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Version finale

37th Legislature, 2nd Session
(March 14, 2006 au February 21, 2007)

Tuesday, January 30, 2007 - Vol. 39 N° 43

Consultation générale sur la protection des épargnants au Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures sept minutes)

Le Président (M. Hamad): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires. Je salue la présence de mes collègues députés de l'Assemblée nationale et les personnes présentes dans la salle.

Le mandat de la commission est de procéder à des auditions publiques dans le cadre de sa consultation générale portant sur la protection des épargnants au Québec.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, M. le Président.

Remarques préliminaires

Le président, M. Sam Hamad

Le Président (M. Hamad): Alors, nous passons maintenant aux remarques préliminaires. Et je vais commencer par mes remarques puis par la suite je vais ? pardon? ? après permettre au député de Charlevoix de faire ses remarques aussi. Et on va commencer les auditions par la suite.

Donc, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue aux auditions publiques de la Commission des finances publiques portant sur la protection des épargnants au Québec qui débutent aujourd'hui. Il importe de mentionner que ce mandat a été adopté à l'unanimité par les membres de la commission. C'est avec beaucoup d'enthousiasme et aussi avec des grandes attentes que la commission entreprend ce mandat d'initiative. Plus de 150 organismes provenant des différents milieux experts et citoyens ont répondu jusqu'à présent à la consultation par l'entremise des mémoires ou d'un questionnaire en ligne.

En préparation de ce mandat, les membres de la commission ont tenu l'an dernier des consultations préliminaires. Plusieurs acteurs du domaine des fonds communs de placement ont alors été entendus. Il y a eu, entre autres, des représentants des organismes en réglementation et d'autoréglementation, des assurances, des investisseurs institutionnels, du milieu universitaire, des médias et des organismes de défense des consommateurs.

Quoique ces consultations aient permis aux députés de se familiariser avec les règles et pratiques du monde des fonds communs, ces rencontres ont surtout démontré la nécessité d'étudier plus en détail certaines problématiques vécues dans ce domaine et d'initier d'autres acteurs à contribuer à la réflexion. C'est pourquoi la commission étudiera spécifiquement le secteur des fonds communs de placement en raison de son importance et des problèmes vécus récemment.

n (14 h 10) n

Un document de consultation a été préparé, et les grands enjeux qui y sont abordés sont les suivants. Le premier, c'est les lacunes dans la gouvernance. Rien n'empêche le gérant du fonds, celui dont le travail consiste à administrer le fonds, à être la même personne que le fiduciaire, celui qui détient les titres et même le conseiller en placement. Cette situation recèle un potentiel de conflits d'intérêts. Devrait-on exiger la séparation de ces fonctions pour minimiser ce risque? La commission se penchera également sur la nécessité d'obliger les fonds à se doter d'un comité d'examen indépendant.

Deuxième élément: le problème relatif à l'échange d'informations entre les organismes de vérification et les services policiers. La législation actuelle ne permet pas à un comptable chargé de la vérification des états financiers d'une entreprise gestionnaire de fonds d'alerter les autorités chargées de la protection des investisseurs, comme l'Autorité du marché financier, lorsqu'il y a apparence de fraude envers les investisseurs en raison notamment du secret professionnel. L'autorité ne pourra pas contraindre ce professionnel à divulguer certaines informations cruciales à cet effet si elle a des soupçons sur cette entreprise. Cela constitue un sérieux frein à la prévention ou à l'arrêt d'une fraude avant qu'il ne soit trop tard. La commission ne fera donc l'examen pour voir si ces règles devraient assouplies. Enfin, la preuve recueillie par les organismes de réglementation n'est souvent pas prise en compte par les services policiers dans le cas de fraude en raison de problèmes potentiels d'admissibilité de cette preuve devant les tribunaux.

Troisième élément: l'indemnisation des épargnants. Il existe au Québec divers fonds d'indemnisation en cas de faillite ou fraude des entreprises impliquées dans la gestion des avoirs des épargnants. Toutefois, dans le cas de fraude d'un gestionnaire de fonds communs de placement, il n'existe aucun mécanisme d'indemnisation. La commission va donc s'interroger sur la possibilité de mettre en place un tel mécanisme. Elle examinera également la possibilité d'instaurer un nouveau recours judiciaire, appelé recours civil sur les marchés secondaires, similaire à ce qui se fait en Ontario.

Quatrième élément: les sanctions imposées aux fraudeurs. Présentement, la peine maximale pouvant être imposée à un fraudeur est de cinq ans d'emprisonnement et une amende de 5 millions de dollars. Plusieurs se plaignent de la faiblesse de ces peines dans le cas des fraudes de grande envergure et proposent de les augmenter substantiellement à 20 ans d'emprisonnement. Par exemple... De plus, la question de la sensibilisation judiciaire à la gravité des crimes économiques devra être étudiée.

Les autres problématiques: la commission se penchera également sur d'autres questions, tels que les frais de sortie de fonds, le rôle de l'Autorité du marché financier et les ressources mises en place ou l'éducation des investisseurs.

Au cours des prochains jours, nous aurons l'occasion d'échanger avec de nombreuses personnes sur les mesures à prendre pour améliorer la confiance des investisseurs québécois dans les marchés financiers, la confiance du public étant un élément nécessaire au bon fonctionnement d'une économie moderne comme celle du Québec. La commission est consciente que la mise en place éventuelle de ces mesures n'empêchera pas toutes les fraudes. Toutefois, il est important de prendre des actions afin de limiter au maximum les cas de fraude envers les investisseurs tout en évitant de noyer sous la paperasse les gens responsables et honnêtes qui sont impliqués de près ou de loin dans le domaine de fonds communs de placement.

Les membres de la commission sont aussi bien conscients que toute modification au cadre réglementaire doit être examinée avec soin en pesant bien les avantages et les inconvénients. Il faut éviter les répercussions négatives non désirées sur le marché financier. De même il faut toujours garder à l'esprit que la réglementation des marchés doit prévoir une réglementation équivalente pour des produits similaires.

Je nous souhaite donc des discussions riches et fécondes, et je cède la parole à mon collègue le vice-président de la Commission des finances publiques et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'institutions financières, M. le député de Charlevoix.

M. Rosaire Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord saluer tous nos collègues, les gens qui nous accompagnent, les fonctionnaires de quelque niveau que ce soit qui vont, dans les prochaines journées, faire un travail immense, immense parce qu'on vient de prendre l'engagement, cet avant-midi, en commission, qu'on va essayer de préparer notre rapport le plus rapidement possible pour être soumis dès l'ouverture de la prochaine session, si c'est possible ? donc, c'est bon que tout le monde sache que c'est dans cet esprit-là qu'on travaille ? saluer de façon aussi particulière les gens qui nous visitent à quelque niveau que ce soit.

Je voudrais, avant de commencer, M. le Président, vous remercier et remercier les membres qui, lorsque j'ai été malade, m'ont accompagné, si je peux employer cette expression-là. Il semblerait que c'était très, très, sincère, les voeux de prompt rétablissement que mes collègues de tous les partis ont fait. Je voudrais aussi dire à ceux et celles qui trouvent qu'on a retardé, c'est sûr qu'on a retardé à cause de ça, oui, mais à cause de d'autres facteurs, mais on va essayé quand même de se reprendre dans le temps.

Je voudrais pour commencer, M. le Président, rappeler, nous rappeler, à nous et à tout le monde, que l'industrie des services financiers, l'industrie des marchés financiers, c'est une industrie majeure au Québec, majeure par le nombre d'employés qu'elle emploie, majeure par les investissements qui sont créés par tous les joueurs de cette industrie, majeure par les citoyens et les citoyennes qui jouissent des services offerts par cette industrie. Et, quand on parle de cette industrie, on parle évidemment de la grande industrie des services financiers, que ce soit l'assurance de personnes, de dommages ou de ceux et celles qui font du placement. Et je le souligne parce que je ne suis pas sûr qu'on donne à cette industrie l'importance qu'elle doit avoir. Et je souligne aussi que, quand on a créé l'agence des marchés financiers, c'était pour améliorer la protection, améliorer le service offert aux investisseurs de quelque niveau que ce soit.

Je souligne aussi que, quand on parle d'investisseurs, aujourd'hui et dans les prochains jours, on va parler particulièrement des fonds communs, mais ne jamais oublier que sont touchés aussi, quand on parle de protection au consommateur, que sont touchés aussi les gens qui achètent des produits que ce soit l'assurance de personnes ou de dommages ou même l'investissement dans les fonds de retraite. Aujourd'hui, on va aller particulièrement, dans les prochains jours, sur les fonds communs. Mais on doit toujours garder à la tête qu'on est dans une industrie, là, qui est majeure et que le rôle de l'AMF qui quand même est encore relativement jeune comme organisme, notre rôle, à nous autres, c'est de voir comment on peut aider cet organisme-là à protéger davantage les consommateurs, à protéger davantage cette industrie.

Il est bien évident, M. le Président, qu'on aura beaucoup de questions à poser aux gens qui vont venir nous voir. Dans l'analyse des mémoires qui nous sont soumis jusqu'à maintenant, il y a de grandes différences sur les conseils ou les représentations ou les commentaires qui nous sont donnés. On devra, nous, de la commission, essayer de savoir pourquoi il y a autant de différences que ça, essayer de savoir aussi quelles sont les meilleures recommandations qu'on devra faire. C'est sûr qu'on sait très bien qu'il y a des groupes qui sont devant nous, il y a des groupes d'intérêts, il y a des représentants des particuliers, il y a des particuliers qui vont venir aussi nous donner leur opinion. Alors, on aura à sortir de ça ou à préparer de ça les meilleures recommandations possible.

Alors, je nous souhaite à tous et à toutes, M. le Président, de bonnes séances. On va le faire... Comme ce soir, on travaille exceptionnellement jusqu'à 20 heures, ce soir. Mais je veux vraiment que tout le monde sache qu'on va tous faire les efforts possibles, la commission, pour préparer nos recommandations et émettre au gouvernement, au ministre concerné, à tout le monde concerné nos recommandations le plus rapidement possible.

Peut-être ajouter, M. le Président, à ce que vous avez dit: Lorsqu'on a passé, à la fin du mois de décembre, les projets de loi n° 29 et 7, il y avait déjà des éléments pour protéger davantage, dans ces deux projets de loi là, il y avait déjà des éléments. À cette occasion-là, lorsqu'on a discuté avec le ministre, le ministre M. Audet nous a, à quelques reprises, au moins à deux reprises, mentionné qu'il avait hâte d'avoir nos recommandations, qu'il attendait avec impatience nos recommandations. Donc, on a déjà, nous, ici, la commission, et c'est bon que les gens le sachent, on a déjà ici la garantie du ministre qu'il sera réceptif aux recommandations qu'on va faire, d'une part. D'autre part, il y a déjà des pouvoirs de réglementer qui ont été donnés par le projet de loi n° 29 à l'AMF. Donc, il y a des recommandations qui, s'ils touchent la possibilité par l'AMF de procéder en réglementation, bien qu'elles pourront être adoptées, M. le Président, par l'AFM et le ministre des Finances, s'il y a lieu, très rapidement, indépendamment des circonstances qui arriveront par la suite, et là je parle évidemment du déclenchement d'une élection. La même chose si, dans les recommandations qu'il y a, il y a des questions financières, bien le ministre a ses pouvoirs-là.

n (14 h 20) n

Le seul élément, puis je pense que c'est important que les gens le sachent, qui pourrait retarder un petit peu dans les recommandations qu'on va faire, ce sera les éléments qui apporteraient des modifications à une loi. Ça, évidemment, on est soumis au processus, là, plus long un petit peu, si je peux employer cette expression-là, sur le plan parlementaire. Mais c'est important que les gens sachent qu'on a la volonté comme commission de protéger, de donner à l'AMF des outils nécessaires pour protéger le plus rapidement possible les investisseurs qui sont concernés, particulièrement actuellement dans les fonds communs. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. le député de Charlevoix. On ajoute aussi que nous avons fait une consultation en ligne qui va durer jusqu'à la fin de la séance, c'est-à-dire le 7 février. Alors, j'invite ceux et celles qui nous écoutent d'aller au site de l'Assemblée nationale, Commission des finances publiques, et, s'ils veulent continuer à soumettre des mémoires ou répondre à notre questionnaire dans le fond, ils sont bienvenus.

Maintenant, le député de Chutes-de-la-Chaudière, vous avez quelques minutes pour faire... si vous avez... Est-ce qu'il y a d'autres collègues ici, du côté ministériel? Ça va? Alors, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Je suis heureux de participer à cette commission en vue des consultations sur la protection des épargnants au Québec. L'actualité de la dernière année a soulevé un doute dans la tête des investisseurs, et cette commission nous permettra certainement de faire la lumière et même, je l'espère, de rassurer les investisseurs. Plusieurs questions ont été soulevées pendant la dernière année, et c'est notre rôle, en tant que représentants des citoyens, de se pencher sur les problématiques soulevées et d'envisager, avec les avis d'experts, les meilleures solutions pour assurer la protection des épargnants québécois.

Comme à notre habitude, M. le Président, ma formation politique sera attentive aux discussions et aux avis, et nous travaillerons de manière constructive aux travaux de la commission. D'emblée, j'aimerais toutefois attirer l'attention de mes collègues sur une ligne directrice qui guidera la démarche de ma formation politique. Nous avons le choix soit d'alourdir la réglementation existante et donc mettre encore plus de pression sur les institutions financières ou de clarifier la réglementation existante et de donner les moyens et les pouvoirs nécessaires aux institutions de contrôle pour bien faire leur travail.

M. le Président, cette question est essentielle, car elle balise cette fâcheuse tendance que les élus ont à toujours vouloir élaborer de nouvelles lois pour créer une illusion de sécurité pour les Québécois, alors qu'en réalité les solutions se trouvent la plupart du temps ailleurs, soit dans le contrôle et la disponibilité de l'information ou même dans la dissuasion. Je fais donc appel à la diligence habituelle de mes collègues afin qu'ils ne tombent pas trop facilement dans ce piège de l'illusion de la sécurité que produirait une nouvelle loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Alors, comme vous le savez, vous faites partie de la commission et vous allez faire... et ce que la commission a dit déjà, les membres de la commission, que ce n'est pas la paperasse qui est importante, c'est les épargnants.

M. Picard: Comme vous le savez, nous ne sommes pas majoritaires à la commission.

Le Président (M. Hamad): Vous avez une chaise, puis on est unanimes à date, on va maintenir ça. Alors, merci. Donc... Oui, M. le député de Charlevoix.

M. Rosaire Bertrand

M. Bertrand: Je m'excuse, M. le Président, est-ce que je peux faire une courte intervention? Un élément majeur que j'ai oublié, c'est de rappeler, nous rappeler tous ? puis ça répond peut-être aussi au député de Chutes-de-la-Chaudière; mais de nous rappeler tous ? que notre responsabilité à nous n'est pas de se substituer aux responsabilités des investisseurs, des citoyens et des citoyennes. Ce n'est pas non plus de se substituer aux responsabilités des gens qui fournissent les produits. Nous, c'est de s'assurer que, là où il y a des éléments de protection nécessaires, de s'assurer que ça se fait. Mais, moi, je ne veux pas que les gens pensent, là, qu'on va sortir des nouvelles affaires, on va compliquer les affaires pour remplacer la responsabilité qu'a l'investisseur dans son choix, quand il choisit un produit, quand il choisit une institution financière, et ça, ça m'apparaît extrêmement important. Ça m'apparaît aussi extrêmement important de tout de suite mettre très clair qu'il n'est pas de l'intention de qui que ce soit à ma connaissance de compliquer davantage, parce que c'est un domaine qui est déjà suffisamment compliqué.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Alain Paquet

M. Paquet: Je vous remercie, M. le Président. Alors, très brièvement, juste quelques éléments, je pense, qui complètent, qui vont dans le sens de ce qui a été dit. Je crois que, un élément important, on a comme commission parlementaire, les gens parfois sont portés à voir une période de questions, mais comme commission parlementaire, notre expérience, c'est la Commission des finances publiques, et on va le démontrer dans les prochaines semaines, de travailler en collégialité sur des enjeux comme ceux-là qui sont importants, sur lesquels il y a des choses qu'il n'y a personne qui prétend avoir la vérité absolue, mais il y a des choses à apprendre, il y a des leçons à tirer des expériences passées. Notre objectif clairement est de trouver la meilleure façon de protéger l'intérêt du public, du public investisseur et épargnant, et en même temps, dans un contexte où le marché financier fonctionne de façon efficace, au bénéfice des épargnants et des investisseurs. C'est ça, l'objectif.

Parce que le rôle d'un marché financier, effectivement, c'est de faire un intermédiaire ? c'est le cas de le dire ? entre des gens qui ont des fonds de disponibles à mettre de côté et d'autres qui ont besoin de fonds à utiliser. Or, le seul moment où notre économie est gagnante, où la société est gagnante, c'est quand justement cette intermédiation-là se fait de façon la plus efficace possible pour aller chercher les meilleurs rendements dans les meilleures conditions, avec le moins de risques possible aussi ? évidemment, il y a une relation entre le risque et le rendement ? mais de permettre les diversifications qui sont appropriées et de permettre... et de s'assurer le plus possible que la réglementation... Ce n'est pas une question de quantité de réglementation, ce n'est pas de faire des règlements pour en faire ou de réduire les règlements pour les réduire, c'est trouver la réglementation, le cadre législatif et réglementaire qui permet le mieux possible de protéger les épargnants et au marché financier, aux prêteurs et emprunteurs de fonds donc de pouvoir se rencontrer.

Et je crois que les démarches dans lesquelles la commission... la preuve qu'elle a faite en adoptant unanimement ce mandat d'initiative, je crois que les intentions qui ont été manifestées l'an dernier, lors de nos séances de travail, il y a un an, qu'on a eu et la préparation de la commission et des consultations publiques qui commencent aujourd'hui vont donner l'occasion justement de poser des questions. On ne part pas avec des a priori, dire: C'est sûrement telle chose ou sûrement pas telle autre chose. On peut donc seulement questionner pour essayer d'apprendre, de dire: Maintenant, en quoi est-ce que ça pourrait mieux protéger? Comment? Quelle serait l'implication pour les épargnants? Quelles seraient les implications en termes de risques, de rendement, de frais, etc.? Toutes ces questions que nous allons poser aux différents intervenants qui témoigneront seront pour essayer d'approfondir davantage, d'essayer de questionner, de se questionner constructivement, de dire: Bien, tiens, est-ce qu'il n'y a pas tel problème?, peut-être, et peut-être qu'il n'y en a pas, et peut-être qu'il y en a, pour pouvoir soulever ces différents éléments pour alimenter notre réflexion et nous amener à faire des recommandations constructives pour un seul objectif: améliorer la protection des épargnants là où c'est possible et bien sûr... et aussi dans un contexte qui n'est pas incompatible avec un fonctionnement efficace des marchés parce que ce ne sont pas des objectifs qui sont contradictoires. Merci beaucoup.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. le député de Laval-des-Rapides.

Auditions

Mouvement d'éducation et de défense
des actionnaires (MEDAC)

Alors, nous nous préparons maintenant aux audiences. Le premier groupe, c'est le groupe de Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires. Alors, je vous invite, M. Michaud, à prendre place. Vous arrivez juste à temps.

M. Michaud (Yves): ...toujours prêt.

Le Président (M. Hamad): Vous êtes prêt? Bon. Mais ça, c'est...

M. Michaud (Yves): ...

Le Président (M. Hamad): Alors, je vais suspendre quelques secondes, juste pour vous permettre de prendre place.

(Suspension de la séance à 14 h 28)

 

(Reprise à 14 h 29)

Le Président (M. Hamad): M. Michaud, vous êtes représentant de Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires. Alors, bienvenue à l'Assemblée nationale. Et je vous demanderai de présenter les personnes qui vous accompagnent, et par la suite vous avez autour de 30 minutes, entre 20 et 30 minutes, pour présenter votre mémoire, et par la suite il y aura une période de questions partagée entre le parti ministériel et l'opposition.

M. Michaud (Yves): Très bien, M. le Président. Si nous pouvons convenir du fait que nous devons reprendre l'autobus, le car, à 4 heures, si tant est que vous ayez assez pour la période de questions, de la trentaine de minutes, cela nous siérait grandement. Est-ce que...

Le Président (M. Hamad): Vous avez besoin de 30 minutes pareil?

M. Michaud (Yves): On a besoin... une heure au total, hein?

Le Président (M. Hamad): Vous? Vous?

M. Michaud (Yves): À peu près... Non, non, tout le monde et tout compris. C'est que nous souhaiterions quitter ces lieux, sans porter offense aux distingués parlementaires qui sont ici, vers 3 h 30, 3 h 40.

Le Président (M. Hamad): Alors, je vous donnerai 20 minutes, puis on va laisser pour la période de questions de 40 minutes.

M. Michaud (Yves): Très bien.

Le Président (M. Hamad): Ça marche?

M. Michaud (Yves): Très bien.

Le Président (M. Hamad): Alors, c'est à vous la parole.

n (14 h 30) n

M. Michaud (Yves): Très bien. Vous me posez un pensum grave parce que je ne sais pas faire court. Quand je prends la parole, je ne la rends jamais ou à peu près.

M. le Président, j'ai une sorte de parfum de nostalgie quand j'arrive dans cette salle où j'ai siégé pour la première fois il y a 40 ans, en qualité de député de Gouin, en 1966, exactement dans cette salle. Ce souvenir est aussi vif dans ma mémoire, alors que les eaux usées de l'histoire ont charrié tant d'autres souvenirs tristes et joyeux, ce qui est la loi de tout engagement politique. Alors, pour peu, l'homme cabossé que je suis par tant de luttes et de combats serait tenté de m'adresser à vous en utilisant l'expression «chers collègues», mais je me garderai bien d'un rapprochement aussi inconvenant qu'audacieux entre le passé et le présent de notre histoire commune.

Deux questions se posent en venant témoigner devant vous: Qui sommes-nous et de quoi s'agit-il? Je répondrai à la première question, qui sommes-nous, tandis que ceux qui m'accompagnent répondront à la seconde en deux temps: Fernand Daoust, vice-président du Mouvement d'éducation des actionnaires, conseiller, actuellement conseiller spécial auprès du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec et ex-président de la centrale syndicale également du Fonds des travailleurs de solidarité; à ma gauche, M. Jean Legault, membre de notre conseil d'administration, de notre association, de notre mouvement, membre de l'Ordre des comptables agréés du Québec, formateur de professionnels au Barreau du Québec et à la Chambre des notaires, vous parlera plus précisément de l'objet de ce qui fait les délibérations de la commission que vous présidez, c'est-à-dire les fonds communs de placement.

Et qui sommes-nous? Ce ne sont pas les petits investisseurs individuels que nous représentons qui influencent la Bourse. La Bourse est sous l'emprise de gestionnaires de portefeuilles de caisses de retraite, de gros fonds communs d'actions, des fonds de pension des entreprises, des grandes banques, des grandes maisons de courtage. Ce sont ces gestionnaires, souvent de mèche avec des analystes peu scrupuleux, champions des conflits d'intérêts, en recommandant des titres de société dont ils sont les employés, qui provoquent les mouvements à la hausse ou à la baisse dans le secteur boursier.

L'investissement individuel du monde ordinaire des investisseurs représente actuellement au plus 15 % du capital-actions des sociétés ouvertes qui sollicitent l'épargne du grand public, alors d'où le poids insignifiant de l'investisseur privé, de l'actionnaire privé dans la gestion des entreprises à capital ouvert. C'est presque le pelé, le galeux, le tondu, le laissé-pour-compte relégué au mieux dans la classe sardine du jet-set financier, quand ce n'est pas dans la soute à bagages. On a beau se démener, il a beau se démener, ce petit investisseur, comme un beau diable dans l'eau bénite lors des assemblées d'actionnaires, faire des propositions, en débattre, poser des questions, interpeller la direction d'une entreprise dont il est, lui, l'actionnaire, le propriétaire indivis, bien que plusieurs personnes partagent ce droit, les dés sont pipés d'avance et joués par le billet tricheur des procurations sollicitées et trafiquées au seul bénéfice de la haute direction.

Les assemblées d'actionnaires, dont le législateur a voulu qu'elles soient le plus haut lieu de la reddition annuelle des comptes des entreprises, sont, dans la plupart du temps, une farce grotesque, un opéra comique d'hymnes encensoirs aux grands prêtres de la direction et aux servants de messe que sont les membres du conseil d'administration.

En parlant d'assemblée d'actionnaires, je vous signale, M. le Président, une chose. Nous avons écrit, au nom de notre association, j'ai écrit au ministre des Finances du Québec, il y a déjà un mois, en parlant de la refonte de la Loi des compagnies du Québec, qui est probablement une des plus poussiéreuses, une des plus archaïques, une des plus rétrogrades de toutes les lois des compagnies du Québec. Nous n'avons pas le droit de faire des propositions d'actionnaires aux assemblées comme Metro. Pourquoi? Parce qu'elle est incorporée Loi des compagnies du Québec. Idem pour l'Industrielle Alliance, alors que les lois fédérales ? tout le monde connaît peu ou prou mes penchants politiques ? alors que le gouvernement fédéral a des lois beaucoup plus progressistes concernant la démocratie actionnariale et la participation des actionnaires à leurs assemblées, ce qui est absolument impossible au Québec, puisque la Loi des compagnies du Québec, que vous allez réviser, je crois, dans quelque temps, il faudra la moderniser pour faire en sorte qu'il y ait au moins autant de démocratie au Québec qu'il y en a au Canada.

Notre mouvement qui auparavant s'appelait l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec, APEIQ, depuis 16 mois, s'appelle le MEDAC. On a changé de nom: Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires. Pourquoi? Pour marquer un virage absolument essentiel, important et novateur dans la formation, dans l'éducation des investisseurs, des actionnaires, de M. Tout-le-monde.

J'étais, il y a sept, huit mois, conférencier à l'Université du Québec du troisième âge. Il y avait à peu près 1 000 personnes dans la salle. J'ai posé une question: Est-ce qu'il y a une personne, quelqu'un d'entre vous, qui peut faire la différence entre une obligation et une débenture? Résultat, pas une seule main ne s'est levée. Qui est à la base même de l'investissement. C'est là que j'ai constaté la profondeur abyssale de l'ignorance de l'ensemble des citoyens.

Et celui qui vous parle honnêtement a connu la différence d'une obligation et d'une débenture en mars 1993 quand Trustco général du Canada, maison mère de Trust général du Canada, est tombé en quenouille alors que M. Garneau, l'ancien ministre des Finances du Québec, était le président de ce holding, de cette maison mère, en flouant 500 millions de dollars de perte d'actions, d'actions privilégiées, de débentures. Parce que mon courtier avait acheté à ma femme des débentures. Or, tout le monde sait qu'une action repose sur des actifs, les commissions scolaires, etc., le gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada, alors que la débenture repose sur la notoriété de l'entreprise, c'est-à-dire sur du vent. Or, quand un courtier vous propose une débenture, comme investisseur, vous devez être un petit peu plus prudent.

Alors, qu'est-ce qu'on a obtenu au cours des 10 ans de démocratie, de militantisme actionnarial? Et je termine là-dessus. Vous ferez bien de m'indiquer combien de secondes ou de minutes il me reste là. Ah? 10 minutes encore. Ah! mon Dieu que vous êtes généreux, alors...

Le Président (M. Hamad): Mais 20 minutes pour l'ensemble de votre équipe.

M. Michaud (Yves): Pour les trois?

Le Président (M. Hamad): Oui.

M. Michaud (Yves): Alors, je termine tout de suite. Qu'est-ce qu'on a fait depuis 10 ans?

Le Président (M. Hamad): Règle de base: trois fois 20, c'est une heure, hein, c'est...

M. Michaud (Yves): Très bien. La confirmation par les tribunaux de soumettre des propositions. Je suis allé en cour seul, sans avocat, en disant: Mme la juge, je ne suis pas avocat, je ne suis qu'un honnête homme, au sens classique et moliéresque du terme, bien sûr. Alors, c'est là que j'ai obtenu, en 1996, le droit de soumettre des propositions. On a obtenu ça. La séparation des postes de président et de chef de la direction. Toutes les banques avant, c'était toutes le même chef de la direction qui était le président du conseil, qui s'autovotait son salaire. Aujourd'hui, c'est tout séparé. Alors, la divulgation séparée des honoraires des vérificateurs externes pour la production des états financiers, le vote distinct des administrateurs, la divulgation préalable aux actionnaires des clauses des indemnités de départ des dirigeants, l'adoption d'une Code de procédure, etc., et j'en passe.

Donc, avec des moyens loqueteux et un budget dérisoire, nous avons réussi cela, à transformer la gérance et la régie des entreprises non seulement au Québec, mais à travers tout le Canada, d'une façon je ne dirais pas absolument admirable et exponentielle, mais au moins sur la bonne voie d'une meilleure régie des entreprises.

J'arrête là ma présentation. Et je demanderai maintenant à Fernand Daoust de bien vouloir prendre la parole.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. Daoust.

n (14 h 40) n

M. Daoust (Fernand): Merci beaucoup, M. le Président. MM., Mmes les membres de ce comité, M. le vice-président, quelques mots, puisqu'il me reste à peu près cinq minutes, si nous voulons que M. Legault puisse intervenir pour vous dire que, pour nous, la formation, l'information sont des objectifs incontournables, si on veut que les petits actionnaires, que la population du Québec en général y voient clair dans cet incroyable fouillis que constitue le ou les marchés financiers. Nous ne sommes pas les seuls à le dire: M. St-Gelais, il y a à peine trois mois, devant un groupe d'experts, mentionnait qu'au-delà de la législation et de la réglementation nous devons ensemble redoubler nos efforts visant à sensibiliser et éduquer les consommateurs des produits financiers.

Nous nous sommes donné cette tâche sans prétention puisque d'autres le font aussi, chacun à sa façon ou à leur façon, peu importe, mais nous nous sommes imposé ce redéploiement depuis quelque temps déjà. Les besoins sont considérables puis, plus tard, au moment des échanges, on aura l'occasion de creuser ça un peu plus et de vous décrire, de vous dire ce que nous faisons avec les faibles moyens qui sont les nôtres et grâce à des appuis financiers qui nous viennent substantiellement de l'Autorité des marchés financiers.

Dans le document que cette commission a fait parvenir aux futurs intervenants dont nous sommes, vous posez 16 questions. J'ai noté que la toute dernière de ces questions a trait au sujet qui nous amène ici, cet après-midi. Vous mentionnez: Que proposez-vous pour améliorer les connaissances des investisseurs en matière de choix des placements et des risques encourus? Je ne parlerai pas trop longtemps de l'endroit où c'est placé, cette question, puis je ne veux pas faire d'ironie, mais c'est la 16e, et il y a peu de texte qui accompagne cette question que vous posez aux intervenants. Je ne doute pas de votre immense intérêt à l'égard de la formation et de l'information, et je voudrais que cette commission se penche là-dessus dans ses recommandations, dans ses orientations.

C'est bien beau, là, tous les autres problèmes qui sont abordés à l'égard desquels il faut trouver des solutions, mais, s'il ne se fait pas une éducation financière de l'ensemble de ces Québécois et de ces Québécoises qui investissent et qui subissent le choc du marketing des multiples vendeurs de tous les produits inimaginables, qui, de temps à autre, se perdent dans des discours éthérés des milieux de la finance, qui voient les scandales, qui les vivent et qui en souffrent, on est tous, à cet égard-là, on fait tous les mêmes constatations. On ne se perdra pas là-dessus en discours.

Nous vous disons: la formation, l'éducation financière de ceux et de celles qui, à quelque niveau que ce soit, font les placements que vous savez dans tous les outils de placement inimaginables se doivent d'être formés, et il y a une lacune incroyable au Québec dans ce domaine-là. C'est un peu à cette lacune-là que le MEDAC veut répondre avec, encore une fois, ses faibles moyens, mais il faut lui donner le souffle de vie. Il faut l'accompagner financièrement. Vous devriez vous pencher là-dessus au-delà des beaux discours que nous faisons, de part et d'autre, et je m'en excuse ni m'en accuse, mais il faut trouver les solutions, les moyens, les voies pour faire en sorte que l'éducation financière dont on connaît la grande importance ? on peut en parler de part et d'autre pendant des heures de temps ? ne puisse pas être un vain mot, mais puisse s'appuyer sur des moyens concrets.

Alors, on aura l'occasion d'en discuter au moment de la période de questions. Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Daoust. Alors, maintenant...

Une voix: M. Legault.

Le Président (M. Hamad): ...M. Legault.

M. Legault (Jean): Alors, M. le vice-président, mesdames et messieurs, nous illustrons le propos à partir de ce qu'on appelle maintenant le scandale Norbourg. Sachez que 925 des victimes, seulement 925 des victimes de Norbourg sur 9 200 seront indemnisées par le Fonds d'indemnisation des services financiers, si on se fie à la déclaration de l'Autorité des marchés financiers de janvier 2007, seulement 10 %. 90 % ne seront pas indemnisés soit parce que la fraude n'est pas reliée à l'offre de service, l'offre de produits ou la vente. La fraude, pour être indemnisée, doit être reliée à la distribution. Alors que seulement 10 % semble relié à la distribution, 90 % est relié soit à la gestion des fonds ou parce que 7 213 victimes ne se sont pas inscrites ou n'ont pas inscrit leur demande auprès de l'AMF. 80 % n'ont pas inscrit leur demande. Une autre question sur laquelle on doit réfléchir.

