(Quinze heures quarante minutes)
Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Avant de commencer, je demanderais à tous ceux et celles qui ont un téléphone cellulaire de bien vouloir en éteindre la sonnerie afin de ne pas perturber nos travaux. La Commission des finances publiques est réunie cet après-midi, afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gautrin (Verdun) est remplacé par Mme Hamel (La Peltrie) et je rappelle que M. Legault (Rousseau) est remplacé par M. Simard (Richelieu) pour la durée du mandat.
Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le secrétaire. Je vais d'abord lire l'ordre du jour pour cette séance de cet après-midi, du mardi... du mercredi, pardon, 3 novembre 2004. Nous recevons d'abord l'Association des hôpitaux du Québec et par la suite nous recevrons la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Document déposé
Juste avant de procéder à la présentation de nos premiers invités, suite à la proposition hier qui avait été faite ? il y avait une référence à un document du Fonds monétaire international ? alors donc j'accepte le dépôt de ce document au bénéfice de tous les membres de la commission, qui s'intitule Public-Private Partnerships.
Auditions (suite)
Alors donc, maintenant, il me fait plaisir, au nom des membres de la Commission des finances publiques, de souhaiter la bienvenue à M. Jean-Paul Cadieux, président de l'Association des hôpitaux du Québec, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Je vous inviterais d'ailleurs, s'il vous plaît, à nous présenter ces personnes, et vous pourrez par la suite, évidemment, faire votre présentation.
Association des hôpitaux du Québec (AHQ)
M. Cadieux (Jean-Paul): Merci. Alors, M. le Président de la commission, Mme la présidente du Conseil du trésor, mesdames messieurs du gouvernement et de l'opposition, mesdames messieurs, l'Association des hôpitaux du Québec apprécie l'opportunité de partager avec vous quelques réflexions sur le projet de loi n° 61 sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Effectivement, mon nom est Jean-Paul Cadieux. Je suis président du conseil d'administration de l'Association des hôpitaux du Québec. Je suis accompagné, à ma droite, de M. Daniel Adam, vice-président exécutif de l'association, et, à sa droite, de Me Sylvain Poirier, notre conseiller juridique à l'association, et, à ma gauche, M. René Rouleau, qui est le directeur général du Centre hospitalier universitaire de Québec. D'entrée de jeu, je tiens à souligner que l'Association des hôpitaux du Québec partage l'intérêt que Mme la présidente du Conseil du trésor et ministre responsable de l'Administration gouvernementale à l'effet de recourir davantage aux partenariats public-privé dans la réalisation de projets d'infrastructures ou de services. En effet, dans le contexte particulier de sous-financement du réseau de la santé, il apparaît souhaitable que les établissements puissent non seulement compter sur l'appui de leur communauté interne et externe ainsi que sur les gouvernements du Québec et du Canada, mais aussi sur l'entreprise privée, afin d'améliorer l'efficience et la qualité des services aux usagers, mais non à n'importe quelle condition.
Malgré ses préjugés favorables pour les partenariats public-privé, l'AHQ émet toutefois de sérieuses réserves sur le champ d'application du projet de loi n° 61 et le processus d'autorisation placé sous l'autorité de l'Agence des partenariats public-privé du Québec. D'entrée de jeu, nous disons que nous croyons que ce projet de loi devrait être retiré dans sa forme actuelle, pour permettre de considérer un certain nombre de recommandations que nous allons faire valoir pour faire en sorte que l'agence agisse beaucoup plus en complémentarité avec les établissements plutôt qu'à titre d'organisme de substitution, voire de contrôle. Et nous allons démontrer les problèmes significatifs que certains articles du projet de loi pourraient entraîner si appliqués dans leur libellé actuel.
De toute évidence, les rédacteurs du projet de loi ont choisi de créer une nouvelle société d'État identifiée sous le nom de Partenariats Québec afin de promouvoir les partenariats public-privé. Ce choix nous apparaît étonnant, considérant qu'il s'écarte des priorités d'actions prévues au plan d'action du Parti libéral de Québec de septembre 2002 qui proposaient plutôt de réduire le nombre de ministères, organismes et sociétés d'État du gouvernement. Le projet de loi exige que tout organisme public doive recourir aux services de l'agence pour l'évaluation de ses projets d'investissement public, le choix de ses partenaires ainsi que pour la négociation et la conclusion de ses contrats de partenariats public-privé. Or, le texte législatif proposé est particulièrement obscur sur l'étendue réelle des pouvoirs de l'agence. Celle-ci disposera-t-elle de la faculté de déterminer quand, et avec qui, et comment les organismes assujettis pourront conclure des contrats pouvant porter tout autant sur la construction d'immeubles que sur la fourniture de services alimentaires? À notre avis, l'obligation des organismes assujettis d'obtenir l'avis préalable de l'agence ne consiste ni plus ni moins qu'à confier à celle-ci un rôle de contrôle et de régulation par opposition à un rôle d'accompagnement des organismes publics désireux de recourir à l'expertise de l'agence.
Dans le cas des établissements de santé et de services sociaux, ce pouvoir de contrôle préalable confié à l'agence viendrait s'ajouter, sans souci apparent d'harmonisation, aux pouvoirs de contrôle et d'autorisation déjà dévolus aux agences de développement de réseaux locaux de services et de santé et de services sociaux, au ministre de la Santé et des Services sociaux ainsi qu'au Conseil du trésor en vertu de la Loi sur les services de santé et des services sociaux. En outre, dans le cas de projets d'infrastructures initiés par les établissements du réseau de la santé, le rôle de l'agence viendrait s'ajouter à celui déjà reconnu par la Loi à la Corporation d'hébergement du Québec. En effet, la loi sur ladite corporation confie à cet organisme une mission d'assistance des intervenants du secteur de la santé quant à la gestion, à la construction, à l'entretien et à l'acquisition d'infrastructures sociosanitaires. Plus particulièrement, l'article 4 de cette loi confère expressément à la corporation le pouvoir de valoriser l'expertise immobilière du secteur sociosanitaire dans un cadre de partenariat avec le secteur privé.
Rappelons aussi que le Vérificateur général nommé par l'Assemblée nationale détient un mandat de vérification des fonds publics et de vérification de la conformité des opérations aux lois, aux règlements, aux énoncés de politiques et aux directives. Les ententes de partenariats public-privé pourraient donc faire l'objet de balises dans le cadre d'un règlement ou d'une politique sujets aux vérifications du Vérificateur général. Ainsi, l'Association des hôpitaux déplore que le projet de loi n° 61 crée une nouvelle institution gouvernementale qui d'après nous ne fera que rendre encore plus lourde et complexe la conclusion de relations de partenariats durables entre les organismes publics et les entreprises privées. Par ailleurs, le projet de loi n° 61 ne contribuera pas à alléger le fardeau normatif des établissements qui doivent pourtant se consacrer au premier chef à l'accomplissement de leur mission. À cet effet, rappelons que les contrats d'approvisionnement en biens ou en services et des contrats d'immobilisations des établissements sont déjà sujets au régime juridique régissant les contrats administratifs et sont déjà aussi soumis à un processus d'appel d'offres et d'autorisation très strict qui, pour le tout, limite significativement la liberté contractuelle des établissements. À cela s'ajoute un régime de nullité des contrats administratifs qui exige que les établissements aient scrupuleusement respecter toutes les formalités associées à l'attribution d'un contrat à un tiers.
L'AHQ regrette donc que le projet de loi n° 61 vienne ajouter aux nombreuses exigences déjà imposées aux établissements de santé et de services sociaux. À force de multiplier les niveaux d'intervention, les avis préalables et les autorisations requises, le risque nous apparaît grand que les partenaires privés se désengagent purement et simplement de coentreprises avec le secteur public. Pour ces raisons, l'Association des hôpitaux recommande que l'étendue des pouvoirs de l'agence soient clairement précisés dans la loi et que ceux-ci soient limités à un rôle consultatif exercé à l'initiative des établissements de santé et de services sociaux. Nous recommandons aussi que le vérificateur externe de l'établissement ait la responsabilité d'exprimer une opinion sur le respect, par ledit établissement, de la loi et des règlements au regard du partenariat public-privé. Le projet de loi soulève aussi, dans sa version originale, une grave confusion quant aux contrats qui seraient soumis à son processus.
Outre l'imprécision de la notion de contrat à long terme sur laquelle nous reviendrons plus loin, le texte réfère à celle d'ouvrage public puis à celle de prestation d'un service public, puis à celle d'infrastructure, puis encore à celle d'équipement. Nous sommes légitimés de nous demander quels contrats sont visés exactement. Si on peut interpréter la notion d'ouvrage public comme se référant à des projets d'immobilisations, quelle est l'envergure des contrats qui vont être soumis à l'examen de l'agence? Il faut préciser que, chaque année, les établissements de santé et de services sociaux entreprennent des travaux d'immobilisations de divers types qui peuvent associer des entreprises privées dans leur financement. Lorsque ces travaux sont d'un coût relativement modeste, l'agence sera-t-elle aussi appelée à intervenir? La notion de service public n'est pas nécessairement plus claire. Faut-il comprendre que le projet d'associer une entreprise privée à la gestion de cafétérias ou à d'autres services offerts au public qui fréquente les établissements de santé et de services sociaux devra aussi être soumis à l'évaluation de l'agence? De la même manière, des contrats visant des infrastructures ou des équipements sont négociés chaque jour ? et, je précise: chaque jour ? dans bon nombre d'établissements de santé et de services sociaux.
Le projet de loi n° 61 semble assujettir tous ces contrats au contrôle de l'agence dans tous les cas, même lorsque l'entreprise privée ne participe pas au financement de ces contrats, mais dès que cette entreprise participe à la conception, à la réalisation ou à l'exploitation des activités visées par le projet. Pour toutes ces raisons, l'association recommande que les objets visés par le projet de loi n° 61 soient non seulement mieux définis, mais ne soient encore là une intervention étatique d'alourdissement dans un système qui l'est déjà beaucoup.
n(15 h 50)n L'application du projet de loi n° 61 pourrait également avoir un impact négatif sur le financement de la recherche dans les établissements de santé et de services sociaux. Ainsi, faut-il penser que le financement de contrepartie en provenance du secteur privé, par exemple les fondations ou encore autres organismes, pour l'acquisition d'équipements ou l'aménagement de laboratoires de recherche dans le cadre de programmes de subventions publiques, est-ce que ça va être soumis aussi à l'examen de l'agence? Déjà complexes, les montages des financements mixtes dans leur secteur de la recherche risquent de devenir proprement ingérables si l'agence doit se prononcer sur le choix des partenaires, sur la négociation des ententes et sur la conclusion des contrats de financement de la recherche. Par ailleurs, d'aucuns pourraient croire que le projet de loi n° 61 aura un impact négatif sur la valorisation de la recherche. Rappelons que la valorisation de la recherche, que nous définissons comme l'ensemble des activités ayant pour but d'augmenter la valeur commerciale des résultats de la recherche notamment dans le secteur de la santé, interpelle tant les organismes publics, tels les établissements de santé et de services sociaux, les chercheurs, les universités que l'entreprise privée. Il ne faut pas oublier qu'en semblables matières la propriété des résultats de la recherche et leur confidentialité doivent être protégées.
Dans la mesure où de tels projets sont considérés comme des partenariats public-privé sujets à l'intervention de l'agence, il est à prévoir que les investisseurs privés seront peut-être moins enclins à participer à la valorisation de produits de la recherche sans que des mesures de protection de la confidentialité soient adoptées. De même, les investisseurs souhaiteront établir, avec l'établissement de santé concerné, des voies de communication simplifiées auprès d'interlocuteurs détenant des pouvoirs décisionnels en mesure d'être exercés dans les meilleurs délais. Le projet de loi n° 61 soumet également les projets d'équipements au contrôle de l'agence. À ce chapitre, l'Association des hôpitaux est d'avis qu'il apparaît déraisonnable d'assujettir de tels projets au pouvoir de surveillance de l'agence, considérant que, tel que nous l'avons déjà fait valoir, l'acquisition de biens ou d'équipements par un établissement auprès du secteur privé fait partie de sa gestion courante. Ainsi, à titre d'exemple, dans le secteur de la réadaptation en déficience physique, les établissements mettent fréquemment en place des collaborations avec des fournisseurs privés pour la prestation de services cliniques directs. Pensons aux ententes avec des sous-traitants pour la réparation de fauteuils roulants ou encore aux nombreuses interactions avec des entreprises privées de services professionnels, à titre d'exemple les audioprothèses, les pharmacies, optométrie, etc. Il est difficile d'imaginer l'implication de l'agence dans l'autorisation et la surveillance de chacune de ces collaborations, lesquelles sont établies par les établissements de réadaptation dans le respect obligé de normes et de règlements déjà prévus en la matière.
