(Neuf heures trente-trois minutes)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je souhaite la bienvenue à tout le monde et particulièrement la bienvenue au député de Kamouraska-Témiscouata, qui en est à sa première commission parlementaire. Donc, bienvenue à la Commission des finances publiques. Une bonne et heureuse année à tous et à toutes, les membres de la commission, Mme la ministre, tout le monde, pour cette première commission de l'année 2011.
Donc, la commission est réunie aujourd'hui afin de procéder... procéder, pardon, à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 130, Loi abolissant le ministère des Services gouvernementaux et la Société québécoise de récupération et de recyclage et mettant en oeuvre le Plan d'action 2010-2014 du gouvernement pour la réduction et le contrôle des dépenses en abolissant et en restructurant certains organismes et certains fonds.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a trois remplacements: M. Aussant (Nicolet-Yamaska) est remplacé par Mme Malavoy (Taillon); M. Marceau (Rousseau) est remplacé par M. Simard (Richelieu); et M. Pelletier (Rimouski) est remplacé par M. Simard (Kamouraska-Témiscouata).
Remarques préliminaires
Le Président (M. Huot): Merci, Mme la secrétaire. Donc, ce matin nous commençons avec les remarques préliminaires et nous recevons quatre groupes en consultation. Nous allons débuter tout de suite, Mme la ministre, avec les remarques préliminaires. Vous disposez d'un maximum de 7 min 30 s. La parole est à vous.
Mme Michelle Courchesne
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, mes premiers mots seront certainement pour saluer mes collègues. Et je crois qu'on peut se permettre ce matin, M. le Président, encore, même si c'est le 19 janvier, se souhaiter une excellente année. Je souhaite que nos travaux soient des plus constructifs en cette année 2011. Mais avant tout, si nous sommes ici, c'est parce que nous sommes en santé. Et je dis toujours que c'est peut-être ennuyant de se faire souhaiter de la santé, mais, à notre âge... de ce côté-ci, il y a quelques plus jeunes, mais, à notre âge, c'est un élément essentiel, cette santé. Alors, je vous souhaite à tous de rester en santé pour pouvoir continuer de fabriquer des lois qui soient tout aussi importantes pour l'avenir du Québec.
Et je me permets aussi de souhaiter vraiment particulièrement la bienvenue au nouveau député. Nous disions, la députée de Taillon et moi, tout à l'heure que nous aimions tellement fabriquer ces lois et participer aux travaux de la commission parlementaire. On vous souhaite d'avoir le même engouement que nous avons tous ici, parlementaires, au cours de ces travaux. Vous allez voir, c'est très, très, très différent du salon bleu.
Maintenant, chose plus sérieuse maintenant, ce matin, M. le Président, le projet de loi n° 130 constitue bien sûr un pas de plus dans la volonté du gouvernement de répondre aux attentes des Québécois, particulièrement dans l'administration de leur gouvernement. Et, bien sûr, l'administration du gouvernement, dans la société d'aujourd'hui, s'étend à bien des organismes qui sont autour et qui participent à cette gestion des fonds publics, notamment. Mais je veux tout de suite, avant d'aller plus loin, vous dire que j'ai le privilège ce matin de parler au nom de différents collègues; c'est-à-dire, tout au long de cette commission, je parlerai au nom de plusieurs collègues ministres du gouvernement et pour chacun d'entre eux ou d'entre elles. Et je suis certaine que nous échangerons énormément sur les missions de l'État. Et le coeur de... Et, à première vue, on pourrait croire que ce... parce que nous proposons d'abolir un certain nombre d'organismes, mais en fait, moi, je dirais d'alléger des structures, d'augmenter notre efficacité, notre efficience, de moderniser les structures de l'État, je pense que ça fait aussi partie de nos responsabilités et de notre rôle de parlementaires, mais d'autant plus que la population -- et on le voit quotidiennement -- la population l'exige.
Cela dit, je veux qu'il n'y ait aucune équivoque et je serai très collaboratrice et très à l'écoute sur le fait que nous devons aussi... à l'intérieur des choix qui nous sont proposés, nous voulons aussi maintenir les missions, les missions de chacun, qui sont absolument des missions incontournables et très importantes dans l'évolution de notre société, mais aussi, plus que ça, dans notre façon de travailler et de voir l'avenir du Québec à travers différents secteurs d'activité. Et je trouverais dommage que nous nous limitions à croire que parce qu'il y a le mot «abolition» de certains organismes ça veuille dire que nous négligeons justement l'importance de ces missions fondamentales.
D'ailleurs, M. le Président, dans certains cas, et on le verra ce matin, on parle davantage de regroupement. Et donc ce n'est pas nécessairement, là, et je veux être très claire, abolir pour abolir. Ce n'est pas ça, l'esprit de la loi. Et ce n'est pas... Il n'y a pas de petites économies, ça va de soi, mais ce n'est pas l'essence même de nos travaux pour les jours qui viennent. Et ça va être une belle occasion, M. le Président, justement de se requestionner, d'aller plus en profondeur sur ces différentes missions de l'État, mais surtout sur comment souhaitons-nous, d'une part, être conseillés comme gouvernement et comme parlementaires, mais, d'autre part, comment souhaitons-nous faire évoluer ces missions-là aussi partout à travers le Québec. Parce que, bien sûr, c'est important partout à travers le Québec. Et c'est donc dans cet esprit vraiment d'ouverture et d'écoute, parce que nous aurons cinq jours à passer ensemble, ce sera vraiment dans cet esprit d'écoute que nous aborderons nos travaux.
**(9 h 40)** M. le Président, je veux aussi dire que, le service aux citoyens, le citoyen lui-même est de plus en plus exigeant par rapport aux services que nous octroyons. Et il ne sera jamais assez exigeant, le citoyen. Il a ce droit. Il a ce droit d'exercer son rôle de citoyen et d'exiger de nous la qualité de service, mais d'exiger de nous aussi que nous puissions permettre, nous permettre collectivement d'être... d'évoluer dans un monde moderne, dans un monde parfois très compétitif -- est-ce trop? Et peut-être qu'il y a un équilibre qu'il faut atteindre aussi à cet égard-là dans notre façon d'aborder les missions de l'État. Mais, très certainement, ne perdons pas de vue que notre objectif premier, et je le répète, même si on parle d'abolir des organismes ou de les regrouper, notre objectif premier sera toujours, sans aucune hésitation, sera toujours de nous assurer que nous rendons ces services le plus efficacement et avec la plus grande qualité.
Nous toucherons à différents sujets, et ce matin particulièrement un sujet... Et je suis très heureuse que nous commencions avec le domaine de la recherche et que nous ayons l'occasion aujourd'hui de nous intéresser, je vais dire, aux tenants et aboutissants de ces organisations, parce qu'on n'a pas l'occasion de le faire très souvent. Et je rappelle, M. le Président, parce que c'est important de le faire avant de terminer, que mon collègue le ministre du Développement économique et responsable de la recherche avait annoncé le regroupement de ces organismes dans sa politique sur la recherche et l'innovation, donc bien avant que nous présentions ce projet de loi n° 130, ce matin. Donc, il y avait là une volonté qui était présente et qui avait des... qui présente des explications et des justifications qui vont bien au-delà d'une économie budgétaire. Et je pense que nos échanges seront intéressants de ce point de vue là et nous permettront certainement de voir, encore là, les enjeux qui sont liés à ce qui nous est présenté ce matin.
Alors, M. le Président, je termine là-dessus pour vous dire que mes collègues de l'aile parlementaire, que je remercie, qui sont tous présents mais qui participeront activement aux travaux de cette commission, alors nous sommes là, M. le Président, pour vous assurer de notre plus grande collaboration.
Le Président (M. Huot): 7 min 30 s exactement, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Yé! Ça commence bien l'année!
Le Président (M. Huot): Impressionnant, impressionnant.
Mme Courchesne: Pour moi, oui.
Le Président (M. Huot): Oui. Merci beaucoup. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de Conseil du trésor, de fonction publique et de services gouvernementaux, le député de Richelieu, à faire ses remarques préliminaires. M. le député, vous avez une période maximale de six minutes.
M. Sylvain Simard
M. Simard (Richelieu): Ça va être dur. M. le Président, d'abord permettez-moi de vous saluer. Vous êtes très actif dans nos commissions parlementaires depuis quelques années, et je sais que vous mènerez de main de maître ces travaux, je n'en suis pas inquiet. Saluer mes collègues du parti gouvernemental. Évidemment, de notre côté, saluer, je l'indique tout de suite, d'abord la députée de Taillon, qui m'accompagnera tout au long de la défense de ce projet de loi, de l'étude de ce projet de loi. D'autres collègues, selon les thèmes abordés, puisque ce sont leurs champs de critique, se joindront à nous. Je vois évidemment le nouveau député de Témiscouata, Kamouraska-Témiscouata, qui se joint à nous puisqu'il est critique pour les questions de recherche, Mme la députée de...
Une voix: Taschereau.
M. Simard (Richelieu): ...Taschereau -- je m'en excuse, là -- qui se joint à nous évidemment comme critique de la santé, puisqu'il sera question des services sociaux et de... cet après-midi, de fonds qui concernent ce secteur. Saluer également mon collègue de l'Action démocratique. Nous nous retrouvons, nous, à peu près dans toutes les commissions.
Je veux évidemment, en terminant, saluer, pour la première fois dans nos rôles respectifs en commission, la présidente du Conseil du trésor. Nous avons beaucoup travaillé dans notre vie ensemble, mais c'est la première fois que nous sommes des vis-à-vis directs. La transition est facilitée par la présence à côté de moi de la députée de Taillon. Un bonheur ne vient jamais seul, madame!
Nous allons donc travailler ensemble très sérieusement, étudier ce projet de loi qui, vous l'aurez compris, réunit plusieurs domaines d'activité et qui donc exigera de nous une grande souplesse intellectuelle, une ouverture d'esprit, une volonté d'analyser à fond les propositions qui nous sont faites. Je vais dans quelques minutes vous dire un peu l'attitude, au cours des prochaines minutes, vous dire l'attitude qui sera la nôtre.
D'abord, il est, il faut le dire, tout à fait nécessaire et logique qu'un État vérifie régulièrement la pertinence des organismes et structures qu'il a mis en place pour en vérifier d'abord l'efficacité et afin de s'assurer qu'ils rendent bien les services pour lesquels ils ont été créés. Ce n'est pas un aberration de revoir régulièrement le rôle et la mission des organismes créés par l'État, bien au contraire.
Par ailleurs, on le sait, la situation des finances publiques dans un État endetté, hein, qui s'endette à un rythme affolant d'ailleurs et dont les marges de manoeuvre ont été systématiquement anéanties par une perte de contrôle des dépenses au cours des années, impose de chercher à vérifier si les moyens mis en oeuvre permettent d'atteindre vraiment les objectifs qui sont visés. Nous ne sommes pas, je le dis en partant ici, nous ne sommes pas arc-boutés sur quelque statu quo que ce soit. Nous sommes ouverts à la discussion.
Cependant, au-delà des principes, il faut voir si l'opération en cours n'est pas un simple leurre visant à jeter en pâture à l'opinion publique un certain nombre d'organismes sans trop se préoccuper des services qu'ils rendent ni des économies réelles que leur abolition ou leur fusion entraînerait. Ça, pour nous, c'est extrêmement important. L'opération réingénierie dans laquelle nous avons vécu avec une des prédécesseures de la présidente du conseil actuelle -- nous l'avons vécue pendant plusieurs années -- a été, on se rappelle, lancée à grand renfort de publicité et a été selon nous un échec lamentable. Il y a lieu d'ailleurs de s'interroger sur cette tentative de reprise de cette opération de réingénierie.
Je rappelle à ce sujet, pour... et ce sera toujours en arrière-plan de nos remarques, l'existence de trois rapports qui ont été faits, réalisés à la demande de la présidente du Conseil du trésor et du gouvernement, les rapports de Thomas Boudreau, le rapport Geoffrion, le rapport Rolland, justement sur la pertinence du maintien de ces organismes, sur l'analyse de l'hypothèse du maintien des fusions, des disparitions. Et je constate, je le dis en partant, que, l'immense majorité des organismes dont on présente aujourd'hui un projet de fusion ou de disparition, ces rapports en proposaient simplement le maintien. Il y a une formidable contradiction, dans la plupart des cas, entre l'analyse faite à la demande du gouvernement par les plus hauts fonctionnaires du gouvernement sur ces organismes et la décision tout à fait bizarre maintenant de demander la suspension de ces organismes.
Je voudrais... Je vais accélérer, parce que le président me le demande, pour dire que nous allons interroger chacun des groupes. Et ils seront nombreux, parce que le projet est multiforme. Nous allons interroger chacun des groupes sur deux aspects essentiels: sur la pertinence et l'assurance du maintien de leur mission, sur la mission, et, deuxièmement, sur les économies réelles provoquées par les changements proposés. Ces deux questions reviendront à chaque fois, je le dis pour ceux qui s'en lasseront, à l'avance, là, ce qui nous permettra à la fin de faire un véritable bilan et, nous, de notre côté, faire l'analyse nécessaire pour des prises de position définitives. Et, lors de l'étude article par article du projet de loi, nous pourrons présenter à ce moment-là des positions claires, des propositions. D'ailleurs, j'ai toujours privilégié... je n'ai jamais privilégié la politique du pire. J'ai toujours tenté de proposer des suggestions pour améliorer les projets de loi. Donc, nous aurons aussi des propositions à faire.
Mais pour l'instant nous sommes dans une attitude -- et j'invite la ministre à avoir la même attitude -- d'ouverture aux analyses qui nous seront présentées...
Le Président (M. Huot): Merci.
M. Simard (Richelieu): ...et aux propositions qui nous seront faites. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Huot): Merci, M. le député de Richelieu. J'invite maintenant le député de Shefford à faire ses remarques préliminaires. Et vous avez le défi de le faire en 1 min 30 s, M. le député de Shefford.
M. François Bonnardel
M. Bonnardel: Ça va être fait, M. le Président. Alors, bonjour à tous. Bonne année, et salutations aux collègues. Et bonjour à vous tous.
M. le Président, ce projet de loi a été déposé à la dernière session, est un peu un bébé du budget qui a été déposé par le ministre des Finances au 31 mars dernier, projet de loi n° 130 qui nous parle d'abolition, oui, mais qui grosso modo regroupe certains fonds en un seul. On le sait, pour ceux qui l'avaient oublié, que ce projet de loi vient aussi... nécessairement, en fait, qu'il y avait un effort de 62 % qui devait être fait par le gouvernement. Ceux qui l'avaient oublié, j'ai toujours gardé cette page, qui est plus pertinente que jamais.
Une voix: ...
M. Bonnardel: Oui, elle est rendue jaune, mais...
Une voix: ...
M. Bonnardel: Bien, c'est ça. Vous ne vous souvenez peut-être plus, mais c'est toujours ça qui était quand même en lien avec ce que le budget nous déposait. Et on avait, avec le terme «fusion» ou «abolition» de 28 fonds et organismes, des économies d'échelle de 4 millions sur un budget d'à peu près 70 milliards, au côté du gouvernement du Québec.
Alors, vous comprendrez que, oui, le terme que j'utilisais depuis presque deux ans déjà, une révision générale des politiques publiques, vient en lien -- il faut l'avouer, qu'il y a un effort -- vient en lien un peu avec ce que le projet de loi nous parle aujourd'hui. Mme la ministre parle de moderniser l'État. Oui, je trouve ça intéressant. Je pense que c'est un pas. Maintenant, est-ce que c'est un pas assez grand? On va le voir. On va écouter attentivement toutes les personnes qui vont venir nous parler aujourd'hui, tous ces organismes, pour faire avancer le projet de loi du mieux possible et apporter notre part dans ce projet de loi.
Alors, M. le Président, je finirai avec ça rapidement pour qu'on puisse commencer à auditionner tous ces gens. Merci.
**(9 h 50)**Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. le député de Shefford. Nous allons débuter la période de présentation et d'échange avec les groupes. Comme on l'a mentionné plus tôt, nous recevons quatre groupes ce matin. Je rappelle aux membres le fonctionnement: les différents groupes ont une période de 15 minutes pour leur présentation, et il y aura une période d'échange avec les membres de la commission de 30 minutes.
Auditions
Donc, nous allons commencer sans plus tarder avec l'Association francophone pour le savoir. Je vais demander -- je présume que c'est M. Noreau qui fera la présentation -- donc de bien vous identifier -- vous avez l'habitude des commissions parlementaires, je crois -- donc de bien vous identifier et d'identifier la personne qui vous accompagne. Et vous avez une période maximale de 15 minutes pour votre présentation. La parole est à vous.
Association francophone
pour le savoir (ACFAS)
M. Noreau (Pierre): Merci beaucoup. Alors, oui, Pierre Noreau, président de l'Association francophone pour le savoir, plus connue sous le terme ACFAS, en fait, qui est une association qui existe depuis 1923, et qui est une des premières associations du genre dans le monde, en fait, et qui s'est maintenue toutes ces années. Je veux vous présenter Esther Gaudreault, la directrice générale de l'ACFAS, et qui a contribué aussi à développer les points de vue qu'on va présenter ici.
Je ne veux pas parler 15 minutes. Si je le peux, je vais faire ça en cinq minutes. D'abord, je veux dire qu'on considère que c'est un privilège toujours de pouvoir s'adresser aux élus. Ce n'est pas une chose, comme vous le savez, qui est possible dans tous les États, dans tous les régimes. Et que de pouvoir parler, je dirais, presque d'égal à égal avec les élus, c'est quelque chose qui devrait toujours être apprécié pour ce que ça vaut, quand on voit de quelle façon, dans d'autres sociétés, la société civile se retrouve plus ou moins sans relation avec la société politique. Je pense qu'au Québec on a cette possibilité-là et que c'est... il faut souligner ça à chaque fois, que c'est un grand privilège.
Je trouve que c'est d'autant plus utile dans la société québécoise, qui est une société où les interactions et où la société civile jouent un rôle important et, à cause de ça peut-être, où la science aussi joue un rôle particulièrement important. À cause de la situation particulière du Québec, de sa culture spécifique, de sa place particulière en Amérique du Nord, le monde de la recherche est un monde qui prend une place fondamentale. On peut, d'une certaine façon, considérer que le monde scientifique ou l'activité scientifique, c'est une activité qui est aussi importante aujourd'hui et qui même, jusqu'à un certain point, prend la place en importance sur l'activité économique dans les années cinquante ou soixante. La recherche, c'est la nouvelle richesse des nations, et toutes les sociétés développées se définissent et tentent de se définir comme des sociétés du savoir.
Il ne s'agit donc pas d'un champ d'activité comme les autres. Les sociétés qui se développent sont des sociétés du savoir, sont des sociétés où la recherche tient une place primordiale. Et je pense qu'on a été assez chanceux, au Québec, de se donner une politique de la recherche. Je ne parle pas uniquement de la dernière politique, mais je parle aussi des choix qui ont été faits dans les années antérieures, depuis une quinzaine d'années, même une vingtaine d'années, au Québec, et qui visent à favoriser la recherche dans différents axes, notamment au point de vue du financement des infrastructures, du financement des équipes et de la recherche interdisciplinaire. Ces conditions-là, lorsqu'elles ont été réunies, ont fait qu'aujourd'hui le système, je dirais, scientifique québécois, le système de la recherche, est peut-être le système le plus performant au Canada. Les chercheurs québécois, qui représentent 22 %, 23 % des chercheurs au Canada, vont chercher, sur le plan fédéral, 30 %, 32 %, 33 % des subventions, et donc ils vont chercher beaucoup plus d'argent que les autres collègues du Canada anglais. Pourquoi? Parce qu'on a développé ici un système de recherche qui fonctionne. Et les fonds de recherche, dans ce cadre-là, sont le coeur de ce système de recherche.
Et donc c'est essentiellement ce dont on parlera, et peut-être dans les échanges en particulier. Et on ne peut pas toucher à ce système-là sans voir un peu à l'avance quelles vont être les conséquences de ça, pour une autre raison qui vient de ce que, le système actuel, sa structure ne date que de l'an 2000, en fait. Ça fait 10 ans que ce système, tel qu'il est là, avec découpage dans les trois fonds, existe. Et évidemment il a fallu passer une partie de nos énergies à construire ce système-là, qui actuellement fonctionne très, très bien. Et, si on le change, il faut accepter qu'il va falloir différer une partie des énergies que les chercheurs mettent dans la recherche pour faire fonctionner le nouveau, et il y a quelque chose à réfléchir là. Tout à l'heure, Mme Courchesne avait tout à fait... elle a tout à fait raison, il faut être capable de répondre aux attentes du public, mais la demande qui a été faite ou en tout cas la proposition qui est faite de modifier le système de recherche n'est le produit d'aucune demande du côté du milieu scientifique, d'aucune demande du milieu universitaire, et je ne suis même pas certain non plus que ça constituait une demande du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation. C'est la première chose que je voulais dire.
La deuxième, c'est que, si on change ou si on veut modifier l'économie de notre système, il y a quelques principes qu'il faut respecter. Ces principes-là sont reconnus partout dans le monde occidental comme les conditions qui fondent la recherche.
La première condition, c'est de financer la recherche adéquatement, à moins évidemment de vouloir être à la remorque des autres sociétés. Et ça nécessite, à ce moment-là, un financement à peu près à la hauteur de 3 % du produit intérieur brut. Du moins, c'est la proportion qu'on considère nécessaire pour assurer le développement du système de la recherche.
Le deuxième élément, c'est qu'il faut que les fonds de recherche soient répartis d'une façon équitable entre les différents champs de la recherche. Au Québec, il y a trois grands fonds et sur trois grands champs parce qu'il y a trois grands champs de la recherche: il y a les sciences sociales et humaines, il y a le champ de la santé et il y a le champ des sciences et de la technologie. Et chacun de ces fonds-là et chacun de ces champs-là a une logique interne propre qu'il faut savoir utiliser et que, nous, on a eu la chance finalement de cristalliser, d'institutionnaliser et dont on a tiré un très, très grand avantage. Donc, un financement qui est adéquat, un financement équitable.
Il faut assurer l'indépendance de la recherche, c'est-à-dire qu'on ne sait jamais d'où va venir l'idée qui va changer notre vie. Actuellement, on travaille sur des ordinateurs dont on n'avait jamais idée il y a 30 ans qu'ils se retrouveraient sur les bureaux de tout le monde, hein? C'était utilisé par des actuaires. C'était utilisé par la NASA. C'était presque un fantasme, alors qu'aujourd'hui on vit tous les jours avec ça. Il est très difficile de savoir à l'avance quel est le champ de la recherche et quelle est la connaissance dont on aura besoin dans 30 ans, et c'est pour ça qu'il faut avoir des chercheurs dans tous les champs puis c'est pour ça qu'il faut financer tous ces champs-là. Et donc ces champs-là peuvent exister dans la mesure où ils sont indépendants, c'est-à-dire dans la mesure où chacun bénéficie de fonds suffisants pour être capable de générer des travaux signifiants dans ces champs-là.
Le dernier élément, c'est l'indépendance de la recherche. Il faut que les chercheurs puissent travailler en sachant que leurs travaux vont pouvoir éventuellement se déployer, tant dans le domaine de la recherche appliquée que dans le domaine de la recherche fondamentale. La tendance généralement, là, au sein des États, et je pense que le Québec n'est pas à l'abri de ça du tout, c'est de financer de la recherche à très court terme sur des aspects très techniques. Mais en général les changements qui traversent le plus la vie de tout le monde tous les jours sont au contraire des changements qui surviennent de travaux de recherche qui ont été menés sur des questions qui à l'époque n'intéressaient personne, mais en fait on préparait l'avenir. Et il est très important, dans ce contexte-là, que la recherche puisse se mener de façon indépendante, c'est-à-dire sans l'influence directe d'intérêts, que ce soient des intérêts économiques, ou des intérêts institutionnels, ou des intérêts politiques, qui peuvent se justifier pour eux-mêmes mais qui ne doivent pas venir intervenir dans l'orientation de la recherche.
Donc, financement adéquat, financement équitable, financement... indépendance de la recherche. Transparence, aussi, de la recherche. Il faut que la façon dont on produit les connaissances bénéficie de la transparence dont le milieu scientifique a besoin, et je vais expliquer qu'est-ce que ça veut dire.
En général, le travail scientifique, c'est un travail collectif. On pense souvent: Les chercheurs sont des gens qui travaillent individuellement dans leurs bureaux. Ça n'a rien, rien, rien à voir avec ce qu'on fait. Tous nos travaux font l'objet de critiques. Le travail scientifique, c'est un travail constant de critique. Quand on cherche quelque chose, c'est parce qu'on pense que ce qu'on sait n'est pas suffisant compte tenu de ce qu'on devrait savoir.
Donc, on passe notre temps à se critiquer les uns les autres, mais cette critique-là est possible dans la transparence. C'est possible dans la mesure où les chercheurs sont ceux qui ont la possibilité d'évaluer la valeur du travail des autres, et notre système permet ça. Il est même exemplaire à ce chapitre-là, et il ne faut pas remettre ça en question, parce que c'est la crédibilité de tout notre système de recherche qui serait remise en cause. Et il nous semble que le projet de loi actuel ne protège pas ces principes généraux, qu'il a été écrit dans la précipitation et qu'on doit réfléchir aux conséquences que ça a sur notre système de recherche et vérifier s'il n'y a pas moyen, s'il y a des obligations ou si on considère qu'il est nécessaire de repenser notre système, de le faire en prenant le temps qu'il faut pour le faire.
Deux derniers points. Le projet de loi n° 130, il modifie la configuration de deux types d'organisme: des organismes consultatifs d'un côté et des organismes décisionnels de l'autre. Dans notre cas, c'est clair que ça touche très largement des organismes décisionnels. Donc, ça a un impact sur des milliers et des milliers de personnes, pas seulement sur les chercheurs, mais également sur les étudiants, qui sont la relève en recherche. Et ça, là, c'est... si j'avais à le chiffrer, ça doit être autour de 50 000 à 60 000 personnes au moins qui travaillent simultanément dans ces secteurs-là. Toutes ces décisions-là ont un impact sur leurs activités. Et donc il ne s'agit pas uniquement d'organismes consultatifs, dans notre cas, il s'agit d'organismes décisionnels. Il faut tenir compte de ça, et on ne peut pas intervenir là-dedans n'importe comment.
**(10 heures)** Le dernier élément, c'est sur l'intégration. Comme je l'ai dit, peut-être que c'est important de réfléchir à l'intégration de notre système de recherche. Peut-être qu'on peut considérer légitimement qu'il faut réfléchir à une façon de faire mieux et d'avoir des institutions plus performantes dans le domaine de la recherche. Mais, si on le fait, il faut le faire comme on le fait dans tous les autres domaines. Vous savez, quand on change quelque chose dans le domaine de la santé, les dernières modifications dans le domaine de la santé, mettons, la création des groupes de médecine de famille, ça a été établi en toute complicité avec les médecins, les praticiens, les infirmières, les gens qui le font. Lorsqu'on change quelque chose dans le domaine de l'éducation, c'est la même chose. D'ailleurs, quand on ne le fait pas avec les membres du secteur de l'éducation, bien on est souvent obligé de revenir en arrière, sur les décisions qu'on a prises. C'est la même chose dans le domaine de la justice. C'est la même chose dans tous les grands domaines où l'État intervient. Il faut le faire avec la complicité, conséquemment, si on parle de recherche, du milieu scientifique. Et donc peut-être qu'on peut réfléchir à l'avenir sur la façon de faire mieux les choses, mais il faut le faire en complicité, en collaboration avec le milieu scientifique.
Vous savez, les scientifiques sont essentiellement des gens insatisfaits, sinon il n'y aurait pas de recherche, hein, c'est-à-dire que, si on était toujours satisfaits de ce qu'on sait, on ne chercherait pas à connaître autre chose que ce qu'on sait. Mais en même temps, à cause de ça, c'est un milieu à la fois exigeant et c'est un milieu extrêmement ouvert. La plupart des changements qui traversent notre société sont le produit de la recherche. Donc, il n'y a pas, comme tel, de réaction épidermique au changement dans le milieu de la recherche. Au contraire, c'est un milieu qui construit sur le changement.
Donc, si on est pour changer les choses, il faut regarder de quelle façon on s'associe à tous ces gens, à toute cette armée qui est justement une armée du changement et qui serait tout à fait disposée à réfléchir, en prenant le temps qu'il faut, à une restructuration, si c'est nécessaire, de notre système, mais dans des cadres qui satisfont les impératifs de la recherche et les principes dont j'ai parlé tout à l'heure. Voilà.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Noreau. Je ne sais pas si Mme Gaudreault veut rajouter quelques mots, il reste un peu plus de trois minutes? Ça va? Donc, on va passer à la période d'échange, qui est répartie: 15 minutes du côté gouvernement, 15 minutes du côté opposition. Donc, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. D'abord, je veux vous remercier tous les deux d'être avec nous aujourd'hui. M. Noreau, c'est intéressant de vous entendre parce que vous le faites avec beaucoup de passion, mais on sent que c'est un sujet... C'est plus qu'un travail pour vous, et ça s'entend très, très bien.
J'ai lu le mémoire, je vous ai écouté attentivement et je comprends votre réaction. Cela dit, vous avez sûrement, quand même, participé aux travaux qui ont conduit à la politique sur la recherche et l'innovation, et vous connaissez ce secteur-là à fond. Et vous savez aussi, vous l'avez mentionné, que le nerf de la guerre, c'est aussi le financement puis... Depuis bientôt huit ans que j'occupe des fonctions ministérielles et où ces dossiers reviennent à chaque année, sur la répartition des fonds, et on sait que, dans ce cas-là, il y a des fonds qui viennent bien d'ailleurs aussi. Et vous avez dit: Nous devons nous assurer d'un financement équitable.
Or, effectivement, est-ce que le fait d'être réunis et regroupés ne va pas mieux armer le Québec pour s'assurer que, dans ce monde instable que nous vivons... dans lequel nous vivons, nous ayons davantage un meilleur... une meilleure capacité d'aller chercher, bien sûr, notre juste part, mais, au-delà d'aller chercher notre juste part, de nous assurer que nous avons cette très forte coordination pour répondre aux impératifs de recherche du Québec, et qui puissent aussi suivre l'évolution de ce que nous avons besoin en termes de recherche pour nos différents secteurs d'activité? Est-ce qu'il n'y aurait pas, dans cette volonté de regrouper, un côté positif qui nous permettrait de nous assurer que nous avons ce levier important pour l'avenir de la recherche au Québec?
Le Président (M. Huot): M. Noreau.
M. Noreau (Pierre): Bien, écoutez, moi, je... On est ici pour réfléchir ensemble, donc c'est ce que je vais faire, là. Et puis... On a déposé un mémoire, et il est clair... On n'a pas tout mis là-dedans. Mais, je vais vous dire honnêtement, s'il s'agit de donner plus de visibilité au champ de la recherche, au monde de la recherche, même au sein de l'État québécois, je pense qu'il faut aller toujours dans ce sens-là. Donc, par exemple, l'idée qu'il existe telle chose que Recherche Québec, ce n'est pas une aberration en soi si ça donne au monde de la recherche une plus grande visibilité, dans un contexte où on sait que la recherche va déterminer tout notre avenir.
Il ne détermine pas seulement tout notre avenir, hein? Parce que, quand on forme des chercheurs, on dit tout le temps: Oui, mais il y en a peut-être d'autres qui vont trouver ça bien avant nous, pourquoi est-ce qu'on investirait dans tel, tel domaine? Mais ce n'est pas comme ça que ça marche, parce que, si ça se découvre quelque part par des chercheurs qui sont en Inde, on est bien contents, nous, d'avoir quelqu'un qui est capable de prendre la balle au bond quand elle arrive ici, parce qu'on a l'expertise qui... Alors, le monde de la recherche est aussi un monde qui permet d'être toujours à jour sur les connaissances mondiales. Et, nous, on a vraiment particulièrement besoin de ça au Québec parce qu'on a un système industriel spécifique, on est une société spécifique. Et donc on a vraiment besoin de toutes ces expertises-là. Donc, s'il s'agit de donner plus de visibilité, de créer une banderole unifiée, tu sais, un...
Une voix: Une bannière.
M. Noreau (Pierre): Une bannière qui annonce que la recherche prend une place importante, rappelle constamment ça au sein de l'État québécois, auprès de la population, je pense qu'il faut favoriser ça.
Mais la question, c'est de savoir de quelle façon c'est fait. On n'est pas les seuls, hein, vous savez, à dire que peut-être c'est quelque chose qui peut être envisagé. Mais on n'est pas très certains que le projet de loi répond aux conditions dans lesquelles ça doit se faire, à cause de ce que j'ai indiqué, tel que c'est construit. Et, comme le mémoire est écrit... -- et vous pouvez le lire. Il y a beaucoup d'éléments là-dedans qui peut-être, d'un côté, sont fondés sur des bonnes intentions, et puis qu'on appuie même jusqu'à un certain point, mais il n'est pas certain que c'est la façon de le faire, parce qu'on désorganise un système qu'on a pris beaucoup de temps déjà à faire fonctionner puis qui fonctionne déjà relativement bien.
C'est certain qu'on peut entretenir des idéaux élevés sur la nécessité de la recherche qu'on appelle ici intersectorielle, hein? Moi, je suis tout à fait de cette école-là. Je ne fais que de la recherche, au moins, interdisciplinaire. Mais, les fonds actuels, vous savez, sciences sociales et humaines, là, il faut quand même voir, c'est très interdisciplinaire. Les champs comme les champs de la santé, c'est des champs hyperinterdisciplinaires. Le champ de la santé publique, c'est un champ où il y a des intervenants de toutes les disciplines. Ce n'est donc pas des cloisonnements tels qu'ils empêchent l'interdisciplinarité. Et il n'est pas très certain que c'est en modifiant ces structures-là qu'on va faire plus d'interdisciplinarité.
On sait très bien qu'un des... Le nerf de la guerre, dont vous parlez, nous, on est pris avec, tu sais. On cherche constamment des moyens de faire mieux et avec d'autres. Ce qu'on essaie de faire... Les fonds subventionnaires, ce n'est pas la seule source de financement, mais dans beaucoup de domaines c'est la source principale. Moi, je travaille beaucoup, dans mon secteur, avec le secteur de la justice, parce que -- sciences politiques, droit, etc., c'est mon secteur à moi -- je vais chercher de l'argent au ministère de la Justice, puis ce n'est pas les organismes subventionnaires, je vais chercher de l'argent chez les juges, dans la magistrature, au Barreau. Mais je suis capable d'aller le chercher parce que je suis soutenu par l'État québécois. Je suis soutenu par les fonds qui me financent et qui légitiment, parce que c'est la reconnaissance par mes collègues, par les gens, par mes pairs que les travaux que je mène valent la peine d'être menés. J'ai absolument besoin de cette reconnaissance-là pour aller chercher des fonds extérieurs.
Et conséquemment ce que vous dites est vrai, qu'il n'y a pas des fonds uniquement qui viennent des fonds subventionnaires. Mais c'est quand même pour nous central, un, que ces fonds-là existent et, deux, qu'ils soient attribués sur la base de décisions prises par des gens de notre discipline, de notre champ de connaissances. C'est comme ça.
Et, sur le plan international, c'est la même chose. Si je vais chercher de l'argent, je ne sais pas, moi, à la Banque interaméricaine de développement, eh bien, j'ai besoin d'abord d'avoir fait la preuve que je suis un chercheur qu'ils pouvaient rencontrer, qui faisait partie... qui était dans le club, qui était capable de faire ces travaux-là, avec des équipes des fois qui sont très importantes sur le plan numérique. Et donc j'ai besoin que ce système-là existe et j'ai besoin que ceux qui me financeront à la Banque interaméricaine de développement, qui seront dans mon domaine, qui travaillons sur des questions d'État de droit ou... qu'ils comprennent que j'ai également le soutien de ma communauté scientifique, de celle d'où je viens, qui est la communauté des sciences de... Si les décisions sont prises par des chimistes, des botanistes, etc. -- je n'ai rien contre ça -- mais la crainte, en fait, existerait à ce moment-là que la légitimité et que la validité de mes travaux soient remises en cause, parce qu'on dirait: Bien oui, mais ils sont financés, en fait, et soutenus par une communauté qui n'est pas déjà celle qui a l'expertise pour les évaluer. C'est un peu la question qu'ils se posent.
Alors, jusqu'où ça peut aller? Quelles sont les conséquences de ça? C'est très difficile à évaluer, mais je dirais qu'a priori c'est ce qu'on essaie d'éviter. Et c'est pour ça que, le processus décisionnel qui amène au financement de la recherche, il ne doit pas y avoir d'ambiguïté sur le fait qu'il est fondé sur des évaluations qui sont faites par des spécialistes du champ pour lequel ces projets sont soumis. Et ça, c'est un des éléments qui est potentiellement remis en cause ici.
Alors, bien peut-être que vous ne le voyez pas comme ça, mais, dans le milieu de la recherche, et pas seulement dans mon domaine... Parce qu'évidemment l'avantage peut-être d'être à l'ACFAS -- c'est fantastique pour ça -- c'est qu'on est en lien avec des gens de tous les domaines. Il y a une forme d'unanimité sur cette crainte-là, sur cette inquiétude-là. On peut toujours dire que ça dépend beaucoup des procédures qu'on va se donner sur l'évaluation, mais, tel que c'est construit...
**(10 h 10)** Je vais vous donner un exemple du genre d'ambiguïtés qui risquent d'arriver. Et je pense que ces ambiguïtés-là peuvent être levées, mais, tel que c'est écrit là, c'est inquiétant. Tel que le système est établi, tel que je le comprends, les membres de ce qu'on appelle les comités sectoriels, qui sont, dans le fond... qui vont remplacer les conseils d'administration des fonds actuels, ces membres-là sont très largement désignés par les responsables du... par les membres du conseil d'administration de Recherche Québec, et donc on est dans un système où on se nomme les uns, plus ou moins, les autres. Et la question pour nous est de savoir, dans ce contexte-là, si les gens qui sont nommés dans une certaine discipline, comme par exemple mon secteur à moi ou le secteur des sciences politiques, ou le secteur de la littérature... Est-ce que ces gens-là, finalement, qui sont nommés par des gens qui, eux, sont des chimistes, sont éventuellement des botanistes, vous pouvez me dire, sont éventuellement des physiciens ou sont des ingénieurs, est-ce qu'ils ont la possibilité de nommer des gens dont on est très certains de la crédibilité sur le plan scientifique? La question se pose.
L'autre difficulté que ça pose, c'est la distinction qui doit être faite entre l'évaluation des projets de recherche, leur valeur et puis l'attribution des fonds. Actuellement, le système tend à distinguer, quand c'est possible, d'un côté, l'évaluation de la valeur des projets et, de l'autre côté, l'attribution des fonds. Actuellement, dans le système actuel, ce n'est pas certain que c'est garanti. Tous ces éléments-là font craindre, en fait, qu'une confusion du système se développe et qu'on soit pris avec des décisions, donc, qui pourraient être contestées par ceux...
Parce que, vous savez, quand on décide de financer un projet, c'est parce qu'on décide de ne pas en financer d'autres, hein? Alors, évidemment, le vrai problème qu'on a, c'est rarement avec les gens qui sont financés. C'est plutôt avec ceux qui ne le sont pas. Et ceux qui ne le sont pas, c'est souvent la majorité. Des fois, on ne finance que 20 % à 25 % des projets qui sont soumis dans une année. Alors, la grande question, c'est: Comment on fait réussir à faire accepter une décision par des gens qui se font dire non? Bien, c'est en général quand on dit: Bien, c'est établi par ceux qui sont en mesure de l'évaluer, c'est vos pairs. Et c'est ça qui risque... En tout cas, c'est ce qu'on craint, nous, de voir remis en cause dans le système actuel.
Le Président (M. Huot): Il reste cinq minutes.
Mme Courchesne: Du premier bloc?
Le Président (M. Huot): En tout... non, c'était 10 minutes. Il reste cinq minutes en tout d'échange.
Mme Courchesne: Donc, si je fais deux blocs, la parole est au...
Le Président (M. Huot): On peut laisser la parole immédiatement au porte-parole de l'opposition officielle. M. le député de Richelieu, vous avez la parole pour un maximum de 12 minutes.
M. Simard (Richelieu): Juste une petite parenthèse.
Le Président (M. Huot): Oui.
M. Simard (Richelieu): Comme on n'a pas eu de discussion sur notre mode de fonctionnement, j'aurais préféré que les blocs soient complets plutôt que de jouer les allers-retours.
Le Président (M. Huot): Moi, je vais y aller selon les bons voeux de tout le monde. Il y a une période de 15 minutes au gouvernement, il peut en disposer, s'il veut, en deux blocs, si...
M. Simard (Richelieu): Si vous le souhaitez, M. le Président, nous agirons ainsi.
Le Président (M. Huot): Si vous avez un problème, on en discutera par la suite pour voir...
M. Simard (Richelieu): On en discutera par la suite. Très bien. Merci, M. le Président. Je vais tout de suite aller en continuité de la question de la ministre et demander peut-être des précisions à Pierre Noreau sur les propos qu'il a tenus tout à l'heure. Je... Dans la perspective qui est la nôtre -- j'espère qu'elle est partagée par tout le monde -- que nous devons tout mettre en oeuvre pour aider les chercheurs québécois, ne serait-ce que parce que cela les met dans une meilleure position pour aller chercher ailleurs -- et on sait où est ailleurs, en grande partie, c'est au fédéral, le niveau fédéral -- des sommes très, très importantes pour la recherche... Donc, notre but, c'est de les armer pour qu'ils puissent ensuite, dans les différents organismes subventionnaires, aller plus loin dans leur recherche. Est-ce que la mission des différents secteurs de recherche ne risque pas... -- et je ne voudrais pas impliquer la réponse dans ma question -- est-ce qu'elle est mise à risque par la fusion des organismes?
Je m'explique. Est-ce que la recherche en sciences humaines, par exemple, qui est aussi importante que la recherche en santé pour l'avenir d'une société, qui est aussi importante que la recherche en sciences pures, qui est aussi importante que la recherche en sociologie... Est-ce que le fait de fusionner ne risque pas, par la nature différente des équipes constituées et des modes de recherche mis en place, de diminuer la part et l'importance de ces secteurs?
Le Président (M. Huot): M. Noreau.
M. Noreau (Pierre): C'est une question... Je vais répondre deux choses autour de ça. D'abord, le projet de loi, tel qu'il est construit actuellement, dans un de ses articles, prévoit que le ministre a la possibilité d'orienter et de déterminer l'orientation des fonds de recherche notamment en matière... ou concernant la question économique. Bon, ça, je pense que ça peut toujours se réfléchir. De toute façon, il y a des choix qui sont faits, sur le plan politique, au niveau de la répartition des fonds. Mais actuellement les fonds sont répartis équitablement entre les différentes... C'est trois enveloppes du même niveau.
À côté de ça, il y a le SQRI, qui favorise certains champs de recherche plutôt que d'autres. Alors, déjà, ça recrée éventuellement un déséquilibre entre les champs. Et à côté de ça il y a toute la possibilité de compter ou pas sur du financement privé. Quand on est dans le domaine de l'ingénierie ou dans la pharmaceutique, on a plus de chances d'avoir des fonds privés pour mener nos travaux que quand on travaille sur la pauvreté ou les problèmes d'intégration sociale des jeunes autochtones, hein?
Et donc, uniquement que par ce biais-là, on comprend que les fonds, et même s'ils sont équitablement pourvus actuellement, ne donnent et ne favorisent pas nécessairement de la même façon tous les champs, puisqu'à côté il y a d'autres financements sur lesquels on peut compter ou ne pas compter. On sait qu'en sciences sociales et humaines -- c'est pourtant 50 % des chercheurs, 66 % des étudiants aux études supérieures -- c'est le champ le moins pourvu, en définitive, de tous les champs de recherche.
Actuellement, la loi prévoit que le ministre peut notamment intervenir sur les orientations des fonds, notamment en matière de financement. Je pense que l'objectif, c'est d'assurer justement qu'il y ait des fonds équitables pour chacun des fonds, et je pense que c'est tout à fait correct. Mais en même temps, évidemment, ça laisse supposer que le ministre pourrait éventuellement orienter les activités, les programmes, parce que, tel que c'est écrit, en bon juriste, je suis obligé de conclure que, quand c'est marqué «notamment», ça donne un très grand pouvoir au ministre d'intervenir sur les orientations des fonds. Et c'est là que l'indépendance de la recherche est mise à mal.
L'autre élément qui joue, c'est le fait que, ces enveloppes-là, peut-être que pour l'instant elles sont égales -- et je pense que c'est l'intention, pour la première année, de maintenir ces fonds-là dans leur intégralité -- mais, s'il arrivait qu'on donnait au conseil d'administration de Recherche Québec -- il n'y a rien qui l'interdirait actuellement -- la possibilité de répartir entre les différents domaines de la recherche ces fonds-là, on aurait une situation qui est très connue et qui est la suivante, c'est qu'entre la recherche fondamentale puis la recherche appliquée on aura toujours tendance à financer plutôt la recherche appliquée. Entre la recherche qui donne les résultats à beaucoup plus long terme ou dont on ne sait même pas si elle donnera un jour des résultats et celle dont on sait très bien qu'elle réglerait un petit problème technique dans une usine demain matin, c'est toujours plus tentant de financer celle qui apporte un résultat dans une petite usine demain matin. Entre le secteur de la santé, par exemple, et le secteur des sciences sociales -- à chaque fois qu'on ouvre la radio, on entend parler du problème des urgences -- c'est clair qu'on aura toujours tendance à favoriser d'abord le système de la santé ou le secteur de la santé. Et je parle de ça pas pour indiquer qu'il n'y a pas de besoin dans le secteur de la santé, il y a des besoins incroyables dans ce secteur-là, mais ce sont des secteurs qui, s'il s'agit de plaider la cause du secteur, d'une certaine façon ne sont pas à égalité.
Ici, on est dans une commission qui travaille sur les finances. Bien, sans doute que la plupart d'entre vous avez des formations en administration, en commerce, en management, peut-être pas tous parce qu'il y a de l'exception, mais, vous savez, c'est des sciences sociales, humaines, ça. C'est-à-dire qu'il y a des secteurs dont on a absolument besoin, et, si on donne au conseil d'administration, où on retrouve des gens de tous les secteurs, la possibilité d'établir des priorités budgétaires en disant: On favorisera tel secteur plutôt que tel autre, dès ce jour-là, on risque de voir certains champs de recherche complets sous-financés et éventuellement disparaître parce qu'on aura toujours tendance à répondre immédiatement aux besoins de certains secteurs dont on voit plus immédiatement l'utilité. Et ça, c'est une... c'est un élément fondamental dans la donne actuellement.
Le Président (M. Huot): ...merci.
M. Simard (Richelieu): ...M. le Président, je rappelle la conclusion du rapport Geoffrion sur l'analyse de la pertinence ou non du maintien des trois fonds: «La structure des fonds en trois champs permet de combiner les avantages d'une gestion sectorielle, soit une meilleure connaissance des besoins, des acteurs et des expertises étrangères, ainsi que d'une gestion intégrée de l'ensemble des subventions et bourses de recherche permettant l'harmonisation des programmes et des services à la clientèle.» Donc, je pense que le rapport Geoffrion disait en d'autres mots ce que vous venez de nous dire.
Il y a évidemment aussi une autre préoccupation qui... et les scientifiques ne peuvent pas être dans l'abstraction de cette donnée, c'est les coûts de gestion de ces différents fonds et de ces différents programmes. Vous avez dû, j'imagine, aussi vous interroger sur les économies réelles à court, moyen et long terme de la proposition du projet de loi n° 130, quelle est votre réaction?
M. Noreau (Pierre): Bien, écoutez, la vie étant ce qu'elle est, on passe pas mal de temps dans notre vie à travailler dans les structures, des regroupements de structures. Moi, j'ai contribué à en faire, j'en ai subi, j'en ai initié. Il arrive des fois qu'on sauve de l'argent, c'est... mais je ne peux pas dire que ça a été la... Mon expérience, c'est que ce n'est pas la règle générale. Actuellement, il faut voir comment fonctionnent les fonds. C'est des très petites structures, hein, ce n'est pas des gros groupes, là. Le nombre des gens, qu'on pourrait appeler les fonctionnaires de la recherche, qui travaillent dans chacun de ces fonds-là...
M. Simard (Richelieu): ...faire comprendre aux gens que ce sont d'abord les pairs qui travaillent à l'évaluation...
M. Noreau (Pierre): Non, non, tout à fait.
M. Simard (Richelieu): Donc, ce n'est pas des... ce n'est pas des milliers de fonctionnaires, là.
**(10 h 20)**M. Noreau (Pierre): Non, non, non. Puis, quand, nous, on fait de l'évaluation des projets des autres, on est en comité, on les préside ou on passe nos fins de semaine à évaluer les projets qui sont proposés dans un domaine ou dans un autre, honnêtement tout ça, c'est bénévole, ça ne coûte rien, rien, rien. La seule chose qui dans le fond détermine les coûts associés à l'appareil, à la machine, bien c'est, dans le fond, de payer les permanents, les responsables de programme, qui sont des gens qu'on finit par connaître assez bien à la longue mais qui ne sont pas très nombreux. Moi, je suis très admiratif du travail qui se fait dans les fonds, parce que c'est fou tout ce qu'ils font avec le nombre si... Ils sont si peu nombreux pour réussir à le faire que, moi, je suis plutôt admiratif de ce qui se fait dans les fonds de recherche.
Est-ce qu'en les fusionnant on va sauver éventuellement quelque chose? Je ne pense pas, du point de vue du personnel, qu'on va sauver beaucoup, parce qu'ils sont déjà pas très nombreux, puis le travail, le volume du travail va continuer à être à peu près le même. Donc, je ne pense pas qu'à ce point-là ou en tout cas sur cette question-là on sauverait énormément.
Le fait que l'essentiel du système fonctionne à partir du bénévolat fait que les chances qu'on fasse des économies sur une fusion organisationnelle ne sont pas très élevées. Bon, je pense que c'est déjà su, il y a des organismes subventionnaires qui partagent déjà des services administratifs; le FQRNT, par exemple, et le FQRSC travaillent de pair. Les trois organismes subventionnaires utilisent les mêmes plateformes au niveau électronique et Internet, au niveau du C.V. qu'on doit remplir, etc. Il y a beaucoup de choses qui sont déjà unifiées, alors on ne fera pas d'économie là-dessus non plus. Et donc il faut être réalistes.
