(Onze heures trente-sept minutes)
La
Présidente (Mme Richard) : Donc, à
l'ordre, s'il vous plaît! Donc,
bonjour. Et, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
de l'économie et du travail ouverte.
Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur les normes du
travail et d'autres dispositions législatives afin principalement de faciliter
la conciliation famille‑travail.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Lamontagne
(Johnson).
Auditions
(suite)
La
Présidente (Mme Richard) : Merci. Nous entendrons, cet avant-midi, les
Manufacturiers et exportateurs du Québec et le Conseil canadien du
commerce de détail.
Et notre premier groupe est le secteur
manufacturier et exportateurs du Québec. Bonjour, Mme Proulx, M. Poirier. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vais vous céder la parole. Et vous avez un
temps environ de 10 minutes pour
nous faire votre exposé. Et par la suite il y aura des échanges avec
les parlementaires. Donc, Mme Proulx, je présume, c'est
vous qui allez prendre la parole.
Manufacturiers
et exportateurs du Québec (MEQ)
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait. Excellent! Merci. Alors, bonjour à tous. Très heureux d'être ici.
Merci à la commission de nous avoir invités à venir présenter le point de vue des manufacturiers sur ce projet
de loi. Alors, avant de rentrer dans les principales recommandations que l'on a faites dans le cadre du mémoire, je voulais juste prendre
quelques instants pour nous remettre en
contexte par rapport à l'environnement, le contexte économique dans lequel
travaillent nos membres, dans lequel travaillent les manufacturiers.
Le Québec compte 23 000 entreprises
manufacturières, qui emploient 450 000, 475 000 employés. Alors,
sur les 23 000 entreprises,
il y en a 22 000 qui emploient moins de 100 employés et 1 000
qui emploient plus de 100 employés. Donc, on le sait, une très grande proportion de PME, avec tous les défis
que ça compose, mais également de très grands employeurs, qui sont des grands donneurs d'ordres et qui emploient
beaucoup de personnes, beaucoup de travailleurs à travers le Québec. Ces entreprises travaillent
dans un contexte particulier, d'une part, de rareté de main-d'oeuvre et,
d'autre part, je dirais dans un contexte d'environnement d'incertitude
économique internationale.
Alors, je
vais commencer par la rareté de main-d'oeuvre. Je sais qu'on en a beaucoup
parlé, beaucoup entendu parler. Dans
les dernières années, on parlait de main-d'oeuvre spécialisée, mais on
constate, chez les manufacturiers dans les dernières années, particulièrement la dernière, une rareté de
main-d'oeuvre au niveau des métiers non spécialisés. Alors, nous avons mis en place un comité en décembre
dernier. 70 % de nos membres manufacturiers, et c'est
particulièrement vrai en région, manquent de main-d'oeuvre non spécialisée.
Donc, non spécialisée, souvent, on ne demande pas un secondaire V.
• (11 h 40) •
Et je donne deux exemples très, très concrets de
ce que vivent nos membres sur le marché. Alors, on a une entreprise qui est à Plessisville, qui emploie
600 personnes, 60 millions de chiffre d'affaires. Cette entreprise-là
refuse 1 million de commandes par mois,
faute de main-d'oeuvre. Donc, elle n'arrive pas à répondre à la demande. Elle ne peut même
pas penser à exporter parce qu'elle manque de main-d'oeuvre.
J'ai un autre
membre qui est en Estrie, qui, elle, emploie 600 personnes. Elle a recours
à des agences de placement pour 100 employés non spécialisés. Ça
lui coûte entre 60 000 $ et 100 000 $ par semaine de frais
d'agence.
Alors, qu'est-ce qui est commun à ces
entreprises-là? C'est vraiment l'enjeu de la compétitivité. La rareté de
main-d'oeuvre a un impact très direct sur la compétitivité du secteur
manufacturier.
Le deuxième
facteur qui est important, c'est l'environnement d'affaires. Alors, on le sait,
avec l'ALENA, ça a créé beaucoup d'incertitudes, beaucoup d'entreprises
qui retardent leur projet d'investissement au Québec, qui choisissent d'investir à l'international. Et, quand on ajoute
la réforme fiscale américaine, ce que cela vient faire, c'est qu'on est
de moins en moins attractifs, de moins en moins concurrentiels.
Alors, je vous
présente ces deux-là pourquoi? Parce que, lorsqu'on a présenté le projet de loi
à nos membres, lorsqu'on les a consultés,
puis on a consulté la petite, la moyenne et la grande, le premier réflexe, la
première chose qu'ils nous ont dite, c'est : Pourquoi? C'est tellement difficile pour
nous d'opérer présentement au Québec, c'est tellement difficile dans un
contexte de rareté de main-d'oeuvre, pourquoi est-ce que le gouvernement vient
nous ajouter cette couche additionnelle?
Pourquoi cette réglementation additionnelle là? Et je vous le traduis tel que
ça m'a été dit autant par écrit qu'à l'oral parce que ça donne le ton un
peu à leur réception de ce projet de loi là.
Ceci
étant dit, on a étudié le projet de loi, et il y a, je vous dirais, trois
secteurs ou trois priorités sur lesquels nous sommes davantage préoccupés. Alors, la première concerne les agences de
placement et de recrutement. Je le mentionnais, nos membres utilisent
beaucoup les agences, ce sont des partenaires, pour les besoins temporaires,
mais de plus en plus des besoins permanents
également. Pourquoi? Bien, parce qu'il n'y a pas de main-d'oeuvre. Alors, elles
n'ont pas le choix. Je reprends
l'exemple de l'entreprise en Estrie. Elle a besoin de 100 employés non spécialisés
de façon permanente; elle fonctionne avec des agences uniquement. Alors,
les agences sont des partenaires importants.
Ceci étant dit, et
quand on utilise autant d'agences et autant de main-d'oeuvre temporaire,
nécessairement, il y a des défauts de
fabrication, il y a des retards de
fabrication, et ça a un impact sur la qualité, ça a un impact sur les
coûts et, encore une fois, sur la compétitivité. Alors, lorsqu'on
ajoute dans le projet de loi la clause sur laquelle ils sont solidairement
responsables des obligations pécuniaires,
les employeurs nous disent : Pourquoi? Nous, notre contrat, il est avec
l'agence. Et, sachant qu'on vient encadrer
davantage les agences, qu'on oblige des licences, et on n'est pas contre ça, on
est conscients qu'il y a eu certaines
problématiques, il y a eu des agences fautives, peut-être une minorité, mais,
quand même, on n'est pas contre le
principe, pourquoi est-ce qu'en plus on doit tenir les manufacturiers
solidairement responsables avec les agences? Alors, encore une fois, c'est une contrainte additionnelle que l'on
ajoute aux entreprises manufacturières. Elles sont, bien sûr, d'accord à s'assurer qu'elles aient leurs agences,
mais de là à les tenir responsables si les agences ne paient pas les
employés ou ne les rémunèrent pas adéquatement, pour nous, c'est d'aller un peu
trop loin. C'est encore une fois de restreindre la compétitivité du secteur
manufacturier.
Le
deuxième point, c'est les disparités de traitement. Alors, plusieurs de nos
membres sont passés, avec le temps, d'un
régime à prestations déterminées. Ils ont fait le transfert et ils ont fait le
changement déjà. Mais pour celles qui ne l'ont pas fait encore, qui ont le privilège de pouvoir offrir ça à leurs
employés, lorsqu'ils voient le projet de loi arriver, ils se disent : Est-ce qu'on serait mieux de le
changer tout de suite? Est-ce qu'on serait mieux de le fermer tout de suite?
Parce qu'on ne le sait pas, dans cinq ans,
10 ans, 20 ans, comment le marché va évoluer, comment le marché de
l'emploi va évoluer également. Donc,
advenant que ça se fasse, on pénalise des employés qui auraient pu bénéficier
de conditions très avantageuses.
Alors,
pour nous, la clause de disparité de traitement ne devrait pas s'appliquer au
régime de retraite. On devrait permettre
aux employeurs, leur donner la flexibilité d'offrir les conditions qu'elles
peuvent offrir à leurs employés dans le contexte actuel, dans le marché actuel. Et, si, dans cinq ans,
10 ans, 15 ans, elles considèrent qu'elles ne sont plus
capables de le faire, bien, elles vont
devoir le couper, tout simplement, on va avoir donné la chance à des employés
d'en bénéficier. Et les jeunes, quand
ils rentrent sur le marché du travail aujourd'hui, ils ne s'attendent pas à
avoir les mêmes conditions que leurs
parents ou leurs grands-parents avaient. Ils sont très conscients que la
réalité a changé. Et d'ailleurs je pense que le projet de loi, quand on parle de conciliation travail-famille, quand on
parle de vacances additionnelles, vient répondre à leurs préoccupations.
Alors, pour nous, encore une fois, c'est l'une de clauses qui ne devraient pas
être intégrées au projet de loi.
La
dernière, et qui a peut-être été moins discutée, je pense, ici, c'est le droit
de refus de travailler. Alors, ça dit essentiellement
qu'un employé peut refuser s'il n'y a pas eu un préavis de cinq jours. Mais
dans la réalité, dans le secteur manufacturier,
parfois, si on pense au secteur de la construction, des entreprises qui sont
dans les matériaux de construction, il
peut y avoir des retards de livraison sur les chantiers, il peut y avoir un
bris d'équipement qui fait en sorte que l'usine va fermer pendant un jour, deux jours, trois jours et qui
fait en sorte qu'on doit changer les horaires. Les employés doivent se
présenter.
Alors,
c'est sûr qu'on est tous pour la conciliation travail-famille, qu'on veut être
capables de prévoir à quel moment on
va travailler, mais, quand même, il y a des moments, il y a des secteurs, dans
le secteur manufacturier, où c'est difficile de prévoir et de le planifier. Et cette clause-là vient enlever la flexibilité aux entreprises de pouvoir s'adapter et de répondre à la
demande.
Et
j'ajouterais sur ce point que la rareté de main-d'oeuvre, ce qu'on voit
sur le marché, c'est que ça a beaucoup changé
les relations de travail entre les employeurs et les employés. De plus en
plus, les employeurs offrent d'excellentes conditions aux employés. Ils n'ont pas vraiment le choix, les
employés magasinent les postes, magasinent les salaires, les conditions, également. Donc, ils
redoublent d'efforts et d'ingéniosité pour proposer des conditions intéressantes, et, de plus en plus, on
sent que les employés sont partie prenante du succès de l'entreprise
et qu'ils sont capables de comprendre que,
si on a en enjeu de délai de livraison, de retard, une nouvelle commande qu'on
ne peut pas refuser, ils sont prêts à faire
cet effort additionnel et, souvent, ils sont payés au temps supplémentaire.
Alors, pourquoi, encore une fois, venir légiférer,
ici, ajouter une clause qui vient restreindre la flexibilité de l'entreprise?
Donc, ce sont les trois principales, je vous dirais, priorités sur
lesquelles nos membres sont intervenus.
J'ajouterais
un dernier point, qui concerne surtout les PME. Alors, je reviens au commentaire de départ, les gens qui nous
disent : Pourquoi on fait ces changements-là? Qu'est-ce que ça implique,
qu'est-ce que ça veut dire dans ma réalité? Et, sachant qu'on a une
grande proportion de PME qui ont très peu de gens en ressources humaines pour
pouvoir les accompagner, je pense qu'il
serait important de pouvoir accompagner ces entreprises-là,
lorsque le projet de loi sera adopté, pour pouvoir leur expliquer concrètement ce que ça implique, pour
pouvoir les accompagner dans les différentes mesures qu'elles vont devoir mettre en place, pour qu'elles puissent le planifier aussi. Alors, une autre chose qui
est revenue souvent, nos membres nous
ont dit : Ça va être mis en application quand? Est-ce qu'on va avoir un
délai raisonnable, par exemple,
par rapport à la troisième semaine de vacances pour être capable de le planifier,
de le gérer? Donc, je pense qu'il y a
un exercice de communication, mais d'accompagnement aussi, qui va être essentiel, notamment
pour les PME manufacturières.
Alors, sur ce, je tiens quand même...
je tiens à souligner, en fait, qu'on trouve que c'est une très bonne chose
d'avoir revu, d'avoir ouvert la loi sur les
normes, d'avoir fait cet exercice-là. Il
y a plusieurs mesures fort intéressantes qui visent à augmenter la
qualité de vie des travailleurs, et on ne peut pas être contre ça. Mais on veut
s'assurer de ne pas nuire à la flexibilité puis à la compétitivité du secteur manufacturier
parce qu'une fois que ça, ça se fait, c'est très difficile d'y revenir.
Et je vous ai parlé beaucoup
des PME, mais, quand on parle des grands donneurs d'ordres, ces entreprises-là,
lorsque vient le temps de faire des projets
d'investissement, lorsque vient le temps d'investir, de développer
des projets de recherche et développement, ont accès au monde, ont accès à tous les sites qu'ils ont à travers le
monde. Et, une fois qu'ils quittent,
ils ne reviennent pas. Puis ça, il ne faut pas l'oublier. Il faut en tenir
compte dans chacun des règlements, des lois qu'on met en place et s'assurer que, globalement, on ne vient pas nuire
aux investissements et à la compétitivité de ce secteur. Je
vous remercie.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, Mme Proulx, pour votre exposé. On va débuter la période d'échange. Mme la ministre, vous
avez la parole.
Mme Vien :
Oui, Mme la Présidente. Bonjour à tous. Bon matin. Bonjour, Mme Proulx,
bonjour, M. Poirier, bienvenue à l'Assemblée nationale.
Qu'on vienne réguler
les agences, vous n'êtes pas contre ça?
Mme Proulx
(Véronique) : On n'est pas
contre. On n'est pas contre qu'on vienne réguler. On comprend qu'il y a
un besoin d'encadrement. On comprend qu'il y a eu certaines agences qui ont été
fautives, effectivement.
Mme Vien :
Vous dites : On remarque que de plus en plus de manufacturiers font appel
à des agences de placement. J'ai noté
«utilisent beaucoup les agences», là, c'est ce que vous venez de nous
dire, et c'est de façon de plus en plus permanente, là. C'est quelque
chose que vous remarquez dans votre secteur?
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait, je vais vous reprendre l'exemple...
Mme Vien :
Pouvez-vous nous l'illustrer?
Mme Proulx
(Véronique) : Oui, tout à fait. Alors, l'entreprise dont je parlais, puis je reprends le même exemple
parce qu'il illustre bien la situation
que vivent d'autres entreprises, ils ont 700 employés, 100 d'entre eux...
Ils ont besoin de 100 employés
non spécialisés, ils ne les trouvent pas en région. Donc, ils travaillent avec
une agence qui est à Montréal. Alors, sur les 100 postes,
annuellement, il passe 600 personnes différentes.
Donc,
ils utilisent l'agence, ils n'arrivent pas à combler le poste, tu sais, les
gens sont à Montréal, ils s'en vont en Estrie, ce n'est pas
évident, les conditions ne sont pas idéales. Ils préféreraient de loin
embaucher des gens en région probablement pour leur offrir un fonds de pension et des
conditions à moyen et à long terme plus intéressantes, mais ils
ne peuvent pas le faire, donc ils passent par les agences. Et on le voit de
plus en plus, effectivement.
Mme Vien : Le Conseil
du patronat, hier, puis j'ai questionné aussi, là-dessus, la Fédération des
chambres de commerce du Québec, je ne
sais pas si vous avez pris nos travaux hier, mais le Conseil du patronat, il semblait
dire : Non, non, ce n'est pas
tant... c'est plus occasionnel ou c'est pour pallier à des besoins plus
ponctuels, et tout ça. Nous, on n'a pas nécessairement tout le temps
cette lecture-là, puis c'est effectivement ce que vous nous dites aujourd'hui,
hein, puis il y en a d'autres qui l'ont
soulevé aussi, hein, notamment... c'était la Direction, hein, de la santé
publique? C'est ça. Hier.
• (11 h 50) •
Mme Proulx
(Véronique) : Ça varie peut-être en fonction des secteurs d'activité, mais c'est clair que, dans le manufacturier, je pense au comité qu'on a mis en
place, la plupart d'entre eux utilisent des agences de placement pour
répondre à des besoins qui ne sont pas saisonniers, qui sont permanents.
Mme Vien :
La cosolidarité en cas de non-paiement des dus pécuniaires, vous n'êtes pas à
l'aise avec ça?
Mme Proulx
(Véronique) : Bien, en fait,
c'est qu'un employé a déjà un
recours. Sachant en plus que les agences, maintenant, sont réglementées et qu'il y a des licences, ils ont déjà un
recours, pourquoi est-ce qu'on vient tenir l'employeur…
Mme Vien :
Parce qu'on veut être sûr qu'ils soient payés. Il y a déjà une disposition à 95
qui... aux normes du travail qui le spécifie.
Nous, on vient renforcer le message, on vient être encore, je
pense, plus précis. Mais ce que
vous nous dites aujourd'hui : on n'aurait pas eu besoin de faire ça.
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait. Ce n'est clairement pas le souhait des employeurs, des manufacturiers,
d'avoir cette clause-là, d'avoir cette obligation additionnelle là.
Mme Vien :
Elle existe.
Mme Proulx
(Véronique) : C'est-à-dire que, présentement, ce que je
comprends, c'est que la loi vient
clarifier qu'effectivement l'employeur est également tenu responsable, alors
qu'avant il y avait un certain flou dans la loi, à moins que... Je suis
dans l'interprétation, c'est ce que je comprends.
Mme Vien :
En tout cas, là, ça sera clair. Ça sera clair.
Mme Proulx,
on vous a entendue sur les trois points que vous avez soulevés. Je vous en
remercie. On va en prendre, bien sûr,
bonne note, et puis, quand viendra le temps de faire tout l'arbitrage qu'il est
possible de faire, on regardera vos opinions.
Mais il y a d'autres éléments que contient le projet de loi. Puis je suis
contente parce que, tu sais, en même temps, vous dites que, nous, il y a des choses qui nous chicotent un peu, mais
on trouve que, dans l'ensemble, c'est franchement une belle avancée, c'est une bonne idée de l'avoir
ouverte que cette loi-là, hein? Une loi qui n'est pas ouverte très, très
souvent. Adoption en 1979, première
ouverture, 1990, ensuite 2002, puis aujourd'hui, en 2018. J'aimerais ça vous
entendre sur un certain nombre de choses
qu'on a mises à l'intérieur du projet de loi, comme, par exemple, cette
spécification ou de cette précision
du harcèlement sexuel, qui est inclus à l'intérieur de ce qu'on comprend du
harcèlement psychologique. Comment vous trouvez ça?
Mme Proulx (Véronique) : Mais
c'est très positif. Je pense que c'était nécessaire de pouvoir l'intégrer et de
pouvoir en tenir compte. Encore une fois,
les choses évoluent, puis je pense que ça doit... on doit donner... on doit
pouvoir intégrer ça dans la loi. Mais
j'ajouterais aussi... je reviens à la notion d'accompagnement, surtout pour la
PME, de s'assurer qu'elle est outillée pour être capable de la mettre en
place.
Mme Vien :
En fait, nous, ce qu'on dit, c'est, d'une part, ce qui n'était pas dit va
devenir nommément compris, c'est-à-dire
que le harcèlement sexuel fait partie du harcèlement psychologique. Il va être
dit et écrit. Et on va venir exiger de chacun des employeurs l'adoption
d'une politique et qu'elle soit évidemment diffusée à l'intérieur de
l'entreprise.
Mme Proulx
(Véronique) : Oui. Puis on avait d'ailleurs cosigné une lettre avec
les associations patronales et syndicales
pour nommer que c'était également important que les entreprises reconnaissent
cette problématique-là et puissent agir
en cas de besoin. Lorsqu'on parle de mettre en place une politique, je reviens
encore à la PME, lui donner des outils, de l'information, etc., c'était
sur ce point-là que je voulais...
Mme Vien :
La CNESST, sur cette question-là, le mandat très clair qu'elle a reçu de chez
nous, c'est : On ne veut pas des
affaires compliquées. On veut des affaires simples qui vont atterrir facilement
puis qui vont être comprises de tout le monde.
Proche
aidant. Chez les manufacturiers, c'est très certainement quelque chose qui va
toucher aussi comme dans la... ailleurs,
dans d'autres entreprises. On est tous, à un moment dans notre vie, un proche
aidant ou une proche aidante. Ça, c'est la reconnaissance, c'est une
première, là.
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait. Ce qui est très positif encore une fois
puis qui a été bien reçu. Il n'y avait pas d'enjeu spécifique, là. Je
reviens à ce que je disais d'entrée de jeu, c'est vraiment un marché où les
employés magasinent leur emploi. Alors, les
entrepreneures font des pieds et des mains pour pouvoir offrir des meilleures
conditions. Puis une clause comme celle-là
n'est pas une contrainte et, souvent, peut être offerte aux employés actuels
justement parce qu'ils essaient de donner le plus d'avantages ou de
bénéfices possible à leurs employés, le plus de flexibilité.
Mme Vien :
On ramène, nous, de cinq à trois ans la durée continue à l'emploi pour avoir
droit à trois semaines de vacances. Chez les manufacturiers, est-ce que
c'est déjà quelque chose qui était acquis?
Mme Proulx (Véronique) : Dans
plusieurs cas, ça l'était déjà. Donc, je n'ai pas beaucoup de membres qui
n'étaient pas déjà à ce...
Mme Vien : Ce n'est pas
un enjeu.
Mme Proulx
(Véronique) : Non, non, pas
du tout, pas du tout. J'ai eu une entreprise qui m'est revenue en
me disant... en fait, quelques entreprises
qui nous ont dit : Pour celles qui ne l'offrent pas, quel sera le délai
pour qu'on puisse le mettre en place et le planifier? Mais, pour la
plupart des entreprises manufacturières, c'est déjà un acquis.
Mme Vien : Évidemment,
pour ce genre d'article, qui va susciter des déboursés supplémentaires pour les
entreprises, il y a une période tampon, là. Ça n'entre pas nécessairement... de
mémoire, ça n'entre pas... ça entre le 1er janvier.
Admettons que c'est adopté au 15 de juin, c'est une mesure qui va être mise
en place le 1er janvier 2019. Donc, ça laisse le temps aux
entreprises.
Mme Proulx,
merci beaucoup pour votre contribution, M. Poirier, merci
de vous être déplacés ce matin. Ce sera tout pour moi, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Richard) : Merci
beaucoup, Mme la ministre. Et je cède maintenant la
parole à M. le député de Beauharnois, qui est porte-parole
en matière de travail pour l'opposition officielle.
M. Leclair : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Poirier, Mme Proulx,
bienvenue et merci pour votre mémoire. Bien
entendu, vous n'êtes pas le premier groupe que nous entendons, mais... qu'on
commence à être pas mal autour des mêmes
sujets. Alors, je vais quand même aller sur les agences de placement parce qu'on a comme deux visions des...
Bien, j'ai deux visions des agences de
placement : une avant le début des auditions et une aujourd'hui. Alors vous,
vous nous dites que, dans le monde manufacturier,
il y a beaucoup de petites PME. Donc, ça semble vouloir être un nouveau modèle d'affaires, de dire : Bien, nous, on n'aura
pas les ressources humaines à fond. On va plutôt faire affaire avec des
agences. Est-ce que je me trompe?
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, c'est une obligation. Elles le font parce
qu'elles n'ont pas le choix de le faire. Elles préféreraient avoir des
employés permanents, employés, plutôt que de passer par des agences, mais,
faute de main-d'oeuvre, et ce n'est pas
juste dans la PME, c'est aussi dans les grandes entreprises, elles passent par
des agences.
M. Leclair :
O.K. Donc, leur souhait serait le contraire.
Mme Proulx
(Véronique) : Tout à fait.
M. Leclair : Donc, si, dans les agences de placement, on sait que la ministre va
venir avec des permis, et tout ça, qu'on
va légiférer, encadrer, en tout cas beaucoup mieux que ce qu'on faisait, parce
que l'encadrement ne semblait pas là, si on va... Il y a certains
groupes qui nous ont dit : Bien, il y a même l'Ontario, puis ils nous ont
amené des exemples d'encadrement, de dire
que, pour une agence de placement... parce que je retiens très bien, là, vos
coûts additionnels. Vous dites :
Là, nous, là, arrêtez les coûts. On est des petites PME, là, ils en ont plein
la casquette. Mais, en Ontario, ils spécifient. Ça prend un permis pour être une agence, et ensuite l'utilisation de
l'agence, il y a des contextes. C'est un travail qui est très ciblé. Exemple, là, pour une année, on fait telle
chose, on va passer par une agence pour ces employés-là, ce type
d'employé là, ou bien donc pour un remplacement à moyenne, courte durée. Mais
on ne parle pas de permanence.
Et
plus qu'on entend des groupes, plusieurs groupes nous le disent : Bien, on
n'a pas le choix, on tombe dans la permanence.
Alors, est-ce que vous suggéreriez que, lorsqu'on prend une agence, qu'on les
balise puis qu'on dit : Bien, après
un certain temps, il devient un employé. Il a le droit de faire le transfuge
entre étant de l'agence puis... parce que vous le dites, là, à force d'aller avec des agences, bien, c'est de la
qualité inférieure de travail, des rendements, et tout, et tout. Vous voulez que cette personne-là reste
permanente. On ne veut pas faire affaire avec des nouvelles personnes. Est-ce
que vous aimeriez qu'on légifère jusqu'à
dire : Après un certain temps, il a le droit de passer à employé permanent
chez vous?
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, je reprends mon exemple en Estrie, l'entreprise
est prête à les prendre, mais ce ne
sont pas des gens qui sont très mobiles, qui sont prêts à se déplacer en
Estrie. Il n'y a pas d'hébergement, il n'y a pas de transport en commun.
C'est plutôt ça, la problématique. C'est que les employeurs sont prêts à les
prendre, mais il faut avoir... c'est toute
la question de la régionalisation de l'immigration, en fait, qui est le défi,
d'être capable d'amener les immigrants
en région. Puis là je parle d'immigrants parce qu'on sait qu'on a un bassin de
travailleurs issus de l'immigration où
le taux de chômage est un peu plus élevé à Montréal. Alors, c'est ces gens-là
qu'on voudrait pouvoir amener en région, faire le pont avec les besoins des entreprises, mais également
travailler avec la MRC, les syndicats, les écoles pour être capables de développer des facilités pour les
garder en région. C'est là où est le problème. Et les agences viennent
juste pallier de façon temporaire. Ce n'est
pas idéal pour les employés, ce n'est pas idéal pour l'employeur non plus.
Donc, je ne serais pas portée à dire qu'il faut légiférer davantage.
M. Leclair : Je vais vous dire, je ne vous suis pas vraiment dans votre explication
que vous venez de faire, parce que
moi, je me mets à la place d'une de vos entreprises que vous représentez, puis
il dit : Bien, nous, là, on fait affaire avec une agence, puis cette personne-là devient quasi permanente, comme
vous avez expliqué dans plusieurs des cas. Alors, si la personne travaille via une agence, est,
exemple, en Estrie dans une manufacture, c'est quoi, la différence d'être
engagée par une agence ou par vous, là? Il faut qu'elle se loge, il faut
qu'elle soit là?
Mme Proulx
(Véronique) : ...qu'il y a un roulement important. Je reprends
l'exemple de l'Estrie, il y a 100 postes, il y a 600 personnes qui passent dans ces 100 postes là. Les
gens ne restent pas. Il y a un roulement très, très important. La nuance
est là. Si on pouvait les prendre...
• (12 heures) •
M. Leclair : Donc, vous faites affaire en permanence
avec une agence, mais ce n'est pas le même employé qui est là pendant
l'année.
Mme Proulx
(Véronique) : Exactement, exactement, oui.
M. Leclair :
O.K., O.K., c'est complètement un autre contexte. O.K., je vous remercie de la
précision.