Pour toutes ces raisons, l'Association des hôpitaux de même que l'Association des établissements de réadaptation en déficience physique du Québec estiment que le projet de loi n° 61 ne devrait pas empiéter sur le régime applicable au réseau de la santé en matière d'approvisionnement en biens et en services tel qu'établi par la réglementation pertinente. Selon nous, les contrats de partenariats public-privé devant être soumis à une éventuelle agence devraient se limiter à la conception, à la réalisation et à l'exploitation de projets d'infrastructures d'un ouvrage public ou encore d'un projet de prestation de services publics, excluant les équipements et tout projet concernant les services non publics.
Le projet de loi n° 61 prévoit que tout organisme public doit recourir aux services de l'agence notamment pour la négociation et la conclusion de ses contrats de partenariats public-privé ainsi que pour le choix de ses partenaires. Il est pourtant bien connu que les établissements de soins de santé constituent des personnes morales distinctes de l'État dont l'autonomie juridique qui leur est conférée devrait entraîner une certaine réserve de la part des autorités de l'État. La version actuelle du projet de loi n° 61 ne permet pas de bien cerner jusqu'où l'agence pourrait intervenir dans les négociations et dans l'exécution de contrats de partenariats public-privé non plus que dans le choix des partenaires de l'organisme public. Dans d'autres juridictions, le rôle de telles agences se limite souvent à conseiller l'organisme public sur la négociation d'une entente avec le secteur privé. À nos yeux, les gestionnaires d'établissement sont les mieux placés pour juger des intérêts de leurs institutions et sont compétents pour négocier et structurer un partenariat public-privé en corporation avec l'agence mais sans être sujet à sa tutelle.
Or, le modèle établi par le projet de loi n° 61 semble prévoir un contrôle excessif par l'agence sur la négociation de la structure du partenariat, même pour les organismes publics jouissant d'une autonomie juridique face à l'État québécois, tels les municipalités, les établissements de santé, les universités, les collèges et les commissions scolaires. En somme, le projet de loi n° 61 semble privilégier une approche extrêmement interventionniste où l'agence pourra vraisemblablement se substituer à la capacité décisionnelle d'un établissement, allant même jusqu'à exprimer un choix quant aux partenaires que ce dernier devrait retenir, même dans les cas où le financement requis provient du secteur privé.
Les établissements de santé ne bénéficient même pas de l'exclusion partielle prévue au 2e alinéa de l'article 8, en faveur des cégeps, commissions scolaires, universités ou municipalités, dans le cas d'investissements financiers entièrement par le secteur privé, avec le résultat que même un achat d'équipements financé à 100 % par un partenaire privé sera assujetti au contrôle de l'agence. C'est pourquoi l'Association des hôpitaux recommande que les établissements du réseau de la santé et des services sociaux soient sujets à la même exclusion partielle prévue au 2e alinéa de l'article 8 du projet de loi n° 61.
Nous poursuivons nos commentaires sur certaines dispositions particulières du projet de loi qui selon nous devraient faire l'objet de modifications, advenant le maintien comme tel du projet de loi n° 61. Ainsi, l'article 9 du projet de loi précise qu'un organisme public doit, sur demande de l'agence, lui fournir tout renseignement relatif à des projets d'infrastructures, d'équipements et de prestation de services publics. Cette mesure accroît l'impression que le projet de loi n° 61 entend confier à l'agence un véritable rôle de surveillance des activités économiques des établissements qui sont pourtant des personnes morales autonomes. De plus, cette disposition s'applique non seulement aux projets de partenariats public-privé, mais à toute forme de projet qui pourrait concerner les infrastructures, les équipements ou les services rendus par un établissement. Or, nous croyons que cet article 9 devrait aussi être retiré du projet de loi.
Quant à l'article 20, il dispose que les affaires de l'agence seront administrées par un conseil d'administration composé d'au plus neuf membres nommés par le gouvernement. Considérant que le réseau de la santé et des services sociaux occupe le premier rang au chapitre des dépenses du gouvernement du Québec et qu'il constitue l'une des priorités de l'action gouvernementale, nous recommandons que deux sièges à ce conseil devraient être réservés à des représentants du réseau sociosanitaire du Québec. Par ailleurs, l'AHQ est d'avis qu'au même titre que les membres d'un comité d'experts-conseils constitué en vertu du chapitre 4 du projet de loi chacun des membres du conseil de l'agence et de son personnel devrait être tenu à des règles de confidentialité, d'éthique et de déontologie fixées par un règlement de l'agence soumis à l'approbation du gouvernement.
L'article 52 maintenant du projet de loi indique que l'agence doit, chaque année, produire au président du Conseil du trésor ses états financiers ainsi qu'un rapport de ses activités pour l'exercice précédent. Or, pour les motifs exprimés plus haut et ayant trait à la confidentialité des échanges ou projets devant le mener à la conclusion, entre un organisme public et une entreprise privée, d'un contrat de partenariat public-privé, l'Association des hôpitaux recommande que ce rapport d'activité soit soustrait de l'application de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et que la confidentialité de son contenu soit assurée par la loi.
Voici, M. le Président. Ceci complète les commentaires, les recommandations que nous souhaitions partager avec les membres de la commission. Par ce mémoire, nous avons voulu faire la démonstration que le projet de loi n° 61 constitue un frein au développement de partenariats public-privé et qu'il est plutôt une nouvelle institution gouvernementale qui rendra plus lourde et plus complexe la conclusion de partenariats durables entre les organismes publics et les entreprises privées. Les établissements du réseau de la santé et des services sociaux sont en accord avec une ouverture accrue aux partenariats public-privé et auraient même vu d'un bon oeil l'arrivée d'une agence disposant d'une expertise reconnue assumant un rôle d'accompagnement dans l'accomplissement de contrats ou d'ententes de partenariats. Ils auraient été aussi tout ouverts à l'énoncé de balise sur les ententes de partenariats sujettes à une reddition de comptes à partir des mécanismes et du cadre juridique déjà existants.
Toutefois, devant l'étendue des pouvoirs consentis à l'agence dans le projet de loi et l'imprécision des objets sur lesquels s'exercent ces pouvoirs, l'AHQ ne peut que de recommander le retrait de ce projet de loi ? et encore une fois nous disons ? dans sa forme actuelle.
Nous avons voulu cependant apporter une contribution positive à la réflexion et nous avons ainsi énoncé un certain nombre de recommandations susceptibles de bonifier le projet de loi dans le respect de l'autonomie et des responsabilités assumées par les établissements de santé et de services sociaux. Nous vous remercions de votre attention et nous serons prêts à répondre aux questions.
Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie, M. Cadieux. J'invite maintenant Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor à débuter l'échange.
n(16 heures)nMme Jérôme-Forget: M. le Président. Alors, M. Cadieux, bienvenue à toute votre équipe, à l'Association des hôpitaux du Québec, de prendre la peine de venir nous rencontrer, de préparer un mémoire exhaustif et de soulever bien sûr des réserves que vous avez à l'endroit du projet de loi n° 61.
Maintenant, je vais peut-être pouvoir vous rassurer, M. Cadieux, parce que, dans le projet de loi, je pense que la mission et les pouvoirs de l'agence sont clairement décrits à l'article 5. Et ce pourquoi je les énumère, M. Cadieux, c'est précisément parce que c'est l'intention du législateur, cette agence sera une agence-conseil. Il faut que ce soit très clair. Et cette agence ne pourra pas se substituer au gouvernement, que ce soit le ministère de la Santé, ministère des Transports, quelque ministère que ce soit. Mais permettez-moi quand même, parce que je pense qu'on n'est pas si loin que ça en termes de perception de ce que devrait être l'agence. Ce pourquoi je le soulève encore, c'est parce que vous parlez de BC Partnerships, qui est différent de notre agence parce que BC Partnerships, c'est vraiment une entreprise privée qui a été formée à l'extérieur du gouvernement. Nous, nous voulons développer une expertise à l'intérieur du gouvernement, puisque les partenariats public-privé seront un outil, nous estimons, qui va être de plus en plus utilisé, d'accord?
Mais permettez-moi de vous réitérer la mission de cette agence: conseille le gouvernement sur toute question relative aux partenaires public-privé, notamment en ce qui concerne la sélection et la priorité de réalisation de projets ? conseille; deuxième, met à la portée des personnes intéressées un centre de connaissances et d'expertise sur toute question afférente au partenariat public-privé ? deuxième volet; troisième volet, informe les organismes publics, le milieu des affaires et le public en général sur le concept de gestion publique en mode de partenariat public-privé; quatrième volet, élabore et met en oeuvre des stratégies de promotion en vue de favoriser les partenariats public-privé; cinquièmement, suscite, accueille, évalue et propose des projets de partenariats susceptibles de favoriser la réalisation de projets d'infrastructures, d'équipements et de prestation de services publics; finalement, fournit aux organismes publics tout service d'expertise relatif à l'évaluation de la faisabilité. Or, vous comprendrez qu'en aucun temps cette agence va se substituer au gouvernement pour prendre des décisions: s'il s'agit, s'il est souhaitable d'aller en partenariat public-privé.
Dans la politique-cadre, puisque je pense qu'on se rejoint, à bien des égards, dans la politique-cadre, les critères de sélection des projets de PPP, les projets majeurs d'infrastructures et de prestation de services qui sont retenus pour faire l'objet d'une évaluation ? l'objet d'une évaluation ? en mode PPP présentent généralement les caractéristiques suivantes: une amélioration de la prestation des services publics; des engagements financiers importants de la part de l'État; une complexité technique et un degré de risque élevé, un potentiel de créativité et d'innovation susceptible de mettre à profit le savoir-faire de l'entreprise privée; et un marché concurrentiel existant. Et ça suit: En fonction de ces critères, l'Agence des partenariats public-privé du Québec conseille le gouvernement sur la sélection et la priorité de réalisation des projets de PPP. Alors, vous comprendrez que l'image ou l'apparence qui est donnée ? et je reconnais que ça a été soulevé par plusieurs ? donc ça soulève bien sûr des questions de votre part. Mais je vous dirais qu'à bien des égards l'article 5 et la politique-cadre des partenariats public-privé expliquent quand même les limites de cette agence.
Et ce pourquoi nous voulons limiter cette agence à une agence-conseil, c'est précisément parce que nous voulons développer une expertise à l'intérieur du gouvernement mais que par ailleurs nous estimons que c'est le gouvernement qui est responsable, n'est-ce pas, d'infrastructures majeures, et ce seront les ministres responsables de chacun des secteurs qui auront la décision à prendre si on y va en partenariat public-privé. Autrement dit, parce que, là aussi, il y a un danger, il y a plusieurs organismes qui vont souhaiter faire appel à l'agence pour mousser des projets en PPP qui n'auront pas reçu l'approbation du ministère. Ça aussi, il y a un danger à cet égard. Je peux vous dire que ça existe déjà, des gens qui souhaitent passer à côté justement d'un ministère et faire appel à l'agence pour promouvoir l'idée de faire un partenariat public-privé. Il faudra qu'en tout temps, pour que ce soit un partenariat public-privé, que le ministère, que le gouvernement ait donné d'abord son approbation à un projet.
Maintenant, comme je pense que je ne peux pas vous blâmer parce que vous n'êtes pas le seul à avoir lu l'étendue de cette agence, je pensais, moi, que la mission, elle était clairement définie dans le projet de loi. Je l'avais réitérée dans la politique-cadre, pour que ce soit bien clair que c'étaient des projets d'infrastructures majeurs. Parce que, si vous regardez ce qui s'est fait ailleurs dans des partenariats public-privé, ce sont essentiellement des constructions d'hôpitaux, hein, de gros hôpitaux, notamment en Angleterre. Ils en construisent 100, hôpitaux. Ils en ont terminé une trentaine en partenariat public-privé, mais ce sont des projets de plusieurs centaines de millions. Et je vous dirai qu'en Angleterre il y a un hôpital dans le moment qui est en train d'être restauré au coût de 1 milliard de livres, donc plus de 2 milliards de dollars, 2,5 milliards de dollars, pour nous. Alors donc, nous nous inspirons essentiellement de la façon dont on le fait là-bas. Et l'agence, je l'ai répété, doit demeurer petite, une expertise pointue, petite, pour donner des conseils. Et ce pourquoi je garde cette agence petite, c'est précisément pour ne pas que cette agence souhaite se substituer au ministère qui, eux, à l'occasion vont vouloir justement se délester de leurs responsabilités et les mettre sur le dos de l'agence. Nous, nous estimons que ce sera le ministre de la Santé qui devra s'assurer que tout est conforme. Nous, à l'agence, on aura la mission par ailleurs de conseiller le ministre de la Santé.
Maintenant, j'aimerais vous poser une question parce qu'au niveau dans le fond du conseil d'administration vous évoquez, à un moment donné, le côté confidentiel des réunions du conseil d'administration ou des volets inclus, là, dans un partenariat public-privé, vous savez... à l'encontre de la Commission d'accès à l'information à cet égard. Peut-être que vous voulez clarifier la position que vous défendez, puisque les revendications qu'on me fait, c'est au contraire au niveau de la transparence et c'est de mettre des balises très claires à cet égard.
Le Président (M. Bertrand): M. Cadieux.
