(Dix-neuf
heures trente-trois minutes)
Le
Président (M. Cousineau) : À l'ordre, s'il
vous plaît! Ayant constaté le quorum,
je déclare la séance de la Commission
de l'économie et du travail ouverte.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi
visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.
M. le secrétaire,
est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M.Leclair (Beauharnois) est remplacé par M. Turcotte
(Saint-Jean) et M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par M. LeBel (Rimouski).
Étude détaillée (suite)
Le Président
(M. Cousineau) : Merci. Alors, lors de notre dernière
séance, nous avions débuté l'étude de l'amendement de M. le député de Rimouski
à l'article 83.1 proposé par l'article 28 du projet de loi.
Alors, avant de vous demander s'il y a d'autres interventions, voici le temps restant pour chacun des parlementaires. Alors, M. le député de Saint-Jean, il vous reste
17 min 40 s, M. le député de Rimouski,
13 min 5 s, M. le député de Richelieu, 20 minutes, M. le
député de Drummond—Bois-Francs,
20 minutes.
Alors, je suis prêt à
reconnaître un premier intervenant. M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Turcotte :
Je suis tout à fait sur l'amendement, vous allez voir ça. L'amendement est très
clair : «Le ministre s'engage à
rendre publiques les analyses d'impact effectuées, avant que n'entre en vigueur
le programme Objectif emploi.»
Le
ministre, à la dernière séance, nous a dit qu'il était d'accord avec le
principe que ça se... c'est une nouvelle pratique du ministère, et
cependant ce n'était pas au bon endroit que l'amendement était proposé. Vous
comprendrez, M. le Président, que, bon, nous, nous disposons des services de
notre recherchiste, de notre conseillère politique ici, Mme Plamondon, mais nous n'avons pas toute l'équipe qui entoure le ministre.
Donc, nous sommes prêts, nous, à faire bon usage des conseils du ministre,
mais vous comprendrez, M. le Président, que nous ne sommes pas prêts à retirer
notre amendement maintenant parce que vous comprenez le jeu parlementaire,
hein? Même si on dit «le jeu», on rit, mais on ne rit pas tant que ça.
Donc,
moi, ce que je propose, et je l'ai proposé à la dernière séance, et je vais le
proposer de nouveau, nous avons fonctionné
de cette façon-là à plusieurs reprises dans la première partie du projet de loi, donc, moi, ce que je propose, nous pourrions suspendre
l'article 83.1, nous pourrions nous rendre à l'article en question où le ministre
nous a dit que cet article-là pourrait
aller. J'ai cru comprendre que même le ministre avait un certain libellé à proposer. Nous
pourrions adopter ce libellé et revenir à l'article 83.1, retirer notre amendement
et poursuivre le travail, comme nous le faisons si bien depuis le début de l'étude
détaillée de ce projet de loi. Donc, moi, c'est ma proposition,
mon humble proposition dans le sens
où nous avons éprouvé cette méthode de travail qui a bien fonctionné dans la
première partie du projet de loi. Le ministre
ne semble pas... en tout cas, n'a pas voulu utiliser cette méthode qui a fait
ses preuves depuis tant d'années dans le parlementarisme, ici, à l'Assemblée nationale, pour notre amendement sur
les règlements. Peut-être que, cette fois-ci, nous aurons la chance
d'entendre un oui de la part du ministre. Du moins, la balle est dans le camp
du ministre.
J'ai terminé, là,
pour l'instant.
Le Président
(M. Cousineau) : D'accord. Alors donc, M. le ministre.
M. Blais :
Merci, M. le Président. J'ai déjà eu l'occasion de m'engager, là, disons, par
rapport à cette demande-là, de lui
donner une forme, là. Cependant, au-delà de l'engagement que j'ai pris, là, je
pense que, maintenant, on a près de 50 heures, tout près de 50 heures de
faites sur seulement un article, là. On devrait l'adopter, continuer, puis,
rendu, disons, aux éléments transitoires, hein, du projet de loi, à ce
moment-là, on pourra l'intégrer avec d'autres éléments transitoires,
d'ailleurs, dont j'aimerais parler quand on sera rendu là.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de
Saint-Jean.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président. Pour une nouvelle fois, nous tendons la main au
ministre pour faire en sorte que nous puissions progresser dans l'étude
du projet de loi.
Je comprends que le ministre, peut-être, trouve
le temps long et trouve qu'on tourne en rond, mais ça ne fait pas 50 heures que nous sommes sur cet article, ça
ne fait que 35 heures que nous sommes sur cet article. Je comprends que le ministre trouve ça long, mais, en même temps,
nos amendements, je pense qu'il y a 26 amendements que nous avons déposés à cet article, c'est des amendements très
intéressants, très importants pour la suite des choses, d'autant plus
que même le ministre lui-même a dit à
plusieurs occasions que ces amendements-là, là, il les appuyait sur le fond,
mais que, bon, ce n'était pas au bon
endroit, ce n'était pas au bon article. Je crois que, si le ministre écoutait
davantage les députés de l'opposition,
la méthode de travail que nous avons proposée et que nous lui proposons encore
aujourd'hui, nous aurions davantage progressé dans l'étude du projet de
loi. Preuve est que, pour la première partie du projet de loi, malgré des
oppositions sur le fond, nous avons quand même cheminé et avancé malgré tout
assez rondement.
Là, nous déposons des amendements. Le ministre
nous dit : On est d'accord, ce n'est pas le bon endroit. On dit :
Bon, bien, allons l'adopter au bon endroit. Il nous dit : Non, je ne veux
pas faire ça ainsi. Progressons et nous allons
y arriver. Nous, nous disons : Progressons, adoptons des articles au bon
endroit pour pouvoir progresser davantage. On est dans un dialogue de sourds actuellement, M. le Président. Donc,
je vais recommencer mon argumentaire sur le fond, espérant que le fond
primera dans ce débat.
• (19 h 40) •
Le fond de
l'amendement est très simple, il s'inspire largement du mémoire du Syndicat de
la fonction publique du Québec, qui a
été très clair, qui a été très clair, M. le Président. Ils n'ont pas été clairs
ici, en commission parlementaire, parce
qu'ils n'ont pas pu être entendus ici, en commission parlementaire. Nous avons
demandé des consultations générales, M.
le Président. L'ancien ministre, actuel député de Louis-Hébert, le ministre
actuel ont refusé d'entendre le Syndicat de la fonction publique. J'ai même déposé, M. le Président, une motion, ici
avant l'étude détaillée du projet de loi, pour que nous puissions
entendre le Syndicat de la fonction publique du Québec, que je rappelle,
d'ailleurs, que, bon, le ministre a aussi traité d'ignorant.
Je rappelle
que le Syndicat de la fonction publique du Québec représente les agents d'aide
sociale, représente les agents d'Emploi-Québec dans les centres locaux
d'emploi. Donc, c'est eux qui... ils seront aux premières loges pour appliquer le programme Objectif emploi, donc le
projet de loi n° 70. Dans leur mémoire, M. le Président, le Syndicat
de la fonction publique mentionne avoir fait
une demande au ministère pour avoir, obtenir toute étude d'impact, analyse
ou projection des retombées économiques
et/ou sociales réalisée dans le cadre du dépôt du projet de loi n° 70, en
lien avec tous les aspects du projet de loi.
M. le
Président, si vous avez une bonne mémoire, vous allez être capable de me
répondre à la question suivante : Combien
y a-t-il de documents que le ministère a jugé pertinents pour répondre à cette
demande d'accès du Syndicat de la fonction
publique? La réponse est 39, 39 documents que le ministère a répertoriés.
Combien de documents le ministère, et donc
le ministre, a accepté de rendre publics au Syndicat de la fonction publique?
Un sur les 39. Il nous en manque 38. C'est de ça qu'on parle, M. le
Président, notamment. Là, on est au premier point, là. On est à «étude
d'impact». Analyses, projections, retombées
économiques, etc., on y reviendra plus tard, à ces aspects-là. Mais là nous sommes,
bon, aux analyses d'impact effectuées.
Donc, un
document sur 39. On a même dû, si on peut dire, faire la bataille, hein, faire
bataille ici, M. le Président, pour,
nous, parlementaires, pouvoir obtenir ce document-là. Le ministre, finalement,
nous a remis le document en question, donc
le seul document, jusqu'à maintenant, qui a été rendu public. Et ce document,
que contient-il, M. le Président? Ce document contient une revue
sommaire des différentes législations entourant l'assistance sociale dans le
monde. Très intéressant, M. le Président. Très intéressant, mais, en même
temps, ce n'est pas des données très confidentielles et stratégiques, là, pour
la suite des choses.
Donc, la
question qui se pose, M. le Président, et le Syndicat de la fonction publique
le mentionne très bien dans leur
mémoire : «Les propos du ministre laissent croire que celui-ci s'est
contenté d'un simple calcul coûts-bénéfices, sans prendre la peine d'en
évaluer les conséquences à plus long terme, sur le plan social et économique.»
Pourquoi nous disons ça? Pourquoi le
Syndicat de la fonction publique mentionne ça? Parce que le ministre a sûrement
des documents. Il ne veut pas les
rendre publics sûrement parce qu'ils ne vont pas dans le sens du projet de loi,
M. le Président. Ou, s'ils vont dans
le sens du projet de loi, bien, je me demande pourquoi que le ministre ne les
rend pas publics. On aurait enfin des études,
des documents provenant du Québec qui démontrent la plus-value du programme
Objectif emploi, bien, du moins les sanctions qui découlent du programme
Objectif emploi.
C'est elles,
ces études que nous attendons depuis tant de semaines, que le ministre n'a
toujours pas déposées. On a même
déposé des amendements ici, vous le savez, M. le Président, pour obtenir de
telles études, pour avoir ces documents. Donc, moi, je crois sincèrement, M. le Président, qu'il n'y en a pas,
d'études. Le ministre n'a pas d'études qui démontrent que les sanctions
au Québec sont une bonne chose pour lutter contre la pauvreté.
Et je vais reciter le chapitre I, le chapitre
fondateur du livre du présent ministre, Un revenu garanti pour tous. Le
ministre va apprécier cette belle publicité pour son livre avant la période
d'été. Les gens pourront se le procurer...
Une voix : Pour lire sur la
plage.
M. Turcotte :
...pour le lire sur la plage, exactement. Chapitre I, chapitre fondateur, Faire
la guerre à la pauvreté plutôt qu'aux
pauvres. Donc, M. le
Président, je crois que, si le ministre...
Et, je le sais, le ministre, il a un bon fond. Il n'a pas écrit ce livre-là pour rien, M. le Président. Le ministre a écrit ce livre-là, il a fait plusieurs
études, il a fait des conférences,
même, dans des colloques, des conseils nationaux du Parti québécois par le passé. Vous le savez, M.
le Président, on
en a parlé, de ça. Puis ce n'est pas parce
qu'il est venu à une activité
du Parti québécois qu'il a un bon fond, là. Ce n'est pas ça, là, M. le Président, quoique ça
aide. Mais ce n'est pas de ça qu'il est question, M. le Président, c'est parce qu'il a
des convictions, il a des valeurs, on le
sait. À la lecture du livre, ça ne peut pas mentir, à moins que... bon, je ne
pourrais pas dire ça ici, mais moi, je crois que le ministre est sincère
dans son approche.
Cependant, la science
est têtue, les études parlent, et il n'y a pas d'études qui parlent actuellement,
des études québécoises, au Québec... Le ministre nous a cité des études d'un peu partout, comme il
dit, dans les pays du monde, hein? Intéressant, très intéressant, mais il a lui-même mentionné qu'il
fallait isoler les variables. Quand on isole des variables, ce n'est pas la même situation qu'au Québec nécessairement. La situation économique n'est pas la même. Peut-être que, dans ces
pays-là, il y a des gouvernements qui ont des politiques économiques, ce qui
n'est pas le cas du gouvernement actuel, M. le Président. Peut-être que, dans ces pays-là, le ministre
l'a mentionné dans le cas de la Grande-Bretagne lorsque nous avons cité une étude de l'Université d'Oxford... le ministre l'a si bien dit, en Grande-Bretagne, ce n'est pas du tout la même chose qu'au Québec,
hein? Les sanctions sont beaucoup plus difficiles. Ce n'est pas le même
portrait, mais pas du tout. Il a raison, il a raison.
Cependant,
on en a cité une, étude du Québec, cependant, hein? Notre collègue député de
Richelieu a cité une étude d'une dame, d'une
chercheuse de l'Université de Montréal, Deena White, hein? Donc, Vers une politique
saine d'activation — L'impact sur la santé et bien-être
des prestataires d'aide
sociale, de l'intégration des
services de sécurité du revenu et d'employabilité. C'est un rapport
de recherche qui a été transmis, je crois, au ministre, du moins à un ministre.
C'est, bon, dans le fonds de recherche sur la société et la culture. Donc, c'en
est une, étude du Québec, faite au Québec. Et, si je me souviens
bien, la conclusion était très claire sur les sanctions. Notre collègue
avait lu un extrait à ce sujet-là, recommandation, du moins, aspect
3.1 : «Dans le design des politiques, programmes et mesures, un accent plus fort sur la carotte — par exemple, incitatifs, mobilisation, soutien prolongé — que
sur le bâton — par exemple, des sanctions financières, [du] monitorat hautement exigeant,
[des] règles ou informations communiquées de façon à être perçues comme des menaces ouvertes ou tacites — le
bâton ayant pour effet de créer un climat et sentiment de précarité élevés pour le prestataire, conduisant au stress
chronique. L'approche du bâton comporte aussi un plus grand risque de
punition financière qui baisse encore le revenu des plus pauvres.»
M. le Président, le ministre l'a écrit, le ministre le croit, le ministre
veut travailler dans ce sens-là, faire la guerre à la pauvreté plutôt
qu'aux pauvres. Le problème, c'est que le projet de loi n° 70, tel
qu'écrit, tel que présenté par son prédécesseur...
Ce n'est pas lui qui a présenté le projet
de loi n° 70, hein, c'est le député de
Louis-Hébert. Mais les sanctions, M. le Président, vont créer davantage de pauvreté. Nous l'avons dit, nous l'avons
répété, nous le répétons ce soir, tant et aussi longtemps, M. le
Président, que le ministre
ne se rendra pas à l'évidence et, comme il l'a mentionné pour d'autres groupes, il ne s'élèvera pas dans le débat actuel,
M. le Président, c'est clair que nous ne pourrons accepter de
telles sanctions.
Je crois qu'il y a peut-être
d'autres collègues qui veulent intervenir, là, mais, M. le Président, c'est
clair pour nous : les sanctions, c'est non négociable.
• (19 h 50) •
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Richelieu, en
vous rappelant, M. le député de Richelieu, que vous avez un beau 20 minutes.
M. Rochon :
Ah! merci, M. le Président. À combien d'heures en sommes-nous, là, disiez-vous
tantôt, là, au collègue de Saint-Jean?
M. Turcotte :
35 heures.
M. Rochon : À 35 heures. Bon, bien, je vais vous apprendre quelque chose. Je
suspecte que puisse exister au sein de
ce gouvernement, du parti ministériel, une norme, une norme politique ou une
norme gouvernementale en vertu de laquelle
on change de cap après 60 heures. En tout cas, c'est ce qui est arrivé dans le
cas du projet de loi n° 59. J'ai eu le plaisir de siéger avec ma collègue de Taschereau à l'étude article par
article, et, après 60 heures, le miracle tant attendu s'est produit, la ministre a décidé d'oublier la
partie I de son projet de loi, contestée de toutes parts. À peu près tous
les groupes que nous avions entendus, les experts, les analystes que nous
avions entendus en commission parlementaire, auxquels se sont rajoutés plus
tard des éditorialistes, des analystes, des journalistes, ont condamné à
l'unanimité la première partie de ce projet de loi, y voyant tous et toutes une
atteinte à la liberté d'expression.
Alors, oui, en effet,
M. le Président, ce sera pratique pour vous aussi de savoir, il devrait nous
rester environ 25 heures avant que le
ministre ne change d'idée, ce qu'il a passé près de faire, cela dit, lors d'une
séance pas très ancienne, hein?
Rappelez-vous, nous avons tous et toutes assisté à la même chose, tant les
collègues du parti ministériel qu'ici les gens des oppositions, il s'est mis à réfléchir. Ça vient de me faire penser à
un sketch des Cyniques, ça, au sujet de Camil Samson. Vous souvenez-vous
de ça? On va oublier ça. Alors, j'ai peut-être éveillé le souvenir chez
certains téléspectateurs.
Il
s'est donc mis à réfléchir à l'idée, effectivement, d'abandonner les sanctions
au profit d'une autre approche. Vous vous souvenez, M. le ministre, vous
m'avez dit habilement que c'est moi qui vous avais inspiré cette approche qui
pourrait peut-être vous faire reconsidérer l'idée des sanctions. Je me suis
absenté une séance, il n'y a pas eu de développements à ce sujet.
M. Turcotte :
On t'attendait.
M. Rochon :
Ah! il m'attendait sans doute.
Le
Président (M. Cousineau) : Attention! Il n'y a seulement
qu'une personne qui a le droit de parler. Pour les enregistrements,
c'est préférable comme ça.
M. Rochon : Prenez ça pour de
l'enthousiasme, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, oui.
M. Rochon : C'est ce que vous aviez conclu, hein? Qu'il
s'agissait de ça? Mais, le plus sérieusement du monde, moi, j'étais
heureux de voir cette porte s'ouvrir sur la fin des sanctions et une autre
approche. Et on me dit, peut-être n'est-ce pas une analyse juste, que le
ministre a depuis refermé la porte sur cette avenue-là. Je ne sais pas s'il l'a
refermée de bon coeur, peut-être pas.
Il faut des
ministres très forts, et là je ne propose pas qu'il n'en est pas un, là, mais
je reconnais qu'il doit falloir des ministres extrêmement forts pour
ébranler ces ministères, qui sont parfois de véritables temples. Alors, leur
dire, là : Ce que vous nous avez
préparé, là, je ne suis pas d'accord, moi. Comme ministre, c'est moi qui aurai
le dernier mot, et les sanctions,
oubliez ça, là, ça ne passe pas. Et en plus on m'a convaincu, on m'a convaincu,
que ce n'était pas une bonne idée. Ça prend quelqu'un de très, très,
très fort.
Encore une
fois, je ne propose pas qu'il ne le soit pas, mais je comprends ses
hésitations, je comprends ce qu'il doit
vivre. Moi, j'ai l'ai senti vraiment s'ouvrir, là, sur la fin des sanctions et
une autre approche, mais je suis capable de comprendre que ce n'est pas
facile d'ébranler le temple et de le faire changer de direction.
Je reviens,
M. le Président, avant que vous me le suggériez, sur l'amendement du collègue
de Saint-Jean — ...
