(Dix-sept heures six minutes)
Le
Président (M. Bernier) : Alors, bonjour à tous. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Et bien sûr, comme d'habitude, je
demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de poursuivre le
débat sur le discours du budget conformément à l'article 275 du règlement.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M.
le Président. Mme de Santis (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Hardy (Saint-François).
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, je souhaite la bienvenue à tous les parlementaires qui vont participer à ce
débat. M. le ministre, les représentants des oppositions, aussi de la première et la deuxième opposition, bienvenue, le
personnel également du ministère des Finances qui vous accompagne, qui nous
accompagne afin de bien vouloir répondre à toutes nos questions, le personnel
de l'Assemblée nationale. Donc, bienvenue à vous tous.
Donc, avant d'entreprendre nos travaux, je vous
informe des règles du débat que nous amorçons aujourd'hui. La répartition des temps
de parole pour les 10 heures sera la suivante : le gouvernement,
4 h 45 min; l'opposition officielle, 2 h 51 min; deuxième
groupe d'opposition, 1 h 54 min; députés indépendants,
30 minutes.
Nous débuterons par les remarques préliminaires
du ministre, du porte-parole de l'opposition officielle et du porte-parole du deuxième groupe
d'opposition, qui disposeront chacun
de 20 minutes. Le temps inutilisé sera pris à même les enveloppes de temps respectives de chacun des groupes parlementaires. Le temps inutilisé par un groupe parlementaire sera ajouté à son
temps pour le débat. Donc, si les remarques préliminaires sont moins de
20 minutes, elles seront ajoutées à l'enveloppe de temps.
Nous procéderons par blocs de 20 minutes,
incluant les questions et les réponses. J'appliquerai la règle de l'alternance
entre les députés du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés
de l'opposition.
Enfin, selon la pratique établie à ce jour,
l'étape du débat débutera par une intervention du porte-parole de l'opposition
officielle au moment où nous amorcerons nos échanges.
Remarques préliminaires
M. le
ministre, sans plus tarder, vous disposez d'un maximum de 20 minutes pour
vos remarques préliminaires. La parole est à vous.
M. Carlos J Leitão
M. Leitão : Très bien. Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, chers collègues de la députation
ministérielle, chers collègues et députés des partis d'opposition, nous aurons
le plaisir, au cours des prochains jours, de poursuivre ensemble le débat amorcé avec le dépôt du plan économique et du budget
2015-2016. Ce plan est le résultat des efforts soutenus consacrés par
notre gouvernement au redressement des finances publiques et à la relance de
l'économie depuis notre arrivée au pouvoir, il y a tout juste un an.
Les Québécois
aspirent à une prospérité durable, dont une des conditions de base est
l'assainissement des finances publiques.
Nos actions visent à leur donner cette prospérité. À cet égard, nous respectons
notre engagement, le Québec retrouvera enfin en 2015-2016 l'équilibre
budgétaire. Cette étape importante ne constitue pas un point final. Bien au
contraire, elle représente un départ et imprime un nouvel élan pour le Québec.
La stabilité
financière que nous redonnons au Québec constitue une base solide à la croissance de l'économie et de l'emploi et ouvre la voie à la réduction du fardeau fiscal de tous les Québécois. Cette réduction du fardeau fiscal passera, dans un premier temps, par l'abolition graduelle de la contribution santé à partir du
1er janvier 2017. Les contribuables à faibles revenus verront cette
contribution complètement éliminée dès la première année. À terme, c'est
1,7 milliard de dollars qui retourneront dans les poches des
4,5 millions de contribuables québécois d'ici 2019.
• (17 h 10) •
Avant de
présenter les principales mesures du plan économique, permettez-moi de dresser
un bref portrait des finances du Québec.
Les gestes posés dans le budget de juin dernier et dans notre mise à jour
économique de décembre ont permis de réduire le déficit prévu de
5,9 milliards pour le ramener à 2 350 000 000 $ pour
l'exercice 2014-2015, c'est-à-dire la cible que nous nous étions fixée en juin
dernier. Les résultats des derniers mois ont démontré notre capacité à
maintenir la croissance des revenus à un niveau supérieur à celle des dépenses.
Ce contrôle rigoureux des dépenses et de la
croissance des revenus assureront le maintien de l'équilibre budgétaire au
cours des prochaines années.
Autre élément
important, le poids de la dette du Québec diminuera au cours du prochain
exercice pour s'établir à 54 % du PIB.
Cette réduction de 0,9 point de pourcentage marque un renversement de
tendance, alors qu'il n'avait cessé d'augmenter
depuis 2009. Nous maintenons ainsi l'objectif de ramener le poids de la dette à
45 % du PIB en 2025-2026.
Parallèlement
à nos actions pour stimuler l'économie, nous poursuivons nos efforts pour
contrôler les dépenses et assurer une
saine gestion des finances publiques. En plus de la réforme importante en santé
que notre gouvernement met en oeuvre, le plan économique prévoit
d'autres actions pour poursuivre l'allègement des structures administratives et
l'efficacité de leur fonctionnement. Les
efforts demandés en 2015-2016, notamment au réseau de la santé et de
l'éducation, sont importants, mais ils sont
aussi proportionnels à la capacité de payer des Québécois. Nous ne financerons
plus nos services sur la dette, c'est-à-dire sur la carte de crédit de
nos enfants, ni en taxant davantage les Québécois.
Les réformes
structurelles importantes entreprises par notre gouvernement vont permettre de
mieux maîtriser l'augmentation des coûts de
système et de mieux contrôler les dépenses sans affecter les services,
notamment en santé et en éducation.
C'est par une gestion plus rigoureuse des dépenses, mais aussi par une plus
forte croissance de l'économie que nous
retrouverons une plus grande marge de manoeuvre dans le financement de nos
services. La croissance économique, justement,
a amorcé un net redressement au Québec au cours de la dernière année, soutenue
notamment par les exportations internationales
de biens, qui ont bondi de presque 11 %. Après deux ralentissements
successifs, une croissance du PIB de seulement
1 % en 2013, la tendance s'est inversée, et nous prévoyons une croissance
qui devrait s'accélérer à 2 % en 2015.
L'effet
de nos actions pour relancer l'économie s'est fait sentir également sur
l'emploi. Depuis le début de notre mandat, soit de début mai 2014 à
la fin mars 2015, le Québec a créé près de 57 000 nouveaux emplois.
Le contexte économique demeure favorable et
contribuera à soutenir nos exportations et la demande intérieure. Nous allons
poursuivre nos actions pour que le Québec profite pleinement de cette reprise.
Le
plan économique que nous proposons a pour objectif d'assurer l'essor et le
développement économique et social du
Québec à long terme. Il vise notamment à accélérer la croissance grâce à
l'allègement du fardeau fiscal, et à l'investissement
des entreprises, et à la création d'emplois. Plus spécifiquement, le plan
économique du Québec présente des mesures pour alléger le fardeau fiscal
des particuliers et des entreprises dans le but d'encourager le travail et
l'investissement; deuxièmement, de stimuler l'investissement privé et favoriser
le développement économique de toutes les régions du Québec; et, troisièmement,
encourager une plus grande participation au marché du travail en assurant une meilleure adéquation entre la
formation et l'emploi. L'ensemble des actions prévues dans ce plan
totaliseront 3,4 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années,
dont 2,5 milliards en allègements fiscaux. Le plan économique du Québec
engendrera des investissements de 13 milliards de dollars.
Le plan économique
propose trois mesures qui permettront d'alléger le fardeau fiscal des Québécois
de plus de 2 milliards de dollars au
cours des cinq prochaines années. En plus de l'abolition de la contribution
santé, nous mettrons en place un
bouclier fiscal qui protégera les travailleurs réalisant un effort additionnel
de travail. Ce dispositif permettra de limiter la perte de prestations
fiscales liée à une augmentation de leurs revenus. L'objectif est de
récompenser les travailleurs et de leur permettre de retirer davantage de leur
travail. Nous bonifierons également, sur une période de trois ans, le crédit
d'impôt à l'égard des travailleurs d'expérience afin de les inciter à rester
sur le marché du travail ou à le réintégrer.
Le plan économique
prévoit également une diminution du fardeau fiscal des sociétés, qui, à compter
de 2019-2020, atteindra 215 millions de dollars par année. Pour y
parvenir, le gouvernement privilégiera des mesures d'application générale rejoignant un maximum d'entreprises qui pourront
ainsi bénéficier d'une fiscalité plus compétitive. Nous voulons, tout
d'abord, offrir aux PME, qui sont le principal moteur de l'économie québécoise,
un régime fiscal propice à leur croissance,
à l'investissement et à la création d'emplois. À cet égard, deux mesures
entreront en vigueur à compter du
1er janvier 2017 : la réduction de 8 % à 4 % du taux
d'imposition déjà annoncée pour les PME manufacturières sera élargie au secteur primaire, et la réduction
graduelle de 2,7 % à 2,25 % du taux de la cotisation au FSS pour les
PME du secteur des services.
Le gouvernement prévoit
également consacrer 51 millions de dollars au cours des cinq prochaines
années à des initiatives visant à favoriser
la relève entrepreneuriale. Par cette mesure, nous voulons faciliter le
transfert d'entreprises familiales entre personnes liées du secteur
manufacturier et du secteur primaire, ce qui profitera notamment au secteur
agricole.
Le
plan économique propose également des mesures qui favoriseront la croissance de
l'investissement pour toutes les
entreprises, dont la réduction graduelle du taux général d'imposition sur le
revenu des sociétés de 11,9 % à 11,5 %, le maintien
jusqu'en 2022 du crédit d'impôt à l'investissement relatif au matériel de
fabrication et de transformation pour les régions.
Nous
agissons également pour que le Québec conserve sa place de
chef de file dans plusieurs domaines stratégiques ou sensibles en
agissant sur l'efficacité de certaines aides fiscales sectorielles. Nous
majorons le crédit d'impôt pour la production de titres multimédias et le
crédit d'impôt pour le développement des affaires électroniques. Et nous bonifions le taux de certains crédits d'impôt du
secteur de la culture pour favoriser les productions originales
québécoises.
Par
ailleurs, dans le cadre du plan économique, le gouvernement maintient son appui
aux fonds des travailleurs en leur
donnant les moyens nécessaires pour poursuivre leur contribution au
développement économique du Québec, en particulier dans les régions, et
pour favoriser l'épargne des Québécois.
Le deuxième volet de
notre plan économique contient plusieurs mesures visant à favoriser la
performance du marché du travail. La
croissance du Québec, au cours des prochaines années, devra composer avec
l'enjeu démographique auquel nous faisons face. Nous devons assurer une
meilleure adéquation entre la formation et l'emploi et favoriser la participation de tous au marché du travail. Des
mesures totalisant près de 125 millions de dollars sur cinq ans
permettront de soutenir la formation de
l'emploi. Ainsi, le seuil d'assujettissement à la loi du 1 % pour les
entreprises passera de 1 à 2 millions
de dollars de masse salariale, ce qui constituera un important allègement
réglementaire pour environ 8 000 entreprises.
Deuxièmement,
de nouvelles sommes sont aussi prévues pour répondre aux besoins de formation
actuels et futurs des entreprises, notamment
en donnant un rôle stratégique à la Commission des partenaires du marché du
travail.
Troisièmement,
certains programmes de formation seront adaptés afin de mettre un accent
particulier sur l'apprentissage en milieu de travail, et le crédit
d'impôt pour stage en milieu de travail sera bonifié afin d'inciter les
employeurs à recourir davantage à des stagiaires.
Finalement, un nouveau programme, Objectif emploi,
encouragera une plus grande participation de la main-d'oeuvre disponible
au marché du travail.
Notre gouvernement
est convaincu que l'immigration est un atout essentiel pour soutenir le
développement économique du Québec. Dans ce
contexte, le gouvernement travaille à l'élaboration d'une nouvelle politique en
matière d'immigration, de diversité et d'inclusion que ma collègue présentera
bientôt. Cette politique sera accompagnée d'une
stratégie qui proposera des actions concrètes visant à renforcer la
participation des nouveaux arrivants au marché du travail, notamment grâce à une meilleure
reconnaissance de leurs compétences. Des investissements de 22,5 millions
de dollars sont prévus au cours des trois prochaines années pour la mise en
oeuvre de cette stratégie.
• (17 h 20) •
Le
plan économique prévoit des initiatives totalisant 406 millions de dollars au cours des cinq prochaines années pour
stimuler les investissements privés dans plusieurs secteurs de l'économie québécoise,
et ce, autant pour les entreprises d'économie sociale que les PME et les
grandes entreprises.
Le
gouvernement investira 160 millions de dollars au
cours des prochaines années pour, notamment,
mettre en place le nouveau congé fiscal bonifié pour les
grands projets d'investissement; deuxièmement, implanter la Stratégie québécoise
de développement de l'aluminium; troisièmement, réaliser un
nouveau plan d'action gouvernemental en économie
sociale; et, finalement, appuyer le secteur de l'aérospatiale et le secteur
pharmaceutique.
Nous
dévoilerons dans quelques semaines les détails de notre Stratégie maritime,
impliquant des investissements de
plus de 1,5 milliard de dollars d'ici 2020. Cette stratégie mettra à contribution
tous les acteurs concernés tant par la mise en valeur et la protection
de la ressource marine que par le développement des secteurs de l'industrie
maritime. Dans le prolongement de la
Stratégie maritime, nous avons aussi prévu des mesures pour soutenir le développement et la diversification du tissu
industriel de la région de la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine. Nous voulons ainsi aider au
développement économique des Îles-de-la-Madeleine en tenant compte de
leur caractère spécifique.
Comme
vous le savez, M. le Président, la Société du Plan Nord est entrée
officiellement en fonction le 1er avril. Le gouvernement a
d'ailleurs rendu publics la semaine dernière les détails sur le redéploiement
du Plan Nord. Au cours des cinq prochaines
années, les interventions totaliseront 1,3 milliard, soit
900 millions en investissement pour des projets d'infrastructure
stratégiques, 400 millions provenant du Fonds du Plan Nord pour la mise en
oeuvre d'initiatives prioritaires et pour
l'administration de la Société du Plan Nord. En y ajoutant les initiatives
entièrement financées par les différents
ministères et organismes ainsi que par leurs partenaires, les interventions
réalisées totaliseront près de 2 milliards à l'horizon 2019-2020. Au total, les investissements publics et privés
totaliseront plus de 50 milliards à l'horizon 2035.
Dans
la même veine, le gouvernement prévoit également des mesures concernant la mise
en valeur des ressources naturelles,
notamment les mines et les forêts. Le plan économique présente différentes
mesures pour favoriser l'exploration minière
visant notamment à soutenir l'activité et à faciliter la caractérisation des
territoires. Le gouvernement consacrera également 542 millions de dollars en 2015-2016 afin de valoriser la
forêt québécoise et la faune. Un soutien additionnel à la vitalité
économique des régions forestières est aussi prévu par l'entremise
d'investissements du Fonds Valorisation Bois
dans le secteur des pâtes et papiers et par le maintien de l'accessibilité aux
terres du domaine de la protection... et la protection, et la
conservation de la ressource faunique.
Parce
que l'égalité des chances fait partie intégrante des conditions préalables à la
croissance et à la prospérité, notre plan économique contient un volet
social important. Le plan économique prévoit des investissements totalisant
284 millions de dollars pour améliorer les conditions de logement des plus
démunis. Ces investissements permettront la
construction de 1 500 nouveaux logements sociaux dans le cadre du
programme AccèsLogis, mais également l'ajout de 5 800 nouvelles
unités d'ici 2020 dans le cadre du Programme de supplément au loyer. Avec ces
nouveaux montants, ce sont
7 300 familles de plus qui auront accès à un logement abordable, dont
1 000 familles additionnelles dès cette année. Le gouvernement
donne également suite à un engagement en annonçant l'instauration, dès le
1er janvier 2016, d'un nouveau programme d'aide aux aînés pour le
paiement des taxes municipales.
La
lutte à l'intimidation est également une préoccupation importante de notre
gouvernement. C'est pourquoi des crédits additionnels de
4,4 millions seront dédiés au financement du plan d'action pour lutter
contre l'intimidation, qui sera déposé prochainement. Ce plan découle
directement du forum tenu en septembre dernier et est le fruit d'un engagement
personnel du premier ministre.
Alors,
en conclusion, M. le Président, un an après notre arrivée au pouvoir, nous
pouvons nous réjouir du chemin parcouru et des résultats obtenus. Nous
avons accepté les remises en question afin d'éliminer le déficit et de rétablir
la solidité financière du Québec.
Nous avons construit notre action économique sur des bases solides en rétablissant d'abord
l'équilibre budgétaire. Nous parvenons aujourd'hui à franchir le dernier droit,
cette étape importante, sans hausse de taxe
ni d'impôt, comme nous nous étions engagés à le faire dans la mise à jour économique
de décembre dernier. Nous prenons acte des efforts consentis pour
atteindre ce résultat et les reconnaissons à leur juste valeur. Ensemble, nous
redonnons au Québec sa capacité de faire des choix et de financer les services
et les projets qui lui importent.
À partir de cette
solidité retrouvée, ce budget engage un ambitieux plan économique proposant de
puissants ressorts pour l'action. Les
leviers que nous mettons en place permettront de bâtir l'avenir plutôt que de
le subir. Ce budget marque ainsi une étape majeure vers un Québec plus
prospère, plus fort, plus confiant et plus juste.
M. le Président, je souhaite maintenant que nous abordions nos travaux dans un esprit
d'ouverture et de respect et que nos échanges soient constructifs. Je
suis convaincu que tous mes collègues des oppositions pourront mesurer le chemin parcouru au cours de la dernière année et qu'ils
appuieront nos efforts en votant en faveur de ce budget, qui vise à redonner un
nouvel élan au Québec. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de votre présentation. M. le député de Rousseau, la parole est à vous. Vous avez une
période de 20 minutes, maximum.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, tout d'abord, je voudrais saluer les collègues autour de la table et leur dire que j'aborde ce débat en commission parlementaire dans un esprit constructif. Le ministre
peut être assuré de tout mon respect.
Maintenant, de là à aller jusqu'à voter pour le budget,
je crois qu'il y a une marge qui ne sera pas franchie de ce
côté-ci, en tout cas
Je voudrais
aussi saluer les fonctionnaires qui accompagnent le ministre
et puis leur dire que je sais tout le bon travail qu'ils font et que, s'il
y a quelque chose qui n'est pas bien dans le budget, ce n'est pas de leur faute.
Une voix : ...
• (17 h 30) •
M. Marceau : O.K. M. le Président, je vais essayer d'aller
assez rapidement, faire le tour de quelques points. Un premier qui est important,
je pense, c'est que, bien sûr, le gouvernement a déposé un budget. Un budget,
c'est un plan, c'est ce qu'on annonce qu'on
va faire pour l'année qui vient, et je veux simplement rappeler à tout le monde
que ça n'est pas encore un résultat. Le budget, ce ne sont pas des états
financiers, c'est le plan de ce qu'on entend faire pour l'année, le chemin
qu'on entend parcourir, qui pourrait mener
éventuellement à l'équilibre budgétaire. On sera à même de constater l'an
prochain, à peu près aux mêmes dates, si, effectivement, on a atteint
l'équilibre budgétaire.