De 1995 à 2005, il y a une augmentation de 458 % de l'avoir des épargnants du Québec qui a été placée dans des organismes de placement collectif, selon l'AMF encore une fois. Pourquoi? Bien, je pense qu'on peut facilement en déduire que c'est parce qu'un tiers des Québécois sont retraités, il y a un autre tiers qui épargne actuellement en vue d'une retraite imminente. Alors, la question qu'il faut se poser, et c'est à vous comme législateurs d'en débattre et d'en décider: Est-ce que les épargnants qui ont été floués par le scandale de Norbourg font la différence entre perdre leurs économies à cause de la gestion frauduleuse des gestionnaires de fonds ou de la perdre à cause de la distribution de ces fonds? Autrement dit, l'objectif de protéger la santé financière des épargnants doit-elle être assujettie à des conditions?

Je pense qu'au Québec on peut dire que, dans l'ensemble, le droit à la justice et le droit de recevoir des soins de santé sont assortis d'aucune condition. C'est pour ça que la principale recommandation du MEDAC pour la protection du public est de suggérer, de créer un fonds d'indemnisation pour tous les épargnants victimes de fraude de gestionnaires de fonds et non pas seulement pour ceux qui sont victimes de fraude dans la distribution de ces fonds, c'est-à-dire dans l'offre de produits et dans la vente de ces produits. Et le MEDAC croit que ce fonds d'indemnisation doit être financé par l'industrie et non pas par l'ensemble des contribuables du Québec. Autrement dit, ce n'est pas au gouvernement de financer ce fonds.

Par ailleurs, si on regarde à plus moyen et long terme, des suggestions, des recommandations pour prévenir la fraude, une première recommandation en termes de gouvernance. Les épargnants au Québec sont habitués à la protection de leurs épargnes. Toute leur vie, ils sont allés à la caisse populaire, ils sont allés dans les banques à charte puis ils ont donné leur argent en dépôt, ils ne se sont jamais demandé s'ils pouvaient ou non retirer leur argent. Le MEDAC croit que des règles de gouvernance assujettissant les entreprises cotées en Bourse doivent s'appliquer aussi aux organismes de placement collectif, aux fonds communs de placement. On entend par là un conseil d'administration formé d'administrateurs compétents et externes, autrement dit traitant à distance avec les gestionnaires, et un comité de vérification vigilant comme il existe dans les sociétés publiques cotées en Bourse.

Deuxième recommandation, c'est que le MEDAC considère qu'on doit simplifier le processus de nomination d'un administrateur provisoire par l'organe des marchés financiers dans un contexte urgent. Lorsqu'il faut agir, lorsque l'AMF doit agir, elle a parfois des problèmes à harmoniser son régime avec celui de la Loi des faillites et insolvabilité, et on supporte la recommandation d'ailleurs de l'Autorité des marchés financiers de vouloir simplifier le processus de nomination d'un administrateur provisoire lorsqu'il y a urgence d'agir.

n (14 h 50) n

Un autre élément, c'est la prévention des conflits d'intérêts. On suggère de prévenir les conflits d'intérêts en exigeant un moratoire de deux ans ou plus, dépendant de l'importance relative du poste qui était détenu par un employé, un ex-employé d'un organisme public intervenant sur le marché financier. On veut qu'un employé qui était dans un organisme public intervenant sur le marché financier dans l'intérêt de protéger le public ne puisse pas quitter cet organisme et entrer immédiatement dans une société de placements ou une société privée. On suggère un moratoire d'au moins deux ans ou plus, selon l'importance du poste.

On suggère aussi le renforcement de la coordination entre les organismes chargés de protéger le public, notamment l'Ordre des comptables agréés du Québec, dont je suis membre, l'Autorité des marchés financiers et le Conseil canadien de reddition de comptes afin de faciliter l'échange d'informations et la rapidité d'information.

Sachez qu'actuellement le Code des professions contraint l'Ordre des comptables agréés à assurer la confidentialité des informations obtenues lors d'enquêtes, et empêchant ainsi la transmission d'informations pertinentes à l'Autorité des marchés financiers, malgré que l'Ordre des comptables agréés et l'Autorité des marchés financiers aient le même objectif ou même mission de protéger le public. Il en est de même de... La loi empêche aussi le partage d'informations entre le Conseil canadien de reddition de comptes et l'Autorité des marchés financiers.

Une autre suggestion, une autre recommandation de notre groupe est de sanctionner les fraudeurs à la hauteur des préjudices causés aux épargnants. Vous savez qu'il y a des épargnants qui ont perdu leurs fonds de pension. Il y en a qui ont été obligés de retourner travailler parmi les retraités. Donc, il faut que la sanction des fraudeurs soit à la hauteur des préjudices causés aux épargnants afin de sécuriser les épargnants et, j'ajouterais, afin de protéger le système capitaliste d'abus cancérigènes. Parce que vous savez, les plus grands dangers pour le système capitaliste, c'est les gens qui en abusent, ce n'est pas les terroristes. La démocratie capitaliste, elle se doit de se raffermir, de s'enlever de ces cancers potentiels par les abus, par les fraudeurs.

Entre autres, si on compare les lois qu'on a au Québec et au Canada par rapport aux lois qui sont aux États-Unis, entre autres, on sait qu'il y a des mauvaises langues qui se demandent si Conrad Black aurait été mis en accusation si Eliot Spitzer, le procureur de New York, n'était pas intervenu auprès de la Security Exchange Commission, qui se trouve à être l'équivalent de l'Autorité des marchés financiers au Québec. La Security Exchange Commission, c'est en Ontario.

Deux autres recommandations... une autre recommandation, et je termine. On croit qu'il faut donner plus de ressources, y compris plus de policiers, à la police des marchés financiers pour que l'AMF puisse exercer adéquatement son mandat de protéger les épargnants et de donner aussi plus de ressources financières au MEDAC pour lui permettre de jouer son rôle de sensibilisation et d'éducation pour justement former les épargnants.

En 2025 ? ce n'est pas un démographe qui me l'a dit, peut-être qu'un démographe peut me corriger ? mais en 2025 environ, deux tiers de la population du Québec vivra de ses épargnes si vous leur en donnez les moyens. Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Legault. Alors, vous avez pris 25 minutes, mais c'est correct. Alors là, on va passer à la période de questions. Partie ministérielle, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Merci, M. le Président. Alors, MM. Michaud, Daoust, Legault, bienvenue à la Commission des finances publiques. Merci de votre présentation du mémoire que vous nous avez fait parvenir.

Je pense qu'un élément important, vous soulevez l'importance de l'éducation des épargnants. C'est quelque chose... ce n'est pas juste... c'est un principe qui semble tellement évident. Effectivement, c'est un principe qui est important dans l'application de permettre aux gens de savoir quelles sont les options, les actions ? sans jeu de mots, là ? les différents instruments financiers qui sont devant eux, c'est important de pouvoir stimuler l'épargne. On sait comment l'épargne est un élément important pour la croissance économique future donc et le niveau de vie des citoyens. Donc, c'est un objectif, il n'y a sûrement aucun doute là-dessus. Il y a des choses qui sont faites, et il y a des choses qui peuvent être encore faites, et je pense qu'on souscrit, personnellement, je souscris à l'objectif que vous poursuivez à cet égard-là.

Je vais me limiter à un champ. Il y a plusieurs éléments intéressants, là, qui méritent d'être discutés et d'échanger là-dessus, je vais aller directement sur la question de votre proposition de créer, d'évaluer la possibilité de créer un fonds d'indemnisation plus général que celui qui est là présentement, c'est-à-dire qui couvrirait même le cas de fraudes provenant de gestionnaires de fonds.

Est-ce que vous avez évalué d'une part qu'est-ce qui se fait ailleurs par rapport... quelles sont les leçons qu'on peut avoir d'ailleurs par rapport à l'existence ou non d'un tel type de fonds d'indemnisation en Amérique du Nord, au Canada ou ailleurs, d'une part? Le cas échéant, si, mettons, on mettait en place un tel fonds au Québec, l'impact que ça pourrait avoir sur les coûts, parce que les gens de l'industrie devraient peut-être payer les frais, parce qu'il faut mettre de l'argent de côté, avez-vous évalué l'ordre de grandeur d'un tel fonds, en comprenant que ça ne se fait pas du jour au lendemain? Il pourrait y avoir une période de transition, mais avez-vous évalué l'ordre de grandeur que ça représenterait et quel est l'impact potentiel que ça peut avoir sur les frais de gestion qui bien sûr ont un impact direct soit en frais de courtage pour les actionnaires potentiellement, mais aussi en termes de rendement net à cet égard-là?

Et ma dernière sous-question, je sais qu'il y a plusieurs sous-questions, mais c'est un peu relié. Un des éléments, ma foi, qu'on entend, et il y a un exemple aux États-Unis, la crise importante qu'ont vécu les «savings and loans» découlait en bonne partie d'après les études qui ont été faites, ça a été un événement très malheureux, la façon, pas l'objectif poursuivi, mais la façon dont l'assurance dépôt fonctionnait, parce que ça a augmenté finalement le risque de mauvaise gestion. Et il y a des cas comme ça qui ont été démontrés. Quel est l'impact qu'il peut y avoir à cet égard-là? Et finalement, l'applicabilité qu'il peut y avoir au niveau... si, par exemple, le Québec avait un tel fonds puis qu'il n'y en avait pas, par exemple, en Ontario, comment un fonds qui est distribué à deux endroits au Canada ou à 10 endroits au Canada, comment on pourrait appliquer un tel fonds?

Le Président (M. Hamad): M. Michaud.

M. Michaud (Yves): M. le Président, la réponse à cela, c'est qu'avec la modestie de nos moyens, c'est qu'on n'a pas été capables de faire l'étude. J'aurais pensé que l'Autorité des marchés financiers, qui n'est guère favorable à notre recommandation, aurait quand même, avec tous les moyens qu'elle a, l'autorité, à fouiller le sujet un peu plus pour nous donner les raisons pour lesquelles il ne serait pas opportun de créer ce fonds d'indemnisation qui serait payé par l'industrie et de toute façon ultimement par tous les contribuables forcément, parce que la note serait refilée aux clients. Alors, la réponse est non, parce que ce sont des études extrêmement poussées, pointues, revoir à l'ensemble de l'échelle canadienne ce qui se fait dans les autres commissions des valeurs mobilières, et le reste, la réponse est non. Mais je refilerais plutôt cette étude à l'Autorité des marchés financiers.

Le Président (M. Hamad): Vous savez qu'il n'y a pas de fonds d'indemnisation sur le côté canadien, hein? Vous savez ça?

M. Michaud (Yves): Non, je sais, je sais.

Le Président (M. Hamad): O.K. Alors, il y avait le collègue le député de LaFontaine, après ça le député de Matane, Marguerite-D'Youville puis le député de Montmorency. Alors, allez-y, M. le député de LaFontaine.

M. Tomassi: Merci, M. le Président. M. Michaud, messieurs, bonjour. Peut-être pour un éclaircissement, vous faites mention, à la page 14, puis je pense que c'est un de vos combats, M. Michaud, lors des rencontres d'actionnaires, lors de ces conseils d'actionnaires, la bataille que vous menez contre la rémunération des hauts dirigeants, là, le 200, 300 fois le salaire que ces gens-là se prennent, là, à même les avoirs des actionnaires, parce qu'en bout de ligne, l'argent qui appartient à l'entreprise, c'est l'avoir des actionnaires. Vous faites mention, à votre page 14, que cette incidence, là, de conditions générales de travail généreuses vis-à-vis ces hauts dirigeants là, fait en sorte que les autres employés arrivent à ce que vous dites, là, à faire des choses qu'ils ne devraient pas faire, faire des erreurs ou essayer de reprendre quelques argents qu'ils se disent: Pourquoi, c'est moi qui lui fais faire de l'argent? Pourquoi c'est lui qui devrait avoir 200 fois mon salaire?

Je sais que vous n'avez pas les moyens, là, comme vous l'avez dit concernant l'autre question, mais avez-vous des exemples ou des données qui démontrent que ces employés commettent autant d'infractions ou d'omissions vis-à-vis leurs employeurs et vis-à-vis les fonds ou les actionnaires?

n (15 heures) n

M. Michaud (Yves): Écoutez, vous touchez là le coeur, si vous voulez, du combat que nous menons, entre autres choses, hein, sur la rémunération des hauts dirigeants. La réprobation, elle est universelle. Sur ces salaires... bon, vous pouvez utiliser les qualificatifs que vous voulez: astronomiques, himalayens, indécents, provocants, dégoûtants, etc. Pourquoi? Parce qu'il y a eu une dérive telle que cela offense même... et les plus grands économistes américains comme Galbraith, Joseph Stiglitz le plus récent qui a publié, prix Nobel d'économie, était conseiller de Clinton, donnaient en disant: Ça s'en va nulle part et ça risque de briser les structures mêmes d'un sain capitalisme.

Il y a Henry Ford, qui est le père du capitalisme moderne américain, disait, lui, que 40 fois... président, un directeur d'entreprise, pouvait gagner 40 fois le salaire d'un employé. Si je prends l'exemple de Metro, par exemple, une caissière a 16 $ ou 20 $ de l'heure, mettons 20 $, un salaire pour un patron extrêmement compétent pourrait être d'environ 800 000 $. Or, il arrive aujourd'hui que c'est non pas 260, c'est souvent 300, 400 et parfois 500, les multiples, hein, du plus haut salaire. Ce qui fait que les subalternes... et d'ailleurs il y a eu des règles qui ont déjà été proposées, des recommandations. Les recommandations, c'est que le président, le P.D.G., ne devrait pas gagner plus que quatre fois le salaire de son premier subalterne, les quatre autres, puisque, ce qu'on voit, c'est les cinq dirigeants dont on voit les rémunérations dans le conseil d'administration.

Alors, ce qui se fait, la passe qui se fait, c'est des délits d'initiés. Des délits d'initiés, quand on est dans les cinq premiers dirigeants, on sait très bien ce qui s'en vient: on sait qu'on a reçu un téléphone de New York pour pouvoir acheter notre entreprise; on sait très bien que nous avons une possibilité d'acheter une autre acquisition, ça se discute entre nous. Alors, les délits d'initiés font en sorte que c'est là où on retrouve, en dehors de ces rémunérations pharaoniques, là, qu'on retrouve le plus de... j'appellerais ça de la gabegie légale, gabegie légale. Ces informations que possèdent les hauts dirigeants normalement devraient être transmises ipso facto à tous les actionnaires qui sont pari passu devant la loi.

Alors, c'est surtout dans les délits d'initiés, et c'est pour cela que nous avons fait une recommandation, qui a été battue ? et la plupart du temps elles sont battues, mais elles rentrent en vigueur trois ans après ? de sorte que les délits d'initiés, que l'on donne un avis préalable de 10 jours ? parce que nous sommes toujours informés post facto ? on sait deux mois après que M. Untel, président de banque ou président de société, a acheté ou vendu des actions de la propre compagnie qu'il gère, mais qui est un signal extrêmement intéressant. Alors, une des façons de combattre cela, l'enrichissement sans cause par le délit d'initié, c'est d'avoir, de donner le délit de dire: Dans 10 jours, je me porterai acquéreur ou je vendrai des actions de la compagnie que je gère. Alors, voilà, je ne sais pas si ça répond à votre question, mais il me semble que ce serait un correctif approprié.

M. Tomassi: Maintenant, dans vos explications, vous êtes plus précis. Dans votre mémoire, vous êtes très large, là, où est-ce que, quand vous dites que: Les employés qui, dès lors sont tentés de se faire justice à eux-mêmes dans leur exercice, dans leurs fonctions. Ça peut être n'importe qui, ça peut être des employés, ça peut être... Alors, vous êtes plus précis dans vos explications devant la commission, aujourd'hui, pour dire: C'est les délits d'initiés entre-temps, où est-ce que vous dites: J'aimerais mieux le savoir 10 jours de facto, comme quoi il s'apprête à vendre ses actions et non pas le savoir un mois ou deux mois après, que de le dire de la manière que vous le dites, où est-ce que vous dites que c'est les employés qui sont en dessous, qui ont de l'information, puis lui, quand il voit son patron faire 200 fois son salaire, bien, il dit: Moi, je vais essayer de faire des affaires cachées. Alors, si c'était ça, votre explication, je la comprends. Mais peut-être le mettre plus précis dans l'explication de votre mémoire.

M. Michaud (Yves): Vous avez parfaitement raison, parce que le rôle des commissions parlementaires, c'est d'aller au fond des choses. Donc, vous nous forcez à aller au fond des choses et de préciser des choses qui, dans un mémoire, sont de caractère général. Ce mémoire date du mois de... d'un an, hein, parce qu'il y a eu report. Ce que vous avez entre les mains, des choses ont changé depuis, hein? Quelques-unes des choses ont changé depuis. Alors, vous avez raison.

M. Tomassi: Votre explication, même si elle date d'un mois, vous l'aviez quand même décidée, là.

M. Michaud (Yves): Je l'avais quand même en tête il y a un an.

M. Tomassi: Parfait.

M. Michaud (Yves): Écoutez, votre observation est fort bienvenue, et je vais battre ma coulpe, de telle sorte qu'au prochain mémoire nous serons plus précis.

Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Première question à M. Legault. Je voudrais qu'il élabore davantage sur le fonds d'indemnisation. Qui va vraiment le payer, sachant très bien que le groupe d'entreprises est plutôt limité que nombreux? C'est bien beau dire: On va refiler ça aux citoyens finalement, là, mais je voudrais que ce soit précisé davantage, sachant aussi que, dans l'industrie, s'il y a création d'un groupe, vont être touchées d'autres entreprises qu'uniquement les gens qui font du fonds; ça va être aussi les assurances de personnes, les compagnies, et de dommages, et autres. Alors, j'aimerais ça que vous élaboriez.

Et, le temps que vous répondez, j'aimerais que M. Daoust me revienne sur la formation. Il nous a invités à revenir là-dessus. Ça m'intéresse beaucoup parce que je suis un de ceux qui pensent qu'on doit, le plus rapidement possible, formation et information, trouver le moyen de le faire. Est-ce que c'est ceux qui vendent les produits? Est-ce que c'est l'AMF? Enfin, je suis d'accord avec vous que le citoyen devrait être mieux informé, mais, un coup qu'on a dit ça, c'est comment on doit le faire. M. Legault.

Le Président (M. Hamad): M. Legault.

M. Legault (Jean): Oui. Excusez. Écoutez, le fonds d'indemnisation, on le veut de façon générale parce qu'actuellement il est limité, même s'il est unique au Québec, ça n'existe pas ailleurs au Canada, il est limité à la distribution des produits, on le veut de façon générale. On n'a pas approfondi, on n'a pas approfondi... On n'a pas fait une étude coût-bénéfice à savoir les avantages versus les inconvénients et dans quelle mesure il faudra augmenter les frais de gestion dans les fonds communs ? parce que la question a été posée tantôt ? pour pouvoir le couvrir.

Bien, actuellement, le fonds d'indemnisation indemnise plusieurs catégories, n'est-ce pas, au niveau des assurances, au niveau... Il y a toute une liste, là, d'ailleurs, que vous allez retrouver dans le mémoire ? je le cherche, je ne l'ai pas devant moi ? dans le mémoire de l'AMF. Mais pour l'instant, nous, c'était l'idée générale que nous lancions, comme ça, pour pouvoir peut-être amener... Si ça semble être l'intérêt de l'Assemblée nationale ou de votre comité, on pourrait effectivement approfondir cette question en vue éventuellement de pouvoir arriver avec des réponses plus précises. Alors, pour l'instant, je n'ai pas de réponse plus précise.

M. Bertrand: Mais vous savez quand même très bien que le fonds actuel couvre particulièrement ceux et celles qui vendent des produits, tandis que, là, avec tout ce qu'il arrive de scandales, on veut réussir à atteindre plus haut.

M. Legault (Jean): À la gestion des fonds, ceux qui gèrent les fonds.

M. Bertrand: Bon. C'est pour ça, il va falloir augmenter les fonds, il va falloir établir d'autres catégories de personnes qui vont être touchées?

M. Legault (Jean): Bien, en fait, la problématique de Norbourg, c'est ça, hein, c'est que... Et d'ailleurs, dans ses commentaires publics, l'AMF le dit: La problématique avec Norbourg, c'est qu'on a un vendeur de fonds puis un gestionnaire en même temps et que la grosse majorité de la fraude, elle est liée à la gestion et non à la vente. C'est pour ça qu'on arrive avec 10 % des victimes qui sont indemnisées, alors que le reste n'est pas indemnisé.

M. Michaud (Yves): J'ajouterais, M. Bertrand: il y a, en première ligne, le courtier qui vend des fonds communs de placement, mais, après cela, il y a le gestionnaire du fonds, il y a le gardien de valeurs et puis il y a le fiduciaire. Ils font quoi, tout ce monde-là? Comment se fait-il que ces coupe-feux, dans le cas Norbourg, ça n'a pas marché? Parce qu'il y a... Pourquoi? Parce qu'il y a une absence de contrôle de la part de l'État et une absence de surveillance.

Ça me fait penser, il y a un sénateur romain qui avait une très jolie femme ? très jolie. Alors, il a engagé un jardinier pour la surveiller. Il est arrivé chez lui, il a trouvé sa femme couchée avec le jardinier. Et là il a dit: Quid custodiet custodes? Qui surveillera le surveillant? C'est une question qui se pose. Où est-ce qu'il est, le contrôle, là, chez les gestionnaires, les fiduciaires puis tout ce monde-là, dans le cas Norbourg, ces millions qui ont été manipulés? Alors, ayant contrôle... Il y a des trous dans la loi qui empêchent l'Autorité des marchés financiers de pouvoir enquêter là-dessus sur simple dénonciation ou pas. Alors, il faut surveiller les surveillants des fonds.

n (15 h 10) n

M. Legault (Jean): On a six d'ailleurs... six recommandations qui traitent de la prévoyance pour la prévention de la fraude. On en a une qui tente de colmater l'impact négatif que ça peut avoir sur les épargnants, mais la plupart de nos recommandations sont sur la prévention de la fraude.

Le Président (M. Hamad): Je ne sais pas si, M. Daoust, vous voulez répondre à la question de l'éducation.

M. Daoust (Fernand): Oui, je veux bien, et je souhaite que vous me donniez tout le temps voulu afin que je puisse expliciter, préciser un peu les orientations du MEDAC dans cette formation qui se met en place.

Dans un premier temps, au-delà des réflexions, des expériences que nous avons connues, des batailles que nous avons livrées, je dois vous mentionner que...

Bon, là, il faudrait suivre un cours de formation pour...

Le Président (M. Hamad): Premier cours d'éducation, ça va être: Comment gérer un cellulaire.

M. Michaud (Yves): Je suis un dinosaure, moi, je ne sais même pas comment l'arrêter.

M. Daoust (Fernand): C'est quelque peu dérangeant. C'est...

Le Président (M. Hamad): C'est moins compliqué que les débentures.

M. Daoust (Fernand): Oui.

Le Président (M. Hamad): C'est moins compliqué que les débentures. Allez-y, M. Daoust.

M. Daoust (Fernand): Je voudrais souligner l'accueil très ouvert et la grande compétence de ces gens de l'AMF et de l'AMF évidemment qui nous a accompagnés, dans une certaine mesure, tout au long de notre réflexion sur ce type de formation qu'il fallait donner aux membres du MEDAC et à la population en général. Je ne veux pas vous dire que l'AMF nous a guidés, nous a dit: Vous allez faire ceci, vous allez faire cela, mais nous a accompagnés avec beaucoup de générosité ? on pourra en parler un peu plus longuement; peut-être pas assez selon certains, mais je parle d'une année passée et de celle qui est en cours ? afin que nous puissions mettre sur pied des cours de formation.

C'est des cours de formation qui, dans un premier temps, vont s'adresser aux membres du MEDAC, qui sont environ 1 000, 1 100, 1 200. Il y a des fluctuations qui sont tout à fait normales dans le membership, les adhérents, l'effectif du MEDAC, mais ça, c'est un problème de fond, et nous souhaitons bien qu'avec le temps plus de gens adhéreront à notre organisation.

C'est des cours qui vont s'échelonner sur une période de 12 heures, qui vont tenir compte inévitablement des groupes que nous allons constituer. On peut parler d'une certaine homogénéité quant à la connaissance des problèmes et à l'expérience que ceux qui viendront à nos cours auront vécue. 12 heures, ça veut dire trois jours de quatre heures, des veillées ou des fins de semaine, peu importe les détails puis les modules, on n'entrera pas là-dedans, et on va aborder un tas de thèmes.

Je pourrais vous en mentionner quelques-uns sans vous inonder de petits détails. On veut parler d'abord de la nouvelle bataille des épargnants actionnaires. On en connaît les contours, de cette bataille-là, on en connaît la réalité, on l'a nous-mêmes vécue par les interventions du président fondateur et de plusieurs membres du MEDAC, n'entrons pas dans tous les détails, mais les contours de cette bataille-là.

Maintenant, on s'adresse à des gens qui vont suivre les cours, des modules d'une vingtaine de personnes: Vous et la finance. Êtes-vous chasseur, gibier, spectateur? Je pourrais vous donner beaucoup de détails, mais je vous dirai qu'on veut compléter les connaissances de base des participants en matière de placement, d'investissement et d'actionnariat, informer les participants sur le fonctionnement des marchés financiers dans ses moindres détails sans entrer, là, dans la complexité de ceux-ci, parce que c'est un cours d'une douzaine d'heures, bon.

Maintenant: S'aventurer dans la jungle. Vous n'êtes peut-être pas d'accord avec la façon de décrire ce qu'est ce milieu-là, mais, nous qui le fréquentons à notre façon, nous estimons que c'est une véritable jungle, et puis on pourrait en faire une démonstration mais ce n'est pas le moment. Les règles élémentaires de prudence, bon, des outils pour survivre, bon, la régie ou la gouvernance des entreprises, l'exercice du droit des actionnaires. Sans compter une formation de base sur ce qu'on retrouve là, que ce soit les actions, les obligations, les débentures si chères à notre ami Michaud, les actions à vote multiple, le droit des actionnaires, tout ça. Bon. 12 heures.

Je dois vous mentionner que nous allons avoir recours à des formateurs expérimentés que nous allons former, trier sur le volet, d'abord trier sur le volet, former par la suite. Ceux qui seront déjà formés, on n'aura pas à les former, ça va de soi.

Mais ce n'est pas de l'amateurisme. On s'adresse à une population de tous les milieux socioprofessionnels, on s'adresse à tous les groupes d'âge, mais surtout des gens qui sont dans la cinquantaine et qui ont les moyens ou qui ont déjà fait des placements et souhaitent en faire et des gens qui ont de vastes expériences, de tous les milieux inimaginables, et qui ont devant eux des formateurs, des gens qui viennent leur dire: Voici ce que vous devez savoir. Pas parole d'évangile, là. Mais voici minimalement ce que vous devez savoir. Ce n'est pas de l'endoctrinement non plus, c'est les faits les plus précis possible.

L'Autorité des marchés financiers va coopérer avec nous. C'est entendu que, quand on va parler des organismes intervenants de toute nature, on va faire appel, on va demander à l'AMF de venir, de nous déléguer des gens compétents, et Dieu sait qu'il y en a à l'autorité, pour qu'ils puissent nous accompagner dans ce type de cours là pour être en mesure de répondre, sans espèce d'orientation idéologique. Bien sûr qu'il y en aura une, orientation idéologique, mais les gens qui viendront de l'Autorité des marchés financiers vont pouvoir eux-mêmes dire de quelle façon ils gèrent ou analysent ou examinent tel ou tel problème.

Je dois vous dire aussi que nous sommes en pourparlers qui se poursuivront demain. Les pourparlers sont entamés depuis quelque temps déjà avec l'École des sciences de la gestion de l'Université du Québec à Montréal afin que ces derniers ? et c'est acquis là, on n'est pas dans des négociations floues et vagues, lointaines, c'est acquis ? qu'on a leur appui sur tous les plans. Je ne veux pas entrer dans des détails un peu trop précis, mais que ce soit les locaux, puis tout ça, là, mais à l'égard de ceux qui vont nous accompagner pour donner de tels cours.

Autrement dit, on n'est pas dans l'amateurisme, on n'est pas dans le discours que vous pouvez imaginer, là, on a les deux pieds bien à terre, avec une vingtaine de personnes à chaque fois qui vont suivre un module de 12 heures et qui vont être en mesure par la suite de poser des gestes et connaître un peu mieux le financement des marchés financiers dans ses moindres détails. Bon. Je ne veux pas non plus exagérer puis vous dire qu'ils vont avoir réponse à tout.

Alors, appui de l'Autorité des marchés financiers qui nous accompagne par des fonds, par des moyens, il en faut, appui et accompagnement de l'École des sciences de la gestion de l'Université du Québec à Montréal et évidemment le MEDAC par ses structures, ses intervenants de toutes sortes.

On souhaite que ça fasse boule de neige. On commence. C'est un plan triennal que nous nous sommes tracé. Et, au-delà des cours qui vont se donner, nous voulons former des formateurs ? je n'en parlerai pas très longtemps ? mais que des gens puissent intervenir un peu partout, un peu partout. Les modules de 12 heures, c'est sûr que c'est sur l'ensemble du Québec mais par la suite des formateurs qui seront le résultat de ces cours-là et qui seront reformés à leur tour pourront aller un peu partout ici, un peu partout sur l'ensemble du territoire québécois. Alors, on peut en parler fort longtemps, mais...

n (15 h 20) n

Le Président (M. Hamad): Oui, mais...

M. Daoust (Fernand): ...c'est un projet de... Bon. Voilà.

Le Président (M. Hamad): Alors, je dois donner... Il y avait la députée de Matane. Je ne sais pas si elle va céder sa... Est-ce que vous êtes prête, oui? Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Outre la formation, dans votre mémoire, vous prévoyez, vous envisagez la formation d'un conseil d'administration et d'un comité de vérification externe composés de membres qui sont compétents en la matière, mais est-ce que vous envisagez également qu'il serait nécessaire qu'à titre préventif il existe un mécanisme de contrôle annuel, dirigé aussi ou contrôlé par des personnes compétentes, qui permettrait de vérifier annuellement les activités d'un gestionnaire de fonds? Vous parlez de cabinet également de valeurs mobilières, mais notamment de gestionnaire de fonds. Et, si oui, quelle serait ou quelle pourrait être la forme de ce mécanisme de contrôle?

M. Michaud (Yves): Madame, la question est fort bien posée. Les fonds communs de placement ne sont l'objet d'aucun contrôle de la part des investisseurs. Dans les banques, dans les sociétés ouvertes, il y a des assemblées annuelles d'actionnaires. Un fonds commun de placement ne fait jamais d'assemblée annuelle des investisseurs qui vont au fond... fidélité, mettez-en. Ça n'existe pas parce qu'il n'y a pas de contrôle de la part de ceux-là qui investissent dans le fonds, et c'est pour cela qu'on recommande que le législateur trouve un moyen que l'actionnaire, l'investisseur dans le fonds puisse, une fois par année, poser des questions aux administrateurs. Les administrateurs doivent être élus, qu'ils pourraient élire comme les conseils d'administration des grandes banques et des grandes sociétés ouvertes sont élus, et trouver un moyen qu'il y ait une reddition des comptes. Les vérificateurs externes doivent répondre aux investisseurs de la qualité des états financiers. On ne peut pas poser leurs questions. Les fonds communs de placement, c'est quelque chose qui circule dans un univers nébuleux, puis il n'y a pas moyen de toucher à ça.

Alors, c'est pour cela qu'on est arrivés, nous, avec cette suggestion qui est classique dans le modèle des sociétés ouvertes, des actionnaires, des assemblées annuelles, on peut poser des questions, un conseil d'administration, des vérificateurs externes qui sont l'équivalent des commissaires aux comptes, en fait toute la démocratie actionnariale que l'on voit et que l'on pourrait appliquer aux fonds communs.

M. Legault (Jean): L'Ordre des comptables agréés du Québec serait très habilité à pouvoir rendre compte dans ce sens-là, sauf qu'actuellement le Code des professions empêche l'Ordre des comptables agréés du Québec même à transmettre de l'information à l'Autorité des marchés financiers, et c'est pour ça qu'aussi dans son mémoire, que vous allez sans doute lire ou que vous avez lu, l'Autorité des marchés financiers souhaite aussi que la loi soit modifiée, certains amendements soient donnés à la loi pour que justement il y ait un échange d'informations en utilisant les spécialistes de la vérification et du contrôle, qui sont les comptables agréés du Québec, qu'on puisse bénéficier de leurs compétences et qu'on puisse en faire bénéficier autant l'Autorité des marchés financiers que les investisseurs de fonds.

