(Dix
heures cinq minutes)
Le
Président (M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de l'économie
et du travail ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi
visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.
Mme la secrétaire, est-ce
qu'il y a des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Rochon (Richelieu) remplace M. Bergeron (Verchères)
et M. Turcotte (Saint-Jean) remplace M. Leclair (Beauharnois).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la secrétaire. Alors, lors de notre dernière séance, nous
avions entrepris l'étude de l'article
83.1 introduit par l'article 28 du sujet n° 4. M. le député de Saint-Jean avait présenté un amendement à cet article. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mais
je dois vous dire, avant, que, sur l'amendement présenté par M. le député de Saint-Jean... Alors, M. le député de
Saint-Jean, il vous restait 13 min 50 s sur votre amendement.
Vous pouvez peut-être...
M.
le député de Saint-Jean? Juste peut-être nous relire votre amendement et puis on peut
continuer la discussion, parce
que, comme je vous dis, il vous reste 13 min 50 s. C'est beau?
M.
Turcotte :
Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : C'est beau? Alors, à vous la parole, M. le député
de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Bon. Je
ne voulais pas donner un scoop à tous en lisant un autre amendement
qu'on n'a pas encore présenté, mais...
Le Président (M.
Cousineau) : Consentement...
M.
Turcotte : ...le ministre
aurait peut-être aimé ça, je sais qu'il est fébrile, sur sa
chaise, de connaître tous les arguments, là, qu'on... les amendements
que nous aimerions déposer.
Mais,
plus sérieusement, M. le Président, effectivement, lors de la dernière séance,
j'ai présenté l'amendement suivant.
Donc, à l'article 28 : Au premier alinéa de l'article 83.1, remplacer «qui
y participent» par «aptes à y participer».
Donc,
pourquoi, M. le Président, j'ai déposé cet amendement? C'est qu'on peut lire, à
l'article, donc, 83.1, là, qui se
trouve dans l'article 28 du projet de loi, la mention suivante : «Le
programme Objectif emploi vise à offrir aux personnes qui y participent
un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi.»
Donc,
nous considérons qu'à un certain moment de leur vie des citoyens peuvent avoir
besoin, effectivement, d'une aide — dans ce cas-ci, hein, une aide de dernier
recours, on le sait — pour
pouvoir s'en sortir, pour leur donner un peu de temps pour se remettre
sur les rails. Que ça soit suite à des problèmes personnels, que ça soit à des,
bon, problèmes familiaux, des problèmes,
bon, autres, là, on n'a pas à juger de ça. Une personne, à un certain moment de
sa vie, a besoin d'une aide ponctuelle, et l'aide sociale... au fond,
c'est ça, le Programme d'aide sociale.
Et
là l'article, au fond, dit que tout nouveau demandeur, au fond, aura, là... va
offrir aux personnes qui participent un
accompagnement. On sait que le programme Objectif emploi est obligatoire pour
les nouveaux demandeurs, à part quelques
exceptions que le ministre nous avait énumérées lors d'une dernière séance...
qui, d'ailleurs, j'avais demandé, je pense,
la présentation de la liste. Mais je crois qu'on l'a eue, hein, ça? Oui, on l'a
ici, là... Je l'ai ici, c'est parfait. Donc, il y a quelques exceptions, là : Est admissible au programme de...
«Les personnes se [trouvent] dans l'un des cas suivants pourraient être exclues d'Objectif emploi.» Ça,
bien entendu, c'est des intentions réglementaires, là, on sait qu'est-ce que ça veut dire. Ça ne veut pas dire que c'est
exactement ça qui arrivera, mais c'est ce que le ministre a l'intention de
présenter, au fond, au Conseil des ministres.
Donc,
les personnes suivantes pourraient être exclues d'Objectif emploi, donc être
admissibles au Programme de solidarité sociale : «La personne ou son
conjoint; est admissible à une allocation pour contraintes temporaires
au Programme d'aide sociale[...]; est
considérée comme hébergée au sens de la loi [des] services de santé et [des]
services sociaux; est hébergée dans
un centre offrant des services en toxicomanie; est demandeur d'asile; [et] est
tenue sous garde pour une évaluation
psychiatrique; est tenue de loger dans un établissement en vue de sa
réinsertion sociale — sauf
exceptions.»
• (10 h 10) •
Donc, il y a quand même quelques
exceptions, mais, sinon, tout nouveau demandeur devra s'inscrire au programme
Objectif emploi. Programme Objectif emploi,
trois branches, bon : recherche intensive d'emploi, formation et habiletés
sociales — bon, les trois branches du programme
Objectif emploi. Si la personne embarque dans le programme, bravo! C'est
ce que le gouvernement lui dit. On va lui donner un montant supplémentaire, une allocation spéciale. Si elle n'embarque pas, tant pis : Tu n'en as pas, de chèque d'aide sociale. Si la personne embarque et que là elle est absente à certains moments pour des raisons, puis tout ça,
des absences non motivées — ça
nous a été dit — bien
là, il y a toute une séquence qui s'enclenche, là, de
pénalités et de sanctions.
Donc,
au fond, l'amendement, ce que nous, on dit, c'est : Plutôt que
tous, à l'exception de quelques
mentions ici que j'ai mentionnées,
donc ceux qui sont aptes à y participer y participent et ceux qui ne sont pas
aptes n'y participent pas, du moins
pas obligatoirement. Donc, c'est une grande nuance, parce qu'on l'a vu en
commission parlementaire, il y a un très grand nombre... malgré le fait que
beaucoup de groupes voulaient être entendus, M. le Président, et qui n'ont pas
pu être entendus, mais, de ceux qui ont été
entendus, un très grand nombre ont dénoncé l'obligation et encore un plus grand
nombre ont dénoncé les sanctions.
Parce
qu'effectivement il y a des groupes qui nous ont dit : Bon, il pourrait
effectivement avoir une forme d'obligation
de participer au programme, mais qu'il n'y ait pas nécessairement de sanction
suite à ça, ou du moins que ça n'affecte pas l'allocation de base du
Programme d'aide sociale. Parce que c'est ça aussi, ce n'est pas que l'allocation
spéciale qui est coupée dans les sanctions
prévues, M. le Président, il y a aussi une diminution du montant de
l'allocation de base de l'aide
sociale, donc, qui est 623 $ par mois, actuellement, au Québec. Donc, si
on coupe dans le 623 $, ça fait en sorte que la personne va vivre,
on se le dit, avec peu d'argent.
En
même temps, il y a... Bon, on le sait, là, le gouvernement, habituellement,
parle d'une seule voix, hein? Ça, vous
savez ça, M. le Président. Habituellement, c'est le cas. Mais là, en ce moment,
ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas parce que, dans deux dossiers différents, mais qui sont quand même
importants, là, il faut le dire, dans le cas de l'Éducation et dans le cas de ce qui nous occupe actuellement
du Programme d'aide sociale, on a le ministre actuel de l'Éducation qui,
lundi, 16 mai — ça, c'est hier, ça — dans LeJournal de Québec,
mentionne, quand on lui parle : Est-ce qu'il pourrait avoir des amendes ou des pénalités si la
personne... le jeune ne se rend pas à l'école jusqu'à 18 ans? Bien, le ministre
répond : «Je n'en suis
pas là. Je n'ai pas entendu au Québec que les gens valorisaient un modèle comme
ça. La pénalité, la stigmatisation
[...] pour moi, ce n'est pas l'avenue à prendre.» Je répète, M. le
Président : «La pénalité, la stigmatisation, pour moi, ce n'est pas
l'avenue à prendre.» Ça, c'est le ministre de l'Éducation qui dit ça, là, hein,
et, je pourrais mentionner, à plusieurs occasions. Il l'a
même dit ici, à l'Assemblée nationale, lors de la période des questions.
En même temps, on a un autre ministre, dans le même
gouvernement, qui dit : L'avenue à prendre à l'aide sociale, c'est les pénalités, les sanctions.
Puis je vais arrêter là parce que ça serait ajouter des mots dans la bouche du
ministre qu'il n'a peut-être pas
prononcés. Donc, on a quand même une divergence d'opinions, là. C'est deux
approches complètement... C'est la
même approche, mais, dans le cas du ministre de l'Éducation, il s'y
oppose ; dans le cas du ministre de l'Emploi et de la Solidarité
sociale, il la préconise. M. le Président, moi, j'ai de la difficulté à suivre.
Je
pourrais ajouter aussi un autre élément. Vous savez, c'est une grande journée
pour la circonscription de Saint-Jean
aujourd'hui, peut-être un peu moins actuellement, mais on a le premier ministre
du Québec qui est dans ma circonscription actuellement. Il vient de
terminer un discours. Et, dans ce discours-là, sur la question... bon, il vient
prononcer, là, un état, là, de la situation
sur différents dossiers, et il mentionne qu'«il s'est engagé en politique pour
que le Québec soit plus libre de ses choix et que les jeunes ont droit
de rêver». Il mentionne ça dans son discours.
Quand on veut que le Québec soit plus libre de ses choix, bien, M. le Président, ça veut dire bien des choses. Ça
veut dire bien des choses. Nous, on a quelques
idées là-dessus; on pourra y revenir sur une autre tribune. Mais,
quand on dit aussi que les jeunes ont
le droit de rêver... mais il faut leur donner les outils puis les moyens de rêver.
Puis moi, personnellement, M. le
Président, je crois — puis
je ne suis pas le seul — que
le projet de loi actuel que nous étudions, le projet de loi
n° 70, qui vise l'intégration en emploi, soi-disant, moi, je crois que ça
va freiner les rêves des jeunes.
Pourquoi?
Parce qu'on va leur dire : Tu as le rêve de faire telle étude, bien, ce
n'est pas ça qu'on va te demander. On
va t'obliger à aller suivre telle formation parce qu'elle est plus courte, elle
rentre dans le 12 mois ou dans le 24 mois du programme, puis c'est ça
qu'on a besoin, actuellement. On a besoin de plombiers, tu vas t'en aller en
D.E.P. en plomberie. On a besoin de préposés
aux bénéficiaires, tu vas aller faire ton D.E.P. pour devenir préposé aux
bénéficiaires. On a besoin de ci, tu vas faire ça.
C'est déjà commencé,
on le sait. Il n'y a déjà plus vraiment d'orienteurs dans les écoles. En ce
moment, c'est pratiquement uniquement les
carrefours jeunesse-emploi qui ont ce mandat-là ou qui réussissent, de peine et
de misère, à offrir des services
d'orientation pour nos jeunes, à faire en sorte que nos jeunes puissent faire
le métier qu'ils souhaitent, avoir le
goût de continuer. Mais là, actuellement, le projet de loi n° 70, selon
moi, va freiner cet élan-là de nos jeunes.
Le
premier ministre mentionne que le Québec... lui, il est embarqué en politique
pour que le Québec soit plus libre de
ses choix. Moi, je suis d'accord pour que le Québec soit plus libre de ses
choix, mais je suis aussi d'accord pour que les citoyens soient plus
libres de leurs choix. La liberté de choix des citoyens est importante, selon
moi.
Donc,
je crois que, M. le Président, dans le cas qui nous occupe, du projet de loi
actuel, il n'y a pas de liberté de choix; il n'y a que des obligations,
que des sanctions. Il y a de l'aide qu'on a encore de la difficulté à
concrétiser et à matérialiser. Pourquoi je dis ça, M. le Président? Parce qu'on
le sait : depuis quelques années déjà, il y a moins de... il y a 500 et plus agents, à Emploi-Québec, dans...
bon, dans les centres locaux d'emploi, de moins, il y a 500 agents de moins dans les centres locaux d'emploi, il y a
moins de centres locaux d'emploi. Il y avait une réussite, au Québec, qui
s'appelait les carrefours jeunesse-emploi,
et le gouvernement a voulu s'y attaquer et a fait en sorte maintenant, là, bon,
de signer une entente avec un nombre de
carrefours jeunesse-emploi en mettant de côté les autres carrefours
jeunesse-emploi.
Je vais
m'arrêter ici, M. le Président, pour entendre les commentaires du ministre sur
cette question-là. Mais moi, je crois
qu'à ce moment-ci, M. le Président, le ministre devrait réfléchir. Il a pris du
temps, en fin de semaine, pour réfléchir, mais faire en sorte de voir où il en est sur ces
sanctions-là imposées à nos jeunes. Je dis «nos jeunes» parce qu'il cible
lui-même, dans son discours, et l'ancien
ministre aussi ciblait les jeunes, comme si c'étaient uniquement des jeunes qui
étaient visés par le projet de loi
n° 70, ce qu'on sait, M. le Président, qui n'est pas... ce n'est pas
exact, là, ce n'est pas que des
jeunes, hein? Donc, j'aimerais ça savoir... même si je sais que le ministre
semble être entêté, là... Puis ce n'est pas un reproche, là; il a le droit, là, d'être dans cette ligne-là. Mais
nous nous y opposons fermement pour les mêmes raisons que le ministre
actuel de l'Éducation s'y oppose, aux pénalités et à la stigmatisation.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean.
Avant de passer la parole au ministre et puis de voir s'il y a d'autres parlementaires qui veulent discuter sur cet
amendement, ça me prendrait un consentement pour permettre à la
secrétaire d'annoncer un autre remplacement. Consentement?
Des voix :
Consentement.
Le Président (M.
Cousineau) : Consentement. Mme la secrétaire.
La Secrétaire :
Oui. Donc, M. Matte (Portneuf) remplace M. St-Denis (Argenteuil).
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, toujours sur
l'amendement... On est rapides, hein, monsieur... Alors, toujours sur
l'amendement, M. le ministre, est-ce que vous voulez réagir, s'il vous plaît?
M. Blais :
Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : C'est comme vous voulez.
• (10 h 20) •
M. Blais : Il y a peut-être deux grosses difficultés, au moins, là, avec la
proposition qui est faite, là. La première difficulté, c'est que l'expression «apte» a quitté le langage de ce
programme-là depuis plusieurs années. C'est même le Parti québécois qui avait, disons, acquiescé à une
demande qui était faite, notamment par les personnes qui ont des contraintes
sévères à l'emploi, de ne plus parler
d'«apte» et «inapte». Pourquoi? Parce que vous pouvez avoir une contrainte
objective et sévère à l'emploi, réelle, mais vous pouvez quand même
occuper un emploi ailleurs.
J'étais
à Rimouski pour souligner, là, un organisme qui accueille, depuis plus de 20
ans... un café, le Café des halles, à
Rimouski, qui accueille, depuis plus de 20 ans, dans ses cuisines et dans son
personnel, des personnes qui ont un handicap, qui sont certainement, là, considérées comme ayant une contrainte à
l'emploi, sévère ou temporaire — je n'ai pas eu le temps suffisamment
de voir — et
ces personnes-là, bien sûr, avec l'appui des propriétaires du café, là, sont de
retour sur le marché du travail. Le
propriétaire reçoit un montant d'argent — on appelle ça un contrat d'insertion au
travail —qui permet de
financer un peu la plus faible productivité — j'appellerai ça comme ça, là, en toute
objectivité — de
ces personnes. Donc, elles sont contraintes
sévères à l'emploi, et pourtant il y a un arrangement qui s'est fait avec le
café, mais aussi avec les autres employés, parce que les autres employés
doivent accepter que... le monsieur qu'on m'a présenté
hier, bien, il est un peu moins rapide que les autres, clairement, mais il
occupe cet emploi depuis des années. Alors, on a quitté ces expressions «apte», «inapte» pour quelque chose, je
pense, qui est un peu plus objectif et qui ne ferme pas la porte — du
moins, dans son expression, là — à la réinsertion, sur le marché du
travail, de certains.
L'autre
difficulté avec la proposition, c'est qu'elle est très subjective. Qui va juger
qu'une personne est apte ou pas? Et,
dans le fond, ce que le collègue veut, ce n'est pas apte ou pas, mais c'est
volontaire ou pas. Si vous n'êtes pas volontaire,
vous n'êtes pas apte parce que vous n'êtes pas volontaire. Hein, moi, c'est ce
que j'ai compris, dans la... Et ça, bien
sûr, ça nous éloigne beaucoup trop, là, du projet de loi. Le projet de loi, en
ce moment, a le mérite, par ses intentions, là, de préciser les personnes, là, qui sont considérées comme devant
suivre la filière et ceux qui en sont exemptés pour différentes
raisons... on a rappelé les intentions la semaine dernière.
Je
veux dire au collègue : J'étais, hier, à Rimouski. Je profite toujours de
ce temps-là pour aller, dans les CLE, rencontrer
des agents puis discuter avec eux de leurs réalités puis, notamment, du projet
de loi. Effectivement, ils ont reconnu qu'un
des mérites, là, du projet de loi, c'était, hein, de permettre d'identifier des
personnes qui ont des difficultés plus importantes
et qui ne devraient pas être considérées nécessairement dans un programme comme
celui d'Objectif emploi, compte tenu
des problèmes, notamment, là, de santé mentale. Ces personnes-là ne sont pas
suffisamment repérées aujourd'hui.
Et,
bien sûr, avec Objectif emploi, il y a une obligation quand même de rencontrer
des agents qui peuvent évaluer l'état
à la fois de santé, mais aussi, parfois, un environnement qui est fragile, qui
est problématique, qui ne permet pas à quelqu'un
de s'engager, là, immédiatement, dans une recherche d'emploi ou, encore, même
un retour aux études. Et ça, on en a
parlé longuement, de cette catégorie de personnes plus fragiles dans un
environnement fragilisé. Et ce que permet Objectif emploi, c'est de les rencontrer : d'abord, de faire une
évaluation et, avec eux, de décider comment on peut les aider à se sortir de la situation dans laquelle
ils sont, pour éventuellement — je dis bien éventuellement — aller vers un cheminement qui est plus ou bien un retour à l'emploi ou bien études,
là, selon, bien sûr, les priorités de la personne. Donc, je vais être
défavorable à la proposition du collègue.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean,
il vous reste 50 secondes.
M.
Turcotte :
Bien, écoutez, M. le Président, j'entends ce que le ministre dit. Je crois que,
rendus à ce stade-ci, là, on verra s'il y a d'autres collègues, là, qui veulent
s'exprimer sur l'amendement. Sinon, je vais demander le vote par appel
nominal, M. le Président.
Le
Président (M. Cousineau) : Bien sûr. Alors, est-ce qu'il y a
d'autres parlementaires qui veulent discuter de l'amendement? Monsieur...
de la deuxième opposition, est-ce que ça vous va?
M.
Schneeberger :
Oui. Moi, ce serait vraiment une question. Quand on dit «apte» ou «pas
apte», la personne qui fait une première demande, là, bon, bien, c'est
là qu'on la classe si elle est apte à participer au programme Objectif emploi ou non. Alors, ici, l'article 28,
je pense, qui traite du programme Objectif emploi... alors, normalement,
une fois qu'elle est au programme Objectif emploi, c'est qu'on a décidé qu'elle
était apte à y participer.
M.
Blais : ...M. le Président, on évite d'utiliser l'expression «apte».
Je comprends qu'on l'utilise de façon plus générique, là, ici, là.
Lorsque quelqu'un se présente aujourd'hui ou... plutôt, quand... avec l'application
de la loi, là, lorsqu'une personne va se présenter, la question, c'est d'abord : Est-ce qu'elle peut avoir... question d'une personne qui a une
contrainte sévère? Donc, est-ce que c'est un premier demandeur? Oui. Donc,
premier élément. Est-ce qu'il a une contrainte
à l'emploi sévère ou temporaire qui fait en sorte qu'il ne peut pas participer?
Et ensuite, dans les intentions réglementaires
qu'a reprises le député de Saint-Jean, on exclut aussi un certain nombre de personnes,
là, les personnes qui sont hébergées
en toxicomanie, bon, et il reste un résidu de personnes qui doivent participer
à Objectif emploi, qui sont effectivement des personnes
aptes au sens de l'ancienne loi, et ensuite, bien, il y a
une évaluation sur les besoins de ces personnes-là et sur
le parcours qu'ils devraient suivre éventuellement.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Oui. Ça, ça
veut dire que la personne qui n'a
aucune contrainte temporaire ou majeure est apte à y participer. Même si vous ne voulez pas utiliser ce mot-là, je
veux dire qu'elle participe à l'emploi. Maintenant, si elle participe
au programme, ça ne veut pas dire
qu'elle est directement... Justement, étant donné qu'on a la classe...
cases, pardon, 6, 7 et 8, si elle est en
dépression, est-ce qu'elle va être au niveau de la case 8 ou elle va être jugée
inapte à participer?
M.
Blais : On me corrigera ici, derrière, là, mais une personne qui a un
diagnostic, hein, de dépressif... une personne qui a une contrainte
temporaire à l'emploi, là, hein, donc, s'il y a un diagnostic, ne peut pas
participer, n'est pas prête à participer à Objectif emploi.
M.
Schneeberger : O.K. Pourriez-vous me donner un exemple d'une personne
qui serait maintenant... après la rencontre, qui serait classée au niveau du développement des habiletés sociales? Avez-vous un exemple d'une personne qui
serait là, qui ne serait pas au niveau de la formation, mais qui devrait
développer certaines habiletés sociales?
M.
Blais : Oui. Alors, ça peut
être différentes choses. Pensons à l'environnement de ces personnes-là, des personnes qui sont dans un environnement qui est
fragile : un jeune qui arrive, qui n'a pas de logement, carrément. Ça
arrive, hein, des jeunes qui sont... parce qu'ils viennent de se faire mettre à la porte de l'endroit où ils vivaient et
puis... Donc, il faut sécuriser cette
personne-là, l'aider à lui trouver un logement — et donc il
y a des services pour ça. Ou des
jeunes qui sont pris avec des problèmes
de fréquentations, disons, là. Ils veulent sortir un peu du réseau dans lequel
ils sont, peuvent avoir besoin d'aide, d'encadrement, de suivi pour ça — il y
a des groupes, là, qui font ce type d'accompagnement là.
Des personnes
qui sont... Une personne qui est immigrante, qui, très clairement,
ne comprend pas un certain nombre de façons de faire socialement et qui, peut-être même n'est même pas prête encore à, je ne sais
pas, par exemple, à préparer un curriculum vitae, hein, mais, bon, parce qu'il y a des conflits...
on a des conflits autour de lui qui sont liés, bon, peut-être
à des façons de faire différentes... Donc, c'est ce type de situations.
Pour les
jeunes, il y en a plusieurs autres, là, qui peuvent être des... et pour les
moins jeunes. Quelqu'un qui est dans
une situation financière précaire... Vous allez me dire qu'en
se présentant à l'aide sociale on est déjà dans une situation précaire,
mais il y a des gens qui peuvent être dans une situation
encore plus précaire parce qu'ils ont des habitudes de consommation, ils ont des difficultés
à gérer un budget. Elles sont tellement grosses que l'idée même de commencer un parcours, là, vers l'emploi ou les études, ce
n'est pas... Ça aussi, on a des organismes pour les accompagner
et à reprendre le contrôle de leur gestion budgétaire.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Drummond—Bois-Francs.
• (10 h 30) •
M.
Schneeberger : O.K.
Bien, c'est parce que c'est... Moi, je comprends tout à fait l'approche du député
de Saint-Jean, puis je suis assez d'accord au niveau de l'apte, inapte. Mais je voudrais
juste, pour bien cadrer l'approche, c'est-à-dire que, moi, si le système que le ministre
veut mettre en place marche comme il faut avec les personnes-ressources sur le terrain, la personne que, au niveau de l'amendement ou de apte — ah!
là, même si M.
le ministre n'aime pas le mot «apte» ou «inapte», là, mais là c'est ça
qui est dans l'amendement — normalement, devrait se faire... le triage, là, devrait se faire avant et
non rendu au programme Objectif emploi.
Maintenant, si la personne est au programme
Objectif emploi et qu'elle est classée en développement des habiletés, c'est
qu'elle est apte, ça veut dire qu'elle participe au programme avec même un
avantage financier plus élevé que la personne qui serait au niveau de la classe
rouge, là, à l'aide sociale temporaire — ça, c'est temporaire, là.
Alors, financièrement, elle a intérêt à y
participer. Mais maintenant je veux savoir, vous avez nommé des cas... donné
des exemples. Là, ce n'est pas le
centre jeunesse qui va aider ces gens-là, là. Ils peuvent en aider une partie,
mais, si... Vous parlez du logement,
pas de logement, et autres, là, le centre jeunesse, là, ce n'est pas... en tout
cas, moi, chez nous, il n'offre pas ça. Il offre d'autres services, mais ce n'est pas,
genre... j'ai d'autres organismes qui le font. Et, si je me fie à la liste des
organismes actuels, il va falloir
qu'il s'en rajoute. Et c'est pour ça que moi, je veux... c'est hyperimportant,
ça. C'est ces personnes-là qui ont besoin de plus d'aide.
Alors,
tu sais, si on juge qu'elles sont aptes à y participer, mais que finalement
elles n'aient pas l'aide, alors là, moi,
je ne peux pas dire qu'elle est apte parce qu'elle n'est pas... à retourner sur
le marché du travail, mais il faut qu'elle ait de l'aide directement au niveau de ses besoins, c'est-à-dire
peut-être une auberge du coeur parce qu'elle n'a pas d'appartement, elle
n'a pas de logement. C'est ce point-là, là, puis c'est hyperimportant. Puis
est-ce que ça va se mettre en place?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Il y a deux choses, je pense, dans la remarque. La première
chose, c'est que, quel que soit le parcours, il est possible que, dans l'accompagnement, on se rende compte que la
personne a des problèmes plus sérieux qu'on n'avait pas vus. Au départ, c'est un problème de logement
puis on se rend compte, je ne sais pas, que cette personne-là a des phases
psychotiques, par exemple. On s'en rend
compte parce que, justement, on la voit suffisamment régulièrement pour voir
que le problème de logement, il est lié à des phases psychotiques qui sont
beaucoup plus sérieuses. Ces personnes-là aujourd'hui
ne sont pas souvent diagnostiquées. On ne les connaît pas. Donc, quel que soit
l'endroit où on se situe, parce que ces personnes-là vont être accompagnées, il
y a plus de chances qu'elles soient repérées, puis c'est une excellente chose
en soi.
Maintenant, pour la
fameuse case 8, je ne me trompe pas dans le numéro, je pense bien que c'est 8,
là...
M.
Schneeberger :
Oui, 8.
M. Blais :
C'est assez intéressant. Parce qu'hier, dans ma rencontre avec les agents
d'aide sociale du CLE de Rimouski, on a
parlé un peu du programme et on a parlé de cette case-là, là. Je n'ai pas
présenté le document, mais, hein, je leur ai dit qu'on avait cette
vision-là des choses. Ils nous disaient qu'heureusement — en
tout cas, dans le cas de Rimouski — ils ont beaucoup d'organismes du secteur de
la santé et services sociaux, mais, disons, avec qui ils ont des ententes, pas formelles en termes d'employabilité,
mais avec qui ils font du référencement, et eux reconnaissaient que
c'était peut-être la partie la plus intéressante du projet parce que, vraiment,
ça répondait à un besoin de plus en plus important. Est-ce qu'il y a assez
d'organismes, partout sur le territoire, pour répondre aux besoins? Je vous
rappelle qu'Objectif emploi, c'est
17 000 bénéficiaires de l'aide sociale pour Rimouski — quand même pas une petite ville de rien du tout. C'est 80 nouveaux demandeurs par
année qui seraient à l'intérieur d'Objectif emploi. Donc, ce n'est pas une
pression, là, je veux dire, énorme, là, pour
une organisation comme ça et pour un réseau; eux, ils se vantaient d'avoir un
excellent réseau de partenaires. Donc, si on voulait étendre Objectif emploi
puis vouloir le faire pour, disons, tous les prestataires,
là, les 420 000, là, là je reconnais qu'il y aurait une pression énorme,
là, sur le réseau, mais on est très ciblés dans l'intervention.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Bien, le ministre m'amène sur une piste puis
je trouve ça hyperimportant. Je veux prendre l'exemple de chez nous que
je connais, c'est facile d'en parler quand tu connais tes organismes, là, des
organismes qui font déjà ça chez nous, mais,
le problème, ils ont des ententes, mais les ententes financières qu'ils ont,
elles ne sont pas assez élevées. Ça
fait en sorte que, oui, il y a une entente financière quand on demande à
Emploi-Québec. Oui, il y a une
entente, mais sauf que souvent ces ententes-là ne sont pas de niveau auquel ils pourraient donner le
maximum de services, c'est-à-dire, c'est qu'il y a... des fois, il y a des personnes
qui sont référées à leurs organismes, mais ils ne sont pas capables d'en prendre en charge correctement, ou des fois, parfois, du tout, parce qu'ils n'ont pas assez de
personnel pour les prendre en charge au complet.
Alors, oui, il y a
une entente, mais l'entente est-elle suffisante? Alors, c'est sûr que, si on
force une personne à y participer, bien,
faut-il encore que la personne ait le service auquel elle a droit dans le
processus. Et c'est là le point, moi,
que je tiens mordicus : c'est que ça se fasse, parce que, sinon, la
personne, elle va retourner voir son... Bien, premièrement, il y a des risques
d'absences, parce que là, à un moment
donné, il faut qu'elle soit là et
c'est là qui pourrait causer problématique. Vous comprenez?
M.
Blais : Oui. Bien, prenons
un exemple concret, là. Je pense que Les Auberges du coeur, il y en a une dans
votre circonscription, je pense...
M.
Schneeberger :
...
M.
Blais : Concrètement, les
CLE ne vont pas obliger Les Auberges du coeur à accepter quelqu'un si... Donc,
ça ne fonctionne pas comme ça. Ce sont des organismes communautaires qui sont
libres ou pas. Les CLE travaillent parfois,
oui, avec ces organismes-là, parce qu'ils ont une personne qui est au bureau,
qui a vraiment, là, un
problème de logement, donc il n'y a
pas d'obligation de ces organismes-là de participer, mais ils existent pour ça.
Ils existent pour donner un coup de main puis répondre à ça. Imaginons,
puis je m'en vais dans votre direction, là, imaginons que, dans ma circonscription, il n'y en a pas, d'organisme
comme ça, ou, dans la ville de Québec, il n'y en a pas non plus, d'organismes
comme ça, ce qui n'est pas le cas, là, mais,
dans certains endroits, peut-être que c'est possible... alors, il faut trouver
d'autres solutions. C'est la réalité, là, il faut trouver d'autres
solutions.
Mais, encore une fois, le but, là,
c'est de ne pas faire rentrer quelqu'un dans un parcours alors qu'il n'est pas
prêt. Alors, on va travailler avec
les ressources disponibles, les ressources du secteur public, parapublic,
communautaire, mais le but, c'est
toujours de dire : On ne peut pas rentrer quelqu'un dans un parcours alors
qu'il n'est pas prêt. Mais, cependant, si
on s'entend avec cette personne-là sur une démarche, bien, cette personne-là,
bien, a une obligation par rapport à la démarche avec laquelle on s'est entendus. Si on s'est entendus, par
exemple, que, dans la situation, la personne nous dit : Écoutez, moi, là,
le mieux pour moi avant de commencer à faire... retourner aux études, je veux
aller à l'auberge du coeur pendant
quelque temps, régler un certain nombre de problèmes. Bien, on dit : Très
bien, bravo! On se revoit dans un mois, deux mois, pour voir si ces problèmes-là sont réglés ou si ça progresse,
puis ensuite on reparlera de la situation. La personne est dans un
parcours normal et elle reçoit ses bonifications pour ça.
M.
Schneeberger :
Mais elle est toujours dans le programme Objectif emploi.
M.
Blais : Elle est toujours dans Objectif emploi parce qu'elle n'est pas
considérée comme ayant une contrainte sévère
ni temporaire, mais elle a un problème que l'on reconnaît, qui est lié à son
environnement, des choses qu'elle doit régler. Dans certains cas, ça
peut se régler rapidement; dans certains cas, ça peut se régler plus
difficilement.
M.
Schneeberger :
O.K. C'est bon. Ça va.
Le Président (M.
Cousineau) : Ça va, M. le député de Drummond—Bois-Francs?
Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui veulent dire un mot sur l'amendement
déposé par M. le député de Saint-Jean?
Alors, nous allons mettre aux voix
l'amendement du député de Saint-Jean, qui se lit comme suit : Au premier
alinéa de l'article 83.1, remplacer «qui y participent» par «aptes à y
participer».
Alors, Mme la
secrétaire.
La Secrétaire :
M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte :
Pour.
La Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
La Secrétaire :
M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
La Secrétaire :
M. Hardy (Saint-François)?
M. Hardy :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
La Secrétaire :
M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
La Secrétaire :
M. Polo (Laval-des-Rapides)?
M. Polo :
Contre.
Le Président (M.
Cousineau) : Je m'abstiens.
La Secrétaire :
C'est rejeté.
Le
Président (M. Cousineau) : Donc, l'amendement de M. le député
de Saint-Jean est rejeté. Nous revenons à l'article 83.1. Il nous reste
du temps de discussion. Je vais vous donner le temps qu'il nous reste :
pour M. le député de Saint-Jean, il vous
reste quatre minutes; M. le député de Drummond—Bois-Francs, il vous reste 14 min 45 s.
Alors, M. le député de Saint-Jean.
• (10 h 40) •
M.
Turcotte : M. le Président, j'aimerais déposer un nouvel
amendement, qui se lit comme suit : Dans le premier alinéa, supprimer «aux personnes qui y
participent», et ajouter, après «emploi», «aux personnes qui désirent y
participer».
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord. Est-ce que vous avez des
copies de... Donc, on va ouvrir la discussion sur l'amendement. Faites-en des copies pour les membres de la
commission, mais je crois que... M. le député de Saint-Jean, je vous
donne la parole. Argumentez.
M.
Turcotte : Bien,
tout d'abord, j'aimerais peut-être que le ministre puisse en avoir une copie.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, mais j'ai vu que c'était un mot à changer, alors... ou à ajouter, là.
M.
Turcotte : Ça va?
Parfait.
Le Président (M. Cousineau) :
Donc?
M.
Turcotte : Donc, l'objectif... M. le
Président, j'ai entendu les commentaires du ministre, bon, dans le débat sur l'utilisation des mots
«apte» et «inapte», etc. Donc, cet amendement-ci reprend un autre vocabulaire
qui, au fond, présente, d'une façon
différente, une même problématique. Donc, on croit que, par ce
libellé, ça pourrait peut-être représenter un meilleur état des faits que
nous voulons faire entendre.
On a fait des
recherches pas très exhaustives, M.
le Président, sur un élément. On
voit, dans l'article 83.1, qu'on dit : «Le programme Objectif emploi vise à offrir aux personnes qui
y participent un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi.» On utilise le mot
«offrir». Quand on cherche ce que ça signifie, le mot «offrir», ou ce que
ça laisse sous-entendre, le mot «offrir», on peut voir rapidement, première
définition qu'ils sortent, c'est : «Laisser à quelqu'un la possibilité de faire quelque chose», hein? Je vais le répéter parce que
c'est assez important, M. le
Président : «Laisser à quelqu'un la possibilité de faire quelque
chose.»