Mais, d'un autre côté, si vous organisez une boîte beaucoup plus large où vous mettez tous ces gens-là ensemble, c'est clair qu'uniquement au niveau de la gestion des ressources humaines, là, vous venez de vous acheter du travail, et donc ça va sans doute éventuellement augmenter les coûts de cette nature-là. On le sait très bien. Puis je pense qu'il n'y a pas tellement d'économies. Moi, je ne pense pas... Parce que ce n'est pas un système qui coûte cher, non plus, là. Alors, je ne crois pas qu'on peut faire beaucoup d'économies avec cette fusion-là. Ce n'est pas une question d'ordre économique. Moi...
Puis je pense que peut-être que, si l'intention, c'est de simplifier la structure -- parce que ça, c'est l'autre aspect -- on pourrait dire: On ne fera pas d'économies, ou pas beaucoup, puis dans le fond peut-être qu'il faut le reconnaître, mais peut-être qu'on simplifie les structures. Je pense que c'était le propos de Mme Courchesne, et puis, moi, je suis tout à fait d'accord qu'on réfléchisse à ça.
Mais le système tel qu'on le propose ne fera pas tellement d'économies de structure non plus, hein? Parce que, pour des raisons qui tiennent à l'économie du système de la recherche, vous allez être obligés d'avoir trois comités sectoriels qui vont prendre la place des trois conseils d'administration. Vous ajoutez là-dessus un conseil d'administration, vous abolissez le Conseil des sciences et de la technologie, au bout de la ligne... Et peut-être que... Donc, vous remplacez trois structures par trois... bien, en fait, trois... quatre structures par quatre structures.
Et il n'est pas impossible que le scientifique en chef, à qui on demande une fonction conseil qu'il ne pourra pas assumer seul... Moi, je ne connais aucun scientifique... Vous savez, on n'est plus au XVIIe siècle, ça fait que l'homme universel, la femme universelle qui sait tout... Cette personne-là va être obligée de s'entourer de gens. Et puis ils vont sans doute être obligés, dans le fond, de créer un autre comité. Et donc, en fait, on n'est pas en train, même, de simplifier la structure, on va la compliquer et on va ajouter des structures, ou du moins on va rester avec le même nombre de structures. Donc, au plan de la structure, nous, on ne voit pas l'intérêt que ça présente.
Le Président (M. Huot): Merci. Oui. Rapidement.
Mme Gaudreault (Esther): Je pourrais peut-être compléter aussi, rapidement, pour répondre peut-être aux attentes de Mme la présidente du Conseil du trésor. Il existait -- et on pourrait peut-être réfléchir à cette avenue-là -- à un certain moment donné, la Table des présidents, qui avait pour fonction justement de réduire au maximum et de voir des collaborations. C'est ce qui a donné lieu, entre autres, à l'intégration des C.V. dans deux des fonds. Je pense qu'on pourrait revoir cette avenue-là avec les communications, avec la gestion informatique. Il y a encore peut-être du travail de réduction des coûts au niveau administratif qui éviterait, en changeant la structure, de déstructurer le système. Et je pense que c'est ça, le message, l'inquiétude de l'ACFAS, c'est: on risque de jeter le bébé avec l'eau du bain. C'est juste ça.
Le Président (M. Huot): Merci. M. le député de Shefford, la parole est à vous pour trois minutes.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. M. Noreau, vous disiez tantôt: Le nerf de la guerre en recherche, c'est l'argent. C'est indéniable. Vous dites que le fruit... le projet de loi n'est le fruit d'aucune demande du monde scientifique. Je ne ferai pas de cours de recherche ici pour vous, je ne suis pas du tout dans ce domaine-là, mais, quand on parle un petit peu de chiffres, puis c'est un peu ça qui est le nerf de la guerre aussi, de ce projet de loi, c'est pour essayer de démontrer qu'on est capable d'aller, par certaines fusions ou abolitions... de sauver quelques dollars. Puis, dans ce domaine-là, dans ce domaine-là, M. Noreau, j'imagine que vous êtes au courant... Vous êtes ici pour défendre les trois fonds de recherche qui vont venir nous parler tout de suite après. Vous êtes sûrement au courant que le budget total que le gouvernement leur a accordé l'an dernier, c'est près de 205 millions de dollars, les trois ensemble. Ça, c'est une augmentation d'à peu près 5,5 % pour ces trois fonds.
Loin de moi, aujourd'hui, de vous dire que ces montants devraient être à la baisse, loin de ça. Sauf que, quand vous dites dans un communiqué, à la fin, que «l'ACFAS invite le gouvernement à réfléchir dès maintenant aux orientations de la prochaine stratégie. Les enjeux devront cette fois porter sur certaines grandes questions laissées en marge de la politique actuelle comme la démographie [et] les conséquences du vieillissement de la population», vous êtes sûrement au fait que, si ces fonds-là vous sont accordés, c'est parce que le gouvernement vous donne ces argents. Et ces argents viennent d'où? Ils viennent de la population du Québec. C'est nous tous qui payons pour ces fonds de recherche, et bravo. Mais, quand le vieillissement de la population va nous amener à avoir trois travailleurs pour un retraité, en 2016, qui vont se partager l'assiette fiscale puis qui vont mettre de l'argent dans le pot pour subventionner ces fonds, c'est correct, mais on était huit pour un en 1970.
Si je vous dis que ces fonds, les trois ensemble, ont augmenté leurs frais de fonctionnement, l'an passé, d'en moyenne 9,5 %... Moi, je suis persuadé que, si le ministère prévoyait... C'est minime, vous allez me dire. Il n'y a pas de petits millions aujourd'hui, là, avec un retour à l'équilibre budgétaire qui va coûter aux contribuables québécois 12 milliards. Si le gouvernement prévoyait sauver 4 millions, et que je vous dis que ces trois fonds ont 205 millions de revenus l'an dernier, et qu'ils sont déficitaires, les trois ensemble, et que les frais de fonctionnement de ces trois fonds ont augmenté en moyenne de 9,5 %, je fais juste vous dire que, si, moi, je vais me mettre le nez là-dedans, je suis persuadé que je suis capable d'aller chercher 500 000 $ sans affecter -- sans affecter -- le travail que vous faites. Parce que, grosso modo, dans tous les chiffres que j'ai là, 90 % des argents qui vous... qui sont donnés à ces trois fonds viennent du gouvernement.
Alors, ne me dites pas qu'il est impératif de ne pas déstabiliser un système qui a fait ses preuves sous couvert d'une volonté de faire des économies, parce que ce sont tous les Québécois qui paient pour ces fonds. Et ça, encore une fois, comprenez-moi bien, je ne suis pas là pour dire qu'on ne doit pas donner de l'argent à ces fonds-là puis même pas les augmenter. Ils ont augmenté l'an passé de 5 % -- la ministre doit avoir ces chiffres-là. Mais, de l'autre côté, si les frais de fonctionnement ont augmenté plus que considérablement comparativement à ce que le gouvernement souhaite pour ses ministères... Faites juste me dire que ça n'affectera pas le travail de vos... des gens qui sont à la recherche pour ces fonds.
Le Président (M. Huot): Merci, M. le député de Shefford. Les trois minutes sont malheureusement complétées, vous pourrez peut-être réagir dans la poursuite des échanges. Il reste un cinq minutes du côté gouvernemental, un deux minutes du côté de l'opposition officielle. On va y aller avec la partie gouvernementale pour un maximum de cinq minutes. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. C'est sûr qu'on n'a pas beaucoup de temps, donc on doit faire beaucoup de choses un peu plus en surface. Mais je veux revenir, M. Noreau, parce que je vous ai écouté attentivement, notamment sur... Et d'ailleurs je vous... je me confesse d'emblée, la sociologue et urbaniste en moi, depuis cinq ans, s'est assurée ou en tout cas a eu beaucoup de discussions avec ses collègues pour s'assurer qu'on avait une part équitable au niveau des sciences sociales. Moi, je suis d'accord avec le député de Richelieu, il y a une tendance à... et vous l'avez mentionné, dans les domaines scientifiques, qui sont très importants. Mais il reste qu'il faut qu'on s'assure qu'au niveau des sciences sociales, dans une société particulièrement comme le Québec... Parce que le Québec, sur le plan social, culturel et identitaire, socioéconomique, a quand même des enjeux qui lui sont propres et... En tout cas, on pourrait en parler longtemps.
Mais, quand je vous écoute sur... en disant: Bien, si on regroupe, il y a des risques pour nous... Vous avez parlé du comité de sélection, puis c'est évident dans notre esprit que le comité de sélection doit être constitué de vos pairs et qu'on doit maintenir cette expertise-là. Ça va de soi. Il y a une neutralité, il y a une objectivité, il y a une expertise qui doit être maintenue. Mais, quand je vous écoute, M. Noreau, c'est comme si j'avais... La question que je me pose, c'est: Est-ce que le verre est à moitié plein ou il est à moitié vide? Pourquoi je dis ça? Parce qu'à chacun des arguments que vous apportiez j'avais envie d'avoir l'argument contraire pour vous dire qu'a contrario il peut y avoir aussi des effets qui soient extrêmement positifs en termes, et j'insiste, de renforcement de votre positionnement par rapport à ça, d'une part.
D'autre part, vous avez parlé d'interdisciplinarité. Vous personnellement, je vous fais entièrement confiance, vous êtes un homme très dynamique, très expérimenté, je n'ai pas de problème avec ça. Mais je ne pense pas que l'interdisciplinarité soit toujours si facile que ça, là, ça soit toujours aussi spontané que cela, là, tu sais, dans... dans... D'une certaine façon, c'est pour ça que j'allais... j'avais envie... pour chacun de vos éléments, a contrario dire: Bien, écoutez, peut-être que le regroupement peut aussi apporter des éléments de renforcement qui soient importants.
Ce que je sens, c'est que -- et comme il me reste peu de temps -- je sens que fondamentalement vous n'êtes pas contre, parce que, dans... Bien écoutés, vous avez des propos qui disent: Bien, peut-être que, dans l'évolution, ça fait partie de: il faut se rapprocher, il faut travailler plus ensemble, etc., donc... Mais ce que je sens, c'est que vous êtes inquiet des modalités. Vous posez des questions, très légitimes, sur l'opérationnalisation de tout ça puis comment ça va se passer véritablement parce que vous ne voulez pas que ce secteur-là... Et, au nom de la...
Et vous avez raison de parler de la recherche fondamentale, de la recherche appliquée. Mais est-ce que... Je répète ma question: Si, à partir de tous les éléments de crainte que vous avez... Parce que ce n'est pas les structures qui font les succès. Ce sont les hommes et les femmes qui composent les structures qui font les succès, ce n'est pas les structures. Alors, à partir de chacun des éléments de faiblesse que vous notez, si on utilisait ça pour, au contraire, être tous ensemble pour renforcer la place de la recherche, pas juste au Québec, pas juste au Canada, mais dans le monde... Parce qu'aujourd'hui c'est face au reste du monde, et la recherche n'y échappe pas. Vous êtes aussi en compétition avec le reste du monde dans le secteur de la recherche. Donc, est-ce qu'on n'est pas rendus... En 2011, est-ce qu'il n'est pas temps justement, une fois qu'on aurait travaillé ensemble pour diminuer au maximum ces craintes de modalités... Est-ce qu'on n'a pas là une opportunité, là, au contraire, tout le monde ensemble, de travailler à renforcer notre place dans la recherche à travers le monde?
**(10 h 30)**Le Président (M. Huot): M. Noreau, je vous laisse une minute.
M. Noreau (Pierre): Je vois que vous partagez le même enthousiasme pour la recherche que moi. Mais comprenez...
Mme Courchesne: ...ma dernière carrière.
M. Noreau (Pierre): Le fait est que... C'est que, nous, on n'est pas contre le changement, on est contre l'improvisation et on trouve... Et la position qu'on tient ici, comprenez, là, je ne l'ai pas inventée tout seul. On a consulté notre conseil d'administration. C'est une position très ferme. Ce qu'on veut, c'est que, si on est pour modifier le système, on soit capables de justifier précisément pourquoi, parce que le système qu'on a marche bien. Et, deux, il faut le faire avec ceux qui sont dans le système, de manière à ne pas éventuellement fausser des principes qui marchent et avec lesquels... sur lesquels, en tout cas, il y a unanimité dans notre secteur. C'est un système qui marche. Puis là je réponds indirectement à votre question: on donne 200 millions de dollars par année au système de recherche québécois et, nous, on va en chercher 800 millions avec ça. Et donc il faut le voir de cette façon-là. Dans une société comme la nôtre, la recherche, c'est un investissement, ce n'est pas une dépense.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Noreau. Mme la députée de Taillon, la parole est à vous pour deux minutes.
Mme Malavoy: Je vous remercie. Je salue tout le monde rapidement, puisqu'il y a peu de temps. J'aimerais parler de la question du scientifique en chef et, si vous permettez, je voudrais d'abord honnêtement indiquer ce qui me semble être une anomalie profonde en termes parlementaires. Nous sommes en train de discuter d'un projet de loi. Or, il y a depuis l'automne un appel de candidatures avec définition très précise des critères et de ce qu'on attend de ce scientifique en chef, je me permets de commencer par le dénoncer. Je crois au processus parlementaire et je n'accepte pas qu'il y ait déjà quelqu'un que l'on recherche, et qui soit accessible effectivement sur le site Internet. Je suis d'ailleurs déjà allée voir ce qu'on demandait, et on lui demande, entre autres, d'avoir un fort sens politique. Je ferme la parenthèse, parce que cela m'a étonnée.
Puisqu'il reste peu de temps, dites-moi quand même... Le scientifique en chef, vous manifestez certaines inquiétudes quant à sa nomination, quant à son indépendance. Est-ce que vous croyez qu'une personne qui obligatoirement proviendra d'un des secteurs peut avoir le leadership qu'il faut dans les trois secteurs représentés actuellement par les trois fonds?
M. Noreau (Pierre): Je pense que c'est un immense défi, parce qu'on vient toujours de quelque part. La recherche interdisciplinaire, ce n'est pas si facile à mener, je suis d'accord avec Mme Courchesne, et c'est très difficile de trouver quelqu'un qui est capable de porter ça et incarner ça par lui-même. Et donc c'est un défi peut-être qui dépasse ce qu'on peut normalement attendre d'une personne ou d'un scientifique normalement constitué.
Nous, ce qui nous inquiète pour le scientifique en chef... encore que, nous-mêmes, on pense qu'il faut contribuer, s'il est pour y en avoir un, il ne faut tout de même pas le laisser mener par n'importe qui. Mais, cela étant, ce qui nous préoccupe principalement, c'est qu'on lui demande à lui de faire ce qu'on faisait collectivement avant, et ça, c'est l'abolition du Conseil des sciences et de la technologie. On lui donne la fonction conseil à lui, qui devait être assumée antérieurement par les gens du Conseil des sciences et de la technologie. On peut dire beaucoup de choses sur le Conseil des sciences et de la technologie. On peut considérer que pendant plusieurs années ils n'ont pas fait le travail qu'on s'attendait d'eux, mais la structure est nécessaire. On ne peut pas la remplacer par une seule personne.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Noreau. Bien que vous ayez mentionné que les scientifiques sont des êtres essentiellement insatisfaits, j'espère que vous êtes satisfait de votre passage parmi nous aujourd'hui. M. Pierre Noreau, Mme Esther Gaudreault, merci de votre passage dans cette commission, merci de votre contribution aux travaux de la commission.
J'invite maintenant les représentants du Fonds de la recherche en santé du Québec à prendre place et je suspends quelques minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 34)
(Reprise à 10 h 36)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la commission. Nous recevons maintenant les représentants du Fonds de la recherche en santé du Québec. Ce sera sans doute M. Joanette qui fera la présentation. Donc, vous avez l'habitude aussi, je crois, des commissions parlementaires, donc je vous demande de bien vous identifier, de présenter les personnes qui vous accompagnent, et je vous informe que vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous, M. Joanette.
Fonds de la recherche en
santé du Québec (FRSQ)
M. Joanette (Yves): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires, c'est à titre de président du conseil d'administration du Fonds de la recherche en santé du Québec que je me présente à vous aujourd'hui. Je suis accompagné par Mme Michèle Stanton-Jean, qui est vice-présidente du conseil d'administration, et, à ma gauche, M. Gilbert Tordjman, qui est vice-président du fonds, aux affaires administratives.
Alors, je voudrais d'abord remercier la commission, la ministre et notre ministre du MDEIE d'avoir choisi de nous inviter à participer à cette commission, et les commentaires et propos que je vais tenir sont ceux des membres du conseil d'administration, que je vais exprimer et qui sont en fait inspirés largement des réactions et propos de la communauté scientifique elle-même.
Alors, je vais d'abord commencer par un tout petit rappel. Le Fonds de la recherche en santé du Québec, qu'est-ce que c'est? Bien, le Fonds de la recherche en santé du Québec, c'est ce qui a permis, et c'est ce qui permet toujours, au Québec, de structurer, planifier, organiser la recherche en santé au Québec par des actions de formation à la recherche, par des actions de structuration autour de centres de recherche qui sont situés dans les hôpitaux universitaires. Chaque hôpital universitaire, le CHUM, le CHUQ, ici, à Québec, le CHUS, à Sherbrooke, celui à McGill et Sainte-Justine, par exemple, et les autres hôpitaux universitaires disposent tous d'un centre de recherche qui a été approuvé, qui est vérifié et évalué à chaque période de quatre ans par des comités de pairs du Fonds de la recherche en santé du Québec. C'est également des soutiens à des projets stratégiques, souvent en partenariat avec soit des associations caritatives, ou même des aspects non commerciaux de certaines entreprises, et c'est aussi un positionnement à l'international. On l'a mentionné tantôt, c'est un positionnement important en lien avec les structures d'appui du MDEIE lui-même, mais un positionnement qui est très fort, ciblé sur des thématiques et des régions, et en particulier de ce temps-ci sur... un positionnement au sein des grands réseaux de l'Union européenne, à un moment où le Québec participe dans de grandes négociations avec le Canada sur... une réflexion sur un libre accord avec l'Union européenne.
Le Fonds de la recherche en santé du Québec, c'est près de 100 millions de dollars d'investissement en recherche, qui est une contribution d'environ 95 millions de dollars du gouvernement, mais à laquelle s'ajoutent cette année près de 3 millions de dollars en partenariats divers que le Fonds de la recherche en santé du Québec négocie. C'est des impacts très précis. On a bien mesuré et décrit tantôt l'idée derrière la création du Fonds de la recherche en santé du Québec par les parlementaires dans les années soixante: c'était de faire en sorte que les chercheurs du Québec se méritent par leur plus grande excellence plus que leur part démographique au niveau des grands concours fédéraux. Et, je dirais, ça fonctionne, puisque globalement année après année, encore aujourd'hui, les chercheurs du Québec se méritent, sur base de concours, 1,3 fois le poids démographique du Québec. Dans certains secteurs, ça va jusqu'à 37 %, 39 % des parts fédérales, dans certains domaines de recherche, alors que nous sommes 23 % de la population.
**(10 h 40)** C'est aussi des impacts précis sur la qualité des soins et des services de santé et sur les soins de santé eux-mêmes. Je rappelle, par exemple, que la revue Québec Science, l'année dernière, a mentionné que, parmi les 10 découvertes de l'année, il y en a cinq en santé, par exemple sur une nouvelle classe d'antibiotiques pour des défis de santé, pour des maladies antibiorésistantes, une meilleure compréhension des espèces génétiques, de la migraine, des meilleures compréhensions du rôle de l'environnement et de l'eau et du manganèse dans l'eau sur le fonctionnement et le développement des bébés. Alors, on voit qu'il y a des impacts bien précis.
Alors, pour faire tout ça, on a bien sûr des frais de fonctionnement. Ils ont été évoqués un peu plus tôt. Le Fonds de la recherche en santé du Québec est assez fier d'avoir des frais de fonctionnement qui représentent, sur trois ans, 5,9 %, 6 % de ses frais globaux, qui est le taux le plus faible au Canada. Une organisation similaire en Colombie-Britannique a un taux de frais de fonctionnement d'environ 11 %, alors que la plupart des organismes de ce type au pays oscillent autour de 8 %.
Alors, les membres du C.A., du conseil d'administration du Fonds de la recherche en santé du Québec, bien sûr, prennent acte de la décision du gouvernement. Ils auraient bien sûr cependant souhaité que la communauté de recherche en santé et ses partenaires soient consultés avant le dépôt du projet de loi pour prendre connaissance des orientations, des buts, des objectifs et voir si toutes les études comparatives sur les solutions possibles pour atteindre ces objectifs, ces buts, ont été bel et bien réalisées.
Cependant, les membres de mon conseil d'administration sont en mode action et sont prêts à collaborer avec le gouvernement, si le projet de loi devait être adopté tel qu'il est présenté, afin de faire en sorte que le Fonds Recherche Québec devienne une organisation forte, efficiente, qui veille sur les intérêts de la recherche puis la formation du personnel hautement qualifié de demain, sans jamais sous-estimer le fait que la formation du personnel en recherche, ce n'est pas uniquement pour faire des nouveaux chercheurs, des nouveaux scientifiques, mais c'est ce qui nourrit cette économie basée sur le savoir, c'est ce qui nourrit aussi plusieurs d'entre vous qui en fait siégez autour de cette commission.
Alors, les membres du conseil d'administration ont évoqué sept points que je vais rapidement aborder dans les prochaines minutes. Le premier, c'est l'importance du maintien d'une recherche en santé forte au profit du Québec. Alors, c'est important de maintenir une recherche en santé en santé, si je peux m'exprimer ainsi, parce qu'elle contribue bien sûr à l'activité économique du Québec et donc à la santé de l'économie, et certains de ses secteurs, par exemple, en biopharmaceutique, en biotechnologie, mais c'est aussi la santé de la population, des Québécoises et de Québécois, et l'efficience de son système de santé qui préoccupent nos citoyens.
C'est bien sûr une contribution au bien-être de la population, mais c'est également un positionnement à l'international. Le fait qu'on ait un système de santé qui, malgré ces aspects qui restent toujours des défis, représente un acquis important pour la société québécoise, représente un atout unique pour le Québec en tant qu'attracteur, par exemple, pour l'immigration, pour attirer même des investissements économiques.
C'est aussi important de respecter toutes les formes de recherche, et, quand on parle de recherche, il n'y a pas que la recherche fondamentale en laboratoire, il y a la recherche clinique, qui se fait dans les hôpitaux universitaires pour la plupart du temps, qui est cette recherche où on fait... on transforme ces connaissances en meilleures pratiques. Il y a la recherche sur l'organisation des soins et des services de santé et il y a bien sûr la recherche en santé à caractère social. Donc, maintenir une recherche en santé forte au profit du Québec était le premier point.
Deuxièmement, bien sûr, les membres du conseil d'administration soulignent que les décisions qui doivent être prises pour le soutien à la recherche doivent toujours être basées sur l'excellence. C'est l'excellence qui fait en sorte qu'on soutient la recherche et c'est l'excellence qui motive toutes les décisions de financement et de soutien que notre fonds adopte chaque année. Elle est basée, on l'a évoqué tantôt, sur la participation d'environ 450 chercheurs du Québec et d'ailleurs qui contribuent à titre bénévole -- à titre bénévole -- à l'évaluation des projets qui sont recommandés éventuellement au conseil d'administration.
Le Fonds de la recherche en santé du Québec lui-même, ses employés, on a évoqué tantôt, c'est 35 employés plus une douzaine de conseillers scientifiques à temps partiel. Donc, c'est tout petit comme organisation. Mais l'importance d'appuyer les décisions sur l'excellence est un point très important.
Le troisième point, quand on pense à ce projet de loi, c'est l'importance de respecter les rôles et les cultures de chacun des secteurs: le secteur de la santé, le secteur... nature-technologies, le secteur des sciences... société, culture, sciences humaines, sciences sociales, parce qu'il y a des contextes, il y a des cultures distinctes entre ces trois secteurs qui ont motivé des déploiements de soutiens distincts entre les trois secteurs. Le fait qu'il y ait des centres de recherche dans les hôpitaux universitaires n'est pas reproduit dans d'autres secteurs, puisque c'est propre à la santé; et autres formes de soutien. Donc, il est important que, dans le Fonds Recherche Québec qui est prévu, chacun des trois secteurs puisse poursuivre ses activités de soutien à la manière et adaptées en fonction de son secteur, parce que sinon on perdrait notre compétitivité et notre capacité historique à aller chercher plus que notre part démographique, par exemple, au fédéral.
Donc, le quatrième point que je voulais mentionner découle de cela, et, dans le projet de loi, il est prévu donc un conseil d'administration central et trois conseils sectoriels pour chacun des trois secteurs, et les membres de mon conseil d'administration soulignent l'importance que devraient avoir, et le rôle que devraient avoir, et les pouvoirs que devraient avoir ces conseils sectoriels. Une centralisation de toutes les décisions au sein du conseil d'administration ne serait évidemment pas efficiente et pourrait aller interférer avec l'efficience de chacun des trois secteurs. Donc, c'est important d'offrir un certain rôle décisionnel. Est-ce que ce doit être inscrit dans le projet de loi? Est-ce que ce doit être mis dans les règlements qui... et la culture qui sera mise en place, et donc dans les conseils qui seront... qui vont entourer le déploiement du Fonds Recherche Québec? C'est une décision qui appartient au gouvernement mais qui doit certainement être abordée, donc le pouvoir de ces conseils sectoriels et le rôle qu'ils auront à jouer, pour au moins les activités sectorielles. Si ces conseils sectoriels, en plus, ne devenaient que consultatifs et n'avaient aucun pouvoir décisionnel, on peut même se demander s'il serait possible d'y attirer des membres de qualité qui n'auraient pas l'impression de contribuer réellement au fonctionnement de leur secteur.
Le cinquième point, c'est la question des budgets sectoriels. Le Fonds Recherche Québec aura des budgets sectoriels, et le ministre Gignac, quand il a rencontré les membres de mon conseil d'administration, a évoqué le fait que les budgets sectoriels seraient quelque part protégés pour assurer un investissement logique sur un certain nombre d'années. On ne peut pas changer ces budgets d'année en année de façon majeure sans affecter la logique et la continuité des opérations dans une logique de recherche, mais les membres du conseil d'administration constatent que le projet de loi n° 130 est muet sur la répartition de ces budgets pour chacun des secteurs. Il y a donc une inquiétude de voir, à moyen et court terme ou à long terme, voir varier de façon non cohérente ces budgets sectoriels, et il est suggéré de réfléchir à inscrire dans le projet de loi n° 130 une mesure qui pourrait protéger ces budgets sectoriels, quitte à les revoir sur une période de plus d'une année, peut-être trois ans, peut-être cinq ans, en fonction des besoins de chacun des secteurs, des priorités de la société, des priorités du gouvernement, donc une invitation à réfléchir sur la possible inscription d'une protection et d'une orientation sur les budgets sectoriels au sein du projet de loi n° 130.
Finalement, le sixième point ou l'avant-dernier point, bien sûr j'ai parlé des secteurs, mais le projet de loi et l'esprit du projet de loi mettent beaucoup d'emphase sur les collaborations intersectorielles. Elles existent déjà, mais l'avantage du Fonds Recherche Québec réside bien sûr dans cette capacité à probablement soutenir de façon beaucoup plus forte ces aspects intersectoriels. Les membres du conseil d'administration sont inquiets de penser que ces activités intersectorielles puissent être financées à même les budgets sectoriels, donc en ponctionnant à l'intérieur de ces budgets sectoriels. Donc, il faudra bien sûr réfléchir sur les investissements qui seront à faire si on veut investir, puisqu'il ne s'agit pas de dépenser, mais d'un investissement en santé. Je rappelle les chiffres: les 100 millions que le FRSQ consent à chaque année permettent à nos chercheurs d'aller chercher environ 600 millions de dollars au fédéral. Donc, c'est, en termes, je dirais, même économiques, un investissement important.
Finalement, bien le septième point, c'est: bien analyser les expériences des autres juridictions, de ce qui s'est fait ailleurs, pour bien comprendre quels sont les facteurs de succès et d'insuccès d'un tel déploiement d'une telle fusion dans le monde de la recherche, et une invitation, donc, à bien préparer les conditions qui vont faire en sorte que ce fonds va être déployé.
En somme, si je peux terminer, la fusion ou la véritable valeur ajoutée, aux yeux des membres du conseil d'administration, la véritable valeur ajoutée de ce Fonds Recherche Québec, bien, en termes de... par exemple, d'économies, c'est... Bien sûr que la fusion des trois C.A. en un seul C.A. n'est pas en soi une source d'économies, les C.A. sont composés de membres bénévoles, donc ce n'est pas là que se trouve l'économie; des économies peuvent être anticipées au chapitre de certains soutiens administratifs, mais toujours dans le respect de la pratique des cultures sectorielles. Toutefois, la véritable valeur ajoutée, c'est probablement cette valeur ajoutée sur un accroissement de la recherche entre les secteurs, cette synergie entre les secteurs. Il y a déjà... Le Québec se démarque déjà au Canada et de par le monde sur sa capacité à fonctionner en interdisciplinarité et à fonctionner entre les institutions, entre les universités, entre les centres de recherche...
**(10 h 50)**Le Président (M. Huot): Merci.
M. Joanette (Yves): ...eh bien, on pourrait donc accroître à ce niveau-là. Merci.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Joanette, pour votre présentation. Mme la ministre, la parole est à vous. J'informe les membres de la commission qu'après discussion on fera les échanges en un seul bloc. Donc, Mme la ministre, vous avez 15 minutes.
Mme Courchesne: Merci. Alors, madame, messieurs, merci beaucoup d'avoir pris la peine d'être venus jusqu'à Québec. C'est apprécié, d'autant plus que vous représentez les fonds de recherche dans le domaine de la santé.
Écoutez, en santé, on le sait, il y a beaucoup d'argent, puis il y a beaucoup d'argent à aller chercher, puis il y a beaucoup de compétition. Puis, je l'ai dit un peu tout à l'heure, du côté ministériel, on a toujours eu ce souci d'essayer d'équilibrer, pour la part du Québec, on s'entend, d'avoir un financement équilibré et équitable entre les trois fonds. Là, je vous parle de perception, hein, dans la perception publique -- mettons ça comme ça, là -- dans la perception très large. Le domaine de la santé est un domaine extrêmement spécialisé, c'est un domaine où il y a vraiment des nécessités de recherche à la fois fondamentale et appliquée très, très pointue, où, vous l'avez mentionné, il y a des liens de collaboration très importants entre tous les intervenants du milieu médical.
Mais est-ce que c'est, au niveau de la santé... Par exemple, si on regarde, puisque vous aurez trois fonds regroupés, vous vous êtes prononcés, là, sur l'interdisciplinarité. J'aimerais ça qu'on aille un petit peu plus loin à l'intérieur de ça. J'ai cru comprendre que, oui, on va en faire si on a un peu plus d'argent. C'est un peu ça que j'ai compris de vos propos. Corrigez-moi si j'ai mal compris. Mais est-ce que déjà, de façon... j'allais... je ne veux pas dire spontanée, mais est-ce que déjà, au-delà de collaboration en santé, on juge importante cette... on la juge importante, cette interdisciplinarité? Comment elle peut s'actualiser? Comment elle se fait? Comment elle se concrétise? Est-ce qu'il y a déjà des activités complémentaires à l'intérieur de votre fonds qui suscitent cet aspect-là de la question? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Et vous avez, vous aussi, parlé de renforcement. J'en ai beaucoup parlé. Je vais en parler beaucoup. Essayons de voir en quoi ce regroupement -- oublions le projet de loi 30 secondes -- mais en quoi un regroupement pourrait renforcer cette place de la recherche en santé, et là je vais dire au Canada, puisqu'il y a des fonds extrêmement importants à travers le Canada au niveau de la santé.
M. Joanette (Yves): Merci, Mme la ministre. Et vous avez pleinement raison, l'un des nerfs de la guerre, je dirais, de compétitivité non seulement sur la scène québécoise, mais surtout sur la scène canadienne et internationale, c'est cette capacité à rassembler les acteurs de toutes les disciplines autour de grandes questions. L'époque des recherches où les chercheurs, les scientifiques étaient seuls dans leur coin, dans leurs propres disciplines, essayaient de faire avancer leurs propres domaines est strictement révolue, et c'est l'une des bases mêmes de l'évaluation des centres de recherche, du Fonds de la recherche en santé du Québec, par exemple, dans les hôpitaux, la capacité à faire en sorte que les différentes disciplines médicales, les différentes disciplines de la santé, sciences infirmières, pharmacie, enfin toutes les autres disciplines de la santé, les disciplines des sciences humaines, les disciplines de l'ingénierie, les nanotechnologies, l'imagerie médicale, la bio-imagerie, que tout ça soit intégré au profit de grands projets porteurs qui abordent et qui attaquent les grandes questions qui sont les nôtres. Alors, l'interdisciplinarité, elle fait partie... elle est au coeur même de notre quotidien et elle fait partie de la manière dont on valorise et dont les comités de pairs sont amenés à se faire une opinion sur l'excellence des milieux. Ce n'est pas uniquement l'excellence des individus, c'est l'excellence des regroupements.
Le Québec se distingue d'ailleurs par la mise en place non seulement de centres et de groupes dans différentes universités ou hôpitaux, mais on est la seule province, peut-être même la seule juridiction qui a permis et soutenu le déploiement de réseaux thématiques de recherche. Nous avons au Québec 18 réseaux thématiques de recherche, que le Fonds de la recherche en santé du Québec soutient, dans différents domaines, sur le cancer, sur la douleur, sur différents domaines qui sont d'importance pour notre société, pour des défis de santé, et ces réseaux non seulement rassemblent toutes les disciplines, mais ils rassemblent le meilleur du Québec au travers l'ensemble des universités, l'ensemble des centres de recherche. Donc, en termes de réseautage, en termes de barrières disciplinaires, je pense que le Québec a un avantage concurrentiel reconnu par les autres provinces, reconnu par nos voisins des États-Unis, reconnu aussi par l'Union européenne, et c'est une caractéristique qui fait en sorte que ça explique le leadership du Québec en matière de recherche en santé au Canada.
Ceci étant, vous avez raison, la question qui se pose après, c'est: Si on a réussi, à l'intérieur de chacun de ces secteurs, de faire ces collaborations interdisciplinaires, est-ce qu'on ne peut pas devenir des champions de l'intersectorialité cette fois, donc de faire en sorte que la santé, l'ingénierie, nature-technologies, sciences humaines, sciences sociales deviennent mieux intégrées? Il y a déjà de larges, de grands embryons de cette capacité à le faire. Il y a déjà des aspects pour lesquels ces liens existent déjà. On n'a qu'à penser aux défis de la bioéthique, par exemple, et des réflexions sur la société en lien avec les défis de santé. On peut aussi penser aux liens entre nanotechnologies et imagerie physique de la résonance magnétique et la santé. Donc, il y a de ces liens. Le Fonds Recherche Québec, oui, pourrait être une occasion de renforcer ces liens, et vous avez tout à fait raison.
Maintenant, vous avez souligné au passage le fait que j'ai subtilement dit que ça prenait peut-être plus de ressources. Écoutez, si on veut faire plus de choses, il ne faut peut-être pas dépouiller Paul pour habiller Pierre, ou dépouiller Marie pour habiller Hélène, je ne sais pas. Mais il faut donc s'assurer qu'on a les moyens de le faire, parce que le domaine dans lequel on est, le monde dans lequel on est, c'est un monde de compétition internationale. Donc, si on fait tout à moitié, on ne va rien faire, donc il faut le faire sérieusement.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Joanette. M. le député de Viau, la parole est à vous.
**(11 heures)**M. Dubourg: Merci, M. le Président. J'en profite aussi pour saluer mes collègues. Et bonjour, M. Joanette ainsi que les personnes qui vous accompagnent.
M. Joanette, je vous écoutais parler de ce secteur-là avec beaucoup de passion, tant de la recherche fondamentale, recherche appliquée. Moi, personnellement, ce n'est pas ma discipline, c'est plutôt côté économie, côté finance, et le parallèle que... la question que j'aimerais vous poser surtout, c'est de dire que ce domaine-là, vous le maîtrisez, et c'est important pour nous effectivement au Québec de garder cet avantage concurrentiel dont vous parlez. Vous avez mentionné plusieurs éléments de la recherche en santé, forts, de l'excellence, de culture sectorielle, donc ce sont tous des domaines que vous maîtrisez bien, et je veux vous laisser ces domaines-là. Mais, moi, ma préoccupation à moi, c'est de dire: En termes économiques, en termes de ce qu'on vit présentement au niveau économique, j'ai participé récemment à une consultation où est-ce qu'on parlait de fusion SGF puis Investissement Québec, donc où est-ce qu'il y a beaucoup d'employés. Or, dans votre présentation, aussi vous nous avez dit que vous n'êtes pas nombreux, vous êtes 35 employés.
La question que je me pose, donc, cette fusion-là des trois fonds, ça devrait quand même être... bon, bien, en termes de structures, ça devrait être assez facile à faire. Et je me dis: Il devrait, à mon avis, aussi y avoir un certain nombre d'économies qu'on pourrait réaliser. Vous avez parlé de bénévoles, mais je me demande, en termes de cadres qu'il y a dans ces trois fonds-là, quand on parle de regroupement: Est-ce qu'il n'y a pas possibilité d'économiser? On parle, O.K., d'alléger les structures, mais d'économiser en termes de frais de déplacement, tout ça, là. Vous maîtrisez l'aspect recherche, d'accord, mais, moi, j'aimerais voir l'aspect économique de cette éventuelle... bien, de cette fusion, là, de ces trois fonds-là. J'aimerais vous entendre là-dessus, des économies potentielles qu'on pourrait réaliser, M. Joanette.
M. Joanette (Yves): Merci pour cette question. Les économies potentielles, je l'ai évoqué, bon, elles ne sont pas au niveau des gens qui sont bénévoles, le conseil d'administration ou les 450 chercheurs qui participent chaque année à ces activités d'évaluation par les pairs. Je dirais qu'au niveau de l'administration je ferais une distinction entre deux portions: il y a la portion gestion des programmes eux-mêmes et il y a des gestionnaires de programmes. Et on aura toujours un programme de centre de recherche, à moins qu'on veuille aller vers un mur au Québec, mais on aura toujours un programme de centre de recherche, de réseau, donc il y aura toujours de ces gestionnaires. Donc, ceux-là, je ne vois pas. Peut-être que la fusion n'aura pas grand impact sur cette portion-là.
Par contre, il y a une portion soutien, donc les aspects communication informationnelle, ressources humaines, et ces aspects-là pourraient certainement, lorsqu'ils seraient pris ensemble, générer d'éventuelles économies. D'ailleurs, on a évoqué un peu plus tôt le fait qu'il y avait à une certaine époque une table des trois présidents-directeurs généraux, des trois fonds de recherche. En fait, il n'y a plus de table, mais il y a un groupe. Donc, on se réunit chaque... de façon très périodique. Et c'est une avenue qu'on a évoquée de façon préliminaire sans avoir été amenés à l'examiner, et de fait il pourrait y avoir des économies qui sont à peu près de l'ordre des économies anticipées dans le cas, par exemple, de la loi n° 100, sur un certain nombre d'années. Donc, il pourrait y avoir cela. Il pourrait aussi y avoir une certaine rationalisation des dépenses qui pourrait être facilitée par ce rapprochement.
Le Président (M. Huot): M. le député de Viau.
M. Dubourg: Oui, merci. Et plus de précision, M. Joanette, à savoir: est-ce que vous pouvez chiffrer brièvement, là, ces économies-là dont vous parlez au niveau du soutien administratif, au niveau des ressources, d'équipement, etc., tout ça, qu'est-ce que ça pourrait représenter? Parce qu'on est dans un contexte où on dit: Il n'y a pas de petites économies.
M. Joanette (Yves): Bien, écoutez, évidemment, l'exercice précis n'a pas été fait et ne peut être fait tant qu'on n'aura pas une idée précise de la forme que prendra la fusion. Il faudra aussi éventuellement mesurer, j'imagine, d'éventuels coûts associés à cette fusion, puisqu'il y a des petits groupes d'employés mais qui sont quand même... qui appartiennent à des unités syndicales distinctes, donc, qui doivent être rapprochés, et on sait que ça peut être une source de défis.
Ceci étant, l'ordre de grandeur des économies anticipées, à vue de nez, évidemment sans trop savoir quel est le détail de l'organisation, comme je disais, est de l'ordre de ce qui est espéré, exigé dans le cadre de la loi n° 100. C'est à peu près 10 % des frais de fonctionnement.
Le Président (M. Huot): Merci. M. le député de Chapleau, il reste un peu plus de deux minutes.
M. Carrière: Merci, M. le Président. À mon tour, j'aimerais saluer les collègues, souhaiter la meilleure année à tous. Bienvenue pour venir nous faire part de vos recommandations.
Moi, j'aimerais vous entretenir sur la 10e... la page 5 de votre mémoire, là, l'élément 10. Conditions de succès pour le regroupement. Vous parlez des initiatives qui ont fonctionné, d'autres qui n'ont pas fonctionné...
Une voix: ...quel mémoire?
M. Carrière: Bien...
Le Président (M. Huot): Vous avez peut-être un papier. Il n'y avait pas de mémoire qui avait été soumis du...
M. Carrière: Bien, les notes, excusez-moi, les notes en vue de la... J'imagine que vous avez ça.
Une voix: ...
Le Président (M. Huot): Oui, on peut faire une copie. S'il vous plaît.
M. Carrière: Pas de problème.
Le Président (M. Huot): Il n'y avait pas de mémoire officiellement déposé, mais j'informe les membres de la commission, il y a... on a...
Des voix: ...
Le Président (M. Huot): Il n'y avait aucun document déposé directement à la commission. Si les gens veulent partager le document, on va faire copie pour tout le monde.
Une voix: ...
Le Président (M. Huot): Non, c'étaient les notes préparatoires du fonds de recherche. On va vous donner copie immédiatement.
Donc, M. le député de Chapleau, avec la suspension, je vous redonne les deux minutes pour faire l'échange.
M. Carrière: O.K., merci. O.K. Bien, premièrement vous parlez des conditions de succès pour le regroupement. Vous parlez des initiatives qui ont été faites dans d'autres domaines ou dans des domaines similaires, de fusions qui ont fonctionné, qui n'ont pas fonctionné. J'aimerais ça savoir si vous avez fait des analyses plus poussées à cet effet-là.
Et puis vous parlez également des degré de liberté, là, une des... «...le succès du regroupement réside notamment dans le degré de liberté qui sera donné au scientifique...» Si vous pouviez peut-être élaborer un peu plus là-dessus, s'il vous plaît.
Le Président (M. Huot): M. Joanette.
M. Joanette (Yves): Merci, M. le Président. De fait, le Fonds de la recherche en santé du Québec n'avait pas choisi de déposer un mémoire, parce qu'en tant qu'organisme visé par le projet de loi n° 130 il nous paraissait plus utile de répondre aux questions plutôt que de défendre une position précise dans un mémoire. Les notes auxquelles vous référez sont des notes qui étaient préparatoires à un certain moment donné de la discussion avec les membres du conseil d'administration. Et donc elles sont justes, mais elles ne représentent pas nécessairement la version ultime.
Vous avez évoqué deux choses. D'abord, une flexibilité et la liberté au scientifique en chef qui a été évoquée dans ces notes, il est évident que la personne, homme, femme, qui sera amenée à être scientifique en chef et par conséquent va agir à titre de présidente-directrice générale ou président-directeur général du Fonds Recherche Québec devra avoir une certaine latitude afin de s'assurer... et Mme Courchesne, Mme la ministre, l'a évoqué elle-même, ce sont les gens qui font les institutions et non pas les structures, et donc afin de mettre en place une nouvelle dynamique de culture. L'efficience même actuelle des trois fonds de recherche, et entre autres du nôtre, elle se base sur une culture qui a été mise en place.
Le Président (M. Huot): Merci. Merci beaucoup, M. Joanette. Je vais céder la parole au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Richelieu. Et je rappelle à tous les membres: La commission n'a pas eu, n'a pas reçu de document, Il n'y a pas de document qui a été déposé à la commission. Donc, simplement pour rappel. M. le député de Richelieu, la parole est à vous.
**(11 h 10)**M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. J'ai... Nous avons entendu avec beaucoup d'attention les différents aspects de... non pas de votre mémoire, mais de votre présentation, et les sept points qui sont en fait le coeur de votre analyse. Sur ces sept points, six en tout cas me semblent a priori plaider pour un maintien de la situation actuelle. Le septième, qui parle de la possibilité d'améliorer la coopération intersectorielle, était même conditionnel, vous l'avez exprimé, à l'augmentation des budgets, qui favoriserait cette interdisciplinarité.
Il y a un proverbe anglais un peu populaire qui me revient à l'esprit: «If it ain't broken, don't fix it.» Est-ce que vous ne pensez pas que cela résume assez bien ce que vous nous présentez aujourd'hui à travers ces sept points? Votre exigence quant à l'excellence, votre exigence quant au maintien d'une recherche forte, de moyens spécifiques à votre secteur pour permettre d'être concurrentiel et d'aller chercher au niveau fédéral, par exemple, plus de 600 millions de dollars par année pour non pas des chercheurs en santé, c'est pour des équipes de recherche, pour des laboratoires, pour ce qui est au coeur de notre dispositif de recherche en santé, je ne vois pas comment on peut sortir de cette rencontre en ayant l'impression que vous appuyez le moindrement le projet de loi n° 130. Je vous le dis bien clairement, là. Je cherche. J'ai bien noté chacun des aspects. Notamment, je veux vous entendre sur la nécessité de maintenir un conseil d'administration sectoriel fort et décisionnel et le fait qu'un conseil d'administration global qui se surajouterait ne pourrait donc être consultatif sans être même assuré d'y attirer des gens très compétents, puisque ce ne serait que consultatif. J'aimerais vous entendre élaborer sur cet aspect qui me semble fondamental de votre présentation.
Le Président (M. Huot): M. Joanette.
M. Joanette (Yves): Alors, merci, monsieur, de ce commentaire. Il est évident qu'il est possible que les commissions d'examen parlementaires ne soient pas fréquentes lorsque... enfin, qui invitent des organismes qui sont visés par le projet de loi, et donc notre position reste prudente. Et la position des membres du conseil d'administration, bien sûr, sera en accord avec les décisions qui seront prises par vous, parlementaires.
Ceci étant, il est certain que cette annonce de fusion des trois fonds s'est faite sur un fond, je dirais... C'est l'orage dans le ciel bleu, comme on dit. Ma foi, les choses allaient plutôt bien. Le Québec a une part plus importante que son poids démographique au Canada en termes de recherche en santé. Nous avons une organisation au Québec qui est, et je crois qu'elle est... que c'est un fait, jalousée par d'autres provinces qui n'en ont pas, copiée. La Colombie-Britannique, il y a 10 ans, qui avait beaucoup moins que sa part démographique en matière de recherche en santé, est venue au Québec, a pris des notes et a mis en place le fonds de recherche en santé Michael Smith, qui est en fait inspiré du modèle québécois. Donc, si on inspire, c'est que ça ne doit pas être trop mauvais.
Est-ce que le fait qu'il y ait un seul conseil d'administration comporte des risques? Je l'ai évoqué au nom des membres du conseil d'administration, il y a là a une invitation à la grande prudence, parce qu'à force de vouloir viser cette synergie supplémentaire entre les secteurs il ne faudrait pas perdre les acquis actuels. Et donc mon propos n'était ni pour ni contre, mais une grande prudence, une invitation à la prudence, de faire en sorte qu'on a fait tous les examens qu'il faut, toutes les analyses qu'il faut pour s'assurer qu'on ne perdra pas les avantages actuels à force de bonne volonté d'ajouter une dimension de synergie.
M. Simard (Richelieu): M. le Président, je comprends très bien la prudence nécessaire d'un président d'organisme qui est soumis à la loi et qui devra s'adapter aux lois qui suivront. Cependant, je vous ai tendu la perche et je comprends que vous ne vous objectez pas beaucoup à la conclusion à laquelle j'en arrive, qu'il n'y aura pas nécessairement amélioration de la situation avec le projet de loi n° 130.
Maintenant, le député de Viau tout à l'heure a soulevé quand même un aspect qui n'est pas négligeable et qui nous préoccupe, ce sont les coûts. Vous avez vous-même mentionné que les coûts de gestion actuels du fonds de la santé étaient de 5,9 %, ce qui nous place en tête au Canada de tous les fonds semblables dont la fourchette de frais s'étend jusqu'à 10 % environ et dont la moyenne probablement est autour de 7 %, donc une performance tout à fait satisfaisante. Si on regarde les coûts, en fait le budget réel, c'est 96 millions par année. Vous avez... il y a 35 employés qui travaillent à ce fonds, pour un budget annuel de frais de fonctionnement d'environ 5 millions. C'est sur cette fraction-là que l'effort de rationalisation et d'économie se ferait. Et jusqu'à quel point peut-on aller plus loin, puisqu'il s'agit pour l'essentiel de personnel professionnel spécialisé, d'analyse et de présentation pour le travail des différents comités de pairs qui, je le rappelle, travaillent bénévolement?
L'effort de diminution et de rationalisation me semble extrêmement réduit dans son champ, où il y a très, très peu à comprimer. Et l'argument utilisé tout à l'heure par le député de Viau se retourne un petit peu malheureusement contre son argumentation, sur lui-même. Quand on considère la... ce que nous avons appris depuis deux semaines dans la fusion de la SGF et d'Investissement Québec, que la partie non syndiquée a décidé entre-temps de se syndiquer, et on nous annonce que tous les chiffres qui nous avaient été donnés de prétendues économies ne se réaliseront pas, il faut toujours être très, très prudent. Je sais qu'on l'a fait au niveau des fusions municipales, pas toujours avec grand succès là-dessus. Les fusions n'amènent pas toujours d'économies radicales, disons-le comme ça.
Une voix: ...
M. Simard (Richelieu): Ce n'est pas un aveu, c'est... Les défusions ont démontré aussi qu'elles étaient très coûteuses.
Donc, méfions-nous des économies. Je pense que c'est Pierre Noreau qui le disait tout à l'heure, que les changements aux structures n'apportaient pas nécessairement là où les économies sont à faire.
Est-ce qu'il y a malgré tout dans les outils que présente le projet de loi n° 130, pour vous, des garanties que vous pouvez sensiblement diminuer vos coûts pour arriver à un meilleur financement de la recherche en santé?