Mme Charest (Matane): Merci. Je laisserai la place...

Le Président (M. Hamad): Merci. On fait l'alternance. Alors, la députée de Mirabel, il reste pour la partie de l'opposition, questions et réponses incluses, pour deux députés, cinq minutes. Alors, je vous demanderai d'être concise si vous voulez avoir d'autres questions.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Michaud, M. Daoust, M. Legault, merci pour la présentation de votre mémoire et félicitations pour votre travail.

Ce dossier m'interpelle de façon particulière puisque je suis porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite, et plusieurs retraités ont été brimés dans leurs droits concernant cette saga également.

Moi, j'aimerais vous entendre concernant les sanctions parce que, dans une autre vie, j'ai été avocate criminaliste, et, vous savez, le Québec est une société distincte. Nous avons une approche complètement différente de nos voisins, des gens de l'Ouest, particulièrement quand on a parlé de la question des jeunes contrevenants. On disait: Bon. Il faut les punir, il faut augmenter les sanctions, puis tout ça, et puis, nous, au Québec, on disait: On va faire de la prévention. Alors, moi, j'aimerais vous entendre concernant les sanctions et les peines d'emprisonnement. Qu'est-ce que vous pensez de tout cela? Est-ce que vous pensez que c'est un incitatif, qu'on devrait augmenter les peines d'emprisonnement ou bien agir d'une façon différente pour les dissuader, dissuader les fraudeurs?

Le Président (M. Hamad): M. Michaud.

M. Michaud (Yves): Écoutez, il est certain, absolument certain que la peur du gendarme et la peur de la prison est beaucoup dissuasive que des amendes qui sont payées, serait-ce à la hauteur de centaines de milliers de dollars et de millions. Heureusement que le pays de l'oncle Sam ne fait pas toujours de mauvaises choses. La Loi Sarbanes-Oxley qui a été votée et qui a prévu des peines d'emprisonnement sévères, dans le cas d'Enron allant jusqu'à 20 ans de prison, 25 et 30. Mme Stewart, délit d'initié, 30 000 $ ou 40 000 $ américains, quatre mois de prison. Ici, au Canada, je pense que la seule personne qui a fait de la prison, c'est il y a une quinzaine d'années en Ontario, puis ça a été trois mois par une décision de la Commission des valeurs mobilières en plus de la... il n'y en a jamais eu. Trouvez-moi un exemple de peine d'emprisonnement, et Dieu sait s'il y en a, des manoeuvres dolosives, dans le monde financier, qui par définition est un monde qui attire à cause de la tentation, et ne nos inducas in tentationem, tout l'argent et les milliards qui circulent.

Alors, la réponse ? vous avez été avocat en droit criminel: Oui, des sanctions plus sévères, plus musclées, des lois beaucoup plus coercitives parce que le crime financier, c'est devenu le crime du siècle à la hauteur de souvent des centaines de millions de dollars. Alors, le bras séculier de l'État doit absolument exercer... je dirais presque un bras vengeur à l'égard de ceux qui détroussent des honnêtes gens et des citoyens qui souvent perdent tous leurs avoirs par des manoeuvres frauduleuses.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Merci. M. Daoust, je vous ai écouté dans votre présentation en ce qui regarde la formation des gens. On sait que, dans bien des cas, la population va acheter ces fonds-là soit dans le cadre d'un REER ou dans le cadre d'un fonds général, et ils posent peu de questions, ils vont se fier à la personne qui est là. On leur remet des documents qui ne sont pas faciles à lire, pas faciles à comprendre.

Vous ne croyez pas qu'on devrait également travailler sur l'information? Ou quelles sont les informations pertinentes? Parce que, même si on les forme, dans bien des cas quelques initiés vont peut-être davantage comprendre, mais pour la population en général qui travaille, qui est occupée, qui n'a pas le temps de suivre cette formation-là, on devrait davantage travailler sur l'information qu'on donne à ces gens-là au moment où ils achètent ces fonds-là de façon à bien identifier la pertinence. Quelles sont les informations pertinentes à être divulguées ou à être données au consommateur ou à l'acheteur de fonds?

Le Président (M. Hamad): M. Daoust.

n (15 h 30) n

M. Daoust (Fernand): Bien sûr, nous applaudissons à une information vulgarisée facile à comprendre, simple, mais là c'est dans le monde du rêve ou quasiment de l'impossible. Des cours de formation vont permettre à ceux qui vont les suivre et au mouvement d'exiger une forme de simplification sans être simpliste, pas une damnée miette, mais une forme de document, une rédaction de ces documents-là de façon telle qu'on puisse comprendre un peu mieux le type de produit qui nous est offert.

Il y a beaucoup à faire dans ce domaine-là sans aucun doute, mais faut-il au point de départ être en mesure de comprendre minimalement le type de jargon qui est utilisé et d'être capable de s'en ouvrir à des gens qui vont vous conseiller. Et le vendeur ou le promoteur, le courtier ou qui que ce soit, lui, il est intéressé comme quelque vendeur que ce soit dans quelque domaine que ce soit et il est là pour faire en sorte qu'il y ait une transaction qui lui soit bénéfique, et qui peut être bénéfique évidemment et qui doit l'être à celui qui achète. Mais il faut avoir un minimum d'instruments pour être capable de décrypter ? le mot est souvent utilisé; «décrypter» ? des documents d'une complexité inouïe et pour pouvoir les décrypter, il faudra se donner, au-delà de la formation bien sûr, mais des politiques, pas de simplicité ni de simplification, mais des politiques où on pourrait être en mesure de mieux comprendre. Mais on est toujours dans des domaines très difficiles et très complexes.

Le Président (M. Hamad): Alors, la dernière question, si vous voulez partir, donc votre réponse est en fonction de votre heure de départ. Dernière question pour le député de Marguerite-D'Youville.

M. Moreau: Bien, merci, M. le Président. Vous aimez beaucoup le latin, alors vous pourriez agrémenter votre passage ici en répondant au sénateur romain qui se posait la question: Qui va surveiller le surveillant? Propter fragilitatem aetatis, propter fragilitatem sexus, s'il y avait eu une surveillante au lieu d'un surveillant, il n'y aurait pas eu de problème.

Ma question s'adresse plus sérieusement à M. Legault. Vous avez parlé de la coordination entre les comptables agréés et l'Autorité des marchés financiers et le Conseil canadien de reddition de comptes. Je ne veux pas vous embarrasser dans un débat juridique, mais en réalité, ce n'est pas partagé, l'opinion de l'Ordre des comptables agréés à l'effet qu'ils sont soumis au secret professionnel. D'ailleurs, l'Autorité des marchés discute, se distancie de l'opinion de l'Ordre des comptables à cet égard-là. Mais, en prenant pour acquis qu'on n'a pas à trancher ce débat-là, quelles sont les modalités que vous souhaiteriez mettre en place, vous, pour pallier le problème et assurer la coordination que vous estimez essentielle?

M. Legault (Jean): Comme je suis comptable agréé, je ne répondrai pas à votre question, il faudrait que je l'analyse dans toutes ses facettes pour... Moi, je n'en suis qu'aux intentions. Les intentions, c'est: utiliser des spécialistes en vérification, utiliser des spécialistes en systèmes de contrôle ou en manque de systèmes de contrôle pour qu'on puisse éventuellement partager avec les gens en autorité pour faire appliquer ces systèmes de contrôle ou pour empêcher la fraude. C'est ça qui est l'idée générale.

Maintenant, comment on peut faire le «reporting», en anglais, comment on peut faire rapport? Comment on peut rendre... Là, il faudrait l'étudier en détail. Il faudrait étudier en détail comment on peut faire ça. Mais actuellement, il y a, d'une part, il y a l'Ordre des comptables agréés qui a les compétences, qui fait que, selon son code des professions, est contraint de garder l'information confidentielle et, d'autre part, il y a l'Autorité des marchés financiers, en demande et en besoin, d'avoir à l'occasion, lorsque c'est pertinent, cette information détenue par l'autre groupe. Alors, il faut trouver des moyens...

M. Moreau: Mais à supposer que le secret professionnel existe chez les comptables, là...

M. Legault (Jean): À supposer qu'il existe?

M. Moreau: ...à supposer qu'il existe, est-ce que vous militeriez en faveur du fait de lever cette obligation au secret professionnel?

M. Legault (Jean): Bien oui. Oui. Parce que, moi... parce que, regardez, autant l'Ordre des comptables agréés que l'Autorité des marchés financiers a comme mission première la protection du public. Alors, on vise la protection du public et on prend les moyens pour le faire. Si ça veut dire de lever le secret professionnel pour protéger le public, bien c'est évident, c'est une question d'organiser les moyens pour qu'on puisse atteindre la mission.

M. Moreau: Alors, l'intérêt public doit primer sur la protection de la relation client-comptable, si le secret professionnel existe. C'est votre opinion?

M. Legault (Jean): C'est mon opinion.

M. Moreau: Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, M. Michaud, M. Daoust...

M. Michaud (Yves): Je voudrais vous remercier de votre bonne écoute et merci de l'éventuel soutien que vous pourrez apporter à la seule association au Québec et au Canada vouée exclusivement à la défense des actionnaires et de tous les administrateurs bénévoles, qui font leur travail sans copinage et sans repas arrosé de la part de qui que ce soit.

Le Président (M. Hamad): Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

 

(Reprise à 15 h 38)

Le Président (M. Hamad): La commission reprend les travaux. Et maintenant nous avons le deuxième groupe, c'est l'Ordre de CGA du Québec. Alors, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vous demanderais de se présenter et présenter aussi vos collègues. C'est Mme Fortin, je suppose? Oui. Allez-y.

Ordre de CGA du Québec

Mme Fortin (Ginette): Merci beaucoup, M. le Président. Mmes les députées et MM. les députés, donc merci beaucoup de nous accueillir aujourd'hui. Je vais me présenter, Ginette Fortin, FCGA, planificateur financier et directrice en gestion personnalisée à la Banque Nationale. Je vais laisser le soin à mes collègues de se présenter eux-mêmes, je pense qu'ils vont être capables... Mme Blanchard.

Mme Blanchard (Danielle): Bonjour. Danielle Blanchard. Je suis présidente-directrice générale de l'Ordre des CGA.

Mme Hébert (Danielle): Bonjour. Danielle Hébert, FCGA, deuxième vice-présidente au conseil d'administration et formatrice pour les vérificateurs d'entreprises à l'Agence du revenu du Canada.

M. Smith (Georges): Mon nom est Georges Smith, j'ai été membre à l'occasion de l'Ordre des CGA, mais j'ai surtout participé à la rédaction de ce mémoire comme, je ne dirais pas, expert dans le domaine, mais impliqué dans le domaine à cause d'une carrière de 36 ans à l'Industrielle Alliance, qui, entre autres, a des produits de fonds de placement.

Le Président (M. Hamad): Bienvenue. Alors, on a un bloc de une heure: donc, vous avez 20 minutes et 20 minutes après partagées entre les deux groupes parlementaires.

Mme Fortin (Danielle): Merci, M. le Président. Donc, je suis très heureuse de présenter le mémoire déposé auprès de la Commission des finances publiques de l'Assemblée nationale dans le cadre du mandat d'initiative de la protection des épargnants du Québec, qui a été préparé par l'Ordre professionnel des comptables généraux licenciés du Québec. Donc, outre l'introduction, nous allons voir avec vous le rôle du vérificateur externe, la norme sur l'indépendance des CGA, la surveillance des vérificateurs, nos recommandations, et pour terminer avec une conclusion.

n (15 h 40) n

C'est avec un immense plaisir que l'Ordre des CGA du Québec accepte l'invitation de participer aux travaux de la commission parlementaire des finances publiques dans le cadre du mandat d'initiative sur la protection des épargnants.

L'année 2008 marquera le centenaire de la fondation de l'Ordre des CGA du Québec. Les comptables généraux licenciés du Québec poursuivent toujours le même objectif: assurer la protection du public et maintenir les normes élevées régissant leur formation et leur pratique à titre d'experts-comptables polyvalents. Les CGA oeuvrent à titre de gestionnaires et d'experts-comptables dans les différentes sphères de l'activité économique, les entreprises publiques et privées, les cabinets d'experts-comptables et les organismes publics et parapublics. Après une solide formation théorique et pratique, les CGA doivent obligatoirement, pour exercer leur profession, être inscrits à l'Ordre des CGA du Québec. Ils sont soumis à une déontologie rigoureuse dans l'intérêt de leurs clients, de leur employeur et du public.

Aujourd'hui, l'ordre fait partie des 45 ordres professionnels reconnus par le gouvernement du Québec qui relèvent de l'Office des professions du Québec. Il compte plus de 10 000 membres et étudiants. Il est affilié à CGA Canada, qui regroupe 67 000 membres et étudiants à travers toutes les provinces et les territoires canadiens.

L'Ordre des CGA se réjouit du dépôt, le 14 décembre dernier, du projet de loi n° 64 modifiant le Code des professions et la Loi sur les comptables agréés concernant la comptabilité publique. Ce projet de loi permettra ainsi à tous les comptables du Québec qui détiendront le permis d'auditeur de pratiquer la comptabilité publique. Non seulement l'adoption de cette loi ouvrira-t-elle la voie à une saine concurrence, mais, ce faisant, elle permettra une protection du public accrue. Nous espérons que ce projet aura force de loi cette année.

Nous avons lu avec intérêt le document de consultation publié par la commission. Dans ce document, la commission identifie le vérificateur externe comme un intervenant important dans l'industrie des fonds communs. C'est dans cette optique que l'Ordre des CGA du Québec dépose ce mémoire.

Les fonds communs de placement qui sont des émetteurs assujettis sont tenus de déposer annuellement, auprès de l'Autorité des marchés financiers, des états financiers vérifiés par un vérificateur externe, selon les principes comptables généralement reconnus au Canada. Le vérificateur externe joue un rôle primordial: il est l'expert-comptable indépendant retenu par la société de gestion pour vérifier annuellement les états financiers du fonds. Ce dernier est chargé de délivrer une communication écrite attestant que l'information financière contenue dans les états financiers reflète une image fidèle de la situation financière de ladite société et que les états financiers sont exempts d'inexactitudes importantes.

La mission de vérification est définie comme étant la certification. Cette certification est effectuée selon les normes de vérification généralement reconnues au Canada, telles que définies dans le Manuel de l'ICCA ? Certification. Dans le cadre de cette certification, le vérificateur externe acquiert une bonne connaissance des affaires et des activités de la société, incluant l'évaluation de son système de contrôle interne. Il doit connaître l'environnement dans lequel la société oeuvre afin d'établir son risque de mission. Une fois ces éléments identifiés, le vérificateur externe réunit suffisamment d'éléments probants pour arriver aux conclusions sur lesquelles il fonde son opinion dans son rapport de vérificateur. Il demeure alors primordial que le vérificateur et l'équipe chargée des missions de vérification soient indépendants en regard du promoteur, et ce, conformément à la norme sur l'indépendance en vigueur afin de protéger les intérêts du public et des épargnants.

Notre mémoire fera le tour de la question de l'indépendance de l'expert-comptable. Nous vous présentons comment la profession comptable a répondu à la crise de confiance qui s'est manifestée au lendemain des grands scandales financiers, en Amérique et en Europe, et nous vous présenterons quelques suggestions visant à accroître la protection des petits épargnants, que ce soit dans un contexte de fonds importants ou émergents.

Maintenant, le rôle du vérificateur externe. Bien que plusieurs observateurs aient cru que les grands scandales financiers au début du XXIe siècle étaient derrière nous, que les leçons avaient été apprises et que de nouveaux mécanismes de réglementation et de surveillance avaient été mis en place, l'actualité nous révèle qu'on ne peut être que trop vigilant. À cet égard, l'apport des travaux de la commission parlementaire est très important.

On attribue la citation suivante au regretté économiste canadien John Kenneth Galbraith: «Les récessions rattrapent les erreurs des vérificateurs.» Bien que le prestige et la notoriété de M. Galbraith soient indiscutables, nous portons à votre attention que cet économiste de renommée internationale n'avait pas examiné de façon précise les questions suivantes: Comment l'information tirée d'une mission de certification peut-elle appuyer les décisions des épargnants? Que révèlent les états financiers vérifiés? Que cachent les chiffres? Quel est l'écart entre les attentes des investisseurs et les états financiers? Voilà quelques éléments importants à considérer. L'efficacité des marchés financiers est fondée sur la divulgation des informations pertinentes aux investisseurs. De là, encore une fois, l'importance de l'indépendance du vérificateur.

L'écart par rapport aux attentes en matière de vérification persiste toujours malgré les 25 années d'efforts déployés par la profession pour le combler. Les utilisateurs des états financiers, particulièrement dans le domaine de l'épargne, s'attendent à ce que ces derniers soient exacts, faute de quoi la confiance dans le système financier risque d'être ébranlée. Le problème tient au fait que le public assimile une opinion sans réserve d'un vérificateur externe à un certificat de bonne conduite.

Cet écart entre les attentes et les réalités a aussi été signalé par l'Autorité des marchés financiers dans son mémoire déposé devant la commission, en janvier 2006. L'autorité tenait les propos suivants: «La vérification externe confère au vérificateur un rôle de première ligne auquel les activités et les processus de surveillance de l'autorité ne peuvent équivaloir. Bien que le travail exécuté par le vérificateur externe comporte certaines limites quant à la détection des fraudes et des inexactitudes, ce dernier peut relever des situations qui pourraient se révéler préoccupantes en regard de la protection des investisseurs.»

Selon certains, le rôle du vérificateur externe consiste à accroître la confiance des investisseurs dans la fiabilité et la véracité des états financiers d'une société. Cette interprétation du rôle du vérificateur externe pose un problème, car elle néglige un certain nombre de questions: nul ne peut garantir que la direction d'une société n'essaiera pas délibérément d'en tromper les actionnaires et les instances de réglementation; nul ne peut garantir que les vérificateurs parviendront infailliblement à détecter les cas où la direction a conspiré pour les tromper; nul ne peut garantir que les vérificateurs auront toujours la possibilité de détecter la fraude ou qu'ils y parviendront.

En fait, ce n'est pas là leur responsabilité. Les normes de vérification généralement reconnues au Canada attribuent aux vérificateurs l'obligation d'avoir une assurance raisonnable que les états financiers pris dans leur ensemble soient exempts d'inexactitudes importantes résultant de la fraude ou de l'erreur.

Le vérificateur externe a pour rôle de certifier que les états financiers sont conformes à tous les égards importants aux principes comptables généralement reconnus. La référence au PCGR dans l'opinion du vérificateur est primordiale. Comparons ce point de vue à celui du Royaume-Uni, où l'opinion qu'exprime le vérificateur externe ne fait pas mention des PCGR. Certains peuvent avancer que pareille vérification a pour but de garantir que les états financiers donnent une image juste et fidèle des activités de l'entité. L'image juste et fidèle n'élude pas les PCGR. Elle laisse plutôt à penser que le vérificateur externe, se basant sur des critères qui ne sont pas explicitement énoncés, s'assure que les états financiers ne sont pas trompeurs. Il ne donne aucune garantie quant à la valeur de l'entreprise. Il faut souligner que cela ne fait pas partie de le vérification externe.

Au Canada, la commission MacDonald de l'Institut canadien des comptables agréés, dont le rapport sur les attentes du public à l'égard de la vérification a été publié en 1988, a constaté qu'aux yeux du public les vérificateurs externes n'étaient pas suffisamment indépendants de la direction dans leurs observations. Entre autres, la commission a constaté: que les actionnaires ou leurs représentant devraient assumer la responsabilité de choisir les vérificateurs et négocier les honoraires de vérification, ce qui n'est pas le cas dans la pratique; que le vérificateur s'occupe de défendre les choix de la direction plutôt qu'à veiller aux intérêts des actionnaires et des autres parties intéressées; que les vérificateurs externes utilisent la vérification comme produit d'appel, un «lost leader», pour promouvoir leurs services de consultation, ce qui peut être préjudiciable à la qualité de la vérification et faire en sorte que des erreurs, des actes illégaux et des fraudes passent inaperçus; que les vérificateurs externes doivent leurs revenus à la direction des entreprises. Ils risquent donc de ne pas avoir l'objectivité nécessaire pour adopter une attitude ferme si, par exemple, ils détectent des inexactitudes importantes dans les états financiers de l'entreprise. Au demeurant, le fait d'entretenir d'étroites relations avec son client peut avoir une incidence sur l'indépendance du vérificateur.

n(15 h 50)n

Les scandales qui ont secoué les marchés financiers ont obligé les multiples intervenants des marchés financiers à évaluer, à analyser et à améliorer leurs processus, leurs normes, leurs lois et leurs règlements. La conjoncture remettait à la surface les constatations de la commission Macdonald.

Pour sa part, dans le cadre même de son mandat de protection de l'intérêt du public, l'Association des comptables généraux accrédités du Canada a entrepris une analyse approfondie des réformes nécessaires. L'élaboration de la norme sur l'indépendance des CGA, avec le plein concours des ordres professionnels des provinces, y compris l'Ordre des CGA du Québec, a été partie intégrale du processus de renouveau nécessaire pour rétablir la confiance du public dans la fiabilité de l'information financière.

Maintenant, la norme sur l'indépendance des CGA. L'intérêt du public est le fondement même de la norme sur l'indépendance des CGA. L'indépendance des experts-comptables, des cabinets, des membres des équipes de certification et des clients est nécessaire afin de fournir une assurance raisonnable que la mission exécutée et que le rapport délivré dans le cadre de cette mission reposent sur l'exercice d'un jugement professionnel exempt de conflits d'intérêts et de partis pris.

Les exigences en matière d'indépendance applicables aux missions de certification et aux missions d'application de procédés de vérification spécifiés sont formellement énoncées dans le Code des principes d'éthique et règles de conduite de CGA-Canada.

Tout expert CGA qui prépare des états financiers doit se soumettre à la norme sur l'indépendance des CGA. De plus, à la suite de l'avis de modification de la règle émise par le Conseil canadien sur la reddition des comptes, le CCRC, le 30 juin 2006, tout CGA qui participe au programme de surveillance du conseil doit se conformer à la norme sur l'indépendance des CGA.

La norme des CGA repose en partie sur le cadre conceptuel énoncé dans le Code of Ethics for Professional Accountants de l'International Federation of Accountants. La norme a été reconnue par le CCRC comme étant équivalente à celle de l'Institut des comptables agréés.

La norme fournit un cadre devant être utilisé par les CGA, les membres des équipes de certification, les cabinets et, s'il y a lieu, les entités du réseau pour identifier les menaces pour l'indépendance; déterminer si ces menaces prises individuellement ou collectivement sont manifestement négligeables; déterminer et mettre en place, dans le cas où les menaces ne sont pas manifestement négligeables, les sauvegardes propres à éliminer les menaces et à les ramener à un niveau acceptable, de façon à préserver l'indépendance d'esprit et l'apparence d'indépendance. De plus, la norme offre un guide d'application du cadre général à des situations spécifiques qui pourraient survenir lors d'une mission de certification.

Aujourd'hui, ces normes sont formellement acceptées, intégrées à la pratique et sujettes à l'inspection professionnelle rigoureuse des CGA. L'Ordre des CGA du Québec a la responsabilité d'élaborer des normes professionnelles pour ses membres et l'obligation de protéger le public et de veiller à ce que les CGA respectent les normes d'éthique les plus élevées. Les épargnants peuvent ainsi être assurés que les CGA respectent les plus hauts standards en matière d'éthique professionnelle.

Le Conseil canadien de reddition des comptes et les vérificateurs. À la suite des faillites colossales qui ont secoué l'Amérique du Nord et l'Europe, les organismes de réglementation du Canada et l'Institut canadien des comptables agréés ont réagi en mettant sur pied le Conseil canadien sur la reddition des comptes, le CCRC, qui s'est donné pour mission de rétablir la confiance du public dans l'information financière.

Organisme sans but lucratif, sa légitimité lui a été conférée par l'adoption, en août 2005, du règlement 52-108 sur la surveillance des vérificateurs. Ce règlement impose aux émetteurs assujettis qui déposent des états financiers accompagnés d'un rapport de vérification de faire établir ce rapport par un cabinet d'experts-comptables qui participe au programme du CCRC et qui respecte les restrictions émises et les sanctions prises par ce dernier.

Le CCRC dispose de pouvoirs d'inspection et d'enquête auprès des membres inscrits. L'intérêt public exige des marchés financiers efficients soutenus par une information financière solide. Comme les investisseurs s'appuient en partie sur cette information pour prendre leurs décisions, il est important qu'elles soient fiables. En outre, une information financière fiable a des répercussions importantes en matière de politiques d'intérêt public parce qu'elle a le pouvoir d'influer sur l'économie.

Nous avons accueilli favorablement cette initiative qui a un objectif louable, soit celui de favoriser une vérification indépendante de grande qualité.

Maintenant, M. le Président, nos recommandations, nous les avons ajoutées au mémoire que vous avez déjà eu en main. Donc, nous observons et... Notre observation et notre pratique du monde des affaires nous portent à présenter les recommandations suivantes visant une protection accrue des épargnants.

Premièrement, que chaque émetteur de fonds, quel que soit son mode de création, soit tenu d'avoir son propre conseil d'administration et que ce conseil soit composé d'un certain nombre de membres indépendants.

En novembre dernier, dans notre mémoire sur la gouvernance des sociétés d'État, nous avons suggéré la création d'un conseil d'administration composé d'un président du conseil différent du président et chef de la direction de l'entreprise ainsi que des administrateurs compétents.

Dans le cas d'un fonds, le promoteur du fonds aurait l'obligation de s'entourer d'un conseil d'administration permettant l'application de règles de gouvernance adéquates, incluant la création d'un comité de vérification auquel le vérificateur externe ferait rapport.

La présence des membres indépendants non seulement augmenterait la qualité des commentaires et des décisions des membres face à la gestion du fonds, mais également favoriserait l'indépendance du vérificateur tenu alors de rendre compte au comité de vérification et non au seul promoteur.

Deuxièmement, que le comité de vérification issu du conseil d'administration soit composé de membres indépendants.

Dans l'exercice de leur mandat, ces membres indépendants pourraient ainsi se préoccuper non seulement des intérêts des actionnaires, mais également de celui des épargnants. Ce comité de vérification favoriserait également une plus grande indépendance entre le vérificateur externe et la direction. Cela permet alors de renforcer la gouvernance et l'efficacité de la direction.

Par ailleurs, en vertu du règlement 81-107, le comité d'examen indépendant des fonds d'investissement, le CEI, est chargé de la supervision des décisions qui entraînent ou sont susceptibles d'entraîner un conflit d'intérêts. En l'absence d'un comité de vérification, ce comité d'examen indépendant pourrait alors s'intégrer au conseil d'administration et voir son mandat d'examen élargi pour ainsi protéger les intérêts des épargnants.

Dernière recommandation: que l'Autorité des marchés financiers puisse, lors d'un mandat particulier de vérification auprès d'un fonds, confier ce mandat à un vérificateur différent que le vérificateur déjà attitré au fonds. Le vérificateur du fonds remplit sa mission de vérification normale, soit de s'assurer que les états financiers sont exempts d'inexactitudes importantes. Par contre, lorsque l'Autorité des marchés financiers a des raisons de croire qu'une situation douteuse nécessite une vérification particulière, il nous semble raisonnable de croire qu'une telle contre-expertise devrait être exécutée par une autre firme de vérification choisie par l'Autorité des marchés financiers. En demandant à un autre vérificateur de procéder à des mandats spéciaux, l'AMF renforce l'indépendance du vérificateur assigné. Il s'agit alors d'un mandat spécial d'inspection. De plus, cette assignation spéciale favorise la transmission de l'information entre le vérificateur assigné et l'AMF.

Donc, en conclusion, la commission parlementaire sur les finances publiques a un travail important à accomplir. La fiabilité de l'information financière est un élément important dans la protection des épargnants. Les épargnants doivent pouvoir compter sur une information qui est à l'abri de toute ingérence. La norme sur l'indépendance des CGA a été adoptée dans l'intérêt du public.

L'Ordre des CGA du Québec tient à remercier la commission de lui avoir donné l'occasion de déposer ce mémoire. Rappelons-nous toutefois que, quels que soient les mesures de contrôle ou les systèmes de vérification mis en place, tout cela ne pourra jamais remplacer l'honnêteté et l'intégrité d'individus. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Alors, Mme la présidente, vous avez respecté très bien votre temps. Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.

n(16 heures)n

M. Moreau: Merci, M. le Président. Vous êtes gentil.

Alors, je veux saluer les gens de l'Ordre des CGA du Québec, vous féliciter en fait pour votre participation à nos travaux. Vous avez raison, nos travaux sont importants, mais ils ne seront équivalents qu'à la qualité des représentations qui nous seront faites, et, à cet égard-là, vous avez une partie de la responsabilité. Je veux également vous féliciter pour le mémoire que vous avez produit.

J'irai, pour laisser le temps à mes collègues de poser les questions sur d'autres sujets, j'irai sur un aspect que j'ai commencé à aborder avec le groupe qui vous a précédés, et je sais que vous l'avez entendu: la question du secret professionnel.

L'opinion publique, lorsqu'on regarde la revue de presse concernant notamment le dossier de Norbourg, condamne assez généralement la rapidité d'intervention de l'Autorité des marchés financiers, laquelle, en partie, se défend sur cet aspect-là des choses en disant: Oui, mais, vous savez, notre intervention, elle est importante. Elle a des conséquences qui sont lourdes et, compte tenu de ces conséquences-là, on ne peut pas agir sur des impressions. Il faut avoir des preuves solides et notamment avoir de l'information.

Or, un des éléments qui empêchent la circulation fluide des informations, c'est la position, opposée d'ailleurs à l'opinion exprimée par l'Autorité des marchés financiers, de l'existence du secret professionnel chez les comptables. Je sais qu'il y a certains bureaux de comptables qui ont présenté un mémoire et qu'on entendra demain, qui émettent l'opinion que ce secret professionnel là existe. Et je ne veux pas nécessairement vous entraîner dans le débat juridique de savoir s'il existe ou s'il n'existe pas, mais j'aimerais que nous puissions réfléchir ensemble à haute voix. Je vous ramène à la page 10 de votre mémoire, lorsque vous parlez du Conseil canadien sur la reddition de comptes, où on dit que les investisseurs s'appuient en partie sur l'information, là, dont vous venez de parler pour prendre leurs décisions; il est important qu'elle soit fiable. En outre, une information financière fiable a des répercussions importantes en matière de politique d'intérêt public parce qu'elle a le pouvoir d'influer sur l'économie. Et, plus tôt, vous parlez... parlant de l'Ordre des CGA, que son mandat notamment... qu'elle a pour mandat la protection de l'intérêt du public, et c'est pourquoi vous avez entrepris une analyse approfondie dans le domaine.

Dans la mesure où on parle de l'intérêt public et de votre mission première qui est l'intérêt du public, comment pourrait-on souscrire ? et voyez là une question, non pas une opinion que j'émets; comment pourrait-on souscrire ? au fait qu'il peut exister un secret professionnel ou une obligation qui ferait en sorte que l'on empêcherait la libre circulation de l'information, laquelle est à la base même de la protection du public, qui est le mandat de votre ordre et qui sous-tend la fiabilité des informations qui sont données au public investisseur?

Mme Fortin (Ginette): Votre question a plusieurs volets, mais je vais répondre quand même assez simplement compte tenu... simplement. Par contre, le débat est très grand, puis l'Ordre des comptables agréés en a discuté grandement.

Lorsqu'on permet de donner de l'information, c'est important de voir tous les volets. Donc, de l'information, c'est l'information que le client nous a donnée et puis la confiance qu'il met en son vérificateur pour avoir, pour représenter l'information qui soit juste. Donc, si on ouvre une information très grande, je crois qu'à ce moment-là on va tomber dans un cercle vicieux en ce sens que le vérificateur va avoir de la difficulté à aller chercher l'information. En termes simples, il faudrait mettre des balises sur l'information: il faudrait savoir quelles sont les informations pertinentes, et ces balises-là seraient connues de tout le monde. Donc, le vérificateur à l'intérieur se doit d'aller chercher l'information, et le promoteur se doit de lui donner la bonne information. Si le promoteur ne lui donne pas la bonne information, c'est qu'il y a deux raisons: c'est qu'il veut vraiment la cacher. Il peut y avoir motif de fraude ou tout simplement de négligence parce qu'il n'a pas bien fait son travail, mais, à partir du moment où on pourrait établir certaines balises qui ne sont pas simples comme ça ? là, ça a de l'air facile à discuter comme ça, mais qui sont très... sont plus difficiles à élaborer compte tenu qu'un mandat de vérification, ça peut être assez large comme ça peut être assez spécifique ? donc, il faudrait établir des balises qui fait en sorte que le vérificateur est tenu de divulguer l'information dans un laps de temps très court si l'information qu'il reçoit est à l'intérieur de ces balises-là. Mais je ne crois pas qu'on remplirait le mandat d'ouvrir toute l'information, que toute l'information de l'entreprise soit divulguée soit aux gens de l'Autorité des marchés financiers, ou au CCRC, ou à l'Ordre des comptables agréés, ou à l'Ordre des CGA lorsque nous aurons le mandat de faire des vérifications de compagnies publiques. Donc, il faut avoir des balises afin de respecter l'industrie et le client aussi. Je ne sais pas si...

