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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Thursday, February 2, 2023 - Vol. 47 N° 4

Special consultations and public hearings on Bill n° 3, An Act respecting health and social services information and amending various legislative provisions


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

11 h 30 (version non révisée)

(Onze heure quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers collègues, je constate que nous avons quorum. Et nous sommes en mesure de pouvoir reprendre et poursuivre nos travaux.

Comme vous le savez, la commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 3, Loi sur les renseignements de santé et de services sociaux.

Mme la secrétaire, bonjour. Y aurait-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Monsieur Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par Madame Setlakwe (Mont-Royal-Outremont) et Monsieur Bouazzi (Maurice-Richard) par Monsieur Marissal (Rosemont).

Le Président (M. Simard) : Merci. Ce matin, nous recevons des représentants du Regroupement provincial des comités des usagers. Madame, Monsieur, soyez les bienvenus. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?

M. Hamel (Pierre) :Oui, bonjour. Pierre Hamel, je suis président du C.A. du RPCU.

Le Président (M. Simard) : Merci.

Mme Tremblay (Sylvie) : Sylvie Tremblay. Bonjour. Bonjour, M. le Président. Directrice générale du Regroupement provincial des comités des usagers.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue à vous. Et vous disposez de dix minutes.

M. Hamel (Pierre) :Alors, M. le Président, membres de la Commission, Mesdames et Messieurs...

M. Hamel (Pierre) :...les députés. Le Regroupement provincial des comités d'usagers a été fondé en 2004. Nous avons sous notre gouverne 540 comités d'usagers et de résidents à travers la province dans toutes les régions de la province, qu'ils soient publics, privés, conventionnés ou autofinancés. Nous intervenons aussi dans plusieurs enjeux concernant la santé et les services sociaux, dans l'intérêt et du point de vue de l'usager. Notre mission : défendre et protéger les droits des usagers, soutenir les comités d'usagers et de résidents dans la réalisation de leurs missions, entre autres en leur offrant de la formation, et aussi d'exercer un leadership à l'égard de l'amélioration de la qualité des soins et de la sécurité des services de santé et services sociaux sur le vaste territoire du Québec. Le mandat des comités d'usagers et de résidents est ensaché dans la Loi sur les services de santé et services sociaux aux articles 2009, 2010, 2011 et 2012. Alors, les comités des usagers sont les gardiens des droits des usagers. Tout au long de l'année, nous oeuvrons à supporter nos comités à la réalisation de leurs missions et de leurs objectifs. Plus particulièrement, nous avons... nous proposons une semaine nationale des droits des usagers et des services sociaux qui se tient habituellement en novembre.

M. le Président, nous vous remercions de nous donner l'opportunité de présenter les comités d'usagers à cette commission parlementaire. Cette présentation permettra, nous l'espérons, de tenir compte d'abord et avant tout des personnes usagères, de leurs besoins et du respect de leurs droits, en particulier le droit d'accès à son dossier d'usager et celui du droit à la confidentialité de son dossier d'usager.

Les travaux de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 3 touchent l'accès aux données, l'utilisation, la circulation, le partage des données et la conservation et la protection des données.

• (11 h 50) •

En ce qui concerne le dossier des usagers au niveau informatisé et le plus uniforme possible et le pouvoir de pouvoir le partager à travers tous les établissements de la province de Québec, nous sommes sûrs que c'est un plus pour l'usager. Par contre, nous constatons que, pour le citoyen, que nous représentons, les avancées proposées en ce qui concerne l'accès et la confidentialité de son dossier sont semées d'embûches et... dû à la complexité et aux différents acteurs qui en sont touchés.

Le projet de loi contient aussi une modification vaste, quelquefois surprenante, des cas de figure où les renseignements de santé pourront être partagés à d'autres fins que la prestation des soins et des services sociaux.

Les brèves consultations sur invitation et le très court préavis les ayant précédées sont loin de permettre la tenue d'une réflexion sociétale à ce sujet. Face à un projet d'une telle ampleur qui aura des impacts majeurs sur les usagers et sur le réseau des services... sur le réseau de la santé et des services sociaux, nous pensons que ce serait prudent de prendre le temps voulu pour approfondir et consulter l'ensemble des acteurs qui sont touchés par un tel projet de loi.

La question qu'il faut se poser : L'usager est-il servi ou desservi par ce projet de loi...

M. Hamel (Pierre) :...nous pensons que le dossier de confidentialité et le dossier appartenant à nos usagers font partie de leurs vies et de toutes les étapes qu'ils ont à parcourir d'avant la naissance jusqu'à la mort. Donc, c'est un dossier qui est excessivement important pour nos usagers et la confidentialité, et l'accès au dossier est pour nous majeur. Sur ce, je vais laisser la parole à Mme Tremblay.

Mme Tremblay (Sylvie) : Merci, M. Hamel. Donc, les questions posées sont les suivantes : Suis-je bien renseigné sur les changements à venir sur le projet de loi? Est-ce que je comprends bien les buts visés par ce projet de loi?

Les renseignements santé sont les données les plus intimes et les plus sensibles détenues par l'administration publique au sujet des individus. Leur protection est garantie à la fois par l'article 5 de la Charte des droits et libertés de la personne qui fait du droit de la vie privée un droit fondamental, et également par l'article 9 qui consacre le caractère fondamental du droit du secret professionnel.

La confiance des usagers dans le respect de la confidentialité de leurs renseignements est une condition essentielle au partage par ceux-ci de l'information sensible pertinente à leur prise en charge. Cette confiance est parfois également une condition essentielle pour qu'un usager décide d'aller chercher des soins que requiert son état.

À la lecture du projet de loi, on se demande comment... comment informer, accompagner, former les usagers et leurs proches aux changements sur l'accès et la confidentialité des données. Ainsi, nous aimerions que le gouvernement du Québec lance une campagne de sensibilisation et d'information sur les suites de ces travaux, ces modifications, et que cette campagne soit diffusée à l'ensemble de la population, et en particulier les usagers et l'ensemble des intervenants du réseau de la santé et des services sociaux.

Pour l'usager, son dossier et ses renseignements est une obligation. Le fait d'avoir de façon informatisée le plus uniforme possible et interprétable l'ensemble de l'information qui le concerne doit être soumis. Les usagers que nous représentons demandent que ce projet de loi améliore deux aspects : la capacité de consultation du dossier de façon simple et interprétable afin, comme nous le disons souvent, que le dossier suive l'usager d'un établissement à l'autre et, le cas échéant, d'une région à l'autre.

Cependant, nous avons quelques préoccupations que nous voulons porter à votre attention, particulièrement l'article 7. Cet article donne la possibilité à une personne de restreindre l'accès à certains renseignements en déterminant qu'un intervenant ou une catégorie d'intervenants ne peut avoir accès à un ou plusieurs renseignements. C'est une mesure essentielle, mais insuffisante. L'usager devrait pouvoir également confier un renseignement à un professionnel de la santé en demandant que ce seul professionnel ait accès à ce renseignement, particulièrement, je vous dirais, en matière de suivi psychosocial, dans un contexte où la confidence s'effectue dans un temps, dans un... pardon, dans le cadre d'une relation thérapeutique basée sur la relation thérapeutique personnelle avec cet individu.

Le projet de loi laisse à l'usager le fardeau de prendre l'initiative de décider s'il veut rendre certains renseignements inaccessibles à un intervenant ou à une catégorie d'intervenants. Pourquoi laisser le fardeau sur les seules épaules de l'usager? Pourquoi avoir retiré de la version antérieure du projet de loi la possibilité qu'un règlement prévu d'emblée des... prévoit d'emblée des restrictions d'accès pour certaines catégories de renseignements plus sensibles? La protection de la vie privée est essentielle. L'ouverture à certaines données sensibles à cet égard est une ligne rouge qui ne doit pas être... qu'on ne doit pas nécessairement franchir.

L'usager...

Le Président (M. Simard) : En Conclusion, s'il vous plaît.

Mme Tremblay (Sylvie) : Pardon?

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Tremblay (Sylvie) : L'usager apte et...

Mme Tremblay (Sylvie) : ...nous sommes interpellés pour cette différenciation et nous aimerions que vous preniez en considération, donc, la recommandation 3 de retirer la...

Le Président (M. Simard) : Mme Tremblay...

Mme Tremblay (Sylvie) : Désolée. Je vais finir avec ça parce que c'est essentiel

Le Président (M. Simard) : Très bien. Nous vous écoutons.

Mme Tremblay (Sylvie) : Les usagers aptes et inaptes, c'est les mêmes droits. Et là on amène une catégorie, et je vous demanderais de regarder à la page 11, deux catégories sur le droit des usagers, les aptes et les inaptes, et nous considérons que ce n'est pas possible à cette étape-ci. Je vous remercie de votre attention. Merci beaucoup.

Le Président (M. Simard) : C'est moi qui vous remercie, Mme Tremblay. Et sachez à quel point je suis désolé de devoir vous couper comme ça. C'est un rôle bien ingrat. M. le ministre, à vous la parole. Vous disposez de huit minutes dix secondes.

M. Caire : Merci. Merci beaucoup. Bien, compte tenu du peu de temps, je vais y aller direct avec mes questions. J'ai cru comprendre, là, vous avez parlé de cas surprenants de partage des données. Donc, vous voyez dans cette loi-là une possibilité de partager les données qui fait en sorte que l'information de santé va suivre le patient, mais vous voyez aussi un partage de données qui va au-delà de ça. Vous l'expliquer comment? Puis en quoi vous trouvez ça surprenant? Et surtout en quoi vous trouvez ça inquiétant?

Mme Tremblay (Sylvie) : J'aimerais vous revenir sur les constats que l'on fait au fur et à mesure que nous travaillons avec les usagers. Le réseau de la santé et des services sociaux est toujours en bouleversement. Ce qu'on se rencontre dans ce contexte-là, c'est que beaucoup d'intervenants qui ne sont pas membres de l'ordre professionnel ont accès, et on ne sait pas trop comment, aux dossiers des gens. Alors, on remarque que la confidentialité est toujours mise à mal. Il y a des agences qui sont maintenant dans le réseau et qui peuvent voir... et on le voit quotidiennement, particulièrement pour les clientèles vulnérables qui veulent avoir accès aux soins ou non, et là il y a une catégorie de monde qui peuvent avoir accès sans qu'on puisse... sans que les usagers eux-mêmes aient droit au chapitre à ce niveau-là.

M. Caire : Madame Tremblay, si je peux me permettre, la situation que vous décrivez, ça, c'est la situation actuelle ou c'est la situation telle que vous la voyez après l'adoption du projet de loi?

Mme Tremblay (Sylvie) : Nous ne pensons pas que le projet de loi, dans ce contexte, va permettre une étanchéité. Au contraire, ce qu'on voit dans le projet de loi, c'est qu'il y a beaucoup d'ouverture, entre autres, pour d'autres missions. Les ordres professionnels, par exemple, pour des préposés, il n'y a pas de question sur ça. Donc, vous ouvrez au-delà pour des catégories d'emplois où qu'ils pourront avoir accès sans qu'on puisse, évidemment... On ne restreint pas nécessairement la confidentialité. Au niveau des...

M. Caire : Mais, si je peux me permettre, parce qu'il y a un article qui stipule clairement que... n'ont accès aux informations que ceux qui ont une prestation de services à donner et n'ont accès qu'aux seules informations nécessaires à leurs prestations de service. Cet article-là, pour vous, ce n'est pas assez clair, ce n'est pas assez restrictif?

Mme Tremblay (Sylvie) : Ce n'est pas... Bien, c'est-à-dire que ce qu'on comprend du projet de loi à cette étape-ci, c'est qu'il y a une ouverture plus grande pour donner l'accès à la fois à la recherche, aux intervenants qui ne sont pas ciblés par des ordres professionnels, que ce soit aussi dans le secteur privé pour d'autres situations, les services psychologiques aussi, qui ne sont pas liés directement au secteur public, où les gens pourront, par catégorie, par exemple, pouvoir avoir accès au dossier. Donc, on trouve que ce n'est pas assez étanche.

• (12 heures) •

M. Caire : Mais je veux juste être clair, là, vous, pour l'usager... bon, par exemple, moi, je consomme des services psychologiques au privé, vous considérez que le psychologue au privé ne devrait pas avoir accès à l'ensemble de mes informations dans sa prestation de services? Parce que la loi, elle est très claire, là, elle dit que vous n'avez accès qu'aux seules informations nécessaires à votre prestation de services. Là, là-dessus, la loi est très claire. Donc, vous, vous trouvez que ce n'est pas suffisamment restrictif?

Mme Tremblay (Sylvie) : Dans le contexte actuel, les services psychosociaux... par exemple, si on parle de psychologie, 75 % des services en psycho sont donnés par de la pratique privée. Cette pratique privée là est encadrée souvent ou pas par... soit par les... les assureurs par exemple. À partir du moment où vous, ou M. le ministre, ou moi-même, ou d'autres vont voir un privé pour...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Tremblay (Sylvie) : ...une consultation psychologique, c'est souvent défrayé par des assureurs, ou pas. Dans ce contexte-là, ce n'est pas toujours au dossier du patient, et, souvent, les gens veulent, dans leurs étapes de vie, garder confidentielles ces informations-là. Ce que l'on vous dit, c'est, dans un contexte où cela n'est pas balisé - on considère que ça ne l'est pas tout à fait - la personne pourrait être... on pourrait avoir accès à des données qui sont sensibles, et qu'elle ne veut pas qu'on ait accès. Alors on vous dit : Faites attention. L'ordre professionnel des psychologues, je ne sais pas qu'est-ce qu'ils en pensent, on ne les a... on n'a pas entendu parler de leurs préoccupations, par ailleurs.

Mais ce qu'on vous dit, c'est que beaucoup, beaucoup, beaucoup de services, particulièrement au niveau des clientèles vulnérables, particulièrement au niveau des services sociaux, ont été liquéfiés dans le secteur public, et on considère que, dans ce contexte-là, il faut être excessivement prudents. Ce n'est pas vrai que, quand on va en privé, que les usagers veulent que tout soit accès... et disponible. Que le médecin traitant puisse, dans une relation de confidentialité, une santé, avoir accès à notre vie, et que l'usager décide de lui en faire part, c'est une chose, mais, pour autres choses, je pense qu'il peut y avoir des dérives. C'est la même chose pour les personnes inaptes, d'ailleurs.

Alors, pour... l'article 22 dit : le tuteur, ou le curateur, ou... ne peut avoir accès au dossier que ce sur quoi il est tuteur sur la personne. Alors, une personne âgée... Quand nous serons âgés, vous et moi, on va avoir des étapes de vie qu'on ne voudra pas dire, et là ce que ça fait, dans l'ouverture, c'est que votre tuteur, votre curateur peut avoir accès à des données que vous n'avez jamais voulu dire et que, là, il va y avoir accès. Alors, ce qu'on vous dit, c'est que, par exemple, si la personne devient inapte et que, là, le curateur ou le protecteur dit : Aïe! tu as eu ça dans ta vie, toi... puis là il peut y avoir, même, de la maltraitance, là, par ailleurs, parce qu'on n'a pas tout divulgué. Il faut avoir des secrets dans la vie, et on a peur, à cet égard, qu'on amène deux droits, là, au niveau des inaptes et des aptes. Alors, les droits s'appliquent pour tout le monde, donc il ne faut pas ouvrir les choses.

J'ai... C'est très rapide, hein, d'avoir huit minutes avec vous, là, vous comprendrez. Vous allez lire le mémoire...

M. Caire : Mais on va...

M. Montigny : Très rapide...

Le Président (M. Simard) : Oui, je cède la parole au député de René-Lévesque.

M. Montigny : Très rapide, une petite question. Vous savez, il y a des... dans le domaine de la psychologie, il y a certains psychologues qui travaillent à la fois au public et au privé, par exemple, une journée au privé. Alors, si je comprends bien, pour vous, il ne devrait pas y avoir accès quand il est au privé, mais il devrait y avoir accès quand il est au public, aux données. C'est-u ça?

Mme Tremblay (Sylvie) : Quand les travailleurs sociaux travaillent au public, quand les psychologues travaillent au public, il y a le dossier santé. Le dossier est inscrit, les gens peuvent avoir accès. Le tableau des travailleurs en services sociaux, les psychologues et d'autres domaines de la santé et des services sociaux, c'est beaucoup au privé, et ils sont de moins en moins au public. Donc, il y a déjà des lignes, là, par rapport à ça.

Le Président (M. Simard) : M. le ministre, pour les 30 secondes qui restent. Ça vous va? Alors, je cède la parole à la députée de Mont-Royal-Outremont, qui dispose de 6 min 45 s.

Mme Setlakwe : Merci. Merci, M. Hamel, Mme Tremblay, soyez rassurés, on a votre mémoire, qui est très détaillé, et pour lequel on vous remercie. Juste d'entrée de jeu, vous les posez, les questions fondamentales, dans votre mémoire, et soyez rassurés. Vous avez raison, ce sont des enjeux tellement importants, il ne peut pas y avoir de précipitation dans notre réflexion, pour s'assurer d'avoir pensé à tout et d'avoir... On va prendre notre temps, dans ce sens-là, inquiétez-vous pas. Vous dites aussi que le projet de loi doit s'accompagner d'une campagne de sensibilisation, d'information. C'est noté, effectivement. Mais là, nous, notre devoir, là, aujourd'hui, c'est de... bien, on est à l'écoute, mais on veut voir si le projet de loi, dans son état actuel... si on a atteint l'équilibre, là, au niveau des objectifs souhaités, tout en protégeant la confidentialité et la protection des informations de vie privée.

À la lecture de votre mémoire et à l'écoute de vos interventions verbales aujourd'hui, je ne peux pas m'empêcher, là, de vous demander... J'ai de la difficulté à dégager une appréciation générale, là. Est-ce que... Puis vous posez même la question : Est-ce que l'usager, il est servi ou desservi? Quelle est votre appréciation générale? C'est parce qu'on apprécie, là, que vous entriez dans le détail puis ça, on va y venir en étude détaillée, tout ça, puis... mais on aimerait...

Mme Setlakwe : ...Votre appréciation globale de... Est-ce que vos usagers sont généralement bien servis? Quels sont les éléments pour lesquels on est partis dans la bonne direction?

Mme Tremblay (Sylvie) : Alors, d'entrée de jeu, on vous a... on a écrit, dans le Mémoire, il y a deux aspects importants des droits, c'est-à-dire l'accès et la confidentialité. Ce qu'on vous dit, c'est que c'est très bien d'ouvrir l'accès interportable. Parce qu'on se rend compte dans le quotidien, c'est que les usagers, dans leur dossier, quelquefois ils vont dans une autre région, quelquefois ils sont soignés par... essentiellement. Et là, le dossier ne suit pas. Et ça, on trouve que c'est une avancée. Ça va permettre un accès plus intéressant et plus simple aux intervenants de la santé, particulièrement le médecin traitant.

Au delà, la confidentialité, là, on est un petit peu moins bien desservis. Dans le contexte qu'on vous résume dans le présent mémoire, on a des questions substantielles, là, par rapport à la confidentialité, et au-delà, je pense que le Collège des médecins en a fait part aussi, la notion de traitement avec le professionnel de la santé avec qui on travaille, la notion de confiance à toutes nos étapes de vie. Pierre le disait précédemment, nous, on représente les gens qui sont à la fois à la DPJ... jusqu'à la fin de vie. Il y a des étapes assez cruciales dans nos dossiers. Et il y a des étapes, et des étapes de vie qui doivent rester confidentielles, particulièrement à l'enseignement, à la recherche, et autres.

Alors, pour ce qui est de l'accès, on est assez contents, mais, pour ce qui est de la confidentialité, là, on a beaucoup, beaucoup de questions.

Mme Setlakwe : Très bien. Merci. Peut-être que le projet de loi... puis là, je vais vous poser la question, là, mais vous ne voyez pas que peut-être le projet de loi n'est pas assez détaillé? On laisse beaucoup de... peut-être de... il y a des notions qui sont implicites. Et on laisse aussi beaucoup de rédaction, beaucoup de... Il y a une grande partie du libellé qui va se retrouver dans des règlements à suivre. Est-ce que vous pensez qu'il y a un manque de précision? Parce que, pour moi, il y a des principes de base, on donne le contrôle, moi, si je l'interprète bien, là, à l'usager. C'est l'usager qui a le contrôle. Donc, la donnée suit l'usager, et on lui donne, il me semble, le contrôle de qui va avoir accès et à quelles fins. Mais est-ce que... Et là, je vous... pour vous, ce n'était pas clair? Est-ce qu'il manque des éléments, peut-être des éléments de principe, des notions de base qui nous aideraient à mieux le comprendre puis à mieux le vendre à la population? Je vous pose la question.

Mme Tremblay (Sylvie) : Je reviens à ce que l'usager, il a besoin de connaître son dossier, de voir comment il évolue et s'il est exact. C'est de ça dont on a besoin. On n'a pas besoin d'avoir beaucoup, beaucoup d'autres choses pour être satisfaits d'avoir accès à son dossier, que l'on puisse se faire soigner convenablement et que le médecin traitant ou l'autre, ou d'autres intervenants puissent avoir les informations suffisantes. C'est de ça dont on a besoin. On peut ouvrir ad nauseam beaucoup de critères, par règlement ou autre, mais il faut revenir à l'essentiel sur les besoins des usagers à cette étape-ci.

Pour ce qui est de... Par exemple, pour les intervenants qui ne sont pas des ordres professionnels, qui auront accès, ça, il y a vraiment un problème. Ce sera par réglementation. Alors, on considère qu'il aurait dû y avoir un petit travail supplémentaire, là, particulièrement sur l'article 36 à cet égard.

Alors, il y a des choses à bonifier, bien sûr. Mais revenons donc à l'essentiel. Oui, c'est un gros projet de loi. Il y en a pour tous. Mais revenons aux besoins essentiels des usagers. Les usagers, ils veulent deux ou trois... ils ont deux ou trois perspectives sur l'accès et la capacité d'avoir une consultation de leur dossier, mais, à ce point élargir, ce n'est pas ce que les usagers ont demandé, en tout cas.

• (12 h 10) •

M. Hamel (Pierre) :Vous savez, déjà, actuellement, dans le réseau de la santé, on a plusieurs plaintes au niveau de la confidentialité. Parce que dans les corridors, on s'échange sur la maladie de X, la maladie de Y. Nous, en tant qu'usagers, là, puis en tant que comité d'usagers, on reçoit, je vous dis, fréquemment, par semaine, des gens qui nous disent : bien, la confidentialité de notre dossier n'a pas été respectée. Et, ça, là, ce n'est pas parce que les gens ne veulent pas respecter le cadre confidentiel du dossier. Mais, dans le fil de l'action, bien, on se parle entre confrères...

M. Hamel (Pierre) :...Madame X, là, si monsieur y a ça, et les gens, à ce moment-là, disent : Bien, moi, mon dossier, il n'est pas protégé puis il n'est pas confidentiel. Quand on est sur une civière, trois, quatre, trois, quatre personnes collées sur une civière puis que le médecin nous dit qu'est-ce qu'on a, je veux dire, il n'y a aucune confidentialité là-dedans. Et ça, on voit ça à tous les jours. Donc, c'est pour ça qu'on a une crainte au niveau de la confidentialité des dossiers.

Mme Setlakwe : Merci. Mais est-ce que vous...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Mme Setlakwe : En conclusion. Bon, on va conclure sur ça. La notion de confidentialité, vous voyez, elle est déjà... elle peut déjà être mise à risque, là, dans le contexte actuel et même dans le passé, je veux dire, ce n'est pas nouveau. Vous voyez qu'on va être plus à risque en rendant la donnée informatique...

M. Hamel (Pierre) :Bien, en partageant...

Le Président (M. Simard) : Rapidement, s'il vous plaît.

M. Hamel (Pierre) :...à tout le monde, oui. Moi, je pense qu'il y a un risque.

Mme Setlakwe : J'avais plus de questions, mais c'est... Merci beaucoup.