Maintenant,
je pense que vous m'avez déjà entendu vous dire que j'ai un certain doute quant
au fait qu'on va parvenir à atteindre
l'équilibre budgétaire. De la manière, en tout cas, qui est décrite dans la
documentation du budget, je le redis,
je pense que le cadre financier est sensiblement étiré. Qui serait peut-être un
anglicisme de «stretché», mais donc c'est étiré, et étiré des deux
côtés, M. le Président. Étiré, tout d'abord, du côté des revenus, puisque le
gouvernement, dans le document, prévoit une
croissance du PIB nominal de 3,8 % — puis le PIB nominal, on le sait, c'est une
espèce d'élément de base, là, pour mesurer
la croissance des revenus, évidemment, c'est une partie de l'explication, ce
n'est pas toute l'explication, mais
il n'en demeure pas moins que c'est un facteur important — et la moyenne du secteur privé, là, c'est de 3,5 %. Alors, on aura l'occasion d'y
revenir, là, puis de savoir pourquoi le gouvernement a inscrit un 3,8 %, alors
que la moyenne du secteur privé, c'est
3,5 %. Mais, quand même, ce qu'il faut comprendre puis retenir, c'est que,
du côté des revenus, en tout cas, on n'est pas du côté conservateur de
la ligne, on est du côté optimiste.
Puis, du côté
des dépenses, la prévision de croissance des dépenses consolidées pour cette année est de 1,5 %, 1,5 %. En
fait, pour l'année qui vient de se terminer, là, 2014-2015, les dépenses
s'établissaient, là — en
tout cas, les résultats préliminaires — à
2,9 % et, aujourd'hui, elles seraient... pour l'année qui commence, là,
on entend appliquer un 1,5 %.
Moi, je pense que ce n'est pas possible d'arriver à des
chiffres comme ceux-là sans couper drastiquement dans les services à la population. Puis, évidemment, les deux secteurs qui sont les plus touchés puis qui sont les plus
importants sont la santé et l'éducation. En
santé, on prévoit un 1,4 %. 1,4 % de croissance des dépenses en
santé, ça ne s'est jamais vu en 15
ans. Par ailleurs, évidemment — puis
ça, je pense qu'il n'y a pas grand monde qui s'enfarge là-dedans — c'est très, très loin du 4 % qui était promis en campagne
électorale, là. 4 % en campagne électorale, 1,4 % dans le budget. En
éducation, on prévoit 0,17 % cette année, on prévoyait 3,5 % dans le
cadre financier du Parti libéral.
Bon, moi, je
vous dis simplement, je ne crois pas que ce soit réalisable sans que les
Québécois souffrent. En tout cas, certainement en santé, c'est une
évidence pour moi. J'aurai l'occasion de poser des questions. Vous savez, M. le
Président, je n'apprends rien aux gens qui nous écoutent en disant que le
ministre des Finances, c'est aussi un peu un ministre
de la Santé, et il doit s'intéresser de façon très, très particulière à la
santé, il doit connaître ce secteur-là mieux qu'à peu près tous les autres, puisque c'est la moitié du budget
quasiment qui est... j'exagère, mais une grande partie du budget qui y est consacrée, et il doit être très
familier avec ces concepts-là. Or, j'aurai quelques questions là-dessus
en temps et lieu. Mais je retiens, moi, pour
l'instant qu'à 1,4 %, dans un contexte de croissance de la population,
dans un contexte de vieillissement de
la population, dans un contexte d'inflation des prix dans le secteur de la
santé, pour moi, c'est quasiment impossible, à moins d'avoir la volonté
de couper dans les services.
Alors, je
reviens à ce que je disais, quand je dis qu'on est étiré, on est étiré du côté
des revenus par des prévisions très
optimistes puis, du côté des dépenses, on est sérieusement, sérieusement dans
le... bien, en tout cas, d'après moi, on est dans le monde de ce qui est irréalisable. Je vous regarde, puis vous
avez, M. le Président... Je ne suis pas en train de vous dire, là — je veux juste être bien clair — qu'on ne pourrait pas parvenir, au Québec, à
mener à bien un certain nombre de réformes puis, au bout de quelques années, en
arriver à avoir des taux de croissance qui soient beaucoup plus faibles que
ceux qu'on a observés dans le passé de façon
historique. Je ne dis pas, là, qu'on est condamnés à rester à 4 % ou à
4,5 %, je ne dirai jamais ça, mais je
dis que le travail préalable, les réformes nécessaires pour en arriver à avoir
des taux de croissance plus faibles
n'ont pas encore été réalisés. Je le souhaite, je l'appelle de tous mes voeux,
mais il n'a pas encore été réalisé, ce travail.
Et de dire tout d'un coup : Je décrète que ça va être 1,4 % cette
année, bien, moi, je pense que c'est très périlleux. Et, encore une fois, on aura l'occasion d'y revenir.
Tout ça pour dire quand même que, comme on est à la fois dans le très optimiste du côté des revenus et dans l'irréaliste
du côté des dépenses, je pense que, l'année prochaine, à cette date-ci, il y a peu de chances qu'on constate un équilibre
budgétaire, à moins d'avoir décidé de faire profondément souffrir les
Québécois puis d'avoir coupé de façon drastique dans les services. Bon.
Rapidement,
sur le fardeau fiscal, malgré les promesses qui ont été faites, le gouvernement
a choisi d'augmenter le fardeau
fiscal. J'aurai l'occasion d'expliquer plus en détail ce qu'on retrouve dans la
documentation budgétaire lors de différents blocs, mais disons
simplement que les revenus, donc, cette année, augmentent plus vite que la
croissance du PIB nominal. Il y a un beau
graphique qui nous présente ça, l'augmentation qui aurait été sans les mesures,
puis vous avez l'augmentation avec les mesures, et donc on peut déduire
l'augmentation du fardeau fiscal des Québécois. C'est 700 millions cette année, 700 millions auxquels il faudrait
ajouter les autres ponctions, les autres tarifs, par exemple les hausses de tarifs d'Hydro-Québec ou bien les
hausses de taxes municipales, là, qui pourraient survenir dans les
prochains mois, dans les prochaines années.
Du côté des sociétés, il y a un beau tableau qui
présente bien la hausse du fardeau fiscal, et là la hausse du fardeau fiscal est assez spectaculaire, là, on
parle de 2,5 milliards sur cinq ans. J'aurai l'occasion aussi d'en
discuter, mais retenons, M. le
Président, là — parce
que je veux faire court — qu'on nous avait promis des vallées verdoyantes, puis ce que les Québécois ont eu à vivre jusqu'à
maintenant, c'est des... Enfin, ce qu'on leur fait miroiter pour cette année, c'est des coupes dans les services auxquels ils tiennent, en même temps accompagnées d'une hausse du fardeau
fiscal. Ça, c'est la réalité à
laquelle les Québécois sont confrontés.
Là où, évidemment, les choses sont carrément
stupéfiantes, je dirais, c'est du côté économique. Alors là, je viens de parler des finances publiques, des
services à la population, mais, du côté économique,
on nous avait promis un effet
libéral, on nous avait promis que, par la simple présence du gouvernement, les choses iraient mieux. Évidemment, il n'y a
rien de cela qui s'est matérialisé, je
pense que les Québécois
le savent. Et, plutôt que de prendre acte du fait que leur simple présence ne stimule pas l'économie,
le Parti libéral aurait peut-être pu, M.
le Président, dire : Bien là, je
me rends compte que, finalement,
quand j'y suis, ça n'arrange pas les choses. Alors, il aurait peut-être
pu se retourner de bord puis décider
de mettre en oeuvre une politique économique,
mais il n'y a pas ... Le choix qui
a été fait, ça a été le choix qui a été évoqué à plusieurs reprises par
le ministre de l'Économie, c'est celui de ne pas mettre en oeuvre une véritable
politique économique. Je ne dis pas qu'il
n'y a rien, là. Il y a des mesures, il y a quelques mesures. Mais est-ce qu'il
y a un tout cohérent? Est-ce qu'il y a une vision d'ensemble? Pas vraiment. En
tout cas, moi, je pense... On aura l'occasion d'en discuter, mais je n'ai pas
vu, moi, de vision cohérente.
De la
stratégie maritime dont on nous parle, peut-être qu'un jour on verra le
document, puis on pourra peut-être en parler plus longuement. Mais, pour
l'instant, moi, ce que je comprends, c'est que ce sont des choses qui auront
des impacts peut-être à long terme. Mais là, pour l'année prochaine, pour dans
deux ans, pour dans trois ans, là, je pense qu'il
n'y a rien là-dedans qui va aider l'économie du Québec ou qui va aider notre
secteur manufacturier à passer à travers les difficultés qu'il a à
vivre.
Le Plan Nord,
éventuellement ça pourrait être une très bonne chose pour le Québec que d'avoir
prévu, effectivement... Puis,
là-dessus, j'en conviens, il faut préparer les choses puis il faut développer
nos ressources naturelles. Moi, j'en
conviendrai toujours, mais est-ce que, dans le contexte de prix des ressources
naturelles actuel, on peut compter sur
le Plan Nord pour stimuler la croissance économique québécoise cette année,
l'année prochaine et dans deux ans? Non.
La réponse, c'est non, c'est évident. Peut-être dans cinq ans, dans 10 ans,
puis ça, c'est bien correct. Mais là je vous parle, là, de cette année,
de l'année prochaine, de dans deux ans, de dans trois ans, là. Là, il y a du
monde qui vivent présentement au Québec, là,
ils ne vivront pas tous dans cinq ans puis dans 10 ans, là. Aujourd'hui, il y a
du monde qui ont besoin d'emplois,
ils ont besoin de croissance économique, et, aujourd'hui, on est forcés
d'admettre qu'il n'y a pas de vision puis il n'y a pas de plan pour
améliorer la situation économique québécoise.
Et je ne vais pas vous inonder de chiffres, mais
quand même assez cocasse de voir ce qui s'est passé avec les prévisions de croissance du PIB réel pour 2014.
Dans le cadre financier du Parti libéral en campagne électorale, on
prévoyait du 2,1 %, 2,1 %. Dans le
budget de juin 2014, on était rendu à 1,8 %. Dans la mise à jour de
décembre 2014, on était rendu à 1,6 %. Dans le budget que nous
étudions présentement, on était rendu à 1,5 %. Puis, le lendemain du dépôt
du budget, le 27 mars, l'Institut de la
statistique du Québec a publié ses comptes économiques qui nous disaient que,
pour 2014, donc, le taux de croissance a été
1,3 %. On est passé, donc, de 2,1 % à 1,8 %, à 1,6 %, à
1,5 %, à 1,3 %. Ça, c'est la croissance économique en 2014.
Alors, on voit que l'effet libéral n'est pas trop, trop présent.
Puis, pour
2015, le budget prévoit un taux de croissance du PIB réel de 2 %.
2 %, là, juste qu'on s'entende, là, sur les... Puis je reprends ici
quelque chose qui a été dit par le Mouvement Desjardins, mais, depuis 2001,
c'est arrivé à seulement trois reprises qu'on a eu un taux de croissance du PIB
réel de plus que 2 %. Et ils nous disent dans leur texte publié le
13 avril, donc hier : «La faible hausse du PIB réel de 0,4 % au
dernier trimestre de 2014 rappelle que l'économie
du Québec repose sur des bases fragiles. Avec un résultat aussi amorphe — et là ce n'est pas moi qui l'invente,
là, c'est Desjardins — l'acquis de croissance pour 2015 est limité.
Voilà qui appuie notre prévision de 1,7 % cette année.» Ça, c'est
Desjardins, M. le Président. Ce n'est pas moi, là, c'est Desjardins.
• (17 h 40) •
Donc, sur le plan de la croissance économique,
on n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent, on peut dire ça comme ça, puis il y a des économistes... Puis
même Desjardins rappelle encore que
l'action du gouvernement
soustrait à la croissance économique. La Banque
de Montréal le dit. Pierre Fortin, dans un travail qu'il a fait où il a comparé
le Québec avec d'autres juridictions,
est arrivé aussi à la conclusion que l'action gouvernementale d'austérité, ça
soustrayait à la croissance
économique. Lui, il arrivait à des chiffres du genre 1 % de croissance qui
est soustrait. Or, c'est quand même des chiffres importants. Alors, l'effet libéral, là, on va dire ça de même,
là, ça a été remplacé par l'austérité, par l'austérité toxique, puis ça
nuit à la croissance économique, puis ça fait en sorte qu'on a les chiffres
qu'on a vus au plan de la croissance économique.
L'emploi,
je pourrais vous en parler longuement, je dis rapidement, simplement, que le
budget a confirmé qu'il s'est perdu
1 100 emplois en 2014 après une création de 48 000 en 2013. Les
prévisions pour 2015-2016 sont meilleures, sont de l'ordre de 38 000 emplois.
Évidemment, ce sont des prévisions à ce stade-ci, on espère qu'on aura
38 000. Pas moins 1 000, on
espère qu'on aura 38 000. N'empêche, il faut quand même rappeler que le
ministre et les collègues qui l'accompagnent ont été élus en promettant
250 000 emplois aux Québécois dans un contexte démographique... Moi, je vous le dis, là, très simple, là, 250 000
emplois dans le contexte démographique actuel? Impossible. Impossible.
Puis ce n'est pas moi, puis ce n'est pas
l'économie, puis ce n'est pas les entrepreneurs qui rendent ça impossible,
c'est la démographie. Mais les gens,
là, qui étaient autour de la table, là, dans le comité de stratégie du Parti
libéral, ils devaient le savoir, ça.
Ou bien, s'ils ne le savaient pas, ils étaient mal informés. Prévoir
250 000 emplois sur cinq ans dans le contexte démographique actuel,
ce n'est tout simplement pas possible, ça n'arrivera pas. Je vous fais une prévision,
M. le Président, ça n'arrivera pas.
Alors,
je m'arrête là-dessus. Je vous dis simplement, donc, qu'au plan de la politique
fiscale et budgétaire je ne suis pas
à l'aise du tout. La politique économique, il n'y en a pas vraiment. Alors,
écoutez, malgré tout le respect que j'ai pour le ministre des Finances, on va avoir une belle conversation pendant les
prochaines heures, mais ça ne se conclura pas par un appui du Parti
québécois au budget. Voilà, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rousseau, donc,
de votre présentation. Nous allons maintenant inviter M. le député de Granby, du deuxième groupe d'opposition, à faire
et à nous présenter ses remarques préliminaires. M. le député.
M. François Bonnardel
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. Alors, encore une fois,
salutations à la présidence, au ministre, à ceux qui l'accompagnent du côté ministériel, mon collègue
de Rousseau, mon collègue de Beauce-Nord et ceux qui accompagnent le
collègue de Rousseau à l'opposition officielle.
C'est impossible de
ne pas revenir, M. le Président, quand on est rendus aux 25 heures de débat...
Suite au discours sur le budget, on a fait
15 heures ou presque de discours, on est aujourd'hui à l'étape du 10 heures où
on va discuter avec le ministre des
enjeux de ce qui a été déposé dans ce discours. Et, comme je l'ai mentionné
lors du discours voilà déjà presque
deux semaines, presque trois même, ce n'est pas le budget 2015-2016 que le ministre
a déposé, c'est le budget 2017-2018 parce que le gouvernement a un
objectif intéressant — je
pense que tout le monde en convient — c'est celui, premièrement, d'atteindre l'équilibre budgétaire. Parce qu'il y a
juste un député à l'Assemblée nationale qui ne veut pas retrouver l'équilibre budgétaire, c'est le
député de Marie-Victorin. Les 124 autres ont, au moins, cet objectif de
retrouver l'équilibre budgétaire. Je suis à l'Assemblée nationale depuis 2007,
je n'ai pas vu de budget équilibré ou presque depuis
2007. Et, oui, on a connu la crise malheureuse de 2008, la Caisse de dépôt qui
a perdu énormément d'argent. J'ai posé
d'innombrables questions lors des mêmes travaux quand j'ai été critique aux
finances de 2009 à 2013. Et, quand je dis :
On est face au budget 2017-2018, bien, vous comprendrez, M. le Président, il y
avait des points intéressants. Est-ce qu'ils auraient été applicables
immédiatement? Le gouvernement a décidé que non.
Que
ce soit le bouclier fiscal pour la classe moyenne, que ce soit la promesse de
la taxe santé — je vais y
revenir — taxe
santé qui devait être abolie avant la fin du mandat libéral, hein... C'était
une promesse du premier ministre d'en arriver à abolir complètement cette taxe,
qui est une erreur du passé, là, soit dit en passant. Parce que j'y reviendrai, là, mais ce sont les libéraux qui
l'ont mise au monde. Que ce soit de baisser le fardeau fiscal des PME,
que ce soient le fonds de santé et sécurité, la relève entrepreneuriale, il y
avait des points intéressants, le crédit d'impôt aussi pour garder les
travailleurs d'expérience sur le marché du travail. Ça, on peut être d'accord
avec ça, mais il faut revenir un peu en arrière pour comprendre pourquoi nous
sommes aujourd'hui face à des enjeux aussi importants : le premier, je
l'ai mentionné, retrouver l'équilibre budgétaire; l'autre, d'en arriver — mon
collègue de Rousseau l'a mentionné — à une compression des
dépenses à 1,5 % ou à peu près.
Vous
savez, j'ai connu les belles années, les belles années du gouvernement libéral
où, supposément, les revenus rentraient à la pelletée. On ne faisait pas
attention aux dépenses, on avait une croissance moyenne des dépenses qui était de 4,5 %, 4,7 %, même du 5 %
par année — par
année — de
beaucoup au-dessus du principe de l'inflation. Alors, on dépensait
énormément. Et, je le disais lors du discours sur le budget, vous savez, les
promesses de 2003 à 2008, si on veut reculer
un peu en arrière... même 2003 à 2007, où les libéraux avaient promis mer et
monde aux contribuables, c'était une
baisse de 1 milliard d'impôt par année, c'était le système de santé qu'on
allait revoir. On allait donner un médecin de famille à tous, on allait
abolir les délais d'attente dans les urgences et, nécessairement, baisser le
fardeau fiscal.
On
se souvient... On peut même faire un petit aparté, M. le Président. On est à
discuter du projet de loi n° 28 aussi à cette commission, on le faisait ce matin et, dans ce contexte, on était
à débattre depuis hier sur le fait que le gouvernement va déposer un
rapport préélectoral à la prochaine élection en 2018, mais... Puis je vous
ramène ça parce que, vous vous souvenez, M.
le Président, en 2003, quand Jean Charest a gagné l'élection, c'est drôle, on a
demandé un rapport aussi pour
vérifier l'état des finances publiques et on a trouvé curieusement un autre
trou, 3, 4, 5 milliards de dollars, et là le gouvernement libéral
n'a pas pu remplir ses promesses de réduire les impôts des Québécois.
Et
devinez quoi? On a vu la même, même chose quand le Parti québécois a perdu le
pouvoir au bout de presque 20 mois, où le Vérificateur général a été
mandaté pour faire une vérification, où on a vu une confirmation, là, du déficit de 2,8 milliards qui était prévu à
quelques millions près, et soudainement le terme «déficit potentiel» est né,
«déficit potentiel». Et je ne me gêne pas de
prendre la défense du Parti québécois sur ces questions parce que c'en était
complètement ridicule. C'est particulier que
je vous dise ça, mais je ne suis pas gêné de vous le dire, c'en était complètement
ridicule d'inventer ce terme et de dire aux gens : Ah! bien là, le Trésor
avait engagé... Non, le Trésor n'avait rien engagé. Le budget, moi, je l'ai vu,
j'ai vu les comptes publics puis j'ai vu un chiffre en bas qui était celui
qu'on prévoyait, peut-être à quelques millions près.
