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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Messieurs les membres du cabinet, mesdames et messieurs les
fonctionnaires, nous avons quorum, donc, nous pouvons commencer les travaux de
cette commission. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la
secrétaire?
La Secrétaire: Non.
Le Président (M. Marcil): Aucun remplacement. Donc, je
déclare , la séance ouverte à 10 h 11. Je vais vous
rappeler le mandat de la commission: il s'agit de procéder à
l'étude des programmes 1 à 6 et 8 à 11 des crédits
du ministère de la Justice. Nous avons un bloc de cinq heures: trois
heures ce matin et deux heures ce soir, à partir de 20 heures.
Les ententes prévues entre les deux partis sont les suivantes: il
y aura les remarques préliminaires de part et d'autre; puis, nous allons
voir les programmes, selon l'ordre, c'est-à-dire programme par
programme.
Juste avant de commencer, je vais vous présenter les membres de
la commission. Pour le gouvernement, il y a M. Kehoe, député de
Chapleau; le député de Mille-Îles, M. Bélisle; le
député de Marquette, M. Dauphin; le député de
Taillon, M. Filion, et moi-même, le député de Beauharnois.
Mme Giguère, la secrétaire de cette commission, fait un travail
magnifique, en passant,
M. le ministre, je vous inviterais à présenter votre monde
et à faire vos remarques préliminaires.
Remarques préliminaires M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président. Avant de prononcer mon
discours, j'aimerais souligner la présence des personnes suivantes: M.
Daniel Jacoby, sous-ministre et sous-procureur général; M. Claude
Brazeau, sous-ministre associé à Direction générale
des services judiciaires; M. Clément Ménard, sous-ministre
associé à la Direction générale du personnel; M.
Raymond Benoît, sous-ministre associé à la Direction
générale de l'administration; M. Jean-K. Samson, sous-ministre
associé à la Direction générale du contentieux; M.
Roch Rioux, sous-ministre associé à la Direction
générale des affaires législatives. M. Rémi
Bouchard, sous-ministre associé à la Direction
générale des affaires criminelles et pénales.
Il y a aussi Mme Jeanne d'Arc Vaillant, présidente de la
Commission d'appel en matière de lésions professionnelles; M.
Yves Lafontaine, président de la Commission des services juridiques; M.
Jacques Lachapelle, président de la Commission des droits de la
personne; M. Jacques Dufour, vice-président du Comité de la
protection de la jeunesse; M. Yves Lauzon, secrétaire du Fonds d'aide
aux recours collectifs; M. le juge Guy Dorion, président du Tribunal de
l'expropriation; M. Jean-Pierre Barrette, secrétaire du Conseil de la
magistrature; M. Gilles Moreau, président de l'Office de la protection
du consommateur, qui se joindra à nous lors de l'étude des
crédits de cet organisme.
C'est avec plaisir que je participe à cette commission dont je
connais bien le rôle pour y avoir siégé à quelques
reprises comme membre. C'est cependant la première fois que je comparais
pour l'étude des crédits du ministère que je dirige depuis
bientôt cinq mois en tant que ministre de la Justice et Procureur
général.
Avant d'entreprendre l'examen des différents programmes, je
désire apporter la précision suivante. Comme vous le savez, le
ministère de la Justice, tel qu'on le connaissait jusqu'à tout
récemment, est en voie d'être scindé de façon
formelle, une partie relevant désormais du Solliciteur
général. Vous savez que j'ai demandé un tel changement
depuis 1980 ou 1981.
Aussi, pour vous faciliter la tâche, nous avons ajusté les
sommes de chacun des programmes de l'an dernier pour qu'une comparaison
réelle puisse être effectuée avec les crédits de
l'année financière 1986-1987. Je dois aussi noter que,
contrairement à la tradition, je ne ferai pas le bilan de la
dernière année financière pour des raisons qui
m'apparaissent évidentes, sauf bien entendu pour la partie où
j'ai été à la tête de ce ministère, soit
depuis le 12 décembre 1985.
Données budgétaires. Les crédits du
ministère de la Justice pour l'exercice 1986-1987
s'élèvent à 363 698 400 $, ce qui signifie une diminution
de 1 040 000 $ ou 0,3 % par rapport aux crédits de la période
précédente de 1985-1986.
Cette réduction s'explique par la non-indexation des
dépenses de fonctionnement et la contribution du ministère aux
compressions budgétaires pour assurer l'équilibre financier du
gouvernement pour l'exercice 1986-1987. Cette diminution s'inscrit dans le
cadre de la volonté gouvernementale de redresser les finances publiques,
particulièrement en réduisant la croissance des dépenses
sans mettre en cause, bien entendu, la qualité des services rendus par
le ministère,
II faut tenir compte qu'une somme de 12 395 100 $ a été
ajoutée au budget du ministère pour tenir lieu de révision
de traitements, d'augmentation des loyers et de certains autres ajustements
mécaniques. De cette somme doit être soustraite celle concernant
les compressions budgétaires, soit 13 435 100 $. On en arrive ainsi
à une diminution du budget de 1 040 000 $.
En ce qui concerne les mesures de compressions, des réductions
importantes de dépenses se sont réalisées dans chacun des
programmes du ministère, les plus significatives étant les
dépenses de soutien administratif à l'activité judiciaire,
pour une somme de 5 790 300 $; les dépenses de programme d'aide aux
justiciables 2 720 000 $; les dépenses relatives à
l'administration 1 517 800 $ et les dépenses en matière
d'affaires législatives 950 000 $.
Nous aurons l'occasion, au cours de l'étude des divers programmes
du ministère, d'examiner à fond les éléments de ces
mesures de restrictions budgétaires.
J'ai également procédé à un examen en
profondeur des organismes dont je suis responsable. D'ailleurs, ont
déjà été annoncées l'intégration du
Tribunal de l'expropriation et du Tribunal minier à la Cour provinciale,
l'intégration de la Commission de refonte des lois et règlements
à la Direction générale des affaires législatives
du ministère, l'intégration des activités du Comité
de la protection de la jeunesse à celles de la Commission des droits de
la personne. À ces mesures s'ajoute l'abolition du Conseil consultatif
de la justice, cette fonction étant déjà exercée
par la Direction de la recherche du ministère de la Justice et par
d'autres mécanismes de communication entre le milieu juridique et le
ministère assurant ainsi le niveau de consultation nécessaire,
tels les comités Justice-Barreau et Justice-Chambre des notaires. Ces
dernières modifications administratives permettront une économie
d'au moins 1 700 000 $ dès le présent exercice, mais les
économies seront beaucoup plus substantielles pour les exercices
ultérieurs.
J'anticipe peut-être vos questions, mais je crois
nécessaire d'apporter certaines précisions sur l'impact des
mesures de compressions qui ont été annoncées ou qui le
seront dès que le gouvernement aura eu l'occasion de se prononcer sur
les différentes hypothèses avancées. J'ai mentionné
précédemment que les services de base aux citoyens ne seront pas
touchés. C'est une de mes premières préoccupations et
c'est pourquoi j'ai retenu comme critères pour l'intégration de
points de services le faible achalandage et le nombre restreint
d'employés visés. Quant à ces derniers, tous leurs droits
reconnus par règlements, directives ou conventions collectives seront
respectés. J'ajoute cependant que, prise non dans un contexte de
compressions mais dans celui d'un simple exercice de bonne administration,
l'intégration de ces points de services aurait dû être faite
depuis longtemps.
Bien entendu, si des organismes font l'objet d'une abolition, vous
comprendrez que leurs fonctions demeurent, pour être assumées dans
un autre encadrement et ce, non seulement pour fins de diminution des
coûts, mais également pour assurer aux citoyens un service
adéquat.
Maintenant, si je reviens à l'enveloppe budgétaire du
ministère, les budgets les plus impartants sont comme suit: 69 692 900 $
au soutien administratif à l'activité judiciaire; 64 491 200 $
à l'aide aux justiciables et 114 650 500 $ à l'administration, ce
qui représente respectivement 19,2 %, 17,7 % et 31,5 % du budget du
ministère.
La large part consacrée au programme de l'administration dans ce
budget est due au fait qu'une somme de 77 200 000 $ est maintenant inscrite
à ce programme pour prévoir le loyer des immeubles du
ministère à la Société immobilière du
Québec. De même, il faut noter que les crédits
afférents à l'administration du ministère du Solliciteur
général sont provisoirement inclus dans ceux du ministère
de la Justice.
En ce qui concerne la nature des dépenses, on constate que les
traitements constituent 43,3 % des crédits, les dépenses de
fonctionnement, incluant les loyers à la Société
immobilière du Québec, 32 %, les dépenses de transfert, 23
% et les dépenses de capital, 1 %.
Les effectifs. Les effectifs autorisés au 1er avril 1986
s'établissent à 4485 employés permanents et 321
employés occasionnels. Les effectifs permanents sont diminués de
188 par rapport au 1er avril 1985. Cette réduction résulte de
l'application de la règle de compression de 1 % du personnel au 30
septembre 1985 et de la décision du Conseil du trésor du 17
décembre 1985 de fixer le niveau des effectifs réguliers
autorisés au niveau correspondant au nombre d'employés en poste
au 19 décembre.
J'ai dit à maintes reprises que ma principale
préoccupation vise une meilleure administration de la justice au
Québec et je crois que les projets dont je vais maintenant vous
entretenir en témoignent. Ces projets se
regroupent sous trois grands thèmes: la réforme du droit,
la justice sociale et les droits et libertés de la personne.
La réforme du droit. Dès ma nomination, je me suis
engagé à donner priorité à ce qui constitue une des
bases de notre droit, le Code civil, dont j'ai sans cesse dénoncé
le manque de vigueur dans le processus de sa révision. J'ai
décidé d'accélérer ce processus pour doter, dans un
prochain avenir, les Québécois et les Québécoises
d'une loi essentielle qui soit moderne et qui corresponde à leurs
attentes et à leur environnement social. J'ai de plus
décidé de le mettre en vigueur dans un seul bloc.
Cette réforme, j'en ai pris l'engagement devant
l'Assemblée nationale, se terminera en 1989. Cet objectif est
réaliste à la condition qu'on y mette les ressources
nécessaires; c'est ce que j'ai fait en adjoignant aux personnes
déjà chargées au ministère de la Justice de la
révision du Code civil, l'honorable juge Georges Chassé,
jusqu'à tout récemment juge en chef associé à la
Cour provinciale à Québec, et M. le professeur Jean Pineau de la
Faculté de droit de l'Université de Montréal. Me Claude
Dauphin, mon adjoint parlementaire, aura comme première
responsabilité de m'assister pour piloter ce dossier à
l'Assemblée nationale.
L'échéancier des travaux se présente comme suit: le
projet de loi 20 que nous compléterons cette année; puis, au
printemps 1987, le dépôt d'un projet de loi sur les
sûretés et la publication des droits réels, suivie des
audiences de la commission des institutions pour entendre les
représentations des organismes et des personnes intéressés
par ce dernier projet.
Le projet de loi sur les obligations et les contrats nommés
suivra à l'automne de 1987, pour être ensuite examiné par
la commission en 1988. Au printemps 1988, je déposerai le projet sur la
preuve, la prescription et le droit international privé. Les audiences
seront tenues peu après.
Tous ces projets seront ensuite repris dans un seul, afin de
réaliser véritablement l'unité et la cohérence du
droit civil québécois, et un nouveau Code civil sera
adopté au printemps de 1989. Il faut rappeler aux députés
que le processus a commencé en 1955. Nous sommes en 1986. Et le
gouvernement précédent a adopté seulement une loi, le
droit de la famille, en ce qui concerne cette révision du Code
civil.
Le droit civil, s'il est fondamental, n'en est pas pour autant le seul
droit qui affecte les citoyens dans leur vie quotidienne. Mentionnons seulement
le droit social, le droit administratif et le droit économique. Tous ces
secteurs juridiques de notre société doivent faire l'objet d'un
réexamen, autant pour éliminer les textes inutiles que pour
ajuster l'ensemble du corps législatif à la société
québécoise. C'est pourquoi j'ai déjà fait
référence à la création éventuelle d'une
commission de réforme du droit.
Il est aussi un autre secteur particulier de droit public qui
mérite une attention spéciale, soit les poursuites judiciaires
à caractère pénal. Me Claude Dauphin, mon adjoint
parlementaire, a d'ailleurs déjà annoncé, lors du 23e
congrès de la Société de criminologie du Québec, il
y a quelques semaines, la révision en profondeur de la Loi sur les
poursuites sommaires qui conduira à un véritable code de
procédure pénale. Ce code, en plus d'uniformiser l'ensemble des
règles de procédure et de preuves allégera la
procédure actuelle souvent trop coûteuse et trop longue.
Enfin, toujours au chapitre de la réforme du droit, j'entends
examiner le rôle et le fonctionnement de nos tribunaux administratifs.
À cet effet, j'ai annoncé, récemment, la création
prochaine d'un groupe de travail formé de personnes oeuvrant dans ce
milieu.
Je n'ai pas non plus tardé à donner suite à une
revendication depuis longtemps manifestée par tous les intervenants de
l'administration de la justice, à savoir la
déréglementation. J'ai déposé un projet de loi sur
les règlements qui constitue le premier volet de ce dossier. Outre cette
législation, il y a deux autres volets: la mise sur pied d'un
comité qui oeuvre sous ma direction et qui est présidé par
M. Reed Scowen, ajoint parlementaire au premier ministre, et l'élagage
des règlements désuets, inapplicables ou inutiles. (10 h 30)
J'ai aussi l'intention de mettre sur pied un comité qui fera la
liste des règlements qui, bien que toujours en vigueur, sont
désuets, inapplicables ou inutiles. On peut penser qu'il existe bon
nombre de ces règlements et leur suppression permettra à tous de
mieux s'y retrouver.
L'objectif premier du projet de loi déposé à
l'Assemblée nationale est de démocratiser l'élaboration et
l'adoption de règlements puisque ces derniers constituent le
prolongement de la loi, quand ils ne prennent pas tout simplement pour le
citoyen plus d'importance que cette dernière.
Je vous souligne d'ailleurs que la Commission d'étude sur le
contrôle parlementaire de la législation
déléguée, dans son rapport mieux connu sous le nom de
rapport Vaugeois-French, en juillet 1983 allait en ce sens. Ce projet de loi
mettra donc fin à des années de tergiversations, d'autant plus
que la plupart des juridictions canadiennes se sont dotées d'un
instrument semblable.
Je présenterai aussi un projet de loi modifiant le Code de
procédure civile en matière d'arbitrage. Ce projet a deux
objectifs: la mise en oeuvre de la convention pour la reconnaissance et
l'exécution des sentences arbitrales étrangères, dites de
New York et, par la même occasion, la révision des règles
d'arbitrage interne.
Cette convention a pour objet de faciliter sur le territoire d'un
État contractant la reconnaissance et l'exécution des sentences
étrangères en limitant les motifs de refus de reconnaissance et
d'exécution. L'adhésion à cette convention est devenue un
critère majeur pour la tenue d'arbitrages internationaux sur le
territoire d'un pays contractant.
Nous allons donc modifier les règles actuelles applicables en
matière d'arbitrage interne contenues au Code de procédure civile
afin de les rendre conformes à celles portant sur l'arbitrage
international, donnant ainsi au Québec une législation moderne en
cette matière, en favorisant par la même occasion la tenue
d'arbitrages internationaux chez nous.
La justice sociale. En matière de justice sociale, une des
premières actions que j'ai entreprises a porté sur la violence
conjugale. C'est un dossier dont je m'occupe depuis plusieurs années et
qui vient de faire l'objet d'une politique gouvernementale.
L'objectif de cette politique est d'améliorer le processus
d'intervention en apportant une aide accrue à la victime, tout en
offrant une possibilité de traitement aux maris violents. Cette
politique lancée le 17 mars dernier prévoit un
échéancier de mise en oeuvre incluant un comité
interministériel regroupant les principaux intervenants, dont le
ministère de la Santé et des Services sociaux, le Conseil du
statut de la femme, le personnel affecté à la ministre
déléguée à la Condition féminine et le
ministère du Solliciteur général. Par la suite, des cours
sur une méthode d'intervention et des directives seront donnés
aux intervenants de première ligne, comme les substituts du Procureur
général, les policiers, les agents de probation et le personnel
relevant des services sociaux. Enfin, une campagne de sensibilisation du public
au fait que la violence conjugale est un crime qu'on ne peut tolérer
sera lancée cet automne. Il conviendra également de voir à
l'implantation graduelle du traitement des maris violents dans quelques
régions pilotes.
En matière de protection de la jeunesse, ma collègue du
ministère de la Santé et des Services sociaux et moi-même
sommes sur le point d'adopter une politique concernant l'établissement
de comités de justice pour la jeunesse, tel que le permet la Loi sur les
jeunes contrevenants. Ces comités seront constitués de citoyens
désireux de s'impliquer bénévolement dans des
activités reliées à la prévention de la
délinquance juvénile et visant à dispenser des services
auprès des jeunes contrevenants et de leurs familles.
Déjà, un premier groupe de personnes a manifesté un
intérêt à être reconnu.
Je suis préoccupé aussi par le sort que l'on fait aux
victimes d'actes criminels. Comme vous le savez, traditionnellement, notre
système de justice pénale vise l'arrestation des criminels et
leur punition dans un but de maintenir la paix publique. Cependant, le
critère de réinsertion sociale doit nous guider de plus en plus
dans notre approche à l'égard de la criminalité et il
ressort aussi qu'il faut s'occuper davantage du sort des victimes.
La possibilité que les auteurs des crimes soient davantage mis
à contribution dans la réparation du préjudice pourrait
également être envisagée. Conséquemment, j'entends
examiner toute cette question. Je souhaite également étudier la
possibilité d'intervenir pour éviter que des criminels puissent
tirer impunément des bénéfices financiers de
l'exploitation de leurs crimes.
Cette question des victimes d'actes criminels m'amène à
celle des victimes d'erreurs judiciaires. Depuis 1984, les ministres
fédéraux et provinciaux responsables de l'administration de la
justice analysent la question de l'indemnisation des personnes ayant subi une
condamnation par suite d'une erreur judiciaire. Bien que ce genre de cas soit
peu fréquent, il importe tout de même que des mesures
réparatrices soient prévues pour celles qui en sont victimes.
Comme je l'ai souligné, il s'agit d'un dossier en cours d'étude
dans le cadre des rencontres fédérales-provinciales. J'entends
prendre les moyens nécessaires afin d'accélérer le
processus de consultation pour que nous en arrivions à des
résultats concret dans les meilleurs délais, sans exclure la
présentation d'un projet de loi à ce sujet.
En tout dernier lieu, je ne saurais passer sous silence la
réforme qui s'impose en matière d'emprisonnement au
Québec. Je l'ai déjà mentionné, l'emprisonnement
doit devenir une exception particulièrement pour le contrevenant qui ne
constitue pas une menace envers la société. Aussi, je suis
heureux de pouvoir collaborer à un comité récemment mis
sur pied sous la responsabilité du Solliciteur général du
Québec, mon collègue, M. Gérard Latulippe.
Enfin, toujours en matière de justice sociale, j'entends revoir
les dispositions du Code de procédure civile traitant des saisies.
Actuellement, si les créanciers peuvent généralement
saisir les biens de leurs débiteurs pour satisfaire leurs
créances, la loi interdit de saisir une partie du salaire et certains
meubles meublants et effets personnels. Or, je constate que les montants
prévoyant ces insaisissabilités n'ont pas été
révisés depuis bientôt dix ans et cela me préoccupe
et m'a préoccupé depuis quelques années. C'est pourquoi je
déposerai à
l'Assemblée nationale un projet de loi modifiant le Code de
procédure civile de façon à augmenter substantiellement
ces montants.
De plus, je constate qu'aucune mesure n'est prévue afin de
protéger la résidence principale de débiteur contre une
saisie pour une petite dette qui ne découle pas d'un privilège ou
d'une hypothèque sur cette résidence. Vous vous souvenez tous du
cas de ce citoyen de la région de Montréal dont la maison faisait
l'objet, l'an dernier, d'une saisie en exécution d'une créance de
quelques centaines de dollars. Aussi m'apparaît-il opportun de
légiférer sur cette matière.
Cette approche répondra, j'en suis certain, à des besoins
exprimés par des associations de protection de consommateurs. C'est mon
double rôle de ministre de la Justice et ministre responsable de la
Protection du consommateur, dont les crédits seront
étudiés demain, qui me permettra d'entreprendre de façon
réellement cohérente des actions en matière de justice
sociale. Cette question de l'insaisissabilité dont je viens de parler en
est une. J'aurai l'occasion, demain, de traiter plus à fond de mes
projets en matière de protection du consommateur.
Les droits et libertés de la personne. Bien qu'on ne puisse
séparer les droits et libertés de la personne du cadre de la
justice sociale, leur importance mérite qu'on les traite dans un
chapitre distinct. Tout d'abord, vous savez que la Charte des droits et
libertés de la personne a un effet prépondérant sur toutes
les lois québécoises qui lui sont antérieures et, ce
depuis le 1er janvier 1986. Or, pour assurer le respect des droits des citoyens
et limiter autant que faire se peut la nécessité de recourir aux
tribunaux pour les faire reconnaître, le ministère de la Justice a
procédé à l'analyse de l'ensemble de la législation
québécoise à la lumière de la Charte des droits et
libertés de la personne pour y corriger les dispositions douteuses. Avec
le concours des juristes de chacun des ministères et organismes
québécois, ces dispositions ont été
repérées et analysées; par la suite, les modifications qui
s'imposaient ont été proposées. Le résultat de ces
travaux se retrouvera dans une législation globale qui constituera un
autre pas important pour assurer è tout citoyen québécois
le respect de ses droits et libertés fondamentaux. J'ai aussi
décidé de procéder à l'examen de l'ensemble de la
réglementation afin de la rendre cohérente avec la Charte des
droits et libertés de la personne.
Quant aux programmes d'accès à l'égalité, un
projet de règlement était à l'étude devant la
commission des institutions qui vient de déposer son rapport. Ce projet
de règlement sur les programmes d'accès à
l'égalité devrait donc être adopté prochaine-
ment.
En guise de conclusion, le manque d'intérêt que j'ai
constaté ces dernières années, pour l'administration de la
justice, nous a fait perdre l'avance considérable que nous avions prise
dans ce domaine au début des années soixante-dix tant au Canada
qu'en Amérique du Nord. J'ai l'intention que le Québec reprenne
les devants, redevienne sur ce continent, la meilleure juridiction en
matière d'administration de la justice.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre.
M. le député de Taillon, porte-parole de l'Opposition.
M. Claude Filion
M. Filion: M. le Président, j'aimerais tout d'abord, en
tant que président de la commission des institutions, souhaiter la
bienvenue au ministre de la Justice ainsi qu'aux fonctionnaires,
présidents d'organismes et conseillers qui l'accompagnent
aujourd'hui.
La discussion que nous aurons au cours des prochaines heures devrait
être des plus fructueuses et pour ma part, j'ose espérer qu'il
s'agit d'un objectif partagé.
C'est un tout nouveau ministère de la Justice que nous avons
devant nous. En effet, le premier ministre actuel a choisi de poursuivre sur la
lancée de son prédécesseur et de maintenir la
séparation du poste de ministre de la Justice et Procureur
général de celui de Solliciteur général,
responsable entre autres des services correctionnels et de la
sécurité publique. La décision ayant été
prise de créer deux ministères distincts, le ministère de
la Justice pourra enfin prendre son envol et se concentrer pleinement sur sa
mission légale et sociale.
Je me réjouis donc de ce changement, bien que j'aie dû
malheureusement constater que, quelque part dans ce changement, les promesses
et idées mises de l'avant par le critique de l'Opposition
"unifié" qu'était le député de D'Arcy McGee
s'étaient malheureusement égarées. Que l'on pense
seulement à la construction annoncée par le Procureur
général d'une nouvelle prison à Trois-Rivières au
coût de 11 000 000 $.
Dans le cas du ministre de la Justice, la période normale de
transition et d'adaptation se prolonge plus longuement que prévu. Le
bilan des réalisations du ministre étant assez maigre depuis son
entrée en fonction. Mes commentaires porteront forcément sur ses
attitudes en tant que ministre de la Justice, sur ces détails qui
révèlent de plus en plus les difficultés qu'éprouve
l'actuel ministre a assumer son nouveau rôle de jurisconsulte et de
Procureur général. Nous traiterons ensuite des activités
législatives et réglementaires et enfin des décisions
administratives du ministre, notamment en ce
qui concerne les compressions budgétaires.
D'abord, mes propos pourront lui paraître sévères.
Mais je crois que le ministre est en train de nous prouver par son attitude et
ses déclarations sur plusieurs dossiers importants qu'il prend à
la légère ses deux fonctions qui sont de l'essence même du
fondement de nos institutions. La relation de confiance entre le Procureur
général et la population qu'ont mis tant d'énergie
à bâtir les diverses personnes qui ont occupé cette charge
au cours des quinze dernières années est précieuse et
mérite beaucoup de doigté pour se développer. (10 h
45)
Prenons l'exemple des poursuites ou plutôt des non-poursuites en
vertu de la Charte de la langue française. Ce ne sont pas les
rebondissements de ce dossier qui sont de nature à projeter l'image d'un
Procureur général calme, serein, impartial, au-dessus des
mêlées partisanes. Qui peut maintenant sincèrement croire
qu'actuellement l'administration de la justice pénale dans le domaine de
la langue puisse s'effectuer dans des conditions adéquates, tant au
niveau du climat que de l'impartialité et ce, pour toutes les parties en
cause, peu importent leurs idéologies?
Les volte-face juridiques - on ne poursuit pas en janvier, on poursuit
pour certains délits en avril - l'ambiguïté du Procureur
général qui est mal à l'aise politiquement avec la loi et
qui, paradoxalement, la défend juridiquement devant les tribunaux, tout
en refusant de l'appliquer pleinement dans les faits, les empoignades verbales
avec des hauts fonctionnaires, les interprétations nouvelles du droit,
notamment en ce qui concerne la présomption de validité des lois
tant et aussi longtemps qu'un jugement final d'une cour n'a pas
été rendu, autant de situations que la population et les milieux
juridiques n'avaient pas vues depuis belle lurette.
Et que dire des effets néfastes sur tout le reste des
activités des poursuites pénales? En fait, on dirait vraiment que
le ministre n'a jamais entendu parler du devoir de réserve du Procureur
général. Est-il conscient de la nécessité, pour le
Procureur général, de projeter constamment une image stable,
rassurante et imprégnée d'impartialité? Est-il conscient
de l'importance d'incarner adéquatement l'institution?
Pensons aussi à la rocambolesque histoire de la disparition en
douce de la clause "nonobstant". Aucun débat préalable sur les
enjeux de cette disparition, surtout pas à l'Assemblée nationale.
Aucune étude fouillée sur les impacts de cette décision,
tant sur le droit québécois que sur le dossier constitutionnel.
Quel a été le rôle du jurisconsulte du gouvernement dans ce
dossier qui, on le sait, a conduit à la démission du conseiller
senior du gouvernement en matière constitutionnelle? En fait, on a
parfois l'impression que la décision s'est prise dès le mois de
décembre, à la sauvette, au Comité de législation,
à l'instigation d'un ou deux membres qui avaient des comptes à
régler, mais qui avaient oublié qu'ils n'étaient plus dans
l'Opposition mais bien au gouvernement, avec les responsabilités que
cela comporte vis-à-vis de la population et des intérêts du
Québec.
On attend toujours des éclaircissements sur ce qui a pu amener le
ministre du Revenu à mettre en application au mois de février une
décision prise par le Conseil des ministres le 5 mars. Comment le
Procureur général, président du Comité de
législation, a-t-il pu laisser passer une bourde semblable?
Enfin, tout dernièrement, lors de discussions publiques sur la
possibilité pour les consommateurs d'intenter un recours collectif
contre le gouvernement en raison du niveau de taxation trop élevé
et peut-être illégal de l'essence à la pompe, on assistait
au spectacle assez surprenant d'un Procureur qénéral et ministre
responsable de la Protection du consommateur, à la limite du conflit
d'intérêts dans ce dossier, qui déclarait avec le cynisme
d'un avocat rompu à tous les trucs du métier: "Moi, je pense que
ce que le gouvernement fait est légal. S'il y en a qui pensent le
contraire, ils n'ont qu'à poursuivre. Les tribunaux sont là pour
cela". Est-ce là le genre de comportement que les consommateurs sont en
droit de requérir du Procureur général? Est-ce là
le genre de commentaire que les Québécois sont en droit
d'attendre de leur ministre de la Justice? Où est le devoir de
réserve du Procureur général?
Sur le plan législatif et réglementaire, depuis quatre
mois, le ministre s'est surtout employé à confirmer et à
concrétiser des mesures initiées par ses
prédécesseurs. Évidemment, ces initiatives sont louables
et je serais bien malvenu d'en critiquer le fondement. Cependant, compte tenu
des nombreuses déclarations du ministre, lors de ses années comme
député à l'Opposition, sans compter ses textes
écrits, ses promesses pendant la campagne électorale, on ne peut
pas dire qu'à ce jour en tout cas l'innovation soit la marque de
commerce du nouveau ministre.
Prenons d'abord l'entrée en vigueur de la
prépondérance de la charte québécoise des droits.
Certaines déclarations du ministre ont pu laisser croire qu'il
s'agissait là de l'une des décisions du gouvernement. Cette
entrée en vigueur, le 1er janvier 1986, était automatique puisque
inscrite dans la charte même adoptée en 1983.
En ce qui concerne le projet de loi abolissant les clauses
discriminatoires dans les lois du Québec, ce projet découle
automatiquement de l'entrée en vigueur de la prépondérance
de la charte. Des groupes de
travail ministériels et interministériels étudient
les amendements à venir depuis plus de deux ans. Le ministre pilotera le
projet à l'Assemblée nationale sans plus. C'est fort louable,
mais il n'y a rien de bien nouveau dans ce dossier. Pourtant, à entendre
le ministre, on croirait parfois le contraire.
Également, le ministre a fait une déclaration
ministérielle à l'Assemblée nationale pour nous annoncer
l'adoption d'un nouveau Code civil en entier pour 1989. Quels sont ses
échéanciers, quelle est la méthode? À peu
près les mêmes que ses prédécesseurs. La
nouveauté? L'ajout de deux nouveaux codificateurs aux deux codificateurs
oeuvrant déjà depuis quelques années dans le domaine. Tout
cela sans que l'on puisse savoir vraiment, avec tout le respect que j'ai pour
ces deux juristes, en quoi l'ouvrage qui était, à toutes fins
utiles terminé et bien fait, pourra l'être plus rapidement et avec
plus de qualité.
Je voudrais également attirer l'attention du ministre sur deux
nouveaux défis que nous impose l'évolution de notre
société, à savoir les impacts juridiques du
développement prodigieux de l'informatique et de la biologie. II importe
que le Code civil de 1990 ou de l'an 2000 soit complet et qu'il
réflète les réalités contemporaines.
Par ailleurs, dans le dossier de la violence conjugale, le ministre a
cherché encore à se faire un capital politique à partir
d'un travail presque mené à terme à son arrivée en
fonction. Mais là où il y a différence dans les deux
gouvernements, c'est dans l'absence de ressources nouvelles accordées
par le gouvernement libéral aux organismes les plus aptes à
traiter la source du problème de la violence conjugale plutôt que
de s'attaquer uniquement à ses conséquences. Que l'on pense
seulement à l'absence de ressources nouvelles au niveau des maisons
d'hébergement des femmes, là où réside une
expertise exceptionnelle.
En fait, en toute honnêteté envers le ministre, il n'y a
que te projet de loi sur les règlements récemment
déposé à l'Assemblée nationale, qui soit le reflet
d'une décision d'opportunité nouvelle du ministre. Cependant, le
contenu de ce projet de loi est nettement décevant par rapport aux
objectifs poursuivis, et nous aurons l'occasion d'y revenir peut-être
à l'occasion de l'examen des crédits mais sûrement à
l'occasion de l'étude détaillée du projet de loi 12.
En conclusion, c'est le mutisme total sur les grands enjeux
législatifs et réglementaires qui pourtant devraient être
la préoccupation d'un ministre de la Justice. Outre les exemples que
j'ai déjà donnés concernant le code civil, rien sur la
création de la Cour du Québec, sur l'indépendance de la
magistrature et sur la Constitution du Québec. Qu'en est-il du nouveau
code de procédure pénale - bien que le ministre ait ouvert une
porte à ce sujet tantôt dans son allocution d'ouverture - ou d'une
nouvelle politique en matière de pardon? La cause de ce mutisme ne
serait-elle pas les comités de bénévoles, décideurs
du gouvernement parallèle?
En ce qui concerne les décisions administratives maintenant.
Depuis plusieurs années, le ministre de la Justice ou le
ministère de la Justice, pardon, a eu à fournir sa juste part au
niveau des compressions budgétaires. Cette année, sous
l'impulsion du Conseil du trésor ou d'un comité de
bénévoles, les compressions apparaissent particulièrement
lourdes pour le ministère. Ces coupures, au montant de 13 400 000 $,
restent cependant assez obscures, bien que le ministre ait apporté
tantôt certains détails, puisqu'elles sont titrées par le
président du Conseil du trésor sous le chapitre "Rationalisation
interne et autres mesures". Nous avons réussi à en retracer
certaines - et, encore une fois, le ministre a apporté certains
éclaircissements tantôt - mais il apparaît indispensable
d'obtenir une ventilation détaillée de toutes les mesures
projetées sous cette rubrique.
Il vient donc un temps où les coupures ne peuvent continuer
à s'exercer sans que l'on ne soit obligé de commencer à
jouer avec les institutions mêmes. Dans le secteur de la justice, cela
m'apparaît particulièrement sérieux et préoccupant.
II y a une limite à ne pas franchir et un point où le ministre
doit se refuser à subir des coupures susceptibles d'affecter la vocation
même du ministère dans ses missions essentielles. Or, le ministre
me semble avoir franchi cette limite. Tout le litige entre le ministre et les
magistrats déborde le cadre d'une simple compression budgétaire.
Comment le ministre de la Justice a-t-i! pu décider et procéder
dans ce dossier sans consultation avec les principaux intéressés?
Comment le ministre de la Justice a-t-il pu se placer dans une situation telle
qu'un juge devra peut-être trancher un litige opposant le ministre de la
Justice, lui-même et les principaux officiers de la justice que sont les
magistrats? Absence de consultation? Assurément. Manque
d'habileté? Probablement. Mais, comment donc le ministre de la Justice
a-t-il pu se placer dans un pétrin semblable? Quel dur coup pour l'image
de la justice! Comment expliquer aux justiciables qu'ils doivent
idéalement régler leurs problèmes entre eux, sans recourir
aux tribunaux, alors que l'exemple nous vient de haut? On dit souvent que la
réalité dépasse la fiction. Dans ce cas-ci, il s'agit
presque de politique fiction.
Quant à la fusion du Comité de protection de la jeunesse
avec la Commission de la personne, voilà une décision qui
étonne encore plus. Je sais que les bureaux
régionaux du Comité de protection de la jeunesse sont un
attrait pour un Conseil du trésor qui ne veut pas allouer de ressources
pour des bureaux régionaux des droits de la personne. Mais, tout de
même, de là à fusionner les deux vocations de ces
organismes! Le Comité de la protection de la jeunesse n'était-il
pas le fruit d'un compromis historique entre le secteur des affaires sociales
et celui de la justice lors de l'adoption de la Loi sur la protection de la
jeunesse en 1977? Ne venait-il pas d'être confirmé dans
l'utilité de ses fonctions par de récents amendements à
cette même loi? Peut-on faire un tel geste, encore une fois, sans aucune
consultation?
Même sur un plan strictement administratif, les économies
de deux ou trois centaines de milliers de dollars ne méritent certes pas
de mettre en péril le travail de géant accompli ces
dernières années pour une protection efficace du droit des
enfants. 35 000 signalements ou plaintes ont été reçus
l'an dernier par les directeurs et, dans bien de ces cas, l'exercice des droits
des enfants peut entrer en conflit avec les droits reconnus aux parents ou aux
autres adultes responsables. Le ministre crée une situation où
les mandats respectifs des deux organismes ainsi que leur loi constitutive
peuvent créer une incompatibilité impossible à vivre
quotidiennement. La protection des enfants les plus vulnérables est la
meilleure garantie de la richesse collective de demain et le choix de valeurs
effectué par le ministre est périlleux pour l'avenir de notre
société. Mais, il y a plus, car ce choix de valeurs s'est
exercé sans tenir compte de l'opinion de ceux qui vivent la situation
à la Commission des droits de la personne et à la Commission de
protection de la jeunesse. Est-il utile de rappeler qu'il y a un peu plus d'un
mois, les deux autorités concernées avaient convenu, après
un examen des avantages et inconvénients de la fusion, que celle-ci
n'était pas opportune?
Compte tenu de ce qui précède et du fait que c'est le
ministre, lui-même, qui est responsable de la partie de la Loi sur la
protection de la jeunesse protégeant les enfants, l'Opposition demande
donc au ministre de la Justice de parler au nom de ces enfants - ils sont plus
de 1 500 000 au Québec - au Conseil des ministres pour éviter
qu'un butin trop lourd ne soit payé en échange de quelques
dollars de plus dans les goussets du Conseil du trésor. Il n'est pas
trop tard pour reconsidérer la décision si le ministre a la
volonté politique nécessaire. Sa collègue, la ministre de
la Santé et des Services sociaux a eu l'occasion, récemment, de
reconsidérer elle aussi une décision qu'elle avait prise en
matière de prévention de soins dentaires. Dans ce cas-ci, si,
encore une fois, le ministre en exprime la volonté politique minimale,
je crois qu'il serait en mesure de convaincre ses collègues de
reconsidérer la décision du Conseil des ministres
là-dessus.
Accessoirement, l'intégration du personnel de la Commission des
droits de la personne paraît menacer l'indispensable indépendance
des travailleurs et travailleuses des droits fondamentaux vis-à-vis le
gouvernement. En quoi cette décision était-elle
nécessaire? Nous aimerions interroger le ministre là-dessus. (11
heures)
Un mot enfin sur l'abolition du Conseil consultatif de la justice et de
la Commission de refonte des lois et règlements. Je trouve pour le moins
ironique qu'alors que le gouvernement et ses ministres multiplient les
comités de bénévoles pour le conseiller dans un foule de
dossiers, on trouve le moyen de faire disparaître un conseil qui existe
officiellement par une loi constitutive. Dans la même veine, les raisons
qui motivent la disparition de la Commission de refonte des lois et
règlements ne sont pas évidentes. Premièrement, la refonte
des lois et règlements devra se continuer au sein même du
ministère, d'où l'absence d'une économie véritable,
à moins de surcharger les légistes.