M. Hamel (Pierre) :De rien.

Mme Setlakwe : On va poursuivre avec un autre collègue.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député de Rosemont, vous disposez de deux minutes quinze secondes.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Monsieur Hamel, madame Tremblay, merci d'être là. Vous trouvez que vous n'avez pas beaucoup de temps, croyez-moi, je sympathise et je comprends. Donc, je vais y aller avec une question, puis on n'aura jamais le temps de répondre, mais ce n'est pas grave, on va mettre la balle en jeu, là. Vous dites qu'apte, pas apte, mêmes droits. Le problème, c'est quand on est inapte, on ne peut pas exercer nos droits. Est-ce que vous voyez un mécanisme, genre, DMA mais qui serait DDA, donc demande de divulgation anticipée? Parce qu'une fois qu'on n'est plus apte on n'est pas capable de passer nos demandes, nos commandes, nos refus, nos objections. Ça fait que comment vous voyez que ça peut se... Allez-y.

Mme Tremblay (Sylvie) : Ce que je dis, c'est que les mêmes droits doivent s'appliquer pour les... Ce que l'on voit, ce que l'on voit dans le projet de loi, c'est qu'on ouvre le critère de nécessité. Alors, quand vous nommez quelqu'un... que vous devenez inapte, quand vous nommez quelqu'un, la personne doit être votre répondeur ou votre gardien sur la nécessité. Là, vous allez... Si on enlève la notion de nécessité, la personne pourrait avoir accès, parce que, là, vous êtes inapte, à tout un pan de votre vie que vous n'avez jamais divulgué, ce que vous n'avez pas... qui n'est pas le cas quand vous êtes apte. Alors, il n'y a pas deux droits dans cette affaire-là. Alors, tout doit être protégé, excepté la notion de nécessité. Et c'est ce qu'ont dit l'article 22 précédent et l'article 26. Alors, revoyez un peu l'ensemble pour qu'on garde la notion de nécessité sur la protection du dossier...

M. Marissal : Oui, la nécessité, donc, dans ce cas-ci... la nécessité, dans ce cas-ci, sous-traitée à quelqu'un d'autre, un tuteur ou curateur. Donc, ce n'est pas le même droit, ce n'est pas le même droit, là, on s'entend.

Mme Tremblay (Sylvie) : C'est-à-dire que le curateur ou le tuteur doit... et maintenant, si vous êtes inapte... À l'article 22, c'est sur ce qui est nécessaire que vous allez exercer ce droit. Là, on ouvre un peu sur la nécessité, et là on trouve qu'il pourrait avoir une plus large divulgation de votre dossier qui n'est pas nécessaire si vous êtes nommé curateur ou tuteur.

M. Marissal : Oui, mais, Madame Tremblay, donc, cette personne ou cette entité, tuteur ou curateur, devient donc gardien et l'expression de vos droits que vous n'êtes plus en mesure...

Mme Tremblay (Sylvie) : Par nécessité, par nécessité.

M. Marissal : D'accord. Donc, c'est le juge de la nécessité ou l'arbitre de la nécessité.

Mme Tremblay (Sylvie) : C'est le juge de la nécessité. Oui, mais on n'ouvre pas sur d'autres affaires qui étaient dans le dossier parce que ce n'est pas nécessaire sur le rôle que vous allez jouer.

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Marissal : Je comprends. Bien, merci. Mais, dites-le pas, le président nous a laissé plus de temps aux deux en même temps, ça fait qu'on le remercie.

Le Président (M. Simard) : Aux deux, aux deux partis d'opposition, oui. Alors, madame Tremblay, Monsieur Hamel, merci beaucoup pour la qualité de votre présentation. Merci d'avoir répondu à l'appel.

Sur ce, nous allons suspendre nos travaux. Et, et, et je vous laisse entre de très bonnes mains, ma collègue la vice-présidente de notre commission, la députée de Bourassa-Sauvé, qui va poursuivre, donc, la présidence de ces auditions. Au plaisir.

(Suspension de la séance à 12 h 15)

(Reprise à 12 h 19)

La Présidente (Mme Cadet) : Bonjour à tous. Nous allons reprendre les travaux. Merci beaucoup de m'accueillir à titre de présidente pour la première fois de cette...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Cadet) : merci, merci. Je l'espère.

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de l'Institut national de santé publique du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de dix minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé. Merci.

• (12 h 20) •

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Merci beaucoup. Bonjour, Mme la Présidente, chers membres de la Commission. Mon nom est Pierre-Gerlier Forest. Je suis le président-directeur général de l'Institut national de santé publique. Puis je suis accompagné de trois excellents collègues, madame Valérie Émond, qui est la directrice scientifique du Bureau d'information et d'études en santé des populations, elle est aussi responsable de l'infocentre, qui est hébergé par l'INSPQ, le Dr Éric Litvak, qui est vice-président adjoint aux affaires scientifiques de l'Institut, et puis madame Maude Chapados, qui est conseillère scientifique en analyse de politique publique puis qui a piloté notre groupe de réflexion sur ce projet. Ils ont donc tous participé très activement à nos travaux de réflexion autour du projet de loi trois et peuvent tous répondre à vos questions pendant la période de questions.

Je pense que le point de départ, c'est de vous dire que l'INSPQ salue avec enthousiasme l'intention gouvernementale d'élargir, de démocratiser, de pérenniser l'accès sécuritaire aux renseignements de santé. Nous pensons que le projet de loi trois jette les assises d'une gestion de la donnée qui sert bien notre vision d'une santé publique moderne, d'une santé publique performante. Il n'y a pas de santé publique sans données. Vous savez peut-être que l'acte de naissance de la santé publique au milieu du XIXᵉ siècle, c'est un médecin anglais qui a l'idée de croiser des données de distribution d'eau potable... pardon, de distribution d'eau potable avec les cas de choléra dans la population à Londres, qui, pour la première fois, donc, va utiliser des modèles qui vont permettre des interventions. Alors, vous vous imaginez aussi que cette façon de voir les choses, d'utiliser les données, ça a encore plus de force et de pertinence au XXIᵉ siècle pour des gens comme nous.

On vous remercie, Mme la Présidente, de l'occasion qui nous est donnée de clarifier certaines dispositions, d'apprécier...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...alors leur impact, leur implication pour un organisme de santé comme le nôtre. Mais peut-être que ça vaut la peine de présenter l'INSPQ. Nous sommes le premier centre d'expertise et de référence en santé publique au Québec. Nous soutenons le ministre de la Santé, les autorités régionales de santé et puis les établissements du réseau. Dans tous les problèmes, les cas de santé publique, nous leur fournissons de l'expertise, des conseils. Il se trouve qu'un de nos rôles essentiel, c'est d'informer la population sur son état de santé et le bien-être, sur les problèmes en émergence et sur tout ce qu'on a vu avec beaucoup de plaisir dans le projet de loi, à l'article 3, les facteurs déterminants de la santé. C'est un des rôles de l'institut d'informer la population sur ce sujet. Vous vous demandez peut-être quand même ce que ça signifie, les données, concrètement, pour l'INSPQ. Je vais vous donner quelques exemples. C'est nous qui avons soutenu le développement du passeport vaccinal par le développement du registre de vaccination pendant la pandémie de COVID-19. Tous les jours, l'INSPQ alimente les tableaux de bord du ministre pour l'infocentre, de façon à documenter ces tableaux de bord autour des problèmes de santé publique. Et puis on génère des données sans arrêt sur les comportements de santé des Québécoises et des Québécois. On vous raconte ce qu'ils mangent, ce qu'ils boivent, ce qu'ils fument, et puis, depuis quelques années, on s'intéresse aussi à ce qu'ils regardent parce que ça a aussi un impact sur leur santé.

Je pourrais continuer longtemps, mais je voudrais me concentrer sur trois grands objectifs aujourd'hui, qui sont les trois grands objectifs que nous avons poursuivis dans notre mémoire. La première chose, je pense, c'est d'essayer de montrer comment une perspective de santé publique... Le projet de loi a essentiellement, et c'est très normal, une vision clinique, une vision de gestion, mais comment une perspective de santé publique permet d'utiliser des données de santé non seulement pour mesurer les états de santé, mais aussi pour avoir la capacité d'éclairer les facteurs qui déterminent l'utilisation des services et la consommation de soins. Avec les bons algorithmes, avec les développements actuels de l'intelligence artificielle, avec des données accessibles, avec des données accessibles de bonne qualité, nous pensons que la Santé publique de l'avenir va être capable de mesurer l'effet croisé de ces facteurs déterminants, le logement, l'éducation, le travail, la structure familiale, le contexte social, l'environnement, et déterminer ce que ça implique non seulement pour la santé publique, mais pour la demande pour des programmes de santé et pour la consommation de soins, y compris la consommation médicale. C'est un domaine stratégique pour le Québec. Partout en Amérique du Nord, il y a des gens qui travaillent sur ce problème-là et il ne faudrait pas qu'on se laisse distancer par les gens qui ne partagent ni notre vision ni nos objectifs en matière de santé et de services sociaux.

Le deuxième objectif qu'on poursuit dans notre mémoire, c'est de plaider pour que soit préservée l'expertise unique de l'INSPQ en matière d'hébergement, d'analyse et d'utilisation des données, notamment en ce qui concerne, je viens d'en parler, l'appariement des données, le jumelage des données parce que c'est ce qui nous permet de remplir nos mandats de soutien aux décisions en épidémiologie, en environnement, en matière de comportements à risque. C'est ce qui nous permet de parler de façon informée du cancer du sein, des suicides, de la consommation d'alcool, de l'exposition aux polluants atmosphériques, des blessures à vélo, des virus respiratoires. C'est le quotidien de l'INSPQ : utiliser des données pour documenter, pour comprendre, évidemment, pour expliquer. Si on arrivait à clarifier un certain nombre des dispositions qui se retrouvent dans le projet de loi, nous pensons que ce projet devrait mettre fin, pour un organisme comme le nôtre, à la course à obstacles pour accéder aux données de santé et donc remplir notre mission. On ne voudrait pas être soupçonnés de profilage, c'est dans l'article 15, ça, quand on identifie un risque particulier pour une communauté. On ne voudrait pas faire la file pendant des mois ou pire quand on veut obtenir ou traiter des données qui sont nécessaires pour les interventions. Regardez les articles 45 et 55, qui créent des possibilités de délais. On ne voudrait pas voir des informations qui sont essentielles tomber dans l'oubli parce qu'elles ne sont pas accessibles ou parce qu'elles ne sont plus accessibles à cause, par exemple, de l'article 16 sur la conservation des données. En fait. L'INSPQ soutient le projet de loi mais voudrait qu'on l'aménage pour donner à la Santé publique la chance de continuer le travail qu'elle fait. L'institut existe depuis 25 ans. Depuis 25 ans, on fournit de l'expertise et des conseils aux autorités publiques.

Le troisième point, c'est de plaider pour une période de transition plus substantielle pour la mise à niveau des politiques et des systèmes d'information. Je ne veux pas m'étendre sur ce sujet, mais... Parce qu'on ne questionne pas les mesures de sauvegarde qui sont dans... les mesures de précaution, qui sont dans l'article... dans le projet de loi n° 3, bien au contraire. Mais la réalité d'une organisation comme la nôtre, qui a un budget et des ressources calculées, c'est qu'on ne peut pas tout arrêter pour mettre en place le nouveau...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...Il va quand même falloir, demain, fournir des données pour le tableau de bord, continuer à faire les études que nous faisons. Et en plus, comme vous le savez sans doute, on est engagés en ce moment dans le transfert des banques de données que nous possédons, de nos centres de données dans l'infonuagique, c'est extrêmement compliqué, ça demande beaucoup de ressources, ça pose des défis techniques et sécuritaires importants. On trouve que les périodes de temps qui sont prévues dans le projet de loi sont un peu trop courtes, un peu trop serrées pour une organisation comme la nôtre. Puis encore une fois, ce n'est pas parce qu'on ne veut pas le faire, ce n'est pas parce qu'on veut se traîner les pieds, c'est simplement pour nous donner la chance de ne pas travailler dans la précipitation. Quand on travaille dans la précipitation, comme vous le savez, on travaille mal.

En conclusion, bien, on espère que... Ces considérations, elles sont appuyées par notre réflexion, par une longue expérience, encore une fois, d'utilisation des données, on espère qu'elles vont vous être utiles, qu'elles vont alimenter votre propre réflexion. Et, avec grand plaisir, on va accueillir vos questions et remercions encore une fois Mme la Présidente pour votre attention. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Cadet) : Merci beaucoup. Donc, aucune autre intervention des autres représentants? Merci. Donc, merci énormément pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Donc, le gouvernement dispose de neuf minutes 30 pour intervenir. M. le ministre... Ah...

Une voix : ...ma collègue d'Huntingdon qui va ouvrir le feu.

La Présidente (Mme Cadet) : Parfait. Mme la députée d'Huntingdon, alors la parole est à vous.

Mme Mallette : Bonjour. La question, je vais aller rapidement, on n'a pas beaucoup de temps : selon vous, si le projet de loi trois avait été en place lors de la COVID-19 ainsi que les systèmes inhérents, naturellement, qu'est-ce que ça aurait eu comme impact sur vous et sur les décisions du ministère de la Santé et des Services sociaux? Donnez des exemples concrets, s'il vous plaît.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...fournit une grande partie de l'analyse de données pour le ministère. Puis, Valérie, évidemment, tient le registre, peut aussi donner la...

M. Litvak (Éric) : J'ai un peu l'impression que c'est une question piège.

Mme Mallette : Pas du tout.

M. Litvak (Éric) : Mais je pense que c'est d'abord très difficile de retourner en arrière puis d'essayer de se demander, à chacune des phases et des étapes et des périodes qu'on a vécues, en quoi ça aurait été différent, là. Donc, honnêtement, je ne m'aventurerais pas trop loin à essayer de répondre à ça. Puis je pense que dans le contexte d'urgence qu'on a vécu, il y a beaucoup d'aménagements qui ont été pris pour qu'on ait accès aux données dont on avait besoin. Mais ce qu'on peut dire, c'est, en rétrospective, beaucoup de ces choses-là n'étaient pas très bien prévues, pas très bien organisées, puis on a dû un peu les construire puis les développer au fur et à mesure. Et je pense qu'avec un... ce Projet de loi là puis tous les aménagements qu'il ramène, bien, une prochaine fois, ce serait sans doute encore un peu plus facile et un peu plus fluide. Je n'irais pas jusqu'à dire que nos décisions auraient été différentes, en rétrospective, dans ce qu'on a vécu, parce que je pense qu'on est quand même arrivés, malgré tout, mais avec beaucoup plus d'efforts, et ça a été beaucoup plus laborieux.

Mme Mallette : Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Cadet) : M. le ministre.

• (12 h 30) •

M. Caire : Merci. Bienvenue à vous quatre. Merci beaucoup pour la présentation.

Vous parlez, vous avez parlé, puis vous le dites aussi dans votre mémoire, de l'individualisme des données. Vous avez dit, au niveau du consentement, avoir de la souplesse sur la gestion, bien, ce que moi j'appelle le cycle de vie utile de la donnée. Vous semblez vouloir avoir des aménagements, des souplesses aussi. Vous parlez de jumelage des données. Moi, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Parce qu'on a aussi, les collègues, on a entendu des gens venir nous dire : Bien, moi, je ne veux pas que mes renseignements servent à d'autres fins que les soins. Est-ce que vous pensez qu'on doit respecter ça? D'autres nous ont dit : oui, mais il y a un comité de chercheurs qui devrait quand même être consulté avant qu'on détruise des données. Le croisement, on en a entendu parler abondamment, et je vous dirais que s'il y a une chose qui suscite la crainte, c'est le fait de pouvoir croiser les données. Vous, vous dites : non, il faut aller vers ça. Et la notion de ce que j'appellerais l'«opting in» versus l'«opting out», on vient encore de l'entendre avec le comité des usagers, qui est à l'autre bout du spectre de ce que vous nous dites, là, qui, eux, semblent dire qu'il y a une... il y aurait une possibilité d'une utilisation par trop cavalière des renseignements de santé prévue par le projet de loi. Eux voudraient qu'on resserre, au contraire, le consentement, qu'il soit beaucoup plus explicite, individualisé à chaque finalité de la donnée. Donc, comment on concilie votre monde, la santé publique, donc la protection de la santé des Québécois, et les usagers qui disent : non, mais là, venez pas jouer dans mon dossier puis dans ma vie privée? Comment, nous, législateurs, on réconcilie, puis ce qui semble être...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...ce que je peux faire, je vais... Parce que je ne veux pas monopoliser les réponses. Peut-être, sur l'opting out, ça me paraît probablement la solution préférable, d'abord, parce qu'elle me semble très bien fondée aussi dans le reste de notre régime de protection des renseignements, avec l'idée que les données appartiennent aux gens, de la même façon qu'on peut refuser des soins même quand les autres pensent que ce n'est pas dans notre intérêt. On devrait avoir la possibilité de se retirer de ces banques de données, même si les autres pensent que ce n'est pas dans notre intérêt, même si l'INSPQ voudrait y avoir accès. Donc, je comprends assez bien la logique d'opting out, compte tenu du contexte philosophique, disons, dans lequel, au Québec, on a traité... Mais l'opting in, non, parce que ça, ça rend la vie, je pense, de tout le monde vraiment très, très compliquée.

Pour ce qui est de la conservation des données, je pense que le plus simple, c'est... Je vais essayer d'être vraiment très, très concret, là, c'est... Vous savez, on travaille, nous, sur les projets dans la très longue durée. Si je veux mesurer l'effet d'un programme de soutien à la petite enfance sur l'employabilité des gens et leur état de santé, 20 ans plus tard, j'ai besoin d'avoir accès et de pouvoir conserver ces données-là, sinon, c'est horriblement compliqué et coûteux, puis on n'arrive jamais à obtenir les réponses que l'on cherche. Alors, c'est ça qu'on essaie de faire en santé publique, c'est de continuellement situer nos interventions non seulement, là, demain, faire une politique ou une autre, mais aussi se poser la question : Est-ce que la politique en question a obtenu les effets attendus? Est-ce qu'elle a des objectifs à long terme?

Je pourrais vous donner, là, trois heures de cours sur les effets à long terme de certaines interventions qu'on fait. Changer la diète des adolescentes, à 13 ans, vous aurez des effets sur leurs enfants et vous aurez un effet mesurable sur leurs petits-enfants. Mais ça, j'ai besoin de pouvoir le mesurer. Si je ne peux pas le mesurer, je ne le saurai jamais et je n'aurai jamais la capacité d'imaginer des programmes qui nous permettent de diminuer la pression sur la consommation de soins.

M. Caire : Mais, si je peux me permettre... Parce que je reviens à votre mémoire. Vous parlez de l'individualisme des données. Je vous entends. Puis j'aurais envie de vous reposer la question : Est-ce que vous ne trouvez pas, justement, que le projet de loi trouve cet équilibre entre la règle de base, qui est qu'à la fin de son cycle de vie on doit détruire la donnée, ou, s'il n'y a pas cet opting out qui a été manifesté, l'anonymiser, l'archiver et s'en servir aux fins de données? Donc, c'est ce que la loi prévoit actuellement, c'est comme ça qu'elle est construite. Est-ce que vous ne trouvez pas, donc, à la lueur de ce que vous me dites, que c'est le bon équilibre entre ceux qui nous disent «non, non, ça prend un consentement explicite à chaque finalité» et ce qu'on fait dans la loi?

M. Litvak (Éric) : Bien, je peux peut-être compléter sur cette question-là. Probablement que le principe est bon, mais dans le type d'utilisation qu'on peut faire en santé publique, il faut comprendre que le cycle de vie, je pense... ce qu'on essaie de dire, c'est qu'il peut être assez long puis peut-être étonnant par rapport à une utilisation qu'on fait plus dans une prestation de soins et services cliniques.

M. Caire : J'aimerais ça que vous précisiez ce que vous voulez dire par là, par exemple, là. Dans le cycle vie, moi, j'entends, la donnée est collectée à une finalité précise, pour laquelle l'utilisateur, l'usager a consenti. Lorsque cette finalité-là est atteinte, le cycle vie est atteint, on la détruit, ou on anonymise, et on peut se servir, à ce moment-là... Ça, c'est ce que la loi... Alors, moi, dans le fond, ce que je vous demande, c'est : Est-ce que, par rapport à la situation actuelle que vous décrivez, peut-être... Est-ce que, justement, la loi ne nous amène pas dans une fourche où on peut quand même aller vers la continuité dont vous parliez tout à l'heure? Ce qu'on se fait reprocher par certains groupes, là, ceci étant dit.

M. Litvak (Éric) : Oui, bien, j'ai un peu de mal à être capable, vraiment, de me prononcer puis de juger là-dessus. Je pense que l'idée, là, c'est juste de sensibiliser au fait que l'utilisation qu'on fait de renseignements de santé à des fins de santé publique, c'est un peu différent, incluant dans le cycle de vie ou la durée pendant laquelle ces données-là peuvent être pertinentes puis utiles.

Puis j'aurais peut-être voulu aussi revenir... Vous avez posé des questions sur les croisements. Pour nous, c'est des choses qui sont excessivement importantes parce qu'en fait ce qu'on doit faire, nous, c'est essayer de comprendre ce qui crée de la santé à l'échelle de la population ou, au contraire, ce qui nuit à la santé, puis de voir comment, éventuellement, d'abord, on peut faire un diagnostic populationnel, mais aussi, où sont les endroits où on peut intervenir puis apporter des différences.

M. Caire : Pour que tout le monde comprenne, là, vous voulez dire, moi, je veux avoir accès à des données de santé, puis je veux avoir aussi accès à des données financières, je veux avoir accès à des données sur le niveau d'éducation, et je vais être capable de dresser un portrait à partir de ça.

M. Litvak (Éric) : Nous, on a besoin de ça pour travailler. Ça fait qu'il y a deux choses. Donc, on a besoin...

M. Caire : Mais... Parce que mon temps est court et... Mais ce dont vous avez besoin, ce n'est pas... Parce que ça, c'est la grande crainte qu'on entend, «je ne veux pas que vous ayez accès à mes données». Mais dans la mesure où ces données-là, elles sont anonymisées...

M. Litvak (Éric) : C'est ça.

M. Caire : ...est-ce que vous êtes capables de garantir...

M. Caire : ...cette... le secret à la vie privée, le droit à la vie privée et l'irréversibilité d'une donnée qui est anonymisée. Parce que, ça, on l'a entendu aussi : Oui, mais... Puis je suis informaticien, là, je peux vous dire que c'est vrai que, tu sais, l'irréversibilité totale et absolue, là... Mais, dans un contexte très précis, puis peut-être que vous parlez un peu des cas de risques aussi, là, qui sont un contexte où on peut amener, je pense, un niveau de garantie supplémentaire, est-ce qu'on peut se fier que l'INSPQ va être capable, un, de se servir de données dénominalisées, deux, garantir la vie privée, et trois, des finalités de service public?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui, la réponse est oui, hein, sans aucune hésitation, et puis on... Je pense que le passé de l'institut est garant du présent et du futur là-dessus, enfin, parce qu'on travaille déjà avec des données, on croise déjà des données. On a des problèmes d'accès, mais ce n'est pas vrai qu'on n'est pas déjà engagés dans ce travail.

La Présidente (Mme Cadet) : Voilà. Donc, je dois malheureusement vous interrompre, donc c'est tout le temps que nous avions pour la partie des échanges gouvernementaux. Donc, les échanges sont absolument captivants. Je cède maintenant la parole à la députée de Mont-Royal-Outremont.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cadet) : Vous avez 7 min 7 s.

Mme Setlakwe : On va poursuivre rapidement la discussion avec moi. Merci pour votre mémoire, merci pour vos interventions, vous nous aidez vraiment à donner vie au projet de loi. Vous êtes clairement un acteur important dans ces changements-là, dans ce changement de régime, dans le projet de loi, et vous êtes spécifiquement nommé, là, comme un des organismes en annexe.

