(Dix heures trois minutes)
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour, tout le monde. Bonjour. Nous avons tous bravé le froid ce matin.
Alors, bravo! Écoutez, je crois que nous
avons le quorum. Alors, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle, pour
s'assurer, là, qu'on ne soit pas dérangés, d'éteindre ou, du moins, de
mettre en sourdine votre téléphone cellulaire.
La commission,
ce matin, est réunie afin de procéder aux consultations particulières et
aux auditions publiques sur le projet de loi n° 10, la Loi
modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer
l'évaluation du maintien de l'équité salariale.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplaçants?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata) remplace
M. Allaire (Maskinongé); M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee) remplace M. Derraji (Nelligan); M. Ouellet
(René-Lévesque) remplace Mme Richard (Duplessis).
Remarques
préliminaires
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous débuterons cet
avant-midi par les remarques préliminaires puis nous entendrons d'abord
l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services
sociaux. Ensuite, nous aurons le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes
au travail.
Nous débutons par les remarques préliminaires.
J'invite donc le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale et député de Trois-Rivières à
faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de six minutes.
M.
Jean Boulet
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. D'entrée de jeu, j'aimerais saluer les collègues parlementaires du
Parti libéral, du Parti québécois, de Québec solidaire, mes collègues, bien
sûr, de l'équipe gouvernementale.
Et, ce matin,
on aborde, donc, l'examen d'un projet
de loi qui m'apparaît extrêmement fondamental. Il faut savoir qu'en
1996 cette loi-là avait été adoptée initialement, elle est entrée en vigueur en 1997, elle a été amendée en 2009, et, suite à l'amendement en
2009, c'est là qu'il y a eu des recours judiciaires.
Cette loi-là
prévoit une démarche proactive en deux étapes. Il y a d'abord
un exercice initial d'équité
salariale, où on regarde les emplois
à prépondérance féminine et on les compare avec des emplois à prépondérance
masculine. Et là, si on réalise qu'à travail équivalent il n'y a pas un
salaire égal, il faut corriger les écarts salariaux. Ça, c'est l'exercice
initial que la loi prévoit. Par la suite, de façon épisodique, c'est-à-dire à
tous les cinq ans, il y a une démarche qu'on appelle
de maintien de l'équité salariale. Donc, à tous les cinq ans, on doit examiner s'il y a
eu des écarts qui ont été créés ou des événements qui ont créé des
écarts pendant les cinq années précédentes et là faire la correction.
Entre 1997 et 2009, lors de cet exercice-là d'évaluation
du maintien, on faisait les ajustements de façon rétroactive, donc on rétroagissait à la date de l'événement qui créait le nouvel écart. En 2009, quand la loi a été amendée,
cet exercice d'évaluation là ne prévoyait plus d'ajustement ou de correction
des écarts de façon rétroactive. On disait :
À partir de 2009, l'entreprise qui fait son travail de maintien de l'équité salariale ne corrigeait les écarts qu'à la date du deuxième affichage, donc seulement de
façon prospective, c'est-à-dire pour l'avenir. On n'avait plus à revenir dans le passé.
Et donc c'est
suite à ces amendements-là que notamment des groupes que nous allons entendre ont intenté
des recours judiciaires fondés sur notamment
l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés
de la personne, qui prévoit l'égalité entre les hommes et les femmes. Et
on invoquait, à ce moment-là, que ça contribuait à maintenir une discrimination
systémique entre les hommes et les femmes. Et la Cour supérieure a rendu une
décision disant que trois articles
particuliers de la loi étaient invalides, donc contraires à la charte,
perpétuant la discrimination systémique invoquée par les syndicats qui étaient les initiateurs de ce recours-là.
Ce jugement-là a été porté en appel, la Cour d'appel du Québec a maintenu le jugement de la Cour supérieure, et il y a eu un appel à la Cour suprême du Procureur général du Québec,
et, le 10 mai 2018, la Cour suprême
du Canada a rendu la décision
déclarant invalides les trois articles appropriés de la Loi sur l'équité
salariale, mais suspendant la déclaration d'invalidité à une année, donc
donnant au législateur jusqu'au 10 mai 2019 pour réparer. Donc, on a jusqu'à
cette date pour adopter une loi remédiatrice, à défaut de quoi les dispositions
seraient considérées invalides ab initio.
C'est une
décision qui est majoritaire. Et les
modifications qui apparaissent dans le projet de loi n° 10, modifiant, donc, la Loi sur l'équité salariale, se regroupent
sous quatre thèmes. Le premier thème, on veut évidemment rendre la loi
conforme à la décision de la Cour suprême. Deuxièmement, on veut favoriser la
participation des personnes salariées lors de l'évaluation du maintien, ce qui
n'existait pas avant. Enfin, troisièmement, c'est encadrer le traitement des
plaintes, notamment les plaintes
pendantes, et, enfin, le quatrième thème, c'est améliorer certains éléments de
mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale.
Ce
n'est pas global, ce n'est pas une réforme complète, mais la loi nous impose,
de toute façon, au mois de mai, de déposer un rapport sur la mise en
oeuvre de la Loi sur l'équité salariale au gouvernement. Ce sera, par la suite,
présenté à l'Assemblée nationale. Il y aura
des avenues de réforme, mais je peux vous dire d'emblée que le rapport laisse
entendre que l'application se fait de façon
fluide, harmonieuse, et on a fait un grand bond en avant en matière d'équité
salariale. Mais l'adoption de notre projet de loi avant le 10 mai 2019 nous
apparaît comme une priorité, un impératif imposé par la Cour suprême du Canada. Et c'est donc ce qui complète mes
remarques préliminaires, Mme la Présidente.
• (10 h 10) •
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole
de l'opposition officielle en matière de travail, M. le député de Vimont, à
faire ses remarques préliminaires pour un maximum de quatre minutes.
M. Jean Rousselle
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Premièrement, je voudrais saluer
le ministre, le député de Trois-Rivières. Donc, je suis content de... C'est une première pour nous. Tous les
collègues du côté gouvernemental. Sur mon côté, je voudrais remercier ma collègue la députée de Fabre
d'être avec moi dans cet exercice-là. Aussi, Isabelle Paquet, qui est ma recherchiste. Donc, ces gens-là, ils
travaillent beaucoup à l'arrière, et puis ça nous aide beaucoup. Écoutez, je
suis heureux aussi parce que c'est
notre première, mais étant aussi vice-président de cette commission-là avec ma
collègue de Duplessis, donc, c'est vraiment encore plus intéressant.
Écoutez,
je ne ferai pas... Puis c'est une première sur la 42e législature, donc,
on commence, je pense, vraiment bien
sur un dossier... Je ne ferai pas l'historique que vous avez fait, M. le
ministre, parce que je suis vraiment en accord avec vous. Je pense que c'est un dossier qu'il va falloir vraiment
travailler tous ensemble. On a tout intérêt de travailler tous ensemble parce qu'on a tous à travailler sur
l'équité salariale. Vous savez, c'est sûr que, quand on regarde cette loi-là,
qui est venue au monde en 1996, peu importe
la loi, à un moment donné, il faut qu'elle évolue aussi dans le temps. C'est
sûr qu'il y a toujours des choses à corriger
parce qu'il y a des situations aussi, des nouvelles situations qui s'installent
au niveau de la population, et tout. Bien,
je pense qu'on veut justement faire progresser ce dossier-là. Et je peux vous
dire que vous allez avoir toute notre
collaboration parce qu'on a tout, comme je vous dis, intérêt à régler cette
lacune-là, qui est une lacune qui, malheureusement, perdure.
Puis
on parle d'équité salariale, mais, à l'intérieur de ça... l'équité salariale.
Et, la majorité du temps, c'est des femmes
qui sont touchées par cette équité salariale là, mais il faut regarder aussi...
À l'arrière de ces femmes-là, il y a des familles. Donc, vous savez, il faut aller plus loin que ça. Il y a
toujours, des fois, des dommages collatéraux qui s'attachent à ça, donc
je pense qu'il faut vraiment aller plus loin. Donc, juste pour vous dire que
vous pouvez voir notre pensée là-dedans. On veut vraiment collaborer. C'est sûr
qu'on a des questions.
Puis je remercie
d'ailleurs les groupes, tous les groupes qui vont passer ici et ceux qui nous
ont envoyé des mémoires. Ça nous aide vraiment à améliorer... Actuellement, le
projet de loi, il est là, mais il est là aussi pour être peaufiné, pour être amélioré. Donc, des fois, des
suggestions provenant de mémoires, ça nous aide énormément. Et je vous dirais... Et ça prend du temps, préparer ces
mémoires-là, vous savez. Des fois, il y en a qui ont dit : Oui, mais je
n'ai pas eu assez de temps pour
préparer. Donc, ça, c'est sûr que laisser plus de temps aux organismes à
préparer leurs mémoires, ce serait intéressant parce qu'à ce moment-là
ils peuvent être plus performants aussi, ces organismes-là qui viennent nous
rencontrer. C'est juste ça que je pourrais dire, qu'on ne laisse peut-être pas
assez de temps.
Mais, au moins, ceux qui nous ont envoyé les
mémoires et ceux qui sont présents, merci de vous avoir déplacé.
Effectivement, comme la présidente le disait, pas toujours évident de se
déplacer dans des températures comme ça, surtout
que j'ai remarqué ce matin que... bien, hier soir, enfin, qu'il y avait eu un
petit peu de neige qui avait tombé sur Québec. Donc, je peux vous dire, oui,
un peu.
Donc,
écoutez, encore une fois, on va... Oui, on a... il faut se conformer d'ici le
10 mai prochain, et puis on va travailler ensemble pour en arriver à une
solution le plus rapidement possible. C'est tout, madame.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Merci, M. le député et vice-président de la commission
économie et travail, effectivement. J'invite
maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de
travail et député de René-Lévesque à faire ses remarques préliminaires pour
une durée d'une minute.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Donc, à mon tour de vous
souhaiter bonne commission. C'est la
première fois qu'on se réunit ensemble, il y
en aura plusieurs,
je présume, donc je vous souhaite une bonne présidence. M. le ministre, les collègues de la partie gouvernementale, bonjour, mes collègues de l'opposition officielle, de la troisième opposition, merci d'être là.
Effectivement, pour le Parti québécois, lorsqu'on parle d'équité salariale, on parle
de notre ADN. Dès 1996, les premières
discussions, l'adoption de la loi en 1997, ça fait partie de notre cursus
politique avec lequel on a travaillé à travers les années. Et je ne me rajeunirai pas, mais, au
tournant des années 90, lorsque j'étudiais les relations industrielles, l'équité salariale était à l'ordre du jour. Donc, j'ai pu, dans certains cas, étudier les
tenants et aboutissants des lois qui allaient être appliquées. Donc, je
suis content de me retrouver 20 ans plus tard et de travailler à sa modification.
Cela
étant dit, M. le ministre, vous aurez toute notre collaboration dans ce projet de loi là pour fonctionner de façon constructive
et d'arriver à l'échéance du 19 mai 2019, pour se conformer, pour éviter des
trous juridiques. Mais je tiens à
rappeler à la commission qu'il existe encore un écart de 3 $ de l'heure entre les salaires des femmes
versus les hommes. Donc, on a un grand travail à faire, et cette
commission peut en régler une bonne partie. Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci, M. le député. J'invite maintenant le
porte-parole du troisième groupe d'opposition
en matière de travail et député d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses remarques
préliminaires pour une durée d'une minute.
M.
Alexandre Leduc
M. Leduc : Une minute, c'est une
torture, Mme la Présidente. Merci de me céder la parole. Merci, Mme la
Présidente, merci, M. le ministre, merci, mes collègues des deuxième opposition
et première opposition officielle également.
C'est un plaisir d'être ici aujourd'hui. Ayant une formation en droit du
travail, étant un ancien conseiller syndical, j'avais hâte à mon premier projet de loi qui toucherait à la question du
droit du travail. Alors, voici, on inaugure ça aujourd'hui en grand.
Donc, bien heureux d'être parmi vous.
De manière
générale, vous ne serez pas étonnés d'apprendre que ma formation politique va
favoriser une approche qui vise à
renforcer l'équité salariale plutôt que de l'affaiblir ou de la fragiliser. On
aura l'occasion, au courant des différentes présentations, d'aller
vraiment dans les détails. J'aurais pu vous parler pendant au moins une
demi-heure de toutes sortes de modifications
que je ferais si j'étais assis sur le siège du ministre à ce projet de loi là,
mais, évidemment, à partir des
présentations qui seront faites tantôt et demain, et après-demain, on aura
l'occasion d'en débattre un peu plus en détail.
Donc, encore une fois, bien content d'être ici
et bien hâte d'entendre les invités. Merci, Mme la Présidente.
Auditions
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci,
M. le député. Nous allons donc maintenant débuter les auditions. Je souhaite la
bienvenue à l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et
des services sociaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, et nous procéderons, par la suite, à une période d'échange.
Je vous invite d'abord à vous présenter et à commencer rapidement ensuite votre
exposé.
Alliance
du personnel professionnel et technique
de la santé et des services sociaux (APTS)
Mme Dubé
(Carolle) : Merci. M. le ministre, Mme la Présidente de la
commission, membres de la commission, mesdames
messieurs, c'est vraiment un plaisir pour moi d'être ici ce matin et de
participer à cette commission à titre de présidente de l'Alliance du personnel professionnel et technique du
réseau de la santé et des services sociaux, que je vais abréger en vous
parlant de l'APTS.
Donc, notre organisation syndicale représente
plus de 55 000 personnes, qui oeuvrent partout dans le réseau, partout au Québec. Ce plaisir est d'autant plus
grand que nous sommes consultés les premiers par cette commission, alors
que l'APTS a été dans les toutes premières organisations syndicales à contester
les modifications à la loi qui ont été apportées
en 2008, des recours qui nous ont conduits devant la Cour supérieure, devant la
Cour d'appel et, finalement, devant
la Cour suprême, laquelle a accueilli toutes nos revendications. Cette décision
du plus haut tribunal a donné lieu au dépôt du projet de loi dont nous
discutons ici aujourd'hui.
Je tiens à
vous préciser que l'APTS est composée de 86 % de femmes. C'est vous dire
que nous connaissons bien les conditions qui sont les leurs et les
multiples iniquités qu'elles subissent à un titre ou à un autre. Et nous sommes
évidemment solidaires de toutes les femmes du Québec et de leurs conditions.
Par le passé,
l'APTS a été à même de constater les impacts sur un exercice d'évaluation du
maintien de l'équité salariale quand un employeur choisit de le faire seul.
Nous sommes actuellement engagés, comme organisation, dans des plaintes relatives à ces exercices, des
exercices qui ont eu lieu en 2010 et en 2015. Nous avons également, à l'APTS,
tout un secteur d'activité dédié à toutes les questions qui sont en lien avec
l'équité salariale. Je suis d'ailleurs accompagnée
aujourd'hui des membres de cette équipe-là, M. Robert Comeau, vice-président et
responsable politique de ce dossier, Julie Daignault, Marie-Josée Leroux, qui
sont respectivement coordonnatrice et agente de recherche dans le
secteur.
• (10 h 20) •
Ce préambule démontre bien que l'APTS dispose d'une
solide expertise sur le sujet, laquelle a trouvé favorablement écho devant la Cour suprême.
Cette
parenthèse étant faite, j'entrerai à présent dans le vif du sujet, le projet de loi n° 10. Nous avons, dans un premier temps, salué le dépôt du projet de loi tout en gardant le privilège d'en faire une analyse plus approfondie.
C'est maintenant chose faite. Nous sommes ici pour vous présenter le
résultat de notre réflexion.
D'emblée, je
dois vous dire que la joie initiale a eu tôt fait de céder la place à la
déception. Dans son état actuel, et
spécialement au regard des conclusions de la Cour suprême, ce projet de loi n'est pas de nature, malheureusement, à nous rassurer. Le gouvernement a certes
prévu... Le projet de loi a certes prévu un retour au principe de maintien en continu, c'est-à-dire d'ajuster les salaires au moment où l'événement a été créé par la discrimination, mais nous constatons que les dispositions proposées ne s'appliqueraient qu'à la date de l'adoption
du projet de loi, soit pour le futur seulement.
Le
libellé de l'article 23 de la loi nous donne ainsi à penser que
les plaintes de maintien déposées respectivement en 2011 et en 2016 seront exclues de toute rétroactivité. C'est à croire
que, malgré les jugements unanimes et malgré la décision du plus haut tribunal, que le gouvernement essaie encore de
trouver des échappatoires à la pleine réparation de la discrimination salariale faite aux femmes. C'est le principal reproche que nous
adressons au projet de loi n° 10. Une telle disposition maintiendrait
l'amnistie accordée aux employeurs en 2009, y compris celle que vous avez
accordée, à ce moment-là, au Conseil du
trésor lui-même, à savoir de ne pas corriger la discrimination salariale entre
les intervalles de maintien. Hasard
ou non, cela survient au moment où une étude de l'Institut de recherche et
d'information socioéconomique, l'IRIS,
nous apprend que les femmes travaillant dans l'administration publique font
l'objet d'une discrimination sectorielle systémique quand on compare
leurs emplois à celles des autres secteurs du reste du secteur public.
Maintenant, sur la question de la périodicité
dans l'intervalle liée aux exercices de maintien, tel que prévu à
l'article 23, nous croyons qu'un intervalle de cinq ans est beaucoup trop
long, principalement parce qu'il empêche le traitement plus contemporain autour
des informations et peut également amener un nombre plus important d'événements à évaluer quand on est dans un
intervalle aussi long que celui que est proposé de cinq ans. On suggère donc un
intervalle de trois ans, ce qui serait beaucoup plus raisonnable et davantage
en phase aussi avec la réalité.
Quant à l'article 6, nous nous opposons au
fait qu'un employeur puisse faire seul un exercice de maintien de l'équité. L'APTS est en effet d'avis que seul un
comité paritaire de maintien de l'équité salariale créé de plein droit peut combler
toutes les attentes en matière d'accès et de partage d'information. Le fait
pour une association accréditée de convenir
d'un résultat en comité favorise une adhésion de toutes les parties
intéressées. De plus, nous sommes convaincus que la participation obligatoire des personnes salariées ou de leurs
associations dans un processus de maintien de l'équité salariale est un
gage de réussite. Sur la question des correctifs salariaux, nous sommes très
inquiets de constater, à l'article 9, que
les ajustements à être versés le seraient sous forme d'indemnité forfaitaire.
Selon nous, cette nouveauté dans la loi pourrait s'avérer très pénalisante
pour les personnes salariées. Nous proposons plutôt de revenir au terme d'«ajustements salariaux», comme le prévoient les
dispositions relatives à l'exercice de l'équité salariale. Un correctif d'équité salariale, même étalé, puis c'est ce
qu'on a fait à l'époque, en 2006, pourrait ainsi être considéré aux fins du
calcul dans les prestations de
retraite, ce qu'on ne fait pas quand on parle d'indemnités forfaitaires. Sinon,
l'article 9 empêche les personnes
salariées d'être mises dans leur droit, avec leur salaire exempt de
discrimination au moment où l'équité aurait dû s'appliquer.
Concernant
les nouveaux pouvoirs prévus pour la Commission des normes, de l'équité et de
la santé et de la sécurité du
travail, la CNESST, nous croyons que les délais en matière de traitement des
plaintes dont il est question à l'article 15 sont irréalistes. L'APTS a mené plusieurs exercices de conciliation de
plaintes de maintien, tant dans le secteur parapublic que dans certains établissements hors réseau.
L'expérience nous incite plutôt des délais plus souples et la possibilité de
les prolonger si les parties y consentent avec l'accord, naturellement,
de la commission. Nous suggérons aussi que la commission puisse, dans
l'objectif de pouvoir respecter ces délais-là, de disposer des ressources
financières et des ressources humaines suffisantes pour pouvoir le faire.
Quant à l'article
17, qui rend le règlement d'une plainte opposable à tout salarié ou à toute
association accréditée, nous pensons
qu'il faut le retirer. Il devient non pertinent, vu notre recommandation un peu
plus haut, de créer un comité paritaire
sur le maintien de l'équité salariale. À partir du moment où on aura un tel
comité où les décisions doivent être prises
par consensus, la possibilité, par la suite, pour les organisations de déposer des plaintes n'existe plus. Donc, pour nous, on n'a
pas besoin de l'article 17 à ce moment-là.
À défaut de
retirer la disposition concernée, il faudrait permettre à une association accréditée de manifester, par écrit, son intention de ne pas être liée
par l'accord et donc de ne pas être obligée de l'entériner. Finalement, quant
aux dispositions transitoires du projet de loi, nous pensons
que celles-ci devraient prévoir que les enquêtes en cours puissent
se poursuivre concernant les exercices de maintien de l'équité de 2011 et ceux
de 2016.
En conclusion, tel qu'il se présente
actuellement, le projet de loi n° 10 aurait des effets potentiellement déplorables au chapitre de la rétroactivité,
exactement les mêmes que la Cour suprême a ouvertement dénoncés. Nous
nous interrogeons sérieusement sur l'objectif visé par le gouvernement si les
améliorations majeures ne sont pas apportées.
À défaut de telles améliorations, nous voyons mal comment ce projet de loi
pourrait déboucher sur une loi sur l'équité salariale véritablement proactive
et respectant pleinement son objectif fondamental. C'est en ce sens que nous
avons présenté nos recommandations à cette
commission. Nous demandons au législateur d'y donner suite et surtout de
donner suite au jugement de la Cour suprême
dans toute son amplitude. Cette commission a l'occasion de redonner aux valeurs d'égalité et d'équité une loi à la hauteur
des principes qui ont conduit à son adoption en 1996. Autrement, nous
n'aurons d'autre choix que de retourner dans le cercle stérile des
contestations, et c'est ce que personne ne souhaite.
Avant d'être
un employeur, je le rappelle, l'État est le gardien du principe d'équité
salariale entre les hommes et les femmes et il a un devoir d'exemplarité. Il
lui appartient d'éviter les erreurs du passé. À lui d'en saisir l'occasion.
Je vous remercie de votre attention.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Je vous remercie, Mme Dubé, pour votre
exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange, et la
parole est à vous, M. le ministre, vous disposez de 16 min 30 s.
M.
Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci pour cette belle
présentation. Je vous connais bien, l'APTS, puis vous avez effectivement
été un chef de file dans le processus de contestation judiciaire. Et je veux
reconnaître le principe de la discrimination
systémique, hein? Ça ne fait pas l'unanimité, mais moi, je reconnais que c'est
parfois érigé en système, et il faut
tous travailler dans la même direction. Et je trouve que vos commentaires sont
bénéfiques à bien des égards, non seulement parce que vous adhérez au
principe de la loi, mais que vous souhaitez qu'on essaie de l'améliorer de façon plus globale, hein, c'est ce
que je comprends. Vous disiez même, puis ça, je ne suis pas certain que j'ai bien compris, que le rapport que la loi nous
impose ou nous demande de soumettre au mois de mai, vous voudriez que ce
soit reporté d'une période de six mois. Est-ce que j'ai bien compris ce
volet-là?
Mme Dubé (Carolle) : En fait, c'est plutôt l'obligation que vous avez,
je pense, après 10 ans, de revoir la loi.
M. Boulet : Oui. Tout à fait.
Mme Dubé
(Carolle) : Les dernières
modifications, en 2008... il a été inscrit dans la loi qu'il devait y avoir un
exercice le 28 mai 2019, c'était aussi
précis que ça. Bien, on pense que c'est serré, dans le contexte où vous avez
d'abord à traiter du projet de loi
n° 10 et des exigences qui vous ont été imposées par la décision de la
Cour suprême. Donc, on pense qu'un délai de six mois... de reporter le délai
d'une période de six mois, là, par rapport à la révision générale de la
loi...
• (10 h 30) •
M.
Boulet : Ça va. Et l'indemnité forfaitaire, bon... évidemment, il y a un impact à cette loi-là, les
exercices de maintien de l'équité
salariale qui seront faits postérieurement à l'entrée en vigueur de cette
loi-là, par exemple, avant le 10 mai 2019,
vont devoir rétroagir. On est
conscients, on partage, et c'est cet objectif-là que nous impose le jugement
de la Cour suprême, donc on va devoir revenir dans le temps, aller bien
identifier les événements qui ont créé de la discrimination et corriger les
écarts salariaux pour l'avenir.
Mais ce qui
aura été accumulé pendant cette période-là, que ce soit possible pour une
entreprise de le payer en cinq
versements, une indemnité forfaitaire étalée sur une période de quatre ans,
j'aimerais ça que vous me précisiez un peu plus clairement pourquoi vous
vous objectez à ça.
Mme Dubé
(Carolle) : On ne s'objecte
pas à ce qu'il y ait un étalement des correctifs comme le prévoyait la loi.
Quand on a fait l'exercice en 2006, la loi prévoyait qu'un employeur pouvait
étaler, puis c'est d'ailleurs ce qui a été fait au gouvernement et probablement dans certaines entreprises, qu'on étale,
sur une période, les ajustements. Nous ne sommes pas en désaccord avec
ça.
Où nous sommes en désaccord, c'est quand on va
permettre à des employeurs de verser sous forme de forfaitaire, parce qu'un forfaitaire, en tout cas, dans notre monde à
nous, peut-être que ce n'est pas pareil chez tous les employeurs, mais
ça, ça veut dire que ce n'est pas intégré à l'échelle salariale, donc ce n'est
pas, dans notre cas, RREGOPable, ça ne sera
pas admissible pour la prestation pour la retraite. Puis il y a beaucoup
d'autres inconvénients qui sont liés au fait que le salaire n'est pas
ajusté quand on le verse sous forme de forfaitaire.
M. Boulet : D'accord. Simplement apporter une précision, les ajustements,
le cas échéant, vont devoir se faire au
fur et à mesure, après l'exercice de maintien de l'équité salariale. Ce qui est
potentiellement payable sous forme
d'indemnité forfaitaire, c'est la somme des
plus et des moins qui se seront accumulés dans les cinq années précédentes.
Mais, à partir du moment où on a réalisé qu'une indemnité forfaitaire... à
verser, il y a aussi des écarts salariaux à corriger
à partir de ce moment-là. Est-ce
qu'on vous me comprenez bien sur ce volet-là? Est-ce qu'on se comprend bien?
Parce que l'indemnité forfaitaire ne
soustrait pas l'entreprise de corriger l'écart salarial pour l'avenir à partir
du moment où on a fait l'exercice de maintien. Je veux que ça soit
clair, parce que c'est un bon point que vous soulevez.
Mme Dubé
(Carolle) : Si vous nous
rassurez que les correctifs vont être faits aux échelles de salaires, bien, ça,
c'est l'objectif qu'on cherche à atteindre.
M. Boulet :
Puis, comme je vous dis, on fait la somme des plus et des moins, parce que,
s'il y a un événement, par exemple, qui a créé une iniquité quatre ans et demi
avant l'exercice de maintien et que cet événement-là est disparu deux ans plus tard, bien, il va falloir, via
l'indemnité forfaitaire, verser l'écart pendant les deux ans. Mais, si
l'événement est disparu, là, il n'y a
pas un écart à corriger dans le temps. Mais, si l'écart persiste, il va falloir
corriger l'écart à partir du moment où l'exercice de maintien sera fait.
Et je vous rassure là-dessus.
Des voix : ...
Mme Leroux
(Marie-Josée) : On va
s'habituer. Juste des précisions. Je
comprends que ce que vous mentionnez
va être en vigueur à partir de la sanction du projet de loi,
donc pour les situations
dans l'avenir. Ce qu'on... pour faire le lien avec ce que Mme Dubé disait tout à l'heure, nous, on est
très préoccupés du fait que tout ce qui
est pendant pour le passé ne sera pas
visé par l'application de la loi. Donc, il n'y aura pas d'effet rétroactif
à l'application de p.l. n° 10. Ça, c'est une chose.
D'autre
part, la façon dont vous nous expliquez le versement des indemnités forfaitaires,
ce matin, nous inquiète encore plus dans la mesure où il y a des
dispositions dans la loi, il y en a dans le cadre de la réalisation des
exercices initiaux d'équité salariale, mais
il y en a aussi dans le maintien qui interdisent de baisser les salaires. Donc,
il va falloir trouver des mécaniques
qui font... bon, d'une part il y a la question qui reste entière : Est-ce
que les correctifs qui vont être
versés de façon rétroactive sont intégrés aux salaires ou ça ne va être qu'une
indemnité compensatoire? Nous, ce qu'on comprend du projet de loi, c'est que ça ne serait qu'une indemnité
compensatoire qui ne sera pas
intégrée aux échelles de salaires. Ce qui veut dire, dans le fond, que
les gens ne seront pas remis dans leur droit tel qu'il existait au moment où l'événement est
survenu et au moment où ils auraient dû avoir un salaire équitable — on va dire ça comme ça, là, un salaire équitable, là — si
on corrigeait la discrimination au
moment de l'événement. Donc, ce n'est qu'un... ce n'est qu'un! Ce n'est
pas que ce n'est pas important, oui, il faut compenser la discrimination
salariale, mais, d'après nous, ça ne doit
pas être qu'un montant forfaitaire
versé au moment de l'événement, mais
bien que la différence soit intégrée au niveau... bien, dans notre cas,
on parle d'échelles de salaire, là, on comprend qu'il y a toutes sortes de
modalités dans les entreprises, là. Mais,
pour nous, ce qu'on vise, et vous avez aussi le pendant de ce principe-là où on
parle, dans le document qu'on vous a
transmis, qu'on ne veut pas que le maintien de l'équité salariale soit un
régime de deuxième ordre par rapport à l'exercice initial, ça fait aussi
partie de ça.
Dans
l'exercice initial, les correctifs qui étaient versés étaient versés en termes
d'ajustements salariaux et, pour nous, ils ont été intégrés aux échelles de
salaire, ce qui veut dire que les augmentations de salaire subséquentes se sont
ajoutées à ce salaire d'équité là, ce qui
veut dire que ce salaire-là a été considéré dans le calcul des années... dans
le cas du RREGOP, du calcul des cinq
meilleures années dans le cas échéant, là, pour les salariés qui prenaient leur
retraite. Donc, ça a bonifié leurs prestations de retraite.
Le
fait d'intégrer le correctif aux échelles de salaire a des impacts très
bénéfiques et permanents qui durent dans le temps, tandis qu'un versement d'un montant forfaitaire ne donne pas
tous ces droits-là. Ça, c'est une chose qu'on voulait mentionner.
Et
l'autre chose que je me permets de mentionner aussi, c'est que, comme on ne
peut pas baisser les salaires, il faut faire attention avec la façon dont on
parle des moins. Vous dites : Quand il y a des plus, on va verser des
compensations puis, quand il va y
avoir des moins, on va l'enlever. Si c'est ça, le principe, il y a un problème
parce que normalement on ne peut pas
baisser les salaires en réalisant l'équité salariale. Donc, on part toujours du
salaire le plus élevé obtenu, puis, quand il y a des événements qui
feraient, par exemple, varier la courbe des emplois masculins ou la valeur des
emplois masculins, bien, normalement on
s'attend à ce qu'il y ait statu quo et non pas que les salaires baissent. Mais
ça, bon, c'est une particularité de l'application, mais c'est dans la
loi aussi, il y a des articles qui le prévoient.
M. Boulet :
Oui. Puis, ça, on ne touche pas à ça. D'ailleurs, il y a maintien, là, ça ne
peut pas aller à la baisse. Donc,
même s'il y a un événement où le salaire masculin est baissé, le salaire
féminin ne sera pas baissé. Ça, c'est maintenu. Ça, c'est conservé de
façon intégrale.
Deux
points. L'indemnité forfaitaire, encore une fois, je le redis, ne soustrait pas
l'employeur de corriger les écarts salariaux.
Donc, s'il y a des écarts, il faut que ce soit corrigé à partir du moment où
l'exercice de maintien est fait, donc intégré dans les échelles de
salaire, et ça, je tiens à vous rassurer.
Ce
qui est payable par la voie d'une indemnité forfaitaire, c'est les sommes
découlant des événements qui ont créé
des iniquités pendant la période de cinq ans préalable. Donc, on maintient
exactement ce que la loi prévoyait, mais on prévoit dorénavant, pour respecter la décision de la Cour suprême du
Canada, de rétroagir. Donc, si on fait notre exercice de maintien à tous les cinq ans, ce que la loi
prévoit, on va devoir retourner dans le temps et respecter la rétroactivité. Ça,
je tiens à vous rassurer.
Il y a un point que
vous soulevez qui est extrêmement important, puis ce sera certainement au coeur
de nos discussions, puis moi, je veux le
traiter, c'est sûr que la déclaration d'invalidité, elle est effective au
moment de l'entrée en vigueur de la loi remédiatrice, qui, souhaitons-le
tous ensemble, sera adoptée avant le 10 mai 2019. Donc, elle ne s'appliquera, cette rétroactivité-là, que pour les
exercices de maintien qui sont faits après l'entrée en vigueur de la loi,
donc tous les exercices de maintien faits
après le 10 mai 2019. Je sais que vous... je m'attendais à ce que
vous souleviez ce commentaire-là.
• (10 h 40) •
Et
ceux qui ont demandé à la CNESST de reporter les exercices de maintien, dans
les dernières années, vont aussi être
soumis à la loi actuelle, pas à la loi remédiatrice qu'on adoptera avant le 10 mai 2019. Ça, je le
précise, il n'y aura pas deux poids,
deux mesures, tout le monde va être traité de la même façon. Mais, s'il y a
un exercice, par exemple, je vous...
qui doit être fait en 2020, l'employeur va devoir revenir jusqu'en 2015 et
regarder, depuis 2015, tous les événements qui
ont créé des nouvelles iniquités, verser... s'il a fait son exercice de
maintien, mettons, le 1er juin 2020, il va devoir payer, par une
indemnité forfaitaire, tout ce qui découle du calcul des iniquités pendant la
période de cinq ans précédente, et il va
devoir, bien sûr, corriger, à partir de ce moment-là, dans les salaires,
dans les échelles de salaire. Il va devoir
en tenir compte dans ses conditions
de travail à partir de ce moment-là.
Ça fait que je pense que ça devait être précisé à partir de ce
moment-ci. Est-ce que ça vous va?
Mme Dubé
(Carolle) : Non.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Boulet :
Bien, je sais que vous avez...
Mme Dubé
(Carolle) : Pas du tout.
M. Boulet :
Non.
Mme Dubé
(Carolle) : Ça ne nous va pas du tout, c'est vraiment l'aspect, pour
nous...
M. Boulet :
Je pensais avoir l'accord de l'APTS ce matin.
Mme Dubé
(Carolle) : Non, non, non. Bien, écoutez, je vous l'ai dit, dans ma
présentation...
M. Boulet : Oui, je comprends.
Mme Dubé (Carolle) : ...pour nous,
c'est vraiment l'élément majeur, là, sur lequel on est complètement en
désaccord par rapport au projet de loi.
M.
Boulet : Je comprends. Je
comprends puis je respecte ce désaccord-là, mais il y a quand même
des précisions qu'on a pu faire. Il y a juste un autre point, je ne sais
pas si j'ai assez de temps, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste trois minutes.
M.