M. Joanette (Yves): Merci. Dans le projet de loi n° 130, la lecture qu'en ont fait les membres de mon conseil d'administration ne... il y a peu de liens directs entre le projet de loi lui-même et les éventuelles économies. Ceci étant, ce projet de loi met en place un contexte qui pourra permettre l'examen et la mise en oeuvre de certaines économies sur la marge de fonctionnement, comme vous l'avez bien souligné, qui est limitée à moins de 6 % en ce qui concerne le Fonds de recherche en santé du Québec.
La question que les membres du conseil d'administration se posent, c'est: Est-ce que l'ensemble des mesures contenues dans le projet de loi n° 130 sont requises pour éventuellement arriver aux mêmes économies? La question reste ouverte. Et je dirais plus globalement: Ce sont des deniers publics. Et le FRSQ est très conscient de l'importance de les gérer de la manière la plus serrée et la plus efficiente possible. Et il ne faudrait pas que des économies petites à droite viennent mettre en péril des avantages concurrentiels qui font en sorte que ça génère des entrées d'argent pour l'économie, des avantages en termes de santé de la population et un positionnement pour le Québec. Il faut bien soupeser ça, et c'est ce que les membres du conseil d'administration soulignent.
Le Président (M. Huot): M. le député de Richelieu, 2 min 30 s.
M. Simard (Richelieu): Je vous demande de donner la parole à la députée de Taschereau, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taschereau, la parole est à vous.
Mme Maltais: Merci, M. le Président. Je comprends... Messieurs, bonjour. Mesdames. Je comprends votre inquiétude quant à la note qui est... que nous avons pu obtenir, puisque l'analyse du ministère était que le fonds ne semble pas très bien accepter la fusion, ce que nous comprenons tout à fait, nous aussi, en entendant vos commentaires qui nous montrent finalement qu'il y a énormément de problèmes susceptibles d'être générés quand on touche à une organisation qui fonctionne très bien. En fait, on essaie d'amener, d'appliquer -- parlons santé -- d'appliquer un remède à quelqu'un qui est en grande forme et en santé et on n'est pas tout à fait sûr que ce remède-là n'amènera pas plus de problèmes. On parle d'économies, mais vous dites vous-même dès le départ qu'il va falloir un peu plus d'argent et il va falloir réinvestir pour le travail intersectoriel, donc une économie qui sera immédiatement compensée par un nouvel investissement.
Mais je remarque qu'il y a deux choses que... sur lesquelles je serais curieuse d'avoir un avis, même si on a peu de temps. Est-ce qu'il ne serait pas possible d'obtenir le même objectif, soit un objectif de travail intersectoriel et d'économie au niveau administratif, en remettant sur pied officiellement les tables de concertation qui existaient avant, qui sont disparues mais sur lesquelles vous avez continué à travailler de façon un peu officieuse pour cette intersectorialité, donc d'obtenir les économies au niveau administratif et cette intersectorialité qui existe déjà dans la pratique? Donc, est-ce qu'on a besoin d'une loi pour ça?
Deuxièmement, vous avez parlé des autres juridictions. Effectivement, est-ce qu'il n'y a pas des exemples dans le monde d'endroits, comme par exemple le Royaume-Uni et l'Allemagne, où on a reculé sur cette idée de réunir les fonds parce que ça se révélait à la fin non performant? Et il y a d'autres exemples qui sont souvent cités, par exemple, par le ministre de la Santé, comme Israël, où il vante beaucoup le scientifique en chef, mais il faut savoir qu'en Israël il y a 13 scientifiques en chef. Il y en a un par ministère. Donc, même là-bas, qui est l'exemple préféré du ministre, on a décidé de gérer ministère par ministère les fonds de la santé.
Alors, est-ce que ces économies ne sont pas réalisables sans le projet de loi, déjà à l'intérieur de vos structures? Deuxièmement, est-ce que les autres juridictions ne nous ont pas donné l'exemple, là, que c'était extrêmement dangereux de faire ce type de travail de fusion?
**(11 h 20)**Le Président (M. Huot): Tout un défi! En 10 secondes, M. Joanette.
M. Joanette (Yves): Alors, en 10 secondes, à notre connaissance cette étude comparative stricte n'a pas été faite. Nous sommes conscients que, par exemple, le Royaume-Uni a décidé de rassembler plutôt fonctionnellement que par un projet de loi centralisé certaines organisations de recherche qui mettent en commun des soutiens administratifs, mais il faudrait faire cette étude peut-être pour s'en convaincre.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Joanette. M. le député de Shefford, la parole est à vous pour trois minutes.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Je veux juste savoir, M. Joanette, rapidement: Depuis que le plan de retour à l'équilibre budgétaire a été déposé par le gouvernement, est-ce que vous avez déposé ou travaillé avec votre conseil d'administration sur un plan de croissance des dépenses? Donc, l'objectif que vous vous étiez fixé, c'était d'en arriver à une croissance des dépenses de 4 %, de 5 %, de 6 %, de 8 %. L'an dernier, c'était de 8,52 %. Est-ce qu'il y a eu un plan de votre part de préparé depuis que le plan de retour à l'équilibre budgétaire a été déposé?
M. Joanette (Yves): Merci pour la question. Le plan, un plan a été préparé, a été déposé et discuté au conseil d'administration, et nous sommes strictement enlignés sur les attentes gouvernementales en termes de réduction des frais de fonctionnement, en lien avec la loi n° 100 et en lien avec chacun des articles de la loi n° 100.
M. Bonnardel: Donc, dès l'an prochain, on devrait voir ces attentes...
M. Joanette (Yves): Oui, tout à fait.
M. Bonnardel: Parfait. Est-ce que vous considérez... Est-ce que la fusion de ces trois fonds, qui vont s'appeler Fonds Recherche Québec, est-ce que ça va vous empêcher d'être... Vous avez parlé tantôt de compétition internationale, d'être compétitif face aux autres dans le monde. Est-ce que ce 100 millions que vous recevez -- l'an dernier, c'était 97 735 000 $ -- est-ce que ça va vous empêcher, cette... avec cette supposée fusion qui va prendre place, d'aller chercher les argents que vous dites? Donc, pour 100 millions, c'est 600 millions que vous allez chercher au fédéral. Est-ce que, malgré que cette fusion prenne place, que vous ne soyez pas nécessairement d'accord avec ce projet de loi, est-ce que vous allez être moins compétitifs? Est-ce que ça va vous empêcher d'aller chercher les argents que vous obtenez depuis quelques années déjà?
M. Joanette (Yves): Bien, écoutez, le fait que les chercheurs du Québec, les scientifiques du Québec vont chercher plus que leur part, c'est bien sûr parce qu'on les soutient avec de l'argent mais aussi parce qu'il y a un conseil d'administration. Il y a donc un groupe d'individus qui connaît le milieu de la recherche en santé, qui met en place des... une forme de soutien. Il ne s'agit pas simplement d'ouvrir un guichet où les gens se servent. Il faut le faire de façon stratégique et opportuniste en fonction de ce qui va être généré, des retours. Si le conseil sectoriel santé à l'intérieur du Fonds Recherche Québec joue toujours ce rôle pour le secteur santé, on pourra maintenir cette compétitivité. Mais il faut que le conseil sectoriel ait un rôle important et décisionnel, si jamais on devait mettre en place le Fonds Recherche Québec.
Mme Stanton-Jean (Michèle): Si je peux me permettre...
Le Président (M. Huot): Oui, allez-y.
Mme Stanton-Jean (Michèle): Pour être au conseil depuis quelques années, la vitesse de prise de décision dans certains secteurs est extrêmement importante. Si la prise de décision est trop lente, le conseil sectoriel doit s'en aller au grand conseil, etc., il y a parfois des décisions qu'on a prises très rapidement, sur le SRAS, sur le sida, parce qu'il y avait un fonds disponible. Donc, comme on dit aussi en anglais, le diable est dans les détails. Si c'est trop long pour la prise de décision, ça peut handicaper.
Le Président (M. Huot): 10 secondes, M. le député de Shefford.
M. Bonnardel: Bien, pour faire du chemin donc là-dessus, pour aller en lien avec le député, s'il y avait seulement un conseil d'administration, et que vous alliez chercher les meilleurs éléments de votre conseil d'administration présentement, et que ce... ce conseil qui chapeauterait ces trois fonds, vous ne seriez pas capables de prendre des décisions aussi rapides pour vous retourner sur un dix sous, pour être capables de prendre ces décisions-là?
Le Président (M. Huot): Cette question demeurera sans réponse, M. le député de Shefford. Malheureusement, nous avons écoulé notre temps. Merci beaucoup.
Document déposé
Avant de suspendre, je veux déposer. Il y a eu... Les membres de la commission ont eu un document. Donc, je dépose officiellement les notes en vue de la participation du FRSQ aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 130, les déposer officiellement.
Messieurs mesdames, merci pour votre contribution aux travaux de cette commission.
Je suspends quelques instants et j'invite le Fonds québécois pour la recherche sur la nature et les technologies et ses représentants à prendre place, s'il vous plaît. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 25)
(Reprise à 11 h 29)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons les travaux de la commission. Nous recevons les représentants du Fonds québécois pour la recherche sur la nature et les technologies. Ce sera sans doute M. Prémont qui fera la présentation. Vous avez l'habitude des commissions parlementaires, donc je vous demande de bien vous identifier, de présenter les personnes qui vous accompagnent. Et je vous informe que vous avez une quinzaine de minutes pour présenter votre mémoire.
Fonds québécois pour la recherche sur
la nature et les technologies (FQRNT)
M. Prémont (Pierre): Alors, mon nom est Pierre Prémont. Je suis président du conseil d'administration du Fonds québécois recherche nature et technologies. Et j'ai avec moi aujourd'hui... Bien, tout d'abord, Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, Mmes, MM. les représentants de l'Assemblée nationale et membres de la commission, on veut vous remercier de nous donner l'occasion de vous faire part du point de vue du Fonds québécois de la recherche nature et technologies sur le projet de loi n° 130.
**(11 h 30)** Alors, je suis aujourd'hui avec Mme Lucie Lapointe, qui est vice-présidente du conseil d'administration du FQRNT et présidente de notre comité de gouvernance. Mme Lapointe est consultante et cumule de nombreuses années d'expérience à des postes de haut niveau dans les organismes fédéraux et privés de recherche et d'innovation. Je suis aussi avec M. Jacques de Guise, président de notre comité de vérification. M. de Guise est professeur titulaire à l'École de technologie supérieure, directeur du laboratoire de recherche en imagerie et orthopédie, LIO, qui est situé au Centre hospitalier de l'Université de Montréal. Il fait également partie du comité de sélection du scientifique en chef, Fonds Recherche Québec.
M. Charles Gale, qui est président de notre comité des programmes. M. Gale est professeur titulaire et directeur du Département de physique à l'Université McGill. Mme Claire Boulé, présidente du Comité science et société et directeur général du Réseau Trans-tech, le réseau des centres de transfert de technologies des collèges, est actuellement à l'extérieur du Québec et s'excuse de ne pas être présente. Je suis aussi accompagné de la secrétaire du conseil d'administration, Mme France Busque, et qui est adjointe au président-directeur général et secrétaire à la FQRNT. Et Mme Annie Baron, directrice des ressources financières. Mme Baron fait partie de l'équipe des services communs avec le fonds société-culture.
Écoutez, d'abord je veux vous dire qu'au FQRNT les efforts consacrés à la réalisation des objectifs visés dans notre plan stratégique 2007-2010 et à la mise en oeuvre de cette stratégie ont été fructueux. Au cours des années, le FQRNT s'est aussi vu confier des mandats additionnels par le gouvernement... que par ses partenaires. Ces mandats ont été réalisés sans augmentation notable des frais de fonctionnement, dans le respect des réductions budgétaires demandées par le Conseil du Trésor... peuvent être réalisés. Employés et membres du conseil d'administration du FQRNT sont très fiers des performances de notre organisme et de la satisfaction exprimée à notre égard par la communauté que nous desservons. Le degré de satisfaction de la clientèle est mesuré périodiquement par l'entremise d'un sondage intégré aux demandes d'aide financière et qui tient compte des échanges avec notre clientèle, notamment dans le cadre des tournées universitaires.
Ainsi, les membres du conseil d'administration du FQRNT ont d'abord été surpris par l'annonce du regroupement des trois fonds québécois en un fonds unique. Comprenant les intentions du gouvernement cependant, nous avons rapidement saisi la nécessité de favoriser une bonne transition afin que l'expertise du FQRNT soit mise à profit dans le nouveau Fonds Recherche Québec. Nous nous sommes donc engagés à respecter notre planification stratégique 2010-2013, axée sur la continuité de la SQRI 2007-2010, et à assurer l'atteinte des objectifs visés dans nos plans d'action jusqu'à la mise en place du nouveau fonds.
Permettez-moi de vous rappeler brièvement la mission de notre fonds: soutenir financièrement et promouvoir la recherche universitaire, collégiale, la formation du personnel hautement qualifié, la diffusion des connaissances dans les domaines des sciences naturelles, des sciences mathématiques, le génie, ainsi que contribuer au développement économique et à l'innovation du Québec dans un contexte de développement durable.
Les crédits de base alloués au FQRNT sont d'environ 35.5 millions de dollars par année. La SQRI 2007-2010 a favorisé le secteur des sciences naturelles et du génie en bonifiant nos budgets de 39 550 000 millions de dollars sur trois ans, qui nous a permis d'en répartir 23 millions dans les subventions et 15 millions dans les bourses. Ces crédits additionnels ont donc été un élément majeur pour l'atteinte des cibles visées. Nous considérons toutefois que ces octrois étaient un rattrapage nécessaire pour le secteur des sciences naturelles et génie, très porteur en innovation et pour le développement de la richesse.
La SQRI 2010-2013 a maintenu nos acquis. Des crédits additionnels de 40 millions de dollars sur trois ans répartis: 25 millions en subventions, 15 millions par les bourses. Afin de faire profiter la communauté que nous desservons de ces crédits additionnels, il nous apparaît essentiel de poursuivre les actions du FQRNT pour former la relève de personnel hautement qualifié dans les entreprises en milieu académique; renforcer nos pôles d'excellence et rentabiliser les investissements en grands équipements et installations scientifiques; accentuer le virage vers la valorisation et l'innovation dans les secteurs et les domaines ciblés; favoriser un meilleur dialogue entre les chercheurs et la société; puis être un modèle d'imputabilité et d'efficience.
Aussi, il est nécessaire que ces engagements soient maintenus dans le Fonds Recherche Québec et qu'ils se concrétisent dans des mesures et des programmes ciblés, tels les bourses d'excellence en recherche, les bourses et les stages de recherche milieu-pratique, les stages internationaux pour les étudiants des cycles supérieurs, ainsi que les programmes de subventions destinés aux chercheurs universitaires, notamment les nouveaux chercheurs en région ainsi que les chercheurs de collèges.
Il est aussi important pour nous de voir bonifié le programme recherche en équipe, dont les mérites sont reconnus par l'ensemble de notre communauté et qui nécessite des investissements supplémentaires pour répondre aux besoins des chercheurs. Créé par le FQRNT et envié au niveau national, le programme de recherche en équipe a pour objectif de favoriser l'émergence de nouveaux projets de recherche par la réalisation de projets novateurs reposant sur des équipes interdisciplinaires. Ce programme permet également de rentabiliser les investissements consentis aux regroupements stratégiques. Il est essentiel au dynamisme, à la stabilité et à la viabilité de ces pôles d'excellence. Le programme recherche en équipe soutient la base de la recherche, favorise la relève scientifique au Québec. En offrant la latitude nécessaire aux chercheurs pour supporter les étudiants, ce programme contribue aussi à développer des collaborations internationales. Il est complémentaire aux autres programmes offerts par le FQRNT qui supportent la recherche individuelle, les regroupements, les réseaux, et la recherche orientée en partenariat avec l'industrie. À cet effet, les partenariats avec l'industrie ont un effet... nos programmes de recherche ont un effet de levier de 1 %.
Le personnel du FQRNT est déterminé à bien faire valoir ses compétences dans le nouveau Fonds Recherche Québec. Certains membres de l'équipe FQRNT comptent plus de 20 ans d'expérience et possèdent une grande expertise en gestion de programmes de recherche, en particulier dans l'évaluation des demandes d'aide financière. D'ailleurs, cette expertise est reconnue tant par la communauté universitaire que par nos partenaires, notamment les ministères, qui n'hésitent pas à nous confier l'évaluation et la gestion de leurs programmes de bourses et de subventions. Depuis le 31 mars 2010, 496 avis ont été formulés dans le cadre de 17 mandats spéciaux au FQRNT par 12 ministères et organismes. De plus, le FQRNT gère, pour le compte de 12 partenaires privés ou publics, une enveloppe budgétaire de 7,9 millions, en incluant celles des programmes en recherche en partenariat.
Le FQRNT, comme vous le savez probablement, partage avec le Fonds société et culture des services administratifs communs pour les ressources humaines, matérielles, financières, informationnelles et informatiques, permettant d'optimiser nos ressources. À cet égard, nous pouvons compter sur l'expertise pour supporter nos opérations, tant pour la gestion financière de la recherche, la reddition de comptes, que pour les développements de services en ligne et les processus d'affaires électroniques; cette expertise a aussi été partagée avec le FRSQ.
Les membres de notre conseil d'administration, représentatifs de la communauté que nous desservons, souhaitent aussi faire valoir leur expertise et maintenir leur engagement envers le FQRNT à travers la nouvelle structure qui sera mise en place. Le maintien des liens avec la communauté sectorielle nous paraît essentiel pour répondre aux besoins spécifiques des secteurs et soutenir la compétitivité sectorielle aux niveaux national et international. Nous sommes convaincus qu'un conseil d'administration bien structuré constitue un atout majeur pour le succès de Fonds Recherche Québec.
**(11 h 40)** Notre conseil d'administration joue un rôle prépondérant au FQRNT. Ses membres sont particulièrement heureux de l'évolution de notre modèle de gouvernance au cours des trois dernières années. Nous sommes une petite société d'État avec un modèle de gouvernance exemplaire qui favorise la participation et l'utilisation de ses membres. Ce modèle bien adapté à notre contexte a été inspiré des enseignements des grandes écoles de gouvernance. Nos comités permanents du C.A. sont le comité de gouvernance, le comité des programmes, le comité de vérification et le comité sciences et société. Ces comités ont éliminé la concentration d'un pouvoir d'un comité exécutif moins propice à la responsabilisation de tous les membres. Nous souhaitons que ceux qui auront la responsabilité de déterminer le mode de gouvernance du Fonds Recherche Québec s'inspirent du modèle du FQRNT et l'adaptent au nouveau contexte.
En conclusion, les efforts consacrés à la réalisation du mandat au FQRNT par le gouvernement ont été fructueux et grandement appréciés par la communauté scientifique et nos partenaires. Ces succès ont été possibles grâce à l'expertise et à l'engagement de l'ensemble du personnel du FQRNT et de ses services administratifs communs. Nous croyons sincèrement que les nouveaux décideurs auront avantage à maintenir les acquis de la SQRI, Stratégie québécoise recherche et innovation, tant dans les crédits que les mesures et programmes ciblés; bonifier le programme recherche en équipe; profiter de l'expertise du personnel du FQRNT et de ses services communs; et de s'inspirer du modèle de gouvernance FQRNT, l'adapter au nouveau contexte dans lequel Fonds Recherche Québec devra se positionner.
Enfin, les membres du conseil d'administration réitèrent leur volonté de collaborer avec le gouvernement pour la mise en oeuvre du projet de loi n° 130. Je vous remercie.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Prémont. Nous passons à la période d'échange. Nous débutons avec Mme la ministre pour une période d'une quinzaine de minutes.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mesdames messieurs, merci d'être devant nous aujourd'hui. Je vais faire du pouce, M. Prémont, tout de suite avec un peu une dernière partie de ce que vous venez d'énoncer. Vous nous parlez d'un nouveau mode de gouvernance qui a été évolutif -- ce que j'ai cru comprendre, là -- depuis trois ans, que vous avez mis en place. J'aimerais que vous nous disiez en quoi il est différent, ce mode de gouvernance, des autres fonds, et nous dire en quoi ce nouveau mode de gouvernance de votre fonds est une valeur ajoutée, mettons ça comme ça, là, même si c'est une expression que je n'aime pas tout le temps, mais en quoi ça donne une stabilité, un renforcement, je ne sais pas, en quoi ça améliore la capacité d'une recherche adéquate dans vos secteurs ou dans votre capacité soit de recueillir les fonds... en tout cas, dites-moi en quoi cette gouvernance-là apporte un changement important chez vous.
M. Prémont (Pierre): Bon, bien, dans les modèles plus traditionnels, au sein des conseils d'administration, il y a très souvent -- puis il y avait chez nous -- un comité exécutif. Un comité exécutif, ça concentre le pouvoir sur quelques membres du conseil d'administration. Tous les membres d'un conseil d'administration doivent être imputables de leurs actions, et, dans un modèle où il y a un comité exécutif, on dit toujours que les membres doivent être égaux, mais, quand on a un comité exécutif, souvent on reconnaît qu'il y a des membres qui apparaissent plus égaux que les autres.
Alors, quand on a différents comités qui s'adressent à des spécialités puis qui voient bien les enjeux d'un conseil d'administration, un conseil d'administration a une priorité, c'est la gouvernance et l'éthique de son fonctionnement. Alors, si on a un comité qui se préoccupe de ça, c'est un comité important puis il y a des membres du comité qui s'impliquent davantage mais qui sont redevables à l'ensemble du conseil d'administration, et les gens peuvent faire confiance à ce comité-là.
On va souvent prendre d'autres membres. Des fois, il peut y avoir des membres qui participent à plusieurs comités, pour un comité de vérification qui est plus indépendant, qui prend du recul par rapport à la gestion et qui voit l'ensemble des prévisions financières. Ça peut exister dans d'autres modèles aussi, et ce comité de vérification là, on va chercher de l'expertise à l'intérieur de nos membres du conseil pour bien se situer, puis les membres de l'ensemble du conseil ont une certaine confiance aussi envers ce comité-là, et on a...
Nous, là, le nerf de la guerre dans nos activités, ce sont nos programmes. Alors, on a mis le focus sur un comité de programmes, puis des fois, quand il y a des décisions un petit peu plus rapides à prendre pour les programmes, c'est délégué au comité de programmes, puis les changements qu'on va apporter dans nos programmes sont discutés en profondeur avant d'arriver au conseil d'administration, avec les membres des conseils d'administration qui sont un petit peu les leaders des programmes. On a aussi un comité sciences et société qui est pour toute la communication, qui est encore un enjeu important.
Alors, vous avez... ici, bien je suis entouré des présidents de comités. Alors, vous avez des gens qui sont engagés dans des spécialités qui sont les spécialités importantes du fonds et puis qui interagissent entre eux au conseil d'administration. Ça facilite les réunions du conseil d'administration, parce que ces gens-là, qui sont déjà préoccupés de ces points-là avec notre équipe de direction, ça facilite le travail du conseil puis ça donne l'implication de tout le monde, avec une certaine valorisation. Parce que, vous savez, on a une équipe de bénévoles, puis, quand on arrive avec les membres qu'on voit qui nous arrivent au conseil d'administration, les gens nous disent: Est-ce que ça va prendre beaucoup de temps, ce conseil d'administration là? On a des activités ailleurs. On a accepté, mais... et là, tranquillement, les gens sont appelés pour leur expertise à un comité, puis ils donnent du temps, puis ils en donnent de plus en plus. Je ne dis pas qu'ailleurs ça n'existe pas, mais le modèle de gouvernance avec l'implication de chacun dans ses domaines d'expertise et dans ses intérêts, ça facilite beaucoup le fonctionnement, puis c'est le modèle qui de plus en plus s'implante autant dans les entreprises privées que dans les grandes sociétés d'État, parce qu'il faut que les membres soient... se sentent égaux autour de la table puis que tout le monde soit responsabilisé, mais en tenant compte des expertises de chacun.
Le Président (M. Huot): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci. Autrement dit, plus de comité exécutif, c'est ça?
M. Prémont (Pierre): Bien, c'est un... un comité exécutif, nous, on l'a fait évoluer. On l'a abandonné puis on a réparti ça, les responsabilités d'un comité exécutif, qui prend un peu tout l'ensemble dans divers comités.
Mme Courchesne: Vous avez combien d'employés, M. Prémont?
M. Prémont (Pierre): Nous, je dirais qu'on a un équivalent de temps complet de 35 employés -- parce qu'on partage les services pour les services communs, là, pour l'administration, avec le Fonds société et culture. Alors...
Mme Courchesne: Moi, M. Prémont, si vous me permettez, je veux en... le temps est court, je comprends que vous partagez des services administratifs avec le Fonds de recherche société et culture...
M. Prémont (Pierre): Oui.
Mme Courchesne: ...est-ce que... je veux savoir si ça fait longtemps, mais surtout comment vous y êtes arrivés puis quels sont les bénéfices de ça. Puis je comprends qu'il y a des bénéfices administratifs, sûrement, là, mais essayons de le voir dans une perspective un petit peu plus élargie, là, tu sais: Pourquoi vous l'avez fait? Est-ce que vous l'avez fait strictement pour des raisons économiques? Mais est-ce qu'il y a d'autres bénéfices qui... Est-ce que ça a accru des synergies? Est-ce qu'il y a d'autres bénéfices? Quel est le constat que vous faites?
M. Prémont (Pierre): Bien, écoutez, c'est là, c'est implanté, au fond, depuis longtemps, ce partage-là.
Mme Courchesne: C'est combien, ça, «longtemps»?
M. Prémont (Pierre): Bien, à sa création.
Mme Courchesne: Ah oui!
M. Prémont (Pierre): À la création du FQRNT et du Fonds société et culture.
Mme Courchesne: O.K.
M. Prémont (Pierre): À ce moment-là, les ressources qui étaient au FCAR ont été placées dans un pool de services communs pour desservir les deux fonds. Alors, les avantages que ça donne, bien ça nous permet d'aller... comme vous avez dit tout à l'heure, d'aller chercher l'expertise dans différents domaines et puis de s'assurer que... un moment... au lieu d'avoir un... au lieu d'avoir deux directeurs de gestion financière, bien on a une directrice, qui est ici aujourd'hui, pour la gestion financière. C'est la même chose dans les ressources humaines, c'est la même chose en informatique. Alors, c'est le fonctionnement administratif. Ce regroupement-là, on considère que c'est à la fois économique et que ça nous donne accès à de l'expertise parfois qui est difficile à avoir, un petit organisme seul, tandis que deux ensemble peuvent se permettre davantage.
Mme Courchesne: Et vous gardez votre autonomie.
M. Prémont (Pierre): On garde notre autonomie. On garde notre autonomie puis on garde... on s'assure jalousement que les choses qui doivent demeurer confidentielles à un fonds, c'était dans notre pratique qu'elles demeurent confidentielles, et la personne qui répond aux deux fonds n'a pas du tout à donner d'information sur ce qui existe dans le fonds voisin.
**(11 h 50)**Mme Courchesne: Je vais tendre la même perche que le député de Richelieu a utilisée pour les intervenants précédents. A contrario, vous semblez plus favorables... vous avez... vous semblez avoir moins d'inquiétudes sur le projet de loi, vous semblez plus favorables. Est-ce que c'est parce que vous avez cette expérience de regroupement administratif avec le Fonds de recherche société-culture ou... et -- et -- je rajoute comme question: Vous avez lu la loi, est-ce que donc vous sentez qu'il y a une volonté? Puis, la loi peut être bonifiée, hein, peut être améliorée, on est ici pour ça, mais est-ce que vous êtes d'avis que ces comités sectoriels peuvent préserver justement l'indépendance des décisions prises au niveau des projets de recherche? Est-ce que c'est pour ça que vous... on sent qu'il y a moins de réticence de votre... à moins que je ne me trompe, là, mais qu'il y a moins de réticence? Vous semblez y voir plutôt... Surtout si vous avez déjà des regroupements de faits, je comprends que, pour vous, par exemple, de regrouper ces mêmes services avec la santé, est-ce que c'est un problème? Est-ce que c'est faisable? Est-ce que c'est souhaitable?
M. Prémont (Pierre): Bien, je pense que regrouper ces services administratifs avec la santé, comme il vous a été expliqué tout à l'heure par M. Joanette, ceci peut générer des économies sur une période de temps, et puis aussi...
Mme Courchesne: Est-ce que ça améliore l'efficacité?
M. Prémont (Pierre): Bien, vous savez, quand on est vis-à-vis un inconnu, là, c'est difficile de dire: Ça, ça va améliorer l'efficacité, puis ça, ça ne l'améliorera pas. Nous, on a un modèle, on travaille comme ça, puis on trouve que notre efficacité est bonne, puis je me dis... puis ça fonctionne bien, puis on pense que c'est exportable pour l'ensemble des fonds. Puis on pense qu'on a de l'expertise à l'interne qui est capable de répondre aux besoins qui sont des besoins différents.
Quand vous dites que nous semblons plus favorables, écoutez, là, c'est des choses, à un moment donné, que... il faut vous dire que, comme on vous a indiqué dans notre petit mémoire, au départ nous avons été aussi surpris, mais il reste que le secteur des sciences et génie, un petit peu naturellement, quand on parle d'interdisciplinarité, nous, on a les sciences et génie, on a les mathématiques, on a l'informatique, alors on doit travailler en collaboration avec tout le monde. On est un petit peu au coeur de tout, alors... Puis, quand il y a eu des échanges inter... interfonds, je pense que les gens pourront reconnaître qu'on était peut-être le fonds qui était toujours le plus... pour lequel c'était toujours plus facile...
Mme Courchesne: Plus difficile...
M. Prémont (Pierre): ...de partager. Alors, c'est sûr que cette culture-là chez nous est peut-être... sûrement plus...
Mme Courchesne: Plus développée.
M. Prémont (Pierre): ...omniprésente. Mais là, vous dire que pour nous il n'y a pas d'inconnu puis que... c'est difficile à mesurer...
Mme Courchesne: C'est sûr.
M. Prémont (Pierre): ...puis de vous dire: On va faire tant d'économies, on n'a pas fait des études pour dire: Bien, si on avait les services communs qui sont dans deux fonds, s'ils étaient dans trois fonds, c'est exactement ça qu'on sauverait. On a à un moment donné élaboré un petit peu ça au départ en regardant, en disant: Oui, il pourrait y avoir des économies, et puis on... dans toute cette transition-là, on n'a pas fait exprès pour... lorsqu'on avait des départs, pour faire des recrutements. On a voulu s'assurer qu'on continuait la bonne marche des opérations mais qu'on pourrait faciliter l'intégration quand elle arriverait, parce qu'on pensait que c'était notre responsabilité d'agir ainsi.
Le Président (M. Huot): Merci. M. le député de Viau, en 1 min 30, s'il vous plaît.
M. Dubourg: Alors, merci, M. le Président. Bonjour, M. Prémont, bonjour à toute l'équipe. M. Prémont, il y a une question que j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est en ce qui concerne le scientifique en chef.
Étant donné que vous avez déjà une longueur d'avance avec culture et société, là, dans les services en commun, j'aimerais savoir c'est quoi, les difficultés, vous pensez, que le scientifique en chef, là, dans son rôle, qu'il va rencontrer, advenant le cas que ce projet de loi là atteigne... enfin, soit réalisé, soit mis en place.
M. Prémont (Pierre): Écoutez, actuellement le modèle, on est... avec société-culture, on est... il y a deux présidents qui sont responsables chacun de leurs activités propres. Alors, vous dire qu'on a une longueur d'avance, on a des services communs administratifs, mais on a tous des programmes distincts, puis on n'a pas nécessairement une longueur d'avance, à dire: Bien, ça va être... un scientifique en chef doit avoir tel profil.
Puis vous savez que, quand on est président d'un organisme qu'on trouve performant -- vous voyez ce que je dis, vous voyez mon propos -- bien, envisager d'autres façons de faire, au départ, bien on est un peu surpris. Mais il faut avoir une ouverture d'esprit, puis, à ce moment-là, si on a vraiment une volonté de bien préserver les acquis qui existent dans les programmes, dans les façons de faire, bien ça se gère, puis, à un moment donné, bien celui qui sera le scientifique en chef... J'entendais...
Le Président (M. Huot): Merci...
M. Prémont (Pierre): Oui.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Prémont. La parole est maintenant au député de Richelieu.
M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. D'abord saluer M. Prémont et toute l'équipe qui l'accompagne. S'il se dégage une... un axe majeur dans votre mémoire, c'est -- et ne le prenez pas mal -- c'est une certaine autosatisfaction; vous êtes satisfaits de...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Simard (Richelieu): Hein, disons les choses comme celle-la... et comme ça. Le conseil fonctionne bien, vous en faites une certaine démonstration. Ça fait 10 ans que le FCAR a été démantelé et organisé de la façon dont vous fonctionnez. Vous avez, au niveau de la gestion administrative, une entente qui est issue du FCAR, puisque les mêmes personnes... enfin... et celles qui leur ont succédé ont continué de s'occuper de la gestion. Et vous avez des secteurs spécialisés, vous avez des programmes... notamment, dans votre cas, beaucoup de programmes qui s'adressent à des étudiants postdoctoraux, à des jeunes chercheurs. Vous avez beaucoup... C'est un secteur que vous avez beaucoup développé.
Ce qu'on essaie de comprendre dans votre mémoire, c'est... La ministre a utilisé l'expression «plus-value» tout à l'heure. Quelle est l'amélioration par rapport à ce bilan très positif que vous faites? Quelle est l'amélioration qu'amènera le fait de transférer ces responsabilités à un conseil d'administration central?
M. Prémont (Pierre): Bon. Écoutez, quand vous parlez de nos programmes, oui, on est très fiers de nos programmes, on est très fiers de nos façons de faire. Vous avez parlé des jeunes chercheurs, de l'insertion dans l'entreprise -- on n'a pas élaboré, dans le temps qu'on avait, sur tout ça -- beaucoup de regroupements stratégiques, favoriser le fait que les gens de disciplines différentes se regroupent, travaillent ensemble, des chercheurs qui dans le passé pouvaient travailler un peu plus en silo, les mettre en commun, leur faire voir les avantages avec nos programmes, et ça a donné de bons résultats. Puis on voit dans les... par exemple, quand il y a des prix sur des scientifiques, bien il y en a un très grand nombre qui ont passé dans l'ensemble de nos programmes.
À présent, nous, on était concentrés sur notre domaine puis on n'a pas souhaité... ce ne serait pas correct de dire qu'on a souhaité un regroupement, puis on a dit: Aïe! il faudrait... Par contre, quand on voit le jugement de quelqu'un qui est à l'extérieur, qui a une objectivité ou qui a une subjectivité différente de la nôtre, bien on peut comprendre qu'on est toujours... il y a toujours des possibilités d'améliorer, puis, à un moment donné, comme il a été dit précédemment, ça dépend beaucoup des individus qui sont en place, puis on est dans une période où on a à s'assurer qu'on gère avec des économies...
Puis, comme il a été dit, il n'y a pas de petites économies. Alors, vous dire qu'on a fait des études exhaustives pour dire: Ça, ça va être de la valeur ajoutée, on travaillait pour faire des choses ensemble avec les autres fonds, on n'avait pas toujours les résultats qu'on voulait, mais, dans des domaines particuliers, bien les gens vont continuer, puis, s'il y a une orientation plus forte qui est donnée dans ce sens-là pour l'interdisciplinarité, ça peut favoriser. Je me dis: C'est toujours important de partir d'où on est, puis ceux qui arrivent s'arrangent pour aller plus loin.
Puis, nous, notre mémoire n'était pas pour critiquer le projet de loi ni dans un sens ni dans l'autre, mais pour vous présenter les acquis de notre fonds puis dire que ceux qui suivront, on souhaite qu'ils prennent connaissance comme il faut de ce qui nous est apparu important, comme conseil d'administration ensemble, dans notre organisation, pour la suite des choses.
**(12 heures)**M. Simard (Richelieu): M. le Président. Je veux bien vous faire comprendre, M. Prémont, qu'on n'est pas dans un domaine, disons, de dogmes, de réalités tranchées où tout est bon d'un côté et tout est mal de l'autre. On est dans de l'évaluation du plus ou moins bon. On est dans des secteurs vraiment où il faut regarder les choses avec beaucoup d'attention en nous assurant... en tentant d'améliorer les choses, mais surtout en nous assurant de ne pas perdre les acquis. C'est une tendance québécoise malheureuse, que plusieurs ont pu observer, que souvent nous avons tendance à jeter le bébé avec l'eau du bain et, quand les choses vont bien, de recommencer éternellement presque à zéro. Donc, je suis toujours, moi, un petit peu attentif à la continuité.
Vous nous faites un bilan positif notamment parce que vos comités qui fonctionnent pour déterminer les subventions et les bourses fonctionnent bien. Là, dans votre vision du nouveau système, est-ce que vous souhaitez que ces choix, ces décisions quant aux programmes que vous gérez actuellement soient maintenus dans un comité sectoriel qui soit le vôtre ou transposés dans l'organisme central où se trouveraient à égalité les gens de sciences de la nature et du domaine de la santé?
M. Prémont (Pierre): Écoutez, le mode précis de fonctionnement, là, ce n'est pas vraiment à nous de déterminer ça, parce qu'on était dans un cadre bien précis. Par contre, ce que je comprends puis ce que j'ai compris puis que nos membres du conseil d'administration ont compris, c'est qu'on voulait préserver les programmes, on voulait préserver les acquis. Alors, c'est sûr qu'à l'intérieur d'un nouveau fonds ça va prendre l'expertise dans chacun des secteurs, et puis que les gens qui ont de l'expertise dans un secteur prennent les décisions dans ce secteur-là, puis qu'ils soient suffisamment entourés de gens qui connaissent le domaine pour leur permettre de prendre les bonnes décisions puis de bien avancer. Mais, le modèle précis, je pense qu'on a voulu répondre à ça avec les conseils sectoriels, puis il restera à voir comment ça s'opérationnalise. Puis ce que je comprends, c'est qu'à un moment donné les gens qui vont être en place pour faire avancer le modèle, bien, devront avoir aussi une certaine latitude pour que ça s'adapte bien au contexte.
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Je vous remercie. Bonjour, M. Prémont, de même que les gens qui vous accompagnent. J'ai écouté et j'ai lu aussi ce que vous avez écrit, et permettez-moi de relever d'abord une chose. Vous dites, assez tôt dans votre texte, que les membres du conseil d'administration ont d'abord été surpris par l'annonce du regroupement, et vous dites ensuite: «Toutefois, comprenant les intentions du gouvernement, nous avons rapidement saisi la nécessité de favoriser une bonne transition...» Vous ne dites pas: Nous avons saisi la nécessité de ces fusions, mais vous dites, de façon réaliste: Si fusion il doit y avoir, nous avons donc conclu qu'il fallait s'adapter rapidement.
Je voudrais faire une remarque -- je la fais maintenant, mais en fait elle s'adresse à nous tous. Nous sommes en train d'étudier un projet de loi, et la décision sera celle qui sera la conclusion de ce travail parlementaire et de la décision de la Chambre. Donc, dans mon esprit... Et ce n'est aucunement une critique envers vous, parce que je comprends bien que, de façon réaliste, vous disiez: Si ce projet de loi vient à être exécuté, on devra s'adapter. Mais, au moment où nous en sommes, le fonds unifié n'existe pas encore, il est soumis à la discussion. Et je pense que toutes les personnes qui ont des raisons de questionner cette orientation doivent le faire en toute liberté. C'est ce que nous nous permettons de faire, parce que je ne conclus pas à ce moment-ci que c'est inéluctable. Ça n'est pas inéluctable.
Ce qu'il y a derrière cette orientation gouvernementale, c'est l'idée de faire des économies et c'est l'idée donc de dire: Bon, si on regroupe les forces, probablement que ça fera plus d'économies que s'il y a trois fonds distincts. Vous avez déjà, vous, des comités donc... Vous avez déjà, plutôt, des services administratifs, puis on l'a évoqué, qui sont les mêmes que ceux de société et culture. Mais vous avez aussi... Et c'est là-dessus que j'aimerais peut-être avoir votre opinion, vous, vous avez choisi ce que j'appellerais une déconcentration du pouvoir, c'est-à-dire qu'au lieu d'avoir un comité exécutif vous avez des comités qui, chacun, ont leurs secteurs, ont une expertise et doivent prendre des décisions, et le C.A. finalement les avalise.
Il me semble que le projet de loi va dans un autre sens. Au lieu de dire: Essayons de déconcentrer et de donner à chacun son expertise, le projet de loi va plutôt dans l'idée de concentrer en un seul conseil d'administration. Et on voit bien, même si on a commencé seulement ce matin, que ce n'est pas évident que les cultures de chaque milieu soient respectées, que les compétences de chaque secteur soient également présentes. Alors, j'aimerais savoir si... tout en comprenant votre prudence, je comprends fort bien, mais j'aimerais savoir si vous ne considérez pas, vous aussi, que le projet de loi va dans un sens inverse de ce que vous-mêmes vous pratiquez avec succès depuis ces dernières années.
Le Président (M. Huot): M. Prémont, en 50 secondes.
M. Prémont (Pierre): Bien, écoutez, notre modèle de gouvernance peut s'adapter, puis il peut s'adapter avec aussi des conseils sectoriels. Puis il peut y avoir des choses transversales dans une organisation. Comment ça s'opérationnalise? Comment ça doit être fait? On n'a pas réfléchi à ça. On a regardé, comme tout... avec nos membres du conseil d'administration. On est une société d'État, on prend le mandat qui nous est donné par le gouvernement, on le réalise dans les formes qui nous sont proposées, puis on essaie d'en tirer le meilleur parti possible. Et c'est comme ça qu'on a regardé, puis c'est comme ça qu'on a regardé aussi le mémoire qu'on vous a déposé.
Le Président (M. Huot): Merci. M. le député de Shefford.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Prémont, et bonjour à vous tous. La députée de Taillon vient de dire que ce projet de loi est déposé pour faire des économies. C'est exactement le défi qu'on a aujourd'hui et dans les prochains jours, entreprendre ce projet de loi.
Vous dites, M. Prémont: «Nous sommes une petite société d'État avec un modèle de gouvernance exemplaire qui favorise la participation et l'utilisation du talent de ses membres.» Je vais vous parler de finances un petit peu, parce que j'ai les chiffres devant moi, et, dans un contexte budgétaire extrêmement difficile, où l'augmentation de vos subventions, donc l'argent de l'État, a été de 7 % l'an passé, vous avez presque 54 millions de dollars qui vous a été donné, avec les intérêts, près de 54 millions, une augmentation de 7 %. Et malgré ça vous avez réussi à faire un déficit de 1,3 milliard... de 1,3 million. Ça, c'est ce qui est indiqué en 2010, un déficit de 1,3 million. Vous avez eu des augmentations de frais de fonctionnement, M. Prémont, de 12 % l'an dernier; une rémunération à la hausse de 15 %; formation et perfectionnement, hausse de 71 %; les honoraires, hausse de 17 %; hausse de 18 %, du loyer; la reprographie aussi, hausse de 52 %.
La gouvernance, je suis entièrement d'accord. Mais, dans un contexte budgétaire difficile, ceux qui reçoivent 7 %, dans une entreprise, de revenus additionnels, dans n'importe quelle PME du Québec... Vous comprendrez que, si les revenus sont à la hausse, d'habitude on devrait faire attention et pas nécessairement amener un déficit au fonds que l'on préside. Alors, si je me fie à vos chiffres, que j'ai dans les mains, ici, pour 2010, 2009, vous aviez fait un excédent l'an dernier et, cette année, vous avez fait un déficit avec les argents qui ont été... qui vous ont été donnés, à la hausse.
Alors, ma question est fort simple: Pensez-vous, dans le contexte budgétaire extrêmement difficile que les Québécois ont, que vous auriez pu encore faire mieux, être capables au moins d'égaliser à zéro ce budget qui vous a été donné, qui vous est octroyé comme président?
Le Président (M. Huot): M. Prémont, une minute
M. Prémont (Pierre): Écoutez, quand vous parlez de déficit, là, c'est l'utilisation des excédents pour aller dans les programmes de transfert. Il faut faire attention, là, quand on prend des terminologies dans des documents puis qu'on dit «un déficit», ce n'est pas un déficit vraiment d'opération. C'est tout simplement l'utilisation de fonds qu'il y avait au début, qui sont là pour la recherche, puis qu'on ne peut pas utiliser dans une année puis qu'on utilise dans l'autre. Puis, quand vous prenez des statistiques de frais à une place, de frais à l'autre, moi, je peux vous dire que, pour nos frais d'administration, au cours des deux dernières années, là, ils sont à... Ils se situent, les frais d'administration, d'opération, ils se situent autour de 4,5 millions. Ils sont, d'année en année, autour de ça, et puis... Pardon?
M. Bonnardel: C'est quand même une hausse de...
**(12 h 10)**M. Prémont (Pierre): Non, ce n'est pas une... Si vous prenez 2010-2011, on est 4 530 000, on était, 2009-2010, 4 660 000. Puis il y avait eu une baisse, puis on... et ça s'est stabilisé d'une année à l'autre. Mais il n'y a pas eu des sursauts marqués, ça a été une évolution. Puis, quand on parle des augmentations de main-d'oeuvre, bien, à un moment donné, il y a la question de l'équité d'emploi, ça coûte de l'argent, ça...
Le Président (M. Huot): Merci.
M. Prémont (Pierre): ...la politique d'équité...
Le Président (M. Huot): Merci, monsieur.
M. Prémont (Pierre): On stabilise nos effectifs puis on augmente notre payroll.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Prémont, Mme Busque, Mme Lapointe, M. Gale, M. de Guise, Mme Baron. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission. J'invite maintenant les représentants du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture à prendre place.
Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 11)
(Reprise à 12 h 12)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons maintenant les représentants du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture. Avant de débuter la présentation, je vais avoir besoin du consentement des membres de la commission pour dépasser l'heure prévue. Nous devions terminer à 12 h 45, nous allons défoncer de quelques minutes. Donc, je présume que j'ai le consentement de tous. Consentement. Merci.
Donc, ce sera sans doute M. Babin qui fera la présentation. Je vous demanderais de vous présenter au départ, de présenter les gens qui vous accompagnent. Vous disposez d'une quinzaine de minutes pour faire la présentation de votre mémoire. La parole est à vous.
Fonds québécois de la recherche
sur la société et la culture (FQRSC)
M. Babin (Jacques): Merci, M. le Président. Alors, mon nom est Jacques Babin. Je suis président-directeur général du fonds société et culture. À ma droite, Mme Monique Régimbald-Zeiber, qui est vice-présidente du conseil d'administration du fonds. Elle est aussi vice-doyenne à la recherche et à la création et professeure à l'École des arts visuels et médiatiques de l'Université du Québec à Montréal. À l'extrême droite, Mme Marie Simard, qui est membre du conseil d'administration aussi et qui est professeure associée à l'École de service social de l'Université Laval. Et, à ma gauche, M. Pierre Lefrançois, membre du conseil d'administration également, qui est vice-président à l'enseignement et à la recherche à l'Université du Québec. Alors, voilà.
Alors, si vous le permettez, je vais présenter tout de suite. Alors, ma présentation se fera en trois parties. Je dirai quelques mots d'abord de la reconfiguration des fonds de recherche du Québec en 2001. Dans un deuxième temps, je parlerai de ce qui a été réalisé et de ce qu'est devenu le FQRSC depuis 2001. Et je terminerai par mes remarques directement reliées au projet de loi n° 130. Je parlerai notamment des défis à relever dans le nouveau contexte, des inquiétudes que soulève le projet et de ce qui, d'après nous, constitue des conditions gagnantes pour mettre en oeuvre le changement proposé. Au cours de mon exposé, je vais utiliser à plusieurs reprises un sigle qui peut être rébarbatif au départ, les SSHAL, les SSHAL, pour sciences sociales et humaines, les arts et les lettres, ce qui résume l'essentiel du domaine d'intervention du fonds société et culture. Je dirai aussi «société et culture» plutôt que revenir chaque fois avec l'appellation complète du fonds.
Alors, institué le 21 juin 2001, le FQRSC intègre les activités qu'exerçait auparavant le Conseil québécois de la recherche sociale et une part importante des responsabilités qui étaient dévolues jusqu'alors au Fonds pour la formation des chercheurs et l'aide à la recherche, le fonds FCAR. La création du FQRSC a suscité de grands espoirs. J'aimerais ici rappeler brièvement les objectifs et les fondements de cette réorganisation et dire quelques mots sur la place que s'est taillée le FQRSC depuis cette refonte.
La réorganisation des fonds subventionnaires de 2001 répondait à l'un des objectifs de la Politique québécoise de la science et de l'innovation, soit d'assurer un partage plus équilibré des dossiers et des leaderships afin que le système québécois de la recherche soit plus efficace. Cette nouvelle configuration des fonds de recherche québécois a été conçue de façon à correspondre davantage à celle des fonds de recherche canadiens, et ce, dans le but d'accroître la part des chercheurs et étudiants d'ici dans l'obtention des subventions et des bourses provenant du gouvernement fédéral.
Cette refonte des fonds visait aussi à répondre à une nouvelle vision de la recherche, à savoir que la compréhension de la réalité passe par divers points de vue qui sont complémentaires, voire intégrés les uns aux autres. Dorénavant, les interventions des fonds sont basées sur des objets de recherche plutôt que sur des disciplines. Autrement dit, ce n'est plus sur la base de la discipline d'appartenance du chercheur qu'une demande est acheminée à l'un des trois fonds, mais bien selon son objet de recherche.
Ce nouveau découpage entend favoriser l'approche thématique et stimuler la multidisciplinarité en recherche. Il veut aussi assurer le plein développement de la recherche à l'intérieur de chacun des grands secteurs que sont ceux des sciences sociales et humaines, ceux des sciences naturelles et génie, et de la santé, tout en évitant le dédoublement de financement d'une même demande de subvention, un motif aussi important dans la réorganisation de 2001.
Où en sommes-nous aujourd'hui? Alors, nul doute, le FQRSC a bien intégré cette vision de la recherche en termes d'objets de recherche plutôt que de disciplines. Aujourd'hui, les créneaux d'excellence développés par les équipes et les regroupements financés par le FQRSC se pratiquent sur une base multidisciplinaire et font écho ou s'insèrent dans des problématiques sociétales d'envergure.
Les trois fonds de recherche ont été actifs dans le soutien apporté à la recherche intersectorielle. À titre d'exemple, je signalerai le soutien accordé par les trois fonds au Réseau stratégique de recherche et d'innovation en sécurité routière, ou encore la participation financière au réseau concernant les aspects éthiques, environnementaux, économiques, légaux et sociaux du développement des nanosciences et des nanotechnologies.
