Journal des débats (Hansard) of the Committee on Labour and the Economy
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Wednesday, September 13, 2023
-
Vol. 47 N° 20
Special consultations and public hearings on Bill 29, an Act to protect consumers from planned obsolescence and to promote the durability, repairability and maintenance of goods
Aller directement au contenu du Journal des débats
15 h (version non révisée)
(Quinze heures trois minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : Bonjour,
tout le monde. À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare
la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous
souhaite la bienvenue et je demande à tous les personnes... toutes les
personnes, pardon, dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n°29, Loi protégeant les consommateurs contre l'obsolescence programmée
et favorisant la durabilité, la réparabilité et l'entretien des biens.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente.
Mme Tremblay (Hull) est remplacée par Mme Lecours (Les Plaines);
M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Bourassa
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré); Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est
remplacée par Mme Rizqy (Saint-Laurent); Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey)
est remplacée par Mme Prass (D'Arcy-McGee); et M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve) est remplacé par Mme Zaga Mendez (Verdun).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Nous entendrons, cet après-midi, les témoins suivants : soit la
Corporation des concessionnaires automobiles du Québec, le Conseil canadien du
commerce de détail et le Centre d'études et de recherches... intersectorielles,
pardon, en économie circulaire.
Je souhaite maintenant la bienvenue à la
Corporation des commissaires... concessionnaires - j'ai de la difficulté cet
après-midi, je vais prendre un café, ça va m'aider. Donc, je me reprends, je
souhaite maintenant la bienvenue à la Corporation des concessionnaires
automobiles du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre
exposé, s'il vous plaît.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : M.
le ministre, Mme la Présidente, mesdames et messieurs les élus, merci de nous
recevoir, de nous permettre de vous éclairer dans ce projet de loi là. Je me
nomme Ian Sam Yue Chi. Je suis P.D.G. de la CCAQ, la Corporation des
concessionnaires automobiles du Québec. À mon extrême droite, vous avez maître
Julia Labrecque-Saliba, conseillère juridique à la corporation. À ma droite
immédiate, vous avez maître Gabrielle Gauthier, aussi conseillère juridique à
la corporation. À ma gauche, M. Charles Saillant, multiconcessionnaire ici, à
Québec, donc coprésident du Groupe Saillant, quatre marques à volume ici, à
Québec, qui va pouvoir répondre à vos questions, peut-être, plus techniques et
exposer sa réalité de concessionnaire.
Tout d'abord, je tiens à dire, avec tout
notre, je dirais, volonté de vous aider, qu'on est complètement en phase avec
les objectifs du projet de loi qui vise l'obsolescence programmée...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...bien,
l'élément immédiat que je vous expose, c'est que nous, les concessionnaires, on
ne se sent pas exactement impliqués lorsqu'on parle d'obsolescence des biens.
Et je vous expliquerai pourquoi immédiatement. Parce que je veux vous dire en
premier lieu qu'on est très fiers de se présenter devant vous parce qu'on a
derrière nous 890 femmes et hommes d'affaires concessionnaires dans toutes
les régions du Québec qui investissent dans leur communauté, dans leurs
affaires, bien évidemment, mais aussi au niveau communautaire. On est très,
très impliqués au niveau philanthropique dans chacune des régions du Québec. On
fait vivre, dans bien des cas, le hockey. On fait vivre aussi les milieux
culturels dans nos régions. On est là aussi pour investir dans nos médias
québécois. Vous savez, les concessionnaires sont les plus grands annonceurs sur
le marché du Québec ici. Donc, on est très fiers d'être qui on est et on fait
tourner 20 milliards de dollars dans l'économie du Québec bon an, mal
an.
Alors, cette fierté-là vient aussi avec
une certaine humilité. On a des grandes responsabilités. Vous savez, on livre
400 véhicules neufs par année, 200 000... J'ai dit 400?
400 000 véhicules neufs, 200 000 véhicules d'occasion par
année, bon an, mal an toujours, à des Québécois et on veut leur faire vivre la
meilleure expérience qui soit. C'est notre responsabilité comme concessionnaire.
D'ailleurs, j'ai mentionné que la mission de la CCAQ, elle a évolué récemment,
et désormais la corporation est là pour servir ses membres et les représenter
en renforçant la confiance du consommateur. Donc, il n'y a pas aucune
inadéquation entre les droits des consommateurs, l'expérience qu'on veut leur
offrir et le développement de nos membres que sont les concessionnaires.
Donc, le projet de loi qu'on a sous étude
devant nous vise essentiellement à augmenter les droits des consommateurs.
Nous, on dit : Faisons attention parce que le message qu'on pourrait
envoyer pourrait être que les automobiles ne sont pas des biens durables ni
fiables, alors que la réalité est tout autre. Un véhicule, ça a tout un cycle
de vie. On l'achète, on l'entretient, on le répare, et ça a toujours été. Un
véhicule, de façon générale, va arriver chez le recycleur après 10 ans
d'utilisation. Il aura peut-être deux ou trois propriétaires. Lorsqu'il arrive
chez le recycleur, bien, on prend le maximum de pièces qu'on va redistribuer,
revendre dans le marché pour réparer les seconds véhicules qui sont sur le
marché. Dans certains cas, on va réunir les pièces parce que, bon, on veut
pouvoir les remettre le plus possible sur le marché. Au bout d'un certain
moment, bien, il n'y a plus de pièces. Alors, on va démanteler le véhicule et
on va refondre tout le matériel métallique pour évidemment revaloriser ce
matériel-là. Avec ce qu'on appelle le stock, les tissus et tout ça, on fait un
matériel qui va être installé dans les dépotoirs pour éviter que des
émanations, c'est technique, là, je vous épargne les détails, mais puissent...
puissent sortir puis que la poussière lève, etc., etc. Bref, tout ça pour dire
que, contrairement à d'autres biens qui sont visés par le projet de loi, les
véhicules sont des biens qui sont revalorisés, qui sont revendus, qui sont
réparés, qui sont entretenus et sans égard au projet de loi. Ça existe déjà et
ça a toujours existé.
Il y a des éléments dans la loi qui nous
préoccupent. Vous savez, au niveau du droit à la réparation, vous avez entendu
différentes perspectives de différentes industries, dont l'après marché, qui
peuvent avoir des intérêts commerciaux évidemment à obtenir certaines
informations, mais toujours est-il qu'actuellement, en fonction d'un cadre
négocié qui s'appelle CASIS, C-A-S-I-S, l'après marché a accès à la forte
majorité de ce qui est représenté dans le droit à la réparation du projet de
loi, c'est-à-dire nommément tout ce qui est manuel de réparation, tout ce qui
est outil spécialisé et tout ce qui est formation afférente à la réparation
automobile aussi.
• (15 h 10) •
Le seul élément auquel ils n'ont pas accès
parce qu'il y a une exception dans CASIS, exceptions, je le répète, qui a été
établi par les différentes parties prenantes que sont les manufacturiers et
l'après-marché, l'AIA, l'exception, c'est les données personnelles des
véhicules. Dans la rédaction actuelle du projet de loi, on ne fait pas cette
exception-là. On parle de données télémétriques, de données sensibles qui pourraient
être affectées par le projet de loi no 25 qui est actuellement en mises en
vigueur successives, des données qui sont critiques, qui visent les gens, mais
qui sont utiles aussi. Vous savez, aujourd'hui, on a une situation qui est
assez fréquente, où un véhicule peut être accidenté. Des occupants du véhicule
peuvent être blessés, mais certains manufacturiers ont la possibilité
actuellement d'envoyer immédiatement, dès que l'accident est subi, des secours.
Or, des fois, on se questionne à savoir ça sert à quoi...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...alors,
des fois, on se questionne, à savoir : Ça sert à quoi, ces données
télémétriques-là? Bien, ça sert essentiellement, en premier lieu, à rendre les
véhicules plus sécuritaires. Maintenant, certaines personnes, certains groupes
d'intérêt vous disent qu'ils ont besoin d'avoir accès à ces données-là. On se
questionne, nous, encore aujourd'hui, les concessionnaires, pourquoi. Si c'est
pour réparer les véhicules, ils ont déjà accès à toutes les données nécessaires
à la réparation des véhicules. Alors, on a un sérieux doute là-dessus. Donc, en
prémisse ou, plutôt, en principal, dans notre présentation, je vous dirais que,
dans ce qui nous préoccupe, ça fait partie du champ le plus important de
préoccupation. Deuxième élément, loi anticitron, qui est une initiative
québécoise intéressante qui ressemble beaucoup à ce qu'on voit côté américain,
il y a plusieurs lois qui ont été votées dans le temps. Il y a aussi un
programme d'arbitrage existant déjà, là, qui s'appelle le PAVAC, qui est un
programme d'arbitrage entre le manufacturier et le consommateur lorsque le
consommateur considère qu'il a un véhicule citron. On trouve intéressant que le
législateur veuille bonifier sa loi sur la protection du consommateur pour
mettre un cadre plus strict, plus régi, plus prévisible peut-être, puis je
pense toujours aux intérêts des concessionnaires puis de la corporation de
gagner la confiance des consommateurs. Alors, on trouve intéressant qu'on
puisse légiférer sur une question comme ça, sans égard, je dirais, à l'utilité,
au bon fonctionnement de PAVAC, ça existe, ce sera toujours là. Seule chose,
c'est qu'à vouloir un peu tempérer, trouver la bonne solution, on pense que,
dans les paramètres du régime anticitron québécois qu'on propose dans le projet
de loi actuellement, on va peut-être un peu trop loin, on est peut-être un peu
plus... un peu trop restrictif.
Les concessionnaires, nous, ce qu'on
voudrait essentiellement, c'est qu'on puisse identifier les vrais citrons. On
ne veut pas générer de faux citrons. Donc, pour être plus précis, la loi
prévoit actuellement... ou plutôt le projet de loi, devrais-je dire, trois
fréquences de réparation pour faire, finalement, qualifier un véhicule de
citron. On trouve que c'est un peu trop rapide. On pense que d'avoir un minimum
de cinq visites chez le concessionnaire pour un seul et même trouble serait
plus équilibré. Et, à titre de référence, le droit américain, là, en moyenne,
est autour de cinq fréquences chez le concessionnaire pour que le véhicule soit
déclaré citron. Pourquoi cinq? Parce que, disons-le, les véhicules sont de plus
en plus complexes. Ils ne l'ont jamais été autant qu'aujourd'hui et pas pour
des raisons d'obsolescence programmée, principalement pour des raisons
doubles : efficacité énergétique et sécurité. Les véhicules sont de plus
en plus sécuritaires en fonction de différents systèmes qui peuvent être
électroniques, dont les systèmes ADAS.
Ces systèmes-là étant complexes, il arrive
des situations, je ne dirais pas fréquentes, mais il arrive des situations où
le problème ou le trouble ne se reproduit pas systématiquement. Alors, on peut
se retrouver, comme concessionnaire, à recevoir le véhicule du client avec la
description qualifiée par la personne, par le client : Voici, ça a fait
prout, ça a fait ceci, vous savez, je ne veux pas imaginer la présentation,
mais vous comprenez ce que je veux dire.
Alors, on essaie de voir : O.K. Ça peut être
ceci, ça peut être cela. On a certains indices, mais on ne réussit pas à
reproduire le trouble, de sorte qu'on dit au client : Regarde, ton
véhicule est sécuritaire, il est carrossable. Il peut continuer de rouler, mais
je ne suis pas en mesure de réparer ton véhicule présentement parce que je n'ai
pas trouvé le trouble. Quand ça se reproduira, souvent, on dit : Prends
ton téléphone, essaie de filmer, d'entendre le fameux prout ou je ne sais trop,
puis on pourra peut-être avancer un peu plus dans le processus.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
terminant.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Oh!
ça va vite, hein, ça va très vite. Alors, bref, ce qu'on aimerait, je l'ai dit,
3 à 5 mois... à cinq fois, à cinq reprises, et aussi de limiter à 24 mois 30
000 kilomètres, on pense qu'on serait dans l'équilibre atteint à ce niveau-là.
Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous sommes maintenant rendus à la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. Me Sam Yue Chi, Me Labrecque-Saliba, maître Gauthier, M.
Saillant, bonjour. Merci de participer aux travaux de la commission
parlementaire.
Vous avez abordé quelques points,
notamment sur le dernier point, sur les garanties sur la loi anticitron qu'on a
intégrée... qu'on intègre dans la Loi sur la protection du consommateur. Donc,
si je comprends bien vos commentaires, dans le fond, il y a deux volets là la
garantie citron, trois bris... en fait, trois fois le même bris à l'intérieur
de 60 000 kilomètres, ça ouvrirait la possibilité d'être qualifié de citron,
sinon 12 fois pour des réparations qui ne sont pas les mêmes à l'intérieur de
60 000 kilos, puis également le fait que le véhicule soit 30 jours en
réparation...
M. Jolin-Barrette : ...30
jours en réparation. Là, vous, vous nous dites : Écoutez, on irait plus
vers cinq réparations pour un même... une même défectuosité. Puis, par rapport
au 12, est-ce que vous souhaitez le modifier, ça?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : On
n'a pas de commentaire quant au 12, on trouve que 12 fréquences chez le
concessionnaire, pour un véhicule, effectivement, ça fait du sens, c'est beaucoup.
On espère ne pas se rendre là.
M. Jolin-Barrette : O.K. Puis
le 30 jours, est-ce que vous êtes à l'aise avec ça?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Le
30 jours nous occasionne certaines difficultés. Peut-être, Charles, si tu veux
parler de disponibilité de pièces.
M. Saillant (Charles) : Oui.
En fait, c'est la disponibilité des pièces. Puis on sort d'une pandémie, puis,
même avant la pandémie, ça arrive que plus... Je vais parler un mot en anglais,
là, «BO», là, «back order». Je ne sais pas, en français, comment on dit ça.
Mais ça, malheureusement, on ne peut pas contrôler cette disponibilité de
pièces là, puis des fois ce n'est même pas les manufacturiers qui vont
contrôler, ça va être leurs sous-traitants. Il peut arriver une guerre dans un
pays, puis les pièces sont souvent de plus en plus globales. Alors, il peut
arriver des affaires aussi qu'on a les mains liées. Puis on ne veut pas non
plus que, tu sais, ça encombre avec plein, plein, plein de réclamations que,
malheureusement, on ne peut pas... C'est juste le temps qui va les régler, là.
M. Jolin-Barrette : Puis,
selon votre expérience, est-ce que ça vous arrive fréquemment d'être en rupture
de stock?
M. Saillant (Charles) : Depuis
trois ans, oui. Mais ça, encore une fois, on le sait, toutes les chaînes
d'approvisionnement mondiales ont été perturbées et le sont encore. On livre
encore des véhicules aujourd'hui avec une seule clé à cause qu'on n'a pas
toutes les pièces, les véhicules neufs dans mes marques à moi.
M. Jolin-Barrette : Et puis,
supposons qu'on prend le contexte nord-américain, là, j'imagine, vous avez des
liens avec les manufacturiers, notamment aux États-Unis également. Bon. Dans
les 50 États, ils ont une législation qui est comparable à celle-ci. Comment
vous trouvez que ça s'inscrit, le nombre de réparations? Parce qu'aux
États-Unis, il y en a qui sont encore plus sévères que nous, il y en a d'autres
qui sont moins sévères. Vous ne trouvez pas qu'on est dans la moyenne, avec ce
qu'on propose?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Oui.
Tu peux répondre, Julia.
Mme Labrecque-Saliba (Julia) : En
fait, effectivement, on a fait des recherches chez nos voisins du Sud, là, pour
voir qu'est-ce qui se passait à ce niveau-là. Nous, ce qu'on propose, là, dans
notre mémoire, essentiellement, c'est qu'on mette à cinq tentatives, pour les
raisons qui ont été exposées, là, par M. Sam Yue Chi, minimalement à quatre,
parce que c'est ce qu'on voit, en majorité, dans les États américains. Oui, il
y a du trois, mais je ne me le cacherai pas, là, je ne viendrai pas mentir ici,
effectivement, il y a du trois, mais on considère que, minimalement, à quatre,
là, quand on fait une certaine moyenne, on considère que les États sont...
O.K., je croyais que mon micro était
fermé. M'entendez-vous toujours? Bien. Parfait, merci.
M. Jolin-Barrette : Très
bien.
Mme Labrecque-Saliba (Julia) : Donc,
on considérait, là, que quatre, c'était une moyenne, là, qui était
relativement, là, bien, mais, effectivement, cinq, là, avec ce qu'on a dit...
Donc, minimalement quatre, mais on pousserait vers le cinq, là, aujourd'hui,
c'est ce qu'on disait.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Si
je peux me permettre, il y a certainement un choix à faire, quelque chose à
arbitrer ici, puis le choix, essentiellement, c'est de dire c'est quoi pour
nous, là, collectivement, au Québec, un citron, parce que, si on est un peu
trop restrictif, bien, on va générer des citrons qui, même dans l'imaginaire
québécois, ne sont pas des citrons, puis on ne veut pas générer, évidemment, de
multiples recours inutiles qui viendraient encombrer nos tribunaux. Il y a
beaucoup de véhicules sur la route, là, disons-le. Alors, notre idée est
d'arbitrer un peu tout ça.
D'un point de vue commercial aussi, soyons
honnêtes, là, nous, on vend des véhicules, on est en affaires. Alors, bien
évidemment que, si le coût de faire des affaires devient plus important, donc
si on génère davantage de citrons alors que ce n'est pas des citrons,
factuellement et par définition, bien, il y a un coût à quelque part qui
existe qui peut évidemment préjudicier au final le consommateur. Alors, c'est
tout ça. C'est juste une question de juste équilibre. Puis, effectivement, on
pourrait lancer des chiffres, on pourrait tomber à deux, trois, quatre, cinq,
et le... tout ça reste à être arbitré. Nous, notre position... plutôt, notre
définition de «citron», cinq, ferait beaucoup de sens en regard du projet de
loi.