On a entendu plus tôt cette semaine la commissaire venir et, un peu comme vous, là, tu sais, plaider pour une fluidité des données pour qu'elle puisse, tu sais, remplir sa mission. C'est la même chose pour vous, on apprécie la mission que vous avez à accomplir, là, pour le bénéfice de la population. Est-ce que, vous, vous avez un souci, en fait, de l'élément discrétionnaire à certains endroits dans le projet de loi où est-ce qu'on dit que certains organismes doivent partager l'information avec les autres, alors que dans certains cas on utilise la terminologie «peut»? Tu sais, le «peut» versus «doit», c'est assez fondamental.

Et puis, juste pour terminer — alors, c'est ça, mon intervention, je vais vous laisser répondre — c'est... nous, ce qu'on est en train de faire, puis le ministre l'a bien mentionné, c'est un jeu d'équilibre, là. On veut... Je pense qu'on s'entend sur le principe, tout ça, mais on doit, à la fin de notre analyse, oui, ce... tu sais, utiliser les exemples concrets qui auront été mentionnés, mais, ultimement, nous, ce qu'on veut, c'est de... bien, atteindre l'équilibre pour justement servir le bien commun. Donc, j'aimerais vous entendre.

Mme Émond (Valérie) : Puis tout à fait, on est... Merci pour cette question-là. On est tout à fait dans cet équilibre-là aussi, nous, entre le... avec le but toujours de répondre à notre mission, répondre à notre loi puis avec l'objectif d'améliorer l'état de santé de la population par les études que l'on fait.

Puis, pour votre première question, moi, je pense que ce qui est important, c'est de travailler aussi avec l'article 65 puis avec le gestionnaire des données aussi, là, qui est plus... qui est la question de... le gestionnaire des... les renseignements qu'ils vont nous communiquer, les renseignements dont on... qu'on n'a pas déjà. Puis l'important, je pense que c'est de travailler, du point de vue opérationnel aussi, à s'assurer qu'on a une fluidité dans l'information qu'on reçoit puis qu'on a des mécanismes qui nous permettent peut-être de reconduire ces ententes-là d'année en année, avec une reddition de comptes, par exemple, qui nous permettrait... Nous, on justifie les renseignements dont on a besoin. Donc, on continue à les justifier, mais dans une perspective peut-être plus globale qu'à la pièce, que... de la façon dont c'est fait présentement.

Mme Setlakwe : Merci.

Mme Émond (Valérie) : Je ne sais pas si c'est assez clair. Oui?

• (12 h 40) •

Mme Setlakwe : Oui.

Mme Émond (Valérie) : Oui? Merci.

Mme Setlakwe : Je vais aller... oui, enchaîner, j'ai deux, trois questions. Vous avez évoqué, donc, au niveau de vos trois grands objectifs, le troisième, la période de transition. Ça se comprend. Est-ce que... Là, moi je comprends de vos propos qu'à moyen, long terme, tout ça va vous simplifier la vie. Mais, dans la mise en application immédiate, bon, vous avez un souci de budget de main-d'œuvre, de bras. Est-ce qu'on a un enjeu sérieux de pénurie de main-d'œuvre, là, chez vous? Est-ce qu'on doit vraiment s'inquiéter, là, de la mise en application de la loi, pour vous, là, l'impact pour vous?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui. Je peux vous dire : on est à 126 postes affichés à l'institut en ce moment.

Mme Setlakwe : Voilà.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : C'est un problème concret, réel. Mais on n'est pas les seuls, là. Mais, évidemment, dans ce monde-là, tout le monde est en concurrence pour recueillir, accueillir des talents, les conserver. On est dans la même situation, tout le monde.

Mme Setlakwe : Est-ce que... Là, ce que... Puis je suis désolée, le ministre l'a évoquée aussi, la question, là, de la... d'anonymiser les données. Moi, je ne suis pas informaticienne. Mais est-ce que vous, dans votre... Donc, moi, ma question est plus d'ordre général : Pour remplir votre mission, vous n'avez pas vraiment besoin d'avoir les données nominales qui permettent d'identifier ou...

Mme Émond (Valérie) : Exactement, on n'a pas besoin d'avoir l'information...

Mme Émond (Valérie) : ...que le nom, prénom, par exemple, de la personne, on a... Ce qu'on a aussi, parce qu'on parle beaucoup de jumelage aussi, là, c'est d'avoir de l'information. On a une clé qui nous permet de dire que c'est la même personne qu'on peut retrouver d'un fichier à l'autre, mais on n'a pas l'information, ce qui nous permet d'identifier la personne comme telle, sauf qu'il y a un potentiel. Si on veut être transparent, il y a un potentiel parce qu'on a de l'information sur des renseignements de santé, par exemple, avec des dates d'hospitalisation qui peuvent éventuellement nous permettre... Mais ce que je veux dire, c'est qu'on est habitué de travailler avec ces données-là. On a des mécanismes en place pour assurer la sécurité de la donnée, la confidentialité aussi. On est tenu à la protection des renseignements personnels. On a en place des mesures physiques, administratives puis technologiques pour assurer la confidentialité. Puis, quand on diffuse cette information-là, il y a une notion aussi de traiter l'information, mais aussi, quand on la diffuse, on fait du masquage, on s'assure qu'on ne peut pas aller dans les tableaux statistiques qu'on produit, qu'on ne peut pas identifier la personne par la suite. Il y a des méthodes, là, qui sont reconnues, puis on les applique, là, on les applique de façon rigoureuse aussi.

Mme Setlakwe : Merci. Est-ce que... Une partie importante de la loi, c'est les chercheurs. Tu sais, on s'entend que la recherche nous permet de faire des avancées tellement importantes. Est-ce que, vous, vous avez des relations avec les chercheurs? Et à quelle mesure est-ce que le projet de loi va avoir un impact là, ou à ce niveau-là pour vous?

M. Litvak (Éric) : on a des liens avec des chercheurs puis on a aussi certaines personnes qui sont des chercheurs qui sont dans la boîte. Comme un peu c'est souligné dans le mémoire, pour nous, le projet de loi, il est très aidant parce qu'il facilite leur travail. Il leur donne aussi un certain avantage. Dans la mesure où ils font des travaux de recherche qui sont alignés avec notre mission puis avec les priorités de notre organisation, bien, ils peuvent avoir un accès facilité aux données. Ça fait que, ça, cet aspect-là, pour nous, il est extrêmement aidant puis il aide à rendre notre milieu plus attirant aussi pour des personnes qui ont des compétences en recherche puis qui aimeraient travailler, par exemple, chez nous.

Puis il y a tout un autre volet, bien, pour des chercheurs qui ne sont pas dans notre organisation, avec qui on peut aussi collaborer à l'occasion, bien, assez régulièrement, en fait. Puis, dans ce cas-là, bien, eux, ils tombent dans une autre catégorie dans le projet de loi, mais pour lesquels je pense que c'est aussi facilitant pour le travail qu'ils peuvent faire puis qu'on peut vouloir faire en collaboration avec eux. Ça fait qu'essentiellement pour les aspects liés à la recherche, c'est très soutenant, je crois.

Mme Setlakwe : Merci. Est-ce que j'achève, moi...

La Présidente (Mme Cadet) : oui. Bien, par courtoisie, donc, je vous informe, vous disposez de moins de 45 secondes pour conclure.

Mme Setlakwe : Merci. Honnêtement, on n'embarquera pas dans une autre question. Je vais tout de suite céder la parole, avec l'autorisation de la présidente, à mon collègue de...

La Présidente (Mme Cadet) : Parfait. Donc, je cède la parole au député de Rosemont. Vous disposez maintenant de deux minutes 22 pour conclure.

M. Marissal : Merci. 126 postes sur combien?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...

M. Marissal : 126 postes sur combien?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : On a, l'Institut, à peu près 800 personnes.

M. Marissal : O.K. C'est pas mal. Je suis content que vous vous soyez frayé un chemin jusqu'à nous, hein? On a réussi à vous trouver une place. Je suis très, très, très content. Malheureusement, on n'aura pas beaucoup de temps. Mais j'ai lu votre mémoire en diagonale. Je vais le relire en fin de semaine. Mais vous êtes une pièce majeure, là, sans flagornerie, là, pour ce qu'on est en train de faire là, puis on n'a pas de temps, là.

J'ai un devoir à vous soumettre. Vous n'avez pas formulé de recommandations. Par contre, vous ciblez notamment et nommément plusieurs articles, là, huit ou dix. Est-ce que c'est trop vous demander, peut-être dans les prochains jours, de nous pondre des recommandations sous forme même d'amendements possibles, faites ça comme vous voulez, mais pour faciliter le travail, compléter votre mémoire, qui est excellent, mais qui formule des recommandations en prose. On en aurait besoin sous forme légale, ou le plus près possible, si... Je pense que ça vous aiderait, ça va nous aider, en tout cas. Moi, je parle pour moi, ça m'aiderait assurément que vous le fassiez ainsi.

Par ailleurs, avez-vous une définition, vous, à l'INSPQ, de ce qui est le bien public, de ce qui est l'intérêt public?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : L'intérêt général, oui. En fait, c'est une des valeurs affirmées par l'Institut, à la fois de façon générale dans son travail, mais aussi dans les grandes valeurs dominantes de l'Institut. C'est clair, on ne peut pas imaginer la santé publique sans cette préoccupation de l'intérêt général. Les gens de santé publique, ce sont des gens qui essayent de sauver des vies, 1 million de vies à la fois, hein? C'est ça, l'objectif. Et, vous l'avez vu au concret, pendant la pandémie.

M. Marissal : La Ligue des droits et libertés nous disait hier : «Il convient, selon nous, de limiter les autorisations d'accès aux recherches, poursuivant le bien commun.» Comment on fait ça, le bien commun, dans un projet de loi? Ça me paraît... L'idée est noble, là. Mais, vous, vous avez une idée...

M. Marissal : ...Vous, vous êtes le bien commun, mettons, là, comment vous limitez votre carré de sable?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Rapidement, moi, je pense que dans l'univers, encore une fois, philosophique dans lequel nous travaillons au Québec, cette question-là, elle a été confiée au Comité d'éthique qui règle l'accès à la recherche. C'est eux qui sont chargés de débattre, de dialoguer, de peser, soupeser l'intérêt justement d'un projet, puis de vérifier qu'il se fait bien dans l'intérêt commun. Et cet encadrement-là, il est prévu par le projet de loi. Puis évidemment, toutes les grandes organisations auxquelles vous allez parler vont vous dire qu'elles ont en place des systèmes qui permettent à ces comités d'éthique de débattre, de dialoguer et finalement d'évaluer l'intérêt commun dans les projets qui sont entamés. Et c'est comme ça que le Québec a réglé cette question. Je trouve que ça fonctionne. Il ne faut pas changer ce qui fonctionne.

M. Marissal : C'est fascinant. Je n'ai plus de temps, mais peut-être qu'un jour j'irai postuler chez vous pour un poste.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Ça nous ferait plaisir.

M. Marissal : C'est vraiment fascinant, l'idée que vous amenez ici, les idées que vous avez...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : 125 postes seulement, c'est fantastique.

La Présidente (Mme Cadet) : Non, non, mais essentiellement parce que le groupe n'a pas utilisé ses dix minutes au complet, donc, en début de séance. Donc, était réputé écoulé. Donc...

M. Caire : Puis on ne peut pas, par consentement, donner quelques minutes de plus au député de Rosemont?

La Présidente (Mme Cadet) : Bien, j'entends que, par consentement, on peut tout faire. Donc, je comprends que c'est la...

Des voix : ...

M. Caire : Bien, on finissait à et 50.

La Présidente (Mme Cadet) : On finissait à et 50, donc vous...

M. Marissal : Bien, pourquoi, pourquoi je vous parle...

Merci. Merci de la collaboration. D'autant qu'on a fait venir ces gens-là puis... Je réitère ma proposition de recommandations sous forme précise.

La raison pour laquelle je vous parle de ça, parce que vous savez qu'il y a un débat ici depuis quelques années sur qu'est-ce qu'on fait avec les données, qui valent de l'or, qui sont très recherchées. Je dis souvent à la blague, puis ce n'en est pas une tant que ça, que la RAMQ, c'est le Fort Knox des données au Québec, là. Où est-ce qu'on trace la ligne pour que vous, vous ne deveniez pas non plus des expérimentateurs à tout crin, là, qu'on ne devienne pas des cobayes, autrement dit, de l'INSPQ, mais que nos données soient protégées aussi, notamment de la... mercantilisation. Pardon.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Je vais commencer. Peut-être, Éric, tu veux intervenir sur ça, Valérie aussi.

La première chose, c'est de placer les données publiques derrière une muraille de Chine. Puis c'est ce que le projet de loi fait, au fond, et c'est ce qu'on a toujours fait. C'est la question aussi de votre collègue de tout à l'heure, là. L'Institut, c'est un coffre-fort. Vous seriez surpris des mesures vexatoires qui sont appliquées tous les jours pour protéger justement les données et la sécurité des données. Donc, il faut que ces travaux-là se fassent derrière cette muraille. Ça, c'est essentiel.

L'autre chose que je vous ai dite tout à l'heure, c'est que c'est absolument essentiel pour le Québec de prendre de vitesse les grands acteurs privés qui travaillent dans ce domaine-là.

M. Marissal : Pourquoi?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Parce qu'ils auront des algorithmes à vendre. Parce qu'ils vont décider du marché. On l'a vu dans d'autres domaines. En santé, c'est un domaine dans lequel nous avons les données, nous avons les compétences, je pense que nous devrions être les maîtres d'oeuvre de cette transformation numérique.

M. Marissal : O.K. Mais vous ne fabriquez pas de médicaments, par exemple?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Non.

M. Marissal : Vous ne... Donc vous n'êtes pas dans la même ligue que les Pfizer de ce monde, là.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : C'est sûr.

M. Marissal : Mais néanmoins, il y a une concurrence. Et vous souhaitez avoir les outils pour être au-devant de la parade?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui. Parce que, comment dire ça, les approches de santé publique, nos modèles nous permettent de pondérer l'importance des facteurs qui déterminent la demande de soins. Et, ça, c'est un savoir extraordinaire que, je peux vous dire, les grands acteurs du monde des données ne possèdent pas. Et nous, nous l'avons, et je pense qu'il devrait rester dans le domaine public, là où il est en ce moment.

M. Marissal : Je vous remercie.

La Présidente (Mme Cadet) : Voilà. Merci beaucoup. Donc, là, c'est véritablement tout le temps que nous avions. Merci beaucoup aux représentants de l'Institut national de santé publique pour votre participation. Merci aux parlementaires pour ces travaux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 50)


 
 

13 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 14 h 1)

La Présidente (Mme Mallette) : La Commission des finances publiques reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre sonneries et les appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 3, Loi sur les renseignements de santé et de services sociaux modifiant diverses dispositions législatives. Je souhaite donc la bienvenue...


 
 

14 h (version non révisée)

La Présidente (Mme Mallette) : ...représentants de BioQuébec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à présenter... à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Alors, merci beaucoup. Alors, je suis Emmanuelle Toussaint. Je suis avocate, mais ce n'est pas à ce titre-là que je suis ici aujourd'hui, mais bien à titre de directrice générale de BioQuébec, qui est le réseau québécois des biotechnologies et des sciences de la vie.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Et Alexandre Le Bouthillier. Je suis chercheur et entrepreneur en optimisation et en intelligence artificielle. J'ai fait mon doctorat en informatique à l'Université de Montréal et postdoc à l'Université de Genève. Mais outre cet aspect très structuré, ce qui m'anime vraiment, ce qui me passionne, c'est l'environnement et l'humain, donc, son bien-être et son avenir.

Et, petite histoire personnelle, depuis huit ans, j'ai décidé de me consacrer à la lutte contre le cancer, par la montée en puissance de l'IA, et ça coïncidait avec le diagnostic de cancer de mon père. Il lui restait quelques semaines à vivre, et c'est sûr qu'en rétrospective, bien, il y avait des outils diagnostiques, en recherche, qui existaient mais qui n'étaient pas disponibles ici, qui auraient permis son diagnostic beaucoup plus tôt. Mais grâce à des programmes d'exemption et de compassion, il a pu avoir accès à des nouveaux traitements. Il a vécu pendant près de deux ans et il a pu terminer son dernier roman, qui est un récit de reconnaissance à tous ceux qu'il aime.

Donc, je suis fondateur de Linéaris, un fonds d'investissement responsable en IA santé. J'ai très hâte qu'on vous présente ses recommandations, qui ont été co-construites avec plusieurs acteurs de l'écosystème. Merci de l'invitation.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Alors, merci, Mme la Présidente et chers membres de la Commission des finances publiques. BioQuébec, on représente 170 membres dans l'écosystème des sciences de la vie, donc on compte des organisations de recherche contractuelle, on a des sociétés de recherche clinique et préclinique. On a également plusieurs biotechs, donc des petites entreprises qui représentent vraiment tous les maillons de la chaîne de l'innovation, qui travaillent à développer et à rendre disponibles des nouveaux tests, des médicaments, des vaccins et d'autres produits innovateurs qui sont liés au domaine de la santé, et ce, pour le bien-être de la population.

Donc, BioQuébec soutient le projet de loi n° 3, qui aura des répercussions positives tangibles pour le système de santé au Québec ainsi que pour l'ensemble de la population du Québec. Nos organisations de recherche et nos chercheurs ont besoin d'avoir un accès aux données médicales, tout en comprenant le besoin que ce soit bien encadré. Je crois que c'est important de rappeler que la recherche scientifique, c'est une démarche qui est rigoureuse, qui est vraiment bien ordonnée, qui a pour but de comprendre et d'étudier les processus biologiques pour produire des nouvelles connaissances, et le partage et la diffusion des résultats de ces recherches-là, c'est un fondement qui est vraiment fondamental de la démarche.

Donc, au Québec, on est chanceux, on a un système des sciences de la vie qui est intégré. Il y a plusieurs collaborations entre différents acteurs dans l'écosystème. On peut penser, évidemment, aux chercheurs universitaires, aux organisations de recherche clinique, donc, entre autres, nos membres, et c'est vraiment tous ensemble qu'on peut travailler pour produire des nouveaux résultats, des nouveaux traitements. Et, on le sait, au Québec, on excelle vraiment en recherche, mais, trop souvent, les innovations ne se rendent pas nécessairement jusqu'au patient, et c'est un des points qui est vraiment important. Donc, la recherche collaborative nous apparaît vraiment comme étant un des éléments clés pour que ces découvertes-là se rendent jusqu'aux patients et pour que ceux-ci puissent recevoir des soins qui sont adéquats.

Et une des choses, aussi, qu'on note, c'est que, souvent, les meilleurs traitements ne sont pas disponibles au Québec en premier, parce qu'ils sont développés à l'extérieur du Québec. Un autre élément, c'est qu'il n'y a pas assez d'études cliniques locales qui permettent aux patients de bénéficier des dernières avancées en matière de santé et, également, de trouver les traitements qui fonctionnent le mieux pour notre population, donc qui sont les mieux adaptés.

Et le manque d'accès aux données, c'est préjudiciable à plusieurs patients québécois qui sont aux prises avec des maladies rares ou avec des cancers. Et, on le voit aussi, le Québec est fréquemment exclu de certaines données annuelles canadiennes sur les taux d'incidence de certaines maladies, parce que les données ne sont pas à jour. Puis il faut se rappeler, je pense, que le secteur des sciences de la vie, des biotechs, au Québec, compte 700 organisations, et on parle de 36 000 Québécois et Québécoises qui sont hautement spécialisés, mais ils font face à différentes embûches, et je pense qu'on en a entendu parler au cours des deux derniers jours.

Et on a des exemples réels, chez BioQuébec, de membres qui... ça démontre que l'accès aux données est vraiment compliqué, et cet accès-là, c'est crucial pour la viabilité de nos organisations, pour la compétitivité, la croissance de ces organisations-là, de beaucoup de PME en biotech. Et, si on prend des exemples... On le sait, le Québec, c'est un des joueurs clés en matière d'intelligence artificielle, on a des sommités...

Mme Toussaint (Emmanuelle) : ...Et pourquoi ne pas utiliser davantage cette expertise-là pour que ça soit au bénéfice de la santé? Donc, en ce moment, on a des membres qui doivent se tourner vers des banques de données qui sont européennes ou américaines, ou encore de d'autres provinces comme par exemple l'Ontario, le Manitoba et l'Alberta parce que les données ici sont difficilement accessibles. Ce n'est pas qu'elles ne sont pas disponibles, il y en a de disponibles, mais c'est très fragmentaire et on sait que les délais sont très longs. Donc, pour les différents acteurs qui font de la recherche, c'est important de savoir, dès le début du développement d'un médicament, si la protéine ou le gène ou le processus est approprié pour au moins un groupe de patients de la population québécoise et aussi de connaître la taille de ce groupe-là. Même chose pour certains de nos membres qui font des recherches cliniques, donc on parle des essais de phase 1 à 4, des étapes qui sont cruciales pour prouver qu'une molécule est efficace, par exemple, et qu'elle est sécuritaire pour la prévention et le traitement d'une condition de santé.

Donc, tous ces éléments-là démontrent vraiment, là, que l'accès aux données, c'est un élément qui est important. Ça doit être bien encadré. C'est là pour sauver des vies, c'est là pour améliorer la santé de notre population. Et ces entreprises-là, qui nous aident, et les autres organisations de recherche, on a des PME en biotech, ce sont nos PME, notre fierté, nos chercheurs. Ils collaborent, ils contribuent à former les chercheurs de demain. Alors, il ne faut pas l'oublier.

Le cadre juridique en ce moment fait en sorte, comme je l'ai dit, que ça peut être très long, on voit des délais jusque de 18 à 24 mois au Québec pour avoir accès à des données, alors que dans d'autres provinces, comme en Ontario, on parle davantage d'un délai de quatre mois. Alors, ça, bien, ça fait que c'est difficile d'être compétitifs. Et, BIOQuébec, on est d'avis que les principes juridiques du projet de loi doivent être très clairs, précis et sans ambiguïté, tout en tenant compte des évolutions technologiques.

Alors, on a donc six recommandations à présenter. Et je vais laisser la parole à mon collègue.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Merci. Donc, six recommandations pour bonifier le projet de loi, la première concernant les redditions de comptes. Ça a été mentionné plusieurs fois en commission. Ce qu'on veut, c'est que ces redditions-là, ces redditions de comptes comprennent non seulement des statistiques, mais également des mesures à mettre en place afin de favoriser l'amélioration continue et aussi un rapport d'impact. Donc, on veut voir qu'est-ce que ça a apporté à la population et au développement, tous ces projets de recherche là.

Ce rapport annuel devrait être rendu public par souci de transparence. Cette obligation devrait couvrir les demandes d'accès émanant de tous les types de chercheurs et inclure les métadonnées brutes concernant les demandes d'accès, incluant les délais, donc on va pouvoir s'améliorer sur ces délais, ainsi qu'une analyse visant à évaluer le processus et l'impact sur la recherche. Cette démarche sensibiliserait le public à l'importance des travaux réalisés grâce à l'accès aux données encadré par le présent projet de loi.

La deuxième recommandation, une déclaration de principe sur des délais d'accès qui soient raisonnables. La recherche, comme vous le savez, est très compétitive. Il est primordial pour nos organisations d'avoir un accès rapide aux données encadrées. Le projet de recherche du milieu académique ainsi que des projets d'études cliniques doivent débuter rapidement après qu'ils aient été approuvés et non pas deux ans plus tard. Le Québec devrait, dans le p.l. Trois, avoir cette déclaration de principe à cet effet.

Troisième recommandation.... Juste avant la troisième recommandation. Il serait également préférable que la Commission d'accès à l'information ait un rôle de surveillance complémentaire aux autres mécanismes en place au lieu d'un rôle de révision afin d'alourdir le processus d'accès aux données. C'est déjà prévu à l'article 104, je le souligne.