Donc, moi,
quand je vois le mot «offrir» écrit dans le projet de loi et qu'on sait
que ce programme-là et ce projet
de loi là sous-entend une obligation et des sanctions si la personne ne
participe pas au programme, bien, moi, je crois qu'on n'est pas dans «laisser à quelqu'un
la possibilité de faire quelque
chose». On a ce débat-là, souvent,
lors de commissions parlementaires, sur le «peut» et sur le «doit», puis qu'il y a une nuance. Dans ce
cas-ci, le mot «offrir» amène une nuance assez importante.
Donc, c'est
pourquoi que, pour être davantage en phase avec le mot «offrir» qui est écrit dans
le projet de loi que le ministre
parraine actuellement, on considère qu'il serait mieux de dire :
«...les personnes qui désirent y participer...» On est dans la droite
ligne de laisser à quelqu'un la possibilité de faire quelque chose. Donc, c'est
pour ça qu'on a déposé l'amendement actuellement, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.
M. Blais : Bien, écoutez, c'est une modification substantielle,
là, presque, hein? C'est presque un rejet d'Objectif emploi, là. Parce que, dans le fond, ce qui est important dans Objectif emploi, c'est quand même le principe d'obligation pour un certain nombre de
personnes. Donc, on ne peut pas l'accepter, pour cette raison-là.
M.
Turcotte : O.K.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : M. le
Président, quand j'entends le ministre dire que l'objectif ultime du programme
Objectif emploi, c'est l'obligation,
moi, je crois qu'on fait fausse route. Le nom du programme, c'est Objectif
emploi, donc c'est tout mettre en
oeuvre pour aider, accompagner une personne à se trouver un emploi. Et, pour se
trouver un emploi, on lui offre aussi la
possibilité de retourner aux études. On lui offre aussi la possibilité d'être
accompagné, bon, dans le bloc, là, qu'on parle, là, les habiletés sociales, mais je ne crois pas, M.
le Président, que, dans les outils qu'on lui offre pour se trouver un emploi, de lui offrir des obligations et de lui offrir des sanctions, puis je
dis ça un peu à la blague parce qu'on
ne lui offre pas dans ce cas-ci, là,
on est loin de laisser à quelqu'un la possibilité de faire quelque chose, là,
ce n'est pas offrir des obligations puis
offrir des sanctions, c'est de lui imposer des obligations et des sanctions. Je
crois que le programme Objectif emploi peut très bien vivre par lui-même
si le réel objectif du programme Objectif emploi est de faire en sorte que les
gens retournent ou entrent sur le marché du travail. Parce que je crois que, si
on offre une formation adaptée aux gens, une formation
qualifiante, faire en sorte qu'on lutte véritablement, au Québec, contre
l'analphabétisme, qu'on valorise davantage la formation professionnelle, qu'on fasse en sorte qu'il n'y ait plus de
liste d'attente dans l'éducation des adultes, de faire en sorte qu'on
puisse offrir davantage de ressources spécialisées dans l'éducation des
adultes...
M. le
Président, ça n'a pas de bon sens, actuellement, au Québec, le nombre famélique
de professionnels que nous avons dans
l'éducation des adultes. Je n'ai pas eu le temps, lors de l'étude des crédits,
de... On a posé des questions, on n'a pas
eu les chiffres, etc., là, avec le collègue le ministre actuel de l'Éducation,
mais il y a très peu, très peu de spécialistes. Je n'ai pas les chiffres devant moi, là, mais je crois que c'est...
Combien de psychologues au Québec? Si je ne me trompe pas, M. le Président, on
parle de soit deux ou quatre psychologues pour tous... pour les 100 quelques
milliers d'étudiants, à l'éducation
des adultes au Québec, répartis sur le territoire? On s'entend, c'est n'importe
quoi. On pourrait parler des psychoéducateurs, on pourrait parler de
tous les autres professionnels dans l'éducation des adultes.
Si on veut
véritablement aider les gens à se trouver un emploi ou à retrouver un emploi,
on doit véritablement investir en éducation, et force est de constater,
M. le Président, que ce n'est pas les choix que le gouvernement actuel a faits. Le gouvernement
actuel a coupé en éducation, a fait en sorte de couper les moyens que nous
avons, dans nos écoles un peu
partout, pour aider nos jeunes et nos moins jeunes. Parce qu'on parle souvent
du décrochage scolaire, M. le Président, qui est un fléau national, effectivement. Mais, quand on parle de
décrochage scolaire, on doit aussi avoir en tête raccrochage scolaire. On fait la promotion de la persévérance
scolaire. C'est extrêmement important de le faire pour faire en sorte que
nos jeunes qui sont actuellement à l'école
puissent demeurer à l'école. Mais il faut aussi tout faire et tout mettre en
oeuvre, au Québec, M. le Président,
pour que nos jeunes qui ont quitté l'école pour diverses raisons puissent
retourner à l'école. Puis, pour ce faire, bien, il faut valoriser
l'éducation, faire en sorte qu'on lui donne des moyens.
Moi,
j'en ai visité, des centres d'éducation des adultes, vous en avez sûrement
visité, le ministre en a sûrement visité,
il a été ministre de l'Éducation, il le sait, c'est un environnement
particulier qui est très intéressant pour certains, mais qui peut être aussi un handicap pour
d'autres. Ça prend une autonomie, ça prend une détermination, ça prend une
rigueur : parce que là on est une vingtaine, une trentaine dans une même
classe, on n'est pas tous au même niveau, on n'a pas tous les mêmes modules. On
a un prof en avant qui ne parle pas, puis tout ça, là, qui répond aux questions
individuelles, etc., bon, différents modèles,
peu importe, et là ça fait en sorte que le jeune qui est là, là, il est stimulé
par plein de stimuli alentour de lui,
là, hein? Un jeune qui est sur l'ordinateur, qui fait un travail de recherche,
après ça, à côté, l'autre jeune qui
se lève pour aller poser une question, etc., donc, ça demande une
concentration, mais aussi une force. Parce
que c'est facile, pour le jeune, de dire : Ah! je vais le faire demain, le
module, je vais le finir demain. Aujourd'hui, je vais prendre ça relax, là. Mais, à force de se dire ça, à un moment
donné, on n'est plus dans le «beat», là. Il n'y a pas personne qui te
rappelle à tous les jours : Regarde, là, il faut que tu sois rendu là,
etc., là.
• (10 h 50) •
Donc,
il faut offrir davantage de... Puis on le sait, là, nos jeunes qui sont en ce
moment au secteur jeune, donc qu'ils soient au primaire ou au
secondaire, qui ont plus de difficultés, bon, qui ont besoin plus d'accompagnement,
etc., ces jeunes-là, là, bien, ils peuvent décrocher à un moment donné, là. Puis, si on veut
les raccrocher sans avoir l'éducation des adultes, ou ils s'en vont en formation professionnelle, ou au cégep, ou
autre, ce n'est pas un problème, ils peuvent rêver. Le premier ministre l'a dit, aujourd'hui,
là : Je veux que les jeunes puissent rêver. Mais, nous aussi, là, on est
tous d'accord avec ça, là. Mais, pour
rêver, bien, il faut avoir les moyens, aussi, de l'accompagnement pour pouvoir
réaliser ses rêves. Et ces jeunes-là
qui retournent à l'école entrent automatiquement à l'éducation des adultes s'ils
n'ont pas terminé leur diplôme
d'études secondaires, et là ils n'ont plus l'accompagnement qu'ils pouvaient
avoir. Même si je dis : Accompagnement au secteur jeune, on s'entend qu'il y a une pénurie, là, on s'entend
qu'il y a des manques, là, puis il y a des listes d'attente, là, mais il
y a quand même un plus grand nombre, disons ça comme ça, toutes proportions
gardées, même s'il y a des manques. Mais là, dans ce cas-ci de l'éducation des
adultes, il faut le faire.
Donc,
moi, M. le Président, quand j'entends le ministre me dire... mais nous dire, il
nous le dit à nous tous, de nous
dire : S'il n'y a pas d'obligation, le programme Objectif emploi perd
tout son sens — il ne
l'a pas dit dans ces mots-là, mais
c'est ça que ça veut dire — moi, j'ai de la misère, gros problème. Je ne pense pas qu'un
ministre d'un gouvernement se lève le
matin puis dise : Moi, je vais imposer des obligations, j'embarque en
politique pour mettre des obligations. Ce n'est pas ça. Je ne pense pas
que c'est ça, l'objectif du ministre.
L'objectif du
ministre, c'est de faire en sorte qu'il y ait un plus grand nombre de personnes
qui soient sur le marché du travail, des
gens qui aient des emplois, mais aussi des emplois de qualité, mais aussi des
emplois qui répondent aux aspirations
des individus puis des citoyens, M. le Président, pas des emplois qu'on dit
alimentaires, qui font juste faire en
sorte qu'ils amènent un chèque de paie à la fin... de la personne, mais que la
personne, elle se détruit par en dedans parce que ça ne répond pas du tout à ses aspirations puis à sa volonté.
Ce n'est pas ça que je pense que le ministre veut pour notre société,
pour la société québécoise. Je ne pense pas, M. le Président.
Donc,
moi, je crois bien humblement que mon amendement fait en sorte de répondre à ce
désir et à cette volonté de la part
du ministre, qui, dans le principe même, nous sommes d'accord, nous sommes
d'accord pour faire en sorte qu'on puisse
aider, accompagner des gens pour se trouver un emploi, et, pour y arriver, que
ces gens-là puissent avoir davantage d'aide,
sur le plan social, sur le plan humain, avec, bon, les habiletés sociales comme
il est écrit dans le document, mais aussi par la formation, etc.
Nous
sommes d'accord avec ce principe-là, mais je crois, M. le Président, qu'on peut
arriver à ça sans l'obligation et sans
les sanctions. Puis l'obligation, bien, je crois que l'obligation pourrait être
aussi renversée, ça pourrait aussi être une obligation du ministre et du
gouvernement d'offrir les services à la population. Parce que notre collègue le
député de Drummond—Bois-Francs,
le député de la CAQ l'a souvent dit, puis je crois que là-dessus il a tout à
fait raison de le mentionner, puis on gagne
à entendre son commentaire quand il dit : Moi, je ne veux pas que les gens
aient à se battre pour avoir les
services qu'ils ont droit. Parce qu'actuellement c'est ça qui arrive : il
y a des gens qui veulent avoir des services, qui doivent se battre pour
y avoir accès.
Dans ma
circonscription, je n'ai pas les derniers chiffres, mais, jusqu'à tout
récemment, il y avait des listes d'attente pour pouvoir s'inscrire à
l'éducation des adultes. Quand on veut lutter... quand on veut, plutôt,
favoriser le raccrochage scolaire, puis
qu'il y a des listes d'attente à l'éducation des adultes, quand le jeune ou la
jeune est prêt, à ce moment-ci, à retourner à l'école puis qu'on lui
dit : Ah! c'est très bien, félicitations, mais tu vas avoir une place dans
quatre mois. Dans quatre mois, là, elle va
être rendue où? Ailleurs, puis on aura manqué une nouvelle chance de l'aider,
ce jeune-là.
Donc,
moi, quand je lis ça, là, qui est écrit, là, «offrir aux personnes qui y
participent un accompagnement personnalisé»,
puis tout ça, là, moi, je crois que c'est le ministre et le gouvernement qui
doivent avoir l'obligation d'offrir les
services à la population pour que la population puisse — puisse — avoir tous l'aide et l'accompagnement nécessaires
pour réaliser ses rêves.
Puis je
pourrais nommer, là, quelques exemples, là, «offrir», la définition, là, dans
le Larousse, là : «Donner quelque chose à quelqu'un, le lui remettre en cadeau.» Bon, exemple :
«Offrir des fleurs.» On n'est pas là-dedans, là, on n'offre pas des fleurs, on offre
des sanctions ou des fleurs qui sont pas mal fanées, M. le Président, là.
«Payer quelque chose à quelqu'un et,
en particulier, inviter quelqu'un à participer
à une réjouissance.» Toute une grosse réjouissance, là, qu'on a là, là, M.
le Président. La liste est longue. Je ne continuerai pas, M. le Président, parce
que c'est...
Une voix : ...
M.
Turcotte : Ah! la
cour est plus que pleine, là, M. le
Président, à force de lancer toutes
ces belles fleurs là. Écoute, là.
Donc,
moi, ce que j'aimerais aussi mentionner, M. le Président... Puis là je
ne sais pas, là; tu sais, je parle, je m'emporte un peu, M. le Président. Je ne sais pas combien de temps qu'il me reste,
j'ai peur d'avoir épuisé tout le temps qui m'était imparti dans cet amendement-là.
J'aimerais ça aussi pouvoir permettre à mes collègues de pouvoir intervenir,
là.
Le Président (M. Cousineau) :
Il vous reste du temps, je crois, cinq minutes.
M.
Turcotte : Bien, je
vais laisser mes collègues intervenir. Bien, peut-être le collègue, là, de la...
Le Président (M. Cousineau) :
Je vais voir. Je vais poser la question.
M.
Turcotte : Parce
que je ne veux pas prendre toute la place, non plus, là.
Le
Président (M. Cousineau) : Bien sûr. Alors, M.
le ministre, est-ce que
vous voulez réagir au bouquet de fleurs qui vous est lancé?
M.
Blais : Bien, écoutez,
je pense qu'on commence à... ça commence à tourner un petit peu à vide, M. le Président, là. Que notre collègue ait un problème
avec le principe d'obligation de réciprocité, je ne lui en veux pas. Il peut
avoir deux raisons pour ça : ça ne
fonctionne pas, ça ne donne pas les résultats, notamment en termes de sortie de l'aide sociale.
Bien, malheureusement, tout porte à croire que, si on choisit bien, bien
sûr, les clientèles, le résultat est là.
La semaine dernière, je crois, le Danemark a été reconnu comme la société
la plus égalitaire des sociétés avancées dans le monde, c'est-à-dire, là où la redistribution des revenus est la plus
égalitaire dans le monde. Peut-être que ce n'est pas un gouvernement de droite... il existe des obligations de la
réciprocité, hein, pour les demandeurs... les gens à l'aide sociale, pardon, au Danemark. C'est le cas en Suède, qui
est souvent considérée comme un modèle de social-démocratie. Il existe des obligations et il existe de la
réciprocité. Le collègue n'en veut pas. C'est son droit. Je pense qu'on
tourne en rond s'il essaie, à chaque
10 minutes, de trouver, là, une autre façon de ne pas faire face à cette
réalité-là. On a un désaccord là-dessus. C'est un désaccord que je
respecte, mais on ne changera pas d'opinion.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a d'autres intervenants
concernant l'amendement du député
de Saint-Jean? M. le député de Drummond—Bois-Francs?
M.
Schneeberger : Oui.
Moi, regardez, moi, je ne suis pas en faveur de l'amendement. Ça revient un peu
les mêmes choses que tantôt. Moi, ce que je veux et ce que je redis, c'est que maintenant,
avec la nouvelle approche, là, Objectif emploi, c'est que moi, je crois à cette approche.
Je crois qu'il faut suivre les personnes qui ont des nécessités, qui sont inaptes à se trouver un travail ou
inaptes à suivre un cours, que ces personnes-là soient quand même
encadrées, c'est-à-dire pour leur bien, parce qu'il y a un cheminement à
faire.
Mais, aussi,
je crois surtout que, là, le ministère s'embarque dans une approche où est-ce qu'il va y avoir de plus grandes responsabilités, c'est-à-dire d'offrir un service, d'offrir une aide à ces
personnes-là. Parce que, quand on a la notion d'obligation, bien, la notion d'obligation, elle
est des deux côtés. Et je peux vous dire que je vais être le premier à suivre
et à talonner et à regarder ce qui se fait
sur le terrain quand ce programme-là sera mis en place. Mais, pour l'ensemble de
l'objectif, je crois à cette cause. Je pense que la meilleure aide qu'on peut
apporter à une personne qui a besoin d'aide ou qui a des besoins, c'est de l'aider. Ce n'est pas de la laisser chez
eux seule, c'est de l'encadrer. Alors, par
contre, le gouvernement là-dessus aura une obligation,
et c'est une grande obligation. Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Une réaction, M. le ministre?
• (11 heures) •
M.
Blais : Si vous permettez, M. le Président, je veux revenir sur la question de la formation des adultes et la formation
professionnelle, là. À Charlesbourg, il y a quatre écoles de formation adulte et professionnelle.
La clientèle diminue. Et, bon, ils
ont beaucoup de ressources. Ils font un travail formidable, mais la
clientèle diminue. C'est certain que la directrice m'a dit, il
y a quelques semaines : Objectif
emploi, ça va nous aider parce que ça va
nous amener des gens, puis nous autres, on va les accrocher.
Hier, j'étais
dans un centre de formation professionnelle, un gros centre, là, le centre l'Avenir, à Rimouski.
Le directeur m'a dit : Écoutez,
là, nous autres, là, on manque de clientèle, là. On avait 1 200,
1 300 élèves à une certaine époque, on en a 800. Il y a des équipements impressionnants, il y a des emplois
à prendre. C'est sûr qu'eux, là, la ressource, elle est
là, là. Il ne manque qu'une clientèle, des gens qui viennent, qui sont référés.
Et ils n'ont pas peur de ces personnes-là : ça fait partie de leur clientèle naturelle, des gens qui reviennent sur
le marché du travail après un certain temps. Ce qui m'a étonné, hier, dans la visite, et ça m'a
frappé, il y avait des gens pas mal plus âgés que ce qu'on est habitués de voir
dans ce centre de formation des adultes. Et parfois ils prenaient le collier,
ils étaient aidés par le Programme d'aide sociale
pour y revenir. Donc, moi, je trouve que tout ça, là, c'est à la fois une possibilité pour beaucoup, là, d'aller terminer leurs études,
d'aller chercher une qualification, et les gens qui comprennent bien ce que
c'est que ces clientèles et qui comprennent bien ce que ça peut offrir, là, ils
nous appuient, là, dans les grands objectifs, là, du programme.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger :
Bien, non, ça va pour moi, là. Au
niveau... Je ne veux pas embarquer... étirer ce dossier-là. Tout à
l'heure, le ministre... le ministre, je veux dire le député de Saint-Jean a
parlé d'éducation. Je pense que là on s'embarque
dans une autre sphère. Même s'il y a certains liens avec l'éducation ou la
formation dans le projet de loi actuel, mais... en tout cas, peut-être une autre fois, je pourrai intervenir, là,
ce qui est, en même temps, de la formation professionnelle, là, où
est-ce qu'on aura peut-être beaucoup de travail à faire aussi. Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Je suis prêt à entendre d'autres
intervenants sur l'amendement de M. le député de Saint-Jean. M. le député de
Richelieu?
M. Rochon :
Oui?
Le Président (M.
Cousineau) : Vous avez 20 minutes.
M. Rochon :
Merci, M. le Président. Je suis, ça ne surprendra personne, et surtout pas le
ministre, favorable à l'amendement proposé par mon collègue de Saint-Jean. À la
dernière séance de cette commission sur l'étude article par article du projet
de loi, j'ai exprimé mon scepticisme quant à la pertinence d'obliger un premier
demandeur... on appelle ça un
primodemandeur, nous, dans notre jargon, là, de prestations d'aide sociale à
s'inscrire à une formation, là, sans quoi on ne lui versera aucune
espèce d'allocation. Ce n'est pas exact?
M. Blais :
Pas tout à fait, non. Pas tout à fait, non.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Je veux juste rappeler au collègue que des gens ne sont pas
obligés de s'inscrire à une formation, ils sont obligés d'être dans un parcours qui convienne à leur situation et,
une fois qu'on a décidé ensemble de ce parcours-là, qu'ils l'ont choisi — je le réitère, ils l'ont choisi suite à une
discussion — ensuite,
ils ont l'obligation de participer à ce parcours. Et, bien sûr, là, c'est eux qui choisissent... en partie,
c'est eux qui choisissent leur programme, ça fonctionne mieux quand
c'est eux qui choisissent le programme qu'ils veulent faire.
M. Rochon :
C'est bien, M. le ministre. Je n'aurais pas dû parler de formation, j'aurais dû
parler de parcours, mais mon
scepticisme demeure entier. Je ne suis pas certain que tout le monde soit
disponible, disposé à s'embarquer, si
on me permet le verbe, dans un parcours. Il y a toutes sortes de situations. Le
premier demandeur dont la contrainte sévère
à l'emploi n'est pas encore évaluée, sur laquelle on n'a pas statué, doit-il
s'insérer dans le programme Objectif emploi?
M.
Blais : Alors, une contrainte sévère à l'aide sociale, ça doit être
appuyé par un diagnostic médical. Alors, si quelqu'un qui n'a pas de diagnostic... un rapport médical, pardon, un
diagnostic, ne peut pas être considéré automatiquement comme ayant une
contrainte.
M. Rochon : Alors, le délai, avant que ce diagnostic soit posé, M. le ministre...
Je pense notamment aux demandeurs qui pourraient ne pas avoir de médecin
de famille. Ce n'est pas un cas si rare.
M. Blais :
Je suis en train de vérifier, là, le délai.
(Consultation)
M.
Blais : Alors, je peux peut-être demander à la sous-ministre adjointe,
si vous voulez répondre à la question?
Le
Président (M. Cousineau) : Oui. Ça va prendre un consentement,
s'il vous plaît. Consentement pour que la sous-ministre adjointe puisse
répondre à la question?
Des voix :
...
Le
Président (M. Cousineau) : Ça va? M. le député de Drummond—Bois-Francs, est-ce que j'ai le consentement?
M.
Schneeberger :
Oui.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, madame, votre titre et
votre nom, s'il vous plaît, pour l'enregistrement.
Mme
Maltais (Chantal) : Oui. Bonjour. Chantal Maltais, je suis
sous-ministre adjointe aux politiques, à l'analyse stratégique et à
l'action communautaire.
Alors, de la
façon que ça fonctionne, c'est que, comme le dit le ministre, il doit y avoir
un rapport médical de fourni, et il y
a certains diagnostics qu'on appelle des diagnostics évidents, il y a une liste
qui est connue. Alors, si les personnes ont un de ces diagnostics, ça prend quatre jours avant que la décision
soit prise. Donc, c'est assez automatique : la personne vient porter son rapport médical et la décision
est prise pratiquement sur-le-champ. Donc, cette personne-là, qui a une contrainte sévère à l'emploi, n'est pas dirigée
vers Objectif emploi. Il peut y avoir d'autres investigations qui sont plus
longues si c'est un diagnostic qui n'est pas
sur la liste. Alors là, les délais sont un peu plus longs, mais le travail se
fait de façon assez rondement. Il y a un délai de 30 jours à ce
moment-là.
M.
Rochon : Alors, on pose
rapidement le diagnostic dans le cas de conditions évidentes, là, d'inaptitude,
et cela peut mettre jusqu'à 30 jours dans le cas de conditions moins
évidentes. C'est ça?
Vous avez bien
fait, tantôt, de me rappeler qu'il ne s'agit pas que de formation, mais de
parcours. J'aimerais vous entendre sur les trois parcours possibles. Ma
question est : Est-ce qu'il y a une hiérarchie? Est-ce qu'on doit avoir
une hiérarchie entre ces parcours : soit, si je me souviens bien,
recherche d'emploi active, formation et puis acquisition et développement des
habiletés sociales?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la sous-ministre ou M. le ministre? M. le ministre.
M.
Blais : Donc, formellement, il n'y a aucune hiérarchie, formellement,
c'est-à-dire que les trois doivent être disponibles comme parcours. Ce qu'on me dit, de plus en plus, de la part
des agents d'aide sociale, c'est que, notamment avec les plus jeunes, même les plus vieux, ce qui est favorisé, c'est
quand même le retour aux études, une qualification, en général, ce qui est favorisé, là, et ça
fonctionne assez bien pour plusieurs. Cependant, il y a des gens qui ne sont
pas prêts à retourner aux études, qui
ont vécu des mauvaises expériences et qui préfèrent aller vers un stage ou
encore un travail.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Richelieu.
M.
Rochon : Mais, encore une
fois, primodemandeur, un premier demandeur qui refuserait d'adhérer à l'un de
ces trois parcours que nous venons de citer ne pourrait pas recevoir de
prestation d'aide sociale.
M.
Blais : Le parcours est à la fois un parcours en termes de programme,
mais il peut y avoir aussi des bonifications qui sont accordées au programme parce qu'il participe, et quelqu'un qui
ne participe pas ou a des manquements par rapport à sa participation peut se voir couper, après un
certain temps, là, une partie de sa prestation seulement. Donc, le montant
maximal... j'ai toujours un peu de
problèmes... mais c'est 226 $, si je me souviens bien, ou 224 $, là,
s'il y a eu plusieurs manquements.
C'est
beaucoup moins que la réforme de 1998, là, du Parti québécois, parce qu'en 1998
le Parti québécois avait introduit
des sanctions. C'est beaucoup moins à plusieurs endroits parce que, dans le cas
de ce qu'avait fait le Parti québécois, c'est l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale. Ce n'était pas
uniquement les primodemandeurs, mais l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale. C'est pour ça que les agents d'aide
sociale ont plus ou moins un bon souvenir de cette période-là parce que ça touchait un grand, grand
nombre de personnes. Et surtout les pénalités, sous le Parti québécois, étaient très sévères, hein? Je vous rappelle que,
dans le cas d'Objectif emploi, quelqu'un a un manquement, mais cette personne-là, si elle revient dans son parcours ou
encore elle choisit avec la personne avec qui elle travaille, l'agent avec
qui elle travaille un autre parcours, elle reprend tous ses droits.
Dans le cas
de la... pas la proposition, mais de la réforme du Parti québécois, c'était
quand même sur 12 mois, le
manquement. Donc, vous vouliez vous reprendre ou vous vous repreniez, vous
étiez pris dans cette sanction-là pendant 12 mois. Et les montants étaient importants, là. Les montants, à
l'époque, en... il ne faudrait pas que je me trompe, c'est 1998, voilà, Mme Harel, 1998, c'était quand
même... le montant maximal était de 300 $ à l'époque; aujourd'hui, en
dollars constants, c'est 426 $. C'est le double, hein, de ce que
nous, on recommande.
Pourquoi?
Parce que ce qui est important, je pense, ce n'est pas la nature vindicative,
hein, de la sanction, c'est simplement,
au contraire, d'avoir une sanction qui est modérée, qui est stricte et qui
permet toujours à quelqu'un de se refaire.
Donc, la réforme, là-dessus, elle est très, très différente, là, de celle qui
avait été mise en oeuvre par Mme Harel en 1998.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Richelieu.
• (11 h 10) •
M.
Rochon : Oui. M. le
Président, restons sur votre projet de loi, si vous permettez, M. le ministre.
Un auteur que vous connaissez bien a
écrit : «Il apparaît difficile de compter uniquement sur la classe
politique pour mener de tels débats
de fond puisqu'elle demeure soumise à la logique électoraliste qui n'accepte
généralement d'elle que la formulation de slogans. Alors, n'en faisons
pas, ni l'un ni l'autre.» Cet auteur, c'est vous-même.
Vos derniers
commentaires m'amènent une sous-question. Vous parliez des pénalités, là, pour
quelqu'un qui ne suit pas
rigoureusement le parcours qu'il a choisi. Comment on fait pour évaluer cinq
jours d'absence dans la recherche active d'emploi? Comment ça
s'articule, ça?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Écoutez, c'est une proposition qu'on fait, là, dans les
intentions réglementaires, là. À vrai dire, c'est beaucoup plus facile à évaluer dans le cas de la
formation parce qu'en cas de formation vous avez des cours à suivre; si vous ne vous y rendez pas, à vos cours, à un
moment donné il y a un coût, là, réel, en termes de progrès puis d'acquisition,
là.
Dans le cas
de la recherche d'emploi, en général, c'est des rencontres que vous devez faire
avec des gens qui vous aident dans la
recherche d'un emploi, qui vous donnent les outils nécessaires pour aller
chercher l'emploi que vous désirez. On parle de ce type de rencontre là.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M. Rochon : Oui. Vous dites :
En général. C'est qu'il y a d'autres situations, là. Vous avez dit : En
général.
M. Blais : Oui, c'est vrai. Mais
précisez votre question, parce que...
M.
Rochon : Alors, j'aimerais
vous entendre, là, élaborer sur les différentes façons de procéder à une
recherche active d'emploi,
l'évaluation, par l'employé du ministère, sur la rigueur avec laquelle le
prestataire procède à sa recherche d'emploi.
Vous dites : On l'évalue selon les rencontres qu'il a avec son agent ou,
en général, on l'évalue comme ça. Comment peut-on aussi l'évaluer?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Écoutez, M. le
Président, ma réponse pourrait être longue. Je vais être prudent. Puis on en a
déjà parlé, je pense, amplement, de ce sujet-là, là. On a signé une
entente avec les carrefours jeunesse-emploi. Les carrefours jeunesse-emploi sont parmi les ressources
peut-être, là, qui sont plus habilitées, là, à accompagner notamment les moins
de 30 ans, 35 ans, là, à la réinsertion.
En général,
ça commence par une évaluation à la fois des intentions, du désir; ensuite, on
regarde les moyens que la personne doit prendre. Souvent, on l'aide aussi à
trouver les ressources où sont les affichages d'emploi. Bien sûr, la préparation des entrevues, c'est extrêmement
important. Parfois, c'est d'aller chercher des bonifications à son pedigree,
là, personnel, là, pour se rendre
plus attractif sur le marché du travail. Je ne veux pas reprendre toute cette
discussion-là, je pense qu'on en avait parlé quand même passablement
jusqu'ici, là.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Rochon : Est-ce que je dois
comprendre qu'un jeune qui cumule cinq jours d'absence en six mois mais qui
refuse systématiquement une rencontre avec le CLE ou le CJE, là, le carrefour
jeunesse-emploi, va voir amputer son allocation après chaque refus de
rencontre, et ce, même s'il continue à être présent dans son programme?
M.
Blais : Bien, c'est-à-dire qu'encore une fois on s'entend avec la
personne sur son parcours. Une fois qu'on s'est entendus sur : Oui, je ne sais pas, moi, je vais aller
travailler avec les CJE de mon coin, on s'attend à ce que la personne participe, hein? C'est lui-même qui a décidé qu'il
allait le faire. Il est possible qu'il ait de bonnes raisons pour ne pas se
rendre parfois; c'est sujet à évaluation.
C'est bien dit, là, je pense, dans nos intentions, là, c'est toujours sujet à
évaluation. Mais effectivement, s'il
y a un manquement, après un manquement, après deux, après trois, il y a des
conséquences potentielles.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Ça va pour l'instant, M.
le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Ça va pour l'instant? M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Ça
va.
Le Président (M. Cousineau) :
Non? M. le député de Saint-Jean? Il vous reste, je crois, cinq minutes.
M.
Turcotte :
Bien, merci, M. le Président. Le ministre parle souvent de réciprocité, hein?
Il a mentionné ça, bon : Ça
s'inscrit dans le principe de réciprocité. Pour qu'il y ait réciprocité, il
faut aussi que le gouvernement ait des obligations à respecter, puis l'obligation, c'est d'offrir des
emplois. M. le Président, vous savez, d'avril 2015 à avril 2016, 9 500
emplois ont été perdus au Québec.
Donc, il y a, en ce moment, un solde négatif dans la création d'emplois au
Québec. Le ministre le sait. Il est ministre de l'Emploi, il le sait.
On pourrait
faire toute la nomenclature, là, des causes, et puis de tout ça, là. On
pourrait dire que le gouvernement a
tardé et n'a pas présenté une politique économique inspirante pour le milieu
des affaires. On pourrait parler de plein d'éléments internationaux, puis tout ça. Que, lorsque nous étions au
gouvernement, là, le prix des métaux, etc., là, ça, ça n'existait pas puis ça n'était pas un argument,
mais là, quand le gouvernement est actuellement au gouvernement, là, ça,
c'est très important et ça explique, là, le fait que le Plan Nord ne fonctionne
pas, bon, etc.
On pourrait tout faire la nomenclature de ça, M.
le Président, mais ça, c'est à côté, là. On a des collègues qui parleront de ça. Bien, on peut en parler aussi,
là, je suis porte-parole en emploi, et il est ministre de l'Emploi, on pourrait
en jaser longtemps,
là. Mais, quand on voit qu'actuellement il y a de plus en plus de gens qui se
cherchent un emploi, de plus en plus de gens qui doivent prendre deux,
trois emplois pour être capables de subvenir aux besoins, là, des frais courants, là — un logement, électricité, bon, garderie,
etc. — parce
que tout augmente, de dire que l'obligation n'est que du côté du
primodemandeur, moi, j'ai de la misère avec ça, M. le Président.
Je l'ai
mentionné précédemment, puis je reviens à la charge en disant que le ministre,
que le gouvernement a lui aussi une obligation. Et je crois que c'est
lui qui a davantage l'obligation, M. le Président, sur deux ordres, comme je viens de le mentionner : de s'assurer que son
gouvernement stimule l'économie suffisamment pour qu'il y ait une croissance
économique, mais aussi de la création
d'emplois, ce qui n'est pas le cas actuellement. Et les chiffres sont têtus, M.
le Président : depuis un an, il
s'est perdu 9 500 emplois — en un an. Et l'autre aspect, c'est qu'il a
l'obligation, M. le Président, d'offrir les services adéquats à la
hauteur des besoins de la population.
J'ai fait un
long plaidoyer, M. le Président, sur l'éducation. Je pourrai y revenir et je
pourrai revenir sans problème. Le
problème, c'est que ça ne règle pas la situation déplorable qu'on a en
éducation. Je pourrais de nouveau faire un plaidoyer sur le nombre qui diminue, d'année en année, du
nombre d'agents dans les centres locaux d'emploi, la fermeture des centres
locaux d'emploi. Je peux continuer à faire
ce plaidoyer-là; malheureusement, M. le Président, ça ne règle pas plus la
situation.
Donc, M. le
Président, force est de constater... le ministre considère, et là je cite ses
propos, il dit qu'«on tourne à vide
et qu'on tourne en rond, actuellement, en commission parlementaire». Nous, des
législateurs, nous sommes payés pour
faire des lois, nous sommes payés, ici, pour débattre d'enjeux de société et on
se fait dire qu'on tourne à vide et qu'on tourne en rond. Dans ce cas-là, les groupes qui sont venus ici, en
commission parlementaire, s'exprimer, est-ce que c'est aussi leur dire
qu'eux aussi tournent à vide et tournent en rond?
Moi, je vais
vous dire, M. le Président, pour la plupart des groupes qui sont venus ici,
s'ils tournent en rond ou s'ils
tournent à vide, la principale raison, c'est parce qu'ils n'ont pas le
financement suffisant pour répondre aux besoins de la population, parce que le gouvernement actuel ne rehausse pas le
financement des organismes communautaires et n'offre pas les services que la population mérite d'avoir pour répondre
aux priorités que le ministre s'est fixées par son projet de loi actuel, c'est-à-dire de retourner
les gens... et de favoriser le retour au travail. Si le ministre et le
gouvernement prenaient les
responsabilités qui leur importent et offraient un financement adéquat aux
organismes, bien, peut-être que ces organismes-là ne tourneraient pas en
rond comme le ministre semble dire et nous accuser de tourner en rond ici.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur
l'amendement apporté par M. le député de Saint-Jean? S'il n'y a pas d'autre
intervention, alors je vais...