• (15 h 20) •
M. Saillant (Charles) : Si je
peux rajouter, le cinq fois, oui, d'accord, le 12 fois, il n'y a pas de
problème, c'est... Le 30 jours, pour revenir avec la disponibilité des pièces,
c'est un faux critère ou un faux problème, parce que nos buts, le concessionnaire,
le client et le fabricant, sont entièrement liés. Lorsqu'il se passe quelque
chose, lorsque la pièce est BO, on... en règle générale, on va passer un
véhicule à nos frais ou aux frais du fabricant, quand la pièce est BO. Alors,
on le passe au client. Il n'a pas le véhicule, évidemment, qu'il voulait, parce
qu'il veut avoir son véhicule original, sauf qu'à chaque jour, les coûts, c'est
nous qui les assumons. Alors, on a tout intérêt à régler le plus vite possible
le problème, et pas nécessairement besoin d'une loi pour nous rappeler ça.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur
la question des données du véhicule - parce que tout à l'heure vous avez abordé
cette question-là - notamment les données personnelles du véhicule,
probablement qu'hier vous avez écouté la commission à distance, probablement,
puis vous avez entendu, bon, les groupes de garagistes indépendants, de
protection des automobilistes aussi, et eux, ils disent, bien, essentiellement
qu'à 6, ça ne marche pas tellement...
M. Jolin-Barrette : ...essentiellement
K6, ça ne marche pas tant que ça, là, si on lit entre les lignes, là, puis ils
veulent avoir davantage accès aux données, notamment sur certains constructeurs
maintenant qui n'utilisent plus le même port. Donc eux, ils veulent pouvoir...
bien en fait, réparer les véhicules. Puis je comprends qu'on est dans une
industrie où il y a une question de partage de marché, notamment entre les
concessionnaires qui vendent le véhicule... Et vous avez également... vous
faites de la réparation de l'entretien de véhicules directement chez le
concessionnaire. Vos membres, c'est leur modèle commercial d'affaires. De
l'autre côté, bon, il y a les garagistes indépendants eux aussi qui réparent
les véhicules que vous avez mis sur les routes. Donc, on s'entend que, s'ils ne
vont pas chez le garagiste indépendant, ils vont chez vous. S'ils ne vont pas
chez vous, ils vont chez le garagiste indépendant. Grosso modo, là, je résume
sommairement, mais c'est à peu près ça. À moins de le faire à la maison, c'est
moins fréquent.
Comment est-ce qu'on départage ça, là, la
nature de l'information? Eux, ils nous disent : On a besoin de davantage
d'informations parce qu'il faut qu'on trafique des fois certains systèmes pour
pouvoir accéder à la donnée. Vous, vous nous dites : Écoutez, c'est des
données personnelles, c'est des données sensibles, mais on ne peut pas les
transmettre. Où on trace la ligne.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Notre
position là-dessus est fort simple. Les mêmes parties dont on parle, qui ont
des intérêts commerciaux compétitifs, soyons honnêtes, c'est ça, la réalité. Il
y a quelques années, on négocie K6, et K6 n'a fait qu'une seule exception, les
données personnelles et celles qui touchent à la sécurité des véhicules. Ce
n'est pas les manufacturiers qui ont inventé ça, ce n'est pas les
concessionnaires, ce n'est pas l'AIA, c'est tout le monde ensemble se sont
assis en disant : Ça ferait bien du sens effectivement qu'on exclue ces
éléments-là de K6.
Alors là, dans la loi, on ne les exclut
pas, puis nous, on dit : Il y a des risques pour la sécurité, puis on peut
vous donner plusieurs exemples des automobilistes. Il y a des risques de bris
de confidentialité au sens large. Oublions la sécurité automobile en tant que
telle. Il y a les risques de vol. Et à la question à savoir : Comme
réparateur, je n'en ai pas accès, bien, ça se peut que tu n'aies simplement pas
acheté l'outil afférent pour y avoir accès parce que l'outil existe, et le port
pour pouvoir sortir les données de réparation ou de diagnostic -c'est de ça
dont on parle de réparer les véhicules, pas d'accéder aux données- ça, ça
existe et l'après-marché a accès à ça en fonction de K6, justement.
M. Jolin-Barrette : Juste une
sous-question.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Vous me
parlez de l'outil, là, c'est-tu quelque chose qui est accessible d'avoir cet
outil-là. Exemple, on m'a raconté, c'est du ouï-dire, mais que, parfois pour
être accrédité, pour avoir accès aux données, ça coûte extrêmement cher pour le
garagiste indépendant.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Pour
avoir accès aux données, bien, via le...
M. Jolin-Barrette : Oui,
supposons de certaines compagnies.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : K6
prévoit le prix raisonnable, Gabrielle, à moins que je ne me trompe. Peut être
que...
Mme Gauthier (Gabrielle) : Non.
Bien, j'irais peut-être...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Oui.
Mme Gauthier (Gabrielle) : Bonjour.
En fait pour répondre à votre question, les outils qui sont disponibles, il y
en a de différents niveaux. Tu as des outils qui vont pouvoir lire tous les
ordinateurs des manufacturiers, tu en as qui vont être plus spécialisés, bien,
plus tu augmentes, bien, plus le prix va augmenter aussi. Ça fait que le
garagiste va avoir l'option de choisir avec quel outil il veut travailler, puis
il y a des fournisseurs qui vont donner les... une fois que tu as le
diagnostic, comment réparer, mais tu as aussi cette option-là, d'aller chercher
avec quel fournisseur tu veux travailler pour pouvoir obtenir les manuels
afférents, là. Maintenant, c'est rendu dans le nuage, là sur Internet, mais
essentiellement, c'est le manuel de réparation du véhicule. Donc, dépendamment
avec qui il veut travailler, quel nombre d'informations il veut obtenir, il
peut l'obtenir, mais c'est sûr qu'il y a des coûts qui vont avec ça, comme
c'est une entreprise au final...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Si
je peux me permettre, Gabrielle?
Mme Gauthier (Gabrielle) : Oui,
vas-y.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Autrement
dit, dans les fameux outils, on est dans un marché compétitif. Donc, le garage
indépendant peut acheter un OBD2 chez NAPA, à titre d'exemple, qui est une
filiale... pas une filiale, une entreprise qui vend des pièces d'après-marché,
comme il peut acheter directement du manufacturier, le même outil, avec peut
être différents niveaux de performance.
M. Saillant (Charles) : Exactement.
Si je peux compléter la réponse? C'est que ça coûte très cher pour nous aussi,
les concessionnaires, les... Ce n'est pas à cause qu'on prend dans une bannière
que l'outil est gratuit, ils nous le vendent. Il nous le vendent 4 000 $,
5 000 $, 6 000 $, 7 000 $, 8 000 $. Il y a des outils, dans
le marché général aussi, qui sont moins chers, ils sont plus génériques. Ils
font 95 % à peu près du travail grosso modo, puis on est en symbiose les
indépendants avec les concessionnaires. Il y a des jobs que je sous-traite
parce que je ne suis pas spécialisé, je n'ai pas assez de volume pour faire
cette petite affaire-là qui est bien précis, et vice versa. À 95 %, je
pense que... puis ils paient vraiment moins cher leur outil que nous, on le
paierait. Je pense que tout le monde en a... parce qu'on ne pourrait pas avoir
100 % du marché. On est déjà débordés de travail. Tous les
concessionnaires, eux aussi, ils sont débordés. Alors, c'est juste vraiment...
M. Saillant (Charles) : ...que
tout le monde ait son "fair share", puis on a déjà les informations,
on a toutes les informations qu'il faut pour régler le problème. Mais quand
c'est rendu très, très précis... moi, il y a des jobs que... de carrosserie que
je ne touche pas à tel type de voiture, parce que je n'en fais pas assez pour
être bon. Je vais perdre de l'argent à faire la job et vice versa. Alors, on s'entraide
tous. Puis quand je réfère, bien, je ne charge personne, c'est gratuit, là. Il
m'appelle pour une donnée spécifique, je vais la donner gratuitement. On
s'entraide entre... dans la même profession.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie pour votre présence. Je vais céder la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré.
Mme Bourassa : Juste... ce
n'est pas toutes les voitures qui ont le... les belles voitures, je pense à
Tesla, ils ne les ont pas. Donc, ça, il va falloir aussi penser à une autre
façon de partager ces données-là.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...intéressant,
en fait, et comprenez bien qu'on n'est pas contre le projet de loi, là, pas du
tout. On veut juste que les différentes dispositions... à la bonne place, en
bon français. Vous avez tout à fait raison de mentionner le modèle Tesla qui
pourrait être un modèle difficile en soi. Alors, le cadre légal peut servir
justement à ouvrir, on va dire, le partage dans le cas de Tesla. Mais j'ai
appris que la semaine dernière, juste pour votre information, Tesla a accepté
de signer... alors c'est tout nouveau. Je ne sais pas si le gouvernement du
Québec a provoqué ça. Tant mieux, tant mieux, alors, mais ils auraient signé...
Ça serait une belle avancée. Bravo. Alors, à votre question : Oui, la
réponse est oui.
Mme Bourassa : Parfait. Et
j'ai une question. Vous avez parlé du... qui est cette place d'arbitrage entre
les manufacturiers puis les clients. Il y a de moins en moins de cas québécois
de dossier d'arbitrage, là, les chiffres que j'avais, c'est en 2022, 26. Mais
en 2018, il y en avait 81. Donc, on voit une diminution. On me dit que... puis
vous l'avez dit vous-même, que l'anticitron viendrait peut-être pallier à des
imperfections du PAVAC. Parlez-nous de la différence, puis pourquoi anticitron
pourrait être mieux pour le client?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : En
fait, Julien, est-ce que tu aurais une perspective là-dessus?
Mme Labrecque-Saliba (Julia) : En
fait, là, ce qu'il faut savoir, c'est que le PAVAC, vous l'avez très bien dit,
et je crois que c'est la lacune actuellement, du PAVAC, c'est méconnu quand
même. Je veux dire, moi, avant de travailler à la CCAQ, je n'avais aucune idée
que ça existait, le PAVAC. Donc je pense que ça, évidemment, en mettant dans la
loi, une disposition anticitron, c'est certain que ça peut avoir ses avantages
par rapport au PAVAC, qui est, oui, un programme auquel les fabricants ont
adhéré, mais c'est un programme qui est aussi volontaire d'arbitrage.
La particularité aussi avec le PAVAC,
c'est que les décisions d'arbitrage ne sont pas publiques, quelque chose qui
est assez, là... que je sais qui est un irritant pour certains, là, dans le
secteur, là, on aimerait savoir qu'est-ce qui se passe, là, plus précisément
dans ces décisions-là, versus là, effectivement, si on vient implanter des
dispositions légales... à une disposition anticitron. Donc, vous dirais que c'est
un petit peu ce qu'on a exploré, mais, vraiment, le PAVAC est méconnu, ça gagne
à être connu, là, parce que c'est rapide pour le consommateur, surtout, c'est
gratuit, et ça évite la judiciarisation des dossiers.
Mme Bourassa : Alors, une
dernière question rapide. Vous mentionniez tout à l'heure que, bon, on est en
pénurie de main-d'œuvre partout, donc, effectivement, dans votre secteur. Je
viens tout juste de faire évaluer ma voiture, une Tesla, ils l'ont gardée
pendant 36 jours juste pour l'inspection, pour qu'elle soit déclarée perte
totale, parce qu'ils n'avaient pas le personnel pour l'inspecter avant.
Considérant que c'est les seuls qui pouvaient faire ça de par la marque, vous
ne trouvez pas que ça serait plus juste, pour le client, de pouvoir choisir
puis peut-être prendre son garagiste où les délais sont moins longs, quand vous
dites la répartition du travail.
M. Saillant (Charles) : Dans
notre cas, dans notre industrie, il y a la pénurie de personnel, mais il y
aussi le nombre de baies, de baies de service. Alors, moi, personnellement, je
n'ai pas tant de problèmes que ça à recruter du monde, mes baies de service
sont pleines. Je pourrais bien en engager d'autres, je n'ai pas d'autre baie,
il faudrait que je construise un autre building. C'est pour ça que je dis,
c'est vraiment une symbiose, on est ensemble, il va avoir autant... à peu près
de volume comme ça. Mais là, actuellement, on sort d'une pandémie, les
véhicules vieillissent. On a vendu moins de véhicules, le parc vieillit, puis on
voit qu'il y a de plus en plus de monde qui se présente à nos shops sans
rendez-vous.
Ça, c'est un phénomène qui, toutes marques
confondues, les indépendants aussi, mes partenaires sous- traitants, même
chose. Tout le monde est débordé actuellement, ça va durer encore un certain
temps, parce que je vais encore vendre moins de voitures que j'en vendais avant
la pandémie dans toutes mes marques.
Mme Bourassa : Merci.
• (15 h 30) •
La Présidente (Mme D'Amours) : Questions?
Mme la députée de Les Plaines.
Mme Lecours (Les Plaines) : Bien
sûr. Est-ce qu'il reste encore un peu de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) : Une
minute 15.
Mme Lecours (Les Plaines) : Une
minute. Rapidement. Une donnée sensible, outre ce que vous avez expliqué,
télémétrique, je comprends, mais qu'est-ce qu'un véhicule pourrait contenir
comme données sensibles?
Mme Gauthier (Gabrielle) : Je
vais pouvoir y répondre, peut-être n vous mettant dans le contexte. Vous faites
des déplacements avec votre véhicule au quotidien, le traceur GPS, si on met ça
dans les mains de n'importe qui, est-ce... tu sais, vous êtes consciente que
cette information-là pourrait...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Gauthier (Gabrielle) : ...être
ouverte, là, à qui le veut bien. C'est ça qui est... c'est surtout cette
information-là qui est dangereuse. On pourrait suivre vos déplacements en
temps réel.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Tout
ce qui est habitudes de conduite, vitesse, donc, on sait vous êtes allé où, à
quelle vitesse, en combien de temps, vous avez peut-être visité quelqu'un que
vous ne voulez pas qu'on sache que vous avez visité. On pourrait en dire
beaucoup, là, ne serait-ce que de la programmation des clés. C'est une affaire
qui est très, très sécurisée entre le manufacturier puis le concessionnaire. Ça
comporte un coût, là, je vous le dis, là, remplacer une clé.
Une voix : ...on fait signer
un document de confidentialité au garagiste, non?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Ah!
bien, ce serait le fun, mais...
Mme Labrecque-Saliba (Julia) : ...ça
va être encadré par la nouvelle loi 25, éventuellement.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci beaucoup. Nous sommes maintenant rendus sur le côté de l'opposition
officielle. Je cède la parole à Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Bonjour et bienvenue parmi nous. On est content de vous
recevoir. En fait, je suis même très contente de recevoir M. Saillant parce qu'on
va avoir une personne pratico-pratique, du terrain.
Et je comprends de votre propos, vous êtes
pour le projet de loi, mais il faudrait plus cerner la responsabilité de tous
et chacun en tenant compte de votre contexte. Donc, par exemple, moi, je
comprends, à titre d'individu, la relation d'un consommateur avec un
concessionnaire, vous, généralement, vous avez essayé... vous essayez d'avoir
une relation de confiance puis de ne pas vendre un citron, puis votre objectif,
c'est de vendre à moi, à mon conjoint puis peut-être plus tard à mon enfant si
tout va bien. Est-ce que je me trompe? Habituellement, vous essayez d'avoir une
relation de confiance.
Une voix : ...vous m'étonnez,
vous êtes très bonne.
Mme Rizqy : Je... bien, c'est
ça, là, pardonnez-moi, j'aimerais comprendre la relation entre le
concessionnaire et le fabricant. C'est ça, je pense, qu'il nous manque pour
vraiment mieux cerner, en fait, plus tard la responsabilité qui devrait, je
pense, relever davantage du fabricant que du concessionnaire. Mais j'aimerais
que vous, vous élaborez, c'est quoi, la relation que vous avez avec le
fabricant.
M. Saillant (Charles) : Je
trouve vraiment perspicace. La question est superbonne. Souvent, on pense
que... Nous, on n'a pas d'ingénieurs, on a des mécaniciens, O.K.? Les
fabricants ont les ingénieurs, ils ont des mécaniciens aussi, mais nos
mécaniciens, même si ça fait 20 ans, 30 ans d'expérience, on ne les
laisse pas aller lousse, là, quand le client vient avec sa voiture, il y a une
ligne d'aide qui communique avec le même fabricant, et non seulement il faut
faire la réparation correctement, mais il faut le faire de la façon qu'ils
veulent qu'on la fasse. Alors on est vraiment guidé par une étape à la fois, on
ne peut pas sauter aux conclusions immédiatement. Il faut vraiment suivre la
façon que c'est fait. Alors, c'est pour ça qu'effectivement on est des
commettants beaucoup plus que des magiciens.
Mme Rizqy : Mais vous, vous n'avez
pas le gros bout du bâton lorsque le véhicule arrive chez vous... dire :
Allô, Honda, ça me prend la pièce, puis ça me la prend pour demain?
M. Saillant (Charles) : Oui,
oui, bien, on va le dire, mais c'est juste que les pièces, par contre,
malheureusement, ça ne marche pas comme ça, là, tu sais, c'est vraiment une
question de premier arrivé, premier servi, là. Puis eux autres, il faut qu'ils
soient fair, il y a une question de distribution parce que tout le monde peut
dire : Ça presse, là, ça... Tout le monde lève la main à travers... le monde
lève la main pour la pièce, ou l'Amérique du Nord, dans notre cas à nous,
souvent, il y a un, deux centres de distribution pour le continent au complet.
Alors là, dans ce temps là, bien évidemment, il y a tout un système
électronique qui fait que c'est un dispatch de pièces, et cetera.