M. Moreau: ...en fait, je vais vous amener... je vais préciser un peu ma question.

Mme Fortin (Ginette): Oui.

M. Moreau: Imaginez que les gens qui nous écoutent sont des investisseurs uniquement et dont certains d'entre eux ont été floués dans le dossier Norbourg. Comment peut-on expliquer à quelqu'un qui est dans cette situation-là qu'on devrait mettre des balises à l'égard de l'information qui doit circuler à un organisme qui n'est pas en compétition avec le client, là. On parle de l'Autorité des marchés financiers qui a, elle aussi, une obligation du public, qui a une obligation d'intervenir et qui de toute façon, même si elle recevait une information qui peut être, par exemple, un secret industriel, qui pourrait être une technique ou une pratique administrative qui confère un avantage à une entreprise, l'autorité n'étant pas en compétition avec cette entreprise-là, pour quelle raison est-ce que je devrais commencer à disséquer l'information qui devrait être donnée par le comptable, qu'il soit un CGA ou comptable agréé à l'autorité alors que celle-ci enquête? Si l'information est pertinente et qu'à la fin de l'enquête l'autorité estime qu'il y a matière à intervenir, à poursuivre ou à faire des recommandations, bien elle aura eu l'information nécessaire. Si elle estime qu'il n'y a pas lieu d'intervenir, cette information-là va demeurer confidentielle. En d'autres termes, le secret auquel est tenu le comptable s'étendrait à l'Autorité des marchés financiers, ce qui permettrait une liberté totale d'action et de circulation de l'information. Pourquoi est-ce qu'on s'opposerait à cette liberté-là de circulation d'informations?

Mme Fortin (Ginette): Je vais transmettre la parole à mon collègue pour pouvoir dire...

Le Président (M. Hamad): M. Smith.

M. Smith (Georges): C'est parce que, dans le travail du vérificateur externe, il y a beaucoup, beaucoup de choses qui ne sont pas ce que j'appellerais le secret professionnel parce qu'elles sont ou vont devenir du domaine public. Alors, l'ensemble des données financières qui sont dans le travail du vérificateur, ce ne sont pas ce que j'appellerais des choses qui font partie du secret professionnel.

Votre question portait sur la libération du secret professionnel, mais, cette question-là, elle ne porte pas sur l'ensemble du travail de la vérification. L'ensemble du travail de la vérification, c'est quelque chose de public, c'est normal que le vérificateur en parle à l'inspecteur. Mais quand on tombe dans ce qui est le secret professionnel, ça, il faut s'assurer de le protéger aussi parce que, si on ne le protège pas, comme ma consoeur a dit, le client va avoir tendance à cacher les choses. Alors, ce qu'on dit, c'est que, si l'autorité a besoin d'une information qui n'est pas publique, qui ne fait pas partie des chiffres qui sont publics, qui ne font pas partie d'une confirmation qu'on a envoyée à un tiers mais qui fait partie vraiment, là, de l'intimité du secret professionnel, cela, ça doit être balisé.

Et parmi les balises possibles, c'est qu'il y ait l'autorisation d'un tribunal pour dire au vérificateur: Oui, bien là le tribunal a examiné l'ensemble des choses, puis il a dit: Là il faut que l'accès au secret professionnel, y compris à l'égard de l'Autorité des marchés, il faut que ça reste l'exception; il ne faut pas que l'Autorité des marchés peut en tout temps avoir accès au secret professionnel du comptable. Mais cette partie-là, comme je vous dis, là, c'est une partie infime de l'information qui est disponible.

M. Moreau: Mais, M. Smith, avec égard, là, pour les gens qui nous écoutent, on sait très bien que, quand quelqu'un fait de la fraude ou essaie de dissimuler des informations, ça ne fait pas partie de ce qu'il va rendre public, hein. Si je fraude et que je l'écris dans mes états financiers, ce ne sera pas très long, là, il va y avoir des gens qui vont se protéger rapidement. Alors, le secret professionnel intervient ici, là. Il y a des éléments d'information qui sont transmis au vérificateur externe qui devraient normalement être portés à l'attention de l'Autorité des marchés financiers.

Vous dites: On va faire les balises, et là vous avez fait une référence ? vous savez, je suis avocat de formation ? ça devrait être autorisé par le tribunal. Il y a 200 personnes qui vont vous dire: Bien, on va le savoir trois ans plus tard, quand de toute façon il va être trop tard. C'est exactement ce que les gens reprochent à l'autorité à l'heure actuelle dans le dossier Norbourg, d'être intervenus trop lentement ou trop tardivement. Et l'autorité dit: Écoutez, moi, je n'ai pas accès à cette information-là. Alors, c'est un peu comme le chien qui court après sa queue, si vous me permettez. Plus on va baliser le secret professionnel, plus on va rendre inefficaces les mesures propres l'autorité efficace.

Alors, si ce qui fait partie du secret professionnel est divulgué sans contrainte à l'autorité et que l'autorité, qui est quand même un organisme qui a mission de protéger le public, pas de divulguer l'information privilégiée qu'elle reçoit de façon large, peut recevoir cette information-là, où est le mal, où serait le mal?

M. Smith (Georges): C'est une question de pondération entre l'intérêt du public. C'est quoi, la meilleure façon de protéger l'intérêt du public? Est-ce que c'est de protéger la relation entre le vérificateur et son client ou aller jusque-là? C'est une question de pondération. Nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'il faut protéger le secret professionnel parce que c'est une des bases de la vérification.

M. Moreau: Mais, moi, je vous suggère...

M. Smith (Georges): Mais on ne s'oppose pas, là.

n(16 h 10)n

M. Moreau: Non, mais, si vous étendez ce secret professionnel là à l'autorité, où est le mal? Alors, vous avez le secret professionnel du vérificateur externe, qui ne s'applique à l'égard de l'autorité. L'autorité est soumise au même secret professionnel, sauf lorsqu'elle constate qu'il y a un cas de fraude où elle doit intervenir. Où est-ce que la relation privilégiée entre le client et le professionnel est menacée dans une hypothèse semblable?

Mme Hébert (Danielle): Moi, je voudrais juste apporter un point...

Le Président (M. Hamad): Juste vous présenter. C'est madame...

Mme Hébert (Danielle): Oui, Danielle Hébert.

Le Président (M. Hamad): Danielle... Mme Hébert. O.K.

Mme Hébert (Danielle): C'est ça. Juste apporter un point, parce qu'on discute, et, moi, je pense qu'il y a une différence à regarder. La première chose, c'est que vous avez le lien de confiance avec le client et qu'on sait que c'est un-un ou très peu de personnes. Pour travailler dans un organisme gouvernemental, on sait que pour la population ou pour les gens en industrie, quand on tombe dans un organisme gouvernemental, c'est très gros. Alors, pour la personne qui établit un contact un à un, il y a un lien, il y a une personne, on capable de divulguer. Les gens de façon générale, je ne dis pas à tort ou à raison, ont souvent le fait de dire: donner l'information à un gros gouvernement ou un gros organisme gouvernemental, il y a des craintes, fondées ou non fondées, on pourrait en parler longtemps, mais il y a des craintes. Et, je pense, qu'est-ce qu'il faut juste faire attention, c'est que, tant qu'on a une relation un à un ou quelques-uns, il y a de l'information qui se donne beaucoup plus facilement. Quand on a un appareil gouvernemental en arrière, les gens parfois ont peur. Peut-être qu'ils n'ont pas raison d'avoir peur, mais ils ont peur.

Alors, je pense que, ce qu'il faut faire attention, c'est tant qu'on va parler, si la personne, elle sait qu'il y a le gros organisme gouvernemental en arrière, elle va peut-être limiter dans sa... elle va avoir une réticence, et peut-être que l'objet de la protection du public, on va lui nuire, parce que la personne pourrait peut-être parler plus, donner plus d'éléments, pour justement détecter ces cas-là, qu'on n'aurait pas parce que la personne serait sur la défensive.

Ça fait que ce n'est pas dire qu'on est contre, je pense qu'il faut juste penser, pour avoir à transiger souvent avec cet élément-là, que le gros organisme gouvernemental en arrière, ça n'a pas de visage, hein, et les gens ont souvent l'impression que c'est gros, qu'il y a beaucoup de pouvoir ? dans certains cas c'est vrai. Alors, moi, je pense que ça, c'est un bémol. Il faut penser.

Le Président (M. Hamad): Là, je vais intervenir, là. En fait, l'autorité, ce n'est pas un gouvernement, là...

Mme Hébert (Danielle): Non, non, mais...

Le Président (M. Hamad): ...c'est un organisme d'enquête. Il faut mettre ça dans les...

Mme Hébert (Danielle): Oui, oui, je suis d'accord. Mais c'est la même image, là, c'est...

Le Président (M. Hamad): Attendez. Oui, mais l'image... on parle de réalité, là. Et là dans un cas... mettons, moi, j'ai mon background dans le privé, mettons, une compagnie qui a fait ses états financiers, puis a prévu des profits dans ses états financiers basés sur des prévisions, et finalement ces profits-là ne se sont pas concrétisés et les gens qui ont investi, bien là ils ont perdu de l'argent et là il y a une enquête pour voir qu'est-ce qui s'est passé. Alors, quand l'autorité intervient avec le comptable, puis il demande au comptable: Est-ce que, quand vous avez mis les prévisions de vente et de profits dans vos états financiers, est-ce que vous l'avez bien... est-ce que vous avez des «backups» en arrière qui justifient ou qui démontrent que l'information que vous avez était bonne? Avez-vous fait la vérification? Évidemment, les chiffres, ce n'est pas eux qui sont responsables, ce n'est pas le comptable, c'est le propriétaire.

Mais là, où il est, le secret professionnel? Autrement dit, je suis un citoyen, et la compagnie a fait des mauvaises prévisions, ils ont vendu des actions, je suis un épargnant qui a acheté et finalement s'est fait floué, et là il y a un organisme d'enquête, là, ce n'est pas le ministère de la Justice, ce n'est pas... un organisme d'enquête qui vient, qui arrive. Un organisme, ce n'est pas le gouvernement. C'est encore plus petit que le gouvernement fédéral, donc qui arrive pour intervenir, et là, la relation, ce n'est pas une question de confiance, on est rendu dans l'enquête, et là on va demander au comptable: Est-ce que vous avez fait votre job? Est-ce que, les chiffres que vous avez mis là, les prévisions de vente, est-ce qu'elles ont été validées, vérifiées? Avez-vous des preuves que vous avez un carnet de commandes de 1 milliard, mettons, est-ce qu'il y a des preuves derrière ça? Avez-vous un estimation détaillée des coûts? Avez-vous validé ça? Là, il n'y a pas de secret professionnel.

Le secret professionnel, c'est plus sur si j'ai des données commerciales, si j'ai une méthode de gestion, que je le fais pour moi-même, qui me permet d'être plus... Mais là, c'est ce point-là qu'on veut éclaircir là-dessus, là: Jusqu'où on peut aller? Quand l'autorité vient puis elle prend cette information-là pour faire son enquête ? et plus tard ça peut être la Sûreté du Québec aussi, on ne peut pas dire que c'est un gros organisme ? c'est la vérification, c'est les procureurs de la couronne qui interviennent, mais on ne peut pas dire: Vous êtes gros, je ne peux pas vous donner l'information.

Alors, comment vous répondez à ce point-là? Comment est-ce que... Pourquoi le comptable dit: Non, je ne peux pas vous donner l'information? Mais ce n'est pas donner l'information, c'est vérifier si le comptable a fait sa job en premier; deuxièmement, s'il l'a fait sa job et les données sont erronées, qui sont fournies par le propriétaire, mais là il y a un problème. C'est ça que l'autorité veut faire, là, puis pour finalement protéger l'investisseur qui a mis de l'argent sur les bases des états financiers ou des prévisions.

Mme Hébert (Danielle): Vous avez tout à fait raison. L'Ordre des CGA est en accord avec cette information-là parce que, comme le mentionnait mon collègue, la majorité de l'information, elle est d'ordre public. Lorsqu'il y a lieu de savoir si le vérificateur a bien fait son travail ou non, là, on entre dans un sujet plus délicat, mais en principe, selon les normes généralement reconnues, il doit avoir fait tous ces procédés-là. Ça fait que, si le vérificateur est en mesure... il se doit d'être en mesure de répondre, oui, s'il y a des inventaires, s'il y a tant d'actions ou des choses comme ça: Oui, j'ai vérifié, parce que, dans un mandat de vérification, on se doit de s'appuyer sur des données probantes.

Effectivement, on est en accord avec cette divulgation de l'information qui sont sur le travail du vérificateur mais qui se veut un travail qui est, je dirais, plus spécifique lorsqu'on parle de fonds communs, mais c'est quand même le même travailleur appuyé sur des procédés. Vous avez raison, je pense qu'on est en accord avec la divulgation de ces informations-là. Mais ça, c'est une information qui est très précise, mais, lorsqu'on parle de divulgation d'informations, c'est large, c'est un peu aussi, je vous dirais, préjudiciable, au travail du prévenu. Mais, dans un cadre comme vous dites, la fraude est là.

Le Président (M. Hamad): La largeur que vous voulez dire, là, c'est l'autorité qui vient, qui prend l'information. Quand on dit de divulgation, là, c'est à l'autorité. Alors, où elle est, la limite de ça? Nous autres, on veut juste savoir la limite des...

Mme Hébert (Danielle): Je comprends. Je vais vous ramener un petit peu aux recommandations qu'on a faites. On a recommandé un conseil d'administration puis aussi en dessous, à l'intérieur du conseil d'administration, un comité de vérification. Et le comité de vérification, ces gens-là qui peuvent être indépendants ou il peut y avoir une partie qui sont dépendants, dépendamment du choix, ce comité-là a pour mandat de vérifier justement le contrôle interne. Parce que, lorsqu'on fait un mandat de vérification, on doit s'assurer que le contrôle interne et tout le processus des données doit être correct. Donc, c'est pourquoi on recommande un conseil d'administration et surtout un comité de vérification auquel le vérificateur va devoir aller chercher de l'information à l'intérieur, que peut-être il n'aurait pas par la direction, et s'assurer que tout le processus qui se fait à l'intérieur soit légal. Donc, c'est pourquoi on recommande...

Cette information-là, ça va éviter effectivement d'avoir des fraudes, mais, si jamais il y avait fraude, à ce moment-là, le vérificateur pourrait facilement donner l'information à l'autorité, dire: Bien, effectivement, le contrôle interne est probant, tout a été fait. Les choses, ça, on l'a fait, on s'est assuré de ça, de ça. Il n'y a pas de problème à ce niveau-là, là.

Mais là on vient encore un petit peu peut-être ajouter, je dirais, là, une protection pour les épargnants parce que le mandat du conseil d'administration et du comité de vérification de par nature, son mandat, c'est vraiment de protéger l'actionnaire mais aussi l'épargnant.

Le Président (M. Hamad): Parce qu'il y a les cas normaux puis les fraudes.

Mme Hébert (Danielle): C'est ça.

Le Président (M. Hamad): Les fraudes, là, on ne les connaît pas, là, on ne le sait pas là. Et quand les états financiers sont signés, le citoyen, l'investisseur investit parce qu'il a vu des états, il a vu des prospectus. Mais tout est signé, tout a l'air beau. Il y a un comptable qui a signé, etc. Donc, il n'y a pas une personne qui a dit: Ça ne va pas bien, là. Hein?

Mme Hébert (Danielle): Effectivement.

Le Président (M. Hamad): Et là pourquoi où... Nous, on veut comprendre, juste comprendre: Pourquoi et où on protège l'information lorsqu'on enquête?

Mme Hébert (Danielle): Vous savez, dans un rapport de vérification, le vérificateur peut émettre une réserve.

Le Président (M. Hamad): S'il a mis des notes sur les états financiers, il y a une annonce d'un problème.

Mme Hébert (Danielle): C'est ça.

Le Président (M. Hamad): ...ce n'est pas le cas. Le cas, c'est que tout va bien. J'ai investi, une autre année plus tard, il y a des pertes majeures.

Mme Hébert (Danielle): Je présume, monsieur, là, je présume que le vérificateur n'a pas décelé, n'a pas décelé, dans le mandat de sa vérification, parce que son mandat n'était pas d'aller chercher de la fraude, mais de s'assurer de l'exactitude des états financiers. Donc, il n'a pas décelé qu'il y avait de la fraude en arrière, donc n'a pas eu comme l'obligation d'émettre une réserve dans son rapport ou de se récuser tout simplement.

Le Président (M. Hamad): Alors là, il faut qu'il ouvre les portes pour que l'Autorité du marché fasse son enquête. On ne dit pas que le comptable est coupable...

Mme Hébert (Danielle): Pas du tout, effectivement.

Le Président (M. Hamad): ...ce qu'on dit, c'est que, s'il y a eu un problème, il faut que quelqu'un puisse faire sa job d'enquête. Si le comptable n'a pas décelé des problèmes, ce qui pourrait être le cas, comment on ouvre? Puis là on dit: On ne peut pas ouvrir parce qu'il y a des informations à protéger. Le secret professionnel. Mais cette protection-là, elle va jusqu'où et elle va comment? Je ne dis pas que le comptable n'a pas fait sa job, mais ça prend quelqu'un pour voir qui qui n'a pas fait sa job. C'est qui a fraudé?

Mme Hébert (Danielle): Effectivement. C'est pourquoi aussi, monsieur, on recommande que l'autorité pourrait faire, dans certains cas, envoyer lui-même un vérificateur avec un mandat très précis, pas un mandat d'émettre un rapport de vérifier sans restriction, mais bien un mandat précis, de s'assurer que le contrôle interne, que les données, parce qu'il y a peut-être une chance qu'il peut y avoir une fraude.

n(16 h 20)n

Le Président (M. Hamad): Donc, il n'y a plus de mur de dire: Secret professionnel. Touche pas aux données.

Mme Fortin (Ginette): Effectivement.

Le Président (M. Hamad): O.K. Donc, c'est ça qu'on...

Mme Fortin (Ginette): Donc, on vient un peu...

Le Président (M. Hamad): O.K. Là, on change ce qu'on disait au début, là.

Mme Fortin (Ginette): Oui.

Le Président (M. Hamad): Au début, on disait: Non, il y a des informations qu'on ne donne pas puis qu'on donne, mais là on ouvre. Alors, on vient... D'autres collègues? Il y a le député de Trois-Rivières. Puis on revient ici? O.K., la députée de Mirabel, faire l'alternance.

Mme Beaudoin: Bon. Dans un autre ordre d'idées... D'abord, merci pour la présentation de votre mémoire. Et, moi, j'aimerais savoir ? c'est une question que beaucoup de gens se posent ? en quoi la vérification faite par un CGA se distingue de celle faite par un CA.

Mme Fortin (Ginette): Elles ne se distinguent pas, madame. C'est un ordre professionnel qui a des règles, un code de déontologie, un comité d'inspection professionnelle. Donc, c'est tout simplement que vous avez la concurrence, tout simplement, mais elles ne se distinguent d'aucune façon, elles se... Le CGA, comme le comptable agréé, se doit de faire sa vérification selon les normes généralement reconnues. Les CGA ont l'ICCA comme norme parce qu'ils sont établis au Canada, ce sont les normes de l'Institut canadien des comptables agréés. Donc, c'est la même chose, madame.

Mme Beaudoin: L'autre chose, c'est que vous mentionnez, à la page 8 de votre mémoire: «Tout expert-comptable CGA qui prépare des états financiers doit se soumettre à la norme sur l'indépendance des CGA. De plus, à la suite de l'avis de modification de la règle émise par le Conseil canadien sur la reddition de comptes le 30 juin 2006, tout CGA qui participe au programme de surveillance du conseil doit se conformer à la norme sur l'indépendance des CGA.»

Alors, j'aimerais avoir des explications.

Mme Fortin (Ginette): Oui.

Mme Beaudoin: En quoi ça consiste, les deux normes, là?

Mme Fortin (Ginette): O.K. Comme vous le savez, le CCRC est un organisme qui est canadien. L'Ordre des CGA du Canada donc est une association qui est canadienne. Lorsque le CCRC a été formé, l'Ordre des CGA du Canada, qui avait élaboré sa règle d'indépendance, a fait... dans le fond a demandé au CCRC si la règle de l'indépendance de CGA-Canada était conforme à leurs attentes, et ils ont dit oui. Donc, en tant que CGA, nous devons suivre la règle d'indépendance de CGA qui, elle, est acceptée par le Conseil canadien de la reddition des comptes.

Tout simplement, c'est qu'en fin de compte, comme je vous ai dit tantôt, les normes de vérification sont édictées par l'ICCA, l'Institut canadien des comptables agréés. Ce sont les normes de vérification: comment effectuer notre certification, comment faire, la façon de le faire. La règle de l'indépendance, elle est édictée par chacune des associations. Donc, CGA Canada par contre a fait accréditer... bien, pas accréditer, mais le CCRC a accepté la norme comme étant valable de... pour être capable, par les cabinets de CGA, de pouvoir faire des comptabilités publiques parce que, dans toutes les autres provinces, les CGA ont le droit de faire de la vérification des comptabilités publiques, des compagnies publiques.

Une voix: Sauf au Québec.

Mme Fortin (Ginette): Oui.

Mme Beaudoin: Sauf au Québec. C'est ça, hein?

Mme Fortin (Ginette): Sauf au Québec, effectivement.

Mme Beaudoin: D'accord, oui. Merci.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Merci, M. le Président. Merci, Mme Fortin, merci à vos collègues de votre présentation. Je pense honnêtement que vous pourriez éclairer davantage la commission dans ce qu'on recherche, puis j'espère que les autres intervenants vont également être sensibles à cette préoccupation-là, et je m'explique. Le mandat de la commission, évidemment c'est de trouver de meilleures façons pour protéger l'épargnant, l'actionnaire, mais ultimement l'épargnant, éviter d'arriver à des situations extrêmement malheureuses comme celles qu'on a connues.

Puis je vais prendre une image peut-être pour exprimer ce que je pense jusqu'à maintenant. J'espère qu'on ne se retrouvera pas devant une situation qui serait la suivante, c'est-à-dire que, sur une rue sur laquelle j'habite, où il y a plein de gens qui habitent sur cette rue-là, il y a des vols qui sont constatés depuis un certain temps, et que finalement la seule solution que nous trouvons, c'est qu'il faudrait qu'il y ait une présence policière accrue, alors qu'on sait très bien que les résidents ont déjà des indices, ont déjà des informations, mais ce n'est pas à eux à la donner, cette information-là, c'est aux policiers à la trouver. J'espère que cette commission-là, on n'entendra pas plein d'intervenants qui vont venir nous dire: Créez une grosse police qui va les trouver, puis c'est peut-être l'AMF ou il faudrait peut-être avoir un corps policier plus important qui va le trouver, mais, nous, on sait à peu près comment ça peut se faire, mais on ne veut surtout pas être mêlés à ça.

Cela étant dit, je reviens à la page 12 de votre mémoire, à votre troisième recommandation, qui dit ceci: «Le vérificateur du fonds remplit sa mission de vérification normale, soit de s'assurer que les états financiers sont exempts d'inexactitudes importantes. Par contre, lorsque l'AMF a des raisons de croire qu'une situation douteuse nécessite une vérification particulière, il nous semble raisonnable de croire qu'une telle contre-expertise devrait être exécutée par une firme autre.» Bon.

Mais l'AMF, elle va le savoir comment, elle? Il me semble qu'il manque un morceau là-dedans, là. On dit: Les vérificateurs vérifient ce qui semble être normal, puis à l'AMF de trouver ça. Mais l'AMF est où là-dedans? Qui va lui donner l'information?

Ce que je veux dire, c'est: Moi, j'espère, en tout cas, peut-être que vous pourriez, dans le futur, déposer peut-être des informations supplémentaires, vous savez certainement comment il est possible d'intervenir, il y a sûrement des indices que vous voyez. Peut-être que ce n'est pas facile pour vous, comme professionnels, de conclure, mais il me semble, et c'est ce qu'on recherche, comment détecter des indices qui vont éviter d'arriver à des situations qu'on a connues?

De faire l'autopsie d'un meurtre, là, ça, c'est facile, mais de prévenir le meurtre, c'est plus difficile, puis c'est ce qu'on souhaite. Alors, il me semble, et ça vaut pour votre ordre professionnel comme, j'imagine, l'Ordre des comptables qui vont vous suivre, vous avez très certainement l'expertise pour nous donner à nous, la commission, une façon, en tout cas des outils peut-être pour vous permettre, entre autres, à vous de mieux détecter, et comment peut-on faire pour mieux détecter.

Le Président (M. Hamad): Mme Fortin.

Mme Fortin (Ginette): Oui. Regardez, puis vous avez tout à fait raison, puis pour voir comment ça a évolué quand on parlait... Anciennement, le vérificateur devait s'assurer de l'exactitude des états financiers qui étaient préparés par la direction. Aujourd'hui, le rôle du vérificateur, c'est de s'assurer l'exactitude, qu'il n'y ait pas d'inexactitudes, mais aussi de voir, avec son oeil de comptable, s'il n'y aurait pas de la fraude ou non. Donc, on a vraiment évolué, et donc, c'est dans le mandat du vérificateur, ce n'est pas de détecter de la fraude, mais c'est de voir s'il y a fraude, effectivement, de communiquer l'information. D'où là l'importance d'avoir un conseil d'administration et un comité de vérification qui, eux, sont redevables et sont responsables face aux actionnaires ou aux petits épargnants.

Donc, par un procédé comme ça, fait en sorte que le vérificateur qui détecte peut-être une fraude transmet l'information au comité de vérification qui, eux, leur mandat est vraiment la protection des actionnaires ou des épargnants, donc ça va faire son chemin. Comment l'autorité peut être sollicitée dans ce mandat-là? J'ai de la difficulté, au moment où on est, on n'a pas vraiment... on ne s'est pas penchés sur cette solution-là. Parce que le comité de vérification, s'ils sont responsables, ces gens-là, se doivent de prendre les mesures afin de corriger la situation, sinon ils vont être personnellement responsables si jamais il sortait une fraude.

Donc, en principe, si on part de là, la direction va s'assurer, pourrait toujours à la limite mettre des gens qui sont peut-être peu conformes, mais la responsabilisation des gens du conseil d'administration et du comité de vérification va faire en sorte que le problème devrait se régler. Si le problème ne se règle pas, le vérificateur se doit de se retirer. Ou là, à ce moment-là, est-ce qu'il y aurait lieu de mettre un processus d'information face à l'autorité? Oui. Et comment le faire? On ne s'est pas penchés vraiment du comment le faire. Quand on a tout mis en place le processus, le comité de vérification, le conseil d'administration, tout le monde sont bien responsabilisés de leur mandat, suite à ça, il y a encore un problème? Bien là, peut-être qu'il y aurait lieu d'aller aviser l'autorité, mais sous toutes réserves.

Le Président (M. Hamad): Est-ce qu'il y a d'autres collègues? Oui, M. le député de LaFontaine.

M. Tomassi: Est-ce qu'il reste du temps?

Le Président (M. Hamad): Un peu de temps.

M. Tomassi: Merci, M. le Président. Seulement pour... c'est une information. Nous avons le mémoire que vous avez déposé ce matin, là. Il y avait l'autre mémoire que vous aviez déposé en commission en septembre 2006. Vous parliez dans ce mémoire-là de septembre 2006, puis c'est à savoir si vous êtes toujours sur la même pensée concernant le CCRC, où est-ce que vous faites état, à la page 9 du mémoire de septembre 2006, là, de certaines, on va dire, réticences ou de mises au point que vous voudriez apporter au CCRC, surtout sur le pouvoir qu'il dispose d'inspection et d'enquête, là. Vous dites que ce n'est peut-être pas ce que vous attendiez, là, vous vouliez que ce soit plus poussé.

Est-ce que c'est à dire aujourd'hui que le CCRC n'est pas nécessairement transparent ou indépendant dans la forme qu'il est actuellement? Parce que, là, on revient, là, on revient toujours dans le sens si le comptable respecte le CCRC, puis eux-mêmes ne sont pas transparents ou les règles qu'ils s'imposent ne vont pas dans le même sens, on retourne encore en arrière, là.

Mme Fortin (Ginette): Je vais transmettre la parole à madame.

Mme Blanchard (Danielle): Ce que je pourrais dire là-dessus, c'est que, par rapport au CCRC, on souhaiterais que...

Le Président (M. Hamad): Mme Blanchard, Mme Blanchard, allez-y.

n(16 h 30)n

Mme Blanchard (Danielle): C'est ça. Merci, M. le Président. Alors, par rapport à votre question, ce qu'on souhaiterait, c'est que, tout comme aux États-Unis, au Canada, on soit doté d'un organisme qui soit complètement indépendant, qui soit financé de façon indépendante. Comme ça, on assurerait que cet organisme-là ne soit pas soumis aux influences des gens qui le financent. Alors, c'est un peu dans ce sens-là que le CGA-Canada voulait intervenir et qu'on avait fait cette mention-là dans notre mémoire. Alors, c'était pour améliorer l'indépendance par rapport aux différents vérificateurs parce que le CCRC, c'est un organisme qui examine les sociétés de vérification; alors, nous, on souhaitait que ce soit un organisme qui soit complètement indépendant.

M. Tomassi: Ça pourrait être l'AMF.

Mme Blanchard (Danielle): Pardon?

M. Tomassi: Ça pourrait être l'AMF.

Mme Blanchard (Danielle): Ça pourrait être...

M. Tomassi: Je vous lance ça comme ça.

Mme Blanchard (Danielle): Je ne me suis pas penchée sur la solution finale...

Le Président (M. Hamad): Ça n'a pas l'air sûr de votre côté.

Mme Blanchard (Danielle): Ça serait un équivalent canadien parce qu'il ne faut pas oublier l'harmonisation pancanadienne. Alors, il faudrait voir, là.

Le Président (M. Hamad): On va à la dernière question puis on termine là-dessus. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Ma question était dans le même sens que celle de mon collègue député de LaFontaine, c'est-à-dire que vous avez préconisé, dans votre mémoire, une approche mieux vaut prévenir que guérir. Dans une situation comme celle que nous connaissons, je pense que c'est une formule qui peut permettre d'éviter bien des problèmes. Et vous avez, dans vos recommandations, prévu la création d'un conseil d'administration, d'un comité externe indépendant, mais, malgré que vous ayez abordé la question du Conseil canadien de reddition de comptes et de ce qu'il peut avoir comme impact en termes de double vérification et du fait également que vous avez comparé les obligations des vérificateurs du Canada soumis au PCGR versus ceux du Royaume-Uni, qui ont une obligation de présenter un état fidèle de la situation financière de la société, je n'ai pas vu dans vos recommandations qu'on ait mis l'emphase sur une possibilité de création d'un comparable au Conseil canadien de reddition de comptes. Est-ce que c'est...

Mme Fortin (Ginette): Et qui serait québécois?

Mme Charest (Matane): Qui serait québécois, oui.

Le Président (M. Hamad): Mme Fortin.

Mme Fortin (Ginette): Non, effectivement. Merci, M. le Président. Nous avons cru bon de créer un autre organisme parce qu'il y en a déjà un qui fait son travail. Nous voulons nous assurer par contre qu'il fait un bon travail, qu'il respecte son mandat. Est-ce qu'il serait judicieux d'avoir un autre organisme qui serait seulement québécois? Compte tenu qu'au niveau de la Commission des valeurs mobilières, certain que c'est une juridiction québécoise, l'Autorité des marchés financiers qui fait bien son travail, est-ce qu'il pourrait y avoir un organisme qui supervise les cabinets comptables quand on sait que les cabinets comptables peuvent avoir une provenance partout dans le Canada et que nous sommes régis par les mêmes principes comptables généralement reconnus, que nous sommes les normes de l'ICCA, on pense que les personnes... un nouveau conseil se doit d'avoir les mêmes règles que le CCRC. On viendrait juste mettre deux organismes qui seraient parallèles mais qui auraient effectivement le même mandat parce qu'on relève tous des mêmes normes et des mêmes principes comptables généralement reconnus.

Ça fait que je ne penserais pas que d'avoir un organisme québécois pourrait faire en sorte que ce sont des fonds québécois parce que les fonds québécois doivent être régis comme les autres fonds qui proviennent de l'Ontario ou non. Je crois... en tout cas, nous ne l'avons pas regardée cette avenue-là parce que, là, on serait dans la multiplication peut-être, mais nous ne l'avons pas vraiment regardée, mais on ne croit pas que... Le CCRC, son mandat est vraiment de... ils ont la compétence, il faut avoir la compétence pour vérifier un organisme, c'est excessivement important. Donc, ils ont la compétence pour vérifier les cabinets ou le vérificateur qui va faire la vérification. Donc, à partir du moment qu'ils ont la compétence...

