(Quinze
heures vingt et une minutes)
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Alors, bon après-midi à tous. Bienvenue à la Commission
des finances publiques. À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de
loi n° 15, Loi sur la gestion et le contrôle des
effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur public
ainsi que des sociétés d'État.
M. le secrétaire, y a-t-il
des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) est remplacé par
Mme Hivon (Joliette); M. Lelièvre
(Gaspé) est remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); Mme Samson
(Iberville) est remplacée par M. Surprenant (Groulx).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le secrétaire. Voici l'ordre
du jour pour cet après-midi : nous entendrons la Fédération québécoise des professeures et
professeurs d'université, le Secrétariat intersyndical des services publics,
le Syndicat des professionnelles et
professionnels du gouvernement du Québec et l'Association québécoise des
établissements de santé et de services
sociaux. Alors, bienvenue à tous les groupes qui vont participer à cette
commission.
De
consentement, pour... J'ai besoin de votre consentement pour aller au-delà de
l'heure prévue, comme nous débutons
nos travaux déjà avec une vingtaine de minutes de retard. Consentement?
Consentement, du côté de la deuxième? Merci. Donc, consentement.
Donc,
sans plus tarder, je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise des
professeures et professeurs d'université,
en présence de M. Max Roy et M. Michel Umbriaco. Alors, bienvenue,
messieurs. Vous avez 10 minutes pour votre présentation.
Fédération québécoise des professeures
et professeurs d'université (FQPPU)
M. Roy (Max) : Merci, M. le Président. Je suis Max Roy, je suis le président de cette
fédération, et mon collègue, Michel
Umbriaco, qui est professeur à la TELUQ et président du Comité sur le financement
des universités qui agit au sein de
la FQPPU depuis 2006. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les
membres de cette commission, je veux vous
remercier de l'opportunité que vous nous offrez d'exprimer à l'égard de ce
projet de loi la position et les propositions de notre Fédération québécoise des professeures et professeurs
d'université. Je le rappelle, notre fédération représente les professeurs des universités québécoises,
incluant les constituantes du réseau de l'UQ, les universités à charte et
toutes les universités anglophones.
D'emblée, je dois
dire notre étonnement qu'un tel projet de loi sur la gestion et le contrôle des
effectifs des ministères et organismes
publics puisse s'étendre au secteur de l'enseignement supérieur et,
singulièrement, à l'Université du
Québec et à ses constituantes. Envisager un gel parmi les personnels
académiques universitaires dans tous les établissements serait, à notre
sens, une aberration, puisque les établissements manquent déjà de ressources
professorales et que les inscriptions
étudiantes sont en hausse constante depuis près de 15 ans, donc cela
constituerait même une diminution des ressources
eu égard à des besoins qui sont croissants. Les services aux étudiants en
souffriraient mais aussi les services à
la population en général, notamment à travers la recherche, ses retombées dans
la santé, les services sociaux, etc. Et on peut craindre que le
développement économique même du Québec en souffrira grandement.
Nous
avons fait la démonstration à plusieurs reprises dans le passé du manque de
ressources dans les universités québécoises,
surtout à l'occasion du Sommet sur l'enseignement supérieur en 2013, où nous avons chiffré avec des données vérifiées et vérifiables un manque d'effectifs
professoraux d'un minimum de 813 personnes pour s'en tenir au minimum
requis à la même situation.
Mais, pour atteindre une véritable qualité d'enseignement, selon les
normes qui sont reconnues à
l'extérieur et ici même au Canada, il
faudrait minimalement 1 600 professeurs supplémentaires. Alors, c'est vous
dire que, lorsqu'on parle d'un gel des effectifs, pour nous, c'est très
inquiétant. On se dit : Ce n'est pas possible d'imaginer qu'il y aura moins de professeurs pour encadrer le
flot important de nouveaux étudiants que nous recevons chaque année. Et il faut s'en féliciter, il faut se féliciter
qu'il y ait de plus en plus de diplômés, de gens compétents sur le marché du
travail, de gens qui s'activent à notre développement social, culturel
et économique, évidemment.
Il faut dire
qu'aux cycles supérieurs en particulier l'encadrement des étudiants est très
exigeant. On ne peut pas encadrer 12 étudiants à la maîtrise, 12 étudiants
au doctorat seul, c'est impossible. Il faut donc se répartir le travail. Si on
souhaite véritablement continuer à développer nos universités, il faut de
nouvelles ressources.
Les
dispositions de la loi nous donnent aussi beaucoup d'inquiétude. Par exemple,
il y a les dispositions qui cèdent des
pouvoirs importants aux ministres, à chacun des ministres, qui deviennent quasi
des responsables des effectifs. Ainsi, la troisième section du projet de
loi, les articles 9 à 17, reste, pour nous, la plus inquiétante. On comprend,
dans cette section-là, d'après ce qui est
écrit, que le conseil souhaite fixer, souhaite déterminer le niveau de
l'effectif total et placer la responsabilité de cet effectif sous la
responsabilité de chaque ministre, mais la loi prévoit aussi qu'un ministre
peut répartir les effectifs entre les
organismes publics sous sa responsabilité sans aucune contrainte. Ainsi, on
pourrait imaginer une situation où le ministre de l'Enseignement
supérieur — c'est
notre ministre — déplacerait
des effectifs entre les universités ou entre
des universités vers les cégeps ou l'inverse sans avoir vraiment besoin de
justifier sa décision. Alors, cette
possibilité semble irréalisable, ne serait-ce qu'à cause des autres lois, des
chartes constitutives, des accréditations syndicales, etc. Aussi, le projet de loi, à l'article 12, prévoit
que l'organisme ne peut gérer ses effectifs de façon à diminuer les services offerts à la population. Et pourtant,
si on gèle des effectifs académiques, on nuit nécessairement aux services.
Donc, il y a une contradiction. Il semble
qu'un ministre puisse agir de manière à diminuer les services sans aucune interdiction, rien n'est inscrit dans la loi à cet égard. Il peut même
donner n'importe quelle directive concernant la gestion de l'effectif d'une université. On se pose la question : Si l'un des objectifs du gouvernement est de restreindre l'accès à l'université,
il nous semblerait plus simple de l'affirmer et d'en débattre éventuellement.
Les contrôles
et sanctions qui sont prévus par les sections IV, V et VI du projet de loi
permettent à un ministre d'imposer les
changements qu'il souhaite s'il juge qu'un organisme public ne rencontre pas
les objectifs fixés. De ces sanctions,
celles où une partie ou la totalité de la subvention accordée à l'organisme
peut être retenue ou annulée, c'est un grand gage d'instabilité future
qui crispera les administrations des universités placées sous la coupe du
ministre. Les étudiants en seront certainement les premiers touchés.
Il faut
comprendre que ce projet de loi aussi, qui, de notre point de vue, est inusité
dans les annales de l'administration
publique au Québec, transformera chaque ministre en gestionnaire direct des
ressources humaines de l'ensemble des organismes publics sous sa
responsabilité.
Nous ne
voulons pas simplement critiquer le projet de loi, nous voulons aussi dire
qu'il doit être retiré. Il faut exclure l'Université du Québec de ce projet de loi, elle ne peut pas répondre
aux exigences de ce projet de loi sans sacrifier à sa propre mission. Mais nous voulons aller au-delà.
Nous avons déjà émis, dans le passé, des propositions pour limiter certaines
dépenses qui n'affectent pas le secteur
académique, et on nous a entendus lors du Sommet sur l'enseignement supérieur
en 2013, on nous avait entendus souvent dans
les médias, on va le répéter aujourd'hui : Il y a des lieux qui sont
beaucoup plus importants, où il y a des dépenses majeures,
discutables, questionnables, et c'est à cela qu'il faudrait s'attaquer en
priorité.
• (15 h 30) •
Notamment, la
question de la bureaucratie, la reddition de compte a pris une telle
importance, dans les universités, que
ça devient dysfonctionnel et ça entraîne l'embauche de dizaines et de centaines
de nouveaux gestionnaires. On vous montrera
tout à l'heure un tableau représentant la complexité des mécanismes de
reddition de comptes dans les universités au Québec. Le projet de loi rajoute une couche supplémentaire de
reddition de comptes et exige des rapports supplémentaires. Plus encore, dans un énoncé il est inscrit qu'il
doit y avoir un rapport sur le rapport. Alors, c'est démultiplier les
opérations, et on pense que c'est du temps perdu. On pense qu'au lieu
d'atteindre une meilleure efficacité on va embrouiller les choses et
finalement on va perdre beaucoup d'efficacité dans le milieu.
Deuxième point, deuxième élément : les
immobilisations. On en a parlé dans le passé, on a dit qu'il y avait beaucoup de transferts de fonds parce que les
administrations universitaires ne suffisaient pas... pardon, n'avaient pas les budgets suffisants pour rendre compte des besoins
dans les équipements, les besoins en immobilisations pour accueillir les nouvelles populations étudiantes. Ça fait en
sorte qu'il y a une partie des fonds de fonctionnement qui est déversée
et, on peut dire, détournée vers les
immeubles. Alors, ces fonds-là devaient servir à des fins académiques et
finalement ils ne servent pas à cela, et c'est une perte importante. Il
faut limiter ces transferts de fonds.
Enfin, les coûts de la gestion sont devenus absolument
incroyables dans les universités. La masse salariale a augmenté de façon exponentielle. On pourra donner des détails tout à
l'heure, on a des chiffres. Vous avez reçu le mémoire, on vous l'a envoyé par voie électronique. Puis il
y a des copies. Si c'est nécessaire, on va vous en distribuer. Cette masse
salariale, elle est disproportionnée par rapport aux besoins et par rapport à
l'augmentation de la masse salariale des personnels d'enseignants. C'est
inadmissible et c'est absolument incompréhensible.
Je vais terminer mon exposé, puisque je sais que
je dispose d'à peine 10 minutes...
Le Président (M. Bernier) :
Il vous reste une minute, monsieur.
M. Roy (Max) : Pardon? Il m'en reste
une?
Le Président (M. Bernier) :
Une minute, M. Roy.
M. Roy (Max) : Bon, on va essayer de
faire ça correctement. Alors, pour nous, l'actuel projet de loi, il vise à concrétiser de manière radicale des énoncés et des
orientations politiques du gouvernement, c'est-à-dire des compressions massives dans le réseau universitaire par le
contrôle et la réduction draconienne des organismes publics, dont l'Université
du Québec.
D'une part, le
projet de loi, il instaure un contrôle démesuré du ministre de l'Enseignement
supérieur, de la Recherche et de la
Science sur la planification et la gestion des ressources humaines de
l'Université du Québec. Même si des
contrôles et des redditions de comptes puissent être nécessaires, la conduite
de la gestion des ressources humaines à partir du bureau du ministre
apparaît comme une pratique d'un autre siècle.
D'autre part, les nouvelles charges
qui seront imposées aux établissements dans la production de la multitude de
rapports de reddition de comptes
nécessiteront assurément de nouvelles ressources qui seront consacrées à une
bureaucratie vouée à ne répondre qu'à ces demandes.
Et enfin...
Le Président (M.
Bernier) : En terminant, en terminant.
M. Roy
(Max) : En terminant, nous proposons au gouvernement d'explorer
d'autres voies pour faire des économies.
Mais, chose certaine, il ne faut pas diminuer la capacité des universités à
rendre des services à la population, des services d'enseignement et de
recherche. C'est la mission essentielle de l'université. Je vous remercie.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. Roy, merci de votre présentation.
Nous allons donc passer du côté ministériel. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Coiteux :
Oui. Merci beaucoup, M. Roy, et merci d'être là aussi, M. Umbriaco.
Je vais commencer par, peut-être, la question suivante, parce que vous avez
fait état de l'explosion de la masse salariale puis vous avez fait la distinction entre au moins deux aspects de la
masse salariale, le personnel administratif où vous dites qu'il y a
une explosion démesurée par rapport à la masse salariale des enseignants,
des professeurs d'université. Et il y a un article ici du projet de loi qui est l'article 4, d'accord, qui dit
nommément : «Un organisme public informe périodiquement le ministre dont
il relève du niveau de son effectif et de sa répartition par catégories
d'emploi.»
Alors,
prenons cet article-là. En quoi cet article-là va à l'encontre de ce que vous
avez présenté, là, il y a un instant, qui est simplement, finalement, de
partager entre nous cette information sur la nature des effectifs à l'intérieur
de l'organisme en question ici, l'Université
du Québec? Et ça nous permettrait justement de voir là où sont les professeurs,
dans les effectifs, puis là où sont les
administratifs, puis comment ça évolue dans le temps. Pourquoi ce serait un
problème, ça, de partager cette information?
Le Président (M.
Bernier) : M. Roy, M. Umbriaco.
M. Roy
(Max) : M. Umbriaco va... on va se partager les réponses...
Le
Président (M. Bernier) : Il n'y a pas de problème en autant que
vous vous identifiiez, que je puisse bien vous enregistrer.
M. Roy
(Max) : Très bien. Merci.
M.
Umbriaco (Michel) : Michel Umbriaco, président du CFU. Le problème,
c'est... Le nombre des étudiants augmente
comme ça, on a l'équivalent de trois universités de Montréal, depuis
10 ans, là, qu'on a créé, qu'on a accueilli au Québec. Le nombre d'administrateurs va plus vite que la courbe
d'accroissement des étudiants, et le nombre de profs va en baissant. Alors, il y a un paradoxe. Il y a
de plus en plus d'étudiants, de plus en plus d'étudiants aux deuxième et
troisième cycles, et il y a de plus en plus d'administrateurs et de moins en
moins de professeurs.
Le
problème est le suivant : la qualité même de l'enseignement et le suivi de
l'encadrement des étudiants, surtout aux
deuxième et troisième cycles, font que le temps moyen de travail d'un
professeur d'université, qui était de l'ordre de 48 à 52 heures selon les rapports dans les dernières années, a
monté à 55 et 60 heures. C'est le fun de s'arracher le coeur pour
les étudiants, mais ça ne peut pas durer éternellement. Il est là, le problème.
Ça, c'est le premier problème.
Partager
les informations, on a les informations sur les masses salariales, on a les...
Tout ça est déjà disponible. Et, tous
les chiffres qu'on vous donne, on les a déjà donnés au ministère de
l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science, c'est
disponible. Est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi?
Je
n'ai rien contre qu'il y ait un projet de loi qui fasse de la recherche
documentaire, et on l'a proposé même au sommet en disant : Ça prendrait un conseil des universités où il y
aurait une veille stratégique sur l'ensemble des dépenses, pas juste sur les masses salariales mais sur
l'ensemble des dépenses, l'immobilisation et l'ensemble de la planification
du réseau universitaire. On n'a rien contre
ça. Alors, ce n'est pas l'échange d'information... Et tous nos livres sont
ouverts, on peut vous abreuver ad
nauseam, là, de nos données... ou le ministère aussi, j'espère, serait capable
de le faire, mais... Ces éléments-là ne posent pas problème.
Ce
qui pose problème, c'est de dire : Le nombre de profs s'en va en
diminuant. Il y a des «quick fixes» continuels des administrations
universitaires, qui ne peuvent, plus ou moins, faire autrement, comme ils nous
disent. Ces «quick fixes» là reposent sur
les chargés de cours, et les chargés de cours commencent à être épuisés, eux
autres aussi. On ne peut pas tout
faire avec des chargés de cours, surtout aux deuxième et troisième cycles.
Donc, à un moment donné, on atteint
une zone critique. Et, s'il y a un gel des effectifs ou, encore pire, un gel de
l'embauche, là on ne peut pas répondre de rien, on s'en va vers une
catastrophe annoncée.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Je vais revenir à ma... Bien, d'abord, peut-être juste un
petit préambule : Si l'information nous était transmise dans un délai qui soit raisonnable,
notamment dans les réseaux, là... Ce n'est pas un gros enjeu dans l'univers
immédiat, qu'on contrôle au gouvernement,
mais, dans les réseaux, si l'information nous était transmise dans un temps
plus opportun, plus
rapide, bien il y a des dispositions de ce projet de loi qui seraient moins nécessaires,
on s'entend. Si elles sont là et si
cet article 4 est là, c'est parce qu'il y a vraiment un enjeu d'avec quel
délai les données nous sont transmises. Alors, je ne remets pas en
question ce que vous me dites, cette évolution des courbes, administrateurs, professeurs, employés, mais la vérité des choses,
c'est que l'évolution de ça dans le temps, dans un temps qui nous permette
de voir s'il y a un problème, actuellement cette information-là, elle ne nous
est pas transmise.
Alors,
je répète ma question : Est-ce que ça pose un enjeu particulier qu'on
demande à ce que cette information-là nous
soit transmise de manière périodique par catégories d'emploi, pas seulement
pour les professeurs, par catégories d'emploi,
pour qu'on puisse, dans le fond, avoir accès à la même information que vous
utilisez, pour nous dire qu'il y a un enjeu
actuellement d'explosion de la masse salariale des administrateurs puis d'un
suivi, finalement, qui n'est pas équivalent du côté des professeurs?
Est-ce que c'est un enjeu vraiment, ça?
M. Umbriaco
(Michel) : ...de la bureaucratie.
Le Président (M.
Bernier) : M. Umbriaco.
• (15 h 40) •
M.
Umbriaco (Michel) : Pardon.
Michel Umbriaco. L'enjeu est celui de la bureaucratie. On a amené ici, là...
C'est parce qu'on a essayé de faire le
relevé. Puis on l'a fait avec nos collègues de l'Université du Québec. Ça, en
1990, chacune des lignes, ce sont les
rapports que le ministère ou le gouvernement nous demandait pour répondre, justement, aux éléments de l'article 4. En 2012, c'est les 200 et quelques
rapports qu'on doit remettre annuellement
au ministère. On peut en remettre 10
autres ou 15 autres, rapports, ça ne nous fait rien, mais annuellement c'est le
genre de rapports que l'on remet au ministère.
On
a posé la question à savoir est-ce que le ministère les lisait, et un des
constats qui a été fait, au Sommet sur l'enseignement
supérieur, c'est de dire que le ministère de l'Enseignement supérieur ne
disposait pas des fonctionnaires ayant
la compétence pour lire les rapports ou encore du temps pour répondre aux
rapports. On a estimé que, si on abolit l'ensemble... Quand on parle d'abolir de la bureaucratie, c'est ça qu'on
veut dire. Si on abolit, je dirais,
les deux tiers de ça qui nous
apparaissent inutiles, ça ne nous fait rien de répondre à toutes les questions
par catégories d'emploi, ces choses-là. Je pense que toutes les universités vont le faire, il n'y a
aucun problème là-dessus. Mais, si on abolit les trois quarts de ça,
qui est parfaitement inutile, et qu'on
a deux, ou trois, ou quatre redditions
de comptes trimestrielles par année
avec des questions assez simples, répondre à vos questions,
on calcule que c'est 45 millions à 60 millions par année qu'on sauve. Et ça, c'est facile, là. L'augmentation des masses salariales des administrateurs,
on n'arrête pas de nous la justifier par la reddition de comptes supplémentaire qui est demandée. Si on arrête de
faire de la reddition de comptes... Je ne dis pas que la reddition de comptes, ce n'est pas une bonne
affaire, là, il faut en faire. Mais on part de ça à ça. À un moment donné,
ça devient kafkaïen, là
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : J'aimerais vous rassurer là-dessus, là, il ne s'agira pas
d'un rapport complexe qui va nécessiter toute une équipe pour nous dire à combien de personnes et à quelle catégorie
correspondent les chèques de paie que vous faites toutes les deux semaines. Alors, ça... Mais ça, je
pense que, ça, vous ne nous le transmettez pas comme tel, n'est-ce pas?
M. Umbriaco
(Michel) : ...il n'y a pas de problème.
M. Coiteux :
Alors, ce ne sera pas très bureaucratique. Ce ne le sera pas du tout,
d'ailleurs.
Alors,
cette information-là est nécessaire pour qu'on puisse, avec vous, là, suivre
l'évolution des effectifs puis voir
si ça va au bon endroit. Parce que vous me dites qu'il y a un problème, vous me
dites qu'il y a un problème d'explosion de la masse salariale. C'est un problème pour le gouvernement, ça, parce
qu'on paie ça, ultimement, une explosion de la masse salariale, puis, dans le contexte actuel, il n'y a pas d'espace
pour payer des explosions de masse salariale. Puis, s'il devait y avoir à tout le moins une stabilité
temporaire de la masse salariale, parce que c'est de ça qu'on parle ici, on
aimerait savoir si on est en train
d'embaucher des administrateurs puis de mettre à pied des professeurs, parce
que ce n'est pas ça qui est le but.
Alors,
il y a l'article 4 puis il y a l'article 12. Quand vous les combinez
ensemble, là, partager une information de base qui n'est pas partagée à
l'heure actuelle avec nous, je pense que ce n'est pas un enjeu vraiment pour
vous, là, finalement, parce que ce n'est pas
un rapport complexe qu'on vous demanderait. Mais, d'autre part,
l'article 12 dit : «La gestion
de l'effectif par un organisme public doit s'effectuer de façon à maintenir les
services offerts à la population.» Et,
dans une institution d'enseignement, bien, je pense que maintenir les services
à la population, en période de contrôle, ce n'est pas de faire une
explosion de la masse salariale des administrateurs.
Alors,
j'essaie de comprendre. Puis je vous donne la parole tout de suite. J'essaie de
comprendre quelle est, dans le fond,
l'objection de fond que vous avez à l'égard d'un projet comme celui-là, qui
combine deux choses qui semblent vous préoccuper et qui préoccupent le
gouvernement.
Le Président (M.
Bernier) : M. Umbriaco.
M.
Umbriaco (Michel) : S'il y avait seulement l'article 4 et l'article 12, écoutez,
on va vous appuyer grandement. Si on
nous dit qu'il y a une augmentation
cette année de l'ordre de 4 % des étudiants, et cette augmentation-là est
surtout aux deuxième et troisième cycles, et qu'il y a un gel d'embauche
des professeurs, là, c'est là qu'on ne marche plus.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Ce n'est pas un gel d'embauche qui est envisagé, là, c'est...
Il y a deux choses. Il y a la question du
dénombrement, puis là je pense qu'on est en train de se mettre d'accord, j'ai
cette impression-là, vous me contredirez si j'ai tort. Vous dites : Après tout, là, partager l'information
sur à qui on fait des chèques de paie et à quelle catégorie d'employé ça correspond, je pense que c'est... le
gouvernement doit connaître, finalement, ce qu'il finance, ultimement.
Bon. Ça, je pense qu'il n'y a pas d'enjeu.
Maintenant, l'autre enjeu, c'est de dire... Vous
souhaiteriez que les décisions de gestion des effectifs soient, évidemment, pour préserver les services
d'enseignement. C'est les étudiants qui sont en croissance, donc vous ne voulez
pas que ça aille à l'augmentation des administrateurs. Bien, c'est exactement
ce que vise le projet de loi.
Alors, je répète
un peu ma question : Pourquoi on n'est pas d'accord, là, on semble ne pas
être d'accord complètement sur...
Le Président (M. Bernier) :
M. Roy.
M. Roy
(Max) : Écoutez,
notre inquiétude, là, elle ne date pas d'hier. C'est qu'à chaque fois qu'on
nous demande quelque chose de plus, que ça vienne du ministère de l'Enseignement supérieur ou d'un autre ministère, ça affecte le
service pédagogique, ça affecte le
travail que les professeurs peuvent faire, qu'ils doivent faire. Il n'y a
pas que les professeurs, au sein de l'université, il y a aussi tout le soutien académique, et tout cela
est affecté. Notamment quand on a réduit les budgets
de recherche, bien il y a tout le personnel de recherche. Quand on a
modifié les organismes de recherche, donc c'est devenu le Fonds de recherche du Québec, peu importe, ça a
modifié également tout le rapport que les professeurs ont
aux organismes et avec les étudiants et tout.
Alors, notre
inquiétude, elle date de longtemps. Si on avait vu, au cours des dernières années,
un redressement de la situation
pour améliorer, justement, les services aux étudiants et améliorer la situation
des... les effectifs des professeurs,
on n'en serait pas là. Or, toutes les redditions de comptes qu'on nous a
demandées n'ont servi qu'à créer du contrôle supplémentaire et des réductions.
Et, au lieu d'avoir du soutien supplémentaire, tout ce qu'on a, c'est des
classes plus populeuses.
Il y a eu des investissements majeurs, au Québec,
dans l'enseignement supérieur, on y est allés à coups de milliards.
Mais on ne l'a jamais
vu dans les classes et dans les laboratoires. Où est allé l'argent? Et c'est ça
qu'on a dénoncé, même chose pour les immobilisations, c'est des frais d'infrastructures. Le gouvernement n'a pas pris ses responsabilités à une époque, je n'accable pas le gouvernement actuel ni le précédent, mais à une époque il n'a pas pris ses responsabilités, ce qui fait qu'on a pelleté
par en avant, et aujourd'hui on a eu des problèmes que tout le monde a dénoncés. On a vu une multiplication
de campus mais qui ne sont pas payés. C'est bien beau, de donner l'accessibilité à tout le monde. Tout
le monde est en faveur de ça, et on va être les premiers à
défendre l'accessibilité sur tout le territoire. En passant, l'Université du Québec, elle a une mission régionale en plus d'une mission nationale.
Et, si on pense à un gel des effectifs, inévitablement ça va affecter les effectifs qui vont venir en
soutien aux professeurs, soit dans les laboratoires soit dans les instituts de
recherche, etc., et les autres personnels
qui ont un lien avec l'académique.
Sans compter que, si on gèle les effectifs par principe, nous, comme il y a une augmentation de la fréquentation
étudiante, bien il y a nécessairement une disproportion.
Alors, on est
déjà en décalage, c'est ça qui nous inquiète. Si on n'était pas déjà en
décalage, je vous dirais, bien peut-être
qu'on peut s'entendre ensemble sur une progression, une courbe de progression
de x pourcentage, mais on est en rattrapage.
Il faut commencer par faire le rattrapage avant de penser à une diminution. Et
là, pour nous, un gel, quel qu'il soit, c'est une diminution,
nécessairement, des services. C'est ça, notre inquiétude.
Alors, la masse salariale, oui, des personnels
de direction, ça a augmenté de 154 % ou 157 % en une dizaine d'années. La masse salariale des enseignants,
c'est 50 quelques pour cent, 57 %. On est plus nombreux, c'est entendu,
mais que cette masse salariale augmente à ce
point, ça indique deux choses, c'est qu'il y a une bureaucratie exponentielle
et puis il y a aussi des salaires
importants. Je ne veux pas commencer à casser du sucre sur le dos des recteurs
ou tout ça, là, ce n'est pas ça,
notre objectif ici, ce n'est pas ça du tout, mais je ne pense pas que ce
mécanisme-là va nous permettre d'atteindre l'objectif que vous visez, je
pense qu'au contraire ça va nous en éloigner.
Et ce que je sais aussi, c'est qu'au
ministère — là,
présentement, ça s'appelle le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science — eh bien, ils connaissent, ils connaissent
les problèmes, et, si on avait pris les
responsabilités qu'il était nécessaire il y a plusieurs années, je pense qu'on
n'aurait pas le problème qu'on a actuellement. On aurait pu le résorber, ce déficit-là. Alors, il faut donc revenir au
ministère. Et c'est pourquoi nous, on a demandé de créer un conseil des universités qui remplacerait
la CREPUQ, à laquelle de toute façon le gouvernement consacre des sommes, et les sommes sont tout simplement
déversées dans l'autre organisme, un organisme qui soit impartial, qui ne soit
pas un lobby de direction d'établissement,
et par lequel, grâce auquel on puisse avoir l'heure exacte sur ce qui se passe
dans les établissements.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Vous avez 30 secondes, M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, simplement pour dire que vous avez fait référence au
fait que, dans le passé, on a pelleté en avant un certain nombre de problèmes.
Ce projet de loi vise justement à contribuer à ne pas pelleter en avant
davantage de problèmes par rapport au déficit budgétaire.
Je vois
certaines inquiétudes sur le long terme, mais le gel des effectifs dont il
s'agit ici est une mesure ponctuelle qui
se termine le 31 mars 2016. Donc, on n'est pas en train de parler d'un gel
de 10 ans, là. On s'attaque au problème maintenant.
Alors, on a eu un bon
échange. Je pense que, sur le dénombrement, on est assez d'accord. On
poursuivra les discussions sur l'arrimage entre l'article 4 et 12. Mais
l'objectif qu'on a ressemble beaucoup au vôtre, c'est ce que je voulais dire.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord saluer M. Roy et
M. Umbriaco, merci d'être ici; saluer mes collègues aussi, les membres de la commission parlementaire et
évidemment saluer le président. Mais je laisserais d'abord la parole à
ma collègue de Joliette, qui aurait des questions à poser à nos invités.
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour à vous deux, merci d'être ici.
Vous
représentez des professeurs de, donc, l'ensemble des universités. J'aimerais
vous entendre... Vous l'avez vraiment
juste effleuré, mais, pour vous, est-ce qu'il y a quelque chose qui peut
justifier que le réseau de l'Université du Québec soit inclus dans le projet de loi et qu'aucune autre université
ne le soit? Comment vous expliquez ça? Puis comment vous pensez que ça
se justifie ou non?
Le Président (M. Bernier) :
M. Umbriaco.
• (15 h 50) •
M.
Umbriaco (Michel) : Oui. Le réseau de l'Université du Québec est dans
le projet de loi, mais il y a d'autres articles
qui permettraient au gouvernement d'inclure les autres universités, ce qui nous
inquiète. Nous, on pense qu'aucune université
présentement au Québec, pas plus l'Université du Québec que les autres
universités — on ne
veut pas faire une fausse bataille
des universités dites à charte et du réseau de l'Université du Québec — aucune université présentement, dans l'état des ressources académiques, les
professeurs, chargés de cours, etc., dans l'état des ressources académiques
actuel, ne peut vivre un gel.
Si on vit un gel, il va arriver trois
conséquences, quel qu'il soit, quel que soit le gel. Première
conséquence : à un moment donné, il y a des programmes qu'on ne sera plus capables de
donner ou des concentrations où il va y avoir des gels de l'accessibilité, on ne sera plus dans l'accessibilité
urbi et orbi, ça, c'est clair, parce
qu'à un moment donné il y a des limites à ce qu'un prof ou un
chargé de cours est capable d'encadrer dans des cours ou des choses...
La deuxième
limite, c'est qu'il va y avoir une limite où il va y avoir une dégradation de
la recherche. C'est déjà commencé avec
d'autres éléments, mais il va y avoir une dégradation de la recherche. Alors, non seulement cette dégradation de la
recherche là a des impacts sur la qualité de nos étudiants de deuxième et troisième
cycle, mais ça a un impact aussi carrément sur notre compétitivité et,
je dirais, notre capacité d'excellence au Canada ou en Amérique.
Troisième élément, c'est toute la question des
services à la collectivité. Si on n'est pas capable de vraiment donner notre enseignement et de faire notre
recherche, tout ce qu'on fait comme services à la collectivité, que ce soit
avec les entreprises, les services
communautaires, des collectivités quelles qu'elles soient, ça va se réduire à
peau de chagrin, parce qu'on n'aura ni le temps ni l'énergie.
On est déjà
en déficit. En 2012, on était en déficit de 813 professeurs. Présentement,
cette année, si on se fie aux normes
minimales au Canada, on serait une centaine de plus. Si on était dans la norme
canadienne — on ne
parle même pas des normes
américaines, là — si on
était dans la norme canadienne, on serait autour... entre 1 600 et
1 800 profs de plus, sans
réduire le nombre de chargés de cours, parce que la masse étudiante est là.
Quand on dit que c'est l'équivalent de trois universités de Montréal
qu'on a engagé, c'est ça que ça veut dire. Il y a beaucoup d'étudiants.
On ne veut
pas restreindre l'accessibilité, alors pas plus l'Université du Québec que les
autres universités à charte. On pense que c'est une mauvaise querelle,
universités à charte et Université du Québec, surtout que la majorité des universités, sauf peut-être McGill — on pourrait toujours faire un long discours
sur McGill, sauf peut-être McGill — la majorité des universités, au
Québec, dépend essentiellement des subventions de fonctionnement du
gouvernement du Québec. McGill, c'est un peu
plus bas à cause de toutes sortes d'autres raisons, on pourra toujours faire un
cas, là, mais, à part McGill, toutes
les autres dépendent... Puis il n'y a pas de différence significative en
disant : Il y a les grandes universités, il y a les petites universités, ces choses-là. Nous, on
pense qu'il y a 19 universités, au Québec, puis ça vient de finir. Elles
ont des missions différentes, mais il y en a 19.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Hivon :
Oui. Je pense que vous avez mis le doigt sur quelque chose tantôt aussi en
parlant de l'endroit où les investissements
se font, dans le fond, puis je pense que vous avez... Vous avez parlé des
immobilisations, puis effectivement on
voit ça un peu, la multiplication des projets d'immobilisations par rapport à,
je dirais, la matière grise et les ressources qui sont vraiment là, le corps
professoral, l'enseignement. Donc, ça, je pense que c'est quelque chose qu'on
doit avoir à l'esprit.
L'autonomie
universitaire, je vous suis parfaitement. Je pense que c'est un enjeu réel,
qu'on doit garder à l'esprit quand on
étudie le projet de loi. Mais, vous qui êtes vraiment sur le terrain, dans le
concret, si ce projet de loi là s'appliquait tel qu'il est, quel impact ça pourrait avoir sur l'autonomie? Est-ce que
ça pourrait, par exemple, nuire à ce que des domaines émergents d'études puissent se voir attribuer des
effectifs? Parce que le ministre, il va vous dire : Ce n'est pas juste une
question de gel. Là, il y a un gel, mais le
projet de loi, il n'est pas juste sur le gel, en fait, il est sur le contrôle
des effectifs. Donc, il pourrait éventuellement ne plus y avoir de gel
mais une volonté du Trésor de pouvoir contrôler les effectifs. Mettons qu'on ne parle plus de gel, qu'on parle du contrôle,
est-ce que ça pourrait avoir un impact comme ça, sur la possibilité d'avoir des domaines d'études émergents, d'avoir les
effectifs? Est-ce que, par exemple... Ou, si une université — bien,
l'Université du Québec, parce que c'est la seule qui est directement
touchée — pourrait
faire attention à ce qu'elle ferait
de son autonomie pour ne pas déplaire au ministre, qui a un pouvoir important
sur les effectifs, quelles pourraient être les répercussions?
Le Président (M. Bernier) :
M. Umbriaco.
M.
Umbriaco (Michel) : Oui. Ça va être assez court : C'est
inadmissible. On a gagné la liberté académique au Moyen Âge, il y a plusieurs milliers de personnes
qui sont mortes pour préserver la liberté académique. Et, si un gouvernement, quel qu'il soit, par souci de bien
faire, par volonté d'atteindre d'autres objectifs, commençait à contrôler
le développement académique d'une
université, on n'est plus dans des universités, on est en Russie dans les
années 20, c'est là qu'on est.
Et c'est une des choses qu'on dit carrément, là, dans notre mémoire. Alors, ça,
c'est assez clair pour nous. Ça nous inquiète.
Si le projet
de loi, tel qu'il est là, est voté,
quel impact ça va avoir? Je n'en ai aucune idée. C'est inédit pour nous autres. On ne le sait pas, là. Je vais travailler
avec mes données probantes : ce n'est jamais arrivé. Donc, je ne
peux pas vous dire : Ça va arriver,
puis c'est comme du papier à musique. Je ne le sais pas. Mais ça nous inquiète beaucoup.
Donc, ça, c'est la partie claire.
Maintenant,
la question des immobilisations, nous, on n'a rien contre qu'il y ait
un campus à Drummondville, à Longueuil,
à droite puis à gauche. Qu'il y ait des campus, c'est comme ça que les universités
se sont développées, pour parler
clair. Mais un campus, ça veut dire des professeurs, des étudiants, des
laboratoires, ces choses-là. Alors, qu'il
y en ait une dizaine de plus, au
Québec, ce n'est pas grave. Présentement, on en a 217, il y a 217 lieux
d'enseignement, au Québec, dans
lesquels on a investi, mais où il n'y a pas beaucoup de professeurs, puis il
n'y a pas beaucoup d'étudiants, et ce n'est qu'en compétitivité et en toutes sortes d'autres choses. Et ça, pour
nous autres, c'est pour ça qu'on disait : On ne pense pas que ce soit le lieu au gouvernement de gérer ça.
On pense que c'est plutôt dans un organisme académique, appelons-le
comme on voudra...
Le
Président (M. Bernier) : Merci. On va juste permettre au député
de Sanguinet de pouvoir poser sa question.
M.
Therrien :
Écoutez, très, très rapidement, je pense que vous étiez là-dessus... Je
pourrais revenir sur un paquet de
choses que vous avez mentionnées que j'ai trouvées très intéressantes. Je
voudrais peut-être juste... Pour faire du pouce sur ce que vous venez de dire, là, par rapport aux immobilisations, vous
disiez, dans votre laïus du départ, qu'on détournait en quelque sorte un montant des immobilisations
pour... pardon, du, au contraire, fonctionnement pour l'immobilisation. Vu que vous en parliez, là, j'aurais eu plein de
choses à vous poser comme questions. C'était très intéressant, puis ma
collègue a fait un bon bout de chemin. Je voudrais vous entendre, pour
terminer, là-dessus.
M. Roy (Max) : Ah! je peux dire un
mot là-dessus.
Le Président (M. Bernier) :
M. Roy, vous avez environ... un peu moins d'une minute. Allez-y.
M. Roy (Max) : Bon, je suis toujours limité à une minute, là,
finalement. Alors, je vous dirais que, parce qu'il n'y pas eu des investissements au bon moment, les
universités ont puisé... les administrations universitaires ont puisé à même les fonds de fonctionnement pour pouvoir
combler les besoins. On peut dire que justement elles n'avaient pas le choix,
il y avait plus d'étudiants, il fallait bien les loger quelque part. Ça, c'est
la première chose. Mais, au-delà de ça, il y a une compétition qui se fait, justement, et qui, là, est, elle,
malsaine, parce qu'on essaie d'avoir... Puisque les universités sont
subventionnées par tête de pipe, hein, par le nombre d'étudiants — et
ça, nous, on veut absolument réviser cette formule
de financement en profondeur — à cause de ça, ça crée une compétition entre
les établissements, qui offrent des points
de service à gauche, à droite, etc. Je ne dis pas que tout est mal intentionné,
mais ça ne fonctionne pas, et il faut, pour
réguler ça, justement, qu'il y ait un organisme, qu'il y ait une instance qui
puisse voir les choses de façon impartiale, il faut que ce soit impartial absolument. Il ne faut pas que ce soient
les directions d'établissement, il ne faut pas que ce soient uniquement
les professeurs, il ne faut pas que ce soient uniquement les étudiants,
évidemment.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Roy. Nous allons
passer du côté du deuxième groupe d'opposition avec le député de
Beauce-Nord.
M.
Spénard :
Alors, merci, M. le Président. M. le ministre, chers confrères et consoeurs,
M. Roy et M. Umbriaco. Moi,
il y a... Si on avait eu ce projet de loi là voilà 10 ans, peut-être qu'on
ne serait pas rendu là aujourd'hui, vous en conviendrez avec moi. Parce
qu'il y a des statistiques qui m'ont surpris à l'intérieur de votre mémoire.
C'est-à-dire qu'en 10 ans, c'est-à-dire
de 1997‑1998 à 2008‑2009, c'est ce qu'on a dans... c'est que les cadres
auraient augmenté de 154 %, et les professeurs, de seulement 58,5 %. C'est pour vous dire toute
l'utilité de ça, parce que ça n'aurait peut-être pas fait ça si on avait eu ce projet de loi là où est-ce qu'on
demandait des redditions de comptes. On aurait peut-être moins laissé... Moi,
je trouve que la loi est importante. Peut-être
qu'elle est malvenue, mais peut-être que... Moi, je la trouve assez importante.
Vous parlez
aussi de la reddition de comptes, puis là vous avez apporté deux tableaux, un
petit et un très grand. Est-ce qu'on peut les faire déposer à la
commission, ces deux tableaux-là?
Le
Président (M. Bernier) : Oui, on peut les faire déposer. Si
vous acceptez, vous pouvez les déposer.
M.
Spénard : Alors, moi, j'apprécierais que ces tableaux-là soient
déposés pour notre gouvernance, en tout cas, pour voir...
Le Président (M.
Bernier) : ...version électronique?
M. Roy
(Max) : ...pas sur un écran. En tout cas, pas sur un iPhone, hein?
M.
Spénard :
Alors, j'aimerais ça... Pourriez-vous...
Le
Président (M. Bernier) : Bon, bien, écoutez, c'est parce que ça
complique un peu... le format complique un peu la chose, là. Je ne sais
pas si vous avez d'autres...
M. Roy (Max) : Bien sûr. Ce document-là était officiel, était public, il est dans le
rapport Bissonnette-Porter, à la suite du Sommet sur l'enseignement
supérieur, le chantier qui s'est ouvert sur la loi-cadre des universités.
M.
Spénard :
Maintenant, vous parliez des transferts de fonds de fonctionnement vers les
immobilisations. Moi, j'aimerais
savoir : Est-ce que vous avez... C'est quoi, le pourcentage qui aurait pu
être transféré? Je conçois que ça peut
dépendre d'une université à l'autre, là, mais, tu sais, grosso modo, là, c'est
quoi, le pourcentage qui peut être transféré dans les fonds de
fonctionnement vers les immobilisations?
Le Président (M.
Bernier) : M. Roy.
• (16 heures) •
M. Roy
(Max) : Le chiffre exact, on... Tu l'as? Alors, Michel va répondre,
Michel Umbriaco.
Le Président (M.
Bernier) : M. Umbriaco.
M.
Umbriaco (Michel) : Bonjour. Essentiellement, il y a eu trois vagues
de réinvestissement sur 10 ans dans les universités, et, quand on a fait le calcul — on l'a fait sur 10 ans — tout l'argent réinvesti dans les universités
qui devait servir à l'enseignement et à la recherche — et on
parle de l'ordre d'à peu près 400 millions, 500 millions — a
servi à peu près exclusivement au béton.