Et
je vous ramène, donc, à la discussion qu'on avait en souhaitant que le
ministre, qui s'est engagé ce matin à dire : On va retravailler la
problématique d'avoir un rapport du Vérificateur général vérifié deux mois avant
l'élection, possiblement quelques semaines, mais aussi de prendre en
considération que, dans un contexte minoritaire, on aura ce rapport... J'espère
que, comme le ministre l'a mentionné ce matin, on pourra travailler de façon
adéquate pour se préparer à ça.
Maintenant, je vous disais : Il faut
revenir en arrière. 2003-2007, ça a été des bonnes années, des revenus, des dépenses aussi qui étaient à hauteur de 4 %,
5 %, comme je le mentionnais. 2008, une crise qui est celle de la Caisse
de dépôt, et là, soudainement, les
Québécois, qui avaient un taux d'endettement moyen, celui qu'on pouvait
connaître dans les autres provinces
canadiennes, qui était peut-être à 140 %, donc, dans ces années, il y a
énormément de gens qui ont perdu de
l'argent, énormément de gens. Les fonds de retraite à la Caisse de dépôt ont
perdu énormément de sous. Les gens qui avaient
des REER ont perdu énormément de sous et, même, pas été capables peut-être
d'aller chercher l'argent perdu, comme la caisse a pu le faire près de
six ans plus tard.
Et, dans ce
contexte, quand on revient en 2008, M. le Président, on a eu l'après-crise, et
il y avait un ministre... Et je n'ai pas le choix, à chaque fois, de
revenir à cette situation pour que les Québécois comprennent bien comment le
Parti libéral a fonctionné pour nous amener aujourd'hui à ça. Le Parti
québécois aussi parce qu'ils ont été au pouvoir pendant 20 mois, mais on ne
peut pas leur mettre le chapeau complètement parce que les libéraux ont été au
pouvoir depuis 2003. Et on arrive aux années
2009-2010, Raymond Bachand est ministre des Finances, Jean Charest est
premier ministre, et la situation est intenable.
• (17 h 50) •
La situation est intenable parce que, déjà en
2010, je me souviens que les gens aux Finances, ça m'est resté... Ça m'a frappé, M. le Président, on parlait déjà du
choc démographique, on parlait, là, de la problématique que nous allions
vivre — on était en 2010 — en 2016-2030. Je me souviens que les
fonctionnaires nous avaient dit lors d'un briefing : Il y aura
trois travailleurs pour un retraité en 2016 au Québec parce que nous sommes la
deuxième nation au monde la plus
vieillissante après le Japon. Et, en 2030, attention! il y aura deux
travailleurs pour un retraité. Ça voulait dire quoi, ça? Ça voulait dire imaginez la pression fiscale
de ces travailleurs sur le marché du travail pour payer des taxes et des
impôts et protéger les acquis sociaux que
nos parents et grands-parents ont payés. Ça, les gens ne mesuraient pas encore,
mais là ça nous frappe, ça nous frappe. On est en 2010, là, n'oubliez pas ça.
Il y a eu l'élection de 2007 minoritaire, l'élection libérale 2008 majoritaire, et là on part encore, on continue, là, sur
une spirale, une croissance des dépenses qui continue de monter à hauteur
de 4,5 %, 5 % par année et même plus.
Parce que,
dans ce temps-là, M. le Président, on ne regardait même pas ce que les entités
autres que budgétaires... Un terme qu'on a commencé à utiliser, à
comprendre quand le Vérificateur général Renaud Lachance était venu à l'Assemblée nationale parce que la plupart des
gens qui regardaient les dépenses regardaient les dépenses de
programmes, dépenses de programmes. Bel
exemple que je peux donner aux gens, c'est que dépenses de programmes, c'est un
ministère. Il existait avant le ministère du Revenu, et on a voté une loi pour
ramener le ministère du Revenu à une agence du revenu. Cette agence est sortie du périmètre comptable. Or, il fallait
être plus préparé à suivre la croissance des dépenses de ces entités qui
étaient autres que budgétaires, sorties du périmètre comptable.
Un peu
difficile à comprendre, mais là, aujourd'hui, on a... au moins depuis 2010, on
a martelé, martelé... Moi, je l'ai
fait, mon collègue de Lévis l'a fait — Christian Dubé, dans le temps — pour être capables d'avoir un portrait
plus juste, que nous avons quand même dans les budgets depuis deux ans et même
dans les rapports mensuels que le ministère des
Finances nous dépose depuis longtemps. Mais au moins, aujourd'hui, on a un peu
plus de transparence. Mais il reste encore qu'il y a des entités — Société
des traversiers, Régie du cinéma, peu importe — qui n'ont pas encore cette
attitude de préparer un rapport où on va savoir exactement, à chaque année, la
croissance des dépenses de ces entités.
Et là, M. le
Président, Raymond Bachand se rend compte, avec son gouvernement, que la
croissance des dépenses est trop
forte et que les revenus n'entrent pas, les revenus n'entrent pas. On est en
2010, et il y a des qui vont peut-être se souvenir, en 2010 ce fut
l'invention... N'oubliez pas une chose, là, sur un dollar d'impôt, il y a à peu
près la moitié, là, la moitié qui va à la
santé présentement, il y a le quart qui va à l'éducation, puis on est rendus à
12 % pour le service de la dette,
ou à peu près. Donc, trois postes budgétaires qui englobent au-dessus de
80 % du budget global du Québec aujourd'hui, puis on se souvient,
là, du choc démographique que je parlais tantôt. Donc, 2010, on invente la taxe
santé. On devait aller chercher entre
750 millions et 900 millions de dollars à terme. Parce que, si je ne
me trompe pas, la taxe santé a commencé à 25 $, on l'a montée à
50 $, on l'a montée à 100 $ puis, après ça, 200 $ par personne.
Donc, il y a eu la taxe santé en 2010, puis
tous les tarifs, minimalement, ont été augmentés, tous ceux que le gouvernement
pouvait. Taxe sur l'essence, c'est
indéniable, hein? Année après année, on a un gouvernement qui taxe l'essence.
Et les deux fameux points de TVQ.
Le fédéral a décidé qu'il baissait le fardeau fiscal
des Québécois. Fardeau fiscal, c'est la taxe... C'est sûr que, si on paie moins de taxes, on stimule l'économie
dans une certaine mesure. Et le fédéral baisse la TPS de deux points, et
les libéraux décident, en deux ans, d'aller chercher ces deux points de TVQ.
Alors, si on additionne tout ça, taxe santé, les
tarifs qui ont été augmentés, taxe sur l'essence, et juste TVQ... J'ai un
papier que Michel Girard a écrit dans les derniers jours qui disait : «Allègement fiscal, mon
oeil!» C'est près de 16 milliards d'argent neuf qu'on est allé chercher
dans les poches des contribuables.
Quand on regarde les revenus globaux, là, bon,
bien, quand l'élection de 2012 est arrivée, où le Parti libéral a perdu le pouvoir, on ne balançait toujours pas le
budget, M. le Président, on ne le balançait toujours pas. Le Parti
québécois est arrivé au pouvoir pendant 20 mois. Et je dois donner à César ce
qui lui revient, les libéraux, à la dernière année, en 2012, la croissance des dépenses avait baissé à 3,3 % si je me
souviens bien. C'était la première fois que ça baissait depuis que j'étais arrivé à l'Assemblée nationale.
Et là, 2014, l'année complète où le Parti québécois a été au pouvoir, on
a vu une croissance
des dépenses à 4,7 %. On est revenus au même, même niveau que le Québec
avait connu dans les dernières années. Et devinez quoi? On ne balançait
toujours pas le budget.
Ah oui! on
n'en serait pas ici aujourd'hui à débattre d'une situation où l'équilibre
budgétaire est un objectif noble. Parce
que ce n'est pas compliqué, le ministre des Finances le sait mieux que moi, les
agences de notation qui lui disent et qui lui ont certainement dit, tout
comme, j'imagine, le collègue de Rousseau quand il était ministre des
Finances : Faites attention, faites
attention... Même Desjardins disait hier... ne partage pas la confiance du
ministre des Finances. Je pourrai y revenir un peu plus tard parce que
mon collègue de Rousseau l'a mentionné tantôt.
Et donc on va
chercher des revenus additionnels. Depuis 2010, on ne balance pas le budget, on
pellette en avant déficit après
déficit. On se fout un peu, là, de la situation en se disant : Ah! ça va
nous frapper un jour, mais ce n'est pas grave. Vision à court terme pour se faire élire. Arrive l'élection de
2012, le Parti libéral perd, le Parti québécois arrive minoritaire. Ça dure 20 mois, on ne balance
toujours pas le budget. 2014, les libéraux gagnent, la majorité, et là on
est face à un mur. On est face à un mur, il n'y a personne qui a vu une
croissance des dépenses à 1,5 % globale. Globale, consolidée, là, il n'y a personne qui a vu ça. Moi, je n'ai pas vu ça,
je n'ai pas vu ça. Quand on regarde que la croissance des dépenses en santé a été en moyenne de 4,5 % à
5 % et que l'éducation l'a été à 3 %, 4 % dans les huit, 10
dernières années, changement de paradigme important, là, important.
Et c'est là
qu'on arrive à l'étape de 2015, dépôt de budget et que le gouvernement nous
dit : Bien, c'est bien le fun,
là, on ne vous a pas augmenté vos taxes puis vos tarifs pour ce budget-ci, on
n'a pas touché à vos impôts non plus. Excusez,
c'est parce que l'année 2014 qui vient de se terminer, encore une fois la même
recette a été celle que Raymond Bachand a mise en place avec Jean
Charest et ce que le ministre des Finances, aujourd'hui, et le premier ministre
ont décidé de faire. Comment? Bien, simplement en reniant des promesses. En
reniant des promesses.
Puis, je le
dis bien respectueusement, tous se souviennent... Première chose, là, débat des
chefs, débat des chefs où les tarifs
de garderie, c'était odieux. Premièrement, le Parti québécois disait : On
l'a augmenté de sept à neuf. C'était plus que l'inflation, et là eux déchiraient tout ce qu'ils pouvaient en
disant : Non, non, non, les tarifs de garderie n'augmenteront pas plus que l'inflation. Eh bien, surprise,
aujourd'hui on est à des tarifs qui iront jusqu'à 20 $. On évalue, pour
une famille qui gagne à peu près 85 000 $ en 2015, à une
augmentation de 790 $ les frais de garderie.
En 2014,
l'essence, M. le Président, c'est indéniable, c'est ce qu'il y a de plus
facile, hein, tout le monde a une automobile,
peut-être deux, alors c'est 0,01 $, 0,02 $ par année, donc 125 $ qu'on évalue là. Il y a quand même un point positif qu'il faut donner, c'est que le contexte
mondial, qui est un contexte à l'avantage des automobilistes
présentement que nous n'avons pas connu depuis très, très, très longtemps, fait
que la plupart des gens qui sont ici, qui ont une automobile, qui nous écoutent vont sauver facilement entre 10 $ et 20 $
par semaine parce que le prix de l'essence est à 1,00 $ ou 1,00 $, un peu plus, le litre. Alors, tant mieux.
Tant mieux, ça, c'est un peu d'oxygène. Mais ça, c'est un bon cycle présentement versus l'offre et la demande de ceux
qui sont les producteurs de pétrole. Moins bonne nouvelle peut-être pour
ceux qui produisent en Alberta, mais ça, c'est un autre sujet.
On a eu une
augmentation de la taxe sur les assurances automobile. Ah! vous allez me dire
que c'est minime, mais 40 $...
Ça me fait toujours rire quand j'entends le premier ministre nous parler des
tarifs d'Hydro-Québec et me dire : C'est seulement 3,50 $ par mois. Bien, si vous saviez les
3,50 $ par mois que j'ai vu d'augmentation depuis que les libéraux
sont là en 2003, mais surtout la période
depuis 2010, bien, on additionne, M. le Président, après ça, ce qui a été sous-traité...
Le Président (M. Bernier) :
Je vais juste vous arrêter 30 secondes, M. le député de Granby. Est-ce
qu'il y a consentement — il
reste environ 2 min 30 s — pour que le député puisse
terminer sa présentation?
M.
Bonnardel : Je vais
atterrir. Je vais atterrir, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) :
Pardon?
M.
Bonnardel : Je vais
atterrir, là.
• (18 heures) •
Le Président (M. Bernier) :
Ça fait qu'il vous reste environ 2 min 30 s.
M.
Bonnardel : Je ne
pensais pas qu'il était déjà 6 heures.
Le Président (M. Bernier) :
Donc, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on poursuive?
M.
Bonnardel : Tout le
monde a faim, puis moi aussi.
Le Président (M. Bernier) :
Continuez, M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Je
pourrai y revenir. Toujours en terminant, en disant que depuis 2014, depuis
l'élection des libéraux, c'est près de 1 300 $ que les libéraux sont
allés chercher dans les poches des contribuables, que ce soit taxe scolaire,
que ce soient taxes municipales, comme je l'ai mentionné, Hydro-Québec. Tout ça
ensemble fait que les contribuables ont payé
énormément, énormément pour ce retour à l'équilibre budgétaire. On aura la
chance d'en discuter dans les
prochaines heures pour faire le point de la situation et comment on va relancer
l'économie, comment on va recréer de
l'emploi et redonner un peu de pep à une économie qui en a bien, bien, bien
besoin et surtout à des contribuables qui ont besoin d'oxygène. Voilà.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, vos remarques préliminaires
étant terminées, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la
commission jusqu'à 19 h 30. À tout à l'heure. Oui, vous pouvez...
Je suspends les
travaux.
(Suspension de la séance à
18 h 1)
(Reprise à 19 h 33)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, bonsoir. La Commission des finances publiques reprend ses travaux.
Je vous rappelle que
la commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget.
Discussion générale
Nous
en étions rendus à l'étape du débat. Donc, comme le veut la tradition, je cède
la parole au porte-parole de l'opposition
officielle en matière des finances. M. le député de Rousseau, la parole est à
vous pour un bloc d'environ 20, 23 minutes, une vingtaine de minutes.
M.
Marceau : Parfait.
Une vingtaine de minutes, parfait. O.K. Bien, écoutez, je vais commencer par quelques questions, mais je vais commencer par une question
qui m'intrigue, bien sincèrement, une question, en
fait, que j'ai déjà posée, M. le
Président, à l'Assemblée, au salon bleu, mais, à l'époque, j'avais eu une
réponse dans laquelle on m'avait dit :
Attendez, vous allez tout savoir ça au budget. Alors, la question était sur les
marges de prudence incluses dans les prévisions,
marges qui avaient été... enfin, dont on avait eu connaissance à l'occasion du
rapport du Vérificateur général sur la mise à jour financière de
décembre 2014. Donc, à la page 25 et 26 de son rapport, le Vérificateur général
nous disait : Il y a des marges de
prudence dans les prévisions. Il y en avait pour 1 077 000 000 $
en 2015-2016, il y en avait pour
1,6 milliard en 2016-2017, et le Vérificateur général disait au paragraphe 45 de la page 26 de son rapport : Ces
marges de prudence ne sont pas divulguées
dans le point, essentiellement. Puis il invite... Je cherche la
phrase. «Par conséquent, notre
recommandation précédemment formulée [...] d'adopter une orientation claire
concernant la marge de prudence à intégrer dans le scénario économique
et dans les prévisions budgétaires, à la diffuser de façon explicite aux
différents intervenants et à l'expliquer dans les documents budgétaires demeure
pertinente.» Bon, ça, c'est le premier élément.
Et
donc, voyant cela, à l'occasion, donc, d'une période de questions,
je ne sais plus laquelle, j'ai demandé à notre estimé collègue le ministre
des Finances de nous dire ce qu'il en
était, et ce à quoi il a répondu : Dans 48 heures, M. le député de Rousseau, je vous dirai ce qu'il en est, et vous pourrez
le voir dans le plan budgétaire.
Alors, quand j'ai ouvert le plan
budgétaire à l'occasion du huis clos, lors du dépôt du budget, bien, j'ai
cherché, M. le Président, ces explications et je ne les ai pas trouvées. Alors là, je reviens avec la même
question : Où sont-elles, ces marges de prudence? Et y a-t-il des
explications à trouver à quelque part? Je commence comme ça, tout simplement,
puis je reviendrai.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. Alors, pour ce qui est des marges de prudence, je pense
qu'il y a deux choses qu'on doit... on doit
distinguer deux choses. En termes de marges de prudence comme telles, nous
avons... dans notre plan budgétaire, pour 2015-2016, il y a à peu près
200 millions dans le Fonds de suppléance. Et puis, pour 2016-2017, il y a
le même 200 millions dans le Fonds de suppléance. Il y a une marge
budgétaire aux dépenses de 250 millions et puis il y a la provision pour éventualités de 400 millions.
Alors donc, ça, ce sont les montants qui sont inscrits dans le plan
budgétaire.
Ce
à quoi le député de Rousseau fait allusion, c'est au rapport du Vérificateur
général, qui, en effet, peut porter à une
certaine confusion. Le Vérificateur général, quand il a, donc, parlé des
dépenses, il a mentionné qu'il y a des risques favorables, il y a des
risques défavorables. Et, quand on fait le net des deux pour l'année 2015-2016,
c'est à peu près 360 millions. Donc,
c'est une façon prudente, prudentielle de gérer le budget en identifiant les
risques qui sont favorables, qui sont positifs et aussi en identifiant
les risques qui sont défavorables. Comme ça, on peut gérer les dépenses de
programmes de façon prudente.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau...
M. Marceau :
Oui. Bien, regardez, ce n'est pas parfaitement clair pour moi.
Le Président (M.
Bernier) : ...l'occasion d'éclaircir tout ça.
M.
Marceau : C'est l'occasion de l'éclaircir, M. le Président.
O.K. Je vais recommencer. Donc, on se comprend, là, les provisions pour éventualités, si ce n'est pas là-dedans, elles
étaient révélées, de toute façon, dans le rapport du VG déjà. Alors, ce n'est pas de ça dont on parle, on
parle des marges de prudence. Prenons simplement 2015-2016, 881 millions.
Là, le VG, il n'a pas inventé ce chiffre-là, là, il y a quelqu'un qui lui a dit
ça à quelque part, au ministère. Il y a quelqu'un qui lui a dit :
881 millions de marge de prudence aux dépenses.
Et là la question que ça posait pour nous,
c'est : Est-ce que les dépenses... Là, je prends les dépenses pour... des
dépenses... Ça, c'est ça, pour les dépenses, j'essaie de voir si... Est-ce que
c'est pour l'ensemble des dépenses ou simplement les
dépenses de programmes? Mais disons que c'est pour l'ensemble de dépenses, M.
le Président, les dépenses consolidées.
Alors, si on prend les dépenses consolidées — je vais prendre mon... — pour 2015-2016, il est prévu, disons, 88 milliards aux dépenses
consolidées, auxquels il faut ajouter, bon, comme vous savez, le service de la
dette, mais restons à 88 091 000 000 $. Puis là on
dit : On a 881 millions de marge de prudence. Et là la question que ça
pose, c'est : Est-ce que les dépenses qui vont être effectuées cette
année, c'est bel et bien 88 091 000 000 $ ou bien
88 091 000 000 $ duquel on doit soustraire le 881 millions?