Oui, M. le député de Saint-Jean?
M.
Turcotte : M. le
Président, j'aimerais procéder au vote par appel nominal.
• (11 h 20) •
Le
Président (M. Cousineau) : Il n'y a pas de problème. Alors, la
demande est faite. Donc, nous allons procéder par un vote nominal sur
l'amendement déposé par M. le député de Saint-Jean, qui se lit comme
suit :
Dans le premier alinéa, supprimer «aux personnes
qui y participent» et ajouter, après le mot «emploi», «aux personnes qui
désirent y participer».
Alors, Mme la secrétaire.
La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte : Pour.
La Secrétaire : M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon : Pour.
La Secrétaire : M.
Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais : Contre.
La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?
M. Hardy : Contre.
La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé : Contre.
La Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
La Secrétaire : M. Matte (Portneuf)?
M. Matte : Contre.
La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?
M. Polo : Contre.
La Secrétaire : M. Cousineau
(Bertrand)?
Le Président (M. Cousineau) :
Je m'abstiens.
La Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, nous revenons aux discussions sur l'article 83.1, en rappelant
le temps de parole qu'il reste aux parlementaires : M. le député de Saint-Jean, quatre minutes, M. le député de Richelieu,
14 min 30 s, M. le
député de Drummond—Bois-Francs, 14 min 45 s. Et voilà. Donc, une discussion sur l'article
83.1. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : M. le
Président, j'aimerais déposer un
nouvel amendement. Ce nouvel amendement se lit comme
suit : Remplacer «vise à offrir» par «offre».
Le Président (M. Cousineau) :
Alors donc, discussion, donc, sur l'amendement déposé par M. le député de Saint-Jean.
M. le député de Saint-Jean, votre argumentaire.
M.
Turcotte : M. le
Président, je crois que cet amendement
que nous présentons actuellement n'est pas anodin, n'est pas anodin dans le sens où, plutôt que de soumettre l'idée que le
programme Objectif emploi vise à offrir aux personnes qui y participent un accompagnement personnalisé en
vue d'une intégration en emploi... Il
y a eu une modification, là, d'ailleurs, hein? On a eu un amendement que nous avons
accepté, là, où on inclut aussi «notamment par la formation». Mais nous, nous voudrions y lire «offre», c'est-à-dire : «Le
programme Objectif emploi offre aux personnes qui y participent un
accompagnement personnalisé, notamment par la formation, en vue d'une
intégration en emploi.»
Ce qui veut
dire, premièrement : le but du programme, c'est d'offrir aux gens un
accompagnement. Donc, disons-le, que
le programme offre. Quand on dit «vise à offrir»... J'ai fait toute une
nomenclature, là, des définitions, là, d'offrir, puis tout ça. Bon, on y reviendra peut-être plus tard, là. Mais,
quand on dit «vise à offrir», c'est comme si on se donnait un objectif,
là : on croit, là, qu'on va être capable d'offrir, là, donc on se donne
comme objectif d'offrir, mais on n'est pas sûr d'y
arriver, ça fait qu'on vise.
Moi, j'ai un
problème avec ça, M. le Président, parce
que, là, c'est sérieux, là. C'est
sérieux parce qu'il y a des gens
qui ont l'obligation d'embarquer dans un programme, mais ça se peut
que, dans ce programme-là, on ne puisse pas tout leur offrir l'accompagnement nécessaire pour atteindre l'objectif. Et, s'ils n'atteignent pas l'objectif, ils seront punis, sanctionnés par des
sanctions monétaires.
Donc, je crois qu'il faudrait — qu'il
faudrait — que
le gouvernement et le ministre, comme je l'ai mentionné précédemment, prennent leurs responsabilités et prennent l'engagement d'offrir — pas
de viser à offrir, mais d'offrir — les
services nécessaires pour que la population,
pour que les primodemandeurs, comme on appelle dans le jargon, là — il n'y a pas grand monde qui se reconnaît comme primodemandeur, là, ça ne dit pas
grand-chose, là, mais on va utiliser le terme qui nous est proposé,
là — donc
pour que les primodemandeurs puissent véritablement poursuivre si... Bon, il y
a obligation, là, d'embarquer dans le parcours. On y reviendra plus tard, là,
sur l'obligation, mais, à tout le moins, que l'obligation soit dans les deux
sens, hein?
Le ministre
parle de réciprocité. Il nous en parle, là, régulièrement, réciprocité. Bien,
la réciprocité dit aussi que le gouvernement a l'obligation. Peut-être
que le ministre aura une nouvelle proposition pour changer, là, le libellé, et tout ça, mais moi, c'est le fond que je veux
lancer en ce moment, de faire en sorte que le ministre entende notre volonté
ferme, qu'il prenne lui aussi la
responsabilité, et que lui aussi ait l'obligation, et que lui aussi ait le
fardeau de la preuve de montrer la
volonté du gouvernement d'aider, d'accompagner les gens à se trouver un emploi,
que ça soit par la formation,
que ça soit par les habiletés sociales, que ça soit par la recherche d'emploi,
mais que le gouvernement ait l'obligation d'accompagner les gens et non pas de
viser à offrir.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.
M.
Blais : Écoutez,
M. le Président, je vais vous
expliquer pourquoi je pense qu'on tourne en rond. Simplement parce que, du côté de la deuxième opposition, je
pense qu'il y a une préoccupation que je comprends bien depuis un certain
temps : Est-ce que les ressources vont
être là? ...pas d'objection de principe, mais est-ce que les ressources vont
être là? Je comprends cette
préoccupation-là pour essayer de répondre le mieux possible à cette
préoccupation. Du côté de la première opposition,
là, je vois une opposition de principe, moi, que je respecte, je ne me battrai
pas là-dessus. J'ai déjà souvent dit qu'il faut tester nos principes, il faut les
remettre en question parfois, hein, être conséquentialiste donc, mais c'est une
objection de principe.
Si
jamais ce que le collègue me dit en face, c'est que, s'il y avait ce
changement-là, l'obligation de principe serait levée, hein, je suis prêt à la regarder. Mais, pour le moment, nous
prévoyons déjà — puis là
je le dis pour mon collègue de la
deuxième opposition aussi qui a cette préoccupation — qu'il y a une forme d'engagement qui est
prise, par le ministère, avec tous
les agents, et cet engagement-là prend la forme d'un contrat qui est signé, en
bonne et due forme, par l'agent et par
le participant, dans lequel on s'engage à verser l'aide financière, on s'engage
à verser le supplément, on s'engage à un accompagnement personnalisé. On
signe, donc, ces étapes-là.
Donc,
nos intentions, c'est vraiment de l'offrir, mais, comme je sens que, même si je
faisais cette concession-là, que je
ne trouve pas utile par ailleurs, compte tenu que ce qui est important, là,
c'est le type de contrat que l'on va signer, je n'acquiescerai pas. Si jamais le collègue me dit : Écoutez, moi,
là, il y a cet élément-là qui me manque et je suis prêt à lever mon objection de principe, je suis prêt à la
regarder, mais, vraisemblablement, dans l'état des discussions, je ne vois
pas comment ça nous aiderait à progresser.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Je vais avoir besoin de votre aide, M. le
Président, pour utiliser des mots qui sont parlementaires actuellement pour ne pas aller à l'encontre du
règlement. Mais moi, ce que je viens d'entendre, j'ai de la difficulté avec ça.
J'ai de la difficulté avec ça. Je ne dirais
pas que le ministre veut monnayer notre appui au projet de loi, mais c'est un
peu ça, là. Je ne sais pas si j'ai le droit de dire ça, M. le Président,
là.
Le Président (M.
Cousineau) : Vous êtes dans les limites de l'acceptable.
• (11 h 30) •
M.
Turcotte : Bon. Je ne veux pas outrepasser, là, les limites,
loin de là, mais j'ai de la grosse difficulté, de la difficulté à entendre ça, moi, ça, là. Pas parce
que ça me dérange : moi, là, écoutez, M. le Président, là, ça va faire
huit ans que je suis député, c'est trois mandats dans ma circonscription, hein?
Saint-Jean, comté baromètre. J'ai fait deux mandats dans l'opposition, le premier député de l'histoire
de la circonscription de Saint-Jean, depuis 1854, à avoir obtenu ça. La
première fois depuis 60 ans qu'un député a trois mandats consécutifs dans la
circonscription. Je vais continuer, moi, à travailler pour mon monde, c'est
pour ça que je suis ici.
On
avait une ancienne collègue, Danielle Doyer, vous l'avez connue, vous avez
siégé avec, j'ai siégé avec. Quand je
suis arrivé ici, à l'Assemblée nationale, comme député, c'était ma marraine,
hein? Et Danielle me disait et elle nous disait souvent en commission parlementaire : Il faut que tu te
rappelles, mon petit gars, que tu es ici pour défendre ton monde puis défendre les plus démunis parce qu'eux
autres ils n'ont pas tous les lobbys puis ils n'ont pas toutes les voies,
dans les médias, pour faire entendre leurs voix.
Puis,
oui, j'ai un problème de principe. Oui, j'ai un problème de principe, on ne
s'en est pas caché, on l'a dit depuis le
début. On a offert aux ministres, passés et actuel, là, des voies de passage
pour ce projet de loi là. Nous avons déposé une motion de scission, à l'Assemblée nationale, pour scinder le projet
de loi en deux parties : pour une partie qui nous pose problème, mais que nous pouvons trouver
davantage de solutions et d'ententes... La preuve, c'est que pratiquement
tous les articles de la première partie du projet de loi ont été adoptés sur
division, mais ils ont été adoptés.
Nous
avons fait des amendements : certains ont été refusés, d'autres ont été
acceptés. Le ministre a déposé des amendements : on a appuyé certains de
ses amendements, d'autres qu'on a refusés. Mais la moitié du projet de loi...
le projet de loi, là, la partie qui
vise l'adéquation entre la formation et l'emploi, dans les faits, là, cette
partie-là, là, serait déjà adoptée comme projet de loi et pourrait être
mise en vigueur à la volonté du ministre et du gouvernement.
La
section où nous sommes actuellement, c'est plus compliqué. On l'a toujours dit,
ce n'est pas nouveau. Puis moi, il
n'y a pas personne qui va m'empêcher de dire ici, à part le règlement et le
président, ce que j'ai à dire et ce que je veux dire, parce que je suis ici pour représenter une partie de la
population, des gens qui auraient aimé être ici, en commission parlementaire, dans cette salle-ci, là... nous
avons réuni plusieurs fois, ici, là... auraient aimé ça ici, au bout de la
table, là. Il y a des micros qui sont
là, là, puis ces micros-là, là, ils servent à entendre les citoyens. Puis ces
gens-là, là, voulaient être ici. Ils n'ont pas été invités.
Ça n'a pas été des
consultations générales, ici, sur le projet de loi, M. le Président, c'est des
consultations particulières. Puis des
consultations assez particulières, merci, parce que pas tous les groupes ont pu
être entendus. Des groupes qui
auraient dû être entendus n'ont pas été entendus, mais il n'y a pas beaucoup de
citoyens qui ont été entendus non
plus. Puis vous allez me dire, M. le Président, que, bon, c'est la prérogative
du gouvernement d'accepter ou non qui est entendu ou pas. Mais, si on n'a pas l'occasion d'entendre la voix de ces
citoyens-là ici, à l'Assemblée nationale, Parlement qui prend les décisions pour l'intérêt supérieur
de la population... Hein, c'est ça, notre objectif, on est ici pour ça, là...
mais ça prend au moins des députés qui puissent faire entendre leur
voix.
Je
comprends que le ministre n'aime pas ce que je dis. Je peux comprendre que
certains de ses collègues n'aiment pas
ce que je dis. À la rigueur, je peux comprendre que mon collègue de la deuxième
opposition n'apprécie pas ce que je dis
à tous les moments, mais je crois qu'on est capables quand même de s'entendre
sur certains principes. Puis je crois que,
si le ministre est sincère... Et je le crois sincère. On ne partage pas les
mêmes opinions. C'est sûr que moi, je m'entends plus avec le ministre actuel lorsqu'il était dans sa période plus
fougueuse ou plus... bien, je ne sais pas, là, je ne veux pas dévoiler des secrets, là, mais il y a une période
où il était plus libre penseur, disons ça comme ça, où il se permettait de
coucher, sur le papier, des opinions et des
pensées. Tu sais, on le voit, là, dans son livre, là, ici, là, puis on en parle
souvent, on fait référence, là, à Un
revenu garanti pour tous, là, bon, livre très intéressant. Moi, bon, je ne
partage peut-être pas tout, mais il faudrait en débattre. Il a eu le
mandat du premier ministre pour le faire.
S'il
est d'accord, s'il est d'accord avec l'amendement que nous proposons, s'il est
d'accord avec le fond, que le gouvernement doit aussi avoir une
obligation d'offrir des services à la population et aux gens, on n'a qu'à
adopter l'amendement puis qu'on passe au
suivant amendement, au suivant article. Moi, là, je continue, là, mon travail,
mais il faut s'assurer qu'à terme...
c'est à ça que ça sert, une commission parlementaire... que le projet de loi
qui sera adopté, par le chemin
habituel ou par le bâillon... Parce que le ministre a aussi invoqué le bâillon
sur le projet de loi n° 70, je dois le dire, M. le Président, au moment où tout allait bien,
les articles se suivaient un après l'autre. Même, le ministre, à quelques
occasions, nous a dit : Ça va vite, ça
va trop vite. Que ça soit par les forces naturelles des choses, là, par le
règlement habituel ou par bâillon, je crois qu'on a la responsabilité de
s'assurer que le projet de loi soit le meilleur.
Et moi, je n'accepterai pas, M. le Président, de me faire
dire : On va accepter cet amendement-là à condition où le député de
Saint-Jean — qui
est moi — ou
mes collègues, que ça soit moi ou autre, là, mais qu'on
arrête, là, puis qu'on règle le projet de loi, là, un, deux, trois, là.
Gros problème avec ça. Gros problème.
S'il est d'accord
avec le principe de l'amendement, qu'on vote pour, qu'on continue le travail.
Puis, s'il est contre, bien, qu'il le
dise puis on va voter. Mais, un instant, là, avant de dire : Bien là, ci,
ça, puis... Allons-y avec nos convictions. Est-ce que le ministre a la
conviction? Est-ce qu'il est prêt à aller jusqu'au bout de sa conviction de
l'importance du programme Objectif emploi
assez pour dire : Moi, là, j'y crois tellement que ça va fonctionner comme
programme, là? Que, oui, je suis prêt
à prendre l'obligation d'offrir les services aux primodemandeurs, aux nouveaux
demandeurs d'aide sociale? Puis oui,
on va les accompagner, puis, oui, il n'y a personne de laissé de côté? S'il a
l'assurance que son programme peut
fonctionner et qu'il a les ressources, avec les 40, 50, là, je ne sais pas, là,
ETC supplémentaires qui vont s'ajouter, là, avec... je pense que c'est 5 millions ou 50 millions, là,
que le ministre a lancés ici, dans une discussion, là, peu importe, là...
S'il a l'assurance que son programme peut
fonctionner, moi, je crois qu'il peut très bien accepter l'amendement qu'on
propose.
S'il
n'accepte pas l'amendement, moi, je vais comprendre que lui-même n'est pas
convaincu d'être capable d'offrir tous
les services à la population, que les gens sont en droit de s'attendre pour
atteindre l'objectif ultime du retour au travail ou de l'entrée sur le marché du travail. Parce qu'on
parle de ça aussi : des gens qui ont déjà été sur le marché du travail,
qui veulent retourner sur le marché
du travail, mais aussi des gens qui n'ont jamais été sur le marché du travail.
Parce que, quand on parle de jeunes
de 18 ans, puis tout ça, qui commencent, là, à l'aide sociale, ça se peut que
ces jeunes n'ont jamais été sur le marché du travail. Donc, les gens ont
besoin de services.
Je vais
m'arrêter ici, M. le Président, mais je crois que le ministre a, en ce moment,
l'obligation — il aime
ça, l'obligation, là — il a l'obligation de réfléchir à ce qu'il
est capable, oui ou non, d'offrir les services nécessaires, qu'il doit
déjà avoir chiffrés, élaborés, etc. Il l'a mis en place, le programme Objectif
emploi, il veut le mettre, puis ça fait deux
budgets qu'on en parle. Ce n'est pas nouveau, là. Donc, il a l'obligation de
réfléchir actuellement à : Est-ce que je suis capable ou non d'offrir les services nécessaires
aux participants du programme? Et, suite à sa décision, on comprendra
bien des choses.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.
M.
Blais : Alors, oui, M. le Président, donc on a ce qu'il faut, on a
ajouté des ressources supplémentaires dans les derniers budgets. Dans le tout dernier budget, là, on a ajouté
5 millions additionnels, là, pour embaucher l'équivalent... donc, 90 personnes à temps complet de plus, là,
dans les centres locaux d'emploi. On a ajouté des sommes supplémentaires
aussi pour bonifier — vous parlez de ça — bonifier aussi les montants que l'on donne,
là, pour les participants. On vient de signer
une entente sur trois ans avec les carrefours jeunesse-emploi, qui vont être
parmi les partenaires les plus importants du programme. Donc, j'ai la
conviction que ça va fonctionner parce qu'on a une... la littérature, sur le
sujet, est assez abondante. C'est vrai que
les sanctions sont beaucoup moins sévères que celles qui avaient été adoptées
par le Parti québécois en 1998, mais,
malgré tout, là, moi, je pense que ça va fonctionner. Parce que ce qui est
important, c'est des ressources que
l'on met, ce qui est important, avant tout, c'est l'encadrement. Oui, que les
gens sachent, là, qu'on compte sur eux, qu'il puisse y avoir des
sanctions, mais il ne faut pas être trop sévère surtout dans les sanctions, ça
ne donne rien.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Drummond—Bois-Francs.
• (11 h 40) •
M.
Schneeberger :
Oui. J'ai écouté attentivement les paroles du député de Saint-Jean, j'ai aussi
écouté le ministre, et, tout à
l'heure, quand j'ai pris la parole où est-ce que je mentionnais que le
gouvernement aussi avait une responsabilité, là, avec l'approche, là, d'Objectif emploi, à fournir les services ou les... en tout cas, les besoins nécessaires,
là, pour que les gens qui sont
classés aptes au programme à poursuivre leur cheminement, qu'il soit social,
vie professionnelle ou autre, l'amendement
que le député de Saint-Jean amène, moi, j'appuie cet amendement.
C'est-à-dire que c'est le principe et, oui, c'est vrai
que le mot «vise à offrir» ne détermine pas une obligation, c'est un but.
Maintenant,
bien, on a tous des buts dans la vie, mais ça ne veut pas dire qu'on arrive
tous à leurs fins. «Offre», c'est-à-dire
que là c'est plus une obligation. Alors, ça va être totalement
dans la visée. Moi, je pense que, par principe, j'appuie cet amendement-là,
pour les raisons que je viens de dire.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Alors, réaction, M. le
ministre? Ça va? M. le député
de Richelieu.
M.
Rochon : Alors, nous aurons
des oppositions unies derrière la proposition de mon collègue de Saint-Jean. Je
crois en effet qu'il y a là un test pour le ministre, un test de conviction.
Tout à l'heure, il nous demandait, pas très habilement, si je puis me permettre, si nous
allions revenir sur notre position quant au principe même du projet de loi s'il
acquiesçait à cet amendement. La réponse, c'est non. On garde nos principes.
Il
y a une seconde question qui s'adresse cette fois au ministre. Croit-il,
croit-il vraiment en ce programme Objectif emploi? Il est tout à fait pertinent de dire que «viser à», ce n'est pas
s'obliger. «Viser à», hein... «Le programme Objectif emploi vise à offrir», c'est un objectif, ce n'est
pas une obligation. Ça ne pose pas d'obligation d'offre. Alors, le gouvernement
impose des obligations aux primodemandeurs,
l'obligation de s'inscrire au programme Objectif emploi, mais il ne veut
pas se donner, à lui-même, l'obligation, ce
gouvernement, d'offrir à ces personnes un accompagnement personnalisé en vue
d'une intégration en emploi. C'est un
objectif. C'est un objectif qu'il pourrait, hein, puisque c'est un objectif, ne
pas remplir, ne pas pouvoir remplir.
«La
Protectrice du citoyen a exprimé de "sérieuses réserves" à l'égard du
projet de loi 70.» Elle a dit croiser les doigts pour que «les personnes qui seront admises au programme Objectif
emploi seront véritablement aidées et, à terme — et je la
cite, là — qu'elles
ne seront pas — ces
personnes — victimes
d'exclusion, voire menées au dénuement total.»
Si
le ministre croit que ce ne sera pas le cas, il ne devrait pas hésiter à
souscrire à l'amendement soumis par le collègue
de Saint-Jean et qui fait consensus de ce côté-ci de la table, il me semble.
S'il ne le fait pas, il sème un sérieux doute sur ses propres
convictions, M. le Président, il me semble.
M. Blais :
Alors, M. le Président...
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : ...ça va bien, oui? Bien, tout simplement pour dire que je
n'ai pas demandé formellement aux gens — en face — de changer leurs principes. Il faut toujours
questionner nos principes, hein? Quelqu'un qui est raciste devrait, hein,
questionner ses principes. Quelqu'un qui est
sexiste devrait questionner ses principes. Il faut toujours être en mesure de
le faire.
J'avais
compris, dans la proposition du collège, mais je me suis trompé, il me l'a dit
qu'il y avait comme une volonté que,
si on sécurisait cet élément-là, bien sûr, on pouvait aller de l'avant avec
Objectif emploi. Il m'a dit clairement que ce ne serait pas le cas, donc
c'était un enjeu de clarification.
L'important,
peut-être ce que je n'ai pas mentionné, là, qui va peut-être sécuriser les
collègues, c'est qu'à 83.3 on
revient, dans le projet de loi, beaucoup plus formellement avec les obligations
que le ministère doit remplir à
l'intérieur du projet de loi. Donc, on aura l'occasion de voir ça.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui. Mais il me semble que cette obligation, elle doit se retrouver dans l'article, appelons
ça, fondateur du projet de loi. Là, M. le ministre nous signale que ça se retrouve plus loin, mais pourquoi ça ne se
retrouverait pas dès le début du projet de loi? Le ministre réalise-t-il
bien que les gens qui suivent nos travaux deviendront sceptiques quant à la livraison d'offre, là, par le gouvernement, d'offre d'accompagnement personnalisé en vue d'une intégration à
l'emploi?
Je
rappelle l'amendement suggéré par mon collègue de Saint-Jean
à l'effet de ne plus voir apparaître, dans le texte, «vise à offrir», «le programme Objectif emploi
vise à offrir», mais de plutôt passer à la formulation très claire, très
nette : «Le programme Objectif
emploi offre aux personnes [...] un accompagnement personnalisé en vue d'une
intégration en emploi.» Ce n'est plus
un objectif, c'est une obligation. Je ne comprends pas, si le ministre
est convaincu des vertus qu'aura le programme Objectif emploi, qu'il
résiste tant à passer de l'expression «vise à offrir» au verbe «offrir»
lui-même.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Peu de choses à
ajouter. J'ai parlé avec les légistes, c'est une façon... Le projet de loi est souvent écrit de cette
façon-là. Ce qui est important, c'est qu'à 83.3, là, on retrouve les engagements,
là. «Vise à offrir», ça parle de l'ensemble du programme, ça le décrit,
et les préoccupations des collègues se retrouvent à 83.3.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Mais je veux, je veux vraiment comprendre, ici, pourquoi le ministre
tient tant à l'expression «vise à offrir».
Il me dit : Bon, ça apparaît régulièrement dans les projets de loi. C'est une expression consacrée,
dois-je comprendre. Mais il y a une
résistance quand même, là. On pourrait très bien écrire : «Le programme
Objectif emploi offre aux personnes [...]
un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi.» Pourquoi
n'accepterait-il pas cette formulation beaucoup plus claire et
engageante à notre point de vue?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Bien, parce qu'il faudrait... là, on me dit qu'il faudrait
juste modifier les articles 44, 67, 74, 80, là, où on utilise déjà ces expressions-là pour présenter le projet. Encore une fois, les engagements,
ils existent, ils sont à l'article 83.3.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Richelieu.
M.
Rochon : Mais, M. le Président, nous ne reculerons devant aucun amendement subséquent pour
rendre les textes de chacun des articles cohérents entre eux. On n'a pas
de problème.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais : Alors, tant mieux, la
cohérence est déjà là dans l'écriture. On va s'en tenir à ça.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Richelieu.
M.
Rochon : Je rappelle, et je
ne peux pas jouer le conseiller politique du ministre, il en a un sûrement fort brillant et articulé à ses côtés, mais je me permets de
signaler au ministre que les gens qui nous regardent seront
sceptiques, seront sceptiques qu'il
veuille que soit inscrit au projet de
loi «le programme
Objectif emploi vise à offrir» plutôt qu'«offre». Ils se demanderont qu'est-ce
qui se cache en dessous de cette résistance.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Bien, ils seront très heureux qu'on adopte 83.1 et qu'on aille
rapidement à 83.3. Je pense, nous aurons des réponses à leurs
préoccupations, si jamais elles existent.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Richelieu, ça va?
M. Rochon : ...
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Drummond—Bois-Francs?
M.
Schneeberger : Ça
va.
Le Président (M. Cousineau) :
Ça va? M. le député de Saint-Jean, il vous reste 5 min 25 s.
• (11 h 50) •
M.
Turcotte :
Merci, M. le Président. J'ai mentionné, depuis le début de la commission
parlementaire, deux aspects importants,
en termes avec... je parle, depuis ce matin, là, deux aspects
importants que le ministre et que le gouvernement ont comme obligation pour accompagner cette obligation
que le gouvernement transmet à la population et aux primodemandeurs.
Première obligation : d'avoir les services adéquats pour répondre aux besoins des gens. Le ministre
nous parle des carrefours jeunesse-emploi. Il nous parle des carrefours jeunesse-emploi. À
ma connaissance, les carrefours
jeunesse-emploi vont offrir ce
service d'accompagnement là uniquement aux jeunes, à moins que je ne me
trompe. Je ne pense pas que les gens
de plus de 30 ou 35 ans — je
ne sais jamais si je suis inclus ou pas dans la jeunesse, mais
peu importe, de plus de 30 ans, on va dire — vont pouvoir aller
dans un carrefour jeunesse-emploi, ça m'étonnerait.
L'entente qui
est signée avec les carrefours
jeunesse-emploi, ce n'est pas tous
les carrefours jeunesse-emploi...
bien entendu, un certain nombre qui n'ont pas encore signé. Mais, au-delà de ça — au-delà
de ça — le
projet de loi fait en
sorte que c'est les agents, dans les centres
locaux d'emploi, qui auront à offrir l'accompagnement voulu et qui prendront, en
bout de ligne, les décisions. Je
pourrais apporter des nuances ou des questionnements au ministre sur certains aspects
de : si la personne embarque
dans un tel parcours Objectif emploi, est-ce
qu'elle sera encore réputée comme
faisant partie du programme
d'aide sociale? Ce qui fait en sorte que, sur les
décisions prises et les sanctions prises dans le programme Objectif emploi, sur
l'allocation spéciale, sur le montant de base de l'allocation d'aide de dernier
recours, si cette personne-là va pouvoir
aller en appel de ces décisions-là ou d'aller en recours, hein, quand on sait très bien
que, lorsqu'il y a ce type de programme là et qu'il y a
des sanctions de prises, les gens n'ont pas de recours pour contester la
décision du programme
particulier... Ils ont une possibilité de le faire sur la prestation d'aide
sociale, mais pas sur le programme particulier.
Je l'ai dit
au ministre aussi, il
y a toute la question
de l'emploi. Puis, bon, on a ici un ancien membre de l'Assemblée nationale, Camil Bouchard, qui
a écrit un très beau texte, vendredi dernier, le 13 mai, qui parle justement
du ministre actuel : Les jeunes et l'effet libéral, donc le projet de loi
n° 70, bon, fait toute la
nomenclature de tout ça. On pourra y revenir plus longuement, sur le texte qui est proposé, mais un paragraphe très parlant, M. le Président, mentionne : «...l'approche punitive [du ministre] fait porter sur le dos des jeunes l'échec de ce gouvernement à leur offrir autre chose. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Chez les jeunes, en une seule
année — février
2014 à février 2015 — le taux
d'inscription à l'aide sociale a
bondi de 12,2 % alors que le taux général augmentait de 0,5 %. Les
belles années de développement économique promises par ce gouvernement se sont transformées en années
d'exclusion pour des milliers de jeunes. Le ministre veut maintenant les
punir pour cause d'incompétence économique de ce gouvernement.»
Des voix : ...
M.
Turcotte :
Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est... Puis je peux comprendre que certains
réagissent, là, ici, là, mais, je
l'ai dit tantôt, les chiffres sont têtus : depuis des années, le nombre de
jeunes à l'aide sociale diminue, à l'exception faite, à un moment précis, l'élection du gouvernement libéral, où,
depuis, le nombre de jeunes à l'aide sociale a recommencé à monter.
M. le
Président, je peux comprendre que le gouvernement veut régler ce problème-là,
mais je crois que ce n'est pas par
l'obligation ni encore moins les sanctions qu'on va pouvoir régler ce
problème-là. C'est pour ça que l'amendement qu'on propose d'«offrir», donc le mot «offre» plutôt que de «viser à
offrir», permettrait de démontrer que le gouvernement est sérieux dans
sa volonté d'appliquer correctement le programme Objectif emploi.
Moi, c'est ce que je pense, c'est ce
qu'on pense, certains. Bon, même nos collègues de la deuxième opposition
sont d'accord avec ça. Parce qu'il y a un
principe de base qui dit — le ministre en parle souvent : la réciprocité. Bon, mais,
si la réciprocité est vraiment importante
pour le ministre, qu'il le démontre dans l'action. Et, s'il oblige les nouveaux
prestataires d'aide sociale, bien, qu'il oblige son propre gouvernement
à offrir les services à la population.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement déposé par M.
le député de Saint-Jean?
M. Blais :
...M. le Président, si vous voulez? Juste...
Le Président (M.
Cousineau) : Oui, une petite remarque.
M.
Blais : J'ai connu M. Bouchard à une époque où il avait peut-être un
peu plus de rigueur, hein? Je ne sais pas si c'est son passage en
politique qui a modifié les choses.
Donc,
depuis deux ans, il y a eu une diminution non négligeable, là, de personnes à
l'aide sociale et des jeunes à l'aide
sociale. Donc, ce qui se passe, c'est que, comme on a mis fin au programme
Alternative jeunesse — c'est bien ça? il ne faut pas que je me trompe, là — il y
a un soubresaut aux statistiques, parce qu'Alternative jeunesse n'était pas considéré comme un programme d'aide sociale — c'est un programme d'aide sociale, mais
particulier — et là,
maintenant, ils font partie du bassin de l'ensemble des jeunes à l'aide
sociale. Alors, si on compare ce qui doit être comparé, c'est l'ensemble des jeunes
à l'aide sociale il y a deux ans et aujourd'hui, il y a une diminution de...
Une
voix : ...
M.
Blais : ...2,9 %, depuis les deux dernières années. Vous
connaissez bien M. Bouchard, vous trouverez l'occasion de lui dire, j'en
suis sûr.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions sur... M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui. Comment appelle-t-on ça, en psychologie, ce que vient de faire le
ministre? Je pense, c'est de la projection,
qu'on appelle ça? M. Bouchard, dont l'opinion ou les opinions seraient
affectées par un passage en politique... C'est amusant, parce que je vous citais tout à l'heure... je citais cet
extrait de votre fort intéressant ouvrage, Un revenu garanti pour tous,
et vous écriviez précisément : «Il apparaît difficile de compter
uniquement sur la classe politique pour mener de tels débats de fond puisqu'elle demeure soumise à la logique
électoraliste qui n'accepte généralement d'elle que la formulation de
slogans.» M. Bouchard a quitté la politique; vous y êtes, M. le ministre.
Et
je reviens à l'amendement, là, ce que la rigueur m'impose de faire, puisque
nous étudions un amendement bien précis sur lequel nous aurons à voter.
Là, je suis à examiner les différentes raisons pour lesquelles vous ne voulez
pas souscrire à l'idée d'utiliser clairement
le verbe «offrir» et que vous lui préférez l'expression «vise à offrir». Ce
n'est pas anodin, M. le ministre. Et
je ne fais pas ça pour vous lasser ou être déplaisant, je voudrais vous voir
vous commettre, avec assurance et
fermeté, derrière ce programme Objectif emploi que vous avez développé, que
vous voulez rendre obligatoire pour
les primodemandeurs, les premiers demandeurs. S'ils ne s'inscrivent pas dans
les parcours que le programme suppose, ils
n'auront pas d'allocation, de prestation. Ça peut les conduire dans la rue,
dans le cercle tragique de l'itinérance, beaucoup d'experts l'ont dit.
Alors,
ça m'effraie de ne pas vous sentir plus convaincu des vertus du programme
Objectif emploi, de même refuser d'utiliser
le libellé «ce programme offre — offre — un accompagnement personnalisé». Vous
restreindre à «vise à offrir», ça m'inquiète.
Je disais tantôt les inquiétudes de la Protectrice du citoyen; vous les
nourrissez drôlement, il me semble, là, en tout respect, là, ce matin.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu.
Alors, écoutez,
compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux.
(Suspension de la séance à
11 h 59)
(Reprise à 15 h 31)
Le Président (M. Cousineau) :À l'ordre, s'il vous
plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Je
vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi
visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.
Lors de la suspension
de nos travaux, nous avions débuté l'étude de l'amendement du député de Saint-Jean
à l'article 83.1 proposé par l'article 28. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Avant, est-ce qu'il y
a des modifications, Mme la secrétaire?
La Secrétaire : ...
Le Président (M.
Cousineau) : D'accord. Alors, pour le temps restant sur
l'amendement de M. le député de Saint-Jean,
M. le député de Saint-Jean, vous avez écoulé votre temps sur votre amendement.
M. le député de Richelieu, il vous
reste 11 min 20 s, M. le député de Drummond—Bois-Francs, il vous reste
18 min 40 s, et évidemment, Mme la députée de Gouin, vous
avez 20 minutes.
Donc, je suis prêt à prendre une première
intervention sur l'amendement de M. le député de Saint-Jean : Remplacer, à
83.1, «vise à offrir» par «offre». Je cède la parole à Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Alors, j'imagine que, sans surprise
pour le ministre, je vais indiquer que
je vais appuyer l'amendement du député de Saint-Jean, mais je vais expliquer
pourquoi. En fait, j'appuie cet amendement tout simplement parce qu'il
me paraît juste et raisonnable.