Alors, c'est aussi simple que ça, là. On a un rapport de 800 pages qui
prouve ça par a plus b égale c, là, c'est... On peut le déposer aussi,
on l'a déposé ailleurs. Et le problème, c'est que la loi sur les
immobilisations universitaires oblige le gouvernement à financer les
immobilisations, parce que, quand ça a été créé, cette loi-là, on disait : Les universitaires, c'est des joyeux
zéros, ils ne sont pas capables de gérer ça, du béton, on va plutôt
gérer ça au ministère, et ils ont payé 100 % de toutes les immobilisations
pendant 15, 20 ans.
Quand
est arrivé HEC, il n'y avait plus d'argent dans le fonds d'immobilisations,
donc là ils ont commencé à faire des
montages financiers avec des baux emphytéotiques. Et ça a bien marché pour HEC,
là. Ça va bien, HEC, il n'y a pas de problème.
Ce n'est pas un scandale, loin de ça. Mais de plus en plus le gouvernement s'est
retiré des immobilisations. Ils ont
même créé une norme hypothétique, vous allez trouver ça dans les règles de
financement, une règle hypothétique, et
ils financent à 30 % ou 40 % de leur propre règle hypothétique.
Alors, quand il y a des masses d'étudiants qui rentrent, la règle
hypothétique ne marche pas, elle n'est pas tout le temps subventionnée. Et il y
a eu beaucoup d'aléatoire et d'incompétence
au ministère — on est
obligés de le dire comme ça, c'est les mots du président du Conseil supérieur de
l'éducation — pour
la gestion des immobilisations.
Nous,
ce qu'on dit : Bon, bien, si le gouvernement n'a pas d'argent pour les
immobilisations, qu'il nous le dise... ou, si le gouvernement veut couper dans les universités, qu'il nous le dise,
mais qu'il ne nous mette pas 95 000 contrôles. Ils nous diront
l'enveloppe, puis on va gérer avec l'enveloppe qu'on aura.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Groulx.
M.
Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, je vais revenir au tableau duquel mon collègue
a fait état tantôt, provenant du
rapport Bissonnette-Porter, alors où il est fait état de la kyrielle, là, de
mécanismes de surveillance qui est demandée,
le «reporting» qu'il y a à effectuer. Alors, ça, c'est un constat à une date
fixe, j'imagine. Vous me le confirmez? Bon.
Alors, est-ce qu'il y a eu une croissance, au cours des
10 dernières années, des demandes de «reporting», excusez-moi l'anglicisme,
là, mais de mécanismes de surveillance?
Le Président (M.
Bernier) : M. Umbriaco.
M.
Umbriaco (Michel) : ...1990‑2012.
De 2012 à 2014, on a eu de plus en plus aussi de nouvelles demandes. On n'a
pas refait le tableau parce qu'on aime ça, là, travailler. Et ça, c'est avec les collègues
de l'Université du Québec. Vous allez
voir l'Université du Québec ce soir, là, je pense. Les collègues
de l'Université du Québec, c'est eux autres qui ont développé ce tableau-là.
Entre nous, on l'appelle «le Goliath de la reddition de comptes», là, c'est
comme ça qu'on l'appelle, mais c'est
la... On joue avec ça. Et ça va tout
le temps en croissant, mais à chaque
fois qu'il y a une ligne, là-dedans, ça veut dire qu'il
y a du monde qui remplit des papiers.
Chaque fois, ce n'est pas des données compliquées, mais, s'il y en a 200 à faire par année, des données pas compliquées, dans
des formats différents... Nous, on dit : Faites un format — ça,
je vais être d'accord ça, avec M.
le ministre — faites un format quatre fois par année avec des
questions simples, 20 à 30 questions, on va y répondre, et parce qu'on répond ad nauseam à toutes les demandes qui nous
sont faites à plusieurs ministères : le ministère de la Santé, le ministère
de l'Éducation, le ministère de l'Enseignement supérieur. Il n'y
a pas de problème,
pour nous, de répondre. Et, à chaque
fois qu'on nous demande des rapports, à l'université... Je ne sais pas
ailleurs, peut-être qu'ailleurs ce n'est pas pareil, mais, à chaque
fois qu'on nous demande des réponses, à l'université, en l'espace d'une
semaine, ou deux, ou trois on les remet.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Umbriaco. Ces informations-là sont comprises dans le
rapport Bissonnette-Porter, annexe 7,
pages 86 et 87. Donc, si vous voulez les consulter, vous vous rendez sur
ce site-là aux informations que nous avons. Nous allons d'ailleurs
rendre cette information disponible sur le site de la commission.
Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
vous avez 2 min 30 s. Allez-y.
Mme
Massé : Merci. Bonjour, tout le monde. Je vais faire ça simple, vous comprendrez. Je pense
qu'effectivement, étant dans Sainte-Marie—Saint-Jacques,
et de voir comment, dans le fond, l'immobilisation peut amputer un budget d'université — et je pense, bien sûr, à l'îlot
Voyageur — je
comprends que des fois il y a
des préoccupations qui devraient être plus à la bonne place.
Vous
avez laissé entendre dans votre présentation, M. Roy, que le projet de loi — ou
j'ai mal compris, là — avait
comme potentiel de restreindre l'accès à
l'université. J'aimerais mieux
comprendre votre vision. En peu de mots, parce que nous avons peu de
temps. Puis j'aurais une autre question.
Le Président (M. Bernier) :
M. Roy. En peu de mots.
M. Roy
(Max) : Très bien. Ça restreint forcément l'accès à l'université dans
la mesure où, si on a moins de professeurs,
on ne pourra pas donner les mêmes services. Et, si on ne donne pas les mêmes
services, il n'y aura pas autant d'étudiants.
On ne pourra pas les admettre, c'est simple. Là, c'est comme si on
disait : Bien, il suffit tout simplement de diminuer la
fréquentation à l'université pour régler le problème financier de l'université.
C'est comme si on disait, vous allez me permettre la comparaison : Cessons
d'admettre des malades à l'hôpital, là, puis on va avoir réglé les problèmes
dans le réseau de la santé.
Le Président (M.
Bernier) : Mme la députée.
Mme
Massé : Merci. C'est sûr que, si on gèle et après ça on contrôle, là,
ce que vous nous avez bien expliqué, ça va avoir des impacts, et tout
ça. Est-ce que vous ne trouvez pas aussi qu'en termes d'équité
intergénérationnelle... c'est-à-dire que les
jeunes vont avoir de la misère à devenir profs si on gèle ça puis il n'y a plus
de nouvelle ouverture?
Le Président (M.
Bernier) : M. Roy.
M. Roy (Max) : Il y a certainement cet aspect-là, il n'est pas négligeable. Pour un
président de fédération des professeurs,
ce serait certainement un élément important; que je n'ai pas rappelé, merci de
le souligner. C'est certain. Et d'ailleurs
nous, on forme des nouveaux professeurs, hein, les futurs professeurs, et, pour
pouvoir les former, bien il faut avoir
les ressources. Et on les forme aux deuxième et troisième cycles, là. Alors,
ça, ça demande donc de l'énergie et ça demande des ressources.
Et j'aimerais dire
que... Tout à l'heure, on a parlé des dépenses. On a dit : Cette loi-là,
bien, elle va permettre d'éviter les
dépenses. Mais, les dépenses dont on parle, nous, ce n'est pas par cette loi-là
qu'on va pouvoir les contrôler, ce
n'est pas le lieu, ce n'est pas ce projet de loi là. Parce qu'effectivement il
doit y en avoir, on est prêts à faire notre travail de ce point de vue là, mais il y a des mécanismes
qui sont inutiles, puis il y a des mécanismes déjà prévus, qui existent, et
il suffit tout simplement d'avoir une
meilleure gestion de toutes ces opérations-là. Et on n'a pas besoin d'une loi
pour ça. Il y a des accommodements à
ce qui existe déjà qui vont permettre de rendre clair ce qui se passe dans les
universités.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. Roy, M. Umbriaco, de la
Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université. Merci de
votre participation à cette commission parlementaire.
Je
suspends quelques instants afin de permettre au Secrétariat intersyndical des
services publics de prendre place, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à
16 h 7)
(Reprise à 16 h 10)
Le Président (M.
Bernier) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc
reprendre nos travaux. Alors, je souhaite la bienvenue au Secrétariat
intersyndical des services publics, en vous demandant, s'il vous plaît, de vous
identifier pour qu'on puisse plus facilement procéder aux enregistrements.
Secrétariat
intersyndical des services publics (SISP)
Mme Martineau (Lucie) : Alors,
bonjour, M. le Président...
Le Président (M. Bernier) :
Non, vous n'avez pas à peser, là, ça fonctionne tout seul.
Mme Martineau (Lucie) : Ah! ça va?
Le Président (M. Bernier) :
On a un régisseur qui est là pour s'occuper de tout ça.
Une voix : C'est contrôlé.
Le Président (M. Bernier) :
C'est contrôlé. C'est démocratique mais contrôlé.
Mme
Martineau (Lucie) : Bonjour,
M. le Président. Mmes, MM. les parlementaires. Alors, d'abord,
je vais vous présenter les collègues
qui m'accompagnent. J'ai Mme Louise Chabot, qui est présidente de la CSQ;
M. Francis Lamarre, qui est
conseiller à la recherche au SISP; Mme Nadia Lévesque, qui est conseillère
politique au SFPQ; et Mme Nathalie Léger, qui
est conseillère juridique. Donc, on vous remercie de nous permettre de nous
exprimer sur le projet de loi.
Le Secrétariat intersyndical des services publics, en fait, ça représente... ça
regroupe trois organisations syndicales qui sont engagées à la défense et la
promotion des services publics. Alors, il
y a la Centrale des syndicats du Québec — la
CSQ — il y a le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec et
l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Ensemble, on représente
plus de 270 000 travailleuses
et travailleurs qui travaillent dans
les réseaux de la santé et des services sociaux, de l'éducation, de la petite
enfance et de la fonction publique et parapublique.
Tout comme les autres groupes qui nous ont
précédés, nous accueillons avec beaucoup d'appréhension le projet de
loi n° 15 qui concerne la gestion et le contrôle des effectifs. Nous
estimons que ce projet, bien plus qu'une démarche
démocratique ou démarche de transparence pour permettre de dénombrer les
effectifs de l'État, est avant tout un exercice
comptable visant à centraliser le droit de gérance, en donnant des moyens
accrus soit au ministère ou au Conseil du trésor, et continuer à miner
l'autonomie des organismes publics.
Il faut bien
s'entendre, le Conseil du trésor — et le gouvernement — doit savoir le nombre d'effectifs qui
oeuvrent pour lui. Nous craignons des
exigences en matière de transmission de renseignements qui se traduisent par un
alourdissement de la
bureaucratie — je pense
que ceux qui nous ont précédés en ont fait part également — d'un dédoublement de tâches
administratives. Et en fin de compte le texte de loi comporte d'importantes
zones grises qui laissent place à beaucoup d'interprétation.
Globalement,
le SISP s'oppose au gel global d'effectif, qui se traduira inévitablement par
des impacts négatifs sur la qualité
et l'accessibilité des services publics, déjà lourdement affectés par des
compressions et des coupures depuis plusieurs
années. Aussi, notre analyse des effets de la politique de non-remplacement
d'un fonctionnaire sur deux nous donne
un aperçu des conséquences importantes que pourrait entraîner un gel d'effectif
en santé et en éducation, parce qu'un
gel d'effectif, dans les réseaux de la santé et de l'éducation, ça équivaut à
une diminution des effectifs, compte tenu des besoins croissants dans
ces deux réseaux, et nos prédécesseurs en ont fait part également.
Le projet de
loi est-il nécessaire? La volonté du gouvernement de constituer un portrait
plus détaillé, c'est respectable.
Déjà, ça pourrait être possible par un décret, par une directive. Avons-nous
besoin d'un projet de loi de 38 articles?
Le véritable
objectif du projet de loi en est un dans la logique de l'austérité, il s'agit
de resserrer encore l'étau sur les
travailleuses et travailleurs du secteur public au nom du déficit zéro.
Impossible pour nous de ne pas faire de lien avec la commission de révision des programmes, avec la commission sur la
fiscalité et avec le projet de loi n° 10 en santé.
Une
centralisation renforcée. Concentrer les pouvoirs aux dépens de l'autonomie des
organismes publics, privés de
souplesse dans l'accomplissement de leur mission et de leurs particularités
régionales, cette centralisation s'exprime par la volonté de surveillance, de contre-vérification, de contrôle de
la part du Conseil du trésor. Une panoplie de sanctions, également, est prévue au projet de loi, tout ça
visant une perte d'autonomie des organismes publics. Par exemple, pour
répondre aux besoins des élèves dans une commission scolaire, on doit prendre
en compte différents facteurs, dont le contexte socioéconomique et culturel. La
commission scolaire qui voudrait avoir plus de soutien aux élèves par une
allocation plus importante de ressources professionnelles pourrait même être
rappelée à l'ordre par le ministère de l'Éducation ou le Conseil du trésor.
Malgré l'article 12 qui prévoit que les organismes doivent maintenir les
services offerts à la population, comment
les gestionnaires pourront répondre à cette double obligation de maintenir les
services publics et de satisfaire les
exigences du ministère et du Conseil du trésor? À notre avis, c'est une
véritable condamnation à l'endroit
des gestionnaires publics, prétendant qu'ils sont incapables de gérer
adéquatement leurs ressources humaines. On peut s'attendre à une
démobilisation importante puis des conséquences évidentes sur les relations de
travail.
Le calcul et
le gel des effectifs comportent également des lacunes évidentes. Nous n'avons
pas les critères qui vont être
retenus pour effectuer le calcul de l'effectif et le niveau de gel de
l'effectif. Est-ce qu'on va se baser sur les postes qui sont déjà comblés? Est-ce qu'on va inclure les
postes où les tâches sont effectuées par du personnel d'une agence? Comment on va intégrer le fait de calculer les
contrats de services professionnels dont on fait mention? Et les activités
saisonnières seront-elles prises en compte? Donc, il y a beaucoup de zones
grises dans le projet de loi.
Un
alourdissement bureaucratique, pour nous, inefficace. On parle d'une
planification triennale de la main-d'oeuvre comme si c'était une nouveauté. Ça existe depuis des lunes, et puis
c'est évident que chaque organisme le fait, également. On ne parle même pas que
ça va être fait en concertation avec les organisations syndicales, on ne parle
même pas de les consulter, ce qui se
fait actuellement dans les réseaux de la santé et de l'éducation, pas dans la
fonction publique. Alors, c'est
évident que c'est les travailleuses et travailleurs sur le terrain qui sont les
mieux placés pour expliquer le détail de leurs tâches et qu'est-ce
qu'ils prévoient comme besoins à venir pour les citoyens et citoyennes au
Québec.
Les
établissements, actuellement, font déjà un suivi des ressources humaines. Les
planifications de main-d'oeuvre, c'est
depuis longtemps effectué. Donc, on entrevoit un dédoublement fait par le
Conseil du trésor ou par le ministère et de nouvelles frictions, probablement, entre la vision des uns par rapport à
la vision des autres. En quoi les compétences du Conseil du trésor pourraient-elles être meilleures que celles des
établissements actuels? Nous pensons que le projet de loi, vraiment, rate ici
sa cible. Le réel déficit dans les services publics ne va pas nécessairement à
la planification des besoins et des
ressources mais bien à comment on va faire pour attirer et retenir le personnel
nécessaire dans le réseau public, et ce qui suppose un financement
adéquat de ces services-là.
Quand
on parle de l'article 12, du maintien des services à la population, on a
vu d'autres initiatives de ce genre-là dans
le secteur public et on sait que ça n'a pas fonctionné. Il n'y a aucune
définition de c'est quoi, un service considéré comme touchant à la
population. Y a-t-il un mécanisme de contrôle pour les conséquences du gel?
Avec les pertes de services en région et Internet, comment on va définir
l'accessibilité du service à la population?
Je
donne quelques exemples. Un mandataire de la Société d'assurance automobile du
Québec a fermé ses portes à Sainte-Anne-des-Monts.
Les gens doivent, pour renouveler leur permis de conduire ou leur carte
d'assurance maladie, se taper
100 kilomètres de plus pour aller à Matane. Est-ce qu'on a atteint notre
cible? Avons-nous maintenu le service à la population?
Dans
le secteur de la santé, il y a des services qui sont payants, donnés par le
privé. Si à force d'attendre on se dirige vers le service privé et on paie, est-ce que ce sera ça, le maintien du
service à la population? Est-ce que ce sera ça, le maintien de
l'accessibilité aux services?
Dans
la portion du projet de loi concernant l'encadrement des contrats,
premièrement, c'est à peu près la seule chose qu'on a vue d'intéressante dans le projet de loi, c'est qu'enfin
on pourrait avoir une mesure de contrôle des contrats publics. Sauf que s'agit-il d'une réelle reprise
de contrôle? Nous ne le croyons pas. Nous croyons que c'est nettement insuffisant. On ne précise pas comment les
contrats de services seront décomptés. On laisse la latitude aux gestionnaires
pour autoriser des contrats avant ou après
des périodes de gel, donc on peut se préparer. La différence entre le contrat,
également, pris pour contourner un gel et un qui ne l'est pas, pris, n'est pas
faite non plus.
• (16 h 20) •
Nous
saluons l'article 18 qui dit que le sommaire des contrats serait inscrit
au rapport annuel, mais le bilan qu'on a
de tout ce qui s'est passé dans la fonction publique québécoise depuis la
politique de non-renouvellement de la main-d'oeuvre, c'est-à-dire le non-remplacement d'un sur deux,
nous porte à croire qu'on rate notre cible. Des économies? Elles seront limitées. Ça ne génère pas beaucoup d'économies. Les dépenses sont transférées en contrats de
services, ça prend de plus en plus la forme d'un remplacement progressif en fonction du public vers le privé, et
ça demande également aux gestionnaires de faire plus avec moins de
ressources à l'interne.
En
2013, nous étions rendus, au gouvernement du Québec, à 9,3 milliards de
dollars en contrats de services, ce qui
est près du tiers de la masse salariale du gouvernement du Québec. Le
Vérificateur général a même déterminé que la pratique d'impartition,
juste dans le domaine de l'informatique, augmentait le taux d'une ressource qui
passait de 215 $ à 475 $ par jour et le portait à 400 $ à
900 $ par jour.
Maintenir
les services à une population en croissance partout sur le territoire du Québec
avec moins de personnel, sans
recourir aux ressources externes, c'est rêver en couleurs. Au contraire,
10 ans après cette politique dans la fonction publique, nous constatons une perte d'expertise et
un gaspillage des fonds publics. Quand la sous-traitance prend trop de place, l'impartition renverse le rapport
d'autorité entre le donneur d'ouvrage et la firme externe, il se crée une
dépendance de l'État envers les fournisseurs de services, et l'organisme
devient incapable de jauger la valeur d'un contrat ou de l'encadrer par la
suite. Moi, je suis allée à la commission Charbonneau dernièrement; on disait
la même chose.
La
réduction des effectifs, est-ce une bonne idée? Contrôler les effectifs sans
affecter les services, ça, c'est un mythe.
Élargir les mesures en place depuis plusieurs années qui existent dans la
fonction publique nous permet de dégager des constats. De manière similaire, au début, on faisait accroire :
On ne touchera pas aux services publics. Les gestionnaires, on leur disait : Vous allez remplacer les bons
postes, garantir le maintien des services. Le président du Conseil du trésor
en 2007, M. Luc Meunier, disait :
On ne touchera pas aux services. Mme Courchesne, en 2010, disait :
L'intention est de geler la masse salariale 2013‑2014, mais pas fermer
les bureaux en région, pas se faire au détriment des services aux citoyens. C'est faux. Nous avons prouvé maintes et
maintes fois que les services à la population et l'accessibilité ont bel et
bien été effrités au Québec. Après
10 ans, nous avons des garanties que ce qu'on nous avait promis n'a pas
été respecté.
Alors
là, ce n'est même plus le SFPQ ou le Secrétariat intersyndical qui le dit, on
va vous citer des gens qui le disent,
des gens qui ne représentent pas les employés. Alors, dans le plan pluriannuel de
la main-d'oeuvre du ministère des
Transports 2006‑2008, on dit — et on cite : «Les réductions d'effectif
que nous subissons depuis maintenant deux ans affectent inévitablement notre capacité à livrer adéquatement nos
produits et services.» À plus long terme, ce manque chronique d'effectif
a généré une perte d'expertise importante, on a dû même recourir à des firmes
externes pour la préparation et la surveillance de ces contrats
d'infrastructure.
En
2009, à l'époque, le directeur général Pierre Thomassin, du secteur minier,
constatait que le développement était
freiné par le manque de ressources : «Il manque de ressources au
ministère, ce n'est pas compliqué! On le voit, ils sont en retard dans
tout!»
En 2010, le
président de la Fédération des cégeps, Gaëtan Boucher, souligne que le manque
d'expertise au ministère de
l'Éducation, des Loisirs et du Sport par le non-remplacement des départs à la
retraite causait une perte de productivité importante pour les cégeps.
En
2010, six ans après le début des mesures d'attrition, le Conseil du trésor
lui-même constatait l'efficacité déclinante
de la mesure : «Les résultats [...] démontrent qu'il devient de plus en
plus difficile d'appliquer le plan de réduction [des effectifs] et que
l'approche appliquée depuis six ans a atteint ses limites.» On est quatre ans
plus tard, là. «...les économies découlant
de la réduction de l'effectif peuvent, dans certains cas, être réduites, voire
[...] compensées par l'octroi de
contrats professionnels plus coûteux donnés à l'externe», qui pourrait même
compromettre l'offre de services gouvernementale en région.
Au-delà
de tout ça, nous croyons que l'impact négatif sur le recrutement dans le
secteur public est à prendre en compte.
Vous savez, on se compare beaucoup à l'Ontario. Alors, le vérificateur général
en Ontario, lui, il a dit : «Plusieurs années de réduction des effectifs, combinées aux restrictions de
recrutement...» «La prestation des services publics essentiels pourrait être en danger, à moins de mettre en
oeuvre dans les meilleurs délais des stratégies visant à recruter des
[travailleuses et] travailleurs plus
jeunes possédant les compétences nécessaires.» Alors, le gel des effectifs dans
les réseaux, comment va-t-on pouvoir maintenir le service à la
population? Nous sommes vraiment inquiets.
S'interroger sur les
conséquences sur le système de santé. Un centre hospitalier régional — c'est
celui de Rimouski — annonçait en février dernier un
investissement de 100 millions de dollars, compte tenu de la croissance
des demandes. Le nombre de
traitements de dialyse était passé de 21 159 à 25 886; les chirurgies
d'un jour, de 5 372 à 5 679; le nombre de visites en
hémato-oncologie, de 14 270 à 19 390. Donc, on n'est pas en surplus
de personnel, on est en pénurie de
personnel. Les prétentions qu'on peut ne pas toucher aux services en gelant le
nombre d'employés et en faisant des compressions seulement dans la
bureaucratie, nous n'y croyons pas.
En
plus, ces différentes formes de réforme qui ont été mises dans le réseau de la
santé n'ont même pas permis de freiner l'augmentation du nombre de
cadres. Au contraire, il a augmenté.
Et
qu'en est-il du secteur de l'éducation? Le secteur de l'éducation a subi des
compressions et des coupes, on a assisté
à la dégradation des conditions de travail des professionnels et des... des
enseignants et du personnel de soutien. Dans plusieurs catégories
d'emploi, ça s'est traduit par une surcharge de travail, un manque d'effectif
tandis que les besoins étaient en
croissance. En 2014‑2015, ce sont des coupes de 70 millions de dollars
dans les mesures d'appui à la réussite
scolaire, 10 millions en adaptation scolaire et, depuis 2010, des
compressions budgétaires de l'ordre de 800 millions.
Le
nombre d'élèves handicapés, dans le rapport Champoux-Lesage, a augmenté de
50 %, le nombre, également, d'élèves
handicapés a doublé — c'est-u
ça que j'ai dit? — en
difficulté d'adaptation. Mais pire encore : 410 % d'augmentation
du nombre d'élèves en troubles envahissants
du développement, 252 % pour la déficience langagière et 163 % pour
les troubles relevant de la
psychopathologie. Le résultat : des délais importants. Nombre de parents
s'en vont au privé, et ça, c'est ceux
qui sont capables de se le payer. Alors, le gel d'effectif compromet non
seulement l'offre de services, mais aussi son accessibilité.
En
conclusion, ce projet de loi suscite de vives inquiétudes. Nous nous opposons
au gel catégorique des effectifs dans
les réseaux, l'ensemble des réseaux. L'expérience négative que nous vivons dans
la fonction publique nous fait craindre le pire pour les deux autres réseaux et nous permet de constater qu'on a
vraiment affecté la qualité et l'accessibilité des services publics.
Et il faut d'ailleurs
aussi s'inquiéter des récentes déclarations du ministre Leitão : «Il n'est
pas nécessaire que l'État soit seul à livrer
les services à la population, on pourrait transférer une part de ces
responsabilités à des organismes communautaires
ou privés.» Là est l'enjeu, l'enjeu de la sous-traitance, de la privatisation
des services publics. C'est ça qui est soulevé dans ce projet de loi là,
et nous recommandons le rejet pur et simple du projet de loi.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, Mme Martineau. Vous avez
été très, très dans le respect du temps qui vous est accordé. M. le
ministre, la parole est à vous, maintenant.
M.
Coiteux : Merci beaucoup, Mme Martineau. D'ailleurs, je souligne que
ça fait quelques fois qu'on se rencontre, là, depuis l'été dernier, puis c'est
toujours intéressant d'avoir l'occasion d'avoir ces discussions-là, parce qu'on
a pu discuter à la fois de la révision
des programmes, on a pu discuter du contexte des négociations, puis ce soir ça
me fait plaisir qu'on puisse échanger autour du projet de
loi n° 15.
Je
commencerais peut-être par la question suivante, parce que vous avez dressé un
portrait comme si le secteur public
québécois, depuis de nombreuses années, était en gel des effectifs :
Est-ce que vous êtes d'accord ou en désaccord avec moi qu'au cours des dernières années il y a eu, bon an, mal an, une
croissance des effectifs dans le secteur public québécois à tous les ans, là, un certain nombre de milliers de personnes
additionnelles à chaque année? Est-ce que vous êtes d'accord ou en
désaccord avec ce constat-là?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Martineau.
Mme Martineau
(Lucie) : Dans la fonction publique, il y a eu trois vagues de gel et
puis la politique de non-renouvellement.
Mais, si vous me parlez des 6 000 de plus annuellement qui viennent...
Parce qu'on a vu ça passer dans les journaux. Évidemment, depuis 1980,
on a rapatrié du fédéral beaucoup d'activités. La gestion de la TPS, la politique de main-d'oeuvre au Québec, c'est quand
même 1 000 fonctionnaires fédéraux qui sont passés du fédéral au...
Ça, ce n'est pas de l'ajout. Si on veut...
Oui, il y a de l'ajout, le centre de la petite enfance qui n'existait pas en
1980. Moi, dire qu'on va... juste des
chiffres pour des chiffres, là, non. On va les mettre sur la table, on va
s'expliquer pourquoi. Et probablement
qu'une fois qu'on aura tout fait nos courbes, là, on va trouver qu'il y a le
même nombre d'effectifs par rapport à la population active depuis les
30 dernières années.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
• (16 h 30) •
M.
Coiteux : Donc, on n'est pas
en désaccord avec le fait qu'il y a eu croissance des effectifs. Ce que vous
dites, c'est que, dans certains cas, ça correspondait à un transfert d'une
responsabilité fédérale vers le gouvernement du Québec.
Et vous dites : Dans d'autres cas, c'est parce qu'on a développé des
nouveaux services.
Mme Martineau (Lucie) : ...le Régime
québécois d'assurance parentale. Il y a des nouveaux... Oui.
M. Coiteux : Par exemple. Puis, dans
d'autres cas, il y a eu une expansion des effectifs dans les services existants, là, qui n'ont pas été modifiés, dans le
secteur de la santé, dans le secteur de l'éducation, dans l'ensemble des
secteurs. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Bien, écoutez,
oui, si les effectifs augmentent en même temps que les besoins augmentent, pour nous, ce n'est pas une
augmentation d'effectif, c'est une stabilité. Alors, c'est pour ça qu'on ne
peut pas lancer des chiffres comme
ça, il faut vraiment les... Oui, on ne conteste pas qu'il y a 6 000 personnes de plus par année. Mettons-les sur la table, on va les trouver, ils
sont où. Parce que, c'est drôle, moi, je trouve qu'on le sait, ils sont où,
nous autres, les chiffres.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Coiteux : ...question suivante, bon : Est-ce que vous pensez que
c'est important ou non, pour le gouvernement, de connaître dans quelle catégorie d'emploi cette croissance de
6 250 personnes par année arrive? Est-ce que vous pensez que
c'est un objectif légitime que de savoir ça?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : J'ai été
la première surprise à penser que le Conseil du trésor ne savait pas ça. Mais
ça, ça ne prend pas un projet de loi, faites
une directive. Les gens, là, des universités ont passé avant nous, là. Au lieu
de leur demander 350 rapports
sur 10 000 copies à je ne sais pas combien de ministères — c'est ça, la bureaucratie — faites un décret puis demandez à chaque organisme, quatre fois par année, de
vous envoyer le nombre d'effectifs, dans quelle catégorie, où ils sont,
puis quels programmes ils administrent. Ça, là, je pense que ça ne prend pas un
projet de loi à 38 articles comme ça.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Alors, vous êtes d'accord avec l'aspect dénombrement. C'est
qu'il y a différents moyens d'obtenir le dénombrement, mais vous êtes
d'accord avec le dénombrement. Vous êtes d'accord avec un dénombrement à une fréquence plus grande, un dénombrement qui nous
permet de faire la distinction des effectifs entre les différentes fonctions,
les différentes tâches. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Léger.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, si c'est
une question... Si vous nous demandez si on est d'accord à ce que notre
gouvernement connaisse les effectifs de l'État, la réponse, c'est oui. Mais, si
vous nous demandez spécifiquement de répondre...
Ça, c'est l'article 4, je crois, là, périodicité, tout ça. C'est parce
qu'on lit le projet de loi dans son ensemble. Ça fait que
l'article 4, c'est une chose, mais dans quel objectif, dans quel but vous
voulez connaître? Si c'est juste de connaître,
je pense que notre collègue l'a dit, d'autres l'ont dit, vous auriez pu faire
une directive. Vous pourriez, avec les différentes administrations,
regarder comment, écoutez, on est en 2014, là.
Je veux revenir sur quelque chose, par contre,
que je trouve majeur, là, sur cette question-là de croissance des effectifs. Ce
n'est certainement pas ça non plus qui doit laisser croire que c'est ça qui
vient justifier un projet de loi.
Alors, la
croissance des effectifs, le 6 200 dont vous avez vous-même parlé, ça se
base sur le nombre d'employés du
secteur public au Québec sur une population de 1981 à 2012. Donc, c'est une
croissance qui est quasi normale. Je ne dirais même pas qu'elle a répondu totalement aux besoins, parce qu'on a
vu d'autres occasions où... Actuellement, même, on ne pourrait pas dire
que les services, dans la plupart... dans l'Administration puis dans nos
services, on répond totalement aux besoins de la population.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme Chabot. M. le ministre.
M.
Coiteux : Est-ce que vous
seriez d'accord avec le fait que la croissance des effectifs de l'ordre de
6 250 par année rend plus difficile le retour à l'équilibre
budgétaire?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Chabot.
Mme
Chabot (Louise) : Non, pas
du tout, pas du tout, parce qu'il faudrait nous démontrer que cette
croissance-là, elle a été excessive,
qu'elle est due à de la mauvaise gestion, qu'elle serait due à des écarts qui
sont inexplicables, qu'il y aurait
une explosion, puis ce n'est pas ça, le constat qu'on fait de la croissance des
effectifs, normale sur une période de 20 ans, à notre avis.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Non, mais là je
parlerais davantage, là, de... pas des 20 années derrière nous, là. Ça, on
hérite du passé. Puis on essaie de prendre des moyens, justement, pour
corriger une situation qui s'est créée dans le passé.
Mais, si on
regarde devant nous, est-ce qu'on est d'accord avec le fait que cette
croissance-là, si on ne la contrôle pas,
va exiger des efforts ailleurs et plus forts pour retourner à l'équilibre budgétaire? Est-ce qu'on est d'accord là-dessus?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Moi, là,
non. La réponse, c'est non. Je vais vous dire pourquoi : Là, vous avez un projet de loi qui ne concerne que les
effectifs, comme s'il n'y avait que ça au gouvernement du Québec. Moi,
mettez-en sur l'encadrement des ressources
externes, M. Coiteux, puis ça va me faire plaisir de venir vous appuyer. Là,
on ne regarde que les personnes
humaines qui travaillent pour d'autres personnes humaines, on ne regarde pas
tout ce qu'on donne en contrats. Écoutez,
le Vérificateur général, il ne travaille toujours bien pas pour le SFPQ ou le
Secrétariat intersyndical des services publics, là; il le dit année
après année. La Protectrice du citoyen aussi, elle ne travaille pas pour nous.
Alors, si on
regarde tout... Vous dites : L'augmentation des effectifs, c'est ça qui va
faire en sorte qu'on n'atteindra pas l'équilibre budgétaire. Ah non! On
a de belles grandes colonnes, là, de d'autres affaires qu'on peut regarder.
Puis inquiétez-vous pas, je ne vous
demanderai pas de hausse d'impôt, il y a bien d'autres affaires à regarder.
J'en parle à toutes les fois. Je vous en parle à toutes les fois,
d'ailleurs.
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Coiteux : Bien, j'aimerais
vous rassurer sur une chose ou en tout cas le réitérer : Le contrôle des
effectifs, ce n'est pas la seule
chose qui est dans les cartons pour retourner à l'équilibre budgétaire, ce
n'est pas la seule chose. Il y a,
on en a discuté ensemble, la révision des programmes.
Mais
j'aimerais vous entendre peut-être là-dessus
maintenant. C'est-à-dire que, si on laisse augmenter les effectifs de manière rapide au cours des prochaines années,
est-ce qu'on n'est pas obligé de faire des efforts encore plus grands du côté de la révision des programmes pour
atteindre l'équilibre budgétaire? Autrement dit, est-ce qu'on ne peut pas avoir
une approche où on répartit nos efforts de
différentes façons, le gouvernement en faisant son effort, le réseau en faisant
son effort, la façon de faire dans
l'ensemble de nos programmes on fait des efforts tous ensemble? Est-ce que ce
n'est pas une approche plus équilibrée, justement, celle-là?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : En
indiquant qu'on laisse augmenter les effectifs comme ça, ça présuppose, comme
disait ma collègue, que ça a été abusif, que
ce n'est pas justifié, que c'est hors contrôle, ce qui n'est totalement pas le
cas. Vraiment, quand on regarde dans les 30 dernières années, les
6 000, écoutez, on peut dire où ils sont, puis il y en a beaucoup dans la
bureaucratie des 400 rapports que doivent fournir les universités au
ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de tous les autres
rapports qui peuvent être simplifiés. On n'a jamais été...
Et puis en plus on dit : On va regarder les
effectifs puis on va regarder les programmes. Il y en a encore plus, M. Coiteux. On va regarder ce qu'on donne en
sous-traitance, on va regarder comment qu'on paie pour l'externe. On va
regarder peut-être si on centralisait nos achats de médicaments, il y a un beau
projet, là, 1 milliard, sur la table.
Mais,
écoutez, si on regarde tout, on est toujours prêts à regarder, mais l'ensemble,
pas juste dire : On augmente les
effectifs, puis, si on augmente les effectifs, on va devoir couper dans les
programmes. Ce n'est pas juste ça. On n'a pas deux variables, on en a
plus que ça. Mais, à regarder tout, nous, on est ouverts à ça.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, c'est notre approche, de regarder tout, justement.
Puis c'est une approche qui n'a pas été trop faite par le passé, donc
c'est...
Mais je
reviens sur la question de la sous-traitance, parce que vous y accordez
beaucoup d'importance, avec raison, tout à fait avec raison, puis c'est
la raison pour laquelle, justement, ça fait partie du projet de loi. On a
inséré ici une disposition pour éviter,
justement, que le gel des effectifs soit contourné par la signature de contrats
de services avec des personnes. Alors, ça, c'est un geste, il me semble,
que vous devriez accueillir assez favorablement, non?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Bien,
c'est marqué dans notre mémoire. C'est marqué, puis je l'ai dit. Mais on a même
dit que ce n'était pas assez, parce que,
écoutez, on a juste à prendre les deux derniers rapports de la Commission de la
fonction publique du
Québec : dans ce qu'elle a étudié dans les différents ministères et
organismes, il y avait pas mal un assez
gros pourcentage, je pense, ça tournait autour de... 40 % des contrats
étudiés étaient assimilables à des contrats de travail. Bon, alors, ça, c'est marqué dans notre mémoire, qu'on est
d'accord avec ça. On dit même que ça ne va pas assez loin. On dit qu'en laissant la latitude avant et
après les périodes de gel on est capable de prévoir le gel qui s'en vient, là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Coiteux : D'autre part aussi, une
autre question que j'aurais... Parce que c'est le groupe qui est venu juste avant vous qui expliquait : Où il y a un
problème d'explosion de la masse salariale, c'est juste que l'explosion de la
masse salariale n'est pas à la bonne
place. C'étaient leurs propos tout à l'heure. Et on a cette préoccupation-là
dans l'ensemble du secteur public, de
s'assurer que, quand il y a expansion des effectifs, ça soit à la bonne place
aussi. Au-delà du contrôle, il y a cette question d'être capable de voir
la situation puis de pouvoir intervenir, au besoin.
Est-ce que vous êtes d'accord avec cette
vision-là?
Mme Martineau (Lucie) : Bien, ce
qu'on voit actuellement...
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
• (16 h 40) •
Mme
Martineau (Lucie) : Oui. Ce qu'on voit actuellement, c'est vraiment la
coupure du service au citoyen. On ne voit pas, justement, où est-ce
qu'on pourrait regarder autrement.
Alors, ce
n'est pas compliqué, là, on a juste à prendre les journaux jour après jour, là,
hein, c'est la coupure directement aux
services aux citoyens; la coupure aux plus démunis également, là, hein, on a vu
les services des personnes handicapées. Nous, là, dans la fonction publique, je peux vous faire une liste, là,
hein, le 10 ans de gel, là, qu'est-ce qu'on a vu. La Régie du logement, c'est 20 mois d'attente. On a le
temps de déménager, maintenant. Ensuite, fermeture des bureaux du ministère, à Roberval, des Ressources naturelles et de la Faune, un palais de
justice à Jonquière, CSST à Granby, le bureau régional du MICC à Rouyn-Noranda. L'Office de la protection
du consommateur, ils ferment, c'est marqué, en raison du manque d'effectif, là, ça va être fermé du tel juillet au
tel juillet, là, c'est sur le site Internet. Aïe! c'est beaucoup
d'accessibilité, là, aux citoyens,
ça. La Commission de protection du territoire agricole également, le MAPAQ
également, le ministère de l'Emploi et Solidarité sociale. Le ministère de la
Justice, un kiosque maintenant à Montréal. Le développement régional :
abolition des CRE. Ça, c'est ce qu'on voit, là, dans les rumeurs, là, les CRE,
les CLD, et tout ça.
Bon, écoutez,
on voit vraiment la coupure de services aux citoyens. Alors, si on regarde
tout, il faut tout regarder.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Coiteux : Je voyais... À la page 14, en conclusion, il y a une
phrase ici qui a attiré mon attention, où on écrit, ici : «En procédant à ce gel, le gouvernement
se prive de la possibilité de créer tout nouveau programme...» Est-ce que
vous pensez qu'on a la capacité financière actuellement puis au cours de la
période visée notamment par le gel des effectifs...
Est-ce que vous pensez qu'on a la capacité financière actuellement, au
gouvernement du Québec, de créer des nouveaux programmes, alors qu'on a
du mal à financer les programmes existants?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : En fait,
tout ce financement de programmes là, c'est des choix politiques. Alors, on a
des choix à faire... Bien, vous avez des
choix à faire beaucoup plus que moi, dans les choix politiques, évidemment.
Alors, on ne sait pas ce qui peut
arriver dans l'avenir, mais il peut arriver qu'on ait besoin... On n'avait pas
prévu... Bien, ça, c'est un peu... On
n'avait pas prévu qu'il y a un viaduc qui tomberait, hein, puis qu'on a été
obligé de mettre 41 milliards sur les routes du Québec, mais,
savez-vous, il y a des choses comme ça. Puis ce qui est bien, bien inquiétant,
dans les services publics, c'est qu'on
attend, là, d'être rendu à... que ça fasse mal, là, avant de dire : Ah!
c'est vrai, on a oublié d'investir à
quelques endroits. Alors, je ne peux pas vous dire, moi, qu'il n'y aura pas
d'autre besoin, mais je vais vous dire une
chose, par exemple : Quand les citoyens vont le réclamer, là, vous allez
devoir prendre des choix politiques, c'est sûr.
Le Président (M. Bernier) :
30 secondes, M. le ministre.
M. Coiteux : Bien, 30 secondes,
je dirais que justement un choix politique important qu'on a pris, c'est de contrôler la dette par l'élimination du déficit,
parce que justement on sait très bien ce qui va arriver si on ne le fait pas
et on va payer une facture plus grande. Ça,
c'est un instrument par lequel on va essayer d'atteindre les objectifs. Puis à
court terme l'objectif de déficit,
celui-là, il est ferme. Maintenant, l'objectif à long terme, c'est justement de
faire de l'espace pour être capable de financer les nouveaux besoins.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons
donc passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de
Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je voudrais saluer Mme Martineau, Mme Chabot,
M. Lamarre, Mme Léger et Mme Lévesque. Je n'ai pas oublié
personne, hein, je pense. Non? Ça va? Alors donc, bienvenue.