Comme autres initiatives de collaboration intersectorielle, je mentionnerai le développement par le fonds société et culture et le fonds santé de programmes de recherche portant, un, sur la déficience intellectuelle et les troubles envahissants du comportement; deux, sur les facteurs sociaux, culturels et environnementaux pour prévenir l'apparition des problèmes de poids; et, trois, l'évaluation des impacts des politiques publiques sur la santé et le bien-être des populations. De telles collaborations démontrent que la santé est un objet de recherche à la fois multidisciplinaire et intersectoriel et qu'elle n'est pas réductible au domaine biomédical.
Des initiatives semblables ont été mises en place avec le fonds nature et technologies. Il s'agit de quatre regroupements stratégiques dont les travaux portent sur le transport; deux, sur le cycle de vie des produits, des procédés et des services; trois, sur la musique, les médias et les technologies; et enfin, un quatrième, sur le langage, l'esprit et le cerveau.
Toutes ces initiatives sont porteuses d'une vision où la compréhension de l'objet passe par différents points de vue et appelle des expertises de plusieurs disciplines et secteurs de recherche qui sont complémentaires. Ces quelques exemples montrent aussi que la refonte de 2001, en misant sur le plein épanouissement des trois grands secteurs de recherche, a bel et bien atteint ses objectifs en termes de renforcement d'approches multidisciplinaires et aussi de collaborations intersectorielles.
En terme d'effets de levier auprès des organismes fédéraux de financement de la recherche, autre objectif poursuivi par la réforme... la refonte de 2001, le FQRSC contribue à la bonne performance des chercheurs québécois sur la scène fédérale, et ce, grâce à sa programmation diversifiée et complémentaire à celle du Conseil de la recherche en sciences humaines. Sur une base historique, les chercheurs québécois en SSHAL affichent une surperformance dans le cadre des divers programmes canadiens de financement de la recherche. En effet, ils ont obtenu près du tiers des subventions accordées par les organismes subventionnaires fédéraux, une performance de loin supérieure au poids démographique du Québec dans le Canada, à savoir 23 %.
**(12 h 20)** En créant un organisme spécifique aux SSHAL, la refonte de 2001 a voulu assurer un meilleur développement de la recherche dans ce secteur. Aujourd'hui, le FQRSC représente un levier confirmé pour l'avancement de la recherche en SSHAL. Il a permis non seulement de favoriser les synergies et le réseautage entre les chercheurs issus de différents milieux, il a aussi permis de soutenir une plus grande diversité de pratiques et de traditions de recherche et de faire la promotion de la vitalité et du dynamisme de la recherche dans ces domaines d'intervention.
Enfin, j'ai la conviction que la recherche-création ne serait pas ce qu'elle est aujourd'hui sans les efforts du FQRSC. Sous l'impulsion du fonds, la recherche-création s'est taillé une place significative dans la culture universitaire dont le Québec... place dont le Québec, pionnier en la matière, peut s'enorgueillir.
Fort des gains de la refonte de 2001 et de l'héritage du FQRSC, le nouveau fonds de recherche devra, à mon avis, tabler sur trois points majeurs: le premier, miser encore davantage sur les collaborations intersectorielles; deuxièmement, reconnaître pleinement le dynamisme, l'ingéniosité et le rôle des SSHAL dans la création d'interfaces disciplinaires et dans la production d'innovations; et enfin, consolider la structure administrative avec l'intégration du FRSQ dans le partage des services communs.
En ce qui concerne les collaborations intersectorielles, je signalerai d'emblée qu'il s'agit d'une tendance de fond en recherche, qu'il y ait fusion des fonds ou pas. Comme je l'ai évoqué précédemment, les trois fonds y consacrent déjà des énergies en soutenant des regroupements, des centres et des réseaux de chercheurs qui travaillent à l'interface de leurs champs de responsabilité. La plus récente initiative en la matière est la mise sur pied en 2010 d'un groupe de réflexion interfonds pour élargir l'accès des chercheurs aux programmes de l'un et l'autre fonds.
Je suis convaincu qu'il est indispensable aussi de donner une impulsion supplémentaire en matière de collaborations intersectorielles. C'est en effet au croisement des disciplines qu'apparaissent les découvertes les plus fécondes. Et à cet égard les SSHAL interviennent comme une composante clé.
Que l'innovation soit technologique, commerciale, éducative ou sociale, l'originalité de l'apport de la recherche en SSHAL s'y avère déterminante. De la recherche en SSHAL découlent notamment des innovations aux retombées commercialisables, des innovations qui réduisent les coûts économiques et sociaux des phénomènes de société, les approches novatrices permettant une meilleure compréhension et adaptation des innovations technologiques, organisationnelles ou autres. De surcroît, on réalise de plus en plus que les travaux de recherche en SSHAL concourent à éclairer les changements organisationnels, l'adoption de nouvelles pratiques, l'évolution de comportements et les modes de gouvernance en cause dans l'intégration des nouvelles connaissances issues de la recherche, toutes disciplines confondues.
Au moment où les trois fonds de recherche sont en train de s'associer dans une stratégie de médecine personnalisée, il importe de se rappeler que les conditions de succès d'une telle entreprise sont loin d'être uniquement d'ordre médical ou technologique. Au contraire, sa réussite tient aussi et peut-être surtout à notre capacité de transformer les modes d'organisation du travail, les pratiques professionnelles et les habitudes de vie et de poser de façon éclairée les considérations éthiques d'une telle démarche.
Je ne saurais trop insister là-dessus: la qualité de la recherche scientifique et la qualité pour le Québec... et la capacité, pardon, pour le Québec de tirer le meilleur parti de ces retombées sont très souvent liées à une collaboration étroite et entière avec les SSHAL. C'est une condition gagnante, d'après nous.
En toute logique, la fusion des fonds devrait permettre des économies de fonctionnement grâce au partage des services administratifs et des ressources matérielles. Elle devrait également encourager la mise en commun des meilleures pratiques entre les trois fonds de recherche. Je rappellerai ici que depuis sa création, en 2001, le FQRSC partage avec le FQRNT les effectifs dédiés aux services communs qui sont responsables de la gestion des ressources humaines, financières, matérielles, informatiques et informationnelles. La fusion devrait donc normalement permettre, voire exiger l'intégration du FRSQ dans le partage des services administratifs entre les trois fonds, un meilleur arrimage des pratiques de travail et des modèles de gestion des programmes, comme elle devrait permettre la consolidation des activités de communication et de promotion.
J'en viens maintenant aux inquiétudes que suscite le projet de loi n° 130 au sein du conseil d'administration du fonds, dont je suis ici le porte-parole, vous l'aurez compris. La nouvelle gouvernance proposée par le projet de loi n° 130 soulève quatre ordres de questionnement: premièrement, le rôle du conseil d'administration unique et des trois conseils sectoriels; deuxièmement, la place des SSHAL dans une perspective de recherche multidisciplinaire et intersectorielle; troisièmement, l'équilibre des ressources financières; et, quatrièmement, l'impact des changements sur le plan organisationnel.
Premièrement, le conseil d'administration et les conseils sectoriels. Dans la situation actuelle, évidemment chaque fonds a un conseil d'administration et quelques comités statutaires ou ad hoc. Évidemment, le projet de loi n° 130 prévoit, pour sa part, un seul conseil d'administration et trois conseils sectoriels. Les conseils sectoriels ont un mandat... auront un mandat d'orientation de la recherche, mais ils ne seront pas décisionnels, et leurs responsabilités restent encore fort imprécises. C'est le conseil d'administration, composé des membres de conseils sectoriels, évidemment externes, qui prendra ultimement les décisions.
On peut s'interroger sur la capacité d'un conseil d'administration unique à rendre compte adéquatement de la spécificité de la recherche en SSHAL et d'assumer pleinement la vision qui sera vraisemblablement mise de l'avant par le conseil sectoriel en SSHAL, comme le faisait le conseil d'administration du FQRSC avec son propre plan stratégique. Comment portera-t-il les orientations de chacun des secteurs? Quels seront les critères qui présideront à l'établissement des priorités, notamment celles en SSHAL? Comment se fera l'arbitrage entre les secteurs? Le démantèlement du fonds FCAR, en 2001, ne découlait-il pas justement du fait qu'il en embrassait trop large?
Le Président (M. Huot): M. Babin, je ne veux pas vous interrompre, il vous reste une minute.
M. Babin (Jacques): Une minute. Bon. Bien, écoutez, je vais terminer tout de suite, là. L'objectif du fonds de recherche, et je pense que c'est le point central, l'objectif du Fonds Recherche Québec sera de faire mieux que la structure actuelle en termes de gouvernance, d'efficience et d'efficacité. Je pense que le défi majeur du Fonds Recherche sera de mieux positionner le système québécois de recherche et d'innovation dans le monde, de mobiliser les chercheurs dans la réponse aux besoins et problèmes sociétaux et d'améliorer les retombées de nos investissements en recherche. On conviendra que le pari est de taille.
Pour relever ce défi, le Fonds Recherche Québec devra reconnaître pleinement le dynamisme et l'apport indispensable des sciences sociales, humaines, des arts et des lettres et de les placer comme pierre angulaire de l'intersectorialité. Sans la pleine reconnaissance du rôle stratégique des SSHAL... que les SSHAL jouent, pardon, dans une démarche de recherche intersectorielle, celle-ci risque d'avoir nettement moins d'impact au chapitre des retombées, de l'innovation et de la création de richesse.
En somme, si les SSHAL s'avéraient le maillon faible en termes de financement et d'orientations, cette fragilisation rendrait hautement vulnérable l'ensemble du système de recherche et compromettrait la capacité du Québec à innover. Je vous remercie.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mesdames messieurs, merci d'être là. Et soyez rassuré, M. Babin, nous avons bien lu la totalité de votre mémoire. Alors, même si vous... malheureusement vous n'avez pas eu le temps que vous souhaitiez, soyez rassuré, on a bien pris connaissance, là, de... parce que vous avez pris la peine de le faire, on a bien pris connaissance des différents points que vous soulevez.
Il y a deux choses, M. Babin, que je veux voir avec vous, en fait qui se regroupent. D'abord, vous savez -- je constate, là -- vous êtes le troisième fonds... le dirigeant du troisième fonds, et les trois dirigeants ont bien sûr dit que, rassurez-vous, Mme la ministre, de l'intersectoriel, il s'en fait depuis longtemps, puis il s'en fait beaucoup, puis etc. Moi, regarde, je vous crois sur parole, mais sincèrement je peux vous dire que, depuis huit ans que j'exerce des fonctions de ministre, partout à travers le Québec, j'ai souvent eu des chercheurs et des chercheuses qui n'étaient pas tout à fait du même avis que les trois dirigeants.
Bon, vous savez, on en prend, on en laisse, bon, etc. Mais sincèrement je peux vous dire, quand j'étais à l'Éducation, notamment, je me suis souvent, souvent fait dire cela, et souvent, souvent fait dire aussi que les sciences sociales et humaines, et même nature et génie, dans une moindre proportion, avaient le sentiment que -- et je ne parle pas par rapport aux fonds québécois mais par rapport à cette compétition dont on parlait plus tôt -- avaient le sentiment que c'était beaucoup plus difficile d'y accéder, que c'étaient des batailles durement livrées. Et donc...
Et il y a une distinction, on en convient, hein, entre interdisciplinarité et intersectorialité, on s'entend là-dessus. Vous, dans votre cas, vous avez beaucoup de disciplines, mais ce que l'on recherche, c'est véritablement entre secteurs. Alors, je ne sais pas si vous pouvez me dire à peu près ce que représente chez vous un... quel serait le pourcentage du budget qui serait consacré à de l'intersectorialité. Puis ce serait intéressant d'avoir le même pourcentage au niveau de la santé. Première chose.
Deuxième chose, dans votre mémoire, vous dites qu'en 2010 il y a eu une initiative des trois fonds pour créer un groupe de réflexion interfonds pour élargir l'accès des chercheurs aux programmes de l'un ou l'autre des fonds. Donc, si vous avez senti le besoin de créer ce groupe de travail, il devait y avoir une raison. Il y a sûrement... Puis, dans la vie, on peut toujours s'améliorer, on en convient. Mais j'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu pourquoi cette initiative et qu'est-ce que vous recherchez plus concrètement comme conclusion de travail à ce groupe de réflexion.
**(12 h 30)**M. Babin (Jacques): O.K. Alors, M. le Président, si vous permettez, d'abord en réponse à la première question, je vais vous dire d'entrée de jeu que je ne dispose d'aucune mesure qui nous permettrait d'imputer telle ou telle proportion de nos budgets à la recherche intersectorielle. Je ne sais pas si c'est possible de le faire, mais pour l'instant je ne peux pas répondre à ça.
Le deuxième point, pour ce qui est des remarques sur l'intersectoriel et le groupe de travail que nous venons de mettre sur pied cette année, c'est parce que pour la première fois il est venu à mon esprit qu'il y avait des dispositions dans nos règles générales communes qui faisaient en sorte que les... je connaissais la disposition qu'un chercheur ne pouvait pas bénéficier d'une subvention de regroupement stratégique dans deux fonds différents en même temps. Et ça, c'est une règle commune qui a été adoptée à la suite d'une remarque du Vérificateur général lors des comparutions des présidents de fonds en 1999.
Cette fois-ci, par ailleurs, il s'est avéré que la règle en question a eu un effet néfaste. Et ça, mon collègue de la santé peut vous le dire. Il y a des chercheurs de la santé qui voulaient travailler avec chez nous. Et, s'ils venaient travailler chez nous, ils perdaient leur droit de contribuer à l'effectif d'un centre de recherche en santé.
Ceci étant dit, cette interdiction du double financement n'interdit pas aux gens de travailler ensemble. Ils étaient tout à fait libres de travailler ensemble. Mais, en venant chez nous, ils étaient comptés dans les règles de financement qui contribuaient au financement de regroupement stratégique et, de l'autre côté, ils contribuaient à l'existence du centre de recherche en santé.
Alors, écoutez, on n'avait jamais été placés devant cette situation-là. Et après coup j'ai appris que de toute façon il y avait beaucoup de relations entre ces équipes, ces personnes-là. Mais c'est la première fois, à ma connaissance, que ceci a mis en... a compromis le développement d'un centre de recherche universitaire parce que ça lui enlevait un effectif. Et eux, les effectifs, si je comprends bien, ils sont comptés dans la subvention. Chez nous, la subvention n'est pas guidée par le nombre de chercheurs, là. C'est une subvention relativement semblable parce qu'on contribue à l'infrastructure humaine. Puis, écoutez, un coordonnateur, qu'il y ait 28 chercheurs ou 27, c'est à peu près la même chose. Puis l'essentiel de notre contribution, dans les cas des centres... des regroupements stratégiques, il est de cet ordre-là.
Alors, quand on a vu ça et quand on a senti aussi, parce que notre ministre nous dit qu'il y avait un peu de remarques à l'effet qu'il n'y avait pas assez d'intersectoriel, bien, écoutez, on a dit: On va s'asseoir ensemble. Et ça, je dois vous dire que les trois vice-présidents aux programmes travaillent, et on a déjà une proposition sur la table de modification des règles communes. Mais ces règles communes là, ça fait 10 ans qu'elles existent.
Alors, c'est pour ça. Ce n'est pas parce qu'on craignait la commission parlementaire, M. le Président. C'est vraiment parce que le danger, les conséquences néfastes de cette règle-là sont apparus cette année, et on a réagi tout de suite.
Le Président (M. Huot): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Donc, ce que je comprends, c'était vraiment... vous avez créé ce groupe-là vraiment pour un point très, très, très spécifique. Mais, avec ce que vous me dites -- puis je veux m'assurer que je comprends bien -- c'est qu'au fond effectivement, puis ça, je le crois complètement, qu'il y a beaucoup d'interrelations entre chercheurs de différents secteurs. Ce que vous soulevez qui m'apparaît très important, et c'est peut-être là la confusion, parce que je me permets de dire que je ne suis pas dans votre quotidien, mais c'est peut-être là la confusion, il y a peut-être effectivement beaucoup de ces interrelations, mais que dans les faits ça ne s'inscrit pas nécessairement autant qu'on le souhaiterait dans des projets de recherche.
Peut-être que je vais trop loin, là. Vous réagissez. Peut-être que je vais trop loin, mais j'essaie d'éclaircir cette confusion-là, parce que sincèrement, M. Babin, quand j'étais à l'Éducation, et particulièrement dans les sciences sociales et humaines, que ce soit au niveau des chercheurs, professeurs, bien sûr, étudiants, organismes aussi, on déplorait énormément cette réalité-là. Et on avait bien sûr la perception... quand je dis «on», là, j'exclus celle qui parle, mais la perception que le domaine scientifique en général et de la santé en particulier était plus concentré, là aussi, sur des thèmes de recherche extrêmement précis et que cette intersectorialité était différente.
Là, vous soulevez un point important. Vous dites: Peut-être qu'après 10 ans il faut aussi revoir les règles à cet égard-là.
M. Babin (Jacques): Si vous permettez, M. le Président, c'est certain que, si, dans nos règles, on vient d'identifier une conséquence néfaste qui était imputable à cette règle-là, je pense qu'il faut la modifier tout de suite. Et c'est ce qu'on a mis sur pied. Il faut régler le problème.
Pour régler ce problème-là, il ne faut pas, par ailleurs, créer des situations de double financement. Alors, c'est...
Mme Courchesne: ...parce que ça, on ne souhaite pas ça à personne.
M. Babin (Jacques): Bon. C'est ce qui rend la chose compliquée présentement. On dit: S'il y a un partage puis une collaboration de gens qui viennent de chez vous, de gens qui viennent de chez nous, pourquoi on ne se partagerait pas la facture? Bon. Alors, c'est... on en est là présentement, là.
Mme Courchesne: Si les comités sectoriels font les évaluations de demandes comme ça se fait, j'imagine, là, actuellement chez vous, ces évaluations de demandes actuellement retournent au conseil d'administration. Est-ce que c'est ça que je dois comprendre? Il y a quelqu'un qui prend une décision finale à la...
M. Babin (Jacques): Le résultat de l'évaluation des projets est finalement accepté...
Mme Courchesne: Au conseil d'administration.
M. Babin (Jacques): ...par le conseil d'administration. Cependant, si vous permettez, avant de prendre sa décision -- et ça peut vous paraître bizarre -- avant de prendre sa décision, le conseil d'administration est informé de toutes les règles qui ont présidé au choix des candidats.
Mme Courchesne: Ça, je comprends ça.
M. Babin (Jacques): Les comités d'évaluation et le comité des concours qui siège à la fin des comités d'évaluation regardent la liste et disent: Dans les circonstances actuelles, avec les budgets que l'on a, on peut aller jusqu'à ce niveau dans la liste. Et c'est la liste qui est présentée au conseil d'administration pour approbation. Et c'est après avoir approuvé la liste que le conseil d'administration a accès aux listes.
Mme Courchesne: Je comprends.
M. Babin (Jacques): Pour éviter tous les conflits d'intérêts, le conseil d'administration n'intervient aucunement à un niveau qui pourrait influencer l'évaluation des dossiers.
Mme Courchesne: À ce moment-là, M. Babin, dans le modèle qui nous est proposé aujourd'hui, est-ce qu'on ne pourrait pas aussi avoir des comités sectoriels qui fonctionnent exactement comme celui qui fonctionne chez vous, sur l'évaluation de la demande, et qu'au niveau du conseil d'administration nous ayons les mêmes exigences que ce que vous exercez actuellement? Est-ce que vous croyez, dans la mesure... Parce que, moi, dans mon esprit, là, puis je le dis en toute transparence, là, je ne suis pas non plus la ministre responsable, mais, dans mon esprit, ça va de soi qu'il doit y avoir trois comités sectoriels qui soient complètement indépendants, avec des personnes issues de chacun des secteurs de recherche. Donc... Mais est-ce que ce regroupement, on ne pourrait pas quand même conserver cette façon de faire en imposant les mêmes règles que vous vous imposez, vous, membres du conseil d'administration, avec trois comités sectoriels qui auraient... Parce que chaque mémoire souhaiterait... je crois comprendre qu'on souhaiterait que ces comités aient des pouvoirs décisionnels. Est-ce que c'est ça que je dois comprendre? Et, à ce moment-là, comment on articule ça par rapport à un conseil d'administration qui va quand même être légitime et avoir une responsabilité importante? Est-ce que vous voulez dire que le comité sectoriel va prendre toutes les décisions et ça ne sera pas... ça ne retournera pas?
Alors, c'est pour ça que je... Mais je me fie par rapport... parce que tout le monde se pose la question: Est-ce que ces comités-là seront décisionnels? Donc, est-ce que je dois comprendre que vous souhaitez maintenir un peu le modèle actuel en vous... si on vous assure et garantit que les trois comités sectoriels sont vraiment indépendants?
Le Président (M. Huot): En deux minutes, M. Babin.
**(12 h 40)**M. Babin (Jacques): Deux minutes? Écoutez, là, moi, je suis certain que, les comités sectoriels, il est important qu'il y en ait. Et ce qu'on dit: Des comités sectoriels, c'est intéressant. Mais un conseil d'administration, c'est un conseil d'administration. O.K.? Et un conseil d'administration, c'est lui qui a le dernier mot sur tout. Certaines des responsabilités peuvent être déléguées, mais c'est lui qui a le dernier mot.
Et évidemment, moi, ce que le conseil d'administration craint, ce n'est pas que le ministre ou le scientifique en chef aille choisir un projet particulier dans une longue liste. Le problème n'est pas là du tout. Dès qu'on a commencé les conversations sur ce projet de loi là, c'est le principe même du conseil d'administration qu'on perdait, aux sciences sociales, parce qu'on continue de penser que la meilleure façon de... j'allais dire de défendre les intérêts des sciences sociales, mais je vais dire les intérêts du Québec dans ses sciences sociales, c'était d'avoir un conseil d'administration dédié qui prenait les décisions d'orientation et qui contrôlait la mise en oeuvre. Ça reste ça, parce que, vous savez... Puis ce n'est pas une nouveauté que je vais annoncer aujourd'hui. C'est que, quand les sciences sociales et humaines, les arts et les lettres sont placés dans une situation de... je vais dire de concurrence ou de compétition pour les ressources avec les sciences naturelles et génie et la santé... Vous savez ce que je veux dire.
Mme Courchesne: ...
M. Babin (Jacques): Et, quand on regarde ce qui s'est passé au cours des dernières années, la Stratégie québécoise de recherche et innovation, c'est d'excellents documents, c'est d'excellentes stratégies, mais j'ai l'impression qu'on voit plus souvent le mot «commercialisation» dedans qu'«innovation sociale». Alors, la vigilance que le conseil d'administration aujourd'hui vous suggère d'avoir, c'est une condition minimale pour que la refonte présente sinon une amélioration de la situation, du moins le maintien de la condition.
Alors, c'est ça. Alors, le conseil d'administration n'entend pas arriver avec des propositions d'amendement qui vont faire qu'il y aura tel nombre de personnes plutôt que tel autre, qu'il va être décisionnel ou non. La loi dit des choses. Et on a beau dire à l'intérieur que...
Le Président (M. Huot): Merci.
M. Babin (Jacques): ...les conseils sectoriels vont préparer la planification stratégique, pour moi, je ne comprends pas ce que ça veut dire.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Babin. La parole est au député de Richelieu.
M. Simard (Richelieu): Ça tombe bien, M. Babin, on va continuer sur le même sujet. Vous dites à quelque part: «Il est important de mentionner que la constitution d'un fonds dédié exclusivement aux SSHAL, une première au Québec en 2001...» Qui venait à la suite d'une longue consultation, d'une politique scientifique qui a été unanimement approuvée. Je me souviens que l'opposition libérale de l'époque, et je me souviens très bien des personnes qui sont intervenues, était très favorable aux décisions qui ont été prises à l'époque. C'était un constat de société. Eh bien, ça s'est avéré, dites-vous -- et vous l'écrivez en majuscules, en lettres capitales -- une «stratégie gagnante». J'en conclus que les nouvelles stratégies qui nous sont proposées ont toute une côte de crédibilité à monter pour arriver à ce niveau. C'est toujours le même principe. On sait ce que l'on a, mais on ne sait pas trop, trop ce que l'on aura.
J'en arrive, et la ministre a posé des questions dans les secteurs essentiels: Un conseil d'administration unique, avec évidemment des conseils sectoriels qui ne pourraient pas être décisionnels, selon l'esprit du projet de loi actuel, est-ce que cela ne va pas à l'encontre de cette stratégie gagnante? Et là j'introduis un domaine puis je me réfère à une présentation précédente des gens du conseil de la santé, ils en sont conscients aussi: la présence des sciences de la santé dans un conseil unique, soyons honnêtes, là, puisque dans la vie ça fonctionne beaucoup comme ça, hein, selon les sommes qui sont en jeu, cette présence serait déterminante. Peu importent les répartitions exactes, là. Le centre de gravité, l'axe autour duquel les décisions seraient prises serait largement un axe qui dépendrait des sciences de la santé.
L'ancienne ministre de l'Éducation sait très bien ce que c'est quand arrive le temps de répartir les ressources entre la Santé et l'Éducation. Eh bien, j'ai l'impression qu'on se retrouverait probablement petit à petit, sans mauvaise volonté, dans la nature même des choses, parce que l'ampleur des projets entre un chercheur -- et c'est l'historien et le littéraire qui vous parle -- entre le chercheur et sa petite équipe d'étudiants dans un secteur qu'il pense être nécessaire pour l'avenir de la civilisation et une recherche très précise dans un domaine de santé publique ou de santé pharmacologique, les rapports de force risquent d'être généralement dans la même direction, d'aller généralement dans la même direction.
Alors, cette crainte que vous exprimez, les chercheurs de l'ACFAS nous l'ont exprimée dès le départ ce matin. Et je pense que même les gens de santé, qui ont un système qui fonctionne bien, et ils nous l'ont exprimé à leur façon aussi, cette rencontre-là qui forcerait un conseil d'administration unique à prendre les décisions risque bien de faire perdre... -- et je vous le dis sous forme d'affirmation mais en même temps en invitant votre commentaire -- cette stratégie gagnante risquerait peut-être d'être perdue.
Le Président (M. Huot): Oui, allez-y, M. Babin.
M. Babin (Jacques): Bien, écoutez, la question du partage des ressources reste fondamentale. Pour l'instant, le partage des ressources est décidé a priori par... ou sur recommandation du ministre du Développement économique à l'occasion des stratégies. En d'autres termes, l'accroissement des ressources disponibles au fonds est partagé à ce moment-là.
Il est tout à fait légitime qu'un... Écoutez, là je vous parle en... je suis aux frontières du politique et de l'administratif. Il est tout à fait légitime qu'un ministre fasse des choix et qu'il les propose. Ce dont je suis moins certain, c'est quelle va être la reddition de comptes que devra faire un président d'organisme si lui fait des choix d'allocation de ressources aussi déterminants pour l'avenir du Québec.
Alors, s'il y a des redditions de comptes à faire au ministre et que ça s'arrête là, je pense que la dynamique fondamentale du développement du système de recherche au Québec est complètement modifiée. Alors, c'est pour ça qu'on s'abstient de faire des recommandations sur des modalités ou, comme je disais tantôt, sur des... ce que je vais appeler des détails un peu de la loi. Le conseil d'administration unique entraîne les conséquences néfastes que, moi, j'essaie de vous décrire le mieux possible dans les circonstances, dans une situation qui est fort indélicate, là, mais c'est ça, parce que les angoisses et les inquiétudes du conseil d'administration, je les partage complètement. D'après moi, elles ont un fondement certain qui est dans la connaissance de l'expérience passée et dans la structure ou la signification des lois.
M. Simard (Richelieu): Je n'ai pas à rajouter là-dessus, mais revenons maintenant à l'autre aspect, l'autre volet de nos interrogations: les économies potentielles. Vos ressources administratives sont déjà conjointes avec le fonds qui s'occupe de la technologie, et on nous a dit que ça fonctionnait plutôt bien. Vos ressources opèrent à Québec, si je comprends bien.
En quoi l'élargissement, maintenant, à la santé, dont le fonds opère, si mes informations sont bonnes, surtout à Montréal, en quoi il y aurait des économies à faire de gestion commune, avec un fonds qui n'opère pas à Québec?
M. Babin (Jacques): Deux indicateurs: un indicateur, la proportionnalité, et l'autre, les montants absolus. C'est certain que, si on ajoute 80 millions à nos ressources puis on met ça en dessous de la ligne, c'est que le coefficient des dépenses de fonctionnement sur l'ensemble va baisser de façon dramatique. Donc, ça, relativement, ça projette l'image d'une organisation plus efficiente.
Deuxièmement, bien il est certain que jusqu'à maintenant on avait un vice-président à l'administration, mais on pourrait faire l'économie d'un autre vice-président.
En tout cas, il y a des choses comme ça qui peuvent faire en sorte qu'on peut encore économiser davantage. Je pense, par exemple, au développement informatique. On a eu des expériences pas très heureuses ces derniers temps dans les expériences mathématiques, puis je pense que les systèmes de tout le monde doivent être revus. Alors, c'est aussi bien de les faire pour tout le monde. Ça, pour moi, là, il y a des éléments là-dedans qui sont porteurs d'économies. Bon.
Les économies d'échelle, maintenant, quand la loi n° 100 aura fait... aura donné tous ses impacts, bien il n'y aura plus... il y aura déjà des économies qui auront été grugées, là, sans la fusion, parce qu'on doit diminuer de façon significative nos dépenses. Alors, je ne peux pas dire qu'il n'y aura pas d'économies d'échelle, qu'il n'y aura pas d'économies de fonctionnement. Maintenant, c'est toujours cette économie-là qu'il faut soupeser à la lumière ou à l'aune de ce que... des pertes que le changement entraîne, là. Alors, le coût net, je ne suis pas sûr que... Il y a évidemment aussi l'économie de salaires, là, d'émoluments de deux présidents-directeurs généraux, là, hein? Ça, c'est clair. Puis il y a des services qui pourront être réduits. Mais je ne suis pas sûr qu'il y ait d'économies d'échelle majeures. Et, si c'était la seule raison pour faire le changement, je trouve que ce serait un peu risqué.
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taillon.
**(12 h 50)**Mme Malavoy: Je vous remercie. Bonjour, M. Babin. Et je salue les gens qui vous accompagnent.
On en est là. Dans le fond, pourquoi une loi? Bon, prenons ce dont vous venez de parler. Y a-t-il des économies réelles? Ce n'est pas évident. Vous avez dit: On projette l'image d'économies. Mais projeter une image et avoir des économies réelles, ce sont deux choses. Donc, s'il n'y a pas vraiment d'économies.
Ensuite, on dit: Ce projet de loi devrait permettre de renforcer l'intersectorialité. Moi, ce que j'ai compris en lisant votre mémoire, c'est qu'il s'en fait déjà beaucoup. Vous donnez des exemples éloquents. Et vous semblez dire, j'aimerais que vous me le précisiez, mais vous semblez dire que c'est une tendance qui irait en s'accentuant tout naturellement. Autrement dit, on n'a pas besoin d'un projet de loi pour avoir des projets de recherche qui soient de plus en plus intersectoriels, parce que... et là c'est moi qui le dis, mais la réalité nous le commande. Les problèmes sont devenus tellement complexes et d'une telle ampleur, par exemple dans le domaine de la santé, qu'on doit mettre à contribution des gens de toutes provenances disciplinaires.
Donc, est-ce que je comprends bien que la nécessaire intersectorialité se fait déjà de façon concluante et que c'est une tendance qui se poursuivrait et pour laquelle on n'a pas besoin d'un projet de loi? Je commence par ça.
M. Babin (Jacques): Elle se fait. Jamais je n'oserai dire qu'il s'en fait trop. Et c'est peut-être avec raison qu'on nous rappelle qu'on devrait en faire plus. Soyons bien clairs, là. Mais n'oubliez pas qu'il y a eu des changements il n'y a pas si longtemps, il y a quatre, cinq ans, à la loi, où il y avait une instance qui était dans la loi et qui nous obligeait à nous réunir. C'était la conférence des présidents-directeurs généraux, et on a aboli cette table-là. Sachez qu'on a continué à travailler quand même avec cette préoccupation à l'esprit, mais c'était quand même un signal qui était plutôt surprenant.
Bon, ceci étant dit, ce que je vous ai dit qu'on en faisait, là, c'est des indications de ce qui est possible. J'ai identifié dans les règles communes un élément qui rendait la chose, dans certaines circonstances, difficile. On est capables de recevoir des orientations de notre ministre, de notre ministère, dire: Cette année, au lieu de vous donner des subventions additionnelles pour je ne sais pas trop quel projet, cette année, on va mettre l'accent sur l'intersectoriel. C'est... Il y a des mécanismes pour signifier des attentes. Jusqu'à maintenant, le principal mécanisme, c'était la Stratégie québécoise de la recherche et de l'innovation.
Bon, écoutez, tout ça, là, je ne veux pas poursuivre le plaidoyer jusqu'à la mort. Vous savez quel est le point de vue du fonds et quel est le mien aussi. Il y a des moyens de faire des choses qui nous permettraient de préserver ce que j'appelle le respect de la spécificité de ce qu'on fait, pour permettre aux sciences sociales et humaines de jouer tous leur rôle dans l'avenir du Québec. C'est le genre de proposition qu'on met sur la table.
Mme Malavoy: Il reste très peu de temps, mais je voudrais mettre en lumière une chose que vous avez indiquée et qui me semble fondamentale dans ce projet de loi. Est-ce qu'un conseil d'administration unique qui aurait de toute façon à prendre les décisions finales est vraiment approprié pour préserver la mission de la recherche, particulièrement dans le secteur que vous représentez?
Le Président (M. Huot): 15 secondes, M. Babin.
M. Babin (Jacques): Écoutez, là, ça, c'est la capacité d'un organisme comme ça de se donner une planification stratégique qui prend en considération la richesse de chacun des secteurs et qui a une vision intégrée du rôle de la science, de la recherche dans l'avenir de la société. Il est évident que la force des sciences sociales, c'est de jouer un rôle essentiel pour mettre tout ça ensemble. Quand je disais tantôt que nos domaines ont des choses à dire dans toutes les formes d'innovation au Québec...
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. La parole est maintenant au député de Shefford pour trois minutes.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs dames. Le projet de loi qu'on a dans les mains, qui a été déposé à la dernière session, il équivaut à des économies de 4 millions de dollars.
Une voix: ...
M. Bonnardel: Bien, ça, c'est ce qui m'a été donné au 31 mars. Puis ça, je l'ai marqué ici en bleu. On va dire 4 millions. Mettons on va dire 10. On va partir avec ce qui m'a été donné au mois de mars. 4 millions sur 26 organismes, c'est 150 000 $ de compressions de dépenses. Si au début je vous avais dit... Puis, la volonté, je pense qu'elle était commune pour tout le monde, c'est une réduction des dépenses parce que le retour à l'équilibre budgétaire est difficile. Puis là je parle aux autres fonds qui ont passé ce matin. Si, à chacun d'entre vous, on vous avait donné, comme présidents du conseil d'administration, l'objectif de réduire vos dépenses de 150 000 $, on n'en serait pas aujourd'hui à parler d'un projet de loi ou une fusion que vous n'êtes pas nécessairement d'accord, où on parle de craintes, à la page... à votre point n° 4... parce que c'est ça en réalité le défi, là. Le défi qu'on a tous ici, c'est de réduire nos dépenses pour être capable d'en arriver à retrouver l'équilibre budgétaire. Parce que tous les Québécois font cet effort-là aussi, on vous le demande aussi. Je ne passerai pas au travers de vos dépenses, non plus, en trois minutes, mais c'est ça, le défi. Parce que, là, aujourd'hui, on dépose un projet de loi qui a 100 pages ou presque pour 4 millions ou 10 millions, peu importe. Si on le met à 10, là, bien on va mettre 400 000 $ de réduction de dépenses.
Alors, la volonté, je suis sûr que vous l'avez pour aider les Québécois à retrouver ça. Je suis certain que vous l'avez. Puis les autres fonds qui ont passé ce matin, ils l'ont, eux aussi. On a ce défi-là tous ensemble comme collectivité, comme société. Ça fait que ça, là, ça ne sert absolument à rien, si on vous aurait juste dit: Réduisez vos dépenses, ayez un plan précis pour retrouver l'équilibre comme on le fait puis comme on essaie de le démontrer, au gouvernement. Puis on n'en serait pas à se questionner si ça prend des comités sectoriels, si ça prend un comité de... un conseil d'administration fort. C'est aussi simple que ça. Fini.
Le Président (M. Huot): Merci, M. le député de Shefford. Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux, mais avant je remercie M. Babin, Mme Régimbald-Zeiber, Mme Simard, M. Lefrançois. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
Et je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 56)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président (M. Huot): À l'ordre. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je vous rappelle... Je vous demande d'éteindre les sonneries de vos téléphones cellulaires.
Nous poursuivons le mandat, cet après-midi, sur les consultations particulières sur le projet de loi n° 130, Loi abolissant le ministère des Services gouvernementaux et la Société québécoise de récupération et de recyclage et mettant en oeuvre le Plan d'action 2010-2014 du gouvernement pour la réduction et le contrôle des dépenses en abolissant et en restructurant certains organismes et certains fonds.
Nous recevons quatre groupes cet après-midi. Je vous rappelle les temps de parole: 15 minutes au groupe pour faire sa présentation, 30 minutes d'échange avec les différents groupes parlementaires.
Nous débutons avec le Conseil national des cycles supérieurs de la Fédération étudiante universitaire du Québec. Je vais demander... Ce sera M. Viau, sans doute, qui fait la présentation. Je vais demander à M. Viau de se présenter, évidemment, de présenter la personne qui l'accompagne. Vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura échange avec les parlementaires. La parole est à vous.
Conseil national des cycles supérieurs de
la Fédération étudiante universitaire
du Québec (CNCS-FEUQ)
M. Viau (Laurent): Parfait. Merci beaucoup, messieurs dames. Je vais tout d'abord laisser la parole à M. Louis-Philippe Savoie, président de la Fédération étudiante universitaire du Québec, pour faire l'introduction. Ensuite, je présenterai moi-même les positions du CNCS-FEUQ concernant la question de la fusion des fonds de recherche et l'abolition du Conseil de la science et de la technologie. Donc, Louis-Philippe.
M. Savoie (Louis-Philippe): Merci. Donc, désolé un peu pour la confusion. Donc, Louis-Philippe Savoie, président de la Fédération étudiante universitaire du Québec. Donc, un mot d'abord sur la FEUQ. On est 15 associations étudiantes de niveau universitaire réparties sur l'ensemble du territoire québécois, un groupe de plus de 125 000 étudiants dans les différentes associations, autant en région que dans les grands centres, les associations anglophones et francophones. Au sein de la fédération -- c'est là la subtilité qui s'est introduite -- sont regroupées les associations de cycle supérieur au sein du Conseil national des cycles supérieurs, donc d'où le fait qu'il y a deux présidents assis ici, à cette table.
Donc, il y a trois sujets qui ont attiré notre attention. M. Viau va s'occuper de la présentation de nos positions concernant la fusion des trois fonds subventionnaires québécois et l'abolition du Conseil de la science et de la technologie. Pour ma part, je conclurai la présentation avec Conseil permanent de la jeunesse.
Donc, je céderais la parole à M. Viau, président du Conseil national des cycles supérieurs.
M. Viau (Laurent): Donc, concernant la question de la fusion des fonds de recherche, tout d'abord j'aimerais souligner notre étonnement et notre surprise au moment de l'annonce, lors du budget, de la fusion des fonds de recherche. On croit qu'il y a une certaine improvisation qui a été mise de l'avant par rapport à la question de la fusion des fonds. Il y avait un processus qui était en cours par rapport au renouvellement de la Stratégie québécoise de la recherche et de l'innovation pour les années 2010 à 2013. La SQRI n'avait pas été présentée au moment de l'adoption du budget. Et donc nous croyons que l'ensemble des intervenants dans le milieu de la recherche ont été surpris par la fusion des fonds de recherche et par cette annonce-là, incluant probablement les gens du ministère du Développement économique et les dirigeants des trois fonds subventionnaires. C'est d'ailleurs un élément qui n'avait été demandé par personne, par aucun des regroupements lors des consultations qui avaient lieu par rapport au renouvellement de la SQRI.
Par ailleurs, les fonds avaient déjà été fusionnés par le passé. En fait, le FQRNT et le FQRSC, qui étaient regroupés au sein du FCAR, ça a pris un certain temps pour être en mesure de s'ajuster par la suite au fait de défusionner ces deux organismes-là. Les deux organismes fonctionnaient déjà avec des ressources conjointes, notamment au niveau du secrétariat et des locaux. Et donc on va se retrouver encore une fois avec un certain bouleversement dans le milieu de la recherche qui va faire en sorte que les gens ne pourront pas se concentrer pleinement au développement de la recherche, mais plutôt à restructurer l'ensemble de la gouvernance de la recherche.
**(14 h 10)** Par ailleurs, les économies qui sont envisagées sont relativement minimes, on parle d'économies de l'ordre de 1 million de dollars par année, et donc principalement d'économies de bouts de chandelles, alors qu'on sait très bien que ces fonds-là fonctionnent bien, qu'ils ont donné des résultats. Ils permettent de dégager un effet de levier de quatre pour un, c'est-à-dire qu'il existe... pour 200 millions qui sont dépensés dans les fonds de recherche, il y a des investissements supplémentaires de l'ordre de 800 millions qui sont effectués au Québec, que ce soit par l'entremise des conseils subventionnaires fédéraux ou de l'entreprise privée. Donc, c'est un modèle qui fonctionne bien, et donc on voit mal pourquoi est-ce que le gouvernement veut remettre en question cette gouvernance-là de la recherche au Québec.
Cela dit, il y a certains éléments, si le gouvernement décide d'aller de l'avant, qui nous interpellent et donc pour lesquels nous aimerions apporter des modifications, des amendements. Tout d'abord sur la question des principes, il nous apparaît important que soient énoncés clairement dans la loi certains principes fondamentaux, notamment le fait d'assurer un juste équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Ensuite de ça, assurer un juste équilibre entre le financement qui est imparti à chacun des trois grands secteurs de la recherche, et finalement assurer l'autonomie et l'intégrité des chercheurs et de leurs travaux.
Par ailleurs, nous souhaitons aussi qu'une attention particulière soit accordée au soutien à la relève scientifique. D'ailleurs, à ce sujet, nous voulons en profiter pour aborder la question de la représentativité étudiante au sein de l'organisation de la recherche au Québec. Les étudiants supportent... les étudiants-chercheurs supportent près du tiers de la recherche au Québec par leurs travaux. Environ 75 % des étudiants de maîtrise et de doctorat sont des étudiants-chercheurs et donc qui contribuent, par le biais de centres de recherche et par l'appui qu'ils offrent à leurs directeurs, contribuent à l'avancement de la recherche au Québec. Ils vivent au quotidien les répercussions des décisions qui sont prises en matière de recherche et, à cet égard, ont droit à contribuer pleinement à la gouvernance de la recherche.
À l'heure actuelle, des étudiants siègent déjà sur les conseils d'administration du FQRSC et du FQRNT, et il existe un siège d'observateur... un siège étudiant observateur au FRSQ. Cela dit, ces acquis-là nous semblent fragiles, notamment par le fait qu'au FRSQ ce n'est pas un siège d'administrateur plein et entier qui existe présentement, par le fait également que les étudiants ne participaient pas directement au comité consultatif pour le renouvellement de la SQRI, pas plus qu'ils ne font partie du comité pour la nomination du scientifique en chef. Nous souhaitons donc que des sièges étudiants soient garantis par la loi à partir du projet de loi n° 130.
Par ailleurs, concernant la structure de la gouvernance, nous croyons important de faire le point sur certains éléments de la structure qui est proposée. Donc, notamment le fait de centraliser la gouvernance de la recherche entre les mains d'un scientifique en chef nous interroge par rapport à l'attention qui va être portée par rapport à l'ensemble des secteurs de la recherche. Et donc, à ce sujet-là, ce qu'on propose dans ce mémoire-ci, c'est de créer également un poste de vice-président, pour chacun des secteurs de la recherche, qui serait en charge de chacun des comités sectoriels et donc qui permettrait de faire le pont entre le scientifique en chef et chacun des secteurs de la recherche.
Ensuite, par rapport à la nomination du scientifique en chef, il nous apparaîtrait important de clarifier également le processus de nomination, que ce soit par règlement ou par la précision des membres et la nomination des membres au comité de sélection du scientifique en chef. À cet égard, encore une fois, nous souhaiterions qu'il y ait des étudiants qui puissent se prononcer sur cette question-là.
Ensuite, nous sommes préoccupés par la disposition de l'article 70 qui permet au ministre de, et je cite, «donner des directives sur les orientations et les objectifs [...] que le fonds doit poursuivre, notamment en ce qui concerne l'équilibre entre les enveloppes budgétaires allouées aux [différents] secteurs». Ce qui nous préoccupe à ce niveau-là, c'est la question de l'intégrité et de l'indépendance de la recherche par rapport au politique. Donc, à notre avis, ces éléments-là devront être modifiés ou clarifiés.
Enfin, concernant la fusion des fonds de recherche, nous croyons tout de même qu'il puisse exister certains avantages à la fusion. Essentiellement, il peut y avoir un meilleur travail d'interdisciplinarité qui peut être fait, question que des demandes de subvention ne tombent pas entre les craques, entre les différents secteurs de la recherche, et donc qu'il peut y avoir un meilleur arrimage au niveau de l'interdisciplinarité.
Et finalement nous croyons qu'il puisse y avoir des économies, même minimes, qui puissent être engendrées par la fusion des fonds. Ces économies-là devraient être investies directement dans les fonds de recherche afin d'améliorer, de continuer à soutenir davantage encore la recherche, surtout qu'on sait, et le Conseil supérieur de l'éducation l'a dit récemment, qu'il y a des besoins importants au niveau notamment des bourses aux étudiants pour le soutien à la relève scientifique.
Enfin, en ce qui concerne le Conseil de la science et de la technologie, on est surpris qu'il n'y ait aucun élément dans le projet de loi qui parle de l'attribution des fonctions et des mandats du CST et donc de leur dévolution au ministère du Développement économique, comme c'était spécifié dans la SQRI. Dans la SQRI, ce qui était proposé, c'était une structure où on créerait un comité stratégique en science et innovation. Par contre, il n'y a aucun élément qui est spécifié là-dedans et, à notre avis, il est important de préciser quels seront les mandats, les fonctions; s'assurer également que les recommandations et les avis du conseil ou en fait du comité qui pourra être créé et donc hériter des mandats du Conseil de la science et de la technologie... que ces avis et recommandations là soient publics. Ça nous apparaît très important pour, encore une fois, l'intégrité de la recherche au Québec.
Pour conclure sur les questions de fusion de recherche et de l'abolition du CST, nous tenons à dire que nous partageons les craintes d'autres groupes qui ont comparu aujourd'hui, comme l'ACFAS, et qui comparaîtront par la suite, comme l'AELIES et la FQPPU. Nous espérons que ces craintes seront entendues et que des modifications seront apportées en ce sens lors de l'adoption du projet de loi n° 130.
Sur ce, je vais céder la parole à mon collègue sur la question du Conseil permanent de la jeunesse.
M. Savoie (Louis-Philippe): Merci. Donc, si on se permet de faire un peu d'histoire, en 1987, l'Assemblée nationale du Québec adoptait à l'unanimité un projet de loi qui allait devenir la loi créant le Conseil permanent de la jeunesse. À cette époque, il s'agissait d'une structure novatrice et unique qui permettait aux jeunes d'avoir une voix au sein de l'appareil gouvernemental. C'est quelque chose, d'ailleurs, c'est retranscrit dans le mémoire, que le premier ministre du Québec et ministre responsable de la Jeunesse avait souligné, lors du 20e anniversaire du Conseil permanent de la jeunesse, alors qu'il soulignait que, et je cite: «Le CPJ est reconnu à l'échelle internationale et fait l'envie de plusieurs gouvernements.» Ces commentaires, à notre sens, sont toujours d'actualité. Il faut aussi noter qu'il soulignait entre autres que le CPJ, c'était une expertise reconnue mondialement, c'était une possibilité d'offrir aux jeunes tous les outils nécessaires à leur réussite. C'était un organisme gouvernemental par et pour les jeunes.
On pourrait croire que ce serait un organisme qui coûterait extrêmement cher. Pourtant, avec l'abolition du Conseil permanent de la jeunesse, ce qu'on sauve, les économies engendrées seraient seulement de 300 000 $. Ce qu'on perd au change par contre est beaucoup plus important que ça: on perd une voix autonome, une voix forte, une voix par et pour les jeunes au sein de l'appareil gouvernemental québécois, une voix qui est unique, une voix aussi qui s'est penchée sur des sujets aussi divers que le suicide chez les jeunes, l'homophobie, l'emploi atypique et les finances personnelles des jeunes, très récemment. C'est des sujets qui sont des préoccupations du milieu et des jeunes. Un ministère comme le Secrétariat à la jeunesse ne peut en aucun cas remplir ce rôle. C'est le rôle idéal pour un conseil indépendant administré par et pour des jeunes, au risque de me répéter.
À une époque, aussi, et à un moment où plusieurs déplorent beaucoup de choses, un taux de participation chez les jeunes qui est plutôt faible aux élections, à un moment aussi où de nombreuses décisions sont prises qui vont affecter les jeunes, qui vont affecter la relève québécoise, alors que le premier ministre chantait les louanges du Conseil permanent de la jeunesse il y a de cela quelques mois à peine et à un moment aussi où est-ce qu'on est en discussion à savoir est-ce qu'on doit augmenter l'endettement des étudiants universitaires, abolir le CPJ, c'est un signal extrêmement négatif qui est envoyé à la relève québécoise, c'est un signal de plus que le gouvernement lance à la jeunesse et un signal qui est extrêmement négatif.
Nous croyons, en tant que plus grand groupe jeunes au Québec, que le Conseil permanent de la jeunesse, dans ses fonctions et dans son indépendance, doit être préservé. En effet, les jeunes vivent des situations disparates et multiples: ils sont étudiants, ils sont travailleurs, entrepreneurs, syndiqués, jeunes parents, fondateurs de familles, ils sont essentiellement la relève de demain. Pourtant, ce sont des sans-voix. Ils sont peu présents dans les lieux de pouvoir; ils sont peu présents dans les conseils d'administration d'entreprises, dans les conseils d'administration de sociétés publiques, au sein du Conseil des ministres aussi. C'est, entre autres, imputable à leur jeunesse.