Le Président (M. Hamad): Quelques secondes. Question-réponse.

Mme Charest (Matane): Ma question était relative au fait de la préoccupation d'une part, là, d'une double vérification ou d'une demande de divulgation des informations par soit les CA ou les CGA et le problème qu'ils ont avec le secret professionnel. Un organisme comme le Conseil canadien de reddition de comptes, qui est un organisme, soit dit en passant, sans but lucratif et qui donc n'est pas une institution d'État additionnelle à ce qui existe dans les structures actuelles, qui exige également et qui demande des restrictions précises et des sanctions précises dans le cas de l'épargne des entreprises qui sont dirigées vers l'épargne précisément, m'aurait semblé être une solution très intéressante pour l'ensemble de l'intérêt public et des formations professionnelles, en ce sens qu'il s'agit d'une entité indépendante et où véritablement la protection des informations divulguées serait davantage protégée. Et c'est dans ce sens-là qu'étant donné qu'on parle d'organisme sans but lucratif je croyais que ce serait peut-être une avenue intéressante.

Mme Fortin (Ginette): Compte tenu du secret de confidentialité à l'intérieur de cette entreprise-là, ça pourrait peut-être. Mais nous n'avons pas vraiment élaboré dans ce sens-là.

Mme Charest (Matane): Merci.

Le Président (M. Hamad): On l'a dit tantôt, pour le secret professionnel, quand il y a une enquête, on n'a plus ces barrières-là, là. O.K.

Alors, Mme Fortin, Mme Blanchard, Mme Hébert, M. Smith, merci beaucoup d'être présents ici, présenter votre mémoire. Je suspends les travaux pour 10 minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 36)

 

(Reprise à 16 h 48)

Le Président (M. Tomassi): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux, et nous accueillons l'Ordre des comptables agréés du Québec. Alors, je demanderais au président ? je crois, M. McMahon ? de vous présenter et de présenter les gens qui vous accompagnent, et par la suite de nous présenter votre mémoire.

Ordre des comptables agréés
du Québec (OCAQ)

M. McMahon (Daniel): Merci, M. le Président. Effectivement, mon nom est Daniel McMahon, Fellow comptable agréé. Je suis président et chef de la direction de l'Ordre des comptables agréés du Québec. Et aussi, pour le bénéfice de la commission, je suis membre du conseil d'administration du Conseil canadien sur la reddition de comptes. Ça pourra peut-être aider au niveau de la période des questions, tout à l'heure.

Je suis accompagné, aujourd'hui, de deux de mes proches collaboratrices à l'ordre, soit Me Christiane Brizard, qui est la directrice des Affaires juridiques, et Mme Christine Montamat, qui est directrice du Développement stratégique, affaires externes et communications, à l'ordre.

Alors, M. le Président, Mmes, MM. les membres de la commission, au nom des 17 300 comptables agréés du Québec, nous vous remercions de cette opportunité qui nous est offerte de vous présenter brièvement le contenu de notre mémoire et surtout de pouvoir échanger avec vous sur des pistes de solution envisagées pour accroître la protection des épargnants. Puisque les membres de la commission ont déjà eu l'opportunité de lire notre mémoire, je me permettrai d'en faire un résumé très succinct, insistant davantage sur les solutions que nous proposons, ceci afin de nous laisser encore plus de temps pour échanger ensemble, au cours de la période de questions.

n(16 h 50)n

Une importante section de notre mémoire vise à rappeler que tout commence au sein des entreprises elles-mêmes. C'est à l'entreprise, qu'elle soit cotée ou non en bourse, que revient la responsabilité première de mettre en place des règles de saine gouvernance exigeant notamment la séparation des fonctions clés, de mettre en place des mécanismes de contrôle interne et de reddition des comptes adéquats, de préparer des états financiers qui témoignent de la situation financière de l'entreprise et de mettre en place un comité de vérification qui est un comité d'examen indépendant ainsi que l'interlocuteur privilégié du vérificateur externe. L'ordre croit donc qu'il est opportun d'assujettir les fonds communs de placement au contrôle d'un comité de vérification qui s'inspirerait du modèle des comités de vérification que l'on connaît dans les sociétés ouvertes.

Une autre section de notre mémoire vise à énoncer clairement que le but de la vérification des états financiers est de permettre au vérificateur d'exprimer une opinion à l'effet que les états financiers donnent à tous égards importants une image fidèle de la situation financière, de ses résultats d'exploitation ainsi que ses flux de trésorerie. Les vérifications visent donc à fournir une assurance raisonnable, comme on l'a mentionné ? je l'ai entendu tout à l'heure ? que, pris dans leur ensemble, les états financiers ne comportent pas d'inexactitude importante. Et donc l'opinion du vérificateur, et c'est important, ne constitue pas un jugement quant à l'efficacité de la direction de la conduite des affaires de l'entreprise ni une garantie que les états financiers sont exempts de fraude. J'y reviendrai dans quelques instants.

Les membres de cette commission doivent être conscients que les procédés de vérification qui sont efficaces pour détecter les erreurs peuvent se révéler inefficaces pour la détection d'inexactitude intentionnelle qui a été dissimulée par une collusion impliquant une ou plusieurs personnes parmi la direction, le comité de vérification, les salariés ou des tiers, ou qui est imputable à un document qui aurait été falsifié. En effet, une inexactitude importante est plus facilement décelable puisqu'elle est le résultat d'une erreur involontaire, alors que la fraude est accompagnée d'une volonté de cacher, d'une volonté de tromper.

Cela dit, j'aimerais informer les membres de la commission que la profession de comptable agréé a été proactive en ce qui a trait à la détection des fraudes. En effet, depuis janvier 2006, les comptables agréés sont tenus de se conformer aux exigences d'une nouvelle norme de vérification qui s'intitule Responsabilités du vérificateur relativement à la prise en compte des fraudes. Cette norme, distincte de la fraude, de l'erreur, décrit les responsabilités respectives des responsables de la gouvernance et de la direction d'une entreprise relativement à la prévention et à la détection des fraudes, et énumère une série d'exigences précises faites aux vérifications dans le cadre de leur mission de vérification. Voilà déjà, M. le Président, des mesures additionnelles et très concrètes qui sont en vigueur depuis quelques mois à peine.

À titre d'exemple, si le vérificateur relève une fraude ou prend connaissance d'informations impliquant l'existence possible d'une fraude, il doit communiquer rapidement ces informations au niveau de direction approprié, notamment au comité de vérification, lequel devra aviser le conseil d'administration.

Dans une autre section de notre mémoire, nous faisons état de la nécessité de pouvoir échanger des informations avec d'autres organisations ayant les mêmes objectifs de protection du public que l'Ordre des comptables agréés. À cet égard, M. le Président, nous tenons à remercier votre gouvernement et les membres de l'Assemblée nationale qui ont adopté le projet de loi n° 7 en juin dernier, lequel nous permet de conclure des ententes avec le Conseil canadien sur la reddition des comptes et l'Autorité des marchés financiers. Les membres de cette commission seront heureux d'apprendre que, le 8 février prochain, le conseil d'administration de l'ordre devrait procéder à l'adoption du projet d'entente avec le CCRC, lequel sera par la suite soumis au processus de consultation prévu par le projet de loi n° 7. En ce qui a trait à une entente avec l'Autorité des marchés financiers, les travaux sont amorcés, et nous espérons en venir à une entente au cours de la prochaine année. La bonne nouvelle est que, dans les deux cas, nous parviendrons à conclure des ententes dans le respect du secret professionnel du comptable agréé ainsi que du cadre législatif québécois.

À cet égard, l'ordre désire partager avec les membres de la commission une piste novatrice. En effet, nous croyons qu'il est possible de concevoir une liste d'indicateurs qui permettraient à un comptable agréer d'aviser l'Autorité des marchés financiers de certains faits. Il s'agirait ainsi pour le comptable agréé non pas de dénoncer, mais d'informer de la présence de faits préalablement identifiés comme étant symptomatiques d'une opération douteuse dans un contexte qui serait ainsi connu à l'avance par les organisations. L'autorité pourrait aussi exiger de l'entreprise, qui fait appel au public pour se financer, des rapports plus pointus que le vérificateur aurait à fournir, en quelque sorte un rapport spécial sur certains éléments que l'autorité jugerait nécessaire pour la protection du public, pour éviter la fraude notamment.

À titre d'exemple, nous pensons à des éléments sur le contrôle interne. En fait, l'autorité aurait accès à des indicateurs que le comptable agréé devrait dévoiler lorsqu'il fait une vérification. Il s'agirait d'éléments factuels ainsi que de rapports spécifiques qui pourraient être demandés au vérificateur comme c'est le cas actuellement dans le cas, par exemple, de la vérification des centres de la petite enfance, dans le cas de la vérification des municipalités, dans le cas des vérifications des commissions scolaires, dans le cas aussi des relations que nous avons avec CANAFE, qui est l'agence de blanchiment d'argent canadien.

Voici quelques exemples très concrets: certaines opérations ou transactions qui ne semblent pas cadrer ? pardon ? avec l'apparente situation financière du client ou ses habitudes habituelles; certaines opérations ou transactions qui consistent en plusieurs entrées et sorties avec des filiales ou des entités qui sont liées hors du cours normal de l'entreprise; on se sert d'une entreprise comme prête-nom; les opérations ou transactions qui sont inutilement complexes compte tenu du but visé, ou semblent aller à l'encontre des pratiques courantes de l'industrie, pour ne donner que quelques exemples précis. L'ordre, M. le Président, est totalement disposé à collaborer avec l'autorité afin de bâtir une liste d'indicateurs ou discuter des rapports spéciaux que l'entreprise devrait fournir par l'intermédiaire du Vérificateur et sur lesquels l'autorité pourrait agir rapidement.

Enfin, les deux dernières sections de notre mémoire portent sur la notion de responsabilité partagée et sur les sanctions. Il est clair que l'État a un rôle à jouer dans la protection des épargnants. Toutefois, l'ordre est d'avis que la protection des investisseurs dans l'industrie des fonds communs de placement nécessite de chacun des intervenants qu'il assume sa juste part de responsabilité. Les représentants qui offrent des produits financiers doivent informer leurs clients des liens qui entacheraient leur indépendance par rapport aux produits qu'ils offrent, mais également ils doivent expliquer clairement les éléments de risque qui sont associés à une telle forme de placement. Les épargnants doivent procéder avec vigilance en s'informant sur les entreprises dans lesquelles ils investissent, notamment sur la qualité de l'équipe de direction, sur la progression des revenus de cette entreprise et sur les bénéfices par action qu'elles peuvent escompter.

L'entreprise, grâce à l'interaction entre son conseil d'administration et son comité de vérification, jouera pleinement son rôle dans le respect des principes de saine gouvernance. Le Vérificateur, quant à lui, assumera sa part réelle de responsabilité en effectuant son mandat de vérification selon les normes de vérification généralement reconnues en interaction avec le comité de vérification, sous l'oeil vigilant de l'ordre et du CCRC, lesquels pourront communiquer efficacement avec l'autorité. Enfin, l'ordre croit fermement que toutes les préoccupations prises en matière de séparation des fonctions, d'échange d'information et de détection de la fraude seront vaines si les sanctions existantes ne sont pas suffisamment sévères pour dissuader les fraudeurs. Des recours civils adéquats et des peines plus sévères au pénal et au criminel sont également essentiels pour prévenir les fraudes.

En conclusion, M. le Président, tous les gestes posés par l'ordre dans les dernières années, l'ont été afin de mieux encadrer ses membres et assurer une meilleure protection du public. Pensons notamment à la mise en place du Conseil canadien sur la reddition de comptes, à la modification de la règle d'indépendance dans le Code de déontologie des CA, à l'adoption de la nouvelle norme concernant la responsabilité du Vérificateur relativement à la prise en compte des fraudes. Et c'est dans cet esprit que l'ordre propose d'élaborer, de concert avec l'Autorité des marchés financiers, une liste d'indicateurs qui permettrait aux vérificateurs de détecter et de prévenir en amont les cas problématiques. M. le Président.

Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Moreau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci, M. le président, les gens qui vous accompagnent. Merci d'être avec nous.

J'irai droit au point, j'en ai deux. Vous avez parlé de l'entente visée à l'article 22.1 de la Loi sur les comptables agréés, et que cette entente serait conclue le 8 février prochain. Et, dans cette entente, en fait dans la disposition de la loi, on dit que l'entente peut... doit prévoir la nature et l'étendue des renseignements que l'ordre et l'organisme pourront échanger sur l'inspection.

Donc, il s'agit d'une entente conclue... On dit: Le bureau peut conclure une entente avec les organismes suivants: l'Autorité des marchés financiers. L'entente dont vous parlez qui serait conclue le 8 février prochain, est-elle une entente entre l'ordre et l'Autorité des marchés ou le bureau? Entre qui et qui, cette...

Le Président (M. Hamad): O.K. L'ordre, le bureau de l'ordre, c'est l'ordre.

M. McMahon (Daniel): M. le Président, en fait, l'entente dont on a fait mention, qui sera présentée au bureau de l'ordre, le bureau étant l'équivalent du conseil d'administration de l'ordre dans le jargon professionnel, cette entente-là est le projet d'entente avec le Conseil canadien sur la reddition de comptes. C'est le projet d'entente qui est le plus avancé au moment où on se parle. Évidemment, il faut faire attention, hein, il va être déposé au conseil, et on va suivre la procédure prévue au projet de loi, c'est-à-dire qu'une fois que notre conseil d'administration et le conseil d'administration du CCRC l'auront tous les deux adopté, on entre dans le processus de préconsultation qui est prévu au projet de loi pour obtenir les commentaires, et s'enclenche donc ce processus-là qui est adopté dans le projet de loi.

En ce qui concerne l'entente avec l'Autorité des marchés financiers, nous avons amorcé nos travaux et nous avons bon espoir qu'au cours de l'année courante nous serons en mesure de faire le même exercice, c'est-à-dire de le déposer pour enclencher les processus de consultation prévus au projet de loi n° 7.

n(17 heures)n

M. Moreau: Bon. Merci. Ma prochaine question s'adresse probablement à Me Brizard. À la page 12 de votre mémoire, au deuxième alinéa, vous indiquez: «La loi et ses règlements prévoient le respect du secret professionnel du conseiller juridique et aménage la procédure d'exercice de ce droit.» La loi à laquelle vous faites référence, c'est quoi? C'est le Code des professions, essentiellement?

Mme Brizard (Christiane): Oui, entre autres le Code des professions, mais il y a aussi, au niveau de l'article 22 ? je n'ai pas la loi devant moi, le projet de loi n° 7, mais ? il faut nécessairement, au niveau de la confidentialité, il va falloir s'assurer de respecter, entre autres choses, le secret professionnel de l'avocat, oui.

M. Moreau: De l'avocat, oui. Ça va. Mais, dans le même paragraphe, vous indiquez que la loi s'applique... «Il est par contre stipulé que la loi s'applique aux comptables agréés lorsqu'ils exercent certaines activités financières pour un client, mais sont exclues ? donc il n'y aurait pas de secret professionnel ? les activités exercées dans le cadre d'une mission de vérification, d'examen ou de compilation.» C'est exact?

Mme Brizard (Christiane): Là, j'essaie de...

M. Moreau: Ah, vous êtes à la page... Je suis à la page 12 de votre mémoire.

Mme Brizard (Christiane): Oui. À ce moment-là, on parle de CANAFE, on parle des principes au niveau de l'entente avec... Enfin, ce n'est pas une entente, c'est la loi sur le blanchiment d'argent. CANAFE a prévu...

Bien, premièrement, il n'y a pas de secret professionnel du comptable agréé qui s'applique dans le cadre d'organisme fédéral parce que la charte québécoise n'a pas cette prépondérance-là, sous réserve du secret professionnel de l'avocat, bien entendu. Alors, au niveau de l'organisme qui s'appelle CANAFE, le comptable agréé est assujetti aux règlements et à la loi et doit donner certaines informations à CANAFE, il y a d'ailleurs des indicateurs au niveau des opérations douteuses, et il doit le faire. Toutefois, dans la réglementation à l'égard du blanchiment d'argent, ont été expressément exclus tous les services professionnels en matière de vérification, d'examen et de compilation. Ils sont exclus du principe de la divulgation à CANAFE.

M. Moreau: Alors, ma question est la suivante: Ne croyez-vous pas que nous devrions suggérer aux législateurs que nous sommes de mettre exactement les mêmes exceptions afin de protéger les investisseurs? Est-ce que le fait de dire: Alors, les activités exercées par un comptable dans le cadre d'une mission de vérification, d'examen ou de compilation ne sont pas assujetties au secret professionnel, si tant est qu'elles le soient? Parce qu'il y a une controverse là-dessus. Je sais que les comptables, qu'ils soient comptables agréés, CGA, par rapport à l'autorité, il y a des opinions juridiques qui sont diverses sur le fait qu'il existerait un secret professionnel dans le cas des comptables.

Mme Brizard (Christiane): Bien peut-être, pour répondre à cette dernière suggestion là, il est évident que, même quand on a plaidé dans l'affaire Norbourg, l'Ordre des comptables agréés est intervenu, et à une autre occasion, pour minimalement faire reconnaître par la cour qu'existait le secret professionnel du comptable agréé, parce qu'il est précisément prévu à l'article 9 de la charte pour 45 ordres professionnels, dont le comptable agréé. Je fais cette première parenthèse là.

La deuxième, je reprends ce que j'ai dit par rapport à CANAFE. Au niveau de l'obligation, pour le comptable agréé, de donner des informations à CANAFE, cette obligation s'applique pour tous les services professionnels, sauf la vérification, l'examen et la compilation. Ce que vous me suggérez, c'est plutôt de faire l'inverse. Vous me dites: Le législateur québécois devrait prévoir qu'il y a une levée du secret professionnel en matière de services professionnels de vérification, d'examen et de compilation. Est-ce que c'est ça?

M. Moreau: Oui.

Mme Brizard (Christiane): Bon. Alors, écoutez, la question, je pense, qu'il faut se poser, c'est: Pour quelle raison le législateur a consacré le secret professionnel dans la charte et a protégé 45 ordres...

M. Moreau: Ce n'est pas dans la charte, c'est à l'article 60.4 de la loi sur... au Code des professions. À l'article 9 de la charte, le législateur vient dire: Toute personne a droit au secret professionnel. Et après ça il ne parle pas directement des professions, il vient nous dire: En fait, la charte oblige au secret professionnel les ministres du culte. Et après il dit: Les professionnels, dans la mesure prévue par la loi... Ça prend donc une disposition législative expresse qui agisse sur le professionnel, parce que la charte directement n'a pas cet effet-là.

Mme Brizard (Christiane): Bien, je vous dirais que je ne suis pas nécessairement convaincue que c'est cette interprétation-là que les tribunaux ont donnée.

M. Moreau: O.K. Vous avez le droit.

Mme Brizard (Christiane): Et, tenant pour acquis que la charte le protège, moi, je pense que la question qu'il faudra se poser, c'est: Est-ce que c'est le moyen qu'on doit privilégier pour aller chercher l'information du comptable agréé? Compte tenu que le législateur a parlé et a protégé ce secret professionnel là, est-ce que c'est opportun de l'éroder dans certains de ces cas-là ou est-ce qu'on ne peut pas avoir cette information-là autrement? Et je pense que c'est ça qu'il faut rechercher, il faut rester...

Parce qu'à partir du moment où on érode le secret professionnel dans un cas x, pourquoi on ne l'érodera pas dans un cas y, etc.? Et on ouvre la porte à cela. Est-ce qu'il n'y a pas un autre moyen? Et c'est ça, ces démarches-là qu'on a déjà commencé à faire avec l'Autorité des marchés financiers. Est-ce qu'il n'y a pas un autre moyen pour obtenir ces informations-là sans nécessairement, par une législation, venir dire: Nonobstant le secret professionnel? Et je ne dis pas donc qu'il n'y a pas un travail à faire de réflexion, mais, moi, ce que je suggère aux membres de la commission, c'est qu'il faut vraiment, peut-être, être dans nos derniers retranchements, si on se rend à suggérer que ce doit être nonobstant la charte.

M. Moreau: Mais alors le secret professionnel protège l'information d'un individu. Ici, on doit mettre dans la balance la protection du public qui, dans des cas de fraude, notamment en matière d'investissement, touche un grand nombre, donc la population en général, et il faut soupeser l'intérêt public par opposition à l'intérêt privé.

Mme Brizard (Christiane): Vous avez tout à fait raison.

M. Moreau: Et, si on en venait à la conclusion, après vous avoir entendus et avoir entendu tous les groupes qui vont venir nous faire des représentations, qu'il n'existe aucune autre mesure efficace que celle-là, est-ce que vous seriez d'accord pour que nous concluions ou nous fassions la recommandation de lever le secret professionnel dans ce cas particulier là?

En d'autres termes, est-ce que, dans ce cas particulier là, l'intérêt public ne doit pas prévaloir sur l'intérêt privé?

Mme Brizard (Christiane): C'est parce que est-ce que c'est l'intérêt privé, le secret professionnel? c'est une question qu'il faut se poser. Mais je pense que ce travail-là de réflexion n'est pas terminé. Je ne sais pas jusqu'à quel point les membres de la commission seront éclairés pour faire cette recommandation-là, d'arriver jusque-là.

Une voix: ...un exemple.

Le Président (M. Hamad): Parce que, moi, je ne suis pas avocat, je ne suis pas comptable, je suis juste ingénieur.

Une voix: ...

Le Président (M. Hamad): Je reviens encore à une évaluation. Il y a un citoyen qui a fait toutes les économies, il a regardé un prospectus, il a regardé des états financiers signés par un comptable. Le vendeur, le représentant financier a montré ça: Il y a de l'avenir là-dedans, il faut que tu investisses. Il a mis tout son argent là sur la foi de ces bilans-là. Après ça, l'autre année après, tout est tombé, il a tout perdu. Alors là, ce citoyen-là, il a tout perdu. Là, on arrive pour faire une enquête, là. Ça peut être la Sûreté du Québec aussi, les procureurs de la couronne, ce n'est pas seulement juste l'Autorité du marché. Et là on arrive pour faire une enquête dans le but de protéger le citoyen, puis là on a un mur en face: Ah! c'est le secret professionnel, je ne peux pas... là, tu ne rentres pas dans ce mur-là. C'est comme ça que je le vois, moi, là, là.

Votre secret professionnel, vous allez m'expliquer c'est quoi, là. Dans le sens, s'il faut voir, entrer dans les états financiers, voir si les chiffres sont bons ou non, est-ce que c'est un secret professionnel? Est-ce que, si on valide s'il y a quelqu'un qui a mis des mauvais chiffres dans ça... Je ne dis pas que le comptable est de mauvaise foi, là, en partant là, non. Mettons, il a fait sa job, elle a fait sa job. Mais, quand on arrive à voir les chiffres puis rentrer là-dedans, c'est là, le mur que vous mettez, le secret professionnel. Est-ce que ce mur-là, il ne devrait pas être enlevé dans ce cas-là pour voir qu'est-ce qui s'est passé et récupérer rapidement et permettre à la Sûreté du Québec peut-être ou à l'Autorité du marché d'intervenir rapidement puis pouvoir rapidement donner, attraper ou minimiser le mal puis protéger le citoyen?

Je comprends que, mettons, le secret professionnel pour un avocat, pour quelqu'un qui a tué, il ne peut pas dire comment, puis etc. Mais là, là, on est dans le citoyen, là.

Mme Brizard (Christiane): Parce qu'en fait le secret professionnel de l'avocat pourrait s'appliquer beaucoup plus largement de toute façon qu'on sait qu'il y a des accusations criminelles, là.

Le Président (M. Hamad): Oui, revenons au comptable.

n(17 h 10)n

Mme Brizard (Christiane): Moi, sous réserve que M. McMahon pourrait expliquer qu'est-ce qu'on pourrait trouver dans le dossier du comptable agréé parce que, ça aussi... Il ne faut pas, je pense, tenir pour acquis que c'est la panacée puis qu'il y a tout dans le dossier du comptable agréé. Puis j'aimerais peut-être à ce moment-là plus laisser la parole à M. McMahon.

Mais, si je vous suis, c'est donc que, sans aucune autre balise, quelqu'un pourrait dire: Écoutez, il est arrivé cette situation-là, elle est inexpliquée ou inexplicable. Doit-on, à ce moment-là, présumer qu'il y a une fraude? Ou est-ce que c'est une mauvaise décision d'affaires? Et peu importe qu'on ne soit pas rendus dans une fraude ou dans une décision d'affaires de la compagnie qui était inopportune, on va donner accès au dossier qui est protégé par le secret professionnel? C'est un peu ça que vous... Vous ne faites pas la différence.

Le Président (M. Hamad): Pas au public.

M. Moreau: Mais pas au public, à l'autorité. Et ce que le président suggère, c'est de dire: On est dans le contexte d'une enquête, et donc à l'autorité, mais pas mettre ça sur un panneau sur le bord de l'autoroute, là.

Mme Brizard (Christiane): Mais à partir du moment où ça va à l'autorité, quelle est la garantie que cette information-là reste à l'autorité? Parce que ça, c'est une autre des problématiques qu'on a discutée, nous autres, avec l'Autorité des marchés financiers, compte tenu que l'autorité a déjà convenu de signer différentes ententes avec d'autres organismes pour échanger cette information-là. Donc, une fois que la porte est ouverte, où se ferme-t-elle? Est-ce qu'il y a un autre moyen que celui-là? Moi, je vous dis que, pour l'instant, déjà avec les réflexions qu'on a faites, on considère qu'il y en a d'autres.

Il y en a d'autres qui permettent aussi à l'AMF de légiférer et de dire exactement à l'émetteur ce que le comptable agréé devra dire. L'émetteur le sait quand il s'inscrit à la Bourse, il sait exactement à quoi s'en tenir. Il sait que tel et tel indicateur vont toujours être dévoilés. Le comptable agréé ne se posera pas la question: Y a-t-il fraude? N'y a-t-il pas fraude? Dès qu'il voit cette information-là, il devra en informer l'AMF et peut-être, dans certains cas, pourra-t-il y avoir une enquête conjointe ultimement entre l'AMF et l'ordre.

Le Président (M. Hamad): Mme la députée de Mirabel, puis on revient de l'autre côté après. Là, tout le monde...

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. McMahon, Mme Montamat et Me Brizard, merci pour la présentation de votre mémoire.

Moi, je vais également dans le même sens que mes collègues d'en face parce que nous sommes ici pour faire des recommandations, et les recommandations vont être communes parce qu'on veut s'entendre, mais on veut absolument savoir exactement comment s'enligner, autant l'opposition officielle que le gouvernement, et la protection du public est très, très, très importante.

Vous avez dit tantôt qu'il fallait trouver d'autres moyens. Est-ce que vous parlez d'autres moyens au pluriel ou simplement que vous avez une idée comme ça? Parce que pour nous il faut faire des recommandations, puis là, tantôt, j'écoutais ce que vous disiez. À un moment donné, quand on parlait du secret professionnel, vous avez dit: Il y a certains faits restrictifs qu'il faudrait dévoiler, quand on parlait, là, du comité de vérification, et puis, nous, on veut trouver les moyens pour protéger le public. Alors, quand c'est restrictif, bien ça ne nous aide pas, là, parce qu'il faut absolument trouver une façon pour que les gens soient sécurisés dans tout ça.

Je suis avocate de profession puis je comprends très bien qu'est-ce qui se passe, puis je suis également porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régime de rentes et de retraite, et j'ai reçu beaucoup de téléphones, à mon bureau de circonscription, de retraités qui disaient que... bien c'était leur vie, ça, là, là, tout ce qu'ils avaient investi, leurs économies au complet. Ils ont tout perdu. Alors, quand vous nous dites qu'il faut simplement dévoiler certains faits restrictifs, bien pour nous, membres de la commission, c'est difficile à accepter.

On aimerait avoir votre opinion: Quels sont les autres moyens aussi efficaces, là, pour que finalement on puisse protéger le public au complet, qu'on ait toutes les informations?

Le Président (M. Hamad): Une réponse concise, si vous êtes... parce que tous les députés veulent intervenir. Allez-y.

M. McMahon (Daniel): D'accord. En fait, je vais vous donner un exemple très, très précis. Le mandat principal de l'ordre est la protection du public, et l'ordre a déjà les pouvoirs de procéder à des enquêtes par rapport à la compétence de ses membres. Qu'est-ce qui nous empêche de pouvoir avoir un mandat qui nous est demandé par l'Autorité des marchés financiers, dans un contexte de cet ordre-là, pour pouvoir aller faire ? de toute façon, qui a la meilleure expertise pour être capable d'aller faire cette vérification, si ce n'est pas nos propres inspecteurs, entre guillemets? Ils ont été formés pour ça, là ? pour aller faire ce type d'intervention là et partager le fruit de cette enquête-là avec l'Autorité des marchés financiers. Pour faire ça, on n'a pas besoin de lever le secret professionnel, on est capable d'aller... parce que, nous, on a déjà toute l'autorité de rentrer dans le cabinet, et le cabinet est obligé de nous fournir tous les renseignements que l'on peut demander. Donc, on est capable d'aller les chercher.

Ce qu'il s'agit de faire, c'est de se doter des moyens, et c'est pour ça qu'on avait demandé le projet de loi n° 7, pour être capable d'entrer en entente avec les organisations qui ont les mêmes objectifs que nous, pour pouvoir aller partager de l'information qui est pertinente. Et là on est vraiment dans un contexte d'enquête. Et là vous comprenez que lever le secret professionnel dans son sens large, pour nous, c'est presque un non-sens parce que vous êtes en train de me parler de peut-être quatre, cinq ou six organisations qui ont commis des actes frauduleux, mais il y en a peut-être 7 000 autres qui fonctionnent correctement. Et on va empêcher le comptable agréé d'avoir accès à toute l'information qu'il a besoin pour mesurer son risque de mission parce que les gens vont tomber ? excusez l'expression ? sur les freins en se disant: Je vais lui en dire le moins possible au cas où que... On ne sera pas capable de faire le travail.

Ce qu'on a besoin, c'est d'être capable de faire notre travail pour mesurer le risque, pour s'assurer que les informations financières sont correctes. Mais il faut aussi, dans le cas où il y a des situations où des gens ne se comportent pas correctement, être capable d'envoyer les signaux rapidement à l'Autorité des marchés financiers comme on le fait avec l'entente qu'on a citée tout à l'heure dans CANAFE, où on s'est entendu sur une liste de paramètres qui ne sont pas restrictifs, qui sont très clairs, qui sont très précis et qui permettent de dire: Ça, ce sont des indicateurs que, de part et d'autre, on reconnaît que ces indicateurs-là sont des signes qu'il y a un problème.

Et on lève le drapeau et là on prend une mesure commune qui pourrait être, comme on l'a mentionné tantôt, des enquêtes qui seraient faites conjointement. Et pourquoi brandir tout de suite l'arme ultime? Parce que n'oubliez pas que, si vous faites tomber le secret professionnel du comptable agréé, ultimement, au bout de la ligne, tous les renseignements vont se ramasser dans le dossier de l'avocat. Allez-vous faire tomber le secret professionnel de l'avocat? On pellette le problème par en avant en faisant juste ça, là.

Le Président (M. Hamad): Alors, sur le secret professionnel, puis après ça on va revenir. M. le député de LaFontaine, secret professionnel? C'était votre tour.

M. Tomassi: Non, non, non. C'est important parce qu'une des questions de Me Brizard, c'était de dire: Quel est votre secret professionnel? Il faudrait peut-être le savoir parce que, à ce que je comprends, quand une entreprise vous donne les renseignements que vous avez et vous étalez sur papier les états financiers, vous les signez, ces états financiers.

Alors, si jamais il y a un problème, je suppose que vous ne signez pas ces documents-là ou vous mettez une notice dans les rapports financiers de dire: Écoute, on a un problème. N'est-ce pas?

Une voix: Tout à fait.

M. Tomassi: Bon. Alors, le fait de dire que vous avez un secret professionnel, de un, c'est peut-être avoir l'information de qu'est-ce que l'information privilégiée que vous avez, le secret qui est si important à garder vis-à-vis l'AMF?, la première question. Et la deuxième, c'est justement ? parce qu'en parlais à mes collègues, et tantôt M. Smith en a fait mention, et je crois que c'est assez important ? c'est de dire: Est-ce qu'on peut essayer de concevoir ou de voir les problèmes arriver?

Parce que, quand l'AMF rentre dans une entreprise, dans un fonds, ou etc., ça fait déjà trois ou quatre ans que lui, l'argent, là, peut-être n'est plus là. Alors, votre indication de dire: Est-ce qu'on ne peut pas mettre un mécanisme qui vient lever le drapeau à l'AMF de dire: Écoute, va donc vérifier parce que je pense qu'il y a quelque chose qui ne marche pas, je crois que c'est une bonne suggestion.