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Rochon : ...oui, il y avait des collègues du parti ministériel
qui s'apprêtaient à vous demander de me donner cette directive — que
«le ministre s'engage à rendre publiques les analyses d'impact effectuées,
avant que n'entre en vigueur le programme
Objectif emploi». On souhaite ajouter ça après le premier alinéa, à l'article
83.1. J'ai beau regarder ça de tous
bords, tous côtés, puis j'imagine que les gens qui suivent nos travaux font la
même chose et arrivent à la même conclusion que moi, et je vous la
donne : Comment peut-on s'objecter à ça? Sur quel motif? «Le ministre
s'engage à rendre publiques les analyses
d'impact effectuées, avant que n'entre en vigueur le programme Objectif
emploi.» Ce n'est, rassurez-moi, pas parce qu'il n'y aura pas d'analyse
d'impact ou qu'il n'y a pas eu d'analyse d'impact d'effectuée. Ça, ce serait irresponsable. Alors, ce n'est
certainement pas ça. Et quoi d'autre? Quoi d'autre? Que pourrait-il y
avoir, dans ces analyses d'impact, qu'il est
préférable que nous ne voyions pas, parce que c'est la seule conclusion
possible qu'on puisse tirer : le
ministre ne souhaite pas que nous voyions ces analyses d'impact ou, en tout
cas, il ne souhaite pas que nous en discutions maintenant parce
qu'encore là il a ouvert une porte. Peut-être celle-là aussi se
refermera-t-elle brutalement dans un fracas
terrible que tout le Québec entendra résonner. Il nous a ouvert une porte, il
nous a dit : On pourrait imbriquer cet amendement-là à l'étude d'un
article subséquent. Bien, mon collègue de Saint-Jean lui fait une suggestion, ma foi, tout à fait pertinente. Il lui
dit : Bon, bien, c'est parfait! Suspendons l'étude de l'article en cours,
s'il y a consentement de tout le monde, M. le Président, à moins que vous me
disiez l'inverse, c'est possible de le faire, la commission est souveraine, et passons à l'article auquel le ministre
souhaite imbriquer cet amendement. C'est raisonnable, la proposition du
collègue de Saint-Jean.
Encore là,
j'ai beau réfléchir, je ne comprends pas pourquoi le ministre balaie cette
suggestion-là. Peut-il, M. le Président, m'éclairer?
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Richelieu. Alors, M. le ministre.
M. Blais : J'ai combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Cousineau) :
Oh! vous avez tout le temps que vous voulez, vous, vous êtes le ministre.
M. Blais :
...prendre un petit peu de temps, si vous voulez, parce qu'on travaille ce
soir, on a au moins trois heures, je pense. Demain, on a encore deux
heures de travail, si je me souviens bien.
Le Président (M. Cousineau) :
Demain, je ne sais pas si c'est annoncé.
M. Blais : Je pense que oui, M.
le Président, mais, bon...
Le Président (M. Cousineau) :
Bon, de toute façon, on ne débattra pas là-dessus.
Une voix : ...
M. Blais :
Non? Ce n'est pas confirmé. Pardon, pardon. Alors, je vais en profiter ce soir,
donc, raison de plus pour en profiter ce soir, peut-être pour essayer de
faire un petit peu un bilan, là.
Le Président (M. Cousineau) :
Allez-y, mettez le paquet ce soir.
M. Blais :
Oui, oui, c'est ça. Pour ce qu'il en reste, M. le Président, pour ce qu'il en
reste.
Le
Président (M. Cousineau) : Je dois vous annoncer que vous n'avez pas 35 heures de faites, hein,
vous avez, au total, 83 h 29 min de faites. Bien là, 29
minutes... Excusez-moi, on est à peu près à 39 minutes.
M. Blais : Ça a passé si vite
en bonne compagnie.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, oui. Bien oui! Bien sûr!
M. Blais : Peut-être prendre un
petit peu de temps puis donner l'occasion aux collègues d'en face de se reposer
un peu.
Une voix : ...de supposer un
peu?
• (20 heures) •
M. Blais : Se reposer un petit peu et faire un
bilan. Puis, bon, je pense qu'on est à la fin d'un cycle. On verra, au
retour des vacances, comment, là, on fait aboutir ce projet-là.
Tout d'abord,
revenons très, très, très en amont, hein, parce que j'ai été interpellé sur ma
démarche personnelle. Ensuite, on
verra ensuite comment on peut s'associer à la démarche du gouvernement. Quand
j'ai commencé à m'intéresser aux questions de transfert de politiques
sociales, il y a assez longtemps, et quand j'ai commencé à travailler sur l'allocation universelle, moi, j'ai eu l'occasion
d'avoir un maître, le maître sur le sujet, qui est un ami aujourd'hui,
qui s'appelle Philippe Van Parijs, et on a
souligné ses 65 ans la semaine dernière, qui est le créateur aussi d'un
organisme international qui s'appelle Basic
Income Earth Network, qui va souligner ses 30 ans d'existence aussi, je pense,
l'automne prochain. Et donc, en travaillant
là-dessus... Et il faut comprendre que l'allocation universelle, comme l'impôt
négatif, d'ailleurs, est une forme de
transfert qui a le grand avantage, par rapport à l'aide sociale, par exemple,
que l'on connaît aujourd'hui, qui a
quand même ses qualités, d'être un programme qui est beaucoup moins
stigmatisant et surtout qui permet beaucoup
plus facilement le cumul avec le travail que l'aide sociale. On en a déjà parlé. L'aide
sociale n'a pas été faite à
l'origine pour des personnes qui étaient sans contrainte, pour les inciter au
travail, ça a été fait à l'origine pour des personnes
qui avaient des contraintes, des personnes
handicapées, disait-on à l'époque,
pour qui on ne pouvait pas espérer qu'il
y ait un retour... ou on ne voyait
pas les choses de cette façon-là, qu'il
y ait un retour à l'emploi. Tout ça a
changé aujourd'hui, puis les personnes qui ont un handicap aspirent
aussi, en tout cas, en grand nombre, à prendre leur place au
soleil et avoir éventuellement un emploi.
Donc, c'est
pour ça que le premier ministre m'a mandaté pour regarder si on pouvait
moderniser notre système de transfert
social pour le rendre plus accessible, plus cumulable aussi, là, au travail que
les programmes actuels. Prenons, par exemple, les allocations
familiales au Québec. C'est un programme qui est facilement
cumulable au travail. Vous êtes à l'assistance sociale ou vous prenez un
travail, vous gardez toujours votre allocation familiale. Donc, il n'y a pas de
rupture, de désincitation. Et, quand on
regarde l'histoire des politiques sociales des 25, 30 dernières années et des
transferts au Québec, on voit toujours
cet effort d'intégration pour faire
en sorte que, quand vous choisissez
le travail, vous n'êtes pas pénalisé à la fois du point de vue moral et économique,
là, ça se tient très bien.
Et, dans les
discussions que j'avais sur le sujet à l'époque avec Philippe Van Parijs, il me
disait toujours que la principale
critique à l'égard des mécanismes plus inconditionnels, comme
l'allocation universelle, critique qui est faite par des économistes, par
ailleurs, tout à fait de gauche, pas de droite, là, c'est que ce type de mesure
pouvait être désincitatif au travail.
Il y a différents arguments du point de vue moral et économique qu'on peut
tenir à l'encontre de ce point de vue là,
sauf, et c'est fondamental et ça revient, finalement, à notre discussion,
curieusement, de ce soir — je n'aurais jamais pensé
un jour que j'aurais ce genre de discussion là dans un contexte politique comme
aujourd'hui — pour les
personnes, disons, les plus jeunes, hein,
qu'on ne pourrait pas accepter même une prestation inconditionnelle pour les
plus jeunes, compte tenu, hein, que, lorsque nous sommes jeunes, il faut
absolument forcer un peu la note pour développer son capital humain. Par
exemple, on n'a pas d'objection, je pense, de principe ici, de ce côté-ci,
comme en face, à ce que l'école soit
obligatoire jusqu'à 16 ans, hein? Ça nous semble une évidence. Certains disent
même 18 ans bientôt ou au moins, un
minimum, un diplôme secondaire, hein? Des gens réfléchissent à ça aujourd'hui
et pensent que c'est tellement important
pour le reste de sa vie qu'on peut obliger, hein, forcer, forcer sous
contrainte, pénalité, qui sait, les gens, pour leur bien, pendant un certain temps, là, à avoir un comportement qui va
protéger leur avenir. On appelle ça une forme de paternalisme bienveillant. On fait ça avec nos plus jeunes et on peut
penser qu'il faut faire ça avec des gens qui sont un peu plus fragiles
dans la société.
Donc, même une allocation universelle, qui est
beaucoup moins stigmatisante que l'aide sociale, moins marginalisante, mériterait d'être versée sous condition minimale, hein,
comme je le mentionnais à la fameuse page 145 de mon livre. Je ne pensais pas que ça serait si utile aujourd'hui, hein,
mais ça choquait beaucoup mes étudiants quand j'en parlais, que l'allocation universelle devrait être
au moins conditionnelle au fait d'occuper un travail, d'être en stage ou
d'étudier, donc d'être en train de développer son capital humain pour une
période fondamentale de la vie.
Je vous
dirais que ça, c'est un peu l'arrière-fond philosophique, là, de la démarche,
mais c'est aussi un arrière-fond sociologique,
c'est-à-dire beaucoup de personnes disent : Il faut vraiment pousser le
capital humain à cet âge-là. Je lisais récemment
un texte, je ne sais pas s'il est publié encore, mais, en tout cas, de Pierre
Fortin qui disait que, si on termine son secondaire V, M. le Président, au Québec, on aura un revenu
supplémentaire dans sa vie d'un demi-million de dollars de plus simplement parce qu'on a un diplôme et qu'on
a accès à des emplois que d'autres n'ont pas. Alors, la prochaine fois que vous allez... Parfois, les députés, on va
parfois à des remises de diplôme de fin d'année, hein, de secondaire V.
Moi, j'en ai manqué
une, ce soir, malheureusement, à Charlesbourg, parce qu'on était en Chambre
avant souper, et je m'étais dit que
j'allais dire ça aux jeunes, que vous avez 500 000 $ dans vos poches
de plus, là, aujourd'hui parce que vous allez avoir un diplôme et,
mathématiquement, là, vous allez avoir des emplois un peu mieux rémunérés.
Donc, il y a
un argument de nature morale, une forme de paternalisme bienveillant, je n'ai
pas trouvé de meilleur mot, là, je ne veux pas choquer personne en
utilisant cette expression-là, pour dire : Il faut pousser les jeunes et
les plus jeunes. Et ça, c'est un argument
qui est encore, disons, décuplé quand il s'agit de l'aide sociale, encore une
fois, qui est un programme qui, lui, est beaucoup plus marginalisant du point
de vue économique qu'une allocation universelle ou qu'un impôt négatif.
Alors, c'est
un peu le coeur de la démarche, hein? La démarche ici, ce n'est pas de
sanctionner, ce n'est pas de punir.
La démarche, c'est de savoir comment on peut pousser encore les gens, là, qui
arrivent à l'aide sociale, qui n'ont pas eu une vie facile, les pousser un peu pour qu'ils atteignent... qu'ils
aillent un petit peu plus loin. Et là moi, je suis prêt à entendre, je l'ai souvent dit, toutes les propositions des collègues d'en face. Si une sanction financière n'est pas
le bon geste, on peut trouver
d'autres gestes, mais il faut que ça soit efficace. Faut-il enlever le permis
de conduire? En Ontario, les jeunes qui n'ont pas terminé leur
secondaire V n'ont pas le droit à avoir le permis de conduire. Bon, hein?
Alors, c'est une façon. Est-ce que
c'est efficace? Je ne sais trop, mais c'est la façon dont ils se sont pris pour
inciter les jeunes et envoyer un message fort. Donc, on peut regarder de
différentes façons des mesures qui auraient une capacité, là, d'incitation pour
les premiers demandeurs.
Maintenant,
sur la question : Est-ce
que les pénalités financières sont
efficaces, évidemment, c'est une question complexe parce
qu'on a eu l'occasion de déposer les
recherches à notre disposition. Et, pour le moment, je le réitère, on
n'en a eu aucune, sauf celle qui n'est pas
publiée d'Oxford, qu'on est en train
d'étudier, mais qui ne semble pas démontrer, disons, aussi fortement la thèse qui a été avancée ici, là, que ça
aurait eu peu d'effet, notamment, là, sur l'employabilité. Mais on pourra y revenir. Nous, on a présenté des
recherches qui montraient, mais ça répond à une intuition simple, que,
bien sûr, si on force les gens, leur comportement va changer un peu quand même.
Au Québec, on n'a pas d'étude... C'est-à-dire,
tout ce que l'on a, c'est l'expérience qu'on a faite sous le Parti québécois.
Je ne sais pas si je l'ai mentionné ici, j'oublie toujours... Je ne rappelle
jamais si je l'ai mentionné, mais, en 1998, le Parti québécois...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Blais : J'en ai déjà parlé?
Oui?
Une voix : Une fois ou deux.
M. Blais : Donc, c'est intéressant
parce qu'en 1998 c'est Mme Harel, je crois, là, qui avait... — c'est
en 1998, non? — ...
Une voix : ...
M. Blais :
...qui avait introduit, là, donc, une obligation de recherche d'emploi pour les
personnes actives... les personnes,
pardon, aptes à l'emploi. Ça devait faire à l'époque, quoi, 70 %, pas
loin, des bénéficiaires de l'aide sociale, peut-être un 350 000, 400 000 bénéficiaires d'aide sociale. On
parle de 17 000 dans le cas d'Objectif emploi. Mais disons que le
Parti québécois a toujours été un parti qui avait beaucoup de vision puis
beaucoup d'attentes, là, par rapport au potentiel des Québécois. Donc, ils
avaient visé l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale.
Donc, dans le
cas de ce programme-là, essentiellement, il était tourné vers l'emploi, pas
nécessairement vers le retour aux
études. Pourquoi? On comprend bien, parce qu'il s'adressait à des personnes de
différents âges. Donc, axé sur l'emploi
dans un contexte où le chômage était quand même plus élevé qu'aujourd'hui. Il
devait y avoir trois points à peu près
de plus qu'aujourd'hui. Obligation, et, bien sûr, s'il y a obligation, la
recette qui avait été trouvée par le programme du Parti québécois... Je l'ai dit que c'était le
Parti québécois? Oui. C'était... Oui. La recette qui avait été trouvée, c'était
des sanctions, à l'époque, qui étaient de 103 $, 103 $ en dollars
d'aujourd'hui. C'est bien ça?
Une voix : Oui.
• (20 h 10) •
M. Blais : Et ça pouvait monter
jusqu'à 412 $ en dollars d'aujourd'hui. Donc, la coupure était plus de
50 %. C'était une coupure du deux tiers
de la prestation de base. Je vous rappelle qu'à l'époque le crédit d'impôt de
solidarité, à mon avis, n'existe pas ou, en
tout cas, il est embryonnaire. Donc, c'étaient des sanctions très sévères.
Donc, il n'y avait aucune distinction entre les types de manquements.
Donc, on a cette expérimentation-là, si je peux
dire, qui a duré un certain nombre d'années. Ça a été assez compliqué. Quand vous en parlez avec les agentes
de l'aide sociale, puis ça, je le reconnais puis je pense que je l'ai
déjà dit ici, le fait que ça s'adresse à
autant de personnes et le fait que le programme ne pardonnait pas beaucoup,
c'est-à-dire qu'une fois que la
sanction était décidée elle s'appliquait pour une période de temps assez
longue, différemment du programme que l'on
propose, ça pouvait devenir assez lourd à gérer, là. Et ça devenait des grands
nombres pour les agents. Donc, ils en ont un souvenir mitigé.
Mais, à cette
époque, quand même, puis là je réponds directement à la question du député de
Saint-Jean, on a vu une croissance de
la sortie de l'aide sociale et une diminution de l'entrée à l'aide sociale.
Donc, ça a fonctionné, si notre critère, bien sûr, c'est la sortie et
entrée.
Notre critère est un peu différent
parce qu'on s'intéresse à la fois, bien sûr, à la sortie de l'aide sociale, je
l'ai dit souvent, mais c'est sûr que,
comme on a aussi cette préoccupation-là de forcer, amicalement, mais forcer
quand même la diplomation et la qualification, notre mesure, elle est
différente.
Donc,
c'est l'essentiel de notre démarche, M. le Président. Donc, hein, sur le plan
des principes, il y a une volonté
d'aider, et parfois, pour aider, il faut obliger, hein, les gens,
malheureusement, surtout des gens qui n'ont pas eu l'occasion ou la chance de naître ou de se développer dans un
environnement qui est aussi propice que la majorité d'entre nous, peut-être, dont on a pu bénéficier.
Alors, tout ça, c'est un peu l'esprit qu'il y a dans la proposition, il
me semble, qui la rend acceptable, d'autant
plus qu'encore une fois contrairement, là, au modèle qui avait été développé
par le Parti québécois, là, à la fin des
années 90 le nôtre, c'est un modèle vraiment qui est très, très progressif, des
pénalités qui sont presque la moitié de ce
qui avait été mis en place par le Parti québécois, qui s'adresse exactement au
bon groupe, c'est-à-dire des
personnes aptes qui arrivent à l'aide sociale et dont on sait que, si on
facilite la sortie avant la première année, les chances qu'ils
reviennent vont avoir diminué beaucoup.
Alors, je vous
remercie beaucoup, M. le Président, de votre attention.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci beaucoup, M. le ministre.
Alors, nous pouvons poursuivre avec M. le député de Richelieu ou M. le
député de Saint-Jean.
M. Rochon : Oui, pour faire remarquer, M. le Président, et je ne lui en tiens pas
rigueur, ce sont des choses que nous
faisons peu souvent, nous, de notre côté, mais là, je ne sais pas si vous avez
bien observé, mais jamais le ministre n'a référé à l'amendement qui est
à l'étude actuellement.
Le Président
(M. Cousineau) : Bien, indirectement, il a parlé d'impact
d'une certaine époque.
M. Rochon : Ah! vous croyez? Oui, oui, oui, une certaine époque dont il se rappelle
plus que d'autres époques, hein?
Est-ce que quelqu'un se souvient ici... Ça m'amuserait de le savoir. Peut-être
que c'est un rêve que j'ai fait, que ça n'a jamais existé. Hier, dans la nuit, je me suis réveillé avec l'image de
boubous macoutes. Est-ce que ça a déjà existé, ça, ou c'est moi qui...
M. Turcotte :
Il y a 30 ans cette année.
M. Rochon : Ah! il y a 30 ans cette année. Ah bon, bon, bon! Ça, je n'en avais
jamais parlé ici, hein, je pense, des... Je pourrais parfois oublier et
revenir là-dessus, mais je vais essayer d'avoir une mémoire fidèle.
Donc,
puisque le ministre n'a pas bien, bien clairement réagi à l'amendement du
collègue de Saint-Jean, qui, je le rappelle,
souhaite voir le ministre s'engager à rendre publiques les analyses d'impact
effectuées avant que n'entre en vigueur le programme Objectif emploi,
puis-je, par votre entremise, M. le Président, souhaiter que le ministre nous
donne des explications à l'égard de sa réticence?
J'ai
tout à l'heure exprimé ne pas la comprendre, estimant raisonnable que des
études d'impact soient effectuées au sujet d'un programme comme celui
qui nous est soumis, le programme Objectif emploi. Alors, j'ai dit ne pas
douter qu'il y en avait, des analyses
d'impact, mais je me suis inquiété qu'elles ne soient pas rendues publiques.
Alors, j'aimerais, M. le Président,
encore une fois, en passant par vous, que le ministre explique à la commission pourquoi
il résiste à rendre publiques les analyses d'impact effectuées avant que
n'entre en vigueur le programme Objectif emploi.
Le Président
(M. Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
M. le Président, j'avais l'impression que je l'avais déjà fait, mais je vais le
refaire. Donc, tout d'abord, j'ai
déjà mentionné ici que c'est un programme dont les intentions réglementaires
sont assez importantes et lourdes de conséquences,
hein? Donc, les montants, par exemple, sont définis par règlement, le parcours
est défini aussi par règlement. Donc,
c'est pour ça que j'ai annoncé très tôt qu'on allait déposer les intentions
réglementaires, et Dieu sait que j'en ai d'autres après à déposer puis à présenter. Ce sera assez intéressant,
d'ailleurs, si on peut se rendre là,
là, ce soir. Donc, on va le faire par
souci de transparence, même si on
n'est pas obligés de le faire. On sait
bien, là, que, disons, les règles parlementaires,
à moins que je ne m'abuse, M. le
Président, ne nous y obligent pas,
mais, compte tenu de la sensibilité et de l'importance, on
va le faire.
