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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, October 21, 2020 - Vol. 45 N° 90

Special consultations and public hearings on Bill 66, An Act respecting the acceleration of certain infrastructure projects


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Table des matières

Auditions (suite)

Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE)

Équiterre et Fondation David-Suzuki

Vérificateur général

Association nationale des camionneurs artisans inc. (ANCAI)

Bureau de l'inspecteur général (BIG) de la ville de Montréal

Intervenants

M. Jean-François Simard, président

Mme Sonia LeBel

M. Gaétan Barrette

M. Vincent Marissal

M. Sylvain Gaudreault

M. Guy Ouellette

M. Pierre Arcand

*          Mme Geneviève Paul, CQDE

*          Mme Anne-Sophie Doré, idem

*          M. Marc-André Viau, Équiterre

*          M. Diego Creimer, Fondation David-Suzuki

*          Mme Guylaine Leclerc, Vérificatrice générale

*          M. Paul Lanoie, bureau du Vérificateur général

*          M. Gaétan Légaré, ANCAI

*          M. Jean-Pierre Garand, idem

*          Mme Brigitte Bishop, BIG de la ville de Montréal

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Simard) : Bien. À l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, je constate que nous avons quorum. Nous pouvons donc amorcer nos travaux. Je vous souhaite à tous un bon matin.

Comme vous le savez, notre commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Mme la secrétaire, bonjour. Rebienvenue parmi nous. Vous nous avez manqué. Y aurait-il des remplacements ce matin?

La Secrétaire : Oui, M. Simard. Alors, Mme Melançon (Verdun) est remplacée par M. Arcand (Mont-Royal—Outremont); M. Ouellet (René-Lévesque) est remplacé par M. Gaudreault (Jonquière), et aussi... et c'est tout.

Le Président (M. Simard) : Alors, bienvenue à ces collègues. Y aura-t-il des votes par procuration aujourd'hui, Mme la secrétaire?

La Secrétaire : Oui. Excusez-moi. Alors, M. Thouin (Rousseau) votera par procuration pour M. Asselin (Vanier-Les Rivières) et Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré); et M. Barrette (La Pinière) votera par procuration pour M. Fortin (Pontiac).

Auditions (suite)

Le Président (M. Simard) : Alors, aujourd'hui, nous entendrons, comme hier, par visioconférence, trois captations regroupant quatre groupes différents. Nous commençons ce matin par le Centre québécois du droit de l'environnement.

Nous sommes en présence de Mme Geneviève Paul et d'Anne-Sophie Doré, à qui je souhaite la bienvenue. Mesdames, vous savez que vous disposez d'une période de présentation de 10 minutes. Alors, nous vous écoutons.

Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE)

(Visioconférence)

Mme Paul (Geneviève) : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour, Mme la ministre, distingués membres de la commission. Donc, Geneviève Paul, directrice générale du Centre québécois du droit de l'environnement, et je suis accompagnée d'Anne-Sophie Doré, avocate au sein de notre organisation. Je vous remercie pour l'opportunité de m'adresser à vous aujourd'hui sur ce projet de loi.

Le CQDE a à coeur une relance forte, efficace, et, pour qu'elle soit efficace, cette relance doit être, selon nous, juste, verte et durable. On comprend que le projet de loi n° 66 s'inscrit comme un des éléments d'une relance.

Nous étions devant vous en juin pour les débats portant sur le projet de loi n° 61. Malheureusement, il semblerait que notre préoccupation principale n'ait pas été entendue, c'est-à-dire qu'on demeure profondément inquiets, inquiètes de constater que l'approche préconisée par ce projet de loi est une approche qui abaisse, hein, finalement, les exigences en matière d'environnement et d'aménagement du territoire. Selon nous, il y a des solutions administratives qui existent, et donc ce n'est pas justifié de modifier de manière aussi significative les règles applicables, mais c'est aussi profondément inquiétant pour nous parce que ça vient ouvrir la voie à un affaiblissement permanent de la protection environnementale au Québec. Et on voit déjà, y compris dans le cadre des travaux, là, sur ce projet de loi, que certains acteurs s'empressent, hein, de réclamer que de telles mesures soient permanentes.

Donc, je vais concentrer mes remarques aujourd'hui sur cinq aspects particulièrement qu'on considère plus problématiques du projet de loi et nos recommandations pour y répondre, à savoir, bon, l'abaissement des exigences environnementales et d'aménagement, l'affaiblissement de la procédure d'évaluation d'impact, la limitation de la participation du public, les risques pour les milieux humides et hydriques et la portée du projet de loi.

Donc, d'abord, selon le CQDE, c'est important de renoncer à abaisser les exigences environnementales, à plus forte raison pour les projets qui posent un risque élevé pour l'environnement, comme les autoroutes. Avec respect et contrairement aux déclarations publiques, notre analyse du projet de loi, ce qui en ressort est qu'il s'agit bel et bien d'un affaiblissement afin d'autoriser plus de projets, plus vite et avec moins de débats. Même chose, sans toutefois entrer dans le détail, pour les mesures d'accélération, qui permettent, hein, de contourner, finalement, la planification territoriale, donc de faire... contourner, en quelque sorte, les outils d'aménagement et d'urbanisme et ainsi augmenter les risques de pertes de milieux naturels.

Ce que le projet de loi fait, selon notre analyse, c'est, d'abord, par exemple, bon, de traiter les activités considérées comme ayant un risque environnemental modéré de la même manière qu'on le ferait si elles avaient un risque plutôt faible ou négligeable, donc sans exiger d'autorisation environnementale, avec, en plus, des contrôles par le ministère qui ne seraient pas forcément obligatoires et une simple obligation pour les promoteurs de conserver les documents sans que ceux-ci ne soient rendus publics. Selon nous, il n'y a aucune urgence qui peut justifier que ces renseignements-là, importants, ne soient pas rendus obligatoirement publics, notamment sur le registre environnemental. Bon, petite parenthèse pour mentionner que le registre, ce fameux registre, on l'attend toujours, bon, trois ans après l'entrée en vigueur de la réforme, et c'était vraiment une des avancées clés de celle-ci.

Tout ça dans un contexte, il nous semble important de le rappeler, où le régime d'autorisation environnementale au Québec vient juste d'être réformé et qu'on adoptait, quelques jours à peine avant le dépôt du projet de loi, la dernière pièce maîtresse de cette réforme, que vous connaissez bien, le Règlement encadrant les activités en fonction de leur impact sur l'environnement, le fameux REAFIE. Les intervenants qui ont parlé de délais indus dans la procédure d'autorisation ministérielle font référence à une réalité qui n'existera plus dans deux mois, quand le REAFIE entrera en vigueur. Vous le savez, l'accent a justement été mis sur la réduction des délais et l'amélioration des processus administratifs, en plus de créer des procédures distinctes en fonction du risque environnemental associé au projet. C'est vraiment au coeur de la réforme et du REAFIE. Donc, c'est difficile pour nous de dire que... on comprend mal comment on peut dire que ça ne fonctionne, parce qu'on ne l'a pas encore testé. Donc, pourquoi le mettre de côté alors qu'il n'est pas encore entré en vigueur et que ça a quand même représenté, évidemment, pour les équipées dédiées au gouvernement aussi, un chantier de travail colossal?

• (11 h 40) •

Par ailleurs, en fait, sur la liste des projets à l'annexe I, pour la majeure partie d'entre eux, et sous réserve évidemment de pouvoir connaître, là, l'ensemble des détails associés à chacun de ces projets-là... mais, pour la majorité, ils passeraient déjà, donc, par la voie rapide normale puisqu'ils ne nécessiteraient pas d'autorisation ministérielle, et là je fais notamment référence aux écoles et aux maisons des aînés. Donc, pourquoi — on pose la question — venir amputer, hein, des exigences environnementales en les présentant comme si c'était nécessaire, là, pour réaliser ces projets-là, d'une part?

D'autre part, ce que vient faire le projet de loi, par rapport, cette fois-ci, aux projets qui présentent des risques élevés pour l'environnement, comme des projets d'autoroutes, le projet de loi vient modifier de manière substantielle la procédure d'évaluation et d'impact sur l'environnement en faisant essentiellement deux choses. Premièrement, on vient retirer la possibilité pour tout citoyen de demander une audience publique, hein, sur les projets visés par les mesures d'accélération. En faisant ça, on vient, finalement, mettre de côté la plus ancienne et la plus connue forme de participation du public au Québec en matière d'environnement, donc les audiences publiques ouvertes à tous et toutes. Et c'est, d'ailleurs, ce qui a démarqué le Québec, hein, en 1978, comme pionnier. Donc là, en limitant la consultation à des consultations principalement ciblées ou à de la médiation à huis clos, on crée, selon nous, un autre précédent qui est dangereux, qui n'est pas nécessaire, alors même que les consultations ciblées devaient être utilisées avec parcimonie quand elles ont été introduites, là, dans la réforme de la LQE, en 2018.

Et là je n'aborde même pas les projets à risque élevé, dans l'annexe I, pour lesquels on suggère carrément, là, de les soustraire de la procédure du BAPE. Selon le CQDE, c'est essentiel qu'on puisse garantir la possibilité pour le public de demander la tenue d'audiences publiques pour tout projet soulevant des préoccupations. Ça permet d'améliorer le processus, en autant évidemment que la demande ne soit pas jugée frivole, là, il va de soi.

Deuxièmement, ce que ça vient faire, pour les projets à risque élevé, c'est que ça fait en sorte qu'une étude d'impact remise par un promoteur serait automatiquement considérée comme étant recevable par le ministre. Donc là, ce que ça fait, cette proposition-là, c'est que ça vient retirer au ministre de l'Environnement un des rares nouveaux pouvoirs qu'il a obtenus dans le cadre de la réforme de la LQE concernant la recevabilité des études d'impacts, comme la possibilité de mettre fin à une évaluation environnementale si, par exemple, l'étude d'impact est incomplète ou si les questions aux réponses soulevées ne sont pas fournies.

On a beaucoup parlé, troisième point, des milieux humides, dans les derniers jours, et il a souvent été mentionné que ceux-ci étaient préservés par le projet de loi. Je vais m'en tenir ici, vu le temps limité, à mentionner que, selon notre analyse du projet de loi, on s'éloigne quand même de l'objectif de zéro perte nette de milieu humide et hydrique sur le territoire québécois, objectif qui est, bien entendu, reconnu dans la Loi sur la qualité de l'environnement.

Une des notions fondamentales qui est liée à cet objectif-là repose sur le principe d'évitement, mais, quand on parle d'évitement, c'est quand on peut garantir qu'on va supprimer totalement un impact, sinon, on parle de minimisation. Là, le projet de loi, il parle essentiellement de mesures de protection temporaires qui seraient prises durant les travaux. Il est davantage, en fait, question de normes de gestion de chantier que de réelles mesures écologiques. Si on considère qu'une remise en état est possible un an après les travaux, dans le fond, ce que le projet de loi vient faire, c'est qu'on accélère le processus, et le promoteur n'a pas à se poser les mêmes questions concernant les mesures d'évitement et de réduction, là, qui seraient les plus adéquates et spécifiques pour son projet.

Donc, l'évitement, ça demeure quand même l'étape cruciale de la séquence d'atténuation. Et, sans le respect de cette première étape-là, ça nous semble difficile, voire illusoire, là, de parler de l'atteinte de notre objectif de zéro perte nette. Et on connaît le stade critique, hein, des milieux humides et hydriques au Québec et les conséquences associées à leur perte. Selon nous, il faut faire de leur préservation une priorité.

Enfin, on interprète certains articles, par exemple, les articles 42 et 43, comme pouvant éventuellement permettre — et là je fais référence à la portée, là, du projet de loi — comme pouvant éventuellement permettre à d'autres projets de loi qui ne sont pas nécessairement identifiés à l'annexe I de bénéficier en partie de mesures d'accélération. À cet égard-là, nous apprécierions obtenir vos éclaircissements, Mme la ministre, sur ce point et aimerions, bien entendu, suggérer que l'intention du législateur soit explicitement indiquée à ce propos, là, dans le projet de loi.

Et je pense qu'il ressort, donc, clairement de ces points-là que, selon le CQDE, il serait injustifié et irresponsable, en fait, à ce stade-ci, vu les enjeux environnementaux auxquels on fait face, de fragiliser le système d'autorisation environnementale dans son entièreté afin de faire bénéficier certains projets d'infrastructure de mesures d'accélération. On propose plutôt de créer une équipe dédiée qui serait chargée de l'analyse, d'un côté, exclusive des autorisations de projet visées à l'annexe I, avec des analystes régionaux pour l'analyse des demandes d'autorisation ministérielle et des analystes chargés de l'évaluation environnementale, une manière d'accélérer les choses sans compromettre la protection de l'environnement.

Si on exprime, aujourd'hui, ces profondes préoccupations, ça fait aussi suite à plusieurs décisions prises par le gouvernement au cours des derniers mois qui font en sorte qu'on se retrouve avec un cocktail qu'on juge, nous, particulièrement préoccupant pour l'environnement. Un REAFIE, d'un côté, insuffisant, quand même, il faut le noter, qui ferme les yeux sur les impacts climatiques et cumulatifs et qu'on met de côté à peine adopté, une loi sur la gouvernance climatique qui n'inclut pas plusieurs éléments fondamentaux qui auraient pu en faire un outil législatif majeur clé pour s'attaquer aux bouleversements climatiques. Le projet de loi n° 61 est maintenant le projet de loi n° 66, qui nous engage sur une pente glissante.

Donc, avec respect, on propose de ne pas affaiblir les exigences environnementales, parce qu'à vouloir faire ça pour relancer l'économie à court terme, le Québec s'expose à des coûts humains et économiques à long terme, évidemment, une perte de services écologiques rendus par la nature, des impacts sur notre santé, à tous les Québécois et Québécoises, et une plus faible résilience aux changements climatiques. Nous sommes nombreux à vous inviter à saisir cette opportunité pour miser sur une relance verte, inclusive et durable, et on serait nombreux à vous soutenir si vous privilégiez cette approche. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme Paul. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre. Vous disposez d'une période de 15 minutes.

Mme LeBel : Merci, M. le Président. Merci, Mme Paul, pour votre présentation très bien... J'aime aussi le ton de la conversation, parce que je pense que c'est important d'avoir un ton qui nous permette d'échanger, donc j'apprécie beaucoup l'angle que vous prenez dans votre présentation puis, je tiens à le souligner, je pense que c'est important.

Ceci étant dit, je vais quand même vous dire que je ne pars pas du même postulat de départ que vous, puis je ne vous étonnerai pas de dire que je ne suis pas en accord avec vos conclusions. Je vais quand même me permettre de dire à voix haute que je suis d'accord avec vos objectifs, par contre, c'est-à-dire qu'on partage les mêmes objectifs de ne pas atteindre la qualité de l'environnement. Je ne rentrerai pas dans les détails de normes, mais vous comprenez ce que je veux dire, d'être capable de faire du développement économique et particulièrement une relance dans un temps qui est extrêmement particulier. Je vous dirais qu'on n'aurait probablement pas cette conversation-là et je ne serais pas assise à cette table si on n'était pas dans un temps extrêmement particulier, donc.

Et je veux... et je comprends votre préoccupation du précédent, mais j'ose espérer qu'on ne revivra pas une telle pandémie à court terme. Je lance ça dans l'univers, là, mais vous comprenez qu'on n'est quand même pas dans une situation où on est en... une récession autre, etc. Il y a quand même quelque chose de mondial qui se fait, donc je me permets de calculer... de qualifier ces temps-là de temps extraordinaires, et en souhaitant, naturellement, que ça ne se reproduise jamais.

Donc, je pense qu'il faut quand même cibler la conversation dans ce contexte-là, mais je partage vos préoccupations environnementales, donc, il faut que vous le sachiez. Donc, mon objectif n'est pas de bafouer l'environnement, mon objectif n'est pas d'abaisser les normes, mais oui, mon objectif avoué est d'accélérer des projets d'infrastructures pour relancer une économie. Et, encore une fois, le projet n° 66 est une des pièces du casse-tête que nous devons monter, là, pour aider la société en matière économique. Donc, ceci étant dit, je veux que ça soit très clair.

Maintenant, je ne partage pas votre lecture du projet de loi à l'effet qu'on abaisse les normes. J'ose espérer qu'on est capable de trouver des solutions. Oui, il y a le REAFIE, effectivement, c'est une belle avancée, je pense. Il n'est pas exclu, il fait partie d'un portrait général. Il y a ce qui est cher à mon collègue d'en face — je dis «en face» parce qu'il est présentement assis en face de moi, le député de La Pinière — tout ce qu'on peut travailler au niveau purement administratif et au niveau des effectifs. D'ailleurs, je dois dire que, dans les dernières années, dans les deux premières années de notre arrivée au pouvoir, on a rattrapé les coupures d'effectifs qui avaient été faites précédemment. Donc, on doit continuer à le faire.

Moi, je suis quand même députée d'une circonscription avec plusieurs maires et deux MRC, je sais que l'accompagnement environnemental est crucial pour ces... sur le terrain, et c'est une des solutions, vous avez tout à fait raison, et c'est une conversation qu'il faut continuer d'avoir avec mon collègue, effectivement, mais je pense qu'on est capable, dans le contexte d'une situation extraordinaire, tout en maintenant les objectifs de qualité d'environnement, réfléchir en dehors de la boîte. Et je ne suis pas capable de concevoir qu'on ne peut pas trouver des façons d'accélérer certains processus sans abaisser les normes et le contrôle de la qualité.

Je pense qu'il est bon, d'entrée de jeu, puis je n'ai pas l'intention de faire un monologue de 15 minutes, là, mais je veux placer... je pense que c'est bon que je place un peu ma façon, ma pensée, la pensée du gouvernement dans ce dossier-là. Pour moi, là, les milieux hydriques, milieux humides, c'est zéro perte nette, on est dans la même philosophie. Oui, il y a une portion de certains projets qui pourrait bénéficier de ce qu'on appelait la déclaration, hein, la déclaration de projet plutôt que l'autorisation ministérielle, mais on est dans le type de projet où on n'atteint pas un milieu humide de façon permanente et on se doit de le restituer, de le refaire.

Et le suivi est là, le ministre conserve tous ses pouvoirs, les sanctions et les pénalités sont présentes, les obligations de restituer ou de restaurer... ce n'est peut-être pas les bons termes, là, je ne veux pas entrer dans un débat de termes, mais vous comprenez ce que je veux dire, là, les obligations de remettre en état si on ne peut pas éviter. Parce que l'obligation d'éviter demeure, mais, dans le cas où on ne peut pas éviter, l'obligation de remettre en état demeure la même. Donc, pour moi, c'est important de le mentionner.

• (11 h 50) •

Maintenant, je suis, comme vous, d'avis qu'il faut avoir une liste fermée. Je veux vous rassurer, je vais peut-être... je vais regarder l'article que vous mentionnez, parce que je ne veux pas partir dans un débat juridique, là, mais je vais vous rassurer que, si l'effet de l'article que vous venez de nous mentionner donne apparence d'ouverture pour ajouter des projets après l'adoption du projet de loi, ce n'est pas l'objectif. Donc, on va en regarder la rédaction pour être sûr qu'on n'a pas cet effet-là. Donc, je pense répondre à une de vos préoccupations.

C'est important pour moi que la liste soit fermée. Vous avez raison, ce n'est pas tous les projets qui ont besoin de ce projet de loi en matière environnementale. Il y a 50 projets routiers, là-dessus, il y en a peut-être 10 qui sont des projets de capacité de réseau routier. Il y a aussi seulement deux projets nommés dans le projet de loi, il n'y a pas intention de dispenser du BAPE, je vais le dire de cette façon-là, d'autres projets que la 117 et la 30, qui font l'objet d'un article précis et particulier dans le projet de loi. Donc, ça aussi, c'est clair.

Maintenant, les groupes environnementaux, j'imagine que vous en faisiez partie, vous m'excuserez si je ne suis pas capable de distinguer, là, dans ma mémoire, chacun, mais demandaient plus de redditions de comptes. On en fournit plus. Je suis très intéressée à vous entendre un peu plus sur la possibilité de rendre publics les documents, toute l'histoire de la déclaration de projet, là, puis le processus pour que vous ayez un regard. Parce que mon objectif, c'est, comme on a 181 projets, c'est qu'on ait... que vous, comme nous, le gouvernement, comme le ministère de l'Environnement, puisse suivre de près ces dossiers-là, justement, pour s'assurer que les normes sont respectées en tout temps dans un temps extraordinaire.

Donc, peut-être vous entendre un peu plus sur les possibilités peut-être d'élargir la reddition de comptes ou de rendre publics certains documents, qu'on pourrait peut-être étudier avec sérieux pour que vous ayez plus de regards puis une attention plus particulière, et, s'il y a, Dieu nous en préserve, des alertes à sonner, environnementales, que vous soyez capables de le faire. Donc, peut-être m'entretenir un peu plus sur ce sujet-là, s'il vous plaît, comment on peut faire pour vous... Je comprends qu'on ne sera jamais d'accord, puis ça, là-dessus, on va se mettre d'accord d'être en désaccord, mais comment je peux faire pour me rapprocher le plus possible, tout en maintenant mon objectif d'accélération, de mécanismes qui pourraient au moins vous rassurer sur le suivi qu'on va en faire.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme Paul.

Mme Paul (Geneviève) : Je vous remercie, Mme la ministre, pour ces éléments, nombreux éléments de réponse, c'est très apprécié. Je vais essayer d'y répondre en ordre et de... je passerai également la parole à ma collègue, là, Me Doré.

D'abord, d'emblée, je tiens à mentionner, évidemment, qu'on reconnaît aussi, hein, le caractère exceptionnel, extraordinaire de la situation et évidemment le travail colossal, là, que ça implique pour l'administration, pour le gouvernement. Bon, vous l'avez dit, là, sur la scène mondiale, tout le monde a bien hâte, hein, de sortir de cette situation-là.

Et, justement, vous avez parlé de temps extraordinaire, on se trouve en temps extraordinaires, et c'est d'autant plus important pour nous, donc, d'assurer une relance qui passe par une gestion responsable du territoire. Parce que vous serez, je pense, d'accord avec moi là-dessus, on ne veut pas générer davantage de coûts sociaux pour la santé, et environnementaux, écologiques, pour la population du Québec.

Et donc c'est dans cette perspective-là qu'on fait nos recommandations, parce que... et là on n'entrera pas dans les détails, mais vous l'aurez vu, hein, les scientifiques, mon Dieu! vous lancent des cris d'alarme, oui, sur la biodiversité, mais ils sont très clairs aussi sur les liens entre la protection de la biodiversité et notre résilience, y compris face à l'émergence, hein, de conditions qui peuvent favoriser, en fait, l'émergence de pandémies, notamment, et donc soulignent à quel point c'est d'autant plus important et urgent aujourd'hui, en 2020, qu'on fasse tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger notre territoire et la biodiversité. Et on oublie souvent, malheureusement, les nombreux services rendus, hein, par la nature, et à quel point on est, évidemment, intimement liés, hein, avec notre territoire, c'est normal.

Et donc on est... je suis complètement d'accord avec vous quand vous dites qu'il faut penser en dehors de la boîte, et c'est ça que le CQDEV appelle. Et on n'est pas tout seuls, évidemment, vous l'aurez vu, là, on est plus de 80, juste cette semaine, hein, syndicats, organisations sociales de défense des droits, ordres professionnels, groupes environnementaux, etc., à, justement, alerter sur le fait que, là, ce que le projet de loi fait, selon nous, ce n'est pas penser en dehors de la boîte, c'est, au contraire, continuer à opposer économie et environnement. Et on voit le résultat que ça a donné aujourd'hui, bien avant votre administration, évidemment, mais ça nous a menés dans une situation où le territoire est dans un état critique à plein d'égards, et je ne parle pas seulement des milieux humides et hydriques.

Donc, oui, à penser en dehors de la boîte, et il y a... on est chanceux, au Québec, il y a une force de propositions incroyable, y compris du milieu des affaires, pour nous aider à penser la relance à travers des projets structurants mais qui ne vont pas venir compromettre notre capacité à la fois à, évidemment, relancer l'économie, parce que... COVID, en raison de ses conséquences, mais aussi à répondre à ce qu'on a dans le... j'allais dire «ce qui s'en vient», mais on l'a déjà, hein, les bouleversements climatiques se font déjà ressentir, puis ça va nous coûter cher à plusieurs niveaux. Donc, c'est d'autant plus important pour nous de miser sur une approche différente.

Je suis rassurée de vous entendre sur la liste, merci. Et, effectivement, bon, ça nous fera plaisir d'échanger, ultérieurement, mais, effectivement, lus de façon autonome, ces articles-là soulevaient un doute pour nous, même si l'intention est claire, d'une part, mais ça n'empêche pas, évidemment, comme vous savez, par ailleurs, que, selon nous, ce n'est pas l'approche qui devrait être préconisée, on devrait... notamment pour les projets à risque élevé, là, qui ne devraient pas se retrouver sur une telle liste.

Quant à la possibilité de rendre publiques des informations, merci également pour votre ouverture. Pour nous, bien, en fait, c'est lié aussi au fait que, comme je le disais d'entrée de jeu, beaucoup de... bien, on suggère de traiter des projets qui auraient eu un... qui sont considérés normalement comme ayant un risque modéré de la même manière qu'un risque faible ou négligeable.

Donc, c'est dans cet esprit-là qu'on dit : Non, il faut quand même que ces informations-là ne soient pas non seulement conservées par le promoteur pour une durée de cinq ans mais qu'elles soient accessibles pour le public. Et on en profite aussi évidemment pour rappeler, je crois, si je ne me trompe pas, 117.5 de la LQEV, qui est le registre environnemental, donc le registre parallèle à celui des études d'impact, qui n'est toujours pas en vigueur, là, puis ça fait plus de trois ans, évidemment. Donc, on l'attend impatiemment et on sait que c'est important pour les citoyens de pouvoir... c'est un de nos meilleurs outils, hein, finalement, pour garantir la protection du territoire. Et enfin, sur...

Mme LeBel : Mme Paul, je ne veux pas vous interrompre, mais il me reste peu de temps, mais je veux juste, peut-être, vous entendre, justement, sur quelque chose. Vous avez parlé de la durée de cinq ans. Je sais que, dans un de vos communiqués, vous parliez peut-être de réduire à trois ans. Moi, je ne suis pas contre de réfléchir à cette option-là. Le cinq ans a été mis sur la table parce qu'on voulait donner, quand même, aux 181 projets la possibilité de les utiliser, puis on sait que les projets ne progressent pas tous au même rythme.

Alors, peut-être vous entendre, parce que je veux vraiment qu'on... Moi, je ne veux pas opposer économie et environnement, loin de là l'idée, mais je ne veux pas non plus opposer accélération à normes. Pour moi, c'est deux choses différentes. Des contrôles, des mesures de contrôle peuvent être repensées sans que les normes soient abaissées, et c'est là-dessus que... si vous voulez le faire, dans un deuxième temps, et vous pouvez nous faire des propositions. Moi, je veux qu'il y ait un effet d'accélération, c'est l'objectif, mais l'objectif n'est pas de rabaisser les normes, mais je pense qu'on a trouvé un juste équilibre en limitant la liste comme vous le demandiez, en ayant de la reddition de comptes pour que vous puissiez faire un suivi adéquat. Et, justement, si on voit que, sur certains projets, en bon français, on est en train de rentrer dans l'arbre, là, je ne veux pas faire... mais on pourra corriger. Parce que l'idée, c'est que les normes demeurent exigibles, les normes, naturellement, que le ministre de l'Environnement garde ses contrôles, que les pénalités soient là. Donc, on ne change pas la finalité, si on veut, O.K.? Mais, sur le trois ans versus cinq ans, vu qu'il reste deux minutes, j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus.

