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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, May 18, 2016 - Vol. 44 N° 89

Clause-by-clause consideration of Bill 70, An Act to allow a better match between training and jobs and to facilitate labour market entry


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Document déposé

Intervenants

M. Claude Cousineau, président

M. Robert Poëti, vice-président

M. François Blais 

Mme Françoise David

M. Dave Turcotte

M. Harold LeBel 

M. Sébastien Schneeberger

M. Guy Hardy 

Mme Monique Sauvé

Mme Caroline Simard 

M. Saul Polo 

M. Mathieu Lemay 

M. Yves St-Denis 

Journal des débats

(Onze heures huit minutes)

Le Président (M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour à tous et à toutes. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Turcotte (Saint-Jean) remplace M. Leclair (Beauharnois); M. Lebel (Rimouski) remplace M. Therrien (Sanguinet); et M. Lemay (Masson) remplace M. Lamontagne (Johnson).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la secrétaire. Alors, lors de notre dernière séance, nous avions entrepris l'étude d'un sous-amendement du député de Saint-Jean à l'amendement de la députée de Gouin à l'article 380... excusez-moi, 83.1 proposé à l'article 28.

Donc, nous en sommes à la poursuite de nos interventions, mais je vous donne avant le temps restant. Donc, pour M. le député de Saint-Jean, il vous reste une magnifique 1 min 35 s; Mme la députée de Gouin, vous savez, votre temps est écoulé pour le sous-amendement.

Mme David (Gouin) : Bien oui, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Bien oui. Voilà. Et puis, pour M. le député de Rimouski, qui remplace M. le député de Richelieu, alors il vous reste 12 minutes sur le temps, quoique...

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Vous avez un beau 20 minutes, monsieur.

Une voix : Ah, non!

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Cousineau) : Pas de problème, pas de problème.

Des voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! À qui la parole? Oui, votre minute...

• (11 h 10) •

M. Turcotte : Je vais faire une déclaration de député sur le sujet, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Ah! c'est une minute, la déclaration de député. Donc, il y a 35 secondes qui...

M. Turcotte : Bien là, prenez-moi pas tout mon 30 secondes, là, de plus, là, M. le Président.

Donc, juste pour qu'on se remette un peu, là, dans le bain... Au fond, mon sous-amendement vise à ajouter «d'une personne...» Parce que l'amendement de notre collègue la députée de Gouin est très bon. C'est suite à notre débat sur le fait que, pour un couple à l'aide sociale, 965 $, s'il y a une sanction pour un des deux membres du couple, ça ferait en sorte que le revenu du couple, donc de la famille, serait amputé de la sanction. Donc, inévitablement, il y aurait une conséquence pour l'autre membre du couple qui, lui, participe peut-être au programme ou peut-être ne participe pas parce qu'il n'a pas à participer au programme parce qu'il est peut-être déjà prestataire actuellement de l'aide sociale.

Donc, pour éviter qu'un individu, donc une personne d'un couple soit pénalisée par une sanction due à l'autre membre du couple, la députée de Gouin dépose un amendement qui règle cette question-là. Nous, on ajoute «d'une personne...» parce qu'on considère que, de toute façon, obligation ou non, on ne devrait pas toucher à la prestation de base d'aide sociale, qui est de 623 $ pour une personne, et on considère... Puis j'ai fait la nomenclature, là, de témoignages, là, des gens, là, de la Mauricie et du Centre-du-Québec et d'ailleurs aussi, je considère qu'à 623 $ par mois c'est déjà difficile de se trouver un logement, de pouvoir s'habiller, se vêtir, se nourrir décemment, etc., donc on ne devrait pas toucher au 623 $ par mois qui est la prestation de base.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Vous êtes en plein dans le temps. M. le ministre, voulez-vous réagir? Ça va? Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le sous-amendement? M. le député de Rimouski, vous avez 20 minutes.

M. LeBel : O.K. Oui, effectivement, l'amendement qui est amené par la députée de Gouin, je pense qu'il va sous le sens, là, de dire qu'il ne faut pas diminuer le revenu d'une famille, puis le sous-amendement amène «d'une personne...» — ce qui est correct aussi — sous le niveau de la prestation de base reconnue à l'article 56. Je pense, ça va dans le sens surtout de la loi qu'on... comme j'ai déjà expliqué, avait fait l'unanimité, là, le consensus à l'Assemblée nationale, la loi qui vise à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Moi, bien, je vais en profiter, parce que moi, je trouve que le projet de loi qu'on travaille actuellement, à mon avis, il ne va pas dans le sens du grand consensus qu'on avait développé autour de la loi pour lutter contre la pauvreté. Ce consensus, c'était qu'on devait lutter contre les causes, quand même, de la pauvreté. On devait travailler sur ces causes-là. On devait essayer d'enlever la pauvreté, de faire en sorte qu'il y a moins de gens qui tombent dans la trappe de la pauvreté. Puis on luttait contre la pauvreté, on ne luttait pas contre les pauvres, on s'attaquait à la pauvreté. C'était ça qui était le sens de la loi qui, je répète, avait fait consensus avec tous les partis qui étaient à l'Assemblée nationale à cette époque-là.

Puis, depuis, la loi, même si ce n'était pas parfait... Parce que moi, je pense qu'il y a bien des éléments de la loi, je trouve que le gouvernement n'a pas respectés, là. Il y avait des clauses d'impact pour certains projets de loi que je serais curieux de voir si la clause d'impact avait été... ou on avait pris en compte la clause d'impact sur la pauvreté dans beaucoup d'actions que le gouvernement a faites dans tout le climat d'austérité, dans les coupures qu'on a eues depuis un an. Je pense, ça a eu des impacts sur la pauvreté, puis je suis certain que, s'il y avait eu vraiment une analyse à partir de la lunette de la loi pour lutter contre la pauvreté, on aurait pu voir que ces lois ou ces interventions du gouvernement n'allaient pas dans le sens de l'objectif de lutter contre la pauvreté.

Et ce qu'on voit maintenant, avec ce projet de loi qui nous est déposé, c'est que ça vient briser ce contrat social qu'on avait entre les groupes puis le gouvernement, où on voulait lutter contre la pauvreté. Puis la grande mobilisation qui avait été mise en place dans tous les comtés du Québec, on le voit... puis les députés, on le voit, dans nos bureaux de comté : le milieu de la santé, les groupes communautaires, autour de tables de concertation souvent qui avaient été comme encouragées par les CRE, les grandes tables de concertation, les gens se sont réunis pour se poser la question : Qu'est-ce qu'on fait, dans notre communauté, pour lutter contre la pauvreté? Il y a eu plein d'initiatives, plein de mobilisation partout. C'était positif, c'était une mobilisation pour travailler sur le transport en commun, sur le logement, sur les soupes populaires, l'alimentation. Plein d'initiatives du genre qui ont été faites partout, une grande mobilisation depuis plusieurs années, des fondations, comme la Fondation Chagnon aussi qui s'en est mêlée, qui est venue... ils participaient. Une grande mobilisation positive pour lutter contre la pauvreté.

Puis on essayait de sortir aussi du piège du préjugé, de dire : Si toi, tu vis dans la pauvreté, c'est parce que c'est ton problème. Il y a eu quelque chose que tu n'as pas fait comme il faut, là. Soit tu as lâché l'école trop de bonne heure, tu n'étais pas assez vaillant, tu t'es isolé... l'alcool, la dope, n'importe quoi, mais c'était... on a essayé de se sortir des préjugés puis de l'accusation, toujours, de la personne, qui devait se sentir coupable un peu d'être à l'aide sociale. Et ça, c'était souvent porté par... Quand je parle de préjugés, c'est facile à dire, là. Quand j'entends, de temps en temps, du gouvernement, de dire : Bien là, la personne, on va l'aider à se prendre en main, là, il faut qu'elle se prenne en main, il faut sortir de la pauvreté, il faut qu'elle se prenne en main, il faut que la personne travaille, apprenne à se lever le matin ou... comme si ces personnes-là ne le faisaient pas ou ils étaient paresseux par définition parce qu'ils étaient tombés dans la trappe de la pauvreté. Ça fait que, depuis quelques années, on travaille à se sortir des préjugés.

D'ailleurs, là, je l'ai oublié, là, mais, lundi, j'étais à Rimouski puis on m'a déposé un guide... un groupe de citoyens de la région, soutenus par les alliances, là, de comités contre la pauvreté, ont bâti un guide depuis trois ans, une pièce de théâtre qui circule partout dans la région, et un guide pour essayer de lutter contre différents préjugés qu'on peut avoir par rapport aux gens qui vivent de la pauvreté. Je voulais vous l'amener, vous le déposer, M. le ministre, ça sera pour les prochains jours. Mais c'est intéressant de voir cette action-là, que je dis encore positive. On dit : Comment on peut, comme communauté, mieux intervenir? Puis il y a des actions, là. Quand je parlais de transport en commun, là, si on aide un peu... puis on permet, par différentes mesures, que des gens moins en moyens puissent avoir accès au transport en commun pour se chercher un emploi, pour aller s'alimenter ou les comptoirs alimentaires... tu sais, Moisson, chez nous, c'est hyper important, bien, comment on peut les soutenir. Toute cette mobilisation, c'était positif.

Là, on arrive dans un projet de loi qui met un peu ça de côté, puis il dit : Bien là, on va travailler sur la personne qui doit s'en sortir. Et là on le rend plein d'obligations où on pousse l'individu à répondre à ces obligations-là. On le rend un peu comme responsable, là, de ce qu'il vit puis on dit : Si tu marches dans le cadre qu'on te donne, bien, on va te prendre, toi, puis ça... On ne parle pas de la communauté autour, là, mais on parle de toi, on va te soutenir, mais il faut absolument que tu participes parce que sinon... laisser entrevoir qu'il pourrait comme ne pas participer ou qu'il pourrait... Puis il y a des mots des fois, comme le ministre disait... je ne me souviens plus c'était quel dossier, mais il disait : À la CLE, on a fait des ouvertures pour des informations, mais il y en a un sur 10 ou un qui venait se présenter pour venir chercher de l'information, comme si, par définition, ça voulait dire qu'on ne peut pas les laisser tout seuls vouloir s'impliquer ou s'investir, il faut aller les chercher puis il faut les obliger, sinon ils ne viennent pas nous voir.

• (11 h 20) •

D'un autre côté, les groupes communautaires en arrachent, n'ont pas de soutien, ils ne sont pas capables de soutenir leurs activités. On remet en question les fonds comme le Fonds québécois d'initiatives sociales. Tout ce qui pourrait comme mobiliser du monde, on met ça de côté, mais on dit : Là, vous allez embarquer dans la machine bureaucratique, puis vous allez avoir des obligations à livrer, puis... Puis les obligations, des fois, moi... je ne sais pas, le ministre a donné des ouvertures, là, mais toute l'idée du déplacement, d'obliger les gens à se déplacer, là, plusieurs kilomètres pour aller chercher un emploi, ou embarquer dans le programme ou dans le stage qui est proposé, ou... Dans des régions comme la mienne, là, c'est... quand on dit : Se déplacer, là, c'est partir d'un village puis aller dans la ville ou aller à Rimouski, à Matane, à Rivière-du-Loup, ou partir à Lévis, ou Québec, ou je ne sais pas trop, mais c'est déraciner du monde, des fois, des familles. Tu sais, ce n'est pas magique comme entre quartiers de Montréal, là, il y a une situation qui est différente. Mais c'est un genre de projet de loi encore, comme bien d'autres projets de loi, qui est fait mur à mur, où on intervient directement avec les mêmes obligations pour chacun, pour tout le monde, qu'ils viennent de la ville ou de régions.

Puis, en bout de ligne, c'est ça que l'amendement amène, c'est-à-dire que ces personnes-là, tout ça pour 623 $ pour une personne seule, 965 $ pour une famille. Un couple, il faut voir ce que ça donne, là. Tu sais, on a de la misère à arriver. Quand tu as payé un logement avec tout ça, comment tu veux... Tu sais, je pense qu'avant de commencer à parler de tout ça il faut essayer de conceptualiser ou de réfléchir c'est quoi, le revenu minimum qui est décent pour vivre, pour avoir accès à certains services puis accès juste à de la bouffe. Je pense qu'il y a des discussions à avoir là-dessus, mais là on ne parle pas de ça, on dit : On va s'attaquer aux personnes puis on va dire : Vous êtes obligés ou pas d'embarquer dans le programme ou pas.

Moi, depuis le début, je me dis : On est à l'envers dans l'étude de ce projet de loi là. On a un projet de loi de lutter contre la pauvreté qui est là depuis 12 ans, je pense, on est rendus à la 12e année. On devait, après 10 ans, se rasseoir puis l'étudier, on ne l'a pas fait. Il me semble qu'on aurait pu, comme parlementaires, faire un bon bilan de cette loi-là puis de voir jusqu'où ça nous a amenés. C'est quoi, les côtés positifs? Puis il y a plein de comités, là, qui ont déposé certains rapports puis ça aurait été intéressant de voir. Entre autres, il y en a un, moi, un comité qu'une de ses propositions que je trouvais intéressantes, c'est qu'il disait : Si la loi sur la pauvreté a réussi... on a eu des gains pour lutter contre la pauvreté, c'est qu'on l'a vraiment décentralisée puis on l'a démocratisée, tu sais, on a donné des moyens à des groupes partout dans les régions puis on a collé les interventions aux réalités des régions. C'est un constat que, je pense, un des comités, là, qui conseille le ministre, qu'il avait émis, que c'était un bon constat, mais on n'a jamais eu l'occasion d'en discuter concrètement, du bilan de la loi sur la pauvreté. Puis, dans la loi sur la pauvreté, on se donnait des cibles sur 10 ans. Des cibles, bien là, il faudrait s'en donner d'autres. Ça n'aurait été pas mauvais non plus de s'asseoir puis de dire : Tiens, c'est quoi, nos prochaines cibles? On ne l'a pas fait. On a embarqué aussi dans un nouveau plan d'action pour lutter contre la pauvreté, mais c'est fait sans véritable débat.

Et là, malgré ce qu'on n'a pas fait vraiment, c'est qu'on ne s'est pas donné vraiment une vision globale de ce que ça pourrait être, lutter contre la pauvreté, puis à partir d'expériences qu'on a faites, puis faire un bilan, puis se donner des nouvelles cibles, malgré qu'on n'a pas fait ça, on a tassé ça de côté puis on embarque dans un projet de loi qui vient changer les règles au niveau du Programme d'aide sociale, qui vient changer les règles au niveau de la solidarité sociale. Il me semble qu'avant de toucher à ça on aurait pu se donner une vision. Mais là on a décidé de ne pas faire ce travail-là, ce qui fait qu'aujourd'hui, bien, il faut agir à la pièce puis on découvre, dans le projet de loi, différents articles, puis il faut essayer d'améliorer.

Puis il me semble que le ministre devrait en convenir, que l'amendement de la collègue de Gouin, sous-amendé par mon collègue ici, vient au moins donner une règle de base, là, de respect des gens qui vivent la pauvreté, c'est-à-dire que, pour nous autres, il ne faut pas que ça vienne diminuer le revenu de ces personnes-là sous le niveau de la prestation de base; au moins, qu'il y ait un minimum qui est reconnu actuellement. Si on n'est pas capables de reconnaître ça, bien, là, vraiment, on n'est pas dans le sens de tout ce qu'on a pu faire comme avancées pour lutter contre la pauvreté depuis 10 ans. Il me semble qu'on est partis du reculons. Il me semble que ça va de soi que l'amendement de la collègue, sous-amendé par mon collègue, vient au moins répondre à certains enjeux ou certaines craintes que les gens ont un peu partout, que les gens nous ont posés puis qu'ils ont envoyés dans les mémoires.

Ça fait que je ne sais pas comment le ministre voit ça. Je ne vois pas le problème d'intégrer cet amendement sous-amendé, là, qui nous permet au moins de reconnaître qu'il y a un revenu, là, qu'on ne peut pas... on ne peut pas aller plus bas que ce revenu-là, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre, voulez-vous réagir?

M. Blais : Je regrette qu'on ne se soit pas vus à Rimouski, j'étais là lundi. Donc, c'est assez intéressant parce que, bon... souligner tout d'abord...

M. LeBel : Les Halles.

M. Blais : ...un petit café que vous connaissez bien...

M. LeBel : Le Café des Halles.

M. Blais : ...je pense, qui est bien charmant, le Café des Halles, avec des propriétaires qui sont, hein, tout à fait méritoires parce que, depuis plus de 20 ans, ils embauchent des personnes, là, dans leur cuisine, qui sont différentes, qui ont des handicaps. Ils bénéficient aussi d'un contrat d'insertion au travail — tout à fait normal — pour financer une partie de la rémunération. C'est quand même des personnes qui sont un peu moins rapides que d'autres, hein? Il faut que les collègues employés tolèrent aussi la situation, hein? Un petit peu moins rapides pour laver la vaisselle peut-être que son voisin, mais, bien, ces gens-là, ils sont, hein, dans la dignité du travail. Puis, ensuite, on est là pour les aider, hein? On est allés faire un tour aussi au centre local d'emploi, on a parlé notamment avec les agents... les agentes, parce que c'étaient pas mal des agentes qui étaient là sur Objectif emploi, sur la façon dont ils voyaient les choses.

Je pense que ce qu'ils appréciaient bien dans le programme. D'abord, ça s'adresse à des nombres restreints de personnes. Hein, il faut toujours rappeler que c'est des premiers demandeurs. Au centre local d'emploi de Rimouski, c'est à peu près 80 par année, qui sont des personnes qui seraient à l'intérieur de ce programme-là. Le centre local d'emploi de Rimouski, c'est un assez gros centre local d'emploi, c'est normal, ils sont tout à fait capables de gérer ça. D'autant plus que ce qu'ils me disaient, c'est qu'ils ont déjà un bon taux de participation. Ils sont contents de la participation des jeunes, au centre local d'emploi, dans les activités, dans la réinsertion. Ils voyaient bien que ça permettait de les mobiliser un petit peu plus parce que là on a des montants supplémentaires qui sont intéressants, notamment pour qu'ils puissent poursuivre leurs études.

Elles ont, puis je vais vous dire franchement, elles ont un mauvais souvenir de la période du programme du Parti québécois à la fin des années 90 parce que là c'étaient des pénalités qui s'adressaient à toutes les personnes aptes. C'est des centaines de milliers de personnes au Québec, et là ça pouvait devenir compliqué à gérer. Donc, là ils voyaient bien, je pense, que, hein, une gestion, là, d'un programme avec des petits nombres de personnes dont ils savent qu'il y a des chances de retourner sur le marché du travail, compte tenu quand même que le marché du travail peut être intéressant, là, dans votre coin de pays... Je le dis, je le répète, là, je pense que c'est nécessaire : Le projet de loi va favoriser la sortie de l'aide sociale. Ce que l'on veut, hein... Puis je ne pense pas que le collègue veut que les gens restent à l'aide sociale, veut absolument les empêcher de sortir de l'aide sociale, je ne pense pas que c'est ça qu'il souhaite. Il veut qu'ils sortent dans les meilleures conditions possibles. Ça, on s'entend là-dessus.

Donc, cette pratique-là d'avoir des éléments de réciprocité, ça existe aujourd'hui, partout dans le monde, partout au Canada. Est-ce que c'est toujours bien fait? Est-ce que c'est de la bonne façon? Hein, ça, c'est une autre question. Mais, même dans les pays sociaux-démocrates, on en a parlé hier, c'est une pratique courante d'avoir des éléments de réciprocité, donc des possibilités... Il faut bien insister, c'est des possibilités, là, de réduction pour une période de temps. Mais je vous rappelle que le programme que l'on a ici, c'est un programme qui fait en sorte que, dès qu'une personne, bon, a eu un manquement ou deux manquements, a une diminution, il est possible, ensuite, de se rattraper, de revenir à l'intérieur de sa démarche sur laquelle on s'est entendus, et elle retrouve tous ses droits.

Je vous rappelle que la formule, là, qui avait été mise en place par le Parti québécois, la personne ne retrouvait pas ses droits. Une fois que c'était perdu, c'était perdu pour une période de temps qui pouvait aller jusqu'à un an. Donc, on est vraiment dans la recherche de la lutte contre la pauvreté, de la sortie de l'aide sociale. On ne s'entend peut-être pas sur les moyens, mais je peux vous dire que les moyens dont on dispose, c'est des moyens qui sont réputés comme ayant un effet, disons, positif parce qu'on a bien sélectionné les personnes. Encore une fois, les personnes qui sont aptes à apporter une contribution, on leur fournit des ressources, on leur fournit un parcours aussi, là, pour qu'elles puissent s'en sortir. Donc, on est très, très loin, là, du modèle, là, qui avait été mis en place, par le Parti québécois, à la fin des années 90.

• (11 h 30) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Vous savez, je sais qu'en politique ça ne se fait pas bien, bien, paraîtrait-il, mais il faut toujours défendre bec et ongles ce qu'on a fait depuis... Moi, je ne suis pas gêné de dire qu'il y a peut-être des choses qui ont été faites, dans les anciens gouvernements du Parti québécois, qui auraient pu être faites autrement. Je ne suis pas gêné de dire ça, puis c'est la façon que moi, je fais de la politique. Ça fait que : Est-ce qu'il y a des choses qui auraient pu être faites autrement? Je vous le laisse, peut-être, mais...

Mais, ceci étant dit, maintenant, on est en train d'étudier un projet de loi qui va avoir des impacts, là, puis... Ça fait qu'on peut bien se dire : Bon, vous autres, vous avez fait ci, vous avez fait ça... Moi, je vois les impacts comme député, parce que j'ai des gens qui viennent me voir. Puis, lundi, c'est vrai, vous étiez à Rimouski, je l'ai su par la bande, on aurait pu se croiser, j'étais à l'autre bout de la rue. Mais, si vous étiez resté un peu plus longtemps — je pense que vous êtes parti pour Rivière-du-Loup en après-midi, là — je vous aurais fait rencontrer le groupe qui lutte contre les préjugés. Dans un petit café, sur Saint-Germain... sur la Cathédrale, à Rimouski, on s'est réunis, puis ils nous ont... Eux autres, depuis deux ans, ils font une pièce de théâtre pour lutter contre la pauvreté. Et, dans les acteurs, là, il y a des gens qui vivent la pauvreté, il y a des intervenants, il y a toute sorte de monde. Puis là il y a les gens de Cogeco qui sont mêlés à ça pour produire un genre de vidéo avec un... C'est une belle démarche, là, collective, et, comme vous étiez là, c'est dommage, vous auriez pu rencontrer ces gens-là puis ils auraient pu vous témoigner de leur démarche.

Parce que c'est un peu ça, quand vous dites... vous dites un peu : J'espère, ou je n'en doute pas, que le député de Rimouski ne veut pas que les gens restent à l'aide sociale. Bien, ça ne se pose comme pas, la question, là. Je ne veux pas que les gens restent à l'aide sociale, puis je pense qu'il n'y a personne qui veut rester à l'aide sociale. Mais poser la question, c'est comme laisser entrevoir qu'il y a des gens qui voudraient peut-être rester à l'aide sociale. Puis, quand on part de là... c'est cette prémisse-là, moi, qui me fatigue un peu. C'est de dire : Peut-être qu'il y a des gens qui veulent rester là-dessus, là, puis là on va aller les sortir de ça, là, un peu de force, là, en leur disant : Bien, si tu ne participes pas, bien, tu vas avoir des problèmes. Parce que, si tu ne participes pas, on va peut-être te couper puis tu vas être en bas de ce que tu reçois déjà. Ça fait que, si tu veux en avoir un peu plus, participe, sinon, tu es dans le trouble.

Mais être dans le trouble... ils sont déjà dans le trouble : bien, les repousser dans le trouble encore sur cette base-là que peut-être qu'ils ne veulent pas s'en sortir, moi, c'est ça qui me... j'ai l'impression qu'il y avait comme un contrat social, depuis la loi pour lutter contre la pauvreté, où on travaillait sur les causes, on ne travaillait pas sur accuser des individus, tu sais. Puis, tu sais, là, il y avait une série d'articles, là, en Gaspésie, là : Des compressions lourdes de conséquences dans l'Est.L'austérité et l'éloignement, un cercle vicieux pour les femmes de la Gaspésie. Dans ces régions-là, quand tu vas voir un jeune, là, qui...

Le CLE, là, c'est des gens qui travaillent fort, en passant. Le CLE de Rimouski, c'est des gens qui accueillent le monde, puis qui travaillent très fort, puis qui étaient aussi, il n'y a pas longtemps, deux, trois ans, étaient comme partie prenante dans la mobilisation communautaire. Quand il y avait des rencontres de concertation pour savoir comment on peut faire pour soutenir un projet ou mieux intervenir auprès de la clientèle, ils participaient aux rencontres, avec les groupes communautaires, avec les autres... Et on sait ce que c'est, dans ces communautés-là, là, on est tous des chums, là, on essayait de voir comment on pouvait faire pour mieux aider le monde.

À un moment donné, l'année passée, j'étais un peu surpris, j'ai dit : Ils sont où, les gens du CLE? Bien là, ils avaient eu la directive du Conseil du trésor qu'ils ne pouvaient plus sortir de leurs bureaux, ça fait qu'ils ne pouvaient plus participer aux activités. J'ai dit : Bon, ça commence bien, tu sais. Mais c'est ça qui est comme un peu brisé, ce genre de solidarité ou de mobilisation de la collectivité pour lutter contre la pauvreté, travailler sur les causes.

Puis on oublie souvent l'histoire de l'exclusion sociale, mais ça aussi, c'est un élément important, là. Quand tu vis la pauvreté, tu t'exclus, puis, quand tu vis des problèmes de santé puis des problèmes de... c'est un cercle vicieux qui... Puis, quand tu es en région, quand tu es dans un village... Moi, à Rimouski, les gens du Halles, c'est vrai qu'ils travaillent très bien, là, puis... C'est une ville assez importante puis là les gens... Mais, quand tu es dans les villages, je ne sais pas, moi, quand tu es à Trinité-des-Monts ou à Saint-Marcellin, tu es assez éloigné, là, puis là il y a eu les coupures dans la forêt, il y a les coupures en agriculture, il y a des difficultés, il a des gens qui allaient chercher des petits revenus autour de ça, ils n'ont plus ces revenus-là, ils font face à l'aide sociale... Des villages qui sont en difficulté, un peu dévitalisés, là, il faut que tu embarques dans un programme comme ça, là, qui dit : Bien là, si tu restes dans ton village, tu ne peux pas avoir accès. Nous autres, on va te sortir de là, on va t'emmener ailleurs, on va t'emmener en ville ou ailleurs. Tu sais, sur papier, c'est beau, là, tu dis : Regarde, on va l'aider, on va l'encadrer parce que là il ne veut pas vraiment s'en sortir, puis nous autres, on va l'aider à s'en sortir.

Quand tu vis dans ce village-là puis qu'à chaque année tu as travaillé à l'érablière, tu as réussi à te sortir un salaire qui avait de l'allure pour continuer à bien vivre dans ta communauté, mais là toutes les coupures qu'il y a eu dans ces milieux-là, les difficultés... puis la forêt privée, chez nous, c'est un problème majeur... mais là tu te retrouves avec plus rien... Et tout ça, ce qui est proposé là, bien, la personne, dans sa famille, tu sais, là, elle se sent... c'est comme si tout est focussé sur la personne, dire : Tu sors de là, tu viens embarquer dans les programmes, sinon on va te couper en bas de... Tu es déjà dans le trouble, on va te mettre encore plus dans le trouble, tu vas avoir moins d'argent au bout du mois. Moi, je suis un peu désolé, là, de travailler là-dedans. Je vous le répète : J'aurais aimé mieux qu'on travaille sur la vision qu'on a du Québec sans pauvreté.

Je rencontrais Mgr Grondin, là, l'archevêché chez nous, puis c'était un peu ça, il avait encore l'épinglette du groupe qui avait proposé la loi sur la pauvreté, puis c'était une bonne discussion, on avait une discussion plus large. Puis j'aurais aimé ça, parce que je sais que le ministre, on aurait eu une bonne discussion avec lui aussi, puis il pourrait s'ouvrir plus puis donner un peu plus sur la vision plus large qu'il voit d'un Québec sans pauvreté. Puis là on est en train... dans la tuyauterie... puis on frôle souvent les préjugés quand on part, en se disant que peut-être qu'il y a des gens qui veulent rester sur l'aide sociale. Ça fait que j'aurais aimé mieux qu'on ait un grand débat, mais je pense qu'on ne l'aura pas. Merci.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être une précision qui est importante, là, je pense que, jusqu'ici, il me semble qu'on a eu des discussions... On a été prudents, là. Je n'ai pas entendu beaucoup de personnes ici, hein, qui ont énoncé des préjugés... que des gens ne veulent pas s'en sortir ou que des gens ne savent pas comment s'en sortir, hein? Parce que c'est souvent ça aussi, les gens ne savent pas comment procéder, quelles sont les possibilités, parce qu'ils ont vécu des échecs. Quelle que soit leur situation, disons, de départ, hein, ils ont besoin d'être appuyés dans leurs démarches, encadrés, en même temps en leur rappelant que tous les efforts que l'on fait pour eux, en contrepartie — oui, en contrepartie — on a le droit d'avoir des attentes. C'est vraiment ça, les prémisses, je ne pense pas que ça parle... ou ça nourrit quelques préjugés que ce soit.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui veulent intervenir sur le sous-amendement déposé par le député de Saint-Jean? Sinon, je vais mettre au vote...

M. Turcotte : M. le Président?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : J'aimerais qu'on procède au vote par appel nominal.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, vote par appel nominal. Mme la secrétaire, sur le sous-amendement de M. le député de Saint-Jean, qui propose d'ajouter, après le mot «revenu», les mots «d'une personne...»

M. Turcotte : «...ou».

Le Président (M. Cousineau) : «...ou». Allez-y.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

La Secrétaire : M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Poëti : Contre.

La Secrétaire : M. Cousineau (Bertrand)?

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Alors donc, le sous-amendement est rejeté. Nous revenons à l'amendement de Mme la députée de Gouin. Le temps restant pour l'amendement, je vous donne...

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Oui. Pour M. le député de Saint-Jean, il vous reste 1 min 30 s; M. le député de Drummond—Bois-Francs, vous avez 10 min 5 s; Mme la députée de Gouin, c'est terminé pour vous; et puis, évidemment, il y a 20 minutes pour le député de Rimouski.

Alors, à qui la parole? Oui. M. le député de Saint-Jean.