C'est la question toute simple que je pose.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
• (19 h 40) •
M. Leitão : Non, non. Pour
2015-2016, c'est ça, pour 2015-2016, le seul... Vous avez mentionné les 800 et quelques millions, là, mais tout ça, maintenant, a
été attribué, et la seule chose qu'il reste, c'est le fonds de
suppléance à 200 millions. Donc, il y a une marge de 200 millions au fonds de
suppléance pour 2015-2016, c'est tout.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau : C'est ce qui
fait que 681 millions ont été attribués à différents...
M. Leitão : C'est ça.
M. Marceau : Alors, ce n'est
plus vraiment des marges de prudence, là.
M. Leitão : Non, mais c'est ce que
je vous dis, comme marge de prudence, nous avons 200 millions en 2015-2016 et
nous avons le même 200, plus 250 de marge budgétaire, plus 400 de provisions en
2016-2017.
M. Marceau : Non, ça, ça va,
le 400... Je restais juste en 2015-2016, là.
M. Leitão : En 2015-2016, il y a
200. En 2015-2016, il y a 200 millions de fonds de suppléance.
M. Marceau : ...puis le 681 a
été, lui, attribué. O.K. Bien, je pense que vous allez avoir intérêt à parler
au Vérificateur général parce que lui, il était sous l'impression... Enfin,
quand on le lit bien clairement... Et ça, c'était à l'occasion du point, là, à
ce moment-là, donc au point, lui, il voyait une marge de prudence de 881 pour
l'année 2015-2016, là. Soyons bien clairs, là, pas pour l'année 2014-2015, pour
2015-2016. Lui, il disait : Il y a 880... Bon, en tout cas, de toute évidence, il y a quelque chose là, il faudrait
qu'on parle au Vérificateur général pour qu'il nous explique comment il
a compris les choses.
Je vais quand même dire — puis
là on est dans le monde des souhaits, là — ça aurait été bien que vous
expliquiez ça dans le document budgétaire, dans le plan budgétaire, mais, bon,
vous faites comme vous voulez. Mais disons
que, comme vous m'aviez laissé croire que je pourrais trouver la réponse, j'ai
cherché en vain, M. le Président. O.K. Alors, je retiens qu'il y a 681
millions qui n'étaient pas des véritables marges de prudence.
Sur l'année
2016-2017, ce qui est prévu, c'est 1 446 000 000 $. Est-ce
que le même raisonnement s'applique? Est-ce
que je dois comprendre que le 1 446 000 000 $, c'est une
marge de prudence aujourd'hui, mais que, dans le fond, quasiment... Bien, tout à l'heure, on peut dire
qu'essentiellement 75 %... un peu plus de 75 % a été attribué à des
différents ministères. Est-ce que ça va être la même chose pour le
1 446 000 000 $ déjà identifié pour 2016-2017? Est-ce qu'on
peut dire que 75 % de ça est déjà prévu, est déjà attribué?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Bon, il faudrait... De
cela, il y a donc les 800, 850 millions de marge, donc fonds de suppléance,
marge budgétaire, provision pour éventualités. Donc, le reste, oui, d'ici
2016-2017, ça sera attribué aux différents postes de dépenses.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : O.K. Est-ce que
vous avez l'intention d'expliquer cela dans les documents budgétaires? Je ne
parle pas aujourd'hui, évidemment, dans le futur.
M.
Leitão : Non, c'est ça, ce
n'est pas... Bon, lors de l'évaluation des comptes publics, le VG verra ça, mais
nous, on ne se réconcilie pas avec les données du VG.
M. Marceau : Donc, la recommandation
du VG, vous trouvez que, sans vouloir le dénigrer parce que je sais que vous ne
voudriez jamais faire ça, donc, vous... La recommandation du VG, donc vous
n'avez pas l'intention de l'appliquer pour la suite des choses?
M.
Leitão : Non, c'est que... Encore une fois, je pense qu'il y
a un peu de confusion parce que
ce que le VG a identifié, ça, nous sommes entièrement d'accord. C'est
que le gouvernement identifie donc les risques, les risques favorables et les risques défavorables, et c'est ça
qui est la bonne méthode de gérer les dépenses publiques. Et puis, au
fur et à mesure que l'année
fiscale se déroule, bon, ces
marges-là vont s'équivaloir l'une à l'autre, et on va arriver aux objectifs
de dépenses, aux cibles de dépenses que nous avons.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député.
M. Marceau : Vous savez quand
même qu'il y a des crédits qui sont votés par le Parlement puis qui doivent
s'appuyer sur des dépenses qu'on a réellement l'intention d'effectuer.
M. Leitão : ...
M. Marceau : Bien là, de
toute façon, regardez, je comprends, là, que, dans le fond, vous aviez
encore... Enfin, je comprends qu'il y a eu une mésentente entre le VG puis
vous. Pas une mésentente au sens d'un conflit, là, il y a une question de compréhension
qui n'est pas parfaitement consensuelle, je pense. En tout cas, les termes qu'ils utilisent puis
ceux que vous utilisez aujourd'hui ne sont pas les mêmes. Il se peut qu'à travers le
temps on puisse vouloir réaffecter des
sommes dans une... Moi, je n'ai pas de misère à imaginer que l'année se
déroule... au début, on a prévu de faire des dépenses dans le poste a, b, c, d puis qu'à un moment donné en cours
d'année, bien, on se rend compte qu'on va dépenser un petit peu moins dans b pour différentes raisons puis qu'on pourrait prendre un
peu de ça pour aller mettre dans le c, mettons.
Ça, ce n'est pas quelque chose d'inimaginable, mais ce n'est pas comme des
marges de prudence... Enfin, ça ne correspond pas à la compréhension que
le VG en a, c'est tout ce que je veux dire. Lui, il voit ça comme une façon
prudente de gérer. Là, ce n'est pas exactement de ça dont il s'agit.
Regardez, je
vais changer de sujet. Je veux aller sur un sujet très, très
pointu, mais que je trouve important, c'est la question du bouclier fiscal. Là,
la page, c'est quoi? C'est D...
Une voix : B.19
M. Marceau : B.19. B.19, M.
le ministre.
M. Leitão : B?
M. Marceau : Oui. Bien, ça
commence à B.19, il y en a à B.20, B.21, B.22, B.23. Bon, en fait, la question vous a déjà... enfin, a déjà été posée à votre
collègue la ministre de la Famille, puis, après ça, on en a reparlé, mais je
veux juste bien comprendre les orientations qui vous animaient, qui vous
guidaient lorsque vous avez fait le choix de ce bouclier fiscal là plutôt qu'un autre. O.K.? Parce que,
moi, l'idée du bouclier fiscal, en tant que telle, bon, je pense que c'est généreux, ça corrige,
effectivement, un problème qui existe, mais, bon, vous savez comme moi qu'il y
a différents... le bouclier pourrait
défendre différents types de ménages, pourrait les défendre contre différents
types de circonstances. O.K.? Donc, c'est un bouclier, puis il te protège
contre quelque chose, puis il protège certaines personnes, puis pas
d'autres.
Là, le gouvernement a fait le choix — puis
c'est correct — de
protéger des mesures qui sont des encouragements au travail. C'est
clair, il y a donc deux dispositions qui sont incluses dans le bouclier
fiscal : il y a la prime au travail puis
le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Alors, autrement dit, si une personne voit son revenu s'accroître, sa prime au travail puis son crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants sont, d'une certaine façon protégés, il
va y avoir une compensation pour la
baisse du crédit d'impôt puis pour la baisse de la prime au travail. Je
pense qu'on a une compréhension mutuelle. Ça va là-dessus? Bon, très
bien.
Bon, mais on
vous a déjà dit en période de questions... en fait, pas à
vous, là, mais c'est vous qui avez répondu, je pense, c'est ça. C'était
mon collègue le député de Terrebonne qui avait posé la question, puis c'est vous qui
aviez répondu. Mais je reviens
là-dessus parce que vous avez fait le choix d'inclure dans le
bouclier le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants, mais pas
les tarifs de services de garde. Puis, en fait, quand une personne voit son
revenu s'accroître, il y a deux choses qui se passent, là. Si vous envoyez
votre enfant dans une garderie privée, un service de garde privé non subventionné,
on va dire, plutôt, bien... puis votre revenu s'accroît, bien, le crédit
d'impôt devient moins généreux. C'est contre ça que vous voulez protéger les
gens, puis parce que vous les encouragez à aller travailler. Mais, si on adopte — puis
je sens que ça va arriver — les changements que vous proposez à la
tarification des services de garde, bien, quand les revenus des
personnes augmentent, leurs tarifs de services de garde aussi augmentent.
Ça fait que,
si votre logique, c'est d'encourager les gens à travailler, puis là vous me
dites : Je vais juste les protéger dans une circonstance qui est celle dans laquelle ils envoient leurs
enfants dans les services de garde non subventionnés, mais vous ne les protégerez pas quand ils envoient
leurs enfants dans des services de garde subventionnés, bien là vous faites un choix qui... Premièrement, la logique
voudrait que vous protégiez tout le monde de façon équivalente, là, une espèce d'équité horizontale, qu'on appelle, qui
fait en sorte que, quel que soit le mode de garde choisi par les
parents, bien, le bouclier protège de la
même façon les parents. Ça fait que, là, ce n'est pas le cas, là. Là, si vous
êtes en service de garde
subventionné, puis votre revenu s'accroît, votre tarif s'accroît, le rythme...
Je veux juste vous le dire, là, quand on a un revenu en haut de 75 000 $... Là, je n'ai pas le chiffre
avec moi, malheureusement, mais de mémoire... Enfin, je pourrais trouver le rythme, là, mais je pense que c'est
0,039 $ par dollar supplémentaire
gagné, donc, s'il y a une hausse des tarifs, là, des services de CPE.
Alors, probablement, j'aimerais juste vous entendre sur les principes
sous-jacents, peut-être, s'il vous plaît.
• (19 h 50) •
Le
Président (M. Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. Donc, il y a
plusieurs éléments. Et vous avez raison, c'est un choix. Nous avons choisi
d'établir le bouclier fiscal de cette
façon-là. Nous nous sommes inspirés de la commission Godbout pour le
bouclier fiscal. Mais vous avez aussi
remarqué probablement que le nôtre est un
petit peu différent de celui qui
avait été proposé par la commission
Godbout, et cela pour deux raisons, tout
d'abord parce que... La première, c'est qu'évidemment nous le faisons à
l'intérieur de nos moyens. Si on avait des
moyens financiers plus avantageux, évidemment on le ferait plus généreux. Mais, puisque
la réalité est telle aujourd'hui, c'est comme ça. Ça n'empêche pas que, l'année prochaine ou dans deux
ans, si on a les moyens, on puisse bonifier le bouclier fiscal.
Alors,
quand nous avons mis en place le bouclier fiscal, notre première préoccupation,
comme vous avez aussi mentionné, c'est l'encouragement au travail. Donc,
c'est surtout de protéger la prime au travail pour les familles ou les
contribuables à bas revenus. Donc, c'est vraiment ce groupe de personnes que
nous ciblons pour qu'elles puissent trouver un encouragement à aller sur le
marché du travail et à travailler, à ne pas refuser une augmentation salariale
qui pourrait, au net, leur coûter encore plus cher.
Nous avons aussi
inclus les crédits d'impôt pour frais de garde pour, donc, bénéficier encore un
peu plus des personnes à bas revenus, mais qui ont des enfants en milieu de
garde, et donc pour les inciter encore un peu plus. Mais c'est clair que ce qui est important... enfin, le montant
important, c'est la prime au travail, c'est là qu'on va chercher le plus
gros montant.
Maintenant, encore
une fois, pour les personnes à plus bas revenus... Et ça, nous le voyons dans
le tableau à la page B.22 budget, ce sont justement
les personnes à plus bas revenus qui bénéficient le plus du bouclier fiscal, et
ces personnes-là aux revenus de
40 000 $, 45 000 $, même 50 000 $, ces
personnes-là, les tarifs de garde après toute l'aide qui est apportée, les tarifs de garde n'augmentent
pas beaucoup pour ces personnes-là. Donc, le tarif net est
fixe, donc ça ne bénéficie pas... Donc, c'est assez neutre du côté
services de garde. Je ne pense pas que ce soit une mesure qui va inciter les
parents à aller d'un système à l'autre parce qu'à ces revenus-là il n'y a pas
d'impact sur les tarifs. Pour les personnes
à plus hauts revenus, là, des fois, la question peut se poser : Est-ce
qu'on envoie l'enfant dans un type de garde versus un autre? Mais, à
plus hauts revenus, le bouclier fiscal ne s'applique plus ou n'a plus d'effet.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Marceau : Oui, mais
là prenez deux pages plus loin, à la page B.24, vous avez des gens visés par le
bouclier, puis effectivement, quand on arrive à des niveaux de revenus
supérieurs, il y a moins de monde, là, je suis prêt à en convenir, mais il y a quand même
encore du monde, puis je ne comprends juste pas pourquoi vous voulez protéger
les gens qui utilisent des services de garde
non subventionnés puis que vous ne voulez pas protéger les gens qui utilisent
des services de garde subventionnés alors que beaucoup des choses qui ont été
faites par le gouvernement... Puis, M. le Président, je vous prends à témoin,
depuis plusieurs années, ça a été de vouloir rendre neutre le coût, c'est de
vouloir s'assurer que ce soit à peu près
égal puis de... Moi, ça ne correspond pas à mon choix idéologique à moi, là.
Moi, ce n'est pas le choix que moi,
je ferais, mais c'est votre choix à vous, là, de vouloir dire que ça devrait
être neutre puis que ça devrait être
l'équivalent pour subventionné puis non subventionné. Ça, c'est votre discours.
Et là ce n'est pas neutre, là, ce que vous faites, il va y avoir deux
catégories de parents. Mettons qu'on prend quelqu'un qui gagne
100 000 $, là, une famille qui gagne 100 000 $, s'ils ont
5 000 $ de plus, leur crédit d'impôt services de garde va être
protégé s'ils sont en garderie non subventionnée, puis, s'ils sont dans un CPE,
bien là ils vont devoir casquer, tout simplement, ils vont subir l'augmentation
de tarif qui est prévue.
Et,
si vous voulez inciter les gens à demeurer, parce que... Je vais recommencer
cette phrase-là. Il y a des gens qui sont
venus ici, en commission parlementaire sur le n° 28, qui sont venus vous
dire : Il y a des dangers pour la participation des femmes au marché du travail avec
l'augmentation, la modulation des tarifs de garde. Je sais que le gouvernement
en doute, là, mais il y a des gens qui sont
venus dire ça. Puis là vous nous dites — ça, c'est une affaire — vous nous dites : On ne croit
pas, là, cette histoire, là, qui a été dite par plein d'intervenants, que,
donc, si on augmente les tarifs dans les garderies,
ça va amener les gens à quitter le marché du travail. Ça, c'est une partie de
ce qui est dit par le gouvernement. Ça a été dit, en tout cas, M. le
Président, devant vous pendant l'étude du projet de loi n° 28. Puis là, du
même coup... puis là on change de moment ou
de temps dans l'histoire, puis là on arrive, puis ont dit : Écoutez, on
veut encourager les gens à
travailler, on crée un bouclier fiscal puis, pour inciter les gens à
travailler, on va protéger le monde, on va protéger la prime au travail des gens quand leurs revenus
augmentent, puis, quand ils sont en service de garde non subventionné,
on va les protéger...
Le Président (M.
Bernier) : 30 secondes.
M.
Marceau : ...puis on ne peut pas les ... Oui, je vais
arrêter... Moi, je trouve qu'il y a une incohérence, là, autant avec ce
que vous avez dit dans le projet de loi n° 28 que dans votre discours de
neutralité des modes de garde, puis, évidemment, j'ai de la misère à
m'expliquer pourquoi les parents qui utilisent les services de garde
subventionnés seraient pénalisés pour ceux qui gagnent 100 000 $ ou
75 000 $. Il va y avoir un impact sur les services de garde, là.
Le Président (M.
Bernier) : C'est maintenant du côté du gouvernement à prendre
la parole. Je peux vous laisser répondre sur ça si vous le désirez.
M. Leitão : Non, juste rapidement,
juste pour dire que...
Le Président (M.
Bernier) : Oui, allez-y sur le temps du gouvernement.
M. Leitão : D'accord. Rapidement,
pour dire que 93 % des ménages qui vont profiter du bouclier fiscal sont
des familles qui ont un revenu net qui n'excède pas 75 000 $. Donc,
le bouclier fiscal est conçu pour bénéficier à des familles à bas revenus.
Le Président
(M. Bernier) : C'est bien. Donc, je crois que c'est le député
de Sainte-Rose qui va prendre la parole.
M. Habel : Exactement. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Sainte-Rose, la parole est à vous.
M. Habel : Merci, M. le Président.
Permettez-moi de saluer l'opposition officielle et la deuxième opposition, ainsi que la banquette ministérielle et les gens
qui nous accompagnent aujourd'hui pour parler du budget. Après six
déficits du budget, enfin le gouvernement
nous présente un équilibre budgétaire, retrouve l'équilibre budgétaire. Les
agences de notation l'ont confirmé,
nos finances publiques sont plus saines et plus solides que jamais et
constituent une base pour construire la prospérité de tous les
Québécois.
Déjà, la tendance nous le montre, on a une
augmentation au nombre d'emplois de 57 000 durant la dernière portion
que notre gouvernement est arrivé au pouvoir et on a franchi cette étape sans
avoir augmenté les impôts et les taxes des
contribuables. Nous nous étions engagés à le faire lors de la mise à jour
économique. Nous respectons aussi notre engagement en réduisant le poids
de la dette et en allégeant le fardeau fiscal des Québécois tout en contribuant
au Fonds des générations.
Ce budget marque
une étape majeure, et tout est dans ce budget, M. le Président. Tout est dans
ce plan économique pour redresser les
finances publiques du Québec, qui se constitue sur deux piliers, c'est-à-dire
renforcer les conditions de la croissance économique en réduisant le
poids de la fiscalité et aussi en stimulant l'investissement et l'emploi, et,
deuxièmement, pour contrôler les dépenses.
Lorsqu'on est
allés vers la vision du retour à l'équilibre budgétaire, notre vision était
très claire, c'était de réduire les dépenses du gouvernement ou les
optimiser. Je peux vous donner, par exemple, un exemple parce que je suis sur
la Commission de la santé et des services
sociaux. Lorsque le projet de loi n° 10 est venu, on a optimisé le
rendement des centres intégrés de
services sociaux en abolissant les agences de santé et des services sociaux.
Donc, c'était réellement une mesure-phare pour optimiser les dépenses
publiques. Et la réduction des dépenses de notre gouvernement s'est faite à la hauteur de 84 % de tout l'ensemble de la
réduction de l'équilibre budgétaire parce qu'on avait un déficit
potentiel de 7,2 milliards de dollars qu'on a réduit vers l'équilibre
budgétaire.
Le budget qu'a présenté mon collègue annonce
plusieurs mesures qui visent à réduire le fardeau fiscal des particuliers et
des entreprises. Et il est vrai que le fardeau fiscal des Québécois est très
lourd, et je peux en témoigner, ayant été comptable et ayant fait la
vérification au cours de mes années subséquentes, que le fardeau fiscal est
très important et très lourd, et je crois
que notre vision de l'optimiser est excellente. Cependant, nous nous sommes
engagés aussi à avoir une gestion rigoureuse
des finances publiques. Alors, je me pose une certaine question dans un
contexte de rigueur budgétaire. J'aimerais savoir si l'allègement du
fardeau fiscal doit demeurer une priorité par rapport au financement des
services.