Mme Paul (Geneviève) : En fait, on n'a pas formulé de recommandation précise sur la durée, mais on questionnait la période de cinq ans, qui, selon nous, n'était...

Mme LeBel : Ah! excusez.

Mme Paul (Geneviève) : Mais on l'a soulevé, quand même, hein, dans notre mémoire... qui, selon nous, n'était pas justifiée. Pourquoi, hein, étendre ça jusqu'à cinq ans? Et c'est parallèle, évidemment, à notre remarque principale, qui est, là, ce qu'on fait. Et, là-dessus, avec respect, on est en désaccord, comme vous savez, pour nous, le projet de loi vient opposer normes et accélération.

Nous, ce qu'on propose, c'est des mesures administratives. Elles existent, on le sait, et, quand on veut mettre les bouchées doubles, on y arrive. On peut y arriver sans affaiblir les normes. Et là 66 vient créer un régime parallèle, dans le fond, au régime d'autorisation, qui vient, comme je le disais, d'être adopté, qui n'est même pas encore en vigueur, qu'on n'a pas encore testé. Donc, c'est dans cet esprit-là qu'on questionnait la durée de cinq ans.

Peut-être que ma collègue veut ajouter quelque chose à ce sujet-là.

• (12 heures) •

Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien, tout simplement, rapidement, juste... Vous dites : Ça prend du temps, préparer des projets. C'est simplement que la déclaration de projet ou l'étude d'impact doit simplement être déposée. Donc, c'est comme un peu une étape préliminaire, là, quand même, pour que le projet puisse bénéficier des demandes... des mesures d'accélération. Donc, ici, c'est peut-être un autre critère aussi qui peut faire en sorte que le cinq ans, tu sais, ne soit pas calculé à partir, par exemple, du dépôt de ces documents-là.

Mme LeBel : Bien, si vous pouvez nous proposer quelque chose puis nous l'envoyer, ça va être avec... on va le regarder. L'idée, c'était de permettre... mais, naturellement, le cinq ans, là, était un peu sur les perspectives de retour à l'équilibre économique, là, parce qu'on va avoir des impacts pendant plusieurs années, mais ça, là-dessus, on est ouverts à regarder vos propositions. Merci. Je m'excuse, le temps file rapidement. Merci beaucoup, Me Doré.

Le Président (M. Simard) : Merci. Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de La Pinière. M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Merci, M. le Président. Mme Paul, Me Doré, bienvenue, encore une fois. J'ai beaucoup insisté pour que vous soyez ici aujourd'hui. La dernière fois, je vous avais dit que vous aviez été d'une clarté remarquable, vous l'êtes encore aujourd'hui, je tiens à le souligner.

Il y a beaucoup de choses. Écoutez, vous avez dit vous-même, et j'en étais content, là, Mme Paul, vous avez dit vous-même que la majorité des projets qui étaient là n'avaient pas besoin d'étude environnementale, et c'est le cas. Je suis heureux d'entendre de la bouche de Mme la ministre que, même, selon elle, il y en a une dizaine, pas plus... Faire un projet de loi pour tout ça, on pourrait dire : Tout ça pour ça, mais ça, c'est une autre chose.

Vous avez parlé de 42 et 43. Vous comprendrez que moi aussi, j'ai pris ça en note. Pouvez-vous nous donner des exemples plus concrets, bien, des exemples concrets, c'est difficile, là, mais aller un peu plus dans le détail sur ce que vous voyez comme possibilités que ce que l'on fait aujourd'hui viendrait pouvoir être appliqué ailleurs, comme vous l'avez dit?

Puis je vais vous dire précisément pourquoi je pose cette question-là. À lire ce qui a été retenu dans les médias de la journée d'hier, ça tombe bien, c'est ce que j'ai retenu moi-même. Moi, à la fin de la journée, là, j'ai dit la chose suivante en coulisses, je vais la dire publiquement : Je commence à avoir la certitude que 66 est un laboratoire, une expérience pour formaliser dans les prochaines étapes. Et je ne mets pas en cause ni ne prête d'intentions à Mme la Présidente du Conseil du trésor, mais elle fait partie d'un gouvernement qui a un premier ministre, et moi, je pense qu'actuellement on fait une expérience pour plus tard étendre ça de façon permanente.

Alors, commençons donc par 42, 43, là, dites-nous donc, là, peut-être plus précisément comment, légalement, vous voyez qu'aujourd'hui 66 peut aller ailleurs, surtout dans le contexte où tout le monde hier est venu nous décrire 66 comme étant le Saint-Graal du développement économique?

Le Président (M. Simard) : Me Doré.

Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui. Donc, il y a un des éléments, là, qui est superimportant, c'est qu'il n'y a pas de définition de ce qu'est un projet d'infrastructure dans le projet de loi. Il y a beaucoup d'articles qui font des références à : on va permettre une mesure d'accélération pour un projet d'infrastructure, mais sans préciser, par exemple, que c'est pour un projet d'infrastructure qui est visé à l'annexe I. Donc, comme il n'y a pas d'article, dans le projet de loi qui dit : Toutes les mesures d'accélération du projet de loi seront applicables seulement pour l'annexe, ou, encore, qu'il n'y a pas de définition de ce qu'est un projet d'infrastructure, là, il y a une ouverture.

Vous me mentionnez 42, 43, c'est des articles qui sont plus techniques. Si vous me permettez, moi, je vais vous amener à la comparaison 23 et 37, parce qu'à mon sens c'est encore plus parlant. L'article 23 dit...

M. Barrette : Je vous interromps, Me Doré. C'est sûr que, si ma vis-à-vis prenait la parole maintenant, elle vous dirait que non, non, non, tout ce qui est dans le projet de loi est limité aux 181 projets, et à rien d'autre. Je vous dis juste ça comme ça pour que vous puissiez me répondre encore plus précisément et avec plus d'impact.

Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui, c'est ça. Bien, vous allez voir que ça devrait... ma réponse devrait vous satisfaire, dans ce cas-ci. C'est que, si on regarde 23, ça dit simplement qu'un organisme public qui réalise une activité qui est visée à l'article 22 ou 23 va bénéficier de mesures d'accélération. Si on compare à 37, qui parle de la procédure d'évaluation, on précise : «La présente sous-section s'applique à tout projet d'infrastructure mentionné à l'annexe I...» Donc, le projet de loi prend la peine, pour la procédure... les mesures d'accélération pour la procédure d'évaluation environnementale, de préciser que ça s'applique juste au projet de loi... aux projets d'infrastructure de l'annexe I, tandis que, pour les mesures d'accélération qui concernent l'autorisation environnementale, on ne prend pas la peine de le préciser.

Ce flou juridique là ne peut pas être éclairé, malheureusement, par des propos tenus dans un point de presse, par exemple, comme ce n'est pas... ça ne permet pas d'interpréter une loi. Donc, c'est pour ça que nous, on demande à ce qu'il y ait un article qui précise la portée du projet de loi. Parce que, justement, si on compare les articles puis le vocabulaire distinct qui est utilisé, selon un article et un autre, bien, il y a une place à une interprétation pour que plus de projets puissent bénéficier des mesures d'accélération, par exemple, prévues à l'article 23.

M. Barrette : Merci pour les précisions. Or...

Mme Paul (Geneviève) : Puis, si je peux me permettre.

M. Barrette : Allez-y, Mme Paul, excusez-moi.

Mme Paul (Geneviève) : Si je peux me permettre de rajouter, suite à votre commentaire concernant le risque d'affaiblissement permanent des exigences environnementales, donc, au-delà des articles 23, 36, 42, 43, de manière générale, et je pense que c'est important de le réitérer, le message qui est envoyé en demeure un qui est dangereux, selon nous. Parce que ce qui est envoyé comme message, avec ce projet de loi là, c'est que la manière d'accélérer, tu sais, doit forcément passer par un abaissement des exigences. On a parlé beaucoup, là, du régime d'autorisation environnementale, mais aussi évidemment de ce qui concerne l'aménagement du territoire, et c'est ça qui est une pente glissante, dangereuse, selon nous, qu'on doit...bien, qu'on doit éviter. On instaure des flous.

On vient d'adopter des nouveaux concepts, des nouvelles façons de faire, notamment avec le REAFIE, des déclarations de conformité. Là, on parle de déclarations de projet. Donc, que ça soit pour les milieux humides ou hydriques, ou, de manière générale, le régime d'autorisation environnementale, ou des évaluations d'impact, c'est bel et bien un abaissement et ça peut ouvrir la voie, justement, à un précédent dangereux qu'on pense important d'éviter.

M. Barrette : Vous allez sûrement être d'accord. Là, pouvez-vous nous faire parvenir un court tableau, là, spécifique des articles qui font... qui ouvrent la porte à aller ailleurs que dans le 66, pour qu'on puisse agir en étude détaillée? Merci pour ça. C'est sûr que vous allez dire oui. Là, vous n'avez pas besoin de nous dire ça dans le micro.

Alors, autre question. Là, vous m'avez, là aussi, beaucoup accroché sur le fait, puis vous avez raison, honnêtement, je l'avais échappée, celle-là, c'est vrai que le REAFIE était une mesure d'accélération, d'une part, mais c'est surtout vrai que ça n'a pas été testé. Alors là, ça m'amène à vous poser la question suivante : Est-ce que 66 est en contradiction avec les éléments du REAFIE, sur le plan légal, là, j'entends, administratif?

Mme Paul (Geneviève) : Bien, peut-être, rapidement et, Anne-Sophie, tu pourras me compléter. Bien sûr qu'il vient... comme on disait, qu'il est en contradiction ou qu'il s'inscrit en porte-à-faux avec le REAFIE à plusieurs égards. Et un des premiers... c'est ce qu'on mentionnait d'entrée de jeu, c'est-à-dire que le REAFIE, et c'était un des objectifs de la réforme aussi, là, on vient de passer à... C'était un chantier colossal, vous vous en rappellerez peut-être, même la première mouture était tellement complexe qu'on a recommencé, et il y a eu beaucoup de consultations, et ça a mené à son adoption en septembre cette année, et il entre en vigueur en décembre.

Et l'approche du REAFIE, c'est fondé sur les risques : faibles, négligeables, modérés, élevés. Et, comme on le disait, là, ce que 66 vient faire, c'est de prendre tout ce qui serait considéré comme ayant des projets à risques modérés et les traiter comme s'il y avait des risques faibles ou négligeables, donc sans exiger de ceux-ci, par exemple, qu'ils obtiennent une autorisation ministérielle. Par exemple, c'est un des éléments pour montrer la différence et comment est-ce qu'on crée un système parallèle, finalement.

M. Barrette : Ça, je l'avais compris, mais sur ce que faisait le REAFIE pour une catégorie, est-ce que 66 vient en contradiction avec ce qu'il se faisait dans le REAFIE, pas simplement le changement de catégorie, là?

Mme Paul (Geneviève) : Oui. Anne-Sophie, je te laisse élaborer là-dessus, mais effectivement.

Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui. En fait, je vais juste préciser ce que fera le REAFIE, là, quand il va entrer en vigueur dans deux mois. Je vous donne un exemple. En fait, ce qui est créé par la déclaration de projet, c'est presque la même chose que la déclaration de conformité qui est créée par le REAFIE, mais on crée comme une espèce de nouvel outil, une nouvelle façon d'évaluer. Mais, dans le fond, c'est que je pense que ça va juste créer une forme de confusion aussi avec qu'est-ce que sera la déclaration de conformité, la déclaration de projet. Puis, avec le projet de loi n° 66, en fait, on propose de prendre, justement, des projets qui sont en autorisation ministérielle en fonction du REAFIE puis les mettre en déclaration de projet, qui est pratiquement la même chose qu'une déclaration de conformité, mais on crée cette espèce de nouvel outil procédural qui abaisse les normes. Puis je pense que ça va créer quand même, justement, une confusion puis aussi une difficulté d'évaluer quels seront les impacts réels du REAFIE, notamment sur les projets qui seront présentés par des organismes publics.

M. Barrette : Bien, je vais vous poser une question encore plus... elle n'est pas tordue, en fait, je pense qu'elle est assez directe : Est-ce que le REAFIE et le projet de loi n° 66, tel qu'il est écrit, peuvent vivre ensemble, juridiquement parlant? Parce qu'à la fin de la durée de vie de 66 il va probablement falloir choisir entre un des deux.

• (12 h 10) •

Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien, en fait, c'est justement, c'est de... là aussi qu'on parle d'une pente glissante pour toute la structure de l'autorisation environnementale. Parce que, tu sais, au final, bien entendu, ce sont... les promoteurs, ce sont des organismes publics, mais ce sont quand même des promoteurs privés qui mettront en oeuvre ces projets-là, qui vont vivre, pendant une période cinq, huit, 10 ans, avec des mesures d'accélération pour certains projets, donc avec des normes différenciées. Comment est-ce qu'ensuite ils vont pouvoir revenir au REAFIE, à une application plus serrée des normes environnementales? Bien, nous, c'est une des craintes que nous avons.

Mme Paul (Geneviève) : Et, si je peux me permettre d'ajouter, les promoteurs, entre autres, ont été nombreux aussi, là, évidemment, à participer aux consultations entourant le REAFIE. Ils ont participé de manière substantielle au REAFIE. Donc, il y a déjà eu beaucoup, beaucoup, disons, de mesures qui ont été prises pour accélérer les délais, optimiser les processus. Donc, même d'un point de vue, disons, de protection environnementale, nous, au CQDE, on n'est pas satisfaits avec le REAFIE, ça passe à côté.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme Paul.

Mme Paul (Geneviève) : Donc, merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous.

M. Barrette : ...la gentillesse de me laisser vous remercier pour votre prestation. Merci beaucoup.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, la parole appartient maintenant au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Mme Paul, Me Doré, bienvenue. Encore une fois, explications claires et nettes, c'est utile à nos travaux. Le député de La Pinière parlait, tout à l'heure, d'un laboratoire, on a chacun nos images. Moi, plus on étudie ce projet de loi là, plus il me semble prendre la forme d'un cheval de Troie, qui, comme chacun sait, est une bonne vieille ruse mythique pour rentrer en grande pompe avec d'autres intentions.

Vous dites notamment que... Et là il y a un dialogue de sourds entre la présidente du Conseil du trésor et certains groupes, dont le vôtre, je pense que le dialogue de sourds est ici aussi entre la ministre et moi. Vous dites que, dans les faits, 66 abaisse les normes environnementales, la ministre dit non. Pouvez-vous, ne serait-ce que pour essayer de briser ce dialogue de sourds, nous redire, là, précisément, comme vous en êtes capable, en quoi est-ce que ça abaisse les normes environnementales?

Mme Doré (Anne-Sophie) : Donc, en fait, le meilleur exemple, c'est ce que j'ai commencé à expliquer au député de La Pinière, c'est que, vraiment, la déclaration de projet qui est créée, qui est presque similaire... qui est presque, en fait, la même chose qu'une déclaration de conformité... Avec la réforme de la LQE, on a créé la déclaration de conformité pour, disons, reclasser certaines activités qui étaient considérées comme ayant un risque faible pour qu'elles soient soumises à une déclaration de conformité plutôt qu'une autorisation ministérielle. Donc, on a classé les activités par une procédure spéciale, en fonction de leur impact sur l'environnement.

Avec le projet de loi n° 66, on défait ce classement-là, finalement, parce qu'on prend des activités qui sont avec des risques modérés pour l'environnement et on les traite de la même façon que des activités qui ont un risque faible ou négligeable pour l'environnement, en les mettant, finalement, en déclaration de conformité et possiblement, dans certaines situations, en exemption. Donc, on prend des activités avec un impact modéré sur l'environnement puis on leur impose un traitement différencié, donc on diminue la norme de protection de l'environnement.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Des voix : ...

M. Marissal : C'est juste difficile de suivre, M. le Président, là, si tout le monde parle en même temps, là.

Le Président (M. Simard) : Vous avez raison.

M. Marissal : Ça devient assez complexe. Si ça n'intéresse pas la ministre à ce point-là, j'en suis désolé, là, mais...

Des voix : ...

M. Marissal : Non, mais là c'est parce que c'est déjà difficile à suivre par vidéoconférence, là. Vous pouvez vous tweeter, là, vous texter, là, si vous voulez, là.

Le Président (M. Simard) : Non, écoutez, là, M. le député de Rosemont, vous avez passé votre message, ce n'est pas nécessaire d'en rajouter. On va s'assurer que tout le monde puisse, comment dire, être à l'écoute des propos de chacun. Alors, on va poursuivre nos travaux.

Des voix : ...

Le Président (M. Simard) : C'est ça. Donc, je pense que tout ça se fait de bonne foi de part et d'autre. On est dans des salles qui sont petites, alors... Mais, ceci étant dit, M. le député, il vous reste encore 15 secondes. Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Marissal : Ah! j'ai terminé, merci.

Le Président (M. Simard) : Ça vous va?

M. Marissal : Ah! bien, 15 secondes, qu'est-ce que tu veux...

Le Président (M. Simard) : Bien, c'est le temps qui vous restait, que je vous aurais réaccordé.

M. Marissal : C'est bon. Je le donne à mon collègue de Jonquière.

Le Président (M. Simard) : Malheureusement, ça ne peut pas se faire comme ça. Alors, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci. Merci beaucoup. Encore une fois, je veux saluer, féliciter le CQDE pour son travail exemplaire. Bon, il y a beaucoup de choses qui ont été dites. Je veux résumer en disant que, dans le fond, on n'a pas besoin du projet de loi n° 66 dans la mesure où le REAFIE sera mis en vigueur, entrera en vigueur dans quelques semaines. Il faut lui laisser le temps de s'appliquer. Le but du REAFIE, c'est, justement, de réduire les délais, qui était l'objectif de la loi n° 102 et qui n'a pas été mis encore en application. Donc, laissons le temps au REAFIE de s'appliquer.

Je veux revenir, moi, sur la question des milieux humides et hydriques. Vous nous dites, dans le fond, que le projet de loi n° 66 vient écarter le principe de l'évitement pour, au fond, mettre au bénéfice de minimiser et compenser, alors que l'idée de la loi sur les milieux humides et hydriques était une hiérarchisation des principes. D'abord, éviter, si on ne peut pas vraiment, minimiser et, sinon, compenser. Mais là la logique du projet de loi n° 66, dites-moi si je me trompe, c'est : on met les trois principes sur le même niveau, d'éviter, minimiser et de compenser, au lieu de mettre en valeur, nécessairement, l'évitement.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme Paul.

Mme Paul (Geneviève) : Oui. Alors, je vais laisser ma collègue, Me Doré, sur la question des milieux humides et hydriques. Simplement, M. Gaudreault, pour faire écho, effectivement, à ce que vous disiez, oui, laissons une chance au REAFIE, et, en parallèle, il y a d'autres moyens par rapport aux projets à risques élevés, là, au niveau de l'évaluation. Parce qu'on n'a pas beaucoup parlé du REAFIE, là, mais il faut aussi rappeler que le projet de loi n° 66 expédie, vise à expédier les études d'impact aussi, là, et d'évaluation et limiter les possibilités de participation du public, qui, normalement, servent à enrichir, hein, la manière dont on regarde les enjeux quand on est à considérer, là, des projets à risques élevés qui doivent passer, nécessairement, par la procédure d'évaluation et d'examen d'impacts. Donc, il y a, selon nous, définitivement des façons administratives d'accélérer ça sans compromettre le processus existant d'évaluations d'impacts. Et, sur les milieux humides et hydriques, je passe la parole à Me Doré.

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui. En fait, je dirais simplement que la meilleure illustration, c'est, si vous lisez l'annexe II, on parle de mesures d'évitement, sauf que l'article, tout l'annexe en fait, ne parle pas d'évitement, donc d'éviter la destruction de milieux humides et hydriques, mais il parle d'éviter d'émettre des contaminants dans les milieux humides, de minimiser l'émission de ces contaminants-là dans les milieux humides et hydriques, mais ce n'est pas ça, la description de l'évitement, de perte de milieux hydriques.

Le Président (M. Simard) : D'accord. Merci, Me Doré. Nous allons poursuivre avec le député de Chomedey. Vous disposez de deux minutes, cher collègue.

M. Ouellette : Merci. Merci, Mme Paul. Merci, Me Doré. Ça a le mérite, votre présentation, d'être clair, et on n'a pas tous les mêmes connaissances en environnement que mon collègue de Jonquière, qui est un expert dans ce domaine-là. Pour le commun des mortels ou pour le citoyen qui nous regarde ou qui vous entend aujourd'hui, je pense que c'est une sonnette d'alarme qui est très importante. Pourquoi réinventer la roue? Pourquoi ne pas mettre en vigueur ou attendre la mise en vigueur de ce qui a déjà été voté, ce qui a déjà été sanctionné par l'Assemblée nationale et qui va nous aider? Seriez-vous d'accord avec moi de dire que l'accélération des projets d'infrastructure par le projet de loi n° 66, c'est peut-être des mesures d'amoindrissement de mesures contraignantes qui existent déjà et qui ne sont pas encore en application? Et on dilue un peu le projet.

Je ne sais pas pas si vous le voyez de la même façon que mes yeux de citoyen, mais vous avez une expertise beaucoup plus fine que celle que certains de nous autres pouvons avoir alentour de la table, mais combien importante pour la suite de nos travaux. Ça fait que seriez-vous d'accord à ce qu'un peu, puis on l'a vu hier avec d'autres organismes, on mette en application ce qu'on a déjà, qu'on peut peut-être mettre... puis je vais prendre l'expression anglaise, là, mettre sur pause, mettre sur le «hold» certaines dispositions du projet de loi n° 66 qui pourraient avoir des impacts futurs beaucoup plus importants?

Le Président (M. Simard) : Alors, succinctement, Me Doré.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Ah! ou Mme Paul.

Mme Doré (Anne-Sophie) : En fait, en effet, ce qui est particulier, disons, dans le timing du projet de loi, c'est qu'on est à l'aboutissement de la réforme de la LQE. Donc, on n'a pas vu les effets de la réforme. Puis, contrairement à, par exemple, la Loi sur l'expropriation, qui est une loi qui n'a pas été réformée depuis un moment, la LQE vient tout juste d'être réformée. Donc, c'est beaucoup plus dangereux de proposer des mesures alternatives dans ce contexte-là.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup. Alors, Mme Paul, Me Doré du Centre québécois du droit de l'environnement, merci d'avoir été avec nous ce matin et d'avoir contribué à l'avancement de nos travaux. Nous allons suspendre momentanément, le temps de recevoir nos prochains invités.

(Suspension de la séance à 12 h 20)

(Reprise à 12 h 21)

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît, à l'ordre, chers collègues! S'il vous plaît, chers collègues, M. le député de La Pinière, merci beaucoup. On reprend nos travaux.

Nous sommes en compagnie de nos invités, du groupe Équiterre et de la Fondation David-Suzuki. Alors, messieurs, bienvenue parmi nous. Auriez-vous, d'abord, l'amabilité de vous présenter?

Équiterre et Fondation David-Suzuki

M. Viau (Marc-André) : Bonjour. Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales chez Équiterre.

M. Creimer (Diego) : Diego Creimer, codirecteur par intérim à la Fondation David-Suzuki.

Le Président (M. Simard) : Heureux de vous recevoir parmi nous. Vous disposez de 10 minutes, chers amis.

M. Viau (Marc-André) : Merci. Mme la ministre, M. le Président, bonjour. Distingués membres de la Commission des finances publiques, merci de nous recevoir et de nous donner l'opportunité de nous exprimer sur ce projet de loi qui aurait une incidence importante sur le développement de la société québécoise. Je suis avec mon collègue Diego Creimer, et nous partagerons notre temps.

Équiterre existe depuis plus de 25 ans et peut compter sur l'appui de plus de 25 000 membres et 135 000 sympathisants. Nous proposons des solutions concrètes pour accélérer la transition écologique et bâtir une société plus résiliente. Quant à la Fondation David-Suzuki, elle a été établie en 1990 et elle compte près de 100 000 sympathisants au Québec. La fondation définit et met en oeuvre des solutions permettant de vivre en équilibre avec la nature. Nous avons tous les deux été appelés à commenter le projet de loi n° 61 au printemps dernier et nous sommes ravis d'avoir l'occasion de pouvoir le faire avec la nouvelle mouture du projet de loi n° 66.

Alors qu'on s'apprête à construire les infrastructures qui vont façonner le Québec des 50 prochaines années, notre message aux décideurs politiques est simple : Faisons ce qu'il y a de mieux, car il n'y a rien de plus permanent que des infrastructures. La situation d'exception que nous vivons requiert un processus de prise de décision sans faille et non la pression d'agir en urgence. Or, si le projet de loi n° 66 est moins pire que son défunt prédécesseur, le gouvernement continue de présenter l'environnement comme étant un obstacle à la relance en proposant des assouplissements à la réglementation environnementale. Soyons clairs, Équiterre et la fondation Suzuki sont en faveur de la construction d'infrastructures qui vont permettre d'accroître la résilience de la société québécoise et de répondre aux besoins économiques et sociaux du Québec pour les années à venir.

Nous remarquons que le projet de loi n° 66 propose quatre types de modifications. Celles-ci sont liées à l'expropriation, à la gestion des marchés publics, à la réglementation environnementale et à l'aménagement et l'urbanisme. En ce sens, ce projet de loi peut être considéré comme un projet de loi omnibus sur les infrastructures. Notre intervention aujourd'hui concerne uniquement la réglementation environnementale. Selon nous, le gouvernement n'a toujours pas fait la démonstration qu'une loi spéciale est requise pour modifier la réglementation environnementale pendant une période de cinq ans. Au cours de notre intervention qui résume le contenu de notre mémoire, nous expliquerons pourquoi nous croyons qu'il est possible pour le gouvernement d'atteindre ses objectifs dans le cadre réglementaire environnemental existant.

Bien que j'aie dit que j'allais me concentrer sur les aspects environnementaux de ce projet de loi, j'aimerais prendre une minute pour comparer l'approche en matière environnementale vis-à-vis celle en matière de gestion des marchés publics. Alors que le p.l. n° 66 accorde à l'Autorité des marchés publics un rôle de surveillance accrue sur les contrats publics qui découlent de ces projets, il diminue, en contrepartie, les exigences environnementales nécessaires pour la réalisation desdits projets. Le contraste entre ces deux objectifs est frappant. D'une part, on donne des outils supplémentaires à l'AMP, alors que, de l'autre, on retire des outils de contrôle au ministère de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques. En donnant des pouvoirs supplémentaires pour enquêter, ordonner des mesures correctrices, suspendre ou résilier des contrats, le législateur dote l'AMP d'outils permettant de freiner et non d'accélérer la réalisation de projets. Je pense que vous serez tous et toutes d'accord pour dire que jamais une proposition inverse, soit de renforcer la réglementation environnementale et d'affaiblir la gestion des contrats publics, n'aurait été jugée acceptable. On ne voit donc pas pourquoi ce qui est proposé dans le projet de loi n° 66 est acceptable.

Donc, parmi les éléments problématiques du p.l. n° 66, nous avons identifié la durée d'application de cinq ans de ce projet de loi. Nous sommes d'avis qu'il n'est pas justifié de demander des pouvoirs accrus pour outrepasser certains processus réglementaires environnementaux normaux pour une période de cinq ans. Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent donc aux législateurs de modifier l'article 12 afin de limiter à un an l'application des articles de ce projet de loi aux projets d'infrastructure de l'annexe I. À l'échéance de cette période, le gouvernement peut demander à l'Assemblée nationale le prolongement de l'application des articles de ce projet de loi pour une autre période d'un an.