• (11 h 40) •

M. Turcotte : Bien, je vous remercie, M. le Président. Je veux juste en profiter pour reprendre un peu les derniers propos du ministre lorsque, bon, il fait référence à la contrepartie. On a déposé... J'ai déposé un amendement qui aurait pu justement montrer la volonté du ministre d'aller dans ce sens-là : de faire en sorte que le ministre et le gouvernement prennent l'obligation d'offrir les services à la population.

Quand on voit, là, dans les reportages de Radio-Canada, actuellement, là : Lorsqu'un organisme d'aide est au bord du précipice, un organisme qui aide des gens, là, qui ont des dépendances, des troubles de santé mentale, qui sont sur le bord d'être obligés de fermer leurs portes parce qu'ils n'ont plus les ressources financières pour respecter leur mission... Mais ça, c'est des gens, là, qui reçoivent de l'aide. Dans la case, là, habiletés sociales du programme, là, que le ministre nous a déposé, Développement des habiletés sociales, c'est un peu de ça qu'on parle.

Donc, moi, j'entends le ministre qui nous dit : Oui, pour les nouveaux demandeurs, ils vont être obligés d'embarquer dans le programme. Mais, quand c'est le gouvernement qui doit offrir des services, de l'accompagnement personnalisé, là, pour les gens, là il n'y en a pas, d'obligation de les offrir, les services, et c'est à géométrie variable. Donc, la contrepartie, moi, je crois que, si le ministre veut qu'on le croie, je crois qu'il aurait dû accepter notre amendement. Ou il est encore temps pour lui de déposer un amendement qui dit que le gouvernement prend l'engagement et l'obligation d'offrir les services à la population.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement de madame... Oui. Monsieur... Excusez-moi. M. le ministre.

M. Blais : Juste pour un élément, là, parce que le collègue m'interpelle, là. Donc, j'étais en désaccord avec son amendement, disons, pas sur le fond, mais sur la forme, parce que la proposition était redondante. La formulation que nous utilisons très clairement crée des engagements au gouvernement. Ça a été encore réaffirmé hier. C'est pour ça qu'on ne jugeait pas à propos de la changer inutilement.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Rimouski, vous avez 20 minutes.

M. LeBel : Oui. Merci, M. le Président. Mon collègue a parlé des organismes en Gaspésie, et le ministre parlait de sa visite à Rimouski lundi, ça fait que j'ai juste le goût de lui conter un peu ma journée de lundi. Bon, je parlais que j'ai rencontré Mgr Grondin. On a fait un peu le tour de... on a parlé beaucoup de la pauvreté, de la lutte à la pauvreté. Puis, dans la région, vous savez comment l'archevêché, ils sont souvent impliqués au niveau des comptoirs alimentaires, puis tout ça. On a fait un bon tour d'horizon. Et j'ai rencontré aussi des gens de l'UQAR, les retraités de l'UQAR.

Tu sais, le ministre travaille sur un projet de loi où on vise les personnes, mais il y a quand même un contexte autour, puis le contexte est difficile de ce temps-ci. Quand les retraités de l'UQAR... il y a beaucoup de pauvreté aussi chez les aînés. Toujours, on essaie de travailler pour les soutenir puis pour soutenir les... Tu sais, souvent, on fait ça, soutenir les aînés, là, briser un peu l'isolement, bien, c'est souvent par des actions, des activités. Des activités, tu sais, on parle de villes et villages amis des aînés, il y a plein d'activités comme ça pour permettre aux aînés de sortir de leur isolement, souvent parce qu'ils sont tout seuls, pas beaucoup de revenus.

Bien là, actuellement, avec la fin des CRE, il y avait des ententes, il y avait des enveloppes qui étaient données, dans les régions, pour soutenir des activités avec les tables régionales d'aînés. Bien, ces fonds-là n'existent plus avec la fin des CRE, et les programmes sont tous centralisés à Québec. Ça fait que là on fait des appels d'offres, et les fonctionnaires, à Québec, étudient les projets qui rentrent, sans vraiment savoir où ça s'intègre dans la région et est-ce que ça répond à la région. Bref, beaucoup d'activités qui étaient dirigées auprès des aînés, entre autres certains qui vivent la pauvreté, bien, ces activités-là ne sont plus soutenues. Et ça, ça faisait partie, là, de la vision d'améliorer ou de soutenir notre monde dans nos communautés.

Maintenant, si je parle des aînés, là, ce que les gens me disaient, là, c'est que toutes les décisions sont centralisées sur le bureau de la ministre, et on se demande par quel... si c'est tiré au hasard ou je ne sais pas trop quoi, comment ça fonctionne pour avoir du soutien. La centralisation à outrance, comme disait le ministre des Transports : C'est icitte que ça se passe, c'est à Québec que ça se passe, c'est icitte que ça se passe. Pourtant, quand on prenait des décisions en région, entre autres la... Je parle juste de la table des aînés. Il y avait des initiatives le fun, des initiatives qui permettaient aux aînés de briser l'isolement. Puis ça, quand on parle de ça, c'est la pauvreté.

Après ça, j'ai rencontré des gens de COSMOSS... je ne sais pas si le ministre a déjà entendu... dans le Bas-Saint-Laurent. Il y a les gens de COSMOSS qui interviennent pour les enfants... bien, les 0-30 ans, pour avoir une meilleure qualité de vie, des meilleures attitudes de vie. Et c'est sur la santé, ils travaillent sur plein d'aspects. Bien, eux autres, ce qu'ils me disaient, c'est qu'ils perdent des gens parce qu'avant les CPE avaient un peu de temps pour s'impliquer pour essayer de détecter des enfants de familles qui vivaient la pauvreté. Ils avaient le temps de détecter puis ils avaient le temps d'intégrer des problématiques dans les tables de concertation autour du projet COSMOSS Bas-Saint-Laurent. Bien là, les CPE, vous savez ce qu'ils vivent, bien, ils n'ont plus le temps de faire ça, ils sont débordés pour essayer de trouver des façons de financer leurs centres. Et ils s'étaient donné un genre de groupe régional, que le ministère soutenait, mais que le ministère a décidé d'arrêter de soutenir.

Ça fait qu'il y avait une table régionale qui représentait les CPE, qui pouvait leur permettre de travailler, dans des concertations avec des groupes comme COSMOSS, pour des activités pour aider les jeunes à se sortir de la pauvreté ou détecter les familles qui sont en difficulté. Bien là, les gens de COSMOSS venaient me dire : Bien, on aimerait bien travailler là-dedans, mais les directrices dans les CPE sont débordées, elles ne peuvent plus venir à nos rencontres. On peut comprendre ça. Puis le groupe régional, bien, il n'a plus de financement, ils sont tout seuls. Puis c'est la dernière année, il n'y aura plus un cent, ça fait qu'ils ne pourront plus participer à nos affaires. Ça fait que là on est en train de perdre encore une expertise qui pouvait peut-être permettre à... qui ne pouvait pas peut-être, mais qui permettait de lutter contre la pauvreté puis l'exclusion.

Après ça, je rencontre des gens de la ressource. Ça, c'est un groupe qui intervient auprès des personnes handicapées, Bas-Saint-Laurent—Gaspésie. Bien, eux autres, la même chose, ils viennent demander... Parce que c'est grand, la région, là, Bas-Saint-Laurent—Gaspésie, là. De La Pocatière jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine, là, c'est... Bon, eux autres, ils interviennent auprès des personnes handicapées, ils se financent par des téléthons, par toutes sortes d'activités. Et là ils demandaient un genre d'ajustement de leur financement parce qu'ils n'arrivent plus, il y a beaucoup de demandes des personnes handicapées. Encore là, souvent, les personnes handicapées, on le sait, c'est l'isolement et, si on ne veut pas échapper personne, bien, ce groupe-là, même chose, complètement désorganisé, si... Il y avait des bureaux à Matane, il y avait des bureaux à Rivière-du-Loup, il y avait des bureaux à Gaspé, là ils vont tout fermer ça, ils vont essayer de tout centraliser ça à Rimouski, essayer de sauver des sous, mais, en bout de ligne, là, c'est des personnes qui n'auront pas les services.

Ensuite, je suis allé à l'activité pour lutter contre les préjugés. Ça fait que ça, c'est des exemples, mais il y en a plein, d'exemples comme ça, où on voit que, dans la communauté, ils sont déstabilisés, depuis un an, avec l'abolition de certaines structures de concertation qui permettaient de soutenir des projets. Avec la fin de ces structures-là, bien, les gens sont démobilisés, ils sont inquiets, ils sont à bout de souffle. Les aînés, les groupes de femmes, c'est la même chose. Les centres de la petite enfance, différentes organisations comme ça qui venaient comme lutter contre la pauvreté, qui venaient améliorer notre communauté, rendre une communauté plus consciente de la pauvreté puis des actions qui pouvaient être faites... Là, je pense aussi à d'autres groupes comme Je raccroche, qui luttaient contre le décrochage scolaire, qui, à chaque année, sont toujours en train de recommencer à sauver les meubles.

Moi, quand on ne prend pas le temps de parler de cette situation-là, quand on ne prend pas le temps de regarder ce... pour faire une vraie photographie de ce qui se passe, ce que nos groupes communautaires vivent... Dans le logement, c'est la même affaire : le logement social, là, avec AccèsLogis, c'est la même chose, on est en train d'échapper plein de monde. Il me semble qu'on devrait prendre le temps de regarder ça avant de se dire : Bien là, on va aller voir, là, pour aider la personne qui veut s'en sortir, là, ou qui ne veut pas s'en sortir, mais qu'on va l'aider à s'en sortir, puis... Je trouve, comme je disais tantôt, on y va pointu, sans prendre le temps de regarder le contexte plus large.

Puis on ne peut pas faire comme si ça n'existait pas, s'il n'y avait pas un genre de... On l'a vu, dans les articles, là, en Gaspésie, mais on le voit, tous les députés le savent, là, vous autres comme nous autres, là, dans nos bureaux de comté, on reçoit plein de monde, là, de groupes communautaires qui sont débordés. Moi, c'est un peu un cri du coeur, là, je ne sais pas trop, mais je suis un peu fatigué de voir ces groupes-là venir dans mon bureau puis ne pas être capable de leur répondre, tu sais, leur dire : Non, il n'y en a plus, il n'y a plus rien, il n'y a plus de programme, il n'y a plus... Puis ça, je ne sais pas par où prendre ça, je vais écrire une lettre au ministre... J'écris une lettre au ministre, il n'y a pas de...

• (11 h 50) •

Il y a une situation difficile qu'on vit, que les groupes vivent, puis ça, ça a des répercussions sur les gens qui vivent la pauvreté, entre autres. Puis il me semble qu'on devrait se préoccuper de ça avant de commencer à se virer de bord puis aller voir... Il faut faire les deux, il faut travailler avec la personne. Mais il me semble qu'on devrait être capables de se préoccuper de ce qui se passe autour de nous autres. On est en train d'échapper beaucoup de monde. Puis vous ne réussirez pas à aller les chercher par ce programme-là, vous ne réussirez pas à aller chercher tout le monde. On va en échapper, parce que les groupes communautaires, les interventions faites dans nos communautés par différentes organisations, comme je dis, aînés, femmes, tout le monde, bien, ça permettait à des gens d'échapper à la trappe de la pauvreté. Mais là on fait comme si ça n'existait pas, on fait comme si c'était comme il y a deux, trois ans, là, qu'il n'y a pas eu de changement, mais il y en a. La fin des CRE a donné un gros coup, puis la fin de beaucoup de programmes, en habitation, entre autres, ça a donné des coups.

La fin de l'aide qu'on donnait dans nos communautés rurales, toute la Politique nationale de la ruralité, ça faisait travailler du monde dans nos communautés rurales. On a arrêté tout ça. Bien, ça engendre des conséquences. Puis ça a des conséquences sur des individus que vous allez essayer de rattraper en leur disant : Bien, si tu embarques, là, on va t'aider, mais, si tu n'embarques pas, bien, tu es dans le trouble. Il me semble qu'on aurait dû, en tout cas, avoir un vrai portrait de la situation de ce qui se passe dans nos régions.

Dans tous les cas, si on revient... on m'en montre, là, il y a plein... des coupures qu'il y a dans les régions un peu partout, là, en Gaspésie, on le voit, là, l'impact, dans... Les CLD ont travaillé avec du monde... tout le changement avec l'agence régionale de la santé, ça a eu des impacts aussi. Je ne sais pas, mais comme si on est en train de travailler pour essayer de dire : On va faire une loi pour aider des gens à se sortir de la pauvreté sans se préoccuper ou faire comme s'il n'y avait pas eu de changement dans nos communautés. Il y en a eu plein, M. le ministre, et il y a eu plein de monde, plein de groupes qui ont été abandonnés puis qu'en bout de ligne c'est des individus qui sont abandonnés.

Ce n'est pas normal, là, qu'on est obligés de, deux ou trois fois par année, faire des levées de fonds pour les comptoirs alimentaires. Ce n'est pas normal qu'on... Là, tout le monde aide, tout le monde fait quelque chose; bien, ce n'est pas un projet de société, ça, de soutenir des comptoirs alimentaires. Il me semble qu'on devrait avoir une vision plus large. Mais là on est pointus, pointus, pointus, en mettant toute la responsabilité sur l'individu.

Vous avez raison quand vous dites que c'est partagé, chacun... des responsabilités, mais l'État a une responsabilité aussi, une grande responsabilité. Puis je ne suis pas sûr que l'État prend ses responsabilités actuellement. Je suis loin d'être certain. Puis, comme parlementaire, moi, pour avoir vécu... je n'étais pas parlementaire, là, j'étais chef de cabinet à l'époque... mais, pour avoir vécu tout ce qui avait été fait sur la loi sur la pauvreté, je regrette ce temps-là. Tu sais, il me semble qu'on serait capables, ensemble, de tout faire ça, prendre le temps de s'arrêter puis de regarder ce qui se passe. Pourquoi on échappe autant de monde? Pourquoi qu'il y a des jeunes qui décrochent quand on coupe dans les commissions scolaires puis il n'y a plus de ressource dans les écoles? Les enseignants sont débordés. On perd du monde. Bien, ce monde-là, il se ramasse où, vous pensez? C'est ce monde-là, là, que vous allez essayer de rattraper, là?

Ça fait qu'il me semble que ç'aurait été le temps d'avoir une vision plus large, plus claire, plus honnête de ce qui se passe, qu'on aurait pu faire ça d'une façon transpartisane, sans se dire : Bien, vous n'avez pas fait ci, vous n'avez pas fait ça. Il me semble qu'on aurait été capables de s'arrêter puis de penser à ça, là. C'était ça, mon voeu, mais là on est embarqués dans un projet de loi qui ne se donne pas cette vision-là puis je trouve ça malheureux.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. Voulez-vous réagir, M. le ministre?

M. Blais : On est très, très loin de l'amendement, là. On est à quelques années-lumière. Peut-être rappeler, là, au collègue, là, qu'il y aura un plan de lutte qui va être déposé le printemps prochain. Il faut agir sur plusieurs fronts. Il a tout à fait raison, je ne dirai jamais le contraire. Il faut aussi avoir une efficacité : même dans la lutte contre la pauvreté, il y a des mesures qui sont plus efficaces puis il y a des mesures qui sont moins efficaces. D'abord, il va comprendre ça avec moi, puis il ne faut pas simplement faire plein de choses, mais il faut faire des choses qui sont efficaces.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres réactions? Alors donc, est-ce que l'amendement est adopté? M. le député de Saint-Jean?

M. Turcotte : M. le Président, j'aimerais qu'on procède au vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Cousineau) : Oui. Donc, je relis l'amendement : Ajouter, à la fin de l'article 83.1, tel qu'amendé, proposé par l'article 28, l'alinéa suivant :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut avoir pour effet de diminuer le revenu d'une famille sous le niveau de la prestation de base reconnue à l'article 56 du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles.»

Mme la secrétaire?

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

La Secrétaire : M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Poëti : Contre.

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Avant de revenir à l'article 83.1, je reviens un peu sur les derniers propos du ministre. Lorsqu'on dépose un sous-amendement ou un amendement, il faut essayer de se centrer sur ce qu'on dépose dans la discussion. Parce que, là, ma grande générosité... puis je crois que c'est le cas aussi de beaucoup de présidents et de présidentes, lorsque les discussions se font bien, on permet une discussion assez large, mais n'oubliez pas qu'on discute sur un amendement ou un sous-amendement. Donc, il faut se ramener, de temps en temps, à ce qui est sur la table. Alors, voilà.

Nous revenons donc à l'article 83.1, et puis je vous donne le temps restant — parce qu'il y avait des gens qui avaient commencé à discuter sur l'ensemble du 83.1 : M. le député de Saint-Jean, il vous restait 3 min 60 s; M. le député de Drummond—Bois-Francs, 14 min 45 s; Mme la députée de Gouin, vous avez 19 min 30 s; et puis évidemment, M. le député de Rimouski, vous avez 20 minutes sur le 83.1.

Alors, qui ouvre la discussion? M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. J'aimerais déposer un amendement. Ajouter, après le premier alinéa :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de l'objectif de renforcement du filet de sécurité sociale et économique tel qu'énoncé à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.»

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean.

Alors, je suspends quelques instants, le temps de faire des copies de l'amendement.

(Suspension de la séance à 11 h 57)

(Reprise à 12 h 5)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, nous reprenons nos travaux. Donc, nous avons un amendement qui est déposé, à l'article 83.1, par M. le député Saint-Jean. Alors, à vous la parole, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, l'amendement que je dépose actuellement, qui se lit comme suit :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de l'objectif de renforcement du filet de sécurité sociale et économique tel qu'énoncé à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.»

Si on se réfère à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, l'article 9 se lit comme suit :

«9. Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à :

«1° rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels;

«2° favoriser le maintien ou l'intégration en emploi des travailleurs à faibles revenus, notamment par des suppléments à leurs revenus de travail;

«3° rendre accessibles des services en matière de santé, de services sociaux et d'éducation qui soient adaptés aux besoins spécifiques des personnes en situation de pauvreté ou d'exclusion sociale;

«4° favoriser, pour les personnes et les familles en situation de pauvreté, l'accès, en toute dignité, à un approvisionnement alimentaire suffisant et nutritif, à un coût raisonnable, de même qu'à une information simple et fiable qui leur permette de faire des choix alimentaires éclairés;

«5° favoriser l'accès à un logement décent à un prix abordable par des mesures d'aide au logement ou par le développement du logement social, de même que par le renforcement du soutien communautaire aux personnes plus démunies socialement, dont les sans-abri.»

M. le Président, l'article 9 fait partie de la loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale, loi qui a été adoptée à l'Assemblée nationale, pas par cette législature-ci, bien entendu, mais par une législature précédente. Tous les partis politiques à l'époque ont voté pour. Je comprends que, bon, dans certains cas, c'est des nouveaux partis politiques, mais, quand même, l'esprit était là. Comme mon collègue l'a dit précédemment, il vient de le mentionner, notre collègue de Rimouski... notre collègue députée de Gouin qui, elle, était aux premières loges, là, à la Fédération des femmes du Québec à ce moment-là, mon collègue de Rimouski, je crois aussi qu'il n'était pas très loin, là, dans les cabinets de ministres, etc., donc on a, ici, des acteurs privilégiés, le ministre ne devait pas être très loin aussi, là, dans...

M. Blais : ...

M. Turcotte : Pardonnez-moi?

M. Blais : ...

M. Turcotte : Ah! bon. Il était quand même là, dans l'actualité, si on peut dire.

Moi, je crois que — on l'a dit hier — l'article 83.1 est, à nos yeux, l'article fondateur — on le mentionne souvent, là — du programme Objectif emploi, qui donne l'orientation, qu'est-ce que c'est, le programme Objectif emploi. Parce que le programme Objectif emploi, ça fait deux budgets qu'on en parle, mais, à un moment donné, il faut le concrétiser, et la concrétisation de ce programme-là, c'est dans un projet de loi, et là c'est ce qu'on étudie.

Donc, nous, ce qu'on dit, au même titre qu'on l'a mentionné hier, là, pour un autre article faisant référence à la loi... je pense, l'article 15, si je me souviens bien... on considère important, dans l'article fondateur, de donner quelques orientations au programme parce que beaucoup d'éléments du programme Objectif emploi sont décidés ou décrétés par règlement... déterminés par règlement. Et le règlement, on en a fait un long débat sur ça, sur le règlement précédemment, et on en est venus à la conclusion, réciproquement, que, même si nous connaissons les intentions réglementaires, même si le ministre connaît ces intentions puis, bon, a la voix au chapitre au Conseil des ministres, il n'est pas exclu que le Conseil des ministres peut décider d'aller dans une autre direction ou d'être plus drastique, moins drastique, mais aussi un autre ministre, un autre gouvernement, peut passer par la suite et changer le règlement.

• (12 h 10) •

Donc, on se dit : Si c'est dans la loi, les principes de base... autant, hier, l'article que nous avons déposé, l'amendement concernant l'article, et là, aujourd'hui, ce que nous faisons, c'est qu'on donne des balises, en disant au gouvernement, quel qu'il soit, peu importe le parti politique... de dire : On ne veut pas aller en bas de ça ou on veut aller vers ça. Et là, dans le cas qui nous occupe, bien, on dit qu'aucune disposition du programme Objectif emploi ne peut aller à l'encontre de l'objectif du renforcement du filet de sécurité sociale et économique.

Dans l'article 9, comme on fait référence dans l'amendement, on mentionne — le premier picot : «1° rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.» Moi, quand je lis ça, je vois le mot «rehausser», «revenu», «situation de pauvreté», etc. Donc, l'objectif, le but, l'orientation, la vision de la loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale, dans l'article 9, c'est de rehausser le revenu des personnes, ce n'est pas de le diminuer.

Donc, nous, on considère que les propositions du ministre, notamment les sanctions, ne vont pas dans cette orientation-là. Et je sais ce que le ministre va me répondre — je suppose, là — il va me dire : Je comprends que l'opposition officielle s'oppose aux sanctions, je considère que ça tourne en rond. Il a même dit qu'on tournait à vide, hier, puis tout ça, j'ai tout compris ça. Et, après quelques fois, on vient qu'à comprendre assez vite, hein?

Mais, je me dis, justement, quand on répète, ça a une vertu pédagogique. Ancien professeur d'université, le ministre...

M. Blais : ...

M. Turcotte : Pardonnez-moi?

M. Blais : Je l'ai dit souvent, honnêtement.

M. Turcotte : Effectivement, le ministre l'a mentionné souvent. Donc, notre façon, comme membres de l'opposition, qu'elle soit officielle, deuxième opposition ou notre amie la collègue députée de Gouin, nous avons une responsabilité ici, à l'Assemblée nationale, de tenter, tenter, hein... Nous voulons améliorer le projet de loi et, pour nous, le projet de loi, à sa lumière, tant et aussi longtemps qu'il y a le spectre des sanctions, nous pose problème. Donc, par cet amendement-ci, nous disons : Il peut y avoir des sanctions, à la rigueur, mais dans l'optique où ça ne va pas à l'encontre du rehaussement du revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté.

Parce que des sanctions... il peut y avoir des sanctions autres que monétaires, à la rigueur, là, hein? Le ministre peut essayer de trouver une solution pour... Parce que c'était ça, sa grande angoisse, là, que j'ai entendue, là, lors de la consultation particulière, même si elle n'était pas générale, là, quand les groupes, là, étaient ici, là, hein, au micro à cette table-là, là, dans le milieu, là, bien, il disait : Je vous entends. Certains groupes disaient : Nous sommes contre l'obligation. Ça, ça réglait la question. Certains groupes disaient : On est pour l'obligation, mais contre les sanctions. Et le ministre disait : Oui, mais comment on peut obliger quelqu'un s'il n'y a pas une sanction? Donc, ça ne devient plus une obligation. Mais là, ça, le ministre peut tenter de trouver une solution. Des fois — puis on l'a vu par le passé — par d'autres programmes, on considère que l'approche plus positive, parce que, là, c'est un peu une approche... le bâton puis la carotte, là, donc c'est pas mal le bâton... donc, des fois, une approche plus positive peut permettre d'améliorer les choses, surtout que le ministre l'a mentionné, en quelque sorte, lui-même... J'avais retrouvé ça dans mes notes, là. Je n'ai pas cette feuille-là, mais il a dit, hier... et ça, ça m'a frappé. Ça m'a frappé, quand, hier soir, en terminant la commission, ça m'est revenu que le ministre a mentionné ça — et on pourrait le lire dans les galées s'il le faut, mais le ministre a mentionné : C'est sûr que, quand les gens font le choix eux-mêmes, c'est plus facile. Il a dit ça. Il a dit ça : Quand les gens font le choix eux-mêmes, c'est plus facile.

Donc, moi, je comprends qu'au fond de lui, le ministre, il comprend notre argumentaire, puis il l'entend, mais là il y a une obligation pour lui d'essayer de trouver, là, une façon de sanctionner les gens pour maintenir son obligation. Parce qu'il l'a promis : il a dit, dans les médias, qu'il allait y avoir l'obligation. Donc là, il faut qu'il trouve une solution pour maintenir l'obligation, puis, pour ça, bien, c'est les sanctions, c'est ce qui paraît le plus facile. Mais moi, je crois qu'il y a d'autres solutions, il y a d'autres solutions.

Puis, si on va au fond de la question, M. le Président, parce que c'est de ça qu'il est question : Comment on peut faire pour aider les gens à se sortir de la pauvreté? Le ministre nous a dit : Oui, par la recherche intensive en emploi. Mais lui, il a voulu ajouter la question de la formation et acquisition de compétences et le développement des habiletés sociales. Mais moi, quand je vois les trois blocs qui sont présentés, qui... très intéressants, là, on l'a mentionné que le programme Objectif emploi n'est pas que mauvais, là, c'est, bon, le bout de l'obligation puis les sanctions qui posent problème, mais le programme en soi est très bien... quand je lis ces trois blocs-là, que je vois ces trois blocs-là, je reconnais beaucoup l'article 9.

Premièrement, bon, la question du revenu. Quand on voit le deuxième, bon, «favoriser le maintien ou l'intégration en emploi des travailleurs à faibles revenus, notamment par des suppléments à leurs revenus de travail», moi, je reconnais beaucoup d'éléments là-dedans, parce que c'est le but, hein, de l'intégration en emploi; et il y a des suppléments, effectivement. Après ça, on parle de... ici, là, on parle de «rendre accessibles des services en matière de santé, [et] services sociaux et d'éducation qui soient adaptés aux besoins spécifiques des personnes en situation de pauvreté ou d'exclusion sociale». Ça, c'est l'article 9.

Je revois le bout sur le bloc 7 : Formation et acquisition de compétences; puis il y a des éléments du bloc 8 : Développement des habiletés sociales... Quand on voit des gens, là, qui ont des dépendances ou des problèmes, dépression, peu importe, qui auraient besoin d'aide particulière... La collègue, hier — députée de Gouin — mentionnait que, bon, c'était difficile d'avoir accès à un psychologue, là, si, bon, on n'a pas les moyens de se payer un psychologue, d'attendre au CLSC. Moi, j'ai quelques citoyens effectivement qui m'ont sensibilisé à cette question-là : ils appellent au CLSC, ils vont au CLSC, ils sont sur la liste d'attente, ça prend des semaines, des mois... c'est plus des mois que des semaines avant d'avoir un rendez-vous avec le psychologue. Moi, je vois des éléments du point 9, là, qui vont dans le sens du programme... l'article 9, plutôt.

Quand je vois «favoriser, pour les personnes et les familles en situation de pauvreté, l'accès, en toute dignité, à un approvisionnement alimentaire suffisant et nutritif à un coût raisonnable, de même qu'à une information simple et fiable qui leur permette de faire des choix alimentaires éclairés», bien moi, ça me rappelle la discussion que j'ai eue hier.

• (12 h 20) •

La discussion que j'ai eue hier, bien, qui n'était pas vraiment une discussion, là, dans ce cas-là, c'était plus un monologue, là, parce que c'était pas mal moi qui parlais, mais où je reprenais des témoignages des gens de Mauricie et du Centre-du-Québec qui nous ont rappelé certains cas où les gens avaient, bon, le diabète, cholestérol, problèmes de santé, qui fait en sorte qu'ils doivent avoir une diète particulière... Et on le sait, là, le prix des aliments augmente de plus en plus. On le voit, là, dans... de tous ordres. Et là, quand des gens ont une maladie, ont une situation de santé particulière, bien entendu, leur épicerie coûte plus cher, il faut en tenir compte. Puis souvent, malheureusement, c'est souvent les cochonneries, hein, qui coûtent moins cher, mais les bons aliments coûtent toujours plus cher, et souvent les bons aliments, bien, c'est souvent ce qu'on retrouve moins dans les comptoirs alimentaires parce que, bon, les banques alimentaires sont aussi beaucoup dépendantes des dons, des dons que les épiciers, que les supermarchés, que les citoyens donnent. Donc, souvent, c'est des aliments qui sont sur le point, là, d'être périmés, ou autre. Donc, souvent, là, les denrées périssables, bon, c'est plus difficile à conserver. Donc, moi, je vois qu'il y a beaucoup d'éléments de l'article 9 de la loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale qui se retrouvent dans les principes du programme Objectif emploi, à l'exception d'un point qui nous apparaît, nous, non négociable, la question de l'obligation et les sanctions, qu'on voit que ça pourrait être remis en question.

Donc, sur ça, M. le Président, j'aimerais peut-être entendre, de la part du ministre, ses intentions sur l'amendement que j'ai déposé, voir s'il est d'accord pour intégrer cet élément-là dans le projet de loi, et sinon, bien, les raisons qui le poussent à ne pas être favorable à notre amendement.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Il y a deux difficultés avec la proposition qui est faite par le collègue député de Saint-Jean. Tout d'abord, le premier article de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles est très clair, hein? Cette loi-là, elle se fait «dans le cadre des principes et orientations énoncés à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale». Objectif emploi est une portion de cette Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, donc respecte l'article 1, là. Ça, c'est première chose.

Deuxième chose, c'est possible que le collègue peut donner une autre signification à son amendement. Je pense que c'est le cas, de donner une forme de statut, là, hiérarchique à la loi-cadre... un statut juridique, pardon, et une hiérarchie par rapport aux autres lois sociales, parce que la loi-cadre touche l'ensemble des lois sociales et qui peut avoir une influence sur les conditions de vie des personnes, notamment les personnes plus démunies. Et ce statut-là n'existe pas : la loi-cadre demeure une loi-cadre qui vient, disons, encadrer, aligner le gouvernement, là, sur ses orientations, mais la loi-cadre n'est pas une référence juridique, j'insiste, là, n'est pas une référence juridique à laquelle on peut faire appel pour battre en brèche une disposition ou une décision, là, du gouvernement. On peut toujours l'utiliser pour en discuter, c'est ce qui est fait, là, en ce moment, mais on ne mettra pas, dans la loi, un élément qui ferait en sorte de donner à cette loi un statut qu'elle n'a pas.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Bien, je ne sais pas s'il y a d'autres collègues qui aimeraient intervenir.

