souhaitons lever les ambiguïtés quant à la possibilité pour le Conseil permanent de la jeunesse de déterminer ses priorités d'actions. Nous y croyons à cette autonomie du Conseil permanent de la jeunesse. En effet, un bon nombre de mémoires ont souligné ces ambiguïtés. Le gouvernement a eu, à maintes reprises, l'occasion de réaffirmer ses intuitions à ce sujet et déterminera dans les semaines qui viennent les moyens qu'il entend mettre en oeuvre pour lever ces ambiguïtés tout en respectant les autres règles en vigueur au gouvernement, en particulier, certaines règles administratives qui ne seraient pas fondamentalement utiles de contourner. Quoi qu'il en soit, nous prendrons nos responsabilités et nous respecterons nos engagements, comme nous le faisons depuis que nous sommes là, en matière jeunesse comme en matière de gestion des affaires publiques.

En guise de conclusion, M. le Président, le gouvernement s'en va maintenant faire ses devoirs. Nous allons accorder une considération très sérieuse et très complète aux nombreuses recommandations et représentations que nous avons reçues. Nous sommes heureux d'avoir rencontré les organisations et les organismes oeuvrant dans le milieu jeunesse. Au nom du gouvernement, je désire les remercier et les féliciter pour la qualité des représentations que nous avons reçue. Je les assure des salutations les plus cordiales du premier ministre, parrain du projet de loi.

En terminant, je souhaite la collaboration et le positionnement de l'Opposition pour que nous puissions ensemble, à la lumière des améliorations que nous apporterons au libellé du projet de loi 104, adopter ce projet de loi avant l'ajournement d'été. Je désire également, M. le Président, vous remercier de votre collaboration et de la bonne façon dont les travaux de la commission ont été conduits. Je veux remercier l'ensemble des membres qui ont participé aux travaux des deux côtés de la table et, finalement, dire à tous les intervenants que le gouvernement s'en va faire ses devoirs et reviendra dans les meilleurs délais avec un projet de loi 104, bonifié grâce à cette consultation, à cet exercice démocratique que nous avons vécu ensemble au cours des huit ou neuf derniers jours. Merci.

Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Avant d'essayer de tracer un portrait un peu plus critique et un peu plus réaliste des audiences qu'on vient de tenir, je voudrais réagir brièvement aux propos du ministre. Il se dit heureux et satisfait de la qualité de la participation et je partage cette évaluation. Je dirais qu'en qualité, la participation a été excellente et, en quantité, elle aurait pu être davantage. On aurait pu s'attendre à avoir, à la fois, plus d'organismes et une variété plus grande d'organismes. Le ministre déplore l'absence des jeunes des comités jeunesse du Parti québécois qui ont, avec raison, qualifié cette consultation de hâtive pour ne pas dire de bidon, parce que les délais qui étaient impartis au départ, comme le reconnaît le ministre d'ailleurs, étaient brefs. Il y a eu ensuite confusion. Aucun organisme n'a été, à ma connaissance, prévenu qu'il pouvait présenter plus tardivement des mémoires. Il y en a même qui sont arrivés avec leur mémoire et je ne pense pas que c'était quelque chose qui était entendu et qui ait été largement diffusé.

Par ailleurs, le ministre a parlé de la qualité, ce que je partage. Quant à la quantité, il y a eu un grand absent, au-delà de la commission jeunesse du Parti québécois, tout le milieu du travail. Je pense aux jeunes travailleurs, aux jeunes chômeurs, aux jeunes assistés sociaux et aux syndicats également, à l'exception de la CEQ, qu'on n'a pas vus ici à cette commission parlementaire. Il aurait été intéressant qu'on puisse aussi les entendre.

Le ministre dit qu'il y a eu un appui assez général. J'ai des réserves importantes sur cette question. Par ailleurs, il conclut, s'il a eu un appui assez général, qu'on passera donc à l'adoption du projet de loi, sans modification majeure, parce que les quelques modifications qu'il nous annonce ne prenne pas en compte suffisamment l'essentiel des commentaires qui nous ont été ici livrés.

En effet, les jeunes nous ont tracé un portrait sombre, mais malheureusement réaliste de la situation que je qualifierais de catastrophique pour un nombre croissant de jeunes au Québec: chômage, délinquance, abandon scolaire, sous-scolarisation, pauvreté, itinérance, prostitution et suicide.