Boulet : Il y a
un autre point que j'aimerais clarifier avec vous. Quand vous dites, bon :
On pourra regrouper des plaintes,
faire des ententes... puis vous voudriez que des associations accréditées
puissent se dissocier de l'entente... Évidemment, on parle d'ententes qui visent une même catégorie
d'emplois, par exemple, les
infirmières, ou un autre type d'emploi
dans le secteur de la santé ou des services sociaux. Est-ce que ce point-là
tient compte du fait que le projet de loi donne aussi la possibilité à un
salarié pris individuellement de se retirer de l'entente, de lever la main puis
dire : Je ne suis pas en accord avec l'entente? Est-ce que vous en
aviez tenu compte, de ça, aussi?
Mme Dubé (Carolle) : Bien, en fait,
nous, on pense qu'on n'aurait pas besoin de ces processus-là à partir du moment où on aurait un comité paritaire, comme on
a fait... Quand on a fait l'exercice d'équité salariale, en 2006, en comité,
dans le processus initial qui était prévu
dans la loi, à la fin, là, il y a eu un consensus, et ça, ça a fait en sorte
qu'il n'y a aucune plainte qui n'a été déposée de la part des
organisations syndicales suite à l'exercice de 2006. D'introduire un processus
comme ça dans le projet de loi pour s'assurer paritairement du maintien de
l'équité salariale dans les entreprises puis
chez les employeurs, bien, ça donne la garantie à tout le monde qu'on ne se
retrouvera pas, comme c'est actuellement dans le secteur public, avec
des milliers et des milliers de plaintes qui sont à la commission de l'équité salariale — CNESST, maintenant — parce que le gouvernement a choisi de faire
seul, la loi lui permettait de faire ces exercices-là seul, il a fait ça seul, et il n'y a pas de satisfaction,
on n'a pas pu y participer, à l'exercice. Ça fait qu'on n'aurait pas besoin d'avoir tous ces processus-là d'entente
sur les plaintes, puis tout ça, puis ça éviterait sûrement aussi des milliers
de plaintes de permettre, via la loi,
d'avoir un processus de comité paritaire, comme on a fait dans l'exercice
d'équité.
M.
Boulet : Est-ce que vous ne pensez pas que, même s'il y a un comité
paritaire de maintien de l'équité salariale... Vous me dites, bon : S'il y a une entente, tout le monde y adhère.
Il me semble qu'on fait un pas en avant, parce que, là, on permet à un individu, à une personne qui est
syndiquée, malgré le monopole de représentation du syndicat, d'exprimer son désaccord avec l'entente et de faire une
plainte éventuellement. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'on ne fait pas un pas
en avant en permettant à la personne
salariée de s'objecter? Même s'il y a un comité paritaire, c'est la règle de la
majorité qui s'applique, là, selon votre thèse.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Je
vous rappelle qu'il vous reste 25 secondes.
Mme Dubé
(Carolle) : Nous, là, on n'a
pas de malaise que vous gardiez la possibilité à un individu de porter une
plainte suite à un exercice qui aurait été fait en comité paritaire, par
exemple.
M. Boulet : O.K., je comprends.
Mme Dubé (Carolle) : Vous comprenez?
M. Boulet : Bon point.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est tout? C'est bien. Alors, merci. Merci, M. le ministre. Merci,
madame... l'équipe de l'alliance. Je
cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle, M. le
député, et vous disposez de
11 minutes.
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente, un temps que je vais partager ma collègue de Fabre. Écoutez, premièrement, merci d'être ici, merci de
votre mémoire, qui est très intéressant, en passant.
Écoutez,
je vais rester dans le comité paritaire. J'écoutais justement
que, oui, une personne qui fait partie d'un comité, une seule personne à l'intérieur... un représentant syndical, en l'occurrence, peut donner son opinion, puis tout le
kit, mais moi, j'aimerais ça vous entendre, parce que,
par expérience, de mon passé syndical aussi, donc, quand c'est
un comité paritaire, quand que des gens qui peuvent discuter alentour d'une
table, est-ce qu'on n'arrive pas à une solution plus juste ou plus
éclairée? Je voudrais vous entendre là-dessus.
Mme Dubé (Carolle) : Dans? De?
M. Rousselle : Dans un comité
paritaire, peu importe, une compagnie...
Mme Dubé
(Carolle) : Oui, oui, oui.
M.
Rousselle : ...peu importe,
dans votre association, la venue d'un comité paritaire, vraiment,
là, donc un mélange de patrons et de
syndiqués là-dedans, pour en arriver à une entente sur l'équité salariale, vous, vous le voyez comment, ce
comité-là? Moi, je le vois vraiment paritaire, donc vraiment qu'on puisse avoir
des échanges. Vous, vous le voyez comment?
Mme Dubé
(Carolle) : Bien, nous, on
pense que vous devriez vous inspirer de ce qu'il y avait déjà de
prévu dans la Loi sur l'équité salariale, quand tous les employeurs, au Québec,
ont dû faire, pour la première fois, un exercice d'équité salariale. Donc, il y avait
des dispositions, il y a avait des comités, des mandats, des règles
d'affichage. Et ça, ça a fait en sorte qu'il y a pu, comme vous le
dites, avoir des échanges. On a pu faire une évaluation commune des emplois, convenir d'arrangements, convenir d'un
ensemble d'éléments. Et, par la suite, bien, les organisations ont été naturellement en accord avec ces ententes-là, et ça a fait en sorte qu'il n'y a
pas eu de plainte qui a été déposée suite aux exercices d'équité salariale, en
tout cas, du moins, pas par les
organisations syndicales. Il y a peut-être eu des plaintes individuelles, mais il n'y
a pas eu de plainte de déposée.
Ça fait que, pour nous, un processus comme un
comité paritaire, bien, on se dit que, si on est capable de reproduire ça pour faire un exercice de maintien,
puis un exercice de maintien, c'est normalement moins lourd aussi que tous les premiers exercices d'équité, on doit
s'assurer, comme employeur puis comme organisation syndicale, bien, qu'on n'a pas recréé de
la discrimination dans l'entreprise.
Ça fait que
moi, je pense que tout le monde est gagnant de se parler à ce niveau-là, de convenir de quelque chose,
puis de régler les situations discriminatoires, puis qu'on ne se retrouve pas
avec un ensemble de plaintes, comme
on connaît actuellement, du moins, dans le réseau public.
M.
Rousselle : Je n'ai pas vu
dans votre mémoire... Actuellement, les dates pour avoir des données sur les
salaires dans un certain secteur, on
se fie plus souvent au 31 décembre, c'est la fin de l'année, et tout. Par
analyse, par expérience, on ne serait pas mieux, pour avoir des données
plus justes, se fier quand on reçoit les relevés 1 du gouvernement, donc pour avoir une idée ou
une image plus juste, pour pouvoir, justement, faire l'équité
salariale, pour qu'elle puisse... le
comité puisse en débattre.
Est-ce que vous avez regardé ça, ou pas du tout,
ou...
Une voix : ...
M.
Rousselle : Parce que
j'essaie juste de savoir pour les données, parce qu'à un moment donné c'est bien beau qu'on veut avoir une
parité salariale, mais on va chercher la donnée où pour avoir vraiment qui qui
a gagné quoi puis s'il y a injustice? Donc,
moi, je me dis : Si on se fie au 1er décembre, parce que j'ai dit le 31
décembre, est-ce que ce n'est pas
plus juste de s'en aller vers, je ne sais pas... le mois de février, par
contre, quand reçoit les relevés 1 ou... Vous n'avez pas pensé à ça?
Vous n'avez pas regardé ça?
Une voix : ...
Mme Leroux
(Marie-Josée) : Pardon. Notre organisation représente des salariés
exclusivement dans le réseau public
de santé et des services sociaux. Donc, les salaires sont connus, les
progressions salariales sont connues des années l'avance et sont consignées dans les conventions collectives. Donc, pour
nous, les données salariales, ça ne pose pas de problème. Elles sont disponibles en tout temps, elles sont connues à
l'avance, elles sont négociées. C'est sûr que, dans d'autres types d'entreprises, il faut peut-être
avoir une réflexion sur quelles seraient les données et à quel moment ça serait
le plus judicieux de les avoir. Mais, pour nous, pour ça, il n'y a pas de
difficulté.
La
difficulté, elle est de documenter les événements à l'intérieur de la période
dite de maintien de l'équité, le délai de
périodicité. Actuellement, c'est cinq ans, nous, on recommanderait trois ans.
Ce qui est plus difficile, dans notre réseau, c'est de dépister les événements
qui pourraient donner droit à des changements dans l'entreprise qui se
qualifieraient pour considérer que ça
recrée des écarts salariaux. De quel type de changement on... C'est sûr que,
nous, nos membres nous alimentent et
nous mentionnent au fur et à mesure qu'il y a des lois, par exemple, qui
modifient le contenu de leur travail. Ils nous alimentent là-dedans.
• (10 h 50) •
Mais ce qu'on
veut, puis je fais le lien avec ce que vous disiez tout à l'heure par rapport
au comité paritaire, c'est pouvoir avoir un comité de maintien de l'équité
salariale identique à ce que la loi prévoit déjà comme un comité d'équité
salariale au sens des articles 17 à 30 de la loi qui existe déjà.
Donc, ça serait de reconduire en maintien de l'équité pour des entreprises, puis on vous a ciblé le type d'entreprises
comme celles que nous, on représente, là... remplit ces critères-là, c'est-à-dire,
c'est des entreprises de plus de 100 salariés, où déjà la loi prévoit
qu'il y a automatiquement des comités d'équité
salariale. Donc, nous, on voudrait qu'automatiquement, dans le même type
d'entreprises, il y ait des comités de maintien
d'équité salariale. Et, quand vous parliez de comité paritaire, tout à l'heure,
c'est exactement ce comité-là qui est au sens de la loi, et qui répond à
des critères de comité paritaire, et qui est décisionnel.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Mme la députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, Mme la
Présidente. J'ai combien de temps?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il vous reste 4 min 39 s.
Mme Sauvé : Alors, je tiens à saluer quand même... prendre
10 secondes au moins pour saluer le ministre, mon collègue, les collègues des oppositions et, bien
sûr, vous. Merci pour votre mémoire et votre présentation. J'ai été très
attentive, et c'est fort intéressant.
Il y a un
aspect qu'on n'a pas traité, puis là je vais vous parler un petit peu... Mon
collègue vous parlait de son expérience syndicale. Moi, j'ai été
auparavant un employeur qui a permis la première vague de mises en oeuvre de l'équité salariale avec le plan d'action. Alors,
je l'ai vécu de l'autre côté. Et je trouve très important tout l'accent que
vous mettez au maintien, le maintien de l'équité salariale, avec la mise
en oeuvre d'un comité paritaire de maintien, qui s'apparente au comité d'équité
salariale.
Et là je vais y aller sur un autre angle, qui
est au-delà de l'aspect salarial, de réajustement salarial et de rétroactivité, je veux vous parler du maintien de
la culture d'équité salariale. Et j'aime beaucoup votre point quand vous
mettez, dans votre mémoire... au niveau de
l'affichage. Ça semble peut-être moins important, mais c'est important. Vous
l'avez au coeur de votre mémoire. Vous
dites : C'est important de présenter, et d'afficher, et de rendre
transparent l'ensemble de l'oeuvre,
donc pas seulement les éléments qui ont nécessité modifications. Mais, en même
temps, cet affichage complet permet
aussi de faire la promotion des efforts pour maintenir une culture d'équité
salariale. Et ça, je vous dirais que, comme ancien employeur, c'est l'aspect, honnêtement, qui était un peu une
lacune. Donc, de pouvoir, entre autres, parler des gestes de formation continue qui sont présentés, donc, la
diffusion d'outils d'information. Alors, ça fait partie... Alors, oui, l'aspect
correctif, mais aussi l'aspect de maintenir
cette culture-là, qui est essentielle, au coeur de n'importe quelle entreprise,
réseau ou organisation. Alors, je voulais remettre l'accent là-dessus
parce que je trouve que c'est très, très important.
Justement en
lien avec cette culture qu'on doit maintenir d'équité salariale, je voulais en
entendre un petit peu plus sur le
rôle précis du comité paritaire de maintien dans ce sens-là. Au-delà de parler
de la gestion des plaintes, au-delà de regarder l'ensemble de l'oeuvre
au niveau des écarts salariaux, qu'en est-il dans le rôle du comité pour
s'assurer qu'il y a des gestes concrets du maintien de la culture d'équité
salariale dans une organisation? Grande question.
Une voix : C'est une grande
question.
Mme Dubé
(Carolle) : Bien, je peux...je
vais faire... Quand je regarde ce qu'on a fait à l'époque avec l'équité salariale puis les obligations qui sont prévues
dans la loi pour s'assurer... parce que c'était ça, l'objectif fondamental de
la loi, c'était d'éliminer la
discrimination et de s'assurer, par la suite, de toujours avoir le souci de
maintenir cet équilibre-là. Et, comme
vous le dites, toute la question de la culture, j'espère qu'un jour, dans les
entreprises, on n'en aura plus besoin, d'exercices de maintien, parce
qu'on aura réglé, une bonne fois pour toutes, toute la question de
discrimination. Parce que, si, à la base, on
payait aussi bien les femmes puis on reconnaissait la valeur du travail des
femmes, bien, on n'aurait pas eu
besoin, en 1996, d'avoir une loi puis on ne serait pas ici aujourd'hui pour
parler de ça. Donc, tout l'aspect éducation et formation dans ça, je
pense qu'il a toute son importance.
Moi, je pense que d'intégrer et de faire
participer autant l'employeur que les personnes salariées et que leur association dans un exercice, bien, ça permet
justement de se donner une vision commune des valeurs des emplois, des valeurs particulières des emplois féminins, qui ne
sont malheureusement souvent pas bien connus, pas bien considérés, et
c'est ce qu'on... c'est ce qui a été... c'est pour ça qu'aujourd'hui on vit de
la discrimination.
Donc, dans un rôle de comité, bien, je pense que
ça permet justement aux parties d'être parties prenantes de ces discussions-là, de faire une évaluation
commune des changements. Parce que le maintien, on le fait puis... un exercice
qu'on fait quand les emplois ont changé ou
qu'il y a eu des changements significatifs dans l'entreprise,
chez l'employeur. Donc, ça, de faire
cet exercice-là en comité conjoint, bien, je pense que ça permet de faire des
conclusions communes, d'apporter les
ajustements nécessaires, de convenir de règles d'étalement, comme on a
fait, par exemple, avec l'équité
salariale. Donc, je pense, c'est à ça que ça devrait servir, le comité. Et,
jusqu'à ce jour, malheureusement, la loi permettait aux employeurs de faire
ces exercices-là seuls. Je ne sais pas comment tous les employeurs du Québec...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Je
vous rappelle que votre temps est limité.
Mme Dubé (Carolle) : Oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est
terminé.
Mme Dubé (Carolle) : C'est beau.
Excusez-moi.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci
pour ce bel échange. Je cède maintenant la parole au porte-parole du deuxième
groupe d'opposition. M. le député, vous disposez de 2 min 45 s.
M.
Ouellet : On va faire ça
formule 1. Est-ce que les propos du ministre vous ont rassurée quant à votre interrogation sur
le paiement d'indemnités forfaitaires? Moi, ils ne m'ont pas rassuré. Est-ce
qu'ils vous ont rassurée sur le fait que les avantages sociaux seraient
inclus?
Mme Dubé
(Carolle) : Bien, je pense
qu'on reste quand même avec une inquiétude sur l'indemnité forfaitaire
puis j'espère que, dans ce sens-là, nos préoccupations seront entendues, et par le ministre, et par le législateur, et la commission.
M.
Ouellet : Parce que les
propos du ministre... tout
à l'heure, ce qu'il nous disait,
c'est qu'il y aura correction, et les nouveaux salaires seront intégrés effectivement dans la grille
salariale, et donc les modalités seront appliquées à ce moment-là. Ça, je suis d'accord. Mais ce que j'ai bien
compris, dans le cas des montants qui seront versés pour le rétroactif, s'ils le sont de façon forfaitaire, cette fois-ci,
les avantages sociaux tels qu'on les connaît, le régime de retraite, entre autres... Je présume que vous ne
demanderez pas des assurances salaire, puisqu'on est rétroactifs, même chose
pour les assurances médicaments, on
ne paiera pas des couvertures qu'on n'a pas eues, mais, dans le cas du régime de retraite, est-ce que les propos du ministre vous garantissent...
Mme Dubé (Carolle) : ...
M. Ouellet : Oui, allez-y, allez-y.
Mme Dubé
(Carolle) : Excusez.
J'aurais juste envie de vous dire, sur cette question-là, de garder ce
qu'il y avait déjà de prévu dans la loi quand on a fait les
correctifs pour l'équité salariale. Nous étions exactement dans la même situation où
on a fait un exercice en 2006 qui s'appliquait rétroactivement en 2001. Il y a eu
des moyens et des façons de faire pour apporter
les correctifs dans les échelles. Moi, je vous inviterais à garder cette même
formule là puis à ne pas la changer.
M. Ouellet : Autre question pour
vous. Évidemment, l'article 23, son abolition est votre cheval de bataille.
Mme Dubé (Carolle) : Sur la rétro?
M. Ouellet : Oui.
Mme Dubé
(Carolle) : Là aussi, je
pense que, si vraiment vous voulez vous conformer à la décision de la
Cour suprême, il doit y avoir une
rétroactive, c'est ce que la Cour suprême est venue dire, de replacer la situation
des femmes qui ont été discriminées à l'époque d'avant les modifications
de la loi en 2008. Donc, je pense que, pour répondre entièrement à ce que la Cour
suprême est venue dire, il faut rétroagir et se replacer la situation
à 2008, au moment où la loi prévoyait des correctifs et une
rétroactivité. Donc, c'est ce qu'on pense qui devrait être fait.
M.
Ouellet : Est-ce qu'on y va
aussi sur ceux et celles qui ne sont plus en emploi aussi, la rétroactivité?
Celles qui ont...
Mme Dubé (Carolle) : Bien, habituellement, dans les règles de rétroactivité, en tout cas, dans toutes celles que je connais, on replace les gens dans la situation.
S'il y a des gens qui étaient dans cette situation-là
durant ces années-là, bien, je pense qu'il faut leur apporter ces
correctifs-là également.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. C'est terminé. Je cède maintenant la parole au porte-parole du troisième
groupe d'opposition. M. le député, vous disposez aussi de
2 min 45 s.
M.
Leduc : Merci, Mme la Présidente. D'abord, j'aimerais souligner le combat que vous avez mené devant les
tribunaux, ça a été long, plusieurs
étapes, et puis je tiens à vous féliciter pour cette bataille-là. D'ailleurs,
on ne serait pas ici pour en parler aujourd'hui si vous ne l'aviez pas
faite, cette bataille-là. Donc, félicitations!
Vous savez,
mon parti et celui au pouvoir, des fois, on est diamétralement opposés sur le
spectre politique, mais, des fois, on
s'entend sur des choses. Par exemple, là, il y a les clauses de disparité de
traitement. Et puis la réforme libérale d'il y a deux ans a fait en sorte de dire qu'à partir de maintenant ce
ne sera plus possible. Mais les anciennes clauses de disparité de traitement peuvent être prolongées
dans le temps, et mon parti et celui du gouvernement étaient d'accord pour
dire que c'était absurde. D'ailleurs, il y a un projet de loi qui s'en vient
là-dessus pour corriger ça.
Mais la
philosophie derrière cette idée-là de dire que la discrimination qui a été
initiée avant la nouvelle loi peut perdurer, n'est-ce pas la même
philosophie qu'on retrouve dans la question de la rétroactivité qu'on empêche
d'être appliquée pour les anciennes plaintes? N'est-ce pas la même chose, en
fait?
• (11 heures) •
Mme Dubé
(Carolle) : En fait, moi,
j'aurais envie de vous dire que toutes les femmes qui se battent depuis 2008... puis
les exercices, puis les évaluations
qu'on a faits où on a reconnu qu'il y avait de la discrimination, bien, on ne
va pas corriger ces échelles-là, ces valeurs-là de travail si vous ne
permettez pas que la loi rétroagisse à 2008.
M. Leduc : On peut imaginer que, si cette clause-là n'est
pas changée, tel que vous le proposez, une nouvelle séquence judiciaire va s'amorcer avec les mêmes
étapes, puis on se retrouverait à se reparler d'ici cinq à 10 ans peut-être pour recorriger une loi qui
aurait pu être bien corrigée aujourd'hui.
Mme Dubé
(Carolle) : Oui. On pense
que vous devriez aller dans ce
sens-là pour éviter, encore une fois, de longs débats devant les tribunaux.
M. Leduc : Mais, s'il me reste un peu de temps, Mme la Présidente, j'aimerais intervenir sur
une dernière question. Vous réclamez
de réduire la durée des exercices à trois ans plutôt que cinq, c'est
intéressant. Il y a des groupes qu'on va entendre ici, durant la commission,
qui vont dans le sens inverse, qui proposent d'aller plus loin, sept ans,
10 ans. Qu'est-ce qui vous
rendrait inconfortable ou vous effraierait d'aller jusqu'à
10 ans, par exemple? Ça serait quoi, les problèmes
reliés à ça?
Mme Dubé
(Carolle) : Bien, je pense
qu'à un moment donné il faut être contemporain avec ce qu'il se passe dans
les milieux
de travail, là. Déjà,
cinq ans, pour nous, on le vit, là, depuis 2008, on est dans des périodes de
cinq ans, bien, ça devient difficile de faire tout ce travail-là. Plus
la période est longue, plus les événements sont nombreux, plus les changements
sont nombreux, donc c'est certain que ça devient encore plus lourd pour les
gens qui doivent faire le travail. Ça fait que, sur une période de 10 ans, là, on va avoir des gens qui n'étaient
pas là 10 ans avant, puis ça va
être très difficile selon nous, là. On propose plutôt de la réduire à
trois ans.
M. Leduc : L'exercice va être
moins lourd à faire sur une petite période qu'une plus longue.
Mme Dubé (Carolle) : Oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci.
M. Leduc : On se reparlera une
autre fois.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, M. le député. Merci pour cet échange. Écoutez, je vous remercie sincèrement
pour cette contribution, justement, aux travaux de la commission actuelle.
Nous allons suspendre les travaux quelques
instants afin de permettre au prochain groupe de s'installer.
(Suspension de la séance à 11 h 2)
(Reprise à 11 h 5)
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue au
Conseil d'intervention pour l'accès
des femmes au travail. Bonjour. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons, par la suite, à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite aussi à vous présenter et
à commencer votre exposé. C'est parti.
Conseil
d'intervention pour l'accès des femmes au travail (CIAFT)
Mme Rose
(Ruth) : Merci. Je suis Ruth
Rose. Je suis conseillère économiste au CIAFT, puis je vous présente
Roxanne Lorrain, qui est maintenant notre permanente responsable de l'équité
salariale.
Le CIAFT a
été, depuis les années 80, le principal porte-parole des travailleuses
non syndiquées. Alors, même si on a
très peu des ressources, je pense qu'on est probablement le seul groupe qui va vous faire une présentation au nom des
travailleuses non syndiquées.
Alors, il y a plusieurs
éléments positifs dans la loi, ils commencent à répondre à la décision de la
Cour suprême. Nous avons deux préoccupations particulières qui ont trait
plutôt à la rétroactivité de la loi. Alors, je ne sais pas si, en 10 minutes,
on aura le temps de tout présenter, mais notre première recommandation est à
l'effet que les nouvelles dispositions de la
loi devraient s'appliquer à toutes
les plaintes qui ont eu lieu avant la décision Martin, parce que
ça fait six ans que les cas étaient devant
les cours. Et, entre-temps, les plaintes qui ont été déposées et qui sont à
l'origine de cette contestation judiciaire n'ont pas été résolues. Et
nous pensons que le deuxième alinéa de l'article 23 devrait être supprimé et que les nouvelles dispositions de la loi devraient s'appliquer pour traiter les plaintes qui étaient déjà en
cours au moment où toute la série de décisions judiciaires a eu lieu.
Mme Lorrain (Roxanne) : Donc, rapidement,
en fait, on veut quand même mentionner que, pour nous, l'application des mesures qui
visent les entreprises sans comparateur masculin, c'est quand même
très important, donc, du fait qu'eux vont être aussi soumis aux mêmes... dans le fond, aux mêmes articles, si on veut, là, pour que l'évaluation de maintien s'applique dans
leur cas aussi. Donc, pour nous, c'est quand même une avancée importante, là,
pour les travailleuses non syndiquées principalement.
Ensuite de ça, ce qui a trait au processus de participation,
c'est sûr que, pour nous, même s'il est intéressant d'instaurer un processus de participation pour les salariés, il n'en demeure pas moins
qu'on considère que le comité d'équité
salariale devrait être présent dans l'évaluation de maintien au même titre qu'il l'a été dans
l'exercice initial. Ceci dit, si c'est
le processus de participation qui a lieu, on considère qu'il devrait avoir un...
L'employeur devrait fournir, en tout
cas, la formation requise pour
participer à ce processus de participation là, nonobstant le fait qu'il n'y a pas de comité d'équité salariale, s'il n'y a uniquement
qu'un processus de participation.
Puis, finalement, on considère aussi que l'obligation, dans
le fond, de réaliser le processus
de participation devrait s'appliquer
aussi aux entreprises qui emploient au moins 50 personnes
salariées, donc pas uniquement les 100 employés et plus.
Ensuite de ça, on considère aussi que les entreprises
qui emploient entre 10 et 49 personnes salariées devraient être
obligées de faire un plan d'équité salariale au lieu de simplement déterminer
les ajustements salariaux. En ce sens, on considère que, dans le fond, si, au cours de la période
de 60 jours prévue pour l'affichage de l'article 35 ou 76.3... une personne salariée ou une association
accréditée demande de telles informations, la période prévue pour présenter les
observations à l'employeur devrait être prolongée de 60 jours sans pour
autant retarder l'application des ajustements salariaux au-delà de la
date limite pour effectuer de tels changements.
• (11 h 10) •
Mme Rose (Ruth) : On comprend
qu'un des objectifs principaux de cette loi, c'est d'améliorer le contenu de l'affichage, et, en général, nous sommes
satisfaites. Nous pensons toutefois que, dans l'article 76.3, la nouvelle
version, que les deux points 3° et
4° ont été mal formulés, et donc nous... Je ne vais
pas vous le lire, mais, sur papier, on vous suggère une reformulation
qui, nous semble, serait plus claire.
On comprend
aussi, après nos discussions avec certains syndicats, que souvent — et d'ailleurs c'est mentionné dans les décisions des cours — ce n'est pas clair, quand est-ce qu'un
événement a eu lieu, et donc, dans les quelques cas où c'est clair, ça
arrive, nous pensons que le gouvernement devrait nommer un comité d'experts
pour examiner ces questions-là et puis qui pourrait éventuellement mener à un
règlement.
La deuxième
question qui nous préoccupe particulièrement et qu'on pense que la loi ne
permettrait pas de répondre complètement à la décision de la Cour
suprême d'assurer l'équité salariale pour tout le monde tient à l'indemnité forfaitaire. On pense que cette indemnité
forfaitaire ne devrait pas être étalée, sauf sur approbation spécifique. C'est
très rare, les cas où les employeurs
ne sont pas capables de les payer tout de suite, et on pense qu'il ne devrait
jamais y avoir une prolongation au-delà des quatre ans initiaux qui sont
prévus.
Deuxièmement, on veut s'assurer que ce soit payé
à toutes les personnes qui étaient en place au moment où l'événement a eu lieu,
même s'ils ont quitté l'emploi.
Troisièmement,
nous pensons que cette indemnité forfaitaire devrait s'appliquer à l'ensemble
de la rémunération et non pas
seulement sur le salaire. Moi, j'ai travaillé longtemps sur la question des
régimes de retraite, et, si vous perdez les contributions au régime de retraite sur cette partie-là de votre
salaire, c'est une iniquité qui dure non seulement de la période où vous n'aurez pas eu l'ajustement
salarial, mais, aussi, ça va vous affecter pendant tout le temps de votre
retraite, qui est une période assez longue.
Mme
Lorrain (Roxanne) : Donc,
aussi, on considère que les dates d'entrée en vigueur des différentes mesures
sont difficiles à comprendre, dans le sens qu'on recommande... En fait, on
recommande que le ministère produise un document qui clarifie le sens et les
objectifs des délais dans l'entrée en vigueur de certaines dispositions du
projet de loi n° 10, parce qu'on
considère que ce n'est pas assez clair, de la façon dont ils sont inscrits pour
l'instant dans le projet de loi, puis
que le gouvernement ne retienne que les délais pour l'entrée en vigueur qui
visent à faciliter la transition et non pas ceux qui retardent l'entrée
en vigueur des mesures qui visent à améliorer l'accès à l'équité salariale.
Mme Rose
(Ruth) : Je pense qu'elle a sauté quelques affaires. En tout cas,
on... Bien, les autres recommandations qu'on a faites visaient à
faciliter ou étendre davantage les démarches dans les petites entreprises, où
on pense que l'employeur doit faire un vrai plan d'équité salariale et pas
seulement déterminer lui-même ce que devraient être les corrections. Et on pense que, si une plaignante fait une plainte dans ce
cas-là et que la commission fait une enquête, que ces informations
devraient être transmises à la plaignante, parce qu'actuellement elles sont
confidentielles, et là la plaignante n'est
pas nécessairement en mesure de juger : Est-ce que ma plainte est fondée?
Est-ce que je dois poursuivre ou non? Donc, on pense que... Et, surtout,
dans l'esprit du processus de participation, qui vise justement à donner
l'information aux associations accréditées ou aux salariés non syndiqués dans
une entreprise, on pense qu'il faudrait davantage
d'information à la fois dans les cas d'équité salariale et dans l'évaluation du
maintien. Nous sommes d'accord avec l'idée de garder l'information pour
six ans, c'est une des choses qu'on a demandées.
Et, aussi,
une des choses qui nous inquiètent aussi pour les travailleuses non syndiquées,
c'est que vous supprimez l'article... l'obligation de l'employeur
d'aviser les employés, tout le monde qu'il va avoir un affichage, et ça, dans
les articles 35, 65 et 76.3.
Des voix : ...
Mme Rose (Ruth) : J'ai fini. J'ai
terminé.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Oui? Bon. C'est beau. Bien, écoutez,
je vous remercie. De toute façon, nous avons
notre mémoire, hein? Si jamais vous n'avez pas eu la chance de tout nous
rapporter, on pourra... on va le consulter.
Alors,
écoutez, nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre,
hein, du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, la parole est
à vous. Et vous disposez de 16 min 30 s, je vous le rappelle.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. J'aimerais d'abord vous remercier pour la préparation et la belle
présentation de votre mémoire. Ça nous fait plaisir de vous accueillir ce
matin. Je vais y aller de façon un peu plus télégraphique,
là. Il y a quelques points, là, qui méritent des précisions de votre part. Vous
avez référé aux entreprises où il n'y avait pas de comparatif masculin.
Est-ce que j'ai bien compris?
Mme Lorrain (Roxanne) : Oui.
Mme Rose (Ruth) : Oui.
M. Boulet :
Est-ce que vous avez vu dans le projet de loi qu'on traite de ces
entreprises-là?
Mme Lorrain
(Roxanne) : Oui. Ça, dans le fond, mon point visait à dire qu'on
considère que j'ajout, dans le fond,
que, durant le maintien sans comparateur masculin, dans le fond, s'ajoute...
que la loi s'applique à eux, finalement, on considère que c'est une
avancée quand même assez substantielle. Donc, c'était plutôt... On soulignait
cet ajout-là.
M. Boulet :
Bien, c'est un excellent point. Puis je pense qu'il faut le préciser pour le
bénéfice de nous tous, avant, pour
l'exercice initial, dans les entreprises où il n'y avait pas de comparatif
masculin, il y avait un règlement en vigueur en vertu de cette loi-là
qui prévoyait des comparatifs masculins ailleurs sur le marché du travail, donc
permettant aux entreprises où il n'y avait
pas de comparatif masculin de bien faire l'exercice initial. Mais, pour
l'exercice de maintien de l'équité
salariale, il n'y avait rien. Donc, on ne pouvait pas faire les comparaisons
utiles à la correction des écarts salariaux découlant de la discrimination systémique envers les emplois à
prépondérance féminine. Et ça, on a prévu, dans le projet de loi, que, pas simplement pour l'exercice
initial, mais aussi pour l'exercice de maintien, le règlement sera applicable
et, donc, pourra aux entreprises de s'en
inspirer en utilisant les comparatifs masculins. Je suis heureux que vous
l'ayez souligné.
Mme Rose
(Ruth) : Effectivement, on aimerait vous remercier. C'est quelque
chose qu'on a demandé depuis longtemps. Et donc c'est un des bons points
de l'avoir.
M. Boulet :
Bien, merci beaucoup. Deuxième élément. Je pense que vous avez fait référence à
la possibilité qu'il y ait... Puis
vous déploriez le fait qu'il n'y ait pas de formation disponible pour les
salariés pour leur permettre de faire des
observations ou des demandes de renseignement, ce qui n'existait pas avant. Il
n'y avait pas possibilité de faire des observations
ou des demandes de renseignement. Mais vous souleviez le point, je pense, là,
puis corrigez-moi si je suis dans
l'erreur, qu'il n'y avait pas de formation spécifique, notamment pour le
salarié non syndiqué. Est-ce que j'ai bien compris?
Mme Rose
(Ruth) : C'est-à-dire que, dans la boîte, dans le cas de l'équité
salariale, de l'exercice, l'employeur est
obligé d'offrir une formation. Mais c'est une loi qui est très complexe,
surtout pour des gens qui n'ont pas les ressources syndicales. Donc, on pense qu'il devrait avoir un
mécanisme qui permet aux salariés d'avoir, peut-être, au moins, une demi-journée pour voir comment ça fonctionne puis
qu'est-ce que ça devrait être, une évaluation. Alors, on aimerait que la
loi demande... donne cette responsabilité à
l'employeur. Mais on pense que la commission aussi pourrait jouer un rôle
pour offrir des formations aux salariés. Et ça, ça pourrait alléger la tâche
pour l'employeur.
• (11 h 20) •
M. Boulet :
D'accord. Ça, c'est aussi un très bon point. Et je veux vous informer que la
Commission des normes, de l'équité,
santé, sécurité du travail donne des formations en ligne aux salariés, qu'ils
soient ou non syndiqués. Les salariés
ont la possibilité de poser des questions
en ligne et ils peuvent même demander à la commission des normes de libérer une personne qui va former le salarié, qui va lui donner toutes les
informations pertinentes à l'application de la Loi sur l'équité
salariale. Ça fait que, déjà, la commission le fait, et j'avais déjà eu une
discussion sur cet élément-là.
Mme Rose
(Ruth) : ...ça fait longtemps que nous, on travaille avec la
commission, notamment, sur le contenu et la forme de la formation, et on
devrait faire... on a demandé de faire une formation spécifique sur
l'évaluation de maintien. Il faudrait aussi que l'employeur libère ses
salariés, les salariés qui vont participer à un éventuel comité de maintien, ou
même sur le processus de participation, pour qu'ils aient le temps de suivre
ces formations-là.
M.
Boulet : O.K. donc, on est conscient que la commission donne de telles
formations. Là, vous dites : Il faudrait aller un pas en avant et libérer
les salariés pendant les heures de travail pour leur permettre de suivre la
formation.
Mme Rose (Ruth) : Tout à fait.
M. Boulet : O.K. Bien compris.
Mme Rose
(Ruth) : ...ça fait longtemps que le CIAFT a donné des formations aux
travailleuses non syndiquées, à la demande de la commission.