Et peut-être savoir, de votre part à vous, qui est-ce qui serait responsable. Une fois que vous allumez la lumière, est-ce que vous donnez le mandat à l'AMF de débarquer chez votre client pour dire: Écoute, là, on aimerait voir les chiffres? Et par le fait même, une fois que l'AMF débarque, si jamais l'ouverture des livres est faite, c'est votre vérification aussi qui est en jeu, là.

M. McMahon (Daniel): En fait, ce que l'on préconise dans le fond, c'est exactement cette optique-là de les attraper quand c'est petit, O.K.? Parce que, quand l'AMF débarque avec une fraude, le mal est déjà fait, il est trop tard. Pour nous, ce morceau-là, il est ? en plus, vous le savez ? hyperjudiciarisé.

On est dans une société de droit. Tout le monde a le droit à son innocence, et c'est dans ce sens-là qu'on a des problèmes à ouvrir les documents parce que les gens disent: Écoutez, ce même document-là va me servir à ma propre défense parce que vous me dites que je n'ai pas fait mon travail correctement. Donc, on a un gros problème de départ.

Par contre, si on travaille au départ et qu'on s'entend avec l'Autorité des marchés financiers pour, d'une part, avoir des indicateurs précis, pour, d'autre part, avoir dans la déclaration qui est signée par l'entreprise... Parce qu'une entreprise, quand elle s'inscrit en Bourse, là, elle doit donner des pouvoirs aussi à l'autorité si elle ne se comporte pas correctement. On peut prévoir ça là. On peut prévoir la mécanique ensuite d'inspection, comment on veut le faire quand ces signaux-là nous apparaissent.

n(17 h 20)n

Peut-être que les états financiers de l'an 1 sont tout à fait corrects, mais il y a des indicateurs que quelque chose... On appelle ça le «smell test». Excusez l'anglicisme, là, mais, quand on fait la vérification, on doit faire preuve de scepticisme professionnel. À l'intérieur de ces règles-là, dans la norme sur la fraude, on indique trois pages d'indicateurs très précis qui devraient nous mettre la puce à l'oreille qu'il y a des choses qui ne sentent pas bon, là. Bien, est-ce qu'on peut bâtir autour de ces éléments-là une stratégie, de concert avec l'Autorité des marchés financiers, pour rattraper ça très rapidement, lever, comme on disait tantôt, le drapeau à l'autorité et se doter d'un plan conjoint de travail pour ne pas dupliquer non plus les enquêtes?

Présentement, la farce, là, c'est que, moi, mon syndic à l'ordre, il fait son enquête, et puis l'autorité fait son enquête, puis la GRC fait son enquête. puis personne présentement ne se parle. Les trois enquêtent sur les mêmes documents, là; les documents, ils n'existent pas en trois copies, hein. Donc, voyez-vous, l'idée, c'est de bâtir un programme ensemble et de le partager selon les responsabilités de chacun, dans le respect de la législation telle qu'elle existe présentement. Et, nous, on pense qu'on est capable de le faire.

Le Président (M. Hamad): ...de preuve qu'il faut faire attention, là.

M. McMahon (Daniel): Oui, mais ça, on pense qu'on est capable de le travailler correctement parce que, si ça prend une modification dans la Loi sur la Commission des valeurs mobilières pour avoir certaines exigences de la société émettrice, on va faire la modification là qui va donner des pouvoirs qui sont nécessaires, et c'est facile à faire.

Le Président (M. Hamad): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Je me posais la question concernant le projet de loi n° 7, là, vous semblez être en accord avec la teneur de ce projet-là, mais est-ce que tous les comptables agréés sont d'accord avec ça?

M. McMahon (Daniel): Vous voulez dire quoi exactement?

Mme Beaudoin: Non, mais je voulais votre opinion parce que tantôt... on parle quand même du secret professionnel puis tout ça, mais j'aimerais savoir d'abord qu'est-ce que vous en pensez, quelle est votre opinion, et puis après ça, bien, j'aimerais savoir si c'est représentatif de tous les CA?

M. McMahon (Daniel): O.K. Bon, d'abord, l'Ordre des comptables agrées est à l'origine de la demande de ce projet de loi là et l'Ordre des comptables agréés, de par sa fonction, n'est pas une association de comptables agréés, O.K. L'Ordre des comptables agréés est un ordre professionnel dont l'objectif est la protection du public. Donc, on est 100 % d'accord avec l'esprit du projet de loi qui a été adopté.

Maintenant, si vous nous demandez si individuellement certains membres peuvent être en désaccord avec un projet de loi, la réponse, c'est: Bien sûr...

Une voix: ...

M. McMahon (Daniel): Non, non, je vous réponds, la réponse, c'est: Bien sûr, oui il y en a qui peuvent être en désaccord. Mais leur crainte, leur crainte fondamentale, c'est: Qu'est-ce qu'on fait avec la confidentialité de l'information? C'est ça qu'est la crainte de nos membres, O.K., parce que, de la façon dont les lois sont faites, quand l'autorité entre en entente avec un certain nombre d'organismes, il n'y a plus ou pratiquement plus de confidentialité qui existe. Et donc vous comprendrez que nos membres sont inquiets de savoir que le dossier dans son intégralité, qui comporte des renseignements privilégiés sur des stratégies d'affaires, etc., pourrait être accessible à n'importe qui. La crainte de nos membres, ce n'est pas quand il y a une fraude, ça, vous devez être bien consciente de ça, là. Ce n'est pas quand il y a une fraude, leur crainte, c'est qu'il y ait des informations, qui doivent être protégées, gardées confidentielles... puissent devenir accessibles. C'est ça qui est leur crainte.

Le Président (M. Hamad): Vous êtes en train de dire, là, il y a un fraudeur, puis là on dit: Secret professionnel, tout est barré. Ne rentrez pas chez nous scruter. Vous ne pouvez plus faire d'enquête. Vous ne pouvez pas attraper parce qu'il y a un secret professionnel.

M. McMahon (Daniel): Ce n'est pas ce qu'on dit, M. le Président.

Le Président (M. Hamad): On plaint d'aller dans l'information, mais comment vous voulez qu'ils fassent l'enquête? Comment vous voulez qu'ils rentrent puis dire: Ça, c'est coupable, ça, ce n'est pas bon, ça, c'est bon si tout est barré?

M. McMahon (Daniel): Bien, je vais vous donner un exemple très, très simple. C'est déjà le mandat de l'ordre d'inspecter ses membres.

Le Président (M. Hamad): Là, O.K. Vous, vous voulez qu'on passe par l'ordre pour...

M. McMahon (Daniel): Bien, moi, je vous dis: Écoutez, si la prétention est que le comptable agréé ne s'est pas conformé à ces normes, la logique voudrait que, par simplicité puis pour accélérer le processus, on aille la faire, cette vérification-là.

Le Président (M. Hamad): Et le défi au début, on ne sait pas si c'est le comptable ou c'est le propriétaire, c'est ça, le défi. Alors, la question maintenant, c'est le député de Montmorency sur le secret professionnel?

M. Bernier: Oui, sur le secret professionnel.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Effectivement parce que, si on regarde les différents organismes impliqués, on parle de l'AMF, on parle, bon, de firmes comptables qui vérifient ou, dans certains cas, ça peut être la GRC ou la Sûreté. La majorité de ces cas-là, on retrouve des gens qui vont oeuvrer à l'intérieur de ces organismes-là qui sont membres, qui peuvent être membres de votre corporation professionnelle. Ces gens-là, dans bien des cas, sont membres de l'ordre, sont des CA, O.K. Donc, l'information qu'ils transigent, c'est une information entre professionnels membres d'un même ordre d'information ayant les mêmes objectifs: de protéger le public.

À partir du moment où on constate ? là j'essaie de suivre, là, votre cheminement; où on constate ? une problématique versus une divulgation dans le cas de fraude, O.K., à ce moment-là ? puis j'essaie de voir votre rôle, vous autres, au niveau de l'ordre professionnel, là ? est-ce que, à ce moment-là, ce que vous mentionnez, c'est que la firme ou le comptable qui constate ces choses-là remonte à l'Ordre des comptables agréés pour signaler des choses ou si, de par vos ententes que vous avez signées avec l'AMF, il peut aller directement pour être capable de... aller en complémentarité avec le travail de vérification? Parce que les gens de l'AMF sont aussi des comptables agréés comme vérificateurs.

M. McMahon (Daniel): Je pense qu'il faut distinguer deux choses: la situation où il y a une fraude dans une organisation, où on pense qu'il y a une fraude qui n'implique pas le comptable agréé, et la situation où on pense que le bureau pourrait être de connivence, et je m'explique.

La nouvelle norme qui a été adoptée au niveau des normes de vérification, qui s'appelle Responsabilité du vérificateur relativement à la prise en compte des fraudes, édicte très précisément quelles sont les responsabilités du vérificateur à l'égard de la détection de fraude. Et, dans cette norme-là, il est très clair qu'à partir du moment où le vérificateur a un soupçon, il doit discuter avec le comité de vérification de l'organisation et discuter avec le conseil en fait et remonter jusqu'au conseil d'administration dans l'organisation.

Évidemment, si, au niveau du conseil d'administration, il devait y avoir collusion, O.K., et que les gens ne veulent pas que l'information continue, parce que c'est interne ? on est toujours à l'intérieur, on se comprend ? il est prévu que le vérificateur a l'obligation de se récuser de son mandat et il est également prévu que, si la loi l'y autorise, il doive aviser les autorités de réglementation. On a déjà tout ce qu'il faut dans ce cadre-là pour aller encadrer très précisément, avec un mécanisme de levée de drapeau comme on mentionnait tout à l'heure, une fraude dans laquelle le vérificateur fait sa job régulière conformément et qui découvre quelque chose qui n'est pas correct. Donc ça, cette norme-là prévoit déjà ça.

Dans le cas où on pense que le vérificateur serait de connivence, O.K., avec le fraudeur...

M. Bernier: Avec les dirigeants de l'entreprise.

M. McMahon (Daniel): ...avec les dirigeants de l'entreprise...

M. Bernier: C'est ça.

M. McMahon (Daniel): ...là, à ce moment-là, on est dans un tout autre registre...

M. Bernier: Oui, parce que là on parle quand même de sommes financières importantes, là, puis il pourrait y avoir collusion. Tu sais, quand on parle de sommes, là, qui sont quand même assez élevées, là.

M. McMahon (Daniel): Théoriquement, oui...

M. Bernier: O.K. On s'entend.

M. McMahon (Daniel): ...il pourrait y avoir collusion et là, à ce moment-là, on entre dans la réglementation, dans le droit tel qu'il existe présentement.

Mme Brizard (Christiane): Le secret professionnel ne s'appliquerait pas dans ces cas-là.

M. Bernier: Il ne s'appliquerait pas dans ces cas-là?

Mme Brizard (Christiane): Quand il y a participation du professionnel à la fraude, il ne peut pas se cacher derrière le secret professionnel pour empêcher un organisme d'enquêter. Le secret professionnel ne s'applique pas dans ce cas-là.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Tantôt, vous avez dit avec beaucoup de conviction que c'est l'Ordre des comptables qui devrait être autorisé à faire des vérifications par rapport... directement, au lieu de l'AMF ou trouver quelqu'un d'autre. Dans le mémoire qu'Ogilvy Renault a présenté au nom de quatre grands cabinets, qu'on va recevoir demain, évidemment il est facile de voir qu'ils ne sont pas d'accord. Quand vous dites que c'est l'ordre, j'imagine que vous dites aussi que l'Ordre des CGA devrait être aussi avoir les mêmes autorisations que vous autres, la même entente, avez-vous la conviction aussi profonde que ça réglerait la problématique soulevée par certains de vos membres représentés par Ogilvy, qui vont venir demain nous voir? Première question.

M. McMahon (Daniel): Moi, je pense qu'eux, ce qu'ils vont... et on n'a pas lu le mémoire comme tel, là, mais eux ce qu'ils vont sûrement vouloir vous dire, c'est leur inquiétude par rapport au fait qu'on puisse signer une entente qui ne garantirait pas la protection de la confidentialité. C'est l'élément qui est au coeur des préoccupations qu'ils nous ont déjà fait part quand on a discuté du projet de loi n° 7 et pour lesquelles ils sont venus d'ailleurs faire des représentations à cet égard-là, à ce moment-là.

Cela dit, je vous répète que l'ordre, ce n'est pas une association de comptables agréés, O.K.? Notre mandat, il est très clair: on a été créés par le gouvernement pour la protection du public. Et qu'il y ait des divergences sur la façon dont on doive mener nos activités, ça, ça peut exister, là.

n(17 h 30)n

M. Bertrand: ...un comptable se retire d'un dossier, est-ce qu'il a l'obligation, d'abord, exemple, de vous informer, l'ordre, et d'informer l'AMF aussi? Non, j'imagine. Est-ce qu'un comptable qui, pour une raison ou pour une autre, sent la soupe chaude ou... Parce que, là, je vais vous dire mon feeling...

M. McMahon (Daniel): Bien...

M. Bertrand: Oui, allez-y.

M. McMahon (Daniel): Mais je pense que ce que vous donnez, c'est un très bel exemple. Dans les règles actuelles, telles qu'elles existent, il n'y a pas d'obligation, mais ? mais ? à l'intérieur des indicateurs qu'on pourrait se donner, ce devrait être un des éléments qui demanderait une divulgation automatique autant à l'ordre qu'à l'Autorité des marchés financiers.

M. Bertrand: ...il n'y a rien qui empêche une entreprise de changer de comptable, en trouver un qui va signer, puis on ne règle absolument rien. Moi, ce que je constate, là, depuis cet après-midi, là, c'est que tout le monde a des bonnes raisons de dire qu'on ne veut pas franchir telle et telle lignes. Nous autres, il faut qu'on trouve le moyen d'atteindre... de trouver la bonne raison pour protéger les clients. Puis, moi, je ne suis pas capable de croire à quelque part qu'il ne s'est pas produit des cas où il y a des gens qui ont senti la soupe chaude, qui ont senti les choses venir puis qu'à quelque part, là, on essaie de protéger tout le monde. Je veux dire, il faut être clair, là, il faut trouver une façon d'entrer dans le canal pour protéger les clients.

M. McMahon (Daniel): On est tout à fait d'accord avec l'affirmation que vous faites. C'est...

M. Bertrand: Je vulgarise, là...

M. McMahon (Daniel): Non, mais... Oui, mais écoutez...

M. Bertrand: ...mais c'est assez précis.

M. McMahon (Daniel): C'est très précis. Écoutez, nous, ce qu'on fait aujourd'hui, c'est exactement vous dire que ce qu'on vise, c'est ça. O.K., c'est de trouver de quelle façon on peut le faire sans aller dédoubler les organisations qui sont existantes, mais en mettant en synergie les organisations existantes. Et ce qu'on vous dit, c'est que c'est beaucoup plus facile de travailler au niveau de la prévention et des mécanismes qui nous permettent de faire cette détection-là que d'aller jouer présentement dans les mécanismes où on est rendu en poursuite pour fraude, où, là, bien là c'est le jeu en fait... On est dans une société de droit, hein? Les gens ont droit à leur défense. Et là ça devient excessivement compliqué.

Par contre, dans tout ce qu'est le travail en amont, on est capable de s'associer ensemble et de se donner des balises, des guides, des systèmes d'alarme et des moyens de travailler à enquêter ensemble dans certains cas. Et ça, nous, on pense que ça peut se faire. Il s'agit juste... Avant, on n'était pas autorisés à le faire.

M. Bertrand: Vous allez être d'accord avec moi que les citoyens puis les citoyennes qui perdent de la grosse argent, là, qui perdent leur retraite, qui perdent leur avenir, eux autres, là, ils veulent qu'on agisse. Puis les excuses puis les raisons, ils disent: C'est assez. Donnez-nous... Donnez-vous des vrais moyens.

Puis, moi, j'écoute ça depuis qu'on a commencé. Certains vont dire: Bien, écoutez, il ne faut pas franchir telle ligne. D'autres vont dire: Bien, il ne faut pas créer d'autres organismes. D'autres vont...

Moi, je ne veux pas d'excuses, je veux trouver... je veux être capable de faire des recommandations précises, trouver la façon d'entrer. Ça peut en être une, mais je veux avoir la garantie que les autres qui viennent nous voir demain, si c'était celle-là, ne nous disent pas le contraire. Même si c'est de vos membres puis même si vous n'êtes pas une association, je comprends tout ça. Sinon, on va la prendre, la décision, nous autres.

Le Président (M. Hamad): Alors, je vois que c'est correct. Alors, M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Merci, M. le Président. Bien, je partage tout à fait ce que vient de mentionner le député de Charlevoix.

Deux questions. La première: Quant à la liste d'indicateurs, pourquoi ne pas les prévoir dans la loi ou du moins de le dire clairement ce que seraient des gestes sur lesquels devrait être fondée une dénonciation ou du moins un avis à l'office?

Et le deuxième élément, parce qu'on a parlé beaucoup du secret professionnel sans identifier le mandat, hein? Ça devient bien aléatoire de parler de secret professionnel quand on n'a pas identifié de qui provient le mandat. Et j'ai toujours pensé, puis vous me corrigerez si je me trompe, que le mandat de vérification vient des actionnaires. Et à partir du moment où le mandat vient des actionnaires, dès le moment où le vérificateur constate un élément de fraude, il s'agirait peut-être d'ajouter en quelque part, peut-être dans la loi, que le vérificateur a l'obligation d'informer non pas l'office...

Des voix: ...

M. Gabias: L'AMF de la situation sans tirer nécessairement une conclusion. Et là il n'est pas question de secret professionnel trahi, là. Je veux dire, le mandat vient des actionnaires. Il me semble qu'il n'y a pas de problème à ça. Tout le débat sur le secret professionnel, il me semble qu'il est très, très théorique.

Je comprends que le comptable doit garder l'information confidentielle des données qui appartiennent à l'entreprise, et tout le reste, mais quant aux mandats donnés par les actionnaires, je ne vois pas de problèmes dans la mesure où... et là, c'était ma deuxième question, ne pensez-vous pas que ça devrait être prévu dans la loi carrément?

M. McMahon (Daniel): En fait, c'est ce qu'on a mentionné tantôt en disant que, si on doit faire des modifications dans la Loi sur les valeurs mobilières, c'est là qu'il faut aller faire la modification, parce que, je veux dire, à partir du moment où l'émetteur assujetti désire faire appel public à l'épargne, il doit aller chercher l'autorisation de l'Autorité des marchés financiers pour émettre des actions. Et donc il doit s'engager à un certain nombre de choses, et on peut très bien prévoir, dans ces cas-là, qu'on aille mettre nos indicateurs dans la loi directement ou qu'on aille mettre des balises. Ça peut très bien se faire là, et ça, dans le pur respect des règles et de la législation qui existe présentement. C'est faisable.

M. Gabias: Et Me Brizard est d'accord qu'on ne parle pas de problème de secret professionnel à ce moment-là.

Mme Brizard (Christiane): Non, et c'est ce qu'on suggère et c'est ce qu'on retrouve aussi dans la loi, la réglementation sur le blanchiment d'argent.

M. Gabias: Oui, absolument.

Mme Brizard (Christiane): On prévoit des indicateurs. Le comptable agréé n'a pas à se poser de questions. On arrive à un, deux ou trois indicateurs et il en informe automatiquement l'autorité. L'AMF a des pouvoirs de réglementation qui pourraient donc imposer cela aux émetteurs et les émetteurs comprennent que c'est ça, le terrain de jeu.

Le Président (M. Hamad): Ça, c'est l'entente qui va être préparée.

Mme Brizard (Christiane): Ça va plus loin que l'entente.

Le Président (M. Hamad): Mais dans l'entente.

Mme Brizard (Christiane): C'est plus loin que l'entente parce que l'entente ne nous permet pas d'aller aussi loin que ça.

Le Président (M. Hamad): C'est le règlement qui...

Mme Brizard (Christiane): Ça prend des modifications soit législatives et réglementaires.

Le Président (M. Hamad): ...veux-tu parler? Veux-tu parler? Député de Laval-des-Rapides?

M. Paquet: Une clarification par rapport à la loi n° 7 qui a été votée en décembre dernier et par rapport à l'entente qui est en discussion présentement entre vous et l'AMF. Est-ce que je me trompe sur la portée de la loi ou de l'entente?

Alors là, vous arrivez à une entente qui reflète les préoccupations, je pense, qui sont communes et vous entendez très bien les préoccupations des membres de la commission, et je pense qu'ils ne sont pas complètement en contradiction avec les vôtres. S'il y avait une telle entente, ça veut dire que... il va falloir qu'il y en ait une de toute façon, mais on vous encourage le plus rapidement possible à y arriver aussi, que ça ne traîne pas, mais s'il y arrive, une fois l'entente conclue, si un comptable a raison de trouver qu'il y a un problème, par le mécanisme qui sera dans l'entente, je suppose qu'il ressemble à ce que vous écriviez tout à l'heure, que c'est une balise, qui sont spécifiés dans l'entente, dit: Voici, dans tel contexte, il y a un problème de vérification... Au moyen de vérifications, on constate qu'il y a une problématique et que là il semble vraiment pour le comptable qu'il y a une problématique qui pourrait sembler un cas de fraude, à ce moment-là, il a avisé à l'interne qu'il y avait problème, ils n'ont pas réagi, le comptable dit: Là, j'ai un problème, je dois démissionner. Supposons que c'est ce contexte-là, l'entente que vous étiez avec l'AMF, à supposer que c'est dans le contexte qu'on a mentionné, fait en sorte que le comptable devrait à ce moment-là alerter l'AMF pour dire: Voici, il y a une problématique. Et donc l'entente qui serait signée en vertu de la loi n° 7 permettrait d'avoir toutes les balises une fois que l'entente est signée, prépublication pendant 45 jours par l'AMF du règlement en vigueur. Par la suite, ça revient au Conseil des ministres et ça devient force de règlement. Est-ce que je comprends bien?

Parce que je pense que c'est important qu'on voit bien, là, la portée de la loi n° 7, la portée du travail que vous avez à faire pour arriver à une entente et ce que ça impliquerait, et donc ce à quoi vous êtes en train de travailler et qui est important d'arriver à répondre aux besoins qu'on a mentionnés, et dans un délai le plus rapidement possible, permettrait de faire cela. Est-ce que je me trompe?

M. McMahon (Daniel): Est-ce que cet élément-là spécifiquement, là, de la dénonciation dans un cas de récusation devrait faire l'objet d'un alinéa dans l'entente ou d'une modification dans la loi pour atteindre le même objectif? Ça sera l'un ou ce sera l'autre. Est-ce que ce sera à travers l'entente ou ça sera à travers une demande qu'on veut faire la Loi sur la Commission des valeurs mobilières? Il s'agit de trouver le bon véhicule.

Mme Brizard (Christiane): Oui, mais je répondrais, là, d'emblée que ça serait préférable qu'il y ait une modification au niveau de la réglementation sur les valeurs mobilières parce que je vais chercher l'émetteur assujetti. Moi, je n'ai pas de juridiction sur lui, et, à ce moment-là, c'est clair que même pour l'émetteur assujetti qui pourrait prétendre au secret professionnel, parce que c'est lui qui y a droit au secret professionnel, saurait d'emblée que son comptable agréé donnerait telle et telle information dans telle situation.

M. Paquet: O.K.

Le Président (M. Hamad): Mme la députée de Matane.

n(17 h 40)n

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. En rapport avec ce que mon collègue vient tout juste de mentionner, je me posais la question, M. McMahon: Même si on prévoit, dans la Loi sur les valeurs mobilières, la liste des indicateurs qui permettent de relever des situations potentielles de fraude, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'adopter aussi, dans un même ordre d'idées, une vision similaire à celle qu'applique le Conseil canadien de reddition de comptes en ce sens que les indicateurs seraient mentionnés dans la loi, mais également on aurait une vérification d'un vérificateur indépendant pour s'assurer qu'ils ont bien été vérifiés, ces indicateurs-là, et que le comptable a fait le travail qu'il se devait de faire? Puisqu'on doit ? et ce que je pense ? dans toute la problématique qu'on vit actuellement, s'assurer de prévenir le plus possible des situations qui nous amènent à ce qu'on a vécu dans les derniers temps, ce qui à mon avis serait une double vérification qui pourrait assurer davantage aux épargnants une protection accrue?

M. McMahon (Daniel): En fait, vous allez l'avoir automatiquement deux fois, parce qu'à partir du moment où c'est entré dans la loi, quand l'ordre fait l'inspection, il doit s'assurer du respect de la loi, et, quand le CCRC fait son inspection, il a aussi à faire le même exercice. Donc, il y aurait deux...

Mme Charest (Matane): Une double vérification.

M. McMahon (Daniel): ...une double vérification parce que dans le fond, le CCRC, c'est le vérificateur des vérificateurs.

Mme Charest (Matane): C'est ça. Merci.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Charlevoix, complétez, terminez là-dessus.

M. Bertrand: Est-ce que je comprends bien qu'on peut en venir à trouver une formule où le vérificateur qui veut se retirer en avertissant ou en informant l'AMF, la question que je me pose, c'est: Est-ce que c'est suffisant pour que l'AMF voit qu'il y a une lumière jaune là ou qu'il y a une lumière rouge, si on veut, là?

Moi, je cherche le moyen que l'AMF agisse plus rapidement en quelque part. Puis, s'il n'y a pas d'information qui sort puis... Je ne sais pas si j'ai été assez clair tantôt, mais...

M. McMahon (Daniel): Mais, à votre question très précise: Est-ce que vous croyez qu'un signal de cette nature-là ferait en sorte que l'AMF bougerait? La réponse, c'est automatiquement oui. Parce que le vérificateur ne se récuse pas sans motif valable. Et, à partir du moment où il se récuse, c'est qu'il y a des motifs valables.

M. Bertrand: O.K. C'est beau.

M. McMahon (Daniel): Ce n'est quand même pas quelque chose qui est fréquent, là.

M. Bertrand: Non, non, non. Les fraudes, ce n'est pas trop fréquent non plus.

M. McMahon (Daniel): Non.

M. Bertrand: On ne veut pas qu'il y en ait.

Le Président (M. Hamad): Alors, merci beaucoup. Merci de votre présentation.

On va suspendre quelques secondes pour préparer l'autre...

(Suspension de la séance à 17 h 42)

(Reprise à 17 h 45)

Le Président (M. Hamad): Nous allons accueillir l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Et, M. Charest, bienvenue.

Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

M. Charest (Yvon): Merci beaucoup.

Le Président (M. Hamad): Je vous demanderai de se présenter et présenter votre collègue aussi. Et vous avez 45 minutes, c'est-à-dire 15 minutes pour votre présentation et 15 minutes de chaque côté, ici, pour la période de questions.

M. Charest (Yvon): Merci beaucoup, M. le Président. Merci aux membres de la commission.

Alors, je me présente, Yvon Charest. Je suis le président du conseil d'administration de l'ACCAP, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, ainsi que président et chef de la direction d'Industrielle Alliance, Assurance et services financiers, et m'accompagne, Yves Millette, vice-président Affaires québécoises de l'association.

L'ACCAP représente les sociétés d'assurances de personnes qui souscrivent plus 98 % des primes d'assurance vie et santé au Québec et au Canada. Et, parmi ses membres, l'ACCAP compte le Regroupement des assureurs à charte du Québec, qu'on appelle le RACQ.

En janvier 2006, vous aviez demandé à l'association de témoigner dans le contexte de l'élaboration du mandat d'initiative que votre commission préparait sur les fonds communs de placement et la protection des épargnants au Québec. Nous vous avions présenté alors un aperçu de la réglementation qui s'applique aux assureurs dans ce qui constitue le principal point de rapprochement entre les assurances de personnes et les fonds communs de placement, soit les fonds distincts. Nous vous avions également présenté la protection accordée aux assurés dans les fonds distincts par Assuris, autrefois connue comme la Société d'indemnisation d'assurance de personnes ou la SIAP.

Depuis, le gouvernement a procédé à l'adoption du projet de loi n° 29 modifiant la Loi sur les valeurs mobilières et d'autres dispositions législatives, notamment pour introduire un nouveau régime d'encadrement pour la gestion des fonds communs de placement et pour étendre le droit de demander en justice réparation pour des dommages subis à cause d'une information fausse fournie à un acquéreur de titres sur le marché secondaire, comme c'est le cas si cette fausse information était contenue dans un prospectus. Votre commission continue maintenant ses auditions sur son mandat d'initiative sur la protection des épargnants avec, en fond de scène, les retombées des scandales sur la gestion des fonds de placement. Ces retombées illustrent, nous croyons, l'intervention que nous avons faite dans notre lettre au président Hamad le 7 décembre 2006. C'est dans ce cadre que se situe notre intervention.

Donc, dans un premier temps, j'aimerais ça parler de la mise en oeuvre de la loi ou ce qu'on appelle en anglais l'«enforcement». La législation et la réglementation ne seront efficaces que si elles sont appliquées. Avant d'ajouter de nouveaux éléments, il faut mettre en oeuvre les moyens d'appliquer ce qu'on a actuellement. Dans ce contexte, on parle beaucoup de poursuites criminelles lorsqu'il y fraude ou du laxisme canadien en comparaison de ce qu'on voit aux États-Unis.

Rappelons d'abord que l'application de la loi ne se limite pas aux poursuites criminelles en cas de fraude. L'application de la loi repose d'abord sur un bon système d'inspection des activités conduites par les intervenants au marché et d'enquêtes efficaces lorsque des anomalies sont suspectées. Pour ce faire, l'autorité doit compter sur des professionnels ayant une bonne connaissance des produits, des marchés financiers, des opérations et de la distribution. J'ajouterais qu'un tel système de surveillance doit être complété par une capacité d'analyse qui mettra à choisir des sanctions administratives et pénales assorties à la gravité de l'offense. De plus, ces sanctions devraient être appliquées rapidement après l'événement ? et j'insiste là-dessus ? parce que c'est le meilleur élément de dissuasion, et c'est là une grande différence entre ce qui se passe au Québec et au États-Unis. C'est une évidence que les sanctions doivent être appliquées avant que les problèmes ne prennent une ampleur incontrôlable.

n(17 h 50)n

De plus, les consommateurs doivent avoir des recours individuels qu'ils peuvent faire valoir s'ils s'estiment lésés. Le nouveau recours offert par le projet de loi n° 29 si un consommateur subit un dommage à cause d'une information fausse fournie aux acquéreurs de titres sur le marché secondaire en est un exemple. Également, l'industrie collabore avec les autorités réglementaires à la mise en place d'un système de traitement de plaintes harmonisé, et ce système de plaintes là progresse suffisamment bien au Québec, nous croyons.

Dans un deuxième temps, j'aimerais vous parler des poursuites criminelles et pénales, et, dans ce domaine, l'Autorité des marchés financiers est tributaire du système policier et judiciaire. Il faut améliorer le fonctionnement du système en ce qui regarde la nature des crimes de nature économique. Des escouades policières spécialisées doivent être opérationnelles, et les corps policiers doivent y consacrer des ressources suffisantes et bien formées pour que les enquêtes progressent rapidement. Il faut aussi que les inspecteurs et les enquêteurs des autorités de réglementation collaborent avec les escouades spécialisées, et ce n'est jamais aisé de faire travailler du monde ensemble. Évidemment, les principes de droit criminel et les précautions à prendre pour préserver la preuve rendent délicate la collaboration entre les divers enquêteurs. Toutefois, les succès des escouades contre les gangs criminels sont une indication qu'on peut y parvenir.

Les procureurs de la couronne doivent aussi accepter d'apporter une plus grande attention aux crimes économiques. Les réticences constatées ont plusieurs causes: la complexité des dossiers, le manque d'expertise des procureurs ou les lacunes de la législation dans la formulation des dispositions constitutives d'infraction. Il y a une perception que les vols économiques ne sont pas aussi graves que les vols que nous sommes habitués, comme les vols de marchandises. J'aimerais ça vous rappeler qu'un détournement de fonds de 100 millions, c'est l'équivalent de 2 millions de paires de gants à 50 $. Ça fait quelques camions de gants. Mais la perception est que les crimes économiques, ce n'est jamais aussi grave, qu'il y a toujours un doute, qu'il y a toujours des circonstances atténuantes.

Les régulateurs, les corps policiers, les procureurs de la couronne pourraient mettre en commun leurs pratiques, leurs besoins et leurs attentes pour en arriver à un système plus efficace. Finalement, les sentences prévues au Code criminel et pour les offenses pénales dans les diverses législations doivent être ajustées pour les rendre plus dissuasives. À notre avis, nous avons d'ailleurs un problème actuellement où il semble y avoir une hésitation à utiliser les peines les plus sévères prévues par les lois actuelles.

Troisième et dernièrement, j'aimerais parler de la meilleure façon de protéger les épargnants, et, d'après nous, la meilleure façon, c'est de supporter le renforcement de la mise en application des législations en matière de services financiers; autrement, la tentation de fraude sera tout simplement trop grande, trop invitante. La responsabilisation des manufacturiers de produits financiers rendra moins nécessaire la mise en place de mécanismes d'indemnisation des épargnants.