Je
vous apporte sur disparité de traitement. On a entendu plusieurs
groupes dire : Bien, il y a
souvent plusieurs modèles qui vont
s'offrir à nous dans le futur. Et vous avez pris l'exemple : Ce n'est pas
nécessaire que le régime de retraite que
mes grands-parents ou mes parents avaient, que ce serait l'idéal pour moi.
Donc, il y a peut-être d'autres modèles d'affaires.
Est-ce
que vous seriez d'accord avec... lorsqu'on parle de disparité de traitement, de
dire : Bien, avoir une table, avoir
un endroit que les gens peuvent discuter, qu'ils soient vraiment chapeautés par
les normes du travail pour dire : Bien, on peut trouver des régimes équivalents sans dire : C'est tout un,
tout l'autre, est-ce que vous êtes de cette opinion-là?
Mme Proulx
(Véronique) : C'est-à-dire de trouver des alternatives?
M. Leclair : Un régime équivalent. Parce que, si on parle de
disparité de traitement dans les régimes de retraite, tantôt, vous, vous avez plus spécifié : On ne
touche pas à ça du tout. Ce serait votre souhait. Je ne pense pas qu'on
s'en aille là, on dit : On n'aura plus
de disparité de traitement dans les régimes de retraite, et autres. Mais
certains groupes nous disent :
Bien, on ne veut pas nécessairement, peut-être, que ça se termine en
disant : Bon, bien, ça va être soit le plan A ou le plan B. Ils disent : Bien, il pourrait
même y avoir un plan C, en autant que le régime soit équivalent à ce que les
autres ont, pour ne pas qu'il y ait une disparité.
Mme Proulx
(Véronique) : Bien, en fait, quand qu'on regarde les entreprises qui
ont fermé ces régimes-là, c'est qu'elles
n'avaient pas nécessairement les moyens. Alors, un régime équivalent, si le
coût est le même, si le marché a évolué, ça ne fonctionne pas. Je vois mal comment on peut arriver à un régime
équivalent, mais qui coûte moins. Vous me suivez? J'ai de la difficulté...
M. Leclair : Ça, c'est le défi.
Mme Proulx (Véronique) : Oui,
exactement.
M. Leclair : C'est le défi,
effectivement.
Je vous
apporte... le droit de refus et les cinq jours. Parfois, je trouve que c'est
incohérent lorsque j'entends les groupes
patronaux qui nous disent : On est en manque de main-d'oeuvre, on
recherche de la main-d'oeuvre, il y a une pénurie de main-d'oeuvre, puis, lorsqu'on dit : Bien, il faudrait
qu'on donne la cédule cinq jours à l'avance, là, on dit : Bien là, c'est impossible. Ça fait qu'on a beaucoup
d'ouvrage, pas beaucoup de monde, mais pas capable de donner cinq jours
à l'avance.
Mais je
comprends dans des contextes, on a entendu des gens de restauration, mais, en
manufacturier, peut-être que vous
avez d'autres réalités, parce que tout le monde a sa réalité, je ne pense pas
que ça peut être un portrait fixe pour tout
le monde. Mais, lorsque j'entends ou je me mets dans la position du cinq jours
d'avance pour un horaire de travail, j'ai toujours la même image dans ma tête. Je prends une personne
monoparentale, homme ou femme, puis qu'on lui dit : Bon, bien là, toi, il faut que tu t'occupes des
autobus, de la gardienne à la maison après l'école, et blablabla, là, si on est
dans la période scolaire, puis je me
dis : Comment qu'on peut tenter de faire semblant qu'on... tout le monde,
on est pour la vertu du...
conciliation travail-famille, et même d'autres ajoutent études? Dans la peau de
cette personne-là, là, comment est-ce qu'on peut dire : Bien, toi,
on ne te donne pas un avis de travail de cinq jours à l'avance? J'ai bien de la
misère.
Mme Proulx
(Véronique) : Je comprends très bien. Quand qu'on regarde les employés
qu'une entreprise emploie, donc, dans
le secteur manufacturier, disons qu'ils ont 100 employés sur leur quart de
travail, est-ce que c'est une minorité ou une majorité d'employés qui sont dans cette situation-là? C'est évident
que quelqu'un qui est monoparental a tout ça à gérer, ne sera probablement pas celui à qui on va demander de rester ou
qui va pouvoir rester, mais on se garde la flexibilité pour les autres qui pourraient l'avoir. Si on
légifère puis qu'on se dit : À moins de cinq jours avant, on fait quoi? On
laisse tomber la commande? On ne livre pas
le produit? Ultimement, c'est toute l'entreprise et les employés qui sont
perdants.
M. Leclair : Bien, moi, je ne le vois pas dans le contexte
qu'on ne peut pas demander du temps supplémentaire, là. Moi, je le vois plus dans le contexte des plus
petites entreprises qui n'ont pas ces conventions collectives là. Parce
que ceux qui ont des conventions
collectives, c'est clair et net, tu peux faire deux heures après ton chiffre,
c'est du temps et demi. Après, tu
tombes du temps double. Là, lorsqu'on parle des normes du travail, moi, je
pense sérieusement qu'on cadre ou on cible
beaucoup plus la plus petite PME, qui, parfois, a sûrement un certain
pourcentage qui sont plus cow-boys, puis ce n'est pas tout le monde, je ne veux pas mettre tout le monde dans le
même panier, mais je pense que les normes du travail, c'est ça qu'ils veulent venir dire, il y a un
minimum de respect dans les heures de travail et les avis de cédule. Parce
que c'est sûr, si vous me parlez d'un
endroit qu'il y a 100 employés, je suis à peu près convaincu que ça roule
assez bien. Il ne doit pas y avoir,
justement, comme vous le dites, beaucoup de cas qu'on a des problématiques.
Mais l'entreprise qui a deux, trois
employés, eux en perdent une, puis de lui dire : Bien là, si toi, tu n'es
pas... quand je te demande de faire du temps ou je change ta cédule, tu me dis non, bien, je vais
passer au suivant parce que moi, j'ai juste trois employés, je n'ai pas
l'intention d'en avoir quinze, faute de moyens, faute de blabla...
Mme Proulx
(Véronique) : Je comprends, mais là je me mets du point de vue de l'employeur. Il fait quoi? Il se retourne vers qui? Je trouve qu'on... Dans le fond, ce que je veux dire, puis je reviens à ce que je disais, les employés
ont plusieurs... présentement, on manque de main-d'oeuvre. Donc, les
employés ont des choix. Et souvent qu'on soit... peu importe notre contexte, on va faire des choix de professions puis de métiers qui conviennent à notre réalité aussi de plus en plus, si c'est le cas.
M. Leclair : Vous avez raison. Vous avez raison. C'est sûr
que, si la restauration te demande de suivre la météo, puis, si tu dis : Bien, ça ne s'adapte pas à
moi, bien, je n'irai pas travailler en restauration, effectivement. Mais en bout de piste...
La Présidente (Mme Richard) :
C'est tout.
M. Leclair : ...ça prend des normes minimales. Je crois que je
n'ai plus de temps. Je vous remercie
beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard) : Merci
beaucoup, M. le député de Beauharnois. Et je
cède la parole maintenant au député de Chutes-de-la-Chaudière et porte-parole
en matière de travail pour le deuxième groupe d'opposition.
M. Picard : Merci. Merci d'être là ce matin. J'ai bien lu
votre mémoire. Très clair. Quelques précisions. Lorsque vous dites que ça prendrait une période de
transition raisonnable, est-ce que vos membres ont défini le raisonnable pour
différentes mesures ou vous lancez ça...
Tantôt, la ministre parlait du 1er janvier pour certaines
mesures si on adopte d'ici la fin de la session. Est-ce que vous avez eu
des réflexions là-dessus, tout simplement?
Mme Proulx
(Véronique) : Je pense que,
dans un monde idéal, ça serait une année financière pour qu'on ait le temps de planifier, surtout lorsqu'on
a des projets dans des secteurs où les commandes sont planifiées longtemps d'avance. Une année financière pourrait être un délai raisonnable pour pouvoir
planifier et s'organiser en conséquence, parce que, lorsqu'on parle, par
exemple, d'une entreprise
qui n'offre pas les trois semaines de travail, même si la plupart le font,
c'est quand même une semaine additionnelle. On s'organise comment? On trouve
nos gens où?
M. Picard : Donc, une année financière, il faudrait que ça
soit en juillet 2019, parce que chaque entreprise a ses périodes financières.
Mme Proulx
(Véronique) : Oui. Je dirais
qu'au minimum, si le projet de loi est adopté, par
exemple, en juin, en avril
prochain, au minimum.
M. Picard : O.K. O.K. C'est bon. Vous avez parlé aussi tantôt, d'entrée
de jeu, là, d'éviter le plus possible des coûts additionnels, parce que vous êtes en concurrence avec nos voisins américains.
Avez-vous évalué les impacts de la réforme
fiscale américaine, là, qui... parce que vos clients, là sont... les gens que
vous représentez, leurs produits... O.K.
Mme Proulx
(Véronique) : En fait, la
réforme vient de se mettre en place. Donc, il
y a plusieurs fiscalistes
qui sont encore en train de l'analyser. Mais la première chose qui apparaît très clairement, c'est
toute la notion de la compétitivité au niveau
des crédits d'impôt à la R&D. Historiquement, le Québec et le
Canada étaient très attractifs. Beaucoup d'entreprises américaines, notamment dans le secteur
pharmaceutique, venaient faire leurs projets au Québec parce qu'on était
très, très compétitif. Avec la réforme qui a
été faite, on l'est beaucoup moins. Donc, lorsqu'on parle de multinationales
qui ont une usine ou un siège social,
même ici, lorsque vient le temps de développer des nouveaux projets, si on
pense à l'aérospatiale, les projets de R&D se font sur 25 ans,
est-ce qu'ils vont le faire au Québec, aux États-Unis ou dans un autre pays?
Alors, c'est
toujours la réflexion qu'ils font lorsque vient le temps de faire un
investissement important. Et, dans ce
contexte, la réforme fiscale vient faire en sorte qu'on est moins attractif,
moins intéressant. Et les investissements qui ne se font pas ici, bien sûr, on les perd, mais en plus on n'est pas en
train d'investir parfois pour améliorer, agrandir des usines, améliorer
la productivité de nos installations également. C'est vraiment une
préoccupation majeure.
M. Picard : O.K. Ça va
pour moi, Mme la Présidente. On a fait le tour. Merci.
La
Présidente (Mme Richard) : Merci
beaucoup, M. le député. Merci également à vous, Mme Proulx, M. Poirier,
pour votre contribution à nos travaux.
Et je suspends la commission quelques instants
afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 9)
(Reprise à 12 h 13)
La
Présidente (Mme Richard) : Donc, la commission reprend ses travaux. Mme Aubin,
M. Benoît et Mme bich, bienvenue
à l'Assemblée nationale. Vous allez avoir 10 minutes pour
nous faire part de votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les
différents parlementaires.
Donc, Mme Aubin, je pense que c'est vous
qui allez nous faire votre exposé. Donc, je vous cède la parole.
Conseil
canadien du commerce de détail (CCCD)
Mme Aubin
(Stéphanie) : Merci, Mme la Présidente. Mesdames et messieurs les membres de la commission,
mon nom est Stéphanie Aubin. Je suis
directrice, Affaires publiques et gouvernementales du Bureau du Québec
du Conseil canadien du commerce de
détail. Je suis accompagnée aujourd'hui de geneviève bich, vice-présidente, Ressources
humaines, chez Metro, et, éventuellement, mon collègue Jean-Luc Benoît,
qui est directeur des relations gouvernementales pour le Québec.
Nous tenons
d'abord à remercier la commission de nous donner cette occasion de présenter le
point de vue de nos membres sur le
projet de loi n° 176. Nous sommes toujours disponibles pour échanger et
discuter avec les membres de l'Assemblée sur les enjeux touchant les
détaillants québécois.
Le
CCCD constitue la principale organisation oeuvrant à la défense et à la
promotion des intérêts des détaillants. Le conseil regroupe plus de 45 000 établissements au Canada, dont
près du tiers sont au Québec. Il s'agit de l'une des plus grandes associations sans
but lucratif, financée par l'industrie, regroupant tous les types de
détaillants tels que les grands magasins, les magasins grand public, les
chaînes spécialisées, les magasins indépendants et les commerces en ligne.
Au Québec, le
commerce au détail emploie plus de 475 000 personnes, soit 11 %
de la population active. Le commerce de
détail génère des ventes annuelles estimées à 109 milliards de dollars et représente une activité économique de
5 % du PIB québécois.
Le CCCD saisit les objectifs
visés par le projet de loi n° 176. C'est dans cet esprit que nous avons
analysé les modifications proposées. Nous tenons d'entrée de jeu à expliquer certaines particularités du secteur. Avec les
habitudes d'achat changeantes des
consommateurs, les magasins peuvent être ouverts jusqu'à 83 heures par
semaine, voire 89 dans le domaine de
l'alimentation. Les produits vendus proviennent de plusieurs
secteurs différents; les compétences nécessaires à l'équipe des ventes varient beaucoup. Dans bien des cas, les clients peuvent magasiner
les produits 24 heures sur 24 en ligne
et au cours de plages horaires étendues en magasin. Nos membres comptent
plusieurs types d'employés, des employés à temps plein qui travaillent
de 9 à 5, cinq jours-semaine, et aussi des employés à temps partiel qui ne
travaillent que quelques heures par semaine et qui, dans bien des cas,
représentent de 60 % à 80 % des employés en magasin.
Le
bassin de main-d'oeuvre compte beaucoup d'étudiants, dont certains occupent
leur premier emploi et qui ont besoin
de flexibilité d'horaire. On retrouve aussi des gens en deuxième carrière qui
souhaitent travailler quelques heures par semaine. Chez certains
détaillants, les employés sont syndiqués.
Plusieurs
détaillants offrent déjà des mesures de conciliation famille-travail. Les
mesures sont variées, compte tenu des
besoins qui changent selon les employés et l'évolution de leurs
carrières. Un employé peut avoir ou des enfants ou pas, un conjoint, un
parent vieillissant, pour ne nommer que quelques exemples. Le défi des
détaillants reste aussi de maintenir une
équité interne, c'est-à-dire offrir différentes options qui sont équivalentes
pour répondre aux besoins variés des employés.
La
gestion des absences est aussi un grand défi. Un employé qui part en vacances
doit être remplacé, un employé qui s'absente également. Cette gestion
change aussi d'un détaillant à l'autre selon sa taille, ses heures d'ouverture
ou encore son modèle d'affaires.
Nous
anticipons quatre types d'impact pour les détaillants au Québec. Les premiers
sont d'ordre financier. Le projet de
loi ajoute des coûts aux détaillants. L'ajout de congés rémunérés pour les
salariés est un des exemples les plus faciles à démontrer. Dès qu'un employé de magasin s'absente pour maladie ou pour
des vacances, le détaillant doit le remplacer. Il doit donc payer le salaire deux fois. Les
détaillants doivent trouver une offre attrayante pour les salariés. La
troisième semaine de vacances avant les cinq ans de service continu fait
souvent partie de son pouvoir d'attraction. Imposer la troisième semaine après trois ans de service continu enlève la marge de
manoeuvre qu'ils avaient pour offrir des conditions de travail supérieures aux normes et être
concurrentiels dans le marché. Un autre exemple d'avantage concurrentiel
des détaillants est d'offrir plus de jours
de congé personnels que la loi le prévoit. Cette distinction risque aussi de
disparaître. Ces détaillants subiront la pression de trouver d'autres façons
d'attirer les candidats.
Nous croyons qu'une
période de transition plus longue permettrait aux détaillants de s'adapter aux
nouvelles normes si des journées de congé
supplémentaires sont ajoutées. Plusieurs d'entre eux ont déjà entamé leur année
financière et n'ont pas prévu les ajouts
proposés. Nous recommandons aussi de diminuer le taux de la masse salariale
pour l'ensemble des entreprises afin
de leur permettre d'atténuer l'impact des coûts additionnels dans l'esprit de
la mesure annoncée pour les PME dans le dernier budget.
Les
changements proposés dans le projet de loi ajoutent aussi des contraintes de
gestion pour les détaillants. Il base
déjà les taux de salaire sur les mêmes échelles salariales, peu importe le
nombre d'heures travaillées. Plusieurs
critères sont pris en considération pour
fixer la rémunération : les compétences, le nombre d'années
d'expérience, le niveau de responsabilité en sont quelques exemples. Les
détaillants font affaire avec des agences de placement lorsqu'ils ont un besoin
à combler rapidement pour des tâches précises et souvent pour une durée
déterminée. Le remplacement d'un employé en congé pour les périodes de pointe et
les décomptes d'inventaire en sont quelques exemples.
Nous questionnons la
nécessité de lier solidairement les agences de placement de personnel et les entreprises
clientes. Si l'agence détient un permis
délivré par la CNESST, ses pratiques de gestion devraient avoir été vérifiées.
Elle devrait donc être reconnue comme une entreprise
de confiance. De plus, plutôt que verser au taux de salaire équivalent
aux employés des détaillants, d'autres
critères devraient être considérés. Un employé d'agence exécute rarement
100 % des tâches de l'employé régulier, et le niveau d'exigence
n'est pas le même. On devrait plutôt faire référence à l'échelle salariale du
poste.
• (12 h 20) •
La
gestion des horaires de travail et des heures supplémentaires a aussi un
impact sur les opérations. Dans bien des
cas, les détaillants n'encouragent et ne prévoient qu'en de rares occasions du
temps supplémentaire. La gestion des horaires tient de l'art dans le commerce de détail. Plus un détaillant y
excelle, mieux il s'en porte. Il arrive cependant de gérer des
imprévus quand un employé ne se présente pas pour son quart de travail, qu'il
doive s'absenter à la dernière minute
pour maladie ou obligation
personnelle ou encore qu'il doive quitter précipitamment. Il est illusoire de
penser que tout peut être réglé cinq
jours à l'avance. Comment un détaillant peut-il prévoir un remplacement, alors
que, cinq jours avant, il ne savait pas qu'il allait devoir en trouver
un?
Enfin,
l'article 9 mentionne «sauf [si] la nature de ses fonctions exige qu'il
demeure en disponibilité». Nous croyons qu'il est nécessaire de préciser ce que cela signifie et nous
recommandons que le nombre de jours pour informer l'employé soit diminué
à trois.
Nous
apprécions la volonté d'ajouter de la
souplesse de gestion avec certains ajours proposés dans le projet de loi. La proposition d'étaler les heures de travail sur quatre
semaines plutôt qu'une seule permettra une plus grande facilité de planification des horaires. Les détaillants seraient mieux outillés pour gérer les
périodes de pointe comme la période des fêtes ou encore la rentrée
scolaire.
Parmi
les conditions proposées, la durée maximale de six mois semble courte. Les entreprises
planifient leur budget sur des
périodes de 12 mois. Dans un souci d'allègement du fardeau administratif des entreprises, nous suggérons
que la durée de l'accord s'étende sur un cycle de 12 mois.
À l'article 13
du projet de loi, le versement de l'indemnité afférente aux congés
annuels pourrait être versé si la nature de l'entreprise est saisonnière
ou intermittente. Or, les détaillants embauchent régulièrement des employés
pour des périodes saisonnières, comme
je le mentionnais, la période des fêtes ou encore la période estivale, et nous croyons qu'il serait logique de
permettre le même avantage à ces employés.
Enfin, nous
ne pouvons que saluer les efforts du gouvernement à mettre en mots et à
reconnaître les défis sociétaux que
nous vivons. Plusieurs détaillants ont déjà instauré une politique contre le
harcèlement depuis quelques années. Nous adhérons au principe de tolérance zéro pour toute forme de harcèlement.
Nous soulignons toutefois l'importance de ne pas alourdir le fardeau administratif de gestion des entreprises. Comme par
le passé, pour différentes politiques à mettre en place, la CNESST pourrait proposer des modèles pour les entreprises qui n'en auraient
pas encore. Nous aimerions nous assurer
que l'implantation d'une politique de harcèlement psychologique n'alourdisse pas les
processus internes et que la gestion des dossiers soit menée en collaboration
entre toutes les parties prenantes.
Nous tenons à rappeler que le Québec, avec la
Loi sur les normes du travail, est une des provinces les plus généreuses en ce
qui concerne ses conditions de travail. Le CCCD espère que le gouvernement
tiendra compte des conséquences des
changements à la loi sur tous les secteurs. L'ajout de contraintes
opérationnelles et de coûts additionnels pour les détaillants risque de
diminuer leur compétitivité et d'affecter le secteur, qui a déjà eu son lot
d'adaptations.
Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos
questions. Merci.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, Mme Aubin. M. Benoît, encore une fois, bienvenue à
l'Assemblée nationale. Nous allons débuter les échanges. Mme la ministre, vous
avez la parole.
Mme Vien :
Bonjour à vous trois, merci de vous être déplacés ce matin. M. Benoît, on
vous a récupéré au passage, hein? Bienvenue à vous. On a commencé... on
avait juste commencé à... deux ou trois petites minutes.
Vous êtes d'accord avec ce qu'on est en train de
faire, d'ouvrir la Loi sur les normes du travail?
Mme Aubin (Stéphanie) :
Excusez, j'ai entendu un «oups» dans la foule.
Mme Vien : Qui est
nombreuse.
Mme Aubin
(Stéphanie) : Une
modernisation de la loi sur les normes était nécessaire. Beaucoup
des modifications qui
sont proposées facilitent la vie ou aident les différents employés, il n'y a
pas beaucoup de choses qui ont été adaptées pour les employeurs. Donc, on aurait pu aller
encore plus loin dans la réflexion pour corriger certains éléments, là, je
dirais, de part et d'autre.
Mme Vien : Des mesures comme l'étalement des heures, qui
était une demande, hein, des employeurs, là, est-ce que ça vous satisfait?
Est-ce qu'on va assez loin?
Mme Aubin
(Stéphanie) : Bien, en fait,
on reconnaît les efforts d'ajout de souplesse. Encore une fois, on
aurait pu aller plus loin. Le quatre
semaines, c'est une période... je dirais, ce n'est pas la période idéale, mais
c'est déjà un premier élément. Le
30 jours à prévoir avant, bien, quand il y a un nouvel employé qui
entre chez l'employeur puis qu'on doit attendre 30 jours avant que ça puisse être mis en place pour
respecter la loi, bien, c'est plus contraignant, le six mois aussi.
Ça va
vite, le temps. Donc, c'est pour ça qu'on propose, entre autres, là, le
12 mois pour ça. C'est pour ça que je vous dis : C'est une brèche, là, dans ça. Ça fait partie de nos
demandes, vous avez tout à fait raison, mais on aurait aimé aller encore
plus loin dans la réflexion sur comment ça aurait pu se gérer.
Mme Vien : Mais enlever l'autorisation de la CNESST,
cette lourdeur administrative là, je
présume que c'est quelque chose que vous appréciez.
Mme Aubin (Stéphanie) : Ah! c'est
un pas qu'on reconnaît, là, c'est vraiment...
Mme Vien : J'aimerais ça vous entendre davantage,
parce que je ne suis pas tout le
temps sûre d'avoir bien saisi,
concernant les agences de placement. Je
présume que vous êtes d'accord avec nous qu'il était temps qu'on y voie, là,
aux agences de placement et aux agences de
recrutement. C'est peut-être moins votre... mais aux agences de placement,
qui était un secteur qui n'était pas régulé du tout, où on a vu le meilleur
comme le pire de ce qui peut exister, là.
Mme Aubin
(Stéphanie) : Bien, pour
nous, qu'il y ait une forme d'encadrement, on ne peut pas être contre ça. Travailler avec des entreprises qui sont des bons
citoyens corporatifs, tout le monde veut le faire, qui respectent la
loi. Donc, dans la mesure où c'est clair, là, nous, c'est de faire affaire avec
des entreprises qui détiennent leur permis. Donc, on a comme...
Il y a beaucoup d'agences de placement qui sont
bien. La majorité des détaillants travaillent avec des grandes entreprises, là, qui ont des bonnes pratiques
d'affaires aussi, mais on est conscients qu'il y en a d'autres qui sont à
l'opposé du spectre aussi. Donc, qu'il y ait un nettoyage qui se fait, on ne
peut pas être contre ça, là.
Mme Vien :
Oui, d'ailleurs, je pense que c'est... je ne me souviens pas du nom de
l'association des agences, là, venez à mon secours...
Une voix : ACSESS.
Mme Vien :
...ACSESS, qui, elle-même, est tout à fait disposée à entendre parler
d'encadrement des agences.
Parlez-moi
davantage de problématiques que vous voyez autour de l'interdiction de
disparité de traitement dans une agence quand on remplace une personne,
là, juste pour que je comprenne bien c'est quoi, votre...
Mme Aubin (Stéphanie) : Ça va
être Mme bich qui va répondre à la question.
La Présidente (Mme Richard) :
Mme bich.
Mme Vien : Allez-y,
madame.
Mme bich
(geneviève) : Merci. En pratique, quand on va chercher des employés
d'agence, principalement pour un remplacement
temporaire ou pour faire face à une demande, comme au temps des fêtes ou quand
on doit faire un décompte d'inventaire
dans un magasin, on n'ira pas chercher chez l'employé d'agence la qualité, la
qualification, la compétence et la connaissance
qu'ont nos propres employés de l'environnement dans lequel ils travaillent.
Donc, il faudra juste être clairs pour
les employeurs, pour les employés, pour les associations qui les représentent,
comment on va devoir placer l'employé d'agence
à la même place qu'un employé qui est au travail. Alors, tu sais, on ne va pas
le payer comme un plein temps qui a 10 ans d'expérience.
Mme Vien : Qui est là,
par exemple, depuis 15, 20 ans, qui a l'expérience...
Mme bich
(geneviève) : Exact, puis qui a progressé. Exact. Donc, il va falloir
donner aux employeurs puis aux employés
le moyen de placer l'employé d'agence, s'il doit être rémunéré comme un
employé, au bon endroit, compte tenu
de sa contribution, de ses compétences puis de ce qu'on lui demande de faire,
de ses responsabilités. Des fois, il va prendre un poste qu'on va dire similaire à celui d'un employé, mais, en
fait, on lui fait faire seulement une partie des tâches. Alors, je pense qu'il faut tenir compte de ça
parce que l'employé d'agence, qui arrive ainsi, là, pour donner un coup
de main à un moment précis, n'apporte pas la
même qualité qu'un employé qu'on a développé, qui connaît l'entreprise,
et ainsi de suite. Puis vous avez d'autres
enjeux, pour les agences qui sont utilisées, là, à plus long terme, mais ça, ce
n'est pas un modèle d'affaires qu'on utilise beaucoup dans le commerce de
détail.
Mme Vien :
Merci, Mme bich. Je vais... une dernière question. Vous représentez des
entreprises, bien sûr. Certains nous disent : Ah! non, c'est pour
du remplacement temporaire. Puis d'autres nous disent, comme les Manufacturiers
et exportateurs : Non, on se rend compte qu'il y a quelque chose qui se
développe, là, en marge, c'est-à-dire que les entreprises
utilisent de plus en plus, là, les agences de placement, même, ça peut être
considéré sur une base permanente, là. Qu'est-ce que vous observez dans
votre secteur à ce niveau-là?
• (12 h 30) •
Mme Aubin
(Stéphanie) : Bien, pour le
secteur du commerce de détail, ça ne fonctionne pas tout à fait de la même façon, c'est vraiment
pour des besoins ponctuels. Donc, quand on prend un décompte d'inventaire,
c'est un projet qui a un début, un milieu, une fin, ce n'est pas quelque
chose qui se prolonge sur plusieurs années ou quoi que ce soit. Un remplacement d'un employé, souvent, c'est un remplacement d'un employé qui
est en congé de maladie, par
exemple, donc il y a un employé qui revient aussi par la suite. Donc,
dans le... Puis, je vais vous dire, pour la rédaction du mémoire, j'ai parlé quand
même à près d'une dizaine de vice-présidents Ressources humaines,
incluant Mme bich, et ce n'est pas monnaie courante dans le secteur du commerce de détail parce qu'ils ont tout
avantage à avoir leurs employés qui sont formés, qui sont en mesure de
répondre aux clients, qui vont avoir une certaine forme d'efficacité aussi.