Je vais maintenant passer la parole à mon collègue Diego Creimer pour les recommandations n° 2 et n° 3.

M. Creimer (Diego) : Merci beaucoup. Écoutez, je vais droit au but. Dans un contexte de perte accélérée de biodiversité et de bouleversements climatiques qui fragilisent davantage les écosystèmes desquels nous sommes interdépendants, tout allègement des exigences environnementales risque de diminuer notre résilience comme société et de mettre davantage en péril notre santé et notre économie.   

Avec le Règlement sur l'encadrement des activités en fonction de leur impact sur l'environnement, le REAFIE, qui soustrait plusieurs catégories de projets de moindre envergure à l'obligation d'obtenir une autorisation ministérielle en échange d'une déclaration de conformité, on assistait déjà, au Québec, en pleine crise sanitaire, à un affaiblissement des exigences environnementales. L'idée que la protection de l'environnement et les lois environnementales dont le Québec s'est doté au fil des décennies constituent un obstacle au développement économique était déjà latente dans l'adoption de ce règlement et, à notre avis, se confirme avec le projet de loi n° 66. Les allègements réglementaires contenus dans ce projet de loi viennent limiter la portée de la Loi sur la qualité de l'environnement et, de ce fait, créent des dangereux précédents, que le respect de la LQE peut être subordonné à des priorités d'ordre économique.

En conséquence, pour éviter de fragiliser davantage les normes de protection de l'environnement et les modalités d'évaluation et d'approbation de projets au Québec, nous recommandons au législateur d'appliquer la procédure d'autorisation ministérielle prévue à la Loi sur la qualité de l'environnement et précisée par le REAFIE à tous les projets et sous-projets de l'annexe I qui devraient normalement obtenir une telle autorisation.

Je voulais parler aussi d'un principe d'évitement que l'on voit comme étant marginal pour les milieux humides et hydriques. Les principes d'évitement consacrés dans le premier paragraphe de l'article 25 de la Loi sur la qualité de l'environnement deviennent, à notre avis, marginaux dans ce projet de loi. Même pour les mesures de minimisation, ce n'est, dans les faits, pas une minimisation des impacts pour éviter la destruction permanente des milieux humides et hydriques dont il est question. À l'annexe II du projet de loi n° 66, la minimisation fait référence au fait de minimiser les polluants émis dans les milieux humides et hydriques et non de minimiser la perte de milieux humides et hydriques en soi. Ce n'est pas du tout les mêmes concepts que ce qu'on applique en ce moment avec la Loi sur la qualité de l'environnement.

Côté compensation, on doit regarder la réalité dans les yeux, la compensation financière d'aujourd'hui ne fera pas contrepoids à la perte de milieux humides intacts. Les mesures de minimisation d'impacts ne pourront pas non plus restituer la qualité des services écosystémiques ni garantir la préservation de la biodiversité originale. Dans un contexte de perte de biodiversité accélérée et de crise climatique, c'est tout le Québec qui en sort perdant.

Dans le cas des milieux humides et hydriques, cette relance verte et juste envers les générations présentes et futures exige la primauté absolue du principe d'évitement. Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent alors au législateur de modifier la référence au principe d'évitement à l'annexe II du projet de loi n° 66 afin qu'elle concorde avec la définition donnée dans la Loi sur la qualité de l'environnement. Marc-André, à toi pour les autres recommandations.

• (12 h 30) •

M. Viau (Marc-André) : Merci, Diego. Il nous reste deux points avant de passer à la période des questions, le premier étant qu'Équiterre et la Fondation David-Suzuki sont extrêmement préoccupés par l'atteinte à la crédibilité du processus québécois de consultations publiques introduit dans le projet de loi n° 66. Nous sommes d'avis que d'institutionnaliser le principe de BAPE ciblé, dans un projet de loi s'appliquant à près de 200 infrastructures pour une période de cinq ans et pour toute la durée de la construction, fait un dangereux précédent qui risquerait d'affaiblir l'institution du BAPE.

Nous recommandons donc le maintien de l'intégrité des processus de consultations publiques et donc d'abroger l'alinéa 7 de l'article 38 du p.l. n° 66, puisque le pouvoir de recourir à des consultations ciblées est déjà inscrit dans la Loi sur la qualité de l'environnement, à l'article 31.3.5.

En terminant, je souhaiterais remettre en contexte le projet de loi n° 66 dans l'agenda législatif global du gouvernement. L'adoption du projet de loi n° 44 sur la gouvernance climatique est imminente et le Plan pour une économie verte doit être présenté incessamment. Nous sommes d'avis que les objectifs du projet de loi n° 66 sur les infrastructures doivent être arrimés avec ceux du PEV et que les pouvoirs du ministre de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques prévus au p.l. n° 44 doivent avoir préséance sur les articles du p.l. n° 66. Or, à l'heure actuelle, le p.l. n° 44 s'oppose au p.l. n° 66 en ce sens que le Conseil du trésor impose au ministère de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques des directives en matière environnementale alors que le p.l. n° 44 donne des pouvoirs inverses au ministre.

C'est pourquoi Équiterre et la Fondation David-Suzuki recommandent d'assujettir les projets visés dans l'annexe I du projet de loi n° 66 aux principes du p.l. n° 44, conformément aux nouveaux pouvoirs qui sont accordés au ministre de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques dans le projet de loi sur la gouvernance climatique.

Sur ce, merci d'avoir pris le temps de nous écouter, et nous serons heureux de pouvoir répondre à vos questions.

Le Président (M. Simard) : Merci, messieurs. Je cède immédiatement la parole à Mme la ministre.

Mme LeBel : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Beaucoup de choses. On va pouvoir peut-être en discuter dans le temps qui m'est imparti, mais on va prendre, effectivement, je vous le dis, là, avec beaucoup de sérieux vos recommandations d'ajustements dans le p.l. n° 66 et voir ce qu'on est capable de faire, parce que loin... Je le dis, je pense qu'on peut être en désaccord sur certaines choses sans avoir un dialogue de sourds. L'important, c'est de discuter, et c'est ce qu'on fait, et on va considérer ça avec sérieux.

Je vais peut-être prendre quelques secondes pour préciser que je n'ai pas dit qu'il y avait juste 10 projets dans la liste qui bénéficiaient de l'environnement, j'ai dit que, parmi les projets du MTQ, il y en avait 10 qui étaient des projets pour augmenter la capacité du réseau routier, juste pour remettre mes paroles en contexte, des fois, c'est bien. Mais, ceci étant dit, ça ne s'adressait pas à vous, M. Viau, là, mais, des fois, il faut prendre le temps qu'on a pour être capable de rectifier certaines petites choses, donc c'était la nature de ma déclaration.

Ceci étant dit, il y a plusieurs choses intéressantes. On va y aller, bon... on est, bon... naturellement, on postule, je vais postuler, comme je l'ai fait avec le groupe précédent, sur le fait que loin de moi, loin de l'intention du gouvernement d'opposer économie et environnement. Je n'ai pas la même lecture de nos intentions que vous. Nos intentions ne sont pas d'abaisser les normes environnementales. Vous nous dites que c'est ce qu'on fait, alors on va regarder avec beaucoup d'attention l'effet, mais l'objectif n'est pas d'abaisser les normes environnementales, l'objectif est d'accélérer certains processus. Donc, je prends vos commentaires avec sérieux. La différence d'opinions, pour l'instant, est sur l'effet, plutôt que sur les objectifs, puis je veux juste que ce soit clair qu'on est dans une conversation de ce type-là, et je ne suis pas en train de vous dire, là, que ça n'a pas d'allure, ce que vous nous dites, puis l'environnement, il faut le jeter aux poubelles. Ce n'est pas le cas. Donc, je veux que vous soyez au moins rassuré sur le fait que l'ouverture d'esprit sur le fait qu'il faut protéger l'environnement, elle est là, mais moi et notre gouvernement pensons qu'on peut, dans une situation exceptionnelle comme le temps que nous vivons, une pandémie mondiale... Et, non, je ne chevauche pas un cheval de Troie, j'essaie d'accélérer l'économie dans une situation pandémique mondiale exceptionnelle qui, je l'espère, ne se reproduira pas dans un avenir rapproché. Donc, je veux vous rassurer également là-dessus.

Donc, c'est pour ça que le projet de loi n° 66 est limité à 181 projets. Je pense que c'était une de vos demandes, de façon générale, dans votre communiqué, de dire que le projet... «qu'un projet ne soit exempté d'exigences environnementales que de manière exceptionnelle.» Donc, l'exception, c'est les 181 projets. Ce n'est pas les 181 projets, naturellement, qui vont bénéficier de la portion environnementale. Je n'ai pas le détail et je ne lancerai pas de chiffre, parce que mon collègue de La Pinière va, après ça, dire que j'ai dit qu'il y en avait juste 10 ou juste 15, mais c'est sûr que ce n'est pas...

Une voix : ...

Mme LeBel : Non, ce n'est pas vrai. C'est sûr que ce n'est pas les 181 qui auront des enjeux environnementaux. Ça, je pense que je peux le postuler, mais les 181 projets vont bénéficier d'une des quatre mesures ou de plusieurs mesures dans le projet de loi. Ceci étant dit — c'est un éditorial — donc, on limite aux 181 projets. On vous a entendu sur cette chose-là.

Vous parlez de la durée des mesures d'accélération. Je trouve ça intéressant, ce que vous me dites, parce que je ne suis pas fermée à réfléchir à réduire la durée, parce qu'effectivement on veut limiter l'impact du projet de loi à 181... bien, à 181, théoriquement, 181 projets, là, aux projets de la liste en annexe I. Le groupe précédent nous expliquait qu'il y avait peut-être des articles qui donnaient ouverture à plus, donc on va les étudier avec beaucoup de sérieux pour rencontrer ces objectifs-là.

On a mis en place... Sur le principe d'évitement, peut-être en parler un petit peu plus. Le principe de zéro perte nette, évitement, minimiser et... voyons, compenser — j'allais dire «restituer», mais ce n'est pas le terme — compenser, donc, éviter, minimiser, compenser, pour moi, c'est un principe qu'on doit préserver. Donc, ce n'est pas l'objectif non plus du projet de loi. S'il y a, donc, des choses qui, selon votre lecture, nous permettent de faire le contraire, on va regarder ça avec beaucoup de sérieux.

On a mis en place des mécanismes de reddition de comptes extraordinaires, comme vous le demandiez. Est-ce qu'il y aurait plus de redditions de comptes, selon vous, qui seraient nécessaire? Parce que l'objectif, là, c'est qu'on ait un suivi adéquat, là, des projets. Donc, je vais commencer par ça puis, après ça, on pourra parler des pouvoirs du ministre puis de la relation avec 44, qui s'en vient, là.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. Viau.

M. Viau (Marc-André) : Oui. Écoutez, sur la reddition de comptes, je veux dire, je pense qu'il y a eu des progrès qui ont été faits par rapport au projet de loi n° 61, et ça, on le reconnaît, on le reconnaît, au gouvernement, et on apprécie beaucoup votre ouverture envers certains des éléments qu'on a mentionnés.

Sur la question de la reddition de comptes, oui, écoutez, on est favorable, on ne s'est pas attardé très longuement à savoir est-ce que c'est le meilleur processus de reddition de comptes possible, on s'est vraiment attardé sur la question de la réglementation environnementale. Ceci étant dit, si le gouvernement arrive, rend publics certains avis, ce qui n'était pas nécessairement le cas dans le projet de loi n° 66, force est de constater que c'est un progrès, et nous en sommes très satisfaits. Ceci étant dit, si on fait une reddition de comptes dans ce qui, selon notre interprétation encore, est une réglementation environnementale affaiblie, bien, pour nous, ça ne répond pas à l'objectif d'assurer d'avoir les meilleurs projets.

Mme LeBel : O.K. Donc, c'était s'assurer, à la base, que notre objectif commun... même si on pense... moi, je pense qu'on le maintient, mais notre objectif commun est respecté. Mais c'est parce que je fais référence, à moins que je ne me trompe, vous me corrigerez, à votre communiqué du 23 septembre 2020, où vous disiez, entre autres, que vous souhaitiez... Bon, merci de constater qu'il y a eu une avancée, c'était l'objectif. Maintenant, on peut voir si on peut faire un pas de plus. Vous disiez que les mécanismes de reddition de comptes devraient être renforcés, donc peut-être voir... peut-être que ça fait l'objet de votre mémoire, je m'en excuse, là, mais peut-être voir s'il y a, dans la proposition du projet de loi n° 66, au niveau de la reddition de comptes... pour permettre, justement, une meilleure surveillance.

Je ne pense pas qu'on peut opposer les pouvoirs accrus de l'AMP avec ce qu'on fait, mais l'objectif est de donner une meilleure surveillance sur les chantiers pour s'assurer que les normes environnementales sont respectées, peu importe le processus qu'on suit. Donc, je pense qu'il faut s'attarder aux objectifs.

Donc, si vous aviez des propositions qui pourraient permettre de renforcer la reddition de comptes qui est déjà proposée dans le projet de loi n° 66, bien, ce serait apprécié, et on va les analyser avec beaucoup de sérieux. Et ça faisait l'objet de votre communiqué, c'est pour ça que je me demandais si vous aviez peut-être des points particuliers.

M. Viau (Marc-André) : Bien, peut-être que Diego pourra compléter pour la reddition de comptes. Il n'y a pas d'élément spécifique sur la reddition de comptes dans notre mémoire. Ceci étant dit, on pense que la meilleure reddition de comptes, c'est la reddition de comptes qui vient avec la réglementation environnementale actuelle, donc...

Mme LeBel : Vous parlez du REAFIE, là.

M. Viau (Marc-André) : Bien, c'est l'ensemble, l'ensemble...

Mme LeBel : L'ensemble de la loi.

M. Viau (Marc-André) : ...de la loi, du REAFIE aussi, si vous voulez qu'on en parle, on peut en parler. Effectivement, c'est aussi une bonne façon d'assurer une reddition de comptes.

Mme LeBel : O.K. C'est bien noté, mais, si jamais il y a des choses qui vous viennent en tête dans le but de renforcer ce qui est proposé dans le projet de loi n° 66, n'hésitez pas à nous le faire parvenir avant l'étude article par article, on va le regarder avec sérieux.

Vous parliez aussi... Dans le cadre du projet de loi n° 61, puis ça a été bien compris, là, il y avait un large pouvoir habilitant, à ce moment-là, dans la proposition initiale, qui pouvait aussi donner... porter à inquiétude, parce qu'on se proposait, à l'époque, de modifier par règlement les processus, donc on pouvait peut-être penser aussi à un impact beaucoup plus permanent. Là, on le fait dans le cadre du projet de loi.

Je peux vous dire que tout ce qui est sur la table, c'est ce qui est... je vais dire, «what you see is what you get», en bon français, c'est-à-dire que les propositions de processus environnementaux nous permettant d'accélérer sont clairement identifiées dans le projet de loi. Alors, j'imagine que, pour vous, également, ça, ce n'est, bon, peut-être pas complètement satisfaisant, mais plus rassurant que la mouture précédente. J'imagine.

• (12 h 40) •

M. Viau (Marc-André) : Encore là, puis on l'indique dans notre mémoire... ça, c'est quelque chose qu'on indique dans notre mémoire, oui, c'est moins pire, c'est ce qu'on qualifie de moins pire. En même temps, on pense qu'on mérite ce qu'il y a de mieux. Donc, il y a un effort qui a été fait, je pense qu'il y a encore un effort supplémentaire qui peut être fait pour s'assurer... Et puis, comme vous l'avez vous-même dit en introduction hier : je ne ferai aucun compromis sur les questions de gestion des marchés publics. Bien, de notre côté, notre position, c'est : on ne fera aucun compromis sur la gestion environnementale. Et donc c'est en ce sens-là qu'on aimerait ça pouvoir arriver à un terrain d'entente.

Mme LeBel : Bien, écoutez, je ne ferai aucun compromis sur les normes environnementales. Maintenant, là où on diffère d'opinion, c'est sur l'impact des processus qu'on propose, mais... et encore là, je vous écoute avec beaucoup d'attention, puis vous faites des suggestions très précises dans votre mémoire, et on va les regarder avec attention.

Donc, je vous remercie beaucoup de votre présentation. Ce n'est pas parce que ce n'est pas intéressant, mais votre mémoire est quand même très bien étoffé, et j'ai bien compris. Ça fait qu'on va prendre le temps de l'étudier avec sérieux, surtout sur les points particuliers, là, de la reddition de comptes et les autres principes, tantôt, que vous avez mentionnés, là, dans votre présentation. Merci beaucoup, M. Viau.

M. Viau (Marc-André) : Merci, Mme la ministre.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme la ministre. Merci pour votre collaboration. M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Je tiens à souligner à ma collègue, à la présidente du Conseil du trésor, qu'elle serait bien la première à chevaucher un éventuel cheval de Troie, puisque ça ne s'est évidemment jamais fait.

Ceci étant dit, je reviendrai à un autre moment sur les fameux 10 projets. C'est vrai que c'est 10 sur 50, mais, en réalité, il n'y en a pas, d'enjeu, là. D'ailleurs, je serais très heureux de savoir lequel des quatre volets va bénéficier la réfection de la morgue de Montréal, mais on en reparlera à un autre moment. Monsieur...

Une voix : ...

M. Barrette : Bien, c'est parce que la ministre nous a dit, M. le Président, que tous les projets allaient bénéficier d'un des quatre aspects du projet de loi n° 66.

Le Président (M. Simard) : ...revenir à notre présentation, ce serait peut-être une bonne idée.

M. Barrette : Oui. D'accord. Vous avez bien raison. M. Viau, j'aimerais ça... ou M. Creimer, un ou l'autre, là, parce que vous avez abordé une chose, là, qui mérite un peu plus de précisions, à mon avis. Vous dites que 44 s'oppose à 66, ou plutôt 66 s'oppose à 44. Pouvez-vous le détailler un petit peu?

M. Viau (Marc-André) : Oui, certainement. Écoutez, règle générale, puis je vais ressortir les éléments directement du texte du projet de loi n° 44, mais, règle générale, le projet de loi n° 44 est un projet de loi qui donne des pouvoirs supplémentaires au ministre de l'Environnement, le ministre peut donner des directives aux ministères. Et là je cite le projet de loi n° 44 : «...le ministre peut donner des directives aux ministères et aux organismes publics quant aux méthodes qu'ils doivent appliquer afin de calculer la quantité de gaz à effet de serre émise, réduite, évitée ou limitée ou celle retirée de l'atmosphère, ou encore [...] évaluer et d'intégrer les risques liés aux impacts du réchauffement planétaire et des changements climatiques dans l'adaptation de ces derniers si de telles méthodes ne sont pas autrement prescrites par la loi. De telles directives lient les ministères et les organismes publics concernés.»

À un autre endroit, on dit que «le ministre doit être consulté lors de l'élaboration des mesures qui pourraient avoir un impact significatif en matière de lutte contre les changements climatiques. Il donne aux autres [ministères] et [...] organismes publics tout avis qu'il estime opportun pour favoriser la lutte contre les changements climatiques, notamment lorsqu'une mesure proposée n'est pas, à son avis, conforme aux principes et aux objectifs énoncés dans la politique cadre sur les changements climatiques prévue à l'article 46.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement...» Et ça continue.

Bref, ce qu'on fait avec le projet de loi n° 66, c'est qu'on dit : On retire — notamment sur les consultations publiques — on retire au ministre le pouvoir de déterminer quel sera le type de consultations appropriées. Il y a trois types de consultations, que ce soit consultations publiques, consultations ciblées ou modération. Et là on dit au ministre, on dit : ce sera consultations ciblées seulement. Le projet de loi n° 44 dit, clairement : Le ministre a les pouvoirs de donner des avis, alors que, là, c'est l'avis qui vient du Secrétariat du Conseil du trésor au ministre de l'Environnement, et on pense que c'est en opposition directe. Le principe du projet de loi n° 44 est en opposition directe avec celui du projet de loi n° 66.

M. Barrette : Qui gagne, législativement, selon vous? Qui a le plus...

M. Viau (Marc-André) : Bien, je dirais que le projet de loi n° 44 a été déposé avant, donc il devrait gagner.

M. Barrette : Ah! non, mais... bien, je dis non, peut-être que oui, mais, normalement, non, là.

M. Viau (Marc-André) : Dans ma logique, M. Barrette, dans ma logique. Non, non, mais c'est pour ça qu'on...

M. Barrette : Oui, mais la logique, en politique, ce n'est pas toujours de même, là.

M. Viau (Marc-André) : C'est pour ça qu'on dit que le projet de loi n° 44 devrait avoir préséance sur le projet de loi n° 66.

M. Barrette : Pour la date d'adoption, O.K. Un autre élément, là, puis là je vais vous demander votre opinion, puis j'aimerais ça, si c'est possible, ce n'est peut-être pas possible, de nous donner au moins un angle, sinon un exemple concret, là. Je comprends, Mme la présidente du Conseil du trésor, elle défend son projet de loi, c'est normal, elle nous dit qu'il n'y aura aucune concession sur les normes environnementales. Ceux qui ont un intérêt environnemental qui se présentent devant nous nous indiquent le contraire. Quelle est votre lecture, là? Est-ce que, quand vous lisez 66, vous considérez qu'il y a des concessions qui sont faites sur les normes environnementales?

M. Creimer (Diego) : Oui. Si je peux me permettre, M. le député de La Pinière, on a passé les derniers mois à lire et relire la Loi sur la qualité de l'environnement, le REAFIE, le projet de loi n° 61, le projet de loi n° 66, le projet de loi n° 44. On s'est donné, dans le projet de loi n° 44, les moyens d'agir sur un risque qui est déterminé par la science. Et là, quand je parle de risque environnemental, c'est un concept qui ne doit pas être assujetti à une perception du législateur. Le risque environnemental est établi par la science. La Loi sur la qualité de l'environnement établit clairement des critères pour fixer ces niveaux de risque là et le niveau d'autorisation qui est nécessaire pour un projet pour aller de l'avant.

Ici, dans le projet de loi n° 66, on sent que le niveau de risque est déterminé de façon arbitraire dans la liste des projets qui se retrouvent à l'annexe I et qu'on peut se retrouver à traiter un projet qui normalement serait considéré comme étant de risque modéré, comme un projet à risque négligeable. Donc, il y a une procédure... qui est allégée de par ce fait. Donc, c'est ce qu'on veut dire, c'est...

On a déjà assisté, dans l'histoire du Québec sans p.l. n° 66... Je peux vous citer des études sur l'élargissement de l'autoroute 19, où il était clairement dit par l'État et par les commissaires désignés par l'État qu'il y avait destruction de milieux humides et hydriques, puis on a invoqué un principe de minimisation et de compensation. Oui, l'État a déjà agi de cette manière-là dans un projet... plusieurs projets autoroutiers et de grandes infrastructures. Et ici, dans le projet de loi n° 61, on vient couler ça dans le béton — excusez la métaphore, elle est pertinente ici — on vient couler ça dans le béton puis on vient distortionner ce qui doit être l'évaluation de risques pour donner au législateur, dans un projet de loi, la possibilité de déterminer de façon, à notre avis, arbitraire... c'est... ce qui a un risque environnemental.

M. Barrette : Donc, votre lecture, c'est une lecture de risque, il n'y a pas, factuellement, dans le projet de loi, d'élément qui vienne affaiblir les procédures d'évaluation environnementale. C'est un risque. Donc, il pourrait être possible que tout se passe correctement, mais votre lecture est que ça ne se passera pas partout correctement.

M. Creimer (Diego) : Bien, ma lecture... non, je pense que notre lecture va plus loin que ça. Honnêtement, on pense que le projet de loi n° 66 ouvre la porte à traiter des projets qui sont à risque moyen comme des projets étant à risque moindre.

M. Barrette : O.K., bon, ça tourne autour de cet élément-là. M. le Président, je passerais la parole à mon collègue.

Le Président (M. Simard) : Bien sûr. M. le député de Mont-Royal—Outremont.

M. Arcand : Merci beaucoup, M. le Président. Il y a une propension, dans le gouvernement, de façon générale, depuis le début de son mandat, à se soustraire de certains... ou, enfin, d'enlever des pouvoirs à certains organismes. On l'a vu, entre autres, pour ce qui est des tarifs d'Hydro-Québec, où on a dit : Bon, bien, dorénavant, la régie n'aura pas à se pencher là-dessus d'ici cinq ans. Dans le projet de loi n° 44, on enlève aussi des pouvoirs au... On fait disparaître, d'abord, Transition énergétique Québec, on enlève des pouvoirs également à la Régie de l'énergie. Et, dans le projet de loi n° 66, j'ai entendu, tout à l'heure, un de vos commentaires, où vous avez dit : Avec ce projet de loi, le BAPE va avoir moins de pouvoirs. Et j'aimerais bien comprendre ce que ça veut dire, dans votre esprit, que le BAPE, à ce moment-là, aurait moins de pouvoirs.

M. Viau (Marc-André) : Merci pour votre question, M. Arcand. La question du BAPE, donc... on est inquiets de l'affaiblissement des moyens du BAPE. Le BAPE peut... Bon, comme j'en ai parlé tantôt, il y a trois catégories de consultations qu'on peut utiliser, la consultation publique, qui est une consultation ouverte à tous, où est-ce que c'est un processus de consultation où tout le monde peut participer, la consultation ciblée, où, là, il y a des restrictions qui sont imposées dans le temps et aux participants, et la médiation. Donc, en disant, dans ce projet de loi là, simplement, la seule consultation acceptée est la consultation ciblée, on évacue le potentiel que tous les citoyens puissent s'exprimer sur des projets qui les concernent. Et donc, en ce sens, on pense que ça affaiblit la valeur et la qualité de la consultation et que, dans ce sens-là, on ne tire pas le plein potentiel des outils de consultations publiques qui existent.

• (12 h 50) •

M. Arcand : Je comprends, mais ma question c'est... Il me semblait que, par exemple, s'il y a un projet — je vous donne un exemple, là — il y a un projet, exemple, à Port-Cartier, que des citoyens de Montréal veulent intervenir, il me semblait qu'auparavant il y avait quand même certaines restrictions à ce niveau-là. Est-ce que ça n'existait pas avant, cette...

M. Viau (Marc-André) : Il y a des possibilités de restreindre la participation qui existent déjà. Donc, c'est une autre des raisons pour lesquelles on pense que les mesures environnementales contenues dans le projet de loi n° 66 ne sont pas nécessaires. Il y a déjà moyen, dans les pouvoirs actuels, de restreindre la participation. C'est le cas, par exemple, dans le BAPE sur GNL, en ce moment, sur l'usine de liquéfaction de gaz. Donc, il y a une restriction géographique de participation.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Viau (Marc-André) : C'est ça.

M. Arcand : Très bien. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le député de Mont-Royal—Outremont. M. le député de Rosemont, à vous la parole.

M. Marissal : Merci. D'abord, pour faire amende honorable, M. le Président, il était indélicat de ma part tout à l'heure de prétendre que la ministre n'écoutait pas, je tenais à le dire, c'est sorti un petit peu sous le coup de. La preuve en est qu'elle écoute, elle a même ressorti quelques-unes de mes expressions, dont le cheval de Troie. Alors, je tenais à dire, pour faire amende honorable, que c'est sorti un peu croche, et j'en suis désolé si ça vous a blessée.

Revenons, donc, à nos moutons. Vous parlez, M. Viau, M. Creimer, dans votre mémoire, de risque d'affaiblissement permanent. Pourtant, ce qu'on nous dit, au gouvernement, c'est ce n'est pas possible, parce qu'il y a une liste fermée puis c'est conscrit dans le temps, ça ne dépassera pas cinq ans. La ministre a même dit, tout à l'heure : Bien, ce n'est pas nécessairement cinq ans. Il semblait y avoir une certaine flexibilité. Alors, expliquez pourquoi, donc, vous persistez à dire qu'il y a un risque d'affaiblissement permanent.