Les jeunes sont venus nous dire: Comment voulez-vous qu'on réagisse à un tel projet? C'est un peu comme si la maison était en feu chez nous et qu'on me proposait d'ouvrir une école de pompiers. Il y a une situation de crise et on nous propose un conseil consultatif. Comment, en situation de crise, penser qu'un gouvernement estime que la priorité soit de créer un conseil consultatif? Comment croire ce gouvernement qui prétend vouloir aider les jeunes en créant une nouvelle structure et qui, en même temps, coupe dans de nombreux services qui nous étaient précieux et qu'on a souvent réclamés? On pense en particulier au

Secrétariat à la jeunesse, on pense aux maisons de jeunes, on pense aux répondants jeune dans les bureaux de Communication-Québec. On pense à ces services qui nous étaient précieux et pour lesquels on a demandé une augmentation du budget ou, à tout le moins, le maintien des budgets dans lesquels on a coupé. On nous propose de créer, avec les marges de manoeuvre ainsi dégagées, un conseil consultatif.

Comment croire ce gouvernement qui, durant la campaqne électorale, faisait de sa priorité, la priorité des priorités, la jeunesse, mais plus particulièrement l'emploi? Des emplois de qualité, nous disions-nous, des emplois de qualité à temps plein et bien rémunérés. On parlait également de la parité de l'aide sociale.

On offre aux jeunes un Conseil permanent de la jeunesse, alors que ces derniers demandent une politique d'emploi, une reconnaissance et un financement des organismes communautaires et la parité de l'aide sociale.

Dans les mémoires qu'on a reçus, on a fait une analyse assez fine, je dirais, et aussi assez conservatrice des mémoires. On dénombre environ 17 mémoires qui sont pour, avec des modifications qu'on a qualifiées de mineures en se disant qu'une modification mineure comprenait les structures régionales. On s'est dit! Cela peut toujours entrer; pour vous dire à quel point on a été assez conservateur dans la lecture de ceux qui étaient pour; 7 sont carrément contre et 23 nous apportent des modications telles que, si elles étaient adoptées, elles viendraient considérablement modifier l'essence même de la structure qu'on leur propose. Si vous faites le total, vous avez dans les mémoires qu'on a entendus 17-30.

Les jeunes nous ont rappelé l'état d'urgence, ils ont dit: Dans certains secteurs d'activité, pour certains jeunes selon la scolarité, c'est 30 % de chômage. Il reste encore le tiers de la population des 15-24 ans qui n'a pas terminé son secondaire V, qui n'a même pas un secondaire V en poche. Il y a 2000 itinérants à Montréal, ce qu'on appelle la clochardisation précoce qui menace de plus en plus de jeunes et on pense qu'il devrait être environ 15 000 d'ici les prochaines années. Des sans-statuts: 50 000 dans la région de Montréal. Dans les pénitenciers et dans les prisons provinciales, la moitié des jeunes résidents ou institutionnalisés a mois de 24 ans. Le suicide vient pour la deuxième cause de décès au Québec. Et on leur propose un Conseil permanent de la jeunesse.

C'est une réaction de méfiance et de scepticisme. Premièrement, la structure n'a pas été demandée par les jeunes. Je pense qu'on a oublié de le rappeler. Les jeunes n'ont pas souhaité cette structure. Ils réagissent à un projet qu'on leur a demandé, mais ils ne l'ont pas demandé.

Assez, que les jeunes sont venus nous dire que, pour un certain nombre d'entre eux, ce projet voulait davantage faire plaisir aux jeunes du Parti libéral qu'à la jeunesse du Québec. Il est difficile, en effet, de croire à la bonne volonté du gouvernement quand, d'un côté, on leur dit que c'est un geste important que le gouvernement pose en créant le conseil permanent et que, de l'autre côté, on coupe froidement dans le financement des groupes de jeunes.

Méfiance et scepticisme, parce qu'ils s'interrogent sur l'efficacité d'une telle structure du fait qu'il n'y a pas de politique gouvernementale concernant les jeunes. On se rappellera qu'il y a une douzaine de mémoires qui recommandaient qu'on devait commencer par élaborer une politique, se donner une politique gouvernementale de la jeunesse, parce que le conseil a peu de pouvoirs réels. Il n'a pas peu de pouvoirs; il n'a pas de pouvoirs.