Même
chose pour les analyses d'impact, on est à peu près dans le même type
de situation. On n'a pas d'obligation de rendre
publiques les analyses d'impact, mais je rappelle qu'après un impair qui avait
été commis par la députée de Taschereau il n'y a pas si longtemps, je ne sais
pas si j'ai déjà parlé de ça, mais il n'y a pas si longtemps, il y a une décision ou il y a une façon de faire au ministère
qui a été prise, et moi, j'endosse cette façon de faire, que maintenant,
si on change des règlements à l'aide sociale, on va aussi déposer publiquement,
là, les analyses d'impact. Bien sûr, encore faut-il
s'entendre sur ces règlements. La première étape, c'est qu'on discute ensemble
des intentions réglementaires. Ça me permet à moi de prendre, bien sûr,
les conseils des collègues, de parfois faire des changements, et ensuite que le
gouvernement prenne les décisions finales sur les règlements. Et là on peut, à ce moment-là, déposer un certain nombre d'études d'impact et voir, valider exactement
ce que ça peut donner.
Donc,
je pense qu'on a toujours fait les choses de cette façon, en tout cas,
ces dernières années au ministère, puis on va continuer à agir de la même
façon.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Peut-on, M.
le Président... Je voulais vous
amener à solliciter des précisions,
c'est ça qui a troublé mon articulation. Peut-on demander des précisions au ministre
quant au moment où il déposera, rendra publiques les analyses d'impact
effectuées?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : À mon avis, là...
Une voix : ...
M. Blais : Donc, après
publication du règlement.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, vous avez votre réponse, M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Après publication
du règlement. Règlement que, je lui rappellerai, nous souhaitons également
pouvoir examiner, hein? Il se souviendra... Est-ce qu'on l'avait déjà dit?
M. Turcotte :
Oui.
M. Rochon : On l'a déjà dit.
M. Turcotte :
Mais répète-le.
M. Rochon : Ah bon! Je vais le
répéter. Il se souviendra que c'est un...
Une voix : ...
M. Rochon : Oui, oui, oui, absolument.
Le Président (M. Cousineau) :
L'enregistrement...
M. Rochon : Mais on voit quand même qu'il y a une trame
ici, hein, des deux côtés, des deux côtés de cette table.
Le Président (M. Cousineau) :
Moi, je protège le gars qui est en arrière, là.
M. Rochon : Oui, d'accord.
Mais, puisque j'en ai déjà parlé, mais que, néanmoins, je peux le rappeler, je
le rappelle, nous souhaitons pouvoir
examiner ces règlements. Nous venons d'ailleurs d'entendre le ministre
dire que bien des choses résident
dans ces règlements, hein? Ils sont essentiels à l'application du projet de loi et ils en déterminent la portée, en quelque sorte, les personnes
visées.
Alors, ces
règlements, M. le Président, peut-on demander à nouveau au ministre
à quel moment nous pourrons les examiner?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Si je comprends bien la
question... est-ce que c'est la même que tout à l'heure, c'est-à-dire à quel
moment nous allons les déposer?
M. Rochon : ...
M. Blais : Alors, nous...
M. Rochon : Les règlements.
Tantôt, nous parlions des analyses d'impact, nous parlons maintenant des
règlements.
M. Blais : Ah! alors, les règlements
vont être adoptés suite à l'adoption, là, du projet de loi.
Le Président (M. Cousineau) :
C'est précis, comme réponse. Poursuivez, M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Absolument. Le ministre
est égal à lui-même, ce qui semble le réjouir. Alors, j'en suis fort aise.
M. Turcotte : Il
est constant.
• (20 h 20) •
M. Rochon : Il est constant,
voilà, il y a une certaine constance chez lui. Mais cette constance, je le
rappelle, pourrait, pourrait...
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Rochon : En effet. Cette constance pourrait, pourrait,
disparaître dans maintenant... je ne sais plus à combien on est
rendus, là. Je disais 35 heures encore tantôt... 25 heures, que je disais. On
est peut-être rendus à 24 h 30 min. En
24 h 30 min, on va peut-être voir la constance, là, changer un
peu de trajectoire.
Alors, nous,
nous aurions donc souhaité que le ministre s'engage, là, à rendre publiques les analyses
d'impact effectuées avant que n'entre en vigueur
le programme Objectif emploi. Pourquoi? Parce que nous entendons beaucoup
de voix s'élever pour nous dire que le projet
de loi n° 70 va à l'encontre des
résultats de la recherche sur les politiques publiques de l'emploi. Alors, ça, ce sont des gens qui font partie du groupe chéri
du ministre, du groupe des 300 universitaires qui a appuyé le Collectif pour un Québec sans pauvreté. Évidemment,
je rigole quand je dis qu'il s'agit
du groupe chéri par le ministre, là.
Alors, enfin, pour un certain nombre de signataires parmi ces 300
universitaires : «Le projet de loi [...] va donc à l'encontre des
résultats de la recherche sur les politiques publiques de l'emploi, qui font de
la sécurisation des trajectoires
professionnelles, notamment par l'accès à un revenu adéquat, un devoir
collectif dont l'État est le premier garant, particulièrement pour les
publics menacés d'exclusion — peut-on lire. En effet, le passage par un
nouveau programme, dénommé "Objectif
emploi", plutôt que d'initier la démarche d'intégration professionnelle en
sécurisant le revenu, deviendrait pour certaines catégories de personnes
un préalable à l'accès au régime normal de l'aide sociale.
«Selon le
projet de loi n° 70, serait "offert" — en réalité imposé, que j'ai l'air de le
dire, moi, mais cette parenthèse, elle
était des signataires — un "plan d'intégration en emploi" comprenant des
"engagements" — en réalité des obligations, c'est aussi eux qui écrivent ça — définis unilatéralement par le ministre. On
contreviendrait ainsi à l'un des principes de la STP : privilégier la liberté des personnes en leur donnant plus de
pouvoir de décision sur leur parcours de vie, d'autant plus que le programme volontaire "Alternative
jeunesse" disparaîtrait. Enfin, non seulement l'aide accordée
demeurerait-elle insuffisante pour échapper à la détresse financière — 623 $
mensuellement pour une personne seule sans contrainte à l'emploi, soit
50 % du seuil de faible revenu — mais elle pourrait être
réduite.
«Les
dispositions du projet de loi n° 70 risqueraient en outre de porter
atteinte à des droits garantis par les chartes : droit à la vie, à la liberté et à la sécurité et
droit à l'égalité — articles
7 et 15 de la Charte canadienne; droit à la sécurité, à la vie et à l'intégrité, droit à un niveau de vie décent,
droit à des conditions de travail justes et raisonnables, et non-discrimination dans la jouissance des droits — articles 1, 45, 46 et 10 de la charte
québécoise. Le très faible niveau des prestations d'aide sociale a
d'ailleurs été critiqué par le Comité des droits économiques, sociaux et
culturels des Nations unies, dont le dernier
rapport sur le Canada appelle les provinces à les rehausser. Le droit
international oblige les États à agir
au maximum de leurs ressources disponibles pour assurer la réalisation
progressive du droit à un niveau de vie suffisant et du droit à la
sécurité sociale et prohibe — prohibe — toute mesure régressive. Les
lois, politiques et programmes d'un État
adhérant au PIDESC doivent donc permettre l'amélioration constante de la
situation des personnes en regard de ces droits fondamentaux. Le projet
de loi n° 70 ne va certainement pas dans ce sens.»
Il y a peut-être des gens qui, comme moi,
n'affectionnent pas particulièrement les acronymes, le recours aux acronymes.
Alors, le PIDESCJ, c'est le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels.
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Rochon : C'est bien, ça.
Donc, voilà des universitaires qui, à partir des résultats de recherches sur
les politiques publiques de l'emploi,
émettent de grandes réserves, de grandes réserves relativement au projet de loi
n° 70. Parmi ceux-là, il y a les Lapointe, Paul-André Lapointe, Sylvie
Morel, Christine Vézina.
Alors, nous
lisons cela, nous lisons des textes avec référence à des résultats de
recherches, nous sommes inquiétés. Et,
pendant ce temps, le ministre refuse de s'engager à rendre publiques
rapidement, maintenant, les analyses d'impact effectuées avant que n'entre en vigueur le programme Objectif emploi.
Nous avons de quoi nous inquiéter, mais nous n'avons rien pour nous
rassurer.
À la place du
ministre, s'il possède des études, des analyses rassurantes, qu'il ne fasse pas
que les parcourir en nous les lisant,
qu'il les produise. On pourrait même, je crois que la commission est équipée pour ce faire, s'il
les dépose, les mettre en ligne. Est-ce que je me trompe, M. le
Président?
Le Président (M. Cousineau) :
Il n'y a pas de problème.
M. Rochon : Imaginez, imaginez
le bénéfice en termes d'information du public qui nous suit.
Alors, encore
une fois, je réclame et j'espère du ministre qu'il s'engage à rendre publiques
les analyses d'impact effectuées
avant que n'entre en vigueur le programme Objectif emploi, ce à quoi il
souscrirait très, très, très clairement tout à l'heure, au moment où on va voter sur l'amendement de mon collègue de
Saint-Jean pour que cette notion soit ajoutée après le premier alinéa de l'article 83.1. Hein, il souscrirait
concrètement à l'idée en votant avec nous en faveur de cet amendement
tout à fait pertinent du collègue.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.
M. Blais :
M. le Président, peut-être faire un commentaire à mon tour, là, sur le texte
qui est paru ce matin. C'est bien ce
matin, là? Le temps passe vite, là, puis j'ai eu l'occasion de le lire et même
prendre quelques notes là-dessus. Peut-être
vous dire tout d'abord que j'ai été assez content de... j'ai vraiment
l'impression que, malgré tout, là, au Québec, on progresse sur ce débat-là, c'est-à-dire qu'on ne refait pas les mêmes
erreurs. Moi, en lisant le texte, je me suis rendu compte que les écueils dont j'ai
parlé moi-même, dans un texte cette semaine, par rapport à Objectif emploi
n'étaient à peu près pas repris dans
ce texte-là. D'autres écueils, cependant, sont commis, et peut-être je vais
corriger le tir un peu, là, si le collègue le permet, là.
D'abord, au sens strict, Objectif emploi ne
s'inspire pas — donc,
c'est le sous-titre de l'article — des pays nordiques, hein? Je n'ai jamais eu cette prétention-là d'avoir comme
source d'inspiration les pays nordiques. Ce qui est arrivé dans le débat, disons, de société autour
d'Objectif emploi, c'était qu'on a vu ce type de mesures là comme étant
des mesures régressives, je pense que c'est une expression qui est utilisée
dans le texte, ou des mesures de droite, de régimes qu'on voit aux États-Unis,
en Angleterre et peut-être en Ontario parce que, hein, ce sont des gens, là,
des Anglo-Saxons plus à droite que les Québécois, qui sont naturellement plus à
gauche.
Ce que j'ai
voulu montrer simplement dans l'argumentaire du débat de société, c'est que de telles mesures, donc, de réciprocité et d'imputabilité, elles existent
aussi dans d'autres pays que l'on peut considérer facilement
comme étant des pays de gauche, sociodémocrates. Il y a une raison sociologique
pour ça, probablement, c'est que ceux qui connaissent un petit peu les
pays scandinaves savent que ce sont des cultures protestantes, hein, et ce sont
des gens très travaillistes, hein? Ça va, oui? Donc, hein, ils sont très
travaillistes. Regardez, par exemple, le cas qui m'a toujours intéressé, de la Finlande, au niveau des droits de scolarité. Vous
avez des droits de scolarité qui sont à zéro, à peu près, en Finlande,
mais cependant l'accès à l'université est limité, là, aux meilleurs. Et, dès
que vous n'avez pas un rendement suffisant, hein,
vous pouvez perdre votre place à l'université. On n'a pas du tout cette
approche-là au Québec où ailleurs, l'approche est un petit peu mixte.
Donc, premier
argument, donc, Objectif emploi n'est pas d'inspiration sociale-démocrate, même
s'il y avait une force dans
l'argument à dire : Écoutez, tous les pays du monde le font, bien sûr, les
pays peut-être un peu plus anglo-saxons, un peu plus exigeants, mais
aussi les pays sociodémocrates, et ils le font de façon, disons, assez active
et avec des exigences assez fortes.
• (20 h 30) •
Prenons, par
exemple, le cas... Est-ce que je l'ai ici? C'est quand même assez fascinant,
là, dans le cas de la Suède, hein,
l'obligation, en Suède, là, pour les allocataires, les jeunes, c'est de se
rendre à l'équivalent du bureau d'Emploi-Québec ici, du CLE, ça s'appelle le Jobcentrum, là-bas, et puis c'est une
présence obligatoire au centre pendant trois heures par jour en
alternance, matin et soir, d'une semaine à l'autre. Et là vous devez faire une
recherche active d'emploi là-bas. Avant de
sortir, vous présentez le travail que
vous avez fait à la personne qui est l'équivalent
du CLE pour montrer que vous avez fait une véritable recherche d'emploi,
et puis que les emplois, pour le moment, que vous avez trouvés ne conviennent pas pour différentes raisons. On est
en Suède, là. Les allocations sont
généreuses, mais, bien sûr, les exigences de contrepartie sont très,
très généreuses aussi. Mais j'aurais
pu aller en Saskatchewan, j'aurais pu aller en Alberta, j'aurais pu
aller en Ontario.
Donc, ce qui
est intéressant, c'est que, si on essaie de faire un clivage
gauche-droite sur cette question-là, c'est assez fascinant, si on essaie de
faire un clivage gauche-droite sur cette question-là, on ne réussit pas vraiment
à définir les sociétés, à dire : Bien,
voilà, les sociétés plus à gauche ne feraient jamais ça, et les sociétés
plus à droite le font, hein? Il n'y a pas vraiment de corollaire sur.
Dans les autres difficultés que j'ai vues dans
le texte ce matin, qui sont des autres écueils, comme j'ai dit, qui méritent peut-être
d'être corrigées, en espérant que le débat va continuer de progresser au Québec
sur les véritables enjeux d'Objectif emploi, bon, on dit qu'on fait des
omissions importantes en ce moment, on dit que la liste des participants, elle n'est pas définie. Au
contraire, elle est très définie. D'ailleurs, on l'a déposée, elle est par règlement, bien
entendu, mais elle est très claire. La liste des participants, comment je
pourrais dire, elle n'est pas aléatoire, elle s'explique aussi assez
bien. Je pense qu'on a eu l'occasion de faire quelques arguments là-dessus.
Contrairement à ce qui est dit aussi, ce n'est pas le ministre... Alors là, je pense
que j'ai la citation des auteurs : Le ministre
définit unilatéralement les engagements du nouveau prestataire. Donc, si on avait l'occasion
de se rendre un petit peu plus
loin dans la lecture du projet de loi, on verrait comment, hein, ce travail-là est
fait. Et, bien sûr, ce n'est pas le ministre qui
décide : Toi, jeune homme, tu vas aller aux études, tu vas finir ton
secondaire V. Toi, jeune fille, c'est plutôt
un emploi. On sait bien que c'est la personne qui décide, mais, bien sûr,
elle décide en supervision avec un agent qui essaie de voir exactement qu'est-ce
qui est le plus réaliste selon sa situation. Mais ce n'est pas le ministre qui
décide unilatéralement. Donc, c'est
probablement une petite erreur, là, d'enthousiasme que les auteurs ont causée à
ce moment-là.
Alors, ce qui
est aussi important dans le texte et ce qui n'est pas mentionné, là, on laisse
entendre que les pénalités sont là pour longtemps. Le programme Objectif
emploi dure 12 mois, et il est toujours possible pour les prestataires de se reprendre. C'est-à-dire, même ceux qui ont
eu des manquements, dès qu'ils se reprennent, donc, dès qu'ils
reviennent dans le parcours qu'ils ont décidé eux-mêmes, bien sûr, ils
retrouvent leurs pleins droits.
Le projet de loi, on l'a mentionné ici, malgré
ce qui est dit dans le texte, et ça, vraiment, là, on a eu une bonne discussion
là-dessus, le projet de loi, il respecte la loi qui vise à lutter contre la
pauvreté. Cependant, il y a un problème d'interprétation de cette loi-là. Il y
a des gens qui disent qu'on ne peut pas du tout diminuer une prestation, même une prestation de base. On sait
bien que ça se fait déjà aujourd'hui. Donc, on diminue les prestations
de base dans certaines circonstances. Donc, on s'inscrit dans le même
continuum.
Et
il y a toute une section qui est rédigée, là, qui est un petit peu verbeuse,
là, mais qui porte sur le droit, je m'excuse pour les légistes qui sont derrière moi, là, mais qui essaie de faire
valoir qu'il existe une richesse juridique importante qui nous empêcherait de commettre des exigences de
réciprocité. Encore une fois, je l'ai dit, ces exigences de réciprocité,
au niveau international, elles sont plutôt
la norme que l'exception. L'exception, elle est plutôt ici. Et tous les pays
que j'ai déjà nommés ici, je peux les renommer encore une fois, le
Danemark, la Suède, les Pays-Bas, la Saskatchewan, Norvège, Alberta, bon, les provinces canadiennes,
l'Angleterre, la France, les États-Unis, tous ces pays-là font quand même
partie, aux dernières nouvelles, des Nations unies. Ils
sont considérés comme étant... oui, voilà, Saskatchewan, j'ai dit la
Saskatchewan... sont considérés aussi comme honorables, là.
Donc, encore une
fois, je peux comprendre qu'on utilise des leviers de déclaration qui sont...
des déclarations qui ont une certaine importance, mais de là à dire qu'Objectif
emploi est contraire, là, à la législation internationale, c'est pousser un peu
la note, je pense, sur l'état du droit international, justement.
Alors, voilà quelques
remarques sur le texte qui est paru ce matin.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de
Richelieu, en vous rappelant qu'il vous reste 1 min 26 s.
M. Rochon : Juste suffisamment de temps pour faire remarquer au ministre, qui
présente le Québec comme une exception,
que ce n'est pas un défaut d'être exceptionnel, hein? En quoi serait-ce un
défaut d'être exceptionnel, être distinct, de faire les choses autrement, d'être meilleur, hein, de dépasser les
autres sociétés? Je ne trouve pas que c'est un défaut, d'être
exceptionnel si, tel que le ministre l'avance, le Québec constituerait plutôt
l'exception.
Autre
remarque brève, puisqu'il me reste une minute, je suis d'accord sur une chose
avec le ministre. C'est vrai que ce
n'est pas du tout inintéressant, cette discussion que nous avons et que les
téléspectateurs et téléspectatrices peuvent suivre. Ce qui me fait penser à l'intérêt que constituerait une autre
proposition que nous avons faite dans un amendement antérieur : soumettre l'examen des règlements
à une période de discussion de six heures, maximale ou minimale, comme
le ministre le voudrait, pendant laquelle
nous pourrions inviter des experts et des chercheurs à se prononcer. Imaginez
la conversation nationale.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Je suis
prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Rimouski.
M. LeBel :
Combien de temps?
Le Président
(M. Cousineau) : Bien, vous débutez votre
13 min 5 s.
M.