Mais pour les pièces, c'est te que tel,
pour la façon de travailler, oui, là, on peut avoir des lignes prioritaires où
est-ce qu'on a immédiatement... C'est comme un peu, si on est avec certaines
compagnies aériennes où c'est que tu es un membre privilège, puis tu peux avoir
la ligne tout de suite. Ça, oui, on peut l'avoir que... par rapport à n'importe
quelle autre personne. On a un avantage là-dessus, O.K? Mais c'est le fait d'être
dans le réseau des... dans le réseau, avec la marque. J'ai payé cher,
justement, ma marque pour pouvoir être conseillé par quelqu'un qui a construit
l'automobile pour me le dire.
Mme Rizqy : Au niveau de ce
qu'on appelle, dans votre projet de loi, là, enlevez-nous l'obsolescence
programmée, parce que nous, l'objectif, c'est de vendre des véhicules qui
roulent, là, je comprends. Et vous... tantôt, vous l'avez dit, Nous, on a des
mécaniciens, on n'a pas des ingénieurs. Donc, si jamais d'aventure il y avait
eu de l'obsolescence programmée par une grande bannière, ça ne sera pas chez
vous, ça risque d'être en amont dans la chaîne de production, n'est-ce pas?
M. Saillant (Charles) : Exactement.
Je vais vous faire un énorme aveu, par contre, j'ai... moi, j'ai les marques
japonaises. O.K., j'en ai plusieurs, mais je peux vous dire qu'il y a 20 ans,
je faisais vraiment... je faisais vraiment la pluie et le beau temps. Il y
avait vraiment une grosse différence en termes de qualité entre les voitures.
Mais maintenant, le gap de qualité s'est rétréci. Maintenant, les voitures sont
beaucoup plus fiables qu'avant dans toutes les marques. Alors, puis c'est ça...
malheureusement, il faut que je dise.
Mme Rizqy : Non, bien, c'est
correct... le goût d'aller vous voir, là.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Si
je peux me permettre...
Mme Rizqy : Oui, c'est sûr.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...de
participer à la réponse, vous amenez un point qui est fondamental, dans le
langage du projet de loi, on utilise de manière un peu invariable la notion de
commerçant et de fabricant. Alors, il faut vraiment comprendre les dynamiques
pour que les bons responsables soient dans les bonnes cases, dans le contexte
de la loi que vous définirez...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...le
fabricant, il conceptualise, il construit le véhicule. Il est responsable de la
garantie du véhicule. Alors, si le véhicule ne fonctionne pas bien, ce qui
arrive, c'est que le client arrive chez le concessionnaire. Nous, on le reçoit,
on est là pour la relation client, et on prend contact avec le fabricant pour
dire : Bien là, voici tel problème. Et le fabricant prend la décision à
savoir si la réparation devra être assumée sous garantie par le manufacturier.
Donc, si c'est le cas, bien, le manufacturier nous paie, nous, comme
concessionnaire, pour exécuter le travail pour le client. Alors, il faut faire
bien attention dans la rédaction, puis on n'a peut-être pas le temps
aujourd'hui d'entrer dans chacune des dispositions, mais de mettre les bons
responsables dans les bons articles pour que les gens qui sont redevables
puissent assumer leurs responsabilités, en quelque sorte.
Mme Rizqy : Mais moi, là, ce
que je comprends de votre propos, c'est que, lorsqu'il est question d'avoir des
pièces, la conceptualisation d'un véhicule, l'ingénierie du véhicule, tout ça,
ce n'est pas dans votre cour à vous, c'est dans la cour du fabricant. Puis même
si vous étiez les gens les plus bien intentionnés de respecter la loi, c'est
que vous n'avez aucun levier par rapport à ça.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Comme
concessionnaire, la réponse, c'est effectivement non. Même chose pour avoir les
véhicules. Des fois on aimerait en avoir plus, des fois moins, mais on n'a pas
beaucoup de contrôle sur les allocations qui arrivent sur le marché du Québec,
comme concessionnaire, j'entends.
Mme Rizqy : Là, pour ma
gouverne, il faut vraiment comprendre pour s'assurer que le projet de loi soit
bon d'un point de vue une fois qu'il est écrit, mais moi, je dis souvent :
C'est bien beau, là, dans la vraie vie, le test de la réalité. En ce moment,
dans les pièces, ça peut prendre pour... Là, tantôt, vous avez parlé de la
deuxième... qu'on est en attente, mais pour les autres pièces, est-ce que
30 jours, c'est suffisant ou vous allez me dire : Non, c'est
impossible, dans l'état actuel des choses, de respecter un 30 jours?
M. Saillant (Charles) : C'est
à cause qu'il va y avoir des cas... Ah! Excusez-moi.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Non,
ça va.
M. Saillant (Charles) : C'est
beau? O.K. Il y a certains cas... il ne faudrait pas déclarer un citron
uniquement parce que la pièce n'est pas disponible. Mais ça peut arriver. La
façon que la loi est écrite, ça peut arriver. Il va y avoir des véhicules que,
des fois, une pièce peut... et on attend six mois pour une pièce. Ce n'est pas
que le véhicule est un citron, c'est que la pièce n'est pas disponible parce qu'elle
est fabriquée une seule place dans le monde... il y a un tremblement de terre
ou je ne sais pas ce qui peut arriver. C'est juste cette affaire-là.
Au niveau, par contre, de revenir
plusieurs fois, là, je pense que vous rejoignez beaucoup, beaucoup de monde
qu'effectivement, même pour moi, en tant que consommateur, c'est impensable de
venir plusieurs fois soit pour le même problème ou soit pour une succession de
problèmes. Je trouve que, là, il y a une vertu à cette loi-là, effectivement.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Si
je peux me permettre, Charles, je vais me permettre un mauvais jeu de mots,
mais les situations qu'on voit actuellement sont autogérées, de sorte qu'on ne
laisse aucun client en reste. Dans le sens que si on n'a pas la pièce que le
véhicule... c'est une pièce importante, le véhicule ne peut pas rouler, bien,
on prête un véhicule.
Mme Rizqy : O.K.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Alors,
il n'y a pas de Québécois présentement qui sont dans une situation non
souhaitable en raison de non-disponibilité de pièces. Le problème se situe à
quelque part entre le concessionnaire puis le manufacturier, puis on a hâte de
recevoir la pièce pour passer au suivant, puis diminuer nos coûts de
«goodwill», là, de fournir un véhicule au client, mais le client ne subit pas
les conséquences directes de ne pas avoir accès à la pièce actuellement,
malgré, je vais dire, toutes les difficultés qu'on a eues en termes
d'approvisionnement depuis 2020, là.
Mme Rizqy : Au niveau d'une
réparation à un prix raisonnable, qu'est-ce qui serait raisonnable, selon vous?
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Ça,
je pensais vous poser la question. Je ne pensais pas y répondre.
Mme Rizqy : Ce n'est pas
défini, alors.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Ce
n'est pas défini. Alors, bien, on a beaucoup de difficultés avec cette
disposition-là, parce que, vous savez, être en affaires, c'est d'être dans des
situations parfois chaotiques, imprévisibles. Alors, on va chercher de la
prévisibilité là où on peut en avoir. Et un des éléments en affaires qui est
crucial, c'est combien je vais vendre mon produit. Alors, pour nous, ça amène
une couche d'imprévisibilité, certes. Et c'est quoi un prix raisonnable? Tout à
fait. C'est difficile d'y répondre. J'estime qu'on est dans un marché hautement
compétitif.
• (15 h 40) •
Tu sais, on parlait d'après-marché,
tantôt, on parlait des concessionnaires. Bien, je vais vous le dire, c'est deux
industries florissantes, là. L'après-marché, j'ai regardé un peu le rapport
annuel, je voulais m'y intéresser davantage dans les derniers temps. C'est une
très belle et grande industrie de 7 milliards de dollars ici, au
Québec. Ça va bien. On n'est pas devant une situation difficile. Alors, prix
raisonnable, bien, marché compétitif avec une compétition saine de compétiteurs
qui vont bien, de multiples bannières, point S, concessionnaires, Canadian
Tire, garages indépendants, Lebeau Vitres d'auto, on a un écosystème bien
établi. Puis je comprends très bien qu'on veut coller l'automobile au iPhone
et/ou aux laveuses sécheuses, mais vous comprenez, je pense, assez clairement
que c'est n'est pas la même réalité. Donc, on n'a pas à promouvoir
l'installation d'une industrie de l'entretien du et de la...
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : ...la
réparation du véhicule, elle est déjà existante puis elle est saine.
Mme Rizqy : Donc, si je peux
résumer votre propos, on devrait distinguer ici dans le projet de loi, les
véhicules versus tout ce qui est les autres biens, électroménagers, produits
électroniques. Parce que, de toute évidence, c'est sûr que, si vous essayez de
réparer votre toaster, le seul dommage sera chez vous dans votre cuisine, alors
que, si quelqu'un essaie de réparer un véhicule, le dommage peut être beaucoup
plus grand et exposer le risque à d'autres personnes.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Absolument,
vous avez raison. Mais il reste qu'il y a un univers actuel de gens compétents,
et ce n'est pas que les concessionnaires, là. Je veux dire, il y a des
bannièrés dans l'après marché qui sont ultra compétents aussi, qui peuvent
réparer les véhicules. Il ne faut juste pas pousser trop, trop rapidement...
Actuellement, il ne faut pas, dans un objectif de faire mieux, occasionner des
impacts négatifs collatéraux, essentiellement.
Mme Gauthier (Gabrielle) : ...
Mme Rizqy : Oui, allez-y,
oui, oui.
Mme Gauthier (Gabrielle) : J'aimerais
juste rajouter peut-être, là, un peu pour vous éclairer. Bien, au niveau du
prix... raisonnable, notamment donc dans l'entente qui a été signée au
Canada... on parle du prix commercialement raisonnable. Est-ce que... On
n'établit pas des critères fixes, mais on prévoit des moyens pour déterminer un
prix raisonnable. Je ne vous dis pas qu'on vous dit de mettre tout ça, mais
c'est peut-être quelque chose à s'inspirer. Par contre, c'est sûr que, d'abord,
on mentionne que c'est déjà régi par...
Ensuite, comment est-ce qu'on peut venir
mettre un prix raisonnable sur des services qui ne sont pas 100 % les
mêmes? Quand on est chez un concessionnaire ou chez un garage indépendant, mais
avec des certifications de manufacturiers précises, on a un service qui est
offert de haute qualité. Quand vous allez chez un concessionnaire agréé, bon,
par exemple, vous allez voir, M. Saillant, M. Saillant va vous
garantir que la réparation qu'il va faire correspond aux normes de sécurité et
aux normes environnementales aussi que le manufacturier prévoit puis que le
manufacturier doit suivre. Donc, lui, il a sa responsabilité puis il s'assure
que les techniciens qui travaillent sur vos véhicules ont cette
certification-là. Donc, vous avez un service, vous avez une compétence en
allant chez un concessionnaire. Ça va être la même chose si vous allez dans un
garage indépendant, ils n'auront pas toutes les mêmes certifications, mais
certains d'entre eux vont se spécialiser et vous allez pouvoir choisir votre
garage en fonction de ça, pas juste concessionnaire, n'importe quelle autre
bannière que vous pouvez avoir. Donc, les prix vont varier en fonction du
service que vous avez. Je vois mal comment on peut établir un prix raisonnable
pour une réparation sur un véhicule.
M. Sam Yue Chi (Ian P.) : Si
je peux me permettre, je ne suis pas législateur, vous en êtes. Je suis
juriste, toutefois. Moi, je voyais cette mesure-là de prix raisonnable comme
une mesure de soutien, O.K., au droit à la réparation. Dans le sens que, sans
mesures de prix raisonnables, comment développer un droit à la réparation qui
se soutient? Autrement dit certains joueurs, je les nommerai, tient, je ne suis
pas gêné de nommer Apple, à supposer qu'on veuille bâtir un droit à la
réparation, il faut que le prix soit raisonnable de la réparation, sinon on ne
réparera jamais. On est d'accord là-dessus? Les véhicules actuellement, ils
sont réparés, imaginez-vous donc.
Mme Rizqy : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...d'opposition...
le premier groupe... c'est-à-dire l'opposition officielle. Étant donné que le
deuxième groupe d'opposition n'est pas en mesure de prendre le temps, est-ce
que vous désirez... Il vous resterait quatre minutes.
Mme Rizqy : Bien, oui,
certain.
La Présidente (Mme D'Amours) : Allons-y.
Mme Rizqy : Je crois que M.
Saillant voulait aussi ajouter... mais je vais vous laisser compléter votre
phrase et par la suite...
M. Saillant (Charles) : ...simplement
compléter. Mes collègues ont très bien répondu, mais, en tout cas, j'ai hâte de
voir la loi sur les avocats pour les honoraires raisonnables. Mais, ceci étant
dit... Ça, c'est juste mon opinion.
Mais non, pour revenir à votre question,
quand vous disiez vraiment exclure l'automobile du reste, quand on regarde dans
la loi, dans sa prémisse... Puis c'est sûr que, quand on disait : C'est
vraiment l'obsolescence programmée... Parlez à n'importe qui, puis là on n'y va
même pas scientifique, là, mais je vous défie de trouver quelqu'un dans votre
entourage qui a un feeling que les automobiles, elles sont de moins bonne
qualité qu'il y a... ou moins fiables qu'il y a 20, ou il y a 30, ou
40 ans, ce qui n'est peut-être pas le cas pour certains autres appareils
ménagers qui font peut-être l'objet de la loi aussi.
Alors, on est comme dans une autre
prémisse, là. La loi est bonne, ceci étant dit, il faut l'appliquer, mais on
n'est pas pantoute dans la même dynamique que les autres produits qui sont
aussi dans cette loi-là. ...que, oui, je pense, ça vaut la peine d'avoir une
section séparée pour l'automobile.
Mme Rizqy : Donc, section
séparée, garantie citron, 5 visites que vous proposez... pour les
12 différentes réparations. Juste en terminant, parce que là, vous m'avez
fait sourire puis j'ai comme oublié ma dernière question.
Une voix : ...
Mme Rizqy : Ah oui! Bien,
non... Bien, honnêtement, moi ça conclut, mais je vous dis d'entrée de jeu, vu
qu'on va faire l'étude détaillée par la suite...
Mme Rizqy : ...si vous êtes
disponibles, peut-être, pour des questions plus techniques, lorsqu'on arrivera
à l'étude détaillée, ce serait apprécié, pour vraiment distinguer la
responsabilité. Mais je comprends qu'on pourrait juste se concentrer, les
véhicules, pour ce qui est garantie citron, puis, par la suite, s'assurer que
la responsabilité, lorsque c'est vraiment plus à propos que ce soit celle du
fabricant, pour s'assurer que M. Saillant ne soit pas toujours à la Cour des
petites créances, là...
M. Saillant (Charles) : Bien,
c'est ça. Vous avez tout compris.
Mme Rizqy : Parfait. Merci
beaucoup de votre temps. Un immense merci pour vos statistiques aussi, merci de
m'avoir éclairé au niveau de la moyenne américaine. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Mesdames,
messieurs, merci beaucoup de votre contribution à nos travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre aux prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 47)
(Reprise à 15 h 51)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue au Conseil
canadien du commerce de détail. Je vous rappelle, messieurs, que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
commencer votre exposé.
M. Rochette (Michel) : Parfait,
bonjour. Merci, Mme la Présidente. Merci, MM. et Mmes les députés, M. le
ministre. Mon nom est Michel Rochette, je préside le Conseil canadien du commerce
de détail pour le Québec. Et mon collègue avec moi, Apraham Niziblian, qui est
directeur, Affaires publiques et gouvernementales, avec...
M. Rochette (Michel) : ...Donc,
merci de nous accueillir et de nous permettre de prendre part à la discussion.
C'était fondamental puisqu'on était en quelque sorte assez visés par le projet,
à tout le moins, nos membres étaient visés.
Il faut le rappeler, le commerce au
détail, au Québec seulement, c'est 500 000 travailleurs. C'est une
immense industrie. Et les commerçants qui servent les Québécois sont dans
toutes les régions, dans chaque village. Ils font partie du quotidien des gens,
il faut le rappeler. Ils les aident à se nourrir, se vêtir, se loger, entre
autres. Et c'est important évidemment de les impliquer d'une quelconque façon
dans la discussion puisque les changements qui seront proposés dans le projet
de loi n° 29, bien, vont changer considérablement les obligations qui
encadrent les... leur relation avec les citoyens.
Un de nos objectifs, vous l'avez sûrement
vu dans le mémoire qu'on vous a fait parvenir plus tôt, c'est d'être
constructifs et d'éviter le plus possible les dommages collatéraux. Comme on
sait, l'enfer est pavé de bonnes intentions, des fois, alors... et comme on dit
dans le monde des affaires publiques, le détail... Le diable se cache souvent
dans les règlements. Donc, un de nos objectifs, donc, c'est de s'assurer qu'on
réussisse correctement à protéger les consommateurs, parce que c'est l'objectif
du projet, sans que ces derniers soient perdants de certains changements qui
découlent du projet diminue.
10 minutes, c'est court, alors on va
essayer de se concentrer sur quelques aspects plus fondamentaux du projet de
loi. Notre mémoire couvre un peu plus largement, et les questions permettront
certainement d'aborder un peu plus de sujets.
Les trois grands sujets que je vais
aborder, qu'on va aborder avec vous, d'une part, c'est, vous l'aurez deviné, le
nombre d'éléments qui seront déterminés par règlement plus tard est colossal.
Ils sont non seulement nombreux, mais les implications sont probablement plus
considérables que les éléments déjà inscrits dans la loi. Les produits, quels
produits, pendant combien de temps, quel type de pièces et à quel coût :
tous ces éléments seront encadrés par des règlements futurs. Inutile de vous
rappeler qu'un règlement, contrairement à une loi, ça ne se discute pas en
public avec la même transparence qu'à l'Assemblée nationale. On y reviendra.
D'autre part, il faut distinguer le rôle
et la responsabilité du manufacturier de ceux des commerçants qui ont pignon
sur rue au Québec. Le projet de loi semble considérer le commerçant comme s'il
avait conçu et fabriqué les produits qu'il vend. Inutile de rappeler que ce
n'est pas le cas.