M. Viau (Marc-André) : Je commencerais, puis peut-être que Diego pourra compléter. Bien, écoutez, bon, la durée de cinq ans, d'abord, à notre avis, est un des facteurs qui peut mener à un affaiblissement permanent. Après cinq ans, c'est plutôt difficile de dire : Bon, bien, on va revenir comme c'était avant. Donc, on a cette possibilité-là. On a vu des groupes, hier, en commission parlementaire, l'Autorité des marchés publics, les chambres de commerce, également, demander de rendre certaines modifications permanentes. Donc, les demandes sont là, également.

Pour l'Autorité des marchés publics, moi, je n'ai aucune objection à ce qu'on ait une saine gestion des contrats publics qui soit... et que les mécanismes de contrôle soient accrus. Comme je l'ai dit précédemment, je trouve qu'il y a inadéquation entre ce qu'on propose pour la gestion des marchés publics et la gestion environnementale. Si on veut renforcer puis faire ce qu'il y a de mieux en matière de saine gestion des marchés publics, bien, il faudrait renforcer puis faire ce qu'il y a de mieux en matière de saine gestion environnementale. Pourquoi on fait l'un et on ne fait pas l'autre? Pourquoi on donne à l'Autorité des marchés publics la capacité de ralentir les projets? Parce que ce sont les pouvoirs qui lui sont donnés, de capacité de ralentir les projets. On ne le fait pas à l'environnement.

M. Marissal : D'accord. Très bien, merci. La réponse est claire. On a parlé du REAFIE, hier, on parlait de la Loi de l'aménagement et de l'urbanisme, la Loi de la qualité de l'environnement. On est déjà pas mal équipés, là. Puis là vous dites, vous, bien, la loi n° 66, telle qu'adoptée, si elle était adoptée telle quelle, risquerait de mettre à mal ces autres lois ou règlements. Est-ce que je comprends bien? Vous avez une crainte, donc, que 66 non seulement pourrait créer des dommages permanents, mais avoir priorité sur les autres lois et règlements.

Le Président (M. Simard) : Succintement, s'il vous plaît, M. Viau.

M. Viau (Marc-André) : Diego, vite fait, veux-tu y aller?

M. Creimer (Diego) : Bien, écoutez, oui, ça crée un précédent si, dans un état d'urgence ou d'exception, on est obligé d'y aller contre des lois qui ont été adoptées au fil des décennies de façon démocratique et bien...

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci. Merci, M. Creimer. Alors, nous allons passer la parole au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Je veux vous informer que le projet de loi n° 44 n'est plus un projet de loi, il a été adopté hier. Donc, c'est déjà en fonction. Alors, ce que je veux bien comprendre de votre part... parce que je trouve ça extrêmement intéressant, dans votre mémoire, les liens que vous faites entre le projet de loi n° 44 et le projet de loi n° 66. Et, lors de l'étude du projet de loi n° 44, on avait questionné cette espèce de rôle contradictoire que le ministre s'accorde, à la fois d'être conseillé sur des enjeux qui ont un impact climatique, mais à la fois de ne pas avoir de rapport de force sur l'ensemble des autres ministres. C'est pour ça que ça devrait être de la responsabilité du Conseil exécutif et non pas juste du ministre.

On ne reviendra pas sur la gouvernance climatique, mais ce que je comprends, c'est que ce que vous soulevez, c'est qu'il y a un premier test qu'on peut vérifier entre ce qui est maintenant la loi n° 44 et les pouvoirs accordés au ministre, en termes de conseils, et le projet de loi n° 66 que nous avons devant nous.

M. Viau (Marc-André)T : Oui, c'est exact. Et merci d'avoir apporté cette précision-là, là. Au moment de mettre sous presse, comme on dit, ce n'était pas encore le cas, mais j'ai vérifié, d'ailleurs, hier après-midi, et puis... l'état des travaux, et il n'y avait pas encore de sanction. Mais, oui, ce sera effectivement un premier test, à savoir est-ce que ces pouvoirs-là seront utilisés et comment ils seront utilisés. Et donc on aimerait voir, on aimera entendre, sûrement, le ministre de l'Environnement pour voir comment il compte utiliser ces pouvoirs-là et voir comment il compte les utiliser dans une perspective où un projet de loi n° 66 contraint sa marge de manoeuvre

M. Gaudreault : Exact. Et mon collègue de La Pinière parlait de laboratoire avec le projet de loi n° 66, bien là, le laboratoire a un nouveau flacon avec le projet de loi n° 44 qui rentre en application.

Maintenant, avec le temps qu'il me reste et qui doit être assez limité, le principe de l'évitement, dans l'annexe II, versus le principe de l'évitement dans les milieux humides et hydriques, pour vous, il y a confusion, là, avec l'annexe II dans le projet de loi n° 66.

Le Président (M. Simard) : Rapidement, s'il vous plaît.

M. Creimer (Diego) : Bien, effectivement. Effectivement, le principe d'évitement n'est pas clair, à notre avis, et on conclut que le principe d'évitement doit être clairement mentionné.

M. Gaudreault : Parfait. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le député de Jonquière. M. le député de Chomedey, pour deux minutes.

M. Ouellette : Merci. Merci, M. Creimer. Merci, M. Viau. M. Viau, juste pour votre information, le projet de loi n° 44 va être sanctionné demain après-midi par le lieutenant-gouverneur, ça fait que ne buvez pas votre champagne tout de suite, ce soir, là, ça va être demain après-midi que ça va être sanctionné.

Mais on apprécie, les parlementaires, on apprécie que vous nous souligniez que... pourquoi réinventer la roue puis repartir, parce que mon collègue de Jonquière pourra vous le dire, et vous avez suivi les travaux, une centaine d'heures et plus de discussions, pour le projet de loi n° 44, et on va passer outre et passer par-dessus. Vous nous soulignez que la REAFIE a déjà désavoué le projet de loi n° 102. Là aussi, beaucoup d'heures. Pourquoi ne pas utiliser la Loi de la qualité de l'environnement, qui a été adoptée aussi? On dirait qu'on a une vision très restreinte de tout ce c'est qu'il est fait au niveau des parlementaires.

Et vous amenez un autre élément. L'AMP, avec des pouvoirs additionnels, pourra être un empêcheur de tourner en rond, pourra être un organisme qui va... au lieu d'accélérer, qui pourra retarder l'exécution des projets, justement, par les pouvoirs de surveillance. Ça, c'est une chose qui, à la lumière de ce que vous venez de nous dire, qu'il va falloir tenir compte dans nos débats.

Merci beaucoup. Je sais que M. le Président veut récupérer une autre petite minute, et je ne sais pas si vous avez un commentaire, puis je la récupérerai avec beaucoup de plaisir, ma petite minute.

Le Président (M. Simard) : Bien, grâce à la collaboration de tous, nous sommes dans nos temps, M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Ah! bien, c'est bon.

Le Président (M. Simard) : Alors, en terminant, merci beaucoup à nos deux conférenciers pour la qualité de leur présentation et leur contribution à nos travaux.

Sur ce, je vais suspendre la commission jusqu'à 15 heures. À plus tard.

M. Viau (Marc-André) : Merci, M. le Président. Merci aux membres de la commission. Merci, Mme la ministre.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous deux. À bientôt.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 08)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers collègues, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Merci beaucoup. Je constate que nous avons quorum. Nous pouvons donc entreprendre nos travaux. Comme vous le voyez, nous avons déjà cumulé environ sept minutes de retard, que nous pourrions facilement combler en prenant des suspensions un peu plus courtes entre chaque captation. Mais néanmoins, au cas où, mieux vaut prévenir que guérir. Y aurait-il consentement afin de dépasser, au besoin, le temps que nous avions initialement prévu?

M. Barrette : ...M. le Président.

• (15 h 10) •

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci, M. le député de La Pinière.

Alors, nous avons l'honneur de recevoir aujourd'hui la Vérificatrice générale du Québec, Mme Leclerc. Merci d'être parmi nous. Vous êtes accompagnée par M. Paul Lanoie ainsi que par M. Serge Giguère. Vous savez que vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre présentation. Nous vous écoutons.

Vérificateur général

(Visioconférence)

Mme Leclerc (Guylaine) : Alors, merci. M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs, membres de la commission, je vous remercie de m'offrir l'occasion de faire des commentaires et de répondre à vos questions sur le projet de loi n° 66.

Pour l'occasion, je suis accompagnée de M. Paul Lanoie, Commissaire au développement durable, et M. Serge Giguère, sous-vérificateur général.

Je constate que ce projet de loi comporte des améliorations importantes comparativement au projet de loi n° 61. Parmi celles-ci, je note que la liste des projets qui bénéficieront des mesures d'accélération est clairement définie et que le nouveau projet de loi ne prévoit plus de dispositions permettant un grand pouvoir discrétionnaire d'assouplir les règles édictées par la Loi sur les contrats des organismes publics. De même, la compensation financière n'est plus la seule option prévue pour les projets réalisés en milieux humides.

Tout en reconnaissant ces améliorations, j'aimerais attirer votre attention sur cinq éléments qui représentent des risques dans la mise en application de ce projet de loi.

Le rôle confié à l'Autorité des marchés publics dans le projet de loi est très important. Il doit lui permettre d'assurer un équilibre entre l'accélération des projets d'infrastructure et le respect des principes d'intégrité, d'équité et de transparence énoncés dans la Loi sur les contrats des organismes publics. À cet égard, il est important que l'autorité ait les coudées franches lors de ses interventions. Je me questionne donc sur le sens à donner à l'article 5 du projet de loi, qui indique que l'autorité pourra intervenir si l'organisme concerné n'apparaît pas agir en conformité avec le cadre normatif. Je considère qu'il est essentiel de s'assurer que cette disposition n'est pas de nature à limiter l'intervention de l'Autorité des marchés publics.

À titre de comparaison, mes vérifications effectuées dans différentes entités me permettent de soulever des lacunes qui étaient inconnues avant le début de mes travaux. Cette capacité d'intervenir de façon aléatoire sans avoir à démontrer au préalable un manquement est primordiale pour que l'Autorité des marchés publics puisse exercer une vigie efficace des fonds publics.

Concernant les contrats dans le domaine municipal, je comprends que l'Autorité des marchés publics aura un pouvoir de recommandation auprès du conseil municipal lorsque les contrats relèveront de la municipalité. Or, ce pouvoir de recommandation diffère grandement du pouvoir que l'autorité peut exercer sur tout autre organisme public. En effet, l'autorité a le pouvoir de rendre une ordonnance ayant un effet exécutoire pour les autres organismes publics. Dans la mesure où des projets concernent les municipalités, je m'interroge sur les moyens qui seront pris pour assurer la transparence et l'imputabilité des conseils municipaux visés quant aux correctifs nécessaires pour donner suite aux recommandations de l'autorité. Il faut aussi considérer que certaines instances de surveillance sont en place dans les grandes villes. À cet égard, il sera important qu'une coordination soit faite en vue d'optimiser les résultats de leurs interventions.

Par ailleurs, la reddition de comptes doit être fiable, pertinente et faite en temps opportun.

Au chapitre de la fiabilité, je n'ai vu aucune mesure permettant de répondre à mes préoccupations. Nous avons observé plusieurs lacunes à ce sujet au fil des ans, notamment dans le réseau de la santé et des services sociaux. Le Fonds vert en est aussi un bel exemple puisque, malgré l'ampleur des sommes qui y sont investies, nous avons constaté, dans le passé, de grands problèmes liés à la qualité de l'information disponible. Je réitère donc l'importance de mettre en place les mécanismes nécessaires afin d'assurer la qualité de l'information dont on doit rendre compte.

Comme l'objectif du projet de loi est d'accélérer la réalisation des projets d'infrastructure, il faut viser à ce que le rythme de la reddition de comptes soit adapté en conséquence pour que l'on puisse réagir suffisamment tôt en cas de situation problématique. À cet égard, la première reddition de comptes semestrielle risque d'être faite au mois de novembre 2021, ce qui me paraît passablement éloigné.

Sur le plan de la pertinence de l'information, le contenu de la reddition de comptes sur l'avancement des projets reste à préciser par le Conseil du trésor. Il serait bon de déterminer immédiatement l'information à diffuser avant de pouvoir s'assurer... afin de s'assurer qu'elle soit suffisante. À tout le moins, l'information devra inclure le budget initial, le budget révisé, les coûts déjà engagés et l'état d'avancement des travaux. De plus, étant donné le risque afférent à toute acquisition importante faite de gré à gré en vertu de l'article 15 du projet de loi, chacune devrait faire l'objet d'une reddition de comptes spécifique. Un dépôt périodique de la reddition de comptes à l'Assemblée nationale serait aussi souhaitable.

Passons maintenant aux enjeux environnementaux. Le projet de loi vise d'abord la relance économique. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que les moyens prévus pour atteindre cet objectif pourront avoir des conséquences à long terme. Dans une perspective de développement durable, la diminution des exigences environnementales soulève des questions quant à l'impact qu'aura cette relance économique sur les générations futures, notamment sur leur santé et leur qualité de vie. M. Lanoie, qui m'accompagne, pourra vous entretenir plus en détail sur cette question, si vous le désirez. Pour l'instant, je vais me permettre de vous souligner certains éléments observés dans le projet.

En ce qui concerne les milieux humides, le projet de loi prévoit qu'il ne sera pas toujours requis de vérifier au préalable s'il est possible d'éviter tout impact sur ceux-ci. Ainsi, la séquence privilégiée dans la Loi sur la qualité de l'environnement, soit éviter, réduire et compenser, ne sera pas entièrement respectée. Cela est d'autant plus préoccupant que les projets pourront être exclus de l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui a été conçue de façon à permettre aux municipalités de protéger des milieux humides et hydriques d'importance.

Nous sommes également préoccupés par les dispositions visant les terrains contaminés, notamment la réhabilitation progressive. Considérant que les contaminants peuvent migrer dans le sol et qu'une réhabilitation progressive pourrait s'étaler sur plusieurs années, je me demande comment les autorités auront l'assurance que l'ensemble d'un terrain est réhabilité comme prescrit.

Avant de terminer, je crois important de faire certaines mises en garde en ce qui concerne les risques liés à l'accélération de la réalisation de certains projets d'infrastructure. Dans le passé, j'ai observé plusieurs situations dans lesquelles les étapes essentielles pour des projets d'acquisition ou de construction ne respectaient pas les règles de saine gestion des fonds publics. Pourtant, ces projets étaient réalisés dans des conditions dites normales. Vous comprendrez alors mon inquiétude quant aux projets réalisés en mode accéléré.

Je me permets de vous rappeler certaines de mes observations formulées dans le passé. D'abord, il est de première importance de s'assurer que les citoyens en auront pour leur argent. Pour ce faire, il est essentiel d'approuver ces projets sur la base d'une détermination des besoins précise et à jour, de même que d'une estimation des coûts le plus fiable possible.

Il y a tout juste deux semaines, j'ai illustré les conséquences à long terme d'une mauvaise planification sur les coûts et la performance d'un projet. Le Réseau national intégré des radiocommunications, le RENIR, faisait l'objet de mes propos. En novembre 2019, j'avais formulé des constats semblables concernant les bâtiments scolaires. J'avais fait part de lacunes dans la capacité de définir les besoins, de même qu'en ce qui concerne la hausse importante des coûts liés à la construction de nouveaux locaux scolaires. Je mentionnais que le ministère de l'Éducation n'était pas en mesure d'en analyser et d'en expliquer les causes.

Dans un contexte où les décisions se prendront rapidement, et compte tenu du risque de surchauffe du secteur de la construction en raison de nombreux projets lancés, il sera de première importance de ne pas négliger cette première étape fondamentale pour la suite des choses afin de minimiser notamment les dépassements des coûts.

Ensuite, le suivi du respect des clauses contractuelles en cours de projet et la vérification de la qualité du travail réalisé ne doivent pas être négligés. Sur ce point, l'Autorité des marchés publics devra disposer de tous les leviers nécessaires afin d'intervenir au bon endroit et au bon moment. J'ai eu l'occasion d'aborder ces éléments à plusieurs occasions dans le passé. À ce chapitre, vous pouvez consulter mes travaux portant sur les contrats liés aux infrastructures routières et sur ceux accordés dans le domaine des technologies de l'information.

Je réitère l'importance pour le gouvernement d'examiner, dans les mois à venir, une solution pérenne qui passera par une révision de la réglementation en vigueur afin d'éliminer, le cas échéant, ce qui s'est avéré superflu au fil des ans et qui peut entraîner des délais indus.

Je vous remercie de votre attention, et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions, de même que mes collègues.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme la Vérificatrice. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme LeBel : Merci, M. le Président. Merci beaucoup, Mme la Vérificatrice. C'est très intéressant. Beaucoup de choses dont on prend bonne note, naturellement.

Je suis heureuse de voir que vous constatez, en effet, qu'on a une liste de projets définis. Je pense que c'était une remarque extrêmement importante qui a été faite par vous et par plusieurs groupes qui sont venus témoigner dans le p.l. n° 61. Compte tenu qu'il s'agit d'un projet de loi à vocation extraordinaire et, je dirais, déterminé dans le temps, là, donc, très circonscrit, je pense que c'était important aussi d'éliminer la possibilité d'ajouter des projets par la suite. Donc, je suis contente que vous preniez la peine de le souligner.

Maintenant, pour ce qui est... Je vais peut-être passer à votre dernier point, l'accélération des projets d'infrastructure. Vous avez tout à fait raison, il faut être... la planification est d'une très grande importance ici. Comme vous l'avez souligné, on ne touche pas non plus à la loi sur les contrats publics. Donc, on est dans des processus d'accélération qui sont dans le... j'allais dire, dans la ligne de temps, qui ne sont pas à cet endroit-là, donc. Mais on en prend effectivement bonne note. Vous avez tout à fait raison, c'est important de le souligner.

Maintenant, pour ce qui est peut-être de... Je vais peut-être commencer par les milieux humides, peut-être parce qu'on a eu deux groupes environnementaux ce matin et c'est plus frais dans mon esprit. La notion d'évitement, éviter, minimiser et... j'arrive...

Une voix : Compenser.

• (15 h 20) •

Mme LeBel : Compenser. Merci. C'est le terme qui finit toujours par m'échapper. Éviter, minimiser et compenser, c'est une notion qu'on veut qu'elle soit respectée dans son intégralité ou dans son intégrité, si vous voulez. Donc, l'objectif du projet de loi n'est certainement pas de faire en sorte qu'on puisse minimiser la notion d'évitement ou éviter cette notion, si je peux prendre ce jeu de mots là. L'objectif est que... dans le projet de loi, que ce soit juste les projets qui ne portent pas atteinte aux milieux humides ou qui le font de manière temporaire, qu'ils puissent se prévaloir de cette mesure-là, qui est la fameuse déclaration de projet. Les projets qui ont une atteinte permanente aux milieux humides et hydriques doivent respecter les règles actuelles, c'est-à-dire trouver des scénarios alternatifs pour éviter, minimiser l'impact, s'il n'y a pas de scénario alternatif, et compenser cet impact-là quel qu'il soit, si c'est le cas. Donc, je voulais juste vous rassurer.

Par contre, j'ai bien noté, ce matin, les commentaires des deux autres groupes qui ont témoigné, et on va faire en sorte de s'assurer de clarifier, si c'est possible, cette notion-là dans le p.l. n° 66 pour que la notion du respect des milieux humides et hydriques, le zéro perte nette, et tous les principes qui en découlent soient bien respectés, parce que ce n'était pas un des objectifs.

Parlons du rôle de l'AMP. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de regarder les commentaires de l'AMP, de voir leur mémoire suite au projet de loi n° 66. L'AMP considère qu'elle a présentement tous les pouvoirs lui permettant d'agir, à tout le moins sur les 181 projets, là, parce que la discussion se poursuit pour la plus grande échelle, si on veut.

Je ne suis pas sûre de comprendre, et peut-être de m'expliquer un peu plus qu'est-ce que vous pensez que l'AMP n'a pas comme pouvoirs actuellement. Et, si vous parlez du monde municipal, on pourra en parler dans un deuxième temps, là, mais, si on parle des contrats gouvernementaux, qui est le champ d'action actuel de l'AMP...

Parce que je pense que c'est important de préciser que, dans la mise en place de l'AMP, en 2018, elle n'avait pas ce champ d'action municipalité là aussi précis, et je pense que c'est dans une réflexion beaucoup plus large qu'il faudra effectivement, je suis d'accord avec vous, se poser la question sur le rôle de l'AMP vis-à-vis le monde municipal.

Mais je ne le ferai pas aujourd'hui, mais je voulais voir, si on exclut présentement vos commentaires par rapport au monde municipal, quels sont les manques dans le p.l. n° 66, selon vous, ou les zones d'ombre qu'il faudrait éclaircir, là, par rapport aux pouvoirs de l'AMP, qui, par ailleurs, s'est déclarée satisfaite.

Mme Leclerc (Guylaine) : Oui, je sais. Mais, si on va à l'article 5 du projet de loi, alors on dit que l'AMP pourra «examiner un processus d'adjudication ou d'attribution d'un contrat [...] lorsque l'organisme public concerné n'apparaît pas agir, à l'égard de ce processus ou de ce contrat». Donc, il faut qu'il y ait des suspicions ou des allégations, et ça, le Vérificateur général ne l'a pas. Alors, c'est ce que je mettais en relation.

Je disais que, nous, au Vérificateur général, même si on n'a pas de suspicion, on peut aller dans n'importe quel organisme public, faire une vérification d'optimisation de ressources et, à chaque fois ou, je vous dirais, presque toujours, on identifie des lacunes. Et, des fois, ça nous permet aussi de pouvoir comparer les pratiques. Donc, c'est un élément qui est important pour nous, que l'Autorité des marchés publics ait les coudées franches.

Mais, comme vous le dites, c'est ce qu'ils mentionnaient. Ils mentionnaient qu'il y a... de par leur première... Parce qu'ils n'ont qu'une année d'existence, alors, et le Vérificateur général a 150 ans d'existence, alors c'est pour ça que je me permettais de comparer ce que le fait d'avoir les coudées franches, pour nous, ça apportait. Et, à mon avis, d'enlever ce bout de phrase là permettrait à l'AMP d'avoir les coudées franches pour ce qui est de l'extérieur des municipalités, parce que, comme vous l'avez dit, au niveau des municipalités, je crois qu'il y a quand même une problématique importante en relation avec les pouvoirs de l'AMP.

Mme LeBel : Abordons-le peut-être dans un deuxième temps. Donc, je veux juste comprendre votre propos. Dans le fond, ce ne sont pas les pouvoirs de l'AMP comme tels, c'est ce qui déclenche l'exercice de ces pouvoirs-là que vous voulez qu'on clarifie. Et donc, quand vous dites que vous considérez que l'AMP devrait pouvoir intervenir de façon aléatoire sans constater de manquements préalables, c'est ce que vous voulez dire. Donc, ce n'est pas le fait brut de... ce n'est pas les pouvoirs, c'est ce qui déclenche l'exercice de ces pouvoirs, pour bien le dire.

Mme Leclerc (Guylaine) : Absolument. C'est ça.

Mme LeBel : Donc, écoutez, je peux vous dire que c'était l'objectif, de permettre à l'AMP d'intervenir de son propre chef, je vais le dire comme ça. Donc, on va regarder avec beaucoup d'attention, c'est noté, puis on va voir si on ne peut pas éclaircir cette position-là dans le p.l. n° 66, là, pour lui permettre, donc, d'exercer ces pouvoirs-là.

Pour ce qui est du constat dans le monde municipal, je pense que c'est une conversation qu'on pourra avoir à un autre moment, très intéressante, parce qu'il y a également une réflexion au Conseil du trésor présentement, au secrétariat, pardon, du Conseil du trésor pour revoir, si on veut, après un an d'existence — c'est quand même une organisation très jeune, vous l'avez dit, tout étant relatif, naturellement — de revoir un peu les pouvoirs de l'AMP et de voir comment on peut aussi revoir certaines règles de la loi sur les contrats publics. Là, je ne veux pas alerter personne, on ne veut pas jouer dans les notions d'intégrité, mais, entre autres, la règle du plus bas soumissionnaire, là, qui a été une règle qui peut faire... qui peut porter place à certains, disons, abus, je vais le dire comme ça... Présentement, il y a une liste de projets définie et fermée. Il n'y a aucun contrat municipal, aucun projet... bon, bien que les municipalités l'aient réclamé, au moment où on se parle, il n'y a pas d'enjeu à ce que l'AMP n'ait pas de pouvoir sur les contrats municipaux, parce qu'il n'y a pas, dans le cadre du p.l. n° 66, de tels contrats.

Maintenant, de façon plus large, la réflexion, je ne la mets pas de côté, là, mais je parle du projet de loi n° 66. Donc, je veux juste voir avec vous pourquoi...

Mme Leclerc (Guylaine) : Bien, c'est parce qu'on le dit ici.

Mme LeBel : Ce serait un pouvoir théorique, dans le projet de loi n° 66, là, si je me fie aux contrats qui sont là, aux projets, là.

Mme Leclerc (Guylaine) : Mais on a essayé d'identifier s'il y avait des contrats au niveau... qui étaient de juridiction municipale ou pas. On n'a pas été en mesure de clarifier la situation. Comme par exemple : Le transport en commun, est-ce que ça va être de juridiction municipale ou si ça va être le ministère des Transports? Pour nous, ce n'était pas clair dans le projet de loi.

Mme LeBel : O.K. Bien, tous les projets qui sont à la liste, présentement, ce sont des projets gouvernementaux ou faits par les mandataires du gouvernement, donc. Quand je parle de mandataires du gouvernement, je vais vous donner une commission scolaire, à titre d'exemple, ou un CISSS, ou un CIUSSS. Donc, je vais, par contre, prendre bonne note de vos commentaires, mais, compte tenu qu'il n'y a pas de contrats municipaux dans le projet de loi n° 66... Mais je pense que vos commentaires sont quand même pertinents pour une réflexion beaucoup plus large par rapport aux champs d'action de l'AMP, disons-le de cette façon-là.

La reddition de comptes. Vous parlez de la première reddition de comptes semestrielle, qui est prévue en novembre 2020‑2021. Je n'ai pas d'enjeu particulier à discuter d'un moment plus opportun, là. Disons qu'à un moment donné il faut mettre une date en jeu, puis, après ça, on peut en discuter, là. Quel serait pour vous — là, on est déjà quand même rendus au milieu de l'automne — quel serait pour vous un moment opportun, tout en donnant la possibilité à tout le monde de s'organiser, là, dans les faits, là? Est-ce que vous avez une idée d'un espace-temps à nous suggérer? Puis je vais la considérer avec beaucoup de sérieux, là.

Mme Leclerc (Guylaine) : Ce que je vais vous dire, c'est qu'étant donné qu'on va sur un processus accéléré je pense que la reddition de comptes se devrait, elle aussi, d'être accélérée. Alors, d'avoir une reddition de comptes seulement qu'en novembre 2021, ça nous donne un an d'ici. Donc, si on est en processus accéléré, ça veut dire que les projets seraient déjà passablement avancés. Donc, ce que nous disons, c'est qu'il faudrait que, dès le printemps, qu'il y ait, à tout le moins, un début de reddition de comptes de façon à pouvoir réorienter le tir, si jamais on se rend compte qu'il y en a des éléments à identifier qui pourraient être éventuellement problématiques.

Mme LeBel : O.K. Parfait. C'est bien noté, puis on va voir comment on peut décliner ça ou faire... transcrire ça, pardon, dans le projet de loi n° 66.