Deuxièmement, il ne m'apparaît pas évident que la
fonction de refondre les lois et règlements doive être
exercée par le ministre de la Justice quand on connaît les
quelques pouvoirs discrétionnaires que cela implique, et l'importance
légale des gestes posés pour le milieu juridique qui n'a pas
nécessairement les mêmes intérêts que le Procureur
général. La Commission de la refonte des lois et
règlements offrait plus de garantie au niveau de l'indépendance
et de l'impartialité et aurait pu même constituer, à peu de
frais, l'embryon de cette Commission de refonte du droit
québécois à laquelle faisait si souvent allusion le
ministre du temps qu'il était à l'Opposition, et auquel encore
tantôt il faisait allusion. Pour le moment donc, l'occasion est
ratée.
En conclusion, M. le Président, au niveau administratif, les
choix du ministre sont pour le moins discutables. Au plan législatif,
les initiatives sont bien minces. Quant à l'attitude dont il a fait
preuve depuis quatre mois autour d'un débat, elle apparaît, pour
le moins en rupture avec la tradition. La chance au coureur existe et la
collaboration de l'Opposition est acquise à ce coureur, mais encore
doit-il démarrer, et dans la bonne direction.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le
député de Taillon. Tel que prévu, nous allons poursuivre
programme par programme. Oui, M. le ministre.
M. Marx: J'aimerais juste dire quelques mots, M. le
Président.
Le Président (M. Marcil): Allez-y, M. le ministre.
M. Herbert Marx (réplique)
M. Marx: Je ne vais pas prendre beaucoup de temps, parce que cela
ne sera pas nécessaire. Premièrement, je ne suis pas ici pour
faire le procès de l'ancien gouvernement qui a été au
pouvoir pendant neuf ans, qui n'a rien fait en matière de justice. Il
n'a absolument rien fait durant neuf ans. Il ne faut pas oublier que ces gens
ont été là neuf ans, ils n'ont pas fait adopter un nouveau
Code civil. Neuf ans.
La question du Solliciteur général. Je demande depuis 1981
qu'on scinde le ministère en deux. M. Johnson a fait cela a la fin de
son mandat. Sur la question de la violence conjugale, c'est moi qui ai
lancé le dossier dans l'Opposition; j'ai demandé au gouvernement
depuis trois ans de faire quelque chose. Il n'a rien fait. En ce qui concerne
le projet de loi sur les règlements, pourquoi le gouvernement
précédent n'avait-il pas le courage de déposer et de faire
adopter une telle loi? Cela existe partout au Canada, sauf au Québec.
Qu'est-ce qui a empêché le gouvernement, durant neuf ans, de faire
adopter un tel projet de loi?
En ce qui concerne la Cour du Québec, que le député
de Taillon a soulevée, cela me fait rire, M. le député.
Cela me fait rire parce que M. Bédard, en tant que ministre de la
Justice, chaque fois qu'il a donné une conférence, soit au
Barreau ou ailleurs, chaque fois pendant des années il a annoncé
le dépôt d'un projet de loi sur la Cour du Québec.
J'espère que vous ne voulez pas que je dépose ce projet de loi
tout de suite.
Sur la question des juges. Le litige, je ne veux pas parler de litige,
parce que c'est sub judice. Mais est-ce que le député est au
courant qu'il y a quelques années le gouvernement péquiste a
décidé de réduire le nombre d'huissiers audienciers, que
les juges ont porté cette question devant les tribunaux et que les juges
ont gagné leur cause? Savez-vous ce que le gouvernement
précédent péquiste a fait? Le gouvernement péquiste
précédent a fait passer une loi pour contrer cette
décision de la Cour d'appel du Québec. Et je vais vous dire, M.
le Président, que j'étais d'accord avec cette loi et j'ai
voté pour cette loi. Quand le gouvernement péquiste a fait ces
choses dans le passé, c'était toujours durant la nuit,
c'était avec des papillons qu'ils sont venus, durant la nuit, quelques
minutes avant la fin de la session. Moi, je ne fais pas des choses durant la
nuit, je fais des choses durant le jour. Tout le monde peut prendre
connaissance de ce que je fais, tout le monde peut contester, le cas
échéant, ce que je fais.
Le député a parlé du Conseil consultatif de la
justice, cela me fait encore rire parce que M. Bédard, quand il
était ministre de la Justice, a fait en sorte que le conseil ne
siège pas pendant environ trois ans. Je ne pense pas qu'on puisse me
dire aujourd'hui qu'un tel conseil est essentiel, qu'il ne faut pas mettre fin
à un tel conseil, quand l'ancien ministre de la Justice n'a pas fait
siéger ce conseil pendant trois ans.
Pour les critiques, le député peut soulever toutes ces
questions, mais j'aimerais juste toucher à un point. Il s'agit de la
fusion du Comité de la protection de la jeunesse et de la Commission des
droits de la personne. Premièrement, les deux organismes ont
essentiellement la même mission. Il y a une économie de centaines
de milliers de dollars, on va garantir les droits acquis de tout le monde. Il y
a un grand avantage à cela, parce qu'il sera possible pour les
employés de la Commision des droits de la personne de demander
d'être mutés dans d'autres organismes au gouvernement, ce qui
n'est pas le cas maintenant. J'aimerais vous dire, M. le député,
que j'ai été commissaire à la Commission des droits de la
personne pendant cinq ans. Je comprends très bien le fonctionnement de
cette commission.
Deuxièmement, quand vous parlez de l'autonomie de cette
commission, vous ne devez pas oublier que c'est un ancien ministre de la
Justice péquiste qui a fait des attaques violentes à l'endroit de
cette commission, parce que la commission a osé critiquer l'adoption de
la loi 111, avec des "nonobstant", qui a enlevé à des enseignants
leurs droits fondamentaux. Troisièmement, en ce qui concerne cette
intégration de personnel de la Commission des droits de la personne
à la fonction publique... J'attends le député, je ne veux
pas qu'il manque ce point.
M. Filion: Non, je vous écoute.
M. Marx: Cela peut être important dans son apprentissage
comme député péquiste, cela peut être utile.
M. Filion: M. le ministre de la Justice, je vous écoute
toujours.
M. Marx: L'an dernier, M. Johnson, comme ministre de la Justice,
a fait une consultation auprès de l'Opposition, parce qu'il a voulu
modifier la charte québécoise pour faire l'intégration des
employés de la Commission des droits de la personne dans la fonction
publique. Il a consulté l'Opposition à l'époque. Il a
voulu faire cette modification dans un projet de loi omnibus durant la nuit,
quelque part à la fin du mois de juillet. Il a consulté.
L'Opposition était d'accord avec cette intégration. Mais comment
pouvez-vous me dire maintenant que c'était une mauvaise
chose? Mon prédécesseur a voulu faire exactement la
même chose. Dans ce dossier, M. le Président, les larmes de
crocodile du député de Taillon ne m'impressionnent pas. Je trouve
que c'est mal partir que de me critiquer de vouloir faire exactement ce que mon
prédécesseur a fait. Je pense qu'il serait souhaitable que le
député se mette au courant de certains faits de l'ancien
gouvernement, pour qu'il puisse me critiquer de façon plus juste
à l'avenir. Merci.
Le Président (M. Marcil): C'est bien, M. le ministre.
Discussion générale
M. Filion: M. le Président, vous permettrez
peut-être, avant de passer à un échange que j'espère
rapide sur plusieurs questions... Ces crédits-là, pour moi, c'est
la première fois que je les étudiais et j'ai plusieurs
interrogations au ministre. Mais avant, quand même, rapidement, à
la suite de la réplique du ministre... Le ministre fait beaucoup
référence au passé. On a entendu parler du ministre
Marc-André Bédard, du ministre de la Justice, de son
prédécesseur qui est maintenant chef de l'Opposition. Je voudrais
simplement lui dire ceci: si on se met à rebrasser le passé
ensemble, je vais être obligé de sortir tous les écrits du
ministre de la Justice, du temps qu'il était critique de
l'Opposition.
M. Marx: Faites ça, c'est une bonne idée.
M. Filion: C'est déjà fait. Le nombre de
contradictions...
M. Marx: Donnez-m'en une. Une.
M. Filion: Je vais vous en donner plusieurs. D'accord. Le nombre
de contradictions risque de devenir impressionnant avec le temps. En ce sens,
vu que nous aurons à travailler ensemble...
M. Marx: Donnez-m'en une. Au lieu de dire un nombre de
contradictions, donnez-m'en une.
M. Filion: Sur la politique de détention, la construction
de la nouvelle prison à Trois-Rivières, je l'ai dit tantôt
dans mon discours, 11 000 000 $
M. Marx: M. le Président, comment le député
peut-il me reprocher de faire quelque chose dans un dossier dont je ne suis pas
responsable?
M. Filion: La clause "nonobstant", la cohérence
législative, la politique nécessaire de cohérence
législative...
M. Marx: La clause "nonobstant"?
M. Filion: D'un gouvernement qui ne doit pas, à la
sauvette...
Le Président (M. Marcil): A l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant, M. le ministre.
M. Filion: Je réponds à sa question.
Le Président (M. Marcil): Oui, une seconde.
M. Filion: Bien que ce soit moi qui les pose ici,
généralement.
Le Président (M. Marcil):Oui, une seconde, M. le
député de Taillon.
M. Lefebvre: M. le Président, quand on pose une question,
il faut permettre à celui à qui on pose la question de pouvoir
répondre.
Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît! Nous
allons revenir exactement à la façon dont nous avons
travaillé dans les autres commissions, pour les autres dossiers. M.
Filion.
M. Filion: Je disais donc que si le ministre de la Justice veut
retourner dans le passé - et votre ministre de la Justice, pendant un
certain temps, une couple d'années au moins trois... Ce semble
être la limite générale d'un gouvernement sous la gouverne
du premier ministre actuel - il risque que le nombre de contradictions à
ses écrits et à ses décisions s'allonge dangereusement. De
mon côté, étant nouveau à cette Assemblée
nationale, étant nouveau à ce poste, je m'abstiens dans bien des
cas de relever ce genre de contradictions pour qu'ensemble nous puissions
regarder l'avenir.
Deuxièmement, en ce qui concerne l'indépendance de la
magistrature, la question des juges, j'y reviendrai plus tard. Je ferai
remarquer au ministre de la Justice que dans la cause de Shatila en 1982,
décision de la Cour d'appel, ce n'était pas un litige opposant
directement les juges au ministre de la Justice comme, encore une fois,
ça semble être le cas actuellement. Nous reviendrons
là-dessus immédiatement.
Troisièmement, en ce qui concerne la fusion entre la Commission
des droits de la personne et le Comité de la protection de la
jeunesse... Je savais que le ministre de la Justice avait siégé
à la Commission des droits de la personne - belle expérience
-mais, manifestement, il n'a pas siégé au Comité de la
protection de la jeunesse, parce qu'il y a un bout de chemin qui n'est pas
facile à comprendre. Si le gouvernement précédent ne l'a
pas fait, ou n'a pas fait certaines choses, c'est peut-être parce
qu'il
avait de bonnes raisons de ne pas les faire, que le ministre de la
Justice actuel n'a pas vues. Encore une fois, nous y reviendrons. Ma
première question, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Un instant, s'il vous
plaît. Oui, M. le député de Chapleau.
M. Kehoe: C'est une question d'ordre général. J'ai
une question à adresser au ministre de la Justice. Depuis les derniers
cinq ans, M. le ministre, lorsque vous étiez responsable du dossier de
la justice pour l'Opposition, vous avez toujours prôné la
séparation du ministère de la Justice et du Procureur
général. Maintenant, c'est chose faite. C'est un des derniers
actes du ministre de la Justice précédent. Pourriez-vous nous
renseigner et indiquer à notre collègue le député
de Taillon la raison pour laquelle vous avez fait cela et pourquoi le ministre
de la Justice ne l'a pas fait pendant quatre ans. Est-ce la raison principale
pour laquelle l'état de la justice était tellement
négligé à ce moment-là. Il occupait les deux
fonctions et il ne pouvait combler les deux en même temps.
M. Marx: Malheureusement pour le Québec, depuis 9 ans,
nous n'avons pas eu de ministre de la Justice à temps plein. De temps en
temps, nous avons eu un ministre de la Justice è temps partiel et en
d'autres temps, nous avons eu un ministre de la Justice à temps perdu.
Je pense que tout le monde au Québec est conscient de cela. Quand M.
Bédard était ministre de la Justice, il était ministre de
la Justice, Procureur général du Québec, Solliciteur
général du Québec et président du Comité de
législation, ministre délégué à la
Réforme électorale où on n'a pas fait grand chose, leader
parlementaire, etc. Il avait tellement de titres et de fonctions que j'ai
appris, quand j'ai visité mes bureaux pour la première fois
à Montréal au palais de justice, que le ministre de la Justice
n'était jamais là. Les bureaux n'avaient pas vraiment
été utilisés pendant des années.
M. Filion: Voyons, franchement. (11 h 15)
Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît! Bon,
écoutez... Une minute, s'il vous plaît!
M. Bélisle: M. le Président, il n'y a pas de "Bon,
écoutez..." Quand un député soulève une question de
règlement, vous devez lui donner la parole.
Le Président (M- Marcil): II n'y a aucun
député présentement qui a soulevé...
M. Bélisle: J'ai soulevé une question de
règlement, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Je regrette, M. le
député de Mille-Îles, vous n'aviez pas soulevé de
question de règlement.
M. Bélisle: Question de règlement.
Le Président (M. Marcil): Cela a été
uniquement des commentaires que chacun d'entre vous a formulés. Oui, M.
le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: À l'article 209, aux articles 283 et
285, M. le Président, quand le ministre répond à une
question, il a 20 minutes pour répondre à la question qui lui est
posée. Je pense que c'est la règle. Et si le député
de Taillon veut commencer à l'interrompre, on commence très mal
une commission qui doit durer cinq heures. Si vous voulez, M. le
Président, rappeler à l'ordre le député de
Taillon.
Le Président (M. Marcil): C'est bien. M. le ministre,
avez-vous terminé votre réponse?
M. Marx: Non. Non, M. le Président, mais... J'ai
demandé que le ministère soit divisé, comme c'est le cas
en Alberta, comme c'est le cas en Ontario, comme c'est le cas au
fédéral, pour un certain nombre de raisons. Premièrement,
parce que c'est trop pour un ministre, d'être ministre, Procureur
général, Solliciteur général et ainsi de suite.
J'ai demandé que l'on nomme un Solliciteur généra! pour
s'occuper de la police et des prisons essentiellement. Mais aussi, il y a une
autre raison: si le ministre de la Justice est responsable de la police, des
prisons, des poursuites et ainsi de suite, il y a un conflit. Peut-être
direz-vous que c'est un conflit théorique, mais je pense que c'est un
conflit qui pourrait être actuel et aussi il s'agit de toute l'image de
l'administration de la justice. Il ne faut pas oublier qu'en
Nouvelle-Écosse le ministre de la Justice n'a pas vraiment la
responsabilité de la police parce que c'est la GRC et tout ce qu'il
fait, il administre un contrat. C'est la même chose dans les autres
provinces, sauf en Ontario où ils ont un Solliciteur
général. Donc, je pense que c'est très important d'avoir
deux ministres pour qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts.
Mais, je vais vous dire que, quand M. Johnson a divisé le
ministère, il l'a mal fait. Il l'a mal fait parce qu'il a nommé
M. Fréchette comme ministre de la Justice et ministre du Travail. Il y
avait un conflit dans ces deux postes parce que, quand nous avons adapté
la loi 42, nous avons prévu que ce soit le ministre de la Justice qui
ait la responsabilité de la CALP, la Commission d'appel en
matière de lésions professionnelles, et quand on a nommé
M.
Fréchette ministre des deux ministères, il était
tout de suite en conflit d'intérêts. M. Johnson a mal fait cela,
mais cela n'a pas duré longtemps, comme vous le savez.
Donc, tout ce que M. Johnson a fait à la fin de son mandat, c'est
de faire par décret ce que nous avons demandé au gouvernement de
faire par une loi depuis cinq ans. Et je pense que l'on va avoir une meilleure
administration de la justice, et on voit cela maintenant, parce que ce
gouvernement-ci, dans l'administration de la justice, a déjà fait
plus dans six mois que l'autre gouvernement a fait dans un mandat, sinon dans
deux.
Le Président (M. Marcil): Cela va?
M. Marx: Et je pense que, si on fait le bilan, vous allez voir
cela.
Formulation de jugements
Le Président (M. Marcil): Je rappelle à tous les
membres de cette commission que le mandat de la commission, c'est de
procéder à l'étude des programmes 1 à 6, et 8
à 11. Donc, on a quand même dix programmes à passer en cinq
heures, ce qui veut dire qu'il nous reste environ une heure. Ce matin, on
devrait terminer vers 1 heure. Donc, j'appelle le premier programme qui est la
formulation de jugements. M. le député de Taillon.
M. Filion: Alors, M. le Président, je me retiens de
recommenter encore une fois la question de la division entre les postes de
Solliciteur général, Procureur général et le
ministère de la Justice. Je l'avais traitée d'une façon
non partisane, d'ailleurs, dans mon texte, mais parce qu'on a beaucoup de
chemin à faire, on va essayer de se comprendre.
D'abord, cela touche à la fois le programme 1 et le programme 2.
J'aimerais que le ministre fasse le point, non pas sur le fond du litige,
mais... J'ai vu, à mon bureau, hier après-midi, un document
telbec, à 15 h 40 et 36 secondes, intitulé "Entente entre le
ministre de la Justice et les juges en chef. Le ministre de la Justice et les
juges en chef s'entendent sur la rationalisation des dépenses de la
magistrature."
Parallèlement à cela, suite à une conversation avec
le ministre et également à la lecture des journaux de ce matin,
je me rends compte qu'il y a eu une poursuite intentée, semble-t-il, par
certains juges contre le Procureur général. Sans entrer dans le
fond du litige, aucunement, le ministre peut-il juste faire le point? Y a-t-il
une entente ou une poursuite?
M. Marx: Ce que le député a dit est exact. Je n'ai
rien à ajouter.
M. Filion: Y a-t-il une entente ou n'y a-t-il pas d'entente?
Est-ce une entente partielle ou...
M. Marx: II y a eu un communiqué de presse le 29 avril. Le
titre était: "Le ministre de la Justice et les juges en chef s'entendent
sur la rationalisation des dépenses de la magistrature." Et le 30, il y
a une poursuite intentée par certains juges contre le ministre de la
Justice. Ce sont les faits et je n'ai rien à ajouter. Je pense que le
député devrait être capable de comprendre la situation. Je
pense que c'est clair.
M. Filion: Je pense que cela est important, M. le ministre de la
Justice. Je peux avoir un entendement qui n'est pas le bon. On a un conflit qui
n'est pas mineur, qui est presque un précédent dans,
probablement, les annales occidentales, où il y a des
démocraties. Des poursuites judiciaires sont prises par des juges, qui
sont les premiers officiers de la justice dans n'importe quelle
société, contre le ministre de la Justice qui est
l'autorité, encore une fois, suprême, en termes d'administration
de la justice. Alors, j'ai un communiqué qui dit qu'il y a une entente,
et d'autre part, il y a une poursuite. Dois-je comprendre qu'il y a une entente
partielle ou locale et qu'il y a encore une partie des problèmes qui ne
sont pas réglés et qui font l'objet de litiges? Dois-je
comprendre qu'il y a une entente avec un groupe de magistrats, alors qu'avec un
autre groupe de magistrats, il y a toujours un litige?
M. Marx: C'est une bonne question, M. le Président. Le
communiqué de presse du 29 avril 1986 se lit comme suit:
M. Filion: C'est bien le 29?
M. Marx: C'est ce qui est écrit. Lundi, c'était le
29.
M. Filion: Parce que moi, j'ai le 28.
M. Marx: Le 28, d'accord, le 28. C'était le 28,
d'accord.
M. Filion: Mais cela a été émis hier, je
crois?
M. Marx: Mais c'était le 28 sur le Telbec, d'accord.
M. Filion: Mais hier, c'était le 29.
M. Marx: II se lit comme suit: "Le ministre de la Justice et les
juges en chef s'entendent sur la rationalisation des dépenses de la
magistrature. Dans le but de
parvenir à une rationalisation des dépenses auprès
de la magistrature, le ministre de la Justice, M. Herbert Marx, et les juges en
chef de la Cour provinciale, de la Cour des sessions de la paix et du Tribunal
de la jeunesse en sont arrivés à des solutions qu'ils jugent
acceptables de part et d'autre. En outre, le ministre de la Justice et les
juges en chef prépareront d'ici quelque temps un document de principe
sur l'autonomie administrative de la magistrature. D'ici là, toute
situation nouvelle sera discutée entre les parties qui ont convenu d'une
autre rencontre à brève échéance." Fin du
communiqué.
En ce qui concerne le litige devant les tribunaux, M. le
Président, je ne veux pas discuter de cette question. Le
député doit être au courant que dans l'affaire Shatila que
nous avons déjà mentionnée, c'était un litige
semblable, c'est-à-dire que les juges ont contesté une
décision administrative d'un ministère de la Justice. Je ne vois
pas la différence entre ces deux litiges. S'il y en a une, le
député pourra m'expliquer tout cela.
M. Filion: Encore une fois, sauf erreur, dans l'arrêt
Shatila - vous me corrigerez, M. le ministre - je crois bien qu'il ne
s'agissait pas d'une procédure judiciaire entre les magistrats contre ou
versus le ministre de la Justice ou le Procureur général.
M. Marx: Mais est-ce que le député a vu les
procédures ou si le député a vu seulement les
journaux?
M. Filion: C'est ma prochaine question, M. le ministre de la
Justice. Est-ce que...
M. Marx: Oui, mais si le député veut vraiment poser
des questions de fond, qu'il se munisse des documents officiels et qu'il ne
lise pas seulement les manchettes de journaux...
M. Filion: D'accord.
M. Marx: ...qui sont des vulgarisations souvent.
M. Filion: Est-ce que le Procureur général a
reçu effectivement signification d'une poursuite....
M. Marx: Oui.
M. Filion: ...de la part de certains juges ou des juges?
M. Marx: C'est cela. Oui.
M. Filion: Oui, alors de la part de quels juges? Quel groupe de
juges?
M. Lefebvre: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Marcil): Oui, M. Le député
de Frontenac.
M. Lefebvre: Je voudrais porter à votre attention
l'article 35, paragraphe 3, qui dit que "le député qui a la
parole ne peut parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un
organisme quasi judiciaire". Alors j'attire votre attention, M. le
Président, sur l'extrême prudence qu'on doit avoir lorsqu'on
s'engage dans un débat soulevé par le député de
Taillon jusqu'à date. Je pense qu'on peut établir qu'il y aeu des procédures d'intentées, mais je vous soumets, M. le
Président, qu'on ne peut pas aller plus loin en vertu de l'article 35
que je viens de vous citer.
M. Filion: M. le Président. Question de
règlement.
Le Président (M. Marcil): Je reçois votre question
de règlement, cependant...
M. Filion: Est-ce que le Président veut m'entendre sur la
question de règlement?
Le Président (M. Marcil): Oui, juste une seconde, je veux
au moins répondre à celle-là. Par contre, et compte tenu
que...
M. Filion: Je veux intervenir sur cette question de
règlement.
Le Président (M. Marcil): Oui, compte tenu que nous avons
le ministre en présence, je crois qu'il est sage de sa part de
décider de répondre ou de ne pas répondre è cette
question. M. le député de Taillon.
M. Filion: M. le Président.
M. Lefebvre: Je m'excuse, M. le Président, l'article 35 ne
donne pas le choix à la présidence de décider que Je
député ne peut pas. C'est un article qui est clair: le
député qui a la parole ne peut parler d'une affaire. La
présidence n'a pas le choix de tolérer ou pas. C'est restrictif
l'article 35, le député ne peut parler d'une affaire qui est
devant les tribunaux ou un organisme quasijudiciaire.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Taillon.
M. Filion: M. le Président. Bon, c'est la règle du
sub judîce qui grosso modo est reproduite dans notre code de
procédure et de façon tout à fait raisonnable. Ma question
- le député est intervenu - ma question était: Est-ce
qu'il y a une procédure judiciaire? Et je demandais: quelles sont les
parties? Manifestement, je voudrais dire au
leader parlementaire adjoint et député de Frontenac que je
suis tout à fait conscient, que je voudrais à coup sûr ne
pas intervenir - s'il y a eu procédure judiciaire, là on l'a
appris - dans un litige pouvant faire l'objet d'une décision du
tribunal. Encore une fois, ma question était extrêmement prudente
dans ce sens-là. Je la répète, peut-être pour vous,
M. le ministre de la Justice: quelles sont les parties, par qui a
été intentée cette procédure et de quelle nature
est la procédure elle-même?
M. Marx: M. le Président, je remercie le
député d'avoir porté à l'attention de la commission
cet article de notre règlement. Mais le député m'a
demandé: c'est une procédure intentée par qui? Je vais lui
dire exactement par qui. René Beaulac, en sa qualité de juge de
la Cour provinciale, résidant et domicilié au 92 de la rue Basin,
ville de Laval, district de Montréal et Gilles Bélanger en sa
qualité de juge de la Cour provinciale, résidant et
domicilié au 300 de la rue Saint-Georges, ville de Saint-Lambert,
district de Montréal et Rodolphe Bilodeau, en sa qualité de juge
de la Cour provinciale, résidant et domicilié au 3435 de la rue
Drummond dans les villes et district de Montréal, et Guy Boissonneault,
en sa qualité de juge de la Cour provinciale, résidant et
domicilié au 6000 du chemin Deacon, dans les ville et district de
Montréal, et Roland Bourret, en sa qualité de juge de la Cour
provinciale, résidant et domicilié au 165 ouest de la rue de la
Gauchetière, dans les ville et district de Montréal, et Simon
Brassard, en sa qualité de juge de la Cour provinciale, résidant
et domicilié au 481 de la rue Oak, ville de Saint-Lambert, district de
Montréal et Charles Simon, en sa qualité de juge de la Cour
provinciale, résidant... oui.
M. Filion: M. le Président, je m'aperçois que le
ministre de la Justice cite un document. Pour sauver...
M. Marx: M. le Président, le député m'a
demandé quelles sont les causes...
M. Filion: D'accord. Mais étant donné que le
ministre de la Justice...
M. Marx: ...j'essaie de lui expliquer de la façon la plus
détaillée possible, de lui donner toute cette information...
M. Filion: Cela va, s'il y en a cinq pages ce serait perdre le
temps de la commission.
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: M. le Président, est-ce que le
député veut l'information ou s'il ne veut pas l'information?
M. Filion: Est-ce qu'il peut déposer... À ce
moment-là, la meilleure façon d'obtenir l'information...
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Taillon, s'il vous plaîtl À l'ordre, vous avez posé une
question au ministre, et puis le ministre répond à votre question
de façon plus précise. (11 h 30)
M. Filion: M. le Président, je pense bien que nous sommes
ici pour faire un travail et vous avez à coeur que nous puissions
avancer le plus rapidement possible. Ma suggestion au ministre de la Justice...
D'ailleurs, ce n'est pas une suggestion. Étant donné qu'il cite
le document et comme le prévoit notre règlement, est-ce qu'il
pourrait tout simplement déposer le document? Nous en prendrons
connaissance sans que ce soit nécessaire pour lui, à l'examen des
crédits, de passer quinze minutes à le lire; parce que le nombre
de requérants et de demandeurs, j'ignore s'ils sont requérants ou
demandeurs, comme dans certaines procédures peut être fort...
M. Marx: M. le Président...
M. Filion: À ce moment, je demanderai tout simplement le
dépôt du document.
M. Marx: M. le Président...
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, compte tenu que
vous aviez quand même du temps alloué pour répondre
à votre question, est-ce que vous désirez mettre fin à
votre réponse et déposer le document?
M. Marx: J'aimerais juste dire que le règlement ne
prévoit pas qu'on peut déposer un document auprès d'une
commission. Mais je suis prêt à faire faire des copies et à
les distribuer aux membres de la commission. Cela me ferait grand plaisir;
ça va m'ernpêcher de lire les noms de toutes les parties. Je pense
que c'est bon. Mais la différence, ce ne sera pas dans le Journal des
débats et il ne sera pas possible pour le député de faire
référence à cela l'an prochain. Quand même,
j'espère qu'il va garder le document...
M. Filion: Un document rare, M. le ministre.
Le Président (M. Marcil): Donc, vous acceptez de
déposer votre document, M. le ministre?
M. Marx: Oui, on va faire faire des copies.
M. Filion: II y aurait peut-être une copie dont je peux
disposer immédiatement; je pourrais la feuilleter pour amener ma
prochaine question?
Le Président (M. Marcil): En attendant...
M. Filion: M. le ministre de la Justice - oui, en attendant -
est-ce que je dois comprendre que parmi ces demandeurs ou ces
requérants, il n'y a que des juges des Cours provinciales?
M. Marx: Oui. Ce n'est pas juste de Montréal. Ce sont des
juges de la Cour provinciale.
M. Filioon: Qui sont les procureurs au dossier pour les
demandeurs ou les requérants?
M. Lefebvre: M. le Président...
Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député
de Frontenac.
M. Lefebvre: Là on est en complète
dérogation avec 35.3. On parle de l'affaire, on va jusqu'à
déposer la procédure; jusqu'à un certain point, je pense
que ça peut être toléré. Mais sûrement pas
discuter le contenu de la procédure. C'est textuel, c'est l'article
35.3.
Le Président (M. Marcil): Je reçois votre point de
règlement, M. le député de Frontenac. Cependant,
j'aimerais bien vous faire remarquer que, présentement, on ne discute
pas du tout du fond. On ne discute pas de la cause comme telle. On discute
uniquement sur une question de procédure, point. C'est-à-dire
qu'on demande des noms et c'est à peu près tout. On n'a pas
discuté jusqu'à maintenant de la question qui est devant les
tribunaux. Il n'est pas question non plus d'en discuter à cette
commission.
M. Lefebvre: Lorsqu'on en est rendu à vouloir qualifier
les demandeurs, à vouloir établir qui est partie à la
procédure, qui n'est pas partie à la procédure et quelles
sont les qualités des demandeurs, si ce n'est pas parler d'une affaire
qui est devant les tribunaux... Écoutez, ce sont des questions
préalables, préliminaires, régulières devant les
tribunaux à savoir la qualité des demandeurs. On est en
complète dérogation avec l'article 35.3 au moment où on se
parle.
Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y en a qui veulent
discuter sur la question de recevabilité?
M. Filion: Simplement pour qu'on se comprenne, je pense que te
Ieader parlementaire adjoint et député de Frontenac est dans
l'erreur. Le nom des parties...
M. Lefebvre: II est toujours possible que je sois dans l'erreur,
M. le député de Taillon.
M. Filion: ...ce qui figure à la face même des
procédures, dans la mesure où le contenu, encore une fois, dans
la mesure où ce qui est appelé à être tranché
par le tribunal ne fait pas l'objet de discussion, comme par exemple ma
dernière question au moment où vous m'avez interrompu: Qui sont
les procureurs des demandeurs ou des requérants?
M. Lefebvre: Je m'excuse, question de règlement.
Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député
de Frontenac.
M. Lefebvre: Cela peut arriver que je ne sois pas d'accord et que
le député de Taillon et moi-même ne soyons pas du
même avis. Cela ne veut pas nécessairement dire que je sois dans
l'erreur. Je répète ce que je viens de dire, savoir que l'article
35 défend au député de parler d'une affaire qui est devant
les tribunaux. Je voudrais ajouter, en terminant, que ce n'est
évidemment pas parce qu'on a des choses à cacher, on consent
à déposer la procédure. Mais de traiter de la
procédure, de qualifier les demandeurs, de parler du contenu de la
procédure, c'est en dérogation avec l'article 35. Je pense, M. le
Président, que vous devez voir à l'application des règles
même si le ministre de la Justice a, jusqu'à maintenant, fait
preuve de tolérance et de patience. Il a répondu à des
questions auxquelles il aurait pu s'opposer. Je pense qu'il faut être
prudent. Il ne faut pas aller trop loin.
Le Président (M. Marcil): Mme la députée de
Chicoutîmi.
Mme Blackburn: Sur la question de règlement. Il ne s'agit
pas ici de discuter sur ce qui fait l'objet de la poursuite en justice de la
demande. Il s'agit simplement de savoir ce qui est connu actuellement,
c'est-à-dire qui sont les procureurs de ces personnes. Je ne vois pas en
quoi cela vient en contradiction avec le règlement qu'on a en main. Il
ne s'agit pas de discussion sur le fond. Je pense que la décision du
président est généralement, dans ces cas-là, sans
appel, comme en Chambre.
M. Lefebvre: Sauf erreur, M. le Président...
Mme Blackburn: Et il a pris cette décision
tantôt. Il me semblait que c'était clair, à moins qu'il y
ait d'autres règles pour les commissions parlementaires que celles qui
s'appliquent en Chambre.
M. Lefebvre: Sauf erreur, je pense que la question du
député de Taillon ne référait pas aux procureurs
des demandeurs.
Mme Blackburn: Oui, essentiellement. M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît!
Jusqu'à maintenant, en ce qui concerne les règlements de cette
commission, même si on se réfère au règlement de
l'Assemblée nationale, il n'est pas question qu'on discute sur le fond
de la cause. Ce sont uniquement des demandes de renseignements et de noms qui
sont déjà connus publiquement.
M. le ministre.
M. Marx: Quelle est la question? Le nom des avocats? La
procédure était signée par Robert, Dansereau, Barre,
Marchessault & Lauzon, procureurs des demandeurs requérants.
M. Filion; En attendant une copie du document, on se comprend que
ce sont des juges de la Cour provinciale. Est-ce que le ministre de la Justice
peut nous apporter des éclaircissements sur le dossier avec les juges de
la Cour supérieure ou s'il ne voudrait pas traiter de cette partie du
dossier vu les conséquences que cela pourrait avoir dans l'autre
dossier?
M. Marx: M. le Président, je pense que le
député est lent à apprendre...
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, en vertu de
l'article 35, troisièmement, je pense que cette question est irrecevable
vu la cause.
M. Marx: C'est cela. J'ai voulu dire que je pense que le
député est lent, parce qu'il n'a pas encore compris que je ne
vais pas parier de cette question qui est devant les tribunaux. Mais s'il veut
insister, ilpeut insister, mais je ne vais pas parler de cette question
qui est en litige, qui est sub judice. C'est évident que je ne vais pas
parler de cela. Mais s'il insiste, qu'il insiste.
M. Filion: Est-ce que le Procureur général a
reçu d'autres procédures que celle-là provenant des juges
de la Cour supérieure?
M. Marx: Non, M. le Président. Si nous recevons d'autres
procédures, je suis prêt à en envoyer des copies au
député de Taillon.
M. Filion: Merci. Est-ce que le
Procureur général, ou ses représentants ont
rencontré, ces jours derniers, les représentants des juges de la
Cour supérieure?
M. Marx: M. le Président, il y a quelques minutes j'ai lu
un communiqué que nous avons rendu public... De la Cour
supérieure? M. le Président, je ne vois pas la
nécessité de sortir mon agenda pour dire au député
qui j'ai rencontré, quand et comment. Il y a toujours eu des discussions
entre les différents juges et le ministre ou les fonctionnaires au
ministère.
M. Filion: Quand puis-je espérer avoir... Je vais passer
à un autre sujet.
Le Président (M. Marcil): En attendant, M. le
député de Taillon, de recevoir le document, sur le programme 1,
le député de Mille-Îles avait une question. M. le
député de Mille-Îles.
Déontologie judiciaire et perfectionnement des
juges
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Relativement au
programme 1, élément 2, "Formulation de jugements",
Déontologie judiciaire et perfectionnement des juges, il apparaît
de plus en plus, M. le ministre de la Justice, que le droit se
surspécialise. La pratique du droit devant les tribunaux devient de plus
en plus complexe à cause de l'étonnante masse de
réglementations et de lois qui existent au Québec. Ayant une
courte expérience d'environ treize ans comme plaideur devant les
tribunaux du Québec, et plusieurs de mes confrères sont
également dans la même situation que moi, je peux vous dire que
nous avons quelquefois des problèmes quant à la
spécialisation des juges. Je ne veux pas du tout ce matin critiquer la
compétence des juges du Québec. Ce n'est absolument pas l'objet
de mon intervention. Mais je me demande où en est rendue la
réflexion au ministère de la Justice. C'est impossible de
demander à un pratiquant en droit qui accède à ta
magistrature de connaître ce que les avocats ne peuvent pas
connaître, c'est-à-dire l'étendue et l'ensemble de toutes
les lois et réglementations au Québec. Par exemple, vous avez une
cause en droit immobilier, vous poursuivez sur cautionnement, vous poursuivez
sur privilège, vous pratiquez le droit par domaine de
spécialisation; les généralistes se font de plus en plus
rare. Est-ce qu'il y a une politique au ministère de la Justice,
présentement, pour orienter la magistrature dans des secteurs de
spécialisation, ou pour affecter des groupes de juges
en fonction de leur pratique passée et de les limiter à
certains domaines de leur compétence où ils sont à l'aise
et où Us n'ont pas à englober, à avaler des tonnes de
connaissances dans un court espace de temps, ce qui les rend mal à
l'aise, je crois? M. le ministre, j'aimerais que vous livriez à la
commission... Je crois que c'est très important pour les justiciables du
Québec, pour ceux qui pratiquent le droit devant les tribunaux de
connaître les intentions du ministère de la Justice sur ce point
fondamental, parce que c'est l'application concrète, quotidienne du
droit et de la justice devant nos tribunaux qui est en cause.