• (20 heures) •
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien. Alors, écoutez, le plan que nous avons mis en
place, en fin de compte, repose sur plusieurs piliers. Et, pour répondre
à votre question directement et immédiatement, je pense qu'une partie dépend de
l'autre. C'est-à-dire l'allègement fiscal, à notre avis, est important, et
c'est avec l'allègement fiscal qu'on va être capables d'obtenir une croissance
économique plus rapide, ce qui va nous permettre de mieux financer nos services
publics.
Mais avant,
donc, d'arriver à cette conclusion, permettez-moi peut-être d'élaborer un peu
plus. D'abord, le plan repose sur
l'atteinte de l'équilibre budgétaire. L'atteinte de l'équilibre budgétaire est
importante, et souvent ça a été un peu minimisé par... Que ce soient
certains membres de l'opposition ou de la société civile, d'autres
observateurs, disent : Oh! bof! Pourquoi l'équilibre budgétaire? Pourquoi
ne pas remettre à plus tard? Pour nous, l'équilibre budgétaire fait partie
essentielle de ce plan-là parce que c'est un... En étant capables d'atteindre
l'équilibre budgétaire, nous allons assurer
la stabilité financière du Québec, et la stabilité financière est la condition
sine qua non pour pouvoir aspirer à avoir une économie en santé, de
l'investissement privé en croissance, etc. Tout le reste, tous les autres plans
de croissance économique n'auraient aucun effet ou seraient défaits si on
continuait à démontrer au monde, aux marchés financiers notre incapacité de
gérer nos finances publiques. Donc, tout d'abord, c'est essentiel de prouver...
et d'atteindre cet équilibre budgétaire.
Une fois qu'on a fait ça, où est-ce qu'on s'en
va? Alors, pour générer une croissance économique qui soit à la hauteur de nos
attentes et qui soit à la hauteur des objectifs et des capacités du Québec, il
faut se rendre compte que probablement un
des grands obstacles, comme le député de Granby le mentionne souvent, un des
grands obstacles à une croissance
plus rapide, c'est le fait que notre fardeau fiscal est très élevé. Donc, il
fallait, d'ores et déjà, mettre en place des mesures, annoncer la direction dans laquelle nous voulons aller, qui
est la direction de baisser, de diminuer le fardeau fiscal tant des particuliers que des entreprises
pour que l'économie... pour que tout le monde sache dans quelle
direction nous allons aller.
Et c'est avec ces deux conditions-là,
donc l'atteinte de l'équilibre budgétaire et l'atteinte de la stabilité
financière, conjuguées à l'annonce de la direction où nous allons, qui est d'un
allègement du fardeau fiscal... ça, ça constitue les fondations d'une économie qui peut atteindre des taux de croissance plus
élevés. Donc, ça, c'est l'essentiel. Si on n'avait pas fait ça, tout le
reste n'aurait aucune importance, on ne serait pas capables d'atteindre ça.
Alors,
nous commençons par ça, nous commençons par lancer ces fondations qui sont très
fortes et puis, par la suite, nous
nous en allons dans l'allègement du fardeau fiscal. L'allègement du fardeau
fiscal, du côté des particuliers, consiste,
dans une première étape, celle que nous avons annoncée... On verra dans des
budgets subséquents qu'est-ce qu'on peut faire, mais nous avons annoncé
tout de suite deux éléments importants. Le premier, on a parlé tantôt, donc le
bouclier fiscal. C'est une mesure importante pour protéger les familles à plus
bas revenus parce que le taux effectif d'imposition
souvent le plus élevé n'est pas seulement
pour les familles à très hauts revenus, mais pour les familles à plus bas revenus, ceux qui gagnent 40 000 $, 45 000 $ par
année et qui reçoivent certains transferts fiscaux, évidemment. Ce sont
ces personnes-là qui font face souvent à des taux effectifs d'imposition qui
sont les plus élevés, donc il fallait alléger cette couche de la population là.
Et
l'autre élément de l'allègement du fardeau fiscal des particuliers, c'est la
taxe santé. En effet, c'est une taxe qui est loin d'être la plus intelligente, et donc nous nous sommes engagés à
l'éliminer. Et donc nous commençons le processus en 2017, et, encore une
fois, les premières couches de la population qui vont bénéficier de
l'élimination progressive de la taxe santé
seront d'abord les personnes à plus
bas revenus. Les personnes, les familles à plus hauts revenus, celles-là
bénéficieront de cet allègement un peu plus tard. Donc, c'était important de
faire ça d'ores et déjà.
Et
l'autre partie qui est aussi très importante dans l'allègement fiscal concerne
les entreprises. Et, là aussi, nous annonçons nos intentions, et ces
intentions-là sont de baisser les taux d'imposition généraux des entreprises.
Le plus général possible parce que nous
pensons que c'est de cette façon-là que nous allons avoir un meilleur effet sur
les décisions d'investissement des entreprises et surtout des PME.
Donc, voilà,
allègement fiscal, oui. Allègement fiscal, c'est important pour qu'on puisse
aspirer à avoir une économie plus forte, et
c'est cette économie plus forte qui va nous permettre de financer adéquatement
nos services publics.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Vous avez terminé? Vous avez une autre...
Bien, allez-y, M. le député de Sainte-Rose.
M. Habel :
Non, non, j'ai une sous-question par rapport à l'allègement fiscal encore.
Le Président (M.
Bernier) : Bien, allez-y, M. le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : Je vais aller plus au niveau des sociétés. Parce qu'on a
mentionné qu'on voulait avoir une réduction fiscale, on a parlé du taux d'imposition de 8 % à 4 %,
j'aimerais qu'on parle du taux d'imposition de 11,9 % à
11,4 %. Parce que je pense à mon
collègue de Chapleau, qui est limitrophe avec l'Ontario, quel est l'impact pour
cette région-là d'aligner... dans le
fond, d'avoir le même taux d'imposition que l'Ontario? Est-ce que ça constitue
un avantage? Et dans quelle mesure c'est avantageux?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
Bien, en effet, donc, nous avons choisi la réduction graduelle du taux général
d'imposition, de l'impôt sur le revenu des
sociétés, grandes et petites, toutes les sociétés, de 11,9 % à
11,5 %. Là aussi, nous nous sommes inspirés des travaux de la
commission Godbout. Évidemment, la commission Godbout allait plus loin que ça,
elle parlait de baisser de 11,9 % à
10 %. C'est quelque chose que, pour l'instant, nous ne sommes pas en
mesure d'aller si loin que ça, mais
c'est un objectif que nous gardons toujours en tête, et nous essaierons à
l'avenir, si c'est possible, de le faire.
De
11,9 % à 11,5 %, pourquoi 11,5 %? C'est justement comme vous
avez mentionné, pour qu'au moins on puisse s'aligner avec les taux d'imposition en Ontario. L'Ontario est,
évidemment, notre province voisine. Ce sont nos grands partenaires, ce sont aussi des compétiteurs, alors
c'était important de nous assurer que notre régime fiscal soit
compétitif avec celui de notre plus grand
partenaire économique, qui est l'Ontario, pour éviter que la fiscalité devienne
un facteur de décision, de choix
d'investissement dans une province versus l'autre. Donc, avec ce taux qui va
converger vers celui de l'Ontario, je pense que nous éliminons... enfin,
nous minimisons cette compétition fiscale. Et en gardant aussi en tête que,
pour les PME, pour les PME manufacturières, en fin de compte, maintenant le
régime fiscal québécois est plus avantageux que celui de l'Ontario. Pour les
PME manufacturières.
Encore là, on
aimerait bien étendre ça aux PME de plusieurs autres secteurs. On y arrivera
avec le temps, au fur et à mesure que nous
avons les moyens, mais au moins, pour les PME manufacturières, déjà le régime
fiscal québécois, au moins, là aussi, ça ne sera pas un obstacle à la
localisation de l'investissement versus nos voisins ontariens. Donc, c'était
important de s'aligner avec la fiscalité de nos voisins.
• (20 h 10) •
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Vous avez une sous-question?
M. Habel :
...sous-question au niveau du taux d'imposition, qui va passer de 8 % à
4 %. Ça constitue quand même un avantage concurrentiel pour les PME, qui
vont pouvoir en bénéficier au cours des prochaines années. Dans quelle mesure ça va être bénéfique pour les
régions du Québec, cette réduction de 8 % à 4 %, pour le secteur
primaire?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão :
C'est ça, parce que ce que j'avais tantôt, c'est que le 8 % à 4 %
pour les PME manufacturières, c'est ce que
nous avions dans le budget de juin. Dans le budget de mars 2015, nous avons
prolongé ça, nous avons étendu ça
aussi au secteur primaire. Donc, le secteur primaire, c'est l'agriculture,
c'est les mines, les pêches, la forêt. Alors, le secteur primaire, bien sûr, est un secteur qui est particulièrement — presque,
par définition — présent
et important en région. Alors,
les industries manufacturières, c'est très bien, mais, pour pouvoir vraiment...
pour que les régions un peu plus éloignées du Québec puissent aussi
bénéficier de cet allègement fiscal, pour que les PME des régions du Québec
puissent bénéficier aussi de cet allègement fiscal, c'était utile d'étendre ça
au secteur primaire, ce que nous avons fait dans le budget de mars 2015.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Portneuf? M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : C'est à moi? O.K.
Bien, merci, M. le Président. Bonsoir, les collègues. Bonsoir, l'opposition...
les deux oppositions, en fait, M. le ministre.
Donc, comme
vous le savez, le ministre a déposé un budget équilibré pour 2015-2016,
et je pense que tout
le monde est conscient des efforts
qu'il reste encore à faire pour arriver à un équilibre budgétaire. Je pense
qu'on a entendu parler pendant de
longues périodes des risques et de la fragilité de cet équilibre budgétaire là, et ces efforts vont nous permettre de combler un déficit de plus de 7 milliards de dollars qui aurait pu être créé durant cette année.
Donc, pour ce faire, on a posé des gestes qui étaient nécessaires et
difficiles pour que la croissance des revenus augmente plus rapidement que celle des dépenses. Et le défi va être de
maintenir, j'imagine, à plus long terme, cet équilibre-là, qui fait que les
coûts avaient tendance, depuis
plusieurs années, à augmenter plus rapidement que le PIB. Et on l'a vu — je pense que l'opposition en a parlé
très abondamment — où
les croissances, entre autres, de la santé, qui représentaient des coûts de
plus de 4 % annuellement, puis, étant
donné que c'est presque 50 % du budget, bien, ça représente une croissance
relativement élevée.
Les derniers
rapports mensuels aussi nous confirment que les étapes que nous avons mises en
place, la tendance se maintient, ça va dans la bonne direction. Donc, le
budget déposé prévoit aussi que l'équilibre va se prolonger durant les années
suivantes.
Donc, M. le
Président, j'aimerais savoir comment nous assurer que l'équilibre budgétaire
durement acquis sera maintenu pour les années à venir. Donc, j'aimerais
demander au ministre des Finances quelles sont les mesures qui ont été prises
et qui seront prises pour poursuivre l'assainissement des finances publiques.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, comme vous avez
mentionné, l'équilibre budgétaire, ce n'est pas seulement, comme j'ai déjà dit, l'affaire d'un soir, c'est quelque
chose qu'il faut maintenir par la suite. Donc, nous nous engageons à
atteindre l'équilibre budgétaire cette année, 2015-2016. Par la suite, il faut
maintenir cet équilibre-là.
Je souligne
aussi en passant qu'au Québec, selon notre Loi de l'équilibre budgétaire, quand
on parle de l'équilibre budgétaire,
ça, c'est après versement au Fonds des générations. Donc, en fin de compte,
d'une façon opérationnelle, le gouvernement
du Québec génère des surplus opérationnels déjà cette année, 2015-2016, et puis
dans les années suivantes.
Comment
allons–nous nous assurer qu'on va maintenir cet équilibre-là après versement au
Fonds des générations? En fin de
compte, notre méthode, si vous voulez, est une méthode qui n'est pas
particulièrement complexe. Nous allons nous assurer que les dépenses
publiques n'augmentent pas à un rythme plus rapide que les revenus. Alors, si
nous pouvons compter sur une augmentation des revenus de l'État, en moyenne, à
long terme, 3 % par année, juste pour prendre
un chiffre comme ça, 3 %, 3,5 % par année, ça voudra dire que les
dépenses publiques ne pourront pas croître à un rythme plus rapide que
cela. Donc, il va falloir qu'on soit capables de vivre à l'intérieur de nos
moyens et qu'on soit capables d'atteindre ces cibles-là de croissance de
dépenses.
Mais est-ce
qu'une telle rigueur en termes de contrôle des dépenses... est-ce que, comme on
l'a déjà entendu dire aussi, ça va démolir, détruire le modèle québécois?
Écoutez, en suivant cette tendance-là, en suivant cette approche de limiter la croissance des dépenses — parce
qu'elles augmentent toujours — au
rythme d'augmentation des revenus, ce que nous allons obtenir d'ici
2020, c'est que les dépenses, les dépenses consolidées, excluant le service de
la dette, atteindraient à peu près
21 % du PIB du Québec. Elles sont maintenant à peu près
à 23,2 %. Donc, le poids des dépenses va diminuer légèrement, mais
il va revenir à 21 %, il va devenir à la moyenne historique.
Le
Président (M. Bernier) : On aura l'occasion d'y revenir, M. le ministre, on aura
l'occasion d'y revenir. Nous allons maintenant
passer la parole au député de Granby, porte-parole officiel en matière de finances publiques.
Allez-y, M. le député.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Alors, je vais amener la discussion, M. le Président, sur
l'emploi et sur la Stratégie maritime. Pourquoi? Parce que, lors de la dernière
élection, le Parti libéral avait la prétention de dire qu'avec l'effet libéral — vous
le savez, tout le monde s'en souvient — qu'ils allaient créer 250 000 emplois,
que le plan de relance économique,
une partie de ce plan de relance économique, une partie majeure allait être la
Stratégie maritime. Le gouvernement,
en campagne électorale, parlait d'investissements de 3 milliards de
dollars sur une période de 15 ans, on parlait de créer 30 000
nouveaux emplois.
Le Plan Nord, hein, relancer le Plan Nord, on
l'a vu la semaine passée, un gros show encore une fois, comme on l'a déjà connu sous la gouverne de
M. Charest en 2010-2011 si je me souviens bien, mais avec des conditions
économiques, aujourd'hui, qui ne sont pas du tout, du tout, du tout les mêmes
que nous avons connues dans un cycle qui était à la hausse, où le prix des métaux, du
fer, de l'or, qu'on connaissait à 1 500 $ l'once, le fer, si je ne me
trompe pas, qui était à 150 $, ça
allait quand même assez bien. On avait même connu, on avait même
connu... on avait même atteint des redevances, si je ne me trompe, qui
avaient presque atteint 300 millions de dollars et un peu plus...
Une voix : 330.
• (20 h 20) •
M.
Bonnardel : 330 lors de la bonne année de 2013, si je ne me
trompe. Et, l'année passée, on a atteint un creux, un creux stratégique
de 30 millions de dollars ou à peu près.
Je n'y reviendrai pas parce que ce n'est pas nécessairement
le débat, là, des conditions de comment on est arrivé à avoir de l'incertitude
qui a plané énormément sur l'industrie minière, mais ma première intervention
se fait nécessairement sur un plan global, sur un plan d'emploi.
Vous avez entendu maintes et maintes fois mon chef, moi-même parler des conditions économiques, comment on
pouvait relancer le Québec, comment on pouvait redonner de l'oxygène
aux contribuables québécois, et l'emploi, c'est important, les Québécois
veulent travailler. On est une population vieillissante,
je le répète depuis des années, on veut garder nos gens, nos sages le plus
longtemps sur le marché du travail. Les
gouvernements veulent trouver des avantages fiscaux pour garder ces gens sur le
marché du travail pour accompagner nos plus jeunes, bravo!
Mais, si on
regarde le portrait, le vrai portrait de l'emploi, là... Parce que, bon,
certains utilisent des chiffres qui sont
à leur avantage, mais le vrai portrait de l'emploi en 2014, quand on regarde
les trois premiers mois du Parti
québécois et les neuf mois du Parti libéral, l'Institut de la statistique
l'a démontré, c'est une perte. C'est une perte, pour l'année, totale de 11 000 emplois, ou à quelques dizaines
près. C'est une perte. Si on prend lors de l'arrivée du Parti libéral en avril
2014 et on termine l'année, on a une
progression — les
chiffres, je les ai ici — de 31 300 emplois. Ça, c'est les neuf premiers
mois de l'année 2014.
Dans ces conditions, on a posé maintes et
maintes fois la question en Chambre, mais c'est important, encore une fois, aujourd'hui, que le ministre nous expose
sa pensée et qu'il revienne sur ce qui pouvait être une cible, là, dans
le temps — on en a bien rigolé — une promesse ou peu importe. Mais, dans ce
budget, on parle de 37 500 emplois pour la prochaine année, on parle de 36 000 pour
l'année suivante, on va être loin de l'objectif à atteindre, qui est de 250 000 emplois. Alors, bien
respectueusement, le ministre, il l'a presque avoué la dernière fois en se
disant : C'est vrai que ça va être difficile d'atteindre
l'objectif. Aujourd'hui, il peut juste nous confirmer que c'était peut-être
ambitieux d'annoncer en campagne électorale l'objectif de
250 000 emplois. On a voulu frapper un grand coup comme Robert Bourassa l'avait fait voilà quelques dizaines
d'années, mais on se rend compte aujourd'hui que l'objectif ne sera pas
atteint parce qu'il faudrait avoir une
création d'emplois d'au-dessus de 70 000 dans les deux dernières années du
mandat, ce qui est à peu près impossible.
Alors,
première question fort simple, puis je vais essayer d'approfondir un peu la...
surtout par la suite la situation du
31 500 emplois de créés depuis l'arrivée des libéraux pour l'année
2014. Mais, juste avant ça, je veux que le ministre nous expose la
situation en peu de temps, là, mais la situation comme on la connaît
aujourd'hui, là. Là, 2014, on sait que,
depuis leur arrivée, O.K., 31 500. Au global, avec le Parti québécois, les
trois premiers mois de l'année, c'est une perte de 1 000. Mais là on a quand même un objectif moindre pour l'année
qui s'en vient, le gouvernement l'a mentionné dans son budget. Et, pour
l'année suivante, donc on n'arrivera pas à créer l'objectif de
250 000 emplois.
Alors, je veux que le ministre... Je pourrai
élaborer par la suite sur l'autre promesse de la Stratégie maritime, mais, au final, au global, on se rend compte
aujourd'hui qu'il sera extrêmement difficile... Donc, que le ministre nous
dise que c'est un objectif qu'il souhaite atteindre, oui, pour la prochaine
année, je suis d'accord, mais qu'on ne sera pas capable d'arriver à l'objectif,
que les libéraux souhaitaient avoir, de 250 000 emplois.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Très bien. Merci, M. le
Président. Alors, très bonne question parce que je pense que l'emploi, là, il
faut parler un petit peu de ça, parce qu'en effet il y a toutes sortes de
chiffres qui circulent. Notre engagement était — et l'est
toujours — de
250 000 emplois sur cinq ans. Pas en cinq mois ni en cinq
semaines, mais en cinq ans.
Alors, d'ailleurs,
on avait eu cette discussion lors du dernier budget avec le député de Rousseau,
et j'avais dit à ce moment-là que,
pour nous, donc, comment on va faire le décompte des emplois, pour nous, on met
le compteur à zéro à notre arrivée.