Je vous ai parlé des milieux humides. Donc, ce n'est pas... L'objectif n'est pas de contourner les principes actuels. Donc, si... Je le mentionne. Et j'ai bien compris votre propos. Donc, c'est pour ça que je vous ne demande pas d'élaborer, parce que je vous mentionne qu'on va regarder la rédaction, là, du projet de loi n° 66 pour clarifier. Ça a été aussi l'enjeu de deux des groupes de ce matin, de nous mettre en garde sur cet aspect-là. Et, comme ce n'est pas un objectif d'accélérer dans ce contexte-là, bien, on va s'assurer de le clarifier.

Pour les terrains contaminés, vous dites : Comment les autorités auront l'assurance que, dans le cas de réhabilitation progressive, l'ensemble des terrains aura été réhabilité? Encore une fois, dans le cas des terrains contaminés, c'est également exclu d'une procédure d'accélération quelconque. Donc, je vais m'assurer... Donc, c'est la procédure habituelle et l'assurance habituelle qui est prévue à la Loi sur la qualité de l'environnement. Mais je vais quand même m'assurer de faire en sorte que, dans le projet de loi n° 66, on ne crée pas autre chose que ça. Donc, j'en prends bonne note.

Écoutez, je ne sais pas s'il y a d'autres aspects que vous pensiez vouloir élaborer. Vous aviez simplement 10 minutes. Je ne sais pas si un de vos collègues veut renchérir sur quelque chose, mais je vous donnerais, à ce moment-là, les quelques minutes qu'il me reste, parce que je trouverais ça intéressant, là.

Mme Leclerc (Guylaine) : Très bien. Alors, peut-être, je laisserais la parole à M. Paul Lanoie, qui est Commissaire au développement durable au Vérificateur général.

M. Lanoie (Paul) : Oui.

Mme LeBel : Avec consentement.

M. Lanoie (Paul) : Alors, bonjour.

Mme LeBel : C'était pour le procès-verbal, M. Lanoie. Allez-y.

• (15 h 30) •

M. Lanoie (Paul) : Oui. Alors, rapidement. Donc, bonjour, tout le monde. Et moi, il y a une préoccupation qu'on avait et qu'on n'a pas pu mettre dans l'allocution, c'est, dans le fond, la question du REAFIE. Alors, le REAFIE, dans le fond, vient d'une intention d'assouplir la LQE, donc d'assouplir les mécanismes pour donner des autorisations environnementales. Et ma compréhension, c'est que c'est un mécanisme auquel on a abouti récemment, en septembre dernier. Donc, ça a été adopté, il va entrer en vigueur. Alors, je me posais la question : Comment ça se fait qu'on ne donne pas à ces mécanismes-là la chance d'être mis en oeuvre, de voir son efficacité, avant de toucher aux exigences gouvernementales autrement? Donc, quand on compare le REAFIE et le projet de loi n° 66, on voit qu'il y a des nuances, on voit que ça peut peut-être même entraîner de la confusion. Alors, c'est un questionnement qu'on avait...

Mme LeBel : Bon, bien, merci de le soulever. Il a également été soulevé ce matin. Je vous dirais qu'avec les discussions qu'on a avec le ministère de l'Environnement l'objectif est d'apporter une certaine complémentarité sur des projets particuliers, pour une situation particulière avec le projet de loi n° 66. Mais, encore une fois, on a pris bonne note des commentaires de tout le monde ce matin puis on va travailler à l'effet qu'il n'y ait pas, à tout le moins, de confusion ou qu'un... Et on va parler du projet de loi n° 44 aussi, qui a été adopté hier et sanctionné bientôt, je pense, qui donne plus de pouvoirs au ministre de l'Environnement, donc s'assurer d'une cohérence et d'une concordance de nos actions. Donc, c'est bien noté. Merci. C'est tout pour moi, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme la Présidente du Conseil du trésor. Je cède maintenant la parole au député de La Pinière.

M. Barrette : Merci, M. le Président, Mme Leclerc, M. Lanoie, M. Giguère. Je suis quasiment fâché après vous avoir entendu puis je vais vous dire pourquoi. Non pas parce que... après vous, mais après ce dont vous avez parlé. Je m'explique. Vous avez été clairs, et, s'il y a une chose que personne ne peut dire d'autre, c'est que vous n'êtes pas un groupe de pression, vous êtes objectifs et vous reprenez à votre compte les critiques qui ont clairement été énoncées dans les dernières heures. Ça doit vouloir dire que les critiques avaient un certain fondement.

Sur l'AMP, Mme Leclerc, je suis celui qui a demandé à ce que l'AMP, dans un amendement, ait les mêmes pouvoirs que le BIG. Je comprends que vous souhaitez ça, et vous constatez que ce n'est pas le cas. Et ce qui me fâche, Mme Leclerc, c'est que j'ai posé la question à l'AMP, ce qui soulève, chez moi, bien des interrogations. La question était simple : Avez-vous les mêmes pouvoirs que le BIG? Ils ont dit oui, vous dites non.

Alors, moi, là, je suis d'accord avec vous, en passant, O.K.? Je suis d'accord avec vous. Ma question sur ce sujet-là : Dans un projet qui aura des ramifications municipales dans le cadre de ces 181 projets là... Je reprends l'exemple que j'ai donné précédemment, l'hôpital de Vaudreuil, je prends juste cet exemple-là, aura des ramifications contractuelles municipales obligatoires. Un hôpital, ça a besoin d'être connecté à des égouts, ça a besoin d'avoir des bretelles d'accès, et ainsi de suite. Est-ce que vous considérez que, dans le cadre de 66, l'AMP non seulement devrait avoir 100 % des pouvoirs du BIG, mais il devrait pouvoir s'appliquer aux sous-contractants municipaux liés au projet qui est dans les 181?

Mme Leclerc (Guylaine) : Vous permettez?

M. Barrette : Bien oui, j'ai fini.

Le Président (M. Simard) : Nous n'attendons que cela d'ailleurs.

Mme Leclerc (Guylaine) : Deux choses. Premièrement, je n'ai pas comparé la loi du BIG avec la loi de l'AMP, la seule chose que je peux vous dire, c'est que la phrase du cinquième paragraphe... cinquième article, à mon avis, limite les pouvoirs, O.K., ou l'application des pouvoirs, comme l'a dit Mme la ministre. Alors...

M. Barrette : On s'entend là-dessus, Mme Leclerc.

Mme Leclerc (Guylaine) : Et ça, c'est quelque chose qui, pour nous, est important. Deuxièmement, ici, on a regardé la liste des projets en long et en large et on n'était pas en mesure d'identifier qu'est-ce qui était de juridiction... même s'il y a un ministère qui est identifié, là, qu'est-ce qui pouvait être, en partie, de juridiction municipale par rapport à ce qui pouvait être de juridiction d'un ministère, O.K.? Puis je donnais l'exemple, là, de transport en commun, O.K, donc un projet structurant dans différentes municipalités : Est-ce que c'est le ministère des Transports ou c'est la municipalité?

Dans l'éventualité où les contrats sont donnés par une municipalité puis qu'ils sont considérés comme faisant partie des 181 projets, ce dont je n'ai pas encore été capable d'identifier, eh bien, le seul pouvoir qu'a l'AMP, c'est d'aller au conseil municipal et de faire des recommandations. Dans certaines grandes villes, ces recommandations... déjà, elles ont déjà un BIG, les grandes villes, donc on va parler de moyennes et de petites villes qui n'ont pas de BIG. Donc, dans ces villes-là, qu'est-ce que la ville va faire... ou la municipalité va-t-elle faire avec les recommandations? L'AMP n'a aucun pouvoir sur le suivi de ces recommandations-là ou pour s'assurer que ces recommandations-là sont mises en place.

M. Barrette : Souhaitez-vous qu'ils les aient?

Mme Leclerc (Guylaine) : C'est certain.

M. Barrette : Merci. Je vais prendre un instant pour vous féliciter de ce que vous avez écrit, vous allez comprendre le lien. Lorsque vous avez déposé votre dernier rapport, en ce qui a trait à la santé et les services sociaux, quand vous avez dit que le gouvernement avait, par la loi n° 20, les leviers nécessaires à faire sa gestion et que le gouvernement avait choisi de ne pas le faire avec Rendez-vous santé Québec...

Je vous pose la question identique, mais dans un autre champ : Au ministère de l'Environnement, est-ce que vous trouvez que le gouvernement se donne suffisamment les moyens pour faire son travail d'évaluation environnementale? Plus clairement, est-ce que le gouvernement a assez de monde, en partant, pour faire sa job, selon vous, et que, s'il avait les ressources nécessaires, il pourrait la faire, puis on ne serait pas ici aujourd'hui?

Mme Leclerc (Guylaine) : Avant de passer la parole à M. Lanoie, une des choses qu'on dit, puis qu'on a dit lors du projet de loi n° 61, et qu'on dit encore dans le projet de loi n° 66, il est certain que le gouvernement a un certain ménage à faire. Donc, si c'est ce qui l'empêche d'accélérer les projets, et que c'est les processus qui font en sorte que c'est trop long, bien, il faudrait qu'il s'assure de mettre en place les bons processus pour avoir les bons projets. Et, comme le disait Mme la ministre ce matin, le fait de... on doit accélérer les projets en diminuant les processus, mais en ayant les mêmes contrôles. Alors, si c'est le cas, il faudrait s'assurer qu'il y ait une action pérenne sur la diminution des processus qui ne sont pas nécessairement utiles. Mais là je laisse immédiatement la parole à M. Lanoie, qui peut vous parler spécifiquement du ministère de l'Environnement, qu'il connaît très bien.

M. Barrette : Rapidement, s'il vous plaît, parce que j'ai une autre question, plusieurs autres questions, et le temps file.

M. Lanoie (Paul) : Alors, rapidement, donc, M. Barrette. Alors, oui, le Commissaire au développement durable est allé souvent visiter le ministère de l'Environnement, puis, en général dans nos travaux, on ne se pose pas nécessairement la question : Est-ce qu'il y a suffisamment de ressources? On se pose la question : Est-ce que les ressources sont bien utilisées? Est-ce qu'elles travaillent de façon efficiente? Et, dans plusieurs mandats, on a constaté qu'il y avait des problèmes d'efficience. J'ai en tête, entre autres, un mandat qu'on a réalisé sur la réhabilitation des terrains contaminés, où il y avait des procédures qui n'étaient pas claires, des banques de données qui n'étaient pas facilement accessibles, etc.

M. Barrette : Nous allons retenir ce commentaire-là, je vous l'assure. Maintenant, Mme la Vérificatrice, écoutez, là, vous allez aimer ma question. Je suis extrêmement d'accord sur le commentaire que vous avez fait sur la reddition de comptes aux six mois. Je vais vous conter une petite histoire. Il était une fois un député, c'est-à-dire moi-même, à la dernière étude des crédits de la Capitale-Nationale, qui avait déposé un amendement sur le projet structurant de Québec dans lequel... Bon, j'avais déposé un amendement selon lequel il y aurait une reddition de comptes aux six mois. Alors, imaginez que la ministre responsable de la Capitale-Nationale, puisqu'il n'y avait eu aucune reddition de comptes à date, a dit : Bien non! Ça, ça veut dire : Un coup que les travaux sont commencés.

Trouvez-vous qu'une réponse comme ça, dans le cas de 66, serait acceptable? J'imagine que vous pensez que... bien, vous allez me le dire, que la reddition de comptes aux six mois... et moi, je pense que vous avez raison, dans une accélération, ça devrait être aux trois mois, ça commence à partir du lancement de projet, pas un coup qu'il y a eu une première pelletée de terre.

Mme Leclerc (Guylaine) : Bon. Je ne voudrais pas me faire mettre des paroles dans ma bouche, mais ce que je dis, c'est qu'en vertu de ce projet de loi ci c'est très important d'avoir une reddition de comptes. Et je vous amène à un article que personne n'a parlé jusqu'à maintenant, mais qui, moi, me préoccupe, c'est l'article 15, l'article 15, où on dit : «Est habilité à acquérir, de gré à gré ou par expropriation...» Alors, si on acquiert de gré à gré, je comprends que c'est... on ne va pas en expropriation parce qu'on s'entend, mais on s'entend à quel prix? Et, pour moi, c'est une grande préoccupation. Et la reddition de comptes se doit vraiment d'être très, très efficace, très juste et très fréquente pour avoir une information qui soit adéquate régulièrement.

M. Barrette : Très bien noté, mais, sur la fréquence de la reddition de comptes, Mme la vérificatrice, le point de départ de cette fréquence, qui est un élément qui est un élément temporel, c'est quoi, d'après vous, c'est le lancement du projet?

Mme Leclerc (Guylaine) : C'est quand on commence le... lorsqu'on débute le projet. À partir du moment où on identifie le projet et qu'on... À partir du moment où on identifie le projet, je vous dirais, là, et qu'on décide de l'exploiter, le projet.

M. Barrette : Parfait. Donc, ce n'est pas la première pelletée de terre, ça commence au début, à la limite, là, au devis, avant l'appel d'offres, tout ce qu'ils ont fait, les travaux préliminaires.

• (15 h 40) •

Mme Leclerc (Guylaine) : Absolument, oui.

M. Barrette : Alors, merci pour cette réponse-là. Maintenant, une... Parce que, là, il me reste juste une minute, sur la question... et là c'est peut-être M. Lanoie, je pense, là, qui va répondre à cette question-là. Vous êtes d'accord que le REAFIE, de la manière qu'il est constitué, faisait le travail qu'on vise aujourd'hui par 66, mais qu'on ne le fera pas parce qu'on met quelque chose de plus. Alors, dans votre esprit, là, l'un vient... Est-ce qu'il vient simplement remplacer l'autre ou il vient contrecarrer l'autre, dans votre esprit?

M. Lanoie (Paul) : Donc, comme je l'ai mentionné tantôt, donc, l'esprit du REAFIE, c'est vraiment de simplifier les procédures, de faire en sorte que les certificats d'autorisation puissent être donnés plus rapidement lorsque les projets ont peu d'impacts. Et ma crainte, c'est qu'avec le projet de loi n° 66 il puisse y avoir de la confusion chez les gens. Quand on les compare, les deux, par exemple, on voit que, dans le REAFIE, on exige des études de caractérisation, alors que, dans le projet de loi n° 66, on parle de caractérisation et de repérage. Donc, ça ne sera pas nécessairement simple, là, pour les gens, là, qui ont affaire là-dedans, donc, de s'y retrouver.

M. Barrette : Et laquelle des deux doit avoir préséance, à votre avis?

M. Lanoie (Paul) : Je n'ai pas nécessairement une opinion là-dessus, mais...

M. Barrette : Mais entre nous?

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Lanoie (Paul) : Mon propos, c'est d'insister... de dire que la REAFIE doit être...

Le Président (M. Simard) : Merci. Très bien. Merci, monsieur. Nous pourrons poursuivre subséquemment, je suis sûr que vous trouverez une manière de répondre à cette question un peu plus tard à travers d'autres questions qui vous seront adressées. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Madame, messieurs, bonjour, merci d'être là encore une fois. Je lis votre mémoire, je suis en train de relire celui de juin pour le p.l. n° 61, le projet de loi n° 61. Il n'y a pas de copier-coller, vous avez refait ça correctement, là. Vous avez refait vos devoirs, et c'est bien ainsi. Par contre, il y a beaucoup de choses très similaires, là, à part, évidemment, l'article 50, là, qui faisait problème, et Mme Leclerc, vous l'aviez noté, là, notamment sur la probité des contrats publics. Mais autrement, là, voyez-vous tant de nuances, en particulier quant aux évaluations environnementales entre 61 et 66?

Mme Leclerc (Guylaine) : Je laisserais la parole peut-être à Paul pour la comparaison entre...

M. Marissal : Bien sûr.

M. Lanoie (Paul) : Oui. Bien, écoutez, moi, quand j'avais regardé le projet de loi n° 61, l'élément qui m'interpelait le plus, c'étaient les milieux humides et hybrides... et hydriques, dis-je. Et, dans le projet de loi n° 61, le seul élément qui était prévu dans la séquence éviter, réduire, compenser, c'était la compensation. Donc là, on voit que, cette séquence-là, on tente de la rétablir, pas entièrement d'après ce que j'en comprends, mais ça, c'est un élément, là, qui est positif, comme Mme Leclerc l'a mentionné.

M. Marissal : Parce que c'est bien que vous parliez de ça, c'est... Merci, M. Lanoie. C'est là où je m'en allais, justement, parce que vous écrivez : «Ainsi, la séquence privilégiée dans la loi, éviter, réduire et compenser, ne sera pas entièrement respectée.» Pouvez-vous élaborer davantage sur le «pas entièrement respectée»?

M. Lanoie (Paul) : Oui. Bien, écoutez, je ne veux pas prendre beaucoup de votre temps là-dessus, mais j'ai les mêmes réserves.

M. Marissal : Je n'en ai pas, ça fait que vous n'en prendrez pas beaucoup.

M. Lanoie (Paul) : J'ai les mêmes réserves qui ont été soulevées ce matin, entre autres par rapport à l'annexe II, où on parle de réduire les polluants plutôt que de réduire l'utilisation des milieux humides et hydriques. Alors, en particulier, donc, il y a cet élément-là. Puis je pourrais élaborer, là, si on a plus de temps à d'autres moments.

M. Marissal : D'accord. Par ailleurs, je pense que j'ai fait à peu près le tour avec le temps qu'il me reste, là.

Le Président (M. Simard) : 20 secondes encore, cher collègue.

M. Marissal : Oui, 20 secondes. Bien, effectivement, vous avez parlé de confusion, M. Lanoie, puis, au département de la Vérificatrice générale, vous êtes des spécialistes, là, de la confusion au gouvernement. Comment on peut éviter la confusion? Je comprends que vous ne pouvez pas répondre quelle loi est prépondérante, mais comment on fait pour éviter la confusion apparente?

Le Président (M. Simard) : Rapidement, s'il vous plaît, monsieur, très, très rapidement.

Mme Leclerc (Guylaine) : C'est à toi à répondre.

M. Lanoie (Paul) : Ah bon! Comment éviter la confusion? Je n'ai pas de réponse claire là-dessus.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, nous passons la parole au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Alors, merci beaucoup pour votre mémoire. Le CQDE, qui est venu, ce matin, nous rencontrer, a été très, très clair à l'effet que des projets, qui, en vertu de la LQE actuelle, sont qualifiés de risque modéré, seraient traités, via le projet de loi n° 66, comme des projets à risque faible parce que la déclaration de conformité serait transférée en déclaration de projet. Et ainsi il y aurait un traitement, là, différent pour les projets à risque modéré qui seraient traités comme des projets à risque faible en vertu de la LQE. J'aimerais avoir votre avis là-dessus, M. Lanoie.

M. Lanoie (Paul) : Oui. Je fais la même lecture que le CQDE sur ces questions-là.

M. Gaudreault : Parfait. C'est très important de vous entendre là-dessus. Maintenant, je vais aller un petit peu plus loin sur la question des fameux principes des milieux humides et hydriques. La loi sur les milieux humides et hydriques prévoyait, genre, ce que moi, j'appelle une hiérarchisation des principes, donc éviter, réduire, compenser. Est-ce que, pour vous, cette hiérarchisation est aplatie — pour reprendre une expression à la mode, là, ils ont aplati la courbe en mettant les trois principes sur le même pied, éviter, réduire et compenser — ou vous sentez que cette hiérarchisation est toujours présente?

M. Lanoie (Paul) : Bien, on sent une intention de garder la hiérarchisation, mais il y a vraiment des nuances qui valent la peine d'être mentionnées. Je vais vous en mentionner une qui n'a pas été dite ce matin. La LQE, présentement, donc, exige que, lorsqu'un projet touche des milieux humides, il faut faire la démonstration qu'il n'y a aucun autre endroit dans la MRC où on aurait pu faire ce projet-là. Et maintenant, donc, dans le nouveau projet de loi n° 66, ce n'est plus la MRC, c'est la municipalité. Donc, ce n'est pas le même niveau de démonstration, c'est une démonstration qui est plus facile à faire. Alors donc, c'est des nuances comme ça, entre le p.l. n° 66 et la LQE, qu'on a notées, là, par un examen plus en profondeur, là, de cette question-là.

M. Gaudreault : C'est majeur. Je sais que vous aimez avoir beaucoup de mandats pour travailler, et vous le faites toujours très bien. Si on laissait le REAFIE s'appliquer avant la loi n° 66, peut-être que ça vous enlèverait des mandats, parce qu'on permettrait ainsi de vraiment faire en sorte que la réduction des délais, en vertu de la loi n° 102, s'applique. Oui?

Le Président (M. Simard) : Très rapidement, s'il vous plaît.

M. Lanoie (Paul) : Bien, écoutez, c'est un questionnement, là, que j'ai évoqué plusieurs fois. Oui, on se pose la question : Pourquoi faire ça alors que le REAFIE va entrer en place... en vigueur?

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Lanoie. Je cède la parole au député de Chomedey.

M. Ouellette : Bonjour à vous trois. Merci d'être là, merci de votre mémoire. Vous soulevez, de façon très diplomate, je trouve, l'incapacité du ministère de l'Éducation et du ministère des Transports à être... j'emploierais le mot «performants». On a des mesures d'accélération, mais on n'a pas un système qui est capable de suivre ces mesures d'accélération là. Peut-être que le politique veut bien, mais la machine, elle, elle n'est pas capable de suivre.

J'ai une interrogation par rapport aux contrats gré à gré, et vous l'avez soulevée à l'article 15, puis je sais que vous avez une préoccupation vous aussi. De quelle façon est-ce que vous nous suggéreriez de faire cette reddition de comptes? Est-ce que c'est juste un dépôt à l'Assemblée nationale, parce que vous parlez de l'Assemblée nationale, ou ça pourrait être une étude, en Commission de l'administration publique, de ces informations-là? Parce que... il y a un... je pense qu'il y a un danger de dérive sur les contrats de gré à gré, on le voit avec l'urgence sanitaire et un paquet de contrats de gré à gré qui sont donnés. Il va falloir, à un moment donné... Vous aurez probablement un mandat pour vérifier tout ce qui a été fait, si c'était conforme, et j'anticipe déjà vos conclusions. Donc, est-ce qu'il y aurait une suggestion que vous pourriez nous faire relativement à ce que vous nous avez indiqué à la page 7?

Mme Leclerc (Guylaine) : Bien, à tout le moins, il faudrait que... pour chacun des actifs qui ont été acquis de gré à gré, on se devrait de faire la même reddition de comptes que ce qui est prévu pour les autres. Puis, même pour les autres, ce qu'on disait, ce serait intéressant que ce soit déposé à l'Assemblée nationale de manière à ce que tous les parlementaires soient mis au courant de l'évolution des projets et aussi des acquisitions de gré à gré. Mais, effectivement, que ce soit étudié en commission avec la Commission de l'administration publique, c'est encore une chose qui pourrait être intéressante.

M. Ouellette : Merci.

Le Président (M. Simard) : D'accord. Alors, Mme la Vérificatrice générale, messieurs, merci beaucoup pour votre précieuse contribution à nos travaux. Au plaisir de vous revoir.

Sur ce, je suspends momentanément nos travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 50)

(Reprise à 15 h 52)

Le Président (M. Simard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Nous avons réussi à établir la liaison avec les représentants de l'Association nationale des camionneurs artisans. Messieurs, bienvenue parmi nous. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?

Association nationale des camionneurs artisans inc. (ANCAI)

(Visioconférence)

M. Légaré (Gaétan) : Oui, bonjour. D'abord, Gaétan Légaré, je suis directeur général à l'Association nationale des camionneurs artisans. Je vais laisser mon président se présenter.

M. Garand (Jean-Pierre) : Jean-Pierre Garand, président de la corporation. J'ai 40 ans de ma vie dans l'industrie. Je suis... On a un conseil d'administration de 20 camionneurs au total, et puis ça fait 35 ans que je suis travailleur autonome dans cette industrie.

Le Président (M. Simard) : Très bien, messieurs. Vous disposez de 10 minutes. Nous vous écoutons avec plaisir.

M. Légaré (Gaétan) : Merci beaucoup. Alors, écoutez, d'abord, mes premiers mots, c'est pour remercier la commission de pouvoir intervenir à ce projet de loi là. D'abord, je me permets de présenter l'ANCAI. L'Association nationale des camionneurs artisans, qu'on appelle l'ANCAI communément, représente tout près... aux alentours de 80 organismes de courtage qui détiennent un permis de la Commission des transports du Québec pour faire du courtage dans les marchés publics. Cette accréditation par la Commission des transports du Québec est un régime extrêmement disciplinaire dans lequel les organismes de courtage accrédités doivent déposer, à chaque année, des bilans audités, c'est le plus haut standard de vérification en matière de comptabilité... et également détiennent tous des comptes en fidéicommis dans lesquels ils transigent toutes les sommes d'argent entre un camionneur et un entrepreneur.

On a aux alentours de 5 200 membres qui sont regroupés dans ces 82 organismes de courtage là, et ils sont tous inscrits au régime disciplinaire de la Commission des transports du Québec, et ce sont tous des travailleurs autonomes. Ils possèdent, à eux autres, environ 10 000 camions pour donner un service dans le camionnage en vrac dans les marchés publics. On est partenaires depuis plus de 50 ans, là, avec les différents donneurs d'ouvrage, les grands donneurs d'ouvrage pour construire le Québec. Par exemple, bien sûr, le ministère des Transports, Hydro-Québec, l'ensemble des municipalités du Québec, également la SQI, la Société québécoise d'infrastructures. Alors, on donne un service dans les marchés publics à la grandeur du Québec, mais on opère seulement, bien sûr, au Québec.

Au Québec, il existe un encadrement sur le courtage de camionnage en vrac qui découle de la Loi des transports, ce qui permet effectivement de... l'obligation de détenir un permis de courtage dans les marchés publics pour faire du courtage. Si je vous parle maintenant des bienfaits de cet encadrement, elle a reçu... le Québec a... (Panne de son) ...obtenir l'accord... lors... le commerce intérieur, la Loi sur le commerce intérieur. On a... Cette loi-là, la Loi sur le commerce intérieur, a permis au gouvernement du Québec de pouvoir maintenir un encadrement dans le camionnage en vrac. Et cet accord-là a quand même été... cette exemption-là pour le Québec a été... également, a fait l'objet d'un accord sur... en 2017.

Les bienfaits de cet accord, de cet encadrement sur le courtage de services de camionnage en vrac... Bien sûr, première des choses est de s'assurer des retombées économiques locales à l'endroit où s'exécutent des travaux, et ça, bien, on a entendu même la Fédération québécoise des municipalités en parler, et même notre premier ministre en a parlé énormément, des retombées économiques locales à l'endroit où est-ce que s'exécutent les travaux. Parce que ces organismes-là sont établis sur tout le territoire, et les entrepreneurs doivent normalement faire affaire avec ces organismes-là pour leurs besoins en camion.

Ça maintient également une flotte en santé à la grandeur du Québec pour offrir un service de qualité à tous les donneurs d'ouvrage. Si... Par exemple, on a fait la démonstration, lors des catastrophes naturelles au Saguenay—Lac-Saint-Jean, au déluge, également lors de la crise du verglas, la digue à Sainte-Marthe-sur-le-Lac. Alors, on est toujours des partenaires avec le gouvernement pour donner un service à la grandeur du Québec. Ça permet aussi au gouvernement de connaître le prix du camionnage en vrac puisque le tarif est fixé par le ministère des Transports.