Le Président (M. Cousineau) : Oui? On peut passer la parole à d'autres collègues, évidemment. Par alternance, je passe à la deuxième opposition. M. le député de Drummond—Bois-Francs, est-ce que...

M. Schneeberger : Ça va.

Le Président (M. Cousineau) : Ça va pour vous? Merci. Alors, M. le... Excusez! Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Moi, je vais, bien sûr, appuyer l'amendement du collègue le député de Saint-Jean. Je comprends très bien ce que le ministre vient de dire, que la loi-cadre visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion n'a pas un statut juridique, et moi, j'ajouterais, disons, comparable à celui de la Charte des droits et libertés de la personne, par exemple, je pense que tout le monde aura compris ça. Cependant, il me semble que, lorsqu'on adopte une loi-cadre... bien, en fait, le ministre le dit lui-même, hein, c'est qu'on adopte une vision, une orientation, et je pense que c'est comme ça que ça a été compris en 2002, et cette vision et cette orientation doivent guider l'ensemble de l'action gouvernementale en matière de lutte à la pauvreté.

Donc, de réaffirmer qu'aucune disposition du présent chapitre ne puisse aller à l'encontre de l'objectif du renforcement du filet de sécurité sociale et économique, bon, tel que prévu à l'article 9 de la loi, me paraît tout à fait raisonnable et me paraît conforme à l'esprit sinon la lettre de cette loi adoptée en 2002. À moins qu'on décide que non seulement cette loi-cadre n'a pas de statut juridique particulier, mais qu'au fond elle n'a plus beaucoup d'importance, 14 ans plus tard. Oui, on l'a adoptée, mais, dans le fond, on ne s'en inspire plus. Bien, si c'est ça, il va falloir le dire, mais ce n'est pas ça que j'ai entendu jusqu'à présent. Jusqu'à présent, personne n'a prétendu que cette loi de 2002 n'était pas importante dans, je dirais, la conception de tous les paramètres, là, qui doivent nous guider dans la lutte à la pauvreté.

J'irais plus loin. Bien sûr, on discute du projet de loi n° 70, on discute particulièrement du programme Objectif emploi, mais, à un moment donné, il faut faire des liens aussi, là. Le collègue député de Rimouski parlait de sa journée de lundi à Rimouski. Moi, je n'étais pas à Rimouski lundi, donc je ne parlerai pas de ça, mais moi, je vais vous parler de quelque chose qui est lié directement à l'atteinte de résultat dans le programme Objectif emploi. C'est comment on compte sur bon nombre d'organismes pour aider les gens, les accompagner, les soutenir dans une recherche d'emploi et non seulement dans une recherche d'emploi, mais dans le renforcement de leurs habiletés.

Et là il y a vraiment un paradoxe, M. le Président, puis c'est pour ça que l'amendement du collègue est important. Le paradoxe, c'est le suivant. Pendant qu'on est en train de dire, ici, que, par exemple, on veut permettre à des gens de renforcer leurs habiletés sociales dans un but éventuel d'insertion à l'emploi, on ne donne pas aux organismes qui ont mission d'aider les personnes... et moi, je parle des contextes, là, de préemployabilité... on ne leur donne pas les moyens d'agir.

Alors, en revenant de cette commission hier soir, j'ai, encore une fois, écouté les nouvelles et j'ai, encore une fois, vu un reportage tout à fait remarquable, mais déprimant, qui nous expliquait qu'en Gaspésie — on n'est pas loin de la circonscription de mon collègue de Rimouski — bien là, il y a des organismes, là, qui ne veulent que ça, aider des gens, et ils sont coupés. Des gens avec des problèmes de dépendance à l'alcool, par exemple, mais là ils vont être obligés de fermer quatre mois, à partir de septembre, parce qu'ils n'ont pas assez d'argent pour accueillir les gens, les mêmes gens que nous voulons aider avec le projet de loi n° 70. Minimalement paradoxal, là, il y a un problème. Puis c'est pour ça, à mon avis, l'importance de l'article 9 de la loi contre la pauvreté et l'exclusion, puis c'est pour ça l'importance du renforcement du filet de sécurité sociale et économique.

Si on manque d'emploi pour les gens peu qualifiés, par exemple, qui est le cas de beaucoup de gens à l'aide sociale, si les organismes communautaires ne sont même plus capables de les aider alors qu'on leur confie de plus en plus de mandats, mais de quoi on est en train de parler, là? Le paradoxe est trop grand. Dans le même article 9, on parle, dans un des alinéas, de s'assurer de la sécurité alimentaire des personnes. Dans le reportage d'hier, on voit qu'il y a une sorte de comptoir alimentaire, là, dans la baie des Chaleurs, je crois, qui a de la difficulté à opérer, là, pleinement puis à organiser ses cuisines collectives, encore une fois, faute d'argent. Vraiment, on est dans la contradiction totale.

Dans un autre alinéa de l'article 9, on parle de fournir à toutes les personnes qui sont dans le dénuement, là, un logement, hein, que les gens puissent se loger, là, décemment. Alors, avant-hier, les femmes dont ces mêmes reportages parlaient, franchement ne vivaient pas dans des logements décents; pour certaines d'entre elles, en tout cas, c'était lamentable. Mais, deuxièmement, je rappelle que le gouvernement actuel a décidé de diminuer de moitié la construction de logements sociaux chaque année, là, pour les prochaines années. Donc, paradoxe total.

Puis, pendant ce temps-là, comme le disait le collègue tout à l'heure, on fait reposer sur les individus la responsabilité de s'en sortir. Et on est d'accord que les individus ont leur part de responsabilité, ça, c'est certain, mais assumons-nous les nôtres, comme collectivité, comme État, comme gouvernement? Moi, je pense qu'on les assume peu et moins bien qu'avant. Moins bien qu'avant : moins de logements sociaux qu'avant, des organismes communautaires à qui on confie de plus en plus de mandats et qu'on indexe à peine, à peine, des services publics — ça fait partie de l'article 9 aussi, hein — qu'on doit fournir aux gens vivant dans la pauvreté, des services sociaux, de santé, d'éducation, même problème, difficulté à rencontrer psychologues, médecins, travailleuses sociales, difficulté à avoir des ressources pour aider les enseignants en milieu scolaire pour travailler avec les jeunes.

Alors, je pense qu'on ne peut pas décider à la fois d'adopter un projet de loi qui, oui, va offrir des... enfin, qui dit qu'il va offrir des services aux personnes, mais, si j'ai bien compris, avec un grand total de 6 millions ou 5 millions — le chiffre m'échappe, là — de dollars de plus par année.

• (12 h 30) •

Une voix : ...

Mme David (Gouin) : Cinq. Merci, collègue. Cinq. C'est mince. C'est mince, M. le Président, là, pour remplir l'ensemble de nos obligations face aux gens en situation de pauvreté. En fait, ce n'est pas mince, c'est famélique, soyons clairs. Et ce n'est pas parce qu'il y aura 90 personnes équivalents temps complet de plus que ça, ça va nous aider à offrir les services de santé et les services sociaux dans l'éducation, dans le logement, soutien aux organismes communautaires. Ça, ça ne fait pas partie, là, du 5 millions. Alors, moi, je ne sais pas ce qu'on va faire avec tout le reste.

Donc, je crois que nous devons soutenir vigoureusement l'amendement du collègue de Saint-Jean. Il faut que ça soit clair, là, que la loi qu'on veut adopter pour aider les personnes en situation de pauvreté soit une loi qui tient compte de ce que nous dit la loi contre la pauvreté et l'exclusion et de ce qu'elle est censée garantir aux citoyennes et aux citoyens les plus démunis.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre, voulez-vous réagir?

M. Blais : Écoutez, donc, bien sûr, on a annoncé que le programme Objectif emploi allait coûter des sommes supplémentaires, là, au gouvernement, puis on est prêts à les investir parce qu'on y croit. Je rappelle : l'équivalent de 5 millions par année pour ajouter 90 ETC.

C'est difficile d'évaluer le coût des bonifications. Mais prenons un exemple simple, là, faisons des mathématiques simples. Si l'essentiel des primodemandeurs allait vers des mesures en éducation — en formation, c'est bien ça — le coût du Programme d'aide sociale augmenterait de 56 millions de dollars dès la mise en place pour la première année du programme.

À cela, il faut ajouter qu'hier on a annoncé un rehaussement du financement de l'ensemble des organismes externes avec qui on fait affaire. On en a parlé, ici, souvent, hein? Les collègues avaient des préoccupations — en face — sur leur situation. Donc, un rehaussement de 3,5 % sur un budget, Mme la sous-ministre, de 200 millions, hein? Donc, ça doit nous faire quelque chose comme 7 millions — je fais un chiffre rapide; si j'induis en erreur, là, vous me corrigerez tout à l'heure — 7 millions de plus. Ça, c'est les coûts des dépenses bien réelles, bien concrètes. C'est dire comment on y croit. Et, encore une fois, je le répète : Aucune évaluation des économies ou des possibles économies qu'on pourrait faire par des sanctions... parce que ça risque d'être mineur, ça ne vaut même pas la peine d'être calculé.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Je remercie le ministre pour ses indications, mais j'aimerais ça qu'il précise les informations qu'il nous donne. Quand le ministre nous dit : Si la majorité des primodemandeurs — finalement, si j'ai bien compris, là — se retrouve dans le système d'éducation, ça coûtera 56 millions de plus. Est-ce que ce 56 millions de plus, c'est le montant qu'il calcule en tenant compte des allocations qui seront données aux primodemandeurs? Est-ce que c'est de ça que nous parlons lorsque nous parlons du 56 millions?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Oui. Donc, le 56 millions, encore une fois...

Une voix : ...

M. Blais : 54, pardon. Alors 54,5, c'est une évaluation sommaire, c'est une multiplication du nombre de primodemandeurs moyens, là, par la bonification, effectivement, de 260 $ par mois. C'est beaucoup d'argent.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Donc, je pense, j'avais bien compris. 54,5 millions, c'est la somme totale qu'il faudrait pour qu'une majorité, si j'ai bien compris, de primodemandeurs puissent bénéficier, là, de services éducatifs, alors, j'imagine, formation aux adultes, formation professionnelle, etc. Donc, c'est l'argent qui est calculé et qui va directement aux primodemandeurs, mais je ne vois pas, dans tout ça, d'argent supplémentaire donné au réseau de l'éducation.

Est-ce que, par exemple, tout ce réseau, là, de formation professionnelle, d'éducation aux adultes et d'organismes, comme celui dont je parlais hier, qui essaient d'aller attraper des jeunes qui ont de la difficulté à performer dans le système actuel d'éducation aux adultes, est-ce qu'on pense soutenir ces organismes-là? Est-ce qu'on va soutenir les organismes qui s'attaquent au décrochage scolaire? Il n'y a pas que l'argent donné aux primodemandeurs au niveau de leurs allocations. Ça, c'est bien, c'est intéressant, mais il faut aussi investir des ressources financières pour que la manière d'éduquer, pour que les jeunes, disons, là, qui vont se retrouver dans le système d'éducation ne décrochent pas, justement, ou ne redécrochent pas, parce qu'il s'agit souvent d'anciens décrocheurs. Est-ce que le ministre a pu parler avec son collègue du ministère de l'Éducation, le ministre de l'Éducation, pour s'assurer qu'au bout du fil, au bout de la ligne, là, dans le système d'éducation, les services seront au rendez-vous pour des jeunes qui ont des besoins particuliers?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : On a regardé ça un petit peu, hier, mais une bonne partie de ces jeunes, c'est la formation des adultes. Parfois, ça peut être aussi vers la formation professionnelle, certains... mais bon. Il faut rappeler que le système, quand même, le réseau de l'éducation a obtenu, au dernier budget, la plus haute augmentation... je ne veux pas me tromper, là, des fois, je me suis trompé, mais la plus haute augmentation de tous les budgets des ministères du gouvernement du Québec, là, donc, hein, en meilleure situation que jamais pour accueillir ça. D'autant plus que le financement, de toute façon, a toujours un lien direct ou indirect avec la clientèle.

Donc, il y a un intérêt. Moi, je sais bien qu'à Charlesbourg, là, c'est très clair, là, en ce moment, les centres de formation aux adultes et professionnelle feraient tout pour avoir plus d'élèves dans leurs murs, notamment, là, si le programme Objectif emploi pouvait leur en apporter. Donc, moi, j'ai eu un soutien d'effectif d'une des directrices d'une école de formation des adultes, à Charlesbourg, sur Objectif emploi, parce qu'ils croient beaucoup qu'ils peuvent vraiment aider ces jeunes-là.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Oui, je comprends, M. le Président, mais le réinvestissement en éducation, il existe, mais il est modeste. Il va couvrir à peine les coûts de système. On n'est pas dans un réinvestissement réel en nouvelles capacités, par exemple, d'accueillir des jeunes en difficulté. Je ne doute pas un instant de l'intérêt et de la motivation des centres de formation pour adultes, des commissions scolaires qui l'organisent, tout ça. Je pense, la question n'est pas dans la volonté des gens. Je suis certaine que la volonté existe, mais je soumets que, pour un certain nombre de jeunes, il va falloir des ressources particulières, il va falloir soutenir les organismes communautaires pour leur permettre de collaborer avec des centres d'éducation aux adultes ou des centres de formation professionnelle pour vraiment, là, aller chercher les jeunes qui ont de la difficulté à fonctionner dans un système qui est quand même un peu rigide, là. Et ça ne tient pas à la bonne volonté ou à la mauvaise volonté des gens, là. N'importe quel système, quand on met plein de jeunes dans une classe, il y a des normes, il y a des manières de faire, puis c'est difficile, à ce moment-là, de s'occuper de chaque jeune qui a des difficultés particulières. Donc, moi, je pense qu'on se trompe si on croit que le réinvestissement en éducation va pouvoir garantir une aide réelle à ces jeunes-là.

J'ai une question aussi en ce qui a trait aux organismes, où le ministre dit, hier : Nous avons annoncé un réinvestissement de 7 millions. Je suis désolée, je ne l'ai pas vu passer, mais ce 7 millions concerne quels organismes? Je ne demande pas la liste, mais, je veux dire, quels types d'organismes? Est-ce qu'on parle seulement des carrefours jeunesse-emploi, est-ce qu'on parle de d'autres organismes? Je voudrais juste une précision.

• (12 h 40) •

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Donc, j'ai dit 7 millions, je n'ai pas le chiffre exact, là, mais le chiffre exact, c'est une augmentation de 3,5 % des budgets des 399 organismes externes avec qui on a des ententes. Comme le budget est autour de 200 millions, hein, cette année, j'ai fait un calcul mental qui me permet de dire que c'est 7 millions; on pourrait vérifier pour donner le montant exact.

Ah! on me dit que c'est 7,1 millions. Je suis encore assez bon en mathématiques.

Mme David (Gouin) : O.K. Donc, M. le Président, est-ce qu'on parle, ici, des organismes qui sont sur la liste que le ministre nous a distribuée l'autre jour?

M. Blais : Oui.

Mme David (Gouin) : Bon, bien, merci de le dire dans le micro, parce que ça représente un intérêt certain, entre autres pour des organismes de ma circonscription. Comme il y en a un qui vient nous rendre visite cet après-midi, ils vont être contents.

Donc, on se parle vraiment de tous les organismes qui sont là, on parle d'une augmentation, si j'ai bien compris, là, de 3,5 %, mais est-ce que ce 3,5 % s'applique également pour chacun des organismes à partir, bien sûr, de son budget actuel, là? On parle de... n'importe quel organisme présent sur la liste, là, est assuré d'avoir une augmentation de 3,5 %. Est-ce que c'est une bonne compréhension?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : On va vérifier. On est loin de l'amendement, encore une fois, M. le Président, mais on va vérifier l'information.

Le Président (M. Cousineau) : C'est vous qui avez ouvert sur ce dossier-là.

M. Blais : Ah bon! C'est moi?

Des voix : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la députée.

Mme David (Gouin) : Il me reste combien de temps, M. le ministre? Ah! M. le ministre... M. le Président?

Le Président (M. Cousineau) : On va vous calculer ça.

M. Blais : Alors, c'est 3,5 %, réparti également entre chaque organisme. Voilà.

Le Président (M. Cousineau) : Merci.

Mme David (Gouin) : Merci.

M. Blais : ...bien raison, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Il vous reste six minutes, Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : O.K.

Le Président (M. Cousineau) : Vous voyez que vous avez un président qui suit, hein?

Mme David (Gouin) : Mais j'apprécie, M. le Président, que j'aie pu poser ces questions et avoir ces précisions. Puisque le ministre avait donné les chiffres, je pense que ça valait la peine de les faire préciser, même si, en apparence, on s'éloignait de l'amendement. En fait, je pense qu'on y est à plein parce que ce que l'amendement nous propose, c'est de dire que rien, dans le chapitre qu'on est en train d'analyser, ne doit aller à l'encontre de l'objectif de renforcement du filet de sécurité économique et sociale, etc. Bon. Alors, le ministre nous dit : Non seulement on n'en est pas loin, mais on s'en rapproche parce qu'on met des sous. Je continue de plaider, quant à moi, que...

Bon, je reconnais qu'il y a certains sous qui sont mis, effectivement, mais qu'on est tellement loin du compte. Et je voudrais, toujours dans le cadre de la discussion sur cet amendement, apporter un point de vue sur un tout autre aspect. Dans tout ce qu'on est en train de discuter, il y a des chiffres qui sont... on parle de principes, on parle de pratico-pratique aussi, et il y a des chiffres un peu étonnants qui ont été amenés à ma connaissance et...

Parce que là on est en train de se parler de renforcer le filet de sécurité sociale et économique. En ce moment, à l'aide sociale — et ça, c'est dans le petit fascicule ici, là, du Régime québécois de soutien au revenu, bon, ça a été déposé au moment du budget. Lorsqu'on lit, à la page 49, pour un couple qui a deux enfants, alors, actuellement, personne ne travaille, ce couple-là a deux enfants, avec toutes les mesures dont on peut discuter, sauf les allocations familiales, les allocations pour les enfants, ce couple a près de 30 000 $ par année, c'est-à-dire 29 594 $ très exactement.

Donc là, on parle de ce dont disposent deux adultes. Mais, quand on parle d'une personne seule à l'aide sociale, puis on est évidemment dans la catégorie des personnes qui n'ont pas de contrainte à l'emploi, on ne diminue pas ce montant par deux. En fait, on le diminue énormément, parce que cette personne-là a 9 192 $ par mois... Déjà, on est très, très loin du compte pour ce qui est d'un filet de sécurité économique. Avec les pénalités du projet de loi n° 70, on tombe à 6 024 $. Donc, on passe de la moitié de la couverture des besoins de base, selon la mesure du panier de consommation, au tiers de la couverture de ses besoins de base. Moi, j'aimerais comprendre comment, dans ces conditions, le ministre peut-il penser qu'on est en train de renforcer le filet de sécurité économique des gens.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.

M. Blais : Je ne veux pas discuter du fond, j'ai déjà indiqué qu'il y avait deux éléments... deux objections peut-être, plutôt, de nature juridique : le fait qu'Objectif emploi s'inscrit dans une loi, la loi plus générale de l'aide sociale, donc il est soumis au premier article, et le fait que la formulation qui est proposée donnerait un statut juridique à une loi... et un statut juridique et une forme de hiérarchie... créerait une forme de hiérarchie des lois entre une loi-cadre et la loi actuelle. Ce qui n'est pas le cas, là, du point de vue juridique.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin? Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : C'est terminé, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : C'est terminé.

Mme David (Gouin) : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord. On vous dira le temps restant, là, dans quelques minutes. M. le député de Rimouski, je crois?

M. LeBel : Oui. Dans le fond, là, ce qu'on essaie de faire, c'est de... ce que la députée de Gouin amène aussi, c'est qu'on voudrait au moins s'assurer que ce projet de loi là, cette loi-là respecte... ou s'intègre dans la vision consensuelle qu'on s'était faite de la lutte à la pauvreté, qui est représentée par la loi-cadre, là, la loi de lutte à la pauvreté. C'est ce qu'on essaie de faire, puis là l'amendement, bien, ça vient comme rappeler que cette loi-là doit respecter certaines balises ou certains principes qui avaient été adoptés sur la loi qui luttait contre la pauvreté.

 Pourquoi on le fait? Parce qu'il y a un élément qui nous questionne, là, c'est l'élément non seulement l'histoire de... comme je disais tantôt, là, il y a un contexte plus large, mais, dans la loi, c'est l'élément de coercition, là, d'obligation, qui est un peu fatigant, et là on se dit : Bon, peut-être, si on intègre l'amendement, bien, on pourrait encadrer un peu cet élément de coercition là. Parce que l'article, là, comme il a été proposé, on veut que les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout adulte qui est tenu, «dans les cas et aux conditions prévus par règlement», tenu de participer au programme. Moi, ce bout-là, ça me fatigue un peu, puis j'essayais de voir comment on pourrait faire pour l'encadrer parce que je trouve que c'est un élément important, là, qui est dans le projet de loi.

Il y a un comité consultatif qui est là pour donner des avis au ministre, qui s'appelle le Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, différentes personnes de plusieurs régions du Québec qui y participent, des gens du ministère aussi, sans droit de vote, mais qui y participent. Et c'est intéressant d'aller voir sur le site, là, il y a beaucoup d'avis sur la pauvreté, l'emploi au Québec.

Dans un des avis qui ont été faits, je vais vous en lire quelques bouts, là, puis on pourra... «Le comité souhaite faire part de sa grande préoccupation concernant certaines modifications proposées [par la loi] Objectif emploi. Selon ses analyses, la réinstauration de mesures obligatoires et de pénalités pour refus de participer à ces mesures peut avoir un effet négatif très important sur des personnes déjà en situation de grande vulnérabilité, sans procurer par ailleurs [des] résultats escomptés.»

Bien, le comité — rapidement — plaide contre les mesures de coercition. Le comité dit qu'il peut appuyer l'intensification de soutien et l'accompagnement des nouveaux prestataires d'aide sociale. Puis, «on le sait, plus une personne demeure longtemps à l'aide, plus il lui devient difficile de s'en sortir. Par contre, le comité s'oppose à toute mesure coercitive assortie de pénalités qui viendraient réduire une aide financière déjà trop faible — c'est un peu ce qu'on proposait tantôt puis ce qu'on essaie de ramener — pour assurer la couverture des besoins de base des personnes, compromettant ainsi leur santé et leurs chances de s'en sortir. Cette façon de faire contrevient à la législation en vigueur, notamment [à] la Loi [qui vise] à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, la Charte des droits et libertés de la personne et le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels.» Vous comprenez un peu pourquoi on arrive avec un amendement, là. C'est pour essayer de rattacher — c'est ce que l'avis nous dit — la loi à la loi-cadre.

• (12 h 50) •

«Paradoxalement, malgré le caractère éminemment social des difficultés en intégration au marché du travail de nombreux groupes de la population, on accorde souvent plus d'importance aux causes attribuables aux caractéristiques ou aux soi-disant lacunes des personnes qu'à celles qui découlent du marché du travail» ou de la communauté. C'est un peu ce que je disais et ce que la députée de Gouin a amené, là : on travaille sur la personne, là, sur les lacunes de la personne, mais on ne regarde pas ce qu'il y a autour.

Je rappelle, là, ce que je suis en train de lire, là. C'est l'avis qui a été proposé, là, qui a été déposé par le comité qui est chargé d'informer le ministre. «Les mesures punitives sont selon le comité injustes, inutiles, souvent peu concluantes [des termes] de résultats et elles risquent de détériorer la situation des personnes déjà très vulnérables.» Il me semble, c'est assez clair.

«Elles sont injustes parce qu'elles sont en contradiction totale avec le respect de la dignité des personnes et de leur libre choix. Cette façon de faire s'appuie sur le préjugé selon lequel les personnes choisissent librement l'aide sociale.» C'est ce que je disais un peu tantôt. «On reporte ainsi sur les personnes l'entière responsabilité de leurs difficultés d'intégration à l'emploi alors que dans les faits, le principal facteur est le marché du travail lui-même.»

On dit : «De telles mesures sont aussi inutiles. Les statistiques le prouvent : les prestataires veulent s'en sortir et font de nombreux efforts malgré les obstacles qui leur barrent trop souvent la route. Année après année, des dizaines de milliers de prestataires participent volontairement à des mesures d'intégration à l'emploi, soit quelque 88 000 nouveaux participants en 2014‑2015 dont [...] 21 000 jeunes [en] moins de 25 ans.

«Les mesures punitives — ce qu'on nous dit — sont par ailleurs le plus souvent inefficaces. Elles ont déjà été appliquées sans résultats concluants. Selon des spécialistes, de telles mesures n'ont pas tenu leurs promesses, notamment celles d'intégrer les personnes dans des emplois, certainement pas dans des emplois de qualité, ni de réduire la pauvreté. Elles ne permettent [certes] pas d'établir une relation de confiance entre la personne et l'agent d'aide à l'emploi. Il faut par ailleurs être prudent en s'appuyant sur les comparaisons internationales. L'environnement [est] très différent, notamment en ce qui concerne les règles du marché du travail, le niveau des salaires», etc.

«Des mesures obligatoires assorties de pénalités ont déjà été [appliquées] au Québec sans résultats concluants. L'une des clés de la réussite des interventions, c'est d'offrir aux personnes la bonne mesure, tant et aussi longtemps qu'elles ont besoin de soutien. Une autre clé, c'est de s'assurer que le marché du travail est prêt — la communauté — à accueillir ces personnes, dans des conditions décentes.»

Et là le comité nous parle d'une étude. Il dit : Il y a une étude réalisée par votre ministère, «une étude réalisée par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, la réussite de la participation à une mesure active semble être fortement influencée par le choix éclairé et réfléchi de la participation, par la motivation et par le niveau de présentation aux différentes activités. Selon cette même étude, les deux principales causes de l'interruption ou [...] l'abandon de la participation à une mesure active sont le retour sur le marché du travail et le manque de motivation. Quant à ce dernier motif, ce serait le cas notamment pour les personnes qui s'inscrivent pour éviter une pénalité.»

Ce que j'aimerais savoir, M. le ministre : Est-ce que vous avez pris connaissance de cet avis-là qui va complètement à l'inverse de votre projet de loi puis qui dit que le projet de loi... ils sont assez clairs que le projet de loi va à l'encontre des principes de la loi pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale? On nous parle d'une étude réalisée par votre ministère. Est-ce que vous avez pris compte de cette étude-là? Et, si oui, est-ce qu'on pourrait avoir cette étude, qui dit... C'est une étude réalisée par le ministère, où on parle de la réussite de la participation à des mesures actives, qu'est-ce qui pourrait influencer la participation ou non. C'est inscrit dans l'avis du comité. Est-ce que cette étude-là existe? Puis est-ce que vous avez aussi pris compte de l'avis du comité?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : On va croire sur parole le comité, là, qu'il y a une étude qui existe, là. On va vérifier, et tout. Parce qu'il y en a plusieurs, là, on va vérifier, là. Mais j'ai pris connaissance du rapport, là. Je n'ai pas été impressionné par la rigueur, hein, scientifique et le contenu de ce rapport-là, je peux vous le dire, là; il y a des amalgames et des confusions. Ils ont tout à fait le droit d'écrire, hein? Ils sont tout à fait autonomes et libres, ils ont le droit d'écrire ce qu'ils désirent. Mais, disons, en termes de rigueur, là, c'est des affirmations, là, assez fortes.

M. LeBel : Et vous savez qu'il y a des gens de votre ministère sur ce comité-là.

M. Blais : Mais ils n'ont pas droit de...

M. LeBel : Sans droit de vote.

M. Blais : Sans droit de vote, ils sont simplement observateurs.

M. LeBel : Je n'ai pas nommé de nom.

M. Blais : C'est tout à fait correct, d'ailleurs, hein? Un comité consultatif doit être totalement libre d'écrire ce qu'il veut, ce qu'il désire. Et on peut être libre, bien sûr, d'en faire un commentaire critique aussi, dans le but de l'amélioration future, peut-être.

M. LeBel : Je n'ai pas compris, excusez-moi.

M. Blais : C'est important qu'un comité consultatif soit libre d'écrire. Donc, les fonctionnaires n'interviennent pas de quelque façon, mais, des fois, les fonctionnaires peuvent aider, je suppose, ils sont là un petit peu pour soutien, hein, information, si c'est nécessaire. Ensuite, le comité, c'est des gens qui sont libres d'écrire ce qu'ils veulent sur les sujets, ce qui est une bonne chose, là. Donc, on prend acte de ce qu'ils ont écrit, mais, vraiment... surtout les extraits que vous me lisiez, là, c'était presque déroutant, au niveau des études qui sont disponibles sur ces questions-là. Voilà.

M. LeBel : Ce que vous dites, c'est que...

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Excusez-moi, M. le Président. Ce que vous dites, c'est que le comité... ce que je viens de vous lire du rapport du comité, vous dites : C'est un peu déroutant, ce n'est pas réalité, là.

M. Blais : Oui, parce que les études... ont déjà mentionné ici... Les études sur les effets, là, des formes de réciprocité, là, elles sont nombreuses. L'OCDE a fait des métaétudes même sur le sujet, là, pour faire des comparaisons internationales. Ce que le Parti québécois a fait aussi, à la fin des années 90, ça a été étudié, sur les effets, en termes de sortie, par des experts en économétrie, donc, pour montrer qu'effectivement il y a eu un impact sur les effets de sortie. Donc, voilà. Alors, c'est étonnant, ce qu'on a pu lire. Mais, encore une fois, là, un comité consultatif, les gens ont la liberté d'écrire à partir de leurs connaissances, de leur sensibilité et, bien sûr, on a le droit aussi d'en faire un examen un peu critique, là, quand c'est nécessaire. Il y a probablement eu des meilleurs rapports que celui-là, j'en suis certain.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Oui. C'est certain que le comité est libre d'écrire ce qu'il veut, il a un mandat assez serré. J'ai l'impression que ce comité-là existe depuis longtemps. Je n'avais pas l'impression qu'ils écrivent n'importe quoi. Puis, quand je regarde les membres du comité, c'est des gens qui viennent d'un peu partout au Québec, puis il y a des gens là-dedans qui connaissent leur métier, je...