Alors,
écoutez, je vais un peu réagir à ce que j'ai entendu. Il me semble que j'aurais
1 million de questions à vous poser,
c'était très intéressant. Faire des efforts, le ministre vous demande de faire
des efforts. Est-ce que vous l'avez déjà entendue, celle-là? Et
qu'est-ce que ça a donné?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Moi, ça
fait 25 ans que je milite professionnellement au syndicat, ça fait
34 ans que je suis dans la
fonction publique du Québec, et puis je pense que c'était ça en 1980 quand je
suis rentrée. C'est toujours ça. Je
pense que les employés des secteurs public et parapublic ont fait beaucoup
d'efforts, on a travaillé une dizaine d'années à réorganiser, en organisation du travail. Malheureusement, ça ne donne
pas les résultats qu'on souhaitait et puis... Mais c'est sûr qu'on n'a jamais dit non à faire des
efforts puis on n'a jamais dit non à regarder comment on peut être plus efficace,
comment on peut donner de meilleurs services. Mais là ce n'est pas ça qu'on
voit, c'est des services directs coupés.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Vous parlez de dénombrement. J'ai bien apprécié votre propos par rapport à dire : On n'a pas besoin
d'un projet de loi pour ça, parce que nous, on n'est pas contre l'idée non
plus, on trouve ça intéressant de dénombrer
le nombre de personnes qui travaillent pour l'État, et donc j'ai bien
apprécié votre proposition de dire : On n'a pas besoin d'aller aussi
loin. Et vous parliez d'une zone grise dans le projet de loi, puis il y a
ça un peu, hein, une zone grise. Au
début, vous disiez : Bien, tu sais, avec le dénombrement des effectifs puis
ensuite le contrôle des effectifs...
Puis là le ministre nous dit : Bien, avec ce contrôle des
effectifs là... Il nous le justifie en disant : Bien, on va éliminer le déficit grâce à ce contrôle d'effectif
là. Nous, on pense qu'il y a plusieurs façons d'éliminer le déficit, on n'est pas
obligé de couper de cette façon-là.
Mais moi, je
voudrais revenir sur la conception. Dites-moi ce que vous en pensez, de ce que
j'ai de cette lecture du projet de loi. Habituellement, tu as les services, hein, puis les conventions collectives, souvent c'est comme ça, il y a les
services, et on va faire en sorte que les services soient bien comblés, soient
bien donnés à la population à partir des besoins qu'on a, et c'est toujours à peu
près comme ça qu'on fonctionne. Selon
les besoins, on essaie de coller les services qui correspondent aux
besoins qu'on a. Quand les besoins augmentent, on essaie de suivre la cadence.
Des fois, c'est difficile, mais on essaie de
le suivre. Là, c'est l'inverse, là, on se dit : On va déterminer les
effectifs nonobstant ce qui se
passe au niveau des services. C'est complètement le contraire de ce qu'on a toujours
vécu. C'est vraiment innovateur, là, moi, je n'avais vu ça. C'est de dire : Peu importe ce qui se
passe, hein, au niveau de la population, au niveau des services qu'on peut donner à partir des besoins qu'on a,
nous, on va déterminer les effectifs, puis, à partir des effectifs, bien, vous
donnerez les services que vous pourrez.
Comment vous trouvez ça, cette façon de voir les
choses? C'est innovateur, hein, c'est nouveau.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : C'est
nouveau pour le secteur de la santé et de l'éducation mais pas pour la fonction publique, parce que ça existe
depuis mai 2004 et ça s'appelle la politique de non-renouvellement des
fonctionnaires un sur deux. Puis un sur
deux, là, ce n'est pas un sur deux partout. Des fois, c'est même un sur 10, ça
dépend. Et on voit ça également
avec les enveloppes fermées puis les ETC, les équivalents temps
complet. Et puis je vous dis que, quand il n'y a plus d'argent...
C'est le Conseil du trésor qui le décide, en fait, c'est l'expansion de ça,
là, O.K., sauf que nous, en plus d'un gel d'effectif, on a un gel d'embauche. Mais le Conseil du trésor dit : Tu as une enveloppe de tant, puis, quand tu n'en as plus, tu n'en as plus, ce qui fait en
sorte que, durant la période de la chasse, les agents de la faune, ils restent
au bureau.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député.
M.
Therrien : Je reviendrais avec les idées que vous avez, là,
d'économiser, en tout cas de faire en sorte que l'État soit
moins gourmand, là, en termes de dépenses financières. Puis vous en avez parlé,
des solutions que vous proposiez. Vous
dites qu'il n'y a pas juste le paramètre de dire... regarder le
paramètre des effectifs, il y a d'autre chose qu'on peut regarder. Et c'est souvent ce qu'on va remarquer
quand on écoute les gens sur le terrain. Quand on écoute les gens sur le
terrain, des fois, on a des saprées bonnes
idées, dire : Peut-être si on coupait là, là, on pourrait avoir de l'argent
de plus, puis les services ne s'en trouveraient pas trop amochés, au
contraire. Vous avez proposé des choses tantôt.
Mais ça, ce
n'est pas un peu les conséquences d'une centralisation comme propose le projet de loi, c'est de dire... de se
détacher de ce qui se passe dans la réalité puis de se priver de bonnes idées
qu'on pourrait avoir pour justement dire : Aïe! il y a peut-être d'autres
solutions, écoutez-nous, puis on va vous en proposer? Et, dans la santé, avec
le projet de loi n° 10, tu as une centralisation au carré. Moi, je
voudrais vous entendre là-dessus, sur l'idée que la centralisation peut
nuire à l'efficacité de notre gouvernement.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Chabot.
• (16 h 50) •
Mme Chabot
(Louise) : Bien, vous aurez
l'occasion de nous entendre sur le projet
de loi n° 10, où effectivement on va dénoncer cette grande demande de contrôle et de centralisation. Ça
fait qu'en arrivant ici comme SISP au niveau du projet
de loi n° 15, je me suis
dit, moi-même : Coudon, c'est une maladie! Je ne sais pas si c'est très
novateur, mais effectivement il y a quelque chose qui est pris à
l'envers.
En
santé puis en éducation, c'est parce qu'en même temps, le projet de loi n° 15, là, on est déçus mais pas surpris. Tu
sais, au dernier budget, on nous a parlé de gel d'embauche dans la fonction
publique, gel d'effectif en santé et en éducation,
qu'il y a un gel d'effectif en santé et en éducation. Puis, sur la base de la
période que vous donnez, là, ça veut dire qu'effectivement, là, on ne
calcule plus les besoins, là.
Je
vais prendre un chiffre simple, j'ai 100 personnes, puis c'est tout
confondu, là, hein, enseignantes, enseignants, professionnels ou personnel de soutien. Bien, je dois rester à 100 pour
une période, ça fait que ça, c'est indépendamment des besoins. On sait
déjà qu'en éducation, bien, on a certaines règles dans les conventions
collectives par rapport aux enseignants. Ça veut
dire que, si ça dépasse parce qu'il y
a un nouveau besoin, bien, «just too
bad», c'est 100, puis on coupe.
Bien,
c'est ça, l'objet du projet de loi. Tu sais, là, on nous questionne. L'objet du projet de loi est de dénombrer les effectifs
mais dans quel but? Un, de contrôler au Conseil du trésor puis de dire
aux administrations publiques quoi faire,
alors qu'on pense qu'il y a déjà des règles, la loi n° 100
en est une qui est assez contraignante, la Loi sur l'équilibre budgétaire, à notre avis, qui permet un contrôle.
Alors, on est capables de chiffrer une demande salariale, actuellement, dans le réseau de la santé et de l'éducation, de la fonction publique, c'est parce qu'on a une idée des effectifs. On nous plaide ce projet
de loi là parce que
les effectifs seraient hors contrôle, ce qui n'est pas le cas en éducation,
en santé, puis encore moins dans la fonction publique. Ça fait qu'il
y a une trame de fond qui suppose que
ce projet de loi est nécessaire
non pas pour seulement connaître nos
effectifs mais pour les contrôler et les geler, et les geler au nom d'une politique d'austérité
budgétaire et de déficit. C'est ça. C'est pour ça qu'on s'y
oppose. Ça fait qu'on a essayé de trouver des vertus à ça, là, mais il
n'y en a pas, de vertu. Puis c'est une vue de l'esprit, l'article 12, parce
que ce n'est plus vrai.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Je
voudrais... Dans votre longue liste que vous avez faite de services qui sont
coupés à la population avec les choix politiques du gouvernement actuel, sûrement un oubli, vous n'avez pas mentionné les carrefours jeunesse-emploi. Moi,
j'aimerais vous entendre sur l'impact pour Emploi-Québec avec la fin du
modèle des carrefours jeunesse-emploi.
Déjà
qu'on voit qu'il y a des fermetures de centres locaux d'emploi un peu partout au Québec, hein, Saint-Rémi, Contrecoeur ont fermé, on voit aussi qu'il y a une
centralisation des dossiers des citoyens dans des grands centres comme à Longueuil, par exemple, puis les autres bureaux,
donc les gens doivent se déplacer, avec la fin du modèle des carrefours jeunesse-emploi tout jeune devra passer par
Emploi-Québec et remplir un formulaire puis une bureaucratie supplémentaire.
Donc, déjà, les agents, qui sont déjà
surchargés, à Emploi-Québec, vont devoir en faire encore plus. Avec le projet
de loi actuel, comment les gens
d'Emploi-Québec vont pouvoir répondre à cette surcharge de tâches et de
citoyens à rencontrer?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Martineau, 30 secondes.
Mme Martineau (Lucie) : Oui. Alors, écoutez, actuellement on a des
rumeurs de fermeture de 66 centres locaux d'emploi, mais depuis trois, quatre ans on a déjà centralisé, en région.
On ne rencontre même plus les gens qui font une demande d'aide sociale. Moi, c'était mon travail, là, au gouvernement du
Québec, ça, alors, tu sais... On traite les besoins spéciaux, on traite les personnes incapables de
travailler dans un CLE. Écoutez, quand on s'en va sur la Côte-Nord, là, c'est
parce qu'il y a 200 kilomètres entre un
et l'autre, là, alors, le service, la proximité du service, là, elle n'est déjà
plus là. Alors, si on ferme encore
70 centres locaux d'emploi, que les gens des centres locaux d'emploi
reprennent des fonctions qu'il reste,
bien c'est comme le retour du balancier, parce qu'anciennement on avait la
politique jeunesse qui était déjà dans le réseau. Sauf que, si on
n'ajoute pas de personnel...
Le
Président (M. Bernier) : Merci, Mme Martineau. Nous allons
passer du côté du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx.
M.
Surprenant : Merci, M. le Président. Je vais d'abord mentionner une
chose. Au niveau du projet de loi, on parle
d'une loi sur la gestion et le contrôle des effectifs, mais on parle souvent de
gel des effectifs, dû à des énoncés qui ont été effectués, et en fait je pense qu'on devrait plus parler du
contrôle des effectifs et de la gestion, parce qu'à mon avis il y a peut-être de l'efficience à aller
chercher, et puis donc on peut sauver autant en gérant mieux et en contrôlant,
sans nécessairement peut-être geler, en tant que tel. Donc, le sens des mots a
son importance.
Alors,
vous faites état dans votre mémoire à la page 5, au niveau des effectifs :
Est-ce que le niveau des effectifs inclura
des postes ou des tâches qui sont actuellement accomplies par du personnel
provenant d'agences? Alors, on est conscients
qu'au niveau de la santé, au cours des dernières années, en fait même des 10,
15, 20 dernières années, il y a des agences qui se sont créées. Il y a peut-être eu de l'épuisement puis des
gens qui voulaient une qualité de vie, qui sont allés dans des agences
pour pouvoir mieux contrôler leurs horaires. Donc, ça a un impact au niveau des
soins de santé en particulier, alors... Mais ça peut être un cercle, tout ça,
un peu.
Est-ce
que, d'une part, il peut y avoir peut-être une gestion déficiente de la part
des dirigeants des milieux hospitaliers
pour offrir une qualité de vie aux gens ou est-ce qu'il y aurait... D'où
partirait, selon vous, là, la solution à ça?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Je vais
peut-être répondre pour fonction publique, mais je vais laisser ma collègue
pour la santé. Écoutez, les gestionnaires, quand ils sont soumis à dire :
Tu as une enveloppe de tant d'ETC puis tu as un budget... Puis, chez nous, dans la fonction publique,
tu ne passes pas de budget de sous-traitance à budget de fonctionnement,
là, tu n'as pas le droit de faire ça, c'est
déjà assez contrôlé. Bien, ils font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont, c'est
ça qu'ils font.
Alors, c'est déjà actif dans la fonction
publique, mais on peut présupposer que c'est ce qui va se passer dans les deux
autres réseaux aussi.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M.
Surprenant : Est-ce qu'il y aurait déjà eu des discussions qui
auraient pu être faites concernant le nombre d'heures supplémentaires qui est travaillé, et les coûts reliés à ça, et
le nombre de ressources que ça représente, et puis de s'asseoir puis de
dire : Écoutez, si on engageait tant de personnes de plus, ça
coûterait beaucoup moins cher, on
réglerait le problème et puis on aurait une qualité, puis on serait plus
attrayant? Y a-tu déjà eu, dans l'histoire récente, des discussions puis des
tentatives de rapprochement à ce niveau-là?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Chabot.
Mme Chabot
(Louise) : Bien oui, tout à
fait. Puis, avec respect, on n'a pas besoin du projet de loi pour régler
ces questions-là, hein? Ça, c'est de la
planification de la main-d'oeuvre. Justement, dans le nombre d'effectifs, tout
ce qui est agence, au niveau des soins
infirmiers, puis qui est particulièrement plus en région urbaine, mais quand
même, là, ça... est-ce qu'on les
dénombre dans les effectifs? Ils peuvent faire de l'occasionnel, ils peuvent
faire de la permanence. Les heures
supplémentaires obligatoires, si on additionne ça au terme d'une année, est-ce
que ça fait 15, 20, 25, 30 postes de
plus dans le réseau? Comment qu'on règle ça? C'est ça, c'est toute la question
de la planification de la main-d'oeuvre en lien avec l'attraction, la rétention, en lien avec la pénurie, en
lien avec les besoins. Et c'est ça qu'on dit exactement dans notre mémoire, que, ces exercices-là, on les
fait déjà, c'est un souci. Ça fait que, oui, il y a des lieux de parole, il y a
des lieux de discussion qui concernent les
acteurs au premier chef concernés, donc le personnel puis les administrations,
puis ça, le projet de loi, là, ne contrôlera pas mieux ça avec ce projet de loi
là, là, au contraire.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Groulx.
M. Surprenant :
Mais, si ces discussions-là ont déjà eu lieu, il me semble que ça fait du sens.
Alors, vous n'en êtes pas arrivés à
des consensus? Il n'y a pas pu y avoir de décision de prise disant :
Écoutez, on va sauver de l'argent, alors embauchons puis réglons le
problème? Il n'y a pas eu de...
Le Président (M. Bernier) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Moi, je
vais vous dire, on avait deux lettres d'entente, dans la dernière convention collective, concernant la
sous-traitance, une pour le ministère des Transports puis une pour l'informatique. On a fait des travaux paritaires avec trois syndicats de la
fonction publique et le Conseil du trésor. Bien, le Conseil du trésor a mis fin
aux travaux, puis la sous-ministre des Transports ne veut pas signer le
rapport. Ça fait que c'est bon.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme Chabot.
Mme Chabot (Louise) : ...à votre question
précise, oui, il y a eu des gains de ces exercices-là. Oui, il y a eu certains
contrôles. Parfois, ça a pris des batailles juridiques, mais d'autres fois
c'est par des ententes, des ententes qui voulaient aussi limiter ça. Puis ça,
aux dernières conventions...
Ça fait que,
oui, il y a certains résultats. Est-ce que
c'est la totale? Non, ce n'est pas la totale, parce qu'effectivement on
manque d'effectifs dans nos réseaux de santé et d'éducation, il y a un manque
criant. Puis tous ces moyens-là viennent le combler, puis, nous, ce
qu'on veut, c'est de le régler par de la stabilité, en répondant aux besoins.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député, il vous reste environ 1 min 30 s.
M. Surprenant : Mon collègue va...
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Oui. Bon, bien, à mon tour de vous saluer,
Mme Martineau, ainsi que votre confrère et vos consoeurs. Moi, ça m'attriste un peu, parce que
votre position est claire — et
je comprends votre position très
bien — que tout service donné à la population se
doit d'être public. Et ça, quand on part avec une prémisse de base comme ça...
Moi, je me
suis toujours dit — puis,
il me semble, c'est le gros bon sens : S'il y a du monde qui vont au
privé en santé, bien ça libère les
listes d'attente au public. S'ils veulent payer, bien qu'ils paient. Qu'est-ce
que c'est que vous voulez que je vous
dise, moi? C'est fait comme ça. Dans l'éducation,
il y en a qui veulent payer pour aller au réseau d'écoles privées ou... les Juifs ou n'importe quoi, les
écoles juives hassidiques, là, que M. Bolduc a acceptées. S'ils veulent
payer puis s'organiser avec leurs affaires, bien, qu'ils paient, en
autant, comme dans la santé, qu'ils aient des affaires.
Mais, moi, ce
que je vois à travers votre rapport, c'est : Il faut tout que ce soit
public, il faut tout que ce soit l'État, puis c'est comme ça. Mais, à un
moment donné, l'État n'aura plus les moyens.
Alors, on est rendus au mur
économique. Alors, qu'est-ce que vous proposez concrètement? Parce que moi, je
n'ai pas vu de concret, j'ai juste vu : Bien, on a été coupés, ça
20 ans qu'on est coupés, c'est fini.
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Je dois vous interrompre.
Des voix :
...
Le
Président (M. Bernier) : Je dois vous interrompre, je dois vous interrompre. Vous aurez l'occasion
d'échanger. Nous allons passer maintenant
à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je dois lui donner l'opportunité
de vous poser des questions. Allez-y, Mme la députée.
• (17 heures) •
Mme
Massé : Tellement à dire et en même temps... Services publics,
services à la population. Partir du besoin, partir du chiffre comptable. Votre position est claire, très appréciable. On sait qu'il y a
des choix politiques, des choix de société qui nous amènent à faire en sorte qu'on va encore... — vous
l'avez bien démontré, après 10 ans de coupe il y en a plein, d'impacts — qu'il va encore y avoir des impacts et, bien
sûr, des impacts particulièrement sur les femmes et les régions, vous ne
l'avez pas mentionné, mais je sais qu'on le sait. Donc, c'est très inquiétant.
On le sait — et
j'ai envie de vous entendre là-dessus — que
c'est un choix politique, dans le sens où on met le TGV du déficit zéro en avant, ce qui fait en sorte
que ça fait pression sur nos services publics. Et en plus c'est que, quand,
dans un an, on aura atteint l'équilibre, selon le plan de M. Coiteux et de son
équipe, ce qui va ressortir de là, c'est un surplus
qui, lui, va être investi au Fonds
des générations. Alors, j'ai besoin
que vous me parliez de c'est quoi, l'équité intergénérationnelle. Et est-ce
que vous, vous en aviez d'autres, solutions?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Martineau.
Mme Martineau (Lucie) : Bon, alors, oui, vous avez raison, femmes,
régions, jeunes aussi. Vraiment, là, ça... Oui. Et, d'autres solutions, oui, à toutes les fois qu'on se prépare
pour aller à la préconsultation budgétaire on amène des solutions, ça fait des années que les organisations syndicales proposent différentes solutions. Puis là je ne veux pas
entendre : Vous voulez que les impôts
augmentent. On veut que les impôts, ils soient progressistes, selon le revenu de
chaque personne et de chaque personne
morale aussi. Alors, ce n'est pas plus que ça, que chaque personne et chaque
personne morale paie sa juste part, parce que,
si je bénéficie... En tant que personne puis en tant qu'entreprise, au Québec,
je bénéficie des services publics qu'on a voulus gratuits pour tous,
dont la santé, ce qui n'est pas le cas aux États-Unis. Bon, alors, ça, tout le monde en bénéficie, qu'on soit citoyen ou qu'on
soit une personne morale, une entreprise. Tu n'as pas à donner un programme
d'assurance à tes employés, il y en a, au Québec, un programme d'assurance, tandis que, si tu négocies aux
États-Unis, tu dois commencer par demander une police d'assurance pour tes
employés, en organisation syndicale, c'est ça que tu fais, parce
qu'il n'y en a pas.
Le Président (M.
Bernier) : Vous avez environ 15 secondes, madame...
Mme
Massé : Bien, j'ai été très
préoccupée... Vous avez soulevé un enjeu qu'on appelle l'autonomie des institutions, qui est déjà assez cadré, hein, avec
des lois, bon, tout ça. Vous avez envoyé des pistes très intéressantes sur...
peut-être pas besoin d'un projet de loi si on veut dénombrer. Et je vous
remercie beaucoup de votre participation.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, Mme la députée. Donc, Mme Martineau,
Mme Chabot, Mme Léger, Mme Lévesque,
M. Lamarre, merci de votre participation à la Commission des finances publiques sur le projet de
loi n° 15.
Nous
allons maintenant suspendre quelques instants afin de permettre au Syndicat des
professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec de prendre
place.
(Suspension de la séance à
17 h 3)
(Reprise à 17
h 5)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous
souhaitons la bienvenue aux représentants du Syndicat des
professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, en l'occurrence
M. Richard Perron et M. Pierre Riopel. Bienvenue à la Commission des
finances publiques. Nous allons procéder
dans un premier temps à une présentation, vous avez une période de
10 minutes. Donc, la parole est à M. Riopel, M. Perron?
Bon, alors, M. Perron, allez-y. Vous avez 10 minutes.
Syndicat de professionnelles et professionnels
du gouvernement du Québec (SPGQ)
M. Perron
(Richard) : Oui, bonjour.
Bien, merci pour cette invitation à venir présenter notre mémoire au nom
des 25 000 professionnels du gouvernement du Québec que nous
représentons.
Le
Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
s'oppose au projet de loi n° 15 parce qu'il exacerbera le contrôle du Conseil du trésor sur les
ministères et organismes, alors que le gouvernement devrait d'abord s'attaquer au trou noir de la
sous-traitance abusive. Les ministères et organismes devront rendre davantage
compte de tout ce qu'ils font pour
les effectifs. Jamais le Conseil du trésor n'était allé aussi loin en
s'octroyant de tels pouvoirs de
surveillance et de vérification pour s'assurer du respect du gel des effectifs,
allant même jusqu'à une mise sous tutelle. En centralisant tout et en demandant plus de surveillance et de contrôle,
le Conseil du trésor tend vers une hyperbureaucratisation qui induira moins de marge de manoeuvre pour les
ministères et organismes. Ces derniers sont pourtant les mieux placés pour
connaître les besoins de leurs clientèles, tant en région qu'en zone urbaine.
Cette
limitation vient d'ailleurs en contradiction avec l'article 12 du projet
de loi n° 15, qui spécifie que «la gestion de l'effectif par un organisme public doit s'effectuer
de façon à maintenir les services offerts à la population». De plus, mentionnons que certains de ces organismes
s'autofinancent, raison pour laquelle la Commission de la construction du
Québec veut se soustraire à l'application du
projet de loi. Le financement nécessaire pour réaliser son mandat provient
à 96 % de l'industrie, et c'est la même
chose à peu près dans le cas de la CSST et de la Société d'assurance automobile
du Québec.
Ce projet de
loi contribue directement à accroître la perte d'expertise des ministères et
organismes, comme il a été mentionné
au cours des audiences de la commission Charbonneau en ce qui concerne plus
particulièrement le ministère des Transports du Québec. D'importants
investissements pour l'embauche de ressources supplémentaires et pour la formation sont pourtant primordiaux pour la
reconstruction de l'expertise interne. En tant qu'employeur, le gouvernement du Québec ne prend pas les moyens adéquats pour
rendre sa fonction publique attractive. Il doit cesser de projeter une image négative d'employeur sans le sou. Pour le
SPGQ, l'embauche de ressources supplémentaires pour la reconstruction de son expertise est fondamentale, car le coût de
ces ressources est nettement moindre que celles du privé, comme on l'a
démontré.
Bon, d'abord,
le premier volet, celui du recensement des effectifs. Il est d'abord légitime
de se demander si le gouvernement
avait vraiment besoin d'une loi pour réclamer et pour vérifier l'état des
effectifs. Un mandat accordé au Vérificateur général aurait probablement
été suffisant... ou même à l'interne.
Nous avons
ensuite de sérieux doutes sur l'obtention des résultats à court terme et même
en ce qui concerne le plan triennal.
Quel en sera le coût? Va-t-on allouer de nouveaux effectifs aux ministères et
organismes et au Conseil du trésor pour réaliser ces mandats?
Un peu plus
tard, vous aurez le directeur de l'ENAP qui viendra vous dire, ce soir, qu'il
va devoir, lui, gérer toute dépense
de plus de 25 000 $. Embauche de réceptionniste, toute dépense, dans
son école, va devoir passer par son bureau. J'ai demandé : Mais est-ce qu'on va te permettre d'embaucher une
ressource, au moins, pour gérer tout ça? Il dit : Non, même pas.
• (17 h 10) •
Par ailleurs, le SPGQ estime que le Conseil du
trésor devrait utiliser ces mécanismes de dénombrement et de planification afin de recenser les nombreux
consultants, sous-traitants et l'ensemble de la main-d'oeuvre indépendante
travaillant quotidiennement dans les
secteurs public et parapublic. Nous ne connaissons pas le nombre de
sous-traitants, mais nous connaissons en partie la valeur totale de ces
contrats de services. En 2010, nous avons consulté nos délégués présents sur le terrain et constaté que près de
2 562 sous-traitants côtoyaient les 9 863 membres du
personnel interne des ministères et organismes. C'est beaucoup trop.
Le projet de
loi n° 15 stipule, dans un deuxième volet, que le gouvernement du
Québec doit se doter d'un outil de
gestion, de contrôle et d'encadrement de ses effectifs. La dérive
centralisatrice qu'engendrera la mise en oeuvre du projet de loi n° 15 implique que les dirigeants de chaque organisme public visé auront «la responsabilité de recueillir divers renseignements et de
répartir les effectifs attribués par le Conseil du trésor ainsi qu'en lui
conférant des pouvoirs de vérification et de sanction». Ils devront ensuite rendre des
comptes au président du Conseil du
trésor, c'est-à-dire qu'ils seront imputables de la gestion de leurs
effectifs.
L'objectif du
projet de loi n° 15 n'est pas clairement indiqué, bien qu'on puisse
deviner qu'il consiste dans une forme
de gel des effectifs. Puis, le traitement réservé aux renseignements obtenus de
la part des ministères et organismes n'est pas non plus expliqué de
manière limpide. De quelle façon va-t-on procéder à une forme de gel des
effectifs?
De plus, le
projet de loi comprend des exceptions et des dérogations dont la portée peut
être particulièrement large. Pourquoi alors autant de dérogations, si
l'objectif consiste à contrôler?
Le Conseil du
trésor se donne des pouvoirs importants qui auront des répercussions majeures
dans l'ensemble du gouvernement du
Québec et de sa fonction publique. Il se donne le beau rôle en décrétant le
seuil nécessaire des effectifs. Par
ailleurs — et ça,
c'est important — il
décline toute responsabilité en laissant aux ministères et organismes l'odieux
d'en gérer les conséquences et la violation de l'article 12, services non
rendus à la population.
Le Conseil du trésor va exiger une planification
triennale de la main-d'oeuvre aux ministères et organismes. Lorsqu'il aura en
main l'ensemble des nombreux renseignements fournis par les ministères et
organismes, qui ne suggéreront sûrement pas
d'emblée eux-mêmes de réduire leurs propres effectifs, dans un contexte actuel
et prévisible, comment va-t-il procéder pour la rationalisation des
effectifs? Le projet de loi ne répond pas à ces questions.
Dans son troisième volet, le projet de loi instaure des mesures particulières applicables aux contrats de services
qu'un organisme public entend
conclure pendant les périodes soumises à des mesures de contrôle de l'effectif.
Bon, nous venons de suggérer au Conseil du trésor de dénombrer les consultants et sous-traitants oeuvrant quotidiennement
dans les secteurs public et
parapublic. La mise en perspective de ces données constitue un enjeu
prédominant dans la mise en oeuvre du troisième volet du projet de loi.
Bien que la mise en oeuvre de ce troisième volet
représente un des rares points positifs de ce projet de loi, les dérogations seront sûrement nombreuses, surtout
dans le domaine des ressources informationnelles. Comment estimer le sérieux de ce projet
de loi qui défend de contourner les règles du gel d'embauche en recrutant par
contrat des employés de l'État, des professionnels et surtout des
gestionnaires retraités parfois après seulement quelques jours de retraite?
Le
gouvernement du Québec veut limiter la sous-traitance, ce qui est fort bien, et
on vous le dit, c'est bien, mais le
personnel va manquer en raison du gel des effectifs. Ce gel créera forcément un
manque réel de personnel. Contrairement au discours alarmiste du gouvernement, il n'y a pas trop de personnel,
il en manque. C'est ce que l'on constate, nous, sur le terrain. Si le gouvernement enregistre une
croissance d'environ 6 000 employés à temps complet par année, c'est parce
qu'il y a une véritable demande. Les besoins
de services à la population ne cessent de croître, surtout dans les réseaux
de la santé et de l'éducation, on en convient.
Par
la mise en oeuvre du projet de loi n° 15, on se dirige sûrement vers
une vague de coupes dans le personnel d'environ
6 000 postes, ce qui ne manquera pas d'ouvrir la porte à la privatisation.
L'instauration de nouveaux PPP — les partenariats public-privé — dans le réseau de la santé et ailleurs
pourrait alors constituer une avenue que retiendra probablement le
gouvernement pour répondre à la demande.
Éliminer
une partie de la sous-traitance abusive est très bien, mais rien ne dit que le
gouvernement n'ira pas vers une
privatisation de la livraison des services, tel que l'a récemment mentionné le
ministre des Finances, Carlos Leitão, lors
d'une allocution devant l'Association des économistes québécois. Heureusement,
le premier ministre a rapidement contredit
son ministre des Finances sur cette question. On peut quand même se poser la
question suivante : Assiste-t-on à un retour de la vieille nouvelle gestion publique, «new public
management», qui a sévi dans plusieurs administrations publiques au cours des dernières décennies,
provoquant d'importantes pertes de contrôle et d'expertise de l'État? C'est
en effet la réingénierie inspirée de cette
nouvelle gestion publique qui a engendré et qui semble vouloir continuer à
accentuer l'atrophie des effectifs, des salaires et des savoir-faire de
la fonction publique québécoise, provoquant ainsi de graves problèmes d'attraction et de rétention de talents,
qui ont d'ailleurs été mis en lumière par la commission Charbonneau.
Par
son projet de loi n° 15, le gouvernement du Québec prend les moyens
pour contrôler la taille du secteur public. Ce projet de loi est donc en phase avec son idéologie d'austérité, qui
se traduit concrètement par son objectif de comprimer 3,2 milliards de dollars afin de parvenir à
l'équilibre budgétaire dès 2015. Ce retour à l'équilibre budgétaire en 2015,
nous l'estimons beaucoup trop rapide. Et nous ne sommes pas les seuls à
le dire. À l'instar de l'économiste Pierre Fortin, nommé meilleur économiste de la décennie par l'Association des
économistes québécois, signataire du manifeste des lucides avec Lucien Bouchard, qu'on ne peut donc pas
accuser d'économiste de gauche, le SPGQ ne partage pas les mêmes constats
économiques que le gouvernement, qui prêche
par une austérité excessive et qui sème l'alarmisme sur son passage. Certes, comme
l'indique Pierre Fortin, il convient de rééquilibrer les finances publiques du Québec, mais encore plus d'examiner les façons de
gérer l'État avec intelligence et sans fracas inutile.
Le
SPGQ considère que le recours à des coupes abusives des effectifs du gouvernement, c'est-à-dire dans son expertise — du
moins dans ce qu'il lui reste — ainsi
que les services publics, comme l'éducation, la culture, la réinsertion sociale ou l'aide à la famille, éloigne le Québec
de l'idéal de croissance inclusive prêché par l'OCDE elle-même. Nous sommes pleinement en faveur de la lutte au
gaspillage et à la malversation, tout en encourageant un émondage ciblé des
programmes, on vous l'a déjà dit. En conclusion, cependant,
nous pourfendons les coupes exagérées et improvisées dans les effectifs
et dans les programmes qui contribuent à humaniser notre société et à la rendre
plus juste.
Finalement,
ce qui caractérise le plus les interventions du gouvernement du Québec qu'il
compte mettre de l'avant pour réduire
sa dette consiste dans le fait qu'il désire agir rapidement. En réalité, le gouvernement dispose de 11 ans pour parvenir
à son objectif de 45 %
du ratio dette-PIB. Nous croyons qu'en visant une hypercentralisation
bureaucratique — et
ce seront mes derniers mots pour la
présentation — le
gouvernement établit mal la priorité de ses cibles. C'est au gaspillage de fonds publics lié au trou noir de la
sous-traitance, provoqué par le manque d'expertise interne, qu'il devrait
d'abord s'attaquer. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Vous m'avez fait peur en me
disant que c'étaient vos derniers mots. M. le ministre, ce sont vos
premiers mots, allez-y.
M.
Coiteux : Ce sont mes premiers mots. Alors, d'abord et avant tout,
merci beaucoup, M. Perron. Puis merci également, M. Riopel,
d'être là ce soir.
Je
vais commencer par le principe du dénombrement, si on est d'accord, parce que,
dans le mémoire puis dans les propos
que vous avez tenus, vous avez dit : Écoutez, ça, c'est des informations
qu'on a déjà. Le problème, c'est que, ces
informations-là, on les a avec un décalage important dans certains cas. Dans
les réseaux, ça peut être un décalage qui peut aller aussi loin que deux ans. Et il peut se passer beaucoup de
choses, là, pendant deux années, et en particulier la croissance des
effectifs, elle peut aller au mauvais endroit aussi.
Est-ce
que vous êtes d'accord avec le principe d'un dénombrement plus fréquent, plus
ciblé, sur le nombre de chèques de
paie, ultimement, qui va être émis puis en fonction des catégories d'emploi?
Est-ce que vous avez un problème philosophique avec au moins cette
partie-là du projet de loi?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Mais non, évidemment pas. Écoutez, moi-même, comme président de
syndicat, je suis un gestionnaire. On
a 47 employés, je connais nos effectifs. D'ailleurs, on est contraints aux
quotas imposés par le Conseil du
trésor pour servir nos membres et dégager nos effectifs, libérer nos effectifs.
Tout gestionnaire responsable devrait effectivement être conscient des
effectifs qu'il a.
Maintenant, le gouvernement du Québec a fait le
choix d'une gestion déléguée, d'une responsabilisation puis d'une
autonomisation des différentes institutions qui ont été mises en place pour
gérer et pour contrôler les effectifs. Maintenant, de savoir, pour le gouvernement,
l'ensemble des employés qui reçoivent un chèque de paie, qui vient de la
poche des contribuables, c'est tout à fait
légitime. Tout ce qu'on dit, c'est qu'on n'avait quand même pas besoin de créer
un projet de loi à incidence aussi centralisatrice et qui multiplie les
redditions de compte.
Quand
je vous ai vu, là, sur la commission avec Mme Robillard, la commission de
révision des programmes, je vous ai
dit qu'il y avait des économies à faire dans les processus bureaucratiques,
dans l'hyperbureaucratisation, dans la multiplication
de la reddition de comptes inutile. Bien là, ce qu'on fait, avec le projet de
loi, c'est qu'on en crée, justement.
Puis
on n'avait pas besoin de ce projet de loi là pour aller dénombrer les
effectifs. Un simple mandat... Le monde dit «au Vérificateur général»,
mais un simple mandat donné à vos fonctionnaires, à nos professionnels aurait
pu très facilement aller dénombrer... Chaque
personne qui va passer ici devant vous ou représentant est capable de dire dans
quelle direction... Chaque dirigeant
d'organisme est capable de vous dire combien il y a de monde sur son chèque de
paie, chaque responsable de
ministère, secrétaire de ministère ou d'organisme est capable de vous le dire
également. Donc, on n'avait pas besoin du projet de loi, même si c'est
tout à fait louable de vouloir connaître l'étendue des effectifs.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
• (17 h 20) •
M.
Coiteux : L'un des problèmes que j'aimerais souligner, c'est qu'il y a
quand même une différence entre ce qu'on
est capable d'accomplir au sein des ministères et des organismes, là, où on a
un contrôle direct, par rapport aux réseaux,
où c'est extrêmement décentralisé, où la fluidité de cette information-là sur
les effectifs, elle n'existe pas à l'heure actuelle. Donc, il y a derrière le projet de loi ce but-là aussi de
permettre cette fluidité-là, parce qu'ultimement c'est l'État québécois,
c'est le gouvernement qui assume la facture. Donc, c'est un peu normal, comme
gestionnaires ultimes de l'ensemble de l'appareil, qu'on connaisse cette
situation-là.
Maintenant,
ceci étant dit, là, je sais qu'il y a un aspect de votre présentation puis
votre mémoire qui conteste la vitesse avec laquelle on retourne à
l'équilibre budgétaire. Ça, j'ai noté ça.
Bon, mettons que je fais fi de ça pour l'instant,
là, cette question de la vitesse, est-ce que vous êtes quand même
d'accord avec le fait, peu importe à quelle date on veut mettre le retour à
l'équilibre budgétaire, qu'une gestion des effectifs
de l'ensemble du secteur public, ça doit forcément faire partie de la stratégie
de retour à l'équilibre budgétaire, puisque
c'est déjà 60 % des dépenses de programmes, la rémunération? Est-ce que
vous êtes d'accord... Peu importe la date, là. Vous dites : Peut-être que la date pourrait être un peu plus tard. On
pourra discuter ensuite combien plus tard dans votre esprit. Mais, une fois qu'on a dit ça, que ce soit
un an, que ce soit deux ans ou cinq ans, est-ce que vous n'êtes pas d'accord
avec le fait que la gestion des effectifs fait partie de la stratégie?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Évidemment, la gestion des effectifs doit être au coeur de
toute stratégie de bonne gestion, des
finances publiques notamment. Puis,
nous, ce qu'on dit... Et ma prédécesseure, Mme Martineau, vous a parlé,
là, d'une lettre d'entente qu'on
avait pour créer des hauts comités sur la sous-traitance, dont un sur
l'informatique. Vous vous êtes scandalisé
de ne même pas savoir quelles dépenses on faisait annuellement en informatique,
je partageais votre sentiment. Mais
on avait pu identifier... Et donc on a tiré sur la plug, pour parler en
québécois, là, de ces comités-là, et il n'y a rien qui a été rendu public, fait normalement, mais on
avait quand même évalué à plus de 1 200 l'embauche d'effectif nécessaire pour renverser la vapeur et se remettre à
contrôler un tant soit peu la gestion de nos dépenses en ressources
informatiques.
Donc,
oui, la gestion des effectifs est au coeur de la stratégie, mais, quand François
Legault — on a des
membres de la CAQ ici, là — disait en pleine campagne électorale :
Il faut investir des millions de dollars au ministère des Transports pour lui redonner son expertise, de cette façon-là
elle va sauver des milliards aux contribuables québécois, bien on parle de
gestion des effectifs mais pas dans le même
sens que des coupures et d'un calcul arithmétique et simple. On ne se demande
même pas si ces effectifs-là sont des
investissements qui rapportent à l'économie québécoise. On les considère
simplement comme des dépenses qu'on peut tout simplement évacuer, peu
importent les conséquences qu'on aura.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Bon, je vais quand même revenir, parce que je pense que
c'est un point qui est important. Actuellement, on n'est pas en équilibre budgétaire, on ne l'est pas. Les dépenses de
rémunération, c'est une partie importante de l'équation, ça représente 60 % des dépenses de
programmes, et les effectifs augmentent bon an, mal an, globalement, là — c'est un estimé, hein, on va avoir un estimé plus précis une fois qu'on aura mis
en place le dénombrement, qui est un aspect du projet de loi — bon an, mal an de 6 250 personnes... ETC par année, ETC,
bon. Alors, c'est clair que cette croissance-là, en soi, elle nous
éloigne de l'équilibre budgétaire. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Non, je ne partage pas, parce que je sais qu'embaucher des ressources à
l'interne... Et je vous donne
l'exemple des ressources informatiques. Embaucher quelqu'un qui coûte deux fois
moins cher que la même ressource qui
travaille pour une firme externe pour faire le même travail... Et la présidente
de la Commission de la fonction publique l'a révélé : dans
41 % des cas, ce sont des travaux qui devraient être faits à l'interne qui
sont des contrats de services. Donc, il faut embaucher des gens mais au bon
endroit.
Quand
le premier ministre vous a nommé président du Conseil du trésor, M. Coiteux,
j'étais là, ici, à l'Assemblée nationale, et je l'ai bien entendu
dire : Vous serez chargé de préserver l'expertise du gouvernement du
Québec dans les
secteurs stratégiques. Bien, l'expertise du gouvernement du Québec dans les
secteurs stratégiques, elle a été mise à mal par des politiques de rémunération inadéquates, par des politiques de
non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite qui ont perduré de
gouvernement en gouvernement, peu importe le parti au pouvoir. L'expertise du
gouvernement du Québec, elle a été mise à
mal au point où on a eu besoin d'une commission Charbonneau, où il y a des
anciens ministres, des anciens ministres de tous les partis confondus qui sont
venus dire : On a complètement déshabillé le ministère des Transports de son expertise, on s'est livré pieds
et poings liés au secteur privé, qui a pris le contrôle et qui s'est servi dans
le plat de bonbons.
Donc,
oui, le contrôle des effectifs peut servir à économiser des sommes importantes
à l'État si on gère intelligemment, et
qu'on va embaucher l'expertise dont on a besoin, et qu'on se donne les
conditions pour embaucher l'expertise
dont on a besoin, comme M. Caillé l'a fait valoir quand il a témoigné à la
commission Charbonneau à titre de
dernier témoin, et on lui a demandé : Comment ça se fait que ça va bien,
que vous n'avez pas de gaspillage, de collusion et de corruption? Il a
dit : Nous, nos experts, on les paie, et l'expertise, c'est ça qui vaut de
l'argent.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Par contre, le gouvernement n'embauche pas que des informaticiens, là, si
c'étaient strictement les contrats de
services en informatique, employés à l'interne en informatique. Le secteur
public est beaucoup plus vaste que
ça. Puis il y a certains groupes qui ont présenté un mémoire aujourd'hui qui
nous ont dit qu'il y a eu une explosion de la masse salariale du côté de l'administration dans les réseaux au cours
des dernières années. On a notamment parlé de l'enseignement
universitaire.