M. Cadieux (Jean-Paul): Si vous permettez, je demanderai à Me Sylvain Poirier de répondre spécifiquement à votre question, mais permettez-vous auparavant, Mme la présidente, de commenter un peu vos commentaires sur notre position?
Le Président (M. Bertrand): ...possible, M. Cadieux, parce qu'on est très limité dans le temps, mais allez-y.
M. Cadieux (Jean-Paul): D'accord. Vous savez très bien que les partenariats public-privé, dans le réseau de la santé et des services sociaux, ce n'est rien de nouveau, d'accord? On l'a dit, hein, il y a beaucoup d'ententes qui sont déjà existantes présentement. Bon. Et ça fonctionne, d'accord, puis tout est établi à l'intérieur des règles, des balises déjà existantes en vertu de tout ce qui peut exister, notamment la loi qui nous régit.
Or, ce qui nous inquiète, nous, c'est qu'on ne soit pas freinés davantage dans nos intentions de développer ces partenariats. Au contraire, qu'on puisse les promouvoir lorsque c'est bien fondé. Vous avez fait référence à l'article 5 et vous avez raison, d'accord? Ce qui nous a accrochés, nous, c'est beaucoup plus le texte de l'article 8 lorsque, et je cite, on parle des pouvoirs de l'agence et on dit: «Un organisme public doit recourir aux services de l'Agence pour l'évaluation de la faisabilité en mode de partenariat public-privé de ses projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestation de services publics, pour le choix de ses partenaires, ainsi que pour la négociation et la conclusion de ses contrats de partenariats public-privé ? bon ? sauf dans les cas et aux conditions que détermine le gouvernement.» Ça, ça nous a accrochés, et c'est là qu'on a vu cette possibilité de limitation, voire de contrôle qui pourrait être un frein plus qu'un encouragement. Alors, voilà pour mon commentaire. Et, ceci étant dit, maintenant je demanderais à Me Sylvain Poirier de répondre à la question de madame.
Le Président (M. Bertrand): M. Poirier, vous pouvez faire ça en une minute et demie, maximum?
n(16 h 10)nM. Poirier (Sylvain): Ça va être difficile, mais je vais essayer. Je voulais simplement souligner que toute la question de la confidentialité est un peu superposable au rôle que le législateur veut confier à l'agence. Parce que, vous savez, moi, j'ai le privilège d'assister des établissements hospitaliers universitaires qui ont eu à finaliser des 3P au Québec. L'entreprise privée, ces gens-là sont assez jaloux de leurs produits et de leurs services, sont en compétition, sont en concurrence et souhaitent, lorsqu'ils veulent conclure des partenariats public-privé, souhaitent faire en sorte que ce soit efficace, que ce soit fait selon des balises confidentielles pour des raisons tout à fait légitimes: ce sont des gens qui sont en affaires, ce sont des gens qui ont des entreprises.
Alors, à partir du moment où ces gens-là sont tenus, en vertu du projet de loi, à se soumettre non seulement à des paliers d'autorisation déjà connus, mais également à un autre palier, que constitue l'agence, et que leurs projets d'affaires vont faire l'objet d'une certaine forme de publicité, alors il faut comprendre que, pour arriver à les favoriser, les partenariats, il faut qu'il y ait un minimum de confidentialité qui soit apportée aux projets qui sont en cause. Alors, c'est la raison pour laquelle ça nous apparaissait tout à fait légitime, avec respect pour l'opinion de la Commission d'accès à l'information.
Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le député de Richelieu, porte-parole de l'opposition.
M. Simard: Merci, M. le Président. D'abord, souhaiter la bienvenue aux membres du conseil d'administration de l'Association des hôpitaux du Québec. Ce sont des partenaires avec lesquels nous, de l'Assemblée nationale, sommes régulièrement appelés à collaborer. Évidemment, vous allez évoluer dans votre régime associatif, à mesure que la loi qui vous régit, elle, a évolué au cours de la dernière année.
Je voudrais vous demander, M. le Président, je voudrais demander à cette commission l'accord pour que la députée d'Hochelaga-Maisonneuve puisse interroger nos invités. Elle est la critique en matière de santé et de services sociaux, et je pense que c'est très important.
Le Président (M. Bertrand): Est-ce que j'ai le consentement pour que Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve...
Une voix: Consentement.
Le Président (M. Bertrand): Consentement. Adopté. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Simard: Non, je vais d'abord...
Le Président (M. Bertrand): Non? Après. Ah, bon.
M. Simard: ...faire un commentaire, M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): Merci d'avoir fait le travail du président.
M. Simard: ...un commentaire que la présidente du Conseil du trésor maintenant connaît mais qui est très important pour votre gouverne de façon à ce que vous ne pensiez pas, dans un moment de doute, que vous avez des problèmes de santé mentale: ce que vous avez lu, ce que vous avez compris est effectivement dans le projet de loi. On est devant deux réalités, là, complètement dissociées: on a le discours de la ministre sur ce que devrait être son projet de loi ? je pense que ça tiendrait à peu près sur une page, sa définition des PPP et des pouvoirs de l'agence ? et, de l'autre, un projet de loi que nous avons lu, que vous avez lu, et, comme tous les autres groupes, vous y avez vu ce qu'il y avait dans ce projet de loi. Donc, je peux vous rassurer, là, vos interrogations, elles sont toutes légitimes. Je ne suis pas d'accord avec toutes vos conclusions, mais je peux vous dire que vos interrogations sont toutes légitimes parce qu'effectivement l'article 7, l'article 8 comportent des pouvoirs et des exigences pour tous les réseaux, que ce soit la santé... Et, quand on parle de la santé, on parle du plus gros réseau consommateur d'infrastructures, là. Vous ne parlez pas d'un élément de détail, vous parlez de l'essentiel des dépenses. C'est vrai aussi pour l'éducation, le monde municipal.
Tout le monde est venu nous dire qu'il avait les mêmes réactions que vous. Alors, c'est tout à fait normal que vous les ayez. Comme il s'agit, dans beaucoup de cas ? et la ministre l'a cité à de nombreuses reprises ? de construction d'hôpitaux, de grandes infrastructures, puisqu'elle veut réduire cela à cette dimension-là, je vais inviter ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve à poursuivre et à vous poser des questions spécifiques sur ces sujets.
Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. M. Cadieux, M. Adam, Me Poirier et M. Rouleau, vous avez bien démontré, dans le mémoire que vous présentez à la commission, toutes les strates, si vous voulez, là, de contrôle et de surveillance en commençant par le pouvoir de contrôle et d'autorisation déjà dévolu aux agences régionales, et au ministre, et à la Corporation d'hébergement, et ensuite au Trésor, et puis ensuite à l'agence, si tant est que le projet de loi était adopté.
Moi, je voudrais prendre un cas concret. Appliquons-le, par exemple, dans le dossier des CHUM, donc des centres hospitaliers universitaires à Montréal et à McGill. J'écoutais tantôt la présidente du Conseil du trésor qui indiquait que son intention était de laisser les secteurs décider des projets à réaliser, et donc que l'agence servirait de conseiller notamment, par exemple, au ministre de la Santé. Mais je prends acte cependant qu'elle a à maintes reprises, et pas seulement dans un seul journal, parce que finalement on ne peut pas se fier simplement à un seul journal, mais que, dans plusieurs médias, elle a eu l'occasion, d'autorité, d'annoncer que les deux hôpitaux universitaires, McGill et Université de Montréal, seraient construits sous l'égide, là, des partenariats public-privé.
Donc, est-ce que, si on applique, là, le projet des CHUM, qui a fait, sous votre, si vous voulez, pas autorité, mais sous votre regard... Quel est l'impact, si, par exemple, telle que rédigée, la loi était adoptée? Par exemple, doit-on croire que, comme le mentionnait la présidente du Conseil du trésor, il ne pourrait pas y avoir, avant trois, quatre ans ? on parle de 2008-2009 ? avant que les contrats... plutôt, que la construction débute? On rappelait, dans le journal LaGazette à maintes reprises, mais également dans le journal Le Soleil et dans quelques autres, que le mode de planification qu'on retrouve dans le projet de loi amènerait des années, si vous voulez, de report de la construction des deux centres universitaires, superuniversitaires. Alors, quelle est votre opinion à ce sujet?
Le Président (M. Paquet): M. Cadieux.
M. Cadieux (Jean-Paul): Je demanderais à M. Adam de répondre à la question. Il y aurait peut-être un complément à donner par M. Rouleau ensuite.
Le Président (M. Paquet): M. Adam.
M. Adam (Daniel): Merci, M. Cadieux, M. le Président. Mme Harel, évidemment on ne suit pas les projets au jour le jour, là, le projet du CHUM et du CUSM, mais je pense que, s'il devait y avoir des partenariats public-privé, ça devrait, peu importe l'optique, là, ça devrait respecter un certain nombre de critères et de principes qui devraient être à la base de ces projets-là, à savoir évidemment, là, des projets financièrement abordables, une meilleure valeur ajoutée pour les fonds investis, un partage optimal des risques et évidemment un traitement équitable des employés du secteur public, là, parce que ce sont déjà des établissements qui sont existants.
Mme Harel: Et je vous rappelle que...
Le Président (M. Paquet): Mme la députée, je pense que M. Rouleau voulait peut-être ajouter quelque chose.
Mme Harel: Ah, très bien.
Le Président (M. Paquet): M. Rouleau.
M. Rouleau (René): Ce n'est pas autant la temporalité parce que, pour faire naître un projet d'une pareille amplitude, pas besoin d'être un CHUM puis un CHU McGill. La construction d'un hôpital, dans quelque région du Québec que ce soit, est un processus complexe. La temporalité est à mon avis secondaire de la façon suivante: l'agence pourrait très bien accompagner le processus: détermination du projet clinique, le plan fonctionnel et technique, les différents appels d'offres, je dirais, la convergence des corps de métiers, etc. Il n'y a pas beaucoup de projets qui se font en bas d'une période de trois à quatre ans de conception; c'est très complexe. Donc, une agence bien intentionnée, bien outillée pourrait certainement nous accompagner dans ce projet-là. Et, honnêtement, je ne crois pas, si elle jouait bien son rôle, que ça amènerait des lenteurs complémentaires. Il s'agirait qu'elle démarre en même temps que tout le monde, là, puis qu'elle soit dans une bonne disposition pour travailler.
Ce qui est plutôt la question fondamentale qu'il faut se poser et que nous croyons, c'est qu'actuellement, que ce soit le Conseil du trésor, les ministères sectoriels, si l'agence est légerte comme elle semble l'être... légère, excusez, il me semble que le Conseil du trésor, les ministères sectoriels ont tous les leviers actuellement pour faire converger les intérêts supérieurs. Puis on ne comprend pas en quoi la valeur ajoutée de l'agence, qui serait strictement une agence-conseil... Et on pense que, dans les structures gouvernementales, qui sont nombreuses, il pourrait très bien y avoir une mission confiée à une sous-commission du Conseil du trésor ou à un sous-élément pour bien conseiller le gouvernement dans ce sens-là. Et c'est notre question sur la pertinence de créer cette structure-là.
Le Président (M. Paquet): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, M. le Président, je conclus des propos de M. Rouleau que ces projets pourraient se faire sans que le projet de loi soit adopté et qu'il n'est pas nécessaire de les retarder. Est-ce que c'est ce qu'on doit comprendre?
Le Président (M. Paquet): M. Rouleau.
M. Rouleau (René): L'intention du législateur, je me dois de le respecter. S'il y a une volonté gouvernementale de créer une agence ? puis la ministre l'a démontré ? je n'ai pas à juger de ça. Je sais que, par exemple, si elle a un rôle petit d'accompagnement, on a ce qu'il faut au gouvernement pour jouer ce rôle-là. C'est mon propos. Si c'est une autre chose, c'est un autre rôle. Il faudrait qu'elle soit vraiment, elle démontre une valeur ajoutée certaine dans des processus qui sont déjà très complexes. Et le gouvernement a déjà prévu des structures d'accueil, que ce soit la Corporation d'hébergement du Québec, différentes structures d'accueil pour nous aider à cheminer dans le sens qui est recherché.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Paquet): Il reste 1 min 30 s. Mme la députée.
n(16 h 20)nMme Harel: Oui. Alors, très vite. Le sous-ministre en titre du ministère de la Santé et des Services sociaux qui était en audience devant la Commission de l'administration publique répondait à des questions que je lui posais concernant le plan triennal d'immobilisations. Et il mentionnait que ce plan triennal était toujours, huit mois après le début de l'exercice budgétaire, là, il était toujours au Conseil du trésor. Il disait qu'il n'avait pas de réponse encore pour aucun projet. Je cite les paroles, là, du sous-ministre Iglesias.
Est-ce que vous pensez que la mise en place de ce partenariat public-privé a à voir avec le report et le retard des projets d'immobilisations? Je rappelle ce que disait M. le sous-ministre, M. Iglesias: en fait, qu'il n'y avait aucun projet, là, qui était prévu dans le cadre du plan triennal d'immobilisations.
Le Président (M. Paquet): M. Adam.