On ne peut pas être tenus responsables de ce qui s'est passé avant notre
arrivée, donc on met le compteur à zéro au mois d'avril 2014. On verra
bien où on va être au mois d'avril 2019, cinq ans plus tard.
Avril 2014, le niveau d'emploi au Québec était
de 4 042 000 personnes. Donc, nous allons être jugés, si vous
voulez... notre engagement est qu'en avril 2019 l'emploi total au Québec soit
de 4 290 000 pour faire 250 000 sur cinq ans. Alors, rapport d'étape, un an plus tard, où nous nous trouvons
maintenant au mois de mars 2015? Bon, nous nous trouvons avec
57 000 de plus. Donc, on est déjà à 4,1 millions ou à peu près, comme
ça. Donc, on va dans la bonne direction.
Donc, oui, il y a de la création d'emplois qui s'est faite au Québec au cours
des 10, 11 derniers mois, création
d'emplois qui est quand même vigoureuse, surtout depuis les quatre derniers mois. Si vous regardez le tableau que nous avons à la page C.17 de notre plan
économique, où on a l'emploi, on voit qu'en effet, depuis notre arrivée, nous
avons été capables de renverser la tendance,
de stabiliser l'emploi, pour, par la
suite, avoir cette augmentation un peu plus récente.
Maintenant, j'aimerais aussi clarifier encore
une fois les choses. Quand on parle de moyenne, la moyenne de l'emploi, 40 000, je ne sais pas quelle année, 30 000 l'autre année, la
moyenne annuelle, comme vous le savez très bien, la moyenne annuelle, c'est une façon... En campagne
électorale, on s'est beaucoup amusés avec ça, on a beaucoup discuté de ça, on a beaucoup parlé de ça, qu'un meilleur
indicateur de la vigueur d'un marché du travail, ce n'est pas la moyenne
annuelle, mais c'est ce
qui se passe pendant l'année. On rigole, mais on a discuté de ça plusieurs
fois, et j'ai bien l'impression qu'on va en discuter d'autres fois.
Comme par exemple, en 2013...
Le
Président (M. Bernier) : Je veux juste essayer de balancer le temps, M. le ministre, pour permettre aux gens de poser des questions et que vous
puissiez donner les réponses.
M. Leitão : Vous avez raison, parce
que, quand un économiste commence à parler, on... difficile de l'arrêter.
Le
Président (M. Bernier) : Bien oui, quand un économiste... C'est pour ça... Et, comme j'en ai plusieurs autour de la table, je vais
essayer de vous contrôler.
M. Leitão : Alors, juste finir avec
l'emploi, donc, avec l'emploi, juste pour dire que notre engagement, le 250 000,
bien sûr, nous y tenons toujours et, après 10 mois, nous sommes en plein
dans la trajectoire voulue.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M.
Bonnardel : M. le
Président, si je prends trois minutes, j'aimerais ça que le ministre puisse en
prendre trois minutes, juste pour qu'on soit...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, c'est effectivement ce qu'on a fait, là, on a balancé le temps que vous
avez pris par rapport au temps présenté par le ministre.
M.
Bonnardel : Bon, je comprends la situation
des chiffres. Il y a un autre point qui frappe quand même assez fortement la situation de l'emploi au Québec, et c'est nécessairement
la création d'emplois à temps partiel, la création d'emplois à temps plein, mais surtout la création d'emplois aussi dans le
secteur public, que ce soit municipal, provincial, fédéral et privé. Et, si on prend l'année 2014, si
on prend juste depuis l'arrivée des libéraux, là, on prend les neuf
premiers mois de l'année 2014, il y a
eu 31 500 emplois de créés,
mais, sur ces 31 000, il y en a 83 % qui ont été créés dans le
secteur public et une perte de 9 100
emplois dans le secteur privé. Et, sur ce 31 500 emplois, il y en a
3 % seulement qui viennent du secteur à temps plein. Le ministre
doit convenir qu'un job à temps partiel, ce n'est pas un job à temps plein, ce
n'est pas l'équivalent. Oui, c'est un job,
c'est vrai que c'est un job. Un job à temps partiel, on peut y travailler
20 heures, on peut en travailler 15, on peut en travailler 25, mais
ce n'est pas un job à temps plein.
La situation
de l'emploi aussi dans le secteur privé — puis je sais que ça le touche, là, c'est
certain — on
souhaite voir énormément d'emplois créés dans le secteur privé. Dans le secteur
public, O.K., mais, si c'est le secteur public qui débalance le reste et qui donne une création plus grande, on
n'avance pas. Et il le sait très bien parce que, quand on regarde les chiffres de l'investissement privé du
Québec versus la moyenne canadienne, on est à peu près à 14 % au
Québec et on représente 24 % de la population, on a un énorme retard.
Donc, au-delà
du débat partisan, là, du salon bleu, là, jour après jour, où on lui pose la
question, où mon chef lui dit :
Création d'emplois, plan de relance économique, il le sait très bien — ce soir, là, il n'y a personne... oui, il y
a des gens qui nous écoutent, là, les caméras de télé ne sont pas
là — il
le sait très bien, là, que c'est majeur, la situation de l'emploi dans le privé versus le public et qu'on a
besoin de création d'emplois à temps plein, puis, on le souhaite, des jobs payantes, payantes. Donc, au-delà
de la création que lui dit avoir créée, moi, si je regarde les neuf premiers
mois de l'année, là, sur ces 31 500 emplois, il le sait, il y a 3 % qui
sont dans le secteur à temps plein et une grande majorité de ces emplois
ont été créés dans le secteur public. Est-ce qu'il pense être capable de
changer cette dynamique en 2015? Et rapidement,
dans le même temps que j'ai pris, comment il pense remettre cette situation en
équilibre entre les jobs créés, les emplois créés dans le secteur privé
versus le secteur public?
Le Président (M. Bernier) :
Il ne faut pas minimiser nos cotes d'écoute, M. le député.
M.
Bonnardel : Ah non!
Je ne minimise pas, non.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Bonnardel : Il y en
a déjà eu des grosses, hein?
• (20 h 30) •
M. Leitão : M. le
Président, oui, en effet,
c'est une très bonne question. Et, en
effet, la qualité de l'emploi,
c'est quelque chose qui nous préoccupe, nous voulons, évidemment,
que les emplois créés soient de la meilleure qualité possible. Et vous avez mentionné que la création d'emplois
par le secteur privé est loin d'être optimale, en effet. Et les mesures
que nous avons mises en place, justement,
dans notre plan économique, l'allègement du fardeau fiscal pour les
entreprises manufacturières, secteur primaire, la baisse du taux d'imposition
général, bon, toutes ces mesures-là, leur objectif, c'est de stimuler l'investissement privé parce
que la création d'emplois viendra
ultimement de l'investissement
privé. Comme on s'était dit cet après-midi
en Chambre, c'est le secteur privé qui doit créer les emplois. Alors, nous
mettons en place des mesures pour stimuler l'investissement, et c'est de là que
viendra l'emploi.
Maintenant,
le secteur public, secteur privé, en effet, beaucoup d'emplois qui ont été
créés dans les derniers mois sont dans le secteur public. De notre côté,
évidemment, nous contrôlons la croissance des effectifs. Donc, je ne pense pas que ce soit dans la fonction publique provinciale qu'il y a ces gains, c'est dans d'autres secteurs. Et,
souvent, ce sont dans les secteurs des réseaux parapublics, santé,
éducation, c'est là qu'il y a un bon nombre de nouveaux emplois. Ça voudrait dire aussi, je pense,
que la fameuse austérité toxique, ce n'est peut-être pas si toxique que
ça, puisqu'il y a des emplois qui sont créés. Mais vous avez raison que
ce que nous souhaitons, c'est la création d'emplois par le secteur privé et qui viendra d'une augmentation marquée de l'investissement, chose qu'on n'a pas vue en 2013. On a commencé à
le voir un peu en 2014, et notre objectif en 2015, c'est que l'investissement
reparte.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Bonnardel : La vérité, M. le Président, c'est que,
d'ici les deux prochaines années... Je l'ai mentionné, je le répète encore une fois, ce budget 2015-2016,
rien n'est applicable pour relancer l'économie immédiatement, fortement, avant 2017, il le sait bien. Que ce soit le bouclier fiscal, que ce soit
le fait qu'on va commencer à réparer l'erreur du passé qui est la taxe santé à partir de 2017 et on va
l'abolir complètement après le mandat libéral — on devait le faire avant la fin de son mandat — que ce soit l'impôt des sociétés,
baisser le fardeau fiscal, que ce soient les cotisations au fonds de
santé, sécurité, tout ça, il n'y a rien d'applicable dans les deux prochaines
années, là.
Et là j'arrive à un point majeur qui était un
des points d'importance du plan de relance économique. Tout le monde a rigolé
quand on a déposé le Projet Saint-Laurent, quand M. Legault... quand le chef du
deuxième groupe d'opposition a déposé son
livre. C'est que, soudainement, tout le monde a trouvé un peu sexy de
développer une stratégie maritime et
de dire : Bien, tiens, nous aussi, on peut faire la même chose. Et, je
l'ai mentionné en début d'intervention, les libéraux souhaitaient
3 milliards d'investissement sur 15 ans et 30 000 nouveaux
emplois. Bien, on a revu ça à la baisse. De
notre côté, on était beaucoup moins ambitieux parce qu'on prévoyait
2 milliards, 10 000 emplois. Et, quand le plan de stratégie... quand j'ai déposé... j'ai
demandé au gouvernement... qu'on a regardé le budget, on s'est dit :
Écoutez, un instant, là, il y a une annonce qui est faite, là, on parle de
1,5 milliard maintenant sur les cinq prochaines années, on revoit aussi à
la baisse, là, la création d'emplois pour ramener ça aussi à 10 000, si je
ne me trompe.
Ça fait que,
là, quand on s'est dit : Il y a 1,5 milliard d'investissement, on est
allés fouiller un peu plus loin, puis là
on s'est rendu compte, à la page B.161, que l'impact financier des nouvelles
mesures, là, qui sont annoncées dans le budget 2015-2016 pour la stratégie maritime, bien, pour l'année qui est
là, qui est commencée depuis le 1er avril, c'est 13,8 millions. Là,
on s'est dit : Un instant! Quand j'ai parlé de ça au huis clos devant les
centaines de journalistes, là on s'est fait
marteler un petit peu en se disant : Non, non, non, il y aura
1,5 milliard d'investissement. O.K. Attendez un instant, là, il y a
peut-être des choses qui nous ont échappé dans le programme québécois
d'investissement... dans le PQI. Il n'y avait rien.
Alors là, question fort simple — je ne
veux pas prendre tout le temps — le ministre... Avec ce qui est indiqué dans le budget, l'impact financier réel, là,
l'investissement qui aura lieu pour la prochaine année, on parle de
13,8 millions de dollars, là. Mais, à la page juste avant, la page 160, on
parle d'investissement, dans les cinq prochaines années, de 1,5 milliard. Là, je veux qu'il m'explique,
le ministre, quelle sorte d'effet de levier qu'il a pu imaginer, là, quelle
sorte de comptabilité créative ils peuvent
s'imaginer ou créer en nous disant que, sur une période de cinq ans,
170 millions de dollars pourront
amener des investissements de 1,5 milliard de
dollars, mais surtout pour l'année
qui s'en vient, le 13,8 millions.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Bon, M. le Président,
c'est bien que le collègue soulève cette question parce qu'en effet il semble y
avoir un peu de confusion. L'impact financier des nouvelles initiatives
annoncées dans le budget 2015-2016 pour la mise en oeuvre de la
stratégie maritime, page B.161, les fameux 13,8 millions en 2015-2016,
oui, ça, c'est l'impact financier, donc,
dans les crédits budgétaires, mais le véritable impact de la stratégie
maritime, ce sont les investissements. Donc,
c'est l'investissement public et privé qui va générer l'activité économique.
Les 13,8 millions, ça, c'est l'impact financier dans l'année 2015-2016. Mais, comme, par exemple, quand vous
achetez une maison, évidemment ça va vous coûter 300 000 $, mais, dans l'année 1, le coût de
l'amortissement et le coût de l'intérêt pour la première année, ce n'est
pas 300 000 $, c'est beaucoup
moins que ça, donc c'est un peu cette dynamique-là. C'est 1,5 milliard,
oui, d'investissement, et
1,5 milliard par le gouvernement du Québec. L'investissement privé, ça va
venir en plus. Donc, 1,5 milliard, et, en termes de dépenses, de
crédits, là, dépenses financières, ça, c'est 13,8 millions. Ce sont deux
parties de la même médaille. L'investissement,
c'est 1,5 milliard pour la période 2015-2020. En 2015-2016, pour l'année
2015-2016, c'est 13,8 millions d'impact financier.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Bonnardel :
Oui, oui, Attendez, là. Là, le ministre, là, je pense qu'on ne se comprend pas,
là. Moi, ce que je comprends, là,
c'est que l'impact financier réel de l'investissement pour la stratégie
maritime, c'est 13,8 millions. C'est ça qui est indiqué, là. Ce qui est indiqué à gauche, c'est une prévision,
là, c'est ce qu'on souhaite, là. Moi, de l'investissement public, à
moins que ce soit dans les crédits, là, ou que ce soit dans le PQI... J'ai
demandé aux fonctionnaires qui étaient là,
ils m'ont dit : Non, non, c'est dans le PQI. J'ai dit : Oui?
Montrez-moi où. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, là, il y a
peut-être de l'investissement au port de Montréal, au port de Québec, il y a
peut-être un 300, 400 millions en
quelque part qui... Faites juste me... Vous ne me rassurez pas, là. Moi, ce que
je vois, c'est que l'impact financier
réel de la stratégie maritime pour l'année 2015-2016 est de 13,8 millions.
Donc, c'est avec ce 13,8 millions que vous souhaitez créer — on va
l'appeler l'effet de levier — un effet de levier pour être capable
d'aller chercher...
Parce que je vous ai
envoyé une demande d'accès à l'information. L'année passée, là, vous avez mis
en place un congé fiscal. Si certains d'entre vous ont le budget 2014-2015, à la
page B.59, il y avait les incitatifs fiscaux du budget de l'année passée. Donc,
je lui ai envoyé une demande d'accès à savoir combien de sociétés, de
compagnies ont pu profiter de ces congés
fiscaux, le nombre de navires, le nombre d'entreprises, s'il le faut, valeur
moyenne des projets. Et, vous vous
souvenez, j'ai posé la question en Chambre, puis c'était zéro, il n'y en avait
pas. Alors, je vous le dis bien respectueusement, il n'y en avait pas.
Alors, moi,
si on me dit : Il y aura 300 000 $ pour accélérer les
investissements dans les infrastructures portuaires commerciales, il y aura 10 millions pour
attirer les investissements privés en misant sur des infrastructures
logistiques et portuaires,
100 000 $ pour favoriser l'essor du tourisme maritime,
200 000 $ pour la bonification pour les Îles-de-la-Madeleine, crédit
d'impôt, 1,5 milliard, coordonner l'action gouvernementale...
1,5 million, pardon, 1,5 million pour soutenir la recherche et
l'innovation, moi, c'est ce que le gouvernement s'engage à dépenser.
Le
Président (M. Bernier) : Votre temps étant écoulé, si vous
désirez répondre à la question qui est posée par le député de Granby,
vous pouvez le faire sur le temps gouvernemental...
M. Leitão : Juste très...
Le Président (M. Bernier) : ...sur
le bloc du gouvernement, nous retournons à notre...
M. Leitão : D'accord. Juste très
rapidement. Parce qu'on...
Le Président (M. Bernier) :
Bon.
M.
Leitão : ...pourrait peut-être poursuivre après, mais, très
rapidement, pour finir avec ce que le collègue a fini, donc favoriser l'essor du tourisme maritime, en
effet ça va nous coûter, en termes de dépenses du gouvernement, ça va
nous coûter 100 000 $. Mais l'autre côté, à la page 160, le même...
favoriser l'essor du tourisme maritime, sur la période 2015-2020, il va y avoir
76 millions qui vont être investis. C'est l'investissement,
76 millions, sur cette période de cinq ans. Cette année, en 2015-2016, le
coût estimé est de 100 000 $.
• (20 h 40) •
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Mégantic, la parole est à vous.
M.
Bolduc
: Merci, M. le Président. Écoutez, M. le ministre, vous étiez en train de
nous expliquer comment, pour maintenir
les finances et poursuivre l'assainissement des finances publiques, que les
dépenses devraient être plus faibles que celles des revenus, donc je
vous ramène un peu à votre élan dans lequel vous étiez pour vous ramener sur
les explications de ce...
M. Leitão : C'est ça. C'est ça,
merci, vous me ramenez à l'ordre.
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y, M. le ministre.
M.
Leitão : Donc, ce que je mentionnais, c'est que, donc, ces efforts-là
de contrôle de croissance des dépenses vont ramener le poids des dépenses publiques consolidées à peu près à
21 % du PIB, ce qui était la moyenne historique des années 90 au Québec. Donc, à ce que je sache, à ce
moment-là, on n'était pas en train de détruire le modèle québécois. Alors, on revient à la moyenne historique, on
revient à l'intérieur de ce qu'il est possible de faire à l'intérieur de
notre capacité de payer. Donc, nous allons
nous assurer que les dépenses augmentent moins rapidement que les revenus.
Donc, nous allons avoir, en suivant la
tendance que nous mettons en place maintenant, des dépenses de l'ordre, donc,
de 20 % et quelques du PIB. Les revenus vont être légèrement plus
élevés, donc à 25 %, mais eux aussi vont diminuer un petit peu parce que
nous voulons alléger le fardeau fiscal.
Maintenant,
je pense que ce qu'il est aussi important de tenir en considération, c'est
qu'évidemment, pour s'assurer que les
dépenses augmentent à ce rythme-là, ce qui est contraignant... Dans le
passé, oui, comme le collègue de Granby l'a mentionné plusieurs fois,
les dépenses augmentaient à 4 %, 5 %, 6 % par année. Alors, pour
ramener la croissance des dépenses à un rythme qui soit plus soutenable à long
terme, c'est exigeant, c'est contraignant, il va falloir qu'on regarde les façons de faire. Ce n'est pas
seulement de faire des petites coupures ici et là, ce n'est pas comme ça
qu'on va y arriver. On va y arriver en examinant les programmes de haut en bas,
en s'assurant qu'on est capables de livrer les services publics à moindre coût,
donc qu'on est capables de bien utiliser la technologie. On est quand même au XXIe siècle, on est quand même dans la deuxième
décennie du XXIe siècle, la technologie a beaucoup progressé. Ça se fait
ailleurs, où la livraison des services publics est beaucoup plus efficace en
utilisant mieux la technologie, ce que nous allons faire aussi.