M.
Boulet : D'accord.
L'étalement, un autre sujet que vous avez traité. Bon, l'étalement, vous vous y
opposez. Est-ce qu'on réalise que l'étalement est une possibilité, non une obligation d'étalement? Est-ce que ça, on est sur la
même longueur d'onde?
Mme Rose
(Ruth) : On se rend compte
que l'évaluation du maintien, il affecte normalement un nombre limité de travailleuses, donc ce n'est pas nécessairement un
fardeau très lourd pour l'entreprise, alors on voudrait que ce soit la norme qu'il n'y ait pas d'étalement et que, si
l'entreprise est vraiment en difficulté, qu'il doit demander l'approbation de
la commission et qu'il n'y a pas possibilité d'aller au-delà des quatre ans qui
sont prévus dans la loi.
M.
Boulet : En 2009, quand la loi a été amendée, ce que le législateur de
l'époque avait réalisé, c'est que la loi était peu appliquée, peu
respectée, et c'est la raison pour laquelle, à partir de ce moment-là, il
s'inspirait de cette absence
de respect là pour dire : Dorénavant, il n'y aura plus de rétroactivité,
on va corriger les écarts uniquement à la date où on fait l'exercice d'évaluation du maintien. Est-ce que vous ne
pensez pas que l'étalement peut être aussi considéré comme un incitatif?
Parce qu'on a un but commun, c'est-à-dire de combattre la discrimination
systémique envers les emplois à
prépondérance féminine. Est-ce qu'on ne doit pas se donner les moyens et donner
aux entreprises les moyens de bien
respecter et d'appliquer la loi? C'est simplement une indemnité forfaitaire qui
est étalée dans le temps, et, je le répète,
comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, les écarts sont corrigés à partir de
ce moment-là dans les échelles de salaire. Est-ce que, donc, l'étalement
n'a pas aussi un effet incitatif à un plus grand respect de la loi?
Mme
Rose (Ruth) : C'est-à-dire qu'on ne demande pas de l'enlever
complètement, mais de ne pas en donner... le fixer comme règle, c'est-à-dire que, si l'employeur a vraiment besoin de
l'étalement, il pourrait le demander. Mais il faut se rappeler que, pendant tout le temps que l'iniquité
existe, que ce soit rétroactif, les hommes sont payés selon la valeur de
leur travail. Chaque fois qu'on demande un
allègement pour l'entreprise, on met le fardeau uniquement sur les femmes. Et je
pense que la décision de la Cour suprême et des cours antérieures ont essayé de
faire respecter cette loi, cette... En fait, c'est un droit en vertu de la charte des droits canadienne et
québécoise, que les femmes ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. Alors, qu'on essaie
d'arrêter de créer des obstacles, et de prolonger, et d'étaler. On fait ce
qu'on peut, mais le principe devrait toujours être de corriger le plus
rapidement possible.
M. Boulet :
Je suis totalement d'accord avec ça, mais je réitère que l'étalement est une
possibilité non appliquée de façon automatique.
Il y a
un autre point que j'aimerais traiter avec vous. Vous avez référé aux
travailleurs ou aux travailleuses qui ont
quitté. Donc, si on fait l'exercice d'évaluation du maintien de l'équité
salariale le 1er janvier 2020, vous voudriez que les salariés qui ont quitté avant puissent
bénéficier de l'indemnité forfaitaire. Est-ce
que c'est le point que vous avez bien
soulevé?
Mme
Rose (Ruth) : Oui, dans le cas
de l'équité salariale, quand il y a rétroactivité, ça s'applique à tout le
monde qui était en place au moment où la rétroactivité devrait s'appliquer.
Alors, oui, on voudrait que le même principe s'applique dans le cas de l'évaluation du maintien et, encore là, parce que
c'est une période de cinq ans, les gens ont pu prendre leur retraite,
ils ont quitté l'emploi pour aller ailleurs. Alors, ils ont droit à cette
correction, elles aussi.
M.
Boulet : On s'entend bien. Parce que
je vais vous rassurer : si l'exercice de maintien est fait le 1er janvier
2020, par exemple, si une salariée...
puis que l'événement qui a créé l'iniquité est survenu trois ans avant, la
salariée qui a été là pendant deux
ans, elle pourra bénéficier de l'indemnité forfaitaire. Donc, ces personnes-là,
suivant tous les principes de rétroactivité
généralement applicables, là, ce n'est partout le cas, là, il y en a
qui pourraient me corriger, là, mais ça va s'appliquer. La rétroactivité va protéger les salariés hommes ou femmes
qui ont quitté avant l'exercice du maintien de l'équité salariale.
Mme
Rose (Ruth) : C'est très
bien. Je ne suis pas avocate, je ne sais pas s'il faut avoir une clause
spécifique dans l'article, dans la loi ou dans les règlements, mais on
est heureuses d'entendre vos paroles.
M. Boulet :
Merci. L'autre point...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Cinq minutes.
M.
Boulet : J'aimerais ça que
vous reveniez sur quand vous dites : Il faudrait que ça concerne
l'ensemble de la rémunération.
Mme
Rose (Ruth) : Ça, c'est très
essentiel. Il faut dire que notre préoccupation est principalement avec les
crédits de rente qu'on accumule
pendant une période. Il y a d'autres dimensions qui sont peut-être
plus complexes, par exemple, une assurance maladie. Alors, le problème,
c'est que, si vous n'avez pas payé les primes pour l'assurance maladie pendant cette période-là, c'est peut-être
inutile de le faire, sauf si la personne est tombée malade pendant la période
et a dû recourir à cette assurance
maladie, et donc elle l'a fait sur la base d'un salaire qui était incomplet.
Alors, c'est peut-être un problème qui a des éléments techniques importants.
Mais, par exemple, pendant que les gens sont en congé parental, ou en
maternité, ou en congé maladie, la Loi sur les normes prévoit que, en autant
que la personne paie sa part des assurances,
que l'employeur est obligé de payer sa part puis de maintenir son adhésion. On
pense que l'indemnité devrait inclure
l'ensemble de la rémunération et, d'ailleurs, notre interprétation de la loi
fédérale est à l'effet que, dans l'évaluation de maintien et dans la rétroactivité potentielle, toute la rémunération
est comprise. Alors, moi, je crains que, si vous n'incluez pas l'ensemble de la rémunération, les
associations accréditées qui sont allées en cour sur cette question-là vont se
retrouver encore avec un manque de rétroactivité complète. Ils vont être
obligés de retourner en cour pour compléter la loi.
• (11 h 30) •
M. Boulet :
C'est un point qui avait été soulevé par le groupe qui vous a précédé, l'APTS.
Et il faut relire la définition de
salaire : comme dans plusieurs lois statutaires et du travail, ça comprend
tous les avantages qui ont une valeur pécuniaire, dont les régimes de
retraite et d'avantages sociaux. On pourra en rediscuter, mais les avantages à
valeur pécuniaire, on le dit même, les
régimes de retraite, de prévoyance collective, les régimes d'assurance maladie
ou d'invalidité, c'est un concept qui
est global. Et donc, quand on parle de l'indemnité forfaitaire, fondamentalement, ça vise à corriger des
écarts de salaire, et le salaire est bien défini comme comprenant les avantages
pécuniaires.
Mme
Rose (Ruth) : Je m'excuse, mais votre projet de loi, très spécifique,
j'essaie de trouver la place. Mais dans l'article 76.5.2, il dit très spécifiquement que : «Aux fins
du présent article, la rémunération comprend la rémunération flexible et les avantages à valeur
pécuniaire — ça,
c'est pour les ajustements salariaux qui vont aller pour l'avenir — à l'exception d'une indemnité
forfaitaire visée au deuxième alinéa de l'article 76.5.» Donc, on pense
que l'indemnité forfaitaire doit aussi inclure la rémunération... les avantages
de valeur pécuniaire.
M.
Boulet : Je comprends. Et
moi, je fais une lecture qui n'est pas la même que vous. Ce que ça dit, ce
paragraphe-là, c'est qu'on ne peut
pas, pour maintenir l'équité salariale, diminuer la rémunération des salariés
qui occupent des emplois dans
l'entreprise. Mais, quand on paie une indemnité forfaitaire, forcément, il y a
une augmentation du salaire de la personne qui reçoit l'indemnité forfaitaire, parce qu'on a fait le calcul de
l'impact de l'événement qui crée l'iniquité dans la période de cinq ans qui précède l'exercice du maintien de
l'équité salariale, et donc on paie l'indemnité forfaitaire qui tient compte
des avantages pécuniaires. Mais, quand on
fait l'exercice de maintien, on ne pourrait pas cependant, dans l'avenir — et là c'est pour la correction des écarts salariaux — diminuer la rémunération de quelqu'un. Donc,
s'il y a eu des événements qui créent
une iniquité, mais que ces événements-là sont disparus puis que, par exemple,
le salaire masculin est en dessous du
salaire féminin, on ne pourrait pas baisser le salaire féminin. C'est la raison
pour laquelle on dit que, dans un exercice de maintien d'équité salariale, ça ne peut pas avoir pour effet de
maintenir... ça ne peut pas avoir pour effet de diminuer la rémunération
des salariés.
Mme Rose (Ruth) : ...d'accord avec
la première phrase. C'est la deuxième phrase qui...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Pardon. Pardon, le temps est écoulé.
M. Boulet : Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Le
temps est écoulé. Moi, je vous remercie beaucoup pour cet échange, Mme Rose, Mme Lorrain et M. le
ministre. Nous allons maintenant... ou je cède la parole maintenant au
porte-parole de l'opposition. Je vous rappelle, M. le député, que vous
disposez de 11 minutes. Merci.
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. On va continuer dans la même
veine, madame, parce que, je pense, vous avez d'autres choses à dire là-dessus, puis... je suis bien conscient,
effectivement, qu'un forfaitaire, là, tu ne reçois rien sur ton fonds de pension, c'est un forfaitaire,
c'est un montant d'argent, mais tu ne reçois pas d'autre chose avec ça. Et
vous avez fait la lecture, justement, de
l'article proposé de loi, là. J'aimerais ça que vous reveniez là-dessus parce
que, je pense, c'est important qu'à
un moment donné c'est bien beau, un forfaitaire, c'est bien beau essayer
d'avoir une équité, mais l'équité,
là, on essaie de l'avoir partout, comprenez-vous, même dans les avantages.
Donc, je voudrais vous entendre là-dessus.
Mme Rose
(Ruth) : Bien,
effectivement, s'il y a un problème de crédit de rente, ce n'est pas quelque
chose qui va être payé directement à
la personne, c'est plutôt quelque chose que l'employeur doit corriger dans ses
livres et faire la contribution, et
ça implique aussi que le salarié paie sa part des contributions au régime de...
donc, normalement, quand l'indemnité forfaitaire est calculée, de toute façon,
on déduit les taxes sur les autres cotisations, puis les cotisations au
régime de retraite. Donc, l'indemnité forfaitaire devrait tenir compte de
toutes ces valeurs, de tous ces avantages.
M.
Rousselle : Je regardais au niveau... vous avez demandé, justement,
une formation pour les gens qui font partie du comité paritaire, là, et le
comité au niveau de l'évaluation de l'équité salariale. Vous, vous en pensez...
parce que j'écoutais le groupe avant
vous, et puis ils nous proposaient, eux, un comité permanent au niveau de
l'équité salariale.
Et aussi, en
même temps, je vais y aller aussi là-dedans, eux autres, ils suggéraient aussi
avoir une évaluation de maintien aux
trois ans au lieu du cinq ans. Parce qu'on sait tous qu'à un moment donné, peu
importe la compagnie, peu importe le
gouvernement, peu importe quoi, il y a une évolution et, à un moment donné, il
y a un changement qui se fait au niveau du travail. Et eux trouvaient ça long,
cinq ans, donc ils préféraient trois ans. À ce moment-là, à la place d'avoir
une rétroactivité sur le deux ans qui manque, bien, à ce moment-là, la
personne peut en bénéficier immédiatement. Êtes-vous capable de... Avez-vous
une pensée là-dedans? Est-ce que vous avez réfléchi à ça ou...
Mme Rose
(Ruth) : Oui, c'est une des choses qu'on avait demandées dans... On a
été consultées avant le dépôt du
projet de loi, puis c'est une des choses aussi que nous avons dites. Nous
sommes toujours d'accord avec l'idée que la bonne pratique... qu'un employeur devrait quantifier un changement quand
il introduit un nouveau poste ou s'il fait changer la tâche d'un poste existant. On pense que c'est
une bonne pratique de déjà l'intégrer à l'équité salariale, du plan d'équité
salariale. Comme ça, quand vient
l'évaluation, il n'y aurait pas de correction à faire, parce que ça aurait déjà
été fait. Donc, on peut espérer que les employeurs vont, de toute façon,
éviter à avoir à changer les choses aux cinq ans. Et ça, ça reviendrait à
l'évaluation... excusez-moi, le maintien en contenu qu'il y avait avant la loi
de 2009.
Ceci étant
dit, réduire la périodicité à trois ans pourrait aussi améliorer. Il faut dire
que, pour les travailleuses non syndiquées qui n'ont pas les ressources des
syndicats, c'est plus difficile, parce qu'elles n'ont pas, à l'intérieur de
l'entreprise, elles n'ont pas des mécanismes pour se concerter, puis
s'organiser, puis s'informer. Et 60 % des travailleuses du Québec ne sont pas syndiquées, et c'est encore plus
important dans le secteur privé. Donc, on pense que, pour eux, il vaudrait mieux avoir une périodicité
et il faudrait alors prévoir un mécanisme spécifique pour que, d'une part,
qu'ils élisent des représentants pour travailler avec
l'employeur et, d'autre part, qu'on leur donne une formation. Et, évidemment, ceci est un des mécanismes qui vont
s'appliquer plutôt dans les grandes entreprises. Nous aimerions que ça
s'applique à partir de 50 employés et que, pour les petites entreprises,
on ait plutôt des mécanismes d'améliorer les informations.
M.
Rousselle : Merci.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : ...
Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation. Je
vais faire du pouce sur ce que mon collègue vient de dire.
Vous
avez parlé de ces mesures-là pour l'entreprise avec 10 à 49 salariés. Moi,
je me préoccupe de la très petite entreprise
aussi, parce qu'évidemment le projet de loi s'applique à tous. Donc, je
m'intéresse à la plus petite entreprise, et vous parlez de simples mécanismes. Donc, est-ce que c'est suffisant?
Puis, l'autre chose, je me préoccupe aussi de la petite entreprise qui n'est ni syndiquée et qui n'a pas de service de
ressources humaines. Parce qu'on comprend que ce sont des milliers... On
les appelait les très petites entreprises du Québec.
Alors,
ma première question, c'est : Est-ce que vraiment des simples mesures ou
un processus plutôt simplifié, mais
qui prévoit quand même un plan d'action, ne seraient pas davantage bénéfiques
pour ces entreprises-là? Comment vous voyez ça, là, si on élargit la
portée à l'ensemble de ces très petites et moyennes entreprises?
Mme Rose
(Ruth) : Bien, nous, on a fait accompagner plusieurs petites
entreprises, surtout dans le secteur communautaire,
et ce qu'on a trouvé, c'est que le fait d'être obligées de faire un exercice
d'équité salariale les a amenées à penser
à la politique salariale. Avant, ils engageaient quelqu'un, puis ils mettaient
un salaire au pif, puis ils avaient toutes sortes d'incohérences, puis ils ne savaient pas pourquoi. Alors, le fait
d'être obligées de faire un exercice d'équité salariale les a amenées à réfléchir à leur politique de
ressources humaines et leur politique salariale plus spécifiquement. Et moi, j'ai été longtemps sur le comité des partenaires
et j'ai entendu aussi beaucoup d'employeurs du secteur privé qui ont dit :
Oui, on est contents d'avoir fait un exercice d'équité salariale, parce que ça
a clarifié nos politiques.
• (11 h 40) •
Mme Sauvé :
Oui, je suis très au courant de votre implication avec les partenaires du marché
du travail.
Je
veux vous parler aussi... Le groupe qui a précédé a parlé de l'importance de l'affichage du plan
d'action, mais pas seulement pour les aspects correctifs, mais qui
nécessitaient correction, mais aussi de l'ensemble de l'oeuvre, des
actions posées. Je ne vous cacherai
pas que je trouvais que c'était une
bonne nouvelle. Vous, dans votre mémoire, la recommandation 4, vous dites qu'un seul affichage est
nécessaire. Toujours dans l'appropriation du plan d'action qui va être présenté et dans le maintien réel, au-delà
d'un comité, au-delà des gestes posés au niveau du rattrapage des écarts
salariaux, est-ce que vous croyez vraiment qu'un seul affichage est nécessaire
pour assurer le maintien?
Mme
Rose (Ruth) : Bien, quand je parle d'un... je parlais d'un seul
affichage dans le cas de l'exercice, parce que, quand on a un comité d'équité salariale dans des entreprises de plus de
50, il y a un premier affichage après les deux premières étapes du
programme, c'est-à-dire au moment où on a identifié les catégories d'emploi et,
je pense, on a choisi l'outil d'évaluation. Puis, après, après qu'on a appliqué
les choses puis on a identifié les ajustements salariaux, il y a un deuxième affichage. C'est un langage qui
est difficile, mais, dans chacun de ces affichages, il y a d'abord la période
de 60 jours, puis ensuite les commentaires,
puis ensuite une correction, et donc il y a, en quelque sorte, quatre
affichages pour l'équité salariale.
Dans le cas de
l'évaluation du maintien, il y a besoin... il n'y a pas une première étape,
donc il y a juste un affichage pendant 60 jours puis ensuite l'affichage final.
Et on pense que, pour les 10-49, même pour l'exercice initial — puis on
aimerait quand même que cet exercice soit davantage formalisé qu'il ne l'est
actuellement — un seul
affichage est nécessaire, mais l'affichage... la première moitié de
l'affichage, c'est-à-dire, c'est 60 jours pour commentaires, et on pense que ça pourrait être une période un peu
plus longue s'il y a une réaction de la part des travailleuses. Et
c'est en ce sens-là, donc, c'est quelque chose que... on
voudrait formaliser davantage l'exercice d'équité salariale dans les petites
entreprises.
Mme Sauvé :
...votre réponse. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Vous voulez... M. le...
M.
Rousselle : Il reste combien de temps?
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Ah! quatre minutes.
M.
Rousselle : Quatre minutes?
Merci. Écoutez, j'ai lu un
petit peu, puis dites-moi si j'ai
fait erreur, là, vous parlez, à un
moment donné, de garder les informations pendant six ans. Pourquoi six ans? Puis, je veux dire, quand on veut garder
les informations d'une structure, pourquoi
ne pas les garder plus longtemps? Ou de quelle manière vous en êtes arrivés à six
ans? C'est ça, je voudrais...
Mme Rose (Ruth) : Bien, la loi actuelle dit cinq ans. Le problème,
c'est que, étant donné que le maintien, c'est cinq ans, au
moment où l'affichage de l'évaluation du maintien se fait, l'employeur peut détruire le matériel de
l'exercice antérieur. Donc, s'il y a
contestation du maintien, les documents nécessaires pour savoir qu'est-ce qui était l'exercice ou l'évaluation antérieure n'est pas nécessairement là. Alors, il faut que
ça soit prolongé. Je pense que nous, on a demandé sept ans, mais six ans, c'est quand même
raisonnable, parce qu'il y a moins d'un an pour que les gens formulent des
plaintes. Et, en plus, la loi ajoute
que, s'il y a plainte ou que la commission a décidé de faire enquête, que les
documents doivent rester jusqu'à ce que cette plainte ou cette enquête soit
réglée. Alors, on pense que six ans, c'est une grande amélioration par rapport à cinq ans, où il y avait... avec la
loi actuelle, il y a une grande possibilité que tout le matériel nécessaire
pour investiguer une plainte disparaisse.
M.
Rousselle : Je suis d'accord avec vous, parce que, plus qu'on peut
garder les informations, je veux dire, on peut savoir vraiment, en tout
cas, ça peut nous aider, justement, à faire des revendications, à faire des
démarches, effectivement. Mais c'est juste
le six ans, parce que, même moi, honnêtement, personnellement, six ans, je
trouve ça même court, honnêtement.
Moi, vraiment, je pense, de l'information, ça devrait rester là plus longtemps
pour, justement, avoir une référence,
à un moment donné, dans le temps. Mais
ça, c'est moi que... je pense ça... c'est là-dessus que je voulais vous
entendre, là.
Mme
Rose (Ruth) : Si vous voulez mettre 10 ans ou 14 ans, nous, on serait
d'accord, mais six ans, c'est une grosse amélioration par rapport à
cinq.
M.
Rousselle : Je reviens toujours...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : M. le député de Vimont et M. le
vice-président, écoutez, on a constaté que le système a bloqué, le système de l'horloge a bloqué, donc vos
11 minutes sont vraiment largement, même, dépassées. On présume que c'est peut-être le froid. Mais on se
rendait compte que ça n'avançait plus et là on constate que, vraiment,
le 11 minutes est passé.
M.
Rousselle : ...vous en remercie.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, on cède la parole
immédiatement au porte-parole du deuxième groupe de l'opposition,
2 min 45 s, s'il vous plaît.
M. Ouellet :
...geler l'horaire, j'aimerais ça.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Ouellet : Je vais être très bref. Cet après-midi puis au courant des
consultations, on va rencontrer des grandes centrales syndicales. On aura aussi des fédérations d'employeurs, la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante, la Fédération des chambres de commerce, et c'est... Donc, on aura
effectivement plusieurs pendants des propositions qui pourraient être regardées dans le projet de loi.
Mais, quand on regarde deux fédérations qu'on va avoir prochainement, on
nous parle que, dans le projet de loi, on va rajouter un fardeau administratif
aux petites entreprises. On va complexifier ce qui est déjà compliqué dans les
commerces qui, dans certains cas, n'ont pas de syndicat. Donc, moi, j'aimerais vous entendre. Vous représentez, vous
travaillez de part et d'autre avec des femmes non syndiquées. Si on avait
une chose à modifier dans le projet de loi
qui favoriserait l'équité salariale pour les travailleurs non syndiqués, ce
serait quoi?
Mme Rose
(Ruth) : Bien, je pense qu'on l'a dit : Dans l'exercice initial
d'équité salariale, que l'employeur soit obligé de faire un plan, c'est-à-dire qu'il fasse toutes les étapes
d'évaluation... Parce que, sinon, il peut aller au pif, il peut dire : Ah! peut-être que celle-là n'est pas
bonne ou... Alors que de formaliser un plan... et qui n'est pas si difficile
que ça... Nous, on donne des
formations à des travailleuses ordinaires en dedans de trois à six heures qui
les permettent de maîtriser... Et un
des problèmes avec les formations qui sont données par la commission, c'est que...
parce qu'ils doivent, eux, couvrir tous
les cas possibles, ça devient énormément compliqué. Alors que nos formations,
parce qu'elles sont ciblées pour les petites
entreprises, sont beaucoup plus courts et plus légers, et... Nous, on a
beaucoup échangé avec la commission sur cette question-là, c'est une des
raisons pour laquelle ils nous ont donné un mandat pour donner des formations.
Alors,
au niveau de l'équité salariale, c'est... on pense qu'obliger l'employeur de
faire les étapes... ce qui va aussi faciliter
les enquêtes quand la commission va faire une enquête ou va faire une
vérification de sa propre initiative. Et ça permet aussi de formaliser
l'information si un salarié demande de l'information.
M. Ouellet :
Donc, pour les petites entreprises de 10 à 49, ce que vous proposez, c'est que
ces entreprises-là obtiennent une formation ciblée, propre à leurs besoins, et
qu'ils puissent, par la suite, faire un plan.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Très bonne question, mais nous
n'aurons pas le temps d'entendre la réponse. Alors, nous cédons
immédiatement la parole au porte-parole du troisième groupe d'opposition. Vous
disposez de 2 min 45 s, c'est vite passé. Allons-y.
M. Leduc :
Vous êtes juste avec tout le monde, Mme la Présidente, c'est correct.
On
a parlé beaucoup avec le groupe qui vous a précédé de ce qui est dans votre
recommandation n° 1, en fait, le fait qu'il n'est pas possible d'avoir un traitement des plaintes qui
avaient été déposées dans le passé avec la nouvelle loi qui va être adoptée. Et je faisais le comparatif
avec les clauses de disparité de traitement, où il y a un projet de loi qui a
été déposé il y a presque un an et
demi, deux ans, qui disait qu'à partir de maintenant les nouvelles
discriminations seront interdites, mais les anciennes pourront être
répétées dans le futur.
Est-ce
que c'est... il n'y a pas quelque chose de paradoxal là-dedans? Est-ce que ce
n'est pas la même chose, la même
philosophie qu'on applique en ce moment dans le projet de loi pour dire :
Bien, les anciennes plaintes vont être gérées avec l'ancienne loi, qui a été reconnue comme étant
discriminatoire, tandis que les nouvelles pourront être avec la nouvelle
loi, qui, supposément, ne l'est plus? Est-ce que, dans ce cas-là, on ne vient
pas invalider le fait que la nouvelle loi permet la fin de la discrimination en
laissant les anciennes plaintes être prolongées?
• (11 h 50) •
Mme Rose
(Ruth) : Bien, le problème, c'est qu'effectivement... parce qu'il y a
le problème de cheminement et le problème de contenu. Parce qu'en
principe l'évaluation de maintien qui est faite en 2010 ou 2009 a identifié les
discriminations qui étaient antérieures. Et,
s'il ne l'a pas fait, ces plaintes-là ont été traitées. Le problème a été, d'une part, est-ce que
les syndicats avaient l'information nécessaire pour juger, et, d'autre part, qu'il n'y avait pas
de rétroactivité. Alors nous, on a
été plus préoccupés par la rétroactivité des plaintes dont certaines traînent
depuis 2008, 2009. Et on pense que ça, ça doit être corrigé, alors que
la nouvelle loi ne le permet pas.
M.
Leduc : ...que, si c'est la recommandation n° 1, c'est que, pour vous, c'est la chose la
première à modifier dans ce projet de loi là.
Mme Rose
(Ruth) : Ça puis l'indemnité... l'ensemble de la rémunération.
M.
Leduc : O.K.
S'il me reste un petit peu de temps, je poserais une dernière question. La recommandation n° 7, vous
demandez que l'indemnité forfaitaire, bon, dans le projet de loi, puisse être étalée, mais vous voulez vraiment que ça soit un
maximum de quatre ans, et non un étalement qui peut être jusqu'à sept ans dans
le projet de loi. Et vous demandez
l'approbation spécifique de la commission pour ça. Quel est votre raisonnement derrière ces
deux demandes?
Mme
Rose (Ruth) : Mais c'est parce que...
normalement pas nécessaire de faire de l'étalement. Alors, on veut
que ce soit difficile.
M. Leduc :
Mettre un peu de contraintes, qu'ils se forcent un peu. D'accord, parfait.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Tout le temps est écoulé. Alors,
écoutez, je vous remercie beaucoup, Mme Rose,
et Mme Lorrain aussi, pour avoir
participé, votre contribution à nos travaux. Je remercie également
M. le ministre, M. le vice-président et tous les autres députés. Vous savez que c'était notre première séance. Je pense que nous
avons très bien travaillé.
Nous
devons suspendre les travaux jusqu'après les affaires courantes. Donc, on se
revoit vers 15 h 30, ça va? Je vous remercie beaucoup. À plus
tard.
(Suspension de la séance à
11 h 52)
(Reprise à 15 h 30)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, bonjour, tout le monde. Nous allons continuer. Je répète ce que j'ai
demandé ce matin. Toutes les personnes qui sont dans la salle, de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques. C'est fait? Merci.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 10, la Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin
principalement d'améliorer l'évaluation du maintien et de l'équité salariale.
Cet après-midi, nous
allons entendre les organismes suivants : la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante, la Centrale des syndicats du Québec et la Fédération
des chambres de commerce du Québec.
Avant
toutefois de commencer, il y aura possiblement un changement de député, donc le
député de Hochelaga-Maisonneuve risque
d'aller faire une intervention en haut. Il sera donc remplacé par la députée de
Sherbrooke. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'une partie de la séance de
cet après-midi il y ait ce changement? Nous avons le consentement? Parfait.
Alors, nous
commençons immédiatement. Je souhaite la bienvenue à la Fédération canadienne
de l'entreprise indépendante. Je vous
rappelle que vous avez 10 minutes pour exposer votre discours, votre
présentation, et, par la suite, nous
allons procéder à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite d'abord à vous présenter et puis, ensuite, de commencer
votre exposé.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert (Martine) : Je vous remercie beaucoup, Mme la
Présidente. Mon nom est Martine
Hébert. Je suis vice-présidente principale à la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante, le plus important regroupement de PME à
l'échelle du pays, qui compte 110 000 membres au Canada, dont environ
un sur cinq est au Québec.
Alors,
je remercie d'abord les membres de la commission de nous donner l'opportunité d'être ici aujourd'hui pour discuter avec vous du projet de loi n° 10. Comme vous le savez, en tant que PME, nos
membres doivent composer avec la législation
québécoise en matière d'équité salariale et on a donc pris
connaissance avec beaucoup d'intérêt, là, du projet de loi n° 10.
Je dois vous dire d'emblée, Mme la Présidente,
qu'on souscrit entièrement aux grands objectifs qui sont poursuivis par le gouvernement. D'entrée de jeu,
il est aussi primordial, je pense, de bien mentionner que la FCEI souscrit sans réserve aux grands objectifs de la Loi sur
l'équité salariale elle-même. Les employeurs que nous représentons, Mme la Présidente, là, ne sauraient tolérer que leur milieu de
travail soit le théâtre de pratiques de rémunération qui soient fondées sur une discrimination basée sur le sexe des
personnes en emploi comme en toute autre matière, d'ailleurs, visée par nos
chartes.
On estime
qu'il est très important aussi que les moyens qui sont déployés pour atteindre
les objectifs de la Loi sur l'équité salariale soient conçus,
par contre, de manière à ne pas alourdir indûment le fardeau réglementaire et administratif des entreprises québécoises,
en particulier celui des PME, et ce, Mme la Présidente, dans un objectif d'en
assurer une observance optimale. Hein, on sait que, lorsque les lois et les
règlements qu'on applique aux entreprises sont trop complexes, on ne favorise
pas nécessairement l'observance et la conformité, bien au contraire. Alors,
nous, dans une perspective d'observance et
de conformité, on souhaite que le projet de loi ne vienne pas alourdir, là, les
procédures et les exigences auprès des entreprises.
Il faut se rappeler
aussi que les PME demeurent des entités qui ont des moyens limités, hein, et
que l'économie du Québec est une
économie de PME. Il faut bien dire que la très, très vaste majorité de nos
entreprises, 73 % ont moins de 10 employés, 95 % en ont
moins de 50, et, dans ces petites entreprises là qui ont 10, 15,
20 employés, on n'a pas de département
de ressources humaines, il n'y a pas de contentieux juridique non plus, donc
les ressources sont limitées. Alors,
en ce sens, nous estimons avec déférence, Mme la Présidente, que le législateur
serait bien avisé d'appliquer le principe
de modulation de ces exigences en fonction de la taille des entreprises
assujetties, et ça, de manière transversale dans le projet de loi n° 10. Ce principe-là, d'ailleurs, Mme la
Présidente, j'en profite pour rappeler qu'il est porté par la politique gouvernementale sur l'allègement
réglementaire et administratif, qui est une politique adoptée par décret et
qui, en l'instance, là, revêt un caractère obligatoire pour l'appareil
d'État québécois.
Alors, on a
pris connaissance de la décision de la Cour suprême, en fait, qui est notamment
une des raisons d'être, là, de ce
projet de loi là et on aimerait rappeler deux principes que la cour semble
avoir mis en exergue dans sa décision, à savoir, premièrement, le fait que le gouvernement a tout le loisir de
choisir une périodicité plus ou moins longue aux fins de l'évaluation des ajustements salariaux sous les
auspices de l'actuelle Loi sur l'équité salariale. Autrement dit, hein, le gouvernement, ce n'est pas sur le cinq ans pour
l'exercice d'un maintien que la cour a statué, mais plutôt sur la rétroactivité à la date de l'événement qui s'est
produit, là, des versements salariaux aux fins d'ajustement, là, au niveau
de l'exercice de maintien.
Le deuxième
principe, par contre, qu'on a aussi lu dans le jugement, c'est la question de
la reconnaissance que la réduction
des obligations des employeurs, en vue d'assurer une meilleure conformité à la
loi, peut être tout à fait justifiée. Et
ça, dans le jugement, ça nous apparaît, en tout cas, un principe à garder, si
vous voulez, aussi en tête dans l'étude du projet de loi, dans le même
esprit de ce que nous avons, si vous voulez, mentionné au début.
Un autre
rappel important, je vous dirais que, quand on regarde les résultats de la Loi
sur l'équité salariale... Parce que
c'est bien beau d'avoir une loi, mais encore faut-il que cette loi-là ait
vraiment conduit à des résultats. Quand on regarde les résultats de la
Loi sur l'équité salariale, ce qu'on constate, c'est que ce n'est pas dans les
plus petites entreprises où il y a eu le
plus d'ajustements salariaux à faire. C'est-à-dire que le pourcentage de plus
petites entreprises qui ont eu à
réaliser des ajustements salariaux à la suite de l'exercice de maintien ou de
l'exercice initial d'équité salariale est de beaucoup inférieur à celui
des plus grandes entreprises. D'ailleurs, en l'occurrence, je vous signalerais
même qu'ironiquement celui qui a eu le plus
de mailles à partir avec cette loi-là, c'est le gouvernement. C'est là où il y
a eu le plus de plaintes et c'est là où il y a eu le plus de cas où les
ajustements les plus importants ont dû être imposés, donc, dans le secteur public et non dans le secteur
privé. Alors, je pense que c'est important de garder ça en tête lorsqu'on
analyse le projet de loi aussi pour
dire : Bien, on peut être en faveur du principe de l'équité salariale,
mais il ne faut pas voir non plus des bibittes là où il n'y en a pas.
Donc, c'est en ce sens-là qu'on a fait cette petite mise en garde là.
Je vous
dirais aussi qu'on a... en regardant tout ça, finalement, il nous est apparu
peu justifié d'imposer un exercice aussi fastidieux aux petites
entreprises alors que ces dernières ne sont visiblement pas celles où la
majorité des problèmes se retrouvent. Et
c'est pour ça d'ailleurs qu'on a proposé... On s'est demandé si le projet de
loi n° 10 ne serait pas une occasion justement pour dire : Bien,
écoutez, est-ce que le seuil de 10 employés, là, est toujours justifié ou
est-ce qu'on ne devrait pas profiter
de cette occasion-là pour hausser le seuil d'assujettissement à la loi?
Puisqu'il ne semblait pas y avoir de
problème dans les plus petites entreprises, est-ce qu'on ne pourrait pas
profiter du projet de loi pour hausser ce
seuil-là? Nous, c'est sûr qu'on préférerait, idéalement, un seuil de
50 employés et plus, mais, bon, on serait contents quand on est... Comme on n'est pas dans un monde
idéal, bien, on se contenterait, peut-être, d'une hausse, là, à
20 employés. Et, regardez,
avoir, peut-être, une clause au terme de la loi qui nous permettrait de
regarder, dans le futur, quelles sont les conséquences, là, liées à ça et de faire des rattrapages si c'est
nécessaire. Mais nous, on pense que... En tout cas, à la lumière des résultats qu'on a obtenus sur l'équité
salariale, à la lumière de l'application de la loi et à la lumière des
observations de la Cour, aussi, suprême, on pense que ça pourrait être
justifié de hausser le seuil d'assujettissement.