Il existe à l'heure actuelle au sein du gouvernement du Québec un organisme par et pour les jeunes qui permet de faire porter la voix des jeunes au Québec. Ce qui est certain, c'est que le Conseil permanent de la jeunesse peut et doit être révisé de temps à autre dans ses fonctions, dans sa composition, dans ses différents fonctionnements. Par contre, d'abolir et de transférer les fonctions du CPJ au Secrétariat à la jeunesse, ça reste la pire des solutions. C'est dire aux jeunes qu'ils passent d'une organisation par et pour les jeunes au sein de l'appareil gouvernemental à zéro. C'est dire aux jeunes essentiellement de se taire, c'est refuser d'écouter les jeunes. Ce n'est pas, je crois, le message qu'il faut envoyer et qu'on souhaite envoyer à la relève québécoise, parce que c'est eux qui vont former le Québec de demain.
Ça conclut notre exposé sur les différents points du projet de loi n° 130. Je veux remercier les parlementaires de l'écoute que vous avez pu nous offrir.
**(14 h 20)**Le Président (M. Huot): Merci. Mme la ministre, la parole est à vous pour 15 minutes.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Bien, merci à vous, messieurs, messieurs les deux présidents, d'être là. Si vous me permettez, comme le temps est rapide, je voudrais tout de suite aborder avec vous, en lien avec les recommandations de votre mémoire, vos propos sur la recherche interdisciplinaire. Je crois comprendre que vous souhaitez bien sûr qu'on puisse encourager cette recherche interdisciplinaire. Moi, j'aimerais ça avoir votre opinion sur la situation actuelle. Puis, vous utilisez le terme «recherche interdisciplinaire», mais, ce matin, on a beaucoup discuté... on en discute davantage, puisqu'on parle de trois fonds distincts, on parle davantage de recherche intersectorielle.
J'aimerais ça avoir votre opinion d'étudiants dans ce que vous vivez dans le monde universitaire ou dans votre perception de l'avenir de cette recherche intersectorielle et de la façon dont les trois fonds actuellement exercent cette recherche-là. Et je vais extensionner dans la même question. Vous nous dites dans une recommandation que vous souhaitez assurer un juste équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. J'aimerais ça vous entendre aussi sur la perception que vous avez de ce qui se fait actuellement au Québec.
M. Viau (Laurent): Peut-être par rapport à la question d'interdisciplinarité, j'ai évoqué tout à l'heure la question de demande de subvention qui tombe entre deux chaises. Ça arrive, ça arrive notamment dans le secteur de la psychologie, par exemple, où les demandes de subvention sont à cheval entre les sciences humaines, entre les sciences de la santé. Ça peut arriver également, par exemple, en ce qui a trait au design, où justement ça peut... les projets de recherche peuvent avoir trait à la fois au domaine de la santé et au domaine de la science et du génie. Et donc il nous apparaît intéressant de pouvoir profiter du fait d'intégrer les trois fonds pour pouvoir favoriser les mesures interdisciplinaires, d'autant plus que de plus en plus les problèmes de la société se complexifient, la science évolue, et de plus en plus, bon, des projets vont se retrouver à l'interface entre deux ou voire trois grands secteurs de la recherche.
En ce qui concerne l'équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée, la gestion présentement de la recherche au Québec permet jusqu'à un certain point d'établir cet équilibre, dans le sens où une bonne partie des subventions, notamment pour les étudiants, est accordée en fonction des projets de recherche et non pas nécessairement en fonction de leur applicabilité directement, que ce soit en milieu industriel ou en milieu institutionnel. Et donc, en ce sens-là, il y a énormément d'efforts qui sont faits en ce qui concerne la recherche fondamentale. Mais on note que, dans les dernières années, de plus en plus la recherche est orientée vers des mesures de soutien pour le développement de partenariats, par exemple, entre les universités et les entreprises, c'est une bonne chose.
Nous, ce qu'on souhaite, c'est qu'il y ait justement un équilibre qui soit appliqué à ce niveau-là. Même chose dans la dernière SQRI, il y a eu un développement des bourses en milieu pratique. Ça permettait notamment justement d'avoir des gens qui, tout en faisant leurs études, peuvent avoir des expériences directement sur le terrain et améliorer par le fait même les possibilités. Contribuer à la recherche en entreprise, ça nous apparaît intéressant, mais il faut être en mesure de ne pas tout mettre les oeufs dans le même panier.
Le Président (M. Huot): M. Savoie, vous voulez compléter?
M. Savoie (Louis-Philippe): Oui. Je compléterai un peu. C'est extrêmement important de préserver le rôle de la recherche fondamentale, surtout dans des contextes de partenariat. Les partenariats effectivement sont importants, mais la recherche fondamentale, comme son nom l'indique, est fondamentale dans le travail scientifique. Elle n'est pas nécessairement directement applicable. Par contre, sans une recherche fondamentale qui est forte, on n'avance pas scientifiquement en tant que société. Et aussi la recherche fondamentale permet de faire avancer la recherche appliquée. Donc, il y a un rôle qui est extrêmement important et qui doit être préservé. Pour ça, ça prend une vision véritablement à long terme de ce qu'on veut faire dans le développement de la recherche universitaire québécoise, ce qui évidemment a soulevé et soulèvera constamment des inquiétudes dans le domaine de la recherche universitaire.
Le Président (M. Huot): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Bien, je vous écoute, là, sur l'interdisciplinarité, vous semblez un peu rejoindre le point de vue quand vous dites que les subventions peuvent tomber entre deux chaises, puis on ne sait pas si ça appartient aux sciences humaines ou si ça appartient à la santé. Vous ne pensez pas donc qu'effectivement le regroupement pourrait faciliter ou en tout cas diminuer et enrayer cette confusion ou cette possibilité et faire en sorte, justement, qu'à travers un regroupement on puisse se donner une vision d'avenir, tant au niveau de l'intersectorialité ou interdisciplinarité qu'au niveau de la recherche fondamentale et appliquée, puisqu'on aura autour d'une même table des représentants de ces secteurs qui sont absolument importants pour le Québec, mais qui, à ce moment-là, feraient en sorte qu'on pourrait s'assurer qu'effectivement il y a une meilleure cohésion dans notre façon d'aborder ou d'évaluer, même, certains projets? Est-ce qu'un regroupement n'est pas souhaitable pour éviter qu'on ne sache pas à qui doit s'adresser la demande en question?
M. Viau (Laurent): À notre avis, ce n'est pas une condition sine qua non à... le regroupement n'est pas une condition sine qua non au fait de permettre une meilleure interdisciplinarité. C'est sûr que ça peut permettre de favoriser ça, et d'ailleurs, dans notre mémoire, ce qu'on dit, c'est qu'à peu près un des seuls avantages qu'on voit concrètement de la fusion des trois fonds, c'est de favoriser l'interdisciplinarité.
Cela dit, il existe présentement un comité des trois dirigeants des fonds. Les gens qui travaillent au sein des trois organisations se parlent. À notre avis, il est déjà possible, avec la structure actuelle, de faire beaucoup plus, beaucoup mieux. Cela dit, ça serait effectivement un des avantages qu'on pourrait voir dans la fusion des organisations.
Mme Courchesne: Merci de le préciser. De la même façon, vous nous dites... actuellement, je pense que vous l'avez dit dans votre présentation, vous êtes déjà observateur dans certains cas, d'autres cas, vous êtes déjà membre, et donc ce que vous nous dites aujourd'hui, comme vous le faites très bien pour d'autres décisions, d'autres lois, vous nous demandez bien sûr de maintenir cette présence-là.
Est-ce que vous sentez parmi vos collègues étudiants qu'il y a un plus grand engouement pour la recherche? Comment c'est perçu? Parce que là aussi on a des indicateurs parfois qui sont contradictoires. Certains vont nous dire que c'est de plus en plus difficile de recruter de jeunes étudiants chercheurs ou qu'il y a moins d'intérêt pour... peu importe, il peut y avoir différentes raisons pour ça. Mais vous, puisque vous parcourez le monde universitaire, d'après vous, quelle est la tendance, ou qu'est-ce qui peut être fait pour améliorer cet intérêt des jeunes pour la recherche? D'ailleurs, vous en parlez dans votre mémoire, vous l'exprimez différemment, mais vous le dites quand même.
**(14 h 30)**M. Viau (Laurent): À notre avis, il existe un ensemble de mesures pour favoriser la relève scientifique, et ça passe notamment par l'amélioration du financement des bourses aux étudiants par les fonds subventionnaires. On estime à environ 28,5 millions le manque à gagner pour être en mesure de financer l'ensemble des dossiers qui sont recommandés mais non financés, faute de moyens, et donc c'est déjà un pas en avant.
Une autre mesure qu'on a mise de l'avant, également, est de favoriser la conciliation études-famille-travail. À ce niveau-là, on recommande notamment de permettre d'inclure les revenus de bourses et d'aide financière au Régime québécois d'assurance parentale. C'est un dossier, d'ailleurs, que, je crois, vous connaissez déjà relativement bien.
Pour ce qui est d'intéresser la relève, nous, on tente de le faire de notre côté. Je crois qu'il existe diverses initiatives. L'ACFAS, notamment, travaille beaucoup là-dessus. Je crois que c'est le rôle de tous et chacun de travailler à améliorer l'intérêt pour le milieu de la recherche.
Pour ce qui est de la participation au milieu... à la gouvernance de la recherche, de recruter des gens pour les sièges étudiants en question, nous, c'est certain, on représente des étudiants de différents milieux. Au Conseil national des cycles supérieurs, on représente des étudiants de maîtrise, de doctorat, de postdoctorat, des étudiants des régions, des étudiants de grands centres, de l'ensemble des disciplines également, et donc on est en mesure d'être en contact directement avec un ensemble d'étudiants qui pourraient être intéressés à ce genre d'implication là.
Il existe différents types d'implication: l'implication étudiante au sein de l'association étudiante est un type d'implication; l'implication au sein des conseils d'administration ou de comités sectoriels de la recherche est un autre type d'implication. Et à notre avis on est capables de rejoindre ces gens... ces gens-là qui sont intéressés par cet autre type d'implication là, chose qui est beaucoup plus difficile de faire peut-être directement à partir des fonds subventionnaires. Ou, si, par exemple, certains professeurs décident de dire: Ah! bien, moi, je connais un étudiant peut-être qui pourrait être intéressé, nous, on pourrait facilement fournir des noms, si on était appelés à vous aider pour fournir... pour combler ces sièges étudiants là.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Huntingdon. Il reste quatre minutes.
M. Billette: Quatre minutes, M. le Président? On va faire ça rapidement. Je veux tomber un petit peu sur le dossier jeunesse. Premièrement, je vous souhaite la bienvenue en commission parlementaire. Je pense, c'est important de vous faire entendre via les commissions sur un projet de loi aussi important qui touche plusieurs sphères d'activité de notre société.
Je veux revenir sur l'abolition du Conseil permanent de la jeunesse. Je pense que vous l'avez abordée dans votre deuxième partie de mémoire. On sait, vous avez retracé l'historique: en 1987, lorsque M. Bourassa avait fondé le Conseil permanent de la jeunesse, où les jeunes maintenant avaient une voix. J'aimerais savoir l'évolution, à ce moment-là, l'intérêt pour les jeunes que vous sentez à travers le Conseil permanent. Parce qu'en 1987 j'étais un des jeunes, donc il y avait peu de tribunes où on pouvait se faire valoir, et j'aimerais connaître l'intérêt, à l'heure actuelle, des jeunes envers la commission.
M. Savoie (Louis-Philippe): Bien, les jeunes se sentent interpellés par leur avenir, d'abord et avant tout, et aussi c'est une catégorie, tel que mentionné plus tôt, qui est extrêmement disparate, donc qu'il est difficile de réunir en un seul endroit. Ce qui est intéressant actuellement avec le CPJ et ce qui risque de disparaître avec le projet de loi n° 130, c'est le fait qu'il existe un organisme gouvernemental qui est géré par et pour les jeunes. Donc, le conseil d'administration est composé exclusivement de jeunes, les personnes qui mènent le Conseil permanent, donc la présidence ou la vice-présidence, doivent avoir comme caractéristique principale d'être des jeunes, et ça se penche sur des sujets qui sont souvent d'actualité et des sujets qui sont extrêmement diversifiés, mais des sujets qui ne seraient probablement pas explorés autrement, étant donné que c'est une tribune qui existe pour des jeunes, pour disposer d'un moyen pour étudier, mettre de l'avant et promouvoir certains enjeux qui ne seraient pas étudiés autrement. Parce que les jeunes, on le voit, les étudiants, entre autres, sont très intéressés souvent par la vie de leur institution, sont souvent impliqués dans leur... au sein de leur association étudiante, au sein du conseil d'administration de leur université et leurs comités de programmes, etc.
Pour faire une analogie, le CPJ est un peu, jusqu'à un certain point, la continuité logique de ce type d'implication là au sein du milieu; simplement que le milieu est plus large, et les lieux d'implication nationaux pour les jeunes sont souvent restreints. Il y a peu de présence jeunes sur les conseils d'administration, il y a peu de présence jeunes aussi à l'Assemblée nationale en tant que telle, au Conseil des ministres. Donc, oui, il existe un intérêt pour qu'il y ait une tribune existante pour les jeunes, au risque de répéter le mot -- je devrais trouver un synonyme bientôt...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Savoie (Louis-Philippe): ... -- mais il existe un intérêt pour les travaux, aussi, qui sont menés par le conseil à l'heure actuelle. Les travaux, entre autres, sur les finances personnelles, qui ont été terminés en 2010, sont somme toute assez intéressants et permettent de mettre en lumière une réalité qui n'aurait pas été mise en lumière autrement.
M. Viau (Laurent): Peut-être, sur la question de l'engouement pour le Conseil permanent de la jeunesse, les activités du Conseil permanent de la jeunesse, il y a généralement une assez grande participation. Également, à chaque fois où on a eu à combler les postes au Conseil permanent de la jeunesse, il y a tout le temps eu un grand nombre de candidatures pour pouvoir combler ces postes-là, que ce soit la présidence ou simplement pour siéger au conseil d'administration. Donc, à notre avis, il existe un intérêt dans différents secteurs pour pouvoir maintenir le Conseil permanent de la jeunesse en vie.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Richelieu, porte-parole de l'opposition officielle en matière de Conseil du trésor, de fonction publique et de services gouvernementaux. La parole est à vous, M. le député de Richelieu.
M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. D'abord remercier nos deux présidents de leur intervention puis d'avoir pris la peine de préparer des mémoires. Je me réserverai juste quelques commentaires et questions au début, je vais demander ensuite à des collègues de prendre le relais.
Vous insistez sur un aspect qu'il est important de rappeler: la recherche au Québec est le fait de chercheurs, elle est le fait aussi beaucoup d'étudiants. On tend à oublier que, dans une subvention de recherche, le chercheur principal s'entoure de collaborateurs, d'autres chercheurs, mais aussi d'étudiants. D'ailleurs, l'un des buts de la recherche et l'une des évaluations que l'on fait d'un dossier, c'est la capacité d'amener des jeunes à participer à cette recherche, les retombées sur les maîtrises, les doctorats, sur la formation postdoctorale. L'implication des jeunes dans la recherche est très, très importante. Donc, vos commentaires sont pertinents, à ce point de vue là.
D'ailleurs, dans le passé, il me souvient que la FEUQ avait déjà présenté un certain nombre de mémoires sur la situation des jeunes chercheurs, rappelant et nous rappelant qu'encore aujourd'hui les chercheurs n'ont pas tous le même statut. Il existe, en dehors des grands professeurs universitaires, et je ne vais pas les dénoncer, ce serait scier la branche sur laquelle j'ai été assis longtemps, mais il existe, à côté, des professionnels de recherche qui sont souvent payés de façon sommaire. Cet automne, d'ailleurs, nous avons amélioré leur sort par un projet de loi sur les régimes de retraite touchant ces chercheurs dans des centres de recherche. Mais il existe aussi des milliers d'étudiants qui ont besoin de faire cette recherche pour acquérir les compétences et les connaissances, qui ont besoin aussi des revenus de cette recherche pour vivre et qui forment souvent, parfois en tout cas, pendant un trop grand nombre d'années, une sorte de sous-prolétariat de la recherche, qui malheureusement est nécessaire pour l'évolution de cette recherche mais qui tient peu compte des besoins de ces jeunes chercheurs. Alors, il va falloir que vous continuiez à vous intéresser au sort de ces chercheurs, en termes de régimes d'assurance, en termes de possibilités de carrière réelles au sortir de cette période, qui est parfois très longue, d'initiation à la recherche comme étudiants.
C'est pour ça que vos remarques, tout à l'heure, sur le fait que constituer un fonds centralisé amènerait peut-être une meilleure interdisciplinarité, vous aviez cité quelques secteurs, je ne crois pas tout à fait que ça donne ce résultat-là. Vous mentionniez, par exemple, les sciences autour de la psychologie qui souvent tombent entre deux. Et en fait ça continuera d'être le cas parce qu'il y aura toujours des secteurs spécialisés, sciences... sciences de la nature, d'autres sciences de la santé... et effectivement, en psychologie, il y a des orientations plus psychologie sociale, d'autres davantage neuropsychiatrie, ou des orientations qui sont beaucoup plus liées à la santé. Ça ne fera pas disparaître ces frontières à l'intérieur même des disciplines, ces approches différentes. En fait, le problème n'est pas tellement l'interdisciplinarité que l'intersectorialité: comment aborder des problématiques de société par plusieurs approches combinées.
Est-ce que vous n'avez pas peur qu'en créant un seul fonds de recherche centralisé les sommes qui pourraient être économisées ne restent pas dans la recherche? Si 200 millions de dollars sont distribués cette année en recherche, est-ce que ce ne serait pas le prétexte de diminuer ce financement plutôt que de s'assurer que les sommes qui pourraient être économisées restent dans la recherche?
**(14 h 40)**M. Viau (Laurent): À cet égard... Bien, premièrement, merci de soulever les questionnements par rapport aux conditions des étudiants-chercheurs, par rapport également à l'insertion professionnelle des jeunes chercheurs. Le CNCS travaille abondamment sur ces questions-là et continue... il l'a fait dans le passé et il continuera à le faire dans le futur.
Pour ce qui est des économies qui seront réalisées puis au fait d'être investies ou non dans le milieu de la recherche, je crois qu'avec la Stratégie québécoise de recherche et d'innovation, la dernière et celle pour 2010-2013, le Québec s'était fixé notamment pour objectif d'atteindre 3 % du PIB dépensé en recherche et innovation. À cet égard, il reste encore du chemin à faire, et donc les moindre miettes qu'on est capables d'aller chercher pour faire un pas supplémentaire en avant, pour nous, c'est sûr que c'est des efforts qui doivent être faits. Et donc, si c'est 1 million de dollars par année qui sont dépensés en bourses supplémentaires, bien, pour nous, ça nous apparaît comme un gain, ça nous apparaît comme des bourses supplémentaires qui pourront être offertes à des gens dont les dossiers, comme je l'ai souligné précédemment, sont recommandés mais dont... mais qui ne sont pas financés, faute de fonds suffisants. Donc, on va être capables de peut-être faire un pas en avant avec les économies qui sont réalisées. Par contre, il faudrait, pour ça, qu'il y ait une garantie à l'effet que ces sommes-là vont être réinvesties directement dans la recherche.
M. Simard (Richelieu): Merci.
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Je vous remercie. J'aurais peut-être une première question un peu rapide. Une des choses dont on nous a entretenus ce matin, c'est l'importance de protéger la mission des trois fonds et les enveloppes. Dans votre mémoire, vous dites, si j'ai bien lu, on voudrait que l'on garantisse les trois fonds, mais vous liez ça à la prochaine politique de la SQRI. Vous n'avez pas l'air d'en faire quelque chose qui devrait être absolu et pas lié à une politique gouvernementale de quelques années. J'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus parce que ça m'a un petit peu étonnée -- si vous voyez à quelle section je fais référence.
M. Viau (Laurent): Bien, en fait, par rapport à ça, nous, ce qu'on souhaitait, c'était notamment, dans la recommandation 1, ajouter un élément qui, dans la mission même du Fonds Recherche Québec, qu'on puisse dire qu'il faut structurer et distribuer équitablement les fonds attribués à la recherche et donc que ça devienne un principe général qui se perpétue dans le temps.
Cela dit, c'est et ça sera toujours, jusqu'à un certain point, la prérogative du gouvernement de décider l'enveloppe qui est allouée à la recherche et de la façon que ce sera distribué. La dernière... la SQRI précédente avait une façon de distribuer l'argent qui était différente de celle dans laquelle on se retrouve actuellement. Nous, c'est sûr qu'on va s'assurer... ou en fait on va faire des pressions pour qu'à chaque fois justement on se retrouve avec un équilibre relativement stable, mais on ne croit pas qu'on puisse perpétuer ad vitam aeternam la répartition des fonds pour que ça reflète exactement la situation de 2011 ou de quelque autre année qu'on trouverait comme année de référence.
Cela dit, un des éléments qui est préoccupant, c'est qu'avec la création du Fonds Recherche Québec le ministre du Développement économique, de l'Innovation et Exportation n'aura à rendre des comptes que sur l'allocation des sommes qui seront versées au Fonds Recherche Québec et non plus sur la répartition qui sera faite dans chacun des fonds. Et donc ça, c'est un des éléments qui nous apparaît problématique à ce niveau-là.
Mme Malavoy: Je...
M. Simard (Richelieu): M. le Président, on a parlé des jeunes tout à l'heure. Je pense que le député de...
Une voix: Terrebonne.
M. Simard (Richelieu): ...Terrebonne représente bien cette nouvelle génération...
Le Président (M. Huot): Simplement...
M. Simard (Richelieu): On va lui laisser la parole, si vous permettez.
Le Président (M. Huot): Oui. Avant de lui laisser la parole, comme le député de Terrebonne n'est pas membre de la commission, j'ai simplement besoin d'un consentement de tout le monde pour céder la parole. Donc, M. le député de Terrebonne, je vous cède la parole pour trois minutes.
M. Traversy: Rapidement, je vais essayer de laisser un peu de temps encore pour la recherche. Mais je voulais poser une question, par rapport au Conseil permanent de la jeunesse, pour faire du pouce sur l'intervention de mon collègue député, tout à l'heure. Donc, vous avez mentionné... vous mentionnez, dans le fond, dans votre mémoire que l'abolition du CPJ est essentiellement une décision politique. On constate que la plupart des employés du CPJ vont être transférés à l'intérieur, là, de l'appareil public. Outre la représentation jeunesse, qui risque effectivement de disparaître, est-ce que vous voyez d'autres éléments, là, qui sont négatifs ou à réfléchir, là, pour la suite des choses?
M. Savoie (Louis-Philippe): Bien, c'est qu'effectivement les employés sont préservés dans le Secrétariat à la jeunesse, mais leur mission va nécessairement changer, ne serait-ce que parce que le patron change. On passe d'un conseil d'administration composé de jeunes, mené par une présidence et une vice-présidence qui sont élues au sein du conseil d'administration, qui doivent obligatoirement aussi, jusqu'à un certain point, refléter la réalité et la composition sociale des Québécois, à essentiellement des employés fonctionnaires au sein d'un ministère; donc, la nature n'est pas la même.
Pour faire une analogie avec un domaine avec lequel nous sommes plus familiers à la fédération, le Conseil supérieur de l'éducation et le ministère de l'Éducation remplissent des fonctions qui sont complètement différentes. Le Conseil supérieur de l'éducation avise le ministère sur un certain nombre de questions, bénéficie d'une indépendance qui lui est propre, est formé de gens du milieu et a une autonomie par rapport aux avis qu'il est capable d'émettre. Le ministère de l'Éducation, quant à lui, met en place des programmes, exécute les lois qui sont mises en place par le législateur et suit les volontés du ministère et du gouvernement québécois. Donc, un conseil indépendant et un ministère, par définition, sont deux choses complètement différentes. On économise peut-être 300 000 $, mais on en perd beaucoup plus que 300 000 $ en abolissant et en transférant les activités du Conseil permanent de la jeunesse.
Le Président (M. Huot): Merci. Il reste une minute à l'opposition officielle. Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Oui. C'est vraiment rapide, mais j'en reviens à l'autre aspect de votre mémoire. Concernant l'abolition du Conseil de la science et de la technologie, vous manifestez des inquiétudes et vous craignez, entre autres choses, que la nouvelle structure réduise la distance entre les avis du conseil et le ministre responsable. J'aimerais, en quelques secondes, donc que vous me précisiez ces inquiétudes que vous avez.
M. Viau (Laurent): Bien, par rapport à ça, ce qu'on dit, c'est qu'il n'y a aucune mention dans le projet de loi à savoir qui est-ce qui va prendre le relais du Conseil de la science et de la technologie. Comme on a dit plus tôt, dans la structure qui est proposée par la Stratégie québécoise de recherche et innovation, on a d'un côté un comité... une commission d'éthique en sciences et technologies et d'un autre côté un comité stratégique en sciences et innovation qui sont créés, puis le comité stratégique en sciences et innovation doit... vont prendre le relais du Conseil de la science et de la technologie. Par contre, il n'existe rien par rapport à ça. La même chose qu'avec le Conseil permanent de la jeunesse, on se retrouve avec un vide en termes d'expertise, en termes d'indépendance face au ministère, afin d'émettre des recommandations.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Viau. Je reconnais maintenant le député de Shefford pour trois minutes.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour, MM. Viau et Savoie. Les tenants et aboutissants de ce projet de loi, vous les savez, c'est des fusions pour 26 organismes et certains fonds, et c'est des économies d'échelle, que la ministre nous a dit, d'à peu près 10 millions de dollars.
Si, votre recommandation 14, je la suis, «que le gouvernement du Québec maintienne le Conseil permanent de la jeunesse», si on prend 10 millions et on divise pour ces 26 organismes, c'est à peu près des économies d'échelle de 380 000 $ par organisme ou fonds.
Si je vous disais demain matin que vous avez un objectif de me réduire de vos dépenses, pour le Conseil permanent de la jeunesse, de 380 000 $ sur une période de trois ans, puis je vous laisse comme vous l'êtes présentement, est-ce que vous le feriez?
M. Savoie (Louis-Philippe): On perd, avec l'abolition du CPJ, beaucoup plus que 300 000 $. On perd une expertise qui est unique, qui est reconnue mondialement, une expertise par et pour les jeunes. Donc, on économise peut-être 300 000 $ en faisant un transfert d'activité, mais ce qu'on va perdre en valeur ajoutée pour le gouvernement du Québec, ce qu'on perd aussi en tant que société québécoise en disposant d'un outil unique qui est contrôlé... un organisme gouvernemental contrôlé par des jeunes et qui dispose de ressources pour éclairer sur des situations qui peuvent être aussi diverses que l'homophobie, les finances personnelles, les...
M. Bonnardel: Je suis entièrement d'accord avec vous. Ma question est: Si vous avez un objectif de réduction de vos dépenses de 350 000 $ sur trois ans -- parce que c'est ça, l'objectif du projet de loi n° 130, là, c'est de réduire les dépenses d'à peu près 10 millions -- ...si vous avez cet objectif-là en main, puis le Conseil permanent de la jeunesse va survivre, est-ce que vous seriez capables de le faire?
C'est juste ça, parce que... Je vous comprends, là. Je suis entièrement d'accord avec ce que vous prônez comme valeurs, et tout ça. Mais, si l'objectif, c'est de réduire les dépenses du gouvernement -- parce que c'est ça, ce projet de loi là -- je vous donne le défi, vous me dites: Vous devez... Vous devez réduire vos dépenses de 350 000 $, et le Conseil permanent de la jeunesse va survivre, est-ce que vous le feriez?
M. Savoie (Louis-Philippe): On croit aussi que c'est un peu une question de... c'est une question de choix de la part du gouvernement en termes de dépenses. 300 000 $, par exemple, en termes d'économie, c'est la moitié de la prime de départ qui a été octroyée à l'ancienne présidente de l'Université Concordia. On pense qu'avec le 300 000 $ qu'on sauve avec le CPJ on aurait pu sauver deux fois plus avec la prime de départ de Mme Woodsworth.
M. Bonnardel: Trois minutes, M. le Président?
Le Président (M. Huot): 50 secondes, M. le député de Shefford.
M. Bonnardel: Rapidement. Vous dites que, pour les trois fonds de recherche, les économies d'échelle sont d'à peu près 1 million de dollars. Mais vous dites, à la recommandation 6, que, si ce projet de loi prenait forme, il faudrait créer trois postes de vice-président sous le scientifique en chef. Ce n'est pas un peu contradictoire, trois vice-présidents qui gagneraient des salaires assez considérables, ça?
**(14 h 50)**M. Viau (Laurent): À notre avis, l'essentiel est de maintenir une gouvernance qui soit acceptable au niveau de la recherche. Par la suite, s'il y a des économies qui peuvent être réalisées, qu'elles le soient, et à notre avis elles devront, à ce moment-là, être investies en bourses supplémentaires pour les étudiants-chercheurs.
Cela dit, juste avec la création de trois conseils, avant on se retrouvait avec trois conseils d'administration, maintenant on se retrouve avec trois conseils plus un conseil d'administration. Jusqu'à un certain point, la structure est déjà alourdie.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Viau, M. Savoie. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
J'invite maintenant les représentants de l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures à prendre place.
Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 14 h 51)
(Reprise à 14 h 52)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux. Nous recevons l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. Je demanderais au porte-parole de l'organisme de s'identifier et de présenter les personnes qui l'accompagnent.
Je vous rappelle que vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Il y aura par la suite une période d'échange de 30 minutes avec les représentants, avec les membres de la commission. Donc, la parole est à vous, pour 15 minutes.
Association des étudiantes et
des étudiants de Laval inscrits aux
études supérieures inc. (AELIES)
M. Mercier (Sylvain): Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, premièrement, permettez-moi de me présenter: Sylvain Mercier, président de l'AELIES, l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. Je suis étudiant à la maîtrise et chercheur à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l'Université Laval.
Je vous présente les personnes qui m'accompagnent: M. Vincent Jourdain, à ma droite, vice-président aux droits étudiants de l'AELIES. Il étudie à la Faculté de pharmacie de l'Université Laval comme doctorant et chercheur; il est également membre de la Commission de la recherche de l'Université Laval. Et, à ma gauche, M. Étienne Chabot, attaché à l'exécutif de l'AELIES et bachelier en sciences politiques.
C'est avec un grand intérêt que l'AELIES participe aujourd'hui aux consultations particulières sur le projet de loi n° 130. Plus spécifiquement, notre intervention portera sur la fusion des trois fonds de recherche. Cette question nous interpelle particulièrement puisqu'elle touche directement les étudiants que nous représentons. En effet, notre association représente l'ensemble des étudiants inscrits aux deuxième et troisième cycles de l'Université Laval, soit plus de 11 000 membres. La mission qu'elle poursuit, depuis plus de 40 ans, est la défense des droits et des intérêts de ses membres ainsi que la promotion de leurs idées.
Notre présentation est divisée en deux parties. La première partie présentera notre position concernant la création du Fonds de Recherche Québec qui intègre les activités du Fonds de la recherche en santé du Québec, du Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies et du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture. Ensuite, nous présenterons différentes recommandations sur le projet de loi, notamment à l'égard des articles qui traitent de la composition du conseil d'administration et des trois conseils sectoriels.
C'est avec étonnement que nous avons appris, lors du dépôt du budget 2010-2011, la fusion ou la possible fusion des trois fonds de recherche. Dès cette annonce, des inquiétudes sont soulevées de la part du milieu universitaire et de la recherche quant aux impacts potentiels de ce regroupement. À l'instar d'autres groupes, telles la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, la CREPUQ, et l'Association francophone pour le savoir, l'ACFAS, l'AELIES accueille avec réserve cette nouvelle orientation gouvernementale.
À cet effet, nous considérons qu'il n'est pas approprié d'entreprendre cette vaste réorganisation de la structure actuelle du financement de la recherche au Québec, incluant les trois fonds, qui a largement fait ses preuves depuis 2001.
Quatre éléments justifient notre position: les économies engendrées par cette fusion sont minimes; une bonne coordination existe déjà entre les trois fonds; le principe d'équité entre les disciplines est remis en question par cette fusion; et l'arrimage pourrait être plus difficile avec les organismes subventionnaires fédéraux.
Afin de justifier cette restructuration, le gouvernement évoque une réduction des coûts et une plus grande efficacité dans la gestion des programmes. En ce sens, on peut comprendre que, pour lui, ce regroupement permettrait de réaliser des économies d'échelle et une mise en commun des ressources afin de réduire les coûts de fonctionnement et améliorer la gestion des programmes.
Lors du dépôt du projet de loi n° 130, la présidente du Conseil du trésor affirmait que, pour les 32 organismes et fonds qui seraient abolis ou fusionnés, des économies annuelles de près de 10 millions de dollars seraient générées de façon récurrente. On a entendu aussi 4 000, donc on n'est plus certains. Ces économies proviendraient de l'abolition de postes de direction des organismes visés et du replacement du personnel excédentaire et de la réduction des charges générales et administratives.
Sans vouloir minimiser l'importance pour le gouvernement d'atteindre l'équilibre budgétaire et de procéder à une rationalisation des dépenses, nous croyons que l'analyse doit aller plus loin. L'obsession de vouloir à tout prix réaliser ces économies, aussi minimes soient-elles, n'entraînera-t-elle pas des conséquences importantes pour les chercheurs et les étudiants-chercheurs? Chambarder une structure qui fonctionne bien ne révèle-t-il pas de la part du gouvernement une vision réductrice du rôle et de l'apport de ces organismes pour le développement de la recherche et de leur contribution à la société?
Il s'agit pour nous d'une décision précipitée et injustifiée qui met de l'avant une vision à court terme. L'analyse du gouvernement ignore une série de données importantes. Par exemple, les membres des conseils d'administration, à l'exception des trois présidents-directeurs généraux, sont bénévoles. De plus, la grande partie des budgets des fonds est octroyée en bourses ou pour des projets de recherche. À moins d'effectuer des coupures au sein de ces programmes -- ce que nous ne souhaitons aucunement -- la marge de manoeuvre en vue de réaliser des économies est quand même limitée. Aussi, les salaires constituent près de 60 % du total des dépenses de fonctionnement. Nous pouvons donc douter des économies réelles reliées à cette fusion, puisque le projet de loi prévoit que les membres du personnel des trois fonds deviendront tous des employés du nouveau Fonds Recherche Québec. Bref, remettre en question une structure qui fonctionne bien et qui fait consensus auprès de plusieurs acteurs en vue de réaliser de si faibles économies nous apparaît injustifié.
Deuxièmement, tel que spécifié par le gouvernement, ce regroupement vise à assurer une plus grande coordination entre les trois fonds en harmonisant leurs actions et leurs programmes. Si le gouvernement fait mention de cet argument, on peut comprendre qu'il juge que des problèmes de coordination existent. Il est vrai que, lors des discussions entourant la création des trois fonds, en 2001, on en avait fait état. Le choix retenu par le gouvernement à l'époque, soit de créer trois fonds au lieu d'une structure unique, avait soulevé certaines craintes, notamment dans le cas où des projets de recherche nécessiteraient la participation de chercheurs issus de plusieurs disciplines. Or, il semble que les difficultés appréhendées ne se soient pas réellement concrétisées. À cet effet, afin d'assurer une concertation et une complémentarité entre les différents fonds, le gouvernement avait prévu la mise en place de différentes mesures, notamment la création du Comité permanent des présidents-directeurs généraux des fonds de recherche du Québec.
Plusieurs actions communes sont réalisées entre les trois fonds, des rencontres ponctuelles sont organisées, et des collaborations financières sont prévues dans le cas où les projets couvrent plusieurs volets de recherche et englobent plus d'une discipline. Ce fut notamment le cas en 2008-2009, où les trois fonds se sont concertés afin de mener des actions conjointes sur la question des changements climatiques, où les enjeux regroupent des aspects sociaux, économiques, environnementaux et de santé publique. Bref, nous sommes d'avis qu'une concertation entre les différents secteurs d'activité est nécessaire afin d'assurer une plus grande efficacité de la conception des programmes. Or, nous croyons que le regroupement des trois fonds de recherche ne constitue pas une solution à envisager et que des mesures peuvent être mises en place ou améliorées dans la structure actuelle.
**(15 heures)** Troisièmement, cette fusion nous apparaît risquée pour l'équilibre et l'équité entre les disciplines. En les regroupant au sein d'une grande structure dont les délimitations entre les champs de recherche semblent être plus floues, nous craignons que certaines d'entre elles soient pénalisées. Il est donc peu souhaitable de remettre en question ces structures dont les secteurs sont actuellement différenciés en fonction de leurs besoins spécifiques. À l'instar d'autres acteurs, nous croyons qu'il est important de préserver les particularités propres aux trois secteurs d'activité en conservant des conseils d'administration distincts. Nous sommes conscients que la mise en place des trois conseils sectoriels pourrait atténuer les risques de disparité entre les disciplines. Toutefois, un danger subsiste quant à la répartition équitable des sommes. En transformant les conseils d'administration des trois fonds, qui disposaient de véritables pouvoirs, par des conseils sectoriels dont les contours sont à l'heure actuelle plutôt imprécis, nous craignons qu'émergent au fil des années des iniquités qui pourraient défavoriser certaines disciplines, notamment les sciences humaines et sociales et les lettres.
Nous craignons également que l'arrimage devienne plus difficile avec les trois fonds fédéraux: le Conseil de recherches en sciences humaines, et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et l'Institut de recherche en santé du Canada. Lorsque les trois fonds du Québec ont été mis en place, en 2001, on évoquait l'importance d'harmoniser les secteurs d'activité avec ceux des organismes subventionnaires fédéraux afin de favoriser la concertation dans le financement de la recherche. À notre avis, la fusion des trois fonds serait susceptible de fragiliser ces liens soutenus.
La première partie de notre présentation nous a donc permis de soulever des interrogations quant aux motivations sous-jacentes à cette décision gouvernementale. Bien qu'il soit difficile pour nous de mesurer tous les impacts de cette fusion, nous avons néanmoins relevé plusieurs questionnements, notamment à l'égard des économies qui seront réalisées par ce regroupement, de la répartition des montants entre les trois secteurs d'activité et de l'harmonisation du futur ou du nouveau fonds avec les organismes subventionnaires fédéraux. Alors que la structure actuelle de financement fait consensus auprès des différents acteurs du milieu de la recherche, nous considérons que sa remise en question n'est aucunement justifiée. Cette deuxième partie nous permettra d'émettre différentes recommandations sur le projet de loi, notamment à l'égard des articles qui traitent de la composition du conseil d'administration et des trois secteurs... des conseils sectoriels.
Alors, les deux articles de ce projet de loi qui nous interpellent davantage, ce sont les articles 59, qui précise la composition du conseil d'administration du Fonds Recherche Québec, et l'article 77, qui traite des conseils sectoriels. Puisque le projet de loi entraîne la création d'une nouvelle structure pour les fonds de recherche au Québec, incluant la mise en place d'un conseil d'administration et des trois conseils sectoriels, l'AELIES considère que le gouvernement du Québec devrait inclure dans les changements structurels proposés une amélioration de la représentativité au sein du nouveau conseil d'administration. Ainsi, nous considérons que la présence étudiante aurait des impacts positifs sur les orientations privilégiées, puisque celle-ci refléterait davantage la réalité et les besoins des étudiants-chercheurs.
Plusieurs éléments justifient l'attribution de sièges à des étudiants de deuxième ou de troisième cycle. D'abord, les fonds alloués proviennent d'investissements publics. Actuellement, près de 200 millions sont alloués pour les trois fonds. Les organismes subventionnaires doivent donc être imputables à l'égard des populations et des étudiants qui bénéficient directement ou indirectement de ces fonds. De plus, personne ne peut contester que la composition du conseil d'administration et des conseils sectoriels doit refléter le plus possible différents critères tels que les domaines de recherche, les universités et les centres de recherche. Il est donc souhaitable que les étudiants y soient également représentés afin que leur réalité soit prise en compte. Finalement, il semble normal que les étudiants prennent part aux décisions et orientations susceptibles d'affecter leur formation, d'où l'importance d'accorder des sièges d'administrateur avec droit de vote.
En fonction de ces arguments, l'AELIES souhaite soumettre des recommandations, tel qu'il apparaît dans notre mémoire: que le gouvernement réserve un siège étudiant sur chacun des secteurs... des conseils sectoriels et, une autre, que le gouvernement du Québec nomme trois étudiants sur le conseil d'administration du Fonds Recherche Québec. Ces étudiants devront provenir évidemment des conseils sectoriels. Nous croyons donc qu'une occasion privilégiée s'offre au gouvernement d'assurer une présence étudiante sur le Fonds Recherche Québec et ainsi favoriser la représentation des étudiants, des intérêts des étudiants-chercheurs.
Dans la première partie de notre présentation, nous avons mentionné que la mise en place des conseils sectoriels pourrait atténuer certains impacts négatifs de la fusion de ces trois fonds. Or, il nous semble que le mandat, les pouvoirs dévolus et le processus de nomination des membres de ces conseils sont imprécis. C'est pourquoi nous sommes d'avis que le gouvernement devra mettre en place des balises qui permettront de clarifier le rôle et les mandats des conseils sectoriels afin que ceux-ci puissent réaliser pleinement leur mission.
De plus, le gouvernement devra s'assurer que le travail réalisé depuis plusieurs années afin de favoriser la concertation avec les organismes subventionnaires fédéraux soit le moins possible affecté par le regroupement. En ce sens, nous croyons que le mandat des conseils sectoriels devra être précisé afin d'assurer et de faciliter cette coordination.
Nous considérons également que le processus de nomination des membres des conseils sectoriels qui siégeront sur le conseil d'administration mériterait d'être précisé. En effet, le projet de loi stipule que le conseil d'administration est formé de 15 membres nommés par le gouvernement, dont au moins neuf membres choisis parmi les membres des conseils sectoriels de recherche. Toutefois, la représentation des trois secteurs n'est pas garantie par cet article et n'assure pas une répartition équitable des postes réservés au conseil d'administration. À cet effet, il nous apparaît important que le gouvernement mette en place des mécanismes visant à éviter des situations susceptibles de défavoriser certaines disciplines.
Le Président (M. Huot): M. Mercier, je vous informe qu'il vous reste 30 secondes pour conclure.
M. Mercier (Sylvain): En conclusion -- j'étais rendu là -- lors de cette présentation, nous avons exposé la position de l'AELIES concernant la fusion des trois fonds de recherche du Québec. En fonction des faits invoqués précédemment et de l'absence d'arguments clairs du gouvernement quant à la pertinence d'enclencher cette restructuration, nous croyons fermement que ce regroupement est inutile et injustifié. Le projet de loi, tel qu'il est présenté, comporte plusieurs éléments qui mériteraient d'être précisés, notamment le rôle des conseils sectoriels. Les enjeux entourant le financement de la recherche au Québec sont trop importants pour laisser planer autant d'incertitudes.
Le Président (M. Huot): 15 minutes juste. Mme la ministre, la parole est à vous pour une période de 15 minutes.
Mme Courchesne: Merci. Alors, je vais saluer trois chercheurs extrêmement rigoureux, puisque vous avez respecté le temps de façon remarquable. D'abord, je veux vous saluer et vous remercier d'être présents parmi nous. Et, si vous me permettez, j'aimerais revenir, parce que j'ai lu votre mémoire, ça revient souvent dans votre mémoire. Je veux quand même redire que ce projet de loi, bien sûr, va susciter des économies, mais j'ai eu l'occasion en remarques préliminaires de l'affirmer: Il serait totalement faux de prétendre que ce projet de loi vise exclusivement des économies. Le député de Richelieu, ce matin, à juste titre a dit: Il est important, dans une organisation gouvernementale ou dans un gouvernement, de revoir et d'évaluer et de revoir à la fois nos organismes et de s'assurer que nous obtenons vraiment non seulement l'efficacité, mais que nous faisons évoluer les missions des organismes en fonction d'une évolution de société qui est tout à fait normale, particulièrement dans des temps où tout bouge extrêmement vite. Et ce matin on a eu l'occasion de dire que le monde de la recherche québécois est plus que jamais face à des défis qui sont internationaux, face à des enjeux et à des compétitions à travers le monde.
Donc, je comprends vos réticences. Je comprends bien les points d'interrogation que vous suscitez... ou les interrogations, plutôt, pas les points, mais les interrogations que vous suscitez. Mais pouvez-vous nous dire pourquoi -- je vais prendre l'argument a contrario -- pourquoi un regroupement ne permettrait-il pas justement de renforcer le positionnement de la recherche québécoise face à ses... aux défis d'aujourd'hui, d'une part, d'autant plus que vous êtes extrêmement craintifs, dans votre mémoire, face aux organismes subventionnaires? Alors, pourquoi ce regroupement ne pourrait-il pas plutôt devenir une force plutôt qu'un affaiblissement?
Et vous parlez de la nécessité d'un financement équitable. Est-ce qu'actuellement vous pouvez nous dire que... Et vous le dites: Notre financement est équitable. Et franchement, aujourd'hui, je ne m'attendais pas à ce que personne nous dise que le financement n'était pas équitable. J'ai assez d'expérience, surtout en commission parlementaire, pour savoir que j'étais convaincue que tout le monde viendrait nous dire que le financement est équitable. Mais, quand ils sont dans nos bureaux, par contre, de ministre, peu importe le ministre lié à ce dossier-là, woups! ce n'est pas équitable. Vous savez, c'est un peu le propre de la réalité, là. Et ça, on sait ça.
Moi, je voudrais savoir de vous qui êtes de jeunes chercheurs: Est-ce qu'actuellement, avec trois fonds, nous avons vraiment un financement équitable? Et est-ce qu'un regroupement ne pourrait-il pas renforcer notre capacité d'aller chercher notre juste part en termes de financement, puisqu'il n'y a pas que le Québec qui finance? Et là je ne parle pas que du gouvernement fédéral, je parle de fonds qui sont disponibles à travers le monde.
**(15 h 10)**M. Mercier (Sylvain): Je pense que c'est une question... En fait, la question est de savoir: ce qui est important, c'est les sommes qui sont allouées. Qui va les administrer devient un peu secondaire pour les personnes qui font de la recherche. L'important, c'est d'en avoir suffisamment. C'est sûr que, s'il y avait plus d'argent alloué aux fonds de recherche, ceux actuels ou le futur fonds, on serait... tout le monde serait content et heureux. C'est vrai qu'il en manque, mais on fait avec ce qu'on a. Ça, c'est une chose.
Pour la question des trois instances qui décident actuellement d'où va l'argent, il me semble que ces trois instances-là, séparées comme elles sont, ont des compétences qui sont, à mon sens, mieux réparties qu'un seul conseil qui jugerait de ces trois champs, finalement, là, où est-ce que c'est plus difficile et délicat. Il vaut mieux trois instances séparées qui se parlent et qui s'entendent sur comment répartir certaines finances, qui se regroupent, qu'un seul qui manque de compétence ou de chercheurs pour dire, bon, bien, comment allouer les sommes qu'ils ont.
L'autre chose aussi, c'est qu'on a peur qu'il y ait un déplacement ou qu'il y ait des vases communicants, ou une facilité de vases communicants, au détriment de certains domaines. Et ça, c'est vraiment là que le bât blesse.
Mme Courchesne: En fait, vous soulevez des inquiétudes au niveau des modalités. Ce que vous dites, moi, ce que je crois comprendre, c'est que vous ne seriez pas en désaccord, par exemple, avec des regroupements de services comme il existe déjà. Vous ne seriez pas en désaccord avec une administration commune dans la mesure où il y aurait des règles de gouvernance très précises et très strictes sur justement la possibilité d'avoir les vases communicants dont vous parlez.
Et vous nous dites aussi: S'il y avait des comités sectoriels qui étaient très bien définis, encore là, avec des règles très strictes, il pourrait y avoir certains regroupements, par ailleurs. Est-ce que c'est un peu ça que... Parce que, là, il y a un petit peu de contradiction. Vous dites... Bien, dans le fond, vous faites beaucoup état de la gouvernance puis vous dites: Bien, nous, ce qui est important, ce n'est pas qui les gouverne, c'est d'avoir l'argent pour faire de la recherche. Puis ça, je comprends ça très, très bien, là. J'essaie de juste voir un peu plus clair dans votre position.
M. Mercier (Sylvain): Non, bien en fait c'est que... Bien, on les a entendus ce matin, les trois fonds. Ce que j'en ai compris, c'est qu'ils semblent dire ou affirmer que leur gouvernance va bien. Alors, pourquoi chambouler tout ça alors que ça semble aller bien?
D'autre part, certains partagent déjà des ressources ensemble. Alors, bon, bien pourquoi, dans le fond, chambouler une structure qui fonctionne ou qui arrive même déjà à s'entendre sur des frais de fonctionnement? Je pense qu'il y aurait... ça aurait été plus facile de leur demander chacun, bien, de faire des choses en commun ou dire: Bien, réduisez d'un 5 %, d'un 10 % votre fonctionnement, plutôt que d'essayer de changer la structure, ce qui va amener inévitablement des frais aussi. Quand on change une structure, on le sait, ça peut amener des fois même plus de frais après que ce qu'on avait pensé avant.
D'autre part, on n'a aucune garantie hormis la bonne volonté du ministre que les trois fonds dans le projet de loi actuel vont demeurer des vases non communicants ou peu communicants. On peut comprendre, dans certains projets spécifiques, qu'il faut avoir le concours de tout le monde, mais dans l'ensemble on ne veut pas que les vases soient tellement communicants qu'il y ait un secteur qui soit délaissé.
Mme Courchesne: Je comprends. Qu'est-ce qui vous fait dire qu'actuellement le financement est équitable?
M. Mercier (Sylvain): Bien, en fait, il nous semble équitable. C'est-à-dire que, quand on regarde les sommes allouées dans les trois fonds, bon, c'est sûr que le fonds de la santé en a quand même un peu plus, et on comprend pourquoi. C'est quand même une certaine priorité du Québec. Mais, pour les autres fonds, ce n'est quand même pas... l'écart n'est quand même pas très, très, très important. Donc, c'est quand même assez pondéré.
Mme Courchesne: Donc, un financement équitable. Puis là je ne mets pas en cause que la santé en ait plus ou moins, là. Ce n'est pas ça, mon point. Mais, la façon de mesurer un financement équitable, comment on mesure un financement équitable? Est-ce que c'est par le nombre de chercheurs, le nombre de professeurs, le nombre d'étudiants? Là, vous nous dites: La santé, c'est plus important, parce qu'au Québec on sait que c'est plus important. Mais est-ce que c'est à cause des retombées économiques? Comment on fait pour établir ce que doit être un financement équitable pour le Québec? Et, encore là, est-ce qu'un regroupement ne permettrait pas d'avoir une vision plus forte de ce que l'on souhaite justement comme développement de la recherche au Québec?