Il n'a qu'un pouvoir de donner des avis. Si tant est qu'on puisse appeler cela un pouvoir. C'est un pouvoir de recommandation, parce que les jeunes craignent la centralisation à Québec, ce qui a peu de rapport avec la réalité jeunesse à travers les régions; parce qu'ils s'interrogent sur la fausse représentativité de cette structure, parce qu'ils craignent le manque d'autonomie du conseil.

Selon eux, le ministère possède trop de pouvoirs discrétionnaires. Le ministre nous dit qu'il allait faire des modifications pour tenir compte de ces diverses remarques. Je pense qu'il pourrait trouver dans différents projets de loi des modèles qui pourraient l'inspirer à cet égard.

Les jeunes sont méfiants, parce que le mode de nomination choisi par le gouvernement mine la crédibilité d'un tel organisme, parce qu'ils craignent l'uniformisation du discours jeunesse, parce qu'en plus, les jeunes craignent que ce soit le prétexte à l'inaction et qu'on fasse reporter sur ce conseil la responsabilité de donner des avis, après quoi, le conseil agira.

Je pense que cet après-midi, l'avant-dernier intervenant nous a donné un exemple de ce que cela pourrait être, lorsqu'il a cité la démarche qui avait été faite auprès de la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme Lavoie-Roux les auraient renvoyés au Conseil permanent de la jeunesse.

Par ailleurs, ce que les jeunes qui sont venus nous parler ont dit, c'est: Si vous voulez nous créer une structure qui nous permette effectivement de passer à l'action rapidement et dans différents secteurs. Ils ont eu - on a pu le constater - des exigences ou des attentes qui dépassent largement ce qui est généralement entendu comme étant le mandat d'un conseil consultatif.

Mais je dis que le gouvernement n'a pas à se surprendre des demandes qui ont été faites par les organismes. Il n'a pas à se surprendre non plus des réactions et de l'ampleur des demandes, parce que, déjà, le 2 décembre dernier, à l'occasion de l'étude article par article du projet de loi 103, Loi sur la Société d'Investissement Jeunesse, le premier ministre suscitait un espoir face au Conseil permanent de la jeunesse.

Ainsi, en répondant à une question du chef de l'Opposition qui demandait à quand le ministre délégué à la jeunesse, le premier ministre répondait - je cite - "La formule adoptée par le Parti libéral et le gouvernement, c'est d'établir un Conseil permanent de la jeunesse qui, lorsqu'il sera adopté, se trouvera à remplir le rôle qui aurait pu être confié à un ministère".

On ne cite pas n'importe qui. C'est ici, dans cette même salle, que le premier ministre faisait cette déclaration. Le conseil consultatif que ce gouvernement s'apprêtait à créer lorsque la loi sera adoptée, ce conseil se trouvera à remplir le rôle qui aurait pu être confié à un ministère, ni plus, ni moins.

Comment, avec un tel discours, ne pas comprendre les attentes exprimées par les jeunes, ne pas comprendre que les jeunes veuillent aller beaucoup plus loin que de confier leur destinée à un conseil consultatif? Avec un tel discours, on ne pouvait pas s'attendre que les jeunes demandent mieux ou moins que ce que le premier ministre promettait. (20 h 30)

Par ailleurs, les jeunes nous ont rappelé que la priorité était ailleurs. Un conseil permanent, une priorité? Les jeunes ne l'avaient pas vu comme cela à la lumière des propos du premier ministre, mais également à la lumière du programme électoral du Parti libéral. Le Parti libéral du Québec ne faisait pas de la création du conseil permanent, sa priorité. Il faisait de l'emploi, de i'entreprenariat, de la parité de l'aide sociale, de la bonification de l'aide financière aux étudiants, ses principales priorités. La création d'un Conseil permanent de la jeunesse devait se retrouver au bout de la ligne des priorités de ce gouvernement. Comment alors ne pas partager l'inquiétude des jeunes qui voient en ce projet une fuite en avant d'un gouvernement incapable de proposer des solutions concrètes, parce que sa politique favorise les plus forts? Comment reprocher aux jeunes d'en demander autant à un organisme consultatif, quand le premier ministre lui-même présente le Conseil permanent de la jeunesse comme un organisme qui pourra remplir le rôle que remplit un ministère?

Les jeunes ont pris ces propos au sérieux et proposent des orientations et des mandats qui se rapprochent du ministère et de l'organisme consultatif. Mais cela ressemblerait davantage au mandat que l'on voit généralement confier à un office qui prend à la fois les fonctions d'un organisme consultatif mais aussi à la fois, par les budgets et les programmes qu'il gère, un peu celles d'un ministère.