Au niveau, maintenant, plus précisément, de
l'article 7 du projet de loi, qui parle du remplacement de l'article 76.3 de la Loi sur l'équité
salariale, qui voudrait que le nombre d'exigences qu'un employeur devra
respecter en matière d'évaluation du
maintien en entreprise, là, de l'équité salariale en entreprise, c'est-à-dire,
viendrait être augmenté, nous, on pense que cet article-là viendrait
imposer des obligations supplémentaires, en ce sens qu'il exige que l'employeur intègre à
l'affichage requis, suivant l'évaluation du maintien de l'équité salariale, un
sommaire des questions posées et des commentaires reçus en cours de
processus.
Mme la
Présidente, dans un milieu de travail où le nombre d'employés est restreint, la
publication des commentaires reçus peut évidemment créer des situations,
là, qui ne sont pas nécessairement souhaitables, générer des bris de confidentialité. Vous comprendrez que, si vous
avez 10, 12 employés puis que vous êtes obligé d'inscrire les commentaires,
bien, les personnes qui ont fait des
commentaires pourraient être facilement identifiables. Et vous comprendrez que
ça pourrait créer des situations, là,
malencontreuses, particulièrement dans les plus petites entreprises. Alors,
c'est pour ça qu'on a recommandé
d'ailleurs que les paragraphes 2° et 3° du nouvel article 76.3, introduit
par l'article 7 du projet de loi, là, soient abrogés. Et, à défaut,
on recommande que les entreprises de moins de 50 employés soient exemptées
de ces obligations-là, un peu comme c'est le
cas pour le comité d'équité salariale, hein? Parce que les autres obligations
dans la loi s'imposent aux
entreprises de 50 employés et plus. Donc, on dit : Bien, appliquons,
alors, sinon, cette obligation-là aux entreprises de plus grande taille
pour éviter ces situations malencontreuses là au sein des plus petites
entreprises.
Même chose au
niveau de l'article 76.5 qui est introduit par l'article 9 de projet
de loi, qui va obliger l'employeur à établir la date précise d'un
événement ayant présidé à la nécessité d'un ajustement salarial nécessaire au
maintien de l'équité salariale, puisque les sommes dues devront dorénavant être
versées à compter de cette date-là d'événement.
• (15 h 40) •
Mme la
Présidente, on a beaucoup, beaucoup de difficultés avec cet article-là. En
fait, ça va être très difficile d'application dans les plus petites
entreprises, où il y a un taux de roulement de personnel souvent très élevé, où
aussi les caractéristiques, là, en
matière de structure interne, de catégorisation des tâches, des postes, des
catégories d'emploi, etc., c'est en constante mouvance. C'est souvent
très imprécis, parce qu'une même personne occupe plusieurs fonctions, lorsqu'il y a une personne qui part, ça crée un déséquilibre très important
au sein de l'entreprise. Donc, c'est sûr que, pour nous, cette disposition-là, encore une fois, là, nous semble, en tout cas, poser un très grand problème
d'application dans les
plus petites entreprises. Et c'est pour ça d'ailleurs qu'on a fait
quelques propositions, là, que ce soit, encore une fois, de
mettre le seuil d'exemption prévu de la loi à des entreprises de plus de
50 employés ou encore à fixer un nombre maximum
d'années lorsque c'est impossible de pouvoir déterminer à quel
moment ou quel événement en particulier... a créé l'iniquité, là, dans
la période de cinq années nécessaire au maintien.
Alors, peut-être,
terminer sur une note positive, Mme
la Présidente, si vous le permettez.
On était très, très contents de
voir que le ministre nous avait écoutés en retirant l'avis d'affichage
sur l'affichage. Je pense qu'il fallait afficher un avis pour dire qu'on allait afficher un avis... à un moment donné, ça fait... quand on parle de paperasse inutile... Je pense qu'on
est contents que cette disposition-là du projet
de loi, elle soit retirée, et ça nous
fait plaisir de l'accueillir positivement. Voilà.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, Mme Hébert. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M.
le ministre, la parole est à vous, et vous disposez de
16 min 30 s.
M. Boulet : Merci,
Mme la Présidente. Je voudrais d'abord
remercier Mme Hébert de la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante
pour vos propos, votre présence et le contenu de votre rapport. Et, considérant
que vous représentez beaucoup
de petites et moyennes entreprises au Québec, ça ajoute évidemment
de la crédibilité à ce que vous nous mentionnez.
Vous savez,
Mme Hébert, vous connaissez bien cette loi-là. D'ailleurs,
vous souscrivez aux objectifs fondamentaux de la loi. Bien dit. Vous souscrivez, donc, au dispositif de la décision
de la Cour suprême du Canada. Je
pense qu'on est tous du même avis autour de la table : il faut
lutter contre la discrimination systémique envers les emplois à prédominance
féminine. Ceci dit, j'aimerais vous poser
quelques questions pour obtenir des précisions sur des commentaires que vous
venez de nous faire.
Dans un
premier temps, le fardeau pour les PME. Vous revenez sur l'exigence
administrative imposée aux petites et moyennes entreprises. Mais vous savez, en même temps, qu'il y a une modulation des obligations dans la Loi sur l'équité salariale en fonction du
nombre de salariés. C'est 10 ou plus, 50 à 99, et 100 et plus. Et donc c'est
seulement l'entreprise où il y a
100 salariés et plus où il y a une exigence d'avoir un programme d'équité
salariale et un comité d'équité salariale.
Est-ce que
cette modulation-là... j'aimerais ça, vous entendre un peu plus clairement sur...
bon, vous me dites : Vous
représentez... la plupart des entreprises que vous représentez ont moins de 10
employés. Où vous... à 50, est-ce que vous pensez que c'est sensé,
acceptable socialement, de hausser le seuil à 50?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez,
je vous dis qu'on... dans un... de façon optimale, nous, on pense que ça
devrait. Parce que l'exercice est très complexe, hein? Nous, on accompagne, M.
le ministre, Mme la Présidente, on accompagne
des membres. Je ne sais pas combien d'appels qu'on reçoit à chaque année, là,
mais ça se chiffre par centaines, qui nous posent des questions, qui ne
comprennent pas, qui ont de la difficulté avec... C'est une loi qui est très,
très complexe à saisir, hein? D'ailleurs, je
tiens à dire, par contre, que la Commission de l'équité salariale, la CNESST,
la division de l'équité salariale
fait un travail exceptionnel pour accompagner les entreprises, là, qui désirent
se conformer.
Mais, quand on regarde, M. le ministre, les
résultats, hein, à un moment donné, là, il faut se dire aussi qu'il faut légiférer, mais il faut que ce soit légitime
de légiférer. Puis, même si on s'entend sur l'objectif, lorsqu'on regarde
en termes de résultats, est-ce que le
fardeau qu'on impose aux entreprises, par exemple, qui ont entre 10 et
20 employés, n'est pas
disproportionné par rapport aux bénéfices que nous en tirons comme société?
Parce que, ce fardeau-là, il faut bien
se dire qu'il faut qu'il soit repris quelque part. Et, encore une fois, chez
l'employeur, ce sont des ressources de moins à la disposition des travailleurs en place, etc.
Donc, quand on regarde, là... excusez mon passé d'économiste, mais, quand
on regarde le rapport coûts-bénéfices, d'assujettir
des plus petites entreprises, genre, qui ont 10, 12, 13, 14, 15 employés, peut-être que le bénéfice ne justifie pas, si vous
voulez, là, le fardeau qu'on leur impose. Et c'est pour ça que moi, je vous ai dit 50, parce que c'est plus facile, dans le sens
où la loi comporte, comme vous avez bien dit avec justesse, M. le ministre,
des obligations particulières pour les 50 et plus, puis ensuite pour les 100 et
plus.
Mais,
bon, je ne vis pas dans un monde idéal, et c'est pour ça que je vous dis que je
me contenterais de dire : Bien, peut-être
qu'on pourrait hausser le seuil d'assujettissement global de la loi à 20 employés et qu'on en sortirait tous gagnants.
M.
Boulet : O.K. Je
comprends bien. En même temps, vous n'auriez pas une appréhension qu'on
créerait un régime à deux vitesses ou deux catégories d'entreprises, où
les entreprises à moins de 50 employés, l'iniquité salariale, entre
guillemets, serait plus tolérable, mieux acceptée, alors que non permise dans
les entreprises de 50 et plus?
Mme Hébert (Martine) : C'est pour ça que je vous dis que, dans le fond, on propose une proposition intérimaire en disant : 20 employés, puis on serait satisfaits, là, en disant
que, si on hausse le seuil au moins à 20 employés, de sorte que... Et ça ne veut pas dire qu'on tolérerait l'iniquité,
justement, dans ces plus petites entreprises-là,
parce que l'expérience nous démontre qu'il y a eu moins d'ajustements salariaux et que même les ajustements
qui ont eu lieu étaient, quand même,
assez minimes, là. Donc, on ne viendrait pas
créer une situation comme celle que vous décrivez, M. le ministre, en ayant ce compromis-là.
M.
Boulet : C'est intéressant, parce que,
là, ce projet de loi vise principalement à donner suite au jugement de la Cour suprême du Canada, mais ça nous donne l'opportunité d'avoir des
commentaires pour éventuellement réformer, de façon plus compréhensive ou
plus globale, la Loi sur l'équité salariale, et ce n'est pas la première fois
qu'on nous entretient de la modulation, là,
des obligations en
fonction du nombre de salariés. Et sachez, je l'ai mentionné ce matin, qu'avant le 28 mai 2019 on doit déposer un rapport
sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'équité salariale, donc depuis les
derniers amendements en 2009, et sur l'opportunité de la maintenir, cette
loi-là, en tenant compte de ses résultats d'application.
Et
c'est dans cette perspective-là que j'aimerais aussi vous entendre sur ce que
vous appelez la périodicité. Il faut bien
distinguer, encore une fois, entre l'exercice initial d'équité salariale et,
après ça, l'exercice qui vise à maintenir l'équité salariale, qui est...
Cet exercice-là doit être fait de façon périodique à tous les cinq ans. Vous
nous mentionniez tout à l'heure : ça
pourrait être fait à tous les 10 ans, à tous les 15 ans. Si je vous
dis, par exemple : Il y en a qui nous demanderaient d'aller en bas de cinq ans, que ce soit à trois
ans, à quatre ans plutôt que cinq ans... Il y a beaucoup d'entrepreneurs et de
syndicats qui ont des avis très partagés là-dessus, qui me disent : À tous
les cinq ans, c'est un bel équilibre; à tous les trois ans, ce serait trop rapide. Mais il y en a qui me disent : À
tous les trois ans, s'il y a eu des événements qui créent des iniquités,
il faut agir et corriger les iniquités de façon continue et presque tout le
temps, alors que vous parliez d'une hypothèse de 10 ans, 15 ans ou...
J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Mme Hébert (Martine) : Bien, écoutez, nous, sur la question du cinq ans,
je pense qu'on pourrait se satisfaire, là, que ça soit maintenu à cette
périodicité-là. Le fait, je vous dirais, de l'abaisser, par contre, ça, ça nous
poserait un problème. On est préoccupés, parce qu'effectivement on vient
encore en rajouter. Puis il ne faut pas oublier, là, qu'on ne se le cachera pas, là, le Québec, on est le
champion des réglementations en tous genres, surtout lorsqu'il y a trait aux
lois du travail. Moi, je pense qu'il n'y a pas de justification. D'ailleurs, la
cour l'a bien dit. En tout cas, je ne suis pas juriste, là, en toute déférence, M. le ministre et Mme la Présidente, je
ne suis pas juriste, mais je n'ai pas compris que la cour avait remis en cause la périodicité. La cour,
ce qu'elle a dit, ce n'est pas la périodicité, c'est le moment à partir duquel on
corrige les écarts salariaux, c'est là-dessus qu'elle a statué et non pas sur
la périodicité. Alors, «if it ain't broken, don't fix it».
M.
Boulet : Merci. Est-ce qu'à la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante vous avez déjà sondé vos membres sur l'application de la
Loi sur l'équité salariale?
Mme
Hébert (Martine) : Je vous dirais qu'on n'a pas besoin de les
sonder, on reçoit tellement d'appels de membres qui sont désespérés puis qui
ont de la difficulté à se comprendre dans cette loi-là que... Je vous dirais
qu'on traite des centaines d'appels par année, là, de cas de membres, là, qui
nous demandent : Comment je fais ça?
Puis de la
compréhension aussi de la globalité, hein? Le processus est complexe, là.
Écoutez, même moi, M. le ministre, là,
j'aurais de la misère à vous dire c'est quoi, toutes les étapes, puis les
comparateurs masculins, puis les postes
à prédominance féminine, masculine, etc., là. Alors, imaginez, là, le petit
garagiste, là, à Saint-Pie de Bagot, là, qui est dans son garage, puis
qui regarde tout ça, puis qui dit... Il se gratte la tête longtemps avant de
comprendre qu'est-ce qu'il faut qu'il fasse. Donc, c'est extrêmement complexe.
Et
c'est pour ça que je vous dis : Je me demande si le fardeau, tu sais, dans
une perspective d'intérêt public, là, et
de... je me demande si le fardeau qu'on impose à ces plus petits employeurs-là
n'est pas disproportionné par rapport aux
bénéfices sociétaux qu'on tire
d'appliquer une loi aussi complexe, là, chez ces plus petits employeurs,
surtout lorsqu'on voit les résultats en matière, là, d'ajustements
salariaux, où on sait que ce n'est pas là qu'ont eu lieu les pires... les plus
gros problèmes.
• (15 h 50) •
M. Boulet :
Absolument, la plupart des plaintes en suspens, d'ailleurs, ont été soumises
dans le domaine public et parapublic
dans le secteur de la santé, de l'éducation et des services sociaux. Là, il y a
beaucoup de problématiques d'équité salariale, et les plaintes émanent
surtout de ces secteurs-là.
Autre point que je voulais discuter
avec vous, vous mentionniez l'article 7, qui amende 76.3. Il me semble que
ça fait référence à un processus de participation des salariés. Puis,
indépendamment du seuil d'assujettissement, dans beaucoup de PME, le taux... En fait, le taux de syndicalisation est
moins élevé au sein des PME au Québec. Donc, il me semblait, moi, que le processus de participation
devait être un peu mieux raffermi au sein des PME pour permettre aux salariés qui ne sont pas représentés par des
syndicats, où il n'y a pas d'association accréditée, de faire des observations,
de demander des renseignements. Donc, il me
semble que le processus de participation, oui, je comprends votre élément de
lourdeur administrative, mais, en même
temps, les objectifs de la loi nous imposent parfois une certaine
administration pour mieux atteindre ces objectifs.
Mais
j'aimerais ça vous entendre, là, surtout tenant compte que le taux de
syndicalisation n'est pas très élevé, puis une entreprise, quand même, là, je le dis, de 38 salariés, où il y
a des problèmes d'équité salariale, puis on veut se plaindre, puis qu'on
ne connaît pas la loi, puis qu'on la trouve alambiquée puis compliquée, puis on
sait qu'on peut consulter quelqu'un de la
commission des normes, mais ce n'est pas toujours facile d'avoir accès à
l'information, donc, qu'on puisse demander
à son employeur — où il
n'y a pas de comité d'équité salariale, là, on n'est pas en haut de 100 — qu'on puisse demander des informations puis qu'on puisse faire des observations, il
me semble que c'est démocratique au sein de la PME. Qu'est-ce que vous
me diriez là-dessus?
Mme Hébert (Martine) : Je vous dirais que moi, j'avais compris que cette
obligation-là sur la participation des employés, ça s'appliquait aux
50 employés et plus, hein?
M. Boulet :
Oui.
Mme Hébert (Martine) : À moins que je ne me trompe, là, c'est ça. O.K.
Donc, là-dessus, moi, là, où j'en ai, c'est
qu'est-ce que ça veut dire participation, hein? Le législateur ne parle jamais
pour ne rien dire, mais, souvent aussi, on sait que la définition de ce que c'est, le processus de participation,
comment ça va être défini, est-ce qu'on va attendre que ce soient les tribunaux qui balisent ce qu'on
veut dire par là... Et c'est tout ça, dans le fond. Peut-être que, sur le
principe de participation, le
principe de la démocratie, je pense, M. le ministre, on se rejoint. C'est
peut-être plus sur la manière, sur le
moyen. Et, sur l'obligation, peut-être plus circonscrire l'obligation. Ça veut
dire quoi, exactement, cette participation-là? Peut-être la définir
davantage ou la baliser, hein, y mettre certaines balises, tel que notamment,
en définissant tel que notamment, etc., pour
faire en sorte qu'en ayant, par exemple, une boîte de courriel où l'employé
peut envoyer ses questions, etc.
Donc, je pense qu'il faudrait peut-être circonscrire ce qu'on veut dire par le
mot «participation». Comme je le
disais ce matin, vous savez, Simone de Beauvoir disait : «Pourquoi les
mots, cette précision brutale qui maltraite nos complications?». Alors, les mots ayant toute leur importance et
pouvant nous maltraiter parfois, ou nous rendre la vie plus complexe, je pense que ce serait peut-être
bien de circonscrire, dans le projet de loi, dans l'article, ce qu'on veut, à
tout le moins, définir par le «participation».
M. Boulet : D'accord. Ça va. Non, je le reçois bien. C'est un bon commentaire. Maintenant, vous référiez aussi... Bon, quand on fait notre exercice de maintien, on
doit... Avant, d'ailleurs, le maintien de l'équité salariale n'était pas
défini. Maintenant, dans notre projet de loi, on définit ce qu'est le
maintien d'équité salariale et on dit ce que doit contenir clairement l'affichage. Et, quand on parle de la
date précise de l'événement, il nous apparaissait que, de bien l'identifier,
c'était important, parce que,
si on fait l'exercice de maintien, puis je pense que vous adhérez à la
périodicité de cinq ans, il faut s'assurer de bien identifier la date où
il y a création d'une iniquité, où est survenu un événement qui crée une iniquité. Ça, vous dites, c'est un fardeau indu
pour les plus petites PME. C'est difficile à suivre. Mais est-ce que,
comme pour les accidents de travail
et les maladies professionnelles, on doit tenir un registre puis faire une
enquête quand il y a un accident de travail qui comprend des lésions
corporelles qui sont plus importantes? Est-ce que ce n'est pas
envisageable que, même au sein d'une
PME, pour le bénéfice du respect de l'équité salariale et des obligations
qui sous-tendent la loi, il ne serait pas opportun d'avoir un registre
avec la date d'un événement où il se crée un écart?
Mme
Hébert (Martine) : Le problème, c'est qu'il y a beaucoup d'événements
au sein d'une PME quand on considère le taux de roulement, quand on considère
le profil des personnes qu'on peut embaucher. Dans une petite entreprise, comprenez-vous que l'impact ou
l'incidence du départ d'une personne ou d'un changement d'une tâche dans
un poste, ça a... on vient de changer
10 % de l'ensemble, justement, des tâches ou des postes. Donc,
comprenez-vous que la... Dans le fond, notre problématique, c'est que
chaque petit changement, aussi lilliputien fusse-t-il, dans une petite entreprise comme ça, de 10 ou 15 employés, peut
avoir un impact sur l'ensemble, justement, de l'équité à chaque fois.
Et
aussi il peut y avoir plusieurs événements consécutifs auxquels... on ne sait
pas à partir duquel événement en particulier
on va attribuer cette problématique, l'iniquité, donc, ou la date qu'on va
pouvoir attribuer, par exemple, que c'est exactement l'événement qui a
fait en sorte qu'on créait le déséquilibre.
Alors,
c'est un petit peu ça, notre problème, M. le ministre, avec la disposition
qu'il y a là. On dit : Ih! c'est... En tout cas, moi, j'ai parlé à mes conseillers aux entreprises aussi, qui
reçoivent, justement, les appels de nos membres, puis ils m'ont dit ih! comment nos membres vont faire,
comment on va faire pour déterminer ça dans une petite entreprise, là? Il va falloir que la commission, sinon, nous
fournisse, là, des balises, des guides ou des «templates», là, qu'on appelle
en bon français, quelque chose, des outils, là, pour nous accompagner
là-dedans. Ou encore, beaucoup plus simple, exempter,
encore une fois, là, ou fixer quelque chose de plus clair pour les plus petites
entreprises, dans les cas où on n'est pas capables de l'évaluer,
justement.
M.
Boulet : Absolument. Il y a certainement une frontière qu'on va
peut-être devoir déterminer, mais, tu sais, si tu donnes une prime à un ouvrier, une prime de rétention, surtout
dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre qu'on connaît, de 2 $, puis que cet ouvrier-là
quitte, puis que c'était l'emploi en prépondérance masculine, et que la
secrétaire, elle, demeure en emploi, il y a quand même eu une iniquité
pendant la période de temps où l'ouvrier continue. Ou, si l'employeur décide de mettre fin à la prime de
rétention parce qu'il n'y a plus de problème de rareté de main-d'oeuvre,
il y a quand même eu une iniquité pendant une certaine période de temps. Mais,
parfois, il peut y avoir beaucoup de mouvement de main-d'oeuvre dans une petite
organisation, et ça peut être complexe.
Mme Hébert (Martine) :
C'est justement, et c'est là où on se dit : Tu sais, dans le fond, si on
fait une loi, assurons-nous aussi qu'on va
mettre en place les mécanismes qui vont en faciliter l'observance, qui vont en
permettre l'observance. Et là je
pense qu'on n'est pas nécessairement, en toute déférence, dans un mécanisme où
on va pouvoir... ou je pense qu'au contraire on va, de facto, mettre en
non-conformité beaucoup d'entreprises, alors qu'elles n'en peuvent rien, là.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Je dois vous couper, je dois vous couper,
votre temps est écoulé. Alors, merci pour
ce bel échange. Je cède maintenant la parole au député du deuxième groupe
d'opposition, tel que mentionné ce matin...
Une voix : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...officielle, oui. De l'opposition officielle, tel que mentionné ce matin,
excusez-moi. Vous disposez de 11 minutes.
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Hébert, merci
d'être ici, vraiment merci, là, d'avoir fait ce travail-là, parce que ça
demande sûrement du temps, et puis vous l'avez mis vraiment, le temps, pour
nous préparer ça.
Je remarque, entre autres, dans votre nombre
d'employés, que les gens que vous représentez, 70 %, c'est
10 employés et moins. Je lis bien?
Mme
Hébert (Martine) :
C'est-à-dire que, au Québec, la composition de l'économie québécoise, à peu
près 73 %... en fait, 73 %
des entreprises, au Québec, ont moins de 10 employés, O.K.? Mais, dans ceux que
je représente à la FCEI, là, nous, nos membres ont, en moyenne,
22 employés.
M. Rousselle : Je m'en vais au
niveau des 50 et plus, parce qu'on a parlé beaucoup des 50 et plus, on a parlé,
justement, que, quand on veut, justement,
avoir une équité, l'évaluation du maintien, l'équité salariale, et tout, vous
avez parlé de plus que cinq ans,
vous, mais moi... Vous, qu'est-ce que vous en pensez, d'un comité
paritaire — puis je
vous lance l'idée, là, tu sais, là — un comité paritaire pour que ça se fasse
d'une manière régulière, tu sais? Parce qu'à un moment donné, vous l'avez dit, des fois, dans des compagnies ou dans des
endroits, ça va vite. Ça va vite, puis, à un moment donné, on peut se perdre là-dedans. Un comité
paritaire qui serait, justement, à l'affût de ça, de ces changements-là, puis
qui ferait les changements à fur et à mesure, vous en pensez quoi, là? C'est-u
une idée folle, ça, là, ou...
• (16 heures) •
Mme
Hébert (Martine) : Il n'y a
jamais d'idées qui sont folles, ou`, en tout cas, à peu près pas, mais est-ce
que c'est une bonne idée, ça, peut-être là est la question. Je vous dirais que
moi, je suis davantage pour laisser
aux employeurs le choix des moyens, hein, des moyens qu'ils vont
appliquer dans leur entreprise et des moyens qu'ils vont prendre pour justement s'assurer, là, entre les exercices de maintien...
Parce qu'à partir du moment où on va imposer cette façon de faire là à un employeur, peut-être,
ça va convenir à un, mais ça ne conviendra pas nécessairement à l'autre, ce
ne sera peut-être pas optimal pour personne non plus ni pour les travailleurs ni pour les employeurs. Alors, moi, j'inviterais plutôt à
laisser le libre choix aux employeurs à y aller sur l'objectif, hein, comme on
a ici, là, le grand objectif qu'on a.
Et d'ailleurs
je vous soumets respectueusement aussi que, si la Cour suprême avait jugé qu'il y a
d'autres éléments de la loi, là, qui ont besoin d'être renforcés, bien, elle
l'aurait dit, ou qu'il y a d'autres éléments de la loi, là, qui ne
sont pas conformes à nos chartes ou qui ne
sont pas conformes, elle l'aurait dit. Or, à ma connaissance, ce n'est pas ce
que la Cour suprême a fait. Elle a
bien mentionné tels, tels éléments, elle a pointé ces éléments-là. Alors,
pourquoi, comme j'ai dit tantôt, «if it ain't broken, don't fix it»,
alors pourquoi est-ce qu'on rajouterait des choses, alors que la Cour suprême elle-même
n'a pas jugé bon de rajouter ces éléments-là? C'est un petit peu la question
que je poserais.
M.
Rousselle : Je reviens aux
compagnies qui ont 10 employés et moins ou dans ces environs-là, vos membres,
vous dites, aux alentours de 22 employés.
Cette modification-là de loi, ça va avoir un coût financier,
est-ce que vous avez regardé l'impact
financier des compagnies que vous représentez? Est-ce que vous avez fait un
survol avec... vous avez sûrement eu des téléphones, mais est-ce que
vous avez fait une analyse, là, là-dessus?
Mme
Hébert (Martine) : Bien, écoutez,
on a regardé l'étude d'impact réglementaire qui a été produite par le gouvernement, hein, comme la politique sur le logement réglementaire d'ailleurs
l'a prescrite, je félicite le gouvernement
d'avoir suivi d'ailleurs cette directive-là de la politique qui lui incombe.
Les coûts seraient évalués annuellement à 566 millions de dollars par
année, ça, c'est juste pour les ajustements, O.K.?
Mais il y a
un autre coût, M. le député, je suis contente que vous posiez la question,
parce qu'il y a un autre coût dont il faut
tenir compte. Dans le projet de loi, on dit que la CNESST devra accompagner chaque
personne qui dépose une plainte, que la plainte soit, prima facie, frivole ou pas, O.K.? Et
ça, c'est des coûts pour les employeurs, parce que la division de l'équité
salariale, tout comme celle des
normes du travail à la CNESST, est financée à 100 % par les employeurs, par une
taxe sur la masse salariale qui est prélevée et que les employeurs doivent
payer pour financer cette division-là, tout comme la CSST d'ailleurs, la
partie SST.
Alors, c'est
sûr qu'on vient rajouter des coûts, là, la CNESST va devoir accompagner chaque
personne, là. Moi, je décide, demain matin, comme ça, là, «out of the blue»,
hein, je m'en vais déposer une plainte, mais, même si ma plainte est complètement frivole puis qu'elle n'a aucun
fondement à sa face même, la CNESST va devoir prendre fait et cause pour moi, là. Donc, c'est beaucoup de ressources qui
risquent d'être engrangées à la division de l'équité salariale, qui, peut-être, pourraient être dévolues, ressources
qui, peut-être, pourraient et devraient être dévolues à des choses un peu
plus optimales que ça.
Donc, c'est
pour ça d'ailleurs qu'on a proposé, dans le projet de loi, de dire : Bien,
la CNESST, de ne pas lui mettre une
obligation comme ça, mais elle peut, si elle le désire ou dans des cas
particuliers, là, offrir une aide, mais pas qu'elle soit obligée
systématiquement, là, sans avoir fait une analyse préalable du bien-fondé de la
plainte.
M.
Rousselle : Je continue
avec, toujours, les 10 employés et moins. Je me mets à la place
d'une travailleuse qui n'est pas syndiquée, qui n'a pas de structure,
justement, pour faire valoir ses droits. Puis là c'est sûr que, là, ça a un
impact, puis peut-être que son employeur
est peut-être au même niveau dans le sens qu'il ne connaît pas les structures
non plus. Je veux dire, j'y vais
vraiment d'une petite, vraiment, PME, peu importe la région, je vais prendre la
région de Laval, pour ne pas en
étiqueter d'autres, mais je vais prendre Laval. Mais cette entreprise-là,
justement, je le sais qu'à un moment donné
10 employés et moins, des fois, c'est plus familier, c'est plus proche, on
s'entend. Mais s'il y a une égalité là-dedans, avez-vous réfléchi? Je sais que vous avez représenté des employeurs,
mais cette personne-là qui vit une iniquité, justement, salariale, qui est là, qui travaille puis qu'elle,
elle ne sait pas comment s'y prendre, avez-vous déjà jasé de ça avec vos
membres?
Mme Hébert (Martine) :
Bien, écoutez, je pense qu'il faut faire attention, là, il ne faut pas
prétendre que les travailleurs salariés, au
Québec, n'ont pas de recours, là. Je veux dire, la commission des normes, de
l'équité salariale, est là pour ça.
Ils ont des services, d'ailleurs, ils prennent fait et cause pour les
travailleurs. Donc, je pense que les travailleurs ont des recours, les 10 employés et moins sont...
d'ailleurs, les 10 employés et moins ne sont pas assujettis à la loi. Et,
moi, ce que je dis, si on ne les a pas
assujettis à la loi dès le départ, c'est parce que le législateur considérait
qu'effectivement la question de
l'équité salariale, au terme de la loi, hein, on considérait, donc, qu'elle
n'était peut-être pas problématique dans
ces petites entreprises là. Et, moi,
ce que je vous dis, même, c'est qu'à la lumière des résultats de l'équité salariale qu'on voit, là, le pourcentage
des entreprises où il y a eu des ajustements, on dit même qu'à 10, là... ce
n'est pas chez les 10 à 49 où ça a été pire.
Donc, je me dis : On pourrait-u se donner une chance? Haussons le seuil à
20, peut-être, et refaisons un exercice peut-être
dans cinq ans, hein, mettons. Ça se met, dans une loi, ça, de faire une évaluation
puis de dire : Dans cinq ans, est-ce que
finalement... Bon, je
pense que c'est possible et j'irais
plus dans ce sens-là, je vous dirais.
Mais les
recours pour les travailleurs, ils sont existants, là. On les a, puis ils
fonctionnent très bien. Je ne vois pas pourquoi on viendrait ajouter,
là... ou, en tout cas, ajouter des structures. Je pense que les
structures fonctionnent parfaitement
bien.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci. Bonjour, et merci pour votre prestation.
Ce n'est pas une première visite, il me semble. Comme toujours, c'est
réfléchi et ça s'ajoute à nos réflexions.
Je prends
note que vous avez bien dit que vous... les grands paramètres
du projet de loi vous conviennent, et on comprend qu'on est ensemble quand on parle de l'obligation de s'enligner vers l'équité de façon la plus complète que possible. J'entends aussi que c'est les PME qui
sont les moteurs de notre économie et que... je crois qu'on partagerait aussi l'objectif
de limiter le fardeau du... surtout sur le garage du coin, comme vous dites, le
dépanneur du coin. C'est le moteur de notre économie, il faut les
appuyer.
En même temps, on est dans la situation où on a
à équilibrer les besoins tout à fait légitimes et à trouver des moyens de le faire. Je reviens avec la question
de... on prend l'exemple d'une madame telle, qui a des difficultés
au sein d'une petite entreprise, où elle voit un collègue homme qui
bénéficie des conditions qui sont un petit peu différentes. Il faut
dire que je n'ai nullement lu, avec respect, dans la décision de la Cour suprême, un diagnostic qu'il n'y avait aucun problème chez les PME. Il ne s'est pas prononcé là-dessus.
Il y a des recours pour chaque travailleur, travailleuse, qu'ils soient dans
une entreprise de 100 employés ou de 50. En même temps, je
constate, c'est un des fardeaux très difficiles pour quelque gouvernement que ce soit de ne pas chercher des solutions
paramétrées de A à Z et de respecter les besoins des entreprises, dans
cet exemple-là, qui sont plus restreintes, avec des ressources plus limitées.
Mais je vous invite, de façon générale à vous
mettre dans la peau d'une femme qui travaille au sein d'une entreprise,
on va dire, de 21 employés. Comment faire? Voyez-vous des façons
d'atténuer ce projet de loi ou de l'adapter pour que ça puisse se
rendre efficace pour tout le monde, y compris cette employée-là?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez, moi, je pense que, d'abord, là, en
tout cas, à ma connaissance, dans la Loi sur les normes du travail, il y a quand
même des dispositions qui empêchent les employeurs de faire de la discrimination, de payer... de moins rétribuer des
employeurs d'une même catégorie de salariés, là, c'est comme... Donc, il y
a déjà des dispositifs dans la Loi sur les normes du travail actuelle qui
permettent aux travailleurs et au scénario que vous me décrivez de la dame en question,
là, de pouvoir déposer une plainte devant la Commission des normes du travail, là, si elle juge qu'il y a
discrimination. Il y a aussi nos chartes qui protègent les travailleurs. Donc, je
pense qu'il y a des dispositifs à l'heure actuelle qui, si
vous voulez, aident, supportent les travailleurs dans leurs démarches.
Puis
moi, je suis tout à fait pour le fait de dire, par exemple : Est-ce qu'on peut... est-ce
que les employeurs ont une responsabilité, par
exemple, d'informer leurs employés,
leurs travailleurs sur les recours, etc.? Je pense que oui, à travers différents mécanismes, comme ils le font déjà
présentement, et je pense que les mécanismes actuels fonctionnent bien.
Donc, ce que je dis,
c'est : Regardons le coût-bénéfice en termes sociétaux et peut-être que le...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Mme Hébert, je dois
malheureusement encore vous couper. Merci au député de l'opposition officielle.
Nous y allons maintenant avec le député du deuxième groupe d'opposition. Je
vous rappelle que vous avez 2 min 45 s
• (16 h 10) •
M. Ouellet :
Mme Hébert, on va aller «straight to the point». Vous avez parcouru la
législation, vous faites référence à ce
qu'il s'est passé au sein de la cour, donc, ce que je veux dire, c'est que vous
avez pris le temps de bien analyser le projet de loi en question. Mais
j'aimerais avoir votre interprétation à l'article 76.5, lorsqu'on parle de
verser... de l'article 9, pardon, pour
la modification de l'article 76.5, lorsqu'on parle de verser une indemnité forfaitaire. À votre avis, est-ce que cette indemnité forfaitaire inclut, selon vous, les paies de
vacances, les régimes de retraite ou c'est un montant fixe?
Mme Hébert (Martine) : C'est une bonne question. D'ailleurs, je pense
qu'il y en a qui ont déjà posé la question devant cette commission, et je vous remercie de toute la considération
que vous me portez, mais je n'ai pas la réponse à cette question-là. Moi, je
pense que... en tout cas, de ma compréhension et de mon humble compréhension,
là, je ne veux pas me substituer du
tout à la cour ni aux tribunaux, mais, de ma compréhension, quand on parle
d'équité salariale, on parle de salaire. Donc, pour moi, c'est salarial.