Une partie
très importante de ce processus de s'assurer que le contrôle de la croissance
des dépenses est maintenu, c'est ce
que nous avons mis en place l'année passée, le cran d'arrêt, c'est-à-dire que
nous n'allons pas commencer, démarrer de
nouveaux programmes sans que cela... Pour trouver le financement pour de
nouveaux programmes, il faut le trouver à l'intérieur de notre dépense actuelle parce que nous nous sommes rendu
compte qu'il y a une grande partie de la pression sur l'augmentation de
la croissance des dépenses au cours des dernières années... Au-delà de la
croissance, bon, de la population, et tout
ça, des facteurs démographiques, il y avait aussi deux autres facteurs qui
étaient très importants. D'abord, le fait qu'on ajoutait continuellement de nouveaux
programmes, de nouvelles dépenses au fil des dernières années, toujours
de nouvelles dépenses. Et aussi on s'est rendu compte que les effectifs de
l'État augmentaient, augmentaient à un rythme
de peut-être 6 000 par année continuellement. Donc, nous nous sommes
employés à ralentir, voire même réduire les effectifs de l'État et à utiliser la technologie de façon plus
adéquate pour freiner la croissance des coûts et à ne pas ajouter de nouvelles dépenses, de nouveaux
programmes sans qu'on soit capables de les financer à l'intérieur de l'enveloppe
totale. Donc, ce n'est pas facile. Ce n'est pas l'affaire de seulement pendant
un an, et puis on revient aux habitudes précédentes, c'est une nouvelle façon
de gérer les dépenses publiques.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Écoutez, ce que vous nous dites là,
c'est un peu fascinant. On est en train de parler, selon moi, non pas d'austérité toxique, comme le disent
certains, ou de démantèlement de notre tissu social, mais vous êtes en train de nous dire qu'on veut un peu
revoir les façons de faire, un peu comme la productivité dans les grandes
entreprises internationales, qui
requestionnent, revoient leurs façons de faire de façon continue. Mais, au
gouvernement, ce n'est pas une pratique
normale ou usuelle de faire ça. Est-ce que vous prévoyez qu'on va devoir
commencer à innover, créer, impliquer les gens à améliorer la
productivité? Comment vous voyez ces choses-là évoluer?
M.
Leitão : Je pense que, quand on parle de productivité, c'est un
concept qui est peut-être un petit peu mal compris de la population en général. Souvent, on pense
productivité : Ah bon! Vous allez nous faire travailler plus. On va
juste travailler plus longtemps et gagner moins, etc. Au contraire, la
productivité, c'est de donner aux travailleurs — que ce soit le secteur public ou privé — les meilleurs outils possible pour qu'ils
puissent faire leur travail d'une façon plus efficace. Ce n'est pas une question de travailler un plus grand nombre
d'heures, c'est une question de travailler les mêmes heures ou même moins, mais mieux, avec des outils
appropriés. Et dans le... donc, les activités gouvernementales dans le grand secteur des services... Et on a vu que, dans
d'autres branches du secteur des services, on en a vu, de très forts
gains de productivité au cours des dernières
années, des changements technologiques importants. On le voit maintenant
dans le secteur du commerce de détail, c'est
majeur, ce qui est en train de se passer dans le commerce au détail. Et cette
révolution technologique dans le marché de
détail change complètement les façons de faire, et ce type de changements
technologiques, donc, peut s'appliquer dans d'autres segments du secteur des
services, incluant le secteur gouvernemental.
J'ai plein
d'exemples en tête dans des pays moins prospères que le Canada ou le Québec où
on voit que l'État livre maintenant
les services d'une façon beaucoup plus efficace qu'avant. Par exemple, dans mon
pays d'origine, au Portugal, il y a eu une énorme révolution dans la
livraison des services par l'État. En utilisant l'Internet, en utilisant la
haute technologie, ils ont réduit leurs
coûts de livraison de services de façon majeure. Je ne vois pas pourquoi nous,
ici, nous ne serions pas capables d'accomplir de l'épargne de cette
façon-là, là. Tout le processus de permis, toute la bureaucratie qu'il y a, je pense qu'il y a énormément de gains
qui peuvent être faits dans la livraison des services publics au Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Laval-des-Rapides, la parole est à vous.
• (20 h 50) •
M.
Polo : Merci beaucoup, M. le Président. C'est la deuxième fois que je
participe à cet exercice de questionner le ministre des Finances sur le dépôt du budget, puis j'aimerais l'inviter
peut-être à revivre un peu ses anciennes fonctions d'économiste en chef, notamment parce que ma
question s'adresse sur tout l'impact des prix du pétrole sur les
prévisions budgétaires ou les prévisions économiques et de quelle façon le
ministre des Finances a utilisé ses analyses ou ses prévisions pour déterminer, justement, de quelle façon ça allait
expliquer, justement, non seulement l'état au niveau de l'économie, mais aussi l'effet au niveau de ses
prévisions, comme on a pu le constater notamment par la motion présentée
par la deuxième opposition aujourd'hui, en
termes des prévisions budgétaires ou des prévisions de croissance
économique au cours des prochaines années.
Alors,
peut-être une première question, M. le ministre, surtout pour nos auditeurs,
parce que je crois sincèrement qu'il
y a beaucoup de citoyens qui prennent le temps de vous écouter et d'entendre
les travaux qu'on fait ici, en commission parlementaire. Expliquez-nous de quelle façon... Parce que, l'an
dernier, nous avons vu, au cours des six derniers mois de l'année, une
baisse importante des prix du pétrole, qui dépassaient au-delà de 105 $ et
qui sont descendus autour de 50 $ en une période très courte. Nous avons
constaté également que les grands pays producteurs n'ont pas modulé ou changé
leur production de pétrole, ce qui a occasionné une surproduction et, donc, un
effet spirale à la baisse qui a grandement bénéficié les consommateurs. Pour
ceux qui ont vu le prix à la pompe, l'an dernier, baisser, ça les a grandement
bénéficié.
D'autre part,
nous avons vu, à titre d'exemple, la province de l'Alberta devoir composer,
pour la première fois depuis des
années, avec un déficit important de 5 milliards grandement dû au fait
que, comme vous le savez, c'est une province
exportatrice, productrice de pétrole et qui a été affectée grandement par cette
baisse-là. Mais donc j'aurais comme première question : Comment
vous expliquez, M. le ministre, les fluctuations... ou l'analyse que vous
faites de ces fluctuations-là l'an dernier
et les différents facteurs qui ont affecté ou qui expliquent cette grande
fluctuation, M. le ministre.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, une bonne question pour vous.
M.
Leitão : Une bonne question pour moi. Hélas! je pense que je vais
peut-être prendre un peu plus de temps que...
Une voix : ...surprise...
M.
Leitão : Un peu par surprise. Vraiment, je suis surpris. Franchement,
quelle question! Écoutez, d'ailleurs, c'est une question qui est très
importante parce qu'il y a eu, encore une fois, un peu de confusion là-dessus.
Beaucoup d'analystes, beaucoup de commentateurs
semblaient un peu préoccupés, voire même un petit peu paniqués : Ah! le
pétrole baisse, ça veut dire que c'est mauvais.
La première chose que j'ai à dire — bon,
tout le monde est au courant, mais c'est utile, quand même, de le rappeler — c'est qu'évidemment le Québec importe tout
son pétrole, une bonne partie de l'Ouest canadien, mais en grande partie de l'étranger. Donc, quand le prix de ce
produit-là baisse, la première chose qui arrive, c'est que le solde
commercial du Québec s'améliore, donc notre
déficit commercial diminue. Les importations, ce que nous devons payer pour
acheter du pétrole de l'étranger diminue,
même si nous gardons le même volume, puisque le prix a beaucoup baissé. Et ça,
ça a un effet positif sur le PIB du
Québec, le PIB étant juste la somme des dépenses des consommateurs,
l'investissement privé, etc., dépenses du gouvernement et, évidemment,
les exportations nettes. Alors, les exportations nettes s'améliorent avec la
baisse du prix du pétrole.
Maintenant,
la baisse du prix du pétrole pourrait être un facteur préoccupant, en effet, si
cette baisse-là reflétait une baisse
de la demande. Donc, si l'économie mondiale était en difficulté, comme ça a été
le cas en 2008-2009 où on a aussi
assisté à une baisse rapide du prix du pétrole... À ce moment-là, c'était
préoccupant, oui, parce que cela reflétait une baisse soudaine de la demande. Donc, l'économie mondiale était tombée en
récession, et ce n'était évidemment pas une bonne histoire. Cette fois-ci, la baisse du prix du pétrole ne reflète
pas un choc de la demande. Au contraire, elle reflète un choc de l'offre. Donc, le prix est plus bas, comme
vous avez mentionné, parce que les producteurs de pétrole n'ont pas
voulu, n'ont pas pu... enfin, n'ont pas diminué leur niveau de production.
Donc, il y a une situation de suroffre dans les marchés pétroliers mondiaux, ce
qui met beaucoup de pression à la baisse sur les prix. Et ça, pour l'économie
québécoise, puisque nous sommes des importateurs de pétrole, est très positif.
Et ça va se
maintenir parce que, quand on regarde les phénomènes semblables dans le passé,
donc, quand il y a eu une baisse du prix du pétrole qui reflète un choc
de l'offre plutôt qu'un choc de la demande, ça prend quand même du temps avant
qu'on revienne au prix précédent. Donc, 100 $ le baril et plus, ça ne sera
pas demain matin qu'on va y arriver. Nous
estimons que ça pourrait nous prendre de trois à quatre ans avant de voir le
prix du pétrole revenir au-delà de
100 $ le baril. Donc, pendant toute cette période-là, nous allons, au
Québec, en tant qu'importateur de pétrole, nous allons bénéficier de ce
phénomène-là d'une façon directe.
Il y a aussi
des conséquences ou des répercussions indirectes, puisque la baisse du prix du
pétrole ne reflète pas un choc de demande.
Puisque la demande demeure forte, surtout aux États-Unis, nous allons avoir une
situation où notre solde commercial
va s'améliorer parce que les importations diminuent avec la baisse du prix du
pétrole, et nos exportations devraient augmenter parce que la demande
américaine, elle, est plus forte pour les produits que le Québec exporte. Donc, c'est cette amélioration du solde commercial
international, donc les exportations surtout, qui, à notre avis, vont
avoir un effet très positif sur l'économie du Québec. C'est de là que va venir
notre accélération de croissance économique, donc, qu'on peut attribuer en
grande partie à la baisse du prix du pétrole.
Un autre effet important de la baisse du prix du
pétrole, c'est qu'avec la baisse du prix du pétrole nous avons vu aussi une
baisse importante du dollar canadien. Donc, la baisse du dollar canadien va,
elle aussi, bénéficier à nos exportateurs. C'est peut-être important aussi de
souligner que, souvent, on associe la baisse de la monnaie avec une augmentation
des exportations. La baisse de la monnaie n'a pas vraiment d'effet direct sur
le volume d'exportation. Quand le dollar se déprécie, l'effet que ça a sur les
exportateurs, c'est une amélioration prononcée de leur marge bénéficiaire. Donc, les profits des exportateurs
augmentent et augmentent rapidement avec la dépréciation de la monnaie, et donc c'est avec cette amélioration de marge de profit qu'éventuellement ça devrait se traduire par une augmentation de la production, investissement,
production et augmentation du volume d'exportation, augmentation de l'emploi.
Donc, pour
toutes ces raisons-là, la forte baisse du prix du pétrole dans la deuxième
moitié de 2014 et qui s'est poursuivie un peu en 2015 a un effet direct
et indirect très positif sur l'économie du Québec, ce qui, à mon avis, rend notre projection de croissance économique, le 2 % que nous avons du PIB réel en 2015...
Nonobstant les craintes de nos collègues
de Desjardins, qui semblent trouver ça un peu optimiste, moi, au contraire, je
trouve que c'est assez réaliste dans
cet environnement-là de baisse prononcée du prix de l'énergie, baisse de la
valeur du dollar canadien, augmentation des exportations. Et d'ailleurs d'autres prévisionnistes que Desjardins
ont des taux de croissance pour le Québec en 2015 au-delà de 2 %. Donc, nous avons construit
notre cadre financier sur des hypothèses de croissance économique qui, à
mon avis, sont... Dans le climat actuel,
dans la conjoncture actuelle, ce sont des hypothèses de croissance très
conservatrices.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. J'ai laissé l'économiste s'exprimer durant cette
période. Nous souhaitons la bienvenue et nous donnons la parole à Mme la
députée de...
Une voix : De Gouin.
Le Président (M. Bernier) :
De Gouin. Allez-y.
• (21 heures) •
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Moi, j'aimerais, ce soir, dans le
temps que j'ai, avoir une discussion avec
le ministre des Finances sur l'effet de son budget en rapport avec
l'augmentation des inégalités sociales au Québec. Mais j'aimerais mettre
la table avec un petit peu le postulat suivant, puis on verra bien si le ministre
et moi, nous sommes d'accord. J'ai un peu l'impression que ce qu'on nous dit
avec ce budget, ça a quelque chose d'un petit peu judéo-chrétien — vous
allez peut-être être surpris — c'est : Souffrez maintenant,
mais il y a le paradis à la fin de vos jours. Et, quand j'écoute le ministre des Finances et le premier
ministre, ce que j'entends,
c'est : Nous allons avoir une année exigeante, mais, à un moment donné, là, quand
on aura atteint l'équilibre
budgétaire, que tout va bien aller,
là on va faire deux choses. On va
mettre de l'argent, 50 %, dans
le Fonds des générations, paiement sur la dette, et l'autre 50 % va
aller à des baisses d'impôt. Mais ce que je
soumets très respectueusement au ministre, c'est qu'en tout cas parmi les gens
que je rencontre non seulement dans ma circonscription, mais ailleurs au Québec
personne ne demande de baisses d'impôt, tout
le monde se plaint de l'augmentation des tarifs, que ça soit tarifs en service
de garde, Hydro-Québec, tarifs de permis de conduire, et même on m'a
parlé des permis de chasse. C'est de ça que les gens me parlent.
Alors, de leur dire : Là, ça va être dur,
il faut souffrir un peu, puis, à la fin, il y aura quelque chose comme le paradis,
c'est-à-dire qu'on va baisser vos impôts, moi, ce que j'entends, c'est que ça
n'impressionne pas tellement les gens,
d'abord parce qu'ils ne sont pas si certains que ça qu'on va baisser les
impôts, deuxièmement, parce que, de toute façon, on aura tellement augmenté les tarifs qu'ils se demandent
vraiment à quoi vont servir les baisses d'impôt, sinon à encore enrichir les plus riches, qui,
proportionnellement, bénéficient davantage des baisses d'impôts. Puis,
troisièmement, tout ça ne nous dit pas comment le gouvernement va, en même
temps, remettre de l'argent dans les services publics, services publics, qui sont l'un des grands, grands facteurs au Québec,
je dirais, du fait qu'on a moins d'inégalités sociales que dans d'autres
provinces canadiennes et dans l'ensemble de l'Amérique du Nord.
Donc, ce que je demande au ministre des
Finances, c'est : Qu'est-ce que je devrais répondre aux gens qui me disent : C'est parce que ça fait déjà un
certain temps qu'on a arrêté de croire au paradis à la fin de nos jours, puis
là on a un gouvernement qui nous dit que ça serait bien d'y croire?
Qu'est-ce que je devrais répondre?
Le Président (M. Bernier) : Vous
avez environ deux minutes, M. le ministre, pour...
M. Leitão : Combien?
Le Président (M. Bernier) : Environ
deux minutes, parce que je veux essayer de balancer le temps. Mme la députée de Gouin a environ 15 minutes. Donc, pour
qu'elle puisse poser le plus grand nombre de questions, je vous donne
deux minutes pour répondre.
M.
Leitão : O.K. Bon, ça aurait demandé beaucoup plus que deux minutes,
mais je vous dirais seulement ceci. Honnêtement,
là, ce que nous faisons, à mon avis, est dans... l'objectif de ce que nous
faisons est d'assurer la viabilité du modèle
québécois. Nous nous étions engagés sur une tendance qui n'est pas soutenable.
Si on continuait à faire ce qui avait été fait jusqu'en 2014, on se
trouvait dans une situation où notre dette augmenterait continuellement, et, à
un moment donné, il y aurait un dérapage
majeur, on trouverait ça extrêmement difficile de continuer de financer cette
dette qui ne finirait pas d'augmenter.
Donc, ce que
nous mettons en pratique maintenant, en place maintenant, ce sont des mesures
qui... Je le conviens bien, ça, ce
n'est pas agréable. Ce n'est pas agréable de limiter la croissance des dépenses
quand on était habitué à avoir des dépenses
qui augmentaient, bon an mal an, 4 %,
5 %, 6 % par année. Nous limitons beaucoup la croissance des
dépenses et nous faisons ça pour nous
assurer que nous sommes capables de maintenir l'essentiel du modèle québécois.
Parce que, si on ne faisait pas ça, je pense qu'on se trouverait dans
une situation qui serait beaucoup plus complexe que celle où nous nous trouvons
aujourd'hui.
Je vous
dirais que ce qui rend cet exercice un peu plus pénible et urgent à faire ça,
c'est le fait que nous avons accumulé une très grande dette. Je ne vais
pas non plus partir des peurs, on a une dette qui nous écrase, tout ça. Nous
avons une dette qui est très élevée, et une dette qui est très élevée qui est
le produit de décisions qui ont été prises au cours des 30 dernières années par
les gouvernements qui se sont succédé, ce qui nous rend maintenant beaucoup
plus vulnérables, par exemple, que...
Le Président (M. Bernier) :
En terminant, M. le ministre.
M. Leitão : ...que nos amis et nos
collègues en Alberta, par exemple, où ils n'ont pas de dette, ils peuvent se permettre d'avoir des déficits. Nous, parce que
nous avons une dette très élevée, nous sommes obligés à avoir des
finances publiques en ordre pour qu'on puisse maintenir les services publics
auxquels nous tenons.
Le Président (M. Bernier) : Mme
la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Bon, écoutez, je sais d'avance que, sur la question
de la dette, nous aurons un désaccord important. Non pas que la dette ne
soit pas une chose importante, mais, premièrement, je suis toujours
frappée — et
ça, ce n'est pas seulement le gouvernement
actuel, c'était la même chose avec les gouvernements précédents — on est terriblement préoccupés par la dette
financière, mais jamais par la dette environnementale, ce qui, pourtant,
à moi, me paraît fort important quand je pense à mes petits-enfants.
Alors, laissons de côté ce débat, mais
demandons-nous la question suivante, et je la pose au ministre des Finances : Qu'est-ce que je réponds au père
de famille de ma circonscription que j'ai rencontré il y a une semaine et
qui me dit qu'à cause de toutes les mesures d'austérité qu'on connaît, qui
n'ont pas commencé hier, mais avant-hier, soyons assez clairs là-dessus, son fils a dû aller... en fait, les parents ont
dû aller dans le secteur privé pour que son fils reçoive un diagnostic
d'autisme et qu'il puisse enfin, ayant un diagnostic, bénéficier des services
auxquels ont droit les enfants autistes? Il
s'est fait dire par l'hôpital de ma circonscription : Vous faites bien
mieux d'aller dans le privé parce que, dans le public, je vous le dis, vous en avez pour un an d'attente. Qu'est-ce que
je réponds à ce père de famille, qui, heureusement, avait des assurances, hein, ce qui est le cas
d'une infime minorité de travailleurs? Qu'est-ce que je lui réponds, que
c'est normal, puisqu'il faut souffrir
maintenant pour avoir du plaisir plus tard, d'attendre un an pour un diagnostic
d'autisme pour son enfant? C'est normal, là? C'est ça qu'on appelle vivre une
année exigeante?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Non, pas du tout. Je pense que, là, vous êtes en train,
peut-être, de sombrer un peu dans l'alarmisme. Écoutez, s'il y a des problèmes — et il y en a — il y a des problèmes ponctuels dans le
système de santé ou dans le système d'éducation, où certaines dépenses
ont peut-être été coupées d'une façon irréfléchie, ce sont des choses qui se
gèrent. Maintenant, je ne pense pas qu'on
puisse utiliser l'exemple que vous avez donné, qui est un exemple très
malheureux pour la personne en question...