Ce que veulent les jeunes, c'est une structure très décentralisée, branchée directement sur le pouvoir, en l'occurrence le Conseil des ministres, et ce, par le biais d'un ministre délégué à la jeunesse. Ce que veulent les jeunes, c'est une politique intégrée de la jeunesse et de l'emploi. Ce que veulent les jeunes, c'est des services en région. C'est d'ailleurs pourquoi ils demandent de soutenir plus fortement le Secrétariat è la jeunesse plutôt que de couper dans les services sux jeunes en région. Ce que veulent les jeunes, c'est une place pour être véritablement entendus. Ce que veulent les jeunes, c'est une politique de reconnaissance et de financement des organismes jeunesse.

Une politique de financement et de reconnaissance des organismes jeunesse se trouve systématiquement dans 17 mémoires, en plus des mémoires et des jeunes qui sont venus nous en parler. Les jeunes nous l'ont dit: La crédibilité du Conseil permanent de la jeunesse passe nécessairement par la survie et la vitalité des groupes de jeunes. Un financement récurrent doit leur être fourni, un peu comme cela se fait dans le monde des loisirs et un peu comme cela se fait également pour les associations étudiantes qui ne sont pas tributaires des humeurs et de la bonne volonté ni du collège, ni de l'université, ni du ministère, pour recevoir ses subventions.

En fait, tous les groupes de jeunes devraient idéalement, pour pouvoir bénéficier des mêmes avantages, de la même vitalité, avoir les mêmes avantages qui ont été consentis aux associations étudiantes par le biais de la loi 32. Le gouvernement se doit de reconnaître l'expertise inestimable concentrée chez nos groupes de jeunes. Ceux-ci offrent des services à un prix si peu élevé que ni la fonction publique, ni l'entreprise privée peut concurrencer. On le sait, par exemple, en hébergement, il en coûte un peu moins de 20 $ dans les maisons d'hébergement pour jeunes, alors que si vous allez en institution, en centre d'accueil, il en coûte 80 $ par jour. C'est quatre à cinq fois plus élevé.

Ce que les jeunes veulent, c'est d'une politique claire de financement qui éviterait, d'une part, l'instabilité financière des organismes et, d'autre part, le discrétionnaire. Une politique de financement donnerait également toute la latitude possible aux jeunes pour pouvoir s'exprimer sur des sujets litigieux. Je pense que vous avez tous été à même de constater ici que, lorsqu'on lisait un mémoire, on pouvait estimer que les

jeunes étaient plutôt non seulement réservés mais souvent contre l'idée d'un conseil permanent. Ils estimaient que ce n'était pas la priorité. Ils s'en viennent ici devant des parlementaires desquels dépendent les subventions par le biais des ministères. À des questions un peu serrées, ils finissent par dire: Oui, oui. On n'est pas en désaccord. Une journaliste me disait tout à l'heure que l'impression que cela laissait, c'est qu'ils n'avaient pas toute la liberté pour exprimer ce qu'ils avaient à dire.

Ce que les jeunes veulent, c'est une enveloppe budgétaire spécifique à ia concertation nationale et régionale. Cette enveloppe pourrait être gérée par les groupes de jeunes. Ces sommes pourraient être confiées au Conseil permanent de la jeunesse, en vue de les redistribuer. Ce que les jeunes veulent également et ce qu'on devrait leur accorder, c'est la possibilité d'organiser des symposiums sectoriels et régionaux. Ce que les jeunes refusent, c'est que le conseil permanent vienne parler en leur nom, sans qu'ils aient droit de parole. Ils ont réclamé des tables régionales, des tables de concertation. Ils ont réclamé le maintien du collège électoral. Ce que l'on devrait leur offrir, c'est vraiment des enveloppes qui permettent la tenue annuelle de sommets ou de symposiums sectoriels dans les régions et dans la province. Ce serait une façon de recueillir non seulement les informations qui viennent de l'expérience des différentes associations, des différents organismes, mais ce serait aussi une façon de mieux saisir la réalité multiple selon l'âge, les régions ou les secteurs d'activité. Ces symposiums organisés et dirigés par les jeunes, mais dont le soutien technique proviendrait du Conseil permanent de la jeunesse seraient des lieux propices à la discussion de grands thèmes concernant bien spécifiquement la jeunesse. Ces symposiums seraient une bonne façon pour le Conseil permanent de la jeunesse de tâter véritablement le pouls des jeunes.