Et enfin, de manière plus générale, bien,
le consommateur lui-même. Son accès aux produits, le prix de vente, la
disponibilité des produits, les enjeux de sécurité : Tous ces éléments
seront touchés par le projet de loi. Et on veut éviter évidemment que le
consommateur prenne le chemin de sites de vente et de revente en ligne qui ne
seraient pas soumis aux mêmes règles.
D'emblée, pour commencer, on partage la
volonté du ministre et du gouvernement de mieux protéger les consommateurs. Le
Québec bénéficie déjà d'une loi solide, la Loi de la protection sur le
consommateur, et chercher à la renforcer est tout à fait normal et louable. On
est évidemment sensibles aux propos des associations de consommateurs, de
protection du consommateur, notamment ceux qu'on a entendus hier, et on
collabore déjà avec l'Office de la protection du consommateur sur une base
régulière.
Il y a déjà quelques mois, on demandait à
l'OPC de nous aider à mieux comprendre les pratiques à corriger chez les...
chez certains détaillants et viser de meilleures façons de faire chez ceux-ci
afin d'être proactifs dans l'amélioration de la relation entre eux et les
consommateurs.
Une des pièces maîtresses du projet de
loi, c'est la mise en place d'une garantie de bon fonctionnement. À
l'article 38 de la LPC, on greffe plusieurs articles, vous le connaissez
mieux que moi, le projet, donc d'une liste, une longue liste de produits qui
seraient touchés par la nouvelle garantie. On y précise que, par simple
règlement, on pourrait ajouter tout autre produit à tout moment. Il est
également indiqué que la durée de la garantie serait, elle aussi, déterminée
par règlement.
Même un peu plus loin, en modifiant
l'article 39, on ajoute que c'est par règlement qu'on obligerait un
détaillant, entre autres, à garantir toute pièce de rechange, l'accès à des
services de réparation et même les coûts qui y sont liés, la braquette des
coûts. La liste des règlements ne semble pas avoir de limite, mais les
obligations sont considérables et les conséquences sont très sévères.
Donc, il faut, à notre avis, encadrer
cette ouverture réglementaire là. C'est pourquoi, dans notre mémoire, on
recommande la mise en place d'un... Le nom, on pourrait l'améliorer si vous
voulez, mais d'un comité consultatif qui pourra aider le gouvernement à élaborer
les futurs ajouts réglementaires. Ce comité devrait être constitué, on le
croit, à parts égales de membres représentant les détaillants et les fabricants
et aussi les associations qui représentent les consommateurs, évidemment l'OPC
et des membres de ministères à définir, mais notamment l'économie. Ce comité,
on le souhaite, devrait être au cœur des réflexions et non pas seulement
informé une fois que les changements réglementaires seraient déjà élaborés.
À titre de rappel, je pense que c'est
important de le rappeler, lorsque la France a mis en place son indice de
réparabilité, qui affecte toute l'industrie, il faut rappeler que la démarche
en a été une de concertation qui a impliqué, entre autres, avec l'industrie, au
moins, et c'est ce qu'on a... c'est ce qui a été précisé, au moins pas moins de
70 rencontres de travail en amont, ce qui a permis du même coup une réelle
implication, une intégration dans les pratiques. Quand on veut...
M. Rochette (Michel) : ...changer
les façons de faire chez les fabricants ou les détaillants, le mieux à faire,
c'est de les intégrer dès le début du processus. Donc, on croit que ce comité
aurait un rôle fondamental.
Sur la question du rôle et de la
responsabilité du manufacturier par rapport à ceux des commerçants qui ont
pignon sur rue au Québec, encore une fois, on dirait que le projet de loi
cherche un peu à pénaliser les commerçants du fait qu'il n'y a pas vraiment de
fabricant d'électroménagers ou d'électronique au Québec, les produits qui sont
listés, entre autres, dans la loi. On demande aux détaillants, entre autres, de
garantir toutes les pièces de rechange de tous les produits de chaque modèle
qu'il vend en magasin ou sur son site Web, pour une durée elle aussi définie
plus tard par règlement. On demande d'assurer l'accès aux pièces et même
d'assurer que les outils soient couramment disponibles et que ces outils ne
causeront pas de dommage. Il faut rappeler que le fabricant, lui, peut s'en
assurer, mais un détaillant québécois peut vendre jusqu'à des centaines de
produits visés par la loi, les marques, les modèles, les futurs modèles, qui
contiennent dans certains cas jusqu'à des centaines de pièces. Alors, il faut
juste vous mettre à la place du détaillant et du commerçant.
Puis il faut le rappeler à chaque année,
parce que c'est aussi ce dont on parle dans les produits qui sont visés, les
innovations sont telles qu'on retrouve des matériaux par exemple plus légers,
résistants, recyclés, recyclables ou des moteurs ou des batteries plus efficaces,
des écrans tactiles, des capteurs, des systèmes d'efficacité énergétique,
l'accès au WiFi, la reconnaissance vocale, le contrôle à distance, tout ça, ce
sont des ajouts qui se greffent année après année à tous ces produits. Demander
au commerçant de porter sur lui ou elle la connaissance du fin détail de chaque
produit, vous savez que ce n'est tout simplement pas possible.
Puis on va jusqu'à demander aux
administrateurs, personnellement, en fait, à viser les administrateurs
personnellement, dans le cas de sociétés, en cas de problème à respecter une
des obligations. Donc, c'est des implications considérables. Et, pour nous,
c'est donc fondamental de distinguer la responsabilité réelle qui devrait
reposer sur les épaules des manufacturiers vers ce celle des détaillants que
l'on représente.
Enfin, de façon plus générale, le
consommateur lui-même, son accès aux produits, le prix de vente, les enjeux de
sécurité, ce sont tous des éléments qui sont touchés par le projet de loi. Il
faut éviter, par exemple, que, sur un commerce, sur une étagère d'un commerce,
quand on trouve une série de machines à café, il y en a une à 30 $ puis il y en
a une jusqu'à 1 000 $. Forcément, on sait qu'il y a des machines pour tous
les portefeuilles. Il faut éviter d'arriver à une réglementation aussi sévère
que tout ce qui va rester de possible à vendre, c'est une cafetière à
1 000 $ parce que les autres ne respectent pas une ou l'autre des
contraintes. Alors, il faut juste garder en tête que le consommateur, au final,
c'est lui qui doit payer le prix des changements réglementaires. Si la loi
devient trop contraignante, bien, on devine quel produit va disparaître en
premier.
Donc évidemment, du même coup, nous, on ne
souhaite pas que la loi devienne un genre de loi qui limiterait les innovations
technologiques, vous le comprendrez, ou qui limiterait les Québécois d'avoir
accès à des produits ou, pire encore, les diriger vers des sites de vente ou de
revente en ligne qui n'ont pas du tout les mêmes obligations, les mêmes règles à
respecter et encore moins tout ce qui touche la sécurité ou les services après
vente, puis enfin tout ce qui amènerait le citoyen à chercher à faire réparer
par lui-même ou des tiers, on y reviendra dans notre mémoire, un peu plus loin,
mais sans autre encadrement sur le type de réparation qui peut être fait par
qui, vous devinez que tout ce qui concerne notamment les données, les
informations personnelles, tout ce qui peut encadrer la sécurité à la fois du
produit et des données qu'il contient. On laisse un peu le consommateur dans le
fond sur son propre chemin à essayer de deviner qu'est-ce qui... qu'est-ce qui
encadrerait ou assurerait sa sécurité. Donc, il faut aussi penser aux citoyens
et aux consommateurs dans l'élaboration du projet de loi.
• (16 heures) •
Bref... ah! puis je ne peux pas m'empêcher
de passer un commentaire sur... ce n'est pas le but de notre mémoire, mais sur
le fait que le projet tel que rédigé obligerait en quelque sorte d'avoir ou de
produire des pièces de rechange en quantité phénoménale pour tous les produits
visés, puis il n'y a pas de limite, mais les obligations sont réelles. Donc, on
imagine la quantité de pièces de rechange qui pourraient être à tout le moins
être assurément disponibles en sol québécois, juste pour le Québec, ça
demanderait et ça obligerait, si des produits restaient tels qu'ils sont,
d'avoir une somme incalculable de pièces. Je ne suis pas certain qu'elles vont
toutes prendre le chemin de la recyclabilité. Donc, il faut garder aussi en
tête... c'est un élément qui me fascine.
Pour le reste, dans tous les cas, on est
ici à votre collaboration. On sait que la vraie prochaine étape, la plus
importante, c'est l'étude détaillée en commission. Sachez que nous, on s'offre
d'être partenaire, d'être collaborateur, d'aider. Évidemment, les fabricants ne
sont pas à la commission, les autres détaillants non plus. Donc, il y a peu de
personnes qui représentent l'industrie, pourtant visée par le projet de loi.
Mais aux meilleurs de nos connaissances, et de nos... et des représentants...
des représentations que l'on fait au nom de nos membres, bien, on va tenter
d'être utile, pertinent et d'améliorer le projet de loi pour éviter qu'il n'y
aucun dommage collatéral qui toucherait à la fois les consommateurs et les
commerçants québécois.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, merci pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange. M. le ministre, la parole...
16 h (version non révisée)
La Présidente (Mme D'Amours) : ...est
à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. M. Rochette, M. Niziblian, bonjour, bienvenue à l'Assemblée.
Merci pour la présentation de votre mémoire dans le cadre de l'étude du projet
de loi n° 29.
Je reviens sur votre exemple de machine à
café entre 30 $ puis 1 000 $. Je comprends qu'il y a différents
types de machines. Supposons qu'un consommateur québécois achète une machine à
café, là, à 300 $, c'est quand même une somme substantielle pour les
consommateurs québécois, puis la machine, elle, brise. Et là, supposons,
actuellement, il n'y a pas de pièces de disponible. Donc, le consommateur
québécois, où le coût de la réparation est très élevé, puis ça lui revient
quasiment aux deux tiers du prix de la machine, qu'est ce qu'on fait dans ce
genre de situation là, supposons si on n'adopte pas la loi, là? Parce que ça,
ça s'applique sur le cas d'une cafetière, mais on peut prendre l'exemple pour
un lave-vaisselle, pour réfrigérateur. Puis je pense que vous êtes au courant,
là, des types d'exemples, là. Comment vous voyez ça? Qu'est-ce qu'on fait? Puis
ma question sous-entend aussi, puis je pense que ça va être dans votre réponse,
le fait que peut-être vous voudriez avoir une distinction entre le détaillant
puis le fabricant.
M. Rochette (Michel) : Bien,
à mon avis, quand on dit : Le diable se cache dans les détails, dans ce
cas-ci, il faut s'assurer que les bonnes personnes portent la bonne
responsabilité. Dans le cas hypothétique où une machine se retrouve avec pas de
pièces de rechange et/ou l'absence d'outils, légalement, je comprends qu'il
faut agir, mais est-ce que c'est le fabricant ou le détaillant qui porte la
responsabilité? Le projet de loi, lui, ne fait pas de nuance. Il indique que c'est
un ou c'est l'autre. Il a une absence de fabricants de ces produits au Québec,
on comprend que c'est le commerçant, qui qu'il soit, quelle que soit sa
grandeur, sa grosseur et son emplacement au Québec. Donc, il porte une
responsabilité qui est colossale sur une durée de temps qui n'est pas définie
et pour laquelle on dit qu'éventuellement il va le savoir et qu'il aura l'obligation
de fournir les pièces. Et à défaut de trouver à la fois la réparation, et on a
vu le dossier de La Presse tout récemment qui rappelle à quel point la
pénurie de main-d'œuvre, on ne le rappellera jamais assez, touche tous les
corps de métiers, en l'absence de réparateurs ou d'accès à la réparation ou
accès à une pièce... Il faut le rappeler... Une parenthèse.
Vous savez très bien que les fabricants
eux-mêmes ont des usines, voire un peu partout à travers le monde. Ils ont des
relations avec des fournisseurs de partout sur la planète. Déjà que, pour le
fabricant, c'est impossible de garantir des pièces, imaginez pour le commerçant.
Donc, de lui dire qu'il devra ou qu'elle devra garantir l'accès aux pièces et à
la réparation, sinon on doit rembourser le prix tel quel, sans autre nuance, ça
le met un risque dans tous les cas et sur un nombre d'années incalculable. Tout
ça, encore une fois, ce sont des portes ouvertes réglementaires sur lesquelles
il faut, à tout le moins, donner un peu de précision, là.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends que vous nous invitez par voie réglementaire à préciser certaines
informations. Je vous rassure, c'est ça qui est déjà prévu. Dans votre mémoire,
vous dites que le processus réglementaire n'est pas très transparent. Vous me
permettrez de dire que je suis en désaccord avec vous parce que, bon, il y a
une prépublication de 45 jours, les industries, les...
M. Rochette (Michel) : Oui.
Je n'oserais pas comparer, évidemment, un processus législatif à un processus
réglementaire. Vous le savez comme moi, une large partie des règlements, on va
se le dire, sont souvent dévoilés en plein mois de juillet ou juste avant Noël.
Le processus de consultation étant ce qu'il est, on n'a pas accès à toutes les
données qui sont données. On ne sait pas qu'est-ce qui a été retenu comme
commentaire. Et quand on apprend la publication finale, c'est après qu'il ait
été voté par le Conseil des ministres. C'est plus contraignant, c'est-à-dire,
ça a une certaine flexibilité parce qu'on n'a pas besoin de passer en
commission parlementaire, mais, à tout le moins, il n'y a pas de transparence.
Donc, il faudrait juste s'assurer, à tout le moins, de se donner quelques
outils d'encadrement. Je ne recommande pas la voie réglementaire, mais je dis
que, puisqu'elle est choisie, qu'elle est suggérée, encadrons au moins le
processus réglementaire pour éviter que ça se fasse complètement derrière des
portes closes, sans une certaine forme de transparence pour le public.
M. Jolin-Barrette : On va
juste mettre quelque chose au clair tout de suite, là, je suis vraiment en
désaccord avec vos propos puis je les trouve un peu glissants quand vous
laissez prétendre qu'un État démocratique comme le Québec, que la voie
réglementaire, elle n'est pas transparente, alors que c'est prévu à la Loi sur
les règlements du Québec. C'est prévu avec un processus encadré avec
prépublication, ensuite avec édiction et les gens sont consultés. C'est paru à
la Gazette officielle du Québec, puis l'organe de diffusion des décrets
gouvernementaux, des publications réglementaires, ça se fait à la Gazette
officielle du Québec. Donc, je comprends, par vos propos, que vous êtes en
désaccord avec le mode de fonctionnement législatif et réglementaire qui
gouverne notre Assemblée puis les lois du Québec.
M. Rochette (Michel) : Je
suggère seulement de bien encadrer un processus.
M. Jolin-Barrette : Puis il y
a une autre nuance aussi à apporter. Vous dites : Tous les règlements sont
adoptés avant Noël puis l'été. Écoutez, un, ce n'est pas vrai. Deux, je suis en
désaccord. Je pense que vous devriez apporter davantage de nuances...
M. Jolin-Barrette : ...Relativement
à ce type de propos là. Mais revenons sur le fond des choses. Donc, pour vous,
ce qui serait souhaitable, je comprends que vous souhaitez qu'on vise davantage
les fabricants et moins les détaillants. J'ai une question pour vous, par
contre. Le consommateur québécois, lui, quand il achète un bien, supposons que
le bien, il ne fonctionne pas, il s'est adressé... En fait, il a été réaliser
sa relation d'affaires dans un établissement physique, bien souvent sur le
territoire québécois. Le fabricant, vous l'avez dit, il n'est souvent pas sur
le territoire québécois. Donc là, si on n'encadre pas ça, qu'est-ce que le
consommateur québécois va faire en lien avec son droit à la réparabilité ou la
lutte à l'obsolescence programmée? Il va prendre le téléphone, il va appeler,
supposons, en Corée, puis il va dire : ma laveuse, elle ne fonctionne pas?
Parce que c'est un peu ça, là, la réalité
à laquelle on est confrontés. Nous, on cherche une piste de solution, mais je
serais curieux de vous entendre là-dessus.
M. Rochette (Michel) : Bien,
en fait, oui. Puis J'aimerais.... Bien, on peut aussi poser la question dans
l'autre sens : comment on s'assure et comment ceux qui ont rédigé les
bases du projet de loi se sont assurés qu'on ne met pas à risque les
commerçants au Québec, quels qu'ils soient, en leur obligeant à avoir des
responsabilités qu'ils ne pourront peut-être pas répondre? Puis, ce n'est pas
parce que... Ce n'est pas à défaut de vouloir, hein? C'est à défaut d'être
capables.
Évidemment, ce que ça veut surtout dire,
c'est que dans certains cas, on va devoir limiter les produits qui vont entrer
sur les étagères, n'étant pas capables de garantir la totalité des pièces qui
composent le produit. Si c'est le cas, ça sera une décision qu'on aura prise de
façon transparente ici. Mais il faut juste s'assurer qu'on a prévu le coup.
Ce que nous, on souhaite, c'est que quand
on fixe des responsabilités par règlement, qu'on s'assure de mettre les
commerçants, les détaillants... Et on le sait qu'on peut mettre les fabricants
autour des tables pour discuter avec eux. L'objectif, je crois, c'est de
transformer l'industrie, c'est de provoquer des changements à la fois chez les
consommateurs dans certains cas, pour les conscientiser sur le fait d'acheter
beaucoup et également sur les fabricants et les détaillants, sur leur façon de
produire. Bien, pour faire provoquer des changements de comportement, il faut
impliquer les gens et les asseoir autour des mêmes tables.
Puis je réitère, parce que je dois le
mentionner, je ne critique pas le processus réglementaire et je ne dis pas que
tous les projets sont dévoilés en juillet et en décembre. Il y en a beaucoup.
Et ce n'est pas un processus qui est aussi transparent que celui auquel on
assiste présentement, où les diffusions sont en direct, et on a des règles qui
sont claires. Et, autour de la table, on peut inviter plusieurs personnes et
même faire des consultations publiques, ce qui n'est pas ce qui entoure,
évidemment, le projet de règlement.