M. Marx: Merci, M. le Président. Premièrement, je
dirais que nous avons un système d'administration de la justice, un
système de justice qui est peut-être un des meilleurs en
Amérique du Nord. Je pense que si on lit le Sunday Times de New York, le
New York Times, le dimanche de temps à autre, on verra que nous avons le
meilleur système. Lorsque je lis le New York Times, le dimanche de temps
à autre, je vois qu'il y a des juges à Chicago, des juges
à Atlanta ou des juges ici et là qui sont poursuivis pour
corruption. " Le système ailleurs en Amérique du Nord ne
fonctionne pas aussi bien qu'au Québec, il y a beaucoup de
problèmes.
En ce qui concerne un nouveau juge, il y a une période
d'apprentissage. Supposons qu'on nomme un juge au Tribunal de la jeunesse, il y
a une période d'apprentissage. Il y a aussi le Conseil de la
magistrature qui organise des cours pour les juges. Je pense que si vous
voulez, je peux... Il y a un budget de plus de 500 000 $ pour les cours de
perfectionnement, il y a toutes sortes de cours. Aussi, nous avons des chambres
spécialisées au Québec. Par exemple, il y a le Tribunal de
la jeunesse pour ces lois qui touchent les jeunes. Il va y avoir une chambre
spécialisée pour l'expropriation, une chambre
spécialisée - un juge y sera affecté - pour le Tribunal
minier. Il y a des juges qui font presque exclusivement du droit criminel, et
ainsi de suite. Donc, il y a une certaine spécialisation, il y a aussi
les cours organisés par le Conseil de la magistrature. Il n'y a pas
longtemps, quelques semaines, j'ai rencontré un juge de la Cour d'appel
d'une autre province qui est en train de promouvoir un dossier pour un conseil
national de la magistrature, afin que les juges des provinces puissent
s'associer dans des cours de perfectionnement. Nous avons des juges qui vont
dans d'autres juridictions pour suivre des cours, et ainsi de suite. Donc, je
peux vous assurer qu'il y a des programmes de perfectionnement pour les juges
et les juges participent à ces programmes.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Marquette.
M. Bélisle: En additionnelle. Pas trop long. M. le
ministre de la Justice, ce que je dois comprendre, c'est que les juges
affectés à des tribunaux de juridiction générale,
comme la Cour supérieure, qui par le fait de notre système sont
affectés à des chambres spécialisées, par exemple,
il y a une chambre qui existe de fait, la Chambre administrative, dans le
district judiciaire de Montréal, pour le matrimonial et tout le reste...
Est-ce que je dois comprendre que votre intention est de maintenir le
système actuel, c'est-à-dire que les juges seront
orientés, selon leur secteur de compétences, dans les chambres
qui, de fait, sont spécialisées dans les secteurs dans lesquels
ils ont une certaine expérience? Est-ce cela? (11 h 45)
M. Marx: C'est cela. À la Cour supérieure, il y a
des chambres spécialisées, par exemple, pour les faillites ou
pour les assises criminelles. Il y en a une pour la famille, et ainsi de suite.
C'est au juge en chef de nommer les juges qui siégeront dans ces
différentes chambres. En tant que ministre de la Justice, je n'ai pas de
responsabilités en ce qui concerne l'attribution des juges dans
différentes cours. Mais, je peux vous assurer que la magistrature a et
aura notre collaboration en ce qui concerne ses programmes de
perfectionnement.
J'ai même déjà annoncé que nous sommes
prêts à moderniser l'équipement disponible à la
magistrature, c'est-à-dire à procurer les machines de traitement
de texte qui manquent dans les bureaux des juges, des machines à
écrire modernes, des standardistes, etc. Nous sommes prêts
à moderniser tous les équipements pour que nos juges puissent
travailler de façon plus efficace.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: Merci beaucoup, M. le Président. Toujours
à propos du programme 1, plusieurs groupes m'ont récemment fait
des représentations au sujet de la division des petites créances
qui relève de la Cour provinciale du Québec. Les corporations ou
les sociétés qui sont incorporées ne peuvent pas aller
devant les petites créances à moins de prendre un avocat. Ainsi,
plusieurs sociétés incorporées, je pense notamment aux
courtiers d'assurances qui ont beaucoup de cas de collection,
régulièrement, à toutes les semaines, des petits comptes
de 150 $, 200 $ ou 300 $. Ils m'ont fait des représentations
récemment à savoir si le ministère de la Justice
n'envisagerait pas éventuellement d'apporter des modifications
pour permettre à ces sociétés incorporées
d'aller devant les petites créances, par l'entremise d'un des
actionnaires ou d'un des officiers de la société. Alors que les
avocats - en étant tous ici, de notre côté du moins -la
plupart du temps, en honoraires, vont chercher, bien souvent en grande partie
le montant qu'on peut réclamer aux petites créances.
Ma question est bien simple. Est-ce que le ministère
n'envisagerait pas éventuellement d'apporter des modifications
là-dessus?
M. Marx: Je connais bien le problème, M. le
Président, car j'y ai réfléchi depuis quelques
années. Quand on a établi la Cour des petites créances et
quand on a modifié le Code de procédure civile, l'un des
objectifs visait à permettre aux gens ordinaires d'aller devant la cour
et de plaider leur cause d'une façon simple, devant un juge, sans avoir
recours à un avocat. C'était l'un des principaux objectifs.
Nous avons modifié le Code de procédure civile il y a deux
ou trois ans pour permettre la présence d'avocats dans des cas où
le juge décide qu'on a besoin d'une certaine expertise. Il y a
maintenant une cause devant la Cour provinciale, division des petites
créances, où un citoyen ordinaire a pris une action contre un
certain nombre de banques. Le juge a permis aux banques de se faire
représenter par des avocats. Maintenant, ce citoyen se plaint car il dit
qu'il n'y a pas d'égalité entre les avocats et lui-même. Ce
sont des experts et il n'en est pas un. Cependant, il faut ajouter aussi que ce
justiciable peut se prévaloir de la possibilité d'engager un
avocat qui sera payé aussi par le gouvernement. Effectivement, il a
engagé un avocat mais il dit que les autres, les banques ont
engagé un gros bureau d'avocats et donc, il n'y a pas
d'égalité entre les parties. Donc, cela est un
problème.
En ce qui concerne les PME, il s'agit d'une possibilité de
permettre que ces hommes d'affaires instituent leurs propres actions devant la
Cour des petites créances, mais nous n'avons pas pris de décision
sur ce dossier. C'est un dossier à étudier. Cela a beaucoup
d'implications. Cela va modifier, dans un certain sens, l'orientation que nous
avons donnée à la Cour des petites créances. Cela se fait
dans certaines juridictions ailleurs en Amérique du Nord, où les
compagnies peuvent intenter des actions devant la Cour des petites
créances, mais avant de plonger dans ce dossier, j'aimerais avoir plus
d'information et avoir des études de fond.
Je connais bien le problème, le problème, c'est le
suivant: c'est que quelqu'un qui ne paie pas une dette de 50 $ à une
compagnie est souvent assuré qu'il ne sera pas poursuivi, parce que cela
coûte trop cher, parce que la compagnie doit intenter l'action devant la
Cour provinciale par l'entremise d'un avocat et, après cela, le
défendeur peut demander que la cause soit transférée
à la Cour des petites créances. Et intenter une action pour une
dette de 50 $, cela ne paie pas, et donc ces gens ne sont pas poursuivis. C'est
un problème, et on va se pencher sur ce problème dans les mois
à venir.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. M. le
député de Taillon.
M. Filion: Merci, M. le Président. Alors, je remercie le
ministre et le sous-ministre. Je viens de recevoir copie de l'action en
nullité, requête en injonction provisoire interlocutoire,
requête pour ordonnance de surseoir et affidavit, dont a parlé le
ministre tantôt. Je dois vous avouer que j'avais un tas de questions sur
l'indépendance de la magistrature, mais peut-être aurons-nous
l'occasion d'en traiter `s une autre occasion.
En ce qui concerne le dossier de l'unification des tribunaux, dont le
ministre a fait mention tantôt, est-ce qu'il pourrait nous faire part
quand même de ses intentions à court, moyen ou long terme,
concernant ce dossier?
M. Marx: Mais, vous savez, M. le Président, je ne peux pas
déposer des projets de loi dans tous les dossiers durant la même
session. Je pense que nous aurons cinq ou six projets de loi cette session, je
pense que c'est beaucoup. Et nous n'avons pas de projet de loi omnibus, on a
modifié tout le processus de l'adoption des lois.
En ce qui concerne la Cour de Québec, que M. Bélair a
annoncée quelquefois pendant six ans, sept ans ou huit ans, j'ai
l'intention de me pencher sur ce dossier. Et comme je vous en ai fait part dans
le communiqué que nous avons envoyé l'autre jour, nous avons
parlé de l'autonomie administrative de la magistrature, je crois
à cela, je crois à l'autonomie administrative de la magistrature,
et j'ai même proposé cela il y a quelques années.
J'ai aussi parlé de la création prochaine d'un groupe de
travail sur les tribunaux administratifs qui sera mis sur pied d'ici à
quelques semaines. Donc, j'ai l'intention de mettre de l'ordre dans tout ce
dossier. Parce qu'il y a des années... Il y a aussi les pensions des
juges, il y a quelque chose à faire parce qu'il y a une injustice en ce
qui concerne les pensions de nos juges. Il y a aussi la question des salaires
des juges qui a été soulevée sur la place publique il n'y
a pas longtemps. J'ai l'intention de me pencher sur toutes ces questions.
M. Filion: En ce qui concerne la créa-
tion du groupe de travail sur les tribunaux administratifs, est-ce que
le ministre est en mesure de nous dire, aujourd'hui, quel est
l'échéancier de ce groupe de travail, quelle est la composition
du groupe, qui en fait partie. Quelles sont les lignes directrices que le
ministre aurait pu ou pourrait immédiatement nous communiquer
relativement au travail de ce groupe sur les tribunaux administratifs?
M. Marx: Je vais donner un document au député de
Taillon sur cette question. J'ai fait un discours sur cette question le11 avril 1986 devant la Société de droit administratif du
Québec, où j'ai effectivement annoncé la création
d'un groupe de travail sur les tribunaux administratifs. Je ne peux pas vous
dire, à ce moment-ci, qui seront les membres de ce groupe de travail,
parce qu'on n'a pas encore nommé ces personnes. Je vais communiquer ce
document tout de suite au député de Taillon. Il pourra en prendre
connaissance.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre de la Justice,
vous ne déposez pas le document à la commission. C'est seulement
une transmission d'information au député.
M. Marx: C'est ça.
Le Président (M. Marcil): Cela va.
M. Marx: Je pense que j'ai déjà envoyé une
copie à tous les députés, mais peut-être que le
député de Taillon n'a pas encore reçu sa copie.
Voilà. Nous n'avons pas de secrets.
M. Filion: Je reçois habituellement les discours du
ministre de la Justice, ses interventions publiques, mais je ne l'ai pas encore
reçu dans ce cas-ci. À moins que ce soit dans mon livre de
lecture. Est-ce que le ministre peut nous dire à peu près quand
ce groupe pourrait commencer ses travaux?
M. Marx: J'ai l'intention de créer ce groupe de travail
avant la fin de la session et de demander à ce groupe de travail de
remplir son mandat avant la fin de l'année.
M. Filion: Sur un autre sujet, toujours à...
M. Lefebvre: M. le Président. Cela viendra un peu dans le
même sens que les questions du député de Taillon. À
moins que je puisse intervenir tout à l'heure.
Le Président (M. Marcil): J'aimerais mieux que vous
attendiez. Concernant le programme 1, "Formulation de jugements".
M. Filion: J'ai une autre question à poser.
Le Président (M. Marcil): Êtes-vous toujours sur le
même programme? Oui. Je vais permettre au député de Taillon
de terminer et à la fin, avant d'accepter le programme 1, je vais
revenir.
M. Filion: Ma dernière question avant l'adoption du
programme 1. Est-ce que, en ce qui concerne l'expérience de la Cour des
petites créances en matière fiscale, le ministre peut nous
brosser, dès maintenant, un tableau de la situation. Est-ce qu'il y a
des statistiques à ce sujet? Est-ce qu'on a eu certains problèmes
au niveau de la spécialisation des juges qui entendent ces petites
créances qui sont, avouons-le, d'une nature spéciale, mais de
plus en plus présentes dans notre société.
M. Marx: Nous n'avons pas de statistiques avec nous aujourd'hui
parce que c'est essentiellement le ministère du Revenu qui s'occupe de
ces causes. Nous prenons note de cette question et nous essaierons de faire les
recherches nécessaires pour envoyer au député et aux
autres membres de la commission toute l'information que nous possédons
à ce sujet.
M. Filion: Je remercie le ministre de la Justice. Pour ma part,
si vous voulez appeler le programme 1, on pourrait...
Le Président (M. Marcil): Je vais permettre au
député de Frontenanc de poser sa question sur ce même
programme.
M. Lefebvre: Pour faire suite aux questions que M. le
député de Taillon vous a posées relativement à
l'examen et à différents tribunaux administratifs, est-ce que le
groupe de travail que vous avez constitué a un mandat strictement
d'examen, d'inventaire des tribunaux, ou si vous entendez également
demander à ce groupe de travail de vous faire des recommandations
précises. Quel est en gros, à peu près, le mandat du
groupe de travail que vous avez constitué? (12 heures)
M. Marx: Je peux vous donner quelques éléments
possibles dans un te! mandat. Je n'ai pas l'intention de demander à ce
groupe de travail de me faire une autre étude théorique parce que
nous avons besoin de recommandations très concrètes auxquelles on
peut donner suite pour améliorer le système des tribunaux
administratifs.
Dans le cadre de son mandat, le groupe de travail pourrait avoir
à traiter des sujets suivants. Je vous donne des exemples parce qu'on
n'a pas rédigé de mandat. Cela pourrait être de
déterminer les juridictions qui, par la nature des dossiers qu'elles
traitent, pourraient être regroupées. Nous avons beaucoup de
tribunaux administratifs
au Québec et il me semble que cela devrait être possible
d'en regrouper un certain nombre pour faire des économies très
importantes.
Un autre sujet pourrait être: Quels sont ceux qui peuvent
être supprimés? Est-ce qu'on peut supprimer certains tribunaux
administratifs? On est déjà en train d'en supprimer deux. Est-ce
qu'il y en aurait d'autres? On pourrait aussi demander à ce groupe de
travail d'examiner l'opportunité d'unifier les règles de la
preuve et de la procédure applicables aux tribunaux administratifs, de
faire des recommandations sur le statut des membres des tribunaux
administratifs, le processus de sélection, la déontologie,
l'indépendance, ainsi de suite, et d'examiner d'autres sujets.
J'insiste sur ce point, M. le Président, je ne veux pas avoir une
autre étude théorique. Il faut dire qu'au Québec, nous
avons beaucoup d'études et beaucoup de dossiers sur ce sujet. C'est
maintenant le temps de passer à l'action. J'ai déjà
passé à l'action, mais il y a beaucoup de choses à faire
d'ici à la fin de ce premier mandat du gouvernement libéral.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. M. le
député de Chapleau, vous vouliez la parole. Est-ce que cela porte
précisément sur le programme 1 Formulation de jugements?
M. Kehoe: Oui.
Le Président (M. Marcil): Ce n'est pas plutôt sur un
autre? On saute un peu partout.
M. Kehoe: M. le ministre, vous avez mentionné tantôt
que vous êtes prêt à passer à l'action. Je remarque,
spécifiquement dans vos notes, que vous avez élaboré une
politique pour changer la loi en ce qui concerne les saisies.
Spécifiquement, vous avez mentionné que cela fait dix ans...
Le Président (M. Marcil): Excusez, M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: Mais ce sont des jugements. Suite à un jugement,
il y a une saisie.
Le Président (M. Marcil): Disons que vous jouez sur les
mots. Votre question se rapporterait plutôt au programme 9 Affaires
législatives. Si vous voulez garder votre question, je vais revenir au
programme 1 pour le faire adopter.
M. Filion: On s'est déjà entendu, M. le
Président. Votre question est déjà formulée.
Allez-y, sauf que je fais appel à mes collègues de l'autre
côté. La règle que m'ont confirmée les deux
parlementaires adjoints, selon laquelle 10 % du temps...
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Taillon, je vais faire respecter cette règle, soyez sans
inquiétude. C'est la dernière question.
M. Filion: Cela veut dire trente minutes.
M. Kehoe: Si vous arrêtez, je vais la poser tout de
suite.
M. Filion: Allez-y.
M. Kehoe: Dans ce domaine-là, cela fait déjà
dix ans que les règles n'ont pas été changées.
Est-ce que vous prévoyez que cette modification au Code de
procédure civile sera faite dans un échéancier court ou
c'est dans le cadre du premier mandat?
M. Marx: M. le Président, il y a au moins un ou deux ans,
j'ai demandé au gouvernement précédent de modifier le Code
de procédure civile en ce qui concerne les insaisissables.
Le gouvernement précédent n'a pas bougé dans ce
dossier. Moi, j'ai l'intention de déposer un projet de loi sur les
insaisissables, avant le 15 mai, et de le faire adopter avant la fin de cette
session. On y propose d'augmenter le montant des meubles meublants qui sont
insaisissables, d'augmenter le montant du salaire qu'on peut garder avant que
le salaire puisse être saisi et d'indexer, c'est-à-dire
d'augmenter d'une façon substantielle ces montants. Cela se retrouve, je
pense, dans l'article 753.
Une voix: L'article 552.
M. Marx: C'est dans l'article 552 du Code de procédure
civile.
M. Kehoe: C'est la même chose pour la saisie des immeubles
aussi, si je comprends bien; toutes les injustices de cette part aussi.
M. Marx: Pour les immeubles, pour les maisons, pour le domicile,
je crois que nous sommes la seule juridiction en Amérique du Nord
où on peut saisir une maison d'une famille pour une dette ordinaire
impayée. Vous savez que c'est déjà arrivé à
Montréal et d'ailleurs on a saisi la maison de quelqu'un pour une dette
impayée de quelques cents dollars. Dans d'autres juridictions, comme en
Alberta ou en Floride, c'est quasiment impossible de saisir la maison de
quelqu'un pour une dette impayée. Dans d'autres juridictions en
Amérique du Nord c'est impossible. Il me semble qu'il faudrait que ce
soit impossible au Québec. On va passer à l'action avant la fin
de la
session. Je suis sûr que le député de Taillon va
voter pour ce projet de loi.
Le Président (M. Marcil): J'appelle le programme 1.
M. Filion: Juste avant de passer à l'adoption.
Effectivement si le ministre de la Justice, comme il l'a exprimé
à plusieurs reprises, songe à revoir ce qu'on appelait les biens
saisissables ou la portion des biens saisissables, on va étudier le
projet de loi de près, mais a priori cela semble être une
initiative intéressante. Cela m'amène à poser la question
suivante au ministre... On connaît son projet en ce qui concerne le Code
civil, mais en ce qui concerne le Code de procédure civile, j'avoue que
je n'ai pas suivi ce dossier. Dois-je comprendre qu'à ce moment la
politique générale du ministre va dans le sens d'amender le Code
de procédure civile selon des objectifs bien précis et sur des
matières bien précises, plutôt que de procéder
à mettre sur pied une espèce de commission qui serait
probablement énorme en termes de ressources et de temps, est-ce bien
cela?
M. Marx: Comme vous le savez, j'ai l'intention de modifier le
Code de procédure civile en ce qui concerne les insaisissables» Si
vous me posez une telle question sur le Code de procédure civile, je
vais vous parler non seulement de mes projets mais de mes rêves aussi. Un
de mes rêves serait de revoir et de refaire le Code de procédure
civile. Le Code de procédure civile a été adopté en
1965 - le nouveau code - cela fait maintenant plus de 20 ans, et je pense qu'il
faut le revoir. Par exemple, nous allons adopter un nouveau chapitre sur
l'arbitrage international. Il faut revoir le Code de procédure civile,
il faut simplifier le Code de procédure civile, le cas
échéant. J'ai l'intention de commencer ce travail après
qu'on aura fait le travail sur les tribunaux administratifs. J'ai l'intention,
d'ici à un an et demi ou deux ans, de commencer ce travail en ce qui
concerne la révision du Code de procédure civile. Ce sera
nécessaire aussi dans le cadre de l'adoption de notre nouveau Code
civil. Ce sera nécessaire de modifier le Code de procédure
civile. C'est difficile de parler d'un projet quand on parle de faire quelque
chose dans deux ans, mais c'est dans mes rêves et je pense souvent
à ça.
Le Président (M. Marcil): Programme 1, Formulation de
jugements, adopté?
M. Filion: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Programme 2,
Soutien administratif à l'activité judiciaire. M. le
député de Taillon.
M. Filion: En ce qui concerne le programme 2, est-ce que le
ministre peut rn'informer comment s'articule le programme de perfectionnement
des juges? Est-ce qu'il peut me donner des détails sur cela?
M. Marx: Les juges? M. Filion: Oui.
M. Marx: C'est adopté comme programme, mais si on veut
revenir sur cela je n'ai pas d'objection.
M. Filion: Excusez c'est vrai, c'est l'élément 2 du
programme 1, vous avez raison.
M. Marx: Je n'ai pas d'objection, M. le Président.
J'aimerais souligner qu'au Québec nous avons un Conseil de la
magistrature qui a pour mandat, entre autres, d'organiser des programmes de
perfectionnement des juges. En ce qui concerne le perfectionnement des juges
provinciaux, le budget est de plus de 500 000 $. C'est 541 000 $ par
année.
Le Conseil de la magistrature organise des programmes de
perfectionnement. Je peux vous donner une idée de certains de ces
programmes. Par exemple, il y a eu un symposium pour les juges municipaux du
Québec sur la réglementation. Il y a eu un colloque sur l'article
15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
M. Filion: L'argent...
M. Marx: IIy a eu un colloque sur la loi pour les jeunes
contrevenants. Il y a eu le congrès annuel de l'Association canadienne
des juqes de cours provinciales, le colloque national sur la
détermination de la peine et ainsi de suite. Donc, il y a beaucoup de
programmes, beaucoup de cours, beaucoup de congrès où les juges
se gardent à jour dans tous leurs dossiers.
M. Filion: Les 500 000 $ servent essentiellement à
permettre la participation des juges à des colloques ou à des
séances d'information sur les nouveautés juridiques?
M. Marx: À des cours, c'est cela. Nous avons investi
beaucoup dans les bibliothèques des juges pour qu'ils aient des
instruments de travail. Les juges ont également des recherchistes et
ainsi de suite.
M, Filion: Sauf erreur, le montant est resté le
même. Est-ce que le ministre considère que cette somme de 500 000
$ est suffisante...
M. Marx: C'est à peu près la même chose que
c'était.
M. Filion: ...pour permettre le perfectionnement des juges,
compte tenu notamment de ce que disait mon collègue, le
député de Mille-Îles, tantôt, à savoir
l'étendue de plus en plus vaste du champ d'étude des juges? Par
la force des choses, le nombre de litiges en vertu des règlements, en
vertu des lois se diversifie constamment. Alors, est-ce que cette somme qui est
restée la même par rapport à l'an dernier est
suffisante?
M. Marx: Est-ce que?
M. Filion: Est-ce que cette somme est suffisante?
M. Marx: Je pense que c'est suffisant à ce moment. C'est
relatif aussi, mais je pense que c'est à peu près la même
chose que ce qui a été accordé l'an dernier. Si
c'était suffisant l'an dernier, j'imagine que ce serait suffisant cette
année également.
M. Filion: Cela va. Encore une fois, je m'excuse. Cela va pour le
programme 1. Le programme 2, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): II est déjà
adopté.
M. Filion: C'est cela.
Le Président (M. Marcil): Soutien administratif à
l'activité judiciaire.
Soutien administratif à l'activité
judiciaire
M. Filion: Au programme 2, le ministre peut-il m'expliquer la
hausse de 20,9 % des postes de professionnels, 91 à 110, alors que, dans
la plupart des autres catégories d'emplois, on assiste à une
diminution des effectifs?
M. Marx: Puis-je demander au député de
répéter la question? C'est dans quel programme?
M. Filion: Oui. L'élément 1 du programme 2.
M. Marx: Un instant. D'accord.
Soutien aux cours de justice civiles et
criminelles
M. Filion: Le ministre peut-il expliquer la hausse de 20,9 % au
chapitre des postes de professionnels qui passent de 91 à 110, alors
que, dans la plupart des autres catogories d'emplois, on assiste à une
diminution des effectifs? Vous devriez le trouver. C'est à la page 2,
l'élément 1 du programme 2. Il doit y avoir une bonne raison.
C'est juste parce que je ne l'ai pas retrouvée dans le livre des
crédits. (12 h 15)
M. Marx: M. le Président, on me dit que c'est à
cause des postes de cadre qui ont été remplacés par des
professionnels. C'est un changement de...
M. Filion: C'est un ajustement finalement.
M. Marx: C'est un changement de terminologie. C'est une
distinction sans différence.
M. Filion: Cela va. C'est un changement de terminologie.
M. Marx: J'imagine que cela a été fait avant que je
n'arrive au ministère.
M. Filion: Mais vous assurez, n'est-ce pas, la continuité
de l'institution?
M. Marx: C'est la continuité, et nous avons aussi
d'excellents fonctionnaires qui sont là toujours, même quand nous
sommes en élection, avant et après.
M. Filion: D'accord. J'ouvre un chapitre avec le ministre, celui
des palais de justice. Le ministre de la Justice sait déjà depuis
un certain temps que son collègue, le Solliciteur général,
a décidé de procéder à la fermeture de six prisons:
à Matane, Percé, Rouyn, Cowansville, une réduction
à Joliette, à Saint-Joseph-de-Beauce dont on entend beaucoup
parler...
M. Marx: Le député est-il contre la fermeture des
prisons? Je n'ai pas saisi.
M. Filion: Et, également, il me manque une prison...
M. Marx: J'espère que le... M. Filion:
...àPercé.
M. Marx: Êtes-vous contre la fermeture des prisons? Vous
étiez contre? Cela ne me surprendrait pas.
M. Filion: Je voudrais savoir du ministre...
Le Président (M. Marcil): Si vous permettez, M. le
ministre, nous allons lui permettre de poser sa question.
Une voix: C'est une bonne question.
M. Filion: Le débat a été fait la semaine
dernière et je dois vous dire que je me suis rendu compte que le
Solliciteur général mettait dans ce dossier la charrue
devant les boeufs, puisque vous me posez la question. C'est une
expression qui, d'ailleurs, a été reprise par
l'éditorialiste du Soleil qui a utilisé exactement la même
argumentation.
M. Marx: II n'y a...
M. Filion: Ma question au ministre de la Justice porte sur les
palais de justice. À cause de l'inquiétude créée
à la suite de ces fermetures de prisons, le ministre de la Justice
peut-il nous dire s'il al'intention de procéder à la
fermeture de palais de justice au Québec?
M. Marx: Le député a-t-il un palais en particulier
à l'esprit?
M. Filion: Je vais vous poser la question: Par exemple, dans les
endroits...
M. Marx: À Montréal et Québec, cela reste
ouvert, Sherbrooke reste ouvert. Oui.
M. Filion: Par exemple, dans les régions et, notamment,
dans les municipalités où on a procédé à la
fermeture de prisons alors que le palais de justice se trouve
précisément dans ces endroits.
M. Marx: Je n'ai pas l'intention de fermer quelque palais de
justice que ce soit.
M. Filion: D'accord. Le ministre peut-il faire le point sur le
dégré d'avancement des projets de construction de palais de
justice suivants: Premièrement: commençons par celui qui est dans
le comté de ma collègue, la députée de Chicoutimi,
pour ce qui concerne le dégré d'avancement à Chicoutimi.
Je peux peut-être les énumérer. Deuxièmement: nous
irons dans mon comté. Si vous le voulez bien. Nous parlerons de
Longueuil, dans Taillon, où je vois le palais de justice grandir et
grossir. Depuis quelques semaines, je dois vous dire qu'il ne s'est pas fait
grand-chose. Je ne suis pas inquiet, mais j'aimerais cela entendre le ministre
sur le degré d'avancement de ce projet. Il en va de même pour
Joliette, Sherbrooke et Saint-Joseph-de-Beauce.
M. Marx: Nous avons un programme de construction de palais de
justice. On va faire le plus possible. Par exemple, à Longueuil, les
travaux sont en marche, ils seront terminés bientôt. C'est la
même chose pour Sherbrooke et Chicoutimi. On va continuer dans cette
construction des palais de justice.
M. Filion: Le ministre nous annonce qu'il n'y aura aucun retard
à l'échéancier prévu pour chacun de ces palais de
justice?
M. Marx: Oui, c'est cela, cela suit l'évolution normale
des dossiers. Cela veut dire... Je ne peux pas vous dire dans quelle semaine on
va compléter Longueuil, mais ce sera complété dans
quelques mois, me dit-on. Sherbrooke aussi, Chicoutimi et ainsi de suite pour
d'autres palais. On va continuer ce qu'on a commencé à faire,
c'est-à-dire construire des palais de justice. On va suivre le plan
élaboré il y a quelque temps. On me dit qu'on a six mois d'avance
à Longueuil.
M. Filion: C'est un petit retard de quelques semaines.
M. Marx: Le critique est toujours bien servi.
M. Filion: M. le Président, je suis heureux d'entendre le
ministre de la Justice nous faire part que la construction de ces nouveaux
palais de justice, dans les endroits que j'ai mentionnés, continue de
faire partie de ses priorités et également que
l'échéancier des travaux de construction ne sera pas
retardé dans les localités de Chicoutimi, Longueuil, Joliette,
Sherbrooke et Saint-Joseph-de-Beauce. Je passe la parole à ma
collègue, Mme la députée de Chicoutimi.
Le Président (M. Marcil): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: M. le Président, je partage le sentiment de
mon collègue. Je me réjouis que le ministre n'ait pas
modifié les échéanciers prévus pour la construction
des maisons de la justice dans ces différentes villes. Je voudrais
savoir si vous connaissez l'échéancier pour Chicoutimi?
M. Marx: Pour Chicoutimi, on me dit que ce sera terminé en
juillet 1987, mais j'espère aller, avant juillet 1987, visiter le palais
qui est là, pour voir la différence.
Vous savez que je suis le premier ministre de la Justice qui n'a jamais
visité de palais de justice.
Mme Blackburn: Je pensais que vous diriez: Le premier ministre
qui n'est jamais allé à Chicoutimi. Mais cela
m'étonnait.
M. Marx: Le ministre Bédard a peut-être
visité le palais à Chicoutimi, mais il n'a jamais visité
les autres.
Mme Blackburn: Ce que je me demandais... Il me semble me souvenir
que l'échéancier était fixé à l'automne
1986. C'est tout juste à côté de mon bureau, c'est pour
cela que je vois un peu l'état des travaux.
M. Marx: On me dit que c'est l'échéancier original
et les travaux sont en cours. Voulez-vous le coût total?
Mme Blackburn: Oui. M. Marx: C'est près de 10 000
000 $. Mme Blackburn: Oui. On a vu cela. M. Kehoe: C'est
beau.
Mme Blackburn: C'est bien. Il y avait un bon ministre avant. Si
vous me le permettez, je voudrais dire au ministre qu'il sera le bienvenu au
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Sauf que, évidemment, il se peut qu'il ne soit
pas très à l'aise parce qu'on connaît l'orientation
politique de cette région. Je peux lui dire qu'il va certainement, de
toute façon, être mieux accueilli que le ministre
délégué aux Forêts.
M. Filion: Pendant que le ministre a son livre, est-ce que je
peux savoir quand je peux espérer recevoir le ministre de la Justice
dans mon comté pour l'ouverture du palais?
M. Marx: Pour le député de Taillon, on va faire un
effort spécial. Cela devrait être terminé vers la fin de
cette année; donc avec six mois d'avance.
M. Filion: On m'avait dit mars.
M. Marx: Si c'est possible, on va même essayer de faire
cela à la fin de l'automne. On va faire le plus vite possible.
M. Filion: D'accord. Et dans les cas de Joliette, Sherbrooke et
Saint- Joseph-de-Beauce?
M. Marx: Je n'ai pas de date de livraison... Pour
Saïnt-Joseph-de-Beauce, cela est prévu pour janvier 1989, mais je
n'ai pas de date pour chaque palais.
M. Filion: J'aurais une autre question sur le même
point.
Le Président (M. Marcil): Allez, M. le
député de Taillon.
M. Filion: Maintenant, en ce qui concerne les projets de
rénovation au palais de justice, est-ce que le ministre peut faire le
point?
M. Marx: Sur la rénovation?
M. Filion: Sur les projets de rénovation du palais de
justice, peut-être qu'il a un document dont il peut nous faire part
rapidement et qui fait le tour des projets.
M. Marx: Oui, j'ai déjà visité, par exemple,
Trois-Rivières, où j'ai vu un réaménagement des
greffes et d'autres aménagements. Il y a des aménagements
à
Baie-Comeau; il y a la relocalisation du palais de justice de
Chibougamau et ainsi de suite.
Si le député a à l'esprit un palais en particulier,
cela me fera plaisir de répondre à sa question.
M. Filion: II vient d'en mentionner quelques-uns. Je ne sais pas
si c'est trop demander au ministre...
M. Marx: IIy a des réaménagements à
Rouyn, à Montréal...
M. Filion: Drummondville?
M. Marx: Pardon?
M. Filion: Drummondville.
M. Marx: Sur la liste, je ne vois pas Drummandville. Pensez-vous
que c'est nécessaire de faire des rénovations au palais de
justice à Drummondville?
M. Filion: C'est ce que ma dernière visite là-bas
m'avait...
M. Marx: Vous avez visité le palais de justice à
Drummondville.
M. Filion: Je les ai à peu près tous
visités. Pour certains, cela remonte loin, par exemple. Peut-être
qu'il y a eu des choses de faites.
M. Marx: On a un petit projet de rénovation et de
réaménagement des palais. On va essayer de suivre ce plan le plus
fidèlement possible. Cela dépend des budgets du gouvernement
d'une année à l'autre, mais on va faire cette
rénovation.
Le Président (M. Marcil): Toujours sur les palais de
justice, M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Vous allez excuser mon chauvinisme, M. le
ministre, mais je vais parler au nom de Laval et de la grande région de
Laval. Laval est la deuxième ville en importance au Québec en
population: 280 000 habitants dans Laval et la région
périphérique. Je posais une question, lorsque vous
répondiez à la question du député de Taillon, de la
députée de Chicoutimi. Je comprends que Chicoutimi ait des
besoins à satisfaire sur le plan judiciaire, ville de 60 000 personnes,
région périphérique d'environ 200 000.
Vous comprendrez, M. le ministre, que dans la deuxième ville en
importance au Québec, il y a urgence plus rapprochée. Je pense
qu'en termes de priorités, Laval... Dans le rapport annuel 1984-1985
du
ministère de la Justice, à la page 10, lorsqu'on parle de
Saint-Joseph-de-Beauce et de Rimouski, je suis sensible aux arguments de
Rimouski et de Saint-Joseph-de-Beauce, mais il y a une marge avec la
deuxième plus grande ville du Québec.
Je vous demanderais, M. le ministre, de nous indiquer si vous avez
d'excellentes nouvelles pour les citoyens de la deuxième plus grande
ville du Québec. À quand notre palais de justice à
Laval?
M. Marx: En ce qui concerne la construction du palais de justice
de Laval, le programme architectural est à compléter. Nous avons
des plans pour procéder à la construction d'un tel palais. C'est
également relié à l'implantation complète du
district judiciaire à Laval.
Est-ce terminé? On a des plans de construction. C'est
amorcé. On est à la phase 1 et on va procéder. Il faut que
je souligne que ces projets de construction et d'aménagement des palais
de justice étaient commencés par mon prédécesseur,
M. Bédard. On va continuer ces programmes. Concernant la ville de Laval,
c'est prévu.
M. Bélisle: D'accord. Est-ce que je dois comprendre que,
dans ceux qui sont en voie d'être terminés, dans les nouveaux
à débuter, Laval sera le premier sur la liste?
M. Marx: C'est l'un des premiers projets pour ce qui est des
palais de justice qui vont débuter.
M. Bélisle: N'avez-vous pas d'échéancier en
tête, M. le ministre?
M. Marx: Non. Cela va dépendre des budgets qu'on va avoir
pour la construction des palais. Mais Laval est un des premiers.
Le Président (M. Marcil): Avez-vous terminé votre
réponse, M. le ministre?
M. Marx: Je ne peux pas donner la date.
Le Président (M. Marcil): Cela va! M. le
député de Taillon.
M. Marx: On va essayer de faire cela durant ce mandat,
M. Filion: J'ai une série de courtes questions rapides, M.
le ministre de la Justice. Où en est rendu l'informatisation des
greffes? Est-ce qu'on a un échéancier de réalisation pour
les prochaines années?
M. Marx: Premièrement, je dois dire que, au
ministère de la Justice, on a fait beaucoup en ce qui concerne
l'informatisation des greffes et des bureaux d'enregistrement.
On a un programme sur l'informatisation de ces greffes. Je peux vous
fournir l'information tout de suite, si vous voulez attendre 30 secondes, ou je
peux vous écrire à ce sujet. (12 h 30)
M. Filion: Oui, d'accord. Je remercie le ministre, mais sans
m'écrire nécessairement, s'il m'envoie un document.
M. Marx: Oui. D'accord. Mais j'ai l'information, si vous la
voulez.
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, vous avez vingt
minutes pour chacune des questions.
M. Filion: Non, mais c'est parce qu'il sait...
M. Marx: Sur l'informatisation de nouveaux points de service. Le
1er décembre 1985 marquait le début officiel de l'informatisation
de 21 nouveaux points de service, ce qui portait à 36 le nombre de
palais de justice informatisés au Québec.
Cette extension du réseau de greffes informatisés a permis
une couverture de plus de 90 % du volume des dossiers ouverts dans toute la
province. On me dit que nous avons 36 palais de justice informatisés sur
40.
En ce qui concerne la gestion des causes civiles, le 31 janvier
1986...
Auparavant, j'aimerais souligner, M. le député, que sur
cette question de l'informatisation de notre système d'administration de
la justice, je pense que nous avons pris les devants. On me dit qu'il y a des
fonctionnaires d'autres provinces qui viennent nous voir ici pour apprendre ce
qu'on fait. Je pense que c'est un produit exportable, si je puis dire, surtout
dans les pays francophones, parce que nous n'avons pas seulement l'expertise
dans l'informatique, nous avons aussi développé des banques de
terminologie et nous avons aussi la Société
québécoise d'information juridique, la SOQUIJ. Ensemble, il y a
quelque chose à faire, non seulement pour prendre et garder tes devants
au Canada mais aussi pour exporter notre expertise dans les pays francophones.