Je pense que Mme bich pourrait compléter
aussi.
Mme bich (geneviève) : Oui. Ce
que j'ajouterais à cet égard-là, c'est... le commerce de détail, en général, va
davantage privilégier l'utilisation du
travailleur à temps plein et du travailleur à temps partiel, plutôt que d'aller
chercher des agences. Et donc l'ajout de
certaines normes dont on parle, là, par exemple, dans le projet de loi va avoir
des impacts sur cette main-d'oeuvre,
qui est déjà notre main-d'oeuvre, mais qui a un statut différent selon que
c'est un statut temps plein ou un statut temps partiel.
Mme Vien : Parfait.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. Et je cède la parole maintenant au député de
Beauharnois et porte-parole en matière de travail pour l'opposition officielle.
M. Leclair : Merci, Mme la Présidente. Alors, mesdames monsieur, merci d'être là.
Écoutez, je vous apporte dans votre
sommaire des recommandations, là, dans vos impacts opérationnels. J'aimerais
vous réentendre, là. Vous avez fait une
explication que j'ai de la misère où on dit qu'un salarié d'agence sera
rémunéré au même taux que la personne qui fait la tâche dans l'usine, ou dans le Metro, ou
dans le travail qu'il est appelé à faire. Vous, vous nous dites : On
aimerait qu'on respecte plutôt l'échelle salariale du poste, plutôt que le taux
du salarié.
Donc,
pour que je comprenne bien, est-ce que vous avez, exemple, des échelles
salariales ou des taux très, très divers dans votre mode de rémunération
des employés? Donnez-moi un exemple pour que je comprenne.
Mme Aubin
(Stéphanie) : Je vais laisser Mme bich répondre à la question.
Mme
bich (geneviève) : Alors, dans le commerce de détail en général,
effectivement, il y a le salaire d'entrée, qui est souvent le salaire minimum, puis parfois un salaire minimum qui va
être majoré. Et, au fur et à mesure qu'on accumule de l'expérience en heures ou en mois, ça dépend
des types d'échelles, le salaire augmente. Et donc l'employé qui est
chez nous depuis un certain temps va
peut-être faire 22 $ de l'heure, alors, évidemment, qu'un nouveau commis
qui commence dans l'épicerie, ou qui
commence chez Jean Coutu, ou ailleurs va commencer au nouveau salaire minimum
et/ou un salaire minimum que nous avons majoré.
Alors,
il y a des échelles, et c'est commun, ce n'est pas tous les détaillants, il
faut faire attention, mais c'est commun chez les détaillants d'avoir des
échelles qui reconnaissent l'expérience, la compétence, la contribution.
M. Leclair : O.K. Donc, vous nous mettez en garde de dire : Pour cette
équivalence salariale là, vous devez suivre l'échelle ou les taux que
l'entreprise utilise. C'est votre mise en garde, ce que vous faites, si je
comprends bien.
Mme bich
(geneviève) : Oui.
M. Leclair : Vous aviez dit très clairement tantôt : On n'est pas tout à fait
contre le projet de loi. Les normes, plus qu'elles montent, plus que ça donne une qualité de vie à tout le monde.
Sauf que nous, comme entrepreneurs et comme employeurs, bien, on ne trouve pas notre juste mesure. Je vous ramène à
notre première journée d'auditions, qu'il y a un groupe qui nous a dit : Les normes du travail, c'est fait pour les
travailleurs puis augmenter leur qualité à eux. Ce n'est pas vraiment fait pour venir gâter directement...
Mais on comprend très bien l'impact que ça engendre à tous les
commerçants et les entreprises du Québec.
Puis vous dites... Et
la ministre a répondu à quelques groupes en disant qu'il y aura peut-être
une manière de diminuer les taxes sur les
masses salariales. Est-ce que vous croyez à ça, que ça va pallier, ou vous
voyez ça plus comme un souhait que la réalité?
Mme Aubin
(Stéphanie) : Je vais laisser mon collègue, M. Benoît...
M. Benoît (Jean-Luc) : Merci. Ce serait certainement un pas dans la
bonne direction. Dans le dernier budget, comme vous le savez, il a été
prévu que la diminution de la masse salariale qui était accordée aux PME, qui
est une diminution qui est dégressive, on
part de zéro de masse salariale qui était à 2 millions, serait étendue à
jusqu'à 4 millions de masse
salariale pour une seule entreprise. Lors du budget, en réaction au budget, on
avait salué cette initiative-là, mais on croit que c'est définitivement quelque chose qui devrait être exploré et
qui aiderait les entreprises à au moins pouvoir mitiger une partie des
impacts que l'ajout de congés pourrait avoir sur la masse salariale et sur les
coûts des entreprises.
M. Leclair : Puis, en ce moment, là, tel qu'annoncé dans le dernier budget, est-ce
que vous croyez qu'on devient un facteur
assez équivalent ou vous dites qu'il y a encore un bon manque à gagner? Parce
que la ministre, elle disait que son collègue
ministre était très ouvert à regarder ça parce qu'il reconnaissait les divers
impacts que ça va engendrer. Alors, il semblait
y avoir une ouverture ministérielle là-dedans. Mais, si vous nous dites :
Bien, déjà là, le taux de départ, on n'est vraiment pas dans un facteur d'équivalence, il faudrait le regarder
rapidement, puis la ministre a même invité les gens à aller rencontrer
le ministre. Alors, peut-être vous allez avoir un carton pour aller le visiter
rapidement.
Une voix :
...
M. Leclair :
Ce n'est pas sur la masse?
La Présidente
(Mme Richard) : Allez-y, M. le...
M. Benoît (Jean-Luc) : C'est certain que ce qui a été annoncé dans le
budget est un pas dans la bonne direction, on l'a salué à ce moment-là, mais on pense que, compte tenu de
l'augmentation du salaire minimum qui... Bon, on a pris acte de la politique qui avait été annoncée l'an
dernier par la ministre, on comprend les objectifs, mais ça fait que c'est
une augmentation un peu plus élevée que
l'inflation, compte tenu de la volonté exprimée dans le projet de loi
n° 176 d'ajouter des journées de
congé. Donc, ça a un impact nécessairement sur les coûts des masses salariales
des employeurs. On croit que c'est
définitivement une avenue qui devrait être explorée parce que ça nous semble
une manière de donner un peu d'air, justement, aux employeurs.
M. Leclair : Vous dites aussi dans les impacts opérationnels : Retirer la
responsabilité solidaire des agences et des entreprises. Est-ce que vous
pouvez m'expliquer votre point de vue là-dessus?
Mme Aubin
(Stéphanie) : Ce qui est décrit dans le projet de loi, c'est qu'il y a
une responsabilité pécuniaire solidairement
liée entre l'entreprise et l'agence. Ce n'est pas tant la retirer comme ne pas
l'implanter, là, parce que nous, on considère que l'agence a une
responsabilité comme employeur. C'est elle qui doit respecter les conditions
avec ses employés. Le raisonnement est
derrière le fait que, si l'agence a un permis émis par la CNESST, il y a déjà
des éléments qui vont avoir été
évalués pour s'assurer que ses pratiques de gestion sont bonnes, qu'ils
respectent la loi, et tout ça. Donc, est-ce
que c'est vraiment nécessaire d'ajouter une responsabilité solidaire entre
l'entreprise cliente et l'agence aussi? Parce que les employés de l'agence sont les employés de l'agence aussi. Comme
on dit, ils sont sur des bases temporaires quand ils vont travailler
chez les détaillants.
M. Leclair : Je pense que vous
avez partiellement raison. Mais, avec ce qu'on a entendu dans les dernières 48 heures, moi, je suis entièrement derrière
la ministre à dire : Non, barricadez ça solide, parce que c'est la terreur
dans les agences. Pour certaines, il y en a
sûrement qui sont modèles, mais, de ce qu'on a entendu en commission
parlementaire, je vous le dis, que j'ai très, très, très hâte qu'on balise les
agences, parce que c'était un petit peu pathétique.
Mme Aubin
(Stéphanie) : C'est bien de baliser, là, les agences, et tout, mais
c'est le lien avec l'entreprise cliente qui doit faire affaire avec une agence qui est détentrice d'un permis,
bien, le permis devrait être garant de quelque chose. Donc, c'est un peu cet élément-là... Nous, la
logique de dire : Pourquoi est-ce que, parce que l'agence ne fonctionne
pas bien, c'est l'entreprise qui fait
affaire avec qui doit compenser? Nous, c'est le raisonnement, là, qu'il y a
derrière ça aussi, en même temps.
M. Leclair : Dernière petite
question, parce que je pense que mon temps...
Une voix : ...
M. Leclair : Ah! trois minutes? Vous nous parlez d'une période
de transition, le groupe avant vous en a parlé aussi, on n'en a pas trop, trop entendu des autres
groupes, puis effectivement, là, il va falloir prévoir un délai raisonnable
parce que, premièrement, il y a des
conventions collectives, il y a des demandes de dates de vacances à l'avance,
et tout. Alors, il faut prévoir tout
ça. Alors, je veux vous entendre sur une période de transition que vous
jugeriez acceptable au-delà... je pense,
la ministre, dans le projet de loi, elle a mis janvier 2019. Mais est-ce qu'on...
il faut se donner un autre délai pour être certains, là, qu'on couvre la
plage?
Mme Aubin
(Stéphanie) : Je vais laisser Mme bich répondre, qui a vraiment
l'expérience terrain, qui va être en mesure de vous expliquer.
• (12 h 40) •
Mme bich (geneviève) : Puis je suis très passionnée de ce sujet-là parce
que moi, je les implante, ces changements-là. Et, lorsqu'on en parle avec les
détaillants et d'autres employeurs, la période d'implantation qu'on vous
implore de nous offrir, c'est
12 mois de la date de mise en oeuvre du projet de loi, et pourquoi? Je
vais vous le décrire d'une... En général, on n'aime pas trop les comparaisons d'un Parlement à l'autre, mais je vais
me permettre de le faire. On vit, en ce moment, avec des changements à
la loi sur les normes en Ontario. On a eu six mois de préavis pour ajouter deux
jours de congé personnel, ajouter du temps,
changer les salaires, faire l'équité salariale, et nous n'y arrivons pas. Puis
nous, Metro, on est un employeur
sophistiqué, qui a des moyens. Il faut changer des processus, il faut changer
des systèmes, il faut parler... Nous, on a 238 conventions
collectives chez Metro. On a des syndicats avec qui il faut échanger, et ça
prend du temps.
J'aime
beaucoup le fait que vous ayez identifié l'élément de l'impact sur les autres
employés. Si on donne une semaine de
vacances additionnelles puis que la nouvelle semaine à partir de trois ans de
service s'applique pour les employés qui ont trois à cinq ans, bien, il
va falloir refaire des calendriers de vacances. Ceux qui ont déjà choisi leurs vacances, on leur dit quoi? Vous les perdez? Tu
sais, il y a un nombre de vacances x que tu peux donner en
même temps.
Alors, il y a vraiment,
vraiment des enjeux d'implantation, et ne croyez pas que
les mesures ne seront pas utilisées. S'il
y a un message que j'aimerais que
vous reteniez aujourd'hui, c'est celui-là. L'année passée, le gouvernement ontarien a donné les deux
jours de congé payé, qui sont supposés — puis c'est correct, là — être
pour des journées d'urgence personnelle. De janvier 2018 à avril 2018, nos
employés de magasin en Ontario ont pris 2 372 jours de congé sur quatre mois en prenant ces jours de congé payé. On
respecte ça, mais sachez que l'année dernière, à la même date, ils en
ont pris 22. Ça fait qu'il y a eu
2 352 urgences qu'il n'y avait pas eu l'année dernière, et nous
offrions des jours de congé à nos employés. Alors, il faut comprendre
cela.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, Mme bich. C'est tout le temps qui était alloué à
l'opposition officielle. M. le député de
Chutes-de-la-Chaudière, porte-parole en matière de travail pour le deuxième
groupe d'opposition, c'est à vous la parole.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Je vais poursuivre sur le fait de changer de trois
semaines après trois ans. Je suppose
que vous avez des statistiques sur l'impact financier. Parce que, tantôt, on
disait que, pour... c'est un moyen de recruter
les gens, dire : Nous, on offre trois semaines, là. Actuellement, là, la
moyenne, c'est quoi, là? Est-ce que vous avez des statistiques pour l'ensemble? Je comprends que vous représentez
plusieurs employeurs, là, mais est-ce que vous avez évalué ça? Avec
votre mesure d'attractivité, est-ce que ça fonctionnait? Est-ce que la plupart
des gens avaient déjà trois semaines ou c'était le quart?
Mme Aubin (Stéphanie) :
En fait, dans bien des cas, le trois semaines était offert après quatre ans.
Pour avoir un avantage compétitif,
c'est les... Je peux vous donner cette information-là. Ce que ça représente
comme changement, on n'a pas fait le tour de chaque détaillant pour leur
demander, là, qu'est-ce que ça pouvait impliquer. Par contre, ce qui les désole
un petit peu, c'est... j'offrais déjà mieux que la loi sur les normes, parce
que la loi sur les normes, c'est vraiment le
seuil qu'on doit respecter. De dire : Bien, je vais donner un plus pour
que mes employés puissent venir. Le trois
ans, non seulement ce n'est pas le quatre ans qu'eux offraient, mais ils
reculent d'un an, puis cette marge de manoeuvre là, ils ne l'ont plus vraiment. Parce que c'est compétitif aussi dans le
secteur, là. Ce n'est pas toujours facile attirer des employés pour le
commerce de détail.
M. Picard :
Un sujet que vous n'abordez pas, les clauses de disparité de traitement, les
clauses orphelin. Ça n'a pas d'impact? Vous n'avez d'avis? Ou vous
n'avez pas analysé ça?
Mme Aubin
(Stéphanie) : Oui, on l'a analysé. Et je, vous dirais, ce n'est pas la
majorité des détaillants qui en ont. C'est surtout dans les milieux qui
sont syndiqués. Et, je vous dirais, appelons-la la mesure d'atténuation, c'est l'article 46, qui permet les clauses
grand-père sur les régimes qui sont déjà en place, on n'est pas... ce n'est pas
le cheval de bataille qui est ici,
parce qu'on représente un secteur, puis ce n'est pas le secteur où il y a le
plus de clauses de disparité. Comme je vous dis, c'est vraiment pour les
secteurs qui sont syndiqués où il y en a le plus.
M. Picard :
Il y a certaines entreprises que vous représentez, dont Metro, qui ont beaucoup
de conventions collectives. Tantôt, c'est ce
que j'ai entendu. Donc, ce n'est pas... Donc, qu'on abolisse les clauses
orphelin, ça ne cause pas de
problème? Parce qu'il y a eu des gens, hier, qui nous ont dit : Bien là,
ça va mettre la paix industrielle en danger, là. C'est ce qu'on a
entendu hier, là.
Mme
bich (geneviève) : Si je provenais d'un des secteurs où j'ai déjà
travaillé, ça aurait été de cela que j'aurai été très passionnée, parce
que c'est vrai.
Une voix :
...
Mme bich
(geneviève) : Je vais me garder une petite réserve sur ça, là.
M. Picard :
Bien, le secteur.
Mme
bich (geneviève) : Oui, non, c'est ça. Non, mais il y a, par exemple,
des secteurs où on a dû… puis moi, je l'ai
fait moi-même, là, des secteurs où, pour protéger, par exemple, un régime de
retraite à prestations déterminées pour les employés qui en bénéficiaient, d'introduire un régime à cotisation
déterminée, ça a quand même été une solution gagnante qui a permis de
négocier des ententes avec des syndicats, qui a permis aux employeurs de tenir
la promesse qu'ils avaient faite aux employés qui étaient en place puis
d'offrir un nouveau contrat de travail différent aux nouveaux.
C'est sûr qu'après ça
pendant la période de transition où les deux employés vivent côte à côte et
n'ont pas les mêmes conditions de
rémunération globale, c'est malaisant. Mais on a le choix entre ça et, par
exemple, enlever le régime à prestations
déterminées quand on n'a plus les moyens de se le payer. Et ça, c'est quasi impossible de faire ça sans des
litiges, sans mettre la paix industrielle en jeu.
Alors,
moi, je parle de... J'ai fait ça chez Bell quand j'y étais, on l'a négocié
comme ça, et ça satisfaisait l'ensemble des parties prenantes. On a fait ça il y a 15 ans. La clause
est derrière nous, et aujourd'hui il n'y
a plus d'enjeu à cet égard-là,
sur ce point particulier. Alors, elles ont
eu leurs avantages, ces clauses-là, là, qui nous permettaient de faire des modifications. Mais je ne me sens pas à l'aise d'aller beaucoup plus loin.
M. Picard : Sauf que, dans le projet de loi actuel, on dit qu'il n'y aurait plus de clause orphelin à partir de... lorsque le projet
de loi sera sanctionné. Donc, il va y
avoir encore disparité, là. Donc, la... je vais dire le branle-bas de
combat qu'il pourrait y avoir, là, entre guillemets, là, il pourrait toujours
être là.
Mais
je vais changer de sujet. Bon nombre... Je voudrais savoir : Lorsque
vous accueillez des nouveaux employés, est-ce
que vous les sensibilisez à leurs
droits? Parce qu'on a entendu toutes sortes de choses ici,
là, puis il semble que... on dit souvent
que c'est des étudiants, puis soit qu'ils ne connaissent pas leurs droits ou,
s'ils les connaissent, ils ont peur de les faire appliquer.
Est-ce que
vous avez... dans vos regroupements, là, est-ce
que vous dites à vos gens :
Informez-les, les gens, parce que c'est la base des conditions de
travail qu'on offre au Québec, là?
Mme bich
(geneviève) : Je vais me
permettre de répondre à cette question. La réponse, dans une entreprise comme Metro, en tout cas, c'est oui, on donne aux employés leur manuel
d'employé à l'arrivée, et ça ne décrit pas seulement leurs obligations, c'est vraiment un ensemble complet. Puis je représente Metro, mais je
représente Jean Coutu aujourd'hui, je représente
Première Moisson, qui est un petit employeur, je représente Adonis. On a toutes
ces bannières-là chez nous, et c'étaient
des employeurs qui étaient indépendants de Metro. Et, au moment de
l'acquisition, ils avaient chacun un manuel de l'employé. Ils ont reconnu la valeur qu'il y a à avoir un bon
manuel qui indique aux employés à quoi ils ont droit, quelles sont leurs
obligations, quels sont les moyens pour exercer leurs droits puis les
sensibiliser aux politiques, comme les politiques en matière de harcèlement,
ainsi de suite. Puis évidemment, dans un milieu syndiqué, ils reçoivent la
copie de leur convention collective.
M. Picard :
O.K., en terminant, ce que je comprends des propos de M. Benoît, c'est que
la venue de baisses sur la taxe de la masse salariale, c'est une avenue
que le gouvernement devrait toujours utiliser lorsqu'il y a des charges
additionnelles qui sont aux employeurs. Est-ce que je résume bien?
M. Benoît (Jean-Luc) :
Rapidement, je dirais que c'est une mesure qui, selon nous, devrait être
considérée, définitivement, parce que ça a un impact direct. Mais je me permets
de rajouter un élément. Dans le budget, on se concentrait
sur les PME. On est passés des entreprises qui ont moins de 2 millions de
masse salariale à celles qui ont moins de
4 millions de masse salariale. Mais 4 millions de masse salariale,
pour mettre les choses en perspective, dans le cas du commerce de détail, il y a plusieurs grandes
surfaces qui ont plus que 4 millions de masse salariale. Alors, ils ne
seront pas touchés par ce qui est annoncé dans le budget.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci. Merci beaucoup, Mmes Aubin, bich, M. Benoît, et vous avez
contribué, avec votre exposé, pour la suite de
nos travaux. Donc, je nous souhaite un bon début de journée encore, parce que
nous allons siéger encore cet après-midi. Donc, bon appétit. Nous allons aller
dîner.
Et je suspends la commission jusqu'à
15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 49)
(Reprise à 15 heures)
La
Présidente (Mme Richard) : La Commission
de l'économie et du travail reprend
ses travaux. Je demande à toutes les
personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques et je nous souhaite un bon après-midi.
Nous
poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 176, Loi
modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives afin principalement de faciliter la conciliation famille‑travail.
Nous entendrons cet après-midi la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec, Force Jeunesse, la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante. Et nous recevons aujourd'hui...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Richard) :
Pardon? Ah! c'est ça, on n'a pas pris la bonne feuille. Désolée.
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Richard) : Désolée. On
avait une petite erreur. Non, je l'avais vue ce matin, mais on ne l'a
pas corrigée en lisant le texte. Je me disais : On ne peut pas comparer.
Donc, nous
recevons la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Madame
messieurs, bienvenue à l'Assemblée
nationale. Et je pense que c'est M. Boyer, vous allez prendre la parole.
Je dois vous inviter quand même à nous présenter
les personnes qui vous accompagnent. Vous connaissez le processus des
commissions parlementaires. Vous avez environ 10 minutes pour vous
faire votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les parlementaires. Je
vous cède la parole.
Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
M. Boyer
(Daniel) : Merci, Mme la
Présidente. On va se partager, moi et mon confrère Serge Cadieux,
secrétaire général de la FTQ. C'est rare qu'on
sort en gang, quand même. Que moi et Serge Cadieux sommes présents en
même temps, ça vous démontre toute l'importance qu'on accorde à ce projet de
loi. Je suis accompagné aussi de deux vice-présidents, une
vice-présidente : Denis Bolduc, président du SFP Québec, Anouk Collet,
directrice des TUAC, des Travailleurs unis
de l'alimentation et du commerce, et Alain Croteau, directeur québécois des
métallos, du Syndicat des métallos.
Bien,
écoutez, au fil des ans, la FTQ a proposé d'importantes améliorations à la loi
sur les normes, toujours dans le but
de défendre l'ensemble des travailleurs et travailleuses, qu'ils soient
syndiqués ou non, en passant. Plusieurs des mesures que nous avons réclamées visent à améliorer les
conditions de vie et de travail de millions de Québécois et de
Québécoises qui n'ont pas d'autre protection
que cette loi. Puis, parmi elles, la hausse du nombre de semaines de vacances
payées, du nombre de congés pour une meilleure conciliation travail-vie
personnelle, l'obligation pour les employeurs de rendre disponibles des avantages sociaux aux personnes salariées à statut
précaire, pour n'en nommer que quelques-unes, et bien sûr le salaire minimum à 15 $. Je pense que
personne ne peut ignorer ça. C'est une revendication importante de la
FTQ.
La FTQ est
heureuse de constater qu'elle a été entendue sur un certain nombre de ses
revendications, mais on aurait pu
être plus ambitieux. Après 15 ans, depuis la dernière réforme, on aurait
pu vraiment être plus ambitieux. Et le marché du travail a changé, le nombre d'emplois atypiques a bondi, l'écart entre
les emplois stables bien rémunérés et les emplois précaires mal protégés s'est creusé davantage. Les
horaires brisés, des horaires atypiques, on en a vu de toutes les
sortes, on en voit de toutes les sortes.
Donc,
cela dit, le projet de loi comporte quand même, incontestablement, un nombre
d'avancées qui bénéficieront à une
forte majorité de travailleurs puis de travailleuses au Québec. Et la FTQ
souhaite donc son adoption avant la fin de la présente session parlementaire. Concurremment, nous aspirons ardemment
que certaines recommandations énoncées dans ce mémoire, dans notre
mémoire de la FTQ, soient ajoutées au projet de loi afin de le bonifier.
Quelques grandes lignes, je vous dirais, je vais
surtout m'attarder au bloc conciliation travail-famille. Donc, important de disposer de temps de qualité. Pour
une personne en emploi, c'est un défi de taille. C'est pourquoi la FTQ
parle de conciliation travail-vie
personnelle. La FTQ réclame aussi, ce qu'on ne retrouve pas dans les
propositions actuelles… on réclame
une loi-cadre pour que la conciliation travail-vie personnelle soit prise en
compte plus largement dans notre société et dans les milieux de travail et que les employeurs soient forcés de convenir
de mesures facilitant la conciliation travail-vie personnelle avec leur
personnel.
En matière de
conciliation travail-famille, le projet de loi répond... il répond à des
revendications de longue date du
mouvement syndical, mais des améliorations sont encore souhaitables, concernant
notamment les heures supplémentaires obligatoires,
concernant la remise de l'horaire à l'avance, concernant le nombre de jours de
vacances. On peut saluer, bien sûr,
la reconnaissance de la violence conjugale comme motif d'absence légitime,
l'élargissement de la notion de «parent», qui donne droit à différents congés pour obligations familiales, la
reconnaissance du rôle de proche aidant,
l'abolition de l'exigence de trois mois de
service continu pour pouvoir bénéficier du droit de s'absenter pour maladie,
l'allongement de la durée de certains
congés, et l'élargissement des motifs d'absence, et la rémunération d'au moins deux journées de congé de maladie ou d'absence pour
obligations familiales. Donc, on peut saluer ça.
Il y a des choses à améliorer, bien évidemment. Quelques-unes
des choses : les heures supplémentaires. Nous demandons de comptabiliser et compenser en salaire ou en temps chaque
heure supplémentaire effectuée après le quart régulier de travail, d'élargir les motifs admissibles pour exercer un
droit de refuser du temps supplémentaire. Dans le cadre de l'horaire
cinq jours à l'avance, donc, ce qu'on demande, c'est de prévoir une obligation
explicite que l'employeur fournisse l'horaire hebdomadaire de travail une
semaine à l'avance, introduire un délai de préavis d'au moins une journée en cas de modification d'horaire, et
donner un droit à une indemnité, et protéger le droit de refus des travailleurs
et travailleuses.
En matière de harcèlement psychologique, brièvement,
le message principal que nous lançons, c'est que les dispositions concernant le
harcèlement psychologique ont été apportées en 2002 et elles ont porté leurs
fruits. On extentionne au harcèlement sexuel. On salue ça. Malheureusement, il
y a des situations dans les milieux de travail de violence psychologique et de
violence sexuelle qui n'ont pas disparu. Puis il faut continuer de les prévenir
puis de les combattre. Puis ça se passe par
une plus grande responsabilisation des employeurs. Et le projet de loi répond
de manière intéressante à cette nécessité, mais il faut consolider nos
moyens d'action.
M. Cadieux
(Serge) : Merci, Daniel. De
mon côté, je vais vous parler de deux sujets, là, compte tenu du court
temps qu'on a, les clauses de disparité de traitement et les agences de
placement temporaire.
En ce qui
concerne les clauses de disparité de traitement, comme vous le savez, ça fait
longtemps qu'à la FTQ on demande que
ces clauses de discrimination intergénérationnelle là soient abolies, comme on
l'a fait en 1999 pour les doubles échelles de salaire, les doubles
standards de vacance et les doubles standards en matière de journées de congé.
Le
1er décembre 2017, je vous rappelle, l'Assemblée nationale a voté une
motion à l'unanimité, présentée par la députée de Québec solidaire, à
l'effet de déposer un projet de loi qui allait enrayer toutes les clauses de
disparité de traitement, pas une partie des
clauses de disparité de traitement, toutes les clauses de disparité de
traitement. Et tous les parlementaires ont voté pour, y compris vous,
Mme la ministre.