• (14 h 10) •

Troisième recommandation, la création du centre d'accès en amont de l'entrée en vigueur de la loi. Donc, considérant que ces données sont cruciales pour l'innovation et que leur utilisation doit être encadrée avec grand soin afin que la vie privée des patients soit respectée, BIOQuébec recommande qu'un tel centre soit identifié ou les tels centres soient identifiés le plus tôt possible et que cette organisation ou ces organisations disposent de ressources financières et humaines nécessaires à son bon fonctionnement en amont, à l'entrée en vigueur de la présente loi. Il serait également important que la gouvernance de ces centres d'accès soit de nature collaborative et impartiale, en incluant des différents acteurs de l'ensemble de l'écosystème.

Quatrième recommandation, des clarifications quant à la conservation des données. Il y aurait lieu de prévoir la possibilité de conserver les données pour... Dans leur forme initiale, pour certaines fins secondaires, dont celle réglementaire.

La Présidente (Mme Mallette) : ...Pour conclure. Je suis désolée.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : C'est parfait. Cinquième recommandation, c'est ce qui a lieu aux...

M. Le Bouthillier (Alexandre) : ...je ne vais pas m'étendre, mais il y a un mémoire qui va être déposé par Medtech Canada qui va être plus exhaustif à ce sujet. Mais c'est important qu'on n'ait pas des certifications locales au Québec. On doit se reposer sur des certifications internationales lorsque c'est possible.

Et le dernier point, c'est sur le retrait au consentement. En ce qui a trait plus spécifiquement au paragraphe 3° de l'article 8, pour les chercheurs non liés, on aimerait une plus grande granularité sur ces retraits de consentement. Entre autres, par exemple, un patient voudrait ne pas se retirer et vouloir faire partie d'une étude clinique. Donc, il y a déjà quelques conditions de retrait qui sont permises, mais on aimerait une plus grande granularité.

La Présidente (Mme Mallette) : Bien, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission. Donc, je vais céder maintenant la parole à M. le ministre.

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Mme Toussaint, bonjour. M. Le Bouthillier, bonjour. Là, si je comprends bien, M. Le Bouthillier, vous êtes informaticien puis vous travaillez en intelligence artificielle, c'est bien ça?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Appliqué à la santé depuis huit ans.  

M. Caire : O.K. Je vais vous poser une question puis je ne vous demande pas nécessairement de me répondre immédiatement, là, vous pouvez prendre le temps d'y réfléchir, mais est-ce que vous êtes ouvert à changer d'emploi?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : En fait, moi, ce que je trouve stimulant, c'est d'aviser plusieurs PME québécoises, à travers du mentorat, il y a plusieurs accélérateurs au Québec. Bien, ça me fait plaisir de...

M. Caire : Comme je ne vous dirai pas... Ne me dites pas non tout de suite, c'est correct. Bon. Écoutez... Non, plus sérieusement, vous amenez un certain nombre... un certain nombre d'éléments qui ont déjà été entendus puis, pour lesquels, je vais vouloir vous entendre. Puis je vais y aller assez succinctement, si possible. Délais d'accès raisonnables, qu'est-ce qu'un délai d'accès raisonnable? Parce qu'il faut bien comprendre que, si on met un délai d'accès dans la loi, ça devient une obligation légale d'y répondre.

Et considérant que le processus d'acceptation d'un protocole de recherche ne relève pas nécessairement que d'une seule entité, il y a différents intervenants, ça devient... ça devient peut-être compliqué de légiférer sur un délai d'accès. Donc, j'aimerais ça peut-être vous entendre là-dessus dans ce contexte-là.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Bien, c'est bien compris, c'est pour ça que la reddition de comptes devient importante, parce qu'on va être capable de suivre, on espère, l'amélioration de ces délais d'accès. Donc, ça, ça peut être une façon d'y répondre. Mais, pour les délais d'accès, ce qui est important, c'est, à partir du moment où le dossier est jugé recevable, il est déposé. Bien, c'est peut-être un peu là que le temps commence, et il y a peut-être des délais administratifs qui peuvent être contrôlés.

On se comprend que, d'avoir un délai raisonnable pour l'ensemble du processus, ça peut être difficile à légiférer, mais, sur des délais administratifs, c'est certain qu'on peut.

M. Caire : Si je traduis ce que vous dites, des délais concernant ce qui relève de la décision gouvernementale, de l'administration publique.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Ce que le processus que le p.l. peut contrôler.

M. Caire : Parfait. Vous parlez d'un centre d'accès et vous souhaitez qu'il entre en vigueur avant la loi? En fait, la question c'est : Pourquoi, puisque la loi créant ce centre d'accès lui donne des pouvoirs, qu'un centre d'accès créé avant la loi n'aura pas, donc une entité administrative qui va... qui va gérer l'accès dans le contexte législatif actuel? Puis en quoi ça, ça améliorerait les choses dans les faits, là?

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Je peux répondre. Dans le fond, l'idée, c'est vraiment d'avoir un centre d'accès qui est opérationnel dès l'entrée en vigueur de la loi, alors qu'il y a déjà une façon... qu'il y ait déjà les ressources, comme on a mentionné, financières et humaines. Alors, on s'entend que le centre d'accès, ce n'est pas une question de l'avoir opérationnel énormément avant l'entrée en vigueur de la loi, mais si on veut éviter de créer un goulot d'étranglement, dans le fond.

Donc, au moment où le projet de loi n° 3 devient une loi, on doit s'assurer que les centres d'accès soient quand même fonctionnels, donc que tout soit bien planifié. C'est vraiment...

M. Caire : Je m'excuse, maître, c'est parce que là, ça nous pose, nous, comme parlementaires, un problème, à savoir le ministère de la Santé crée un centre d'accès avant que la loi soit adoptée. Ça s'appelle un outrage au Parlement.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Non, on parle vraiment de l'entrée en vigueur, si je peux me permettre, c'est-à-dire que lorsque la loi est en place, s'il y a des mesures transitoires.

M. Caire : Je comprends.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Quoi que ce soit, c'est juste que tout soit bien harmonisé

M. Caire : Ce que vous souhaitez, c'est qu'on accélère les choses dans le processus de mise en place.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Que tout soit bie planifié.

M. Caire : Je vous entends bien... bien, en fait, mon collègue de la santé vous entend bien, parce que moi, je me contente de faire adopter la loi. Là, vous vous abordez un sujet qui a été abordé de façon... et sous des angles très différents, qui est toute la conservation des données. Ce que la loi prévoit, c'est que la donnée à la fin de son cycle de vie utile, doit...

M. Caire : ...être détruites, sinon anonymisées à des fins de recherche. J'aimerais que vous me disiez, dans ce contexte-là, qu'est-ce qu'on devrait faire de plus ou de mieux pour répondre à cette préoccupation que vous avez quant à la conservation des données.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Il y a deux aspects : l'usage primaire, donc qui est un bénéfice clinique pour le patient, mais l'usage...

M. Caire : Ce pour quoi la donnée a été collectée.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Exactement, et ce pourquoi elle pourrait être détruite. Par contre, il y a l'usage secondaire qu'il ne faut pas oublier, c'est-à-dire que, si par exemple un nouveau traitement est disponible et aide la population, si on efface les données qui ont servi à la production de cette innovation-là, bien là, on enfreint des exigences réglementaires fédérales ou certaines exigences d'organismes subventionnaires provinciales et fédérales. Donc, il y a tout cet aspect, peut-être qu'on ne veut pas anonymiser les données. En deuxième temps, on peut les dépersonnaliser de façon à respecter les exigences réglementaires. Donc, ça, c'est la préoccupation des chercheurs en termes de reproductibilité des expériences et de respecter les lois en vigueur.

M. Caire : Oui. O.K. Je vous entends.

Ce qui m'amène à la granularité du retrait du consentement, ce qui... Parce que, bien, en fait, les deux se chevauchent, puisque les données qui seraient anonymisées, et donc disponibles à la recherche, sont des données qui n'auraient pas fait l'objet d'un «opting out». Là, je veux être... dans un premier temps, je veux être sûr qu'on parle de la même chose. Quand vous parlez de la granularité du retrait du consentement, est-ce que vous parlez d'un «opting in» ou d'un «opting out» plus détaillé?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Oui. Je fais «oui» de la tête, donc c'est un «opting out» plus détaillé pour les chercheurs non liés, donc là, c'est-à-dire que dans le projet de loi, on...

M. Caire : Chercheurs non liés sont des chercheurs qui ne sont pas attachés à un centre hospitalier?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : C'est ça, qui peuvent être des chercheurs universitaires ou qui peuvent être des chercheurs de PME, et là, actuellement, les patients peuvent se retirer en fonction de types de projets de recherche ou de catégories, de thèmes de recherche. Donc, il y a déjà une certaine granularité.

Par contre, peut être qu'un patient peut vouloir se retirer de certaines recherches, et, s'il y a des recherches qui impliquent une étude clinique où le patient pourrait potentiellement avoir un bénéfice - je suis très malade, je me suis retiré, je ne pourrais pas en bénéficier - donc, ce serait d'explorer peut-être cette granularité pour que le patient puisse choisir jusqu'où il veut se retirer. Est-ce que je veux me retirer de tout, ou j'accepterais de, justement, participer à ces études cliniques?

M. Caire : Je vous entends, sauf que ça présuppose que le patient est informé de façon granulaire que ses données de santé pourraient servir à un projet de recherche en particulier. Est-ce que vous ne craignez pas que, là, on inverse le fardeau, et donc que nous devions exiger dans les protocoles de recherche que les chercheurs s'assurent d'avoir le consentement des patients dont on va utiliser les informations, ce qui - puis je le lance dans l'univers, là - ce qui à mon sens aurait pour conséquence de rendre beaucoup plus complexe l'élaboration du protocole de recherche. S'il y a une autre façon de faire, je vous entends, là, puis je... Mais...

• (16 h 20) •

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Je vais clarifier, si je peux... permettre. Donc, ce qu'on veut permettre, ce n'est pas l'«opting out» pour les projets de recherche d'études cliniques, c'est-à-dire, si un patient ne veut pas participer, là, il pourrait faire l'«opting out» plus granulaire.

M. Caire : Non. Là, je vous avoue que je ne vois pas la... Moi, je dis : Je ne veux pas participer à des études. Actuellement, là, je dis : Moi, je fais un «opting out», je ne veux pas que mes données de santé servent à des projets de recherche sur le cancer. C'est un retrait du consentement général, c'est ce que la loi prévoit actuellement. Vous, vous dites : Oui, mais peut-être qu'en ce qui concerne un cancer de la prostate, là, la personne voudrait pouvoir faire partie de ce protocole de recherche là.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Il y a deux cas de figure : il y a une recherche rétrospective sur des données et il y a une recherche prospective sur des données à venir, donc une étude clinique qui peut avoir un chevauchement entre des données passées puis des données futures, et là, la loi, elle n'a pas cette subtilité-là. Donc, les patients qui veulent se retirer pourraient être pénalisés.

M. Caire : Oui. Puis c'est juste qu'il faut trouver un texte législatif qui dit ça, là. C'est... Ça commence à être effectivement...

M. Caire : ...très, très granulaire. Mais comment on pourrait puis comment dans un texte législatif... puis là je me tourne vers ma collègue de Mont-Royal-Outremont, qui, en cette matière, est nettement plus compétente que moi, là. Comment on pourrait aller dans ce niveau de granularité là dans le consentement? Puis, en plus, puis je vous le soumets parce que ça nous a été dit en commission, est-ce que ça ne présuppose pas un niveau de littératie que tout le monde ne peut pas avoir? Donc, jusqu'à quel point? Si on va dans ce niveau-là de granularité, peut-on parler d'un consentement valide? Là, je m'adresse peut-être à vous, maître.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Bien, c'est sûr que c'est une des questions, de s'assurer que le consentement est éclairé, donc qu'il y ait vraiment aussi tout un rôle des professionnels qui sont, entre autres, dans le domaine de la santé, qui sont en mesure de bien expliquer les différents niveaux de consentement. Donc, il faut que ce soit bien compris, et qu'il y ait une partie d'éducation. Mais l'idée, encore une fois, c'est de vraiment s'assurer que ce ne soit pas nécessairement un rejet en bloc, c'est-à-dire que, s'il y a certaines choses qui les concernent davantage, qu'il puisse y avoir une certaine... encore une fois, là, de se garder une certaine latitude, comme patients, là de décider à quoi ils veulent participer.

M. Caire : O.K. Vous parlez qu'il faudrait autant que faire se peut, éviter les homologations ou les certifications locales. J'aimerais ça que vous m'expliquiez un peu ce que ça veut dire, ça, pour les chercheurs, puis en termes de données. En termes de mouvement de la donnée, ça, je pense que le projet de loi le prévoit par des ententes qui seraient de nature contractuelle pour assurer des régimes de protection des renseignements personnels qui sont équivalents à ce qu'on fait au Québec, parce qu'on a un régime qui est nettement plus sévère que ce qui se fait ailleurs. Donc, la transposition, on le fait contractuellement. Mais, pour ce qui est des certifications, homologations, là, je vous avoue que ça, c'est peut-être un univers où je suis moins familier. Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : En fait, le projet de loi semble présupposer qu'il va y avoir une certification locale ou une homologation locale. Donc, ces mots-là, on ne veut pas remplacer des certifications internationales ISO ou en cybercybersécurité, comme le NIST CSF, qui existent déjà. Donc, dans l'évaluation des facteurs de risque, si on veut qualifier un produit ou un organisme qui fait un logiciel, bien, on ne veut pas certifier l'organisme, on fait juste regarder l'ensemble des facteurs. Donc, on ne doit pas refaire un processus de certification. S'il y a une certification qui existe déjà, bien, elle aide beaucoup le processus d'évaluation du BC.

M. Caire : O.K. Donc, si je suis ce que vous me dites, les certifications internationales, est-ce qu'elles devraient s'appliquer là où il n'y a pas de certification locale déjà ou d'homologation locale ou vous dites, elles devraient avoir préséance sur...

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Dans une perspective de collaboration internationale, on veut éviter le travail en double. Donc, s'il y a un effort de certification qui a été fait et que c'est une certification internationalement reconnue, le Québec devrait reconnaître, par exemple, la certification ISO 27001 et dire : Bien, ça ne fait pas partie de la totalité de notre évaluation, mais, si on a déjà cette certification-là, bien, ça coche déjà beaucoup de cases.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Et, si je peux ajouter, c'est vraiment, là, l'idée d'éviter d'isoler le Québec et de s'assurer que les technologies qui sont disponibles soient également au Québec et que ça ne soit pas vu comme étant une étape additionnelle à faire ou d'autres critères, parce que ça devient vraiment complexe. Donc, encore une fois, c'est lorsqu'il y a déjà des certifications ou des homologations qui existent dans d'autres juridictions ou qui sont de nature plus internationale. Comme mon collègue vient de le dire, c'est de s'assurer d'être capable de reconnaître ces certifications-là ou ces homologations-là et éviter d'arriver avec un deuxième niveau qui peut être d'autres critères et tout, et, en bout de ligne, ce ne serait pas pour le bénéfice, là, de la population au Québec.

M. Caire : Je comprends. Mais, en même temps, est-ce que... puis là je me fie plus à votre expérience qu'à la mienne, évidemment, mais est-ce que ces certifications-là, homologations locales n'ont pas pour but justement de palier au fait qu'à l'international, généralement, il n'y en a pas? Vous parliez de la norme ISO, là, qui est... ça, c'est un univers que je connais peut-être un peu plus, là. Justement, quand il y a des normes internationales, en tout cas, le petit carré de sable dans lequel moi, j'ai travaillé, là, c'est une norme internationale, que ce soit une norme ISO ou d'autres, il y a d'autres normes en matière de cybersécurité et de sécurité de l'information, il n'y a pas vraiment d'intérêt à aller chercher des normes locales, on va rester avec. Donc, est-ce que, dans le...

M. Caire : ...la recherche, ce n'est pas le même principe qui s'applique. C'est-u ça que vous êtes en train de nous dire?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Non, pas du tout. C'est juste que, dans le libellé du projet de loi, il y a les mots... on va avoir une certification, et là on suppose que c'est une certification locale. Donc, c'est plus...

M. Caire : Sans de déterminer que, si une homologation reconnue de niveau international, on va s'en contenter.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Exact.

M. Caire : O.K., je comprends. Parce que je ne dois pas avoir beaucoup de temps. Vous avez parlé de la reddition de comptes. Je vous dis, je suis quand même agréablement surpris, parce que généralement les gens trouvent qu'il y en a trop, vous, vous dites : Il n'y en a pas assez. Et, en ce sens, vous nous recommandez d'ajouter quoi exactement dans la loi, au niveau de la reddition de comptes? Parce qu'il y a quand même des publications Internet qui sont obligatoires. Il y a des homologations qui sont obligatoires, là, au niveau des protocoles de recherche notamment, parce qu'on parle évidemment de la recherche. Donc, il y a quand même déjà un encadrement sur la reddition de comptes. Vous dites : Ce n'est pas suffisant. Vous iriez jusqu'où exactement, là?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : En fait, il manque un mot, donc, il faut que la reddition de comptes qui soit remis au ministre soit aussi... une version de cette reddition de comptes soit remise au public. Donc, notre compréhension, c'est que ce petit élément-là devrait être ajouté au projet de loi. Et...

M. Caire : Si vous me permettez, monsieur Le Bouthillier, parce que c'est très intéressant, ce que vous dites, surtout que vous travaillez dans le secteur privé, donc ce que vous dites, c'est que le secteur privé devrait rendre publiques les conclusions de ses recherches, mais on va jusqu'où avant de se faire dire : Aïe! Wo! Wo! Un instant, là, il y a le secret de la recherche là-dedans, là, puis...

La Présidente (Mme Mallette) : Ça va être 30 secondes pour conclure.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Si je peux me permettre, et, Alexandre, tu pourras compléter, mais ce n'est pas nécessairement de rendre publics tous les résultats, c'est vraiment dans une perspective d'amélioration continue, donc dans une perspective : Oui, c'est bien d'avoir des données qui sont rendues publiques sur les délais d'accès, par exemple, sur différentes choses, mais vraiment de s'assurer que tout le processus continue de s'améliorer. Alors, ce n'est pas tant, là, sur tout le résultat des recherches mais sur le fonctionnement. Si tu veux compléter.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Exact, c'est ça.

La Présidente (Mme Mallette) : Bien, merci beaucoup, M. le ministre. Donc, maintenant, je cède la parole à la députée de Mont-Royal-Outremont.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous deux. Là, il y a peut-être certaines de mes questions qui vont paraître redondantes mais posées d'une façon différente, ça va juste nous permettre de continuer la discussion, mais d'entrée de jeu, mon commentaire général, si je vous entends bien, c'est que vous êtes non seulement très enthousiaste, mais vous êtes... on vous sent pressés et impatients de voir tout ça, tous ces changements-là être mis en œuvre.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Bien, c'est-à-dire que ce qu'on entend vraiment dans le domaine de la recherche, encore une fois, c'est que c'est difficile en ce moment. Et, ces étapes-là, que ça soit dans le domaine de la recherche, par exemple, universitaire ou autres, ça peut être difficile. S'il y a des étudiants qui attendent après des autorisations pour pouvoir compléter leurs travaux, c'est difficile de prendre part à certaines recherches qui peuvent être pancanadiennes et de se démarquer à l'international. Donc, ça, c'est dans un des secteurs. Et, dans d'autres types de recherche également, les délais et le fait que les données ne sont pas nécessairement à jour, et tout, c'est une situation qui perdure quand même depuis longtemps.

Alors, effectivement, on voit d'un bon oeil ce projet de loi là qui peut permettre de faire avancer la recherche, là, d'une façon, encore une fois, bien encadrée et avec des règles qui sont rigoureuses et des comités d'éthique qui sont déjà en place et qui vont rester là. Alors, oui, c'est sûr qu'il y a un souhait que le tout soit vraiment, là, plus... je vous dirais que les délais soient plus courts dans les processus d'approbation.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Si on se compare aussi, par exemple, aux pays du G7, on est en dernière position, et dans l'OCDE, 19 positions sur 20 sur l'accès à des médicaments. Vous avez entendu l'histoire de mon père, mais elle n'est pas unique. Donc, c'est sûr que, si on faisait nos développements locaux d'innovation, bien, peut-être qu'on aurait plus accès aux propres innovations qu'on a développées. Donc, c'est pour ça que ça doit commencer d'abord par des innovations locales.

Mme Setlakwe : Pensez-vous qu'il y a un manque d'éducation ou de sensibilisation dans la population? Est-ce qu'il y a de la désinformation qui nuit à vos membres?

• (16 h 30) •

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Bien, il y a définitivement une meilleure communication, oui, c'est un des éléments. Et c'est pour ça que, quand on parlait de la reddition de compte aussi, que ça soit une reddition de comptes qui soit publique, c'est que, oui, il doit y avoir... Sans parler de de désinformation, c'est davantage, là, de vraiment expliquer les bienfaits et que, lorsque les familles, les collègues, amis ont accès à des traitements, bien, il y a tout un processus qui ont permis d'en arriver là. Alors, une plus grande transparence et une meilleure communication, c'est définitivement quelque chose qui va devoir continuer à se faire et de se faire de plus en plus.

Mme Setlakwe : J'allais vous demander si généralement le projet de loi vous impose un fardeau additionnel. Puis là je crois comprendre qu'il faut faire certaines distinctions. En général, non, mais ce que je comprends, c'est que non, mais même vous semblez même offrir... Par exemple, la question de la reddition de comptes, vous semblez proposer que...


 
 

14 h 30 (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...que ça soit resserré ou qu'il y ait des ajouts qui soient faits.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Bien, encore une fois, il y a des recommandations effectivement qu'on recommande. Et, du côté de la reddition de comptes, là, encore une fois, j'y reviens beaucoup, c'est dans une perspective d'amélioration et de communication au public.

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Un aspect aussi qui est très difficile lorsqu'on fait de la recherche, c'est ne pas faire de la recherche biaisée. Donc, si c'est très difficile d'avoir accès à des données pour un chercheur dans un hôpital, donc là ce n'est pas représentatif de la population. Je dois le faire dans plusieurs hôpitaux, et, idéalement, je dois le faire à travers plusieurs provinces ou d'autres juridictions. Donc là, c'est sûr que le projet de loi va favoriser l'harmonisation de ces processus d'accès avec le centre d'accès. Il faudra voir les détails. Mais, une chose qui n'est pas couverte, c'est des juridictions que le Québec pourrait reconnaître ayant des protections adéquates. Donc, on veut favoriser des collaborations avec nos pairs en Ontario, au Manitoba. Ça, ce n'est pas le cas actuellement. Donc, ça, c'est une petite amélioration qu'on aimerait voir.

Mme Setlakwe : Oui, c'est ça. Dans le fond, le partage d'information puis la réciprocité ne peuvent que servir la population ultimement. C'est comme ça que je le comprends. Revenons, à la question, là, de l'article 8, puis de votre demande d'y insérer une plus grande granularité, ce n'est pas un terme que je connais si bien, mais, si je ramène ça au point de vue... de la façon dont moi je le comprends, puis point de vue, tu sais, mon chapeau d'avocate. Est-ce que je vous ai bien compris que vous aimeriez que... c'est trop noir ou blanc, là? Les gens disent, c'est ça, disent oui ou non puis il n'y a rien entre les deux, si on le simplifie à l'extrême?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Exactement.