J'ai déjà amorcé des discussions avec le ministre de la
Justice d'un autre pays pour voir si on peut aider ce pays dans ce domaine. Je
pense qu'il y a beaucoup de choses à faire dans ce dossier.
M. Filion: Évidemment, je partage le point de vue du
ministre là-dessus. Ma prochaine question concerne les délais
devant les cours de justice. Je pense, sans qu'il soît nécessaire
de préciser longuement, que le ministre est grandement conscient de
l'importance...
M. Marx: Cela s'est beaucoup amélioré depuis que
j'ai fait mes critiques en 1983.
M. Filion: Oui. Je pense que le ministre de la Justice en
connaît l'importance. Je ne voudrais pas qu'il réponde à ma
question maintenant parce qu'elle demande beaucoup trop de détails.
Est-ce que le ministre pourrait simplement prendre note de mon
intérêt pour cette question? S'il lui était loisible de me
faire parvenir les statistiques concernant les délais encourus dans
l'ensemble des cours de justice, à ce moment-là, je serais
très heureux de pouvoir les étudier. On sait que ces statistiques
changent rapidement, notamment, à la suite de la nomination du juge en
chef de la Cour supérieure, M. le juge Gold; il semblerait que les
progrès soient déjà presque manifestes et concrets.
En ce sens, si le ministre pouvait simplement prendre note de mon
désir.
M. Marx: On va vous envoyer les statistiques. Ce qui ne m'a
jamais été envoyé, quand j'étais dans l'Opposition.
Peut-être qu'on m'a envoyé cela une fois. Mais, de toute
façon, je n'ai pas de cachette. On va vous envoyer ces statistiques.
Mais vous devez être conscient que les rôles sont établis
par les juges en chef et non pas par le ministre de la Justice. Si un
rôle est établi et qu'à 11 h 30 il n'y a pas d'autre cause
à entendre, ce n'est pas la faute du ministre de la Justice, ce n'est
pas la faute des fonctionnaires du ministère non plus. C'est au juge en
chef de faire en sorte que les rôles soient bien confectionnés
pour qu'on entende le plus de causes possible durant une journée.
Effectivement, nous avons fait beaucoup de progrès depuis deux
ans. C'est M. Bédard qui a pris les mesures nécessaires. Il a
fait modifier le Code de procédure civile. Il a pris les mesures
nécessaires à l'époque pour faire en sorte que les
délais soient diminués et, effectivement, ils ont diminué
considérablement dans certaines cours, depuis deux ans.
M. Filion: Sur le plan de la justice civile, c'est là que
les efforts devaient porter dans le passé. Sur le plan de la justice
criminelle, notamment, à la Cour des sessions de la paix, les
progrès avaient déjà auparavant été
enregistrés d'une façon assez spectaculaire, sous la direction de
M. le juge en chef Mayrand à la Cour des sessions de la paix. Je
remercie le ministre de prendre note de m'envoyer ces statistiques.
Maintenant, en ce qui concerne les services de médiation. On sait
qu'il en existe un dans le secteur familial. Il existe également un
service de médiation au tribunal des petites créances. Est-ce que
le ministre peut, en quelques mots, nous faire part de ses perspectives
d'avenir dans ces secteurs importants que sont les services de
médiation?
M. Marx: Dans un document que j'ai rendu public au début
de l'année 1985, "L'avenir de la justice au Québec", j'ai
souligné que la médiation est très importante.
Effectivement, nous faisons beaucoup de choses dans ce domaine surtout à
la Cour des petites créances où nous avons un service de
médiation qui sera étendu à d'autres palais.
Aussi en matière familiale, nous avons des services de
médiation. M. le député, peut-être n'êtes-vous
pas au courant, il y a maintenant une association de médiation au
Québec qui s'est formée. Il y a des cours qui se donnent. Il y a
des gens qui vont aux États-Unis pour suivre des cours. Il y a des
professeurs qui sont venus des États-Unis donner des cours ou participer
au colloque. Au Barreau, il y a un certain nombre de cours qui sont
donnés. Nous avons l'intention de mettre une certaine emphase sur la
médiation.
M. Filion: Cette emphase, sauf erreur, n'est pas traduite par un
soutien financier au niveau budgétaire.
M. Marx: Au niveau budgétaire, oui, dans le sens que nous
avons des médiateurs qui sont payés par le ministère.
M. Filion: Si je parle par rapport au budget 1986-1987, sauf
erreur...
M. Marx: Pour la médiation familiale, il y a le
comité, le Barreau, la magistrature qui vont nous faire des
recommandations après avoir visité l'Australie où il va se
tenir un congrès sur cette question.
M. Filion: Concernant l'élément 2, je n'ai pas de
question. Concernant l'élément 3, le tribunal...
Le Président (M. Marcil): Juste une secondel M. le
député de Chapleau, vous aviez une question sur le soutien
administratif.
M. Kehoe: M. le Président, mon collègue de Taillon
a passé très vite sur la question de l'engorgement des
rôles. Dans le passé, cela a toujours été un facteur
très important lors de l'étude des crédits. Je vois qu'il
y a une amélioration marquée depuis quelques années, M. le
ministre. Je veux juste poser des questions. Dans le district judiciaire de
Montréal, où il y a eu des problèmes sérieux,
combien de temps cela prend à la Cour civile, pour entendre une cause
ordinaire, comparativement à deux ou trois ans passés.
Le Président (M. Marcil): Très brièvement,
M. le ministre.
M. Marx: À la Cour civile...
M. Kehoe: Une cause qui va durer une journée. Pas une
longue cause qui va durer une semaine ou cinq jours d'audition.
M. Marx: Est-ce que vous voulez pour Montréal?
M. Kehoe: Oui. Je pense que, auparavant, c'était là
où étaient les problèmes les plus sérieux.
M. Marx: Pour les causes de deux jours à la Cour
supérieure en matière civile, en 1983 c'était sept mois;
en 1984, neuf mois; en 1985, 4,1 mois. C'était pour les causes urgentes.
Pour les causes ordinaires c'était: 31 mois en 1983, 15 mois en 1984 et
3 mois en 1985.
M. Kehoe: Trois mois en 1985.
M. Marx: Pour les causes de deux jours. Pour les causes de trois
jours, les causes urgentes, c'était six mois en 1983; neuf mais en 1984,
4,2 mois en 1985. Pour les causes ordinaires de trois à dix jours,
c'était 45 mois en 1983, 15 mois en 1984 et 8,7 mois en 1985.
Voilà, je pense qu'on a fait un certain progrès pour ne pas dire
un progrès énorme.
M. Kehoe: II y a une grosse amélioration, M. le ministre,
mais la question que je veux poser est: Avec la concertation et avec le
changement de la loi et les efforts de tout le monde, est-ce que vous
prévoyez que la situation va s'améliorer, va se maintenir ou si
cela va reculer un peu comme c'était avant? Auparavant, comme vous le
savez, c'était un système ou une situation complètement
inacceptable. Prévoyez-vous que cela va se maintenir à peu
près dans les chiffres que vous venez de nous donner?
M. Marx: C'est possible de faire encore certaines
améliorations. Il y a aussi la possibilité de modifier certaines
lois pour que le processus judiciaire soit plus efficace. Nous ferons cela.
C'est possible qu'on fasse encore des améliorations. Nos juges nous ont
dit que c'est encore possible.
M. Kehoe: À Montréal, quand une cause dure plus de
cinq jours, est-ce que cela prend encore six à sept ans pour qu'elle
soit entendue?
M. Marx: On va vous donner les statistiques exactes.
M. Kehoe: Pour tes causes qui vont durer longtemps.
M. Marx: Pour les causes de onze jours et plus, les causes
urgentes, en 1983 c'était 24 mois, en 1984 c'était 16 mois. Nous
n'avons pas les statistiques pour 1985, mais pour les causes ordinaires de onze
jours et plus, en 1983 c'était 91 mois, en 1984 c'était 44 mois.
Nous n'avons pas les chiffres pour 1985. Donc, on a fait des
améliorations.
M. Kehoe: Cela prend encore quatre ans. Cela prend au moins 48
mois, vous dites.
M. Marx: Nous n'avons pas les statistiques pour 1985, mais
j'imagine que c'est moins de quatre ans. Quand nous aurons les statistiques,
nous pourrons vous les envoyer.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Chapleau et M. le ministre, le temps est écoulé pour le programme
2. Est-ce que le programme 2: "Soutien administratif à l'activité
judiciaire" est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Filion: Alors, il reste... Non, j'ai une question sur
l'élément 3 du programme: Tribunal de l'expropriation.
M. Marx: Oui. Tribunal de l'expropriation
M. Filion: Dans l'éventualité d'une
intégration du tribunal à la Cour provinciale, il a dit qu'il y a
cinq membres spécialisés qui ne sont pas des juges. Qu'advient-il
de ces personnes? (12 h 45)
M. Marx: Quant à ces personnes, M. le Président,
nous sommes encore en discussion. Vous savez qu'on n'a pas fait encore
l'intégration du Tribunal de l'expropriation à la Cour
provinciale. Cela prend une loi. Je peux vous assurer que cela va venir
bientôt.
M. Filion: Mais la décision...
M. Marx: En ce qui concerne les experts, certains vont rester.
D'autres peuvent être mutés à la fonction publique,
à leur demande; c'est possible. Mais personne ne perd son emploi au
gouvernement. Il y en a d'autres qui peuvent prendre leur retraite. C'est
à chacun de décider ce qu'il veut faire.
M. Filion: Le ministre me dit que les discussions sont toujours
en cours, mais la décision est prise, elle, par exemple.
M. Marx: Mais la loi...
M. Filion: La décision de l'intégration est prise.
À ce sujet, j'aimerais que le ministre m'explique cela.
M. Marx: Cela prend une loi, M. le député.
M. Filion: Oui, d'accord.
M. Marx: Moi je peux bien décider de faire quelque chose,
mais avant que ce soit fait, il faut que l'Assemblée nationale adopte le
projet de loi et que le lieutenant-gouverneur signe le projet de loi. Avant
cela, ce n'est pas une loi.
M. Filion: Combien de dollars le ministre pense-t-il
économiser avec l'intégration du Tribunal de l'expropriation,
compte tenu du fait que ce tribunal avait développé, de
façon indubitable, une expertise bien particulière?
M. Marx: Est-ce que le député est en train de me
suggérer qu'il faut garder le Tribunal de l'expropriation tel qu'il est?
Est-ce que le député est au courant que, nulle part ailleurs au
Canada, il y a un Tribunal de l'expropriation juste pour des expropriations?
Est-ce que le député est au courant que, dans d'autres
juridictions au Canada, le travail d'un tel tribunal est fait par d'autres
tribunaux ou par les tribunaux de droit commun?
En ce qui concerne les économies, ce serait environ 650 000 $
pour la première année. Je pense que c'est mieux de couper dans
cela que de couper dans les services de santé, et les services sociaux
au l'éducation. Mme la députée de Chicoutimi sera tout
à fait d'accord pour qu'on coupe ici et non pas dans
l'éducation.
M. Filion: Est-ce que le ministre peut assurer la population et
la clientèle que la qualité des services rendus par le Tribunal
de l'expropriation sera maintenue, compte tenu du fait que ce tribunal s'est
développé une expertise et qu'avec le temps, il s'est
développé une façon de procéder? J'ai vu
d'ailleurs, sauf erreur, dans un des rapports, que les délais
étaient particulièrement intéressants. Ce qui
m'intéresse ici, M. le ministre, c'est la qualité des services.
Encore une fois, vous me répondez par des comparaisons avec ce qu'il
existe ailleurs. Vous savez, au Québec, il y a des choses qui se font
différemment d'ailleurs et moi, ça ne me fait pas mourir non
plus.
M. Marx: Moi non plus.
M. Filion: Je disais à votre collègue, le ministre
du Travail, qu'au Québec, on est à peu près le seul
endroit où il n'y a pas de commission des relations du travail. Par
exemple, il existe ici une loi sur les décrets de conventions
collectives qui gouvernent des centaines de milliers de personnes. Cela
n'existe nulle part ailleurs sur le continent. Il existe une
spécificité au Québec qu'il est bon de temps en temps de
respecter au niveau des institutions. Il est bon de comparer. Dans certains
cas, il est bon de regarder ce qui se fait ailleurs pour voir si on ne peut pas
aller prendre une bonne idée.
M. Marx: Certes.
M. Filion: D'une façon systématique, il me semble
que le ministre de la Justice tombe dans une ligne d'argumentations qu'on
retrouve chez plusieurs de ses collègues du Conseil des ministres,
où on voudrait se mettre à ressembler à ce qui existe
partout ailleurs. Même au niveau de la justice - je ne l'apprends pas au
ministre de ta Justice -on est un peuple, apparemment, particulièrement
chicanier. Des litiges, il y en a au Québec. D'ailleurs, on l'a vu, il y
a un litige entre le ministre de la Justice et les juges et il est rendu en
cour. Quand même, cela ne se retrouve pas ailleurs. Qu'on ait
développé, au fil des années, une tradition qui
corresponde à ce caractère un peu spécifique de la
communauté québécoise, je vais vous dire que cela ne
m'empêche pas de dormir, en aucune façon. J'espère, M. le
Président, qu'on saura garder ce caractère distinct, non
seulement dans nos institutions juridiques ou dans nos institutions
judiciaires, mais également dans d'autres secteurs. Vous savez, on va
étudier tantôt le Comité de la protection de la jeunesse et
la Commission des droits de la personne. Les comparaisons peuvent jouer dans
bien des sens et elles peuvent servir à toutes les sauces. En ce sens,
encore une fois, ma préoccupation en ce qui concerne le Tribunal de
l'expropriation porte sur la qualité des services rendus eu égard
à l'économie projetée.
Ce qui me préoccupe dans ce cas, encore une fois, ce sont les
services rendus par les gens du tribunal, que je ne connais nullement, à
une clientèle bien précise qui, selon les informations qui me
sont transmises, est extrêmement bien servie maintenant. Là, on
voudrait, parce qu'un analyste du Conseil du trésor a
décidé qu'il y avait une petite économie à faire
là, de fusionner des organismes, comme si les gens du Conseil du
trésor, dans la plupart des cas, étaient au courant des
réalités vécues sur le terrain.
On va parler cet après-midi - on va peut-être avoir
l'occasion tantôt sur le plan du Comité de protection de la
jeunesse et de la Commission des droits et libertés de la personne - de
cette fusion qui, encore une fois, fait partie d'une même ligne.
Je suppose, plus, dans le cas de la Commission des droits et
libertés de la
personne et du Comité de protection de la jeunesse, que le
comité de bénévoles a dit: La Commission des droits et
libertés de la personne, cela protège les personnes; le
Comité de protection de la jeunesse, cela protège la jeunesse; la
jeunesse, c'est des personnes; on va fusionner cela...
M. Marx: Est-ce que le député est
sérieux?
M. Filion: ...sans tenir compte de l'expertise, sans tenir compte
des mandats, des vocations des organismes. En voilà un exemple: Un
analyste du Trésor a peut-être dit, à un moment
donné: Le Tribunal d'expropriation, cela rend des jugements; la Cour
provinciale fait cela également; on envoie tout cela. On fond tout cela
ensemble et allons-y, sans regarder ce qui s'est développé au
Québec comme institutions, comme particularités.
Encore une fois, je suis préoccupé encore plus dans le cas
que nous étudierons cet après-midi, et j'aimerais entendre le
ministre sur la qualité des services: qu'il nous dise dans quoi,
où il va chercher son assurance que la qualité des services
offerts aux justiciables dans ce secteur sera maintenue.
M. Marx: Le député de Taillon commence à
parler comme son chef, le député d'Anjou. Il parle de la
spécificité comme le député d'Anjou a toujours
parlé de la spécificité du Québec. Mais quand on
parle de la spécificité de nos institutions, on parle surtout du
Code civil du Québec. Le député d'Anjou, quand il
était ministre de la Justice, n'a rien fait. Il a parlé souvent
de la spécificité de nos institutions et il n'a rien fait pour la
garantir.
Je ne vais pas parler de cela, mais au moins je vais les garantir. Je
pense que c'est une différence importante. Est-ce que le
député est au courant qu'il y a trois ans, le gouvernement a
voulu abolir complètement le Tribunal d'expropriation?
M. Filion: Voulez-vous une réponse? Le gouvernement ne l'a
pas fait, peut-être parce qu'il s'est rendu compte qu'il y avait de
bonnes raisons pour ne pas le faire. Parmi ces bonnes raisons pour ne pas le
faire, cela s'appelle une reconsidération de l'ensemble du dossier, de
l'ensemble des missions et des vocations, pas juste, encore une fois, les
analyses déconnectées, dans certains cas, du Conseil du
trésor ou des mathématiciens administratifs. Regardons les
réalités, regardons ce qui se vit sur le terrain.
Si le ministre de la Justice me dit: Le gouvernement ne l'a pas fait,
mais il avait peut-être une bonne raison, et peut-être que le
ministre passe à côté. Peut-être que dans ce cas-ci -
je ne l'espère pas - la qualité des services juridiques offerts
aux justiciables dans ce secteur en particulier...
M. Marx: Maintenant, je comprends pourquoi l'ancien gouvernement
n'a rien fait en matière de justice: chaque fois qu'il a voulu faire
quelque chose, il a trouvé de bonnes raisons pour ne rien faire. Donc,
en fin de compte, il n'a rien fait. II a voulu fermer des bureaux
d'enregistrement, cela n'a pas marché. II a voulu abolir certains
organismes, cela n'a pas marché. Il a voulu adopter le Code civil, cela
n'a pas marché. Il a voulu faire la cour du Québec, cela n'a pas
marché. II a voulu abolir le Tribunal d'expropriation, cela n'apas marché.
Tout ce qu'il a voulu faire, cela n'a pas marché. Il a
trouvé de bonnes raisons pour ne pas faire tout ce qu'il n'a pas fait.
En ce qui concerne le Tribunal d'expropriation, cela va être les
mêmes juges qui vont siéger dans cette chambre
spécialisée de la Cour provinciale. Ils ont toujours fait un
excellent travail. Ils vont continuer de faire un excellent travail. Je n'y
vois aucun problème. Ce n'est pas le Conseil du trésor qui nous a
dit de faire cette opération.
M. Filion: C'est le comité bénévole?
M. Marx: Ce n'est pas le comité bénévole.
C'est moi-même qui ai décidé de faire tout cela, parce que
je pense à cela depuis des années. Quand je suis arrivé au
ministère, j'ai fait tout cela: tout ce que l'ancien gouvernement a
voulu faire, mais ce pourquoi il a trouvé de bonnes raisons de ne pas le
faire. Demandez à vos recherchistes et ils vont vous donner toute la
preuve de cela.
Commission d'appel en matière de lésions
professionnelles
M. Filion: Vous pourriez peut-être chercher de bonnes
raisons, parfois, pour ne pas faire certaines choses. Cela éviterait
peut-être certains problèmes.
Enfin, une dernière question sur l'élément 4, avant
de passer la parole à ma collègue, la députée de
Chicoutimi. Il y a une diminution des assesseurs à la Commission d'appel
en matière de lésions professionnelles, de neuf à cinq.
Est-ce que j'ai mal...
M. Marx: Les assesseurs?
M. Filion: Oui, les assesseurs, les commissaires.
M. Marx: Quelle est la question?
M. Filion: II y a une diminution de neuf à cinq, de la
moitié des assesseurs, à la page 2, au programme 2,
élément 4:
Commission d'appel en matière de lésions
professionnelles.
M. Marx: Le député doit savoir que la CALP est un
nouvel organisme. On n'a pas vraiment tellement de dossiers pour garder neuf
assesseurs permanents. Donc, le nombre a été réduit
à six assesseurs permanents mais nous avons prévu un budget de
250 000 $ pour engager des assesseurs à vacation. Donc, le travail sera
fait mais on essaie de faire une certaine rationalisation des dépenses.
Les services sont garantis, toutefois.
M. Filon: Mais l'idée, dans le cas de cette commission
d'appel, évidemment, c'est que le volume des dossiers ne peut que
croître étant donné que la juridiction de la commission
d'appel s'applique sur les accidents du travail, sur les lésions, mais
sur ceux survenus après le mois d'août 1985, je pense, sauf
erreur. Donc, en ce qui concerne le volume des dossiers, il est bien certain
qu'il est réduit actuellement. Mais l'idée, c'est qu'il ne peut
que croître et très rapidement alors que, dans ce cas-ci, on
prévoit un maintien du nombre des commissaires et qu'il y a une
diminution des assesseurs. Je suis un peu surpris, disons, encore une fois
compte tenu du volume additionnel de travail qu'on peut raisonnablement
prévoir pour la commission d'appel.
M. Marx: Nous avons prévu une moyenne de 2100 dossiers par
année mais, depuis neuf mois, la commission a ouvert seulement 225
dossiers. Donc, nous avons ajusté nos budgets et nos ressources pour
tenir compte du fait que nous avons seulement 225 dossiers ouverts. Quand le
nombre des dossiers augmentera, on augmentera le personnel affecté
à ces dossiers. Il n'y a pas de problème là. On ne peut
pas avoir des gens qui n'ont rien à faire. On ne peut pas engager du
monde à ne rien faire, comme l'ancien gouvernement l'a fait souvent. Je
peux vous donner des exemples.
Je ne crois pas dans le fait de "tabletter" des gens, d'engager des gens
pour leur faire attendre des dossiers. Je pense qu'il y a assez de travail
à faire pour affecter des gens aux dossiers qui existent et non aux
dossiers qui vont peut-être exister un jour.
Vous savez que l'ancien gouvernement a prévu, pour cette
commission, un budget de plus de 5 000 000 $. C'est déjà
réduit considérablement. Si vous pensez que c'est une fausse
économie, je suis prêt à vous fournir toutes les
statistiques pour vous démontrer que nous pouvons faire un excellent
travail avec beaucoup moins d'argent.
M. Filion: Est-ce que le ministre nous dit que les
prévisions étaient d'environ 2000 dossiers?
M. Marx: Elles étaient de 2100 dossiers.
M. Filion: Évidemment, a cause de ce que j'ai
expliqué. Le volume des dossiers est nettement inférieur.
M. Marx: C'était le rythme de croisière. (13
heures)
M. Filion: Le ministre peut-il nous expliquer la cause de cette
différence entre les prévisions et le nombre de dossiers
effectivement ouverts à la commission? Est-ce un manque d'information
chez les victimes d'accident de travail?
M. Marx: La raison, c'est parce que c'est une loi nouvelle et
qu'il faut du temps avant que les gens ne se familiarisent avec une loi
nouvelle. Mais nous avons prévu un rythme de croisière d'environ
2100 dossiers et nous en avons moins. On ne peut pas forcer les gens à
venir devant la commission.
M. Filion: C'est peut-être une réduction des
accidents du travail aussi.
M. Marx: Peut-être.
M. Filion: Ce qui ne serait sûrement pas à notre
passif.
M. Marx: Depuis que le gouvernement a changé il y a moins
d'accidents, c'est sûr.
Ce sont des accidents du travail qui sont survenus depuis le 19
août, donc cela va entrer. Pour les anciens, c'est l'autre commission.
J'espère que nous avons mal prévu le nombre de dossiers, qu'il
n'y aura pas d'accidents du travail et qu'il n'y aura pas d'appels; ce sera
excellent. Tout le monde sera heureux, sauf le député de
Taillon.
M. Filion: Ah! Mais pas du tout! M. Marx: Non?
D'accord.
M. Filion: Au contraire. Le dossier de la santé et de la
sécurité est extrêmement important pour nous. On l'a
démontré dans le passé.
En ce qui concerne le programme 2, M. le Président, je suis
prêt à procéder à l'adoption.
M. Marx: M. le Président.
M. Filion: Je voudrais laisser la parole à ma
collègue... Oui, c'est à 13 h 12.
Le Président (M. Marcil): C'est à
13 h 12.
M. Filion: 13 h 12.
Le Président (M. Marcil): Le programme 2 est-il
adopté?
M. Filion: Sur division.
Le Président (M. Marcil): Adopté sur division. En
ce qui concerne le programme...
M. Marx: Sur division?
Le Président (M. Marcil): Oui. En ce qui concerne le
programme...
M. Marx: Le député n'est pas d'accord avec l'un des
éléments?
M. Filion: Beaucoup de...
M. Bélisle: M. le Président, question de directive,
s'il vous plaît. À quel endroit dans les programme pourrais-je
poser une question sur la juridiction des cours? Vous avez l'obligation de me
diriger.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Mille-Îles, vous pourriez poser votre question à n'importe quel
programme.
M. Filion: Dans le sens que je suis consentant que ce soit
traité en... Mais là, j'ai un petit problème. Me
permettez-vous, M. le député de Mille-Îles?
M. Bélisle: Oui.
M. Filion: Ma collègue, la députée de
Chicoutimi, ne peut pas venir ce soir. La soirée va commencer
entre nous sur la question du...
Le Président (M. Marcil): ...à la
députée de Chicoutimi.
M. Filion: Donc, c'est sur le programme 3.
Protection des droits et libertés de la
personne
Le Président (M. Marcil): On reviendra à votre
question juste avant l'ajournement. C'est cela?
M. Filion: C'est sur le programme 3. Effectivement, nos
premières interrogations portent sur la fusion du CPJ et de la CDP. Je
laisse donc la parole à ma collègue, la députée de
Chicoutimi et, dans mon cas, mes questions viendront dans la deuxième
portion de notre examen des crédits.
Fusion du CPJ et de la CDP
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Tout à
l'heure, j'entendais le ministre qui disait que la députée de
Chicoutimi serait certainement davantage intéressée à
avoir des compressions ou des coupures faites dans le budget de la Justice, de
préférence à celui de l'Éducation. Je vous dirais
que ce n'est pas pour moi qu'une question d'Éducation lorsque je
défends le budget de l'éducation, mais bien une question d'avenir
pour le Québec. Ma préoccupation s'étend davantage
à l'ensemble de la jeunesse. Je pense que la plupart d'entre vous le
savez.
D'ailleurs, ce que je déplore le plus dans l'exercice qu'on est
en train de faire dans les différentes commisions, c'est que l'absence
d'une vision d'ensemble de la problématique jeunesse nous empêche
de voir les effets réels des coupures dans les différents
ministères sur la jeunesse. Je ne recommencerai pas une
énumération que j'ai faite, hier, dans une autre commission; mais
par rapport è cette commission-ci, la décision qui me
préoccupe le plus, c'est vraiment la décision de fondre ou de
fusionner, d'intégrer le Comité de la protection de la jeunesse
à la Commission des droits de la personne.
Brièvement, il serait important de rappeler que le Comité
de la protection de la jeunesse a été créé en vertu
de !a Loi sur la protection de la jeunesse. Ce comité a comme mandat de
surveiller l'application de la loi, il peut faire enquête, comme il peut
faire également des études, des recherches et des
réflexions sur la situation de la jeunesse. Il y a des bureaux
régionaux, et les directeurs de la protection de la jeunesse ont souvent
été dérangés par les avis du Comité de la
protection de la jeunesse, sauf qu'ils estiment qu'il a joué un
rôle extrêmement utile et que, selon eux, il faudrait le maintenir.
C'est une question de ce que j'appellerais la visibilité de la
problématique jeunesse.
Il faut d'abord savoir que quand on touche à un dossier comme
celui-là, les clientèles concernées, ce sont des enfants,
ce sont des jeunes qui ne sont pas organisés ni structurés pour
défendre leurs droits. Alors, ce sont vraiment les plus faibles et les
plus démunis de notre société. J'ajouterais que la fusion
des activités, si j'ai bien compris, de ce comité avec la
Commission des droits de la personne pourrait, à la limite, créer
une certaine ambiguïté et peut-être même un conflit de
mandat entre la Commission des droits de la personne et le Comité de la
protection de la jeunesse. Par exemple, comment une commission peut-elle, sans
difficulté ou sans tension, veiller au respect des droits de la
liberté religieuse et faire enquête sur le mode de vie d'une secte
à cause des enfants qui s'y trouvent? Cela
s'est présenté, on le sait.
Voici une deuxième question qui m'apparaît importante, s'il
y avait fusion de ces deux organismes. S'il n'y a pas de budget
spécifique prévu pour le Comité de la protection de la
jeunesse, la commission pourra mettre ses priorités ailleurs. Cela veut
donc dire pénaliser ainsi les jeunes du Québec. Quand je vous
disais tantôt que ma préoccupation n'est pas de protéger un
budget particulier, mais bien de m'assurer qu'on se donne des chances
d'améliorer notre avenir au Québec, le Comité de la
protection de la jeunesse est un outil indispensable pour protéger les
plus démunis d'entre nous. Je le répète, ce n'est pas une
question de vouloir à tout prix sauvegarder certains organismes, mais
c'est une question de visibilité de la problématique
jeunesse.
À présent, je me disais qu'au moment où le ministre
avait pris cette décision il avait probablement voulu élargir les
bureaux ou créer des bureaux régionaux de la Commission des
droits de la personne là où ils sont déjà ouverts
ou déjà occupés par le Comité de la protection de
la jeunesse. Je me dis: On peut occuper les mêmes bureaux sans être
obligés de partager le même lit. Aîors, on peut penser que
la Commission des droits de la personne pourrait être logée
à la même adresse, sans pour autant que l'on fusionne les deux
organismes.
Par ailleurs, voici l'autre question. Est-ce qu'on a bien
évalué l'économie réalisée en regard des
torts que l'on peut causer tantôt à cette clientèle? Je
voudrais rappeler ici aux députés ministériels et au
ministre que votre priorité devait être la jeunesse: Élire,
disiez-vous, le Parti libéral, le porter au pouvoir, c'est porter la
jeunesse au pouvoir, et la nouvelle question nationale devait être la
jeunesse. J'ai assisté à plusieurs commissions et,
malheureusement, je n'ai pas senti cela dans vos commissions. Alors, c'est ce
que je voulais rappeler au ministre en même temps que j'aimerais qu'il
réponde à certaines de mes questions.
M. Marx: II faudra peut-être prendre deux minutes, parce
que je peux répandre en deux minutes et, si je n'ai pas assez de temps,
je peux continuer ce soir ou je peux écrire à Mme la
députée de Chicoutimi. Premièrement, en ce qui concerne
les jeunes, vous devez savoir que nous avons pris la décision
d'établir des comités de justice prévus dans la loi sur
les jeunes contrevenants. L'ancien gouvernement arefusé de faire
cela depuis des années. Cela ne coûte absolument rien. Ce sera
fait par des bénévoles dans les communautés du milieu.
J'ai écrit au gouvernement pendant trois ou quatre ans pour le faire. Il
était nécessaire d'avoir un changement de gouvernement pour
établir ces comités. C'est pour parler de la jeunesse et de
l'intérêt que les gouvernements portent à la jeunesse.
En ce qui concerne cette fusion, il faut dire que les autorités
à la Commission des droits de la personne sont tout à fait
d'accord. En ce qui concerne la visibilité, un des problèmes avec
le Comité de la protection de la jeunesse est que cela n'a aucune
visibilité parce que tout le monde l'a confondu avec le Directeur de la
protection de la jeunesse. Comment le député de Taillon peut-il
dire nonquand il n'est pas au courant? Est-ce qu'il veut m'expliquer
comment j'ai tort? J'ai visité le Comité de la protection de la
jeunesse et c'est une des premières choses qu'on m'a dites: On nous
confond toujours avec le Directeur de la protection de la jeunesse. Donc, ils
n'avaient aucune visibilité, tout ce qu'ils avaient, c'était de
la confusion.
Premièrement, je peux vous assurer que l'on va avoir plus de
visibilité à l'avenir parce que, de toute façon, il y abeaucoup de gens qui ont téléphoné à la
Commission des droits de la personne quand ils ont vraiment voulu
téléphoner à quelqu'un au Comité de la protection
de la jeunesse. On me l'a dit souvent.
En ce qui concerne les conflits opérationnels, pas les conflits
théoriques, de toute façon, vous savez qu'un comité de la
protection de la jeunesse ou une commission fusionnée ou quoi que ce
soit ne peut jamais aller à l'encontre de la Charte des droits et
libertés de la personne. Donc, où est le conflit?
Mme Blackburn: Si vous me le permettez...
Le Président (M. Marcil): Juste une seconde. Avec le
consentement des deux partis, est-ce que l'on pourrait ajouter cinq minutes
pour permettre à la députée de Chicoutimi et au ministre
de vider la question? Cela va?
Mme Blackburn: Excusez-moi, je dois siéger à une
autre commission ce soir et, malheureusement, je ne pourrai pas être des
vôtres.
Le Président (M. Marcïl): Mme la
députée de Chicoutimi.
M. Marx: Cela me fait plaisir de rester.
Le Président (M. Marcil): Allez.
Mme Blackburn: Juste pour illustrer par un exemple ce qui
pourrait se passer - je l'ai cité tantôt - la Charte des droits et
libertés de la personne reconnaît, parmi les droits, la
liberté religieuse. On sait que des cas se sont présentés
ou certaines sectes religieuses refusent que les enfants subissent
une transfusion sanguine. On connaît cela. On a vu des cas dans la
région de Sherbrooke, il n'y a pas plus d'un an, où des pratiques
relativement violentes... exercent une certaine violence, une violence certaine
à l'endroit des enfants, parce qu'ils ont une certaine conviction
religieuse. Quand des cas sont portés devant la justice, qu'est-ce qui
prime? La liberté religieuse qui asa conception par rapport
à l'éducation?
M. Marx: La liberté ne veut pas dire que vous pouvez
battre vos enfants...
Mme Blackburn: La liberté religieuse...
M. Marx: ...et moins votre mari ou votre épouse.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, on va permettre
à la députée de Chicoutimi...
Mme Blackburn: Je suis capable de me défendre. Les
enfants, c'est moins certain.
M. Marx: C'est cela.
Mme Blackburn: Â ce moment-là, le comité qui
est saisi d'une plainte concernant les enfants... Je trouve que dans un cas
comme cela, c'est un exemple qui me semble pertinent et pour lequel exemple, il
se peut qu'à un moment donné, la commission soit en conflit de
mandat. Cela m'apparaît extrêmement important.
M. Marx: Je ne vois pas cela...
Mme Blackburn: Est-ce que le ministre a bien examiné,
comparé, la valeur des économies réalisées en
regard du tort qu'on pourrait causer à cette population et je pense aux
jeunes. Parce que...
M. Marx: On ne causerait pas de tort à qui que ce soit. De
toute façon, disons que la Commission des droits de la personne fait des
enquêtes maintenant. D'accord. Elle fait des enquêtes, elle
pourrait poser un acte qui va à I'encontre de la charte aussi. Supposons
qu'on ne donne pas la chance à une personne de se défendre devant
la commission, cela peut être une décision renversée par
les tribunaux. Honnêtement, je trouve difficile de voir où est le
conflit.
Mme Blackbrun: Parce que le temps coule, est-ce qu'il y aura un
budget spécifique réservé à cette activité
c'est-à-dire aux activités qui étaient celles du
Comité de la protection de la jeunesse?
M. Marx: II faut harmoniser les droits. Honnêtement, je ne
vois pas de problèmes dans les conflits. J'ai vu des conflits entre le
Solliciteur général et le ministre de la Justice quand
c'était la seule et même personne. Mais, ici, je ne vois pas de
conflit. Si nous trouvons qu'il y a un conflit, nous prendrons les mesures qui
s'imposent. Je peux vous assurer que dans toutes les compressions que nous
faisons, dans toutes les rationalisations que nous faisons, nous donnerons le
même ou un meilleur service à la population. Il n'est pas question
de donner moins de services.
Mme Blackburn: ...budget protégé?
M. Marx: Le budget de la Commission des droits de la personne au
Québec est le budget de la commission des droits le plus
élevé, je pense, au Canada. Donc...
Mme Blackburn: Ma question n'est pas là.
M. Marx: Donc, il n'y a pas de question de... (13 h 15)
Mme Blackburn: Ma question n'est pas là, M. le
Président. Ma question est la suivante: Est-ce qu'il y a un budget
protégé pour les activités du Comité de la
protection de la jeunesse?
M. Marx: Le budget de la Commission des droits de la personne
sera augmenté considérablement parce qu'on va avoir un virement
de fonds. Cela sera protégé comme cela se fait dans toute autre
commission. Quand on va avoir du travail à faire, il va y avoir des gens
pour faire ce travail et il va y avoir l'argent, les ressources.
Mme Blackburn: Je veux bien comprendre le ministre. Les budgets
vont être fusionnés et si la commission estime devoir
établir ailleurs, par exemple, ses priorités de recherche, le
Comité de la protection de la jeunesse, ou les activités qui
touchent à la protection de la jeunesse, ne trouvera pas
nécessairement la même enveloppe qu'il a actuellement.
M. Marx: En ce qui concerne la jeunesse...
Mme Blackburn: Exception faite des...
M. Marx: ...le mandat vient de la loi et on va remplir le mandat.
C'est sûr et certain.
Mme Blackburn: Je conclus donc qu'il n'y a pas de budget et qu'il
n'y aura pas dans l'enveloppe de la Commission des droits de la personne...
M. Marx: Cela veut dire quoi cela?
Mme Blackburn: Je...
M. Marx: Cela veut dire quoi? Que l'on ne donnera pas de
services?
Mme Blackburn: M. le Président, je veux seulement essayer
de savoir si on a bien compris et si ceux qui en bénéficient ou
qui utilisent actuellement ces services pourront s'attendre au même
niveau de services. Ma question est la suivante et je la répète:
À l'intérieur de l'enveloppe, est-ce que...
M. Marx: C'est une mauvaise question. Vous pouvez me poser la
question: Est-ce que dans l'enveloppe de la Cour provinciale du Québec
il va y avoir une petite enveloppe pour le Tribunal de l'expropriation? S'il
n'y a pas cette petite enveloppe, comment va-t-on donner des services? C'est
complètement à côté de la question.
Mme Blackburn: Le ministre sait que dans certains organismes, il
n'y a pas de transférabilité entre certaines enveloppes.
M. Marx: Je peux vous assurer qu'il va y avoir...
Mme Blackburn: C'est ce que je voulais savoir.