Nous avons
devant nous un projet de loi qui veut obliger des prestataires à s'inscrire
dans un programme x, y ou z, là,
d'insertion en emploi ou de formation, etc., sous peine de se voir retirer une
partie de leurs prestations s'ils soit ne participent pas ou soit, en cours de route, pour une raison ou
pour une autre, là, ont des manquements, comme dit le ministre, à leur
participation.
Le ministre
sait à quel point je suis et nous sommes, dans ma formation politique,
profondément allergiques à cette
notion. Mais, une fois cela dit, il nous semble que la moindre des choses,
c'est que, si on crée une obligation pour l'une des parties en cause, il faut en créer une pour l'autre partie en
cause, qui s'appelle l'État ou le ministère Emploi, Solidarité sociale.
C'est une sorte de justice élémentaire, à mon avis.
Le ministre
nous a beaucoup parlé, depuis le début de toutes ces discussions que nous avons
là — nous les
avions déjà au moment de la
commission parlementaire et nous les avons maintenant en étude détaillée — il nous a beaucoup parlé de contrat
moral, de réciprocité, bon, hein, toutes ces choses. Où est le contrat moral si
le gouvernement ou le ministère n'est pas
véritablement tenu d'offrir? Et celui qui n'est pas tenu d'offrir, c'est celui
qui a le pouvoir d'offrir, c'est celui qui a l'argent, c'est celui qui a
les moyens d'y travailler.
Donc, «vise à
offrir», là, c'est faible. C'est vraiment faible. Et nous avons des attentes
bien plus élevées face au ministère
Emploi, Solidarité sociale. Puis-je rappeler, peut-être pour la 30e fois, que
les gens dont nous parlons ici sont des
personnes vivant dans la pauvreté, dont le revenu annuel est la moitié de ce
qu'il en faut pour couvrir tout simplement des besoins essentiels? La moitié. Et là le gouvernement, pour
gagner, là, pour avoir droit à cette maigre moitié, veut leur imposer de participer à des programmes avec toutes
sortes de règles, mais lui, il ne s'impose pas de règle. Bien, moi, je trouve ça tout simplement injuste. Je ne comprends
pas, et il me semble que ça ne serait pas très compliqué de changer un vocabulaire qui n'est pas adéquat. Alors,
j'aimerais bien comprendre pourquoi le ministre résiste à appuyer ou à adopter,
ou enfin à recevoir positivement cet amendement.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.
M.
Blais : Pour nous, là, avant tout, je l'ai déjà mentionné, là, c'est
une question de cohérence au niveau de la rédaction de la loi. Il y a plusieurs articles où on l'écrit de cette
façon-là. Je rappelle, là, qu'en 83 on retrouve quand même les engagements, et je rappelle aussi que, pour la
première fois, je crois, là, il y a vraiment un contrat qui est signé, là,
dans le cadre d'Objectif emploi, entre le
ministère et le participant; et les obligations, là, du ministère, là, sont
décrites. Ce qui fait en sorte de
protéger, je pense, ce que cherche la collègue, là, protéger, là, la personne,
en disant : Écoutez, nous, nous
allons vous offrir un accompagnement personnalisé qui correspond à vos
perspectives, bien entendu, et mettre à la disposition les ressources nécessaires. Donc, on a exactement les mêmes
préoccupations. Il s'agit, encore une fois, d'une question de cohérence
dans la façon dont on écrit la loi.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : J'entends bien ce
que dit le ministre, M. le Président,
mais ça ne m'explique toujours pas pourquoi
le ministre refuse une formulation, en somme, qui serait tout simplement un peu
plus contraignante pour le ministre... en
fait, pour le ministère, soyons plus clairs, là, pour un ministère qui dit
vouloir absolument, bon, offrir justement aux gens, là, un
accompagnement personnalisé.
Dans ma tête
à moi, ça, ça veut dire que ce ministère se crée une obligation, et là il y a
une obligation pas seulement de
résultat, il y a une obligation d'offre, c'est-à-dire qu'il doit y avoir cet
accompagnement, il doit y avoir des agents d'aide sociale disponibles ou des agents du centre local
d'emploi, en somme, là, disponibles pour rencontrer les prestataires, pas
juste pour avoir une brève conversation
téléphonique, là. Il faut être sérieux si on fait une évaluation de la
situation d'une personne, on la rencontre. Alors, ça veut dire... Le
ministre disait, l'autre jour : Ce n'est pas trop compliqué parce qu'il n'y aura pas tant de gens que ça par centre
local d'emploi. Moi, je veux bien, mais, à ce moment-là, justement, créons
une obligation pour le ministère et écrivons
«offre» parce que ça va vouloir dire que, dès qu'une personne va vouloir avoir
une prestation à la sécurité du revenu, oui,
il y a quelqu'un, quelqu'une qui va la rencontrer. Tu sais, il va y avoir une
offre. Ça va être clair. Les
sanctions sont une autre chose, mais l'offre, elle, elle va être claire, et
moi, je trouve que la cohérence, justement,
c'est d'adopter un vocabulaire contraignant pour la partie qui a le plus de
pouvoir, en fait, qui a tous les pouvoirs, soyons assez clairs.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Non, ça va, M. le
Président.
Le Président (M.
Cousineau) : Ça va, M. le ministre?
M. Blais : Je pense qu'on l'a déjà
dit et redit, là.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la députée de Gouin, avez-vous autre chose à rajouter?
Mme David (Gouin) : Oui, M. le
Président. Mais là...
Le Président (M. Cousineau) :
C'est votre temps.
• (15 h 40) •
Mme David
(Gouin) : Oui, oui, je sais que c'est mon temps de parole, donc, je le
prends. Mais écoutez,
M. le Président, c'est parce que
je n'entends aucun argument. Je
comprends que peut-être il y en a eu quelques-uns? Il n'y en
a pas, O.K. Donc, il n'y a pas eu vraiment
d'argument, alors j'attends toujours les arguments, là, si on veut avoir, ici,
une discussion intéressante, disons.
Et ça vise à faire ça, une étude détaillée, je pense; bien, il me semble qu'il
faut que, de part et d'autre, il y
ait un dialogue, là. Alors, moi, j'essaie encore de comprendre le
positionnement du ministre, là. Je ne doute
pas de la bonne foi du ministre lorsqu'il dit : Oui, oui, nous offrirons
un accompagnement personnalisé. Mais, à ce moment-là, qu'il l'écrive. Qu'il dise : «Le programme Objectif emploi offre aux personnes...» Il y a
une obligation, ici, là. Pourquoi
l'obligation, elle serait toujours pour les mêmes,
hein, pour les sans-grade et les sans-voix? Pourquoi ce seraient elles
et eux qui auraient toutes les obligations, mais pas le ministère? C'est la question
que je pose, en fait, là.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.
M.
Blais : Écoutez,
c'est vraiment une question d'écriture juridique, là. On me dit et on
réitère, là, qu'à chaque fois qu'une
loi crée un programme, là, on crée une obligation aussi, pour le
ministre, de mettre sur pied et de respecter les paramètres qui sont à l'intérieur de la loi ou à l'intérieur des règlements,
hein? Nous devrons préparer un plan pour chacun des participants. Ce plan doit comporter des mesures, des activités,
il doit donner l'aide financière prévue. Donc, je pense que la loi est
correctement rédigée. On l'a vu pour d'autres articles, elle est rédigée de
cette façon-là. C'est une question de cohérence, simplement.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui. Le ministre s'aperçoit bien, et les gens qui
nous regardent de même, que nous partageons tous, de ce côté de la table, l'opposition officielle, la
deuxième opposition, Québec solidaire, le même point
de vue exactement que le ministre qui
pose des obligations aux primodemandeurs, aux nouveaux demandeurs de prestation
d'aide sociale, il ne pose pas beaucoup d'obligations à lui-même.
«Le programme
Objectif emploi — je
rappelle le texte — vise
à offrir aux personnes [...] un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi.» Viser : encore une fois, ça témoigne d'un objectif, ça ne pose pas une obligation comme poserait une rédaction allant
dans le sens de «offre — le
programme Objectif emploi — aux
personnes [...] un accompagnement personnalisé», etc.
Le ministre
exprime un souci de cohérence. Moi, en tout respect, je souhaite exprimer que
lui n'en montre pas avec sa
conviction que ce programme accompagnera en effet, de façon
personnalisée, les gens qui auront l'obligation de s'y inscrire — en
tout cas, ce sera le cas des premiers demandeurs — en vue d'une
intégration en emploi.
Nous avons,
de ce côté-ci, des doutes sur ce programme.
Je faisais parler, un peu plus tôt, la Protectrice
du citoyen, qui en avait aussi, qui a
exprimé de «sérieuses réserves» à
l'égard du projet de loi n° 70, qui disait se croiser les doigts afin que «les personnes qui seront admises au programme
Objectif emploi seront véritablement aidées et, à terme,
qu'elles ne seront pas victimes
d'exclusion, voire menacées de dénuement total». Pas sûr qu'elle va être
rassurée d'entendre le ministre ne pas préciser ce qu'il y a à préciser
à l'article 83.1.
Il devrait
accepter puisque c'est sa conviction que ce programme constituera un
accompagnement personnalisé qui permettra d'intégrer en emploi les
demandeurs. Il devrait préciser qu'il offre cela aux personnes, qu'il ne vise
pas seulement à l'offrir, qu'il l'offre.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.
M. Blais : Non, non, ça va.
Le Président (M. Cousineau) :
Ça va.
M.
Blais : On a une lecture
différente du projet de loi, de cet article-là, mais, pour nous, c'est clair
que ça crée une obligation...
Le Président (M. Cousineau) :
D'accord. D'autres interventions...
M.
Blais : ...à l'endroit du gouvernement. Puis je voudrais peut-être rappeler aux collègues que les obligations
sont nombreuses, c'est un programme qui est assez dispendieux parce qu'il
augmente, de façon non négligeable, les bonifications, là, pour ces personnes-là, fait en
sorte aussi que des ressources soient disponibles, là, pour les aider. Donc, ce
qu'on me dit, c'est clairement que les obligations sont exprimées ici comme
elles sont exprimées dans plusieurs projets de loi de cette façon-là.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. M. le député de Richelieu.
M.
Rochon : Cette réponse,
peut-être suis-je difficile à satisfaire, mais elle ne me satisfait pas, M. le
Président, et je doute qu'elle
satisfasse mes collègues. Ça me semble
un peu léger, alors, souci de cohérence, avec le texte, ça, c'est du langage juridique. Ça ne me
convainc pas. Et, s'il faut, plus tard, amender les textes des articles
suivants en vue de les rendre
cohérents et bien adaptés à l'article 83.1, nous le ferons, hein? Nous ne baissons les
bras devant aucun effort utile pour améliorer ce projet de loi, qui a
grand besoin d'être amélioré.
J'ai le goût
de citer Camil Bouchard, auquel on a donné la parole un peu plus tôt, en lisant des extraits d'un texte publié le 13 mai. «Le projet
de loi piloté par [le ministre] va exactement dans le sens contraire. Il punit
celles et ceux qui parmi nos jeunes font déjà, depuis longtemps pour nombre
d'entre eux, les frais de l'échec de nos institutions ou [du milieu] de vie dans lesquels ils sont nés. Ce projet [de loi] prévoit que des jeunes qui s'inscrivent à l'aide sociale pour la première fois se verront offrir un parcours d'insertion
à l'emploi associé à une prime. En cas de refus du jeune, cette prime sera réduite; des refus répétés
mèneront même à une diminution de la prestation de base. Cette seule idée de
réduire un montant d'aide qui est déjà
largement famélique — ma
collègue de Gouin en parlait — est indécente et immorale.»
Ce sont les
mots de Camil Bouchard. Et c'est plus indécent et immoral qu'il ne le croit,
puisque le sentiment de M. Bouchard est à l'effet, dans le cas des
premiers demandeurs, qu'ils verront leur prime réduite. Or, ce n'est pas ça, ils n'auront pas du tout d'allocation. Ils n'en
auront pas, de prestation, si les primodemandeurs... S'ils ne souscrivent pas à
l'idée de s'inscrire aux trois parcours
qu'offre le programme, ils n'auront pas de chèque de prestation. M. Bouchard
n'est pas au courant de ça. Il trouve déjà, lui — là,
je le cite, là — le
projet de loi indécent et immoral.
«Qui plus est — ajoute t-il — l'approche
punitive [du ministre] fait porter sur le dos des jeunes l'échec de ce gouvernement à leur offrir autre chose. Les
chiffres parlent d'eux-mêmes. Chez les jeunes, en une seule année[...], le taux
d'inscription à l'aide sociale a bondi de 12,2 % alors que le taux
général augmentait de 0,5 %. Les belles années de développement économique promises par ce gouvernement se sont
transformées en années d'exclusion pour des milliers de jeunes. Le ministre veut maintenant les punir
pour cause d'incompétence économique de son gouvernement.» C'est
l'opinion de M. Bouchard.
Cela dit,
nous sommes quelques-uns, au Québec, à la partager et à trouver, pour cela
effectivement, bien injuste ce
resserrement des règles pour les premiers demandeurs de prestations d'aide sociale.
Alors, imaginez notre consternation de
voir, en plus de tout cela, le ministre refuser que soit libellé l'article 83.1
de façon à ce que le programme Objectif emploi ne fasse pas que viser offrir, mais «offre aux personnes [...] un
accompagnement personnalisé en vue d'une intégration à l'emploi».
Bon, je ne
plaiderai pas éternellement, je vois que le ministre semble inébranlable, mais
je veux dire combien je ne comprends
pas ce blocage cet après-midi. Il professe, depuis des semaines, les... sur les
vertus du programme qu'il proposera aux
gens qui reçoivent des prestations d'aide sociale ou qui en requièrent pour une
première fois. Je trouve qu'il paraît ne
pas y croire beaucoup lui-même en établissant non pas un objectif ou des
objectifs, mais en posant à son gouvernement une obligation de résultat
à travers ce programme-là.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.
• (15 h 50) •
M.
Blais : Bon, écoutez, je pense que le désaccord n'est pas un désaccord
de fond, c'est une façon de rédiger la loi, là. On me montrait d'autres
segments de la loi générale sur l'aide aux personnes et aux familles. On
utilise cette expression-là. On me dit, derrière, parce que je pense que c'est
vraiment ce qui vous préoccupe le plus, là, que cette formulation-là, elle a été juridiquement testée et elle accorde un droit
aux prestataires, elle accorde un droit de se plaindre et de, à la limite, poursuivre, là, si des
mesures, etc., ne sont pas
disponibles. Donc, cette formulation-là a déjà été testée. Et le
droit, vraiment, ou l'obligation de réciprocité, elle est créée de lege, là,
par la formulation.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Rimouski.
M. Rochon : Oui, M. le Président. Il
y a, dans ma propre...
Le Président (M. Cousineau) :
De Richelieu, excusez-moi.
M. Rochon : Vous avez dit «de Rimouski»,
hein?
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, oui, voilà!
M.
Rochon : J'ai une parenté
d'esprit avec lui. C'est un honneur que vous me compariez au député de
Rimouski, qui
s'est intéressé d'ailleurs lui-même à un revenu minimal garanti, hein, comme le ministre,
qui semble l'avoir oublié.
Dans...
J'allais dire : Dans ma circonscription, M. le
Président, on a éloigné les
prestataires d'aide sociale de leur agent : parce qu'il y a des agents qui ne
travaillent plus, là, désormais à Sorel-Tracy, mais qui ont été relocalisés
plus loin. Et j'ai sous les yeux,
ici, un communiqué de presse du Regroupement des organismes communautaires
autonomes jeunesse du Québec, en date du 22
février, qui dit : Le Regroupement des organismes communautaires
autonomes jeunesse du Québec exige du ministre François Blais qu'il respecte sa
parole.
«Lors de son
audition en commission parlementaire dans le cadre du projet [...] 70, le
regroupement s'est dit inquiet face à
la disparition d'Emploi-Québec, à la diminution des points de services et à la
perte de l'expertise du gouvernement en matière d'employabilité.
«Le ministre
de l'Emploi et de la Solidarité sociale a affirmé catégoriquement que ces
inquiétudes n'étaient pas justifiées.
Or, nous apprenons cette semaine la fermeture des centres locaux d'emploi de
Châteauguay, de Saint-Rémi et de Contrecoeur et que ceux de Granby et
Boucherville le seront sous peu.
«Les impacts
sur la population seront nombreux [...] dans un contexte où, tel que décrit
dans le projet de loi 70, il est préconisé un accompagnement
personnalisé pour tous les premiers demandeurs.
«Le
[regroupement] exige du ministre de la constance et rappelle que l'homme n'est
pas jugé sur ses paroles, mais bien sur ses actes.»
Est-ce pour
cela, M. le Président, pour les situations décrites dans ce communiqué et
celles que j'ai moi-même décrites,
que le ministre refuse, quant à l'article 83.1, qu'il soit lu que : «Le
programme Objectif emploi offre aux personnes [...] un accompagnement personnalisé en vue de leur intégration en
emploi» et préfère simplement énoncer un objectif dont il sait très bien
qu'il pourrait ne pas être atteint?
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.
M.
Blais : Je comprends que le collègue est préoccupé d'une réciprocité
d'obligation. Et puis on me confirme encore une fois que la formulation,
là, crée l'obligation, là, du ministère à l'endroit de la clientèle.
Le
Président (M. Cousineau) : M. le député de Richelieu, il vous
reste deux minutes. Peut-être tantôt. M. le député de, par alternance,
de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Oui,
ça va pour moi.
Le Président (M. Cousineau) :
Ça va pour vous. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. J'ai écouté attentivement
l'échange qui vient d'avoir lieu. Je comprends
que le ministre dit : Juridiquement, on est blindés, on est sûrs. Mais
j'aimerais simplement lui signaler que, juridiquement, je suis pas mal certaine, même si je ne suis pas
professionnellement une avocate, là, qu'«offre» plutôt que «vise à offrir»,
là, c'est sûrement bon aussi. Je ne pense pas que les juristes de l'Assemblée
nationale trouveraient grand-chose à y redire. Et, dans le fond, si ça plaçait
l'idée de façon encore plus péremptoire et claire, pourquoi pas?
Je voudrais
mentionner, à la suite de ce que mon collègue vient de dire, encore une fois
qu'on parle de quelque chose
d'important ici. Je pense que tout le monde en est conscient, là, on parle de
l'obligation que l'État doit se donner d'offrir
réellement à des gens démunis, dans le besoin, des gens qui vivent des
difficultés, toute une démarche — et ça, c'est en partenariat, je l'ai bien compris, avec d'autres organismes,
là — qui, à
un moment donné, pourrait leur permettre de sortir de la pauvreté.
Aux exemples que le collègue vient de
mentionner, je vais ajouter quelque chose que j'ai écouté hier soir. Peut-être que d'autres collègues ici, dans la
salle, l'ont écouté aussi. Moi, je peux vous dire, en tout cas, que ça m'a
troublée profondément. C'est au Téléjournal
de Radio-Canada, un reportage, ma foi, fort bien ficelé, trois femmes, en
Gaspésie, victimes de l'austérité
libérale, de toutes les coupes qu'on peut vivre dans la santé et les services
sociaux. Mais ce qui les caractérisait aussi, ces trois femmes, c'est
d'être toutes les trois à l'aide sociale.
Je sais bien,
le ministre va me dire : Bien, ce n'est pas des primodemandeurs. Non. Mais
c'est important de comprendre
qu'est-ce que les gens vivent. Il y en a une d'entre elles d'ailleurs qui, en
ce moment, n'est pas à l'aide sociale parce qu'elle travaille dans un
groupe communautaire avec une subvention salariale de... voyons! du centre
local d'emploi. Le jour où elle n'a plus cette subvention salariale et où
elle épuise ses maigres prestations d'assurance-emploi,
elle va retomber à l'aide sociale. Là, je ne sais pas si elle va redevenir primodemandeur, d'ailleurs. Ça, c'est une question, en passant, là.
Mais, moi, ce
qui m'a frappée dans ce reportage-là, c'est deux choses. La première, c'est la
pauvreté indécente dans laquelle
vivent ces personnes. Franchement, là, je
pense qu'il n'y a personne ici, dans
cette salle, qui... Vous pouvez aller le regarder sur Tou.tv, lereportage,
là, il n'y a personne qui peut rester insensible à ce que
vivent ces trois femmes.
La deuxième
chose qui m'a frappée, c'est que deux d'entre elles étaient en attente de
services. Et voilà le lien que je
fais avec la notion d'obligation. L'une d'entre elles avait un urgent besoin de
voir un psychologue parce qu'elle est en dépression
suite à des épisodes de violence conjugale. Essayez de voir un psychologue
gratis, dans les services publics, pour le fun. Combien de temps ça
prend? Six mois, un an? Ça n'a aucun sens.
Et l'autre
attendait, au moment du reportage, de
voir un travailleur social ou une travailleuse sociale. À la fin du reportage, on nous annonçait, grâce au reportage, peut-être, d'ailleurs — c'est fou tout ce que les gens arrivent à
faire quand ils passent dans les médias, hein — que
là, finalement, elle allait voir une travailleuse sociale. Bon!
Mais c'est
ça, la vraie situation, là, M. le Président. Je ne l'invente pas, là. La vraie
situation, que l'on soit jeune ou
moins jeune, si on a besoin de l'aide sociale, on peut avoir besoin de voir un
psy, une travailleuse sociale, on peut avoir besoin... tiens, de voir juste un médecin de famille. C'est la croix et
la bannière. Pendant ce temps-là, il se passe quoi, au fait? Est-ce que l'État a une obligation
quelconque? Avant de faire un programme avec ces gens-là, est-ce que la
première chose
qu'on va faire c'est de leur trouver un psy? Ça serait intéressant... Gratuit,
parce qu'il ne faut pas s'imaginer qu'avec 623 $ par mois on se
paie un psychologue, là.
Donc, c'est
de ça qu'on parle ici, hein? Je trouve ça toujours important de rappeler qu'on
n'est vraiment pas dans une
discussion bureaucratique, on est, en ce moment, dans une discussion qui touche
des êtres humains. Et donc il y a quelque
chose qui me frappe. Le collègue qui m'accompagne m'a ramenée à la loi
n° 112, la loi-cadre adoptée unanimement,
en 2002, par l'Assemblée nationale. Il y a un article intéressant qui dit que,
«dans le cadre de l'orientation visant à favoriser l'accès à un emploi
et à valoriser le travail, le gouvernement doit — doit — se
concerter avec ses différents partenaires du
marché du travail et les organismes communautaires». Il doit se concerter. Je
trouve ça intéressant, moi. On a
adopté ça, il y a quoi, 14 ans, à l'unanimité. On n'était pas tous là, bien
entendu, mais il y avait un certain nombre de partis présents ici qui étaient là à l'époque. Moi, je n'ai pas vu
les programmes changer beaucoup, donc j'en conclus que le Parti libéral
est censément d'accord avec ce que je viens de lire.
Hein, le
gouvernement doit se concerter afin notamment «d'intensifier l'aide à l'emploi
pour mieux soutenir les collectivités
dans leurs efforts de développement d'emplois». Le collègue vient de parler du
taux de chômage chez les jeunes. Il
va quand même falloir s'y atteler, là, parce que c'est vrai qu'il est plus
élevé que pour les adultes. Et là on n'a pas parlé des jeunes migrants, on n'a pas parlé des jeunes noirs de
Montréal. Vous pouvez l'augmenter, le taux de chômage, là, il est plus qu'à 12 %. Donc, peut-être
qu'il faudrait s'occuper de ça. C'est ce que la loi-cadre nous demande de faire.
Le gouvernement doit le faire «particulièrement dans les territoires à
concentration de pauvreté», etc.
Le gouvernement doit «favoriser une approche
centrée sur la prise en charge par le milieu et l'intégration du développement
social et économique». Intéressant. Il doit «favoriser, dans les milieux de
travail, l'insertion sociale et professionnelle
des personnes qui ont [une difficulté particulière] d'intégration en emploi,
notamment celles qui présentent une déficience ou une incapacité». Il
doit.
Les mots
ont un sens. Quand on doit, bien, on ne coupe pas les subventions salariales
aux entreprises qui embauchent des personnes handicapées. On ne fait pas
ça, on n'a pas le droit de faire ça puisque la loi-cadre nous l'interdit.
Finalement,
le gouvernement doit «améliorer la qualité des emplois afin que les personnes
qui travaillent puissent disposer
d'un revenu permettant un niveau de vie décent — ça nous dit des choses sur le salaire
minimum, ça —compte tenu des revenus de l'ensemble des travailleurs
québécois, d'une meilleure protection de l'emploi à l'égard des risques
d'exclusion, de même que de mesures permettant de mieux concilier la famille et
le travail». Autre sujet extrêmement intéressant.
• (16 heures) •
Autrement
dit, en 2002, de façon exemplaire, cette Assemblée nationale a voté à l'unanimité une loi qui donne des obligations à l'État. Je dirais, par une observation d'assez près
depuis ce temps-là, que les gouvernements — mais ce sont surtout les libéraux qui ont gouverné — ont plus ou moins respecté cette loi. Dans
certains cas, oui, dans d'autres cas, non.
Mais on se
retrouve, en 2016, avec un gouvernement qui fait face au chômage chez les
jeunes, et particulièrement pour
certaines catégories de jeunes et
dans certaines régions, par une loi créant des obligations de parcours — on
appelait ça comme ça à l'époque, là,
mais c'est encore ça — des obligations de parcours, sous peine de
sanctions. Mais le même gouvernement
plaide des arguments juridiques pour nous dire : Moi, là, je pense que je
suis obligé, je pense que c'est ce que
mon texte veut dire, mais je refuse de l'écrire aussi clairement que le
voudraient les oppositions. M. le Président, je trouve ça un peu spécial. Il me semble que ça ne serait pas très
compliqué d'écrire «offre». On peut l'écrire dans cet article-là et, comme le disait le collègue, s'il faut changer d'autres articles
pour être cohérents, on changera les autres articles, on parle ici
de quelques mots.
Mais le plus
important pour moi, c'est l'esprit. Est-ce
que, oui ou non, ce gouvernement a l'intention de se créer des
obligations face aux jeunes et aux moins jeunes qui ont la
malchance de tomber, comme on dit souvent, là, tomber sur le BS, là, de tomber à l'aide sociale et de, oui, vouloir s'en
sortir, là, mais en mettant toutes les chances de son côté puis en ayant une aide véritable de la part du
gouvernement? Ce qui n'est pas seulement le programme Objectif emploi,
ce qui doit absolument inclure des soutiens
professionnels soit sur le plan social, sur le plan psychologique, sur le plan
médical, parce que bon nombre de ces
personnes-là vivent dans des situations de détresse psychologique, d'isolement
social ou de problèmes physiques qui ne les
empêchent pas complètement d'aller vers l'emploi, mais qui temporairement
peuvent leur créer des problèmes importants.
Et je ne sais pas où est-ce qu'elle est, moi, l'obligation, dans... oui, c'est
ça, où est-ce qu'elle est,
l'obligation, dans le programme Objectif emploi, d'offrir tous ces services
véritablement. Je cherche
encore, dans ce projet de loi, où est-ce qu'il y a cette obligation.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre, voulez-vous réagir?
M.
Blais : Bien, écoutez, je
pense qu'il faut respecter à la fois l'esprit et la lettre, là, et c'est pour ça qu'on
ne modifiera pas, là... en tout cas, on ne peut pas modifier, parce
qu'on me dit, encore une fois, derrière, que l'obligation — puis je pense que c'est ce que recherche tout le monde ici, là, de tous les côtés,
là — l'obligation,
elle est créée par cette formule-là, comme elle est créée dans d'autres
lois.
Cependant, un
commentaire. Il faut faire bien attention. J'écoutais attentivement la collègue
et puis il faut faire très attention, c'est-à-dire le... Il n'y a pas,
par exemple, de programme d'accès universel à la psychologie privée, hein? Les thérapies de psychologie privée au Québec,
ça n'existe pas. Peut-être un jour on verra ça, je ne sais trop. Donc,
il faut faire attention quand on prend des
cas, on dit : Bon, cette personne-là n'a pas accès à un psychologue privé.
Il y a beaucoup de gens à
faibles revenus, etc., qui n'ont pas
accès. Donc, on ne se donne pas l'obligation de tous les services que l'on peut imaginer, qui seraient une bonne
chose, mais qui ne sont pas disponibles, hein, pour la population.
Bien sûr, c'est
les ressources qui sont à notre disposition, à la
fois dans le milieu de l'éducation — et là je peux vous dire qu'elles sont nombreuses — à la fois dans le milieu de la santé et des
services sociaux, à la fois dans les milieux communautaires, c'est ça
dont on parle, et, bien sûr, les agents à l'aide sociale.
Bien
comprendre aussi, là, que — je le réitère, là, toujours — il s'agit des premiers demandeurs à l'aide sociale. Pour vous donner une idée du problème que nous
avons au Québec, puis c'est
véritablement un problème — là, je prends les moins
de 25 ans — chez les
moins de 25 ans, il y a à peu près 35 % seulement des premiers demandeurs
de moins de 25 ans qui... non, des
jeunes à l'aide sociale de moins de 25 ans qui participent à des mesures. Ça ne
veut pas dire qu'ils vont jusqu'au
bout de la mesure, mais qu'ils sont allés au moins à une rencontre, je crois,
ou deux... Un participant, c'est une ou deux rencontres, je crois,
quelque chose comme ça. On me corrige, c'est 32 % seulement.
Sur ce
groupe-là, il y en a seulement un tiers qui vont se rendre en fin de parcours,
qui vont terminer le parcours. Ça, ça
veut dire, M. le Président, que, pour nos jeunes de moins de 25 ans, pour qui
c'est crucial, hein, de développer, là, leur capital humain, leur capacité d'augmenter leur liberté, hein, mais
la liberté réelle, bien sûr, ça nous fait
un maigre 14 % de ces jeunes-là qui vont s'inscrire dans
une mesure et qui vont terminer la mesure, et c'est ça, le problème que nous
avons. Le problème le plus important que nous avons, ce n'est pas qu'il manque
des mesures, le problème le plus important
que nous avons, c'est que malheureusement les gens abandonnent beaucoup trop
rapidement puis ils ont besoin d'un
incitant supplémentaire, notamment, là, financier, mais aussi un rappel, hein,
de leurs obligations pour qu'ils aillent le plus loin possible dans ces mesures-là et qu'ensuite ils peuvent
éventuellement sortir de l'aide sociale et commencer une vie, là,
différente.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) : Il me reste
combien de temps, M. le Président, s'il vous plaît?
Le Président (M. Cousineau) :
Il vous reste cinq minutes.
Mme David (Gouin) : Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Je crois qu'on vous a envoyé un petit papier, là.
Mme David (Gouin) : Oui.
Une voix : ...
Le Président (M. Cousineau) :
3 min 30 s, qu'on me dit. 3 min 30 s, excusez-moi.
Mme David (Gouin) : Il me semblait.
Je voudrais d'abord rappeler au ministre que, mettons, là, pour un primodemandeur, quel que soit son âge, si cette
personne pense sincèrement qu'elle est dans une situation de détresse psychologique qui l'empêche de participer à un
programme, il va falloir qu'elle en discute avec son agent. Si cette personne,
par manque de ressources, ne peut faire attester cette situation par un
psychologue ou une travailleuse sociale — un médecin, ça, c'est si on a la chance d'en voir un, là — je ne sais pas, moi, comment cette
personne-là va pouvoir plaider qu'elle est dans une situation qui l'empêche de
participer à un programme, et c'est là où l'État a une obligation. Quant
à moi, l'État devrait fournir des services
psychologiques bien plus importants dans les services publics que ce qu'on
connaît en ce moment parce que ce
sont effectivement des services, pour le moment, qui sont réservés soit aux
gens qui disposent d'assurances
collectives ou soit aux gens qui ont des revenus assez élevés pour s'en payer,
là; la vraie situation, c'est ça. Mais
je rappelle que là, là, on est dans un projet de loi qui crée des obligations
et des sanctions. Alors, ça veut dire que, de l'autre côté, il faut se
créer des obligations aussi, parce que sinon, on est complètement dans
l'injustice.
Deuxièmement... je
vais manquer de temps, c'est clair, mais je voudrais juste rappeler au ministre
qui vient de nous parler de la
situation des 18-25 ans que je ne doute pas de ses chiffres, mais la question à
laquelle malheureusement le ministre
ou le ministère ne répond jamais, c'est : Pourquoi? C'est la seule
question importante : Pourquoi seulement 32 % des jeunes participent à des mesures? Est-ce que c'est parce
que le reste, là, c'est-à-dire les deux tiers des jeunes, sont, quoi, paresseux, innocents? Enfin, je ne
sais pas, moi. Ils ont quoi, ce deux tiers des jeunes qui ne veulent pas
participer à un programme, là? C'est
de la mauvaise volonté? C'est quoi? Puis il n'y a que la menace d'une sanction
financière qui va les amener à
participer? Je trouve ça incroyable, moi. Les deux tiers? Alors, le chiffre est
probablement exact, là, mais on n'a
aucune étude qui est mise sur la table pour nous expliquer pourquoi les deux
tiers ne participent pas. Qu'est-ce qui les empêche?
Et ce n'est
pas faute d'avoir tenté de l'expliquer en commission parlementaire, il y a
plein d'organismes qui ont essayé de
nous expliquer ce qu'ils voient, eux, sur le terrain, avec les jeunes qu'ils
rencontrent. Donc, ce n'est pas une étude scientifique ou statistique,
mais ce sont des gens qui, tous les jours, rencontrent des jeunes. À défaut
d'étude scientifique, statistique ou enfin,
bon, d'étude du ministère, une étude quelconque, bien, moi, je fais confiance
aux organismes terrain qui nous
disent : On va vous en parler, des jeunes qui viennent nous voir. On va
vous parler de leurs problèmes, là, de
tout ce qu'ils vivent et qui les empêchent effectivement, pour un laps de
temps, de participer à des programmes. Mais ça, c'est comme si cette parole-là, le ministre était incapable de
l'entendre, ou ne voulait pas, ou enfin pensait qu'elle n'était pas crédible. Bien, si ça n'est pas crédible aux
yeux du ministre, qu'il nous sorte des études faites ici, au Québec, là, pas en
Allemagne ou en Finlande ou... non, non,
ici, au Québec, qui vont nous expliquer pourquoi les deux tiers des 18-25 ans
ne participent pas aux programmes.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin.
Voulez-vous réagir, M. le ministre?
M.
Blais : Je pense qu'il faut éviter de porter des jugements moraux,
hein, sur ces situations-là. C'est des personnes qui vivent toutes sortes de difficultés. Donc, paresse ou des choses
comme... Non, non, mais ce que je veux dire, c'est que j'ai entendu, là : Est-ce que c'est la
paresse, ou tout ça? Je pense qu'il n'y a personne ici, je pense, on l'a déjà
dit, qui porte des jugements moraux, là.
On
a à peu près 77 % des jeunes à l'aide sociale qui viennent d'une famille,
hein, qui était à l'aide sociale.
Donc, c'est un phénomène, sociologiquement, qu'on dirait, de
reproduction, hein, qui est lié, bien sûr...
• (16 h 10) •
Mme David
(Gouin) : ...