LeBel : O.K. Merci, M. le Président. J'aimerais commencer par... Le
ministre a dit quelque chose tantôt, là, ça m'a frisé les oreilles. C'est le côté paternaliste, là. Puis là il a
essayé de trouver un bon... paternalisme bienveillant, où il disait avec un petit sourire : On pourrait
peut-être penser... On pourrait peut-être leur enlever le permis de conduire.
On pourrait peut-être, je ne sais pas, moi,
les priver de leur iPad le soir ou priver de dessert. Je ne sais pas, peut-être
que ça pourrait les aider à
s'intégrer. Ils ont besoin de quelque chose, là, pour... C'est ce genre d'idée,
là, de Dieu le Père qui sait...
On
parle de gens adultes, là, on parle de jeunes adultes, tu sais, on ne parle pas
d'enfants, là. Il me semble qu'on ne devrait
pas aller dans ce genre de discours là. Tu sais, on parle de personnes qui ont
vécu des moments difficiles ou qui vivent un stress énorme, qui vivent
avec pas grand-chose. On ne devrait pas faire ce genre de commentaire, à mon
avis, là, là-dessus.
M. Blais :
Moralisateur.
M. LeBel :
Un peu moralisateur, oui. Tu sais, ces gens-là, on n'a pas besoin de les priver
de dessert pour leur dire que ça ne va pas
bien puis qu'ils seraient bien mieux avec un travail ou avec une démarche. Ils
n'ont pas besoin de ça. Ils le
savent. Ils le savent puis ils ont juste besoin d'être accompagnés. Ils n'ont
pas besoin qu'on... Ils ont déjà assez de préjugés sur le dos. Qu'on
commence à rajouter ça, je trouve que c'est un peu... ce n'est pas très drôle.
Mais
il y a ce côté-là du gouvernement souvent, le côté Dieu le Père, là. Moi, je le
vis dans les dossiers de régions, là.
Je me rappellerai toujours une question que mon collègue de Gaspé posait au
ministre des Transports sur les transports en Gaspésie, puis le ministre a dit : Voyons donc! Mais ce n'est pas
en Gaspésie que ça se passe, c'est ici, là, c'est à Québec que ça se passe, c'est à Québec. Tu sais, le côté
un peu paternaliste, là, de Dieu le Père, qui est à Québec, qui sait
par-dessus tout le monde ce qui est le mieux pour les régions, puis le monde,
puis etc., ça ne me rentre pas. J'ai de la misère à accepter ça. Bref, là, je
l'ai dit. Une affaire de dite.
L'autre chose que je
voulais... un rappel. Il y a une loi...
Le Président
(M. Cousineau) : Sûrement que vous allez nous ramener à
l'amendement.
• (20 h 40) •
M.
LeBel : Éventuellement. Sûrement. Il y a un rappel que je veux amener,
il y a une loi-cadre qui existe, la loi pour lutter contre la pauvreté. Puis je profite ici... Derrière, il y a
la députée de Pointe-aux-Trembles, qui a travaillé sur cette loi-là
puis, comme vous, M. le ministre, qui était assise de l'autre côté, qui a
accueilli je ne sais pas combien de personnes
qui sont venues témoigner, puis témoigner, puis témoigner, qui ont donné leur
opinion sur... pour lutter contre la pauvreté. Puis il y avait toutes
sortes d'opinions. J'expliquais, le Conseil du patronat, à l'époque — elle
va s'en souvenir — qui
disait : Après cinq ans d'aide sociale, si tu n'es pas sorti, là, dehors,
tu sais, puis là dans la rue, puis...
Tout
le monde a négocié, tout le monde a discuté ensemble — pas négocié, discuté — pour arriver à un compromis qui a été adopté par tout le monde partout, tous
les partis politiques. Ça a été un... Mais cette loi-là, c'était le grand
consensus québécois. Puis je veux saluer le travail de la députée de
Pointe-aux-Trembles, à l'époque, qui a travaillé beaucoup là-dessus. Puis ça prenait beaucoup d'écoute,
beaucoup d'écoute puis pas trop de préjugés, même pas de préjugés
pantoute. C'est comme ça qu'on fait avancer les affaires. On a réussi à les
faire avancer.
Depuis ce temps-là, ça, c'est début
2000, le gouvernement du Parti québécois perd le pouvoir en 2003, ça a
été presque des gouvernements libéraux depuis
ce temps-là. Mais les libéraux n'ont pas remis ça en question, ils ont
travaillé avec ce projet de loi là, cette
loi-là, parce qu'elle avait été adoptée unanimement. Là, il y a eu des plans
d'action, des plans d'action pour
arriver... Récemment, il y en a un autre, plan d'action qui a été déposé où la
consultation a été un peu, on pourrait dire, ciblée, pas une grande
consultation.
Puis
je rappellerai aussi, sur le projet de loi de la lutte à la pauvreté, après 10
ans, là, il y a eu un rapport, mais ça aurait
été bien de prendre le temps d'étudier ce rapport-là avec les parlementaires.
Ça aurait été bon parce que ce projet de loi a été adopté par tous les parlementaires. Ça n'aurait pas été
mauvais qu'on prenne le temps... parce qu'on voit que le Québec se situe meilleur pour lutter contre la
pauvreté, meilleur que l'Allemagne, que l'Irlande, Royaume-Uni, pas mal meilleur que le Canada. Bon, il y a peut-être des
questions. Les pays nordiques sont meilleurs que nous autres. Pourquoi?
On aurait pu discuter, les parlementaires ensemble, puis avoir des réponses,
mais ça, le gouvernement a décidé de ne pas faire ce genre de consultation.
Ensuite, il y a eu le
plan d'action, consultations très serrées. Là, le projet de loi n° 70 qui
nous arrive, il remet tout en question. Moi, je pense qu'il remet en questions
des valeurs, pas toutes, mais des valeurs assez importantes de la loi-cadre. On fonce là-dedans tête première.
En même temps, le premier ministre donne un mandat au ministre de travailler sur le revenu minimum garanti, le
revenu de base. Ça arrive du champ gauche. Mais là il me semble qu'on
aurait dû, avant, faire un vrai bilan de la
loi-cadre, s'entendre sur un vrai plan d'action puis, à partir de là, faire un
projet de loi pour lutter... pour
aider les gens à l'aide sociale à partir de la grande consultation. Puis,
peut-être, si on veut parler d'un revenu
de base, c'est... Mais là on est à l'envers. On part tout de suite, on a un
projet de loi n° 70 qui intervient au niveau de l'aide sociale, on a un mandat qu'on ne sait pas
trop comment le ministre... comment il prend ce mandat-là, là, sur le
revenu minimum. On n'en entend pas parler, mais tout ça sans qu'on puisse avoir
le temps de discuter sur le bilan de nos dernières années de lutte à la
pauvreté. Ce qui est un peu dommage parce qu'on aurait pu prendre ça autrement.
L'autre
rappel, si je rappelle un peu la prémisse que j'ai expliquée ici hier ou
avant-hier, je ne me souviens plus, la prémisse qui roule, même si ce
n'est pas les mots du ministre, mais c'est un peu ça qui est dit, c'est que...
quand il parle, tantôt : On pourrait
les couper, il faut leur donner, il disait forcer, forcer la note, tu sais, il
disait : Il faut forcer. Bien, ça laisse
entrevoir que, pour aider une... quelqu'un qui a... si tu veux avoir ton
chèque, il faut que tu fasses tes efforts. Tu veux avoir un chèque, fait des efforts. Mais ça, derrière ça, beaucoup,
beaucoup de préjugés, comme si ceux qui ont des chèques, là, ne font pas
les efforts. Mais on laisse entrevoir ça.
Après
ça, on arrive par des statistiques qui ne sont pas toujours très claires, mais
qui essaient d'expliquer que les gens
qui sont à l'aide sociale, là, puis on ne sait pas trop si c'est des
primodemandeurs, c'est l'ensemble, on ne sait pas trop, là, c'est plus large, mais il englobe tout
le monde... prouver que ces gens-là ne participent pas d'eux autres
même, ils ne répondent pas aux convocations,
ils ne viennent pas, puis ceux qui viennent, ils débarquent, là, pour montrer
que, si on ne les oblige pas, on les
perd. Tu sais, il faut faire quelque chose pour les obliger, sinon on les perd.
Là, il nous emmène plein de
statistiques là-dessus pour arriver à la conclusion que, s'il n'y a pas de
menace de couper, bien, il ne se passera rien. Ça fait qu'il faut forcer
la note, comme dit le ministre.
Dans
le projet de loi, le comité consultatif pour la lutte à la pauvreté, le comité
qui est mandaté par le ministère, qui
est à ses bureaux, à même le ministère, arrive dans son mémoire sur la loi
n° 70, nous dit que, dans les règlements, c'est là que ça se cache, les détails — puis, j'explique souvent, le diable est dans
les détails — c'est
dans les règlements qu'on peut voir
un peu plus ça va être quoi, les sanctions, c'est quoi, un parcours, c'est
quoi, un emploi convenable, etc., c'est
tout dans les règlements, puis que les règlements ne sont pas discutés, puis,
là-dedans, il y a beaucoup d'arbitraire. Ça fait que c'est pour ça qu'on veut en discuter. On veut voir si c'est si
fondamental. Puis ce n'est pas juste nous autres qui le dit, là, c'est
le comité qui doit conseiller le ministre et c'est... il y a plein d'autres
organismes, là, qui nous le disent.
Pour
nous autres, c'est important d'aller voir exactement dans les règlements et
c'est pour ça qu'on aurait aimé, puis on
était proches, là, d'y arriver, mais on n'y est pas arrivés... mais c'est pour
ça qu'on essaie de rajouter des amendements par-dessus amendements pour essayer de donner des garde-fous, donner
certaines protections aux gens parce que, là, ce qu'on vient de
travailler, ce qui était à l'encontre de la loi-cadre, ce que disait aussi le
comité d'étude de la lutte à la pauvreté,
c'est qu'on vient toucher ce qu'on appelait dans le jargon le barème plancher.
Tu sais, arriver avec des sanctions sur
le minimum de ce que les personnes peuvent avoir, on vient... On avait convenu
au Québec qu'il y avait un certain niveau,
on ne pouvait pas penser que les gens puissent vivre avec ça. L'autre jour, je
déposais un budget, là, de quelqu'un de Rimouski à l'aide sociale, là. Vivre avec 700 $ par mois quand tu
as un loyer à quasiment 400 $, ça ne marche pas, là. Ça fait qu'il y a un genre de minimum. Et là la
loi-cadre disait : Bien, on ne peut pas aller plus bas que ça. Mais là le
projet de loi qui nous arrive, selon les sanctions
puis ce qui est prévu au règlement qu'on ne peut pas discuter, bien, on
pourrait aller plus bas que le barème plancher. Ça fait que c'est pour ça qu'on
veut en discuter.
Ce qui est
fondamental derrière ça, le ministre le sait, puis...
Le Président
(M. Cousineau) : ...
M. LeBel :
Je vais finir rapidement, j'achève.
Le Président
(M. Cousineau) : Poursuivez, M. le député.
M.
LeBel : Le ministre
le sait, ce qui nous accroche, c'est les fameuses sanctions. Puis les fameuses
sanctions... Dans le rapport sur les 10 ans
de la loi de lutte à la pauvreté, le Québec se situe à
peu près au milieu, pas mal
meilleur que le Canada, meilleur que l'Allemagne ou à peu près la même chose
que l'Allemagne, Irlande, Royaume-Uni. Les pays nordiques, la Suède, la
Finlande, Danemark, sont meilleurs que nous autres. Le ministre amène ça
souvent.
Je
vais juste rappeler, puis ça, souvent, on l'oublie, même nous autres, on
l'oublie, là, on parle de pays. Nous autres, on est une province. On
n'est pas un pays. On nous compare avec des pays. Tantôt, le ministre
disait : C'est tous des membres de
l'OCDE. Il mêlait la Saskatchewan avec l'Irlande, avec... bon. La Saskatchewan n'est pas encore à l'ONU, là,
ou je ne sais pas trop quoi. Ça me surprendrait. En tout cas, s'ils y sont
arrivés avant nous autres, c'est bien tant mieux pour eux autres, mais
là on parle de pays.
Quand on
compare avec la Suède... L'autre jour, j'ai écouté un reportage. Tu sais, en
Suède, là, les garderies, c'est gratuit.
Les gens, ils ont accès à des garderies. Les gens qui vivent dans la difficulté,
les familles plus démunies ou les
femmes qui veulent intégrer le marché
du travail, il y a
des garderies. Nous autres, ce n'est pas ça qu'on fait au Québec. Là, on
est en train de détruire le réseau des centres de la petite enfance.
Il y a
des éléments... Pourquoi que ces pays-là, ils ont réussi à protéger ou à
sortir de la pauvreté? Ce n'est pas qu'une
histoire de chèques aux bénéficiaires, c'est une communauté qui se prend en
main. Et ça, on ne le voit pas dans... Ce n'est pas une affaire juste de
sanctions, tu sais. Ça fait que c'est pour ça que j'aimerais ça... qu'on veut
en discuter.
Puis là le ministre nous parle d'études. Ses
collègues, là, des... Pierre Isalys? Paul...
M. Blais : Issalys.
M.
LeBel : ...Issalys, que vous
connaissez bien, Paul-André Lapointe, Sylvie Morel, Christine Vézina. Je
vais vous lire la conclusion.
Le Président (M. Cousineau) :
Deux minutes.
M.
LeBel : Deux minutes? Je
fais ça vite. «Selon la littérature scientifique, l'approche coercitive et
punitive ne contribue pas à réduire
durablement la pauvreté. Au contraire, elle accroît la part des emplois mal
rémunérés, peu qualifiants et
précaires dans l'emploi total, comme en témoignent les cas des États-Unis
[...] du Royaume-Uni.» Je pourrai lire plus tard, mais là on se garroche
des études. Non, il n'y a pas d'étude.
Moi, il me
semble qu'on devrait réussir à discuter ensemble sur l'histoire des sanctions.
Je pense que le ministre a des objectifs
intéressants, c'est intéressant, ce qu'il veut faire, mais les sanctions, ça
accroche. Est-ce qu'il y a moyen, par exemple... Le ministre
ne sait pas, parce qu'il n'a pas les statistiques, il ne sait pas le... Je
lui ai demandé des statistiques sur les primodemandeurs. Qui arrive ou
s'inscrit en arrivant au bureau? Qui s'inscrit dans les cinq jours? Qui
s'inscrit dans le mois? On n'a pas les
statistiques. Vous ne le savez pas dans votre propre ministère,
exactement, les statistiques. Je pense que ce serait bon de savoir ça parce que
c'est là, c'est là que ça se joue. Quand la personne arrive au bureau, il
ne faut pas l'échapper. Ça fait que c'est là que ça peut se jouer.
Est-ce qu'on ne pourrait pas s'assurer à l'entrée? Est-ce qu'il y a quelque chose à faire à l'entrée pour s'assurer qu'on n'échappe pas personne? Il me semble qu'il y
a quelque chose à faire là. C'est là qu'il faut que ça se joue, pas sur
les sanctions ou de leur dire qu'on va leur couper le dessert ou enlever leur
permis de conduire pour s'assurer qu'ils vont trouver une job. Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre, voulez-vous réagir?
• (20 h 50) •
M. Blais :
Bien, tout d'abord, il faut bien... Il y a plusieurs choses dans ce qui a été
dit, là. La première chose, c'est
que — ça, il
faut le répéter — les
sanctions et les obligations ne sont pas des fins en soi. Dans le fond, ce que
l'on veut, ce que l'on aimerait, c'est un
plus fort taux de participation à des mesures qui peuvent faire la différence,
ne serait-ce que terminer ses études,
ne serait-ce que chercher un emploi, ne serait-ce que faire le ménage dans sa
vie parce qu'on n'est pas encore prêt, là, à ça.
Donc, les
obligations, et parce qu'il y a obligations il y a sanctions sous une forme
monétaire ou quelque autre forme, là,
c'est simplement pour augmenter le
taux de participation parce
qu'on pense et on sait que, quand le
taux de participation augmente, et ça, on a des bons chiffres là-dessus,
quand on regarde tous ceux qui ont participé à nos mesures jusqu'à la fin, le taux de sortie est vraiment, là, très, très,
très intéressant. Peut-être que je pourrais rappeler ces chiffres-là avant la fin de la soirée. Donc, ce
n'est vraiment pas une finalité. Donc, je suis toujours prêt à discuter de
ça, là, avec les collègues.
L'autre chose, il ne faut pas comprendre... Je
n'ai jamais dit et pensé qu'il y aurait quelque chose comme une corrélation entre le taux de pauvreté dans les
pays et le fait qu'il y ait des obligations parce que ce qu'on voit bien ici, c'est qu'il
y a des pays qui ont un taux de
pauvreté assez élevé où il y a des obligations, et il
y a des pays où le taux de
pauvreté est très faible, parmi les plus
faibles, où il y a des obligations très fortes. Donc, on voit bien qu'il y a
d'autres mesures qui font en sorte que des pays réussissent à mieux
faire dans la lutte contre la pauvreté. Alors, je ne dis pas qu'il y a une
corrélation forte à ça, mais je ne dis pas non plus que ça ne peut pas aider
des gens à sortir de la pauvreté. Donc, il faut faire attention.
Donc, dans
les chiffres les plus récents qu'on avait, mais ça va changer probablement cette année, la province canadienne où le taux de pauvreté était
le plus faible, c'était l'Alberta. Pourquoi? Pas à cause des mesures sociales, je ne suis pas certain que, par exemple, le système de garderie soit très développé, hein, en Alberta, ça
m'étonnerait, mais parce que l'économie et les salaires sont «boostés», bien
sûr, par une économie du pétrole, en tout cas, un peu moins en ce moment.
Donc,
pourquoi certains pays réussissent mieux que d'autres, là, ces différents types
de mesures redistributives? Nous, on
n'a pas le pétrole, on a autre chose, mais on a aussi des mécanismes de
transfert qui opèrent assez bien quand on compare avec l'Alberta. L'Alberta, les revenus...
Essentiellement, l'Alberta, les revenus primaires sont assez
élevés, donc permettent à plusieurs
personnes de sortir des seuils de faibles revenus. Au Québec,
les revenus primaires sont moins élevés, mais les revenus secondaires, donc après effet redistributif, sont plus importants.
On ne fait pas aussi bien que l'Alberta, mais on compense quand même de façon très intéressante. Donc, il n'y a
pas de corrélation. Et je n'ai jamais voulu dire qu'il y avait une corrélation forte, en
tout cas, dans ce qu'on peut voir,
entre le fait qu'un pays ait des obligations et le taux de pauvreté.
J'ai prêté moi-même le mot, volontairement, là,
à mon collègue, qu'il faut éviter d'être moralisateur, là, puis c'est vrai.
Mais parfois, surtout dans une conception, disons, un peu libérale au sens
philosophique, là, de la société, c'est-à-dire
où on pense que, dans une société moderne, les individus doivent pouvoir
choisir le type de vie qu'ils veulent mener — hein, c'est un peu comme ça que je
définirais le libéralisme, le droit de chacun de définir sa vie — c'est difficile d'imposer des choses
aux gens. Par exemple, on a eu un débat très intéressant sur les soins de fin
de vie et l'aide... l'assistance... pas l'aide à mourir, l'assistance à mourir?
Une voix : ...
M. Blais : L'aide médicale à
mourir? Bon, l'aide médicale à mourir. Bon, ça aurait été impossible d'avoir le
même débat dans les années 60 dans la culture religieuse dans laquelle on est.
Dans une culture plus libérale au sens philosophique,
où on pense que les gens ont le droit aussi de décider du type de vie qu'ils
veulent vivre et du type de fin de
vie qu'ils veulent vivre, ça a été possible de dire : Oui, dans certains
cas, les gens pourraient demander l'aide de fin de vie.