Ce que l'on devrait également donner à un futur organisme pour lequel j'ai de la difficulté à qualifier ce que pourrait être la structure, est-ce que ce serait un conseil permanent, un office ou un ministère? Ce serait l'évaluation des programmes destinés aux jeunes. Il y a un foisonnement de programmes gouvernementaux offerts aux jeunes et un manque de concertation entre les différents ministères; ce qui a pour conséquence de créer bien souvent des chevauchements, tant entre les ministères qu'entre les paliers de gouvernements. Un mandat pourra être confié, par exemple, à la commission de l'emploi pour tenter d'effectuer un arrimage entre ces différents programmes.

D'ailleurs, le Conseil permanent de la jeunesse pourrait voir à mieux informer les groupes de jeunes sur la multitude de programmes offerts par le gouvernement. C'était, si je ne m'abuse, un engagement de ce gouvernement de créer ce qu'ils appelaient les guichets uniques, où on trouverait dans un même lieu les informations touchant les différents programmes des jeunes. Juste au Québec, on doit avoir è l'emploi quelque quinze programmes. Vous devez en retrouver au moins autsnt au gouvernement fédéral, plus ceux des autres programmes communautaires.

On pense qu'une des façons de vraiment répondre aux attentes exprimées par les jeunes serait de s'assurer que l'on puisse avoir à la fois cette évaluation des programmes destinés aux jeunes et cette information.

Au début de la commission, j'estimais qu'une des façons de rendre ce conseil plus efficace et capable d'intervenir plus rapidement sur les vraies priorités, serait de former deux commissions permanentes. Cette première commission, chargée du dossier de l'emploi, pourrait entre autres reprendre l'évaluation des programmes de création d'emplois. La seconde commission traiterait de toute la question de l'enfance et de l'adolescence. On nous l'a répété tout è l'heure, les problèmes que vit la jeunesse prennent leur origine dans des situations qui ont été vécues bien avant l'âge de quinze ans. Donc, il est important que l'on intervienne en matière de prévention. Ce n'est pas vrai qu'un conseil consultatif peut intervenir, à moins de se donner de façon très claire les outils pour évaluer et suivre l'évolution de la situation des adolescents et de pouvoir composer des mesures préventives*

On peut penser qu'à l'instar de ce qu'il se fait dans d'autres conseils consultatifs, ces commissions permanentes pourraient avoir à leur tête un président ou une présidente. Dans le projet de loi, on propose deux vice-présidents et deux vice-présidentes; on pourrait avoir un président ou une présidente de la commission de l'emploi et la même chose pour la commission de l'adolescence. Ces présidents pourraient être nommés sur recommandation des membres du conseil.

Pour ce qui est des nominations, les jeunes qui ont défilé devant nous pendant ces huit jours ont été suffisamment clairs: ils veulent choisir les membres du Conseil permanent de la jeunesse. Tout à l'heure la réaction du ministre qui... Je n'ai pas cru comprendre dans ses propos qu'il laisserait toute cette latitude aux organsimes jeunesse. J'ai réexaminé les différentes lois, qu'il s'agisse des conseils consultatifs des offices, des conseils d'administration dans les affaires sociales, en éducation, dans le public et le parapublic. Plusieurs lois constitutives prévoient déjà que les nominations se font sur recommandation de... Cela veut dire que c'est le groupe qui fait la recommandation

et le ministre ou le gouvernement nomme. Ce que demandent les jeunes n'est pas exceptionnel, puisque cela se fait déjà. Je pense, par exemple, qu'il s'agit d'une corporation publique, mais quand même, dans les CLSC, c'est plus des deux tiers des membres qui sont nommés par les groupes.

Je pense au conseil d'administration des cégeps, vous avez quatre socio-économiques sur 21 membres et tous les autres sont nommés sur recommandation des étudiants, des professeurs, des parents, du conseil d'administration. Ce n'est pas exceptionnel. On peut penser que les jeunes pourraient, par voie élective, recommander un délégué par région et que le gouvernement pourrait se réserver la nomination du président ou de la présidente et de trois ou quatre socio-économiques, comme cela se fait dans d'autres organismes consultatifs, comme cela se fait dans d'autres organismes publics et parapublics, organismes dans lesquels il y a des budgets importants d'engagés. Par ailleurs, les membres des commissions pourraient être nommés sur recommandation du conseil.