M. Marx: ...du personnel et des ressources pour s'occuper de ce
mandat. Si vous trouvez que la commission ne remplit pas son mandat, ce sera
à vous de m'écrire ou de me poser une question à
l'Assemblée nationale. On va rendre les mêmes services et
peut-être même qu'ils seront meilleurs.
Mme Blackburn: Pendant ce temps-là, on aura
échappé une partie de la clientèle.
M. Marx: On va avoir un regroupement de certains services: les
services administratifs, de recherche, de contentieux et ainsi de suite.
M. Filion: Ce n'est pas cela la question de la
députée de Chicoutimi, M. le ministre.
M. Marx: Quand on fusionne, on n'a pas de budget.
M. Filion: Le ministre...
M. Marx: C'est comme pour le Tribunal de l'expropriation. On
n'aura pas une petite enveloppe à l'intérieur d'une grande
enveloppe. Je pense que...
Mme Blackburn: C'est tout ce que je voulais vérifier. Je
pense que la réponse est claire. Il n'y aura pas d'enveloppe
protégée pour la protection de la jeunesse.
M. Marx: On va avoir des services protégés...
Mme Blackburn: Mais...
M. Marx: ...en vertu de la loi.
Mme Blackburn: Je dois dire que je suis...
M. Marx: II ne faut pas déchirer des vêtements quand
il n'y a rien...
Mme Blackburn: Je suis étonnée du peu
d'intérêt et du peu de souci qu'on a de protéger ces
clientèles les plus démunies et les plus faibles, malgré
tout le discours qu'on a tenu en campagne électorale. C'est ce que je
veux dénoncer aujourd'hui, parce ce que qui d'autre va le faire?
Certainement pas ces jeunes, ils ne sont pas organisés pour le faire.
Merci, M. le Président,
Le Président (M. Mardi): Merci, Mme la
députée.
Mme Blackburn: Je dois dire que j'apprécie le fait que
vous m'ayez accordé cette petite prolongation de la durée
prévue au débat. Je vous en remercie infiniment.
Le Président (M. Mardi): À l'ordre, s'il vous
plaît!
II est présentement treize heures et dix-neuf minutes.
Nous avons prolongé de quelques minutes.
Vous voudriez poser une question vu que vous n'êtes pas là
ce soir?
M. Filion: M. le Président, le député de
Mille-Îles m'informe qu'il ne sera pas là ce soir. Il a une courte
question à poser au ministre. Si le ministre veut bien attendre quelques
minutes. Je suis prêt à laisser la...
Le Président (M. Mardi): Nous allons allouer deux
minutes.
M. Filion: Vu qu'il ne sera pas là.
M. Marx: Avec plaisir, M. le Président. Je suis toujours
disponible, même après les heures...
Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît, M. le
ministre, on va entendre la question du député de
Mille-Îles.
M. Marx: ...prévues pour la commission, pour
répondre aux questions.
Cela me fait plaisir de parler de nos réalisations.
Le Président (M. Marcil): Allez, M. le
député de Milles-Îles.
M. Bélisle: J'ai une courte question, M. le ministre de la
Justice, relativement à la juridiction de la Cour provinciale et de la
Cour supérieure. Dans toutes les causes où on touche les droits
immobiliers ou les droits futurs, prenons en exemple un privilège, une
hypothèque de 2000 $ qui est en cause. D'après les arrêts
de jurisprudence actuels, c'est sous la juridiction de la Cour
supérieure du Québec. Maintenant, lorsqu'on arrive avec des
causes de 2000 $ en Cour supérieure, on est mal vu, même si c'est
de la juridiction de la Cour supérieure. Ne serait-il pas
approprié de faire un amendement ponctuel, dans les plus brefs
délais, pour laisser à la Cour provinciale la juridiction de
toutes les causes qui sont en dessous de la juridiction en termes
monétaires de 15 000 $ et qui affectent des droits immobiliers ou des
droits futurs? Juste une suggestion d'amélioration du
système.
M. Marx: D'accord, le député est sûrement
conscient de l'article 96 de la constitution qui attribue...
Le Président (M. Matcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: ...c'est parce que 96, tel qu'interprété
par les tribunaux, donne une certaine juridiction à la Cour
supérieure. C'est enchassé dans la constitution et, dans certains
domaines, il est impossible pour l'Assemblée nationale de modifier cette
juridiction, c'est-à-dire de donner une certaine juridiction à la
Cour provinciale. Quand on le fait, si c'est inconstitutionnel, ce sera
jugé inconstitutionnel par la Cour suprême. Sur cette question
spécifique que vous avez posée, de donner à la Cour
provinciale juridiction en ce qui concerne des droits immobiliers, quand il
s'agit d'un montant...
M. Bélisle: En dessous de 15 000 $.
M. Marx: Oui, mais, on ne peut pas transférer... je me
demande si cela pourrait être fait, je vais vérifier auprès
de mes fonctionnaires, mais vous savez qu'il y a une certaine juridiction de la
Cour supérieure qu'on ne peut pas transférer à la Cour
provinciale...
M. Bélisle: Oui.
M. Marx: ...même en matière familiale, par
exemple...
M. Bélisle: Je suis d'accord, M. le ministre, mais il n'y
a aucun argument de type constitutionnel d'invoqué pour
l'évocation à la Cour supérieure. Je vous demanderais de
faire une vérification, s'il y a lieu. Ce serait un amendement qui
serait une amélioration au système et qui ne prendrait pas des
années à faire.
M. Marx: Je vais faire préparer une opinion sur cette
question et je vais vous envoyer une copie dans les meilleurs
délais.
M. Bélisle: C'est apprécié, M. le
ministre.
M. Marx: C'est une question qui m'intéresse et on va faire
l'étude.
Le Président (M. Marcil): Nous poursuivrons ce soir
à 20 heures le programme 3. Pour les membres de cette commission
n'oubliez pas que cet après-midi, immédiatement après les
affaires courantes, on a un bloc de 45 minutes sur le Conseil exécutif
touchant les autochtones. Ce soir à 20 heures, nous poursuivons les
travaux avec le ministre de la Justice.
(Suspension de la séance à 13 h 23)
(Reprise à 16 h 48)
Crédits du Conseil exécutif
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je déclare la séance ouverte. Donc, juste avant les
remplacements, Mme la secrétaire.
La Secrétaire: M. Godin (Mercier) est remplacé par
M. Claveau (Ungava) et M. Johnson (Anjou) par M. Perron (Duplessîs).
Affaires amérindiennes et inuit
Le Président (M. Marcil): Je vous rappelle le mandat de
cette commission qui est de procéder à l'étude de
l'élément 3 du programme 2 du Conseil exécutif pour lequel
nous avons un bloc de 45 minutes seulement. À partir de ce moment je
vais laisser la parole au ministre Savoie. C'est M. Claveau qui sera le
porte-parole de l'Opposition sur ce dossier.
Exposés généraux M. Raymond
Savoie
M. Savoie: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
vous présenter les gens du SAGMAI. Il y a M. Gilles Jolicoeur, à
côté de lui, M. Jean-Marc Lessard et, à ma droite
immédiate, M. François Lévesque.
M. le Président, en tant que ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, il m'est
très agréable de déposer devant cette commission les
crédits affectés au SAGMAI pour l'année
budgétaire
1986-1987.
Comme vous le savez, ce secrétariat est un des
organismes-conseils auprès du premier ministre dont il relève en
dernier ressort. J'ai été invité tout récemment par
M. Robert Bourassa à partager la responsabilité des affaires
autochtones et, de ce fait, à assumer la responsabilité
ministérielle du SAGMAI.
Cet organisme composé d'une trentaine de fonctionnaires a pour
mandat principal d'élaborer, en consultation avec les
intéressés, la politique d'ensemble de l'État
québécois touchant les autochtones, d'assurer la coordination et
la cohérence des interventions gouvernementales et paragouvernementales
en milieu autochtone et de fournir à cette clientèle
particulière l'information pertinente relative aux activités des
programmes gouvernementaux.
Il exécute en plus à l'occasion, à la demande du
Conseil des ministres ou du Conseil du trésor, des mandats
spéciaux comme c'est le cas actuellement en ce qui concerne les travaux
de construction d'un nouveau village à Umiujaq et en territoire
inuit.
Pour assumer pleinement son rôle touchant la coordination, le
SAGMAI réunit d'une façon statutaire, chaque mois et chaque fois
que les circonstances l'exigent, des coordonnateurs oeuvrant dans les
ministères sectoriels. Au cours de l'année 1985-1986, deux
nouveaux coordonnateurs se sont ajoutés au groupe, soit le
vice-président aux Affaires amérindiennes et inuit
d'Hydro-Québec et le conseiller du président pour les affaires
autochtones pour l'Office de la construction du Québec.
Durant l'année qui vient de s'écouler, les efforts du
SAGMAI ont porté principalement sur la reconnaissance des droits des
autochtones, l'aménagement de l'exercice de ces droits et le soutien
administratif, juridique et financier nécessaire à leur mise en
oeuvre. Ces efforts se sont concrétisés par la participation
à la troisième conférence constitutionnelle des premiers
ministres du Canada tenue en avril 1985 et par la préparation de la
prochaine conférence qui doit se tenir le printemps prochain. Ils se
sont également concrétisés par la production d'un rapport
synthèse concernant l'harmonisation des relations du gouvernement avec
les nations autochtones, par l'élaboration d'une politique de
main-d'oeuvre en collaboration avec les ministères et les organismes
autochtones concernés, par la mise en route d'un programme
expérimental de développement de langues et par l'ébauche
d'un projet de formation en emploi à l'intention des
bénéficiaires de ta Convention de la Baie James et du Nord
québécois et celle du Nord-Est québécois.
Le SAGMAI a participé activement, le plus souvent en les
présidant, à différents groupes de travail concernant
notamment l'habitation nordique, l'entretien des édifices publics dans
le Nord et la taxation locale dans les municipalités des villages
nordiques.
De plus, le SAGMAI a participé à des travaux concernant la
protection contre les incendies en territoire cri, à la phase finale du
relogement à Kawawachikamack et à l'implantation à
Akwesasne des services de santé et de main-d'oeuvre, en collaboration
avec le conseil de bande, le ministère de la Santé et des
Services sociaux et le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Le SAGMAI a maintenu pendant l'année ses services d'information
destinés aux autochtones et à l'administration en publiant la
revue Rencontre, en mettant à la disposition du public quelque 3000
documents informatiques sur les autochtones dans son centre de documentation et
en émettant, en principe, une fois la semaine, un communiqué
destiné aux coordonnateurs des ministères sectoriels. Il a
participé également au programme d'échange
d'étudiants en collaboration avec le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche et il a apporté son soutien financier
à divers colloques, dont la Conférence circumpolaire inuit tenue
à Montréal en septembre 1985.
Le SAGMAI a aussi organisé des tournées dans les
communautés nordiques par des délégations de la Chine et
de la Russie, à la demande du ministère des Relations
internationales. Toujours dans le domaine de l'information, soulignons sa
participation avec le ministère de l'Énergie et des Ressources
à la préparation d'un document sur le statut historique foncier
des réserves et des établissements autochtones du Québec,
dont la publication est prévue au cours de l'année 1986.
Comme par les années passées, le SAGMAI aura
apporté son soutien financier en vue d'assurer le fonctionnement
à l'Alliance autochtone du Québec Inc., à l'Association
des Métis et Indiens aux réserves, à l'Association des
femmes autochtones du Québec et au Regroupement des centres
d'amitié autochtones. Le SAGMAI a contribué activement aux
négociations avec les Inuit du Labrador concernant leurs revendications
dans le cadre de l'article 2.14 de la Convention de la Baie James et du Nord
québécois avec les Cris de Chibougamau pour la création
d'une neuvième bande crie et l'octroi des terres de la catégorie
1-A à des fins résidentielles et avec les Hurons de Lorette pour
l'octroi d'un territoire de chasse et de pêche.
Quant aux négociations avec les Indiens attikamèques et
montagnais, elles n'ont connu aucun progrès au cours de l'année
écoulée. Des contacts récents, toutefois, nous indiquent
qu'elles peuvent être reprises à brève
échéance.
C'est là, en résumé, l'essentiel des
réalisations au cours de l'année 1985-1986. Pour ce qui est de
l'avenir, je me suis engagé avec les représentants des
différentes nations, que j'ai rencontrés à deux reprises
depuis ma nomination, à mettre l'accent sur le développement
socio-économique, sans pour autant négliger les autres questions,
notamment les négociations constitutionnelles et celles de
revendications globales. J'ai l'intention également, en consultation
avec les nations autochtones, de revoir le mandat et la structure du SAGMAI.
D'ailleurs, j'en ai déjà informé les représentants
des nations autochtones au cours de la dernière rencontre que j'ai eue
avec eux. Je les ai invités, à cette occasion, à me faire
part de leurs observations à cet effet. Ils sont les mieux placés
pour me faire des suggestions et des recommandations pertinentes.
Voilà, M. le Président, les remarques préliminaires
que je voulais présenter à l'occasion de la défense des
crédits du SAGMAI pour l'année 1986-1987 et dont je propose
l'approbation par cette commission. Vous noterez, M. le Président, en
examinant les crédits de l'année 1986-1987, qu'ils sont
inférieurs à ceux de l'an passé d'un montant d'environ 1
800 000 $. Cette réduction de crédits provient du fait que les
travaux de Umiujaq sont maintenant en phase terminale et que le comité
directeur, chargé de leur réalisation, aura terminé ses
travaux en décembre 1986. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre.
Maintenant, la parole est au député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci, M. le Président. M. le ministre, c'est
avec plaisir que je participe à cette rencontre afin de discuter
brièvement, puisque le temps qui nous est alloué est quand
même très restreint, des problèmes qui sont reliés
au SAGMAI et de son budget. Étant donné qu'on a été
averti juste hier, c'est-à-dire que mon bureau a su, hier
après-midi, que les crédits étaient séparés
de ceux du Conseil exécutif et qu'on ne discuterait vraiment,
spécifiquement, que du SAGMAI, on n'a quand même pas pu
élaborer une présentation qui soit vraiment d'une
phraséologie articulée. Par contre, je crois qu'on a suffisamment
d'éléments pour pouvoir avoir une bonne discussion.
J'aurai seulement un très bref préambule, afin de ne pas
empiéter indûment sur le temps de questionnement par rapport aux
différentes activités du SAGMAI. Je vaudrais simplement dire, en
termes d'introduction, que c'est en janvier 1978 que le gouvernement du
Québec créait le SAGMAI. Dès son origine, le SAGMAI a
toujours été étroitement associé au bureau du
premier ministre et celui-ci en assurait personnellement la
responsabilité ministérielle, de ce fait, garantissant une
relation étroite entre les chefs des nations et le chef du Québec
qui est le premier ministre.
D'ailleurs, on peut constater historiquement que le premier
intérêt vraiment manifesté par le Québec en ce qui
concerne les occupants du Nouveau-Québec date de la période
où M. Lévesque, premier ministre au moment de la fondation du
SAGMAI, était lui-même ministre des Richesses naturelles, alors
qu'il avait présidé ou orienté la création de la
Direction générale du Nouveau-Québec, au tout début
des années soixante.
C'est avec le SAGMAI, finalement, que le gouvernement du Québec a
fini par s'intéresser pour la première fois, exprimer clairement
pour une première fois sa volonté de travailler avec l'ensemble
des réserves non "conventionnées", parce qu'avant la
création du SAGMAI existait déjà la Convention de la Baie
James concernant un certain nombre d'établissements autochtones cris et
inuit dans le Nouveau-Québec.
Donc, on peut dire que le SAGMAI a été vraiment une
initiative, une émanation des réflexions de l'ancien gouvernement
qui visait à normaliser les relations entre les autochtones et les
allochtones. C'était, à toutes fins utiles, ta première
fois que le gouvernement du Québec identifiait spécifiquement sa
volonté de faire quelque chose en milieu autochtone.
La brochette que M. le ministre vient de nous décrire concernant
les activités du SAGMAI est reluisante et démontre, finalement,
que la vocation du SAGMAI n'a pas à être mise en doute, en ce qui
nous concerne. Malgré certains petits problèmes de relations qui
sont tout à fait normaux, d'ailleurs, avec la mise en place d'un tel
bureau de coordination, il reste que le SAGMAI semble avoir rempli
jusqu'à maintenant passablement bien sa mission et que son passé
est garant de l'avenir.
Sans plus tarder, M. le ministre, je crois qu'on peux passer à la
période des questions sur le budget, à moins que vous ne
vouliez...
Période de questions
Le Président CM. Marcil): C'est à vous la parole,
M. le député d'Ungava, si vous voulez procéder à la
période des questions.
M. Claveau: Je vous remercie bien.
Les éléments du budget en ce qui concerne le SAGMAI sont
quand même assez limités. Il y a très peu de chiffres,
étant donné que c'est un élément à
l'intérieur d'un programme. Donc, l'aspect strictement budgétaire
va être passé assez rapidement.
Tout à l'heure, vous nous disiez que la grosse part des
diminutions, c'est-à-dire 1 745 000 $ à peu près, au
niveau des équipements était due au parachèvement des
travaux à Umiujaq, Est-ce que le ministre pourrait nous donner un bref
aperçu de l'état des travaux et, par la même occasion, nous
dire où en est rendu le dossier en ce qui concerne le transfert des
Inuit de Kuujjuarapik à Umiujaq?
M. Savoie: Pour ce qui est des principaux travaux qui ont
été réalisés jusqu'à maintenant, on parle
d'une étude d'impact sur l'environnement, de l'établissement d'un
campement temporaire et de l'achat de véhicules et machineries, des
études de sol, du concassage de 256 000 tonnes de granulat, de la
construction d'un dépôt pétrolier, de la construction d'un
dispensaire, de la construction d'une partie des rues, de la construction de
huit logements pour les professeurs et d'une école, de la construction
d'un réservoir à eau en vue de construire un réservoir
d'eau potable, des relevés en vue de la confection d'une cartographie
marine et de l'aménagement de deux pistes d'atterrissage temporaires.
(17 heures)
Si vous voulez connaître les travaux qui seront
réalisés en 1986, tel qu'indiqué dans le rapport qui m'est
soumis, on indique la construction de 60 logements pour des familles inuit -
c'est environ 350 personnes -construction de trois logements pour le personnel
infirmier, la construction de la ligne électrique, la construction d'un
réseau d'aqueduc pour alimenter l'école et d'une station de
pompage, l'aménagement d'un dépotoir, le
déménagement des bâtiments du campement temporaire, la
construction de radiers et de rues et le déménagement des
familles dans deux villages avoisinants que je ne nommerai pas.
M. Claveau: Dans sa réponse, le ministre nous dit que le
problème qui existait avec le ministère de l'Environnement en ce
qui concerne la localisation des réservoirs de pétrole... il y a
eu tout un problème qui était relié à cela...
Est-ce que ces problèmes sont réglés?
M. Savoie: Ce n'est pas réglé encore et nous avons
demandé que d'autres études soient faites pour régler les
problèmes des deux réservoirs en question.
M. Claveau: Puisqu'on parle de
Umiujaq, on parle par le fait même de Kuujjuarapik. Vous savez
qu'au niveau de la convention de la Baie James, il était prévu
que les Inuit de Kuujjuarapik déménagent à Umiujaq, suite
à un référendum qui devait se tenir postérieurement
à la signature de la convention de la Baie James. Au moment du
référendum la population de Kuujjuarapik a été
passablement divisée sur l'intérêt de
déménager ou de rester. Je croîs que le vote final
était de 46 à 53 en faveur du déménagement à
Umiujaq. Est-ce que le ministre entend rencontrer, enfin approfondir le
problème qui émerge avec les gens de Kuujjuarapik qui
désirent rester à Kuujjuarapik et qui par le fait même
amènent un nouvel élément dans l'application de la
convention du Nord québécois.
M. Savoie: Je suis relativement nouveau à ce poste et il y
a une visite de toutes les communautés Inuit prévue au mois
d'août. Je compte reprendre mon bâton de pèlerin pour ainsi
dire, faire le tour et me familiariser particulièrement avec ces
problèmes. Pour le moment il y a un certain nombre de gens qui veulent
se déplacer. Pour le reste, je n'ai pas d'autres informations.
M. Claveau: On aura sûrement l'occasion d'en reparler.
M. Savoie: Oui, sûrement.
M. Claveau: En ce qui concerne le budget la diminution est quand
même assez énorme, mais étant donné la phase finale
où pratiquement des travaux de Umiujaq, j'aimerais passer à
d'autres genres de questions plus globales qui nous permettraient de cerner
certains problèmes qui existent actuellement en milieu autochtone.
Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on passe à des questions de
ce genre?
La première question touche à une motion qui a
été adoptée le 20 mars 1985 à l'Assemblée
nationale, dans laquelle on reconnaît un certain nombre de droits ou de
privilèges aux communautés autochtones ou aux autochtones en tant
qu'individus. Le gouvernement a travaillé sur un projet de loi-cadre
fixant un certain nombre d'avantages qui pourraient être reconnus en
faveur des autochtones. Le ministre peut-il nous dire s'il a l'intention de
déposer un projet de loi en ce sens dans les prochaines semaines?
M. Savoie: II n'est pas prêt pour dépôt. Le
projet de loi est actuellement à l'étude au ministère de
la Justice et il n'est pas prêt pour dépôt. Je ne pense pas
qu'il sera déposé à cette session.
M. Claveau: Mais le ministre continue ses travaux dans le
même sens de ce qui a été adopté en mars 1985,
à l'effet de reconnaître dans une loi des droits et
privilèges aux autochtones?
M. Savoie: Actuellement, oui, c'est cela. La politique actuelle
du Québec, dans ce dossier, est la suivante. Le Québec est
favorable en principe à l'enchâssement dans la constitution
du droit d'autonomie gouvernementale des autochtones, Tant qu'il n'aura pas
terminé sa propre négociation, le Québec ne signera rien,
il ne sera partie à aucun accord politique ou constitutionnel. En ce qui
concerne les délégations du Québec, elles sont
composées pour plus de la moitié des représentants choisis
par les nations autochtones et ces derniers ont droit de parole lors des
réunions. Quant aux autochtones et les problèmes d'ordre
constitutionnel, notre politique pourrait se résumer à ces trois
points.
M. Claveau: Le ministre nous dit que ce sont ces points qui vont
orienter les éléments fondamentaux d'une telle loi.
M. Savoie: C'est cela.
M. Claveau: Tout dernièrement, jeudi dernier, le ministre
était dans la région de Chibougamau où il a
rencontré, entre autres, les Cris de la bande Oujib Bougoumou et leur
chef, M. Abel Bosurn.
M. Savoie: C'est exact.
M. Claveau: Lors de ce voyage, le ministre a eu l'occasion
d'aller visiter le site qui avait été retenu à la suite
d'une négociation ou d'une entente entre les municipalités et la
bande en question pour la construction d'une neuvième réserve sur
le territoire délimité par la convention de la Baie James.
Le ministre peut-il nous dire comment il entend traiter ce dossier?
M. Savoie: Avant de partir pour ce voyage, j'avais
déjà communiqué avec les gens du ministère de
l'Énergie et des Ressources. Ils m'ont fait part que, effectivement,
c'était à l'étude et qu'en ce qui concerne les
catégories 1-A, il n'y avait peu ou pas de problème et que la
recommandation de la communauté crie de Chibougamau relevait un
problème de routes de l'ordre de 15 000 000 $, auquel il va falloir
faire face à court terme.
J'ai eu, comme vous l'avez souligné, l'occasion de visiter cette
route avec, justement, le chef Bosum, jeudi après-midi. Nous nous sommes
par la suite assis avec les membres de son conseil. Je lui ai dit que ma
position était la suivante: Que, pour le moment, j'acceptais le projet
qu'il nous déposait, que cela serait discuté à court terme
et qu'une rencontre serait prévue d'ici peu avec les principaux
intéressés, soit le MER, le MENVIQ, le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et évidemment, le SAGMAI.
M. Claveau: Quand vous dites le MER, je suppose que vous parlez
de...
M. Savoie: ...du ministère de l'Énergie et des
Ressources.
M. Claveau: Du ministère de l'Énergie et des
Ressources. Est-ce que vous avez l'intention, de la même façon, de
rencontrer les représentants des deux municipalités de
Chibougamau et Chapais qui ont été étroitement
associées au débat sur cette réserve?
M. Savoie: À cet effet, j'en ai parlé avec le maire
de Chibougamau qui m'a dit qu'il me ferait parvenir une lettre indiquant sa
position en ce qui concerne ce dossier. J'imagine que j'aurai la lettre en ma
possession lors des rencontres.
M. Claveau: Ainsi que de la ville de Chapais.
M. Savoie: Aussitôt que j'aurai la position de la ville de
Chibougamau, je vais faire appel à la mairesse de Chapais pour qu'elle
me transmette sa lettre.
M. Claveau: Si l'on revient sur le dossier, il reste que
c'était une condition au départ que les deux municipalités
soient d'accord sur le site et s'entendent avec la bande sur les
différents critères. Les deux municipalités devaient
être associées conjointement au processus.
Est-ce que le ministre entend aussi rencontrer prochainement son
homologue fédéral en ce qui concerne ce dossier? On sait qu'il
est question de terres de catégorie 1-A, de terres qui sont
transférées au fédéral pour des investissements
venant du gouvernement fédéral et que les montants en cause sont
relativement importants. J'ai cru comprendre qu'il y avait même,
actuellement, des pressions du côté fédéral, en ce
sens qu'on essaie de réviser le dossier parce que les deux montants
impliqués peuvent avoir une certaine incidence monétaire sur le
budget du ministère des Affaires indiennes. Est-ce que le ministre
entend rencontrer prochainement son homologue fédéral
là-dessus?
M. Savoie: Je pense qu'une rencontre est prévue. Nous en
avons discuté à deux ou trois reprises. Maintenant, en ce qui
concerne spécifiquement le problème des Cris de Chibougamau, je
pense qu'il serait logique qu'on tienne la première réunion avec
les intéressés dont je vous ai fait part tantôt et à
la suite de cette rencontre, on pourrait viser particulièrement une
rencontre avec le gouvernement fédéral concernant la question des
Cris de Chibougamau.
Négociations avec les Hurons de
Loretteville
M. Claveau: D'accord. Merci pour les réponses concernant
ce dossier. On pourra s'en reparler aussi, cela me ferait plaisir.
Un autre dossier qui a été porté à notre
attention et qui, je pense, mérite qu'on s'y arrête, c'est celui
des négociations qui sont ou qui seraient actuellement en cours avec les
Hurons de Lorette concernant des droits exclusifs sur une
propriété de pourvoirie, ou un genre comme cela, et le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour des droits
exclusifs de chasse, de pêche et de pjégeage sur des
propriétés. C'est quelque chose qui pourrait un peu ressembler
aux terres qui ont été données par la convention de la
Baie James, bien qu'on ne soit pas dans le même ordre de grandeur.
M. Savoie: M. le député d'Ungava, il y a eu
effectivement une rencontre entre les fonctionnaires du MER et du MLCP, qui ont
récemment aplani leurs divergences. Et une rencontre spécifique
sur le sujet a eu lieu dernièrement entre M. Picotte et M. Ciaccia. Le
MLCP devrait être en mesure de faire sous peu une nouvelle proposition
aux Hurons. À moins d'autres informations de la part des gens du SAGMAI,
c'est...
M. Claveau: M. le ministre nous fait part d'une nouvelle
proposition ou d'une nouvelle plate-forme d'entente entre les deux
ministères concernés. Est-ce que le ministre pourrait nous donner
certains éléments de cette plate-forme en ce qui concerne, entre
autres, les problèmes qui avaient été déjà
soulevés antérieurement relativement à la gestion du
territoire, au statut spécial au niveau de la gestion du territoire et
au niveau des permis spéciaux pour la chasse, la pêche et le
trappage? Actuellement, est-ce qu'il y a des données disponibles sur
cette nouvelle plate-forme d'ententes?
M. Savoie: Regardez, je vais chercher à situer un peu le
problème. Au printemps 1985, à la suite de l'adoption par
l'Assemblée nationale de la motion portant sur la reconnaissance des
droits des autochtones, le MLCP entreprenait des négociations avec les
Hurons de Lorette et ce, dans le cadre de la politique annoncée par le
gouvernement. Il s'agit essentiellement d'allouer des droits exclusifs de
chasse, de pêche et de piégeage aux Hurons sur un territoire
convenu, les gorges de la rivière Malbaie. Le ministère entendait
ainsi permettre aux Hurons d'exploiter une pourvoirie et de poursuivre leurs
activités traditionnelles. Les négociations avec le MLCP
étaient à toutes fins utiles terminées. Toutefois le MER
s'est opposé à certains aspects de l'entente projetée. Par
la suite, le débat s'est déplacé sur la question de
permis, c'est-à-dire un permis spécifique de chasse et de
pêche. Pour le moment, on ne discute pas de l'aspect du permis, on pense
tout simplement à leur accorder ce droit -c'est ce qui est
discuté - dans la région de la gorge de la Malbaie. À cet
effet, j'ai eu une rencontre, jeudi dernier, avec M. Conrad Sioui qui m'a
déposé un ensemble de documents que je suis en train
d'étudier concernant cette question.
M. Claveau: Est-ce que le ministre pourrait cerner
brièvement le territoire dont il est question? Est-ce grand ou
est-ce...
M. Savoie: La gorge de la Malbaie, c'est un territoire - si ma
mémoire est bonne... À moins qu'on me dise le contraire, il me
semble que c'est à peu près 250 milles carrés.
M. Claveau: C'est situé dans l'actuelle réserve des
Laurentides, non?
M. Savoie: Oui, c'est-à-dire que les gorges de la Malbaie
sont à l'extérieur de la réserve, elles ne sont pas
à l'intérieur de la réserve. C'est cela. C'est un
très beau territoire d'ailleurs. On y pratique le "mountain
climbing".
M. Perron: J'aurais juste une question à poser au ministre
se rapportant à ce qui vient d'être mentionné par rapport
aux Hurons et le territoire concerné. Le ministre a bien dit 250
kilomètres carrés?
M. Savoie: Approximativement... M. Perron: Avec droits
exclusifs?
M. Savoie: C'est la question qui est à l'étude
actuellement.
M. Perron: De chasse, de pêche et de piégeage?
M. Savoie: C'est ce qui est à l'étude.
M. Perron: Compte tenu des ententes et des positions
gouvernementales de l'ancien gouvernement se rapportant aux autochtones de
l'ensemble du Québec, incluant bien entendu les Montagnais, les Hurons,
etc., face aux ententes qui ont déjà été
signées avec les Naskapis, les Cris et les Inuit, le ministre ne
trouve-t-il pas dangereux pour le moment de donner des droits exclusifs aux
Hurons de Loretteville? (17 h 15)
M. Savoie: On m'avise que le problème se pose au niveau de
la pourvoirie et non pas vis-à-vis des autochtones. C'est qu'on
donnerait un droit exclusif à une pourvoirie
et non pas à une nation spécifique.
M. Perron: D'accord. Une dernière question. Est-ce que ce
territoire est actuellement exploité par des Blancs?
M. Savoie: Effectivement, je pense que c'est exploité...
C'est cela. Il y a une partie du territoire qui est libre actuellement.
M. Perron: Qui est libre. M. Savoie: Oui.
M. Perron: Donc, les 250 kilomètres carrés
concerneraient la partie du territoire qui est libre?
M. Savoie: Oui, c'est cela.
M. Perron: Merci, M. le ministre.
Le Président (M- Marcil): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Je voudrais revenir brièvement sur le projet
de loi dont il a été question tout à l'heure. Est-ce que
le ministre pourrait nous donner une idée des délais qu'il entend
prendre avant de déposer son projet de loi? Ce serait pour quand?
M. Savoie: On avait dit que cela ne serait pas fait durant cette
session mais on peut s'attendre, enfin, on m'avise qu'au début de cet
automne ce sera probablement prêt.
M. Claveau: Durant l'automne.
M. Savoie: Oui, à la session d'automne.
M. Claveau: Merci.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Saguenay.
Trappage et chasse
M. Maltais M. le ministre, dans les négociations que vous
allez entreprendre avec les gens du ministère du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche, il y a quand même un point qui ressort
régulièrement chez les bandes indiennes de nos comtés,
c'est la fameuse réglementation sur la trappe et sur la chasse. Les
territoires de trappe ont été rapetisses. Ils sont maintenant
libres, avec la fameuse loi du trappeur occasionnel ou à temps partiel.
C'est ce qui a rendu presque caducs les droits ancestraux de ces bandes
indiennes. Non seulement cela, mais elle les a rendus "impiégeables"
aussi parce que tout le monde joue là-dedans. Tout le monde peut se
procurer un permis de petite trappe et de petite chasse en même temps que
ces trappeurs qui sont considérés comme des trappeurs
professionnels.
Je pense particulièrement à la réserve des
Escoumins où on a un problème monumental avec cela. Je pense que
des négociations avec les représentants du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche doivent être bien entreprises
et qu'on doit apporter des modifications à certaines lois. C'est
pourquoi il devrait peut-être y avoir une partie ou un article que l'on
pourrait appeler omnibus qui viendrait corriger certaines anomalies usuelles
que l'on retrouve quotidiennement chez nos membres. Je pense que cela devrait
être fait.
C'est un peu cette certitude que j'aimerais avoir de vous aujourd'hui.
Ce n'est pas plus compliqué que cela.
M. Savoie: D'une part, on m'avise que le problème de la
réserve des Escoumins est un peu particulier. C'est un problème
spécifique plutôt qu'un problème qui reflète la
situation de l'ensemble de la province. Pour le reste, lorsqu'on regarde le
Québec, les autochtones ont quasiment un droit exclusif sur les deux
tiers du territoire de la province de Québec. Je comprends, au point de
vue de la réserve des Escoumins, que cela présente un
problème particulier et c'est un problème sur lequel je vais me
pencher.
M. Maltais: Je n'aimerais pas que vous employiez les mêmes
méthodes que celles de mon prédécesseur qui était
député de Saguenay, puisqu'il avait réglé cela
à coups de carabine. Finalement, le problème n'a jamais
été réglé. Je vous demande d'être très
prudent dans ce dossier.
M. Savoie: Les coups de carabine, comme vous le savez fort bien,
M. le député de Saguenay, ne sont pas propres au Parti
libéral. On va tâcher de régler ce problème en
s'assurant d'éviter justement des frictions à l'intérieur
de la réserve. Une fois familiarisé avec les problèmes du
groupe de la réserve des Escoumins, je compte aller les visiter. Ce sera
l'occasion d'autres rencontres.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: J'aurais seulement une ou deux questions sur ce qui a
été soulevé par le député de Saguenay. Le
député fédéral de Charlevoix, député
conservateur, d'ailleurs, a fait une déclaration, il y a quelques mois,
indiquant qu'il voulait négocier l'agrandissement du territoire de la
bande montagnaise de la réserve des Escoumins, je crois.
M. Maltais: La bande montagnaise des Escoumins.
M. Perron: Est-ce que le ministre délégué
aux Mines a eu des négociations avec des représentants du
gouvernement fédéral sur ce sujet, pour agrandir le territoire
qui est actuellement sous juridiction fédérale?
M. Maltais: Mais, en fait, ce n'est pas ce que les Indiens
demandent, par exemple. Malheureusement.
M. Perron: Oui. mais je parle du député
conservateur fédéral, M. le député de Saguenay.
M. Maltais: II a lu cela dans le Soleil.
M. Savoie: À ce jour, il n'y a pas de négociation
spécifique là-dessus. On me dit qu'il y a une politique
gouvernementale qui s'applique et qui s'applique également à la
question des Escoumins. Pour ce qui est de la question de l'agrandissement, il
faut procéder pour des fins résidentielles seulement.
M. Perron: C'est la raison pour laquelle je vous ai posé
la question. C'est la façon dont on a procédé au cours des
dernières années, pour ne pas dire des décennies. C'est
toujours de cette façon que cela a procédé, strictement
pour des fins résidentielles. D'accord, merci.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Ungava.
Une réserve à Charlesbourg
M. Claveau: Merci, M. le Président. J'aurais encore trois
ou quatre questions d'ordre général. Des autochtones du
Québec m'apprenaient dernièrement qu'un groupe d'Indiens de
l'Ouest du Canada était sur le point de conclure avec le gouvernement
fédéral et le gouvernement du Québec, par l'entremise du
ministre des Transport, une entente à l'effet de réserver un
territoire ou d'avoir un territoire spécifique - pour avoir un statut de
réserve, entre autres - à Charlesbourg, dans le but de construire
un complexe hôtelier et un centre commercial, ce qui pourrait
créer environ 700 emplois.
Le ministre, dans sa première déclaration lors de sa
nomination, annonçait d'ailleurs à la presse qu'un de ces
principaux soucis était d'assurer que le dialogue existe entre les
Indiens et les ministères concernés et qu'il devait mettre
l'accent sur le développement économique des Amérindiens.
Peut-il nous éclairer sur ce dossier et nous assurer que les Indiens du
Québec ne seront pas pénalisés si jamais cela se
réalise?
M. Savoie: Si je comprends bien, c'est un groupe
d'Amérindiens de l'Ouest canadien?
M. Claveau: C'est ça.
M. Savoie: Qui vont venir s'installer au Québec pour faire
un Disneyland? C'est ça?
M. Claveau: II est question qu'il y ait un groupe d'Indiens de
l'Ouest canadien qui aurait entrepris des négociations avec le
fédéral et le gouvernement du Québec pour venir installer
un complexe hôtelier et commercial à Charlesbourg.
M. Savoie: Je suis certain que les citoyens du Québec vont
leur souhaiter la bienvenue, moi également. S'ils font cela, ils font
cela à titre de commerçants, ils font cela à titre
privé. Ils ne peuvent pas fonctionner dans les cadres...
M. Claveau: Le cas échéant, toute la
législation concernant les exemptions aux autochtones ne s'appliquerait
pas, me dites-vous.
M. Savoie: C'est hors réserve, je vois mal pourquoi cela
s'appliquerait.
M. Claveau: Parce que dans la négociation, enfin dans
l'information qui m'a été transmise, il me semblait qu'ils
désiraient fonctionner comme à l'intérieur d'une
réserve, finalement. Je pense que l'hôtel...