M. Blais : Mais, à la défense peut-être du comité, hein, pour reprendre la balle au bond, là, si vous permettez, là, à la défense du comité, je l'ai déjà dit ici, c'est vrai que le projet Objectif emploi est parti, disons, d'orientations, au départ, qui étaient assez, disons, travaillées, disons-le comme ça, et aussi où on pouvait craindre des pénalités assez lourdes, assez fortes, là, hein? Bon. Le Parti québécois nous avait habitués à des pénalités qui étaient le double des pénalités dont on parle ici. Donc, on peut comprendre un peu, là, les gens qui sont dans le milieu, qui ont connu cette époque-là, d'avoir ces craintes-là et d'être montés aux barricades, là, dans le rapport, en disant : Écoutez, il ne faut pas revenir à ça.

M. LeBel : Encore la faute au PQ! Non, mais la ligne est...

Le Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît, attention! Attention! Attention!

M. LeBel : Excusez, M. le Président. Non, non, mais je trouve ça comique, mais... tu sais, c'est une bonne ligne. Mais il faut être, comme dit le ministre, plus rigoureux un peu.

M. Blais : Toujours.

M. LeBel : Je dis ça d'une façon sympathique. Mais ce que le comité dit, il dit : La «façon de faire [qui est proposée par le ministre] contrevient à la législation en vigueur, notamment [à] la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion, la Charte des droits et libertés...» C'est gros, là. C'est...

M. Blais : Gros.

M. LeBel : Mais il me semble qu'il faut regarder ça. Et, comme vous dites, là, le comité a la liberté d'écrire ce qu'il veut, le ministre a la liberté de ne pas écouter ce que le comité fait. Mais, bon, chacun est libre de faire ce qu'il veut, sauf qu'on ne peut pas faire semblant, là, ça existe, c'est là.

J'aimerais quand même... le comité parlait d'une étude qui avait été faite sur... si c'était possible de retrouver cette étude-là, là, je pense, ça pourrait nous éclairer.

Mais, nous, quand on lit ce qu'il y a là... Puis moi, je suis porté à croire ce qui a été écrit par ce comité-là. Puis je vous dis, là, on pourrait déposer les membres du comité, là... la liste des membres, c'est des gens, là, tu sais, qui n'écrivent pas n'importe quoi, à mon avis. Je me dis, ça fait juste plaider pourquoi on veut amener cet amendement, pourquoi on veut rattacher un peu votre projet de loi sur les grands principes de la loi pour lutter contre la pauvreté. Ça fait juste nous convaincre qu'il fallait faire quelque chose.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 8)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de St-Denis, allez téléphoner dans... M. le député d'Argenteuil, vous téléphonez dans le corridor.

La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Lors de la suspension de nos travaux avant dîner, nous avions débuté l'étude de l'amendement de M. le député de Saint-Jean à l'article 83.1 proposé par l'article 28. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet amendement? Alors, oui, bien, on peut débuter avec Mme la députée de Gouin. Alors, à vous la parole, madame, en vous précisant qu'il vous reste 2 min 35 s.

Mme David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Alors, juste assez de temps pour apporter un sous-amendement à l'amendement de mon collègue le député de Saint-Jean...

Le Président (M. Cousineau) : Un sous-amendement.

Mme David (Gouin) : Oui. Le sous-amendement serait le suivant : Ajouter, à la fin de l'amendement, les mots suivants : «Ni risquer d'amener les adultes seuls et les familles au dénuement total».

Le Président (M. Cousineau) : Alors, on va suspendre pour faire quelques photocopies de votre sous-amendement, Mme la députée.

(Suspension de la séance à 15 h 9)

(Reprise à 15 h 12)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, votre attention, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Attention, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.

Alors, Mme la députée de Gouin nous propose un sous-amendement à l'amendement de M. le député de Saint-Jean. Mme la députée de Gouin, on vous laisse plaider.

Mme David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, en fait, la question est la suivante. L'amendement du collègue propose de faire en sorte, là, que ce qu'on appelle le présent chapitre... en fait, de quoi on discute depuis quelques heures, ne puisse «pas aller à l'encontre de l'objectif de renforcement du filet de sécurité sociale tel qu'énoncé à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion».

Pourquoi est-ce que j'y ajoute le libellé suivant : «Ni risquer d'amener les adultes seuls et les familles au dénuement total»? C'est parce qu'à l'article 49 de la loi sur le soutien aux personnes et aux familles il y a ce qu'on appelle souvent dans le jargon, là, la clause de dénuement total, qui est le fait que «le ministre peut accorder une prestation à un adulte seul ou à une famille qui n'est pas admissible à un programme pour un motif autre que [...] prévu» — bon, dans un paragraphe — ou qui, bien qu'étant admissible, n'aurait pas droit à cette prestation [si le ministre] estime que, sans cette prestation, cet adulte ou les membres de cette famille seraient dans une situation qui risquerait de compromettre leur santé ou leur sécurité [et] de les amener au dénuement total».

Autrement dit, dans certaines situations, le ministre a la possibilité, vu cette espèce de clause de dénuement total, là, de clairement venir en aide à une personne ou une famille qui est à l'aide sociale et qui, si le ministre ne lui accordait pas une prestation raisonnable, là, serait vraiment dans le dénuement total, et je pense qu'au Québec on ne veut pas que personne soit dans le dénuement total. Donc, l'idée de l'amendement que je dépose, c'est de dire : Non seulement aucun article, aucune disposition du présent chapitre ne doit aller à l'encontre de l'objectif de renforcement du filet de sécurité sociale et économique, non seulement ça, mais il ne faut pas risquer d'amener les adultes seuls ou les familles dans une situation de dénuement total.

Et qu'est-ce que j'appelle le dénuement total? Bien, le dénuement total, en fait, à mon avis, il est déjà présent à 623 $ par mois, ce qui fait qu'à 400 $, là, je trouve qu'on est même en... en fait, je n'ai plus de mot pour le dire, M. le Président. Je trouve qu'on est tellement en bas de ce dont une personne a minimalement besoin, là, juste pour se loger, s'éclairer, se chauffer, manger... Même pas : à 400 $ par mois, on n'a même pas ça, on est dans le dénuement total.

Alors, le but de mon sous-amendement, c'est peut-être — je le dis humblement — d'éclairer le ministre sur le fait qu'on ne peut pas vouloir sortir les gens de la pauvreté, mettre en place un programme, qui peut être un programme très intéressant, mais, d'un autre côté, dire que, bien, s'il y a des gens qui, pour des raisons qui vont nous apparaître ou apparaître aux agents d'aide sociale comme futiles ou, enfin, non pertinentes ou, bon, etc., bien, qu'est-ce que vous voulez, il y aura des sanctions, puis, à la limite, ça fera que les gens, ils auront 400 $ par mois. En faisant ça, on enfonce les gens dans la misère et dans le dénuement total.

Je comprends que le ministre nous disait : Mais, au lieu de parler seulement de ça, pourquoi on ne parle pas de toutes ces personnes qui auront des allocations majorées, intéressantes, plus substantielles et qu'on va aider à sortir de la pauvreté? Je ne demande pas mieux que d'en parler, M. le Président, ça me ferait tellement plaisir. Mais mon plaisir est hautement gâché par le fait que, oui, il y aura ces personnes-là, mais, à côté, il y en aura d'autres qu'on aura plongées dans le dénuement total, sachant que, par ailleurs, la loi permet au ministre d'agir quand il y a dénuement total.

Donc, on ne veut pas d'un dénuement total, on ne veut pas ça au Québec. Personne ne veut ça, tous partis confondus. Je suis certaine que le ministre ne veut pas ça, nous ne voulons pas ça, mais n'empêche que les dispositions du présent chapitre peuvent... je ne dis pas que c'est certain, mais peuvent conduire au dénuement total. Alors, est-ce qu'il faut donc qu'à chaque fois le ministre intervienne pour dire : Ah! c'est vrai, hein, il y a le dénuement total, donc j'invoque l'article 49 et puis là j'agis? Ça n'a aucun bon sens, hein, le ministre ne pourra pas faire ça. Alors, je pense que le plus simple, bien, c'est de ne pas mettre les gens à risque de tomber dans le dénuement total, et c'est la raison pour laquelle je dépose ce sous-amendement.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. Alors, réaction, M. le ministre?

M. Blais : Bien, écoutez, la difficulté, là, encore une fois, elle est législative, là, elle est sur la forme. Sur le contenu, on en reparlera aussi, là, sur la portée exactement, mais, sur la forme... Donc, je rappelle aux collègues, là : l'article 64 de la présente loi — donc la loi-cadre — ne peut être interprété de manière à étendre, à restreindre ou à modifier la portée d'une disposition d'une autre loi, quelle que soit la loi. L'aide sociale a beaucoup d'autres lois qui ont une portée sociale. Donc, c'est vraiment une loi-cadre. Donc, on aimerait faire ce que les collègues nous demandent qu'on ne pourrait pas le faire parce qu'on est en train de modifier, là, la structure et la hiérarchie, là, des droits au Québec. Donc, c'est pour cette raison, là, de forme... d'abord, que la proposition ne fait que démontrer que... Disons, là, l'objection que nous avons n'a pas été encore comprise, visiblement, parce qu'on ne fait qu'empirer les choses.

Sur la question de dénuement total, quand on avancera, on verra que j'apporterai un amendement sur cet enjeu-là en particulier, là où il doit se poser dans le projet de loi, mais pas ici, là où, vraiment, il aura une plus grande efficacité que ce qui est proposé ici, qui n'a aucune efficacité, aucune portée juridique.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Mais, M. le Président, comme le ministre nous met quand même l'eau à la bouche, est-ce qu'il pourrait nous donner ne serait-ce qu'une indication... sans peut-être pouvoir nous révéler le libellé exact, mais est-ce qu'il peut nous donner une indication de ce qui pourrait constituer l'amendement dont il nous parle et dont il nous dit qu'il viendra plus tard?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Essentiellement, dans la première version, là, du projet de loi, là, on avait retiré des outils, au ministre, d'intervention discrétionnaire en situation de dénuement total. On va réintroduire ces outils-là, on va vous indiquer comment on va le faire.

Mme David (Gouin) : D'accord. Merci, M. le Président. Est-ce que c'est à mon tour, M. le Président?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, oui, allez-y, c'est vous qui êtes là.

• (15 h 20) •

Mme David (Gouin) : Oui? D'accord. Donc, on verra ce que le ministre fera à ce moment-là. Mais je soumets que... En fait, pour être franche, je n'ai pas très bien compris l'argument juridique par rapport au sous-amendement que j'apporte. Je ne fais pas exactement le lien. Je suis sincère, là. Est-ce que le ministre pourrait me le réexpliquer?

M. Blais : Non, non, je comprends, là.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Donc, encore une fois... mais c'est ma propre compréhension du sous-amendement, là, bien entendu, là. Je me suis déjà objecté à la proposition d'amendement parce que c'est une proposition qui n'avait pas de force de loi, qui n'avait aucun impact juridique, sauf, à la limite, de porter une confusion juridique sur ce que c'est qu'une loi-cadre. Encore une fois, le texte de la loi-cadre est très clair, là : «La présente loi ne doit pas être interprétée de manière à étendre, restreindre ou modifier la portée d'une disposition d'une autre loi.» Article 64.

Donc, si vous voulez, disons, ajouter à l'amendement qui, en ce moment, est problématique du point de vue juridique, on n'a pas avancé du tout, là, parce que, contrairement à ce que vous recherchez, là, j'en suis sûr, ça n'aura aucune portée, aucune influence juridique, ça va mener à une confusion.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Alors, M. le Président, si le problème du sous-amendement, mais, évidemment, qui est en rapport avec l'amendement, est un problème d'ordre juridique, le ministre... et, si ce n'est que ça, est-ce que le ministre peut suggérer, à ce moment-ci, une avenue permettant de rencontrer exactement le même objectif, c'est-à-dire de nous assurer qu'aucune disposition du présent chapitre pourrait ou bien non pas renforcer, mais alléger, si j'ose dire ainsi, ou démanteler, ou enfin porter atteinte au filet de sécurité économique, puis encore bien pire, amener des familles ou des personnes seules dans une situation de dénuement total? Si le problème n'est que juridique, on peut sûrement le régler.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

(Consultation)

M. Blais : Bon, je m'excuse, on me parlait, là, en même temps, là. Je pense que, sur la question du dénuement total, là, puis les pouvoirs d'intervention, on va clarifier ça en temps et lieu. Je vous ai donné l'indication, là, orientations générales, donc la portée exacte, l'écriture juridique, là, sera déposée en temps et lieu.

Si ce qui est demandé, encore une fois, c'est : Oubliez les sanctions, il ne faut pas qu'il y ait aucune sanction, c'est difficile pour nous, tout simplement parce que je vous rappelle le problème fondamental que nous avons. Je vous rappelle, dans le cas d'une personne seule qui va dans un parcours de formation... pourra aller chercher jusqu'à 1 193 $ par mois. C'est, je pense, du jamais-vu, là, de l'aide sociale. Et, en plus, on ajoute à titre expérimental, mais il faudra voir ensuite, là, si on peut l'ajouter pour les autres prestataires, la possibilité d'aller chercher plus d'argent sans être coupés à 100 % immédiatement, après le montant d'argent habituel de 200 $.

Donc, pour parler un peu plus techniquement, le taux marginal de taxation de ces personnes-là serait réduit à autour de 50 %, alors qu'il est aujourd'hui, là, très élevé. On veut le faire pour eux, on va voir comment on peut fonctionner. Parce que c'est un peu difficile, ça demande une intégration de la fiscalité plus forte que ce qu'on a aujourd'hui. Donc, c'est beaucoup d'argent sur la table. J'ai mentionné que le coût simplement des bonifications pourrait être autour de 56 millions.

Le paradoxe dans ce que vous recherchez, puis là c'est là qu'il y a finalement un désaccord, là, le paradoxe dans ce que vous recherchez, c'est que, lorsqu'on ne met pas les pénalités, hein, le taux de participation tombe très faible. Je vous rappelle qu'en ce moment les taux de participation pour les mesures chez les jeunes 25 ans et moins — on pourra regarder d'autres groupes si ça vous intéresse — au bout du compte, c'est 14 %. Bon, plusieurs vont à une rencontre ou deux, mais, lorsqu'ils s'engagent vers un parcours, le taux de participation est extrêmement faible.

Le paradoxe, c'est qu'il y a un effet d'avoir la présence d'une pénalité, sans la prendre nécessairement, c'est-à-dire ce qu'on appelle l'effet ex ante d'une pénalité, c'est là, c'est présent. Et, en majeure partie, les gens n'iront pas dans cette direction-là, il s'agit de personnes qui sont des premiers demandeurs, qui sont aptes. S'ils ne sont pas aptes, on les trouve simplement parce qu'il y a des rencontres, donc on peut progresser avec eux.

Donc, le paradoxe de ce que vous recherchez, c'est que les pénalités, même si elles ne sont pas effectives parce que les gens finalement participent, elles ont un effet de participation, puis elles élèvent la participation à un seuil plus important, donc ils vont aller chercher plus d'argent dans leurs poches et, éventuellement, qui sait, avoir un parcours dans lequel ils vont pouvoir sortir définitivement, là, de l'aide sociale, ce que l'on recherche tous ici, autour de la table, bien entendu.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Je comprends ce que le ministre dit, M. le Président, mais je ne peux quand même pas m'empêcher de dire que — je parlais de paradoxe, ce matin — on est quand même encore dans des paradoxes. Non seulement personne ne souhaite qu'une personne reste à l'aide sociale, à moins évidemment qu'elle vive suffisamment de problèmes pour n'avoir aucun autre choix que d'être à l'aide sociale... Et ça, je pense que tout le monde va en convenir aussi, c'est sûr que c'est un projet de vie qui, en tout cas, pour le moment, là, condamne à la pauvreté.

Puis je rappelle au ministre qu'au bout de deux ans du programme Objectif emploi on va s'entendre, hein, si la personne n'a pas réussi à trouver un emploi, s'il n'y a pas d'emploi disponible dans sa région, si les choses n'ont pas beaucoup avancé, bien, tout ce qu'elle recevra, c'est sa prestation de base. Alors, on est dans des situations difficiles, là, à moins de s'imaginer que tous les nouveaux demandeurs qui arrivent chaque année trouvent, dès l'année suivante, un emploi vraiment convenable, là. En tout cas, je ne pense pas que personne ne s'imagine ça, ici. Donc, on est vraiment dans des situations de pauvreté.

Le ministre nous dit : Moi, je veux faire tout ce qui est possible pour que les gens puissent s'en sortir. C'est ce que nous voulons tous et toutes, je sais, mais le problème, c'est qu'entre-temps on accepte en ce moment — en ce moment, là — qu'une personne seule touche à peu près, à l'aide sociale, une personne seule dite apte à l'emploi, la moitié de ce qu'il en faudrait pour couvrir ce qu'on appelle la mesure du panier de consommation. En ce moment, là, au moment où on se parle, la moitié, 9 000 quelques dollars; avec les pénalités, 6 000 $. On est au tiers du panier de consommation.

Or, je comprends que le ministre voit quelques vertus dans l'hypothèse de sanctions; moi, il ne me convainc pas. Je n'ai jamais été convaincue par les arguments du style la carotte et le bâton, là. Là, je comprends que les carottes sont devenues peut-être plus intéressantes, mais le bâton est quand même assez sévère. Oui, il y a eu d'autres gouvernements qui en ont fait autant par le passé, là, mais moi, j'étais dans l'opposition, je m'opposais à ces mesures. J'ai quand même une certaine cohérence dans la vie. Mais c'est du passé. Là, en ce moment, on peut faire mieux, disons. Disons ça comme ça.

Une voix : ...

Mme David (Gouin) : Puis il semble que mes collègues de l'opposition officielle sont d'accord avec moi. Donc, j'aimerais juste demander au ministre... Dans un contexte où, par ailleurs, il s'est vu confier, par le premier ministre...

Des voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Allez-y, Mme la députée.

Mme David (Gouin) : Oui, les petits copains, ils sont agités un peu, là.

Le Président (M. Cousineau) : Oui. D'ailleurs, c'est pour ça que je les ai rappelés à l'ordre.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Poursuivez, Mme la députée.

Mme David (Gouin) : Dans un contexte où le ministre s'est fait donner, par le premier ministre, un mandat important, qui est celui de mettre en place un grand chantier de réflexion sur le revenu minimum garanti, est-ce qu'au fond ce que le ministre est en train de nous dire, c'est : 400 $ par mois, ça pourrait être ça, le niveau du revenu minimum garanti au Québec? Est-ce que c'est ça, là, qu'on est en train de se dire?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : J'ai déjà mentionné que l'aide sociale est une forme particulière de revenu minimum garanti, ou que toutes les limites que j'ai déjà expliquées dans un ouvrage quand j'étais plus jeune, je suppose, que toutes ces limites-là, notamment que ça a été fait pour répondre aux personnes inaptes — on appelait ça comme ça à l'époque — et ça a été fait avec peu de considérations pour l'incitation au travail, hein? Quand on relit, là, les textes des fonctionnaires qui ont travaillé là-dessus à l'époque, ils ne pensaient pas qu'il y aurait des personnes très nombreuses qui soient aptes au travail là-dessus.

Donc, il nous faut d'autres formes de mécanismes de transferts. On en voit certains à l'oeuvre, on en a déjà parlé; par exemple, les allocations familiales pour les familles ont un effet bénéfique parce qu'elles sont accordées à la fois aux actifs et aux inactifs; donc, il nous faut d'autres formes de transferts. Quelle que soit la hauteur de ces transferts-là, même un transfert modifié, différent, 300 $, pourrait avoir un impact, bien sûr, sur son maintien à l'aide sociale, hein, ou pourrait avoir un impact sur la pauvreté plus important, là, qu'une augmentation, là, de l'aide sociale de 300 $, qui aurait très, très, très peu d'impact sur la pauvreté. Donc, c'est assez facile à démontrer, là, par un petit schéma.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

• (15 h 30) •

Mme David (Gouin) : M. le ministre... Excusez-moi. M. le Président, je veux juste être sûre de bien comprendre, parce que je pense que ça ne se peut pas, là, le ministre... je veux être sûre d'avoir bien compris le ministre, là. 300 $ par mois ne peut pas être le montant de base d'un revenu minimum garanti, là.

M. Blais : ...

Mme David (Gouin) : En 2016, au Québec.

M. Blais : ...proposition sérieuse... comme en Europe, qui tourne autour de ces montants-là. Bien sûr, il faut que vous mainteniez, pendant la période de transition, des mécanismes sélectifs, aide sociale ou d'autres, hein, de maintenir ces mécanismes-là. Mais l'impact sur la pauvreté, à une autre époque, je l'ai mesuré, l'impact sur la pauvreté, la diminution de la pauvreté était réelle. Parce que les premiers, statistiquement, à sortir de la pauvreté, c'est ceux qui sont les plus près des seuils. Ceux qui sont les plus près des seuils, ce sont les actifs qui ont des faibles revenus. Et, bien sûr, vous élevez aussi, en plaçant un socle sous leurs pieds, les personnes qui sont... qu'on appelle les inactifs... en tout cas, les personnes qui sont à l'aide sociale, notamment... peut avoir un impact positif, mais tout dépend, bien sûr, des effets de substitution des programmes que vous abolissez notamment pour financer cette mesure-là.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée.

Mme David (Gouin) : Oui, je comprends, M. le Président, mais, pour faire une histoire simple et courte, là, ma question au ministre est la suivante : Estime-t-il qu'au Québec, en mai 2016, un montant de 400 $ par mois pour une personne qui n'a rien d'autre...

M. Blais : ...

Mme David (Gouin) : ... — rien d'autre — une personne seule, à l'aide sociale, apte au travail et qui n'a rien d'autre... elle est seule, il n'y a pas d'allocation familiale, tu sais, elle a 400 $ par mois. Est-ce qu'il estime que ça représente une forme de revenu minimal garanti... en fait, pas une forme de revenu minimal garanti, mais la hauteur raisonnable d'un revenu minimum garanti? C'est ça, le sens de ma question.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Oui... complexe, parce qu'encore une fois il y a différents types de revenu minimum garanti. Si vous maintenez votre aide sociale comme elle est là aujourd'hui, c'est un revenu minimum garanti. Si vous maintenez d'autres transferts, ça peut constituer des revenus minimums garantis. La question, c'est : Comment vous agencez vos transferts entre eux pour augmenter la valeur — c'est ce qui vous intéresse — la valeur de ce revenu minimum garanti? Comment vous le garantissez à des personnes qui n'y ont pas accès aujourd'hui, qui devraient y avoir accès? Et l'effet que ça peut avoir, notamment sur les taux marginaux du revenu minimum garanti actuel? Donc, ça dépend des effets de substitution, là.

Mme David (Gouin) : Bon. Alors, je vais poser ma question de façon plus simple, dans le fond, parce que je pense aussi aux gens qui nous écoutent, là, c'est un peu complexe, tout ça, hein, on s'entend? Le ministre estime-t-il qu'au Québec aujourd'hui une personne seule, quel que soit son âge, peut — je ne sais même pas si je dois dire «vivre», là — mais peut vivre avec 400 $ par mois?

M. Blais : Bien, écoutez, là — puis c'est tout à fait différent comme question — on ne parle plus de revenu minimum garanti, là, on parle tout simplement de savoir quel est le niveau financier qu'une personne doit avoir pour vivre, là. Moi, je ne veux pas me prononcer là-dessus. Ce qui est important, là, ce qui est important dans le programme, ce n'est pas ce que l'on... hein, on ne veut pas que les gens se rendent là. Et le programme n'est pas fait pour ça, hein? Ce n'est pas un programme qui est fait...

Je l'ai mentionné souvent, l'évaluation que nous faisons des coûts est au-dessus de 50 millions — du programme — facilement, parce que les bonifications vont coûter cher. Quelqu'un, là, qui est vraiment dans un parcours, après un manquement, deux manquements, trois manquements, quatre manquements — je vous rappelle que, pour le PQ, c'était deux manquements — si quelqu'un décide, là, qu'il préfère ne pas faire affaire avec l'État et qu'il ne veut pas rendre de comptes, je pense que tout le monde accepte... même ces personnes-là souvent ont accepté qu'il y aura des conséquences puis... Et ça, ça se fait, encore une fois, partout dans le monde, aujourd'hui.

Donc, à un moment donné, les gens doivent faire des choix, choix que nous leur proposons, à ces personnes-là, qui sont de loin les personnes qui ont une capacité à sortir éventuellement de l'aide sociale et à bénéficier, pour le reste de leur vie, hein, d'une amélioration de leur capital humain. Bien, si jamais ces gens-là font ce choix-là, c'est parce qu'ils vont aller chercher d'autres revenus ailleurs, je suppose, hein?

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée.

Mme David (Gouin) : C'est intéressant, M. le Président, ce que le ministre vient de dire, parce que c'est exactement ce que je pense. Pour une fois qu'on est d'accord, on va célébrer quelques instants.

Le danger des fameuses conséquences — c'est drôle, je venais d'écrire le mot «conséquences» — que le ministre est en train de débattre avec nous, là, bien, c'est qu'effectivement il y a des gens... je ne dis pas qu'il y en aura des masses, mais il peut y en avoir qui trouvent que tout ça est vraiment très compliqué, là, très encadré, très suivi. La liberté, je vous dis qu'elle n'est plus très grande dans tout ça. Bon, finalement, je vais prendre le 400 $ puis, bien oui, je vais m'adonner au travail au noir parce que c'est tellement plus simple.

M. Blais : ...

Mme David (Gouin) : Je ne conseille pas ça aux gens, comprenez-moi bien, ce n'est pas ça, pour toutes les raisons qu'on a dites hier soir, je crois, mais ça peut arriver, et je trouve que c'est une conséquence indésirable, alors que ma pensée, c'est que, si on offre aux gens ce strict minimum, et entendons-nous qu'on est vraiment dans le strict minimum, là, de 623 $ par mois, le risque est moins grand.

L'autre chose que je veux dire au ministre, c'est qu'il nous dit souvent : Bien là, il faut penser à tous ceux et celles qui vont bénéficier du programme —je suis d'accord avec lui — puis il faut penser à ceux et celles, et je sais qu'il pense aux jeunes en particulier, que la menace d'une sanction va amener à se mettre en mouvement — là, j'essaie d'utiliser un petit peu les mots ministériels que j'ai souvent entendus de ce côté-là — et puis que, dans le fond, il n'y en aura quasiment pas, des gens qui vont subir des sanctions. Mais il va y en avoir, parce qu'en fait, vous savez, c'est comme quand... je sais que la comparaison est risquée, mais je la tente quand même, juste pour qu'on se comprenne.

On est plusieurs, ici, à avoir des enfants ou des petits-enfants, les menaces de sanctions, là, surtout de nos jours, sont assez inopérantes, si, à un moment donné, il n'y en a pas, de sanction; tout le monde sait ça. Et donc, lorsque, du côté ministériel, puis on a même utilisé le terme «pardon» hier, lorsqu'on parle de sanctions, c'est parce qu'on sait qu'il va y en avoir et on sait que le fait qu'il y en ait va pouvoir avoir un effet, selon le ministre, incitatif sur d'autres personnes pour ne pas se rendre aux sanctions. Donc, il va y en avoir.

Il va y en avoir parce que sinon, tout ça, ça serait comme une espèce de vaste mise en scène pour dire aux gens : Attention! Si vous ne participez pas, si vous ne faites pas telle chose, il y aura des sanctions. Puis il n'y aurait jamais de sanctions? Ça, ça se sait assez vite, hein? Donc, ça ne marchera pas. Donc, il va y avoir des sanctions. Et, s'il y a des sanctions, ça veut dire qu'on va accepter qu'il y ait, au Québec, des personnes... Quel en sera le nombre? Je ne le sais pas. Je ne le sais pas. Est-ce que ce sera peu de gens, est-ce que ce sera plus de gens? Je ne le sais pas. Mais il y en aura, et ces gens-là vivront avec 400 $ par mois, ce qui est, à mon avis, parfaitement indécent. Ou alors, effectivement, ils vont aller vers l'itinérance ou vers le travail au noir, et je pense tellement qu'on ne sera pas plus avancés. J'arrête ici pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord. Il vous restera 4 min 30 s pour avoir peut-être le dernier mot sur votre sous-amendement, Mme la députée. Alors, je suis prêt à recevoir, par alternance, l'opposition officielle.

M. Blais : Oui?

Le Président (M. Cousineau) : Oui.

M. Blais : J'ai une petite chose sur ce qui a été dit, là.

Le Président (M. Cousineau) : Allez-y.

• (15 h 40) •

M. Blais : En fait, si vous êtes préoccupée par le montant minimal, le revenu minimum, etc., là, donc, le montant, là, accessible, dans ce qui est prévu à Objectif emploi, c'est 502 $, hein? Vous voyez, là, notamment, là, à la case 16, là, c'est le montant dont va disposer une personne qui ne veut absolument pas, là, participer et qui préfère — libre choix — aller plutôt chercher ses revenus. Je n'ai pas dit qu'il va aller chercher des revenus au noir. À vrai dire, on pourrait regarder plus précisément la conséquence de ça. Il va probablement aller chercher des revenus au blanc : il va aller faire autre chose, mais ce n'est pas 502 $.

Sur l'effet des incitations, ça, la littérature, elle est abondante pour dire que l'effet de l'incitation, c'est plutôt simplement l'effet ex ante, c'est-à-dire le non-exercice de... de la sanction... de la pénalité, pardon, c'est le non-exercice de la pénalité, mais savoir que, si c'est présent, que c'est dans l'ambiance, c'est aussi important sinon plus important que l'exercice même de la pénalité.

Et je rappelle à ma collègue, là, que la réciprocité, elle existe à peu près partout dans le monde, dans toutes les provinces canadiennes, sauf le Québec et Terre-Neuve. Elle existe, à ma connaissance, ce qu'on a vérifié, dans tous les pays scandinaves. Les pays les plus égalitaires au monde exercent une forme de réciprocité. Je ne dis pas que c'est la même que la nôtre, il y a différentes variantes, il y a différentes façons de fonctionner. On a essayé de trouver un mécanisme qui va avoir un impact positif sur la participation. Et je rappelle aussi que, si jamais quelqu'un décide d'aller aussi loin qu'elle le pense, là, c'est-à-dire de nier, là, toute forme de participation, au maximum, ça va durer deux ans, là, de sa vie. Ensuite, elle redevient de plein droit, là, bénéficiaire de l'aide sociale, si c'est vraiment son choix de vie, là, de continuer dans cette voie-là. À un moment donné, les gens peuvent choisir ou ne pas choisir. On leur offre des choses, on ajoute à la fois des bonifications, on ajoute des conséquences. À un moment donné, les gens, je pense que vous avez raison là-dessus, peuvent choisir, là. Ils refusent ça puis ils vivent les conséquences pendant une période de temps qui est limitée quand même.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je passerais maintenant la parole à M. le député de Saint-Jean, sur l'amendement.