Ce qu'on devrait aussi donner à cet organisme, c'est la possibilité d'offrir des services en région. Les jeunes sont revenus à maintes reprises, pour ne pas dire presque à chaque fois, pour dire qu'il était important, non seulement qu'on maintienne le Secrétariat à la jeunesse, mais qu'on augmente son budget. Il serait souhaitable que le Secrétariat à la jeunesse soit rattaché à cet organisme de façon certaine de manière à éviter le dédoublement dans les services, de manière à s'assurer qu'il y ait des services décentralisés. Cela n'aurait rien d'absolument, de complètement irrationnel puisque cela se fait déjà. Cela se fait déjà à l'Office des services de garde, cela se fait déjà au Conseil de la condition féminine. Les jeunes, à mon avis, à cet égard, n'ont pas demandé autre chose que ce qui se fait déjà et cela n'appellerait pas d'augmentation de budget.

Enfin, les jeunes veulent un répondant ministériel. Ce propos est revenu, si je ne m'abuse, dans quelque dix-sept mémoires où les jeunes demandent un ministre délégué à la jeunesse qui ne soit pas le premier ministre, pour les raisons qu'on connaît. Je ne recommencerai pas là-dessus et ce n'est pas particulier au gouvernement actuel, cela a toujours été la critique qu'on a faite. Avoir le premier ministre comme répondant au dossier jeunesse, c'est comme la meilleure façon de bien indiquer qu'il n'y a pas là une priorité. Parce que, non pas par mauvaise volonté, comme l'ont bien exprimé les jeunes, mais par faute de temps, et parce qu'on pense que le premier ministre ne peut pas faire d'une catégorie de citoyens son unique priorité. Ses priorités, c'est la priorité de l'ensemble des citoyens du Québec.

En somme, si je résume, ce que les jeunes nous ont demandé, c'est ce que je souhaitais que le gouvernement puisse faire, c'est un organisme, on dit oui, ce n'était pas cela notre priorité, cependant si vous nous en donnez un, donnez-nous-en un qui favorise l'expression des besoins des jeunes. Donc, on peut penser que cet organisme pourrait gérer un budget qui aurait comme fonction d'organiser des sommets régionaux et sectoriaux.

Les jeunes nous ont dit: On veut un organisme, on veut la reconnaissance et le financement des organismes jeunesse. Pourquoi ne donnerait-on pas à cet organisme la responsabilité d'établir la politique et l'appliquer de manière à s'assurer que les organismes communautaires jeunesse ne soient pas constamment tributaires du ministère qui les subventionne?

Les organismes jeunesse sont venus nous dire qu'ils avaient besoin de services décentralisés et de services régionaux. Ils ne croient pas à la structure centralisée; leurs problèmes c'est dans le quotidien, dans l'immédiat. Je pense qu'on devrait s'assurer que cet organisme puisse avoir le pouvoir d'offrir ces services en région. (20 h 45)

Je n'irai pas plus loin dans les détails. Est-ce qu'un conseil permanent de la jeunesse, est-ce que les conseils consultatifs au Québec, tels qu'on les a à ce jour mandatés, peuvent détenir des pouvoirs réels qui leur permettent d'évaluer les programmes, d'agir en matière de concertation interministérielle, peuvent distribuer des subventions ? À ma connaissance, il n'y a rien de comparable. Est-ce qu'il est pensable, sous le vocable conseil consultatif ou conseil permanent de la jeunesse, de regrouper ces services qui nous ont été incessamment demandés par les jeunes? Je pense que c'est possible, sinon il existe actuellement dans les différentes législations, différentes lois ici au Québec un modèle qui ressemble un peu à l'office qui est à mi-chemin entre le conseil consultatif et le ministère. Ces offices ont généralement aussi le pouvoir et la responsabilité de donner des avis, de faire des évaluations et, en même temps, de gérer certains programmes.

Je pense que les jeunes sont venus nous dire que la création du conseil consultatif n'était pas une cassure et n'était pas leur priorité. Ce qui presse pour eux, c'est une politique de l'emploi, une politique de financement, de reconnaissance des organismes jeunesse. C'est cela qui presse. D'ailleurs, je le rappelle, le Parti libéral lui-même, alors qu'il était en campaqne électorale, le disait. Dans son document intitulé Priorité jeunesse Politique sur la jeunesse du Parti libéral du Québec, on remarque que le problème central est celui

de l'emploi. Ce n'est qu'en dernière page du document, je le rappelle, soit à la page 18, qu'on fait mention dans un paragraphe de la création d'un Conseil permanent de la jeunesse. J'entendais un député se surprendre que les organismes jeunesse ne se soient pas élevés contre cette proposition qui était contenue en dix-huitième page, en dernier bout des priorités du gouvernement en disant: Ce n'est pas ce dont on a besoin. Ils étaient, enfin, en droit de penser que cela serait exactement traité dans cette priorité, c'est-à-dire en dix-huitième priorité.