Puis je vous réitérerais qu'on a voulu
participer à la commission. Il a fallu faire beaucoup de démarches pour
finalement être entendus. Et malgré tout, c'est une des tribunes ici qui est
les plus ouvertes au Québec, donc d'où la nuance sur la part réglementaire, sur
l'approche réglementaire, forcément.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Jolin-Barrette : Bien,
Écoutez, on est heureux de vous accueillir à l'Assemblée nationale. Puis je
pense que votre demande d'être entendus a été acceptée. La démonstration, c'est
que vous êtes là aujourd'hui.
M. Rochette (Michel) : Oui.
Merci.
M. Jolin-Barrette : Mais d'un
autre point de vue, puis moi, je vous le suggérerais aussi, la voie
réglementaire amène beaucoup de souplesse aussi puis permet aussi d'avoir des
ajustements.
M. Rochette (Michel) : Tout à
fait.
M. Jolin-Barrette : Puis
lorsqu'on connaît le processus législatif, c'est assez lourd, le processus
législatif. Ça fait que voici une proposition que je vous fais aussi. Dans
l'éventualité où un gouvernement adopte des règlements, puis il y a des enjeux
d'application avec le cadre réglementaire parce que peut être que c'est trop
strict ou ça devient inapplicable, la modalité, bien, il devient beaucoup plus
facile d'amener des modifications, notamment, qui pourraient être en faveur des
détaillants pour répondre à une problématique soulevée par les détaillants.
Là, ce que vous me suggérez, c'est de
dire : Bien, on va mettre toutes les normes dans la loi, on va être fixe,
puis ça va être dans la loi.
• (16 h 10) •
M. Rochette (Michel) : Non.
Juste pour que ça soit clair, ce serait important pour les travaux, qu'on ne
demande pas de transformer les règlements en loi. Je réitère que notre première
proposition, celle du rapport que vous avez sous les yeux, on demande à ce que
le processus réglementaire ne soit pas... tout ce qu'on dit, c'est de lui
donner une forme... en fait, de lui offrir des yeux, des gens qu'il vise
directement. Donc, tout ce qu'on demande, c'est de mettre en place un comité
aviseur pour aider le gouvernement dans la mise en place des futurs règlements.
Donc, on ne les dénonce pas. Tout ce qu'on dit, c'est qu'on ne peut pas les
laisser au hasard parce que les implications sont grandes.
Vous avez raison, dans beaucoup de cas, on
a demandé de la souplesse réglementaire. Ce n'est pas anormal, au contraire.
Dans ce cas-ci, c'est que le nombre de règlements qui s'appuient sur le projet
de loi sont considérables, et leurs portées sont excessivement considérables
dans la durée et la valeur, le temps et les conséquences également, jusqu'à
judiciaires, qui concernent les gens qui sont visés.
Donc, le minimum, c'est de s'assurer un
encadrement. Mais on ne le dénonce pas. Tout ce qu'on demande, c'est, on
suggère, on suggère une approche qui permettrait d'éviter l'impression que les
gens sont visés sans avoir eu leur voix au chapitre. C'est tout ce qu'on
propose. Donc, c'est encore une fois une voie constructive qu'on recommande. Et
je crois qu'on n'est pas les seuls dans les organisations au Québec à proposer
l'usage d'un...
M. Rochette (Michel) : ...consultatif
pour encadrer les règlements de ce projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Puis,
j'ai eu l'occasion de le souligner, on va adopter le projet de loi, et l'Office
de la protection du consommateur, également, va consulter les différents
partenaires, va consulter les membres de l'industrie également, notamment sur
les différentes durées des garanties et les différentes modalités, puis c'est
comme ça qu'on fonctionne avec l'Office des professions. D'ailleurs, même avant
le projet de loi, l'office avait fait des consultations, également, depuis
plusieurs années. Alors, je pense qu'on démontre qu'on est à l'écoute.
J'avais une question de fond à vous
poser...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui.
D'ailleurs, je pense que vous avez même participé à ces consultations-là de
l'Office de la protection du consommateur en 2019.
M. Rochette (Michel) : En
2019? Possiblement, je n'étais pas en poste à ce moment-là, mais en 2019, il
est possible, oui.
M. Jolin-Barrette : O.K.
C'est ça, on vous consulte. J'ai une question de fond sur la question de la
compétence des techniciens. Vous dites, là, par rapport au droit à la
réparabilité, de permettre au consommateur de faire effectuer la réparation, à
condition que ce soit par un technicien compétent et que les frais soient
commercialement raisonnables.
Quand vous amenez la notion de technicien
compétent, comment vous l'envisagez, cette compétence-là? Est-ce que vous
voulez l'encadrer? C'est uniquement certaines personnes qui peuvent réparer?
Est-ce qu'on vient dire à un réparateur qui a pignon sur rue : Bien, il va
falloir que tu ailles chercher des qualifications? Vous voulez un programme
normé? Comment... c'est quoi, votre vision, par rapport à «technicien
compétent»?
M. Rochette (Michel) : C'est
justement pour se donner le plus de flexibilité, on a proposé un langage
ouvert. La compétence, ça se démontre. Techniquement, ça se démontre sur
papier, et on calcule... dans le cas de ceux qui sont bien certifiés, ou
formés, ou qualifiés, qui ont un diplôme, et on l'a vu encore, dans La Presse,
sur la question de ceux qui étaient formément... donc formables, qui étaient
formés pour... avec les compétences pour gérer à la fois les appareils
électroniques et électroménagers. C'est assez fondamental, parce que ces appareils-là,
à la fois, il y a des enjeux de sécurité réelle de l'appareil électrique,
électronique, de gestion de données, de données personnelles, d'accès à, de
plus en plus, du WiFi et donc des connexions qui sont liées à d'autres sources
d'information qui donnent des données sur les consommateurs. Donc, le minimum,
c'est de s'assurer que ces gens-là soient, au moins, qualifiés, et éviter, à
défaut d'avoir accès rapidement à un réparateur, que les gens se retournent
vers le premier venu qui va lever la main, sans aucune certification, et qui va
vous dire : Faites-moi confiance, je m'en occupe, et ce ne sera pas cher.
Et, après ça, bien, qui va gérer les conséquences?
M. Jolin-Barrette : Excellent.
Je vous remercie pour votre présence en commission parlementaire. Je pense que
j'ai des collègues qui souhaitent vous poser des questions.
M. Rochette (Michel) : Merci
à vous.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole à la députée de Les Plaines.
Mme Lecours (Les Plaines) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Il me reste combien de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) : Quatre
minutes.
Mme Lecours (Les Plaines) : Quatre
minutes. Merci. Merci, M. le ministre d'avoir fait ces précisions-là. Oui, vous
avez participé... Votre organisation a participé en 2019. Je me souviens bien
d'avoir rencontré votre prédécesseur.
L'idée derrière l'objectif du projet de
loi, oui, vous l'avez dit, c'est de faire en sorte de protéger l'ensemble des
gens, l'objectif est bon aussi. Mais c'est aussi d'être respectueux les uns des
autres. À la base, c'est ça, c'est de respecter le marchand, le commerçant, le
consommateur. Vous représentez des commerçants, mais vous êtes aussi des
consommateurs, hein? Alors, l'exercice qu'on fait aujourd'hui puis qui s'est
travaillé sur de nombreuses années ponctuées de deux années de pandémie où
l'Office de la protection du consommateur a beaucoup travaillé sur d'autres
niveaux. Donc, aujourd'hui, on est prêt, c'est déposé. Il y a des gens qui vont
continuer à travailler sur ce projet de loi là, puis c'est tout à fait sain.
Vous représentez des commerçants, des
marchands, des commerçants où justement, leur idéal, c'est toujours faire en
sorte que le consommateur soit satisfait, non, hein?
M. Rochette (Michel) : Tout à
fait.
Mme Lecours (Les Plaines) : Donc,
à l'heure où on se parle, là, on n'a pas... le projet de loi n'est pas accepté.
Moi, si j'arrive chez un de vos marchands que vous représentez avec quelque
chose qui est brisé, puis ça ne fait pas tellement longtemps que je l'ai
acheté, je suis un petit peu dépassée, ce qui est actuellement, là, mais à
peine. On fait quoi avec moi à l'heure où on se parle? On va m'aider?
M. Rochette (Michel) : Tout à
fait.
Mme Lecours (Les Plaines) : Oui?
M. Rochette (Michel) : Bien,
déjà, il y a des garanties légales au Québec qui sont quand même assez sévères.
La Loi de la protection du consommateur est assez unique au Canada dans son
genre. Elle est donc déjà très sévère. L'idée de la renforcer, on est tout à
fait d'accord avec l'idée, on s'entend. Puis vous comprenez qu'un détaillant,
je ne peux pas parler au nom des fabricants, mais je présume qu'eux aussi,
quand ils mettent en marché un produit, ce n'est pas pour que le consommateur
soit déçu et qui retiennent une très mauvaise image du produit qu'il a acheté
et qu'il aille voir une marque concurrente. L'objectif, c'est... évidemment,
c'est de conserver le consommateur et l'amener, j'imagine, idéalement à
reconsommer autour d'une même bannière ou d'un même commerce. Donc c'est déjà
ce qui... Il y a déjà donc des... Vous savez qu'il y a également des politiques
de garantie de longue durée qui sont offertes par les détaillants et il y a
déjà beaucoup de réparateurs au Québec qui vont le travail...
M. Rochette (Michel) : ...dans
tous les cas, il y a une ossature puis un système qui existent déjà. Je
réitère, dans ce cas-ci, qu'il faut juste éviter que le règlement... pardon,
que la loi, par des voies réglementaires, finisse par pointer du... bien, en
fait, incriminer en quelque sorte des gens qui n'ont pas eu leur voix au
chapitre dans le processus, par exemple, si un commerçant doit répondre de
lui-même qu'il manque une pièce dans un des produits qu'il a sur ses étagères,
on voit mal pourquoi c'est le détaillant qui porte cette responsabilité-là sur
les épaules. Le fabricant doit avoir un rôle et une responsabilité. Il faut que
ce soit plus clair que ça dans la loi.
Mme Lecours (Les Plaines) : Justement,
un détaillant, vous avez parlé des cafetières, tantôt, de... bien, il y en a
une qui peut se détailler à 30$ puis l'autre à 1 000 $. Moi, si mon budget
me permet 100$, moi, j'ai moins de budget que le ministre, là, le ministre
avait 300$, moi, j'ai juste 100 $. Mais je sais, par exemple, que le café
que je vais me faire avec cette cafetière-là, bien, ça va être une sorte, deux
sortes, je vais changer les filtres, tandis que celle à 1000$, je peux me faire
du latté, des... Ça, je le sais, je le sais comme consommatrice, j'arrive là.
Donc, le détaillant qui a acheté un lot de ces six types de machine là le sait
aussi. Il y a des clients pour 30 $ puis il y a des clients pour 1000$, O.K.?
Ça va continuer, ça, parce qu'un projet de loi comme ça fait en sorte qu'on
protège le consommateur, justement, puis qu'il a le droit à la réparabilité,
mais je vais demeurer une consommatrice d'une cafetière à 100$.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...Mme
la députée, je suis désolée...
Mme Lecours (Les Plaines) : Ah!
excusez-moi. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
devons passer au groupe d'opposition officielle, et je cède la parole à la
députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Merci, Mme la
Présidente. Merci de votre présentation et le travail qui a été mis dedans.
Quand vous parlez de l'affichage et vous suggérez que... de laisser un peu de
flexibilité et d'indiquer simplement l'information qui doit être visible et
claire plutôt qu'à proximité du prix de manière aussi évidente que ce prix,
comme c'est indiqué dans le projet de loi. Évidemment, le projet de loi, c'est
la question de la protection du consommateur et on veut qu'ils aient toutes les
informations à leur portée quand ils vont prendre leur décision pour faire un
achat. Puis on comprend, quand on rentre dans un magasin, des fois, il y a
beaucoup d'informations qui est à côté.
Donc, pour que ça soit vraiment clair et
que les gens puissent le retrouver facilement, pourquoi est-ce que vous
suggérez qu'il ne soit pas à côté du prix?
M. Rochette (Michel) : En
fait, c'est une bonne question, puis je trouve, c'est une belle porte ouverte
sur à quoi sert un règlement. Dans le cas où l'ossature du projet de loi donne
les grands morceaux, les fondements d'une loi et de ce qu'on vise à obtenir,
quand on arrive dans le menu détail, c'est vrai que, parfois, on peut avoir
besoin d'un règlement. Parce que c'est ce qu'on dit simplement, c'est qu'on
précise dans la loi qu'en fait on va jusqu'à indiquer la grandeur de l'espace
que doit occuper l'information à côté du prix. Tout ce qu'on dit, on veut
surtout s'assurer, puis même un des participants, hier, de l'Université de
Sherbrooke, qui est l'initiateur du premier projet de loi, indiquait lui aussi
qu'il avait un questionnement sur la grandeur du... l'obligation d'afficher
l'information. Tout ce qu'on dit, c'est qu'il faut que l'information soit
claire, évidente et efficace, pour qu'on puisse comprendre clairement quelle
est la garantie. Mais d'aller jusqu'à dire qu'elle doit être aussi grosse que
le prix... en d'autres mots, le prix risque de prendre beaucoup moins d'espace
que la place de la garantie.
On suggérait simplement de le mentionner,
dans le projet de loi, pour se garder une marge de manœuvre. Indiquer que ça
doit être écrit clairement et facilement visible, mais pas aller jusqu'à
mentionner il faut que ce soit aussi gros que le prix. Dans plusieurs cas,
c'est que ça oblige les commerçants à avoir... à modifier l'ensemble de
l'affichage, ce qui n'est pas impossible, là, puis ils décideront de le faire s'ils
le veulent, mais d'aller jusqu'à obliger de l'avoir à côté du prix aussi gros,
là on vient de transformer les méthodes d'affichage de prix au Québec, à tous
niveaux, et, par voie réglementaire, de nouveaux produits éventuellement. Donc,
on suggérait une certaine flexibilité et de ne pas aller jusqu'à mentionner la
grandeur et la hauteur... vous comprenez l'idée, là. Il me semble qu'un projet
de loi, ça ne doit pas aller jusque-là, dans le menu détail, sur l'affichage de
la grandeur d'un chiffre.
• (16 h 20) •
Mme Prass : Mais vous êtes
d'accord qu'il devrait avoir une certaine proximité, disons, à côté du prix
pour que la personne comprenne que les deux sont associés.
M. Rochette (Michel) : Tout à
fait, on n'en fait pas un point fondamental, c'est une recommandation, parce
qu'on nous a dit que, dans la pratique, c'est un peu plus compliqué, des
fois... exactement de la même grosseur à côté du prix. Mais tout ce qu'on dit,
c'est de... puis je lis ce qu'on écrit, là : «Nous suggérons de laisser un
peu de flexibilité et d'indiquer, simplement, que l'information doit être
claire et visible.» Si on peut démontrer que c'est clair et visible, à mon
avis, le citoyen et le consommateur s'y retrouvent, là.
Mme Prass : Parfait. Ainsi,
vous recommandez que soit bonifiée la mention dans l'article 38.5 et d'ajouter
«le commerçant... que le commerçant a le choix de faire réparer le bien ou
permettre au consommateur de faire effectuer la réparation, à condition que ce
soit par un technicien compétent et les frais soient commercialement
raisonnables». Deux questions à propos de ça, premièrement...
Mme Prass : ...technicien
compétent. On espère que, justement, les commerces de détail vont s'assurer
que, quand il y a une réparation qui va être faite, ça va être fait par une
personne qui a les compétences de le faire.
M. Rochette (Michel) : Eh
bien, en fait, on veut que ce soit... Il faut l'indiquer à notre avis, parce
que ce que le projet de loi ouvre comme porte, si on renvoie vers le
consommateur la perte de la capacité à sa guise de refuser les services de
réparation offerts par le commerçant et d'aller lui-même ou elle-même chercher
des services de réparation où et... où ils le veulent, sans autre précision. On
dit c'est que, dans ce cas-ci et dans certains cas de plusieurs produits, les
enjeux de sécurité sont réels, et il faut juste s'assurer minimalement...
Remarque, en compétence, on n'est pas..., on n'est pas les... on n'a pas indiqué
quel diplôme, là, on a juste marqué «compétence», ce qui implique au moins
qu'on puisse démontrer, je crois, par écrit que la compétence existe et non
pas, désolé de l'expression : Mais mon beau-frère va vous arranger ça.
Puis dans ce cas-ci, c'est important de le préciser parce qu'on est en train de
travailler sur une loi qui est excessivement importante, dont les implications
sont énormes et minimalement, c'est de s'assurer que le consommateur sera
protégé.
Mme Prass : Dans le même
sens, «des prix soient commercialement raisonnables». Comment est0ce qu'on
détermine quoi commercialement raisonnable? Surtout avec... Si on demande à un
technicien ou un spécialiste de faire une réparation, comment est-ce qu'on
détermine ça pour le consommateur qui ne connaît pas les prix raisonnables dans
ce monde-là?
M. Rochette (Michel) : Bien,
c'est une belle... Bien, en fait, c'est une bonne question, puis là aussi,
comme il n'y a aucune précision dans le projet de loi, techniquement, à sa face
même, je pourrais demander à quelqu'un de faire réparer mon produit qui va me
dire ça va coûter puisque c'est le coût... De toute façon, c'est le détaillant
qui va rembourser. Ça va te coûter 10 000 $ et me livrer à Chibougamau,
puis tu me rembourses tout. Le détaillant va devoir rembourser tout ça. Alors,
il faut au moins fixer quelques barèmes. Là, ce qu'on dit on ne va pas très
loin. Tout ce qu'on dit, c'est «commercialement raisonnable». On est capable de
le démontrer. Tu sais, il faut qu'on soit capable de montrer que c'est des prix
qui existent et qui sont d'application dans d'autres... pour d'autres produits.