M.
Blais : ...et ça, c'est
archidocumenté et ça n'a pas rapport
avec la paresse ou le manque de volonté, hein? Il y a une grande, grande majorité de ces jeunes-là qui
viennent de cet environnement-là. Alors, si vous avez été élevé dans un environnement comme celui-là, bien, ça peut être
plus difficile d'avoir, disons, une vision, là, qui est différente de celle
de votre famille là-dessus. Donc, il faut
les aider. La façon de les aider, c'est de les encourager à retourner aux études — ce n'est
pas évident — finir
leur diplôme, aller chercher une qualification et, si, vraiment, leur objectif,
c'est de se trouver un emploi dans leur environnement, bien, de donner
les ressources nécessaires pour qu'ils puissent en trouver un.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, oui,
M. le député de... Oui, je vais aller à M. le député de Drummond—Bois-Francs
puis après ça M. le député de Richelieu.
M.
Schneeberger : Juste un commentaire. Par contre, quand on
dit qu'il y a 70 % des jeunes qui viennent de l'aide sociale, je pense que, s'il y a des chiffres comme
ça, c'est aussi qu'il faut comprendre le système, c'est-à-dire que, quand
on a atteint l'âge de 18 ans, il y a des
règles qui changent et, si on demanderait à toutes les familles au Québec, ici,
de mettre les enfants à la porte parce qu'ils ont 18 ans, je pense qu'on
aurait un méchant gros problème social.
Bien,
c'est ce qui se passe, au niveau des familles : c'est qu'à 18 ans on ne
paie plus pour le... alors, c'est sûr qu'eux, ils sont contraints d'aller chercher cette aide. Moi, je pense qu'il
faut... les chiffres, il faut les souligner, mais il faut aussi les comprendre. Alors, le système est fait ainsi;
alors, c'est sûr qu'il ne faut pas s'étonner des chiffres. C'est tout. Merci.
Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. M. le député de Richelieu, il
vous reste deux minutes.
M. Rochon :
Oui, d'accord. Ce sera suffisant pour faire entendre le Pr
Jean-Yves Desgagnés, qui est directeur du module en travail social à l'Université du Québec à Rimouski :
«Il n'existe aucune preuve...» Je ne sais pas où le ministre a pris ses chiffres; en tout cas, ils ne lisent
pas les mêmes documents, M. Desgagnés et le ministre. «Il n'existe
aucune preuve, dit M. Desgagnés, que des gens sont sur l'aide
sociale de génération en génération.
«On
laisse sous-entendre à la population qu'on est en face de jeunes qui font de
l'aide sociale leur projet de vie.» Ce n'est pas vrai, dit
M. Desgagnés.
«Moi,
j'ai travaillé...» Là, cette fois, c'est Marc Boily qui parle. Il est
codirecteur, lui, du module en travail social à l'Université du Québec à
Rimouski : «Je ne pense pas que les gens font des demandes d'aide sociale
parce qu'ils veulent être sur l'aide
sociale. C'est parce qu'ils ont certaines limitations ou qu'ils ont des
conditions qui font qu'ils ont besoin
de ce soutien-là.» Pas parce qu'ils veulent être sur l'aide sociale. «Les
programmes d'emploi, poursuit M. Boily, ne sont pas
nécessairement adaptés pour ces personnes-là.»
Alors,
oui, il faut se prémunir contre les jugements rapides, un peu simplistes. C'est
sûr que c'est commode, ça permet de
classer les gens, mais ça ne tient pas compte, là, finement, de leur réalité.
La pauvreté, elle a plusieurs visages. Les gens qui vivent la pauvreté,
ils ont plusieurs visages. Voilà, c'est ce que je voulais vous faire savoir.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le député. Voulez-vous... M. le
ministre.
M.
Blais : Encore une fois, je ne veux pas faire une bataille de
chiffres, là, c'est des chiffres que l'on m'offre, je suppose qu'ils
sont de nature publique, là. Donc, les jeunes au programme d'aide sociale âgés
de moins de 21 ans, en janvier 2016, dont un
des parents était... donc qui étaient enfants de familles de prestataires, en
2016, 21 ans et moins, c'est 82 %. En
2016, pour les moins de 25 ans, le groupe des moins de 25 ans, c'est
76,9 %. Donc, ce sont des chiffres, puis je pense que le collègue a
raison de... ces chiffres-là n'expliquent pas la complexité puis la difficulté,
hein, du problème de faire émerger, là, ces
jeunes-là, là, bon, à un moment où l'autre, là, un potentiel de retour aux
études, au travail. Donc, je ne nie
pas la difficulté, mais, comme je dis souvent, ce n'est pas en restant chez
eux, là, que le problème va se résoudre, mais c'est vraiment en se
mettant en action puis en étant appuyés.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, c'est
tout le temps... À moins que... Est-ce qu'il y a d'autres interventions
de la part des députés du parti ministériel? Non. Donc, c'est le temps que nous
avions pour cet amendement, un amendement
déposé par M. le député de Saint-Jean qui vise à remplacer «vise à offrir», à l'article 83.1, par
«offre». Donc, est-ce que...
Oui, M. le député de Saint-Jean?
M.
Turcotte : M. le Président, est-ce qu'on peut procéder au
vote par appel nominal?
Le Président (M.
Cousineau) : Bien sûr. Donc, vote par appel nominal. Mme la
secrétaire.
La Secrétaire :
M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte :
Pour.
La Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon :
Pour.
La Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Pour.
La Secrétaire :
M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
La Secrétaire :
M. Hardy (Saint-François)?
M. Hardy :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Simard :
Contre.
La Secrétaire :
M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
La Secrétaire :
M. Polo (Laval-des-Rapides)?
M. Polo :
Contre.
La Secrétaire :
M. Cousineau (Bertrand)?
Le Président (M.
Cousineau) : Je m'abstiens.
La Secrétaire :
C'est rejeté.
Le
Président (M. Cousineau) : Donc, l'amendement de M. le député
de Saint-Jean est rejeté. Nous revenons à la discussion sur l'article 83.1. Et je vous rappelle le temps restant pour
l'article 83.1. Alors, M. le député de Saint-Jean, il vous reste 3 min 30 s; M. le député
de Richelieu, 14 min 30 s; M. le député de Drummond—Bois-Francs, 14 min 45 s;
et, Mme la députée de Gouin, vous avez 20 minutes sur l'article 83.1.
Donc, qui prend la
parole au départ? Mme la députée de Gouin.
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je voudrais apporter un nouvel
amendement qui se lirait comme suit — et on va pouvoir vous le
distribuer. D'ajouter, à la fin de... Voyons!
Je recommence.
D'ajouter, à la fin de l'article 83.1 tel qu'amendé, l'alinéa suivant :
«Aucune disposition
du présent chapitre ne peut avoir pour effet de diminuer le revenu d'une
famille sous le niveau de la prestation de base reconnue à l'article 56 du Règlement
sur l'aide aux personnes et aux familles.»
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, merci, Mme la députée de Gouin.
Alors,
je vais suspendre deux, trois minutes... quelques instants pour nous permettre
de faire des photocopies de l'amendement pour distribuer aux membres.
Alors, je suspends.
(Suspension de la séance à
16 h 17)
(Reprise
à 16 h 24)
Le Président (M.
Cousineau) : Merci. Alors, attention, s'il vous plaît! Donc,
nous reprenons nos travaux. Et puis, Mme la députée de Gouin nous a déposé un amendement qui vient ajouter,
à l'article 83.1, un alinéa supplémentaire. Alors, Mme
la députée de Gouin,
donc on vous laisse du temps pour nous lire votre amendement
encore une fois et puis plaider. Vous avez 20 minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : ...le député de Drummond—Bois-Francs, vous aviez une
question?
M.
Schneeberger :
Non, c'est beau, ça va aller comme ça.
Le Président (M.
Cousineau) : Ça va aller?
M.
Schneeberger : Je voulais parler au ministre seul à seul,
mais, bon, vous avez recommencé, alors il n'y a pas de problème.
Le Président (M.
Cousineau) : Bon, d'accord.
M.
Schneeberger :
Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, Mme la députée de Gouin.
Mme
David (Gouin) : O.K. Donc, je lis l'amendement, M. le Président. C'est
d'ajouter, à la fin de l'article 83.1 tel qu'amendé, proposé par
l'article 28, l'alinéa suivant :
«Aucune
disposition du présent chapitre ne peut avoir pour effet de diminuer le revenu d'une famille sous le niveau
de la prestation de base reconnue à l'article 56 du Règlement sur l'aide aux
personnes et aux familles.»
Alors,
M. le Président, j'explique l'amendement. L'amendement, je tiens à le préciser,
ne signifie en rien que, subitement, je souscris à l'idée de sanctions et de
diminution des prestations des personnes seules à l'aide sociale, mais je
veux attirer l'attention du ministre sur la
situation des familles. Parce que, là, il y a quelque chose qui se crée, M. le
Président, à partir de toute cette
notion d'obligation sous peine de sanctions. C'est des gens vivant en ménage...
un couple, hein, vivant en ménage, ou
une personne seule avec des enfants, pourraient voir leur revenu général,
familial — hein,
comme on dit souvent, familial — diminuer parce que l'un des membres de la
famille n'aurait pas satisfait aux obligations prévues par le ministre,
là... prévues par le projet de loi qu'il veut faire adopter.
Donc,
ma compréhension, c'est qu'on pénalise toute une famille, y compris les
enfants, parce qu'il y a, selon le ministre,
manquement à cette fameuse réciprocité entre l'État et les personnes pauvres de
notre société. Alors là, il me semble,
M. le Président, qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là. C'est comme
s'il y avait une sorte... Je ne dis pas
que c'est l'intention, mais on dirait qu'il y a une sorte de culpabilité par
association. Il y a un membre de la famille qui manque, selon le ministre, à certaines responsabilités; dans le
fond, tout le monde est pénalisé, y compris les enfants.
Moi,
ça ne me paraît pas possible, ça. Et je souligne que, dans ce cas-ci, si on
parle de famille, dans l'immense majorité des cas, il ne sera pas
question de jeunes entre 18 et 21 ans, là. Il va être question de gens plus
âgés, dans la vingtaine, dans la trentaine,
même dans la quarantaine, qui vont être des primodemandeurs... Parce que je
rappelle, pour le public qui nous
écoute, que le projet de loi ne vise pas que les jeunes. Le ministre nous parle
énormément des jeunes, mais je
souligne, encore une fois, que ce projet de loi implique et est applicable à
n'importe quelle personne qui fait, pour la première fois, une demande à l'aide sociale. Cette personne peut
avoir 43 ans ou 37 ans et être mère de famille. Ça, c'est la vraie réalité, là, du projet de loi.
Alors, moi, je plaide que c'est impensable de diminuer le revenu déjà tellement
faible des familles à l'aide sociale, et j'aimerais beaucoup entendre le
ministre là-dessus.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci beaucoup, Mme la députée de
Gouin. M. le ministre, alors, sur l'amendement déposé par Mme la députée
de Gouin.
M.
Blais : Oui. J'essaie de suivre la collègue, là. Il faut rappeler que
les prestations pour enfants, heureusement — on en
a déjà parlé, on a déjà échangé là-dessus — heureusement, pour différentes raisons, là,
ne font plus partie de l'aide sociale.
Donc, elles sont indépendantes, là. Pour le premier enfant, le montant est de
2 392 $; le deuxième enfant, là, 1 195 $. Et ça, bon, ces allocations-là, elles ne sont pas
retouchées, comme les bonifications, là, qui sont annoncées par le gouvernement
fédéral.
Sur
la proposition qui est faite aujourd'hui, donc on ne peut pas y souscrire parce
que, disons, elles vont à l'encontre, là,
des principes, un peu, là, qu'il y a dans la loi. Mais je veux vraiment,
vraiment, là, que la collègue, là, situe bien le débat. Et donc, s'il y a obligation ou il y a possibilité
de manquement... s'il y a manquement, il faut qu'il y ait des conséquences
quelconques, là. Donc, ça existe partout,
là, dans le monde et en particulier à peu près dans toutes les sociétés
sociales-démocrates, on en a retrouvé.
• (16 h 30) •
Notre
modèle est plus proche... on a regardé un petit peu les pénalités, donc plus
proche, par exemple, du Danemark que de l'Ontario. Dans le cas de
l'Ontario, un manquement, ça peut être un mois, deux mois, trois mois sans
aucune allocation. Notre modèle, c'est un
modèle qui a aussi comme intérêt de pardonner. C'est-à-dire que, dès que la personne se remet en
marche, elle retrouve tous ses droits. Puis ça, c'est important de le dire.
Dans le modèle qui avait été défendu, là, il
ne faut pas que je me trompe d'année, toujours en 1998, par le Parti québécois,
c'étaient des pénalités sur un an.
C'est-à-dire que, s'il y avait un manquement, c'était 150 $, le deuxième
manquement, c'était 300 $. C'était sur une longue période de temps. Et, bon, 300 $ aujourd'hui, là, c'est
l'équivalent d'à peu près 402 $ de coupure dans la prestation de base. On ne va pas dans cette direction-là, on
n'est pas aussi sévères. On essaie vraiment de trouver une façon pour que
les gens puissent se reprendre en ayant des petits montants.
Quand on regarde maintenant les études
économétriques, puis je n'ai pas eu le temps encore de regarder, là, l'étude de mes anciens collègues de l'École de
service social de l'Université Laval, mais, disons, je serais prudent quand
je vais faire la lecture, parce que c'est
assez difficile de comprendre exactement les variables qui font jouer la sortie
de l'aide sociale. C'est un problème
complexe, mais, en général, les économistes, les économètres réussissent à
diviser les variables qui comptent.
Et, clairement, même sous le Parti québécois, avec les sanctions qui avaient
été proposées, il y a eu une
augmentation, là, des sorties à l'aide sociale à cette époque-là. Et, lorsqu'on
a mis fin à ces sanctions-là, qui étaient mal ciblées, qui étaient
universelles, on a vu que la sortie de l'aide sociale a diminué par la suite.
Donc, on a
des bonnes raisons de croire... mais on ne sera pas aussi sévères, je ne pense
pas que ça soit nécessaire d'être
aussi sévères que le Parti québécois à l'époque, mais on a des bonnes raisons
de croire qu'il y aura un impact positif sur la sortie, là, à l'aide sociale. Le but recherché, c'est ça,
finalement; le but, ce n'est pas que les gens restent à l'aide sociale. Je pense que personne, ici, ne poursuit
ce but-là. Le Programme d'aide sociale, c'est un programme qui est assez
stigmatisant pour les gens, qui peut conduire même à une forme de marginalisation
sociale et économique. Donc, le but, c'est
de permettre aux gens de pouvoir en sortir et d'être bien appuyés
financièrement s'il faut. Mais c'est vraiment ce qu'on a présenté, là, en intentions réglementaires,
c'est très, très mesuré et surtout ça pardonne constamment, ce qui fait en
sorte que les gens peuvent continuer leur parcours avec leurs pleins
droits puis même, bien sûr, avec les bonifications.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Écoutez, je trouve intéressant,
malgré tout, le débat que nous avons parce
que je pense qu'on va vraiment au fond des choses, à la fois sur des questions
de principe et sur des questions très pratico-pratiques aussi qui sont
nécessaires.
Le
vocabulaire utilisé me fait parfois sourire, je dois le dire. Le pardon, c'est
assez judéo-chrétien. Moi, j'ai été élevée
là-dedans, alors je sais de quoi je parle. Ici, on a un État laïc qui a comme
responsabilité de s'occuper des gens puis
de le faire de son mieux; enfin, je pense que c'est ce qu'on veut. Donc, je
voudrais, moi aussi, rappeler un certain nombre de choses. D'abord — le ministre a élargi le débat, je me permets
donc de le faire — si tant
de jeunes issus de familles à l'aide
sociale se retrouvent à l'aide sociale à 18 ans, peut-être qu'il faut y voir un
échec partiel, à tout le moins, de la lutte à la pauvreté au Québec,
tous gouvernements confondus.
C'est un
échec de penser qu'un jeune de 18 ou 20 ans — ou une jeune — se retrouve à l'aide sociale et vient d'une
famille à l'aide sociale. Comment ça se
fait? Et là, moi, ce qui me fascine, c'est qu'on dit vouloir l'aider puis on
pense que la meilleure façon de
l'aider, c'est, bien sûr, fournir l'accompagnement, et tout, mais c'est de
brandir la sanction, alors que, si on
plaidait que, par exemple, tous les enfants de familles à l'aide sociale ou
vivant dans une pauvreté relative ou complète
devraient avoir une place dans des services de garde — à défaut, dans des maternelles quatre
ans — devraient
avoir accès à des services à l'école primaire, à l'école secondaire... qu'on
s'organisait, là, pour ne pas échapper tous ces
jeunes, là, oui, qui viennent de familles pauvres, très souvent, puis qui sont
dans des milieux défavorisés et qui, même avant l'âge réglementaire de 16 ans, quittent l'école... Et tout le
monde le sait, ça, tout le monde le sait qu'on a plein de jeunes, au
Québec, qui ont 15 ans et qui ne vont plus à l'école et qu'on ne rattrape pas,
sinon quelques organismes communautaires,
là, qui s'en occupent à bout de bras puis sans budget, là. Mais on a beaucoup
de difficultés. Puis après ça on s'étonne puis on trouve ça regrettable
qu'à 18 ans ils soient à l'aide sociale.
Si on commençait par les tout-petits, là, puis
qu'on s'occupait vraiment de nos écoles publiques primaires et secondaires, moi, je pense — puis ça fait tellement longtemps qu'on le
dit, puis il y a plein de chercheurs en politique publique qui le disent aussi — qu'on ne serait pas dans la situation, qu'on
trouve déplorable aujourd'hui, où, effectivement, un certain nombre de
jeunes de 18, 20 ans sont sans beaucoup de projets d'avenir. Moi aussi, je
trouve ça déplorable. Et je ne le dis pas au
sens moral du terme du tout, je le dis au sens de notre vie en société, là. Ce
n'est pas un projet de vie d'avoir
18, 20 ans puis d'être dans une situation où on n'a souvent aucune idée de vers
quoi on va aller, on est perdu, on est dans une situation de détresse
économique, souvent physique, souvent psychologique. Mais c'est tellement avant
qu'il aurait fallu commencer. Et moi, je me
dis qu'un État, un gouvernement, quel qu'il soit, qui n'est pas capable de
s'occuper comme du monde de ses
enfants et de ses adolescents ne devrait pas, une fois qu'ils ont 18 ans, les
sanctionner. Ça, c'est la première chose.
La deuxième, c'est que le moment où on a eu le
plus de sorties à l'aide sociale... je dirais, peut-être dans les 20 dernières années, il y en a deux, moments. Il y
a eu des moments où l'emploi a repris beaucoup de mieux et, à un moment donné, quand l'emploi va bien dans un certain
nombre de régions, il y a beaucoup moins de gens qui sont soit au chômage
ou soit sur l'aide sociale. C'est évident,
là : l'emploi, c'est la première clé. Puis il y a une deuxième clé :
c'est effectivement le fait qu'on a
sorti les allocations pour enfants des prestations d'aide sociale. Ça a été une
excellente décision, et on a augmenté
le niveau, de façon importante, de ces allocations. C'est un ministre libéral
qui l'a fait, il s'appelait Yves Séguin, et ça a été un autre moment important de sortie de l'aide sociale chez bon
nombre de mères monoparentales. Autrement dit, les meilleures façons d'aider les gens à sortir de
l'aide sociale, c'est d'avoir des emplois pour ces personnes-là, puis c'est
d'avoir, dans le cas des familles, des prestations qui tiennent la route.
Pour en
revenir à mon amendement : Pourquoi est-ce que je me permets d'insister?
Je sais bien que les allocations pour
enfants ne seront pas touchées, là; je suis bien au courant de ça. Mais le fait
de pouvoir couper la prestation de base d'un des adultes de la famille... jusqu'au tiers de sa prestation de
base, hein, parce que c'est de ça qu'on parle : quand il reste
400 $, là, on l'a coupée du tiers. C'est beaucoup d'argent, ça. Une
famille, là, tout le monde le sait, hein, ça ne fonctionne pas : un des adultes a tant d'argent, puis l'autre a
tant d'argent, puis on fonctionne complètement séparément, comme s'il n'y avait pas de pot commun. Je pense
que, dans la plupart des familles, et surtout quand on est pauvres, on met l'argent en commun puis on essaie de se faire
un budget puis de se débrouiller avec ça. Ça fait que, s'il y a un des adultes de la famille dont la prestation est
coupée du tiers, ce n'est pas vrai que ça n'aura pas d'impact sur la famille.
Allons donc! Ça a des impacts sur la famille.
Et donc il y
a une prestation de base pour les familles, là, qui est reconnue à l'article 56
du règlement. Alors, moi, je pense que cette prestation de base ne peut pas
être diminuée, et surtout pas quand il y a présence d'enfants. Ce n'est pas
possible, là, c'est trop important si on
parle du revenu familial global. Ça a des effets sur toute la famille, ça a des
effets particulièrement sur les enfants. Puis ça, je ne comprends pas
comment on peut l'accepter. Ça me paraît impensable.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.
• (16 h 40) •
M.
Blais : Donc, deux, trois petites choses. D'abord, je suis d'accord
avec la collègue, là, qu'il faut travailler sur plusieurs fronts à la fois, notamment la configuration des mécanismes de
transfert pour les rendre moins stigmatisants, pour faire en sorte qu'ils n'empêchent pas... disons, ils ne
contraignent pas à l'effort, ce qui est, malheureusement trop souvent, le cas dans certains programmes;
n'enferment pas les gens dans des trappes de pauvreté. S'il y a quelqu'un qui a
écrit sur le sujet, c'est bien moi. Donc, tout à fait d'accord là-dessus.
En même
temps, bon, dire : Si on agit en prévention, on ne se retrouverait pas à
discuter de ce problème, là. Je rappelle,
là, que la social-démocratie la plus égalitaire sur cette planète en ce moment,
c'est le Danemark, le coefficient de
génies plus élevé; on paie beaucoup d'impôt au Danemark. Et le Danemark a aussi
des mesures, hein, comme Objectif emploi,
là, pour les bénéficiaires de leur équivalent d'aide sociale, parce qu'ils
considèrent, eux aussi, que ça peut donner un coup de main.
Sur la
question du chômage, c'est vrai qu'un des grands — bon, ça, là, les études le montrent
bien — facteurs,
là, de sortie de l'aide sociale, c'est l'évolution du taux de chômage, hein?
Ça, c'est très clair, mais il y a d'autres variables possibles. Des mesures
comme celles que nous proposons sont des mesures aussi qui ont un certain
impact.
En 1998, sous
le Parti québécois, le taux de chômage était à 10,3 % et, en plus, on
forçait, là, les gens à aller vers l'emploi.
Aujourd'hui, en 2016, le taux de chômage est de 7,5 %. J'étais, encore une
fois, à Rimouski, hier, le taux de chômage,
de mémoire — j'y vais
vite, là — 6 %,
8 %, je pense, quelque chose du genre, et, vraiment, il y a une crise de
l'emploi dans plusieurs secteurs.
Donc, je
pense que ce serait beaucoup plus gênant pour le gouvernement d'avancer un
programme comme Objectif emploi avec
un taux de chômage élevé, mais là on est dans une situation, je pense, où c'est
beaucoup plus réaliste d'avoir un effet positif, là, sur la sortie à
l'aide sociale.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : M. le Président, le ministre revient souvent sur l'exemple
danois ou d'autres exemples de pays
scandinaves. Alors, bien, tant qu'à y être, moi, j'aimerais ça avoir plus
d'information : À combien s'élève la prestation de base d'une personne
adulte dite apte à l'emploi au Danemark? Et comment est-ce qu'on peut comparer
cette prestation de base en rapport avec, évidemment, le coût de la vie,
qui est beaucoup plus élevé là-bas qu'ici? C'est une information concrète, là, que je demande. Parce que, si on
cite sans cesse un modèle en disant : Après tout, si eux le font, pourquoi
pas nous?, bien, moi, j'aimerais qu'on ait plus d'information sur le modèle.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : J'ai cité ce modèle-là parce que, bon, il est assez
intéressant, là, il se rapproche un peu plus de ce que nous faisons; c'est parfois difficile d'avoir des
comparables. Ce sur quoi j'ai voulu insister, c'est qu'il y a un blocage un
peu moral dans ce débat-là, il me semble,
pas assez conséquentialiste, donc trop déontologique, un blocage un peu moral
qu'il est impossible d'être
social-démocrate, impossible, et avoir ce type de... Le Parti québécois, qui
s'est toujours présenté, je crois,
comme un parti social-démocrate, pourtant, ils ont mis sur pied un programme du
genre en 1998. Moi, je ne pense pas
qu'on distingue les pays sociaux-démocrates, hein, où la force qu'ils
accordent, disons, à la social-démocratie, à partir de l'existence ou la non-existence, c'est beaucoup
plus complexe que cela. Bon, je pense qu'on est en train de me fournir des chiffres... Non? O.K. Alors, quand j'aurai des
chiffres — pour le Danemark,
là — je
pourrai peut-être les présenter.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Bien, ça m'intéresserait beaucoup, M. le Président, là,
d'avoir plus d'information sur le modèle danois parce que, tant qu'à en
parler, parlons-en. Parlons-en avec toutes les informations disponibles :
Donc, à quel niveau s'élèvent les
prestations? Comment est-ce que ça permet aux gens de faire face au coût de la
vie? Quelles mesures
leur sont proposées? À combien s'élève l'assurance-emploi? Quelles sont les
mesures qui sont prises dans les écoles
primaires et secondaires pour s'assurer de la réussite scolaire des enfants?
C'est tout ça qu'il faut savoir, parce que, si on veut permettre aux gens du Québec de sortir de la pauvreté dans
laquelle vivent malheureusement encore trop de personnes, bien, il va falloir que le modèle, il soit complet. C'est ce
que la loi n° 112, adoptée en 2002, disait, d'ailleurs. Et ce n'est pas juste une chose qu'il faut faire,
il faut en faire plusieurs à différents niveaux, et c'est comme ça qu'on va
permettre aux gens de sortir de la pauvreté.
Ce que je veux aussi dire au ministre, c'est que
moi, je ne fais pas, ici, de politique partisane; le ministre se chicanera avec les collègues de l'opposition
officielle s'il en a envie, moi, je ne suis pas là-dedans. Moi, ce que j'essaie
de faire, c'est de dire au ministre qu'à la fois, oui, c'est vrai qu'il y a des
raisons de principe, mais il y a des raisons extrêmement pratico-pratiques qui
font en sorte que nous croyons sincèrement non seulement dans ma formation politique, mais, je dirais, chez 90 % des
organismes qui sont venus en commission parlementaire, je le rappelle encore
une fois... je crois sincèrement que, tout autant
pour des raisons pratiques d'efficacité, la sanction n'est pas intéressante, elle n'est pas pertinente, elle n'est pas
efficace. Et je pourrais répéter, pour la centième fois, pourquoi, puis c'est
des raisons extrêmement pratiques,
là : parce que les gens non motivés ne suivent pas attentivement les
programmes; parce que ça devient très difficile pour les organismes de
les encadrer comme il faut; parce que ça atteint le climat de travail dans l'organisme où vont les gens; parce que, oui, un
certain nombre de gens choisiront et, entre autres chez les jeunes, de ne
pas participer aux programmes; ils se
rendront au fameux 400 $ par
mois, ce qui créera chez eux de l'itinérance, itinérance à laquelle la société québécoise devra faire face.
Ça, ce n'est pas moral, c'est super pratico-pratique, là. Et il y a tellement
d'organismes qui sont venus nous faire des mises en garde que je ne comprends
pas qu'on ne les écoute pas.
Alors, je le
répète encore une fois : Le programme Objectif emploi, s'il n'y avait pas
cette obligation de sanctions, serait
un bon programme, et je serais la première à y souscrire. Mais, avec les
dispositions actuelles qui atteignent non seulement le revenu des personnes seules, mais qui atteignent le revenu
des familles — je
répète, des familles — je trouve que ce n'est un programme ni acceptable ni
efficace.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.
M.
Blais : Alors, j'ai la chance d'ailleurs d'avoir un attaché politique
qui fait sa thèse de doctorat sur la Suède mais pas sur le Danemark,
malheureusement, là. Il me soufflait quand même un certain nombre de choses.
Alors, j'ai presque envie de dire à ma
collègue : Seriez-vous d'accord pour être au moins ex aequo avec les
pénalités du Danemark, qui est,
encore une fois, en ce moment, la société la plus égalitaire au monde, selon
lui? Mais je ne veux pas vraiment induire
en erreur, on peut aller chercher des informations. On trouve tout, ici, sur
Internet. Mais, selon lui, la pénalité, curieusement, au Danemark, est plus sévère pour les couples, et donc il y
a un des membres du couple qui perd complètement son droit, là, à l'aide
sociale, lorsque les sanctions s'appliquent.
Mme David
(Gouin) : M. le Président, ça veut peut-être juste dire que le
Danemark est de moins en moins une société
sociale-démocrate. Il faudrait aller regarder, hein? Parce que je pense que là
on peut faire des grandes discussions de
plus ou moins experts sur la question. Je rappelle aussi qu'au Danemark il y a
une montée extrêmement inquiétante de
l'extrême droite, en passant. Je ne dis pas que ça a contaminé toute la
société, là, mais je veux juste rappeler qu'il y a eu des élections il
n'y a pas si longtemps, que l'extrême droite a énormément gagné de terrain.
Alors, plutôt
que de se comparer, on pourrait avoir de grandes discussions sur la Suède, le
Danemark, etc., où il se passe en
même temps des choses très intéressantes, je ne veux surtout pas le nier. On
pourrait se dire qu'au Québec on peut
décider, par nous-mêmes et pour nous-mêmes, d'adopter un certain nombre de
mesures qu'on va juger à la fois éthiques et efficaces, ça se peut, ça.
Voilà!
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Entièrement d'accord.
Entièrement d'accord avec la collègue : efficaces et éthiques à la fois.
Le Président (M. Cousineau) :
Est-ce que, Mme la ministre... la députée, ça va? Merci.
Mme David (Gouin) : Pas encore
ministre.
Le
Président (M. Cousineau) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions
sur l'amendement? Oui. M. le député de Saint-Jean, sur l'amendement de
la députée de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Non, la
députée de Gouin.
Le Président (M. Cousineau) :
De Gouin. Mon Dieu, mon Dieu! Je suis fatigué.
M.
Turcotte :
Moi, je suis le député de Saint-Jean. Mais je vous remercie beaucoup, M. le
Président, pour m'offrir l'occasion d'intervenir sur la motion de notre
collègue, parce que...
Le Président (M. Cousineau) :
L'amendement.
• (16 h 50) •
M.
Turcotte :
Oui, pardonnez-moi. Excusez-moi. Donc, sur l'amendement de notre collègue,
parce que ça permet, en même temps,
de poursuivre une discussion que nous avons abordée, il y a de ça maintenant
près d'une semaine, là, sur l'impact des sanctions présentées dans les
intentions réglementaires du ministre. Mais, intentions ou pas, l'esprit est dans le projet de loi. Donc, on avait fait ce
débat-là. Bon, on avait vu, bon, pour un couple à l'aide sociale, 965 $ par mois, pour une personne seule, 623 $ par mois. Donc, il y a quand même
une différence. Ce n'est pas le double, on comprend, il y a des frais communs, donc la question du
logement, par exemple, etc., mais il y a quand même des frais qui sont là, là,
pour que les gens puissent vivre décemment.
Cependant,
moi, j'avais posé, à plusieurs reprises, la question suivante : Est-ce
qu'un conjoint ou une conjointe d'un
nouveau demandeur pourrait être pénalisé ou sera pénalisé si son conjoint,
conjointe, qui est nouveau demandeur, n'accepte
pas d'embarquer dans le programme? Et je ne veux pas qu'on embarque sur les
raisons qui pourraient faire en sorte
qu'il ne voudrait pas accepter, là. Bon, on pourra y revenir un jour, là, mais,
pour l'instant, là, ce n'est pas important, là, dans la mesure où il n'accepte
pas pour de bonnes raisons qu'on n'a pas à juger maintenant. Est-ce que son
conjoint ou sa conjointe sera
pénalisée, qui, elle, pourrait accepter d'embarquer dans un parcours si elle
est nouveau demandeur, ou elle
pourrait être dans un parcours parce qu'elle est peut-être... elle est déjà
embarquée dans le programme, ou peut-être parce qu'elle est déjà à
l'aide sociale, donc elle n'a pas à embarquer ou non dans le programme?
Donc,
j'ai posé la question, à l'époque, au précédent ministre, qui est député de
Louis-Hébert, et je n'avais eu aucune réponse, comme bien d'autres
questions que j'ai posées. Mais le ministre actuel, lorsque je lui ai reposé
cette question-là ici, en commission, nous a
dit : Le conjoint, conjointe ne sera pas touché par les sanctions. On a jasé
pas mal de ça et on s'est aperçu
qu'effectivement la personne, le conjoint ou la conjointe ne sera pas
sanctionnée directement, mais,
implicitement, elle sera affectée par cette sanction parce que la sanction va
s'appliquer sur le montant d'aide sociale du couple — donc,
du ménage, de la famille.
Donc,
si la personne, bon, enfreint... la première absence, ça ne pose pas de
problème à première vue parce que c'est
l'allocation spéciale. Donc, l'allocation spéciale est dédiée pour une
personne — pour le
participant ou la participante. Mais
c'est quand on embarque dans la deuxième, troisième, quatrième absence, où, là,
l'allocation de base d'aide sociale est
coupée : pour deuxième absence, on parle de 56 $ de réduction pour un
mois; dans le cas d'une troisième absence, 112 $; dans le cas d'une quatrième absence, 224 $. Donc, ça,
c'est de moins au montant de base d'aide sociale et, pour un couple,
965 $.
Donc,
j'avais expliqué, à ce moment-là, que, pour un couple dont un des deux
partenaires qui n'embarque... s'il n'embarque
pas dans le programme, bien là, il n'y en a pas, d'aide sociale, ça règle la
question. S'il embarque et qu'il est
absent, le couple pourrait être pénalisé davantage que pour un participant
seul, donc, un prestataire qui est célibataire, disons ça comme ça.
Bon,
le débat en était venu avec le ministre à la question de l'individualisation
des prestations. Et le ministre, à ce moment-là,
avait mentionné, bon, une certaine ouverture, dans le sens que lui, il
considérait qu'effectivement ça pouvait régler certaines parties du problème, puis tout ça. On a même abordé la
question... mon collègue, ici, le député de Richelieu a posé la question : Est-ce qu'il y a d'autres
éléments, dans la fiscalité québécoise, qui ne sont pas individualisés, donc qui
sont considérés pour le ménage, pour la
famille? Le ministre, un peu à la blague, avait mentionné : Bien, c'est le
ministre des Finances qui pourrait
répondre à cette question-là. Bon. Mon collègue de Richelieu a même
mentionné : Bon, bien, qu'il vienne, là. D'un consentement, on peut
tout faire ici, en commission.