Il faut être conscient que les meilleures législations et leur mise en application la plus efficace n'élimineront pas toute possibilité de fraude. C'est pourquoi les intervenants au marché, que ce soit les intermédiaires ou les épargnants, doivent aussi prendre leurs responsabilités. À travers le rôle conseil, l'intermédiaire est amené à s'informer sur la réputation des différents manufacturiers. L'épargnant et l'intermédiaire ont également une responsabilité de ne pas encourager un manufacturier dont la réputation est plus douteuse. Un mécanisme d'indemnisation contre la fraude d'un manufacturier ne serait pas de nature à favoriser cette responsabilisation.

Les épargnants qui veulent obtenir des rendements plus élevés pour leurs épargnes doivent accepter certains risques. Pour ceux qui y sont réfractaires, les risques peuvent être minimisés par certains produits supportés par des exigences de capitalisation applicables aux manufacturiers, comme les dépôts garantis indexés au marché, comme les débentures indexées au marché ou comme les fonds distincts, et qui sont déjà généralement protégés par un mécanisme de compensation.

Alors, nous, notre conclusion, c'est que les mécanismes d'indemnisation peuvent avoir un effet pervers. Ça peut diminuer la pression sur les gens fautifs ou avec peu de scrupules, et, à la limite, ça peut même diminuer la pression sur les autorités de surveillance. La facture ne sera payée que par les gens intègres. Ce système punit tous ceux qui ont des comportements exemplaires via des cotisations plus élevées. Il faut mettre la pression à la bonne place, en intervenant de façon sévère et rapide sur les fautifs. C'est la priorité. Quand le législateur sera satisfait que les mesures prises sont efficaces, il sera alors opportun de revoir les mécanismes d'indemnisation.

Merci de votre attention, et nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Hamad): Merci, M. Charest. Donc, M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. MM. Charest et Millette, bonsoir. Je vais y aller de quelques questions le moins longues possible parce qu'on a quand même beaucoup de choses... Moi, je pense que vous avez beaucoup de choses à nous dire, et on a beaucoup de questions à traiter. Mais la première de toutes, vous dites: L'autorité doit compter sur des professionnels ayant une bonne connaissance des produits. C'est la première fois que je l'entends, celle-là. J'aimerais ça avoir des détails un peu plus précis.

M. Charest (Yvon): En fait, nous, on est pour le regroupement des différentes autorités de surveillance qui a amené la création de l'AMF parce qu'on pense que, de façon générale, c'est la meilleure façon d'aller chercher des ressources de qualité et c'est également la meilleure façon de s'assurer que l'AMF travaille sur les priorités, que dans le fond les dossiers les plus délicats, bien, qu'il y ait des ressources suffisantes qui sont mises. Pour ce qui est des produits, je dois vous avouer, M. le député, que les produits financiers sont devenus de plus en plus complexes. Et il y a eu un certain nombre de cas de fraude au Canada et, si on prend le cas de Portus en Ontario, vous avez juste à lire le document, et c'est loin d'être évident pour qui que ce soit de voir dans quelle mesure le capital était garanti, dans quelle mesure c'était un produit financier à rendement variable dont le capital était garanti. Alors, ce qu'on dit, c'est que les produits financiers se complexifient excessivement rapidement, et il faut s'assurer que, dans tous les domaines incluant l'Autorité des marchés, ces gens-là sont à jour sur toute la connaissance de ces produits-là.

M. Bertrand: Je disais, ce matin à la conférence de presse et lorsqu'on a commencé cet après-midi, que l'industrie des produits financiers, c'est une industrie majeure, c'est une industrie qui emploie beaucoup de personnes. Vous qui êtes particulièrement chez les entreprises de personnes, M. Millette, un ou l'autre doit le savoir, combien on peut parler de personnes qui sont employées dans l'industrie des services financiers, incluant l'assurance de personnes, l'assurance de dommages et, de plus en plus, les produits financiers concernant les placements comme tels.

M. Charest (Yvon): Alors, je vais peut-être juste commencer par faire une remarque sur la région parce que je vois qu'il y a certains députés de la région. Dans la région de Québec, il y a 11 sièges sociaux de compagnies d'assurance qui emploient directement 10 000 personnes à temps plein. C'est une hausse de 3 000 dans les cinq dernières années, ça augmente d'environ 600 à 650 personnes par année, et on pense que ça va continuer dans les cinq prochaines années, principalement parce que la plupart des assureurs de la région sont en expansion pancanadienne. Au niveau canadien...

M. Bertrand: Au niveau québécois, entre autres.

Une voix: ...

Le Président (M. Hamad): Je veux m'assurer que mes collègues de Montréal ont bien compris, là.

M. Charest (Yvon): En fait, je vais vous donner indirectement. En fait, au Canada, on peut diviser ça en deux: on peut diviser ça en assurance de personnes, le personnel administratif puis les autres personnes. Quand on regarde qu'au Québec, à Québec, on dit qu'on en a 10 000, on en a peut-être 4 500 en assurance de personnes, puis c'est 8 % des emplois du Canada qui sont dans la région de Québec. Alors, vous multipliez par 12, ça fait un 50 000 personnes à peu près sur le marché canadien en assurance de personnes au niveau du personnel administratif, et Yves, il se trouve à voir les distributeurs.

M. Millette (Yves): Oui. En assurance de personnes au Québec, il y a 20 000 personnes qui travaillent pour les entreprises d'assurance soit dans des emplois administratifs, soit comme représentants. Et ça ne comprend pas les courtiers, je pense, les courtiers viennent s'ajouter, il y en a 3 000, 4 000 courtiers. Et vous avez à peu près le même nombre de personnes en assurance de dommages, puis là, si vous ajoutez à ça des représentants en fonds communs de placement, c'est ? je ne me souviens pas ? 28 000, quelque chose comme ça, 22 000, je pense. Ça vous donne quelque chose comme 65 000, 70 000 personnes qui travaillent dans le domaine des valeurs mobilières, dont 11 000 dans la région de Québec.

n(18 heures)n

M. Bertrand: Je voudrais vous amener... évidemment, ma question, il y avait un but à tout ça. Vous dites, à la page 9: «Un mécanisme d'indemnisation pour de la fraude de manufacturier ne serait pas de nature à favoriser cette responsabilisation.» Vous autres, s'il y en a qui savent ce que ça veut dire, un fonds d'indemnisation, ce que ça veut dire en conséquences pour les propriétaires d'entreprise, mais aussi en conséquences pour les représentants, vous savez le fonctionnement. J'aimerais ça vous entendre un petit peu plus détaillé par rapport à ce que vous dites dans ce paragraphe-là.

Le Président (M. Hamad): Sur le fonds d'indemnisation.

M. Charest (Yvon): Oui. On peut parler du fonds d'indemnisation qu'on a en tant que manufacturier. L'industrie de l'assurance de personnes, au début des années quatre-vingt-dix, a pris l'initiative de créer un fonds de protection des épargnants pour tous les produits d'assurance, et ça protège une faillite d'un manufacturier. Et en fait le mécanisme, de la façon qu'il a été développé, c'est de dire qu'il faut s'assurer d'abord qu'on comprend bien le profil de risque de chaque manufacturier. On accepte qu'un manufacturier prenne plus de risques, mais, à la fin de la journée, ça veut dire qu'il va payer des cotisations plus importantes au fonds d'indemnisation...

M. Bertrand: On s'entend bien, quand vous parlez de manufacturier, qu'on parle d'une compagnie d'assurance, on veut vulgariser.

M. Charest (Yvon): C'est ça, les compagnies d'assurance. Donc, on parle de toutes les compagnies d'assurance au Canada. Donc, on a développé un mécanisme de cotisations en fonction du profil de risque de chacun des individus. On a créé une entreprise... Il y a une entreprise indépendante qui a été créée, qui s'appelle Assuris, qui travaille en collaboration très étroite avec les autorités de surveillance, et, s'il y avait une fraude, Assuris... s'il y avait une faillite, Assuris, le législateur et les autorités de surveillance travailleraient ensemble pour indemniser les consommateurs. Et, quand on dit dans un paragraphe ici qu'il faut d'abord s'assurer que la législation est excessivement étanche au niveau des distributeurs avant de penser à une autre avenue, bien, nous, au niveau des manufacturiers, les compagnies d'assurance, on considère que notre système réglementaire est sévère, il est étanche. Il y a deux autorités de surveillance principalement au Canada qui contrôlent les compagnies d'assurance, de sorte que le risque de faillite s'en trouve autant diminué.

Il faut dire comme point additionnel que les compagnies d'assurance sont régies par des normes de capital, ce qui veut dire que non seulement les consommateurs sont protégés par leurs actifs qu'ils nous ont prêtés, mais qu'on a également de la réglementation excessivement détaillée sur le montant de capital qu'on doit avoir dans notre bilan en fonction des risques qu'on a pris au niveau des consommateurs. Donc, ce coussin-là existe au niveau des compagnies d'assurance, et, dans ce sens-là, c'est un coussin extrêmement intéressant pour protéger les consommateurs.

M. Millette (Yves): Et je pourrais peut-être ajouter: c'est important parce que dans le fond un manufacturier ou un fabricant de produits, il met de son argent au risque. Donc, c'est plus compliqué d'aller voler après parce qu'il est obligé de mettre une bonne partie du capital dans ça, ce qui n'est pas nécessairement le cas ailleurs.

Le Président (M. Hamad): On n'est pas dans la même game, là, que les fonds...

M. Bertrand: Le fonds d'indemnisation que vous parlez, si je comprends bien, est différent du fonds d'indemnisation qui est à l'AMF. Mais vous y contribuez ou c'est le même? Parce que je sais que vous contribuez au fonds de l'AMF.

M. Millette (Yves): Là, on vient dans un... On vous a parlé du fonds des manufacturiers, qui n'est pas un fonds de fraude mais un fonds contre la faillite des entreprises, peu importe la cause, là, alors que, si on parle du fonds d'indemnisation de l'autorité, c'est un fonds contre la fraude de représentant, de distributeur, et, à ce moment-là, les assureurs...

M. Bertrand: Représentant ou distributeur. Ça n'inclut pas en montant.

Le Président (M. Hamad): Le gestionnaire.

M. Millette (Yves): Ça n'inclut pas de manufacturier.

M. Bertrand: Voilà.

M. Millette (Yves): Et je reviendrai avec la notion de gestionnaire tantôt. Ça n'inclut pas le manufacturier, sauf si le manufacturier est lui-même un distributeur. Il peut être distributeur et, à ce moment-là, il est enregistré à l'AMF, et là il va devoir participer à l'indemnisation. Donc ça, c'est une chose.

Évidemment, on parle du gestionnaire et on a un peu de difficultés à situer c'est quoi, un gestionnaire de fonds mutuels: Est-ce que c'est un émetteur de valeurs mobilières ou si c'est un manufacturier de produits financiers? C'est un hybride entre les deux.

Nous, on a tendance à vouloir le... à le considérer comme un distributeur. On a beaucoup d'assureurs qui sont des distributeurs de fonds... des gestionnaires de fonds mutuels. Ce sont aussi les manufacturiers de produits, donc...

M. Bertrand: Je voudrais vous amener... Je m'excuse, M. le Président. Je peux? Je voudrais vous amener maintenant sur...

Le Président (M. Hamad): Si vous voulez faire l'alternance, M. le député de Charlevoix, on a l'alternance...

M. Bertrand: Est-ce que je peux?

Le Président (M. Hamad): ...mais finissez là-dessus. On va faire l'alternance après.

M. Bertrand: Juste parce que je m'en viens sur la même ligne. Je voudrais vous amenez maintenant... On sait que le fonds, à l'heure actuelle, de l'AMF, s'il n'est pas liquidé, il est proche, et il ne reste plus... Bien, quand ils auront tout payé, là, ce qu'ils ont à payer dans le moment, quelqu'un va devoir renflouer ce fonds-là. Ce sera des représentants et probablement les émetteurs, ou les producteurs, ou les manufacturiers, pour ne pas dire les compagnies d'assurance ou les fonds mutuels.

Je voudrais savoir comment ça va marcher, quelle implication financière ça va avoir sur vos représentants et sur les membres que vous représentez, les compagnies.

M. Charest (Yvon): Bien, en fait, comme M. Millette a mentionné, la cotisation va devoir être payée par les cabinets. Alors, les cabinets, ça peut être quoi? Ça peut être des petits regroupements de courtiers ou ça peut être une organisation. Si je prends l'exemple de l'Industrielle Alliance, nous, on a 1 500 représentants à temps plein qui travaillent pour nous, qui sont regroupés dans un cabinet. Donc, ce cabinet-là va payer l'équivalent pour 1 500 personnes. Alors, si on dit, par exemple, que ça pourrait coûter 1 500 $ par distributeur pendant les cinq prochaines années parce qu'il y a un trou, bien faites le calcul: 1 500 fois 1 500, c'est 2,25 millions pour nous, par année, pendant cinq ans. Pour une plus petite organisation de 10 distributeurs, bien ce serait un montant...

Le Président (M. Hamad): ...l'article de La Presse qui était après.

M. Charest (Yvon): C'est ça. C'est un article, quelqu'un mentionnait que, si c'était tel montant... j'essaie juste de donner un ordre de grandeur.

Le Président (M. Hamad): Vous avez pris l'ordre de grandeur, O.K., 2 250 000 $ sur cinq ans. Y a-tu maintenant... le député de Laval.

M. Paquet: Merci, M. le Président...

Une voix: C'est en banlieue de Québec.

M. Paquet: Ah, oui, Laval, c'est un très bel endroit pour faire de l'assurance, des produits financiers.

Le Président (M. Hamad): M. Charest est originaire de Québec, ça fait qu'il est pas pire.

M. Paquet: Alors donc, effectivement, on vient de parler du fonds d'indemnisation, et vous avez évoqué dans votre mémoire le danger qu'il pourrait y avoir déresponsabilisation, ce qu'on appelle aussi un problème de hasard moral, problème bien connu dans le milieu de l'assurance, il faut faire attention, et en cas d'information incomplète, finalement. C'est un peu ça, quand il y a de la fraude, c'est qu'il y en a qui gardent l'information pour eux pour faire des manoeuvres qui sont non seulement illégitimes, mais qui ont des répercussions directes par la suite évidemment pour les épargnants.

Un élément, puis vous venez de toucher un petit peu à ça, avez-vous évalué un peu l'ordre de grandeur que ça représenterait, pour faire référence un peu à l'article de La Presse, mais si demain matin on disait: Bien là, on veut mettre en place un tel fonds? Et deuxième sous-question concernant ? puis je reviendrai avec un autre élément par la suite ? quel genre... pratico-pratique ça pourrait faire en termes d'application dans la mesure où, par exemple, au Québec, on aurait une législation qui permettrait éventuellement, sous cette hypothèse-là, un fonds d'indemnisation qui couvrirait aussi les gestionnaires, alors que ce ne serait pas nécessairement le cas encore ailleurs au Canada?

Dans le cas de l'assurance ? vous me corrigerez; dans le cas de l'assurance ? il existe des contreparties ailleurs au Canada, alors que ce n'est pas le cas, là, pour les valeurs mobilières. Est-ce que je me trompe?

Le Président (M. Hamad): M. Millette.

M. Michaud (Yves): Oui. Il y a des fonds d'indemnisation pour les valeurs mobilières, il n'y en a pas nécessairement pour les fonds mutuels et il n'y en a pas pour les représentants en assurance de personnes ou en assurance de dommages. C'est uniquement au Québec qu'il y en a pour tout ce monde-là. Donc, c'est évidemment selon des principes de base en assurance: plus il y a de participants à un fonds, moins ça va coûter cher à chacun. Et donc, s'il y a seulement au Québec que vous avez des gens et qu'il y a seulement au Québec qu'on participe à payer au fonds, ça va coûter cher. C'est le genre de chose qui... le plus le risque est réparti, le moins ça coûte cher au...

M. Charest (Yvon): Et il faut être conscient ici qu'on essaie de mesurer un coût pour une protection contre la fraude, hein. Alors, le risque, ça se trouve à être quoi à la fin de la journée, là? Ça se trouve à être le risque des gens qui rentrent dans la profession, à la limite, c'est le risque de l'autorité de surveillance. Si l'autorité de surveillance manque de ressources puis, pendant une certaine période, il ne peut pas agir de façon aussi rapide, bien, finalement, c'est le fonds qui paie. Alors, vous voyez que de chiffrer une protection contre la fraude, c'est extrêmement difficile, c'est extrêmement difficile.

M. Millette (Yves): Et juste pour revenir là-dessus, je pense qu'on a parlé tantôt que la base de la surveillance, c'est par des inspections ou des enquêtes de l'Autorité des marchés financiers. Ce n'est pas compliqué, là, on a juste à apporter l'exemple, en tant que citoyens, on connaît tous l'efficacité d'une auto de la Sûreté du Québec au milieu de la 20, là. Mais c'est exactement la même chose pour des inspections et des enquêtes de l'Autorité des marchés financiers: ça a un effet dissuasif très important.

n(18 h 10)n

M. Paquet: Donc, vous suggérez des photoradars pour les fonds de gestion, non?

Une question, une dernière question, M. le Président. Oui. Vous parlez de l'élément, vous parlez de l'élément effectivement dissuasif, d'avoir un système d'inspection puis d'enquête, est-ce que vous avez réfléchi en termes de législation, en termes pénal ou en termes de comment... Est-ce que c'est des sentences plus sévères? Quel genre de sentence vous imaginez ou...

M. Charest (Yvon): Mais, comme je vous dis, en partant, on a l'impression que les différentes personnes ont de la difficulté pour les crimes économiques à dire que ça doit être puni puis que ça doit être puni de sommes importantes. L'impression qu'on a, c'est qu'actuellement les gens n'utilisent même pas les limites supérieures prévues par la loi, puis c'est pour ça que, quand je fais l'exemple de 100 millions de dollars, puis je dis c'est 2 millions de paires de gants, à quelque part, t'as peut-être beau dire que c'est un petit peu la faute de l'autre, puis qu'il y a quelqu'un qui n'a pas fait son ouvrage, mais que j'avais une bonne raison, puis que j'ai travaillé pour l'intérêt des gens, ça reste que c'est un centre d'achats au complet.

Puis, moi, l'impression qu'on a, c'est que les gens, au niveau culturel, de tous ceux qui ont à prendre des décisions, ils ont de la misère à utiliser les limites maximales permises et, quand on dit maintenant: Quelles devraient être les conséquences?, puis, moi, j'ai toujours pensé que, la meilleure chose, c'est la prévention. C'est incroyable l'histoire qu'on entendait la semaine passée sur ce qui se passe dans l'industrie du cinéma, puis les gens qui falsifient des copies de films qui sont utilisées dans les salles de cinéma, de savoir qu'il y a quelques années c'était aux États-Unis, puis que, depuis qu'une des personnes est allée en prison, bien ça s'est déplacé ailleurs, puis actuellement le problème est à Montréal. Ça vous donne une idée c'est quoi, la dissuasion, puis c'est exactement, nous, ce qu'on dit ici. Puis à quelque part, la dissuasion, ça peut être des montants d'argent, mais à quelque part aussi c'est un séjour en prison, et peut-être c'est ce que ça prend pour faire réfléchir drôlement les gens.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: ...M. le Président. M. Charest, vous êtes un spécialiste de l'aval. L'aval, c'est la prévention. Pas Laval, Université Laval, là, mais c'est la prévention, c'est la formation. Je voudrais vous entendre, moi, sur... On a beau parler de moyens très, très forts, puis je ne dis pas que je ne suis pas d'accord là-dessus, de punitif et tout ce que vous voudrez, mais, si je vais en avant de ça, là...

M. Charest (Yvon): Bon. Alors, il faut dire en partant, là, que je dois vous avouer qu'il n'y a pas nécessairement de solution extrêmement facile parce que, si on prend trois fraudes qui se sont passées au Canada puis on regarde Portus, on regarde Norshield puis on regarde Norbourg, ce n'est pas seulement les petits investisseurs qui ont mis des sommes là-dedans puis qui se sont trompés, qui ont mal géré leur risque de réputation. Dans deux des trois cas, il y a eu des institutions financières et des régimes de retraite. Alors, ce n'est pas juste le petit épargnant, puis ce n'est pas l'intermédiaire qui demeurait au coin d'une rue proche de l'Université Laval ou la ville de Laval, là. Donc, en partant...

Donc, ça veut dire, ça, que le risque de réputation, c'est difficile à gérer et ça veut dire que, pour une autorité de surveillance comme pour une institution, c'est d'avoir les oreilles bien ouvertes. Ça veut dire des fois que ce n'est pas nécessairement travailler dans son bureau. Ça veut dire c'est de sentir puis savoir ce qui se passe dans le marché. Ça veut dire tout ça.

En plus de cet élément-là, ça veut dire surtout des ressources qui sont assez fortes, compétentes et qu'on accepte de dédier à ces tâches-là, et il y a des gens aux États-Unis qui peuvent penser que M. Spitzer et son escouade sont allés un petit peu trop vite puis un petit peu trop fort, mais ça a donné des résultats. Donc, ça montre qu'à quelque part, quand on met les ressources au bon endroit, ça peut donner les résultats.

Maintenant, l'élément additionnel, puis je vais insister là-dessus parce que le groupe qui est venu avant nous ont également insisté puis on l'a mis dans notre mémoire: ce n'est jamais facile de faire travailler ensemble des autorités réglementaires, des forces de l'ordre, les procureurs de la couronne, mais, à la fin de la journée, si seulement vous réussissiez à bien faire travailler ces gens-là ensemble... Quand, nous, on dit que les dossiers, non seulement ils doivent être traités de façon sévère, mais ils doivent être traités de façon rapide, bien, si vous réussissez à faire travailler ces gens-là ensemble puis que, trois mois après une infraction, il y a quelqu'un qui est en cour au niveau criminel, ça va avoir un impact important. Malheureusement, si l'enquête traîne pendant 18 mois, ça envoie un autre message à tout un chacun.

Alors, les deux points qu'on dit c'est que: un, mettons la pression à la bonne place; deux, il y a plusieurs groupes qu'il faut trouver une façon de faire travailler ensemble. Puis, dernièrement, on voyait des longs reportages dans le Globe and Mail en disant: L'escouade des crimes économiques, dans quelle manière elle pourra mieux fonctionner? Ils ont fait venir des gens de New York qui leur ont expliqué comment les gens travaillent ensemble. C'est un élément important de la solution en aval.

Le Président (M. Hamad): Nous, ce matin, M. Charest, la commission, à la conférence de presse, on a parlé de ça. L'importance de finances, l'Autorité du marché, les procureurs de la couronne et la Sûreté du Québec feraient ensemble, il y a plusieurs niveaux, là. Il y a le niveau de l'éducation pour les gens de la Sûreté du Québec puis il y a aussi l'ajout des procureurs de la couronne pour travailler ensemble. On va dans le même sens. C'est ce qu'on a dit, ce matin, nous autres aussi. M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Effectivement, c'est important ce que vous mentionnez là. C'est très important parce que, si on regarde au niveau du crime organisé, si on regarde au niveau du Revenu Québec, l'efficacité de récupérer les sommes, c'est parce qu'on va rapidement. C'est qu'à ce moment-là il y a des mesures qui sont prises puis elles sont prises rapidement, de façon à pouvoir aller saisir et aller chercher ces biens-là dans le but de s'assurer qu'on va chercher le maximum le plus vite possible puis qu'on les protège, dans le cas du crime organisé, à des fins au niveau du ministère de la Justice et divers organismes et, dans le cas de Revenu Québec, au niveau des créances qui sont dues à Revenu Québec.

Donc, ce que vous suggérez, c'est un peu de s'inspirer de ces organismes-là de façon à pouvoir récupérer le plus rapidement possible ce qui existe comme disponibilité financière dans ces organismes-là et, pour ce faire, utiliser une concertation entre que ce soit au niveau de l'AMF, les corps policiers et tout organisme de contrôle.

M. Charest (Yvon): Exactement.

M. Bernier: Mais il y a également la signalisation, comme on a discuté avec les différents ordres de comptables agréés ou des CGA tout à l'heure, qui est importante au moment où on découvre ces choses-là.

M. Charest (Yvon): Oui. Tout à fait d'accord. C'est là l'essence d'un de nos deux messages principaux: de faire travailler les gens ensemble. Puis le deuxième, c'est de s'assurer que, dans le système, on met la pression à la bonne place, c'est-à-dire que de s'assurer qu'il y a des ressources fortes et compétentes qui agissent de façon sévère à l'autorité.

M. Bernier: Je vais vous poser une question précise: Est-ce que vous croyez actuellement que l'AMF possède les outils pour accomplir adéquatement son travail en ce qui regarde la prévention?

M. Charest (Yvon): L'AMF a été créée il y a trois ans, puis c'est une fusion de quatre organismes. Mais ce n'est pas nécessairement facile de fusionner des organismes dont la moitié du personnel est à Québec puis la moitié du personnel est à Montréal. Je pense que l'AMF, jusqu'à date, nous a démontré qu'il faisait une job correcte. Malheureusement peut-être pour eux il y a eu plus d'incidents depuis la création de l'AMF, mais je ne pense pas vraiment, là, honnêtement, je ne pense pas que c'est relié.

On me dit, à l'AMF, qu'ils sont capables d'engager des gens qui n'ont pas nécessairement de contraintes salariales. Si j'avais un conseil à donner, ce serait de dire peut-être parce que l'organisme est nouveau, veut faire beaucoup de choses en même temps, par exemple, il veut faire de la vérification continue des plus grandes institutions pour être certain qu'il les comprenne bien, puis c'est peut-être là, au niveau du choix de priorités, qu'ils doivent peut-être faire des choix puis dire: On est un nouvel organisme, les attentes sont très grandes pour nous, on voudrait tout faire en même temps.

L'autorité, quand vous regardez ça, le nom de l'autorité est beaucoup plus connu que toutes les autorités qui existaient avant: l'Inspecteur général des institutions financières, puis tout ça. Donc, ils ont travaillé fort pour faire connaître l'organisme, ils ont travaillé fort pour développer un registre des plaintes où chaque consommateur qui se croit lésé, il va y avoir un registre centralisé, puis l'AMF va être capable exactement ce qui s'est passé. Et donc ils ont un gros agenda, puis peut-être le seul conseil que je pourrais donner, c'est de dire: Acceptons de mettre la priorité à certains endroits et peut-être de ne pas satisfaire les attentes de tous les intervenants du milieu. Puis, dans mon livre à moi, une des priorités, c'est de dire: Peut-être, au lieu de faire de la vérification continue, mettons des ressources plus sur la vérification en fonction du profil de risque, en fonction du risque de réputation.

M. Bernier: ...ciblé.

Le Président (M. Hamad): M. le député de Marguerite-D'Youville.

n(18 h 20)n

M. Moreau: Merci, M. Charest, M. Millette, bienvenue. J'aime beaucoup votre approche. Votre mémoire est concis et il va directement au point. J'avais une question cependant. Vous parlez, bon, d'appliquer rapidement les sanctions, ça, ça va, mais, un peu plus loin, vous dites: Il faut coordonner les gens pour qu'ils travaillent ensemble. Le président vous a dit que c'est l'objectif que nous poursuivons. Vous faites un parallèle qui m'apparaît cependant douteux lorsque vous dites: «Les principes de droit criminel et les précautions pour préserver la preuve rendent délicate la collaboration des enquêteurs, mais le succès des escouades contre les gangs criminels sont une indication qu'on peut y parvenir.»

Avec respect, dans ce cas-là, c'est la police qui travaille avec la police, c'est une escouade spécialisée, alors que, là, on parle de professionnels qui invoquent des limitations liées au caractère particulier qui existe entre eux ou qui doit exister entre eux et leurs clients et la police. Est-ce que vous ne croyez pas que c'est un peu plus délicat dans ce cas-là?

M. Charest (Yvon): Je déclare que je ne suis pas un expert des gangs criminels mais que je pensais que plusieurs corps policiers qui devaient travailler ensemble pour que ça fonctionne sur une assez longue période de temps puis partager beaucoup d'information, que ce n'était pas nécessairement une unité.

M. Moreau: Oui, mais le diagnostic que l'on semble faire ici, c'est que la lenteur dont vous soulignez l'existence, particulièrement au Québec, vient du fait qu'on a des enquêteurs, des policiers, l'Autorité des marchés financiers et des professionnels. Et, ce que j'ai cru comprendre de ceux qui vous ont précédé, c'est qu'il y a de la friture sur la ligne parce qu'on ne peut pas facilement faire circuler l'information entre les uns et les autres. Là-dessus, est-ce que vous pensez que c'est un faux débat ou...

M. Charest (Yvon): Je ne suis pas sûr qu'on peut aussi faire circuler facilement l'information entre deux ou trois corps policiers, là. Ça, je ne suis pas sûr de ça.

Le Président (M. Hamad): Il y a toujours l'aspect de contamination de preuve qui est plus difficile que dans les poursuites de criminels, là. C'est ça, le défi.

M. Charest (Yvon): Oui. Et une des raisons pour laquelle je pense, sans être un spécialiste, si ces choses-là fonctionnent, c'est parce que les procureurs de la couronne ont participé à la rédaction des législations. Parce que, ça aussi, c'est une chose qui est importante. Je pense que celui qui va avoir à appliquer une loi, s'il a participé à sa rédaction, il court des chances de se comprendre un peu mieux. Parce qu'un des problèmes dans les crimes économiques, c'est que les procureurs de la couronne ont à faire face à des législations qui n'ont pas été rédigées par des spécialistes, et souvent ils ne sont pas capables de retrouver des éléments de preuve dont ils ont besoin pour amener une condamnation. Donc, si ces gens-là participent à la rédaction des législations ou en tout cas à certaines parties des législations, les parties pénales, peut-être que ça va être plus facile de faire appliquer les législations.

M. Moreau: Et donc vous êtes tenant de toute modification législative nécessaire pour faciliter la circulation de l'information?

M. Charest (Yvon): Dans la mesure où c'est nécessaire.

M. Moreau: Bien.

M. Charest (Yvon): Il y a beaucoup de législations qui existent à l'heure actuelle, et je ne suis pas certain que c'est toujours un problème de législation quand on parle d'un problème de communication de la preuve.

M. Moreau: J'ai une dernière question à vous poser. Vous êtes pour des sentences beaucoup plus sévères pour, dites-vous, les rendre plus dissuasives. Il y a deux écoles de pensée là-dessus. Lorsqu'on est dans le domaine des crimes économiques et que l'enjeu pour le criminel ou le fraudeur s'évalue en centaines de millions, est-ce que vous pensez que le fait de rendre plus sévère une peine a véritablement un effet dissuasif ou si ce n'est pas de créer un peu un miroir aux alouettes en disant: Bon, les gens vont être bien heureux, dans le public, de voir qu'on condamne à des peines d'emprisonnement, comme aux États-Unis, à quatre fois la vie d'un individu et il va mourir juste une fois cependant, et qu'ils vont se sentir protégés, alors que, dans la réalité, c'est juste de se donner bonne bouche sans que ça ait véritablement un effet réel?

M. Charest (Yvon): Je pense qu'il y a plusieurs personnes aux États-Unis qui ont été extrêmement surprises des pénalités qui ont été imposées pour des crimes économiques incluant le nombre d'années de prison, et je crois foncièrement que ça a fait réfléchir beaucoup de personnes. Je dirais en complément que j'ai eu l'opportunité d'aller visiter une prison à sécurité maximale dernièrement en tant que visiteur...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charest (Yvon): ...et je ne crois pas que ça pourrait intéresser bien des gens à aller là. Je crois vraiment...

Une voix: ...

M. Charest (Yvon): Je crois vraiment que ça peut être dissuasif. Maintenant, si vous volez 5 millions...

Une voix: ...

M. Charest (Yvon): ...si vous volez 5 millions, puis on vous demande d'en rembourser 1, puis vous recevez une tape sur les doigts, on s'entend. Mais, s'il y a un séjour en prison puis que le séjour peut être suffisamment long, moi, je suis pas mal convaincu qu'il y a bien des gens aux États-Unis qui ont réfléchi suite aux peines qui ont été mentionnées dans les deux, trois dernières années. Et je dirais que, si vous n'êtes pas totalement convaincus, je dirais que ça vaut quand même la peine d'essayer.

M. Moreau: En réalité, vous favorisez davantage les peines d'emprisonnement plutôt que des amendes pour ce type de crimes là, en disant: C'est des gens qui ne sont pas habitués à des séjours à l'hôtel moins bien garni.

M. Charest (Yvon): Je dirais que c'est qu'il faut certainement que ce soit considéré parce qu'effectivement, quand vous regardez... par exemple, quelqu'un peut acheter un portefeuille de fonds commun qui appartient à un autre manufacturier. Alors, ça se vend combien, un portefeuille de fonds communs? Actuellement, au pays, ça se vend à environ 8 % de l'actif. Alors, si quelqu'un a un portefeuille de 100 millions, vous l'achetez 8 millions, en tant que manufacturier, puis vous espérez que la valeur présente de tous les profits que vous allez générer comme honoraires de gestion dans les 15 prochaines années, ça rembourser votre 8 millions.