Est-ce
que vous ne pensez pas que ça aussi, ça devrait être quelque chose qui devrait
attirer notre attention puis sur
lequel on devrait se pencher si on veut à la fois faire deux choses :
retourner à l'équilibre budgétaire puis s'assurer que les ressources
soient mises au bon endroit puis que les services publics soient maintenus?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : À la commission Charbonneau, quand le commissaire Lachance nous a
demandé si on avait d'autres exemples
que l'informatique, au ministère des Transports, de recours abusif à la
sous-traitance, on lui a justement
donné l'exemple de la ressource... c'est-à-dire de la sous-traitance en
gestion, en matière de gestion et d'administration.
Le gouvernement, maintenant, est en position où il sous-traite la gestion de
ses effectifs. Et c'est inscrit dans
notre mémoire, je vais demander à notre conseiller de retrouver les chiffres
exacts. Mais, là aussi, si on embauchait et qu'on formait des bons gestionnaires à l'interne, on s'exposerait
moins à du gaspillage de fonds publics lié à la sous-traitance en
matière de gestion.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Perron
(Richard) : Si c'est ce que vous vouliez dire, je suis d'accord avec
vous.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Comme le coeur de votre argumentation semble tourner autour
des contrats de services, et du coût des
contrats de services, puis le fait que les contrats de services parfois se
substituent à des contrats de travail en bonne et due forme, donc
l'emploi d'un... l'embauche d'un employé de l'État ou d'un fonctionnaire, dans
le cas de la fonction publique, vous devez
accueillir quand même favorablement au moins l'aspect du projet de loi qui vise
à éviter qu'en période de contrôle
des effectifs on contourne les choses en recourant à des contrats de services.
Est-ce que vous ne voyez pas là justement une avancée importante par
rapport aux préoccupations que vous avez?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Oui, bien je l'ai dit tout à l'heure, hein, c'est, pour nous, un point
positif du projet de loi. On ne peut pas demander le contrôle, de fermer
le robinet de la sous-traitance 364 jours par année puis venir ici aujourd'hui puis vous dire le contraire, hein?
C'est évident que, pour nous, un meilleur contrôle de la sous-traitance, de
fermer le robinet de la sous-traitance, de
se réapproprier les ressources, l'expertise qui va être rendue disponible par
la fermeture de ce robinet-là à l'externe
et de se le réapproprier à l'interne pour se redonner l'expertise, c'est ce que
l'on doit faire.
Maintenant,
le projet de loi évoque plusieurs possibilités de dérogation, et ça, ça nous
inquiète. Ça nous inquiète parce que
le gestionnaire qui va être en position... Vous savez, là, tous les contrats de
sous-traitance qui passent dans les mains de nos délégués professionnels
qui sont dans les comités ministériels et qui ont le droit de voir les contrats
de sous-traitance, à 95 % des cas, la raison pour aller en sous-traitance,
c'est manque d'effectif, manque d'expertise à l'interne.
Et donc ces raisons-là vont subsister, parce qu'ils auront, en vertu de
l'article 12, encore la responsabilité de donner des services à la population. Donc, au besoin, bien, les
gestionnaires iront recourir... Et donc on pense qu'il y a trop de
trous, si on veut, dans cet aspect-là de la loi.
Et nous, on ne veut pas nécessairement couper la
sous-traitance et que ça finit là. On veut la couper pour se réapproprier l'expertise à l'interne, pour pouvoir
donner les mêmes services ou même de meilleurs services à moindre coût,
pour que tout le monde y gagne.
Donc,
c'est deux bras du même corps, là. Oui, c'est bien, de vouloir contrer et
contrôler la sous-traitance abusive pour
dégager des ressources qui vont nous permettre de bonifier les conditions, qui
vont nous permettre aussi d'engager des ressources à l'interne, mais
l'un ne va pas sans l'autre.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
• (17 h 30) •
M. Coiteux : Je vais juste changer
un petit peu l'angle, là, maintenant, de nos échanges ou de mes questions.
C'est une
grande organisation, l'État, c'est une très, très grande organisation, puis on
a comme particularité d'être actifs dans différentes sphères. On fait de
l'éducation, on fait de la santé, on administre la chose publique à travers la fonction publique. On intervient dans plusieurs
domaines. On a des sociétés d'État, on est dans le commerce de détail.
On est dans tout, on est dans plusieurs choses.
C'est sûr que
c'est un petit peu plus simple pour une entreprise qui a juste une fonction,
mais néanmoins, néanmoins on a des
difficultés financières, je pense que tout le monde en convient. Je pense que
tout le monde doit convenir du fait que l'État québécois a des graves
difficultés financières.
Il y a des
divergences d'opinions quant à la vitesse avec laquelle on doit résoudre, là,
les termes de l'équation. Nous, on
est absolument convaincus que le déficit doit être éliminé. On a déjà reporté la
date à partir de laquelle on doit atteindre
l'équilibre budgétaire, ça a déjà été fait, reporter, donc on pense que ça
serait une grave erreur que de la reporter à nouveau, donc on ne le fera pas. Mais je pense qu'on va être d'accord
sur le fait qu'on a des graves difficultés financières puis qu'on doit
les résoudre.
Une
organisation qui a des difficultés financières, elle va toujours chercher à
voir comment est-ce qu'elle peut, à
travers la réaffectation de ses effectifs, le contrôle de ses effectifs, livrer
la marchandise à l'intérieur de ses paramètres financiers. Autrement dit, elle va chercher à s'organiser pour faire
mieux avec les ressources qu'elle a plutôt que demander davantage de ressources, elle va faire des efforts
de productivité. Est-ce que c'est trop demander, dans le contexte des difficultés budgétaires qu'on a actuellement, que
de demander à nos réseaux de faire un effort particulier, d'améliorer davantage leur productivité au cours de la
prochaine année et demie pour contribuer au retour à l'équilibre budgétaire
en réaffectant les ressources de manière
correcte, sans qu'on puisse leur accorder une expansion des effectifs comme on
a eu au cours des dernières années? Est-ce que c'est trop demander?
Le Président (M. Bernier) :
Il vous reste 30 secondes pour répondre, M. Perron.
M. Perron
(Richard) : Écoutez, nous,
on est plutôt d'accord avec l'économiste Pierre Fortin quand il dit qu'à
trop se presser pour faire des coupures
rapidement et dégager la marge de manoeuvre pour se préparer pour la prochaine
élection on risque de mettre à mal, par ces
gestes d'austérité, la capacité du Québec de développer sa création d'emplois,
dont il a cruellement besoin.
Le
gouvernement fédéral a reporté deux fois son équilibre budgétaire, il va nager
dans les surplus prochainement. Est-ce
qu'il y a eu des menaces de décote là-dessus? Non, il n'y a pas de menace de
décote. On n'est pas dans la même situation que les années 90 ou
les années 80.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. On va passer du côté de
l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet, la parole est à
vous.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Alors, je souhaite la bienvenue à M. Perron et à
M. Riopel. Écoutez, très intéressant.
On dirait que je dis toujours ça, mais c'est toujours le cas, c'est toujours
intéressant. Donc, vous poursuivez dans
la lignée des gens qui vous ont précédés, on apprend beaucoup. Il y a des
choses... Bon, quand vous avez dit : On n'a peut-être pas besoin
d'un projet de loi pour dénombrer, vous êtes pour le dénombrement, je trouve ça
intéressant.
J'aurais peut-être des petites questions de
précision, parce que vous êtes très clairs, hein? Moi, en tout cas... Quand on vous écoute, on voit où est-ce que vous
voulez aller, c'est très clair. Mais je vais quand même vous poser des
questions pour vous permettre d'élaborer sur certains points où est-ce que je
voudrais avoir plus d'information.
Par rapport à
la centralisation, dans la situation de la loi n° 15 et la
loi n° 10 où est-ce qu'on a un accroissement de la centralisation, vous dites que ça pose des
problèmes. Je voudrais vous entendre un peu, très rapidement là-dessus, là.
C'est quoi, les conséquences, selon vous, d'une centralisation comme le propose
le projet de loi n° 15 sur l'efficacité gouvernementale que l'on a
actuellement?
Le Président (M. Bernier) :
M. Perron.
M. Perron
(Richard) : C'est une
lourdeur administrative, une multiplication de redditions de comptes inutile,
une hyperbureaucratisation qui aura des coûts, qui aura des coûts, évidemment,
et ça, le projet de loi n'en parle pas.
Mais je vais
vous donner un exemple concret, là, qu'on a vu, là, concrètement, dont j'ai
entendu parler. Ce même phénomène de
centralisation s'est fait à travers le projet de loi n° 10, hein, mes
prédécesseurs l'ont mentionné. Bon. Donc, on dit : Nous, on va décréter tes budgets, tes effectifs, ce que tu
dois avoir, et tu t'arranges avec ça, et les CSSS, dans le cas de Laval, par exemple, bien ils ont coupé des
effectifs à un niveau tel que c'était en deçà des services essentiels, de ce
qui est convenu aux services essentiels pour
l'urgence de l'hôpital à Laval. Donc, on a pu contester ça devant le Conseil
des services essentiels, qui ont donné
raison aux syndicats et qui se sont dit : Bien, la coupure d'effectif,
elle va en deçà de ce qui est exigé par le Conseil des services
essentiels quand ils font la grève.
Sur la Rive-Sud de Montréal, ils ont
coupé des postes de pédopsychiatre, des postes de pédopsychologue. Ce sont
les services directement, en matière de
santé mentale, de nos jeunes, et Dieu sait que les besoins sont criants et se
développent à ce niveau-là. J'ai des
amis, des gens que je connais très bien qui se sont fait dire, alors qu'ils
avaient finalement, après trois ans
de lutte, trouvé des services pour une thérapie urgente, besoin pour leur
enfant de neuf ans, qui se sont fait dire, le jour où ils allaient pour
leur premier rendez-vous : Désolé, le poste a été coupé hier.
Et
c'est ça que ça fait, de l'hypercentralisation. C'est qu'on décrète comme
ça : Vous devez rendre des services, vous aurez tel carré de sable, droit à tant d'effectifs ou à tant de
budget, puis arrangez-vous pour que ça rentre dans le cadre, et ce qui arrive, c'est une coupure de
services directement. Même si on a dit : Il n'y aura pas de coupure de
services à la population, concrètement on voit qu'il y a des coupures de
services à la population.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Therrien : Oui. Ça
concorde avec ce que vous aviez dit à la page 13, là, quand vous parliez
de l'article 12. Vous
dites que ça ne permet plus de rendre les services essentiels à la population,
là, ce qu'on propose dans le projet
de loi.
Moi,
écoutez, je vous mets dans la peau du président du Conseil du trésor quelques minutes. Et vous m'avez allumé sur un questionnement, là, quand vous avez dit : Comment va-t-il
rationaliser les effectifs? Là, vous êtes dans la peau du président du Conseil
du trésor.
Comment
on peut évaluer les effectifs qui vont être attribués à chaque ministère... ou en tout cas qui va faire en sorte, là, d'en mettre un
peu plus ici ou un peu moins là? Comment vous pensez qu'il peut arriver à ça?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Bien, en engageant une armée de personnel et d'experts qui vont aller
s'enquérir de la situation réelle par rapport à la livraison de services
et l'équation avec les effectifs dans chacun des ministères et organismes puis dans chacune des organisations du réseau de la santé et de l'éducation. Il y a même
un haut fonctionnaire hier qui m'a
dit : Mais c'est impossible, ça ne peut pas se faire, et surtout si on
n'embauche pas du personnel supplémentaire.
Donc, vous me mettez
dans la peau du président du Conseil du trésor. Mon premier geste, ce ne serait
pas de réfléchir à ça. Ce serait d'abord de
faire adopter une loi pour protéger les divulgateurs d'actes répréhensibles,
pour que ceux, dans nos
professionnels, qui voient vraiment où il y
a du gaspillage éhonté de fonds
publics puissent le dire, et qu'on puisse
corriger le tir. Et, deuxièmement, ce serait de mettre en place un plan d'action
pour redonner l'expertise dont le gouvernement du Québec a besoin pour
reprendre le contrôle de ses dépenses publiques.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Therrien :
Donc, vous dites que le président du Conseil du trésor, s'il veut réaliser cet objectif-là,
devra augmenter ses effectifs pour contrôler
les autres effectifs. Étant donné qu'on est dans un gel d'effectif, ça veut dire
que les effectifs qu'il va engager devraient être coupés ailleurs dans
la distribution de services, c'est ce que je comprends, là.
M. Perron (Richard) : Bien, il y a des dérogations. Je ne sais pas si, par exemple, le cas de M. Dicaire, là, qui a été engagé à un contrat d'abord de gré à gré de 52 000 $ — c'est un contrat de services, ça, là — 52 000 $, après l'élection,
puis un autre contrat en septembre de
72 500 $... Donc, ça fait 124 500 $ de contrats de services
à un ancien secrétaire général du
gouvernement pour qu'il coache le nouveau secrétaire général du gouvernement,
qui, lui, est payé 310 000 $ par année. Est-ce que ça fait partie des exceptions et des dérogations
multiples qui vont aller de soi? Je ne sais pas, mais en tout cas c'est
une pratique concrète qu'on vient de constater.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Therrien : Bien, j'avais posé, d'ailleurs, la question en
Chambre au président du Conseil du trésor. Je trouvais que c'était
pertinent de le soulever, en effet
Écoutez,
sous-traitance, vous dites qu'il y a une augmentation de la sous-traitance,
vous le mentionnez dans votre document.
Moi, je vous dirais, il n'y a pas des gains à faire de la sous-traitance? Il
doit y a voir une raison pourquoi on a sous-traité
nos... ou que le gouvernement augmente sa sous-traitance. Il doit y avoir des
gains, des gains en argent. J'imagine que ça coûte moins cher,
sous-traiter, que d'engager des effectifs au sein des...
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M.
Therrien : Je vous pose la question. Je ne vous dis pas que
c'est ça, la réponse, je vous pose la question. J'ai l'air de dire une affirmation, mais je vous pose
la question, là : Est-ce que c'est avantageux de sous-traiter? Je devrais
dire ça, parce que, là, je vous ai vu
le visage, là, je ne suis pas sûr que j'ai bien posé la question. Là, je vous
pose la question : Est-ce que
c'est avantageux de sous-traiter? Ça doit, parce qu'il y a eu une augmentation
de la sous-traitance. Est-ce qu'il y a un gain à avoir à sous-traiter?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M.
Perron (Richard) : Bien, je
ne suis pas d'accord avec votre conclusion, mais je vous dirais que, oui, dans
certains cas il faut utiliser la sous-traitance, de façon intelligente,
lorsqu'une intervention particulière et pointue est nécessaire. Par exemple, les entreprises à Lac-Mégantic qui ont été
embauchées par nos professionnels au ministère de l'Environnement pour faire le nettoyage des
citernes qui étaient au centre-ville, on n'a pas besoin d'avoir ça à l'emploi
du ministère de l'Environnement 12 mois
par année, tout ce personnel-là, là. Il faut être capable d'utiliser la
sous-traitance de façon intelligente.
On le fait même nous, au syndicat. On n'embauche pas du personnel pour faire un
travail qui est pointu, qui est précis, qui nécessite une expertise
particulière ou qui est temporaire dans le temps.
Le problème,
c'est que la sous-traitance est devenue maintenant une avenue pour corriger le
manque d'effectif, le manque
d'expertise dans les ministères, pour faire du travail qui devrait être fait à
l'interne à moindres coûts, et c'est là le problème. C'est un cercle
vicieux. Les ministères engagent des firmes privées parce qu'ils n'ont pas
l'expertise nécessaire. Ils ne peuvent pas
avoir l'expertise nécessaire, parce que l'expertise, elle est à l'embauche des
firmes privées, qui les paient plus
cher. Donc, c'est un cercle vicieux dans lequel on est pris. Il faut briser ce
cercle vicieux là, tel que le demandait même M. Legault en campagne
électorale.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député, environ une minute.
• (17 h 40) •
M.
Therrien :
Oui. Pour terminer, vous avez beaucoup insisté sur la perte d'expertise, les
conséquences que ça avait eu au MTQ
et ce qu'on avait vu déborder, là, en commission Charbonneau. Ça, vous l'avez
très bien mentionné.
Est-ce qu'il
y a d'autres domaines que le MTQ où est-ce qu'on a vraiment noté, là, une perte
d'expertise qui met en péril, si on veut, là, la gestion efficace des
ressources publiques?
Le Président (M. Bernier) :
M. Perron.
M. Perron (Richard) : Bien, écoutez,
on vient de donner l'exemple, là, de la gestion. Quand on regarde, par exemple, il y a des ministères aussi régaliens que
le ministère de la Justice qui recourent, dans certains domaines, à 62 %
de sous-traitants. Il y a de quoi
être inquiet, il y a de quoi être inquiet. Et il y en a de multiples, domaines
comme ça où on recourt à la
sous-traitance : en matière de soutien à l'orientation par exemple, en
matière de gestion, par exemple, de nos immigrants, d'intégration de nos
immigrants. On vient de fermer, d'ailleurs, les directions régionales du
ministère de l'Immigration, alors que c'est le contraire qu'il faudrait faire.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Perron. Nous
allons donc passer du côté de la deuxième opposition. M. le député de
Groulx.
M.
Surprenant : M. le Président, merci. M. Perron, vous avez
mentionné tantôt certaines choses, puis je voudrais faire des calculs, des règles de trois, puis vous
me direz si j'arrive à un chiffre qui correspond à ce que vous avez en tête.
Alors,
d'abord, dans votre mémoire à la page 6, dans le bas, vous disiez que la
valeur des contrats de services en sous-traitance
dans les ressources informationnelles de l'ensemble des MO de la fonction
publique québécoise a grimpé de
218 millions de dollars à 778 millions de dollars, donc un bond
spectaculaire, évidemment. Donc, on parle de 778 millions dans
l'année la plus récente que vous avez.
Dans le
dernier paragraphe de la page 7, vous dites, dans la troisième
ligne : «Nous savons toutefois qu'il en coûte environ 2,5 fois
plus cher au gouvernement pour embaucher du personnel contractuel, qu'il
s'agisse d'individus ou d'équipes.» Vous avez également mentionné tantôt que
41 % de l'ouvrage pourrait se faire à l'interne.
Alors, si je
fais un calcul, en fait, le 778 millions qui coûte 2,5 fois plus
cher, donc, il y aurait environ 600 millions de ça qui est «over» payé, en bon français.
41 % de ça, donc, c'est 250 millions de dollars en valeur qui
pourrait se faire à l'interne. Donc,
il y a énormément d'argent qui pourrait être sauvé, là, si je comprends bien.
Je vous ai bien compris en citant ces chiffres-là?
M. Perron
(Richard) : Oui, oui, oui,
vous êtes tout à fait, là, en phase avec nos constats. Il y a beaucoup d'argent
à aller sauver, là, en matière de
sous-traitance, et c'est pour ça que votre chef le disait en campagne
électorale, même si ça peut paraître
un petit peu surprenant de la part de quelqu'un qui a plutôt tendance à vouloir
couper ou réduire la taille de la fonction publique ou l'expertise. Il
avait compris qu'il y a des sommes importantes à aller économiser en matière de
sous-traitance.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Surprenant : O.K. Donc, on s'entend donc sur le principe que ce n'est
pas nécessairement un gel. C'est de déplacer
l'emploi d'une case à l'autre pour la rendre moins coûteuse puis plus efficace
et conserver l'expertise, c'est aussi simple que ça.
M. Perron
(Richard) : Exactement.
Regardez, Mme Courchesne, prédécesseure, Mme Courchesne avait décidé
de prendre 120 millions de dollars de
contrats au ministère du Transport, d'entretien de route, et de les faire faire
à l'interne, décision intelligente
que l'on a saluée et qu'on salue encore. Il y a des bons gestes, il faut les
saluer. Et, dès la première année, on
a constaté que les coûts d'entretien de ces routes-là avaient diminué, avaient
coûté 59 millions de dollars, donc on avait économisé plus de
50 % de la facture en faisant faire les travaux à l'interne. Cet
exemple-là, on devrait le multiplier partout, M. Coiteux, pour faire économiser des sommes
importantes aux contribuables, et tout le monde vous en remercierait.
Le Président (M.
Bernier) : Oui, M. le député de Beauce-Nord.
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Il vous reste environ quatre minutes.
M.
Spénard : O.K. Moi, monsieur... Bonjour. Bienvenue,
M. Perron et M. Riopel. On parle beaucoup d'emplois, on parle beaucoup... Puis là je ne veux pas
m'adresser juste à vous, mais je veux savoir si vous avez une idée, une idée
quelconque là-dessus, parce qu'il n'y a pas
un groupe qui nous est arrivé et qui nous a parlé de ça, puis, moi, ça
m'interpelle un peu. Parce qu'on
parle tout le temps d'ETC, d'équivalents temps complet, du nombre, etc., mais
on n'a jamais parlé de la
productivité. À travers tous les mémoires qu'on a reçus, je n'ai pas vu un seul
mémoire qui nous a parlé de productivité.
Est-ce que vous avez
des études sur la productivité à l'intérieur de l'appareil gouvernemental,
ministères ou organismes, et à l'extérieur?
Y a-tu des études? Moi, je ne sais pas, je vous pose juste la question. Puis je
ne veux pas dire que c'est vous, là,
mais il n'y a pas un groupe qui nous est arrivé avec ça. Y a-tu des études de
faites sur la productivité à l'intérieur et à l'extérieur?
Le Président (M.
Bernier) : M. Perron.
M. Perron (Richard) : Bien, écoutez, on n'a pas le budget du gouvernement, on n'a pas les
effectifs nécessaires pour faire ce
genre d'étude là de productivité de la très grande panoplie des ministères et
organismes. Mais ce que je peux vous
dire... Ça ne fait pas si longtemps
que ça que je suis dans la fonction publique, mais j'ai été embauché il y a
quand même une vingtaine d'années et
j'ai toujours entendu, depuis 20 ans, qu'il fallait faire plus avec moins,
qu'il fallait faire plus avec moins,
qu'il fallait faire plus avec moins. Et la Protectrice du citoyen a affirmé, il
y a environ un an, que, dans l'état
actuel des effectifs, couper dans les budgets des ministères et organismes, ce
n'est plus couper dans le gras, c'est couper
dans les services à la population directement. Donc, je pense qu'à travers
toutes ces années, depuis 30 années de resserrement, de contrôle, de diminution des budgets, si on veut, des
effectifs par rapport à la tâche, je ne vous dis pas de façon absolue mais de façon proportionnelle, des
effectifs dans certains secteurs, moi, je pense que la corde... l'élastique de la productivité, il est pas mal étiré, il est
pas mal étiré, de ce que j'ai pu constater, moi, dans mon ministère d'origine
et qui avait une vue d'ensemble sur plusieurs ministères également.
D'ailleurs,
c'est pour ça que, quand Jean Charest a démissionné, il a tenu à rendre hommage
et dire à la population qu'on était
chanceux, au Québec, d'avoir une fonction publique d'aussi grande qualité,
parce que ça, ça compte dans le développement
et la prospérité d'une société. Bien, si le plus haut placé est capable d'en
constater les vertus, c'est certainement qu'il a constaté une certaine
productivité.
Le Président (M.
Bernier) : 30 secondes, M. le député.
M.
Spénard : ...à l'intérieur des différentes redditions de
comptes que vous avez à faire à différents ministères, avez-vous une solution pour les réduire ou les
simplifier? Y a-tu des solutions d'amenées à différentes tables, à différents
ministères pour dire : Écoutez, là,
cette reddition de comptes là, on n'en a réellement pas de besoin, pas aussi
souvent? Est-ce que ça a été avancé à quelque table que ce soit?
Le Président (M.
Bernier) : Je vous laisse 30 secondes pour répondre si...
M. Perron (Richard) : Je sais que le Vérificateur général en a parlé. Si on pouvait, là...
Nous, on serait tout à fait disposés,
puis on vous l'a dit, M. Coiteux, lors de la commission avec
Mme Robillard sur la révision des programmes, on serait tout à fait disposés à s'asseoir et à
voir quelles économies on peut faire dans certains cheminements ou processus
administratifs qui n'ont pas lieu d'être en 2014.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. Perron, M. Riopel. Merci de
votre participation à cette commission parlementaire.
Donc,
sans plus tarder, avant de suspendre les travaux, pour permettre au groupe de
l'Association québécoise des établissements de santé et de services
sociaux de prendre place, je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 48)
(Reprise à 17 h 50)
Le
Président (M. Bernier) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous
recevons l'Association québécoise des établissements de santé et de services
sociaux, représentée par Mme Diane Lavallée, directrice générale — Mme Lavallée — M. Luc
Bouchard et M. Denis Perras. Donc, bienvenue à cette Commission
parlementaire des finances publiques. Vous avez 10 minutes pour
faire votre présentation, la parole est à vous.
Association québécoise
d'établissements de
santé et de services sociaux (AQESSS)
Mme Lavallée (Diane) : Merci. M.
le Président, Mmes et MM. les membres
de la commission, je tiens à vous remercier de nous avoir
invités à participer aux consultations portant sur ce projet de loi.
Nos
membres, qui emploient environ la moitié des effectifs de l'État, sont tout à
fait conscients qu'il est justifié que
le gouvernement puisse connaître le niveau des effectifs dans les organismes
publics qu'il finance. Ils comprennent aussi qu'une reddition de comptes en matière de dénombrement des
effectifs est essentielle et qu'ils doivent faire preuve de transparence dans la gestion des fonds publics.
D'ailleurs, comme il sera mentionné plus loin, ils s'y consacrent déjà.
Il
importe que les établissements conservent une marge de manoeuvre quand même
suffisante à l'égard de leurs ressources
humaines pour pouvoir répondre aux besoins grandissants de la population et
pour faire face à toute situation de crise qui pourrait menacer la santé
de la population, par exemple une épidémie. Nos commentaires, qui se veulent
constructifs, s'inscrivent donc dans le sens de cette préoccupation.
Sur
le dénombrement des effectifs, nous tenons à rassurer le ministre ainsi que les
membres de cette commission que de
nombreuses données concernant l'état de la main-d'oeuvre des établissements sont
déjà transmises à l'appareil gouvernemental.
En effet, le ministère de la Santé et des Services sociaux dispose de la
banque R25, qui recèle une foule d'informations
concernant les employés du réseau et qui tire ses informations à partir des
données des systèmes de paie. Cette
banque de données avec 75 variables permet, entre autres, de connaître
l'état des effectifs en nombre de personnes et en équivalents temps complet, ainsi que le nombre d'heures
rémunérées. Elle permet de connaître le nombre d'employés d'un titre d'emploi particulier, situé même à un
échelon précis, ainsi que le type de prime dont ils bénéficient. D'ailleurs,
dans le cadre de la négociation des
conventions collectives, le Conseil du trésor utilise ces informations pour
évaluer les coûts d'une mesure qui aurait un effet sur la rémunération.
Sur
le plan de la détermination et de la répartition des effectifs, nous désirons
exprimer certaines préoccupations. Comment
le Conseil du trésor s'y prendra-t-il pour déterminer les effectifs dans le
domaine de la santé et des services sociaux? Nous souhaitons grandement
que le ministre puisse nous informer et nous fournir l'éclairage à ce niveau.
Édictera-t-il que le ministère de la Santé et des Services sociaux dispose, à
titre d'exemple, de 250 000 employés? Comment procédera-t-il pour
faire une adéquation entre un nombre d'effectifs et les services de santé et de
services sociaux à donner à la population?
De son côté, comment le ministre de la Santé et des Services sociaux s'y
prendra-t-il pour répartir les
effectifs entre les différents établissements et organismes sous sa
gouvernance? Et comment, toujours, l'adéquation
entre cette répartition d'effectif et les besoins sera déterminée?
Qu'arrivera-t-il si l'évaluation faite par le Conseil du trésor s'avère erronée ou si la répartition faite par le
ministre de la Santé ne cadre pas avec les besoins de la population des différentes régions du Québec? Cela
pourrait causer un préjudice grave sur la santé des populations. C'est pourquoi nous sommes profondément convaincus que
ce sont les établissements qui, localement, sont davantage en mesure de
déterminer le nombre et la nature des effectifs requis pour répondre aux
besoins grandissants de la population.
Ceci
étant dit, nous sommes quand même soulagés de constater que l'article 11
n'exige pas que cette répartition s'effectue
sur des bases compartimentées, par exemple par type d'emploi ou par catégorie
d'emploi. Nous saluons donc cette
approche retenue par le ministre. Nous partageons également l'objectif énoncé à
l'article 12 en matière de protection des services offerts à la population, et nous exprimons toutefois le
souhait qu'il ne s'agisse pas là d'un voeu pieux et que les établissements disposent des ressources
suffisantes pour assurer le maintien de leurs services, et ce, indépendamment
des nouvelles formules de calcul qui découleront éventuellement du
projet de loi n° 10 et ses modalités, s'il est adopté.
Le réseau doit
composer avec des réductions budgétaires qui se sont chiffrées à 850 millions
au cours des quatre dernières années. De
plus, la loi n° 100 a contraint les établissements à réduire de façon
significative leurs effectifs de
nature administrative, soit une réduction de 10 % du personnel
administratif, donc il y a une limite à leur capacité d'agir aussi à cet égard. Aussi, afin de se conformer à
des objectifs de réduction budgétaire, certains établissements ont diminué,
dans le passé, le nombre de postes dans le
secteur de l'hygiène et de la salubrité afin de ne pas toucher aux postes
cliniques. Nous avons alors assisté à une prolifération des infections
nosocomiales. Quand on sait que chaque patient atteint de C. difficile coûte environ 50 000 $, on
peut constater l'importance de maintenir des effectifs adéquats dans ce
domaine, même s'il ne s'agit pas de personnel clinique.
Quant
au contrôle des effectifs, les autorités ministérielles devront faire preuve de
flexibilité pour tenir compte des
budgets de développement et des situations particulières des établissements qui
sont aux prises, pendant une période de
référence, avec une pénurie de personnel notamment. Il faudra prendre en compte
le fait que le volume d'activité est aussi
variable dans le temps, que ce soit au cours d'une même année ou d'une année à
l'autre. De plus, certaines situations
imprévues peuvent amener une augmentation des heures travaillées ou rémunérées, notamment en cas de crise,
comme nous l'avons vécu pendant l'épisode H1N1.
En
somme, les établissements ne contrôlent aucunement la demande de services.
Celle-ci peut évoluer selon la croissance
des besoins, notamment en raison de l'augmentation des maladies
chroniques et des problématiques reliées à la santé mentale, qui sont en
augmentation. D'autres facteurs influencent l'offre de services, dont
l'augmentation du vieillissement de la
population. Et enfin, et non le moindre, les établissements sont tributaires
d'orientations ministérielles, qu'on
nous demande d'intensifier les soins
à domicile ou une plus grande gestion
des maladies chroniques. Donc, comment le
projet de loi nous assure-t-il que ces facteurs seront pris en considération
dans le contrôle de l'évolution des effectifs des établissements?
Nous
venons d'illustrer les difficultés que soulève le projet de loi pour les
établissements, et c'est pourquoi nous en
questionnons la nécessité. Si le gouvernement estime que la banque R25 doit être actualisée
afin d'améliorer la validité des
informations qu'elle contient ou la périodicité de leur transmission, nul n'est
besoin de procéder par voie législative, il suffit d'améliorer les
outils et les processus actuels déjà existants.
Qu'est-ce qui est le plus important pour contrôler
les dépenses publiques, le respect du cadre budgétaire ou celui du niveau des effectifs déterminé par le Conseil
du trésor? Lorsqu'un établissement se
voit octroyer un budget et qu'il le respecte,
en quoi le nombre de personnes utilisées pour accomplir sa mission est-il
important au regard de l'atteinte de l'équilibre des finances publiques?
À compter
du 1er avril 2015, si le projet de loi est adopté tel quel, les ressources
budgétaires allouées aux établissements le seront par programme-service. De plus,
la mise en place annoncée d'un financement axé sur les patients aura un impact
certain sur le niveau des effectifs des établissements. Nous voyons mal comment
les mesures contenues au projet de loi n° 15, particulièrement celles ayant trait à la détermination et au
contrôle des effectifs, pourront s'harmoniser avec cette nouvelle façon
de faire, et la référence à l'année 2014 devient donc obsolète.
Enfin, a-t-on
bien évalué les coûts reliés à la gestion et au contrôle des effectifs qui
découleront du projet de loi, en termes notamment de ressources humaines
et financières?
Toutes ces
questions nous amènent à inviter le ministre à maintenir une approche de
contrôle budgétaire plutôt qu'à
procéder selon la manière prévue au projet de loi. Toutefois,
si le projet de loi devait être adopté, nous demandons alors que les établissements bénéficient de
l'exemption prévue à l'article 3 pendant une période d'au moins deux ans. En
effet, le ministre et les membres de
cette commission n'ignorent sûrement pas que le projet de loi n° 10 actuellement à l'étude
pourrait amener une transformation majeure du réseau de la santé et des services sociaux et son financement. Les nouveaux
établissements évolueront
dans un environnement très différent de celui en place au moment de
l'éventuelle adoption du projet de
loi n° 15. Ils devront définir une nouvelle offre de services,
une nouvelle structure de postes et une nouvelle organisation du travail. Les énergies des gestionnaires seront
consacrées principalement à réussir cette transformation pendant les
années à venir.
Donc, en
conclusion, si la mouture finale du projet
de loi devait demeurer sensiblement la même, il est impératif que
certains paramètres soient respectés : éviter d'alourdir le fardeau
administratif des établissements en utilisant au maximum les informations qu'ils transmettent déjà; laisser aux établissements
la plus grande marge de manoeuvre possible eu égard à la gestion de leurs ressources humaines afin qu'ils puissent
conserver leur capacité de s'adapter aussi aux besoins de leur
population; éviter d'adopter une approche par silo — par titre d'emploi,
par catégorie d'emploi ou par champ d'activité — car
l'organisation du travail et la détermination de la structure de postes doivent
continuer de relever des établissements. Donc, il faut éviter, bien sûr,
de tomber dans de la microgestion.
Donc, merci, M. le Président. Et ça va nous faire plaisir de répondre aux questions
des membres de la commission.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme Lavallée. Merci de votre présentation. M. le ministre.
M.
Coiteux : Merci, Mme
Lavallée. Je vais commencer par la question sur les données actuelles, parce que
vous avez parlé de la banque de
données R25. Quels sont les enjeux avec l'augmentation de la fréquence
de transmission des données notamment,
là, sur les effectifs, par exemple données par heures rémunérées, par catégories
d'emploi? Quels seraient les enjeux?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
• (18 heures) •
Mme
Lavallée (Diane) : Bien, en fin de compte, les transmissions d'information,
elles sont transmises à toutes
les périodes de paie, hein? Il y en a donc 26 fois par année. Pour ça, il
n'y a pas de contrainte, les établissements fournissent déjà l'information en
grande partie, j'imagine, qui vous permet d'avoir un portrait assez fidèle du
nombre d'employés dans le réseau de la santé, les catégories d'emploi, etc.
Par contre,
ce qu'on nous dit, le traitement de cette information-là, ce serait peut-être
plus pertinent, pour avoir une
meilleure vue d'ensemble puis des périodes de référence plus valables, de
pouvoir la fournir aux trois mois plutôt
que d'en faire des analyses de façon
plus régulière, ce qui permettrait de faire une analyse sur une plus grande
période qui serait plus significative et plus représentative d'une
réalité.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous disiez aussi,
Mme Lavallée, qu'il y a des fluctuations notamment dans les heures
travaillées en cours d'année qui sont
normales. Donc, il y a quelques économistes ici, je pense, des deux côtés de la
table. Donc, on va reconnaître
l'existence de, excusez le terme anglais, un pattern saisonnier, donc, on est
capables de capter tout ça. Donc, il y a moyen de trouver une cible
d'effectif qui tient compte, là, d'une certaine fluctuation saisonnière.
Est-ce que ça, ça pose des enjeux particuliers
pour vous?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
Mme
Lavallée (Diane) : Nous, on
pense que les cibles d'effectif, ce n'est pas ce qui est le plus important, parce que, je vous dirais, chaque établissement, en fonction de, souvent, l'endroit où il se situe, peut avoir plus
d'effectif mais rentre pareil dans leur budget.
Je vous donne des exemples. Dans certaines
régions du Québec, il y a des pénuries de main-d'oeuvre plus spécialisées, comme des infirmières bachelières notamment.
Ils vont embaucher peut-être plus de ressources qu'un établissement de même taille parce
qu'ils vont faire faire du travail davantage par d'autres types de personnel,
ça peut être des infirmières auxiliaires, des infirmières avec un niveau
collégial. Certains établissements font faire plus de tâches administratives à du personnel administratif pour
dégager des infirmières de leurs tâches administratives, pour les consacrer
dans ce qu'ils font de mieux, des tâches cliniques.
Donc,
cette marge de manoeuvre là peut faire en sorte que, oui, il peut y avoir plus
d'effectif à certains endroits, dû à
une réorganisation du travail qui tient compte d'une pénurie de catégorie
d'effectif dans une région, mais ça n'a pas pour autant amené une
augmentation des coûts de gestion des ressources humaines ou du budget de
l'établissement.
Donc,
nous, on pense que la marge de manoeuvre des gestionnaires des établissements
doit demeurer, et les mieux placés
pour déterminer le nombre d'effectifs qu'ils ont besoin et la catégorie
d'emploi aussi doit être le plus près possible de l'offre de services, donc des établissements, des gestionnaires des
établissements, et d'avoir un contrôle des budgets, bien sûr, puis de vous permettre d'avoir aussi le
nombre d'effectifs qu'il y a dans le réseau de la santé. On est tout à fait
d'accord avec ça, que l'État doit le savoir, et les outils actuels permettent
aussi de le faire.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Dites-moi si je me trompe, mais la situation que vous
décrivez ici, c'est des réaffectations d'heures travaillées d'un secteur vers un autre secteur. Alors, ils ont fait
moins d'heures dans tel domaine, ils ont fait plus d'heures dans tel domaine, mais ça ne doit pas
nécessairement s'accompagner d'un volume global d'heures travaillées en
croissance constamment, non? C'est
plus une réaffectation. Dans le fond, vous voulez la flexibilité de réaffecter
à l'intérieur d'une enveloppe globale qui tient compte notamment de la
saisonnalité.
Le Président (M.
Bernier) : Mme Lavallée.
Mme Lavallée (Diane) : Bon, il y a la saisonnalité, mais il y a aussi
les besoins de la population, il reste qu'il y a eu des besoins croissants de la population du Québec. Selon toutes les
données, il y a une augmentation, hein, le vieillissement de la population, une augmentation des maladies
chroniques, une augmentation des problématiques en santé mentale. Ça peut amener et ça amène, justement,
une augmentation, souvent, des effectifs pour répondre à ces besoins-là,
hein? Ce sont des humains qui ont besoin de services et dont les services de
santé sont offerts par du personnel.
Donc,
oui, ça peut expliquer une augmentation aussi des besoins des effectifs dans le
secteur de la santé, si on veut répondre aux besoins grandissants de la
population. Sinon, ça va se traduire par une diminution des services à la population. Si les besoins augmentent puis on
reste avec le même nombre d'effectifs, vous comprendrez qu'il va falloir
avoir une coupure à quelque part des services à la population.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : M. Perras.
M. Perras (Denis) : Peut-être un complément, M. le ministre, pour vous expliquer que, oui,
des fois on peut avoir des heures travaillées en plus grand nombre par
une main-d'oeuvre qui est moins rémunérée. Alors, quand on parlait tantôt, là,
des gestes de nature administrative qui sont confiés à du personnel
administratif, donc qu'on dégage les infirmières
et qu'elles peuvent se consacrer, à ce moment-là, davantage à donner des soins,
ce que la population attend, mais il
y a aussi des exercices de réorganisation du travail qui font en sorte qu'on
peut abolir dans un service, mettons, deux
postes d'infirmière, parce que les infirmières ne faisaient pas juste des
tâches d'infirmière, et de dire : Bien, avec les heures qui étaient travaillées, mettons une
moyenne de 70 heures pour les deux, bien on peut mettre plus de préposés
aux bénéficiaires, qui commande une rémunération nettement inférieure. Donc, on
pourrait avoir trois préposés aux bénéficiaires
dont le nombre d'heures, finalement, va correspondre à 105 heures, mais on
va avoir fait des économies en plus.
Donc,
c'est pour ça que, la question des heures travaillées, des heures rémunérées,
du nombre d'effectifs, on dit : Ça
ne va pas. Ce qui est important,
c'est plus de contrôler le budget. Quand on vise un objectif d'équilibre
budgétaire, c'est sur le budget qu'on devrait davantage consacrer... le
respect du budget qu'on devrait consacrer nos énergies.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. Bouchard.
M. Bouchard (Luc) : ...M. le ministre, la période de référence dont on fait référence
ici, à l'article 36, où on dit
du 1er janvier au 31 mars, pose un
problème dans le sens que, dans certaines organisations, les saisons... On
prend l'exemple des
Îles-de-la-Madeleine ou Magog, etc., où la population double durant le mois de
juin au mois de septembre. Ça poserait certains problèmes, parce que le
saisonnier, il varie d'une région à l'autre, O.K.?
Alors,
ce qu'on dit, c'est qu'il ne faut pas prendre une période de référence fixe de
trois mois pour déterminer, en 2015, quel va être le nombre d'effectifs
comparé à 2014, parce que la fenêtre n'est pas égale de région en région, d'établissement à établissement ou de situation de
santé à situation de santé aussi. Alors, la période de référence ici, en la
limitant à trois mois comme dit dans le
projet de loi, peut causer un problème dans certaines régions. C'est une
fluctuation saisonnale qui change d'une région à l'autre du Québec.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, là où je peux... Puis c'est l'esprit du projet de loi.