M. Turcotte : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : Sur le sous-amendement.

M. Turcotte : Sur le sous-amendement, mais aussi j'aimerais reprendre quelques éléments, là, que le ministre mentionne, bon, que, si les gens, au fond, n'acceptent pas le programme ou n'embarquent pas dans le programme Objectif emploi, bien, les gens, c'est parce, bon, soit qu'ils travaillent au noir ou autres. Là, c'est un peu ça qu'il a mentionné.

Bien, moi, je crois que c'est comme un constat d'aveu, de la part du ministre, de confirmer que le montant, là, avec les sanctions, etc., ça va inciter effectivement le travail au noir, puis je pourrais même dire — on l'a vu hier, je l'ai mentionné — la violence, etc., là, la criminalité, parce qu'inévitablement, quand on met les gens... puis c'est un peu ça que notre collègue la députée de Gouin mentionne par son amendement quand on dit : «...risquer d'amener les adultes seuls [ou] les familles au dénuement total.» Si on amène les gens au dénuement total, bien, à un moment donné, les gens ont quand même une dignité, ont quand même un besoin de vivre de base, là, avoir un toit, d'avoir des vêtements, d'avoir un peu de nourriture — au moins pour s'alimenter — de base. Si on n'est pas capables de couvrir ces besoins-là, bien, c'est là que des mauvais choix, si on peut dire ça ainsi, se posent, puis ce n'est pas parce que les gens désirent poser ces mauvais choix là, mais c'est parce qu'ils y sont obligés et confrontés.

Le ministre nous parle : Bien, avec 300 $ par mois, ça peut être ça, le revenu minimum garanti. Bien, je m'excuse, là, avec 300 $ par mois, au Québec, à l'heure actuelle, c'est impossible de vivre, à moins que le ministre a des recettes magiques qu'il aimerait faire profiter, là, aux citoyens, là, et que les citoyens puissent vivre avec 300 $ par mois. Si le ministre prétend ça puis le croit, moi, je crois qu'on a un gros problème. On a un gros problème.

Puis, en plus, le même ministre qui nous dit ça... si je me réfère à l'article 19 de la loi sur la pauvreté et l'exclusion, le ministre dit souvent : C'est la loi-cadre, hein? Bon, c'est comme si, parce que c'est une loi-cadre, on n'y réfère pas. On y réfère certain. C'est une loi importante, une loi-cadre, ça donne aussi des orientations puis ça dit un peu une volonté, là, pour le gouvernement.

L'article 19 de la loi-cadre mentionne : «Le ministre est d'office le conseiller du gouvernement sur toute question relative à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.» Le même ministre qui nous dit qu'on peut pratiquement vivre avec 300 $ par mois, là.

M. Blais : ...

M. Turcotte : Vous aurez le temps de répliquer par la suite.

M. le Président, le ministre, s'il veut répliquer, pourra répliquer, mais moi, c'est ce que j'ai entendu. Peut-être que j'ai mal entendu. Mais ma collègue a posé plusieurs fois la question : Comment ça prend d'argent pour être capable de vivre? 400 $, 300 $, le revenu minimum garanti? Le ministre : J'aimerais mieux ne pas répondre, je ne veux pas prendre ça personnellement, puis tout ça, bon. Beaucoup de parenthèses pour finalement arriver au fait qu'après toutes les sanctions, là, bloc 16, Conséquences de l'absence, après quatre absences, bien, la personne, elle va devoir vivre avec 399 $ plus le 103 $. Je vais le rajouter, parce que le ministre va tout de suite me le sortir. Mais ça, même les gens qui ne sont pas à l'aide sociale ont le 103 $ par mois. Donc, ça fait 502 $ par mois. 502 $ par mois, là, on n'est pas capables de se payer un loyer, on n'est pas capables de s'alimenter, puis on a encore moins l'occasion de subvenir aux autres besoins de base.

Je continue l'article 19. «Le ministre est d'office le conseiller — le conseiller — du gouvernement sur toute question relative à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. À ce titre, il donne aux autres ministres tout avis qu'il estime opportun pour améliorer la situation économique et sociale des personnes et des familles en situation de pauvreté et d'exclusion sociale et il est associé à l'élaboration des mesures qui pourraient avoir un impact significatif sur ces personnes et ces familles.

«Il incombe aux ministères et organismes du gouvernement de communiquer au ministre les renseignements nécessaires à l'exercice de ces responsabilités.»

Moi, je lis ça, M. le Président, et je comprends que c'est le ministre qui est devant nous actuellement, et c'est le même ministre qui parraine un projet de loi important, le projet de loi n° 70, qui, à nos yeux — et on n'est pas les seuls, un grand nombre de groupes sont venus ici, en commission parlementaire, se faire entendre, un grand groupe d'organismes nous ont envoyé des mémoires parce qu'ils n'ont pu être entendus en commission parlementaire...

En passant, je rappellerais, M. le Président, que peu de groupes ont sauté de joie à la lecture du projet de loi actuel, là, hein, on s'entend? Même les groupes qui étaient favorables au projet de loi avaient des bémols, là, et même les groupes qui étaient favorables à l'obligation disaient qu'on ne devait pas embarquer sur le terrain des sanctions. Même le Conseil du patronat a mentionné qu'il est très difficile de vivre au Québec avec 623 $ par mois. Bon, on a entendu ça, ici, là. Tous ceux qui étaient présents ont entendu ça.

Le même ministre, qui est le conseiller, qui est d'office le conseiller du gouvernement sur toutes les questions relatives à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, dépose ce projet de loi là qu'on a, aujourd'hui, devant nous, qui, je dois le dire — je dois le dire — va créer de la pauvreté, va créer de la pauvreté, parce qu'on le voit, là, avec les sanctions... Puis le ministre, c'est comme s'il nous dit : Si les gens n'acceptent pas le programme ou si les gens sont absents... Et on ne le sait pas, pourquoi, là. On donne des exemples, on a donné quelques exemples puis, bon, souvent, le ministre, bon : Ah! oui, peut-être, on ne sait pas.

On ne peut pas connaître l'état de la vie de chacun des nouveaux prestataires et les impacts que ça peut avoir sur leur vie. Donc, moi, je dis qu'à l'heure actuelle, là, en s'attaquant à la prestation de base d'aide sociale, inévitablement, ça va créer de la pauvreté et ça va à l'encontre de différentes lois qu'on a mentionnées. D'autant plus qu'hier on l'a su — on l'a su, le ministre l'a lui-même confirmé — que, pour les nouveaux demandeurs, donc les prestataires du programme Objectif emploi, ils n'auront pas les mêmes droits que les prestataires d'aide sociale actuels. Il nous a dit ça quand on a fait référence à l'article 59, je crois, hein, de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, article 59 qui, je vais le citer, M. le Président, ça vaut la peine de le citer, article 59 : «La prestation accordée à l'adulte seul ou à la famille ne peut être réduite pour défaut d'entreprendre des démarches en vue d'intégrer le marché du travail, notamment en cas de refus, d'abandon ou de perte d'emploi.»

• (15 h 50) •

M. le Président, le ministre a mentionné que cet article-là, ça ne s'appliquait pas aux participants du programme Objectif emploi parce qu'ils n'étaient plus considérés dans la même case — même si je n'aime pas ça dire ça, mais c'est quand même ça, le fait — que les prestataires actuels de l'aide sociale. Moi, j'ai bien de la misère. Bien de la misère. On est en train de créer deux catégories, même si on sait que ça se fait déjà parce qu'on sait, bon, des participants à des programmes, puis tout ça, des fois, ont des statuts particuliers. Mais ces participants-là aux programmes particuliers actuellement ne sont pas obligés de participer à ces programmes-là. Il y a un choix qui se fait. Là, le programme Objectif emploi est obligatoire pour les nouveaux demandeurs et, s'ils n'acceptent pas, bien, ils n'en ont pas, de prestation. Et, s'ils acceptent, et pour des raisons qu'on pourrait énumérer, mais on y reviendra, ils seront sanctionnés, en premier sur l'allocation spéciale et, par la suite et à différentes fréquences, sur la prestation de base. Donc, selon moi — selon moi — le sous-amendement de notre collègue la députée de Gouin est très pertinent parce qu'effectivement nous voulons éviter que les personnes, les adultes seuls et les familles soient confrontés au dénuement total.

Je l'ai mentionné hier et je le redis aujourd'hui : C'est pratiquement une clause orphelin, hein? On le voit, là, on l'a vu dans d'autres sujets, dans d'autres enjeux, et je crois qu'il y aura des contestations de ce programme-là parce que c'est vraiment parce qu'on est nouveau demandeur, donc soit à cause de notre âge... Puis le ministre dit toujours : C'est les jeunes, c'est les jeunes, c'est les jeunes. Mais on sait qu'il y en a d'autres, mais, en même temps, de viser juste les jeunes, uniquement les jeunes, ça serait vraiment considéré, là, discriminatoire. Donc, on inclut un certain nombre d'autres personnes pour montrer que ce n'est pas que les jeunes, mais le ministre — et le précédent ministre — s'attaque vraiment aux jeunes dans le projet de loi, on le voit.

On a demandé à plusieurs occasions, puis je crois que c'est notre collègue la députée de Gouin qui, à l'Assemblée nationale, au salon bleu, s'est levée durant son intervention pour demander une étude, une analyse différenciée selon les sexes. Elle l'a demandée. Elle a demandé de suspendre l'étude du projet de loi tant et aussi longtemps qu'on ne connaissait pas les résultats de cette étude. Ça a été refusé. On l'a mentionné, le syndicat de la fonction publique a fait une demande d'accès à l'information pour obtenir toutes les études et analyses des impacts du projet de loi. Je ne me souviens plus exactement, là, mais je crois qu'on en a... le syndicat a reçu une information comme quoi qu'il y en avait peut-être 17, études, là, et documents, et seulement qu'une a été transmise. Donc, peu importe le nombre, là, sur tout le nombre, qui était quand même important, seulement qu'une étude a été transmise. Et le ministre nous a déposé, ici, la réponse ainsi que le document en question, qui est un document quand même assez de base, là, qui ne dit pas grand-chose sur l'impact du projet de loi, bien entendu.

Je pourrais mentionner différents éléments, M. le Président, mais je pourrais citer le RAPSIM, qui est le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal, qui mentionne, dans la revue... bien, ce n'est pas le RAPSIM, là, mais le RAPSIM est impliqué indirectement, là, mais c'est dans la revue L'Itinéraire de janvier 2016. Une citation, ici : «Dans le Plan d'action interministériel en itinérance 2015‑2020, il est reconnu pourtant que le niveau des prestations actuel permet à peine de couvrir la moitié des besoins essentiels d'une personne, qui sont de se loger, de se nourrir, de se vêtir et de se déplacer. Le gouvernement envisage tout de même de couper dans un niveau de revenu déjà largement insuffisant.»

Je l'ai mentionné, les groupes, bon, de la Mauricie et du Centre-du-Québec ont fait un exercice, on pourrait mentionner plusieurs groupes comme ça qui ont fait un exercice de rencontrer leurs membres, de rencontrer les participants pour voir leur opinion, ce qu'ils en pensaient, comment qu'ils vivaient cette situation-là. Force est de constater qu'il n'y a pas personne, il n'y a pas personne qui est capable de vivre après les sanctions qui sont mentionnées.

Et, en terminant, pour l'instant, M. le Président, le ministre aime beaucoup l'histoire, j'aimerais rappeler une partie sombre de l'histoire de l'aide sociale au Québec, qui, malheureusement, célèbre son 30e anniversaire ce mois-ci. Et vous aurez compris, M. le Président, qu'il est question, bon... en mai 1986, le gouvernement libéral engage une escouade d'environ 150 agents, qu'on a appelés les boubous macoutes par la suite, et qui faisaient, au fond, la chasse aux sorcières, hein, rentraient dans les maisons et partout pour voir qu'est-ce qui se passait dans les ménages. Effectivement, ça arrive, des fois, qu'un gouvernement, qu'un parti politique fait des choses qu'on peut dire regrettables, mais je crois qu'on a aussi la responsabilité de travailler à améliorer notre présent et notre avenir. Puis je crois que le ministre a actuellement une belle opportunité, effectivement — effectivement — d'aider les gens à se trouver un emploi, effectivement, d'aider les gens à améliorer leur formation et leurs compétences de base, puis j'inclurais beaucoup, principalement important, l'alphabétisation, le ministre l'a mentionné aussi, la francisation, et aussi, oui, si on peut faire en sorte de développer des habiletés sociales pour les gens puis que les gens puissent être davantage autonomes, puis puissent participer davantage dans la société. Mais tout ça, tout ça peut se faire sans obligation de la part du ministre et sans sanctions.

Quand je dis : Sans obligation, j'aimerais rappeler, M. le Président, le ministre a refusé notre amendement, a voté contre notre amendement qui visait à... Le ministre aime ça parler de la contrepartie, hein, il parle souvent de la contrepartie. Dans ce cas-ci, là, le gouvernement avait une belle occasion de démontrer que lui aussi, il prend une obligation de résultat, parce qu'en ce moment les seuls qui ont une obligation de résultat sous peine de sanctions et d'en arriver, comme notre collègue le mentionne, la députée de Gouin, dans le dénuement le plus total, bien, le gouvernement avait une belle occasion de démontrer que lui aussi, il a une obligation de résultat, puis de bien faire les choses, puis de s'assurer que son programme Objectif emploi soit performant, efficace, puis qu'il réponde aux besoins des prestataires, des bénéficiaires.

Mais, pour ça, il faut qu'il y ait les services, il faut qu'il y ait l'accompagnement. Jusqu'à maintenant, on n'a pas eu, tant que ça, la preuve que c'est au rendez-vous. Même si le ministre nous annonce, là, 3,5 % d'augmentation, là, on s'entend, là, c'est beaucoup, hein, dans l'indexation de base, là. Et, quand on voit tout le nombre d'agents qui ont... qui, d'année après année, diminue le nombre d'agents dans les centres locaux d'emploi, qu'on ferme les centres locaux d'emploi... Hier, notre collègue de Richelieu en a fait la nomenclature : Saint-Rémi, Contrecoeur, etc., Granby, donc des centres locaux d'emploi qui ferment. Sinon, quand il y a des centres locaux d'emploi, ça devient juste un comptoir postal, là, hein? À Mirabel, si je ne me trompe pas, à Mirabel, on rouvre la porte, c'est un comptoir avec une boîte aux lettres, puis il y a un téléphone, et puis, une journée par semaine, on a une agente, un agent qui est là et qui accepte les demandes, prend les demandes puis il transfère ça ailleurs. Donc, côté services, accompagnement personnalisé, de la difficulté.

Donc, moi, je crois que le ministre, s'il veut être crédible sur sa volonté de résultat pour le programme Objectif emploi, il doit prendre l'obligation, lui aussi, sur ses épaules, et pour le gouvernement, de dire que : Oui, les services seront au rendez-vous, oui, l'accompagnement sera au rendez-vous, puis, oui, les places seront disponibles pour les formations, pour le développement des habiletés sociales et, là, on pourrait commencer à jaser de quelque chose. Mais là on n'en est pas là : en ce moment, les seules personnes qui ont le fardeau de la preuve, c'est les nouveaux demandeurs, les primodemandeurs, qu'on appelle. Et c'est déjà eux qui ont à vivre, au quotidien, les réalités de leurs conséquences. Il n'y a pas plus conscients des problèmes de la pauvreté que les gens qui la vivent, ils la vivent au quotidien. Ils ont déjà des enjeux d'être capables de se nourrir, de se trouver de la nourriture pour finir la semaine, d'être capables de payer le compte d'Hydro. On le sait, c'est la période, là... là, c'est terminé un peu, là, mais, dans les dernières semaines, les derniers jours, c'était la période du début des coupes à Hydro-Québec. Le nombre de personnes qui a appelé à mon bureau de circonscription, j'en ai déjà parlé, j'en ai déjà fait référence, M. le Président, ce n'est pas des gens qui vivent dans la richesse; des gens qui vivent dans la pauvreté, puis c'est des gens qui ont des choix difficiles à faire et, des fois, malheureusement, bien, n'ont pas assez d'argent pour boucler leurs fins de mois.

Donc, avec toutes les sanctions que nous avons là, M. le Président, moi, je crois que l'amendement... le sous-amendement, pardonnez-moi, le sous-amendement de notre collègue la députée de Gouin est d'autant plus pertinent. Bien entendu, il s'inscrit dans le cadre de l'amendement que j'ai déposé. Et je crois que le ministre pourrait y réfléchir parce qu'il a la responsabilité, selon la loi-cadre, d'être le conseiller spécial du gouvernement dans toutes les matières. Et donc il a cette responsabilité-là, il doit assumer le poids de cette responsabilité-là, il aura à appliquer le projet de loi n° 70, mais il a aussi à appliquer et à insuffler cette volonté-là de la loi-cadre dans toute l'action du gouvernement. Et moi, je crois puis je l'ai dit, je sais que le ministre a une sensibilité et a développé une expertise dans la matière, je crois qu'il est la personne toute désignée pour occuper ce poste-là. Cependant, il faudrait que ça ne s'arrête pas qu'aux paroles, mais que ça passe dans les actes et dans l'action. Merci, M. le Président.

• (16 heures) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, voulez-vous réagir à ces derniers propos, avant que je passe la parole à quelqu'un d'autre?

M. Blais : Oui. Hein, soyez prudent sur l'expertise, je suis juste un ancien professeur de philosophie, là, donc soyez très prudent là-dessus.

Deux éléments, donc. Je vais être obligé de corriger, là, le collègue. L'article 83.1 a une portée juridique en ce moment et il oblige le ministre à offrir un accompagnement personnalisé. Il l'oblige, et un prestataire pourrait avoir recours contre le ministre. Donc, il a une portée juridique. L'amendement que vous proposez n'a aucune portée juridique. C'est la raison pour laquelle j'ai considéré, là, qu'il était inutile.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je suis prêt à céder... Oui. M. le député de Masson.

M. Lemay : Bonjour, M. le Président, M. le ministre. Bien moi, j'avais juste une petite question, là. En fait, la semaine dernière, là, vous avez introduit le nouveau diagramme, là, qui explique ce qu'on discute, tantôt, des absences, là, et puis peut-être deux, trois questions rapides, là. Quand vous parlez, là, de s'absente pour plus de cinq jours, est-ce que vous mentionnez cinq jours consécutifs ou si c'est quelqu'un, exemple, qui s'absenterait pendant cinq vendredis? J'aimerais juste avoir le détail, là. Pour vous, cinq jours, est-ce que c'est cinq jours consécutifs?

M. Blais : Ça, ici, c'est un exemple qu'on a utilisé, là. C'est un exemple de quelqu'un qui est plutôt dans un parcours de formation. Donc, ces cinq jours, ça n'a pas nécessairement à être consécutif, puisqu'après cinq jours, là... Disons, je suppose qu'ils sont assez rapprochés quand même dans le temps, là. Il ne faudrait pas que ça soit cinq jours sur un an, là, mais cinq jours à l'intérieur d'une... deux semaines, par exemple, là. À ce moment-là, la personne est rappelée uniquement pour voir s'il y a un problème : il y a peut-être un problème de santé, il y a peut-être une très bonne justification pour ça. Mais effectivement, s'il n'y a aucune justification, donc là, il y a un avertissement qui n'a aucune conséquence financière.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Vous mentionnez, là, à l'article 83.2, là, qu'il va y avoir des conditions prévues par règlement. J'imagine que ce que vous venez de mentionner, ça sera prévu dans le règlement pour préciser et encadrer, là, la durée de cinq jours?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Oui. On va essayer d'être le plus... Bon, ici, là, les intentions réglementaires, on l'a utilisé comme exemple pour indiquer un peu comment ça peut et ça doit fonctionner, là. On aura des éléments un petit peu plus précis, là, sur les autres parcours. Il faut comprendre que les parcours peuvent être hétérogènes, hein? C'est-à-dire, tout d'abord, si vous avez des problèmes à résoudre au niveau de l'hébergement, hein, si vous n'avez pas d'endroit pour vous loger, il faut régler ce problème-là avant de penser à toute autre chose, et on va vous aider, avec des ressources, à trouver une façon de vous loger correctement. Ça peut prendre un certain temps, ça.

Ce qui est important dans Objectif emploi, hein, moi, dans ça, une autre différence avec le programme du Parti québécois — parce que j'en oublie souvent, là, hein — c'est qu'il n'y a pas d'obligation de résultat ferme, hein? On pourrait même dire : Bien, le programme n'est pas très sévère là-dessus parce qu'il n'y a pas vraiment d'obligation de résultat, il y a une obligation de participation.

Vous dites : Écoutez, moi, j'ai besoin d'aide pour trouver un logement, je ne peux pas commencer une mesure tant que ce n'est pas réglé. Je dis : Bien oui! Bien sûr, c'est tout à fait normal, donc, trouve un logement. Parfois, ça peut être simple, parfois, ça peut être plus difficile, selon les circonstances. Une fois que ça, c'est réglé, on peut peut-être regarder quelle est la prochaine étape. Est-ce que la prochaine étape, c'est de rencontrer des gens dans un carrefour jeunesse-emploi pour essayer d'identifier : Bien, c'est quoi, ton projet? Qu'est-ce que tu aimerais faire? Veux-tu étudier, veux-tu aller chercher une qualification? Est-ce que tu préférerais plutôt travailler ou obtenir un stage? Ça aussi, ça peut prendre un certain temps, hein? Ce n'est pas à la première rencontre, nécessairement, que l'on... Donc, il n'y a pas de délai qui dit : Après trois mois, tu dois être rendu à telle étape... Parce que, hein, il y a trop de variations dans les situations humaines entre les personnes. Certains partent de plus loin, certains ont un passé plus difficile, d'autres partent de plus près. Donc, il n'y a simplement que l'idée qu'une fois qu'on s'est entendus sur ce qu'on doit faire ensemble, bien, tu acceptes de t'en tenir à ça, à moins qu'on se rencontre une autre fois pour dire : Bien non! Finalement, le plan n'est peut-être pas le meilleur, voilà ce que je propose comme nouveau plan. Donc, ça, c'est une différence assez importante avec le programme du Parti québécois. J'avais oublié de le mentionner, je m'excuse.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Puis ce que je comprends aussi, c'est que, dans le niveau de gradation des absences, là, les absences prennent fin après 12 mois si le ministre n'a pas décidé d'étendre ça pour une durée totale de 24 mois. Donc, après 12 mois, la personne, elle retourne à sa situation initiale. C'est ce qui est prévu dans la disposition que vous mettez en place, là, par l'introduction de l'article 28, là.

Le Président (M. Cousineau) : Mais là on n'est plus du tout...

M. Blais : Oui. Là, il y a peut-être une confusion, là. J'essaie de bien comprendre, parce que 83.2 porte sur la durée du programme. Le programme peut s'étendre jusqu'à deux ans, mais une participation continue est satisfaisante après 12 mois.

M. Lemay : Mais ce que je veux dire, c'est : Quelqu'un qui se rendrait au quatrième niveau d'absence... Supposons, là, la personne, elle commence le programme, O.K., puis, dès le début du programme, elle décide qu'elle s'absente. Par exemple, là, que, rendu au sixième jour, là, il reçoit un appel pour avoir une rencontre, puis là, le sixième jour, il ne se présente pas, ça fait que là... à sa rencontre... Supposons qu'il l'avait fixée à la septième journée, là, là ça peut aller vite, là. Si on se rend compte, là, ici, on a au moins 20 jours d'absence plus les délais administratifs, quelqu'un, à l'intérieur de deux mois, peut déjà s'être rendu au niveau 4 d'absences. Donc, cette personne-là, elle serait dans une situation... dans mon exemple, dans mon hypothèse de travail, elle aurait au moins 10 mois de temps qu'elle devrait recevoir cette même prestation, là, de 502 $, comme vous mentionnez. Après 12 mois, cette personne-là, son programme a pris fin, elle retourne à la case départ de l'aide sociale? C'est ça, elle retourne à son 726 $?

M. Blais : Oui.

M. Lemay : C'est ça, la théorie, là. Je veux juste savoir si c'est ça que vous êtes en train...

Le Président (M. Cousineau) : Attention pour ne pas parler en même temps, là. Ne parlez pas en même temps.

M. Blais : Oui.

M. Lemay : Parfait.

M. Blais : ...parler en même temps, parler vite, aussi. Donc, il faut suivre, là. Le programme dure 12 mois, où il doit y avoir participation. Là, vous, vous avez constitué un exemple où... Mais la personne, visiblement, ne participe pas ou est...

M. Lemay : C'est ça, aucune participation.

M. Blais : À ce moment-là, si, après quatre mois — là, je ne veux pas commettre d'erreur, là, on me corrigera — il y a eu absence, il y a eu manquement à ses engagements, etc., à un moment donné, bien, les pénalités s'accumulent. La première, elle est de 56 $. En passant, ce n'est pas des nouvelles pénalités, hein? On présente ça comme quelque chose de nouveau. Ces pénalités-là existent déjà à l'aide sociale, il y a déjà des gens qui vivent avec des pénalités exactement du même type, donc, pour des cas de fraude, alors que nous, dans ce cas-ci, les pénalités, on pourrait aussi les appliquer aux participants... aux non-participants, plutôt, au programme. Et, si quelqu'un se rend, là, volontairement ou non, là, à une série d'échecs, là il aura une prestation qui est coupée, pendant une période de temps qui ne peut pas excéder 24 mois depuis le début — c'est bien ça — de l'inscription de la personne. Donc, tu sais, j'essaie de reprendre votre exemple. Si vous me dites : À l'intérieur de quatre mois, elle a brûlé toutes ses chances, bien, il lui reste encore 20 mois à avoir une prestation diminuée, et, au bout de ces 20 mois là, bien, elle redevient éligible au programme d'aide sociale, là, si c'est son souhait, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Masson.

M. Lemay : Mais, M. le Président, ici, M. le ministre nous parle qu'il... c'est pour 24 mois. Mais, en fait, on n'a pas encore étudié, là, l'article 83.2, mais, à 83.2, on dit que ça peut être prolongé sur un 12 mois additionnel. Mais ça, c'est le ministre qui en décide, ou son ministère, ou la personne qui est responsable, là, et j'espère que, dans toutes les directions régionales ou tous les CLE ou CJE, là, il y aura la même consigne. Mais, je veux dire, quelqu'un qui a refusé d'obtempérer, est-ce que ça va être mentionné par règlement? Dans un cas de refus d'obtempérer, on va systématiquement, ça, étendre pour une période de 24 mois?

• (16 h 10) •

M. Blais : Non, non! Là, on va plus loin que... On va voir cet article-là, là, on en a déjà parlé un petit peu. Mais il y a une possibilité de prolongation dans des cas où la personne participe où ça fonctionne bien. Pensons, par exemple, à un retour aux études, où il y a une progression normale, une participation correcte, les bonifications sont pleines et entières. Après 24 mois, le programme n'est pas terminé tout à fait, mais tout progresse bien, alors, à ce moment-là, on peut considérer maintenir les bonifications pour que la personne termine son programme. Donc, c'est plutôt pour les gens, disons, qui participent bien, qui vont bien, qui progressent, qu'il peut y avoir une possibilité de prolongation.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Bon, j'essayais juste de comprendre un peu, là, quelqu'un qui décidait de ne pas collaborer, il avait une pénalité de son aide sociale pendant combien de mois, là. Là, dans la deuxième explication que le ministre vient de donner, je comprends qu'on parle d'une prolongation lorsqu'il y a collaboration, et que quelqu'un n'a pas terminé, puis on sent qu'il aurait besoin d'un 12 mois supplémentaires pour pouvoir arriver à avoir tout le développement de ses habiletés sociales, ses acquisitions de compétences, là. Donc, on ne ferait pas une prolongation pour quelqu'un qui décide volontairement de ne pas participer au programme, là.

M. Blais : Non, c'est pour donner un petit coup de main à des gens qui vont bien puis qui auraient besoin d'un peu plus de temps dans une bonne démarche. Alors, on maintient la bonification pour ces personnes-là, pour qu'elles terminent leur parcours. Et les cas sont explicités, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci pour les éclaircissements.

Le Président (M. Cousineau) : Ça va? Merci. Alors, vous avez remarqué qu'on vous a laissé poser beaucoup de questions sur le tableau qui a été déposé, mais on est sur un sous-amendement, là. Mais, étant donné que... On vous a laissé quand même...

M. Lemay : Ça va. Merci.

Le Président (M. Cousineau) : ...la grande générosité du président, ça.

Mme la députée de Gouin, voulez-vous poursuivre? Il vous reste quatre minutes. Ah! oui, bien, j'y vais par alternance.

Mme David (Gouin) : Oui? D'accord, M. le Président, merci. Quelques remarques, donc. Quatre minutes. D'abord, dans la loi sur la pauvreté et l'exclusion, à l'article 12, on dit clairement que les mesures qu'on devra prendre — donc, dans le contexte de la lutte à la pauvreté — devront être «complémentaires et cohérentes».

Dans mon esprit... ce n'est peut-être pas le cas du ministre, mais des mesures complémentaires et cohérentes, ça veut dire que, si l'on pense que les personnes doivent avoir, comme je le disais ce matin, une sécurité alimentaire, le droit à la dignité, le droit au logement, doivent avoir une mesure d'aide financière convenable, il me semble que des mesures complémentaires et cohérentes, ça ne peut pas conduire à des sanctions qui privent les gens de droits élémentaires.

L'autre chose que j'aimerais dire, c'est que je comprends que le ministre nous dit : La loi-cadre n'a pas une portée juridique à l'infini, là, ça n'est pas la Charte des droits et libertés de la personne. Mais, quand même, moi, je considère que cette loi-cadre, depuis 2002, inspire les orientations des gouvernements qui se succèdent. Elle n'a jamais été remise en question. Et, au fond, je crois que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, c'est celui qui est, quelque part, le fiduciaire de cette loi. C'est celui qui, je pense, doit s'en sentir le meilleur représentant. Alors, je dis ça en réponse à ce que le ministre a dit tout à l'heure.