M. Ouellet :
Oui, mais le législateur choisit les mots, on ne parle pas de salaire.
Mme Hébert
(Martine) : On l'a dit tantôt.
M. Ouellet : Alors, ma deuxième question sera la suivante. Vous faites mention de
l'opportunité de mettre, dans la loi,
jusqu'à sept ans pour l'étalement et de ne pas avoir à demander la permission à
la CNESST pour aller dans ce sens-là, considérant
que certaines petites entreprises pourraient avoir des crises de liquidités.
Donc, est-ce que vous êtes d'accord avec
le fait que les travailleurs ou travailleuses, surtout les travailleuses, qui
seraient touchés par ça... Tu sais, dans le fond, ils n'ont pas été payés, mettons, pendant cinq ans,
au bon régime, mais là on pourrait aller jusqu'à sept ans, un remboursement.
Vous ne trouvez pas que c'est un petit peu long? Le législateur dit : De
quatre. C'est des situations particulières,
la CNESST pourrait être saisie pour dire : Considérant x, y paramètres, je
le... prévaut. Là, vous dites, vous : Non, on devrait y aller de façon unilatérale jusqu'à sept pour s'assurer
que les liquidités soient disponibles ou présentes, les entreprises. Il n'y a pas un double discours
pour dire : S'il y a eu une erreur, on va prendre plus de temps de la
corriger que le fait que l'erreur s'est manifestée, est arrivée?
Mme Hébert (Martine) : Oui. Mais, dans la mesure où il y a une
compensation, quand même, là, pour l'étalement du paiement, là, qui est
versé, quand même, aux travailleurs. Je vous dirais que, là-dessus, on pourrait
penser, par exemple, à un minimum et un
maximum, là, puis ça pourrait, par exemple, être soumis à la CNESST, à
l'approbation de la CNESST en fonction, par exemple, de la situation
financière de l'entreprise, là, quelque chose comme ça.
M. Ouellet : Puis vous parlez de compensation, c'est qu'il y aurait un pourcentage
d'intérêts versé. C'est ce que vous...
Mme Hébert (Martine) : Bien, c'est ce qu'on semble comprendre, en tout
cas, de ce qui est le cas actuellement.
M. Ouellet :
Combien de temps, madame?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Huit, sept...
M. Ouellet :
Merci, Mme Hébert.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci pour ce bel échange. Alors,
nous y allons maintenant avec le porte-parole du troisième groupe de
l'opposition, 2 min 45 s
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Hébert, d'être ici avec nous.
Je
n'ai pas pu m'empêcher de sourire quand vous avez commencé en disant qu'on
n'était pas dans un monde idéal, parce
que je me suis dit : Si Québec solidaire avait écrit le projet de loi,
quelle expression auriez-vous utilisée, le cas échéant? Mais, bon.
Vous avez
parlé, tantôt, des plaintes frivoles. Je trouve ça intéressant. Est-ce que vous
avez une idée, à peu près, en ce moment, de la proportion des plaintes
qui seraient jugées frivoles à la CNESST?
Mme Hébert (Martine) : Il faudrait que
vous posiez la question aux gens de la CNESST. Moi, je ne suis pas directrice des opérations, là, à la CNESST. Mais
ce que je peux vous dire, c'est que, souvent, dans les législations qui
sont similaires, hein, justement, on va mettre des paramètres qui vont
permettre, en amont, de juger, là, est-ce que la plainte doit rentrer, finalement, dans la moulinette et doit rentrer
dans le processus de traitement justement pour éviter un engorgement, engorgement indu qui crée
d'ailleurs une iniquité pour les travailleurs qui, eux, ont des plaintes qui
sont vraiment fondées et qui débouchent finalement sur effectivement des
décisions qui leur sont favorables.
M. Leduc :
Je vous posais la question parce que vous avez dit, sur un autre sujet,
tantôt : «If it's not broken, don't fix
it.» Donc, je comprends que, pour les plaintes frivoles, pour l'instant, vous
n'avez pas une idée particulière de s'il y en a, en fait, tout
simplement.
Mme Hébert (Martine) : Non. Par contre, par contre, ce que je peux vous
dire, c'est qu'actuellement il y a un déséquilibre dans le traitement des... en
matière d'équité salariale, dans le traitement des employeurs versus les
salariés. Il y a une iniquité.
L'opinion de l'employeur, dans la décision, dans la publication de la décision,
dans les commentaires qu'il formule
aussi n'est pas nécessairement toujours prise en compte et ne fait pas partie
non plus... n'est pas inscrite, là, nommément, textuellement dans les
décisions de la commission, et ça, ça pose un problème, parce qu'il y a une iniquité
de traitement, là, dans les processus.
M. Leduc :
À la page 9 de votre mémoire, vous faites référence au fait, juste avant
la recommandation à peu près en milieu de page, là, qui pourrait notamment
menacer la trésorerie de certains employeurs. Est-ce qu'il n'y a pas quelque
chose d'un peu triste de conclure qu'en
quelque sorte le... Est-ce que je vais trop loin en pensant que le modèle
d'affaires, finalement, était construit sur la discrimination systémique
des femmes?
Mme Hébert (Martine) : Non. Non, pas nécessairement. Mais ça ne veut pas
dire que vous pouvez arriver, par exemple,
dans une période creuse pour
l'entreprise, où la décision sort, puis que là vous devez faire votre
versement, et, pour x, y raisons, le
«flow»... ou encore dans une période où l'entreprise est en train de faire des
investissements majeurs puis que les
liquidités ne sont pas nécessairement dans le compte de banque. Donc, ça n'a
pas rapport nécessairement, au contraire, avec ce phénomène-là.
M.
Leduc : Des gens qui sont
passés avant vous ce matin ont parlé du fait de réduire la durée, là, de la
période pour refaire l'exercice de
maintien notamment à trois ans ou... en tout cas, là, il y a
d'autres personnes qui parlent de 10 ans. Un argument qui a été avancé,
c'est que, si on le fait aux trois ans, l'exercice est moins lourd parce qu'il
y a moins d'années à étudier. Donc, est-ce que
c'est logique d'y aller dans ce
sens-là? De faire ça sur moins
d'années, c'est plus facile?
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Pardon, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, le temps est écoulé. Alors, je vous remercie, je vous remercie, toutes et tous, pour votre contribution, hein, aux travaux de cette commission-ci.
Nous
suspendons les travaux quelques instants, le temps de permettre au prochain
groupe de s'installer. Merci, Mme Hébert.
(Suspension de la séance à
16 h 16)
(Reprise à 16 h 19)
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Bonjour. Bonjour, tout le monde. Alors,
nous reprenons les travaux. Je souhaite la bienvenue à la Centrale des syndicats du Québec. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis ensuite nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite donc à vous présenter et ensuite de donner votre exposé.
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Mme Éthier (Sonia) : Bonjour. Mon nom est Sonia Éthier. Je suis la
présidente de la Centrale des
syndicats du Québec. Je suis accompagnée, à ma gauche, de Nathalie
Léger, qui est avocate aux services juridiques à la centrale, et de Karen
Harnois, qui est conseillère au dossier de l'équité salariale aussi à la Centrale des syndicats du Québec. Et la présentation, on va la partager.
• (16 h 20) •
Donc,
vous rappeler que la Centrale des
syndicats du Québec, nous sommes
200 000 membres, dont 240 syndicats et, tout de même, 350
titres d'emplois, et la CSQ compte, dans ses rangs, 75 % de femmes.
Alors,
dans un premier temps, il faut se rappeler que la discrimination
systémique, c'est insidieux et ça se retrouve encore dans nos milieux de travail, et il faut se rappeler que c'est
complexe. Et, à cette fin, un encadrement
légal est vraiment nécessaire pour l'identifier, mais aussi la corriger.
Et il faut se rappeler aussi qu'au Québec il y a eu, quand même, de nombreuses
batailles, que ce soit devant les tribunaux, ou des manifestations dans les
rues, et, après de nombreuses représentations
des organisations syndicales, comme société, nous avons choisi de mettre en
place une loi proactive qui impose
l'équité salariale — et c'est
un droit fondamental — non seulement pour l'atteinte, mais aussi pour le maintien.
Pourtant,
malgré que la loi ait été adoptée il y a quand même 22 ans, il demeure encore
des entreprises qui sont retardataires,
pour différentes raisons, soit qu'elles n'ont pas fait l'opération de maintien
ou encore qu'elles n'ont pas apporté les
correctifs nécessaires. Alors, c'est vraiment problématique, et, aujourd'hui,
22 ans plus tard, suite à la décision de la Cour suprême, il y a des
modifications qui sont proposées pour rétribuer les femmes de façon adéquate et
corriger la discrimination salariale.
Donc, pour
nous, le projet de loi qui est présenté... pour nous, il y a quand même
certains reculs. Tout d'abord, le
fait que ce soit versé sous forme forfaitaire, ces sommes qui sont dues à la suite
de l'évaluation du maintien, pour nous, c'est très problématique.
Ensuite, que ces sommes-là puissent être
réparties sur plusieurs versements, ça a pour effet d'accorder aux employeurs
une période de grâce en niant le droit des femmes de recevoir les sommes.
Et,
troisièmement, la reconnaissance d'une pleine rétroactivité pour les femmes qui
ont été représentées par les organisations syndicales, qui ont mené
cette lutte jusqu'à la Cour suprême et donc ne pourraient pas être visées rétroactivement, notamment pour l'opération de
maintien 2010 et 2015... Donc, on a diverses modifications au projet de loi
à apporter, trois grandes sections. Et Mme Harnois et Léger vont préciser.
Mme
Harnois (Karen) : Alors,
pour faire suite à Mme Éthier, dans
le fond... juste pour vous préciser
que les recommandations ont été rédigées de manière à ce qu'elles soient
directement applicables dans la loi, donc, lorsque vous le
lirez, vous serez en mesure de constater cela.
Premier
élément, le processus de participation. Le processus
de participation qui est proposé dans le projet de loi est, pour nous, problématique, en fait, il ne s'applique pas à toutes les entreprises
assujetties, le processus cible seulement
les entreprises où il
y a eu un programme
d'équité salariale, ou encore dans les cas où il y a
une présence d'associations accréditées. Donc, pour nous, d'abord,
ça, c'est un problème.
L'autre
élément, en fait, il s'agit d'un processus de consultation et non de participation. Pour nous, un processus de
participation, je dirais, se résume ou se réfère à un comité de maintien de l'équité salariale, et on souhaite que la loi
soit modifiée ainsi en obligeant la mise en place d'un comité paritaire de
maintien de l'équité salariale, peu importe le type d'entreprise assujettie à
la loi. Dans le fond, le comité vise la participation réelle des personnes
salariées pour comprendre l'équité salariale, pour identifier les éléments
discriminatoires et, naturellement, pour prendre position. Également, un comité de maintien fait en sorte de
diminuer considérablement le nombre de plaintes qui pourraient être
déposées. Pour nous, ce sont des éléments positifs. Vous retrouverez cet
élément à la recommandation n° 1.
Également,
dans l'évaluation du maintien, le projet de loi, tout comme la loi actuelle, ne
prévoit pas un encadrement pour réaliser le maintien, il n'y a pas
d'étape spécifique. Nous, on souhaite que la loi soit modifiée afin de voir un processus ou des modalités particulières pour
réaliser le maintien, tel qu'il a été le cas dans le cadre du programme d'équité
salariale, où on voit quatre étapes bien définies. Cela nous permet justement
d'assurer une continuité, d'assurer une compréhension
de ce qu'il se passe comme évaluation du maintien dans l'entreprise, bref,
d'assurer une compréhension de la réalisation de l'équité salariale dans
les entreprises. Vous retrouverez cet élément-là à la recommandation n° 3.
Concernant
l'évaluation du maintien, on souhaite
que la périodicité soit réduite de cinq à trois ans. En fait, cette réduction de périodicité permettrait aux
employeurs d'alléger leur fardeau financier et aussi faciliter l'identification des événements qui peuvent survenir dans la période de
référence. Vous retrouverez cet élément à la recommandation n° 8.
Concernant la
section suivante, je vais me permettre de lire textuellement la recommandation n° 10, étant donné qu'elle est particulièrement technique. On est toujours dans le cadre de l'évaluation du maintien, et la CSQ souhaite vous proposer une méthodologie de calcul, une mécanique de calcul des ajustements à l'intérieur de cette périodicité
justement pour répondre au jugement
de la Cour suprême et respecter la Loi sur l'équité salariale. Dans le fond, la
recommandation n° 10 se lit
ainsi : «L'employeur doit, pour chacune des années comprises dans la
période de maintien et à la date anniversaire de celui-ci, déterminer si des ajustements salariaux sont requis. Pour
chacune de ces années, la somme due en ajustement salarial rétroactif sera calculée à partir du
salaire déterminé pour l'année antérieure et à compter de la date de
l'événement qui crée un écart
salarial. L'employeur doit payer les ajustements salariaux à la date où
l'exercice de maintien doit être complété.
À défaut par l'employeur de verser les ajustements salariaux à cette date, ces
ajustements portent intérêt au taux légal à compter du moment où ils
auraient dû être versés.»
Vous
comprendrez que, dans cette recommandation-là, on retrouve l'ajustement
salarial, qui, pour nous, fait référence au projet de loi, où on parle
d'indemnité forfaitaire. Pour nous, cet élément-là, indemnité forfaitaire, nous
pose problème, puisqu'il ne s'agit pas
de corriger le salaire des catégories d'emploi à prédominance féminine qui sont
discriminées. De plus, ce qui nous
cause problème, c'est également l'étalement, le nombre de versements. Donc,
corriger l'équité salariale, on souhaite que ça soit fait au moment... à la
date de l'événement et pas qu'il y ait d'étalement. Donc, on souhaite respecter l'esprit de la loi et,
naturellement, le jugement de la Cour suprême. On ne veut pas compenser, mais
on veut corriger les écarts.
La mécanique
que je vous ai lue, notre proposition de nouvelle mécanique pour évaluer...
ajuster... pour calculer les écarts
salariaux, on souhaite qu'elle soit référée, que le comité consultatif soit
mandaté, justement, pour, s'il y a lieu, retravailler cette mécanique-là, la bonifier s'il y a lieu. Et pourquoi
on souhaite que le comité consultatif soit interpelé? En fait, on pense
que c'est un lieu où on retrouve de l'expertise au niveau de l'application de
la loi, on retrouve plusieurs partenaires, et on souhaite une collaboration
avec les partenaires en place.
Mme Léger (Nathalie) : Ensuite, on aimerait attirer votre attention sur
la mécanique de traitement des plaintes qui a été mise en place. On
comprend qu'actuellement la commission effectue un travail colossal dans la gestion
et le traitement des plaintes qui ont été déposées pour les exercices de
maintien 2010 et 2015 et que ce traitement-là s'est révélé être assez ardu. Ce que le projet de loi
propose, en fait, c'est de regrouper les plaintes à la seule discrétion de la
commission, ce qui, pour nous, est
problématique, notamment au niveau du devoir de représentation des
organisations syndicales, qui doivent pouvoir être en mesure de
consulter adéquatement leurs membres et de prendre les décisions qui sont les plus appropriées pour elles. En plus,
la mécanique qui est prévue dans le projet de loi, dans les différents articles
qui ont été ajoutés, ressemble beaucoup
plus, à notre avis, à une mécanique qui relève de la négociation collective et
non à une mécanique qui s'applique en équité salariale, qui ne peut être
négociée, étant un droit fondamental.
Je vais passer la
parole pour la conclusion.
Mme Éthier (Sonia) : Bien, écoutez, en conclusion, je pense que le
législateur a la possibilité d'agir maintenant pour mettre en place les mesures qui vont permettre de corriger
réellement la discrimination salariale systémique. Et on se rappelle que
la loi a quand même été adoptée — je pense que c'est important — il y
a quand même 22 ans; en 2004, il y a eu le
jugement Julien qui a invalidé le chapitre IX; 2009, le processus de maintien;
2018, le jugement de la Cour suprême.
Donc, je pense qu'il est important de s'assurer que les femmes puissent
bénéficier d'un salaire qui est équivalent à celui des hommes et que des
correctifs soient apportés.
• (16 h 30) •
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Merci. Merci pour cet exposé. Nous commençons maintenant
la période d'échange. M. le ministre, vous disposez de
16 min 30 s
M.
Boulet : Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous remercier. C'est un rapport qui est
complet, qui est très bien présenté, fait en équipe, Sonia, comme vous
me le mentionniez. On a apprécié beaucoup vos commentaires, puis on ne
redira jamais assez souvent comment c'est important pour notre gouvernement de
dire qu'on est totalement d'accord avec les
principes qui sont à la base de cette loi, qui est de lutter contre la
discrimination systémique envers les emplois à prépondérance féminine,
et notre accord avec le dispositif du jugement de la Cour suprême du Canada.
D'ailleurs,
ce projet de loi là, ce n'est pas une révision globale de la Loi sur l'équité
salariale. Puis, ça aussi, je tiens à le rementionner : avant le 28 mai,
cette année, on va devoir déposer un rapport sur l'opportunité de maintenir en
vigueur cette loi-là, et quel est le bilan de son application au cours des
10 prochaines années. Et, le cas échéant, vos commentaires, on pourra les utiliser dans un contexte autre. Mais ce
projet de loi, il vise essentiellement et principalement à donner suite aux conclusions de la décision de
la Cour suprême du Canada, qui nous dit : Le maintien de l'équité
salariale, il faut que ça soit fait
en continu, il faut que ça rétroagisse à la date de l'événement qui crée l'iniquité,
et non seulement à la date où l'exercice de maintien est fait.
Vous
disiez — je pense
que c'est vous, Mme Éthier — qu'il y avait beaucoup de retardataires.
Puis j'ai l'impression qu'en 2009 on
a modifié la façon de faire l'exercice de maintien de l'équité salariale en
abolissant la rétroactivité puis en le faisant à une date fixe, parce que la
loi n'était pas suffisamment respectée. Puis vous faisiez référence aux
retardataires pour le maintien de l'équité salariale. Est-ce que vous
avez les mêmes commentaires pour l'exercice initial d'équité salariale? Est-ce que ça veut dire que l'exercice
initial a été plus respecté, mais qu'après ça, à tous les cinq ans, l'exercice
de maintien n'est pas vraiment fait?
Mme Éthier (Sonia) : Bien, d'abord, il y a beaucoup de retardataires.
Probablement un problème de compréhension, compréhension de la loi. Aussi, on comprend que le gouvernement fait
partie des retardataires parce que, dans l'ensemble de la fonction publique, là, il y a eu beaucoup de
plaintes de 2010-2015 qui ne sont pas encore réglées. Est-ce que l'exercice
initial de l'équité salariale a été problématique? Je pense que ça a quand même
été un exercice complexe, là, pour...
Puis je pense qu'il y
a probablement, au niveau... quand on parle des entreprises, je le disais
tantôt, une méconnaissance, mais aussi peut-être pas assez de coercition ou
d'obligations pour faire en sorte de respecter la Loi sur l'équité salariale.
Parce que, 22 ans plus tard, je crois que c'est anormal qu'on soit encore
aux prises avec de la discrimination systémique, notamment dans une société où
on en a tellement débattu, on en a parlé. Et, même, les gouvernements qui se sont succédé, quand même, ont reconnu cette
question de l'équité salariale. Mais, au fond, je pense qu'on a encore
beaucoup de travail à faire sur cette question.
M.
Boulet : Je suis totalement d'accord avec vous. Est-ce que c'est juste
une... J'ai lu, récemment, un article qui mentionnait qu'entre 1996 et 2016, pour 0,84 $ gagnés par une femme
pour chaque dollar gagné par un homme... on était passés de 0,84 $ à 0,90 $. Est-ce que
vous avez les mêmes données statistiques que moi? Est-ce que la loi, selon
vous, sur l'équité salariale a eu un effet pratique sur la
discrimination systémique envers les femmes?
Mme
Éthier (Sonia) : Bien, je répondrais que oui, là. Je pense
qu'il y a eu... Ça a eu ses effets, mais pas totalement comme ça aurait dû
l'être. Mais, oui, ça a eu ses effets, certainement.
M.
Boulet : D'accord. Vous mentionniez... Est-ce qu'on fait bien la
nuance entre l'indemnité forfaitaire puis les ajustements salariaux?
Parce que le versement de l'indemnité forfaitaire ne soustrait pas l'employeur
de son obligation de verser aussi les ajustements salariaux. Si on fait
l'exercice de maintien à tous les cinq ans, on va voir la date de l'événement qui a créé l'iniquité puis on
fait le calcul. Puis, des fois,
l'iniquité a pu subsister pendant six mois, pendant un an, pendant la période de cinq ans, et là il n'y aurait
qu'une indemnité forfaitaire à verser par l'employeur.
Mais,
si l'iniquité persiste au moment où on fait le maintien, il y aurait à la fois
une indemnité forfaitaire ainsi qu'un
ajustement salarial sur le salaire versé au moment de l'exercice du maintien. Et
donc, s'il y a des échelles de salaire, les échelles de salaire sont adaptées. Je pense, c'est Mme Harnois ou
Mme Léger, là, une des deux, là, qui le mentionnait. Est-ce qu'on fait
bien, tous ensemble, la même nuance?
Mme
Léger (Nathalie) : En fait,
on fait effectivement la même nuance selon la façon dont c'est écrit dans le
projet de loi. Sauf que, nous, notre
prétention, ce que la Cour suprême du Canada nous a enseigné, c'est que, pour
qu'il y ait réellement une
disparition de la discrimination systémique et donc une réelle égalité de
traitement, il faut qu'il y ait un ajustement salarial à la date de
l'événement, et non pas simplement une rétroactivité en compensations.
Il faut bien
aussi faire attention à la terminologie qui est indiquée : clairement,
lorsqu'on parle d'une indemnité, celle-ci
n'est pas assimilée ou assimilable à du salaire pour les fins des différents
régimes sociaux, ce qui pose d'énormes problèmes, à notre avis.
M.
Boulet : D'accord. J'ai bien compris. Puis, dans votre expérience, là,
sur le terrain, quand on dit : L'événement qui crée l'iniquité,
comment vous définissez ça, vous?
Mme Léger
(Nathalie) : En fait, il n'y
a pas une seule définition, et c'est ça, la difficulté, mais c'est aussi pour
ça que notre recommandation
principale, qui est la recommandation n° 1, est de faire en
sorte que toutes les entreprises doivent mettre en place un comité d'équité salariale de manière à ce que ça soit
les parties prenantes de l'entreprise, celles qui sont les mieux placées pour évaluer les événements qui
surviennent dans leur entreprise, d'un commun accord, qui puissent identifier ces événements-là. Parce que,
nécessairement, ça va être impossible, compte tenu de la diversité des entreprises,
de la diversité des milieux et des types
d'emploi, de faire une liste des événements. Et, pour qu'on évite d'avoir un
nombre record de litiges sur est-ce
que c'est un événement ou pas, bien, aussi bien de donner aux parties le soin
de s'entendre sur ces événements-là à travers un comité décisionnel.
M.
Boulet : D'accord. Et ce comité décisionnel là, il serait applicable à
tout le monde, indépendamment du nombre de salariés? Parce
qu'actuellement le comité d'équité salariale est requis quand il y a
50 salariés et plus dans une entreprise.
Est-ce que, quand vous dites : Un comité paritaire d'évaluation pour le
maintien de l'équité salariale, ce comité paritaire là, vous le verriez
dans toutes les entreprises, indépendamment du nombre de salariés?
Mme Léger
(Nathalie) : En fait, oui,
on le verrait dans toutes les entreprises. On se concerte pour être sûres
d'être sur la même longueur d'onde. Puis que c'est moi qui réponds.
Mais, oui, on le verrait dans toutes les entreprises.
Je vous ferai
remarquer, M. le ministre, que votre projet de loi ne prévoit pas que le
mécanisme de participation soit
modelé selon le nombre de personnes dans l'entreprise, hein? Et nous, on est
tout à fait d'accord avec l'idée ou le principe
que ça prend une participation, peu importe la taille de l'entreprise, parce
que, je vous dirais, encore plus, dans les plus petites entreprises, lorsqu'il n'y a pas d'expertise particulière
au niveau des ressources humaines là-dessus, ça prend la parole des femmes, ça prend cette parole-là
pour être en mesure d'assurer à l'employeur une réelle compréhension de ce
qu'il se fait dans le milieu de travail.
M.
Boulet : D'accord. En même temps, il y a une nuance à apporter :
le processus de participation, c'est vrai, c'est quand on est en présence d'un comité d'équité salariale, donc
d'une entreprise qui a 100 salariés et plus, où il y a une association accréditée. Mais il y a quand
même, pour tout le monde, c'est-à-dire 10 employés et plus, la possibilité
de... Il y a un processus de consultation,
mais vous faisiez la nuance entre la consultation et la participation, mais ça,
ça s'applique à tout le monde, poser
des questions, faire des observations, et que l'employeur soit contraint de
donner des réponses. Sur la distinction aux consultations et
participations, qu'est-ce que vous auriez à me mentionner?
Mme Léger
(Nathalie) : Bien, en fait,
la consultation, c'est la capacité, comme vous venez de le dire, de poser
des questions puis qu'on réponde à nos
questions, sauf que ce n'est pas décisionnel, ça ne permet pas aux femmes de
prendre réellement leur place dans le
milieu de travail et d'être en mesure d'avoir une influence réelle sur les décisions
qui sont prises à leur égard.
Il faut bien comprendre que, dans le milieu de travail, les
femmes, pour qu'on puisse réellement assurer une égalité de traitement, bien, il faut qu'elles puissent
être partie prenante aux décisions, pas seulement au partage de l'information, sur ce qu'elles vivent, elles, dans le milieu de travail.
• (16 h 40) •
M.
Boulet : Et, quand vous
référez à la pleine rétroactivité... La lecture qu'il faut faire de la décision
de la cour... en fait, la Cour supérieure, la Cour d'appel et, par la
suite, la Cour suprême du Canada, c'est qu'on invalide trois dispositions spécifiques de la Loi sur l'équité
salariale et on dit : Ces trois articles-là sont invalides à l'expiration
d'une période d'une année suivant la
reddition du jugement. Donc, on suspend l'invalidité. C'est la raison pour
laquelle on dit : Si la loi remédiatrice qui doit entrer en vigueur
avant le 10 mai 2019 s'applique conformément à la décision de la Cour suprême Canada, ça va viser tous les
exercices de maintien qui sont postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi. Ça
fait qu'il faut cependant mentionner que, si
un exercice de maintien est fait en 2020, il va falloir que l'employeur
identifie, dans son affichage, la
date des événements qui ont créé des iniquités dans la période de cinq ans,
donc il va falloir qu'il retourne en 2015 et faire exactement ce que
prescrit la Cour suprême du Canada. Et donc la Cour suprême n'a pas mentionné qu'on devait rétroagir, qu'on devait
comme annuler les dispositions en 2009, à la date de leur entrée en vigueur,
en 2009. Est-ce qu'on se comprend bien?
Mme Léger
(Nathalie) : En fait, oui,
je comprends votre point de vue à ce sujet-là, sauf que moi, je vous dirais
qu'il faut aller au-delà du seul libellé des
conclusions de la décision de la Cour suprême du Canada. La cour est venue
nous dire spécifiquement que, premièrement, qu'elle était d'accord avec les
décisions des deux autres juges ou des deux autres
niveaux de cour qui ont rendu cette décision-là et donc que, clairement, ces
dispositions-là sont déclarées invalides par
un tribunal depuis 2014. Donc, on sait depuis au moins ce moment-là que c'est
invalide, et, en plus, la Cour suprême
nous a rappelé que ces dispositions-là créaient une discrimination systémique
pour les femmes. Ne pas permettre l'application
de l'essence, de l'esprit de la décision en reconnaissant pleinement le droit à
la rétroactivité pour les plaintes qui
sont encore pendantes, pour nous, perpétue cette discrimination-là. Oui, la
cour a donné un sursis d'un an au législateur pour réécrire sa loi. Ça ne veut pas dire que le législateur ne devrait
pas prendre la décision de faire en sorte que cette décision-là soit applicable
à l'ensemble des travailleuses et des personnes salariées du Québec.
M.
Boulet : On se comprend bien. Ce n'est pas ce que le jugement de la
Cour suprême du Canada nous impose de
faire, mais, si on voulait respecter les objectifs fondamentaux, il faudrait
aller couvrir les exercices de maintien qui auraient dû être faits en 2010 et en 2015, conformément à ce
principe-là. Ce n'est cependant pas ce que la Cour suprême nous demande
de faire.
Quand vous
parlez du regroupement des plaintes, vous mentionniez, il n'y a aucun critère,
mais on précise bien que c'est par catégorie d'emploi puis c'est... tu sais,
c'est pour favoriser le règlement des plaintes, qu'on puisse... puis ça,
c'est possible suivant le Code de procédure
civile du Québec puis suivant plusieurs lois statutaires, de regrouper des plaintes
qui ont le même objet. Ici, on réfère à la
même catégorie d'emploi. Je pense que c'est sain, bénéfique, et on vise quand
même l'efficacité administrative dans la
gestion des plaintes. Parce qu'il y a 14 000 plaintes pendantes,
actuellement, ça fait que c'est quand
même assez imposant. Si on veut se donner un processus qui est efficient, il
faut aller vers un regroupement des plaintes, c'est notre compréhension
à nous.
Mme
Harnois (Karen) : Ce n'est pas tant sur le regroupement des
plaintes... qui est problématique, c'est le fait que chaque association accréditée qui est mandatée par les personnes
plaignantes ne puisse pas être en mesure de se situer par rapport à une
éventuelle entente ou règlement, ne soit pas en mesure de dire : O.K.,
cette conciliation-là amène un résultat
qui répond au mandat qu'elle a ou qui ne répond pas. C'est cet enjeu-là qui est
problématique pour nous. Parce que
vous dites dans votre projet de loi que vous désirez, oui, regrouper certaines plaintes par catégorie,
mais qu'il est possible de s'entendre
si advenant qu'il y ait une organisation majoritaire
qui s'entend avec l'employeur. Donc, ça exclut certaines associations
accréditées.
Une voix : ...
M. Boulet : Oui. Merci. Est-ce que vous avez aussi,
j'imagine, pris connaissance de la possibilité, pour un salarié pris individuellement ou une
salariée prise individuellement, de se retirer d'une entente? Si, par exemple, il y a une ou plusieurs associations accréditées qui conviennent de régler d'une
certaine façon, il y a quand
même la possibilité, pour une personne... Parce qu'une
plainte en matière d'équité
salariale, elle est fondamentalement de nature individuelle et non collective. Et donc on permet quand même à la
personne de, ce qu'on appelait, nous, d'opter out, de se sortir de cette
entente-là et de poursuivre sa plainte.
Mme Léger
(Nathalie) : En fait, pour
vous dire, là-dessus, ça, c'est un... On vous réfère à notre recommandation
n° 13, qui est tout simplement d'ajouter à l'article 103.0.2
qui est ajouté au projet de loi, là, les mots «ou une association accréditée». Parce que, même si on reconnaît
qu'effectivement ce sont des plaintes individuelles, il faut bien comprendre
que, surtout pour les grandes, très grandes
entreprises ou pour le secteur parapublic, l'entreprise parapublique, les
plaintes sont nécessairement regroupées et gérées par l'organisation
syndicale qui les représente. Ce n'est pas chacune des personnes, et on ne vous
le souhaite pas, bien honnêtement, qui va négocier sa plainte individuellement.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Pardon.
Mme Léger (Nathalie) : Donc,
d'avoir un retrait...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Pardon. Alors, le temps est écoulé.
Merci pour cet échange. Je cède maintenant la parole au député de
l'opposition officielle. Vous disposez de 11 minutes.
M.
Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être ici aujourd'hui. Merci. On feuille, depuis tout
à l'heure, votre mémoire
puis, écoutez, on le regarde avec intérêt. Je remarque justement
que, comme vous l'avez dit tantôt, vous représentez 75 % des femmes et puis,
j'ai remarqué aussi, 30 % de jeunes âgés de moins de 35 ans. Donc,
c'est pas mal. Puis là vous avez, je regardais,
350 types d'emplois différents. Ce n'est pas rien ça, là, là. C'est comme...
Pour une équité salariale, ça ne doit être
pas nécessairement évident, j'imagine, parce qu'il doit avoir des emplois qui
se recoupent ou... On met à barre où à ce moment-là?
Moi, j'en
viens avec le processus de participation. Donc, je m'en viens, dans le fond,
avec votre recommandation n° 1, la participation des personnes
salariées et des associations accréditées. J'ai bien entendu avec la question
du ministre là-dessus, mais j'aimerais ça
vous entendre encore plus loin, dans le sens que... Puis dites-moi si je suis
dans le champ, mais un comité... Un
comité qui serait d'une base permanente, qui serait pour essayer vraiment
d'enrayer... Puisque, vous l'avez dit
tantôt, là, la bataille que les femmes ont faite dans ce domaine-là, c'est
comme... à un moment donné, c'est assez, là, tu sais, à un moment donné, là, ça fait 22 ans, vous l'avez
dit. Mais ça fait plus longtemps que 22 ans, mais ça, tu sais, ça
fait longtemps. Mais, à un moment donné, pour en arriver à une facilité pour
trouver le juste milieu là-dedans, vous en pensez quoi, vous, d'un comité permanent?
Et... Ah! je vais vous laisser répondre là-dessus, puis j'en ai une autre
après, là-dessus.
Mme Léger (Nathalie) : C'est bon. Alors, bien sûr, on ne serait pas
contre un comité permanent, là. C'est quelque chose qui peut être envisagé au même titre que... Et j'entendais des
commentaires tantôt qui étaient faits sur le coût d'une rétroactivité au même
titre que les ajustements salariaux peuvent toujours être faits en cours de
maintien, hein? Ça, c'est une réalité
aussi. Bien entendu, si on avait un comité permanent qui serait chargé de ça,
ça permettrait d'en arriver à un consensus plus rapidement,
probablement.
M.
Rousselle : Est-ce qu'on peut le faire, ce comité-là, partout? Parce
que ça doit être plus difficile des fois. Un exemple, là, je regarde une petite municipalité que tu as le directeur
général. Vous savez, ils ne sont pas nombreux, donc, peu de ressources
pour faire ce dossier-là. Vous, vous le voyez comment, cette approche-là?
Mme Léger
(Nathalie) : Bien, en fait, dans la pratique, ces éléments-là vont
devoir souvent être négociés ou adaptés. Tu sais, les comités d'équité
salariale, ils vont fonctionner avec les gens qu'on a en place puis avec la
façon dont ils peuvent fonctionner. À
l'heure actuelle, on n'a pas de modèle sur les comités de maintien. Donc, c'est
un petit peu difficile de vous
répondre. Les comités d'équité salariale sont obligatoires seulement à l'heure
actuelle malheureusement pour les
entreprises de plus de 100 salariés. Ils peuvent être mis en place pour
les entreprises de 50 à 100. Moi, je ne suis pas sur le terrain. En matière
d'équité salariale, là, je m'occupe du côté juridique. Donc, malheureusement,
je ne suis pas capable de répondre à votre question.
• (16 h 50) •
M.