Mme Setlakwe : O.K.. Et est-ce que... Là, je relis le paragraphe, là. Est-ce qu'une personne aussi se prononce à un moment X de sa vie, là, avec son... mais il se prononce pour aujourd'hui et pour le futur? Puis, ça, c'est un problème aussi. Donc là, si, dans quelques années, il développe une maladie, il développe un cancer, et là, soudainement, veut participer à un projet de recherche, là, la loi, c'est ça, renverse le fardeau. En tout cas, juste préciser un peu ce que vous souhaitez voir. C'est peut-être dans le mémoire, puis là je m'en excuse, là, si je n'ai pas lu en détail. Mais comment on pourrait y arriver, à un meilleur libellé?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Alors, on a proposé un libellé très spécifique, là, je ne veux pas le lire, mais «être exercé si l'accès envisagé est à des fins de sollicitation». Donc, en fait, si la personne ne veut pas être dérangée pour un projet de recherche ou une étude clinique, là il faudrait qu'il coche, il dit : Moi, je ne veux pas être dérangé. Donc, ça, c'est quelque chose qui serait l'équilibre entre le blanc et le noir. Et, ce qu'on voit un peu sur les sites Internet lorsqu'on choisit les options, souvent, il y en a trop, mais là, c'est peut-être un juste équilibre entre un retrait complet et partiel.

Mme Setlakwe : Très bien. Mais on va certainement se pencher en détail sur votre mémoire. Ah! moi, j'ai peut-être une question qui sort un peu du champ gauche, mais ça me trotte dans la tête depuis qu'on discute de ça, depuis lundi. Est-ce qu'il y a... Puis je comprends que la loi fait une distinction, là, les mineurs, plus ou moins de quatorze ans, tout ça, mais juste généralement, dans le monde de la recherche, est-ce qu'il y a des distinctions à faire au niveau du milieu pédiatrique versus le reste? Tu sais, dans les énoncés que vous avez faits, est-ce que ça se passe mieux, moins bien? Est-ce qu'une meilleure collaboration? Tu sais, je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire.

Mme Toussaint (Emmanuelle) : De mon côté, je comprends la question. Ce n'est pas quelque chose qu'on a couvert, de vraiment, là, venir traiter de ce sujet-là en particulier. Je ne sais pas si, Alexandre...

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Non. Tout ce que je peux dire, bien, c'est le tuteur, mais souvent les enfants malades, on n'aime pas ça puis on veut avoir des traitements de dernier cri pour nos enfants. Donc, généralement, les tuteurs vont être les maîtres d'oeuvre du consentement pour leurs enfants.

Mme Setlakwe : Oui. Je demandais juste si, dans la vraie vie, il y a des choses qui avançaient plus vite au niveau pédiatrique, parce que, je ne le sais pas, il y aurait... Non, j'imagine que...

M. Le Bouthillier (Alexandre) : Bien, ça revient un peu sur les collaborations internationales. Alors, lorsqu'on veut faire de la recherche, même si on prend des grandes maladies, puis là je vais revenir aux adultes, là, mais cancer du poumon, on a des sous-classes de maladies pour lesquelles il y a des traitements spécifiques. Et là je regarde dans un hôpital, j'ai 25 patients. Évidemment, ce n'est pas assez pour être capable de faire avancer la science. Donc, c'est la même chose au niveau pédiatrique. Il y a des maladies rares, donc je dois faire des collaborations avec d'autres centres. Donc, si je n'ai pas une reconnaissance d'autres juridictions avec des protections équivalentes, le fardeau va être mis sur le chercheur qui devra justifier par les articles de loi, c'est un peu ce qui est demandé : Bien voilà, l'Ontario... Il va faire référence. On ne peut pas demander à chaque chercheur de justifier l'équivalence. Donc, nous, on pense que ça serait bien d'avoir une liste qui est publiée, peut-être annuellement non exhaustive, par le centre d'accès qui établirait des juridictions amies.

Mme Setlakwe : Oui. Je pense, c'est quelque chose auquel il faut réfléchir, parce qu'on espère, comme parent, puis là c'est...

Mme Setlakwe : Je ne peux pas parler des enfants, mais que Sainte-Justine, qui est notre fleuron, là, puis on espère qu'ils se parlent, puis je pense qu'ils le font, ils parlent aux centres universitaires de recherche à travers le monde. Et on espère qu'il n'y a pas, tu sais, qu'il n'y a pas de fardeau exagéré, là, en termes de fluidité. Pour moi ça va, je n'ai pas d'autre question. Merci.

La Présidente (Mme Mallette) : Bien, merci. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont. Vous avez 8 min 12 s.

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Mme Toussaint, M. Le Bouthillier, merci. Merci d'être là. Une question qui me trotte dans la tête, là, plus j'entends des témoins, ici, là, puis vous êtes le 10e ou 11e groupe depuis hier, là. En fait, ça me trotte dans la tête depuis que j'ai eu un échange légendaire, ici, je dirais, avec le ministre de l'Économie sur la possibilité pour les pharmaceutiques d'avoir accès aux données de santé. Mon biais est connu là-dessus, là, on ne se cachera pas, là, mais ma question est tout à fait sincère et objective. Qu'est-ce que vous voulez obtenir comme données?

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Sur cette question-là, je pense que c'est très clair que, du côté du privé, c'est vraiment un écosystème, hein, chaque partie prenante a un rôle à jouer. Et le privé n'est absolument pas intéressé à avoir des données qui sont personnalisées, là. Donc, ce qui est important, c'est que les données soient soit personnalisées ou encore anonymisées ou agrégées, mais vraiment de pouvoir faire avancer la science.

Et je pense que c'est... Le privé est un des joueurs, comme j'ai dit, qui est important dans l'histoire, et j'aimerais peut-être juste faire une petite parenthèse. On s'est rendu compte, Alexandre et moi, qu'on avait une histoire un peu similaire, et je crois qu'on a tous des histoires de gens de nos familles, nos amis qui ont passé à travers des expériences, qu'ils ont bénéficié de la recherche. De mon côté, moi, c'est mon père est décédé d'un cancer à 60 ans il y a maintenant 22 ans. Ma mère est décédée d'un cancer il y a seize ans à 60 ans pile aussi. Je peux continuer comme ça, ma belle-mère il y a six ans également. Donc, on en a tous, de ces histoires-là. Et, grâce au traitement déjà de l'époque, d'il y a cinq, dix, 20 ans, il y avait déjà des traitements qui étaient disponibles, ça a permis de prolonger et peut-être pas d'avoir une rémission dans ces cas-là mais quand même d'avoir une prolongation.

Et en ce qui me concerne, mon père, ça lui a permis également, pendant ces cinq années-là, d'écrire un livre qui était ses mémoires. Et je ne peux pas faire autrement que de me dire : Si, à cette époque-là, il y avait des recherches qui avaient déjà été faites, qui permettaient soit des traitements ou encore, encore une fois, de prolonger un peu l'espérance de vie mais que ces recherches-là n'étaient pas disponibles pour les patients, je ne suis pas sûre que c'est un baume vraiment à avoir.

Alors, il faut garder en tête, je pense, que, du côté du privé, encore une fois, tout le monde travaille dans le même objectif, c'est-à-dire d'améliorer la santé des patients, de guérir, si c'est possible, des patients. C'est vraiment dans un intérêt public. Et il y a tellement aussi de processus qui sont déjà en place, et ce projet de loi là vient définir... harmoniser aussi des processus. Donc, il ne faut pas oublier qu'il y a des comités d'éthique qui sont là. Et il y a... On est chanceux, au Québec, encore une fois, d'avoir beaucoup de petites organisations en biotechnologie, des organisations de recherche contractuelle qui travaillent en collaboration avec le privé. Alors, il faut s'en souvenir.

• (14 h 40) •

Et une des expériences professionnelles aussi que j'ai, j'ai travaillé pendant quelques années au vice-rectorat à la recherche de l'Université Laval où je m'occupais notamment des travaux de la Faculté de médecine, pharmacie. Et les chercheurs veulent, évidemment, diffuser leurs connaissances, ils veulent faire avancer la science, mais, encore une fois, l'objectif commun est toujours de s'assurer que ça se rend jusqu'aux patients. Alors, le privé veut la même chose, encore une fois, c'est le bien commun. Et, avec tous les moyens qui sont en place, on est vraiment... et qui vont être mis en place avec ce projet de loi là, on est vraiment confiants que c'est possible de le faire d'une manière bien encadrée et pour le bénéfice de tous.

M. Marissal : Désolé pour vos pertes, là. Puis on ne fera pas un palmarès, mais j'ai perdu moi-même deux de mes frères, dont un à l'âge de 57 ans, en septembre dernier, d'un cancer qui l'a affligé pendant quinze ans. Ce n'est pas moi qui vais me mettre dans le chemin de la recherche, mais, comme parlementaire, je vais mettre dans le chemin de la... propagation, pardon, des renseignements personnels à des fins purement mercantiles et commerciales, parce que je pense que ce n'est pas pour ça, notamment, que la RAMQ collige et garde nos renseignements.

Supposons que nos données personnelles, c'est une ressource naturelle, c'est une ressource première, puis qu'elles sont exploitées comme on exploite...

M. Marissal : ...nos ressources naturelles au Québec, c'est-à-dire qu'il y a des extracteurs qui arrivent, qui font un trou, parfois même, on le fait pour eux, prennent les ressources puis ils s'en vont avec les ressources et les profits. Puis nous, il reste deux, trois granules ici pour rester dans le thème, là. Est-ce qu'on ne risque pas ça avec nos données? Vous dites le bien commun, je comprends, là, personne n'est contre la vertu, mais les pharmaceutiques, c'est des entreprises capitalistes qui font un paquet de fric, là, puis elles sauvent des vies, j'en conviens, j'en conviens. Mais où est-ce qu'on met la borne, là, où on s'arrête pour dire : Là, on n'est plus dans l'intérêt public, on est dans la marchandisation et dans la capitalisation d'entreprises qui font de l'argent puis qui vont peut-être même partir du Québec. Mon exemple, là, des mines, c'est ça aussi, la PME, là, qui se crée ici, je connais personnellement, là, des génies qui ont lancé des petites PME dans le domaine de la santé, qui ont été rachetées par des géants des Pays-Bas, par exemple. On a tout perdu. On a mis de l'argent là-dedans. Investissement Québec a mis de l'argent là-dedans. On a formé ces gens-là à l'université. Ils ont créé quelque chose de superbien, Pfizer ou un autre est débarqué, l'a racheté, puis c'est parti. Comment on... Mettons, là, qu'on dit ça, là, qu'on fait un pacte, là, comment on garde ça puis qu'on a un bénéfice pour nous ici?

Mme Toussaint (Emmanuelle) : Bien, je ne crois pas qu'on a lieu de s'inquiéter. Parce qu'encore une fois... puis vous donnez l'exemple du côté des ressources naturelles, et tout, ce n'est pas dans les ressources elles-mêmes. C'est qu'est-ce qu'on en fait, c'est la transformation qui en est faite. Et, dans ce cas-ci, ce sont des solutions pour les patients. Alors, encore une fois, je ne pense pas que c'est une question pour des sociétés privées de venir prendre des données. Leur intérêt, encore une fois, n'est pas d'utiliser des données qui sont personnalisées, c'est vraiment, là, de pouvoir utiliser les données qui sont... qui deviennent publiques et qui sont... il faut le rappeler, là, on parle de données anonymisées ou dépersonnalisées. Alors, cet aspect-là est vraiment important et il y a des collaborations qui se font aussi. Comme on est très heureux d'avoir de la recherche qui se fait dans le secteur académique. Mais il faut comprendre que le privé est important aussi de ce côté-là. Donc évidemment, il y a un financement également qui se fait. Alors je pense que à partir du moment où on a un très bon encadrement, et c'est ce qu'on est confiant avec ce projet de loi là, ce n'est pas le scénario que vous avez décrit, je ne crois pas que c'est un scénario qui peut se réaliser, encore une fois, que ce soit avec... par le biais des comités d'éthique qui sont là et qui jouent un rôle extrêmement important. Et par la suite, c'est vraiment de pouvoir avoir accès à des données. Et si on n'avait pas d'exemple ailleurs dans le monde où ça se fait déjà, peut-être qu'on pourrait se poser certaines de ces questions-là. Mais on le voit que dans d'autres juridictions, entre autres en Europe, il y a déjà un hub, là, qui est en train de se créer. Il y a déjà dix États qui sont signataires et le but, c'est vraiment de pouvoir avoir des banques de données qui sont globales encore une fois et qui ont toute l'information.

La Présidente (Mme Mallette) : Environ 30 secondes pour conclure.

M. Marissal : Bien, ma question est vraiment de comment on garde, à nous, chez nous ce qu'on a créé nous-mêmes à partir de nos propres données. On ne peut pas empêcher une entreprise de se faire vendre. Vous l'avez dit vous-même, la concurrence est immense là-dedans. Où est-ce qu'on trace la ligne?

M. Le Bouthillier (Alexandre) : ...ce qu'il faut, je vais continuer votre analogie, il ne faut pas exporter nos ressources, il faut les transformer localement. Donc c'est ce qu'on cherche à faire. On veut transformer ces données en innovation. Et pourquoi c'est si difficile de le faire localement? On le voit un peu l'écart avec les autres pays. Donc c'est ce qu'on veut soutenir cette transformation, puis on veut la faire ici.

La Présidente (Mme Mallette) : Je vais devoir vous interrompre, malheureusement, c'est tout le temps qu'on avait, parce qu'on a d'autres groupes à rencontrer. Je vous remercie beaucoup pour votre contribution à cette commission.

Donc je suspends les travaux pour quelques instants afin de permettre au prochain témoin de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 14 h 45)

(Reprise à 14 h 52)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers amis, nous pouvons poursuivre nos travaux. Avant de procéder, je tenais à remercier ma collègue pour la présidence de séance qu'elle vient d'assumer avec brio. Nous sommes en ce moment en compagnie de représentants du Consortium Santé numérique. Monsieur, mesdames, auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il vous plaît, de vous présenter?

M. Joanette (Yves) : Oui, merci. Yves Joanette, je suis professeur-chercheur à l'Université de Montréal, à la Faculté de médecine, mais également à l'Institut de gériatrie, mais je suis ici à titre de directeur du Consortium Santé numérique.

Le Président (M. Simard) : Soyez le bienvenu, M. le directeur.

Mme Motulsky (Aude) : Bonjour, Aude Motulsky, professeure-chercheure à l'École de santé publique de l'Université de Montréal et directrice adjointe du Consortium santé numérique.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue, madame.

Mme Alary (Flamine) : Flamine Alary, directrice des opérations du Consortium Santé numérique.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue à vous également. Et nous vous écoutons. Vous savez que vous disposez d'une période de 10 minutes.

M. Joanette (Yves) : Merci. Je vais donc commencer par vous rappeler ou vous informer que le consortium, c'est une organisation universitaire assez unique, c'est 28 membres institutionnels qui regroupent les facultés, les écoles affiliées comme HSBC et Polytechnique et les établissements de santé et de services sociaux affiliés comme le CHUM, Sainte-Justine, les CIUSSS, de même que des organisations importantes pour la santé numérique comme Mila, Ivado et l'IRIC également. Alors, l'objectif du consortium, c'est de favoriser les liens entre ses membres à travers tout l'écosystème de l'Université de Montréal, et même au-delà, pour soutenir, coordonner, planifier la recherche et l'enseignement dans le domaine de la santé numérique.

Alors, dans un premier temps. On aimerait vraiment dire que le consortium et ses membres aimeraient souligner les avancées importantes que permettrait de prendre l'adoption du projet de loi n° 3, et ça permettrait au Québec, comme l'ont dit plusieurs autres intervenants, je crois, de rattraper le retard important en matière d'accès aux données de santé pour améliorer les soins de services. En fait, avec l'évolution de la science et les avancées en sciences des données, on pourra en parler si vous le souhaitez, il est probablement désormais plus risqué de se priver des connaissances issues des données massives que d'en faciliter l'accès.

Ceci dit, on aimerait souligner quatre points qui mériteraient attention et on a quatre recommandations à proposer pour optimiser le projet de loi N° 3. Le premier point, c'est la question de l'arrimage de la loi n° 25 et du projet de loi n° 3 ou de la loi qui pourraient en découler. Alors, on note que les articles 39, 43 du projet de loi N° 3 précisent que pour les chercheurs liés aux établissements du réseau de la santé, que ce soit la plus haute instance de l'organisation, par exemple le président directeur ou la présidente-directrice générale d'un établissement qui est l'autorité pour autoriser l'accès à ces renseignements ou aux renseignements et que l'entente complétée doit être transmise à la Commission d'accès à l'information, la CAI. Ce dernier point mériterait clarification, car l'intention derrière cette transmission à la CAI ne semble pas limpide complètement, elle n'est pas claire, et nous recommandons que l'intention de transmission de l'entente à la CAI soit explicitée et qu'elle se limite à des fins d'information. En fait, au moment où on se parle, la loi n° 25 se déploie, vous le savez très bien, et elle a introduit de nouvelles exigences pour les chercheurs qui accèdent à des informations personnelles, des documents doivent être complétés, lesquels doivent être transmis à la CAI pour approbation. Et, à l'heure actuelle, il y a plusieurs projets, dans un des établissements associés au consortium, qui sont différés à cause de... à la suite de l'envoi des premières demandes à la CAI. Alors, on comprend que si le projet de loi n° 3 devait devenir une loi qui serait particulière, elle aurait peut-être... elle aurait probablement préséance sur la loi générale qui est la loi n° 25, et que ce seraient les procédures du projet de loi n° 3 qui prévaudraient. Si c'est le cas, nous aimerions voir préciser ces choses et limiter la transmission à la CAI à titre d'information.

Le deuxième point qu'on voulait souligner, c'est la question de l'accès équivalent à l'ensemble des chercheurs universitaires. La section deux du projet de loi N° 3 décrit les procédures d'accès aux renseignements pour les chercheurs universitaires en... on va dire deux groupes distincts, hein, on représente l'université...

M. Joanette (Yves) : ...alors il y aurait les liés et les non-liés, enfin, les autres.

Or, il y a deux points ici. Le projet de loi ne définit pas ce qu'est un professeur-chercheur lié. Est-ce que ce sont les professeurs-chercheurs... et, évidemment, ici, je l'emploie au sens générique, les professeurs, les professeures-chercheuses... qui ont des privilèges de recherche dans les établissements affiliés ou... Et, si c'était le cas, bien, les autres chercheurs universitaires, qui ne sont pas nécessairement, au quotidien, liés à des établissements de santé, pourraient avoir des difficultés à avoir accès à ces données ou seraient soumis aux procédures plus longues et plus complexes, alors qu'ils ont le potentiel superimportant de contribuer à l'amélioration du système de santé et des soins de santé. Je prendrai comme exemple le Pr Yoshua Bengio, bien connu en intelligence artificielle. Il n'est pas lié, au sens des privilèges de recherche, à un établissement de santé, mais il pourrait y contribuer de manière significative.

Donc, nous recommandons que les modalités d'accès aux renseignements de santé des services sociaux s'appliquent à l'ensemble des chercheurs universitaires, dans la mesure où l'université avec laquelle... ou laquelle... où sont ces professeurs-chercheurs est une université auquelle les établissements sont affiliés, et ça pourrait être précisé dans les contrats d'affiliation.

Le troisième point que l'on voulait souligner, c'est la question de s'assurer que la science moderne contribue bien ou que... puisse contribuer au bénéfice des Québécoises et des Québécois. La science moderne, ça implique que... La science des données, c'est la science de... qui permet d'explorer toutes ces données de santé pour trouver des nouvelles choses, des nouvelles réalisations. Et à cet égard, il y a des principes de la science moderne dont... qui sont rassemblés sous, par exemple, l'acronyme FAIR, c'est-à-dire des données facilement trouvables, accessibles, interopérables et réutilisables. Le «R» de FAIR, c'est «réutilisables». Or, les articles 45, 77 et 103 réfèrent à des obligations de... soit de destruction ou d'anonymisation des données extraites, ce qui va à l'encontre du principe de réutilisation de ces données. Je souligne également que la plupart... enfin, toutes les universités au Canada, au Québec et tous les établissements de santé universitaires auront à publier, le 1er mars, une stratégie institutionnelle de gestion des données de recherche, selon la politique des trois conseils de recherche fédéraux, et qui est une politique qui est appuyée par le Scientifique en chef, où les principes FAIR priment, ce qui fait que la question de la réutilisabilité, si je peux me permettre, de ces données est absolument importante.

Donc, nous proposons que les articles 45, 77 et 103 soient remplacés par un cadre qui puisse soutenir l'évolution des méthodes et principes de recherche modernes en conformité avec les meilleures pratiques à travers le monde, dans le respect, bien sûr, du droit à la vie privée et dans le respect de la protection des renseignements personnels. Et nous proposons aussi que le cadre d'accès... et ça se trouve dans le mémoire que nous avons... les quelques pages que nous avons déposées... que le cadre d'accès et d'usage des renseignements de la santé et des services sociaux prévu par le projet de loi n° 3 balise l'accès aux données aux fins de la recherche, pour la rendre plus efficiente et fluide, par exemple, en permettant l'accès par Internet depuis les centres d'accès. Pour ces points, j'aimerais souligner qu'avec sa richesse de savoir dans toutes les facultés et établissements affiliés le consortium offre, éventuellement, de pouvoir accompagner une réflexion dans ce sens et pourrait contribuer, si cela pouvait être utile.

• (15 heures) •

Le dernier point, quatrième que je voulais souligner, est une caractéristique des universités qui est peut-être moins connue. C'est que les universités ont des cliniques universitaires. Ce sont, en fait, des lieux où on allie formation académique et recherche pour former les futurs professionnels. Il y a beaucoup de ces cliniques. L'Université de Montréal est probablement l'université qui en dispose le plus. Il y a neuf cliniques universitaires dans le domaine de la santé, par exemple, en clinique dentaire, une clinique de la vision, une clinique en orthophonie et audiologie. Le nombre de consultations n'est pas banal, hein? Ça va de 400 à 30 000 consultations annuelles par clinique, pour un nombre de consultations d'environ 84 000 par an par clinique.

Donc, à la lecture de l'article 4, chapitre I, Dispositions générales, il n'est pas tout à fait clair si les cliniques universitaires sont considérées comme une personne ou un groupement visé par l'annexe 2 du projet de loi. Alors, afin de soutenir l'usage secondaire des données issues des activités de ces cliniques, notamment pour l'amélioration continue...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Joanette (Yves) : ...de la recherche et pour la recherche. Il nous semble important d'inclure explicitement les cliniques universitaires comme un organisme du secteur de la santé et des services sociaux, d'autant que plusieurs des cliniques, et encore plus dans un avenir rapproché, pourront et seront... auront leurs données connectées à l'ensemble du reste du réseau de la santé et des services sociaux. Donc, la recommandation que les cliniques universitaires soient incluses comme organisme visé par le projet de loi. Et on pourrait simplement les nommer explicitement à l'annexe deux. Ça rajouterait simplement une ligne, les cliniques universitaires. Donc, merci au ministre, à son équipe. Encore une fois, on aimerait féliciter le travail pour ce pas en avant important. Merci aussi de tenir compte de ces quatre points sur lesquels nous offrons notre aide pour l'identification de solutions et éventuellement adapter le projet de loi trois. Je m'arrête ici et je vous remercie.

Le Président (M. Simard) : C'est nous qui vous remercions, Monsieur Joanette. On a très très hâte de pouvoir entreprendre avec vous une période d'échange. Mais avant de ce faire, nous allons devoir suspendre temporairement nos travaux parce qu'on a un petit problème de communication. Et votre image est un peu comme gelée. Alors, on suspend momentanément. On rétablit correctement la communication et on reprend nos travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 03)

(Reprise à 15 h 04)  

Le Président (M. Simard) : Alors, nous allons reprendre. Alors merci à l'équipe technique pour sa précieuse collaboration. Je souhaite maintenant la parole au ministre qui dispose de seize minutes...

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Ah! chère collègue, nous sommes à votre écoute.

Mme Mallette : Dites-moi si j'ai bien compris, afin, bon, d'accélérer l'accès aux données, j'ai entendu : D'avoir accès via Internet à ces données. Je me pose la question : Quel type de données? Est-ce que vous ne voyez pas des enjeux de sécurité?