M. Adam (Daniel): Bien, il faut dire que, de ma connaissance et depuis le nombre d'années que je suis dans le réseau, le plan triennal d'immobilisations tarde toujours, et ça prend toujours beaucoup de mois avant qu'on le voie apparaître, là. Donc, je ne vois pas qu'il y ait une relation, à mon point de vue, entre la création de l'agence, là, et les PTI.
Le Président (M. Paquet): Merci.
M. Rouleau (René): ...
Le Président (M. Paquet): Oui, M. Rouleau.
M. Rouleau (René): Ça pourrait être un déclencheur qui faciliterait l'arrivée des projets à maturité. Je vous dirais que les choix du gouvernement, dans ce sens-là, sont assez difficiles pour élaborer les plans triennaux d'immobilisations ? ça le dit, triennaux d'immobilisations ? donc on est presque toujours une année en retard. Donc, on roule sur des modèles qui sont plus des modèles quinquennaux que triennaux dans les faits.
S'il y avait une catégorisation de projets qui pouvait être confiée à une agence, là, de rôle conseil, que ce soit bien déterminé à l'avance, ça nous permettrait peut-être de faire croître des plus petits projets que les projets majeurs... puis faire accélérer les PTI. Il faudrait le voir dans cette logique-là. Ce n'est pas exclu, ça, et c'est souhaitable.
Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. M. Cadieux, vous mentionniez que vous aviez beaucoup d'expérience de liens avec le secteur privé. Et vous avez parfaitement raison, vous avez une longue expérience à cet égard. Mais je vous dirais qu'en termes de partenariats public-privé on n'en a pas fait au Québec. Et la distinction d'un partenaire, d'un partenariat ou d'un PPP, c'est qu'il y a un contrat à long terme bien établi non pas en termes de direction, de devis, mais plutôt en termes d'extra, de rendement, ce à quoi on s'attend, d'accord, les résultats.
Dans le fond, il y a un lien entre l'institution ? si on parlait d'un hôpital, par exemple ? entre l'institution qui a des besoins, pensons au CHUM ou CUSM, et les partenaires qui sont embauchés pour justement répondre aux attentes. Mais ce n'est pas tant basé en termes, je dirais, là, d'espace ou de choses comme ça, mais plutôt en termes de rendement, délais d'attente, délais pour l'accessibilité à tel service, etc. C'est défini très différemment.
Mais je voulais juste porter à votre attention que ce pourquoi on développe l'agence, c'est qu'il n'y en a pas, d'expertise, au Québec. Et peut-être, à bien des égards, il va falloir faire appel à de l'expérience extérieure pour venir nous aider, pour venir nous conseiller comment s'y prendre pour ne pas justement commettre d'erreurs. Et on a la chance justement d'avoir des organismes qui ont de l'expérience dans ça et par conséquent, pour nous, nous éviter les écueils que ces gens-là ont connus quand ils ont fait des partenariats public-privé.
Alors, je voulais juste vous dire que ce pourquoi on parle de partenariats public-privé, ce sont toujours de grands projets d'infrastructures, généralement. Je vous dirais que ce sont des constructions d'hôpitaux. Dans le domaine de la santé, ce sont des constructions d'hôpitaux. Nous, on a voulu l'élargir parce que mon collègue le ministre de la Santé, au niveau de la modernisation des places en CHSLD, il a souhaité voir s'il n'y avait pas lieu de faire appel à cette formule-là. On va voir si c'est souhaitable.
Mais là je voudrais laisser à mon collègue peut-être le soin de continuer. Il ne reste pas beaucoup de temps.
Le Président (M. Paquet): Une minute et demie.
Mme Jérôme-Forget: Peut-être réagir, peut-être que monsieur? Votre réaction peut-être.
Le Président (M. Paquet): D'accord. Il reste seulement 1 min 30 s. M. Cadieux.
M. Cadieux (Jean-Paul): Oui. Justement, bien, on voit que vous faites principalement référence à des projets d'envergure, d'accord? Lorsque tantôt je faisais référence à l'article 8 du projet de loi, évidemment nous n'avons pas pu nous empêcher de voir l'application de cet article à ce qui se passe couramment, voire sur une base pratiquement quotidienne, dans nos établissements, et c'est ça qui nous a fait principalement sursauter. Sur les grands dossiers, on peut parler de justification, et là on va aller chercher les commentaires que mes collègues avançaient plus tôt. Mais notre inquiétude, nous, c'est par rapport à ce qui se passe sur une base beaucoup plus régulière.
Le Président (M. Paquet): Oui, M. Rouleau.
M. Rouleau (René): ...pour 200, 250 millions de levée de fonds privés via la philanthropie, avec nos fondations hospitalières. 250 millions de levée de fonds privés, ce n'est pas rien. Ces argents-là, on les recycle dans des projets de toute nature, de toute envergure. Et il y a déjà une culture de travail aussi dans nos organisations.
Vous venez nous donner, comme gouvernement, de la marge de manoeuvre pour travailler, avec nos syndicats, au niveau des relations de travail. Je voudrais que vous nous donniez la même marge de manoeuvre pour travailler avec nos partenaires du domaine privé, pour être capables, nous autres aussi, d'être des chefs d'entreprise puis vous livrer les attentes du gouvernement.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu, environ cinq minutes.
M. Simard: Oui. Une question très simple. À l'article 8, vous avez mentionné à plusieurs reprises la notion de prestation de services. Parce que, ce que ne dit pas toujours la présidente du Conseil du trésor, elle le dit quand même parfois, c'est qu'à ces constructions sont associées très souvent, dans les exemples qu'elle nous cite, des gestions confiées aux groupes financiers qui construisent ces hôpitaux.
Comment a réagi l'association au fait qu'un certain nombre d'hôpitaux ou les nouveaux hôpitaux au Québec pourraient être confiés à la gestion de l'entreprise privée?
Le Président (M. Paquet): M. Adam.
M. Adam (Daniel): Nous, bon, tout d'abord, là, l'Association des hôpitaux du Québec n'a jamais été contre les partenariats public-privé. Ça existe déjà; pas à la hauteur où Mme Jérome-Forget en parle, là, mais notamment au niveau des centres privés conventionnés, les achats d'équipements, les cafétérias, les buanderies, stationnements, sécurité à l'intérieur des hôpitaux. Donc, on a déjà une certaine expérience à ça.
Mais, nous, ce que nous disons, c'est que le financement des services et la gestion des établissements, la prestation des soins doivent demeurer publics. Les hôpitaux n'ont pas de problème à transiger avec le privé mais sous lien du public. Autrement dit, pas deux systèmes parallèles, c'est-à-dire un système privé et un système public en parallèle les uns des autres, mais des systèmes complémentaires sous responsabilité du système public.
M. Simard: Est-ce que je comprends bien ce que...
Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.
M. Simard: Ce que je comprends bien, c'est que vous souhaitez qu'un directeur d'hôpital puisse gérer sa maison comme il l'entend. Et vous ne considérez pas de façon positive le fait qu'un gestionnaire propriétaire de l'immeuble puisse être celui qui a le principal mot à dire sur l'utilisation, l'entretien, l'amélioration, l'investissement dans les locaux, et donc ait une influence sur la vie quotidienne de l'hôpital.
M. Adam (Daniel): Bien, je vais me référer, si vous permettez, M. le député, à mon expérience passée de D.G. d'hôpital et pour vous dire essentiellement que, compte tenu des contraintes que les directions d'hôpitaux connaissent avec les conventions collectives, les multiples règles, règlements, un gestionnaire privé, à mon point de vue, ne ferait pas mieux qu'un gestionnaire privé.
M. Simard: Ça me va très bien. Est-ce que vous avez une autre question à poser? Bon.
Le Président (M. Paquet): Alors donc, au nom de la Commission des finances publiques... Oui, M. Cadieux...
M. Cadieux (Jean-Paul): Un commentaire complémentaire.
Le Président (M. Paquet): Oui, M. Cadieux, certainement.
M. Cadieux (Jean-Paul): En complément à ceci, Mme la présidente du Conseil du trésor, si je ne m'abuse, vous avez fait référence, il n'y a pas longtemps, à des besoins de rattrapage, hein, qu'on a dans le réseau. Et ça, évidemment tout le monde va comprendre que c'est un préalable, ça.
Donc, ce rattrapage, comment va-t-on le faire? Est-ce qu'on va utiliser les partenariats privé-public pour les réaliser, à quel degré? Enfin, bon, ça, c'est absolument requis, mais, au-delà de ce rattrapage ou dans le contexte de ce rattrapage, ce que nous avons dit et ce qu'il est important de rappeler, c'est que bien sûr il y a les grands projets, mais, avant de penser à cette agence ? et encore une fois peut-être que le rôle, ou la mission, ou le pouvoir, ou l'autorité sera à redéfinir ? avant de faire appel à cette agence, nous rappelons qu'il y a déjà des leviers déjà possibles, d'accord, à l'intérieur même du Conseil du trésor ou ailleurs, selon le cas. Il y a déjà des leviers qui sont possibles pour y arriver, à ces résultats, sans devoir justement être soumis d'une façon trop rigide.
Vous savez, ça fait déjà plusieurs années que, nous, à l'Association des hôpitaux, nous plaidons pour délier les mains des gestionnaires du réseau, pour leur permettre de gérer ce pourquoi ils sont d'abord en poste, c'est-à-dire procurer des soins et des services. Ensuite, on pourra voir qu'est-ce qui pourrait arriver. Mais je pense qu'il est important d'obtenir ça.
n(16 h 30)n Et aussi un bref rappel de ce que M. Rouleau disait lorsqu'il faisait référence aux fondations qui génèrent 250 millions par année, il faut faire attention. Par une toute bonne volonté de faire d'une certaine façon, il faudrait faire attention pour ne pas décourager non plus d'autre part ces souscripteurs à la cause des établissements. Voilà, merci.
Le Président (M. Paquet): Merci. Au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. Cadieux, M. Adam, M. Poirier, M. Rouleau, qui représentaient l'Association des hôpitaux du Québec, pour leur participation à nos travaux.
Je suspends la séance très brièvement afin de permettre à la Fédération des chambres de commerce du Québec de se joindre à nous.
(Suspension de la séance à 16 h 31)
(Reprise à 16 h 32)
Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant les représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je vous souhaite la bienvenue au nom de la commission, Mme Françoise Bertrand, présidente-directrice générale de la fédération. Je reconnais un de mes anciens étudiants évidemment et économiste de la fédération. Si vous voulez bien, s'il vous plaît, nous présenter les autres gens qui vous accompagnent. Et vous pourrez commencer votre présentation. Merci.
Fédération des chambres
de commerce du Québec (FCCQ)
Mme Bertrand (Françoise): Merci infiniment. Bonjour, M. le Président, Mme la présidente du Conseil du trésor, Mmes et MM. les députés. Je vous présente, sans plus tarder, notre délégation cet après-midi: à mon extrême droite, Alain Kirouac, directeur général de la Chambre de commerce de Québec; à ma droite, très proche, Mme Francine Lortie, présidente du conseil d'administration de la Chambre de commerce de Québec; à ma gauche, un étudiant brillant, j'espère, mais enfin il s'acquitte très bien de la tâche d'économiste de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Et, derrière nous, quand même très important, M. Bernard Hogue, vice-président, affaires publiques, à la fédération.
Alors, un bref rappel, parce que c'est toujours important de dire qui nous sommes, la fédération fut fondée en 1909. Nous représentons 170 chambres de commerce locales et régionales qui représentent, pour elles, 53 000 membres individuels ou corporatifs provenant de chacun des secteurs d'activité de l'économie québécoise. Et en plus la fédération regroupe 2 000 entreprises et qui emploient plus de 720 000 personnes.
La Fédération des chambres de commerce du Québec souhaite remercier le gouvernement et les membres de l'Assemblée nationale de cette opportunité qui lui est offerte de commenter le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec, et, par le fait même, la politique-cadre sur le partenariat public-privé. Nous sommes venus avec la Chambre de commerce du Québec parce que nous allons parler des grands principes, dire qu'on appuie l'approche des partenariats privé-public, dire les commentaires que nous avons à l'endroit de la loi. Mais nous avons pensé que, plutôt que parler des cas de l'eau ou des cas européens tel que nous l'avons fait dans le mémoire, qu'il était peut-être important de montrer la force du réseau des chambres de commerce. Et c'est pourquoi la Chambre de commerce de Québec qui avait fait, elle, une représentation, un mémoire pour parler de la situation du transport dans les grandes villes au Québec va venir présenter, par Mme Lortie, un point de vue évidemment résumé pour permettre d'arriver dans le temps.