Rousselle : L'évaluation — tantôt, j'ai écouté d'autres groupes qui ont passé avant vous — l'évaluation
du maintien, il y en a qui... même,
j'ai entendu parler que plus que cinq ans, ce serait comme correct. Vous, vous
le voyez comment? Parce
qu'actuellement on parle de cinq ans, mais il y a un, autre groupe, aussi, qui
nous parlait de trois ans. Donc, j'aimerais que vous élaboriez un petit
peu là-dessus.
Mme
Harnois (Karen) : En fait,
on l'a dit tout à l'heure, dans le fond, nous, on souhaite voir cette
périodicité diminuée à trois ans, pour justement faciliter l'identification des événements qui surviennent durant cette périodicité-là
et aussi diminuer le fardeau financier des
employeurs, justement, pour prévoir le correctif, payer l'ajustement
salarial... dû aux événements discriminatoires.
M.
Rousselle : On parlait de forfaitaire, de plusieurs versements. Vous,
on voit une iniquité, à un moment donné, qui... on va prendre cinq ans,
que ça a perduré. Vous, vous le voyez comment, ce remboursement-là, ce
règlement d'iniquité, là? Je sais que la loi
dit : Dès le moment qu'on s'aperçoit de l'iniquité, mais, à un moment
donné, il faut y aller sur le côté salarial. Puis je vous entendais tantôt
aussi que ça va toucher aussi les... tout qu'est-ce qui est fonds de pension,
et tout ça, c'est affecté aussi. Voulez-vous encore revenir là-dessus?
Mme Éthier (Sonia) : Moi, je peux peut-être répondre sur la question
de la notion du forfaitaire. Quand on parle de forfaitaire, c'est un montant qui n'est pas assujetti au régime de
retraite, par exemple. Et, tout à l'heure, Nathalie parlait aussi de toute la question des lois sociales, là.
Donc, ça pose problème quand on utilise le forfaitaire, parce que c'est un
droit que les femmes ont d'avoir ce montant
rétroactif, et il faut absolument que ça soit versé sous forme salariale, parce
que, pour ramener vraiment, là, le montant
auquel les femmes auront droit ou avaient droit, il ne faut pas que ce soit
sous forme forfaitaire. Parce que c'est inéquitable, là. On ne répond
pas, à ce moment-là, aux objectifs de la loi.
Pour
le fait de la périodicité de rembourser, pour nous, ce ne serait pas le
forfaitaire, mais vraiment sous forme salariale. Bien, je pense qu'à
quelque part il ne faut pas que ça soit laissé à la bonne volonté de
l'entreprise ou des entreprises, parce qu'à
un moment donné c'est un droit, là. C'est un droit que les travailleuses ont,
et perpétuer ça dans le temps, là, ça serait inéquitable.
M.
Rousselle : Dans votre mémoire, vous parlez méthode d'évaluation du
maintien de l'équité salariale, à la page 5 de votre mémoire. Vous mentionnez justement, «actuellement, la loi
n'impose aucune modalité particulière pour procéder à la réalisation de l'évaluation du maintien de
l'équité salariale». Vous proposez quoi? Tu sais, est-ce que vous avez pensé
à quelque chose? Est-ce que vous avez... sûrement réfléchi à quelque chose, là,
je suis pas mal sûr.
Mme
Harnois (Karen) : Bien, en fait, on s'inspire, ici, de la méthode qui
est... du processus qui est prévu à la base
même de l'exercice d'équité salariale, c'est-à-dire les quatre étapes :
identifier les catégories; leur prédominance; évaluer les événements discriminatoires ou autres événements qui
surviennent durant cette périodicité-là; et estimer les écarts salariaux. Donc, prévoir vraiment les
quatre étapes qui sont prévues à la base même d'un exercice d'équité salariale.
M.
Rousselle : J'en viens à la page 11 maintenant, la mécanique de
traitement des plaintes, la conciliation. Vous amenez l'article 14, l'article 15, en tout cas, plusieurs
articles que vous amenez là-dedans. Je voudrais vous entendre, parce que là, ça... que vous dites «finalement, il
semble primordial de souligner qu'une personne salariée plaignante peut être
en mesure de faire un choix éclairé» quant à la possibilité de prévue à
l'article 103.0.2.
Mme Harnois (Karen) : En fait, la
personne salariée qui a une plainte, oui, le projet de loi prévoit qu'elle peut
adhérer ou non. Maintenant, ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est que cette
personne salariée doit être bien informée du règlement, que ce soit en conciliation ou autre, et on
souhaite justement apporter des précisions dans notre
mémoire, qui est — là,
je cherche notre recommandation — 12, si je ne me trompe pas.
Une voix : ...
Mme
Harnois (Karen) : On n'a pas de recommandation spécifique, mais, dans
le fond, dans notre mémoire, on spécifie, pardon, qu'une personne
salariée doit être bien informée de la part de la commission pour vraiment bien
comprendre l'enjeu et le résultat de cette
entente-là, et que cette personne-là peut, dans un formulaire, identifier
qu'elle est d'accord ou qu'elle n'est pas d'accord avec le règlement,
et, si elle n'est pas d'accord, dans le fond, un processus d'enquête a lieu par
la commission.
M.
Rousselle : Et il y a un autre groupe qui est venu voir, là, tantôt,
qui parlait de garder les informations pour six ans parce qu'à un moment donné il faut se référer, il faut... Vous,
six ans, est-ce que vous trouvez ça correct? Est-ce que vous pensez qu'on
devrait ça plus longtemps? Parce qu'à un moment donné on peut garder, dans
l'avenir, pour le futur, je veux dire, une référence quelconque, là.
Mme Léger
(Nathalie) : Oui, on est
tout à fait d'accord à ce que ça soit prolongé à six ans. Je pense qu'on l'a
mentionné dans notre mémoire, mais, comme on n'en a pas fait une recommandation
formelle, vous serez d'accord avec nous que
tout ça a été assez rapide, et donc nous avons pondu notre mémoire rapidement.
Mais, effectivement, c'est sûr que le
plus longtemps on est en mesure de conserver les informations qui sont
pertinentes à l'évaluation de la qualité des travaux qui ont été faits,
le mieux c'est pour l'ensemble des gens.
M.
Rousselle : Vous avez raison. C'est qu'en peu de temps vous avez fait
un travail incroyable, puis on vous en remercie
parce que, justement, on ne vous a pas laissé vraiment le... peut-être tout le
temps nécessaire que ça vous aurait pris.
Mais je
reviens toujours aux six ans, vous dites que, six ans, ça serait acceptable.
Mais, quelque part, dans ma tête, c'est que pourquoi ne pas garder ça plus
longtemps? Je veux dire, il y a quoi de problématique là-dedans? Est-ce
qu'il y a un problème? À un moment donné, de l'information personnelle peut
sortir ou voyez-vous quelque chose là-dessus?
Mme Léger
(Nathalie) : Non. En fait,
il y a deux éléments. C'est sûr qu'il faut garder l'information au moins
quand il y a une plainte, là, qui touche à cette information-là. Donc, ça, ça
n'a pas nécessairement... on n'est pas capable de vous mettre une date
là-dessus parce que ça va dépendre du délai de traitement des plaintes.
Ensuite, le
six ans, bien, c'est que ça nous permet d'avoir nécessairement un prochain
événement... un prochain exercice de
maintien. Habituellement, ce n'est pas un problème, là, l'accès à
l'information, vous le savez comme moi, qu'il y a des lois qui régissent
ça, et, si jamais il y a des brèches de confidentialité, on va les traiter par
ce moyen-là.
M. Rousselle : Merci beaucoup.
Merci.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci pour cet échange. Je cède
maintenant la parole au député de René-Lévesque. Je souligne que
2 min 45 s est vite passé.
M. Ouellet : Merci beaucoup. Donc, tout comme les gens de
l'alliance, personnel professionnel et technique, donc l'APTS, et le Conseil d'intervention pour l'accès
aux femmes au travail, vous vous inscrivez aussi dans la même lignée, à savoir que les indemnités, pour vous, ne sont pas
des ajustements salariaux et qui, malheureusement, si on les applique tel que
prévu dans le projet de loi en question, les gens, les femmes, en bonne partie,
seraient victimes, encore une fois, d'iniquité salariale. Donc, ça, on
est d'accord avec vous et on va le faire dire par plusieurs autres groupes tout
à l'heure. J'ai essayé de le faire dire par
la fédération d'entreprise indépendante, mais ils ne l'avaient pas vu. Donc, on
va essayer de le faire dire par la
Fédération des chambres de commerce tout à l'heure, si on a même la même
interprétation de ce côté-là.
Cela étant
dit, on a parlé de beaucoup choses aujourd'hui, mais j'aimerais vous entendre
sur votre recommandation 19. Vous nous demandez de biffer les
articles 24 et 27 du projet de loi. Expliquez-moi pourquoi vous voyez que
ces nouvelles dispositions là ne sont pas
adéquates dans le projet de loi en question et expliquez-nous plutôt la
contrepartie que vous voudriez voir apparaître dans ce cas-là.
Mme Léger
(Nathalie) : En fait, ces
articles-là donnent un délai supplémentaire de conformité à la loi ou aux
entreprises qui ont à réaliser des exercices de maintien dans un délai
relativement rapproché, là, de l'entrée en vigueur prochaine de ce projet de loi là. Nous, on prend
pour acquis que les entreprises ont eu bien assez de temps pour savoir que ces dispositions-là étaient incompatibles avec
la charte, donc inconstitutionnelles, et qu'ils n'ont pas besoin d'un
12 mois supplémentaires à l'article 24. Et je ne me rappelle pas
du délai exact, là, bon. À l'article 27, c'est le même effet, là, mais je ne
retrouve pas le délai exact de l'article 27. Mais l'objectif, en arrière
de cette recommandation-là, est tout simplement
de faire en sorte qu'on cesse de donner des délais supplémentaires aux
employeurs et qu'on leur envoie le message clairement que c'est le temps
maintenant de respecter l'équité salariale puis de prendre les mesures qui sont
nécessaires pour ce faire.
• (17 heures) •
M. Ouellet : Donc, selon vous,
pas de délai supplémentaire, on applique tel qu'il est prévu.
Mme Léger
(Nathalie) : Exact.
M. Ouellet : Et vous avez entendu le ministre tout à l'heure, on a un projet de loi
qui vient colliger ce que la cour nous a dit qui n'était pas correct, mais
qu'il y aurait peut-être d'autres choses à faire à l'intérieur de l'équité
salariale. Je ne veux pas reprendre
les paroles du ministre, mais je ne pense pas que ça va être dans projet de loi
là qu'on va l'adresser. Est-ce que c'est ce que vous avez compris?
Mme Léger
(Nathalie) : C'est ce qu'on a compris.
M. Ouellet :
Je présume que vous êtes insatisfaites.
Mme Léger
(Nathalie) : On va voir ce qui va être proposé.
M. Ouellet :
D'accord.
Une voix :
Bonne réponse.
M. Ouellet :
On va y travailler.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci pour cet échange avec le temps respecté. Je cède maintenant
la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve, 2 min 45 s.
M.
Leduc : Merci, Mme la Présidente. Merci d'être ici. Désolé d'avoir bougé, je
devais aller faire des présentations sur le projet de loi n° 1,
c'est fait.
Félicitations pour le mémoire, écrit dans des
circonstances pas idéales, mais très dense, très fouillé! Et je suis certain
qu'il va nourrir nos discussions dans l'adoption d'article par article qui
suivra les audiences.
Vous
étiez présentes, je pense, tantôt, quand on a abordé, avec Mme Hébert de la FCEI, la
question des plaintes frivoles. J'étais curieux de savoir si, dans votre expérience, vous en
avez entendu parler, est-ce qu'il y
en a beaucoup. Est-ce que vous
pensez que c'est un problème qui mériterait une intervention législative ou
est-ce qu'on chasse des chimères un peu, là?
Mme
Harnois (Karen) : Bien, en
fait, on pense qu'il n'y en a pas nécessairement, de plainte frivole. Dans le projet de
loi, on souhaite justement que la commission soit en appui pour la rédaction
des plaintes et prévoir un sommaire de l'enjeu de la plainte. Pour les femmes
qui prennent connaissance des affichages, oui, le projet de loi soumet des
ajouts d'information, mais, quand
même, les femmes peuvent ne pas tout à fait comprendre c'est quoi, la démarche
qui a été réalisée par l'employeur,
ça reste des sommaires, ça reste des résumés comme information, et les plaintes
qu'elles peuvent déposer peuvent ne pas être complètes, mais elles ne
sont pas frivoles.
Dans
des cas où les plaintes sont incomplètes, oui, la commission, elle a un souci
de soutien et d'information, mais, dans
le fond, elles sont... mais les plaintes frivoles, il y a une base, il y a une
base de questionnement, il y a une base de : Est-ce que je suis en mesure de me positionner
sur : Est-ce qu'il y a une discrimination salariale dans mon emploi et
est-ce qu'elle est réellement
corrigée? Pour les statistiques, la commission serait bien placée pour vous
dire quelles sont les plaintes non fondées.
Mme
Éthier (Sonia) : Et non fondées ne veut pas dire frivoles.
M.
Leduc : Tout à fait, on s'entend là-dessus. À la page 8 de votre mémoire au deuxième
paragraphe, je vais citer rapidement,
vous dites : «Selon nous, cette disposition va à l'encontre de la décision
de la Cour suprême puisque le fait de
ne pas rectifier le salaire par le biais d'un ajustement salarial, mais de
procéder plutôt en donnant une somme forfaitaire, perpétue la
discrimination salariale systémique, ce qui va à l'encontre de l'objet de la
loi.»
Est-ce que je vais
trop loin en présupposant qu'advenant que l'adoption du projet de loi soit
telle quelle, donc contienne cette
disposition-là, une ou des organisations pourraient initier de nouveau un
processus de contestation judiciaire qui
pourrait nous ramener, dans 10 ans, à une nouvelle obligation de réviser
la loi, comme on est en train de le faire en ce moment?
Mme
Éthier (Sonia) : C'est possible.
M. Leduc :
Ce n'est peut-être pas souhaitable, mais c'est possible.
Mme
Éthier (Sonia) : Exactement. On pense que le ministre nous aura
entendues. Merci.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : C'est beau. C'est beau. Le temps est déjà
écoulé. Écoutez, je vous remercie toutes et tous. Je remercie
particulièrement mesdames de la Centrale des syndicats du Québec.
Nous suspendons
quelques instants, le temps de donner au prochain groupe le temps de
s'installer. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 4)
(Reprise à 17 h 8)
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Nous reprenons les travaux. Je souhaite la bienvenue à la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour faire votre exposé et ensuite suivra une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite également à vous présenter
avant de commencer votre exposé.
Fédération
des chambres de commerce du Québec (FCCQ)
M.
Forget (Stéphane) : Merci, Mme la Présidente. Stéphane Forget, P.D.G. de la Fédération des chambres de commerce du
Québec. Je suis accompagné de deux, je dirais, spécialistes de la question. Tout
d'abord, mon collègue Alexandre Gagnon,
directeur, Main-d'oeuvre et Santé et sécurité au travail à la fédération,
et de Michel Turner qui est représentant,
Main-d'oeuvre au C.A. de la fédération et qui, dans son
quotidien, est directeur principal, Développement
organisationnel et Gestion de talents chez Metro. Alors donc, deux personnes
qui sont habituées de travailler dans les dossiers qui touchent l'équité
salariale.
Alors, peut-être, brièvement, tout d'abord, vous
saluer, pour un certain nombre d'entre vous qui sont arrivés à l'automne dernier à l'Assemblée nationale, alors
ça nous fait plaisir de vous retrouver, et vous dire brièvement que la fédération, c'est à la fois, donc, une fédération qui fédère et réunit l'ensemble
des chambres de commerce au Québec,
et nous sommes aussi la chambre provinciale,
donc plus de 1 100 entreprises directement membres de la fédération,
ce qui fait que, globalement, on représente tout près de
50 000 entreprises au Québec.
Aussi, dans
mes responsabilités de P.D.G. de la fédération comme une organisation qui
représente les employeurs, je siège
au conseil d'administration de la CNESST, de la Commission des partenaires du
marché du travail et du Comité consultatif travail et main-d'oeuvre.
Voilà.
Donc, la fédération est un partenaire de la
première heure quant à l'équité salariale, ayant notamment fait la promotion de cette loi auprès des membres de son
réseau, en ayant participé très activement aux travaux ayant mené aux ajustements à cette dernière en 2009 et en ayant
deux représentantes siégeant au comité consultatif des partenaires. La FCCQ croit fermement au principe de la Loi sur
l'équité salariale et considère encore aujourd'hui qu'elle est essentielle
à une plus grande reconnaissance de l'apport important des femmes au marché du
travail québécois.
• (17 h 10) •
Les
entreprises membres de la fédération
et du réseau des chambres locales recrutent de nombreux employés à travers le Québec. En tant qu'employeurs, ces
entreprises nous expriment cependant régulièrement
leurs préoccupations quant à la lourdeur et la difficulté d'effectuer
des travaux entourant l'équité salariale.
Il est utile, dans un premier temps, de rappeler
le contexte dans lequel ce projet est présenté. En effet, la Cour suprême a rendu un jugement le 10 mai 2018 dans
lequel elle maintenait un jugement rendu précédemment par la Cour d'appel du Québec à l'effet d'invalider trois des
articles faisant partie du chapitre de la Loi sur l'équité salariale traitant
de l'obligation de maintien de l'équité
salariale, ce chapitre ayant été introduit lors de l'adoption, par l'Assemblée
nationale en 2009, de la Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale.
Je vous dis
ça parce qu'il importe de se rappeler que ce jugement de la Cour suprême du
Canada, à l'instar de celui précédemment
rendu par la Cour d'appel du Québec, rejetait les demandes en justice soumises
par différentes organisations syndicales,
qui cherchaient en réalité à ce que l'ensemble des dispositions contenues dans
le chapitre traitant du maintien de l'équité salariale soient invalidées. C'est
donc dire que les tribunaux ont reconnu la validité des dispositions,
prévoyant le caractère périodique du
processus d'évaluation du maintien de l'équité salariale, soit à tous les cinq
ans, ainsi que plusieurs modalités faisant partie de ce processus.
Aux yeux des
organisations syndicales impliquées, ces dispositions ne permettaient pas une
participation suffisante des salariés
au processus relatif au maintien de l'équité salariale. La Cour suprême a
rejeté cette prétention et a refusé, en
conséquence, d'invalider les autres dispositions du chapitre traitant de
l'évaluation du maintien de l'équité salariale, en concluant qu'elles
n'avaient aucun effet discriminatoire.
Lors des
récentes consultations menées par le ministère du Travail, la fédération a fait
plusieurs recommandations afin de simplifier l'application de la loi sans pour
autant — et c'est
important de le rappeler — porter atteinte à l'atteinte des résultats. Et ça, c'est important de le souligner. Nous avons
notamment proposé de préciser qu'un exercice de maintien devait être fait au
maximum aux cinq ans, permettant ainsi de décaler les périodes où les
employeurs doivent effectuer
l'évaluation de l'équité salariale au sein de leur entreprise. Ce petit
ajustement permettrait d'améliorer le processus, qui exige actuellement
que tout soit fait en même temps, pour tous et dans un court délai.
Nous
reconnaissons l'importance d'avoir davantage, aussi, de transparence dans les
affichages. Nous sommes d'ailleurs favorables à l'obligation de joindre
à l'affichage l'ensemble des événements ayant pu causer des écarts salariaux
depuis le dernier exercice de maintien. Cette nouvelle obligation aura pour
effet de mieux informer les travailleurs et leurs représentants, même si elle
soulève certaines préoccupations quant à certaines informations
confidentielles, notamment le salaire personnel de nouveaux employés. Et il
faudra être vigilant à cet égard-là.
Nous croyons
que ces nouvelles obligations de tenue de registres et d'affichage sont
suffisantes pour assurer aux travailleurs
une participation adéquate sans obliger un mécanisme de participation des
travailleurs qui serait plus exigeant.
Nous
reconnaissons la volonté exprimée par le ministre de faciliter le règlement de
litiges, le cas échéant. Pour les
travailleurs, cela se révèle par davantage d'informations sur les droits de
contestation et un support de la CNESST lors du dépôt d'une plainte. Pour
l'employeur, il s'agit de balises quant au pouvoir d'inspectorat de la
commission, l'utilisation d'un formulaire réglementaire et la
possibilité de regrouper certaines plaintes similaires. Il s'agit de changements désirés, mais
certains ajustements devraient être amenés, notamment au droit de retrait d'une
entente par un travailleur suite à un
regroupement de plaintes et la création d'un processus d'évaluation
préliminaire des plaintes par la CNESST.
Nous désirons
rappeler pour le bénéfice de tous que la Loi sur l'équité salariale, adoptée à
l'origine en 1996, est le résultat
d'un consensus social et d'un équilibre qui ont pu se réaliser grâce à
d'importants exercices de discussion et de consultation auprès des organisations syndicales, des organisations de
défense des droits des femmes, des associations d'entreprises et de
différents organismes à caractère institutionnel.
Le projet de loi n° 10 va, bien sûr, dans
le sens des correctifs exigés par la Cour suprême à propos de la nécessité que les écarts salariaux fassent l'objet
d'ajustements qui s'appliquent de manière rétroactive, soit à la date d'un
événement les ayant occasionnés.
Les remarques que nous avons présentées visent
toutefois à rappeler que certaines modifications ne nous apparaissent pas appropriées compte tenu du récent jugement, certaines d'entre elles étant même de nature,
possiblement, à nuire à l'idéal que
toutes les parties prenantes doivent rechercher, soit évidemment
le maintien de l'équité salariale de manière
ordonnée et rigoureuse, en reconnaissant des droits de recours tout en évitant,
par ailleurs, une judiciarisation excessive du processus de maintien de
l'équité salariale.
Les
changements effectués à loi en 2009 étaient nécessaires, considérant, de notre point de vue, la lourdeur de l'exercice de
l'équité salariale pour les employeurs. Certains de ces changements ont été
invalidés par la Cour suprême. Il
n'en demeure pas moins qu'il faut éviter de rendre à nouveau excessivement
difficile l'application de la loi pour les PME québécoises. Et je suis certain que vous avez tous à l'esprit cette problématique lorsque vous discutez d'équité
salariale et lorsque vous aurez vos délibérations
éventuelles. Parce qu'on le sent, il ne faut jamais l'oublier, il y a,
au Québec, de grandes entreprises qui ont des ressources,
des moyens, il y a de très nombreuses petites et très petites entreprises
qu'il faut considérer lorsque nous appliquons des règles plus strictes,
que ce soit en équité salariale ou autre. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Merci, Mme la Présidente.
Merci à la Fédération des chambres de commerce pour vos propos, le temps que
vous avez consacré à la préparation de votre rapport et de vos recommandations.
Je vais
commencer par une question peut-être un peu plus dure. M. Forget, vous dites, vous
étiez d'accord avec les amendements
qui ont été faits en 2009. Est-ce qu'on pourrait conclure que vous êtes plus ou
moins confortable avec les décisions
de la Cour supérieure, Cour d'appel et Cour suprême, dans la mesure où ça
alourdit le processus de maintien d'équité salariale dans les
PME?
M.
Forget (Stéphane) : Non, ce
n'est pas ce que nous disons, ce que nous disons, c'est : Compte tenu de la décision de la Cour
suprême, assurons-nous que les modifications que vous apportez au projet de loi n° 10 ne viennent justement pas alourdir le processus
à venir. C'est là qu'est notre préoccupation, ce n'est pas de contester. Au contraire, même
que, comme je le mentionnais, la Cour
suprême est venue invalider un certain nombre d'articles, mais a aussi, par la
même occasion, confirmé un certain
nombre d'éléments de la révision, de la réforme de 2009. Donc, ce n'est pas ça,
l'objet, c'est plutôt de se préoccuper d'un alourdissement potentiel
avec certains ajouts qui sont dans le présent projet de loi.
M. Boulet : Et j'aimerais ça que
vous nous donniez des précisions sur... bon, vous dites : Il me semble que
le registre et la date de l'événement
seraient suffisants. Le processus de participation, notamment, qui s'applique, ne
vous apparaît pas nécessairement
pertinent, dans la mesure où c'est une exigence qui est peut-être
un peu trop imposante pour les PME. Est-ce que vous pouvez nous donner
un peu plus de détails là-dessus?
M. Forget (Stéphane) :
Oui, écoutez... M. Turner, si vous le permettez, M. le ministre.
M. Boulet : Ça fait plaisir.
M.
Turner (Michel) : Je suis
plus un praticien qu'un avocat, donc pardonnez-moi si je ne cite pas les
numéros d'articles. J'ai eu à
assister, dans le cadre de mon travail, plusieurs moyennes entreprises,
petites entreprises, dans ça. Le simple fait d'afficher les résultats, d'afficher les processus — c'est
très technique, hein? — a suscité des questions, des interrogations et, dans certains cas, des
contestations qui ont été, par la suite, non fondées. Si on fait le même
exercice avant de débuter le processus d'équité salariale, on a plus
l'impression qu'on va multiplier par deux toutes ces interventions-là. C'est-à-dire qu'avant même que l'employeur se soit
commis, avant même que l'employeur ait travaillé, que ce soit en comité, que ce soit de manière
conjointe, il va ouvrir un débat. Il va ensuite faire l'exercice; après
l'exercice, il va y avoir un autre
débat. Vous avez vu notre position : dans la mesure où on n'a pas
d'argument pour s'opposer à quelque chose
puis qu'on dit : C'est une contrainte logique qui poursuit le but de la
loi, on l'a accepté sans même poser de question.
• (17 h 20) •
Par contre,
quand certaines nous apparaissent à être énormément lourdes en termes
administratifs et ne pas avoir beaucoup
de valeur ajoutée sur l'atteinte de l'objectif de la loi, c'est là où on a
concentré nos efforts, et ça, c'en est une, parce qu'on a l'impression que
l'effort additionnel demandé aux employeurs ne permettra pas d'atteindre mieux
ou plus les objectifs de la Loi sur l'équité salariale.
M.
Boulet : D'accord. Qu'est-ce que vous pensez du seuil
d'assujettissement à la loi, quand on dit... Évidemment, ça ne vise pas les entreprises de juridiction
fédérale, les travailleurs autonomes, et ça vise simplement les entreprises où
il y a 10 salariés et plus. Est-ce que vous êtes confortables avec ce
seuil-là de 10 salariés?
M.
Turner (Michel) : Je vous
dirais, pour l'avoir vécu dans des entreprises de cette taille : Plus
l'entreprise est petite, plus les
résultats sont aléatoires. Vous savez, quand on compare des emplois, trouver
des emplois équivalents dans une
petite entreprise, c'est très difficile. Plus l'entreprise est grosse, plus il
est facile de trouver des emplois équivalents. Quand on parle de 10 employés, là, dans cinq emplois différents, il
va être assez difficile de comparer. Je vous dirais : Au moins doubler ce seuil-là, même si on n'en fait
pas... on n'en a pas fait un cheval de bataille, rendrait ça beaucoup
plus acceptable pour beaucoup de petites entreprises. Mais là je sors du
mémoire qui vous a été déposé.
M.
Boulet : Et vous êtes conscients que, dans notre projet de loi, on...
Parce que, pour l'exercice initial d'équité salariale, dans l'entreprise où il n'y avait pas de comparateur
masculin, on référait à un règlement qui a été adopté en vertu de la Loi sur l'équité salariale qui réfère à des
comparateurs masculins par ailleurs sur le marché du travail. Mais ça ne
s'appliquait pas pour les exercices de maintien d'équité salariale, et on a
corrigé cette lacune-là en disant que ce règlement-là,
il s'applique aussi dans les entreprises où il n'y a pas de comparateur
masculin autant lors de l'exercice initial que lors de l'exercice visant
à maintenir l'équité salariale.
M. Turner (Michel) :
Si j'ai à me prononcer à froid, O.K. — je n'ai pas analysé cette
disposition-là — ça
ne m'apparaît pas une barrière majeure, ou
un obstacle majeur, ou une entrave administrative majeure. Et donc je vais
revenir à notre raisonnement : dans ce sens-là, si ça contribue à
l'atteinte des objectifs, on va souscrire.
M.
Boulet : D'accord. Et vous disiez, M. Forget, bon : La commission
pourrait regrouper des plaintes, par exemple, si les plaintes concernent
une même catégorie d'emplois, même s'il y a plusieurs associations accréditées,
et ce serait pertinent particulièrement dans le domaine de la santé, services
sociaux et éducation, où la plupart des plaintes pendantes sont. Vous avez fait référence au droit de retrait, et je n'ai
pas compris bien le commentaire que vous faisiez eu égard au droit de
retrait, qui s'applique à un salarié ou une salariée prise individuellement. M. Gagnon.
M. Gagnon (Alexandre) :
Oui. Il y a un processus, puis vous êtes à même de le savoir avec votre passé,
qui ressemble beaucoup à ce que vous
proposez, qui est notamment au niveau de la gestion des griefs en milieu de
travail. Donc, on gère les litiges et
on les regroupe ensemble pour les traiter du même coup. Actuellement, dans le
projet de loi, ce qui est proposé, c'est de dire : Oui, on va
mettre ça en place, on va regrouper ça, on va permettre à l'employeur et les associations accréditées, les syndicats, de... pas
de négocier, mais de faire de la conciliation ensemble pour voir un terrain
d'entente, et ça, c'est une bonne avenue, on
vous encourage à aller dans cette direction-là. Le droit de retrait, cependant,
ce que ça vient faire, c'est de dire :
Si jamais il y a une personne, une travailleuse, un travailleur dans
l'entreprise qui décide poursuivre sa
plainte, à toutes fins pratiques, il faut recommencer le processus, parce que
l'accord qui est intervenu ne tiendra
pas. Ce qu'on vous dit... utiliser un processus similaire à ce qu'il y a dans
les processus de grief et que, si jamais quelqu'un n'est pas nécessairement satisfait d'une entente intervenue
entre le syndicat et l'employeur, qu'il puisse avoir recours à l'article 47.2 du Code du travail et donc de... le devoir de juste représentation,
là, de l'association syndicale.
M. Boulet : Donc, il peut faire une
plainte, par exemple. C'est intéressant, le parallèle que vous faites avec... Mais là on est dans un domaine de rapports
collectifs où il y a un syndicat, puis, dans un contexte de renvoi, si
le syndicat fait preuve de mauvaise
foi, le salarié pourrait faire une plainte en vertu de 47.2 pour
contester la manière dont ça s'est fait et éventuellement pouvoir
bénéficier de la procédure d'arbitrage.
Là, ce qu'on
prévoit, c'est qu'il pourrait y avoir une entente entre un employeur et une ou plusieurs
associations accréditées
concernant une même catégorie
d'emploi, et il y a une procédure d'entérinement de cet accord-là. Jusque-là,
ça vous va. Mais, ce que vous dites, le
salarié ou la salariée ne devrait pas normalement... Parce que ça alourdit, ça
créerait un nouveau contentieux de
permettre à un ou une salariée de dire : Moi, je ne suis pas d'accord,
puis je continue ma plainte. C'est bien ça?
M. Gagnon (Alexandre) :
C'est exactement ça.
M. Boulet : O.K. Est-ce que, dans
votre esprit, une association accréditée qui fait partie du regroupement
pourrait, elle, décider de se retirer de la procédure d'entérinement en
disant : Je ne suis pas d'accord?
M.
Turner (Michel) : C'est là
où il y a deux cas d'espèce, qui m'apparaissent difficiles à gérer, si on
commence, là. Un, il est prévu que
quelqu'un peut se retirer dans le cadre d'un désaccord avec son association
accréditée. Et maintenant, s'il y a
plusieurs associations accréditées, une association accréditée ou plusieurs
peuvent se retirer. Je me place dans la peau de l'employeur qui négocie avec la première association accréditée,
qui essaie de s'entendre. Est-ce qu'il a vraiment intérêt à s'entendre
ou il est en train de mettre un doigt dans l'engrenage? Ça fait que le premier
cas d'espèce, c'est : beaucoup
d'employeurs vont décider de ne pas essayer de régler, vont préférer attendre
que la commission intervienne pour le faire, ce qui risque d'engorger le
système.
Le deuxième
cas d'espèce. Et là une loi, c'est pour réglementer des comportements qui sont
à l'encontre de certaines règles ou
de certains objectifs de la société. Donc, il y a des cas où il pourrait
arriver qu'une association accréditée décide de faire une
entente, de s'entendre, et qui, après coup, réalise que ah! oui, je pourrais
peut-être obtenir plus encore, et là pourrait
téléguider une intervention où un salarié, une salariée, pas contente de
l'intervention de son syndicat, revient. Et là l'employeur, qui a déjà
fait ses compromis, est obligé de recommencer.
Donc, il y a
un risque. Vous l'avez bien dit, c'est généralement un droit individuel. Le
législateur a choisi de prendre ce
droit individuel là et de le rendre collectif. Il faudrait faire un choix. Les
deux m'apparaissent dangereux en termes d'administration et
d'efficacité.
M.
Boulet : Donc, si une ou plusieurs associations accréditées,
regroupant la majorité des salariés d'une même catégorie d'emploi, est
d'accord, on y va avec la procédure d'entérinement, et on règle le dossier,
puis ça finit là.
M. Turner (Michel) :
Et on le règle.
M. Boulet : Parfait.
M. Turner (Michel) :
Et je crois que, pour le bien du système puis de la loi, c'est souhaitable.
M.
Boulet : Je comprends. J'aimerais ça demander à mon adjoint
parlementaire, Sylvain Lévesque, qui est à ma droite, de poursuivre et
de vous poser des questions ou faire des commentaires. Sylvain?
M.
Lévesque (Chauveau) : Avec
plaisir. Merci beaucoup, M. le ministre. M. Forget, messieurs de la fédération,
très heureux d'être vous.
Je voudrais
peut-être revenir sur une de vos recommandations. C'est la recommandation
d'obliger la CNESST à mettre en place
un processus d'évaluation préliminaire des plaintes avant d'écarter toute
plainte frivole, futile, qui cherche à
réaliser des objectifs autres que ceux inhérents à un processus d'évaluation.
Tout à l'heure, on a débattu... Mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve a
posé des questions, justement, sur le dossier des plaintes frivoles.
J'aimerais un
peu comprendre, là. Votre lecture que vous avez de vos membres, là... Je n'ai
pas les statistiques, la façon que ça
se fait, les cas de figure qui pourraient apparaître, là. Si vous faites cette
recommandation-là, est-ce que vous
avez évalué... Ou est-ce que vous avez des commentaires qui ont été faits sur
des plaintes frivoles qui sont déposées en lien avec l'équité salariale?
M.
Forget (Stéphane) : Juste
avant de permettre à mon collègue... Juste vous dire que c'est le mot d'usage,
mais on n'est pas très chauds avec
le... on ne croit pas qu'il y a de la frivolité, au sens large du terme. Donc,
c'est le mot utilisé, mais disons que ce n'est pas la prétention que
nous avons. Alors, Alexandre, je vous laisse aller.