Donc, moi, je
suis tout à fait d'accord qu'il faut éviter d'être moralisateur et laisser les
individus... mais, en même temps, du
point de vue philosophique, encore une fois, quand des gens n'ont pas eu la
chance — et ça,
le collègue va le reconnaître avec
moi — que
beaucoup d'autres ont eue d'être entourés, qu'ils ont eu des difficultés, etc.,
et compte tenu de l'importance, quand on est jeune, de définir de façon
minimale son potentiel humain pour le reste de sa vie, on peut justifier, du point de vue des principes, une
intervention, comme, par exemple, on accepte qu'il faut intervenir dans
les cas des personnes qui sont suicidaires. Les personnes traversent une
période difficile, et on va intervenir, si nécessaire, pour les protéger. Il y a des circonstances
comme ça. Je trouve ça tout à fait acceptable de le faire, là, dans le cas des
primodemandeurs. On leur donne une chance.
Je rappelle
aussi qu'on insiste beaucoup sur des pénalités. Nous, on ne croit pas, hein,
qu'il va y avoir beaucoup de gens qui
vont aller vers les pénalités. Je vous rappelle que, dans la façon dont on
fonctionne, hein, ça prend un certain temps avant d'aller chercher le maximum de pénalités. Donc, il y a plusieurs
étapes à franchir, et les gens ont le temps de penser, de réfléchir. Et surtout que le programme est très
généreux, c'est-à-dire que les bonifications que l'on donne... il ne
faut pas l'oublier, hein? Essentiellement,
ce projet-là, c'est un projet de bonification de l'aide sociale pour encourager
les gens à s'en sortir puis faciliter
leur vie dans cette période de transition. Le problème que l'on a, c'est qu'on
l'a fait avec Alternative jeunesse,
on a fait des bonifications, mais malheureusement les gens sont venus les
chercher pendant un bout de temps, et puis abandonné pour toutes sortes
de raisons qui étaient difficiles à comprendre. Donc, notre taux de rétention
étant tellement faible, on a décidé de poser
un geste supplémentaire, c'est ce geste-là, je pense, avec lequel on a un
désaccord, pour essayer de les maintenir davantage, là, dans une démarche.
Moi,
jusqu'ici, j'ai toujours essayé d'éviter de porter un jugement moral sur les
attitudes des gens, dire : Les gens ne veulent pas faire d'effort. Les gens sont paresseux. Je n'ai jamais
parlé dans ces termes-là, j'ai évité ça. C'est une réalité que l'on a, malheureusement. On offre beaucoup de
programmes. Encore récemment, là, je ne sais plus de quelle région...
Qui était là? Je ne sais pas si Johanne
était là. Je pense qu'on a eu une rencontre avec des directeurs régionaux, et
il y a une directrice qui disait qu'elle avait fait...
Une voix : ...
M. Blais :
...directrice des Laurentides, hein, qui a fait une convocation pour offrir les
programmes disponibles pour les
bénéficiaires de l'aide sociale. Je ne suis pas certain que c'était aux
primodemandeurs, cependant, je pense que c'était une convocation pour un CLE. 60 personnes ont été convoquées, M. le
Président, cinq sont venues à la rencontre pour se faire expliquer un
peu les différents programmes, et deux ont commencé, je n'ai pas dit qu'ils ont
terminé, deux ont commencé. C'est très,
très, très insuffisant. Je pense qu'on peut faire un peu mieux. On peut être un
peu plus exigeants puis croire dans le potentiel des gens.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Un autre
intervenant? Alors, avant de passer à l'opposition officielle, est-ce
que les... par alternance, la deuxième opposition? Non? M. le député de
Drummond—Bois-Francs,
peut-être?
M. Schneeberger :
Oui, concernant... c'est parce que, là, je trouve qu'on est rendus très loin de
l'amendement. Le principe est bon. Par
contre, ce n'est pas un amendement qui devrait être placé au 83.1, c'est peut-être
un amendement qui devrait être placé, là,
sur les articles qui s'en viennent un peu plus tard. Alors, il faudrait peut-être
placer les articles où est-ce qu'ils se doivent être placés... oui, les
amendements, pardon.
Là, on entend
beaucoup de discussions, les pays scandinaves, partout dans le monde, et
autres. Vous savez, les politiques,
là, ça marche aussi avec la mentalité. Et ici on n'a pas une mentalité
scandinave. Puis je peux vous dire que je suis né à une autre place sur la planète, ça fait que je suis un peu
placé pour savoir un peu les mentalités. Et puis, souvent, on voit les pays scandinaves, pays scandinaves, mais
souvent, malheureusement, les parties ici qui se disent plus sociales ou
à gauche prennent
l'exemple des pays scandinaves ou la Suède dans les années 80. Mais les années
80, là, 70, là, la Suède, là, était
sur le bord du gouffre. Puis aujourd'hui, avec les années 90, il y a eu des
réformes énormes qui ont été faites en Suède.
Puis aujourd'hui on a, en Suède, des hôpitals privés qui sont cotés à la
bourse, M. le Président. Alors... Comment?
Une voix : Des hôpitaux.
M. Schneeberger :
Des hôpitaux, oui. En tout cas...
Alors, il faudrait faire attention quand on
parle de réforme ou autre parce que je pense qu'on... il faudrait peut-être
comparer avec des données d'aujourd'hui, actuelles, et non 30 ans dans le
passé. C'est bien important.
Puis il y a
des réformes, il y en a énormément qui se sont faites en Suède parce que, financièrement, ça ne marchait
plus. Alors, moi, à moins qu'on veut reprendre les mêmes erreurs, là, il
faudrait faire attention.
Ça fait que
moi, j'ai toujours un petit peu un problème quand on vient dire : Ah! la
Suède, la Suède, la Suède. Mais, premièrement,
ça n'a pas marché. Ils ont reviré de bord, puis, à l'époque, le parti
socialiste, là-bas, là, a dû faire des grosses réformes qui étaient plus de droite pour quelles raisons? Parce qu'ils
étaient dans le trou. Puis nous, on dirait qu'on regarde ça puis on veut faire pareil. Mais on n'est pas
pire là-dedans, pour se mettre financièrement dans le trou, on peut dire
ça, hein, une belle expression du Québec,
là. On n'est pas pire. Alors, déjà, il faudrait déjà devenir un État plus
riche, puis ça enlèverait un peu aussi de pauvreté, bon.
Alors, moi,
j'aime ça, là, on a des belles discussions depuis des heures et des heures sur
un article, mais la réalité, là, c'est
qu'on n'avance pas. Il n'y a absolument rien qui se passe. Et puis on veut refaire
le monde, là, mais la réalité, c'est que, là, on va encore finir ce soir à 22 h 30 puis on sera tous au même point. Bon, alors, bon,
continuons, continuons. Je veux dire, on aime ça perdre du temps.
Je pense que, depuis le...
• (21 heures) •
M. LeBel : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, M. le député de Rimouski, vous avez un point de règlement?
M. LeBel : On aime ça perdre du
temps... Je n'ai pas l'impression qu'on perd notre temps. Si le député a
l'impression qu'il perd son temps, c'est son problème à lui, mais je n'ai pas
l'impression de perdre mon temps.
Le Président (M. Cousineau) :
Parfait! Alors, poursuivez, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Faites
attention pour ne pas blesser les gens.
M. Schneeberger :
Bien, c'est mon problème, c'est correct. C'est bon. Je suis capable de vivre
avec.
Le Président (M. Cousineau) :
Parfait!
M. Schneeberger :
Alors, moi, ce que j'aimerais, c'est qu'on puisse avancer. Puis si maintenant
on parle d'amendement d'article, bien, qu'on
commence par parler de l'article, pas essayer de refaire le monde à chaque
fois. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs.
Avant de poursuivre, nous sommes à mi-parcours,
je vais vous proposer une suspension de cinq minutes.
M. Turcotte :
J'aimerais peut-être juste terminer ma 2 min 30 s qu'il me reste
sur cet amendement-ci.
Le Président (M. Cousineau) :
Ah! il vous reste beaucoup plus. 2 min 30 s?
M. Turcotte :
Oui, c'est ce qu'il me reste.
Le Président (M. Cousineau) :
Ah bon! Bien oui! Bien, on va vous donner votre 2 min 30 s.
Allez-y, M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte : En
conclusion. Bien, le ministre me donne de nouveau l'occasion de revenir à la
charge en mentionnant que son collègue,
l'actuel ministre de l'Éducation, sur l'idée de mettre l'école obligatoire
jusqu'à 18 ans, le ministre de
l'Éducation actuel mentionne : «Je n'en suis pas là. Je n'ai pas entendu
au Québec que les gens valorisent un modèle
comme ça. La pénalité, la stigmatisation [...] pour moi, ce n'est pas l'avenue
à prendre.» Il ajoute dans un autre article : «Ce que j'ai dit,
c'est que j'étais contre les pénalités, contre le fait de punir des gens.»
M. le Président, le ministre nous dit, pour
justifier les sanctions à l'aide sociale, que dans certains pays, dans
certaines provinces, dans certains endroits, bon, on retire le permis de
conduire, on oblige les gens à l'école jusqu'à 18 ans, etc. Son collègue, celui qui le remplace à l'Éducation, lui, il
est contre les sanctions pour l'école jusqu'à 18 ans.
Je
pourrais rappeler... Le ministre aime rappeler 1998. Le ministre aime rappeler
1998, bon, les mesures que nous avons
prises à l'époque. Je pourrais lui parler de 2005, ministre Michelle
Courchesne, qui a retiré les sanctions à l'aide sociale. Je pourrais
vous parler de feu Claude Béchard, qui, assez direct, là : «"Au lieu
de punir les gens, on y va par l'incitation. Un des axes majeurs et prioritaires de ce plan, c'est la
valorisation du travail, de l'effort et de la participation", a affirmé hier le ministre de
l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille...» Il a retiré les
sanctions parce qu'il trouvait qu'au lieu de punir les gens on y va par
l'incitation, hein?
M. le Président, on est loin de l'époque où le gouvernement
libéral avait à coeur d'aider les gens à se sortir de la pauvreté. C'est à peu près à la même époque où le
ministre actuel a écrit son livre. Donc, s'il veut sortir les gens de la
pauvreté, il doit éliminer les sanctions.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de
Saint-Jean. Un petit mot...
M. Blais : ...il faudrait que je regarde le
texte de mon collègue, là, de l'Éducation, mais, si je me souviens bien, puis les collègues de la CAQ
vont pouvoir me rappeler la teneur du débat, là, il y a eu un débat sur
l'obligation d'aller aux études jusqu'à
18 ans, et donc «obligation» dit : Il doit y avoir une pénalité si on ne
le fait pas. Si je me souviens bien, dans la première formulation de la
CAQ, ça a peut-être évolué depuis, la pénalité, si je peux... ce n'est pas une
pénalité qui était du gouvernement, mais
c'était l'impossibilité pour quelqu'un qui quittait l'école d'avoir un emploi,
si je me souviens bien de la pénalité qui était proposée.
Donc, vous vous rendez compte? Quelqu'un qui quitte l'école,
qui ne peut pas avoir un emploi parce qu'on fait une loi
l'interdisant plus le fait qu'il ne peut pas avoir d'aide sociale parce qu'il
n'a pas 18 ans, vous comprenez que c'est amener quelqu'un dans une situation,
là, de dénuement assez important. On n'est pas du tout au même niveau ici, là.
Et, si on veut, disons, favoriser les élèves à terminer leur
secondaire V ou leur diplôme, il faudra trouver des
formes d'obligation quelconque, des
modifications à la Loi de la protection de la jeunesse, qui sait, mais ce en
quoi, là, disons, mon collègue
en avait, si je me souviens bien, c'était l'idée que quelqu'un qui quitte ne
puisse même pas travailler et même pas avoir
l'aide sociale. Donc, c'est le dénuement. On n'est pas du tout à
ce niveau-là, là. On est tout
simplement en train de dire : On bonifie l'aide sociale. Il pourrait y avoir des diminutions si l'engagement que vous avez
pris n'est pas maintenu. Ces diminutions-là sont quand même assez
limitées, là. Voilà.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, à
ce moment-ci, je vais suspendre, je
vous dirais, un cinq, six minutes, là, pour que vous puissiez aller vous
rafraîchir. À votre retour, votre café et votre breuvage sera sur votre table.
Alors, je suspends.
(Suspension de la séance à
21 h 6)
(Reprise à 21 h 17)
Le Président
(M. Cousineau) : Alors, nous reprenons...
Des voix :
...
Le Président
(M. Cousineau) : Votre attention, s'il vous plaît! Votre
attention! Nous reprenons nos travaux.
Alors,
le temps qui nous était alloué pour l'amendement de M.
le député de Rimouski
est terminé, du moins pour les oppositions, l'opposition
officielle et la deuxième opposition. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions du côté ministériel? Sinon, est-ce que l'amendement
proposé par M. le député de Rimouski est adopté? Oui, M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte :
Nous pourrions poursuivre nos bonnes habitudes et procéder par un vote par
appel nominal.
Le Président
(M. Cousineau) : M. le secrétaire, votre par appel
nominal.
Le Secrétaire :
Pour, contre, abstention. M. LeBel (Rimouski)?
M. LeBel :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Turcotte (Saint-Jean)?
M. Turcotte :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M. Schneeberger :
Contre.
Le
Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Hardy (Saint-François)?
M. Hardy :
Contre.
Le Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Simard :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Polo (Laval-des-Rapides)?
M. Polo :
Contre.
Le Secrétaire :
M. le Président?
Le
Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens. Donc,
l'amendement déposé par M. le député de Rimouski est rejeté, d'accord?
Nous
poursuivons nos travaux. Et j'avais ici un amendement qui m'avait été déposé.
Est-ce que ça vient de vous, ça, M. le ministre?
M. Blais :
Je ne crois pas.
Le Président
(M. Cousineau) : Ministre, distribué...
M. Blais :
Je vérifie.
Le Président
(M. Cousineau) : Oui, j'avais ça ici, là, avant de
discarter...
M. Blais :
Ah oui! Donc, alors, il y a un certain temps de ça. Je pense qu'on est rendus
au 26e amendement, je pense. Mais c'est après le sixième ou le septième,
on avait donné ça, là, comme information, là, tout simplement.
Le Président
(M. Cousineau) : Parfait! Parfait! Alors, merci.
Donc,
étant donné que nous revenons sur l'article 83.1... Et puis, avant de
poursuivre, je vais vous donner le temps restant pour l'article 83.1. M. le député de Saint-Jean, il vous reste
1 min 10 s, M. le député de Rimouski, 19 min 45 s,
M. le député de Richelieu, 14 min 30 s, M. le député de Drummond—Bois-Francs,
14 min 45 s.
Donc, nous reprenons
la discussion sur l'article 83.1. Qui prend la parole, s'il vous plaît? M. le
député de Drummond—Bois-Francs.
M. Schneeberger :
Oui. Je pense que l'opposition officielle va sûrement déposer un autre
amendement. Alors, je les écoute.
Le Président
(M. Cousineau) : C'est tout ce que vous aviez à dire?
M. Schneeberger :
Oui.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci. C'est ça, vous les avez, comme on
dit en langage populaire, scoopés.
M. Rochon :
M. le Président.
Le Président
(M. Cousineau) : Oui, M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Je ne sais pas si c'est une question de règlement, mais on vient de nous prêter
des intentions.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le
Président (M. Cousineau) : Non, non, ça...
M. Schneeberger :
M. le Président, c'est de très bonnes intentions.
M. Rochon :
J'ajouterais même que c'est un préjugé.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, bon, voilà. Alors, il
est 21 h 20. M. le député... Qui est-ce qui va intervenir? M.
le député de Richelieu.
M. Rochon :
Je pensais que vous alliez dire : Qui va proposer un amendement?
Le Président (M. Cousineau) :
Non, non, non! Mettez-en plus, la cour est pleine. 14 min 30 s, M. le
député de Richelieu.
• (21 h 20) •
M. Rochon : Oui. Alors, je ne voudrais pas, là, je ne
voudrais pas étonner mon collègue de Drummond—Bois-Francs pour qu'ensuite il passe — ...
Une voix :
...
M. Rochon : ...oui, le décevoir — pour
qu'ensuite il passe une mauvaise nuit, qu'il s'interroge sur :
Comment ça se fait que l'opposition officielle n'a pas présenté un amendement?
Alors, effectivement, l'amendement serait le suivant : Insérer, après le
deuxième alinéa, l'alinéa suivant :
«Le
programme Objectif emploi sera mis en vigueur qu'après le
dépôt du prochain plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion
sociale.»
J'ai
hésité pendant la lecture parce que je voulais vous dire, après avoir glané
là-dessus, que vous alliez voir que ça a plein de sens, que ça a plein
de sens. Je ne plaiderai pas tout de suite.
Le Président
(M. Cousineau) : Mais, avant de le discuter, on va
suspendre quelques instants, le temps d'en faire des copies pour tous les
membres de la commission parce que je suis persuadé qu'ils veulent voir
absolument cet amendement.
Alors, je suspends.
(Suspension de la séance à
21 h 21)
(Reprise à 21 h 24)
Le Président
(M. Cousineau) : Alors, nous reprenons nos travaux. Nous
avons un amendement déposé par M. le député de Richelieu, d'insérer, après le
deuxième alinéa, l'alinéa suivant :
«Le programme
Objectif emploi sera mis en vigueur qu'après le dépôt du prochain plan de lutte
contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale.»
M. le député de Richelieu,
on vous laisse plaider.
M. Rochon :
Tout à l'heure, le dépôt s'est fait sous une trame d'humour, étant donné la suggestion
du collègue de Drummond—Bois-Francs que nous allions précisément,
il sentait venir ça, déposer un nouvel amendement. Mais j'ai aussitôt dit, en le présentant, qu'il
était... et qu'il ne pouvait pas se trouver plus pertinent que cet
amendement de réclamer que le programme Objectif emploi ne soit mis en vigueur qu'après
le dépôt du prochain plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion
sociale.
C'est
tellement important que vous me permettrez, M. le Président, de vous
suggérer ou de vous conduire à céder la parole là-dessus à mon collègue de gauche, le député de Rimouski,
parce que c'est quelqu'un qui connaît bien, mieux que moi encore, bien mieux que moi encore, le plan de
lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale. Je sais qu'il y a des consultations en cours actuellement
pour l'élaboration du prochain plan.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Alors, par alternance, avant de passer la
parole à M. le député de Rimouski, est-ce
qu'il y a d'autres interventions soit
du parti ministériel ou de la deuxième opposition? Non? Alors, M. le
député de Rimouski.
M.
LeBel : Oui, merci, M. le
Président. C'est comme je disais un peu tantôt, quand je suis intervenu,
j'essayais d'expliquer qu'on fonctionnait un
peu à l'envers avec le projet de loi, ce qui faisait qu'on n'avait pas de... les
objectifs. On fonctionnait à l'envers parce qu'on s'est donné une loi-cadre, au Québec,
qui a des grands principes qui sont clairement établis, qui a fait consensus à travers les partis politiques puis qui a
mobilisé une grosse partie des groupes, des gens partout dans la société civile. Et ça, c'est le fondement,
du modèle québécois de lutte à la pauvreté, puis un fondement qui n'a
pas été remis en question par personne, là. J'explique.