Parce que le ministre nous dit beaucoup, beaucoup : Vous savez, on est quasiment les seuls au monde à rendre la prestation de base inconditionnelle — là, je parle toujours des gens qu'on dit aptes au travail — et que la menace ou l'hypothèse de sanctions, de conséquences financières, donc, selon des études, je ne sais pas lesquelles, mais des études, il serait démontré, là, que ça, c'est vraiment extrêmement efficace pour que les gens acceptent de suivre des programmes.

Or, dans son mémoire déposé à la commission parlementaire, donc en auditions, la Protectrice du citoyen disait que ce modèle — donc, le modèle de l'approche mesures d'employabilité, sinon, sous peine de sanctions, là — «a été suivi à la fin des années 1980, alors que la Loi sur la sécurité du revenu, puis la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale en 1998, assujettissaient les prestataires aptes au travail à l'obligation d'adhérer à des mesures d'employabilité sous peine de sanctions financières. Elle a été cependant abandonnée en 2005 par la sanction de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, ses résultats ayant été jugés moins probants que l'approche volontaire.» Intéressant.

Alors, comme on continuera certainement toutes ces discussions, je vais aller me renseigner, on va mettre une couple d'hommes là-dessus, là, comme disait l'autre, pour — oui, oui, «mettre un homme là-dessus», c'est dans une chanson de Richard Desjardins, là, bon — pour aller trouver sur quelles études se base la Protectrice du citoyen, puisqu'elle dit que les résultats des menaces de sanctions, c'est moins probant que l'approche volontaire. Alors, bon, je mettrai une femme là-dessus, s'il le faut.

Le Président (M. Cousineau) : Ça, c'est beaucoup plus... Parce que de dire : Je vais mettre un homme là-dessus, ça passe, mais, s'il avait fallu dire...

Mme David (Gouin) : Chanson!

Le Président (M. Cousineau) : ...qu'on précise «mettre une femme là-dessus», Mme Poirier n'aurait pas aimé ça.

Des voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Oh! la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Ceci dit — on s'amuse un petit peu — une réaction?

Mme David (Gouin) : ...

Le Président (M. Cousineau) : Non, non, non! Une réaction, M. le ministre?

Des voix : ...

M. Blais : Non, non, ça va. On a demandé à la Protectrice du citoyen quelles étaient les études en question, là. Finalement, ils avaient les mêmes, là, il y avait rien de nouveau, là, dans les fameuses études en question.

Il faut faire très attention, encore une fois, là-dessus. Ce n'est pas des choses qui sont faciles à mesurer, du point de vue méthodologique, l'impact d'avoir ou pas des sanctions sur la sortie d'aide sociale. Parce que, finalement, c'est ce qu'on veut savoir, c'est : Est-ce que ça augmente la sortie d'aide sociale ou si ça n'augmente pas la sortie d'aide sociale? Ce n'est pas aussi facile qu'on pense... à éviter absolument. Du point de vue méthodologique, c'est, disons, les enquêtes, où on fait des sondages auprès des personnes, parce que les personnes sont biaisées par rapport à elles-mêmes et par rapport à leurs motivations, hein, surtout dans des questions délicates comme ça. Ce qui est mieux, c'est d'essayer de voir exactement concrètement les comportements. Vous ajoutez les sanctions, est-ce que vous voyez les effets? Bien sûr, il faut que vous contrôliez toutes les autres variables : Est-ce que votre population a changé ou elle n'a pas changé? Ça, il y a des façons de contrôler ces variables-là pour éviter des effets, disons, d'endogénéité des variables. Une fois que c'est fait — ce n'est pas facile à faire — là, vous en arrivez à des conclusions qui sont assez probantes.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je suis prêt à reconnaître maintenant M. le député de Rimouski sur le sous-amendement.

M. LeBel : Merci, M. le Président. Là, tantôt, je souriais, là, la ligne du ministre est revenue, là, sur la faute du PQ, mais mon collègue disait...

M. Blais : Je n'ai jamais dit ça.

M. LeBel : Mais ça ressemblait un peu à ça. Mon collègue disait : Hier, le ministre nous avait promis que c'était la dernière fois hier. Ça fait que je me disais : Ah! une autre promesse rompue des libéraux, une autre qui s'est rajoutée sur la liste. On va prendre ça en note.

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Poursuivez, M. le député. Ne suscitez pas de débat.

M. LeBel : C'est bon, mais elle était trop facile.

Mon collègue a aussi parlé du rôle du ministre, là, comme un peu le chien de garde du gouvernement pour protéger ceux qui, malheureusement, sont confrontés à la pauvreté. Puis je me souviens, quand on avait travaillé sur la loi pour lutter contre la pauvreté, un gain important, un gain de cette loi qui venait de la société civile, là, qui venait des groupes qui nous le demandaient, puis ça n'avait pas été facile à intégrer dans la loi, mais tous les partis avaient convenu de l'intégrer... Puis je le dis, là, c'était vraiment un gain de la société civile, c'est la clause d'impact, où, par la loi, on disait : Bien, chaque projet de loi du gouvernement dans tous les domaines, bien, le ministre devait fournir une clause d'impact, analyser les projets de loi de tous les ministères avec la lunette, qu'est-ce que ça peut donner par rapport à la pauvreté, qu'est-ce que ça peut avoir comme effet.

Et je trouve ça spécial, des fois, quand je regarde... Ce matin, je lisais le mémoire du comité consultatif. S'il y avait une clause d'impact avec un mémoire comme j'ai lu ce matin, je ne sais pas, il me semble qu'on aurait dû réagir ou se poser certaines questions. Ce matin aussi, quand je lisais le mémoire, le ministre disait, bon, ça manquait de rigueur, et tout ça. J'ai essayé de voir qui était là-dessus, mais je ne connais pas le monde qui sont là, sauf une personne avec qui j'ai eu la chance de travailler comme... J'étais au cabinet de la Famille à l'époque, puis c'était M. Pierre Michaud, qui est en Gaspésie, qui était un grand mandarin de l'État, là. C'est quelqu'un qui était à la base des centres de la petite enfance, qui... Ça me surprend, là, connaître ce monsieur-là pour avoir travaillé avec lui dans le temps que j'étais dans le cabinet de la ministre, ça me surprend que ce monsieur-là ait pu manquer de rigueur ou je ne sais pas trop, mais je pense que, dans ce que j'ai pu lire ce matin, il y a suffisamment de choses qui peuvent alerter, en tout cas, le ministre.

• (16 h 20) •

Parce que le sous-amendement parle du dénuement total... il y a un élément, dans le rapport du comité consultatif, qui en faisait référence, puis j'aimerais ça vous le lire rapidement, puis après ça je vais vous parler d'un cas particulier.

«Au Québec...» Selon le comité, là. «Au Québec, le montant des prestations est tellement faible qu'il s'agit déjà d'une pénalité en soi. Des pénalités additionnelles, même de 10 %, sur un montant déjà insuffisant pour assurer la couverture des besoins essentiels, ne risquent-elles pas de fragiliser encore la situation précaire de ces personnes, pouvant même aller jusqu'à en jeter certaines et certains à la rue en cas de coupure plus drastique?

«En soi, un revenu trop faible est un obstacle à l'intégration à l'emploi», selon le comité. Il dit : «À preuve, les personnes les mieux soutenues financièrement sont celles qui sont les plus susceptibles de quitter l'aide sociale. Ainsi, entre 2004 et 2015, le nombre de familles monoparentales prestataires d'aide sociale a chuté de quelque 27 % alors que le revenu avait augmenté de manière significative entre autres grâce à la politique familiale québécoise. Pourtant, on peut penser que les femmes responsables d'une famille monoparentale font face à des obstacles importants pour intégrer le marché du travail notamment en raison de la difficulté d'accès à une place en [service de garde] à contribution réduite et des difficultés de conciliation famille-travail. Durant la même période, le nombre de personnes seules à l'aide sociale a diminué de 6 %.» Ce sont pourtant pour ces dernières que le revenu dont elles disposent est le plus éloigné de ce qui est nécessaire pour couvrir leurs besoins de base.

«Les prestations, surtout celles versées aux personnes dites sans contraintes à l'emploi, sont si faibles qu'elles ne permettent pas de couvrir les besoins de base de nombreux prestataires, tels que définis par la mesure du panier de consommation, mesure retenue par le gouvernement pour suivre l'évolution des situations de pauvreté. Cette situation est pire encore pour les personnes seules qui composent la vaste majorité des prestataires déjà à l'aide financière de même que de celles et ceux nouvellement admis. Le revenu disponible d'une personne seule à l'aide sociale, considérée sans contraintes à l'emploi — soit un revenu annuel disponible de 8 974 $ en 2016 — est loin du montant nécessaire pour couvrir les besoins de base. Ce montant était estimé à 17 246 $ en 2013, selon la mesure de panier de consommation.» Ce chiffre n'est pas encore connu pour l'année 2016, mais il est certainement plus élevé qu'en 2013.

Par ailleurs, «la prestation de base versée est pourtant censée couvrir les besoins suivants : alimentation, logement, entretien ménager, soins personnels, communications, habillement, ameublement, transport, loisirs.

«Peut-on sérieusement penser qu'une prestation de 623 $ par mois couvre l'ensemble de ces besoins? Le montant pour ce faire avait été établi à 667 $ en 1996 et n'a pas été révisé depuis, malgré l'augmentation du coût de la vie. S'il avait été indexé selon le mode d'indexation des prestations versées aux prestataires avec contraintes sévères à l'emploi, il s'établirait aujourd'hui à quelque 925 $.

«Du temps où des pénalités étaient appliquées, une personne pouvait se retrouver en situation de dénuement. Il lui était alors possible de faire appel au pouvoir discrétionnaire du ministre. Avec le programme Objectif emploi, tel que mentionné précédemment, la possibilité de recourir à la clause de dénuement [...] serait exclue, faisant ainsi fi du droit à la sécurité économique, à la santé et la dignité des personnes.» En ce sens-là, l'amendement déposé par la députée de Gouin a toute sa pertinence.

Un groupe de mon coin, qui s'appelle Action populaire Rimouski-Neigette, a déposé un mémoire. Ils n'ont pas été entendus, mais ils ont déposé un mémoire qui va dans le même sens que le comité consultatif vient de nous dire. Ce qu'on dit, c'est : L'insuffisance de prestations empêche de combler des besoins de base. Si on veut comme pousser, proposer de la coercition, couper, bien, on vient augmenter la détresse personnelle de personnes qui sont déjà en difficulté.

J'aimerais, si c'est possible, M. le Président, parce qu'on en a parlé un peu tantôt, mais ce groupe à Rimouski ont déposé, dans leur mémoire, un budget. J'aimerais ça le déposer si c'était possible.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, c'est possible, certain.

M. LeBel : Puis je vais vous en faire part... bien, c'est parce que je pense que ça explique assez clairement, parce que, quand on ne le vit pas, on ne peut pas toujours bien comprendre, mais c'est un budget d'une personne, là, «d'une personne seule sur l'aide sociale. Prestations, 623 $. Crédit pour solidarité, 80 $. Total des revenus, 703 $ par mois.»

Document déposé

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski, bon, vous l'avez déposé, là, à la commission, c'est très bien, on va en faire quelques copies avant que vous donniez les explications, ça va être préférable pour les députés de la commission, là, qui vont pouvoir suivre très bien avec vous.

M. LeBel : On va suspendre un peu pendant...

Le Président (M. Cousineau) : On va suspendre une minute, là, ou deux, là, le temps de faire des copies. Donc, c'est déposé à la commission.

M. LeBel : Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 25)

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, nous reprenons. M. le député de Rimouski, donc, vous allez nous expliquer, puis c'est toujours en lien avec le sous-amendement, là, hein?

M. LeBel : Oui, oui. Bien, le sous-amendement parle du risque de dénuement total, puis on essaie de voir comment on pourrait protéger les personnes.

Je viens de lire un extrait du mémoire du comité consultatif qui... puis, je rappelle, qui est reconnu par la loi qui lutte contre la pauvreté, qui ont des bureaux ici, sur Saint-Amable, qui est reconnu dans la structure pour conseiller le ministre. Puis ils font des bons mémoires, puis ils doivent avoir... je ne sais pas quel budget qu'ils ont pour faire ces mémoires-là. Ça fait que, dans ce sens-là, je pense que c'est important qu'on prenne en considération ce qu'ils peuvent proposer, et ils amènent, eux autres mêmes, l'élément du dénuement et qui explique qu'il y a un risque.

Je parle de ça et je parle d'un mémoire qui a été déposé par un organisme populaire de Rimouski, Action populaire Rimouski-Neigette. Tu sais, ces groupes-là, ce qu'ils font souvent, c'est qu'ils amènent des gens en situation de pauvreté puis ils font des agoras, des discussions et ils parlent de cas concrets. C'est ce que j'aime, c'est concret, c'est des réalités vécues. Ça fait qu'eux autres, ce qu'ils ont fait, c'est que, dans leur mémoire, ils sont allés chercher des cas concrets, et ce que je vous ai déposé, c'est le budget mensuel d'une personne réelle, qui existe, une personne seule à l'aide sociale à Rimouski.

J'expliquais que cette personne-là a des prestations de 623 $, des crédits pour solidarité de 80 $, total des revenus mensuels de 703 $. Les dépenses : elle a un loyer, un un et demie chauffé, éclairé, 385 $ par mois. Ce qu'elle dit, c'est : «J'ai eu de la chance, c'est très petit mais décent, et je suis très loin... [parce que je suis très loin] sur la liste des HLM... Il manque de logements sociaux» à Rimouski.

«Télécommunications : 80 $.» C'est un cellulaire à carte pour des urgences seulement, pas de télé, mais Internet, on est en 2016, ça me permet de communiquer. «Assurances — meubles, vie : 0 $.» Elle dit : Il ne «faut pas que le feu prenne!» «Frais bancaires : 5 $. Pas d'erreur que mon compte soit à découvert [j'ai] — 50 $ de frais.

«Alimentation : 108 $. Je dois faire appel à Moisson» Rimouski. C'est le comptoir alimentaire. «Il faut cuisiner les spéciaux, oublier le Guide alimentaire canadien : rares la viande et les légumes! Et je manque de nourriture à la fin du mois.

«Transport : 50 $. Pour aller à l'épicerie et chercher mon panier à Moisson. Le reste du temps, on marche, heureusement que j'habite en ville!

«Vêtements : 20 $. [Aux] comptoirs de vêtements! Je cherche des bottes de marche...

«Produits hygiéniques/nettoyage : 20 $. Strict minimum.

«Médicaments : 0 $. [Il ne] faut pas tomber malade[...].

«Coiffure : 0 $. [On laisse] pousser. Je regarde les autres puis je me sens moche...

«Dentiste[...] : 0 $. J'aurais besoin de changer mes lunettes... [mais] on oublie ça!

«Alcool/tabac : 0 $. J'ai la chance de ne pas avoir développé de dépendance[...]!

«Loisirs, sorties, sport : 23 $. Cinéma une fois à la fin des mois sans imprévus, café au resto à l'occasion pour voir du monde, c'est pour ma santé mentale, sinon je craque. Sport : marche[...] — c'est tout.

«Livres, inscription à un cours... 0 $.

«Entretien, déco du logement : 0 $.

«Cadeaux : 0 $. J'écris quelques mots [puis je fais] un dessin [...] à la main...

«Animal domestique : 12 $. Juste un peu [pour nourrir] mon chat... jamais malade...

«Électroménagers et autres : 0 $[...].

«Imprévu : 0 $ = endettement assuré...

«Épargne : 0 $.» Elle dit : «Vous voulez rire???!!!»

«Total des dépenses : 703 $.»

• (16 h 30) •

Ici, la personne nous dit : «J'ai mis 6 mois à établir une routine pour me permettre de survivre. S'il arrive un imprévu, je dois m'endetter. Emprunter à des amis ou parents, car bien sûr, je n'ai pas droit au crédit dans aucune institution financière. Mes possibilités de coupures sont au niveau de l'alimentation qui est déjà un poste budgétaire insuffisant. Je pourrais emprunter pour l'achat de lunettes à un fonds d'entraide, mais je n'ai pas de marge de manoeuvre dans mon budget pour les remboursements.

«Je ne mange pas à ma faim et je vis dans le stress continuel de vivre un imprévu. Vais-je en perdre ma santé?»

Moi, je pense que ça, c'est la base. On ne peut pas... Et ces personnes-là, si on leur dit : Vous allez... Ils vivent déjà dans un climat de stress, on leur dit : Vous allez embarquer dans un processus. Il faut vraiment qu'ils soient bien accompagnés. Puis leur mettre sur le dos le risque d'être coupés s'ils n'aiment pas ça, c'est des gens avec qui il faut travailler étroitement. Les groupes communautaires le font bien, mais ce n'est pas des numéros, qu'on dit. On les place dans un continuum, là, puis, quand ils vont sortir au bout de la machine, là, ils vont avoir un emploi ou ils vont être en... ce n'est pas du monde qu'on prend comme ça.

Et je pense que l'amendement a son sens parce qu'on ne peut pas aller plus bas, on ne peut pas couper là-dedans, on ne peut pas aller plus bas que ça. Ça fait que, oui, dans une démarche, mais enlevons ça, l'épée de Damoclès, là, qui rajoute du stress à des gens qui vivent déjà des situations qui ne sont pas acceptables.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être, je vais relever le défi du collègue, mais d'une autre façon, pour... Puis, s'il veut prendre un crayon, là, pour peut-être réfléchir en termes budgétaires? Alors, il ne faut pas que je me trompe.

M. LeBel : ...qu'il va le prendre...

M. Blais : Il ne faut pas que je me trompe dans les chiffres. Puis on va me corriger si jamais je fais une erreur dans les chiffres. Un primodemandeur, là, dans le projet actuel, s'il va chercher ses 20 heures, ou l'équivalent de 200 $, disons, là, sans coupure, son revenu sera de 1 193 $ par mois, d'accord? Et, pour ça, il doit travailler une vingtaine d'heures, 19 heures, à peu près, pour aller chercher...

Une voix : ...

M. Blais : Pardon?

Une voix : ...

M. Blais : Donc, quatre heures et demie par semaine.

M. LeBel : ...combien?

M. Blais : Les 200 $ auxquels il a droit, là, sans pénalité. Puis je vous rappelle qu'en plus, dans le programme, il a la possibilité d'aller chercher plus de revenus sans être coupé à 100 %, mais plutôt à 50 %, jusqu'à un certain seuil. C'est un petit peu technique, on va rester peut-être avec la première partie, mais c'est encore un autre avantage qu'on ajoute. Donc, 1 193 $ — c'est bien ça — par mois.

Un travailleur à faibles revenus, hein, qui travaille 35 heures-semaine, disons, 141 heures dans un mois, donc, avec l'ensemble des prestations — crédit d'impôt solidarité auquel il a droit — et d'autres prestations, on a les calculs ici : au Québec, a, au net, 1 547 $ par mois. Le différentiel, là, si je ne me trompe pas, c'est 354 $.

Alors, je vous invite sincèrement, là... hein, on pourrait aller aux Halles de Rimouski ensemble, faire un vox pop, hein, peut-être pas auprès des groupes dont vous venez de parler, mais on parlerait aux gens, là : Écoutez, en ce moment, là, à Rimouski, quelqu'un qui travaille temps plein, 140 heures par mois, 35 heures, il va chercher 1 547 $. Nous, on a un programme pour aider les jeunes ou les primodemandeurs à s'en sortir, ils n'ont qu'à faire 19 heures par mois de travail, de contribution... S'ils le veulent. Parce qu'ils ne sont pas obligés de faire ces 19 heures là. S'ils veulent augmenter leurs revenus, ils vont chercher 1 193 $, donc ils font 120 heures, 121 heures de moins que vous, là, puis là on parle à la personne qui est à faibles revenus, ils vont chercher un revenu de 350 $ de moins seulement. Puis vous demanderez à cette personne-là : Est-ce que c'est raisonnable? Trouvez-vous qu'on aide les gens à s'en sortir? Il n'y a pas beaucoup de monde, à Rimouski, qu'on va rencontrer, un samedi, dans les Halles, qui ne vous diront pas : C'est raisonnable. Quand on compare ce que vous donnez à une personne, hein, qui aura seulement 19 heures de contribution et qu'ici il n'est même pas obligé de les faire s'il le veut, et la personne, chez vous, qui en arrache, qui travaille fort, au salaire minimum, c'est impossible, impossible... Je vous le dis : On frappe un coup de circuit, à Rimouski, avec ça. Les gens vont dire : Oui, vous faites un effort, vous voulez aider ces gens-là, vous ne voulez pas leur nuire, vous ne voulez pas les appauvrir, bravo! Il y a plusieurs personnes, à Rimouski, qui vont dire : Non, vous allez trop loin, vous êtes beaucoup trop généreux avec ces gens-là, on n'embarque pas là-dedans. Nous, vraiment, là, on veut les aider, je l'ai mentionné, c'est au-dessus de 50 millions de dollars qu'on met dans ces bonifications-là.

Mais c'est important de penser aussi à cet élément-là parce qu'on doit défendre ce projet-là, pas uniquement du côté, disons, des groupes qui ont une préoccupation par rapport aux personnes à l'aide sociale, on doit défendre ça par rapport à l'ensemble de la société. Ceux qui ont un travail à temps complet, qui ont des petits revenus ou des plus grands revenus, on doit défendre ça. Et moi, je suis prêt à me lever, dire à la population du Québec : Je sais que c'est important comme somme, ce qu'on leur donne, c'est pour une période de temps, mais on va les sortir définitivement... en tout cas, une bonne partie, on va les sortir de l'aide sociale, ça sera bien pour eux. Je pense que la population du Québec est prête à ce qu'on aille aussi loin que ça. C'est une autre façon de voir le budget.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Je m'excuse de le dire comme ça, mais c'est un peu facile.

M. Blais : Un peu facile.

M. LeBel : Oui, c'est facile parce que... C'est sûr, vous allez voir tout le monde, là, vous allez dire à quelqu'un qui est à l'aide sociale, qui refuse d'avoir un montant d'argent qui correspond à peu près à ce que quelqu'un est au salaire minimum : Est-ce que vous trouvez ça normal? Ça, là, c'est un peu ce que vous dites. Puis c'est ce bout-là qui est...

M. Turcotte : C'est ça qui est grave.

M. LeBel : ...c'est ça qui est... C'est sûr que le monde, ils vont dire : Bien non! S'il peut, il va aller le chercher, l'argent. Voyons, ça n'a pas de bon sens! Pourquoi il refuserait? Mais ça, là, c'est là qu'on parle du préjugé. Là, les gens...

M. Blais : ...

M. LeBel : Non, mais laissez-moi terminer.

Le Président (M. Cousineau) : Ne parlez pas en même temps, s'il vous plaît!

M. LeBel : On l'entretient parce qu'on dit à la population, là : Bien, celui-là qui est à l'aide sociale, là, s'il refuse de faire son effort pour au moins avancer un peu, parce que ça n'a pas de bon sens qu'il ne fasse pas son effort, parce que quelqu'un qui est à salaire minimum il va gagner presque autant, tu sais, c'est certain que tout le monde vont dire : Ça n'a pas d'allure. Mais il faut expliquer plus un peu. La personne qui vit ça, qui est isolée, ce n'est pas un numéro, ce n'est pas quelqu'un qu'on dit : Demain matin, là, toi, là, tu prends le montant de plus puis tu vas travailler. Cette personne-là a besoin d'accompagnement puis elle ne peut pas travailler dans n'importe quoi. Puis on parle d'emploi décent, on parle d'accompagnement, ce n'est pas du bétail qu'on pousse. On dit : Il y a un programme, vous allez là. Puis vous allez prendre l'argent parce que, si vous ne le prenez pas, vous êtes coupable. Vous voyez, là, celui qui travaille au salaire minimum, qui travaille fort puis qui paie des... Tu n'es pas capable de faire ton effort, toi, d'être au moins au même niveau que les autres? C'est là qu'on embarque dans une spirale populiste, qui passe bien, que les gens disent : Oui, bien, ça n'a pas d'allure.

Mais, en bout de ligne, ce n'est pas comme ça que ça marche, et c'est ça que les groupes communautaires font, ils accompagnent ce monde-là, ils peuvent les emmener dans un processus pour les aider à se sortir de la pauvreté, mais ils les accompagnent dans un processus. Et ce n'est pas des numéros, c'est des personnes. Ah! il leur dit, comme dit le comité consultatif, comme je vous ai dit ce matin : Vous allez participer à des services, à un continuum, vous allez vous intégrer, il va y avoir des montants d'argent qui vont venir permettre de vous aider. Mais on ne vous dit pas : Si ça ne marche pas demain matin, si tu t'absentes parce que tu craques, parce que ça fait longtemps que tu n'a pas travaillé, puis là tu ne sais pas trop comment ça marche, puis là tu t'absentes cinq jours, paf, tu es coupé. Toute cette pression-là sur ces gens-là, là, c'est ça qui n'est pas acceptable, c'est ça que je vous dis.

C'est sûr que, si on va aux Halles puis on dit... Vous l'avez dit en partant : Ah! on va rencontrer des gens qui... pas des gens des groupes, parce qu'eux autres ils sont, tu sais... mais ces gens-là, des groupes, là, ce n'est pas des bornés, ils savent aussi c'est quoi, les réalités, je pense qu'il faut aussi les écouter. Puis je vous voyais venir avec ça — l'ancien ministre disait la même affaire : c'est la formule facile, là, tu sais. Après celle que c'est la faute au PQ, là, c'est de dire : Bien, ceux qui sont à l'aide sociale, il faut qu'ils fassent leur effort parce que le petit qui travaille au salaire minimum, lui, il travaille fort, puis là il faut que l'autre fasse son effort. S'il ne fait pas son effort, le monde ne comprendront pas ça. Ça, cette ligne-là, là, elle est facile, mais c'est parce que ce n'est pas ça, la réalité. La réalité, c'est des gens qui sont dans le stress, qui vivent proches du dénuement puis qui ont besoin d'être outillés, qui ont besoin d'être accompagnés, puis ce n'est pas des numéros qu'on rentre dans une machine.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre.

• (16 h 40) •

M. Blais : Écoutez, le problème dont on a parlé... Il y avait deux problèmes. Il y avait un problème de : Est-ce que c'est suffisant? Est-ce qu'on leur donne assez? Bien, écoutez, moi, ce que j'ai montré, c'est qu'on leur donne, dans les circonstances, hein, beaucoup. Je pense qu'on n'a jamais donné autant, là. Vous pourrez vérifier ça, là, au niveau historique, là, pour ce type de mesure là.

Mais la question de l'équité horizontale est une question fondamentale dans une société. Pourquoi la sous-ministre adjointe gagne plus que des membres du personnel? C'est parce que, bon, elle a plus de responsabilités que d'autres personnes. C'est bien accueilli et c'est bien compris. Pour qu'une société fonctionne bien, il faut que les citoyens aient le sentiment... Puis on peut les aider, nous, les politiciens, à leur montrer qu'il y a une forme d'équité dans ce que l'on fait. Le jour où ils ne sentent plus qu'il y a une équité horizontale, hein, ou verticale, hein, à ce moment-là, il y a un décrochage social, il y a une rébellion, etc.

Donc, ce que je voulais illustrer, ce n'est pas du tout un faux problème, au contraire. Si vous me demandez d'en faire plus, c'est très compliqué d'en faire plus, simplement parce qu'à un moment donné les gens vont décrocher, ils vont dire : Regarde, là, c'est bien, ce que... Et là eux autres aussi il faut qu'ils prennent un petit peu de responsabilités, compte tenu des ressources que l'on met à leur disposition. Encore une fois, ce n'est pas du travail forcé, ce n'est pas une obligation de résultat. C'est différent de ce qu'on a déjà connu par le passé. Je ne nommerai pas, là, des partis, là. Mais c'est différent, mais il y a une obligation de participation, et les gens comprennent ça.

Et ce n'est pas du populisme. Les gens, là, je pense, qui sont le moindrement, là, ouverts, comprennent à la fois que c'est difficile de mobiliser certaines de ces personnes-là. Ça tombe bien, le programme primodemandeur s'adresse à ceux qui sont les plus facilement mobilisables. Et encore, on reconnaît que c'est difficile. On met des ressources importantes, mais il y a une limite aux ressources que l'on peut mettre. Et cette limite-là n'est pas seulement une limite financière, il y a une limite d'équité horizontale parmi les autres citoyens, puis je pense qu'on est dans un bon équilibre. Et, encore une fois, on pourrait faire l'exercice, aux Halles, un beau samedi, ensemble, pour discuter avec les gens de ce qu'ils pensent du programme.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. M. le député de Rimouski, il vous reste cinq minutes.

M. LeBel : N'importe quand, on pourrait aller aux Halles puis on fera ça ensemble, mais j'aimerais ça que, cette fois-là, vous preniez un peu de temps pour venir rencontrer les groupes aussi, à travers ça.

M. Turcotte : Puis qu'il t'invite aussi.

M. LeBel : Oui, puis qu'il m'invite aussi, cette fois-là. Oubliez-moi pas comme la dernière fois.

Ce que je dis, puis ça revient ensuite à ce qu'on s'est dit ce matin : On met beaucoup de pression sur les demandeurs, puis c'est correct, là, on peut leur proposer de s'engager dans un processus, puis on leur dit : Regarde, on va vous aider. Et on les menace, de dire : Si vous craquez, vous allez payer le prix si vous craquez. Puis là on dit à la population : C'est normal. S'il a craqué ou s'il a décidé de lâcher, bien, on n'est pas pour continuer à l'entretenir. Bien, écoutez, c'est un peu ce que vous laissez entrevoir.

Puis, pendant ce temps-là, tout ce qui tourne autour pour accompagner les groupes, ils sont comme laissés pour compte. J'en ai parlé, à matin, du nombre de groupes communautaires qui sont coupés ou qui n'arrivent pas ou que... Ça fait que ce que je dis, ces personnes... Puis, en plus, vous dites à ces personnes-là... il va falloir les intégrer, il va falloir que vous leur offriez quelque chose, là, pour les intégrer au travail. Puis je ne suis pas certain que vous allez être capable, offrir à tout le monde, à tous les demandeurs, un travail décent puis à proximité de chez eux. Déjà, on parle de déménager du monde.

Ce que je dis, c'est que vous jouez avec des personnes qui sont déjà vulnérables. Et vous leur mettez sur le dos toute la responsabilité, vous dites : On va t'aider, mais, si tu lâches, tu es dans le trouble. C'est ça, le problème. Votre programme, vous allez le passer, là, la loi, vous allez la passer. Vous allez faire Objectif emploi, vous allez finir par y arriver, mais, quand... Nous, ce qu'on essaie de voir, au moins, protégeons un principe, c'est qu'on ne peut pas aller plus bas que ça. On ne peut pas faire des menaces à des gens qui vivent avec ça. Puis le budget, je vous l'ai lu, là. On ne peut pas faire des menaces pour dire : Toi, si tu n'embarques pas, là, si tu ne suis pas, bien, tu vas avoir moins que ça, il va falloir que tu coupes en quelque part. Bon, il n'y a pas grand place à couper là-dedans. C'est ce bout-là que j'ai de la misère à accepter.