Mais je ne pense pas qu'on puisse prendre cet exemple-là, extrapoler et dire
que le système de santé au Québec est dans un tel état. Il y a des
correctifs à apporter, et donc je vous invite à voir avec notre collègue le
ministre de la Santé, des Affaires sociales pour corriger ces situations
ponctuelles. Je ne pense pas que ce soit... Enfin,
ce n'est pas, évidemment, l'objectif des réformes que nous mettons en place de
provoquer de tels bouleversements.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Leitão : Je pense que ça demeure
quand même anecdotique.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : M. le Président, j'aimerais, très respectueusement, dire au
ministre des Finances que mon exemple n'est tellement pas ponctuel que
des témoignages comme ça, j'en ai régulièrement à mon bureau de comté, et mes collègues en ont aussi à leur bureau, et je
suis certaine que tous les collègues députés ici auraient de tels
exemples à apporter. Il y a un vrai problème
non seulement au ministère de la Santé, mais au ministère de l'Éducation. Il y
a vraiment des enfants et des
familles laissés-pour-compte. Et je ne parle pas seulement des gens les plus
pauvres, je parle de bien des familles de la classe moyenne.
Donc, le
ministre me dit que je suis peut-être alarmiste. J'aimerais tellement ça, lui
dire que je suis juste un peu alarmiste et que j'ai pris un exemple
très, très rare. Mais non, non, ce n'est pas ça que je fais, j'ai pris un
exemple qui se répète à l'année longue. Et
pourquoi j'ai fait exprès de prendre un exemple concret? C'est simple, c'est
pour illustrer que l'austérité fait mal pour vrai à du vrai monde et
que, quand on me répond : Oui, mais ça ira mieux dans deux ans, trois ans, quatre ans, mais ça ira mieux comment?
Le ministre refuse d'aller chercher davantage d'argent dans la colonne
des revenus, il se fie sur une croissance
économique assez aléatoire — parce
que moi aussi, j'ai lu le papier de Desjardins — puis en plus il nous dit : Je vais
baisser les impôts et mettre de l'argent dans le Fonds des générations.
Alors, j'aimerais que le ministre m'explique
comment, après cette année de souffrance, nous allons retourner à l'organisation de services publics qui vont donner des services
aux gens, à toutes les personnes, là, au Québec de façon décente
et raisonnable. J'aimerais l'entendre là-dessus.
• (21 h 10) •
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : Très bien. Encore là, je
pense que c'est une très bonne question, et vous mettez vraiment le doigt sur l'élément principal. Parce que
je pense que, tant en santé qu'en éducation — et
ici je fais très attention à ce que je dis, et les mots que j'utilise sont bien choisis, ce n'est pas une erreur, ce
n'est pas un accident — en
santé et en éducation, la solution
n'est pas d'ajouter toujours plus d'argent. Nous avons 32 milliards de dollars dans le système
de santé. Justement, ce que nous voulons faire, ce que notre collègue
de la Santé, avec les réformes qu'il est en train de mettre en place... c'est de s'assurer que ces 32 milliards de dollars là
sont dépensés convenablement et qu'on puisse vraiment éliminer ces aberrations que vous avez mentionnées tantôt.
C'est une aberration qu'une personne... Que ça prenne un an pour avoir
un diagnostic d'autisme, c'est absurde. Mais, en même temps, c'est également
absurde qu'on ait 32 milliards de dollars dans un système de santé, et on n'est pas capables d'adresser de telles situations.
Donc, à mon avis, ce n'est pas en ajoutant un autre milliard de dollars qu'on va régler cette
situation-là, c'est en s'assurant que ce qui est dépensé maintenant l'est de la bonne façon, et
c'est la grande réforme de la santé qui est en marche maintenant qui va amener
les réponses à ces questions-là. Juste d'ajouter un autre milliard par-dessus
sans changer les structures, l'organisation du système, à mon avis, ne réglerait rien.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) : Pour combien de
minutes, M. le Président?
Le Président (M. Bernier) :
2 min 30 s.
Mme David (Gouin) : J'aimerais
souligner au ministre que les changements de structure, lorsqu'ils sont nécessaires — et
il sait ce que je pense de la loi n° 10 — peuvent, effectivement, contribuer à améliorer les services
publics, mais, dans ce cas-ci, j'ai vraiment
de la difficulté à voir comment le changement de structure qui
vient d'être adopté dans la Santé va faire en sorte qu'on va avoir davantage
de psychologues dans le système public pour être capables de rencontrer des enfants et poser des diagnostics. Il n'y a aucun
rapport entre les changements de structure et le besoin qu'on a d'avoir
des professionnels de la santé, d'avoir aussi des professionnels dans les
écoles qui sont capables d'accompagner les enseignants dans leur travail auprès
des enfants pour que ces enfants grandissent en sécurité en développant leur
plein potentiel.
Et ce que je
reproche au gouvernement actuel, c'est de nous faire croire que, dans deux ans,
trois ans, quatre ans, je ne sais
pas, peut-être à la veille d'une prochaine élection, là on aura réglé plein de
problèmes, on va baisser les impôts, on
va être capable de mettre de l'argent dans le Fonds des générations, mais il
n'y a pas un mot sur les services publics, pas un mot. On ne nous dit
pas : On se servira de l'argent qu'on aura réussi à économiser pour
remettre des sous dans les services publics,
embaucher davantage de professionnels, donner des meilleurs services aux gens.
Non, on fait miroiter cette espèce de
mirage qui s'appelle la baisse des impôts, qui profite aux contribuables aux
revenus les plus élevés, pendant qu'on
aura continué à augmenter les tarifs. Il me semble que c'est une vision qui ne
concourt pas à réduire les inégalités sociales.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, il reste peu de temps, mais vous pourrez empiéter sur le temps
du gouvernement.
M. Leitão : Le temps du
gouvernement, pourquoi pas?
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y.
M.
Leitão : Écoutez,
plusieurs choses encore
une fois. Revenons à la santé. Vous
avez mentionné les changements de structure, donc je pense que vous
faites allusion au projet de loi n° 10. C'est une partie, mais c'est une
partie. Le changement en santé, en fin de compte, il y a trois composantes à ce changement-là. Le premier,
c'étaient les structures, avec la loi n° 10. Le deuxième, c'est le projet
de loi n° 20, qui est maintenant en train d'être discuté, qui va revoir l'organisation du travail. Vous avez demandé tantôt : Comment on va chercher de
nouveaux psychologues? Mais c'est en réorganisant, en réarrangeant le
travail. Puis il y a une troisième partie à cette réforme qui va venir un peu
plus tard, c'est le financement des activités, le financement qui va suivre les
patients. Donc, c'est une réforme majeure, il faut la prendre comme un tout.
Et, si je
peux me permettre, M. le Président, de donner un exemple... Puisque vous avez donné
un exemple tantôt, je vais aussi vous donner un exemple qui montre d'une
certaine façon que le système de santé au Québec, malgré tous ses ratés et malgré tous ses problèmes,
n'est quand même pas si désastreux que ça. Il y a
un joueur de foot européen qui a choisi
de venir jouer avec l'Impact de Montréal. Je ne veux pas mentionner de nom, mais, probablement, vous savez à qui je fais allusion. Et pourquoi il est venu ici?
Il aurait pu faire beaucoup d'argent en Europe. Il est venu ici, justement, parce qu'il a un enfant qui est autiste, et, dans
sa réflexion d'où est-ce qu'il allait poursuivre sa carrière, il a choisi de
venir ici parce que, justement, il y a un système de santé qui, pour les
besoins de son enfant, est bien supérieur à ce qu'il aurait pu trouver en
Belgique.
Une voix : ...
M. Leitão : Non. Même après le
budget. Donc, tout ça pour dire...
Des voix : ...
M.
Leitão : Tout ça pour dire... Et je ne veux pas personnaliser les
choses, là. Que le monsieur en question me pardonne, je ne veux pas
personnaliser ça, mais juste pour dire que le système de santé que nous avons
ici, avec ses 32 milliards de dollars,
n'est pas en si mauvais état que ça. Et, à l'intérieur des budgets existants,
je pense qu'avec une meilleure
organisation du travail et une meilleure organisation de la façon dont il est
financé, je pense que nous pouvons beaucoup
l'améliorer. C'est ce que je dis. Et de tout simplement ajouter des milliards
additionnels, je ne pense pas que ça serait la réponse à la question.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de
Portneuf. Merci, Mme la députée de Gouin.
M.
Matte : Merci, M. le Président. Je voudrais continuer, là, sur la
dette, là, mais mes propos seront différents de ceux de la députée de Gouin. J'ai été très heureux de constater qu'après
six années consécutives de déficit nous avons présenté un budget
équilibré. Puis je voudrais vous dire aussi que les six années de déficit
accumulé ont alourdi la dette, là, de
16 milliards. Donc, M. le Président, pour la première fois depuis 2009, le
poids de la dette va diminuer de 1 % pour s'établir à environ
54 % du produit intérieur brut au 31 mars 2016.
Nous savons
tous que cette dette reste très élevée par rapport à nos voisins et que le
Québec est la province la plus endettée.
Vous savez qu'une dette élevée est un frein au développement économique. C'est
ce qui fait que notre gouvernement, hein,
a pris l'engagement de contrôler ses dépenses, mais aussi la dette. Il existe
un débat, comme on a pu le voir tout à l'heure, à savoir est-ce qu'on
doit réduire la dette, à quelle vitesse doit-on la réduire, à quel rythme, et
même certains se permettent de se questionner sur le Fonds des générations.
Donc, une dette élevée entraîne un service de
dette élevé — c'est
une maxime — et
le service de la dette est près de
11 milliards. C'est le troisième poste le plus élevé après l'éducation, la
santé et les services sociaux. Ces 11 milliards,
ça représente 14 % de notre budget total. C'est vraiment énorme. Donc, ces
11 milliards ne peuvent pas être utilisés à d'autres fins que de
rembourser la dette, là, qui est de plus de 200 milliards, là, qu'on a
accumulée.
M. le
Président, dans ce contexte-là, j'aimerais demander au ministre des Finances si
la réduction du poids de la dette doit rester une priorité.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
• (21 h 20) •
M.
Leitão : Oui, M. le Président. En effet, encore une surprise. Quelle
surprise, la question qui vient! Une bonne question. Une très bonne question. Blague à part, oui. Ça doit rester
une grande priorité parce que, justement, notre niveau d'endettement est très élevé. Nous n'avons pas le
choix que de continuer de maintenir nos efforts de réduction de dette,
qui se font d'ailleurs à travers le Fonds des générations. Donc, la dette,
c'est en continuant de contribuer au Fonds des générations que la dette nette
diminue.
Juste pour peut-être ajouter un autre élément,
vous avez mentionné plusieurs chiffres, je sais qu'il y a déjà beaucoup de
chiffres, mais un autre que je vais vous donner, et qui est très important
aussi, et qui démontre que... donc, qui
souligne la problématique de notre niveau élevé d'endettement, c'est que, bon
an, mal an, même s'il n'y a plus de déficit,
là, et c'est fini, cette année, c'est le... Il n'y a plus de déficit et il
n'y aura plus à partir d'ici, mais, malgré ça, bon an, mal an,
nous devons aller sur les marchés financiers et emprunter des sommes
importantes juste pour faire rouler la dette. Donc, cette année, en 2015-2016,
il y a 12 milliards que le ministère des Finances doit aller emprunter
dans les marchés financiers. L'année prochaine,
2016-2017, c'est presque 20 milliards qu'on doit aller chercher. Une grande
partie de ça, plus que la moitié, c'est
juste les remboursements, donc, de la dette qui vient à échéance. L'année
d'après, 2017-2018, c'est un autre 16 milliards.
Donc, le Québec doit demeurer, malgré, là, le
fait que les déficits, c'est fini, là... le Québec doit quand même demeurer extrêmement présent, actif dans les marchés financiers parce qu'à chaque année on va aller chercher
quelques dizaines de milliards de dollars.
Donc, nous devons maintenir un accès privilégié à ces marchés-là, chose que
nous avons maintenant, et, donc, nous
devons continuer de maintenir cet accès privilégié. Et une partie de la
recette, probablement la partie la
plus importante, c'est l'existence même du Fonds des générations qui nous
permet de maintenir notre crédibilité et de maintenir cet engagement que nous avons pris, nous, comme
gouvernement — mes
prédécesseurs, au pluriel, l'ont fait — de réduire le poids de la
dette à 45 % du PIB plus tard. Parce que, même à 45 % du PIB, même à
ce niveau-là, c'est un bon progrès de la
situation telle qu'elle est aujourd'hui, mais, même à ce niveau-là, on va
demeurer parmi les plus endettés en Amérique du Nord.
Alors, c'est
pour ça que c'est extrêmement important, c'est d'importance capitale qu'on soit
capables d'avoir cet accès
privilégié, emprunter à de très bons taux, parce que nous devons aller aux
marchés chercher des dizaines de milliards à chaque année malgré le fait
qu'il n'y en a plus, de déficit. Alors, oui, c'est une partie capitale de notre
politique de continuer avec notre approche de réduction de la dette nette en
continuant de mettre des sommes importantes dans le Fonds des générations, un
fonds que... En termes d'actifs, en 2020, le Fonds des générations va avoir à
peu près 20 milliards — c'est facile à retenir — 20 milliards de dollars en 2020. Donc,
ça commence à être un fonds qu'on pourrait considérer un fonds souverain, comme il y a dans d'autres pays, assez
intéressant, assez important. Nous n'avons pas le même pétrole que, par exemple, les Norvégiens,
mais nous avons l'hydroélectricité, nous avons des ressources hydrauliques,
et c'est en grande partie ces ressources hydrauliques là qui alimentent le
Fonds des générations et qui vont le mener à atteindre 20 milliards de
dollars en 2020.
Le
Président (M. Bernier) : J'ai une demande du député de
Saint-François, qui veut nous poser une question.
Une voix : ...
Le Président (M. Bernier) :
Ce n'est pas fini?
M. Matte : Je n'avais pas fini.
Une voix : Je pense qu'il n'a
pas fini encore.
Le Président (M. Bernier) :
Ah! vous n'avez pas terminé. Bien, allez-y, M. le député de Portneuf.
M.
Matte : Mais, M. le ministre, est-ce que c'est réaliste lorsque vous
prévoyez qu'en l'an 2025-2026 que notre dette sera aux alentours de
45 % du produit intérieur brut, tu sais?
M.
Leitão : C'est réaliste, M. le député, parce que, d'abord, il n'y aura
plus de déficit. Donc, avec le budget de cette année, nous nous
engageons à atteindre l'équilibre budgétaire et à le maintenir par la suite.
Donc, on n'ajoutera plus à la dette du côté
des déficits. Et c'est crédible, deuxièmement, parce que nous avons le Fonds
des générations, un fonds qui a des
sources de revenus qui lui sont dédiées, en grande partie des ressources
hydrauliques, mais aussi des redevances minières et d'autres choses. Donc, un fonds qui a des revenus qui sont
versés à chaque année et, donc, qui va continuer de croître. Alors, à cet égard-là, oui, d'atteindre
45 % du PIB en 2025, c'est tout à
fait réaliste. Et je pense qu'à ces
deux conditions-là, qu'on continue de verser les sommes dédiées au fonds
des générations et qu'on ne fasse plus de déficit,
oui, on va arriver à atteindre 45 %. Ce qui est très bien, mais, encore
une fois, ce n'est pas nécessairement : Ah! O.K.
Bon, ouf! Tout est réglé. Mais non, même à 45 % du PIB, on demeure une des
sociétés les plus endettées en Amérique du Nord.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Portneuf.
M. Matte : Vous avez invoqué, M. le
ministre, à plusieurs reprises le Fonds des générations, puis vous misez beaucoup
là-dessus. Vous répondez quoi aux gens qui vont dire :
Pourquoi investir et mettre de l'argent dans le Fonds des générations plutôt que de rembourser la dette? Pourquoi qu'on ne rembourse pas
immédiatement la dette plutôt que de le déposer dans le Fonds des
générations?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre. C'est une question, effectivement, que plusieurs se posent.
M. Leitão : Plusieurs questions, et
je suis sûr que probablement même le président de la commission serait probablement intéressé à connaître la réponse. Écoutez,
nous avons pris le pari que le Fonds
des générations peut générer des revenus qui sont substantiellement plus
élevés... des rendements, je devrais dire, qui sont substantiellement plus
élevés que ce que nous devons payer en
intérêts sur la dette. Par exemple, maintenant, 2015, le gouvernement du Québec peut se financer, on peut faire une
émission d'obligations à 10 ans de presque, quoi, 2 % maintenant, ce
qui est très bien. Le rendement du Fonds des générations, lui, à peu près à 10 %, peut-être
un petit peu moins. Mais vous voyez qu'il y a quand même un
écart important entre le rendement que nous obtenons avec le Fonds des générations et ce que nous payons pour la dette. Si, à l'avenir, pour une raison quelconque,
on voit que les rendements baissent beaucoup ou que les taux d'emprunt augmentent... Enfin, je ne vois pas... j'ai de la
difficulté à concevoir un tel scénario, mais, si jamais ça arrivait, alors,
à ce moment-là, oui, l'équation n'aurait
plus de sens, et alors là il faudrait penser à faire ça d'une autre façon.
Mais, tant qu'on a cette grande différentielle, on paie 2 %, on
peut avoir un rendement de presque 10 %, on n'a pas intérêt à rembourser
directement la dette, mais plutôt à laisser accumuler le Fonds des générations.
Le Président (M. Bernier) :
Poursuivez, M. le député de Portneuf.
M. Matte : Puisqu'on parle du Fonds des générations, puis
vous nous dites qu'on a fait un pari à savoir qu'il va nous rapporter
plus que si on emprunte... Mais par qui c'est géré, le Fonds des générations?
C'est–u une institution financière? C'est-u une banque ou...
M.
Leitão : Ce n'est pas une banque. Ce n'est pas non plus une caisse...
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, on vous écoute.
M. Leitão : Le Fonds
des générations est géré par la Caisse de dépôt et placement du Québec, et donc c'est le ministre des Finances, qui,
avec la caisse, établit les politiques de placement. Donc, ce n'est pas la
caisse qui va investir comme elle, bien, le souhaite, elle va investir
selon les directives que le ministre des Finances lui donne en termes de répartition d'actifs, donc, pour s'assurer que
nous avons quand même un rendement qui est intéressant sans être trop
risqué. Donc, ultimement, c'est le gouvernement, le ministère des Finances, qui
décide de la politique de placement.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Matte : Donc, c'est un mandat particulier qui est confié, mais
qui reçoit les directives du ministre
des Finances, ce qui est différent des autres montants d'argent gérés
par la Caisse de dépôt.
M. Leitão : Bon, la Caisse
de dépôt, évidemment,
elle établit les politiques de placement pour ses déposants, la Régie des rentes et les autres déposants, selon les critères que les déposants eux-mêmes
aussi établissent. Donc, ce n'est pas la
caisse qui décide unilatéralement d'investir dans x, y, z. Ces politiques de
placement sont déterminées par les déposants eux-mêmes, et, le ministère
des Finances étant aussi un des
déposants avec le Fonds des
générations, nous avons toute
la liberté et toute la flexibilité d'établir nos politiques de placement.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de votre
participation. Merci à tous les parlementaires d'avoir participé à ces débats.
Donc, compte tenu de l'heure, je lève
la séance, et la commission ajourne ses travaux à demain, après les
affaires courantes.
(Fin de la séance à 21 h 30)