M. Mercier (Sylvain): Bien, quand on parle de ça, moi, je pense que ce que, nous, on voudrait, c'est que les enveloppes restent les mêmes, c'est-à-dire qu'on ne prenne pas de l'argent des sciences humaines et sociales et lettres et qu'on les envoie en santé ou... On voudrait que ce qui est déjà là au moins soit conservé. Et... Oui? Tu voulais...
M. Jourdain (Vincent): Peut-être pour renchérir. Peut-être pour renchérir, en fait, c'est qu'à quoi ça servirait d'avoir un seul conseil d'administration qui engloberait toutes les enveloppes budgétaires, bien, l'enveloppe budgétaire de 200 millions, tandis que, là, ils ont chacun leur budget et ils s'occupent avec leur budget? En fait, ils ont, mettons, une enveloppe de 80... de 50 millions, de 90 millions, bien ils s'arrangent avec ça. Tandis que, là, un seul conseil d'administration pour les trois fonds, il pourrait y en avoir qui... entre guillemets, qui pourraient tirer plus fort sur la couverte puis avoir un petit peu plus que 50 millions, comparativement à avant où est-ce qu'ils avaient 50 millions. Ils restent avec leur budget normalement, avec leur conseil d'administration présentement.
Mme Courchesne: En fait, ce que vous nous dites, c'est que vous faites plus confiance au ministre qui va choisir la répartition que, par exemple, des recommandations d'un seul conseil d'administration ou des gens de la santé. Tu sais, j'essaie juste de comprendre. Tant mieux, je veux dire, j'accepte ça, là. Puis je ne fais pas ça avec méchanceté, là. J'essaie vraiment de comprendre cette logique-là, d'autant plus que... Je suis peut-être un petit peu plus loin dans le quotidien, mais je vous avoue, là, il est 15 h 15, et dans ma tête ça s'active rapidement par rapport à tout ce qu'on a entendu ce matin. Et ça ne m'apparaît pas si clair que ça, ce qui serait souhaitable ou quels seraient les...
Actuellement, c'est le ministère, c'est le ministre qui, bon, fait un peu cette répartition-là en écoutant, parce que, bon, les gens parlent, consultent le fonds, etc. Mais, moi, j'essaie de me mettre du point de vue... de votre point de vue, où il me semble que, si j'étais chercheur actuellement au Québec, et jeune chercheur de surcroît, j'aurais vraiment envie qu'on se dote d'une organisation qui renforce la vision, les objectifs, les moyens, la capacité d'être constamment meilleur, mais la capacité, sur la scène internationale, de compétitionner avec tous les autres, mais surtout dans notre capacité d'aller chercher le maximum de subventions, d'une part. Et, d'autre part, j'aimerais ça aussi, si j'étais dans le monde de la recherche et le monde universitaire, m'assurer que, pour les cinq, 10 et même 15 prochaines années... Le Québec, même si on a une stratégie, après ça il y a une application à faire, mais pour moi ça doit se faire en étroite relation. Ce n'est pas que le ministre d'un côté puis les fonds de l'autre. Je pense qu'on est rendu à un moment où il faut qu'il y ait véritablement beaucoup de liens et que, dans ce sens-là, un regroupement pourrait... ne pourrait-il pas renforcer cette capacité-là de projeter dans l'avenir et de savoir véritablement quelle est la part de l'un, quelle est la part de l'autre, mais dans un contexte de vision intégrée, justement?
**(15 h 20)**M. Mercier (Sylvain): Bien, oui, c'est qu'il faut comprendre que c'est trois domaines différents qui se sont donné des structures ou des fonctionnements différents, avec des réalités de recherche, aussi, qui sont différentes. On peut bien vouloir toutes les mettre en commun, il va rester quand même des spécificités à certains types de recherche, à certains créneaux. Les sciences humaines, ce n'est pas les sciences de la santé, ce n'est pas le génie, ce n'est pas... Alors, il faut vraiment être conscient de ça. Alors que chacun des conseils actuels est un peu spécialisé, disons, sur la chose, on va donner ça à un conseil d'administration qui ne sera pas spécialisé et avec des conseils sectoriels qui n'ont somme toute pas de pouvoir parce que c'est un grand conseil d'administration qui va finalement décider tout ça. Alors, à ce titre-là, les conseils sectoriels ne sont que consultatifs. Et, bon, il n'y a pas vraiment... ils ne sont pas... Ils vont être spécialisés, mais leur eau au moulin sera...
Mme Courchesne: Est-ce que, selon vous, on devrait augmenter la recherche intersectorielle? Je ne parle pas d'interdisciplinaire, je parle bien d'intersectoriel. Là, vous nous dites: Oui, vous savez, actuellement c'est... Tu sais, je comprends que tout ça, c'est très spécifique des uns aux autres. Mais est-ce qu'en 2011 une société ne doit pas aussi tendre, je dirais, davantage, sans que ce ne soit que ça, mais tendre davantage vers des recherches intersectorielles, puisque le monde dans lequel on vit est de plus en plus complexe?
M. Mercier (Sylvain): Moi, je le crois, mais pas au détriment...
Mme Courchesne: ...d'accord avec ça? Oui?
M. Mercier (Sylvain): Bien oui. Je veux dire, ce qui se fait déjà est aussi garant de l'avenir. Mais je pense que, d'un côté, il faut encourager ça mais, de l'autre, pas au détriment de certaines recherches, tu sais, qui sont fondamentales et qui sont dans des créneaux, disons, bien définis qui ne seront pas intersectoriels. Et c'est un peu là le danger, de détourner tout. De prendre une partie pour ça, c'est très bien. Mais de tout détourner et de tout mettre finalement ces fonds-là qui sont relatifs, à notre sens ça ne fonctionne pas.
Le Président (M. Huot): M. le député de Huntingdon, vous aviez demandé la parole. En une minute.
M. Billette: ...rapidement. Je veux revenir un petit peu sur l'interdisciplinaire. Merci beaucoup, et bienvenue ici.
Vous avez parlé beaucoup de concertation et de concertation ponctuelle. Je crois, lorsqu'il arrivait des dossiers, entre autres, sur les changements climatiques, je pense que vous avez une concertation. On parle de concertation ponctuelle. Vous ne croyez pas qu'en ayant l'organisme ça va pouvoir faire avancer beaucoup plus de dossiers intersectoriels, en ayant un genre de concertation permanente au sein de l'organisme? Au lieu de travailler en silo, on travaillerait de façon horizontale et on s'assurerait d'avoir un point de vue qui est vraiment concerté, comme les organismes fonctionnent, régionaux, les CLD, les CRE, les différents paliers gouvernementaux, maintenant.
Le Président (M. Huot): Très rapidement, M. Mercier... ou M. Jourdain.
M. Jourdain (Vincent): Enfin, présentement, bien, même je parle pour surtout au FRSQ, parce que c'est un petit peu plus qu'est-ce qui m'intéresse, il existe différents regroupements, par exemple le regroupement de la douleur, où est-ce qu'il y a différents secteurs de la santé, ou au niveau psychosocial, qui sont vraiment tous engendrés dans un programme qui est fait par le FRSQ. C'est déjà encouragé, ça existe déjà. S'il y a d'autre chose, on est pour qu'il y en ait plus, des programmes intersectoriels ou interdisciplinaires.
Le Président (M. Huot): Ça va compléter l'échange avec la partie gouvernementale. Je reconnais maintenant le député de Richelieu. La parole est à vous pour 12 minutes.
M. Simard (Richelieu): Oui. M. le Président, si vous permettez, là, on va poursuivre tout de suite ce débat-là qui est amorcé, qui est intéressant. D'abord vous dire que votre mémoire est très rigoureux et très sérieux et qu'il m'a beaucoup intéressé.
Pour cet aspect sur lequel la partie gouvernementale semble insister beaucoup, sur une meilleure intégration intersectorielle, une meilleure ouverture au travail, est-ce que vous ne croyez pas que l'objectif pourrait facilement être atteint en faisant renaître la table de concertation des présidents des différents secteurs et des différents organismes sectoriels tel que ça existait il y a quelques années? Est-ce que cet objectif, qui est valable, qui est souhaitable, ne pourrait pas être atteint de cette façon-là?
M. Mercier (Sylvain): Bien oui, pourquoi faire les choses compliqué en remaniant tout, alors qu'une chose aussi simple fonctionnait très bien? Ça... Oui.
M. Simard (Richelieu): Vous faites... Dans votre mémoire, vous êtes les seuls jusqu'à maintenant à faire une allusion à -- il en a peut-être été question un peu ce matin, mais c'est très clair chez vous, mais ça aurait besoin de plus d'explications -- la question de l'ajustement des fonds sectoriels avec leur contrepartie fédérale. On ne va pas ouvrir le débat aujourd'hui, là. C'est historiquement, en tout cas dans le régime fédéral actuel, réglé depuis un certain nombre d'années. L'essentiel du financement de la recherche nous vient des fonds fédéraux. Et vous nous dites: Le fonctionnement actuel est un petit peu un miroir du fonctionnement au niveau fédéral, nous a très bien servis. D'ailleurs, les fonds sont venus nous donner des statistiques très claires ce matin. C'est par... On est privilégiés, au Québec, dans l'obtention des subventions et des fonds de recherche, pas pour nos beaux yeux, hein, parce que les programmes appréciés, jugés par des pairs sont meilleurs, et année après année on va chercher une proportion. Donc, le système actuel fonctionne et fonctionne, disons-le, très bien.
Quel est l'effet, quel est le rôle ou l'importance de l'ajustement entre les comités sectoriels... les fonds sectoriels actuels et leur contrepartie à Ottawa dans l'obtention de ces résultats-là?
Le Président (M. Huot): M. Chabot.
M. Chabot (Étienne): Oui, merci, M. le Président. Bien, en fait, quand les trois fonds ont été créés, en 2001, ça avait été un des objectifs donc d'arrimer les trois fonds avec les organismes subventionnaires fédéraux. Donc, c'est plus facile, quand c'est des secteurs déjà différenciés, de négocier puis de développer des projets de partenariat de recherche conjoints. Donc, nous, on pense que c'est important. Puis ça avait été évoqué par le milieu de la recherche et de l'enseignement en 2001. Ça avait été un des objectifs, là, qui avaient été mis de l'avant.
M. Simard (Richelieu): En fait, M. le Président, dans ce secteur-là, la réalité, c'est que les administrateurs de ces fonds et notamment les responsables, les permanents de ces fonds se parlent tous les jours. L'argent que le gouvernement du Québec investit dans ces secteurs, c'est souvent de l'argent levier pour aider un groupe à se constituer. Il y a beaucoup de «seed money» là-dedans. Il y a beaucoup d'investissement dans des projets naissants, de façon à se mériter ensuite un financement au niveau fédéral plus important dans les conseils de recherche.
L'argument qui avait été utilisé en 2001, c'était de mieux préparer nos organismes de recherche, nos chercheurs à aller chercher le maximum de subventions au niveau fédéral. Alors, c'est... il faut bien se rendre compte qu'on court un risque actuellement de perdre cette correspondance et diminuer ainsi notre aptitude à aller chercher des fonds au niveau fédéral. Actuellement, ça marche très bien. Il y a lieu de croire que ça pourrait moins bien fonctionner en ayant deux systèmes fondamentalement différents. Est-ce que, M. Chabot, vous êtes d'accord avec ça?
M. Chabot (Étienne): Oui, on est parfaitement d'accord. Et ce qu'on dit aussi, c'est que, les conseils sectoriels, on se questionne sur le rôle qui va être... qui pourrait être joué justement dans le lien avec les organismes subventionnaires fédéraux. Donc, des conseils sectoriels, qui sont... bien, ce qu'on comprend, qui sont plus consultatifs, donc quel est le rôle fondamental qu'ils vont jouer pour aller chercher du financement de la recherche?
M. Simard (Richelieu): Au niveau des conseils d'administration, de la décision, si j'ai bien compris celui qui a présenté, le président qui a présenté tout à l'heure le mémoire, vous craignez... Et nous l'avons dit ce matin et ce n'est pas aller... ce n'est pas une critique à l'égard du milieu de la santé, mais, les fonds en santé étant tellement importants, leur importance quotidienne dans la vie devant les besoins de la société, étant tellement urgents, si j'ai bien compris, ce que vous craignez, c'est un déplacement dans le financement, d'autant plus que ces conseils-là ne sont pas directement imputables.
Mme la ministre, tout à l'heure, soulignait le fait qu'actuellement, dans le fond, c'est le ministre, ce sont les ministres, le Conseil des ministres et les ministres qui attribuent l'importance relative. Et ce n'est pas une si mauvaise chose que ça, hein? Ça s'appelle de l'imputabilité. Ça s'appelle de... Si les sciences humaines ne sont pas suffisamment financées, on sait à qui s'en prendre, à un ministre qui n'a pas su défendre ses dossiers et non pas à un conseil de recherche unique où les réseaux d'influence à l'interne ont fait en sorte que le glissement s'est fait vers plus de financement dans un secteur et nécessairement moins dans l'autre, les fameux vases communicants dont vous nous parliez tout à l'heure. Je pense que, là, vous avez un argument, à mon avis, très fort.
M. Jourdain (Vincent): En fait...
Le Président (M. Huot): Oui, M. Jourdain.
M. Jourdain (Vincent): En fait -- merci pour la parole -- pour donner un peu un exemple au niveau des subventions, si... mettons qu'au lieu de dire: On a une enveloppe, mettons, de 50 millions, on a une enveloppe de 200 millions qui est partagée entre trois différents secteurs, une personne qui aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup de projets pourrait faire des demandes incroyables puis justement faire en sorte que ça... il y a un peu de plus de subventions qui s'en vont vers certains secteurs plus privilégiés, tandis qu'il y a d'autres qui vont en faire un peu moins, ou quoi que ce soit. Donc, il y aurait un vraiment un déplacement. C'est ça aussi vraiment qui nous fait très peur, en fait. On ne veut pas ça.
Le Président (M. Huot): Oui, Mme la députée de Taillon.
**(15 h 30)**Mme Malavoy: Merci. Je comprends, en résumé, que, du début à la fin de votre mémoire, vous questionnez l'utilité de ces fusions. Vous avancez un certain nombre de points critiques. Mais j'aimerais que vous développiez un peu votre dernière phrase. Je la mets en relation avec la présentation de l'ACFAS, ce matin, qui parlait de l'importance de la recherche pour l'avenir du Québec. Vous dites ceci: «Les enjeux entourant le financement de la recherche au Québec sont trop importants pour laisser planer autant d'incertitudes.» Je trouve que c'est une phrase lourde, mais dans le bon sens du terme, c'est-à-dire une conclusion forte. C'est un peu comme si vous disiez: Il y a trop d'imprécisions, et les enjeux sont trop importants pour qu'on laisse place comme ça à des incertitudes ou tout au moins à des choses qui ne seraient pas... dont le succès ne serait pas garanti. Mais j'aimerais que vous me répondiez à cette question de préciser cela et en pensant au développement de la recherche au Québec, ce que vous en comprenez. Vous êtes vous-mêmes des chercheurs, vous êtes dédiés à ce travail-là, qu'est-ce que vous en pensez, de cet enjeu pour le Québec?
M. Mercier (Sylvain): Plusieurs choses. Tout d'abord, les imprécisions générales du projet de loi actuel concernant les fonds de recherche et surtout des conseils sectoriels. Ce qu'on voit, il y a des imprécisions, il y a des flous, ce n'est pas bien ficelé. On a l'impression qu'on aurait eu avantage à faire des consultations et des études avant de présenter un tel projet de loi, d'évaluer d'abord les trois organismes, ça va bien, qu'est-ce qu'ils pourraient faire ensemble, qu'est-ce qu'ils pourraient améliorer dans l'assainissement de leurs propres finances de fonctionnement. Après ça, si ça ne marche pas ou s'il y a des problèmes, on crée un projet de loi et on voit une solution. Là, on a l'impression qu'on a mis la charrue avant les boeufs, et ça, c'est une chose qu'on ne comprend pas.
D'autre part, pour la recherche, c'est vrai que la recherche est trop importante au Québec pour lancer des projets de loi aussi flous que ça, avec, comme je l'ai mentionné, des vases communicants. Même, tu sais, même les personnes sur le C.A., il n'y a rien qui nous garantit qu'ils vont être pris dans des champs sectoriels assez équitables pour assurer qu'au moins, sur le conseil, ils vont pouvoir défendre chacun des projets qui vont... que ça n'ira pas tout à un secteur ou un autre. Alors, il n'y a pas de garantie. Pour nous, c'est comme... c'est comme si, le projet de loi, on essayait de nous vendre une maison sans garantie; il n'y a personne au Québec qui veut acheter une maison comme ça.
Le Président (M. Huot): Oui, il vous reste trois minutes, Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Bien, je voudrais poursuivre là-dessus parce que... Bon, c'est un projet de loi qui a de multiples facettes, et, nous, on va pendant plusieurs jours entendre des gens... Déjà, tout à l'heure, on parlait du Conseil permanent de la jeunesse, on va parler de l'équité salariale, on va parler de plein de choses. Mais là on parle aujourd'hui beaucoup, entre autres, de la fusion de ces champs de recherche, mais je voudrais... je voudrais qu'on se centre bien sur l'importance des choix que l'on va faire. La recherche, au Québec, elle est vitale, compte tenu de ce que nous sommes, de notre démographie, de notre taille dans le monde, c'est vital, si on veut avoir une économie du savoir qui se tienne, et j'aimerais juste que vous concluiez là-dessus, c'est-à-dire, vous qui êtes en recherche, quel rôle donnez-vous à la recherche au Québec et au nom de quoi, dans le fond, dites-vous aujourd'hui: Il ne faut pas improviser dans ce domaine-là, avec des modifications comme celles qu'on nous propose?
M. Mercier (Sylvain): En fait, il ne faut pas improviser, parce que, bien que certains domaines de recherche nous semblent plus importants pour un avenir à court terme pour la société, d'autres projets de recherche, bien qu'ils n'apparaissent pas importants à moyen ou à court terme, vont l'être à long terme pour le développement de la société, et c'est là que c'est important de conserver des enveloppes budgétaires et de conserver non pas des cloisons étanches, mais quand même de préserver des enveloppes à des secteurs précis pour éviter justement qu'on se penche uniquement sur des problèmes de société actuels et là... et qu'on ne se penche pas sur d'autres difficultés de la société qui vont surgir à long terme, où des chercheurs actuellement font des gains ou des recherches là-dessus.
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taillon, ça va? Parfait. Donc, M. Mercier, M. Jourdain, M. Chabot...
Une voix: ...
Le Président (M. Huot): Ah! excuse-moi, excuse-moi, François. Excusez, M. le député de Shefford, trois minutes, trois minutes. Je m'excuse. C'est mon erreur.
M. Bonnardel: Salut, messieurs. Bonjour, messieurs. Ce n'est pas grave, M. le Président, je ne vous en veux pas. Très, très, très bon mémoire, messieurs, très bien documenté, avec rigueur et des chiffres qui sont exacts pour les dépenses des trois fonds de recherche. J'adore la partie coûts de fonctionnement et j'adore votre franc-parler, parce qu'à quelque part, dans ce projet de loi, depuis ce matin, on parle des fonds de recherche, vous le savez, vous êtes là depuis le début, 205 millions de budget, des augmentations de 7 %... 5 % pour les trois budgets depuis l'an dernier, et vous dites: Flou, pas de plan. C'est à peu près ça. Vous dites: «Premièrement, aucune étude démontrant les économies réelles résultant de cette restructuration n'a été rendue publique par le gouvernement.» Quand on veut essayer de sauver 10 millions, à peu près 10 millions -- parce qu'au début c'était quatre, là, c'est rendu à 10, on a 26 organismes -- et qu'on évalue ces économies d'échelle pour ces trois fonds à 1 million de dollars, je suis d'accord. Je commence à être d'accord avec certains d'entre vous qui me disent: On va peut-être créer un certain bordel à créer un fonds de recherche, quand ces trois-là fonctionnent déjà bien et qu'on pourrait peut-être leur donner la volonté de réduire leurs dépenses. Parce que c'est ça, le défi qu'on a tous. Je le répète depuis ce matin, mais c'est ça, le défi.
Alors, à quelque part, vous ne répondez pas à ça exactement, mais vous me dites, là-dedans: Ça fonctionne, on est capables d'aller chercher les argents du fédéral, qui viennent en lien avec les budgets que le gouvernement nous donne. Et, là-dessus, je veux vous entendre encore plus profondément sur le fait que... Est-ce qu'on se doit absolument d'appliquer le projet de loi n° 130, aujourd'hui, pour ces trois fonds de recherche, ou il y a d'autres moyens où on va être capables d'aller réduire les dépenses que le gouvernement s'attend dans les prochaines semaines?
M. Mercier (Sylvain): Bien, pour moi... pour...
Le Président (M. Huot): ...pour répondre à la question.
M. Mercier (Sylvain): Parfait. Bien, pour nous, c'est sûr qu'il y a d'autres moyens avant d'émettre un projet de loi. Il faut se regarder, il faut regarder qu'est-ce qu'on fait, il faut interpeller, il faut faire des études. Moi, si je présente à mon conseil d'administration, à l'association étudiante, une restructuration, tout ça, on va me poser toujours la question: Ça va coûter combien? Puis: Tu l'as-tu étudié, ton... Combien ça va te coûter précisément, avant de le faire? Et, si je n'arrive pas avec des données précises ou si je n'arrive pas avec ce calcul-là, jamais, jamais ça ne va passer. Parce qu'ils ont dit: As-tu étudié ton dossier avant de tout nous changer ça, là? Et c'est comme ça que ça se passe.
Moi, j'aurais préféré qu'on étudie la chose avant, et qu'on suggère, et que même... ou qu'on force les conseils actuels à dire: Bien, réduisez vos dépenses, parce que c'est important. Et on aurait vu après le résultat. Il me semble que demander à des gens qui ont la volonté de le faire dans leur propre organisme, de dire: Assainissez vous-mêmes les finances de votre organisme... Là, ce qu'on leur dit, c'est qu'on met la hache là-dedans, puis on va s'arranger pour que ce soit fait de toute façon. Je ne suis pas certain, moi, qu'à court... même à moyen et à long terme, qu'on va engendrer des économies. J'ai l'impression que finalement ça ne servira à rien et que ça va être au détriment de la recherche.
Le Président (M. Huot): Merci. Alors là, c'est vrai. Merci, M. Mercier, M. Jourdain, M. Chabot. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
Je suspends quelques instants et j'invite la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université à prendre place. Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 38)
(Reprise à 15 h 40)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous recevons la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université. Je rappelle au groupe que vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire, et il y aura par la suite une période de 30 minutes d'échange avec les membres de la commission. Ce sera sans doute M. Roy qui fera la présentation, donc je vous demande de bien vous identifier et de présenter les personnes qui vous accompagnent. La parole est à vous pour 15 minutes.
Fédération québécoise des professeures
et professeurs d'université (FQPPU)
M. Roy (Max): Merci, M. le Président. Mme la ministre, mesdames messieurs, je suis Max Roy, président de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université, et je suis moi-même professeur à l'UQAM. Je suis accompagné de notre vice-président, M. Denis Bélisle, professeur à l'Université de Sherbrooke, et de Mme Florence Piron, professeure à l'Université Laval.
Notre fédération réunit la quasi-totalité des associations et syndicats de professeurs, aussi bien dans les universités publiques que dans les établissements privés et leurs écoles affiliées, francophones et anglophones. La fédération représente la majorité des professeurs d'université du Québec.
D'abord, je vous remercie de nous fournir l'occasion d'exprimer la position des professeurs d'université sur un aspect important du projet de loi, et qui nous concerne au premier chef, c'est-à-dire l'organisation, le développement et la protection de la recherche publique. Nous avons déposé un mémoire sur le sujet dont je présenterai ici les grandes lignes. Notre intervention concerne essentiellement les chapitres VII, XIV et XXIII du projet de loi. Ce projet de loi, je le rappelle, vise à concrétiser des énoncés et des orientations politiques exprimés dans le discours du budget du mois de mars 2010. Alors, je vais vous faire grâce du contexte, que vous connaissez déjà. D'autres associations, fédérations se sont exprimées devant vous à ce sujet. Également, je vais vous faire grâce de la mise en contexte qui renvoie aux propositions de l'OCDE, qui inspirent de façon générale la politique de la recherche au Québec. Je vais plutôt rapidement commencer ma réflexion en parlant de la concentration des pouvoirs que représente le projet de loi.
Dans le nouvel organigramme du MDEIE, le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, le Fonds Recherche Québec relèvera directement du ministre. Il en sera de même de la Commission de l'éthique en science et en technologie après l'abolition du Conseil de la science et de la technologie, à laquelle la commission était rattachée depuis sa création, en 2001.
Se pose évidemment la question de l'indépendance de ces organisations, voire de leur liberté d'expression et d'action. Sans prêter quelque mauvaise intention à qui que ce soit, nous ne pouvons que déplorer cette proximité. La condition d'exercice de leur mandat était justement l'impartialité du conseil et de la commission.
En abolissant le Conseil de la science et de la technologie, le ministère se prive d'un comité aviseur ou d'orientation qui a été très productif et très utile à la fois aux gouvernements antérieurs et à la communauté scientifique. Rappelons, par exemple, la grande enquête Perspectives STS qu'il a menée en 2005 afin de construire un consensus entre scientifiques, société civile et autres utilisateurs de la recherche sur les défis majeurs du Québec et les priorités de recherche qui s'y relient. Quel autre organisme avait l'indépendance et les moyens de mener une pareille consultation?
De la même façon, en plaçant la Commission d'éthique en science et en technologie sous sa gouverne, le ministre prête flanc à la critique, et d'autant plus que les séances de la commission se tiendront à huis clos, ce qui contrevient à un principe de transparence particulièrement souhaitable pour la compréhension d'enjeux importants. En d'autres mots, on mine la crédibilité du processus et on se prive d'une autorité morale éminemment utile. Notons aussi que, selon le nouvel article 45.11, «le ministre peut rendre publics les avis, les recommandations, les constatations et les conclusions que lui fournit la commission», ce qui signifie que certains avis de la commission, notamment ceux qui iraient à l'encontre des choix du gouvernement, pourraient ne pas être rendus publics. Comment, sans indépendance et sans ressources précises, cette commission pourra-t-elle effectivement remplir sa fonction de susciter la réflexion sur les enjeux éthiques liés à la science et à la technologie tel qu'il est mentionné à l'article 45.10?
Par ailleurs, avec le projet de loi, l'administration du Fonds Recherche Québec sera confiée à un conseil d'administration formé de 15 membres nommés par le gouvernement, dont le scientifique en chef et le président du conseil d'administration. Comment seront-ils choisis? De quel horizon proviendront-ils?
L'article 70 du projet de loi signale aussi la nécessité de créer trois secteurs de recherche qui correspondent aux trois fonds existants. À première vue, on reproduit une distinction disciplinaire et on reconnaît la spécificité des programmes de recherche et des critères d'évaluation se rapportant aux disciplines. Il est à se demander alors quels avantages opérationnels et quelles valeurs scientifiques nouvelles apportera la fusion des organismes. Jusqu'ici, chacun des fonds de recherche était décisionnel, ce qui était connu de tous et qui assurait un fonctionnement efficace. Quelle sera la marge de manoeuvre des conseils sectoriels et quelle sera celle du conseil d'administration de Recherche Québec? Quels seront leurs pouvoirs respectifs? À l'évidence, l'un sera consultatif et l'autre, décisionnel. Sinon, à quoi bon créer une nouvelle structure, une nouvelle instance? Mais dans quelle mesure alors la spécificité des champs de recherche pourrait-elle être garantie, encouragée et mieux servie? Comment, à plus grande distance des chercheurs eux-mêmes et de leurs objets, le conseil d'administration pourrait-il agir au profit de l'ensemble de la communauté scientifique?
On doit s'interroger également sur le rôle et l'influence du ministre. Le conseil d'administration sera forcément tenu de respecter les priorités définies, entre autres, dans la programmation de la SQRI 2010-2013. Mais à cela s'ajouteront éventuellement d'autres exigences, puisque, d'après l'article 70, «le ministre peut donner des directives sur les orientations et les objectifs généraux que le fonds doit poursuivre, notamment en ce qui concerne l'équilibre entre les enveloppes budgétaires allouées aux [trois] secteurs».
Le Fonds Recherche Québec sera placé sous l'autorité directe du ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation. Nous ne doutons pas que les objectifs du ministre seront naturellement accordés à sa fonction au sein du gouvernement.
Que faut-il entendre par «équilibre entre les enveloppes budgétaires»? S'agira-t-il d'assurer que les budgets consentis aux secteurs d'activité correspondent à leur importance relative dans le milieu universitaire ou qu'ils reproduisent une répartition récente? Selon quels critères établira-t-on un équilibre entre les enveloppes budgétaires? Il y a fort à parier que les directives du MDEIE, de façon générale, s'appuieront sur les politiques de la SQRI qui mettent l'accent sur la productivité économique et la portée commerciale de la recherche publique et privée, sur le développement de partenariats avec l'entreprise et l'industrie, de partenariats internationaux aussi, de même que sur de nouvelles avenues de recherche appliquée.
Ces orientations, qui s'inscrivent, il faut le dire, dans un large mouvement et qui s'inspirent de propositions de l'OCDE quant à l'économie du savoir et quant à la globalisation des marchés, nous font craindre une uniformisation des critères d'appréciation de la recherche et, partant, une uniformisation des pratiques. On peut craindre un formatage des projets de recherche. Dans le secteur des recherches sur la santé, on pourrait craindre une érosion du social au profit du sanitaire. Dans celui des sciences de la nature, une éviction de la recherche fondamentale au profit de la recherche appliquée. Dans le domaine des sciences sociales, humaines, des arts et des lettres, on pourrait craindre que la mémoire et l'imagination le cèdent à l'actualité et aux idées communes.
Nous devons nous questionner aussi sur la fonction et la responsabilité du scientifique en chef telles qu'elles apparaissent laconiquement dans le projet de loi. Celui-ci sera à la fois le directeur du nouvel organisme Recherche Québec et le président de chacun des conseils sectoriels en plus d'être le porte-parole officiel de l'organisme auprès du ministre et auprès de la large communauté universitaire et scientifique. Nous pensons qu'il sera un intermédiaire ou un gestionnaire plus qu'un véritable chef de file scientifique. Son autorité intellectuelle serait difficilement acquise sans une implication continue dans de grandes entreprises de recherche et sans une reconnaissance du milieu élargi, qui touche autant aux sciences pures et au secteur de la santé qu'aux domaines des arts et des sciences. Compte tenu de la complexité de la tâche et de la diversité des dossiers et des champs de spécialisation, il lui sera extrêmement difficile d'assumer en plus un rôle de leader intellectuel. Chose certaine, il devra s'entourer d'une forte équipe de coordonnateurs et de spécialistes.
Le mécanisme de nomination de ce scientifique en chef suscite également des interrogations. L'article 60 du projet de loi reste vague. Comment sera composé le comité qui conseillera le ministre? Quelles seront les parts, les responsabilités des représentants des secteurs de la recherche, de la communauté universitaire et scientifique en général?
Si ce projet de créer un scientifique en chef était maintenu et si sa fonction était beaucoup mieux définie, il faudrait absolument qu'il soit indépendant et donc qu'il soit nommé par l'Assemblée nationale, sur le modèle du Directeur général des élections ou du Vérificateur général, pour s'assurer une crédibilité auprès de la population et du milieu.
**(15 h 50)** Le projet de loi vise, entre autres, à mettre en oeuvre le plan d'action du gouvernement pour la réduction et le contrôle des dépenses. Nous savons qu'il existe déjà des liens entre les divers fonds de recherche du Québec, qui assurent des économies réelles. Ainsi qu'il est écrit, par exemple, dans le rapport annuel de gestion 2009-2010 du Fonds de recherche sur la société et la culture du Québec: «Depuis sa création, le fonds partage avec le fonds Nature et Technologies des effectifs dédiés aux services communs et qui sont responsables de la gestion des ressources humaines, financières, matérielles, informatiques et informationnelles.» Partant, il est à se demander quels avantages réels entraînerait une fusion des organismes, et on peut se questionner sur les économies et sur l'efficacité promises avec les changements.
L'article 93 décrète l'intégration de tous les employés des trois fonds existants au sein du Fonds Recherche Québec. L'un des présidents-directeurs généraux deviendra également membre de la fonction publique. Il sera réintégré au sein de la fonction publique, ce qui n'est pas le cas des deux autres P.D.G. Les salaires de ces deux autres P.D.G. pourraient constituer une source d'économie, mais il faut considérer l'engagement du scientifique en chef, dont la rémunération sera sûrement établie en fonction des qualifications exigées et de l'ampleur de son mandat. Celui-ci déborde à l'évidence les responsabilités de chacun des P.D.G. actuels. Il faut considérer, de plus, la nécessité de personnel hautement qualifié, d'une part, au sein du nouvel organisme et, d'autre part, en soutien aux conseils consultatifs des trois secteurs. Certains postes, d'ailleurs, devront être réévalués à la hausse. Si on ne peut pas mesurer les éventuelles économies en temps de travail, en fournitures et en matériel, elles pourraient bien être modestes, puisque la diversité des champs de recherche concernés ne risque pas de diminuer. Il faudra prévoir de nouvelles procédures et de nouveaux comités.
Cela suscite aussi des interrogations sur l'efficacité de la nouvelle structure proposée. Comment serait-il plus facile d'apprécier au sein d'un conseil d'administration unique les orientations, les programmes et les projets de recherche dans l'ensemble des secteurs et de leurs multiples disciplines? À moins d'ignorer les besoins et les objectifs spécifiques de ces secteurs et de ces disciplines, on devra nécessairement s'en remettre aux avis des experts, peut-être des experts externes rémunérés à grands frais, et des conseils consultatifs pour rendre des décisions justes et crédibles.
Je conclus. La liberté et l'indépendance académiques sont mises en péril lorsqu'il s'agit de se plier à des exigences et à des objectifs autres que ceux qu'impose normalement le développement des connaissances. Ce développement a ses propres contraintes. Une direction unique et une finalité utilitaire ou commerciale réduisent le champ des possibles et conduisent à des choix stratégiques profitables à court terme. Peut-on alors encore parler de science au service du bien commun? Cette dérive risque de se produire avec la fusion des trois fonds et l'imposition des visées particulières de la SQRI.
Le virage vers l'économie du savoir qu'emprunte le Québec à la suite de la plupart des pays de l'OCDE suscite de nombreuses questions qui n'ont, hélas, jamais fait l'objet d'un débat public. Les modifications de structure, technocratiques donc, que propose le projet de loi ne pourront jamais remplacer une réflexion collective sur le sens de la recherche scientifique pour une société comme le Québec et sur les risques que fait courir la marchandisation de la connaissance à la qualité de cette recherche et à l'enthousiasme des jeunes et de l'ensemble des citoyens envers elle. L'appui de la société civile à la recherche est crucial, mais il dépend de la confiance des citoyens dans l'intégrité des chercheurs financés grâce à leurs impôts. Les citoyens comptent aussi sur les chercheurs pour faire passer le bien commun et l'intérêt général avant leurs intérêts personnels et ceux de l'industrie.
Des scandales récents montrent que la présence accrue de l'industrie dans la science publique a bien d'autres effets que de stimuler la capacité d'innovation des chercheurs. Elle crée une culture de compétition et de secret qui pousse à la fraude, au mensonge, à la falsification des données, y compris dans les plus célèbres revues scientifiques. Il faut trouver le moyen de maintenir la confiance du public et d'éviter ces scandales.
De longs efforts conjugués profitent aujourd'hui à l'ensemble du milieu scientifique québécois. On a déjà dit que les structures actuelles étaient favorables à nos chercheurs, notamment aux concours fédéraux de subventions. Or, le projet de loi n° 130 vient transformer l'organisation de la recherche subventionnée au Québec même s'il n'a pas fait l'objet d'un débat ou d'une consultation auprès de la communauté universitaire et scientifique. Il ne répond donc pas à une demande des chercheurs, mais à d'autres intérêts.
La fusion annoncée entraînera inévitablement une instabilité dans un secteur d'activité complexe et déjà bien développé au Québec. Elle signifie une perte d'autonomie de chacun des fonds de recherche, qui sont décisionnels, ce que tout le monde sait, et qui ont tous une mission différente et complexe, eu égard à l'éventail des champs de la science et de la création. Le FQRSC, par exemple, concerne une grande diversité de domaines se rapportant à la société, à la culture et à son environnement. Son champ d'intervention s'étend des arts et de la littérature aux relations internationales et au développement, en passant par le fonctionnement des personnes et des communautés, la vie sociale, l'économie, l'emploi et les marchés, l'éducation, la gestion des organisations, les langues, les médias, les milieux de vie, ainsi que la transformation de la société et des institutions. Cette variété de disciplines, dont certaines sont plus fragiles parce qu'elles s'accordent mal aux stratégies de développement économique, constitue un vaste horizon où se construisent des savoirs théoriques et pratiques, où existent déjà depuis longtemps des liens interdisciplinaires. Qu'on veuille encourager davantage des recherches intersectorielles est heureux. Mais les avenues que nous indique la programmation de la SQRI ne correspondent pas à la pluralité des champs disciplinaires.
Tel qu'il est décrit, le Fonds Recherche Québec apparaît comme une nouvelle structure administrative sans fondement scientifique, même si son directeur en porte le titre. L'organisation risque d'être peu fonctionnelle puisqu'elle sera peu adaptée aux besoins de tous les secteurs et des acteurs de la recherche. Il sera difficile sinon impossible à l'organisme et à son directeur d'acquérir une légitimité et une crédibilité sans le souhait et l'approbation du milieu scientifique. Par ailleurs, des économies d'échelle et des avantages administratifs sont peu probables, puisqu'on devra faire appel à un personnel hautement qualifié, à des conseils sectoriels, à des comités d'experts et probablement à des consultants et des firmes externes.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Roy. Nous allons procéder à la période d'échange.
M. Roy (Max): ...possible de donner la recommandation de notre fédération?
Le Président (M. Huot): Oui, je vais... je vais faire un spécial pour vous. Je vous donne 15 secondes.
M. Roy (Max): La fédération recommande de retirer les chapitres VII, XIV et XXIII du projet de loi, concernant la création du Fonds Recherche Québec, l'abolition du Conseil de la science et de la technologie et l'institution de la Commission sur l'éthique en science et technologie. Conséquemment, elle recommande de maintenir en leur état les trois fonds de recherche québécois et le Conseil de la science et de la technologie. Je vous remercie.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Roy. Donc, je reconnais maintenant Mme la ministre pour une période de 15 minutes.
Mme Courchesne: Madame, messieurs, merci. M. Roy, vous avez un bon débit et vous nous avez livré votre mémoire, que j'ai parcouru avec attention, avec beaucoup de conviction.
Il y a deux aspects que je voudrais traiter avec vous. D'abord, je veux apporter une précision d'emblée. Mme Tanguay, à mes côtés, la sous-ministre, me fait remarquer qu'il y a effectivement une coquille dans le projet de loi en ce qui concerne la commission d'éthique. Il y aura un amendement de proposé à l'effet que ce n'est pas le ministre qui va décider si les avis seront rendus publics, c'est la commission qui va décider si les avis seront rendus publics après avoir consulté le ministre. Mais c'est la commission qui va vraiment prendre sa décision. Donc, je tiens à le préciser, parce que c'est quand même un point qui est très important. Donc, il y a donc une coquille dans le projet de loi.
Bien, je vais vous dire tout de suite d'ailleurs que je suis très étonnée que vous recommandiez, dans votre dernier 15 secondes, vous recommencez... vous recommandez l'abolition... en fait, vous n'êtes pas intéressé à cette commission sur l'éthique, c'est ce que je crois comprendre, puisque vous souhaitez que ça disparaisse du projet de loi. Or, vous avez fait mention dans votre présentation qu'effectivement, dans le secteur de la recherche, il peut y avoir aussi des dérapages importants -- vous avez même parlé de fraude -- dérapages importants au niveau de l'éthique. Alors, je vais souhaiter que vous... en fait, je souhaiterais que vous m'expliquiez pourquoi vous ne souhaitez pas une commission d'éthique.
M. Roy (Max): Non, écoutez, je me suis mal...
Mme Courchesne: Ah, j'ai mal compris, hein?
M. Roy (Max): Vous avez bien entendu, et donc je me suis mal exprimé ou je me suis mal fait comprendre.
Mme Courchesne: C'est moi qui ai mal compris, non, sincèrement.
M. Roy (Max): Ce que nous demandons, c'est de ne pas instituer une commission en éthique et en technologie qui remplacerait la commission qui existe déjà et qui travaille sous la gouverne du Conseil de la science et de la technologie.
Mme Courchesne: Donc, vous êtes en cohérence avec vous-même.
M. Roy (Max): Je suis en cohérence, bien sûr, je l'espère bien. J'espère le demeurer. Cela dit, pour nous, il nous semble que c'est une perte très grande, puisque le Conseil de la science et de la technologie a depuis longtemps eu un mandat indépendant à l'égard des organismes subventionnaires, et donc il a pu faire des recommandations. Il en a fait à plusieurs reprises. Je pense que ma collègue, ici, pourra donner des exemples tout à l'heure. Donc, il faut absolument préserver, au contraire, un organisme indépendant qui puisse se prononcer sur ces questions-là qui sont trop importantes, qui sont souvent controversées, et que ça concerne les sciences de la santé ou d'autres secteurs.
Mme Courchesne: En fait, ce que vous dites, c'est que vous souhaitez conserver le Conseil de la science. À partir du moment où on conserve ce conseil, on conserve la commission qui est en place actuellement. Mais, si la loi est adoptée et que tout ça est regroupé, vous êtes d'accord qu'il faudra qu'il y ait une commission en éthique?
M. Roy (Max): Si et seulement si, bien sûr.
**(16 heures)**Mme Courchesne: J'ai très bien compris, M. Roy.
L'autre aspect que je veux partager avec vous est le suivant, c'est qu'à la page 9 de votre mémoire vous dites: «À l'heure actuelle, plus de 50 % des chercheurs universitaires et des étudiants aux cycles supérieurs proviennent [...] des sciences sociales et humaines ainsi que des arts et des lettres.» Et vous dites que «les demandes de subventions et de bourses [...] comptaient pour 53 % de toutes les demandes [des] trois fonds». Et on parle ici... vous parlez, vous, d'un financement équilibré.
Or, la santé, actuellement et depuis plusieurs années, si je ne m'abuse, la santé a une part du gâteau, mais je ne le dis pas méchamment, là, mais a quand même une part qui est beaucoup plus importante. Et là vous semblez nous dire: Bien, au fond, en ce moment, on est relativement satisfaits de -- à moins que vous me disiez que vous ne l'êtes pas -- la façon dont tout ça est réparti. Or, il y a plus de chercheurs en sciences sociales et humaines. La santé obtient plus.
Et, est-ce qu'on veut un financement équilibré ou un financement équitable? Parce que, pour moi, il y a vraiment une distinction entre les deux. Et ça, là, poser cette question-là... Les deux termes font en sorte que, dépendant de la façon dont on répond, on vient de motiver... de modifier, pardon, grandement notre façon d'aborder la recherche au Québec, puisqu'il y a plus de monde en sciences sociales et humaines, mais on donne plus d'argent à la santé. Alors, expliquez-moi comment, selon vous, vous souhaitez que ce financement soit: ou équitable ou équilibré. Et avez-vous une réponse à ça, parce que... Puis ce n'est pas un piège, là, rassurez-vous, là, c'est...
Une voix: ...
Mme Courchesne: Non, pas du tout. Parce que sincèrement, aujourd'hui, on a abordé certains de ces aspects-là, mais c'est une question qui est fondamentale. Je reviendrai sur l'autre partie de votre opinion sur la politique actuelle du gouvernement, mais j'aimerais que vous me disiez un peu comment vous aborderiez... ou vous abordez cet aspect-là de la question.
M. Roy (Max): D'abord, je dois vous dire que...
Mme Courchesne: ...recherche, on s'entend.
M. Roy (Max): D'abord, je dois vous dire que nous ne mettons pas en cause les choix de privilégier ou d'accorder beaucoup d'importance au secteur de la santé. Ça nous paraît être un choix collectif et pas simplement, comment dire, occasionnel ou lié à une conjoncture particulière. C'est un choix social que nous avons fait collectivement, et je pense qu'il peut se défendre.
Quant à savoir, maintenant: Est-ce qu'il y a pour autant de l'équité?, l'équité, il faut dire une chose, c'est qu'avec le projet de la SQRI, hein, la nouvelle Stratégie québécoise de recherche et d'innovation, presque tout est passé au crible à partir de considérations commerciales et économiques. Cela signifie que même les recherches qui se feraient en philosophie éventuellement, en histoire, etc., n'auraient pas... seraient dépréciées, ne seraient pas... elles seraient dévaluées. Et c'est donc là où il semble y avoir un risque très, très grand.
Ces secteurs-là n'ont pas nécessairement d'application immédiate dans le milieu commercial, on le comprend bien. Mais vous savez comme moi qu'il est absolument indispensable, par exemple, à l'heure actuelle que des recherches en sciences des religions se poursuivent, parce que les questions religieuses ont une très grande influence sur le plan militaire, sur le plan économique à travers le monde, sur le plan de la connaissance, même, des cultures.
Alors, cette équité, elle doit rendre compte des champs de recherche, de la variété des champs de recherche, et de leurs besoins, et aussi de leur profitabilité respective. Elle ne doit pas rendre compte d'un... comment dire, d'un clivage entre la santé et la philosophie, ce n'est pas de cet ordre-là du tout, ça n'a rien à voir. Donc, ce n'est pas ce débat-là.
Et d'ailleurs, si je peux me permettre, le projet de loi n'avance pas de proposition quant à l'équilibre ou quant à l'équité, mais il tait, justement, toutes les questions qui ont trait à la recherche fondamentale. Il n'y a qu'un seul endroit où l'expression ou la formule «recherche fondamentale» apparaît. Ça laisse donc entendre que c'est la recherche appliquée qui aura la grande part du gâteau, et ça, c'est très inquiétant pour tous les secteurs, et pas seulement pour le secteur des sciences humaines, mais aussi pour le secteur de la santé.
Le Président (M. Huot): Oui, Mme la ministre.
Mme Courchesne: M. le Président. M. Roy, je respecte vraiment votre opinion là-dessus. Sincèrement, je trouve que vous allez un peu loin dans la conclusion de ce qu'est la politique déposée récemment. Très honnêtement, je ne pense pas, d'aucune façon, que le gouvernement veuille, comme vous dites, commercialiser, ou vous avez utilisé le terme «marchandiser», chaque projet de recherche ou que... vous tirez la conclusion que ceux qui seront principalement retenus seront d'abord et avant tout ceux qui auront ces fins-là, même si on ne doit pas... Et je pense que vous serez d'accord avec moi que la recherche au Québec est aussi fondamentale pour le développement de notre économie, surtout dans le monde actuel. Mais je... Sincèrement, comme membre du gouvernement... Puis je le dis de façon très à l'aise parce que je ne suis pas la ministre responsable, mais je vous dis très sincèrement que ce n'est pas du tout la volonté de dire que dorénavant la recherche au Québec sera essentiellement sur cette base-là.
Mais vous posez la question: «Selon quels critères établira-t-on un équilibre entre les enveloppes budgétaires?» Alors, dans ce sens-là, j'aimerais que vous nous donniez quels seraient vos critères pour établir ces enveloppes budgétaires, à partir des constats que vous faites et à partir de la réalité actuelle. Et, comme je vous disais tout à l'heure, aujourd'hui, je ne m'attendais pas à ce que personne nous dise qu'il n'était pas satisfait de la répartition actuelle ou du financement actuel, je dis juste par ailleurs que, quand on se retrouve parfois avec certains intervenants, on nous explique que la réalité n'est pas nécessairement celle que nous croyons.
Alors, moi, je veux savoir quels seraient, pour vous, les critères sur lesquels on devrait établir l'équilibre entre les enveloppes budgétaires.
M. Roy (Max): Ce que le projet de loi avance laisse entendre plus d'inquiétude et de désorganisation que d'ordre dans ce domaine de la recherche qui est si complexe et si important pour le développement universitaire au Québec. Vous savez, Mme la ministre, qui avez été également ministre de l'Éducation, que nous réclamons depuis longtemps des états généraux sur l'enseignement... sur l'université québécoise, et nous pensons qu'un des sujets importants qui doit y être débattu, c'est justement la place de la recherche, l'influence que ça a sur le développement universitaire, sur le développement des institutions et le travail des chercheurs.
Alors, de ce point de vue là, c'est beaucoup plus global comme problème, ce n'est pas une question d'enveloppes qu'il s'agit de distribuer en disant: On va le faire au prorata du nombre de chercheurs. C'est une position qui est sans doute intenable. On va le faire au prorata des établissements. Et je pense qu'il faut qu'il y ait une réflexion beaucoup plus large que celle-là. Et donc me demander de vous dire quelle sera la solution pour l'équilibre budgétaire...
Mme Courchesne: ...en tout respect, ce n'est pas le sens de ma question, c'est que vous nous dites que vous êtes contre le regroupement -- et je respecte ça -- parce que le regroupement pourrait avoir des conséquences non souhaitables, notamment dans la répartition, veux veux pas, des sommes. Quelqu'un avant vous disait: Il y aurait des vases communicants. Je le répète, pour faire de la recherche au Québec, peu importe d'où vient l'argent, ça prend de l'argent, et la recherche est établie à partir d'organismes subventionnaires, et puis... Bon. Alors, ça, c'est la base même de la façon dont la recherche est effectuée. Et, au Québec comme ailleurs, une grande portion de ça provient de fonds publics.
Donc, c'est pour ça, à partir du moment où vous nous dites que vous êtes contre le regroupement, que vous nous signalez que -- en page 9 -- il pourrait y avoir ce type de dérapage, que vous êtes inquiets sur ces répartitions-là, je ne fais simplement que vous poser la question: Vous, comment souhaiteriez-vous... S'il y avait ce regroupement -- même si je sais que vous ne le souhaitez pas -- quels devraient être ces critères-là qui devraient être regardés de façon plus importante?
Maintenant, un projet de loi rarement va nous dire comment se fait la répartition budgétaire. C'est après le projet de loi que normalement vous pourriez nous demander que, par règlement, par exemple, nous puissions avoir un cadre budgétaire. C'est de cette façon-là; rarement on le retrouverait dans la loi.