Puis, si, pour vendre ça, on dit aux citoyens : Bien, les gens à l'aide sociale, là, on va les faire travailler puis on va leur donner des affaires, puis, s'ils ne participent pas, bien, tant pis... Tu sais, ça n'a pas de bon sens, parce que ce qu'on leur donne, c'est l'équivalent à peu près à des gens qui vivent au salaire minimum. Puis ça n'a pas d'allure, s'ils lâchent... tu sais, c'est des gens qui n'ont pas voulu prendre leurs responsabilités. Mais on leur met tout ça sur le dos. C'est ce discours-là que j'ai un peu de difficulté. Puis c'est ça, ce discours-là, qui est très loin de la mobilisation citoyenne avec l'État autour d'une vraie vision de lutte à la pauvreté. C'est dommage.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre, ça va? Ça va, M. le député de Rimouski?

M. LeBel : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : Est-ce que... Oui?

M. LeBel : Pas le choix.

Le Président (M. Cousineau) : Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le sous-amendement déposé par madame... Il n'y a plus de temps pour... Non, vous n'avez plus de temps, Mme la députée.

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Oui. M. le député de Drummond—Bois-Francs, ça va pour vous aussi? Parfait. Donc, est-ce que le sous-amendement déposé par Mme la députée de Gouin est adopté?

M. Turcotte : M. le Président?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : J'aimerais procéder à un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Cousineau) : Vote par appel nominal sur le sous-amendement déposé par la députée de Gouin, qui dit d'ajouter, à la fin de l'amendement... Amendement déposé par le député de Saint-Jean?

M. Turcotte : Non.

Le Président (M. Cousineau) : De?

M. Turcotte : C'est la députée de Gouin, le sous-amendement.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, le sous-amendement, mais qui vient modifier l'amendement déposé par le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Je m'excuse.

Le Président (M. Cousineau) : Bon, d'accord? Donc, ajouter «ni risquer d'amener les adultes seuls et les familles au dénuement total».

Alors, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : M. St-Denis (Argenteuil)?

M. St-Denis : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

La Secrétaire : M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Poëti : Contre.

La Secrétaire : M. Cousineau (Bertrand)?

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Donc, le sous-amendement déposé par Mme la députée de Gouin est rejeté. Nous allons revenir à l'amendement déposé par M. le député de Saint-Jean en vous précisant le temps restant. Pour M. le député de Saint-Jean, il vous reste quatre minutes sur votre amendement; M. le député de Rimouski, 10 min 15 s; et puis, Mme la députée de Gouin, il vous reste 2 min 35 s sur l'amendement de M. le député de Saint-Jean. Alors, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. J'écoute un peu ce que le ministre vient de mentionner précédemment en réponse à mon collègue et, bon, pas d'accord avec ce qu'il mentionne, là, du fait... effectivement, c'est bien sûr que ce n'est pas des préjugés, mais ça entretient les préjugés. C'est comme si affirmer que les gens, dans la population, là, vont voir : Bon! C'est qu'ils ont juste à se forcer puis à se lever le matin.

Donc, moi, j'ai ici, là, des petites affichettes, hein, M. le Président, des petites affichettes qui peuvent... un peu référence à ce que le ministre mentionne. Je les ai retrouvées, là, dans mon ménage cette semaine, puis je me suis dit : À un moment donné, je vais en avoir besoin, je vais les sortir, puis ça s'adonne que c'est en ce moment.

Et c'est la Table de lutte contre la pauvreté de Chicoutimi, donc, sûrement le genre de groupe que le ministre ne voudrait pas avoir à la rencontre où...

M. LeBel : Aux Halles.

M. Turcotte : ...il voudrait parler de... aux Halles, là... parce qu'il a dit : Bon, pas les groupes, là, qui sont contre l'obligation et qui sont contre les sanctions. Mais c'est quand même des messages très parlants, M. le Président. Vous avez la première : «Maladie, faillite, fermeture d'usine, divorce, harcèlement, accident, vente, restructuration, on est tous à l'abri de la pauvreté... Le croyez-vous? On ne choisit pas la pauvreté, on la subit.» J'en ai une autre, ici : «La pauvreté dans une famille, c'est héréditaire. Le croyez-vous? On ne choisit pas la pauvreté, on la subit.» La dernière : «Quand je serai grande, je veux être pauvre. Le croyez-vous? On ne choisit pas la pauvreté, on la subit.»

C'est le genre de préjugés qui sont répandus, puis on doit continuer à se battre pour cesser ce genre de préjugés là. Puis le ministre l'a bien mentionné : Ici, autour de la table, depuis le début des travaux, on n'a pas entretenu ces préjugés-là. Mais je crois que le terrain est quand même glissant. Donc, il faut se rappeler qu'on travaille pour des gens, on travaille pour des gens qui ont des difficultés, puis c'est pour ça qu'à chaque fois que je parle des absences ou je parle des moments où les gens n'accepteraient pas d'embarquer dans le programme, j'avais toujours la prudence de mentionner qu'on ne connaît pas la réalité des gens, on ne sait pas ce qui se cache derrière cette décision-là qui, des fois, est prise a contrario.

Donc, effectivement, ça se peut qu'une personne perde son emploi pour maladie, faillite, fermeture d'usine, divorce, harcèlement, accident, vente, restructuration d'une entreprise. On fait face à ces réalités-là. Puis ça se peut aussi que ça ne soit pas juste une personne, mais que ça soit aussi les deux du couple qui perdent leur emploi en même temps. Parce que, oui, ça arrive, on le sait, dans nos usines, hein, les couples travaillent au même endroit puis, quand l'entreprise ferme, bien, les deux y passent.

Je pourrais parler de la Prysmian, à Saint-Jean. Je me suis battu. J'ai amené ici les travailleurs, ici, devant l'Assemblée nationale. C'était Nathalie Normandeau qui était ministre responsable, à ce moment-là, d'Hydro-Québec. Parce qu'Hydro-Québec a décidé de faire faire ses câbles d'électricité... les câbles, là, qu'on a devant nous, là, à tous les jours, là. Mais, plutôt que de les faire produire à Saint-Jean-sur-Richelieu ou à Saint-Jérôme, ou à La Malbaie, chez Général Cable, puis à Saint-Jean, à Prysmian, bien, elle les faisait faire en Ontario ou aux États-Unis — notre société d'État. Mais ces gens-là qui travaillaient à Prysmian, à Saint-Jean, ont perdu leur job, puis c'est des gens qui travaillaient là depuis leur tendre enfance. Ils ont rentré là quand ils étaient jeunes...

• (16 h 50) •

Le Président (M. Poëti) : En terminant.

M. Turcotte : En terminant? Donc, ces couples-là ont perdu leur emploi, puis on ne sait pas ce qui arrive avec eux. Puis ça se peut qu'ils ne soient pas capables d'embarquer dans un programme comme Objectif emploi.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur... Mme la députée de Gouin, la parole est à vous pour deux minutes.

Mme David (Gouin) : Deux minutes?

Le Président (M. Poëti) : Oui.

Mme David (Gouin) : Ça va. M. le Président, on parle beaucoup de recherche, là, ici, aujourd'hui. Alors, je vais en mentionner une au ministre — je pourrai peut-être lui donner la référence — une recherche impliquant six universités, en Angleterre, qui parle effectivement du «welfare», c'est-à-dire de toute la question de prestations conditionnelles. Alors, ça me fera plaisir de lui donner.

Et je veux lui souligner aussi que j'ai parlé, tout à l'heure, d'études citées par la Protectrice du citoyen. Donc, il y a une première étude issue du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, c'est le Rapport de la ministre, là, du même ministère, sur l'application de certaines dispositions de la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, Québec, 2005.

Je suggère aussi au ministre une autre étude : Alain Noël, Priorité au soutien du revenu : La mise en oeuvre de la Loi québécoise visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques, avril 2005, page 3.

Donc, les recherches ne disent pas toutes la même chose. Il y a des recherches qui, effectivement, veulent apporter des preuves disant que les sanctions ont un effet vraiment incitatif sur la volonté ou la motivation des gens à participer à des mesures et d'autres recherches qui disent le contraire.

L'autre chose que je voudrais signaler au ministre dans la minute à peu près qu'il me reste, c'est que j'écoutais son exemple, tout à l'heure, d'une personne à la sécurité du revenu versus une personne au salaire minimum. En tout cas, je pense qu'il faudrait vraiment en discuter, là, parce qu'une personne au salaire minimum, à 10,75 $ l'heure, travaillant 40 heures-semaine, 52 semaines par année, reçoit 22 360 $. Il y a certainement des primes et toutes sortes de choses avec ça, là. Et la personne apte au travail, je comprends qu'elle peut — elle peut, ce n'est pas sûr, là, hein — gagner jusqu'à 200 $ par mois, puis, pour avoir le montant que dit le ministre, il faudrait qu'en plus elle participe à plein temps aux mesures d'Objectif emploi. Vous comptez juste le 200 $ par mois?

M. Blais : ...participe à temps plein.

Mme David (Gouin) : Ah! elle peut participer à temps partiel. Ah, bien! Ça, c'est une nouveauté, par exemple.

M. Blais : Bien, c'est sûr!

Mme David (Gouin) : O.K., bien, on en rediscutera.

M. Blais : Bien, c'est sûr.

Mme David (Gouin) : Donc, elle participe à temps partiel, elle travaille à temps partiel. Puis tout ça, là, ça lui ferait quelque chose...

Le Président (M. Poëti) : La députée de Gouin, en terminant.

Mme David (Gouin) : ...qui se rapprocherait du salaire minimum.

M. Blais : ...

Mme David (Gouin) : Hé que ça serait à discuter!

Le Président (M. Poëti) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre, avez-vous une réponse?

M. Blais : Surtout que les mathématiques sont implacables, hein, les mathématiques sont implacables, mais bon.

Sur la question des études, là, puis je comprends que... pas faire un combat... encore une fois, je réitère toujours que : Regardez la méthodologie, regardez les points de comparaison. La Grande-Bretagne, par exemple, est allée très loin sur des sanctions. L'OCDE, même, reconnaît que, si vous allez trop loin, par exemple, si vous coupez quelqu'un pendant très longtemps, ça peut avoir un effet contraire. Donc, il faut y aller de façon... un peu comme on le fait, là, beaucoup moins fort que ce qu'avait fait le PQ.

Encore une fois, le monde entier ou presque, surtout le monde entier social-démocrate — puis le Québec est une social-démocratie, quand même — ne peut pas se tromper. Et le Québec montre le pas, hein, ça serait assez étonnant.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député, la parole est à vous.

M. LeBel : Bien, moi, je proposerais qu'à chaque fois que le ministre nous parle, la faute du PQ, on mette 0,25 $ dans le pot, ça pourrait aider peut-être à financer certains projets.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. LeBel : Je pense, ça serait une bonne idée.

M. Blais : Y a-t-il du monde qui fait ça?

M. LeBel : Oui, oui, surtout de votre bord.

Le Président (M. Poëti) : Donc, je vais vous ramener à l'ordre, s'il vous plaît! Je m'occuperai de ramasser l'argent ici.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Poëti) : Alors, si vous voulez continuer, s'il vous plaît.

Une voix : ...du monde, à Québec, qui fait ça.

M. LeBel : Oui, pas sûr...

Le Président (M. Poëti) : M. St-Denis... M. le député, s'il vous plaît.

M. LeBel : Moi, je viens appuyer l'amendement de mon collègue. L'idée qu'on a derrière, c'est de dire : Là, on a un projet de loi qui est coercitif. À mon avis, il n'a pas de vision pour lutter contre la pauvreté. Ça fait que l'amendement, c'est une façon de coller la loi au moins à la loi-cadre, là, bon, la loi qui vise à lutter contre la pauvreté puis à lutter contre l'exclusion.

L'article 9 de cette loi-là, qu'on aimerait qui soit respecté, bien, c'est assez clair, là, c'est des objectifs... C'est positif, tu sais, rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté; favoriser le maintien en intégration à l'emploi des travailleurs; rendre accessibles des services en matière de santé, de services sociaux et d'éducation adaptés aux besoins des personnes — des régions aussi; favoriser, pour les personnes et les familles en situation de pauvreté, l'accès, en toute dignité, à l'alimentation, au logement.

Moi, j'ai l'impression qu'on est en train de faire un retour en arrière, que je trouve dommage, puis qu'on ne se sert pas du consensus qui avait été fait autour de la loi pour lutter contre la pauvreté, qu'on fait comme si cette loi-là n'existait plus. Je trouve ça très dommage. Puis l'amendement faisait en sorte au moins qu'on puisse en faire référence puis qu'on puisse... Si on veut travailler pour aider les gens à se sortir de la pauvreté puis à aller vers l'emploi, c'est O.K., mais ça serait bien que ça soit intégré dans une vision plus large de ce qu'on veut comme société sans pauvreté. Et ça, bien, c'est l'emploi, mais c'est plein d'autres actions qui présentement sont abandonnées un peu partout, dans plein de secteurs.

Ça fait que j'étais plutôt favorable, j'ai essayé de... par l'avis du comité consultatif, par des situations concrètes, là, de gens qui vivent ça près des Halles à Rimouski... je pense qu'il y avait des bons arguments pour intégrer ces éléments de vision de ce qu'on veut faire pour avoir un Québec avec moins de pauvreté. Je suis toujours favorable à l'amendement, mais je ne suis pas très optimiste.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement de l'article 28? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

M. Turcotte : M. le Président?

Le Président (M. Poëti) : M. le député de Saint-Jean, je vous écoute.

M. Turcotte : M. le Président, j'aimerais procéder au vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Poëti) : Bien sûr. Alors, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : M. St-Denis (Argenteuil)?

M. St-Denis : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

La Secrétaire : M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys)?

Le Président (M. Poëti) : Je vais m'abstenir.

La Secrétaire : C'est rejeté.

Le Président (M. Poëti) : Alors, nous allons reprendre nos travaux avec l'article...

Une voix : ...

Le Président (M. Poëti) : On revient à l'article 83.1. En fait, continuer avec l'article 83.1. Est-ce qu'il y a des interventions? Le député de Saint-Jean, la parole est à vous.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. J'aimerais déposer un amendement à l'article 83.1. L'amendement se lit comme suit... Au fond, c'est ajouter un nouvel alinéa : «Aucune disposition du présent chapitre ne peut avoir pour effet que la prestation accordée à un participant ne lui assure pas le niveau de vie décent visé à l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne.»

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député. On va prendre une pause quelques secondes, le temps d'imprimer et de faire circuler l'amendement.

(Suspension de la séance à 17 heures)

(Reprise à 17 h 4)

Le Président (M. Poëti) : Pardon?

Une voix : L'entendez-vous, le bruit?

Le Président (M. Poëti) : Oui, je vous entends même au micro.

Une voix : Bon!

Le Président (M. Poëti) : Il y a un bruit. Oui, effectivement, il y a un bruit derrière. Écoutez, je suis désolé. Est-ce que le député de...

Une voix : ...

Le Président (M. Poëti) : On a un bruit, monsieur... le son qui nous rentre...

Une voix : C'est la construction.

Le Président (M. Poëti) : Ah! c'est les travaux de construction. Bon, bien, c'est bon, c'est pour une bonne cause. Alors, je suis désolé. Alors, M. le député de Saint-Jean, si vous voulez prendre la peine de lire votre amendement, merci.

M. Turcotte : Oui, je vais me donner la peine de lire ça, effectivement, M. le Président. Donc, ajouter, après le premier alinéa, l'alinéa suivant :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut avoir pour effet que la prestation accordée à un participant ne lui assure pas le niveau de vie décent visé à l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne.»

Au fond, ce qu'on dit, bon, on reprend des éléments que plusieurs groupes ont mentionnés lors de leur présentation ici, en commission parlementaire, là, des gens qui se sont prévalu, là, de leur droit de parole ici, en commission parlementaire, entre autres la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec, qui fait référence à l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne à plusieurs endroits, là, dans leur mémoire.

Entre autres, bon, ils ont même un chapitre, là, sur ça, sur l'article 45 de la charte : «À l'instar du droit international, l'article 45 de la charte protège également le droit à des mesures d'assistance financière et des mesures sociales, prévues par la loi et susceptibles d'assurer un niveau de vie décent, pour toute personne dans le besoin et sa famille. La commission l'a d'ailleurs récemment rappelé, ce droit s'impose "comme critère fondamental qui doit présider à l'élaboration de toute la politique de sécurité du revenu". La commission écrivait également à ce propos "qu'une loi de dernier recours ne peut exclure les personnes qui bien que désignées ‘sans contrainte' ne peuvent atteindre un objectif donné d'autonomie économique [et] d'inclusion de ses finalités sans nier son objectif intrinsèque d'assurer un niveau de vie décent aux plus démunis".»

M. le Président, moi, je crois que ça, c'est assez clair. Ça, c'est le mémoire... je vais juste le reprendre, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui dit ça, là, «qu'une loi de dernier recours ne peut exclure les personnes qui bien que désignées "sans contrainte" ne peuvent atteindre un objectif donné d'autonomie économique ou d'inclusion de ses finalités sans nier son objectif intrinsèque d'assurer un niveau de vie décent aux plus démunis». Moi, je crois, à la lecture du projet de loi et à la lecture des intentions réglementaires, même si ce n'est pas des textes, là, dans ce cas-ci, c'est un graphique... on le voit qu'effectivement ça atteint le niveau de vie décent des plus démunis.

Un peu plus loin dans leur mémoire : «L'analyse du programme Objectif emploi ne saurait donc [d']être [complétée] sans réitérer l'importance des droits économiques et sociaux inscrits au chapitre IV de la charte et parmi lesquels figure le droit garanti à l'article 45 de celle-ci. La nécessité de renforcer la garantie juridique des droits économiques et sociaux énoncés dans la charte en 1975 était d'ailleurs l'un des consensus les plus forts à ressortir de la consultation publique organisée par la commission à l'occasion du 25e anniversaire de la charte.»

Je pourrais faire la nomenclature de différents endroits où la commission fait référence à l'article 45 de la charte. On le voit, c'est un principe important. D'ailleurs, lors de leur passage, la commission, plusieurs collègues ici, députés, avaient effectivement souligné que les commentaires de la commission étaient très clairs sur le projet de loi, mais en même temps on avait senti plusieurs grandes surprises, de la part du ministre, à ces commentaires de la commission, en voulant minimiser ces commentaires, donc les commentaires, l'opinion, là, de la commission. Mais, au même titre que les mathématiques sont implacables, on dit aussi que les chiffres sont têtus; dans ce cas-ci, les mots sont peut-être durs, mais sont écrits et ils sont là. Il faut vivre avec cette opinion de la commission.

Je pourrais faire référence aussi, M. le Président, à d'autres organismes ou organisations qui sont considérés comme étant plus légaux, qui ont une opinion aussi sur le projet de loi. Donc, le Barreau du Québec : «Nous tenons donc à rappeler la forte dissidence dans l'arrêt Gosselin c. Québec, qui considérait qu'une réduction du montant des prestations d'aide sociale fondée sur l'âge violerait le droit à l'égalité prévue par l'article 15 de la charte canadienne.

• (17 h 10) •

«Outre le fait que le programme Objectif emploi soit obligatoire pour certains, ils risquent également, contrairement à ceux qui ne participent pas au programme, de perdre leur aide financière s'ils ne se conforment pas aux exigences liées à leur participation. Il ne ressort pas clairement du projet de loi que ces derniers demeurent admissibles à une prestation d'aide sociale en vertu des dispositions du chapitre I de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, suite à un manquement au programme Objectif emploi. Considérant que l'article 83.1 alinéa 2 proposé par le projet de loi reconnaît que ces personnes auraient normalement droit à une prestation d'aide sociale, il semble inéquitable que leur participation à ce programme les prive d'un droit reconnu. Le projet de loi mériterait d'être plus clair à cet égard.»

Peut-être que le ministre a un amendement en ce sens. Nous aurons l'occasion d'y revenir peut-être plus tard. Mais, en même temps, le ministre a eu quelques heures, hein, quelques heures que nous étudions le 83.1. Donc, s'il a un amendement en ce sens, il pourrait nous en faire part. La Commission des droits de la personne, que j'ai mentionnée, que j'ai citée tantôt, dit aussi : «Suivant les circonstances, l'obligation de participer au programme Objectif emploi et le non-accès au Programme d'aide sociale qui s'en suit pourront donc s'avérer discriminatoires, en fonction non seulement du motif condition sociale prévu à la charte, comme nous venons de le voir, mais également de l'[accroissement] de celui-ci à d'autres motifs de discrimination interdite.

«[...]À la lumière de l'ensemble de ces considérations la commission est d'avis qu'en conditionnant, pour certaines catégories de personnes, le droit à des mesures d'assistance financière et des mesures sociales susceptibles d'assurer un niveau de vie décent à la participation à des mesures d'aide à l'emploi, le programme Objectif emploi est de nature à accroître la discrimination déjà vécue par les personnes qu'ils visent à aider, sur la base du motif condition sociale ou de l'[accroissement] de celui-ci à d'autres motifs de discrimination interdite, et que, ce faisant, il porterait atteinte aux articles 10 et 45 de la charte.»

La Protectrice du citoyen, M. le Président, mentionne... ou recommande, dans ce cas-ci... recommandation 4, «que la notion de manquement à un engagement prévu au plan d'intégration en emploi soit définie dans la loi»; recommandation 5, «que cette définition soit fondée sur une obligation de moyens du participant et non de résultat, c'est-à-dire de fournir les efforts raisonnables, compte tenu de sa situation, pour respecter les engagements prévus à son plan d'intégration en emploi».

M. le Président, tout ça pour dire qu'il y a des organismes, le Barreau du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, la Protectrice du citoyen, plusieurs organismes sont venus ici, en commission, ont déposé des mémoires, ont écrit des mémoires, ont fait des communications via les communiqués de presse, pour soit remettre en question le principe même de l'obligation et des sanctions ou de faire des recommandations pour baliser davantage cette obligation et ces sanctions... pas les sanctions mais les obligations... dans le projet de loi. C'est des gens qui ont, par leurs interventions, par leurs rapports, par leurs réflexions habituelles... bon, sont considérés davantage comme plus des gens, là, légaux, donc qui ne sont pas partisans, là. Ce n'est pas des gens, là, qui appuient un parti politique, ce n'est pas des gens qui se présentent à des élections, là, comme nous, on fait ici, là. Bien, on ne le fait pas ici, se présenter à des élections, on l'a fait avant. Si on est ici, c'est parce qu'on a gagné des élections.

C'est pour ça qu'on considère important de faire référence à l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne pour reprendre, justement, ce qui se dit, ce qui s'est écrit. Et on l'a dit, c'est l'article fondateur, selon nous, du programme Objectif emploi. Donc, on désire que le ministre puisse inscrire le principe de la Charte des droits et libertés de la personne dans cet article-là. L'article 45, M. le Président, si vous me permettez, je pourrais le lire, parce qu'on y fait référence depuis déjà quelques minutes, mais peut-être qu'on ne sait pas de quoi on parle. Je vais vous le lire. Moi, je sais que vous êtes au fait, là, mais peut-être que d'autres ici ne sont pas au fait. Donc, pour être sûr que tous, on parle de la même chose, l'article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne stipule... bien, mentionne, dit, affirme : «Toute personne dans le besoin a droit, pour elle et sa famille, à des mesures d'assistance financière et à des mesures sociales, prévues par la loi, susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent.» Je crois que ça parle par soi-même.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Blais : Oui. Alors, moi, je ne suis pas juriste, là, mais effectivement j'étais surpris par ce que j'ai entendu parfois de la Commission des droits de la personne. Je me rappelle même d'un échange où très clairement, là, on nous a dit que le fait d'accorder des montants plus importants pour les personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi devrait être considéré comme étant... le bon mot, ça serait : discriminatoire. Bon, je m'excuse, un effet de fatigue, là : discriminatoire, donc. Ce que je vous dis, c'est : J'en ai entendu pas mal dans ma vie, mais je n'ai pas vu beaucoup, beaucoup de personnes aller aussi loin que dire qu'accorder des montants différenciés pour tenir compte de situations de handicap pourrait être discriminatoire. Je vous le dis, là, dans ma vie, j'ai déjà entendu ça peut-être de personnes plus téméraires, là, jeunes et peut-être avec peu de formation, mais bon. Donc, j'étais resté un peu surpris de certains échanges qu'on avait eus.

Il faut bien comprendre que la Charte des droits, là, au Québec, il y a un certain nombre d'articles qui ont une portée législative, donc qui amène à des recours possibles. Et certains autres articles n'ont aucune portée supralégislative, donc ne peuvent pas imposer, ne peuvent pas conduire à des recours, notamment contre le gouvernement. Donc, il y a certains articles qui peuvent amener des recours, mais pas tous.

L'article 45, et là-dessus, bien, le collègue fait référence à l'arrêt Gosselin... L'arrêt Gosselin, c'est une décision de la Cour suprême où il y avait des dissensions... pas des dissensions, mais des...

Une voix : Des dissidences.

M. Blais : Des dissidences, pardon, encore une fois l'effet de la fatigue, des dissidences sur plusieurs points, mais il y avait unanimité totale sur un élément, c'est bien sûr que l'article 45 de la Charte des droits n'a pas de portée supralégislative et il ne peut pas y avoir de recours. Ça demeure le législateur qui décide de ce que c'est que les niveaux de vie, là, qui doivent être respectés, là, et donc ça ne peut pas être d'aucune façon, là... l'arrêt Gosselin, de toute façon, qui ne... pas l'arrêt Gosselin, pardon, mais la charte qui ne le définit pas. Donc, on est dans le même type de problème du point de vue juridique, hein, formellement, du moins, là, dans le même type de difficulté que l'amendement précédent.

Le collègue cherche à s'appuyer sur une charte, une loi-cadre, etc., qui pourraient avoir un impact supralégislatif et imposer des contraintes, et ce n'est pas le cas. La Charte des droits n'impose pas du tout un revenu quelconque, là, ou le maintien d'un revenu quelconque. De toute façon, je vous rappelle que ce type de pénalité là, sur le niveau de pénalité — hein, qui, je l'ai déjà mentionné, mais qui est de loin inférieur, hein, à ce qu'avait fait le Parti québécois, là, dans son propre programme — il est déjà exercé dans les cas de fraude, là, au Québec. Il y a déjà des gens qui ont ce type de pénalité. Donc, on tourne en rond, encore une fois, M. le Président.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Saint-Jean, la parole est à vous.

M. Turcotte : Bien, c'est parce que j'aimerais ça répondre un peu à ce que le ministre vient de mentionner. Oh là là! Effectivement, il n'y en aura pas de facile, là. On tente de trouver une voie de passage, mais là on semble s'éloigner pas mal, là.

Une voix : ...

M. Turcotte : Vous faites tout pour aider.

Le Président (M. Poëti) : Le oh là là!, M. le député, a étonné le ministre. Alors, reprenez vos sens.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Poëti) : Qui dit qu'on ne s'amuse pas, quand même, en commission, hein?

• (17 h 20) •

M. Turcotte : Non, effectivement.

Le Président (M. Poëti) : Alors, allez-y. Revenons sérieusement à...

M. Turcotte : Mais, M. le Président, le ministre nous dit, et il nous le dit à nous, là : Le député tente de s'accrocher à une charte. Bien, ce n'est pas une charte, là, c'est la charte qu'on parle, là, on est assez clairs, Charte des droits et libertés de la personne... à une loi-cadre, là, on va revenir... on a fait un bout sur la loi-cadre, là on va rester un peu sur la charte, là, parce que c'est de ça qu'on parle, la Charte des droits et libertés de la personne, là, qui est adoptée puis qui est en vigueur et qui, je dois le dire, a force de loi.

La charte, ce n'est pas n'importe quoi, là, on doit la respecter, sinon, ça sert à quoi, d'avoir une charte des droits et libertés de la personne? Et la commission a fait un mémoire très rigoureux, là, une très bonne analyse. Je vois que le ministre semble ne pas partager mon analyse, là, sur la rigueur de la commission, mais je lui donnerai l'occasion avec plaisir d'élaborer davantage sur son appréciation du mémoire de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Mais moi, je ne sais pas, je ne veux pas... moi, ce n'est pas mon genre de faire de la politique, là, en disant des affirmations ou en abaissant les gens, puis tout ça, là, puis je ne dis pas que le ministre fait ça, loin de là. Mais c'est quand même étrange : aussitôt qu'un député, ici, là, amène une étude, ou, bon, notre collègue, ici, amène un rapport, là, d'un comité, qui est dans la loi, qui est prévu dans la loi-cadre, là, pour amener des analyses... là, on a un mémoire de la commission... puis c'est comme si ça, ce n'est pas rigoureux, ce n'est pas démontré selon la science, il n'y a pas de raffinement, là, dans ça.

Mais, en même temps, moi, depuis le début, j'écoute le ministre. À plusieurs occasions, plusieurs occasions, il nous fait référence à la science, à la recherche sans citer, sans déposer même des études ou des recherches documentées ici. On n'en a pas, de dépôt d'études, de recherches que le ministre a fait souvent référence, en disant : Moi, bon, je connais... Bon, c'est sûr que le ministre, tantôt, je l'ai mentionné, il a une expertise. Moi, je ne nie pas ça. Le ministre est très humble dans son expertise; moi, je reconnais son expertise, je ne remets pas ça en question du tout. D'ailleurs, il a fait des écrits par le passé, je l'ai mentionné hier, il a même participé à un colloque du Parti québécois en 1997, j'ai la documentation, j'en ai parlé. Il avait fait sûrement une très belle performance. Malheureusement, je n'étais pas présent, j'étais au berceau, je l'ai dit hier, à ce moment-là. Mais, quand même, je ne remets pas ça en question. Il est documenté, ça, il n'y a pas l'ombre d'un doute.