Alors, nous entendons dire et nous lisons beaucoup de choses sur les partenariats public-privé. Les opposants à la formule des PPP ont rapidement brandi le spectre apocalyptique pour dénoncer ce qui selon eux signifie la privatisation complète de l'État et la détérioration des services publics. Leur discours nous rappelle celui entourant les recours à la sous-traitance et celui, il y a plus longtemps, de l'accord de libre-échange. Aujourd'hui, les défis que posent notamment le renouvellement des infrastructures, les besoins en éducation et en formation et le vieillissement de la population sur les soins de santé, sans compter le fait que, d'ici 2012, 40 % des effectifs de la fonction publique iront à la retraite, ou en fait pourront aller à la retraite, parce que ce n'est pas une obligation, exigent certainement que le gouvernement s'appuie davantage sur une formule de PPP. Dans ce contexte, la volonté du gouvernement de stimuler davantage le recours aux PPP par le biais d'une politique-cadre nous apparaît tout à fait appropriée et justifiée. De la même manière que la compétitivité des économies émergentes pousse nos entreprises à innover, les contraintes budgétaires, les perspectives démographiques et les besoins croissants d'une population obligent aussi les gouvernements à innover en identifiant les meilleures manières de remplir leur mission.
Dans certains cas et lorsque souhaitable, car il ne s'agit pas d'une panacée universelle, d'un point de vue économique et financier, l'offre de service ou certains aspects du fonctionnement de l'État devraient se faire par le biais d'un partenariat public-privé. Le partage des responsabilités du risque et l'engagement qu'il implique de la part du partenaire privé contribueront à augmenter l'efficacité et la qualité du service public offert ou du projet réalisé en partenariat. Selon nous, la peur associée aux PPP vient de l'incompréhension et d'une communication souvent, il faut l'avouer, déficiente de la part du gouvernement mais aussi de la volonté avouée de centrales syndicales de préserver un statu quo sans aucune possibilité de moderniser l'offre des services publics. Il est donc du devoir du gouvernement, croyons-nous, d'amorcer un changement de culture en son sein même et de favoriser le consensus autour de cette pratique courante, en adoptant des messages clairs. Par ailleurs, le secteur privé a aussi des devoirs. Il s'agit d'adapter son offre de service aux réalités du gouvernement et de l'ensemble de la population, le but d'un partenariat public-privé n'étant pas de faire indûment des profits sur le dos de la population mais de profiter de l'expertise développée par le secteur privé pour offrir un meilleur service à moindre coût.
Nous, le secteur privé, avons également le rôle, voire la responsabilité de soutenir et d'accompagner le partenaire public ainsi que de rassurer le citoyen par une plus grande transparence du processus de partenariat et une mise en évidence des retombées des partenariats public-privé. Dans ce contexte, la révision du rôle de l'État et le recours ciblé aux PPP seront sans aucun doute l'occasion pour le contribuable de mieux prendre conscience du coût réel des biens et services publics et, par le fait même, de mieux distinguer les notions souvent confondues que sont l'accessibilité et la gratuité. Et je laisserais ici la parole à Mme Lortie.
Le Président (M. Paquet): Mme Lortie.
Mme Lortie (Francine): Merci. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés membres de la commission, bonjour. Je voudrais d'abord remercier Mme Bertrand de nous accorder quelques instants pour livrer quelques-uns des éléments qui se retrouvent dans le mémoire que nous vous avons fait parvenir au sujet du projet de loi n° 61. Pour la Chambre de commerce de Québec, le partenariat public-privé fait partie de notre discours depuis déjà plus de quatre ans. En effet, à ce moment, nous avions soulevé tout un débat en suggérant l'introduction de la mise en concurrence dans le transport en commun au Québec. Le débat semble maintenant fort bien porté par le gouvernement, et nous demeurons convaincus que les organisations municipales responsables du transport en commun devront apporter des changements à leur façon de faire pour leur permettre de continuer à offrir des services efficaces sans accroître le fardeau financier et fiscal des contribuables québécois.
Les orientations gouvernementales en matière de regroupement municipal ont amené l'Association des propriétaires d'autobus du Québec et la chambre à s'interroger sur la capacité des systèmes de transport en commun actuels d'assurer un niveau de service de qualité dans un contexte continu de rareté des ressources financières. C'est ce qui l'a conduit à décider d'entreprendre une étude portant sur l'opportunité de considérer d'autres avenues de livraison de services de transport en commun que le mode d'exploitation en régie tel qu'utilise présentement la société publique de transport en commun de la région de Québec.
n(16 h 40)n En effet, plusieurs grandes villes à travers le monde ont entamé, au cours des 20 dernières années, un processus progressif de mise en concurrence de l'offre de service de transport en commun dans le but de réaliser des économies sur les coûts de transport et/ou d'améliorer le niveau de services aux usagers. La firme Samson Bélair Deloitte & Touche a donc été mandatée afin de procéder à la réalisation d'une étude d'opportunité qui s'intitule Vers un transport en commun plus compétitif pour la région de Montréal, rendue publique en avril 2000, et qui présente quatre modèles de mise en concurrence utilisés dans les grandes capitales du monde: mise en concurrence progressive sous le contrôle public, mise en concurrence rapide sous le contrôle public, système de franchises, déréglementation. Répondant à l'invitation de la Chambre de commerce de Québec, l'APAQ avait accepté de mandater la firme Samson Bélair Deloitte & Touche pour réaliser un addenda, sur le réseau de transport de la région de Québec, à l'étude de Montréal.
Le modèle de mise en concurrence progressive sous le contrôle public se démarque nettement des autres exemples de par le niveau de performance atteint sur une période de six à 13 ans. Et il a été retenu comme modèle et appliqué au contexte de transport en commun de la région de Montréal et de Québec. À partir des expériences vécues aux États-Unis et en Europe, le modèle de mise en concurrence progressive sous contrôle public permettrait de réaliser des économies d'environ 350 millions de dollars sur une période de 10 ans et d'offrir 50 % des services de transport en commun par autobus au marché concurrentiel sans nuire à la qualité de services ni aux conditions de travail du personnel actuellement à l'emploi des sociétés de transport. Spécifiquement, pour la région de Québec, le modèle suggéré permettrait de dégager, chaque année, une économie récurrente et cumulative de 900 000 $ pendant 10 ans, soit une économie totale de 50 millions. Elle pourrait aussi permettre de réduire la contribution financière des municipalités et des gouvernements. Ces choix appartiennent aux élus municipaux, car, même si l'exploitation quotidienne des réseaux de transport en commun peut être graduellement transférée au secteur privé, nous continuons de croire que le transport en commun doit demeurer un service public sous la gouverne des représentants de la population. Car les bénéfices qu'il procure à la société dépassent largement les avantages directs qu'en retirent les usagers et les exploitants. Merci de votre attention. Je repasse la parole à Mme Bertrand.
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): Merci, Francine. Alors, je poursuis avec des commentaires sur la politique-cadre et sur la loi, si vous permettez. Alors, on peut affirmer que dans l'ensemble les PPP se traduiront à terme par d'importantes économies pour le gouvernement. Nous convenons toutefois que ces économies ne se matérialiseront qu'au fil des ans et non à l'intérieur de l'exercice budgétaire au cours duquel le partenariat sera initié. Dans ce contexte, il nous apparaît nécessaire de doter les ministères et organismes d'un budget de lancement qui permettrait au ministère de supporter financièrement le délai entre la mise de fonds initiale et la réalisation des économies associée à la formule.
Dans le cas contraire, nous craignons, en dépit de la création de l'agence et de l'expertise empruntée à d'autres régimes, que le financement des PPP à même les budgets existants ne constituerait qu'une raison pour le ministère de ne pas s'engager dans un processus de partenariat. À l'instar de certains pays, le gouvernement pourrait introduire le concept de récompense financière, appelée «Reward Revenue» en Angleterre, pour les partenaires publics et privés de manière à les inciter à atteindre et même dépasser les objectifs. La politique-cadre traite de l'attribution des contrats de partenariats et notamment du niveau de concurrence nécessaire et souhaitable. Il nous apparaît nécessaire de doter le processus d'acquisition et de sélection des partenaires de règles favorisant une offre optimale pour le gouvernement. Pour ce faire, les critères du prix mais aussi de la qualité et de l'innovation devraient guider le processus. L'absence de telles règles pourrait entraîner un nivellement des options de partenariats proposées ayant pour effet d'éliminer ainsi toute possibilité de créativité qu'on attend des partenaires. En d'autres mots, le processus de sélection ne peut reposer sur le seul critère du prix. Nous croyons que la révision des règles applicables, pour se doter d'un processus d'acquisition et de sélection des partenaires, doit stimuler la créativité au niveau des propositions tout en assurant un maximum de transparence bien sûr et l'équité nécessaire. Le document de la politique-cadre mentionne la question du caractère confidentiel d'une proposition non sollicitée sans toutefois détailler davantage les mécanismes pour en assurer la confidentialité et en accroître le nombre. Un bilan en cette matière montre que le manque de reconnaissance des efforts conceptuels et intellectuels investis ont contribué à maintenir un nombre peu élevé de propositions non sollicitées au cours des dernières années. Afin de stimuler la créativité et l'initiative du secteur privé, le gouvernement devrait revoir sa politique d'accueil de propositions non sollicitées pour encourager plus d'initiatives de la part des entrepreneurs. Certains projets de partenariats, surtout ceux reliés à la prestation électronique de services intégrés, seront susceptibles de faire intervenir plusieurs organismes publics simultanément. Ceci entraînera inévitablement une augmentation significative du niveau de risque supporté par le partenaire privé et de réunions, bien sûr. Dans ce contexte, nous croyons qu'il est primordial pour le gouvernement d'élaborer des mécanismes de réduction ou de gestion de risques découlant de projets multiorganisationnels de façon à ce que le ou les partenaires privés n'aient pas à supporter un risque additionnel qui soit déraisonnable.
Afin d'être plus efficaces, l'activité gouvernementale et la livraison des services publics s'accompagnent fréquemment d'un échange d'informations, de renseignements personnels et de données de toutes sortes. De par leur nature même, certaines de ces informations susceptibles d'être véhiculées dans des projets de partenariats risquent d'interpeller la Commission d'accès à l'information. Dans ce contexte et de manière à ne pas freiner indûment la réalisation des partenariats, il nous apparaît nécessaire pour le gouvernement d'éclaircir rapidement le rôle et les positions prises par la Commission d'accès à l'information vis-à-vis des projets de partenariats envisagés. Dans le cas de la prestation électronique de services par exemple, la simplification de l'accès aux services nécessite une intégration d'informations provenant de plusieurs ministères. Il faudrait par conséquent s'assurer que les positions que prendra la Commission d'accès à l'information ne viennent pas étouffer, voire interdire toute initiative de partenariat qui serait souhaitable pour l'État et la population.
Nous croyons que le gouvernement doit aussi agir pour faire évoluer le consensus social. Par exemple, certains rappellent à juste titre que les médias et une certaine partie de la population se sont montrés très critiques à l'égard du projet de cartes à puce de la Régie de l'assurance maladie du Québec et de la carte d'identification du citoyen proposé par le gouvernement. Or, en France, on assiste à la mise en place d'une deuxième génération de cartes à puce dans le secteur de la santé, en y associant, il est intéressant de le noter, une technologie conçue par une firme québécoise dans le cadre d'une expérience pilote en télémédecine.
Finalement, les commentaires sur le projet de loi n° 61. Les articles 8 à 10 de la loi énoncent le mode d'intervention de l'agence auprès des ministères et organismes gouvernementaux. Le choix du mode d'intervention aura un impact certain sur la capacité du gouvernement à mener à bien un nombre significatif de projets en partenariat avec le secteur privé. En fait, selon qu'elle agira comme un organisme-conseil auprès des ministères et organismes qui envisagent le partenariat ou qu'elle soit une étape imposée pour tout projet d'envergure, l'agence aura une influence déterminante sur la perception que les ministères et organismes visés se feront des partenariats désirés par le gouvernement. Nous croyons qu'il y aurait donc lieu de préciser davantage le mode d'intervention de l'agence et de le définir de manière, d'une part, à favoriser l'adhésion des ministères et organismes au concept des partenariats public-privé et, d'autre part, à stimuler la réalisation de tels partenariats pour ne pas s'enfarger dans une bureaucratie indue.
Malgré les efforts répétés du Conseil du trésor, l'appareil gouvernemental a démontré par le passé une certaine résistance face à l'approche des PPP. Le gouvernement doit favoriser un changement de culture à l'intérieur même de l'État. Pour ce faire, nous croyons que le gouvernement doit accompagner la création de l'agence d'un ensemble de mesures favorisant ce changement de culture, notamment des efforts de promotion, des incitatifs financiers ainsi qu'une certaine valeur ajoutée liée au recours à des partenariats, du moins lors de la réalisation des premières expériences. Une approche dénudée de ces éléments, ou voire même coercitive risquerait selon nous de compromettre sérieusement l'adhésion des ministères et organismes au principe des partenariats.
n(16 h 50)n Bien qu'il prévoie la participation de représentants du secteur privé au sein des comités d'experts-conseils, le projet de loi n° 61 ne contient aucune règle précise quant à une participation de représentants du secteur privé au sein du conseil. Il est de notre avis que le conseil d'administration devrait également inclure des représentants du secteur privé afin que les outils développés et les interventions de l'agence soient en mesure d'assurer un meilleur arrimage entre les besoins du secteur public et les capacités du secteur privé à les satisfaire. Compte tenu de sa représentativité de différents milieux d'affaires de chacune des régions du Québec et de la crédibilité dont elle jouit, la fédération peut jouer et offre de jouer un rôle pour aider le gouvernement dans la mise en place de politiques de partenariat en agissant comme l'un des principaux interlocuteurs des entreprises dans toutes les régions.