Ce qui choque à la lecture du projet de loi,
c'est qu'à l'article 32 vous acceptez la prétention que c'est une discrimination et qu'on doit l'abolir. Donc, vous
inscrivez le principe, mais, à l'article 46, vous venez défaire en
grande partie ce sur quoi vous voulez
légiférer pour régler le problème, soit l'interdiction des clauses de disparité
de traitement.
En d'autres
mots, par l'article 46, vous rendez légale la discrimination que vivent
des centaines de milliers de jeunes travailleurs
et travailleuses et vous leur dites : Pour le futur, on n'a pas
l'intention de corriger la situation. Et vous dites aux salariés qui, eux, ne vivent pas de la discrimination :
Vous pouvez continuer à dormir sur vos deux oreilles. Vous n'aurez pas deux régimes de retraite différents ou deux
régimes d'assurance différents. Mais ils n'en vivent pas au moment où on
se parle, de la discrimination.
Donc, ce que
vous faites avec l'article 46 dans les mesures transitoires, vous rendez
légal ce que vous dites qui va être
illégal en vertu de l'article 32. Pour peut-être donner une image, là,
souvent on dit : Une image vaut mille mots, c'est comme si vous
prescriviez du Pravachol à tous ceux qui ne font pas de cholestérol. Mais, pour
ceux qui souffrent de cholestérol, vous leur dites : On n'a aucun
médicament à vous offrir pour améliorer votre sort.
Dans le fond,
Mme la ministre, on dit quoi aux jeunes, à ces centaines de milliers de jeunes
qui vont continuer d'être discriminés? C'est pour eux qu'on est ici,
c'est pour eux qu'on demande d'interdire les clauses de disparité de traitement. Pas ceux qui n'en ont pas, ceux qui en
ont, des clauses de disparité de traitement. Et, à eux, vous leur
dites : Non seulement vous allez continuer à en avoir, et on n'a même pas
prévu un horizon pour les corriger.
• (15 h 10) •
Nous, on se
serait attendus, Mme la ministre, que vous procédiez de la même façon qu'en
1999, le gouvernement qui était au
pouvoir à l'époque, quand ils ont décidé d'interdire les doubles standards pour
les échelles de salaire. Ils n'ont pas
dit : On va faire ça rétroactivement. Mais ils ont dit : Quand il
arrive le temps de renouveler les conventions collectives, vous connaissez les nouveaux standards, donc vous
allez corriger la situation à ce moment-là. Et, pour ceux qui n'ont pas
de convention collective, parce qu'il y a
aussi des employés non syndiqués qui vivent des clauses de disparité de
traitement, bien, vous donnez une période de temps pour que l'employeur puisse
corriger la situation.
Vous avez dit, Mme la ministre, à une
intervention d'un de vos collègues quand vous avez déposé le projet de
loi : C'est inacceptable pour un
parlementaire de venir jouer dans une convention collective. Vous avez dit ça,
puis je pourrais vous dire le texte
exact, là. Avec respect, Mme la ministre, je vous rappellerais qu'il y a à
peine trois ans, un peu plus de trois ans, vous n'avez pas hésité à voter en
faveur du projet de loi n° 3, qui modifiait les conventions collectives et
les régimes de retraite des employés
municipaux, et même rétroactivement. Vous alliez toucher à des droits pour des
retraités du passé.
À
la FTQ, on ne vous demande pas de jouer dans les conventions collectives. On ne
demandera ça jamais à aucun gouvernement,
de jouer dans les conventions collectives. Ce qu'on vous dit, quand il arrive
l'échéance de la convention collective
puis le renouvellement, vous dites aux parties : Vous allez vous asseoir
et vous allez trouver une solution pour régler la discrimination. Vous ne faites pas ça, là. Vous dites aux
parties : Ceux qui ont discriminé, vous pouvez continuer à discriminer, on ne vous met pas de balise. Puis
ceux qui n'ont pas discriminé, vous n'aurez pas le droit de discriminer.
Donc, le travail est fait à moitié. Ceux qui
souffrent de clauses de disparité de traitement, vous leur dites :
Continuer à souffrir. Et ça, pour nous, c'est honnêtement inacceptable.
En
ce qui concerne les agences de placement temporaire, il y a un pas qui est fait
dans la bonne direction, mais il reste
du chemin à faire. Vous savez, la problématique des agences de placement
temporaire et surtout des employés qui sont embauchés par une agence de placement temporaire pour faire du travail
chez une entreprise cliente, c'est toute la relation tripartite. Et là le problème, là, c'est que nos
lois du travail, tant la loi sur les normes, mais aussi le Code du travail,
la loi sur la santé-sécurité, la Loi sur les
accidents de travail, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite,
toutes nos lois qui donnent des
protections aux travailleurs, tant les employés dans les agences de placement
que les employés qui travaillent pour
une entreprise, ces lois-là sont faites d'une relation bipartite, pas d'une
relation tripartite. Et, à partir du moment...
Et
le problème qu'on a, à partir du moment où vous dites... puis ça part de bonnes
intentions, le projet de loi dit : On va introduire un principe de coresponsabilité entre l'entreprise
cliente et l'agence pour tout ce qui relève des droits pécuniers en vertu de la Loi sur les normes du
travail, c'est bien, Mme la ministre, mais ça couvre juste une parcelle
des droits des employés des agences de
placement, parce qu'un employé d'une agence de placement est aussi visé par la
Loi sur les accidents de travail, la loi sur
la santé-sécurité, le Code du travail, la Loi sur les régimes complémentaires
de retraite. Qu'est-ce qui arrive à
l'employé qui a un accident de travail? Qui va lui payer ses 14 premiers
jours? C'est-u l'agence de placement
temporaire ou c'est l'entreprise cliente? Moi, je peux vous dire, pour avoir
pratiqué le droit en santé-sécurité pendant
une vingtaine d'années, les deux s'obstinent. L'agence dit : Ce n'est pas
moi ton employeur, c'est l'entreprise cliente.
Puis l'entreprise cliente dit : Ce n'est pas moi ton employeur, c'est
l'agence. Mais ça, ça échappe, là, ça échappe à la disposition que vous avez introduite dans le
projet de loi n° 176 parce que vous rattachez les droits uniquement à
ceux qui sont prévus à la Loi sur les normes
du travail. Qu'est-ce qui se passe... la loi sur la santé-sécurité... Je vais
vous donner un exemple. On a entendu,
au Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, plusieurs experts
venus nous dire : Les employés des agences de placement temporaire,
le taux d'accidents de travail est de huit à douze fois supérieur aux employés réguliers. Pourquoi? Parce qu'il y a des
employeurs qui font appel à des agences de placement temporaire pour ne pas confier des tâches dangereuses à leurs
employés réguliers pour ne pas qu'il y ait d'accidents de travail, pour ne
pas que le taux de cotisation augmente à la CNESST. Donc, ils envoient des
employés temporaires, il y a un taux de lésions professionnelles de 8 % à 12 %. Mais qui est responsable de
procurer des conditions de travail qui respectent la santé et la sécurité au travail? Il y a le même dilemme.
L'entreprise cliente va dire : Bien, ce n'est pas nous autres. C'est un
employé de l'agence. C'est à l'agence à voir
à la santé-sécurité de ses employés. Puis l'agence va dire : Bien, ce
n'est pas nous autres. Ce n'est pas nous autres qui lui a confié le
travail, c'est l'entreprise cliente.
Donc,
la bonne intention que vous avez de rendre coresponsable l'entreprise cliente
et l'agence, bien, il ne faut pas que ça soit juste dans les obligations
prévues à la Loi sur les normes du travail. Il faut que ça soit dans toutes les
obligations qui sont couvertes par les lois
qui protègent un travailleur ou une travailleuse dans une agence de
placement. Et ces lois-là, bien, il y en a
plusieurs. Il y a le Code du travail, la Loi sur la santé et la sécurité, la
Loi sur les accidents de travail, la Loi sur les régimes complémentaires
de retraite. Donc, il est possible de bonifier. Si vous voulez vraiment protéger les employés des agences de placement
temporaire, il ne faut pas se limiter uniquement à la Loi sur les normes
du travail.
Je vais m'arrêter là
parce que je comprends que j'ai dépassé un peu mon temps. Je m'en excuse.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, MM. Boyer et Cadieux.
Oui, effectivement, mais c'est toujours... avec le consensus, ici, des
parlementaires, on peut tout faire. Et donc je vous ai donné un petit peu plus
de temps avec le consentement de la ministre. Et donc on peut débuter les
échanges. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Vien :
Et c'est sur mon temps que vous avez pu vous exprimer, avec plaisir à part ça.
Oui. La présidente me faisait des grands signes pour me dire que, là, ça
dépassait grandement.
Merci
d'être là. C'est vraiment apprécié. C'est toujours vraiment un plaisir de vous
rencontrer. C'est fou à quel point on
peut rencontrer les deux extrêmes, hein, dans cette commission-ci avec la pièce
législative qu'on a devant nous, la Loi sur les normes du travail.
Certains
groupes nous disent, comme vous : On ne va pas assez loin, on aurait dû
aller plus loin que ça, profiter du fait,
effectivement, qu'on n'ouvre pas souvent la Loi sur les normes. Vous avez
rigoureusement raison. On a... 1990, 2002, aujourd'hui, 2018. Et d'autres groupes, vous devinez lesquels, Conseil
du patronat du Québec, la Fédération des chambres de commerce, manufacturiers, nommez-les tous, eux
autres trouvent que, franchement, on va assez... on va beaucoup trop loin, beaucoup trop loin. Puis, s'il y a quelque
chose, il faudrait vraiment, sinon reculer, déchirer complètement la loi
qu'on a devant nous, le projet de loi qu'on a devant nous.
Comment
on concilie tout ça? Vous ne trouvez pas qu'on a une pièce législative qui...
puis j'ai posé à peu près la même
question peut-être sous d'autres formes, mais qu'on a une pièce législative qui
est équilibrée puis qui est une espèce de beau compromis?
M. Boyer
(Daniel) : Bien, on l'a dit,
là, il y a des points qu'on souligne, bien évidemment, où on est
contents, là. On pense que ça aurait dû
aller plus loin, mais on est contents. Mais il y en a d'autres, vous avez fait
le travail à moitié, là. Tant qu'à
faire le travail sur les clauses de disparité de traitement, il faut le faire
au complet. On ne peut pas, Serge le dit souvent, être à moitié enceinte, là. À un moment donné, est-ce que c'est
des clauses discriminatoires? Oui? Bien, si c'est des clauses
discriminatoires, allons jusqu'au bout de l'exercice et ne permettons plus
qu'il y ait des gens discriminés au travail. C'est ça qu'on dit.
Sur les
autres, on est capables de s'accommoder, mais on pense que, dans notre mémoire,
on propose des solutions intéressantes dans le but de bonifier, pas
juste bonifier, là, pour nous, les organisations syndicales ou les
travailleurs, travailleuses, mais bonifier
pour le milieu de travail. Ça va faciliter le travail aussi des employeurs.
Puis, écoutez, on ne se fera pas de
cachette, en situation de rareté de main-d'oeuvre au moment où on se parle, si
les employeurs crachent sur des nouvelles
mesures de conciliation travail-famille, je m'excuse, là, mais la
main-d'oeuvre, elle ne sera pas au rendez-vous tantôt, là. On est rendu
à un moment charnière où il faut améliorer les mesures de conciliation
travail-famille, il faut améliorer l'organisation du travail et l'ensemble de
ses composantes, là.
• (15 h 20) •
M. Cadieux
(Serge) : Bien, peut-être...
Je voulais peut-être juste ajouter, Mme la ministre, quand on parle des
clauses de disparité de traitement, vous savez, j'ai entendu le Conseil du
patronat puis la Fédération des chambres de commerce
du Québec venir dire : Bien, ça n'a pas de bon sens, ce n'est pas
compétitif, les régimes de retraite à prestations déterminées, etc., puis les entreprises ne
viendront plus s'établir là. Ça, c'est faire fi, là, c'est faire fi de tous les
travaux qu'on a fait pour modifier la Loi sur les régimes complémentaires de
retraite, là.
Votre
ex-collègue, Sam Hamad, nous avait confié le mandat de revoir la Loi sur les
régimes complémentaires de retraite,
et j'étais assis en face de Yves-Thomas Dorval, et son discours était de
dire : Si on veut rendre attractifs les régimes à prestations
déterminées, on doit modifier le mode, on doit modifier le financement des
régimes et permettre aux employeurs qu'ils
n'aient plus l'obligation de combler les déficits de solvabilité. On s'est rendus
là, la partie syndicale, pour permettre
la survie des régimes de retraite. Mercer, il y a un mois annonçait, là, que
les régimes de retraite à prestations déterminées étaient solvables à 98 %.
On est loin de ce que c'était quand il y a eu la crise, en 2008.
Vous savez,
Mme la ministre, aujourd'hui, là, un régime
à prestations déterminées, les cotisations que l'employeur met dedans, c'est la même affaire qu'un régime à
cotisation déterminée, c'est le même coût, les deux. C'est idéologique,
parce que les grandes entreprises multinationales comme Rio Tinto, eux, là, à
la longue, ils ont pris une décision : On n'offrira plus de régimes à prestations déterminées à nos employés à
travers le monde. Mais ils ne le savent pas, au Québec, ce que la législature,
au Québec, a réussi à faire.
Donc, ce n'est pas vrai, l'argument de dire
qu'ils ne viendront pas au Québec. Ça ne leur coûte pas plus cher qu'un régime à cotisation déterminée. Et ce qu'on
vous dit, là, en modifiant les clauses de disparité de traitement pour
le futur... On ne dit pas : Faites ça
rétroactivement. Et on ne vous dit pas que tout le monde va avoir un régime à
prestations déterminées. Les gens vont
négocier ensemble, là, puis, au moins, le rapport de force va être équilibré,
ce qui n'est pas le cas actuellement,
puis ils vont choisir pour le futur : Qu'est-ce qu'on fait? C'est-u un régime
PD pour tout le monde, ou un régime
CD pour tout le monde, ou un régime hybride? Il y en a plein, de possibilités à
faire. Mais laissez aux parties le soin
de négocier. Venez pas leur rendre la partie facile, dire : Vous
discriminez vos employés, puis on est d'accord avec vous autres, vous
allez pouvoir continuer à discriminer. Ce n'est pas ça, votre rôle, comme
législateurs.
À partir du
moment où vous trouvez qu'il y a un problème, ce qu'on s'attend de vous, ce que
les travailleurs les travailleuses,
les jeunes travailleurs, jeunes travailleuses s'attendent de vous, là, c'est
que vous montriez la direction pour qu'éventuellement
il n'y en ait plus, de discrimination. Et ça, là, quand il arrive l'échéance de
la convention collective, que ça soit
un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans, et c'est des échéances
différentes, mais au moins les parties savent que, là, ils n'ont pas le choix. Ils ne peuvent pas passer à côté de la
track, il faut qu'ils s'entendent là-dessus. Puis, quand il n'y en a pas, de convention collective, vous
fixez une période temps, puis c'est l'employeur qui va décider tout seul
dans la plupart des cas. Puis il va faire un
choix pour que tout le monde ait le même régime, je le rappelle, pour le futur,
on ne touche pas aux droits passés, pour le futur seulement.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci. Mme la ministre.
Mme Vien :
Bien, je pense que nous, on la donne, la vision qu'on a, là. On n'en veut plus,
de disparités dans ce sens-là. Puis
il n'y a rien qui oblige puis il n'y a rien qui empêche les deux parties, à
leur renouvellement, de décider ce qu'elles veulent. Je ne vois pas où
on ne se rejoint pas.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, regardez,
Mme la ministre, je vais vous expliquer. Je n'ai jamais vu, là, en
35 ans, un syndicat arriver en
négociation et dire : Nous, on va demander un régime de retraite ou un
régime d'assurance collective inférieur pour les nouveaux salariés. Ce
n'est jamais le syndicat qui demande ça.
Dans
la vraie vie, là, comment ça se passe, là, on est en négociation, puis
l'employeur dépose ça et il dit : En vertu du Code du travail, tu n'as pas le choix, il faut que tu ailles le
présenter à ton assemblée, c'est prévu dans le Code du travail. Et là le
syndicat s'en va en assemblée puis il dit à tout le monde qui est là :
Vous autres, vous avez un bon régime de retraite,
là, à prestations déterminées, mais l'employeur, là, il ne touche pas à votre
régime de retraite, là, puis il vous dit, là : Ceux que vous ne connaissez pas, qui ne
travaillent pas encore à l'entreprise, là, eux autres vont avoir un régime
moins généreux. Eux autres, on va les
discriminer. Mais ce n'est pas grave, vous ne les connaissez pas. Le syndicat,
il demande au monde : Ne votez
pas pour ça. Mais l'employeur, il le sait bien. Il dit : Voyons donc!
Combien de monde vont voter pour aller en grève pour du monde qu'ils ne
connaissent même pas?
Malgré
ça, il y en a qui le font. Les métallos sont en grève avec
1 030 employés, au moment où on se parle parce que l'employeur
demande ça.
Une voix :
...
M. Cadieux (Serge) : En lock-out, ils sont en lock-out parce que
l'employeur demande ça. On vous dit : Venez rétablir le rapport de
force.
Écoutez, vous avez
joué dans le secteur municipal parce que les maires vous ont dit : Le
rapport de force est déséquilibré. On vient
vous dire, là : Là-dessus, le rapport de force est déséquilibré. Donc,
rétablissez le rapport de force, là, puis
mettez les mêmes règles du jeu pour tout le monde. Et puis on va la faire, la
job, on va le faire, le travail. Quand on va arriver à la table de négociation, on va mesurer pour l'avenir :
Est-ce que le régime de retraite est vraiment un fardeau pour l'employeur? S'il est vraiment un fardeau
pour l'employeur, on ne veut pas que l'entreprise ferme, là, on va
trouver le chemin, un mi-chemin, là, pour
que tout le monde soit sur le même régime de retraite pour le futur puis que ça
ne coûte pas plus cher. C'est ça qu'on va faire, comme on l'a fait avec
la Loi sur l'équité salariale. La même affaire.
Mme Vien :
Mme la Présidente, j'aimerais ça entendre les représentants de la FTQ sur...
Vous savez que, bon, pour la première
fois au Québec, on va réguler les agences de placement puis on va réguler les
agences de recrutement. L'Ontario
s'est lancée là-dedans, il y a quelques provinces également. Ils ont choisi la
voie législative, nous, on a choisi la voie
réglementaire pour imposer un permis
aux agences. Encore là, ça ne fait pas nécessairement l'affaire de tout le monde qui vient nous voir là-dessus.
Je
ne sais pas si vous avez eu le temps de réfléchir à ça, si vous avez pris le
temps de réfléchir à ça. Nous sommes en
train de rédiger le règlement. Les intentions réglementaires vont être
déposées au moment où on va faire l'étude article par article
du projet de loi. Est-ce que vous auriez des informations, des suggestions à nous faire sur ce que devrait contenir
le permis exigé aux agences?
M. Cadieux (Serge) : Oui, mais, vous savez, c'est parce que, nous, ce
qu'on aurait souhaité, c'est de voir le projet de règlement. C'est parce que c'est difficile, pour nous
autres, de se prononcer sur de quoi qu'on ne voit pas. Je le sais, qu'ailleurs dans d'autres provinces, c'est dans la
loi, là, ce n'est pas par voie réglementaire. Le mérite, quand c'est dans la loi, bien,
qu'on peut vous donner notre avis sur ce qui est dedans...
Mme Vien : Vous pouvez donner votre avis, je vous le
demande : Est-ce que c'est à propos, aujourd'hui, de vous
demander ça? Est-ce que vous avez réfléchi à la question ou si ce n'est pas une
bonne idée de vous poser ça, cette question-là, après-midi, là?
M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez, nous, on attendait de voir le projet de règlement pour faire nos
commentaires là-dessus.
Mme Vien :
Alors, le projet... Bien, en tout cas, vous aurez les intentions, vous pourrez
être attentifs, parce qu'au moment où on va déposer article par
article...
M. Cadieux
(Serge) : ...projet de règlement va être déposé, on peut faire des
représentations.
Mme Vien :
Oui. Parfait. Alors, nous, on va déposer au moment où on va faire article par
article, puis par la suite, comme d'habitude, il y a toujours un
45 jours.
M. Boyer
(Daniel) : ...problématique avec la relation tripartite, là.
M. Cadieux
(Serge) : Oui, mais ça, c'est dans la loi.
Mme Vien :
Oui, ça, c'est dans la loi.
M. Boyer
(Daniel) : Oui, mais elle ne va pas assez loin.
Mme Vien :
Oui. Bien, c'est comme je vous dis, hein...
M. Boyer (Daniel) : Non, mais je pense que c'est parce que vous ne le
saviez pas, qu'il y avait d'autres lois. Ce n'est pas parce que vous ne vouliez pas aller là, c'est parce que vous
avez... bien, en tout cas, vous ne l'aviez pas vu. Là, on vous le dit.
Mme Vien :
Merci beaucoup de nous éclairer comme vous le faites, si brillamment. Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. Et je reconnais maintenant M. le député de Beauharnois
et porte-parole en matière de travail pour l'opposition officielle. Vous avez
la parole, M. le député.
M. Leclair : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de
vous saluer, messieurs et madame. Merci d'être là, toujours pertinents
sur les dossiers.
Bien entendu,
mon premier sujet serait effectivement les clauses... les agences de placement. Puis, je
vous dis, je pense que la plupart des gens autour de la table, on a été quand
même surpris, là, depuis les derniers jours, là, qu'on entend ce qui se passe, là, les atrocités avec certaines agences de
placement. Et je dois vous avouer que j'ai une certaine confiance envers la ministre face à ça. Premièrement, de vouloir l'encadrer. Non, mais, effectivement, je veux dire,
si on arrête six mois pour traiter du
dossier, je suis convaincu qu'on arriverait à quelque chose, mais le délai
de temps va faire en sorte qu'on ne pourra peut-être pas travailler
jusqu'à fond et jusqu'à point.
Mais je crois
que la ministre, avec ce que vous venez de dire... C'est la
première fois qu'on va légiférer pour les agences de placement. Donc, de venir dire que ces relations tripartites
là, c'est correct, exemple, on dit que les normes du travail
vont y être inscrites, il n'y a rien qui va empêcher la ministre,
dans sa réglementation, de dire : Bien, il ne faut pas oublier la Loi sur la santé et sécurité du
travail, et tout, puis de l'inclure là-dedans. Après ça, exactement
comment que ça va se refléter dans la vraie vie, bien, je pense que
c'est la même affaire que la vision que nous avions des agences de placement, parce que je suis convaincu qu'il y en
a qui sont modèles, qui travaillent bien, puis qu'il y en a d'autres
qui, elles, nous font lever le poil sur les bras.
Mais je voudrais quand même vous entendre à
savoir, d'après vous, on est dans le bon cadre, là. Si on vient encadrer les agences de placement, bien, c'est dret
là qu'on peut dire que, là, il faut que vous suiviez la santé et
sécurité au travail, les lois sur les normes
du travail, les lois fiscales qui sont au Québec. C'est là qu'on peut le
mettre, là. Je veux vous entendre face à ça.
• (15 h 30) •
M. Cadieux
(Serge) : Oui, vous avez
raison, sauf que c'est un peu plus complexe que ça. On peut encadrer par
un règlement qui... tu sais, les agences, dans quel cadre ils
doivent travailler, s'ils doivent donner un cautionnement, ces choses-là, on peut le faire. Mais la vraie problématique des employés des agences de placement, c'est qu'il y a
une relation tripartite, et les lois
n'ont pas été conçues pour ça. Donc, les deux employeurs, l'employeur agence et
l'employeur client, là, ils se
relancent la balle quand vient le temps de faire appliquer les droits qui sont
prévus dans la loi sur la santé-sécurité, la Loi sur les accidents de
travail, la Loi sur les régimes complémentaires, la loi sur les normes.
Là, la ministre,
par le dépôt du projet de loi, vient régler une partie des droits couverts par
la loi sur les normes, mais il n'y a
rien qui est réglé pour la Loi sur les accidents de travail, la loi sur la
santé-sécurité, la Loi sur les régimes complémentaires.
C'est pour ça que je dis : C'est une bonne intention. Mais un travailleur d'une agence de placement, comme
un travailleur qui est couvert par une convention collective, il
n'y a pas juste une loi qui s'applique à lui, là. Il y a toutes les lois
du travail qui s'appliquent à cette personne-là. Mais actuellement la problématique,
c'est que tu as deux employeurs qui viennent
dire aux employés des agences... Puis souvent les employés des agences, on vous l'a sûrement dit,
c'est des employés vulnérables, souvent des employés qui viennent de l'immigration. Donc, ces gens-là n'ont pas les moyens de se battre, là, pour dire : Aïe! moi, je vais-tu prendre
une bataille juridique pour savoir c'est qui, mon employeur, là? Mes 14 premiers jours, là, l'agence ne
veut pas me les payer, elle dit que c'est le Walmart où ils m'ont placé qui
doit me payer. Puis le Walmart dit : Ce
n'est pas moi qui ai à payer, c'est l'agence. Ça finit là, hein? Cette personne-là,
elle n'est pas payée, point final, là. Et ça, c'est par la législation
qu'on doit le corriger, pas par le règlement.
M. Leclair : C'est bien. Je voudrais vous entendre encore sur
les clauses de disparité de traitement parce
qu'effectivement vous avez pris la peine de
spécifier que, je pense, tous les groupes, incluant le gouvernement, on
était tous d'accord à dire qu'il n'y aura
plus de disparité de traitement. Alors, combien de temps vous pensez qu'il
faudrait se donner, un maximum de
temps, de dire... si on irait dans le sens de dire : Il n'y a plus de
clause de disparité de traitement? Ou même,
bien, on a entendu d'autres groupes qui nous ont dit… un peu dans votre sens,
mais pas avec les mêmes termes, qui disaient :
Bien, nous, là, en autant qu'on arrive à la fin de la journée avec un régime
équivalent à ce qu'il y a, puis, un peu comme vous disiez, est-ce qu'on va à gauche, à droite... Est-ce que vous
croyez qu'on a besoin de plus de cinq ans pour mettre ça à jour ou à terme?
M. Boyer (Daniel) : Dans les
milieux syndiqués, il faut se fier à la convention collective. Au moment où la convention collective se termine puis qu'on
entreprend une nouvelle négociation de convention, c'est là que les
parties devraient se mettre à l'oeuvre pour
trouver des nouvelles clauses qui ne sont pas discriminatoires. Puis, dans le
milieu non syndiqué, bien, il faut mettre un
délai. Nous, on propose un an dans notre mémoire, là. C'est-u deux ans?
Peut-être, je ne sais pas, mais il
faut proposer un délai pour qu'à la fin de l'ensemble des conventions
collectives où il y a des clauses de disparité de traitement, bien, il
n'y en ait plus. C'est aussi simple que ça.
Puis il ne
faut surtout pas obliger les parties à le faire avant, parce qu'on vient priver
les parties d'un rapport de force,
parce que tout repose sur le rapport de force là-dedans. Donc, à la fin de la
convention collective ou au renouvellement de cette convention-là, il y
a un rapport de force qui existe. Puis là on ne dit pas... on a parlé beaucoup
de prestations déterminées, là, mais on ne
dit pas que c'est des prestations déterminées partout, mais le même régime, à
tout le moins. Puis les parties en
conviendront, c'est quel régime. Puis quand nos régimes à prestations
déterminées étaient en difficulté, il y
a quelques années, on a dit à notre monde : La pire affaire, c'est
justement de ne pas s'en occuper puis de ne rien faire. Mais les parties, les parties avec un rapport de
force égal, sont capables de trouver des solutions. Là, le rapport de
force n'est pas égal, et ils trouvent des solutions qui sont discriminatoires.