M. Joanette (Yves) : Eh bien, vous avez raison qu'il y a toujours des enjeux de sécurité et il s'agit ici de gérer les risques de la meilleure manière possible. Il y a plusieurs juridictions où l'accès aux données de santé sont possibles par l'Internet. Il me semble que c'est une possibilité qui devrait être explorée pour faciliter le travail. À l'heure actuelle, en dehors du projet de loi trois, il y a des lieux où les chercheurs doivent se rendre pour avoir accès à des données publiques. Il faut comprendre que l'accès à ces lieux n'est pas simple. Il y en a un petit nombre et en fait, les chercheurs ne peuvent même pas souvent apporter des appareils de l'extérieur dans ces lieux. Donc, c'est même difficile, il n'y a pas de communication.

Alors, vraiment, je pense que, si on regarde ce qui se passe dans des pays européens qui ont des systèmes de santé publics et pour lesquels des chercheurs, des collègues peuvent avoir accès aux données, à mon avis, c'est une visée qu'on devrait avoir. Est-ce qu'il y a des problèmes de sécurité? Bien, je veux dire, il faudra s'assurer...

M. Joanette (Yves) : ...qu'on aura les meilleurs contrôles pour assurer la sécurité, bien sûr.

Mme Mallette : Mais, à ce moment-là, ce serait quels types de données? Toutes données, normalisées, anonymisées?

M. Joanette (Yves) : Bien, c'est-à-dire pour, disons, contribuer à la sécurité, peut-être qu'on devrait faire un «phase in», si vous me permettez l'expression anglo-saxonne, voir à faire en sorte que, si jamais les données sont saisies d'une manière inopportune, bien, qu'ils soient anonymisés, probablement. Est-ce qu'on devrait aller jusqu'à des données qui sont... qui permettent l'identification de la personne? Je pense que c'est un débat à avoir avec les experts. Et le consortium, vraiment, offre éventuellement la possibilité de réfléchir là-dessus avec ses experts dans ce domaine, qu'ils soient du monde de la santé numérique, ou de la faculté de droit, ou d'ailleurs, ou de l'informatique.

Mme Mallette : Merci.

M. Joanette (Yves) : Merci.

Le Président (M. Simard) : Je cède maintenant la parole au député d'Orford.

M. Bélanger : Merci, M. le Président. Moi, j'ai une question... Parce qu'on parle de données de santé, puis évidemment il y a tout l'aspect sécurité. Puis je vais utiliser le terme anglophone, je ne sais pas c'est quoi en français, mais «edge computing», lorsqu'on a de l'intelligence artificielle qui travaille avec des données, c'est... j'apparente ça un peu comme des chercheurs qui sont dans une bibliothèque. Ça fait qu'à ce moment-là on n'utilise pas un réseau externe, un réseau Internet, on travaille directement avec un accès au serveur.

Est-ce que vous voyez qu'au niveau des données de la santé, qui sont des données qui sont peut-être... qui requièrent une certaine sécurité, un niveau de sécurité... Est-ce que vous voyez ce profil-là ou cette solution-là comme étant plus applicable pour le Québec, c'est-à-dire d'avoir des centres de données, on verra qui va les détenir, et puis d'avoir l'expertise en intelligence artificielle qui est au-dessus... dans le fond, au-dessus des serveurs puis qui travaille directement à partir de ces données-là?

M. Joanette (Yves) : Ma collègue, Pre Motulsky pourrait peut-être commenter.

Mme Motulsky (Aude) : Oui, tout à fait, là. On ne propose pas que les données quittent nécessairement les établissements. Vous m'entendez bien?

Des voix : Oui.

Mme Motulsky (Aude) : Donc, effectivement, là, qu'on mobilise les technologies modernes pour que les données restent à l'intérieur des établissements mais qu'on puisse y accéder, que ce soit pour faire rouler des algorithmes à distance.

Mais le défi décrit précédemment faisait référence aux centres d'accès qui, en ce moment, sont un peu comme des bunkers à l'intérieur desquels on doit rentrer et, une fois qu'on est rentrés, nous-mêmes, on ne peut même pas accéder à Internet. Au-delà des données qui transigent, là, c'est l'humain qui a un défi. Donc, je pense, tout à fait, là, que l'idée de laisser les données là où elles sont étant donné leur sensibilité est l'avenue à privilégier par la majorité des chercheurs qui mobilisent ces données très, très personnelles.

M. Bélanger : Puis ma dernière question serait au niveau... Parce que je sais que, dans certains domaines comme les véhicules autonomes, la question de latence lorsqu'on fait travailler les algorithmes est un enjeu, donc on veut être à proximité de, justement, ces données-là. Est-ce qu'au niveau de la santé c'est un enjeu, la latence, c'est-à-dire d'avoir une base de données en Norvège, exemple, qui prendrait quelques millisecondes de délai, mais ça représenterait beaucoup de temps en termes d'algorithme, de calcul?

Mme Motulsky (Aude) : Il y aurait des collègues plus experts pour répondre à cette question, mais très certainement qu'on a des enjeux de capacité d'infrastructure par lesquels nos fonds de recherche arrivent à compenser via des infrastructures complémentaires.

• (15 h 10) •

M. Joanette (Yves) : Et j'aimerais juste ajouter que, sur la question, par exemple, de l'analyse par intelligence artificielle des données massives, on va dire, de plusieurs établissements, il n'est plus nécessaire, grâce à des avancées d'algorithmes, de devoir rassembler en un seul lieu l'ensemble des données. Il y a des approches en apprentissage fédéré qui permettent de faire les analyses successivement dans chacun des établissements sans que les données ne soient repositionnées dans un lieu commun pour qu'elles soient massivement analysées. Et ça, c'est des choses qui sont... qui ont été développées et qui sont développées ici et qui sont bien connues. Par exemple, le professeur Michaël Chassé au CHUM est très au courant de ces... et utilise cette approche.

M. Bélanger : Mais vous parlez de même juridiction, par contre, ce n'est pas entre des pays.

M. Joanette (Yves) : Pour l'instant, ce n'est pas entre des pays. En fait, le Consortium Santé numérique a accueilli la proposition du gouvernement du Québec de représenter le Québec au Regional Leaders Summit en santé numérique à Munich l'automne dernier. Et il y a actuellement un livre blanc qui est en train de s'écrire sur la possibilité d'utiliser l'apprentissage fédéré par-delà les juridictions au moins d'un point de vue technique.

M. Bélanger : Merci.

Le Président (M. Simard) : M. le ministre.

M. Caire : Oui, merci. Je dois dire que vous êtes probablement le groupe qui nous a amenés le plus loin...

M. Caire : ...dans le libre accès à la donnée, vous avez parlé de la continuité, je ne me souviens plus comment... Vous avez parlé de... Je ne me souviens plus de l'expression que vous avez utilisée... Comment on concilie ce que vous dites, donc une non-anonymisation de la donnée, parce qu'il faut comprendre que le projet de loi dit la collecte... la donnée initialement, elle est collectée à des fins de prestation de services de santé. On s'entend, c'est pour ça qu'elle a été collectée et à aucune autre fin. Donc, quand son cycle de vie est atteint, donc ce pour quoi la donnée a été collectée, le principe est : on doit la détruire.

Ce que la loi dit, c'est que si le détenteur... le possesseur de la donnée, c'est-à-dire le citoyen n'a pas... ne s'est pas retiré... n'a pas retiré son consentement, on peut anonymiser la donnée et s'en servir à des fins de recherche. Vous, vous dites, d'une part, le consentement, vous semblez remettre en question la notion de consentement là-dessus, si j'ai bien compris. Non. O.K. Parfait. Donc, vous êtes d'accord avec le consentement. Mais une fois que le consentement implicite est maintenu, vous dites : On ne devrait pas anonymiser la donnée, on devrait pouvoir s'en servir.

Et vous remettez aussi en question l'utilisation des... donc qui sont les espèces de "sandbox" dans lesquels on envoie ces données-là. Coupé de tout, c'est vrai, soit dit en passant, c'est un modèle qui a été importé de la France, parce que la France fonctionne de cette façon-là pour ses centres de recherche, et qui assure un plus haut niveau de sécurité. Parce que ce qu'on ne veut pas, c'est désanonymiser la donnée et qu'on puisse s'en servir d'une façon plus personnalisée. C'est ce qu'à peu près tous les groupes nous ont dit. Donc, vous nous amenez ailleurs.

Et là je vais vous ramener... et, après ça, je vous laisse répondre, une longue question, mais je vais vous laisser répondre. Parce que vous dites : C'est plus risqué de nous priver à cet accès-là à la donnée que de nous le donner. Convainquez-moi que de ne pas anonymiser les données, de ne pas vous permettre... vous obliger à travailler dans un contexte hypersécurisé, dans un objectif de protection des renseignements personnels, quels risques, que c'est la meilleure chose à faire pour les Québécois. Je vous avoue, là, puis je vais être très honnête, puis je pense que les collègues vont être un peu à la même place que moi, là, vous avez une pas pire côte à remonter.

M. Joanette (Yves) : Nous comprenons complètement ce que vous dites. On a aussi, je pense, au Québec, une côte à remonter en termes d'accès aux données. Donc, je pense qu'on est tous sur la même côte, mais je vous comprends...

M. Caire : La côte à...

M. Joanette (Yves) : ...je vous comprends. Juste avant de laisser peut-être ma collègue Aude Motulsky commenter, parce qu'elle connaît bien ces questions, j'aimerais juste souligner que les principes"fair" auxquels j'ai fait référence et donc dans le "r" du "fair", c'est la réutilisabilité des données. Ça va devenir, ça, et c'est en train de devenir, c'est en train d'être déployé, une condition essentielle pour les organismes qui subventionnent la recherche. Et donc ce n'est pas une loi au sens comme tel, mais c'est une conformité à une bonne pratique en recherche. Et les organismes subventionnaires qui soutiennent la recherche vont exiger des plans de gestion des données de recherche avant même de m'envoyer l'argent, qui vont prévoir ou non cette réutilisabilité des données. Et, si elles ne sont pas réutilisables, ça pourrait compromettre le soutien à la recherche.

Alors, je suis d'accord avec vous, là, on est dans un monde qui change beaucoup et rapidement. Ceci dit, on ne dit pas, je crois, qu'il faut désanonymiser l'ensemble des données ou les... Pas du tout. Je pense qu'on pourrait conserver les données anonymisées. Mais ma , peut-être, pourrait vous dire que, dans certains cas, certaines informations pourraient être importantes pour contribuer à la qualité de vie puis à la santé des Québécoises et des Québécois, puis du système. Aude.

Mme Motulsky (Aude) : Oui, bien, il y a plusieurs cas, par exemple le cas de maladies rares, le cas de maladies émergentes desquelles on ne connaît pas encore les caractéristiques, et surtout, étant donné la quantité de ressources investies dans des projets de recherche, où on fait énormément de travail sur des cohortes. Et, en fait, à la fin, on doit tout détruire. Donc, c'est l'investissement public des Québécois, des Québécoises, qui doit se trouver "reset". Donc, ce qu'on dit, ce n'est pas garder toutes les données avec toutes les informations personnelles, mais qu'elles soient archivées de manière sécuritaire, mais que, quelque part, l'option demeure possible de pouvoir jumeler à nouveau ces données et de les réutiliser dans le cadre de d'autres projets qui vont se poser d'autres questions pour demain.

Donc, juste à penser à la COVID, par exemple, on était tellement dans l'urgence, on avait tellement rapidement besoin...

Mme Motulsky (Aude) : ...de comprendre une nouvelle maladie. On n'est pas sur la conservation ici, mais on est dans la rapidité de l'accès. Les données qui sont sorties très rapidement au début mai 2020 venaient de cohortes au Royaume-Uni, venaient de cohortes de d'autres juridictions que les nôtres, parce qu'on était organisés pour avoir accès très rapidement à ces données extrêmement granulaires au niveau clinique.

M. Caire : Mais je fais du pouce là-dessus. Est-ce qu'un archivage des données, dont vous parlez, dans un... Puis là je rejoins peut-être, puis ça n'arrivera pas souvent, là, mais je rejoins un peu mon collègue de Rosemont. Il y a quand même... Non, je le dis à la blague, parce que lui et moi, on a une complicité que certains jugeraient de douteuse. Mais, dans les faits, il arrive souvent que les projets de recherche sont des partenariats public-privé. Et moi, comme ministre, comme membre du Parlement, comme personne qui a la responsabilité de ça, ce que le CADRIS nous apporte comme sécurité, c'est que vous rentrez avec des questions, vous sortez avec des réponses, et ça, c'est parfait, mais c'est tout. Si Pfizer et autres ont accès à nos données, du moment où ça sort du périmètre sécurisé du gouvernement du Québec, moi, je n'ai aucune espèce d'idée de ce qui peut être fait avec ça. Où est-ce que ça va aller? Entre les mains de qui ça va tomber? Je ne peux le garantir, je ne peux en assurer la sécurité. Alors, je vous avoue, là, que, en tout cas, je me répète, là, mais convainquez-moi, là, parce que ce n'est pas très sécurisant dans cette perspective-à de protection des renseignements personnels. Alors, je comprends que... Pour la souplesse, l'agilité des recherches, je vous comprends. Mais mettez-vous à la place de celui qui a la responsabilité, surtout dans un contexte numérique où c'est à grande échelle, les fuites de données, là, vous m'enlever à peu près tous mes outils de protection et de contrôle. Comment je fais ça?

M. Joanette (Yves) : Bien, dans un premier temps, on parlait des chercheurs universitaires. Alors, on a déjà proposé qu'il y avait les chercheurs oubliés, ceux qui sont liés. Et, encore une fois, le projet de loi n'est pas clair, précis, disons, sur la définition de «liés». Mais il y a donc ce premier point. Donc, on n'a pas impliqué ici, là, le public-privé, on était au niveau des chercheurs universitaires, non, mais, ici, pour ce qui est du commentaire qu'on a fait.

M. Caire : Non, je comprends, mais vous admettrez, docteur, que ce n'est pas exceptionnel dans les protocoles de recherche que ce soit des partenariats public-privé. Sans dire que c'est la norme, ce n'est pas non plus exceptionnel, donc il faut le prévoir, d'une part. D'autre part, et là je mets un autre chapeau, le fait que vous soyez un universitaire ne me garantit pas l'intégrité de l'individu de façon absolue. Donc, qu'est-ce qui me dit, moi, qu'il n'y aurait pas la tentation d'une petite clé USB qui pourrait... Alors, comprenez-vous? Il y a aussi... On a aussi cette obligation-là. Je vous, là, qui... Allez-y, je vous écoute.

M. Joanette (Yves) : Bien, c'est-à-dire qu'on est soumis à des règles, on est soumis très rapidement, puis Aude complétera, mais on est soumis, là, les chercheurs universitaires, à des règles de sécurité et d'éthique extrêmement rigoureuses, extrêmement rigoureuses. Aude, est-ce que tu veux compléter?

• (15 h 20) •

Mme Motulsky (Aude) : Bien, exactement, là. Je pense que, dans la finalité du projet, ça peut se baliser. Puis, au niveau de la transparence, on a une reddition de comptes extrêmement importante à faire. Donc, que la finalité soit l'avancement des connaissances, une approbation par un comité d'éthique qui vient certifier qu'il y a eu une évaluation scientifique de la pertinence, et tout ça se balise en toute transparence, là.  Mais on ne vous dit surtout pas qu'on veut que les chercheurs se promènent avec des données sur des clés USB, là, non.

M. Caire : Non, mais je vous entends. C'est parce que vous me dites : Il y a des moyens législatifs, il y a des moyens réglementaires. Je vous entends, vous avez raison, puis c'est l'objet du projet de loi. Comme législateur, je ne vous dirai jamais que c'est une mauvaise chose. Mais il y a aussi des moyens physiques qui doivent soutenir tout ça. Or, il y a dans ces idées-là du contrôle physique de la donnée, il y a aussi une idée de s'assurer qu'on a différents mécanismes. Donc, l'anonymisation.... Et là j'entends que j'avais mal interprété vos propos, et je m'en excuse. Vous, vous ne souhaitez pas qu'il y ait une désanonymisation des données. Ça, c'est un exercice de diction en soi, là. Mais, d'abord, je vais vous demander peut-être d'élaborer un peu plus là-dessus, parce que c'est ce que j'avais compris. Donc, la donnée anonymisée, tel que prévu dans le projet de loi, ça, ça vous satisfait. Ce que vous souhaitez, comme meilleur accès, dans le fond, c'est de sortir du cadre physique qui est en place actuellement et...

M. Caire : ...d'avoir une mobilité non seulement pour les chercheurs au Québec, mais d'avoir une mobilité aussi plus large, en dehors des frontières du Québec.

Le Président (M. Simard) : Alors, très rapidement, s'il vous plaît.

M. Joanette (Yves) : Oui, si je peux me permettre, il y a... Tout ce que vous dites est juste, en termes de résumé, là, et je vous remercie.

M. Caire : ...il a dit que tout ce que je disais était juste. Arrêtez ça là.

Le Président (M. Simard) : Malheureusement, je... on doit poursuivre et je lance la balle ou cède la parole à ma collègue de Mont-Royal-Outremont.

Mme Setlakwe : Vous allez voir qu'on travaille de façon constructive. Moi, je suis prête à vous laisser répondre, s'il vous plaît, la question, elle est bonne et la réponse, elle est pertinente pour nous tous. Alors, allez-y, c'est extrêmement utile. On pourra continuer la discussion.

M. Joanette (Yves) : Bien, je pense que là où on s'en va, et si le projet de loi trois s'en va là où la rondelle ne sera, là, pas où la rondelle était là. Si on prend le hockey comme exemple. Eh bien, je veux dire, là où la rondelle sera, c'est une capacité à pouvoir réutiliser des données et pas uniquement dans... pas uniquement de rentrer dans un endroit, de pouvoir poser une question, d'en ressortir et qu'après ça ces données-là ne soient plus réutilisables. Donc, je crois que les pays qui représentent un exemple... et les systèmes qui représentent un exemple à cet égard permettent la réutilisation de ces données, anonymisées, bien sûr.

Mme Setlakwe : Merci. Non, ça a été bien précisé, donc il n'y a plus de confusion. Je voulais vous remercier. Juste revenir un peu à... propos introductif. Merci pour votre présentation. Merci pour votre mémoire. Vous avez en particulier apporté un éclairage sur les cliniques universitaires. On vous en remercie. On va relire ça à tête reposée, mais il y a peut-être effectivement lieu d'ajouter à l'annexe deux.

Vous avez mentionné que vous avez représenté le gouvernement du Québec en Allemagne récemment. Donc ça m'amène à... vous avez retiré quoi, de cette expérience-là, et en vous comparant à d'autres chercheurs universitaires dans le monde? Qu'est-ce que vous pouvez nous relater comme état de la situation, ou si on se compare, on se console, ou on est plutôt déçu et découragé?

M. Joanette (Yves) : Bien, je pense que non. Je pense que d'abord, c'est une organisation qui a un nom anglophone, qui s'appelle... summit, auquel le gouvernement du Québec adhère, et c'est de la collaboration avec d'autres régions fortes comme la Bavière et d'autres régions dans d'autres pays, en Amérique du Sud, en Asie et même en Afrique. Et je pense que ce que l'on a tiré de ces échanges, c'est qu'on est tous un peu au même endroit pour ce qui est de là où on veut aller. L'exemple, c'est que, collectivement, il a été décidé qu'on pourrait réfléchir sur un livre blanc, sur comment procéder à de l'apprentissage fédéré, là, ce que j'avais décrit au niveau de comment appliquer de l'intelligence artificielle à des groupes de données qui sont physiquement séparés dans des endroits séparés, dans des établissements séparés, et comment peut-être faire ça par delà les juridictions. Alors, je pense que ça montre cela.

Ça montre aussi que... et là, il y a des regards tournés vers nous, que le Québec a un potentiel, au niveau de l'application, de l'analyse des sciences des données, qui est envié par les autres régions. Et c'est conforme avec notre force en intelligence artificielle ici au Québec. Et donc je pense qu'on a là un potentiel énorme de pouvoir utiliser ces outils pour pouvoir mieux comprendre certains défis de santé et certains défis du système de santé pour ici au Québec.

Mme Setlakwe : Merci. Puis je terminerai avec une question générale. Là, je fais du pouce sur une question du ministre Caire, mais en fait c'est une question, c'est une réflexion qu'on a en continu à travers tout ce processus-là. Il y a des craintes, elles sont légitimes et pour nous les législateurs, il serait peut-être tentant de pencher du côté d'une plus grande prudence. Alors on a des experts devant nous, on a des acteurs sur le terrain. Si vous souhaitez nous rassurer, rassurer la population davantage, c'est le temps de le faire.

M. Joanette (Yves) : Bien, d'abord, si on voulait, disons, donner suite à une crainte absolue, on dirait : Bien, aucun accès aux données. Mais je pense que là, on va y perdre collectivement. Et je sais que ce n'est pas ce que le projet de loi n° 2...

Mme Setlakwe : J'aurais dû dire aussi : Sachant que le risque zéro n'existe pas.

M. Joanette (Yves) : C'est ça. Mais en termes de gestion de risques, je pense que le passé a montré qu'on n'a pas fait d'études absolues là-dessus, mais on n'est pas au courant, nous, de...

M. Joanette (Yves) : ...cas de perte de données personnelles majeures issues d'un regard sur la... par la recherche. En fait, à l'Université de Montréal, il y a même la chaire en cybersécurité par le professeur Benoît Dupont, qui est en fait sur les dimensions humaines de la cybersécurité plus que sur les dimensions technologiques. Et la plupart des problèmes de sécurité qui ont été rapportés dans les médias sont souvent reliés à des problèmes humains. Or, le monde de la recherche est soumis à des règles d'éthique et de bonne conduite en recherche qui font qu'il y a énormément de contraintes et de vérifications à ce niveau-là, comme le disait ma collègue Motulsky.

Mme Setlakwe : Merci. Je suis fière de vous avoir entendu, je suis une ancienne de l'Université de Montréal, qui se trouve dans ma circonscription. Je vous remercie pour votre participation aujourd'hui.

M. Joanette (Yves) : Merci, madame.

Le Président (M. Simard) : Il n'y a pas un brin de chauvinisme là-dedans, là, non?

Mme Setlakwe : Je me suis permis ce petit écart.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Bien oui. Tout à fait. Bien entendu. Je cède la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci. J'ai combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Simard) : En fait, 11 minutes.

M. Marissal : Merci. Je voulais voir si vous suiviez.

Le Président (M. Simard) : J'essaie, mais ce n'est pas toujours évident.

M. Marissal : Blague à part, merci d'être là, c'est intéressant, nos discussions qu'on a ici, mais «intéressant» est un euphémisme, c'est plus qu'intéressant, ça nous éclaire beaucoup. Je vais y aller d'abord sur vos réflexions sur la CAI, sur la Commission d'accès à l'information, puis il n'y a pas de pression, là, mais ils passent après vous, ça fait qu'ils doivent être en train d'écouter, ça fait qu'allez-y librement. Éclairez donc ma lanterne, là, vous voulez quoi comme rôle pour la CAI? Ce n'est pas clair pour moi ce que vous souhaitez qu'elle fasse ou qu'elle ne fasse pas.

M. Joanette (Yves) : Je pense que, comme on l'a écrit dans notre mémoire, nous pensons que le projet de loi N° 3 devrait favoriser et exiger que les ententes d'accès qui seront autorisées par les plus hautes instances d'un établissement, par exemple un P.D.G. d'un établissement comme le CHUM, que ces ententes-là soient transmises à la CAI, mais je crois que le projet de loi devrait préciser quel serait l'objectif de cette transmission. Nous pensons que l'objectif devrait être une transmission pour information.

Le Président (M. Simard) : C'est à dire? Par rapport à?