Tout
ça pour dire, M. le Président, que l'amendement, ici, de notre collègue la
députée de Gouin, à mes yeux, à nos yeux
pourrait régler cette question importante qui ferait en sorte que la famille ne
serait pas pénalisée pour une décision qui
est, au fond, peut-être du ressort d'un des membres de la famille. Puis là
c'est toujours délicat dans ces situations-là, puis ça peut... mais il faut avoir en tête différents scénarios,
différentes choses qui peuvent
arriver. Ici, on n'est pas dans chacune
des maisons, chacun des appartements des gens concernés. On ne sait pas comment
ça se passe. On ne sait pas pourquoi
certaines décisions se prennent. Par
exemple, où, dans un couple, le
conjoint ou la conjointe... mais, bon, on voit qu'habituellement c'est plus le conjoint qui pourrait avoir une
relation, disons, avec une tendance dominatrice sur sa conjointe, pourrait dire : Moi, je
n'embarque pas dans le parcours, etc., puis tout ça, et ça ferait en sorte que
la femme en question — ou ça peut être l'inverse aussi, ça peut
être un homme, bon, versus une femme — pourrait être pénalisée.
Puis
c'est toujours délicat parce
que, bon, on n'est pas, là, dans le
quotidien de ces gens-là puis on voit des choses qui se passent, et moi, je
crois que l'amendement de la collègue... la députée de Gouin
vient, si on peut dire, colmater cette brèche
qui est présente dans le projet de
loi et que nous avons questionnée à
plusieurs reprises et que nous voulions avoir un éclaircissement. Nous avons eu finalement l'éclaircissement
comme quoi que la famille, indirectement, sera affectée par une non-participation ou une absence dans le programme
parce que les sanctions vont s'appliquer à la prestation de
base de la famille, donc, implicitement, à chacun des membres.
M. le Président,
j'aimerais aussi amener un autre élément. Il y a plusieurs contradictions, dans
le projet de loi actuel, avec une loi ou
avec des lois qui nous gouvernent ici, au Québec. Peut-être
que nous ne faisons pas une interprétation appropriée. Dans ce cas-ci, j'aimerais que le ministre
précise davantage et puisse expliquer comment l'interprétation
devrait être différente de celle que nous faisons.
Si
on fait référence à la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, article
59 de la loi : «La prestation accordée à l'adulte seul ou à la
famille ne peut être réduite par défaut d'entreprendre des démarches en vue
d'intégrer le marché du travail, notamment en cas de refus, d'abandon ou de
perte d'emploi.» Ça, c'est la loi actuelle, article 59.
Dans
le projet de loi, à moins que je ne me trompe, nous n'abrogeons
pas l'article 59, nous ne modifions pas l'article 59 de la Loi sur l'aide aux personnes et aux
familles. Donc, j'aimerais savoir comment le ministre peut expliquer qu'au
fond le projet de loi n° 70 ira à l'encontre de l'article 59 de la
Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.
M.
Blais : Donc, l'article que
vient de nous lire le député de Saint-Jean, là, s'applique en ce moment et va continuer
de s'appliquer, la loi d'aide sociale et la solidarité sociale aussi, hein, mais il ne s'appliquera pas à
Objectif emploi parce qu'on
crée un nouveau programme.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Saint-Jean.
• (17 heures) •
M.
Turcotte : Bien, M.
le Président, c'est là qu'on embarque
dans un autre enjeu. Le ministre nous a dit que les gens qui embarquaient
dans le programme Objectif emploi seront réputés pour être prestataires de l'aide
sociale, bien entendu, et auront tous les
mêmes droits que les autres prestataires de l'aide sociale. Et j'ai
apporté la question ce matin, je n'ai pas eu de réponse. Et là
le ministre vient de nous dire : L'article 59 va s'appliquer encore pour
les prestataires à l'aide sociale, mais ne s'appliquera plus aux prestataires d'aide sociale qui sont dans le programme Objectif emploi parce qu'ils sont dans le programme
Objectif emploi.
Moi, j'ai
amené le point, ce matin, sur le droit de révision pour une décision qui va à
l'encontre d'un citoyen. Parce
que,
exemple, là, on peut aller pas bien, bien loin, là, dans la motivation de
l'absence. Je ne remets pas en question la qualité des agents, pas du tout, mais un agent qui pourrait — qui
pourrait — considérer
que ce n'est pas une absence motivée, qui ferait en sorte que ça pénaliserait un participant au programme
Objectif emploi, quels sont ses recours, à ce participant du programme
Objectif emploi?
Actuellement, les prestataires à l'aide sociale ont des recours. Ils ont un droit de révision pour une décision.
Surtout que, dans ce cas-ci, il y a
des sanctions monétaires. Donc, si, pour l'article 59 de la Loi sur
l'aide aux personnes et aux familles,
un participant à Objectif emploi n'est plus considéré... n'a plus l'ensemble
des droits qu'un prestataire de l'aide
sociale qui ne participe pas à Objectif emploi, comment la révision peut
s'appliquer à ce même prestataire là qui participe au programme Objectif emploi et qui a une situation
qui demande révision? Donc, il y a un deux poids, deux mesures qui peut questionner beaucoup. Peut-être que le ministre a une réponse à ça à donner. Je ne sais pas. Je
vais lui laisser la parole, là, dans quelques instants, mais j'aimerais, encore une
fois, rappeler, M. le Président, que ce n'est pas moi, là, qui invente ça, là.
Moi, je reprends
des craintes et des commentaires de différents organismes qui sont venus ici, en commission, nous le dire, mais aussi qui ont écrit des
mémoires et qu'on a entendus, là, qu'on a pu lire les mémoires, entendre ici,
en commission, donc c'est des gens qui
nous amènent ça. Donc, le ministre a peut-être une réponse sur le droit de
révision, mais moi, je trouve ça
étrange que ça soit deux poids, deux mesures. Pour l'article 59, bien là, les
participants du programme Objectif
emploi n'ont plus tous les droits des autres prestataires de l'aide sociale,
mais, dans le cas de la révision, ah, bien, ça, peut-être qu'ils
pourraient l'avoir. Je ne sais pas, le ministre pourra répondre.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Disons que, M. le Président, c'est l'article 30 de la loi, là,
où on décrit, là, les droits de révision... l'article 30 du projet de loi, pardon, où on décrit les droits
de révision. Vous allez voir que c'est des droits de révision qui sont déjà
assez bien connus et pratiqués aussi.
Le Président (M. Cousineau) :
O.K. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Bien, j'aimerais peut-être que le ministre répète, là, parce que j'ai été
distrait, là. Ce n'est pas parce que mon collègue est distrayant, là, ce
n'est pas ça, là.
M. Rochon : Bien.
M.
Turcotte :
Il est très agréable, mais il m'a posé une question importante pour la suite
des choses qui pourra peut-être faire
avancer l'étude du projet de loi. Donc, je voulais effectivement lui offrir une
réponse. Mais j'aimerais ça, si c'est possible, je ne veux pas, là...
M.
Blais : Bien, M. le Président, l'article 30 du projet de loi, là,
traite de la question du droit de révision, là. Et c'est un droit de révision qui est assez connu,
qui touche, selon les cas, le Tribunal administratif du Québec, ou encore
une procédure de réexamen administratif. On aura l'occasion de regarder ça
ensemble bientôt, j'en suis sûr.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Nous aurons l'occasion d'y revenir effectivement, mais, d'emblée, moi, je peux
dire que je ne fais pas nécessairement la même lecture que le ministre
de cette information-là. On pourra revenir effectivement avec quelques
éléments, parce qu'il y a un...
M. Blais : ...
M.
Turcotte :
Pardonnez-moi?
M. Blais : ...l'article 30, c'est
ça, en reconsidération, oui, c'est ça...
M.
Turcotte :
C'est ça.
M. Blais : ...on en parlera.
M.
Turcotte :
C'est ça, on y reviendra. Mais ça ne règle pas plus le fond de l'amendement de
notre collègue la députée de Gouin,
qui... Moi, je me questionne : Quelle est l'intention? Pourquoi le
ministre nous dit : Une personne qui est participant au programme
Objectif emploi n'aura plus l'ensemble des droits des autres prestataires
d'aide sociale? Parce qu'eux, là, ils
n'auront plus... l'article 59, ça ne s'appliquera plus à eux. Parce qu'en plus
ce n'est pas comme s'ils avaient le
choix, là, ils sont obligés. Donc, ça implique que tous les nouveaux demandeurs
d'aide sociale n'auront plus les mêmes droits que les autres
prestataires d'aide sociale. C'est assez étrange, là. Ça revient un peu à une
clause orphelin, là. Surtout qu'on sait que
le ministre mentionne que c'est beaucoup la question de l'âge, donc parce qu'ils sont jeunes, on va les
sanctionner davantage? C'est un peu étrange, là.
M.
Blais : Bien, je ne sais pas
si c'est étrange, M. le Président, donc... Il faut bien distinguer ce que l'on fait,
là. 1998, sous le Parti québécois, c'étaient des centaines de milliers de personnes, donc c'étaient tous
les prestataires aptes, donc des
centaines de milliers. Il y avait plus de prestataires à cette époque qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, c'est un groupe, les premiers demandeurs, dont on sait qu'on a vraiment des chances,
quand on travaille avec eux de façon plus étroite, là, d'avoir un effet
positif.
Moi-même,
j'aurais été — hein,
je peux le dire publiquement — très
réticent à adopter la même politique que le Parti
québécois, qui ont un doute là-dessus,
parce que c'est viser beaucoup de personnes avec des situations très complexes.
Et, si on se concentre sur un groupe qui est
un groupe qui est dans une situation, disons, clé, là, parce que ce sont des premiers
demandeurs, notre capacité à les faire
émerger, là, est beaucoup plus grande que l'ensemble des personnes
considérées comme aptes ou sans contrainte, plutôt, là. Je pense qu'il
faut le faire.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Bien, le ministre actuel,
bon, a un passé, on a tous un passé.
Il a écrit, mais il a aussi parlé, il a même offert des conférences. Bon, il a eu l'occasion de venir au Parti québécois, à l'époque, donner une conférence, à l'époque, quand Louise Harel était ministre.
Il a eu l'occasion de s'exprimer sur différentes mesures. Je pourrais, là,
ressortir, là, toute la documentation de cette conférence-là, là. On a chacun des centres de documentation, là. Une chance que le centre de
documentation du Parti
libéral est efficace pour sortir, au ministre,
quelques lignes sur l'héritage, là, à croire le ministre, très noir du Parti
québécois, mais, au-delà de ça, ça ne règle pas la question actuellement.
Il y avait un contexte... en tout cas, j'étais
au berceau, pratiquement, à cette époque-là.
On pourrait revenir sur différents éléments,
mais je crois que ce n'est pas ça, le fond du débat, parce que ces mesures-là, à l'époque, ont été retirées, effectivement; l'obligation a été retirée. Et il y a une raison pourquoi cette obligation-là a été retirée à l'époque : peut-être
parce qu'on s'est aperçus que ça ne fonctionnait pas, peut-être
qu'on s'est aperçus qu'on n'était pas
capables d'offrir tous les services, là. Je ne le sais pas. Je l'ai dit puis je
le dis bien humblement, j'étais dans les centres de la petite enfance
avant qu'ils existent à cette époque-là pratiquement, M. le Président. Mais force est de constater que moi, là, là, grâce à l'amendement
de notre collègue la députée de Gouin,
moi, je viens de réaliser qu'il y a effectivement un élément où on créé une nouvelle catégorie à
l'aide sociale, donc les participants au programme Objectif emploi qui n'auront pas les mêmes droits
que les autres prestataires de l'aide sociale, parce qu'eux ils doivent
être punis parce qu'ils ont le malheur d'être des nouveaux demandeurs.
Donc, ça, là-dessus,
là, il y a un élément. Peut-être que le ministre, là, aura le temps, aujourd'hui, de réfléchir, là. On a
encore quelques séances, là, quelques heures ensemble pour avoir le temps
de réfléchir. Moi, je ne sais pas s'il est à l'aise avec ça, mais moi, j'ai un problème, un problème avec ça, là,
parce qu'on est nouveau demandeur, on a moins de droits qu'un
prestataire actuel.
Je vais
m'arrêter ici pour l'instant, M. le
Président, je vais peut-être...
Il y a d'autres collègues qui veulent parler. Peut-être, mon collègue
de...
Le
Président (M. Cousineau) : Je vais aller par l'alternance, avant de passer... Oui. Par alternance, Mme la députée de
Gouin?
Mme David (Gouin) : Non, pas pour
l'instant, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Non? M. le député de Drummond—Bois-Francs?
M.
Schneeberger :
Oui, M. le Président. On amène ici un amendement qui modifie l'article 83.1. Je
voudrais savoir, premièrement, question pratico-pratique — puis
excusez mon ignorance : Est-ce qu'une famille dont un des deux parents fait
une demande de prestations... est-ce qu'elle y a droit si le conjoint ou
conjointe travaille?
M.
Blais : Alors, elle peut y avoir droit, mais on va tenir... donc on
parle d'une famille ou d'un... oui, qui ont des enfants, là, donc...
M.
Schneeberger : Oui,
oui, une famille.
M. Blais :
Oui, oui.
• (17 h 10) •
M.
Schneeberger :
Bien, habituellement, une famille, c'est avec des enfants, là. Sinon, c'est un
couple, là.
M.
Blais : Oui, c'est à cause que, encore une fois, dans le langage de
l'aide sociale, un ménage, ça peut être sans enfant, avec enfants.
M.
Schneeberger : Avec
des enfants, une famille. Je pense que, dans le...
M. Blais : ...on parle d'une famille
au sens sociologique du terme.
M.
Schneeberger : Le
terme québécois, là.
M. Blais : Voilà! Alors, on va tenir
compte des revenus de la personne qui a un travail ou si elle a d'autres
revenus avant d'évaluer le droit à l'aide sociale de l'autre conjoint et aussi
les montants, là, qui sont disponibles.
M.
Schneeberger : O.K.
Ça veut dire qu'il y a une possibilité qu'elle y ait droit.
M. Blais : Hein?
M.
Schneeberger :
Vous dites qu'il y a une possibilité d'y avoir droit, selon le revenu du
conjoint. S'il est très élevé, à ce moment-là, il n'y aurait pas droit,
c'est ça?
M. Blais : Voilà.
M.
Schneeberger :
O.K., bon. Y a-tu un maximum de revenu du conjoint pour y avoir droit,
actuellement?
(Consultation)
M.
Blais : Alors là, ce qu'on me dit, là, je dirais, on répond à chaud,
là, on ne veut pas commettre d'erreur, ce serait 965 $ net, je
suppose? Oui, c'est exactement net, hein? Dollars. Donc, si un conjoint...
M.
Schneeberger :
Mensuellement, ça?
M. Blais : Oui, mensuellement.
M.
Schneeberger : O.K.
Ça, ce n'est pas...
M. Blais : C'est exactement la même
somme...
M.
Schneeberger :
...élevé, là.
M.
Blais : Oui, mais c'est exactement la même somme que ce à quoi un
couple a droit à l'aide sociale. Montant de base, là. À ça, ajoutez les
crédits d'impôt et autres choses, là.
M.
Schneeberger : O.K.
Ça veut dire, au-delà de ça, c'est rejeté.
M. Blais :
À vrai dire, là, on essaie de le faire correctement : 965 $, plus des
revenus de travail. Comme la personne... vous dites que la personne déjà a un travail, donc ça nous fait
maintenant — à moins
que je ne me trompe —
1 265 $ par mois. Et là on ne calcule pas les allocations
familiales pour les enfants, parce que c'est neutre, ça n'a pas d'effet.
M.
Schneeberger :
O.K. Bon. Alors, ça veut dire que ça, la personne qui s'est inscrite ou, en
tout cas, qui rencontre les règles s'en
va au programme Objectif emploi alors que l'autre conjoint travaille avec un
salaire assez bas par contre, là... Parce qu'il faut le dire, là :
Si quelqu'un fait 40 000 $, là, elle n'y a pas droit, là? O.K. Bon.
Je veux bien
formuler ma question, là. Alors, à ce moment-là, si la personne fait la
formation, soit aux formations acquisition
de connaissances ou recherche intensive d'emploi, ça veut dire qu'elle a un
montant supérieur à l'aide sociale régulière.
Est-ce que là, si elle ne trouve pas d'emploi, est-ce qu'elle va être coupée,
ou, si elle est capable de prouver qu'elle est en recherche active d'un
emploi, elle ne sera pas coupée?
M.
Blais : Oui. On traite de ça dans un des articles un peu plus loin,
là, c'est-à-dire de la question de l'emploi convenable, qu'est-ce que ça
signifie au juste.
M.
Schneeberger :
Non, non, mais, je veux dire, emploi, peu importe s'il y a une région, qui...
je veux dire, ça dépend aussi de la situation économique de la région,
là. Je pense qu'il faut en tenir compte.
M.
Blais : Ah! là, il y a un triangle vertueux dans tout ça, là... ou, en
tout cas, on espère qu'il soit vertueux. On prend en considération le souhait de la personne, on évalue ses
capacités aussi. Et on tient compte aussi de l'environnement dans lequel elle est. Si quelqu'un vous dit :
Moi, je veux devenir astronaute, bon, bien, là il y a un problème, hein, parce
que ce n'est pas réaliste. Il faut tenir
compte des capacités puis de l'environnement de la personne pour ne pas l'obliger,
par exemple, à déménager, hein, pour avoir un emploi.
M.
Schneeberger :
O.K. Bon. Bon, alors, à ce niveau-là, bon, elle suit le processus, et autres.
Alors, à ce moment-là, il n'y a pas
de pénalité en tant que telle, là, parce qu'elle suit le processus, et autres,
ce qui est tout à fait normal. Je pense que la majorité, là, qui ont perdu un emploi, ils ne veulent pas rester
sur l'aide sociale, ils veulent retourner travailler. Alors, s'il y a des formations ou acquisition de
compétences, là, tout à fait normal. En plus, elle a un revenu supplémentaire
qu'elle aurait à l'aide sociale régulière.
Maintenant, dans un cas de famille
monoparentale, est-ce que la personne qui fait une demande, avec deux, trois jeunes enfants ou un jeune enfant en très
bas âge, est considérée apte à l'emploi, selon sa situation familiale? Et là je
parle des enfants qui sont d'âge préscolaire.
M.
Blais : Que ce soit le cas à
l'aide sociale actuellement ou que ce soit le cas avec Objectif
emploi, une personne qui a des jeunes
enfants d'âge préscolaire est considérée comme ayant des contraintes
temporaires, hein, et donc on n'a pas à lui demander de participer. Si
jamais elle veut participer parce qu'elle s'est arrangée au niveau de la
garde...
M.
Schneeberger :
C'est ça. De toute manière...
M. Blais : ...c'est possible, mais il
n'y a pas d'obligation. Elle est considérée comme contrainte temporaire pendant
toute la période où les enfants sont de cet âge-là.
M.
Schneeberger : O.K. Ça veut dire que cette personne-là, si elle a un service de garde adéquat, proche, aurait peut-être avantage à faire une formation,
à participer au programme.
M.
Blais : Oui, mais je ne veux
pas commettre d'erreur, on va peut-être me faire un signal en arrière, mais, même quelqu'un... oui, quelqu'un dont les enfants sont d'âge préscolaire et qui
vont en service de garde, même à temps plein, je crois qu'il continue à
être considéré comme étant contrainte temporaire. Je ne me trompe pas, hein?
Non. Voilà.
M.
Schneeberger : O.K. Moi, c'est parce que j'essaie de regarder
l'amendement qui est proposé, c'est-à-dire je
voudrais savoir, cet amendement-là, à quelle personne, dans quelle situation
pourrait s'appliquer. Parce que là moi, je
veux bien mettre des amendements puis les comprendre, mais il faut
aussi que ça s'applique à quelques personnes. Parce que moi, je regarde, là,
les cas, peut-être c'est sûr qu'il y a des cas que
j'oublie, et autres, là, peut-être
que la députée de Gouin pourra me le dire, je veux bien approuver ou
appuyer un amendement, sauf que l'amendement, il faut aussi qu'il soit applicable, c'est-à-dire : Est-ce qu'il peut
s'appliquer à quelqu'un? Ou, s'il ne s'applique à personne, à ce moment-là,
il n'y a pas de raison d'être, là.
Et moi, si je
regarde avec les questions que je vous pose, je veux dire, on... Parce que là,
quand on parle d'absences, là, ou de
coupures, là, c'est des absences au niveau de l'emploi, c'est-à-dire qu'il y a
eu des emplois qu'elle s'est pris, mais est-ce que maintenant, si elle
perd... ses absences à plusieurs reprises, c'est-u pour des raisons de maladie,
des problématiques? Il faut les voir. Mais, non, ça, ça va être, je pense,
probablement être pris en compte, là.
M.
Blais : On fera poser la question, je pense, à la collègue qui a
déposé l'amendement, là, sur des cas précis, là. On a déjà parlé de cette question, je pense que le député de Saint-Jean
aussi est revenu là-dessus, on a eu des discussions là-dessus. Le Programme d'aide sociale, qu'on aime
ou qu'on n'aime pas, là, il s'adresse à des ménages, il est non individualisé;
donc, c'est la réalité. Sortir de ça, c'est
un travail important qui n'est pas... hein, c'est sortir de l'aide sociale tout
court et de trouver d'autres mécanismes de transferts.
Donc, à ce
moment-là, ce qui est important, c'est de dire que, bon, si un des membres du
couple doit participer à Objectif
emploi, reçoit la bonification, le couple en bénéficie, entre guillemets, là,
ça dépend des arrangements économiques, comme l'a dit le député de Saint-Jean. Puis il faut toujours être
prudent là-dessus. Si c'est le père, c'est bien sûr, on peut considérer que ça a une conséquence indirecte sur
le couple qui en bénéficiait hier et qui n'en bénéficie pas aujourd'hui,
mais, si le programme Objectif emploi
n'existait pas, il n'en aurait pas bénéficié non plus hier. Donc, c'est assez
difficile de résoudre le problème.
Pour résoudre vraiment le problème, il faudrait que l'aide sociale soit
totalement individualisée et là ça
causerait d'autres problèmes, là. Ça veut dire que le conjoint de la femme
dentiste a droit à l'aide sociale, là, c'est à peu près ça que ça
pourrait vouloir dire, là.
M.
Schneeberger : O.K. Non, c'est pour essayer de comprendre l'amendement. Parce que moi, j'ai un amendement qui a... bien, il n'est pas similaire, mais plus loin,
qui est en lien, mais c'est surtout au
niveau de quand on parle, au niveau
qu'est-ce qui est encore un emploi convenable au niveau des distances, et
autres, alors on pourra y revenir rendus là. Si, admettons, ce qu'on amène ici, il
faut que ce soit applicable, maintenant,
à qui ça s'applique et puis... Je ne sais pas, est-ce que la députée de Gouin pourrait me répondre? Est-ce
qu'elle a le droit? Je ne sais pas. Oui?
• (17 h 20) •
Le Président (M. Cousineau) :
On va lui passer la parole.
M.
Schneeberger :
Oui?
Le
Président (M. Cousineau) : Si vous me dites que vous avez terminé, je vais lui passer la parole
puis elle pourra vous répondre.
M.
Schneeberger :
Parfait. J'ai terminé, M. le Président.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord. Bon. Alors, merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Alors, Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Je sais qu'il me reste quelques minutes, donc ça va me
faire plaisir de...
Le Président (M. Cousineau) :
Il vous reste cinq minutes.
Mme
David (Gouin) : C'est ça.
Ça me fait plaisir de répondre à mon collègue le député
de Drummond—Bois-Francs. Un
couple à l'aide sociale reçoit 965 $ par mois. Après ça, il y a les allocations pour les enfants,
mais le ministre nous a dit — avec raison — que ça, ce n'est pas à l'aide sociale. C'est
des allocations pour les enfants, donc je ne les compte pas. Parce qu'on les compte ou on ne les compte
pas; celles-là, on ne les compte pas. Alors, c'est 965 $. Et, oui, ça
existe, des couples où les deux
personnes formant le couple sont malheureusement, là, pour un certain temps, à
l'aide sociale. Ça existe. Il y a des situations comme ça.
Évidemment,
le ministre nous dit : Bien, si une des deux personnes, c'est un nouveau
demandeur, donc il participe au
programme Objectif emploi, donc il a une allocation supplémentaire qu'il va
évidemment perdre s'il ne participe plus au programme. Bien oui, c'est
clair! Mais c'est déjà ça, hein? Quand on est à l'aide sociale puis qu'on
participe à un programme, on a une
allocation supplémentaire, puis, si on arrête de participer au programme, on
perd l'allocation supplémentaire. Ça,
ce n'est rien de nouveau, là. Ce qui est nouveau, c'est qu'il y a quand même
certaines allocations proposées par le ministre qui sont plus élevées
qu'en ce moment, mais le principe de l'allocation supplémentaire, là, lui, il
existe déjà.
Mais là ce
n'est pas de ça qu'on parle. Là, ce dont on parle, c'est d'une perte dans la
prestation de base. C'est clair que,
si on ne participe pas au programme ou si on n'y participe plus, on a perdu
l'allocation supplémentaire. Ça, c'est sûr, mais là on vient couper dans la prestation de base jusqu'à concurrence
de 200 $ par mois, ce qui veut dire qu'un couple à l'aide sociale, puisque l'aide sociale n'est pas
individualisée dans le cas de ce couple, dans les faits, là, n'aura plus
965 $ par mois, mais 765 $.
C'est ça que ça veut dire. Je sais bien que ça s'applique à l'un et pas à
l'autre, mais, quand on est dans ces
revenus-là, je ne sais même pas si on a deux comptes en banque, hein, parce que
ça coûte cher avoir des comptes en banque, en passant; de plus en plus cher. Donc,
il y a bien des chances qu'il y en ait un. Ça fait que c'est ça, la réalité,
là.
Je voudrais
aussi dire amicalement au député de Drummond—Bois-Francs que tout ce dont on discute ne touche pas que l'emploi. Quand on parle d'éliminer l'allocation supplémentaire, ce n'est pas seulement dans le cas où une personne refuse un emploi jugé convenable par l'agent
d'aide sociale, c'est dans le cas aussi où il y a manquement... hein, c'est
bien expliqué, là, soit, par exemple, au chapitre de la formation et de l'acquisition de compétences ou même
au développement des habiletés sociales. Puis ça, j'ai bien hâte qu'on
en discute, parce que je ne sais même pas comment on va faire pour
parler de manquement dans le cadre de ce programme-là.
Donc, ça ne
touche pas que l'emploi. Et je dirais aussi, peut-être moins aux collègues,
mais au ministre, qu'il a raison
de dire que, si on individualisait les prestations à la sécurité du revenu, ça
pourrait vouloir dire qu'une personne, épouse
ou époux de dentiste, pourrait théoriquement, là... théoriquement, parce qu'il
ne faut pas avoir de maison qui vaut trop
cher, etc. Je pense que, pour les dentistes, ça va assez bien, là, mais,
théoriquement, cette personne pourrait avoir de l'aide sociale. Mais savez-vous quoi? C'est ça, le revenu minimum
garanti. Et ça veut dire que toute personne adulte a un revenu propre
que l'État... évidemment, dans le cas d'un couple avec l'un des deux membres du
couple qui gagne 200 000 $... ou
je pense que je suis vraiment en bas, là, 500 000 $ par année, c'est
évident qu'on va reprendre tout ça par l'impôt, quand même; mais c'est
ça. C'est ça, le revenu minimum garanti, là.
Donc, de deux
choses l'une : ou on individualise les chèques d'aide sociale ou ne les
individualise pas. Si on ne les individualise
pas, et je pense que c'est dans cette situation qu'on est, la coupure qu'on fait aux chèques de
l'un touche forcément les conditions
de vie de l'autre. Et, si on ne veut pas que ça soit comme ça, il faut
individualiser les chèques. Mais on ne peut pas tout avoir, ici :
c'est un ou l'autre.
Alors, le ministre nous dit : Non, on
n'individualise pas. Très bien. Je lui réponds donc que l'application du programme Objectif emploi, tel qu'il le prévoit,
va affecter le revenu de l'autre membre du ménage et aussi des enfants.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. Alors, maintenant, je passe la parole à M. le député de... M. le ministre, est-ce
que vous aviez quelque chose à ajouter? Sinon, je m'en vais au député de...
M.
Blais : Bien, je n'ai pas
annoncé, aujourd'hui, qu'on n'allait pas individualiser l'aide sociale, hein? Alors donc, ce n'est
pas ça que j'ai voulu dire. C'est que, pour le moment, ce n'est pas
individualisé. J'ai dit que ça m'étonnerait que ça soit la meilleure solution d'individualiser l'aide sociale. Bien, il y a plusieurs choses que l'on peut faire pour
améliorer les transferts aux
personnes. Il faut trouver des solutions qui améliorent le net des actifs,
hein, tout d'abord, parce
qu'on ne peut pas améliorer le net
des inactifs si on n'améliore pas le net des actifs. Il faut trouver en même
temps la solution qui ne détériore
pas le net des inactifs, mais qui commence à diminuer... leur taux, hein, de
taxation implicite est tellement élevé, hein, que, bien sûr, ça ne les aide pas à
aller travailler. Et il y a l'enjeu difficile, mais nécessaire au XXIe siècle,
quelque part, de l'individualisation des
transferts. Et là il y aura des choix à faire, en termes de développement, pour
savoir quelles sont les priorités. Est-ce qu'on va sur le net des
actifs, sur la question des taux marginaux effectifs ou sur l'individualisation?
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui. Oui, M. le Président. Alors, la députée de Gouin a très bien
expliqué l'amendement qu'elle soumet
à cette commission, que je vais relire pour les gens qui l'ont entendu il y a
longtemps déjà : «Aucune disposition du présent chapitre ne peut avoir pour effet de diminuer le revenu d'une
famille sous le niveau de la prestation de base reconnue à l'article 56
du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles.»
L'aide
sociale n'est pas individualisée. Nous l'avons dit et redit : 965 $
par mois pour un couple — ce couple a des enfants — auxquels s'ajoutent des allocations pour les
enfants. Comment s'imaginer qu'un couple sans enfant, disons, puisse vivre avec moins de 965 $ par mois?
Car, c'est bien ce qui arrivera si un membre de ce couple participe au
programme, là, Objectif emploi et fait défaut de répondre aux
obligations du programme.
Ma collègue de Gouin
l'expliquait au député de Drummond—Bois-Francs : Ce n'est pas que son
allocation, l'allocation supplémentaire
qu'il reçoit pour sa participation au programme qui est coupée, c'est la
prestation même au couple qui est
réduite en fonction des manquements, des absences. 56 $, 112 $,
224 $ de moins que ces 965 $ versés au couple. Ça ne me paraît
pas, moi, faire de sens d'aller dans cette direction-là.
Et
mon collègue de Saint-Jean faisait bien d'attirer notre attention, tout à
l'heure, sur l'article 59 de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. C'est un article qui n'est pas prorogé,
hein, qu'on ne raie pas de la carte, là. Et il dit : «La prestation accordée à l'adulte seule ou à la
famille ne peut être réduite pour défaut d'entreprendre des démarches en vue
d'intégrer le marché du travail, notamment en cas de refus, d'abandon ou de
perte d'emploi.»
Alors, on oublie ça.
On oublie ça, ce beau grand principe là, puisque, pour un premier demandeur, il
faudra, n'est-ce pas, s'inscrire au
programme Objectif emploi, qui vise différentes choses : pas
simplement l'intégration au marché du
travail, là, mais plus question de prestation d'aide sociale pour quelqu'un
qui, premier demandeur, refuse de s'inscrire au programme Objectif emploi, et également pénalité dans la prestation
d'aide sociale même de celui ou de celle qui fait défaut de répondre aux
obligations du programme.
Alors,
il y a nette contradiction, là. On oublie ce qui est édicté par l'article 59 de
la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, M. le ministre.
• (17 h 30) •
M.
Blais : Bien, je ne pense pas qu'on l'oublie. Ça demeure là, ça
s'applique à des centaines de milliers de personnes à l'aide sociale. Mais le programme Objectif emploi
est plus spécifique, il s'adresse à un petit groupe. Il est important aussi
de rappeler, dans les discussions pour, disons, clarifier la portée du débat,
là, c'est que le programme Objectif emploi s'applique
pour une période de temps déterminée, hein? Dans le cas du Parti québécois, là,
leur programme, à l'époque, là,
c'était pour une période indéterminée, hein? Donc, ça pouvait durer tout le
temps, alors que, nous, c'est 12 mois de participation. Après 12 mois de participation, là, on pense qu'en
général on va avoir un certain succès. Voilà. Donc, ça explique, bien sûr... Et c'est un autre programme,
différent, avec des privilèges, pour bien le... hein, des avantages, mais
aussi des obligations, ça, c'est assez clair, mais pour une période de temps
limitée.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député.
M. Rochon :
Je comprends, M. le Président, qu'on fait de la politique, ici. Le ministre est
en politique, il réfère constamment aux législations, aux mesures, aux
règles sous le gouvernement du Parti québécois. J'aimerais lui faire remarquer qu'ici on essaie de faire une étude
sérieuse, rigoureuse du projet de loi de son gouvernement, là. C'est ça qu'on
est en train d'étudier, là.
Bon,
c'est sans doute de bon aloi, là, pour quelqu'un qui est politicien, de faire
ces références au passé. Mais je ne crois pas que ça fasse avancer
beaucoup le débat sur le projet de loi de ce jour, de cette législation-ci, que
d'y aller de remarques... sans cesse, là,
sur les législations, les mesures, les règlements sous un gouvernement
antérieur... puis qui n'est pas le
dernier gouvernement du Parti québécois. Il remonte à quoi, là? 1998, là?
Bientôt, il va parler de 1976, là. Je ne sais pas, il me semble que ça
n'ajoute pas grand-chose, là.
J'aimerais
le voir défendre, avec beaucoup de fougue, d'énergie et de conviction, son
projet de loi. Et nous avons été plusieurs
à dire qu'il n'a pas l'air de croire tant que ça aux mesures incluses dans le
programme formation emploi. J'en veux
pour preuve le débat qui a précédé celui-ci sur l'amendement de ma collègue de
Gouin, où il a refusé de dire que ce programme
allait offrir à ses participants des... je ne sais pas, je vais essayer de
retrouver le texte, là... «un accompagnement personnalisé en vue d'une intégration en emploi». Et il a souhaité se
limiter à dire qu'il visait à leur offrir ça. Bien, ce n'est pas montrer
beaucoup de conviction.
Mais,
de toute façon, sur l'amendement, là, que nous avons actuellement sous les
yeux, de ma collègue de Gouin, à l'effet qu'aucune disposition du
présent chapitre ne puisse avoir pour effet de diminuer le revenu d'une
famille, j'adhère à ça puisque c'est ce qui
va se produire. Ça va clairement... le ministre le dit, le confirme... non, il
n'y a pas de cachette, il ne s'en
cache pas : le revenu familial — ou du couple — se trouvera réduit par les obligations non
respectées par un membre de ce couple
en regard du programme formation emploi, des absences successives qui vont
réduire le revenu déjà maigre de ce couple.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M.