M. Leclair :
Je vous apporte sur un autre aspect. On a entendu plusieurs groupes, des
représentants de la restauration, du monde
récréatif, puis on nous parle de cinq jours à l'avance. Alors, on tente de les
mettre dans... moi, je donne toujours
le même exemple. On dit : Bien, une femme ou un homme monoparental qui a la
garde de son enfant puis qui n'est
pas capable d'avoir son horaire de travail à l'avance, donc, pas besoin de
rajouter, là, là-dedans, là, je pense que tout le monde voit le cas de
figure.
Donc,
qu'est-ce que vous répondez aux gens en restauration et dans le milieu
récréatif qui disent : Bien là, nous, cinq jours à l'avance peut nous causer des problèmes à cause qu'on ouvre
la terrasse, on ferme la terrasse, il fait beau, il ne fait pas beau, réservations. Je voudrais vous
entendre, votre perception de ça, parce que vous représentez sûrement
des gens qui y travaillent.
M. Boyer
(Daniel) : Tout à fait.
Mais, premièrement, il y a un détail... ce n'est pas un détail, là, mais, dans
le projet de loi, on ne mentionne pas
quel genre d'horaire. Nous, ce qu'on dit, c'est : Oui, connaître cinq
jours à l'avance, mais ça devrait
être un horaire hebdomadaire, parce que, sinon, là, je t'avise cinq jours à
l'avance que tu travailles lundi prochain puis, le lendemain, je t'avise cinq jours à l'avance que tu travailles
mardi prochain. C'est parce que ça n'a pas de bon sens de faire ça.
Puis
effectivement, vous avez tout à fait raison, il y a des secteurs d'activité où
c'est peut-être plus compliqué. Ça, c'est
vrai. Mais est-ce qu'on prend le plus petit dénominateur commun pour le mettre
dans la loi sur les normes? À ce compte-là,
si on fait ça, là, on est aussi bien de prendre la loi sur les normes puis la
jeter aux poubelles. On ne peut pas prendre le plus petit dénominateur
commun.
Les
conditions générales qui devraient s'appliquer au Québec, elles sont là. S'il y
a des exceptions, il faudrait qu'on s'en parle. Mais les conditions
générales, elles doivent se refléter dans la loi sur les normes.
M. Leclair : C'est clair. C'est clair. Les groupes de
représentants de la partie patronale, ce matin, nous disaient : Écoutez, on vient modifier, là, les semaines de
travail, la plupart des gens avaient déjà trois semaines, mais il y a
peut-être des groupes qui avaient deux
semaines, il va falloir qu'ils réenlignent leurs flûtes avec leurs employés
pour la troisième semaine. Alors,
d'après vos connaissances, combien de
temps qu'on aurait besoin de délai pour ajuster ces gens-là, là? Tu sais, on comprend, là, que les vacances sont
souvent cédulées par séniorité, et tout. Pour les peu de cas, s'il y en a... ou combien de temps? La ministre, elle suggère le 1er janvier 2019. Les
gens semblaient nous parler de minimum un an.
M. Boyer
(Daniel) : Mais je ne comprends pas pourquoi. Il me
semble qu'à la prochaine période de
vacances... Je suis conscient que cet été,
c'est peut-être vite un peu, là, mais, à la prochaine période de
vacances, la prochaine année, ça devrait être possible, là. Et je ne
vois pas le problème. C'est un nouveau lot de vacances que j'ai, là.
Puis, nous,
ce qu'on dit pour les vacances, c'est qu'il faudrait peut-être
aller un peu plus loin. On va plus loin, mais il
y a encore une petite... Puis je vais
vous conter une petite histoire
personnelle. Moi, depuis que j'ai l'âge de 19 ans, j'ai minimum quatre semaines de vacances. Je ne
vous dis pas que, depuis que je suis président de la FTQ, elles ne sont
pas scrapées des fois, là. Mais j'ai un
minimum de quatre semaines de vacances. J'ai de la misère à m'imaginer que
quelqu'un peut avoir moins que quatre
semaines de vacances. J'ai de la misère à m'imaginer ça. J'aurais peut-être dû
naître en Europe ou vivre en Europe, c'est peut-être plus simple, ça
aurait peut-être été plus simple. Mais, en tout cas, j'ai toujours eu quatre
semaines de vacances depuis l'âge de 19 ans, moi.
M. Cadieux
(Serge) : Mais on
s'entend-tu que trois semaines de vacances en 2018, c'est comme le
minimum, hein?
M. Boyer (Daniel) : Bien oui.
M. Cadieux
(Serge) : Puis, avec la
pénurie de main-d'oeuvre qu'on vit et qu'on va vivre, là, ceux qui
n'offrent pas trois semaines de vacances, là, bonne chance pour des mesures de
rétention de main-d'oeuvre, hein?
La Présidente (Mme Richard) :
Il vous reste environ 20 secondes, M. le député.
M. Leclair :
20 secondes pour vous remercier de vous être déplacés à Québec. Merci
beaucoup, messieurs.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, M. le député de Beauharnois. Maintenant, du côté du deuxième
groupe d'opposition, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière et porte-parole en
matière de travail.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs dames, pour, je dirais, vos propos
très clairs, qu'est-ce que vous avez à dire, vous le dites, et on peut
le comprendre très facilement.
Pour les
clauses orphelins, il n'y a aucun problème... bien, vous avez vu, j'ai déposé un
projet de loi qui était très simple,
là. Moi, je dis souvent, puis je l'ai dit hier puis je vais le répéter, là,
lorsqu'on veut, on peut. Puis il ne faut jamais oublier que nous sommes allés sur la lune à un moment donné. Donc, si on
veut, là, il y a des moyens. Lorsque j'ai déposé le projet de loi, oui,
il y a des... Mme la ministre a dit : C'est à quel moment? Il y a des
renouvellements de conventions collectives,
là, puis discussions. Puis j'ai bien aimé vos précisions, parce que, tout ce
que nous avons entendu depuis hier, on parle
toujours du régime à prestations déterminées. Ce n'est pas ça qu'on dit. On
dit : Régime équivalent, ça peut être un CD. En tout cas, mais je
pense...
M. Cadieux
(Serge) : On laisse aux parties le soin...
M. Picard :
Exact.
M. Cadieux (Serge) : ...de choisir. Les deux parties vont s'entendre,
ça va être quoi pour le futur. On n'impose rien à personne.
M. Picard :
Exact, exact. Encore une fois, la FTQ et notre groupe parlementaire, on est sur
la même longueur d'onde, tout simplement.
Une voix :
...encore une fois.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Picard :
Ah! on a toujours des bonnes discussions, avec M. Cadieux plus souvent,
là. C'est vrai, là, ce n'est pas...
Mais
je vais aller dans votre mémoire, là, à la page 13, lorsque vous parlez de
travail sur appel. Vous dites qu'en Ontario
il y a eu des choses de faites. Mais vous dites : Ici, on devrait se
pencher sur la question pour y réfléchir, là, du travail sur appel,
comment mieux l'encadrer. Je ne sais pas. Est-ce que vous pouvez préciser votre
pensée là-dessus, votre réflexion?
M. Boyer (Daniel) : Bien, écoutez, il y a des choses en Ontario qui
existent sur la compensation, notamment. Parce que, là, on se parle de mieux encadrer la mise en disponibilité puis le
travail sur appel, mais il y a toujours la possibilité pour un employé de refuser, mais le fardeau repose
toujours sur l'employé, qui a le fardeau de refuser. Ce n'est pas
toujours simple de refuser, hein, avec les pressions.
Donc,
en Ontario, ce qu'ils ont fait, bien, ils l'ont fait aussi pour le temps
supplémentaire, ils l'ont fait pour ça, quand tu as un droit de refus, il y a une compensation qui peut venir
avec aussi si l'employeur ne respecte pas certains critères. Donc, ça vient empêcher l'employeur
d'exercer certaines pressions sur le salarié qui a un droit de refuser,
mais, en bout de piste, on ne sait pas si c'est un vrai droit de refuser.
M. Cadieux
(Serge) : Par exemple, en Saskatchewan, là, on dit : Ça prend une
période de repos d'au moins huit heures. Tu sais, un employé qui rentre chez
eux, puis que l'employeur l'appelle puis il lui demande de rentrer quatre heures après, bien, non, en Saskatchewan,
on dit : Non, tu n'as pas le droit de faire ça. Ça lui prend une
période de repos d'au moins huit heures. Donc, il n'y a rien, là, sur
l'encadrement du rappel au travail.
Souvent,
des conventions collectives en ont, mais là on ne parle pas de la loi, là. La
loi doit prévoir des «guidelines» là. Tu ne peux pas être rappelé à
n'importe quel moment sans avoir le droit de refuser, là. Ça prend un
encadrement.
M. Boyer (Daniel) : Sinon, ton nombre d'heures maximal dans une
journée, il ne veut rien dire parce que je peux t'envoyer chez vous
trois heures puis, après ça, je peux te rappeler.
• (15 h 40) •
M. Picard :
O.K. Pensez-vous que le gouvernement
fait assez la promotion de la loi sur les normes? Pensez-vous que les travailleurs, là, qui sont assujettis font
valoir leurs droits, un, parce qu'ils connaissent leurs droits et, deux, ils n'ont
pas peur de revendiquer, là? Parce que,
dans la réalité, là, c'est que je disais hier, là, dans la vraie vie, là, il y
a des gens qui apprennent que c'est illégal, mais ils disent :
Regarde, moi, je veux continuer à travailler, là.
Il
y a-tu un travail qu'on devrait faire, l'appareil gouvernemental, pour dire, là : C'est les normes, il faut que les gens
les respectent?
M. Cadieux (Serge) : Je vais vous dire, je siège à la commission
des normes de la santé et de la sécurité du travail, là, et on s'est penchés cette année sur une
campagne publicitaire pour faire valoir les droits des gens tant en vertu de la Loi sur l'équité salariale
que la Loi sur les normes du travail. On l'avait toujours fait pour la
santé-sécurité au travail. Il y a toujours
une campagne annuelle en santé-sécurité. Ce n'était pas le cas nécessairement en matière de normes du travail et en matière d'équité salariale. Et, au conseil d'administration, on a
décidé de mettre ça de l'avant parce
qu'on constate qu'effectivement il y a plusieurs travailleurs et
travailleuses qui ne sont pas conscients de leurs droits.
M. Picard :
Je vais vous amener sur un sujet, là, il n'est pas dans le projet de loi, là,
mais je pense que, si on regarde vers l'avenir, là, il y a un sujet
important qui pointe, là, c'est la transformation du marché du travail, la
quatrième révolution, là, qu'on pense à la
robotisation, l'intelligence artificielle, là. Pensez-vous que ça serait le
temps, là, qu'on débute un chantier
là-dessus, là, pour revoir nos normes en fonction des nouvelles réalités puis,
je vais dire, la... Ça va changer de plus en plus rapidement, là, parce
que... On ne peut pas attendre toujours 20 ans, là, pour modifier une loi,
là.
M. Boyer
(Daniel) : Bien, oui, je... oui, il faut être proactifs, absolument.
Puis là vous parlez d'intelligence artificielle,
robotisation, automatisation. Il y a aussi tout ce que nous, on appelle... bon,
il y en a qui appellent ça l'économie collaborative,
mais toute l'économie de plateforme aussi, qui se développe à la vitesse grand
V, où on a... Puis on a à se poser
des questions concernant l'emploi, concernant le travail, mais tout l'aspect
réglementaire qui doit entourer cette économie de plateforme là, on doit
y voir parce qu'on est là, là. On est là.
Puis on dit... Puis je
pense qu'on... je ne dirai pas qu'on est en retard, on est très en retard,
parce que, si on n'y réfléchit pas, on va
voir des économies de plateforme étrangères, des monstres comme Uber, comme
Airbnb, débarquer ici, tasser les
petites économies de plateforme qu'on pourrait faire naître ici avec des
start-up puis qui vont se faire damer le pion. Et là on n'aura aucun
contrôle sur la réglementation autant en matière de travail qu'en matière de
toute autre réglementation, là. Demain
matin, si vous voulez avoir un plombier, là, vous allez sur une économie de
plateforme, vous allez en trouver un.
M. Picard : ...disait
qu'on pouvait avoir une agence de placement par application, là.
M. Boyer
(Daniel) : Tout à fait, tout
à fait. Ça fait que le plombier, là, est-ce qu'il a ses cartes de
compétence? Combien il est payé? On ne le
sait pas. On ne sait pas ça. Moi, je vous le dis, je fais de l'électricité, là.
Mais appelez-moi pas pour faire de l'électricité chez vous, là, ça me...
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, M. Boyer, c'est tout le temps qui était alloué. Madame
messieurs, merci pour votre contribution aux travaux de la commission.
Et je suspends quelques instants afin de
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 44)
(Reprise à 15 h 47)
La
Présidente (Mme Richard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Et nous
recevons le groupe Force Jeunesse.
Mesdames
monsieur, bienvenue à l'Assemblée
nationale. Vous allez avoir un maximum
de temps de 10 minutes pour
faire votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les parlementaires. Et je présume que, Mme Tremblay, vous allez nous faire la
présentation. Peut-être également nous présenter les personnes qui vous
accompagnent. Vous avez la parole.
Force
Jeunesse
Mme Tremblay
(Sophie) : Merci beaucoup. Mme la Présidente, Mme la
ministre, Mmes MM. les députés,
merci de cette invitation transmise à notre organisation dans le cadre des présentes consultations sur le projet
de loi n° 176. Je me présente, Sophie Tremblay, présidente de Force
Jeunesse. Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue, Julien Nepveu-Villeneuve,
vice-président exécutif de Force Jeunesse, et de ma collègue
Léa Gamache, qui est vice-présidente
responsable du contenu à Force Jeunesse. Et
je souligne également la présence dans la salle de notre secrétaire général, M. Daye Diallo.
Force
Jeunesse, c'est un regroupement bénévole et non partisan de jeunes travailleurs
de 18 à 35 ans qui milite depuis
sa fondation, en 1998, pour l'amélioration des conditions
de travail et des perspectives
d'emploi de la relève, avec, comme lunette d'analyse, l'équité
intergénérationnelle dans les politiques publiques.
Nous sommes
conscients de la responsabilité qui nous incombe dans le cadre des présentes consultations, puisque nous sommes en effet le seul groupe jeunesse appelé à
se prononcer sur le projet de loi n° 176, qui a vocation, donc, comme vous
le savez, à améliorer les conditions de travail minimales offertes aux
travailleurs québécois.
Je mentionne également
que nous sommes particulièrement interpelés par le projet de loi en raison, en
plus de notre implication, évidemment, à Force Jeunesse, de nos parcours
académiques et professionnels respectifs. Je suis en effet avocate en droit du travail et de l'emploi. Et mon collègue,
Julien Nepveu-Villeneuve, est conseiller en relations industrielles
agréé et également diplômé en droit. Donc, ce sont des sujets qui nous
interpellent particulièrement.
Pour
commencer, j'aimerais rappeler que les jeunes travailleurs, donc les
travailleurs âgés de 35 ans et moins, font face à des défis particuliers dans le cadre des changements du monde du
travail. Comme nous le mentionnons en introduction dans notre mémoire, les jeunes sont les
principales victimes, d'une part, des clauses de disparité de traitement. Ils
sont aussi, en proportion, plus nombreux à
subir les effets de la précarisation du travail, que ce soit la précarité
contractuelle, le fait d'occuper des
emplois non syndiqués, peu qualifiés et/ou à temps partiel, des emplois
atypiques, avec des horaires rotatifs, par
exemple. Et effectivement nous pouvons constater que cette tendance à la précarisation du travail
va en augmentant.
Les jeunes sont
aussi plus susceptibles, donc, d'évoluer dans des milieux qui leur offrent uniquement
les conditions minimums prévues par la Loi sur les normes du travail. Et
la réforme de la loi sur les normes aura donc des impacts particulièrement
significatifs sur les jeunes travailleurs.
De manière générale, nous saluons le dépôt du projet
de loi n° 176, qui apporte plusieurs améliorations aux conditions de travail minimales des travailleurs québécois.
La majorité de nos commentaires sur le projet de loi vont
porter sur les clauses de disparité de
traitement et sur l'importance, selon nous, d'aller encore plus loin que ce que
le projet de loi prévoit en ce moment
au niveau, notamment, de la mesure transitoire à l'article 46 du projet de
loi, considérant l'importance,
selon nous, avec la population
vieillissante, de maintenir l'équité dans les conditions de travail des jeunes
travailleurs et, à ce titre,
d'éliminer l'ensemble des conditions de disparité de traitement qui existent,
même celles qui seraient ratifiées avec l'article 46 dans sa
mouture actuelle, donc pour garantir, en fait, la prospérité à long terme du
Québec.
Pour la
prochaine partie de l'intervention, je vais laisser la parole à mon collègue
Julien, qui va vous présenter, d'une
part, l'historique de l'implication de Force Jeunesse dans le dossier des
clauses de disparité de traitement, les enjeux qui entourent l'existence de telles clauses dans
les milieux de travail et également la solution que nous proposons comme
mesure transitoire de remplacement de l'actuel article 46 du projet de
loi.
• (15 h 50) •
M. Nepveu-Villeneuve
(Julien) : Parfait. Merci, Sophie. Bonjour, Mme la Présidente. Merci
de nous recevoir, Mme la ministre. MM. et Mmes les députés.
Comme ma
collègue Sophie l'a mentionné, on est très contents d'être ici, d'autant plus
contents parce que, peut-être que
certains ne le savaient pas, mais notre organisme est né, il y a de cela
20 ans, sur cet enjeu-là, des clauses de disparité de traitement avec une volonté de réunir les
jeunes de toutes les formations politiques, de tous les horizons pour
abolir ces clauses-là.
Cette année,
notre organisme fête son 20e anniversaire, d'ailleurs. On se réjouit, je
vous dirais, que, pour notre 20e anniversaire,
on ait l'occasion de voir déposer un projet de loi qui interdit une fois pour
toutes et qui vient combler ce flou-là
qu'il y avait dans la loi par rapport au projet qui avait été déposé à
l'époque, en 1999. Je vous parlerai du flou, tout à l'heure, puis de l'espèce de brèche qui a été
créée par la jurisprudence. Donc, on est très contents de voir qu'enfin
il y avait une mesure législative qui était déposée pour la première fois.
Comme je l'ai
mentionné, notre travail a commencé en 1999, mais s'est vraiment, je vous
dirais, poursuivi en 2013, lorsqu'on
a réalisé, en 2013, que le nombre de clauses de disparité de traitement qui
touchaient les régimes de retraite et les régimes d'assurance collective
était encore plus nombreux, toutes proportions gardées, bien sûr, que celles qu'il y avait, en 1999, au niveau des salaires.
Donc, le problème est encore plus présent maintenant qu'à la fondation
de notre organisme. Donc, pour nous, c'était
essentiel de mettre les bouchées doubles et de hausser le ton par rapport à
cet enjeu-là. C'est ce qu'on a fait et on
n'a pas raté une occasion, Force Jeunesse, pour s'exprimer en commission
parlementaire, en consultation, en
comité, en consultation de politiques. Et il y en a eu beaucoup, des
consultations du gouvernement. Il y a
eu plusieurs avenues qui ont été explorées pour régler cet enjeu-là des clauses
orphelin, et on s'est présenté à chaque fois, on a répondu présent.
Pour bien
comprendre pourquoi on croit qu'il est urgent d'agir, là, pour abolir les
clauses de disparité de traitement, je
vais vous dresser un petit portrait. Vous connaissez sans doute un peu le
dossier, mais je vais quand même y revenir. Comme vous le savez, l'Assemblée nationale a légiféré, en 1999, pour
amender la Loi sur les normes du travail, mettre l'article 87.1 pour interdire les clauses de disparité de
traitement. Cette mesure-là a été un grand pas en avant pour favoriser
l'équité intergénérationnelle sur les lieux de travail.
Toutefois,
les années ont passé, et on a réalisé que la définition de «salaire» n'était
peut-être pas celle qu'on pensait à
l'époque. Si on regarde la Loi sur les normes du travail, c'est assez clair, je
vais vous le lire, le salaire, c'est «[toute] rémunération…», il s'agit de «la rémunération en monnaie courante et les
avantages ayant une valeur pécuniaire [...] pour le travail ou les services d'un salarié». On pouvait
donc croire, là, que les régimes de retraite rentraient dans cette
définition-là. Or, en 2015, la Cour d'appel,
en arrêt Pages jaunes, vient nous dire : Non, les régimes de retraite, ce
n'est pas considéré dans la définition de «salaire» de la Loi sur les normes
du travail.
Donc là, il y a une brèche qui est créée, et on
se retrouve dans cette brèche-là. Et elle n'a pas été petite, cette brèche-là, elle n'est pas marginale. On estime à environ
150 000 travailleurs québécois qui se retrouvent affectés par cette fameuse brèche là qui touche les régimes de retraite et les assurances collectives. Dans une étude qu'on a faite en
2013, on réalise que près de 20 % des
salariés, là, touchés par les conventions collectives sont victimes de clauses
de disparité de traitement. Et là on
ne parle pas de celles qui touchent les avantages sociaux comme les régimes
d'assurance collective parce que, de
la bouche même du comité du gouvernement, là, on n'a pas de données par rapport à ça, c'est assez
flou.
Donc, tout ça
pour vous dire que le phénomène, il existe, cette brèche-là, elle n'est pas
marginale, et il fallait donc agir.
Et on salue ce pas-là du gouvernement dans la bonne direction pour interdire
les clauses orphelin. Ça marque, je vous dirais, un progrès et un pas assez majeurs pour l'équité
intergénérationnelle parce qu'il vient combler le flou, combler la brèche. Par contre, comme ma collègue Sophie l'a
dit, il y a des améliorations qu'on juge essentielles pour répondre à un
problème majeur qu'on voit dans le projet de loi.
La
disposition actuelle du projet de loi vient, je vous dirais, permettre, même
ratifier toutes les clauses de disparité de traitement qui sont déjà en place. On vient donc dire, d'un côté de
la bouche, puis ça, c'est le côté de la bouche avec lequel on est vraiment en accord… on vient dire,
d'un côté de la bouche, que ces clauses-là sont discriminatoires, qu'il faut les éliminer. Ça, je pense que tout le monde
ici est d'accord là-dessus. Par contre, de l'autre côté de la bouche, on
vient dire qu'on va légitimer une iniquité
entre les travailleurs et on vient même en créer une entre certaines
entreprises, ce qui est problématique
parce que celles qui avaient déjà discriminé obtiennent un passe-droit, une
sorte de «n'allez pas en prison, ne passez pas go, ne réclamez pas
200 $», et les autres devront se conformer à la loi.
Pour Force
Jeunesse, il existe des manières beaucoup plus efficaces d'appliquer cette
mesure-là pour répondre réellement aux objectifs du gouvernement et de
tous les partis représentés à l'Assemblée nationale, soit d'atteindre l'équité
intergénérationnelle.
Je
vais vous formuler rapidement nos deux recommandations à ce niveau-là. La
première, c'est que, plutôt que d'accorder une clause d'amnistie aux
entreprises qui ont déjà des clauses de disparité de traitement, on recommande d'inclure une phase transitoire qui va permettre
aux employeurs d'avoir un délai supplémentaire pour s'adapter à l'entrée
en vigueur de cette nouvelle mesure
législative. On propose un délai de deux ans, mais je vous dirais qu'on est
assez flexibles là-dessus dans notre analyse. Ça pourrait être deux ans
ou plus. Pourquoi est-ce qu'on a pris deux ans? Parce que cette idée-là, on n'est pas allé la chercher à
l'autre bout du monde. Ce n'est pas une idée qui nous vient du Japon.
Elle nous vient de la loi de 1999 qui a
aboli les clauses de disparité de traitement. À l'époque, on a mis une mesure
transitoire de deux ans pour permettre aux entreprises
de se conformer à une nouvelle mesure législative. Et, je vous rassure, l'histoire nous confirme qu'aucune entreprise
n'a quitté le Québec, la paix industrielle a été maintenue, et on arrive maintenant à une nouvelle mesure, une évolution.
On pense qu'on peut suivre les mêmes mesures qui ont été mises en 1999 et qui
ont bien fonctionné.
Par contre,
on est conscients que cette mesure-là va amener quand même des négociations houleuses, laborieuses, du
moins, et, afin d'éviter que les parties se retrouvent dans une impasse de négociation ou se retrouvent dans une issue pour laquelle ils ne s'entendent pas sur la façon de régler les enjeux des
clauses de disparité de traitement, on propose la même mesure qui avait été mise en place dans le projet de loi n° 3. Donc, vous voyez, on s'inspire de mesures qui
ont fonctionné, des lois qui ont été adoptées
par l'Assemblée nationale. On propose d'intégrer un mécanisme de médiation
et d'arbitrage similaire à celui du projet de loi n° 3, qui visait
la santé financière et la pérennité des régimes de retraite du secteur municipal.
Donc, si les parties ne s'entendent pas après un délai, le processus de
médiation s'enclenche, et il y a un processus d'arbitrage qui va s'enclencher
par la suite s'il y a un échec de la médiation.
On
croit que ces deux solutions-là viennent bonifier le projet de loi et lui permettent d'assurer une véritable équité intergénérationnelle, qui est l'objectif, je pense, de tout le monde ici. Puis, je le
précise, là, on ne demande en aucun cas une mesure rétroactive. On ne
veut pas revenir en arrière. On veut simplement que les entreprises qui ont des
clauses de disparité présentement les éliminent graduellement, tout
simplement parce que
la loi les interdit. On propose une mesure de transition, pas une mesure
de rétroaction, et je trouve important de le préciser.
Donc,
finalement, on espère que le projet de loi, dans sa forme
actuelle ou amendée avec les excellentes idées qui ont été exprimées qui ont été exprimées en commission parlementaire, sera adopté d'ici la fin de la session parce que, depuis trop longtemps, et je pense qu'on peut tous s'entendre là-dessus,
là, les jeunes ont été victimes de ces discriminations-là. Et
là, enfin, on a un projet de loi sur la table, les parties s'entendent sur une
bonne majorité de ces idées-là, et on en appelle à la collaboration
des parlementaires pour faire adopter ce projet de loi là.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci. Merci beaucoup. On va débuter les...
Mme Tremblay
(Sophie) : En fait, rapidement,
pour conclure puis faire un petit point additionnel sur les régimes de retraite, je pense que mon collègue
Julien l'a bien exprimé, on ne demande pas de venir réparer le passé. C'est
vraiment d'avoir une transition avec un mécanisme qui, selon nous, est
raisonnable puis qui permet, donc, d'atteindre l'équité intergénérationnelle. Et, dans le rapport Fortin, entre autres, il y
avait plusieurs pistes de solution qui étaient déjà présentées sur la manière de venir interdire les clauses de
disparité de traitement. On pourra en discuter davantage dans la période
d'échange. Il y avait, entre autres, soit
interdire complètement les clauses de disparité avec un seul régime pour tous
les employés, mais il y avait aussi toute la
question des régimes équivalents, entre autres, qui pouvaient être introduits
avec, évidemment, des critères pour savoir
qu'est-ce qu'un régime équivalent. Donc, c'est quelque chose dont on pourra
discuter avec vous pendant la période d'échange.
Et
donc, voilà, donc, en conclusion, nous saluons le projet de loi n° 176.
C'est vraiment un projet qui contient toute une panoplie de mesures qui sont bénéfiques pour les travailleurs, pour
les jeunes travailleurs. Et il y a vraiment, en fait, l'enjeu central des clauses de disparité de
traitement sur lesquelles on aimerait attirer l'attention des parlementaires
et qu'on espère, donc, qu'il y aura des
améliorations qui seront apportées dans le sens de ce que nous vous proposons.
Donc, merci beaucoup. Et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Richard) : Merci. Merci beaucoup. Nous allons
débuter les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Vien :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous trois de vous être déplacés cet
après-midi. C'est un vrai plaisir de
vous recevoir. On sent que vous réfléchissez fort puis que vous êtes résolument
déterminés à faire en sorte qu'effectivement la jeunesse trouve sa
place. Et je vous salue pour ça. Je disais à mon chef de cabinet à quel point
je vous trouvais intelligents et brillants. En tout cas, je suis bien contente
de vous rencontrer cet après-midi.