La loi avait été mise
en place en... la consultation a été faite par un gouvernement du Parti
québécois, mais ça a été adopté unanimement. Et le gouvernement du Parti
québécois a perdu le pouvoir pas très longtemps après, 2003, et c'est les gouvernements libéraux qui ont
continué à travailler à partir de cette loi-cadre. Et les gouvernements
libéraux, et là le ministre est... les gens
pourront peut-être m'informer davantage, mais, à partir de la loi-cadre, ils
avaient à mettre en place des plans d'action sur cinq ans pour lutter
contre la pauvreté, des plans d'action qui donnaient des objectifs et impliquaient les communautés, impliquaient les
régions. Dans ces plans d'action, il y avait des sommes d'argent qui
étaient consacrées à des groupes communautaires, il y avait des façons de faire
pour lutter contre la pauvreté.
Je pense qu'on est
rendus au troisième plan d'action depuis, et le ministre ou... là, c'est
l'ex-ministre, là, le député de
Louis-Hébert, qui avait enclenché le processus. Je trouvais ça un peu spécial
qu'on enclenche un nouveau plan d'action
sans avoir évalué la loi-cadre parce que la loi-cadre, elle a 10 ans, ça aurait
été bien, après 10 ans, c'est ce qui était prévu dans la loi, d'ailleurs, qu'il y ait une évaluation. L'évaluation
a été déposée, mais les parlementaires n'ont jamais pu interroger ou
avoir une discussion sur les 10 ans de cette loi-cadre-là. Ça fait que, bref,
il n'y a pas eu de discussion, de
consultation sur le bilan des 10 ans de la loi, mais on a enclenché un
processus de consultation pour un nouveau plan d'action. La consultation
sur le nouveau plan d'action, elle s'est faite, mais d'une façon très fermée,
là, c'était assez ciblé, où on a demandé à
des citoyens d'intervenir par Internet, là, par des mémoires, mais les
parlementaires n'ont pas été mis à contribution dans cette consultation-là.
Ça
fait qu'on ne sait pas où est-ce que c'en est rendu. Les consultations sont
terminées, mais comment évolue ce plan
d'action là, on n'en a aucune idée. Mais, pendant ce temps-là, on est en train
d'écrire une pièce hyperimportante qui va
intervenir, là, sur la pauvreté des personnes, sur l'intégration des personnes
éventuellement à l'emploi, une pièce qui vient jouer dans un secteur ou... je ne sais pas comment on peut appeler
ça, vient toucher à quelque chose qu'on s'était dit qu'on ne touchait pas, c'est-à-dire un barème
plancher, tu sais. Et là on vient, par l'idée des sanctions, remettre en
question ce barème plancher, remettre en
question le fait qu'en bas de 700 quelques dollars on ne devrait pas toucher
aux revenus des personnes. Ça fait que c'est assez gros comme démarche.
Et, pendant ce temps-là, on travaille sur un plan d'action puis on ne sait pas
où c'en est rendu.
Est-ce qu'on ne
pourrait pas, au moins, si on n'a pas participé sur l'évaluation de la
loi-cadre... au moins, on pourrait-u se dire
que ce projet de loi qui va être adopté, il devrait être conforme au plan
d'action puis aux consultations
qui sont faites ou est-ce qu'il devrait au moins s'intégrer? La loi-cadre, les plans d'action, la loi, ça devrait fonctionner comme ça, pas à l'inverse. Et c'est un peu ça, là, l'idée de l'amendement. Est-ce qu'on peut s'assurer que la loi-cadre ne sera pas... pas la loi-cadre, mais le projet de loi n° 70, là, une fois adopté,
pourrait au moins attendre la conclusion du plan d'action avant d'être
mis en oeuvre?
Je
rajouterais aussi par-dessus ça, ce qui rend encore l'affaire plus nébuleuse et
compliquée, c'est que le ministre a aussi
un mandat de mettre en place un... d'évaluer la mise en place d'un revenu de
base. Ça, on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va. Ça fait que, tu sais, on ne sait pas pantoute, là, comment ça
va fonctionner, cette réflexion-là, mais ça vient comme rajouter à un peu l'improvisation, là, qu'on est
en train de vivre en matière de lutte à la pauvreté. Et on a une loi-cadre,
on a des plans d'action, s'il y avait un
genre de ligne, est-ce qu'on ne pourrait pas au moins respecter tout ça? C'est
un peu l'objectif de l'amendement.
• (21 h 30) •
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le
ministre.
M. Blais :
Écoutez, M. le Président, comme d'autres amendements, là, que les derniers
amendements qui ont été faits, qui
ont été présentés ici, là, c'était vraiment un type d'amendement que l'on met à
la fin, là, du projet de loi, dans les dispositions transitoires, donc.
Pour le moment, je n'ai pas de parti pris sur le fond, donc je ne peux même pas
dire... Dans d'autres cas, je me suis
avancé, j'ai pris position. Dans ce cas-ci, là, il faudrait que j'y
réfléchisse, mais, de toute façon, on
le regardera, là, à la fin, là, de la lecture du projet de loi pour voir
exactement si on se comprend bien sur les dates, sur les contraintes.
Mais je ne pense pas que ça soit le moment, là, de parler de ça en ce moment.
On fera ça à la fin de la lecture du projet de loi.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de
Rimouski.
M.
LeBel : Juste une question avant de... Est-ce que le ministre pourrait
nous informer où il en est rendu avec son plan d'action? La consultation
est terminée. Ça, au moins, on pourrait être éclairés là-dessus.
Le Président
(M. Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
Non, M. le Président. Je ne pense pas que c'est le temps de parler de ça ce
soir, là. On va continuer à travailler sur le projet de loi.
Le Président
(M. Cousineau) : Oui, merci. M. le député de Rimouski.
M.
LeBel : Il me semble que ça n'aurait pas été compliqué, mais, bon,
s'il ne veut pas nous en parler, on ne peut pas l'obliger. On
pourrait... Je veux dire, pas de dessert, pas de permis de conduire, il
pourrait peut-être nous... on pourrait l'obliger... certaines sanctions.
Le
Président (M. Cousineau) : Vous vous attendiez à une
réponse plus longue, là, le temps de brasser votre café, c'est ça, hein?
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président
(M. Cousineau) : Mais vous ne réussissez pas. Alors,
poursuivez.
M. LeBel : ...s'il n'y a pas de
sanctions, on ne peut pas l'obliger, ne pas forcer la note.
Le Président (M. Cousineau) :
D'accord. Alors, M. le député de... Est-ce qu'il y en a d'autres qui veulent se
prononcer, qui veulent prendre la parole avant que je passe la parole au député
de Saint-Jean? Non? Ça va? M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président. Écoutez, je suis un petit peu surpris parce que le
ministre trouve qu'on est imaginatifs dans nos amendements. Moi, je
trouve qu'il est très imaginatif dans ses réponses qu'il nous donne. Je
m'attendais qu'il allait me dire : Bien, on est pour ou on est contre.
Mais là il est ambivalent, qu'il a dit, qu'il n'a pas d'opinion sur le fond.
M. Blais : Dubitatif.
M. Turcotte :
Dubitatif. Donc, M. le Président, je vais avoir le loisir de tenter de le
convaincre, dans ce cas-là, du fond. Par la suite, je lui expliquerai
de... bon, on parlera de la forme, où qu'on le met, puis tout ça, là. Mais, si
on est d'accord avec le fond, après ça, le
reste... Mais je me dis cependant : Le temps file, M. le Président. Il
nous reste peu de temps à la séance
de ce soir. On ne le sait pas si, demain, nous allons siéger. Moi, je trouve
qu'à force de toujours remettre, à pelleter
en avant, à plus tard nos amendements... En tout cas, les dispositions finales,
habituellement, c'est une section du projet
de loi qui se passe assez rapidement. Là, je crois que ça va être long parce
que, là, on remet ça toujours à plus tard. On pourrait très bien
progresser, M. le Président, actuellement, ce soir, là.
Mais là je ne peux pas dire : On suspend
l'article et on va l'adopter au bon endroit parce que, sur le fond, le ministre n'a pas d'opinion. Donc, nous allons
parler du fond, et à votre plus grande satisfaction parce que nous allons
être à 100 % sur l'amendement.
Donc, comme
le collègue l'a très bien expliqué, le collègue de Rimouski... et je ne peux
pas dire le ministre parce que M. le
ministre n'en a pas parlé, de son plan d'action, son plan de lutte, donc on ne
sait même pas si les consultations ont porté fruit, on ne sait pas si
tout est terminé, là. Le ministre ne veut pas nous en parler. Moi, ce que je
crois, M. le Président, et le député de
Rimouski l'a si bien dit, il trouve qu'on ne travaille pas dans la bonne direction et on travaille quasiment à rebours. C'est un peu ça. On a une
loi-cadre qui a été adoptée sûrement à peu
près à pareille date il y a plus d'une dizaine d'années maintenant. J'ai eu l'occasion de revoir dernièrement une photo de l'ambiance
dans le hall, ici, de l'Assemblée nationale le jour de l'adoption de la
loi-cadre, et il y avait vraiment une ambiance de réjouissance où les groupes, les citoyens, bon, avec, à l'époque, la ministre
Linda Goupil... On a eu l'occasion aussi d'avoir, ce soir, notre collègue la députée de Pointe-aux-Trembles, qui était ministre déléguée à ce moment-là, qui a fait le travail du
début à la fin, a rencontré tous les groupes au Québec, etc., faire les
arrimages, etc. On est complètement dans une autre ambiance actuellement, M. le
Président.
Le député de Rimouski nous dit : Nous devions
évaluer, après 10 ans, la loi-cadre. L'évaluation a été faite. Il n'y a
pas eu de débat ici, en commission
parlementaire, sur l'évaluation de cette loi-cadre-là. La loi-cadre dit qu'il doit y avoir des plans de lutte déposés aux cinq ans. Il n'y a
pas de consultation ici, à l'Assemblée
nationale, en commission parlementaire, sur le plan de lutte, un peu la même stratégie qui a été utilisée sur
plusieurs autres plans politiques, stratégies du gouvernement. Je pourrais parler de la Politique
jeunesse. Nous, lorsque nous étions au gouvernement, j'ai fait le tour du Québec
avec Léo Bureau-Blouin, le député de Terrebonne aussi, et nous avons pris l'engagement de déposer un livre blanc, ce
que nous avons fait. Mme Marois, première
ministre, Pauline Marois, de
l'époque, a déposé à l'Assemblée
nationale un livre blanc pour qu'il y ait
une consultation ici, en commission
parlementaire. Le gouvernement, nouveau gouvernement libéral, a plutôt préféré organiser une consultation
derrière des portes closes. On a la même stratégie dans ce cas-ci.
Pourtant,
pourtant, M. le Président, le plan de lutte contre la pauvreté et pour
l'inclusion sociale aura des impacts. Le
projet de loi n° 70, inévitablement, aura des impacts sur le plan
de lutte aussi. Nous, nous avons la prétention, nous croyons, avec ce que nous entendons, ce que nous voyons,
entre autres, les sanctions, selon nous, vont créer davantage
de pauvreté au Québec. Le ministre nous dit que ce n'est pas fondé, que ça va éliminer
ou réduire la pauvreté au Québec. Moi, je crois que le ministre, ou nous, ou les citoyens, tout le monde, on a avantage à connaître le plan de lutte contre la pauvreté
avant l'application du programme Objectif emploi. L'idéal, M. le Président, aurait été de ne pas étudier le projet de loi n° 70 avant le dépôt du plan de lutte contre
la pauvreté parce que le projet de loi n° 70 a des répercussions
inévitables.
On fait un
plan de lutte, on se donne une loi, on adopte la loi, on va appliquer la loi.
Par la suite, on va faire un plan d'action. Ce n'est pas sérieux, M. le
Président. Ce n'est pas comme ça qu'on travaille. Un plan d'action, c'est une
orientation... il y a une politique, bien entendu, mais un plan d'action, là, il
y a une orientation qui est donnée pour les
cinq prochaines années, l'action, les actions du gouvernement, actions 1, 2, 3,
4, les cibles, là, qu'on se fixe, tout ça, comment on fait, là, les actions pour y arriver. Et là, si besoin est,
nous adoptons des lois, nous adoptons des éléments pour appliquer, pour appliquer ces recommandations-là, ces objectifs qui sont dans un plan de lutte, dans un plan d'action. Mais là on adopte une loi, en
tout cas, on étudie une loi, on est loin de l'adopter, mais on étudie une loi,
puis ça se peut que le plan de lutte pourrait aller à l'encontre de ce projet
de loi là.
• (21 h 40) •
Moi, M. le Président, j'ai déjà un peu la
réponse, là. Je ne veux pas imputer de motif à personne, là, mais j'ai l'impression que le plan de lutte va aller dans le
même sens que le projet de loi n° 70 parce que, le plan de lutte, on
ne le sait pas qu'est-ce que les groupes ont dit, on ne le sait pas c'est quoi,
les mémoires, on ne le sait pas, qui qui a été consulté parce que ça se passe dans le cabinet du
ministre. Donc, comme ça se passe du côté du ministre, le ministre va
bien utiliser ou reprendre les idées qui font son affaire, M. le Président.
Donc, je suis certain que tout ce qui pourrait aller à l'encontre du projet de
loi n° 70, il ne les mettra pas dans le plan de lutte. Premier problème.
Faisons abstraction de ce premier problème-là, M.
le Président. Dans les faits, si on veut démontrer une cohérence dans l'action, il
n'y a pas 1 000
solutions, là. C'est s'assurer que le plan de lutte soit connu pour, s'il y a des actions qui émergent, qu'on n'a pas pensé ou que ça prend un outil législatif
pour y arriver... le ministre aurait même pu les inclure dans le projet de
loi, étant donné qu'on ouvre, là,
la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. C'est rare qu'un gouvernement ouvre une loi existante en déposant un projet de loi, M. le Président. Ce n'est pas courant, là, qu'on fait ça.
On a des milliers de lois au Québec, peut-être même plus, sûrement plus. Donc,
avant de modifier une loi, il faut s'assurer, là... Et c'est pour ça que le ministre
l'a fait lui-même.
Je pourrais
sortir des articles, là, M.
le Président, les articles
du projet de loi actuel, là. Article 24, articles
26, 33. Tout ça, là, ces articles-là,
là, c'est des articles qui n'ont pas du tout rapport avec ni
l'intégration en emploi, ni l'adéquation formation emploi. C'est des articles, là, qui règlent des problèmes
que nous avions dans la loi sur l'aide, entre autres... que j'ai
parlé, mais sur peut-être d'autres lois aussi suite à des jugements des
tribunaux, suite à des recommandations de la Protectrice
du citoyen. On l'a vu, là, c'est le Programme
de solidarité sociale pour les héritages, entre autres, puis tout ça, là. Des bonnes mesures, là. Bravo, là! Ça doit
être un des seuls articles qu'on a adoptés à l'unanimité, là.
Mais peut-être
que, si on connaissait le plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion
sociale avant d'appliquer le programme
Objectif emploi... On est en solution de repli, je l'avoue, M. le Président. Nous, là, initialement, ça aurait été avant. Puis je l'ai dit en période de questions, je l'ai répété,
puis on a même déposé une motion avec d'autres collègues. On a déposé
une motion là-dessus, de retenir l'étude du projet de loi n° 70 tant et
aussi longtemps qu'on ne termine pas l'élaboration du plan de lutte contre la
pauvreté et pour l'inclusion sociale. Donc, on a commencé l'étude du projet de
loi. Donc, on doit vivre avec.
Donc, nous, ce qu'on dit, c'est : À tout le
moins, à tout le moins, attendons, avant de mettre en vigueur le programme Objectif emploi, de connaître le plan de
lutte pour s'assurer que, s'il y a des éléments qui vont en divergence, donc qui ne vont pas dans le même sens que le plan
de lutte, bien, qu'on puisse modifier certains éléments. Puis peut-être que ces éléments-là, qui pourraient être modifiés
par règlement... parce qu'entre vous et moi, M. le Président, pas une
grosse confidence pour personne, beaucoup des éléments du programme Objectif
emploi se retrouvent dans le règlement.
Puis là-dessus le ministre nous dit quelque
chose tantôt, a dit quelque chose à notre collègue. Dans la lettre qui est parue dans Le Devoir du
9 juin, ça, c'est ce matin, aujourd'hui, dans la lettre, il y a un passage
qui dit... Tu sais, le ministre nous
dit que... un nouvel écueil, là, qu'il ajoute, là, dit : «Le projet de loi
n° 70 est également inquiétant par ses omissions. Les éléments
essentiels du nouveau programme se trouveront dans des règlements dont la
teneur est imprévisible. Par exemple, son
application uniquement à la personne présentant une première demande n'est pas
précisée dans le projet de loi n° 70; [le] règlement pourrait y assujettir
d'autres catégories de personnes. En outre, l'étendue exacte des nouvelles
obligations — et
donc l'exposition aux sanctions pécuniaires — dépendrait de déterminations
discrétionnaires, faites par les agents de l'aide sociale, sans possibilité de
recours.»
M. le Président, le ministre nous a dit :
J'ai déposé... et c'est un écueil...
Une voix : ...
M. Turcotte :
Bien oui! Bien oui! Pour le ministre, M. le Président, pour le ministre. Puis
le ministre, il fait bien de nous
rappeler à l'ordre là-dessus parce que ça nous permet justement de corriger ses propres écueils, parce que c'est
un écueil du ministre, pas des chercheurs
puis des professeurs d'université qui... Bon, Pierre Issalys, là, c'est une
sommité, là, en la matière, là, dans les lois, dans l'interprétation des lois,
dans la compréhension des lois. Je m'excuse, là, ce n'est quand même pas le
dernier venu, là, hein, bon, M. le Président.
M. Blais : M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, M. le ministre.
M. Blais : ...rapidement. Donc, on l'a déjà
dit, c'est un écueil parce que... c'est des choses, on en a parlé, puis,
effectivement, il faudrait que j'en parle, là, que j'écrive peut-être
une réponse, là, à ça, là, parce qu'on l'a mentionné ici, là, le droit de recours, quand même, est reconnu par la loi, là. Quand on dit que ce serait discrétionnaire
et sans aucun droit de recours, là, ça n'est pas le cas. Voilà.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte :
...rapidement. Mon Dieu! Je ne sais pas quoi dire à ça, M. le Président. Sérieusement,
là, le ministre nous dit : Je vais lui écrire une lettre, là, une réponse
à ça, là. On a tous lu sa lettre dans Le Devoir puis dans le Le
Huffington Post, hein? C'est la
même qui a été reprise. On a même vu son vidéo surFacebook. Peut-être
que les gens... si les gens ne s'endorment pas ce soir, pourraient
l'écouter.
Des voix : ...
M. Turcotte :
Vous êtes peut-être mieux de ne pas le regarder.
Sérieusement,
M. le Président, je crois que, si le ministre veut répliquer à cette lettre-là,
bien, tant mieux, là. Ça va nous donner plus
d'explications. Mais moi, je crois que, jusqu'à maintenant, là, moi, je les
crois, là, parce que je l'étudie, le projet de loi, depuis le début. Et le ministre, oui, nous a déposé des intentions réglementaires de qui pourrait être exclu du programme Objectif emploi. Mais le
ministre l'a si bien dit à plusieurs reprises : des intentions
réglementaires. Je ne peux pas déposer le
règlement ici parce que c'est le Conseil des ministres, donc le gouvernement,
qui va décider. Ce n'est que mes intentions réglementaires. M. le
Président, ce n'est que ses intentions réglementaires.
À
la vitesse où les ministres passent dans ce gouvernement, moi, là, je ne sais
même pas si quand on va revenir, en automne,
ça va être encore le même ministre que je vais avoir assis devant moi pour...