Puis, à titre d'exemple, concernant le tarif, là, je vous cite un exemple. Donc, le tarif horaire pour le camionnage en vrac qui est alloué par le ministère des Transports... dans ce tarif-là, la portion qui est allouée pour la main-d'oeuvre pour la conduite du véhicule se situe aux alentours de 20 $ à 22 $ de l'heure, alors que, dans l'industrie de la construction, le même travail pour un chauffeur, pour un employeur, bien, ça représente tout près de 60 $ de l'heure. Pourquoi? Parce que nous sommes... ceux qui sont inscrits au Registre du camionnage en vrac et abonnés aux organismes de courtage détiennent une exemption du décret à l'industrie de la construction. Donc, le ministère, ça lui permet... le gouvernement, ça lui permet de contrôler ses... (Panne de son) ...en matière de camionnage en vrac sur ses contrats.

Autre chose, ça assure également de fermer la porte à toute possibilité de corruption, de collusion, de fausse facturation et de travail au noir, tout ce qu'on a entendu lors de la commission Charbonneau. Et, à cet effet-là, j'attire votre attention que nous avons reçu... nous avons eu notre intervenant, on a été reconnus comme intervenant au ministère... à la commission Charbonneau pour les contrats du ministère des Transports. Et, à cet effet-là, on a déposé un mémoire et on a fait mention de la difficulté de faire appliquer la Loi des transports sur le courtage en services de camionnage en vrac. Il n'y avait pas d'organisme public ou de police qui était mandaté pour assurer que cette loi-là était respectée et non pas transgressée. Alors, c'est de cette façon-là qu'on a entendu des histoires d'horreur concernant le camionnage en vrac à la commission Charbonneau. D'ailleurs, Mme LeBel était présente à ce moment-là.

Également, ça empêche le copinage entre les camionneurs et l'entrepreneur, parce que l'entrepreneur n'a pas le choix du camionneur. Nous, on répartit équitablement les camionneurs qui sont abonnés. Alors, à la fin de l'année, tout le monde a travaillé pour le même nombre de jours, et, bien sûr, ça nous oblige à changer les camionneurs d'entrepreneur. Donc, il n'y a aucune raison d'avoir du copinage entre un entrepreneur et l'entrepreneur... l'entrepreneur et le camionneur.

Et, en dernier, bien, ça assure la traçabilité des sommes d'argent et des sols. On a vu la catastrophe qui est arrivée dans la traçabilité des sols au ministère de l'Environnement, des terres contaminées. Alors, chez nous, cet encadrement-là, bien sûr, empêche cette façon de faire là, puis on est capable de faire la traçabilité des sols transportés.

Maintenant, on a entendu avec grand intérêt que le projet de loi, maintenant 66, contrairement à celui qui avait été déposé, le 61, tout comme dans notre mémoire, on avait déposé un mémoire à la loi n° 61, au projet de loi, mais on est très fiers de pouvoir... de savoir maintenant que tous ces projets-là sont sur la responsabilité... mais plutôt sur la surveillance de l'Autorité des marchés publics. Et, pour nous, bien, c'est une chose qu'on avait demandée dans notre mémoire et qui est très importante.

• (16 heures) •

Par contre, par contre, je dois avouer que, malheureusement, l'Autorité des marchés publics, au moment où on se parle, ne sera pas capable de faire son travail correctement concernant le camionnage en vrac dans les marchés publics. Elle exerce, là, sa surveillance dans un cadre normatif, donc ça lui prend... elle va... elle veille à l'application des lois et des règlements encadrant les contrats publics. Et malheureusement, dans la Loi sur les transports et le Règlement sur le courtage en services de camionnage en vrac, depuis 2012, et plus particulièrement encore depuis 2018, 2017 et 2018, il y a un juge qui a décidé qu'on n'avait plus besoin de permis de courtage pour faire du courtage dans les marchés publics, en autant qu'ils ont réparti les gens qui sont non régis économiquement. Et donc ils peuvent transiger avec n'importe qui, l'entrepreneur pourrait engager n'importe qui. Et puis, bien sûr, bien, on retourne encore... la situation actuelle, présentement, elle est encore pire qu'on a connu à la commission Charbonneau. La porte est toute grande ouverte, maintenant, suite à ces jugements-là.

Et malheureusement ce n'est pas l'Autorité des marchés publics qui va être capable de le faire, parce que la loi, comme telle, permet maintenant à n'importe qui de faire du courtage dans les marchés publics. Puis, bien sûr, bien, on perd tous les bienfaits que l'encadrement sur le courtage en service de camionnage en vrac nous a donnés et a donné au ministère des Transports et aux grands donneurs d'ouvrage avant 2012. On avait dénoncé, à la commission Charbonneau, cette situation-là qui rempirait, et puis, maintenant, bien, on a un problème.

Donc, nous, c'est simple, dans le projet de loi n° 66, ce qu'on demande, c'est qu'à l'intérieur de cette loi-là... qu'on oblige, qu'on oblige carrément les entrepreneurs, pour leurs besoins en camion, d'effectuer ces contrats-là, de transiger avec un organisme de courtage accrédité supervisé, contrôlé par la Commission des transports du Québec, qui va assurer à l'ensemble des élus de l'Assemblée nationale et à l'ensemble des Québécois de mettre à l'abri au complet entre 10 % et 15 % des montants investis. Ce montant-là, 10 % à 15 %, représente à peu près les montants nécessaires qui étaient alloués au camionnage en vrac dans les appels d'offres pour les marchés publics.

Et on va mettre... Avec cette loi-là, on est capable de mettre à l'abri toute possibilité de corruption, de collusion, de fausse facturation, de copinage et de travail au noir dans tous les contrats qui sont assujettis à l'Autorité des marchés publics et qui sont en annexe de votre projet de loi. Et ça, bien... On veut convaincre nos élus, on veut convaincre la population qu'il est essentiel de faire des modifications à la Loi des transports pour que ça revienne comme avant 2012, parce qu'avant 2012 le ministère des Transports fermait complètement, complètement la porte à cette possibilité-là. Il y a encore des municipalités au Québec...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Légaré (Gaétan) : ...plus de 400 à 500 municipalités au Québec qui ferment la porte à cette fameuse collusion et corruption-là.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci beaucoup, M. Légaré. Je cède maintenant la parole à la présidente du Conseil du trésor. Madame, vous disposez de 15 minutes.

Mme LeBel : Bonjour, M. Légaré. Merci pour votre présentation, tant dans le cadre du projet de loi n° 61 que le projet de loi n° 66, là. On a pris bonne connaissance de tous vos commentaires dans les deux cas puis on a essayé, naturellement, à l'instar de d'autres groupes qui ont soit témoigné soit déposé un mémoire en commission... en consultations particulières, pardon, sur le p.l. n° 61, de prendre en compte le plus de commentaires possible, là. Et, effectivement, bon, dans le cas de l'AMP, là, on a accru ses pouvoirs, donc, merci de le noter, et on a encore peut-être des petites améliorations ou des précisions, je dirais, à faire, mais, pour l'instant, ce cadre-là, je pense qu'on a fait un pas de géant, puis vous l'avez noté.

Je comprends votre demande par rapport à la définition, je la comprends, vous l'expliquez très clairement, d'ailleurs, votre demande par rapport à la... bon, aux conséquences de la décision d'un tribunal de changer la définition du mot «courtage». Par contre, je m'efforce, depuis le début des consultations, d'expliquer que je ne touche pas aux normes, que je touche au processus. Donc, c'est un sujet qui est fort important, mais que je ne suis pas sûre que c'est celui de... ce dont ont doit traiter dans le p.l. n° 66.

Je vais quand même vous demander, est-ce que vous en avez... Je ne veux pas avoir l'objet de vos discussions, mais j'imagine que vous avez eu une discussion avec le ministre des Transports. Parce que c'est plus dans sa cour, là, on parle de changer une norme ou, à tout le moins, de la préciser, peu importe le vocabulaire qu'on prend, vous comprenez ce que je veux dire, là, mais je m'efforce de ne pas toucher aux normes, depuis ce matin, donc, et de faire en sorte que je n'y touche pas en matière d'intégrité ou en matière d'environnement. Donc, je voulais voir si vous aviez eu au moins l'occasion de discuter de ça, surtout. C'est mars 2018, je pense, que la donne a changé, là, plus particulièrement?

M. Légaré (Gaétan) : Oui. Bien, en fait, il faut comprendre également que le ministère des Transports, là, suite à un lobbyisme important à compter de 2012, a quand même libéré les entrepreneurs de sa portion de camions qui lui étaient réservés à lui de pouvoir engager n'importe qui au Québec. Alors, en libérant l'entrepreneur de cette obligation-là, bien là, ça a permis aux gens, justement, de s'infiltrer dans cette partie des travaux là.

On a fait nos représentations nécessaires, il y a eu du gros lobbyisme également des opposants à ce niveau-là. Également, en 2017, lorsqu'une injonction... on a demandé une injonction puis on a demandé l'intervention du ministère des Transports, par le Procureur général, de venir défendre sa loi. Bon, il n'a pas acquiescé à notre demande, et, lorsqu'on est allés à la Cour d'appel, eh bien, la même chose a été faite, puis le Procureur général ne s'est pas présenté non plus. On a rencontré également le ministre Bonnardel avec son équipe pour expliquer ces dommages-là qui avaient été faits dans la loi, et tout ça, pour pouvoir comprendre mieux, mais, malheureusement, là, nos discussions n'ont rien donné à ce niveau-là.

Notre cri d'alarme là-dessus n'est pas de... justement, on sait qu'on ne peut pas modifier toutes les lois par un projet de loi, mais c'est vraiment d'expliquer aux élus que la situation actuelle, elle est... la possibilité de tout ça est beaucoup plus grande encore qu'avec les commentaires qu'on a entendus à la commission Charbonneau, au niveau de la fausse facturation, et tout ça.

La commission Charbonneau, ce qui a été dénoncé, ce n'est pas sur des contrats du ministère des Transports, c'était sur des endroits où il y avait... justement, l'encadrement était laissé un peu de côté. Et on n'était pas capable de faire appliquer la loi sur le courtage, parce que c'étaient les camionneurs qui devaient se défendre eux autres mêmes. Il n'y avait personne qui pouvait faire cesser cela. Et c'est là que la corruption, la collusion, la fausse facturation s'est instaurée, vous l'avez entendu, au CUSM, en tout cas, tous ces chantiers-là qui n'étaient pas le ministère des Transports. Puis, malheureusement, puis comme je vous dis, depuis 2012, le ministère a également ouvert la porte à ça. Avant, il n'y avait aucune possibilité pour qu'il y ait cette sorte de gens sans scrupules qui pouvaient s'infiltrer dans le camionnage en vrac dans les marchés publics au Québec.

Mme LeBel : O.K. Bien, écoutez, je comprends, donc, que vous profitez de toutes les tribunes pertinentes pour pouvoir faire passer votre point de vue puis je respecte ça grandement, donc. Par contre, je vais vous demander, peut-être plus précisément sur les mesures du projet de loi n° 66, si vous permettez qu'on entre dans ce sujet-là, est-ce que vous aviez des préoccupations concernant le projet de loi n° 61? Il y avait l'article 50, entre autres, il y avait le fait que l'AMP n'avait peut-être pas assez de possibilités, compte tenu de l'accélération de certains processus, il y avait... il fallait faire peut-être un contrepoids. Je pense qu'on y a répondu.

Est-ce que vos membres sont prêts à relever ce défi? Parce que je vois qu'il y a... dans votre mémoire, je pense, ou dans ce que vous nous avez présenté, vous avez constaté une baisse marquée des investissements privés entraînant pour vous une baisse de 60 % du chiffre d'affaires. Puis c'est un peu, moi, la lecture que j'ai de l'environnement. Oui, il n'y a peut-être, dans le secteur résidentiel, pas de problème de construction, mais ce n'est pas vrai partout, les marchés ne sont pas occupés partout. Il y a un désengagement justifié ou justifiable, là, je ne veux pas critiquer, du secteur public dans le milieu institutionnel. Et donc on parlait des centres d'achats, on parle, bon, des... etc., et ce que moi, je prétends, c'est que les investissements devancés et accélérés du gouvernement vont simplement venir prendre la place du marché privé. Est-ce que vous constatez cette même baisse dans le milieu?

• (16 h 10) •

M. Légaré (Gaétan) : Bien, absolument. Nous, on a fait le tour du Québec, là, avec nos 80 organismes de courtage, on est bien situés, tout ça, puis il y a des endroits, actuellement, là, dans le secteur des marchés privés, les investissements ont diminué de tout près de 60 %. Pourquoi? Bon, la situation du COVID, bien sûr, les règles sanitaires, l'insécurité économique, et tout, ça fait en sorte que ces investisseurs-là ont retardé ou complètement annulé les projets en investissement. Donc, on a besoin des investissements. Ça, on l'a surtout dans notre domaine, dans les infrastructures. On l'a noté à chaque fois, dans les crises économiques, on l'a noté dans les développements économiques. Lors des travaux de la Baie-James, on a relancé l'économie au Québec. On a relancé l'économie avec, justement, des infrastructures, en augmentant les investissements dans les infrastructures énormément pour soutenir le Québec.

Il y a des crises économiques que le Québec n'a pas presque pas senties... en tout cas, comme individu. Peut-être que le gouvernement et les élus, eux, l'ont sentie, ils sont sur la première ligne, mais les citoyens puis les travailleurs n'ont presque pas senti, parce que ces investissements-là ont fait travailler le Québec, ont fait travailler les Québécois.

Et c'est important que ça, ce soit fait, pour être en mesure, justement, de faire des relances économiques, que ce soit intègre. Vous avez une notoriété d'intégrité qui est importante. J'ai entendu bien des élus le mentionner. On a confiance en ce projet de loi là. Vous êtes en train de mettre en place tous les outils nécessaires pour que ça soit intègre. Et nous, on veut participer à ça, nos membres ont hâte de pouvoir participer, on est prêts à relever le défi. On a 10 000 camions en disponibilité pour vous soutenir là-dedans, dans cette relance économique là, puis soyez assurés qu'on va être à la fine pointe pour pouvoir reconstruire encore une fois le Québec, pour le remettre au niveau des infrastructures correctes et sécuritaires.

Mme LeBel : Bien, votre collaboration est bien appréciée. Donc, je comprends que vous n'avez pas d'enjeu de dire : Bien, on va manquer de camionneurs ou on va manquer... Vous pensez que vous êtes capables de répondre à l'appel, malgré le fait qu'on devance des travaux; on accélère ou on devance des investissements?

M. Légaré (Gaétan) : On est capable de faire la demande, on est capable d'être à la demande et, encore plus que ça, on se prévient. On a fait des représentations à la Commission des transports du Québec, qui sont nos superviseurs, qui sont nos contrôleurs, pour leur demander que les gens qui ne sont pas dans le circuit, qui n'aiment pas ce régime disciplinaire là et qui ne veulent pas faire affaire, de pouvoir, nous, aller les chercher et les faire travailler avec nous autres, un peu comme il se passe dans l'industrie de la construction quand il manque de mécaniciens ou qu'il manque...

Mme LeBel : Une espèce de passerelle, si on veut, là.

M. Légaré (Gaétan) : Exactement. Venez-vous-en avec nous autres, on va vous faire travailler quand on va manquer de camions. Et toutes ces sommes d'argent là vont transiger aussi dans nos comptes en fidéicommis, dans lesquels on va être capable de faire toute la traçabilité de l'argent et la traçabilité des sols. Alors, ça, on est déjà en demande à la Commission des transports du Québec pour encore offrir un service encore plus grand à l'ensemble des donneurs d'ouvrage. Parce qu'il n'y a pas seulement que vos projets, Mme LeBel, qui vont être en application, il y a aussi nos municipalités qui font énormément de travaux. J'espère qu'eux aussi vont pouvoir accélérer le processus puis être en mesure de retaper le réseau routier. Et puis nous, on va répondre à la demande, et puis, avec l'appui de la Commission des transports, bien, ça va être encore plus facile, puis on va pouvoir intervenir plus rapidement, puis on va construire le Québec ensemble.

Mme LeBel : Est-ce que vous avez senti, peut-être, en terminant, parce que votre expertise sur le terrain, là, est vraiment pertinente, est-ce que vous avez senti... par rapport à la baisse de 60 % des investissements privés, là, du retrait des investissements privés à la hauteur d'environ 60 %, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire, est-ce que c'est généralisé dans tout le Québec, est-ce c'est plus dans certains secteurs, est-ce qu'il y a des endroits où la construction est à un niveau similaire ou que la baisse est plus faible qu'à d'autres endroits? Pour bien cibler.

M. Légaré (Gaétan) : Oui, parce qu'au niveau des régions, au niveau des régions comme dans l'Abitibi, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, Gaspésie, même sur la Côte-Nord, ces régions-là, dans les investissements privés, il n'y en avait pas énormément comme à Montréal et partout, ces régions-là ont eu une baisse extrêmement significative. Mais, même dans la région de Montréal, on s'est aperçu, et surtout dans le cercle alentour de l'île de Montréal, là, ce qu'on appelle, nous, la région 06, là, la région alentour de l'île de Montréal, également, il y a eu énormément de diminution dans les investissements privés. Alors, ça, c'est catastrophique, là, c'est préoccupant, de notre...

Mme LeBel : Bien, merci beaucoup, M. Légaré. Pour moi, ça va compléter. Alors, merci, c'était très éclairant. Merci.

M. Légaré (Gaétan) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Il n'y a aucun doute, M. Légaré, M. Garand — bien, d'abord, bienvenue — il n'y a aucun doute, on est tous d'accord pour la relance économique du Québec, on est tous d'accord pour l'importance des infrastructures. Je pense que la ministre est très heureuse de vos commentaires sur ce sujet-là. Maintenant, je vais revenir sur certains autres commentaires qui n'ont pas été touchés par la ministre dans ses questions.

Vous nous avez dit que vous souhaitiez un Québec intègre. Alors, si on souhaite un Québec intègre et que vous êtes devant nous aujourd'hui, c'est qu'il y a des parties qui, à votre lecture ou dans votre expérience, ne sont pas intègres. Est-ce que je me trompe?

M. Légaré (Gaétan) : Bien non. Absolument. Écoutez, moi, là... On rouvre la porte, la porte est toute grande ouverte, en tout cas, au copinage, puis à la fausse facturation, puis à la collusion, puis tout ça. La porte, elle s'est agrandie beaucoup plus que... (panne de son)

Je vais vous donner un exemple, M. Barrette. Quand vous quittez votre résidence, j'imagine que vous barrez votre porte, j'imagine que vous avez peut-être même un système d'alarme, et tant mieux si vous avez un petit sticker d'ADT pour les systèmes d'alarme, ça éloigne les voleurs et ça éloigne les gens qui voudraient entrer chez vous. On ferme la porte. Et, lorsque cet encadrement-là était respecté et que la loi sur le courtage le disait clairement, que ça prenait un permis de courtage pour faire du courtage dans les marchés publics, cette porte-là, elle était fermée. Et tout ce qu'il y a eu de corruption, et de collusion, puis de fausse facturation a été fait dans les endroits où cet encadrement-là n'était pas respecté. Et on en a fait, des signalements. On en voit sur le terrain, mais les gens ne parlent pas.

M. Barrette : Très bien. Alors, ce que vous nous dites... en termes clairs, et vous me confirmerez ou infirmerez ce que je vais dire, aujourd'hui, la porte est malheureusement, depuis quelques années, ouverte, et beaucoup ont passé le seuil de la porte, et il y a aujourd'hui un retour d'un ensemble de copinage, corruption, collusion, et ainsi de suite.

M. Légaré (Gaétan) : Il n'y a absolument rien pour empêcher ça et il y a bel et bien un retour à ça.

M. Barrette : Bon. Donc, ça existe aujourd'hui.

M. Légaré (Gaétan) : Oui, ça existe aujourd'hui.

M. Barrette : Très bien. Et ça existe parce que les règles qui étaient en place à cause d'un jugement x, là, je ne reviendrai pas sur le jugement... Sur le plan administratif, on va dire, là, des fois, il y a des jugements qui ne sont pas nécessairement faits pour le «big picture» de l'intérêt, là, de la société, mais on vient valider une règle, parce que, bon, légalement, on trouve une raison. Depuis ce moment-là, la porte s'est ouverte, il y a du monde qui sont rentrés dedans et, au moment où on se parle, il y a un retour de la collusion, corruption, copinage, et ainsi de suite, dans votre monde.

M. Légaré (Gaétan) : Exactement, et ça a débuté en 2012 et c'est encore plus ouvert en 2017‑2018.

M. Barrette : Alors, on va s'entendre probablement là-dessus, disons que la porte va s'ouvrir encore pas mal plus grand, les portes de l'appartement vont devenir des portes de granges avec la loi n° 66, où on va arriver avec une tonne d'argent sur le marché et de projets qui vont utiliser vos services. On peut dire ça?

M. Légaré (Gaétan) : Absolument. Absolument.

M. Barrette : Très bien. Et donc ce que vous souhaitez, vous, pour le bien de la société, vous l'avez dit comme ça, j'ai bien aimé votre expression, vous souhaitez un Québec intègre, vous souhaitez que... parce que vous le vivez, que, dans ce moment précis d'augmentation momentanée de l'activité de construction d'infrastructures et autres, qu'on ferme la porte. C'est ça que vous souhaitez, là?

M. Légaré (Gaétan) : Absolument.

M. Barrette : Très bien.

M. Légaré (Gaétan) : Absolument. Et, si je peux me permettre, M. Barrette, je pense qu'il n'y a aucun, aucun mécanisme au Québec qui peut promettre aux élus et à la population de mettre à l'abri 10 % à 15 % des montants totaux des investissements, à l'abri de toute possibilité de corruption, puis de collusion, et tout ça, comme on comprend.

M. Barrette : Juste pour que les gens qui nous suivent le comprennent, 10 % à 15 %, on est rendu dans les milliards, là.

M. Légaré (Gaétan) : Et voilà.

M. Barrette : Ce n'est pas banal, là.

M. Légaré (Gaétan) : L'argent qui est réservé au camionnage en vrac est entre 10 % et 15 % sur les contrats de la...

• (16 h 20) •

M. Barrette : Alors, on est dans les milliards. Alors, M. Légaré, je vais faire un commentaire qui va aller dans votre sens. La ministre nous a dit qu'elle, elle s'évertuait à dire que 66, c'était à propos du processus et non des normes, O.K.? Maintenant, je pense que la société québécoise, puis c'est ça que vous voulez dire quand vous parlez d'un Québec intègre, là, la norme, au Québec, c'est qu'on est honnête, et on paie le juste prix, puis on empêche les passe-passe. Je pense qu'on peut dire qu'au Québec c'est une norme. C'est certainement une norme de tous les gouvernements. Et, si un processus favorise le contraire, bien, il faut s'adresser au processus. Et là, actuellement, dans 66, on ne s'y adresse pas. On devrait s'y adresser, et c'est là qu'on devrait aller, parce que le processus auquel on ne s'adresse pas actuellement va à l'encontre d'une norme, qui est celui d'un Québec intègre. Alors, je reçois bien vos commentaires.

Je vais vous poser une autre... une couple de questions additionnelles, puis là vous allez comprendre ce que je vais dire, je suis certain, certain, certain que ça va faire vibrer une corde sensible chez vous, là. Quand l'association des constructeurs est venue nous voir, hier, je leur ai posé une question simple. Actuellement, là, il y a un projet de loi n° 67 qui vise à ce qu'on fasse des achats locaux, qu'idéalement on emploie aussi de façon significative localement. Puis je leur ai dit : Bien, vous ne trouvez pas qu'actuellement, là, il peut y avoir un problème? Parce qu'eux autres, ils favorisent — ils avaient mis ça dans leur mémoire — ils favorisent la mobilité de la main-d'oeuvre. Et là je leur ai dit : Bien, écoutez, mobilité de la main-d'oeuvre, ça veut dire que l'entrepreneur, le gros entrepreneur dans une ville peut débarquer dans un village avec sa main-d'oeuvre et faire tout ce qu'il a à faire. Et là il m'a répondu en disant : Ah! bien non, ce n'est pas grave, les gens, là... ce n'est plus comme ça, les gens de la région veulent venir à Montréal... Bref, pour lui, il n'y avait pas d'impact dans la mobilité de la main-d'oeuvre pour ce qui est de la main-d'oeuvre locale. Alors, pour vous, spécifiquement, dans le camionnage, là, avez-vous une réponse à offrir à ça? Moi, j'ai l'impression que ce n'est pas ça qu'il se passe, là.

M. Légaré (Gaétan) : On parle même de paix sociale, là, M. Barrette, là.

M. Barrette : Pardon? Pardon? Vous parlez de?

M. Légaré (Gaétan) : On parle même de paix sociale.

M. Barrette : Bon.

M. Légaré (Gaétan) : Imaginez, là, imaginez, là, qu'un contrat, là, que le ministère refait la 138, en Gaspésie, peu importe, là, c'est un des bons contrats qui arrivent, là, puis que les gens, ça fait quatre, cinq ans qu'ils attendent, puis là, bien, ils font les contrats municipaux, puis ils sont dans leur patelin, tout ça, et il arrive un entrepreneur de l'extérieur avec toute sa flotte de camions, et les seules retombées économiques qui arrivent, c'est la poussière de leurs camions qu'ils ont laissée au sol. Alors, c'est risqué, là, alors...

Et, d'ailleurs, bien, un des plus grands bienfaits puis le pourquoi que le gouvernement a rendu cet encadrement permanent est, justement, sur les retombées économiques locales. Le gouvernement a même permis aux municipalités qui le désirent, a même permis aux municipalités qui le désirent, dans leurs appels d'offres, de réserver une partie des transports à leurs payeurs de taxes qui sont abonnés aux organismes de courtage et accrédités par la Commission des transports du Québec pour assurer des retombées économiques locales, pour avoir un retour sur leurs investissements dans leurs communautés. Alors, écoutez, là, je ne sais pas si je m'exprime bien, M. Barrette...

M. Barrette : Ah! très bien.

M. Légaré (Gaétan) : ...mais c'est catastrophique, parce qu'on veut défaire ce qui est bien puis ce qui fait l'affaire de tout le monde. Et, je l'ai dit, il y a plus de 500 municipalités qui se sont prévalues de ces pouvoirs-là que le gouvernement leur a donnés pour pouvoir assurer les retombées économiques locales et maintenir aussi une flotte en santé pour offrir les services à tout le monde en cas de catastrophe et en cas de... (panne de son)

M. Barrette : Je comprends. Il me reste 50 secondes, à toutes fins utiles, M. Légaré. J'ai une dernière question à vous poser. La situation actuelle, avec l'ouverture de la porte qu'on voudrait voir fermer, est-elle inflationniste pour le marché, là, pour le gouvernement, là, qui paie tout ça?

M. Légaré (Gaétan) : Bien, écoutez, oui, absolument, là, c'est risqué, là. La seule affaire qui nous protège, là-dedans, c'est que le ministère a un recueil de tarifs qui sert de référence, et on espère, malgré tout, que l'entrepreneur va soumissionner avec ce recueil-là pour ses prix de camionnage, parce qu'on espère qu'un autre entrepreneur...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Barrette : Mais, si j'ai bien compris, vous avez comparé un 22 $, avec les normes, à 60 $, c'est ça que vous avez dit? C'est assez inflationniste, ça.

M. Légaré (Gaétan) : Exactement. 60 $ dans l'industrie de la construction.

M. Barrette : Très bien. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Légaré. Merci d'être là. Je vous avoue que je ne suis absolument pas familier avec le transport en vrac au Québec dans les grands chantiers, mais j'en ai appris beaucoup dans les dernières minutes, je vous en remercie. J'ai l'impression, en vous entendant, qu'on est un petit peu dans le premier épisode, là, d'une éventuelle saison 2 de la commission Charbonneau, et qu'on n'a pas tout réglé, et qu'on revient à certaines mauvaises pratiques.