Mais, cela dit, je posais cette question-là parce que je trouvais curieux que vous nous disiez qu'il y a plus de chercheurs -- avec quoi je suis d'accord -- en sciences sociales, humaines, etc., alors que ce ne sont pas ces secteurs-là qui actuellement reçoivent le plus de financement public. Alors, je posais la question: Est-ce que d'autres critères seraient souhaitables? Ce n'est que ça, mon but.
Le Président (M. Huot): ...M. Roy, simplement vous avertir, vous avez le défi de répondre à la question en deux minutes.
M. Roy (Max): Mais je vais céder la parole à mes collègues, je vais simplement dire... Je ne veux pas vous démentir, mais je suis obligé quand même de préciser que l'une des priorités de la SQRI, c'est effectivement le caractère économique et commercial, hein, la productivité de la recherche. Donc, tout cela vient colorer le travail que le conseil d'administration de Recherche Québec va effectuer. Ensuite, je cède la parole à Mme Piron.
**(16 h 10)**Le Président (M. Huot):. Oui, Mme Piron, 1 min 30 s.
Mme Piron (Florence): Oui. Mais je voudrais justement rappeler que le Conseil de la science et de la technologie avait comme mandat de réfléchir en profondeur, avec toutes sortes d'informations, sur ce genre de questions afin de faire des recommandations sur les critères et de faire en sorte que la recherche publique résiste à la pression d'intérêts variés qui pourraient ne pas refléter un équilibre entre les ressources à la recherche qui dépendraient de leur pertinence sociale et collective. C'était un des mandats du Conseil de la science et de la technologie de guider. Et, par exemple, la grande enquête Perspectives STS indiquait des défis majeurs pour le Québec.
Mais ça, ce sont des guides. Ce n'est pas des questions abstraites ni des questions quantitatives. Et, si on veut transformer les habitudes de vie des Québécois, bien il faut qu'il y ait des gens qui travaillent dans les différents secteurs. Et c'est ça, c'est un critère de pertinence sociale mais qui n'est pas lié forcément à des intérêts industriels, etc., mais à la volonté collective des Québécois.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Richelieu pour une période de 15 minutes.
M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. D'abord, merci pour cette présentation qui a plusieurs mérites. Elle reprend -- vous ne le saviez pas jusqu'alors -- mais essentiellement ce que nous avons entendu de différents horizons depuis le matin dans le domaine de la recherche, mais de façon concentrée et dans une perspective peut-être plus globale, et nous vous sommes gré de nous avoir donné cet éclairage.
Maintenant, j'aimerais qu'on le précise encore davantage. Vous avez parlé de formatage de la recherche, une vision utilitariste. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a un très grand danger -- une tendance qui est déjà solidement installée mais qui risque de connaître une accélération par la création d'un conseil unique -- dans cette transposition dans la recherche, notamment en sciences humaines, des processus d'évaluation de la recherche et constitution de la recherche que l'on retrouve notamment dans les sciences exactes et plus particulièrement dans les sciences de la santé? En d'autres mots, les grandes équipes millionnaires avec énormément de chercheurs, avec... et qui sont nécessaires en santé, et que l'on transpose presque mutatis mutandis directement en sciences sociales ou en sciences humaines, avec des résultats qui, il me semble, ne rejoignent pas la liberté intellectuelle que devraient avoir les chercheurs dans ces champs.
M. Roy (Max): Il y a effectivement un modèle qui s'est imposé et qui est celui, par exemple, des regroupements stratégiques. Il y en a d'autres, là, mais celui-là est très connu. Il nous a profité jusqu'à maintenant. Maintenant... Cependant, avec la nouvelle orientation... Parce que, nous, ce qu'on voit, c'est l'orientation, ce n'est pas simplement la nouvelle direction, hein? Ce n'est pas simplement un organisme de gestion, c'est un organisme qui orientera les avenues de recherche et les initiatives. Et, avec la nouvelle orientation, ce que l'on voit, c'est que le modèle qui vient du milieu... du secteur privé, milieu industriel, du milieu des entreprises va progressivement s'imposer.
À l'heure actuelle, les indicateurs qui sont utilisés -- à l'automne, on en a fait l'expérience -- les indicateurs qui sont utilisés dans les demandes de subvention, ils sont proposés par eRegroupement. Bon, une nouvelle organisation, une nouvelle structure, une liste, si vous voulez, d'indicateurs. Et nos... Je peux vous assurer que nos collègues dans le secteur des arts, des lettres et des sciences humaines avaient maille à partir avec ces indicateurs. Ils ne savaient trop quoi en faire. En fait, ce sont des indicateurs sans doute utiles dans d'autres secteurs mais qui là sont absolument inappropriés.
Donc, le formatage peut créer aussi un effet extrêmement pervers, c'est qu'on pourrait, à la limite, faire un bel exercice qui, sur le plan formel, soit parfaitement recevable mais, sur le plan du contenu, soit de valeur discutable. On sait que dans le passé, par exemple, il y a eu une incitation à ce que l'informatique soit utilisée dans toutes les avenues de recherche, dans tous les champs de recherche. Ça a créé parfois des choses assez, hein, difficiles à apprécier.
Bien, c'est certain qu'il y a une évolution, il y a l'innovation. Il y en a présentement dans tous les secteurs. Et, en particulier quand on pense aux nouvelles technologies qui sont liées à l'informatique, qui sont liées aux communications, c'est dans le secteur des lettres, ça se développe, ça a beaucoup... Les recherches en esthétique, par exemple, donnent lieu... Vous savez, c'est aussi pratique. Ça donne lieu au Moulin à images, ça donne lieu à toutes sortes d'applications que l'on peut apprécier. Alors, ce n'est pas toujours des secteurs industriels ou des secteurs commerciaux qui produisent des effets bénéfiques.
Alors, en ce sens-là, ce formatage-là, au lieu de renforcer ce qui est devenu distinctif dans des secteurs qui ne sont pas nécessairement des secteurs pointés par la SQRI, pour l'instant, eh bien, ça risque justement les désorganiser et finalement les reformater d'une manière qui soit conventionnelle. Et, quand c'est conventionnel, bien, évidemment, on perd la partie innovatrice de tout ça, la partie créative de tout ça.
M. Simard (Richelieu): Très rapidement. Vous avez, ce matin... Tout à l'heure, vous avez précisé qui vous étiez. Donc, vous représentez l'ensemble des professeurs d'université de tous les secteurs au Québec. L'opinion que vous nous présentez aujourd'hui, elle est très importante. Les chercheurs dont nous parlons, ceux qui présentent des projets de recherche, qui sont visés, c'est essentiellement des gens que vous représentez.
Est-ce qu'il y a une attente... Est-ce que vous pensez que vous reflétez fidèlement la pensée de la grande majorité des chercheurs, ceux qui sont impliqués dans la recherche au Québec, et qui ont magnifiquement réussi au cours des 25 dernières années, et qui vont chercher plus que leur part de fonds fédéraux, manifestant par là la qualité de cette recherche?
M. Roy (Max): Parce que les structures qui se sont développées, avec de longs efforts, hein, de patients efforts, ont été profitables effectivement pour nos chercheurs, nous pouvons dire à quel point ce changement qui est annoncé crée pour eux de l'inquiétude. En fait, ce qu'ils redoutent, c'est que tous ces efforts-là soient maintenant anéantis. Mais je voudrais laisser à mon collègue le soin d'ajouter quelques considérations.
Le Président (M. Huot): M. Bélisle.
M. Bélisle (Denis): Merci beaucoup. La partie la plus inquiétante, je crois, du projet de loi est bien incarnée dans un de ses éléments clés, qui est la création du scientifique en chef comme telle. C'est une idée curieuse, ça. Au niveau hiérarchique, on comprend que ça puisse avoir un certain avantage. On a trois conseils. Le scientifique en chef est le président de ces trois conseils-là. Il participe au conseil du Fonds Recherche Québec et il relève directement du ministre ou de la ministre. Puis l'article 70 confère au ministre le droit de donner des directives par lesquelles l'enveloppe budgétaire ou même les orientations de recherche vont être signalées. Donc, finalement on assiste à un effort manifeste de concentrer toute la structure décisionnelle des fonds de recherche au Québec dans les mains du ministre
Alors, ça, c'est la partie la plus inquiétante. Puis, par ailleurs, de vouloir même créer un poste comme celui du scientifique en chef contient un certain aspect saugrenu, je crois. Est-ce que, dans le domaine des arts, on aurait pensé à créer un artiste en chef au Québec? Je ne crois pas.
Puis je crois que cela participe d'une méconnaissance, un peu, du travail de recherche, de c'est quoi, la recherche universitaire ou la recherche scientifique. Et cette différence-là tient beaucoup à la différence qui existe entre, d'une part, information et, d'autre part, connaissance. L'information, elle est arbitraire et elle est particulière. «Je m'appelle Denis»: il n'y a aucun projet de recherche au monde qui va établir ça de façon certaine, on a juste à me poser la question. Et c'est complètement arbitraire. Il n'y a pas de lien nécessité entre mon visage et le fait que je m'appelle Denis. La connaissance, elle, par ailleurs, elle est nécessaire et générale: «Tous les corbeaux sont noirs», par exemple, un énoncé général qu'on peut qualifier de connaissance. Mais la manière par laquelle la connaissance se bâtit est une manière radicalement différente par laquelle on accumule l'information. Et cette vision-là, de vouloir créer un scientifique en chef, me fait penser à un chef de pupitre dans un journal. Ça ne peut pas exister dans le domaine de la recherche.
Dans le domaine de la recherche, il y a tellement d'incertitudes, on est tellement d'individus, là, qui ont consacré leur vie à gérer une grande part d'incertitudes que de les installer dans un cadre hiérarchique va avoir comme effet, comme le disait le président de la FQPPU, de faire en sorte que tout va être conventionné. Ça va être des projets de recherche formatés, conventionnés, pour répondre à des exigences formulées par le scientifique en chef, qui n'aura pas cette capacité-là d'offrir des circonstances où vraiment on va créer de la connaissance. Donc, c'est... Il y a des inquiétudes alentour de ce projet de loi là qui relèvent surtout de cette volonté-là, plus.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant le député de Kamouraska-Témiscouata.
M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, merci pour la présentation. Toujours en lien, du point de vue du professeur-chercheur ou du chercheur, on n'a pas parlé, depuis ce matin, vraiment sous cet aspect-là. On sait que c'est énormément d'énergie de préparer des demandes de subvention, c'est le parcours du combattant. On l'entend régulièrement. Je pense qu'on a l'occasion de pouvoir le souligner.
Mon interrogation est celle-ci: Dans la réflexion que vous avez faite, bien sûr, pour votre présentation, est-ce que vous y voyez... Dans le projet de regroupement, sous l'angle de l'efficacité de la structure et du contexte, bien sûr, de recherche au Québec, est-ce que vous y voyez une incidence, soit positive ou négative, du point de vue de cette énergie, de ces efforts qui sont faits... qui doivent être faits pour en arriver à réussir cette performance quand même remarquable au Québec en termes de retour sur l'investissement?
**(16 h 20)**Le Président (M. Huot): M. Roy.
M. Roy (Max): En fait, ce qu'on craint, c'est que ce soit plus lourd, donc qu'il y ait plus de désavantages que d'avantages. Si cette structure nouvelle pouvait, comment dire, correspondre à un secteur d'activité spécifique dont toutes les balises sont les mêmes, ça pourrait toujours être possible. Mais, dans le cas présent... Les trois fonds ont été distincts.
Vous savez, il y a une longue histoire, hein? Ça ne date quand même pas d'hier, là. C'est en 2001 qu'on a restructuré les fonds, et ils existent depuis les années quatre-vingt. Et c'est petit à petit que ça s'est constitué. Ça a même influencé des programmes au fédéral, qui se sont un peu alignés sur nos programmes, puis inversement. À l'heure actuelle, il y a des regroupements stratégiques, là, qui servent de modèles à la création d'écoles doctorales en France.
Il y a donc... comment dire, il y a une synergie, là, il y a un milieu qui est très actif, qui est dynamique, et ce milieu-là, il voit sa stabilité minée par la possibilité que le porte-parole du bailleur de fonds principal, qui est le gouvernement... Et puis finalement le guichet, si on peut parler ainsi, il disparaît. Alors, ça fait en sorte que les collègues chercheurs disent: Maintenant, à qui est-ce qu'on va rendre des comptes et à qui on va pouvoir demander des choses, puisque les conseils... les secteurs ne seront que consultatifs? L'organisme qui va prendre les décisions, il les prend pour l'ensemble. Les membres du conseil d'administration de cet organisme vont devoir à la fois défendre leur secteur et défendre l'ensemble des opérations. Ça crée plus de distorsion que ça crée de synergie. Donc, on pense que les incidences, elles sont plus désastreuses qu'heureuses. Et c'est donc pour ça qu'on a tant d'inquiétudes.
Mais on ne vous dit pas: Il faut le faire de telle ou telle manière. Ce qu'on voit, c'est qu'il y a eu... On a dit déjà qu'il y avait eu une improvisation. Je ne jette pas la pierre à personne, là, ce que je veux dire, c'est qu'il y a une précipitation, peut-être, qui correspond à la volonté du gouvernement d'appliquer un plan d'action sur le plan budgétaire, hein, du point de vue budgétaire. Mais cette précipitation-là, elle est malheureuse parce qu'elle empêche justement d'avoir un vrai débat sur ce qu'est la recherche au Québec et ce qu'est la recherche publique, son indépendance obligée, sur l'impartialité de la commission qui va se prononcer sur les projets et sur les avenues de recherche. Je pense que, de ce point de vue là, c'est une grande perte que de voir disparaître les trois fonds et de voir disparaître le Conseil de la science et de la technologie, qui était le seul comité aviseur indépendant.
D'ailleurs, on nous l'envie, hein? Quand on va à l'étranger, on parle de l'organisation de la recherche ici. Il y a des choses qui fonctionnent moins bien, c'est entendu. Il y a des ratés parfois. Mais de façon générale on a appris justement à bien conjuguer avec le type d'organisation qu'on a ici et à en tirer le meilleur parti possible, autant sur le plan local que lors de la présentation de demandes de subvention aux concours fédéraux.
Le Président (M. Huot): Merci, M. Roy. La parole est maintenant à la députée de Taillon pour 2 min 30 s.
Mme Malavoy: Ça, c'est le temps que j'emprunte à l'ADQ...
Le Président (M. Huot): Oui, effectivement.
Mme Malavoy: ...que je remercie, en passant, de ne pas être là et donc de me permettre de prolonger un peu la discussion. Exactement là-dessus, M. Roy, sur l'abolition du Conseil de la science et de la technologie, je trouve que, bon, à travers tous les articles, on n'arrive peut-être pas à en parler suffisamment, mais il me semble qu'il y a là quelque chose qui mérite vraiment d'être questionné, d'abord parce que les économies ne sont pas évidentes, un tel conseil fonctionnant avec des bénévoles, et parce que vous dites vous-mêmes dans votre mémoire très justement que ce conseil a rendu de fiers services à la recherche au Québec, permet une réflexion justement libre d'intérêts, permet d'émettre des avis qui éclairent tout le monde, mais qui ne sont pas des avis trop liés, par exemple, au gouvernement en place, et ça, quel que soit le gouvernement.
J'aimerais que vous repreniez cet aspect-là. Parce qu'on passe beaucoup de choses, je dirais, à la moulinette dans le projet de loi. Mais il me semble qu'on a là quelque chose qui ne coûte pas très cher, qui est précieux, qui rend des services, vous venez de dire, «qu'on nous envie», alors plaidez un peu sa cause.
Le Président (M. Huot): M. Roy, en une minute.
M. Roy (Max): En une minute! Me permettez-vous de céder la parole à ma collègue, qui connaît encore mieux que moi l'histoire de ce conseil? Vous me permettez? Mme Piron.
Le Président (M. Huot): ...Mme Piron, en 50 secondes.
Mme Piron (Florence): Oui. Bien, je reprendrai exactement ce que vous avez dit. Je travaille sur la participation publique au Québec, et le Québec, avec tous ses conseils consultatifs de citoyens qui sont près du ministre, a trouvé une façon unique au monde de permettre à la société civile d'influencer les politiques publiques et donc d'assurer que les politiques publiques soient en harmonie avec la société civile. Et le Conseil science et technologie, c'était... il a plus de 30 ans d'existence et il a conduit... il a permis d'instaurer l'économie du savoir au Québec, avec des illustres présidents comme M. Camille Limoges et d'autres grands scientifiques qui y ont travaillé. Il a permis des contacts entre toutes sortes d'acteurs de la recherche scientifique. Il a produit des textes qui vont rester, la Perspectives STS dont je parlais. Et c'est en lui qu'est née la Commission l'éthique de la science et de la technologie, qui n'a pas eu beaucoup de moyens mais qui a fait quand même ce qu'elle a pu.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, donc, M. Roy, M. Bélisle, Mme Piron, de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission. J'invite les représentants de la Centrale des syndicats du Québec à prendre place.
Et je suspends quelques instants les travaux de la commission.
(Suspension de la séance à 16 h 26)
(Reprise à 16 h 30)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la commission. Nous recevons maintenant la Centrale des syndicats du Québec. Ce sera sans doute M. Parent qui fera la présentation.
Bien que vous soyez très connu des membres de cette commission, M. Parent, vous connaissez notre fonctionnement, je vous demande de vous présenter, de présenter la personne qui vous accompagne. Je vous informe que vous avez 15 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Il y aura par la suite un échange de 30 minutes avec les membres de la commission. La parole est à vous.
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
M. Parent (Réjean): Merci, M. le Président. Alors, Réjean Parent, président de la CSQ, Centrale des syndicats du Québec, accompagné de Mme de Sève, Nicole, qui est... la plupart d'entre vous l'avez vue à une occasion ou à une autre en commission parlementaire.
Vous permettrez dans un premier temps, comme on est encore dans le mois de janvier, de vous souhaiter à toutes et tous une bonne année 2011, et, comme on parle beaucoup d'économie, je vais vous souhaiter la fortune dans tous les domaines de votre vie.
Ceci...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Réjean): ...dit, ceci dit, évidemment on va sortir un peu de ce qu'on a entendu précédemment. La centrale, ce n'était pas tellement les fonds de recherche qui étaient le corpus de son mémoire, mais, comme vous nous avez mis dans le trafic des fonds de recherche, on s'est permis un... un petit obiter, dirait un juge de la Cour suprême.
Assez rapidement, d'abord, d'entrée de jeu dire que la CSQ est sensible et préoccupée, je veux dire, de la question budgétaire québécoise et, dans ce sens-là, reconnaît le rôle du gouvernement, là, de travailler, d'oeuvrer à faire en sorte d'assainir les finances publiques et en même temps d'avoir des institutions efficientes. Et c'est vrai qu'il n'y a pas de petites économies, mais il n'en demeure pas moins qu'il peut y avoir de mauvaises économies.
Ça fait que, donc, dans ce sens-là, aujourd'hui, notre mémoire, c'est à la lumière des objectifs du projet de loi, qui sont à l'effet d'être plus efficients et plus économiques, qu'on a essayé d'apprécier la situation en faisant une mise en garde d'entrée de jeu. On ne parle pas de tous les organismes qui sont dans le projet de loi; ça ne veut pas dire que, quand on n'en parle pas, on est en accord -- parce qu'on dit: Qui ne dit mot consent -- pas plus qu'on est en désaccord, c'est tout. La prétention, on a essayé de se limiter dans ce qu'on connaît. Peut-être, vous allez dire même que des fois on parle de ce qu'on ne connaît pas, mais on pense que les sujets qu'on a retenus, on peut en dire quelques mots.
Sur la Commission d'équité salariale -- commençons par celle-ci -- on est assez perplexes par rapport aux intentions du projet de loi. C'est évident, on cherche toujours le motif, la raison, et, dans le contexte, on n'y voit pas d'économie, on n'y voit pas d'amélioration de l'efficience. C'est quand même une loi fondamentale, l'équité salariale, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, bonifiée par M. Whissell lorsqu'il était ministre du Travail. Et je pense que tout le monde va être d'accord, autour de la table, de dire que c'est loin d'être inscrit dans la culture entrepreneuriale du Québec, là, l'équité salariale; il y a encore beaucoup de chemin à faire. Et, dans ce contexte-là, on essaie de dire l'essence: Pourquoi qu'on inclut... Pourquoi qu'on veut intégrer ou fusionner avec la Commission des normes? Quel impact, quel effet ça l'a, et on ne trouve pas. En tous cas, à un point tel... quand on se demande pourquoi qu'on change quand que l'outil est le bon puis qu'il reste encore beaucoup de travail à faire. Évidemment, pour s'éviter ce qui est arrivé à mon prédécesseur, je vais vous dire tout de suite la proposition de la CSQ: c'est de maintenir la Commission de l'équité salariale. Il y a zéro économie, et loin s'en faut de dire que tout a été fait en cette matière.
Pour ce qui est du Conseil des services essentiels, intégré à la Commission des relations du travail, là je... je vais même vous faire un aveu -- il y a sûrement des avocats autour de la table, ça fait que... sûrement plus savants que le président de la CSQ: donc, il y a comme des éléments, là, que... il y a des nuances juridiques, des fondements juridiques... Ce qui interpelle chez nous, je dirais, le contentieux, c'est plus la nature des deux instances: la Commission des relations du travail, qui doit sa parenté... en tous cas, il doit y avoir apparence de justice, et ça constitue un tribunal neutre, indépendant, alors que le Conseil des services essentiels a plus une caractéristique, je dirais, bon, de représentant de l'intérêt public, donc un pouvoir d'auditionner, un pouvoir d'ordonner, un pouvoir de médier -- un peu, je dirais, à la fois partie et juge. Quand on fond ça dans la Commission des relations du travail, l'appréhension, l'inquiétude des juristes chez nous, c'est à l'effet qu'il y ait un mélange des genres entre le rôle, je veux dire, la fonction au Conseil des services essentiels et la neutralité ou l'indépendance de la CRT.
Donc, dans ce contexte-là, le souhait, c'est... là, on pourrait vous dire: Gardez ça comme c'est là, ça fait le travail. Mais, s'il y a une volonté, je ne dirais pas seulement: Si et si que, mais, si vous y tenez beaucoup, intégrez-le plutôt, le Conseil des services essentiels, au ministère du Travail, sous la responsabilité directe du ministre, avec une possibilité pour les parties de se référer à la CRT s'il y a un désaccord qui subsiste. Puis on avait eu ce genre ce débat en lien avec le rôle et la fonction de la Commission de l'équité salariale dans le passé. Ça paraîtrait une façon plus... qui donnerait une plus grande apparence de justice et plus efficiente. Puis, en tout cas, encore là, on cherche les économies, parce qu'on se dit, là, s'il y a des économies sur le conseil, l'impact, c'est que la CRT est très efficiente actuellement, mais on a ajouté à ses mandats, ça fait qu'on ne pourra fort probablement pas ajouter à l'infini, à la Commission des relations du travail, de mandats. Et, bon, cette quête d'économies ne devrait pas avoir pour effet de rendre inefficaces les institutions qui fonctionnent bien.
Sur les conseils consultatifs, bon, regardez, ça représente à peu près 3,5 millions, près de 4 millions, si j'inclus le CCTM. Fort probablement... Tu sais, je regarde juste le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, de la façon dont le projet de loi est construit, il va rester peut-être une économie de salle, peut-être un petit 1 000 $ par année, là, mais on est loin, là... En tout cas, il n'y a pas de petites économies, mais, à un moment donné... Bon, CCTM, je pense qu'il y a conclusion entre les parties, et je pense que le sort qui est dans le projet de loi nous convient bien.
Pour ce qui est des autres conseils, famille, aînés, jeunesse, relations interculturelles, qui représentent autour de 3,5 millions, je comprends que ça peut être une belle économie, mais en même temps c'est quoi, le prix qu'on en paie? Je veux dire, c'était quand même un espace démocratique, c'est un espace de participation de la société civile, c'est de la démocratie participative. C'est en même temps, des fois, un peu se sortir de la bureaucratie gouvernementale. Puis je ne suis pas un antibureaucratie, je pense que la bureaucratie est nécessaire à la démocratie. Mais, à un moment donné, de pouvoir sonner la cloche, éveiller les consciences, faire part de l'ensemble des points de vue, être capables de consolider le dialogue social...
Et, dans ce sens-là, la disparition, je dirais, à mon avis, le jeu n'en vaut pas la chandelle. Mais, si et seulement si le gouvernement maintient cette volonté, je veux dire, d'abolir ces conseils, on pense qu'il faut trouver une alternative à l'espace démocratique. Je pense qu'il aurait pu y avoir des voies mitoyennes; au lieu d'abolir l'ensemble des conseils, il aurait pu y avoir fusion des conseils, des responsabilités, tu sais, plus larges à un conseil, dans un contexte où on aurait permis, je veux dire... je dirais, une place à la démocratie participative puis à ne pas se passer de l'ensemble des expertises dans une société... Je regarde famille et enfance, l'expertise développée par ce conseil-là, je pense que le Québec avait de quoi à en être fier. Ça coûte peut-être quelques dollars, mais, des fois, je veux dire, il y a des économies... Il n'y a personne qui va arrêter de manger au nom de l'économie; ça fait que nourrir l'esprit, c'est aussi bon que nourrir l'estomac.
Pour ce qui est des fonds de recherche, regardez, je n'en remettrai pas beaucoup plus que ce que le président de la FQPPU vient de vous livrer: si ce n'est qu'une des préoccupations que la centrale nourrit dans ce dossier-là, c'est justement... c'est d'éviter de sombrer dans la recherche utilitaire à court terme. J'ai bien entendu la présidente du Conseil du trésor, cette préoccupation, puis je sais d'où vient son origine. Donc, je présume qu'il y a une préoccupation sur le social, sur la culture, sur le long terme. Et, dans ce sens-là, là aussi on dit: En quelque part, est-ce que... est-ce qu'il y a une économie? C'est quoi, l'efficacité supplémentaire qu'on vient placer?
Et, si, à défaut de faire cette démonstration d'une efficacité supplémentaire, d'une économie qui serait significative, pourquoi changer des choses qui fonctionnent? Pour jeter de la poudre aux yeux? Pour donner le sentiment: Regardez, on est actifs! Moi, je pense que ce n'est pas dans ce sens-là que la présidente nous a habitués. Ce n'est pas dans ce sens-là qu'on a vu les parlementaires... Habituellement, quand vous apportez un changement, c'est parce que... c'est parce qu'il y a des affaires à transformer. Et, de ce côté-là, on n'a pas trouvé, là, le fin fond... l'utilité de cette transformation-là.
**(16 h 40)** Pour ce qui est de RECYC-QUÉBEC, bien là, je vais me permettre d'abord de déclarer notre intérêt. La CSQ a un rapport de collaboration avec RECYC-QUÉBEC depuis plusieurs années. Je pense que la plupart des députés autour de cette table sont au courant, et à commencer par le président de la commission, de l'implication de la centrale dans l'éducation et... Et, dans ce sens-là, là aussi, ils ont dit: Oui, il y a peut-être des économies un peu plus réelles. Est-ce que ces économies-là en valent la chandelle? Est-ce que le ministère du Développement durable sera en mesure d'être aussi efficace, sur le plan opérationnel, que RECYC-QUÉBEC l'a été? Est-ce que, jusqu'à un certain point, la vocation éducative de RECYC-QUÉBEC sera maintenue? Donc, ça, c'est des inquiétudes à l'intérieur de nos rangs par rapport, encore là, à une société d'État qui avait un certain caractère d'indépendance, qui n'est pas nécessairement conditionnée par la politique ou la mode politique actuelle, capable d'avoir une vision moyen, long terme en termes d'éducation puis de travailler ou d'oeuvrer au développement durable.
Donc, dans le contexte, on dit: On pense qu'on aurait intérêt à garder la société. Mais, si on ne la garde pas, au moins préserver son espace, préserver, je veux dire, ces collaborations-là. Puis, je dirais, que les fonds soient au rendez-vous et, avec cette mission éducative qu'avait RECYC-QUÉBEC, bien, la poursuivre dans le ministère de l'Environnement, dans le ministère du Développement durable. Parce qu'actuellement, là, pour ce qui est de l'éducation au développement durable, ça ne s'est pas fait au niveau du ministère du Développement, là, ça... un peu plus en Éducation, puis, encore là, ça s'est atténué au fil des ans, et c'est par RECYC-QUÉBEC qu'on était en mesure, je pense, de développer, d'élargir les consciences. Puis, celles et ceux qui ont des enfants qui fréquentent les établissements scolaires du Québec, qui fréquentent des établissements verts Brundtland, ça, je pense qu'ils peuvent en témoigner autour de cette table, de l'impact de cette éducation, puis comment, je veux dire, ces consciences-là se répandent puis s'étendent puis que ça... ça se maintient à l'âge adulte.
Donc, en résumé, sur la Commission de l'équité salariale, le maintien pur et simple, on n'y voit aucun intérêt à court terme. On ne dit pas... Écoutez, la discrimination systémique, là, est séculaire, ça fait qu'avant d'avoir rétabli ça dans le bon ordre, ça va prendre au moins... je ne vous dirai pas ça va prendre un siècle, mais quelques années.
Sur le Conseil des services essentiels, peut-être une prudence à éviter la confusion des rôles.
Sur les conseils consultatifs, essayer de préserver un espace démocratique.
Sur les fonds, éviter la dérive ou un dérapage vers... Et ça, dans ce sens-là, on dit: Maintenir ce qui est là actuellement, parce qu'on n'a pas la démonstration évidente que les changements apportent une quelconque amélioration ou une économie, et ça nous prémunit contre les dérives utilitaristes.
Et, pour ce qui est de RECYC-QUÉBEC, bien on souhaiterait bien maintenir, mais, si on ne maintient pas, au moins préserver, je veux dire, le chantier qu'a développé RECYC-QUÉBEC au cours des ans.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Parent. Je reconnais maintenant Mme la ministre pour une durée maximale de 15 minutes.
Mme Courchesne: Merci beaucoup. Madame, monsieur, merci d'être parmi nous. C'est très court, 15 minutes, pour être capable de passer à travers, un peu... et vous l'avez fait avec un esprit succinct remarquable. Merci.
Donc, j'irai... D'abord, vous me permettrez, M. Parent, de commencer par le dossier de l'équité...
M. Parent (Réjean): ...
Mme Courchesne: De commencer par le dossier de la Commission de l'équité salariale, parce que j'ai eu l'occasion de rencontrer tous les chefs syndicaux sur cette question-là, et je veux... C'est reflété dans le projet de loi, mais je tiens à réitérer la position du gouvernement sur cette question-là, à l'effet que dans la loi il est dit que le gouvernement mettra en vigueur les articles qui touchent la commission au moment où le gouvernement jugera opportun.
Mais il a été dit aussi que nous allons certainement permettre à la commission de terminer son mandat actuel, parce qu'il y a beaucoup de travaux qui sont amorcés, notamment pour le secteur privé, qui restent à compléter, d'ailleurs où il y a bon nombre de petites et moyennes entreprises qui nécessitent de compléter ce travail-là, mais qui nécessitent aussi de travailler étroitement avec la commission. Donc, nous n'avons pas l'intention de mettre en vigueur ces articles concernant la commission tant que ces travaux ne seront pas terminés, ce qui veut dire quand même dans un certain temps. Il n'y a pas d'échéancier, mais on est conscients, vous l'avez mentionné, que nous avons beaucoup fait jusqu'à maintenant, et notre intention n'est certainement pas d'arrêter maintenant. C'est un dossier qui est trop important pour le Québec, mais pour les femmes du Québec notamment, et ça, ce n'est pas uniquement dans le secteur public, mais il faut que ça soit vrai aussi dans le secteur privé. Alors, je tiens à redire cet élément-là qui est très important.
Maintenant, je veux revenir un peu sur le Conseil des services essentiels par ailleurs, parce que le fait... je veux juste m'assurer qu'on convient ensemble que les décisions que prennent le conseil sont toujours des décisions habituellement dans une situation d'urgence -- habituellement -- très majoritairement, et qu'il n'y a pas effectivement au moment où on se parle de droit de révision; et que, dans ce sens-là, le conseil des relations du travail... Est-ce que vous convenez avec moi que la commission a un rôle semblable ou à tout le moins identique dans la façon... et dans sa façon de rendre les décisions, et que là il y a, je dirais, une -- je ne suis pas sûre que c'est le mot -- similitude, mais il y a certainement une accointance qui fait que... il y a une cohérence -- c'est le terme que je veux utiliser -- puisque vous avez dit que vous souteniez le gouvernement dans sa nécessité de réévaluer certains programmes, certains organismes, vous n'êtes pas contre ça, vous... On s'est déjà parlé souvent, vous êtes d'accord qu'il faut améliorer les services, l'efficacité, vous n'êtes pas contre ça. J'ai compris votre message. Mais est-ce qu'il n'y a pas là effectivement, dans un esprit de modernisation et dans un esprit d'efficacité aussi, est-ce que les deux entités sont à ce point éloignées? Je ne croirais pas, puisque, à la commission des services essentiels, on touche les relations de travail, forcément. C'est quand on veut faire une grève qu'on a recours aux services essentiels. Il y a quelque chose qui se ressemble, là.
M. Parent (Réjean): Vous avez pris quand même soin de dire que c'est... ce n'est pas mon chantier fort sur le plan juridique, mais il y a un élément. Parce que, je dirais, quand on parle de cohérence, la distinction profonde entre le Conseil des services essentiels puis la Commission des relations du travail, à la Commission des relations du travail, les commissaires sont neutres, impartial, ne sont pas partie au dossier. Ils entendent les parties... Non! Le Conseil des services essentiels est partie au dossier -- dans le contexte actuel -- et protecteur de l'intérêt public. Donc, en étant partie, il devient aussi juge, dans un contexte où on a une commission. Donc, c'est l'apparence de justice.
Et c'est là qu'on dit: Regardez, peut-être qu'on n'a pas l'idée de siècle à vous attacher là après le ministre, attacher le conseil après le ministre du Travail, mais la confusion des genres, que le commissaire devienne, à un moment donné, commissaire sur les services essentiels, commissaire par rapport à une accréditation, par rapport à un dossier de harcèlement psychologique... Donc, on aurait comme deux restrictions: celle de confusion des genres, plus... Déjà, la CRT en a plein les couverts. On a apporté... On l'a restructurée au début des années 2000 dans un contexte de lui donner une meilleure efficience, bien est-ce qu'on n'est pas en train de défaire ce qu'on a fait dans le passé, mais en plus... je veux dire, entre le caractère... le caractère neutre actuellement des commissaires et éventuellement des commissaires qui seraient partie au dossier? Là, c'est... Et là, regardez, ça, c'est les... je n'appellerais pas ça les subtilités juridiques, c'est pour ça que tantôt j'ai dit: Il y a fort probablement quelques avocats autour de la table qui pourront se payer une veillée là-dessus. Les nôtres, ça les inquiète.
Le Président (M. Huot): Mme la ministre.
**(16 h 50)**Mme Courchesne: Cela dit, M. Parent, on s'entend que, que ce soit la Commission des relations du travail ou la commission des services essentiels, je comprends que, pour vous, le Conseil des services essentiels a comme mandat de défendre le public. C'est là où vous dites qu'il est lié au dossier. Mais en même temps la Commission des relations du travail doit... en fait, pour moi, ces deux organismes-là travaillent d'abord et avant tout dans l'intérêt public, en fait doivent défendre l'intérêt public avant tout sur des bases juridiques que leur confèrent les lois. Les lois ne changent pas, on fait en sorte que les responsabilités sont dévolues, mais l'essence même de leur mission n'est pas changée, et ça reste balisé dans le cadre juridique. Mais est-ce qu'on ne convient pas qu'en quelque part le point... l'intérêt, c'est l'intérêt public dans les deux cas? Dans les deux cas. Et je trouve ça un peu fort quand vous dites qu'il est lié aux parties, là. Le conseils essentiels, c'est de s'assurer que les services sont fournis, là, tu sais, ce n'est pas lié à un individu ou ce n'est pas lié à un cas d'individu en particulier qui a une situation bien précise. Mais, dans les deux cas, on défend vraiment l'intérêt public, là. Je trouve que vous étirez l'élastique un peu, là.
Le Président (M. Huot): M. Parent.
M. Parent (Réjean): Si je peux me permettre encore un petit coup d'élastique, là?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Réjean): D'abord, un, déjà, en soi -- vous allez pouvoir le voir au mémoire -- le conseil n'avait pas les mêmes modes de procédure que la commission. Vous rappeler qu'on a déjà eu ce débat-là; M. Whissell, je pense, était ministre du Travail à ce moment-là, là, sur toute la question de la révision de la loi versus Commission de l'équité salariale, où, à un moment donné, certains courants qui voulaient que la commission puisse rendre jugement aussi, donc donne avis, indique qu'il y a ou pas discrimination systémique, elle doit revisiter...
Puis il y avait eu, je dirais, de ce côté-là, une forte résistance patronale, peut-être... mais y compris syndicale. Je dirais, il y a eu un consensus patronal-syndical et incluant le ministre pour dire, en quelque part, que la commission, je veux dire, qui a un pouvoir d'enquête, qui va émettre un avis puis après ça se juge elle-même de la validité de son avis. Ça fait que c'est pour ça, c'est dans ce sens-là.
Mon élastique est peut-être étiré, mais le sentiment, là, que la façon de fonctionner du conseil, la façon de la commission... Parce que c'est vrai qu'ils travaillent dans l'intérêt public. Je veux dire, les tribunaux aussi, l'ensemble des tribunaux. Je présume que toutes les institutions publiques qu'on met au service du citoyen travaillent dans l'intérêt public. Mais, encore là, je me réfère à celles et ceux qui connaissent ça plus que moi, madame, et...
Mme Courchesne: Ah...
M. Parent (Réjean): ...ils sont dans une dynamique qu'il faut éviter cette confusion des rôles, il faut voir les modes... les procédés. Et, moi, je mets en parallèle le débat qu'on avait eu autour de la Commission de l'équité salariale, où on ne voulait pas qu'elle soit à la fois partie et juge de ses propres recommandations.
Mme Courchesne: Je ne veux pas m'étirer sur le sujet, parce que je veux aborder un autre avec vous, mais est-ce que justement ce n'est pas une occasion aussi de faire en sorte qu'on puisse revoir de part et d'autre, dans la façon de faire, puis trouver, arriver à un principe qui soit correct pour que le même organisme puisse, dans ce même intérêt -- parce que je pense que c'est important -- puisse rendre les bonnes décisions? C'est ça qu'on cherche, au fond; c'est dans ce sens-là. Mais je suis consciente qu'on ne réglera pas ça maintenant, mais c'est peut-être aussi l'occasion d'ajuster ces façons de faire qui n'empêcherait pas effectivement de pouvoir travailler correctement.
Je voudrais vous parler de RECYC-QUÉBEC, M. Parent, parce que vous savez qu'au Québec il y a 21 CFER, et donc on en retrouve dans toutes les régions du Québec. Est-ce qu'on ne pourrait pas justement... et que les... il y a des directions régionales du ministère de l'Environnement aussi dans les régions du Québec, et qui... est-ce que vous ne croyez pas qu'un peu ces trois organismes... en fait, CFER, RECYC-QUÉBEC, ministère de l'Environnement, directions régionales... Quoi, ça fait 15 ans, là, RECYC-QUÉBEC, Mme Jean?
Une voix: Ça fait 20 ans.
Mme Courchesne: Ça fait 20 ans. Est-ce que vous ne croyez pas que... Tu sais, on a fait du chemin, on a parcouru du chemin, là, depuis 20 ans, là. Le Québec n'est plus aujourd'hui, en matière de recyclage, là, là où il était il y a 20 ans. Mais, en région, on se retrouve quand même avec des intervenants où il y a du dédoublement. Mais, dans ce cas-ci, il y a du chevauchement, en tout cas très certainement, et, dans ce sens-là, est-ce que ce ne serait pas le moment de travailler...
Parce que je comprends votre point: il faut garder notre capacité de travailler très étroitement avec les intervenants. Mais est-ce que les CFER, entre autres, ne sont pas là aussi pour participer aux objectifs qu'on doit rencontrer? Et est-ce que c'est nécessaire qu'on soit tous sur le même terrain?
Le Président (M. Huot): Oui. M. Parent.
M. Parent (Réjean): Je dirais, par rapport aux CFER, là aussi, on a bien compris que c'est... c'est un domaine qui nous tient à coeur. C'est un enseignant de la centrale, il y a quelques années, qui les a mis en place, tu sais. Et, moi, quand vous dites «dédoublement», «chevauchement», «dépenses inutiles», là, on va être tous sensibles à ça, et, quand on peut resserrer puis que finalement la solution vient une solution plus qu'un problème, là... C'est pour ça qu'on disait: Bien, actuellement, là, on trouve que ça a été très performant, RECYC-QUÉBEC. Ça fait que, quand on l'abolit, ça me semble dire... ou qu'on l'intègre, ou, quand je dis l'abolir, l'intégrer au ministère, c'est quoi, les fins? Comment est-ce qu'on préserve... je veux dire, qu'on s'assure que les bonnes opérations, que ce qui a été bien fait va se poursuivre? Quels types d'économies qu'on recherche vraiment? Et, ces économies-là, est-ce que ça va réduire l'efficacité opérationnelle qu'on avait? Si ça n'a pas ces effets-là, tant mieux. Si on maintient, je veux dire, la vocation éducative de RECYC-QUÉBEC... Parce que, moi, à mon avis, l'avenir du monde passe par l'éducation, passe par la sensibilisation. Et c'est assez rare qu'à 42, 43 ou 50, là, vous prendrez l'âge que vous voulez, là, en tout cas, tous des plus jeunes que nous deux...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Réjean): ...c'est là qu'on développe les bonnes habitudes. Je pense que plus on intervient de façon précoce... C'est le lot de l'éducation, on dit souvent: Intervenir de façon précoce. Donc, dans ce sens-là, préserver cette mission éducative.
Maintenant, on dit: Regardez, pourquoi est-ce que c'était nécessaire? Si vous nous dites que c'est nécessaire, on est capables de faire un bout de chemin là-dessus, là. Ce n'est pas une fermeture, on ne dit pas: On va les garder à tout prix. Mais on dit, par exemple: La mission puis les fondements, ça, ayez une grande préoccupation. Et en même temps, quand on renvoie ça à un ministère, des fois, tu sais, là c'est d'autres contraintes qui viennent se placer, certaines bureaucraties supplémentaires puis avec la mode du jour. Bien ça, je pense qu'on s'en est parlé assez aussi de l'impact, des pressions médiatiques et de la marge de manoeuvre que des fois les politiciens ont ou n'ont pas, là. Ça fait que c'est dans ce sens-là que RECYC-QUÉBEC avait quand même un fonctionnement autonome.
Le Président (M. Huot): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Je veux juste vous dire que, M. Parent, ça, c'est un bel exemple, pour moi, où ce n'est pas uniquement une question d'économie, là. Ce n'est pas uniquement une question d'argent. Le ministre de l'Environnement a déposé une politique, a fait évoluer les façons de faire là aussi, et, dans ce sens-là, je pense qu'il y a certainement une motivation de cohésion sur le terrain. Et là, à mon avis, face au citoyen qui, lui, doit utiliser les services puis il doit se conformer à des politiques qui sont quand même dans certains cas plus contraignantes et restreignantes, qu'on soit capables d'avoir un seul lieu où on a cette nécessaire coordination, cette nécessaire cohésion et s'assurer qu'on travaille tous avec les mêmes orientations, ça, ici, je trouve qu'on a là probablement un exemple d'efficacité, là. Il y aura toujours des embûches, là, il y aura toujours des contraintes, il y aura toujours des améliorations à apporter, là. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y a pas des ajustements à faire, y compris au ministère. Mais est-ce qu'il n'y a pas là -- et je termine là-dessus, je ne vous demande pas de commenter -- mais là un très, très, très bel exemple dans l'amélioration du service au citoyen, qui, lui... puis citoyen, souvent entreprise, là, on s'entend, qui doit se contraindre à ça? Je pense que, là, on vient de simplifier la vie dans ce domaine-là.
Le Président (M. Huot): Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant le député de Richelieu.
M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président, Mme de Sève, M. Parent, toujours un plaisir de vous voir. Là, vous avez abordé aujourd'hui beaucoup de sujets, hein? Donc, on est obligés d'aller un peu rapidement. Alors que, depuis le matin, on était concentrés sur un secteur très particulier, alors là vous nous forcez un petit peu à jeter un coup d'oeil sur plein de choses. Moi, je vais me restreindre à deux ou trois secteurs où vous êtes beaucoup plus concernés, hein, les organismes qui touchent... Vous êtes un syndicat dans le domaine du travail, et je pense que votre opinion là-dessus devra être prise en compte lorsque des décisions finales se prendront.
La première, ça concerne l'équité salariale. Il y avait déjà, dans le rapport Geoffrion, une note disant qu'il souhaitait que... le faire disparaître, mais en même temps il disait: Il faudrait qu'il y ait un rapport sur le fait que la mission est bien remplie.
On sait qu'il y a eu accélération, parce qu'il y avait des dates limites jusqu'au 31 décembre. Il y a eu accélération cet automne, mais est-ce qu'on peut dire à ce moment-ci que la mission de la Commission de l'équité salariale est terminée, que, mission accomplie, 100 % des entreprises observent la loi? Vous voyez un petit peu où je veux en venir? C'est qu'on... Il ne faut pas que des organismes survivent à leur mission.
Il y avait -- c'est Churchill qui racontait ça, parce qu'il l'avait aboli en 1947 -- il y avait un organisme qui surveillait les côtes anglaises, dans la peur du débarquement des troupes napoléoniennes. Elles avaient réussi à survivre 130 ans à la mort de Napoléon. Il faut faire attention de ne pas avoir des organismes qui, comme ça, survivent à leur destin. Mais est-ce que, dans le cas de l'équité salariale, on en est rendu là?
**(17 heures)**M. Parent (Réjean): Non. La réponse est... Et, je pense, à sa face même, Mme Courchesne l'a dit tantôt, la mise en vigueur de l'article de loi viendrait avec le constat de. Alors, nous, on dit: Non, ce n'est pas... on est loin. Loin s'en faut, là. Je ne sais pas si on... Je pense qu'on dépasse légèrement le 50 %. On vient d'élargir d'ailleurs le mandat aux entreprises de 10 personnes et moins. Puis, avant d'avoir inscrit ça, là, dans la culture, d'avoir fait quelques cycles de maintien, je pense qu'il reste beaucoup à faire.
Ça fait que où est la précipitation de le faire maintenant? Ça aurait pu, je veux dire, au moment venu, un projet de loi spécifique qui dit: Bien, nous avons atteint. Puis, moi, je suis d'accord avec vous, là, Napoléon est mort. Puis, quand l'équité sera faite partout, bien on fera comme Churchill. Mais, en attendant, ce n'est pas rendu encore là. Il y a encore quelques napoléoniens au niveau de la discrimination en matière de... salariale.
M. Simard (Richelieu): Un autre domaine totalement différent -- on saute du coq à l'âne, mais on n'a pas le choix -- c'est le Conseil des services essentiels. Moi, je pense que ça a été la création d'un organisme qui a été extrêmement utile au cours des 25, 30 dernières années. Je sais que les syndicalistes en général ont eu souvent des... beaucoup de bémols par rapport à ça. Il y a eu des situations difficiles parce que, la ministre le disait tout à l'heure avec raison, le conseil, il est effectivement partisan et théoriquement il est là pour défendre le public, les services essentiels à la vie correcte d'une société.
Alors, parfois ça fait plaisir aux syndicats. Des fois, ça ne fait pas plaisir. Des fois, ça fait plaisir aux patrons, en tout cas, là, ou à l'État souvent, mais parfois ça ne lui fait pas plaisir du tout. Mais, moi, je constate que, dans les rapports de force nécessaires dans les relations de travail, ça a été un organisme dont on peut dire aujourd'hui que le bilan est très positif. C'est mon point de vue.
Je ne vois pas en quoi son abolition ou la transmission de ses responsabilités à un autre organisme permettrait de maintenir la première qualité d'un organisme comme celui-là, c'est-à-dire sa crédibilité: crédibilité auprès du monde du travail, crédibilité auprès de la population. On a un lieu qui, jusqu'à aujourd'hui en tout cas, me semble être crédible aux yeux de la population pour arbitrer ces questions qui sont souvent des questions difficiles et d'urgence.
Évidemment, le résultat ne plaît pas toujours immédiatement à tout le monde, mais, au total, est-ce que vous pensez vraiment que la Commission des normes du travail pourrait faire la même chose? Pourquoi on changerait ça?
M. Parent (Réjean): Tu sais, j'ai essayé de le démontrer tantôt. D'abord, un, premier questionnement, tu sais: Si on est à la lumière des économies réalisables, c'est quoi, la nature des économies recherchées par rapport à ça? Tu sais, y a-t-il une économie ou y aura-t-il surcharge de la CRT? Et ça, on est prêts à entendre des explications, parce qu'on n'en a pas eu beaucoup, d'explications à cet effet-là. Puis je ne veux pas jeter de pierre à personne, là, mais on est plus à essayer de saisir et de comprendre.
D'entrée de jeu, j'aurais dit: Bien, écoutez, si on peut améliorer l'efficience ou s'il y a des choses qui peuvent se faire différemment, on n'est pas contre. Mais où on a un certain frein, puis c'est pour ça qu'on dit: Ce n'est peut-être pas nécessairement la bonne place, à la CRT, c'est la nature du conseil. Puis là je ne veux pas répéter toute la question du caractère partial par rapport à un tribunal impartial et... Puis c'est correct que le conseil, je veux dire, soit partie puis prenne la défense de l'intérêt public. Puis, je vous dirais, ma relation au Conseil des services essentiels comme président de centrale ou comme président de syndicat ou travailleur au cours des dernières années, je veux dire, c'est 50-50. Il y a des fois que j'ai été très heureux puis d'autres fois, moins heureux. Mais je pense qu'effectivement vous avez raison de dire: Ça fait son travail.
Et là on veut éviter la confusion des genres puis on veut garder toute l'apparence, je veux dire, de neutralité et la neutralité de la commission, en même temps, là, cesser que le conseil, il ait un mode de procéder différemment, médiation; ses audiences ne sont pas faites dans la même nature de ce qu'on retrouve à la Commission des relations du travail. Ça fait que c'est sous cet aspect-là.
Maintenant, regardez, s'il y a des questions administratives puis on peut l'attacher ailleurs, puis ça va lui permettre de faire le même travail, on est ouverts à regarder ça. Mais on pense que ce n'est pas à la CRT, la place.