Mais tout ce qu'on veut éviter, c'est que ce soit un bar ouvert.
Mme Prass : Donc, avec votre
suggestion d'un comité consultatif, est-ce que ça serait justement une des
responsabilités vous leur donnerez d'établir les paramètres, disons.
M. Rochette (Michel) : Bien,
c'est un bel exemple. Dans ce cas-ci, ce n'est pas directement par règlement,
mais parce que le comité viendrait encadrer les règlements. Mais oui, tout à
fait, le comité consultatif, on peut élargir son mandat également, parce
qu'encore une fois, dans ce cas-ci, on vient viser à la conception même des
produits, à la vente du produit et aux consommateurs. Donc, on a... je crois
qu'on ne perdrait pas au change à faire comme la France a fait. La France a
fait avec l'indice de réparabilité en impliquant l'industrie et les
associations de consommateurs, ne pas... ne pas craindre des réunions de
travail pour s'assurer que les changements sont bien faits. Dans ce cas-ci,
c'est un bel exemple où on pourrait au moins définir, définir, dans le cas
spécifique du Québec, où la pénurie de main-d'œuvre est un peu plus aiguë
qu'ailleurs au pays, qu'est ce qu'on fait quand on a plus de réparateurs. On ne
peut pas juste répondre : C'est de la faute du détaillant. Autrement, on
va juste enlever les produits des étagères, ce que personne ne souhaite. Donc,
donnons-nous au moins une certaine flexibilité, un certain encadrement pour
éviter des dérapages, et c'est ce qu'on propose simplement.
Mme Prass : Et par exemple,
avec ce qu'on a vécu dans la dernière année, avec l'inflation, etc., vous
évaluez à quel intervalle que ça devrait être revu, justement, tous ces
éléments-là?
M. Rochette (Michel) : En fait,
pour la question du comité, du comité aviseur ou du comité consultatif, comme
on l'appelle, l'idée, c'est qu'étant donné que la loi ouvre beaucoup de portes
sur des changements à venir et dont on n'a pas de détail, quand et comment, et
pourquoi, tout ce qu'on veut s'assurer, c'est qu'au moins, dans tous les cas,
qu'il y ait une discussion ouverte avec ce comité-là et les représentants de
l'industrie, et les consommateurs. On n'a pas de durée particulière, là. Tout
ce qu'on veut, c'est s'assurer que, sur une base au moins régulière, il y ait
une évolution. D'abord, comment évolue la loi, comment ça s'effectue, comment
ça se vit dans la pratique? Est-ce qu'on a plus de produits, moins de produits?
Est-ce que ça a augmenté les coûts? Est-ce que ça les a baissés? Est-ce qu'on
est capables de réparer? Est-ce que ça a transformé l'industrie? Pour ça, ça
prend certainement... Bien, je suis content qu'en 2019, nos collègues aient
participé, mais une fois par quatre ans, ce n'est peut-être pas suffisant pour
un changement considérable. Donc, peut-être sur une base un peu plus régulière,
d'asseoir les gens autour d'une table, ça serait, à mon avis, bénéfique pour le
gouvernement.
Mme Prass : Et là, vous avez
mentionné, au début, toute la question des réparations et des pièces, le
transfert de pièces entre le fabricant et le détaillant. Et là, on propose
25 jours pour la réparation. Là, je comprends qu'il y a des difficultés
justement d'approvisionnement pour que le détaillant puisse recevoir les pièces
pour faire la réparation. Est-ce qu'il y a un délai que vous suggérez? Est-ce
que c'est vraiment... Ça dépend de l'industrie? Ça dépend du manufacturier?
M. Rochette (Michel) : C'est
une bonne question, puis on croit... En fait d'emblée, on croit que le fabricant
et le manufacturier et en quelque sorte le détaillant peut avoir sa voix au
chapitre. Mais à la base, ceux qui ont conçu le produit ont un peu plus
d'informations, à tout le moins sur quel type de réparations peut être possible
et par qui et comment, et par quelle pièce, et avec quel outil. Il est mieux
placé que le commerçant.
Dans tous les cas, nous, il reste que ça
nous paraîtrait très raisonnable de s'assurer d'avoir cet oeil là pour...
J'avais une autre question, et je viens de perdre le fil de l'idée. Mais dans
tous les cas, l'important, c'est au moins de s'assurer... Je n'ai pas de
chiffre à vous donner, mais je suis certain que si on consulte...
M. Rochette (Michel) : ...l'industrie,
ils sont mieux placés que nous pour vous donner ce type de précisions là.
Mme Prass : Parce que... à un
moment donné, vous dites... Une question : la capacité à faire déterminer
par règlement quelle pièce de rechange serait disponible à un détaillant et
quel service de réparation serait accessible ou non. Donc, encore une fois,
comment est-ce qu'on déterminerait cela?
M. Rochette (Michel) : Tout à
fait. Bien, en fait, le point qui m'échappait, c'est le fait que... Vous avez
compris que dans l'univers dans lequel on est et pour les produits visés spécifiquement,
là, qui sont indiqués dans le projet de loi, ce sont des produits à fort degré
de nouveauté et d'innovation. Et, quand les produits arrivent nouveaux sur les
étagères, là ce qu'on demande aux détaillants, en tout cas, à tout le moins, ce
qu'on demande, c'est d'avoir déjà le détail de qui pourra le réparer, alors que
le produit est complètement nouveau. Alors, évidemment... Puis là on donne des
contraintes très courtes en termes de délais, 10 jours pour la question de
la réparation, donc, pour trouver l'information.
Donc, l'idée, c'est de s'assurer à tout le
moins de prendre conscience que, si dans plusieurs cas, ça devient
excessivement difficile, mais que tout ça ne passe... ne peut passer qu'au
moins par la voie d'une consultation auprès des manufacturiers et, si on en
vient à comprendre qu'un produit ne peut pas d'aucune façon être réparable,
bien, il trouvera son chemin vers d'autres juridictions. Mais, encore une fois,
ça prend au moins une capacité de nous dire par les... ceux qui fabriquent,
ceux qui innovent, ceux qui les inventent, ces produits-là, bien, par quelle
voie ils sont pensés, là, pour nous aider à mieux les comprendre.
Mme Prass : Puis, justement,
on a entendu une suggestion de la question des imprimantes 3D pour que,
justement, certaines pièces qui ne sont peut-être pas disponibles ou pas
disponibles dans un temps opportun puissent être produites, utilisées pour ces
réparations-là. Est-ce que vous avez un point de vue là-dessus?
M. Rochette (Michel) : Non.
Bien, en fait, c'est une recommandation intéressante parce que... Bien, en
fait, c'est une dynamique d'innovation qui est intéressante, celle des
imprimantes 3D, qui pourront peut-être combler éventuellement le besoin de
pièces dans un cas où elles ne seront pas disponibles. Mais c'est encore une
technologie très nouvelle, elle aussi, qui est liée à d'autres enjeux d'accès
aux pièces et de réparation. Mais c'est un bel exemple d'innovation. Ça vaut la
peine d'être discuté. Encore une fois, un comité aviseur serait mieux placé que
nous, certainement, mieux que nous, et peut-être même certaines personnes
autour des tables, de pouvoir dire : Bien, écoutez, nous, c'est comme ça
qu'on voit les possibilités et voici les risques, voici les conséquences. Mais
il faut les impliquer.
Mme Prass : Parfait. C'est
complet pour moi. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : C'est
complet pour vous?
Mme Prass : Oui.
La Présidente (Mme D'Amours) : Donc,
je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. La commission suspend
ses travaux quelques instants afin de permettre à d'autres invités de prendre
place.
(Suspension de la séance à 16 h 28)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 33)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue au Centre d'études
et de recherches intersectorielles en économie circulaire. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à commencer votre exposé, s'il vous plaît.
M. Laplatte (Benjamin) : Merci,
Mme la Présidente. M. le ministre, membres de la commission, tout d'abord,
merci de nous avoir invités à venir partager avec vous nos commentaires et nos
propositions à l'égard de ce projet de loi, projet de loi fort attendu que nous
appuyons dans son ensemble par ailleurs. Je suis Benjamin Laplatte, directeur
adjoint du Centre d'études et de recherches intersectorielles en économie. Je
suis accompagné par Marc Journeault, professeur titulaire de l'École de
comptabilité de l'Université Laval et également cotitulaire du Réseau de
recherche en économie circulaire du Québec, avec lequel nous avons codirigé...
corédigé, mes excuses, ce mémoire, réseau de recherche, par ailleurs, qui
mobilise 230 chercheurs à la grandeur du Québec. Donc, on parle d'un dispositif
de recherche qui s'intéresse à l'économie circulaire qui est vraiment majeur,
et c'est le seul de son genre en Amérique du Nord.
Pour revenir au projet de loi, même s'il n'en
fait pas explicitement mention, bien, le fait... le simple fait de nous avoir
invités démontre que votre commission a vu un lien évident entre l'économie
circulaire et l'objet de ce projet de loi, et c'est une bonne nouvelle en soi.
On se doute qu'à cette heure-ci, vous devez avoir hâte de finir votre journée
de travail, mais on espère malgré tout que le fait de passer les derniers nous
offrira peut-être l'opportunité d'avoir des beaux liens à faire entre les
échanges que vous avez eus avec la dizaine de groupes qui nous ont précédés et
la thématique qui nous passionne au quotidien. Pour faire un jeu de mots
facile, donc, on espère réussir à boucler la boucle avec vous aujourd'hui en
vous parlant d'économie circulaire et des motifs qui font de ce projet de loi
une pièce législative essentielle, et nous y reviendrons.
Un mot sur l'économie circulaire, puisque
peut-être tout le monde ici n'y est pas familier. L'économie circulaire, c'est
un mode de production-consommation qui vise principalement deux objectifs et
qui s'implante de plus en plus fortement en Europe, en Amérique du Nord et sur
d'autres continents qui vise à tout d'abord réduire la consommation à la
source, dans une perspective de préserver nos écosystèmes qui produisent nos
ressources, d'optimiser l'utilisation des ressources qui circulent dans l'économie
en intensifiant l'usage du produit, prolongeant leur durée de vie ainsi que
celle de leurs composants, et en leur donnant une nouvelle vie en fin de cycle.
Donc, quand on dit ça, on comprend toute l'importance que revêt la réparation
ou le reconditionnement dans la quête d'un système de production qui soit plus responsable,
dans un contexte où il est devenu aussi outrageusement facile de se départir et
remplacer un bien plutôt que de chercher à le réparer pour en prolonger sa
durée de vie, et tout ça à un coût environnemental évidemment prohibitif.
Pour nous, donc, le projet de loi n° 29 ne
se résume pas à rééquilibrer le rapport de force entre les consommateurs, les
fabricants ou les commerçants, il va plus loin. C'est une première pièce
législative, à l'instar d'autres juridictions dans le monde, qui permet de s'attaquer
de front à un des éléments importants de la transition du Québec vers une
économie circulaire et puis durable afin de favoriser notamment une
consommation plus responsable. Donc, pour nous, c'est intrinsèque. Le projet de
loi contient aussi une portée économique dont il faut tenir compte, puisqu'il
pave la voie à la relance et à la revalorisation d'une industrie et d'un marché
de la réparation à qui il faut redonner ses lettres de noblesse et qui a été
particulièrement mal aimé dans ces dernières années.
Dans ce contexte, il faut savoir aussi que
plusieurs ministères...
M. Laplatte (Benjamin) : ...savoir
aussi que plusieurs ministères travaillent actuellement à élaborer une feuille
de route gouvernementale pour accélérer la transition du Québec en économie
circulaire.
Pour nous, il s'agit d'un chantier de
grande importance au sein de la nouvelle stratégie gouvernementale de
développement durable, à laquelle, par ailleurs, le ministère de la Justice et
l'OPC sont assujettis, office des protections du consommateur, excusez pour
l'acronyme. Vous reprenez que nos commentaires, en plus de porter sur les
dispositions du projet de loi n° 29 vont également offrir à la commission
quelques éléments de perspective additionnels pour nous permettre d'aller
au-delà de la portée immédiate de ce projet de loi, et ce sur quoi j'invite mon
collègue Marc à vous entretenir.
M. Journeault (Marc) : Merci,
Benjamin. Bonjour, merci de nous avoir invités à la commission aujourd'hui.
Donc, comme ce serait un peu fastidieux de passer à travers les
18 recommandations que nous avons énoncées dans le mémoire, bien, je vais
aller plutôt m'attarder aux éléments les plus importants. On pourrait revenir
ensuite, dans la période des discussions, sur les autres éléments.
Donc, la première chose que nous avons
proposée dans le mémoire, c'était d'ajouter certaines catégories de biens plus
spécifiquement dans la loi. Donc, on a notamment proposé d'inclure les petits
électroménagers, donc cafetières, robots culinaires, grille-pains, parce
qu'actuellement c'est des items qui sont plutôt difficiles à réparer et chers,
et donc généralement on est obligés de les jeter au lieu de les réparer.
On propose aussi d'ajouter les équipements
de mobilité douce, donc les vélos et les trottinettes électriques, parce qu'ils
sont de plus en plus populaires. Ils sont constitués aussi de composantes
plutôt fragiles et qui peuvent devenir rapidement désuètes. Donc, on pense, ce
serait important de rajouter ces éléments-là.
On propose aussi de clarifier la loi sur
la définition de ce qu'on entend par «bon fonctionnement» lorsqu'on parle de la
garantie de bon fonctionnement, donc dans le but d'éviter, en fait, toute
confusion possible puis interprétation qui ferait en sorte que ça pourrait
nuire, en fait, ultimement, à l'efficacité et à la légitimité de la loi.
Concernant la durée de garantie de bon
fonctionnement puis aussi de la durée associée à la disponibilité des pièces,
bien, on recommande, en fait, au législateur de se baser sur la durée de vie
raisonnable des biens qui est actuellement appliquée dans le cadre de la
garantie légale de l'Office de protection du consommateur. Donc, en fait, on
pense que se baser là-dessus, ça permettrait d'appliquer... en fait, de mettre
en œuvre de façon plus harmonieuse la loi.
On propose aussi, dans le mémoire, de
définir, on aime bien les définitions, de définir plus clairement est-ce que la
loi... ce qu'on entend par prix raisonnable de réparation. Il y a plusieurs
intervenants qui ont déjà parlé de ce sujet-là, on trouvait important de
revenir aussi là-dessus. Bien, pour nous, en fait, ce qui est important, c'est
d'établir ce prix-là en fonction du coût relatif de la réparation versus le
coût de remplacement. Donc, sachant qu'il y a beaucoup d'études qui ont
démontré dans le passé, là, que le seuil psychologique du prix de réparation ne
dépasse pas 33 %. Donc, après 33 %, souvent, le consommateur préfère
remplacer que réparer. Cette définition-là devrait aussi tenir compte de
l'ensemble des coûts associés à la réparation, donc non seulement les pièces,
bien sûr, mais également la main-d'œuvre et le transport, le cas échéant.
Concernant le délai de réparation prévu
dans la loi, bien, nous, ce qu'on propose, c'est de l'établir, ce délai-là, en
fonction de la réalité du consommateur. Donc, par exemple, c'est difficile de
se passer d'un congélateur ou d'un réfrigérateur pendant 30 jours, hein?
Ce serait un peu complexe. Donc, la loi devrait, en fait, trouver une façon de
réduire ce délai-là, le rendre le plus court possible pour tenir compte,
évidemment, de la réalité des consommateurs.
Donc, au-delà de ces dispositions
spécifiques à la loi, nous pensons que le Québec devrait faire preuve de
leadership, donc une fois le projet de loi adopté, bien entendu, puis de
travailler de concert avec les différentes juridictions à travers le monde,
donc évidemment les autres provinces canadiennes, les États-Unis, l'Europe,
bien entendu, afin de faciliter, là, l'adoption d'un cadre réglementaire
similaire.
• (16 h 40) •
Et pourquoi on dit ça? Bien, tout
simplement parce qu'on... le but est d'atteindre une masse critique, en fait,
de consommateurs qui seraient assujettis à ce genre de lois là, ce qui va
permettre par la suite, en fait, de pouvoir hausser les exigences au niveau
mondial et... dans le fond, donc les exigences en termes de garanties de bon
fonctionnement et de droit à la réparation, par exemple, et ainsi accroître la
durée de vie de tes produits, ce qui serait bon pour le consommateur mais
évidemment aussi pour la planète.
En plus du projet de loi n° 29, bien,
nous pensons qu'il y a d'autres cadres réglementaires qui seraient importants à
adopter afin d'améliorer, en fait, la portée et l'efficacité de ce projet de
loi n° 29 et aussi pour mieux informer le consommateur et accélérer la
transition vers une économie plus circulaire et durable, bien entendu.
Premièrement, on vous recommande fortement
de travailler sur un indice de durabilité, donc, en s'inspirant, encore une
fois, de la France. On a nommé beaucoup ce pays-là aujourd'hui. Donc, la France
table actuellement sur un indice de durabilité et qui devrait être adopté
quelque part en 2024 sur certains produits...
M. Journeault (Marc) : ...Cet
indice-là permet aux consommateurs de façon générale et donc aux consommateurs
québécois de faire, éventuellement... De faire des choix plus éclairés en
obtenant de l'information sur la durabilité potentielle des produits, et ça,
basé sur trois critères, donc la réparabilité, la fiabilité et l'amélioration
potentielle des produits.
On recommande aussi de travailler à
l'élaboration d'un affichage environnemental. Donc, ça serait complémentaire au
projet de loi n° 29 et à l'indice de durabilité. Et cet affichage-là
permettrait de renseigner plus spécifiquement les consommateurs sur le
caractère vraiment écologique des produits. Donc, en fait, ce n'est pas parce qu'on
est réparable et durable que le produit est nécessairement écologique. Donc,
c'est pourquoi qu'on pense que l'affichage environnemental, c'est vraiment un
incontournable, en fait, dans un cadre légal à venir pour assurer une
pérennité, bien sûr, à notre planète.