Parce que plusieurs éléments de nos missions respectives militent en ce sens, nous entendons mettre à contribution la force et l'étendue de notre réseau et accroître nos efforts de partenariat avec le gouvernement. Ainsi, nous soutiendrons les efforts du gouvernement pour qu'il tire davantage profit de l'expertise et du savoir-faire du milieu des affaires, et ce, pour le bien de la collectivité et la prospérité de notre économie.
En terminant, nous pensons sincèrement que c'est le temps de travailler tous ensemble pour combiner nos forces et favoriser la richesse collective de tous les Québécois, puisque cette dernière passe inévitablement par la synergie des efforts des intérêts publics et privés. Merci.
Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, Mme Bertrand, Mme Lortie, M. Demers et M. Kirouac, bienvenue. Je veux vous remercier d'avoir d'abord chambardé votre horaire pour nous accommoder et venir nous rencontrer aujourd'hui. Et là je veux m'excuser, Mme Bertrand, parce que je dois quitter à 5 heures. Mais par ailleurs j'ai bien écouté, j'ai bien lu votre mémoire, et bien sûr ça ne tombera pas dans l'oreille d'une sourde. Mes collègues vont certainement, et mon collègue d'en face va certainement prendre bonne note de tout, de pouvoir vous solliciter justement des éclaircissements.
Mais tout de suite, de go, je voudrai soulever: dans votre mémoire, en page 15, vous parlez de propositions non sollicitées. Je présume que, quand vous faites appel justement à ce volet de propositions non sollicitées, vous vous adressez à d'autres volets que les partenariats public-privé, parce que, les partenaires public-privé, il doit toujours y avoir concurrence. Un partenariat public-privé, c'est un contrat à long terme, et effectivement pour être bien certains qu'on va avoir la meilleure entente et le meilleur contrat, il faut toujours faire appel à la concurrence. Donc, autant où, dans les marchés publics, l'idée de propositions non sollicitées s'applique, dans les partenariats public-privé, au fait ils ne peuvent pas s'appliquer parce qu'il faut toujours aller en appel d'offres. Et il y a un volet bien important: dans certains dossiers, parce qu'il y a peu de partenaires, il y a un danger qu'il n'y ait pas beaucoup de concurrence. Et là il va falloir qu'on soit très attentifs pour nous assurer qu'il y a de la concurrence. Je ne sais pas si vous voulez réagir à ça.
Mme Bertrand (Françoise): Oui, je pense, en fait...
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): ...je comprends bien, puis croyez bien que toute la question de transparence et équité nous est très importante aussi. Nous pensons simplement que tout le processus d'appel d'offres, si on veut dire, qui va apporter de la concurrence et qui va donner l'assurance au gouvernement d'avoir choisi la meilleure solution est intéressant, mais n'écartez pas la possibilité qu'il y ait des pistes qui viennent d'un entrepreneur et qu'à ce moment-là: Comment allez-vous recevoir cette proposition-là pour éventuellement la traiter avec un appel d'offres en bonne et due forme? Mais ne pas être fermé à cette possibilité parce que, par rapport peut-être pas aux grands ouvrages mais peut-être par rapport à des éléments très importants dans la gestion de certains services, ça pourrait être un apport extrêmement important.
Alors, c'est plus ça que de dire: Pas de concurrence. C'est plus de dire: Laissez une voie pour l'initiative des entrepreneurs qui pourraient par la suite entrer dans un processus concurrentiel.
Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.
Mme Jérôme-Forget: Alors, je comprends, je vais prendre bonne note. Je voulais également vous soulever un volet important à l'effet qu'il y a eu beaucoup de réserves qui ont été exprimées de la part de certains groupes à l'endroit des partenariats public-privé. Vous avez manifestement raison.
Et je pense que la commission parlementaire joue un rôle important à cet égard, pour dire ce que c'est et ce que ce n'est pas, d'accord? Et je vous dirai également, Mme Bertrand, qu'on nous a exprimé, en Angleterre, la même chose: tant que les gens n'ont pas vu de résultat, il y avait beaucoup de méfiance, et, quand les gens ont vécu l'expérience des partenariats public-privé et qu'ils se sont vus à l'intérieur d'hôpitaux qui avaient été construits ou restaurés, bien sûr que tout à coup on changeait vite d'idée parce que l'environnement était tellement amélioré et que tout s'était fait à l'intérieur des coûts et à l'intérieur des délais.
Alors, vous avez raison, mais il va falloir commencer à en faire, des partenariats public-privé, et je pense que vous avez fait un peu, vous m'avez fait le reproche de ne pas en avoir fait. Vous avez raison, mais par ailleurs j'en cogite quelques-uns. Mais il va falloir qu'on aille prudemment pour bien les faire. Et ce pourquoi nous voulons faire appel à une expertise à l'intérieur de l'agence, c'est précisément pour développer cette expertise à l'intérieur du gouvernement parce que vous savez probablement comme moi qu'il n'y a pas d'expertise au Québec à cet égard, au niveau des partenariats public-privé. Alors, je ne sais pas si vous voulez commenter.
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): C'est-à-dire qu'il y a beaucoup d'expertise, mais elle n'a pas été dirigée vers les services publics au Québec. Elle est dirigée plus vers des expériences à l'étranger ou dans d'autres provinces canadiennes. Alors, il y a quand même de l'expertise. Quand on a préparé notre mémoire et qu'on a discuté à l'entour de membres de la fédération, il y a beaucoup de gens qui ont de l'expérience ailleurs qu'au Québec. Alors, vous n'aurez pas à aller très loin pour aller chercher ces expertises-là, Mme la ministre.
Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.
Mme Jérôme-Forget: Justement, je vous parlerai de l'expertise parce que vous imaginez que j'ai rencontré, nous avons rencontré toutes les grandes firmes comptables il y a de ça un an, puisque c'est là que se retrouve beaucoup de l'expertise. Mais même eux faisaient appel à leur expertise à Londres et à leur expertise ailleurs pour venir nous expliquer comment ça fonctionnait là-bas. Alors, je pense qu'aujourd'hui il y en a manifestement davantage, mais c'est clair que ce n'était pas de l'expertise qu'on avait développée ici. Souvent, il fallait faire appel à des gens qui avaient été impliqués ailleurs, en Ontario, en Colombie-Britannique et beaucoup en Angleterre.
Alors, c'est pour ça qu'il faut, chez nous, développer une expertise bien sûr et également dans ces cabinets, mais à l'intérieur du gouvernement, parce qu'en Angleterre justement ils ont développé une grande expertise à l'intérieur du gouvernement. Et par conséquent, quand il y a des contrats qui sont finalement ficelés ou négociés, les gens des ministères ? certains ministères plus que d'autres ? mais ont développé une grande expertise. Ce sont les fonctionnaires à l'intérieur du gouvernement qui toujours surveillent les partenariats public-privé.
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): Non, je suis parfaitement d'accord, et vous verrez que la fédération ne s'oppose pas, loin de là, à la création de l'agence. Elle dit simplement: attention à de la bureaucratisation qui ferait qu'on n'irait pas de l'avant. Mais on reconnaît l'importance de créer une expertise en soi, et non pas strictement l'expertise qui se retrouve dans tous les ministères.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Hull.
M. Cholette: Oui. Il nous reste combien de temps pour notre...
Le Président (M. Paquet): Trois minutes pour ce bloc-ci.
M. Cholette: Pour notre bloc.
M. Simard: ...
M. Cholette: C'est beaucoup.
Une voix: ...c'est deux auxquelles il a droit.
Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Hull.
M. Cholette: On s'aime bien, vous savez. Donc, merci, M. le Président. Chers collègues, Mmes Bertrand et Lortie, MM. Demers et Kirouac, bon, la ministre vous a déjà remerciés de votre présentation et de votre mémoire qu'on a lu très attentivement.
Mes premiers commentaires vont être pour vous féliciter parce que je trouve qu'il est très bien fait. Vous n'avez pas peur de vous mouiller en disant que: Écoutez, les PPP sont non seulement souhaitables, mais ils sont nécessaires au Québec. On est dans un contexte où on ne pourra pas passer à côté, et, dans ce sens-là, je pense que vous faites écho d'un large pan de la communauté qui pense qu'il y a peut-être d'autres façons de livrer des infrastructures publiques. D'ailleurs, c'est fait à peu près partout ailleurs dans le monde. On est un peu en retard là-dessus. Votre mémoire traite aussi, là, de certains projets, notamment certaines études sur la question du transport en commun. C'est intéressant. Vous faites votre présentation le soir du matin du retour. Je ne sais pas si les gens s'étaient alignés pour...
Mme Lortie (Francine): ...que ça dure 24 heures de plus, la grève...
n(17 heures)nM. Cholette: Mais les études qui ont été donc réalisées, vous sembliez nous faire écho qu'il y avait des gains de productivité importants et qu'il y avait des économies possibles de 50, mon Dieu, 50 millions au bout...
Mme Lortie (Francine): ...la région de Québec...
M. Cholette: ...pour la région de Québec.
Mme Lortie (Francine): ...et 350 millions pour la région de Montréal.
M. Cholette: C'est ça, alors c'est quand même beaucoup d'argent. Écoutez, mon premier bloc, je vais terminer parce qu'il reste peu de temps. Mais vous êtes un des seuls groupes qui a abordé la question de la promotion, la question que l'agence a un rôle de promotion. Et vous avez écrit, dans votre mémoire, que vous trouviez que c'était bien important.
Je dois vous dire que certains trouvaient que c'était contradictoire que l'agence fasse de la promotion et que l'agence en même temps puisse analyser certains dossiers. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Vous voyez ça comment, l'importance pour cette agence d'être un agent de promotion des PPP?
Mme Bertrand (Françoise): C'est promotion au sens...
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand, vous avez une minute.
Mme Bertrand (Françoise): C'est au sens que, dans la façon de faire, c'est un changement de culture. Donc, c'est une promotion en le sens d'apporter l'information. Et plus on fait un peu au sens où la ministre disait, plus on fait des expériences, plus, à ce moment-là, auprès des ministères, on est capable d'être de bon conseil et d'expertise. Et c'est dans ce sens-là. Ce n'est pas une promotion de faire des campagnes et de dire que tout doit être dans les partenariats privé-public, mais c'est d'être le lieu où l'expertise va être et que, par l'information, ça replace les pendules à l'heure sans nécessairement dire que tout doit passer par le partenariat.
Alors, c'est dans ce sens-là parce qu'un changement de culture ne se fait pas sans apporter l'information appropriée et pertinente. Et ça prend les experts pour le faire. On en parle tous, mais, au fond, si on n'en a pas fait, si on ne l'a pas financé nous-mêmes, on va aller évidemment à certaines limites quant à notre capacité de bien informer les gens qui devraient y songer.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le...
M. Cholette: Et vous croyez que l'agence devrait être...
Le Président (M. Paquet): Très rapidement.
M. Cholette: ...cet agent promotionnel.
Mme Bertrand (Françoise): Oui.
M. Cholette: Très bien.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.
M. Simard: Merci, M. le Président. À mon tour de souhaiter la bienvenue en commission aux membres de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Ce n'est pas la première et sans doute pas la dernière fois que nous nous voyons, puisque la Chambre de commerce a une longue tradition d'implications dans les grands débats. Les souhaits de bienvenue ont été particulièrement chaleureux de l'autre côté, qui sont évidemment très heureux enfin de trouver un groupe qui vient les appuyer. Mais nous serons aussi chaleureux, même si nous avons peut-être quelques réserves sur certaines de vos affirmations.
Vous rapportez, dans votre avant-propos, et je cite, là, que «le débat entourant les PPP a été l'occasion d'entendre plusieurs affirmations inexactes et souvent exagérées qui témoignent soit d'une grande incompréhension de la formule ? c'est vous qui le soulignez ? soit d'une fermeture complète envers le changement». Vos propos sont assez directs. Vous continuez en disant: «Ces affirmations nous semblent d'autant plus inexactes, que le gouvernement entretient pourtant de nombreux partenariats public-privé avec des entreprises privées, des organismes à but non lucratif et des associations de toutes sortes.» Je suis en tout cas ? je le dis à peu près à toutes mes interventions ? d'accord avec votre premier point pour dire qu'un des problèmes entourant le débat sur les PPP, c'est que tout le monde en parle, mais personne ne parle de la même chose. Nous avons la démonstration, ici, tous les jours, qu'il y a d'abord un projet de loi que vous avez eu entre les mains et les propos de la ministre, qui sont souvent très, très éloignés du contenu du projet de loi.