M. Simard (Richelieu): Et vous...
M. Parent (Réjean): ...ça pourrait rester comme ça, quant à nous, parce qu'on ne nous a pas fait de démonstration d'économie à ce niveau-là, là.
M. Simard (Richelieu): Ça, c'était très important. On l'a dit ce matin, puis je pense qu'on doit continuer à le dire tout le temps: on va examiner la pertinence de chacun des articles de ce projet de loi à la lumière de la mission. Est-ce que ça remplit vraiment la mission? Est-ce que la mission est toujours pertinente puis est-ce qu'elle se remplit bien? Et, deuxièmement, est-ce qu'il y a de vraies économies? Puis là il y a un rapport à faire entre les économies et le résultat.
Dans ce cas-ci, le Conseil des services essentiels, c'est comme les pompiers. Ça ne travaille pas toute l'année tous les jours, mais ça se prépare pour les moments où il y a des feux. Le Conseil des services essentiels, je ne le vois pas faire beaucoup d'autres choses que ça, là, tu sais, sinon il risque d'être un petit peu en contradiction ou en tous cas en conflit avec sa première mission. S'il s'occupe d'autre chose, il risque de mal s'occuper de ça.
Alors, moi, je retiens de votre intervention là-dessus, là, c'est que la démonstration reste entièrement à faire quant à l'abolition ou à la transformation du Conseil des services essentiels.
M. Parent (Réjean): ...moi, je... oui, la démonstration reste à faire. Puis on dit: Il faut que la solution... Parce que, moi, je peux être sensible puis sympathique à la quête de solutions, Mme Courchesne, mais il faut que la solution devienne, je veux dire, justement une amélioration, pas de rendre inefficaces des structures qui existent actuellement puis qui génère... finalement qui générerait zéro économie, là.
Ça fait que, de ce côté-là, je pense qu'on a placé... on a bien placé nos préoccupations. Puis on va suivre avec attention le cheminement puis l'évolution de ce dossier-là.
M. Simard (Richelieu): Le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, le député d'Argenteuil le connaît bien. Ça fait partie un peu du modèle québécois de discussions un peu permanentes et qui permettent de voir à l'évolution des lois du travail en tenant compte de l'évolution de la société. Je n'ai jamais... je n'ai pas entendu beaucoup de gens qui réclamaient sa disparition. Évidemment, ça ne prouve pas son utilité tous les jours. Ça ne se réunit pas tous les 15 jours non plus. Mais le fait de l'intégrer -- puis ça, c'est valable dans plusieurs secteurs de ce projet de loi -- le fait d'intégrer les activités d'un conseil comme celui-là à l'intérieur d'un ministère, est-ce que ça ne lui fait pas perdre son statut un peu de lieu neutre, de lieu... Tout à l'heure, une intervenante dans le groupe précédent parlait d'un élément peut-être essentiel de notre modèle de société où on a des lieux où la société civile peut conseiller le gouvernement et en toute liberté. Quand on est à l'intérieur d'un ministère, l'élément «en toute liberté» n'est pas le même.
Alors, est-ce que vous allez vous sentir aussi à l'aise dans un... ou trouver ça aussi utile, un conseil consultatif qui fait partie d'un ministère, qu'un statut un petit peu parallèle? Ce n'est pas une question de religion, évidemment, là.
M. Parent (Réjean): Bien, d'abord, un, j'ai indiqué que, du côté du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, il s'est fait un travail de fond de concert avec le ministère du Travail, de concert avec la présidente du Conseil du Trésor, partie patronale, partie syndicale. Je pense que ce qu'on retrouve dans le projet de loi reflète, je veux dire, un consensus. Je ne vous dis pas qu'on était à 100 % d'accord avec tout ce qu'il y a là, comme la partie patronale, 100 %, mais je pense qu'il y a là le reflet, là, d'un travail qui s'est fait en amont, une évolution, je veux dire, de chacune des parties et de concert avec le gouvernement. Et, dans le contexte actuel, moi, je pense que la nature puis les garanties qu'on retrouve à l'intérieur du projet de loi nous conviennent.
Ça fait que d'ailleurs c'est pour ça qu'on n'a pas de recommandation sur le CCTM. On est capables de vivre avec le projet de loi. Dans la mesure où ce qui est ancré là demeure... je ne dirais pas pour des siècles et des siècles, mais sur le moyen et long terme, on pense qu'on a la même capacité d'intervention, la même indépendance. Et ça, de ce côté-là, là, je salue le travail qui a été réalisé, qui a été fait de concert avec la présidente du Conseil du Trésor. Puis le ministre du Travail à ce moment-là était M. Hamad, et ça s'est fait, je dirais, dans une sérénité certaine puis avec des échanges mutuels. Je pense que ça permet d'apporter des vraies solutions. Je ne dis pas qu'il y a des... Je l'ai dit tantôt, là, il n'y aura pas des centaines de milliers de dollars d'économies là-dedans. Mais, si ça permet de réduire l'administratif, la bureaucratie, de faire un rapport distinct du conseil consultatif, qui finalement ne venait pas rajouter vraiment, là...
**(17 h 10)**M. Simard (Richelieu): ...là-dessus, il y a une entente. C'est le résultat de discussions antérieures. Et, là-dessus, quand un projet de loi reflète... Je voudrais bien que tous les aspects de ce projet de loi en soient au même point, mais, dans ce domaine-là, on va être très satisfaits de cet accord. Merci.
M. Parent (Réjean): ...on aimerait ça. Là-dedans, on est satisfaits.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Je reconnais maintenant le député de Shefford pour trois minutes.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs dames. Ce projet de loi est né du dernier budget. La ministre le dépose aujourd'hui, on commence les consultations. C'est un projet de loi qui amène fusion et abolition de 28 organismes. On veut générer des économies d'à peu près 10 millions de dollars, améliorer la gouvernance, la reddition, l'efficacité. Je ne suis pas d'accord avec tout, mais c'est là.
Et, si je vais aux recommandations de votre mémoire et je prends le premier point, il y a «rejeter l'idée de transférer la Commission de l'équité salariale», il y a «ne pas transférer le Conseil des services essentiels», il y a «renoncer à la fusion ou à l'abolition des conseils consultatifs», il y a ne pas donner suite au projet de fusion des fonds de recherche québécois ainsi qu'à l'abolition du Conseil de la science et de la technologie et de conserver RECYC-QUÉBEC. Ça, pour moi, c'est le statu quo. Il n'y a pas grand-chose qui peut faire avancer ou trouver des solutions, peu importe comment on va y en arriver, mais le sens même de ce projet de loi, c'est de trouver des économies à quelque part.
Alors, ce que je vois là-dedans, c'est la négation soit d'avancer ou de ne pas trouver de solution. On fait quoi?
M. Parent (Réjean): D'abord, un, je veux dire, entre l'écrit... au même titre qu'un gouvernement qui écrit un projet de loi, vous aurez compris que la centrale va écrire un mémoire à la lumière, je veux dire, de ses orientations. Je pense que, dans le cadre des échanges qu'on vient d'avoir, vous aurez vu des nuances. Vous aurez vu que... une capacité de bouger sur certains sujets. Autant le gouvernement se donne le privilège et le droit d'ancrer, je veux dire, sa vision, vous permettrez à la centrale d'en faire autant. On est de ceux qui veulent avancer, pas reculer. Et, dans le contexte actuel, quand on sort, je veux dire, tu as des économies de 10 millions. Je veux dire, sur certains aspects, on n'a même pas émis un mot, là. On n'a pas marqué de désaccord ou d'accord. Il y en a 30, organismes, dans le projet de loi.
Ça fait que donc d'être soucieux des finances publiques, de voir, tu sais: Est-ce qu'on peut rendre plus efficientes certaines institutions?, pas de problème, dans la mesure où ça devient une vraie solution. En même temps, je veux dire, évidemment on regarde ça avec la lunette du projet de loi n° 130. Évidemment, vous permettrez à la centrale de le regarder sur un ensemble budgétaire un peu plus complexe. Mais... Et c'est pour ça que j'ai dit d'entrée de jeu: Il n'y a pas de petites économies, on peut acheter ça. Mais il peut y avoir des mauvaises économies si on fait un choix qui finalement s'avère plus coûteux pour l'État du Québec dans les années suivantes parce qu'on a lésiné ou sous-estimé l'impact de certains apports.
Tu sais, je regarde. Je reprends, encore là, le Conseil des services essentiels. Ça dit: Bien là, on va économiser, on fait disparaître ça pour intégrer ça à la CRT. Mais, la CRT, qui actuellement connaît un bon degré d'efficacité, une vitesse de traitement, la justice est rendue rapidement, si ça a pour effet d'étirer les délais, de créer des situations conflictuelles dans les milieux de travail, des tensions puis coûter finalement à l'ensemble des contribuables puis des employeurs québécois, vous allez dire: Bien, finalement, tu sais, l'économie s'est transformée en grande dépense.
Ça fait que c'est pour ça que je l'ai dit d'entrée de jeu, on n'est pas insensibles. Sur ces aspects-là, tu sais, on pense qu'on aurait dû rester comme ça. Mais, après avoir dit ça, on dit: On est prêts. Puis, je pense, j'ai ouvert mon livre assez ouvert. Puis c'est télédiffusé...
Le Président (M. Huot): Merci.
M. Parent (Réjean): ...ça fait que vous allez pouvoir le reprendre.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Parent, Mme de Sève, de la CSQ. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
J'invite maintenant les représentants de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux à prendre place. Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise à 17 h 16)
Le Président (M. Huot): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons le cinquième et dernier groupe de l'après-midi, nous recevons l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux. Je rappelle aux représentants que vous avez 15 minutes pour faire votre exposé. Il y aura par la suite une période d'échange de 30 minutes.
Évidemment, compte tenu de l'heure, je vais avoir besoin du consentement des membres pour poursuivre après l'heure indiquée. On devait terminer pour 17 h 45, donc évidemment vous comprenez qu'on a pris quelques minutes de retard.
Ce sera sans doute M. Potter qui fera la présentation. Donc, vous avez l'habitude des commissions parlementaires, de nos travaux. Je vous demande de vous identifier et de présenter les personnes qui vous accompagnent. Par la suite, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous.
Association québécoise d'établissements
de santé et de services sociaux (AQESSS)
M. Potter (Alex G.): M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent ce soir. En plus de la directrice générale de notre association, Mme Lise Denis, les représentants de nos établissements membres sont Mme Gertrude Bourdon... Elle est directrice générale du Centre hospitalier universitaire de Québec, le CHUQ, et membre du conseil d'administration de l'Institut national en excellence en santé et en services sociaux, l'INESSS. Et, à ma droite, c'est Mme Francine Dupuis. Elle est directrice générale du CSSS Cavendish. C'est un centre affilié universitaire, qu'on appelle un CAU. Ils ont accepté de soutenir notre mémoire à partir de leur propre expérience. C'est une habitude qu'on a prise d'amener du monde qui gèrent les établissements pour vous donner des exemples concrets et partager leurs expériences.
Mesdames et messieurs, nous vous remercions de nous permettre d'exposer notre point de vue sur la volonté gouvernementale de fusionner ces trois fonds, les trois fonds de recherche du Québec. C'est la première fois que notre association participe à cette commission, donc je vous présente un peu notre association. En tant qu'association, nous parlons au nom de 134 établissements publics, soit l'ensemble des centres hospitaliers, des centres de santé et services sociaux, des CHSLD et les centres hospitaliers universitaires. Nous avons notamment pour mission de représenter et de soutenir nos membres et d'agir comme chef de file pour assurer la qualité des services et la pérennité du réseau de la santé et des services sociaux.
C'est dans cet esprit que nous avons souhaité participer à cette consultation. Il faut que vous sachiez que la majorité de la recherche biomédicale et de la recherche dans le domaine social au Québec se réalise dans les 17 CHU, CHA et instituts et les six CSSS affiliés universitaires, tous membres de notre association. Les centres de recherche en milieu hospitalier reconnus par le FRSQ hébergent ainsi la quasi-totalité des infrastructures de recherche en santé au Québec et emploient des milliers de personnes. C'est pourquoi il était important pour nous de venir vous exposer nos préoccupations concernant la loi n° 130.
Je demanderais à Mme Lise Denis de vous résumer notre position. Merci.
Le Président (M. Huot): Mme Denis.
**(17 h 20)**Mme Denis (Lise): M. le Président, Mmes, MM. les députés, je sais que nous avons peu de temps, aussi je ne rappellerai que quelques grands éléments de notre mémoire avant que nous passions à la période d'échange et de questions.
Je tiens d'abord à réaffirmer notre accord avec les objectifs poursuivis par le gouvernement dans l'ensemble de ce projet de loi, à savoir l'allégement des structures, la simplification des procédures, le regroupement des services, la mise en commun des expertises, la recherche de nouvelles synergies. Deux des fonds visés par les articles 55 à 94 ont d'ailleurs déjà procédé au regroupement de leurs directions des ressources humaines, financières, matérielles et informationnelles. Selon ce que l'on sait, ce regroupement s'est fait dans l'harmonie et porte ses fruits. Nous savons de plus que, dans le même esprit, les trois fonds de recherche ont déjà fait part au gouvernement de leur volonté d'aller plus loin en regroupant sous une seule autorité l'ensemble de leurs services administratifs.
Le fonds de recherche du Québec sont donc déjà sensibilisés par les questions de performance et d'efficacité et partagent, eux aussi, les visées de rationalisation. Ils avaient déjà fait des efforts en ce sens d'ailleurs bien avant le dépôt du projet de loi n° 130.
Ceci étant dit, il est important que vous sachiez que les établissements membres de notre association, particulièrement les CHU, les CHA, les instituts et les centres de santé et services sociaux associés universitaires sont d'abord préoccupés par la question de la répartition et du maintien du financement de chacun des secteurs de recherche à l'intérieur d'une éventuelle structure unifiée. En effet, il n'est pas précisé dans le projet de loi comment se ferait la répartition des enveloppes entre les trois grands secteurs de recherche. L'article 70, entre autres, donne au ministre un pouvoir de «directives sur les orientations et les objectifs généraux que le fonds doit poursuivre, notamment en ce qui concerne l'équilibre entre les enveloppes budgétaires allouées». Nous nous demandons ce que le législateur entend par «équilibre» et sur quelle base le ministre se fonderait-il pour procéder à cet équilibre.
Nous croyons d'ailleurs qu'il y a lieu de maintenir la présence d'un conseil d'administration propre à chaque fonds. Ce sont des entités qui ont démontré leur grande capacité à mobiliser et à structurer chacun de leurs secteurs. Cela a eu un effet important, un effet de levier pour générer des retombées financières majeures pour le Québec dans le secteur de la recherche scientifique.
Le maintien d'un conseil d'administration propre à chaque fonds permet également de les protéger et de leur conférer une indépendance relative. Cette indépendance entre les chercheurs et les intérêts ou les points de vue particuliers est la base de la rigueur scientifique, laquelle est la base de sa crédibilité.
Les trois fonds de recherche du Québec couvrent ensemble un éventail très large de compétences, de disciplines et de domaines de recherche pour lesquels il faut absolument prévoir des approches et des programmes correspondant à leurs caractéristiques particulières. Toutefois, le projet de loi n° 130 assujettit le travail de ces conseils sectoriels à l'autorité d'un conseil d'administration dont il est difficile de déterminer le rôle exact, compte tenu du pouvoir de directive du ministre sur les orientations et les objectifs généraux du fonds et compte tenu aussi des multiples responsabilités qui seraient confiées aux conseils sectoriels.
En d'autres termes, ne risque-t-on pas ainsi d'alourdir plutôt que d'alléger le système? La loi nous ferait passer de trois entités distinctes et complémentaires à une structure plus lourde constituée de quatre entités regroupées sous une même appellation. L'exercice nous semble périlleux.
Pour ce qui est de la nomination d'un scientifique en chef, on peut raisonnablement se demander s'il est approprié de confier à la même personne la présidence des trois comités sectoriels chargés de la planification stratégique des programmes et de l'évaluation des demandes pour tous les secteurs couverts en plus de lui demander de comprendre, sinon de maîtriser tous les champs de recherche compris dans la mission du fonds que souhaite créer ce projet de loi. Cela s'ajouterait à ses fonctions liées à la direction générale d'un organisme employant moins de 100 personnes. Confier toutes ces responsabilités à une seule personne nous apparaît irréaliste.
En conclusion, notre association estime que, tel que formulé dans le projet de loi n° 130, le regroupement à ce moment-ci des trois fonds ne peut offrir de garantie ferme quant à la protection des spécificités de chaque secteur, tant sur le plan de l'expertise que sur celui des enveloppes budgétaires allouées. Cela risque de mettre en péril des années d'efforts et d'avancées réelles dans le vaste domaine de la recherche au Québec. Quoi qu'on en dise, le dispositif qu'on projette de modifier avec l'actuel projet de loi fonctionnait à la satisfaction de tous, notamment des partenaires du milieu. Au surplus, de nombreux services étaient déjà regroupés.
Nous ne pouvons que déplorer la volonté gouvernementale de fusionner à tout prix des entités dont le rendement est remarquable en termes de retombées économiques, de création et de maintien d'emplois de qualité et de rayonnement international. La fusion souhaitée par le législateur nous apparaît prématurée. Elle n'atteint pas les objectifs d'allégement des structures, de simplification des procédures et de réalisation d'un plus grand nombre d'activités intersectorielles ou transversales. Selon nos membres, cette fusion risque plutôt de fragiliser des organismes qui ont démontré leur efficacité et leur capacité à faire fructifier les subventions qui leur ont été versées. Elle ne répond pas non plus à aucune demande de la part du milieu de la recherche ni des entreprises et menace de dégrader les réseaux établis dans chacun des secteurs de la recherche au Québec.
En conséquence, selon nous, les articles 55 à 94 devraient être retirés à ce moment-ci. Et cela pourrait permettre, au besoin, que s'amorce au Québec une réflexion plus large sur l'avenir de la recherche. Merci pour cette partie-là.
Juste un commentaire: vous allez retrouver... Je n'ai pas... on n'a pas prévu faire un long topo là-dessus, mais vous allez retrouver dans notre mémoire quelques commentaires en annexe sur la fusion entre la CHQ et la SIQ, l'intégration de la CHQ à la SIQ. Nous ne sommes pas contre. Simplement, nous voulons... nous avons rappelé en annexe certaines précautions qu'il nous apparaît important de prendre au moment où on fera cette intégration. Merci.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup. Donc, nous allons procéder à la période d'échange. Je reconnais Mme la ministre pour une période de 15 minutes.
Mme Courchesne: Hein? Là, on a trois dames et un monsieur. Ça fait changement pour finir la journée. Alors, mesdames monsieur, mesdames...
Une voix: ...
Mme Courchesne: Ah, bien là! Si l'homme est malade, là, méfions-nous. Méfions-nous de l'homme malade. Non, ça... Et vraiment, sincèrement, merci d'être là. Et on vous souhaite vraiment la bienvenue, malgré l'heure tardive. Et je sais que vous êtes là depuis le matin, alors ça démontre votre intérêt sur le sujet, mais je vous remercie sincèrement d'être présents.
Je veux juste revenir un peu sur ce que je viens d'entendre, dans le fait qu'il y a -- et vous n'êtes pas les seuls à avoir exprimé ça aujourd'hui -- une crainte que le ministre soit davantage celui qui oriente, décide, ou je ne sais trop. Mais très franchement, là, actuellement, qu'on ait trois fonds ou qu'on ait un fonds, actuellement le ministre, il donne des orientations. Le ministre, actuellement il approuve les demandes budgétaires, mais il oriente aussi les montants qui sont octroyés, c'est-à-dire, il décide des montants qui sont octroyés. Il a un droit de regard sur les programmes, en fait. Et le plan et les planifications stratégiques et le plan triennal d'activité, tout ça est tout soumis au gouvernement et donc soumis aussi au ministre, et le plan d'activité triennal doit tenir compte des directives du ministre. C'est dans la loi actuelle.
Alors là, il y en a trois. Là, il va y en avoir un. Mais les pouvoirs, je veux qu'on soit bien clairs, là, les pouvoirs du ministre, ils ne changent pas... ou les interventions du ministre, ça ne change pas.
Est-ce que le fait de regrouper, ça ne donnerait peut-être pas plus de liberté même aux fonds de recherche, d'une certaine façon? Moi, je reviens sur le poids, sur la force, parce que, moi, j'ai parlé ce matin du renforcement du positionnement de la recherche au Québec dans le monde entier, mais prenons ça aussi d'un point de vue autre et de dire: Est-ce qu'il n'y a pas là un poids plus grand pour faire pression sur le ministre aussi, là, d'une certaine façon, et que, dans ce sens-là, puis là je ne vais pas dire ça méchamment, là, ne prenez pas ça au pied de la lettre, mais il y en a trois, diviser pour mieux régner, tu sais? Tandis que, s'ils sont regroupés dans un, le ministre, là, veux veux pas, le rapport de force, il vient de changer aussi par rapport à ça.
Donc, il a toujours aussi cette obligation non seulement d'écouter, mais... Tu sais, il y a un argumentaire qui va se développer, mais il me semble qu'il y a là un poids plus important de la recherche québécoise, là. Vous comprenez ce que je veux dire. Vous avez assez d'expérience et l'habitude de travailler avec nous, les ministres, pour faire valoir vos points de vue. Et vous êtes vous-mêmes un regroupement. Je veux vous entendre là-dessus. Qu'est-ce qu'il y a de changé, dans le fond?
Le Président (M. Huot): Mme Denis.
**(17 h 30)**Mme Denis (Lise): Oui. Alors, la première chose, je dirais qu'on comprend très bien que dans le projet de loi les exigences par rapport, tu sais, au dépôt de son plan, de sa planification stratégique, etc., c'est les mêmes, les mêmes que tout organisme. Là où il y a une inquiétude, je pense, c'est lorsque de façon plus spécifique -- puis c'est l'article 70, là -- de façon plus spécifique on parle d'équilibre dans les fonds. L'équilibre des fonds, là je pense qu'il y a vraiment une inquiétude, parce que que veut dire l'«équilibre»? Est-ce que ça veut dire prendre des fonds consacrés à la santé, les amener ailleurs? Est-ce que ça veut dire prendre des fonds du côté social, les amener ailleurs? Je pense que le fondement de la préoccupation, il vient de là, au-delà des exigences normales posées à tout organisme gouvernemental.
L'autre chose que je vous dirais, quand vous évoquez le fait qu'en regroupant nos forces ça peut être plus fort par rapport à une pression sur le ministre, je ne sais pas si c'est une invitation, mais...
Des voix: ...
Mme Courchesne: Vous n'avez pas besoin de ça, d'invitation, vous.
Mme Denis (Lise): Mais je pense que... Puis on regarde dans les travaux qui ont été faits dans les deux dernières années, particulièrement dans la dernière année, il y a des efforts impressionnants des trois fonds de travailler ensemble, et ce, tant sur, je dirais, les modes de gestion, hein, et de gouvernance que sur des secteurs de recherche dans lesquels ils souhaitent que les efforts convergent. Et je pense que, nous, un peu le propos qu'on a, c'est pour ça, dire... Peut-être qu'il faut faire une réflexion plus large. Mais le propos qu'on a: On ne voit pas la valeur ajoutée de remettre par-dessus les trois un conseil d'administration hors que ces efforts-là de faire converger de façon plus importante les façons de gouverner, les critères, par exemple les critères, pour les chercheurs, du côté des femmes, la place des femmes en recherche, les trois fonds s'entendent pour regarder ça ensemble, toute la question des thèmes de recherche sur lesquels ils se sont entendus.
On sait qu'il faut investir plus, c'est-à-dire s'investir plus pour que les recherches soient transversales. Mais on dit: Il nous semble que les ingrédients qui se sont mis en place depuis au moins un an sont propices à favoriser ce genre d'approche là et qu'il n'y a pas... il ne nous semble pas y avoir de valeur ajoutée, en tout cas à ce moment-ci, à rajouter par-dessus un conseil d'administration qui regrouperait tout le monde. Je pense, c'est le sens du propos que...
Mme Courchesne: Je veux juste compléter sur ce que vous venez de dire, et je comprends ça, puis je le respecte, puis je suis consciente, puis j'applaudis les efforts faits. Mais, si on est tous autour d'une même table, en termes d'efficacité, sincèrement ça va plus vite, c'est plus facile. En tout cas, regarde... Mais on peut se dire ça. C'est parce que j'essaie de voir les arguments a contrario, il peut aussi... Ça peut être une valeur ajoutée. Ça peut être plus facile, effectivement. Bon. Ça, c'est un aspect.
Moi, je veux revenir sur l'article 70, parce que l'article 70 dit: «Le ministre peut donner des directives sur les orientations et les objectifs généraux que le fonds doit poursuivre, notamment en ce qui concerne l'équilibre entre les enveloppes budgétaires». Est-ce que vous ne croyez pas que c'est une protection? Ça veut donc dire que le ministre, là, il doit s'assurer qu'effectivement il y a cette répartition, et il y a un équilibre, et qu'on vient empêcher qu'il y ait une concentration dans un fonds ou dans un secteur plus qu'un autre.
Moi, je vois cet article 70 comme étant justement une obligation pour le ministre de respecter cet équilibre-là, donc une protection pour dire: En sorte, les trois fonds devront avoir leur juste part. Je suis un peu étonnée qu'on ne le voie pas dans cet espace... S'il n'y avait pas le mot «équilibre», là je trouverais qu'on donne un très, très gros pouvoir au ministre, là. Mais on lui donne une balise en disant: Ah, ah, attention! il faut que vous assuriez qu'il y a un équilibre dans la répartition.
Mme Denis (Lise): Oui. Mais en même temps je pense qu'il y a des... Puis je pense que j'ai des collègues qui veulent intervenir aussi. Mais je pense qu'il faut voir que, dans les fonds actuellement, si on prend... Si on dit «l'équilibre actuel», c'est une chose. Protégez... La protection des enveloppes, au moment où on se parle, on sait qu'elle continue d'évoluer, je veux dire, toute la stratégie, d'ailleurs, gouvernementale qui permet ça. Mais la protection des proportions dans les enveloppes nous semble fondamentale à ce moment-ci. Il y a de l'histoire, aussi, autour de ça, hein, je pense que... Mais le texte du projet de loi parle d'équilibre mais ne dit pas que c'est la protection de... je dirais, des proportions, ou de l'équilibre actuel, ou... Il y a quelque chose qui ne permet pas d'avoir cette assurance-là. Je pense que c'était ça, le propos. Je pense que Mme Dupuis...
Mme Dupuis (Francine): Bien, ce que j'aurais peut-être aimé ajouter, c'est que -- effectivement, je me suis payé le luxe de passer la journée avec vous, je trouve ça extrêmement intéressant. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut se permettre souvent -- vous avez entendu comme moi tous les gens des fonds ce matin, et, moi, une chose qui m'a frappée dans ce qu'ils disaient, c'était à quel point leurs conseils d'administration actuels sont tricotés serré avec leurs missions. Ce sont des gens qui viennent de leurs milieux, ce sont des gens qu'ils ont recrutés pour leurs connaissances, leurs compétences et leur dévouement dans ce secteur de la recherche là.
Pour avoir fusionné huit établissements, je connais ça, avoir toute sorte de monde autour de la table, je peux vous le dire. Et ça peut être très bien et ça peut être le bordel. Parce que, si vous mettez ensemble des gens qui croient en une mission, qui travaillent fort -- puis c'est des bénévoles -- et qui font marcher une boutique très, très bien, puis tout à coup vous faites un minestrone avec tout ce monde-là autour de la table, dans des secteurs qu'ils ne connaissent pas, qui ne les intéressent pas vraiment nécessairement, ça peut prendre très longtemps avant que vous ayez un conseil d'administration qui soit vraiment intéressé dans le menu de l'autre et qui soit prêt à s'investir dans ce menu-là autant que dans le sien, dans celui dans lequel il était investi.
Et ce n'est peut-être... En tout cas, moi, je les écoutais ce matin, la frilosité que j'entendais était beaucoup à l'effet que le petit a peur d'être mangé par le gros, puis le gros a peur que le petit vienne lui voler sa tartine. Alors, vous mettez tout ce monde-là autour de la table, c'est bien plus dangereux, je pense, que vous ayez des tensions, que vous ayez du monde qui tirent sur la couverte, qui veulent en avoir un plus gros morceau de leur côté, que d'avoir un esprit de collégialité.
En tout cas, je n'y vois pas de valeur ajoutée, sauf peut-être à très long terme, lorsque vous aurez changé les membres du conseil d'administration un jour pour avoir des gens qui se sentent au-dessus de la mêlée. Et là vous allez perdre l'avantage de la personne qui vient de ce secteur-là, qui est dévouée, qui est bénévole et qui s'investit là-dedans. En tout cas, c'est un «gamble» que vous pouvez faire, mais, moi, j'y trouve un danger, parce que ce sont des petits établissements. Et je connais beaucoup de gens qui travaillent là-dedans puis qui font du bénévolat là-dedans, et ils le font... Ceux qui sont dans la santé, là, dans la recherche-santé, ils vont là parce qu'ils tripent là-dessus. Mais le social... bon.
J'aimerais revenir, à ce moment-là, sur votre intersectorialité. Voilà. Je le savais que vous alliez me parler de ça. Mais on n'attire pas des mouches avec du vinaigre! Pourquoi vous ne leur faites pas des fonds intersectoriels, avec de l'argent tagué, pour lesquels les gens vont travailler dans des domaines? Ils vont faire application pour des projets comme ça. Vous enlevez de la paranoïa. Les gens se disent: Ah! il ne viendra pas vider mon enveloppe, moi, pour aller alimenter quelque chose d'autre. Et vous taguez de l'argent sur des projets multisectoriels, intersectoriels. Il y en a, des sujets extrêmement passionnants: la gérontologie sociale et la gériatrie, tous les secteurs écologiques, etc. Et là les gens, ils vont aller chercher ces fonds-là parce qu'il y a de l'argent là-dedans et parce que c'est attaché à de l'intersectorialité. Vous n'avez pas besoin de changer des structures pour ça.
Par ailleurs, pour les structures, c'est vrai que ça marche. On peut fusionner les secteurs... pas les secteurs, mais tous les services de soutien administratif. Mais faites-vous pas trop d'illusions, parce qu'il n'y a pas des millions à sauver là-dedans. Non, non, non. C'est des tout petits centres de recherche. Ils ont 35 personnes. Imaginez-vous que...
Le Président (M. Huot): Merci. Je vais maintenant reconnaître le député de Huntingdon.
M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, mesdames, monsieur. C'est un plaisir de vous recevoir. Le dernier groupe. On garde toujours le meilleur pour le dessert, comme on dit souvent. Donc, bienvenue parmi nous.
J'ai une petite question au niveau de la... je pense, l'objectif de votre association. Vous représentez les établissements de santé et de services sociaux. On sait, depuis 2003 maintenant, les services sociaux étaient seulement offerts par les CLSC et par les centres hospitaliers des services de santé. Le questionnement que j'ai... Vous vous opposez un petit peu à la fusion, je pense, des trois fonds. Mais je regarde les missions de chacun de ces fonds de recherche là, il y en a un, entre autres, qui est au niveau de la recherche sur la société et de la culture. Donc, la société, je pense, via les services sociaux, c'est un domaine qui est maintenant privilégié, et également au niveau de la santé du Québec, mission première des centres hospitaliers comme... qui a été connue dans les années précédentes. Vous n'auriez pas avantage, à ce moment-là, en ayant l'intégration... Je prends l'exemple de ces deux fontes-là, qui rejoint parfaitement les missions des centres... des CSS que vous représentez majoritairement.
**(17 h 40)**Mme Denis (Lise): C'est-à-dire, il faut faire attention. D'abord, ce qu'on propose, nous, c'est de dire: On pense que c'était prématuré de l'envisager comme ça. Et l'échange qu'on vient d'avoir, notamment sur les recherches transversales, ça devrait faire partie d'une réflexion plus large au Québec sur le secteur de la recherche.
Quand vous parlez de fusionner, on dit: Ce que les gens font déjà, c'est qu'ils ont commencé à travailler, peut-être pas suffisamment, je pense qu'il y a sûrement une impulsion supplémentaire qu'il faut donner à ce qui est transversal, mais les gens ont commencé effectivement à travailler ensemble pour identifier des secteurs où il y a intérêt à joindre les énergies. Il faut voir aussi que c'est... ce n'est plus la réalité que de dire, je ne sais pas, moi: L'hôpital, ce n'est que santé, puis le CSSS, ce n'est que social, là. Tu sais, les choses sont beaucoup plus larges que ça. Et on a des instituts aussi, l'institut en santé mentale, bien c'est à la fois santé et social. Dans les centres de santé, services sociaux, on a à la fois social et santé. Même dans les centres universitaires, on a social et santé, parce que la préoccupation de nos CHU, entre autres, c'est aussi, avec leurs centres de recherche, de travailler avec les centres de santé, services sociaux.
Donc, tout s'imbrique, effectivement, mais c'est... On ne pense pas qu'à ce moment-ci ce soit en fusionnant les fonds de recherche qu'on va améliorer. Il faut laisser les gens travailler, poursuivre, intensifier ce qu'ils ont commencé, et probablement avoir une réflexion un petit peu plus large sur l'avenir de la recherche au Québec puis comment on peut l'améliorer. Je pense, madame...
Le Président (M. Huot): Mme Bourdon, en 30 secondes.
Mme Bourdon (Gertrude): Oui. Bien, simplement dire que, moi, je suis encore à mon cours 103 en recherche, parce que je suis directrice générale depuis deux ans. Ce que je vois par contre, c'est qu'on... le monde de la recherche vibre à autre chose que dans les fusions. Alors, on a... Nous, on est à 15 ans de la fusion. C'est important de se souvenir de ça, parce qu'au niveau de la base des scientifiques, chez nous, nos scientifiques, l'axe transfert des connaissances, vont déjà faire des alliances avec les CSSS. Il n'y a pas du tout de mur, là. Alors, ce qu'on dit, c'est que chaque fonds doit avoir cette force distinctive pour grandir, pour que tous les fonds grandissent, pour amener la synergie entre les scientifiques.
Le Président (M. Huot): Merci, Mme Bourdon. Je reconnais maintenant le député de Richelieu.
M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. Avant de passer la parole à mes collègues, peut-être faire un premier bilan de la journée -- vous êtes nos derniers intervenants -- et essentiellement ça a porté aujourd'hui sur la question des fonds de recherche. Puis il restera sans doute d'autres intervenants qui en parleront. La CREPUQ, sans doute, sera intéressée à en parler. Mais, depuis le matin, ceux qui ont été témoins, là, ont vu heure après heure, 45 minutes après 45 minutes, les groupes venir dire: Ça va bien. Ça fonctionne bien. Il n'y a pas d'économie à faire à changer ça. Il y a des risques énormes à prendre.
Et vous venez rajouter évidemment votre grain de sel, pour une raison très simple, c'est qu'il y a des centaines et des centaines de millions qui se dépensent en recherche chez vous. C'est chez vous, là, la recherche en santé, pas juste le 100 millions du gouvernement du Québec, là, l'ensemble de la recherche universitaire en santé, elle se fait en établissement, à toutes fins utiles dans les centres hospitaliers universitaires. Et vous êtes donc mêlés à ce monde-là, à ce milieu-là à tous les jours. Et le monde de la santé n'en veut pas, le monde de la recherche en sciences de la nature n'en veut pas, en technologie, n'en veut pas, en sciences humaines, n'en veut pas.
Alors, vous suggérez: recréer la table des présidents, qui a été abolie par ce gouvernement il y a quelques années, qui permet justement de regarder l'intersectoriel. Vous demandez de poursuivre l'intégration des services administratifs, en nous disant tout de suite qu'il n'y a pas de millions à faire, là, c'est vraiment très, très marginal. Il y a peut-être quelques éléments... quelques sous à aller faire là, et tous les sous sont utiles. En gros, vous nous dites: Ça fonctionne magnifiquement, pourquoi ne pas continuer? Est-ce que je résume votre pensée?
Mme Denis (Lise): J'y ajouterais simplement... D'abord, la table... je ne sais pas si c'est une table, là, que ça prend, mais c'est clair... Ils le font déjà, les trois présidents, hein, ils ont déjà des rencontres avec leurs vice-présidents. Ils ont déjà ce genre de chose là. Donc, ça, il faut accentuer ça, c'est certainement approprié.
Oui, services administratifs. Ce qu'on dit aussi, c'est: Peut-être qu'il faut reréfléchir à l'avenir de la recherche pour voir justement de quelle façon on peut accentuer du côté des recherches plus transversales. Est-ce qu'il faut se donner d'autres règles du jeu, d'autres genres de conditions? On dit: Il y a probablement une réflexion à faire plus large. C'est ce que j'ajouterais.
M. Simard (Richelieu): ...inviter la députée de Taschereau, qui est la critique en santé, à poser la prochain question, si vous me permettez, M. le Président.
Le Président (M. Huot): Absolument. Mme la députée de Taschereau, la parole est à vous.
Mme Maltais: Merci beaucoup. Je suis très heureuse de vous entendre aujourd'hui. Je vous remercie pour un mémoire qui est bref mais qui est extrêmement... qui parle énormément. Je pense que vous nous rappelez d'entrée de jeu, dans votre chapitre des retombées importantes pour le Québec, là, l'extraordinaire performance des fonds québécois actuels. Depuis qu'on les a créés -- je prends les chiffres de votre mémoire -- depuis qu'on a créé ces trois fonds-là, on est passé de 106 millions en 2000-2001, du départ, au début, à 197 millions en 2006-2007, 280 millions l'an dernier. Donc, la progression, elle est fantastique.
Ça fonctionne, et on va chercher plus... j'oserais dire, la part du lion dans les fonds canadiens. Moi, j'ai été étonnée, vous dites: «Dans les secteurs de la recherche en santé biomédicale et sociale -- donc là où vraiment parfois il y a des... on... les gens pensent qu'il y a une faiblesse en recherche sociale -- la [part] des investissements canadiens et privés au Québec atteindrait 39 %», alors qu'on est 21 % des Canadiens. C'est énorme, c'est fantastique. C'est donc un modèle qui semble fonctionner énormément.
Et j'ai cru lire, en filigrane de votre mémoire, que cette performance est due à la crédibilité du système québécois. Alors, est-ce que ce système à trois têtes, comme ça, et reconnu ailleurs, est-ce que c'est un modèle ou si c'est le modèle unique qui est en train de devenir le modèle, puisqu'on nous propose un modèle à une seule tête qui jusqu'ici ne semble... auquel il ne semble pas y avoir beaucoup d'adhésion?
Et, deuxièmement, vous parlez beaucoup de l'indépendance du chercheur. Quelle est la place, là, du fait que, dans ce système, il y ait une caution pour un scientifique, il y ait une caution des gens de son secteur? Quand il reçoit un fonds, les gens du Fonds de recherche en santé... de l'argent du Fonds de recherche en santé, c'est sa discipline, son secteur qui lui reconnaît une importance. Est-ce que ça a une place dans le débat?
Mme Denis (Lise): Je vais juste faire un petit commentaire, puis je demanderais peut-être à Mme Bourdon de compléter sur cette question-là. Simplement pour dire: Oui, nos fonds sont reconnus. Ils sont reconnus à travers le Canada. On a vu récemment... bien, même la semaine dernière, le FRSQ en lien avec la France et d'autres organisations... bien c'est la France essentiellement où il y a une reconnaissance de notre fonctionnement, notre capacité, notre expertise. Donc, là-dessus, je pense que ce qu'on a actuellement permet cette reconnaissance-là et est envié par bien des endroits. Mais j'aimerais que Mme Bourdon complète sur les autres dimensions de la question, sur la recherche.
Le Président (M. Huot): Oui, Mme Bourdon.
Mme Bourdon (Gertrude): Oui, merci. Alors, bien, l'approche scientifique... Souvent, l'angle, là, dans les chercheurs... Parce que les chercheurs ont dans leur routine de travail d'avoir des subventions, et ce qui vient déterminer la recherche -- mais on regarde la recherche au Québec -- ce sont les subventions et les axes de recherche. Alors, souvent les instituts de recherche en santé du Canada, par exemple, vont donner des domaines. C'est pour ça que les orientations ministérielles et gouvernementales en recherche sont si importantes, parce que les chercheurs s'inscrivent dans ces axes-là et, à partir de là, font des groupes de plus en plus. D'ailleurs, ce qui fait la force du Québec, c'est d'aller chercher des subventions en groupe, d'éviter de se cannibaliser entre eux. Et, nous, à Québec, entre autres, c'est ce qu'on fait de plus en plus. Donc, d'aller chercher les meilleurs, de faire des groupes et de faire des équipes de recherche. Et ça, on voit ça de plus en plus aussi entre le domaine social et le domaine de santé, domaine culture et santé.
Mme Maltais: Merci beaucoup. Donc, cette notion d'indépendance des trois fonds pour un chercheur, elle a un impact sur la perception que les gens ont de la qualité du travail, et c'est ce qui... Je ne m'abuse pas en disant que c'est ce système-là qui fait qu'on performe comme ça, là, c'est... C'est un lien direct.
Mme Denis (Lise): Tout à fait. En tous cas, c'est ce qui nous a permis effectivement de performer de cette façon-là puis d'évoluer dans notre capacité à aller chercher des fonds, des partenaires aussi, hein, beaucoup du côté de la santé. Il y a beaucoup de partenariats avec des entreprises dans la recherche et dans les centres de recherche qui sont bâtis. Je pense que vous en avez aussi à Québec, il y en a un petit peu partout.
Mme Maltais: On a parlé de cette espèce de structure que serait le nouveau conseil d'administration. Vous êtes les premiers qui abordent ça, vous dites: De fait, on n'allège pas, on ajoute une structure. Parce qu'à votre avis il est absolument impossible de toucher, évidemment, aux comités... aux conseils d'administration sectoriels. Parce que là il y a quelque chose qui se passe dans le projet de loi: les conseils d'administration deviennent des comités. On ne sait pas quels sont leurs pouvoirs, on n'est pas convaincus du tout qu'il y ait des pouvoirs décisionnels. Vous, vous dites: Non, ça ne marchera pas. Il nous faut des entités opérantes dans leur secteur. Et donc on va se retrouver automatiquement avec un ajout d'une structure, ce qui, en général, coûte plus cher, soyons honnêtes. J'aimerais ça que vous nous en reparliez, de cet aspect-là.
Le Président (M. Huot): M. Potter.
M. Potter (Alex G.): On parle beaucoup de gouvernance ces jours-ci. Normalement, quand vous voulez accroître la performance, améliorer la performance et déduire les coûts, on aplatit une structure administrative. Là, on ajoute une autre structure. Ça a l'air qu'au lieu d'avoir deux niveaux on en a trois maintenant, ça a l'air trois niveaux de gouvernance, et c'est la règle ces jours-ci. Mais on ne voit pas des gains à faire avec ça.
Le Président (M. Huot): Mme Denis, vous voulez compléter?
**(17 h 50)**Mme Denis (Lise): Oui. Puis je pense que... Dans le fond, ce que, moi, je voulais aussi préciser, c'est... Quand on dit: Ça alourdit, c'est parce qu'effectivement il y a quelque chose qui ne nous apparaît pas tout à fait clair dans les pouvoirs des uns et des autres. Alors, si ça veut dire qu'un projet doit être, par exemple, recommandé, recommandé par un comité sectoriel, et après ça être représenté à un conseil d'administration, bien là on vient aussi d'alourdir le processus, O.K.?
Mme Maltais: ...on vient d'ajouter une étape dans quelque chose qui est déjà très complexe.
Mme Denis (Lise): Oui. En tout cas, c'est la perception qu'on a. Peut-être que...
Le Président (M. Huot): Mme Dupuis.
Mme Dupuis (Francine): Bien, d'ailleurs, il y a une dame qui l'a dit ce matin -- je pense que c'était dans le groupe du fonds de santé, là, elle était vice-présidente, je pense -- puis elle a dit: Nous, là, des fois, le temps, là, c'est très, très précieux pour qu'on accroche une subvention, pour qu'on aille chercher un budget de recherche, et de passer par une autre étape, une autre réunion, une autre rencontre avec un autre groupe pour avoir l'approbation, ça va peut-être faire la différence pour qu'on en perde, des projets de recherche. Et, moi, je crois que c'est vrai, ça, elle n'exagérait pas.
Et, dans ce sens-là aussi, peut-être, je voulais dire, moi... C'est par rapport à la gérance, là. Je ne sais pas si ça va dans le sens de ce que vous disiez, mais, moi, là, le petit monsieur qui a parlé de... qui a dit que c'était un peu farfelu, là, d'avoir un scientifique en chef, là, je trouve qu'il a parfaitement raison. C'est un gestionnaire que ça vous prend là, il me semble. C'est compliqué de gérer des affaires vraiment aussi multisectorielles, et ça vous prend un gestionnaire chevronné. Qu'il ait une formation, à la base, de scientifique, tant mieux, ce n'est pas mauvais. Mais... C'est comme l'artiste en chef, là, moi, ça m'a fait rire, mais c'est vrai. Ce que ça vous prend, c'est vraiment un P.D.G. compétent, qui a une grande maturité, qui est capable de ne pas tout donner à Pierre ni de tout donner à Paul, mais plus qu'une personne qui a une compétence en recherche.
Le Président (M. Huot): Merci. Je reconnais maintenant Mme la députée de Taillon.
Mme Malavoy: Dans la même ligne d'idée, ce qui ressort, me semble-t-il, de votre mémoire et de vos interventions, c'est qu'on n'est pas devant un projet de loi, tout simplement, qui serait inutile. Ce ne serait déjà pas utile de le faire s'il est inutile, mais ce que vous écrivez à certains moments, vous dites: Ça risque de mettre en péril des avancées importantes en recherche au Québec. Ce que vous évoquez en répondant à ma collègue de Taschereau, c'est exactement la même chose. Donc, j'aimerais juste que l'on conclue là-dessus. Il n'y a non seulement pas d'intérêt, mais il y aurait des risques réels pour nos avancées en recherche d'adopter un projet de loi qui fusionne ces fonds et donne donc le... répartit les pouvoirs comme on le présente ici.
Mme Denis (Lise): Le message que ça lance... En tout cas, à notre point de vue, à ce moment-ci, le message que ça lance, c'est un message qui risque effectivement de fragiliser. On ne voit pas vraiment de valeur ajoutée. On dit cependant: Il y a probablement des réflexions à faire sur la recherche, sur l'avenir de la recherche. Ça, on en convient. On pense qu'il y a des efforts à faire pour améliorer au plan administratif. Mais on pense aussi que, si on va de l'avant maintenant dans cette optique-là sans prendre un certain nombre de précautions, on risque de fragiliser, les milieux de la recherche étant très sensibles puis, on l'a vu aussi à travers la journée, les chercheurs étant, je dirais, des...
Le Président (M. Huot): Mme la députée de Taschereau voulait quelques secondes pour une remarque.
Mme Maltais: Pour rappeler simplement, puisqu'on est en santé, ce bout du serment d'Hippocrate: Surtout ne pas nuire, surtout ne pas nuire, et c'est ce qu'on risque de faire actuellement.
Le Président (M. Huot): Merci. Merci beaucoup. Donc, je reconnais maintenant M. le député de Shefford. Vous avez l'honneur et le privilège de terminer la journée, M. le député de Shefford.
M. Bonnardel: Merci, M. le Président. Alors, bonne fin de journée. Je vais aller rapidement sur les fonds de recherche, je pense, ça a été un sujet intéressant toute la journée. Vous dites, à la conclusion de votre mémoire, qui est très bien fait, à l'avant-dernier paragraphe: «Il est important de rappeler que le regroupement de différents types de recherche sous un même organisme a été étudié par d'autres gouvernements, [et] notamment en Alberta et en Angleterre», qui s'est avéré complexe à un point tel que la plupart des gouvernements qui l'ont considéré se sont retirés.
Pouvez-vous nous en parler un petit peu plus pour les deux dernières minutes? Est-ce qu'il y a vraiment des exemples concrets en Alberta, en Angleterre qui démontrent que ça n'a vraiment pas fonctionné ou...
Mme Denis (Lise): C'est-à-dire que, quand on essaie de regrouper les missions, qui sont quand même distinctes... ou des secteurs, je devrais dire, qui sont quand même distincts, c'est tout le temps très difficile d'avoir une unité qui est... comment je dirais, qui met la pensée... une pensée innovante pour l'ensemble des secteurs confondus. Et, pour toutes sortes de raisons, puis je n'ai pas le détail, là, mais pour toutes sortes de raisons, les gens ont plutôt reculé par rapport à ça, devant la difficulté de vraiment combiner tous ces secteurs d'activité là et d'avoir une pensée... Parce que c'est un peu ce qu'on demande au chef, là...
Une voix: Au scientifique en chef.
Mme Denis (Lise): ...au scientifique en chef, excusez, c'est un peu d'avoir une pensée un peu innovante, être capable de tracer des lignes, de proposer des avenues. Mais, quand vous avez tous ces secteurs-là devant vous, ce n'est pas évident de trouver la façon, les voies et les personnes aussi qui sont capables d'avoir ce genre de planification là. Et ce n'est pas évident pour personne, ni au Québec ni ailleurs dans le monde.
M. Bonnardel: Alors, rapidement, s'il y a 205 millions de dollars de budget dans la dernière année pour ces trois fonds, puis on se doit d'aller chercher, selon le sens même de ce projet de loi, des économies d'à peu près 1 million -- parce qu'il n'y a aucun plan qui nous dit combien on veut sauver pour ces fonds-là -- on fait quoi?
Mme Denis (Lise): Bien, c'est-à-dire, moi, je pense qu'on continue le regroupement des services administratifs. Oui, il y a 200 quelques millions, mais il y en a entre 15 et 16 qui sont consacrés aux services administratifs. On sait que, quand on donne ces chiffres-là, ça comprend le fait qu'il y a deux fonds qui ont déjà bougé au niveau de leurs services administratifs. Je ne sais pas quelles économies ils ont faites, mais peut-être qu'il faudra s'inspirer de ça pour s'assurer que la poursuite, je dirais, de la fusion des services administratifs donne un résultat.
M. Bonnardel: Merci, madame.
Le Président (M. Huot): Merci beaucoup, M. Potter, Mme Denis, Mme Dupuis, Mme Bourdon. Merci de votre contribution aux travaux de cette commission.
J'ajourne les travaux de la commission au mardi 1er février 2011. Merci. Bonne soirée à tous.
(Fin de la séance à 17 h 56)