Bon, finalement, sans trop rentrer dans
les détails, nous sommes convaincus également que l'écofiscalité pourrait aussi
jouer un rôle essentiel afin d'appuyer le projet de loi n° 29. Donc, ça
pourrait être intéressant de revenir sur ces points-là dans la période de
questions.
Donc, en conclusion, nous sommes
favorables évidemment à l'adoption du projet de loi, le projet de loi
n° 29, bien sûr, en tenant compte de nos recommandations qu'on vous
propose aujourd'hui et dans notre mémoire. Puis, en fait, pour nous, ce projet
de loi là, c'est un jalon important, voire même crucial d'une transition du
Québec vers une économie plus durable et circulaire. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Avant de commencer la période, je veux vous rassurer, chers invités,
que tous les législateurs qui sont ici, même si vous êtes les derniers, vous
êtes entendus. Et soyez assurés que même le personnel, là, est ici pour aider
les législateurs, si jamais ils ont perdu un petit bout de vos conversations.
C'est très, très sérieux, le travail qu'on fait ici, et je voulais vous
rassurer. Donc, la période d'échange commence avec vous, M. le ministre. La
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Oui.
M. Normandin, M. Laplatte, bonjour. Merci de participer....
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Ah!
pardon, M. Journeault, excusez-moi.
M. Journeault (Marc) : ...pas
de souci.
M. Jolin-Barrette : Je
suis désolé. Mes excuses. Bien, écoutez, merci de participer aux travaux de la
commission. Puis je vais joindre ma voix à celle de Mme la Présidente, on garde
le meilleur pour la fin, hein?
M. Journeault (Marc) : Entendu.
M. Jolin-Barrette : Je
crois que vous étiez dans la salle pour entendre le précédent groupe. On m'a
indiqué que, écoutez, il faudrait mettre davantage de détails dans la loi. Vous
nous incitez vous aussi à mettre davantage de détails dans la loi, mais d'une
façon à être plus sévère, donc à nous assurer de viser certaines catégories de
biens, même d'élargir les biens.
Exemple, vous faites une référence aux
petits électroménagers. Donc, actuellement, dans la loi, on a couvert,
supposons, je vous dirais, supposons, les électroménagers qu'on utilise d'une
façon quotidienne ou hebdomadaire, mais qui sont des électroménagers ménagers
avec une plus grande valeur... Parlons laveuse, sécheuse, réfrigérateur,
congélateur, téléphone, ordinateur. Mais vous, vous nous dites : visez
également le grille-pain, la cafetière, tout ça, directement dans la loi, donc
élargir vraiment la notion de biens. Nous, on avait pensé le faire par voie
réglementaire pour certains types de biens, mais vous nous invitez à le faire
très clairement.
Vous nous invitez également à inclure une
durée de temps pour laquelle les pièces doivent être disponibles. Vous, vous
ciblez le sept ans. Pourquoi viser une période de sept ans?
M. Journeault (Marc) : En
fait, si... peut-être juste pour clarifier ce point-là. Ce qu'on mentionne dans
le mémoire, c'est de faire une révision, en fait, des règlements au plus tard
aux cinq ans, donc, et qu'une fois qu'on communique un fait, ces nouveaux...
Ces nouvelles modalités là, bien, c'est de rendre disponibles sept ans d'avance
les modalités pour que l'industrie puisse s'adapter et savoir d'avance
qu'est-ce qui s'en vient en termes de garantie de bon fonctionnement, de
disponibilité des pièces, et cetera. Donc, le sept ans, il concerne, dans le
fond, l'information qui devrait être communiquée sur... à l'industrie.
M. Jolin-Barrette : Mais
qu'arrive-t-il si jamais on souhaite inclure un nouveau bien? On ne pourrait
pas le faire avant un minimum de sept ans, même si ça devient un bien courant?
M. Journeault (Marc) : Bien,
en fait, comme je vous dis, les modalités qu'on propose, c'est de revoir
régulièrement la loi et les règlements pour s'assurer que les modalités sont
toujours à jour et que ça tienne la route en tant que telle. S'il y a un
nouveau bien qui arrive, bien, j'imagine qu'il faudrait prévoir dans le
règlement une modalité pour l'inclusion de ce nouveau bien là en communiquant,
encore une fois, sept ans d'avance, peut-être, les modalités qu'on pourrait y
assujettir.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Pour la garantie le bon fonctionnement, de votre mémoire, je crois comprendre
que vous nous dites : on devrait se coller à ce que la jurisprudence a
déterminé pour la garantie légale. C'est ça?
M. Journeault (Marc) : Exactement.
M. Jolin-Barrette : Et donc
vous ne faites pas de distinction entre la garantie de bon fonctionnement puis
la garantie légale? Un réfrigérateur, c'est, supposons... puis, je pense, vous
avez des exemples, là, dans... vous mettez un tableau, supposons...
M. Jolin-Barrette : ...là,
c'est 10 ans, il faut que ça dure 10 ans.
M. Journeault (Marc) : Mais,
en fait, ce qu'on dit, c'est que ce qui serait bien, pour faire une transition
harmonieuse de ce projet de loi n° 29 avec ce qui existe déjà, c'est peut-être
tabler sur ce qui existe déjà avec la garantie légale. Donc, on propose de
bâtir sur ça pour établir la fameuse durée de garantie de bon fonctionnement et
également pour la disponibilité des pièces. Donc, pour ce qui est de la durée
de garantie de bon fonctionnement, on n'a pas donné de chiffres précis, mais ça
serait une fraction de ce que la jurisprudence avance. Donc, ça pourrait être
quelques années, trois, quatre, cinq ans, peu importe. Et la disponibilité des
pièces, elle devrait être, au moins, aussi longue que la durée de vie espérée
du bien.
Donc, si la jurisprudence dit 10 ou 15 ans
pour un frigo, par exemple, bien, ça devrait être, au moins, ça, évidemment,
pour permettre d'allonger la durée de vie des produits en tant que tels.
M. Jolin-Barrette : Qu'est-ce
que vous dites aux détracteurs du projet de loi qui disent : Bien, en
assurant un droit à la réparabilité puis à la disponibilité des pièces, ça va
faire en sorte qu'on va exiger des détaillants ou des manufacturiers de tenir
un inventaire de pièces de rechange important et que ce n'est pas soutenable
comme modèle d'affaires.
M. Journeault (Marc) : Bien,
enfin, c'est un bon point, puis c'est vrai que la loi force, en quelque sorte,
de repenser, hein, ses façons de faire, puis nécessairement il y aura une
transition. Donc, je pense que la loi aussi devrait s'attarder à assurer une
certaine transition dans l'industrie, ce qui est tout à fait normal. Mais, à
terme, ce qu'on souhaite, en fait, c'est que le manufacturier soit un peu forcé
à repenser ses produits, ce qu'on va appeler l'écoconception, donc de repenser
ses produits pour alléger, en fait, les difficultés, justement, de réparation,
peut-être réduire le nombre de composantes, peut-être aller à l'essentiel
Et ce que ça va faire, à terme, c'est
qu'effectivement ces enjeux-là de conserver un inventaire, un stock de pièces
énorme, mais va s'amoindrir de lui-même. En transition, en attendant d'arriver
là, parce que ça va prendre un certain nombre d'années, bien, évidemment, les
technologies existent, comme on parlait d'impression 3D tout à l'heure, ça
peut... ça ne couvre pas toutes les pièces, mais ça peut couvrir une certaine
partie des pièces également. Et donc on est assez confiants que l'industrie va
pouvoir s'adapter à tout ça avec un certain nombre de temps.
D'ailleurs, il y a beaucoup d'autres lois
en Europe, qui ont été implantées avec à peu près les mêmes... pas comme
celles-ci, mais avec... qui imposent des contraintes, en quelque sorte, à
l'industrie. Puis la recherche a largement démontré, là, que l'industrie
s'adapte, innove et qu'au final, finalement, c'est plutôt rentable, même pour l'industrie,
de faire ces changements-là.
M. Laplatte (Benjamin) : Et
si je permettais d'ajouter, il y a plusieurs exemples, en fait, de groupes
industriels. Alors, évidemment, on pourra dire : Oui, mais il s'agit
d'exemples de multinationales, certes, mais si on pense un peu plus loin, puis
c'était l'essence de notre propos tantôt, c'est qu'on se dit : Oui,
évidemment, c'est un projet de loi contraignant, mais, derrière toute
réglementation contraignante, il y a une opportunité aussi pour une compagnie de
se distinguer de ses concurrents, de développer de nouveaux avantages
compétitifs, de bâtir une relation plus durable, plus transparente avec son
consommateur. Ça fait que c'est sûr que ça va poser un certain nombre de
challenges à l'industrie, ça, il n'y a aucun doute là-dessus. On ne peut pas le
nier, mais, néanmoins, on est confiant, parce qu'il y a des... je suis toujours
mal à l'aise de citer des exemples de compagnies, là, devant devant
l'Assemblée, mais il y a des exemples comme le groupe SEB, par exemple ou...
qui ont développé des stratégies d'affaires, auxquelles il convient vraiment de
s'intéresser puis qui sont très, très, très intéressantes.
Et aussi on imagine que... mais certains
qui vont vouloir se distinguer puis tirer leur épingle du jeu vont trouver des
façons de s'adapter, de revoir, comme le disait Marc, leur chaîne
d'approvisionnement, leurs relations avec certains fournisseurs. On le dit,
dans notre mémoire, nous, ce qu'on espère, c'est qu'il y a une industrie aussi,
il y a un marché de la réparation qui va se développer avec des nouveaux
joueurs qui vont être capables aussi de développer des partenariats, des
ententes commerciales avec ces industriels et ces fabricants.
• (16 h 50) •
M. Jolin-Barrette : O.K.
Dernière question, avant de céder la parole à mes collègues, puis, en même
temps, je vous remercie de votre présence en commission parlementaire.
Pensez-vous que le projet de loi permet de débuter un changement vers la fin
du : Achetez, jetez.
M. Laplatte (Benjamin) : Vas-y.
M. Journeault (Marc) : Je
pense que tu iras en complément, si tu veux. Mais oui, en fait, on est
convaincu, on l'a marqué clairement dans notre mémoire, pour nous, c'est un
jalon important, ce n'est pas la seule pierre, c'est une première pierre, mais
c'est une pierre fondamentale pour changer le modèle de consommation dans
lequel on est. Puis on est convaincu qu'il faut nécessairement passer par là,
parce que l'industrie, tant qu'elle n'a pas trop de contraintes, mais elle,
elle y va, puis c'est correct aussi parce que c'est son travail. Donc, nous, on
est convaincus que c'est un jalon important dans une transition vers une
économie plus durable et circulaire, avec un mode de consommation qui est plus
durable.
M. Laplatte (Benjamin) : J'ajouterais
non seulement ça, on pense beaucoup aux compagnies, les fabricants, les
détaillants que nous avons entendus, mais le consommateur comme tel, consommer
mieux...
M. Laplatte (Benjamin) : ...collectivement,
je dirais qu'il y a certaines déviances qui se sont installées, une espèce de
facilité aussi qui vient avec le coût de se... qui est quasiment nul parfois de
se débarrasser d'un objet plutôt que de le réparer. Ça fait que, comme vous
vous le suggérez, M. le ministre, de votre question, c'est... ce projet de loi,
c'est un jalon qui nous amène dans une transition qui est saine et qui est
souhaitable, et que d'autres juridictions sont en train de faire et, parmi
lesquelles, le Québec a une réelle capacité de se démarquer et surtout dans le
contexte où le Québec travaille actuellement à l'élaboration d'une feuille de
route en économie circulaire pour organiser cette transition-là. Et si on se
compare aux autres juridictions, encore une fois, là, des projets de lois ou de
règlements comme celui qu'on discute aujourd'hui sont des jalons essentiels de
ce dispositif et de ces leviers réglementaires et législatifs.
M. Jolin-Barrette : Excellent.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Charlevoix Côte-de...
Côte-de-Beaupré, pardon. Je vais y arriver.
Mme Bourassa : Merci. M. le
ministre a lu dans mes pensées parce que c'est dans la même direction que je
m'en allais. C'est sûr que vous prônez l'économie circulaire, on a vu
antérieurement qu'il y a seulement, bien, moins de 20 % des gens réparent
leurs biens. Est-ce qu'effectivement, là, le fait qu'on demande des outils qui
sont courants, qui sont communs, le fait qu'on demande l'accès au manuel, au
schéma, à quel point, vous, selon votre expérience, c'était un frein aux gens à
la réparabilité? Est-ce que le fait d'ajouter ça dans la loi, ça va permettre
et encourager l'autoréparabilité, éventuellement une meilleure économie
circulaire?
M. Journeault (Marc) : Oui,
absolument. Mais enfin on est convaincu que oui. Évidemment, encore là, il y a
probablement des dispositifs à améliorer, et tout ça, mais on est convaincu que
ce principe-là est tout à fait fondamental. Hier, mes collègues d'Équiterre ont
cité leurs propres études là-dessus très exhaustives pour nous démontrer qu'un
des freins à la réparation les plus importants, c'était l'absence de pièces, le
coût et l'absence de pièces. Puis un des freins importants à l'autoréparation,
c'est l'impossibilité de réparer soi-même, donc de ne pas avoir accès à des
manuels ou de ne pas avoir les outils qu'il faut pour réparer. Donc, ce qui est
proposé actuellement dans la loi, c'est vraiment un bon pas, là, vers la bonne
direction pour améliorer une réparabilité, une plus grande réparabilité des
biens.
Mme Bourassa : Et dans un
contexte où les yeux sont tournés vers l'adaptation aux changements
climatiques, donc, ce genre de loi-là, quels sont les impacts positifs pour
l'environnement?
M. Journeault (Marc) : On
rouvre une boîte de... une grande... Je vais y aller rapidement, mais en fait,
c'est un des éléments. Comme tantôt je vais le mentionnais, ce n'est pas le
seul élément qui est important. La réparabilité, c'est une chose, la
durabilité, c'est une autre chose. Donc, s'assurer qu'on allonge le produit
dans sa durée de vie, c'est parfait, mais ce qu'il va falloir aussi considérer,
c'est l'impact écologique de la consommation, donc du produit lui-même. Et ça,
bien, on y touche un peu indirectement, avec la réparabilité et la durabilité,
mais pas complètement. Et c'est pour ça que nous, on propose d'aller vers un
affichage écologique pour venir mesurer et communiquer cette information-là
auprès des consommateurs pour ajuster encore une fois leur comportement
d'achat. Donc, c'est une pièce parmi un casse-tête, là, un peu plus large de
choses à mettre en place.
Mme Bourassa : Merci. Je vais
laisser la chance à mes collègues de poser des questions.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député d'Abitibi-Est.
M. Dufour : Bonjour. Une
simple question. Vous avez tantôt abordé rapidement le dossier d'écofiscalité.
Vous le voyez comment? Des incitatifs? J'aimerais vous entendre un petit peu
plus sur cet aspect-là. Ce n'est pas un sujet qui a été énormément discuté
jusqu'à présent, et le fait que vous êtes un centre d'études de recherche, mais
je pense que vous avez des éléments d'information intéressants de pouvoir nous
véhiculer là-dessus.
M. Journeault (Marc) : Oui,
merci pour la question. Bien, en fait, l'écofiscalité, c'est un mot qui peut
faire peur souvent, n'a pas toujours bonne presse parce que c'est vu comme une
surtaxe puis une autre taxe encore, mais en fait le but de l'écofiscalité,
c'est récompenser le bon comportement environnemental et, en fait, évidemment,
un peu, dans le fond, pénaliser le comportement qui est moins environnemental.
Et tout ça, éventuellement, à coût nul pour le consommateur. Donc, c'est-à-dire
que, normalement, quelqu'un qui consomme ou qui est... un comportement
environnemental qui est jugé adéquat ne devrait pas payer plus cher, ne devrait
pas payer plus de taxes qu'actuellement. Par contre, quelqu'un qui fait
vraiment un effort et qui a un impact environnemental moindre devrait être
récompensé, puis l'autre à ce moment-là paye davantage. C'est ça, le principe
global d'écofiscalité.
M. Dufour : Peut-être en
complément, ce qui fait écho négatif au projet de loi dans les différentes
correspondances que j'ai reçues, c'est la peur, justement, que le fait qu'il
n'y a pas de réglementation, exemple en Ontario, que les gens vont aller
acheter plutôt en Ontario qu'ici. Comment vous le voyez ce côté-là?
M. Laplatte (Benjamin) : On
va peut-être me taxer de simpliste, mais on a eu ces discussions-là quand on se
demandait s'il fallait mettre en place une taxe carbone...
M. Laplatte (Benjamin) : ...et
aujourd'hui, c'est une évidence aux yeux de tout le monde. J'ai envie de dire
que ce serait ma réponse, mais.... mais cela étant dit, il n'y a rien de facile
dans la vie. Mais c'est évident qu'il y a toujours un coût d'adaptation, et on
le dit d'ailleurs de façon très, très objective dans le mémoire, dont il va
falloir tenir compte. Donc, c'est certain que par rapport à toute cette transition-là
qui va devoir s'organiser, il y aura des mesures atténuantes... qu'il va
falloir évidemment réfléchir. Mais pensons aussi à récompenser ou à appuyer les
compagnies ou les entrepreneurs qui, eux, vont y voir un avantage concurrentiel
et compétitif. Parce que c'est aussi ça qu'on veut pour notre société de
consommation, c'est avoir des industriels qui vont développer une culture de la
qualité, une culture de la durabilité, une culture qui se bâtit autour d'une
relation client transparente et de confiance.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Maintenant, je cède la parole au député de Nicolet-Bécancour.
M. Martel : Merci. Bonjour à
vous deux. Je ne sais pas si c'est dans votre palette, mais j'aimerais ça avoir
votre opinion quand même. La semaine dernière, je suis allé dans un magasin
électronique acheter un gugusse. Puis, en me promenant dans les allées, à un
moment donné, je vois des boîtes d'outils électriques à des prix ridicules.