M. Savoie: On m'avise que l'hôtel est certainement un des
éléments du projet. Ce n'est pas un élément majeur,
maintenant. C'est comme toute entreprise autochtone, aussitôt que cela se
fait à l'extérieur des territoires, ils sont soumis aux
mêmes lois que nous tous. Même s'ils s'incorporent sur leur
territoire, ils sont soumis aux mêmes lois.
M. Claveau: On me dit en complément d'information qu'il
serait question, finalement, de créer un nouveau territoire de
réserve indienne sur lequel pourraient se faire ces installations.
M. Savoie: Par qui seraient créés ces nouveaux
territoires?
M. Claveau: Il faudrait que cela soit nécessairement par
les instances gouvernementales concernées.
M. Savoie: II faudrait qu'ils nous en parlent.
M. Claveau: Je vous remercie pour l'information. C'est un dossier
à suivre, au fait.
Une autre question. Vous déclariez lors d'une conférence
de presse, le 11 avril, que vous deviez rencontrer prochainement vos
collègues, MM. Marx et Rémillard, afin
d'avoir un "briefing" sur les différents dossiers concernant les
négociations constitutionnelles. Lors de cette même
conférence de presse, vous avez annoncé que vous deviez
rencontrer prochainement les Cris, le mercredi 16 avril, tel que
spécifié dans le communiqué de presse.
Le ministre peut-il nous donner les résultats de cette rencontre
avec les Cris et nous assurer qu'il est allé dans le même sens que
son collègue, M. Rémillard, qui annonçait dans un
communiqué de presse du 20 mars 1986, que le gouvernement du
Québec acceptait de participer à la conférence
fédérale-provinciale sur les autochtones et à celles qui
suivront - et je cite - "pour la discussion la plus fructueuse d'une
reconnaissance des droits des autochtones du Québec à l'autonomie
gouvernementale"?
M. Savoie: Effectivement, il y a eu des rencontres avec tout ce
beau monde. Il y a eu rencontre avec M. Marx. J'en ai discuté avec lui
pendant une heure. Nous avons également eu l'occasion de discuter avec
M. Rémillard. Pour ce qui est des Cris, depuis ma nomination il y a
à peine 30 jours, j'ai eu l'occasion à trois reprises de
m'asseotr avec le grand chef des Cris et deux de ses représentants.
Pour ce qui est de la déclaration concernant M. Rémillard,
je cède toujours le pas devant lui en ce qui concerne les questions
d'ordre constitutionnel. Je compte travailler le dossier constitutionnel de
pair avec M. Rémillard, en me fiant beaucoup sur sa compétence et
sa grande diligence en cette matière. Je fais miennes les
déclarations de M. Rémillard.
M. Claveau: Serait-il possible d'avoir une idée de la
façon dont s'orientent ces négociations
fédérales-provinciales sur la constitution avec les
autochtones?
M. Savoie: En deux minutes ou moins... M. Claveau:
Brièvement. M. Savoie: Cela va bien.
M. Claveau: Je demanderais, M. le ministre, en reprenant toujours
la citation de M. Rémillard qui parle de la reconnaissance
constitutionnelle des droits des autochtones du Québec à
l'autonomie gouvernementale, si, par la même occasion, cette
déclaration ne pourrait pas s'étendre à d'autres
minorités au Canada, entre autres, les francophones du
Québec'
M. Savoie: Je pense que cette histoire a été
réglée en 1980, il me semble, je ne suis pas sûr.
Pour ce qui est des négociations constitutionnelles, il doit y
avoir une rencontre en avril 1987. Les travaux préparatoires
s'exécutent actuellement. On n'a pas eu de rencontre pour s'asseoir et
se renseigner à fond sur la direction à suivre ou le genre de
propositions précises qu'on doit déposer au mois d'avril 1987. Je
crois que c'est encore au niveau préparatoire. J'imagine que, cet
automne, le dossier va être beaucoup plus actif.
Comme vous le savez, la position constitutionnelle du Québec est
considérée comme avant-gardiste. On nous cite en exemple tant en
Australie qu'en Inde. Je crois que cette position, qui est tout de même
saine et rationnelle, sera continuée sous ce gouvernement.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Mille-Îles.
M. Bélisle: M. le ministre, j'avoue mon
incompétence, mon ignorance profonde du dossier des Inuit et des
Amérindiens. J'aimerais vous poser quelques questions...
M. Savoie: ...
M. Bélisle: Oui, c'est une admission que j'ai faite, M. le
ministre. C'est le début de la sagesse, d'après ce qu'on dit,
quand on avoue son incompétence.
Combien y a-t-il d'inuit et d'Amérindiens au Québec?
M. Savoie: II y a environ 40 000 Amérindiens et environ
5000 Inuit.
M. Bélisle: Combien dans la réserve
montréalaise à Caughnawaga?
M. Savoie: Environ 5000.
M. Bélisle: Environ 5000. Combien en zone urbaine,
à part la réserve de Caughnawaga, à Montréal?
M. Savoie: Zone urbaine.
M. Bélisle: Oui. Près d'une zone urbaine comme la
ville de Québec ou d'autres villes adjacentes à une
réserve.
M. Savoie: Les zones urbaines à Montréal ou
à Québec?
M. Bélisle: Québec, disons; Ancienne-Lorette, c'est
près d'ici.
M. Savoie: À Québec, vous en avez environ
1000...
M. Bélisle: Pardon?
M. Savoie: Environ 1000 avec les Hurons. Vous en avez un
groupe... C'est quoi une zone urbaine? Sept-îles, Val-d'Or,
Chibougamau?
M. Bélisle: Près de Sept-Îles. M. Savoie:
Environ 2000.
M. Bélisle: Maintenant une autre question: Quel est le
pourcentage des revenus, si vous avez des statistiques là-dessus, que
les autochtones, les Inuit et les Amérindiens - ils ont des revenus
pendant l'année - retirent des activités de chasse, de
pêche, de piégeage en proportion de leurs revenus totaux?
Avez-vous des statistiques là-dessus?
M. Savoie: II ne faudrait pas trop se fier à cette
orientation et je vais vous expliquer pourquoi. Il y a dix nations qui
composent les groupes autochtones au Québec. Là-dessus, il y a
deux nations qui jouissent d'une situation très particulière. Il
s'agit des Cris et, évidemment, des Inuit qui bénéficient
de l'entente résultant des travaux à la Baie James.
M. Bélisle: Je comprends.
M. Savoie: Eux sont prospères et ils ont des
opérations de trappage du côté survie, mais ils ont
également des opérations économiques très
admirables.
M. Bélisle: C'est pour cela, M. le ministre, que je vous
posais ma question. Je vous demande si à votre ministère ou au
SAGMAI, il existe des études qui pourraient renseigner le pauvre
député de Mille-Îles qui est incompétent en ce
domaine, sur la proportion des revenus, parce que je sais très bien
qu'il y a des opérations lucratives - très lucratives -
menées par certaines portions de la population inuit et
amérindienne.
Alors, ma question est de savoir s'il y a 40 000 ou 45 000 au total,
s'il y a 10 000 ou 15 000 travailleurs déclarés qui produisent
des déclarations d'impôt. J'aimerais savoir quel est le
pourcentage de revenus.
M. Savoie: Les autochtones ne produisent pas de rapports
d'impôt.
M. Bélisle: Non, pas de rapports d'impôt?
M. Savoie: Ils ne sont pas imposables seulement lorsqu'ils se
forment en compagnie. Il y a un jugement qui, pour le moment, fait foi de loi
en ce domaine et qui leur impose de payer de l'impôt lorsqu'ils sont
incorporés. Mais d'autres façons, ils ne produisent pas de
rapport d'impôt...
M. Bélisle: Oui.
M. Savoie: ...bien qu'ils bénéficient de l'ensemble
des mesures sociales qui existent au Québec.
Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît, compte
tenu qu'il reste à peu près une minute, je vais retenir les deux
dernières questions. D'abord, le député de Jeanne-Mance et
ensuite le député d'Ungava.
Ventes de cigarettes à Kahnawake
M. Bissonnet: La
vérification...
Le Président (M. Marcil): Soyez très bref, s'il
vous plaît.
M. Bissonnet: ...actuellement dans la réserve indienne de
Kahnawake, il y a vente de cigarettes à volonté. L'information
que je veux avoir de vous, M. le ministre, c'est: Y a-t-il une certaine
réglementation là-dessus?
M. Savoie: II semble que le ministère du Revenu soit au
courant. Des enquêtes seront faites. Effectivement, il y a des
règlements là-dessus.
Le Président (M. Marcil): Une dernière question, M.
le député d'Ungava.
M. Claveau: Une petite question brève aussi. Comment le
ministre entend-il réagir par rapport au dossier de Radisson?
M. Savoie: Le dossier de Radisson sera sérieusement
examiné bientôt. Comme vous le savez, j'ai été
nommé certainement pour revoir en partie, pour voir à
l'élababoration d'une nouvelle politique et à son
exécution. Dans cette optique, il y a également la question de
Radisson. Si je me fie à des représentations qui n'ont pas
été officielles à ce jour, il semble que cela ne fasse pas
l'unanimité. Les Inuit, évidemment, n'y sont pas impliqués
trop, trop; les Cris sont un petit peu hésitants à s'embarquer
dans le projet de Radisson, et comme vous le savez, font
référence à Radisson comme une opération, surtout
une volonté politique de la part de Québec plutôt qu'une
volonté politique de leur part. Il reste que je doive me pencher
sérieusement sur ce dossier lorsque l'on préparera notre
politique, notre réorganisation du SAGMAI, en conséquence.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, on vous remercie
beaucoup ainsi que M. le député d'Ungava.
Maintenant, on va passer à l'adoption de l'élément
3 du programme 2. Peut-on considérer qu'il est adopté?
M. Claveau: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Maintenant, nous allons faire
adopter l'ensemble des
crédits du Conseil exécutif pour l'année
financière 1986-1987, les programmes 1 à 7 inclusivement.
Une voix: Adopté,
Le Président (M. Marcil): Donc, je suspends sine die les
travaux et je spécifie que la commission a accompli son mandat. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 17 h 33)
(Reprise à 20 h 7)
Crédits du ministère de la Justice
(suite)
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît! Avant de continuer, il y a deux remplacements, donc, cela demande
le consentement unanime des deux partis. Mme Harel, députée de
Maisonneuve, remplace M. Paré, député de Shefford. M.
Brouillette du comté de Champlain remplace M. Fortin, du comté de
Marguerite-Bourgeoys. Est-ce qu'il y a consentement des deux partis?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Marcil): Consentement, c'est bien. Nous
étions au programme 3, "Protection des droits et libertés de la
personne". M. le député de Taillon, est-ce que vous continuez au
niveau de la période des questions?
M. Filion: Je pense, M. le Président...
Le Président (M. Marcil): Juste un instant, M. le
député de Taillon. Je voudrais seulement préciser le temps
qu'il nous reste, soit 1 heure et 49 minutes, compte tenu qu'on en a pris un
peu plus ce matin. C'est ça.
M. Filion: On file jusqu'à 22 heures. Le
Président (M. Marcil): Allez-y.
M. Filion: Je vous remercie. Je voudrais remercier le ministre
qui m'a informé de la réception d'une autre procédure en
Cour supérieure de Montréal, procédure intentée par
le juge en chef de la Cour supérieure qui, cette fois-ci, est le seul
demandeur requérant contre le Procureur général, le
ministre de la Justice du Québec. Je vous remercie, M. le ministre, de
me tenir informé des développements de vos
péripéties judiciaires. Nous en étions donc, ce
matin...
M. Marx: II est bon de ne pas oublier... Peut-être que je
ne devrais pas dire cela, mais, à un autre moment.
M. Filion: Nous en étions donc...
M. Marx: Je ne veux pas être imprudent dans ce dossier.
Fusion du Comité de la protection de
la jeunesse et de la Commission des
droits de la personne (suite)
M. Filion: Vous vouliez me dire publiquement ce que vous m'avez
dit tantôt privément. Je pense que vous avez bien fait de
résister à la tentation. Moi-même, je résiste
à plusieurs tentations dans ce dossier. Nous en étions, ce matin,
à l'importante décision qu'a prise le ministre relativement
à la fusion de la Commission des droits de la personne avec le CPJ. Ma
collègue, Mme la députée de Chicoutimi, je pense, a
soulevé ce matin également des éléments importants
dans ce dossier. J'entendais le ministre nous dire ce matin: Donnez-nous des
cas précis où il pourrait y avoir incompatibilité de
fonctions advenant confusion des deux mandats, à savoir, confusion du
mandat de la Commission des droits de la personne et celui du Comité de
la protection de la jeunesse. Je me suis creusé un peu !a tête
entre-temps et grosso modo - vraiment, je ne suis pas expert dans ces questions
- il me semble que dans l'application de la Loi sur la protection de la
jeunesse, si on décide de placer un jeune contre son gré, dans
une maison ou un centre d'accueil, de le placer dans un endroit où on le
considère comme étant protégé, à ce
moment-là le Comité de la protection de la jeunesse prend une
décision qui va à {'encontre du droit fondamental, celui de la
liberté des individus.
Supposons un cas qui pourrait être grosso modo le suivant - je
laisse le soin au ministre et à son équipe de conseillers de
faire les variations qui s'imposent supposons un cas où c'est le parent
qui présente un danger pour l'enfant, c'est le parent qui est le
déviant, et qu'on enlève l'enfant de son milieu naturel, de sa
maison, pour le mettre en institution, en centre d'accueil, pour le
protéger en quelque sorte de ses parents qui seraient des parents
déviants. À ce moment-là, le jeune qu'on enlève de
son milieu naturel dans son intérêt, encore une fois, et dans le
cadre de l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse, il n'a rien
fait, ce jeune-là.
J'imagine le cas où il réclame de la Commission des droits
de la personne l'application de son droit le plus fondamental,
c'est-à-dire sa liberté, peut-être même la
liberté de retourner chez lui, dans son milieu naturel. Je pourrais
imaginer -j'ai pensé à d'autres cas un peu plus complexes qui
peuvent venir - des questions d'orientation sexuelle qui, comme on le sait
maintenant, sont prévues par la charte.
De façon générale, je pense que, des exemples
pratiques, on peut en concevoir, M. le ministre, parce que fondamentalement le
mandat de la Commission des droits de la personne est de protéger les
droits fondamentaux pour l'ensemble des citoyens, que! que soit leur âge,
quelle que soit leur race, etc., par rapport au mandat du Comité de la
protection de la jeunesse qui, lui, est justement de voir, dans le cadre d'une
loi spécifique, à la protection de la catégorie de
citoyens que sont les jeunes au Québec...
Or, au niveau des vocations, au niveau des missions, on retrouve une
distinction bien nette entre ces deux organismes-là. La Commission des
droits de la personne, c'est, j'allais dire, le contraire; d'une certaine
façon, on peut dire que c'est le contraire. Elle cherche à
garantir l'exercice des droits fondamentaux pour tout le monde alors que, pour
la jeunesse, dans le cadre de la loi, on cherche à mettre en exercice
les mécanismes de protection qui sont nécessaires pour le
développement de ces enfants. Encore une fois, cette
distinction-là est fondamentale et se reflète dans les mandats
des deux organismes. On parle donc de deux choses différentes, encore
une fois.
Si je donnais l'exemple ce matin de ce qui a pu se passer dans un
comité de sages bénévoles, décideurs
parallèles du gouvernement... Je suis convaincu que cela ne se passe pas
dans l'esprit du ministre, mais, par contre, je dois attirer son attention
là-dessus, sur le caractère nettement distinct des mandats des
deux organismes. Il découle de cela un tas de choses. Il en
découle qu'à la Commission des droits de la personne on a
développé au fil des années une expertise qui s'est
articulée autour de la notion des droits fondamentaux pour tous, alors
qu'au Comité de la protection de la jeunesse s'est
développée une expertise bien différente au fil des
années. Là, le ministre voudrait, pour épargner quelques
centaines de milliers de dollars, nous dit-on - ce sera ma première
question tantôt - fondre ces deux organismes, c'est-à-dire faire
disparaître, par exemple, des commissaires des droits de la personne ou
ceux qui dirigent la Commission des droits de la personne.
Il est bien sûr qu'il n'y aura pas deux sortes de commissaires
à la Commission des droits de la personne, il va y en avoir seulement
une sorte. Ces commissaires vont devoir décider sur l'ensemble des
activités de la commission, non pas spécifiquement dans le cas
des jeunes. C'est une fusion qu'on voudrait faire au niveau de la commission et
donc des commissaires, une fusion qu'on va faire au niveau du personnel, au
niveau des cadres, à tous les niveaux où on risque
carrément de placer le personnel en conflit dans certains cas, sans
compter encore une fois la mise de côté de l'expertise qui s'est
développée. (20 h 15)
Je sais que les bureaux régionaux du Comité de la
protection de la jeunesse peuvent être intéressants pour la
Commission des droits de la personne et peut-être peut-on imaginer qu'une
entente intervienne et que les locaux du Comité de la protection de la
jeunesse soient ouverts en partie à la Commission des droits de la
personne? Peut-être même que ce partage des services, que cette
entente de services pourra avoir lieu au niveau central, pas seulement dans les
régions. Je comprends l'objectif du ministre qui veut épargner
des sous, le Conseil du trésor le lui demande, mais la façon
qu'il choisit risque de mettre des valeurs fondamentales en péril.
Encore une fois, dans ce dossier-là, M. le ministre, avec tout le
respect que je vous dois, il n'y a pas eu de consultation. Il n'y a pas eu de
consultation et même...
M. Marx: Mais est-ce que vous avez... Oui, d'accord, allez-y. Je
m'excuse.
M. Filion: Je vais revenir plus tard avec ma série de
questions. Il n'y a pas eu de consultation, tout au plus finalement - je l'ai
dit dans mon allocution d'ouverture - il y a eu une étude, un examen
sommaire qui a été fait des avantages et des inconvénients
de cette fusion. À la suite de cet examen sommaire, il a
été convenu que la fusion n'était pas opportune entre les
deux organismes. Bien plus, M. le ministre, on m'informe qu'une étude
serait en cours actuellement à la Commission des droits de la personne
sur l'opportunité de cette fusion. On a reçu, comme vous, de la
Ligue des droits et libertés, de l'Office des droits des détenus,
du Centre de recherches-actions sur les relations raciales, du Collectif des
femmes immigrantes, de la Fédération de l'âge d'or du
Québec, du Syndicat des professionnels des CSS, sans compter un tas
d'autres organismes, on a reçu, dis-je, des signaux lumineux,
plutôt de couleur rouge, nous disant: Faites attention, vous mettez
peut-être en péril des choses fondamentales.
Encore une fois, on parle ici d'institutions importantes. On n'est pas
en train de traiter d'un bureau de communication à Saint-Tite, avec tout
le respect que je peux avoir pour les bureaux de communication là-bas.
Je veux dire que l'on parle d'institutions fondamentales dans notre
société que sont, encore une fois, la Commmission des droits de
la personne et le Comité de la protection de la jeunesse. Est-ce que le
ministre ne pourrait pas, à la lumière du tollé pas mal
unanime qui se fait dans tous les milieux concernés, se donner un temps
de réflexion? La commission ici pourrait servir. Je l'offre ici, comme
président; je suis sûr que mes collègues
seraient d'accord pour qu'on puisse étudier cette question un peu
plus à fond et également tenir compte des études qui sont
en cours avant de précipiter les choses, parce qu'une fois que les
procédures de fusion seront en marche, on le sait, après cela,
c'est difficile de changer de bord. Je l'ai dit ce matin à votre
collègue, la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui
n'a pas hésité, dans un dossier où les montants d'argent
étaient beaucoup plus importants que ceux-là, à reculer.
Il n'y a pas de honte à reculer, à réviser sa
décision. Peut-être qu'elle reviendra plus tard avec un autre
programme. Dans ce cas-ci, il m'apparaît, M. le ministre, que, pour le
moins, une reconsidération de la décision s'impose. Je sais que
vous voulez répondre à cela. Par la suite, j'aurai une
série de questions plus précises à vous poser, toujours
sur la fusion.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre.
M. Marx: Merci, M. Se Président. Avant d'essayer de
répondre aux questions, à la problématique en
général, le député de Taillon a parlé ce
matin et ce soir aussi... Il me dit toujours: Le Conseil du trésor vous
a demandé de faire des économies de quelques sous et vous avez
coupé ici, vous avez coupé là. J'aimerais demander au
député - peut-être que ce n'est pas à moi de poser
des questions, mais peut-être peut-il m'aider -s'il y a des endroits
où j'aurais dû couper, où je devrais couper; si je devrais
couper en ce qui concerne les secrétaires des juges, abolir des
organismes, etc. Est-ce que je mets tout cela de côté et que je ne
fais pas de rationalisation? Est-ce que j'ai fait une rationalisation dans les
mauvais programmes? Si vous pouviez m'aider par certaines suggestions, je peux
vous dire tout de suite qu'on est ouvert à faire une rationalisation
dans les dossiers que vous trouvez peut-être prioritaires.
M. Filion: Vous avez l'air de me poser la question
sérieusement. J'aurais le goût d'y répondre, M. le ministre
de la Justice...
M. Marx: Vous pouvez.
M. Filion: ...mais l'électorat, le 2 décembre, a
fait en sorte - d'ailleurs, on se le fait rappeler souvent en Chambre - que les
décisions sont prises de l'autre côté de la Chambre.
Cependant, vu votre attitude, je pense qu'il y a des endroits où vous
pourriez mettre un peu moins d'argent au niveau du développement dans
certains secteurs. Par exemple, vous pourriez peut-être intervenir
auprès de votre collègue, le Solliciteur
général...
M. Marx: Non, ce n'est pas mon dossier. Je parle de mon
dossier.
M. Filion: ...11 000 000 $ pour la prison de
Trois-Rivières... Même dans vos dossiers, il y a peut-être
certains développements, certaines améliorations que vous
apportez à certains programmes que vous pourriez peut-être...
M. Marx: Pouvez-vous les spécifier?
M. Filion: ...réduire de quelques centaines de milliers de
dollars, l'équivalent du montant que vous allez chercher dans une
compression qui risque, encore une fois, de toucher au coeur des
institutions.
M. Marx: J'attends des...
M. Filion: Cela dit, je suis quand même obligé de
vous dire que, malheureusement pour moi et heureusement pour vous, les
décisions...
M. Marx: Je sais...
M. Filion: ...sont de votre côté.
M. Marx: ...que je vais prendre les décisions, mais je
suis aussi ouvert aux suggestions. Comme on veut valoriser le rôle des
députés à l'Assemblée nationale, nous sommes ici en
commission parlementaire et je peux prendre la décision mais,
ultimement, c'est l'Assemblée nationale qui décide. Pour moi, le
rôle de député a toujours été très
important; ce l'est encore. Si vous voulez...
M. Filion: Oui.
M. Marx: Vous dites toujours: Le Conseil du trésor a
demandé au ministre de faire des économies de quelques sous et,
maintenant, il fusionne deux organismes et il est en train de réaliser
des économies là où il ne faut pas en faire, et ainsi de
suite. J'aimerais que le député me dise aussi d'une façon
positive où je pourrais faire des économies. Cela n'aidera pas
seulement le ministre et le ministère, mais cela aidera également
l'État. Je suis sûr que le député pense au
bien-être de l'État en faisant toutes ces remarques.
M. Filion: M. le ministre, une des choses que je dois vous dire,
c'est que nous n'avons été consultés, avant que vous
preniez vos décisions, ni dans ce dossier, ni dans les autres.
Deuxièmement, une des premières choses que je ferais
explicitement dans ce dossier, ce serait d'aller voir votre collègue -
et je serais prêt à y aller avec vous - le président du
Conseil du trésor, et lui dire: Écoutez, savez-vous, pour les
quelques centaines de milliers de dollars impliqués là-
dedans, on va attendre un an. On va étudier cela à fond.
Si c'est possible, on va définir les modalités de la fusion, on
va aller un petit plus loin et on va le faire en collaboration avec les
autorités des deux organismes et avec le personnel des deux organismes
impliqués. Ces gens ont une clientèle importante; ils ont
bâti leur crédibilité, au fil des années,
auprès d'une clientèle.
M. Marx: Cela n'avance pas...
M. Filion: Dans certains cas, des restructurations ont même
eu lieu et elles sont en train d'être terminées. Or, on demande
à des organismes qui viennent de se restructurer de se restructurer
encore et d'accepter peut-être un autre organisme qui ne leur convient
pas du tout. Alors, la première chose que je ferais vraiment - et je
suis prêt à accompagner le ministre de la Justice - c'est d'aller
voir le président du Conseil du trésor ensemble et plaider
ensemble, s'il le veut, la cause de la non-opportunité de
procéder immédiatement à la fusion de ces deux organismes,
d'étudier un peu mieux le dossier et de consulter le monde avant d'aller
plus loin.
M. Marx: M. le Président, le député ne
comprend pas comment cela fonctionne au gouvernement. Du moins, c'est ce qu'il
me porte à croire. Le Conseil du trésor pourrait demander au
ministre de faire des compressions, mais il n'a pas mentionné à
quel programme. C'est au ministre de prendre ses responsabilités. Donc,
il est inutile d'aller voir le président du Conseil du trésor,
car c'est moi qui ai décidé de tout cela.
Je reviens à ma question originale. Si le député a
des suggestions en vue de rationaliser les dépenses au ministère
de la Justice, je suis prêt à l'écouter. Étant
donné qu'il s'est préparé pour les crédits
d'aujourd'hui, j'imagine qu'il a certaines idées sur ces compressions.
Nous sommes réceptifs à toute suggestion pour faire des
compressions dans les programmes où nous n'en avons pas fait. Le
député peut me faire des suggestions ici, en commission, en
m'écrivant ou en me parlant à l'Assemblée nationale. Je
suis toujours disponible.
M. Filion: ...la dernière voie que vous venez de m'ouvrir.
On va se voir demain et je vais vous suggérer carrément un
endroit où ce ne serait pas difficile d'aller chercher
l'équivalent de ce que vous voulez allez chercher avec ces compressions
budgétaires un peu précipitées.
M. Marx: D'accord. Je ne veux pas revenir sur tout ce que j'ai
dit ce matin sur ce dossier. Je peux le répéter, parce que
Mme la députée de Maisonneuve n'était pas ici. Si
c'est nécessaire, je vais répéter ce que j'ai dit ce
matin.
M. Filion: Je lui ai dit ce que vous avez dit ce matin.
M. Marx: Parfait.
M. Filion: On travaille en équipe. On n'est pas
nombreux.
M. Marx: Mais ce n'est pas ma faute. Des voix: Ah! Ah!
Ah!
M. Filion: Dans le comté de D'Arcy McGee, c'est vrai que
ce n'est pas votre faute.
M. Marx: Je ne vais pas revenir sur tout ce que j'ai dit ce
matin. Par leur mission, le Comité de la protection de la jeunesse et la
Commission des droits de la personne sont tous deux des organismes voués
à la défense des droits de la personne. Leur principale
différence, c'est que l'un, le comité, s'attache plus
particulièrement au respect des droits octroyés aux enfants en
difficulté alors que la commission a une vocation élargie
à l'ensemble des droits reconnus aux personnes par la charte
québécoise.
J'aimerais vous suggérer, M. le Président, de voir les
articles 1 et 39 de la charte québécoise. J'aimerais les lire
parce que le député de Taillon a donné l'exemple d'un
enfant qu'on met dans un centre d'accueil et certaines difficultés qui
pourraient arriver. Il a parlé de mettre un enfant dans un centre
d'accueil contre le gré de ses parents, si je me souviens bien.
L'article 1 de la charte prévoit que "tout être humain a droit
à la vie ainsi qu'à la sûreté, à
l'intégrité et à la liberté de sa personne." Il
possède également la personnalité juridique. Il y a aussi
l'article 39 de la charte qui prévoit que "tout enfant a droit à
la protection, à la sécurité et à l'attention que
ses parents ou les personnes qui en tiennent lieu peuvent lui donner". Mettre
un enfant dans un centre d'accueil peut bien être pour la protection de
l'enfant.
Je ne vois pas de conflit entre les missions des deux organismes. Le
député a fait des distinctions; j'appelle cela des distinctions
sans différence ou des différences sans distinction. Vous pouvez
prendre cela comme vous le voulez. Il n'y a pas d'incompatibilité
opérationnelle, comme on dit en droit constitutionnel. Le
député pourrait me donner des cas théoriques, des
possibilités qui pourraient arriver, mais il ne m'a pas donné un
exemple où on peut vraiment dire que la Commission des droits de la
personne est en train d'aller dans une
direction et le Comité de la protection de la jeunesse dans une
autre direction.
Aussi, il ne faut pas oublier qu'en fusionnant les deux organismes on va
avoir deux expertises à la Commission des droits de la personne. Comme
je l'ai dit ce matin, ce sera bien clair, dans cette Commission des droits de
la personne, que la commission a une mission spéciale en ce qui concerne
la protection des enfants. Mais, si le député peut me donner un
exemple plus clair,.. Il ne faut pas oublier que ni la Commission des droits de
la personne ni le Comité de la protection de la jeunesse ne pourront
faire quelque chose allant à l'encontre de la charte
québécoise.
Donc, je comprends mal que le député... Oui. Je m'excuse.
(20 h 30)
M. Filion: Écoutez, c'est parce que ce sont deux
philosophies différentes. C'est en dehors du problème
d'incompatibilité qui peut exister entre la charte, d'une part, et la
Loi sur la protection de la jeunesse, d'autre part. On n'a pas abordé
cela, mais il peut y avoir un problème d'incompatibilité. On
parle de deux philosophies différentes, deux approches
différentes, deux façon de traiter les dossiers
différemment.
La preuve, je regardais dans le rapport du Comité de la
protection de la jeunesse, le délai moyen pour le traitement des
plaintes -pour eux, le traitement, c'est ouvrir le dossier puis le fermer; ce
n'est pas juste d'envoyer un accusé de réception et de partir
avec quelque chose - le délai moyen de traitement... Evidemment, c'est
beaucoup plus rapide. Sauf erreur, je pense que c'est une affaire comme 60
jours ou 90 jours. En tout cas, c'est très rapide en termes de
traitement des dossiers. Pourquoi? Parce qu'un enfant qui a besoin d'être
protégé, ce n'est pas la même chose que chez Imperial
Tobacco, une fois qu'on aura adopté peut-être le programme
d'accès à l'égalité, si on s'aperçoit, par
exemple, qu'il n'y a aucun anglophone qui travaille là ou qu'il n'y a
aucune personne de race noire qui travaille là et c'est dans un quartier
qui l'est.
Or, une situation comme celle où se retrouvent les personnes les
plus fragiles de notre société, si elles sont confrontées
à des dangers comme c'est le cas généralement des
signalements - pas généralement mais, en tout cas, cela peut
être le cas des signalements - ou des plaintes qui sont faites au CPJ, on
agit rapidement. On m'informe que le délai est de 58,2 jours
après l'enquête, alors que le délai moyen pour traiter un
dossier à la Commission des droits de la personne, sans l'avoir sous la
main, je suis convaincu qu'il doit être en haut de douze mois.
M. Marx: Cela dépend des plaintes.
M. Filion: Non mais, en moyenne, c'est en haut de douze mois. Je
suis convaincu... Pardon?
Une voix: 202 jours.
M. Filion: Je m'excuse. On vient quand même de parler de
202 jours, par 30, c'est à peu près sept mois. On voit
uniquement, encore une fois...
M. Marx: C'est vrai dans des cas, mais dans d'autres cas, dans
certaines plaintes en ce qui concerne la discrimination dans le logement, la
commission est déjà intervenue par télégramme trois
heures après avoir reçu des plaintes.
M. Filion: Je n'en doute pas.
M. Marx: C'est-à-dire que la commission des droits
pourrait et est déjà intervenue de façon rapide,
exceptionnelle, quand cela a été nécessaire.
M. Filion: Je n'en doute pas une seule seconde, M. le ministre,
et je pense que mon exemple, les gens de la Commission des droits de la
personne qui sont ici l'ont bien saisi. II ne s'agit pas de dire que ça
prend trop de temps à la Commission des droits de la personne. Il s'agit
de voir qu'il s'agit de deux traitements totalement différents. Dans ce
sens, M. le ministre, voici mon autre question: Est-ce qu'au moment où
on se parle il y a des études et des recherches qui sont faites à
la Commission des droits de !a personne sur les conséquences d'une
éventuelle fusion? On sait que la Commission des droits de la personne a
toujours été consultée à chaque fois qu'il a
été question de modifier son mandat ou de modifier la charte. La
Commission des droits de la personne a toujours été
consultée alors que, pour une affaire aussi sérieuse que la
fusion et l'intégration, si on veut, du CPJ à l'intérieur
de la CDP... Ma question est la suivante: Est-ce qu'il y a, au moment où
on se parle, des études et des analyses qui sont faites au sein de la
Commission des droits de la personne?
M. Marx: Apparemment, la Commission des droits de la personne ne
voit aucun problème dans ce fusionnement.
M. Filion: Oui, mais ce n'est pas cela, ma question, M. le
ministre.
M. Marx: Vous avez dit: Si je consulte... Peut-être que
j'ai consulté.
M. Filion: Apparemment. Cela ne me ferait rien...
M. Marx: Je pense...
M. Filion: Vous pouvez prendre deux minutes de plus, si vous
voulez vous informer; je pense qu'il y a des représentants de la
Commission des droits de la personne qui sont ici.
M. Marx: Je pense que c'était important de vous signaler
que la Commission des droits de la personne ne voit aucun problème dans
ce fusionnement. Je pense que, comme conclusion, cela devrait être assez
clair pour vous, M. le député.
M. Filion: C'est vous...
M. Marx: Je ne peux pas inventer. C'est ce qu'on me dit.
Hé bien! De toute façon, les gens à la Commission des
droits de la personne ne vont pas - il faut faire confiance à ces
personnes - travailler contre leur mission. Ils ne vont pas essayer de mettre
des bâtons dans les roues. Ils vont travailler pour réussir, pour
donner suite à leur mission. Je ne vois aucune incompatibilité.
On peut faire un débat sur cette question parce que vous n'êtes
pas prêt à passer à autre chose. Mais, cela n'avance pas
vraiment. Ce n'est pas la conclusion. La conclusion, c'est que vous n'avez pas
d'exemple concret. Vous faites des déclarations ou vous faites de temps
en temps un petit procès d'intention et ainsi de suite, mais dans les
faits il n'y a rien dans vos propos, M. le député. Je trouve
difficile de trouver la viande pour que je puisse m'accrocher à quelque
chose. Je suis prêt à faire le débat, mais...
M. Filion: Le ministre n'a pas été convaincu par
les exemples de ma collègue, la députée de Chicoutimi, ni
par celui que j'ai amené ce soir.
M. Marx: II ne faut pas oublier, M. le Président, et
j'insiste sur ce point, que la commission, ou un employé de la
commission ne peut poser un acte qui va à l'encontre de la Charte des
droits et libertés de la personne, la même chose pour les
employés du Comité de la protection de la jeunesse. Tout le monde
va respecter la Charte des droits et libertés de la personne et surtout
les personnes qui sont engagées pour la faire respecter. Donc, je ne
vois aucun problème. Tout le monde sera très respecté.
M. Filion: Je suis le raisonnement du ministre. Finalement,
est-ce que la Commission des droits de la personne va intégrer demain
matin, je ne sais pas moi, l'Office des personnes handicapées...
M. Marx: II n'est pas question de cela ce soir.
M. Filion: Mais c'est un peu cela ma question, M. le ministre.
C'est de faire des distinctions quant aux clientèles et aux
missions.
M. Marx: Peut-être faudrait-il diviser la Commission des
droits de la personne en quinze afin d'avoir une commission pour tel et tel
groupe, une commission pour les femmes, ainsi de suite. On peut se ramasser
avec quinze commissions parce qu'il peut y avoir des
incompatibilités.
M. Filion: Mais justement, poser la question, c'est y
répondre. On n'est pas pour avoir quinze commissions des droits de la
personne.
M. Marx: Je posais la question comme blague.
M. Filion: Alors, pourquoi avoir le Comité de la
protection de la jeunesse au sein de la Commission des droits de la personne?
Pourquoi pas le Conseil du statut de la femme, l'Office des personnes
handicapées? À ce moment-là, le ministre me demandera de
lui donner des exemples. Je dis que ce sont deux objectifs
différents.
M. Marx: Si je prends...
M. Filion: Ce n'est pas juste une question
d'incompatibilité, ce sont deux objectifs différents.
M. Marx: Si je prends l'article 10 qui parle de la
discrimination, on peut avoir une commission pour traiter des problèmes
de la race, une autre de la couleur, une troisième du sexe, une autre de
la grossesse, etc. Je ne vois pas pourquoi on ne peut pas regrouper tout cela
sous une même commission.
M. Filion: Écoutez, c'est simple finalement. L'article 3
de la Loi sur la protection de la jeunesse dit: "Les décisions prises en
vertu de la présente loi doivent l'être dans
l'intérêt de l'enfant."
M. Marx: Dans l'intérêt de l'enfant.
M. Filion: Oui, c'est cela le prisme, l'objectif, le fondement,
la mission. L'intérêt de l'enfant, c'est le critère.
M. Marx: Ce n'est pas cela.
M. Filion: On peut, pour arriver à réaliser cet
objectif-là... encore une fois, je donne l'exemple: mettre fin à
sa liberté, le contraindre à vivre dans un milieu où il ne
jouira pas de sa liberté. Alors que ce même critère
d'intérêt ne joue pas pour l'ensemble des personnes au
Québec. Pour l'intérêt de la personne âgée, la
charte ne dit pas cela. Il
n'y a aucune loi au monde qui va dire cela. Pour l'intérêt
de la femme, on va la priver de sa liberté... je verrais cela demain
matin. Mais pour l'enfant, par exemple, on a un système, on permet de le
faire. Il me semble que c'est pas mal clair.
Dans ce sens-là, je repose ma question au ministre.
Mme Harel: On peut même faire de la discrimination.
M. Filion: Oui, c'est sûr qu'on peut faire de la
discrimination. Ma collègue, la députée de Maisonneuve, me
signale que pour arriver à atteindre cet objectif de
l'intérêt de l'enfant, on peut même supposer des sortes de
discriminations positives. C'est clair, à mon avis. C'est tout un
système, parce que cela découle d'une philosophie. C'est un
système d'actions, d'enquêtes, etc., pour arriver à un
même objectif. Dans ce sens-là, je repose ma question au ministre
de la Justice...