On
jase, là. Les disparités, là, elles ne sont pas arrivées toutes seules, hein?
Elles sont arrivées lors de négociations, hein, dans certains milieux où c'était sous convention. Puis on a
quelques exemples, là, je ne les ai pas à portée de main, où syndicats et patrons en sont arrivés, justement
dans une négociation, dans un échange : Je te donne, je plie sur
quelque chose, tu plies sur autre chose. C'est souvent négocié. Êtes-vous
d'accord avec ça?
• (16 heures) •
M. Nepveu-Villeneuve
(Julien) : Oui, mais, en effet, on est d'accord, mais je vous dirais
que c'est la raison pour laquelle,
comme législateur, vous avez une responsabilité, je vous dirais, à ce
moment-là, parce que ces clauses-là, elles sont nées du fait que l'employeur et le syndicat, à l'époque, arrivaient à
une négociation, puis, lorsqu'il y avait une impasse dans ces négociations-là, la façon dont on réglait
l'impasse, c'était sur le dos des générations qui arrivaient, le dos des
générations suivantes. Et, lorsque ni
l'employeur ni le syndicat, le syndicat parce qu'il ne représentait pas ces
personnes-là, elles n'étaient pas encore
membres du syndicat... Donc, si l'employeur et le syndicat ne représentent pas
ces catégories de travailleurs là, qui va les défendre? Là, à ce
moment-là, bien, c'est le rôle de la Loi sur les normes du travail.
Donc,
c'est pour ça que nous, depuis le début, on ne veut pas que ça soit inscrit
dans une convention, on veut que ça soit
inscrit dans la Loi sur les normes du
travail pour qu'elle joue son rôle essentiel, qui est de protéger les travailleurs
les plus vulnérables, qui ne sont pas ni
protégés par l'employeur ni par le syndicat. On est contents, puis vous le
savez, vous l'avez vu, les syndicats maintenant
ont changé leur fusil d'épaule, ils le disent haut et fort, et on est très
contents. Ça crée des conflits de travail actuellement, donc les
syndicats refusent qu'il y ait des clauses de disparité de traitement. Ça amène notamment ce qui se passe à ABI
Bécancour actuellement. Mais, en effet, vous avez tout à fait raison, ces
clauses-là viennent d'ententes négociées,
d'où la raison pour laquelle l'État doit protéger les travailleurs les plus
vulnérables, qui ne l'étaient pas dans ce processus de négociation là,
où on les oubliait.
Mme Vien : Vous allez m'éclairer, là, par un cas de figure.
Vous avez dû réfléchir, là, je vous connais un peu, je suis sûre de ça. Donnez-moi un cas de figure... On
irait dans le sens que vous souhaitez, là, donnez-moi un exemple de ce qui pourrait arriver dans un endroit, dans une
shop où il y a deux régimes. On passe la loi avec ce que vous
souhaitez. Qu'est-ce qui arrive après ça?
Donnez-moi un cas de figure pour que Mme et M. Tout-le-monde qui nous écoutent,
ils comprennent bien, là, hein? Ces gens-là
ne sont pas là-dedans à longueur de journée, puis nous autres non plus,
d'ailleurs.
Mme Tremblay
(Sophie) : Bon, disons, par exemple, qu'on est dans un milieu de
travail où il y a deux catégories de
régimes de retraite, un régime à prestations déterminées qui couvre les
employés, disons, qui étaient embauchés avant le 1er janvier 2010, puis après ça, à partir du 1er janvier
2010, il y a un deuxième régime de retraite qui s'applique pour les employés arrivés à partir de cette date-là, qui
est un régime, lui, à cotisations déterminées, par exemple, qui peut
avoir ou pas le même niveau de cotisations,
le même niveau de prestations. Mais, bref, il y a deux régimes de familles
différentes qui sont en place avec une date
claire à partir de laquelle c'est le deuxième régime qui s'applique. Avec ce
qu'on propose, nous, comme mécanisme
de transition, il y aurait donc une période de deux ans, à partir de l'adoption
de la loi, pour que la partie patronale, la partie syndicale s'assoient
autour d'une table, négocient, regardent l'ensemble des conditions de travail, des paramètres de la convention
collective, du régime de retraite en place puis décident d'une solution pour
éliminer, pour le service futur, donc à
partir de la date à laquelle ils doivent se conformer à la loi... s'assurer
qu'il n'y ait plus de clauses de disparité en place.
Mme Vien :
Je vous arrête, on va juste régler ça, là. Donc là, on est en période de négo
après l'adoption de la loi, O.K., ou si vous me dites : Non, on
attend au renouvellement de la convention?
Mme Tremblay (Sophie) : Bien,
ça dépend, effectivement, à quel moment la convention collective arrive à échéance et doit être renouvelée. On avait prévu
une période de deux ans, nous, dans le mémoire qu'on vous soumet, mais effectivement
ça pourrait être une période un peu plus longue, tout dépendant, là, des
cycles. Ça pourrait être jusqu'à trois ans, quatre ans, cinq ans, mais...
Mme Vien : On pourrait
faire entrer dans la danse la fin de la convention collective.
Mme Tremblay
(Sophie) : Exact, le renouvellement de la convention collective ou à l'échéance, là, prévue par le projet
de loi.
Mme Vien : O.K. Et là vous dites : On va demander aux deux
parties de s'asseoir. Est-ce que vous leur demandez à ce moment-là de choisir un des deux régimes qu'il
y a à l'intérieur de la boîte ou
vous dites : C'est ça ou on vous donne aussi la possibilité d'avoir un autre régime? Puis là vous parlez en
plus d'un régime équivalent. Moi, je ne sais pas trop ce que ça veut
dire, là. Peut-être nous éclairer sur la suite des choses. Qu'est-ce qui arrive
dans cette shop-là après, là?
Mme Tremblay (Sophie) : On
n'imposerait pas de solution définitive, là. Ça serait vraiment aux parties de s'entendre entre elles. Elles peuvent soit décider
d'offrir un seul régime pour tous les travailleurs, qui serait le même
pour tout le monde ou...
Mme Vien : Même celui
qui était là avant, même pour ceux qui sont déjà sur...
Mme Tremblay (Sophie) : Ça
pourrait effectivement, dans certains cas, demander... Oui.
Mme Vien : ...sous deux
régimes?
Mme Tremblay (Sophie) : Oui.
Mme Vien : C'est ça? O.K.
Mme Tremblay
(Sophie) : Ça pourrait être
un nouveau régime, ça pourrait être de ramener les anciens... ou, en fait, les nouveaux travailleurs dans l'ancien
régime, ça pourrait être d'avoir deux régimes encore, mais qui sont
équivalents. Puis, sur l'équivalence, je sais que la CSN, entre autres, vous a
entretenus sur la question, il y aurait des critères, évidemment, là, à définir
sur qu'est-ce qu'un régime équivalent, puis après les employeurs auraient, par
exemple, à démontrer à Retraite Québec
que les régimes qui sont offerts sont effectivement équivalents. Donc, ça serait au niveau des cotisations, au niveau des prestations. Au
niveau du partage du risque aussi, il faudrait qu'il y ait certains
critères, là, qui soient déterminés pour qu'on puisse effectivement affirmer
que deux régimes sont équivalents si on va dans cette direction-là. Mais, en gros, ce serait vraiment aux parties
elles-mêmes de décider la manière d'éliminer la disparité de traitement
qui existe.
Mme Vien : Est-ce
que vous ne pensez pas que d'aller
jouer dans... parce que, là, il
y a deux régimes, on
s'intéresse aux entreprises où il y a deux régimes actuellement, que de
redéfinir ce serait quoi, un régime de retraite ou des avantages sociaux, parce qu'il est question de ça aussi, là, hein, que,
là, tout le monde va y perdre son latin, là? Non? Vous ne pensez pas?
Mme Tremblay
(Sophie) : Bien, je pense
qu'au contraire ça viendrait clarifier beaucoup de choses, surtout quand on sait que
certaines clauses de disparité de traitement ne sont pas toujours bien
identifiées ou on n'a pas toujours la transparence
nécessaire pour savoir si ça existe ou pas, les clauses de disparité. Quand il y a
des conventions collectives, c'est facile de l'identifier quand c'est
spécifiquement mentionné dans la convention, mais il y a plusieurs
milieux de travail aussi où ce n'est pas nécessairement écrit qu'il y a
une clause de disparité. Donc, de vraiment l'interdire clairement, formellement dans la loi, je pense que, plutôt que
de confondre les gens, ça vient mettre une règle claire, qui est la même
pour tout le monde, puis c'est le bon principe pour l'équité
intergénérationnelle.
M. Nepveu-Villeneuve (Julien) :
...
Mme Vien : Juste avant, retenez votre idée, M. Julien, si vous voulez, mon collègue me dit, et
à propos : Dans les endroits où
il n'y a pas... ce n'est pas sous convention, ce n'est pas conventionné, il n'y
a pas de négociation, là. C'est un milieu
de travail où c'est le boss qui décide que c'est comme ça, puis qui change de
régime, puis ça va devenir comme ça dorénavant. Je veux dire, eux
autres, on fait quoi avec eux?
Mme Tremblay (Sophie) : Bien,
il y aura une obligation dans ce cas-là, dans la loi, évidemment, pour que l'employeur se conforme. Il y a aussi un recours
qui est prévu, en ce moment dans le projet de loi, pour un travailleur
qui considère être victime d'une clause de
disparité de traitement. Donc, il y aurait quand même un mécanisme pour
permettre à un travailleur qui considère
être victime d'une clause de pouvoir s'adresser à la Commission des normes du
travail pour faire valoir, justement,
la situation. Puis effectivement il y aurait une mesure de redressement qui
pourrait ultimement être prononcée
par le Tribunal administratif du travail dans les cas où il n'y a pas de
convention collective. Et puis ce serait cette mesure-là qui
s'appliquerait.
Mme Vien :
M. Nepveu-Villeneuve.
M. Nepveu-Villeneuve (Julien) :
Oui, merci. Bien, en fait, vous mentionniez tout à l'heure que, bon, si on a
deux types de régimes, et là, aux finances, on doit négocier, bien, tout le
monde va perdre un peu. Ce qu'il faut bien comprendre,
c'est que ce régime-là, plus avantageux, là, qu'une catégorie de travailleurs a
réussi à avoir, là, ils ne l'ont pas eu par hasard. Ils l'ont eu sur le
dos des futurs travailleurs, parce qu'on est arrivés dans une impasse dans les négociations, puis les deux parties se sont
assises ensemble, elles se sont dit : Bon, bien... Ils ont dit : Moi,
je veux un régime comme ça.
L'employeur a dit : Bien, moi, je ne suis pas capable de te le donner
parce que je n'ai pas les moyens. Parfait, on va vous le donner juste à vous autres, puis tous les prochains ne
l'auront pas. C'est ça qui s'est passé. Ça fait que les nouveaux travailleurs arrivent, ils n'ont pas les
mêmes conditions que les autres, ils n'ont pas eu droit au chapitre à la
négociation parce qu'ils n'étaient pas
encore employés, pas membres du syndicat. Et donc ce régime-là, il a été fait
sur le dos des générations à venir ou des
nouveaux arrivants, bien, dépendamment, là, des nouvelles personnes qui sont
arrivées sur le marché du travail.
Ce qu'on
pense, c'est qu'il faut rétablir cette iniquité-là. C'est vraiment ça, là, la
mentalité. Et ce qu'on veut, c'est qu'au
final les parties, quand elles vont négocier, il n'y ait pas cette baguette
magique là facile, cet outil-là, dans leur coffre à outils, pour dire : Bang! On règle la
négociation en mettant ça sur le dos des jeunes qui ne sont pas à la table de
négociation. Pour nous, c'est vraiment ça.
Puis ça s'est
passé par le passé. On ne peut pas le faire de façon rétroactive, mais, au
moins, on peut se dire qu'il n'y en
aura plus, des clauses comme ça, puis qu'on ne va pas les ratifier, celles qui
ont déjà été faites. Et puis elles n'ont peut-être pas été faites de mauvaise foi, hein? Bon, la Cour d'appel
confirme que c'est la bonne façon d'analyser la loi actuellement. Mais on pense que là, maintenant
qu'on change la loi, ça doit être la même chose pour tout le monde puis ne pas avoir deux catégories d'employés puis deux
catégories, là, d'entreprises. C'est vraiment ça, le raisonnement
derrière la solution qu'on propose.
Mme Vien :
Bien, merci. En tout cas, je trouve ça très intéressant, notre conversation. On
met ça dans notre besace à réflexion. Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant du côté de l'opposition
officielle avec le porte-parole en matière de travail. M. le député de
Beauharnois.
M. Leclair : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bonjour à vous, mesdames et monsieur. Effectivement, votre mémoire porte surtout sur les clauses de disparité
de traitement, puis vous venez d'en parler amplement. Mais je suis
obligé de dire que je suis complètement de
votre avis lorsqu'on dit que les clauses de disparité de traitement doivent
être terminées, là, puis qu'elles ne paraissent même plus dans un avenir
prochain. Est-ce que c'est dans un an, dans deux ans, dans cinq ans, dans huit ans? Il faut dire qu'il n'y aura
plus de possibilité, dans un futur, pour un employeur... On l'a réglé,
le côté salarial. Un employé, homme ou
femme, qui fait la même tâche doit avoir le même salaire. Faisons la même chose
dans les fonds de retraite et même affaire
pour... parce que, là, on n'a pas parlé beaucoup, là, de tous les programmes
sociaux, là, les assurances, et tout. Alors, moi, je pense qu'il faut
tendre vers ça.
La prémisse
du projet de loi nous dit : Bien, c'est ça qu'on veut faire. Mais
malheureusement on s'aperçoit qu'on va garder
une brèche, un entre-deux. Puis moi, je suis convaincu que c'est la seule
petite partie qui manque à ce bout-là, de prévoir justement un temps et
certaines normes qui disent : Bon, bien, un an après la convention
collective x, y, bien, il
y aura une procédure d'arbitrage de prévue. Un coup qu'on a ça, moi, je pense
qu'on rattache les fils à tout le monde, l'enlignement de la ministre serait clair, puis on négocierait
complètement avec un autre aspect, avec une autre vision.
Mais je voudrais surtout vous entendre... Vous
parlez dans votre mémoire, à la page 7, là, vous donnez des pourcentages, de plus en plus de jeunes qui vont
travailler à temps partiel, c'est la nouvelle réalité. On entendait
vaguer voilà, je vous dirais, deux ans,
trois ans, par la partie patronale, de dire : Bien là, les jeunes, il
faudrait qu'ils soient capables de se
promener avec leurs régimes de retraite, qu'ils ne soient pas rattachés. Alors,
c'est des nouvelles formes de régimes de retraite. Je ne suis pas un spécialiste là-dedans, mais est-ce que vous
croyez qu'en faisant... cette clause de disparité, qu'on l'effacerait,
qu'on pourrait peut-être donner la chance à une catégorie de jeunes qui
travaillent à aller voir ces styles de modes hybrides là?
• (16 h 10) •
Mme Gamache
(Léa) : Je vais répondre.
Moi non plus, je ne suis pas vraiment une spécialiste de la question, mais j'ai passé à travers quelques
études récemment, dont une de l'ISQ, de l'Institut de la statistique du Québec, qui est sortie en 2014, qui montre que... Bien, d'une part, il
y a deux choses, hein? Il y a les jeunes travailleurs puis il y a aussi les tendances. Et puis ce qu'on voit, c'est qu'il y a
une tendance dans les types d'emploi atypique, parce qu'il y a plusieurs types
d'emploi atypique, qu'il y a une tendance qui va vraiment...
en fait, une augmentation significative au cours des... je dirais, les 10, 15 dernières années. Il y a de plus en plus de travailleurs qui travaillent à temps plein, mais qui ont des
postes occasionnels, donc pas permanents.
J'entendais un peu les auditions des derniers
jours, et puis il y a cette perception-là que les jeunes désirent beaucoup
de flexibilité. Puis j'ai bien l'impression que... Bien, en fait, nous avons
bien l'impression qu'effectivement les jeunes désirent plus de
conciliation travail-famille, mais, lorsqu'on parle de flexibilité en termes de
travail, tu sais, d'insécurité d'emploi, si
on veut, il ne faut pas... c'est ça, il ne faut pas mélanger la cause puis la
conséquence, hein? Je pense qu'il y a
des situations où c'est plutôt les employeurs qui veulent plus de flexibilité.
Et puis les jeunes travailleurs qui viennent sur le marché du travail
font avec. Donc, c'est ça. Et alors ça semble être une tendance qui va en
croissant.
Puis il y a aussi une étude qui est sortie très,
très récemment, Deloitte, qui démontre que... en fait, il y a eu un sondage auprès de 300 grands employeurs
canadiens, et puis que, selon eux, il y a près de la moitié de ces
employeurs-là qui désirent engager davantage d'occasionnels, 50 % d'entre
eux désirent engager plus d'occasionnels dans les deux prochaines années, là. Donc, c'est ça. Alors, peut-être que cette
question-là, de mobilité, là, ce n'est pas la meilleure façon, tu sais, de se positionner par rapport au lien
entre la flexibilité ou la mobilité des jeunes travailleurs, et puis... et
voilà.
Mme Tremblay
(Sophie) : Peut-être simplement pour compléter la réponse de ma
collègue. Face à la mobilité croissante,
qui est une tendance, effectivement, qu'on observe, une des mesures que Force
Jeunesse préconise depuis longtemps aussi,
c'est toute l'implantation d'un régime sectoriel pour faire en sorte,
justement, que, même si un employé se déplace, dans le cadre de sa
carrière, à travers plusieurs employeurs, il aurait son régime dans son
secteur, que ce soient les télécommunications, ou la foresterie, ou peu
importe, il y aurait des grands régimes de retraite sectoriels auxquels le travailleur serait attaché sans que le régime soit
lui-même celui d'un seul employeur. Donc, ça viendrait en quelque sorte prendre en considération les nouvelles tendances
de mobilité du fait qu'il y ait plus de travail occasionnel. Puis, en
même temps, les gens auraient quand même accès à un régime complémentaire de
retraite qui les suivrait, peu importent les déplacements au travers de
différents employeurs.
M. Leclair : Donc, est-ce que
c'est un rêve, ça, ou ça existe?
Mme Tremblay
(Sophie) : Ça existe en Europe, notamment. Vous pouvez regarder en
Allemagne, aux Pays-Bas, les pays
scandinaves, là. C'est des formules qui existent. En Ontario, il y a ça dans le
domaine municipal aussi. Il y a un seul grand régime de retraite pour
toutes les municipalités. Donc, oui, ce sont des choses qui existent ailleurs,
dont on peut inspirer.
M. Leclair : Bon, vous avez entièrement raison, parce que,
justement, dans la première portion de votre réponse, effectivement, on a des tendances que l'employeur,
lui, aime mieux avoir des temporaires pour tout ce que ça ne lui coûte pas. Alors, c'est le jeune qui en écope en bout de
piste, parce qu'il n'a pas de régime de retraite, et tout. Donc,
j'imagine que, d'ici un court laps de temps,
bien, les jeunes vont réagir. Puis ce n'est pas une question de dire qu'ils
vont revendiquer, mais ils vont
trouver une solution, à dire : Bien là, il faut que je sois protégé. Je
vais travailler pareil, mais à un paquet de places temporaires, que je vais faire quand même du temps
plein à la fin de la semaine, avec ses inconvénients, peut-être, que ça
m'apporte, mais il faudra que je m'assure un avenir plus tard pour un fond de
retraite.
Je vous amène
une dernière petite question, le temps file. À la page 15 de votre
mémoire... Parce que, tantôt, vous avez
fait un peu part de ça. On sait que, lorsqu'il y a des conventions collectives
dans des endroits de travail, bien, il y a de moins de problèmes, c'est déjà encadré, et tout. Mais vous disiez :
Il y a des places, là, que, l'iniquité, on ne la voit pas, on ne la sait pas. Il faut la découvrir, il faut
avoir les preuves, après ça aller aux normes. Donc, vous parlez, en
page 15, qu'il y a un délai de
90 jours proposé à l'article 35, puis vous dites : C'est
beaucoup trop court, on devrait avoir une prescription d'un an. Je
voudrais vous entendre sur ce volet-là, s'il vous plaît.
Mme Tremblay
(Sophie) : Bien, effectivement, on s'inspire du délai de prescription
d'un an qui est pour les plaintes pécuniaires dans la loi sur les normes, parce
que, bon, une disparité de traitement, souvent, peut avoir des conséquences financières. Puis le 90 jours
qui est proposé en ce moment dans le projet de loi, selon nous, c'est court
parce qu'effectivement en ce moment, bon, l'employé a connaissance qu'il y a
peut-être un problème ou quelque chose qui cloche, puis le moment où il doit déposer sa
plainte, son recours, peut-être que 90 jours, ce n'est pas suffisant, puis
on considérait qu'un an était plus approprié
pour s'inspirer, en fait, du recours pour les plaintes pécuniaires qui est déjà
le délai d'un an, là, prévu dans la loi sur les normes.
M. Leclair :
Puis ce délai-là, tel que décrit en ce moment, il part lorsqu'on prend
considération des faits?
Mme Tremblay
(Sophie) : À partir de la connaissance de l'employé, mais, encore là,
comment qualifier la connaissance? Quand il
n'y a pas de données nécessairement facilement accessibles ou transparentes
entre le moment où on peut commencer
à avoir la connaissance que quelque chose cloche puis vraiment la réalisation
du côté du travailleur qui n'est justement pas syndiqué nécessairement,
pas outillé pour bien comprendre toutes les subtilités de la question, on
trouvait que 90 jours, c'est un peu court, puis qu'un an serait plus approprié.
M. Leclair :
On va s'assurer d'un amendement pour voir avec la ministre là-dessus. Merci
beaucoup.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, M. le député. Je vais maintenant du
côté du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière et
porte-parole en matière de travail.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Merci, mesdames et monsieur. Plus on avance, plus on
trouve des solutions, là, pour régler
le problème. Tout à l'heure, vous... J'aime bien votre suggestion, là, pour
tout simplement prévoir un délai de deux
ans pour les endroits où c'est peut-être non syndiqué. Où c'est syndiqué,
prévoir tout simplement au renouvellement de la convention, parce que, vous avez dit tout à l'heure avec beaucoup
de pertinence, ça s'est négocié à un moment donné, bien là, ça va se
renégocier à nouveau. Et, quand vous parlez de peut-être prendre la médiation
prévue au projet de loi n° 3... mais je dois avouer que je me fie sur vous qu'elle est bonne. Je ne
l'ai pas validée, là, mais... C'était une bonne loi? Oui? Non? O.K.
Mais,
tantôt, vous avez dit : Ça a été créé, Force Jeunesse, il y a 20 ans,
puis on parle encore du même sujet. Ça, je suis content que l'organisme a tenu le fort pendant 20 ans, mais je
suis triste parce que ça fait 20 ans, là. On s'entend, là?
Mais
donc, pour ça, je pense que la ministre a tous les outils nécessaires avec
qu'est-ce qu'on entend. Hier, on a reparlé
de paix industrielle, là, vous l'avez abordé tout à l'heure. Moi, j'ai insisté
hier, j'ai dit : Pouvez-vous m'expliquer tout ce qui va changer? Puis ça a l'air que c'est dangereux, là,
qu'est-ce qu'on s'est fait dire, là. Mais voulez-vous rajouter sur la paix industrielle? Tantôt, vous l'avez
juste abordée, là. Comment vous voyez ça, vous, là, si jamais, là, la
ministre décide que, oui, on abolit pour tous les travailleurs, là?
M. Nepveu-Villeneuve
(Julien) : Mais, moi, ça me fait toujours un peu rire, cet
argument-là, parce que, ma collègue l'a
mentionné, moi, c'est ma formation, là, j'ai étudié les relations
industrielles, j'ai étudié l'histoire, notamment du syndicalisme,
l'évolution des normes du travail, et, à chaque fois qu'on veut faire ce genre
de mesure là, il y a certains groupes qui disent toujours que ça va être la fin
de la paix industrielle. Et là ça fait peur.
Et
c'est pour ça, moi, ça me fait toujours rire, d'entendre ces arguments-là,
puis, en tout respect, ça fait partie d'un argumentaire qui est plus étoffé que celui-là, mais ça reste un argument
qu'on sort beaucoup, là, comme un épouvantail. Moi, je pense qu'actuellement on a des exemples concrets, là, pas des
épouvantails, des exemples concrets qui démontrent que la formule actuelle,
le statu quo, ne fonctionne pas parce que la paix industrielle, déjà, est mise
à mal.
La paix industrielle,
c'est quoi, ça? C'est lorsqu'on ne s'entend plus sur le lieu de travail, qu'on
a des conflits de travail, qu'on n'est pas capables de mener à bien les
activités de l'entreprise. Mais ce qui se passe à Bécancour actuellement, ce n'est pas une situation de paix
industrielle. On est en lock-out. Ce qu'il y a eu récemment, puis on
peut en nommer, là, il y a eu Brault et
Martineau, Lafarge, Resco, on a une série de conflits de travail qu'il y a eu
dans les dernières années sur l'enjeu
spécifique des clauses de disparité de traitement. On en parle de plus en plus
dans les médias, on en parle
aujourd'hui, ce qui est une très bonne chose, qu'on en parle. Même si on n'est
pas d'accord sur tout, je pense que c'est déjà un très, très bon pas en
avant, mais ça n'arrêtera pas pour la suite.
Donc,
quand on vous sort l'épouvantail de la paix industrielle, que le statu quo
devrait la maintenir, là, c'est tout l'inverse,
c'est tout le contraire. Puis vous avez écouté les représentants syndicaux, je
ne parlerai pas pour eux, je n'ai pas l'impression qu'ils vont en
laisser beaucoup dans les conventions collectives. Moi, je pense que les
conflits de travail vont se multiplier si le statu quo est maintenu.
Donc,
en ce sens-là, le projet de loi est essentiel parce qu'il nous permet justement
d'éviter qu'il y ait des nouveaux conflits
de travail, et ça, c'est gagnant pour tout le monde, autant pour l'entreprise
que pour les employeurs... que pour les employés, pardon.
M. Picard :
Merci. Rapidement, lorsqu'on avance 150 000 travailleurs, avez-vous
la ventilation syndiqués, non syndiqués?
Mme Tremblay
(Sophie) : Moi, malheureusement, je n'ai pas la... C'est sûrement la
FTQ, en fait, qui a la statistique. Donc, je ne sais pas s'ils en ont parlé
juste avant nous, là.
• (16 h 20) •
M. Nepveu-Villeneuve
(Julien) : Qui vient de la statistique du Bureau de l'actuaire en chef
du Canada.
M. Picard : O.K., c'est bon. Lorsque quelqu'un se sent victime d'une disparité, il y a
des recours prévus dans la loi. Ils sont suffisants, selon vous, ou non,
ou on pourrait les améliorer?
Mme Tremblay (Sophie) : Notre principale recommandation, comme on a
discuté tout à l'heure, c'était sur le délai d'un an plutôt que 90 jours. Effectivement, il pourrait toujours y avoir aussi... peut-être s'assurer d'arrimer
le recours avec la plainte pour
pratiques interdites puis pour le congédiement sans cause juste et suffisante
de 122 et 124 de la loi sur les normes
aussi pour ne pas qu'il y ait de dédoublement ou qu'en fait ce soit bien
arrimé. Mais je pense que le projet
de loi, pour le moment, répond bien à
ces questions-là. Donc, c'était plus, nous, une question
simplement du délai d'exécution
de la plainte.
M. Picard :
Au niveau des clauses de disparité, on parle de régime de retraite, régime
d'assurance médicaments. Il y en a-tu d'autres?
Mme Gamache
(Léa) : Bien oui.
M. Picard :
Si oui, lesquels?
Mme Gamache (Léa) : Oui, puis ça, ça fait peut-être
partie des clauses de disparité de traitement qui vont être un petit peu
plus difficiles à identifier par des salariés parce qu'en fait on ne peut pas nécessairement qualifier ça ou, en
tout cas, ce n'est pas clair qu'on puisse
qualifier ça comme des avantages sociaux. On peut penser, par exemple, à la
multiplication des niveaux d'échelle
salariale où, évidemment, les jeunes travailleurs sont au bas de l'échelle,
puis il y a quand même... il peut y avoir
une partie des gens, des travailleurs plus âgés qui ont déjà terminé de
traverser cette échelle-là. On peut aussi
penser à des directives de gel de permanence ou des non-remplacements de
permanence, où des gens qui avaient une permanence quittent pour la retraite et sont remplacés par des
occasionnels, et on pourrait aussi penser qu'à quelque part c'est une
forme de disparité de traitement, puis ça retouche... oui, oui?
M. Picard :
...ma compréhension, lorsque vous parlez de multiplication d'échelles, c'est-u
dans... Je vais prendre un exemple,
auparavant, ça prenait 12 ans avant d'atteindre le maximum, puis là ça va
en prendre 15 ou 18. C'est-u ça que vous voulez dire? C'est ça? O.K.,
c'est bon. O.K.
Moi,
je peux... Tantôt, vous avez dit : On espère que ça va être adopté d'ici
la fin de la session. Nous, notre groupe parlementaire, on va tout faire pour que ce soit... même si ce n'est pas
à notre goût à nous, on va essayer de le bonifier le plus possible, mais on connaît aussi les règles
parlementaires, ils sont majoritaires. Donc, on va proposer un
amendement, s'il est battu, on va continuer
pour travailler pour l'adopter parce que ça fait des années qu'on attend après
ça. Et donc vous pouvez compter sur notre collaboration.
La Présidente (Mme Richard) : Merci beaucoup, M. le député de
Chutes-de-la-Chaudière, c'est tout le temps dont nous disposions.
Mesdames monsieur, merci beaucoup pour votre contribution.
Et je suspends
quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 23)
(Reprise à 16 h 25)
La Présidente (Mme Richard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Et nous recevons maintenant
la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Nous recevons
Mme Hébert. Bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. M. Leblanc, bienvenue également.
Vous connaissez le processus des commissions
parlementaires. Vous avez un maximum
de temps de 10 minutes pour faire votre
exposé. Par la suite suivra un échange avec les parlementaires. Vous avez la
parole, Mme Hébert.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert (Martine) : Je vous
remercie beaucoup,
Mme la Présidente. D'abord, je tiens à remercier l'ensemble des membres de la commission, Mme la ministre, Mme la Présidente, mesdames et messieurs les députés, de nous
permettre d'exposer le point de vue des PME aujourd'hui sur le projet
de loi n° 176, qui entame une
révision, là, de la Loi sur les normes de travail.
D'emblée,
Mme la Présidente, je voudrais bien préciser que les employeurs
propriétaires de PME ont vraiment à coeur
d'offrir les meilleures conditions de travail possible à leurs employés, et
cela est d'autant plus important que, comme vous le savez, plusieurs PME dans plusieurs secteurs d'activité, au Québec, sont en
proie à une pénurie de main-d'oeuvre
importante. Toutefois, ces PME là disposent
de moyens limités, et leur marge de
manoeuvre est souvent
restreinte. Il faut donc être conscient que toute modification à la Loi sur les normes du
travail qui fixe les conditions minimales
de base entrave, d'une part, la flexibilité dont ces employeurs-là ont besoin pour attirer et retenir les employés
clés et, d'autre part, crée des
pressions à la hausse sur les autres emplois et autres conditions au sein de l'entreprise, ce qui se trouve à miner du même souffle leur capacité à
retenir leurs autres employés.
Alors, Mme la
Présidente, je tiens d'abord à saluer la sagesse dont a fait preuve la ministre
du Travail et le gouvernement dans ce projet de loi là. On sait qu'il y avait beaucoup
de pression pour différentes mesures, le salaire minimum à 15 $, le fameux
5-10-15, etc. Je pense qu'au moins on peut dire que le gouvernement a quand
même eu une certaine sagesse, là, de ne pas accepter les doléances qui
auraient été dommageables.
Cela étant, vous savez, je pense que,
même si on peut reconnaître que le gouvernement du Québec a fait preuve d'une certaine retenue relativement à ces
revendications-là, on reconnaît aussi que ça demeure quand même un projet
de loi, là, dont la facture risque d'être
assumée en très grande partie par les PME. Et on sait que la facture, là, peut
totaliser, là, selon ce qu'on nous a
présenté, jusqu'à à peu près 700 millions de dollars par année. Donc,
c'est quand même important.
On
reconnaît aussi que, lors du dernier budget, le gouvernement a quand même
retiré une certaine dose de pression sur
les coûts que subiraient les PME du Québec en raison de l'adoption du projet de
loi n° 176. On souligne du même souffle
cependant, Mme la Présidente, qu'en dépit de ces efforts-là les PME du Québec
demeureront parmi les plus taxées en Amérique du Nord, et
particulièrement au Canada.
Je voudrais souligner
aussi, Mme la Présidente, qu'un des arguments, qui a été fourni pour justifier
plusieurs mesures qu'on a incluses dans le
projet de loi n° 176, semble s'appuyer sur la récente performance
économique enviable, là, du Québec.
Vous savez, il est de notre avis que de fonder la mise en place de contraintes
codifiées, donc de long terme, qui
visent les employeurs, ça demeure une démarche qui reste hasardeuse parce que
ça occulte la nature cyclique de notre économie.
Je dis toujours que, vous savez, ça va bien aujourd'hui, mais la dernière
récession date de 2008, on est à 10 ans de la dernière récession.
Malheureusement, les récessions, c'est comme les épidémies de grippe, ça
revient. Et on voit d'ailleurs des signes,
hein, qui nous disent que peut-être que l'économie va subir un certain ralentissement
éventuellement, parce que les taux d'intérêt augmentent.
Donc,
si vous voulez, ce qu'on veut dire, c'est qu'il faut faire attention, parce que
ces nouvelles contraintes là mur à mur
qu'on vient présenter dans la loi, on va avoir à vivre avec, même en période,
aussi, de déclin économique. Donc, il faut
bien penser à ça en prévision du futur. Cela sans compter que, si vous voulez,
dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre
comme on connaît au Québec, c'est très important de préserver la flexibilité,
particulièrement dans les petites entreprises,
où la marge de manoeuvre est très mince, parce que ce que les employeurs vont
devoir consentir de façon supplémentaire
à certains employés, d'un côté, qui sont visés par les dispositions du projet
de loi, ça ne sera plus disponible pour
les employeurs pour investir sur d'autres employés au sein de l'entreprise, sur
d'autres mesures pour permettre de retenir
ces employés-là au sein de l'entreprise ou encore de les attirer parce
qu'évidemment, l'argent ne poussant pas dans les arbres, hein, ce qu'on
va consentir d'un bord, il va falloir forcément qu'on le reprenne de l'autre,
il ne sera plus disponible pour donner à d'autres employés dans l'entreprise.
• (16 h 30) •
C'est
donc à la lumière de ces prémisses-là, Mme la Présidente, qu'on a analysé le
projet de loi n° 176 et qu'on a présenté
une série de recommandations, qui, selon nous, en tout cas, permettraient d'en
arriver à un meilleur équilibre entre l'objectif recherché par le
gouvernement de bonifier les conditions de travail des Québécois, tout en
maximisant la flexibilité dont les employeurs ont besoin, là, pour y arriver.
Alors,
on vous a présenté dans notre mémoire quelques données sur le fait que les
employeurs du Québec, là, ont bien à
coeur, effectivement, les conditions de travail qu'ils offrent à leurs employés
et le bien-être de leurs employés au travail.
On voit, par exemple, que 99 % disent que la santé et la sécurité au
travail de leurs employés, c'est superimportant pour eux. À peu près la
même proportion dit : J'essaie constamment d'offrir les meilleures
conditions possible à mes employés, etc. Je pense que c'est important de
rappeler ça parce qu'on entend souvent certains groupes dépeindre les employeurs, là, comme des gros méchants loups qui
attendent juste la petite brebis pour la dévorer, alors que ce n'est pas
tout à fait ça dans la réalité. Donc, je pense que c'est important à garder en
tête.
Quelques
mots maintenant, Mme la Présidente, sur certaines dispositions très
particulières du projet de loi, la durée et les horaires de travail. On
a salué favorablement l'article 8 du projet de loi, là, qui prévoit la
possibilité pour les employeurs d'étendre...
de s'entendre sur une... avec leurs travailleurs, de s'entendre sur une formule
d'étalement des heures de travail sur
une base autre qu'hebdomadaire. On se questionnait juste à savoir pourquoi
est-ce que le gouvernement avait décidé
de baliser ça en disant que l'entente était valide juste pour six mois puis
qu'il y aurait un prérequis de 30 jours, là, pour pouvoir la mettre en vigueur. En tout cas, on
se questionnait à savoir pourquoi limiter ce pouvoir-là. Si l'entente
est prise, par exemple, entre un travailleur
qui est à l'année dans l'entreprise... pourquoi est-ce qu'on doit la renouveler
aux six mois? C'était peut-être juste des petites modalités comme ça, là, sur
lesquelles on se questionnait.
Même
questionnement, Mme la Présidente, au sujet de certaines dispositions du projet
de loi qui semblent venir, en tout cas, ou qui risquent de limiter
l'accès des PME à une main-d'oeuvre de contingence, je pense, par exemple, à la
question, là, que le travailleur aura un
droit de refus de travailler si son horaire de travail ne lui est pas remis
cinq jours à l'avance ou encore de
réduire, là, de quatre heures à deux heures la période avec laquelle le
travailleur peut refuser de travailler.
Ça peut poser des problèmes dans certains secteurs comme l'agriculture, comme
la restauration, où il y a des fluctuations
qui sont imprévues, soit à cause de l'affluence de la clientèle ou encore à
cause des caprices de dame Nature. Donc, on demandait au législateur,
là, de peut-être réviser ces dispositions-là.
Même
chose en ce qui a trait, Mme la Présidente, je vous dirais, au niveau des
mesures de conciliation travail-famille,
les fameux deux jours de congé payés, la semaine de vacances, je pense que
c'est des mesures qui comportent quand
même des coûts importants. Peut-être que, si on peut s'entendre, là, à savoir
que c'est souhaitable qu'au Québec les employeurs
déploient des mesures de conciliations travail-famille, on se demande est-ce
que c'est nécessaire d'imposer ça, parce
que le fameux 500 millions à peu près qu'elles vont coûter, ces
mesures-là, ensemble, c'est un 500 millions qu'on impose, supplémentaire, aux employeurs, mais qui
va être destiné aux mesures qui sont prévues dans la loi, et donc qui
leur enlève de la flexibilité pour peut-être satisfaire des besoins de leurs
employés qui sont tout à fait autres et qui sont très diversifiés aussi.
Donc,
on souhaite qu'il y ait peut-être une analyse de ça, de la pertinence de
maintenir ça, d'autant plus que 92 % des PME du Québec affirment déjà offrir des mesures de
conciliation travail-famille. On se demande donc : Est-ce qu'on a un réel problème, par rapport à la conciliation travail-famille au
Québec, qui justifie qu'on doive intervenir, là, de façon législative à
ce niveau-là?
Mme la
Présidente, un petit mot sur le préavis des motifs des refus de l'employeur
visant le congé parental du second
parent. On sait qu'actuellement la loi prévoit que c'est trois semaines, le
deuxième parent. Il peut quitter à trois semaines d'avis, des fois pour plusieurs semaines. Vous
comprendrez que, dans une petite entreprise, là, de cinq employés ou de 10 employés, si tu as un employé qui part, tu
viens de perdre 10 % de ta main-d'oeuvre à trois semaines d'avis. C'est
peu. Ça serait le fun qu'on puisse profiter,
Mme la Présidente, de la révision de la loi pour étendre ce préavis-là à...
nous, on suggère trois mois, parce
que trois semaines, c'est nettement insuffisant. Et, si, dans le cas du premier
parent, qui elle, en principe, va
accoucher, c'est prévisible quand est-ce qu'elle va partir, le deuxième, ça
l'est pas mal moins. Donc, au moins, si on pouvait revoir cette
disposition-là, ça ferait notre affaire aussi.
Un petit mot
sur le harcèlement psychologique et le droit de gérance, s'il me reste encore
du temps. Le harcèlement psychologique et le droit de gérance, je pense
que, vous savez, on peut tous convenir qu'un cas avéré de harcèlement psychologique ou de harcèlement sexuel sera
toujours un cas de trop. Donc, on souscrit entièrement, là, à la volonté
du gouvernement d'inclure la notion de
harcèlement sexuel dans la loi. Je pense que c'est nécessaire. Et là-dessus je
pense qu'il n'y a pas d'argument à y avoir.
La seule
chose, c'est que, des fois, particulièrement dans une petite entreprise aussi,
la ligne entre le droit de gérance de
l'employeur en matière, par exemple, de gestion d'absentéisme, en matière de
gestion de la performance est parfois mince aux yeux du travailleur, là,
entre ça et les cas de réel harcèlement psychologique. Et j'en veux pour preuve
que certaines statistiques qu'on a
recueillies, qu'on a présentées dans le mémoire, là, qu'on a prises
auprès de la CNESST montrent que, sur
les quelque 3 500 recours qui ont été traités à la
CNESST en 2016, il y en avait à
peu près huit sur 10, là, qui se sont avérés soit irrecevables, soit ne
satisfaisant pas aux critères du harcèlement, soit non fondées, ou qui ont
fait l'objet d'un désistement.
Donc, il y a peut-être quelque chose, une
opportunité, Mme la Présidente, pour revoir, dans la loi, certaines modalités.
Et ce qu'on propose, c'est de profiter de cette révision-là pour introduire la
notion de droit de gérance de l'employeur et la définir spécifiquement pour que ce
soit clair pour l'ensemble des parties, quelles sont les situations
qui sont visées par les cas de harcèlement
et quelles sont les situations qui relèvent plutôt du droit de gérance des
employeurs. Je pense que c'est une belle occasion, une belle opportunité que
nous avons pour régler ce problème-là.
Au niveau du placement de personnel temporaire, Mme la Présidente, c'est sûr
que les agences de placement de personnel
temporaire jouent un rôle extrêmement important dans plusieurs PME parce que,
souvent, c'est leur service de gestion
des ressources humaines. La PME,
imaginez-vous, avec l'agence, c'est fantastique, elle a accès à un service
qui va l'aider à recruter, hein, donc à
recueillir des C.V. L'agence, là, va recueillir les curriculum vitae, va faire
passer les tests, va faire la sélection des travailleurs, et tout ça.
Donc, évidemment, dans une petite entreprise, on n'a pas de service de ressources humaines. Ça fait que l'agence permet à la petite entreprise
d'avoir accès à ces services-là et à un coût qui est abordable, parce que le coût est réparti
entre tous les clients de l'agence, là, pour ce genre de service là. Alors,
nous, on pense que c'est un modèle qui est important.
On comprend
que le gouvernement a cherché dans le projet de loi, là, à resserrer
l'encadrement des agences de placement,
mais je tiens à souligner que, si jamais le gouvernement allait de l'avant dans cette voie-là, il faudrait
qu'il enlève l'encadrement qui est déjà là,
qui est imposé à Revenu Québec avec les attestations fiscales, parce qu'à ce moment-là on se retrouverait avec une double, si vous voulez, une
double obligation, là, aux agences de placement et à leurs clients. On
pense que ça ne serait pas nécessaire et que
la CNESST pourrait très bien transmettre l'information à Revenu Québec pour
que Revenu Québec puisse faire ses vérifications.
D'autre part,
on est un petit peu aussi préoccupés par le fait que les travailleurs devront
être payés au même prix que les
salariés qu'ils remplacent dans l'entreprise. Vous savez, Mme la Présidente,
là, un employé temporaire qui rentre dans une entreprise, puis on en a eu à la FCEI, là, j'en ai eu dans mes
équipes, il ne peut jamais effectuer toutes les tâches de l'employé permanent qu'il remplace, là. L'employé
permanent, il est là, il est dans l'entreprise, souvent, depuis
plusieurs mois, plusieurs années. C'est
clair qu'il effectue des tâches, là, qui sont beaucoup plus complètes que
l'employé temporaire qui est là.
Alors, la disposition du projet de loi qui dit qu'on devrait payer l'employé
temporaire le même prix que l'employé permanent,
pour nous, c'est très préoccupant. C'est un peu hasardeux, parce que ça n'a pas
de logique non plus du point de vue de la valeur du travail dans
l'entreprise et du travail effectué.
Alors, on
demande aussi, si vous voulez, là, l'abrogation de cet article-là, qui vise à
interdire, là, les écarts salariaux entre
les employés temporaires et permanents qui exercent les mêmes fonctions, parce
que, même s'ils exercent les mêmes fonctions,
ce n'est pas vrai qu'ils font la même job, autrement dit, parce qu'ils n'ont
pas la même expertise et la même ancienneté au sein de l'entreprise
même.
Alors, un petit mot, Mme la Présidente, encore
une fois, avec la fameuse Loi sur les décrets de convention collective, et je vais finir là-dessus. J'ai vu ce
matin que la ministre s'apprêtait à déposer un projet de loi, là, pour les
décrets de convention collective et j'en
fais mention à la commission parce que, dans le passé, il y a des décrets qui
ont été abolis et qui ont trouvé, si
vous voulez, refuge sous les auspices de la Loi sur les normes du travail. On
pense, par exemple, à ceux dans l'industrie du textile et du vêtement.
Donc, on comprend que la ministre a un projet de loi. On la félicite. On a hâte d'en prendre connaissance et de le voir,
mais, bon, on sait tous que la probabilité qu'il soit adopté, là, est très
minime. On espère que l'ensemble des
parlementaires, là, vont faire en sorte qu'au moins on va pouvoir trouver des
solutions. Et on a peut-être des
solutions alternatives à proposer dans l'intervalle, là, à la ministre pour
régler cette question-là des décrets.
Mais c'est
sûr que je ne vous cacherai pas qu'on a été déçus, Mme la Présidente, de voir
qu'on n'a pas réglé cette question-là
des décrets de convention collective sous les auspices du projet de loi
n° 176. Ça aurait été facile de le faire, selon nous. Et on aurait souhaité que ça se fasse. Puis, bon, on ne perd
pas espoir, on reporte encore une fois la demande auprès, là, des parlementaires ici présents pour
essayer de voir si on ne peut pas régler quelque chose à travers le
projet de loi n° 176 au niveau de cette problématique-là. Alors, je vous remercie,
Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, Mme Hébert. Vous avez dépassé un peu le temps qui
vous était alloué, mais, vous savez, avec le
consentement, on peut tout faire, et donc la ministre
a donné son consentement. Vous avez terminé votre exposé, on va
débuter les échanges. Mme la ministre.
• (16 h 40) •
Mme Vien : Merci
beaucoup à vous deux,
Mme Hébert, de nous avoir présenté votre mémoire. Bien, toujours
un plaisir de vous rencontrer. On a toujours
des bonnes discussions, puis ça nous fait avancer, évidemment.
Et on regardait, mes collègues et
moi, ce que nous avons réalisé quand
même au ministère du Travail depuis la dernière année puis on a été fort actifs. Et évidemment les canaux sont toujours ouverts entre vous et
nous pour de très, très, très bonnes suggestions. On est toujours
partants pour vous entendre là-dessus.
Sur le projet de loi qui est devant nous, sur la révision
des normes du travail, moi, je pense qu'on était rendu là, effectivement, à revoir un certain nombre de
choses, là. Je l'ai dit à plusieurs reprises depuis trois jours maintenant,
c'est une loi qui n'est pas ouverte souvent,
hein? 1990, 2002, 2018, mise en vigueur en 1979. Donc, je ne pense pas que
personne n'exagère. Et je pense qu'on a eu
et nous avons une approche équilibrée pour faire en sorte qu'effectivement on
puisse améliorer les conditions de travail
des personnes les plus vulnérables de notre société, les personnes qui sont
plus souvent des gagne-petit, et la
capacité aussi des entreprises d'assumer les charges, parce qu'il y en a, des
charges, et il n'y a personne qui dit
le contraire, pour assumer, donc, les charges qui viennent avec la
bonification, les bonifications que nous apportons dans le projet de loi
sur les normes du travail.
Je tiens à
dire qu'on a été très sensibles, peut-être pas assez à votre goût, peut-être,
mais je peux vous dire qu'on a été
très sensibles à la situation des entrepreneurs au Québec, des entreprises et
en particulier de la petite entreprise. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il y avait le 5-10-15, vous le savez.
Donc, connaître cinq jours son horaire d'avance, avoir 10 jours payés pour cause de maladie, pour
prendre soin de soi ou des autres, là, et ensuite le 15 $ de l'heure. Nous
avons donné suite aux cinq jours, d'avoir
son horaire cinq jours d'avance, mais, en ce qui a trait aux 10 jours
payés, on n'a pas accédé à ça. À
15 $ de l'heure, vous le savez aussi, on n'a pas accédé à ça parce qu'il
faut être raisonnable, à notre point de vue à nous. C'est-à-dire que, si
on avait accédé à cette demande-là il y a un an et demi, c'est un bond de
47 % que le salaire minimum aurait
connu au Québec, puis je pense que ça aurait créé un chaos, en particulier chez
votre clientèle, hein, chez vos membres.
Donc, on a une approche pragmatique, on a une approche progressive pour le
salaire minimum.
Je me
souviens de vous avoir déjà rencontrés, puis on s'est vus quand même à quelques
reprises, puis vous me disiez :
Il va falloir avoir une sensibilité certaine, là, pour nos petites entreprises
si vous y allez de l'avant avec le projet de loi sur les normes du travail. Et je pense qu'on a répondu présent,
notamment dans le dernier budget, avec des mesures qui oscillent aux alentours de 2,2 milliards de dollars
pour différentes mesures, là, pour les PME. Aussi, dans le projet de loi
que nous avons devant nous, toute la
question de l'étalement des heures de travail, je pense que c'est quelque chose
qui peut vous satisfaire.
Vous posez
une question concernant les agences de placement. On aura l'occasion d'en
parler après. C'est sûr que moi, je
suis très, très motivée à réguler ce secteur-là, là, vraiment très motivée à le
faire. Vous disiez : On est un peu inquiets sur des doublons qui pourraient exister, je ne sais pas, je le
dis en mes mots, là, quand vous parliez de l'attestation de conformité de Revenu Québec. Bon, évidemment,
la CNESST va être dans le décor prochainement parce que c'est elle qui va émettre les permis, mais c'est nous qui
allons élaborer... on est en train de le faire, d'ailleurs. Je le dis à tous
les groupes, là, ça fait que je vais vous le
dire, à vous aussi. On est en train d'élaborer le règlement, les règlements, le
règlement pour les permis des deux types
d'agence, recrutement et placement. Mes intentions vont être déposées en
commission parlementaire quand on va étudier le projet de loi article par
article.
Alors, si
vous avez des commentaires, là, encore une fois, les canaux sont ouverts.
Écrivez-nous, puis ça va nous faire
plaisir d'avoir votre point de vue là-dessus. Mais je voulais vous rassurer qu'on va être
intelligents, là, dans ce qu'on va exiger
de l'entreprise déjà trop surchargée, là, de charges administratives, là. On
travaille tout le monde bien fort pour faire diminuer tout ça, ça fait
qu'on ne va pas faire exprès pour en ajouter, là. On va essayer d'être brillants
là-dedans.
Évidemment, j'ai pris beaucoup de temps. Je
comprends votre position, Mme Hébert, là, puis, tu sais, je la comprends, puis ça fait plusieurs fois qu'on en
parle. Je voulais vous amener sur la question des proches aidants, mais,
avant ça, sur l'encadrement des agences de placement et de recrutement puis des
obligations. Est-ce que vous êtes absolument contre à ce qu'on régule ou je
vous ai mal comprise?
Mme Hébert
(Martine) : Écoutez, c'est
sûr qu'il y a déjà un système qui est en place avec Revenu Québec, qui s'appelle le système d'attestation fiscale, qui
oblige les agences à présenter à leurs clients, là, une attestation fiscale
qui été émise par Revenu Québec, donc qui
dit qu'ils sont en règle, hein, qu'on a des entreprises bien enregistrées qui
ont payé l'ensemble de leurs DAS, de
leurs taxes, de leurs impôts, etc. Et le client de l'agence est obligé d'aller
vérifier à tous les trois mois sur le
site de Revenu Québec que cette attestation-là est encore valide. Alors, c'est
le moyen que le gouvernement du
Québec a emprunté pour réguler le système des agences et lutter contre
l'évasion fiscale. Là, si on arrive avec un permis, bien, on dédouble,
en fait, ce que Revenu Québec est en train de faire.
Ça fait que
je ne suis pas totalement contre le fait qu'on fasse un transfert puis que, si
la CNESST émet un permis, bien que la
CNESST, à ce moment-là, la CNESST, excusez, je l'appelle la CNESST… mais que,
si la CNESST émet un permis, à ce
moment-là elle transfère l'information à Revenu Québec pour que Revenu Québec
puisse regarder si, au niveau fiscal,
cette agence-là, elle a rempli l'ensemble de ses obligations, oui ou non, mais,
tu sais, qu'on n'ait pas les deux systèmes en même temps. C'est soit
l'un ou soit l'autre. Si on introduit le permis, je ne suis pas contre.
L'autre
chose, Mme la ministre, je suis contente que vous parliez des agences, parce
que vous dites : Je veux réguler ce secteur-là, puis vous avez tout
à fait raison de dire... de vous insurger contre les abus qu'on a vus, qui ont
été médiatisés. La seule chose que je veux
dire dans ce dossier-là : Il faut faire attention. Ce n'est pas tous les
motocyclistes du Québec qui sont des Hell's Angels.
Autrement dit, ce n'est pas toutes les agences de placement non plus qui sont
des bandits. Je pense qu'il faut courir
après les bandits, hein, ça, c'est clair, puis il faut les punir. Il faut faire
en sorte que les employeurs de ce
secteur-là qui ne remplissent pas leurs obligations, qui exploitent les
travailleurs, qui d'ailleurs créent la concurrence
déloyale envers ceux qui les respectent, eux autres, il faut courir après, les
pas bons, là, puis les «fly-by-night», et tout ça.
Mais
il faut faire attention de ne pas écorcher au passage et de ne pas punir au
passage les agences de placement qui,
elles, remplissent leurs obligations, et sont de bons employeurs, et sont des
employeurs qui sont d'ailleurs, comme j'ai dit tantôt, très utiles, particulièrement
dans les PME où il n'y a pas de service de ressources humaines pour assumer ces
tâches-là, qui sont...
Moi, écoutez, là,
j'ai vécu l'expérience à plusieurs à la FCEI, il y a quelqu'un qui part en
congé de maternité, il y a quelqu'un qui
tombe malade, etc., on appelle l'agence de placement, c'est fantastique, là. On
a une personne qui est assise là.
Elle ne peut pas faire toutes les tâches que la personne faisait, mais au moins
on a quelqu'un. Et c'est comme ça dans plusieurs PME. Il y a des PME
aussi qui recourent à plusieurs agences parce qu'il y a différentes fonctions
techniques au sein de l'entreprise. Il y a des agences qui se spécialisent dans
différentes spécialités.
Donc,
je pense qu'il faut y aller avec retenue dans le projet de loi sur
l'encadrement et sur ce qu'on veut faire avec les agences parce que c'est un modèle d'affaires qui convient
parfaitement à l'économie du Québec où, vous l'avez rappelé d'ailleurs,
les petites entreprises, là, sont la norme.
Et,
sur la question de la sensibilité aux PME, je vous signalerais, Mme la
ministre, effectivement... et d'ailleurs on le souligne bien en première page, d'ailleurs, de notre mémoire, qu'on a
salué la sagesse du gouvernement de ne pas être allé dans l'extrême. Cela étant, ça demeure quand même 700 millions
de facture. C'est une facture qui est quand même salée, puis le sel,
bien il se retrouve dans l'assiette surtout des PME.
Mme Vien :
En toute amitié, mais ça représente entre 0,40 et 0,45, là, de la masse
salariale du Québec, selon nos calculs à nous, là. Alors, c'est...
Je veux juste vous
dire, Mme Hébert, puis essayer de vous rassurer là-dessus aussi, c'est que
l'interdiction de disparité de traitement,
là, je le dis comme ça, là, mais... dans les agences, là, on est très clairs
là-dessus, là : c'est même tâche,
même salaire. C'est ça. Ça fait que je comprends, mais je veux juste vous
rassurer. Si ce n'est pas les mêmes tâches, ce n'est pas le même
salaire, d'accord?
Mme Hébert (Martine) : Bien j'ai une question, à ce moment-là, Mme la
ministre, peut-être de clarification, parce que prenons l'exemple d'une
réceptionniste...
La Présidente (Mme Richard) : Juste, oui, peut-être être plus
brève, Mme Hébert, parce que la ministre n'a pas beaucoup de temps
puis...
Mme Vien :
Puis, comme j'ai d'autres questions...
La Présidente
(Mme Richard) : Donc, on va lui céder la parole.
Mme Hébert (Martine) : O.K., mais il va falloir bien préciser qu'est-ce
que ça veut dire, ça. Parce que tu peux faire les mêmes tâches, mais pas
nécessairement avec la même expérience.
La Présidente
(Mme Richard) : ...céder la parole à Mme la ministre, si
vous le permettez.
• (16 h 50) •
Mme Vien :
Je veux vous entendre sur le harcèlement psychologique. Bon, on vient dire,
spécifier noir sur blanc, on le
comprend, à cause de la jurisprudence, que le harcèlement sexuel fait partie du
harcèlement psychologique. Nous, on
va venir l'inscrire. Je pense que c'est une bonne affaire. On va venir aussi
demander aux employeurs, on veut que vous rédigiez une politique, puis
que vous la rendiez disponible, puis avoir un système de médiation, là.
C'est-u comme ça qu'on doit dire ça, un système de médiation? C'est-u
ça? Oui? Bon, vous êtes d'accord avec ça?
Puis
je veux juste vous dire au passage aussi que la CNESST nous assure qu'elle a déjà des
modèles puis que ça va être quelque chose de très, très simple pour les employeurs. On ne veut pas les
embêter, là, ce n'est pas ça qu'on veut, mais on veut que le harcèlement
sexuel et le harcèlement psychologique cessent en milieu de travail.
Mme Hébert (Martine) : On est tout
à fait d'accord avec l'objectif
poursuivi. Ce qui nous inquiétait un peu plus dans le projet de loi,
c'était la question du processus, là, de traitement des plaintes.
Mme Vien :
...des plaintes, merci, j'avais «médiation», mais...
Mme Hébert
(Martine) : Bien, c'est ça. Donc, ça veut dire quoi, le processus de
traitement des plaintes à l'intérieur d'une petite entreprise où il n'y a pas de
département de ressources humaines, et tout ça, là? C'était plus,
hein, ça. Peut-être que M. Leblanc peut compléter ma réponse.
La Présidente
(Mme Richard) : M. Leblanc.
M. Leblanc
(Bruno) : En fait, le questionnement qu'on avait, c'était beaucoup qu'actuellement
dans la jurisprudence l'employeur doit avoir les moyens raisonnables.
Donc, on trouvait, nous, que c'était déjà une modulation qui s'appliquait en fonction de la taille de l'entreprise.
Là, ce n'est pas la même chose de mettre un système en place, avec
une politique puis un processus, dans une grande entreprise que dans une entreprise
de, par exemple, 10 employés ou cinq employés.
Alors,
comme la jurisprudence oblige déjà l'employeur à avoir les moyens raisonnables, on
ne change pas l'objectif de lutter
contre le harcèlement psychologique et sexuel, mais on donne le choix
des moyens. Alors, ce qu'on pensait, c'est que c'était peut-être plus
performant, peut-être, d'exclure de cette mesure-là spécifique le petit
employeur, ce qui d'ailleurs serait tout à fait concordant avec un principe de réglementation intelligente en fonction de la taille des entreprises,
comme on a, par exemple, dans la politique
gouvernementale d'allègement réglementaire. Alors, peut-être,
comme on dit en bon québécois...
La Présidente (Mme Richard) : Merci. Merci, on va laisser la ministre pour les quelques secondes qui restent.
Mme Vien : Qu'il me reste. Bon, proche aidant,
reconnaissance pour la première fois dans le corpus législatif.
Mme Hébert (Martine) : Écoutez, encore là, c'est parce que la notion est large,
hein? Si je comprends bien, là, si on
a bien compris le dispositif, c'est que je pourrais... par exemple, une personne pourrait être proche aidant pour son
voisin, ce n'est pas nécessairement les membres de la famille. C'est large,
c'est très, très large.
M. Leblanc
(Bruno) : En fait, la disposition, c'est «toute personne». Donc, on trouvait que c'était large beaucoup.
Alors, on se demandait, ce serait peut-être plus sage de venir resserrer cette disposition-là.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci. Merci beaucoup, c'est tout le temps
qui était alloué du côté du gouvernement. Merci, Mme
la ministre. Merci. Nous allons maintenant
du côté de l'opposition officielle. Et je reconnais M. le député de Beauharnois,
porte-parole en matière de travail.
M. Leclair : Merci, Mme
la Présidente. Alors, à mon tour de
saluer une adepte de nos commissions
parlementaires. Mme Hébert, je vous salue. Bonjour à vous.
Bien,
je veux juste vous assurer, Mme Hébert, qu'effectivement ce matin, un projet de loi est tombé au feuilleton, alors
on risque qu'il soit déposé, mais je vais m'assurer que vous soyez invitée aux consultations particulières, si elles ont lieu. Ne vous inquiétez pas, beaucoup
de groupes vont vouloir se faire entendre.
Mme Vien :
...
M. Leclair :
Je n'ai pas de problème, moi, je suis...
La Présidente
(Mme Richard) : ...allez-y, M. le député.
M. Leclair : Mme la ministre, elle voulait me parler. Alors, je voudrais vous
entendre, Mme Hébert, vous avez parlé,
comme plusieurs groupes, d'ailleurs, à dire : On comprend,
les normes du travail doivent s'améliorer, on doit les remettre à jour, et tout, mais, d'un autre côté,
les entreprises se retrouvent avec un fardeau fiscal face à ça. Vous en parlez dans votre première page de votre
mémoire, là, vous dites : «...en raison de leur capacité réduite
d'absorber les coûts directs et indirects des mesures gouvernementales qui ont
une application "mur à mur"...»
Alors, je vous laisse
nous expliquer. Qu'est-ce que vous souhaiteriez que le gouvernement fasse?
Qu'on soit moins mur à mur? Qu'on vienne pallier
vraiment avec des sommes plus directes pour aider à
apporter cet équilibre-là? Parce que,
là, on parle beaucoup de conciliation travail-famille, donc, je pense, tout le monde est pour, mais il y a un coût à payer, puis on se demande on
partage les coûts comment.
Mme Hébert (Martine) : Bien, c'est
ça, comme je disais tantôt, malheureusement, la majorité de ces coûts-là vont tomber beaucoup, beaucoup dans les plus petites entreprises
où, souvent, c'est plus les normes minimales qui s'appliquent.
Ce
qu'il faut bien comprendre, c'est que... Prenons juste les deux jours de congé,
là, payés pour raisons familiales. Bien,
cette mesure-là coûte à peu près 300 millions de plus aux employeurs. Ça, ça veut dire que le
petit employeur qui, lui, offrait peut-être
déjà trois ou quatre jours à un de ses employés qui est là depuis plus longtemps
dans l'entreprise, etc., il va être obligé, ses employés qui
sont là depuis trois mois seulement, de leur offrir maintenant deux jours
payés. Bien, l'argent qu'il avait pour en offrir un peu plus à ses employés qui
ont plus d'ancienneté, bien, il ne l'aura plus de disponible, là, ou, s'il avait voulu rallonger de l'argent ailleurs ou
mettre d'autres mesures, il ne sera plus disponible, cet argent-là,
parce qu'il va être obligé de le mettre sur les employés qui
cumulent moins d'expérience ou des postes qui sont moins stratégiques
dans l'entreprise.
Ça fait que nous autres, ce qu'on dit, c'est qu'on est déjà
dans un contexte de rareté de main-d'oeuvre, puis ce contexte-là,
il est structurel. Ça fait que, forcément, les employeurs sont obligés de
s'entendre avec leurs employés. Mais laissons-leur au moins la flexibilité
de voir dans l'entreprise, de choisir par eux-mêmes où il faut qu'ils le
mettent, cet argent-là, et comment aussi ils vont le faire.
Ça se peut... puis
l'employé qui a trois mois de service, là, si lui, il dit : Bien, sais-tu,
moi, mon deux jours de congé payés, ça ne
m'intéresse pas, ce que j'aimerais mieux, c'est avoir un horaire flexible ou de
faire ma semaine en quatre jours, bien, ça aussi,
ça comporte des coûts pour les employeurs. Mais là on vient d'enlever cette possibilité-là
d'arbitrage ou de négociation entre les parties au sein de l'entreprise parce
qu'on dit : Bien non, la loi,
elle te dit : Tu es obligé de
payer deux jours. Ça fait que l'argent que tu aurais pu mettre pour accommoder le
travailleur à d'autres égards, il n'est plus disponible.
Alors,
on dit : Bien, c'est sûr qu'on aurait préféré que le gouvernement laisse la flexibilité, d'autant plus qu'il y a 92 % des entreprises au Québec qui offrent déjà
des mesures de conciliation. Et je lisais dans L'Actualité ce matin un excellent article, huit travailleurs sur 10 disent
qu'ils en ont, des mesures de conciliation chez leur employeur. Donc, est-ce
qu'on a un réel problème à un point tel
qu'il faille rajouter des jours de congé payés et les modalités qu'on a dans la
loi quand on sait que ça ne se fait pas sans coûts puis que l'argent ne pousse
pas dans les arbres? Il y en a qui parlaient d'épouvantails tantôt, mais Alice
aux pays des merveilles, ça n'existe pas non plus.
M. Leclair : Mais j'amène la discussion sur un même sens, là, lorsqu'on
parle travail-famille, augmenter les normes du travail pour avoir une
meilleure qualité pour nos travailleurs et travailleuses au Québec. Je vous
amène à votre recommandation à la page 15 puis je voudrais que vous
m'expliquiez ça, là. Je ne la lirai pas toute, là, mais elle se termine en disant que la FCEI recommande que le projet de loi n° 176 mette fin aux congés de maternité, de
paternité et les absences prolongées
pour maladie soient incluses dans le calcul de vacances. Expliquez-moi où est-ce que
vous vous en venir, en 2018, qu'on enlève les congés de paternité.
Mme Hébert (Martine) : O.K. C'est que, lorsque le congé de maternité
ou de paternité, en fait, ce qu'on s'est fait dire, ou des absences prolongées... le travailleur continue de
cumuler quand même les vacances pendant le congé. Comprenez-vous? Oui? Et donc là ça fait qu'au
bout, une fois qu'il revient, après ça, bien là, ça rend le calcul extrêmement
difficile pour l'employeur parce que
le congé doit être payé, la vacance doit être payée sur 4 %, ou 6 %, ou 8 % de ce qui
a été gagné. Donc, ça rend ça très difficile pour l'employeur.
On
ne veut pas enlever les congés de maternité ou de paternité, là, ce n'est pas
ça qu'on a dit. Ce qu'on dit, c'est : On veut mettre fin à cette mesure-là, qui fait en sorte que — c'est peut-être une incongruité dans la
législation actuelle, là — on continue d'accumuler des vacances, même
si on n'est pas dans l'entreprise, si on est absent, dans le fond, du
travail.
M. Leclair :
Je comprends le sens. Vous me rassurez.
On
parle disparités de traitement. On a entendu des groupes tantôt représentant
les jeunes. La plupart du... même les grands
syndicats disent : Bien, la disparité de traitement, bien, on affecte plus
notre jeunesse que les plus vieux travailleurs pour toutes sortes de raisons, on ne rentrera pas dans les détails. Et
vous, vous nous dites, en page 4 de votre mémoire, que le projet de loi, là, dans son ensemble, il va
avoir des impacts sur les emplois chez les jeunes, alors que nous, on
tente de bonifier la qualité de vie de nos
travailleurs et travailleuses, tenter d'enlever la disparité de traitement pour
les jeunes pour que ça devienne
équitable. Est-ce que c'est les mesures parfaites? Mais on fait un pas en
avant, je crois. Puis vous, vous nous
dites que ça va être particulièrement un risque de chômage plus élevé chez les
jeunes. Expliquez-nous votre vision de ça.
• (17 heures) •
Mme Hébert
(Martine) : C'est-à-dire que ce qu'on relate dans notre mémoire, ce
sont des études qui ont été publiées dans le
passé et qui disent qu'il faut faire attention parce que, quand on ajoute de la
rigidité dans le marché du travail,
souvent, on voit que ce n'est pas sans impacts sur les emplois puis sur les
conditions de travail de certains types de postes. D'ailleurs, on l'a
vu, rappelez-vous, dans tout le débat du salaire minimum, le CPQ a fait une
analyse économétrique, justement, des
impacts. Et ce qu'on voyait, c'est qu'effectivement il y avait certains
secteurs qui étaient plus touchés.
Puis ce qu'on voit, les employeurs, où est-ce qu'ils vont couper en premier?
Bien, c'est souvent dans les emplois qui sont occupés par des jeunes ou
des postes d'entrée, de niveau d'entrée sur le marché du travail.
Quand
on dit : Plus on intègre de la rigidité dans le marché du travail, plus ça
va avoir un… ça risque d'avoir un impact
sur ces emplois-là. C'est pour ça qu'il faut faire attention de dire :
Bien, c'est le fun puis c'est beau, mais il faut faire attention aux
effets pervers de certaines mesures.
En
ce qui a trait aux disparités de traitement, maintenant, c'est sûr qu'on n'a
pas beaucoup de nos membres qui ont des
régimes de pension à prestations déterminées, là. On s'entend, on représente
les PME, nous autres. Donc, il n'y a pas beaucoup de nos membres qui ont ça. Mais ce qu'on dit quand même,
c'est : Il faut préserver la compétitivité des entreprises et du Québec, de l'attractivité, aussi, du Québec,
en termes d'investissements, et c'est
une composante importante, de dire : Il faut permettre aux entreprises d'avoir la flexibilité nécessaire pour
pouvoir assurer la viabilité des régimes de retraite. Et on sait tous
que les régimes à prestations déterminées ont été mis en place à une époque où
on vivait beaucoup moins longtemps, on
mourait beaucoup plus jeune. Ces systèmes-là ont été remplacés
progressivement et pas juste au Québec, mais à travers le monde, par des régimes à cotisation déterminée. Même
la Suède, je pense, son régime public est rendu un régime
à cotisation déterminée, là,
l'équivalent du RRQ, donc, parce que ces régimes-là sont de moins en moins viables.
Alors,
ce qu'on dit : Faites attention! On aimait bien le fait que c'est
prospectif, ce qui est proposé dans le projet de loi à l'égard
des disparités de traitement, mais, encore là, ça va être quand même
une épine dans le pied de l'économie du Québec en matière d'attractivité
des investissements.
M. Leclair :
Bien, combien qu'il reste de temps, là?
La Présidente
(Mme Richard) : Il vous reste 1 min 40 s
M. Leclair : 1 min 40 s Bien, effectivement,
vous... Écoutez, il y a deux choses. L'une, la réalité nous dit que... nous disait, en tout cas, que, dans l'histoire, on
avait beaucoup plus de grandes usines. Et là le marché des PME prend sa place et a quasiment... prend une place majeure,
en tout cas, au Québec. Puis effectivement beaucoup de représentants des
entreprises nous disent : Bien, la plupart, là, c'est moins de cinq
employés, là, tu sais. On ne se le cache pas.
Donc,
je peux croire qu'ils peuvent être affectés par certaines raisons ou structures
administratives, mais je ne suis pas
convaincu que beaucoup offrent moins que les normes du travail. Peut-être une
couple, mais je pense que les... Comme vous
dites, ce n'est peut-être pas de dire : Le trois semaines est très grave,
mais de dire : Donnez-nous le choix de le donner où est-ce qu'on
veut par rapport, excusez l'anglicisme, à notre «core business».
La Présidente
(Mme Richard) : Mme Hébert.
Mme Hébert
(Martine) : Oui.
La Présidente
(Mme Richard) : Il va peut-être vous rester moins d'une
minute, là.
Mme Hébert (Martine) : Les entreprises ont des réalités différentes. Les
travailleurs ont des besoins différents. Alors, ça prend de la flexibilité pour permettre aux deux de pouvoir se
rencontrer. Et ce qu'on dit, c'est vrai que la plupart des entreprises
offrent déjà au-dessus des normes, mais pour certains travailleurs. Et là
peut-être qu'ils ont choisi de donner, par
exemple, à un travailleur que ça fait cinq ans qu'il est dans l'entreprise,
quatre semaines de vacances. Mais là, s'il
est obligé de rallonger d'une semaine celui qui y est déjà depuis trois ans,
bien là, peut-être qu'il avait pensé lui donner une cinquième semaine, mais qu'il ne pourra pas le faire. Donc,
comprenez-vous que c'est là où on vient entacher la...
C'est
pour ça qu'on dit : Bien, il y a des mécanismes de réglementation
intelligente, comme M. Leblanc vous le soulignait tantôt. La politique gouvernementale, d'ailleurs, en
allègement réglementaire intègre ces principes-là. Peut-être qu'il y aurait lieu de moduler certaines
obligations comme ça en fonction de la taille des entreprises. On l'a fait dans
d'autres lois. On l'a fait avec l'équité salariale, avec la formation.
La Présidente (Mme Richard) : Merci beaucoup, Mme Hébert.
C'est tout le temps dont disposait l'opposition officielle. Et je reconnais maintenant M. le député de
Chutes-de-la-Chaudière et porte-parole pour le deuxième groupe
d'opposition en matière de travail.
M. Picard :
Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Hébert, M. Leblanc.
Petite
question, là. Je vais poursuivre avec les sujets de Mme la ministre, là. Juste
pour bien se comprendre, là, le même
salaire pour un employé de l'agence, vous dites : Bien, ce n'est pas tout
à fait les mêmes choses, là. Je vais vous donner un cas type, là. Dans une usine, vous avez besoin d'un
travailleur qui alimente une machine. Il va être payé le même salaire,
là. Ce n'est pas parce qu'il est peut-être moins vite, parce qu'il n'est pas
habitué, là, qu'il va avoir un salaire différent.
Est-ce qu'on s'entend? C'est ce que la... Parce que vous avez dit tantôt :
Si ce n'est pas la même chose, là, bien... Parce que je comprends, si c'était un employé, je vais dire, de bureau,
puis la personne fait telle, telle, telle chose, puis là la nouvelle personne qui arrive, on lui dit :
Bien, tu vas en faire seulement une partie... Mais, dans une usine, là, on
s'entend-u que c'est le même salaire?
La Présidente
(Mme Richard) : Donc, M. Leblanc. Vous vouliez
répondre?
M. Leblanc
(Bruno) : Bien, écoutez, c'est sûr que la tâche et la fonction au sein
de l'entreprise, ce n'est pas la même
chose. Un employé qui est là depuis 10 ans a une connaissance des
mécanismes de l'entreprise. Même s'il est attaché à une tâche, il a une connaissance de la
coordination entre les autres tâches, puis tout ça, peut-être plus que le
travailleur qui vient de débarquer puis qui
est là depuis deux mois. Donc, ce qu'on dit, c'est que ça, ça génère des
économies à l'ensemble de l'entreprise.
Donc, dire que c'est totalement la même chose, je pense qu'on peut... Puis là
vous prenez un exemple très chirurgical,
mais, si vous envoyez ça dans un système de bureau, par exemple, bien là, c'est
très différent. Je suis d'accord avec
vous qu'on est plus vers la marge dans un cas comme celui-là, mais là on est
devant une législation qui couvre tout.
Mme Hébert
(Martine) : Pas juste les usines, là.
M. Picard :
Bien non, O.K. Mais on s'entend, là.
La Présidente
(Mme Richard) : M. le député de Chutes-de-la-Chaudière,
allez-y.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. On s'entend, là, si c'est le même travail, que la
personne soit moins performante parce
qu'elle apprend, là, parce que, si tu arrives du jour au lendemain dans mon
usine, là, que je parle, là, elle va
avoir le même salaire. Ce n'est pas parce que... Mais je comprends que, si
c'est un travail de bureau, que quelqu'un est... où il y a une multitude de tâches, puis il dit : Là, toi, on va te
concentrer sur seulement une partie, ça pourrait... C'est ce que j'ai
compris. Oui, Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine) : Mais ça demeure un problème, parce que, si c'est
le même... même si elle fait le même travail,
si elle est moins productive, en principe, les salaires dans une entreprise,
ils ont une progression pour reconnaître la productivité, justement.
M. Picard :
À ce compte-là, est-ce que vous avez... On oublie l'agence, là. Si vous avez
deux employés qui font le même
travail, la loi vous dit de leur donner le même salaire s'ils sont rentrés en
même temps, là, on s'entend, là, même niveau d'ancienneté. Ce n'est pas
parce qu'un va travailler plus vite ou moins vite...
Mme Hébert
(Martine) : Vous venez de le
dire, même niveau d'ancienneté. Le niveau d'ancienneté au sein de
l'entreprise, par exemple, du travailleur d'agence, bien là, il n'en a pas. Ça
fait que...
M. Picard : ...vous
engagez deux nouveaux employés, même formation, même bagage, même travail, même
salaire.
Mme Hébert (Martine) : Oui.
M. Picard : O.K.
M. Leblanc (Bruno) : Même
productivité. Même productivité.
Mme Hébert (Martine) : En
principe. Mais...
M. Picard : En principe.
Mme Hébert
(Martine) : Oui, en
principe. Mais, si, par contre, si j'ai un travailleur d'agence, puis là, si...
pour le payer le même salaire que l'employé
qu'il remplace de façon temporaire, il faut qu'on soit dans les mêmes
conditions : même niveau d'expérience,
même productivité, même expérience dans l'entreprise, etc. Ça ne peut pas
arriver. Je veux dire, s'il est temporaire, il n'était pas là avant.
M. Picard :
Si vous mettez le critère de même expérience dans l'entreprise, ça veut dire
qu'ils n'auront jamais le même
salaire. C'est ce que je décode, là. À moins que... parce qu'un employé
d'agence, il arrive, là. Il ne peut pas avoir l'expérience en
entreprise.
Mme Hébert
(Martine) : Bien,
comprenez-vous? Imaginez, là, si on est en train de se casser la tête, nous
autres, ici, aujourd'hui, là-dessus, à
savoir comment ça va marcher. Imaginez dans l'entreprise quand on va arriver
pour actualiser ça. Moi, je pense...
ce qu'on dit, c'est que ça va être un véritable casse-tête, là, parce que, tu
sais, comment est-ce qu'on va faire
pour départager ça? La ligne est où, justement? Notre interprétation, même, à
nous, M. le député, en tout respect, diffère.
La
Présidente (Mme Richard) :
On va redonner la parole à M. le député. Je pense qu'il avait d'autres
questions. Il vous reste environ 2 min 30 s
M. Picard :
Merci, madame. On se comprend, on se comprend, Mme Hébert. C'est beau. Au
niveau des proches aidants, tantôt,
vous avez commencé une réponse, bon, vous avez manqué de temps. Si vous voulez
la conclure, M. Leblanc.
M. Leblanc
(Bruno) : Bien, au niveau du proche aidant, ce qu'on disait, c'est
que, si on lit le dispositif qui est proposé,
c'est qu'on parle de «toute personne». Alors, on trouvait que «toute personne»,
ça avait quand même une portée assez
large. Généralement, lorsqu'on parle de proche aidant, on pense, par exemple, à
un conjoint, un enfant, tout ça. Est-ce que toute personne... Nous, on pense qu'on devrait limiter ça peut-être
au lien filial ou s'il existe une relation juridique entre les personnes. Venir resserrer ça... Parce que la
manière que le dispositif est fait là, on dirait que ça pourrait être le
voisin qu'on a connu la semaine passée.
M. Picard : Vous avez
raison, mais sauf que c'est pour des congés non rémunérés.
M. Leblanc (Bruno) : Bien,
c'est ça. Je peux prendre...
M. Picard : Mais est-ce
que quelqu'un va demander un congé pour proche aidant pour ne pas être payé
pour s'occuper de quelqu'un pour le plaisir? C'est une question où on va...
M. Leblanc
(Bruno) : C'est un... je pense, c'est ça qu'on dit, c'est que le
législateur doit quand même prévoir les cas à la marge. Est-ce que quelqu'un aurait un intérêt pour ça?
Peut-être, mais il reste qu'il pourrait y avoir 27 semaines de
congé, c'est quand même beaucoup, là, puis il n'y a pas de lien filial.
M. Picard : Sans salaire,
sans salaire.
Je vais en
profiter, parce que vous avez abordé tantôt le sujet, là, des comités
paritaires. Moi aussi, j'ai été surpris, peut-être pas agréablement surpris, là, parce que je suis bien
conscient, là, après un certain nombre d'années ici, là, que, lorsqu'on
présente un projet de loi, après 18 mois des consultations
particulières... Je disais à la blague cette semaine à des citoyens, j'ai dit : Il faudrait que, souvent, on soit en fin
de régime, parce qu'on trouve des solutions à tout, mais, dans la tête des citoyens, ils
disent : Ils vont régler ça. Mais sauf qu'on va manquer de temps, même si
on siège de nuit, je pense, là, parce
qu'il y a eu plusieurs nouveaux projets de loi qui sont déposés cette semaine,
puis je ne sais pas comment qu'on va arriver,
là. Donc, pour moi, je trouve ça triste parce qu'on arrive en bout de piste
avec ça, parce que ça fait 18 mois qu'on a eu des consultations puis ça fait 18 mois qu'on connaît... moi, ça
fait 18 mois que je connais le problème. Vous, ça fait plus
longtemps, parce que vous en aviez expliqué. Donc, si vous voulez commenter,
vous avez beau.
La Présidente (Mme Richard) :
10 secondes.
Mme Hébert
(Martine) : Écoutez, vous
avez tout à fait raison. Moi, j'exhorte la ministre, au moins, on sait
que le projet de loi ne sera pas adopté,
mais, Mme la ministre, on vous exhorte de faire quelque chose, que ce soit une
tutelle ou quoi que ce soit, avec les
comités paritaires, là, où est-ce qu'ils sont plus problématiques ou, en tout
cas, auprès desquels on a plus de
doléances. On vous exhorte, là, on est contents que vous déposiez ce projet de
loi là puis on demande à tout le monde de coopérer, mais...
La Présidente (Mme Richard) :
Merci. Merci beaucoup, Mme Hébert, M. Leblanc, pour votre contribution
à nos travaux.
Et la
commission ajourne ses travaux à demain, le vendredi 18 mai, à
9 h 30, où elle poursuivra les consultations particulières sur
le projet de loi n° 176.
Bonne fin de journée, tout le monde.
(Fin de la séance à 17 h 10)