J'avais vu ces mêmes boîtes là chez un quincaillier auparavant, je suis allé
voir pour voir s'il y avait encore cette sorte d'outil là, il ne l'avait pas.
Mais juste vous donner une idée, là, quelque chose qu'il pouvait vendre
250 $, magasin électronique, il vendait ça 39 $. Je n'en aurais pas
acheté. J'ai l'impression que ça ne doit pas être trop, trop de la bonne
marchandise. Moi, j'ai l'impression que le quincaillier, à un moment donné, ils
se sont aperçus que ce n'étaient pas des bons produits et ont liquidé ça à des
prix ridicules, mais ces produits-là, ils sont encore sur le marché, puis
probablement que le consommateur qui va aller en acheter un, ça se peut que ça
ne marche pas longtemps. Ils vont le retourner, ça se peut qu'il se le fasse
rembourser, mais à la fin, tous ces produits-là vont se retrouver quand même
dans les dépotoirs. Je ne sais pas si vous avez...
M. Laplatte (Benjamin) : Vous
avez entièrement raison et on en est là parce qu'on ne paie pas le juste prix
de ce coût environnemental. Ça fait un peu écho à la question de votre collègue
tantôt, merci, d'ailleurs, c'est que ce qu'on... puis, quand on parle
d'écofiscalité, c'est qu'aujourd'hui on ne paie pas ce coût de décontamination,
le juste prix de ce coût d'enfouissement, de toute la logistique qui vient avec
ça, M., vous l'avez bien décrit. Alors, à un moment donné, c'est un peu un
non-sens tous ces va-et-vient. Et puis ce n'est pas efficace économiquement et
puis c'est probablement rentable pour quelqu'un. Est-ce que c'est rentable pour
la société puis l'économie en général? Nous, on ne pense pas. Donc, c'est ça.
Donc, c'est pour ça que, tu sais, la
question de l'écosystème d'affaires, tu sais, qui favorise la réparabilité,
mais qui favoriserait encore plus, en amont de ça, le recours à
l'écoconception, pour faire en sorte qu'on ait des produits qui soient conçus
dans une optique de favoriser leur durée de vie et leur réparabilité, bien, ça
va passer, à un moment donné, par des mesures comme aujourd'hui, oui,
législatives et réglementaires, mais aussi par des mesures fiscales. On n'aura
pas le choix et de type de... puis on espère que, comme c'est le cas
actuellement, des investisseurs vont venir favoriser aussi ces choix puis ces
stratégies d'affaires là.
• (17 heures) •
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions pour la partie gouvernementale. Maintenant,
je laisse la parole à la députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, merci pour le travail que vous avez fait pour... dans le
mémoire. J'ai trouvé ça très intéressant que vous mentionniez la possibilité
d'ajouter les produits jetables. Et je suis curieuse, je ne sais pas si vous
serez au courant, mais quelle est la durée de vie d'un grille-pain, par
exemple?
M. Journeault (Marc) : Ah! Je
ne peux pas répondre à cette question-là. Benjamin?
M. Laplatte (Benjamin) : ...pardon?
M. Journeault (Marc) : La
durée de vie d'un grille-pain.
Mme Prass : Bien, la raison
pour laquelle je vous pose la question... parce que je pense, justement,
peut-être la raison pour laquelle ces éléments n'ont pas été compris, dans le
projet de loi, c'est qu'en tant que consommateur, justement, votre... la
description de produits jetables, c'est ce qu'on se dit souvent, un séchoir à
cheveux, un grille-pain, on se dit : Ah! Ça va être durer quelques années
et ensuite on va s'en acheter un nouveau. Donc, c'est une... Donc, je suis. Je
vous ai posé la question de la durée de vie, parce que je suis juste curieuse,
à savoir notre perception que c'est des choses qui ont une vie qui est courte
comparée à leur durée de vie. Parce que ce que vous suggérez, par exemple, si
après cinq ans, mon grille-pain ne fonctionne plus, puis l'amener pour le faire
réparer, mais est-ce que ça rentre dans la durée de vie ou c'est vraiment
quelque chose qui peut être sauvé?
M. Journeault (Marc) : Bien,
en fait, nous, on propose... c'est pour ça qu'on propose que ça soit intégré
dans la loi, c'est bien là, parce qu'actuellement ils sont...
17 h (version non révisée)
M. Journeault (Marc) : ...ou
jetable. Encore là, on généralise en disant que c'est plutôt jetable. Il y a de
la réparation possible, mais plus compliquée, souvent en termes, justement, de
proportion du coût de réparation versus le coût du bien. Souvent c'est
quasiment plus intéressant, malheureusement, de le jeter et de le remplacer.
Donc, c'est ça qui est pour nous un non-sens, un non-sens au niveau écologique,
hein? C'est incroyable de penser comme ça. Donc, c'est pour ça que, nous, on
veut, on propose de l'intégrer dans la loi pour qu'il soit considéré. Puis
ensuite, bien évidemment, à travers les règlements, on décidera l'année et le
nombre d'années de garantie de bon usage qu'on devrait appliquer sur un
grille-pain, puis le nombre d'années que les pièces devraient être disponibles.
On n'est pas personnellement des spécialistes, là, de cet aspect plus
technique, là.
Mme Prass : Mais j'imagine,
c'est plus facile pour les produits jetables parce que ça doit être des pièces
qu'on... On ne prend pas la marque en considération. Ça doit être des pièces
qui sont pareilles comparé à d'autres.
M. Journeault (Marc) : Encore
là... Bien, encore là, on n'est pas des spécialistes de ce modèle-là, mais je
pense qu'on peut... On peut penser qu'effectivement ce n'est pas... Ce n'est
pas impossible de réparer ces biens-là. On le faisait, hein? Dans les années 60,
70, 80, on faisait ça. Maintenant, on a perdu ça parce que, au nom du faible
coût et du prix... du prix faible, bien, finalement, on va plutôt dans une mentalité
de jetable au niveau de la fabrication. Donc, ça revient encore au sujet de l'écoconception?
M. Laplatte (Benjamin) : Oui.
Oui, puis si je peux me permettre... l'uniformisation des composantes, à un
moment donné, et en disant ça, l'idée, ce n'est absolument pas de brimer l'innovation,
au contraire. Mais on le voit par exemple avec tous nos appareils mobiles. Il y
a quand même des lois européennes qui se sont dites : Bien, juste le
format de la prise électrique, à un moment donné, il va falloir le standardiser
parce que ça n'a pas de sens. C'est une composante, on peut l'imaginer, et que
c'est pour d'autres types de produits. Et j'ajouterai aussi, puis on en a parlé
tantôt suite à la question du ministre, de M. le ministre, c'est qu'on aimerait
voir un cadre d'application de la loi mais qui soit évolutif, qu'on se donne
une chance de pouvoir continuer de mesurer les progrès, de les étudier et
justement peut être de pouvoir répondre à la question que vous vous posez en
disant : Bien, finalement, la durée de vie utile de tel produit, c'est
quoi pour vrai? Et ça, ça va faire partie peut-être des indicateurs de
résultats ou de succès de ce projet de loi dans le futur.
Mme Prass : Parfait. Et
vous parlez également de... Bien, on parle dans le projet de loi de la question
du prix raisonnable pour la réparation, et c'est une question qu'on a demandée
à plusieurs intervenants, comment est ce que vous pensez qu'on détermine
justement c'est quoi le prix raisonnable? Et il faudrait que ça soit mis à jour
à intervalle parce que, justement, ce qu'on a vécu les dernières années avec l'inflation,
etc., les prix évoluent. Donc, comment est ce que vous voyez... Comment...
Comment est-ce que vous pensez que ça serait déterminé et à quel intervalle
est-ce vous pensez que ça devrait être mis à jour par la suite?
M. Journeault (Marc) : Bien,
en fait, c'est ce que je mentionnais tout à l'heure. En fait, nous, on se base
sur des études, hein, qui ont regardé cette question-là, qui est un, comme on l'a
mentionné tantôt, un frein excessivement important, la réparation. Donc, c'est
le deuxième aspect, en fait, qui freine la réparation, c'est le coût de la
réparation. Donc, ce qu'on... ce que les études démontrent, c'est qu'au-delà du
seuil psychologique de 33 % du coût de réparation versus le coût de
remplacement, ce n'est même pas le coût initial, hein, vraiment, c'est vraiment
le coût de remplacement. Tu sais, dans le fond, j'ai le choix d'acheter un
autre produit à tel prix ou de le réparer au prix y. Je choisis quoi? Mais
aussitôt qu'on dépasse le seuil psychologique de 33 %, souvent le
consommateur va choisir de remplacer au lieu de réparer.
Donc, ça donne déjà un «guideline». Nous,
on n'arrive pas avec un seuil spécifique pour chacun des produits, les règlements
pourront le faire, mais ce qu'on dit, c'est qu'il faut qu'il soit relativement
faible et qu'il devrait inclure évidemment pas juste le coût des pièces, mais
également le coût de la main-d'œuvre et, bon, le transport s'il y en a
également. Donc, tout le coût de la réparation devrait être considéré, incluant
aussi la soumission initiale, c'est-à-dire l'évaluation de la réparation aussi.
Maintenant, pour ce qui est de la
fréquence de la révision, bien, nous, ce qu'on suggère, c'est qu'au... tout au
plus aux cinq ans. Donc, évidemment, selon les types de produits, ça peut être
plus rapide, mais si on passe aux ordinateurs ou aux téléphones portables où ça
évolue très rapidement, bien, peut-être que cinq ans, c'est trop lent. Peut-être
que trois ans, ça serait suffisant. Et encore là de communiquer les
informations sur les modalités suffisamment longtemps d'avance pour que l'industrie
puisse finalement intégrer tout ça puis travailler sur l'écoconception en amont
en sachant que ça s'en vient.
Mme Prass : Parfait.
Votre recommandation no 12, que la loi devrait tenir compte de la réalité
du consommateur et intégrer un délai maximal de réparation pour chaque
catégorie de biens ou prévoir l'existence d'un tel délai au sein des règlements
associés aux biens et s'ajuster à la loi. Donc, on a entendu souvent aujourd'hui
qu'il y a une question d'approvisionnement, comme on le sait dans les dernières
années, et donc donner un délai aux commerçants pour faire leur réparation peut
être difficile dépendamment du produit. Donc, encore une fois, le délai maximal
qui est proposé dans le projet de loi est de 25 jours. Qu'est ce que...
Est-ce que vous verrez qui... Est-ce que vous pensez... Est-ce que vous êtes d'accord
avec le 25 jours? Est-ce que vous pensez qu'il y a place à ce qu'il y ait
plus de temps pour permettre justement dans les cas où le détaillant doit
communiquer avec le...
Mme Prass : ...le fabricant,
ça prend du temps de la part du fabricant. Donc, comment est-ce que vous voyez ça?
M. Journeault (Marc) : Je
pense que l'idée d'évolution nous apparaît intéressante. Je pense que, c'est
sûr que, si on exigeait 12 jours, demain matin à l'industrie, je pense que
ça serait... il faut laisser le temps au marché de s'ajuster, de prendre
connaissance de la chose puis de penser comment la logistique pourrait
s'organiser autour de ça. Donc, peut être que le 25 jours, c'est un bon
point de départ, mais nous, ce qu'on dit, c'est qu'on devrait tenter de viser,
en fait, quelque chose qui est réaliste aux yeux du consommateur. Donc, tu
sais, mon frigo brise demain matin, pas sûr que je peux attendre 25 jours.
C'est un peu complexe, là. Je peux mettre mon... Donc, tout ça pour dire qu'au
départ probablement qu'on n'aura pas le choix d'aller sur 25 jours, parce
que, logistiquement, l'industrie n'est pas tout à fait rendue là, mais je pense
que, tranquillement, on peut envoyer des signaux forts sur le marché en
disant : Bien, nous, on veut descendre ce délai-là, ce qui fait en sorte
qu'éventuellement le marché devra s'ajuster. Puis on a pleinement confiance au
marché de pouvoir s'ajuster, éventuellement d'innover puis de changer les
processus d'affaires pour répondre à plus de contraintes en quelque sorte, mais
finalement aux besoins ultimes du consommateur.
Mme Prass : Et comme vous
dites, c'est par catégorie, parce qu'il y a différentes réalités.
M. Journeault (Marc) : Oui,
c'est ça. Exactement. Ça change.
Mme Prass : Et est ce que
vous pensez que... pensez-vous que ces délais-là devraient, par exemple,
représentent... devraient être visibles lors de l'achat? Est-ce que c'est une
information qu'on devrait avoir justement à ce moment... où on fait notre
décision... où on prend notre décision?
M. Journeault (Marc) : Bien,
oui, clairement. Je pense que c'est une information qui est super intéressante
et pertinente. En fait, nous, ce qu'on dit, c'est que, plus le consommateur va
être informé, plus il va pouvoir prendre des décisions d'achat éclairées. Donc,
le principe de base et là. L'important, c'est de ne pas le noyer d'information,
parce que, là, c'est contre-intuitif, non? Oui, j'ai une collègue, Claudia
Déméné, qui est venue ici, je pense, aussi en commission qui se spécialise sur
l'affichage des informations pour le consommateur. Bien, je pense qu'il y avait
des bons échos là-dedans à regarder sur comment afficher clairement
l'information. Donc, ça peut être une belle piste de réflexion. Mais je pense
que, oui, il faut donner l'information. Puis ce qui devient intéressant, c'est
que, là, ça peut devenir une source de différenciation pour les entreprises.
Donc, si une entreprise affiche 23 jours puis l'autre affiche 18, oups,
bien là, au même prix, peut être que je vais être tenté d'aller chercher
18 jours parce que s'il brise, bien, je sais que je vais être répondu plus
rapidement. Donc, voyez-vous? Donc, ça fait agir les forces du marché. Plus on
donne d'information aux consommateurs, bien, plus les forces de marché derrière
peuvent agir pour innover et s'améliorer au bénéfice, encore une fois, du
consommateur et de la planète, je le répète.
Mme Prass : Et je vous
poserais une question que ma collègue a posée à plusieurs. Question de peines
dissuasives pour ceux qui ne suivent pas les règlements dans la loi, nous, on
suggère plutôt que ça soit une... qu'on regarde chaque entreprise de façon
distincte pour voir leur chiffre d'affaires et que ça soit une représentation
de ça. Parce qu'un 10 000 $ pour une entreprise comme Apple, ça ne
veut rien dire, tandis que, pour une plus petite entreprise, ça a un impact
différent. Donc, seriez-vous d'accord pour dire qu'il faudrait regarder
vraiment le chiffre d'affaires pour déterminer qu'est-ce qui serait vraiment
contraignant et dissuasif pour une entreprise comparée aux autres?
M. Laplatte (Benjamin) : C'était
la question de votre collègue fiscaliste qui... nous avons un comptable ici. Je
ne pense pas qu'on peut...
M. Journeault (Marc) : Bien,
je peux répondre à la question en disant que, bien, tu sais, je pense que ça
prend des amendes significatives, ça, c'est clair, parce que, sinon,
effectivement, l'industrie, puis je pense qu'Émilie Côté d'Équiterre l'a bien mentionné,
il faut... sinon l'industrie pourrait tout simplement dire : Bien,
écoutez, on paiera les amendes puis advienne que pourra. O.K.? Ça fait que, ça,
il ne faut pas que ça arrive, effectivement. Donc, ce que nous, on propose,
c'est qu'effectivement ça soit significatif.
Maintenant, pour les mécanismes, les
modalités, honnêtement, il faudrait les étudier plus finement pour s'assurer
que ça n'amène pas des comportements dysfonctionnels. Donc là, je pense que je
ne pourrais pas me prononcer aujourd'hui, là, sur le mécanisme exact pour ça.
• (17 h 10) •
Mme Prass : Vous êtes
d'accord pour dire qu'il faudrait regarder la nature de l'entreprise plutôt que
d'avoir un montant qui est pareil pour tous, par exemple?
M. Laplatte (Benjamin) : C'est
certain que la loi a un caractère qui est dissuasif ici. Donc, c'est certain
qu'il va falloir paramétrer quand même ces aspects-là dans une certaine mesure.
Mais on ne peut pas vous livrer une réponse fine en vous disant : C'est ça
qu'il faudrait faire plutôt que telle option. Malheureusement, on n'est pas en
mesure de vous donner ce niveau là de réponse aujourd'hui. Mais il faut
préserver le caractère dissuasif de la loi. On veut qu'elle fasse force de
changement, et nous, on fait vraiment pleinement confiance à l'industrie pour
s'adapter. On en a des démonstrations d'initiative puis des cas à succès. Mais,
par contre, aussi, donnons à l'industrie un cadre prévisible, évolutif, pour
favoriser les bons comportements, favoriser les bons coups puis pouvoir faire
du renforcement positif...
M. Laplatte (Benjamin) : ...aussi.
Mme Prass : ...pas pour vous
pousser trop, mais, dans le même sens, est-ce que vous pensez que les mesures
qui sont inscrites dans le projet de loi sont satisfaisantes pour être
dissuasives pour les entreprises?
M. Journeault (Marc) : Encore
là, intuitivement, je vous dirais non. Mais, encore là, en tant que chercheur,
on est habitués à... des fois, on se pose des questions puis on fouille, puis,
des fois, la réponse n'est pas celle qu'on s'attendrait. Donc là, vous sentez
peut-être la réserve des chercheurs en nous, mais c'est-à-dire que c'est
important en fait d'aller valider ça. Je pense, ça serait important de
peut-être faire un travail de fond pour s'assurer quelle est la meilleure
modalité pour éviter l'esprit, je pense, qui nous habite tous, de faire en
sorte que l'industrie se déresponsabilise face à un tel projet de loi. Je pense
que c'est ça que je proposerais.
Mme Prass : Merci beaucoup,
monsieur.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci beaucoup. Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des
mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des
auditions publiques. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'au
mercredi 20 septembre, après les avis touchant les travaux des
commissions, où elle entreprendra un nouveau mandat. Merci, tout le monde.
(Suspension de la séance à 17 h 12)