M. Marx: Mais la distinction...
M. Filion: ...parce que je suis convaincu que la plus belle
expertise là-dedans ne se trouve peut-être pas ici autour de la
table, sauf votre respect, mais quand même c'est à la Commission
des droits de la personne. M. le ministre, on m'informe que des études
sérieuses sont en train d'être effectuées à la
Commission des droits de la personne. Ne pourrait-on pas attendre le
résultat de ces études pour que vous et moi, ainsi que les
membres de la commission, nous puissions nous pencher avec l'éclairage
adéquat, pour y voir clair au lieu d'arriver en pleine noirceur et
risquer de causer des dégâts à des institutions
fondamentales?
M. Marx: Oui, M. le Président.
M. Filion: À ce titre-là, par exemple, comment va
s'appeler cette commission? Cela a l'air simple comme question, mais je vous la
pose quand même, comment va-t-elle s'appeler?
M. Marx: Avez-vous une suggestion?
M. Filion: Non, surtout pas de suggestion sur le nom. Je
n'aimerais pas voir le nom que cela va donner.
M. Marx: Cela peut être...
M. Filion: Deuxièmement, toujours dans le même
esprit, quant au conseil d'administration ou, si on veut, les commissaires,
va-t-il y avoir deux sortes de commissaires? Il va y avoir une sorte de
commissaires, c'est bien sûr qu'il va y avoir une sorte de commissaires
à moins que... En tout cas... Mais les commissaires peuvent avoir des
origines différentes. On sait qu'à la Commission des droits de la
personne, notamment, c'est un endroit au niveau de l'embauche - on en parlera
peut-être tantôt - où on a cherché à faire en
sorte qu'au sein même de la commission la diversité culturelle du
Québec puisse être respectée. Je me demande quelle sorte de
commissaires on va avoir là. Cela fait trois questions, finalement, que
je vous pose.
M. Marx: Les commissaires seront des jeunes, des adultes et des
vieux. Trois genres de commissaires: des jeunes, des adultes et des vieux.
D'accord? Chacun pour s'occuper de dossiers différents. Il y a un
certain nombre de questions que le député a posées et,
franchement, je ne les prends pas toutes au sérieux, mais je vais
répondre à un certain nombre en essayant de comprendre le plus
possible ce que le député a voulu dire. Je sais qu'il est
très sérieux dans ses critiques. Il a parlé, par exemple,
de la discrimination positive. C'est illégal de faire de la
discrimination positive maintenant, sauf si c'est en vertu de la Loi sur la
fonction publique. Le Comité de la protection de la jeunesse ne peut pas
faire de discrimination positive maintenant. Donc, je ne vois aucun
problème. J'espère que le Comité de la protection de la
jeunesse ne fait pas de discrimination positive maintenant parce que c'est
illégal en vertu de la charte québécoise. De toute
façon, je suis sûr que le comité ne fait pas quoi que ce
soit qui aille à l'encontre de la charte.
En ce qui concerne les études de la Commission des droits de la
personne, toutes les études de la commission sont sérieuses. Le
député a fait référence aux études
sérieuses. Toutes les études sont sérieuses et la
commission est en train de faire des études sur l'intégration du
comité dans la commission. En ce qui concerne un nom pour la nouvelle
commission, si vous voulez, je pense que si elle garde le nom de Commission des
droits de la personne, cela va couvrir tout le monde, y inclus les enfants, les
jeunes. Je ne vois pas de problème. La personne, cela comprend les
adultes, les enfants et les vieux, tout le monde.
M. Filion: Ceci dit, M. le ministre...
M. Marx: Je souligne une dernière fois que la Commission
des droits de la personne s'occupe des jeunes et de la protection de l'enfant.
Elle a fait beaucoup de...
M. Filion: Oui, mais les articles 39 et suivants ne sont pas en
vigueur.
M. Marx: Ils sont en vigueur.
M. Filion: Us sont en vigueur, bien sûr, mais la commission
ne peut pas faire enquête.
M. Marx: Ils sont en vigueur, mais non
prépondérants sur d'autres lois, mais sûrement en vigueur.
(20 h 45)
M. Filion: Oui, mais la commission ne peut pas demain matin
procéder à une enquête en vertu des articles 39 et
suivants, en vertu de l'article 69, m'informe-t-on.
M. Marx: La commission peut faire en sorte que l'article 39
soit... La commission peut faire valoir les droits qui sont dans l'article 39
et l'article 1 qui touche tout être humain, un article qui est
prépondérant.
M. Filion: Écoutez, on va lire l'article 69 ensemble:
"Toute personne qui araison de croire qu'elle est ou a
été victime d'une atteinte à un droit reconnu". Aux
articles 10 à 19, au premier alinéa de l'article 48: "peut
adresser par écrit une demande d'enquête à la
commission".
M. Marx: C'est cela.
M. Filion: "Tout groupe de personnes peut, de la même
manière, aux mêmes conditions, faire une demande d'enquête."
Cela n'inclut pas l'article 39.
M. Marx: Oui, mais une fois que la fusion sera effectuée,
la commission va avoir des pouvoirs d'enquête qui relèvent
maintenant du Comité de la protection de la jeunesse.
M. Filion: On parle de joyeux amendements.
M. Marx: On parle d'un fusionnement...
M. Filion: Non, on parle d'amendement...
M. Marx: ...d'une fusion très simple, qui va faire en
sorte que les droits des jeunes seront mieux protégés.
M. Filion: M. le ministre, on parlait aujourd'hui depuis le
début de l'examen des crédits... Vous m'avez dit: Je ne peux pas
tout faire. C'est vrai que vous ne pouvez pas tout faire. Vous avez jusqu'au 15
mai pour déposer un projet de loi qui ne sera peut-être pas aussi
facile que cela, premièrement, et, deuxièmement, qui aura des
conséquences énormes. Est-ce qu'il ne serait pas plus sage
d'attendre à la session de l'automne, après les études de
la Commission des droits de la personne et après avoir consulté,
pas seulement là, mais peut-être le Comité de la protection
de la jeunesse aussi?
M. Marx: M. le Président...
M. Filion: Je pense qu'il y a là une belle expertise et en
ce sens, étant donné les joyeux amendements qu'on nous promet...
On nous dit que la commission va être substituée... Je pense qu'on
vient de changer évidemment la nature de la commission d'une
façon absolument fondamentale.
M. Marx: M. le Président, j'ai attendu déjà
cinq ans pour faire tout ce que je fais depuis le 12 décembre. Ce n'est
pas nécessaire pour moi d'attendre plus longtemps. J'ai d'autres projets
pour l'automne et pour le printemps prochain. Pour moi, il n'y a aucune raison
d'attendre plus longtemps. Tout ce que nous faisons à cette session...
Au ministère de la Justice, nous savons exactement où nous allons
et nous avons des objectifs qui sont très clairs. Je comprends que le
député puisse avoir des objections sur tel ou tel article ou sur
telle ou telle modification. Pour nous, il n'est pas question d'attendre. Pour
nous, il est question peut-être d'aller plus vite, mais vous comprenez
qu'il y a d'autres ministres avec d'autres projets de loi.
M. Filion: En tout cas, avant de passer la parole à ma
collègue, la député de Maisonneuve... 11 y a une chose qui
m'inquiète. Les enfants, qui sont et seront concernés par les
décisions des ministres, ont plus ou moins de voile. Ils ne peuvent pas
venir manifester devant le parlement comme les étudiants.
M. Marx: M. le Président, comment le
député...
M. Filion: Ils ne peuvent pas...
M. Marx: ...peut-il insister et revenir sur ce point à
maintes reprises? C'est-à-dire que, d'une façon bien
théorique, et sans avoir vu le projet de loi qui concrétise le
fusionnement, le député insiste que les droits des jeunes ne
seront pas protégés ou seront mal protégés et ainsi
de suite. C'est de faire...
M. Filion: Je ne prétends pas qu'ils seront mal
protégés, M. le ministre. Je prétends qu'avec ce que nous
avons aujourd'hui devant nous, avec ce qui a été porté
à notre connaissance par vous et par l'ensemble des intervenants, nous
sommes loin d'être convaincus que les chances sont que les enfants seront
mieux protégés dans le cadre d'une fusion avec la Commission des
droits de la personne.
M. Marx: Mais si...
M. Filion: Et je prétends plutôt qu'il
semblerait que la décision administrative que vous avez
déjà prise aura malheureusement l'effet contraire. Ne le
souhaitons pas, mais je dis qu'à ce jour, selon les faits et les
études qui ont été portées à notre
connaissance, c'est cela. Je pense que si le ministre voulait être
objectif, en dehors de sa volonté ferme de procéder -
peut-être a-t-il raison de le faire; comme il le disait: J'attends depuis
tellement longtemps, il faut que je le fasse - il y a des fois où c'est
bon de ralentir ce type d'anxiété et de regarder les dossiers un
peu plus calmement. C'est ce que je lui soumets tout simplement.
M. Marx: Je suis très calme, M. le Président, et
j'ai bien écouté le député de Taillon. Il ne m'a
pas convaincu de ralentir. De toute façon, ce n'est pas une
décision administrative, c'est une décision législative,
parce qu'on va encadrer la fusion dans un projet de loi. Lorsque le
député verra le projet de loi, peut-être que ce sera le
moment de faire le débat sur le fond, s'il n'est pas encore satisfait.
De toute façon, une fois le projet de loi déposé, il y
aura une autre discussion en commission parlementaire sur les articles qui
touchent cette fusion. Le député aura une autre occasion
d'intervenir. Peut-être même qu'à ce moment-là il
aura des modifications à proposer pour raffermir la protection des
droits des jeunes. S'il a des suggestions qui se tiennent, on va les accepter;
il n'y a pas de problème.
M. Filion: Est-ce qu'on va pouvoir tenir une commission
parlementaire ouverte? Est-ce qu'on va pouvoir entendre les gens de la
Commission des droits de la personne? Moi, j'aimerais les entendre ce soir,
d'ailleurs, si c'est possible...
M. Marx: Ce serait...
M. Filion: ...sur cette question, précisément, des
études qu'ils font.
M. Marx: Oui.
M. Filion: D'abord, est-ce que c'est possible de les entendre ce
soir, sans prendre énormément de temps? On peut prendre une
dizaine de minutes. Je vois qu'il y a, sauf erreur, une représentante de
la Commission des droits de la personne. Peut-être y a-t-il d'autres
représentants qu'on pourrait interroger sur cette question?
M. Marx: M. le Président, je comprends que c'est la
première fois que le député de Taillon assiste à
l'étude des crédits mais, à ma connaissance,
l'étude des crédits est réservée aux
députés et non pour entendre qui que ce soit qui n'est pas
député. Je pense que, dans sa sagesse, l'Assemblée na-
tionale a décidé de fonctionner de cette façon et je ne
vois aucune raison pour changer la procédure aujourd'hui.
M. Filion: Est-ce que, M. le ministre, dans le cadre de
l'étude du projet de loi que vous vous promettez de déposer, nous
allons pouvoir entendre en commission parlementaire les représentants du
CPJ, les représentants de la CDP et les représentants qui
pourraient apporter un éclairage valable sur cette question? Je pense
notamment aux travailleurs sociaux...
M. Marx: On va...
M. Filion: ...et aux cadres dans le secteur des services
sociaux.
M. Marx: Non.
M. Filion: Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus?
M. Marx: Non. C'est clair cela: non. Mme Harel: M. le
Président.
Le Président (M. Marcil): Mme la députée de
Maisonneuve.
M. Marx: Je ne veux pas qu'on perde notre temps dans cette
discussion. La réponse est non.
Mme Harel: Pour tout de suite, M. le ministre, je vous
rappellerai qu'un bon nombre de vos collègues - je pense, entre autres,
à votre collègue le ministre des Communications qui s'est fait
accompagner du président-directeur général de
Radio-Québec pour faire l'étude des crédits et, pourtant,
Dieu sait que les compressions sont rudes à Radio-Québec et Dieu
sait qu'elles portent à conséquence également! Combien
d'autres de vos collègues se sont fait accompagner. Je pense à
votre collègue le ministre des Transports qui s'est fait accompagner du
président de la Société québécoise des
transports qui a répondu aux questions des parlementaires.
M. Filion: D'ailleurs...
M. Marx: Si la commission a l'intention de poser des questions
aux fonctionnaires de mon ministère, c'est possible dans le cadre d'une
autre commission. Mais, à cette commission, c'est moi qui réponds
pour le ministère.
M. Filion: M. le ministre de la Justice, avec votre permission,
on m'informe que vous...
M. Marx: ...que cela fait plaisir à Mme
la députée de Maisonneuve.
M. Filion: On m'informe que vous-même, lorsque vous
étiez critique de l'Opposition et donc assis de ce côté-ci,
à la gauche du président, aviez eu l'occasion d'échanger
des propos avec Mme Fournier qui était présidente de la
Commission des droits de la personne, pour obtenir certains
éclaircissements. Dans ce cadre-ci, bien sûr, on a le programme de
la CDP, on a aussi le programme du CPJ et on voudrait échanger des
propos, comme vous l'aviez fait à l'époque, avec les
représentants de la Commission des droits de la personne, sur cette
fusion. Je ne sais pas mais, à titre de ministre de la Justice, vous
n'aimeriez sûrement pas qu'on applique deux poids, deux mesures. Comme
vous-même avez interrogé la présidente au cours des
années passées, ce qu'on vous demande, c'est exactement la
même chose, c'est-à-dire qu'on puisse échanger avec la
représentante ou les représentants de la Commission des droits de
la personne.
Mme Harel: M. le ministre, je dois vous dire que je ne comprends
pas vos réticences. Vous avez tout à gagner à ce que la
situation soit clarifiée. Si tant est que les propos que vous tenez en
réponse aux questions de mon collègue sont fondées, les
questions que l'on va poser au représentant de la direction de la
commission vont certainement se trouver à venir justifier les
vôtres.
M. Marx: Je pensais que j'avais tellement bien répondu aux
questions qu'il ne serait pas nécessaire de poser des questions à
d'autres personnes. Si vous voulez poser des questions au président de
la commission - il n'est pas ici - ou à la vice-présidente de la
commission, je n'ai pas d'objection. Voilà.
M. Filion: D'accord.
Le Président (M. Marcil): ...
M. Marx: Pardon?
Le Président (M. Marcil): Vous savez que vous êtes
le seul à autoriser un fonctionnaire à parler en votre nom...
M. Marx: C'est cela.
Le Président (M. Marcil): ...puisque vous êtes le
seul qui répondez de vos crédits. Donc, vous acceptez.
M. Marx: Oui, j'accepte que la vice-présidente parle en
mon nom.
Le Président (M. Marcil): Juste une petite information. Il
faut tenir compte également que nous sommes au programme 3.
Il nous reste encore huit autres programmes, sauf ie programme 7 qu'on
verra demain, de 10 heures à 11 heures. Il est présentement 21
heures et nous terminons à 22 heures.
Excusez, M. le porte-parole de l'Opposition, est-ce qu'on s'entend quand
même pour accepter ce soir tous les programmes à l'exception du
programme 7, qui est la Loi sur la protection du consommateur, et que l'on
verra demain matin?
M. Filion: Oui, on n'a pas le choix, M. le Président. On
n'a pas le choix.
M. Marx: Je dois vous dire qu'il est arrivé dans le
passé que les ministres n'aient pas de réponse à fournir
et qu'ils laissent leurs fonctionnaires ou leurs présidents d'organisme
répondre pour eux. Je me souviens même de certaines commissions
parlementaires où c'est le sous-ministre qui a parlé tout au
long, mais quand j'ai lu le Journal des débats, c'était
écrit: "Le ministre dit", et c'étaient de grands discours de
fond. Il était écrit dans le Journal des débats que
c'était le ministre qui parlait, mais je sais que c'était le
sous-ministre qui faisait le débat. J'ai pensé qu'il serait
peut-être plus intéressant que ce soit le ministre lui-même
qui réponde aux questions. Mais, comme je viens de le dire, je n'ai pas
d'objection, si vous voulez poser des questions à la
vice-présidente de la Commission des droits de la personne...
Le Président (M. Marcil): M. le ministre.
M. Marx: Juste pour conclure sur ce point - je pense que les
commissions parlementaires ont maintenant le pouvoir d'étudier un
organisme quelconque et de poser toutes les questions que les membres veulent
poser - effectivement, j'ai eu l'occasion, en tant que membre de cette
commission l'an dernier, de poser des questions durant toute une journée
au président d'un organisme.
Si vous voulez vraiment creuser un dossier pour savoir ce que fait un
organisme, vous devez mettre à votre ordre du jour l'étude d'un
organisme quelconque.
M. Filion: Je ne sais pas si mes collègues seraient
d'accord. Dans ce sens, sans s'étendre...
Le Président (M. Marcil): Juste une information, M. le
ministre. Si, lors de l'étude des crédits, certains hauts
fonctionnaires peuvent être appelés à prendre la parole,
à moins qu'un membre de la commission ne s'y oppose, leurs paroles sont
consignées au Journal des débats sous leur propre nom, mais ils
utilisent le temps de parole du ministre. Ce droit devrait leur être
accordé uniquement lorsque l'on discute de questions d'ordre
technique ou d'ordre administratif.
Mme Harel: Contrairement à la pratique dont vous nous
donniez l'exemple, l'imputabilité étant maintenant en vigueur,
les hauts fonctionnaires parlent en leur propre nom.
Une voix: C'est cela.
Le Président (M. Marcil): D'accord.
M. Marx: C'est l'étude des crédits. Je suis
responsable des crédits. Vous pouvez dire ce que vous voulez, c'est moi
qui suis responsable devant la Chambre. Si vous voulez me poser...
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, je
précise encore que le fonctionnaire qui parle, ses paroles sont
consignées au Journal des débats sous son propre nom.
M. Marx: D'accord.
Le Président (M. Marcil): Cela va.
M. Marx: J'ai demandé que cela soit changé depuis
des années. Heureusement que cela a été fait.
Le Président (M. Marcil): Oui, c'est changé. C'est
interprété de cette façon maintenant.
M. Marx: C'est parfait. (21 heures)
Le Président (M. Marcil): Mme la députée de
Maisonneuve, est-ce que c'est à vous ou à M. le
député de Taillon?
Mme Harel: Avec plaisir, mais je pense que mon
collègue...
M. Filion: Bonsoir, Mme Nicole Trudeau-Bérard. Est-ce que
la Commission des droits de la personne est généralement
consultée avant des modifications à sa structure, à son
mandat ou à la charte des droits? Cela capte assez bien.
Mme Trudeau-Bérard (Nicole): Jusqu'ici, lorsqu'il y a eu
des modifications à la charte, cela a été à la
suite de recommandations qui ont été faites par la commission,
par exemple, sur la partie 3, sur les programmes d'accès à
l'égalité. Évidemment, le processus est un peu
différent puisque cela faisait déjà l'objet de recherche
ou d'étude. La situation est tout à fait différente de
celle que l'on connaît aujourd'hui.
M. Filion: D'accord. Dans ce cas-ci, est-ce que la
décision de fusionner le CPJ et la CDP vient d'une recommandation de la
CDP?
Mme Trudeau-Bérard: Non. M. Filion: Non.
Mme Trudeau-Bérard: Certainement pas. Je pense que c'est
connu. C'est connu que c'est une décision gouvernementale, bien
sûr.
M. Filion; Pour laquelle vous n'avez pas été
consulté, comme organisme j'entends, avant la prise de
décision.
Mme Trudeau-Bérard: Enfin, je ne sais pas de quel genre de
consultation vous parlez, mais le président a très certainement
été saisi de la question et a eu à réagir. La
commission comme telle, je dois dire, pour enlever toute ambiguïté
- je parle au nom de la commission - ne voit pas d'incompatibilité
majeure à assumer ce mandat. La commission croit qu'elle est en mesure
de l'assumer tout en respectant la mission spécifique de la protection
de la jeunesse.
M. Filion: Est-ce que cette assertion que vous faites
découle d'études qui ont été faites au sein de la
commission et est-ce que ces études sont terminées?
Mme Trudeau-Bérard: Cela découle d'une analyse que
les commissaires ont faite au moment où ils ont été saisis
de la question. Effectivement, comme nous le faisons toujours sur des projets
de loi, nous étudions actuellement l'impact législatif,
l'arrimage, l'harmonisation que cela devra arriver à faire dans la
charte ou la loi de la protection de la jeunesse.
M. Filion: Ce que vous étudiez, ce sont les
modalités d'arrimage législatif.
Mme Trudeau-Bérard: Oui.
M. Filion: Est-ce que cette étude est terminée?
Mme Trudeau-Bérard: Cette étude est en cours et
elle va, évidemment, s'accélérer à partir du moment
où le projet de loi sera arrêté comme tel et
déposé et sur lequel nous ferons, comme commission, des
recommandations, comme nous le faisons sur chacun des projets de loi.
M. Filion: Est-ce que vous avez travaillé de concert avec
le Comité de la protection de la jeunesse?
Mme Trudeau-Bérard: Oui.
M. Filion: Sur?
Mme Trudeau-Bérard: Nous sommes en constant
échange.
Mme Harel: Mme la vice-présidente de la commission, il
m'est venu, en écoutant les réponses du ministre aux questions de
mon collègue, un exemple en tête. Je ne suis pas ici ce soir
relativement à ce dossier en particulier. Je voudrais interroger le
ministre sur autre chose tantôt. Il m'est venu à peu près
cet exemple et j'aimerais connaître vos réactions. Est-ce qu'il
serait vraisemblable qu'une telle situation puisse se produire, à
savoir, une requête pour placement de l'enfant pour sa protection,
laquelle requête pourrait être déposée par un
employé de la commission fusionnée, si vous voulez, et en
même temps une intervention du parent de l'enfant auprès de la
commission au motif que son orientation sexuelle a été le mobile
qui a conduit le fonctionnaire à déposer la requête pour la
protection de l'enfant? En d'autres termes, à la fois toujours un
employé de la commission, Commission de la protection de la jeunesse et
Commission des droits de la personne, un employé qui fait une
requête pour la protection de l'enfant et un autre qui entend une demande
d'intervention du parent de l'enfant au motif que son orientation sexuelle a
été mise en cause et serait un motif qui aurait amené la
requête.
Mme Trudeau-Bérard: Évidemment, c'est le genre de
problème que l'étude devra examiner, mais il faut bien voir que,
lorsque vous parlez de ce problème, les pouvoirs d'enquête sont
quand même circonscrits. D'une part, il y a les pouvoirs d'enquête
qui sont dans la loi de protection de la jeunesse et les pouvoirs
d'enquête qui sont dans la charte en vertu de l'article 10 sur la
discrimination ou l'exploitation. Ces pouvoirs sont quand même
limités.
Mme Harel: II peut y avoir apparence de conflit
d'intérêts certainement, parce que la commission nouveau genre
servirait à la fois pour la requête pour la protection de l'enfant
et pour permettre à un citoyen de faire requête en fonction d'un
des motifs de l'article 10.
Mme Trudeau-Bérard: Écoutez, je ne vois pas
nécessairement de conflit.
Mme Harel: Apparence de conflit.
Mme Trudeau-Bérard: Ni d'apparence de conflit. Je veux
dire que si une personne, par exemple, invoque la question de son orientation
sexuelle, cela va être à l'intérieur d'un problème
qui va être circonscrit. Si vous nous reliez à la question de
l'enfant, il faudra examiner effectivement, à ce moment, la
primauté du droit. Je vous dirai que ce sont des questions avec
lesquelles nous avons à travailler constamment, même actuellement,
même si nous n'avons pas le mandat précis dont vous parlez. Ce
sont des questions qui se posent régulièrement à la
commission: des droits qui semblent être en conflit... sur lesquels il
faut apporter une médiation.
Mme Harel: C'est donc dire que l'employé qui serait plus
affecté au service relatif à la protection de l'enfant irait en
jaser avec son voisin d'à côté qui serait plus
affecté au service de réception, par exemple, des plaintes.
Mme Trudeau-Bérard: C'est trop tôt pour parler
d'organisation administrative. Nous n'en sommes pas là.
M. Filion: C'est cela. En deux mots, tant que ces études
ne sont pas terminées, vous ne seriez pas prêts à assumer
cette double mission qui, selon vous, n'est pas incompatible. Maïs, dans
le temps, une fois qu'on vous a entendu parler des études qui sont en
cours, qu'on a entendu votre réponse à la question de la
députée de Maisonneuve, on garde l'impression que, finalement,
c'est envisageable comme fusion. Maintenant, il faudrait étudier et voir
de quelle façon cela va s'arrimer concrètement, voir
également toutes les notions légales et législatives qu'il
y a là-dedans. En ce sens, est-ce qu'il ne serait pas
préférable, à votre point de vue, de compléter ces
études avant d'aller plus loin dans le projet?
Mme Trudeau-Bérard: Les études que nous avons
faites jusqu'ici nous ont révélé qu'il n'y avait pas
d'incompatibilité majeure au niveau des principes et au niveau de la
mission. Il est bien certain qu'il faut faire des arrimages administratifs et
qu'il y a des impacts avec lesquels nous avons à travailler. Cela est
certain.
M. Filion: Mais est-ce que le CPJ partage votre point de vue
qu'il n'y a pas incompatibilité de mission dans l'application et dans la
définition des missions?
M. Marx: Je veux juste souligner un point, M. le
Président. Le projet de loi n'est pas devant la commission. C'est
difficile d'examiner les effets d'un projet de loi avant que celui-ci ne soit
déposé. Je pense que ce serait peut-être mieux pour le
député de garder ses questions encore quelques jours quand on va
déposer le projet de loi qui amène ce fusionnement avec d'autres
modifications à d'autres lois. Ce sera peut-être possible pour le
député de poser des questions en connaissance de cause. C'est
difficile de parler des effets d'un fusionnement qui n'est pas encore
opérationnel. C'est impossible de parler des effets d'un projet de loi
qui n'est pas devant la commission. Si vous voulez parler des
hypothèses, des possibilités, on peut bien, mais je pense que ce
serait mieux que vous gardiez vos questions pour l'étude article par
article du projet de loi qui va provoquer ce fusionnement.
M. Filion: Comme je vous l'ai dit, M. le ministre, après
les quelques questions qu'on a posées à la représentante
de la Commission des droits de la personne, que je remercie quant à moi,
je ne sais pas s'il serait possible qu'on puisse passer cinq minutes
également avec un représentant du Comité de la protection
de la jeunesse.
Le Président (M. Marcil): Juste un instant. Avant de
passer à un autre, je vais permettre au député de
Marquette de poser une question à Mme la vice-présidente sur le
même sujet.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Très
brièvement. Je me souviens, il y a quelques mois, d'avoir effectivement
remplacé le ministre de la Justice lors d'une conférence sur
l'éducation au droit et cette conférence avait été
organisée, si ma mémoire est bonne, justement par la Commission
des droits de la personne. J'avais été à même de
constater, dans les différents ateliers, que plusieurs actes ou
plusieurs agissements de la commission étaient intimement reliés
au mandat qu'a encore le Comité de la protection de la jeunesse. C'est
dans ce sens que je suis d'accord. C'est un commentaire plutôt qu'une
question que j'émets, que les agissements, ou les faits et gestes de la
commission étaient intimement reliés au Comité de la
protection de la jeunesse.
À ce moment, il n'était nullement question de fusion lors
de ladite conférence qui avait été organisée par la
Commission des droits de la personne. Je pense que vous allez être
d'accord là-dessus justement, corroborant ce que le ministre a dit
tantôt et ce que vous-même m'avez dit.
Mme Trudeau-Bérard: C'est un fait que la commission a mis
beaucoup d'énergie et a fait des interventions dans le dossier de la
jeunesse. Cela étant dit, il demeure que le Comité de la
protection de la jeunesse a un mandat spécifique sur une jeunesse
particulière qui est en difficulté, mais je pense que son mandat
fait référence aux mêmes droits. On parle toujours de ces
mêmes droits fondamentaux. C'est une des raisons pour lesquelles la
commission se croit en mesure d'assumer ce mandat.
M. Filion: Peut-être avant de passer à un
représentant de...
Le Président (M. Marcil): Excusez, M. le
député de Taillon. M, le ministre, est-ce que vous vouliez
continuer...
M. Marx: Je n'ai pas d'objection si on veut continuer
jusqu'à 22 heures - il reste 45 minutes - et ne parler que de ce
dossier, pas étudier d'autres programmes. Je pense que, vraiment, on ne
va nulle part dans ce dossier dans le sens que le projet de loi qui va
exécuter le fusionnement n'est pas devant la commission. On peut parler
des possibilités et tout ça dans l'abstrait, mais je pense qu'il
serait mieux pour la commission que le député pose ses questions
à un autre moment, quand il va avoir l'occasion d'étudier le
projet de loi. Si le député insiste pour poser des questions, je
ne peux l'en empêcher. Je vois que c'est difficile de vraiment...
M. Filion: Cinq heures, ce n'est pas assez. On va essayer d'avoir
dix heures l'an prochain,
M. Dauphin: Si vous me permettez, M. le Président, une
question de règlement. Le ministre en a fait état tantôt.
Je pense parler au nom de mes collègues de la majorité.
D'ailleurs, cette année, on a la possibilité d'avoir un mandat
d'initiative au sein de notre commission. Je suis persuadé qu'on serait
d'accord pour avoir un mandat d'initiative relativement à la Commission
des droits de la personne.
M. Filion: Je l'avais souligné tantôt. J'avais
posé la question tantôt.
M. Dauphin: À ce moment, on aurait tout le temps
voulu.
M. Filion: Vous ne m'avez pas compris tantôt.
Écoutez, est-ce qu'on ne pourrait pas quand même...
M. Marx: Ce ne serait pas ici. Ce serait juste le
président de la commission et vous auriez l'occasion de poser toutes ces
questions. Cela n'empiéterait pas sur le temps de la commission qui est
censée être vouée à l'étude des
crédits.
M. Filion: II y a toute la question de l'intégration du
personnel à la fonction publique. Je pense que ma collègue veut
intervenir là-dessus. Peut-être que vous pourriez profiter de la
présence de la vice-présidente.
Mme Harel: Je pense, M. le ministre, que vous avez plaidé
la fusion de la Commission de la protection de la jeunesse et de la Commission
des droits de la
personne pour des motifs, nous avez-vous dit, de rationalisation
administrative, essentiellement des motifs d'économie. En fait, ce sont
les seuls, je pense, qui ont été invoqués en faisant
valoir, à votre point de vue, que les inconvénients ne priment
pas sur les avantages que vous pensez pouvoir en retirer. J'aimerais savoir
pourquoi, à ce moment, vous concevez amener l'intégration du
personnel de la commission des droits à la fonction publique? Je ne
pense pas que ce soient des motifs de rationalisation administrative ou
d'économie qui peuvent être utilisés.
En ce qui me concerne, je dois vous dire que je crains que la
crédibilité et la qualité des services de la commission,
la crédibilité surtout, dois-je insister, s'en ressentiront. (21
h 15)
M. Marx: Quel est le problème?
Mme Harel: Le problème est le suivant. Les membres de la
plupart des organismes administratifs sont habituellement nommés par le
gouvernement, à l'exception de la Commission des droits de la personne,
du Protecteur du citoyen et aussi de la Commission d'accès à
l'information et, je pense, de quelques autres. Mais c'est un statut
très particulier qu'ont ces commissions où l'Assemblée
nationale elle-même, à la majorité des deux tiers, nomme
les membres.
Il en a toujours été ainsi, également, du personnel
de la commission depuis sa fondation. La commission a toujours eu le pouvoir
exclusif de choisir son personnel contrairement à tous les autres
organismes dont le personnel, comme nous le savons, est nommé en vertu
de la Loi sur la fonction publique. Là, je ne crois pas que vous
puissiez utiliser, comme vous l'avez fait auprès de mon collègue,
des motifs d'économie ou de rationalisation administrative.
Dans la perspective où vous ne semblez pas sensible à
l'argumentation qui a été développée à
l'encontre de la fusion, donc dans la perspective où il y aurait fusion
du Comité de la protection de la jeunesse et de la Commission des droits
et libertés de la personne, j'aimerais vous mettre en garde. J'ai
l'impression que cette intégration hâtive et
prématurée aurait des conséquences graves sur la
crédibilité même de la commission. Je reviendrai
tantôt pour vous donner quelques exemples, mais j'aimerais avoir votre
point de vue maintenant.
M. Filion: Dans la même veine, puisque c'est à peu
près l'argumentation que je voulais reprendre, le projet de loi initial
qui créait la charte et la commission, la loi 50 qui a été
adoptée en 1975, prévoyait que les employés de la
commission faisaient partie de la fonction publique. Cette question a fait
l'objet d'un débat important en commission parlementaire et j'ai
demandé qu'on me sorte les débats entourant cette question qui a
donné lieu à un amendement.
Les parlementaires du temps - vous et moi n'y étions pas; en tout
cas, mot, c'est sûr, mais vous non plus, sauf erreur -avaient cru bon
à l'époque d'assurer l'autonomie - l'indépendance, si on
veut -comme le disait ma collègue du personnel de la CDP. Et ce,
pourquoi? Dans bien des cas, c'est pour assurer à leur clientèle
une plus grande confiance, une relation de confiance quand on pense que la
commission doit enquêter notamment auprès du gouvernement, ses
organismes, ses ministères. Qu'on pense aux détenus, par exemple.
Quand la commission ou son personnel se présente, cette relation de
confiance qui s'est créée au fil des années, encore une
fois, au fil d'un travail bien fait, est importante. À ce
moment-là, est-ce que l'intégration du personnel au sein de la
fonction publique ne risquerait pas d'affecter cette relation de confiance qui
est drôlement nécessaire à la commission? Elle l'est
probablement beaucoup plus que n'importe où ailleurs parce que, souvent,
les contacts entre le personnel de la Commission des droits de la personne et
sa clientèle sont franchement, dans certains cas, très intimes,
cette clientèle n'ayant pas l'impression de faire affaire - excusez
l'expression, elle n'est pas péjorative - avec des fonctionnaires. Ils
savent que ces gens-là sont nommés par un processus distinct et
la direction vient de l'Assemblée nationale.
Si on ajoute à cela l'excellent argument de ma collègue,
il n'y a pas d'économie là-dedans.
M. Marx: J'ai des observations à faire sur tout cela.
M. Filion: Allez-y.
M. Marx: J'aimerais dire aux membres de la commission que les
employés du fonds de recours collectif, qui ne sont pas dans la fonction
publique, ont demandé d'être intégrés à la
fonction publique. Vous savez que le fonds de recours peut octroyer de l'argent
pour prendre une action contre le gouvernement. Ils n'ont pas peur d'être
dans la fonction publique. En fait, ils insistent pour être membres de la
fonction publique.
Deuxièmement, parce que les secrétaires de juges, les
huissiers, les audienciers...
M. Filion: Faites attention, là!
M. Marx: ...travaillent avec les juges qui sont dans la fonction
publique, je ne pense pas que cela touche l'indépendance des juges. Je
pense que vous faites des critiques qui manquent vraiment de fondement. Si
on
prend les commissions des droits de la personne ailleurs au Canada, ils
sont membres de la fonction publique. II n'y a pas de problème, ils
critiquent le gouvernement jour et nuit.
Il ne faut pas oublier, comme je l'ai dit ce matin, que j'ai
été commissaire à la Commission des droits de la personne
pendant cinq ans. Je connais le fonctionnement de la commission. En ce qui
concerne l'autonomie de la commission, la députée de Maisonneuve
se souvient bien que l'Assemblée nationale a adopté la loi 111.
Il y a un ancien ministre de la Justice qui a fait de violentes attaques contre
la Commission des droits de la personne parce qu'elle a osé critiquer la
loi 111 qui a enlevé des droits fondamentaux aux enseignants par le
biais d'un "nonobstant".
Troisièmement - je dis cela parce que la députée de
Maisonneuve n'était pas ici ce matin - l'ancien gouvernement, il y a
seulement quelques mois, a consulté l'Opposition en ce qui concerne la
possibilité de modifier la charte québécoise pour faire en
sorte que les employés de la commission deviennent des fonctionnaires.
À ce moment-là - je pense que c'était au mois de mai ou
juin 1985 - j'étais d'accord. Donc, on ne peut pas parler de
décision hâtive sur cette question parce que j'étais
d'accord en 1985. Les membres de l'Opposition qui étaient au
gouvernement étaient d'accord au printemps 1985. Je me demande ce que
les membres de l'Opposition ont trouvé depuis le printemps 1985 pour
avoir une autre opinion. Est-ce parce que le projet de loi est piloté
par un autre gouvernement? Je me pose la question.
En ce qui concerne les membres de la CDP... Le conseil d'administration
des commissaires de la Commission des droits de la personne est nommé
par l'Assemblée nationale. On va avoir des commissaires, ou des membres,
qui seront nommés par l'Assemblée nationale. Je pense que cela va
raffermir le conseil d'administration, si vous voulez. En ce qui concerne le
personnel de la Commission des droits de la personne, il ne faut pas oublier
que, depuis dix ou quinze ans, nos lois ont beaucoup changé.
C'est-à-dire que, maintenant, nous avons des syndicats, nous avons une
nouvelle Loi sur la fonction publique et ainsi de suite. L'indépendance
des fonctionnaires est garantie dans nos lois. Il y a aussi la charte
elle-même qui protège les fonctionnaires. Donc, je ne vois
vraiment aucun problème. Les fonctionnaires, dans d'autres
ministères, sont appelés à faire des enquêtes,
à critiquer un organisme du gouvernement et ainsi de suite. Il n'y a
aucun problème là. Je pense que c'est imaginer des choses qui
n'existent pas vraiment.
Le Président (M, Marcil): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, je pose à nouveau ma
question: Pour quel motif, à part le fait d'être conforme aux
autres provinces canadiennes... Il me semblait qu'il y avait là une
innovation intéressante quand cela a été mis en
application à la commission québécoise. J'ai la
fierté de dire que, depuis cinq ans que je suis à cette
Assemblée, en matière de droits et libertés, je n'ai
jamais eu, au gouvernement comme dans l'Opposition, d'autre philosophie de
parti que celle de la défense des droits et libertés. En cette
matière, M. le ministre, j'ai trouvé décevant tantôt
qu'à plusieurs reprises vous fassiez allusion au fait que vous vous
attendiez au respect de la charte par les employés de la Commission de
la protection de la jeunesse. Je pense qu'il faut s'attendre à plus que
cela, il faut s'attendre à la promotion. Je crois que la commission a un
rôle critique à jouer à l'égard des actions et des
politiques du gouvernement. J'ai applaudi lorsqu'elle a joué ce
rôle, même quand cela allait à rencontre des
intérêts du gouvernement dont je faisais partie, parce que je
pense qu'elle le faisait en jouant là un rôle essentiel de
promotion des droits et libertés.