Peut-être que moi aussi je ne serai plus
là, hein? Nous autres aussi, ça bouge un peu des fois. Mais, plus sérieusement,
M. le Président, je crois que... je ne sais pas jusqu'à quel point que,
justement, l'été va faire du bien au ministre pour avoir pas mal le temps
d'écrire, de réfléchir, mais peut-être de réécrire des aspects du projet de loi
puis de modifier son projet de loi parce que, je le mentionne, M. le Président, sérieusement, sans connaître... et
c'est un peu formidable, là, mais pas positivement, là, de voir comment on peut lire des articles de journaux, ou
des commentaires de gens, ou des commentaires de l'ancien ministre, et de lire des commentaires du ministre actuel, lire
des commentaires de chroniqueurs ou de gens, de chercheurs actuellement,
et de voir qu'on parle de deux choses complètement différentes, mais c'est
toujours le même texte et le même projet de loi qui est devant nous.
Ce
que ça veut dire, M. le Président, avec quelques amendements... Bien, en tout
cas, ce n'est pas bien, bien les nôtres
qui ont été retenus, M. le Président. C'est parce que c'est dans les
intentions réglementaires que tout se joue. Sur la question d'un emploi convenable, c'est dans le
règlement, ce n'est pas dans le projet de loi. Les distances, pas dans
le projet de loi, c'est dans le règlement.
Quel type d'emploi qui peut être accepté ou pas, c'est dans le règlement, ce
n'est pas dans le projet de loi. Les parcours, recherche intensive
d'emploi, formation, habiletés sociales, c'est dans le règlement, c'est les
intentions réglementaires du ministre. Qui est exclus, qui qui est inclus,
c'est dans le règlement, ce n'est pas dans le projet de loi. Les sanctions, pas
dans le projet de loi, c'est dans les règlements.
Donc,
tous ces éléments-là, les distances que le ministre... le ministre, qui nous
dit : On pourrait permettre de payer le déménagement pour une personne, 1 000 $ pour le
déménagement. L'ancien ministre n'a jamais parlé de ça, c'est le
ministre actuel. C'est dans les règlements, ce n'est pas dans le projet de loi.
• (21 h 50) •
Une voix :
...
M. Turcotte :
Peut-être que, là, il y a une exception, c'est dans la loi, mais je ne pense
pas que le montant est fixe dans la loi, là. Je pense que c'est dans le
règlement qui découle de la loi.
Donc,
tout ça pour dire... Et je ne remets pas ça en question. Il y a des éléments
qui, effectivement, c'est mieux que ça
soit dans les... bien, dans les règlements parce que ça change avec le temps.
Puis, je l'ai dit, une loi, on ne réouvre pas ça à tous les ans. Donc, c'est normal que des montants,
des éléments se retrouvent dans le règlement, mais, en même temps, ce n'est pas normal qu'on ne connaisse pas
l'ensemble des intentions réglementaires ou, du moins, le règlement et ce
n'est pas non plus normal, puis là, dans ce
cas-ci, je me rattache à l'amendement, M. le Président, du plan de lutte contre
la pauvreté et pour l'inclusion sociale, que
nous ne connaissons pas encore les intentions ministérielles, les intentions
du ministre actuel sur son plan de lutte.
Quelle est l'orientation? C'est quoi, le plan de match, là? Le gouvernement a
fait, là, des rencontres, là, spéciales, des caucus, des conseils des
ministres, etc., là. C'est très enlevant en ce moment pour les chroniqueurs,
là, de suivre la politique sur le gouvernement actuel, et l'argument, moi,
qu'on m'a servi...
Une voix :
...
M. Turcotte :
L'argument qu'on m'a servi, c'est : On est à mi-mandat. On doit se donner
un plan de match, là, pour la mi-mandat, pour la deuxième moitié du
mandat du gouvernement.
Moi,
ce que j'aimerais savoir, là, c'est : Le ministre, qui est le champion de
la lutte à la pauvreté, là, parce qu'il est le ministre de l'Emploi et
de la Solidarité sociale, il doit se donner ce titre-là, ce mandat-là, bon,
c'est quoi, ses orientations? C'est quoi,
son objectif pour lutter contre la pauvreté et faire en sorte qu'il y ait moins
de pauvreté rendu à la prochaine
élection? Bon, ça, c'est l'objectif, c'est l'orientation que le ministre doit
se donner. Ça, là, je pense, à moins que je suis complètement dans le champ, ce qui m'étonnerait beaucoup, un des
outils, c'est de passer par le plan de lutte contre la pauvreté. C'est sur cinq ans. Bon, habituellement,
c'est un gouvernement. Là, dans ce cas-ci, ça sera peut-être deux gouvernements. De toute façon, même si c'est
le même parti, ça sera quand même deux gouvernements différents.
Donc, moi, je crois
que notre amendement est très pertinent.
Le Président
(M. Cousineau) : En conclusion. Il vous reste une minute.
M. Turcotte :
Notre amendement est très pertinent, et j'invite le ministre à voter pour qu'on
puisse progresser dans l'étude du projet de loi.
Le Président
(M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean.
M. le ministre, voulez-vous réagir?
M. Blais :
Je vais revenir sur ce que j'ai déjà dit. Bon, tout ça, c'est des éléments de
fin de loi, là, pour les dispositions transitoires. Donc, je pourrais les
regarder quand on sera rendus là, bien entendu.
Sur le plan
de lutte, peut-être quelques petites informations, là, additionnelles, là.
Donc, on est en consultation en ce
moment, puis les mémoires, notre intention, c'est de les rendre publics.
Peut-être deux remarques sur les mémoires, qui sont, je trouve... qui me rendent positif.
Tout d'abord, un des risques ou une des tentations que l'on trouve
souvent quand on demande aux gens de déposer
des mémoires sur un sujet quelconque, sur un problème quelconque, c'est
que les groupes arrivent, et il y a un
réflexe, disons, c'est humain, il y a un réflexe corporatiste, M. le Président.
Les gens vantent ce qu'ils font, leur
travail, etc., que ça soit un ordre professionnel, bon, c'est tout à fait
normal, là. Les gens qui sont ici, là, comme députés connaissent bien
ces réflexes humains là. Mais je trouve que, dans ce qu'on lit, en tout cas,
parfois, il y a vraiment, là, dans certains
cas, une volonté de prendre une distance un peu de ses intérêts ou sa vision
propre pour... d'aller plus loin. Donc, ça, c'est encourageant.
Il y a un
autre élément qu'on retrouve parfois, c'est aussi d'être audacieux dans les
suggestions que l'on fait. Il faut rappeler
qu'on a déjà eu deux plans, et malheureusement, quand on regarde le début...
quand on compare l'évolution que l'on a faite au niveau de la lutte
contre la pauvreté, si la métrique que l'on utilise — et je
ne dis pas que c'est la seule métrique — mais, si la métrique que l'on utilise, c'est les
taux de pauvreté, on est exactement au même point où on en était. Donc, la loi ne nous a pas aidés nécessairement.
Ça ne veut pas dire qu'elle nous a nui non plus, mais il faut poser des
gestes peut-être un peu plus concrets puis regarder des politiques qui
pourraient avoir un impact.
Puis j'ai
déjà parlé de la question des personnes seules. Je pense qu'il y a un grand
consensus, au Québec, pour identifier
qu'une de nos priorités devrait être de cibler un peu plus les personnes seules
dans le prochain plan. Quelle
est la solution? Par quel mécanisme? C'est encore en réflexion, en discussion,
mais, à mon avis, il faudrait que, dans le prochain
plan... puis c'est un appel que je fais aussi à ceux qui sont intéressés par la
question à faire des suggestions, là, de nous
amener des suggestions par rapport aux isolés, là, qui n'ont pas beaucoup
progressé, là, au contraire, là, dans leur situation économique,
socioéconomique ces dernières années.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, d'autres intervenants sur l'amendement déposé par M. le député de Richelieu? Mme la députée de Gouin,
vous avez 20 minutes sur l'amendement.
Mme David
(Gouin) : Je ne devrais pas
rire, mais... Merci, M. le Président. J'essaie de retrouver un minimum d'énergie pour peut-être poser certaines questions,
et j'en avais même avant que le ministre fasse sa dernière intervention, mais
j'aimerais ça commencer par là.
Le ministre
n'a pas tort, M. le Président, de dire que, malgré l'adoption importante,
là, c'était un moment important, du projet de loi contre la pauvreté et l'exclusion en décembre 2012, à certains égards,
pas dans tout, mais c'est vrai qu'on n'a
pas fait de grands pas dans la lutte à la pauvreté, mais c'est parce que,
tout de suite après ce constat, au risque de me répéter
un peu parce que je l'ai dit pour d'autres sujets, il faudrait comprendre
pourquoi. Moi, je veux bien qu'on me dise ça, pourquoi.
Et pourquoi? Bien, parce qu'il y a
encore des gens au chômage, parce que le logement coûte beaucoup trop
cher aux personnes à faibles revenus. On est à la veille de régler un petit
problème, hein, au fond, qui touche quelques centaines
de personnes âgées, mais c'est loin de toucher l'ensemble des personnes à
faibles revenus, puis là je ne parle même
pas seulement des personnes à l'aide sociale. Le problème du logement, dans les
10 ou 15 dernières années, est devenu un problème extrêmement important.
Les gens ont des prestations extrêmement faibles et doivent payer des logements
trop chers. Ce n'est pas trop compliqué à comprendre, ça. C'est très factuel.
Alors, une
fois qu'on a dit ça, il va bien falloir s'y attaquer à un moment donné, il va
falloir faire quelque chose, là. Je
comprends qu'il y a les suppléments au loyer, mais c'est bien insuffisant. On
coupe dans les logements sociaux. Moi, je veux bien qu'on se fasse
dire : Vous savez, au fond, le taux de pauvreté, il n'a pas tellement
changé. Mais oui, mais, d'accord, qui
gouvernait, pas tout le temps, mais enfin la plupart du temps, et avec quelle
prise de décision? Quand on augmente
les frais de garde, on augmente les tarifs d'hydroélectricité, ça touche les
plus pauvres aussi, en passant, ça, pas seulement la classe moyenne, là.
Et quand le coût des loyers augmente, quand le coût de l'alimentation
augmente... J'étais sidérée de voir un
reportage dernièrement où on parlait d'augmentation du genre plus 21 %
pour un chou-fleur par rapport à
l'année dernière. Ça n'a l'air de rien, mais le chou-fleur, la laitue, les
carottes, les carottes... les carottes, tu sais, ça augmente de 10 %. Voilà un mets normalement à
très faible coût, là, pour des gens à faibles revenus. Bien là c'est
rendu que les carottes sont chères, elles sont cuites aussi, pour pas mal de
monde.
Mais tout ça,
là, le ministre et son personnel le savent. Ils le savent très bien. Nous, nous
avons des salaires qui nous permettent amplement d'acheter toutes les
carottes qu'on veut, mais j'espère qu'on fait nous-mêmes notre épicerie, puis qu'on sait combien coûtent les aliments, et
qu'on sait combien coûtent les vêtements et combien coûte le litre de
lait, par exemple. Puis on s'aperçoit que,
si on veut en chercher, des raisons à la non-diminution, là, de façon
fulgurante, là, de la pauvreté, bien,
on va regarder dans l'inflation puis dans le fait que le salaire minimum
n'augmente jamais en conséquence, ni les prestations.
Ça fait que
ça ne me satisfait pas de me faire dire... malgré l'adoption d'une loi, le
ministre dit : On en est plus ou moins
au même point. Mais est-ce que le raisonnement final, c'est : Bien, pour
en sortir, on va s'assurer que tout le monde suive un programme, puis
ceux qui ne veulent pas, on va faire des sanctions? À mon avis, réponse un peu
courte à un problème très, très, très complexe.
• (22 heures) •
Par contre,
là où je suis d'accord avec le ministre, c'est que c'est vrai que ce sont les
personnes seules à l'aide sociale
qui, actuellement, sont les plus pauvres, proportionnellement, davantage que
les familles. Tout à fait d'accord avec ça. Et souvent ces personnes seules ont déjà un certain âge, ont des
problèmes de santé physique et psychologique, des problèmes de détresse psychologique. Et,
franchement, on aura beau dire : Il y a des emplois disponibles au Québec,
les entreprises recherchent des travailleurs
et des travailleuses, on sait tous très bien que beaucoup de personnes seules à
l'aide sociale ne seront pas embauchées, en
tout cas, pas facilement puis pas rapidement, par les employeurs actuels au
Québec, qui demandent que chaque travailleur
donne du 150 % à peu près, là, parce que c'est ça, maintenant, le marché
du travail.
Alors,
d'accord avec le constat que les personnes seules sont les personnes les plus
mal prises à l'aide sociale, mais il
va vraiment falloir chercher comment permettre à ces personnes de vivre dans la
dignité, et ce, même si, dans bon nombre
de cas, on a beau dire que, théoriquement, ils sont aptes au travail, là...
Oui, pour certaines tâches, oui, plusieurs vont faire, par exemple, 20
heures par semaine dans un organisme communautaire, puis ce sont des gens qui
sont capables, dans un contexte pas trop
stressé, là, d'être efficaces. Il y a plein de choses qui sont possibles à
faire. Mais pour ça, il ne faut pas couper les PAAS-Action puis il faut
continuer de travailler.
Maintenant,
sur l'amendement plus directement, évidemment que je l'appuie, M. le Président,
parce qu'il me paraît juste, plein de bon sens. Tu sais, le bon sens,
c'est vraiment compliqué à comprendre. Quand on essaie d'avoir un raisonnement, là, je ne sais pas, ou on essaie...
en tout cas, moi, j'essaie d'être un petit peu cohérente. Je ne
comprends pas très bien comment il se fait
qu'on ait un projet de loi qui pense apporter des solutions à des problèmes,
dans le fond, d'exclusion économique
et sociale, et tout ça, bon, oui, après une commission parlementaire, mais où à
peu près tout le monde est venu
dire : Ne faites pas ça. Oui, le programme, c'est bon, mais pas de
sanction. Mais on ne les écoute pas. Et, oui, bon, il y a des mémoires qu'on va rendre publics. Donc, ma compréhension,
c'est qu'ils ne le sont pas pour le moment, je ne sais pas pourquoi. Et on ne connaît pas l'hypothèse d'un plan de
lutte global contre la pauvreté et pour l'inclusion.
C'est comme si on prenait toute l'affaire par un
petit bout, on disait : On va faire ça, puis le grand plan, on vous le dévoilera, bien, je ne sais pas exactement
quand, mais sûrement après l'été. Je pense, là, qu'on est à la veille de
se quitter. Donc, c'est sûr que c'est après.
Pourquoi
est-ce qu'on n'aurait pas pu commencer par avoir un rapport ou des
consultations sur le plan de lutte contre
la pauvreté, avoir une discussion générale, puis après ça poser l'hypothèse
de : Est-ce que, dans ce contexte-là, ce que le ministre appelle une réciprocité est, mettons, pertinent? Tu
sais, est-ce que c'est pertinent? Parmi plein d'autres hypothèses, est-ce que celle-là est pertinente?
Alors, moi, je ne comprends toujours pas pourquoi on a pris juste comme un tout petit morceau de la tarte, mais on n'a pas
la tarte au complet, là. Et c'est pour ça que je suis pour l'amendement.
J'aimerais
revenir sur une intervention qu'a faite, une autre journée, je ne saurais plus
dire exactement laquelle, la députée de Fabre lorsqu'elle parlait de son
expérience auprès des jeunes. Moi, j'avais demandé, ça, je m'en rappelle bien : Est-ce qu'on sait pourquoi un certain
nombre de jeunes ne viennent pas dans les programmes? Et qu'est-ce qui
arrive d'eux et d'elles lorsqu'ils ne
viennent pas? Et qu'est-ce qui arrive quand les jeunes viennent? Et la députée
m'a donné une réponse qui m'a
interpellée. Elle dit : Les jeunes... enfin, je ne veux pas... Mme la
députée pourra me corriger si j'ai mal interprété
ses propos, mais ma compréhension a été : Il y a des jeunes qui ne
viennent pas parce qu'au fond leur estime d'eux-mêmes est tellement
faible qu'ils n'imaginent pas qu'ils puissent réussir, ils n'imaginent pas
pouvoir aller vers le succès avec un
accompagnement. Ils n'imaginent même pas que cet accompagnement existe, soit
intéressant, adapté pour eux, etc.
Par contre,
elle nous dit : Ceux qui viennent, ceux et celles qui viennent, là où ça
fonctionne, si j'ai bien compris, c'est
quand il y a un plan d'intervention personnalisé, que le jeune homme ou la
jeune femme peut se l'approprier. On y
va étape par étape, on réajuste le tir et, dans ces conditions-là, on a entre
70 % et 75 % de succès. Je voudrais moins intervenir sur toute cette partie-là puisque je
suis pleinement d'accord avec la députée. Et, pour avoir visité de
nombreux organismes, dans ma circonscription et ailleurs, qui travaillent avec
des jeunes, donc en situation de projet, là, soit dans diverses mesures d'employabilité, dont les entreprises d'insertion,
le taux de succès est effectivement très élevé. Donc, ça, c'est
intéressant parce que ce que la députée nous dit, c'est : À partir du
moment où il y a un accompagnement personnalisé, étape par étape, etc., ça
marche.
Je souhaite donc que le ministre reprenne cette
manière de travailler lorsque je lui parle de la formation générale aux adultes où beaucoup de jeunes adultes
n'arrivent pas à passer à travers, et le taux d'échec est important
parce qu'il n'y a pas d'accompagnement individualisé. Alors, ma compréhension,
c'est que, si on veut que ça marche, il va falloir qu'il y en ait. Il y a des
organismes communautaires qui l'offrent déjà, mais il y en a très peu. Il va
falloir les multiplier. Dans cette
mesure-là, je pense que, oui, plusieurs jeunes pourront terminer leur diplôme
d'études secondaires.
Maintenant,
quant à ceux qui ne viennent pas, au fond, je suis assez d'accord avec la
députée. Je pense qu'un certain nombre
de jeunes ont eu des vies tellement brisées, ils ont été tellement malmenés,
souvent ils n'ont pas vécu tout le temps avec leur famille, ils ont été en famille d'accueil, en centre
jeunesse... À 18 ans, ce n'est pas facile, hein, de faire face à tout ce qui nous attend dans notre vie d'adulte. Et je
peux imaginer qu'un certain nombre, effectivement, n'imaginent même pas,
hein, qu'il y a quelque chose pour eux.
Il y a en a plusieurs qui sont accueillis par
Les Auberges du coeur. Ce n'est pas tout le monde, bien sûr, mais il y en a
quand même plusieurs. Et là je ne connais pas les taux de succès, je n'ai pas
ce chiffre-là, je ne prétendrai pas l'avoir,
mais je peux imaginer que c'est probablement intéressant. Chaque jeune est pris
en main, soutenu. J'en ai visité, des
Auberges du coeur. C'est vraiment remarquable, le travail qui est fait. Mon
collègue de Drummond—Bois-Francs
a l'air de dire que oui. Ça va prendre,
c'est sûr, un certain temps, mais, bon. Mais probablement qu'on en échappe
d'autres. Je suis d'accord avec la députée. Ils ne viennent pas tous dans Les
Auberges du coeur. Donc, on en échappe.
J'ai
beaucoup, beaucoup, c'est là où je pense qu'on diverge d'opinion, de difficulté
à penser que... Mettons, là, au-delà d'une première rencontre, il y a eu
une journée, cette semaine, où une hypothèse a été soulevée par le ministre,
là, d'une rencontre, hein, qui devait être... Pardon?
M. Blais : D'évaluation.
Mme David
(Gouin) : Oui, une évaluation, mais, dans mon esprit, M. le Président,
si on veut faire une évaluation, il faut parler avec la personne.