Puis, dans ses modalités d'application administratives,
on va certainement tenir compte de tout ça, là. C'est une enveloppe que le
ministre va devoir distribuer en
tenant compte des aspects que vous mentionnez, là, justement pour que ça se
fasse de façon cohérente avec comment ça
fonctionne en pratique, là, vos besoins dans le secteur de la santé. Ça ne sera
jamais une règle mathématique pure qui ne tient pas compte de ces
réalités-là. Donc, ça, c'est simplement pour, dans le fond, vous rassurer par
rapport à cette question-là.
Et
vous avez mentionné qu'il y a deux façons, là... Bien, il y a une façon que
vous avez mentionnée, d'atteindre des
cibles budgétaires, là. Supposons qu'on trouvait un équivalent — puis il y a certainement possibilité de le
faire si on connaît l'évolution des effectifs à chaque année — un
équivalent budgétaire d'un gel des effectifs, compte tenu de la répartition actuelle des effectifs dans les
différentes catégories. Vous dites : On peut confier une tâche à une
personne qui a un niveau de
rémunération différent et qui a toutes les qualifications pour le faire. Bon,
j'imagine que vous avez certaines entraves aussi en pratique pour faire
ça, peut-être des règles, peut-être des conventions collectives. Est-ce qu'il y
a des choses qui vous empêchent de faire ça à l'heure actuelle?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Lavalllée.
Mme Lavallée
(Diane) : Il y a quand même de la marge, mais il reste qu'il y a des
tâches qui sont réservées exclusivement à certains professionnels, puis il faut
le respecter. Puis ça relève aussi d'une qualité de services à la population
puis de la sécurité des services.
On
peut le faire, mais je vous dirais que, par le passé, il y a eu beaucoup, beaucoup
de réorganisation sur le plan administratif pour faire en sorte qu'on
libère le personnel clinique de tâches administratives qui faisaient...
Beaucoup d'infirmières dans les soins à domicile, des psychologues, des
travailleurs sociaux avaient de nombreux documents administratifs à remplir. Il
y a eu des changements dans l'organisation du travail, qui fait qu'on a confié
ces tâches-là davantage à du personnel
administratif pour les confier... pour les consacrer exclusivement à leurs
tâches cliniques. Donc, je pense,
c'est cette marge de manoeuvre là que les établissements doivent continuer à
avoir pour améliorer l'efficience, continuer à offrir des soins de
meilleure qualité et contrôler les coûts.
Puis,
dans le contrôle des coûts, je vous dirais que la province est celle qui
dépense le moins per capita au Canada, dans le réseau de la santé. Je
pense qu'on peut conclure qu'il y a de l'efficience là puis il y a de
l'efficacité et que les gestionnaires, qui,
depuis les dernières années, ont fait des redressements de l'ordre de
850 millions de dollars tout en offrant
des services de qualité à la population du Québec, ont largement revu
l'organisation du travail pour permettre de maintenir des services de qualité à la population du Québec. Bien qu'il
y ait toujours des améliorations possibles, et puis on est très ouverts à ça, bien je pense qu'il faut se
rappeler que, si le Québec dépense moins que l'ensemble des autres provinces
per capita dans le secteur de la santé, avec les services qu'on offre, il y a
de l'efficience dans notre système.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Je n'en doute pas, mais la question que... puis toutes les
organisations se la posent toujours : Il y a peut-être de l'efficience, mais est-ce qu'il peut
y en avoir encore plus? Il y a de l'efficience, mais est-ce qu'on peut encore
l'améliorer, cette efficience? J'imagine que ça peut encore se faire.
Puis
est-ce qu'on est capable de livrer des services en portant une attention
particulière non seulement à qui fait quoi
dans le réseau, c'est-à-dire je libère quelqu'un de faire certaines tâches pour
qu'il fasse une autre tâche, mais est-ce qu'on est capable de faire ça, ce genre d'exercice là, dans une période
de contrôle, sans augmenter globalement les effectifs? Est-ce qu'il y a
un espace, autrement dit, pour être encore un peu plus efficace?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Lavalllée.
• (18 h 10) •
Mme Lavallée (Diane) : Il y a de la marge, il y a de la marge. Mais,
quand on parle de contrôle des coûts, je pense qu'il faut regarder dans tous les secteurs, hein? On est sortis dernièrement avec l'Association
médicale du Québec pour démontrer
que, dans le réseau de la santé, il pouvait y avoir de l'efficience améliorée
et des coûts... en tout cas des coûts puis des marges de manoeuvre importantes si on s'attaquait au surdiagnostic et
la non-pertinence de certains actes. Des radiologies, des choses qui sont prescrites inutilement, il peut y en
avoir, selon l'Association médicale du Québec,
entre 2,5 à 5 milliards par année. Donc, nous, on invite fortement
le gouvernement à regarder aussi dans cette direction-là, comment on peut s'assurer... Quand on cherche des
milliards puis à raison il faut atteindre des équilibres budgétaires, bien il
faut aussi regarder du côté de la
non-pertinence et de l'inefficacité pour justement se dégager des marges de
manoeuvre.
Moi,
je pense que, de ce côté-là, ce serait prometteur qu'on s'y attarde, au Québec,
comme dans d'autres juridictions ils
l'ont fait. Et il y a là un espace important pour dégager des marges de
manoeuvre pour le gouvernement et permettre au réseau de la santé d'investir davantage là où on en a besoin, dans les
soins à domicile, une amélioration des services, l'accès aux services en première ligne, et à travers même
la masse budgétaire existante, parce qu'on comprend bien qu'à 49 % du
budget de l'État en santé... qu'il n'y en
aura pas plus. Puis on n'en demande pas plus, et c'est réaliste de le faire.
Par contre, à travers ce budget-là,
il y a moyen de faire mieux et d'avoir plus d'efficience, puis il faut qu'on
regarde aussi de ce côté-là. Ce n'est pas que l'affaire des
gestionnaires, d'accroître l'efficience du réseau de la santé et des services
sociaux.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous faites référence au fait que vous avez, au cours des
quatre dernières années, absorbé 850 millions de compressions. Est-ce que vous pourriez détailler
un petit peu plus comment vous vous y êtes pris pour les absorber en
maintenant les services?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
Mme
Lavallée (Diane) : Chacun
des établissements a dû mettre en place des plans de redressement,
hein, ils ont sûrement été différents à Montréal. Les gestionnaires,
avec leurs conseils d'administration, ont pris des décisions pour atteindre ces objectifs-là. Il y a eu
sûrement de la réorganisation du travail qui a été
regardée. Il y a eu toutes
sortes de mesures, des projets «lean» pour accroître la performance.
Donc, il y a
eu beaucoup d'améliorations qui ont été faites, et c'est dans
ce sens-là que les gestionnaires ont toujours
travaillé avec leurs conseils d'administration depuis les quatre dernières années. Les budgets
étaient déjà amputés, donc il fallait qu'ils rentrent dans l'enveloppe budgétaire. Et il y a la loi qui prévoit qu'il y a
impossibilité de faire des déficits dans
le réseau de la santé. Donc, il y a eu des mesures différentes, je vous dirais,
d'un établissement à l'autre, d'une région à l'autre pour permettre de
tenter de maintenir des services à la population de grande qualité tout en
réduisant.
Il y a eu des
fusions aussi. Il y a eu des mises en commun d'achats, des regroupements. Ce
n'est pas d'hier que les gens se
parlent, dans les régions, pour mettre en commun des services, justement, pour
réduire les coûts. Il y a des services de paie qui ont été mis en
commun, des services d'achats regroupés, on regarde, là, les services d'informatique.
Donc, il y a
eu beaucoup de travail de façon... sur une base régionale, mais il y a eu aussi
des choix qui ont été faits dans
chacun des établissements, chacun des CSSS pour diminuer les coûts, puis
répondre aux besoins du gouvernement, et d'être solidaire, en fin de
compte, avec les objectifs du gouvernement d'atteindre un équilibre budgétaire.
Le Président (M. Bernier) :
Il vous reste une minute.
M. Coiteux : Mon collègue aurait une
question, de Mégantic.
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez une minute.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Une minute? Oh mon Dieu! Seigneur! Merci, M. le Président.
Vous avez une
expérience très large et vous semblez nous donner beaucoup d'indications sur la
qualité ou... les opportunités qui se
sont matérialisées au cours des dernières années. Si vous aviez un conseil ou
une façon de voir qui pourrait être utile au ministre dans l'élaboration
de notre projet de loi, quel serait-il?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mégantic. Mme Lavallée.
Mme Lavallée (Diane) : Si on avait...
Bien, c'est de laisser, moi, je vous dirais, la marge de manoeuvre aux établissements pour déterminer comment organiser
les ressources humaines de la façon la plus efficace possible. Et, moi, le conseil
que j'aurais, si je peux me permettre ainsi, c'est vraiment de s'assurer de
demander au ministère de la Santé, au ministre,
de vous fournir toute l'information qu'il détient à l'heure actuelle, et qui
vous permettrait sans doute d'atteindre vos objectifs d'une meilleure connaissance du nombre d'effectifs par
catégories d'emploi. La rémunération, le service de paie aux 15 jours permet d'avoir toutes ces
informations-là. Et, si jamais vous en aviez besoin d'autres pour satisfaire
les besoins du Conseil du trésor, de
le faire sans alourdir les tâches administratives, qu'on tente, bien sûr, de
diminuer de plus en plus pour se consacrer, dans le réseau de la santé,
aux services à la population.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme Lavallée. M. le député de Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue à M. Perras,
M. Bouchard et Mme Lavallée. Alors, je suis très content
d'être avec vous aujourd'hui.
Écoutez, je
vais revenir sur quelques aspects, parce que vous avez quand même bien élaboré.
D'abord, une première réflexion, vous
parlez des bouleversements que la loi n° 15, si elle est adoptée
comme telle, pourrait causer chez vous en
termes de changement au niveau de la gestion. Moi, je vous poserais la
question, là : On vous envoie la loi n° 10 et la loi n° 15 d'ici Noël, mettons, ou en
tout cas très rapidement, là. C'est quoi, les conséquences d'avoir ces deux
projets de loi, là, qui sont assez
costauds, qui vont changer votre façon de gérer la santé, là? C'est quoi, les
problèmes aussi? Qu'est-ce qu'il va y avoir comme conséquences?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
Mme
Lavallée (Diane) : Écoutez,
encore faut-il croire qu'ils vont être adoptés tels quels, là. On présume que
les commissions parlementaires donnent la
possibilité aux gens de s'exprimer et peut-être d'en modifier certains aspects.
On n'est pas contre, comme on vous le dit, là,
le contrôle des effectifs par le biais du Conseil du trésor puis le gouvernement du Québec. C'est sûr que c'est deux
gros projets de loi qui viennent changer beaucoup dans la marge de manoeuvre qui est laissée aux administrateurs pour
gérer, d'être responsables de leur gestion dans le réseau. Moi, je veux dire, si on a peut-être une indication à donner,
un conseil, c'est de tenter de donner le plus de marge de manoeuvre aux gestionnaires et les rendre imputables des
décisions qu'ils ont à prendre, qu'on fonctionne avec des objectifs de résultat
plutôt que des
contrôles, mais de donner aux gestionnaires du réseau des objectifs de résultat
à atteindre quant à... des objectifs
budgétaires mais aussi des objectifs de santé populationnelle, et de les
laisser travailler à organiser l'offre de services pour répondre aux besoins de leur population. Je pense que, peu
importent les projets de loi, s'il y a un message à transmettre, c'est de laisser de la marge de
manoeuvre aux gestionnaires qui offrent les services, le plus près possible des
besoins de la population, et de s'assurer
qu'ils rendent des comptes sur ces objectifs-là de santé, notamment, de la
population sur leurs territoires.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, madame. M. le député.
M.
Therrien :
Oui. Vous avez dit que vous n'étiez pas contre le contrôle des effectifs par le
projet de loi n° 15, c'est ce que vous venez de dire. Est-ce
que ça...
Mme Lavallée (Diane) : ...dénombrement
des effectifs.
M.
Therrien : Le
dénombrement. O.K. Je voulais m'assurer, là, que j'avais bien...
Mme
Lavallée (Diane) : Pas
contre le dénombrement. Le contrôle, moi, je pense qu'il faut laisser la marge
de manoeuvre aux établissements,
mais, qu'on dénombre, qu'on sache combien il y a d'employés, combien on les
paie, tout ça, je pense que c'est normal. Puis d'ailleurs cette
information-là est disponible.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M.
Therrien : O.K. Je
voulais juste... C'est parce que vous m'avez dit ça, ça fait que, là, j'ai dit...
Mme Lavallée (Diane) : En contrôle?
Oui, possible.
M.
Therrien :
Mais c'est correct, hein? C'est peut-être un mot que vous avez échappé, puis je
peux comprendre.
Mme Lavallée (Diane) : Ça se peut
que ça m'ait échappé, oui.
M.
Therrien : Oui,
absolument. Moi, en tout cas, ça m'arrive souvent. Alors, il y a...
Une voix : ...un petit manque
de contrôle.
M.
Therrien :
Oui, c'est ça. Écoutez, ce que j'ai trouvé intéressant, entre autres, dans
votre mémoire — on
essaie de trouver des particularités
des mémoires, de chaque mémoire, là — c'est de dire : Écoutez, on ne pense
pas que le contrôle des effectifs
puisse nous amener dans une amélioration de l'efficacité de l'État; dans notre
domaine à nous, c'est plus un contrôle budgétaire qui pourrait nous le
permettre. Moi, j'ai trouvé ça intéressant.
Puis ensuite
le ministre vous a dit : On a éliminé... baissé de 850 millions, là,
la gestion, vous avez diminué la facture
de la gestion, là, de vos services de 800 millions sur quelques années. Et
après ça... avant ça vous avez parlé, là, d'une possibilité d'enlever, là, des milliards de dollars par rapport
aux diagnostics, là, les diagnostics en doublon, ou en tout cas la
lourdeur de toute la façon qu'on fait la santé au Québec.
Qu'est-ce que ça prendrait pour qu'on réussisse
ce que vous nous avez dit? Qu'est-ce que ça prendrait? Puis est-ce que le
projet de loi n° 15 va vous aider à y arriver?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
• (18 h 20) •
Mme
Lavallée (Diane) : Non,
parce que, pour s'attaquer au problème de surdiagnostic ou de la non-pertinence,
il faut aussi travailler en collaboration
avec les médecins, parce que ce sont les médecins qui prescrivent les examens
de laboratoire, de radiologie qui, dans certains cas, ne seraient pas
considérés optimaux ou efficaces et pertinents.
Ceci étant
dit, on ne veut pas enlever la marge de manoeuvre de la responsabilité médicale
des médecins d'établir les
diagnostics puis de trouver le bon traitement pour les gens. Par contre, il
existe des études probantes, scientifiques qui démontrent clairement... Et ces études-là sont faites avec des
scientifiques, dans des équipes de scientifiques dans lesquelles se retrouvent des médecins, et qui sont capables
de vous dire que, sur l'ensemble, là, des examens qui sont prescrits pour des problèmes colorectaux ou des dépistages du
cancer du côlon chez les femmes, tel et tel examen qui est utilisé à tel
rythme ne sont pas efficaces et pertinents et peuvent engendrer même des
problèmes.
Donc, on
dit : Si ça existe, ces études-là, il faudrait en prendre acte et s'assurer
que l'INESSS, l'Institut national d'excellence
en santé et services sociaux, puisse avoir la responsabilité de faire ces
études-là, le faire en collaboration avec nos chercheurs, nos médecins. Et, à
partir du moment où, avec des données probantes, on constate qu'une répétition
abusive de tel et tel examen ne devrait pas
se faire au Québec, bien, que ça sorte du panier de services et que ce soit
interdit, tout simplement. Et, dans ce sens-là, l'État n'aurait pas à
payer pour des examens inutiles.
Donc, il y a
des juridictions qui l'ont fait. Je regarde en Angleterre notamment,
il y a un institut qui s'attaque à ces éléments-là et dont les recommandations sont exécutives. Donc, ça évite de politiser le
débat autour de ce qui devrait être dans
le panier de services, dans le type d'examen qui devrait être fait, le nombre
d'examens qui devraient être faits pour telle problématique, y compris tel médicament. Cet
institut-là décide qu'avec les données probantes tel type de médicament,
notamment, oncologique, très coûteux, qui n'améliore pas nécessairement
la qualité et la durée de vie des personnes, ne devrait pas être dans le panier de services payé par le public, parce que
c'est très coûteux puis ça n'a pas les objectifs... on n'en
a pas nécessairement pour notre argent. Donc, ça évite qu'il y ait
des pressions politiques ou de lobby qui se fassent auprès des ministres et des élus, c'est
un institut de chercheurs neutre qui décide et recommande ce qui devrait être
dans un panier de services ou pas
selon des données probantes. Et ça, ça serait une voie qui serait à explorer,
selon nous, au Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Therrien : Oui. Vous avez parlé aussi des soins à domicile,
de favoriser les soins à domicile, c'est beaucoup moins coûteux. Pourquoi
je vous pose ces questions-là, c'est que vous... bien la santé accapare à peu près
la moitié du budget du gouvernement, donc, puis c'est en augmentant, les besoins sont en augmentation.
Alors là, ce que je comprends de vos
propos, c'est que, si on veut faire en sorte d'améliorer l'efficacité du réseau
de la santé, il faut y aller de solutions comme ça au niveau de
l'innovation dans notre approche des services de santé — puis
j'inclus là-dedans les soins à domicile — et c'est de cette façon-là qu'on va
réellement améliorer, hein, la santé budgétaire du gouvernement, à travers
ce que vous allez faire comme offre de services. C'est ce que je comprends.
Ça fat que
des solutions comme le projet de loi n° 15 ne nous amènent pas dans
une situation comme ça. Ça veut dire qu'il faudrait proposer comme des
soins à domicile ou des façons innovantes de produire des services dans votre
domaine, c'est ce que je comprends.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
Mme Lavallée (Diane) : C'est qu'avec
aussi la main-d'oeuvre disponible, bien, je pense que c'est important aussi de
voir qu'on devrait accentuer le nombre de soins à domicile. Ça peut demander à
court et à moyen terme une augmentation des
ressources dans ce secteur-là, mais en bout de piste on va économiser, parce
que, de maintenir les gens à
domicile, toutes les études démontrent que ça peut coûter presque trois fois
moindre que les héberger en CHSLD, pour les personnes en perte d'autonomie. Donc, il y a peut-être un investissement
à faire mais qui en bout de piste va s'avérer une économie, à plus ou
moins long terme. Et ce sont des approches de ce type-là, nous, qu'on
privilégie, effectivement.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Therrien :
Et ça va dans le sens de ce que vous disiez : Oui au contrôle budgétaire,
non au contrôle d'effectif. Là, vous
en avez un exemple criant, une évidence, là, qui vient nous prouver qu'à
quelque part, là, si on veut améliorer l'efficacité de l'État, il faut y
aller vraiment avec une approche budgétaire.
Dernière
question que j'aurais, j'aimerais revenir sur la distribution des effectifs à
travers... je sais que le ministre est
revenu là-dessus, mais par rapport aux régions, par rapport au fait que les
régions peuvent se trouver sous... en tout cas garnies de façon insuffisante en effectifs. Comment ça pourrait se
corriger à l'intérieur du réseau? Si, mettons, le ministre dit : On vous donne tant d'effectifs, mais on
s'aperçoit que, dans les régions, là, il y a comme une inéquation, là, qui fait
en sorte qu'on ne remplit pas assez
de services dans un coin en particulier, comment ça pourrait se gérer à
l'intérieur du projet de loi n° 15?
Le Président (M. Bernier) :
Je vous donne 30 secondes, Mme Lavallée. Après ça, on...
Mme
Lavallée (Diane) : Ça peut
difficilement se gérer du central. Et même le ministre de la Santé... Comment
le ministre de la Santé peut déterminer que, sur la Côte-Nord, il y a un besoin
de tant d'effectifs; à Montréal, c'est tant d'effectifs?
Présentement,
les budgets, c'est à travers... Les budgets, présentement, les budgets sont
faits sur une base historique, et le
projet de loi n° 10 et ce qui s'ensuit, selon ce que le ministre nous
dit, va changer complètement la donne quant au financement des établissements. Premièrement, il n'y en aura plus 125,
il risque d'y en avoir une vingtaine. Ça va être un financement axé sur
le patient, selon les programmes-services.
Donc, toute
la budgétisation du réseau va changer, et c'est pour ça qu'on dit : Si
vous allez de l'avant, bien, attention, dans les deux, trois prochaines années il y aura tout un bouleversement
dans le réseau de la santé. Et attendons de voir pour revoir... Il y aura de la réorganisation des services qui va être
faite, on va être dans des fusions de services, des fusions
d'établissements; fusion des ressources humaines, fusion des unités d'accréditation.
La cour est pleine.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
madame. M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Alors, merci,
M. le Président. Alors, bienvenue,
Mme Lavallée, MM. Bouchard et Perras. J'ai bien aimé votre mémoire, je l'avais lu en
diagonale avant, puis j'aime bien votre intervention. Et je pense
qu'en ayant diminué de 800 millions en quatre ans les services de
santé...
Je ne suis
pas sûr que tout ce que vous amenez, par
exemple, s'adresse au projet de loi n° 15. Il y
en a beaucoup qui vont être réglés
par le projet de loi n° 10, je
pense, réglés ou en phase de l'être.
On parle de... Évidemment, d'avoir un
contrôle des effectifs, on ne peut pas se soustraire à ça. C'est-à-dire qu'il faut savoir comment qu'on paie de monde à l'intérieur du
réseau. Ça, on n'a pas le choix. Et j'aimerais vous préciser que c'est par catégories
de personnel, par exemple. Lorsque vous m'avez apporté : Deux infirmières
remplacées par trois infirmières auxiliaires, ça coûte moins cher, bien ça, ce n'est pas la même catégorie
de personnel. En tout cas, j'imagine.
Je ne sais pas comment ça va se passer.
Moi, j'ai
passé six ans de temps vice-président du conseil d'administration d'un CSSS,
et, quand tu es bénévole à
l'intérieur de ça, tu arrives avec ton tableau de bord à tous les mois qui a à
peu près 300 pages. Je trouve qu'il y a une reddition de comptes... Je trouve que la machine s'est alourdie
elle-même pour des redditions de comptes que, bien souvent, on n'avait même pas besoin de voir ça. On n'avait
même pas besoin de savoir ça. Ça ne nous donnait absolument rien, puis
il n'y a pas un chat qui posait une question là-dessus, même pas le ministère.
Qu'est-ce
que vous feriez, vous, en termes de reddition de comptes, pour essayer
d'alléger la machine administrative? Parce qu'à un moment donné on ne
comprenait plus rien.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
Mme
Lavallée (Diane) : Bien, il
faut de la reddition de comptes. Les établissements gèrent 17 milliards en
fonds publics, donc c'est tout à fait normal qu'il y ait une reddition
de comptes.
Par contre,
il y a des contrôles qui sont... Il y en a beaucoup, puis ça a demandé beaucoup
de personnel administratif, hein? On
cible beaucoup les établissements qui devraient réduire le personnel
administratif, et les nombreux contrôles et les demandes de rapport se font par le personnel administratif. Donc, il
y a 112 rapports différents qui sont demandés par le ministère. Il
y en a 10 qui ne portent que sur les ressources humaines.
Il y a eu un travail qui a été fait avec le
ministère et les agences pour regarder l'ensemble des documents, justement, là,
de reddition de comptes pour tenter de l'alléger. Malheureusement, pour le
moment, on n'a pas vu les résultats. Et puis
là on se retrouve avec le projet de loi n° 10 qui diminue le nombre de
paliers décisionnels. Peut-être que ça va
réduire les nombreux rapports de reddition de comptes, parce qu'il en faut, il
en faut sur nos budgets, il en faut sur les ressources, il en faut sur
les ressources informationnelles, et tout ça, mais effectivement il y a un
travail à faire pour alléger et faire en
sorte qu'on n'alourdisse pas davantage. Et on souhaite que le projet de loi
n° 10 ne vienne pas non plus alourdir
davantage. Même si on enlève un palier, qu'on dit, les agences, il reste que ça
va sembler, à ce jour, être encore assez
lourd, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de demandes de reddition de comptes
qui vont devoir se faire au ministère. Et
nous, on souhaite que ça puisse être allégé, effectivement, là, et on est très
ouverts à travailler avec le ministère à regarder qu'est-ce qui est essentiel pour eux sans alourdir
sur le plan administratif, surtout que, là, vous savez, indépendamment
du projet de loi n° 10, déjà à
partir du mois de juillet dernier, les établissements avaient reçu comme
indication de réduire de 1 300
le personnel cadre d'ici les trois prochaines années, de réduire... Ça s'ajoute
au projet de loi n° 100 qui avait prévu une diminution de
10 % du personnel administratif. Donc, il y a de moins en moins de gens,
sur le plan administratif, capables de
remplir tous ces rapports-là. Ce qu'on veut, dans le réseau de la santé, c'est
d'avoir du temps pour soigner les personnes
et pas pour remplir de la paperasse. Donc, on est très ouverts à regarder avec
le ministère comment alléger ces contrôles-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
Une voix : ...
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Groulx.
M. Surprenant : Combien de temps...
Le Président (M. Bernier) :
Environ deux, trois... Trois minutes, tiens.
M.
Surprenant : Excellent.
Alors, Mme Lavallée, dans votre mémoire à la page 11, il est question,
dans le haut, que «les établissements ont procédé au cours des
dernières années à des exercices de réorganisation du travail. Plusieurs
de ces derniers visaient à dégager les
intervenants cliniques — ce qu'on apprécie et puis donc... — de certaines tâches administratives afin qu'ils se consacrent à ce
qu'ils font de mieux : donner des services de santé et des services
sociaux à la population. [Par contre, cela a] mené à la création de
postes de soutien administratif.»
Alors, je
voudrais que vous m'expliquiez en 30 secondes, une minute, là, quel a été
l'impact au niveau de l'efficience
des services donnés à la population? Pour nous, c'est très important d'essayer
de réduire la taille du système pour qu'il y ait le plus de services
possible. Quel a été l'impact de cette mesure-là, s'il vous plaît?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Lavallée.
• (18 h 30) •
Mme
Lavallée (Diane) : ...des
exemples, je pourrais donner
l'exemple que, dans certains établissements, le fait d'avoir libéré des infirmières et des travailleurs sociaux, notamment,
de tâches administratives parce qu'on
les a confiées à du personnel
administratif, ça a permis à ces cliniciens-là de voir beaucoup plus de
personnes. Donc, la population en a bénéficié, il a pu y avoir une
augmentation du nombre de cas suivis par ces infirmières-là en soins à domicile
ou des travailleurs sociaux. Certains ont pu
voir doubler et même tripler le nombre de personnes qu'ils pouvaient suivre par
semaine parce qu'on les a dégagés de tâches administratives. Ça, c'est
de la bonne gestion.
Et puis, oui,
ça a pu augmenter quand même le nombre de personnel administratif, mais, si ça
a pu dégager du personnel clinique
pour voir plus de patients, en bout de piste, ça n'a pas coûté plus cher puis
ça a augmenté le nombre de services à la population. C'est ce type de choix là ou de marge de manoeuvre
là dont disposent les gestionnaires qu'on souhaite pouvoir conserver.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Surprenant : Une dernière question. Plus bas, dans le deuxième... le
même paragraphe de la même page, vous dites :
«Tout récemment encore, le ministère de la Santé et des Services sociaux a émis
une directive en matière de cadres-conseils
et de nomination de cadres supérieurs.» Alors, vous dites que c'est «une
démarche de microgestion, et nous souhaitons ardemment qu'il fasse
preuve de retenue en la matière».
Alors,
par contre, dans ce cas-ci, là, j'aimerais ça que vous me disiez : Est-ce
que ça a eu un impact sur les services, sur le fonctionnement ou en fait
on a gagné, encore là, en efficience?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Lavallée.
Mme Lavallée (Diane) : Bien, écoutez, pour le moment, toutes les
directives, là, puis les gels d'embauche de cadres supérieurs, bien, je pense, c'était prévu, on attendait le projet
de loi n° 10. Donc, c'est clair qu'il ne peut pas y avoir des augmentations de cadres quand on prévoit une
fusion puis une diminution du nombre d'établissements. Et puis, les 1 300 cadres qui seront coupés dans les
trois prochaines années, là, je ne suis pas en mesure de vous dire quel sera
l'impact, puis ça va se faire dans le
cadre de la réorganisation de tout le réseau. Donc, ce sera à moyen et long
terme qu'on sera en mesure de voir l'impact, là, de toutes ces
réductions-là de personnel d'encadrement.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, Mme Lavallée.
Merci, M. Bouchard. Merci, M. Perras, d'avoir participé à
cette commission parlementaire.
Avant
de suspendre, je peux vous informer que vous pouvez laisser vos choses sur les
tables, les portes seront barrées.
Et
vous aviser que nous reprendrons... Je suspends jusqu'à 19 h 30. Et
je vous prie d'être à l'heure, s'il vous plaît, pour que nous puissions
rencontrer le groupe suivant. Merci.
(Suspension de la séance à
18 h 32)
(Reprise à 19 h 30)
Le
Président (M. Bernier) : Alors, bonsoir à vous tous. Bienvenue à la Commission parlementaire des finances
publiques sur l'étude... les consultations sur le projet de loi n° 15.
La
commission, voici l'ordre du jour pour ce soir. Nous entendrons tout d'abord
l'Université du Québec — bienvenue, les gens de
l'Université du Québec, on aura l'occasion d'échanger ensemble tout à
l'heure — la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et la Fédération
étudiante universitaire du Québec.
Je souhaite la
bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, comme je vous l'ai
mentionné, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que
vous disposez d'un total de 10 minutes pour faire votre exposé — je vais vous faire un petit signe à la fin,
quand il restera une minute, de façon à conclure — et nous allons passer par la suite
aux échanges avec les parlementaires. Donc, si tout ça est bien compris, je
vais vous donner la parole immédiatement. Allez-y, Mme Proulx... Mme Beauchamp,
Beauchamp.
Université du Québec (UQ)
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Beauchamp, c'est ça. Alors, bonsoir, tout le
monde et surtout les parlementaires. Alors,
je me présente : Sylvie Beauchamp. Je suis la présidente du réseau de
l'Université du Québec. M'accompagnent ce soir pour discuter avec vous
M. Daniel Coderre, qui est le chef d'établissement à l'Institut national
de recherche scientifique; Mme Johanne
Jean, la rectrice à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue;
M. Robert Proulx, le recteur de
l'Université du Québec à Montréal; Mme Nadia Ghazzali, la rectrice de
l'Université du Québec à Trois-Rivières; M. Nelson Michaud, qui est le directeur général de l'École
nationale d'administration publique. Et, avec nous également et qui pourra également intervenir, M. Pierre
Dumouchel, qui est derrière nous, qui est le directeur général de l'École de
technologie supérieure.
Alors,
je vais essayer d'être brève pour nous laisser le temps d'échanger sur cet
enjeu majeur pour le réseau de l'Université
du Québec. Alors, on s'exprime tous au nom des 10 établissements, et ces
10 établissements sont donc des universités
autonomes, dotées de leurs propres instances, conseil d'administration,
commission des études, donc instances de
gouvernance. Je répète pour le bénéfice de tous les membres de la commission
que le réseau est formé de l'Université du Québec à Montréal, de l'Université du Québec à Trois-Rivières, de
l'Université du Québec à Chicoutimi — qui ne pouvaient pas être présents ce soir — de l'Université du Québec à Rimouski — qui n'est pas ici ce soir non plus — de l'Université
du Québec en Outaouais; on l'a dit, de l'Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue, de l'ENAP, de l'INRS,
de l'École de technologie supérieure et de la Télé-université, qui ne nous
accompagne pas mais qui est de tout coeur avec nous. Alors, c'est un...
Le Président (M. Bernier) : ...
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Pardon?
Le Président (M.
Bernier) : Le Québec au complet.
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Oui, voilà. Alors, c'est un réseau qui est
implanté, comme vous venez de le dire, M. le Président, sur tout le
territoire québécois, en région rurale, en région urbaine, fortement ancré dans
les milieux professionnel, industriel,
socioéconomique et d'affaires. Ce sont des établissements qui se sont
développés au cours des 50 dernières années et qui ont développé
des créneaux d'excellence en formation et en recherche. Ces créneaux sont reconnus sur la scène nationale et sur la scène
internationale. Ensemble, ces établissements représentent
96 000 étudiants, 600 000 diplômes décernés,
11 000 employés réguliers, dont 7 000 professeurs et
chargés de cours.
Les
établissements de l'Université du Québec estiment que leur inclusion dans le
champ d'application de la loi représente
une pression administrative qui n'a pas de valeur ajoutée pour l'État. Cette
loi risque d'entraver leur capacité à fournir des services
universitaires de haute qualité à l'ensemble des citoyens et, encore une fois,
sur tout le territoire québécois. Les chefs
d'établissement et leurs communautés craignent que cette décision ne contribue
à l'idée d'un système universitaire à
deux vitesses, ce que le Québec et le gouvernement du Québec se sont toujours
efforcés d'éviter jusqu'à présent.
Une telle situation aurait de lourdes conséquences pour le développement du
Québec, notamment dans ses régions mais également en région
métropolitaine.
Les questions que
nous soulève ce projet de loi : Quel est le gain, pour le gouvernement, de
l'inclusion de l'Université du Québec dans le champ d'application de ce projet de loi et pas les autres? Pourquoi hypothéquer le développement de la moitié des universités québécoises présentes,
encore une fois, sur tout le territoire?
Le
projet est un obstacle au développement de la moitié des universités québécoises,
encore une fois, sans que nous croyions qu'il y ait une
valeur ajoutée. Et la question est : Pourquoi?
D'abord,
le dénombrement des effectifs des universités au gouvernement est déjà fait, en ce qui nous concerne, une
fois par année en vertu de la Loi sur l'Université du Québec, avec le dépôt des budgets, qui sont accompagnés
aussi des plans d'effectifs. Alors, nous transmettons annuellement ces
informations.
Ensuite,
parce que le financement qui contrôle les embauches et le financement de
fonctionnement, ce financement est normé en fonction de critères qui
sont bien établis et qui sont prévus dans les règles budgétaires qui
s'appliquent à toutes les universités. Le véritable enjeu, pour les
établissements de l'Université du Québec, c'est bien davantage l'embauche de spécialistes, de professeurs, de
chercheurs de haut calibre et en nombre suffisant. Or, le projet de loi crée
déjà une incertitude sur nos communautés qui
pourrait entraîner des mouvements dans le milieu de la recherche notamment.
Le
projet de loi risque de nuire à la réputation des établissements du réseau de
l'Université du Québec et à leur capacité
à obtenir des financements de recherche et à attirer les meilleures ressources.
Pour, donc, attirer ces meilleurs professeurs,
chercheurs et étudiants, il faut que les étudiants... il faut que les
universités puissent leur offrir des perspectives d'avenir, il faut qu'ils puissent choisir et
saisir des occasions de recrutement, de financement et de partenariat en fonction
d'une vision à long terme.
Le
projet de loi, malheureusement, n'est pas adapté à un milieu universitaire.
Premièrement, il vient encadrer le droit d'engager à contrat. Les
chargés de cours sont engagés à contrat. Qu'est-ce qu'on fait des chargés de
cours?
Deuxièmement,
le contrôle des effectifs, dans la moitié des universités, et en respectant les
conventions collectives, introduit
des déséquilibres entre les corps d'emploi en raison des dispositions de
certaines conventions collectives en regard des planchers d'emploi et entre les établissements, parce que certains
établissements ont des planchers d'emploi, d'autres n'en ont pas. Alors,
on aura à composer avec des contraintes qui sont différentes sur le contrôle
des effectifs.
Qu'est-ce qu'on fait des professeurs, des
responsables de recherche engagés à partir des subventions ou des contrats
de recherche obtenus par les chercheurs?
C'est comptabilisé dans un autre fonds que le fonds de fonctionnement. Il y a
là une entrave importante au
développement de la recherche, qui est massivement subventionnée, on le sait,
par le gouvernement fédéral, et donc c'est une contrainte additionnelle.
La
recherche se fait beaucoup en partenariat, et les partenariats de recherche
deviendront asymétriques en raison du
contrôle des effectifs dans certains établissements seulement. Il faut
comprendre qu'on ne travaille pas seulement entre nous, mais qu'on travaille aussi avec les autres
établissements, les autres universités qui ne sont pas concernées par la loi.
L'inclusion de l'Université du Québec et de
ses établissements dans le champ d'application de la loi menace des créneaux
de recherche d'importance pour le
Québec : la stratégie maritime, le Plan Nord, les ressources naturelles
comme les mines, la mer et la forêt boréale.
En
conséquence, MM. les parlementaires, les chefs d'établissement de l'Université
du Québec recommandent d'exclure
l'Université du Québec du champ d'application de la loi, d'exclure aussi
l'Université du Québec du périmètre comptable du gouvernement et
d'alléger la reddition de comptes, qui est déjà très lourde.
Est-ce que j'ai
respecté mon temps, M. le Président?
Le
Président (M. Bernier) : Vous l'avez très bien respecté. Merci
infiniment de votre présentation. Donc, sans plus tarder, nous allons
passer du côté ministériel avec M. le ministre. La parole est à vous.
M.
Coiteux : Merci beaucoup, madame... — excusez-moi, c'est parce que j'ai les noms
ici, là — Mme Beauchamp.
Merci beaucoup, donc, Mme Beauchamp.
Puis je remercie en même temps toutes les autres personnes qui vous
accompagnent ce soir.
Il y a deux
aspects ici, parce que, dans vos recommandations, il y a la question de
l'application de la loi elle-même, mais
vous allez un petit peu plus loin en disant : On ne devrait pas faire
partie du périmètre comptable du gouvernement. Sur quelle base vous
diriez : On ne fait pas partie, on ne devrait pas faire partie du
périmètre comptable du gouvernement?
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Bien, en fait, écoutez...
Le Président (M. Bernier) :
Mme Beauchamp, oui.
Mme Beauchamp
(Sylvie) : Pardon. Excusez-moi.
Le
Président (M. Bernier) : Ce n'est pas grave. Je vous l'ai dit
tout à l'heure, je vais simplement citer votre nom, et vous prenez la
parole, pour fins d'enregistrement. Allez-y.
• (19 h 40) •
Mme Beauchamp
(Sylvie) : Écoutez, on fait partie du périmètre comptable depuis 2007,
sur des bases qui, justement, ne sont que... — c'est important pour vous, j'en conviens — qui sont des recommandations de l'institut
canadien sur la comptabilité. C'est ça, MM. les comptables? Alors...
Une voix :
...
Mme Beauchamp
(Sylvie) : Les financiers et les comptables. Mais c'est basé
essentiellement sur le fait que l'Université
du Québec est créée à partir d'une loi publique. Or, nous sommes subventionnés
de la même façon que toutes les autres universités.
Et
le gouvernement nomme les chefs d'établissement mais à la suite d'un long
processus. Les critères qui ont été utilisés, à notre avis, ne sont pas
pertinents dans le cadre d'une mission universitaire.
Peut-être que mes
collègues veulent ajouter. Peut-être... Excusez-moi. Peut-être M. Michaud.
Le Président (M.
Bernier) : M. Michaud.
M.
Michaud (Nelson) : Merci beaucoup. En fait, ça ajoute une couche de
plus de reddition de comptes qui est soit
répétitive avec d'autres éléments qui existent... Ne serait-ce qu'en termes
d'états financiers, on est obligés de donner des états financiers qui sont... là ils devront être trimestriels, alors
que dans le monde universitaire, par exemple, les choses sont relativement prévisibles : on dépose un
budget à notre conseil d'administration, il y a un budget révisé qui est déposé
six mois plus tard, approuvé par le conseil d'administration,
et il y a les états financiers qui sont vérifiés par une firme une fois l'année terminée. Et on doit avoir
différents... Il y a les livres bleus, les livres blancs, les livres rouges.
Enfin, il y a toute une série de redditions de comptes qui existe. Et
cette reddition de comptes, vous avez tous vu l'espèce de graphique monstre qui a été préparé, cette
reddition de comptes s'est complexifiée par sédimentation. Et cette décision
de 2007 est une couche sédimentaire
supplémentaire qui ajoute une reddition de comptes pour des éléments qui sont
souvent fournis, par ailleurs.
Ce n'est pas qu'on
s'oppose à la reddition de comptes, au contraire, je pense qu'en tant
qu'organisme public nous sommes extrêmement
soucieux de rendre compte de ce que nous faisons avec les deniers publics.
Mais, ceci étant dit, le dire à
répétition... Et surtout plusieurs de ces éléments de reddition de comptes
tombent un peu dans une zone vide, parce que les ministères n'ont pas toujours
les ressources pour les traiter, nous donner une rétroaction qui nous
permettrait d'agir. Alors, on se
dit : On est mieux d'avoir une reddition de comptes plus ciblée, plus
adéquate et à partir de laquelle on pourra améliorer notre gestion,
plutôt qu'une série de redditions de comptes qui est moins efficace et
efficiente.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous dites que vous avez des planchers d'emploi dans
certaines unités de l'Université du Québec et pas dans d'autres. C'est en vertu des conventions collectives qui
sont différentes d'un établissement à l'autre, c'est ça?
Mme Beauchamp
(Sylvie) : Exactement. M. Proulx, peut-être.
Le Président (M.
Bernier) : Mme Beauchamp. Mme Beauchamp, oui.
M. Proulx
(Robert) : ...nous, on...
Le Président (M.
Bernier) : M. Proulx.
M. Proulx
(Robert) : Pardon. Oui? Ça va?
Le Président (M.
Bernier) : M. Proulx.
M. Proulx (Robert) : Oui. Nous, on en a au niveau de la convention collective avec notre
corps professoral, qui détermine un
plancher d'emploi en fonction du nombre d'étudiants, tout ceci pour appliquer
des règles souhaitables en termes de
taille des groupes-cours, et ainsi de suite. Donc, ça veut dire que, chez nous,
si nos étudiants augmentent, le budget
augmente, les postes de professeur augmentent par le même fait, c'est dans la
convention collective. Dans d'autres universités, ce n'est pas le cas.