Blais : Non, ça va, M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : Ça va aller, oui?
M.
Schneeberger :
Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui, M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Oui. Merci, M. le Président. Tantôt, on
parlait, un couple, revenu de 965 $ mensuellement. Maintenant, deux personnes qui seraient... un
couple, deux premiers demandeurs d'aide sociale, avec la... Bon, ils suivent
la procédure. Finalement, les deux sont en
formation ou recherche, là, peu importe, là, participent au programme Objectif
emploi. À ce moment-là, au niveau... quel
revenu aurait le... étant donné qu'on parlait
d'un couple, là, quel aurait le revenu familial?
Une voix :
...
M.
Schneeberger :
Quel serait — excusez — le
revenu familial?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
La bonification, elle, est individualisée, hein? Donc, ce qui fait que ça
s'ajoute, ça se double.
M.
Schneeberger :
Comment?
M.
Blais : Ça
double. Donc, si, par exemple, pour une personne qui est, disons, un parcours
de formation, c'est bien 260 $ qui est indiqué sur la feuille, il me
semble, de mémoire, donc ça fait 520 $, là, donc. Comme c'est
individualisé, le montant double, là.
Comme les deux personnes... plus, bien sûr, l'aide sociale qu'ils ont comme
couple, là, comme ménage.
M.
Schneeberger :
Oui. Ça veut dire qu'un couple actuel, avec la loi actuelle, qui fait une
première demande, il aurait 965 $ — c'est bien ça — avec
le projet de loi, aurait 965 $ plus 520 $?
M.
Blais : C'est 965 $ plus 520 $. Ils reçoivent leur crédit
d'impôt, qui est peut-être 210 $ ou plus pour un couple...
M.
Schneeberger :
Oui. Bien, ça, le crédit d'impôt, ils l'ont déjà, là.
M. Blais :
Oui.
M.
Schneeberger :
O.K. On peut le calculer, là.
M.
Blais : Mais c'est pour voir un peu comment ils vont se débrouiller
dans la vie. Et ils ont droit chacun aussi à — il
faudra que je compte —
chacun 20 heures? 20 heures de travail rémunéré? Non, pas 20 heures,
mais 200 $? Ou 300 $. 300 $?
M.
Schneeberger :
O.K.
M.
Blais : Donc, pour le ménage, ils ont droit aussi à aller chercher
300 $ en rémunération sans avoir de diminution.
M.
Schneeberger :
Parfait. O.K. C'est-à-dire que c'est quand même un peu...
M. Blais :
Ça fait à peu près 20 000 $... 21 000 $ pour l'année. Pour
un couple sans enfant.
M.
Schneeberger :
Comment?
M. Blais :
C'est un couple sans enfant.
M.
Schneeberger : Oui, oui. Parfait. Non, non, je sais, là, on
va mettre la prestation de côté, étant donné que, peu importe la
situation au niveau des enfants, ça ne change pas. Bon, O.K.
Un autre cas, mais je prends le même couple. Les
deux participent au programme Objectif emploi. Par contre, un est insatisfait, parce qu'il dit : Moi, je
n'étais pas apte. On m'a qualifié, mais moi, je dis que je ne suis pas apte,
j'ai des problèmes, dépression ou
autres, peu importe, mais peu importe, mais je suis quand même
le processus. Se trouver un emploi,
absence de chaque jour, là elle revient à 726 $... là, on parle
individuelle, mais, bon, à ce
moment-là, ce serait la
prestation de 260 $ qu'elle perdrait. C'est ça?
M.
Blais : Attention! O.K., cette personne-là qui quitte le parcours,
c'est parce qu'il se révèle, dans son parcours, un problème qui est une
contrainte, là, à l'emploi ou à la participation, là, hein, on se comprend
bien? Donc, à ce moment-là,
là c'est un couple avec une personne ayant une contrainte sévère, une
contrainte temporaire, donc c'est une prestation qui est majorée à cause
de la reconnaissance de la contrainte.
M.
Schneeberger : Non,
non, non! Bien, ce n'est pas, là... on ne parle pas des... moi, je veux voir le
système, comment il marche, là. Alors là, mettons,
la personne, là, se trouve à la case 10, là, conséquence de l'absence,
diminution de l'allocation, et
autres. Bon, c'est sûr qu'elle a 726 $, mais là... Il faut comprendre, un
couple — parce
que l'amendement fait référence à une famille — à ce
moment-là, est-ce que c'est le 260 $ qui est coupé?
M. Blais : Bien là, si elle est à la
case 10, c'est un premier manquement, hein?
M.
Schneeberger : Oui.
M. Blais : Donc, c'est seulement...
M.
Schneeberger :
C'est 260 $ qui est coupé.
M.
Blais : ...le 260 $, mais une partie. Hein, c'est au prorata,
donc une partie du 260 $ qui est coupée. C'est bien ça?
M.
Schneeberger : Oui. Parfait. Alors, bon, maintenant
elle, elle dit : Regardez, moi, je vous l'avais bien dit, là, je
n'étais pas apte à autre... elle peut retourner à la case n° 5 pour
repasser une évaluation. C'est ça?
• (17 h 40) •
M. Blais : Bien, c'est-à-dire que, s'il
y a un manquement, il y avait peut-être des bonnes raisons, hein? Il y a peut-être...
qu'on s'aperçoit qu'elle n'est pas au bon endroit dans le bon parcours. C'est
sûr que, si elle revient, hein, suite à
une convocation notamment, là, d'un agent, pour positionner un petit peu le problème
puis dire : Écoutez, je pense que j'aurais besoin d'autre chose, un autre parcours, on... Tant que la
personne est dans une situation de participation... C'est
la dernière fois que je le fais, là, je le
jure, mais c'est aussi une différence avec le modèle du Parti québécois en 1998. Parce que, dans le
modèle du Parti québécois...
M.
Turcotte : ...
M.
Blais : ... — oui, c'est ça — il n'y avait pas une obligation de
participation, mais aussi une obligation de résultat, hein, par rapport à la prise d'emploi. Alors,
nous, on est plus dans la participation, hein? Donc, à ce moment-là, elle
retourne avec ses droits.
M.
Schneeberger :
Ça fait qu'à ce moment-là la personne, maintenant, elle pourrait être
reconduite, genre, au développement
des habiletés ou peu importe, ou même... Est-ce qu'elle pourrait maintenant
être transférée sous contrainte temporaire?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : À tout moment, une personne... par exemple, la conjointe dans
le couple tombe enceinte, à ce moment-là, elle est reconnue comme contrainte... contrainte temporaire,
excusez-moi, là. Le temps passe puis je suis un peu fatigué.
Bon, alors,
ça peut arriver à tout moment, pour différentes raisons, que son statut change.
À ce moment-là, encore une fois,
contrainte temporaire, ça peut vouloir dire qu'elle ne participe pas, mais il y
a des gens qui ont des contraintes, qui, pour différentes raisons,
participent, en tout cas, à certains programmes, puis ils veulent participer...
M.
Schneeberger : O.K.
Parfait.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger :
Non, c'est pour comprendre bien le système et y mettre des chiffres, surtout.
Parce que moi, je veux ça. Tu sais, je veux dire, le programme lui-même,
il est quand même avantageux, là, dans le sens qu'on peut s'y permettre de développer des habiletés, mais il
y a quand même, tu sais, une bonne avancée financière qui permet ça
aussi, là.
M. Blais : 21 000 $ pour
un couple, c'est une aide décente.
M.
Schneeberger :
Et puis avant d'être contrainte à ça, je veux dire, soit la personne peut avoir
totalement de mauvaises intentions, ou il y a quelqu'un au soutien, là,
qui n'a pas fait sa job comme il faut. C'est pour ça, moi, je...
Parce que
l'amendement qui est présenté, là, comme je vous disais tantôt, c'est de
trouver quelles personnes, elles auraient
ça. Mais moi, j'ai de la misère d'en trouver un peu, là. J'ai de la misère à
trouver des aviseurs de personnes qui pourraient...
Toujours, M. le Président, c'est important de le préciser : Si le
système mis en place marche comme il faut, on s'entend, là. Parce que là il faut croire au système lui-même. C'est
sûr que, si on n'y croit pas, bien là, on peut imaginer toutes sortes de
problématiques. Alors, ça va aller pour moi. C'est bon.
Le Président (M. Cousineau) :
D'accord, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Alors, je suis prêt à passer
la parole à M. le député de Saint-Jean. Il vous reste un beau deux minutes.
M.
Turcotte : Ah! ça sera suffisant, M. le Président.
J'aimerais déposer un sous-amendement, donc, qui se lit comme
suit : Après «Aucune disposition...»
Bien,
c'est l'article 83.1, bien entendu : Après «Aucune disposition du présent
chapitre ne peut», ajouter «aller à l'encontre
du principe de prestation minimale défini par l'article 15 de la Loi visant à
lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et».
Le
Président (M. Cousineau) : Oui. Nous allons suspendre, s'il
vous plaît, pour regarder votre sous-amendement. En faire des copies
pour distribuer votre sous-amendement aux membres de la commission. Alors, je
suspends.
(Suspension de la séance à
17 h 44)
(Reprise à 17 h 50)
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, nous reprenons nos travaux. Donc, nous avons un sous-amendement déposé par M. le député de Saint-Jean. Alors, M. le député, vous
pouvez nous expliquer votre sous-amendement?
M.
Turcotte :
Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : Et plaider.
M.
Turcotte :
Effectivement. On commence à être habitués un peu, hein, à déposer des
amendements. On se réchauffe un peu, ça va bien.
Le Président (M.
Cousineau) : On se réchauffe?
M.
Turcotte :
Ah oui! Ça va bien, ça va bien.
Le Président (M.
Cousineau) : Bon, on est déjà réchauffés.
M.
Turcotte : Donc, au fond, le sous-amendement vient bonifier,
si on peut dire, l'amendement de notre collègue la députée de Gouin, qui fait référence, pour sa part, à l'article 56 de
Règlement sur l'aide sociale aux personnes notamment. Dans ce cas-ci, nous disons, au fond, qu'on a pu
aller à l'encontre du principe de prestation minimale défini par l'article 15
de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
En
passant, petite parenthèse : dans notre bilan, hein, positif comme
négatif, on devrait mettre, à côté de la colonne des plus, l'adoption de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et
l'exclusion sociale, qui est une belle réalisation d'un gouvernement du Parti québécois. Donc, le
ministre, qui aime beaucoup l'histoire, pourrait ajouter ça dans la colonne
des plus dans notre bilan. Peut-être que, pour ça, on va avoir une étoile à la
fin de la journée.
Donc,
l'article 15. On mentionne, entre autres, «d'introduire le principe d'une
prestation minimale, soit un seuil en deçà
duquel une prestation ne peut être réduite en raison de l'application des
sanctions administratives, de la compensation ou du cumul de celles-ci».
Donc,
au fond, pour les mêmes raisons que nous avons intervenu sur l'article 59 de la
loi visant à aider les personnes et les
familles, si je ne me trompe pas... c'est ça, l'article 59, nous avons cru bon
d'ajouter le rappel de l'article 15 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui, au
fond, ajoute à peu près le même principe, mais sous un libellé différent, mais qui est plus général, donc
pour dire que, bon, une personne ne peut pas, là, être pénalisée outre un tel
montant, là. Donc, c'est pour ça qu'on parle
de prestations minimales. Donc, c'est la volonté de notre sous-amendement.
Le Président (M.
Cousineau) : D'accord, M. le député de Saint-Jean. M. le
ministre.
M.
Blais : Écoutez, je ne serai pas favorable à la proposition, non pas
parce que je suis défavorable à l'esprit, j'ai moi-même un amendement que j'ai fait préparer, il y a un certain temps,
pour l'article 83.10 qui porte sur les défauts, manquements et les
réductions, qui reprend presque mot à mot ce type d'amendement, donc le respect
de l'article 15 de la loi, là, sur la lutte à la pauvreté. Je pense que c'est
le meilleur endroit pour le mettre. Donc, je vais être contre la proposition, simplement parce qu'on va la placer
au meilleur endroit, puis le député de Saint-Jean aura l'occasion de voir
qu'effectivement, là, c'est vraiment équivalent à sa formulation.
Le
Président (M. Cousineau) : Je pourrais peut-être faire une
suggestion à ce moment-ci. Votre amendement que vous voulez introduire à l'article 83.10, si nous pouvions en avoir
une copie pour les membres de la commission... Durant l'heure du repas, le député de Saint-Jean va jeter un petit coup
d'oeil puis peut-être que, suite au repas, il va peut-être nous retirer
son amendement, on ne sait jamais. Alors, c'est une suggestion que je fais.
Soyez bien libre.
M. Blais : On va regarder ça, M. le
Président. On pourra le regarder si on l'a avec nous.
Le Président (M.
Cousineau) : D'accord.
(Consultation)
Le
Président (M. Cousineau) : Dans mon cas, c'est toujours dans le
but de sauver du temps et des discussions inutiles. Alors, remarquez
bien que je ne veux pas mettre du gaz sur le feu, il fait assez chaud.
Des voix : Ha, ha, ha!
(Consultation)
Le Président (M. Cousineau) :
On va suspendre une petite minute.
(Suspension de la séance à 17 h 55)
(Reprise à 17 h 56)
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, dans ce cas-ci, M. le
ministre, on ne dépose pas, on ne
fait seulement que le distribuer pour que les parlementaires
puissent en prendre connaissance.
M. Blais : O.K. Donc, on ne dépose
pas, mais tout simplement le distribuer. C'est ça?
Le
Président (M. Cousineau) : Oui. Parce qu'officiellement
on déposera l'amendement lorsqu'on va arriver à l'article 10.3. Mais,
pour fins de vérification durant l'heure du souper, là, ça sera...
Alors, nous poursuivons. Alors, si vous voulez
continuer à discuter sur le sous-amendement...
M.
Turcotte :
Bien, M. le Président, c'est un peu difficile de poursuivre tant qu'on ne voit
pas le texte. Je ne sais pas si, pour
les... Il reste à peu près quatre minutes, là, je ne sais pas qu'est-ce que le
ministre... Parce qu'on peut jaser pendant quatre minutes puis on va
étirer pour étirer.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui... la proposition, moi.
M.
Turcotte : Oui.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord? C'est qu'on ajourne...
Excusez. On suspend nos travaux jusqu'à 19 h 30. Étant donné qu'il reste trois minutes, ça vous
fera un beau trois minutes supplémentaires pour le souper. Ça va comme
ça? Consentement, tout le monde?
Des voix : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Parfait, merci.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
(Reprise à 19 h 34)
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, à l'ordre, s'il vous
plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
Je vous
rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du
projet de loi n° 70, Loi visant à
permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à
favoriser l'intégration en emploi. Lors de la suspension de nos travaux, nous avions débuté l'étude du sous-amendement
du député de Saint-Jean à l'amendement de la députée de Gouin à
l'article 83.1 proposé par l'article 28.
Alors, je
suis prêt à entendre les interventions. M. le député de Saint-Jean, nous sommes
sur votre sous-amendement. Le
ministre nous avait transmis la copie d'un amendement qu'il entend proposer au
83.10. Alors, je vous laisse discuter, M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Effectivement, l'amendement que le ministre compte déposer
pour l'article 83.10, même si nous sommes
opposés à une partie de l'amendement, même de l'article, qui est, bon... de l'obligation, force est de constater que l'idée que nous voulions faire en sorte que la prestation minimale, telle que prévue dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et
l'exclusion sociale, soit inscrite dans la loi... force est de constater que,
pour cet objectif-là, l'amendement du ministre répond à cet objectif-là.
Je crois que, bon, les gens du ministère,
l'équipe du ministre ont décidé que c'était le meilleur endroit et la
meilleure façon d'introduire ce
principe-là. Donc, ce que j'aimerais peut-être, vu que je n'ai pas eu l'occasion
d'entendre les collègues des
autres formations politiques, ça serait peut-être bien de voir si les collègues
ont des commentaires, et, suite à ça, on pourra voir qu'est-ce
qu'on fait pour la suite des choses.
Le Président (M.
Cousineau) : Je n'ai pas de problème avec ça. Oui, Mme la
députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. J'ai parfois l'impression d'être une
élève à l'école...
Le Président (M.
Cousineau) : Non, ça va.
Mme David
(Gouin) : ...hein, qui se dépêche de lever la main.
Je comprends très
bien ce qui est en cause. Par contre, deux commentaires; peut-être que le ministre
pourra nous éclairer. Le sous-amendement du collègue introduit à l'article 83.1
indique qu'«aucune disposition du présent chapitre — aucune — ne
peut aller à l'encontre du principe de prestation minimale», hein? Aucune disposition.
Dans
son caractère général et absolu, moi, j'aime bien cette formulation. La... Le...
Voyons! Pardon. Excusez-moi, là. L'amendement du ministre, oui, reprend une partie de la formulation du député de
Saint-Jean, mais inscrit cette question de
la prestation minimale dans tout un paragraphe, donc le remplacement du premier alinéa par le suivant, là. Et là on a
la totale, c'est-à-dire toute la question de faire défaut de se présenter à une entrevue,
manquer à un engagement, bon, le montant est réduit... le montant
de la prestation de l'adulte seul ou de la famille.
Je vous rappelle que
j'ai encore, sur la table, un amendement qui dit que les revenus généraux des
familles ne peuvent être atteints par le projet de loi. Donc là, je trouve, moi, qu'il
y a un problème. Et puis ce que je pense
aussi, mais je ne suis pas trop
certaine de l'interprétation : ma compréhension du paragraphe
2° de l'article 15 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion, là, c'est que, quand on parle du
«principe d'une prestation minimale», moi, je doute fort que ramenée aux chiffres d'aujourd'hui, 2016, 14 ans plus tard, on parle d'une prestation qui pourrait être limitée
à 400 $ par mois.
Si
c'est ça, une prestation minimale à l'aide sociale, là, on a des gros, gros
problèmes dans la vie, là. Donc, je trouve qu'il y a un certain nombre de problèmes au fait de, mettons, laisser de
côté le sous-amendement du collègue en se disant : Bien, ce
n'est pas grave, le ministre apportera un amendement à 83.10. C'est, pour le
moment, ma compréhension de la situation.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui. Puis, à ce moment-ci, moi, en tant que
président, je veux disposer du sous-amendement
du député de Saint-Jean. Évidemment, là, le ministre nous a donné, pour fins
d'analyse, son amendement à 83.10.
Lorsqu'on sera rendus là, il y aura peut-être lieu de voir si on l'amende ou
pas ou... ça sera votre prérogative. Mais,
pour l'instant, moi, j'aimerais qu'on s'en tienne au sous-amendement du député
de Saint-Jean. L'amendement, est-ce qu'on
en discute ou on le retire puis on attend au 83.10 pour être capables de
bonifier ce que le ministre a mis sur la table? Parce que moi, je ne veux pas qu'on entre dans le 83.10, l'amendement du
ministre, puis commencer à en discuter alors qu'on a des choses sur la
table, là, présentement.
Alors, M. le député
de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
O.K. Bien, je voulais juste...
Le Président (M.
Cousineau) : Le fardeau est sur vos épaules.
M.
Turcotte :
Ah non! Mais je voulais m'assurer que chacun des députés puisse s'exprimer
librement.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui, oui, c'est tout à fait correct, parce que...
• (19 h 40) •
M.
Turcotte : Donc, vous savez, M. le Président, depuis le
début, en quelques occasions, le ministre nous a dit : Il y a des éléments qu'on est d'accord avec le
principe de ce que vous... bien, pas le principe, là, c'est un peu gros, là...
on est d'accord avec le fond de vos
amendements, mais certains éléments reviendront à tel article, etc. Et là, par
cohérence, nous, à ce moment-là, nous
avons dit, puis mon collègue le député de Richelieu a mentionné : Nous
aimerions que ça soit inscrit dans l'article fondateur, hein? Il l'a dit
l'expression «l'article fondateur» du projet de loi.
Bon,
pour le ministre, ce n'est peut-être pas l'article fondateur, là, mais, à notre
lecture, c'est du moins l'article, actuellement,
83.1, qui présente l'objectif du programme Objectif emploi. Et, à notre
lecture, là, si, dans le paragraphe dans
l'article initial du programme Objectif emploi, on y inscrit ce principe-là
qui, à notre lecture, là, est important, là, parce que, bon, on vient maintenir le principe de la prestation
minimale, bien, on considère que c'est plus clair et ça lance un message plus fort de l'avoir dans ce qu'on
appelle — bon, on
va reprendre l'expression — «l'article fondateur» du programme.
Donc, nous, c'est
notre lecture qu'on fait. Donc, je crois que, pour l'instant, on peut
poursuivre le débat sur le sous-amendement.
Je ne sais pas s'il y a des collègues qui ont des choses à dire sur le
sous-amendement qui est sur la table
actuellement, mais je crois que, par cohérence avec ce que nous avons déjà dit,
nous considérons que ce principe-là, cet élément-là devrait se retrouver
dans l'article premier du programme Objectif emploi.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, la discussion est ouverte sur
le sous-amendement, là, que vous avez déposé. Oui, M. le député de
Richelieu.
M. Rochon : J'aurais bien une question pour le ministre, M.
le Président. Que nous référions, dès l'article 83.1, à l'article 15 de la Loi visant à lutter contre la
pauvreté et l'exclusion sociale, ou que nous y référions plus tard dans le
projet de loi, comme semble plutôt souhaiter
le ministre, j'aimerais l'entendre sur la notion de prestation minimale. Car,
s'il est intéressant d'introduire ce
principe d'une prestation minimale, «soit [d'un] seuil en deçà duquel une prestation
ne peut être réduite en raison»... Là, je
lis là, le 2° de l'article 15 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et
l'exclusion sociale. Alors : «2°
d'introduire le principe d'une prestation minimale, soit un seuil en deçà
duquel une prestation ne peut être
réduite en raison de l'application des sanctions administratives, de la
compensation ou du cumul de celles-ci.» J'aimerais savoir si le ministre a une idée plus précise de
cette prestation minimale. Qu'est-ce que c'est, pour lui, une prestation
minimale?
Le Président (M.
Cousineau) : Bon. Là, je comprends qu'on discute le
sous-amendement du député...
M. Rochon :
Absolument.
Le Président (M.
Cousineau) : ...du député de Saint-Jean.
M. Rochon :
Absolument.
Le Président (M.
Cousineau) : Donc, on est là-dessus.
M. Rochon :
Voilà. Voilà.
Le
Président (M. Cousineau) : Donc, on laisse de côté ce que le
ministre nous a apporté pour fins de réflexion sur l'heure du souper.
Donc, M. le ministre, vous avez une question en provenance...
M.
Blais : Bien, je ne sais pas si la question est... n'est peut-être pas
personnelle, ou pour moi, ou qu'est-ce que ça signifie, là, mais,
disons...
M. Rochon :
Qu'est-ce que ça signifie.
M.
Blais : ...au sens des pratiques et de la loi, c'est défini par
règlement. C'est déjà défini par règlement, aujourd'hui, là. Donc, la
prestation minimale, c'est quel règlement, donc?
Une voix :
...
M.
Blais : De l'aide sociale, non. Mais c'est le numéro... à l'article,
là... vous allez trouver ça à l'article... 188, pardon, et le montant de la retenue est diminué jusqu'à concurrence de
50 %. Donc, on a déjà des retenues à l'aide sociale, dans le cas de fraude, qui peuvent aller jusqu'à
50 %. Vous trouvez ça beaucoup, mais, dans la réforme de 1998 du Parti
québécois, c'était plus que 50 %, hein, c'était à peu près 60 %.
M. Rochon :
Alors, c'est 623 $ divisé par deux, il reste 311,50 $, quelque chose
comme ça, là, au prestataire. C'est ce qui est la prestation minimale
prévue au règlement.
M. Blais :
Oui, voilà. Voilà.
M. Rochon :
C'est une information utile à connaître, n'est-ce pas?
Le Président (M.
Cousineau) : Toujours sur le sous-amendement?
M.
Turcotte : Bien, je ne sais pas, mais le ministre fait
référence effectivement aux éléments du Parti québécois de l'époque. Juste pour notre gouverne à tous, sur
l'heure du souper, en prenant quelques bouchées, j'ai retrouvé, dans mes
archives, un dépliant qui... bon, sur le colloque L'avenir et la
social-démocratie dans le contexte de la mondialisation du 27 et 28 septembre 1997, colloque organisé par le Parti québécois,
où, effectivement, le ministre actuel était présent comme conférencier
sur Le revenu de citoyenneté. Et on peut voir effectivement une époque
où, peut-être, il... bon, il présentait,
bien entendu, des éléments... c'était un chercheur réputé sur la question, là,
quand même, il faut le dire, là, c'est un
acteur important. Cependant, ça nous amène à toute cette réflexion-là
actuellement sur le contexte de l'époque versus le contexte d'aujourd'hui. Et moi, je crois, M. le
Président, qu'il est toujours périlleux de faire des comparaisons entre une
mesure à une époque, une mesure aujourd'hui,
par rapport au contexte. Donc, je voulais juste qu'on en tienne compte,
M. le Président, à ce sujet-là.
Mais,
si, en 1998, j'étais au berceau, en 1997, là, je devais être pas loin de la
pouponnière, donc, malheureusement, je n'ai pas pu assister à cette
conférence-là...
M. Blais :
Ou un projet.
M.
Turcotte :
... — ou
un projet — mais,
en tout cas, j'avais fouillé si on est... On a le verbatim de cette
conférence-là. Mais moi, je crois que c'était très intéressant, sûrement, cette
conférence-là, donc on pourra y revenir plus tard, mais je trouvais ça intéressant de...
bien, pas intéressant, mais important de rappeler, bon, des époques
différentes, des contextes
différents, des mesures différentes dans certains cas. Et le ministre, tantôt,
m'a comme chuchoté... quand j'ai dit
la question : Bien, à l'époque, peut-être qu'on s'est aperçus que ça ne
fonctionnait pas, le ministre m'a chuchoté que ça fonctionnait. Donc, je serais curieux de voir, quand il parle que
ça fonctionnait, donc, si ça fonctionnait, pourquoi il se sert de cet argument-là ou de cet élément-là
pour dire que ce n'était pas une bonne chose à l'époque versus aujourd'hui.
Donc, on pourrait embarquer dans ce long
débat là, mais, nous, ça va nous faire plaisir d'être abreuvés de ces
informations-là.
Mais, au-delà
de ça, il y a quand même des éléments fondamentaux, actuellement, qui sont sur
la table, qui font en sorte que, bon,
on le voit, là, que... mon collègue l'a mentionné, là, sur la question de la
prestation minimale, moi, je trouve qu'en
lien justement, là... c'était le revenu de citoyenneté ou qu'on parle du revenu
garanti pour tous, peu importe, il y a un élément qui reste, selon moi, fondamental, que notre collègue la députée
de Gouin a aussi rappelé aussi tantôt, sur le fait que, si, dans un contexte où le ministre nous dit
que là il n'est pas... il ne nous dit pas que l'individualisation des
prestations ne se fera pas, il ne
nous dit pas que ça va se faire non plus, mais notre collègue la députée de
Gouin a mentionné que, dans l'exemple
d'un conjoint dentiste, sa femme, effectivement, pourrait... son épouse pourrait
être sur l'aide sociale, c'est le principe du revenu minimum garanti un
peu, c'est ce que notre collègue a mentionné...
Bien, si on
veut faire le débat de société du revenu minimum garanti, ce que je crois que
le ministre veut faire, c'est ce qu'il a mentionné un peu lors des
crédits, là, suite à des questions des collègues et lorsque j'ai aussi posé des
questions à ce sujet-là, il y a aussi le
mandat du premier ministre à cette question-là... Et aussi en parallèle de ça,
puis on n'en parle pas beaucoup ici, là, mais on est en train d'étudier
un projet de loi qui pourra peut-être être éventuellement modifié, s'il est adopté, par un plan de lutte...
à une stratégie, là, de lutte à la pauvreté, à l'exclusion sociale, qui est en
consultations actuellement, pas aussi
publiques que nous le souhaiterions, mais c'est un autre sujet... mais, quand
même, qui aura des impacts éventuellement.
Donc, il ne
faut pas tout mélanger, là, parce qu'on n'y arrivera pas. Déjà que le ministre
trouve que ça ne va pas assez vite, là... Au début, il trouvait que ça
allait trop vite; là, il trouve que ça ne va pas assez vite. Ça fait qu'on n'en
y ajoutera pas parce que, comme on l'a dit
tantôt, la cour est pleine, là, hein? On va y aller étape par étape, article
par article. Dans ce cas-ci,
sous-amendement par amendement, tu sais? Et, pour l'instant, moi, je veux
maintenir mon sous-amendement pour permettre aux collègues, s'ils ont
des choses à dire sur la question...
• (19 h 50) •
Le
Président (M. Cousineau) : Dans mon livre à moi, nous sommes
sur le sous-amendement. Et le temps court sur le sous-amendement.
M.
Turcotte : Vous
avez un très bon livre.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, d'autres interventions
sur le sous-amendement? Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) : Oui. Oui,
j'arrive, M. le Président.
Une voix : ...
Mme David (Gouin) : Sur le
sous-amendement?
Le Président (M. Cousineau) :
Bien oui.
Mme David (Gouin) : O.K. J'aimerais
rappeler... Moi aussi, je vais faire un peu d'histoire, tiens! Surtout qu'il y a des personnages historiques qui sont
présents, ici, dans cette salle. Puis je pense qu'il y a des choses qu'il faut
vraiment rappeler. Le ministre nous parle... et je vais être sur le sous-amendement,
vous allez voir.
Le Président (M. Cousineau) :
Parfait.
Mme David
(Gouin) : Le ministre nous parle souvent de réciprocité, de contrat
moral, tout ça. Moi, je voudrais rappeler
qu'en 2002, à l'unanimité de cette Chambre, on s'est donné un contrat
moral — ça, je
l'ai déjà dit — mais je
voudrais rappeler ce qui a précédé cette
adoption du projet de loi, donc, n° 112 contre la pauvreté et l'exclusion
sociale. Je voudrais rappeler que,
dès, ma foi, 1997 ou 1998, là, les dates m'échappent un petit peu, un
extraordinaire mouvement a vu le
jour, au Québec, sous l'égide d'une coalition qui s'est appelée finalement le
collectif contre la pauvreté et l'exclusion sociale ou, enfin, à
l'époque, c'était le collectif pour l'élimination de la pauvreté, un
extraordinaire mouvement.
J'aimerais
rappeler que 250 000 personnes, à travers le Québec, ont signé une
pétition réclamant cette loi-cadre — 250 000 personnes, c'est quand
même assez rare, ça — qu'il y
a eu, je me souviens très bien parce que j'y ai participé, bien entendu, un parlement de la rue, pas loin d'ici, là,
juste derrière la fontaine, une roulotte. Il me semble que c'était en
novembre; en tout cas, il ne faisait pas chaud, chaud. Et là se succédaient,
pendant plusieurs journées, des personnes qui venaient intervenir sur la
question de la pauvreté, puis on travaillait à l'élaboration d'un projet de
loi. Il y a eu un jeûne, le jeûne du Refus
de la misère, à l'église, dans la Basse-Ville. Je ne me rappelle plus du nom de
l'église, mais je sais que j'ai jeûné
24 heures. Ça, je m'en rappelle. Bref, un extraordinaire mouvement, des
tonnes de municipalités qui ont signé
des pétitions, qui ont signé des lettres. C'était un mouvement, je dirais, de
l'ensemble du Québec. Et là on n'était
pas dans la partisanerie, là, mais vraiment pas, là, c'était un mouvement de la
société civile, initié par Vivian Labrie, qui est ici avec nous, et qui a, finalement, après
bien des péripéties que je vous passe, abouti à la loi, donc, qui a été adoptée en décembre 2002. Un grand
moment, à l'Assemblée nationale. Puis, comme j'avais quand même un peu participé à tout ça avec la Fédération des
femmes du Québec, un grand moment pour moi aussi, surtout qu'en 2000, lors de la Marche mondiale des femmes, disons
qu'on avait été déçues sur... en tout cas, par rapport à cette demande-là...
Mais finalement, bon, entre 2000 et 2002, on
retrousse les manches, hein, on continue, puis finalement tout le monde est
d'accord. Tout le monde est d'accord.
Puis là il y
en avait un, contrat moral. Et le contrat moral, c'était : le Québec va se
donner tous les moyens nécessaires
pour sortir les gens de la pauvreté avec vraiment cet espoir que, 10 ou 15 ans
plus tard, je ne me rappelle pas exactement
du laps de temps qu'on s'était donné, mais pas beaucoup plus que ça, des
personnes vivant dans une pauvreté absolue,
au Québec, il n'y en aurait plus. Je vous jure qu'on est pas mal loin de ça,
là. Après, il y a eu des plans d'action, certains plus intéressants, d'autres plus timides. Il y a un conseil,
là, contre la pauvreté et l'exclusion, qui a vu le jour. On s'est quand même donné des outils. Le contrat
moral, c'était ça. C'était une société qui décidait entre elle, là, entre les
membres de cette société, de lutter contre la pauvreté.
Et je
voudrais rappeler — dont
j'ai le texte ici — qu'en
2004, on a adopté, donc, le premier plan d'action, hein, qui faisait suite à la loi qui a été adoptée en
2002, et je vous en lis un petit bout parce que ça devrait inspirer nos discussions de ce soir. Ça s'intitule Un barème plancher à l'aide
sociale. Ça aussi, là, il y a eu une époque où on
était pas mal dans la bataille du
barème plancher pour finalement le retrouver dans ce plan d'action adopté.
Tout ça, là, moi, je vous parle de choses
adoptées, hein? Et ça dit ceci : «Pour protéger les prestataires de
l'assistance-emploi contre une réduction trop sévère de leur prestation, le principe d'une prestation
minimale au Programme d'assistance-emploi sera inscrit dans la Loi sur le
soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale.»
Ce qui s'en vient est encore plus important.
«Ainsi, 100 % de la prestation de base à laquelle une personne a actuellement droit sera protégée contre les sanctions administratives, sauf dans les
cas de fraude ou de remboursement
d'une dette.» Ce n'est pas de ça qu'on est en train de parler, là. On parle ni
de fraude ni de remboursement de dette.
«Avec
l'introduction d'un tel barème plancher, le principe de réciprocité s'appuiera dorénavant, dans les suites de l'évolution du Régime de sécurité du revenu, sur des
approches incitatives plutôt que punitives. En faisant confiance aux personnes, le gouvernement — 2005,
gouvernement libéral, en passant, hein — a choisi de favoriser l'effort volontaire
des personnes. Cette mesure représentera des
investissements de 38 millions de dollars et entrera en vigueur le 1er
avril 2005.»
Je ne sais
pas, M. le Président, si je vais finir par regretter Jean Charest, là. Mais on
parle d'investir 38 millions de dollars.