Moi, il y a quelque chose qui m'a accroché, là, dans votre mémoire — parce qu'avouez que vous êtes un peu périphérique à 66, cela dit, mais je comprends bien votre point, et on en prend note — vous dites que, donc, certains projets, il est arrivé, par le passé, que la conception, la réalisation et même leur propriété soient confiées par entente à des corporations de transport des municipalités et des ministères pour de plus ou moins longues durées, à des consortiums privés ou dits privés. Ces organisations échappent à la juridiction de l'Autorité des marchés publics.

Là, vous nous dites que, par la déréglementation qui s'est passée depuis le fameux jugement de 2018, sur lequel je ne reviendrai pas non plus, ça a rouvert la porte à la collusion. Êtes-vous en train de nous dire qu'on a rouvert la porte — peut-être n'a-t-elle jamais été vraiment fermée — à certains gros chantiers que l'on connaît en ce moment au Québec et qui échappent à l'AMP?

M. Légaré (Gaétan) : Bien, écoutez, effectivement. Puis je vais le nommer, officiellement, là, puis c'est notre bas de laine, là, la Caisse de dépôt, avec infrastructures, le REM, qui se déguisent en marché privé, quand c'est l'argent de tous les Québécois qui sont là-dessus, justement, pour ne pas que le courtage en service de camionnage en vrac s'applique, et peut-être les autres règles. Je ne les connais pas, les autres règles, là, quand c'est un marché privé, qui s'appliquent ou ne s'appliquent pas, mais, dans notre domaine à nous, on a rencontré ces dirigeants-là, et CPQ Infra s'est complètement enlevé de là, a dit : C'est un marché privé, complètement, alors que la juridiction de ce contrat-là était sous le ministère des Transports, le ministre des Transports, puis il y avait une partie, à tout le moins, qui était sous la responsabilité du ministre. Et on considère ça comme un marché privé parce que c'est à la Caisse de dépôt et CDPQ Infra. Je m'excuse de, peut-être, là, avoir à dénoncer des choses que les gens n'aiment pas entendre, mais, effectivement, ce chantier-là est effectué comme si c'était un Walmart.

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Marissal : Donc, votre porte ouverte vers la corruption, c'est notamment dans un tel chantier, c'est ce que vous me dites?

M. Légaré (Gaétan) : Bien, il y a une porte d'ouverte là, là.

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Légaré (Gaétan) : Il y a une porte d'ouverte là parce que même l'encadrement...

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Légaré. Merci beaucoup. M. le député de Jonquière.

M. Marissal : Merci, M. Légaré.

M. Gaudreault : Oui, merci, M. Légaré, et M. Garand, également, qui vous accompagne. Votre cri du coeur est très, très important, parce que, dans le fond, vous dites le gouvernement a une opportunité de faire une relance économique avec des chantiers publics, il ne faudrait pas qu'on en profite pour se retrouver dans un mauvais remake d'une future commission Charbonneau parce qu'on va avoir aussi profité de l'occasion pour rouvrir la porte à la corruption. Alors, c'est ce que j'entends. Vous proposez des solutions. Selon vous, est-ce qu'il y a, dans la liste, de l'annexe... les 181 projets, là, de l'annexe I, est-ce qu'il y a des types de projets plus à risque que d'autres? Parce qu'il y a quand même beaucoup de maisons des aînés, d'écoles, des projets de moindre envergure. Est-ce que, selon votre expérience, les risques que vous voyez s'appliquent à l'ensemble des projets, là, peu importe les sommes, ou c'est vraiment plus les plus gros projets dont on parle ici?

M. Légaré (Gaétan) : C'est sur tous les projets, M. Gaudreault, parce que, dans le fond, il y a du camionnage en vrac partout. Même quand on parle de maisons des aînés, on fait des stationnements, on va refaire une bâtisse, on va reconstruire. Partout, dans toute la liste des contrats qu'il y a là, puis c'est, d'ailleurs, dans tous les contrats qu'on veut avoir... Cette loi-là qu'on parle qu'on veut une modification s'applique dans tous les marchés publics, peu importe l'envergure... Alors, il y a des petits qui peuvent s'infiltrer dans les petits et il y a des grands qui peuvent s'infiltrer dans les grands.

M. Gaudreault : Puis je connais bien des représentants de votre industrie dans ma région, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, là, mais, quand on regarde la liste des projets, il y en a dans toutes les régions, Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, etc. Vous, vous nous alertez également sur le risque que, si on ne soumet pas l'annexe I à la loi sur le courtage, qu'il va y avoir du camionnage, par exemple, de Montréal ou d'autres régions qui vont aller dans les régions périphériques, là.

M. Légaré (Gaétan) : Bien, absolument, parce que, là, on vient un peu d'éliminer l'assurance des retombées économiques locales. Alors, c'est ça qui nous inquiète énormément.

M. Gaudreault : C'est bon. Merci.

M. Légaré (Gaétan) : Et, d'ailleurs, M. Gaudreault... Ah! puis, d'ailleurs...

Le Président (M. Simard) : Finissez votre phrase.

M. Légaré (Gaétan) : Je voulais vous dire, dans votre région, toutes, toutes, toutes les municipalités sont à l'abri de tout ça.

M. Gaudreault : Ah! on est exemplaires, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, dans plein d'affaires.

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Légaré (Gaétan) : On l'est aussi à Québec, par exemple, on l'est aussi à Québec.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci, M. Légaré. Alors, je cède la parole au député de Chomedey — ça rime avec Saguenay, mais, enfin, ce n'est pas au Saguenay.

• (16 h 30) •

M. Ouellette : Bonjour, M. Légaré, toujours un plaisir de vous revoir. Je ne vous demanderai pas si on a la même exemplarité à Laval. Ça fait que... Mais je ne veux pas entendre de réponse, merci.

Je souscris, M. Légaré, ça fait assez longtemps qu'on travaille ensemble, je souscris à vos remarques et j'espère que les parlementaires qui auront à étudier le projet de loi n° 66 en tiendront compte... parce que ce n'est pas la première fois, je le sais, dans une autre vie, pour avoir été, au MTQ, adjoint parlementaire de la ministre Boulet, et vous aviez fait des recommandations, justement, pour être assujetti aux contrats du MTQ. Et si d'aventure Mme la ministre ne souscrivait pas à toutes vos demandes ou à vos recommandations, je veux juste que vous m'expliquiez peut-être un peu plus en détail votre recommandation 4, qui demande d'inclure l'article 7.7 dans les cahiers de charges et devis du ministère des Transports, là. Si c'était... Si on incluait un amendement dans les 181 projets pour que cet article 7.7, qui est très long, qui est très explicite... est-ce que ça améliorerait certaines de vos préoccupations ou certaines de vos inquiétudes?

M. Légaré (Gaétan) : On améliore, par cet article-là, les retombées économiques locales, les bienfaits de l'encadrement, sauf que, si on ne modifie pas la Loi sur les transports pour définir le courtage, ça ne corrigera pas la corruption, et la collusion, et l'ensemble des autres méfaits de cette ouverture-là, parce que...

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Légaré.

M. Légaré (Gaétan) : ...

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, M. Légaré. Alors, sur ce, notre audition d'aujourd'hui se termine. M. Légaré et M. Garand, merci beaucoup pour votre précieuse contribution à nos travaux. On espère vous revoir bientôt.

Et nous allons suspendre momentanément, le temps de faire place à nos prochains invités. Au plaisir.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

(Reprise à 16 h 37)

Le Président (M. Simard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre nos auditions. Nous avons l'honneur de recevoir le Bureau de l'inspecteur général de la ville de Montréal. Bonjour, Madame. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?

Bureau de l'inspecteur général (BIG) de la ville de Montréal

(Visioconférence)

Mme Bishop (Brigitte) : Alors, bonjour, je suis l'inspectrice générale de la ville de Montréal, Brigitte Bishop, et je suis accompagnée, la distanciation sociale oblige, de quelqu'un que vous ne voyez pas, qui est Me Simon Laliberté, un avocat de mon bureau, et Me Guillaume Crête qui va s'occuper du soutien technique, si jamais je vous perdais ou que vous ne m'entendriez plus.

Le Président (M. Simard) : On ne les voit pas, mais on les salue. Madame, nous vous écoutons.

Mme Bishop (Brigitte) : Alors, merci. Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, tout d'abord, je vous remercie de votre invitation de participer à nouveau aux travaux de la commission sur un sujet aussi important pour l'ensemble du Québec.

D'entrée de jeu, permettez-moi de réitérer que le Bureau de l'inspecteur général de Montréal soutient toujours la volonté d'entamer la relance économique du Québec, notamment par le biais d'investissements en infrastructures. Lors de notre dernière comparution en juin, nous avions soumis qu'il était possible et nécessaire d'allier cet objectif de reprise économique avec le maintien des plus hauts standards en matière d'intégrité dans l'octroi et l'exécution de contrats publics, ces standards qui ont été acquis chèrement au fil des dernières années. Avec cette nouvelle mouture du projet de loi, nous estimons que cet exercice d'équilibrage est largement réussi, alors que les remparts d'intégrité préalables à l'accès aux marchés publics, dont le REA, se trouvent désormais préservés. De plus, les dispositions relatives à l'accélération des paiements fourniront des liquidités requises aux entreprises et seront un atout indéniable dans la lutte contre l'infiltration du crime organisé dans l'économie légale.

Nous saluons également l'octroi à l'Autorité des marchés publics de nouveaux pouvoirs, de même que leur élargissement aux sous-contrats publics. L'atténuation des divers risques engendrés par la mise en oeuvre massive et rapide des contrats et des chantiers est en effet un grand défi. C'est dans cette perspective que nous souhaiterions partager avec vous deux éléments de réflexion complémentaires.

Dans un premier temps, nous nous interrogeons sur les paramètres de la capacité d'action accrue de l'Autorité des marchés publics en vertu du projet de loi n° 66. En effet, tant dans les notes explicatives du projet de loi que dans son article 5, elle est circonscrite de la façon suivante : «...lorsque l'organisme public concerné n'apparaît pas agir, à l'égard de ce processus ou de ce contrat, en conformité avec le cadre normatif.» Or, l'emploi d'une telle formulation pourrait paraître en limiter la portée aux seuls cas de non-respect du cadre normatif de la part des organismes publics. La clarification des pouvoirs de l'AMP de sanctionner les manquements, peu importe leur source, écarterait les risques de remise en question à cet égard en confirmant son entière juridiction sur les actions de toutes les parties concernées.

• (16 h 40) •

Tout marché public implique nécessairement une relation entre, d'un côté, un organisme public et, de l'autre, un ou plusieurs cocontractants privés. Il demeure évidemment essentiel d'assurer une surveillance des organismes publics. Défenseurs de première ligne, les donneurs d'ouvrage ont, en premier lieu, la responsabilité que la qualité des travaux soit à la hauteur de ce qui est attendu du public. De la même façon, la rigueur doit être tout autant de mise pour la partie privée. Si le mandat de l'AMP de vérification de la probité des entreprises en amont de l'octroi des contrats constitue une bonne première étape, il doit également être clair qu'elle puisse sanctionner une conduite fautive du cocontractant privé. Le pouvoir d'intervention de l'organisme de surveillance ne saurait être tributaire du seul blâme attribuable à l'administration publique, le cocontractant privé doit lui aussi assumer la part de responsabilité qui lui revient dans le respect de l'intégrité contractuelle.

Au total, plus de la moitié de nos rapports publics au bureau révèlent un large éventail de stratagèmes mis en oeuvre par des cocontractants privés : manoeuvres dolosives, ristournes imposées à des sous-traitants, collusion, infiltration du crime organisé dans l'économie légale, utilisation de prête-noms, devis dirigés, déversements illégaux, et j'en passe. De tels gestes sont posés dans le cours de la passation et de l'exécution des contrats par les acteurs malveillants qui cherchent à abuser des organismes publics et donc, par extension, des contribuables. Ils ne sauraient tout simplement pas être tolérés.

Alors qu'elle est d'ordinaire déjà très importante, la surveillance de l'intégrité des processus de passation et d'exécution des contrats deviendra vitale dans un contexte d'octroi accéléré de marchés publics. Face à des entreprises délinquantes s'avérant bien organisées, ce sont des efforts méthodiques, systématiques et concertés qui devront être déployés. Cela requiert notamment des représentants des organismes de surveillance qu'ils assurent une présence directement sur les chantiers lors de l'exécution des contrats. En effet, les entrepreneurs auront davantage tendance à demeurer intègres dans l'appréhension d'opérations ponctuelles et aléatoires de la part des organismes de surveillance durant la réalisation des travaux publics. Des interventions de cette nature servent tant à valoriser les réflexes d'intégrité des bons acteurs de l'industrie qu'à rendre la vie plus difficile aux compagnies aux pratiques douteuses. Une présence sur le terrain favorise la connaissance des réalités et des enjeux propres tant aux donneurs d'ouvrage publics qu'aux divers entrepreneurs. De par notre expérience, il en découle également l'établissement du lien de confiance requis avec d'éventuels dénonciateurs, qu'ils émanent du public ou du privé.

Ceci nous amène à la deuxième considération que nous voulions vous soumettre, soit la protection des lanceurs d'alerte. Il s'agit d'une priorité constante dans la conduite de tous nos dossiers, étant une condition fondamentale à la réussite de notre mandat. Sans le courage de ces lanceurs d'alerte, nous ne pourrions mener à bien notre mission, et je souligne leur précieuse contribution. En effet, comme nous l'avions mentionné en juin, la capacité d'action d'un organisme d'intégrité repose sur son aptitude à développer et maintenir un lien de confiance avec les dénonciateurs. Cela passe à la fois par l'assurance d'une capacité d'intervention prompte et efficace que par la certitude d'être protégé contre les représailles. Dans un contexte où on accélère la mise en oeuvre de projets publics, il est d'autant plus important de protéger contre les représailles ceux qui détiennent l'information pertinente permettant une action des organismes d'intégrité.

Malgré les grandes avancées en matière de protection des lanceurs d'alerte, quelques améliorations au régime actuel demeurent toujours souhaitables. La Protectrice du citoyen a déposé un rapport sur l'application de la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des organismes publics. Plusieurs des constats et des préoccupations qui y sont énoncés rejoignent les expériences vécues par notre bureau, et nous partageons les recommandations mises de l'avant à cet effet.

En conclusion, nous réitérons que nous adhérons entièrement à l'idée de relancer l'économie par l'entremise d'investissements en infrastructures publiques. À ce titre, le rehaussement des pouvoirs de l'AMP solidifiera définitivement l'arsenal des mécanismes d'intégrité à la disposition de l'État québécois. Nous ne pouvons que nous en réjouir, car, de concert avec l'action des autres organismes de surveillance, cela bénéficiera à assurer une relance de l'économie efficiente, transparente et intègre.

Alors, je vous remercie de votre attention, et c'est avec plaisir maintenant que je répondrai à vos questions.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, Mme Bishop. Je cède la parole à la présidente du Conseil du trésor.

Mme LeBel : Merci, M. le Président. Merci, Mme l'inspectrice générale. Donc, merci de vos commentaires et surtout de votre présence. Ça va être une conversation fort intéressante.

Bon, je note, d'entrée de jeu, effectivement, ça faisait partie des commentaires du BIG sur le projet de loi n° 61, là, que l'AMP n'avait peut-être pas, dans sa loi actuelle, les outils nécessaires pour bien répondre à une accélération de projets ou, à tout le moins, dans le cadre dans lequel on souhaitait le faire. Donc, je pense que vous constatez qu'on a pallié à cet enjeu-là, disons-le comme ça, donc.

Puis on va revenir sur le point que vous mentionnez à la page 5, parce qu'il a été avancé par la Vérificatrice générale également. Ce qui enclenche, je vais dire... Le mécanisme qui enclenche l'utilisation des pouvoirs, pour moi, c'est deux choses différentes et complémentaires, c'est-à-dire quels sont mes pouvoirs et dans quel cadre est-ce que je peux les exercer. Donc, la remarque que vous faites à la page 4, c'est plutôt dans le cadre : Qu'est-ce qui enclenche les pouvoirs? Mais est-ce que je me fais comprendre? Parce que, des fois... Ce que vous dites, dans le fond, c'est qu'à l'article... Je vais commencer par là, je pense que ça va être plus clair pour tout le monde. Ce n'est pas la première fois que je me mêle dans mes propres idées, ça fait que...

Vous dites que l'article 5 vient dire... et je recherche le texte, parce que vous l'avez dans votre chose, vient dire que... je vais le trouver. Bon, voilà, je l'ai : «...lorsque l'organisme public concerné n'apparaît pas agir, à l'égard de ce processus ou de ce contrat, en conformité avec le cadre normatif.» La Vérificatrice générale vient de nous dire que ça limite la possibilité d'action de l'AMP, en ce qu'elle ne peut pas agir de façon aléatoire, si on veut, ou décider d'examiner un contrat de son propre chef, il doit y avoir quelque chose qui lui fait soupçonner, si on peut parler de soupçon, qu'il y a une apparence de ne pas agir à l'intérieur du cadre normatif. Et ce que vous nous dites, ça, c'est que ça vient limiter sa portée d'action. C'est exact?

Mme Bishop (Brigitte) : Pas nécessairement

Mme LeBel : O.K., bien, c'est ça, parce que je veux qu'on le précise, parce que l'objectif du projet de loi n'est pas de limiter sa portée d'action. On a pris note du commentaire de la VG. Donc, si on peut refaire la formulation... Parce que l'objectif est vraiment de permettre dans le cadre des 181 projets, je veux bien le dire. L'AMP aimerait bien qu'on le permanentise, on aura une conversation par rapport à ça, mais, dans le cadre du projet de loi, l'objectif est de donner à l'AMP les pouvoirs d'agir de son propre chef et d'aller vérifier les contrats qu'elle pense qu'elle doit vérifier, on va le dire comme ça, là.      Donc, comment on peut pallier à cet enjeu-là, pour clarifier, selon vous, là?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, c'est ça, c'est que... En fait, ça ne limite en aucun temps... Ce n'est pas ça que je dis, là, que... Ça ne limite pas la capacité d'agir de l'AMP. Ce que je dis, c'est que ça ajoute une étape au chemin pour arriver vers la surveillance de l'exécution du contrat, puis... quand on focusse sur le cocontractant.

En fait, ce qu'on dit, c'est que la façon que c'est rédigé, c'est qu'il faut nécessairement... On parle que l'organisme public a fait un manquement. Donc, on... Et ce qui a été expliqué hier par l'AMP, c'est tout à fait ça, c'est que c'est forcément... Si le cocontractant a un manquement contractuel, forcément que l'organisme public aurait dû ou aurait pu surveiller et éviter cette problématique-là. C'est ce qui a été expliqué hier.

Moi, ce que je soumets, c'est que ce chemin-là, donc de constater forcément et par des... (Panne de son) ...dans la surveillance du contrat par l'organisme public, va ouvrir à aller vers l'exécution du contrat par l'organisme privé, par le cocontractant. En fait, si on fait juste mentionner un manquement contractuel, c'est qu'on va éviter ce chemin-là. C'est juste, au lieu de prendre la voie de service pour aller à l'autoroute, on va aller directement à l'autoroute, donc on n'aura pas à constater le manquement de l'organisme public. C'est qu'on va avoir juridiction sur le manquement, qu'il soit par l'organisme public ou par le cocontractant, c'est juste ça, c'est... La juridiction va être directement sur le contrat, et non pas...

Mme LeBel : Donc, c'est ça. C'est un peu ce que la Vérificatrice générale disait, c'est ce qui enclenche l'exercice de la juridiction. Bien, je veux vérifier avec vous, dans le fond, ce n'est pas la juridiction comme telle, parce qu'une fois que le déclencheur est rencontré ou que la condition est rencontrée l'AMP a tous les pouvoirs nécessaires, c'est d'enclencher cette juridiction-là qu'on... Et donc il faudra voir pour aplanir, en tout cas, ou éviter que cette interprétation-là soit celle que vous proposez et plutôt celle que moi, j'aimerais voir, c'est-à-dire que l'AMP ait le pouvoir d'exercer sa juridiction.

Tenant pour acquis, pour fins de discussion, qu'on règle cette situation-là, votre collègue, votre homologue à l'AMP, M. Trudel, est venu nous dire que, dans le cadre du projet de loi n° 66... et, encore là, on verra pour la suite des événements dans la loi, là, mais, dans le cadre du projet de loi n° 66, pour les 181 projets en annexe, il a, à toutes fins pratiques, présentement, l'équivalent des pouvoirs que vous avez. Est-ce que vous avez la même lecture que lui?

• (16 h 50) •

Mme Bishop (Brigitte) : Tout à fait. Puis, comme je vous ai dit tantôt, c'est juste une petite précision juridique, là, qu'on fait sur l'ouverture au pouvoir sur l'exécution contractuelle, mais, sur l'ensemble du projet, c'est tout à fait... Écoutez, ils ont les pouvoirs du BIG, ça, c'est tout à fait comparable, là. Et, comme on... comme j'ai dit dans mon allocution, c'est clair que le projet de loi, pour moi, vient renforcer complètement les pouvoirs de l'AMP et vient les rendre identiques à ceux du BIG, là.

Mme LeBel : O.K. Peut-être élaborer un peu plus, pour fins d'illustration, qu'est-ce qu'apporte le fait d'avoir... Parce que l'AMP nous a dit... M. Trudel nous a mentionné également qu'il a maintenant les pouvoirs d'avoir cette présence sur les chantiers, qui est si cruciale, qui est dans le pouvoir d'enquête versus un pouvoir de vérification qui se fait différemment. On est peut-être plus entre initiés rompus à ces termes-là, mais, pour les membres du public, c'est peut-être plus délicat de saisir la nuance entre une vérification et une enquête. Donc, peut-être plus nous illustrer dans votre... parce que vous avez une expérience plus longue que celle de l'AMP, peut-être plus nous donner, peut-être, un cas de figure où vous avez senti que la présence sur le chantier a fait une différence versus un pouvoir de vérification, pour bien illustrer qu'est-ce que ça apporte à l'AMP, ce type de pouvoir là. Puis vous avez une expérience, comme je dis, qui est un peu plus grande que celle que l'AMP à ce stade-ci, là.

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, écoutez, récemment, en juin, on a déposé un rapport public suite à, justement, une surveillance d'une exécution de contrat chez... dans le récurage d'égouts. Donc, on a fait des filatures, on a suivi le cocontractant qui devait récurer des égouts. Il y avait tout un mécanisme, il y avait plusieurs exigences de vider le camion de déversement dans des lieux qui étaient protégés. Donc, on avait toutes les exigences contractuelles du contrat qui avait été fait entre ce cocontractant-là et la ville de Montréal. Donc, nous, on a pris des exigences contractuelles et on a suivi, on a fait une filature, on a suivi le camion, on a vérifié où c'était déversé, on a même vérifié les bons de commande, les pesées pour, justement, déterminer que le cocontractant n'exécutait pas correctement le contrat, au contraire, là, passait par-dessus plusieurs obligations pour, à toutes fins pratiques, là, ne pas du tout exécuter le contrat. Donc, ça, c'est un exemple qu'on peut donner. On a même démontré également que les déversements des boues usées n'étaient pas faits conformément avec les exigences de la loi sur l'environnement. Ça, c'est un exemple d'exécution de contrat.

Ce qu'on va faire, également, c'est qu'on va aller surveiller des chantiers. Donc, si, par exemple, la ville de Montréal a un chantier pour l'asphaltage d'une rue, ça, à Montréal, il y en a un peu, donc, à ce moment-là, on va aller vérifier et s'assurer avec... on a des gens qui sont spécialisés pour voir si, par exemple, l'enrobé bitumineux est conforme aux exigences contractuelles, si, par exemple, l'asphalte est bien placé, est-ce que c'est conformément aux règles de l'art et du contrat. Donc, ça, c'est le genre de surveillance qu'on peut faire, et on est là constamment sur les chantiers. Et c'est très aléatoire, donc on ne s'annonce pas. Et donc c'est ça qui est intéressant, c'est que... et le cocontractant ne sait jamais quand il va être vérifié, quand on va regarder ce qu'il fait, quand on va analyser la qualité de son travail. Donc, c'est une assurance et c'est une garantie généralement chez eux de bien se conformer.

Mme LeBel : Et, selon votre lecture du projet de loi n° 66, l'AMP a maintenant le pouvoir ou aura, à tout le moins à l'adoption, si tel est le cas, le cas échéant, les pouvoirs de faire ce que vous venez de décrire pour les 181 projets.

Mme Bishop (Brigitte) : Tout à fait.

Mme LeBel : O.K. Peut-être juste nous expliquer la nuance, par contre, maintenant. Si ce n'était qu'une vérification, quelle aurait été la différence dans le premier dossier, là, où vous avez fait de la filature, vous avez constaté qu'on n'était pas... on ne suivait pas les exigences du contrat, ce qui avait été déterminé par contrat, ce que devait faire les entrepreneurs et les sous-contractants? Si vous vous étiez limités à une vérification, où est-ce que vous auriez eu, je dirais, vos angles morts, finalement, là, par rapport à une enquête, là?

Mme Bishop (Brigitte) : Moi, de la façon que je le perçois, la vérification va être plus... si on regarde au niveau des sources, au niveau des documents, au niveau, peut-être, des factures qui sont demandées, ça va être de l'analyse. Je parlerais plus d'analyse, de recherches que de terrain. C'est là, moi, que je vois la nuance dans la vérification. On va vérifier si les normes sont respectées au niveau... je vous dirais que c'est plus documentaire que physique. C'est comme ça... moi, c'est la nuance que je fais, là, qui... C'est simple, c'est simpliste, comme nuance, mais, en tout cas, je pense que c'est clair... (Panne de son).

Mme LeBel : Non, mais ça se résume à ça.

Mme Bishop (Brigitte) : C'est ça.

Mme LeBel : Donc, avec l'enquête et la vérification sur place, je pense que ça devient limpide de voir que, des fois, on peut voir des choses que des papiers ne puissent pas nous démontrer nécessairement, là, que de la documentation...

Mme Bishop (Brigitte) : Oui, puis, comme je disais tantôt également, c'est là qu'on va aller chercher un maximum d'informations, c'est là que les gens vont nous parler. Les gens sur les chantiers, que ce soit... de l'intimidation, on en a vu, que ce soit quand on leur demande... Par exemple, si on a un surveillant de chantier, on lui demande de fermer les yeux sur le fait qu'on va tourner les coins ronds ou que, par exemple, les matériaux ne sont pas nécessairement de qualité ou la qualité exigée au contrat. C'est là, nous, qu'on va le savoir, parce que, souvent, les gens, en voyant arriver les représentants de nos bureaux, vont automatiquement nous faire... à la longue, nous faire confiance et nous parler. Donc, c'est vraiment intéressant, il y a une belle détection qui se fait. Je regarde dans le... au niveau de mes confrères, là, de Saint-Jérôme, Longueuil et Laval, c'est la même chose. Ils vont aller sur le terrain, ils vont aller chercher de l'information, ils vont aller vérifier ce qu'il se passe, et généralement la présence peut être et dissuasive mais également aider à aller chercher de l'information.

Mme LeBel : O.K. Vous avez plusieurs outils, là, au BIG, que l'AMP va maintenant posséder pour agir quand vous constatez un manquement. On peut comprendre qu'il y a diverses catégories de gravité dans le manquement ou de types de manquement. Ça peut aller, j'imagine, de la recommandation de se conformer ou de rectifier jusqu'à l'arrêt de l'exécution du contrat. En règle générale, j'imagine que vous commencez par demander de corriger, j'imagine, ou... Comment ça fonctionne? Juste pour avoir une illustration de votre quotidien... bien, quotidien, oui.