Cependant, je crois que, dans un débat comme on a actuellement, il faut aussi reconnaître des éléments qui nous proviennent d'organismes ou de gens qui ont des missions claires selon la loi et qui ont une réputation et une crédibilité. Je regrette, là, mais la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, on peut ne pas aimer ce qu'ils mentionnent, on peut ne pas apprécier leur mémoire ou leurs écrits, mais on ne peut pas remettre en question le fond de ce qu'ils affirment. Et effectivement ils le mentionnent, page 13 : «La commission est particulièrement préoccupée par les impacts discriminatoires qu'impliquerait la mise en oeuvre du programme Objectif emploi pour les personnes qui doivent avoir recours à un programme d'aide financière. La commission tient à préciser trois choses à ce sujet. Premier élément : rappelons d'abord que la Cour suprême définit comme suit la notion de discrimination interdite par la charte :

"[...]une distinction, intentionnelle ou non, mais fondée sur des motifs relatifs à des caractéristiques personnelles d'un individu ou d'un groupe d'individus, qui a pour effet d'imposer à cet individu ou à ce groupe des fardeaux, des obligations ou des désavantages non imposés à d'autres ou d'empêcher ou de restreindre l'accès aux possibilités, [et] aux bénéfices et aux avantages offerts à d'autres membres de la société."»

M. le Président, ce qui est mentionné ici, et que le ministre se questionne... Sur la discrimination, il disait : Ils ont poussé fort pas mal, là, sur la discrimination. Parce qu'en disant : Il y en a d'autres, programmes, puis je ne vois pas comment on peut dire que c'est discriminatoire, d'avoir un programme qui bonifie l'aide, puis tout ça, ce n'est pas ça, le problème. Le problème, ce n'est pas la création du programme Objectif emploi; le problème, ce n'est pas d'avoir une allocation spéciale pour la recherche intensive d'un emploi de 165 $, pour la formation et l'acquisition de compétences, de 260 $, ou pour le développement des habiletés sociales, de 165 $. Il n'est pas là, le problème.

Quand la commission dit que c'est discriminatoire, ce n'est pas le programme en soi, c'est l'obligation et les sanctions qui en découlent. C'est de ça qu'on parle. C'est très clair : «...une distinction, intentionnelle ou non, mais fondée sur des motifs relatifs à des caractéristiques personnelles d'un individu ou d'un groupe d'individus — dans ce cas-ci, ils sont nouveaux demandeurs — qui a pour effet d'imposer à cet individu ou à ce groupe — les nouveaux demandeurs — des fardeaux, des obligations ou des désavantages non imposés à d'autres ou d'empêcher ou de restreindre l'accès aux possibilités, [et] aux bénéfices et aux avantages offerts à d'autres membres de la société.»

On l'a vu, les autres prestataires d'aide sociale auront des droits que les participants du programme Objectif emploi n'ont pas. Le ministre l'a dit hier. Et en plus, ils ont l'obligation d'embarquer dans ce programme-là, quand on sait que les prestataires actuels d'aide sociale n'ont pas cette obligation-là, mais ont la possibilité d'avoir 195 $ par mois pour la formation et l'acquisition de compétences. Donc, c'est véritablement deux poids, deux mesures, donc il y a effectivement discrimination. Et on l'a dit, on l'a mentionné et on le répète, ça s'apparente à une clause orphelin.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.

M. Blais : Deux choses. Ce que je voulais dire tout à l'heure, je ne me suis peut-être pas exprimé clairement, c'est que le député recherche un effet juridique qui n'existe pas. Donc, je comprends ce qu'il cherche, il voudrait une protection par rapport à des conséquences ou des pénalités. L'article 45, il l'a invoqué, dans la loi, ne donnera pas cet effet-là, il n'a pas cet effet du pouvoir législatif. Ça, c'est au niveau de la mécanique juridique, je dirais. Maintenant, s'il veut parler au niveau des droits, ce qui a été testé juridiquement, là, ce que je comprends, là, au Canada, là, par des décisions de la Cour suprême notamment, il ne peut pas y avoir de décision des cours supérieures qui réfère à la charte des droits, justement parce que la charte des droits québécoise, l'article 45 n'a pas cette opérationnalité-là, ce caractère supralégislatif. Mais c'est deux choses. On n'a pas testé encore la question : Est-ce qu'une sanction, c'est discriminatoire ou pas, hein? Donc, la commission dit : Oui, c'est discriminatoire. Mais je vous le dis qu'à mon grand étonnement qu'elle a aussi dit, mais ce n'était peut-être pas fidèle à ce que l'ensemble de la commission pense, que, même avoir des montants différenciés pour tenir compte d'un handicap, c'était aussi discriminatoire. En tout cas dans l'échange étonnant que j'avais eu avec un membre, je dois l'avouer, pas avec l'ensemble de la commission.

Donc, on n'a pas de décision juridique forte de la Cour suprême sur les sanctions, les sanctions sont présentes dans huit provinces...oui, voilà, huit provinces au Canada. Il pourrait y avoir une décision un jour, mais en tout cas on ne peut pas invoquer le droit sur ce plan-là. Là, il y a une décision de la Cour suprême qui pourrait intéresser notre collègue, c'est sur la discrimination sur l'âge. Effectivement, si on avait ciblé des âges en disant : Écoutez, Objectif emploi, c'est pour les 25 ans et moins ou les 30 ans et moins, il est possible que le test juridique, il aurait été plus difficile. Mais, comme il s'agit des primodemandeurs, on est aussi protégés, là, par rapport aux décisions antérieures de la Cour suprême.

Le Président (M. Poëti) : M. le député de Saint-Jean, d'autres interventions?

M. Turcotte : Bien, je pense qu'il ne me reste plus de temps.

Le Président (M. Poëti) : Vous avez terminé.

Une voix : ...

Le Président (M. Poëti) : Il ne restait pas tout à fait deux minutes, mais il n'y a pas de problème.

M. Turcotte : Je reviendrai peut-être.

Le Président (M. Poëti) : Alors, merci. Mme la députée de Gouin, la parole est à vous.

• (17 h 30) •

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Bien sûr, je vais appuyer l'amendement de mon collègue le député de Saint-Jean. Avant de parler de la Commission des droits de la personne et d'aller sur ce terrain-là, je voudrais rappeler qu'on parle ici de, bon, de niveau de vie décent. Le ministre, tout à l'heure, nous a dit : Mais il faut faire quand même attention : il y a l'équité horizontale, l'équité verticale. Il nous a apporté des chiffres.

Alors, moi, j'ai fait vérifier tout ça, là. C'est juste impossible qu'une personne à l'aide sociale, participant pleinement à une mesure de formation qui est la plus payante, là, en termes d'allocations supplémentaires, puis en plus, travaillant 19 heures par semaine... par mois, en fait — attendez, excusez-moi, je suis mêlée, je suis fatiguée, là — par mois, puisqu'elle n'a pas plus que 200 $ de gains permis — c'est ça, par mois — c'est rigoureusement impossible que cette personne-là s'approche sérieusement de ce que gagne une personne au salaire minimum, 40 heures-semaine, 52 semaines par année. On en est très loin.

Et j'ajouterais, je sais que ça a été longuement débattu cet après-midi pendant que nous étions ici dans d'autres débats, que, de toute façon, ce n'est pas tellement des prestations à l'aide sociale dont il faudrait discuter — quoique oui — il faudrait discuter de la hauteur du salaire minimum. Ça, ça aiderait pas mal, parce qu'évidemment, si on haussait le salaire minimum à des seuils qui ont un petit peu de bon sens, ça nous permettrait, tiens, sans risque, d'augmenter aussi les prestations de base à l'aide sociale, et là tout le monde pourrait avoir un niveau de vie décent tel que visé à l'article 45 de la Charte des droits et libertés. Ça, c'est la première chose.

Deuxième chose, je voudrais indiquer que le ministre a raison sur un point, puis je dirais quasiment malheureusement. Ce n'est pas de la faute du ministre, mais l'article 45 de la Charte des droits et libertés n'est pas, comme plusieurs le disent... je ne suis pas certaine que ce soit parfaitement français, là, mais... judiciable. Autrement dit, on ne peut pas invoquer cet article pour aller devant le tribunal. Les 39 premiers articles de la Charte des droits et libertés peuvent être invoqués devant un tribunal, le Tribunal des droits de la personne, mais pas l'article 45. J'aimerais juste rappeler que ça doit faire 20 ans que de nombreux organismes demandent justement que l'article 45 puisse être utilisé devant un tribunal.

Donc, la question n'est pas de savoir si, oui ou non, l'article 45 permet d'aller devant un tribunal. La question, c'est que l'article 45 existe quand même, qu'il fait partie de la Charte des droits et libertés de la personne, qui, je pense, jusqu'à nouvel ordre, est considérée comme un outil indispensable non seulement à la vie démocratique au Québec, mais, je dirais, au vivre-ensemble, au respect des droits de la personne, au respect des droits des minorités. C'est indispensable au respect des droits des personnes plus marginalisées. Bref, c'est un extraordinaire outil, probablement perfectible, comme le sont tous les outils, mais ce n'est certainement pas un outil qu'il faut traiter à la légère. Je ne dis pas du tout que c'est ce que le ministre dit, mais, en tout cas, c'est ce que moi, je dis. C'est un outil extrêmement important.

Se basant sur cet outil, la Commission des droits de la personne a effectivement dit un certain nombre de choses qui devraient nous amener à réfléchir sur le projet de loi actuel. Par exemple, la commission dit, dans son mémoire : «Suivant les circonstances, l'obligation de participation au programme Objectif emploi et le non-accès au Programme d'aide sociale qui s'en suit pourront donc s'avérer discriminatoires en fonction non seulement du motif condition sociale prévu à la charte[...], mais également de l'entrecroisement de celui-ci à d'autres motifs de discrimination interdite.»

Et la commission continue : «À titre d'exemple, citons notamment le cas d'une personne devant s'inscrire au Programme d'aide sociale et qui serait par ailleurs en situation de handicap, mais sans que celui-ci soit reconnu au sens de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.» Ça, ce sont des choses qui arrivent. «Une personne peut ainsi être en situation de handicap au sens de la charte puisque celle-ci commande une interprétation large et libérale de cette notion, mais ne pas être considérée avoir des contraintes sévères à l'emploi en vertu de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Elle pourrait alors se voir refuser l'admission au Programme d'aide sociale ou au Programme de solidarité sociale prévus à cette loi et être dirigée vers le programme Objectif emploi sans que sa situation ne lui permette pour autant de suivre une mesure d'intégration à l'emploi non adaptée. Qu'arrivera-t-il à cette personne qui pourrait ne pas être en mesure de respecter certains engagements que prescrirait le programme Objectif emploi ou devoir l'abandonner [ou] dont la prestation d'Objectif emploi serait en conséquence réduite?»

Autrement dit, la Commission des droits de la personne nous met vraiment en garde contre des effets discriminatoires imprévus, certainement non désirés, du projet de loi n° 70, mais effets qui peuvent arriver. Des personnes, par exemple, qui se sont présentées à mon bureau avec vraiment des difficultés importantes mais non reconnues aux termes de la loi sur l'emploi et la solidarité, la Loi sur l'aide sociale, bien, ça existe. Ce n'est pas facile, faire reconnaître par un centre local d'emploi ou par les personnes en situation d'autorité, là, que l'on est, entre guillemets, inapte au travail ou, en tout cas, que l'on a vraiment des contraintes sévères qui nous empêchent d'accéder à un emploi. C'est très difficile. Et, quand le ministre dit : Chaque personne sera évaluée, on reconnaîtra ses besoins, et, s'il y a des personnes qui ne peuvent effectivement participer à des programmes, on va le comprendre, on va les laisser tranquilles, si vous saviez comme j'aimerais que ça soit vrai. Mais le problème, c'est que, sur le terrain, là, ce n'est pas comme ça que ça se passe. C'est extrêmement difficile d'avoir cette reconnaissance-là.

Je voudrais souligner aussi que, bien sûr, la charte interdit la discrimination selon l'âge, et c'est la raison pour laquelle le ministre...

Une voix : ...

Mme David (Gouin) : Pardon, excusez-moi? Oui, M. le ministre?

M. Blais : Bien, juste un petit point, un tout petit point dans la discussion. Nous allons permettre à la collègue de reprendre son souffle. Je ne veux pas donner l'impression que je balaie du revers de la main des avis. À vrai dire, l'extrait que vous avez lu, là, précisément, l'extrait que vous, vous avez lu, là, il y a des éléments là-dedans qui ont beaucoup influencé les modifications qu'on a apportées, notamment, bon, on revient sur les parcours, mais sur la question que ce soit avant tout de la participation plus que des résultats; le fait aussi que la préemployabilité soit importante; la reconnaissance qu'aujourd'hui il y a des personnes à l'aide sociale qui ne sont pas diagnostiquées comme ayant des contraintes et qui en ont, mais, pour le savoir, il faut les rencontrer. Donc, le type de préoccupation qu'avait la commission, là, en tout cas, ces éléments-là ont influencé les changements que l'on a apportés. Cependant, il arrive parfois que je suis en désaccord, là. La philosophie est le dernier refuge des sceptiques...

Le Président (M. Poëti) : Je m'excuse, peut-être si vous voulez répéter la fin de votre phrase, la députée de Gouin n'a pas entendu, M. le ministre.

M. Blais : Ah, non, j'ai dit que la philosophie était le dernier refuge des sceptiques, et que j'avais des désaccords sur plusieurs éléments, là, qui ont été apportés parfois, mais plusieurs aussi des craintes qu'il y a eu, qui nous ont été présentées par les groupes. Parce qu'on imaginait toutes sortes de choses. On a même parlé beaucoup, beaucoup, dans les documents, de «workfare». Tout ça, je pense qu'on a éliminé, je pense, ces craintes-là.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Il me reste combien de temps, M. le Président, s'il vous plaît?

Le Président (M. Poëti) : Il vous reste près de 14 minutes.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. La philosophie est le refuge des sceptiques, c'est vraiment...

M. Blais : Le dernier refuge.

Mme David (Gouin) : ...le dernier refuge des sceptiques, c'est vraiment intéressant, et j'annonce au ministre déjà que la semaine prochaine je vais faire un peu de philosophie avec lui parce que je sais qu'il aime ça.

Mais revenons-en à l'article 45... Pardon?

M. Turcotte : Tu viens de faire sa semaine.

• (17 h 40) •

Mme David (Gouin) : Ah oui? Revenons-en à l'amendement de mon collègue le député de Saint-Jean. Il y a quand même quelque chose qui me frappe dans le projet de loi, que l'on veut non discriminatoire, hein, parce que la charte des droits et libertés interdit la discrimination selon l'âge. Donc, j'aime beaucoup le mot «paradoxe», le ministre l'aura constaté, mais on est tout le temps dans le paradoxe avec ce projet de loi là. Pour éviter de se faire taxer de discrimination selon l'âge, le projet de loi ne dit pas, hein, n'indique aucunement que les mesures proposées ne s'adressent qu'aux primodemandeurs, ne concernent que les primodemandeurs, disons, 18-30 ans ou 18-25 ans, et je comprends très bien pourquoi. En même temps, il faut quand même se dire, là, que j'ai regardé avec assez d'attention la liste des organismes qui collaborent avec le ministère, là, dans le cadre... bien, qui collaborent déjà avec Emploi-Québec et qui vont continuer de le faire. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de carrefours jeunesse-emploi et d'organismes jeunesse. Puis le ministre, de toute façon, ne s'en cache pas, ce qui le préoccupe énormément, ce sont les primodemandeurs, particulièrement 18-21, 18-25 ans, hein? Ça, c'est assez clair, même si ce n'est pas écrit noir sur blanc dans le projet de loi, parce qu'on ne peut pas faire ça à cause de la charte.

Mais moi, j'aimerais ça qu'on parle des autres. On pourrait en parler de temps en temps, des autres. Les plus de 30 ans, il y en a à peu près un tiers, un peu moins d'un tiers parmi les primodemandeurs. Ils sont tout aussi touchés par le projet de loi, et leur prestation de base pourrait être affectée par le projet de loi, donc on va être très loin du niveau de vie décent, là. S'il y a un niveau de vie décent, c'est d'essayer d'atteindre, je ne sais pas, moi, le seuil de faible revenu ou au moins la mesure de panier de consommation, là. On en est déjà à 50 %; avec les sanctions, on est au tiers.

Pour une personne, mettons, qui a 40 ans, là, et qui considère que, mettons, pour un certain temps, elle n'est pas en mesure de participer à un programme, même si son agent d'aide sociale pense le contraire, on se comprend, là, elle va vivre avec un revenu indécent, qui va être en bas de 623 $ par mois. Puis ça, on en parle rarement, parce qu'on est très, très concentrés sur la situation des jeunes, mais, en fait, le projet de loi touche tout le monde. Le ministre, l'autre jour, m'a dit : En bas de 58 ans.

Puis tout le monde, ça veut dire des gens entre 30 et 58 ans, des gens, donc, par exemple, le député de Saint-Jean en parlait, qui ont perdu leur emploi parce que leur usine a fermé. Et ce serait intéressant de voir qu'est-ce qu'ils sont devenus, un an ou un an et demi plus tard; j'espère que, pour un certain nombre d'entre eux, ils ont pu se requalifier, retrouver un emploi. Ce n'est peut-être pas le cas de tout le monde, puis ce n'est peut-être pas possible pour tout le monde. Et qui va juger de ça? L'agent, le ou la fonctionnaire, au meilleur de ses connaissances et avec ce que la loi et les règlements l'obligent à faire. Ça, il faut quand même être clair, là.

Alors, moi, ça me pose problème, parce que la personne, on ne parle pas de quelqu'un qui n'a jamais travaillé, qui vient d'une famille à l'aide sociale; tout ce que le ministre nous a décrit, on n'est pas là-dedans, là. On est dans : Une personne qui a un certain âge, qui a travaillé, qui a occupé un emploi dans bien, bien des cas, dans l'immense majorité des cas, et qui là, malchance, perd son emploi, n'a plus d'assurance-emploi, le délai est terminé, et puis donc, tombe — tombe, comme disent les gens — à l'aide sociale. Alors là, tu participes, parce que, si tu ne participes pas, tu es coupé. Je trouve ça un peu incroyable, M. le Président, quand on parle de tenter d'assurer un niveau de vie décent aux gens, décent. Alors, à moins que 400 $ par mois soit jugé décent, je pense que là on travaille à l'encontre de la Charte des droits et libertés.

Le Président (M. Poëti) : Merci, Mme la députée de Gouin. Est-ce que, M. le ministre, vous voulez ajouter ou répondre à la députée de Gouin?

M. Blais : Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Poëti) : La parole est à vous, M. le ministre.

M. Blais : Non, non, ça va, M. le Président, ce n'est pas nécessaire.

Le Président (M. Poëti) : Pardon, j'avais compris oui, désolé. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui? Alors, M. le député, la parole est à vous.

M. LeBel : Bien, dans le fond, ce qu'on essaie de faire depuis ce matin, c'est de trouver un amendement pour amener le ministre à respecter la loi pour lutter contre la pauvreté ou les éléments de la loi. C'est une loi qui, comme j'ai dit ce matin, avait adopté une façon consensuelle, et tout ça, mais c'est une loi qui... On a été à l'avant-garde, là. C'est une loi qui a été bâtie avec la société civile, avec des gens qui se sont impliqués, avec les parlementaires transpartisans. C'est unique dans le monde. Puis le ministre est un peu le gardien de cette loi-là, une loi qui essaie de définir c'est quoi, un revenu décent, malgré toutes les problématiques, là. Puis le ministre qui est gardien de tout ça, par cette loi-là, vient de dire, vient nous dire : Bien, moi, je ne suis pas capable de... je ne peux pas, par ce projet de loi là... je pourrais aller en bas du... ce qu'on avait au moins convenu comme revenu décent. C'est la première fois que ça arrive comme ça. Ça fait que nous, on essaie de trouver des amendements pour, comme on dit par chez nous, patcher les trous, tu sais, essayer de voir qu'il n'y ait pas de... qu'au moins on s'engage à garder un revenu décent.

Puis la Commission des droits de la personne, bien là, on essaie de le faire par la charte des droits de la personne, et je voudrais... Les gens de la commission étaient intervenus puis avaient dit : «... la commission "n'a cessé de souligner l'importance d'aborder la pauvreté dans une perspective systémique..."» C'est un peu ce que la loi pour lutter contre la pauvreté faisait. Et, ce qu'ils rajoutaient, les gens de la commission : Le programme Objectif emploi n'adopte cependant pas une telle perspective, il risque d'accroître la discrimination systémique vécue par les personnes visées sur la base de leur condition sociale.

Puis, ce matin, quand je citais le mémoire du comité consultatif, comme je disais, c'était gros... puis le ministre en convenait, puis il trouvait, bon... il manquait peut-être un peu de rigueur, mais je vais le relire : «Le comité ne peut qu'appuyer l'intensification du soutien et de l'accompagnement des nouveaux prestataires d'aide sociale, car, on le sait, plus une personne demeure longtemps à l'aide, plus il lui devient difficile de s'en sortir. Par contre, le comité s'oppose à toute mesure coercitive assortie de pénalités qui viendraient réduire une aide financière déjà trop faible pour assurer la couverture des besoins de base des personnes, compromettant ainsi leur santé et leurs chances de s'en sortir. Cette façon de faire contrevient à la législation en vigueur, notamment la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, la Charte des droits et libertés de la personne, et le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels.»

Ça fait que c'est assez inquiétant pour dire : Est-ce qu'on est capables de trouver un amendement pour essayer de se réconforter, tout le monde, essayer de voir qu'on ne touchera pas aux besoins de base?

Je pense qu'il y a eu beaucoup d'arguments qui ont été amenés. Moi, je vais rajouter un autre élément. Je pense qu'on est dus pour une bonne visite à Rimouski. Vous avez parlé des Halles; moi, j'ai rajouté qu'on pourrait aller rencontrer des groupes. On va rajouter l'Université du Québec à Rimouski, tiens. Il y a des profs là-bas qui se sont réunis autour de la recherche en développement social, je pense que c'est exactement, puis ils ont transmis une lettre au Devoir. Puis je vais vous lire quelques éléments de cette lettre-là.

Bien, «dans une lettre transmise au Devoir, des chercheurs en travail social [de l'UQAR] soutiennent que la stratégie de Québec pour réduire le nombre d'assistés sociaux repose sur de "fausses prémisses". L'objectif du projet de loi 70, présenté [l'année passée], est noble — inciter les gens à trouver du travail — mais ce n'est pas en coupant dans les prestations de l'aide sociale qu'on y arrivera, estiment les signataires, professeurs en travail social de l'Université du Québec à Rimouski.» Par mon petit crochet par l'UQAR, on pourrait aller rencontrer les gens.

«"Nous sommes ici dans l'univers des préjugés fortement répandus dans la population à l'égard des bénéficiaires [de l']aide sociale — par exemple, dépendant, paresseux, fraudeur", écrit Jean-Yves Desgagnés, directeur du module de travail social de l'UQAR, au nom de cinq de ses collègues. "Jamais, depuis l'existence de l'aide sociale en 1969, un gouvernement n'était allé aussi loin dans le «workfare» — travailler pour recevoir de l'aide — et la négation des droits fondamentaux des plus pauvres dans notre société", ajoutent les signataires.»

M. Turcotte : C'est encore notre faute, là.

M. LeBel : C'est peut-être manquer peut-être un peu de rigueur, mais c'est des gens de l'UQAR.

«Pour Jean-Yves Desgagnés, il faut mettre en parallèle les coupes de 50 millions à l'aide sociale — donc chez les plus pauvres — et les centaines de millions donnés aux médecins», etc.

«Le gouvernement[...] — du premier ministre ici, là, à Québec — fait appel à la carotte et au bâton pour limiter l'accès à l'aide sociale. D'abord, la carotte : les nouveaux demandeurs recevront entre [autres] 130 $ et 250 $ par mois, en plus de leur chèque régulier de 616 $, s'ils participent à des programmes pour trouver un emploi ou retourner aux études, par exemple.

«En contrepartie, ces nouveaux inscrits à l'aide sociale seront pénalisés s'ils ratent des étapes fixées par leur agent d'aide sociale. Par exemple, leur aide supplémentaire de 250 $ sera coupée s'ils omettent de se présenter aux cours d'aide à l'emploi. Ensuite, leur chèque régulier sera amputé», etc. Puis «les nouveaux prestataires devront aussi accepter tout "emploi convenable" qui leur sera proposé, sans quoi ils perdront l'aide de l'État».

On dit qu'on veut «briser le "cercle vicieux"», on dit qu'on ne veut pas aller dans les préjugés, mais l'ancien ministre disait : «On ne peut pas, comme société, accepter que je suis un enfant de l'aide sociale et que mon ambition, à 18 ans, c'est d'aller chercher un chèque d'aide sociale.» C'est un peu ce que l'affichette démontrait tantôt, puis ça, c'était porté par le ministre. Une autre citation du ministre de l'époque, qui rappelle un peu ce que vous avez dit tantôt : «La société fait un effort, on demande aussi à la personne de faire un effort. Si on ne fait pas d'effort dans la vie, on n'a pas de résultat...» Bref, la pression sur le demandeur.

Je pense qu'il y a assez de lumières rouges, un peu partout, qui sont allumées pour dire qu'il faut faire attention. Puis est-ce qu'il y a vraiment moyen... est-ce qu'on peut vraiment essayer de prendre le temps? Si on veut aller pour aider les gens à se trouver de l'emploi, c'est bien correct, puis on peut trouver des façons de les aider, puis... Mais est-ce qu'on peut s'assurer que tout ça rentre dans une vraie vision qu'on s'était donnée, une vraie volonté globale de lutter contre la pauvreté, puis sortir des préjugés, puis sortir du fait de toujours mettre la pression sur les épaules du demandeur? Est-ce qu'on peut se poser, comme société, la question : Est-ce qu'on a ce qu'il faut pour accompagner ces personnes-là puis avoir des communautés qui interviennent pour lutter contre la pauvreté? C'est un peu ça, la question que ces gens-là nous disent, de partout, là, puis qu'on essaie, nous autres, par nos amendements, d'assurer.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Poëti) : M. le ministre.

M. Blais : Écoutez, j'avais lu l'article, là. C'est paru il y a quand même quelques semaines, peut-être même mois, là. Si je me souviens bien, là, j'avais des désaccords assez importants sur certaines affirmations dans l'article. Moi, j'ai eu le bonheur de travailler avec des universitaires, puis même être le supérieur de plusieurs universitaires dans le domaine, pendant des années. Je leur disais que je n'avais aucune difficulté à ce qu'ils s'engagent socialement, puis même que je le souhaitais, mais que la première obligation d'un universitaire va toujours demeurer la rigueur.

Le Président (M. Poëti) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Là, là, je vais rajouter un peu ce que... répéter ce que mon collègue disait tantôt, là.

Tu sais, on a amené plusieurs éléments, là, de mémoires qui questionnaient le ministre, ou ils questionnaient le projet de loi, pas le ministre, mais le projet de loi — c'est parce que ce n'est rien de personnel — puis, à chaque fois, bien, la réponse, c'est que ce n'est pas assez rigoureux, ça manque de rigueur, ce n'est pas clair, ce n'est pas... Ça se peut que ce n'est pas... qu'il y ait des éléments que... Mais je ne peux pas croire que tout le monde n'est pas rigoureux en même temps, là. Il doit y avoir quelque chose quelque part qui fait qu'il y a un fond de vérité dans ce qui nous est dit. Puis moi, je ne suis pas un spécialiste de tout ça, je ne suis pas un professeur d'université, je suis un député qui accueille des gens au bureau, qui travaille avec mon milieu, puis, je vous dis, là, la personne, là, que vous pensez intégrer dans un programme, là, de... puis en leur disant : Là, tu vas avoir un peu d'argent, puis tu vas t'intégrer dans ce programme-là, tu vas aller chercher l'emploi, vous n'avez pas conscience — assez — d'où part cette personne-là, puis qu'est-ce que vous lui mettez comme responsabilité sur les épaules par toutes vos déclarations, puis vos politiques, puis la façon que la loi est écrite.

On devrait travailler collectivement, on devrait travailler ensemble : les municipalités, le milieu communautaire, les intervenants, les fonctionnaires en région. Tout le monde devrait travailler ensemble pour soutenir puis aider ces personnes-là, et c'est ce qu'on ne réussit pas à faire, puis c'est ce que vous ne faites pas par le projet de loi. Puis c'est ce que les gens, peut-être par manque de rigueur, peut-être qu'ils disent autrement, là, comme vous dites, mais c'est quand même des sons de cloche assez sérieux pour nous dire qu'il faut trouver une façon de s'en sortir.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y a...

M. Blais : Peut-être... Ici, je pense qu'il n'y a personne jusqu'ici qui a nié — M. le Président, pardon...

Le Président (M. Poëti) : Bien sûr.

M. Blais : ... — qui a nié la difficulté de la réinsertion sociale, hein? Personne, je pense, n'a nié que c'était difficile. Puis, quand on rencontre les agents, il n'y a personne qui connaît mieux, je pense, certainement pas moi ni les collègues autour de la table, la difficulté que ça représente, les parcours complexes. Mais personne ne nous a dit que, disons, rester à la maison, c'était la solution, mais que les gens avaient besoin d'aide, ont besoin d'être rencontrés, qu'on peut leur rendre service.

Ce qui est important, encore une fois, ce n'est pas de les obliger, parce que parfois on dit : Vous les obligez à suivre un parcours. C'est eux qui vont décider. Il faut qu'ils se mobilisent, c'est vrai, c'est de l'obligation, mais c'est eux qui vont décider de ce qui les intéresse. Encore faut-il que ce soit réaliste, pertinent. Donc, il y a une discussion là-dessus, bien sûr. Mais c'est eux qui décident, dans Objectif emploi, là, le parcours qu'ils privilégient. Ensuite, on met à leur service, bien sûr, les meilleures ressources disponibles pour qu'ils puissent y arriver.

Le Président (M. Poëti) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin, la parole est à vous.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. À ce stade-ci de la discussion et parce que je pense qu'il y a vraiment un débat — j'écoute attentivement — qui n'est pas terminé, je voudrais apporter un sous-amendement à l'amendement du collègue député de Saint-Jean. Le sous-amendement se lirait comme suit : Ajouter, à la fin de l'amendement : «Ni ne porte atteinte au droit à la dignité visé à l'article 4 de cette même charte».

Une voix : ...

Le Président (M. Poëti) : Oui. Alors, nous allons suspendre quelques minutes, le temps de faire des copies. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 55)

(Reprise à 17 h 59)

Le Président (M. Poëti) : Alors, nous allons reprendre nos travaux, cependant, pour à peu près 40 secondes, parce que je dois vous aviser que nous avons épuisé le temps. Et nous avons quand même distribué le sous-amendement de la députée de Gouin, lequel nous allons prendre connaissance dès le retour de la commission.

Donc, compte tenu d'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 18 heures)

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