J'appelle ça une rencontre et j'ose croire qu'elle est physique, en tout cas,
dans la quasi-totalité des cas, à moins que
ça soit complètement impossible pour diverses raisons, là. Et donc, oui, si
cette rencontre a
lieu, donc là le jeune homme, la jeune femme sait, il le sait, là, qu'on lui
offre quelque chose. Il me semble que, là, il y a un écueil, qui avait
été soulevé par la députée, qui est levé.
Alors,
je ne sais pas, le ministre n'est pas revenu avec cette hypothèse, je ne pense
pas qu'on va régler ça ce soir ni
demain, mais, à l'instar de mon collègue de Saint-Jean, je dirais que,
peut-être, la période d'été pourra permettre aux deux côtés de cette Chambre, de cette commission, de réfléchir à tout ça
parce qu'à l'automne on va vouloir, je pense, atterrir. Et je m'avance
un petit peu, mais, si tout ce qu'il faut, c'est une véritable rencontre
physique d'une heure, 1 h 30 min,
quelque chose de sérieux, là, avec un jeune homme, une jeune femme,
réfléchissons-y, réfléchissons-y. Si c'est ça, l'écueil soulevé par la députée. Tu sais, elle dit : Ils ne
savent même pas, ils ne peuvent même pas imaginer que ça existe. Bien, je comprends, il y a bien des cas où on ne
leur a jamais proposé. Peut-être que, si on leur propose quelque
chose... sait-on ce qui pourrait arriver? Je le soumets, moi aussi, comme
hypothèse, et rien de plus. Rien de plus.
Mais
je comprends ce que la députée a voulu dire, mais je trouve que la partie la
plus importante, vraiment, de son intervention, en tout cas, à mes yeux,
la plus parlante, c'est quand elle nous dit : Il faut un accompagnement
personnalisé étape par étape et que le jeune ou la jeune sente qu'il est au
coeur de tout ça puis qu'il peut faire des choix,
il peut décider ce qui est bon pour lui ou pour elle. Ce n'est pas quelqu'un
d'autre qui l'oblige à, c'est lui ou
elle qui dit : O.K. J'embarque puis moi, j'ai envie de faire telle chose.
Tu sais, faire confiance au jugement des jeunes. Je suis certaine que c'est ce qui se fait dans les carrefours jeunesse-emploi. Il y a de l'aide, il y a de l'accompagnement, il y a du soutien,
mais je suis certaine qu'on fait confiance aux jeunes et à leur capacité
d'agir.
Bref,
M. le Président, je ne sais pas si ma collègue
voudra réagir à mes propos. Je le souhaite, dans le fond, parce
qu'il me semble qu'il y a dans ce qu'elle a dit des avenues intéressantes.
• (22 h 10) •
Le Président
(M. Hardy) : Merci, Mme la députée de Gouin. Mme la députée de Fabre,
est-ce que vous avez des mots à rajouter?
Mme Sauvé : Bien sûr, M. le
Président. Alors, je voulais revenir effectivement aux commentaires de la collègue de Gouin sur trois aspects
qu'elle a nommés. Tout d'abord, revenir sur, effectivement, pour ceux qui
ne viennent pas, à quel point l'obligation à avoir une rencontre et faire
en sorte que rapidement,
rapidement, c'est un mot important, là, parce
que le délai, chez les jeunes, on est beaucoup
dans le ici et maintenant... donc, un délai rapide. Ce qui se fait d'ailleurs maintenant. On est dans les 48 heures dans la réponse aux
jeunes. De faire en sorte que le jeune qui ne croyait pas que l'accompagnement existait, qu'il pouvait être soutenu, aidé dans une aide très
personnalisée... Il n'est absolument pas devant cette possibilité-là au moment
où il vit toutes les difficultés qu'il vit. La rencontre obligatoire, qui se
fait avec l'agent d'Emploi-Québec dans le
CLE, rapidement, avec l'intervenant d'une ressource externe, que ce soit un
carrefour ou un autre organisme en employabilité,
je peux vous dire que, M. le Président, pour l'avoir vu des milliers de fois
par année, ça fait en sorte... puis là je
parle des milliers pour l'ensemble des jeunes, mais, disons, chez les
primodemandeurs, c'est un nombre moins grand. Mais l'avoir vu très, très
souvent, l'étincelle qui s'allume, qui fait en sorte que le jeune réalise avec
l'expertise liée à l'accompagnement, le
jeune qui vient et qui finalement réalise que, oui, il y a une aide possible,
oui, on peut envisager un succès, mais on en discute avec le jeune et on
regarde ça de façon...
Puis
je sais que la préoccupation, ce que j'entends, la préoccupation de la collègue
de Gouin, c'est de prendre le temps.
Je peux vous confirmer que, du côté de l'équipe du CLE, en lien, en dialogue
avec l'intervenant de la ressource externe,
il y a vraiment le temps de faire un plan d'intervention personnalisé. Il y a
le temps qui se prend à faire en sorte qu'il
y a l'évaluation des besoins et une évaluation des besoins qui est faite de
façon holistique dans l'approche globale à prendre en compte toutes les
réalités du jeune.
Alors,
oui, l'objectif, c'est l'employabilité, donc, éventuellement, l'intégration en
emploi, le retour aux études, le développement des habiletés, mais c'est
très clair que, s'il y a cet objectif-là, on tient compte de l'ensemble des réalités. Là, il y a tous les volets de
l'autonomie fonctionnelle du jeune, mais je n'entrerai pas là-dedans. Mais
c'est vraiment pris en compte et
c'est là où s'élabore, après une écoute active, après une intervention experte,
avec l'agent du CLE, avec l'intervenant
de la ressource externe... où il y a finalement un plan d'intervention
personnalisé. Et là le jeune réalise à quel point c'est une étape à la
fois, c'est réaliste, c'est en fonction de ses intérêts. Et on se fixe des
objectifs auxquels il consent, auxquels il consent, je reviens là-dessus. Donc,
ça, c'était l'aspect que je voulais nommer.
La
députée de Gouin a aussi nommé l'aspect de l'éducation, et je sais que ça a
déjà été nommé précédemment, le volet...
la réalité des jeunes qui vont vers la voie de l'éducation des adultes. Il y a
beaucoup de jeunes, en fait, qui décrochent et qui voient en l'éducation des adultes la panacée. Or, on sait bien
que l'éducation des adultes a une forme d'apprentissage qui est beaucoup
dans l'approche modulaire. Ça demande une grande autonomie et une façon
d'apprendre qui est un peu différente.
Moi,
je vous dirais qu'encore là il y a des extraordinaires bonnes pratiques qui
sont sur le terrain. Je vous
dirais qu'il y a des ressources externes, il y a des carrefours jeunesse-emploi
qui ont mis en place, il y en a à peu près dans toutes les régions du Québec, des passerelles d'accompagnement où il y a
des partenariats avec les milieux scolaires entre le décrochage du jeune qui devient primodemandeur et
son accompagnement, sa petite passerelle, il y en a qui appelle ça
les programmes l'école au carrefour ou d'autres formules, qui font en sorte que
le jeune est vraiment dans une formule d'accompagnement vers l'éducation des adultes avec un professeur, un enseignant qui
est en partenariat avec la ressource externe.
Et ça, ça existe. Je pense à plusieurs, là, collègues que j'ai connus dans
ma vie passée qui ont cette formule-là. Et, les enseignants nous le disent, une fois qu'ils sont rendus à l'éducation des adultes, ça fonctionne, ils vivent un succès, il y a une
passerelle très intéressante. Alors, ça, ce sont des bonnes pratiques qui sont déjà
en place et qui donnent des très, très beaux succès.
Je veux revenir sur évidemment toute la notion
des jeunes qui s'autosabotent. Et il y a un constat qui n'a pas du tout émergé tout au long des discussions, que
je veux amener, qui me ramène beaucoup à la réalité des primodemandeurs dans ma région. Je vais me permettre encore une fois d'être un peu
dans mon chauvinisme par rapport à ma région. Vous me permettrez, M. le
Président. Mais, moi, il y a eu plusieurs années un état de choc parce qu'on
disait : Les jeunes primodemandeurs que
vous allez accueillir, bon, tout ça, dans des nouveaux programmes qui étaient
en place à ce moment-là, que ce soit
Solidarité jeunesse en particulier, on me disait : Vous allez voir, c'est
beaucoup d'intergénérationnel, et, bon, et tout ça. Et force est d'admettre que j'ai eu à constater que ce
n'était pas nécessairement uniquement, et loin de là, en tout cas, en ce qui a trait à ma région... les
primodemandeurs n'avaient pas de façon majoritaire le profil de
l'intergénérationnel et du milieu
défavorisé. C'étaient des jeunes qui étaient simplement carencés affectifs dans
des réalités dysfonctionnelles parentales,
et autres, qui faisaient en sorte que ces jeunes-là sombraient dans la
délinquance, dans la petite criminalité qui augmentait au fil des ans. Et c'était un peu un état de choc parce qu'on
devait adresser avec le même accompagnement personnalisé, bien sûr, mais
on n'était pas dans une réalité d'environnement défavorisé en termes de
défavorisation sociale et financière. Donc, c'était très particulier.
Alors, je
voulais amener juste cette notion-là de dire que le jeune primodemandeur qui
est en décrochage social n'est pas
uniquement dans un portrait ou un profil de milieu défavorisé, bien
qu'évidemment il y a une réalité, là, qui est quand même importante.
Alors, je ne sais pas si ça éclaircit certains aspects des préoccupations
qu'avait la collègue de Gouin.
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Fabre. Mme la
députée de Gouin, je vous rappelle qu'il vous reste cinq minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Je ne le prendrai même pas en
entier. Je suis contente d'entendre ma
collègue et je suis particulièrement contente de l'entendre me dire qu'il
existe un certain nombre de ressources, là, qui permettent à des jeunes qui sont en éducation aux adultes ou qui
veulent y aller, là, de réussir à passer à travers parce que je pense c'est la première fois, honnêtement, là,
que j'entends quelqu'un de l'équipe ministérielle dire : Oui, c'est
vrai, ce n'est pas facile, la façon dont
l'éducation aux adultes est faite avec le système modulaire dont parle la
collègue, et que, donc, oui, il faut qu'il y ait des ressources externes
qui donnent un sérieux coup de main. Moi, j'en connais une dans ma
circonscription. Vous en avez sûrement dans la vôtre. Il y en a d'autres
ailleurs. C'est essentiel.
Et ce que je
sais aussi, c'est que plusieurs, peut-être moins les carrefours
jeunesse-emploi, mais, dans d'autres cas, il y a un manque criant de
financement de ces ressources-là. Puis, dans le fond, on serait bien mieux de
les financer plutôt que de retrouver les
jeunes à l'aide sociale. C'est toujours la même chose, hein? Il vaut mieux,
entre 16 et 18 ans, aller à l'école, même aux adultes, être aidé par un
groupe à qui on va donner, je ne sais pas, moi, 10 000 $ de plus par année. Ça va nous éviter qu'à 18 ans le jeune
tombe à l'aide sociale. On en économise plein, de sous, sans compter
tout le bien qu'on fait, évidemment.
La dernière
chose que je veux dire, c'est que, quand je parlais d'une rencontre qui était
nécessaire entre quelqu'un du centre
local d'emploi et la personne, dans mon esprit à moi, c'était cette
rencontre-là. Ça ne veut pas dire que les autres, par la suite, ne sont pas importantes, mais vous
comprendrez que je ne dirai pas là, ce soir, le contraire de ce que je
dis depuis des mois, c'est-à-dire que je ne
vise pas l'obligation, mais que l'État se donne comme obligation, dans ces
centres locaux d'emploi, de rencontrer une
personne qui vient pour la première fois, ça me paraîtrait être la moindre des
choses, et que, oui, c'est une rencontre qui
doit prendre le temps que ça prend, hein, pour faire le tour d'une question,
puis dire à une personne qu'on est avec elle et qu'on va essayer de trouver avec elle
ce qu'elle peut... ce qu'est sa vie, dans
le fond, puis ce que sont ses difficultés, et ce qu'elle aurait envie de
faire... Alors, voilà.
Quant aux jeunes dont la collègue parle, qui, effectivement,
ne sont pas tous d'un milieu défavorisé, je suis complètement d'accord avec elle. Et parfois ce que ça veut dire, c'est
qu'il aurait dû y avoir une intervention familiale, probablement, auparavant. On a échappé des jeunes. On en échappe, d'ailleurs,
on le sait. Et donc, oui, on retrouve à l'aide sociale malheureusement des jeunes qui, en fait, tu sais, avaient... Au départ, on aurait pu
penser qu'ils avaient tout pour ne
pas y être, mais ce n'est pas tout, dans la vie, d'avoir des sous dans une
famille, hein? Il faut bien d'autres choses que ça.
Alors,
d'accord avec elle, mais je suis particulièrement contente de la mention de l'importance de l'accompagnement des jeunes lorsqu'ils sont à l'éducation aux
adultes. Merci, M. le Président.
• (22 h 20) •
Le Président (M. Hardy) :
Merci, Mme la députée de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement
qui a été proposé par le député de Richelieu? M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui, M. le
Président. Je crains que le ministre n'utilise à notre égard, à nous, des oppositions,
particulièrement à l'égard de l'opposition officielle et de Québec solidaire, cette méthode qu'il qualifiait, si je me rappelle bien, de paternaliste bienveillante, celle des
sanctions, des punitions, des privations qui allaient mener à l'adhésion à
quelque chose. Peut-être croit-il qu'en nous privant de règlements,
d'études d'impact, de réponses, de plan d'action, on va finir par adhérer à sa méthode pour sortir les gens de l'aide sociale et les amener vers d'autres voies. Or, il serait intéressant que
des chercheurs assistent à ce qui se produit
ici. Ils pourraient conclure, comme nous le pensons, que ne marche pas, que
ça ne marche pas, les sanctions, les punitions, les privations. Ce n'est pas
ça, M. le ministre, qui nous fera adhérer à votre méthode. Au contraire, il faut, il faut, nous servir ces études
auxquelles vous vous référez. Il faut produire ces règlements si
déterminants dans une loi, le cadre réglementaire, les règlements, les études
d'impact, et tout ça.
Je me
raccroche, M. le Président, évidemment à l'amendement, là, qui est à l'étude, à savoir que le programme
ne soit mis en vigueur qu'après le dépôt du
prochain plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale. Je
m'inscris là-dedans comme mes collègues parce qu'en effet, comme plusieurs le croient,
l'application du projet de loi du ministre appauvrirait encore davantage des gens qui ont toutes les difficultés du
monde à joindre les deux bouts. J'ai ici un texte signé par des gens dont
certains sont de mon comté. J'avais souligné leurs noms tout à l'heure pour les
saluer en même temps : Anne
Rousseau, du Regroupement des assistés sociaux du Bas-Richelieu, et Dominique
Gosselin, d'Action-Logement Pierre-De
Saurel. Ils écrivent : «Le ministre ose [...] affirmer que son projet de
loi n'appauvrira pas les plus pauvres, puisque les personnes qui participeront aux mesures obligatoires d'employabilité
recevront des montants supplémentaires. Or, il [faut] mentionner que les
personnes qui ne participeront pas à ces mesures verront leur maigre chèque
[...] amputé d'un montant pouvant s'élever
jusqu'à 224 $. Pour plusieurs raisons, bon nombre d'individus ne seront
pas disposés à participer de façon
continue aux mesures obligatoires, et seront placés en position d'échec.
Pensons, par exemple, aux personnes
aux prises avec des troubles de santé mentale non diagnostiqués...» Alors, ils
ne sont pas nécessairement jugés inaptes
au travail parce qu'on n'a pas diagnostiqué ces problèmes dont ils peuvent
souffrir. «[Pensons aux personnes aux prises
avec] des difficultés liées [avec] la toxicomanie ou en situation de ruptures
de toutes [autres] sortes. Couper les prestations
de ces personnes-là, c'est en quelque sorte les jeter à la rue.» Puis ça, on
l'a lu bien des fois, on l'a entendu bien des fois et nous l'avons
rappelé au ministre bien des fois.
«Qui peut, en 2016, combler ses besoins de base
avec 399 $ par mois?», parce que c'est ultimement ce qui pourrait arriver aux gens victimes des sanctions
du ministre, dont il croit, lui, que ça va les mener à adhérer au
programme Objectif emploi.
Je poursuis,
là, un extrait du texte des gens dont j'ai cité quelques noms tantôt :
«Nous sommes bien d'accord sur le
fait de bonifier les prestations et l'accompagnement pour les personnes qui
participent à des mesures d'employabilité.» Ça aussi, nous l'avons dit ici. Nous ne cessons de répéter que tout
n'est pas mauvais, de ce projet de loi. «Par contre, nous sommes
totalement opposés à la démarche punitive [...] dans le programme Objectif
emploi. Le montant de base déjà insuffisant ne doit être amputé d'aucune façon.
Historiquement, ce type de mesures a démontré son inefficacité et ses nombreux
effets pervers.»
Alors là, le
ministre pourrait dire tout de suite : Je vous produis toutes les études
que j'ai sur la question. Bien non! À un moment donné, là, il nous dit
que, peut-être, il produira des études d'impact, il profitera de l'étude d'un
article subséquent pour ce faire.
«...ce projet de loi — je
poursuis le texte — vise
à faire des économies sur le dos des [...] pauvres.» Et là j'ai donc le goût de
ressortir la si belle citation : «Il faut s'attaquer — c'est
ça? — à
la pauvreté plutôt que s'attaquer aux pauvres.»
Alors, je ne l'avais pas cité tout à fait correctement, M. le Président. Je
vais le faire, là, au texte, là. C'est encore plus beau au texte parce
que ça a l'air d'un slogan, là, qui suscite l'adhésion d'une société au complet
dans la lutte à la pauvreté. Moi, j'y adhère.
Le texte
précis, c'est, dans le livre Un revenu garanti pour tous, signé par le
ministre : «Faire la guerre à la pauvreté...»
M. Blais : M. le Président...
Le Président (M. Hardy) : Oui.
M. le député de Richelieu...
M. Blais : ...est-ce que je
peux demander le dépôt du document?
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Hardy) :
Est-ce que vous voulez déposer le document?
M. Rochon : Non, je... oui?
M. Turcotte : M.
le Président, il y a des notes personnelles à l'intérieur, dont, M. le
Président, des notes personnelles écrites de la main du ministre, qui m'a
dédicacé son livre : «Dans l'espoir d'une lecture attentive et éclairante, François Blais». Donc, j'en fais une bonne
lecture éclairante, M. le Président. Donc, comme il y a des notes
manuscrites, je ne peux déposer le document.
Le Président (M. Hardy) : Bon,
c'est parfait. Ça fait qu'on continue, M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui, oui, oui. Et
je suis sûr que mon collègue de Saint-Jean voyait comme une sanction le dépôt
du livre.
«Dans
l'espoir d'une lecture attentive et — comment? — éclairante.» Ça, c'est intéressant, comme
dédicace parce que ce que le ministre
a souhaité se produit, s'est produit. Il incarne, mon collègue de Saint-Jean,
quelqu'un d'attentif et d'éclairé à l'égard du sort des Québécois et des
Québécoises qui ont été moins chanceuses et chanceux dans leur vie.
Alors, M. le Président, nous continuerons — je
sens que mon temps s'écoule de même que celui de la commission — à
mener cette guerre à la pauvreté et dirons non à cette guerre aux pauvres.
Le Président (M. Hardy) :
Merci, M. le député de Richelieu.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 22 h 29)