Et aussi un
des problèmes que ça cause, c'est que, ceux-ci étant conventionnés, bien ce
n'est pas le cas dans le cas des employés
de soutien et ce n'est pas le cas dans d'autres corps d'emploi, ce qui veut
dire qu'à un moment donné, pour appliquer certaines règles plutôt arbitraires, qui n'ont rien à
voir avec notre fonctionnement, bien on se retrouverait avec des déficits, des capacités de... On ne
pourrait pas compléter par le personnel de soutien, puisqu'il faudrait suivre
la convention collective pour les embauches
de profs, et ça ne suivrait pas au niveau des employés de soutien, s'il y
avait, par exemple, des règles qui feraient
qu'on serait tenu à ne pas augmenter le nombre de ressources, les effectifs, et
ainsi de suite.
Alors, ça,
c'est un exemple d'où s'applique un plancher d'emploi. Ailleurs, ça pourrait ne
pas s'appliquer, dans une autre
université, qui se trouverait par le même fait favorisée, et ainsi de suite.
Alors, il y a des problèmes d'application au niveau des... en respectant
les conventions collectives.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Beauchamp, vous voulez ajouter?
Mme
Beauchamp (Sylvie) : M. Coiteux, est-ce que je peux ajouter un exemple
qui peut-être va illustrer comment ça
fonctionne, le périmètre comptable? Le Vérificateur général fait l'audit de
l'UQAM. Les états financiers du réseau de
l'Université du Québec sont consolidés pour l'ensemble du réseau, j'ai donc un
auditeur indépendant qui vérifie le consolidé.
Ensuite, donc, mon auditeur
indépendant me dit : L'UQAM est vérifiée par le Vérificateur général, c'est une entité importante,
donc, moi, auditeur indépendant, d'après mes règles, il faut que je vérifie
l'UQAM qui a été vérifiée par le Vérificateur général. Là, quand j'entre dans le périmètre comptable, le Vérificateur général me dit : Ah! bien là vous êtes
un élément du périmètre comptable, alors le Vérificateur général va
vérifier mon auditeur indépendant qui a vérifié le Vérificateur général
à l'UQAM. Alors, c'est compliqué.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Ghazzali, vous vouliez ajouter?
Mme
Ghazzali (Nadia) : Oui, je
voulais juste revenir un peu sur le plancher d'emploi. Donc, sans rentrer dans
les spécificités, ce qu'a dit mon collègue
Robert Proulx, c'est que ça crée une iniquité à l'intérieur même de l'établissement en plus de créer une iniquité entre les établissements, dans le sens...
Moi, par exemple, les profs sont... on a un plancher d'emploi qui est fonction du nombre d'ETP. Si les 30 ETP... je suis obligée d'ouvrir
un poste de professeur. Et je ne l'ai pas pour les autres corps de métier. Alors, qu'est-ce qui va se passer? Ce
qui va se passer, c'est que je suis obligée en vertu de la convention collective, et d'après le projet de
loi, l'article 33, de respecter la convention collective, et auquel cas,
bien, je ne pourrai pas embaucher des employés de soutien ou
des professionnels, parce qu'ils ne sont pas régis par un plancher d'emploi.
Donc, vous
comprenez, on ne peut pas, dans une université, n'avoir que des professeurs,
vous le comprenez très bien. Il faut du personnel de soutien. Il faut
les professionnels, les techniciens. Donc, ça nous met dans une situation
intenable, entre autres l'article 33.
Le Président (M. Bernier) :
M. Proulx.
M. Proulx
(Robert) : Oui. Bien, pour
terminer, sur le périmètre comptable aussi... Je ne répéterai pas ce que mon
collègue M. Michaud a dit, mais
simplement pour vous expliquer aussi une autre réalité. L'UQAM, qui est
50 % du réseau de l'Université du Québec, est une université
métropolitaine, à Montréal. Elle a été créée pour satisfaire un besoin de démocratisation du savoir et elle a fait sa job.
La preuve, c'est que, dans les derniers temps, on a eu le colloque... on a eu
les prix de l'ACFAS : sur sept prix,
quatre l'étaient à l'UQAM, puis le huitième qui était au cégep, l'autre,
travaillait avec les gens de l'UQAM. Donc, on est présents.
Et j'insiste beaucoup, dans le développement de
mon université, sur la collaboration interuniversitaire montréalaise, parce qu'on veut lancer Montréal comme métropole
canadienne, comme l'est Boston, au niveau du rayonnement par les
universités, à travers les universités. Alors, vous comprendrez que, quand on
est dans le milieu montréalais, bien je
travaille avec des... j'ai des programmes conjoints avec McGill, j'en ai avec
Concordia, j'en ai avec l'Université de Montréal, on a des centres de
recherche partagés, en commun, et tout ça nous amène à réaffecter nos ressources de façon collective. Et, s'il se
retrouve, à un moment donné, que nous, à cause qu'on est soumis à des
procédures particulières, compte tenu qu'on est dans le périmètre
comptable, compte tenu qu'on est sous le couvert d'une loi, auxquelles les autres universités ne sont pas,
bien, à ce moment-là, ça va détruire ce processus-là. Et il y a tout intérêt,
à Montréal — j'insiste
toujours là-dessus — à
ce qu'on parle en termes de pôle universitaire et non pas en termes d'universités chacune dans son coin. Et ces
contraintes-là qui ne devraient pas exister parce qu'elles n'existent pas pour
la moitié des universités, elles existent
juste pour l'autre moitié, bien, nous forcent à ne pas être capables de
travailler en collaboration avec nos partenaires montréalais, qui,
d'autre part...
Souvent, je
pense au Geotop chez nous. Bien, c'est nous qui avons créé le centre. Je pense
à toutes sortes d'initiatives en recherche qui ont été lancées par
l'Université du Québec à Montréal, auxquelles s'est joint McGill et Montréal,
puis à un moment donné on se retrouve dans une situation où, à cause d'une
série de règles de reddition de comptes, et de façons de faire, et des
capacités qu'on a ou qu'on n'a pas d'allouer nos ressources, tout en rendant
des comptes de façon très, très, très
claire, de la même façon que les autres universités, bien on se retrouve à
s'exclure de ce pôle-là et à ne pas
faire profiter l'ensemble du réseau de l'Université du Québec de tout ce qu'on
pourrait développer dans la métropole.
Alors, dans
ce sens-là, ça ne fait pas de sens qu'on soit dans le périmètre comptable, pour
la même raison que ça ne fait pas de
sens pour les autres universités, et ça ne fait pas de sens qu'on soit soumis à
la loi sur les effectifs qui est ici présente. C'est pour ça qu'on vous
dit qu'on veut, les deux...
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : J'imagine que vous avez des... Les données dont vous
disposez, vous avez combien de professeurs, vous avez combien de chargés de cours, vous avez combien d'employés de
soutien, vous avez combien de gens qui travaillent dans la partie
administrative, ça, ces données-là, vous les avez dans l'ensemble du réseau de
façon très détaillée?
Mme Beauchamp (Sylvie) : On vous les
transmet annuellement.
M.
Coiteux : Oui. Comment ça a évolué globalement pour ces différentes
catégories là au cours des dernières années?
Le Président (M. Bernier) :
Mme Beauchamp.
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Mme Boucher, est-ce que vous voulez répondre
à ça? Ou madame... M. Roy? Je vais demander à M. Roy de se
joindre à nous si...
• (19 h 50) •
Le
Président (M. Bernier) : Bon, bien, regardez, M. Roy peut se joindre à... Il y a
une chaise de libre avec un micro, si vous voulez prendre place. Ça va
faciliter les choses.
M. Roy (André G.) : Alors, bonsoir.
Le Président (M. Bernier) :
Bonsoir, M. Roy.
M. Roy (André G.) : André Roy,
secrétaire général de l'Université du Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Allez-y.
M. Roy (André G.) : Alors, dans le
cadre du mémoire, on vous a fourni certaines données qui portent sur les années 2008 à 2013. Donc, vous voyez que, pour
l'ensemble des employés, la hausse se situe à 11,6 %; pour ce qui est
des professeurs, 12,4 %; et le
personnel non académique, 11,2 %. Ça, donc, c'est pour les cinq dernières
années. Et ça, on a des données qui vous sont fournies annuellement
depuis que la loi de l'Université du Québec existe, près de 50 ans.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Suivant les courbes que j'ai ici à la figure 2, là, les
12,4 %, 11,6 %, 11,2 %, ça, c'est cumulatif sur la
période, c'est ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Roy.
M. Roy (André G.) : Oui, exactement.
Ça reflète l'augmentation.
M. Coiteux : O.K. Donc, grosso modo...
M. Roy (André G.) : ...à partir de
2008.
M.
Coiteux : Selon les catégories, là, il y a un 2 % de croissance
par année des différentes catégories, grosso modo, là, si on...
M. Roy
(André G.) : Grosso modo. Et
vous pouvez constater, un petit peu comme le disaient les recteurs, les chefs d'établissement, que la croissance se fait
en fonction du corps professoral, selon les effectifs étudiants. Vous avez
également les données qui ont été soumises à
l'intérieur du mémoire, mais on voit également que le personnel de soutien,
professionnels, techniciens et autres ont dû
également voir leur courbe augmenter pour pouvoir répondre aux besoins des
étudiants.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. Roy. M. le ministre. Lequel des collègues veut prendre la
parole?
Une voix : ...
Le Président (M. Bernier) :
Oh! Allez-y, M. Proulx.
M. Proulx
(Robert) : Oui, juste un
petit renseignement au passage, parce que nous aussi, on a toutes nos données
sur les employés. Exemple, dans les
dernières années, la croissance du corps professoral, on était dans le contexte
de la loi n° 100, alors on
a été obligés d'embaucher, je pense que nos surnuméraires ont monté d'à peu
près 20 %, 30 % d'un seul
coup parce qu'on n'était pas capables d'aller plus loin, ce qui étaient des
postes parfaitement justifiés et qui étaient parfaitement comptabilisés,
il n'y avait aucun problème, là. Le problème, c'est que, comme je disais tout à
l'heure, quand on est en collaboration avec
d'autres universités qui ont des ressources stables, et ainsi de suite, bien
nous, on a des surnuméraires, nos
surnuméraires disparaissent quand ils ont un poste ailleurs, et ainsi de suite,
et on se trouve défavorisés par l'application. C'est un exemple précis, ça, de
résultat dû uniquement au fait qu'on est inscrit dans le périmètre comptable
gouvernemental.
Le Président (M.
Bernier) : M. Coderre.
M.
Coderre (Daniel) : Je ne veux pas allonger inutilement la réponse,
mais je pense qu'il y a un autre volet qui est important. Vous savez que, dans les universités, il y a deux
missions essentielles, celui de la formation mais aussi celui de la recherche, et l'augmentation de plusieurs...
En tout cas, chez nous, à l'INRS, c'est très clair, l'augmentation de nos
personnels est fonction de nos succès, de nos succès évalués par les pairs dans
les subventions de recherche que nous obtenons,
dans les contrats de recherche que nous avons avec l'industrie. Et, dans ce
sens-là, il y a une évolution, effectivement, qui se fait, mais qui se fait avec l'excellence que l'on peut développer
dans les universités. Et je pense que, pour le réseau de l'Université du
Québec, cette croissance-là du côté de la recherche a été très grande, et ça
explique une partie des augmentations de
personnel que nous avons, et qui sont financées non pas sur le budget de
fonctionnement classique de l'université mais sur celui des financements
de recherche que nous obtenons au mérite.
Le Président (M.
Bernier) : Oui, Mme Beauchamp.
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Je voudrais juste préciser ad hoc sur la hausse
des effectifs employés, parce que, dans
notre vocabulaire, les effectifs, aussi, c'est les effectifs étudiants. Alors,
si vous calculez peut-être une augmentation de 2 %, la hausse du nombre d'étudiants est beaucoup plus élevée
que 2 % par année, donc on fait déjà beaucoup à l'intérieur des budgets qui nous sont alloués. Et, vous le
savez, on a les mêmes contraintes que tout le monde, des budgets qui sont
réduits par rapport aux capacités de l'État.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Oui, monsieur. En vous identifiant.
M.
Dumouchel (Pierre) : Pierre Dumouchel. Je suis le directeur général de
l'École de technologie supérieure. Puis
on est une école monofacultaire en génie, et nous, on a connu une croissance
assez phénoménale au cours des dernières années. L'année dernière, on a eu une croissance de 9,3 % du nombre
d'ETP. Et on a de la difficulté à suivre la croissance des étudiants, notre effectif ne suit pas cette
croissance des étudiants, on est en manque de professeurs. Actuellement, je
suis à 68 % de chargés de cours dans
mon école. Et la demande... la croissance est encore là, parce que la meilleure
métrique que j'ai pour évaluer cette
croissance-là, la possibilité de croissance là, c'est le ratio du nombre de
stages offerts par les industries et
nos stagiaires, et, dans des domaines comme le génie logiciel, j'ai trois fois
plus de stages qui est offert par les industries que d'étudiants que je
peux placer, en électrique c'est 3,5 fois plus de stages offerts et, dans
le domaine manufacturier, c'est 7,5 fois plus, en génie de la production
automatisée.
Donc,
il y a une place à la croissance, mais il faut que j'aie la possibilité
d'engager les meilleurs professeurs. Et ça, on est dans un milieu hypercompétitif, et il faut qu'on soit très
rapides pour aller chercher le meilleur professeur. Même dans nos
processus internes, il faut être très rapides, parce qu'on peut perdre
l'embauche d'un bon professeur.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre, vous avez une trentaine de secondes
pour terminer.
M. Coiteux :
Une trentaine de secondes pour terminer? Oh!
Qu'est-ce
qui s'est passé en 2013 pour qu'il y ait un bond aussi spectaculaire du nombre
de professeurs? Parce que, là,
c'était comme une très petite augmentation cumulative, jusque-là, on était
rendu à 3,2 % en 2012, puis subitement on passe à 12,4 %.
Une voix :
Les conventions collectives.
M. Proulx
(Robert) : Nous, on a eu un boom au niveau des professeurs parce que...
Le Président (M.
Bernier) : M. Proulx, oui. Allez-y, M. Proulx.
M. Proulx (Robert) : Oui. Nous, on a eu une croissance très importante du corps professoral
parce que, dans le passé, les
quelques années qui avaient précédé, on avait gelé complètement les postes de
prof, et donc on s'est retrouvé avec
un problème énorme au niveau de répondre à la demande. Et je pense qu'on a
embauché... À un moment donné, on a embauché
au rythme d'une centaine de profs par année. Alors, c'est probablement... Ça,
c'est les données de l'ensemble du...
M. Coiteux :
...période de gel, et là... Bon, vous avez déjà vécu des périodes comme ça.
M. Proulx (Robert) : Oui. Oui, une longue période de gel. À cause des budgets qui ne
suivaient pas puis... Oui.
M. Coiteux :
O.K. Merci.
Le Président :
Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député
de Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je vous souhaite bienvenue à tous, très content de vous
voir ici. Très rapidement, je vais poser
quelques questions. Ensuite, je laisserai la parole à mes collègues, qui ont
des questions également.
À la
page 10, vous parlez de concurrence, que le projet de loi n° 5
vous met en situation difficile par rapport à la concurrence. Entre
autres par rapport au dénombrement, ça va vous amener des lourdeurs administratives
qui vont augmenter les coûts du traitement
des dossiers, ainsi de suite. Mais qu'en est-il du contrôle des effectifs? On
est plus ou moins au courant, là,
actuellement, de ce qui va arriver avec les contrôles, on sait que probablement
qu'il y aura un gel. Qu'est-ce qui
peut arriver au niveau de votre compétitivité par rapport aux autres
universités si on arrive avec un contrôle des effectifs?
Le Président (M. Bernier) :
M. Coderre.
M. Coderre (Daniel) : En tout cas,
en ce qui concerne le volet recherche, il est évident qu'on est dans une situation de compétition, c'est vrai, mais aussi
de performance. Dans le réseau de l'Université du Québec, mon université
particulièrement, on est classé premier ou deuxième au Canada année après année
en termes d'intensité de recherche. Il est
évident que, si des contraintes comme celles-là nous sont données, ça veut dire
que nous, on manque des opportunités où
on aurait des financements, où on aurait des financements de chaire de
recherche, par exemple, ou de chaire industrielle en partenariat avec
l'industrie et où on serait contraints de dire non.
Je vais vous
donner un exemple très simple, là. On vient de recruter un jeune chercheur qui
est dans le laboratoire d'un prix Nobel en Californie. Si j'avais eu ce
projet de loi, si j'avais eu cette contrainte des effectifs, j'aurais été obligé de dire à cette personne : Désolé, tu
ne viendras pas à l'INRS cette année. Et ce chercheur est venu chez nous parce
qu'on avait une infrastructure, on a gagné
un financement d'une grande infrastructure de recherche de 20 millions de
dollars, financée par le gouvernement
fédéral mais par le gouvernement du Québec, et on aurait dit : Désolé,
mais tu ne viendras pas.
Pour nous,
là, la réalité, en tout cas dans le secteur de la recherche, de ce type de
contrainte nous rend très fragiles. Et
cette fragilité, elle est constante. Moi, chez moi, je n'ai pas perdu de
professeur, j'ai perdu un ou deux professeurs en six ans, mais ce qui est en train de se comprendre actuellement, c'est
qu'au Québec ce n'est peut-être pas le meilleur endroit pour faire une carrière scientifique de haut
niveau. Et, moi, ça m'inquiète beaucoup. Ce n'est pas simplement ce projet
de loi, bien évidemment, mais ce sont une série de messages qui sont envoyés,
qui sont très bien perçus, pour des chercheurs qui peuvent être partout dans le
monde et qui ont choisi le Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. Proulx, vous vouliez...
• (20 heures) •
M. Proulx
(Robert) : Oui, bien je vais
renchérir sur ce qu'il vient de dire, exactement la même chose au niveau
de l'UQAM. Puis il y a une conséquence
supplémentaire aussi : j'ai des départements qui, actuellement, comme on
ne peut... Si on ne peut pas donner
plus de postes ou embaucher des gens lorsque ça s'applique, à ce moment-là les
gens vont ailleurs. Quand ils vont
ailleurs, les collègues partent de chez nous puis ils s'en vont ailleurs. Puis
rajoutez... Ça, c'est du côté de la recherche.
Du côté de l'enseignement et du côté de la formation, c'est exactement la même
chose, nos clientèles étudiantes sont
en croissance. Et, même si effectivement on a des baisses démographiques, on a
des étudiants internationaux. On
travaille fort et on peut quand même penser que nos clientèles étudiantes vont
continuer d'être en croissance. Et, à ce moment-là, si on n'est pas capables de suivre avec les ressources parce
qu'on est gelés au niveau des effectifs, bien ils vont aller ailleurs,
et là c'est l'université au complet qui va perdre sa capacité.
Quand on
parlait de concurrence sur le terrain, ce n'est pas vraiment de la compétition
interuniversitaire, mais, à un moment
donné, l'inéquité est telle qu'on se retrouve dans une situation où nous, on
dit non, et alors les gens vont ailleurs. Et, si les gens vont ailleurs,
les autres se développent, puis on disparaît. Alors, c'est... Et pourtant on...
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Sanguinet.
M.
Therrien : ...je
céderais la parole à mes collègues.
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Oui.
Alors, bonsoir à vous tous. Merci beaucoup pour votre présentation.
J'aimerais
savoir quel impact... Je pense qu'on vous entend très bien sur toute la
question du recrutement, de la rétention,
de la compétitivité, sur, je dirais, l'ensemble de l'oeuvre, du fait que vous
êtes dans le périmètre comptable, mais,
concrètement, que vous soyez compris dans ce projet de loi là sur le
dénombrement et, je dirais, le contrôle, par rapport aux autres universités, est-ce qu'il y a d'autres impacts? Par
exemple, bon, la fédération des professeurs nous a fait un plaidoyer
très, très fort sur l'indépendance, évidemment, académique et qu'eux seraient
assujettis donc à certaines entraves à
l'indépendance, ce qui ne serait pas le cas des universités à charte. Donc,
j'aimerais ça vous entendre sur ces deux aspects-là, je vous
dirais : vous par rapport aux autres et, deux, toute la question de
l'indépendance.
Le Président (M. Bernier) :
Alors, monsieur... O.K. Mme Jean.
Mme Jean
(Johanne) : Nous, par
rapport aux autres, je vais vous donner... Tantôt, Robert et Daniel ont donné
des exemples un peu plus urbains. Moi, c'est
une université située en région, je vais vous donner un exemple bien simple
de ce qu'on risque d'avoir comme obstacles.
On a un institut de
recherche sur les mines et l'environnement qui existe, on est en partenariat
avec l'École polytechnique. On vient de
signer une programmation de recherche qui a une valeur entre 15 à
20 millions. Mon principal partenaire,
c'est l'École polytechnique de Montréal. L'École polytechnique est mon
partenaire, lui, pour pouvoir engager, et
moi, qui est l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, je vais avoir un
frein au niveau de l'embauche à la fois du corps professoral, à la fois de professionnels de recherche ou de tout
autre personnel en soutien au niveau du développement de la recherche. À quelque part, il y a là une inéquité,
là, qui est très «basic», là, et qui est très opérationnelle, pour une institution comme la nôtre, et ça, on
peut le répéter dans beaucoup de domaines. Dans chacune des institutions,
on peut avoir un exemple semblable qu'on peut vous servir.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Madame... Oui, M. Proulx, vous voulez ajouter?
M. Proulx
(Robert) : À l'autre partie
de la question, qui était la question de l'autonomie, vous
savez, les universités sont fondées
sur l'autonomie universitaire. On a dû vous dire ça, à la FQPPU. Et c'est
normal et c'est partout dans le monde comme ça.
La capacité...
D'être capable de faire progresser la société à partir de l'innovation, ça
prend des gens qui disposent de
liberté académique, et la liberté académique, pour l'avoir, ça prend des
universités qui sont autonomes, c'est-à-dire
qu'elles sont capables de définir elles-mêmes
les plans pour arriver à atteindre leurs objectifs académiques. Et, dès
que certaines universités ne sont pas
soumises aux mêmes règles que d'autres — dans
le cas présent, c'est qu'on se retrouverait avec des règles supplémentaires qui font qu'on pourrait entraver — bien,
à ce moment-là, vous avez moins d'attrait au niveau
de cette université-là, tant pour le
corps professoral, tant pour les étudiants, et puis vous créez un système à
deux vitesses, où il y a
deux types d'université et où, à un
moment donné, les universités qui ne
disposent pas de cette autonomie — et
c'est le cas si on est dans le périmètre gouvernemental comptable et si
on est soumis aux exigences de la loi — bien,
à ce moment-là, on se retrouve dans une situation
où on est beaucoup moins attrayant parce que pas capable de mettre
en oeuvre l'autonomie universitaire nécessaire à créer des universités
innovantes, et ainsi de suite. Alors, dans ce sens-là...
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée.
Mme
Hivon : Je pense
que Mme la rectrice voulait ajouter quelque chose.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Jean, allez-y.
Mme Jean
(Johanne) : On a créé ce
réseau-là, on a créé le réseau de l'Université
du Québec il y a
plus de 40... presque 45 ans, et
on a toujours eu accès aux mêmes outils, aux mêmes
moyens, quelle que soit l'université, quel que soit son nom, quel que soit son lieu, quelle que soit
sa situation. Actuellement, le projet
de loi n° 15, tel qu'il
est, comme Robert l'a dit, crée vraiment
deux classes d'université. Là, on n'aura plus accès aux mêmes
moyens, aux mêmes outils pour pouvoir se développer. Quand on fait référence... Au niveau de la recherche, on a besoin d'être bons, d'être bons, pour obtenir des
subventions puis par la suite réussir à
recruter du personnel hautement qualifié et à former ce personnel-là. Avec le projet de loi, tel qu'il est là actuellement, on n'a pas accès aux mêmes
outils puis aux mêmes moyens pour pouvoir continuer à se
développer. Donc, c'est vraiment une cassure importante.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Oui, M. Dumouchel.
M.
Dumouchel (Pierre) : Oui. Quant à moi, j'ai un taux de placement de mes étudiants de 100 %. Puis tantôt je parlais que j'avais un potentiel de croissance.
Ce projet de loi là va faire en sorte que je vais réussir à avoir un potentiel
de... un taux de placement de 100 %,
mais je pourrais doubler ma clientèle étudiante et avoir toujours un taux de
placement de 100 % de mes
étudiants, pour les besoins socioéconomiques du Québec, et ça, on va rater
cette opportunité-là aussi.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, bonjour. Bonsoir, en fait. Question très simple et concrète. Vous avez
évoqué le fait que le fait d'appartenir au périmètre comptable du
gouvernement, ça implique une lourdeur administrative supplémentaire. Avez-vous déjà tenté de mesurer combien de
personnes ça représente, qui travaillent à faire cette reddition de comptes?
Puis, si vous avez la réponse, j'aimerais bien l'entendre, s'il vous plaît.
Le Président (M. Bernier) :
Bon. Qui prend la parole? Mme Ghazzali.
Mme Ghazzali (Nadia) : ...on ne les
a pas comptés, mais c'est parce que le problème...
M. Proulx (Robert) : Chez nous, on
les a comptés puis...
Mme Ghazzali (Nadia) : Ah! tu
voulais... Vas-y.
M. Proulx (Robert) : Non, non.
Vas-y, vas-y.
Mme
Ghazzali (Nadia) : Bien, moi, je n'ai pas le chiffre exact...
Le Président (M.
Bernier) : Chicanez-vous pas, je vais arbitrer.
Mme Ghazzali.
Mme Ghazzali
(Nadia) : Je ne l'ai pas chiffré exactement, mais je peux vous dire
qu'il y a quand même énormément d'efforts
qui sont faits pour faire la reddition de comptes. Et nous, on ne remet pas ça
en question. C'est la pertinence, le nombre incalculable de redditions
de comptes qui est à revoir.
Et,
quand ces gens-là sont concentrés à faire des rapports, et comme l'a dit... je
ne sais plus qui l'a dit, qu'on n'a pas
de feed-back par la suite, on ne sait même pas ce qu'il en est alors qu'on a
envoyé une quantité de rapports phénoménale, bien ils ne se consacrent
pas à autre chose, à la mission première. Donc, c'est ça, notre problème.
M. Proulx
(Robert) : ...30 % de plus dans les services des finances chez
nous, à l'UQAM, plus...
Une voix :
30 %?
M. Proulx (Robert) : ...30 %, oui, pour satisfaire... Parce qu'en plus il faut en faire
à plusieurs endroits, puis elles n'ont
pas les mêmes exigences, il faut tout rechanger nos comptabilités. Après ça, il
faut un cadre, il faut un cadre dans des
services comme le service de recherche. Et là on est loin, là, on n'embauche
pas des profs et des choses de même. Il faut un cadre parce qu'il faut
recalculer les questions de recherche pour que nos services des finances
comprennent qu'est-ce qu'ils vont mettre
dans les rapports financiers, pour qu'on puisse transmettre au niveau des
demandes qui nous sont faites, généralement par le gouvernement. Et ça,
ça arrive pour la recherche. Ça, ça arrive pour les services aux collectivités. Ça arrive pour deux services dans
la... Donc, on parle de postes, là, on parle de postes de personnes dédiées à
ça, uniquement à ça. Ça, ça veut dire...
Et on n'a pas le choix parce qu'on est soumis à des règles, et donc on ne peut
pas les éviter.
Alors,
ça, là, il y aurait une diminution énorme de dépenses si on était dans un mode
où on serait capable de faire les mêmes démonstrations... On passe à
tous les ans. Moi, j'aime ça quand je viens ici. Et je dis : Je suis
content que l'Assemblée nationale reçoive le
rapport de l'Université du Québec à Montréal, parce qu'on est capable de dire
ce qu'on fait avec l'argent qu'on a, et c'est parfaitement justifié. Et
on n'a pas besoin de ces complications qui sont changer le formulaire untel
pour l'autre formulaire untel, et ainsi de suite, qui nous coûte énormément
d'argent.
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Nous allons continuer
avec la deuxième opposition. M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous
souhaiter la bienvenue. Je suis bien content de vous rencontrer.
On était rendus au...
Bien là, je reviens à qu'est-ce que mon confrère le député de Rousseau disait.
30 % des personnes sont dédiées... Je ne
veux pas... mais je veux être sûr d'avoir bien compris. 30 % des personnes
sont dédiées à la reddition de comptes?
Le Président (M.
Bernier) : M. Proulx.
M. Proulx
(Robert) : Dans le service des finances, dans le...
M.
Spénard :
Dans le service des finances.
M. Proulx
(Robert) : Oui, c'est ça. Mais ça cause le reste aussi.
Le Président (M.
Bernier) : Mme Beauchamp.
Mme
Beauchamp (Sylvie) : M. le député, si vous voulez un autre exemple,
quand on fait des états financiers — les spécialistes
en comptabilité vont corroborer ça — maintenant on fait les états financiers...
Avant ça, on le faisait selon les
règles du ministère. Maintenant, on les fait PCGR, mais il faut les traduire
dans la comptabilité gouvernementale. Ça n'a pas de valeur autre. Puis la façon de le présenter n'est pas la
même. Ça fait qu'il faut qu'on reprenne nos états financiers puis on les
traduise dans un autre langage comptable.
Et,
même à cet égard-là, par rapport à la comparabilité des établissements, on a
comme une exception qui nous est donnée
par le ministère, parce que normalement on devrait appliquer d'autres normes
comptables, parce qu'on est dans le périmètre comptable, qui seraient en
fonction des organismes à but non lucratif du secteur privé... du secteur
public, pardon. Mais là, si on faisait ça,
le gouvernement ne serait plus capable de comparer les états financiers des
établissements, alors ça...
Puis là, maintenant,
on va devoir le faire aux trois mois pour le périmètre comptable, pas parce que
c'est plus intéressant ou parce que c'est plus parlant. Puis je ne vous
parlerai pas des régimes de retraite.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, madame...
Une voix : ...
Mme Beauchamp (Sylvie) :
Non, mais les calculs actuariels basés sur les régimes de retraite. C'est une
autre affaire, là.
Le Président (M.
Bernier) : C'est une autre commission. M. le député de
Beauce-Nord.
• (20 h 10) •
M. Spénard :
...on est juste au niveau municipal, là, présentement.
Mme Beauchamp (Sylvie) :
...ça, je peux vous répondre, mais...
M.
Spénard : Non, non. Je ne veux pas... Moi, il
y a une autre chose qui m'a éveillé
un peu. Vous dites que vous faites de la recherche. J'aimerais ça savoir
le pourcentage de recherche par rapport au pourcentage d'enseignement comme tel. Je ne sais pas si vous avez fait des
corrélations là-dessus. Et la recherche est-elle appliquée ou recherche pure,
la majorité du temps?
Le Président (M.
Bernier) : M. Proulx, Mme Ghazzali.
M. Proulx (Robert) : Ça ne se fait pas comme ça dans les universités. L'enseignement, la recherche, ça... Pensez, par
exemple, les gens qui se forment aux
cycles supérieurs, troisième cycle, des doctorats. Je veux dire, pour avoir un
doctorat, on suit des cours, mais il faut
faire la démonstration qu'on est un chercheur autonome et contribuer à
l'avancement du savoir. Donc, au
niveau des universités, la recherche, si on dit que la formation,
elle est universitaire, c'est qu'elle se fait dans un environnement de développement des connaissances. Et, s'il n'y a plus de
recherche, dans une université, il n'y a plus de formation universitaire
non plus, même au premier cycle.
Et,
pour le reste, si on veut quand même faire des classes, bien on peut comparer nos populations
de premier cycle par rapport à nos populations de cycles supérieurs, d'étudiants. Notre nombre
de centres de recherche, et tout ça, on a toutes ces statistiques-là, je pourrais vous fournir ça. Mais là c'est extrêmement compliqué, mais ça dit exactement tout ce qu'on fait en termes de recherche,
de formation.
Et
n'oubliez pas non plus les services aux collectivités, là, qui, elles, sont
l'ancrage dans la société, c'est-à-dire
comment ces résultats-là, ces
découvertes-là, ces avancements-là, en plus d'être enseignés aux gens, sont
transférés au niveau de... pour l'utilisation par la société directement. Et ça, je peux vous donner tous les détails
là-dessus, on a des rapports annuels qui disent exactement tout ce qu'on
fait, recherche et...
Ce
que je peux vous dire, c'est que toutes les universités du Québec,
quelles qu'elles soient, réseau de l'UQ ou pas, sont toutes des universités de recherche avec les mêmes façons de faire et
produisent à peu près les mêmes choses que les...
Le
Président (M. Bernier) : Oui, vous aviez une question, M. le
député? Oui, M. le député de Groulx, vous avez une autre question? Allez-y, M.
le député de Groulx.
M.
Surprenant : Alors, merci, M. le Président. Dans votre mémoire, vous mentionnez que 80 % des dépenses de fonctionnement sont majoritairement dédiées au
personnel enseignant et que vos coûts administratifs totaux représentent
14 % des budgets de fonctionnement, contre 18 % dans l'ensemble des
autres universités québécoises. D'abord, félicitations pour ça!
Maintenant, je voudrais mieux connaître un peu qu'est-ce qui engendre ce
succès-là, si on peut dire.
Donc,
vous dites que vous avez une structure unique en réseau, à l'Université du
Québec, par la mise en commun de
certains actifs, expertises ou activités. Pouvez-vous m'expliquer un petit peu,
au niveau d'expertises et activités, comment vous réussissez à mettre ça
en commun?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Beauchamp.
Mme
Beauchamp (Sylvie) : Il y a plusieurs éléments qu'on peut faire
ressortir, tout ce qui concerne, je dirais, l'expertise en évaluation de programme, où on peut amener les différents
établissements à des processus plus rapides. Le fait de travailler ensemble donne une cohésion qui est plus grande.
On a une série de services, y compris des services informatiques, des services administratifs, des
services de ressources humaines, d'assurance collective — on l'a dit tantôt, on a un seul régime de retraite. Donc, on essaie,
nous, en réseau, d'avoir une approche, comme le soulignait M. Proulx,
qui est collaborative, où est-ce que c'est
qu'on se renforce mutuellement, où est-ce que c'est qu'on a des programmes.
L'Université du Québec s'est vraiment
développée en collaborant. Les programmes conjoints, à l'Université du Québec,
ça représente... Entre les établissements de
l'Université du Québec, c'est 50 % des programmes, mais on représente
75 % des programmes conjoints
dans l'ensemble des programmes du réseau universitaire québécois. Donc, on a
développé cette façon, je dirais, de mettre en commun des ressources, de
soutenir, de déployer, de conjuguer, avec des valeurs communes sur l'accessibilité, sur l'innovation, sur la
qualité, l'excellence. Et on se met ensemble pour essayer, donc, de diminuer
nos coûts mais aussi de développer des
projets en enseignement, en recherche. Et ça nous permet donc d'être plus performants
sur le plan administratif.
Le Président (M.
Bernier) : Je vous donne 30 secondes, M. Proulx, puis
après ça on va clore.
M. Proulx
(Robert) : 30 secondes.
Bien, elle vous a parlé de l'administratif; je vais vous parler de
l'académique. Il y a un prof, par
exemple, qui est chez elle, en Abitibi, M. Bergeron, qui est un prof qui
travaille à l'UQAM, moitié-moitié, il se promène entre les deux et il travaille... on
a un lac, qu'on se partage, en foresterie, juste un salaire payé. Cette personne-là met en lien les gens de biologie chez
nous, qui, eux, travaillent avec les pays scandinaves, qui, eux, amènent
à travers l'international, via l'UQAM,
direct en Abitibi-Témiscamingue. Puis ça va jusque dans le cégep, parce qu'on a
des ententes avec le cégep. C'est ça, travailler en collaboration puis
en réseau.
Le Président (M. Bernier) :
M. Michaud, je vous donne 15 secondes.
M. Michaud
(Nelson) : 15 secondes. Je veux laisser trois chiffres, je pense,
qui illustrent bien notre propos. On a démontré la dimension d'inéquité.
Le côté de l'efficacité du réseau sans la loi, à l'heure actuelle, si vous
regardez les tableaux, 18 % de
croissance des ETP, 11 % de croissance du personnel, 12 % si on prend
le corps professoral. Et, M. le député,
vous avez souligné notre performance en termes de dépenses administratives qui
est plus basse que l'ensemble des autres universités.
Donc, malgré
une demande accrue, on a su contrôler par nous-mêmes la croissance du personnel
avec des dépenses administratives
minimum. Alors, non seulement il y a une question d'inéquité, mais il y a aussi
le fait que c'est une loi qui ne nous apporterait pratiquement pas
grand-chose en termes de saine gestion, parce que c'est déjà
présent chez nous.
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup aux représentants de l'Université
du Québec. Merci de votre discipline
universitaire. Merci d'être venus à la Commission des finances publiques.
Je vais suspendre quelques instants afin de
permettre aux représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses
du Québec de prendre place. Je suspends.
(Suspension de la séance à 20 h 16)
(Reprise à 20 h 19)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons reprendre nos travaux. Nous
avons le plaisir de recevoir la Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec. Donc, bienvenue à la Commission des finances publiques, merci d'être ici ce soir. Vous avez une
période de 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite nous
passerons aux échanges avec les parlementaires. Allez-y.
Fédération des
travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Berlin (Simon) : Merci. Bonjour.
Nous voudrions d'abord remercier les membres de la Commission des finances publiques de nous recevoir afin de faire
valoir notre point de vue sur le projet de loi n° 15, Loi sur la gestion
et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des
réseaux du secteur public...
Le
Président (M. Bernier) : Je vous arrête 30 secondes juste
pour permettre une identification. Pouvez-vous...
M. Berlin (Simon) : Oui, j'allais...
Le Président (M. Bernier) :
O.K., allez-y.
M. Berlin (Simon) : ...des réseaux
du secteur public ainsi que des sociétés d'État. Je me présente — alors,
je l'avais — ...
Le Président (M. Bernier) :
C'est parce que c'est plus facile pour fins d'enregistrement à ce moment-là.
• (20 h 20) •
M. Berlin
(Simon) : D'accord. Je me
présente : Simon Berlin, directeur exécutif du Syndicat des employées et
employés professionnel-le-s et de bureau Québec, SEPB Québec, et vice-président
de la FTQ. Je suis accompagné de Johanne
Deschamps, conseillère politique à la FTQ, ainsi que de Colin L'Ériger,
conseiller au Service de la recherche de la FTQ. Ça va?
La Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec représente plus de 600 000
travailleurs et travailleuses qui
oeuvrent dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs de
l'économie. Le projet de loi n° 15 aura un impact important sur plusieurs de nos syndicats affiliés
présents dans les réseaux de la santé et des services sociaux, de l'éducation,
dans les sociétés d'État, etc. Il est tout à
fait raisonnable que le gouvernement se donne les moyens de dresser un portrait
des effectifs, là n'est pas le problème.
C'est plutôt le gel des effectifs qui nous inquiète au plus haut point. Comme
envisagé par le gouvernement, ce gel porte atteinte à la qualité et à
l'accessibilité des services publics, en plus de détériorer les conditions de travail de ceux et celles qui
oeuvrent dans ces organisations. C'est pourquoi nous recommandons le retrait
du projet de loi. Celui-ci comporte trop d'effets pervers pour être acceptable.
D'abord, le
raisonnement qui sous-tend le projet de loi est hautement problématique. Le
gouvernement a indiqué à plusieurs
reprises que le gel des effectifs n'est qu'une des mesures visant à rétablir
l'équilibre budgétaire. Oui, la dette est
préoccupante, mais nous sommes loin de la catastrophe annoncée par le
gouvernement. Oui, l'équilibre budgétaire est souhaitable, mais ne sacrifions pas nos
services publics et la reprise économique en voulant procéder trop rapidement.
À cet égard, nous ne pouvons que constater un profond désaccord entre notre
position et celle du gouvernement.
Centralisation.
Passons maintenant au contenu du projet de loi. Nous ne voyons pas
l'élargissement du rôle du Conseil du
trésor et des ministres d'un bon oeil. Leur intervention constitue en effet un
désaveu du modèle de gouvernance des
sociétés d'État et de plusieurs institutions ainsi que du réseau de l'éducation
et de celui de la santé et des services sociaux. Est-ce que ce projet de loi signifie que le gouvernement retire sa
confiance à l'ensemble des conseils d'administration? Si une organisation estime qu'elle doit procéder à
des embauches afin d'accomplir sa mission, comment serait-il possible de
réconcilier cette orientation avec les directives du Conseil du trésor?
Sur le
maintien des services, le projet de loi prévoit aussi que les services devront
être maintenus, et ce, malgré un gel
des effectifs. Jeudi dernier, le ministre Coiteux a affirmé que le gel des
effectifs constituait une occasion unique de moderniser l'État québécois et de faire preuve d'innovation.
Malheureusement, nous ne partageons pas cet optimisme. Dans un contexte de vieillissement et de
croissance de la population, comment serait-il possible de maintenir les
services? Au lieu de mesures structurantes, le gouvernement propose le
sempiternel «faire plus avec moins». Avec le projet de loi n° 15, on gèle les effectifs en espérant que les services à la
population soient maintenus. Au lieu de procéder ainsi, le gouvernement devrait d'abord identifier les
besoins, faire des choix de société et identifier les ressources fiscales
nécessaires pour ensuite laisser les organisations gérer leurs ressources
humaines en fonction des besoins.
Sur la portée du projet de loi, la décision
d'inclure ou non certaines organisations nous laisse perplexes. Par exemple, comment le gouvernement justifie-t-il le
traitement inéquitable du réseau de l'Université du Québec — que vous venez juste d'entendre — par rapport aux autres universités
québécoises, alors qu'elles dépendent toutes d'un fonds de
fonctionnement où le financement étatique est majoritaire? Le gel des effectifs
dans les cégeps et les universités du réseau
de l'UQ aura des effets dévastateurs sur l'accès à l'éducation postsecondaire,
la mission de recherche et d'enseignement des établissements, mais aussi
sur le développement socioéconomique et le développement régional.