Mais si vous achetez le portefeuille de 100 millions parce que vous voulez en détourner 30 millions, vous êtes peut-être prêt à en payer 10, millions, vous êtes peut-être prêt à en payer 11, puis vous savez qu'à un moment donné vous allez commencer à dépenser votre argent puis vous allez en avoir joui un certain temps avant que quelqu'un s'en rende compte. Alors, vous avez une bonne probabilité de jouir d'une partie de l'argent, puis ce que vous perdez, au pire, c'est votre réputation, puis si vous n'aimez pas votre réputation où vous êtes actuellement, vous changez de province ou vous changez de pays. Mais si vous savez que vous ne changerez pas de pays, puis que vous allez visiter le même 100 m² d'un pays pendant les huit prochaines années, ça, je pense que ça peut faire réfléchir.

M. Moreau: Merci.

Le Président (M. Hamad): Vous savez qu'actuellement, vous avez raison, actuellement, la pénalité, elle va jusqu'à un maximum de cinq ans de prison et un maximum d'amende de 5 millions, mais ce n'est jamais applicable en plus. Ça fait qu'on est tout à fait... on est loin au Québec, actuellement, en termes de... les deux, pas seulement les pénalités, là, de prison mais aussi les amendes. Les moyennes des amendes, c'est entre 1 000 $ et 5 000 $.

M. Charest (Charest): Vous avez compris la mathématique du portefeuille. Quand je vous dis qu'on achète, là, tu achètes le portefeuille de 100 millions, tu le paies 8 millions. Si jamais tu veux en détourner 30, comment tu es prêt à payer?

Et quand on dit «le risque de réputation», puis on dit à un moment donné «être dans la rue», bien il faut se questionner quand quelqu'un est prêt à payer plus que le 8 %, de dire: C'est quoi, sa motivation.

Le Président (M. Hamad): Puis, en plus, la problématique, lorsqu'on est accusé à l'Autorité des marchés là-dessus, bien ce n'est pas nécessairement une autre accusation au pénal, l'autre côté, donc les gens vont préférer être accusés à l'Autorité des marchés avant qu'ils soient accusés au pénal parce que ce n'est pas les mêmes... Alors, c'est une faiblesse, là, mais j'espère que les gens n'ont pas compris ça.

Alors, merci beaucoup. Y a-tu d'autres questions? Merci beaucoup. Merci, M. Charest et M. Millette.

Je suspends les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 18 h 27)

 

(Reprise à 18 h 31)

Le Président (M. Hamad): Nous reprenons les travaux. Alors, nous avons maintenant l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec. Alors, je vous demande de se présenter. Vous avez 45 minutes totales: alors, 15 minutes pour vous et 30 minutes pour les questions. Allez-y.

Ordre des comptables en management
accrédités du Québec

M. Fuoco (Dino): Merci. Alors, M. le Président de la Commission des finances publiques, M. le vice-président, Mmes et MM. les députés, mesdames et messieurs, bonsoir. Mon nom est Dino Fuoco, FCMA. Je suis le président élu du Bureau de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec et le président-directeur général d'une société qui s'appelle MATVET; à mes côtés, M. François Renauld, également FCMA et président-directeur général de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec.

Alors, l'ordre tient d'abord à vous remercier très sincèrement de l'invitation qu'elle lui fait de partager avec elle sa position sur la protection des épargnants du Québec. Nous espérons que nos commentaires contribueront à enrichir vos réflexions et vos recommandations, lesquelles feront partie du rapport que vous déposerez à l'Assemblée nationale prochainement. Alors, je cède maintenant la parole à François Renauld, qui agira comme porte-parole de l'ordre aujourd'hui. Merci.

M. Renauld (François): Alors, M. le Président, messieurs mesdames, comme vous pourrez le constater à la lumière de notre présentation et à la lecture de notre mémoire, l'Ordre des comptables en management accrédités rejoint l'objectif de la Commission des finances publiques, qui est d'assurer une meilleure protection des épargnants. Mais, tout en reconnaissant que les problématiques relevées dans le secteur des fonds communs de placement sont de nature à affecter le lien de confiance qui unit les épargnants et l'industrie, nous croyons cependant que leur résolution ne pourra à elle seule enrayer totalement les actes frauduleux commis par des criminels, car, malheureusement, il se trouvera toujours des gens pour contourner les lois, ce qui, nous en convenons, ne doit pas nécessairement freiner le législateur dans sa lutte contre les crimes économiques.

Cette première réflexion faite, il est important de préciser que nous ne prétendons pas avoir toutes les solutions ni toutes les réponses aux questions soulevées par la commission. Le sens de notre intervention d'aujourd'hui se situe davantage sur le plan des principes qui doivent à notre avis guider l'action gouvernementale. La grande question qu'il faut se poser au sujet de la protection des épargnants est la suivante: Jusqu'où l'État peut-il aller pour assurer la protection des épargnants sans compromettre pour autant l'équilibre nécessaire à la bonne marche d'une industrie essentielle à notre activité économique?

Avant de répondre à cette question, il nous apparaît important de préciser que l'Ordre des CMA, l'Ordre des comptables en management accrédités, n'a pas d'intérêt particulier dans l'industrie des fonds communs de placement. De façon générale, nos membres ne sont pas associés à la vente de produits, et notre ordre demeure indépendant face aux différents groupes d'intérêt en présence.

L'Ordre des CMA, qui représente plus de 6 800 membres au Québec, assure le leadership de la profession par le maintien de normes élevées et la reconnaissance du titre. L'intégrité, l'excellence, l'esprit d'entreprise et l'adaptabilité sont les quatre valeurs qui guident notre action. Notre mission consiste d'abord et avant tout à protéger le public comme le prévoit le Code des professions. C'est donc au nom de ce principe de protection du public au coeur de nos activités régulières que nous sommes ici, aujourd'hui, pour vous soumettre nos observations et commentaires au sujet des problématiques présentées dans votre document de consultation. Notre propos portera essentiellement sur quatre volets principaux, soit la gouvernance, l'échange d'information, l'indemnisation des épargnants et les sanctions imposées.

En matière de gouvernance, les récents scandales financiers ont clairement démontré que le cumul des fonctions de gestionnaire, de promoteur, de fiduciaire et de principal distributeur constituait un risque pour les investisseurs. Mais est-ce qu'en séparant ces rôles, les investisseurs seront mieux protégés?

À l'instar de certains intervenants dans le dossier, nous croyons qu'il faut approfondir l'impact réel d'une telle mesure sur la protection des épargnants dans le secteur des fonds communs de placement avant d'apporter une réponse définitive à cette question. Il ne faudrait pas tenter de corriger une situation en créant un autre problème dont les investisseurs pourraient faire les frais. Si la séparation des rôles a pour conséquence de nuire à la viabilité de certaines petites firmes et se traduit par des coûts supplémentaires pour les petits investisseurs, seront-ils plus avancés? La question mérite certainement d'être examinée sous tous les angles.

D'autre part, nous sommes favorables à la mise en place d'un comité d'examen indépendant afin d'encadrer les conflits d'intérêts, particulièrement ceux d'ordre commercial ou opérationnel, où l'absence de réglementation précise en matière de valeurs mobilières est de nature à nous inquiéter. Le règlement 81-107 proposé par les autorités canadiennes en valeurs mobilières nous apparaît à cet égard une solution intéressante. Soit dit en passant, la formation de ces comités ne devrait pas représenter, comme certains le soulignent, un problème particulier, les ordres professionnels du secteur droit et affaires, entre autres, représentant un bassin très riche pour le recrutement de candidats.

Par ailleurs, nous demeurons sensibles et ouverts à des mécanismes qui pourraient être suggérés par des représentants de l'industrie afin de ne pas nuire à l'établissement d'une saine concurrence, notamment en ce qui a trait à l'accès des petites firmes au marché. Cependant, nous estimons avant tout qu'un investisseur mieux protégé est un investisseur mieux servi.

Une autre problématique soulevée par la consultation et qui a attiré notre attention a trait à l'échange d'information entre les organismes de réglementation, d'une part, et les services policiers, d'autre part. D'entrée de jeu, nous ne pouvons qu'être favorables à l'échange d'information et à une meilleure concertation avec les services policiers, surtout si cela est de nature à accélérer le processus d'enquête, actuellement très long. Nous appuyons donc sans réserve les mesures qui pourraient y contribuer.

Pour ce qui est des amendements à apporter aux lois en vigueur afin d'améliorer les échanges d'information entre les organismes de réglementation et les organismes responsables de la vérification, nous tenons à rappeler que la Loi sur les comptables agréés, qui a récemment été modifiée afin justement de permettre de conclure une entente avec certains organismes qui exercent des fonctions complémentaires de protection du public, particulièrement l'autorité financière. Essentiellement, cette modification permet de déroger aux lois et règlements qui régissent normalement l'ordre professionnel à l'égard des renseignements confidentiels qu'il détient. En d'autres mots, comme vous le savez ? il en a été question dans les dernières présentations ? il est désormais possible donc d'échanger, notamment sur l'inspection, la discipline ou toute enquête entreprise par l'organisme. Ces modifications contribueront, selon nous, à la protection des épargnants parce qu'elles faciliteront l'échange d'information qui constituent, il faut bien le dire, le nerf de la guerre dans la lutte contre les crimes économiques.

Par ailleurs, le projet de loi n° 64 actuellement à l'étude permettra éventuellement, comme vous le savez sans doute, aux membres de l'Ordre des comptables en management accrédités et de l'Ordre des comptables généraux licenciés du Québec d'exercer la comptabilité publique au même titre que les comptables agréés. Le législateur devra garder à l'esprit ces changements majeurs à la Loi sur les comptables agréés pour permettre en temps et lieu à l'Ordre des CMA et à l'Ordre des CGA d'échanger des renseignements et assurer ainsi la cohérence législative et une meilleure protection du public.

Au sujet de l'indemnisation des épargnants, qui est mon troisième propos, il est clair que plus on tend à mettre en place des programmes d'indemnisation, plus cela risque de déresponsabiliser à la fois les investisseurs et les différents intervenants impliqués dans la gestion, la promotion ainsi que la distribution des fonds communs de placement. Le Québec se distingue déjà des autres États avec son fonds d'indemnisation des services financiers. Cette couverture, bien qu'incomplète, nous en convenons, nous apparaît suffisante. Aller plus loin risquerait de nuire au marché québécois des fonds communs de placement, puisque l'amélioration de l'indemnisation aurait pour conséquence d'augmenter le montant des cotisations, qui seraient de toute façon refilées, il faut bien le comprendre, aux investisseurs.

n(18 h 40)n

À la lumière des informations dont nous avons pu prendre connaissance dans les différents mémoires et le document de consultation, les mécanismes actuellement en place nous semblent donc suffisants. De plus, nous faisons confiance à l'Autorité des marchés financiers relativement à son analyse en cours, les dispositions législatives ontariennes permettant la réclamation de dommages afin d'évaluer l'opportunité d'importer cette réforme sur les marchés secondaires québécois.

En ce qui a trait aux sanctions imposées, il est clair que les peines actuellement imposées par les tribunaux sont beaucoup trop clémentes pour avoir l'effet dissuasif recherché, et c'est pourquoi nous souscrivons entièrement à une augmentation des peines minimales. Actuellement ? et on vient de le dire dans la présentation précédente, nous le répétons ? les tribunaux traitent les crimes économiques comme des crimes secondaires, et nous croyons qu'il y va non seulement de la crédibilité de l'industrie, mais également de la crédibilité de notre système judiciaire. Comme on l'a vu dans le scandale Norbourg, les crimes économiques peuvent faire un tort énorme aux victimes, et ces dommages ne doivent pas rester impunis.

En ce qui a trait à l'introduction d'une nouvelle responsabilité des tiers, c'est-à-dire les professionnels, les avocats, les comptables et autres, nous mettons en garde la commission contre la tentation de recommander un resserrement législatif tel qu'il aurait pour effet de paralyser une industrie déjà fort réglementée. Il faut éviter de créer un environnement réglementaire trop hermétique, à notre avis, d'autant plus que le système professionnel québécois actuel protège déjà très bien le public.

Au sujet des autres questions soulevées par la commission, à savoir si l'AMF dispose des ressources suffisantes pour accomplir sa mission et si ses pouvoirs doivent être révisés, nous répondons que ce n'est pas nécessairement en mettant un policier à chaque coin de rue que nous allons totalement enrayer la criminalité. Voilà pourquoi nous préconisons l'établissement par l'État de règles minimales qui assureront un meilleur encadrement de l'industrie, des règles qui permettront de mieux prévenir les scandales qui ont eu pour effet d'ébranler la confiance des épargnants dans l'industrie des fonds communs de placement. Nous croyons qu'il faut mettre donc les ressources en amont plutôt qu'en aval, en d'autres mots, qu'il vaut mieux prévenir que guérir.

Pour ce qui est des connaissances, enfin, et de l'information des investisseurs, bien qu'elles aient grandement progressé au cours des dernières années, nous estimons qu'il y a encore place à l'amélioration. Aujourd'hui, les investisseurs disposent d'une multitude de sources d'information, mais encore faut-il qu'ils se donnent la peine de les consulter. Aussi, nous croyons fermement qu'il est de leur responsabilité de s'assurer de faire des choix éclairés quand vient le temps d'investir dans des fonds communs de placement et qu'ils devraient peut-être y consacrer plus sinon autant de temps que lors de l'achat d'une voiture, par exemple.

En conclusion, les récents scandales financiers ont su mettre en lumière certaines lacunes au niveau de la protection des épargnants. L'Ordre des CMA réitère son appui à la Commission des finances publiques quant à l'objectif qu'elle poursuit d'améliorer cet aspect. L'Ordre des CMA met toutefois en garde les élus face à la tentation de trop vouloir réglementer une industrie qui l'est déjà passablement.

Comme vous l'avez exposé dans votre document de consultation, le Québec compte plus de 400 courtiers-cabinets-conseillers regroupant plus de 28 000 représentants actifs inscrits et autorisés dans le domaine des valeurs mobilières, dont ? on l'a dit tout à l'heure encore ? 21 000 représentants spécialisés exclusivement dans le domaine de l'épargne collective. Il ne faudrait pas punir la très vaste majorité d'entre eux pour des crimes qui sont commis, rappelons-le, par une très faible minorité.

Comprenez-nous bien, nous ne sommes pas en train de vous dire de ne pas tenter de trouver des moyens pour mieux protéger les épargnants. Nous vous disons simplement qu'ils devront être conçus de façon à ne pas rompre l'équilibre nécessaire au développement de ce secteur important de notre économie. Alors, merci pour votre attention.

Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, est-ce qu'il y a des questions du côté... M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Moreau: À la première question que vous soulevez, vous ne répondez pas, cependant. En fait, j'ai suivi... Parce qu'on a reçu votre mémoire aujourd'hui, je dois vous dire. C'est plus difficile, dans un contexte comme celui-là, de préparer, là, l'analyse adéquate. Mais, à la première question que vous posez sur la gouvernance, vous dites: Bon, est-ce qu'on doit séparer les rôles de fiduciaire, principal distributeur? Est-ce que le cumul des fonctions de gestionnaire, promoteur, fiduciaire... Puis là vous dites: Oui, mais il faudrait se poser la question puis ne pas créer d'autres problèmes en faisant ça. Mais votre opinion, à vous, c'est quoi? Est-ce qu'il faut les séparer ou s'il n'y a pas de problème avec le cumul?

M. Renauld (François): Oui. Notre opinion au point de vue, je dirais, conceptuel, oui, la réponse serait oui, on devrait séparer. Cependant, ce que nous voyons, ce que nous entendons de la part de gens qui sont dans l'industrie, c'est que, oui, mais faites attention. Le problème, d'abord, un, dans les grandes entités, ne se pose pas. Dans les petites entités, on risque de mettre en péril ces petites entités là parce que ça risque d'être difficile à faire, à réaliser, etc., à moins justement de mettre, comme on dit, le cadenas dans la porte. Alors, nous, là-dessus, c'est pour ça qu'on dit que ça nécessite quand même, et on n'essaie pas de s'esquiver, mais on dit que ça nécessiterait certainement d'être examiné de plus près pour voir l'impact réel de ça.

M. Moreau: ...de la commission vous indiquait tantôt que nous avons fait une consultation en ligne qui n'a pas une prétention d'un sondage scientifique, mais particulièrement, à une des questions posées, on voit justement qu'il y a un glissement des petites entités, en fait des épargnants des petites entités vers les grandes entités, où ils se sentent plus protégés.

Alors, est-ce qu'on n'est pas en train, avec la mise en garde que vous faites, de toute façon, là, de créer un problème? Si on ne fait pas la séparation des fonctions, parce que, dites-vous, ça pourrait être problématique chez les petites entités, est-ce que de toute façon ils ne vont pas avoir un problème plus sérieux tantôt où, de façon naturelle, le marché va glisser vers les grandes entités? Et dans ce contexte-là, est-ce qu'il n'est pas mieux d'appliquer le remède immédiatement plutôt que d'attendre que le virus tue le cheval?

M. Renauld (François): Vous avez peut-être raison, mais c'est pour ça que, nous, on invite simplement à une certaine prudence. Pas parce qu'on veut défendre à tout prix les petites entités, mais on veut s'assurer qu'à moyen et plus long terme on n'amène pas l'industrie à être meublée de simplement quelques joueurs importants, quelques joueurs clés où, à ce moment-là, on éliminerait de facto la concurrence et puis où on générerait certainement des hausses de tarification pour les consommateurs.

Donc, c'est un peu cette perspective qui nous amène simplement à dire: Évaluons de façon bien précise. Maintenant, si vous avez un éclairage nouveau, peut-être que la commission sera encline à prendre justement une direction où on va un peu dans le sens d'imposer.

Mais, comme je vous le disais tout à l'heure, au début de mon propos, c'est clair, M. le député, que, nous, si on regarde les représentations qu'on vient de faire au gouvernement il y a quelques semaines à peine au niveau de la gouvernance, c'est clair dans notre esprit que, dans la mesure où on parle de saine gouvernance, oui, il faut tendre vers une séparation des rôles.

M. Moreau: Maintenant, sur l'échange d'information, vous nous rappelez la question de l'entente, en fait, de la Loi sur les comptables agréés qui a été modifiée, notamment l'article 22.1, vous allez dans ce sens-là. Vous avez entendu cependant cet après-midi, je pense que vous étiez présents lorsque l'Ordre des comptables agréés a été entendu par la commission, où on nous a dit: Pour rejoindre véritablement l'émetteur, il faut aller plus loin que l'entente prévue à l'article 22.1 et il faudrait amener une modification à la Loi sur les valeurs mobilières.

Est-ce que vous vous êtes penchés sur cette question-là et est-ce que vous avez une opinion à cet égard-là? C'est-à-dire préférez-vous essayer de travailler avec l'entente ou devrait-on, nous, comme législateurs, intervenir de façon plus importante, modifier la Loi sur les valeurs mobilières pour s'assurer d'avoir une portée beaucoup plus large et d'agir en amont avant que l'Autorité des marchés financiers constate finalement qu'il manque des dizaines de millions de dollars pour indemniser les épargnants floués?

M. Renauld (François): J'avoue bien simplement, M. le député, que je ne serais pas en mesure, parce que je ne me suis pas penché sur cette dimension-là. Je ne connais pas personnellement les ententes qui ont déjà été convenues, qui sont prévues dans les aménagements qui ont été faits au niveau de la loi. Alors, je ne serais pas habilité à intervenir, parce que vous savez tout simplement, et c'est à ça que je faisais référence tout à l'heure, en parlant de la loi, du projet de loi n° 64 qui a été présenté à l'Assemblée nationale dans les tout derniers jours de la session, mais ce projet de loi là a pour objectif d'amener les CMA et les CGA éventuellement à pouvoir poser les actes associés à la vérification. Donc, c'est un petit peu dans cette mesure-là que je dis: Il faudrait s'assurer le moment venu, quand la loi sera adoptée ou lors de son adoption, s'assurer qu'on dispose des mêmes facilités de transmission d'information, parce qu'autrement on serait lié par encore une fois notre devoir à la confidentialité.

n(18 h 50)n

M. Moreau: J'ai une dernière question. À la page 5 de votre mémoire, vous faites une affirmation. Je veux m'assurer et savoir si vous avez fait des vérifications en se sens-là, vous dites: À l'égard des sanctions imposées que dans le fond, pour punir les crimes financiers, on devrait favoriser des sentences plus sévères pour obtenir un effet dissuasif. Comment pouvez-vous documenter cette affirmation-là, c'est-à-dire j'essaie de trouver un lien de cause à effet entre le fait que des sanctions plus sévères aient un effet dissuasif? Est-ce que vous avez des éléments qui vous permettent de soutenir cette affirmation-là?

M. Renauld (François): Bien, en fait, c'est qu'on constate ce qui s'est passé, là, et nous avons participé, là, tout à l'heure à la présentation de tout ce qui nous a précédé, et M. Charest l'évoquait à ce moment-là, mais effectivement on fait la même observation. On regarde ce qui s'est passé aux États-Unis dans le cas des scandales financiers et on pense effectivement, nous aussi, que justement des sentences plus sévères, des sanctions plus sévères ont eu certainement des effets dissuasifs, là.

M. Moreau: Mais vous ne trouvez pas qu'on est un peu... Moi, je comprends et j'avais posé la question à M. Charest effectivement. Lui, il dit: Bon, voici, c'est mon opinion personnelle, c'est aussi votre opinion, mais vous ne trouvez pas qu'on a le nez un peu près de l'arbre, là, c'est-à-dire que, ce qui s'est passé aux États-Unis avec des peines d'emprisonnement sévères, c'est un peu court pour dire que ça a eu un effet dissuasif sur l'ensemble de l'industrie et que donc le fait ici d'avoir des sentences plus sévères aurait nécessairement un effet dissuasif?

M. Renauld (François): Bien, moi, ce que je constate, là, et on a vécu et toute analogie des fois porte à faux, là, mais on vit comme ordre professionnel, parce que dans notre domaine, on a, vous savez, des gens qui... des imposteurs, comme on peut les appeler, qui s'approprient un titre professionnel auquel ils n'ont pas droit. Alors, on poursuit régulièrement, nous, des gens qui usurpent le titre de CMA et on vit exactement la même chose. Il y a des sanctions qui sont prévues au Code des professions qui varient de 600 $ à 6 000 $. Or, on se rend compte que, quand on va devant les tribunaux, habituellement la tentation des tribunaux, c'est de se coller aux amendes les plus faibles et puis évidemment 600 $, tu sais, pour bien des gens qui s'approprient un titre professionnel qui a une réputation, etc., bien ce n'est pas cher payé si on se fait prendre ? si on se fait prendre. Alors, on a vécu la même chose.

Et ce qu'on réussit à faire avec nos procureurs maintenant, c'est de soit, lorsqu'on est capables, de multiplier certains chefs d'accusation, donc d'étoffer un petit peu plus un dossier puis d'arriver avec... Mais, on se rend compte, quand au total un jugement conduit à des amendes relativement plus importantes, on se rend compte qu'effectivement ça a un effet dissuasif. Et je pense que la même chose s'appliquerait là-dedans. On parle, dans bien des cas, d'entreprises qui sont assez fortunées et pour qui un montant d'amende, là, tout à fait insignifiant comme 5 000 $, 10 000 $ ou je ne sais pas quoi, ça n'a finalement par d'importance. Alors, il y a des gens qui vont faire le pari et puis qui vont s'aventurer. Ça ne viendra pas régler tous les problèmes, mais c'est dans ce sens-là qu'on dit: Si on augmente les amendes, bien, évidemment, ça va avoir un effet dissuasif. En tout cas, on en est fortement convaincus.

M. Fuoco (Dino): Moi, je peux vous dire que je fréquente assez régulièrement les milieux financiers américains. Il y a la question de l'imposition de la sanction comme telle, mais c'est surtout la diffusion de la nouvelle qui a un effet dissuasif. Si on regarde ce qui s'est passé au cours des trois, quatre dernières années, clairement, évidemment il va toujours y en avoir, là, il y a toujours des gens qui essaient de tromper le système, là, mais dans les faits, ça se parle, et je pense clairement que ça a un effet dissuasif.

M. Moreau: Merci.

M. Fuoco (Dino): Maintenant, j'aimerais, si vous me permettez, revenir sur votre première question, qui était la séparation des tâches. Juste un petit mot pour les petites boîtes, parce qu'on a vu que le gros des scandales est arrivé souvent dans des grosses boîtes, surtout du côté américain.

Moi, je pense, et on en a discuté, là, qu'il va y avoir un épurement naturel du marché, vous avez raison, les petites boîtes versus les grandes boîtes, mais je pense que les petites boîtes qui sont efficaces, qui vont se doter de mesures de contrôle efficaces et qui surtout sauront les diffuser et persuader leur clientèle du bien-fondé de leurs mesures de contrôle, je pense qu'elles, si on évalue le rendement qu'elles font et les mesures de contrôle qu'elles auront mises en place, je pense que ces petites boîtes là sont peut-être les boîtes moyennes et les grandes boîtes de demain.

M. Moreau: Mais pouvez-vous valider l'information que nous donne notre consultation en ligne non scientifique? Est-ce que vous, dans le milieu, vous constatez qu'effectivement, depuis les scandales récents, on sent un glissement des épargnants des petites vers les grosses boîtes?

M. Fuoco (Dino): Je pense qu'effectivement il y a une tendance. Parce que c'est plus rassurant, aller vers les grandes boîtes, il y a une séparation de tâches qui est naturelle. Mais, encore une fois, ce n'est pas nécessairement vrai que les scandales se feraient dans des petites boîtes, en fait, là, c'est plus une tendance d'aller vers les grandes boîtes.

M. Moreau: Ça a tendance à contredire l'affirmation que vous venez de faire à l'effet que c'est la communication ou la publicité qui en est faite qui a un effet dissuasif, parce qu'effectivement les scandales qui ont eu lieu aux États-Unis ont été faits dans des grandes boîtes, il y a eu une publicité abondante, et, curieusement, l'effet dans le marché, c'est que les gens glissent des petites vers les grosses boîtes.

M. Fuoco (Dino): Effectivement. Mais c'est parce qu'on parlait de tendances de marché.

M. Moreau: Oui.

M. Fuoco (Dino): Dans le marché, effectivement, il y a une tendance vers les plus grandes boîtes. Ce que je vous disais, je revenais juste sur votre première question...

M. Moreau: Oui, oui, oui, ça va.

M. Fuoco (Dino): ...et je disais qu'il n'y aura pas nécessairement une extinction des plus petites boîtes. Il va y avoir un épurement naturel du marché, parce qu'effectivement il y a une tendance de la clientèle à aller vers les plus grandes boîtes. Cependant, il y a un apanage de petites boîtes qui, elles, en étant capables de persuader leur clientèle... Parce que souvent c'est une question de relation de confiance, et tout ce que je dis, c'est qu'il va en demeurer, des petites boîtes, là, mais elles vont être efficaces.

M. Moreau: Bien, je vous remercie. Merci.

Le Président (M. Hamad): Alors, je pense, ça complète les questions. Avez-vous une question? Alors, le député de Charlevoix.

M. Bertrand: M. le Président, pour ma gouverne puis pour les gens qui nous écoutent, qui sont très nombreuses et nombreux, aujourd'hui on a trois ordres: l'Ordre des CGA, l'Ordre des comptables agréés et maintenant l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec. Alors, la première question que je vous pose, c'est: j'aimerais ça savoir c'est quoi, la différence, puis c'est quoi que vous faites comparé aux deux autres.

M. Renauld (François): Alors, si vous permettez, je pourrais vous dire peut-être de façon bien simple qu'il y a une distinction qui n'est pas toujours peut-être évidente pour le commun des mortels, mais, dans les organisations ? parce qu'il faut comprendre que nos clients sont surtout des organisations, des entreprises ? la distinction est plus évidente.

Nous, dans le cas des CMA, comme le suggère le mot «management», on est dans le domaine de la gestion. Donc, nous, on s'intéresse à la chose comptable ? évidemment, on est des comptables professionnels ? mais on s'intéresse à la chose comptable plus dans une perspective de rendre la comptabilité, les informations financières utiles pour des fins de prise de décision à l'intérieur des organisations, contribuer à créer de la valeur ajoutée dans les organisations, etc.

Nos collègues CA, à l'autre extrême, sont évidemment, par définition par la loi jusqu'à maintenant... ils sont formés d'abord et avant tout pour être des vérificateurs, ils sont d'ailleurs entraînés dans des cabinets de vérificateurs, et donc essentiellement c'est ça.

Ce qui vient évidemment mélanger les choses dans le marché, c'est parce qu'après avoir fini leur stage dans un cabinet, souvent il y en a qui trouvent que la vérification, c'est bien plate puis qui veulent en sortir, alors ils s'en viennent dans l'industrie puis ils occupent des emplois peut-être semblables aux CMA, etc.

Dans le cas des CGA, je pense que c'est un petit peu comme un mixte des deux. Il y a un certain nombre de CGA, une proportion importante de CGA qui opèrent dans le domaine de la pratique publique, de la comptabilité publique et un autre nombre de CGA aussi, un pourcentage qui opèrent dans l'entreprise. Alors, il y a un mixte un peu des trois, puis ce n'est pas rare, dans des plus grandes organisations, ce n'est pas rare de constater la présence justement des trois sortes de comptables, si on peut dire, dans l'organisation.

M. Bertrand: Est-ce que vous avez le droit d'être membre de deux des trois ou trois des trois?

M. Renauld (François): On a même le privilège d'être membre des trois...

M. Bertrand: Oui?

M. Renauld (François): ...et il y en a quelques-uns. Il y a des collectionneurs de titres professionnels. Voilà.

M. Bertrand: Est-ce qu'à votre connaissance vous avez des membres qui ont été ou qui sont vérificateurs dans ce qu'on appelle des produits manufacturiers, là, mais chez des producteurs de fonds? En connaissez-vous? En avez-vous de proches ou...

M. Renauld (François): Non. Bien, vous savez que nous, comme je le mentionnais rapidement tout à l'heure, on a des limitations qui nous sont imposées par la loi actuelle. C'est en voie de changement, mais, pour le moment, évidemment, les seuls domaines de vérification où on peut exercer, les CMA autant que les CGA, c'est les exceptions qui sont dans la loi des CA présentement, donc les municipalités, coopératives, commissions scolaires. Donc, on n'est pas vraiment impliqués, là, dans différents organismes comme ça.

M. Bertrand: M. le président, j'aurais une dernière question qui m'apparaît être très importante. Dans votre mémoire, à la dernière page, vous dites: «Nous croyons qu'il faut mettre les ressources en amont plutôt qu'en aval. En d'autres mots qu'il vaut mieux prévenir que guérir.»

M. Renauld (François): Oui.

n(19 heures)n

M. Bertrand: Mais j'aimerais ça que vous insistiez davantage sur votre affirmation. Allez un peu plus loin dans ce que vous prétendez ou que vous pensez. Est-ce que, exemple, vous reculez aussi loin qu'il devrait y avoir de la formation plus intense de donnée à ceux qui vendent le produit? Est-ce qu'il y aurait de la formation plus intense... évidemment, de l'information aussi, de donnée aux investisseurs? Parce que, aujourd'hui, il y en a qui ont dit: Il y a plus de moyens qu'il y en avait autrefois pour les gens de s'informer, mais encore faut-il s'informer. Et vous le dites justement à quelque part, quand vous dites: Il faut que l'investisseur prenne ses responsabilités.

M. Renauld (François): Bien oui.

M. Bertrand: Si j'ai bien compris. J'aimerais vous entendre davantage là-dessus.

M. Renauld (François): M. le député, je pense que vous avez bien compris. Et puis effectivement notre approche est plus dans une perspective de dire: Il faut éviter de surréglementer. Déjà, je pense qu'on est bien servi là-dessus, et ce n'est pas simplement par la réglementation additionnelle qu'on va venir à discipliner des gens qui sont malhonnêtes, là. Alors, oui, tout ce qui peut être fait pour créer un cadre propice puis faire en sorte qu'on... par exemple, des mesures au niveau de l'éducation, des mesures au niveau de la gouvernance, s'assurer de mettre en place des règles du jeu qui vont rendre la vie plus difficile à des fraudeurs potentiels, etc. Toutes ces mesures-là, des mesures d'éducation, oui, nous sommes haut la main pour ça, mais encore une fois, on veut éviter d'alourdir tout le système et finalement de nuire à la compétitivité de cette industrie-là parce que c'est ça qu'il faut faire attention. On est dans les marchés ouverts, et c'est bien beau de dire: On va ajouter de la réglementation, etc., mais encore une fois ce n'est pas le mur-à-mur là-dedans qui s'impose parce qu'on risque de tuer l'industrie elle-même, là.

Alors, c'est clairement, nous, une option en faveur des mesures qui sont beaucoup plus de nature préventive que curative.

M. Bertrand: Merci.

Le Président (M. Hamad): Alors, merci beaucoup. Merci de présenter de votre mémoire et d'être ici.

M. Renaud (François): Merci.

Le Président (M. Hamad): Merci. J'ajourne les travaux à demain, 9 h 30.

(Fin de la séance à 19 h 2)


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