M. Joanette (Yves) : Par... bien, je veux dire, un autre type de transmission, ce serait une transmission pour décision. Or, s'il y a une transmission pour décision, bien là, ça va impliquer beaucoup de travail pour la CAI, ce qui demande beaucoup de ressources, ça va induire probablement des temps de... des délais beaucoup plus allongés, etc., donc je pense que, étant donné qu'il y aura déjà un processus mis en place pour la plus haute instance de l'établissement qui donnera accès, je... on ne pense pas qu'il soit pertinent de doubler le processus. Mais que la CAI soit informée, absolument.

Le Président (M. Simard) : Le rôle de la CAI dans le projet de loi n° 3, vous le voyez comment?

M. Joanette (Yves) : Comme étant informée des ententes qui seront convenues avec...

M. Marissal : Non, ça... Non, non, ça, c'est votre proposition. Comment vous le lisez dans le projet de loi N° 3 en ce moment? Quel est rôle est-il dévolu à la CAI, selon ce que vous lisez dans le projet de loi N° 3?

M. Joanette (Yves) : Bien, il n'est pas clair, selon nous, justement. Comme on l'a dit dans notre mémoire, ce n'est pas clair quel sera ce rôle? Parce qu'on dit que ce sera transmis à la CAI, mais on ne sait pas dans quel objectif, c'est pour ça qu'on demande à ce que ce soit précisé.

M. Marissal : Mme Motulsky, allez-y, s'il vous plaît.

Mme Motulsky (Aude) : Ça a été dit.

• (15 h 30) •

M. Marissal : Non, c'est complet? O.K. Mais à quoi bon informer la CAI de quelque chose qui, de toute façon, est déjà réglé? Où est son rôle d'arbitre puis de gardien qui lui est conféré par la loi? Je comprends qu'elle est peut-être imparfaite, la CAI, là, puis moi-même je me mets sur le «hot spot» parce qu'ils vont être ici tantôt, là, mais peut-être qu'on peut poser des questions à la CAI, je veux bien, là, mais son rôle, c'en est un de gardien, c'est un de nos chiens de garde, dans le jargon, à quoi bon lui envoyer des demandes qui sont déjà approuvées, de toute façon? Pourquoi le D.G. ou la D.G. du CIUSSS d'une région enverrait le vendredi une pile d'enveloppes en disant «j'ai autorisé tout ça cette semaine», si la CAI n'a rien d'autre à faire que de dire «bien, c'est très bien, merci»?

M. Joanette (Yves) : Bien, à ce moment-là, on revient à la situation actuelle où tout passe par la CAI pour autorisation. Je croyais... on croyait, nous, en tant qu'académiques, en tant qu'universitaires, que le projet de loi n° 3 avait une intention de faciliter l'accès et d'accélérer la rapidité d'accès à des données de santé. Ma collègue Motulsky l'a mentionné précédemment, dans le cas de, par exemple, de la survenue de la COVID, on n'a pas eu accès à ces données-là, on a dû avoir... on a dû prendre des données qui venaient de l'extérieur...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Joanette (Yves) : ...Royaume-Uni parce que le processus était beaucoup trop long. Si la CAI était équipée de manière telle que le processus serait aussi rapide que... À ce moment-là, c'est : si on envoie la CAI pour confirmation ou pour décision, pourquoi demander à la plus haute instance de l'établissement de l'autoriser? Donc, à la limite, c'est l'un ou l'autre. C'est pour ça qu'on dit : Pourquoi il y aurait deux autorisations?

M. Marissal : Donc, ni la CAI ni aucun autre mécanisme de surveillance ou de contre-vérification. Ma D.G. du CIUSSS, ça suffit, à votre avis, c'est la plus haute instance. Elle dit : C'est bon, on y va.

M. Joanette (Yves) : Je crois qu'il y aura à préciser quelles seront les instances de contrôle et de vérification pour que les plus hautes instances institutionnelles puissent effectuer leur rôle dans les bonnes pratiques et avec imputabilité, là, bien sûr, mais, si on met deux mécanismes en place, je crois qu'on ne va pas vraiment avancer vers là où la rondelle sera, comme je le disais tantôt.

M. Marissal : C'est Gretzky qui disait ça, en fait, en tout respect pour vous.

M. Joanette (Yves) : Oui, exactement le philosophe canadien, oui, c'est ça.

M. Marissal : Oui, ça lui a bien servi sur la glace, en effet. Bien, ça mérite réflexion, probablement plus de questions là-dessus. Parce que, moi, le rôle de la CAI, comme je vous dis, là, ce n'est pas une religion, la CAI, là, ça peut être... Ça fait deux jours, là, qu'on reçoit des groupes ici, là, puis qu'on se dit : Ça prend soit un comité d'éthique soit une vérification. C'est qui la personne la plus haute en autorité dans un environnement? Ajoutez à ça que le gouvernement, je ne fais pas de politique, ici, là, c'est factuel, veut créer une agence santé qui chapeautera le D.G., le D.G. chapeautera peut-être quelqu'un d'autre. On commence à s'éloigner d'une imputabilité d'État ici, là, puis il n'y a pas de double vérification par un de nos chiens de garde, que ce soit la Vérificatrice générale, bon, ce n'est pas du tout dans ses attributions, là, je dis ça par fin de compréhension, ou la Commission d'accès à... la bien nommée mais mal équipée Commission d'accès à l'information.

Mme Motulsky (Aude) : Si je peux ajouter la préoccupation principale des chercheurs, là, c'est évidemment de pouvoir mener les recherches, donc l'avancement des connaissances en temps opportun. Et des délais allant de plusieurs mois à plusieurs années sont vraiment un défi pour la compétitivité de nos chercheurs et...

M. Marissal : Je comprends, je comprends ça. Je comprends ça, mais moi, je ne suis pas de votre école qui vaut mieux faire que ne rien faire parce qu'on va être plus perdants. Il me semble que ça, c'est le principe de précaution inversé, là. Je ne suis pas convaincu, là, le ministre ne l'était pas non plus, je le suis encore moins, je pense, là, mais je dis ça parce que je pense qu'on a besoin de mécanismes. Qui est imputable en cas d'incident dans votre formule?

M. Joanette (Yves) : C'est ce qu'on... Je crois que, dans le projet de loi n° 3, il y aura à préciser quelle sera les... bien, peut-être dans l'application des règlements ou la détermination des règlements qui découleraient de l'adoption de ce projet de loi, il faudra préciser, bien sûr, cette imputabilité. Des comités d'éthique de la recherche existent dans les établissements. Il y a plein de mécanismes qui pourraient être mis en œuvre. Il faut simplement savoir si on veut aller vers du parallélisme d'approbation ou si on veut s'assurer que l'imputabilité soit bien faite à l'endroit où le projet le précise.

M. Marissal : Oui. Et comprenez-moi bien, là, je ne remets pas en question l'éthique, l'intégrité puis le professionnalisme de vous trois ou de vos équipes. Cela dit, là, Desjardins ne se lève pas la nuit pour savoir comment faire fuiter nos données non plus, là. Puis normalement moi, je fais confiance à Desjardins, normalement, mais c'est arrivé pareil qu'il y a eu des fuites que vous connaissez. Tu sais, si on manipule des données qui, selon tout le monde, vaut de l'or, de l'or, ça se revend. Ça fait que, tu sais, j'essaie de voir qui surveille mais surtout, en tant que parlementaire, qui est imputable à la fin, «where the box tops», comme on dit en anglais.

M. Joanette (Yves) : Bien, encore une fois, le consortium, nous, on n'est pas là en tant qu'équipe de recherche, là, on représente 28 organisations sur le campus, les établissements affiliés, et tout. Et cette préoccupation, elle est là de la part de l'ensemble des membres, là. On exprime les membres, on les a consultés, on exprime les préoccupations des membres.

La transformation du projet de loi en loi qui exigera des règlements devra aborder sa mise en œuvre, parce que là, dans le projet de loi, il y a un certain nombre de points qui ne sont pas d'une clarté précise en termes des processus, là. J'imagine que ça viendra avec les règlements qui en découleront. Et, à cet égard, je pense que la... on peut vous dire que la communauté est prête à contribuer pour identifier les mécanismes qui permettront d'identifier le contrôle et l'imputabilité comme vous le souhaitez et comme on le souhaite tous, moi aussi, en tant que Québécois...

M. Marissal : ...et votre intervention va dans le sens de nous aider à faire la meilleure loi, je vous en remercie. Je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, mesdames, monsieur, un énorme merci pour votre contribution à nos travaux. Vos éclairages nous seront fort précieux, et au plaisir de se retrouver.

M. Joanette (Yves) : Un grand merci.

Le Président (M. Simard) : À nouveau, merci. Au revoir.

Sur ce, nous allons suspendre momentanément nos travaux afin de faire place à nos prochains invités.

(Suspension de la séance à 15 h 37)

(Reprise à 14 h 42)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers amis, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Et nous avons l'honneur de recevoir les représentants de la Commission d'accès à l'information du Québec. Mme Poitras, bonjour. Bien que vous soyez familière à nos travaux et très connue du grand public, auriez-vous à nouveau l'amabilité, s'il vous plaît, l'amabilité, donc, de vous présenter.

Mme Poitras (Diane) :Bonjour. Je suis Diane Poitras, présidente de la Commission d'accès à l'information.

Le Président (M. Simard) : Et vous êtes accompagnée par?

Mme Poitras (Diane) :Je suis accompagnée par Me Jean-Sébastien Desmeules, qui est secrétaire général et directeur des affaires juridiques.

Le Président (M. Simard) : Alors, bienvenue à vous deux. Et vous disposez d'une période de dix minutes.

Mme Poitras (Diane) :Merci. Alors, d'abord, merci pour cette occasion de partager avec vous nos commentaires au sujet du projet de loi portant sur les renseignements de santé et de services sociaux. D'emblée, la commission salue l'approche d'adopter un cadre législatif uniforme, comme l'ont fait d'autres pays et presque tous les provinces et territoires au Canada. Transformer la courtepointe formée par les lois actuelles protégeant les renseignements de santé en un régime juridique unifié et cohérent, applicable à tous les acteurs de ce réseau est en soi tout un défi. Mais le projet de loi va plus loin. On y propose aussi un changement de paradigme au sujet de l'utilisation et de la communication de ces renseignements.

En effet, le projet de loi prévoit plusieurs situations où il sera permis d'utiliser des renseignements de santé et de services sociaux à des fins secondaires, c'est-à-dire autres que celles pour lesquelles ils ont été recueillis. On pense à la gestion du réseau public de santé, à l'évaluation de la qualité des soins ou à la recherche, bien évidemment. Le projet de loi prévoit aussi une plus grande circulation de ces renseignements sans qu'il ne soit nécessaire d'obtenir le consentement du patient, notamment parmi tous les intervenants du nouveau vaste réseau. On prévoit aussi créer un système national de dépôt de renseignements pour y regrouper toute l'information de santé et de services sociaux d'une personne, notamment afin de faciliter ce partage d'information.

Les objectifs poursuivis par le projet de loi sont légitimes. Toutefois, sur l'échelle de la confidentialité des renseignements de santé et des exceptions, la commission considère que le projet de loi place parfois le curseur beaucoup trop loin en faveur d'une utilisation et d'une circulation maximale, sans qu'on ait à demander l'autorisation de la personne qu'il concerne. Il faut se rappeler qu'en matière de santé et de services sociaux, les citoyens acceptent de partager leurs renseignements avec les intervenants dans le seul but de recevoir des services et des soins, avec l'attente que ces renseignements seront protégés. L'un des fondements de la relation de confiance entre un usager et un professionnel repose sur l'assurance que les renseignements qu'il lui confie vont rester confidentiels.

Rappelons que le droit au secret professionnel et le droit au respect de la vie privée sont garantis par la charte. Le partage accru de renseignements, de santé et de services sociaux touche aux renseignements les plus intimes d'une personne. Une perte de confiance envers le professionnel ou la capacité du système à protéger ces renseignements est susceptible de limiter ce qu'un usager voudra partager avec un intervenant ou de l'inciter à ne pas recourir à des services dont il a besoin. La qualité des soins et des services sociaux est donc intimement liée à la confiance que les gens auront dans la confidentialité de leurs renseignements.

Quant à la protection des renseignements personnels, rappelons qu'elle comprend un ensemble de principes visant à donner aux citoyens le contrôle sur ces renseignements, principalement par le biais du consentement. Le consentement n'est donc pas qu'un simple fardeau administratif, il est l'expression d'un droit fondamental. Bien sûr, ces droits ne sont pas absolus, et une loi qui poursuit des objectifs légitimes peut...

Mme Poitras (Diane) :...à condition qu'elle n'y porte atteinte que dans la mesure nécessaire. La Commission rappelle que le Québec vient de mettre en place un régime avant-gardiste en matière de protection des renseignements personnels. Il serait dommage qu'il adopte une loi accordant moins de protection aux renseignements les plus sensibles et intimes que sont les renseignements de santé.

Pour apprécier toute la portée des exceptions permettant l'utilisation ou la communication des renseignements de santé qui sont prévues au projet de loi, il est utile de rappeler sa portée très étendue tant par la nature des renseignements que par la quantité et la variété des organismes qui seraient visés. Alors, voyons d'abord les renseignements. Sera inclus tous les renseignements concernant la santé physique et mentale d'une personne, peu importe le type de professionnel ou de service consulté. On vise les notes professionnelles, les renseignements psychosociaux ou ceux relatifs aux facteurs déterminants. Ces derniers couvrent un large éventail d'informations comme l'éducation, le revenu, le statut social, travail, environnement physique, habitudes de vie et de consommation et les antécédents médicaux et familiaux. Sont aussi inclus tout matériel prélevé sur une personne, comme les échantillons de sang ou de tissus, donc les biobanques et les renseignements génétiques. Il faut aussi considérer les nouvelles façons de recueillir, de conserver ou d'utiliser ces renseignements, comme les objets connectés, la génomique, l'intelligence artificielle qui a aussi le potentiel d'inférer de nouveaux renseignements à notre sujet.

Maintenant, parmi les milliers d'organismes qui formeront ce très, très vaste réseau, on trouve évidemment, en plus des établissements du réseau actuel, des organismes comme la RAMQ, la Commissaire à la santé et au bien-être et l'Office des personnes handicapées. On trouve plusieurs organisations du secteur privé comme l'IRPA, les services ambulanciers, les laboratoires et les centres de procréation assistée, les regroupements de professionnels comme les médecins, bien sûr, mais aussi les psychologues, les physiothérapeutes, les travailleurs sociaux, les dentistes, les pharmaciens, et cetera. On trouve toutes les cliniques qui se spécialisent dans certains domaines, comme le traitement des dépendances, les troubles psychotiques, la chirurgie esthétique, l'avortement ou les ITSS, et on trouve même les entreprises de services funéraires. Les intervenants qui auront un accès élargi aux renseignements de santé incluent ceux qui offrent des services de santé ou sociaux, mais aussi les personnes qui leur fournissent un soutien technique ou administratif. Cela inclut donc des centaines de milliers de personnes.

Enfin, il ne faut pas oublier la convoitise que suscitent les renseignements de santé et les risques accrus qui viennent nécessairement avec une plus grande circulation de ces informations ou par leur centralisation dans un système national. Les meilleures mesures de sécurité ne peuvent contrer tous les risques, mais surtout pas le facteur humain, souvent responsable des incidents de confidentialité.

C'est dans ce contexte que la Commission formule plusieurs recommandations dans son mémoire afin de trouver cet équilibre entre une plus grande utilisation et circulation des renseignements de santé et leur confidentialité. Par exemple, si l'accès par les différents intervenants faisant partie du cercle de soins d'une personne fait plutôt consensus, la rédaction de la disposition qui le permet va beaucoup trop loin. Les règles entourant l'accès par les intervenants ne sont pas suffisamment définies et balisées, surtout dans un contexte d'un éventuel dossier numérique unique. La Commission s'inquiète d'ailleurs du peu de détails prévus au projet de loi au sujet du système national de dépôt de renseignements. Sans précision suffisante quant à son contenu ou sa gouvernance, aux exigences relatives à son développement, sa gestion ou les mesures de protection et de sécurité qui seront mises en place, il est difficile d'évaluer tous les enjeux que soulève ce nouveau système. Il s'agit pourtant d'une orientation majeure qui définira plusieurs aspects de la prestation de soins et de la gestion des renseignements de santé à l'avenir.

• (15 h 50) •

La Commission constate aussi que plusieurs aspects visant la protection des renseignements seront précisés par règlement du gouvernement ou du ministre. Comme le soulignait le Barreau au sujet du projet de loi n° 19, un pouvoir réglementaire ne devrait pas avoir pour objet de définir les concepts fondamentaux en vertu desquels une loi sera appliquée, surtout en matière de protection de renseignements personnels, un droit protégé par la Charte. Ces éléments essentiels devraient donc être définis dans la loi et débattus par les parlementaires. Il permettrait aussi à tous de mieux apprécier l'ensemble des mesures qu'on souhaite mettre en œuvre par ce projet de loi, comme l'ont souligné plusieurs intervenants.

En matière d'accès à des fins de recherche, les processus d'autorisation différents se multiplient et posent des enjeux d'efficacité et de responsabilité. Enfin, la Commission recommande de hausser les montants des pénalités...

Mme Poitras (Diane) :...prévu au projet de loi. Compte tenu de la nature particulièrement sensible des renseignements visés et des préjudices importants qui peuvent résulter, pour le citoyen, d'une contravention aux règles établies, des sanctions conséquentes et dissuasives devraient être prévues.

Avant de conclure, la commission tient à souligner l'inclusion, au projet de loi, de principes et de droits importants pour le citoyen, qu'elle salue, d'ailleurs. D'abord, la possibilité, pour une personne, de restreindre l'accès aux renseignements la concernant par un ou plusieurs intervenants. Ensuite, une personne pourra aussi refuser qu'un renseignement la concernant soit accessible à certaines catégories de chercheurs ou à des fins de sollicitation en vue de sa participation à un projet de recherche. La commission salue aussi le fait qu'une personne pourra avoir accès gratuitement aux renseignements qui la concernent.

La commission reconnaît le travail colossal ayant mené au dépôt du projet de loi. Toutefois, elle constate que plusieurs éléments devraient être bonifiés afin de permettre la réalisation des objectifs légitimes du projet de loi, tout en limitant l'atteinte aux droits des citoyens. Elle souhaite que les discussions qui suivront la présente consultation, incluant l'étude détaillée du projet de loi, permettent de trouver cet équilibre. Elle offre, d'ailleurs, toute sa collaboration aux ministères et aux parlementaires pour les prochaines étapes. Je vous remercie. Il me fera plaisir d'échanger avec vous dans les prochaines minutes.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme Poitras. Je cède maintenant la parole à M. le ministre, qui dispose de 15 min 30 s.

M. Caire : Merci. Bien, rebonjour, Me Poitras, ça faisait longtemps qu'on ne s'était pas vus, Me Desmeules. D'entrée de jeu, j'aimerais vous entendre... Parce que vous avez commencé votre intervention en disant que cette loi-là, si je vous comprends bien, là, pourrait représenter un problème au niveau du secret professionnel et du droit à la vie privée, et ça pourrait même avoir, pour conséquence, de rendre insécures soit les patients, soit les médecins. Puis je vous avoue, là, très candidement, que la FMSQ avait sensiblement le même discours quant à l'enregistrement des informations dans une banque de données. Qu'est-ce qu'il y a, dans la loi, qui vous amène à cette interprétation-là ou qu'est-ce qui manque à la loi qui fait que vous en arrivez à cette conclusion-là?

Mme Poitras (Diane) :Oui, en fait, il y a plusieurs exceptions, tant le secret professionnel, qui prévoit, dans le fond, la confidentialité des informations avec le professionnel que je consulte, et non l'ensemble des professionnels ou des intervenants, que la protection des renseignements personnels, qui vise à protéger un espace privé ou intime. Les deux prévoient, au fond, que je peux consentir et décider si j'accepte de partager ou non. Le projet de loi prévoit plusieurs exceptions, vous en conviendrez, pour lesquelles ce n'est pas nécessaire de demander mon consentement manifeste et... bon, bien que, comme je l'ai mentionné, et que c'est indiqué au projet de loi, on convient que, dans certaines situations, il y a un consentement implicite, qui semble faire consensus, comme, par exemple, la circulation des informations autour de l'équipe de soins.

Les dispositions, telles qu'elles sont rédigées, vont... ne mettent pas la balise ou ne mettent pas le curseur au bon endroit. C'est comme ça que je le dirais. Et il y a plusieurs exceptions, où on parle... quand c'est à l'extérieur du système de soins de santé et de services sociaux, pour lesquelles on s'interroge. Bref, c'est toutes ces exceptions au contrôle ou au consentement manifeste du citoyen qui est susceptible de poser ce problème d'atteinte, dans le fond, au secret professionnel ou au droit à la vie privée.

M. Caire : Je vous entends. Je vais poser ma question différemment. Les exceptions dont on parle sont souvent... ont souvent découlé de la loi 25, qui prévoit aussi des exceptions où on peut transmettre un renseignement personnel sans le consentement, notamment lorsque c'est, manifestement, dans l'intérêt du... bon, dans le cas de la loi 25, c'est du citoyen, dans le cas de la loi 3, c'est le patient. Mais il y a aussi cette balise... puis je veux vous entendre là-dessus, parce que... est-ce que ce n'est pas suffisamment fort ou est-ce que ce n'est pas suffisamment compris, je ne sais pas... où on dit qu'on donne accès à un renseignement lorsque c'est requis pour une prestation de service. Ce n'est pas comme ça que la loi le libelle, là, je vous...

M. Caire : ...et donc il ne peut être question d'avoir accès à un renseignement de santé si la prestation de services à donner ne nécessite pas l'accès à ce renseignement-là, d'une part. Et, d'autre part, et vous l'avez souligné, je le dis, le citoyen peut refuser le fait qu'on transmette ses renseignements de santé, alors il peut se prévaloir d'un «opting out», là, ce qu'on appelé l'«opting out», pour soit un professionnel de la santé ou certains types de recherche. Donc, il y a cette possibilité-là pour les citoyens de refuser son consentement. Ces balises, cet ensemble de balises là ne vous semble pas suffisant?

Mme Poitras (Diane) :Non, en effet. Peut-être pour y aller concrètement, là, si on prend l'espèce de consentement implicite, c'était le principe dans la loi sur le partage des renseignements de santé qu'on avait mis, mais il y avait quand même des domaines et des informations limitées qui étaient dans le dossier Santé Québec, puis c'était divisé par domaine. Et on pouvait donc gérer l'accès et bloquer l'accès à certains professionnels pour lesquels c'était évident. Je vois... Pourquoi un dentiste aurait accès à mon dossier chez mon psychologue? Ça me semble assez évident. Vous allez me dire : Oui, mais la loi, elle dit, ce n'est pas nécessaire à l'exercice de ces soins.

La question qu'on se pose, c'est : Comment on va empêcher... Comment va être dessiné le système s'il n'y a pas une autre balise que celle-là? Ce qui est ce qu'on voit, là, dans la loi sur l'accès ou la loi sur... Dans la loi sur l'accès, entre autres, on parlait d'avoir qualité pour recevoir l'information, de le faire dans l'exercice de ses fonctions seulement quand c'est nécessaire, puis d'être dans une catégorie de personnes. Bref, il y avait comme trois niveaux de balises. Je vais simplifier, il y avait trois niveaux de balises. Là, on en garde une, et ce n'est pas juste pour l'accès à l'intérieur du même organisme, c'est dans l'ensemble du réseau.

Alors, pour nous, c'est... Comment on va faire, par exemple, pour mettre la loi du moyen de privilège? Comment on va déterminer... Qu'est-ce qui nous assure qu'on va empêcher certains professionnels ou certains intervenants, devrais-je dire, qui n'ont pas besoin d'avoir accès aux dossiers de... c'est clair qu'ils n'ont pas besoin d'avoir accès à ces informations-là? Ça, pour moi, pour nous, ce n'est pas clair dans le projet de loi.