Les
conditions de travail. Le ministre Coiteux estime que 6 250 nouvelles
personnes sont embauchées par l'État chaque
année, la majorité dans le secteur de la santé et des services sociaux et en
éducation. Ces nouvelles embauches, ce sont des travailleurs et des
travailleuses qui offrent des services à la population. Quels moyens le
gouvernement a-t-il envisagés pour éviter que
le gel des effectifs ne vienne alourdir la charge de travail de ceux et celles
qui oeuvrent déjà dans les organisations visées? Rien ne semble avoir
été prévu. Les travailleurs et travailleuses feront donc les frais de
l'obsession du gouvernement pour l'équilibre budgétaire. Avec le gel des
effectifs, le gouvernement s'expose à une multiplication des cas d'épuisement
professionnel.
Je vais passer la parole à Johanne.
Le Président (M. Bernier) :
Mme Deschamps.
Mme Deschamps (Johanne) : Alors, il
nous reste un bon cinq minutes, oui?
Le Président (M. Bernier) :
Il vous reste quatre minutes.
Mme Deschamps
(Johanne) : Quatre minutes. C'est bon, merci.
Alors,
le projet de loi prévoit que les conventions collectives seront
respectées, un principe qui est, pour nous, essentiel. Toutefois, le respect des conventions collectives, le gel des
effectifs et le maintien des services semblent constituer des objectifs trop souvent mutuellement exclusifs. En effet, il existe des dispositions concernant la charge de travail, soit par des clauses de ratio,
par exemple, chez les enseignants ou les professeurs, mais aussi des clauses
d'évaluation de charge de travail. S'il est
impossible d'augmenter le personnel pour respecter la convention collective, il
faudra inévitablement couper des
services. Les organisations soumises aux règles du projet de loi devront
consacrer d'importantes énergies à résoudre les problèmes insolubles.
S'agit-il d'une utilisation optimale des ressources humaines?
En
gelant les effectifs, le président du Conseil du trésor souhaite que l'État se
modernise et devienne plus performant.
Dans les faits, le projet de loi n° 15 empêche l'État de proposer de
véritables innovations et de rendre les services publics plus efficaces.
Voici deux exemples très concrets, à notre avis.
D'abord,
presque tous les pays industrialisés ont mis sur pied un régime public et
universel d'assurance médicaments. Au
Québec, nous avons plutôt opté pour un régime hybride qui est à moitié privé et
à moitié public. Ce programme est
inefficace, coûteux, inéquitable et peu performant comparativement à ce qui se
fait ailleurs. Selon certaines estimations,
le gouvernement du Québec pourrait économiser entre 828 millions et
3,3 milliards de dollars s'il en mettait un sur pied. De telles économies justifient quelques embauches. Même le
C.D. Howe Institute, qui n'est pas un repaire de gauchistes,
recommande la mise en place d'un régime public et universel d'assurance
médicaments.
Ensuite,
autre exemple, un gel des effectifs pourrait entraver le développement
économique du Québec. En limitant la
capacité de croître d'Hydro-Québec, on risque de l'empêcher de développe une
autre filière énergétique, d'électrifier les transports, de mettre en place des mesures d'efficacité énergétique
ou de réaliser tout projet visant à sécuriser l'approvisionnement en
électricité. Le même argument s'applique également à la Caisse de dépôt et de
placement.
En
ce qui a trait à la sous-traitance, enfin, nous ne sommes pas en mesure de bien
apprécier les impacts du projet de loi. Il semble que les contrats de
services seront davantage contrôlés grâce à une meilleure reddition de comptes.
Toutefois, nous nous inquiétons du rôle que
pourrait jouer le Conseil du trésor. Pourrait-il, par exemple, recommander
à certains ministères d'avoir davantage
recours à la sous-traitance dans une perspective de redressement budgétaire? Si
c'est le cas, on peut s'attendre à des
pertes d'emploi et à une précarisation éventuellement plus grande du marché du
travail québécois.
Ensuite, nous
ne sommes pas certains que le projet de loi permette au gouvernement de ramener
à l'interne certains travaux qui
étaient auparavant confiés à des sous-traitants. Par exemple, pour les
ressources informatiques, le gouvernement aurait tout intérêt à bâtir une expertise à l'interne. Les nombreux
dérapages des projets informatiques et les dépassements de coûts démontrent que la sous-traitance est très
coûteuse et qu'un État qui procède à de nouvelles embauches ne prend pas
nécessairement une mauvaise décision.
Plusieurs questions subsistent quant à
l'application du projet de loi. D'abord, qu'est-ce que le Conseil du trésor
entend calculer, des postes ou des personnes? Des effectifs en termes
d'équivalent temps complet ou des personnes réelles?
Le
Président (M. Bernier) : 30 secondes, madame.
Mme Deschamps (Johanne) :
Ensuite, a-t-on évalué les besoins de main-d'oeuvre par rapport à ces nouvelles
exigences en matière de reddition de
comptes? Est-ce que le Conseil du trésor, les ministères et les différentes
organisations sont en mesure d'assumer ces nouvelles responsabilités
avec des effectifs maintenus au même niveau qu'en 2014?
Enfin,
le projet de loi prévoit que le Conseil du trésor détermine combien de temps
une organisation devra fonctionner avec un
niveau prédéterminé d'effectif. Il s'agit d'une situation problématique,
puisque les besoins peuvent évoluer
rapidement. Ainsi, la planification triennale de la main-d'oeuvre qui pourrait
servir de base à la poursuite du gel des effectifs s'apparente davantage
à une camisole de force qu'à un véritable outil de gestion.
Alors, pour l'ensemble de ces raisons,
la FTQ estime que le gouvernement devrait retirer le projet de
loi n° 15. Il fragilise davantage
les services publics, qui subissent depuis des années les contrecoups des
compressions budgétaires. Il mène
directement à une détérioration des conditions de travail de tous ceux et
celles qui oeuvrent dans le secteur public.
Au lieu d'une cure d'austérité, la FTQ
propose un autre traitement. D'abord, il faut reporter l'atteinte de
l'équilibre budgétaire et cesser de
verser l'argent au Fonds des générations. Ensuite, le gouvernement doit
impérativement augmenter ses revenus.
Il ne peut prétendre qu'il n'a d'autre choix que de couper, puisque ce ne sont
pas les solutions qui manquent.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme Deschamps. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires.
M. le ministre.
• (20 h 30) •
M.
Coiteux : Oui. Alors, merci beaucoup, M. Berlin,
Mme Deschamps. Et puis j'ai deux noms ici, mais c'est M. L'Ériger.
Donc, merci d'être là ce soir.
Comme
vous avez terminé sur la question de l'équilibre
budgétaire, je commencerais peut-être
là-dessus. Quand vous dites : Reporter à plus
tard l'équilibre budgétaire, quelle date vous avez en tête?
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin (Simon) : On n'a pas de date, comme tel, en tête, mais ce qu'on dit, c'est que ce
qu'on devrait faire, c'est d'abord
s'attaquer aux besoins qu'on a, combler les besoins, livrer les services à la population,
maintenir des services en santé, en éducation,
des services sociaux, on ne devrait pas être fixé ou viser uniquement
sur l'équilibre budgétaire à une date fixe. On est d'accord que l'atteinte de l'équilibre budgétaire est très souhaitable et on devrait essayer d'en
arriver, on devrait regarder ça comme
objectif, mais on n'a pas de date, comme tel, en vue. Il
faut regarder... D'abord, pour nous, c'est regarder d'abord les
besoins de la population, maintenir les services qui est le plus important.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : En général,
quand on dit que c'est un objectif, vous me dites : C'est un objectif,
normalement on met une date là-dessus.
Si on veut atteindre un objectif, on se donne un horizon. C'est pour ça que je
repose cette question-là, parce
qu'on a déjà
reporté l'atteinte de l'équilibre
budgétaire. Donc, dans le fond, vous dites, là : Peut-être qu'il faudrait le reporter à nouveau. Vous
le reporteriez à quand?
M. Berlin
(Simon) : Comme j'ai dit, on n'a pas précisé...
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin (Simon) : Oui, merci. On n'a pas précisé de date. La question
de l'équilibre budgétaire, pour nous, c'est que question d'un objectif qui est souhaitable, mais il faut le conjuguer
avec les besoins qu'on a, avec l'économie, avec
la croissance de l'économie, permettre la croissance de l'économie,
permettre de livrer les services pour lesquels l'État a la responsabilité.
C'est ça qui est important. L'important, c'est la croissance. L'important,
c'est les services publics. L'important,
c'est l'éducation de nos enfants. L'important, c'est tous les
régimes qu'on a au Québec, c'est le modèle québécois qu'on a établi
depuis de longues années. Si on se fixe uniquement sur une notion d'équilibre budgétaire dans une perspective
d'austérité, on va fixer là-dessus, et toute l'autre va prendre le bord. Et c'est
ça, la difficulté qu'on voit avec ce projet de loi.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Coiteux : Est-ce
que vous êtes d'accord avec le fait
que plus on reporte l'atteinte de l'équilibre
budgétaire, plus les intérêts sur la dette prennent la place
des services à la population, prennent de l'espace budgétaire
qui n'est pas disponible pour les services à la population? Est-ce que
vous êtes d'accord avec ça?
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin (Simon) : Ce que je vous dis, c'est qu'avec une croissance économique, avec la
livraison de services adéquats, avec l'instauration, par exemple, de
programmes comme l'assurance médicale universelle, on va créer des emplois, on va remplir les coffres du gouvernement
beaucoup plus rapidement que si on coupe puis on a moins d'argent qui
rentre, et donc on fixe uniquement sur l'équilibre budgétaire.
Donc,
c'est un cercle, il faut voir l'ensemble. Comme j'ai dit, si on focusse
uniquement sur l'équilibre budgétaire, bien,
à ce moment-là, ça vous permet de couper des emplois, de geler les effectifs,
de faire tout dans une vision d'équilibre budgétaire. Et nous, on dit : L'équilibre budgétaire, oui, on va y
arriver. Mais on va y arriver comment? En créant des emplois, en livrant des services. En éduquant
notre population, nos jeunes. En livrant des services de santé, en s'occupant
d'une population vieillissante. Il y a une
foule de facteurs. On est convaincus que ce n'est pas en mettant moins d'argent
dans l'économie qu'on va avancer plus rapidement, c'est le contraire.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Néanmoins, pour être capable de financer les services
publics, il faut avoir les marges de manoeuvre nécessaires, et on réduit
notre marge de manoeuvre quand on laisse aller le déficit, lorsqu'on laisse
aller la dette.
Donc,
la question du report, pour moi, ce n'est pas une question tout à fait
innocente. C'est parce que derrière le... Le message que je décode, dans le fond, c'est : Oui, c'est un
objectif, mais on n'y met de date. Puis, dans le fond, ce n'est pas vraiment un objectif, il y en a d'autres qui
ont préséance sur tout le reste. Mais ça, ça voudrait dire, concrètement,
qu'on financerait les services publics à
crédit, on ne les financerait pas par les recettes fiscales, et donc on
reporterait à d'autres la facture que
nous, on devrait payer aujourd'hui, parce que c'est les services qu'on utilise
aujourd'hui. Alors, pourquoi on va refiler la facture à ceux qui
suivent? Vous comprenez le raisonnement?
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin (Simon) : Je m'excuse, là, mais, pour
nous, ce n'est pas refiler la facture, comme vous dites. En créant des
emplois, on crée des revenus, on a des nouveaux revenus qui rentrent dans
l'État.
J'ai
un certain âge, je n'ai jamais vu une situation où l'austérité fonctionne. Ça ne
fonctionne pas en Europe, ça n'a pas
fonctionné en Europe. Je ne vois pas comment on coupe les emplois, on a moins
de revenus qui rentrent et on avance comme
société. Je ne vois pas comment on crée des emplois en ayant moins de revenus.
Je ne vois pas comment on peut atteindre
un équilibre budgétaire quand on s'assure qu'il y a moins de revenus qui
rentrent. C'est le contraire qu'on doit faire. On doit regarder nos besoins, les besoins de la société, les
besoins de la population, les besoins... des services dont on a besoin.
On doit créer les emplois même, s'il le faut, où c'est nécessaire.
L'exemple
qu'on vous avait donné, c'est un programme d'assurance médicaments universel
comme dans les pays en Europe, qui
existe partout en Europe. Ça n'existe uniquement pas ici ou aux États-Unis,
qui n'est pas un modèle à suivre, à
notre avis. Ça n'existe pas ici, mais ça existe dans d'autres
pays. On vous démontre ça avec des chiffres, que ça permet de renflouer
les coffres du gouvernement avec des centaines et des centaines de millions de
dollars. Ça peut créer des emplois et ça peut renflouer encore plus.
Moi,
je ne comprends pas comment on peut prétendre qu'en coupant des emplois, en
ayant moins de revenus, bien, comme
ça, on va être capable d'atteindre un équilibre budgétaire puis on va être
capable d'avoir une croissance économique comme vous avez promis.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Je pense que mon collègue de Laval-des-Rapides aimerait poser une question.
Le Président (M.
Bernier) : Oui. Bien, ça me ferait plaisir de lui donner la
parole. M. le député de Laval-des-Rapides, je vous la donne. Allez-y.
M.
Polo : Merci. J'aimerais
savoir, M. le Président : La Fédération des travailleurs et travailleuses
du Québec compte combien de membres, combien de cotisants?
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin
(Simon) : 600 000 membres.
M.
Polo : 600 000 membres.
La taille... Donc, on s'entend que les cotisations, M. le Président, sont gérées par le bras financier de la FTQ, là, le fonds des
travailleurs, le fonds de la FTQ. C'est bien ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Berlin.
M. Berlin
(Simon) : Non. Bien, c'est parce que je ne suis pas sûr de votre
question. La...
M. Polo : Non, non, mais j'essaie de
faire un lien. Vous allez comprendre, vous allez comprendre.
M. Berlin (Simon) : O.K. Allez-y,
allez-y. Je m'excuse.
M.
Polo : J'essaie de faire un
lien parce que, je veux dire, une partie de vos cotisations sont gérées par,
quand même, le fonds de la FTQ.
M. Berlin (Simon) : Non.
M. Polo : Pas du tout?
M. Berlin (Simon) : Non.
M.
Polo : O.K. Le
fonds de la FTQ est quand même relié à votre institution et gère tout près de 9 milliards de dollars.
M. Berlin (Simon) : Là, vous parlez
du Fonds de solidarité?
M. Polo : Fonds de solidarité,
pardon, oui, oui.
M. Berlin
(Simon) : O.K.
Parce que la FTQ, c'est une fédération de travailleurs et travailleuses du
Québec. Le Fonds de solidarité, c'est un fonds d'investissement. Ce
n'est pas là même chose.
M. Polo : Oui, mais ma question et
mon raisonnement, c'est...
M. Berlin (Simon) : Et nos
cotisations ne vont pas au Fonds de solidarité.
M.
Polo : Non, non. O.K. Pardon.
Ma question, c'est dans un esprit... je fais un parallèle avec les cotisations
de vos membres. Vous vous attendez à un certain rendement, O.K., vos
membres s'attendent à un certain rendement des cotisations...
M. Berlin (Simon) : Non, non, pas du
tout, pas du tout. Non. Je peux vous répondre?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, allez-y, M. Berlin, si vous voulez donner des explications, là.
M. Berlin
(Simon) : Bien, pensez au
Fonds de solidarité comme un fonds d'investissement, comme une banque, comme une institution financière. Il y a de nos membres qui contribuent
de leur argent dans une forme de REER au Fonds de solidarité. Au lieu de mettre l'argent, par exemple, à la Banque
Nationale, ils mettent l'argent au Fonds de solidarité. C'est leur
argent, ce n'est pas nos cotisations. Les cotisations que nos membres paient...
D'abord, la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec est une fédération composée de plus que 30 syndicats affiliés, 36 ou
37 syndicats affiliés. Chaque syndicat affilié... Moi, je suis directeur
exécutif de mon syndicat, c'est le
syndicat des employés professionnels et de bureau. On a autour de 15 000
membres qui paient des cotisations à nous
pour des services qu'on leur fournit comme membres du syndicat, services de
négociation, de défense, d'éducation, tous
les services qu'on leur fournit, et nos sections locales sont affiliées à la
FTQ et paient une petite cotisation à la FTQ pour l'affiliation FTQ. Il
n'y a pas d'argent qui va de là au Fonds de solidarité, il n'y a aucun lien
entre les deux.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
• (20 h 40) •
M.
Coiteux : Oui. Moi, je reviendrais à la question des effectifs un
petit peu plus directement, mais vous avez parlé de modèle de développement en disant : L'expansion des
services publics, l'augmentation des budgets de l'État, les dépenses publiques, finalement, la croissance par
les dépenses publiques, puis vous avez cité l'Europe notamment. Ça ne
fonctionne pas nécessairement partout, on peut avoir des débats là-dessus.
Moi,
j'aimerais amener les choses sur l'angle suivant : une bonne partie de la
croissance économique, là, c'est la
croissance de la productivité, hein? Puis il y a le secteur privé qui travaille
très fort là-dessus, puis il doit innover puis il doit contrôler ses effectifs pour aller chercher la meilleure valeur
ajoutée, en faisant attention que ses coûts n'augmentent pas plus rapidement que les revenus qu'il est
capable de générer, mais le secteur public aussi, le secteur public aussi peut
contribuer à la productivité. Et c'est dans
ce contexte-là que, dans une perspective où vous dites : Ça prend des
revenus pour financer les services
publics... Et je suis d'accord avec vous, il y a un rôle à jouer, là,
d'accroître la capacité de l'État de
livrer des services sans nécessairement augmenter ses coûts plus vite que ses
revenus. Et le contrôle des effectifs, bien c'est un outil aussi pour
gagner plus de productivité dans le secteur public.
Qu'est-ce que
vous pensez? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça ou vous voyez ça
complètement autrement?
Le Président (M. Bernier) :
M. Berlin.
M.
Berlin (Simon) : ...productivité,
la question de réallocation des ressources, la question d'être plus efficace,
pour nous, ce n'est pas la même chose qu'un
gel des effectifs puis une réduction de services. Si la question porte sur la
question de comment est-ce que dans
certaines organisations, dans certains organismes on peut mieux faire le
travail, on peut s'assurer que les
bonnes personnes — on va le
dire comme ça — sont à
la bonne place, ça, c'est une autre chose. Ça, c'est une question d'essayer de mieux livrer les services avec le
personnel qu'on a, et ça, ça appartient, quant à nous, pas au Conseil du trésor, mais ça appartient aux
organisations, aux organismes de faire ce travail-là. Puis on a déjà eu des
projets pilotes, comme dans la santé, où les
syndicats dans la santé ont coopéré dans les projets pilotes sur la question,
je vais appeler ça, d'efficacité des
opérations. Ça, c'est une chose, mais c'est tout à fait différent que l'autre
partie qui est ce que vous proposez
dans ce projet de loi : le gel d'effectif, faire un exercice comptable et,
à partir d'un exercice comptable d'en haut, geler les effectifs en bas.
C'est deux choses, pour nous, complètement différentes. À moins que j'aie mal
compris votre question.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, c'est parce que, bon, c'est sûr que, si on n'est pas
d'accord sur l'équilibre budgétaire, on n'est pas d'accord sur le but. Mais c'est un objectif ferme. Et d'ailleurs
même l'Assemblée nationale a voté en faveur du retour à l'équilibre
budgétaire en 2015‑2016. Donc, c'est dans cette direction qu'on va aller.
Donc, vous me
dites que vous avez souvent participé, aidé, collaboré à des exercices comme
celui-là, puis il y a deux exercices...
Il y en a plus que deux, en réalité, mais il y a la révision des programmes,
d'une part, qui n'est pas un exercice
de réduction des services, c'est un exercice d'adéquation de ce qu'on fait par
rapport à notre capacité de payer. C'est
ça qu'on fait. Ce n'est pas réduction de services, c'est de revoir comment on
fait les choses. Et puis il y a aussi, pour nous aider, chercher un peu plus de performance dans la prochaine année
et demie en imposant un contrôle plus strict sur les effectifs.
Alors, il y a
une possibilité de collaborer ici. Jusqu'où vous seriez prêts à collaborer dans
un exercice comme ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Berlin.
M. Berlin
(Simon) : Comme je vous
avais dit, on ne comprend pas, on ne voit pas comment un gel des effectifs
peut être égal... ne pas vouloir dire une
réduction de services. Je donne un exemple. Avec le vieillissement de la
population, si on ne regarde pas nos
besoins, les besoins de la société en termes de services de santé, par exemple,
ou de services sociaux, pour combler
nos besoins pour une population vieillissante, on fait fausse route. Si on
garde d'abord un exercice comptable, on gèle les effectifs et on
dit : Avec ce gel-là, mettons, en date de 2014, ou peu importe la date
qu'on choisit, et on va travailler avec ça, on ne tient pas compte de nos
besoins, on ne tient pas compte, par exemple, du vieillissement de la population, on ne tient pas compte des besoins en
éducation, on ne tient pas compte des besoins du système des universités
du Québec, on ne tient pas compte des
commissions scolaires, par exemple, dans le secteur public d'éducation, qui
sont rendues à je ne sais pas quelle
ronde de coupures comme dans la santé... Ça ne commence pas ici, il y a des
coupures depuis des années, des
années et des années. Et là on dit : En plus de ces coupures-là, on veut
livrer les mêmes services, mais on a coupé, on a coupé, on a coupé.
Et là on va
geler, puis peu importe ce qui arrive demain, peu importent nos besoins, peu
importent les besoins de la population,
on va geler les effectifs, mais on ne réduirait pas les services. On ne
comprend pas cette équation. On n'y
croit pas, on ne voit pas comment on peut faire ça. Si on ne regarde pas
d'abord nos besoins et ensuite les effectifs, on ne comprend pas comment un gel d'effectif comme vous proposez ne veut
pas dire une réduction de services, on ne le voit pas. Je ne sais pas,
dans un an, dans deux ans, dans cinq ans, où on va être rendus en termes de nos
besoins en éducation, on peut faire des
estimés, mais, de dire qu'on va faire tout ça avec les effectifs qu'on avait
l'année passée, ça dépend, il faut voir.
Mais on ne
met pas en cause la question de l'équilibre budgétaire. C'est souhaitable, on
est d'accord à avoir ça comme objectif. On n'est pas en désaccord.
Le Président (M. Bernier) : Il
vous reste une minute, M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, je pense
que... Peut-être c'est la question que je ne vous ai pas posée.
J'essaie de voir s'il y a au moins un aspect avec lequel on...
Bon, l'équilibre budgétaire, on s'entend, vous, la date est sine die, disons,
donc c'est un objectif lointain. Nous, c'est un objectif plus court terme, nécessaire, selon nous, et on
pense qu'il y a lieu de demander un effort particulier à l'ensemble du secteur public, notamment
par une gestion plus rigoureuse des effectifs. Puis ensuite c'est que ça va
nous permettre de connaître les choses.
Ne serait-ce
que le dénombrement puis la connaissance fine des données, est-ce que, ça, vous trouvez
que c'est une bonne idée?
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez 30 secondes.
M. Berlin
(Simon) : Oui, merci. Au
niveau du dénombrement, on n'a aucun problème de savoir c'est quoi, les effectifs, de compter sans que ça devienne une
tâche administrative trop lourde, sans qu'on prenne des ressources pour ne faire que du comptage, que des exercices
comptables au lieu de faire... de livrer les services à la population.
En autant que
c'est fait dans une perspective de savoir, puis de comprendre, puis de peut-être
mieux gérer, c'est une chose. Mais ce
qu'on comprend, avec le projet de loi, c'est que vous faites ce dénombrement-là pour
pouvoir geler les effectifs et en
même temps dire qu'il n'y a pas de réduction de services. C'est impossible.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Berlin. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le
député de Sanguinet.
M.
Therrien : Merci,
M. le Président. Alors, je souhaite
la bienvenue à nos invités, M. Berlin, Mme Deschamps,
M. L'Ériger. Bienvenue chez nous.
Alors,
écoutez, je vous ai écoutés avec grand intérêt. Je reviens un petit peu sur ce que le ministre a dit. Oui, on a voté à l'Assemblée nationale pour rétablir l'équilibre budgétaire, on a
le même objectif. Les moyens sont
différents. Nous, on pense que c'est
par la prospérité économique qu'on peut arriver à cet objectif-là, on ne
s'entend pas là-dessus. Mais, bon,
écoutez, on ne fera pas de débat là-dessus, là, en ce moment, mais, nous, c'est
plus cette façon de procéder qu'on favorise.
Autre chose, j'ai bien aimé quand vous avez
mentionné qu'à l'étape où on est rendu, si on coupe, ça va aller directement dans les services. On est rendu à une
étape où, là, couper dans le gras, comme on disait, là, à l'époque, là, ça
devient de plus en plus difficile. Et même
le Conseil du patronat, quand ils sont venus nous visiter, je pense que c'est
jeudi ou vendredi, nous
disaient : Écoutez, on est rendu à l'étape que, quand on coupe, ça va
aller dans les services. On est rendu là ou à peu près, là. Je veux dire, il y a peut-être des économies de fond
de tiroir qu'on peut faire, là, mais en tout cas on est pas mal rendu à
cette étape-là.
Moi, où
est-ce que je voudrais en venir avec vous, c'est... À la page 7, vous
parlez du respect des conventions collectives. Là, on a un problème
parce que, selon l'étude qu'on fait de la situation actuelle, pour diverses
raisons, on s'aperçoit que les besoins sont augmentation. Si on veut geler les
effectifs, si les besoins augmentent avec les mêmes effectifs, ça veut dire qu'on sera obligé de rouvrir les conventions
collectives et de, entre guillemets, surcharger le travailleur.
Qu'est-ce que vous pensez de ma logique? Est-ce
qu'elle est bonne?
Le Président (M. Bernier) :
M. Berlin, oui, allez-y.
• (20 h 50) •
M. Berlin
(Simon) : Bien, ce n'est pas
la première fois que vous entendez que la question de rouvrir les conventions
collectives, ce n'est pas une approche qui
nous plaît, mais d'aucune façon. Quand il y a une convention collective signée,
c'est signé par les deux parties et c'est
signé pour un certain nombre d'années. Je peux uniquement faire référence au
projet de loi n° 3. On ne
retourne pas en arrière, on a des ententes signées. Et il me semble que, quand
on signe une convention collective, on prévoit le mieux qu'on peut
l'avenir, côté patronal et côté syndical.
Moi, ça fait
plus que 30 ans que je fais ce travail-là. Je n'ai jamais, jamais une fois...
Dans toutes les centaines de
négociations que j'ai faites dans le secteur public, dans le secteur privé,
jamais une fois que j'ai vu un employeur revenir nous voir pour dire : Vous savez, le syndicat, ça va mieux qu'on
pensait quand on a négocié, on va vous donner plus. On va ouvrir la convention, on va vous donner plus.
Jamais que je n'ai vu ça. Puis je vous défie, tout le monde ici, de me trouver
un exemple.
Alors, ce que
je dis : On a signé une convention collective. On a mis de l'eau dans
notre vin, comme on a dit. Si vous
regardez les conventions collectives du secteur public, là, ce n'est pas des grosses
augmentations, c'est un niveau salarial,
un niveau de rémunération plus bas que le secteur privé et plus bas qu'ailleurs
au Canada, on le sait, plus bas que la moyenne
canadienne. Alors, on a fait des sacrifices. Il y a eu des gels de salaire. Il
y a eu des années difficiles, des années plus difficiles que d'autres. On a négocié les conventions collectives;
on s'attend à ce que les conventions collectives soient respectées.
Et la prochaine négociation, ça, c'est une
autre question, mais des conventions collectives
signées, je m'excuse, mais il me
semble qu'il y a des notions même juridiques qui encadrent la question
des conventions collectives. Et donc, dans certaines conventions
collectives, oui, il y a
des dispositions, justement, pour protéger les membres du syndicat, les travailleuses, les travailleurs, pour protéger les gens pour qu'ils ne soient pas en épuisement de
travail, pour qu'il n'y ait pas de
coûts additionnels pour la société parce
qu'il y a des gens qui ne sont plus capables, parce qu'avec toutes les coupures
de poste qu'on a eues année après année, après année, dans le secteur
public...
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Berlin (Simon) : Tu sais, on ne
peut plus. Il n'y en a plus, de tiroir à gratter.
M.
Therrien :
Vous mentionniez tantôt, au niveau de la sous-traitance, que c'était en
augmentation et probablement qu'on verrait peut-être augmenter le
phénomène de sous-traitance avec un gel des effectifs.
M. Berlin (Simon) : ...question
qu'on pose.
M.
Therrien :
C'est ce que vous aviez mentionné tantôt. Alors, ce qu'on assisterait, si le
projet de loi est adopté comme ça, avec les conventions, supposons que
le gouvernement respecte ses conventions collectives, bien, après, quand il y aura les négociations, avec la
sous-traitance, on va s'apercevoir qu'il y aura une précarisation de la qualité
des emplois disponibles, et puis ça va amener, justement, chez le
travailleur que vous représentez, là, un phénomène très problématique, c'est que ces gens-là vont se
retrouver avec un effritement de leur qualité de leur rémunération globale.
Est-ce que vous pensez que c'est ce qui pourrait arriver?
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin
(Simon) : Bien, écoutez, la problématique, si j'ai bien compris la
question, là, c'est qu'on a des conventions
collectives à respecter, on a des... On est conscients des difficultés
économiques, mais je reviens encore à dire : C'est la croissance, c'est la seule façon... Comme
vous avez dit, comme vous avez mentionné il y a quelques minutes, c'est
par la croissance qu'on va arriver à l'équilibre budgétaire, je veux bien dire
la même chose. Je ne sais pas si...
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Therrien : Merci, M. le Président. C'est juste
qu'évidemment, si tu arrives avec des besoins qui augmentent puis tu plafonnes le nombre d'emplois disponibles,
à quelque part, les gens, comme vous l'avez mentionné, il y aura un phénomène de surmenage, il y aura des problèmes,
là, qui seront liés, justement, à la qualité de vie des travailleurs dans
le milieu de travail. Ça, c'est évident, tu
sais, c'est... En tout cas, d'après ce que vous m'avez dit puis ce que j'ai lu
aussi, là, c'est ce qu'on peut constater.
J'aurais des
questions, une réflexion, puis je voudrais avoir votre réflexion par rapport à
ça. Quand on parle d'Hydro-Québec ou de la
Caisse de dépôt et de placement, on parle de gel d'effectif dans l'ensemble du
public, péripublic, parapublic, là,
ça, ça veut dire qu'Hydro-Québec, qui est profitable, s'ils veulent avoir une
création d'emplois — parce
que j'imagine qu'il y a une rentabilisation
de la création d'emplois — si on fait un gel d'effectif dans ces endroits-là comme Hydro-Québec ou la Caisse de dépôt et de
placement, ça veut dire qu'on renoncerait à des profits et à des gains évidents
qui rentreraient dans les coffres de l'État,
si on a un gel d'effectif à, par exemple, Hydro-Québec. C'est à l'encontre de
ce qu'on voudrait.
Ça, c'est ma logique.
Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça.
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
M. Berlin (Simon) : Tout à fait. Tout à fait d'accord avec ça. Hydro-Québec, c'est un bon
exemple, avec tous les projets qu'on peut avoir en termes
d'électrification, de transport en commun, de toutes sortes d'autres choses...
ou d'autres projets qu'on n'a même pas
encore imaginés puis qui s'en viennent. Si on a un gel d'effectif, on ne peut
pas le faire. On ne peut pas compétitionner, on ne peut pas offrir ça
peut-être à d'autres pays ou ailleurs. On ne peut pas.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Therrien : Oui. Bien, écoutez, dans un autre ordre d'idées,
vous parliez tantôt des possibilités, là, par exemple l'assurance médicaments, entre autres, là, mais
j'imagine que vos travailleurs, les gens que vous représentez, qui sont sur le
terrain, qui sont à combler les besoins à la
population à partir des services qu'ils vont offrir... j'imagine que ces
gens-là, dans les régions, vont être
à l'affût des besoins de la communauté et, à partir de la gestion, là, qui est
décentralisée, vont être plus à
savoir qu'est-ce qu'on doit faire dans le milieu pour améliorer la performance
des services. Et, dans ce projet de
loi là, ce qu'on fait, c'est qu'on va éloigner la prise de décision, du fait
qu'on va faire en sorte que le président du Conseil du trésor et les
ministres responsables vont se trouver à prendre des décisions qui vont avoir
des effets sur le terrain.
Si
on veut arriver à des économies ou à une meilleure gestion, plus efficace...
Comme vous avez parlé de l'assurance médicaments. Il faut avoir le nez
dans la cuisine pour avoir des idées comme ça. Alors, est-ce que vous trouvez
que l'idée de laisser entre les mains d'un ministre
qui est le président du Conseil du
trésor et le ministre
responsable la prise de décision liée à ça fait en sorte d'affaiblir
l'efficacité de l'État?
Le Président (M.
Bernier) : Vous avez 30 secondes.
M. Berlin
(Simon) : Je suis tout à fait d'accord. On est tout à fait d'accord,
la FTQ, que c'est le contraire, là, qu'on
n'enlève pas la responsabilité aux organismes qui offrent les services puis le
mettre dans une situation bureaucratique très loin puis très haute qui va être un exercice comptable. Ce n'est
pas comme ça, et surtout dans les régions. Je suis... On est tout
à fait d'accord que c'est ces gens-là
qui connaissent leurs besoins, qui sont capables de repérer leurs besoins. Tout à fait.
Le
Président (M. Bernier) : Nous allons passer du côté de la deuxième opposition.
M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la
bienvenue, M. Berlin, Mme Deschamps et M. L'Ériger.
Moi,
j'ai pour mon dire... Je vous entends, je vous entends très bien,
vous avez fait un très beau mémoire, mais moi, j'ai pour mon dire, en
tout cas, dans ma tête à moi, que le
statu quo monétaire est devenu intenable. J'ai entendu... Bien, mon confrère de Rousseau
est parti, là, mais j'aurais aimé ça le réentendre. Le déficit, au Québec,
je ne suis pas sûr qu'il est
conjecturel, je pense qu'il est structurel. Et, quand on parle d'un déficit
structurel au Québec, bien on n'a pas bien, bien le choix, il
va falloir s'attaquer aux structures à un moment donné.
Ceci étant
dit, vous proposez trois choix, trois éléments de solution que vous avez
proposés : reporter l'équilibre
budgétaire, ne pas verser au Fonds des générations et augmenter les revenus.
C'est les trois solutions que vous avez apportées, madame, si je ne m'abuse. Alors, moi,
j'aimerais ça vous entendre sur l'équité intergénérationnelle, sur la dette
qu'on va laisser à nos enfants, parce qu'on va payer 11 milliards juste en
frais d'intérêts cette année — les taux d'intérêt sont très bas, une chance. Et vous n'avez pas
parlé du tout d'une organisation de travail qui pourrait être différente pour
assumer les services adéquats à la
population. Vous partez des besoins, puis, regarde, on va engager du monde, ça
va faire des revenus pour l'État. Il
reste que le payeur, c'est l'État, puis l'État n'a plus les moyens de payer.
Alors, c'est quoi... Avez-vous d'autres éléments de solution que vous
pourriez m'éclairer, moi, considérant que le déficit est structurel.
Le Président (M.
Bernier) : M. Berlin.
• (21 heures) •
M. Berlin (Simon) : Oui. Bien, dans un premier temps, je vais dire que, oui, j'ai répondu à
une question où, oui, justement, j'ai
dit qu'il y a même eu des projets pilotes pour avoir des milieux de travail
plus efficaces, revoir l'organisation de
travail. Oui, on a fait ça. Oui, on fait ça dans certaines circonstances. Donc,
pour répondre à cette question, oui, c'est des choses qu'on a faites, c'est des choses qu'on pourrait regarder,
mais pas dans un contexte où vous commencez avec un exercice comptable, un gel des effectifs, et maintenant on va
procéder à l'autre partie. Ce qu'on dit, c'est qu'on fait ça à l'envers.
S'il
y a un problème de déficit structurel, comme vous dites, si on a un problème,
au Québec, où il n'y a pas assez d'argent — je pense que c'est comme ça qu'on peut le
dire — s'il y a
un problème comme ça, ce n'est pas une question intergénérationnelle, c'est toutes les générations. S'il y a un
problème, il faut s'attaquer à ces problèmes-là. Puis comment? En créant de l'emploi, en rentrant plus de revenus
dans l'État. En essayant d'atteindre un équilibre budgétaire, justement,
en ayant plus de revenus d'État.
Et,
oui, on vous avait donné quelques pistes de solution. Je peux vous dire qu'on a
eu... En passant, on a eu très, très,
très peu de temps d'étudier ce projet de loi, qui vient dans une foulée de
toutes sortes d'autres projets de loi dans une mentalité et un esprit d'austérité. Celui-là a passé quasiment en
dessous des radars, est arrivé il y a trois semaines. Là, on a demandé... on a fait un mémoire, on vous
avance de pistes de solution, mais ce n'est pas des pistes de solution
dans un encadrement d'austérité, c'est des pistes de solution dans un esprit de
croissance, dans un esprit de livrer les services
à la population. Dans un esprit intergénérationnel,
oui, ça va toucher toutes sortes de monde, si on prend votre approche. Il va y a voir des jeunes qui n'auront
pas d'emploi parce qu'il y a un gel
d'effectif. Il y a aura moins d'accès aux universités parce qu'il y a
moins d'argent pour l'Université du Québec, l'Université du Québec ne peut pas compétitionner. Il va y avoir moins d'argent pour
traiter une population vieillissante. Il va y avoir des employés âgés, plus
âgés et plus anciens qui vont souffrir d'épuisement professionnel. Oui, il y a
des problèmes.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Spénard :
Il faut bien vous dire qu'en économie... Moi, je ne veux pas vous faire de
dessin, là, mais, en économie, là, ce n'est pas l'État qui relance l'économie,
d'habitude. C'est l'industrie privée qui relance l'économie, d'habitude. 50 % des emplois sont dans l'industrie privée, et 70 % des
nouveaux emplois, à venir, s'en vont dans l'industrie privée. Et ce sont eux qui créent de la richesse,
pas l'État. L'État redistribue la richesse. C'est différent de votre schème
de pensée.
Alors,
moi, tu sais, engager, engager pour les... c'est ça que je ne comprends pas,
parce que j'ai toujours su, moi, que
deux plus deux, ça faisait quatre, là. Ça ne peut pas faire cinq, puis ça ne
peut pas faire six dans trois mois, puis ça ne peut pas faire 10 dans 10 ans puis... Deux plus
deux, ça fait quatre, et c'est ça qu'on a. Puis chanceux, avec la structure
qu'on a, qu'on n'ait pas encore été décoté par les maisons de cotation à New
York, parce que ça nous coûterait pas mal plus cher. Moi, en tout cas, je ne sais pas qu'est-ce que le
ministre des Finances a fait, là, mais moi, je m'attendais à une décote
bientôt.
Alors, je ne sais
pas, moi, je n'ai pas d'autre question. Claude, si tu veux...
Le
Président (M. Bernier) : Une courte question. Vous avez à peu
près 30 secondes, M. le député de Groulx.
M.
Surprenant : Je fais un rapide... À votre mémoire, M. le Président, à
votre mémoire à la page 6, peut-être que vous avez trouvé la solution
miracle tant recherchée, vous parlez de mesures qui permettraient d'économiser
entre 828 millions et 3 345 000 000 $. On en cherche
juste 3,2, alors peut-être qu'un seul item pourrait tout régler d'un...
Alors,
pouvez-vous m'expliquer un peu comment vous arrivez à ces chiffres-là, au
niveau de doter le Québec d'un régime
public et universel d'assurance médicaments et nous permettre d'économiser
autant? Pouvez-vous nous expliquer un peu comment on arrive à ça?
Le Président (M.
Bernier) : Mme Deschamps. 30 secondes.
Mme Deschamps (Johanne) : Vous demanderez... Là, le projet, écoutez, il y a plusieurs
variables là-dedans, mais je
pense que Québec solidaire l'avait déjà déposé, alors je vous réfère à vos
propres collègues.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Justement, nous allons aller du côté de Québec solidaire. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Merci. Bonjour. Bonsoir, en fait. Non, je ne
répondrai pas, parce que je n'ai
pas assez de temps, je veux aller au coeur des questions, mais on pourra en
rediscuter avec grand plaisir parce
que ça fait sept ans qu'on en
parle.
J'ai
l'impression, quand je vous entends... Quand vous dites, bon : Il faut
partir des besoins, c'est parce que, dans
le fond, c'est ça, notre job, les services publics, hein, c'est de s'occuper de
notre monde, c'est de s'assurer qu'au
niveau de la population on puisse répondre à leurs besoins. Donc, ce
n'est pas un impératif économique, c'est un impératif humain, je pense que vous insistez beaucoup là-dessus.
Qui nous amène à penser que, dans le
fond, ce qui est difficile dans
l'exercice, actuellement, c'est qu'on voudrait gérer nos services publics
comme on gère une entreprise privée, puis ça, bien ce n'est pas toujours
le chemin à suivre.
Vous avez commencé à parler de la question de
l'équité intergénérationnelle, que j'aimerais bien vous parler, parce qu'il semble y avoir un certain mythe autour de la question
de l'équilibre budgétaire, et, je
pense qu'ils vous l'ont tous dit, Québec
solidaire est le seul qui s'oppose à
cette atteinte de l'équilibre
budgétaire en 2015‑2016.
Nous, on parle de le reporter d'un
an, mais ça, c'est nous. Et pourquoi on parle de ça? C'est parce qu'à partir du moment où on atteint
en 2015‑2016, dans la perspective qui est la nôtre actuellement, puisque la
majorité, elle est là, c'est que ce n'est pas l'équilibre
budgétaire qu'on va atteindre, c'est un surplus budgétaire, un surplus — et vous l'avez nommé aussi dans votre mémoire — qu'on va verser, donc, au Fonds des
générations et non pas qu'on va retourner en redistribution de richesse
aux services publics.
Alors, vous avez commencé à l'aborder à la
question de l'équité intergénérationnelle. J'aimerais que vous continuiez à
nous aider à réfléchir sur cette notion-là.
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez une minute pour nous aider à réfléchir. Allez-y, M. Berlin.