Par exemple, vous parlez des nombreux PPP que le gouvernement entretient avec différents organismes, alors que la ministre nous dit, tous les jours, qu'il n'y a pas un seul, en ce moment, au Québec, il n'y a pas un seul PPP. Est-ce que ce n'est pas déjà là une indication que le projet de loi manque singulièrement de clarté et de précisions?
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): Je ne peux pas me prononcer sur cet aspect, mais ce que je peux expliquer, c'est ce que nous disons. Ce que nous disons, nous, c'est qu'il y a beaucoup de partenariats, mais toujours dans une perspective davantage de fournisseurs de services. On va chercher un secteur privé pour faire l'architecture, pour donner un contrat mais pas nécessairement pour céder.
Ça, c'est vrai, je pense, que nous avons peu d'expérience. Je n'ai pas assez l'inventaire exhaustif de toutes les entreprises qui ont eu lieu au Québec, là, depuis plusieurs années. Notre impression est qu'il est vrai qu'on n'a pas cédé, par exemple, des grands travaux d'infrastructures comme il semble s'être fait dans le reste du Canada, ou en Angleterre, ou en Europe. Mais il y a, dans la relation client-fournisseur, beaucoup d'expériences de fournir ou enfin de confier au secteur privé ou à un OSBL certaines responsabilités. Mais nous pensons que la loi dont il est question ici et l'agence qu'on veut mettre sur pied veulent aller plus loin. Et on souhaite qu'elle veuille aller plus loin. Et ce dont parlait Mme Lortie au nom de la Chambre de commerce de Québec parle définitivement de cette dimension-là qui va jusqu'au bout. Les partenariats avec les hôpitaux, on le sait, il y en a eu plusieurs, que ce soit le stationnement, les cafétérias. J'étais avec des gens représentant les syndicats de la fonction publique, cette semaine, au cours d'une conférence, puis ils m'ont dit: Ça, madame, ce n'est pas des partenariats privé-public, c'est de l'impartition. Bon. Enfin, les termes peuvent être variés.
Mais, vous avez raison, d'une certaine façon, il y a un certain flou, mais je pense qu'il y a une expérience de partenariat. Ce que nous espérons comme fédération et ce que nos membres espèrent, c'est qu'on aille plus loin et qu'on mette de l'avant des grands travaux, soient-ils le transport dans les villes, soient-ils les grandes infrastructures. Mon sujet favori comme exemple, c'est toujours l'autoroute 30, la fameuse autoroute 30. L'autoroute 30, ce n'est pas simplement une question de maîtrise d'oeuvre, puis on le donne à quelqu'un, c'est de pouvoir réaliser une oeuvre qui va permettre, au plan économique, une fluidité qui va faire en sorte qu'on va améliorer la performance des entreprises soit par l'exportation ou par la rapidité de la fluidité du transport des biens et services, qui va faire que ça va réduire des coûts et faire en sorte que nos entreprises vont être plus performantes. C'est extrêmement important.
Or, beaucoup pour des questions de ressources limitées, à ce jour, il y a eu une question de dire: Est-ce que c'est le bon tracé, pas le bon tracé? Ça, c'est une question en soi, mais il y a aussi une question de dire: Comment serons-nous capables de financer l'ensemble des grands ouvrages dont nous avons besoin, soient-ils des routes, soient-ils l'approvisionnement en eau et les questions de transport?
Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.
M. Simard: Oui. Sur le projet de l'autoroute 30, mon parti, il y a quelques années, avait bien fait savoir que nous étions très ouverts à ce genre de formule, encore qu'on n'a toujours pas répondu à une question fondamentale: une participation du privé dans une construction de cette ampleur, dans des coûts à ce niveau, alors que les péages censés financer cette opération toucheraient un nombre d'automobiles sensiblement inférieur à ce qui se passe ailleurs dans le monde, dans les grandes routes. On cite souvent l'exemple des grandes routes européennes, mais on oublie de dire qu'il passe 100 000, 150 000, 200 000 voitures par jour, ce qui rend évidemment le financement beaucoup plus aisé.
Même de ça, certaines sociétés fermières de certaines grandes autoroutes en Europe se voient forcées de construire des tracés moins rentables qu'ils financent à l'aide des tracés extrêmement rentables. L'autoroute vers le sud, en France, est le meilleur exemple de ça. Je ne me souviens plus, c'est plusieurs centaines de milliers de voitures par jour en moyenne, donc des revenus considérables, mais la société a dû accepter en contrepartie d'aller ailleurs. L'autoroute 30, à 25 000 personnes par jour ? estimé ? on est dans un secteur plus difficile. Mais je conviens avec vous qu'il faut pousser l'étude et aller beaucoup plus loin. Il y a là une piste intéressante. Mais je voudrais vous amener sur un point que vous soulevez dans votre mémoire. Vous évoquez la réfection des équipements reliés à l'eau potable. L'eau potable au Québec, on a, je pense, près de 6 % ou 7 % des réserves mondiales. Nous représentons une petite fraction de la population. Nous sommes à la tête d'une richesse importante, et les Québécois sont très attachés à l'eau comme service public, comme propriété publique. C'est un bien commun qui est extrêmement valorisé, vous le savez, par les Québécois. La semaine dernière, la présidente du Conseil du trésor nous avouait, après avoir donné un certain nombre de contrats à des firmes-conseils comme BPR, PricewaterhouseCoopers, SECOR, et d'autres pour préparer la mise en place d'un PPP dans ce dossier, hein, de l'eau potable, elle nous avouait qu'aucun partenaire privé ne s'est montré intéressé parce que le risque était trop grand. Vous n'avez pas l'impression qu'au niveau du partage de risques les PPP ne seront pas d'un très grand secours quand le risque va être trop grand?
Mme Bertrand (Françoise): Bien, écoutez...
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
n(17 h 10)nMme Bertrand (Françoise): ...on soulève la question de l'exemple de l'eau pour dire: Ça se fait et ça s'est fait de diverses manières. Ça s'est fait aussi en prenant la chaîne de valeurs qui est l'eau. Et de dire: Tout n'a pas la même valeur, quel est l'ingrédient, dans le traitement de l'eau ou dans l'approvisionnement en eau, qui est garant de l'aspect eau pure et qui amène les garanties de santé dont nous avons besoin est une partie extrêmement sensible et certainement liée aux valeurs de la société québécoise qu'il va falloir considérer de façon extrêmement prudente.
Maintenant, il y a peut-être d'autres éléments en amont ou en aval qui pourraient être regardés différemment. Nous ne faisons pas, dans notre mémoire, un plaidoyer pour dire: Il faut aller vers un partenariat privé-public. Nous faisons référence au fait que l'eau a été considérée de manière différente, dans les partenariats privé-public en Europe, incluant la France, qui l'a regardée de façon différente et, par la régulation, est arrivée à pouvoir donner des garanties aux citoyens et aux consommateurs. Maintenant, il est vrai que l'eau est peut-être un des domaines très, très sensibles non pas simplement à la société québécoise, je pense bien que l'eau...
Une voix: ...
Mme Bertrand (Françoise): Veux-tu parler de l'eau? Je pensais que tu voulais ajouter un point. Alors, j'admets avec vous que c'est peut-être plus facile de considérer les infrastructures de type routier que de considérer l'eau. C'est un sujet dont il faudrait faire beaucoup d'éducation, et peut-être va-t-il falloir le faire dans des aires, disons, plus acceptées globalement avant de se lancer. Peut-être on va faire celle du transport avant d'aller vers l'eau.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Hull.
M. Cholette: Ça va vite. C'est déjà terminé de votre côté, hein? J'imagine qu'il vous reste...
M. Simard: Ça vous paraît court.
Le Président (M. Paquet): Il reste deux blocs, un bloc de chaque côté.
M. Cholette: Bon. Écoutez, je veux débuter parce que c'est habile mais un peu redondant de laisser entendre, de ce côté-là, là, que le gouvernement a tenté d'avoir des projets de PPP en matière d'eau, puis on a sollicité des entreprises et puis on voulait céder la gestion de l'eau au secteur privé, ce qui n'est pas le cas, ce qui n'est pas du tout le cas. Puis laisser sous-entendre ça par des faux-fuyants de questions, c'est malheureux, je le dis et je le répète. Ce qu'on a dit, c'est: Présentement, la qualité de l'information sur le niveau d'infrastructures ainsi que le coût de gestion de notre réseau sont relativement insuffisantes, ces informations, pour pouvoir envisager sérieusement des PPP. Et c'est ça que la ministre a dit. Et il faut faire attention parce qu'il ne faut pas laisser croire, là, qu'on est allés à pleine vapeur, pour aller chercher des soumissionnaires de PPP pour gérer la question de l'eau potable au Québec. Ce n'est pas le cas.
Bon. Cela étant dit, j'ai quelques sujets qui ont été soulevés dans votre mémoire et je voudrais vous parler de ça. Vous avez parlé de la mise en concurrence de certains projets qui doit être sous le contrôle public. J'aimerais que vous nous parliez de ça parce que ça m'intéresse. Est-ce que, dans votre compréhension, la mise en concurrence, ça veut dire que, lorsqu'on aurait... Prenons votre hypothèse de l'autoroute 30 qui, soit dit en passant, au niveau du péage, c'était déjà prévu, hein, dans le projet de loi n° 164. On ne vous a sûrement pas invités en commission parlementaire parce qu'il n'y en a pas eu à ce moment-là. Mais, sous l'ancien gouvernement, il y a eu un projet de loi sur la question des PPP qui a été adopté, notamment au niveau routier, et, à ce moment-là, on prévoyait le péage sur la 30, en passant.
Mais prenons cet exemple-là. Est-ce que, ce que vous nous dites, c'est qu'une fois qu'on aura pensé au projet puis une fois que le ministère des Transports voit une possibilité d'utiliser le PPP pour la 30 l'appareil d'État devrait prendre le projet et faire soumissionner le secteur public là-dessus? Je tente de comprendre bien exactement ce que vous voulez dire par la mise en concurrence sous le contrôle public.
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): Je ne voyais pas, dans ce que nous disions, de le mettre en concurrence avec le public en soi. Mais par définition, si, par exemple, on construit une autoroute, vous avez déjà, au niveau du gouvernement, des informations quant aux coûts qui seront générés, aux manières de faire. Donc, quand vous soumissionnez vers le secteur privé puis que vous voyez le modèle alternatif, ce sera toujours en fonction d'une comparaison avec ce que sera le modèle public. Il y a déjà une expertise de ce que c'est que le modèle purement public.
Alors, c'est en ce sens-là, je pense, ce qu'on voulait dire. On dit: D'une part, il faut que ce soit en concurrence, si vous décidez d'aller vers le secteur privé, entre les entreprises qui soumissionneront, mais au départ, quand vous allez vers le secteur privé, c'est parce que vous avez fait une analyse préalable de l'analyse coûts-bénéfices, de dire: Pour le gouvernement, pour la société québécoise, au bout de la ligne, ça doit être rentable ou ça doit être bénéfique pour la société québécoise et qu'à cet égard-là il y a certainement une analyse de coûts qui est comparée entre ce que va coûter l'initiative en allant du côté privé versus ce que ça coûterait dans le secteur public. C'est en ce sens-là.
M. Cholette: Donc, ce que vous nous suggérez...
Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.
M. Cholette: Merci. Ce que vous nous suggérez, c'est vraiment de mettre en comparaison le coût sur une période, par exemple, de 30 ans, parce qu'un PPP c'est sur une longue période, comme vous le savez. Alors, ce serait de comparer ce coût-là par rapport à un coût comparable mais en méthode traditionnelle. C'est ce que vous nous dites. C'est de comparer le coût d'un projet sous une forme de livraison traditionnelle, par exemple en sous-traitance, puis les coûts, bon, etc. Donc, la méthode traditionnelle par rapport aux coûts totaux.
Mme Bertrand (Françoise): Voilà. Mais je pense que...
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): Nous, ce qu'on prétend, c'est qu'il y a un changement de culture à faire et de l'information à donner. Quand vous parliez de la promotion tantôt, c'est ça, c'est de dire: On ne pourra pas convaincre les gens, ni le citoyen, ni les ministères, j'imagine, d'un point de vue gouvernemental, à moins qu'on puisse faire une certaine démonstration ou une démonstration certaine des avantages impartis au modèle alternatif. Ce n'est pas en soi une solution, c'est une solution parce qu'elle est plus bénéfique. Et on doit être en mesure de pouvoir la démontrer. Et c'est en ce sens-là, j'imagine, tout à l'heure, que Mme la ministre référait à l'importance d'aller vers des expertises, parce que les expertises qui ont déjà eu lieu ou les expériences qui ont déjà eu lieu ont déjà dû faire ce genre de démonstration.
Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.
M. Cholette: Vous rejoignez donc la vision gouvernementale à l'effet que les PPP, c'est un outil dans un coffre à outils, ce n'est pas la panacée sur tout. Il sera possible donc de faire des choix. Parce que ce qu'on entend souvent des gens qui dénigrent tout ce processus, c'est de dire: Bon, bien parce qu'on aurait une agence de PPP, le projet de loi n° 61 serait adopté, ah, bien c'est ça, tout va s'en aller PPP au Québec. Alors, évidemment ce n'est pas ce qu'on dit et ce n'est pas ce que vous dites.