M. Caire : Je trouve ça intéressant, ce que vous amenez, mais le contexte... Parce que, bon, vous le savez, là, c'est moi qui a porté la loi 64, la loi 25. Est-ce que vous ne pensez pas que le contexte est différent? Dans le sens où la loi 25, c'est une loi générale, donc c'est un cadre général qui parle des renseignements au sens très large du terme, alors qu'ici on est en train d'établir... et vous l'avez salué d'ailleurs, on est en train d'établir un régime particulier parce qu'on se concentre exclusivement sur les renseignements de santé. Donc, on peut penser que les intervenants qui ont accès à ces renseignements-là sont des intervenants du réseau de la santé, pour peut-être amener une réflexion sur : Est-ce qu'ils ont la qualité pour le recevoir?

Donc, dans un... Est-ce que vous ne pensez pas que, dans un régime particulier, on peut penser, effectivement, que les individus ont la qualité pour recevoir ces informations-là, alors que, dans un régime général, ne sachant pas à qui on s'adresse, ça devient peut-être d'une autre nature de le préciser?

• (16 heures) •

Mme Poitras (Diane) :En fait, l'accès... Comme je l'exprimais, il y a peut-être des centaines de milliers de personnes, d'intervenants qui vont se qualifier comme intervenants dans le réseau. Puis je reprends l'exemple, ça va viser... C'est parce que souvent, dans les exemples où on va dire : Bien, oui, c'est normal, on va penser aux médecins, à l'examen de laboratoire, ils vont m'envoyer voir un spécialiste, bref, trajectoire de soins, cercles de soins, là, c'est... Je pense que ce n'est pas ça qui est remis en question, mais pourquoi, a priori, on devrait même permettre qu'un dentiste puisse avoir la possibilité de consulter un dossier psychologue? Pourquoi mon...

M. Caire : Bien, si peux... Je m'excuse, mais je vais vous interrompre parce que je pense que c'est ça, le cœur de mon questionnement. Comment est-ce que vous en arriver à la conclusion que la loi... Puis je pose ma question très candidement...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Caire : ...le permet, dans la mesure où je pense que vous venez de situer le contexte, là, on parle évidemment d'une trajectoire de soins, on parle d'un régime particulier sur les lois de santé, on s'entend que les intervenants seront majoritairement membres d'un ordre professionnel, bon, bien, il touchait tout ça, là. Mais, une fois qu'on a contextualisé tout ça et que la loi stipule que vous n'avez accès qu'aux seuls renseignements dont vous avez besoin dans la prestation de services et qu'il y a quand même... Puis vous avez posé cette question-là. C'est intéressant parce qu'il y a le centre de données, oui, mais il y a aussi gestionnaire de la donnée qui a, lui, pour mission de s'assurer que les permissions sont allouées de la bonne façon. Donc, ce contexte-là, ce que je l'entends, c'est qu'il ne vous rassure pas ou vous ne le trouvez pas suffisamment précis.

Mme Poitras (Diane) :En fait, si la balise est dans la loi, on est sûrs que les règles qui vont en découler et qui vont être gérées par les gestionnaires opérationnels puis ceux qui vont dessiner soit le système national de dépôt ou soit qui vont voir comment les systèmes actuels peuvent peut-être être connectés pour qu'on puisse avoir ces informations-là, c'est si la règle est dans la loi que ça va nous permettre de mettre cette balise. Quand on posait la question au ministère de la Santé, on nous a dit : Bien, on compte sur l'autorégulation et la journalisation des accès. Donc, le citoyen pourra voir si quelqu'un qui pense qu'il n'avait pas d'affaire à voir son dossier a utilisé l'information. Ça, ce n'est pas de nature à nous rassurer, là. Ce n'est pas parce qu'on est professionnel, membre d'un ordre professionnel... Puis on ne peut pas présumer que, parce que j'ai accepté de me confier... Je vais reprendre l'exemple du psychologue. Hier, on vous a donné des exemples d'interruption de grossesse, d'agressions sexuelles, etc. Ce n'est pas parce que j'accepte de me confier à mon professionnel que j'accepte implicitement que tout autre intervenant du réseau puisse avoir accès à ces informations. Et c'est pour ça que nous, c'est important que la balise soit dans la loi pour nous assurer que, quand on va dessiner ce fameux système, quand on va décider de ces droits d'accès, il y a une balise plus claire qui permet d'éviter ces situations-là et qu'on se restreigne à ce qu'on peut appeler cercle de soins, trajectoire de soins.

M. Caire : Bien, si je peux me permettre, vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il faut aussi interpréter... Puis là, je comprends, là... en fait, je ne comprends pas, mais j'entends ce que ce que vous me dites par rapport à la réponse du ministère de la Santé et des Services sociaux. Mais le p.l. 3 va quand même s'inscrire dans la lignée de la loi 95. Je sais que vous n'êtes pas un inconditionnel de la loi 95, mais il n'en demeure pas moins que les sources de données officielles devront faire l'objet d'une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée et de règles de gouvernance que vous aurez à approuver aussi. Donc, le gestionnaire de la donnée numérique de la santé, dans l'interprétation et dans les accès qu'il pourra octroyer ou non... Et là-dessus, je ne sais pas si vous avez entendu l'échange qu'on a eu avec la commissaire à la Santé, mais le «peut», pour nous, est très important, parce que, justement, il fait en sorte que le gestionnaire a cette possibilité-là de dire non à l'accès aux données, selon les règles de gouvernance que vous approuverez. Donc, si on trace ce portrait-là plus large, est-ce que vous ne pensez pas qu'on a quand même la ceinture et les bretelles, là, au niveau d'un accès qui va se faire par les professionnels de la santé et pour lequel, effectivement, la journalisation n'est pas la seule mesure mais est une mesure qui va nous permettre... Alors, le gestionnaire travaille en amont puis la journalisation permet le travail en aval. Donc, on a vraiment une continuité de vérification dans qui a accédé à quoi et pourquoi. Et ça, vous me dites, ce n'est pas suffisant, il faudrait peut-être préciser que c'est le professionnel qui... En fait, le statut de qui accède à la donnée devrait faire partie prenante de la loi.

Mme Poitras (Diane) :Oui, ou un autre critère. Nous, on dit juste que le critère qui est actuellement à cette disposition-là, dont je ne connais pas l'article par cœur, là, mais est insuffisant. Puis on est prêts à travailler à essayer de trouver un critère suffisant. Mais, pour moi, la LGGRI, à laquelle vous faites référence, moi, pour moi, le peut-être, là, qui... il n'y a rien qui m'indique que quelqu'un va être désigné source officielle de données. Et ce n'est pas parce qu'il y a cette... Bien, même si c'est le cas, la règle, il reste que...

Mme Poitras (Diane) :...la règle qui sera incluse au projet de loi qui va déterminer comment les accès vont être accordés, donc.

M. Caire : Mais, si je peux me permettre, Me Poitras, là, dans la loi, il est stipulé que la LGGRI et le gestionnaire de la donnée numérique gouvernementale a quand même son mot à dire, là, sur ce qui se passe et sur... Donc, ça, ça va être soumis quand même au cadre qui est prévu par la LGGRI, d'où le fait que je vous ai dit que vous allez devoir... la CAI va... je dis... pas devoir, excusez, c'est un... Vous allez avoir autorité pour valider les règles de gouvernance, là. Donc vous aurez, vous, cette autorité-là, de dire : Bien, est-ce que les règles d'accès sont de nature à protéger les renseignements personnels? C'est pour ça que je vous dis : Est-ce que ça, ce n'est pas de nature à vous rassurer dans le fond, là?

Mme Poitras (Diane) :La manière... en fait, la règle... Pour nous, c'est clair qu'il faut que la règle soit dans la loi. Il y a un processus à la LGGRI mais il reste que si nous, ça ne nous donne pas le pouvoir de dire : Non, non, non, ça ne fonctionne pas, les règles d'accès. Si la règle permet...  si ce qui est mis en place respecte la règle, on n'a pas de pouvoir de dire à la commission : Non, vous allez trop loin, vous ne respectez pas la règle. Et en fait, quand on regarde l'essence du commentaire, c'est de dire : Comment présumer... parce que c'est ça, là, on parle d'un consentement présumé, mais comment présumer qu'il y a un consentement implicite du citoyen à partager avec l'ensemble des intervenants, pas juste les professionnels, hein, il y a d'autres intervenants.

Le Président (M. Simard) : Alors, en conclusion.

M. Caire : Merci, merci.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la députée de Mont-Royal-Outremont.

Mme Setlakwe : Merci. Merci pour votre présentation, merci surtout, là, pour tout le travail que vous avez investi, là, dans la préparation du mémoire qui est très étoffé, très détaillé. Est-ce que je vous entends bien? Il manque de viande dans la loi, vous avez de la difficulté à bien saisir toute l'ampleur du changement instauré. Est-ce qu'on ne devrait pas ramener plus de détails dans la loi? Puis là, je prends en exemple le système national de dépôt de renseignements, à venir, pour lequel vous semblez manquer d'infos.

Mme Poitras (Diane) :Oui, en effet, c'est un bon exemple. Il y a peut-être deux éléments essentiels où on trouve qu'il manque de viande comme vous dites.

Mme Setlakwe : Je suis désolée... vendredi après-midi.

Ça va. Il y a pour le système national de dépôt. Alors évidemment, parmi les recommandations qu'on fait, le système national de dépôt va jouer un rôle central, on comprend qu'à terme, c'est par là... en tout cas, si on a bien compris, que c'est par là que vont passer l'ensemble des communications ou les possibilités pour les différents intervenants d'avoir accès puis peut-être même certaines autres communications. Donc, c'est important qu'on ait déjà une idée de qu'est-ce qu'on exige, de quels sont... parce que, là, on dit : Le système doit permettre de, mais il n'y a pas : Il doit permettre de protéger les renseignements. Il n'y a pas : Il doit permettre de ne donner accès qu'aux renseignements nécessaires à l'exercice des fonctions de... Bref, il manque beaucoup de détails pour être en mesure d'évaluer l'ampleur des enjeux. Sur l'autre aspect sur lequel il manque de détails, selon nous, dans le projet de loi... et j'ai perdu mon idée, alors je vais arrêter là ma question.

• (16 h 10) •

Mme Setlakwe : Ça va vous revenir puis vous continuerez. Il n'y a pas de souci. J'imagine que vous ne manquez pas de travail, là, vous, Me Poitras et votre équipe avec le statut actuel et les responsabilités qui relèvent de la CAI, en ce moment, est-ce que...

Mme Poitras (Diane) :Non, en effet.

Mme Setlakwe : J'aimerais ça vous entendre sur cette charge additionnelle à venir. Vous allez être... Vous avez été désignés dans le projet de loi comme étant responsables de la surveillance, notamment. Mais est-ce que vous êtes... Je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, là. À quel point êtes-vous... quelles sont vos appréhensions, là, spécifiques quant à cet ajout de charge de travail sachant que déjà, par moments, les délais sont dépassés? Vous avez probablement... je vais m'arrêter là puis je vais vous laisser élaborer, je pense que vous avez compris, vous avez saisi ma question.

Mme Poitras (Diane) :En fait, c'est sûr qu'on est au cœur d'une réforme très importante qui requiert beaucoup de ressources et d'énergie pour mettre en œuvre toutes les nouvelles...

Mme Poitras (Diane) :...responsabilités qui ont été confiées par la loi n° 25, et c'est sûr que mettre une autre réforme, c'est préoccupant, et c'est sûr que c'est quelque chose qui va devoir être considéré quand va venir le temps d'étudier le budget de la commission.

Mme Setlakwe : Est-ce que déjà vous êtes en mesure de quantifier vos besoins, là, en termes de main-d'oeuvre ou de budgets additionnels?

Mme Poitras (Diane) :Non, absolument pas, à ce stade-ci. C'est sûr que si le projet de loi était adopté, nous le ferons avec toute la rigueur nécessaire, comme on l'a fait la dernière fois, mais, évidemment, on a... je l'ai déjà indiqué, là, à la dernière étude des crédits, déjà on considère ne pas avoir les ressources suffisantes pour être capable d'assurer la mise en oeuvre de la dernière réforme, soit la loi N° 25, alors voilà. Ce n'est pas qu'on ne veut pas... tu sais, oui, je pense que la commission est tout à fait l'organisme désigné pour faire ça, on a déjà la responsabilité d'assurer la protection des renseignements personnels des organismes qui sont visés par cette réforme, mais je pense qu'il faut être réaliste aussi dans les ressources que ça prend pour que l'organisme de surveillance puisse bien faire son travail.

Mme Setlakwe : Merci. Vous avez évoqué la question des pénalités. Il n'y a pas assez de mordant?

Mme Poitras (Diane) :Non, en effet... excusez-moi.

Mme Setlakwe : Non, allez-y, j'aimerais ça vous entendre sur la question des sanctions.

Mme Poitras (Diane) :En effet, ce que je comprends, c'est qu'on a mis à peu près les sanctions pénales qui étaient dans la Loi sur l'accès alors qu'on a quand même des organismes du secteur privé, mais peu importe si on se compare à d'autres provinces comme l'Ontario ou la Saskatchewan, je pense, de mémoire, il y a quand même des pénalités pour une organisation qui peuvent aller jusqu'à 1 million de dollars. On pense aussi que ce serait tout à fait pertinent de mettre un régime de sanctions administratives pécuniaires, ne serait-ce que pour certaines infractions ou certaines contraventions à la loi, comme c'est le cas en Ontario, c'est tout nouveau, mais c'est quand même possible. On pense que ça a un caractère dissuasif, la hauteur des pénalités et le fait que ce soit une pénalité, ça a un caractère dissuasif. Malheureusement, moi, quand je regarde, les autres provinces ont des statistiques, ça fait plus longtemps qu'ils ont des lois de cette nature-là dans leur province et ils colligent les statistiques sur les déclarations d'incidents qui leur sont faits. Moi, je pense que ça prend un caractère dissuasif. La commissaire ontarienne a fait un mot sur son blogue il n'y a pas longtemps, dans lequel on apprend qu'en Ontario, 20 % des déclarations d'incidents de confidentialité qui sont fait, c'est ce qu'elle appelle du «snooping» en anglais, là, c'est-à-dire que c'est de l'accès par des intervenants qui ont des accès, mais qui y vont par simple curiosité. Donc, ce n'est pas banal et ça explique un peu aussi pourquoi on tient à ce que la règle soit dans la loi par rapport à l'accès aux intervenants et qu'on diminue la possibilité d'avoir accès à de l'information. Donc, c'est clair que ces professionnels-là, dans telle région, ou tel type de professionnels, n'auront pas besoin d'avoir accès, même en consultation.

Mme Setlakwe : Il y a beaucoup d'éléments dans votre mémoire, on va en prendre connaissance en détail, mais si je vous demandais, là, tu sais, de résumer le top trois, là, tu sais, de ce qui vous préoccupe le plus en termes d'éléments manquants en ce moment, ce serait quoi, manquants ou à préciser ou à ajouter dans la loi?

Mme Poitras (Diane) :Le système... plus d'éléments pour le système national de dépôt, s'assurer qu'on a la balise au bon endroit pour l'ensemble des communications sans consentement parce que c'est vraiment là qu'on écarte le contrôle du citoyen. Le troisième, il serait temps qu'on... j'hésite entre chercheurs et les pénalités.

Mme Setlakwe : On en aura quatre alors. Pour les chercheurs...

Mme Poitras (Diane) :Diminuer les pouvoirs réglementaires pour que ce soit dans la loi, ce serait quand même assez important aussi, là.

Mme Setlakwe : Est-ce que votre idée, tout à l'heure, est revenue?

Mme Poitras (Diane) :Non, malheureusement, par contre, je tiens à souligner que la LGGRI, dont on a parlé tout à l'heure, ça ne s'applique pas dans le secteur privé, puis on aura plusieurs organismes du secteur privé.

Le Président (M. Simard) : Bien. À l'ordre, s'il vous plaît. Madame?

Mme Setlakwe : Merci. Je vous remercie. Pour moi, ça va, on va prendre...

Mme Setlakwe : ...connaissance en détail de votre mémoire. Puis juste pour vous rassurer que nous, on accueille favorablement le concept, là, mais il faut y aller avec... puis ça, ça a été dit d'entrée de jeu, il faut y aller avec... on n'est pas... il ne faut pas y aller dans la précipitation, il faut quand même prendre le temps de bien évaluer les impacts de ce projet de loi vraiment costaud et qui soulève des enjeux extrêmement importants. Donc, on va faire le travail. Il y a énormément d'informations qui nous ont été livrées cette semaine, incluant les vôtres, je vous en remercie.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci à vous, chère collègue. Je cède la parole au député de Rosemont, qui dispose de seize minutes et 40 secondes.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Pardon?

M. Marissal : Merci, M. le Président. 16! Qui dit mieux?

Le Président (M. Simard) : J'ai dit combien, moi? 16? Qui dit mieux? C'est vraiment 6 minutes 40 secondes.

M. Marissal : 18, 18.

Le Président (M. Simard) : Six, oui. On peut ajourner, si vous préférez.

M. Marissal : Non, non, non, vous me faites des fausses joies, comme ça, en fin de journée, ce n'est pas cool, ce n'est pas cool.

Maître Poitras, maître Desmeules, merci, merci d'être là. De toute évidence, vous trouvez que ce n'est pas assez clair, qui pourrait être un intervenant ou avoir accès. Vous dites que ça va se faire après par règlement, que ce n'est pas clair. Ça, je suis assez d'accord avec vous. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois, dans un projet de loi... dans cette législature, oui, mais dans la précédente on a souvent critiqué la façon de fonctionner par règlement, là. Ce n'est pas ici qu'on va régler ça aujourd'hui, là, surtout pas à cette heure-ci, mais vous dites que c'est mal défini, mais je comprends que vous pensez qu'il y en a trop. Mettons qu'on les définisse, là, vous pensez que c'est trop large puis qu'on devrait rétrécir un peu le bec de l'entonnoir.

Mme Poitras (Diane) :Exactement. C'est pour que je prenais l'image du curseur, là. Le curseur, on pense qu'on a été un petit peu trop vers la communication puis l'utilisation sans qu'on demande au citoyen s'il est d'accord ou non. Dans certaines situations, ça va, mais on l'a placé un peu trop loin puis on n'a pas mis les balises au bon endroit, selon nous.

M. Marissal : O.K. Cela dit, ils ne sont pas définis parce que ça sera fait par règlement. Ça fait qu'on présume.

Mme Poitras (Diane) :Bien oui. La seule balise, si on parle des intervenants, c'est nécessaire pour donner des soins, des services de santé ou services sociaux, je crois, mais comme je l'expliquais, c'est un petit peu large, puis le nécessaire va pouvoir être défini par règlement. Puis, pour les intervenants, ça, c'est pour les professionnels, pour les intervenants, c'est un règlement encore du gouvernement qui va déterminer.

M. Marissal : Certains groupes avant vous, dans les trois derniers jours, nous ont dit aussi que ça ratissait beaucoup trop large. Je pense, par exemple, à la Ligue des droits, et d'autres, là. Vous serez indulgente, là, vous êtes le 17e groupe, là, ça se peut que mon disque dur soit plein, là, mais certains groupes nous ont dit que ça ratissait trop large puis que ça ouvrait la porte, par exemple, à ce que la police puisse avoir des données, le DPCP, par exemple. On peut imaginer d'autres corps judiciaires ou quasi judiciaires. Vous pensez quoi de ça?

Mme Poitras (Diane) :Sûrement qu'il y a des exceptions de... que j'essaie de penser rapidement, là, qui pourraient être invoquées. Est-ce que... Il faudrait voir dans quelle situation pour voir si ça correspond aux critères, mais effectivement c'est un des commentaires qu'on fait. Quand on parle d'avoir accès à des renseignements en dehors de pour prodiguer des soins, je pense qu'il faut être encore plus... le mot ne me vient pas, mais être encore plus prudent et limiter ces situations-là. Peut-être que dans certains cas, c'est justifié.

M. Marissal : Plus restrictif, oui.

Mme Poitras (Diane) :Oui, c'est ça.

M. Marissal : Plus restrictif. D'accord, je comprends bien. Pouvez-vous... Non, ça, ça va, vous avez couvert. Juste, juste avant vous, vous avez peut-être entendu, là, je ne veux pas tourner le fer dans la plaie de personne, là, mais on avait un groupe, le Consortium de santé numérique. Vous avez entendu ou non? Ah! vous avez manqué quelque chose.

• (16 h 20) •

Mme Poitras (Diane) :Excusez-moi, non.

M. Marissal : Non, non, mais il disait essentiellement que vous devriez être écarté du décor ou, en tout cas, que vous devriez être le réceptacle des demandes déjà acceptées par la plus haute autorité désignée. Autrement dit, vous êtes une boîte postale, là, si je comprends bien, là, mais, si ce n'est pas vous, là, mettons, là... Non, je reformule ma question. Est-ce que ça prend un chien de garde, que ce soit vous ou un autre groupe, là? Est-ce que ça prend un autre niveau de protection, de sécurité, de surveillance que la personne en autorité, par exemple, dans un CIUSSS, le D.G. ou la D.G. du CIUSSS?

Mme Poitras (Diane) :Je pense que je sais à quoi ils ont peut-être fait référence. En fait, notre rôle actuel, avant on les autorisait, maintenant on ne les autorise plus...

Mme Poitras (Diane) :...ce qu'on fait, c'est que l'entente nous est envoyée. Et nous, tout ce qu'on fait, c'est qu'on surveille que le processus qui est prévu par la loi a été respecté. On ne refait pas l'analyse. Mais je vous donne un exemple. On a reçu, dernièrement, depuis l'entrée en vigueur du nouveau processus, des documents où le processus, à notre avis, n'a pas été conforme. On dit qu'il faut que ce soit une entente, ce n'est pas une entente qu'on nous a envoyée. Et on trouvait que le FVP... excusez-moi, l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, il y avait une ligne. Donc, pour nous, c'est ça... on s'assure de la conformité du processus.

La deuxième chose que je vais vous dire, je vous invite à regarder dans notre mémoire, on convient tout à fait que les organismes qui ont une mission principale et importante de recherche, on pourrait trouver un processus allégé. Nous, à la commission, on pourrait regarder si leur processus est conforme, adopter... approuver le processus qu'ils ont mis en forme, puis les laisser, puis... justement une boîte postale pour recevoir des ententes par la suite, mais avoir juste un pouvoir de surveiller le processus, de l'approuver puis de le surveiller aux trois ans.

M. Marissal : C'est bien. Vous dites, vous n'autorisez pas, mais vous vérifiez. Puis là, dans le cas que vous nous donnez, pas besoin de plus de détails que ça, vous levez quand même le drapeau rouge quand ça ne respecte pas les normes minimales de protection des renseignements personnels. Donc, vous n'autorisez pas, mais vous flaguez en bon français, donc vous avez quand même un rôle de chien de garde, là.

Mme Poitras (Diane) :Oui, on a toujours le pouvoir de surveiller que la loi est respectée. Donc, on s'assure que le processus est respecté. Mais on ne refait pas l'analyse de la personne qui est autorisée, là...

M. Marissal : Je comprends.

Mme Poitras (Diane) :...on regarde juste, est-ce qu'elle a fait ce qu'elle avait à faire.

M. Marissal : Merci à vous deux. Merci.

Mme Poitras (Diane) :Merci.

Le Président (M. Simard) : Alors, monsieur Desmeules, madame Poitras, merci pour votre contribution à nos travaux. On espère vous retrouver sous peu. Sur ce, cher collègue, à nouveau, merci pour la très belle journée et votre précieuse habituelle collaboration.

Nous allons donc ajourner nos travaux et on se retrouve mardi prochain, le 7, à 10 heures. Au revoir! Bon week-end! Et n'oubliez pas que le Carnaval de Québec commence demain soir. Profitez-en. À bientôt!

(Fin de la séance à 16 h 24)


 
 

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