M. Berlin
(Simon) : Comme j'ai
commencé à dire... Et je suis tout à fait d'accord avec ce que vous venez de
dire, que la livraison de services
publics auxquels la population a droit n'est pas un exercice comptable. Il faut
regarder les besoins de la population, c'est quoi, la mission, le rôle
du gouvernement.
Au niveau d'équilibre intergénérationnel ou
d'équité intergénérationnelle, comme j'ai commencé à dire, on applique ce genre de logique, la logique du
gouvernement. Ça veut dire... Bon, qu'est-ce qui arrive pour les jeunes? Les
jeunes, bon, ce n'est même pas une question...
L'équité intergénérationnelle, les jeunes vont perdre en termes d'embauche,
ils vont perdre en termes d'accès à
l'éducation, ils vont perdre en termes d'expérience. Le Québec va perdre en
termes d'expérience, parce que les
jeunes, ils ne resteront pas ici, ils vont aller ailleurs travailler. Il faut
qu'ils gagnent leur vie, il faut qu'ils paient le loyer, il faut qu'ils
mangent. Alors, peut-être ils vont aller ailleurs, on va perdre une expertise.
Au niveau des travailleurs et travailleuses,
bien là ça va être une population de travailleurs et travailleuses vieillissants. Il y a les questions d'épuisement.
Il y a des questions de coûts qui peuvent augmenter, surtout s'il n'y a pas...
Le Président (M. Bernier) :
M. Berlin, je vous remercie. Merci beaucoup de votre présentation et de
votre participation. Mme Deschamps, monsieur...
M. Berlin (Simon) : Je n'ai pas aidé
beaucoup dans la réflexion, je pense.
Le
Président (M. Bernier) : C'est le défi qu'on a comme
parlementaires, de rentrer dans des temps aussi courts.
Donc, je vais
suspendre quelques instants afin de permettre à la Fédération étudiante
universitaire du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 21 h 6)
(Reprise à 21 h 8)
Le Président (M. Bernier) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux.
Avant de
poursuivre, j'ai besoin d'un consentement pour aller au-delà de l'heure prévue,
donc jusqu'à 9 h 45.
Est-ce que j'ai consentement pour aller jusqu'à 9 h 45? Consentement.
Merci.
Bienvenue à
la Fédération étudiante universitaire du Québec. M. Maxence Lenoir,
M. Philippe Poirier-Monette, on
vous souhaite la bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation, et par la suite suivront les échanges avec les
parlementaires. La parole est à vous, en vous identifiant.
Fédération étudiante
universitaire
du Québec (FEUQ)
M. Lenoir
(Maxence) : Parfait. Alors, bonsoir, M. le Président. Bonsoir, M. le
ministre, Mmes, MM. les députés. Donc,
mon nom est Maxence Lenoir. Je suis étudiant en génie électrique à l'École
polytechnique et également vice-président aux affaires universitaires de la Fédération étudiante universitaire du
Québec. Et Philippe Poirier-Monette, ici, qui est notre attaché
politique à la fédération.
Donc, pour
vous rappeler, la fédération représente 13 associations étudiantes
réparties au Québec, 125 000 étudiants. Et ce qui nous intéresse ici pour l'étude du projet de loi n° 15,
c'est, bien sûr, l'implication de l'Université du Québec dans le projet
de loi qui a été déposé par le gouvernement.
Donc, dans le
fond, on s'est intéressés un peu à l'implication qu'avait le projet de loi sur
le réseau de l'Université du Québec.
Je dirais que, dans l'ensemble, on a relevé plusieurs problématiques qui nous
permettent de vous demander aujourd'hui de retirer l'application du projet de
loi au réseau de l'UQ. Et on va s'attarder, là, dans les prochaines minutes,
à essayer de vous expliquer pourquoi on souhaite le retirer.
• (21 h 10) •
La première des choses qu'on a remarquée, en
fait, c'est clairement l'iniquité, en fait, qui est créée dans les universités. On met d'un côté les universités à
charte et on met de l'autre les universités du réseau de l'UQ, comme si c'était un réseau séparé. On considère, à la FEUQ,
que le réseau de l'université, au Québec, est un réseau qui fait un tout.
Il n'y a pas deux types, les universités à
charte et les universités du réseau de l'UQ d'un côté. Donc, le fait d'avoir
impliqué juste une partie du réseau crée clairement une iniquité au sein
des universités
On s'inquiète aussi de la perte d'autonomie des
universités, c'est-à-dire qu'avec le projet de loi, tel qu'il est présenté, on va se mêler vraiment de l'effectif
géré par les universités, alors que, dans les années passées, on donnait en
fait une subvention gouvernementale aux
universités, qui étaient chargées, en fonction des objectifs que fixait le
ministre de l'Enseignement supérieur,
de faire des dépenses, donc, que ce soit en effectif, que ce soit dans du
matériel, que ce soit dans des bâtiments.
Par la suite,
au niveau de la responsabilité de l'application de la loi, on a, comment dire,
un peu de mal à concevoir que le Conseil du trésor va pouvoir
déterminer, en fait, le nombre que ce soit de professeurs, que ce soit d'agents
de soutien, que ce soit... l'effectif, en
fait, qui va être présent au sein des universités, alors que la compétence est
normalement auprès du ministre de
l'Enseignement supérieur. Donc, on voit là, en fait, encore une fois, un
transfert de compétence qui vient
jouer dans l'autonomie des universités. Cette autonomie, nous, on la définit
comme le contenu des cours, comme la nature des programmes, et qui
permet, en fait, d'assurer la mission des universités qui est, bien sûr, au
Québec, la formation supérieure de la population québécoise.
Un de nos
attachements, également, c'est le travail étudiant, qui est un gros
questionnement au coeur de ce projet de
loi. On voit que ça va clairement affecter la capacité des universités à
recruter, à recruter du personnel étudiant. Vous n'êtes pas sans savoir que la réalité financière des étudiants est
précaire et qu'ils ont besoin de travailler, en fait, pendant leurs études, pour subvenir à leurs besoins. On
notait, lors de l'année 2013, que 14,3 % des étudiants travaillaient au
sein des universités et qu'ils occupaient en fait divers emplois, que ce soient
des charges de cours, de la correction d'examen, de la surveillance, des emplois divers, ponctuels ou permanents, des
assistants de recherche, du remplacement également; que ces étudiants, en fait, pouvaient cumuler
également plusieurs emplois au sein même des universités et qu'ils
travaillaient en moyenne
14 heures par semaine. Ces emplois au sein des universités, ces
étudiants-là, c'étaient 35,2 % de leurs revenus qui venaient du
travail au sein des universités, et, avec ce projet de loi, on se demande si on
ne vient pas attaquer en premier lieu ces étudiants, qui ne sont pas, le plus souvent
des cas, protégés par des conventions collectives.
Par la suite,
j'aimerais parler, en fait, du renouvellement du corps enseignant. On
considère, à la FEUQ, que la mission
des universités nécessite d'avoir une capacité d'accueil et d'attraction des
meilleurs professeurs, que ce soit au niveau
de la province, que ce soit au niveau du pays, du Canada, mais également du
monde. Avec l'adoption de cette loi, on craint que cette capacité d'attraction de nos universités pour avoir un
enseignement de qualité au sein de nos universités va être réduite.
Par exemple,
on a également les conventions collectives qui font partie des termes du projet
de loi, donc le projet de loi va
s'appliquer sous réserve, en fait, des dispositions des conventions
collectives. Or, au sein du réseau de l'Université du Québec, vous n'êtes pas sans savoir qu'en
fonction des différentes institutions, des différentes écoles et des
différentes universités les conventions collectives ne sont pas les
mêmes. Donc, on va encore créer une deuxième iniquité, cette fois-ci au sein même du réseau de l'UQ, où
l'application de la loi, l'application du projet de loi, tel que présenté, ne
va pas être la même.
Je
continuerais, en fait, avec les services aux étudiants, qui est une
préoccupation perpétuelle de la fédération, qui servent, en fait, à
s'assurer que les étudiants, lors de leur parcours universitaire, ils puissent
bénéficier, en fait, du soutien, que ce soit
académique, moral mais aussi de vie universitaire, le meilleur possible. Ce qu'on
note, avec ce projet de loi qui va
impliquer un gel d'embauche au sein des universités, notre première crainte, en
fait, c'est que les services aux
étudiants vont être coupés. C'est la porte facile pour les universités, si on
leur oblige, en fait, à faire des restrictions budgétaires, à faire des gels d'embauche, de couper dans les services
aux étudiants. C'est les services, malheureusement, qui sont là en première ligne, qui sont là en
soutien aux étudiants qui sont dans des cas très difficiles, que ce soit
psychologiquement, que ce soit moralement,
que ce soit au niveau académique, et encore une fois on pense — et on le perçoit déjà à l'heure
actuelle — que
les universités seraient tentées de couper dans ces services-là en premier.
Je
terminerais, en fait, ma présentation de notre mémoire par la reddition de
comptes. À l'heure actuelle, il y a tout
un ensemble de redditions de comptes que sont amenées à faire les universités,
que ce soit en vertu des règles budgétaires,
que ce soit en vertu des lois qui les composent. Avec ce projet de loi, on
demande un effort supplémentaire de
reddition de comptes au réseau de l'UQ qui est déjà présent, qui est déjà
présent dans les règles budgétaires, qui est déjà présent dans la loi qui le compose. De dénombrer
l'effectif qui est compris dans le réseau de l'UQ, c'est déjà fait, c'est
déjà fait chaque année, le rapport est déposé auprès du ministre de
l'Enseignement supérieur, qui est ensuite déposé à l'Assemblée nationale. On vient donc dédoubler un travail de reddition
de comptes qui est déjà effectué et qui est déjà présenté à vous, Mmes,
MM. les députés.
On ne dit pas que les mécanismes de reddition de
comptes ne doivent pas s'appliquer, les universités sont financées en majeure partie par des fonds publics.
Par contre, ça nécessite d'avoir une cohésion au sein de la reddition de comptes, et c'est pourquoi depuis plusieurs
années la fédération demande la création d'un conseil national des universités
afin de gérer l'ensemble du réseau et de s'assurer de la cohésion dans le
réseau.
Finalement, je terminerais sur une autre note au
niveau universitaire, qui est le rapport du chantier sur le financement, qui
n'est pas forcément lié directement avec le projet de loi n° 15 mais
qui permettra de déterminer les problématiques de financement actuelles dans notre réseau, et qu'on
pourra mandater en fait par la suite ce conseil national des universités à produire des propositions, que ce
soit en matière de politique de financement mais aussi de reddition de
comptes, pour qu'on puisse atteindre les objectifs que le gouvernement a fixés.
Donc,
je pense que ça conclurait ma présentation du mémoire qu'on vous a soumis. Dans
le fond, pour terminer, c'est un
projet de loi qui, à nos yeux, n'est pas applicable pour le réseau de l'UQ,
pour les raisons qu'on vient d'évoquer, que ce soit l'iniquité qu'il crée au sein du réseau pour la double
reddition de comptes qu'il vient mettre en place et pour l'implication que ça va avoir, que ce soit sur le
travail étudiant mais aussi sur les services qui sont donnés aux étudiants.
Le Président (M.
Bernier) : Merci de votre présentation, M. Lenoir. M. le
ministre, la parole est à vous.
M.
Coiteux : Merci beaucoup. Alors, merci, M. Lenoir, puis merci
aussi, M. Poirier-Monette, d'être ici ce soir. Écoutez, vous avez été trois groupes, aujourd'hui,
à être venus nous parler de l'Université du Québec, alors, chacun avec une perspective un petit peu différente, mais
néanmoins en insistant sur l'inégalité de traitement qui consisterait à
appliquer le projet à l'Université du
Québec et pas aux universités à charte. Juste pour les fins de la discussion,
là, pour les fins de la discussion,
si on soumettait toutes les universités, est-ce que ça réglerait le problème...
ou vous auriez encore des objections?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir, oui.
M.
Lenoir (Maxence) : Bien, comme j'ai présenté, en fait, dans mon
introduction, oui, ça crée une iniquité, mais, au-delà des problématiques, que ce soit en termes de perte d'autonomie
des universités, qui est essentielle pour le moteur du Québec... Les universités ont besoin de cette
autonomie, d'être indépendantes les unes des autres, de pouvoir utiliser
l'argent qu'elles reçoivent pour avoir un
professeur dans tel domaine ou alors avoir plus de soutien, parce qu'elles ont
des réalités différentes. Également, je
pense que... C'est ça. Les universités sont vraiment, réellement différentes,
et ce n'est pas en les appliquant à toutes les universités qu'on va
régler le problème.
De
plus, comme je le disais, la reddition de comptes, on demande à ce qu'il y ait
le dénombrement. Les universités le
font déjà, le gouvernement a déjà les données. Ça fait qu'on ne voit pas
pourquoi on devrait appliquer ce projet de loi à l'ensemble des
universités.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
• (21 h 20) •
M.
Coiteux : Bien, juste un point ici : C'est parce que le
dénombrement arrive avec un retard. Alors, si, pour... D'abord, il y a des fins de connaissance, là.
Comment évolue la situation dans l'ensemble de nos réseaux, ça, je pense
qu'on a besoin de données qui sont plus
fréquentes que sur une base annuelle. Puis, dans certains cas, certains
éléments du réseau, même, les données
annuelles nous arrivent avec une année de retard. Donc, lorsqu'on les a, on est
très, très, très après coup, et donc, s'il y avait eu des choses, des
gestes à poser, on ne serait pas en mesure de le faire.
Donc, de ce point de vue là, l'objectif
ici est toujours que l'État, comme n'importe
quelle organisation, par ailleurs, qui
finance, vous l'avez bien dit, qui finance toutes ces activités-là, dans la
vaste majorité, a besoin de cette connaissance-là. Donc, ce n'est pas un excès de demande sur les
réseaux que de leur demander à qui ils font des chèques de paie, en d'autres
termes, puis à quelle catégorie d'emploi ça
correspond. Donc, ce n'est pas des rapports très complexes qu'on demanderait
dans ce contexte-là.
Alors, est-ce qu'un
dénombrement plus fréquent, vous, vous le voyez comme un problème?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Vous avez évoqué une problématique, je dirais, au
niveau de l'échéancier, c'est-à-dire qu'on
reçoit en retard l'effectif étudiant. Je tiens à rappeler également à Mmes, MM.
les députés que le gouvernement finance
avec l'effectif étudiant deux ans en arrière, c'est-à-dire que les universités
reçoivent pour l'année 2014‑2015 qui s'en
vient avec l'effectif étudiant qu'elles ont eu deux ans auparavant. Donc, si on
veut aussi avoir des universités qui donnent
des effectifs étudiants beaucoup plus récents, pourquoi ne pas financer avec
l'effectif étudiant de l'année précédente, qui serait un portrait beaucoup
plus juste de la subvention qu'octroie le gouvernement auprès des universités?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Je faisais référence, tout à l'heure, au fait qu'il y a eu
trois groupes qui sont venus nous parler de l'Université du Québec ce
soir, puis le premier nous avait dit : Il y a eu une explosion de la masse
salariale du côté administratif. Vous, vous
êtes des étudiants. Vous êtes ceux pour qui les universités existent, là, dans
la fonction de service public, là,
vous permettent d'accéder à un savoir universitaire, vous former,
éventuellement aussi devenir des chercheurs, certains d'entre vous, là, si vous
poursuivez en maîtrise ou au doctorat. Donc, vous êtes les personnes pour
lesquelles on crée et on finance ces
institutions-là. Est-ce que, dans votre expérience de ce que vous vivez dans le
réseau universitaire, et notamment
l'Université du Québec, vous trouvez que les effectifs augmentent au bon
endroit... ou vous pensez que l'augmentation des effectifs,
actuellement, n'est pas à la bonne place?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Quand on parle de l'effectif, c'est sûr qu'il y a
l'administration mais aussi le côté enseignement,
et nous, on s'attarde beaucoup plus au côté enseignement. C'est sûr qu'on
aimerait qu'il y ait un professeur pour 10 étudiants.
Malheureusement, la réalité budgétaire est autre.
Par
contre, je vais revenir sur la question de l'autonomie, qui est, pour nous,
essentielle. C'est-à-dire que, si des universités
décident de mettre beaucoup plus, comment dire, de fonds dans de
l'administration parce qu'elles considèrent que c'est bénéfique pour l'institution, et que ça respecte, bien sûr,
les objectifs qu'a fixés le ministre de l'Enseignement supérieur, on ne peut pas être contre. S'il y a
des universités — et c'est
le cas notamment en région — qui décident de miser plus sur les services aux étudiants parce qu'ils
ont une réalité qui est que c'est des étudiants de première génération en majorité, que c'est des retours aux études en
majorité, des mères monoparentales qui retournent aux études, on considère
également que c'est une bonne chose de
vouloir diminuer cette administration au profit des services aux étudiants.
Encore une fois, c'est une question
d'autonomie des universités. C'est un choix qu'elles doivent faire en fonction
de leur réalité propre et en fonction des différents objectifs que le
ministre a donnés aux universités.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous savez que le contexte budgétaire n'est pas facile,
hein, il n'est pas simple, la situation financière est difficile. Donc,
il y a toutes sortes de décisions qui doivent se prendre pour nous ramener à
l'équilibre, éviter d'augmenter davantage la
dette, qui ultimement nuit aux services et va vous nuire en particulier, parce
qu'il y aura moins de marge de
manoeuvre pour financer quelque programme que ce soit au fur et à mesure qu'on
va avancer dans le temps. Donc, on prend des gestes, là, pour contrôler
la situation.
Comment
vous pensez, dans ce contexte-là... Parce que je sais que vous avez des
attentes en disant : Il faudrait financer
davantage, il faudrait diminuer les ratios professeurs-étudiants. Vous savez
que, dans le contexte actuel, ce n'est pas possible encore. Au
contraire, on doit faire des efforts accrus. Comment vous pensez que les
universités peuvent contribuer concrètement
selon... leur part, qu'elles puissent faire leur part pour aider à faire
atterrir les finances publiques sur un sentier qui est plus soutenable,
au Québec?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M. Lenoir
(Maxence) : Bien, je pense qu'il y a deux volets à cette question-là.
Je pense que les universités contribuent
déjà beaucoup à la société de par le fait des diplômés. J'entendais tout à
l'heure qu'on parlait que l'économie se
créait par l'entreprise privée. Bien, l'entreprise privée a besoin de diplômés,
de diplômés universitaires. Et, pour que ces diplômés-là puissent un jour travailler, il y a besoin d'une
université de qualité, accessible et qui va leur permettre par la suite,
donc, d'aller travailler dans le privé.
Pour les questions de coupures ou, comment dire, de meilleure gestion des fonds publics dans les
universités, je ne pense pas que je
vais être le mieux placé pour répondre à cette question, il faudrait voir les
gestionnaires des universités pour
cela. Encore une fois, de notre côté, on considère que l'université a besoin de
fonds. C'est rentable pour le gouvernement
de financer l'université. Oui, il y a un aspect de rentabilité privé, mais il y
a aussi un aspect de rentabilité public
à la fin, in étudiant universitaire va coûter moins cher à l'État, va redonner
beaucoup plus en impôt, et on pense que c'est comme ça qu'on devrait
voir la question des universités.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Coiteux : C'est parce que...
Puis je vais partager ça avec vous. Ma préoccupation, c'est la suivante. C'est que forcément on doit demander des efforts à beaucoup
de gens, à beaucoup de groupes pour y arriver. On parle de plusieurs milliards
de dollars, là, pour atteindre les objectifs budgétaires, parce
que, quand on dit : Trouver 3,2 milliards puis ensuite s'assurer de maintenir l'équilibre
budgétaire — puis ça,
c'est en partant d'une situation où même cette année on aurait peut-être eu un déficit de 5 milliards — bon, la marche est très haute, hein, pour
ramener l'équilibre. Donc, ça prend des décisions qui sont difficiles, puis en partie ça veut dire qu'il faut
regarder nos programmes puis qu'est-ce qu'on va faire avec les programmes. Est-ce qu'on les finance
exactement de la même façon? Est-ce qu'on fait les mêmes choix? On est
obligés de revoir l'ensemble des façons de faire.
Ma
préoccupation, moi, c'est que l'effort soit partagé par tous. Et donc chaque
fois que j'ai un groupe qui dit : Non,
nous, on ne veut pas participer à cet effort-là parce qu'on est très
différents, on est très spécifiques puis on a des raisons que les autres
n'ont pas pour nous soustraire à l'effort, je veux bien, mais je suis toujours
un petit peu inquiet.
Puis c'est pour ça
que je reviens encore avec ma question. Je comprends, j'ai été universitaire
moi-même, là; étudiant, bien sûr, mais j'ai
été professeur d'université pendant des années. Je le sais, ce que ça veut
dire, la contribution des universités
à la société, c'est sûr qu'il y a une contribution majeure des universités à la
société. Mais néanmoins c'est financé par l'argent des contribuables,
les taxes, les impôts. Les revenus fiscaux, ils n'augmentent plus. L'époque où c'était 5 %, 6 % par année, ça fait
longtemps que c'est terminé, ça, puis même avec la croissance économique qui
peut s'accélérer on ne va pas
retourner à cette période-là. Donc, on ne peut pas avoir des dépenses qui vont
croître comme à une époque où on avait des recettes fiscales qui
croissaient à des taux qui ne vont pas revenir.
Alors, dans ce
contexte-là, est-ce qu'on peut vraiment dire à un pan entier du secteur public,
notamment les universités et l'Université du
Québec : Non, non, vous, vous allez être juste en phase de croissance, et
puis on va vous transférer toutes les sommes d'argent dont vous avez
besoin pour croître, alors que, dans le reste du secteur public, on doit imposer des efforts? Alors, est-ce qu'il
n'y a pas une contribution possible du réseau universitaire à l'effort de
retour à l'équilibre budgétaire?
Le
Président (M. Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Vous avez parlé de la croissance des universités.
Les universités croissent aussi en fonction de l'effectif étudiant, et ça, c'est quelque chose qu'elles ne gèrent
pas d'elles-mêmes, c'est la démographie, en fait, du Québec qui le gère. S'il y a des chiffres du
ministère de l'Enseignement supérieur qui le donnent, si on voit une évolution
du nombre d'étudiants dans les années
futures, c'est normal que le financement des universités augmente pour
s'assurer que l'ensemble de nos jeunes puissent être formés au niveau du
premier, deuxième et troisième cycle dans le futur.
Actuellement,
il y a déjà eu plusieurs coupures, dans les dernières années, dans les
universités. On les a dénoncées, les universités
ont déjà des graves déficits. Il y a des problèmes dans les services aux
étudiants, comme j'ai dit, il y a déjà des problèmes dans la gestion
académique. Si on demande un effort supplémentaire...
Puis
là on demande un effort supplémentaire seulement à l'Université du Québec. Je
veux dire, c'est complètement inéquitable
envers toutes les universités. Et, je vais le rappeler encore une fois — et c'est notre principal argument sur
la question — de l'appliquer à l'ensemble des universités,
il y a un problème d'autonomie. On va fixer un nombre d'effectifs on ne sait pas trop comment, c'est le ministre qui
va décider. Est-ce qu'il va y avoir du lobbyisme de la part des grandes
universités pour avoir plus d'effectif? Est-ce qu'on va connaître la mort du
réseau de l'UQ en région? Nous, c'est la question qu'on se pose.
Le Président (M.
Bernier) : ...un petit peu moins qu'une minute.
• (21 h 30) •
M. Coiteux :
Un petit peu moins qu'une minute. Écoutez, donc, je ne vous poserai pas une question,
je vais simplement... parce que c'est les derniers mots que je peux prononcer
ce soir. Écoutez, on a eu un court échange. J'ai apprécié tous les échanges qu'on a eus, autant aujourd'hui comme la semaine dernière. Je suis venu ici, moi, pour écouter,
lire les mémoires attentivement, bien sûr, et écouter, échanger avec les gens.
L'esprit du projet de loi, pourquoi
on fait ça? D'abord, avoir la connaissance. Ce n'était pas normal que l'État n'ait pas la connaissance de ses effectifs
dans les réseaux. Donc, il y a l'aspect dénombrement. Mais, comme 60 % de nos dépenses de programmes, c'est les dépenses de rémunération, il faut
vraiment qu'on fasse attention à la croissance des effectifs au cours
des prochaines années. Puis on doit se donner les outils pour réussir ça.
Ceci
étant, il y a des arguments qui ont été avancés. Il y aura sans doute... Sans
doute, là, on va considérer des amendements
possibles. Je suis sensible à ce que j'ai entendu ce soir, on va discuter de ça
pour la suite des choses, mais tout
de suite je peux déjà dire au moins une chose : Il y aura un amendement
qui va exclure au moins deux entités qu'on a entendues... ou qu'on a reçu un mémoire aussi. Étant donné la situation
très spécifique, là, d'organisme essentiellement, mais essentiellement fiduciaire, dont les employés
ne sont pas nommés en fonction de la Loi de la fonction publique, on va exclure la Caisse de dépôt et la Commission de
la construction. Ça, je pense qu'on s'est déjà pas mal entendus là-dessus,
là, que c'était nécessaire. Pour le reste, on va continuer notre réflexion.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de
Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.
M.
Therrien : Merci, M. le Président. Merci, et bienvenue,
M. Lenoir et M. Poirier-Monette, d'être ici avec nous.
Écoutez,
j'aurais peut-être deux questions rapides, ensuite je vais passer la parole à
ma collègue. Je vais juste réagir, là,
rapidement. Quand on parle de diminuer les dépenses, contrôler les dépenses au
niveau des universités, au niveau de l'éducation,
il y a des effets négatifs à long terme quand on fait ça. Le ministre de
l'Économie, la semaine passée ou voilà deux
semaines, disait en réponse à une question, au salon bleu, qu'il y avait plus
de 50 000 emplois, actuellement, qui étaient disponibles, des postes disponibles qui n'étaient pas comblés
parce que souvent c'est un manque de formation qui fait en sorte que ces gens-là ne peuvent pas
remplir ces postes-là, combler ces postes-là. Et donc investir en éducation,
c'est la clé du succès pour une croissance à
long terme, soutenue. Moi, je suis de cette école-là, alors, avant de
poursuivre, je tenais à vous dire ça.
Les
conventions collectives, j'en ai parlé tantôt. J'ai toujours
le même laïus, mais, dans ce cas-là, c'est important... puis c'est important dans les autres cas
aussi, là, mais c'est parce que les besoins sont en augmentation, effectif qui est maintenu
constant. Dans ce cas-là, les universités du Québec se retrouvent dans une situation
où il y aura une dégradation des conditions de
travail des professeurs et des gens qui vont travailler dans les universités du
Québec.
Quel sera l'impact
que ça va avoir, cette dégradation-là, sur la communauté des universités du Québec?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M. Lenoir
(Maxence) : Bien, le premier impact, c'est sur les étudiants, malheureusement,
c'est les premiers touchés. En fait, dès
qu'on commence à couper, que ce soit dans les professeurs, dans les chargés de
cours, dans les services aux
étudiants, malheureusement, les premiers touchés, ça va être les étudiants.
Ça va être des étudiants qui vont décrocher, ça va être des étudiants qui vont retarder leur diplomation. Ça va
être des étudiants qui vont peut-être abandonner l'université puis qui ne vont jamais y retourner.
Sur
la question... Vous parliez des conventions collectives,
j'aimerais y revenir. C'est, pour nous, important, ce sujet-là. Chaque université a sa propre
réalité, a signé des conventions collectives avec les groupes qui la composent,
et que ce soit au sein de l'Université
du Québec... L'Université du Québec n'a pas une convention collective pour l'ensemble
de son personnel. Il y en a dont l'engagement de professeurs est en fonction de
l'augmentation des effectifs étudiants; d'autres, non. Donc, avec ce projet de loi qui dit vouloir respecter les
conventions collectives qui sont déjà en place, si des universités n'ont pas
les moyens, en fait, d'augmenter leurs effectifs de personnel enseignant,
puisqu'elles ont reçu une commande de gel de la part du ministre de l'Enseignement supérieur,
et que les dispositions, en fait, de leurs conventions collectives ne leur permettent pas d'augmenter et
d'accroître, en fait, leur personnel enseignant, on va vers un problème.
On va vers des salles de cours qui vont être
multipliées. On va avoir des problèmes académiques réels, et ça va déteindre
ensuite sur les étudiants.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Therrien : O.K., merci. Ensuite, le groupe qui vous a précédés... non, le
groupe avant, le deuxième groupe avant
vous mentionnait que la recherche dans les universités du Québec... on verrait
une diminution de la recherche dans les universités du Québec, il y
aurait moins de dynamisme à ce niveau-là. Qu'est-ce que ça a comme impact chez
les étudiants, d'après vous?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Bien, si on diminue la recherche dans les universités,
c'est sûr qu'on aura moins d'étudiants qui
vont, bien sûr, vouloir aller au deuxième, au troisième cycle, qui vont vouloir
créer de la richesse, que ce soit par des articles scientifiques qui vont être publiés partout dans le monde, que
ce soit par des inventions, par des dépôts de brevet, que ce soit par l'écriture de livres, dans le
domaine littéraire. S'il y a un impact sur la recherche, encore une fois, les
premiers concernés, c'est les
étudiants, malheureusement. On est au sein des universités. Les premiers
impactés dès qu'on touche le financement universitaire, c'est les
étudiants.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M.
Therrien :
...céder la parole...
Le Président (M.
Bernier) : Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Oui, merci, M. le Président. Alors, bonsoir.
Heureuse de vous entendre. Je ne pense pas qu'on peut dire, en ce moment, que les universités, et donc,
par ricochet, les étudiants, ne font pas leur part, parce qu'on fait face à des
coupes records dans le réseau universitaire,
et puis je pense qu'il faut être conscient que ça a des impacts, ce n'est pas
sans impact. Et d'ailleurs le
gouvernement... Évidemment, le ministre n'était pas là à l'époque, mais celui
qui occupait mon poste, qui est
maintenant le ministre des Ressources naturelles, disait à quel point il était
important de réinvestir, donc, il y a
de ça une année. Donc, on ne parlait pas de coupe, on parlait de
réinvestissement. Donc, ça devait être parce que c'était une bonne idée
de s'occuper de notre réseau universitaire, donc je pense que ça le demeure
très certainement aujourd'hui. Donc, il faut garder ça à l'esprit quand on
aborde un projet de loi comme celui-là.
Si je résume un peu vos inquiétudes, puis vous me
corrigerez, puis ça rejoint en partie les deux autres groupes qu'on a entendus, donc la fédération des
professeurs et le réseau de l'UQ, il y a toute la question de l'autonomie, donc
de l'indépendance des universités qui
serait entravée significativement, selon vos arguments, avec un tel projet de
loi. Là, le ministre est arrivé avec
sa suggestion : Que diriez-vous si on embarquait toutes les universités,
donc, dans le projet de loi? Je n'ai
pas l'impression, mais on ne le sait pas, mais que c'est l'hypothèse vers
laquelle il se dirige, parce qu'il n'y aurait pas juste l'UQ qui, donc, s'insurgerait, mais il y aurait toutes les
autres universités, donc, qui ne font pas partie du périmètre comptable. Donc, je ne sais pas, peut-être qu'il
cherche à avoir plus de représentations en ce sens, je ne peux pas lire dans sa
pensée, mais en tout cas il y a tout un aspect par rapport à l'autonomie, je
pense, qui a été bien amené aujourd'hui.
Puis
il y a la question du deux vitesses. Et puis, compte tenu qu'effectivement, en
ce moment, il y a juste l'UQ qui est
concernée par le projet de loi... Les autres nous ont donné des exemples
concrets, mais, vous, est-ce que vous avez des exemples concrets sur les impacts négatifs? Parce que je sens que le
ministre est quand même à l'écoute, il nous a déjà fait part de modifications qu'il apporterait au
projet de loi. Moi, je salue toujours ça, parce que je pense qu'un projet de
loi, c'est toujours perfectible, puis
un exercice, pour qu'il soit louable, de consultation publique, il faut
entendre correctement. Donc, je pense que, votre plaidoirie, peut-être
qu'elle peut...
Le Président (M.
Bernier) : ...une minute pour répondre, M. Lenoir.
Mme
Hivon :
Oui. Donc, je vous demanderais des impacts concrets.
M.
Lenoir (Maxence) : Bien, les impacts du projet de loi, comme je l'ai
dit, là, ça va être vraiment sur la réalité étudiante. Puis, encore une fois, là, c'est les étudiants qui vont
écoper. Si le projet de loi vient fixer un quota d'effectif et que les étudiants... les universités se
retrouvent avec ce quota-là dans les mains, bien les premiers qui vont être
impactés, là, c'est les travailleurs étudiants au sein des universités.
Et, je le rappelle, c'est, pour ceux-ci, 35 % de leurs revenus, c'est-à-dire qu'on va leur couper 35 % de
leurs revenus annuels, puisqu'ils n'auront pas accès à leur travail au sein des
universités. Que ce soit en tant que chargés
de cours, que ce soit en tant que correcteurs d'examen, que ce soit en tant que
surveillants d'examen, les premiers
impactés, c'est ces étudiants-là, qui n'ont pas tous des conventions
collectives et qu'il est très facile de couper par les universités.
Si on vient
couper ces emplois étudiants, il faut bien que quelqu'un le fasse, le travail.
Ça va être sur le travail des
professeurs, qui vont devoir prendre de leur temps, que ce soit en termes
d'encadrement des étudiants de cycle supérieur, pour pouvoir corriger
des examens qui...
Le Président (M. Bernier) :
Excusez-moi. Je vous remercie. On doit passer au deuxième groupe d'opposition
et on est très, très serrés dans le temps. M. le député de Beauce-Nord.
• (21 h 40) •
M.
Spénard : Merci, M. le Président. À mon tour, M. le
président du Conseil du trésor disait que vous êtes les troisièmes qui venez nous parler des universités du
Québec comme telles, etc., et je conçois avec lui et je conçois aussi avec vous qu'il y a une espèce de séparation, que
je m'explique difficilement, là. Pourquoi juste l'Université du Québec
et non pas les autres universités à charte? En tout cas, ça, on pourrait en
discuter plus profondément.
Mais, moi, il y a
quelque chose qui m'est revenu encore dans ce rapport-là et qui est revenu
beaucoup plus souvent que trois fois, c'est
l'importance de la reddition de comptes, qui est rendue exponentielle en termes
de frais. Et, tout à l'heure, je pense que le recteur de l'UQAM nous mentionnait que 30 % de sa
direction financière travaille uniquement à la reddition de comptes pour
différents ministères au gouvernement.
Vous,
êtes-vous en mesure, parce que vous en avez parlé un peu ici, que ça donnait
une surcharge, mais... «...les informations
demandées par ce projet de loi sont déjà fournies au ministère par [...] la
règle 6.6 des règles [...] du ministère...» Ça, vous avez vraiment
l'impression que c'est un travail qui va se faire en double malgré...
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir, oui.
M.
Lenoir (Maxence) : Bien, en
fait, tout à fait. Comme je le disais, le travail qu'on demande
avec ce projet de loi, c'est
de détailler l'effectif du personnel dans les universités, et ça, on le demande
déjà pour le réseau de l'UQ à au moins deux places que j'ai
répertoriées, c'est-à-dire dans les règles budgétaires qu'on doit transmettre
avec un système informatique, chaque année
les universités doivent donner quel est l'effectif de leur personnel, et, en
plus, dans le rapport annuel qui est
déposé à l'Assemblée nationale, le réseau de l'Université du Québec détaille pour
chacune de ses composantes, donc
chaque université, chaque institut, chaque école, quel est le nombre de
personnel qui est dans ses rangs. Donc,
l'exercice existe déjà en double, puis on le rajoute encore une fois dans ce projet de loi, pour une troisième fois. L'université va juste créer des
rapports pour créer des rapports, c'est ça qu'on voit.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Groulx.
M.
Surprenant : M. le Président, merci. Alors, personnellement, moi, j'ai
deux garçons de 25 et 23 ans. Les deux
fréquentent l'université. Un est professeur aussi en même temps, puis l'autre a
été chargé de cours, alors je comprends un petit peu, là, ce que vous
vivez. Mais j'ai mes deux cas à moi, mais j'aimerais avoir un peu plus
d'explications sur l'ensemble, un peu sur le portrait plus global, alors donc
j'aurai des questions dans ce sens-là.
Je
considère également que c'est très important, l'innovation, au Québec.
Et, dans le mémoire que nous a déposé tantôt
l'Université du Québec, ils faisaient état que «l'enjeu en matière de
ressources se trouve dans le renforcement de [la] capacité [de l'Université du Québec] à attirer et à recruter des
professeurs-chercheurs de haut niveau afin d'offrir la meilleure formation possible aux étudiants, de
diriger des projets à la fine pointe des connaissances et de continuer d'agir
comme catalyseur d'innovation au Québec». C'est très important.
Alors, vous avez cité dans votre document les
différentes charges de travail qui sont remplies par les étudiants, et
puis, entre autres, il y aurait un mot que j'aimerais ça que vous me précisiez.
Un répétiteur, qu'est-ce que c'est?
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Bien, un
répétiteur, en fait, dans les universités, c'est souvent une personne qui
accompagne un chargé de laboratoire. Donc, il y a deux ou trois
personnes, dans un laboratoire, pour aider les étudiants à faire le
laboratoire.
M.
Surprenant : ...donc, au
niveau de catalyseurs d'innovation. Je vois que, dans les cours, dans les
travaux que vous avez, c'est «charge
de laboratoire» et «assistant de recherche», entre autres. Alors,
j'aimerais ça que vous m'expliquiez un
peu quelle est l'importance que ces deux items-là ont prise par rapport aux
autres emplois au cours des dernières années? Est-ce qu'il y a une forte croissance? Et est-ce que, donc, les
perspectives sont intéressantes pour vous autres à ce niveau-là? C'est
quoi, le...
Le Président (M.
Bernier) : M. Lenoir.
M.
Lenoir (Maxence) : Je n'ai
pas de chiffre sur l'évolution en tant que telle de la charge de cours ou des
assistants de recherche pour les
étudiants sur les dernières années. Ce que je peux vous dire puis qu'on a mis
dans le rapport qu'on vous présente,
c'est que le travail étudiant au sein des universités est très important. On a
vu, donc, qu'il y a 14 % des étudiants qui travaillent au sein de nos universités, au Québec, et qui
ont besoin, en fait, de ce travail-là pour subvenir à leurs besoins. Ça correspond à 6 100 $
de revenus annuellement. Ce 6 100 $, c'est 35 % de leurs
revenus. Comme je le disais tantôt,
si on commence à couper ces postes-là, qui sont les plus faciles à couper par
les universités, c'est cet argent que
les étudiants auront en moins. C'est cet argent que les étudiants soit devront
s'endetter, qui est en fait, malheureusement,
la chose la plus simple à faire, ou sinon
aller sur le marché du travail privé en essayant de trouver du travail à
l'extérieur de l'université.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Lenoir. Je donne la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous avez deux minutes pour
votre question.
Mme
Massé : Merci beaucoup. Merci d'être là. Bonsoir. C'est sûr que, dans les préoccupations qui
sont amenées ici, on parle beaucoup
de l'importance de l'effort, qu'on doit, tout le monde, partager
collectivement cet effort-là pour améliorer les recettes fiscales.
Ma collègue
disait : Vous avez déjà... ou le milieu universitaire a déjà contribué.
Est-ce que vous avez le sentiment que, dans les 10 dernières
années, il y a eu vraiment un effort qui a été fait, de votre côté?
Le Président (M. Bernier) :
M. Lenoir.
M. Lenoir (Maxence) : Un effort de
la part du gouvernement dans les universités?
Mme Massé : Du côté des universités
pour mieux contrôler leurs coûts, leurs dépenses, etc.
M. Lenoir
(Maxence) : O.K. Bien,
je dirais que, dans les dernières années, là, il y a quand même
eu plusieurs coupures qui ont
été demandées aux universités, donc notamment cette année, avec une grosse
coupure qui est venue vraiment affecter les universités. Donc, je pense
que les universités, année après année, font leur part. Année après année,
la subvention par étudiant, donc, par
étudiant qui est octroyée par le gouvernement, c'est la première fois qu'elle diminue,
cette année. C'est quand même une première dans les 10 dernières années.
Le Président (M. Bernier) :
Une dernière question, oui.
Mme
Massé : Oui. Alors, dans ce
sens-là, je vais revenir sur une de mes préoccupations qui s'appelle l'équité
intergénérationnelle. Ce que je comprends, c'est que vous allez donc avoir, comme jeunes, moins accès à des
services, vous allez payer plus de
taxes. Il va y avoir moins d'embauche, à tout le moins cette année, mais on
peut imaginer que ça va se perpétuer.
Est-ce que vous sentez qu'il y a là un acte
d'équité intergénérationnelle?
Le Président (M. Bernier) :
M. Lenoir.
M. Lenoir (Maxence) : Pour l'équité
intergénérationnelle, je vous dirais qu'on est très préoccupés. On parle beaucoup : Bien, c'est pour nos jeunes dans le futur. Malheureusement, les jeunes n'ont pas été consultés. On attend encore une politique
d'action jeunesse, on attend encore la stratégie, et malheureusement ce n'est
pas sur les rangs. On parle beaucoup des jeunes, mais on ne leur a pas demandé
leur avis, finalement.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Merci, M. Lenoir, M. Poirier-Monette. Merci de votre
participation à la Commission des finances publiques.
Mémoires déposés
Avant de
terminer, je dépose les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été
entendus lors de ces auditions, soit
l'Association des pharmaciens en établissements de santé et la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Merci aux parlementaires qui ont participé à cette commission. Merci à M.
le ministre, M. le porte-parole officiel, le député de Sanguinet,
et M. le député de Beauce-Nord, et M.
le député de Groulx,
et à tous les autres membres, collègues parlementaires. Merci au personnel de l'Assemblée nationale, du Secrétariat du Conseil du
trésor, du personnel à
l'enregistrement également de nos débats, et merci à la population qui
nous a écoutés.
Je lève donc la séance de la commission, ayant
accompli son mandat, et ajourne ses travaux sine die. Bonsoir à tous. Merci de
votre participation.
(Fin de la séance à 21 h 47)