Je m'attends à pouvoir continuer à dire de même
quand je suis ici. Je pense que c'est une erreur, une grave erreur pour des
clientèles. Et j'ai vu dans les médias que des
représentations vous avaient été faites par les
employés de la commission eux-mêmes. Je pense que ça les
honore. Il y aurait peut-être pour eux des avantages personnels à
être intégrés à la fonction publique. Mais je crois
que dans la balance des inconvénients ils ont jugé que les
clientèles qui faisaient appel à eux méritaient une
impartialité pas seulement dans les faits, mais aussi en apparence.
Je veux toujours savoir les motifs de ce changement puisqu'il ne s'agit
pas de motifs économiques ni de rationalisation administrative. Quelle
est la nature des motifs? Simplement parce que, cela serait un jeu de dominos
parce... Est-ce que je dois comprendre que, parce que le Comité de la
protection de la jeunesse serait intégré, parce que les
employés de la commission le sont à la fonction publique, par un
jeu de dominos on en arriverait à intégrer ceux de la Commission
des droits et libertés de la personne? Ce serait le motif?
M. Marx: Si, par exemple, on a aboli le tribunal des mines, le
tribunal d'expropriation c'est parce qu'on a vu que ce serait plus rationnel -
je ne veux pas utiliser le mot "rationaliser" les dépenses toujours -
d'intégrer ces tribunaux à la Cour provinciale et faire des
économies tout en rendant les mêmes services, et ainsi de
suite.
En ce qui concerne les employés de la Commission des droits de la
personne, c'est vrai que j'ai rencontré des représentants des
employés. Il ne faut pas oublier que tous leurs droits sont
garantis. On va garantir tous leurs droits. Personne ne perd quoi que ce soit.
Je pense que c'est important.
Deuxièmement, quand j'étais à ia commission comme
commissaire, et même depuis, il y a beaucoup d'employés qui
souhaitaient devenir membres de la fonction publique pour la raison suivante:
parce que maintenant ils ne peuvent pas être mutés; ils ne peuvent
pas demander... Il y a des employés à la Commission des droits de
la personne qui sont là depuis douze ans, par exemple. Ils ne peuvent
pas demander d'être mutés à un autre organisme, au
ministère de la Justice ou dans un autre ministère, et ainsi de
suite. Une fois qu'ils feront partie de la fonction publique, cela sera
possible pour eux de demander d'être mutés ailleurs. Je pense que
c'est important pour ces personnes de leur permettre de faire autre chose,
d'avoir un autre plan de carrière, d'avoir des promotions ailleurs et
ainsi de suite. Je pense que c'est important.
J'insiste pour dire que personne ne va souffrir de quoi que ce soit. Je
pense que le gouvernement, pas ce gouvernement, mais l'État, dirais-je,
est très généreux vis-à-vis de ses employés.
Tout le monde se voit garantir ses droits acquis. Il y a la permanence, il y a
tout ce qu'on veut. Ce n'est pas comme une compagnie américaine: on
ferme une usine au Québec et tout le monde est mis dans la rue, ou bien
il y a des mutations injustes et ainsi de suite. Les droits acquis seront
protégés. Ce n'est pas la première fois qu'on fait de
telles intégrations. Le gouvernement a beaucoup d'expérience avec
de telles intégrations et on va la faire de façon à ne pas
nuire à qui que ce soit. Je pense que cela est une garantie pour tout le
monde, même pour la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Je pense qu'on ne parle pas du tout le même
langage. Vous me parlez des avantages personnels. Je pense justement que les
avantages personnels militent en faveur d'une intégration à la
fonction publique. C'est d'autant plus impressionnant de voir que,
collectivement, leur sensibilité professionnelle les a conduits à
choisir une voie plus difficile qui est celle de considérer, compte tenu
de leur expertise et de leur expérience, que cela peut avoir des
conséquences néfastes sur la crédibilité de la
commission à moyen terme. (21 h 30)
Je sais qu'ils insistent sur certaines clientèles, notamment
celle des personnes détenues, celle des peuples autochtones qui ont une
sensibilité assez écorehée à l'égard des
institutions gouvernementales. Je sais, pour avoir lu leurs dossiers, qu'ils
traitent de différents dossiers que la commission a dû examiner et
qui concernaient le gouverne- ment. Je pense à la prison Tanguay, je
pense à la rivière Moisie. Dans le domaine des droits et
libertés, il ne faut pas seulement que ce soit le cas, il faut que
l'apparence également soit telle que personne ne puisse mettre en doute
la crédibilité de la commission.
M. Marx: Je ne veux pas revenir sur tout ce que j'ai
déjà dit. De toute façon, je pense à cela depuis
des années. Ce n'est pas une décision hâtive. Vous pouvez
consulter ce que j'ai déjà écrit sur le fonctionnement de
la Commission des droits de la personne et vous verrez qu'autrefois j'ai fait
des critiques sur certaines fonctions de la Commission des droits de la
personne. De toute façon, c'est une fusion de deux organismes. Les
employés du Comité de la protection de la jeunesse sont dans la
fonction publique et les employés de la Commission des droits de la
personne ne le sont pas, mais ils le seront. Donc, on ne peut pas avoir une
commission avec des employés qui sont, soit dans la fonction publique,
soit dans un autre syndicat et ainsi de suite. Mais j'insiste...
Mme Harel: C'est le motif: une mauvaise décision en
entraîne une deuxième.
M. Marx: Non, je pense que...
M. Filion: II nous reste une demi-heure, M. le ministre et...
M. Marx: Mais si vous... M. Filion: Excusez-moi. M.
Marx: Oui.
M. Filion: Je pensais que vous aviez terminé.
M. Marx: Je pense que ce qu'il faut, c'est... Si on veut faire
des choses au gouvernement, si on veut faire des améliorations, si on
veut faire des rationalisations... Lorsque j'ai dit pendant des années
que nous avions trop d'organismes au Québec, trop de commissions, trop
de conseils, trop d'offices et tout cela, lorsque j'ai dit tout cela,
j'étais bien sérieux. Maintenant, vous voyez que j'étais
bien sérieux, parce qu'on est en train d'abolir cinq organismes au
ministère de la Justice. Si on veut faire une rationalisation, si on
veut vraiment faire des améliorations, il faut faire des changements; il
ne faut pas avoir peur de faire des changements, d'améliorer la
situation. C'est ce qu'on est en train de faire et, si vous n'êtes pas
d'accord avec tel ou tel point, je comprends. S'il y a des gens qui trouvent
cela plus difficile que d'autres, j'en conviens. Mais, dans tout ce qu'on fait
au ministère de
la Justice, on protège les droits acquis de tout le monde. Je
pense que les gens ne peuvent pas demander plus que cela. Ils ne peuvent pas
demander plus que cela de l'État.
M. Filion: Juste parce qu'on manque de temps, apparemment,
c'est...
M. Marx: ...les droits acquis, la permanence. Vous n'avez pas la
permanence, moi non plus. Nous n'avons aucune sécurité. Les
fonctionnaires ont la sécurité, comme les professeurs ont la
permanence, ont des droits acquis. Je pense que...
M. Filion: Le seul à avoir sa permanence, c'est le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: De D'Arcy McGee. C'est le seul député
à avoir vraiment la permanence, oui.
M. Filion: Je pense qu'on va être obligé de passer
maintenant... Je ferai quand même remarquer au ministre de la Justice ce
que ma collègue soulevait tout à l'heure, c'est effectivement au
niveau des intérêts individuels et tout cela. Deuxièmement,
lorsque la loi 50 a été adoptée, qui a créé
la charte et la commission, on m'informe que cette loi avait été
adoptée, que cet amendement avait été adopté
à l'unanimité. Cela veut dire que les parlementaires avaient
cette sensibilité à l'importance de préserver, si on veut,
autant en apparence que dans les faits, l'autonomie et l'indépendance.
Mais, quoi qu'il en soit... Oui.
M. Marx: Juste un point qui va peut-être intéresser
le député: lorsque la charte était en train d'être
adoptée, lorsqu'il y avait un brouillon de cette loi 50 dans les
années soixante-dix, j'ai été consulté par le
gouvernement de l'époque pour faire l'étude d'un avant-projet de
loi. Malheureusement, je n'ai pas touché à toute la partie de
l'administration de la commission. Mais, ayant étudié tout cela
depuis, je trouve qu'il y a des améliorations à faire et on est
en train d'en faire une, franchement, qui va permettre à la commission
de fonctionner d'une façon plus efficace à l'avenir. Cela donnera
une ouverture et une possibilité de plan de carrière aux
employés de la commission qu'ils n'ont pas à l'heure actuelle.
Comment cela nuirait-il à qui que ce soit?
M. Filion: Vous prenez une bonne revanche aujourd'hui, si vous
n'aviez pas étudié cela à l'époque. Est-ce qu'on
pourrait, M. le ministre, dans le même sens que tantôt, poser deux
ou trois questions au représentant du CPJ?
M. Marx: Si vous voulez poser des questions au président
de chacun des organismes du ministère de la Justice, je vais
m'excuser.
M. Filion: Non, mais...
M. Marx: J'ai été convoqué pour
répondre aux questions, mais si vous avez l'intention de poser des
questions au président des organismes, je n'ai pas d'objection, mais je
reviendrai ensuite; au cas où je relirais les débats, c'est moi
qui suis censé être ici pour répondre en ce qui concerne
les crédits. Si vous insistez, je n'ai pas d'objection, étant
donné que j'ai parlé, il y a deux minutes, de
l'indépendance des fonctionnaires.
M. Filion: Est-ce qu'on peut nous présenter?
M. Marx: Oui, M. Jacques Dufour, vice-président du
Comité de la protection de la jeunesse.
M. Filion: D'accord. Bonsoir, M. Dufour. Je pense que vous avez
sûrement entendu le débat qui a commencé ce matin et qui
s'est poursuivi ce soir. Vous avez également entendu le ministre et vous
êtes à l'aise devant la commission. Vous connaissez les points qui
préoccupent les membres de cette commission, notamment au chapitre de la
mission et de la vocation de chacun des organismes. Est-ce que vous avez des
choses à dire à ce sujet?
M. Dufour (Jacques): Si vous me le permettez. J'ai relevé
deux points susceptibles de vous intéresser un peu sur la dimension de
l'appartenance du personnel à la fonction publique. Le Comité de
la protection de la jeunesse est également intéressé
à cette question, et de beaucoup-Nos employés sont
déjà membres de la fonction publique. Les membres du
comité ont déjà fait connaître leur position
là-dessus. Ils demandaient que les deux groupes soient joints ensemble
quoi qu'il advienne.
Une expérience a également été vécue
au Comité de la protection de la jeunesse où, nos employés
faisant partie de la fonction publique étant syndiqués, ils ont
eu l'occasion de faire des enquêtes très souvent dans des domaines
syndicaux et dans des domaines où cela ne faisait pas toujours l'affaire
du syndicalisme ou du patronat non plus. De ce côté, je ne pense
pas exagérer en aucune façon en vous disant que cela n'a jamais,
à ma connaissance, posé de difficulté durant
l'expérience au comité depuis dix ans, c'est-à-dire
l'appartenance de nos employés à la fonction publique et
même les syndiqués.
Il y a un deuxième commentaire que je me permettrais de relever.
Il y a une
imprécision que Mme la députée de Maisanneuve
mentionnait tantôt. Dans son hypothèse, elle mentionnait qu'un
employé du CPJ pouvait faire une requête pour demander la sortie
d'un enfant de sa famille pour l'amener en centre d'accueil, ou en famille
d'accueil. Habituellement, ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le CPJ qui agit
comme cela. Ce sont plutôt les fonctions du DPJ. Le rôle du CPJ, en
deux mots, en est un d'inspecteur, en est un d'observateur et de
surveillant.
Sur la question d'origine, là-dessus, je ne peux vous dire qu'une
chose. Les membres du comité se sont prononcés sur cette question
lors de leur réunion du 21 mars et ils ont demandé, en deux mots
- vous me ferez grâce probablement de lire l'ensemble de la
résolution - au ministre de reconsidérer la question de la
fusion. Il y avait une inquiétude et, au besoin, si le ministre de la
Justice désirait aller de l'avant et procéder coûte que
coûte là-dedans, les membres demandaient la garantie sur certains
éléments, garantie notamment sur la nomination de membres
préoccupés jeunesse.
C'est un article qu'on retrouve déjà à la Loi sur
la protection de la jeunesse, à l'article 13, je pense. Cette
résolution a été rendue publique par voie de
communiqué de presse et elle a été amplement
commentée par les journalistes.
M. Filion: Est-ce que la commission avait été
consultée avant la décision?
M. Dufour (Jacques): Dans les quelques jours qui ont
précédé l'annonce, en tout cas quand j'ai appris que la
fusion se ferait, effectivement on m'avait demandé d'examiner les
possibilités, les avantages et les inconvénients de la
faisabilité, en somme, d'une fusion. Je m'étais penché sur
la question avec le président de la Commission des droits de la
personne, M. Lachapelle.
M. Filion: Je vous remercie.
M. Marx: Voilà. Vous voyez comment l'indépendance
des fonctionnaires est respectée.
M. Filion: J'ai pris note du contenu des réponses qui ont
été données ce soir. J'ai pris note de la demande du
comité, mais...
M. Marx: Personne n'est muselé au ministère de la
Justice.
M. Filion: Cela ne l'a jamais été. Cela n'a jamais
été le cas.
M. Marx: Je ne sais pas ce qui se passait avant que je sois
nommé ministre, mais je présume de la bonne foi de mes
prédécesseurs parce qu'il faut prouver la mauvaise foi. C'est le
Code civil. Mais je n'ai jamais demandé...
M. Filion: Vous avez été assis assez souvent sur la
chaise sur laquelle je suis assis ce soir pour savoir...
M. Marx: Quand j'étais sur votre chaise, M. le
député, j'ai toujours voulu questionner le ministre parce que
c'est finalement le ministre qui est responsable dans notre Parlement.
M. Filion: C'est ce qu'on fait.
M. Marx: J'ai toujours voulu poser des questions au ministre et
c'était toujours le ministre qui voulait que ce soient ses
fonctionnaires qui répondent. Vous avez changé cela un peu, mais
je n'ai pas d'objection.
M. Filion: Écoutez! Je vous ai dit tantôt, je vous
ai mentionné tantôt qu'on m'informe que, lorsque vous étiez
assis sur cette chaise, vous avez eu également l'occasion
d'échanger longuement...
M. Marx: À la demande du ministre.
M. Filion: ...avec la présidente de la Commission des
droits de la personne. Vous pouvez appeler le programme...
M. Marx: À la demande du ministre parce que le ministre
n'avait pas la réponse. Donc, il a voulu que la présidente,
à l'époque, réponde. Comme j'ai les réponses -je
pense que j'ai les réponses - je suis prêt à
répondre. Ce n'est pas nécessaire pour moi de demander à
un de mes fonctionnaires qui est hautement qualifié, parce que mes
fonctionnaires sont sûrement qualifiés, de répondre.
M. Filion: Avec votre collaboration, il nous reste quelques
minutes. J'ai quelques autres questions pour le reste des crédits.
Le Président (M. Marcil): Un instant, s'il vous
plaît, M. le député de Taillon. Est-ce qu'on peut dire que
le programme 3 est adopté?
M. Filion: Sur division.
Le Président (M. Marcil): Sur division. J'appelle
maintenant le programme A, "Aide aux justiciables".
Aide aux justiciables
M. Filion: En ce qui concerne la Commission des services
juridiques, encore une fois, c'est une série de questions très
brèves. Grosso modo, où en sont les négocia-
fions en ce qui concerne les tarifs de l'aide juridique? Est-ce que cela
continue à avancer ou si c'est bloqué' Où?
Commission des services juridiques
M. Marx: Les tarifs de l'aide juridique, vous parlez des
avocats?
M. Filion: Avec le Barreau. Les avocats de pratique
privée.
M. Marx: Nous sommes en train d'examiner les tarifs des avocats
et des notaires. J'ai rencontré les notaires il n'y a pas si longtemps.
Il y a quelques jours, j'ai rencontré les notaires, parce que leurs
tarifs n'ont pas augmenté depuis 1977, si je me souviens bien. Nous
sommes en train de redémarrer ces dossiers, de faire avancer ces
dossiers qui n'ont pas avancé beaucoup depuis des années.
M. Filion: D'accord. Est-ce que le ministre pourrait simplement
prendre note de mon intérêt pour les statistiques sur la
répartition des mandats entre les praticiens privés et les
permanents de l'aide juridique? Peut-être pas pour ce soir, mais je sais
qu'il y a des gens de son cabinet, ultérieurement, dans le courrier ou
autrement, en Chambre...
M. Marx: Je peux vous dire cela tout de suite. Je pense que la
facture pour l'aide juridique est d'environ 60 000 000 $ dont environ 24 000
000 $ sont payés aux avocats et aux notaires de pratique
privée.
M. Filion: Oui. Au niveau des chiffres, je l'avais vu par les
dépenses de transfert. C'était surtout au niveau de la
répartition des mandats, en termes de nombre.
M. Marx: On va vous fournir toutes ces statistiques. Il n'y a pas
de problème. Je pense que ces statistiques se retrouvent aussi dans le
rapport annuel de la Commission des services juridiques où je les ai
toujours trouvées.
M. Filion: On n'a pas reçu le dernier.
M. Marx: Pardon?
M. Filion: On n'a pas reçu le dernier.
M. Marx: Cela a été déposé en Chambre
au mois de décembre. (21 h 45)
M. Fiiion: Ah!
M. Marx: Je pense que cela a été
déposé par moi.
M. Filion: Ah!
M. Marx: Non, par mon prédécesseur. Je m'excuse.
Non, par moi. En décembre, c'était moi.
M. Filion: Oui, normalement.
M. Marx: Ce n'était pas là à
l'époque.
M. Filion: Normalement. Votre prédécesseur...
M. Marx: Non, mais cela porte encore son nom.
M. Filion: Votre prédécesseur ne dépose pas
beaucoup de rapports.
M. Marx: Cela porte encore son nom. Nous n'avons pas voulu faire
de dépenses inutiles pour changer cela.
M. Filion: Ah! Oui. C'est cela qui avait été votre
blague. C'est cela qui avait été votre blague à
l'époque, M. le ministre. Je me souviens maintenant. Il y a quand
même une compression de 2 700 000 $ au chapitre de la rationalisation des
tâches. Je suppose qu'elle sont au niveau administratif.
M. Marx: Oui, essentiellement au niveau administratif,
c'est-à-dire qu'on n'a pas fait de compressions des services, si vous
voulez. C'était suggéré que nous ayons un ticket
modérateur pour l'aide juridique. J'ai toujours rejeté cette
possibilité. Vous voyez que cette année nous n'avons pas non plus
proposé un ticket modérateur en matière d'aide juridique.
Autrefois, c'était appelé par le ministre de l'époque des
frais d'ouverture de...
M. Filion: ...de...
M. Marx: Des frais d'ouverture de dossier.
M. Filion: C'est cela. Des frais d'ouverture.
M. Marx: Oui. Frais d'ouverture de dossier.
M. Filion: Mais cela n'avait pas été
appliqué non plus, n'est-ce pas?
M. Marx: Bien, c'est parce qu'il y avait un bon
député de l'Opposition qui empêchait le ministre de le
faire.
M. Filion: De tous les bords, de tous les côtés,
n'est-ce pas? De tous les bords et de tous les côtés. Alors donc,
au programme 4 ces coupures de 2 000 000 $ sont bel et bien au niveau
administratif, surtout au niveau administratif.
M. Marx: Au niveau administratif, oui. Mais nous offrirons les
mêmes services. La loi n'a pas changé.
M. Filion: D'accord.
Le Président (M. Marcil): Cela va?
M. Filion: Cela va pour le programme 4.
Le Président (M. Marcil): Pour le programme 4,
adopté?
M. Filion: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Oui. J'appelle le programme 5.
"Administration".
Administration
M. Filion: En ce qui concerne le programme 5, je constate qu'il y
a un montant de 200 000 $ qui aété mis de
côté pour le comité de déréglementation.
M. Marx: Oui. Comité sur la
déréglementation
M. Filion: Quelles sont les prévisions des
dépenses, le contenu des dépenses pour le comité de
réglementation?
M. Marx: On va vous dire cela.
M. Filion: Pour activer la réponse, est-ce que ce serait
le...
M. Marx: Cela veut dire que nous avons mis sur pied un
comité sur la déréglementation. D'accord? C'est cela.
M. Filion: Oui, mais c'est un comité de
bénévoles, M. le ministre. Comment pouvez-vous prévoir une
somme de 200 000 $ pour un comité de bénévoles?
M. Marx: M. le Président, il n'y a rien qui soit
bénévole dans notre société...
M. Filion: Ah! Bien, c'est comme cela que...
M. Marx: ...sauf le travail des députés.
M. Filion: Non, mais quand même, je pense que le ministre
prend cela à la légère. Le premier ministre nous a
annoncé la formation d'un comité de bénévoles sur
la déréglementation. En étudiant les crédits, on y
retrouve un montant de 200 000 $ et le ministre nous dit que c'est pour payer
les bénévoles.
M. Marx: J'aimerais vous dire qu'on n'a pas demandé
à ces membres bénévoles de venir avec leurs tablettes et
leurs crayons, par exemple. On a décidé de leur fournir des
crayons et des tablettes lors des réunions. Je pense que c'est
important. Maintenant..,
M. Filion: Même quand les réunions ont lieu au
Canadian Club.
M. Marx: À ma connaissance, il n'y avait pas de
réunion au Canadian Club. De toute façon, je n'étais pas
invité. Peut-être que le député était
invité.
M. Filion: Sérieusement, M. le ministre! M. Marx:
C'est très sérieux.
M. Filion: Sérieusement, 200 000 $. Enlevons les crayons,
parce que je peux vous en fournir des crayons à mine et des tablettes
pour 200 000 $.
M. Marx: Ce sont des prévisions budgétaires, ce ne
sont pas les dépenses du comité. Par exemple, il y a les
fournitures; il faut acheter les fournitures de bureau. On a prévu cela.
Il faut prévoir des communications, il faut envoyer des
communiqués et le cas échéant, des frais de voyages. Il y
a certains membres du comité qui viennent de loin, qui ne sont pas des
résidents de la ville,
M. Filion: Sur les 200 000 $, la ventilation donne combien en
honoraires pour les bénévoles?
M. Marx: Quant aux honoraires, je ne pense pas que qui que ce
soit ait été payé jusqu'à maintenant. De toute
façon...
M. Filion: Je vous demande quelles sont les
prévisions.
M. Marx: Les prévisions.
M. Filion: Les prévisions de dépenses, comme
l'ensemble des crédits qu'on a devant nous, ce sont juste des
prévisions.
M. Marx: Cela peut aller de 1 $ en augmentant. On commence avec 1
$ et ça peut aller à 400 $, 800 $, 1200 $. Je ne peux pas vous le
dire maintenant parce que nous n'avons pas reçu de factures. Cela veut
dire que les gens n'ont pas encore été payés pour les
études qu'ils ont faites. Quand ces gens nous enverront leurs factures
pour les études qu'ils auront faites, ce sera tout connu et il me fera
plaisir de dire au député de Taillon combien on a
dépensé.
M. Filion: M. le ministre, vous êtes à la tête
d'un ministère sérieux. On est arrivé au chiffre de 200
000 $ pour les prévisions
de dépenses des comités de bénévoles. Est-ce
que vous pouvez m'envoyer demain - si vous ne pouvez pas ce soir - la
ventilation de ce montant? Je suis sûr qu'on n'est pas arrivé
à 200 000 $ pour des crayons, des tablettes et des voyages
Montréal-Québec. Parce que dans les comités de
bénévoles, on le sait, il n'y a personne qui vient des
régions. Ce sont tous des gens, à peu près, qui viennent
de Montréal et peut-être quelques-uns de Québec. Est-ce que
c'est possible, M. le ministre? Vous ne le pouvez pas ce soir?
M. Marx: Je peux vous dire tout de suite, par exemple, qu'il y a
des milliers de dollars qui sont prévus pour les frais de voyages. Quand
les gens voyagent, ils sont payés comme le député est
payé quand il vient à Québec. Il y a aussi des contrats de
services et des contrats de recherche qui seront donnés à des
personnes qui ne font pas partie du comité et ainsi de suite.
M. Filion:
Ma question: II y a 200 000 $, est-ce que c'est
possible de les ventiler sur une feuille? 5i vous ne pouvez pas me remettre
cela ce soir, pouvez-vous me le remettre demain?
M. Marx: Disons qu'on prévoit, par exemple, 150 000 $ pour
les services professionnels.
M. Filion: Bon, enfin. M. Marx: Enfin, là,
j'ai...
M. Filion: 150 000 $ pour les services professionnels?
M. Marx: Ce sont des projections. M. Filion:Oui,
oui, je le sais.
M. Marx: Cela veut dire que si l'argent n'est pas
dépensé, ce seront des crédits périmés.
M. Filion:
Tout cela, ce ne sont que des projections, M.
le ministre. Je sais cela. Cela fait seulement quatre mois que je suis
député, mais j'ai appris quand même ce qu'était un
crédit, ce qu'on faisait ici et ce qu'était un crédit
périmé.
Donc, 150 000 $, c'était ma question...
M. Marx: Je vais vous donner ce que j'ai, M. le Président.
J'ai les prévisions de fonctionnement: communications, 25 000 $;
services, 11 050 $; fournitures, 5000 $; équipements, 4000 $, autres
dépenses, 16 000 $. Je pense qu'il n'y a pas de secret-là. De
toute façon, tout ce qu'on dépense au gouvernement est public. On
va en informer les députés.
M. Filion:
Rapidement, qui sont les membres du
comité bénévole de déréglementation?
M. Marx: Les membres ont été cités tellement
de fois dans les journaux, mais je vais vous répéter cela. Il y a
Me Reynold Langlois, avocat; Me Jean-Luc Migué, économiste; Me
René Dussault, juriste; Mme Anne-Lise Brien, administratrice; M. Pierre
Clément, président de la Fédération des entreprises
indépendantes; M. Sébastien Allard, président du Conseil
du patronat.
M. Filion:
Justement, rapidement, le nouveau
ministère - j'appelle comme cela le nouveau ministère de la
Justice - aura probablement un nouvel organigramme en ce qui concerne sa haute
direction. Ce document-là, je suppose, sera disponible uniquement
après l'adoption de la législation ou est-ce qu'il existe
déjà?
M. Marx: Nous sommes en train de refaire l'organigramme parce
qu'il faut biffer quelques organismes de l'organigramme.
M. Filion:
Adopté, M. le Président, le
programme 5.
M. Marx: On va avoir un organigramme plus petit, parce qu'il y a
aussi le Solliciteur général qui est responsable de certaines
directions générales.
Le Président (M. Marcil): Le programme 5 est
adopté.
Une voix: Adopté sur division.
Le Président (M. Marcil):
Sur division. Cela va?
J'appelle le programme 6, Enregistrement...
Malheureusement, le temps prévu à cette commission est
écoulé. On va aller jusqu'à 22 heures, encore cinq
minutes.
Le programme 6, Enregistrement officiel. Je vais arrêter une
minute avant, M. le député de Taillon, pour compléter.
Enregistrement officiel
M. Filion:
En ce qui concerne les bureaux
d'enregistrement, est-ce que le ministre envisage, oui ou non, des
fermetures?
M. Marx: J'envisage des fermetures.
M. Filion:
Est-ce que le ministre peut
immédiatement déposer la liste de ces fermetures?
M. Marx: Sûrement pas. M. Filion: Sûrement
pas.
M. Marx: Je prévois des regroupements. Vous savez, ce
n'est pas nouveau, le regroupement des bureaux d'enregistrement. On
prévoit certains regroupements pour rationaliser des dépenses. On
va offrir les mêmes services à la population. Il y a au moins un
bureau d'enregistrement où il n'y a pas d'employés. Je ne pense
pas que vous allez insister pour que je garde ce bureau d'enregistrement
ouvert. Je ne peux pas vous fournir la liste ce soir...
M. Filion: Vous devez être très bien
informatisé.
M. Marx: On va l'informatiser, mais il n'y a personne là.
J'espère que vous n'allez pas me forcer à garder ce bureau
d'enregistrement ou d'autres ouverts parce que c'est nécessaire
pour...
M. Filion: Tout ce qui m'intéresse, c'est la liste...
M. Marx: La liste, non, je ne peux pas.
M. Filion: ...des fermetures envisagées des bureaux
d'enregistrement.
M. Marx: M. le député, vous devez savoir que pour
regrouper...
M. Filion: II faut un amendement à la loi.
M. Marx: C'est cela, il faut...
M. Filion: Un amendement à la loi, je le sais.
M. Marx: ...un projet de loi. Et vous allez tout voir
bientôt.
M. Filion: D'accord. Mais c'était surtout la liste des
fermetures envisagées, c'est cela qu'était ma question.
M. Marx: Rien n'est coulé dans le ciment. Si le
député a des suggestions pour des fermetures, je suis prêt
à les considérer. Je vais vous dire, à cause du faible
nombre de députés dans l'Opposition, je ne pense pas qu'on ait
même pensé à fermer un bureau d'enregistrement dans le
comté d'un député de l'Opposition. Mais, si vous avez des
suggestions, il me ferait plaisir de les considérer.
M. Filion: Des suggestions...
M. Marx: Vous pouvez demander à vos recherchistes qui sont
très au courant.
M. Filion: Je peux avoir des suggestions, mais dans les
deux...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Marx: Ils sont très au courant de tous les
problèmes.
M. Filion: J'en ai des suggestions.
M. Marx: J'ai pensé de les consulter moi-même. Cela
va les gêner, cela ne me gênera pas.
M. Filion: Mais les suggestions vont dans les deux sens, M. le
ministre. Des suggestions, on peut en faire non seulement pour faire en sorte
que les organismes soient plus gros, mais pour faire en sorte, dans certains
cas, que les organismes soient plus petits. "Small is beautiful", ce n'est pas
moi qui l'ai dit, dans une langue que vous connaissez bien.
Deuxièmement, dans ce cas-ci, les suggestions peuvent aller dans
les deux sens, ne l'oubliez pas, c'est dangereux! Cela va pour ce
programme.
M. Marx: Sérieusement, si vous avez des suggestions pour
des fermetures, nous sommes prêts à les accepter et à agir
en conséquence.
M. Filion: Ou des ouvertures.
Le Président (M. Marcil): Le programme 6 est-il
adopté?
M. Filion: Oui; le programme 8 également.
Le Président (M. Marcil): J'appelle le programme 8.
Adapté également. Programme 9, Affaires législatives.
Affaires législatives
M. Filion: Au programme 9, j'avais beaucoup de questions sur le
projet de loi 12, on va y revenir. J'espère qu'on va aller en commission
parlementaire bientôt.
M. Marx: La semaine prochaine, j'espère, M. le
député.
M. Filion: Oui. J'ai traité dans mon allocution
d'ouverture du CRCR. Mon opinion y était contenue. Je n'ai pas d'autre
commentaire ou d'autre question à poser sur le programme 9.
Le Président (M. Marcil): Le programme 9 est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Programme 10,
Affaires criminelles et pénales.
Affaires criminelles et pénales M. Filion: J'ai deux
questions.
Le Président (M. Marcil): Malheureusement...
M, Filion: Avec la permission de mes collègues, j'ai juste
deux questions sur le dernier programme... Le Président (M. Marcil):
Très brièvement, M. le député de Taillon.
M. Filion: Voici la première question. J'ai vu dans un
journal que le ministre songeait ou n'écartait pas la possibilité
d'une législation sur la question des délateurs, afin de
réglementer ou de légiférer la répartition des
tâches entre la police, les procureurs, dans leur négociation avec
les délateurs.
M. Marx: Mais je pense que...
M. Filion: Est-ce que le ministre maintient toujours cette
position stipulant qu'il n'écarte pas la possibilité de
légiférer là-dessus?
M. Marx: Je n'écarte pas la possibilité, mais on
n'a pas le temps dans mon ministère à cette session, parce qu'on
travaille sur tellement de dossiers, on n'a pas le temps de faire vraiment une
étude sur ce dossier. Mais j'ai demandé une étude. On me
dit que l'étude est déjà commencée. J'ai
l'intention de préparer une étude sur cette question et de voir
ce qu'on fait dans d'autres juridictions en Amérique du Nord, en France,
dans d'autres pays. C'est une question qui est traitée ailleurs aussi
et, avant de procéder ici par la voie législative ou
réglementaire ou d'une autre façon, j'aimerais voir ce qu'on fait
ailleurs et avoir une étude de fond sur cette question.
M. Filion: Dernière question. Le ministre a
déposé le rapport Bernier sur la boxe, c'est-à-dire la
partie du rapport qui contenait les recommandations du juge Bernier.
Également - je pense que c'est dans le rapport - on parlait de la
possibilité d'un combat truqué à Montréal qui a
été tenu, si ma mémoire est bonne, avec un des
frères Hilton et un dénommé Benites. Est-ce qu'à la
connaissance du ministre il y a une enquête sur ce combat truqué
qui, s'il est vrai qu'il a eu lieu, aurait été une gigantesque
fraude aux dépens de tous les amateurs de boxe, dont je ne suis pas,
mais je sais que le ministre est friand de ce sport. Est-ce qu'il y a une
enquête en cours sur cette fraude?
M. Marx: Quand a eu lieu le combat de boxe Hilton-Benites?
C'était cette année?
Vous avez fait référence à...
M. Filion: Oui, je pense que c'est un combat qui a eu lieu l'an
dernier.
M. Marx: L'an dernier? Je pense que cela a eu lieu...
M. Filion: Ce n'était pas dans le rapport.
M. Marx: Cela n'est pas dans le rapport, c'est exactement cela.
Cela veut dire...
M. Filion: En fait, c'est venu en même temps que les
révélations du contenu du rapport Bernier que vous n'aviez pas
rendu public mais qui, manifestement, a pris la direction d'un canal qui avait
l'air d'une fuite.
M. Marx: Oui, mais...
M. Filion: Alors, cela a été rendu public par les
journaux à cette époque.
M. Marx: Oui, c'est cela que j'ai voulu dire au
député: qu'il s'adresse au mauvais ministre, parce qu'en fait les
enquêtes policières...
M. Filion: Oui, je sais cela.
M. Marx: ...relèvent du Solliciteur
général.
M. Filion: Je sais cela. Mais vu que le ministre
s'intéressait beaucoup aux affaires de boxe...
M. Marx: Oui, mais parce que les enquêtes policières
relèvent d'un autre ministre, je ne suis pas au courant.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, de même
que les autres membres de cette commission, le temps est écoulé.
J'appelle le programme 10. Est-ce qu'on peut dire que le programme 10 est
adopté?
M. Filion: On me signale qu'en ce qui concerne votre
dernière réponse il y a un service des fraudes à votre
ministère.
Le Président (M. Marcil): J'ai demandé si le
programme 10 est adopté. M. le député de Taillon.
M. Marx: Adopté.
Une voix: Adopté.
Des voix: Ha!Ha! Ha!
Le Président (M. Marcil): M. le député
de Taillon.
M. Filion: C'était quoi, votre réponse, encore?
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Taillon, est-ce que le programme 10 est adopté? Programme 11,
"Indemnisation des victimes d'actes criminels".
Indemnisation des victimes d'actes criminels
M. Filion: En ce qui concerne le programme 11, j'ai juste une
question.
Le Président (M. Marcil): Notre temps est
écoulé, M. le député de Taillon. Nous
dépassons déjà l'heure.
M. Filion: Oui. Est-ce que vous me permettez une question?
Le Président (M. Mardi): Est-ce que les membres de cette
commission acceptent? Une seule question.
M. Filion: Évidemment, on parle du programme de l'IVAC. En
étudiant les crédits, on voit une coupure de 437 000 $
prévue au niveau des transferts donc, on peut le supposer, au niveau des
montants versés aux bénéficiaires du programme.
M. Marx: ...les prestations n'ont pas été
modifiées.
M. Filion: Oui mais, quand même, il y a une diminution de
437 000 $ à la rubrique Paiements de transferts, cette rubrique
signifiant sûrement ou probablement les montants versés aux
bénéficiaires du programme d'indemnisation des victimes d'actes
criminels.
M. Marx: Oui, mais on me dit que ce sont des crédits non
récurrents. Je peux vous fournir des explications par lettre si vous
voulez. Il n'y a aucun problème.
M. Filion: On va faire cela à la demande des membres de la
commission.
Le Président (M. Marcil): Programme 11, adopté? M.
le député de Taillon.
M. Filion: Sur division.
Le Président (M. Marcil): Sur division. Nous ajournons
à demain matin, 10 heures, pour le programme 7...
M. Marx: M. le Président.
Le Président (M. Marcil): ...dans cette même
salle.
M. Marx: Voulez-vous me permettre de remercier les membres de la
commission pour leur collaboration et les fonctionnaires du ministère
qui font du temps supplémentaire sans indemnité. J'aimerais
remercier tous les fonctionnaires du ministère qui m'ont aidé
à me préparer pour l'étude des crédits et
également les dirigeants des organismes qui sont ici aujourd'hui. Il va
de soi que, sans eux, il serait impossible d'avoir un ministère qui
fonctionne de façon efficace.
J'ai toujours dit que ce ministère était efficace,
même quand j'étais dans l'Opposition. Maintenant que je suis au
ministère, je vois que j'avais raison.
M. Filion: M. le Président, dans la même veine, je
voudrais d'abord remercier les présidents d'organismes qui ont
accepté de participer à nos travaux. Je voudrais remercier le
ministre et son équipe. Également, je me sentirais vraiment en
reste avec le ministre, si je ne remerciais pas mes recherchistes.
Le Président (M. Marcil): À demain matin.
(Fin de la séance à 22 h 5)