Le Conseil permanent de la jeunesse n'a emballé personne sinon la commission jeunesse du Parti libéral, je le rappelle. Je dois dire pour la commission jeunesse du Parti libéral qui, somme toute, fait un travail de vigilance assez intéressant que je me serais attendue que des jeunes aient un peu plus d'imagination. On est allé chercher une structure, un modèle de structure qui existait déjà, mais sans se demander si c'était vraiment ce qui convenait. Je dois dire que cela a été... parce que par ailleurs, je sais que sur d'autres questions, ils sont capables de faire preuve d'imagination. Je ne sais pas comment il se fait qu'ils ont acheté ce projet comme cela sans faire preuve de beaucoup plus d'esprit critique.

Le ministre nous disait tout à l'heure: On va retourner à nos devoirs. J'espère que ce sera plus que cela et que le gouvernement va retourner à sa table d'essai, refaire le projet pour qu'il réponde aux besoins exprimés par les jeunes et non seulement par les jeunes libéraux. Agir autrement, ce serait faire montre de mépris à l'endroit des jeunes qui se sont donné la peine de venir dire ce qu'ils en pensaient, en venant exprimer leurs attentes. La démonstration, à mon avis, a été faite. Ce projet qu'ils n'ont pas demandé, qui n'était pas la priorité du gouvernement et qui ne répond en rien à la situation de crise que vivent les jeunes, doit être réécrit, modifié en profondeur, je dirais, dans son essence même. C'est à cette condition que les jeunes pourront évaluer la volonté réelle du gouvernement de trouver des solutions aux .difficultés qu'éprouvent un nombre croissant de jeunes au Québec. C'est à cette condition que le gouvernement fera la preuve qu'il ne s'agit pas d'une fuite en avant. C'est à cette condition que le gouvernement fera la preuve qu'il ne s'agissait pas d'une consultation bidon. C'est à cette condition que le gouvernement fera la preuve qu'il gère aussi pour les plus petits, pour les plus démunis, pour les plus faibles de notre société.

Je voudrais dire, en terminant, que j'ai apprécié de façon générale le niveau des discussions, le souci que les parlementaires ont eu de laisser exprimer les jeunes sur les situations qu'ils vivaient. Je dois dire avec vous que les mémoires qu'on a entendus et la présentation qui nous a été faite nous ont permis de faire un tour de piste, je dirais, assez impressionnant de ce qu'est la réalité jeunesse au Québec. C'est pourquoi je ne peux pas être indifférente à ce que j'ai entendu ici en laissant croire que cette solution de la création d'un Conseil permanent de la jeunesse pouvait, à court ou à moyen terme, constituer une réponse aux besoins criants de la jeunesse. On me dira, et probablement que le ministre le rappellera: ce n'est pas la seule solution, il y a d'autres solutions. Par ailleurs, si j'étais jeune, et c'est ce que les jeunes sont venus nous dire, du moment où le gouvernement consacre son temps et le temps des parlementaires à examiner ce projet de loi, il n'est pas en train de consacrer ses énergies à trouver des solutions sur les situations de crise que connaissent les jeunes. Je me rappelle une intervenante en particulier qui est venue nous dire: Vous savez, quand les jeunes n'ont pas mangé depuis deux jours, ne venez pas me dire que c'est un conseil pernanent qui va leur donner à manger tantôt. Quand les jeunes ne se trouvent pas de travail et que cela fait six mois qu'ils font une recherche intensive de travail, ne venez pas me dire que c'est un conseil permanent qui va amener la solution. Quand on est en train de demander à nouveau des études pour connaître la situation, c'est qu'elles existent par piles un peu partout au ministère; n'allez pas me dire que l'urgence était de créer un conseil permanent.