M. Gagnon (Alexandre) : Oui. Donc, dans nos consultations, ce qu'on nous a dit, c'est que,
souvent, une grande quantité de
plaintes qui se révèlent non fondées, là, ce qui arrive plus tard, c'est que
c'est un manque d'informations, c'est un
manque de connaissances. Donc, dans le projet de loi, on prévoit que la
commission puisse épauler les travailleurs, les travailleuses, lorsqu'ils
déposent une plainte, à bien rédiger, à bien avoir connaissance de leurs droits
et de leurs obligations. Nous, ce qu'on dit,
c'est que, pour les employeurs, de recevoir une plainte comme ça, un, ce n'est
pas évident. Souvent, les employeurs
font affaire avec des consultants, systématiquement, lorsqu'on parle d'équité
salariale. Si on veut simplifier le tout, assurons-nous que, lorsqu'il y
a une plainte qui se rend à eux, il y ait au moins des éléments de droit, là, factuels, qu'à la face même cette
plainte-là ne devrait pas être retirée, ou simplement d'informer la
travailleuse de ses droits,
officiellement, que l'employeur a été de bonne foi dans son exercice, et qu'il
n'y a pas de recours à des plaintes.
Donc, on dit : La commission, lorsqu'elle reçoit
une plainte, non seulement épauler la travailleuse ou le travailleur qui dépose
la plainte, mais également de pouvoir dire : Non, nous ne regarderons pas davantage
la plainte, il n'y a pas d'assise légale à cette plainte-là.
• (17 h 30) •
M.
Lévesque (Chauveau) : Vous
avez l'impression actuellement que le mécanisme d'évaluation des plaintes...
parce que vous proposez quand même de mettre en place un processus
supplémentaire. Vous avez l'impression que le processus
de plainte ne répond pas aux attentes, aux demandes, aux exigences pour arriver
à une pleine satisfaction des gens au Québec.
M.
Forget (Stéphane) : Bien, ce
n'est pas un processus supplémentaire qu'on demande de mettre en place, là. Peut-être,
Michel, expliquer plus simplement.
M.
Turner (Michel) : Oui, actuellement, une plainte va se rendre jusqu'à la conciliation pour être réglée,
alors que, dans certains cas — et
je trouvais, tout à l'heure, les débats très sains, je les ai entendus, je
vais y faire référence — si
la commission avait les outils pour bien informer, dans certains cas, les
travailleurs, travailleuses plaignantes, je suis convaincu que la majorité de ces plaintes-là serait évitée. Et ces
plaintes-là, une fois qu'ils ont été levés, qu'ils se rendent en conciliation, il y a énormément
de ressources qui sont investies. Il n'y a pas un employeur qui va se présenter
devant un conciliateur de la commission
sans être assisté d'experts. Dans certains cas, ils amènent des avocats. Donc,
pour quelque chose
qui aurait pu être filtré par une bonne information de la commission, qui aurait aidé à remplir la plainte, je crois qu'on pourrait éviter beaucoup
de cas. Et, oui, il y en a beaucoup. Vous pourrez référer à la commission,
les cas où, à la face même, les conciliateurs regardent ça et font ouf!
Il y en a.
M. Forget (Stéphane) : On crée des attentes d'un côté, beaucoup
d'inquiétude de l'autre aussi, alors qu'on pourrait éviter cela à bien
des égards.
M.
Lévesque (Chauveau) : ...beaucoup
de la réponse. Peut-être une autre question que j'aurais, c'est :
Quelle est votre lecture sur le mode
de versement des indemnités
forfaitaires? Comment vous voyez ça? Parce qu'on a eu des bons débats autour de la table. On a discuté. Il y
a plusieurs personnes qui ont des craintes sur la rémunération globale, notamment, là, le salaire, les autres avantages.
Quelle est votre recommandation aux membres de la commission en lien
avec les indemnités forfaitaires?
M.
Turner (Michel) : Nous, on a compris du législateur que
l'objectif, ce n'était pas de faire — et là excusez — des
règlements cheap : l'objectif, c'était d'éviter de corriger de manière
permanente des événements qui avaient une
durée limitée dans le temps. Supposons qu'il arrive un incident à la deuxième
année du cinq ans, qui se termine à la quatrième
année du cinq ans. Dans le fond, ce qu'on dit, à la place de faire une
correction qui va durer... qui va devenir permanente, parce que l'ancienne loi pouvait être interprétée comme ça,
on va faire une correction limitée dans le temps. Et les personnes vont être pleinement compensées
pour la période où le préjudice a duré. C'est ça qu'on a compris. Donc,
je pense que le législateur pourrait facilement reproduire ce que je viens de
dire dans le texte.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Merci pour l'échange. Je cède maintenant la
parole au député de l'opposition officielle.
M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue. Je pense que
vous êtes des habitués, d'ailleurs, du Parlement. Donc, vous connaissez
les aires de ce Parlement-là. Donc, bienvenue ici.
Écoutez,
je regardais, Fédération des chambres de commerce du Québec, je regardais votre
réseau, là : 132 chambres de
commerce, 1 100 membres corporatifs, 50 000 entreprises
dont les activités... secteur économique... puis, je pense, dans le secteur québécois, mais, je pense, c'est
varié. Parce que, là, je regarde toutes les chambres de commerce que vous
avez, donc, dans le Québec. Dites-moi, là, à
ce moment-là, vous regroupez, vous, des entreprises de plus de
100 employés, de moins 50, de 10, de deux... Variées.
M. Forget (Stéphane) : De toutes les tailles, et à peu près dans tous
les secteurs de l'économie, et essentiellement dans toutes les régions du
Québec aussi.
M.
Rousselle : Bon. Ce projet de loi là, sûrement, vous avez sûrement
analysé, vous avez des gens avec vous puis à l'extérieur sûrement qui
vous ont sûrement aidé. Vous connaissant, c'est sûr, vous avez regardé cet
aspect-là. Les entreprises ont-u regardé le coût que ça pouvait leur apporter,
une modification de même? Est-ce que vous avez ces chiffres-là, là, que telle modification, ça va m'amener, moi, à ma
compagnie ou à mon entreprise, telle dépense? Puis, pour continuer, est-ce que cette dépense-là peut
m'amener en péril? Est-ce que vous savez, vous, dans votre expertise vous avez, est-ce qu'il va y avoir des entreprises
qui vont être en péril en mettant en place ce règlement-là, cette loi-là?
M. Forget (Stéphane) : Bien, première partie de la réponse, tout
d'abord, et je le répète souvent, c'est ce que j'appelle le phénomène de
sédimentation. Et, comme législateurs ou comme ministres, on voit évidemment souvent le portefeuille qui nous
concerne, puis nous, on doit accumuler les décisions qui se prennent les unes
par-dessus les autres.
Et
je dis toujours que chaque décision prise individuellement a souvent plein de sens. C'est lorsqu'on se met à les accumuler que ça devient très lourd
pour les employeurs. Et là je peux faire référence à une série de lois qui ont
été adoptées dans les dernières années — je pense à la hausse de régime de rentes du
Québec, je pense à la révision de la Loi sur les normes du travail l'an dernier, je pense à ce qu'on est en train
d'appliquer — donc,
évidemment, comme je vous dis, individuellement, ça fait plein de sens,
mais, collectivement, ça devient extrêmement lourd. Ça, c'est la première
préoccupation que je veux soulever.
La
deuxième, vous avez vu l'étude d'impact économique du projet de loi qui est
devant nous... Et là je suis toujours prudent
avec ça pour une raison : un, il faut... Deux raisons. La première, il
faut voir, et là il faut l'analyser comme il faut, l'étude d'impact, je vous avouerai qu'on a encore
un peu de travail à faire à cet égard-là. La deuxième chose, c'est qu'il
y a souvent un écart entre le moment où on
dépose l'étude d'impact qui est en lien avec le projet de loi, mais, à la fin,
le projet de loi, dans bien des cas, il ne
ressemble pas tout à fait à celui qu'on a déposé au début. Alors là, il y a
souvent un écart. J'ai l'exemple en
tête de la Loi sur les normes du travail, l'an passé, où l'étude d'impact initiale
et l'étude d'impact à la fin, si on
l'avait fait, la deuxième étude d'impact... nous, on l'a fait et là on
chiffrait ça en milliards de dollars. Alors, ça, je vous invite à la prudence à cet égard-là parce que les études
d'impact, souvent, sont un peu aléatoires parce qu'à la fin on n'est
plus au même endroit.
Troisième
chose qui est très importante, au-delà du coût pour les employeurs directs,
c'est les coûts indirects, et là je
fais référence à la CNESST. Vous savez, la CNESST est payée à 100 % par les
cotisations des employeurs, et, lorsqu'on ajoute des responsabilités à
CNESST comme c'est le cas présent, inévitablement, soit on va trouver des
moyens à la CNESST d'être plus efficace ou
on va ajouter, et on va ajouter du personnel, on va ajouter des coûts, on va
ajouter toutes sortes de mesures qui finissent, à terme, par être payées
100 % par l'employeur.
Donc,
je vous dirais, ça, c'est une première réponse plus globale. Je ne sais pas si,
de façon plus spécifique, on a une réponse à donner. Il y a peut-être
Alexandre... pourrait ajouter quelque chose à cet égard-là.
M. Gagnon (Alexandre) : En fait, tu sais, on reprend l'analyse d'impact
réglementaire. Souvent, ce qu'on va regarder
à l'intérieur de ces outils-là, c'est les coûts au niveau des indemnités que ça
pourrait occasionner. Je pense que c'était
autour de 590 millions, quelque chose comme ça, qui étaient dans l'étude
d'analyse d'impact. Mais ce qui est pesant pour les employeurs, c'est beaucoup... c'est les obligations, c'est
l'opérationnalisation de ces nouvelles obligations là. Pour un employeur, de passer une heure, deux
heures par semaine pour parler de réfléchir sur l'équité salariale, par exemple,
entre vous et moi, ça, également, ça a un
coût important, ça a un coût opérationnel de consulter, et ça, c'est
difficilement quantifiable. Et, à ce
niveau-là, on vous demande... d'autant plus lorsqu'on parle de sédimentation,
c'est d'autant plus dans ces obligations-là opérationnelles, là, d'un
projet de loi.
M.
Rousselle : Je comprends que ça amène des coûts, ça, on en convient,
mais il ne faut pas oublier non plus que l'objectif, c'est d'avoir une
parité, hein?
Une voix :
Absolument.
M.
Rousselle : Donc, il ne faut pas, je pense, perdre de vue l'objectif
parce que...
Et,
dans votre analyse, à un moment donné, j'ai regardé, dans votre recommandation
3, vous parlez, justement, de
préciser que l'exercice de maintien doit être effectué au maximum aux cinq ans.
Vous pensez quoi si je vous dirais trois ans? C'est-u plus facile pour
vous? Parce que, là, dans le temps, on vient de geler à trois ans, donc c'est
moins difficile d'aller chercher en arrière,
donc, vous savez, on y va plus serré, ou... J'aimerais ça, vous entendre
là-dessus, là. Tu sais, vous avez marqué maximum cinq ans, là.
M. Turner (Michel) : Oui. Maximum cinq ans veut dire que là où on a un
problème, c'est la périodicité à date fixe,
donc 2010, 2015, 2020. Ce qu'on dit, c'est : On devrait dire aux
employeurs : Vous devez le faire aux cinq ans. Si un employeur, pour une raison ou pour une autre, à
la troisième année du maintien, fait une grosse restructuration, il dit :
Ah! — ou à la quatrième année — ce serait le temps de le faire, il pourrait
décider de faire un maintien. Et là ce qu'il va faire, il va se poser la question suivante : Si je fais un
maintien, ça me donne quoi? Ah! bien, en faisant un maintien, je suis
correct pour cinq ans après parce que j'en ai fait un correctement. Mais, s'il
dit : Ah! je fais un maintien, mais, l'année
prochaine, j'en refais un autre, bon, je vais attendre un an, les impacts sur
le milieu de travail sont très grands, donc
pour ça qu'on proposait ça. Et certains employeurs qui ont beaucoup... dans
certaines organisations, il y a beaucoup de programmes, ils pourraient dire : Ah! bien, je vais en faire un
après trois, un après quatre, un
après cinq pour répartir l'effort
dans le temps, ce qui servirait aussi bien les partenaires syndicaux que les
partenaires patronaux et la commission,
qui pourrait répartir ses efforts.
L'autre
chose que ça ferait en supplément, c'est qu'au lieu de discuter
intensivement, à tous les cinq ans, d'équité
salariale, bien, on en discuterait sur une base plus régulière, et il y aurait seulement
des experts qui agiraient comme consultants.
Aux cinq ans, comme on le fait là, là, je peux vous dire qu'il y a
des firmes de consultation qui décollent à tous les cinq ans pour faire
de l'équité salariale. Ce n'est pas tous des professionnels du domaine.
• (17 h 40) •
M. Rousselle :
Vous parlez aussi... qui prévoient l'obligation d'un employeur de réaliser le
processus de participation, vous avez de l'air... bien, je vous entendais tantôt
aussi, là, je l'ai lu puis je vous ai entendu, vous avez de l'air à avoir vraiment un problème au niveau
de la participation. Si on parle des regroupements de
100 employés et plus, on
s'entend, là, des comités paritaires, vous, sur une base régulière, qui, justement,
peuvent s'entendre, vous voyez ça frivole ou...
M. Forget (Stéphane) : Vous l'avez bien tantôt, je vais laisser Michel
répondre. Comme on représente toutes tailles
d'entreprise, la préoccupation n'est pas la même pour toutes et la
capacité de respecter certaines confidentialités ne l'est pas aussi pour
toutes les tailles. Alors, peut-être que Michel peut ajouter à cet égard-là.
M. Turner (Michel) : Oui. Comme on le disait tout à l'heure, il y a un danger à faire perdurer ces discussions-là
dans le temps. Plus ça dure longtemps, plus les risques qu'il s'échappe des renseignements
confidentiels sont grands.
Deuxièmement, on demande aux gens de discuter d'un sujet qu'ils ne connaissent pas
avant même que l'événement se
produise : Avez-vous des préoccupations face à l'équité
salariale? Peut-être
une discussion un peu théorique, un peu longue, mais on est prêts à se
soumettre aux exigences de l'affichage beaucoup plus détaillé pour que les gens
puissent lire l'exercice qui a été fait et
aient des éléments pour dire : Non, on n'est pas confortables avec ça, ça,
ça. Ça, on n'a pas de problème.
Mais, en discuter avant même que ce soit fait, on pense que c'est une perte
d'énergie, ça ne contribue pas à l'équité.
M. Forget (Stéphane) : Pour votre considération, dans la suite de vos
travaux, quand on dit : Faisant notamment
état de leurs préoccupations, de leurs
attentes, de leurs opinions et de leurs suggestions, c'est très large, c'est très, très large, et c'est là qu'on peut, plutôt
que d'améliorer la situation, se retrouver dans une position totalement
inverse.
M.
Rousselle : Merci. Je vais laisser la place à ma collègue.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Alors, la parole est à vous, députée de Fabre.
Mme
Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Forget, M. Turner, M.
Gagnon, un plaisir de vous revoir. Moi, je voudrais vous parler des recommandations
3, 5 et 7 rapidement. Combien de temps me reste-t-il?
La Présidente (Mme
IsaBelle) : 1 min 32 s.
Mme Sauvé :
O.K. Alors, on va en choisir une des trois, mais je veux d'abord
vous dire à quel point... d'abord,
j'apprécie la qualité de votre mémoire, mais j'apprécie beaucoup que vous
mettiez, au centre de la discussion, la réalité
de la très petite entreprise, qui fait partie, bien sûr, il y a plusieurs
de vos membres... très petite entreprise, sans département de ressources
humaines, et tout ça, et de nommer le
mot «lourdeur» et de nous rappeler qu'il
faudra y avoir vigilance, il faudra y
avoir vigilance dans l'application de la loi. J'ai été un employeur avec
25 employés, majoritairement féminins,
et c'est un exercice, même s'il prend tout son sens, qui demande beaucoup,
beaucoup de travail. Alors, ce n'est pas simple, et, voilà, je voulais
vous remercier pour ça.
Je vais y aller
directement avec la 7, la CNESST, ma question est la suivante : Alors que
vous dites qu'il pourrait y avoir
effectivement une gestion des plaintes frivoles, vous avez bien nommé qu'il y
avait un grand nombre qui était non
fondé, ce serait un premier filtre, bien qu'on comprend que l'impact qui aurait
l'ajout de ressources, il y a un coût
lié à ça, moi, je voulais vous demander, quand vous me dites qu'il y a beaucoup
de ces plaintes non fondées là qui sont
liées à un manque d'information, est-ce que, bien que la recommandation est
intéressante, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de faire plus que le simple affichage dans la très petite
entreprise et petite entreprise? Est-ce qu'il n'y a pas lieu, sans rendre ça plus lourd, de faire plus qu'un simple
affichage du plan d'action lié à l'équité salariale pour mieux informer
les gens avant de se rendre à la plainte?
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Je dois vous dire que vous avez une bonne question, mais malheureusement nous n'aurons pas la
réponse.
Mme Sauvé :
C'est bon. On s'en parlera.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Le temps est écoulé. Alors, merci pour cet échange. Je cède maintenant
la parole au député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Oui, merci beaucoup. Bonjour, messieurs. J'aimerais avoir votre
interprétation de l'article... dans le projet de loi n° 9, de l'article
76.5, à savoir que, sous réserve de l'article 76, toutes sommes dues pour la
période précédant la date de l'affichage, on parlerait que ce soit versé sous
forme d'indemnité forfaitaire. Quelle est votre interprétation de cette
indemnité forfaitaire?
M. Forget (Stéphane) : Alors, on avait vu cette chose-là, donc on a une
réponse à vous donner. Alors, Michel, s'il
vous plaît.
Une voix :
...
M. Turner (Michel) : Oui. Une pleine compensation pour le préjudice
qui a été subi. C'est-à-dire, si le préjudice a duré deux ans, on compense deux ans le préjudice qui a été subi. On ne
veut pas éliminer les coûts liés aux avantages sociaux, on ne veut... Le préjudice. Mais on ne veut pas prendre une situation
temporaire qui a duré deux ans et la corriger de manière permanente, ce
qui va induire d'autres problèmes d'iniquité dans l'entreprise.
M. Ouellet : O.K. Donc, vous ne faites pas
de distinction à savoir la différence entre une indemnité forfaitaire et
un ajustement salarial.
M. Turner (Michel) : Une indemnité forfaitaire en rémunération, c'est une compensation qui est le total de tout ce qui a été perdu. On prend chaque semaine... De toute façon, on ne peut pas verser de salaire perdu, c'est déjà
passé. Ça fait qu'on
additionne chacune des semaines, qu'est-ce qui a été perdu, et on le verse en
un montant.
M. Ouellet : J'aimerais comprendre, à la page 8 de votre mémoire, lorsque vous
faites référence à l'article 76.2.1, qu'il ne faut pas encourager de telles attitudes qui ont pour effet de
dénaturer les objectifs pouvant être poursuivis en matière d'équité salariale et de multiplier les sources de
plaintes et de recours. Donc, selon vous, ce que membres vous ont dit, lorsqu'il y a des comités, on discute d'équité
salariale, mais ça devient aussi un comité de relations de travail. C'est ce
que je comprends. Donc, on a dénaturé un peu
ce que ça devait être. Mais est-ce que vos membres trouvent ça pertinent
quand même que ces discussions se tiennent
ou si vous dites : On voudrait en discuter, mais ce n'est pas la bonne
place. Donc, on prend le temps de
discuter d'équité salariale alors qu'on devrait plutôt parler de relations de
travail et vice et versa?
M. Turner (Michel) : Ce qu'on veut dire, c'est : quand on fait
des discussions à ce sujet-là avec le syndicat et qu'on s'entend avec le syndicat, le syndicat
représente ses membres, dans ce cas-là, il devrait être évité que les membres
puissent refaire un recours après qu'il y ait eu une entente ou qu'une plainte
ait même été décidée à la commission.
M. Ouellet : Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Merci pour l'échange. Maintenant, la
parole est au député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
On s'autodiscipline. C'est bien, hein?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, vous êtes bon.
M. Leduc :
On a appris la leçon. Merci d'être là aujourd'hui. Merci pour votre mémoire
superintéressant.
Première question. Il y a des gens qui sont passés
avant vous aujourd'hui, qui réclamaient que l'étalement du paiement soit
vraiment limité à quatre ans, et non avec la possibilité de l'extension jusqu'à
sept. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Parce que quatre ans, c'est quand
même déjà un bon segment d'années.
M. Gagnon (Alexandre) : Bien, ça peut avoir l'air d'être un gros délai
effectivement, mais n'empêche que toute situation... Par ailleurs, parfois, ça peut être des montants
extrêmement importants. Lorsqu'on parle... Lorsqu'il y a une fusion-acquisition, ce n'est pas nécessairement au
niveau d'une entreprise de 10, 15 employés. Ça peut être une entreprise de
plusieurs centaines d'employés. Donc, ça
peut être des montants qui pourraient avoir des impacts significatifs sur une
entreprise. Et c'est là que ça... Et on a
besoin d'avoir la plus grande flexibilité possible afin de corriger ces indemnités-là.
M. Leduc :
Il y a des gens qui proposaient que ça soit, cette pratique-là, autorisé à
chaque fois par la CNESST pour éviter
des abus. Est-ce que c'est quelque chose qui vous semblerait un peu trop
exagéré? Est-ce que c'est quelque chose avec laquelle vous pourriez
vivre?
M. Forget (Stéphane) : Je vous dirais que, tout d'abord, des situations
de grandes entreprises qui exigeraient autant d'années, je ne crois pas qu'il y en aurait tant que ça. Ma crainte avec
cette proposition-là, c'est qu'on se retrouve avec, encore une fois, une
demande additionnelle d'autorisation, de paperasserie, etc. Je pense
qu'essentiellement une entreprise a tout
intérêt à ce que des situations de ce type-là, une fois conclues, se règlent de
façon le plus juste possible et pour éviter tout climat de tension
additionnel dans l'organisation. Donc, je ne pense pas que les entreprises ont
de l'intérêt à faire perdurer une chose, à
moins que, sur le plan financier, c'est des obligations très importantes à
mettre en oeuvre. Je vous dirais que c'est comme ça que les entreprises,
de façon générale, pensent.
M. Leduc :
Parfait. Une dernière question très rapide. Vous avez sûrement vu les mémoires
des organisations syndicales qui sont passées ou qui vont passer.
M. Forget
(Stéphane) : Pas encore.
M. Leduc :
Pas encore?
M. Forget
(Stéphane) : Non.
M. Leduc :
En tout cas, vous allez trouver qu'ils n'ont pas une lecture très enthousiaste
notamment de la question du montant
forfaitaire et du traitement des plaintes déposées entre 2010 et 2015. Ils
considèrent que ça ne respecte pas notamment
le jugement de la Cour suprême. Est-ce qu'il n'y a pas un danger qu'on se
retrouve à réinitier un segment de contestation
judiciaire et qu'on se revoie dans 10 ans pour être obligé d'écrire une
nouvelle loi parce que celle-ci n'aura pas été à la hauteur de la
situation?
M. Turner (Michel) : Je vais répéter pour le forfaitaire. Dans la
mesure où le forfaitaire inclut les bénéfices, puis c'est... il suffit de
changer le terme. Et je crois que les associations syndicales auraient de la
difficulté à aller à l'encontre du principe.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Nous...
Une voix :
...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Pardon. Alors, écoutez, je vous remercie toutes
et tous, particulièrement MM. Gagnon,
Forget, M. Turner, de la Fédération
des chambres de commerce du Québec.
Merci pour votre contribution.
Nous suspendons les
travaux jusqu'à 19 h 30. On se retrouve à 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 50)
(Reprise à 19 h 34)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Bonsoir, tout le monde. Bonsoir, tout le monde.
Alors, on va reprendre. La Commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande encore une fois, au
cas où vous l'auriez oublié, de bien éteindre vos téléphones
cellulaires.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 10, Loi
modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer
l'évaluation du maintien de l'équité salariale.
Nous entendrons, ce
soir, la Confédération des syndicats nationaux.
Avant, toutefois, de
commencer votre exposé, je voudrais savoir s'il y a consentement afin que le
député de Maskinongé puisse reprendre sa
place puisqu'il a été remplacé, ce matin, par un autre député, puisse reprendre
sa place à la commission, car il avait été remplacé effectivement ce
matin? Est-ce qu'on a le consentement?
Des voix :
...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : C'est parfait. C'est beau. Alors, je souhaite la
bienvenue à la...
Des voix :
...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Par contre, je vous invite...
Attention! C'est commencé. Le député de Maskinongé, soyez, oui, à
l'ordre.
Alors,
je souhaite la bienvenue à la Confédération des syndicats nationaux. Je vous rappelle, mesdames, que vous avez 10 minutes pour présenter votre exposé,
ensuite va suivre une période
d'échange avec les députés, et je vous invite aussi à vous
présenter. Alors, c'est parti, vous avez 10 minutes.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Mme Senneville (Caroline) : Bien, merci. Alors, je suis Caroline Senneville,
je suis première vice-présidente de
la CSN. Je suis accompagnée de Me Marilyne Duquette qui est avocate au Service
juridique de la CSN, et Marie-Ève Pinard, conseillère syndicale, en
charge du merveilleux dossier de l'équité salariale.
Alors,
merci de nous recevoir, même si je dois vous dire que, pour nous, bien, on a eu
droit à tout un marathon pour pouvoir vous présenter notre mémoire. Parce
qu'évidemment la Loi sur l'équité salariale, le projet de loi est assez dense, et complexe et, dans le temps imparti, on
vous le dit, et comme on est une organisation syndicale qui aimons quand
même consulter nos membres... je tenais à
vous dire que ça a été assez difficile, l'exercice d'arriver dans les temps
impartis.
Alors,
nos membres, justement, parlons-en. La CSN, elle est riche de
300 000 membres, dont à peu près la moitié dans le public et l'autre moitié dans le privé. Je
vous dis cela pas pour faire une publicité, mais bien pour vous renseigner
sur le fait qu'à la CSN on connaît et on
pratique, depuis ses tout débuts, l'application de la Loi sur l'équité
salariale autant dans le privé que dans le public. Alors, on a une
expertise à ce niveau.
Je
l'ai dit, la Loi sur l'équité salariale, c'est quelque chose qui peut être
complexe, alors je pense que ça vaut la peine de se rappeler les trois éléments importants qui sont sortis du
jugement de la Cour suprême en mai dernier. Pour nous, essentiellement, il est sorti trois choses de ce jugement. C'est
que, moi, comme personne, si je veux faire valoir mon droit à un salaire
non discriminatoire, donc, bien sûr, à l'équité salariale, je dois avoir accès
à toute l'information nécessaire pour ce faire. La Cour suprême dit aussi que
l'exercice du maintien de l'équité salariale est tout aussi important que l'exercice initial pour faire valoir
mes droits en ce sens, un salaire non discriminatoire, et qu'on doit agir
rétroactivement à l'événement qui a créé un
nouvel écart salarial, même si l'exercice de maintien n'est pas fait en continu
mais de façon périodique. Et, le mot le dit, il s'agit
d'équité salariale et il faut donc agir sur le salaire pour mettre fin à la
discrimination.
À
notre avis, cependant, le projet de loi qui est présentement à l'étude ne
répond pas de façon totale et entière à ces éléments essentiels. Ainsi, le processus de participation qui est
proposé à la loi est bien un pas dans la bonne direction, mais il ne fait pas en sorte que tous les salariés
possèdent tous les renseignements nécessaires à un respect de leur droit
à un salaire équitable. À la CSN, ce qu'on
propose, c'est ce qu'il y a dans la loi fédérale, c'est-à-dire que, dès qu'il y
a une association accréditée, c'est-à-dire un syndicat, qu'il puisse y
avoir un comité, peu importe la taille de l'entreprise.
Vous
savez, quand il y a une présence syndicale, il y a un mode de fonctionnement
paritaire qui est habituel, on se voit
en comité de relations de travail, on se voit parler de santé, sécurité au
travail, pourquoi ne pas se voir pour se parler d'équité salariale? À
notre avis, ça simplifie les choses, ça fait en sorte aussi que l'expertise,
elle est partagée. Quand il y a des
nouvelles personnes aux ressources humaines, il peut y avoir de l'expertise du
côté syndical et vice versa, parce que c'est un dossier qui demande
beaucoup de connaissances, et ça, à notre avis, réduit les problèmes à la
source. Parce que, quand le syndicat n'est pas impliqué, bien, c'est là
qu'il... que, quand on n'est pas satisfaits, on a plein de questions par rapport à l'exercice dans lequel on
n'a pas été impliqué ou on a été exclu, bien, notre seul recours, c'est la
plainte, et les plaintes, ce n'est vraiment
pas l'idéal. Alors, si on veut les réduire, ces plaintes, le préférable, c'est
qu'on puisse faire partie des travaux dès leur début.
On pense aussi que le
projet de loi... Bien, en fait, le projet de loi nous laisse un peu sur notre
faim en ce qui a trait à l'affichage, parce
que, par exemple, l'affichage, qui doit maintenant être fait en cas d'exercice
de maintien, inclut les événements
qui, selon l'employeur, ont donné lieu à des ajustements salariaux. Bien, déjà,
ça pose problème, parce que
l'employeur, il n'est pas neutre dans ça, il est juge et partie. Alors, il faut
que les salariés aient accès à la liste de tous les événements qui ont pu
arriver en termes de nouvelles échelles salariales, conventions collectives,
modifications aux régimes de
retraite, etc., pour pouvoir déterminer si, oui ou non, il y a eu des
changements qui pourraient donner lieu à des ajustements salariaux. Il
faut avoir cette liste complète là pour pouvoir le faire.
Le
projet de loi aussi retire l'obligation qui est faite à l'employeur d'indiquer
au salarié un préavis d'affichage de l'équité salariale qui dit :
Attention! Attention! Je vais afficher l'avis à tel endroit, vous pourrez en
prendre connaissance, de mon exercice d'équité salariale.
• (19 h 40) •
Alors,
vous savez, l'employeur, là, un
employeur, quand il veut communiquer avec ses salariés, normalement, il le fait, pour toutes sortes de sujets. Ce n'est pas, à notre avis, un fardeau intense de lui dire : Bien, mets donc un petit mot dans le «slip» de paie ou envoie un courriel,
si c'est ton mode de communication habituel, pour dire : Écoutez,
il y aura avis, il sera affiché à
tel endroit à telle heure. Parce que, bon, envoyer l'avis à tout le monde, ça, par ailleurs, ça peut être lourd, ce n'est pas tout le
monde qui s'intéresse à ça, mais un
petit préavis qui dit : Écoutez, notre affichage sera fait, on pense que
c'est nécessaire de le garder. Donc, ça, c'est en ce qui a trait à tout
l'affichage et faire valoir nos droits.
Qu'en est-il maintenant
de la rétroactivité lors de l'exercice du maintien salarial? Là aussi, on
trouve que la solution proposée, malheureusement, va laisser perdurer les iniquités et la discrimination salariale. La
solution qui est mise de l'avant dans le projet de loi pour les
exercices futurs de maintien — sous réserve du forfaitaire, qui sera mon
troisième sujet — fait
la job.
Par ailleurs, le problème qu'on a, c'est que
toutes les personnes qui ont déposé des plaintes et qui ont fait des recours, qui ont initié les recours, qui sont
allées jusqu'à la Cour suprême, toutes ces mêmes personnes là qui se trouvaient
injustement traitées, bien, vont passer en
dessous de la table, parce que le projet de loi ne fait rien pour les
modifications entre 2009 et 2019,
tout ce bout-là. Et là, pour nous, c'est vraiment un non-sens que de
dire : Bien, ces personnes-là se jugeaient
injustement traitées, elles ont porté leur dossier jusqu'au plus haut tribunal
du pays, le plus haut tribunal du pays leur
dit : Non, vous avez raison, il faut vraiment rétroagir à la date où a
lieu l'événement. Et le projet de loi dit : O.K., c'est vrai, on va le faire pour l'avenir, mais là
il y a comme un hiatus de 10 ans qui va rester comme une zone de non-droit,
et ces gens-là ne verront pas leurs salaires ajustés.
Évidemment,
le projet de loi prévoit de plus que les versements de... les ajustements
salariaux seront, selon notre compréhension,
faits sous forme de forfaitaire. Dans notre compréhension à nous, toujours, un
forfaitaire, ce n'est pas du salaire,
c'est plutôt assimilable à une sorte de bonus. Pour nous, il faut vraiment agir
sur le salaire, parce que seul le salaire couvre tout ce qui nous arrive dans notre vie de salarié quand on est en
congé de maladie, en assurance invalidité, quand on est en congé parental, quand on prend notre
retraite. Imaginez, si on n'agit pas sur notre salaire, bien, c'est
éventuellement toute notre prestation
de retraite qui va être en jeu, et encore plus, je vous dirais, si ce n'est pas
fait... si on part à la retraite avant que le versement soit fait, bien,
là aussi — je
reprends mon expression — on
va passer en dessous de la table.
De plus, la
loi prévoit que ce versement forfaitaire là peut être étalé sur quatre ans.
Alors, si on garde des exercices de maintien d'équité salariale sur cinq ans,
puis qu'on va vérifier des événements qui pourront s'être passés jusqu'à il y a cinq ans, il pourra se passer un
événement qui fait en sorte que je n'ai pas le bon salaire, on s'en rend compte
cinq ans plus tard, et, en plus,
l'employeur, sans aucune condition, peut étaler quatre ans plus tard, alors là
je suis neuf ans, là, à avoir été
payée pas pour le bon salaire pour la prestation que je livre à mon employeur.
La Loi de l'équité salariale prévoit,
à son article 72, que, lors de l'exercice initial de l'équité salariale, si un
employeur a des difficultés financières, et ça, on le conçoit, ce sont des choses qui peuvent arriver, bien, à ce
moment-là, c'est la commission, il doit faire appel à la commission, et c'est la commission qui autorise à
étaler. On pense que ça devrait le cas aussi pour le maintien, je vous dirais,
d'autant plus que, si l'exercice initial a bien été fait, normalement, les
sommes en jeu sont moins importantes lors d'un exercice de maintien que lors d'un exercice initial, et donc
l'idée, le besoin d'étaler devrait être moindre aussi, de par les sommes
qui sont engagées.
Alors, qu'est-ce que nous, on propose, à la CSN?
Bien, on propose qu'il y ait un exercice de façon continue... excusez-moi, un exercice périodique et où on
informe tous les salariés des événements qui sont susceptibles de créer des
écarts salariaux et de rétroagir sur le salaire de ce premier événement là.
Enfin, le
projet de loi prévoit de nouvelles dispositions quant au regroupement des
plaintes. Nous croyons que ce
processus doit demeurer volontaire, au sens où une partie doit pouvoir y
exclure sa ou ses plaintes, tel que c'est prévu pour les individus. Un syndicat, même s'il n'est pas majoritaire, doit
pouvoir bénéficier d'un même droit que les individus.
Enfin, je
terminerais en vous disant que, donc, à notre avis, le projet de loi ne répond
pas à tous les éléments que la Cour suprême a soulignés comme étant des
manquements. On sait aussi que, dans la mouture actuelle de la Loi sur l'équité salariale, la loi est révisible aux
10 ans et le ministre doit faire un rapport de sa mise en oeuvre. Nous
n'avons pas ce rapport. À notre
connaissance, il n'existe pas. Alors, à la lecture du projet de loi, je vous le
dis bien candidement, nous n'étions
pas sûrs si ça couvrait aussi cet examen périodique de la loi là, dans sa
mouture actuelle, ou si couvrait juste le bout de l'équité salariale. Et
je termine en disant que c'est une bonne idée d'avoir une révision périodique
de la loi.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est parfait. Je vous remercie, mesdames, pour votre exposé. Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, je vous laisse la
parole.