On parle d'approches incitatives plutôt que punitives. On parle d'un barème
plancher qui, sauf dans les cas de fraude, doit être au plan de la prestation
de base. Puis ça, c'est un contrat moral, c'est écrit en toutes lettres. Puis
c'est un contrat moral que le
gouvernement actuel, sans le début d'un mandat pour ce faire, parce qu'il n'a
jamais parlé de ça en campagne électorale, ce contrat moral, le
gouvernement est en train d'en faire fi.
Alors, je ne
peux faire autrement que d'appuyer, de façon importante, le sous-amendement de
mon collègue et en clarifiant
clairement que le principe de prestation minimale, comme c'est écrit ici, là,
doit s'appliquer à ce qui a été décidé dans
le premier plan d'action sur l'aide sociale, plan d'action qui n'a jamais été
démenti par la suite. On n'a jamais décidé, collectivement, que la prestation minimale serait autre chose que ce qui
est écrit là. Mais c'est ce que le ministre voudrait qu'on décide, maintenant, en 2016, avec un débat
public qui, oui, a eu lieu en commission parlementaire, quand on a entendu
je ne sais plus combien de dizaines de
groupes venir nous voir et nous dire, dans 90 %, 95 % des cas, qu'ils
étaient contre le fait de diminuer la
prestation minimale. C'est le seul débat public qu'il y a eu. Ça n'a pas un
enjeu électoral. Il y a eu une
commission parlementaire, c'est démocratique, débat public, tout le monde,
presque, dit : On est contre. Le ministre, lui, il est pour. Puis là il veut essayer de faire passer ça à
l'encontre de la loi n° 112, à l'encontre du plan d'action de 2005.
Alors, moi, je pense que le collègue a raison
d'apporter son sous-amendement puis de dire qu'il n'y a aucune disposition du chapitre dont on est en train de
discuter, là, qui peut aller à l'encontre du principe de prestation minimale.
Puis il faut vraiment comprendre la
prestation minimale telle que définie dans le plan d'action. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre?
M.
Blais : Oui. Peut-être une petite remarque. Donc, depuis l'adoption de
la loi-cadre, le Québec n'a fait aucun progrès
dans la diminution de la pauvreté. On était à peu près à 10,8 %, j'ai vu
tout à l'heure. Dans les chiffres, on était à 10,8 %, donc aucun
progrès.
J'ai une
théorie là-dessus, c'est que ceux qui ont fait des progrès sur ces
questions-là... et entre autres le Québec... la situation n'est pas si pire que ça, là. Quand on regarde les 65 ans
et plus, il a une position enviable au Canada. Donc, c'est quand même une position qui est
intéressante, hein? Quand on étudie un peu ces questions des sociétés qui ont
fait des progrès, ils n'ont pas fait
des progrès par des lois, mais par des arrangements institutionnels
intelligents — différents
types d'arrangements institutionnels.
Si vous
réussissez, de différentes façons, hein, si vous réussissez, donc, à sortir des
personnes de l'aide sociale, des
personnes qui ne devraient pas y être, qui ont des capacités, peut-être
différentes, mais qui ont des capacités, vous avez une chance d'avoir un impact, donc, sur la pauvreté, uniquement
parce que ces personnes-là, qui étaient, hier, à l'aide sociale, sont
allées chercher une qualification et peuvent commencer une vie, là, différente.
• (20 heures) •
Donc, il ne
faut pas penser que la lutte contre la pauvreté part du Programme d'aide
sociale. Parce que je l'ai dit en
1997 et je le redis aujourd'hui : Le Programme d'aide sociale, c'est un programme de dernier recours,
dont les capacités à lutter contre la
pauvreté sont à peu près nulles, hein? Elles luttent contre la pauvreté
extrême, mais pas contre les seuils de faibles revenus, tout simplement parce
que ces seuils-là sont définis notamment par le niveau du salaire minimum.
Donc,
on est aussi dans une perspective de lutte contre la pauvreté. On essaie de
dire à des gens, là, qui ont vraiment
un potentiel de s'en sortir... un potentiel — ils
ne s'en sortiront pas tous, hein — qu'on
peut les aider à pousser leur capital humain. Et ça, je veux dire,
toutes les sociétés avancées, quels que soient les moyens qu'ils peuvent
prendre, puis je reconnais que les moyens peuvent être différents, cherchent à
pousser, hein, les jeunes notamment, les plus âgés à développer leur capital humain. C'est la raison pour laquelle, par exemple, l'instruction est obligatoire jusqu'à 16 ans. Qui
sait, peut-être, un peu plus
tard, à 18 ans. On a cette idée qu'il faut
pousser, hein, les gens — parfois,
un petit peu malgré eux — vers
des chemins où ils n'iraient pas naturellement, parce
qu'ils peuvent faire des gains, augmenter la valeur de leur capital
humain, ce qui va les accompagner pour le reste de leur vie. Donc, on est dans
cette optique-là.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. J'aimerais quand même signaler au
ministre, là, que, si on part de 2005,
il y a 518 000 prestataires de dernier recours, il y en a 449 000
aujourd'hui, hein? Donc, on s'entend qu'il y a quand même une diminution
du nombre de prestataires de l'aide de dernier recours.
M.
Blais : Pas à cause de la loi. Cela n'a aucun rapport avec la loi. On
n'aurait pas eu la loi puis on aurait eu la même diminution.
Mme David
(Gouin) : Je comprends que tout ça, ça se discute, M. le Président,
mais je dis tout de même que, quand
le ministre dit : On n'a pas eu de succès dans la lutte à la pauvreté, je
pense qu'il y a eu certains succès relatifs.
Maintenant,
là où je suis d'accord avec le ministre... enfin, si tant est que c'est ce
qu'il a voulu dire, la lutte à la pauvreté
ne se résume pas, de toute façon, ni à une seule loi ni à une seule mesure...
c'est évident qu'il faut, pour lutter contre
la pauvreté, des plans d'action globaux qui incluent pas mal de paramètres; ça,
c'est évident qu'on va s'entendre là-dessus.
Je ne sais pas si on va s'entendre aussi sur ce que je vais dire tout de suite
après, mais il n'y a pas que les gens à l'aide sociale qui sont pauvres au Québec, là, il y a plein de gens au
salaire minimum qui vont dans les banques alimentaires.
Le ministre
sait certainement que maintenant, en 2016, 10 % des personnes qui
recourent aux banques alimentaires sont
des travailleurs et des travailleuses. Il y a le travail atypique, il y a le
travail occasionnel, il y a le travail à temps partiel, ce sont tous des facteurs qui concourent à
maintenir, je dirais, un niveau soit de pauvreté ou carrément de faibles
revenus, c'est-à-dire des gens qui
sont sous les seuils de faibles revenus à partir desquels une personne ou une
famille peut vraiment estimer, là,
qu'on a de quoi vivre, on a de quoi espérer un peu puis peut-être se payer une
semaine de vacances par année.
On n'en est pas là, et, si le ministre insiste,
je pourrais lui faire la liste, ça me ferait plaisir, c'est dans le programme de Québec solidaire, de tout ce qu'il
faudrait faire pour lutter contre la pauvreté. Mais c'est sûr que c'est global.
Ça part de la petite enfance, en passant par
l'école, les services de santé, les services sociaux, les centres jeunesse. Bon,
bref, il y a tout un ensemble de facteurs. Le logement, tiens! Le logement. Le
logement. Alors, c'est clair.
Maintenant,
c'est sûr que ce que j'aurais envie de lui demander, mais je pense que je ne lui
demanderai même pas, c'est :
Qu'est-ce que son gouvernement entend faire pour se donner un plan global de
lutte à la pauvreté? Combien son
gouvernement compte investir dans la lutte à la pauvreté? Va-t-il investir
autant que dans les revenus des médecins, par exemple? Bon. Mais je vais m'abstenir pour rappeler quand même au
ministre que, quand on veut briser un contrat moral, il faut qu'on ait
des sacrées bonnes raisons. Et je les cherche encore.
Pourquoi
briser le contrat moral qu'on s'est donné en 2002 et qu'on a réitéré en 2005
dans un plan d'action qui dit clairement
qu'on ne peut pas aller en bas de la prestation minimale, sauf en cas de
fraude? Pourquoi? Comment est-ce qu'on
peut briser ce contrat moral qu'on s'est donné collectivement? Si le ministre
me répète : Parce qu'il y a des jeunes issus de familles à l'aide sociale qui, à 18 ans, sont à l'aide sociale,
c'est sans fin parce que, moi, ce que je vais lui répondre, c'est : Qu'on s'en occupe avant 18 ans et,
comme ça, à 18 ans, il y a des bonnes chances qu'ils ne soient pas à l'aide
sociale. Puis qu'on s'occupe de leurs
parents aussi, qu'on aide leurs parents, peut-être. Donc, pas seulement les
nouveaux demandeurs, les parents de
ces nouveaux demandeurs. Est-ce qu'on pourrait les aider à sortir de la
pauvreté, à se donner des projets de vie?
À multiplier les mesures d'insertion pour des gens, oui, qui ont 40 ans,
pourquoi pas? Pourquoi adopter un
double standard : les nouveaux
demandeurs, mais pas les autres? C'est incompréhensible, M. le Président. Et, si on n'aide pas les parents
des jeunes, pourquoi est-ce qu'on va sanctionner les jeunes? C'est ce que je me
demande : De quel droit allons-nous consentir à briser notre
contrat moral? Je me le demande vraiment.
Le
Président (M. Cousineau) : M. le ministre, ça va? D'autres interventions sur le sous-amendement du député de Saint-Jean? M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : M. le
Président, on a reçu, tous ici, là,
tous les députés ici, là, vous inclus, M.
le Président, on a reçu une correspondance
de la Coalition pour les droits des personnes assistées sociales des régions de
la Mauricie et du Centre-du-Québec, hein? Je suis porte-parole, là, pour le Centre-du-Québec pour l'opposition officielle, donc ça me fait plaisir, en même temps, de souligner cette correspondance-là que nous
avons tous reçue, la semaine dernière, dans le cadre de la Semaine de la dignité. Ils ont fait un
exercice, les organismes de cette coalition-là, puis c'est très approprié d'en
parler à ce moment-ci parce qu'on voit ce que les gens vivent au
quotidien.
Bon, on sait,
bon, 623 $ par mois pour un chèque d'aide sociale, ce qui consiste à un
revenu annuel de 7 476 $ pour une personne seule. On sait aussi que
la mesure du panier de consommation de Statistique Canada est... bon... de
17 000 $ par année pour une personne habitant dans la ville, là...
une ville de la grosseur de Trois-Rivières. Donc, ça représente... le 7 476 $ par année représente 44 % des
besoins... ça couvre 44 % des besoins d'une personne vivant seule. On a un graphique qui nous a été... deux graphiques qui nous
ont été transmis. Donc, quelqu'un avec 623 $ — on le voit — 44 % des besoins couverts, 56 %
des besoins non couverts. Et là on peut faire la nomenclature, là : le
logement, l'électricité, la
nourriture. Bon, tu sais, si la personne a des problèmes de santé, comme le
diabète, etc., il y a une différence dans
la diète, donc ça fait en sorte que ce n'est pas les mêmes montants en termes
d'épicerie; les besoins... les produits d'entretien, les produits
d'hygiène aussi; téléphone, vêtements, transport, etc.
Les gens qui se sont
regroupés, le 5 mai dernier, dans le cadre de la Semaine de la dignité, ont
émis quelques commentaires, comment ils
vivent ça, là, 623 $ par mois. La personne... Les personnes ont écrit,
là... bon, ont dit, puis c'est un
message au ministre en même temps, ça fait que je lui transmets parce que, bon,
sûrement qu'il a lu ces documents-là, mais je lui transmets quand même,
là, verbalement, les commentaires que les gens ont faits, là :
«Comment
aller travailler si je n'ai même pas assez pour manger, me laver et m'habiller
comme il faut? On ne vit pas avec un
tel montant, on survit. Ça ne couvre pas les besoins de base pour vivre
convenablement. Il serait inacceptable de couper dans ce montant alors
qu'il m'en manque déjà.
«Avec
un tel montant, le moindre imprévu devient une catastrophe. Tout augmente, sauf
la prestation d'aide sociale. Impossible
de vivre une vie normale avec un tel montant. Pourriez-vous vivre avec un tel
montant?» La question s'adresse au
ministre, mais elle pourrait s'adresser à nous tous. «C'est impossible de vivre
avec un tel montant, impossible de budgéter avec un tel montant.» Puis la personne dit : «J'aimerais ça vous
voir à ma place. Une vie normale nous est refusée parce que ça n'a pas
d'importance à vos yeux.»
C'est
sûr que c'est des messages durs, là, mais c'est une réalité que ces gens-là
vivent au quotidien, puis c'est aussi pour ça qu'on est ici pour
travailler pour eux.
• (20 h 10) •
Ils
le mentionnent, dans leur correspondance au début... pas au début, c'est plutôt
à la fin : «En tant que députés, vous
êtes appelés à voter des lois qui peuvent avoir des conséquences importantes
sur les conditions de vie de milliers de
personnes au Québec. C'est pourquoi nous trouvons important de vous sensibiliser.» C'est pour ça qu'on est
ici, voter des lois, c'est ce qu'on fait actuellement. Il faut avoir en
tête qui on représente, qui on défend.
Cependant,
M. le Président, le
deuxième graphique nous parle... le
premier, là, vous voyez, là : Si j'avais 623 $ par mois... Donc, on le voit, là : 44 %,
56 %. Si j'avais 312 $ par mois, bien, on voit qu'il y a seulement
que 22 % des besoins qui sont
couverts contre 78 % non couverts. Les mêmes besoins demeurent. On a
besoin d'un loyer, on a besoin de
l'électricité, de la nourriture, si on a des problèmes de santé, il faut aussi
adapter notre alimentation en conséquence. Le téléphone, vêtements, transport, les produits d'entretien, les
produits d'hygiène. Ça, ça demeure, mais le revenu est différent.
Le
message au ministre, encore là, par les prestataires, qui sont réunis
le 5 mai : «312 $, ça ne paie même pas mon loyer. Avec un tel montant, je ne peux que devenir
un itinérant. C'est impossible de survivre avec un tel montant. Comme je ne peux même pas me loger avec un tel montant,
je vous remercie à l'avance de bien vouloir m'accueillir chez vous.» C'est
une invitation qui est faite. «Ça n'a pas de
bon sens, c'est inhumain, il y a encore plus de misère humaine. Avant de faire
des coupures, avez-vous essayé de vivre avec
312 $ par mois? Personne ne peut vivre avec un tel montant. Quel manque
d'humanité!»
C'est
encore les gens qui ont dit ça, là. «Faites le calcul vous-même : Comment
faire pour arriver? Pouvez-vous me le dire? M. le ministre, essayer de
vivre avec ça, ce n'est pas — là, ça, c'est eux qui le mentionnent, là,
M. le Président — avoir
de coeur et prendre les BS pour des moins que rien. C'est absurde. Augmentation
inévitable de la violence, c'est impossible
de vivre avec un tel montant, c'est même impossible de survivre. Qu'est-ce
qu'il reste comme possibilité?»
M. le Président, je
crois que l'amendement que nous avons déposé, que j'ai déposé...
sous-amendement, pardonnez-moi, vise
justement à maintenir la prestation minimale, à assurer que la prestation
minimale soit maintenue, pour toutes
les raisons que ma collègue la députée de Gouin a si bien expliquées, ayant
elle-même vécu de l'intérieur ce combat,
ce débat de société. Sûrement qu'à ce moment-là, je ne sais pas, peut-être que
le ministre aussi était impliqué de près
ou de loin, je ne sais pas. Je n'ai pas eu cette chance de vivre ces
moments-là, mais je crois que, si, à l'époque, il y a eu une aussi grande adhésion sociale, de la part de
la société, au principe même de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et
l'exclusion sociale... et cette loi, elle a
été, effectivement, comme d'autres l'ont mentionné et on doit le rappeler,
votée à l'unanimité ici, à
l'Assemblée nationale, ce qui est quand même important et rare, je crois que,
dans ce contexte-là, le sous-amendement
prend tout son sens et doit être inclus dans l'article que mon collègue a
appelé l'article fondateur du programme
Objectif emploi pour orienter clairement le programme et faire en sorte qu'il
reste une prestation minimale pour notre population.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Saint-Jean. Je suis
prêt... On est toujours...
M. Blais :
M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui. Oui.
M.
Blais : Peut-être pour un petit peu dédramatiser la situation, pour
comprendre exactement, là, ce dont on parle, parce que là j'ai essayé de comprendre, là, ce dont on parlait. Retenez
le chiffre, là, 1 200 $, un chiffre rond, 1 200 $. C'est ce
à quoi une personne à Objectif emploi, là,
elle peut s'attendre, là, si elle est dans le parcours formation. Hein, c'est
bien ça? Donc, parcours formation. Je
pense, c'est du jamais-vu ou... à peu près, là, avoir des montants de cette
taille-là. Après ça, vraiment, on va
plus haut et on est en situation
de frottement, là, avec les prêts et
bourses, et là ça peut devenir...
elle peut avoir des problèmes d'attraction négative.
Donc,
c'est ça qu'il faut dire aux gens. Il ne faut pas dire aux gens qu'ils vont
être coupés à l'aide sociale, il n'y
a personne qui veut les couper à l'aide sociale, il n'y a personne qui va courir après eux pour les couper
à l'aide sociale. Ce n'est pas du tout comme ça que ça fonctionne.
Moi, tous les agents que je rencontre, là, hein, tous les agents veulent
aider, hein? Et parfois ça fonctionne très bien,
mais, trop souvent, malheureusement, on l'a dit tout à l'heure, 14 %, là, des jeunes qui devraient normalement, là, participer à des mesures
participent et les terminent aujourd'hui. Donc, il faut arrêter de faire peur aux gens avec des chiffres
comme 300 $, 400 $. C'est 1 200 $ que quelqu'un qui
participe... 1 193 $ pour être précis, quelqu'un qui va
participer peut obtenir, peut avoir avec lui.
La question
qui se pose maintenant est : Pourquoi quelqu'un voudrait refuser d'avoir
ces montants-là? Pourquoi quelqu'un
déciderait de ne pas être aidé? Quand on regarde la pratique réelle, on voit
très bien, puis ce à quoi on s'attend, nous,
on n'a évalué aucune économie par rapport à Objectif emploi, aucune économie
par rapport à des sanctions, tout simplement
parce qu'on sait que la grande majorité, parce qu'il y a effectivement des
sanctions et qu'elles ont un effet ex
ante, elle peut avoir aussi un effet ex post, ça va amener beaucoup plus de
gens à participer... Ça va nous coûter pas mal plus cher, il faut leur dire, à ces gens-là, ils vont avoir pas mal
plus que ce qu'ils ont en ce moment, mais qu'ils doivent m'expliquer
pourquoi ils refuseraient toute forme d'aide, là, on parle de toute forme
d'aide, là. Avertissement après avertissement,
après rencontre, après rencontre, là, il y a des questions aussi à se poser
quand on parle de gens qui quand même sont choisis, sélectionnés comme
étant des premiers demandeurs, là, sans contrainte.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors,
toujours sur le sous-amendement, Mme la députée de Gouin, on me dit
qu'il vous reste 5 min 20 s.
Mme David (Gouin) : Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Toujours sur le sous-amendement.
S'il y en a d'autres qui veulent se prononcer aussi, là, libre à vous.
Mme David
(Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Mais loin de moi et de nous, je
pense, l'idée de contester qu'il soit intéressant de participer à des mesures,
y compris sur le plan financier. Ça fait 14 400 $ par année. Bon, ce
n'est pas la richesse, là, on
s'entend, mais c'est sûr que c'est mieux que la seule prestation de base; bien,
ça, c'est évident. Et donc, oui, il
faut souhaiter qu'un bon nombre de personnes puissent participer à des mesures,
ce qu'on n'a mais jamais contesté. Et,
oui, si on peut bonifier les allocations qui sont données pour des personnes...
Je me souviens, là, dans le graphique, là, c'est particulièrement les personnes, je crois, qui sont en formation.
Oui, ce sont les personnes qui reçoivent l'allocation supplémentaire la plus importante. Recherche d'un
emploi : c'est déjà beaucoup moins important, c'est 100 $ de moins.
La même chose pour développement des habiletés sociales.
Donc, le
problème, ici, ce n'est pas le problème des allocations supplémentaires. Le
problème, c'est celui des coupures à
la prestation de base. Et justement parce que les allocations supplémentaires
sont intéressantes, moi, je pense deux choses : premièrement, que
l'immense majorité des nouveaux demandeurs à l'aide sociale vont demander de
participer à ces mesures, pas seulement pour
ça, aussi parce que les gens veulent s'en sortir, mais je reconnais tout à fait
que l'incitatif financier est quand
même intéressant, là, je ne veux surtout pas le nier. C'est d'abord le besoin
de s'en sortir puis avec ça vient : Regardez, vous aurez tant
d'argent de plus par mois.
Donc, si le ministre pense que cette allocation
supplémentaire, et qui a été bonifiée, est hautement incitative et intéressante pour les gens, à mon avis, il
devrait se questionner sur la chose suivante : Pourquoi effectivement un
certain nombre de gens, probablement
une minorité de gens refuseraient d'y participer, puisque c'est si dommageable
pour eux, selon le ministre? Alors,
c'est là où j'essaie d'expliquer au ministre que, si des gens, jeunes ou moins
jeunes, hein, refusent temporairement
d'y participer, ou participent mais se retirent à un moment donné, j'ai
beaucoup de difficultés à imputer ça à une espèce de mauvaise volonté
des personnes.
• (20 h 20) •
Le ministre
nous invitait collectivement à ne pas poser de jugement moral sur les
personnes. C'est ce que j'essaie de
faire, justement, en disant : Je pense que, si des gens renoncent à des allocations intéressantes, il doit bien y avoir une raison...
en fait, ou plusieurs raisons, une multiplicité de raisons. Et que ce
sur quoi il faut travailler, c'est sur les raisons qui font soit que, par exemple, des très jeunes
refusent de participer, refusent de s'embarquer, comme on pourrait dire, ou
alors que des jeunes ou moins jeunes participent à des mesures et, à un moment
donné, pour toutes sortes de raisons, justement, ne participent plus ou disent : Non, ou,
bon, ont des manquements, comme dit le ministre, là, sont absents, hein, c'est le critère de l'absence, puis là il faut
qu'ils s'expliquent sur leur absence, puis, dans certains cas, ça sera accepté,
puis, dans d'autres cas, non. Ce n'est pas
très évident, tout ça, là. Mais c'est un système énorme qui, à mon avis,
ne fait pas confiance aux gens et ne
se questionne pas, en tant que système bureaucratique, là, sur les raisons qui font que
des jeunes ou moins jeunes, disons
particulièrement des jeunes, là, le ministre en parlait, ne participent pas à
des mesures d'insertion.
Tant qu'on ne
comprendra pas pourquoi, outre le fait de dire qu'ils viennent de familles à l'aide
sociale, franchement, là, je
m'excuse, mais je trouve ça un tout petit peu faible comme analyse. Tu sais,
c'est un critère, c'est une donnée — je constate la donnée, moi aussi — mais ça ne dit pas tout, ça. Tu sais, on
vient d'une famille à l'aide sociale, donc
on est à l'aide sociale. O.K. Qu'est-ce qui s'est passé? Pourquoi? Le ministre
nous dit : C'est très documenté. O.K. Est-ce qu'on pourrait avoir
les documents? Est-ce qu'on pourrait comprendre la logique?
Parce que mon
expérience de vie, de travail, de militance dans les mouvements sociaux,
l'expérience des groupes qui aident
les jeunes au niveau de l'employabilité, ce n'est pas ça qu'elle dit. Elle dit
que les sanctions sont inutiles et même nuisibles, que ça ne viendra pas
à bout de... oui, certaines résistances qu'il faut comprendre et avec
lesquelles il faut travailler
autrement. Les Auberges du coeur, il me semble, nous ont expliqué ça
abondamment, ou le ROCAJQ, qui... tous
des groupes, là, qui travaillent avec des jeunes en réelle difficulté, mais pas
inaptes à l'emploi, pas selon les critères du ministère.
Alors, c'est
pour ça que j'appuie le sous-amendement, qui parle du principe de la prestation
minimale. Et cette prestation minimale, moi, je l'associe au plan
d'action de 2005. On ne touche pas à la prestation minimale, à moins qu'il y
ait fraude. Et donc la démonstration reste à faire qu'on aurait raison d'y
toucher.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sous-amendement du député
de Saint-Jean? Non. Alors, si je vois qu'il n'y a pas d'autre intervention,
est-ce que le sous-amendement du député de Saint-Jean est adopté?
M.
Turcotte : M. le
Président?
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
J'aimerais qu'on procède au vote par appel nominal.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, nous allons voter sur le
sous-amendement de M. le député de Saint-Jean, qui se lit comme suit : Après «Aucune disposition du présent
chapitre ne peut», ajouter «aller à l'encontre du principe de prestation
minimale défini par l'article 15 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté
et l'exclusion sociale et».
Alors, Mme la secrétaire.
La Secrétaire : M. Turcotte
(Saint-Jean)?
M.
Turcotte : Pour.
La Secrétaire : M. Rochon
(Richelieu)?
M. Rochon : Pour.
La Secrétaire : M.
Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
La Secrétaire : M. Blais
(Charlesbourg)?
M. Blais : Contre.
La Secrétaire : Mme Sauvé
(Fabre)?
Mme Sauvé : Contre.
La Secrétaire : M. Hardy
(Saint-François)?
M. Hardy : Contre.
La Secrétaire : M. Drolet
(Jean-Lesage)?
M. Drolet : Contre.
La Secrétaire : Mme Simard
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Simard : Contre.
La Secrétaire : M. Polo
(Laval-des-Rapides)?
M. Polo : Contre.
Le Président (M. Cousineau) :
Je m'abstiens.
La Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Cousineau) : Donc, le sous-amendement de M. le
député de Saint-Jean est rejeté. Je reviens maintenant à l'amendement déposé par Mme la députée de Gouin. Et je vous
rappelle le temps restant : M. le député de Saint-Jean,
1 min 30 s; M. le député de Richelieu, 13 min 20 s;
M. le député de Drummond—Bois-Francs,
10 min 5 s; et, Mme la députée de Gouin, vous n'avez plus
de temps.
Donc, un intervenant, s'il vous plaît? M. le
député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
J'aimerais déposer un nouveau sous-amendement. Ajouter, après «le revenu», les
mots «d'une personne ou».
Le Président (M. Cousineau) :
Un instant, là. Ça, c'est un sous-amendement sur...
M.
Turcotte :
Exactement.
Le Président (M. Cousineau) :
...sur l'amendement de Mme la députée de Gouin.
(Consultation)
Le
Président (M. Cousineau) : Oui, d'accord. Donc, on va en faire des copies pour les membres
de la commission.
Je vais suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 25)
(Reprise à 20 h 29)
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, nous reprenons. Donc, il y a
un sous-amendement de déposé par M. le député
de Saint-Jean — sous-amendement à l'amendement de la députée
de Gouin : Ajouter, après le mot «[...]revenu», les mots «d'une
personne...».
Alors, M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Bien, M. le Président, c'est juste pour compléter, parce que, dans l'amendement
de notre collègue la députée de
Gouin, qui se lit comme suit : «Aucune disposition du présent chapitre ne
peut avoir pour effet de diminuer le
revenu d'une famille sous le niveau de la prestation de base reconnue à
l'article 56 du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles», je comprends que ça, ça
s'inscrivait dans un combat... bien, combat, façon de le dire, là, dans un
débat sur le fait que, bon, quand on
est un revenu familial à l'aide sociale, de coupe... la prestation de
965 $, donc, s'il y a une sanction due à des absences, entre
autres, bien, ça peut affecter le revenu familial à l'aide sociale.
Nous, le
sous-amendement que nous faisons, c'est, au fond, qu'on ajoute «d'une
personne...». Donc, on considère aussi
une personne individuelle, donc, au fond, qu'«aucune disposition du présent
chapitre ne peut avoir pour effet de diminuer le revenu d'une personne
ou d'une famille sous le niveau de la prestation de base reconnue à l'article
56 du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles.»
• (20 h 30) •
Donc, nous, on considère que la prestation de
base ne doit pas être affectée, ne doit pas être touchée. On le dit depuis le début, on est cohérents dans cette
position-là. Nous ne sommes pas les seuls, plusieurs groupes qui sont
venus ici en ont parlé. Même le Réseau des carrefours jeunesse-emploi,
qui mentionnait, lors de leur présentation... dans leur mémoire... eux, pour leur
part, ils n'étaient pas opposés à l'obligation de participer au programme, mais ils étaient contre de couper la prestation de base, donc le chèque d'aide sociale de
623 $ ou de 965 $ pour couple. Donc, on reprend cette
demande-là. Il y a aussi, si je me souviens bien, le Conseil du statut de la
femme qui avait pratiquement fait le même commentaire.
Donc, pour
notre part, l'obligation, on la remet en question, mais, dans l'optique où le
ministre semble vouloir maintenir l'obligation, il pourrait décider d'avoir
effectivement une obligation. S'il y a obligation, je ne dis pas que je suis pour, je ne dis pas qu'on est pour, mais
le ministre pourrait maintenir l'obligation, mais ne pas toucher... donc, de
ne pas réduire les sanctions aux... de faire
en sorte que le chèque de base d'aide sociale ne soit pas affecté. Donc, ça
pourrait être l'allocation spéciale ou autre. Moi, je ne dis pas que je suis
pour le maintien de l'obligation, bien au contraire. Sauf dans le contexte où, là, on a un amendement qui nous est
présenté, je considérais important aussi d'ajouter les personnes seules à cet élément-là pour maintenir, là, que...
au fond, qu'on ne diminue pas le revenu en deçà du niveau de la prestation
de base.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.
M.
Blais : Je pense qu'on tourne en rond, là. Je veux rappeler un peu mon
cheminement personnel dans le projet de
loi, là. Quand je suis arrivé, il était déjà là. La question, c'était de le
faire évoluer. Moi, j'ai tenu à ce que la question de l'éducation soit vraiment bien au coeur du
projet... de la formation, la qualification. J'ai tenu aussi qu'il y ait un
espace pour ce qu'on appelle la
préemployabilité, compte tenu, là, des limites, là, des personnes que l'on peut
accueillir parfois.
J'ai tenu
aussi, comme le suggère l'OCDE, à ce que les sanctions soient vraiment
modérées. C'est la moitié moins que
les sanctions du Parti québécois en 1998 — et une durée beaucoup moins importante que
ça. Donc, modérées, strictes, avec
toujours cette possibilité de revenir, hein? De dire : Écoutez, si vous
revenez, tant mieux. Puis c'est votre plan, c'est vous qui l'avez
décidé. C'est vous qui l'avez défini, si vous n'aimez plus votre plan, on va
encore se rencontrer.
Je
pense que c'est vraiment raisonnable comme proposition. D'autant plus que ça
s'adresse au groupe, là, qui peut le
plus gagner, qui fait le plus de gains facilement. Quand on regarde aussi les
groupes que l'on peut aller chercher, donc sortir carrément de la pauvreté, les amener vers un emploi, vers une
formation, on est vraiment dans ces groupes-là. On a bien ciblé le
projet.
Mais, en même
temps, ce que nous disent les bonnes pratiques dans le monde... Et je vous
rappelle que le Québec est seul ou à peu près, là, au Canada ou en
Amérique du Nord, à faire ce qu'il fait. Et Dieu sait que ça n'a pas donné grand-chose, grand résultat au niveau de la lutte
contre la pauvreté, on en a parlé tout à l'heure. Je pense qu'on dans est
quelque chose qui est solide, qui va
fonctionner, qui va avoir un effet bénéfique sur des milliers et des milliers
de personnes, année après année. Mais
c'est vrai qu'on nous dit aussi... les études nous disent qu'il faut y avoir un
élément de sanction non pas pour les
appliquer, mais simplement pour que ça fasse partie, hein, de la rationalité
puis ça fasse partie, bien sûr, des options, là, qui se livrent aux
personnes.
Alors, dans
tout ce contexte-là, moi, j'explique un peu mon cheminement personnel, ce que
j'ai voulu apporter. Puis il y a
d'autres amendements à venir, si on progresse, que je vais apporter pour
clarifier les choses. Mais on ne peut pas, là, accepter cet amendement-là et d'autres qui viendront, qui auraient
le même effet, là. C'est de mettre fin à... On l'a essayé, qu'il n'y ait
pas d'obligation, et ça a donné des résultats, là, assez minces.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Oui. Merci, M. le Président. Je ne peux pas dire que ça me surprend, là, ce que
le ministre nous dit. En même temps, le ministre semble se désoler de
voir... Bon, il utilise l'expression... il trouve qu'on tourne en rond. Il dit
ça, il dit qu'on tourne en rond, M. le Président. Moi, je crois qu'il y a une
façon de faire en sorte qu'on puisse progresser.
On l'a proposée, on l'a soumise. On a, à plusieurs, plusieurs moments, proposé
des voies de passage. Le ministre précédent,
le ministre actuel ne se sont pas prévalus de ces voies de passage là. Moi, je
crois qu'il n'est toujours pas trop tard, on peut toujours trouver des
consensus sur certains éléments.
Mais
effectivement, sur la question des sanctions qui sont proposées actuellement,
il y a un problème de fond. Et nous
ne sommes pas les seuls, M. le Président... Je vais citer le communiqué de la
Table de concertation des organismes au
service des personnes réfugiées et immigrantes, qui mentionne : «À titre
de regroupement de 136 organismes oeuvrant auprès des personnes
réfugiées, immigrantes et sans statut, nous nous opposons fermement au projet
de loi 70, qui pénalisera de nombreuses
personnes réfugiées et immigrantes, puisqu'elles constituent une forte
proportion des nouveaux demandeurs d'aide sociale.
«Il semble
viser une intégration rapide à tout prix à l'emploi des nouveaux demandeurs
d'aide sociale, mais ne tient
aucunement compte de l'existence des nombreux obstacles systémiques auxquels
font face les nouveaux arrivants. Il
oublie également que l'intégration d'un nouvel arrivant est un processus long
et complexe, et qu'une même personne peut avoir besoin de plusieurs soutiens
successifs d'Emploi-Québec avant d'accéder à un emploi à la mesure de
ses compétences.»
Nous avons
même entendu, si vous vous souvenez, M. le Président, M. Pinto, qui était venu
ici au moment où la Table de concertation des organismes au service des
personnes réfugiées et immigrantes sont venus en commission parlementaire. Donc, M. Pinto nous a expliqué ce
qu'il a vécu lors de son arrivée au Québec, ce qu'il a eu comme difficultés.
Et, bon, il le mentionne ici, là, bon.
Plusieurs éléments dans le communiqué, que vous pourrez relire si vous le
souhaitez. Mais moi, je crois, M. le Président, qu'on a une belle
opportunité justement avec notre sous-amendement qui bonifie l'amendement de
notre collègue la députée de Gouin de trouver une voie de passage.
Le ministre nous dit : Il n'y aura pas
d'économie. Il n'y aura pas d'économie.
M. Blais : ...
M.
Turcotte : Pardon?
M. