(Dix heures cinquante-huit minutes)
La Présidente (Mme Richard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de tous leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder aux
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 152, Loi modifiant diverses
dispositions législatives concernant le domaine du travail afin principalement
de donner suite à certaines recommandations de la Commission Charbonneau.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Picard
(Chutes-de-la-Chaudière) remplace M. Lamontagne (Johnson).
• (11 heures) •
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci. Nous débutons cet avant-midi par des remarques préliminaires puis
nous entendrons le Conseil du patronat du Québec.
Remarques
préliminaires
Donc, nous
allons débuter les remarques préliminaires, et j'invite d'abord la ministre du
Travail et députée de Bellechasse à faire ses remarques préliminaires
pour une durée maximale de six minutes.
Mme Dominique
Vien
Mme Vien :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, ce sera probablement plus court que
six minutes pour permettre justement aux collègues, mais aussi aux
groupes qui se sont déplacés, d'avoir tout le temps nécessaire pour s'exprimer. Permettez-moi d'abord de vous saluer,
saluer les collègues et membres de l'Assemblée nationale, le sous-ministre, ici, Normand Pelletier, chez nous, au
ministère du Travail. Également, je suis accompagnée du chef de cabinet,
M. Pierre Milette.
Alors,
effectivement, on est devant une pièce législative assez importante, Mme la Présidente,
le projet de loi n° 152, qui est finalement une réponse aux
recommandations de la commission Charbonneau, rappelez-vous, qui comportait 60 recommandations. Et, de ces 60 recommandations
là, il y en a six qui venaient toucher deux lois en particulier qui sont
sous la responsabilité du ministère du
Travail. Et, de ces six-là, il y en a déjà deux, recommandations, Mme la
Présidente, qui ont connu un suivi, donc
qu'on ne retrouve pas à l'intérieur du projet de loi n° 152. Une de ces
deux recommandations là, donc, touche
l'expertise interne chez les donneurs d'ouvrage publics en construction, et la
seconde, de colliger des situations
d'intimidation qui seraient constatées sur des chantiers de construction. Donc,
ces deux recommandations-là ont déjà
eu des suivis. Donc, il en reste quatre. Et nous en avons aussi profité, Mme la
Présidente, dans l'esprit de la loi, bien entendu, pour ajouter un
certain nombre d'éléments suite à des constatations, notamment faites par la
Commission de la construction du Québec.
À quoi finalement s'intéressait la commission
Charbonneau? Elle s'intéressait à la collusion et également à la corruption dans l'octroi et la gestion des
contrats publics, mais aussi à l'infiltration du crime organisé dans
l'industrie de la construction. Tout le Québec se souvient très bien de la juge
Charbonneau, qui a mené ces travaux-là et qui en est ressortie avec
60 recommandations.
Donc, ce que
nous faisons, nous, aujourd'hui, c'est excessivement important. Nous avons
déposé un projet de loi. Évidemment,
comme toujours et dans la plus grande transparence, nous tenons des audiences
publiques, des consultations publiques pour permettre aux groupes, il y
en a plusieurs aujourd'hui qui seront entendus, certains autres demain, qui auraient des observations à nous transmettre, qui
auraient des suggestions à nous partager, peut-être aussi des
objections, je crois savoir qu'il peut y en
avoir certaines... Alors, c'est le moment aujourd'hui et demain, pour ces
groupes-là, de nous faire part de leurs réflexions.
Essentiellement, à quoi touchent donc, les
domaines dans ce projet de loi n° 152? Rapidement, Mme la Présidente, on veut venir prévenir les situations
d'intimidation sur les chantiers de construction, on veut venir
améliorer la gouvernance, on veut faciliter
l'application de la loi et, bien sûr, protéger les lanceurs d'alerte. Et je
trouve ça important aussi, dans ce
dernier cas, de venir dire que l'inverse est aussi vrai, qu'on va venir aussi
punir des gens qui pourraient faire de fausses déclarations, de fausses
dénonciations, pardon, et qui pourraient donner une mauvaise note, alors qu'il
n'en est rien.
Alors, essentiellement, c'est ce que nous
faisons aujourd'hui et c'est avec grand plaisir que je suis ici pour entendre
les groupes qui auront très certainement des choses intéressantes à nous
livrer, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, Mme la ministre. J'invite
maintenant le porte-parole pour l'opposition officielle en matière de Travail, le député de Beauharnois, à prendre la
parole pour ses remarques préliminaires. Vous avez un temps maximum de
trois 3 min 30 s. M. le député, la parole est à vous.
M. Guy
Leclair
M. Leclair :
Merci beaucoup. Tout d'abord, mes salutations, Mme la Présidente, avec l'équipe
de la commission qui nous entoure.
Bien entendu, Mme la ministre, sous-ministre et les gens qui l'accompagnent,
mes collègues de la partie gouvernementale,
je vous salue. Et, bien entendu, mon collègue de la Coalition avenir Québec
qui... on a la chance de siéger dans
pas mal de commissions ensemble. Et des salutations à tous les gens qui
défileront aujourd'hui pour venir éclaircir ce projet de loi là.
Bien
entendu, le but, on dit principalement de donner suite aux recommandations de
la commission Charbonneau. Il reste plusieurs questions, et j'ai bien
hâte que nous arrivions à entendre tous les groupes puis d'arriver article par article, car, lorsque je lis les notes
explicatives du projet de loi, on dit ici, entre autres : Le projet de loi
ajoute une nouvelle infraction à la
liste de celles pour lesquelles une condamnation rendra une personne inhabile à
diriger ou à représenter une association, soit patronale ou syndicale.
Alors,
il manque un peu de détails en ce moment, puis on va questionner la ministre
pour savoir ses intentions. Alors, j'ose espérer que ça sera dans cas
graves ou extrêmes parce qu'on utilise, dans quelques articles ou dans une
précisément... on veut modifier un mot qui a une importance, Mme la Présidente,
on modifie le mot «susceptible de provoquer»,
alors que, dans le passé, on disait «dans le but de provoquer». Alors,
«susceptible de provoquer», je trouve que c'est un mot qui a une portée très,
très large. Et, dans l'actualité, le quotidien de tous les jours, «susceptible
de provoquer», je crois qu'on peut retrouver
beaucoup de situations parce
qu'il y a des gens qui sont plus
susceptibles que d'autres. Donc, pour l'application de ce terme-là et
les dispositions qu'on met dans la loi, bien, je pense que je ne suis pas
convaincu, là, que...
La commission
Charbonneau nous disait : On ne veut plus qu'il y ait de l'intimidation,
ça doit cesser, puis j'acquiesce totalement à ça, Mme la Présidente, bien
entendu, si le but premier, c'est de dire qu'il n'y aura plus d'intimidation. Mais le moyen de s'y rendre et d'y
parvenir, si on dit qu'une personne est susceptible de provoquer, je crois qu'on va être devant les tribunaux plus qu'à
notre tour. Alors, on aura la question... on aura le temps de poser nos
questions à ce sujet-là, bien entendu.
On dit : La loi
va augmenter aussi le pouvoir de la Commission de la construction du Québec en
matière d'inspections. Alors, je pense que, si on parle d'inspections côté
santé et sécurité au travail, il n'y en aura jamais suffisamment, mais je veux
m'assurer... On sait qu'actuellement et dans le passé les représentants
syndicaux se promenaient sur les chantiers,
puis souvent, bien, il y a eu parfois des mésententes, de dire que peut-être
quelqu'un faisait de l'intimidation du côté syndical. Mais, bien souvent
aussi, des travailleurs rapportaient des faits à leurs représentants syndicaux pour dire : Ce chantier-là, ici, ne
fonctionne pas trop. Donc, j'espère que le but d'augmenter les pouvoirs
de la commission pour la matière d'inspection ne rapetissera pas non plus le
fait qu'il y ait des représentants syndicaux sur les chantiers.
Alors,
on aura amplement le temps d'en jaser, Mme la Présidente. Je vois que mon temps
est écoulé. Donc, on se reverra un peu plus tard.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, M. le député. J'invite maintenant
le porte-parole du deuxième groupe
d'opposition en matière de travail et député des Chutes-de-la-Chaudière à faire
ses remarques préliminaires. M. le député, vous disposez d'un temps
maximum de 2 min 30 s.
M. Marc
Picard
M. Picard : Merci, Mme la Présidente. De courtes remarques.
Permettez-moi de saluer les collègues parlementaires, avec leurs équipes, et surtout, surtout, les gens
qui vont venir nous donner leur avis sur le projet de loi qui est
présenté par la ministre.
Comme la ministre
indiquait tout à l'heure, oui, la commission Charbonneau a formulé six
recommandations spécifiques au monde du travail, deux ont été réalisés. Puis le
projet de loi n° 142 vient répondre aux quatre autres recommandations.
Aussi,
Mme la Présidente, vous vous rappelez que la Commission de l'économie et du
travail s'est donné, en 2016, le mandat de dresser le bilan du carnet de
référence de la CCQ et son impact sur les phénomènes d'intimidation et de discrimination syndicales sur les chantiers de
construction du Québec. Heureusement, nous allons avoir nos travaux, là,
en février, si on trouve des dates, parce que je pense c'est important d'aller
voir ça.
À
la lecture, Mme la Présidente, à la lecture des différents mémoires, là, on
s'aperçoit que les principales associations
patronales et syndicales ont un fort bémol, disons, à la limitation des mandats
pour les administrateurs des C.A. Et je pense qu'on... le but de la
commission, c'est d'entendre, entendre les doléances. Puis on va comprendre le pourquoi que ces groupes-là ont des réticences et
le pourquoi c'est inscrit dans la loi aussi. Je pense que le but, c'est
d'avoir le meilleur projet de loi possible.
Et, comme d'habitude, Mme la Présidente, j'offre mon entière collaboration pour
que le projet de loi, lorsqu'il sera à
l'étape finale, soit le meilleur possible pour l'industrie de la construction.
C'est important d'avoir un secteur de la construction sain au Québec.
Merci.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, M. le député.
Nous allons maintenant suspendre nos travaux
quelques instants afin de permettre aux membres du Conseil du patronat de
prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 9)
(Reprise à 11 h 10)
La Présidente (Mme Richard) :
Donc, nous reprenons nos travaux.
Auditions
Bonjour, messieurs. Bienvenue à l'Assemblée
nationale, M. Thomas, M. Lamy. Donc, vous faites partie du Conseil du patronat du Québec. Bienvenue à
l'Assemblée nationale encore une fois. Et je vous rappelle que vous
disposez d'un temps maximal de
10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite, nous allons procéder à
une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, la parole
est à vous, messieurs.
Conseil du patronat du
Québec (CPQ)
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Merci, Mme
la Présidente. Alors, merci aux membres de la commission de nous
accueillir aujourd'hui pour nous entendre, Mme la ministre, bien sûr, et
l'ensemble des parlementaires.
Alors, il nous fait plaisir de témoigner devant
vous aujourd'hui. Mon nom est Yves-Thomas Dorval, je suis président-directeur
général du Conseil du patronat du Québec, le CPQ, et je suis accompagné, à ma
gauche, de M. Guy-François Lamy, qui
est vice-président, Affaires juridiques et travail, au sein du
Conseil du patronat. Alors, il nous fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui
pour vous partager nos commentaires et répondre à vos questions.
Peut-être juste un petit mot en partant, le CPQ
est une organisation qui est une confédération d'organisations patronales. On représente, directement ou indirectement, plus de 70 000 employeurs, des employeurs qui ne
sont pas que des entreprises privées, ça peut être des coopératives, ça peut
être des organismes également socioéconomiques, ça peut être également
des employeurs du para ou du péripublic. Donc, on représente l'ensemble des
employeurs. Et, fait à notre, on va
fêter notre 50e anniversaire en 2019 et on a été créé à la demande à la fois
des groupes syndicaux, gouvernementaux, afin de représenter l'intérêt, les points
de vue, les préoccupations de l'ensemble des employeurs au Québec. C'est notre spécialité depuis le début. Également,
je dirais... c'est survenu également au même moment où le gouvernement a mis sur pied différentes organisations de type paritaire, que ce soit la CSST, à l'époque, qui est devenue la
CNESST maintenant, c'est vrai aussi pour l'ancienne société de développement
de la main-d'oeuvre, qui est devenue la Commission des partenaires du marché du
travail, et ainsi de suite.
Alors, il me
fait très plaisir d'être avec vous aujourd'hui et de partager nos impressions. Globalement, le
CPQ appuie les objectifs
poursuivis par le projet de loi n° 152, mais il s'oppose à certaines mesures qui
visent à modifier les règles
relatives à la gouvernance de la Commission des normes, de l'équité et de la santé-sécurité
au travail, ce qu'on appelle dans le jargon la CNESST.
Dans notre mémoire, on vous explique un peu le
contexte. Il y a un élément qu'on ne trouve pas ici, dans le contexte. Quand le régime a été créé, hein, c'est
un pacte entre les employeurs, les travailleurs et le gouvernement, on a créé
un régime sans faute de responsabilité, c'était la concession des organisations de travailleurs, et payé entièrement, à 100 % par les employeurs, c'était la
concession des employeurs. Et il y avait une condition à ça. Et j'ai, pas plus tard
que la semaine dernière, revu tout ça avec
l'ancien président du CPQ, qui était présent à ce moment-là, pour savoir
comment ça s'est passé, ça. Et ça a été très clair que la décision, à la fois
des représentants syndicaux et patronaux, de participer à cette organisation
paritaire, c'était d'avoir les plus hauts responsables des associations
concernées parce qu'ils ont la capacité de
voir l'ensemble des enjeux et de représenter aux meilleurs intérêts
non pas des individus ou des entreprises, mais l'ensemble des préoccupations des travailleurs et des employeurs. Et c'est comme s'il y avait
eu une espèce d'entente, à l'époque, qu'on appelle un deal, à l'effet
que les représentants des principales associations, dont le CPQ ou certaines centrales syndicales, seraient représentés par les
plus hauts responsables. Intéressant aussi de savoir que les plus hauts responsables de ces associations-là sont des
permanents, n'ont pas d'intérêt dans des entreprises particulières, donc ne sont pas en
conflit d'intérêts par rapport à des enjeux de concurrence, parce que
rappelons-nous qu'à la fin la commission Charbonneau avait été mise sur pied pour des questions
de collusions et de corruption, hein, qui affectent le marché, et en
particulier dans les domaines de la construction, ce qui n'est évidemment pas
le cas au niveau de la permanence.
Alors, dans
notre mémoire, on fait voir qu'aussi le régime vise la prise en charge de la
santé-sécurité par les milieux de
travail pour indemniser les victimes ou veiller à leur réadaptation. Donc, en
partant, l'origine ou l'intention du régime, c'est de faire en sorte que les milieux de travail prennent, hein,
prennent la responsabilité, la prise en charge du régime. Et c'est pour ça que les représentants des associations syndicales ou patronales sont évidemment,
au premier chef, intéressés.
Alors, en
1980... J'ai parlé tout à l'heure de ce qui avait été mis en place, mais l'histoire
est beaucoup plus longue que ça parce que ça vient de principes qui ont été édictés il y a
plus de 100 ans par William Meredith et qui constituent la base, les principes, au Canada,
des régimes d'indemnisation des travailleurs. Dans le modèle québécois, donc, les
principaux dirigeants des associations représentatives occupent un poste, sont recommandés par les associations, tel que le prévoit la loi, pour faire partie du conseil
d'administration.
Plus récemment, le gouvernement a reconnu que c'était la bonne façon de faire aussi parce qu'il y a
eu le projet de loi n° 42 et le projet de loi qui visait à
reformer, hein, reformer en regroupant la Commission des normes, de
l'équité et de la santé et sécurité au travail ensemble et a, dans le fond,
reprécisé certaines choses par rapport aux conseils d'administration. Et, en ce
sens-là, je pense que c'était une bonne décision.
La
connaissance qu'ont les dirigeants des associations patronales ou syndicales
les plus représentatives de la réalité, c'est un atout. Ce n'est pas une faiblesse, ce n'est pas un enjeu, ce
n'est pas un obstacle, c'est un atout. La commission reçoit chaque année pas moins de
2,5 milliards de dollars de cotisations des employeurs. Alors, les
employeurs veulent que leurs
représentants puissent voir à la bonne gestion de ça. Et ça marche, ça
fonctionne. Les lésions professionnelles ont diminué année après année, et le coût des cotisations du régime n'a pas
augmenté, il a baissé — il n'y a aucun programme québécois
d'organisation de services qui a vu une diminution des cotisations — parce qu'on est à notre affaire.
Quand je dis : On est à notre affaire,
nous, comme représentants d'employeurs, mais aussi les représentants syndicaux.
Et on travaille ensemble pour la bonne gestion du régime.
On
a bien sûr, dans la foulée de tout ce qui peut se passer au niveau de la
gouvernance et de l'éthique, réfléchi à ces questions-là. Et on a mis en place des moyens pour s'assurer d'avoir
une bonne gouvernance et les meilleurs principes d'éthique. On a mis en place un comité de gouvernance et d'éthique puis
on a examiné ce qui se faisait un peu partout, à tel point que, par exemple, le code d'éthique ou la
façon dont on assure la gouvernance à la commission est rendu un exemple
suivi par d'autres. Les autres s'informent de comment est notre code d'éthique
et le copient ou l'adaptent dans leur milieu
parce qu'on a fait un travail en profondeur en termes d'élaboration de
meilleures pratiques. Chaque administrateur doit dévoiler chaque année tous ses intérêts pour s'assurer... Et, à
chaque début de réunion du conseil d'administration, les administrateurs doivent énoncer s'il y a un
potentiel conflit d'intérêts sur un sujet qui est à l'ordre du jour avant
même le début de la réunion, auquel cas il doit s'abstenir et sortir de la
rencontre.
On
a, pour élaborer notre code d'éthique, examiné en profondeur la documentation
spécialisée pertinente. Vous avez,
dans notre mémoire, la liste des organisations qu'on a consultées,
principalement dans le secteur public, mais aussi dans le secteur privé.
Et on s'est inspirés des meilleures pratiques. Ce que je vous ai dit tantôt, ça
en est rendu une question d'exemplarité, les autres s'informent sur de quelle
façon on fonctionne maintenant.
Je disais tantôt que
le régime est bien administré. Entre 2011 et 2015, les cotisations au régime de
santé ont diminué de 465 millions de
dollars, tout en ayant une réduction, ce n'est pas en ne remboursant pas ou en
n'indemnisant pas, tout en ayant une
réduction. Donc, la performance du régime est là pas seulement au plan
financier, mais, d'abord et avant tout, en termes d'incidence au niveau
des accidents, des lésions professionnelles.
Alors,
dans le mémoire, la recommandation de la commission Charbonneau, on ne voit pas
sur quelles bases elle repose. On
comprend qu'il y a une question de... je m'excuse, le terme, mais de faire...
d'avoir des postes à la fois à la Commission de la construction, la
CNESST. On comprend qu'il y a des questions là-dessus, puis il y aura d'autres organisations qui vont s'y pencher. Nous, on parle
de la durée des mandats. Dans le fond, quand on regarde la durée des
mandats, on parle de renouvelables deux fois, des mandats de deux ans. Donc,
c'est six ans maximum.
Alors,
dans notre mémoire, vous avez la liste, hein, de l'étalonnage qu'on a fait. On
a regardé partout dans le secteur public
qu'est-ce qui existe, mais on a regardé aussi dans le secteur privé qu'est-ce
qui existe. Or, force est d'admettre qu'il n'y a aucune organisation qui a une limitation de mandat en bas de 12
ans quand on pense aux renouvellements, et ainsi de suite. Même des organisations comme la Caisse de dépôt, des
organisations qui gèrent... qui peuvent être bien plus en situation... parce que la CNESST, elle ne donne
pas des contrats, là, beaucoup, là, dans le secteur privé, là, et autres.
Donc, ce n'est pas une situation qui peut se
représenter. On a les meilleures normes d'éthique. Puis, en plus de ça, on se
pose la question, à ce moment-là : Qu'est-ce qu'on devrait faire?
Or,
si on regarde ce qui existe dans les meilleures pratiques, ce n'est pas le cas.
Plus, c'est une organisation paritaire. Donc, l'intérêt d'avoir des gens qui sont à la tête, des représentants
d'associations syndicales ou patronales, est d'autant plus fort.
On
accueille aussi, dans notre mémoire, certaines mesures favorablement, qui font
suite... parce qu'il n'y a pas juste cette question-là, bien sûr. Et on
fait énoncer dans notre mémoire ce qu'on appuie en particulier.
Alors, je suis
disponible pour répondre à vos questions.
• (11 h 20) •
La Présidente (Mme Richard) : Merci, M. Dorval. Nous allons
commencer maintenant les échanges. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Vien :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M. Thomas, de la
présentation de votre mémoire. Je comprends
très bien tout ce que vous me dites, là. J'ai tout bien saisi. Évidemment, on a
analysé ce que vous avancez ce matin,
votre position, vos questionnements aussi. Il n'en demeure pas moins qu'à la
suite de longs travaux il y a une commission d'enquête qui arrive à la
conclusion que ce serait une bonne idée, là, de limiter dans le temps. J'ai devant moi, ici... Et c'est vrai, ce à quoi
vous faites référence, que, dans certains cas, là, les limitations ne sont
pas aussi courtes dans certaines organisations, mais il y a aussi une limite
dans le temps de 12 ans, si je lis bien ce que j'ai devant moi.
J'ai devant moi aussi
le rapport de la commission Charbonneau et ses prétentions à l'effet que
serait... et du pourquoi que ce serait une
bonne idée de limiter les mandats. Ce serait quoi, une position de compromis à
ce moment-là?
M. Dorval (Yves-Thomas) : Position de compromis. En fait, ce n'est pas une question
de compromis. Je vais vous avouer
franchement, on pense que le régime est bien administré et que la gouvernance
est bien installée. Alors, ce n'est pas
une question de compromis. Si vous nous demandiez : Quel est... dans
l'étalonnage qu'on fait, les autres exemples, comme je vous ai dit, en
bas de 12 ans, ça n'existe pas.
Il y a un problème déjà en partant, vous savez, les renouvellements sont
aux deux ans. Alors, il y a des organisations dont les représentants sont là pour plusieurs années. Si vous voulez
aider l'organisation, bien, il faudrait peut-être prolonger la durée de
chacune des phases du mandat, pas le faire aux deux ans. Ça, c'est de
l'administration pour rien. Mais la question
de compromis, moi, je vous dirais, quand une organisation représentative,
qu'elle soit syndicale ou patronale, soumet,
entre autres, le nom de son plus haut dirigeant et que ce dirigeant-là, c'est
un permanent en plus de ça, là, il n'est pas en conflit d'intérêt. Donc, à mon avis, il n'y a pas de mesure... c'est une
organisation paritaire, d'où l'intérêt d'avoir les représentants des constituantes qui administrent
les choses. Et, si la commission Charbonneau avait démontré qu'il y
avait eu un problème à la CNESST, je peux
comprendre. S'il y avait eu une élaboration de pourquoi ils font une
recommandation, mais je n'ai pas vu,
dans le rapport Charbonneau, de justification par rapport à la CNESST, qu'il se
serait passé quelque chose de ce côté-là.
Je vous
dirais juste un exemple. Le gouvernement a accepté la recommandation de la
Commission des partenaires du marché
du travail de nommer par intérim deux personnes comme coprésidents de la
Commission des partenaires parce qu'il
y a une vacance actuellement à la présidence. Et le critère de la Commission
des partenaires pour la recommandation, c'est de choisir les deux personnes qui avaient le plus d'expérience au
sein du conseil d'administration. Donc, les années d'expérience dans un conseil d'administration,
c'est une valeur. Ce n'est pas une menace, c'est une valeur. Pourquoi?
Parce qu'il y a beaucoup de décisions,
surtout dans des organisations comme la CNESST, c'est qu'il y a beaucoup de
décisions qui se prennent et c'est important
d'avoir des gens qui sont capables d'expliquer aux administrateurs dans quel
contexte, le pourquoi, la justification, pas
pour conserver des vieilles façons de faire, juste pour expliquer qu'est-ce qui
c'est passé à tel moment versus d'autres. La majorité des conseils
d'administration valorise l'expérience. Alors, six ans, pour nous, c'est un exemple qu'on essaie de faire jouer à la
durée d'un mandat, je dirais, une utilisation qui n'est même pas
expliquée ou justifiée dans le rapport de la
commission Charbonneau et qui n'est même pas en comparaison avec les besoins ou
les équivalences dans des organisations
similaires. Mais, si vous me posez la question, en tout cas, ça ne serait
certainement pas en bas de 12 ans. Et
deuxièmement, par contre, il y aurait une demande pour l'effet que chacun des
mandats serait de plus longue durée
pour que... ne pas être dans un processus constant de renouvellement, qui est
de l'administration qui n'est pas très utile pour une organisation.
La Présidente (Mme Richard) :
Mme la ministre.
Mme Vien :
D'abord, excusez-moi. Je vous ai appelé M. Thomas, mais c'est bien
M. Dorval. Ça a quasiment... Je vous ai appelé par votre petit
nom...
M. Dorval (Yves-Thomas) : Ça
fait 61 ans que j'entends des modifications de mon nom comme ça.
Mme Vien : Je suis bien
désolée, mais je suis convaincue que je ne vous ai pas vexé, là.
Moi, j'ai
bien entendu votre position. Elle est claire, là. Je sais qu'il y a d'autres
groupes aussi qui la partagent. Donc,
vous finissez en disant... tantôt vous me disiez : Il n'y a pas vraiment
de compromis possible, mais, s'il devait y avoir un pas de franchi, pas
en bas de 12 ans et des mandats plus longs.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Et, à
mon avis, ça ne devrait pas, excusez-moi de dire ça, puis ce n'est pas une question
de... Vous savez, à mon âge, je ne serai plus là dans neuf ans ou dans 10 ans,
là. Alors, ce n'est pas... Tu sais, je n'ai pas d'intérêt particulier là-dessus.
Vous êtes surprise. Je donnerai encore du service, mais peut-être dans
d'autres... Je ne suis pas là pour un intérêt
personnel. En fait moi, je n'ai pas de... On n'a pas de... Il y a des jetons de
présence possibles, qui sont très, très petits, et on les refuse parce
qu'on fait partie de la commission.
Alors, juste
en partant, ça vous démontre, là, que, nous, là, notre intérêt
à nous, c'est de s'assurer que le régime fonctionne bien. Puis je suis convaincu que du côté de la partie
syndicale, c'est la même chose. On peut être en désaccord sur plusieurs
éléments, mais on a tous à coeur le même objectif : avoir un régime qui
remplit ses objectifs, qui est administré sainement et qui répond aux besoins.
Cela dit, je pense que les permanents dans les associations
ne peuvent pas être en conflit d'intérêts du genre de ceux qu'expliquait la question de la commission Charbonneau. Peut-être que d'autres
personnes, qui représentent le monde
patronal, qui sont dans les entreprises ou quoi que ce soit, peut-être
que vous pourriez poser la question :
Pourrait-on avoir une limite de 12 ans,
peut-être, mais les représentants... C'est que les constituantes, les parties prenantes,
que ce soient les travailleurs ou les
employeurs, ils veulent que les gens qu'ils ont placés à la tête pour les
représenter soient là pour protéger leurs intérêts.
La Présidente
(Mme Richard) : Mme
la ministre.
Mme Vien : Je
comprends très, très
bien ce que vous dites. En page 128... 127, 128, Charbonneau fait quand même un certain nombre d'observations, mais, M. Dorval, je comprends bien ce que vous me dites. Je veux juste vous rassurer là-dessus.
Et je retiens aussi que vous vous êtes donné un code d'éthique et de gouvernance
à la CNESST mais qu'aussi vous me
dites : Pas en bas de 12 ans puis peut-être... sur la durée des mandats, la durée des mandats,
qui est assez courte, hein? C'est deux ans à la CNESST.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Et, Mme la Présidente, à ce propos-là... parce que, vous savez, un compteur, quand ça commence, ça commence où? Ça commence à quel
endroit, le 12 ans, là? Parce qu'il y a des gens qui sont actuellement sur le conseil
d'administration, et vous savez que c'est une nouvelle organisation qui a été créée... Finalement, la CNESST, ce n'est pas l'ancienne CSST.
Alors, si on regardait en termes de... quand
est-ce qu'on commence le compteur, si vous aviez des années maximum, bien, il faudrait que ce soit au moment où ça a été reformé et non pas à l'origine de la CSST parce que ce
n'est plus le même mandat non plus, puisqu'on touche les questions de normes et
d'équité salariale également.
Mme Vien : Vous, M. Dorval, vous y êtes depuis près
d'une dizaine d'années, neuf ans, selon nos calculs, à peu près,
là.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Moi,
ça?
Mme Vien : Vous, oui.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Mme
la Présidente, ça va faire bientôt neuf ans.
Mme Vien : Oui. C'est
ça. O.K. Près de neuf ans. Parfait. Bien merci.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Mais
neuf ans à la CSST.
Mme Vien : Oui, oui,
oui. J'ai compris.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Mais
ça fait...
Une voix : Deux ans.
M. Dorval (Yves-Thomas) :
...deux ans...
Mme Vien : Deux ans.
M. Dorval (Yves-Thomas) :
...depuis que la CNESST a été créée.
Mme Vien : Depuis la nouvelle organisation, oui, c'est ça. Merci beaucoup, hein, merci de vous être déplacés ce matin. Merci.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. Maintenant, nous allons du côté de l'opposition
officielle. M. le député de Beauharnois, vous avez la parole.
M. Leclair : Merci, Mme la
Présidente. Merci, messieurs. Votre mémoire a le mérite d'être très clair.
Je vais vous
apporter sur une partie que vous n'avez pas eu la chance de discuter. Vous
marquez à la partie II, Commentaires spécifiques sur les autres dispositions
du projet de loi, vous parlez, dans le premier paragraphe, d'une stratégie
anticoncurrentielle. Donc, vous dites : «L'intimidation [...] de stratégie
anticoncurrentielle pour empêcher [des entrepreneurs,
des travailleurs] ou [des fournisseurs] d'entrer dans un marché particulier...»
Ça a fait partie de la commission Charbonneau énormément, tout ça. Puis
dans l'autre paragraphe, vous parlez aussi de l'intimidation sur les chantiers.
Alors,
j'aimerais juste que vous m'expliquer comment vous voyez le côté
anticoncurrentiel de vos yeux, qu'est-ce qui devrait être fait sur ça, puis on reviendra par la suite, là, l'intimidation sur les chantiers, qu'est-ce que ça peut
avoir un lien, parce que c'est dans le même article.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Alors, je
vais céder la parole à mon collègue, vice-président des affaires
juridiques.
La Présidente (Mme Richard) :
M. Lamy, vous avez la parole.
• (11 h 30) •
M. Lamy
(Guy-François) : Merci.
Merci, Mme la Présidente. Premièrement, si on reprend, là, le passage où
vous dites... je comprends que vous êtes en page 10 du mémoire, là, ici. Au
départ, on reprend le constat de la commission Charbonneau. C'est d'abord elle
qui a considéré que le phénomène de l'intimidation constituait potentiellement
une stratégie anticoncurrentielle. Et, par la suite, évidemment, le CPQ, nous,
c'est une mesure qui remonte à bien avant la
commission Charbonneau. Cette question de l'intimidation et la question du placement syndical, qui souvent a
été... on a eu des constats à l'effet
que ça a souvent été relié, là, que le placement syndical mener à des situations
d'intimidation sur les chantiers qui pouvaient avoir pour effet, en
fait, que certains entrepreneurs pouvaient se retrouver dans une situation
où ils se sentaient coincés dans cette situation-là. Et c'est ça qui amenait,
pour nous, une situation potentiellement anticoncurrentielle
parce qu'il pouvait y avoir une
influence indue d'une certaine normalisation de cette influence-là
jusqu'à un certain point sur la réalité, sur
le travail des entrepreneurs, et donc que leur liberté de manoeuvre au niveau
notamment de la sélection de leurs employés
ou de la façon d'opérer leurs activités pouvait être influencée dans ce
contexte-là. Et c'est là où il y a ce
lien que fait la commission Charbonneau, mais que le CPQ, on a aussi partagé
depuis quand même plusieurs années
parce qu'on a fait des représentations à l'encontre du placement syndical
depuis, comme je vous disais, bien avant que la commission Charbonneau
soit mise sur pied, là.
M. Leclair :
À moins que je me trompe, je pense qu'on a corrigé le tir avec le placement
syndical et la CCQ depuis ce temps-là. Mais
j'aurais aimé... Je voudrais qu'on en revienne aussi peut-être encore sur les
chantiers comme tels, mais j'aimerais
bien vous entendre lorsque vous dites ou lorsque vous reprenez puis vous
semblez le dire dans ce sens :
«...le CPQ accueille favorablement les dispositions [...] du projet de loi...»
Mais là ce qu'on parle, ça peut empêcher des entrepreneurs entre eux. Qu'est-ce qu'on a dans ce projet de loi là
qui pourrait nous aider à dire qu'un entrepreneur X ne pourrait pas intimider un plus petit d'aller
appliquer? Parce qu'on a entendu abondamment, de dire : Bien là, c'est
sûr, c'est toujours cet entrepreneur-là qui a ce type de contrat là. Nous, on
ne peut l'appliquer.
Alors, face à
ça, là, je comprends qu'on a débordé un peu sur les chantiers, qui étaient
peut-être mon deuxième volet, mais
j'aimerais voir qu'est-ce que vous y voyez, dans ce projet de loi là, qui va
éviter ça dans le futur ou, en tout cas, s'il y a déjà eu des
changements. J'aimerais vous entendre.
La Présidente (Mme Richard) :
M. Dorval.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Juste
un mot d'introduction avant. La première des choses, le CPQ, moi-même, j'ai témoigné devant la commission Charbonneau à l'époque pour faire état des préoccupations du milieu patronal. Je
pense que c'est important de rappeler, parce qu'on l'a dit plusieurs fois, mais on
l'oublie, les situations où il y a eu des problèmes, ce n'est quand même
pas la majorité des situations, et c'est vrai tant pour les questions
syndicales ou les questions patronales. Donc, il faut faire attention toujours
de ne pas mettre ça comme étant des problématiques qui sont à tous les niveaux.
Il y a eu beaucoup d'améliorations qui ont été
faites. Il y a eu la loi, il y a eu des codes d'éthique, il y a des poursuites.
Donc, il y avait des situations où il y a eu des problèmes, il y a eu des
interventions. Donc, la situation, vraiment, elle est changée de manière considérable.
Mais juste quand même le mettre dans le contexte, là.
Aujourd'hui, d'ailleurs, si on avait un
plaidoyer vraiment à faire, c'est qu'on a besoin de travailler à la
valorisation de l'écosystème de la construction beaucoup plus qu'à continuer à
voir les problèmes. Cependant, la commission
Charbonneau a fait un travail, un travail, puis on a salué plusieurs des
recommandations. Et je pense que le gouvernement
a l'obligation effectivement de mettre en place les différentes mesures qui ont été proposées, mais toujours en tenant compte... Il faut faire attention, les
milieux se sont assainis énormément. Et je vais laisser la parole à
M. Lamy.
M. Lamy
(Guy-François) : Et, si je
peux compléter là-dessus, puis pour revenir à votre question,
lorsque... oui, il y a eu des mesures qui ont été prises, il y a énormément
de mesures qui ont été prises. Justement, M. Dorval vient de le dire, les milieux se sont assainis. Je pense
que la, peut-être... je n'ose pas dire la dernière pièce du
casse-tête, mais certainement une des
dernières pièces du casse-tête que le projet
de loi ici propose spécifiquement
quant à l'intimidation, c'est justement une mesure où... Là, on a
eu des mesures très, très concrètes, si on pense, par exemple, au placement
syndical ou si on pense à d'autres mesures
qui ont été prises, là, au niveau des certificats de conformité, des attestations qui
ont été mises en oeuvre, là, pour la
soumission sur des contrats publics.
Il y a différentes pièces qui ont été
mises qui étaient très, je dirais, très pratico-pratique, là. Ici, il
restait peut-être cette pièce-là qui était cette notion d'intimidation où, là,
on est davantage dans un comportement qui est peut-être moins mesurable, là,
quantifiable, mais qui n'en est pas moins important
à contrecarrer. Et ça vient peut-être compléter l'oeuvre, un peu, ici, là, ce qu'on
fait là, en suivant justement les recommandations de la commission
Charbonneau.
M. Leclair : Merci. Mais, justement, comme qu'on disait d'entrée de jeu, je pense que tout
le monde est d'accord que l'intimidation
devrait cesser à tous les niveaux, puis nous les premiers aussi.
Parlez-moi...
Dans le projet de loi, on parle de «susceptible de provoquer». Vous ne
voyez pas là un conflit éternel qui va se créer entre les deux parties
en ajoutant un mot, «susceptible de provoquer», lorsqu'on parle d'intimidation?
M. Lamy
(Guy-François) : Je vous
avouerai que, sur ce terme-là, la lecture que nous en faisons, en fait, que
moi, j'en fais, n'est peut-être
pas tellement dans... elle n'est pas tellement
qualitative, mais plutôt conséquente, là, dans le sens qu'on cherche un comportement qui entraîne une
conséquence, donc qui est «susceptible de provoquer». Je ne le lis pas, personnellement,
comme une mesure qui serait qualitative ici, mais qui est plutôt un lien de
cause à effet entre le comportement et son effet.
Donc, à ce niveau-là, je ne sais pas à quel
point c'est une mesure qui... On a des points, à notre mémoire, sur lesquels on
a accroché sur certains mots. Celui-là me préoccupe un petit peu moins, peut-être,
là.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : En fait, Mme la Présidente, quand on va un petit peu plus loin dans le mémoire puis on pense, entre autres, à la question de «sciemment», c'est qu'en éliminant la notion
de «sciemment», à ce moment-là,
on se met dans une situation
où, des fois, on pourrait être dans une erreur de bonne foi. Alors, c'est juste
ça qui était notre préoccupation à ce niveau-là. C'est que, dans le
fond, on avait le mot...
M. Leclair : ...par rapport au rapport,
là.
M. Dorval (Yves-Thomas) :
Exactement.
M. Leclair : Exact. Mais je vais revenir sur un autre point, excusez-moi de vous
interrompre. Vous parlez aussi à la
page 11, dans votre mémoire, vous dites que, dans les tels courts délais de
prescription, ça fait obstacle à la sanction des infractions
qui peuvent avoir duré plusieurs années. Vous semblez être d'accord avec les
délais qui vont être prolongés à trois
ans. Donc, j'aimerais vous entendre sur un exemple, de dire qu'un an on pouvait
passer à côté, là, juste pour nous mettre en situation, s'il vous plaît.
La Présidente
(Mme Richard) : M. Lamy.
M. Lamy (Guy-François) : Je vais remettre en contexte notre propos sur la
question des délais de prescription ici. En fait, ce qu'on dit, c'est que la question des délais de prescription
de trois ans, on la comprend, mais, si on se rapporte à notre propos
ici, il y a certaines infractions qui, pour nous, demeurent quand même... parmi
les infractions les plus simples, là,
demeurent quand même fort probablement... on a de la difficulté à saisir qu'un
délai de plus d'un an serait nécessaire.
Pour nous, le délai de plus de trois ans, on le comprend dans la mesure où il y
a plusieurs des mesures, oui, que le
rapport de la commission Charbonneau, en fait, visait à combattre ou, en tout
cas, à trouver des solutions aux enjeux de collusion, de corruption.
Et
on comprend que, dans ce type d'infraction là, la durée de l'enquête peut
être... et l'accumulation de la preuve peut
être assez fastidieuse. Et donc il peut être nécessaire que le poursuivant, la
partie poursuivante, ait besoin d'un plus long délai entre la
connaissance probable de l'infraction et le dépôt de l'accusation.
Par contre, il reste
que, sous la loi R-20, il y a plusieurs infractions qui sont beaucoup plus
mineures...
La Présidente
(Mme Richard) : Je veux juste vous rappeler, si vous
permettez, il reste moins d'une minute.
M. Lamy (Guy-François) : Alors, je conclus en disant qu'il y a d'autres
infractions pas mal plus mineures qui, pour
nous, sous la loi R-20, probablement peuvent se traiter dans le délai habituel
d'un an. C'est pourquoi on propose dans notre mémoire de limiter ça aux
infractions qui sont de nature plus type collusion, corruption.
M. Leclair : En deux mots, j'aurais aimé avoir... parce que vous expliquez
vraiment : «Dans un tel cas, [un] court délai de prescription fait
obstacle à la sanction...» J'aurais aimé avoir peut-être un exemple, là, sans
nommer de nom. Il ne nous reste presque plus de temps. Ça fait que je pense
qu'on va donner au suivant.
La Présidente
(Mme Richard) : Il vous reste encore 20 secondes.
Une voix :
...
La Présidente
(Mme Richard) : 20. 18...
Une voix :
On y va-tu, là?
La Présidente
(Mme Richard) : Le temps file!
M. Leclair :
20 secondes, on est corrects. Ça va prendre un petit exemple.
M. Dorval (Yves-Thomas) : On pourra vous faire parvenir, à la commission,
un exemple, si vous voulez bien, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Richard) : Oui, absolument. Merci. Vous savez, le
temps... on est régis par le temps à l'Assemblée nationale, malheureusement, et
le temps, il file.
Nous
allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition. M. le député des
Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la parole pour un temps d'échange de
6 min 30 s.
M. Picard :
C'est beau. Merci, Mme la Présidente. Si j'ai bien compris, M. Dorval,
vous dites que six ans, c'est trop.
Vous avez dit : Peut-être plus. Mais moi, je voudrais surtout
comprendre : Lorsqu'il arrive un nouveau membre, là, ça lui prend combien de mois ou d'années avant
d'être, entre guillemets, opérationnel, là, bien naviguer dans ses
nouvelles fonctions, là? Parce que quelqu'un qui arrive, là, il n'est pas
opérationnel en partant, là.
La Présidente
(Mme Richard) : M. Dorval.
• (11 h 40) •
M. Dorval (Yves-Thomas) : Merci. Mme la Présidente, ça dépend de chaque
individu, de sa capacité à... de son intérêt
et de son engagement. Donc, ça va dépendre du temps qu'il va investir lui-même.
Je vous dirais qu'étant donné que les réunions ne sont pas à toutes les
semaines, qu'il y en a un certain nombre dans l'année et que, dans un cycle, il y a des réunions qui vont être plus
budgétaires, d'autres vont être plus réglementation, etc., pour faire un cycle
d'une année, c'est le minimum.
Mais, avant qu'une
personne contribue de manière optimale dans une organisation, ça va lui prendre
presque deux ans, probablement. Mais là ça
dépend des individus. Il y a des individus qui sont plus rapides que d'autres.
Puis ça va dépendre de la
connaissance parce que, quand on traite ces sujets-là, il y a des choses très
pointues, très compliquées, puis ça prend aussi de l'aide pour le faire.
Alors, ce qui est intéressant à la CNESST, c'est que les administrateurs
ont dit : Nous autres, on n'est pas des experts dans tous les domaines,
mais on s'est bâti une structure de gouvernance avec beaucoup de comités : comité informatique, technologies de
l'information, comité budget, comité immobilisations. On a un projet de siège social. Beaucoup de projets :
comité audit, comité de ressources humaines budget, et ainsi de suite.
Et, dans les domaines qui nécessitent
beaucoup d'expertise, par exemple, comité de placement, là, on a plusieurs
milliards de placés comme déposés à
la Caisse de dépôt, bien, les membres du conseil d'administration, les membres
du comité placement, hein, ont engagé un consultant expert en placement
qui les accompagne, qui accompagne les membres du conseil d'administration.
Même chose en technologies de l'information.
Vous
savez que c'est très facile, pour bien des organisations, de faire passer ce
qu'ils veulent en projet technologies d'information.
Les membres du conseil d'administration ont engagé, pour leur comité
technologie, un spécialiste. Même chose
pour immobilier, on a un projet de siège social. Vous savez qu'il y a eu des
problèmes dans plusieurs constructions d'immeuble
à travers le temps. On s'est embauché au conseil d'administration, dans le
comité, un spécialiste pour nous aider,
en matière de gouvernance, à suivre le projet. Donc, on va chercher les
ressources nécessaires, pas des experts de la CNESST, des experts indépendants qui travaillent pour les membres du
conseil d'administration pour les accompagner. On n'a pas besoin de ça dans tous les domaines, mais dans les domaines
qui nécessitent beaucoup d'expérience pointue.
Deuxièmement,
les gens... vous savez, ce n'est pas... les gens doivent, dans un conseil
d'administration, faire preuve de jugement. La gouvernance et la bonne
gouvernance, c'est d'abord une question de jugement. Mais ça prend aussi une certaine connaissance dans le temps. Alors, si
une personne est là depuis un an ou deux ans, la force de la personne va
être aussi sur l'ensemble de l'expérience de
ses collègues parce qu'on échange entre nous. Alors, c'est facile pour
nous, quelqu'un que ça fait huit ans qu'il
est là, de dire : Écoute, il y a huit ans, on a changé la politique de
capitalisation pour telle raison. Donc, ensemble, on est capables de
s'aider, je dirais de se former graduellement.
M. Picard :
O.K. L'un des objectifs du projet de loi est de favoriser, d'assainir les
relations sur les chantiers. Du point de vue patronal, est-ce qu'il manque des
choses, dans le projet de loi, pour améliorer, pour assainir ou la
version que nous avons, là... Puis, je comprends, pour les conseils
d'administration, il y a des problèmes, mais pour les autres? Allez-y.
M. Dorval (Yves-Thomas) : Moi, je pense que les efforts qui ont été faits,
c'est comme un balancier, là, on a fait le balancier jusqu'au bout. On est allé vraiment au maximum. Il y a peu
de territoires, de juridictions qui ont fait autant qu'au Québec, là, en matière de toucher des
problèmes de corruption ou de collusion, etc. Donc, on a mis en place
tous les outils. Est-ce que ça va empêcher toutes les situations? C'est
impossible. Où est-ce qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie. Je ne dirais pas : Où est-ce qu'il y a de la femme, il
y a de la femmerie, parce que les femmes sont correctes, eux autres,
mais, où est-ce qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie.
Alors, ce que je veux
dire par là... c'est un compliment...
Une voix :
...
M. Dorval (Yves-Thomas) : Mais je
pense qu'on est allé au maximum.
Ça ne veut pas dire que tous les trous seront toujours bouchés parce que
l'idée d'avoir une législation active, c'est d'être en mesure de voir quelles
seront les situations qui pourraient se
créer au fur et à mesure. À notre connaissance à ce
moment-ci, on a pas mal bouché
tous les trous. Même
qu'on est allés un peu loin parce
qu'on a mis beaucoup de bureaucratie à la fin, hein, parce que ça
nécessite beaucoup d'autorisations. Mais,
dans le contexte québécois, avec ce qui s'est passé, on dit : Bien, il faut
passer par là. C'est comme qui dirait la façon d'assurer à la population
que le maximum a été fait.
Cela
dit, si vous me posez la question maintenant sur la question des chantiers, il
n'y a pas juste la question de la corruption
puis la collusion. Je pense que, chaque trois ans, on a des négociations dans
le secteur de la construction qui vont nécessiter
aussi un examen, une réflexion, comment on peut améliorer les choses, et ainsi
de suite, pour le bénéfice des deux parties, pas pour une partie plus que
l'autre.
Alors,
la raison... ma réponse est : Sur les chantiers, il y a beaucoup de choses
qui peuvent continuer de s'améliorer, mais,
en termes de collusion, corruption, je pense qu'avec la commission Charbonneau,
avec tout ce qui a été mis comme investissement, avec la mise en oeuvre
d'un paquet de choses, des unités anticorruptions, etc., dans les
municipalités, les efforts qui sont faits,
et ainsi de suite, je pense qu'aujourd'hui les employeurs ont mis en place des
codes d'éthique.
Est-ce
qu'on est à l'abri? On ne sera jamais à l'abri, il y aura toujours quelqu'un à
quelque part, mal intentionné, qui va
essayer de se faufiler. Et c'est là où est-ce qu'on doit avoir une vigilance.
L'État doit avoir une vigilance pour suivre ça et adapter sa législation
au fur et à mesure, mais il ne faut pas que ce soient des couches de
sédimentation qu'on ajoute et qu'on ajoute,
qu'on ajoute, parce qu'à un moment donné le poids est tel que ce n'est plus
intéressant de travailler là, dans la
construction, à ce moment-là. Il faut que ça demeure quand même une agilité,
là, le secteur de la construction, pour être en mesure de livrer les
services pour les donneurs d'ouvrage.
La Présidente (Mme Richard) : Merci beaucoup. C'est
malheureusement tout le temps qui vous était alloué. Donc, merci,
messieurs, pour votre contribution aux travaux de la commission.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes, soit vers
15 h 30. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 11 h 46)
(Reprise
à 15 h 47)
La Présidente (Mme Richard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour. La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes présentes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de tous leurs appareils
électroniques.
La commission
poursuit son mandat sur les consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 152, Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine du travail
afin principalement de donner suite à certaines recommandations de la
Commission Charbonneau.
Donc,
cet après-midi, nous recevons la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Bonjour, M. Forget, M. Gagnon.
Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je pense que vous êtes habitués aux travaux de
la commission. Je vous laisse la parole, et vous avez un
temps pour faire votre présentation.
Fédération
des chambres de commerce du Québec (FCCQ)
M. Forget (Stéphane) : Merci beaucoup, MM., Mmes les parlementaires. Merci de nous accueillir
aujourd'hui. Tout d'abord, peut-être
rappeler, la fédération porte deux chapeaux. Le premier, de fédérer et
réunir les 139 chambres de commerce à travers le Québec et aussi, à
titre de chambre provinciale, plus de 1 000 entreprises qui sont directement
membres de la fédération, ce qui fait que, globalement, nous représentons plus
de 50 000 entreprises réparties sur l'ensemble du territoire
québécois.
Évidemment,
la raison pour laquelle je vous mentionne ça, c'est pour souligner que nous
sommes une association représentative
de la communauté d'affaires québécoise, et évidemment ça peut paraître curieux
d'être ici assis aujourd'hui, alors
que moi-même, je suis membre du conseil d'administration de la CNESST.
Évidemment c'est à titre de président de la fédération que je siège à la
CNESST.
Le
présent projet de loi propose plusieurs recommandations faisant suite au
rapport de la commission Charbonneau, mais
nous concentrerons nos interventions sur les articles 24 et 25, visant à
modifier l'article 144 de la Loi sur la santé et sécurité au travail de manière à limiter le nombre
de mandats, consécutifs ou non, que peuvent exercer les membres du
conseil d'administration de la CNESST nommés par le gouvernement.
Selon
la modification proposée, la durée des mandats serait d'au plus six ans, soit
trois mandats de deux ans. Nous vous
invitons à reconsidérer cette modification législative puisqu'elle, de notre
côté, vise à régler une problématique qui nous apparaît avoir déjà été réglée, mène à l'implantation d'une
pratique de gouvernance problématique parce qu'elle va à l'encontre d'une application efficace de l'un
des piliers fondamentaux du régime québécois de santé et sécurité au travail, à savoir, le dialogue social caractérisé
par le paritarisme et exercé par les plus hauts dirigeants des
organismes impliqués.
• (15 h 50) •
La lecture du texte
et de la recommandation du rapport de la commission Charbonneau que visent à
corriger ces articles émane de constats
relatifs à une situation passée, de notre point de vue, due aux décisions du
gouvernement. À la nouvelle gouvernance et
structure de la nouvelle CNESST, la démonstration a été faite qu'il n'est pas
nécessaire de changer la législation
pour s'attaquer à cette problématique du passé. De notre point de vue, le
contexte a changé. Cela dit, le bon
côté du projet de loi n° 152 nous a permis de faire un balisage et
d'identifier ce qui constitue les bonnes pratiques en matière de durée
de mandat.
Pour
les sociétés cotées en bourse, la loi est silencieuse à cet effet. Le règlement
sur la divulgation des pratiques en matière de gouvernance adopté par
l'Autorité des marchés financiers ne prévoit pas d'exigences à cet égard. La
pratique consistant à fixer une durée maximale pour les mandats des administrateurs
est peu usuelle. Seulement six conseils
d'administration des 100 plus grandes sociétés cotées canadiennes avaient une
politique fixant une durée maximale pour les mandats des
administrateurs, l'établissant de 12 à 15 ans.
Du côté du secteur
public, la pratique est contraire à ce qui est sur la table présentement. Au
Québec, la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État n'édicte pas d'exigences
particulières quant à la durée du mandat. À titre d'exemple, les mandats des administrateurs d'importants organismes, tels
que la Société de l'assurance automobile du Québec, la Régie de
l'assurance maladie ou Retraite Québec, peuvent être renouvelés pour une
plus longue période. La loi limite à deux le
nombre de renouvellements des mandats des administrateurs d'Hydro-Québec et de
Revenu Québec pour une durée maximale de 12 ans. La Loi sur la Caisse
de dépôt, elle aussi, prévoit une limite, mais encore plus longue. Dans les autres provinces et territoires,
la situation est similaire à celle prévalant au Québec, et ça, sans tenir
compte du contexte particulier et unique du paritarisme.
Imposer une limite au
renouvellement des mandats des administrateurs repose sur le postulat que le
passage du temps rend les administrateurs
incapables d'agir dans l'intérêt de la CNESST. Or, en plus de ne pas être
reconnue, cette pratique de gouvernance serait problématique. Je peux en
témoigner comme membre du conseil d'administration de la CNESST depuis un peu plus d'un an. C'est un C.A. important. Des
comités stratégiques, il y en a quelques-uns. Il y a aussi l'institut de recherche en santé et sécurité
au travail sur lequel nous siégeons comme administrateurs. Et la CNESST voit à l'application de quatre lois importantes au
Québec. Rappelons qu'avec les années de service les administrateurs
gagnent en expertise, ce qui améliore leur capacité à exercer leur fonction de
surveillance des activités dans l'intérêt de l'organisation. De plus, l'absence
de durée fixe pour les mandats des administrateurs évite leur départ en
cohortes.
Deuxièmement,
l'imposition d'une limite au renouvellement des mandats peut avoir un effet
perturbateur pour le bon
fonctionnement du conseil d'administration. En effet, cette limite crée un
horizon temporel pour les administrateurs. Cela peut les amener à envisager leur contribution et ses effets dans une perspective à court terme plutôt
que dans une perspective à long terme davantage compatible avec l'intérêt
de l'organisation.
La
CNESST s'est d'ailleurs dotée de robustes pratiques de gouvernance au cours des
dernières années. Ces pratiques incluent le code d'éthique et de déontologie des administrateurs publics, le guide sur
l'éthique qui s'applique à tout le
personnel, aux sous-traitants et aux fournisseurs, ainsi qu'un programme
de formation en gouvernance pour les administrateurs. L'ensemble de
ces mesures vient mitiger les risques de conflit d'intérêts de manière plus
efficace et moins perturbatrice que
l'imposition d'une limite au renouvellement des mandats des administrateurs.
D'ailleurs, lors de la création de la
CNESST, il y a à peine deux ans, l'enjeu n'a pas été discuté, et le législateur
n'a pas cru bon de modifier la gouvernance.
De
même, les enjeux soulevés par la composition du conseil d'administration de la
CNESST doivent également s'apprécier
au regard du contexte plus large du dialogue social au Québec, et cela doit
être tenu en compte lorsqu'il est question de la gouvernance de la
CNESST. Selon l'Organisation internationale du travail, le dialogue social a
pour objectif d'encourager la formulation d'un consensus entre les principaux
acteurs du monde du travail ainsi que leur participation
démocratique. Au Québec, le modèle de dialogue social met l'accent sur la
création d'espaces favorisant la concertation
bipartite et tripartite : syndicats, employeurs, gouvernement. Plus
spécifiquement, le Québec se démarque par ses institutions permanentes qui contribuent au dialogue social en permettant aux acteurs d'échanger sur
divers enjeux.
La
gouvernance de la CNESST reflète bien le modèle québécois de dialogue social.
Les administrateurs qui sont nommés par le gouvernement doivent être
choisis en parts égales à partir des listes fournies par les associations
syndicales et les associations d'employeurs les plus représentatives.
Au-delà
de leur rôle au conseil d'administration, les administrateurs de la CNESST sont
d'importants acteurs du dialogue
social dans d'autres organismes relatifs à l'encadrement des milieux de
travail. Cela s'explique par le fait qu'ils ont une légitimité vis-à-vis des milieux dont ils proviennent. Ils sont
nommés en raison du poste qu'ils occupent au sein de leurs associations en tant que hauts dirigeants.
Ils assurent une juste représentation de l'ensemble des acteurs du
marché du travail et une compréhension unique des enjeux.
Ainsi, la plupart des
administrateurs de la CNESST sont également membres du comité consultatif et de
la main-d'oeuvre, le CCTM, qui regroupe les
dirigeants des associations patronales et syndicales les plus
représentatives au Québec. Cette composition paritaire contribue à la mission
de ce comité, qui consiste à développer et maintenir la concertation entre les organisations d'employeurs et syndicales afin de
soutenir et d'orienter l'action gouvernementale en matière de travail et
de main-d'oeuvre.
La durée des mandats, autant au CCTM qu'à la
CNESST, assure une plus grande stabilité. De même, la participation des hauts dirigeants de ces associations contribue
au dialogue social et à la mission aussi à la Commission des partenaires
du marché du travail.
Chacune des
organisations représentées dans ces instances a mis en place des mécanismes de
consultation et de décision visant à préparer les prises de position qui seront
discutées et défendues dans ces instances. D'ailleurs, l'importance de cette juste représentativité est telle que la pratique
veut qu'un haut dirigeant quittant son poste au sein de son organisation demande aussitôt d'être relevé de ses
fonctions au sein de ces instances, n'ayant plus la légitimité requise
dans son travail de représentation.
Comme nous pouvons le
constater, le modèle québécois de concertation et de paritarisme permet aux
hauts dirigeants des associations
d'employeurs et syndicales qui ont une forte légitimité de se côtoyer dans des
organismes où ils ont l'occasion
d'échanger relativement aux enjeux, aux problématiques et de trouver des
solutions liées au capital humain, au monde du travail et au
développement économique.
L'interaction
régulière entre hauts dirigeants dans des organismes de paritarisme est importante.
Elle établit et préserve un climat de confiance entre les acteurs qui alimente
leur volonté de travailler ensemble. L'interaction permet également un échange
d'information qui favorise la compréhension des positions mutuelles. Pour que
cette interaction puisse générer de tels bénéfices, il est essentiel que les
administrateurs se côtoyant occupent des postes de direction dans des associations d'employeurs ou syndicales, ce qui
assure leur représentativité, mais également, si je peux me permettre, l'acceptabilité
sociale des consensus intervenus.
Or,
tout ceci, de notre point de vue, est mis en cause par l'imposition d'une
limite au renouvellement des mandats des administrateurs de la CNESST.
Si elle est adoptée, cette limite viendra augmenter le taux de rotation des
administrateurs dans un horizon relativement court, ce qui nuira au climat de
confiance, aux communications et à la compréhension
mutuelle qui nécessitent des rapports de longue durée. Cette problématique sera
d'autant plus grande que le renouvellement
fréquent de la composition des conseils d'administration pourrait se faire au
détriment de la représentativité et de la légitimité. En clair, le
risque est que, progressivement, les administrateurs nommés ne soient plus des
hauts dirigeants des principales
associations d'employeurs et syndicales. S'ajoutent à cela les arguments
précédents concernant évidemment les règles de gouvernance.
En
conclusion, pour les motifs énoncés, nous recommandons que la modification
proposée à l'article 144 de la Loi sur la SST, qui vise à limiter
le nombre de mandats, soit retirée du présent projet de loi.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci beaucoup, M. Forget. Je vous ai
même laissé dépasser de quelques secondes.
M. Forget
(Stéphane) : Désolé.
La Présidente (Mme Richard) : Pas grave. Merci pour votre exposé.
Mme la ministre, on va commencer les échanges, et la parole est à vous.
Mme Vien : Vous n'avez pas à vous excuser, pas du tout. S'il y a
quelque chose, on va donner du temps chez nous.
M. Forget,
merci d'être là. M. Gagnon également. Vous avez beaucoup parlé de dialogue
social. C'est quelque chose dont j'entends beaucoup parler aussi depuis
que je suis au ministère du Travail. Et vous faites vraiment une corrélation... D'abord, je dois dire qu'il y a un
groupe avant vous, ce matin, vous êtes sûrement au courant, le Conseil
du patronat du Québec, qui a exactement la
même position que vous. C'est essentiellement sur ce point-là qu'ils ont
insisté aussi au cours de leur présentation.
Mais vous
faites vraiment une corrélation très étroite entre le dialogue social puis les
hauts dirigeants, la présence des hauts dirigeants, c'est ce que je dois
comprendre?
• (16 heures) •
M. Forget
(Stéphane) : Oui, absolument.
Puis je peux en témoigner parce que, contrairement
peut-être à d'autres, ça ne fait pas
très longtemps que je siège sur ces instances-là, que ce soit au CCTM ou à la
CNESST, depuis maintenant un peu plus
d'une année à la CNESST puis un petit peu plus longtemps au CCTM. Et je dois
avouer que je constate, un, la capacité que nous avons d'échanger, de
dialoguer dans ces instances, premièrement. Et je fais le lien beaucoup entre les discussions au CCTM et le rôle qu'on joue
aussi à la CNESST. Et je dois avouer que je constate que cela est
possible aussi parce que ce sont les
dirigeants des organisations qui sont en place qui ont une légitimité, je
dirais, ou une capacité d'intervenir,
et d'interagir entre eux, puis d'être, parfois dans notre rôle d'administrateurs
au CCTM... de réfléchir et prendre des
positions en tant qu'administrateurs en sachant ou en ayant l'expérience de ce
que nous vivons dans nos organisations du
fait qu'on représente beaucoup de personnes, d'entreprises dans notre cas ou
des travailleurs dans d'autres cas. Mais je constate que, si ce n'était pas les hauts dirigeants qui étaient en
place, par moments, on devrait prendre plus de temps pour prendre des
décisions parce qu'on aurait une obligation...
Mme Vien : Aller
chercher des assentiments puis revenir.
M. Forget
(Stéphane) : Aller chercher,
d'être... ça. Et, deuxièmement, je peux imaginer une personne qui n'est
pas un haut dirigeant d'être dans le siège,
de se dire : Jusqu'où est ma légitimité, compte tenu que je ne suis pas le
plus haut dirigeant de l'organisation? Et ça, je pense qu'il y a un
enjeu là.
Évidemment, vous me direz que, quand on siège à
un conseil d'administration, on enlève notre chapeau de représentant de
l'organisation et de siéger à titre d'indépendants, et ça, c'est vrai. Cela
étant dit, la gouvernance de la CNESST,
c'est un cas particulier à cause du paritarisme. Mais je pense qu'on est là de
façon indépendante quand on siège au
conseil, mais, inévitablement, on a quand même une responsabilité d'être nommé
parce qu'on représente un groupe important d'un point de vue économique.
Mme Vien :
Qu'est-ce... Vous l'avez lu, là, la partie sur Charbonneau qui parle peut-être
de risques d'influence indue, etc.,
ces réflexions qui sont les siennes et pour en arriver justement à des
limitations de mandat. Pourquoi vous pensez que la commission
Charbonneau en est arrivée quand même à cette conclusion-là, de limitation de
mandat?
M. Forget
(Stéphane) : Bien, un,
évidemment, j'ai fait la même lecture que vous et je peux constater qu'elle
voyait un enjeu entre le fait de se
retrouver peut-être à la CCQ, d'être dans une certaine organisation puis d'être
à la fois à la CSST à l'époque. Donc,
je comprends, dans l'analyse de la commission Charbonneau, qu'elle a vu là un
problème qui, je pense, est, depuis
ce temps, et c'est ce qu'on affirme, réglé. Mais je pense que ce problème-là
peut se régler aisément parce qu'ultimement c'est le gouvernement qui
nomme autant à la CCQ qu'à la CNESST.
Cela dit, je
pense que, dans la réflexion de la commission Charbonneau, on a imaginé une
durée de six ans, mais, quand on
compare la décision de la commission, la recommandation de la commission
Charbonneau avec ce qu'on lit dans
les bonnes pratiques de gouvernance dans les sociétés autant publiques que
privées, on constate qu'une durée trop courte n'est pas au bénéfice de
l'organisation.
Donc, je pense qu'en partie on a voulu régler un
problème, c'est ce que je lis. De l'autre côté, je pense qu'on pourrait en créer un second si on ne permet pas
que les administrateurs puissent être là assez longtemps pour jouer le
rôle qu'on doit jouer comme administrateur
d'une organisation publique, le rôle de surveillance, le rôle conseil, le rôle
de donner des avis, le rôle d'essayer d'aider la direction à bien jouer
son rôle de gestionnaire. Donc, je pense qu'en réglant un problème on pourrait
en créer un deuxième en limitant le temps pour être membre d'un conseil
d'administration.
Mme Vien :
Une dernière question. Avez-vous l'impression que, si le rapport Charbonneau
était sorti ou avait eu lieu...
c'est-à-dire les travaux de Charbonneau avaient eu lieu après la fusion, par
exemple, des trois organisations qui forment aujourd'hui la CNESST, que
la lecture des commissaires aurait été différente?
M. Forget (Stéphane) : ...
Mme Vien :
...disait : Bien, on a mis en place des codes d'éthique, des codes de
déontologie, on s'est donné une gouvernance serrée. Est-ce que vous avez
l'impression que ça aurait différent?
M. Forget
(Stéphane) : Je ne peux pas
porter de jugement sur la preuve qui a été analysée par la commission Charbonneau, mais, chose certaine, je peux
témoigner, depuis que la nouvelle
CNESST est en place, que les règles de gouvernance sont importantes, même reconnues par le Vérificateur général. Je vois les codes d'éthique qui sont en place, le travail qui
se fait, la formation qui est donnée aux administrateurs. Alors, ça, je le
constate.
L'autre chose que je constate, c'est que, pour
avoir une pleine indépendance comme administrateur de la CNESST, moi, ça fait un an que je suis là, il y a encore
du travail à faire pour avoir une pleine indépendance parce que
l'expertise, la connaissance des enjeux, la
connaissance des dossiers, la capacité d'avoir le recul nécessaire, ça prend un
certain temps, et je pense que, si le
délai est trop court, on va pénaliser la direction de la CNESST d'un conseil
d'administration qui sera en mesure de bien jouer son rôle conseil et de
surveillance.
Mme Vien :
Merci beaucoup, M. Forget. Merci de vous être déplacé aujourd'hui,
M. Gagnon. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant du côté de l'opposition
officielle. M. le député de Beauharnois, vous avez la parole pour débuter les
échanges.
M. Leclair : Merci, Mme la
Présidente. Donc, M. Forget, messieurs, merci d'être là.
Bien entendu,
le projet de loi est plus large que votre mémoire, mais je comprends très bien
que vous parliez surtout des mandats,
de la durée des mandats à la CNESST. Tout comme la ministre le disait, le
groupe avant vous disait aussi que
peut-être on arrivait trop peu, trop tard avec ça, qu'on avait déjà réglé,
peut-être, une grande partie des problèmes. Puis je retiendrai peut-être une phrase du groupe avant vous puis je pense ça
résume très bien votre mémoire, c'est : Valorisons l'expérience. À force d'avoir du roulement, on va
finir par noyer le poisson ou bien le café va goûter l'eau, si on aime mieux.
Alors, je
crois que la ministre a déjà fait part qu'elle entend bien ce que les gens
disent, puis on aura sûrement des amendements
à apporter à ce sujet-là. Puis, ce matin, on demandait à l'autre groupe :
Si jamais on ne biffe pas totalement l'article,
est-ce qu'il y a un nombre d'années qu'on pourrait dire : Ça aurait une
logique d'attribuer une direction ou des mandats? On parlait ce matin, il y a des chiffres de sortis, 10, 12 ans.
Comment vous voyez ça, là, si on se rend... Pour vous, ce serait de
biffer ça, dire : On n'en parle plus, je pense que c'est réglé, on
comprend bien, mais, si jamais on...
Une voix : ...
M. Forget
(Stéphane) : Bien,
évidemment, la raison pour laquelle on dit qu'on devrait le biffer, c'est
compte tenu de la nature, de la façon que les gens sont nommés, choisis d'abord
par nos organisations, puis après ça, après consultation, nommés par le
gouvernement.
Cela étant dit,
je pense que, si vous aviez à trouver une solution de compromis, je pense que
la bonne... ce qu'on voit dans les
bonnes pratiques en gouvernance, on voit que ça peut tourner autour de 12 à 15
ans. On voit que la durée souvent des
mandats, le premier mandat est plus long et avec une capacité de
renouvellement. Donc, ce qu'on constate, ce qu'on voit, c'est que les bonnes règles de gouvernance appelleraient
probablement à un compromis qui serait autour de 12 à 15 ans. Ça serait probablement un compromis qui irait dans le sens
de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, ce qu'on voit aussi
dans le secteur privé. C'est le compromis que je vous dirais.
Cela étant dit, on ne l'a pas mentionné parce
qu'on pense que, par la nature du travail qu'on exerce et de la dynamique, ce
n'est peut-être pas pertinent d'en avoir, mais ce serait le compromis qu'on
suggérerait.
M. Leclair : Donc, vous
réitérez aussi le fait, tout comme le groupe précédent, là, qui axait beaucoup
sur la longitivité, de dire que, déjà, les
nouveaux codes d'éthique sont très bien structurés, donc beaucoup moins de
possibilités, là, de se faire avoir. Donc, vous dites que même les règles de
gouvernance, qui ont quand même été modifiées, elles aussi viennent pallier à
toutes ces problématiques-là que la commission, dans le temps, elle a mis sur
papier.
Ça fait qu'on
n'a pas... On ne pourrait pas se tourner vers les codes d'éthique ou les règles
de gouvernance pour dire : On
pourrait modifier ça sans toucher à l'article du tout puis qu'on aurait encore
une marge de manoeuvre là ou, dans ce que vous voyez, qui est déjà dans
les livres. Vous dites : Avec ça, il n'y a pas de craintes à avoir.
• (16 h 10) •
M. Forget
(Stéphane) : Bien, on a la
beauté d'être avec une organisation qui est nouvelle, alors qui a vu le
jour au 1er janvier 2016, donc qui s'est
donné aussi... a eu l'occasion de se donner des nouvelles règles de
gouvernance. Je pense que ça, c'est
la beauté de la chose. Et je peux vous dire, pour y être, qu'il y a un grand
souci de la haute direction de la
CNESST et du conseil d'administration d'avoir les meilleures pratiques en
matière de gouvernance, et donc, que ce soit le règlement intérieur, qui
est révisé constamment, que ce soient les codes dont vous venez de parler, que
ça soit la formation donnée aux
administrateurs en continu, il y a des comités stratégiques très importants à
la CNESST. Donc, ça, c'est vraiment
mis en place. C'est une nouvelle structure qui a à peine deux ans, mais qui...
on voit l'importance qu'on accorde à cela. Et je pense que ça devrait
transparaître dans la réflexion que vous faites présentement sur les durées de
mandats.
Et évidemment, je le réitère, la représentativité
est très importante dans ces dossiers-là, qui font appel aux principaux acteurs du monde du travail. Et, pour
nous, là, c'est fondamental aussi dans votre réflexion, la bonne gouvernance
présente puis la représentativité qui doit jouer un rôle dans le contexte du
paritarisme au Québec.
M. Leclair : Puis je suis obligé de vous forcer à aller jouer
dans une autre section du projet de loi. Soyez bien à l'aise si vous voulez commenter ou non, mais,
lorsqu'on parle d'intimidation, et tout ça, vous le voyez quand même,
là, vous siégez quand même sur deux grands
pans, là, du métier, est-ce que vous croyez que ça aussi, dans l'ensemble,
là, sans prendre un cas en particulier,
parce que, là, on regarde juste dans le côté structure, on a énormément évolué,
est-ce que vous croyez aussi, côté
intimidation, et tout ça, qu'on a quand même évolué au travers de... Que ça
soit à la CNESST, que ça soit sur la
construction, vous avez la chance de voir un peu puis côtoyer ces gens-là. On
le voit quand le feu est pris dans l'auberge. Et, quand on dit : Bien, il restera des
cas isolés, là, je pense qu'il n'y a pas un projet de loi qui va éviter
tout ça. Mais, dans l'ensemble de l'oeuvre, est-ce que tout a évolué dans le
monde de la construction, à vos yeux?
M. Forget
(Stéphane) : Bien, un, j'ai
un recul assez récent, cela dit, dans ce poste-là. Ce que je peux vous
dire, c'est, que ça soit à la CNESST, au
CCTM ou même, bon, à la CPMT, c'est peut-être moins le cas, mais CCTM ou à
la CNESST, je n'ai pas vu ou senti quelque
forme d'intimidation que ce soit. C'est plutôt... Ça a plutôt été
l'inverse : une occasion, dans
des moments difficiles, comme l'an passé, disons, au moment de la négociation
ou de la grève dans le secteur de la
construction, une occasion de se parler franchement, ce n'étaient pas les lieux
de décision en la matière, mais de se parler
franchement. Donc, plutôt que de l'intimidation, depuis que je suis là, depuis
un an, j'ai plutôt vu l'inverse, une occasion de se parler plutôt
franchement, je dirais.
M. Leclair : Parce qu'on a la chance, nous, d'avoir reçu, là,
les mémoires de plusieurs groupes, des gens qui vont être présents et ceux qui ne sont pas présents,
puis je sens... On dirait, je palpe ça, dans environ tous les créneaux du
projet de loi, qu'il y a eu une grosse
évolution dans les cinq, six, huit dernières années, avec différentes
structures, et tout, qu'on dirait qu'on est comme trois, quatre ans en
retard, là, dans notre affaire puis qu'on ne cible pas tout à fait le bobo.
Bien, je vous
remercie. Je n'ai pas d'autre question. Je ne veux pas vous mettre en boîte
avec tout ça non plus. Puis je pense que ça a le mérite d'être clair.
Alors, merci de votre passage.
M. Forget (Stéphane) : Je me
permettrais peut-être, si vous me permettez, d'ajouter deux choses.
M. Leclair : Oui.
M. Forget (Stéphane) :
Évidemment, la commission Charbonneau réfère à une période qui est autre, mais,
cela dit, je veux aussi vous redire comment
on est enviés, dans le reste du Canada, d'avoir une structure de dialogue
social et paritariste aussi bien établie au
Québec. On fait l'envie de d'autres commissions de santé et sécurité dans le
reste du Canada, puis je pense que
c'est important d'avoir ça à l'esprit aussi. Évidemment, ça n'influence pas sur
votre responsabilité en matière de gouvernance, mais je pense qu'il faut
malgré tout avoir ça à l'esprit.
M. Leclair : Oui. Je pense que c'est un très bon point de le
préciser. On ne l'entend pas assez souvent qu'on est capables d'avoir des comités paritaires, même si
on n'est pas toujours au même diapason, de réussir à trouver 90 %
ou 85 % des ententes où est-ce qu'il en reste 10 % ou 15 %, puis
il y aura toujours des petits grafignages, alors il faut effectivement le crier haut et fort. Je pense que
notre côté paritaire, tous les comités qu'on a faits, je pense qu'on voit
une grosse évolution. Alors, merci à vous.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, M. le député. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe
d'opposition. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la parole.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. M. Forget, M. Gagnon, je comprends bien le
message, là, au niveau des mandats
pour le conseil d'administration, mais, lorsque je lis l'article 24, qui vient
modifier l'article 144, on vient dire qu'on limite à deux mandats.
Lorsque je prends la loi actuelle, on dit que c'est des mandats de deux ans, et
c'est le gouvernement qui détermine à partir
d'une liste. Est-ce que ça veut dire qu'on modifie... Parce que le gouvernement,
pour une raison quelconque, là, s'il décide qu'un administrateur ne fait pas
bien son travail, même s'il est sur la liste, il pourrait dire : Je ne te
renouvelle pas. C'est ma lecture.
Donc, pourquoi on doit limiter des mandats si,
actuellement, le gouvernement a le pouvoir de le faire, dire à quelqu'un : Toi, non, on ne veut pas que tu
sois renouvelé? Parce que, normalement, on n'écrit pas dans la loi
quelque chose si ce n'est pas nécessaire. En
tout cas, moi, c'est ma lecture des choses, là. On essaie de simplifier le plus
possible. Est-ce que vous faites la même lecture que moi?
M. Forget
(Stéphane) : J'ajouterais à
ce que vous dites qu'aussi on demande à ce qu'on consulte les associations
représentatives pour suggérer des gens qui
sont ultimement nommés par le gouvernement. Donc, je pense
que ça, c'est une étape importante. Et par la suite, vous avez raison,
c'est le gouvernement, ultimement, qui va nommer les administrateurs sur recommandation des associations ou sur suggestion,
je dirais, des associations représentatives. Donc, ultimement, le
gouvernement a effectivement le pouvoir de le faire. La CNESST, par définition,
n'est pas une société d'État, donc a un rôle
différent, et je pense qu'on doit, un, s'assurer que ce soient les bonnes
personnes représentatives qui sont en place et, deuxièmement, je répète
ce que j'ai dit tantôt : Si on veut que l'administrateur joue son rôle d'administrateur de société, il doit avoir
l'expertise nécessaire, il doit avoir l'expérience nécessaire. Et ces deux éléments-là prennent du temps. Et, quand on a atteint les
deux, ça fait en sorte que l'administrateur est plus crédible dans son
rôle, autant auprès des hauts dirigeants de la CNESST qu'auprès de la société
civile qu'il représente.
Donc,
expérience et expertise égalent crédibilité, et, pour nous, c'est important, et
cela demande du temps. Et, une fois
qu'on a acquis cela, bien, si on veut s'assurer que le dialogue social
fonctionne bien, bien, il faut que ce soient les personnes
représentatives qui soient assises dans les sièges, de notre point de vue.
M. Picard :
Merci. C'est ce que disait ce matin M. Dorval aussi, là, le Conseil du
patronat. Mais, avec la lecture que
j'en fais, que je fais puis que vous confirmez, la commissaire Charbonneau a
fait la même lecture. Et donc pourquoi elle
propose de limiter les mandats? Est-ce que c'est parce que, sans viser aucun
gouvernement en particulier, le gouvernement
n'a pas utilisé les outils qu'il y avait en place s'il voulait que quelqu'un ne
soit pas renouvelé? C'est une question
que je pose, tout simplement, parce qu'elle aussi, elle a pris connaissance
puis elle dit... elle a détecté quand même un problème parce qu'elle
dit : Il faudrait limiter.
M. Forget
(Stéphane) : Mais, pour
reprendre les propos de Mme la ministre plus tôt, je pense que... Est-ce
que la commissaire Charbonneau aurait eu la même réflexion avec la gouvernance
actuelle? Je ne sais pas, là. Je ne peux pas
répondre à sa place. Ce que je peux vous dire, par ailleurs, c'est que la
situation qu'elle décrit dans son rapport est une situation qui, aujourd'hui, n'existe plus, et la
deuxième partie de sa recommandation sur la durée des mandats ne vient pas régler le premier élément. C'est, de mon point
de vue, de notre point de vue, deux choses distinctes qui ont été
réglées depuis le rapport de la commission Charbonneau.
Alors, pour
nous, c'est deux éléments différents. Ce que je peux vous dire, comme je le
mentionnais tantôt, c'est que, de notre point de vue, aujourd'hui, la
CNESST, puis je ne dis pas qu'elle ne l'avait pas avant, là, mais je peux
constater aujourd'hui qu'elle a une gouvernance qui nous apparaît, dans le
contexte du paritarisme, exemplaire.
M. Picard : Bon, merci.
Merci, Mme la Présidente. J'ai terminé.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, M. le député. MM. Forget et Gagnon, merci pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Et je suspends les travaux de la commission pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 19)
(Reprise à 16 h 20)
La Présidente (Mme Richard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux.
Bonjour, Mme Lemieux. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Mme Lemieux, je vais vous demander de vous présenter, de
présenter également les personnes qui vous accompagnent, et vous allez disposer
d'un temps de parole de 10 minutes, ensuite suivront les échanges.
Commission de la
construction du Québec (CCQ)
Mme Lemieux
(Diane) : Merci, Mme la Présidente. Alors, à ma droite, Me François Charette, secrétaire général de la Commission de la construction du Québec
et vice-président des affaires juridiques. À ma gauche,
Jean-François Pelletier, directeur principal des opérations.
Alors, en
guise d'introduction, les opérations à la Commission de la construction
du Québec, c'est 400, presque, personnes qui sont dédiées à ces activités. Nous faisons,
bon an, mal an, 35 000, 40 000... non, même 40 000, 45 000
visites de chantier, bon an, mal an,
2 000 vérifications aux livres, donc des interventions plus soutenues, pour pouvoir débusquer les délinquants. Et, annuellement, nous exerçons à peu près
9 000 recours pénaux. Et, en primeur, pour 2017, nous avons réclamé, en réclamations civiles, plus de 20 millions de dollars. Alors, ça, c'est la section des opérations qui est importante
à la CCQ, mais vous savez qu'on exerce aussi d'autres fonctions. Mais je crois
qu'on comprend bien que le projet de loi n° 152 concerne essentiellement
les moyens d'enquête, de vérification et d'inspection de la commission.
La deuxième
chose que je ferais comme petite remarque préliminaire, vous dire qu'exceptionnellement, étant donné que ce projet de loi a quand même beaucoup d'échos
dans l'industrie, puisqu'il concerne les moyens qui sont dans les dispositions de la commission, nous avons initié
des rencontres de travail avec les associations patronales et syndicales
non pas pour orchestrer le discours, mais
pour que, chacun et chacune, on comprenne bien et on s'entende ou, enfin,
on comprenne bien la portée de cette loi. Ça a pu permettre de saisir des
préoccupations, ce qui va expliquer, d'ailleurs, l'essentiel de mon
intervention.
Alors, en
fait, le plus important — parce que vous avez dû prendre, j'imagine, connaissance de notre
mémoire — pour
moi... et je le fais, d'autant plus qu'on
est bien conscients que plusieurs représentants d'associations patronales et
syndicales qui sont présents aujourd'hui, qui vont participer, qui vont suivre
ces travaux et la suite qui sera donnée au projet de loi n° 152... donc, je juge encore plus important, à ce
moment-là... c'est de préciser les intentions de la Commission de la
construction du Québec. Alors, on le sait, le projet de loi n° 152,
essentiellement, bien qu'il y ait d'autres questions, comme ce qui a été abordé avec l'interlocuteur précédent,
essentiellement, ce projet de loi est une suite de la commission Charbonneau, et notamment quant aux moyens
concrets pour permettre de mieux s'assurer de notre travail pour faire
en sorte que les chantiers soient conformes et qu'il n'y ait pas de délinquant
sur le jeu. Alors, c'est l'essentiel du projet de loi n° 152.
Alors, bien entendu,
nous avons eu des échanges avec le ministère, le secrétariat du ministère.
C'est un peu normal. Je pense qu'évidemment
ils portaient la rédaction finale du projet de loi, ils avaient des questions
pratiques et concrètes. Donc, il y a
eu des échanges techniques. Mais, au-delà de ça, notre intention, en soutenant
un certain nombre de dispositions qui
sont présentées dans ce projet de loi, ce n'est pas de s'arroger des pouvoirs,
ce n'est pas d'obtenir des pouvoirs abusifs en dehors des meilleures
pratiques, en dehors du droit, en dehors de la jurisprudence, ce n'est pas de réclamer des moyens qui ne soient pas reconnus,
qui ne soient pas éprouvés et qu'on ne retrouverait pas, par exemple, dans des organismes
réglementaires comme nous. Notre intention, c'est d'être collés aux meilleures
pratiques, au droit, à la jurisprudence, c'est une intention de
rattrapage. J'entendais la discussion précédente et je crois qu'il y a
plusieurs recommandations de la commission Charbonneau qui ont pour objet de
rattraper des moyens qui n'étaient pas à la disposition
de la CCQ et qu'on retrouve dans des organismes qui ont des objectifs
similaires aux nôtres, des organismes dits réglementaires.
Notre
intention, c'est d'avoir les moyens pour faire ce qu'on doit faire,
c'est-à-dire protéger les travailleurs contre des situations abusives, protéger les travailleurs qui font toutes les
démarches pour être en ordre, avoir, par exemple, leur certificat de compétence par rapport à ceux qui
travaillent et qui n'ont pas leur certificat de compétence. Notre
intention, c'est de protéger les employeurs
qui se conforment, qui suivent les règles du jeu, et de sortir du jeu les
employeurs qui ne se conforment pas,
qui font un mal terrible à l'industrie
en plus de générer et de créer de la concurrence déloyale envers ceux
qui se conforment.
Alors, c'est ça, l'intention des propositions que nous avons soutenues auprès du
ministère du Travail, propositions, évidemment,
qui émergeaient de la commission Charbonneau. On n'en a pas inventé, là, on est
restés dans le sillon de ce que la commission Charbonneau a recommandé.
À titre
d'illustration, il y a certaines dispositions, dans le projet de loi, qui
concernent toute la question technologique.
Il y a une époque où, lorsqu'on avait besoin d'information d'un employeur, des
relevés de paie, les heures travaillées,
peu importe, tout ça était sur support papier. Maintenant, la technologie
supporte ces informations-là. Dans l'état actuel du droit, nous sommes
tout à fait justifiés de recueillir ces informations alors qu'elles sont sur
support informatique, mais je pense que c'est important que les parties le
sachent que nous avons le droit de le faire. Et cette pratique, elle n'est ni abusive ni en dehors des règles. Elle est tout à
fait conforme à ce qu'on peut observer, par exemple, dans des organismes
comme Régie du bâtiment ou Revenu Québec.
Autre
exemple, de créer une obligation de... une exigence de conserver des documents
et un délai de conservation, il n'y a
rien d'exceptionnel. D'y accoler une infraction, c'est ce que fait le projet de
loi n° 152, évidemment, ça nous permet d'avoir beaucoup plus de
mordant lorsqu'on rappellera aux employeurs qu'ils doivent conserver des
documents, il n'y a rien là d'abusif, et
que, s'ils ne le font pas, il y aura donc des conséquences. Ça nous donne pas
mal plus de moyens pour intervenir.
Alors,
je tenais à rappeler ces intentions-là. Je sais qu'elles seront transcrites. On
pourra m'opposer les éléments que j'aurai
exprimés aujourd'hui. Je pense que c'est important parce qu'un des éléments qui
est ressorti des discussions lors des
rencontres de travail informelles que nous avons organisées pour étudier le
projet de loi n° 152, évidemment, certains pouvaient s'en inquiéter. Alors, c'est le message que je porte comme
présidente de cette organisation-là, que je porte auprès du personnel.
C'est le message qui est porté aussi par mes collaborateurs et c'est le message
aussi que je porte auprès des parties prenantes de l'industrie.
Ceci
étant dit, je vais limiter mon intervention à cette question, nous permettant
peut-être d'aborder un plus grand nombre de sujets plus pratiques que
soulève le projet de loi n° 152.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, Mme Lemieux. Nous
allons débuter les échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Vien :
Bonjour, Mme Lemieux, bonjour, messieurs. Bienvenue cet après-midi. Il y
en a qui trouvent qu'il va y avoir trop de
pouvoir à la CCQ, on va dire les affaires telles qu'elles sont, là, qu'on ouvre
trop grand, on ouvre trop large, hein, il va y avoir des flous.
Qu'est-ce que vous leur répondez aujourd'hui?
Mme Lemieux
(Diane) : Bien, je leur réponds que...
Mme Vien :
Peut-être votre réponse, oui, mais peut-être de nous illustrer aussi,
peut-être, dans votre quotidienneté qu'est-ce qui est compliqué,
qu'est-ce qui est difficile, les cas de figure que vos gens rencontrent, par
exemple.
Mme Lemieux (Diane) : Alors, Mme la ministre, je vous salue puis je me
rends compte que je n'ai pas bien salué l'ensemble des députés tout à
l'heure, j'en suis désolée. Je ne voulais pas vous faire perdre de temps.
Mme Vien :
Cassez-vous pas la tête avec ça.
Mme Lemieux
(Diane) : Je m'excuse...
Mme Vien :
Non, non. On l'a noté.
Mme Lemieux (Diane) : D'autant plus que je suis contente, souvent, de
retrouver des anciens collègues. C'est toujours un plaisir d'être ici.
Écoutez,
je peux comprendre que des gens disent : La CCQ a trop de pouvoir. Mais,
très honnêtement, quand on examine
les pouvoirs, nous avons des pouvoirs importants, mais nous avons aussi un
mandat qui est important. Et nous avons
des gens qui comptent sur nous, des travailleurs qui comptent sur... Les
travailleurs, là, ils ne peuvent pas appeler ailleurs qu'à la CCQ s'ils veulent faire valoir leurs droits.
Évidemment, les associations syndicales ont un rôle à jouer, mais, quand arrive l'exercice concret de droit, il
n'y a que la CCQ. Puis les employeurs qui se conforment puis qui voient
à côté un d'entre eux qui a soumissionné
plus bas sachant qu'il ne respecterait pas les règles du jeu, se permet donc
d'avoir une soumission plus basse, ils comptent sur nous.
Alors,
quand j'examine les pouvoirs que nous avons, nous avons des pouvoirs qui
s'apparentent à des pouvoirs de
commission d'enquête. C'est des pouvoirs qu'on retrouve dans des organismes
comme les nôtres, Revenu Québec, Régie du bâtiment, les organismes de
fonds, etc., ce n'est pas exceptionnel. Et les ajustements que propose le
projet de loi n° 52, qui sont une
conséquence de la lecture de la commission Charbonneau, sont beaucoup de
l'ordre du rattrapage. Les
dispositions, je n'ai pas l'article en tête, qui concernent les technologies
dont je vous parlais tout à l'heure, on n'est pas dans du droit nouveau, là. C'est reconnu, mais
c'est important que ça soit écrit dans notre loi pour que, lorsqu'on se
présente devant un employeur puis qu'on
dit : Bien là, on veut vos relevés de paie, là, s'ils sont dans votre
ordinateur, on veut les voir... Non,
non, non, vous n'avez pas le droit. Non, non. Il faut que ça soit clair, là. Il
faut que cette information-là soit disponible
pour qu'on puisse exercer nos pouvoirs de vérification et d'enquête
correctement et atterrir là où on doit atterrir, s'il y a besoin d'avoir
des recours et de sanctionner les comportements.
Alors,
peut-être que je laisserais la parole quelques minutes à M. Pelletier pour
vous illustrer un peu la complexité de ce à quoi on peut faire face.
Alors, M. Pelletier?
• (16 h 30) •
M. Pelletier (Jean-François) :
Merci.
Mme Lemieux (Diane) : Si vous
me... Vous le permettez?
La Présidente (Mme Richard) :
...c'est moi quand même qui dois lui donner la parole.
Mme Lemieux (Diane) : Oui.
La Présidente (Mme Richard) :
Allez-y, M. Pelletier.
M. Pelletier
(Jean-François) : Merci. Enfin, effectivement, on a déjà des pouvoirs
qui sont bien ancrés dans la loi
actuelle. Ce qui change... Quand on des pouvoirs de demander des
renseignements, quand on a des gens qui collaborent, ça va bien, quand on a les documents, etc. C'est
sûr que les problématiques en matière de vérification et enquête
surgissent quand on a des gens qui ne
collaborent pas. Donc, les gens, quand on arrive à une place d'affaires, on a
des pouvoirs qui sont très bien
établis dans la loi, des documents à vérifier. Mais, si on se fait dire :
Il n'y a plus de document, il n'y a rien qu'il a gardé, on n'a aucune emprise pour même pénaliser ce comportement-là de
ne pas avoir gardé les documents qui sont pourtant requis. Et là c'est
là que nos pouvoirs deviennent importants de pouvoir exiger les documents qui
sont sur support informatique.
Ce qu'on voit
concrètement actuellement en chantier, avant, les feuilles de temps, c'était
simple, c'était compilé, c'était donné soit dans un calepin ou sur des
feuilles de temps, maintenant c'est souvent des messages textes qui sont envoyés à l'entreprise pour dire : J'ai fait
tant d'heures aujourd'hui, tel chantier. Il y a quelqu'un qui compile, encore
là, sur un système informatique.
Ça fait que,
comme Mme Lemieux l'amenait, il faut que ça soit clair, qu'on puisse le
faire. On le fait. On le fait et on a
la jurisprudence qui nous aide. Par contre, les règles du jeu doivent être
connues des différents intervenants. Ça fait que c'est des situations comme ça qu'on est confrontés où on s'est déjà
fait dire : Bien, les documents, je ne les ai pas. Moi, après une
semaine, je les détruis, alors qu'il y a des obligations pour d'autres lois,
là.
Mme Lemieux
(Diane) : Et, si je peux me
permettre, il y a... effectivement, M. Pelletier a raison de dire
qu'il y a des pouvoirs qu'on a déjà,
notamment parce qu'on est collés sur la jurisprudence. Mais le caractère de la
prévisibilité, que ce soit écrit noir sur blanc, ça aplanit souvent beaucoup
les difficultés.
Par ailleurs,
il y a des précisions que le projet de loi n° 152 apporte que nous n'avons
pas, notamment la question de la
prescription des recours. Actuellement, le recours, le délai est d'un an. Puis
je me permets de l'aborder de front parce que je sais qu'il y a des gens qui ont des préoccupations à ce sujet-là.
Je le redis : Ce n'est pas pour pouvoir en embrasser plus large,
puis ramasser plus de monde, puis se payer la traite. C'est parce que ça prend
du temps souvent. Les dossiers faciles, ils
se règlent. Mais, en général, on est dans des dossiers compliqués. Des plaintes
de salaire qui impliquent plusieurs...
sur plusieurs chantiers, plusieurs travailleurs, ça ne se fait pas en deux
temps, trois mouvements. Il nous faut des fois recueillir des témoignages, des preuves écrites, etc. Donc, si
le... Un an, ça semble long, mais pas tant que ça quand on a des dossiers complexes, d'où la
recommandation d'étendre, là, le délai de prescription à trois ans, ce qui est
un peu le standard qu'on retrouve
également dans les recours de la... pour des organismes qui ont des pouvoirs
similaires aux nôtres.
Mme Vien : Vous m'avez
devancée parce que je voulais vous amener là-dessus, là, sur la question de la
prescription, parce qu'on sait aussi que ça crée, chez certains groupes, un
inconfort. Puis on a peur, justement, que ça déborde, là, de la même façon, par
exemple, que de ne plus avoir à prouver l'intention avec le «susceptible de»
puis d'enlever le mot «sciemment», ça aussi, là, ça vient créer un certain
nombre de craintes.
Mme Lemieux (Diane) : Alors, si vous me permettez, j'aborderais
peut-être ces deux exemples-là. Mais on a eu des discussions avec les parties aussi. Moi, je pense... En tout cas, on
va voir qu'est-ce qu'ils vont vous dire au cours... puis ils seront libres, évidemment, de s'exprimer.
Je pense qu'on s'est mieux compris. Mais donc l'augmentation du délai de prescription d'un an à trois ans, c'est en lien
d'abord avec une recommandation de la commission Charbonneau. Donc, ce
n'est pas une invention de la CCQ. Les dossiers pénaux, comme je le disais, ils
prennent souvent plus de temps aux organismes
d'application en fonction des normes et du respect des délais identifiés dans
la jurisprudence. 12 mois, c'est très limitatif pour les dossiers de réclamation
civile. Souvent, les... tu sais, les travailleurs, ils vont tarder... Ça peut
être difficile, là, tu sais. Convaincre un
travailleur de formaliser une plainte de salaire alors qu'il veut être capable
de retrouver un emploi, peut-être
même avec ce même employeur, là, tu sais, ce n'est pas simple. Alors, le temps
de qualité, là, il est très important.
Dans
le cas du travail au noir, où, comme M. Pelletier le disait, la
collaboration n'est pas toujours au rendez-vous, alors là ça rend les choses... parce que ça arrive, des dossiers où les
gens collaborent, ils disent : Mon Dieu! Il y a quelque chose qui nous a échappé, puis on n'a aucun
problème. Mais souvent on fait face à
la collaboration... disons beaucoup de résistance, puis on peut comprendre si on
s'adresse à des gens qui ont des comportements... appelons-les délinquants.
Et puis, je le rappelle, sous réserve de
dernière vérification, ce délai de prescription n'est pas exceptionnel par rapport à ce qu'on peut voir ailleurs.
Sur
le «sciemment», puis ça peut-être que Me Charette pourrait... peut-être que Me
Charette pourrait compléter, alors, évidemment,
tous les mots, dans une loi, sont matière à nécessiter une preuve. Puis l'idée,
ce n'est pas de se soustraire à des
règles de preuves élémentaires. Mais, vous savez, on a vu des cas, et Me
Charette pourrait être plus encore précis que moi, mais tu sais, des cas où les contrevenants, ils se cachent
derrière leurs secrétaires puis leurs comptables, là. Alors, ça pose un certain nombre... un niveau de preuve
qui est plus difficile. Et la recommandation de retirer le mot «sciemment» a été aussi
renforcée, puis ça, probablement qu'on a des décrets sur ce sujet-là, par le
DPCP, le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Vous savez qu'on
travaille évidemment beaucoup avec eux parce que c'est eux qui exercent les recours en notre nom, au nom des
travailleurs, et il y a eu plusieurs expériences difficiles autour de ce
mot qui nous a fait échapper des dossiers.
Et c'est une recommandation aussi formelle du DPCP, cet élément-là. Je ne sais
pas si on peut ajouter quelque chose...
La Présidente
(Mme Richard) : ...Lemieux. M. Charette, est-ce que
vous voulez poursuivre?
Mme Lemieux
(Diane) : Est-ce que c'est clair, la réponse que j'ai apportée?
Mme Vien :
Merci. Oui, merci. En fait, j'ai retenu que vous avez dit qu'en temps normal
dans la majorité des cas ou, en tout
cas, dans plusieurs organisations, le délai de prescription est de trois ans.
J'avais retenu une information du ministère chez nous, de l'équipe
juridique, à qui j'avais posé d'ailleurs la question, qui me disait : En
général, c'est un an. Mais ici on vient
faire... on vient porter un oeil nouveau, si vous voulez, sur des nouvelles
façons de faire, compte tenu du
contexte, compte tenu de l'industrie, etc. Je voulais juste apporter cette
précision-là parce que, là, on ne dit pas la même... moi, je ne pensais pas la même chose que vous. Puis on me
confirme qu'effectivement en temps normal, c'est un an. Mais ici, compte tenu du contexte, on est à
trois ans. Puis ce n'est pas pour vous embêter, hein, c'est juste pour
que...
Mme Lemieux
(Diane) : Non, non, non, j'ai dit, moi-même : Sous réserve de vérification...
Mme Vien : Oui, c'est
ça, c'est juste pour que les choses
soient claires, qu'on soit bien transparent, tout le monde.
Mme Lemieux (Diane) : Mais c'est quand même une recommandation formelle de la commission
Charbonneau, qui a bien capté...
Mme Vien :
Oui, oui, oui, tout à fait. Pour le pénal.
Mme Lemieux
(Diane) : ...que nos enquêtes avaient des fois un degré de complexité.
Mme Vien : Oui, pour le
pénal, d'accord. Bien, moi, ça fait le tour, Mme Lemieux, merci.
Messieurs, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, M. le
député de Beauharnois, la
parole est à vous.
M. Leclair : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Lemieux, merci d'être là, les
gens qui vous accompagnent. Je vais
commencer par une question sur le temps, limitation des mandats, ça va être
assez simple, puis après ça je reviendrai sur bien, bien d'autres aspects, là. C'est ma seule question
sur les mandats. Au-delà qu'on a entendu les autres groupes, je pense que la ministre est en train de se
faire une tête là-dessus. Pourquoi que ça ne vous touche pas, à vous, mais tout
le monde en bas de vous, qui ont une limitation de mandats et du temps? Petite question
comme ça.
Mme Lemieux (Diane) : Bien, vous ne posez pas la question
à la bonne personne. Non, écoutez, moi, je vais vous dire, puis je le sais que, bien que, comme je le disais, le projet de loi n° 152 concerne beaucoup les moyens d'enquête
de la commission, il y a d'autres questions en périphérie, dont la question de
la gouvernance mandat.
Je
vais être honnête avec vous, M. le
député, je ne crois pas que, dans ma
position, je suis la meilleure pour me prononcer
sur cette question. Je pense que ça appartient... D'abord, le monde
associatif vont s'exprimer là-dessus. Je pense que ça appartient au législateur
d'avoir un regard fin sur cette question-là.
M. Leclair :
C'était juste une petite question comme ça.
Mme Lemieux (Diane) : Je me ne
sens pas dans une bonne position pour jaser de cela.
M. Leclair : De
toute façon, votre mémoire, il est
plus sur tous les autres aspects. Donc, je vais revenir sur les autres
aspects.
Mme Lemieux
(Diane) : Vous avez bien vu. Vous avez totalement noté qu'on n'a pas
une ligne à ce sujet.
• (16 h 40) •
M. Leclair : Je ne veux pas vous mettre en boîte, mais, moi, ça m'agaçait un peu.
J'ai dit : Je peux bien poser la question.
Mais je reviens...
Vous avez touché plusieurs aspects, là, bien entendu, puis, dans le projet de
loi, on parle beaucoup, là, d'intimidation, là. Je vous pose une question,
là, très, très simple : Est-ce que l'intimidation, elle a
la même évolution ou la même diminution que tous les autres
aspects dont on parlait tantôt? La commission
Charbonneau a été faite il
y a un certain temps, un paquet de
nouvelles règles a été mis en place. Alors, côté intimidation, combien de plaintes exactement vous avez eues, exemple dans les deux dernières années, par
rapport aux quatre dernières, là, autant syndicales que qui pourraient venir du côté de
l'entrepreneur? Bien, je n'ai pas besoin du chiffre exact, Mme Lemieux,
juste une image, là, pour voir est-ce que ça l'empire, est-ce que c'est
grave, c'est moins grave.
Mme Lemieux (Diane) : Alors, je n'ai pas les... malheureusement, puis
j'ai une bonne mémoire, mais je n'ai pas les données précises en tête, mais je vais les acheminer au secrétariat
de la commission, d'avoir une perspective de quelques années, O.K.? Ceci
étant dit, ce ne sera pas un grand nombre. Porter une plainte d'intimidation
dans le domaine de la construction, c'est
beaucoup d'enjeux pour les personnes. Vous comprenez qu'une bonne partie des
travailleurs n'ont pas le même employeur.
Ils travaillent... sur une année, ils peuvent travailler pour deux, trois,
trois, quatre, là. Puis là l'enjeu, c'est :
Ils vont-u être capables de retrouver un mandat ailleurs? Donc, de déposer une
plainte, il y a beaucoup d'enjeux personnels.
Donc, ce n'est pas des plaintes qui sont faciles à faire et ce n'est pas des
plaintes non plus qui sont faciles à documenter et à trouver les
éléments qu'il faut pour que ce soit relativement solide.
Ceci
étant dit, il y a un côté cyclique aussi. Lorsqu'évidemment on est dans des
moments clés, puis je ne crois pas que j'offusquerais les gens, mais il
y a des rendez-vous dans l'industrie. Par exemple, quand on est dans une
période de maraudage, quand on est dans une
période de négociation de convention collective, c'est un peu normal, ça le
dit, il y a comme une tension, une effervescence. Donc, c'est sûr qu'on
a plus de plaintes.
La Présidente (Mme Richard) : Mme Lemieux, je pense que M.
le député voulait vous poser une question, et, comme le temps est très
court, je vais vous demander d'être plus courte dans vos réponses.
Mme Lemieux
(Diane) : O.K.
M. Leclair :
C'était vraiment pour avoir une image. Mais, comme vous dites, il n'y en aura
pas beaucoup. Ce n'est pas le fait
qu'il n'y a pas d'intimidation qui se fait. C'est juste qu'avant qu'on se rende
à une plainte, comme vous expliquez, des fois, ça peut être très
complexe pour réussir à se rendre à une plainte.
Mme Lemieux (Diane) : Juste une dernière chose, une phrase, on a un
certain nombre d'études qu'on est en train de consolider. Il demeure tout de même, si on compare le milieu de
travail de la construction aux autres milieux de travail, plus de phénomènes d'intimidation documentés dans le
milieu de la construction si on compare au reste des milieux de travail.
M. Leclair : Exact. Mais, comme votre «core business», excusez l'anglicisme, est les
métiers de la construction, diriez-vous
que c'est 50-50 des plaintes que vous auriez d'intimidation face aux
travailleurs, face à l'employeur, ou, à l'employeur, vous dites : On veut regarder les livres, voir s'il y
a du travail au noir, qui est complètement un autre aspect qui ne va pas avec les plaintes, mais que, quelque
part, c'est indirectement relié, là? Si moi, je suis l'employeur puis je
dis à la personne : Je te paie tant
d'heures au noir, puis tu n'en parles pas, puis là la CCQ est après moi pour
avoir mes livres de paie, puis je ne
veux pas que ça paraisse. Puis, si tu dis non, bien, «you're out, Sunshine».
Est-ce que c'est 50-50, à peu près, d'intimidation non contrôlable ou
contrôlée, là? Parce que, si vous le contrôliez, il n'y en aurait plus, là.
Mme Lemieux
(Diane) : Je veux juste comprendre quel est le 50 et quel est l'autre
50.
M. Leclair : Bien, je parle, à votre vision globale, sans avoir les chiffres précis,
l'intimidation se fait-u autant l'employeur envers les travailleurs ou
le travailleur envers son employeur?
Mme Lemieux
(Diane) : Bien, dans les études qu'on voit, il y a une portion de
l'intimidation qui provient de l'employeur
et il y a une portion aussi qui provient de vis-à-vis. Les apprentis, par
exemple, vivent un certain nombre de difficultés par rapport aux
compagnons.
Une voix :
...
La Présidente
(Mme Richard) : Oui. Je suis désolée, mais à propos...
Mme Lemieux
(Diane) : C'est intéressant.
La Présidente (Mme Richard) :
...de nos travaux, là...
M. Leclair :
Mais, O.K., je passe dans un autre registre. On voit, là, dans le projet de
loi... on parle de problématiques parce que,
là, on dit... Les gens, les sonneurs d'alarme, là. Si on regarde les gens qui
se promènent sur les chantiers pour aller voir... je parle des
différents syndicats, là, ils font le tour des chantiers pour voir si la
sécurité est appliquée puis si tout va bien.
Eux en sont, des sonneurs d'alarme, là, puis on dit dans le projet de loi, là,
qu'on veut protéger ces gens-là, là,
que, si eux autres disent : Jos Bine, là, il est fou à temps plein,
là... Moi, je veux être protégé. Même si je fais partie d'un grand syndicat, je ne veux quand même pas me retrouver
sur le chômage pour les 20 prochaines années. Donc, si le projet de loi cherche à protéger ces gens-là, ça peut être
un représentant syndical comme un employé, puis le but, je pense qu'il est noble, de dire : Il faut
protéger ces gens-là s'ils nous sonnent l'alarme, est-ce que vous... puis là je
vois un peu plus loin qu'on dit : On va
vous donner plus de latitude pour avoir plus d'enquêteurs sur le terrain.
Est-ce que plus d'enquêteurs, pour
vous, veut dire : On n'a plus besoin des autres ou vous dites : Non,
non, il faut travailler de connivence? Il
faut que le syndicat, avec ses sonneurs d'alarme, continue, et nous, notre job,
à la CCQ... d'en mettre encore plus parce qu'on s'aperçoit qu'on en
échappe. Est-ce que c'est de même qu'on doit le lire?
Mme Lemieux
(Diane) : Bien d'abord, on a
une force d'inspection qui est
relativement stable, et moi, je ne
prévois pas qu'on... on n'ajoutera pas un inspecteur par chantier, là. Ça,
c'est sûr. On a une force d'inspection stable. Là où on doit faire des gains
comme industrie, puis je pense qu'il y a un bon travail qui est fait actuellement,
c'est que, notamment les gens qui sont les yeux et les oreilles puis, je pense,
notamment les représentants syndicaux, ils sont des sources d'information incroyables. Puis quelquefois, sur le moment, on
ne peut pas toujours agir, mais le fait qu'on ait l'information, puis là, deux mois plus tard, il y en a un autre qui s'ajoute au même dossier, ça nous permet d'enrichir
un dossier. Et ça, on renforce beaucoup
les liens avec les gens des opérations. On les invite beaucoup.
Puis c'est sûr qu'on a eu besoin,
dans les dernières années, de rétablir la confiance, mais je pense qu'on a les
conditions pour qu'elle soit là et je crois qu'on leur a donné assez
d'indices qu'à partir du moment où ils nous «feedaient», entre guillemets, si
on peut agir maintenant, on va le faire, mais des fois ce n'est pas possible.
Alors, les sources, les gens qui nous parlent, c'est extrêmement utile parce
qu'on additionne l'information. Et, à un moment donné, on a ce qu'il faut pour
pouvoir agir.
M. Leclair : Il me reste 30 secondes, Mme Lemieux. J'essaie
de vous embarquer dans un grand, grand, grand débat.
Mme Lemieux (Diane) : Oui, oui,
oui.
M. Leclair : J'ai des frissons
juste à voir le nouveau titre : «susceptible de provoquer». Vous voyez ça comment, vous, là, là? Vos yeux, là... Vous travaillez
ça à chaque jour. Le mot «susceptible de provoquer», vous ne trouvez pas
qu'on ouvre une boîte de Pandore puis que le plus susceptible des susceptibles,
ça n'ira pas trop bien?
Mme Lemieux
(Diane) : Alors, M. le Président, quand quelqu'un ferme une route qui est la seule route qui rend
accès à des villes où il y a des chantiers, il est susceptible de provoquer des
arrêts de travail et des ralentissements de chantier. C'est-u assez clair?
La Présidente (Mme Richard) :
Mme Lemieux, merci. Nous allons maintenant...
M. Leclair : ...
La
Présidente (Mme Richard) : C'est terminé, M. le... Votre temps est écoulé. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière,
la parole est à vous.
M. Picard : Merci. Non,
mais...
M. Leclair : J'ai manqué ma
shot...
La Présidente (Mme Richard) :
M. le député de Beauharnois, s'il vous plaît!
M. Picard : Merci. Merci, Mme la Présidente.
Mme Lemieux, je vais poursuivre parce que j'allais justement dans ce sens-là, là. À l'article 14, lorsqu'on remplace «dans le but de provoquer»
par «susceptible», là, vous, là, vous nous dites qu'on ferme le parc des
Laurentides, ça serait...
Mme Lemieux (Diane) : C'est
vous qui dites ça, pas moi.
M. Picard : Non, mais là vous avez parlé d'une route, je vais
dire une route, tout simplement, une grosse route, le parc des Laurentides, c'est susceptible de
provoquer des ralentissements de travail sur les chantiers de construction.
C'est ça que vous nous dites?
Mme Lemieux (Diane) : C'est ce que
je vous dis.
M. Picard : O.K. Est-ce que vous nous recommandez d'adopter
la loi comme ça ou peut-être trouver un mi-chemin pour que ce soit plus
clair?
Mme Lemieux
(Diane) : Moi, je considère que c'est clair, là.
M. Picard : C'est clair.
Oui, c'est clair.
Mme Lemieux (Diane) : C'est
très clair.
M. Picard : C'est très
clair, très clair.
Mme Lemieux
(Diane) : Parce que, là, actuellement, actuellement, le libellé, c'est : «Quiconque use
d'intimidation [...] de menace dans le but de provoquer...»
M. Picard : On dit «dans le but de provoquer». Ça, je comprends que le DPCP devait prouver qu'il y avait le but de provoquer. Il me semble que, là, le balancier
était dans un bout, puis là on est rendus à l'autre bout complètement.
J'essaie de trouver du gros bon sens, là, dans l'application, là. Mais je ne
vis pas votre quotidien, là, on s'entend.
Mme Lemieux
(Diane) : Non, non, non.
Puis il nous faut être capable... Vous savez, on est dans une
mouvance, là, depuis ces derniers mois, là,
de dénoncer des comportements inacceptables. Il faut trouver le bon
équilibre. Moi, je pense que ce
mot-là a passé le test. C'est des discussions aussi qu'on a eues avec le DPCP,
là, on n'invente pas du vocabulaire. Il faudra le prouver. C'est une recommandation
de la commission Charbonneau. On me dit la recommandation 18 de la commission
Charbonneau. Donc, on ne s'est pas mis à vouloir se faire plaisir. Je pense
que, deux, ça passe le message, puis, trois, il y a ce qu'on appelle
dans la vie les tribunaux. Ça fait que, si on abuse de nos affaires, on va se
faire ramener, hein? Il y a un «check and balance» qui se fera.
Mais ce
mot-là, ce n'est pas une invention. C'est la commission Charbonneau qui a
vu qu'il nous manquait un petit bout
pour attraper ces comportements-là qui font du tort et qui provoquent des
entraves, ralentissements, arrêt de travail. Et ça, c'est des concepts
qui sont bien campés dans la loi depuis longtemps.
Alors, voilà,
moi, je pense que c'est ce genre de situation là qu'il nous faut viser. Elles sont
exceptionnelles, mais, quand ça arrive, il faut être capable d'agir.
• (16 h 50) •
M. Picard : En tout
cas, qu'est-ce que je décode de vos
propos, selon les situations, l'application se ferait ou non, là, parce que ça peut être des citoyens qui
bloquent une rue, qui bloquent une route, puis que ça engendre quand même des conséquences sur
les chantiers de construction. Ce n'est pas ces gens-là que vous allez emmener
en cour, là, je ne pense pas.
Mme Lemieux
(Diane) : Non, parce que,
nous, il faut qu'il y ait un lien quand même avec... on parle de
quelqu'un qui use d'intimidation, de menaces susceptibles de provoquer une
entrave.
L'autre
affaire, c'est que, nous-mêmes, devant des cas comme ça, il faut documenter
puis il faut passer le test du DPCP,
là. On ne part pas comme ça, là. Le DPCP, il se dit : Moi, j'ai-tu ce
qu'il faut pour y aller, là? Il y a comme un... Mais, pour moi, là, il y a un outil, il y a une subtilité, qui est un
outil supplémentaire qu'on ne va pas utiliser... ce ne sont pas les
dispositions les plus fréquentes. Mais, quand on en a besoin, c'est dommage,
là, de ne pas pouvoir aller au bout de cette affaire-là.
Donc, il y a le test du DPCP puis il y a le test
des tribunaux. Puis je pense qu'on passe aussi un message à l'industrie. Écoutez, on passe des messages dans
tous les secteurs d'activité au Québec, là : le milieu culturel...
Regarde, il faut aussi, comme industrie, on se dise : On se donne une
discipline. On n'est pas exempt, là, dans cette industrie-là.
M. Picard : Dernier
point, Mme la Présidente. Au niveau de la — je vais prendre vos
termes — sévérité
des sanctions contre les entreprises et les
travailleurs, il faudrait que ce soit un équilibre, donc les mêmes montants.
C'est-ce que je comprends?
Mme Lemieux
(Diane) : Oui. En général,
oui. Je ne suis pas partisane de sanctions financières trop lourdes
parce que, sinon, on est embourbés dans les tribunaux, mais il faut que ça soit
significatif.
M. Picard : ...pour les
deux. O.K. C'est bon. Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Lemieux.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme Lemieux, MM. Charette et Pelletier.
Et on va suspendre quelques instants pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 52)
(Reprise à 16 h 54)
La Présidente (Mme Richard) :
S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter nos travaux.
Donc, bonjour. Nous... À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci! Nous entendons maintenant l'Association des professionnels de la... non, c'est l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec. Désolée. Bonjour, M. Robert,
M. Bertrand. Bienvenue
à l'Assemblée nationale. Je vais quand même... je pense que c'est
M. Robert qui allait débuter. Je vais quand même vous demander de
présenter...
Une voix :
...
La Présidente
(Mme Richard) : Oh! désolée. On vient de m'indiquer qu'il
y a un changement. Oui, Mme la secrétaire?
La Secrétaire :
M. Beauchamp, qui est à gauche.
La Présidente
(Mme Richard) : M. Beauchamp, qui est à gauche.
M. Beauchamp, bienvenue à l'Assemblée nationale.
Donc, je vais vous laisser quand même faire votre présentation. Vous avez un
maximum de temps de 10 minutes. Je
dois juste vous prévenir qu'on a quand même des travaux, nous, au salon bleu,
qui se poursuivent. C'est possible que vous
entendiez les cloches. Donc, on devra interrompre les travaux de la commission
pour se rendre voter au salon bleu. La parole est à vous.
Association
des entrepreneurs en construction du Québec (AECQ)
M. Beauchamp
(Denis) : Excellent! Alors, je me présente. Denis Beauchamp, je suis
entrepreneur en plomberie dans la
région de Montréal. Je suis administrateur et membre du comité exécutif de
l'AECQ. Le mandant de l'AECQ, en fait,
là... bien, en fait, elle regroupe tous les employeurs assujettis à la loi
R-20. Elle a comme mandat la négociation des clauses communes et le
mandat de coordination patronale dans les dossiers d'intérêt général.
Donc, sur ce, je
passerais la parole à M. Dominic Robert, notre directeur général.
La Présidente
(Mme Richard) : M. Robert.
M. Robert
(Dominic) : Mme la ministre, membres de la commission, merci de nous
entendre sur le projet de loi n° 152, en fait, qui est un projet de loi
qui, effectivement, donne suite aux recommandations de la commission
Charbonneau, oui, mais on y voit, nous, aussi et surtout l'octroi de pouvoirs
supplémentaires à la Commission de la construction
du Québec. Et ce qu'on anticipe, en fait, c'est que l'octroi de ces pouvoirs
supplémentaires là va permettre la mise en oeuvre et continuer, dans le
fond, l'implantation de la nouvelle stratégie de conformité de la Commission de
la construction du Québec, qui est basée sur la gestion du renseignement. Et on
partage — je
vous le dis tout de suite — l'objectif de conformité de la Commission de
la construction du Québec, on partage ces orientations-là, mais on pense
que ça ne doit pas se faire au détriment du respect des droits fondamentaux.
En
fait, on va commenter uniquement les dispositions du projet de loi qui touchent
la loi R-20, les relations de travail dans l'industrie de la
construction, en conformité avec notre mandat. On suit l'ordre chronologique
dans la présentation du projet de loi, vous
avez lu le mémoire. Donc, il y a deux modifications qui touchent directement
l'AECQ au projet de loi : l'article 7 du projet de loi et l'article 10 du
projet de loi.
L'article
7 prévoit que les statuts et règlements de l'AECQ devront maintenant contenir
les éléments qui sont prévus à la
loi, des éléments obligatoires, donc, par exemple le mode de convocation des
assemblées, ainsi de suite. On a trouvé cet ajout curieusement inutile, compte tenu que le règlement de l'AECQ
contient déjà... et vous allez retrouver dans notre mémoire le règlement de l'AECQ à la page 15, le
règlement de l'AECQ, qui a été adopté en vertu de la loi, qui incorpore
l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Donc, au règlement
de l'AECQ... Et on vous a mis dans le
mémoire, dans le fond, la correspondance entre les articles du règlement actuel
de l'AECQ et les articles de la loi R-20. Et ce sera à vous d'évaluer si, dans le fond, ça rencontre les exigences.
Comme, par exemple, le mode de convocation des assemblées, le droit des employeurs de participer aux assemblées, ainsi
de suite, c'est déjà prévu au règlement de l'AECQ parce que, bon, on est
encadrés, notre gouvernance est encadrée par un règlement.
Pour ce qui est de
l'article 10 du projet de loi, dans le fond, encore là, il y a beaucoup
d'informations qui sont contenues dans le règlement de l'AECQ, notamment notre
statut juridique. On est incorporés, je vous l'ai dit tout à l'heure, en vertu
d'une loi. Pour l'essentiel, le projet de loi va nous obliger maintenant à,
dans le fond, déclarer à la Commission de la
construction du Québec — j'imagine que ce sera fait via un formulaire — qu'aucun de nos dirigeants n'a été déclaré coupable d'une infraction qui le
rendrait inhabile à occuper sa fonction. On n'a aucun problème avec ça,
aucune objection spécifique à formuler à cet égard-là.
Cependant,
on nous oblige aussi, parce qu'on nous rend... Dans le fond, on nous impose ce
qui existe déjà pour d'autres
associations, de transmettre à la Commission de la construction nos statuts et
règlements. Nos statuts et règlements sont
déjà sur notre site Internet. Ils sont en pleine transparence. Ils sont
disponibles pour tout le monde. Donc, on pourra bien les envoyer à la
Commission de la construction aussi, ce n'est pas un problème.
La limitation de la
durée des mandats des administrateurs de la CCQ, il y a beaucoup de gens qui
vous en ont déjà parlé. Nous ne sommes...
Moi, je ne suis pas un expert en gouvernance des organisations, mais, d'entrée
de jeu, je pense qu'effectivement il
y a peut-être la question de l'expertise qui est à regarder sérieusement. Par
ailleurs, comme je vous dis, n'étant
pas un expert moi-même, on s'est borné, dans le mémoire, à recommander aux
autorités compétentes de requérir
peut-être l'expertise, là. Je sais que l'IGOPP est une... Je ne veux pas faire
la publicité de l'IGOPP, mais c'est le seul
que je connais. Donc, il y a des gens qui en font une spécialité, de la
gouvernance des organisations. J'ai entendu tantôt les commentaires de la chambre de commerce, qui étaient, dans le
fond, aussi très pertinents. Il y avait beaucoup de doctrines dans ça.
Donc, je me bornerai à ça.
Maintenant, les ajouts aux
pouvoirs de la Commission de la construction, vous avez vu que l'essentiel de
nos commentaires portait là-dessus. Je pense
que l'exercice que vous devez faire, c'est... Bon, en fait, quel est
l'équilibre qu'on doit rechercher
entre la recherche de la vérité et, dans le fond... parce que c'est ce que la
CCQ cherche, on vise à corriger ou à,
dans le fond, identifier des situations de non-conformité, et donc l'équilibre
qu'il doit y avoir entre la recherche de la vérité et les droits fondamentaux parce que, dans le fond, ici, c'est de
ça qu'on parle, on parle de perquisition, on parle de saisie et on parle de fouille. Donc, pour trouver
l'équilibre, moi, dans le fond, ce que je pense, c'est : il faut bien
comprendre le modèle opérationnel de la CCQ.
Puis le modèle qu'ils sont en train d'implanter, encore là, je vous le dis, on
est d'accord avec ce modèle-là, on a endossé les orientations de la
commission, mais, quand même, je pense qu'il y aura lieu de peut-être mieux
baliser les pouvoirs.
• (17 heures) •
Bon, quand on regarde le projet de loi, dans le
fond, on parle des nouveaux pouvoirs à la commission. Bien, quel est le fil conducteur, là? On parle des
pouvoirs... Je pense que le fil conducteur, c'est le renseignement, hein?
On parle des renseignements qui sont
contenus dans des systèmes informatiques, dans des appareils électroniques, ça
peut prendre la forme de photographie,
ça peut prendre la forme de vidéo. Il y a aussi, dans le projet de loi, un
nouveau chapitre, qui est le chapitre
XIII.2, qui est le chapitre sur la protection des lanceurs d'alerte, qui va,
dans le fond, faciliter la communication de renseignements à la
Commission de la construction du Québec en accordant une immunité aux personnes
qui vont communiquer des renseignements. Et il ne faut pas oublier non plus,
quand on regarde le portrait plus large, dans le fond, les sources de renseignements dont disposera la Commission de la
construction, bien, c'est l'obligation faite aux organismes publics et
municipaux de divulguer ou, dans le fond, d'informer la CCQ lorsqu'il y a... ou
rapporter à la CCQ lorsqu'il y a des situations d'intimidation, violence ou menace.
Bon, dans le
fond, la question qu'on se pose, c'est : Mais toute cette information-là à
la CCQ, ça va servir à quoi? Alors,
il faut comprendre qu'en ce moment la CCQ, dans sa vision des choses ou dans
son système opérationnel, il y a deux volets. Il y a un volet qui est
sur... dans le fond, axé sur le type de contrevenant, hein? Donc, on va essayer
de sortir du marché le contrevenant qui est
un contrevenant chronique, c'est correct, on n'a aucun problème avec ça, et
on va essayer évidemment de comprendre les
stratagèmes de contournement de la loi, tout ça basé sur un système de
gestion du renseignement. Et comment elle le
présente? Bien, vous avez vu, au mémoire, on donne une citation qu'on n'a pas
prise dans le ciel, et c'est une citation
qui est dans les rapports de gestion, c'est sur le site de la commission :
«L'objectif consiste à tirer pleinement profit de l'information des
différents systèmes en place [...] établir les corrélations pour identifier les
contrevenants chroniques, [...]donner une meilleure compréhension des
stratagèmes.»
Il faut
comprendre aussi que la CCQ dispose déjà de pouvoirs énormes, en termes
d'inspection et de vérification et que
la CCQ dispose aussi des pouvoirs qui sont prévus, les pouvoirs des commissaires
qui sont prévus à la Loi sur les commissions d'enquête.
Donc, la question qu'on doit se poser, et je
pense que c'est une question légitime : Ces nouveaux pouvoirs là, est-ce qu'ils sont vraiment tels qu'on le présente
dans le projet de loi? On parle, dans les notes explicatives, de
nouveaux pouvoirs d'inspection. Est-ce que c'est vraiment des nouveaux
pouvoirs... on va bonifier les pouvoirs d'inspection ou est-ce que, plutôt, on
doit les replacer ailleurs, donc dans un autre objectif? Et nous, on pense
qu'effectivement la jurisprudence là-dessus,
bon, chacun aura son interprétation de la jurisprudence, mais, quand on regarde
certains arrêts de la Cour suprême
dans lesquels on se pose la question : Quel est l'objet prédominant, dans
le fond, des demandes, et tout ça?, bien,
la Cour suprême nous a dit, dans le fond : Oui, effectivement, quand
est-ce qu'une enquête commence? Quand est-ce que l'inspection se
termine, et ainsi de suite? Ils ont eu à se positionner là-dessus, et la cour a
dit : Bien, c'est l'objet prédominant de la demande.
Alors, nous, on dit, dans le fond : C'est
la stratégie qui détermine l'objet prédominant. Et la stratégie, en ce moment,
qu'ils sont en train de mettre en place, la Commission de la construction,
c'est effectivement colliger des renseignements,
alimenter un système de gestion du renseignement, comprendre des stratagèmes,
exclure les contrevenants chroniques.
On est d'accord, mais est-ce que tout ça, dans le fond... est-ce qu'on est
encore en termes de vérification? Est-ce
qu'on est encore en termes d'inspection ou on est ailleurs, on est dans quelque
chose de beaucoup plus large et de beaucoup
plus structuré? Donc, c'est la question. Et c'est pour ça, dans le fond...
parce que nous, on pense qu'effectivement des pouvoirs d'inspection et des pouvoirs de vérification, c'est une
chose, mais, quand on est rendu dans les téléphones puis quand on est
rendu dans les systèmes informatiques, bien, je pense qu'on est un peu
ailleurs.
Puis, dans le fond, ce qu'on recommande dans le
mémoire, c'est tout simplement d'avoir une autorisation judiciaire préalable à
l'exercice de certains pouvoirs qui permettrait, selon nous, peut-être de
préserver — ...
Une voix : ...
M. Robert
(Dominic) : ...effectivement — peut-être de préserver, d'ailleurs, le
projet de loi contre une éventuelle contestation judiciaire basée sur
des arguments constitutionnels. Bon, voici pour les pouvoirs de la CCQ.
L'article 6 du projet de loi, on parle, là, de
la prise de photographie, vidéo, enregistrement sonore, on n'a pas de problème avec ces éléments-là. Par contre, pour
les enregistrements sonores, on a un petit bémol qui va... dans le fond,
qui est en lien avec nos préoccupations sur les droits fondamentaux. Est-ce
qu'on ira prendre des témoignages sur les chantiers
de construction? Bon, dans le fond, alors, on se dit : Peut-être qu'il y
aurait lieu d'aussi exiger une autorisation judiciaire préalable.
L'infraction
de responsabilité stricte, la question du «sciemment», je pense que... Oui,
j'ai compris qu'effectivement ça pouvait être une demande du DPCP. Par
contre, il faut comprendre comment les associations fonctionnent. Il faut comprendre comment les gens dans les associations
reçoivent des mandats des employeurs. Dans le fond, un employeur qui est confronté à une
situation va faire appel à un conseiller en relations de travail, va lui, dans
le fond, soumettre des documents, va
lui donner des papiers, des cartes de temps, et ainsi de suite. Alors là, si on
enlève le terme «sciemment», ça veut
dire que, dans le fond, quelqu'un qui a une pile de papiers, qui n'a pas passé
au peigne fin tous les papiers, on retrouve dans ça une erreur administrative ou un renseignement qui n'est pas tout
à fait conforme, pourrait être susceptible, dans le fond, de se faire émettre un constat d'infraction.
Donc, à notre avis, comme on le disait dans le mémoire, on croit que ça
revient un peu à tirer sur le messager. Donc, ça ne devrait pas être retenu
dans la version finale du projet de loi.
Je termine rapidement. L'immunité et protection
contre les représailles, c'est la question du déplacement des salariés sur des chantiers, on en fait une
présomption, alors que, dans l'industrie de la construction, déplacer un
salarié, ça n'a pas nécessairement toujours
une connotation disciplinaire. Déplacer un salarié, ça peut être aussi, dans le
fond, le sain exercice du droit de
gestion de l'employeur, qui, pour des besoins des projets à venir, ou ainsi de
suite, a besoin d'assigner de la
main-d'oeuvre sur un chantier ou sur un autre. Donc, on croit que ce n'est pas
justifié de présumer que le déplacement d'un salarié, c'est une... ça peut être... d'en faire une présomption,
dans le fond, que c'est un acte de représailles. Donc, on recommande de retirer le mot «déplacement» du
troisième alinéa de l'article dans lequel on prévoit la modification.
Merci.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, monsieur. Je veux juste vous dire que je vous ai laissé
plus de temps que d'habitude, et c'était
avec le consentement de la ministre. Nous pouvons commencer les échanges. Mme
la ministre, vous avez la parole.
Mme Vien : Bien, alors
merci, messieurs, d'être là, M. Beauchamp, M. Robert. Je vais vous
poser deux, trois questions. Ce n'est pas
pour vous embêter. J'aurais dû le dire aussi aux autres groupes puis je le dis
à tous ceux qui sont en arrière,
là : On essaie de vous repousser dans vos plus profonds retranchements
pour avoir la matière la plus pure possible, pour arriver au meilleur
projet de loi possible.
Votre conseil
d'administration est formé de représentants, donc, de l'ACQ, l'ACRGTQ, l'APCHQ,
la CMEQ, la CMMTQ. Est-ce que je dois
comprendre que tous ces groupes-là sont parfaitement en accord avec ce que vous
nous dites?
M. Robert (Dominic) : Bien,
dans le fond, on est resté quand même assez général, hein?
Mme Vien : Oui, oui,
vous êtes quand même assez nuancé.
M. Robert (Dominic) : Mais la
réponse à votre question, c'est oui.
Mme Vien :
Merci. Vous dites... Bon, je vois bien, là, que vous avez quand même... même si
vous semblez être très nuancé, vous avez quand même des craintes qui
sont très clairement exprimées ici aujourd'hui, là, notamment sur les pouvoirs d'inspection qui augmenteraient chez la
CCQ. Est-ce que Mme Lemieux, qui était là avant vous, et sa
brigade, je ne sais pas si vous étiez... est-ce qu'elle vous a rassuré un peu?
M. Robert
(Dominic) : Bien, dans le fond, l'idée, c'est que... Bien, rassuré, je
ne dirais pas ça, là. Je veux dire... Mais
le travail qu'ils font en... Toute cette nouvelle approche en termes de
conformité, là, ça devait être fait, puis c'est correct, tu sais, c'est
correct que ce soit fait comme ça. Ce qu'on dit, c'est que ce serait dommage
que des pouvoirs qui sont présentés comme
des pouvoirs d'inspection ou de vérification soient utilisés à autre escient.
C'est ça qu'on dit.
Mme Vien : Comme quoi?
Comme quoi? Je l'ai noté aussi : Sommes-nous ailleurs? Replacer les
nouveaux pouvoirs dans d'autres objectifs, sommes–nous ailleurs? Ça, ce sont
vos propos. Vous parlez de stratégie de la CCQ. Qu'est-ce que vous voulez nous
dire exactement?
• (17 h 10) •
M. Robert
(Dominic) : Bien, dans le fond, je veux... Je vais vous donner un
exemple très concret. La commission, ils nous envoient... Puis c'est
correct aussi. Encore une fois, ce n'est pas de l'information confidentielle,
là. On reçoit à chaque semaine les résultats, si vous voulez, de certains types
d'interventions sur des chantiers de construction. Puis d'ailleurs, dans ce courriel qu'on reçoit, l'industrie au complet
le reçoit, on nous incite ou on nous demande même de partager ça avec notre réseau. Il y a quelques
semaines, l'histoire, c'était, dans le fond, un salarié qui était... puis je
l'ai avec moi, là. C'est l'histoire, dans le
fond, d'un salarié qui est sur un chantier de construction dont on pense que
c'est un immigrant illégal. Alors, vous voyez, là, on nous présente que la
section des renseignements, des enquêtes a établi un partenariat avec l'Agence
des services frontaliers du Canada, bon, qui permet d'obtenir l'identification
formelle des individus. Puis donc,
essentiellement, on nous dit que le plus récent cas a permis d'identifier un
étudiant américain puis, dans le
fond, de le faire comparaître devant le commissaire de l'immigration, lequel a
décidé de retourner celui-ci dans son pays d'origine.
Quand je vous dis qu'est-ce que les pouvoirs...
Plaçons-nous maintenant dans la situation où la CCQ avait les pouvoirs, dans le
fond, de demander des renseignements qui sont contenus dans des téléphones ou
des systèmes informatiques. Ça veut dire que
cette personne-là, on aurait pu lui demander : Donne-moi ton téléphone que
je regarde ce qu'il y a dans... Là,
on parle d'un salarié, ici, là, alors que l'intention, l'intention, est-ce que
c'était de vérifier s'il avait un certificat
de compétence? Bien non, l'intention, c'était de le traduire devant peut-être
le tribunal compétent pour faire vérifier son statut d'immigrant puis
finalement peut-être de l'expulser.
Alors, quand je dis qu'on est peut-être ailleurs
que la simple inspection, puis je ne dis pas que ce n'est pas correct, je dis juste que : Est-ce que les
droits fondamentaux de cette personne-là auraient été respectés ou est-ce
qu'on ne serait pas,
dans le fond, plus protégés s'il y avait eu une autorisation judiciaire
préalable, un mandat dans lequel un juge aurait pu contrôler? Puis d'ailleurs Mme Lemieux, là-dessus, elle m'a
rassuré parce que, tantôt, elle a dit : Heureusement, il y a les tribunaux. Si un juge avait contrôlé la
demande, voici pourquoi on a besoin d'aller chercher cette information-là
puis voici... tu sais, voici comment on va
le faire. D'ailleurs, dans les jugements de la Cour suprême, c'est souvent
comme ça qu'on évalue si une fouille, une
perquisition est abusive ou non. Les juges vont dire : Bien, la première
question qu'ils vont se poser, c'est : Est-ce que l'intervention ou
la demande a été rendue permise ou a été, dans le fond... s'appuie sur un
article de la loi?
Mme Vien : Mais,
M. Robert, en terminant, quand vous disiez d'avoir une permission
préalable, juste qu'on comprenne bien les bons termes, c'est vraiment un mandat
de la cour. Donc, c'est ça que vous... Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci. M. le député de Beauharnois, vous pouvez commencer les échanges.
M. Leclair : Merci, Mme la
Présidente. Vous soulevez un paquet de points, puis j'en discutais pas trop
fort pendant que vous terminiez : Est-ce que la CCQ, sa job, c'est de
vérifier les barrages au cas que ça redevienne une diminution de travail au bout de la route? Est-ce que c'est de vérifier
si la personne a rentré illégalement? Je trouve que c'est large. Je trouve qu'ils jouent large. Quand
on dit : On va aller regarder dans votre système informatique pour
voir si vos paies, si vous ne payez pas du monde au noir, c'est valable,
valide, mais ce n'est pas le fisc à faire ça? Je ferme la parenthèse.
Je veux quand même vous revenir... Est-ce que
vous croyez, vous... parce que, tantôt, j'ai manqué de temps avec Mme Lemieux, «susceptible de provoquer».
On prend le pire exemple, on ferme une route, qu'il y a juste une route
qui rend au chantier, bien entendu, c'est
évident, tu dis : Oui, pas fin, fin à temps plein. Mais «susceptible de
provoquer», si un entrepreneur... vous
parliez de déplacement d'hommes. Vous dites : Écoutez, là, les fenêtres ne
sont pas rentrées, là, puis j'ai deux
autres chantiers, là, à trois kilomètres d'ici, les gars, pour les trois
prochains jours, on vous déplace là, puis la personne, elle vous répond : Ça ne me tente pas trop, trop.
Vous, vous dites un commentaire en voulant dire : Écoute, là, moi, il faut que ça roule, la patente. Je ne
pense pas que je t'exige de prendre un avion. Mais vous n'êtes pas
«susceptible de provoquer» quelque chose que, vous aussi...
La
Présidente (Mme Richard) :
M. le député de Beauharnois, on n'entend pas les cloches ici, en
commission, mais vous êtes appelés au vote.
Donc, je suspends les travaux. Je suspends les travaux.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise à 17 h 28)
La
Présidente (Mme Richard) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Nous
reprenons nos travaux. Nous reprenons nos travaux.
Donc, les
échanges avaient débuté avec M. le
député de Beauharnois. Vous pouvez poursuivre, il vous reste encore du temps, M. le
député.
M. Leclair : Mon collègue dit
que c'était plate, ce que je disais. Ce n'est pas bien fin.
Je reviens sur le mot «susceptible de
provoquer». Ça peut jouer des deux côtés, là, un employeur comme un salarié. Puis là, s'il y a des sanctions de
rapportées à ça, vous ne croyez pas qu'on va partir une débandade semi-grief
à dire : Il m'a dit ça... Comment vous
voyez ça, vous? Est-ce que ça vous énerve ou vous dites : Bof! Les gens
sont plus adultes que ça. Ils n'embarqueront même pas là-dedans?
M. Robert (Dominic) : Bien, dans le
fond, le changement qui est proposé, pour nous, tu sais, c'est une question
de preuve, hein, c'est une question de... Dans le but ou susceptible de, dans le fond, dans un cas, tu demandes une intention. Tu demandes de prouver qu'effectivement
c'est dans le but. «Susceptible de», c'est une évaluation objective d'une situation. Mais il ne faut pas
perdre de vue que ce qu'on vise là-dedans avant tout, c'est qu'il n'y ait pas d'intimidation, c'est qu'il n'y ait pas de harcèlement,
c'est qu'il n'y ait pas de menace sur les chantiers.
Donc, si
l'effet du projet de loi, c'est de faire en sorte que c'est plus facile de
démontrer... d'obtenir une déclaration de
culpabilité dans les cas où il y a de l'intimidation, harcèlement, bien, c'est
certain qu'on va être d'accord parce
que le but, c'est d'éviter qu'il y en ait sur les chantiers. Alors, si c'est plus facile de prouver avec les
termes «susceptible de», pour le
DPCP, que «dans le but de» puis que l'intention, c'est qu'il n'y ait pas d'intimidation sur des
chantiers, c'est certain qu'on est d'accord.
M. Leclair : O.K., je vous rapporte sur... Dans le projet de
loi, on parle aussi des réunions de travailleurs, on ne parle pas rien que des syndicats, des réunions sur
des chantiers, puis c'est très, très large, là, dans la modification.
Puis je me demandais si vous, dans vos
pratiques, vous dites : Moi, une réunion sur les chantiers, je ne pense
pas que les travailleurs se disent : Bien, on se tape un meeting,
il est 12 h 30 ou il est 9 h 15 le matin.
• (17 h 30) •
Est-ce
que vous avez une problématique avec ça, avec vos travailleurs à vous, des
réunions qui semblent problématiques, qu'on doit légiférer dans ce projet de
loi là pour s'assurer qu'il n'y ait plus de réunion pendant les heures de
travail, exemple? Est-ce que c'est une problématique courante, fréquente?
M. Robert
(Dominic) : Est-ce que vous adressez la question à moi?
M. Leclair :
À la table en avant, un des deux.
M. Robert
(Dominic) : Bien, je vous
dirais que la question des réunions sur les chantiers, ce n'est pas...
Dans le fond, l'idée, c'est l'interruption des travaux, hein? C'est d'empêcher
l'interruption des travaux. Ce n'est pas des concepts qui sont tout à
fait... tu sais, qu'on prend... Ça existe déjà dans l'industrie, hein? Ça
existe déjà dans la législation. Il y a déjà un encadrement des activités des délégués de chantier dans la
loi R-20, dans lequel, notamment, le temps alloué à l'exercice des activités syndicales est limité, puis ça doit faire objet
d'une entente avec l'employeur. Dans les conventions collectives, vous avez les visites de chantiers du représentant syndical qui ne
doivent pas retarder indûment les travaux. Donc, c'est un peu dans cet
esprit-là que... c'est déjà là, là.
M. Leclair : Ça fait que, vous, ça ne... vous ne dites pas : On a une problématique majeure. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas. Il y a tout le
temps une exception à la règle de tous les côtés, mais ce n'est pas une problématique
que vous, vous jugez majeure. C'est là-dedans. On le passe là, puis ce n'est
pas majeur.
M. Robert
(Dominic) : Bien, je
laisserai les... Honnêtement, c'est une question qui regarde, à mon avis,
un peu plus la partie syndicale. Puis
je pense que la partie syndicale va vous faire ses commentaires là-dessus. Je vous dirais que mon premier réflexe,
ça a été de me demander c'est quoi, une réunion, là. Je m'en tiendrai à ça. Je
trouve ça un petit peu imprécis.
M. Leclair :
Est-ce que c'est à un dîner? Tout le monde sont réunis ensemble, on appelle ça
une réunion?
M. Robert
(Dominic) : Je m'en tiendrai à ça.
M. Leclair : Je voudrais vous rapporter, dans votre mémoire lorsque ce que vous
dites... à la page 9, vous dites : «En principe, le fait de prendre [...] photographies [...] vidéos», des
exemples, blablabla. Le deuxième, dernier paragraphe, vous dites : «Cependant, lorsque l'objectif
est de bonifier une preuve en vue [de] dépôt d'une accusation pénale — vous
dites : l'exercice [...] devrait être soumis à l'obtention préalable d'une
autorisation judiciaire.»
Ça
fait que vous dites : Jusqu'à un certain moment donné, on peut prendre des
photos, avoir certaines preuves, mais là,
d'aller plus loin que ça, ça prendrait un casier ou un mandat de la cour, de
dire... un peu comme vous disiez tantôt avec les téléphones. C'est là
que vous vouliez nous apporter?
M. Robert
(Dominic) : Bien, dans le fond, toute l'idée derrière ça, c'est un peu
les principes qui ont été établis. Puis
là je ne veux pas faire non plus une grande analyse juridique, là. Il y a des
juristes, au ministère, qui le feront, dont c'est le travail, mais, dans le fond, la Cour suprême a
déjà eu à se questionner là-dessus, à savoir... Puis ce qu'il faut
savoir, dans le fond, c'est qu'à partir du
moment où tu dépasses ton couloir administratif, tu n'es plus en terme... tu
n'es plus dans ta vérification, selon ton mandat de voir si,
effectivement, il y a une situation, mais que tu essaies d'aller chercher de la
preuve, tu essaies de documenter quelque
chose pour essayer de démontrer effectivement qu'une infraction a été
commise, bien là tu n'es plus dans ton couloir administratif, tu es en train de
faire une enquête. Puis la corrélation que la Cour suprême a faite, c'est de
dire : Quand tu es rendu dans une enquête, ils ont dit ça de façon imagée
en disant : Tu as franchi le Rubicon, hein, c'est comme ça qu'ils
l'expliquent dans l'arrêt, bien là tu es obligé de respecter les règles qui viennent avec le fait de faire une enquête,
c'est-à-dire la mise en garde, c'est-à-dire le respect des principes
contre l'auto-incrimination. Puis c'est
surtout à ça que je référais quand on parlait tantôt des enregistrements
sonores. Si tu n'as pas... tu vas
prendre des enregistrements sonores, tu vas prendre un témoin, est-ce que ça
inclut d'aller prendre un témoignage sur un chantier pour ensuite t'en
servir contre quelqu'un? Tu sais, ça pose quand même des questions
fondamentales en termes de respect des droits fondamentaux.
Donc,
je me dis : Toutes ces questions-là, plutôt que d'éviter des problèmes,
pourquoi ne pas tout de suite mettre une autorisation judiciaire
préalable, qui est toujours, dans le fond... Comme je l'ai dit tantôt, la
première question que la Cour suprême se pose, c'est de se demander si c'est
abusif ou non. Est-ce qu'il y a une autorisation par la loi? Est-ce que ça a
passé devant un juge, puis ainsi de suite?
M.
Leclair : Bon, bien, vous levez le drapeau en disant : À
un moment donné, il faut s'assurer que, si on se donne tellement de
droits... bien là, on joue peut-être dans le terrain d'un autre aussi.
Puis
je vous ramène... Vous avez des données à la page 7 puis vous dites : «En
2015, l'exercice des pouvoirs de vérification
dont dispose actuellement la CCQ a notamment permis de réclamer
[16] millions au nom des salariés, alors que [le] montant était de
[14] millions en 2016.»
On
parle, en général, de réclamer des montants de quoi? De l'argent au noir? Des
entrepreneurs qui ne voulaient pas payer? C'est quoi, grosso modo, ces
sommes-là?
Une voix : Il faut faire attention...
M. Leclair :
Sans y aller, là...
M. Robert (Dominic) : Oui,
c'est ça.
La Présidente (Mme Richard) :
...en 15 secondes.
M. Robert
(Dominique) : Ce n'est pas
toujours non plus des questions de non-conformité. Ça peut être aussi
des questions d'assujettissement à la loi. Il peut avoir une question qui est
soulevée sur le paiement de... le respect des conventions...
dans le fond, même pas le respect, l'application de la loi
R-20 à une situation qui fait en sorte que, bon, on va aller devant le
tribunal compétent...
La Présidente (Mme Richard) :
Merci. Merci. Je suis désolée, c'est tout le temps que disposait l'opposition
officielle. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition, M. le
député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard : Merci.
Merci, M. Robert. M. Robert, concernant... Je voudrais vous entendre
sur les nouvelles technologies. Tout à l'heure, si j'ai bien saisi, vous avez dit : C'est des nouveaux pouvoirs.
Mais, lorsque je regarde le texte de
loi, là, à l'article 6, on dit : «L'article 7.1
de cette loi est modifié...» Mais, lorsqu'on va à 7.1, là, l'article
de base, on dit : «Pénétrer à
toute heure raisonnable...» C'est le paragraphe 1°. Deuxième, c'est : «Exiger tout renseignement
relatif à l'application de la présente loi ou de ses règlements...» Donc, on
dit, là, «pour l'application de la présente loi». Et l'article 6 du projet de loi vient nous dire
qu'on pourrait, la CCQ pourrait «utiliser ou exiger de toute personne
qu'elle utilise les systèmes informatiques,
les appareils électroniques ou autres supports se trouvant dans un lieu où
s'effectuent des travaux de construction».
On est en
2018, là. Des livres de paie papier, il doit en avoir encore, mais de moins en
moins, je pense, là. Et, à ma
connaissance, le ministère du Revenu fait affaire avec des entreprises, a
des systèmes informatiques. Ce n'est pas des nouveaux pouvoirs, c'est des nouveaux moyens, des nouveaux outils, des
nouveaux supports informatiques. Puis, si j'ai bien compris, il faudrait aller devant un juge chercher un mandat. Quand
on va chercher un mandat devant un juge, c'est que, là, on est face à... on va dire une fraude présumée. En tout cas,
la personne qui demande le mandat a une raison
sérieuse de dire : Bien, j'ai besoin
d'aller devant un juge. On ne peut pas demander à la CCQ d'aller chercher un
mandat à chaque fois qu'il y a une entreprise... ses supports sont sur
informatique, puis dire : Là, je veux les avoir, là. J'essaie juste de
comprendre ou j'ai totalement mal compris, là. Je veux juste préciser ça.
M. Robert
(Dominic) : Tantôt, l'exemple
que M. Pelletier a donné, il était assez éloquent à cet égard-là
parce qu'il disait : Quand on demande à
l'entrepreneur des choses, puis qu'il refuse de nous les donner, alors là on
n'est plus dans... on est à une
deuxième étape, là. On est dans le processus, on est dans une étape où on a peut-être
remarqué des choses, on a tenté de valider certaines choses, ou
d'inspecter certaines choses, ou de vérifier certaines choses, on a eu un refus
de l'entrepreneur, on continue à penser qu'il y a peut-être
une situation. Mais là, c'est justement, est-ce qu'on est
encore juste dans une simple vérification ou on est plus en train de se
dire : On sait ce qu'on cherche?
M. Picard : Mais
pourquoi un entrepreneur qui respecte les règles refuserait de donner des informations
dans l'application de la loi pour la CCQ? On s'entend bien, là, ce n'est pas...
il ne va pas à la pêche, là. Il a une loi à appliquer
puis il dit : Je voudrais avoir les informations, puis il
dit : Non, c'est dans mon ordi, puis vous ne les aurez pas. Me semble que ça allume une... Parce que, si on
accepte, qu'est-ce que vous me dites, là, c'est qu'il faut aller devant
un juge. Qu'est-ce qui nous dit que,
lorsqu'on va revenir avec le mandat, si on l'obtient, que les informations vont être encore là?
M. Robert (Dominic) : Bien, il
n'y a rien qui nous garantit que les informations sont là de toute façon.
M. Picard : Bien, si elles ne sont pas là, ils ne les
trouveront pas, donc il n'y a pas de problème à aller dedans.
M. Robert (Dominic) : Bien, il
y a un risque.
M. Picard : O.K. En tout
cas, pour moi, ce n'est pas des
nouveaux pouvoirs, c'est seulement qu'il faut se mettre au goût du jour. Des papiers, il y en a de moins en
moins, puis des ordinateurs, tout le
monde travaille avec ça, maintenant.
Puis même sur les chantiers, à ma connaissance, là, je ne suis pas un
spécialiste, là, mais, de plus en plus, ça se passe par informatique.
M. Robert (Dominic) : La question,
ça va être de savoir c'est quoi, l'information qui est recherchée.
M. Picard :
...application de la loi.
M. Robert
(Dominic) : Oui, mais il ne
faut pas oublier non plus que le projet
de loi facilite la communication
de renseignements dans le nouveau chapitre XIII.2, là, sur les lanceurs d'alerte. Il y a beaucoup, beaucoup
d'information que la commission va être
capable d'obtenir en garantissant aux gens qui vont fournir l'information que
l'employeur ne peut pas exercer des
représailles contre eux ou quoi que ce soit. Ça, ça va permettre énormément
d'information puis énormément de renseignements. Il faut comprendre, il
y a ça aussi, là, à évaluer puis à regarder de l'autre côté, là.
M. Picard :
...en tout cas, il y a peut-être une balance à trouver, mais moi, je trouve que
d'aller fréquemment chercher un mandat, là,
on alourdit pour rien, là. On alourdit pour rien puis, pour moi, on allume une
lumière rouge, je veux dire :
Ah! ça te prend un mandat. Il y a quelque chose qui ne va pas, là, parce que
c'est une simple application de la loi quotidienne que la CCQ aurait
avec ça.
• (17 h 40) •
M. Robert (Dominic) : Dans la simple
application quotidienne de la loi, je suis entièrement d'accord avec vous. Il
n'y a rien qui empêche un organisme public d'utiliser des renseignements qu'il
a obtenus dans le cadre d'une inspection
pour faire des enquêtes. Par contre, quand l'intention, c'est de faire tout
de suite une enquête parce que
tu sais effectivement où tu t'en vas puis que ton objet... c'est là que
la Cour suprême parle d'objet prédominant de la demande...
Puis ils ont eu à se demander cette question-là : Quand est-ce qu'on
commence à penser qu'il y a peut-être eu une violation à la loi? Est-ce que
c'est quand on a des soupçons? Est-ce que c'est quand on a des motifs?
M. Picard : ...poser une
question. C'est quoi, la différence entre une vérification puis une enquête?
M. Robert
(Dominic) : Bien, une enquête, c'est parce que tu es en train
d'essayer de bonifier ta preuve. Tu sais qu'il y a quelque chose qui s'est passé puis tu es en train d'essayer...
C'est tout ça. Là, je ne veux pas faire non plus trop... tomber dans le
légalisme, là. Toute cette question-là, c'est la question qui a été traitée
dans l'arrêt Jarvis parce que le monsieur en question, c'était dans le domaine
fiscal...
M. Picard :
O.K., mais donc, qu'est-ce que vous nous dites, lorsque ce n'est plus une
vérification, que c'est rendu une enquête, c'est peut-être là qu'il
faudrait, là, qu'il y ait un mécanisme.
M. Robert
(Dominic) : Pas juste peut-être, il faut qu'il y ait une autorisation
judiciaire parce qu'on est dans une enquête. C'est ce que la
jurisprudence nous dit.
M. Picard : Merci.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup. Merci pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Et je vais suspendre celle-ci quelques instants
pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 41)
(Reprise à 17 h 43)
La
Présidente (Mme Richard) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Nous reprenons nos travaux, et la commission reçoit maintenant
l'Association de la construction du Québec.
Bonjour,
messieurs, bienvenue à l'Assemblée
nationale. M. Francis Roy, vous
êtes le président. Je vais vous laisser présenter les gens qui vous accompagnent. Vous allez ensuite avoir 10
minutes pour nous faire votre exposé. Suivra un échange par la suite avec
les parlementaires.
Association de la
construction du Québec (ACQ)
M. Roy (Francis) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Mme la ministre, membres de la commission, comme l'a mentionné la présidente, je suis Francis
Roy, je suis entrepreneur en construction.
Je suis aussi président de l'Association de la construction du Québec,
l'ACQ. Je suis accompagné aujourd'hui, à ma gauche, de M. Luc Bourgoin,
directeur général de l'ACQ, aussi à gauche, Me Pierre Hamel, qui est directeur
des affaires juridiques et gouvernementales
de notre association. J'ai à ma droite M. Jean St-Onge, directeur par
intérim du service des relations de travail de l'ACQ.
Je voudrais d'abord remercier la commission de
nous donner l'opportunité de présenter nos commentaires et recommandations visant le projet de loi
n° 152, à l'égard duquel l'ACQ est, à quelques exceptions près, très
favorable. Il s'agit pour nous d'un projet
de loi important qui s'inscrit dans la stratégie gouvernementale visant à
combattre la collusion, la corruption et le harcèlement dans l'industrie
de la construction.
Donc, sur ce,
je vais laisser à M. Bourgoin le soin de vous expliquer plus en détail les
motifs qui entourent notre appui et nos réserves à l'égard de ce projet
de loi. Alors, M. Bourgoin.
M. Bourgoin
(Luc) : Merci, M. Roy. Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu,
l'ACQ est en accord avec les objectifs
du gouvernement visant la mise en oeuvre des recommandations de la Commission
d'enquête sur l'octroi et la gestion
des contrats publics dans l'industrie de la construction afin de diminuer les
risques de collusion, de corruption et l'intimidation dans notre
industrie.
Ainsi, les
modifications relatives aux recommandations de la commission Charbonneau visant à, premièrement, limiter le nombre
de mandats des administrateurs de la CNESST et de la CCQ, ainsi que le cumul
des postes, deuxièmement, à protéger les
lanceurs d'alerte, troisièmement, appliquer un délai de prescription de
poursuites pénales de trois ans après la connaissance de l'infraction
par le poursuivant et, quatrièmement, prévenir les gestes susceptibles de provoquer une entrave, un ralentissement ou un arrêt des
activités sur un chantier sont bien accueillis par l'ACQ. Combattre la collusion, l'intimidation et le
travail au noir par des mesures préventives demeure, selon nous, la voie
que devrait prioriser le gouvernement dans ses actions futures.
Les autres
mesures découlant des recommandations de la commission Charbonneau sont bien
accueillies, certes, mais certaines
nous apparaissent incomplètes. C'est le cas notamment de l'intimidation et la
violence sur les chantiers rapportées
par des donneurs d'ouvrage publics. Pour que cette recommandation de la
commission Charbonneau puisse véritablement
avoir l'effet souhaité, elle devra être accompagnée de mesures supplémentaires.
Les mesures proposées, à ce niveau,
sont sans conséquence aucune. Si le législateur ne parle pas pour rien dire,
dans ce cas-ci, le message est incomplet. Un simple rappel moral nous
apparaît insuffisant.
En ce qui a trait aux dispositions du projet de
loi qui n'ont pas été mentionnées, l'ACQ est favorable à leur adoption, à l'exception de certaines qui modifient
le pouvoir d'enquête et de poursuite de la CCQ, qui nous apparaissent, pour certaines, fort discutables et, pour
d'autres, intrusives. C'est le cas notamment des dispositions qui visent
d'abord l'élargissement des pouvoirs de la CCQ prévu à l'article 7.1 de la loi,
ensuite l'abolition de la notion d'intention pour l'infraction prévue au paragraphe 4 de l'article 122 de la loi et,
finalement, la prolongation du délai de la prescription pour les
poursuites civiles que nous commenterons dans quelques instants.
Nous
insistons sur le fait que l'ACQ appuie la CCQ dans la réalisation de son mandat
et sa lutte contre le travail au noir.
Il faut toutefois prendre en considération que les mesures proposées touchent
toutes les entreprises de construction du
Québec, celles qui sont délinquantes, celles qui sont probes, celles qui sont
expérimentées, organisées, les plus petites, les plus grandes, les nouvelles, les moins organisées et les moins
expérimentées. Aucune d'entre elles n'ont droit à exercer leurs activités au noir. Par contre, toutes ont
droit à exercer leurs activités légitimes, sans contrainte excessive, dans
le cadre d'un régime de relations de travail
particulièrement complexe et rigide. Toutes ont droit à la présomption de bonne
foi et toutes ne sont pas des fraudeurs, et
l'action gouvernementale doit en tenir compte. C'est dans un contexte de
recherche de l'équilibre que nous avons étudié les dispositions du projet de
loi, particulièrement l'élargissement des pouvoirs de la CCQ en matière
d'inspection.
En ce qui a trait à l'élargissement des pouvoirs de la CCQ, prévu à l'article
7.1 de la loi, d'abord, l'article 6 du projet
de loi propose d'ajouter des dispositions permettant à la CCQ, et je cite un extrait du projet de loi : «Utiliser ou exiger de toute personne
qu'elle utilise les systèmes informatiques, les appareils électroniques ou
autres supports se trouvant dans un lieu où
s'effectuent des travaux de construction ou dans un établissement d'un
employeur pour consulter ou reproduire un document qui comporte un
renseignement visé au paragraphe 2°.»
Tel que
rédigé, l'article propose que la CCQ pourra, dans le cadre de ses
inspections, exiger qu'elle puisse utiliser elle-même les systèmes
informatiques et cellulaires sur place pour consulter ou reproduire un document
qui comporte un renseignement visé au paragraphe 2°. Si un inspecteur exige d'utiliser
un ordinateur ou un cellulaire, il devrait lui être remis. Cette façon de procéder nous apparaît
intrusive pour plusieurs raisons. D'abord, pour ce qui est des
ordinateurs, «utiliser» signifie en prendre
possession physiquement. Alors, une telle prise de possession n'est pas utile
pour consulter les renseignements que la CCQ est en droit d'exiger. Le simple fait
d'exiger de toute personne qu'elle utilise les systèmes informatiques
est suffisant pour permettre à la CCQ d'exécuter pleinement son mandat sans
créer inutilement des situations susceptibles d'antagoniser les parties dans le
cadre des visites d'inspection.
L'autre élément qui nous inquiète un peu plus,
c'est l'inclusion implicite des téléphones cellulaires dans la nomenclature des éléments que la CCQ pourrait
utiliser, c'est-à-dire prendre possession afin de consulter des renseignements
qu'elle est en droit de consulter. À ce niveau, on vise particulièrement
l'envoi de messages textes. Or, l'envoi d'un message
texte constitue une conversation électronique au sens de la jurisprudence. Dans
un jugement rendu en décembre dernier relatif à la saisie d'un
cellulaire et la mise en preuve d'envoi de message texte, la Cour suprême du
Canada a mentionné, et je cite, que le
destinataire d'une conversation électronique «peut [...] s'attendre
raisonnablement à ce que ces renseignements soient à l'abri du regard
scrutateur de l'État».
• (17 h 50) •
Les nouvelles
dispositions, telles que rédigées, permettraient aux représentants de la CCQ d'exiger de prendre possession d'un téléphone
cellulaire afin de consulter les renseignements qui sont en fait reconnus comme
étant des conversations électroniques à
l'égard desquelles on peut s'attendre raisonnablement à ce qu'elles soient à
l'abri du regard scrutateur de
l'État. Nous n'avons pas d'objection à introduire des dispositions qui
reflètent la réalité et permettent à la CCQ de faire leur travail, mais, tel que rédigé, le paragraphe 3° de
l'article 7.1 de la loi va plus loin et nous amène là où les tribunaux nous disent de ne pas se rendre. Si
cette disposition vise, dans les faits, uniquement à faire reconnaître
des pouvoirs déjà reconnus par la
jurisprudence, elle devra être reformulée ou simplement évacuée du projet de
loi. L'absence de nouvelles dispositions proposées n'aurait, dans les
faits, aucun impact sur le respect de la loi R-20 ou les pouvoirs actuels de la
CCQ de faire respecter la loi.
L'autre élément important est l'ajout du
paragraphe 4° de l'article 7.1 de la loi, qui permet la prise de photos, de vidéos et d'enregistrements sonores. Encore une
fois, la notion de communication privée entre en ligne de compte en matière d'enregistrements sonores. Les
communications privées devraient être spécifiquement exclues des
enregistrements permis.
Quant à la
disposition qui prévoit l'abolition de la notion d'intention pour l'infraction
prévue au paragraphe 4 de l'article 122 de
la loi, celle-ci vise en quelque sorte à renverser le fardeau de preuve, dans
un premier temps, à l'égard de la
destruction ou falsification de document et, dans un second temps, de l'envoi
de renseignements faux ou inexacts. De
notre point de vue, la présomption de bonne foi est évacuée de l'article 122,
et il appartiendra dorénavant aux entrepreneurs de démontrer qu'ils ont
fait diligence raisonnable afin d'éviter une condamnation. Cette présomption de bonne foi existe dans d'autres lois, pour
d'autres actes similaires, notamment en matière de normes du travail ou
de santé-sécurité du
travail, où le terme «sciemment» est utilisé dans le même contexte. Il est
important de souligner qu'une infraction
à certains éléments prévus au paragraphe 4 de l'article 122 de la loi est
susceptible d'entraîner l'émission d'une licence restreinte. C'est
pourquoi nous croyons opportun de maintenir le fardeau de preuve actuel.
Finalement,
en ce qui a trait à la prolongation du délai de la prescription pour les
poursuites civiles, nous ne sommes pas
en mesure de comprendre la nécessité réelle de modifier le délai actuel de
prescription civile pour les réclamations de salaire. La CCQ est particulièrement active dans ce domaine, et les
dispositions actuelles permettent de faire débuter la prescription à partir des faits pertinents de la
CCQ, qui peut également faire suspendre le délai de prescription pour
une période supplémentaire de six mois. Nous
croyons que toute réclamation de salaire doit être traitée avec célérité,
comme c'est le cas en vertu de la Loi sur
les normes du travail, et que la prescription actuelle devrait être maintenue.
Alors, voilà donc, Mme la Présidente... qui n'est plus là. M. le
Président...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Bourgoin
(Luc) : M. le Président, désolé.
Le Président
(M. Busque) : Non, pas de problème.
M. Bourgoin
(Luc) : Mais voilà donc, M. le Président, l'essentiel de nos commentaires.
Le Président
(M. Busque) : Je vous remercie beaucoup, messieurs, représentants
de l'Association de la construction du Québec.
Alors, pour les prochaines 14 min 30 s, je vais céder la parole
à Mme la ministre, de la partie gouvernementale. Mme la
ministre.
Mme Vien : Bonjour, M. Bourgoin. Bonjour, M. le Président. M. Roy et votre brigade, merci d'être là cet après-midi. Bon, je vois bien, là, que toute la question
d'avoir accès au système informatique, bon, par extension, bien sûr,
ça sous-entend les téléphones cellulaires, les téléphones personnels, et tout ça, puis que
ça vous cause une interrogation, hein, un souci. Qu'est-ce que vous
suggérez?
On comprend l'idée en
arrière de ça, on comprend ce qui est recherché, hein, c'est d'avoir accès à
des informations. Le
député de Chutes-Chaudière l'a dit tantôt : On n'est pas désincarnés de la réalité. On vit
dans un monde hautement technologique, des technologies de
l'information, etc. Je comprends que votre peur, c'est de dire un peu comme le groupe auparavant également, l'AECQ, de
dire : Bien, jusqu'à quel point on n'aura pas aussi accès à
d'autres informations qui sont de l'ordre de la vie privée, du personnel? Bien,
comment on fait pour concilier tout ça, là?
M. Bourgoin
(Luc) : Bien, d'abord, M. le Président, je vais céder la parole à mon
collègue Me Pierre Hamel, qui va répondre avec plus de précision.
Le Président
(M. Busque) : M. Hamel.
M. Hamel (Pierre) : Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre.
On a rencontré la CCQ. On a essayé de comprendre et on a eu une
rencontre très constructive. La CCQ, avec les paragraphes 3° et 4°, nous a
expliqué qu'ils voulaient illustrer dans un projet de loi ce qu'ils étaient
déjà par ailleurs autorisés à faire en vertu de la jurisprudence. C'était ça,
le concept pour dire : Quand je me présente chez un entrepreneur
récalcitrant... puis on ne parle pas de la majorité,
là, évidemment, toutes les dispositions de loi, c'est
pour la minorité, on s'entend. Quand on se retrouve devant ces gens-là, ils vont dire : Non, tu n'as pas
le droit de prendre de photo. Non, tu n'as pas le droit de prendre de vidéo.
Bon, alors, ils veulent mettre en place... tout simplement illustrer ce qu'ils
font déjà.
Or,
nous, on est d'accord avec ça. On est d'accord à ce que la CCQ améliore ou
précise ou que la loi précise les pouvoirs qu'ils peuvent véritablement
exécuter, sauf que, tel que rédigé, les dispositions du paragraphe 3° et
du paragraphe 4° vont un petit peu trop loin. C'est juste ce qu'on
veut dire. Et c'est pour ça qu'on dit : Si vous l'enlevez, ils vont continuer à faire leur pouvoir, puis à les
exécuter, puis à prendre des photos puis des vidéos sur les chantiers.
Mais, si on laisse toute la notion de système informatique ou d'éléments électroniques, on parle
du cellulaire. Or, le cellulaire, c'est à ne pas toucher. Ne touchez pas, ne permettez pas l'utilisation du
cellulaire parce que l'article 3°, il dit : Utiliser le
système informatique. Le représentant de la
CCQ va arriver puis il va demander un cellulaire pour regarder de l'information
dans le cadre de l'inspection. Ce n'est pas
ça que la CCQ veut faire. La CCQ veut faire, c'est : Vous avez un système
informatique, vos données sont là, je veux les voir.
Alors,
la première chose pour faciliter le travail de la CCQ, ce n'est pas de
permettre aux inspecteurs d'utiliser le système, mais c'est d'exiger qu'on lui montre à l'écran les informations
qu'il a besoin. Ça, on est d'accord avec ça. Mais, quand l'information est dans un cellulaire, bien,
il va dire : Envoie ça ailleurs, fais-en une copie puis donne-moi-le.
Mais ne touchez pas au cellulaire. Ne
permettez pas, en rédigeant la loi, de permettre à un inspecteur de la CCQ de
prendre un cellulaire ou de s'asseoir pour
regarder quelque document que soit. Puis là je ne parle pas d'enquête,
d'inspection, je parle juste de
l'inspection, là. Ça va créer de l'animosité. Ces dispositions-là sont faites
pour des personnes qui sont déjà enclines à ne pas permettre aux
inspecteurs de faire leur travail. C'est ça qu'on veut dire, nous autres. C'est
pour ça qu'on... Modifiez la loi. Et, si vous mettez le paragraphe 3° et
le paragraphe 4° pour expliquer les pouvoirs de la CCQ, bien, profitez-en
également pour en indiquer les limites de ces pouvoirs-là. C'est pour ça que,
dans notre mémoire, on dit : Au
paragraphe 3°, n'écrivez pas : Utiliser ou exiger toute personne
qu'elle utilise des systèmes informatiques. Écrivez simplement :
Exiger de toute personne qu'elle utilise les systèmes informatiques.
Le cellulaire, c'est
tellement protégé par la Cour suprême, il y a tellement un... Enlevez... à
l'exception des téléphones cellulaires. Ce
que veut faire la CCQ, c'est : Tu l'as, tu veux me le montrer, si c'est
sur le cellulaire, que tu veux me le
montrer, je vais prendre une photo, je ne veux pas nécessairement y toucher.
Tout 7.1, c'est en inspection, ce n'est
pas en enquête. Alors, ils ne peuvent pas faire beaucoup de choses ou demander
beaucoup d'éléments. Mais, tel que rédigé,
ça ouvre à tellement d'éléments... Et, une fois que c'est écrit dans la loi,
là, ce n'est pas Mme Lemieux, ce n'est pas M. Pelletier, c'est
la loi. Et la CCQ est payée pour faire appliquer la loi dans toute sa force. Et
là c'est ça qu'on veut éviter, c'est des
débordements. On veut juste que ça illustre ce qu'ils veulent véritablement
indiquer et pas en mettre plus. C'est ça, l'élément important.
Alors, oui,
on est d'accord, mais, si on n'est pas capable de le rédiger correctement, on
va faire plus de dommages qu'on va donner d'avantages à la CCQ. Alors,
on dit : Si on n'est pas capable de trouver un texte qui est exact, bien, enlevez-le, le texte, on va vivre avec ce qu'on a
actuellement. La CCQ, elle a... les pouvoirs sont reconnus de prendre
des photos, de prendre des... Ça va être peut-être un peu plus difficile, mais
ça va être sûrement moins difficile que les altercations
qu'on peut prévoir quand on exige de prendre... de s'asseoir puis d'utiliser la
propriété des entrepreneurs, que ça soit le cellulaire ou l'ordinateur.
C'est exactement ce qu'on veut faire.
Le Président (M. Busque) : Je
vous remercie, Me Hamel.
M. Hamel (Pierre) : Je ne sais
pas si c'est assez clair, là.
Mme Vien : Très clair,
très clair.
Le Président (M. Busque) : Mme
la ministre.
• (18 heures) •
Mme Vien :
M. Bourgoin, vous avez dit tantôt : Un objectif qui nous incombe,
nous, c'est d'arriver à atteindre un équilibre,
là, hein, pour chacune des organisations, et tout ça. Avez-vous l'impression qu'on est plus proche de l'équilibre
ou qu'on s'en éloigne avec notre projet de loi?
M. Bourgoin
(Luc) : Mais c'est une bonne
question. Bien, d'abord, c'est clair pour nous que toute entreprise n'a pas droit, évidemment,
d'exercer des travaux au noir et qu'évidemment tous les contrevenants doivent
avoir les sanctions qu'ils méritent. Ça,
c'est clair pour nous si on veut, en
ce sens, rétablir la saine
concurrence dans l'industrie. Ça, c'est une priorité. Mais, en même
temps, il ne faut pas que ces mesures-là deviennent trop, je dirais,
contraignantes, intrusives, abusives pour faire en sorte que, je dirais, des entreprises de bonne foi, je dirais, se désintéressent ou
que des entreprises qui s'investissaient dans l'industrie se découragent
et se retirent de l'industrie. Je pense particulièrement aux petites entreprises
qui pourraient être vulnérables dans ce cas-ci.
Et, si, dans l'objectif au départ, c'était
d'assurer une saine concurrence, bien, on pourrait avoir l'effet tout à fait contraire, c'est-à-dire limiter la
concurrence dans l'industrie. Puis ça, personne ne souhaite ça parce que
limiter la concurrence, ça veut dire
qu'on exerce des pressions à la hausse sur les prix, sur les coûts dans l'industrie,
puis ce n'est pas la solution recherchée.
Donc, je pense qu'il faut se poser les bonnes
questions. Il faut savoir, il est où, l'équilibre pour prendre des bonnes décisions pour que ça ait les bonnes
répercussions puis penser aux effets collatéraux aussi. Alors, les
questions, on se les pose maintenant, de façon à bien délimiter les pouvoirs
puis ne pas être trop intrusifs, disons.
Mme Vien :
Puis une dernière question, M. Bourgoin.
Je comprends quand vous dites : Ça pourrait diminuer
la concurrence. Ce n'est certainement pas le but recherché. Vous avez tout à
fait raison, là. Vous dites ça parce que ce qui pourrait être contraignant,
intrusif, abusif, ça pourrait venir décourager des entrepreneurs, puis qu'ils
quittent le secteur, puis qu'on se
ramasse... en fait, on a de moins en
moins d'entrepreneurs. C'est ça? Est-ce que je comprends bien votre
raisonnement?
M. Bourgoin
(Luc) : La préoccupation... parmi les enjeux, là, à l'ACQ, qu'on a, à
la lumière de l'information qu'on a
quand on consulte nos membres, les entrepreneurs aussi dans le secteur
institutionnel, commercial et industriel, la préoccupation première, en tout cas, une des premières, c'est la
lourdeur administrative et la complexité réglementaire. Alors, quand on
en ajoute, c'est souvent l'élément supplémentaire qui peut décourager. Puis on
en entend. Ils sont découragés. Ils nous demandent de trouver des solutions
pour leur faciliter la vie. Mais là on arrive avec des mesures qui peuvent être
plus contraignantes, abusives et intrusives. Bien, il faut trouver une façon de
leur annoncer que ça va être encore pire. C'est tout simplement ça. Donc, c'est
de s'assurer qu'on ne dépasse pas cette limite-là.
Mme Vien : Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Busque) : Merci. Merci, Mme la ministre. Alors, pour les
prochaines 8 min 45 s, je vais céder la parole au député
de l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois.
M. Leclair : Merci beaucoup,
M. le Président. Bien, bonjour, messieurs. Merci d'être là. Bien entendu, moi, ce qui m'accroche le plus de votre mémoire, puis
dans votre verbatim que vous venez de nous dire, c'est que vous trouvez déjà ce système-là, là, avec la CCQ, et tout, là,
ce qui est l'embauche, un système qui est rigide, qui est lourd, puis,
pour la plus petite entreprise, vous dites que ces
gens-là en ont déjà par-dessus. Puis là, ici, nous, on pensait de dire :
On va limiter l'intimidation, on va refaire peut-être des structures pour les
gens qui siègent sur les conseils d'administration et blabla. Mais, vous, on
dirait que vous nos emmenez complètement ailleurs. Vous dites, là : Déjà,
là, le système, là... Est-ce que c'est ça
que je crois comprendre? Vous dites que le système est déjà lourd et rigide.
Avec le placement syndical, qu'on pensait qu'on faisait une avancée
et... j'aimerais juste que nous faisiez une image, là, du système.
Le Président (M. Busque) :
M. Bourgoin.
M. Bourgoin
(Luc) : D'abord, là, c'est clair, c'est important qu'on précise qu'on
appuie toutes les recommandations qui émanent du rapport de la
commission Charbonneau, celles qui ont été... et pour lesquelles le gouvernement donne suite actuellement. Et c'est
une très bonne nouvelle. Et ce qu'on dit, c'est que la façon dont on va,
disons, les mettre en place, il faut s'assurer que ça soit fait adéquatement.
C'est tout simplement ça.
Parce que les
buts recherchés, on est 100 % d'accord. Les objectifs recherchés quand on
parle d'intimidation, de violence,
quand on parle de sanctionner les contrevenants et ceux qui contreviennent à
multiples reprises, on est 100 % d'accord.
Il faut aller jusque-là puis il faut même aller plus loin. Mais c'est dans la
façon de le faire. C'est tout simplement ça et de cadrer, puis d'encadrer, puis de, disons, délimiter et établir
clairement quelles sont ces limites dans les pouvoirs. Et, si ça, c'est
fait, bien, tant mieux parce que l'objectif qui est recherché avec toutes ces
recommandations-là, on les appuie à 100 %.
Le Président (M. Busque) : M.
le député de Beauharnois.
M. Leclair : Bon, je vous amène sur un autre terrain. Lorsqu'on
parle de dire : On doit être capables d'avoir une saine concurrence, la commission
Charbonneau nous apportait à dire : Bien là, il y a
certains types de contrats... On le sait que, dans la construction, là, tu
as les gros joueurs, les moyens joueurs, les plus petits joueurs, les PME, et
tout. Ça fait qu'on ne peut pas
s'attendre que le petit joueur aille jouer dans les pattes du gros. Ce n'est
pas parce qu'il n'est pas fin, c'est parce que, monétairement, ce n'est
pas la même «ball game».
Mais est-ce que vous, vous voyez que, dans le
métier de la construction, depuis qu'il y a eu la commission Charbonneau, depuis qu'il y a eu différentes
structures, là, autant le placement syndical, et tout, est-ce que vous
voyez que la concurrence est plus équitable entre joueurs, que tout le monde a
accès plus qu'avant à soumissionner sur des contrats x, y? Cette saine
concurrence-là, la voyez-vous plus ou moins ou c'est comme avant?
M. Hamel
(Pierre) : Écoutez, c'est
difficile de répondre à la saine concurrence parce que, d'abord, on a
affaire à une pléiade de nouvelles
dispositions, des dispositions qui s'en viennent. Depuis 2012, le gouvernement
a adopté tellement de mesures, là,
depuis les cinq dernières années que... on a l'AMF, on a différents éléments,
là. Le projet de loi n° 33, le projet
de loi n° 35, le projet de loi n° 1, le n° 122 dans les
municipalités, ça change complètement. Je dirais qu'il y a des
initiatives du gouvernement pour favoriser ça. Et je vais prendre un élément
dans notre...
Quand on parle de concurrence ou de décourager
les petits, la notion de «sciemment», l'article 122.4, il y a deux notions de
«sciemment» à 122.4. Il y a sciemment falsifier ou détruire des documents puis
il y a sciemment transmettre des renseignements inexacts, O.K.? Falsifier des
documents, ce n'est pas correct, on est d'accord avec ça. Et, si «sciemment» est enlevé dans 124, il faudrait le limiter aux
documents, d'autant plus que ça, ça ouvre à une licence restreinte, la
falsification, en vertu de 122.4, comprenez-vous? Il y a un autre règlement
qui... Mais, pour la petite entreprise,
commettre une erreur de bonne foi dans la transmission de leurs documents puis
se retrouver à être... Parce que, quand
tu transmets le document puis tu dis : Ah! il faut que j'amende, en
amendant, tu annonces que toi, tu as commis une infraction, tu as transmis quelque chose d'inexact, donc tu
t'auto-incrimines inutilement. Ça, c'est le genre d'irritant qui fait en sorte que les gens haïssent la CCQ, les petites
choses... Bon, là, j'ai une infraction parce que j'ai commis, de bonne
foi, une erreur. Déjà, mon erreur va me coûter 20 % du salaire, ça te
coûte une fortune, en plus, j'ai une autre infraction.
C'est dans ce sens-là qu'on dit : Soyez
pertinents dans les choix que vous faites pour permettre aux petites entreprises, évidemment, de vivre à travers un
système qu'on a choisi, qui est lourd, mais essayez... rendons-le pas
trop lourd ou trop pénalisant comme tel, pardon, pour donner accès à ces
entreprises-là.
M. Leclair : Je vous entends très bien. Je pense
qu'effectivement, lorsque l'erreur est humaine, puis elle peut être humaine, puis je pense que de manger le gros coup
de barre pour une erreur humaine... et l'autre qui, sciemment, veut
contourner pour cacher, on fait affaire à deux mondes très différents.
Vous parlez
beaucoup des pénalités, que vous mettez vraiment les sanctions, deuxième
sanction, et doubler les prix. Donc,
j'imagine que, si on maintient cet angle-là, que sciemment... la personne est
attrapée pour fraude, lorsqu'on module
à la hausse, première, deuxième, troisième infraction, pour celle qui a la
réelle intention, lui, il devrait payer plus, là, si c'est lui qu'on
cherche à prendre.
M. Hamel (Pierre) : Je pourrais
peut-être le résumer différemment, O.K.? Il y a des infractions qui nous
apparaissent plus sévères que d'autres. La CCQ a des préoccupations sur la
conservation des documents, hein, la conservation
des registres. Quand on les a rencontrés, ils nous ont dit : Il y en a qui
nous disent que le chien les a mangés. Alors,
je comprends que les mettre dans le plat du chien, là, ce n'est peut-être pas
de la diligence raisonnable, on s'entend. Mais par contre il y a
d'autres éléments qui sont moins graves.
• (18 h 10) •
Ce
que je veux vous dire, c'est que, si, pour qu'elle puisse faire son inspection
ou son travail, les registres sont importants,
mettez l'accent sur la conservation des documents. Mais ne reprenez pas tout l'article pour enlever
«sciemment» partout. Comprenez-vous? Alors,
si vous enlevez le «sciemment» pour la falsification ou la destruction des
documents, on comprend pourquoi. C'est important, ces documents-là. L'autre
aspect, il est peut-être moins utile.
M. Leclair : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard) : Ça va? Merci
beaucoup, M. le député de Beauharnois. Nous allons maintenant du côté du député
des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard : Merci, merci. Merci pour votre mémoire. Je
voudrais savoir, dans l'industrie de la construction, est-ce qu'il y a beaucoup
de petites, petites entreprises, des cinq employés et moins?
M. Bourgoin
(Luc) : Oui. Une réponse
rapide. Oui, à peu près 80 %. Ça varie, là, année... 80 % des
entreprises embauchent cinq employés et moins, à peu près.
M. Picard : O.K. Je vous
amène là-dessus parce que... Je vais revenir au cellulaire, mais je comprends,
là, le jugement, là. Mais vous devez être au
fait aussi qu'il y a des applications maintenant sur les cellulaires
pour faire des paies, hein, quand on a quelques employés. Moi, j'ai des
amis qui sont dans la construction qui envoient leur temps à leur employeur par
messages textes. Mais je comprends, là, qu'au niveau personnel on ne peut pas
aller fouiller dans... Mais il y a-tu
une voie de passage qu'on peut trouver, là? Un petit entrepreneur qui fait ses paies avec une application, là, puis qui n'a pas d'ordinateur, il va falloir que
la CCQ soit capable de voir quelque
chose là, là. J'essaie juste de
voir... Mais je comprends, là, mais éclairez-moi.
M. Hamel
(Pierre) : Oui. Alors, essentiellement, là, lorsque tu as quelque
chose dans un appareil
électronique, tu peux le transmettre à une
imprimante. Comprenez-vous? Le pouvoir de la CCQ, c'est de les consulter, ces
documents-là.
M. Picard : On s'entend.
M. Hamel
(Pierre) : On s'entend?
M. Picard : Oui.
M. Hamel (Pierre) : Si c'est ça, mon application de cellulaire, puis
tu lui montres le cellulaire, puis il prend une photo du cellulaire, puis ça satisfait le représentant de la CCQ, il n'y en a pas, de problème. La seule chose qu'on ne veut pas, c'est que le
représentant de la CCQ...
Une voix : ...
M. Hamel (Pierre) : Exactement.
Comprenez-vous? Ça, ça va antagoniser les gens pour qui on essaie d'indiquer ça
pour rien.
M. Picard : O.K. Merci. Concernant la conservation des documents, actuellement, c'est quoi le délai pour la CCQ?
M. Hamel (Pierre) : Il n'y en a
pas.
M. Picard : Il n'y en a
pas.
M. Hamel (Pierre) : Je pense qu'il
n'y en a pas, sous toute réserve.
M. Picard : Mais, pour
le ministère du Revenu, vous devez conserver des documents pertinents.
M. Hamel (Pierre) : Je pense,
c'est six ans, là.
M. Picard : C'est six ans. Donc, les documents nécessaires
au ministère du Revenu, ça va jusqu'aux registres qui sont faits à la CCQ, le nombre d'heures, ces
choses-là. Je pense que oui, là, parce
que, lorsque le ministère du Revenu vérifie... Allez-y, si
vous voulez.
M. Roy
(Francis) : Bien, mes
registres des paies, évidemment que je dois les conserver. Par contre,
les feuilles de temps qui sont
exigées par la CCQ, par expérience, on ne m'a jamais demandé ça au sein
d'une vérification pour...
M. Picard : Bien, sauf que vous êtes conscient, j'espère, que
le ministère du Revenu pourrait les exiger quand même.
S'ils veulent valider vos registres de paie, ils pourraient demander des
feuilles. En tout cas, je vous dirais... je suis un ancien du ministère du Revenu, mais je ne suis plus là et je ne travaille pas pour
y retourner, faites-vous-en pas. Non, O.K. Non,
mais je comprends que, normalement, les délais du ministère du Revenu, c'est
correct pour la CCQ. Là, je comprends, les
registres, les feuilles de temps ne sont pas là. Mais ça, si, un jour, il y a
un problème, vous allez le gérer.
Dernière
question... On parle de l'article 123.4.5. Vous nous dites : Il y a
une obligation qui est faite. Ça fait suite à la recommandation 16 de la commission Charbonneau d'exiger de tous
les donneurs d'ouvrage qu'il apporte à la CCQ les situations
d'intimidation et de violence relative à un chantier. Vous dites de créer et de
mettre en place des mesures de sanction.
Qu'est-ce que vous voulez dire? Financières, administratives? Parce que, là, il
y a une obligation, mais il n'y a pas de sanction si on ne le fait pas.
M. Bourgoin
(Luc) : Tout à fait.
M. Picard :
C'est comme si on dit... C'est un voeu dans ce temps-là, tant qu'à moi.
M. Bourgoin
(Luc) : Exact. C'est comme ça qu'on l'a interprété. D'abord, on appuie
cette recommandation-là puis cette
modification-là au projet de loi. Il manquait juste un élément qui devait être
précisé, selon nous, qui permet... en fait, qui ferait en sorte qu'il y
aurait une application rigoureuse de l'obligation.
Et
quand on parle de sanctions, on utilise le terme «sanction» un peu au sens
large, là, mais ça pourrait prendre la forme, par exemple, d'une
imputabilité, par exemple, des dirigeants, des associations... des dirigeants,
par contre, des organismes publics visés.
Alors,
la forme, la nature de cette imputabilité-là resterait à être déterminée, mais
il faut... Ça prend quelqu'un qui est redevable, ça prend quelqu'un qui
doit rendre compte parce que, si c'est juste dire qu'il doit rapporter des
gestes d'intimidation ou de violence, c'est bien beau, là, mais, à quelque
part, ça prend un renforcement, puis on pense que l'imputabilité ou même une
veille de ce qui est fait, puis ce qui n'est pas fait, puis essayer de faire un
suivi peut-être quelconque... Mais
idéalement, là, la... Parce qu'on ne veut pas peut-être... «sanction», le
terme était peut-être fort, mais qu'il y ait une forme
d'imputabilité. Et ça, il resterait à être déterminé, mais ça, je pense que ça
créerait un incitatif à respecter cette obligation.
M. Picard :
C'est bon. Merci beaucoup. Terminé, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, messieurs, pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Je vous demande de ramasser vos documents
parce qu'il y aura des caucus dans cette salle. Merci.
(Suspension de la séance à
18 h 16)
(Reprise à 19 h 30)
La Présidente (Mme Richard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonsoir. La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je
demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 152, Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine du travail
afin principalement de donner suite à certaines recommandations de la
Commission Charbonneau.
Nous
entendrons ce soir les organismes suivants : l'Association des
constructeurs de routes et de grands travaux du Québec, l'Association
des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec et le
Conseil provincial du Québec des métiers de la construction.
Je souhaite la
bienvenue à l'Association des constructeurs de routes de grands travaux du
Québec. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vais vous demander de vous
présenter et de nous présenter également les personnes qui vous accompagnent et je vous donne un temps
maximal... environ 10 minutes pour faire votre présentation. Vous avez maintenant
la parole.
Association
des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec (ACRGTQ)
Mme Bourque
(Gisèle) : Merci. Alors, je suis accompagnée, à ma droite, de
Mme Marie-Claude Houle, présidente de
notre conseil d'administration, et, à ma gauche, Me Christian Tétreault,
directeur du service des relations du travail et des affaires
juridiques. Moi-même, Gisèle Bourque, je suis la directrice générale de l'association.
Alors,
nous vous remercions tout d'abord de l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui de vous présenter le point de
vue de l'ACRGTQ à l'égard
du projet de loi n° 152. Nous nous permettons de vous rappeler que
l'ACRGTQ, incorporée en 1944, représente la majorité
des principaux entrepreneurs et fournisseurs oeuvrant dans la construction
de route, d'ouvrages de génie civil et de
grands travaux. Elle est la seule représentante attitrée du secteur génie civil et voirie
de l'industrie de la construction.
En vertu de la loi R-20, l'ACRGTQ a le mandat de la négociation, de l'application et du suivi de la convention collective
applicable à ce secteur. À ce titre, elle représente près de 2 500 entreprises
actives au sein de l'industrie de la construction, lesquelles emploient
plus de 35 000 salariés ayant travaillé près de 30 millions d'heures
en 2017.
D'entrée de jeu, nous
tenons à souligner que nous accueillons favorablement la majorité des
modifications législatives proposées par le projet de loi n° 152.
Globalement, nous endossons les mesures qui visent à éradiquer l'intimidation,
à assurer une saine et loyale concurrence et à affermir la conformité. Nous
applaudissons également l'initiative de protéger les sonneurs d'alarme ou les
informateurs.
Le rapport final de la commission Charbonneau
propose 60 recommandations, dont plusieurs ont déjà été introduites au cadre législatif en vigueur au
Québec et d'autres sont sous le coup d'une analyse par les diverses
commissions parlementaires. L'ACRGTQ a accueilli favorablement la majorité des recommandations
du rapport final.
Parmi la
trentaine des modifications législatives proposées par le projet de loi sous analyse,
l'ACRGTQ souhaite commenter seulement quatre de ces mesures. Tout d'abord,
l'article 6, concernant la consultation ou l'utilisation des appareils électroniques ou informatiques. Nous
comprenons l'objectif poursuivi par le législateur d'accroître les
pouvoirs de la CCQ en matière d'inspection
afin de favoriser la conformité, mais la proposition, telle que
libellée, nous est apparue pour le
moins ambiguë. S'agit simplement d'obliger l'employeur de permettre aux représentants de la CCQ d'utiliser le matériel informatique ou électronique
appartenant à l'employeur sous sa supervision? Si tel est l'objectif poursuivi,
nous nous interrogeons sur la nécessité d'introduire à la loi R-20 le
texte proposé.
En effet, le
cadre législatif existant investit la CCQ de larges pouvoirs d'enquête lui
permettant de consulter et d'exiger d'un
employeur la reproduction des documents requis en vertu de la loi R-20.
Cependant, une tout autre portée peut se
dégager de la disposition telle que libellée dans le projet de loi. Cette
disposition permettrait-elle à un représentant de la CCQ d'exiger de
quiconque se trouvant dans un établissement d'un entrepreneur en construction
ou sur les lieux d'un chantier de
construction de lui remettre tout appareil électronique ou informatique, tel
que cellulaire ou tablette, pour utilisation, consultation et examen de
son contenu sans autre forme de supervision ou de contrôle? Si tel était le
cas, l'ACRGTQ considère qu'il pourrait en
résulter une grave atteinte à la vie privée et une entorse à la protection
contre les fouilles ou saisies abusives.
Dans l'affaire Fearon, la Cour suprême nous
enseigne que l'expectative de vie privée est particulièrement importante en ce qui a trait au contenu
d'un téléphone cellulaire, d'une tablette ou d'un autre appareil
informatique et qu'une preuve obtenue
en violation de cet intérêt singulièrement important en matière de respect de la
vie privée serait susceptible de déconsidérer l'administration de la
justice.
Si
l'intention du législateur est d'autoriser un représentant de la CCQ à
consulter, à utiliser et à faire l'examen de tout appareil électronique
ou informatique se trouvant dans un établissement ou sur un chantier de
construction, nous suggérons que l'exercice de ce nouveau pouvoir soit mieux
encadré.
Deuxième
point, l'article 13, proposant l'allongement de la période de prescription en
matière pénale. En vertu de cet
article, le législateur propose que le délai de prescription en matière pénale
passe d'un à trois ans. De plus, le point de départ à partir duquel le délai se compute est également modifié. Nous
considérons important d'avoir un système de justice pénale efficient et permettant de sanctionner de
matière diligente les intervenants de l'industrie qui ne respectent pas
les règles en vigueur. Nous sommes aussi
conscients des impératifs de célérité des enquêtes et du processus judiciaire.
Dans le cas de la préparation d'une défense de diligence raisonnable, le simple
écoulement du temps peut compromettre la cueillette d'informations et la
recherche de témoins, particulièrement dans une industrie caractérisée par la
grande mobilité de sa main-d'oeuvre. Nous
reconnaissons qu'il n'est pas facile de trouver un juste équilibre entre le
délai requis pour initier les
procédures judiciaires et le droit de défense des justiciables. Cela nous amène
à s'interroger sur la pertinence d'augmenter
le délai de prescription pour les infractions prévues à la loi R-20. En
effet, la majorité de ces infractions ne correspondent pas aux
paramètres reconnus par la commission Charbonneau pour justifier la
recommandation n° 37.
Les infractions prévues à la loi R-20 ne
sont pas le résultat d'une pratique de longue date ni d'un stratagème caché et complexe, ne nécessitent pas une longue
enquête et ne sont pas assimilables aux défis analysés par la commission
Charbonneau.
Par ailleurs,
le projet de loi ne fait pas qu'allonger le délai de prescription, mais, qui
plus est, il modifie le point de départ
de la computation du délai. Actuellement, sauf les infractions visées à
l'article 109.1, la prescription débute à compter de la date de la perpétration de l'infraction. Or,
le projet de loi suggère que la prescription débute à partir de la
connaissance de l'infraction par le
poursuivant. C'est donc dire que le délai, qui serait allongé de un an à trois
ans, débute uniquement à partir du moment
où le DPCP reçoit le dossier de la CCQ. Retenons que le poursuivant n'est pas
la CCQ, mais bien le DPCP. Ainsi,
selon les modifications proposées, il pourrait s'écouler jusqu'à sept ans
depuis la perpétration de l'infraction alléguée avant que la prescription
ne soit acquise.
Il nous
apparaît que cette situation ne répond pas aux besoins de célérité des enquêtes
et de la procédure pénale. La modification
proposée génère des délais beaucoup trop longs et non justifiables en fonction
du degré de complexité de l'enquête.
De tels délais portent indéniablement atteinte à l'équilibre nécessaire entre
le délai requis pour mener une enquête efficace
et le droit à une défense pleine et entière. Le délai d'un an à compter de la
date de perpétration de l'infraction nous apparaît suffisant pour
permettre à la CCQ d'exercer adéquatement ses devoirs et responsabilités pour
la majorité des infractions prévues dans la loi R-20.
Le troisième point, le paragraphe 1° de
l'article 21, modifiant la prescription civile. Le recours civil auquel fait référence l'article 21 du projet de loi vise
la mise en oeuvre des dispositions de la convention collective. En
définitive, lorsque l'employeur ne paie pas
le travailleur conformément à la convention collective, la CCQ peut initier un
recours devant les tribunaux de droit commun. Le fait de ne pas payer un
travailleur conformément à la convention collective peut résulter en deux
situations distinctes.
D'une part,
il peut s'agir d'une interprétation faite de bonne foi des dispositions de la
convention collective. Dans ce
premier cas, le recours civil de la CCQ est assimilable à la procédure de grief
utilisée dans les autres secteurs d'activité économique ou à la
poursuite pécuniaire en vertu de la Loi sur les normes du travail.
En
milieu de travail syndiqué lorsque l'employeur et le syndicat ne s'entendent
pas sur l'interprétation de la convention
collective, les parties utilisent la procédure d'arbitrage. Cette procédure est
rapide et adaptée au domaine des relations
du travail. Lorsque le recours civil provient d'une mésentente sur la portée
des clauses de la convention collective, l'employeur respecte chacune de
ses obligations en ce qui concerne la production du rapport mensuel, la tenue
d'un registre et les autres formalités administratives. Il ne s'agit pas d'un
stratagème caché.
Dans une telle
situation, le délai d'un an nous apparaît déjà long pour permettre aux parties
de connaître l'étendue des obligations
résultant du contrat de travail. D'ailleurs, en milieu de travail non syndiqué,
le délai de prescription est également de un an tel que prévu par
l'article 115 de la Loi sur les normes du travail.
• (19 h 40) •
D'autre
part, le non-respect de la convention collective peut être une manoeuvre
anticipée, planifiée et voulue d'un employeur.
Dans ce cas, l'employeur accompagne cette démarche de remises clandestines et
de fausses déclarations au registre
obligatoire, à la liste de paie et au rapport mensuel obligatoire. Puisque
l'enquête de la CCQ est plus laborieuse et que la collaboration des parties n'est assurément pas optimale, nous
sommes d'accord pour que le délai de
prescription se compute à partir de la date où la CCQ a connaissance des faits
qui donnent lieu à l'action civile.
Or,
c'est précisément ce que l'actuel paragraphe 1 de l'article 122 prévoit. Ainsi,
lorsque nous sommes en présence d'une
situation où l'employeur élude sciemment ses obligations contractuelles, la CCQ
bénéficie d'un délai d'un an pour mener
l'enquête et initier les recours judiciaires, et ce, à partir du moment où elle
a connaissance des faits qui donnent lieu
à l'action civile. En conséquence, nous recommandons de maintenir le libellé
actuel de l'article 122, paragraphe 1.
Quatrième
et dernier point : le paragraphe 4° de l'article 21, suggérant de supprimer le terme
«sciemment» des éléments constitutifs de l'infraction prévus au paragraphe
4 de l'article 122 de la loi R-20.
La
modification proposée consiste à supprimer le terme «sciemment»
du texte constitutif de l'infraction. En retirant le critère de connaissance ou d'intention, nous
craignons que la modification proposée ait comme conséquence d'entraîner
la responsabilité pénale d'une personne qui aurait agi de
bonne foi. Ainsi, la responsabilité pénale serait encourue dès lors qu'une personne transmet un document qui contient
une fausseté ou une inexactitude, sans même que cette personne ait
participé à la commission de l'infraction et alors qu'elle ignore la situation.
Accepter la proposition de modification pourrait
entraîner l'effet délétère que la Commission Charbonneau souhaitait prévenir.
Pour éviter de générer des situations injustes, nous vous suggérons de
conserver le texte actuel.
Merci de votre
attention. Nous sommes disposés maintenant à écouter vos questions.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, Mme Bourque, pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Vien :
Bonjour, Mme Bourque. Bonsoir, en fait, et bonsoir à vous deux, à vos
acolytes.
Vous
n'êtes pas les seuls à vous inquiéter, justement, du fait que, dans le projet de loi là n° 152, il puisse y avoir la possibilité, pour
la CCQ, d'avoir accès à des appareils électroniques, notamment, bon, tout ce
qui est cellulaires, tablettes, etc. Donc, ce qui a été exprimé, c'est... on
craint un glissement, on craint même des débordements. C'est effectivement le point de vue que vous avez. Puis je remarque aussi que les
pouvoirs qui sont donc nouveaux et... nouveaux ou... En tout cas, vous, vous dites : Ce que nous avons dans
la loi actuellement est suffisant, là. C'est bien... On a bien
compris votre point de vue?
Mme Bourque (Gisèle) : Oui. Oui, bien, écoutez, je vais passer la
parole à Me Tétreault, qui est le spécialiste en la matière en nos bureaux.
M. Tétreault (Christian) : Spécialiste, c'est un grand mot. Bon, d'abord, évidemment,
j'ai eu l'avantage d'entendre les représentations qui ont été formulées jusqu'à
présent, là, sur cette question-là, et c'est difficile d'être original, là,
au moment où se parle, sur cet élément-là.
Mais soyez assurée qu'on endosse les propos qui ont été tenus par Me Hamel
et par M. Robert, là, Me Robert,
d'ailleurs, de l'AECQ, sur la problématique soulevée par la proposition de
modification.
Et
à une des questions qui a été posée un peu plus tôt, dans le courant de la
journée, à savoir est-ce que les voeux exprimés
ou les souhaits exprimés par Mme Lemieux, est-ce que c'est rassurant du
côté de la partie patronale, j'ai envie de vous dire que ça fait
longtemps que j'ai perdu la naïveté de me fier sur les voeux des gens, qu'ils
expriment devant les commissions parlementaires, et je préfère m'en tenir au
texte de loi tel qu'il est suggéré. Puis je comprends que Mme Lemieux et la Commission de la
construction du... est animée de bonnes intentions, mais il n'en demeure pas
moins que le texte, tel qu'il est formulé, prête à contestation et soulève des
questions de respect des droits fondamentaux.
Une
autre question qui a été posée... Et d'ailleurs une des remarques qui étaient
formulées par Mme Lemieux sur cette
question-là, c'était de dire : Oui, mais aujourd'hui il faut se mettre au
goût du jour. Maintenant, tous les documents, que ce soient les cartes de temps, les systèmes d'enregistrement, la
liste de paie, tout ça est sur support informatique, et il faut permettre à la commission de pouvoir avoir
accès aux documents qui sont effectivement sur support informatique. Ce
à quoi, évidemment... on endosse cette proposition-là.
Par
ailleurs, ce qu'on comprend, c'est qu'il y a un article actuellement qui, à mon
avis, s'applique pour régler cette difficulté-là, qui est l'article 81,
paragraphe e de l'actuelle loi. Et je me permets peut-être de le citer en
disant que la commission, là, elle a
pouvoir, notamment, «à toute heure raisonnable, examiner le système
d'enregistrement, le registre obligatoire
et la liste de paie de tout employeur, en prendre des copies ou extraits,
vérifier auprès de tout employeur et de tout salarié le taux [de]
salaire, la durée du travail et l'observance des autres clauses d'une
convention collective». Et d'ailleurs c'est
un peu là-dessus que la jurisprudence
s'est appuyée pour dire que la commission, à
l'heure actuelle, avait la possibilité, effectivement, d'exiger de prendre connaissance du contenu de documents qui sont sur support informatique.
Alors, c'est un peu dans ce sens-là. Puis nous, on dit... bien, on pense que c'est inutile d'ajouter cet
élément-là ou d'inclure au projet de loi la modification proposée. De surcroît, la proposition, et je le dis avec beaucoup de respect
pour celui qui l'a rédigée, mais, à mon
avis, elle est ambiguë, et on a de la difficulté à comprendre exactement quelle
est la portée qu'on veut donner à la
proposition de modification. Je serais beaucoup plus à l'aise, par exemple, si
on restreignait le fait de pouvoir consulter des équipements
informatiques qui appartiennent à l'employeur. Déjà, ce serait circonscrit,
parce que, là, c'est n'importe qui qui se
trouve sur un chantier de construction ou dans un établissement de l'employeur,
qui aurait un appareil informatique, qui pourrait se voir exiger de la part de
l'inspecteur de la CCQ la possibilité d'utiliser l'équipement informatique. Là,
je vois que vous avez d'autres questions.
Mme Vien :
Non, non, ça va. En fait, Mme Bourque, c'est ce que vous souleviez tantôt.
Ce qui nous inquiète, notamment au
niveau du cellulaire, c'est que c'est large, c'est flou, puis on ne sent pas
que c'est circonscrit, il n'y a pas de contrôle.
Mme Bourque
(Gisèle) : C'est très large. C'est très large.
Mme Vien :
Bien. Bien, écoutez, moi, honnêtement, là, ça fait le tour de mes questions,
là, parce qu'on a beaucoup parlé... on se
rend bien compte, là, que c'est l'élément qui suscite beaucoup, beaucoup,
beaucoup de questionnement chez nos groupes, hein? Je vais laisser la
parole aux collègues là-dessus.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, Mme la ministre. Nous allons
maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois,
vous avez la parole.
M. Leclair :
Merci, Mme la Présidente. Alors, merci d'être là. On va tenter de vous
questionner pour être certains qu'on comprenne très bien votre mémoire.
D'entrée de jeu, j'aimerais, premièrement, comprendre que c'est qu'il y a de si important dans les cellulaires des
travailleurs et travailleuses ou entrepreneurs pour qu'on veuille
absolument prendre un cellulaire. Qu'on leur en achète, à la CCQ, des
cellulaires. Est-ce que c'est rendu vraiment une marque de commerce? Il y a-tu tant de fraude que ça qui se
fait là, que la CCQ se fait passer le pion parce que les cellulaires
existent?
M. Tétreault (Christian) : Oui, écoutez, la question... À notre
connaissance, là, il n'y a pas tant de fraude, comme vous le mentionnez.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que... Pourquoi on s'attarde au contenu...
pourquoi on fait des représentations
particulièrement en ce qui concerne les cellulaires ou les tablettes, c'est
qu'il y a des décisions qui ont été rendues
par les tribunaux où on a reconnu que le contenu de ces équipements-là,
l'individu, donc, qui en était propriétaire avait une expectative, une
attente importante quant au respect au droit à la vie privée. Alors, tu sais,
le contenu d'un téléphone, ce n'est pas
qu'un texto qui est envoyé à l'employeur comme quoi on avait travaillé de telle
heure à telle heure, là.
M. Leclair :
Mais, dans la vraie vie, excusez mon innocence, là, mais, dans la vraie vie,
là, moi, je suis votre employé, vous êtes
mon employeur. Vous me dites : Guy, veux-tu rentrer demain, à
4 heures ou, je ne le sais pas trop, samedi? Je comprends tout
l'aspect législatif de ça ou plus juridique de dire : Ça, ton appareil est
personnel, on ne touche pas à ça. Ça va prendre vraiment un mandat policier.
Mais, au-delà de ça, là, je vous réponds : Oui, je vais faire quatre heures. On se parle de surtemps, pas
de surtemps. Vous, vous êtes mon employeur, vous êtes responsable de rentrer, à la fin de la semaine, que vous m'ayez
dit de faire huit heures, quatre heures, j'en ai fait six, à la fin de la
semaine, il faut que vous rentriez mes données, mes heures, puis, normalement,
si vous êtes un bon citoyen, vous déclarez les bonnes heures, vous me payez le
bon tarif et vous avez à le déclarer puis à le mettre dans vos registres.
Alors,
même si quelqu'un de la CCQ vient jouer dans mon cellulaire, puis on lui
donnerait le droit, on va finir la semaine,
puis je vais te dire si j'ai fait 62 heures, ou 72 heures, ou
42 heures. Il y a-tu tant de données que ça ou des choses qui se disent tant que ça? Moi, je ne serais pas
trop gêné de prêter mon cellulaire, là, vous allez voir des
conversations d'affaires, mais il n'y a pas de... la place cachée au monde, là.
M. Tétreault (Christian) : Je suis un peu étonné de la remarque que vos
formulez. Je n'ai pas l'impression que la majorité des parlementaires
seraient enclins à donner leur appareil cellulaire à un représentant de l'État
pour en examiner le contenu.
M. Leclair : Vous allez voir que ma blonde, elle boit beaucoup de lait :
Apporte du lait! Apporte du lait! Apporte du lait!
M. Tétreault (Christian) : Mais ça reste que c'est votre vie privée, là.
Vous ne voulez pas nécessairement qu'un représentant de l'État ait
connaissance...
M. Leclair :
Oui, oui, mais, c'est correct. Je ne me suis pas trop... je ne me suis pas
trompé sur le lait.
M. Tétreault (Christian) : Vous ne voulez pas nécessairement qu'un
représentant de l'État ait connaissance des mandats qui vous sont
confiés par votre conjointe, là.
• (19 h 50) •
M. Leclair : Bien, c'est ça, je trouve ça spécial. Je
comprends le côté juridique des cellulaires
et la portée d'un appareil personnel,
mais... Bref, peut-être qu'il me manque un bout, que j'aurais dû questionner
Mme Lemieux un peu plus là-dessus, mais j'ai manqué de temps.
Mais
je reviens sur un autre point que je
trouve... j'aimerais que vous
m'expliquiez. Vous dites : On a, avec les conventions collectives, une possibilité de faire un grief sur de l'interprétation au lieu de mettre des
sanctions. Je comprends, sur du normatif des fois, on peut dire : Moi,
je l'ai compris de même, on peut jouer la game, puis on peut vraiment l'avoir compris d'une autre
manière, les écritures, puis les interpréter. Mais, sur des salaires, c'est
assez clair et net, là. C'est taux simple, taux et demi, taux double puis après
40 heures.
Alors,
j'aimerais comprendre pourquoi vous dites : Il y a quand même
un risque d'interprétation face au salaire. Vous avez dit ça tantôt.
J'aimerais comprendre le sens.
M. Tétreault
(Christian) : Oui, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de risques
d'interprétation face aux salaires. Ce qui
peut arriver, par contre, c'est qu'il peut y avoir des questions
relatives à l'horaire de travail applicable sur un chantier. Est-ce que,
par exemple, puis je vous donne un exemple simple, est-ce que l'horaire de
travail applicable au chantier est un
horaire à 40 heures par semaine à raison de huit heures quotidiennes ou est-ce
que c'est un horaire qui est à 45
heures à raison de neuf heures par jours? Alors, il y a des litiges qui
résultent d'une question relative à l'application de l'horaire, de
déterminer quel est l'horaire qui est applicable sur un chantier. Évidemment,
il y a des conséquences importantes parce
que, si c'est 40 heures, puis on en a fait 45, bien, il y a un cinq heures
à taux majoré qui est payable.
Alors,
il arrive, dans certaines circonstances, qu'il y a une ambiguïté sur la portée
de la convention collective qui a des conséquences sur la paie que
l'individu a droit, là. Ça ne vous éclaire pas. Je vois que vous avez un...
M. Leclair : C'est parce que je me demande comment est-ce qu'on peut l'interpréter.
À part de dire qu'on ne fait pas le
même calcul, moi, je dis que j'ai travaillé 42 heures, vous dites : Non,
tu en as fait juste 41 parce que tu as pris ton break, ou je ne sais pas
trop, ou tu es allé manger l'autre jour.
M. Tétreault (Christian) : Non, c'est une question... Oui. C'est que la
question est plus complexe que ça, là. Ce n'est pas simplement de savoir... Tu sais, quand tout le monde s'entend
que l'horaire applicable, par exemple, est de 40 heures par semaine puis qu'on en a fait 41, tout le monde s'entend que
l'individu a droit à 40 payées à taux simple puis une heure à taux
majoré. Ça, on s'entend là-dessus. Ce n'est pas de là qu'origine la difficulté.
C'est
que, dans le secteur de la construction, particulièrement dans le secteur génie
civil et voirie, vous avez de multiples types de chantiers avec de
multiples horaires de travail qui sont variables d'un chantier à un autre. Vous
pouvez avoir des chantiers qui sont à 50
heures par semaine, des chantiers qui sont à 40 heures par semaine, des
chantiers qui sont à 45 heures par semaine,
et ainsi de suite. Alors, il peut y avoir un questionnement à savoir, sur ce
chantier-là, quel était l'horaire applicable. D'où le fait que...
Si,
par exemple, la CCQ soutient que le chantier sur lequel on travaille, c'est un
horaire qui est à 40 heures, alors que
l'employeur considère que c'est un horaire qui est à 45 heures, bien, il peut y
avoir une question d'interprétation des dispositions de la convention
collective pour déterminer quel horaire est applicable. Et là ce qu'on
comprend, c'est que la CCQ va initier des
recours devant les tribunaux de droit commun, parce qu'il n'y a pas d'arbitrage
de grief pour réclamer l'application
des conventions collectives, ça se passe devant les tribunaux de droit commun.
Là, la CCQ va initier le recours
devant le tribunal de droit commun, et là il va y avoir une décision qui va
être rendue par le tribunal, à savoir quel était l'horaire qui était
applicable ou pas.
Mais on comprend que
plus on s'éloigne dans le temps, bien, plus ça complexifie les choses. Pour
nous, c'est... Déjà qu'un délai d'un an pour
que les parties puissent connaître l'étendue de leur convention collective ou
des obligations que chacune des parties doit assumer, bien, c'est déjà un long
délai, là.
M. Leclair : Puis j'aimerais que vous m'expliquiez par un exemple peut-être simple,
là, parce, que si vous le faites trop
compliqué, je ne vous suivrai pas, mais vous dites : Ça modifie aussi le
point de départ, là, de l'analyse. Donc, si la CCQ est en train
d'analyser ou enquêter, c'est juste lorsqu'elle envoie leurs propres résultats
d'enquête que le départ est là? Est-ce que c'est ça que je comprends?
M. Tétreault (Christian) : Vous avez tout à fait compris. Alors,
actuellement, le point de départ de la prescription se situe au jour où
l'infraction a été commise, O.K.? Alors là, ce qui est proposé, c'est que c'est
au moment où le poursuivant prend connaissance de l'infraction, le poursuivant
n'étant pas la Commission de la construction du Québec, mais étant le Directeur des poursuites criminelles et pénales.
C'est lui qui est le poursuivant en vertu de l'article 14 ou 9, je ne
sais plus lequel, là, du Code de procédure pénale. Alors donc, le délai de
trois ans va se computer à partir du moment
où la CCQ va transmettre son dossier au DPCP, qui, lui, bénéficiera, à partir
de ce moment-là, d'un délai de trois
ans pour initier le recours devant les instances pénales. Et là, évidemment,
là, puis puisque vous me donnez l'occasion...
M. Leclair :
Oui, oui, allez-y.
M. Tétreault
(Christian) : ...on comprend que, si, par exemple, pour une raison x,
un délai... en fait, la commission laisse traîner sur son bureau un dossier soit
parce que l'inspecteur s'est absenté, ou peu importe, peu importent les raisons, puis là que ça prend, mettons, deux
ans avant que le dossier soit acheminé au Directeur des poursuites criminelles et pénales, bien là il
s'accumule encore un autre délai de trois ans avant que la procédure soit
initiée, et là on se ramasse, mettons, à cinq ans. Dans l'exemple...
Et
la plupart des infractions qui sont émises en vertu de la loi R-20, à part
celles relatives à l'intimidation et celles relatives au travail au
noir, la plupart des infractions ne sont pas des infractions complexes, là. Si,
par exemple, un inspecteur se présente aujourd'hui sur un chantier, constate qu'au chantier l'employeur a trois apprentis,
deux compagnons, donc qu'il y a
plus d'apprentis que de compagnons, alors qu'il y a une disposition réglementaire qui prévoit qu'on doit avoir un nombre
égal de compagnons et d'apprentis sur le chantier, on n'a pas besoin d'une
longue enquête, là, pour comprendre qu'une
infraction a été commise. Or, s'il faut attendre cinq ans avant que le constat
d'infraction soit émis dans les circonstances dont je viens de discuter avec vous, c'est évident que, quand
l'employeur reçoit son constat d'infraction et qu'il essaie de reconstituer
la chaîne des événements pour essayer de présenter une défense de diligence
raisonnable, cinq ans plus tard, là, je vous
le dis, il n'y a plus grand monde qui se souviendra de ce qui s'est passé le 6
février 2018, là, tu sais.
Alors, c'est ça,
la problématique. Il faut avoir oeuvré du côté de la défense pour
savoir qu'actuellement, même en fonction
d'un délai d'un an à partir de la perpétration de l'infraction, c'est déjà...
souvent, on est obligé de dire à l'employeur, parce qu'il y a une impossibilité
de reconstituer les faits ou reconstituer la chaîne des événements...
La Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup, M. Tétreault. Malheureusement, c'est tout le temps que
disposait l'opposition officielle. Maintenant, nous allons vers le deuxième
groupe d'opposition. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la
parole.
M. Picard : Merci, Mme
la Présidente. Merci d'être là ce
soir. Je comprends bien, comme disait tantôt Mme la ministre, là, vos réticences concernant les cellulaires,
les tablettes, les portables aussi. Vous avez entendu Mme Lemieux
cet après-midi, elle ne vous a pas convaincus du tout?
M. Tétreault
(Christian) : Pas du tout. L'exemple qu'elle a donné est un exemple
qui, à notre avis, est déjà
couvert par les pouvoirs que la CCQ a en vertu de la loi actuelle.
M. Picard : Il y a-tu
une voie de passage qu'on pourrait trouver?
M. Tétreault
(Christian) : Bien, c'est-à-dire que je pense qu'on pourrait encadrer mieux cette disposition-là. D'abord, comme je disais tantôt,
je pense qu'on pourrait s'assurer que l'on permette à un inspecteur de la CCQ
de vérifier le contenu des appareils
informatiques lorsque le propriétaire de cet équipement-là est effectivement l'entreprise. Déjà, à la base,
un équipement informatique qui appartient à une entreprise bénéficie moins de
l'expectative de vie privée qu'un téléphone,
un appareil qui appartient à quelqu'un qui l'utilise pour des fins privées également.
On pourrait aussi exclure de
l'équation... ou préciser la nature des appareils qu'on veut... au sujet duquel
on veut permettre l'inspecteur de faire une vérification ou de faire une
utilisation. Puis, de là, il faudrait exclure, un peu comme ce qui a été
proposé un peu plus tôt, les téléphones
cellulaires et les tablettes. Juste
en modulant avec ces deux éléments-là, on a quelque chose qui protège plus.
M. Picard : O.K. Pouvez-vous m'indiquer si les tablettes, les
cellulaires sont utilisés sur les chantiers à des fins de relevés de
temps ou d'autres choses? Je ne le sais pas, là.
M. Tétreault (Christian) :
Assurément qu'il y a, dans certaines circonstances, l'utilisation de tablettes
ou de téléphones cellulaires qui sont utilisés pour envoyer de l'information au service de comptabilité, qui, lui, fait le traitement ensuite
pour faire la paie. Ça, probablement, oui, ça existe. Mais, en même temps, le
récepteur est une entreprise de construction,
qui, lui-même, doit traiter cette information-là et maintenir à jour un certain nombre de documents
tels que la liste de paie, le registre, les feuilles de temps, etc., là.
Tout ça est...
M. Picard : En fin
de compte, c'est des feuilles de
temps virtuelles, on pourrait dire ça, si, au lieu d'avoir une feuille
de temps, une carte...
M. Tétreault
(Christian) : On peut dire
ça, oui. Oui. Puis, en même temps, l'explication qui vous était donnée par M. Hamel cet après-midi, il disait :
Écoute, à partir du moment où il y a, sur un téléphone
cellulaire, une information de cette nature-là, on peut demander à quelqu'un
de la transmettre pour la reproduire, en bout de piste. Ça, je pense que la CCQ
a l'autorité de faire ça.
• (20 heures) •
M. Picard :
O.K. Dernier point. Vous demandez un ajout, là, concernant un comité, là. Vous
dites qu'il y a une ambiguïté quant au financement d'un comité pour la
résolution de problèmes, là. Pouvez-vous expliquer un peu la
nature?
M. Tétreault (Christian) : Oui.
En fait, d'abord, à l'article 61, on autorise les parties à inclure, dans leur convention collective, une procédure qui vise à
régler les conflits de juridiction de métier. Alors, ça, c'est souvent un
débat qui est sensible sur les chantiers de construction. En fait, telle tâche
appartient à quel métier, hein? Et souvent, bien, il y a des revendications assez vigoureuses, là, par rapport à ça. Et,
dans les faits, on sait, les parties, les partenaires de l'industrie, se sont effectivement prévalues de
cette possibilité-là d'inclure, dans la convention collective, un comité
de résolution de conflit de juridiction de métier.
Et
ça, ça existe depuis 1999. De 1999 jusqu'à aujourd'hui, les activités de ce
comité-là ont toujours été financées ou les déboursés ont toujours été
payés par la CCQ, O.K.? En 2011, on a inclus une disposition qui prévoit que
toute disposition de
la convention collective qui accorde à la CCQ une obligation qui n'est pas
autrement prévue à la loi, bien, c'est
considéré comme étant nul et non applicable. Et, en 2015, la CCQ s'est appuyée
sur cette disposition-là pour nous dire qu'on leur créait une obligation
et qu'ils ne voulaient plus financer l'activité du comité.
M. Picard :
Là, actuellement, c'est financé par les employeurs et le syndicat?
M. Tétreault (Christian) : Non, jusqu'à présent, c'est toujours financé par
la Commission de la construction du Québec,
qui nous a dit qu'elle accepterait de voir aux déboursés générés par la
formation de ce comité-là jusqu'à tant que les nouvelles conventions collectives entrent en vigueur. Et là les
nouvelles conventions collectives sont entrées en vigueur à la fin du mois de décembre 2017. On n'a pas encore
eu de comité de conflit de juridiction de métier qui a été mis en
oeuvre. Alors, qu'est-ce qui va arriver? Là, on nage en pleine ambiguïté. Il
faut comprendre...
M. Picard :
Vous voulez vous assurer que ça reste comme c'était.
M. Tétreault (Christian) : Exact parce que, dans le fond, c'est de codifier la pratique qui s'est installée
entre les parties, entre les partenaires de
l'industrie, incluant la CCQ, jusqu'à aujourd'hui. Il faut comprendre aussi que
c'est très sensible, cette question-là, puis ça concerne, en plus, un
règlement qui a été adopté par la CCQ. C'est un règlement... la définition des métiers est prévue dans un
règlement qui est adopté par la CCQ, puis la CCQ a comme mission de voir
à l'interprétation puis l'application de ce règlement-là, notamment.
M. Picard :
...information, on parle de quel ordre de grandeur de sous, là?
M. Tétreault (Christian) : Bien, écoutez, dans le secteur génie civil et voirie, là, je
pense que, dans la dernière année, il y a
eu deux comités de conflit de juridiction de métier qui ont été formés. Alors, je pense
que, dans les autres secteurs, il y a peut-être
eu un petit peu plus, dans le secteur institutionnel ou le secteur industriel notamment,
quelques comités de plus. Mais on ne parle assurément pas de sommes
importantes, là, O.K.?
M. Picard :
Merci. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, M. le député. Merci
beaucoup pour votre contribution à la commission.
Et je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place.
(Suspension de la séance à
20 h 4)
(Reprise à 20 h 6)
La Présidente (Mme Richard) : Donc, nous reprenons nos travaux.
Nous avons maintenant l'Association des... Nous reprenons nos travaux. Nous avons maintenant l'Association des
professionnels de la construction et de l'habitation du Québec. Madame messieurs, bonsoir. Bienvenue à
l'Assemblée nationale. M. Parent, je pense que c'est vous qui allez
débuter. Donc, peut-être nous présenter également les personnes qui sont avec
vous, et vous aurez 10 minutes pour faire votre exposé.
Association
des professionnels de la construction
et de l'habitation du Québec (APCHQ)
M. Parent
(Michel) : Alors, merci, Mme la Présidente. Bonsoir à Mme la ministre.
Bonsoir à Mmes, MM. les députés.
Merci infiniment de nous accueillir ce soir et de nous recevoir pour vous
exprimer nos préoccupations. Alors, je me présente, mon nom est Michel Parent de Logisco et M. R. Parent.
J'oeuvre dans la construction et dans l'immobilier depuis plusieurs années. Et puis mon deuxième rôle est
celui de vice-président du conseil d'administration de l'APCHQ. Alors à
mes côtés se trouvent Mme Nicole Robichaud, qui est directrice du service
de relations de travail de l'APCHQ, et Me Martin Villa, avocat-conseil de
l'APCHQ.
Alors,
l'APCHQ a été fondée en 1961 et regroupe maintenant 17 000 entreprises
membres oeuvrant en construction et
en rénovation résidentielle. Et la mission de notre association est de
développer et de faire valoir le professionnalisme de nos membres
entrepreneurs. L'APCHQ a aussi le mandat, au nom de 15 137 employeurs du
secteur résidentiel, de négocier la
convention collective qui encadre les conditions de travail de cet important
secteur d'activité économique. C'est
donc avec beaucoup d'attention que nous avons analysé le projet de loi, que
nous soumettons nos recommandations.
Maintenant,
afin d'aborder immédiatement les sujets qui nous intéressent, je cède la parole
à Mme Robichaud, qui présentera les arguments qui nous préoccupent
et que vous avez vus dans notre mémoire.
Mme Robichaud
(Nicole) : Mme la Présidente, je tiens à affirmer d'emblée que l'APCHQ
offrira toujours sa pleine
collaboration et soutien pour aider le gouvernement à assainir l'industrie de
la construction, à freiner les acteurs qui mettent en place des processus de collusion de manière à se soustraire à
volontairement de la portée des règles en vigueur, à contrer les
entreprises qui exploitent frauduleusement la confiance du public et à protéger
les sonneurs d'alarme dans le but de mettre fin une fois pour toutes aux actes
d'intimidation qui ont cours sur les chantiers.
Notre
industrie, qui est l'une des plus importantes du Québec, est composée
d'honnêtes entrepreneurs qui créent des emplois dans toutes les régions du Québec. Ces entrepreneurs s'emploient
à respecter les nombreuses et différentes règles pour faire fonctionner
leur entreprise et alimenter ainsi l'économie du Québec.
Que cette
belle industrie soit entachée par des agissements d'une faible minorité est
bien triste, et nous sommes heureux
de constater que le gouvernement désire adopter les recommandations de la
commission Charbonneau et mettre en place d'autres mesures ayant pour
but d'assainir l'industrie de la construction.
L'APCHQ
s'engage à appuyer le gouvernement dans sa démarche. Vous avez probablement
remarqué, à la lecture de notre
mémoire, que nous avons des appréhensions. En effet, selon notre analyse,
certaines mesures pourraient avoir des impacts
indésirables pour des entrepreneurs de bonne foi. C'est pourquoi nous proposons
des ajustements pour que les visées du gouvernement soient atteintes
sans que cela engendre des dommages collatéraux ou représente un recul des
droits individuels.
Plus précisément, nos recommandations porteront
sur les sujets suivants : nos préoccupations concernant la consultation des appareils électroniques et le
droit au respect de la vie privée, l'impact de l'augmentation des délais
de prescription sur les petits entrepreneurs, l'impact du retrait du mot
«sciemment» de l'article 122.
• (20 h 10) •
Commençons par les nouveaux pouvoirs d'enquête
offerts à la CCQ. L'APCHQ constate, à la lecture de l'article 6 du projet
de loi n° 152, que le gouvernement octroie de nouveaux pouvoirs aux
inspecteurs de la CCQ, notamment la
reproduction de renseignements contenus dans un appareil électronique. Nous ne
mettons pas en doute le renforcement
des pouvoirs d'inspection dévolus à la CCQ. Cependant, même en situation d'inspection, il y a des limites que l'inspecteur ne peut franchir sans qu'il n'y ait
de risque de contrevenir aux droits constitutionnels d'une personne, soit le droit au respect de la vie privée, lequel
droit est protégé par l'article 8 de la Charte canadienne des droits et
libertés. Des contestations
constitutionnelles sont à prévoir, et c'est pourquoi nous recommandons de ne
pas retenir la modification proposée concernant les appareils
électroniques à l'article 6 du projet de loi n° 152.
Traitons maintenant d'un des éléments qui nous
apporte les craintes les plus importantes, qui sont liées à l'augmentation du délai de prescription. Le projet
de loi n° 152 contient une série
de modifications visant à étendre le délai
de prescription pour le faire passer d'un an à trois ans. Nous comprenons la
logique de mettre un délai similaire à d'autres
lois. Cependant, l'application dans notre industrie pourra avoir des impacts
très négatifs pour de maints entrepreneurs.
Rappelons que
notre industrie est constituée à forte majorité de petites entreprises de cinq salariés et moins.
En fait, 83 % des entreprises ont cinq salariés et moins. Elles roulent bien,
mais elles sont loin de rouler l'or. Selon l'historique des dossiers de réclamation dans lesquels le
service de relations de travail de l'APCHQ a été impliqué au nom de ses membres du secteur résidentiel au cours des
dernières années, il a été fréquent de voir des réclamations dont le total a
oscillé entre 30 000 $ et
100 000 $, avec des dossiers plus rares qui ont pu atteindre ou
dépasser le cap des 150 000 $. De plus, les employeurs de notre industrie sont régulièrement
confrontés à des questionnements qui concernent l'assujettissement des travaux afin de déterminer si ceux-ci sont
assujettis à la loi R-20, et les réponses à ces questionnements sont
souvent difficiles à trouver.
Nous pensons
qu'une piste de solution consisterait à une étroite collaboration avec le
service de la CCQ chargé de l'application
des conventions collectives, qui pourrait être tenu de divulguer par écrit,
dans un délai de 72 heures, toute situation où surviendrait une
difficulté d'interprétation d'assujettissement.
L'APCHQ est donc très préoccupée du fait que
l'article 21 du projet de loi n° 152 puisse permettre de bâtir, à
l'endroit d'entrepreneurs ayant commis des erreurs de bonne foi, une imposante
réclamation couvrant trois années d'activités.
Selon notre expérience et notre analyse, cela pourrait contraindre des
entreprises honnêtes à fermer boutique, étant incapables d'assumer une telle réclamation. Nous demandons aux
parlementaires de conserver le délai de prescription à 12 mois.
Le dernier élément que nous mentionnerons en
allocution est le retrait du mot «sciemment» à l'article 122 de la loi R-20. Certes, nous comprenons que le
gouvernement veuille agir pour trouver et punir les malfaiteurs, mais, de
grâce, ciblons les personnes qui participent
intentionnellement à causer du tort à l'économie du Québec. Le mot
«sciemment» permet de faire la distinction
entre les entrepreneurs qui produisent involontairement un document contenant
un renseignement inexact et ceux qui produisent un faux document en
toute connaissance de cause.
Nous demandons de rectifier le tir dans le
projet de loi n° 152 pour que son adoption ne rende pas coupables d'honnêtes entrepreneurs et d'honnêtes
travailleurs. À la lumière de ces impacts, nous demandons aux législateurs
que le mot «sciemment» demeure inscrit au libellé de l'article 122,
paragraphe 4 de la loi R-20.
Enfin, Mme la Présidente, nous sommes persuadés
que le gouvernement peut adopter des dispositions pour déceler et punir les
malfaiteurs, les entrepreneurs malhonnêtes, sans que cela ait comme effet
d'associer ou de punir injustement
d'honnêtes entrepreneurs, en fait, ceux qui composent la vaste majorité de
notre industrie. Les recommandations que
nous avons formulées dans ce mémoire visent à proposer des avenues pour assurer
l'application des recommandations du rapport de la commission
Charbonneau, tout en évitant des impacts négatifs non désirés aux bons joueurs.
Maintenant,
il nous fera plaisir d'échanger avec les députés pour aller plus en profondeur
dans ce que nous venons de soulever
ou pour échanger sur d'autres sujets que nous n'avons pas eu le temps d'aborder
dans cette allocution. Merci.
La Présidente (Mme Richard) :
Merci beaucoup. Nous débutons les échanges. Mme la ministre, vous avez la
parole.
Mme Vien :
Merci beaucoup, Mme Robichaud, de cette présentation. M. Parent,
ravie de vous revoir. Bienvenue, M. Villa.
Alors, je comprends que
vous occupez la position assez commune qu'on entend depuis aujourd'hui...
depuis ce matin, en fait, là. J'aimerais revenir sur les appareils électroniques. Vous craignez effectivement une atteinte au
droit à la vie privée.
M. Villa
(Martin) : Bien, tout à fait, en raison du libellé «utiliser ou exiger de toute personne qu'elle
utilise[...], les appareils
électroniques...» Alors, on pense que c'est pas mal contraignant. Puis, à l'intérieur des appareils électroniques... Je répète probablement les...
Mme Vien : Non, c'est
drôle, c'est parce que je n'ai pas fini ma question.
M. Villa (Martin) : Ah! O.K. O.K.
O.K., excusez-moi.
Mme Vien : Non, non,
mais, écoutez, à cette heure-ci, là, on est...
Une voix : ...
Mme Vien : Oui, c'est
ça. Moi, je trouve ça extraordinaire. Je vous trouve vraiment... Bien, moi, j'ai perdu le fil avec tout ça. Donc, les appareils électroniques,
le droit à la vie privée qui peut être menacé. Mme Robichaud nous
dit : Nous, on a des alternatives, on apporte des ajustements. Comment
on concilie, là, ce que demande la CCQ, puis les... pas les objections,
mais... en fait oui, les objections, bien sûr, mais les craintes que vous
soulevez?
M. Villa (Martin) : Bien, nous, dans
les craintes qu'on soulève, c'est que, nécessairement, en lien avec les téléphones cellulaires, qui contiennent des
informations de nature confidentielle, privée... et on craint des
débordements par rapport à l'utilisation de
téléphones cellulaires sur les chantiers parce que les termes utilisés dans le
projet de loi sont quand même assez importants. Alors, «utiliser un
appareil électronique», nous, notre compréhension, ça voudrait dire qu'un
inspecteur pourrait utiliser un téléphone cellulaire d'une personne qui
pourrait être un salarié ou un représentant de l'employeur. Mais qu'est-ce qui se passe dans le cas de refus? S'il
refuse, cette personne-là, de remettre son cellulaire à l'inspecteur, qu'est-ce qui va se passer? Puis,
nous, ce qu'on pense, c'est que vous avez déjà pas mal d'outils pour
obtenir des informations, prévus dans la loi R-20.
Si vous
voulez savoir, par exemple, les heures de travail, à quelle heure qu'il a
commencé à travailler, la nature du
travail qu'il a fait, vous pouvez passer... il y a des dispositions qui vous
permettent de le faire, il y a l'article 81.01 qui permet à la Commission de la construction du
Québec d'obtenir des renseignements par un écrit qu'elle envoie à un
salarié ou à un employeur et peut lui poser
des questions par rapport aux heures effectuées, par rapport à la communication
de certains documents, que ce soient des
cartes de temps ou des registres de paie. Vous avez déjà une panoplie de
pouvoirs qui sont prévus dans la loi. Puis,
si vous regardez à l'article 7 également, à 7.1, etc., la Commission de la
construction du Québec, elle a le pouvoir de
pénétrer sur les chantiers, elle a le pouvoir d'exiger tout renseignement
relatif à l'application de la
présente loi, elle peut demander à une personne si elle est titulaire d'un
certificat de compétence ou pas, si elle est titulaire d'une licence. Il y a une panoplie... Ils ont des
pouvoirs pour pouvoir appliquer la loi pour obtenir les renseignements
qu'ils ont besoin.
Je ne vois
pas en quoi de demander le téléphone cellulaire va aider plus la cause des
inspecteurs de la Commission de la
construction du Québec. Moi, ça fait 16 ans que je suis à l'APCHQ, puis je
n'ai jamais entendu de problématiques en lien avec l'usage de téléphones cellulaires puis des représentations en
ce sens-là. Alors, je voyais un peu... je ne voyais pas l'utilité de mettre cette disposition-là dans le
projet de loi, considérant l'ensemble des pouvoirs qui peuvent être
exercés par la Commission de la construction du Québec.
Mme Vien : Admettons
qu'on continue dans le même sens, là, admettons qu'on décide d'y aller, qu'on
donne suite à ça. On est en 2018, les appareils électroniques, puis on... Tout
le monde adhère aux objectifs qui sont poursuivis,
hein? C'est des objectifs qui sont nobles. Qu'est-ce qui serait un compromis,
pour vous, à l'APCHQ? Quelqu'un soulevait :
On pourrait, dans des cas très sérieux, par exemple, exiger d'aller chercher un
mandat. Mme Bourque disait : Oui,
s'il faut absolument y aller, au moins qu'on contrôle, tu sais, qu'on ait un
certain contrôle sur ce qui pourrait être permis à la CCQ. Admettons
qu'on garde ça, là, qu'est-ce qui vous satisferait comme compromis?
M. Villa (Martin) : Comme
compromis?
Mme Vien : Oui. Il n'y
en a pas?
M. Villa (Martin) : On n'en a
pas discuté vraiment, je vous dirais. Nous, on a...
Mme Vien : C'est comme
sur la durée des mandats, là, tu sais. Vous ne vous exprimez pas là-dessus,
mais il y en a qui...
• (20 h 20) •
M. Villa
(Martin) : Oui. On s'est surtout attardés sur les appareils
électroniques. Ce que j'ai pu comprendre de Me Thériault, tantôt, en lien avec les supports informatiques...
Dans le fond, si les renseignements... les renseignements que la Commission de la construction du Québec peuvent
obtenir, c'est en lien avec les salaires puis l'application de la
loi R-20, ce
n'est pas compliqué. La loi R-20,
c'est une question de salaire, on vérifie l'assujettissement des travaux. Un coup qu'on a vérifié l'assujettissement des travaux, on vérifie
si les salaires sont bien payés. On peut obtenir les listes de paie puis
les cartes de temps puis, à ce moment-là,
bâtir une réclamation, le cas échéant, s'il y a un solde qui n'est pas payé, ou
faire les corrections nécessaires. Alors, c'est pour ça que, moi...
Mme Vien :
...je vais vous poser ça autrement. Sur la durée des mandats, il y a des gens
qui sont venus nous voir en disant :
Nous autres, là, on ne veut pas de limitation de mandat, pour différentes
raisons. Nous, on dit : Ce ne sera pas plus que six ans consécutifs
ou non consécutifs, ce n'est pas important.
M. Villa (Martin) : Mais qu'est-ce
que vous voulez dire par «mandat», excusez-moi?
Mme Vien :
Des mandats à la CCQ, des mandats de siéger au conseil d'administration de la
CCQ. Je vous donne un exemple, là, je
vous donne un parallèle de gens qui
sont venus nous voir puis qui disent : Bon, nous autres, on n'est
pas pour ça, là, de limiter les mandats, mais, s'il faut absolument aller dans
ce sens-là, on dit : Au moins, gardez ça jusqu'à 12 ans, gardez les gens
en poste jusqu'à 12 ans.
Je comprends
que ce n'est pas votre propos. Moi, ce que je vous dis : Il y a
des gens, sur certains points, ils ne sont
pas d'accord, mais ils nous disent : On serait prêts à un compromis. Moi,
la question que je vous pose, c'est ceci : Si on devait aller dans le sens... comment c'est
écrit dans la loi, sur l'accès des outils informatiques, qu'est-ce qui, pour
vous, à l'APCHQ, serait un compromis? Ce
n'est pas la situation idéale, je le comprends, mais qu'est-ce qui
serait un compromis?
M. Villa
(Martin) : Bien, si c'était
un compromis — moi, je parle en mon nom parce que je n'ai
pas parlé avec mes collègues — ça se limiterait au système
informatique. À partir du moment que le système informatique que vous recherchez, c'est des renseignements prévus par la
loi R-20, puis que vous allez chercher l'information dans un secteur réglementé, puis qu'il reste encadré dans le champ
d'application de la loi et de ses règlements, moi, ça m'irait par
rapport à ça parce que je considérerais
qu'il y aurait peut-être moins une atteinte à l'expectative de vie que par
rapport aux appareils électroniques ou aux téléphones cellulaires. Ça,
ça serait mon point par rapport à ça. Je ne sais pas si...
Mme Vien : Excellent!
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, en fait, on en a un peu parlé de façon informelle
tantôt, mais on se disait que, justement,
les appareils informatiques sur les lieux de l'entreprise, c'était peut-être
une possibilité qui était plus acceptable, les appareils informatiques, les ordinateurs sur le lieu de
l'entreprise, mais c'est parce que, dans le fond, en ce moment, la
Commission de la construction a déjà accès, ils ont déjà accès à tout ça, là.
Mme Vien : Excellent!
Mme Robichaud (Nicole) : Nous,
un compromis...
M. Villa (Martin) : Il y a
sûrement moins d'expectatives de vie privée.
Mme Vien : Nous, on
essaie de trouver des solutions.
M. Villa (Martin) : Mais
peut-être plus, Mme Vien, excusez-moi...
Mme Vien : Non, je vous
en prie.
M. Villa (Martin) : ...au niveau des
systèmes informatiques, comme je disais, il y aurait peut-être moins une atteinte... moins, au niveau de l'expectative de
vie privée, qu'un téléphone cellulaire. Il y aurait peut-être ce
compromis-là à cet effet-là.
Mme Vien : Parfait.
Nous, on essaie de trouver la meilleure solution possible...
M. Villa (Martin) : Il n'y a
pas de problème, on est là pour discuter.
Mme Vien : ...puis on comprend qu'il y a
des gens qui sont frileux, des groupes qui sont frileux sur un certain nombre d'éléments qu'on a écrits dans le projet de loi, qui ont été aussi demandés. Alors, on cherche la meilleure
piste d'atterrissage possible.
M. Villa (Martin) : Il n'y a
pas de problème.
Mme Vien : Mais il
y a vous puis il y en a d'autres aussi. Tu sais, il va falloir
trouver un juste milieu, un équilibre. Il
y a peut-être des trucs qu'on va laisser tomber, il y a peut-être des choses
qu'on va changer, on ne sait pas, on en discutera entre parlementaires, mais c'est la raison pour
laquelle je vous demande : Si on ne va pas dans le sens complet de ce
que vous voulez, qu'est-ce qui serait quand même acceptable pour vous? C'est un
peu la question qu'on...
M. Villa
(Martin) : Système informatique.
Mme Vien :
Parfait. On vous pousse dans vos plus profonds retranchements, hein, c'est ça,
c'est ça, l'exercice aujourd'hui.
M. Villa (Martin) : Il n'y a
pas de problème, il n'y a pas de problème, il n'y a pas de problème.
Mme Vien : Merci
beaucoup.
M. Villa (Martin) : Ça me fait
plaisir.
La
Présidente (Mme Richard) :
Merci, Mme la ministre. C'est maintenant le temps... du côté de
l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois, vous avez la parole.
M. Leclair : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, merci à vous trois d'être présents. On a toujours un énorme plaisir. Alors, tantôt dans la lecture de
votre mémoire, vous parliez des impacts face aux petits entrepreneurs — puis vous l'avez spécifié — dans
l'augmentation des délais. Pourquoi vous les reliez directement à eux?
Avez-vous des exemples précis qui les mettent en trouble lorsqu'on étendrait
les délais?
Mme Robichaud (Nicole) : Bien,
en fait, c'est qu'en ce moment les réclamations qui découlent d'un délai de 12 mois, ça peut facilement jouer entre
30 000 $ et 100 000 $ pour une réclamation. Les
réclamations sont souvent... c'est souvent des problèmes causés par une
difficulté d'interprétation : C'est-u assujetti ou pas assujetti?
Nous, dans le
secteur résidentiel, on est beaucoup à se questionner quasiment quotidiennement
là-dessus, parce que les travaux que
nos membres exécutent sur des chantiers de construction dans le résidentiel,
souvent, ce n'est pas assujetti, des fois, ça l'est. C'est vraiment
compliqué de savoir qu'est-ce qui l'est puis qu'est-ce qui ne l'est pas.
Quand je
parle que les travaux sont assujettis, puis pourquoi c'est compliqué de le
savoir, bien, je peux vous donner un
exemple. Je ne sais pas, moi, il y a quelqu'un qui fait des travaux de
rénovation dans sa résidence privée, bon, bien, dépendamment de la nature des travaux, s'il s'agit d'un agrandissement
de sa résidence, bien là ça va être des travaux assujettis. Ça fait que l'entrepreneur va devoir soumissionner en
conséquence, va devoir payer des salariés avec le taux de la convention collective, respecter un ensemble de
règles. Et, si jamais il n'est pas question d'agrandissement, bien, à ce
moment-là, c'est les normes du travail qui s'appliquent, puis les travaux de
rénovation vont pouvoir être exécutés à moindre coût, là.
Ça fait que,
si, mettons... je vous donne un exemple précis d'où pourrait être difficile,
bien, quelqu'un qui fait construire
un garage annexé à sa maison avec un deuxième étage, bien, dépendamment, ça se
peut qu'une partie des travaux ne
soient pas assujettis puis l'autre partie va l'être. Ça fait que le garage qui
serait annexé ne serait pas assujetti, puis le deuxième étage, on agrandit la superficie habitable, ça va être
assujetti. Ça fait que quelqu'un qui n'est pas au courant... c'est un paquet d'exemples comme ça, je vous en ai
pris un qui est quand même... Tu sais, dans le secteur résidentiel, on
voit ça souvent.
Ça fait qu'un employeur, un entrepreneur qui, de
bonne foi, va soumissionner sur un projet, bien, lui, s'il le sait beaucoup de temps après, tu sais, je veux
dire, des années plus tard que telle chose, c'était assujetti, que lui ne le
savait pas, puis ça fait deux ans qu'il fait
ça avec plusieurs salariés, bien, ça peut être substantiel puis ça va être
difficile pour lui, par la suite, si
jamais il en résulte une réclamation, que le contrat, il est terminé avec son
client puis que, finalement, au bout du compte, c'était un chantier qui
était assujetti, mais là il va dire... il ne va pas retourner voir son client
pour dire : Finalement, j'ai reçu une
réclamation de salaire, ça a coûté 20 000 $ de plus. On oublie ça,
là. Un coup que le contrat est terminé, c'est fini.
M. Leclair : Bien, je
comprends bien. Ça me donne quand même quelques frissons parce que je me
dis : Si vous dites que c'est 80 % de l'industrie de l'APCHQ, les
entreprises de cinq employés et moins, puis vous avez des problèmes... vous avez, les entrepreneurs ont des
problèmes fréquents à justement voir qu'est-ce qui est assujetti ou non,
premièrement, on est très, très loin de la
commission Charbonneau, on ne visait pas ces gens-là du tout,
premièrement. Deuxièmement, c'est de dire
quel ajustement qu'on peut avoir face à la CCQ, justement, d'avoir, je ne sais
pas, moi, une ligne 1 800,
là, pour dire, là... il faut aider à ces entrepreneurs-là parce qu'ils le font,
eux, au meilleur de leurs connaissances. Ça fait qu'on peut peut-être l'échapper dans un cas particulier, mais
là, si vous dites que ça arrive souvent, on a peut-être un petit manquement face à ça puis qui n'a pas
rapport exactement avec la commission Charbonneau. Alors, bref, on aura
la chance d'en discuter, là, mais je trouve
ça triste peu. Mais ça va avoir un rapport direct si on repousse le délai, bien
entendu.
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, je vais corriger juste quelque chose. Le 83 %
des entreprises de cinq salariés et moins,
c'est tous secteurs de la construction confondus, c'est les quatre secteurs, ce
n'est pas seulement le résidentiel, c'est tous les secteurs de l'industrie. Ça fait que l'industrie de la
construction, c'est 83 % d'entreprises de cinq salariés et moins.
M. Leclair : Puis vous
avez suggéré quelque chose tantôt, là, j'aimerais que vous me le répétiez. Vous
dites : Permettez peut-être la chance
de divulguer, en dedans de 72 heures ou 84 heures, si on a fait une erreur pour
remplacer peut-être le «sciemment» ou quelque chose de même. Expliquez-moi ça
un peu plus.
• (20 h 30) •
Mme Robichaud (Nicole) :
O.K. Bien, en fait, il y a souvent des difficultés pour les entrepreneurs de
savoir si tel chantier est assujetti
ou pas. Nous, on est des experts, on se pose... quand je dis, nous, c'est
l'équipe des relations de travail de
l'APCHQ, on représente le secteur résidentiel. Puis nous, régulièrement, on se
questionne puis on travaille vraiment fort
à essayer de savoir : Est-ce que ça, c'est assujetti ou ça, ça ne l'est
pas? Je vous ai donné un exemple, mais, tu sais, des exemples comme ça, on en a des tonnes. Quand on a
des difficultés, nous-mêmes, à avoir des réponses, on va travailler avec
la CCQ puis on va les questionner parce que...
En
fait, c'est que la CCQ, c'est eux autres qui vont trancher au bout du compte.
Si jamais il y a eu une situation où il
y a un chantier qui était assujetti puis que l'employeur, il ne l'a pas payé
assujetti, bien, si jamais il y a une plainte, s'il y a quelqu'un qui
finit par se poser une question, ça va être adressé à la CCQ. La CCQ va se
renseigner, enquêter, si on veut, ils vont
vérifier, ils vont faire une analyse de la situation pour voir c'était-u
assujetti ou pas. Puis ça, ce... S'ils ont eux-mêmes des questions, ils ont un département qui s'appelle la
Direction de l'application des conventions collectives. Eux, dans le fond, c'est le département expert de
la CCQ qui travaille principalement sur ce genre de question là. Puis
nous, on a quand même des bonnes relations.
On les consulte, mais on a quand même souvent de la difficulté à avoir des
réponses dans un délai assez rapide.
Nous,
les employeurs, ils nous appellent dans plusieurs situations. Des fois, ils
sont à soumissionner sur un projet, ils veulent avoir l'heure
juste : Est-ce que je dois faire ma soumission au CCQ, pas CCQ?
Résidentiel léger, lourd, commercial? Ça
change tout, là, dans sa soumission. Ou, des fois, ils vont nous appeler puis
ils vont nous dire : Bien, moi, la CCQ est venue sur mon chantier, puis là ils m'ont dit que ce que je
pensais qui était du résidentiel léger, c'est du résidentiel lourd. Bien
là, ça vient de changer, mettons, de 4 $ de l'heure par gars. Ça va vite,
là.
Ça fait que c'est
vraiment important. C'est le nerf de la guerre. Excusez, là, mais c'est...
M. Leclair :
...parce que je connais la présidente, elle est adorable, mais elle est à la
veille de nous couper.
Mme Robichaud
(Nicole) : O.K. Excusez.
M. Leclair : Puis, en terminant, je veux que vous
m'expliquiez : Le 72 heures dans ces exemples-là, il arrive quand?
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, en fait, c'est que, nous, une des recommandations,
c'est que, quand il y a un questionnement
comme ça sur l'assujettissement, bien, vu que c'est la CCQ, dans le fond, qui a
le pouvoir de dire : Oui, c'est
assujetti, puis, oui, vous pouvez monter une réclamation, tu sais, ils vont
dire ça à leur département d'inspection, mettons : Vous pouvez aller de l'avant avec une réclamation, mais
nous, on dit : Vu qu'il va en résulter une réclamation, bien, on
veut que nos employeurs aient tous les outils le plus rapidement possible pour
respecter leurs obligations au meilleur de ce qu'ils peuvent, là.
M. Parent
(Michel) : Dans le fond, le département d'application de la
convention, on aimerait qu'il divulgue, quand il interprète les choses, qu'il nous le divulgue le plus
rapidement possible pour qu'on puisse en informer nos membres.
M. Leclair :
Et donc c'est lorsque vous faites la demande, vous aimeriez que ça prenne
maximum 72 heures.
M. Parent
(Michel) : Non, quand ils ont statué sur une interprétation, le
département spécial, qu'ils appellent le département de l'application de
la convention, là. C'est ça qu'on appelle?
Une voix :
Oui.
M. Leclair : C'est très intéressant, mais triste qu'on soit à l'extérieur de la
commission Charbonneau. Mais c'est très intéressant parce que c'est vos
problèmes que vous avez. Alors, il faut le regarder, effectivement. Bien, merci
beaucoup.
M. Parent
(Michel) : Merci.
M. Leclair :
Je manque de temps.
M. Parent
(Michel) : Bien, merci.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, M. le député de Beauharnois. Il
restait du temps du côté ministériel. Mme la ministre.
Mme Vien :
Dans le cas que vous soulevez, à moins que je comprenne mal, mais la
problématique n'est pas en amont. En
fait, c'est plus tard. C'est une fois que les travaux sont faits que, là, les
gens, ils se rendent compte que, là... ou lui se rend compte, elle se
rend compte, ou quelqu'un se rend compte à sa place que...
Une voix :
...
Mme Vien :
Je ne suis pas sûre que le problème est... C'est chouette, là, mais la
problématique arrive une fois que les travaux sont faits. À moins que
j'aie la berlue, là.
Mme Robichaud (Nicole) :
Bien, la problématique, elle peut se produire dans deux situations : avant
les travaux... bien, trois
situations : avant, pendant puis après. Ça fait qu'avant c'est l'employeur
qui communique avec nous, il est après soumissionner
puis il veut s'assurer qu'il va soumissionner de la bonne façon. Après ça,
pendant, ça veut dire qu'il y a quelque
chose qui se passe sur un chantier en ce moment, puis là on se rend compte
qu'avec la visite d'un inspecteur suite peut-être à une plainte, soit
une plainte d'un syndicat, soit une plainte d'un salarié, on se rend compte
qu'il y a une difficulté sur le chantier
puis que, genre, le chantier, il n'est pas payé de la bonne manière, tu sais.
S'il est résidentiel léger ou... bon,
comme ça. Puis après, bien, en fait, c'est que, justement, on a l'employeur qui
nous appelle, qui nous dit : Bien, moi, j'ai reçu une réclamation de salaire de 75 000 $. Là, on va regarder ça avec
lui. Nous, on essaie de voir... Puis, dans le fond, les réclamations de
salaire, c'est très détaillé, là. Ça fait que c'est fait par chantier, par
salarié, jour par jour. On a tout
là-dedans, là. Ça fait que, là, l'employeur, tu sais, nous, on va lui poser des
questions, on va lui dire : Bien, ça, ce chantier-là, vous avez payé ça résidentiel léger,
c'était quoi, mettons? Puis là, bien, on va voir qu'il y a
eu des difficultés d'interprétation,
mais une difficulté d'interprétation, là, ça peut valoir des dizaines
de milliers de dollars. Ça va très vite, là, parce que, quand vous avez
un salarié, c'est x montant, quand vous en avez cinq, c'est encore pire.
Mme Vien : Alors donc, dans le cas de figure que vous me
donnez, cette troisième situation qui arrive, les travaux sont faits, il y a
une réclamation de la CCQ, c'est ça?
Mme Robichaud
(Nicole) : Oui.
Mme Vien : Ça peut
chiffrer, hein, c'est bien entendu. Qu'est-ce qu'on fait? Qu'est-ce que vous
suggérez après ça?
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, nous, dans le fond, à notre niveau, notre rôle, c'est de s'assurer que ce qu'il y a
dans la réclamation, dans le fond, c'est des choses dues. Quand on constate que
c'est réellement dû, bien, on va travailler
avec l'employeur, on va faire beaucoup de coaching pour lui dire qu'est-ce qu'il aurait
dû faire, qu'est-ce qu'il va pouvoir
faire pour l'avenir. Puis, tu sais, là, c'est là qu'on s'aperçoit qu'il y a beaucoup
de problématiques au
niveau de l'assujettissement, de l'interprétation de différentes clauses
de la convention collective.
M. Parent
(Michel) : Mme Vien,
c'est l'accumulation sur trois ans d'une erreur qui pourrait être de bonne
foi, d'une erreur qui pourrait...
Mme Vien :
...qui devient problématique ici, là.
M. Parent
(Michel) : C'est ça, d'une erreur qui pourrait être de bonne foi...
Mme Vien :
Tout à fait.
M. Parent
(Michel) : ...puis qui
mettrait en péril plusieurs petites entreprises qui emploient beaucoup de gens.
Mme Vien : Et ce que vous nous dites, M. Parent, c'est
que ce sont des situations qui surviennent passablement régulièrement.
M. Parent
(Michel) : Bien, présentement, on est dans le un an. Comme
Mme Robichaud vous l'a expliqué, ça arrive. Il y a des montants
déjà substantiels.
Mme Vien :
Oui, je sais.
M. Parent
(Michel) : Il y en a. Puis je suis d'accord avec le principe qu'il y
en a qui le font de mauvaise foi. Ça, on
peut en voir de temps en temps. Mais la majorité sont des gens qui sont de
bonne foi, puis la complexité des conventions fait que nos membres, qui souvent travaillent dans le jour sur leur
chantier puis le soir dans leur maison à faire leur paperasse puis à s'assurer de respecter la loi, peuvent
définitivement, puis on en a la preuve, nous, à l'APCHQ... il y a souvent
des erreurs. Alors, c'est ce qui nous préoccupe, c'est l'accumulation de ces
trois années-là, qui pourraient être des erreurs répétées, mais toujours la
même.
Mme Vien :
Parfait. Bien, merci.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, Mme la ministre. M. le député de
Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard :
Bienvenue, M. Villa, Mme Robichaud. Je dois déclarer un intérêt, moi.
Le bureau de comté est dans un édifice de Logisco, dont M. Parent
est propriétaire. Donc, j'en fais...
M. Leclair :
Oh! conflits d'intérêts, mon cher.
Une voix :
Vous divulguez tout, ici.
M. Picard : On divulgue
tout.
Une voix :
On aimerait ça voir le bail.
M. Picard : Le bail a
été signé par le secrétaire général de l'Assemblée, vous le savez tous.
M. Leclair : On va vérifier ça
nous-mêmes...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Picard : Je continue
sur le sujet que nous abordons depuis quelques minutes, là. Actuellement, le
service d'interprétation existe à la CCQ. Le délai de réponse, c'est quoi?
Mme Robichaud (Nicole) : Bien,
en fait, il existe. Le délai de réponse, bien, ça varie, ça peut être très
long.
Une voix : ...
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, écoutez, tu sais, des fois, on peut voir deux, trois
semaines, là, avant d'avoir une
réponse. Ça a déjà dépassé ça. Mais c'est surtout que, nous, ce qu'on aimerait,
c'est que la diffusion de l'information, elle soit systématique parce que, disons qu'il y a une situation, à
savoir si... je ne sais pas, moi, l'installation des gazebos un peu fermés, chauffés, c'est-u assujetti dans
une cour, tu sais? Bon, bien, si on répond à ça, on peut-u le faire par
écrit puis le rendre disponible de façon systématique?
M. Picard : Vous
aimeriez qu'il y ait des lignes directrices ou, je vais dire, une jurisprudence
de la CCQ lorsqu'il y a une situation, je
reprends votre exemple, tantôt, d'un garage avec un deuxième étage, bien, ça,
c'est ça, la règle, donc, pour aider les gens lorsqu'ils font leurs
soumissions pour éviter d'avoir des surprises, c'est ça?
• (20 h 40) •
Mme Robichaud (Nicole) : C'est
exactement ça. Puis, en fait, nous, on répond à des questions là-dessus régulièrement. Quand je vous dis régulièrement,
c'est pratiquement tous les jours. On est une grosse équipe à l'APCHQ, mais il y a tout le temps des nouvelles choses, à
toutes les semaines, qu'on questionne sur : C'est-u assujetti, ça ne l'est-u pas? Ça, ça fait... Puis
c'est-u... C'est normal, là, parce que...
M. Parent (Michel) : Le
consommateur veut économiser, hein?
M. Picard : Au niveau...
Vous dites que c'est une grosse équipe chez vous. À la CCQ, les gens qui font
ce travail-là, c'est-u une grosse équipe?
Mme Robichaud (Nicole) : Oui,
c'est une grosse équipe.
M. Picard : Une grosse
équipe?
Mme Robichaud (Nicole) : Oui,
puis ils sont bons.
M. Picard : Bon, on va
le dire à Mme Lemieux.
Mme Robichaud (Nicole) : Mais
ils ne veulent pas écrire, puis, des fois, c'est difficile d'avoir...
M. Picard : Mais vous
dites qu'ils ne veulent pas écrire. Pourquoi?
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, dans le fond, c'est qu'ils rédigent des lettres. Tu
sais, les employeurs peuvent demander
des avis par écrit. Bien, c'est parce que l'employeur qui demande son avis par
écrit, il y a juste lui qui va avoir la réponse, O.K.? Ça fait que,
nous, ce qu'on veut, c'est que la diffusion de l'information... Moi, si on
statue que tel type de construction, c'est assujetti, bien, on peut-u le
diffuser à tout le monde? Parce que, dans le fond, on va...
M. Picard : Aux employés
puis aux syndicats. À tout le monde.
Mme Robichaud (Nicole) : À tout
le monde.
M. Picard : Exact.
Mme Robichaud
(Nicole) : Je veux dire, la diffusion de l'information de cette
nature, ça aide tout le monde à respecter ses obligations.
M. Picard : Avez-vous eu
des discussions avec la CCQ là-dessus?
Mme Robichaud (Nicole) : Oui.
M. Picard :
Et pourquoi on ne veut pas le faire?
Mme Robichaud
(Nicole) : Ce n'est pas clair.
M. Picard :
Ils ne veulent pas l'écrire, c'est ce que je comprends.
Mme Robichaud
(Nicole) : Bien, en fait, ils l'écrivent, mais ils ne veulent pas le
diffuser, sauf à la personne qui a fait la demande.
M. Picard :
O.K. Je pense que c'est un point que l'on devra...
M. Leclair :
On va se battre pour ça.
M. Picard :
Je vais changer de sujet. Je vais revenir sur les téléphones cellulaires, les
tablettes. Tantôt, vous avez dit : systèmes informatiques à l'entreprise,
chez l'entreprise. C'est ça que vous avec dit, là, tout à l'heure. Vous avez eu
des discussions avec les... vous êtes en contact avec la CCQ. Pourquoi la CCQ
veut avoir ça, l'accès? Ils vous l'ont-u dit?
M. Villa
(Martin) : Moi, je n'en ai aucune idée. Je n'ai pas eu de discussions
avec la Commission de la construction
du Québec là-dessus. Je ne sais pas si ma collègue a eu des discussions. Nous,
au contentieux, on ignore la demande. Moi, d'expérience, je n'en ai pas
entendu parler, là, d'une façon de faire ou de la possibilité d'avoir des téléphones cellulaires sur les chantiers ou qu'on
veut avoir, mettons, les cartes de temps, les paies, la transmission des
heures. Je n'ai jamais entendu d'éléments à
cet effet-là. Alors, je ne vous cacherai pas que, quand j'ai lu le projet de
loi sur cet aspect-là, j'ai été un petit peu étonné, là.
M. Picard :
O.K. Je ne sais pas si vous étiez là cet après-midi, là, mais j'indiquais...
M. Villa
(Martin) : Non, malheureusement, non.
M. Picard :
...il y a des applications, sur les cellulaires, même pour faire des paies de
petites entreprises, là, puis, lorsqu'il
y a trois, quatre employés, là, il y a des gens qui pourraient même faire les
paies sur une application de cellulaire. Puis ça se peut qu'il n'en aient pas, d'ordinateur, là, mais je
comprends, là, mais il doit avoir moyen de trouver, là... Une personne
ne prend pas le cellulaire, mais on lui donne accès soit en imprimant le
document, en tout cas, peu importe, là. O.K. Donc, vous êtes...
M. Villa
(Martin) : Mais toujours à partir du moment que les informations que
vous demandez, vous les circonscrivez, c'est circonscrit dans la loi, là, tu
sais, qu'on parle de salaire...
M. Picard : Oui, c'est ça, mais il faut toujours que ce soient des
informations en vertu de... pour l'application de la loi.
M. Villa
(Martin) : Pour l'application.
M. Picard :
C'est ça, on s'entend.
M. Villa
(Martin) : C'est pour ça qu'ils réfèrent des renseignements visés par
la présente loi ou par le règlement d'application. Il faut l'encadrer, là, il
faut circonscrire toujours la demande.
M. Picard :
C'est ça. Il ne faut pas que ce soit une partie de pêche.
M. Villa
(Martin) : Tout à fait. Tout à fait.
M. Picard :
O.K. Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci. Madame messieurs, merci beaucoup.
Je suspends les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
20 h 44)
(Reprise à 20 h 46)
La Présidente (Mme Richard) :
Bonsoir, messieurs. Nous recevons maintenant le Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction. Je cède la parole à M. Trépanier, c'est
bien ça? Bonsoir, M. Trépanier.
Conseil
provincial du Québec des métiers de la
construction-International (CPQMCI)
M. Trépanier (Michel) :
Bonsoir, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Richard) : Vous allez nous présenter les personnes qui vous accompagnent et vous disposez de 10 minutes
pour faire votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les
parlementaires.
M. Trépanier
(Michel) : Parfait, merci. Mesdames messieurs, membres de la
commission, bonsoir. Je tiens à vous présenter des confrères. Je me
présente premièrement. Je m'appelle Michel Trépanier. Je suis président du
conseil provincial international. À ma
gauche, j'ai un confrère, Patrick Bérubé, qui est directeur général du conseil
provincial international. J'ai Me Dumais, notre procureur, à sa gauche et
j'ai confrère Jacques Émile Bourbonnais, conseiller au conseil provincial, à ma
droite.
Tout d'abord,
laissez-moi vous remercier de nous permettre de vous présenter nos commentaires
et suggestions pour le projet de loi n° 152. À la suite de
l'analyse du projet de loi n° 152 présenté par le gouvernement, le conseil
provincial international a porté son
attention sur les six éléments suivants : la gouvernance de la CCQ et de
la Commission des normes, de
l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, la CNESST, la
dépolitisation de l'industrie de la construction, la modification des pouvoirs de la CCQ en matière
d'enquête et d'inspection et la modification du délai de prescription
relativement aux recours civils, les moyens mis à la disposition de la CCQ en
matière d'enquête et d'inspection, le paiement
des salaires et avantages non déclarés au rapport mensuel d'un employeur et
finalement la lutte au travail au noir, aux menaces et à l'intimidation.
Dans le cadre
de cette présentation, vous nous permettrez de nous concentrer sur quatre
d'entre eux. Les autres recommandations faisant déjà partie de notre
mémoire pourront être abordées à l'occasion de la période de questions.
Tout d'abord,
ce qui en trait à la gouvernance de la CCQ, nous nous opposons fortement à
toute limitation de la durée, du nombre ou du cumul des mandats au sein
de la CCQ ou de la CNESST. Les représentants pour siéger aux différents C.A. de ces organisations sont choisis
par les membres en fonction de leur expertise. Toute limitation serait
une atteinte claire au droit de représentation
des travailleurs et à leur liberté syndicale. Nous sommes donc d'avis qu'il
sera mal avisé de la part d'un gouvernement d'imposer ce type de limitation et
que l'adoption d'un tel article s'attaquerait directement à la souveraineté des
membres des organisations représentatives de cette industrie.
De plus, afin
d'améliorer la gouvernance de la CCQ, nous proposons le modèle de gestion prôné
par la Loi sur la gouvernance des
sociétés d'État et nous recommandons la possibilité d'intégrer dans ce projet
de loi la scission du poste de P.D.G.
de la CCQ, de celui du président du C.A. de la même organisation. Au fil des
années, le cumul des fonctions du président
du C.A. de la CCQ et de P.D.G. a conduit à la confusion des rôles, voire à la
prépondérance constante des priorités administratives de l'organisation
au détriment des fonctions d'orientation qui incombent au C.A. et au détriment
des priorités de l'industrie. Cette
concentration du pouvoir entre les mains d'une seule personne peut conduire à
ces conflits d'intérêts importants,
par exemple au plan du contrôle par le C.A. de la vérification interne ou à
l'éthique de l'organisation. Un coup de barre s'impose donc afin de
permettre au C.A. et à l'organisation de jouer leurs rôles respectifs.
Je vais maintenant
laisser la parole à mon confrère Patrick Bérubé pour vous parler des deux
aspects suivants.
• (20 h 50) •
M. Bérubé
(Patrick) : Alors, à mon
tour. Bonsoir, Mme la Présidente, bonsoir, Mme la ministre, MM. et
Mmes les députés de la commission. Tout d'abord, au niveau des moyens qui sont
mis à la disposition de la CCQ afin de faire enquête,
le projet de loi n° 152 prévoit qu'il serait dorénavant
possible pour un inspecteur ou un enquêteur de la CCQ, dans le cadre de
l'exercice de ses fonctions, de prendre des photographies, des vidéos, des enregistrements
sonores sur les chantiers de construction. Par exemple, il est fréquent que divers éléments de preuve qui peuvent être
pertinents ne soient plus disponibles au moment où les inspecteurs ou
enquêteurs se présentent en chantier.
La politique
actuelle appliquée par la CCQ en
matière de preuve est à l'effet que la commission d'une
infraction en chantier est effectuée
directement et constatée de visu par l'un de ses représentants. Nous
considérons que les moyens technologiques
actuels permettent aux travailleurs et aux représentants ou à des témoins
d'acquérir de la preuve sur place dont
les enquêteurs pourraient prendre connaissance dès leur intervention ou au
courant de leur enquête. On propose donc que l'article 6 du projet de loi n° 152 soit amendé comme
suit : «utiliser des photographies, des vidéos [et] des
enregistrements sonores sur un chantier de construction».
Maintenant, nous nous sommes également penchés
sur la question de salaires ou d'avantages non déclarés au rapport mensuel envoyé à la CCQ. Donc, le projet de loi n° 152 propose un amendement à R-20 qui crée une
nouvelle infraction pour quiconque exige ou
impose le paiement de salaires ou d'avantages non déclarés au rapport mensuel.
Il nous apparaît que cette nouvelle disposition a pour objectif premier d'empêcher ou d'enrayer le travail au
noir dans l'industrie de la construction. Bien, évidemment, sachez que
nous souscrivons totalement à cet objectif. Mais nous sommes aussi préoccupés par le libellé de cet article
quant au rapport mensuel parce qu'il est tout
à fait légitime pour un représentant
syndical ou même un salarié de requérir ou
d'exiger à un employeur le paiement d'un salaire ou d'un avantage qui
émane d'une convention collective, mais qui n'est pas déclaré au rapport mensuel.
Donc, mentionnons, à titre d'exemple, le cas d'un travail effectué en heures supplémentaires pour lequel un salarié n'aurait pas été rémunéré, au sujet
duquel le rapport mensuel d'un employeur indiquerait une rémunération à
taux régulier.
Afin
d'éviter toute ambiguïté quant au droit du salarié ou de son représentant syndical d'être en mesure
d'exiger à un employeur une juste
rémunération pour un travail accompli, mais non déclaré au rapport mensuel,
puis de couvrir tous les angles du
travail au noir, on propose que le libellé de l'article 16 du projet de loi
n° 152 soit modifié pour se lire ainsi : «Commet une infraction [ou] est passible d'une
amende de 1 120 $ à 11 202 $ quiconque offre, effectue,
réclame, reçoit, tente d'offrir,
d'effectuer, [ou] de réclamer [...] recevoir, le paiement de salaires ou
d'avantages contraires à ceux prévus à une
convention collective, et non déclarés au rapport mensuel visé au paragraphe b
du premier alinéa de l'article 82.»
Je vais maintenant
laisser la parole à mon confrère Michel pour terminer la présentation.
M. Trépanier
(Michel) : Merci, Patrick. Comme vous le savez, l'intimidation sur les
chantiers n'a pas sa place et elle
est inacceptable aux yeux de nos travailleurs, de nos employeurs et de toute
l'industrie. Toutefois, il est clair que les situations pouvant
impliquer l'usage de menaces et d'intimidation en matière de relations de
travail ne relèvent pas exclusivement des gestes posés par des représentants
syndicaux ou des salariés, mais aussi des gestes posés par des employeurs et leurs représentants. Nous
considérons donc qu'il serait opportun et équitable d'insérer dans ce projet
de loi une disposition pénale additionnelle à la loi R-20 visant à enrayer le
recours à la menace et à l'intimidation de la part d'entrepreneurs,
d'employeurs et de leurs représentants.
Ce
sujet est tabou depuis trop longtemps, et le législateur a aujourd'hui une
opportunité unique de s'y attaquer. Entre
autres, cela aurait pour effet d'empêcher les employeurs à contraindre un
salarié d'accepter des conditions de travail moindres que celles prévues à la loi ou à une convention collective en
considération de son embauche, de le menacer de perte d'emploi s'il n'accepte pas les conditions de travail ou de toute
autre menace qui constitue de l'intimidation. Cette équité est indispensable afin de s'assurer que les
travailleurs et les travailleuses soient véritablement protégés et que
le travail au noir et les abus soient
enrayés de notre industrie. Vous trouverez à la recommandation n° 6, dans
notre mémoire, le libellé que nous proposons à ce sujet.
Nous
vous remercions encore de votre écoute et espérons que notre contribution sera
entendue afin de conserver un équilibre dans notre industrie et
améliorer au bénéfice de tous les acteurs. Merci.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci beaucoup. Nous allons débuter les
échanges. Mme la ministre.
Mme Vien :
Ça veut dire quoi... Bonjour, d'abord. Bonsoir, M. Trépanier, à vous tous.
Ça veut dire quoi, ça, dépolitisation de la construction?
M. Trépanier
(Michel) : Ça, c'est un
terme qu'on a instauré dans un des mémoires, puis vous me
reprendrez M. Bourbonnais, en
2006. C'est un cheval de bataille du conseil provincial, depuis des lunes, sur
deux volets. Le premier volet, c'est
améliorer la meilleure planification
des travaux, puis le volet dépolitiser, c'est un modèle de Grande-Bretagne,
c'est enlever de la politique dans les
investissements de construction, pour enlever la politique dans les
investissements de construction. Je vous
donne un exemple, le pont Champlain, que ce soit le CHUM... L'exemple que je
peux vous donner, Grande-Bretagne,
c'est qu'ils ont instauré par la loi... qui empêche un député de pouvoir
commenter sur un échéancier ou sur un
coût d'un projet avant que ce projet-là soit soumis à une expertise externe. Ça
évite de créer des attentes. Puis ce point-là,
pourquoi on le ramène? Les travailleurs de l'industrie puis les employeurs
aussi sont tannés se faire imputer, des fois, des retards sur les chantiers qu'à même le début des chantiers on
était au courant que les délais étaient déraisonnables. Ça fait que
dépolitiser, c'est enlever la politique dans ces projets-là.
Mme Vien :
À partir du moment où... Je ne sais pas si les gens des grands travaux sont
encore avec nous ce soir, mais, à
partir du moment où de grands donneurs d'ouvrage ici, au Québec, en tout cas,
on va parler pour le Québec, ce sont
des donneurs d'ouvrage publics, comment on concilie ce que vous... je comprends
l'aspect politique, là. Je comprends ça,
là, le syndrome de la pépine, puis tout ça, là. Mais comment on concilie tout
ça, là? Parce que les grands donneurs d'ouvrage ici, c'est quand même...
M. Trépanier
(Michel) : Je vais peut-être demander à M. Bourbonnais.
Mme Vien :
...soit le gouvernement du Québec ou les municipalités.
M. Bourbonnais (Jacques Émile) : Non, il ne s'agit pas ici, là, d'écarter des
entrepreneurs publics. Il s'agit
tout simplement, comme on l'a vu trop souvent, que l'annonce d'un
projet, quel qu'il soit, mais qui origine du gouvernement, soit lancée,
alors que toutes les études n'ont pas été réalisées pour en connaître les
véritables coûts et le calendrier d'exécution. On l'a vu très souvent. Je
pourrais vous citer l'exemple du métro de Laval, entre autres, là, dont on a abondamment parlé, où on a laissé entendre, effectivement, que ce projet-là avait excédé tous les coûts. En fait, oui, il
avait excédé les coûts annoncés par le
gouvernement, mais, dans les faits, au même moment où ce projet-là se
réalisait, un projet semblable avait
cours, à Toronto, pour le prolongement d'une ligne de métro de même distance
que celui de Laval, qui a coûté le
même prix, qui a pris le même temps. Mais, encore une fois, il n'y a pas eu
d'annonce en Ontario, le projet s'est fait,
donc ça n'a pas fait de bruit. Ici, c'est qu'il y a eu des annonces préalables
bien avant que le projet soit entamé pour dire : Ça va coûter tant,
ça va prendre tant de temps.
On
a fait la même chose... mon confrère parlait du pont Champlain, c'est la même
chose. Quand on a annoncé les premiers
coûts puis le calendrier du pont Champlain, on remonte déjà à une couple
d'années, il n'y avait rien de commencé dans les travaux, il n'y avait
aucune étude de terminée. Les plans n'étaient pas terminés. Je pourrais vous
citer le cas de Gaspésia. C'est la même
chose qui s'est produite où on a fonctionné sans plan, sans soumission précise,
sans calendrier de travail. Puis, après coup, comme mon confrère l'a
souligné, c'est qu'on impute les retards et les excès de coût aux travailleurs et aux employeurs de la construction,
alors qu'en fait, si le projet avait été bien ficelé et annoncé au
moment où on connaissait toutes les données, rien de ça ne se serait produit.
Mme Vien :
J'aurais envie de faire une blague. Donc, annoncer le troisième lien dans les
quatre prochaines années par la CAQ, c'est un peu téméraire. On va dire
comme...
Des voix :
...
La Présidente (Mme Richard) : S'il vous plaît! À l'ordre! Je comprends que c'est tard en soirée, mais je
vous demande de ne pas vous interpeller, s'il vous plaît!
Mme Vien :
On se taquine. On se taquine. On a été élu la même année, ça fait longtemps.
Amender
l'article 6 au
niveau des enquêtes. Je ne suis pas
sûre d'avoir bien saisi. Utiliser des documents sonores. Ça a été vite tantôt, puis je
pense que j'ai échappé, un, ce que vous vouliez nous dire puis la justification
de ce que vous soutenez.
M. Trépanier
(Michel) : Je vais inviter mon confrère, M. Bérubé, à répondre à
votre question.
• (21 heures) •
M. Bérubé (Patrick) : Donc, pour l'article 6, pour ce qu'on
disait quand on disait : «Prendre...» Ce qui est dans le libellé
actuel, ce qui est proposé par le projet de loi, on dit : Prendre des photographies
ou utiliser... Nous, ce qu'on propose, c'est
«utiliser». C'est-à-dire quoi? On a fait référence aujourd'hui à des sonneurs
d'alerte. Des sonneurs d'alerte, ça existe chez les salariés, ça existe
aussi chez les représentants, puis je pense que même la commission est d'avis
que, quand il y a des interventions qui sont
faites de la part des représentants syndicaux, des salariés en chantier,
ponctuellement, ces gens-là sont en mesure de pouvoir faire des constats.
Je
donnais un exemple de ça : il y a du travail au noir, puis ça, c'est
ponctuel. C'est un dossier que, chez nous, on a traité. Il y a du travail qui s'effectue au noir, puis je pense que
c'est le but qui est visé aussi puis qui est recherché au niveau de la
commission, qui se fait les fins de semaine. On a un salarié qui est en
chantier, qui est capable d'identifier qu'il y
a des travailleurs qui sont là, il prend une photographie avec son cellulaire.
Mais, tel qu'il est libellé actuellement, on comprend que, de facto, il faut que ça soit l'inspecteur lui-même, en
soi, qui va factuellement prendre la photo. Mais est-ce qu'il pourrait lui-même utiliser cette preuve-là à
même son enquête pour être en mesure d'agrémenter ou... pour être en mesure de compléter, je m'excuse, son enquête ou
son inspection de quelque façon que ce soit? Nous, on pense que oui. Et
ça, c'est pertinent.
Et,
quand on fait référence — puis je reviens encore aux sonneurs d'alerte — au fait qu'on veut les protéger, ces gens-là, bien, on veut les protéger de quelque
chose. Nécessairement, quand on veut les protéger de quelque chose,
c'est qu'ils sont... ces gens-là sont en
mesure de faire des constats, ils sont en mesure d'alimenter les gens de la
CCQ. Et on a dit aujourd'hui qu'au
niveau de la CCQ il y a des gens qui avaient de la misère à coopérer,
c'est-à-dire des salariés qui ont des problèmes
de coopération parce qu'évidemment ils sont peut-être contraints à vivre une
sanction de quelque façon que ce soit. Et là, à ce moment-là, on va s'en
remettre aux représentants. Et, si on s'en remet aux représentants, ce même représentant-là pourrait, lui, faire le constat,
prendre la photographie ou l'enregistrement sonore, le remettre à la CCQ
et qu'elle puisse apprécier la preuve puis la provenance pour savoir si, oui ou
non, tout ça, avec le DPCP, peuvent faire suite puis qu'il y ait matière à
pénalité ou à contrainte pour l'employeur.
Mme Vien :
O.K. Bien, merci, messieurs. Je vais laisser les collègues poser leurs
questions.
La Présidente
(Mme Richard) : Merci, Mme la ministre. M. le député de
Beauharnois, vous avez la parole.
M. Leclair :
Merci, Mme la Présidente. Alors, bonsoir, messieurs. Bienvenue de veiller avec
nous ce soir.
Moi,
je reviendrais sur... J'ai posé une question à Mme Lemieux, anodine, en
disant : Lorsqu'on parle de mandat, de longévité de mandat... puis
je lui demandais : Pourquoi vous, vous n'êtes pas touchés, et tout en bas,
elle avait de la misère un peu à me
répondre. C'était un petit clin d'oeil, elle n'en parlait pas trop, trop dans
son mémoire, mais je vois que vous,
vous rapportez ça. «La scission du poste [du] P.D.G. de la CCQ pour
[instaurer]...» Je ne lirai pas la suite, je vais vous demander de nous l'expliquer en profondeur, ce que
vous voyez là-dedans qui pourrait être un plus pour notre organisation.
M. Trépanier (Michel) : D'entrée de jeu, je pense que je vais passer la
parole à mon confrère, M. Bourbonnais, puis je vais complémenter par
la suite.
M. Bourbonnais (Jacques Émile) : En fait, la proposition émane directement de la
Loi sur la gouvernance des sociétés
d'État, à laquelle la CCQ est associée depuis longtemps, à telle enseigne que,
par exemple, le code d'éthique qui a été adopté a, en son annexe, le
code des administrateurs publics supérieurs qui est là. Ou, un autre exemple,
le projet de loi n° 135, qui est à l'étude à l'heure actuelle par le
ministre Poëti, a inclus, dans son projet, à titre d'organisme d'État, la CCQ.
Bref,
la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État recommande, dans ses articles que
l'on cite au mémoire, là, de 28 à 31,
que ces deux postes-là soient scindés pour des raisons bien simples,
c'est-à-dire que le président du C.A. voit, avec les membres du C.A., aux orientations de l'organisation, etc.,
alors que le P.D.G. ou... ailleurs ça va s'appeler chef exécutif, patron, ça a des noms différents, là,
selon qu'on est, par exemple, à Hydro-Québec, à Loto-Québec, à la SAQ,
ça a été soulevé ce matin par la Fédération des chambres de commerce. Le nom
peut être différent, mais la technique ou l'application
est la même, à savoir qu'il y a un conseil d'administration qui fait des
orientations puis il y a une organisation qui a la gestion.
Ce
à quoi on a assisté depuis plusieurs années, c'est que les préoccupations de
l'organisation l'emportent sur la définition
des orientations qui incomberaient à un conseil d'administration. Puis il y a
lieu... Puisque ça vaut pour tous les organismes
d'État, il n'y a aucune raison que ça ne vienne pas s'appliquer et bonifier.
Dans le fond, c'est ça, là. Ce n'est pas de... ou soit créer un poste,
je dirais, inutile ou sanctionner la façon de fonctionner à l'heure actuelle.
C'est plutôt de reconnaître qu'à juste titre
une loi vient dire... Puis, dans les principes de gouvernance qui s'appliquent
aussi à d'autres échelles, puis les
gens qui ont témoigné ce matin l'ont souligné, je pense, c'est le Conseil du
patronat, à l'effet que le fait d'avoir
un président du conseil puis un président-directeur général ou un chef
exécutif, là, finalement, c'est le meilleur résultat qu'on puisse tirer
d'une organisation.
M. Leclair : Bien, merci. Il me
reste combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Richard) :
Il vous reste encore 6 min 20 s.
M. Leclair : Bien, je suis obligé de vous apporter sur un
terrain que j'avais manqué de temps avec Mme Lemieux puis je vous reviendrais sur le fameux mot
«susceptible de provoquer». Alors, elle nous disait : C'est évident
lorsqu'on ferme une route, puis il y a une juste route pour atteindre un point
x. Est-ce que ça vous inquiète, vous, de votre côté? Parce que cette
susceptibilité-là peut venir d'un patron, pourrait venir d'un salarié aussi. Je
voudrais vous entendre.
M. Trépanier (Michel) : Je vais
laisser M. Bérubé répondre à la question.
M. Bérubé
(Patrick) : En fait, ça a
une connotation juridique, ça fait que je vais juste apporter un
éclaircissement sur cette lecture-là de «susceptible» puis, après ça, je vais
passer la parole à mon confrère Me André Dumais, qui est à mes côtés.
De notre
part, je pense qu'on en fait tous la même lecture. Présentement, j'ai entendu
tout le monde se prononcer avec le
mot «susceptible». Là où on est chatouillés, c'est que ça laisse place à la
présomption, la susceptibilité d'arriver à quelque chose. C'est sûr qu'il faut le commettre, le geste, ça, on en
convient, tout le monde, mais ça pourrait effectivement laisser la place à des entrepreneurs pour arriver
à dire : Bon, bien, O.K., bien, moi, je suis-tu susceptible de? Est-ce
que c'est réellement arrivé? Non. Mais, dans
les faits, si c'est susceptible de, moi, ça peut prolonger ma réflexion. Puis
je pense que, là, on passerait, nous,
à se défendre, les travailleurs et les travailleuses de l'industrie, avec les
représentants, continuellement en cour à défendre le mot de
susceptibilité pour la présomption, ne serait-ce que ça. Pour ma part, c'est un
peu qu'est-ce qu'on voit puis ce qu'on a
peur un petit peu. Puis peut-être que Me Dumais pourrait peut-être compléter à
ce niveau-là. Me Dumais.
M. Dumais
(André) : Oui. On retrouve
le même vocable à l'article 15 du projet de loi, et vous le retrouvez
lorsque l'on dit : «[User]
d'intimidation ou de menace susceptible de contraindre un employeur à prendre
[la] décision à l'égard de la gestion de la main-d'oeuvre...»
Donc, vous avez un permanent syndical qui va
intervenir sur un chantier pour faire respecter, entre autres, l'embauche de main-d'oeuvre en région. Il y a des
règles qui sont prévues, et je vous réfère à la page 28 de notre
mémoire. C'est une matière qui est sujet à grief en vertu de l'article 62 de la
loi.
Donc, il est évident que, dans les discussions
qui vont s'engager, si on constate qu'il y a un non-respect de l'embauche, bien que, dans les représentations
qu'on peut faire, qu'un employeur à l'épiderme sensible pourrait
considérer que de se faire dire, et on l'a
vécu, qu'à défaut de corriger la situation il y aura une procédure de grief qui
va s'engager, bien, il peut considérer
ça comme étant une menace. Et, à ce moment-là, ça vient fausser les données
parce que le devoir de représentation
syndicale, il est important. C'est l'article 1a de la loi, et ça peut porter
justement à confusion. Donc, on propose
qu'à tout le moins... à la CCQ d'agir avec précaution en semblable matière si
elle est saisie d'une dénonciation de la part d'un représentant patronal
à l'effet qu'il y aurait eu violation de la loi.
La Présidente (Mme Richard) :
M. le député.
M. Leclair : Il me reste du
temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Richard) :
Oui. Profitez-en.
• (21 h 10) •
M. Leclair : On parle aussi de
l'absence de balises claires. On parle de rétroactivité ou bien, donc, la non-rétrospectivité. Alors, lorsqu'on parle de donner
des sanctions ou de bannir des gens dans des postes, si tel est le cas,
et on maintient ça, avez-vous des inquiétudes face surtout à une personne qui
se ferait imputer son poste pendant cinq ans? Elle a-tu le droit d'appliquer ailleurs
ou pas ailleurs? Comment vous lisez cette section-là?
M. Bérubé
(Patrick) : Écoutez,
pour un représentant syndical,
je pense que tous qui sont derrière nous vont être d'accord pour dire qu'intimidation et menaces, ça
n'a plus sa place sur les chantiers de construction. On est tous
d'accord avec ça, puis je pense que le projet de loi n° 152 vise
essentiellement, en partie, certaines choses par rapport à ça.
Maintenant, de perdre
son emploi cinq ans, on considère que, pour un représentant syndical, c'est la
peine capitale. Dans les faits, un
entrepreneur qui est dans une association qui commet une infraction — puis on n'encourage pas ça, je tiens tout de suite à préciser encore une
fois — puis qui
a une entreprise peut continuer à oeuvrer. Un représentant syndical, comme je disais
tout à l'heure, je fais référence à la peine capitale, jamais il ne va pouvoir
revenir en chantier après cinq ans,
d'aucune façon que ce soit. D'abord, un, il ne se serait pas... probablement
pas fait d'amis s'il a fait appliquer les
conventions collectives d'une certaine façon. Et, de deux, en matière
syndicale, c'est très fragile aussi et fragilisé quand on retourne en
chantier parce que, bon, il y en a qui ne veulent pas s'afficher ou peu
importe. On trouve que c'est une sanction qui est lourde de conséquences.
On
n'a pas touché à ça réellement, nous, au niveau de notre mémoire, comme vous
pouvez le constater, mais on est quand même sensible, M. Leclair, à
cette réalité-là.
M. Leclair : Bien, c'est bien. Je ne vous ai pas questionné sur le fait des postes,
et tout. Je pense que tout le monde s'est
répété, là, pour dire qu'il faut garder l'expertise là le plus longtemps
possible. Donc, en ce qui me concerne, là, pour ce soir, c'étaient mes
questions. Merci, d'avoir été de passage avec nous aussi tard que ça.
La Présidente (Mme Richard) : Merci, M. le député de Beauharnois.
M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard :
Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs, d'être ici ce soir. Tout à l'heure,
vous avez indiqué, concernant la
scission du poste de P.D.G. de la CCQ... À moins que je ne me trompe, là, je
regardais la CNESST, c'est le même principe que ce que vous nous avez
dit. Est-ce qu'on devrait l'appliquer à d'autres organisations que la CCQ ou
c'est seulement la CCQ?
M. Bourbonnais (Jacques Émile) : Ça pourrait s'appliquer. À partir du moment où on
prend comme appui la loi des
organismes d'État, à ce moment-là, tous ceux, je dirais, qui ne tombent pas
sous le coup de cette loi-là, effectivement, devraient être touchés. Maintenant, on n'a pas strictement abordé le cas
de la CNESST parce que c'est plus la CCQ qui est l'organisme auquel on
se rattache, là. Mais le même raisonnement pourrait valoir pour celui-ci et
pour tout autre organisme dans la même situation.
Encore une fois, je
vous ramène au fait que c'est une loi des sociétés d'État qui nous dit, qui
recommande qu'il y ait une scission entre le
poste de président du conseil et de chef de la direction, si on l'appelle de
même, ou P.D.G., peu importe. Donc,
si cette loi-là existe, puis elle existe dans les faits, à ce moment-là, elle
doit trouver application. Puis, dans
le cas de la CCQ, c'est qu'on a relevé effectivement, comme je vous dis, des
situations pour ainsi dire où le conseil d'administration, depuis plusieurs années, est subordonné aux nécessités
puis aux obligations, finalement, de l'organisation puis au détriment du rôle des administrateurs,
finalement, qui négligent, jusqu'à un certain point, la définition
d'orientations pour l'organisation.
M. Picard :
Est-ce que je décode bien vos propos si je dis que ce genre d'organisation là
fait qu'il arrive qu'on s'éloigne de la mission par des décisions plus
administratives, disons? On doit aller là, puis...
M. Bourbonnais
(Jacques Émile) : C'est exactement ça.
M. Trépanier
(Michel) : Exactement. Puis une des choses qu'on partage, c'est... on
fait une grosse distinction entre les
opérations de la P.D.G., son rôle, puis le rôle du C.A. Puis un exemple bien
simple que je peux vous donner ce soir,
avec le respect de la ministre : la ministre présente un projet de loi
aujourd'hui. La personne qui anime ou qui préside l'assemblée, ce n'est pas la ministre. Elle a sa
voix, mais l'indépendance du C.A., je pense qu'il est extrêmement
important, puis surtout avec l'ajout des
indépendants... Puis aussi il y a trois comités de vérification puis d'éthique
qui dépendent aussi de la présidente du C.A. Ça fait que tu es juge et
partie de ceux qui te surveillent. Ça fait qu'on fait juste soulever ces
points-là que ça peut amener, puis ça amène des situations de conflits
d'intérêts.
M. Picard : O.K. Merci. Autre sujet, l'équilibre des sanctions, là, parce que
j'ai vu que ce n'est pas la même
chose, employeur, employé. Il faudrait que
ce soit dans des ordres de grandeur pour que ça fasse le même... comment
dirais-je?, que ça permet aux gens qui
reçoivent des sanctions de réfléchir... la même durée de temps, je vais dire ça
comme ça, là.
M. Trépanier
(Michel) : Ce qu'on exige, puis c'était très important,
M. Bérubé, il l'a mentionné, on ne tolère puis on ne tolérera plus jamais des gestes
d'intimidation ou de menace. Ici, on se retrouve dans le cadre de la loi R-20,
puis il y a un déséquilibre par rapport aux
pénalités, qu'on puisse retrouver entre des pénalités qu'un salarié peut avoir,
ou un représentant syndical, ou un employeur. Puis une des choses qu'on
retient, que, si la commission peut s'en rappeler puis se pencher dans le futur, c'est notre recommandation,
l'item 6. Il n'y a aucune protection, présentement, pour un
salarié. Puis la réalité d'un travailleur de la construction...
Je
suis un travailleur de la construction. J'ai vécu de ne pas être capable de
travailler pendant quatre mois, de vivre de l'insécurité. Puis il y a
des choses récurrentes qui arrivent quand on parle d'intimidation pour un
travailleur. Si un travailleur... puis
Mme Lemieux, elle l'a mentionné. Un travailleur va changer d'emploi trois,
cinq, 10 fois dans l'année, de prochain employeur puis du chantier.
Il y a une chose récurrente qui arrive, c'est son embauche. Trop souvent, les
salariés sont convoqués sur un chantier, puis un entrepreneur lui dit, à son
embauche, qu'il ne paiera pas de temps supplémentaire,
qu'il ne paiera pas de frais de déplacement, qu'il ne paiera pas ci, qu'il ne
paiera pas ça, c'est à prendre ou à
laisser. Quand ça fait quatre mois que vous n'avez pas travaillé, moi, tant
qu'à moi, c'est de l'intimidation. Puis cette règle-là, c'est l'item-là,
l'item 6, on veut instaurer une pénalité pénale pour contraindre ces
situations-là.
Mais
la seule chose qu'on demande, c'est l'équité, l'équité. En autant qu'on a
l'équité, si on nous reproche des faits,
la partie salariale ou syndicale, puis que les patrons ont le même type de
pénalité, on n'a aucun problème avec ça. Il faut être conséquent dans la
vie.
Je vais peut-être juste laisser, si vous me
permettez, compléter M. Bérubé.
M. Picard : Allez-y.
M. Bérubé (Patrick) : Bien, une
dernière petite chose par rapport à ça. On parlait de mention taboue au fait que l'intimidation, c'est quelque chose qui existe
parce qu'à l'agrément on a toujours fait référence au fait qu'il y a de l'intimidation au niveau des représentants ou des
salariés vis-à-vis un employeur, mais on ne fait pas l'inverse. Quand on
parle d'équité, on fait aussi référence à ça.
Donc, la
bonification de la pénalité, c'est une chose, parce qu'on a dit d'emblée qu'on
n'était pas d'accord avec l'intimidation,
qu'elle vienne d'un côté comme de l'autre, mais on ne veut pas que, dans
l'abstrait, on oublie l'autre côté. C'est
pour ça que la recommandation 6, comme mon confrère le disait... Puis il y
en a plusieurs autres, mais on profite de la tribune peut-être pour vous
le mentionner. Peut-être que mon confrère Me Dumais pourrait vous en
parler, de ce déséquilibre-là au niveau de certains aspects puis certains
numéros d'articles.
La Présidente (Mme Richard) :
Me Dumais, le mot de la fin? Quelques secondes. 20 secondes.
M. Dumais
(André) : 20 secondes?
Bien, tout le monde l'a soulevé, le Conseil du patronat a parlé d'une
stratégie anticoncurrentielle. Vous avez nos
représentations. Seulement pour vous dire, pour de la menace et de
l'intimidation, le seul article qui existe pour un employeur en ce
moment, c'est l'article 120. Ça constituerait une infraction à la loi
d'ordre général avec des amendes ridiculement basses, comparativement à 113.1,
113.2, 113.3 pour des cas de menace et intimidation.
Ce n'est pas l'apanage syndical, ça, de la menace et de l'intimidation. Il
faudrait s'y mettre au niveau patronal aussi. Les emplois sont
précaires, et on utilise ça comme levier.
La Présidente (Mme Richard) :
Désolée! Désolée! Merci beaucoup, messieurs, pour votre contribution aux
travaux de la commission. Je vais vous souhaiter, à tous et à toutes, une bonne
fin de soirée.
Et la commission ajourne ses travaux à demain,
le mercredi 7 février, après les affaires courantes.
(Fin de la séance à 21 h 19)