M. Boulet :
Merci, Mme la Présidente. D'abord, souligner la qualité de votre présentation
et le temps et l'énergie que vous avez consacrés à la préparation de
votre rapport. On apprécie beaucoup.
Sachez
d'emblée, je veux le mentionner, que l'article 130 de la loi nous demande
de faire un rapport à tous les 10 ans,
et vous le précisiez bien à la fin, et donc on va, d'ici le 28 mai 2019,
faire un rapport qui fait état du bilan de la mise en oeuvre de la loi et de l'opportunité de la
maintenir. Donc, ce sera fait d'ici le 28 mai 2019. Mais les échos que
j'ai à ce jour de la part des
personnes qui préparent le rapport m'apparaissent quand même assez prometteurs.
Mais sachez-le.
Et ce projet
de loi n° 10 là, il vise essentiellement et principalement à faire suite à
la décision de la Cour suprême du
Canada, vous l'avez bien compris. On n'était pas dans un espace de temps
suffisant nous permettant de revoir plusieurs aspects de la Loi sur l'équité
salariale ou faire une révision qui est plus globale. Mais ça viendra, puis je
pense qu'on pourra s'inspirer des commentaires que vous avez dans votre
rapport, et c'est pour ça que je vous en sais gré.
J'aime aussi que vous précisiez que l'exercice
d'évaluation du maintien de l'équité salariale est aussi important que l'exercice initial. Ça m'apparaît
fondamental, parce que la loi prévoit une démarche de l'employeur qui est proactive, qui débute
par un exercice initial d'équité salariale, et là on corrige les écarts. Parce
que le but de la loi, c'est essentiellement
de lutter contre la discrimination systémique envers les emplois à
prépondérance féminine. Et ça, on y souscrit totalement, à cet objectif-là, et on souscrit d'ailleurs à la décision
de la Cour suprême du Canada. On est d'accord avec tant la motivation
que le dispositif de ce jugement-là, donc on y va d'emblée.
Et,
en même temps, ce que la Cour suprême dit, et j'aimerais vous entendre
là-dessus... dit que les trois dispositions dont on parle sont
invalides, mais invalides seulement après une période d'une année suivant le
jugement de la Cour suprême, qui était rendu
l'année passée, le 10 mai. Donc, la loi remédiatrice, ou la loi que nous vous
proposons, doit être adoptée avant le 10 mai 2019, sinon, les trois
dispositions deviendraient invalides à cette date-là, c'est-à-dire le
10 mars 2019. C'est bien la lecture que je fais. Qu'est-ce que vous en
pensez?
Mme Senneville (Caroline) : Je vais laisser Me Duquette vous faire une
lecture juridique, là. Mais moi, je vais, d'emblée, vous faire une
petite introduction politique, là.
Ce n'est pas, à notre
avis, le sens du jugement de la Cour suprême parce que ça aurait un effet de
dire à des personnes que, pendant
10 ans, votre salaire n'était pas exempt de discrimination. Ça aurait ça,
comme effet, puis, pour nous, c'est discriminatoire en soi, je vous dirai, là.
La loi doit mettre fin à une discrimination, elle ne peut pas... Le jugement de la Cour suprême dit : C'est très,
très important. Elle ne peut pas dire, du même souffle : Mais ça n'a pas
été fait pendant 10 ans puis ce n'est pas grave.
• (19 h 50) •
Mme Duquette
(Marilyne) : Mais, au surplus, les dispositions qui ont été
invalidées, ils ont été invalidés tout d'abord par la Cour supérieure,
hein? Et, lorsqu'elles ont été invalidées, c'est une invalidation qui a été
faite en vertu de l'article 15 et
l'article 52 de la charte. Et, lorsqu'on invalide une disposition d'une
loi comme ça, son invalidation, c'est à partir de son adoption, O.K., donc,
l'adoption, c'est le 28 mai 2009, et non pas une invalidation à
partir du jugement qui va le déclarer invalide. O.K.? C'est ça. Et ça,
c'est d'autres décisions de la Cour suprême, je vous en mentionne
quelques-uns : Hislop, qui parle de l'effet rétroactif d'une invalidation
d'une disposition de la loi. Donc, je pense qu'effectivement
lorsque vous dites que ce n'est qu'à compter du jugement, c'est erroné dans la
mesure où l'invalidation de la loi,
elle se fait à partir du 28 mai 2009. O.K.? Parce qu'on dit :
Cette disposition-là, elle est inconstitutionnellement tenable. Et donc, à ce moment-là, elle doit être
réécrite. Elle doit être réécrite dans sa mouture de 2009 avec les éléments
mentionnés dans le jugement autant de la
Cour supérieure, validés par la Cour d'appel, mais également de la Cour
suprême.
Et,
si vous voulez limiter cette portée rétroactive là à une loi, alors, il faut le
demander. Il faut le demander à la cour parce que le principe général,
c'est invalidation égale rétroactivité à sa date de son adoption de la
disposition de la loi, et, pour le limiter,
c'est une exception. Donc, lorsque la cour, elle ne vous dit pas, dans les
jugements : Je vais limiter la portée rétroactive, c'est qu'elle
applique le principe général, ce qui veut dire portée rétroactive au
28 mai 2009. Tellement que je vais
vous inviter à aller relire également le mémoire qui a été déposé par le Procureur
général dans le cadre du dossier de
la Cour suprême, qui dit justement que la Cour d'appel n'a pas limité cette
portée rétroactive là et elle va également dire à la cour : Ce
serait souhaitable que vous la limitez parce que nous en avons besoin.
Au surplus, je vais
également vous inviter à vous rappeler le jugement du SCFP contre le Procureur
général qui est tombé en 2004, hein? C'est
un jugement qui invalidait complètement le chapitre IX de la Loi sur
l'équité salariale. Que s'est-il
passé à ce moment-là? Invalidation d'un chapitre à compter de 2001. Alors, le
jugement de la Cour supérieure est
tombé en 2004. Les affichages ont été repris de l'exercice d'équité en 2006, et
il y a eu une portée rétroactive à 2001 de tous les correctifs d'équité salariale.
Et le gouvernement, à ce moment-là, quand il a réécrit le jugement, quand
il a réécrit tout le chapitre IX, il
n'a pas limité la portée rétroactive des ajustements de l'exercice d'équité
salariale, hein? Et là je vous le rappelle, 2001 à 2006, ici, on est
présentement aussi dans à peu près les mêmes délais.
Donc,
à ce moment-là, dans la mesure où aucun jugement n'est venu limiter la portée
rétroactive, il n'y a aucune raison,
pour le gouvernement, de venir aujourd'hui limiter cette portée rétroactive là
avec la disposition de l'article 23 à votre projet de loi, qui,
quant à nous, ne répond réellement pas aux jugements, autant de la Cour
suprême, mais réellement de la Cour supérieure. Je vais tous vous inviter à
aller lire ces jugements-là, notamment celui de la Cour supérieure, plus
précisément à son paragraphe 50, qui drôlement invalidait justement la
disposition 23 de l'ancienne mouture. Alors, il n'y a aucune limitation à
y avoir ici.
M. Boulet :
Ceci dit, avec respect, oui, on lira tous ensemble le dispositif du jugement de
la Cour suprême du Canada et, oui, la
cour a le pouvoir et l'autorité. Par exemple, ici, on dit : «C'est
effectivement contraire à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés de la
personne, qui stipule l'égalité entre les hommes et les femmes, et donc ça
perpétue une certaine discrimination systémique.» Mais la cour est très
claire : les trois articles sont invalides, et elle suspend sa déclaration d'invalidité à l'année
suivant la reddition de son jugement qui a été rendu le 10 mai 2018
et donc clairement elle dit :
Les articles sont invalides à compter du 10 mai 2019. Et elle donne
donc l'opportunité au législateur d'adopter une loi remédiatrice avant
cette date-là. On pourrait en débattre, mais la lecture du jugement est très
claire.
Puis
la Cour supérieure, sachons, et vous savez, ce jugement-là a été porté en
appel. La Cour d'appel a rejeté l'appel. Et ensuite il y a eu un appel du Procureur général du Québec, et cet
appel-là a été rejeté. Et donc la Cour suprême aurait pu dire, par exemple : C'est invalide ab
initio, c'est invalide depuis la date des amendements. Jamais il n'a été
question de 2009. Toujours il a été
question de la date de la reddition de la décision de la Cour suprême du
Canada, et on suspend l'invalidité.
Souvent, les tribunaux, et de plus en plus, donnent cette opportunité-là au
législateur d'adapter son corpus de lois de façon à respecter les
chartes, dans le cas présent, la Charte canadienne des droits et libertés de la
personne.
Mais, bon, c'est
là...
Une voix : ...
M. Boulet :
Oui, oui, allez-y.
Mme Senneville
(Caroline) : S'il y a désaccord là-dessus, moi, je vais vous dire, nos membres, ce qu'ils
vont vouloir, c'est qu'on fasse
clarifier la chose probablement par d'autres recours juridiques, et la colère,
dans nos rangs, serait assez grande,
je tiens à vous le dire, parce que, je vous le dis, là, c'est les personnes qui ont
porté ça, puis qu'il dirait : Vous, là, vous avez mis le doigt sur un
bobo, mais il n'y aura pas de réparation pour vous, ça ne sera pas
une réponse satisfaisante.
M.
Boulet : Mais sachez que
j'ai beaucoup d'empathie et de respect pour ce raisonnement-là,
et, moi, le message que je
transmettrais à vos salariés syndiqués en est un de compréhension. Moi, je
n'étais pas là en 2009, puis je sais qu'entre 1996 et 2009, au-delà de
l'exercice initial, il y avait toujours un exercice de maintien de façon
périodique à tous les cinq ans et il y avait
une rétroactivité. On reculait à la date de l'événement qui créait l'iniquité
et on compensait, on corrigeait les
écarts salariaux. Et, en 2009, vraisemblablement parce
que la loi n'était pas suffisamment respectée ou bien appliquée, le
législateur a décidé de considérer que, dorénavant, les exercices de maintien devaient se
faire toujours aux cinq ans, mais les
écarts salariaux devaient être payés uniquement à la date où on faisait
l'exercice d'évaluation du maintien de l'équité salariale.
Mais, ceci
dit, je ne veux pas revenir là-dessus. Je comprends, je suis un de ceux qui
confirment qu'il y a encore de la
discrimination systémique. Je suis totalement en accord avec le contenu pas
seulement de l'article 15 de la Charte canadienne
des droits et libertés de la personne, mais avec l'égalité sous toutes ses
formes, et particulièrement envers les emplois
à prépondérance féminine, et, simplement exprimé, c'est de dire : Un
travail de valeur équivalente doit mériter un salaire égal, et indépendamment de la couleur, ou des sexes, ou peu
importe, mais il n'y a aucun motif qui justifie qu'un travail de valeur
équivalente ne soit pas compensé de la même manière.
J'aimerais
ça, vous entendre un peu quand vous dites : L'employeur n'est pas neutre,
bon, et il devrait permettre à tous les salariés d'avoir accès à la
liste des événements. Ma question, plus précisément : Comment vous
protégez la confidentialité de certaines
informations? Parce qu'il y a des salariés syndiqués qui me disent des
fois : Est-ce que, si on publie
ça, tout le monde va savoir mon salaire, à partir de quand il y a eu création
d'une iniquité? La confidentialité, pour beaucoup de vos membres, c'est
précieux. Qu'est-ce que vous avez à me répondre sur ce sujet?
Mme Pinard (Marie-Ève) : Bien, deux
éléments. Premièrement, la question de l'affichage de la liste des événements,
pour nous, est intimement liée à la
présence ou non d'un comité. Donc, à partir du moment où il y a un comité
dûment constitué, là, dans l'entreprise,
bien, à ce moment-là, les représentants des salariés sont également gardiens du
processus, donc l'affichage n'a pas
nécessairement besoin d'être aussi complet. Disons, c'est la remarque
préliminaire que je voudrais faire.
Donc, au niveau de la confidentialité, ça peut être une des façons d'adresser
cette problématique-là.
Concernant la
liste des événements, c'est essentiel que l'ensemble de la liste des événements
figure à l'affichage, puisque, comme
le disait d'entrée de jeu Mme Senneville, pour que les gens soient en mesure de
faire valoir leurs droits, ils doivent connaître les événements qui ont
mené au fait de savoir s'il y avait des correctifs salariaux ou pas. Dans la réalité, là, ce qu'on a comme dossiers, là, quand
on a des affichages, c'est des affichages qui tiennent sur une page 8 1/2 X 11, il y a
à peu près la moitié de la page qui est du texte. Sur ça, c'est : Nous
avons identifié que... Il n'y a aucun élément... aucun événement qui
génère des correctifs salariaux, et avec les recours. C'est ça, les affichages.
Donc, les
gens déposent des plaintes parce qu'ils disent : Oui, mais moi, dans mon
entreprise, les cadres ont eu un changement
dans leur régime de retraite, puis ça n'apparaît pas à l'affichage. Qu'est-ce
qu'il en est? Est-ce que ça a été pris en compte? Donc, on a besoin de
l'ensemble de la liste des événements pour être capable de s'assurer qu'ils ont
effectivement été pris en compte pour
ensuite savoir s'ils ont généré. Ça, c'est sur le processus... sur notre
compréhension de l'exercice même.
Sur le volet
confidentialité, comme je vous disais, à partir du moment où il y a un comité,
bien, les informations plus sensibles
sont traitées en comité, avec les obligations de confidentialité qui figurent
déjà à la loi, et on n'a pas besoin d'avoir un affichage, à ce
moment-là, aussi complet, là.
• (20 heures) •
M.
Boulet : D'accord. Dans notre projet de loi, d'ailleurs, on réfère,
parce que c'était manquant depuis 2009,
que l'affichage va devoir donner les
dates des événements. Est-ce
qu'il y a d'autres informations que vous proposeriez que l'affichage comprenne pour répondre à ce que
vous exprimez? Parce qu'avec les
dates, ça nous permet quand même de reculer et de payer la pleine
rétroactivité.
Mme Pinard
(Marie-Ève) : Bien, dans le
fond, il faut voir, là, encore une fois, comme je vous dis, ça dépend si on est en comité ou pas. Pour nous, dans tous
les cas, pour que... Si on veut que les salariés, là, tu sais, la loi se veut
une loi proactive, on veut que les gens
s'approprient la compréhension de la loi puis que les salariés, dans
l'entreprise, soient en mesure de comprendre ce qu'il se passe. On ne
veut pas que ce soit un exercice opaque, la vérification de la discrimination, puis tout ça. Donc, minimalement, la liste, comme on disait, complète,
là, tous les événements qui ont été pris en compte pour être capable d'évaluer,
dans un deuxième temps, s'il y a des écarts salariaux qui ont été recréés.
Ça, c'est le minimum. Par la suite, la liste
complète, elle figure, là, dans le mémoire, là, de ce qu'on souhaite, mais,
s'il n'y a pas de comité, mais c'est évident qu'on va devoir avoir
besoin de l'ensemble du processus. Donc, c'est quoi, le questionnaire qui a été utilisé, c'est quoi, la méthode de calcul, c'est
quoi... Il faut avoir les détails, il faut comprendre de quelle façon ça s'est
fait s'il n'y a pas de comité. Ou, sinon, on n'est pas en mesure de
s'approprier les travaux qui ont été faits et de porter un regard
compréhensif sur la question.
M.
Boulet : D'accord. Je veux noter, parce qu'il y a un sujet que je veux
traiter avant de terminer, mais un, moi, je vous remercie encore une fois, puis, pour le processus de
participation, j'apprécie votre mention à l'effet qu'on fait un pas dans la bonne direction. Et, sur l'affichage,
on vous laisse encore un peu sur votre faim, mais je pense que ça indique
implicitement qu'on fait un pas dans la bonne direction.
Je veux juste
revenir sur l'indemnité forfaitaire. L'indemnité forfaitaire, c'est pour
assumer la pleine rétroactivité. Ça, ça peut être étalé en cinq
versements sur une période de quatre ans, mais ça n'exclut pas la correction
des écarts salariaux. Et, à partir de l'exercice du maintien d'équité
salariale, s'il y a eu des écarts qui ont été créés dans le temps découlant d'événements qui ont engendré des iniquités,
il va falloir que les salaires soient adaptés, puis il va falloir que
l'indemnité forfaitaire fasse comme...
La Présidente (Mme IsaBelle) : M. le
ministre...
M. Boulet : ...comme si le
travailleur avait été à son emploi aussi pendant cette période-là.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, M. le ministre.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Désolé.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, merci pour cet échange. Je cède maintenant la parole au député de
l'opposition officielle.
M. Rousselle : Merci, Mme la
Présidente. Merci d'être ici ce soir, puis oui, j'ai compris votre message effectivement que... et je comprends, parce que,
quand je vois la CSN, ils sont plus de 300 000 travailleurs,
travailleuses, répartis près de
2 000 syndicats. Donc, si on veut vraiment avoir un son de cloche de
nos instances, ça prend du temps. Donc,
je peux comprendre qu'on vous a comme rétréci ça, mais merci vraiment du
travail que vous avez fait, parce que ça va nous aider vraiment dans nos
échanges pour article par article après.
Vous avez mentionné, j'ai lu que vous avez
mentionné qu'il aurait été préférable que les salariés puissent participer pleinement à tout le processus de
maintien. Je voudrais vous entendre là-dessus, parce que, là, actuellement,
il y a des comités qui ont 100 employés et plus en permanence, d'autres
pas. Je voudrais vous entendre là-dessus.
Mme
Senneville (Caroline) : Bien,
c'est un peu comme je le disais. Dès qu'il y a un syndicat, le mode de
fonctionnement, dans une entreprise où il y a un syndicat, c'est de
mettre le syndicat au jeu sur tout ce qui touche les relations de travail, hein? C'est comme ça qu'on fonctionne. L'équité
salariale en fait partie. Probablement, là, tu sais, les gens doivent se
dire mon Dou! on ne mettra pas le syndicat là-dedans, ça va être bien trop
compliqué. En fait, c'est totalement
l'inverse, parce que... Tout à l'heure, on parlait de confidentialité. Des
fois, la confidentialité, ça tombe dans l'opacité, dans le manque de transparence. Et, face à cette opacité-là,
à ce manque de transparence là, à quelque chose qui se passe derrière des portes closes, mon seul recours, que je sois
un syndicat ou je sois un individu, puis, des fois, les syndicats sont constitués de beaucoup d'individus,
c'est de porter des plaintes. Puis des plaintes, ça embourbe le système,
ça retarde le fait que nos salaires soient
réajustés. C'est un plan B, déposer la plainte. Le plan A, c'est que ça
fonctionne bien. Alors, nous, on est d'avis que, quand le syndicat y
est, bien, on est partie prenante, on est capable de dire à nos membres oui, on l'a fait, oui, ça a été fait de
façon correcte, oui, le régime de retraite des cadres a changé, on le sait, on
a été tenus au courant, vous n'êtes pas obligés de connaître tous les détails,
mais on a vu l'effet, par exemple, sur la courbe ou pas l'effet sur la courbe. Donc, c'est ça qu'on veut mettre au
jeu, et ça, c'est possible, peu importe la grosseur de l'entreprise, dès
qu'il y a un syndicat qui existe.
M.
Rousselle : Justement,
je revenais, justement, avec la grosseur de l'entreprise,
parce que vous avez mentionné tout à
l'heure et là vous venez de le
rementionner. C'est que, tantôt, on a écouté d'autres groupes qui disent :
Écoutez, c'est laborieux pour une
petite organisation. Parce que, là, vous dites : Tous les
groupes. Donc là, à ce moment-là, vous dites :
Peu importe la compagnie, qu'il y ait 20 employés ou... Et, tout à l'heure, j'écoutais, il me dit : Écoute, l'employeur qui a 10 ou 15 employés, déjà,
c'est laborieux pour lui, bien souvent, il n'y a pas de système
de RH chez eux, il n'y a pas... comprenez-vous,
c'est comme... c'est un ajout pour lui. Et là eux, ils disent : Bien, écoutez,
si vous nous rajoutez ça par de suite, bien, ça être encore difficile
pour nous autres de gérer ça. Vous, vous dites quoi là-dessus?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
moi, je dis : C'est tout à fait le contraire, je veux dire, d'abord... en
plus, il peut y avoir un partage
d'expertise, si la personne a fait l'exercice avant, puis c'est plus simple
de mettre cartes sur table, puis de
regarder ça ensemble, puis de voir ce qui fonctionne, que de gérer des plaintes
qui vont venir par après, que de gérer de l'insatisfaction de la part
des salariés.
Puis, vous
savez, dans un régime où il y a un syndicat, même s'il y a
15 personnes, on s'assoit puis on la négocie, la convention collective, on s'assoit puis on en parle, de santé et
sécurité. Pourquoi on ne parlerait pas d'équité salariale?
M.
Rousselle : Au niveau
de l'évaluation du maintien, il y a un autre groupe qui a passé
avant vous, il parle, lui, d'un
maximum de cinq ans, donc il va sur le maximum de cinq ans en disant :
Bien, ça se peut qu'avant cinq ans... qu'il se passe des choses, puis, à
ce moment-là, bien, on le fera à trois ans. Vous, est-ce que vous êtes d'accord
avec cette demande-là, ou vous, vous voyez ça différemment?
Mme Senneville
(Caroline) : Plus les exercices sont faits de façon rapprochée, plus,
je pense, c'est facile de maintenir ses droits, de faire valoir ses droits,
plus ça fait aussi, pour l'employeur, que les montants rétroactifs à verser
sont moins importants. Alors, oui, un exercice de trois ans, c'est possible, on
peut vivre avec un exercice de cinq ans. Plus long que ça, ça serait difficile.
Mme Pinard (Marie-Ève) : Peut-être
juste...
M. Rousselle : Allez-y.
Mme Pinard
(Marie-Ève) : Je rajouterais juste la question de l'importance de la
date fixe, par contre, là, et non d'avoir
des dates qui sont variables, parce qu'une des... C'est important de savoir
quand est-ce qu'est dû l'exercice, là, ne
serait-ce que pour être alerte de voir passer l'avis d'affichage — en souhaitant qu'il demeure — mais donc il y a une facilité de
gestion en ayant une périodicité qui soit connue, là.
La Présidente (Mme IsaBelle) : La
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, Mme la
Présidente. Je vais être disciplinée, je vous le promets. Combien de temps me
reste-t-il?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste six minutes.
Mme
Sauvé : Ouf! Merveilleux.
Alors, bienvenue. Bonjour. Merci beaucoup pour la qualité de votre mémoire,
de votre réflexion en un court laps de
temps. Alors, je vais essayer de parcourir quelques commentaires et questions
que j'ai face aux recommandations qu'on y retrouve.
Dans un premier temps, je voulais souligner,
effectivement, vous êtes les premiers qui portez attention à la recommandation 9, votre préoccupation lorsqu'il y
a une seule et même décision pour des plaintes. Alors, c'est un élément de nuance qui n'a pas été mentionné par les
groupes, précédemment, puis je trouvais effectivement qu'il y avait des impacts
et que c'était un bon aspect à ajouter.
On a parlé
largement tantôt... le ministre a posé des questions, mon collègue aussi, sur
la notion de l'affichage. Et là je me ramène un peu à la liste très exhaustive
des éléments qu'on devrait y retrouver. On vous a entendues, avec vos arguments par rapport à la liste la plus
complète possible sur les événements qui ont généré des écarts salariaux, mais
je retrouve une grande liste d'éléments
qu'on devrait y retrouver et j'ai des grandes préoccupations, évidemment,
avec... bien sûr, comme le
mentionnait, encore une fois, mon collègue, concernant particulièrement des
entreprises de plus petite taille et
le grand travail qui est lié à ça... Je n'enlève pas la vertu de la liste, mais
c'est le travail qui est derrière, donc je me préoccupe. Je vous donne un exemple : dans la liste, on retrouve la
pondération des facteurs, des sous-facteurs en lien avec l'outil d'évaluation, donc je trouve ça très
laborieux. J'aimerais avoir un petit peu d'explications sur cet élément-là
particulièrement.
• (20 h 10) •
Mme Pinard
(Marie-Ève) : Peut-être juste... au niveau des entreprises de petite
taille, il faudrait juste... Oui, ils ont moins de ressources, là,
qu'une entreprise de grande taille. Bon, en milieu syndiqué, là, dans lesquels
nous oeuvrons, le service dans lequel je
travaille, moi, on accompagne, justement, les syndicats, donc on fait
bénéficier également l'employeur de
notre expertise, là, sur la question. Mais l'exercice que l'employeur doit
réaliser, en soi, il est le même, peu
importent ses obligations d'affichage, donc, si... tout dépendant, là, de la
grosseur, là, les modalités d'application sont différentes, là, mais, je veux dire, il va devoir évaluer les emplois,
ce n'est pas parce qu'il est dans une entreprise de petite taille qu'il
n'aura pas à évaluer les emplois. Donc, ce qui figure à la liste, dans le
mémoire, la liste qu'on souhaite voir
apparaître à l'affichage, c'est des éléments qu'il va devoir produire de toute façon, il ne doit pas les produire en sus, là. Donc, c'est vraiment... si le processus est fait correctement, il va
devoir passer au travers de ça. Donc, pour nous, ce n'est pas nécessairement
une contrainte additionnelle, c'est juste plus de transparence pour nous aider
à mieux comprendre le processus.
Mme Sauvé : Et toujours... merci
pour votre réponse. En même temps, j'ajoute un peu à la complexité, mais j'entends ce que vous dites, la complexité d'avoir
une liste aussi importante, parce que je regarde les éléments qui risquent
d'évoluer dans le temps, et il y a des éléments qui vont rester fixes, mais je
prends, par exemple, bon, si l'outil d'évaluation utilisé change, est modifié, est bonifié, bien,
c'est un élément qu'il faut changer plus fréquemment. Et donc il y a
des éléments qui vont rester fixes.
Je suis juste
préoccupée par une certaine complexité de tenir ça à jour. Vous avez le souci
de la transparence, alors comment
l'employeur réussit à tenir ça à jour, alors qu'il y a des éléments qui
évoluent de façon plus fréquente et d'autres qui restent
fixes? C'est un peu...
Mme
Senneville (Caroline) :
Mais, en même temps, c'est toujours la même réponse : S'il a changé d'outil, bien,
il existe, l'outil nouveau qu'il a utilisé, qu'il nous le dise.
Mme
Sauvé : Je vais à d'autres recommandations, je vais à la recommandation 16, je trouve que c'est un élément
excessivement intéressant de dire que, vraiment, il y a une obligation pour
l'employeur de répondre... on a parlé beaucoup, on a
entendu les autres groupes aussi en parler, de l'importance de l'information.
Alors donc, d'avoir cette possibilité-là de
recours-là, d'avoir accès à une information additionnelle pour tout salarié qui
demande, je trouve que c'est un ajout qui est fort pertinent et fort
intéressant, je voulais le souligner.
Dans la recommandation 20... Combien de temps me
reste-t-il?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
1 min 49 s.
Mme
Sauvé : O.K. Rapidement,
rapidement, la recommandation 20. Quand vous balisez l'objectif de l'évaluation
du maintien de l'équité salariale, n'y aurait-il pas lieu d'ajouter à ce que
vous avez déjà nommé l'évaluation aussi d'activité d'information, justement?
Mme Pinard (Marie-Ève) : Mais, en
réalité, si on souhaitait bonifier le 20, là, ce serait de reprendre les quatre étapes du programme d'équité initial. Dans le fond, là, c'est vraiment ce que je vous ai expliqué tout à l'heure, c'est : l'identification des événements doit être distincte du fait de savoir quels
événements génèrent des correctifs. Parce que c'est ça qui permet aux
salariés de comprendre si, effectivement, les événements qu'eux ont identifiés
ont été pris en compte. Donc, il y a énormément
de plaintes qui sont dues juste au fait de cette non-information-là ou de cette
mauvaise compréhension là de ce qui a été fait par l'employeur seul, là.
Mme Sauvé : Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Merci pour cet échange. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.
M.
Ouellet : Oui, merci. On va
aller au fond du sujet. Vous avez fait un plaidoyer sur, justement,
l'article 23 sur les
mesures transitoires. Selon vous, pourquoi, dans le projet de loi en question, ces dispositions-là sont incluses? Est-ce que c'est exclusivement pour que ça coûte moins
cher ou il y a un fondement juridique qui fait que c'est la
chose à faire? À vous entendre, ce
n'était pas la bonne chose à faire, et, à vous entendre, ce serait encore
contestable. Donc, j'aimerais que vous m'expliquiez quel est le
leitmotiv derrière cette disposition-là. Première question. Et rapidement
aussi...
Mme Pinard
(Marie-Ève) : Peut-être
juste rapidement, là, nous, la seule raison qu'on y voit, puis là
c'est une déduction, là, c'est que,
dans le projet de loi, on souhaite indiquer la date de début et de fin
des événements, puis la seule raison pourquoi on voit ça, c'est pour pouvoir jouer la hauteur du
correctif, mais la loi prévoit qu'on ne peut pas baisser le salaire équité, dans le fond, donc en
l'appelant forfaitaire, on ne parle pas de salaire, et donc, à ce moment-là, on pourrait jouer à la baisse, c'est notre déduction.
Mme Duquette (Marilyne) :
Assurément, l'absence de rétroactivité vise simplement à ne pas débourser des
sommes additionnelles.
M.
Ouellet : De le garder juste
un an dans ce cas-là, c'est ce que je comprends. J'aimerais avoir
votre interprétation, maître, sur, justement, les indemnités forfaitaires. La plupart
des mouvements syndicaux nous ont dit que ça devrait être des ajustements, les gens de la Fédération des
chambres de commerce ont dit : Non, non, une indemnité forfaitaire inclut
aussi... peut inclure, dans le fond, les
cotisations pour ce qui est du régime de retraite, entre autres, et autres
sommes qui auraient pu être versées aux salariés. Quelle est votre
interprétation de ça?
Mme
Duquette (Marilyne) : Mais, en fait, dans la loi, il n'y a pas
d'interprétation, comme au niveau fédéral, où la rémunération comprend
le forfaitaire. Donc, c'est la raison pour laquelle on entend ce que le
ministre dit, mais, en fait, ce qu'il dit
n'est pas le reflet de ce qui est rédigé. Alors, s'il veut être conséquent, il
n'a qu'à changer les dispositions ou
la formulation du terme «forfaitaire» pour indiquer ajustement salarial, auquel
cas ça va davantage refléter... Parce qu'un forfaitaire, on le dit, c'est comme
un bonus, hein, donc ce n'est pas inclus dans votre échelle salariale, ça ne
vient pas modifier votre salaire en
conséquence, c'est comme : on vous le donne par la suite. Donc, ça ne sera
pas non plus tenu en compte dans les
autres lois sociales, là. Comme on disait, une personne en congé de maternité
actuellement ne se verrait pas,
malgré un bonus octroyé, ne verrait pas son échelle salariale augmenter. Donc,
on n'en tiendrait pas compte, de ce nouveau salaire augmenté, dans le
cadre de nouvelles prestations. Donc, ça a un impact encore plus large ici.
M.
Ouellet : Et donc elle ne se
verrait pas verser non plus les prestations de retraite reliées à ce
montant-là, selon votre interprétation.
Mme
Duquette (Marilyne) : Assurément, non, puis il n'y a aucune raison non
plus de croire que, si la personne prendrait sa retraite aujourd'hui,
qu'il y aurait de l'étalement du forfaitaire que cette personne-là va recevoir
aussi. Ce forfaitaire-là, parce qu'elle a
quitté, elle a eu un départ ou qu'elle est à la retraite, c'est possible
qu'elle ne l'ait pas parce que c'est du forfaitaire, ce n'est pas des
ajustements salariaux.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Votre temps est écoulé. Merci pour
l'échange. Maintenant, je cède la parole au député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M.
Leduc : Merci. Merci de votre présence ce soir. Passer après le
souper, ce n'est jamais facile. Il y a des gens qui sont passés avant vous aujourd'hui qui ont fait référence au fait
qu'il existerait des plaintes qu'on a qualifiées de frivoles à la CNESST, qui réclamaient qu'il y ait le
pouvoir de pouvoir, justement, s'en débarrasser. Est-ce que, selon vous, ça
existe? Si oui, dans quelle proportion? Est-ce que vous êtes au courant de ça?
Est-ce que ça vous inquiète?
Mme
Senneville (Caroline) : Non,
pas du tout. Ce qui nous inquiète, c'est qu'il y ait des écarts
salariaux qui ne soient pas réglés parce que...
Ce qui nous inquiète, c'est que des personnes, des salariés, majoritairement
des femmes, continuent des fois de travailler, de livrer une prestation
de travail qui n'est pas pleinement reconnue par le salaire. Puis la proposition notamment du forfaitaire, en tout cas, dans le langage
courant, là, une rétro puis un forfaitaire, ce n'est pas la même chose. Tout le monde a signé des conventions collectives qui
avaient un effet rétroactif, notre salaire était réajusté. Un forfaitaire, ce n'est pas... comme Me Duquette le
disait, si on dit que ça peut être autre chose que ce que c'est normalement
entendu, un forfaitaire, ce n'est pas notre lecture de la loi.
M.
Leduc : Un autre aspect qui
a été abordé par des groupes avant vous aujourd'hui, c'est l'étalement
du forfaitaire sur la période qui
peut être jusqu'à sept ans, là, c'est quatre ans permis puis jusqu'à
sept ans. Je ne me rappelle pas si vous aviez une recommandation précise
là-dessus. Mais est-ce que vous ne pensez pas qu'il y a un danger, en
permettant l'ouverture jusqu'à
sept ans, que ça devienne un peu systématique, finalement, par les employeurs
et qu'ils en profitent abondamment, d'où l'intérêt peut-être de mettre
que la CNESST...
Mme
Senneville (Caroline) : Oui,
on a une recommandation, je ne suis pas bonne dans les numéros, mais ce
qu'on dit, c'est que, lors de
l'exercice initial, ça passe par la commission, c'est la commission qui permet un
étalement. Ça doit être plutôt comme ça plutôt que sans condition. Puis,
pour le numéro, c'est...
Une voix : 9.
Mme Senneville (Caroline) : 9.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Une
minute.
M.
Leduc : Ah! il me reste du
temps, je vais en profiter pour aborder quelque chose qui a attiré mon
attention, la recommandation 22, sur le fait de ne plus exclure nommément les étudiants, étudiantes.
Pouvez-vous nous en parler un peu plus pendant la minute qu'il nous
reste?
Mme
Senneville (Caroline) : Oui,
c'est parce que la Loi des normes a été modifiée, la Loi des
normes du travail, pour éliminer les disparités de traitement, notamment
par rapport aux étudiants. Puis on pense qu'il y a
un travail de concordance à faire, là. Dans la mouture actuelle de la
Loi sur l'équité salariale, il pourrait y avoir dissonance, disons, là, par
rapport au droit des étudiantes en termes d'équité salariale, étant donné la
nouvelle... la loi qui a été promulguée le 12 juin dernier.
M. Leduc : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Bien,
c'est bon. Alors, je vous remercie toutes et tous d'avoir contribué aux travaux de la commission. Je remercie
particulièrement Mmes Senneville, Duquette et Mme Pinard de la Confédération
des syndicats nationaux.
Alors,
écoutez, la commission ajourne ses travaux. On se retrouve, pour nous, demain,
le 27 février, à 15 h 45. C'est bien cela? Alors, bonne
soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 20 h 19)