Mme Bishop (Brigitte) : Mon quotidien, oui. Mais vous avez remarqué, c'est que nos rapports publics, on a, bon an mal an, écoutez, entre quatre et six rapports publics, là, où on va recommander formellement et on va déposer ces recommandations-là au conseil de ville où on va annuler un contrat. On fait beaucoup, beaucoup d'interventions, ce que j'appelle en amont, donc au niveau de l'intervention, sans nécessairement arrêter le chantier, ou quoi que ce soit, ça, on en fait beaucoup. C'est ça, c'est généralement ce qu'on va faire, c'est qu'on peut demander immédiatement de corriger le tir, là. On n'attendra pas nécessairement que la situation dégrade lorsque c'est possible de le faire ou lorsqu'il y a une ouverture d'esprit aussi de la part du cocontractant et/ou de la ville dans certains cas.

Mme LeBel : Parce qu'on est tous d'accord, je pense, en théorie, que le fait d'avoir le pouvoir d'arrêter un contrat est un pouvoir extrêmement intéressant puis, souvent, peut-être persuasif aussi dans les discussions que vous avez avec les gens pour se conformer, mais j'imagine que ce n'est pas le pouvoir le plus privilégié, là, en matière d'exécution de contrat. On veut que les chantiers avancent puis on veut que les choses se fassent dans la mesure du possible, là.

Mme Bishop (Brigitte) : Vous avez entièrement raison. Écoutez, j'ai fait... je m'attendais à une question de ce genre. Donc, on a regardé... ou j'ai regardé dans l'ensemble des dossiers qu'on a faits, des rapports publics qu'on a faits, c'est arrivé une fois qu'on a suspendu un contrat. Donc, depuis la création du BIG, c'est arrivé une fois. Et c'était vraiment une situation où il y avait une certaine urgence, et on devait suspendre. Donc, ce n'est certainement pas la... C'est sûr que c'est un... oui, c'est un élément qu'on a, mais généralement on va tenter de dissuader, de discuter. Et, si ça ne va pas, on va aller dans un rapport public, par la suite, qui est beaucoup plus percutant généralement puis qui a une valeur pédagogique pour les autres entrepreneurs privés qui voudraient peut-être tenter la même manoeuvre.

Mme LeBel : Peut-être en terminant, puis c'est intéressant ce que vous venez de dire : Est-ce que vous considérez... Parce que c'est un levier, hein, le fait de pouvoir arrêter un contrat, c'est un levier. Parce que l'objectif de tout le monde, c'est que les gens se conforment, exécutent le contrat correctement puis que le contrat se fasse, parce que, qu'on veut... si on a un contrat, c'est parce qu'on veut que quelque chose se fasse. Mais est-ce que vous considérez qu'il est plus... que votre levier de rendre les manquements... je vais le dire de même, là, je vais simplifier, là, de rendre la situation publique est souvent plus fort que celui de la possibilité ou de la menace d'arrêter le contrat, ou ça s'équivaut, là, en termes de...

Mme Bishop (Brigitte) : Ça s'équivaut, ça s'équivaut. La menace... C'est sûr qu'il n'y a pas un entrepreneur qui veut faire arrêter son contrat puis qui... Donc, on... Parce que, par la suite, écoutez, va venir le rendement, là. Parce que, nous, à Montréal, si on arrête un contrat ou si on... l'entrepreneur peut se voir donner un rendement insatisfaisant, peut se voir mettre sur une liste noire et interdire de faire des contrats avec la ville de Montréal. Donc, l'entrepreneur a beaucoup intérêt à avoir un rendement qui est satisfaisant dans l'exécution des contrats. Donc, souvent, cette menace-là, oui, fonctionne. Comme je vous disais, nous, le rapport public va être généralement... Bon, premièrement, il faut que le manquement soit grave. Et souvent on va le mettre à des fins pédagogiques. Lorsqu'on découvre un stratagème, on va faire un rapport public pour...

Mme LeBel : Informer.

Mme Bishop (Brigitte) : Pour informer, définitivement pour informer. Ça a un aspect qui est, oui, répressif, mais très préventif aussi.

Mme LeBel : Bien, merci. Merci beaucoup, Me Bishop, pour cette conversation.

Mme Bishop (Brigitte) : Merci beaucoup.

Mme LeBel : Merci. Ça va pour moi, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme la ministre. M. le député de La Pinière.

• (17 heures) •

M. Barrette : Alors, rebonjour. Bien, bonjour pour une deuxième fois. À 61, nous avions échangé, vous et moi, puis je vais quand même faire un retour là-dessus, Me Bishop, parce qu'il y a comme une interrogation ici. Comme vous le savez, j'étais l'auteur d'un amendement qui souhaitait que l'AMP ait vos pouvoirs. Je vais y revenir dans un instant.

Mais je me rappelle que je vous avais posé la question suivante : Est-ce que vous considériez que la force de votre intervention provenait, d'abord et avant tout, du fait que vous pouviez débarquer sans avertissement sur le terrain, sur un chantier? Vous m'aviez dit oui, d'où l'importance que vous-même soulevez sur cet élément-là aujourd'hui, comme la Vérificatrice générale l'avait fait la dernière fois. Pas la dernière fois, mais, il y a quelques minutes, elle a noté la même chose.

Alors, c'est sûr que, nous, quand vous nous avez confirmé ça, on l'a enregistré, là. Et non seulement on l'a enregistré, mais on a fait la même lecture dans 66. D'ailleurs, on pourrait se demander comment ça se fait que, dans 61, ce n'était pas là, ces pouvoirs-là.

Ceci étant dit, je n'embarquerai pas dans la comparaison des pouvoirs, parce que, manifestement, là, tout le monde n'a pas la même lecture. On va réfléchir à ça. Puis je comprends ce que vous nous dites, là, mais tout le monde n'a pas la même lecture. Puis je ne remets pas ça en cause, là. Je veux juste voir, dans le fin détail, si c'est équivalent. Par contre, vous avez abordé plusieurs sujets que je veux réaborder avec vous.

Là, je viens de faire mon point sur l'absence de nécessité de déclencheur. Vous êtes un autodéclencheur. Vous pouvez débarquer n'importe quand. Sur la question... et ça, pour moi, c'est important, là, vous, vous êtes le BIG de Montréal, donc vous êtes dans une municipalité. Est-ce que, sur ce plan-là, là, actuellement, il y a un enjeu par rapport à l'AMP? Je m'explique.

Je ne sais pas si vous avez eu la chance ou la malchance de suivre les travaux depuis hier, là. Moi, j'évoque souvent le fait... puis là la question que je veux vous poser, c'est : Ça pose-tu un problème? Le scénario que j'évoque est-il quelque chose qui mérite qu'on s'y attarde? Alors, le voici. À plusieurs reprises, je prends le même exemple. On construit un hôpital, O.K? Là, dans le cas présent, l'exemple que je prends, c'est Vaudreuil. Vaudreuil, c'est l'État, hein? L'État construit un hôpital, mais l'hôpital, à Vaudreuil, est dans un champ, en fait, il est construit dans une ancienne station-service, alors il n'y a pas de drame agricole là, là, c'est une ancienne station-service. Alors, par définition, la municipalité va devoir amener les égouts, l'eau, des bretelles d'accès et construire une rue, à la limite, là, plein de changements qui vont devoir se faire. Donc, c'est un projet qui a des ramifications qu'on va qualifier de nationales pour le donneur d'ouvrage, mais municipales pour ce qui est autour.

Et là la question métaphysique et légale, on va dire, à la limite, même pas philosophique, là... vous, vous avez une expérience d'inspectrice générale au municipal, et là la question, c'est : Oui, mais l'AMP, elle, là, on évoque le fait qu'elle ne peut pas débarquer au municipal. Il n'y a pas de liens qui se font sur les capacités de malversation entre le national, qui donne un contrat, et tous les contrats connexes. Est-ce que l'AMP doit avoir, à votre avis, la capacité de débarquer à la hauteur du municipal, là où il n'y a pas de BIG? Est-ce que vous voyez une utilité là-dedans? Ou, posé différemment, vous en avez vu, vous, sûrement, des contrats nationaux qui ont eu des ramifications municipales. Est-ce que vous voyez un enjeu là? Question très ouverte.

Mme Bishop (Brigitte) : Oui, bien, au niveau du BIG, ce que je peux vous dire, c'est que le BIG, nous, on a... Bon, les juridictions sont... comme vous l'avez mis, effectivement, nos juridictions sont contractuelles et non pas territoriales. Donc, tout contrat avec la ville de Montréal ou les organismes... selon la loi, vont revenir au BIG. D'ailleurs, à cet effet-là, si on regarde dans la Loi sur l'Autorité des marchés publics, l'article 67... 68, excusez-moi, me confère une exclusivité dans les contrats qui touchent Montréal. La question... Oui?

M. Barrette : Me Bishop, permettez-moi de vous interrompre. Je vais changer le scénario en changeant le nom. Là, vous êtes à l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Ils vont finir par construire un hôpital. Ils n'auront pas le choix, il va tomber. Je le sais, j'y ai fait ma pratique. Alors, je sais qu'il est sur le bord de tomber. Alors là, l'hôpital, quand il va être reconstruit sur les terrains de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, c'est un terrain public qui n'est pas... il est au gouvernement, mais ça se pourrait très bien que, dans la reconstruction, on ait besoin de refaire des approches, et ainsi de suite, donc du municipal. Qui va inspecter qui? Et qui devrait inspecter qui?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, écoutez, c'est sûr que le contrat provincial, c'est l'AMP. Si on regarde, c'est l'AMP qui l'a. Et, s'il y a des parties contractuelles qui sont de Montréal, si c'est Montréal qui est signataire de contrats qui sont en lien avec ça, ça va être le BIG. Par contre, dans la... ce que je vois dans 66 puis dans la Loi sur l'Autorité des marchés publics, il y a toujours un pouvoir de délégation, donc il y a des ententes qui peuvent se prendre.

Moi, je peux vous dire que, d'ailleurs... Puis on collabore, là. Il y a d'autres organismes d'intégrité, il y en a dans d'autres municipalités aussi, mais il y a toujours une collaboration puis il y a toujours une discussion entre nous. C'est sûr que, s'il y a des juridictions qui sont concurrentes, il y aura des ententes puis des échanges de bons procédés entre les organismes, là. Puis, écoutez, je parle d'expérience, parce que je m'assois sur ces tables-là. L'AMP, depuis sa création, est venue nous joindre sur nos tables de coordination, et on va se coordonner puis on va...

M. Barrette : À Drummondville, est-ce que l'AMP devrait avoir le pouvoir de regarder la partie municipale parce qu'il n'y a pas de BIG? Bien, je prends Drummondville comme exemple, là.

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, moi, selon moi, ce que... Moi, ce que je comprends de l'article... du projet de loi n° 66, c'est qu'ils l'ont, ce pouvoir-là. Ils peuvent aller voir le contrat et les sous-contrats qui en découlent. Donc, selon moi, ils pourraient aller voir ça. Puis d'ailleurs, l'AMP, on a vu qu'ils ont une juridiction sur des contrats de certaines... de municipalités.

M. Barrette : Écoutez, je comprends ce que vous me dites. Ça demeure quelque chose qui n'est pas clair pour moi à cette étape-ci de la... Mais, comme le temps passe, je vais aller sur un autre sujet. L'enjeu du 20 millions de dollars pour... Parce que je sais que, pour vous... vous regardez ça aussi, les paiements, là. L'enjeu du 20 millions de dollars, est-ce que c'est un... est-ce que ça a un impact sur les possibilités de travers dans la construction?

Mme Bishop (Brigitte) : J'ai entendu, là, les témoignages d'autres parties puis je vais vous dire oui. C'est que j'ai de la misère à comprendre. C'est qu'on a mis de 8 à 20 millions de dollars, ça, c'est dans la loi, mais, en même temps, pour moi, l'infiltration dans l'économie légale ne se fera pas chez des multinationales avec des contrats de milliards, là. Généralement, c'est les petites entreprises qui risquent d'être infiltrées si elles ne sont pas payées. Ils ne peuvent pas... Ils ont beaucoup moins, mettons, d'argent en banque, là, si vous me passez l'expression, donc ils doivent être payés. Donc, c'est une obligation pour faire rouler leurs entreprises, c'est des petites entreprises.

Mais les grosses entreprises qui vont aller chercher des contrats énormes, je doute d'une menace d'infiltration, là. Écoutez, comme je vous dis, d'expérience, c'est vraiment les plus petites entreprises qui ont besoin d'être payées rapidement.

M. Barrette : Et est-ce que la limite, quand même... Est-ce que cette limite-là a une justification comme telle?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, j'imagine. C'est parce que, quand on regarde la façon que le projet de loi est écrit, c'est sûr qu'on parle de... Tu sais, je ne pense pas qu'on va payer «up front» la totalité d'un contrat lorsqu'il est donné. Donc, il y a un certain roulement, puis ça va aller au gré des travaux, là. C'est ce que j'en conclus.

M. Barrette : Il me reste moins de deux minutes. Je ne peux pas faire... compte tenu du dernier témoignage que l'on a eu, je ne sais pas si vous l'avez entendu... les camionneurs.

Mme Bishop (Brigitte) : Non.

M. Barrette : O.K. Les camionneurs sont venus nous dire qu'actuellement, compte tenu du fait que le courtage avait disparu, que la porte était ouverte, et non seulement elle était ouverte, elle était franchie en termes de corruption, collusion, travail au noir, et ainsi de suite. Est-ce que c'est le genre de choses que vous voyez ou avez la capacité de voir dans le transport en vrac?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, je vous dirais que, oui, on est là, puis qu'on surveille, puis qu'on a certaines indications à cet effet-là, là, qu'il y aurait présentement, là, beaucoup... il y a même de l'intimidation, là, qui nous a été rapportée. Donc, effectivement, il y a certaines problématiques.

M. Barrette : Très bien.

Mme Bishop (Brigitte) : Mais...

M. Barrette : Bien, votre réponse me satisfait. Une dernière chose, là, il me reste moins d'une minute. Vous avez beaucoup insisté sur votre capacité de pouvoir aller chez le cocontractant, hein? C'est important dans votre procédure. Est-ce que... Parce que, là, cocontractant, c'est sous-traitant, sous-traitant, sous-traitant. Est-ce que ça, actuellement, à l'AMP, dans les pouvoirs qui lui sont conférés, ça couvre correctement ça? Puis là je reprends mon exemple de quelque chose qui est national puis qui débarque à quelque part dans le municipal.

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, ça couvre ça. Comme je vous disais tantôt, ça couvre ça. C'est juste que le chemin est différent. C'est qu'on prend... pour se rendre au cocontractant, on va automatiquement et par définition constater qu'il y a un manquement, que l'organisme public a fait un manquement, donc que ce soit de surveillance ou dans... forcément par surveillance, et c'est ce qui nous donne... à aller vers le cocontractant. C'est juste ça, le petit chemin. Tu sais, on fait juste donner la... sur le contrat au... juste le contrat, sans nécessairement donner un...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Mme Bishop (Brigitte) : ...attribuer un... à l'une des parties, ce serait préférable.

M. Barrette : Merci beaucoup, Me Bishop.

Mme Bishop (Brigitte) : Merci.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Simard) : Merci. Alors, avant de céder la parole au député de Jonquière, tout juste avant de partir, le député de Rosemont me disait : Puis-je laisser mon temps à mon collègue de Jonquière? Alors...

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Bien, écoutez, tout est possible. Pour que...

M. Barrette : On consent.

Le Président (M. Simard) : On peut splitter en trois, on peut splitter en deux, on peut splitter en un. Avec le consentement, tout est possible. Je ne voudrais pas qu'on prenne plus de temps à définir de ça que le temps à partager lui-même, néanmoins.

M. Barrette : Je veux juste... une question, ça va prendre 15 secondes.

M. Gaudreault : Oui, mais...

M. Barrette : Je te laisse tout le reste.

M. Gaudreault : Non, mais c'est parce que la pratique, quand il y a un des... soit deuxième ou troisième opposition qui s'en va, c'est l'autre qui ramasse.

M. Barrette : Ah! non, non, il y a des règles pour ça.

M. Gaudreault : Bien, c'est...

Mme LeBel : ...

M. Gaudreault : Parce qu'à 2 min 45 s, là...

M. Barrette : ...

Le Président (M. Simard) : Bon, écoutez, on a débattu. Est-ce qu'il y a consentement ou pas pour un partage de temps?

M. Gaudreault : Pour un partage de temps?

Le Président (M. Simard) : Vous faites partie du consensus ou pas?

M. Barrette : Oui, partager.

Le Président (M. Simard) : Partager à trois.

M. Barrette : Donc, je fais partie du partage.

Le Président (M. Simard) : Puis je vois qu'il y en a qui ne veulent pas. Alors, il n'y a pas de partage de temps.

M. Barrette : Moi, j'ai juste besoin de 15 secondes.

Mme LeBel : ...

Le Président (M. Simard) : Oui, mais...

M. Barrette : C'est parce qu'elle ne veut pas que je pose une question.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, conséquemment...

M. Barrette : Je suis prêt à prendre 15 secondes, M. le Président.

M. Gaudreault : Donc, il n'y a pas de consentement.

Le Président (M. Simard) : Non, non, écoutez, collègues, s'il vous plaît, là, l'atmosphère était bonne. Il n'y a pas le consentement.

M. Barrette : Hein? Voyons!

Le Président (M. Simard) : Alors, M. le député de Jonquière, je suis au regret de vous dire que vous disposez du temps convenu de 2 min 30 s.

M. Barrette : Je n'ai pas dit que je ne consentais pas.

Le Président (M. Simard) : Bien oui, vous venez de le dire.

M. Barrette : Bien non, je n'ai pas dit... je n'ai pas prononcé : Je ne consens pas.

Le Président (M. Simard) : Bien, consentez-vous ou vous ne consentez pas?

M. Barrette : Oui, oui, je consens.

Le Président (M. Simard) : Vous consentez? Bon, bien, M. le député, comme le député de Chomedey m'avait dit qu'il consentait, lui, à donner tout son temps au député de Jonquière, cher collègue, vous disposez de cinq minutes. Merci, chers collègues. À vous la parole.

M. Gaudreault : J'ai combien de temps, finalement?

Le Président (M. Simard) : Cinq minutes. 2 min 30 s plus 2 min 30 s.

M. Gaudreault : Bon.

M. Barrette : Puis là il faut que tu nous dises merci, là.

M. Gaudreault : Merci à tous. Je vous aime. Bon. Bonjour, Mme... Me Bishop. Ça me fait plaisir de vous entendre. La Vérificatrice générale, qui est venue nous rencontrer, nous dit que, concernant les contrats dans le domaine municipal, et je cite son mémoire, là : «...je comprends que l'Autorité des marchés publics aura un pouvoir de recommandation auprès du conseil municipal lorsque les contrats relèveront de la municipalité.» Et elle nous dit plus loin : «Il faut [...] considérer que certaines instances de surveillance sont en place dans les grandes villes — évidemment, comme en ce qui vous concerne. À cet égard, il [serait] important qu'une coordination soit faite en vue d'optimiser les résultats de leurs interventions.» Alors, c'est comme une mise en garde, je dirais, que la Vérificatrice générale nous lance ou nous fait pour éviter du piétinement ou du chevauchement.

Alors, moi, j'aimerais savoir comment vous comprenez cette mise en garde de la Vérificatrice générale. Qu'est-ce que vous comprenez de ça, quand elle nous dit «une coordination soit faite en vue d'optimiser les résultats»? Donc, comment vous voyez cette coordination avec l'AMP et vous-mêmes?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, écoutez, ça va être avec l'AMP, nous-mêmes et les autres bureaux d'intégrité, là. Si on parle de municipal, il y a Saint-Jérôme, Laval, Longueuil qui ont des bureaux. Mais présentement, comme je vous dis, nous nous rencontrons, nous avons des tables de coordination, on échange même le renseignement. Lorsqu'un pattern est découvert, on le partage. Écoutez, c'est... présentement, ça fonctionne très bien, comme on dit. Je pense qu'effectivement, avec des pouvoirs accrus, moi, je pense que ça va optimiser, parce que l'AMP, maintenant qu'ils vont avoir des pouvoirs sur l'exécution des contrats, ils vont pouvoir aussi constater des choses que peut-être que nous, on ne constate pas, parce qu'eux c'est à plus grande échelle, là. Et, à ce moment-là, moi, je trouve ça intéressant.

Et, comme je vous dis, c'est que présentement on est capables, entre nous, de s'entendre. On va se faire des protocoles, c'est sûr, parce que, si, par exemple, on devra échanger plus de renseignements, peut-être des renseignements un peu plus nominatifs, il n'y a rien qui nous empêche de faire des protocoles d'entente. Mais présentement ça fonctionne très bien. La table de concertation est là depuis début 2018, même peut-être 2017, et ça fonctionne très bien. Et l'AMP est un joueur très généreux qui vient à notre table aussi, là.

M. Gaudreault : Mais, s'il s'avère que le projet de loi n° 66 est adopté, là on parle quand même de délais assez rapides. Donc, je comprends que vous êtes capable de mettre en place des procédures entre les deux institutions pour partager ces informations ou ces bonnes pratiques dont vous nous parlez.

Mme Bishop (Brigitte) : Oui. Puis on se parle, d'ailleurs, de toute façon. Moi, dans ma loi constitutive, je dois transmettre des informations, déjà, à l'AMP. Par exemple, si je soulève des manquements graves d'une entreprise, c'est l'AMP qui va... je vais transmettre l'information à l'AMP, qui va pouvoir faire l'enquête pour mettre l'entreprise sous le registre des entreprises non admissibles. Donc, on a déjà ce type d'échange d'information.

Écoutez, comme je vous dis, c'est un joueur de plus, avec plus de pouvoirs dans la vérification de l'exécution contractuelle. Moi, je pense que c'est juste positif, c'est juste profitable pour tout le monde.

M. Gaudreault : Très bien. Dans son mémoire, l'AMP nous dit que, les pouvoirs dévolus dans le cadre du projet de loi n° 66, ils aimeraient bien les voir intégrés dans leur loi constitutive de manière permanente. Alors, je comprends que... Qu'est-ce que vous... Quel est votre avis là-dessus?

Mme Bishop (Brigitte) : Bien là, écoutez, comme je vous disais, c'est sûr qu'avoir, tu sais, un organisme de lutte pour l'intégrité qui a autant de pouvoirs que nous, c'est profitable, là, c'est sûr. Maintenant, je suis d'accord avec eux que ça devrait être permanent. Mais, d'un autre côté, bon, c'est un choix qui est fait. Mais moi, comme je vous dis... Bien, moi, ce que je vois, c'est que je vois que c'est une opportunité qui peut être intéressante aussi. C'est des deux côtés, là.

Je vous donne mon opinion, là, à titre d'inspectrice générale. C'est que c'est très rare qu'on a l'opportunité de tester une loi avant qu'elle rentre dans notre loi constitutive. Donc, je trouve que 66, si on le voit du côté d'une opportunité, ça peut être une opportunité. Parce qu'en testant 66, c'est qu'à ce moment-là l'AMP va pouvoir avoir une critique et peut-être même demander des pouvoirs additionnels ou qu'on corrige certaines lacunes dans sa loi constitutive par la suite. Donc, ça peut être...

C'est un peu comme... C'est un véhicule qu'on donne à l'AMP, mais ils ont l'occasion de faire le test routier avec le véhicule avant... Ça fait que je trouve ça... ça peut être intéressant, vu de... En tout cas, je trouve qu'on peut saisir cette opportunité-là qui peut être intéressante.

M. Gaudreault : Donc là, c'est la théorie du laboratoire du projet de loi n° 66...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Gaudreault : ...mais d'un point de vue positif, selon vous. Donc, pour le rendre permanent, vous préféreriez le faire dans une autre procédure législative que dans celle-ci...

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Gaudreault : ...que dans le projet de loi n° 66. Donc, une loi...

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Gaudreault : ...qui vient réformer la loi sur l'AMP en tant que telle.

Le Président (M. Simard) : Bon, merci.

Mme Bishop (Brigitte) : Bien, bien honnêtement, je dois vous avouer que je ne me sens pas...

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci, Madame. Merci beaucoup. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Me Bishop, bonjour.

Mme Bishop (Brigitte) : Bonjour.

M. Ouellette : J'aurai juste une question. Puis, d'ailleurs, c'est pour ça que j'ai été aussi généreux avec mon collègue de Jonquière, pour qu'il puisse récupérer le temps de notre collègue de Maisonneuve... de Rosemont, pas Maisonneuve-Rosemont. Tu sais, je ne sais pas pourquoi j'ai ça dans la tête.

Vous avez pris... Vous avez fait état, dans votre mémoire, vous avez parlé de la protection des lanceurs d'alerte. C'est quelque chose dans 66 qu'on ne voit pas. Vous semblez avoir une préoccupation, dans une accélération de 181 projets d'infrastructure, que... puis avec l'expérience que votre bureau a sur les lanceurs d'alerte puis les représailles, qu'il pourrait y avoir dans des gros chantiers. Vous ne nous avez pas fait des recommandations, vous nous avez dit : La Protectrice du citoyen a fait un rapport, a soumis des recommandations.

Il y a-tu des choses particulières, dans la minute qu'il me reste et qu'il vous reste, que vous voudriez voir inclure dans le projet de loi n° 66 qui amélioreraient de beaucoup les intrants des 181 projets?

Le Président (M. Simard) : Parce qu'il n'y aura plus de temps de réponse.

Mme Bishop (Brigitte) : Oh! bien, écoutez, moi, mes recommandations que je fais, c'est pour... c'est vraiment concernant la loi, pour qu'elle s'applique à tout le monde, dont à moi, pas juste 66 à l'AMP. Je pense que c'est... Mais l'ensemble des recommandations, je les trouve fort appropriées.

Est-ce que c'est fini? Parce que...

M. Ouellette : Ah! Monsieur... Oui? Elle aurait fini, mais là elle ne le sait pas, si elle a fini ou elle n'a pas fini...

Mme Bishop (Brigitte) : Elle ne sait pas si elle a fini, quoi?

Le Président (M. Simard) : Je m'excuse, il y a une petite confusion dans le temps restant, là. Il vous reste 15 secondes.

M. Ouellette : 15 secondes, Me Bishop.

Mme Bishop (Brigitte) : Mais, comme je vous dis, c'est que moi, je trouve que ce serait vraiment dans la loi qu'il faudrait que les changements se fassent, donc, en conformité avec les recommandations de la Protectrice du citoyen, notamment lorsqu'on parle de la suspension qu'on pourrait faire auprès d'un lanceur d'alerte. Là, j'ai fini, là, je pense.

M. Ouellette : Non, mais il va falloir le deviner, là.

Le Président (M. Simard) : Vous lisez dans mes pensées, Mme Bishop.

M. Ouellette : Mais on va prendre les recommandations de la protectrice et on va regarder si effectivement on n'est pas capable de...

Le Président (M. Simard) : Je ne voulais pas vous couper. Je ne voulais pas vous couper deux fois de suite, ça aurait été vraiment impoli. Merci beaucoup de votre patience.

M. Ouellette : Ça, c'est des représailles, Me Bishop. Ça a l'air de ça, des représailles.

Le Président (M. Simard) : Alors, Me Bishop, nous sommes heureux de terminer cette présentation dans le sourire et la bonne humeur. Merci de l'énergie que vous avez insufflée.

Sur ce, nous allons suspendre, en fait, même, ajourner nos travaux jusqu'à demain, le 22, et on se retrouve quelque part après les affaires courantes. Donc, ce n'est pas le temps de partir en vacances. Au revoir.

(Fin de la séance à 17 h 20)

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