Le temps avance. Je voudrais vous poser une question concernant un élément à la page 18 de votre mémoire. Et je trouve ça important parce que vous citez deux articles du projet de loi, deux articles qui ont suscité de la controverse autour de notre table, donc les articles 8 et 10. Plusieurs nous disent: Ah, écoutez ? dont vous. Vous nous dites: Écoutez, il faut clarifier l'article 8, il faut faire attention de la portée, etc. On a vu le groupe tantôt qui disait: Bon, bien peut-être qu'on a une portée quelquefois trop étendue, quelquefois pas assez. Je veux bien comprendre ce que vous nous dites à la page 18. Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est que l'agence ? premier paragraphe: «En fait, selon qu'elle agira comme un organisme conseil auprès des ministères et organismes qui envisagent le partenariat ou qu'elle soit une étape imposée pour tout projet d'envergure, l'agence aura une influence déterminante sur la perception que les ministères et organismes visés se feront des partenariats [public-privé] désirés par le gouvernement.» Bon. C'est ce que vous nous dites, puis vous continuez aussi, mais je n'ai pas senti que vous avez fait un choix.
Je n'ai pas senti, là-dedans, que vous nous dites: Nous, là, on souhaite que justement l'article 8, puis l'article 10, puis le projet de loi n° 61 soient justement ça; on veut que l'agence ne soit qu'un rôle conseil ou on veut que l'agence ait aussi une portion plus coercitive.
Mme Bertrand (Françoise): Vas-y.
Le Président (M. Paquet): M. Demers, en 2 min 10 s.
n(17 h 20)nM. Demers (Steeves): Bien, écoutez, dans notre tête, c'est un peu un mélange des deux. Ce qui est clair dans notre tête, c'est que les organismes, les ministères sont des partenaires, et à ce titre-là ils doivent être incités puis ils doivent avoir le goût d'embarquer dans le projet. Donc, ce qu'on ne souhaitait pas, c'est que l'agence soit un peu le gendarme qui vienne enlever le goût un petit peu aux partenaires publics d'agir comme partenaires. Donc, c'est un mélange des deux.
Je pense que l'agence doit être présente dans ces grands projets là, mais elle doit avoir comme objectif de favoriser, là, de stimuler, donner le goût aux partenaires, dont l'organisme et le ministère, d'embarquer dans les projets de partenariats. On est conscients que les ministères ont, ils ont les changements de culture, et tout ça. Ils doivent embarquer, mais on ne doit pas mettre l'agence comme étant le policier, le gendarme. Et ça crée une mauvaise relation, à notre avis.
Mme Bertrand (Françoise): Mme Lortie avait un petit mot à dire concernant la concurrence parce qu'elle...
Mme Lortie (Francine): Suite à votre question de tout à l'heure...
Le Président (M. Paquet): Mme Lortie.
Mme Lortie (Francine): ... ? oui, je m'excuse ? sur la mise en concurrence public-privé, c'est tout à fait dans le dossier des transports en commun. Alors, si vous voulez, je peux vous déposer ce dossier-là, ici, qui a été monté par l'Association des propriétaires d'autobus du Québec. Et c'est vraiment ça: une mise en concurrence progressive sous contrôle public, et je peux aussi vous déposer le rapport de Samson Bélair Deloitte & Touche qui a été fait. Alors, peut-être que vous auriez tout à fait la réponse et l'exemple exact de ce que peut être cette mise en concurrence progressive du public-privé.
Le Président (M. Paquet): En 40 secondes, M. le député de Hull.
M. Cholette: Oui. Mais, si je vous ai bien compris aussi, vous avez mentionné tantôt que cette mise en concurrence se faisait tout en gardant l'ensemble des conditions de travail des employés, que ce soit dans un sens ou dans l'autre.
Mme Lortie (Francine): Absolument.
Documents déposés
Le Président (M. Paquet): Alors, j'accepte le dépôt de l'Étude d'opportunité ? Vers un travers en commun plus compétitif pour la région de Montréal, de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec, ainsi que le dépôt de l'Addenda à l'étude d'opportunité de la même association. Merci. M. le député de Richelieu.
M. Simard: Ce qui fait problème dans ce que vous nous dites ? et vous n'êtes pas les premiers, hein? ? pour plusieurs personnes qui sont arrivées ici, je dirais même l'immense majorité des gens sont arrivés ici avec ce problème sur le rôle de l'agence, quel est le rôle confié à cette agence. Et ça varie. Les municipalités, les réseaux, enfin tous ceux qui font effectivement des constructions et qui oeuvrent dans le domaine nous disent: C'est excellent, les PPP, mais pas chez nous; alors, c'est très bon ailleurs, et on a observé ça, c'est merveilleux, mais pas chez nous parce que, nous, on fonctionne déjà très bien et on n'a pas besoin de ça. Ça pose un problème.
Un autre problème concernant l'agence, c'est quel rôle lui donner. Alors là, on entend souvent la ministre nous dire: Rôle conseil. On pourrait envisager, et je pense que... Soyons de bon compte: Qui pourrait avoir à redire au fait que le gouvernement s'équipe d'une compétence dans le domaine? Il y a déjà un secrétariat aux partenariats privé-public qui comporte six personnes actuellement. La ministre pense augmenter l'agence à 12 ou 15 personnes. L'ennui, c'est que le projet de loi n° 161 comporte tellement de volets et ouvre à tellement de possibilités non seulement dans les infrastructures, mais la prestation des services que l'idée que l'on puisse faire tout ça simplement en doublant les six personnes, on n'est évidemment plus dans le domaine du groupe-conseil, on est dans le groupe exécution, sélection des projets, promotion. Vous avez parlé de promotion tout à l'heure. Il y a un problème, c'est que cette agence se voit confier par la ministre, par le gouvernement, par le législateur, si ce projet de loi était adopté, le rôle de faire la promotion, mais en même temps il est là pour décider si c'est le meilleur mode, le partenariat public-privé, c'est le meilleur mode d'action.
Il y a un peu de contradiction de confier à un organisme de promotion le rôle de décider si c'est mieux en mode traditionnel, en impartition ou en partenariat public-privé. Là, je pense que vous allez mettre le conseil d'administration dans une drôle de situation. S'il remplit son mandat de promotion, il risque de nous lancer dans des expériences qui ne seront pas toujours les plus pertinentes. Tout ça pour vous souligner qu'il y a un problème ? vous l'avez remarqué ? sur les modes d'intervention, à la page 18. Mon vis-à-vis du parti gouvernemental l'a fait remarquer.
La loi, telle qu'elle est rédigée, est beaucoup trop floue, beaucoup trop imprécise pour être la base d'un réel progrès. Tout le monde qui est venu ici l'a fait remarquer jusqu'à maintenant, là. Au-delà de toutes les réserves qu'on peut avoir ? et j'en ai de sérieuses dans plusieurs secteurs ? le premier constat que vous faites et que tout le monde fait, c'est que tout ça est très imprécis. Vous arrivez avec des définitions de ce que doit être un partenariat public-privé qui sont tout à fait différentes de celles de la ministre. Par exemple, vous me parlez de transport, Mme la présidente de Québec. Vous me parlez de transport, des études qui ont été faites. La vision que vous nous apportez de cela ne relève pas, selon la ministre, de partenariat public-privé parce qu'il n'y a pas de construction d'infrastructures majeures dont le remboursement est étalé sur plusieurs années. C'est beaucoup plus de la gestion, un changement de livraison de services, là il s'agit de confier au secteur...
Vous voyez, on ne parle pas du tout de la même chose. Le problème, c'est que ce n'est pas précis comme définition, l'agence, il y a une confusion des rôles. Je pense que jusqu'à maintenant, quelle que soit notre position philosophique de départ ? moi, je veux être pragmatique, là, mais, vous, vous êtes en faveur de ça en principe, moi, je veux être pragmatique, d'autres s'y opposent systématiquement ? quelle que soit notre position, il faut bien admettre que, là, il y a un devoir que la ministre ? on va lui rapporter nos paroles, mais on lui dit tous les jours... va devoir retourner à sa table de travail et refaire ce projet de loi, présenter quelque chose qui correspond davantage à ce que nous disent tous les groupes qui viennent ici.
Le Président (M. Paquet): Mme Lortie.
Mme Lortie (Francine): Oui. En fait, nous, en ce qui nous concerne, on avait vraiment constaté que la loi avait et que le rôle de l'agence avait une certaine réserve. Et ce qu'on demande justement, notre proposition, c'est d'étendre le mandat de cette agence-là au secteur des services et particulièrement dans la prestation des services de transport en commun. C'était vraiment d'étendre ce mandat-là, oui, et de le préciser.
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand, ça va?
Mme Bertrand (Françoise): Pardon?
Le Président (M. Paquet): Vouliez-vous ajouter quelque chose? Excusez-moi. Oui.
Mme Bertrand (Françoise): Bien, je voudrais simplement ajouter qu'à la vue des différents commentaires j'espère que ça ne voudra pas dire, si la ministre retournait à sa table de dessin, qu'on retarde d'autant l'avènement d'un réel partenariat privé-public. Puis je reviens à mon exemple de l'autoroute 30, mais enfin on peut en prendre plusieurs. Si vous me permettez, souvent on regarde les projets en fonction de tel coût versus tel autre coût, la capitalisation, mais il faut le regarder plus globalement, c'est: Qu'est-ce que ça coûte à une société qui est la nôtre, celle qui nous est la plus chère, hein, de ne pas aller vers des grands projets qui sont requis et qu'on reporte toujours dans le temps parce qu'on ne veut pas toucher à notre endettement, parce qu'on n'a pas les moyens dans une année donnée, on craint?
Je veux dire, on ressort tous, là, du Forum des générations. On peut ne pas avoir exactement les mêmes constats, mais on observe quand même une situation des finances publiques qui sont étranglées, et conséquemment il y a beaucoup de grands projets qui sont sur la table à dessin, eux, depuis longtemps. Et nous pensons, à la Fédération des chambres de commerce du Québec, que plusieurs d'entre eux sont essentiels à la prospérité du Québec. Alors, peu importe ce qui arrivera, nous, on dit: C'est important qu'on en fasse et qu'on aille de l'avant.
Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.
M. Simard: Je ne veux pas poser d'autres questions, mais simplement faire un commentaire sur ce que vous venez de nous dire, une invitation à la prudence, pas parce que ce que vous dites est faux, là, une invitation à la prudence: effectivement il y a un manque de financement, depuis des nombreuses années, des grandes infrastructures, autant dans les municipalités que tous les services à la population, ça a été constaté. Dans le domaine municipal seulement, on a évalué ? ça varie ? mais entre 10 et 15 milliards les besoins de mise à niveau. C'est considérable.
Mais simplement je vous invite à la prudence parce que les démonstrations sont très claires dès qu'on étudie les choses: ce qui ne sera pas dépensé et n'apparaîtra pas sous forme d'emprunt, d'endettement de l'État parce qu'il est sous la forme de partenariat public-privé ne coûtera pas nécessairement toujours moins cher. Donc, si nous n'avons pas le moyen de nous payer 15 milliards sur 15 ans d'une façon, il n'est pas certain que nous ayons les moyens de nous les payer d'une autre façon. Alors, il n'y a pas de solution miracle au financement simplement parce qu'on investirait plus dans le secteur privé.
n(17 h 30)n Il y a certaines personnes ? Mme la présidente de la région de Québec mentionnait le projet de transport ? qui croient qu'il y a des économies considérables à faire non pas dans la construction, parce que la construction, elle est privée, là, dans la gestion. D'autres contestent. On a eu, hier, l'Agence métropolitaine... pas l'Agence métropolitaine, la Société des transports de Montréal qui est venue nous voir, société qui est cotée parmi les meilleures à travers le monde pour son efficience, son efficacité, qui nous dit que, non, eux font beaucoup de petits partenariats public-privé dans plein de secteurs, mais leur gestion globale est selon eux moins chère que la plupart des sociétés de transport, quel que soit le mode de propriété.
Donc, là-dessus, il y a des débats à avoir, mais je nous invite simplement à la prudence: rien n'est gratuit. Si nous voulons rénover nos infrastructures, il va falloir mettre la main dans la poche, quel que soit le mode utilisé.
Mme Bertrand (Françoise): Si vous me permettez...
Le Président (M. Paquet): Mme Bertrand.
Mme Bertrand (Françoise): ...c'est pourquoi on disait: C'est important de peut-être, à ce moment-ci, dissocier accessibilité et gratuité.
M. Simard: Ah, ça, c'est un beau débat.
Le Président (M. Paquet): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Ça va? Alors, Mme la présidente-directrice générale de la Fédération des chambres de commerce du Québec ainsi que M. Demers, Mme Lortie et M. Kirouac, nous vous remercions d'avoir participé à nos travaux.
J'ajourne donc les travaux de la Commission des finances publiques au jeudi 4 novembre 2004, à 9 h 30.
(Fin de la séance à 17 h 31)