J'ajouterais que, pour avoir été - je le rappelle - présidente d'un conseil consultatif avec toutes les vertus que je reconnais à ce genre d'organisme consultatif, j'ai été à même de constater que la lourdeur même de la démarche, la complexité, la diversité des opinions, conditions font qu'un conseil consultatif est efficace, mais surtout à moyen et à long terme. Le Conseil du statut de la femme, sur lequel le Secrétariat à la jeunesse a longuement épilogue en disant: Le Conseil permanent de la jeunesse pourra éventuellement jouer le rôle que joue le Conseil du statut de la femme, je le rappelle, ce conseil créé en 1973 a réussi, avec toute la compétence et l'efficacité qu'on lui connaît, à pondre sa première politique intégrée et assez complète six ans plus tard. Le Conseil du statut de la femme pouvait trouver un appui exceptionnel dans le milieu, ce que les jeunes, ce que le conseil permanent ne trouvera pas nécessairement dû à la précarité des associations jeune pour lesquelles le financement est toujours aléatoire et conditionnel, je dirais, aux humeurs des gouvernements qui changent, des ministres qui changent et qui sont sujets aussi aux modifications des modes. Quant à ce conseil permanent, les jeunes nous l'ont rappelé, il y avait un préalable pour eux, reconnaissance et financement des organismes

jeunesse qui pourrait donner à ce conseil permanent le minimum de stabilité, le minimum d'appui sur lequel il pourrait tantôt faire reposer à la fois sa crédibilité, son efficacité et sa vigilance.

Je le rappelle, même si ce conseil est performant autant que l'a été le Conseil du statut de la femme, le gouvernement ne leur a indiqué aucune priorité et il laisse à ce conseil toute la latitude pour établir ses priorités en disant; On va lui remettre le rapport de cette commission parlementaire. C'est leur laisser beaucoup de poids sur les épaules et, au mieux, si la loi est adoptée au mois de juin, le conseil devrait être formé aux alentours des mois de novembre ou décembre prochain, et on est rendu à la fin de l'année 1987. Cela n'aura toujours pas mis de pain dans la bouche de ceux qui en manquent, pas plus que de beurre dessus. Je partage cette préoccupation de la jeunesse, pendant qu'on est en train ici, entre parlementaires et en commission parlementaire, d'élaborer ce que pourrait être le rôle d'un conseil consultatif - je rappelle que si c'est consultatif, cela n'a pas grand pouvoir - des jeunes ont faim.

Je souhaiterais rappeler l'essentiel des principales recommandations: en groupes, les jeunes veulent une structure qui favorise l'expression de leurs besoins par eux-mêmes, qui permette d'organiser symposiums, forums, conférences, financement et reconnaissance des organismes jeunesse et des services en région. Je vous remercie.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. La tradition veut que le ministre ait un droit de réplique, l'exercez-vous, M. le ministre?

Mme Blackburn: Peut-être de façon générale.

M. Gratton: M. le Président, je n'exercerai aucun droit de réplique. Je pense avoir résisté pendant 45 heures de travaux à la tentation de répliquer à Mme la députée de Chicoutimi, je peux résister encore quelques minutes. Je voulais simplement faire mention que si nous devions décerner des médailles de mérite, celle de l'assiduité aux travaux de la commission devrait être remise â M. Jean-Marie Brûlé. C'est la seule personne qui nous accompagne encore ce soir à la toute fin de nos travaux et qui - je l'ai remarqué - a été présente tout au cours de nos travaux; il y a peut-être la députée de Chicoutimi et moi-même qui avons été ici aussi souvent que lui. Je le félicite pour l'intérêt qu'il porte à la cause jeunesse; je pense que cela mérite d'être souligné.

M. le Président, je réitère mes remerciements également à l'ensemble des membres de la commission. Nous verrons, en temps et lieu, à faire le débat que semble souhaiter Mme la députée de Chicoutimi à l'Assemblée nationale lors de l'étude du projet de loi 104.

Le Président (M. Dauphin): Merci. M. le ministre. Alors, à mon tour, au nom de la présidence, c'est-à-dire au nom de tous les présidents qui se sont succédé, j'aimerais remercier les membres et les remplaçants de la commission des institutions, ainsi que les recherchistes et conseillers des deux groupes parlementaires qui ont accompagné les députés tout au long de nos travaux. Et, pour l'essentiel au niveau de la présidence, je remercie Mme la secrétaire et ainsi que la secrétaire, Mme Normandin, pour leur excellent travail tout au long de cette commission, ainsi que les membres du personnel de l'Assemblée nationale, les messagers qui nous ont facilité la tâche.

La commission des institutions, ayant accompli le mandat qui lui était confié par l'Assemblée nationale, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 20 h 57)

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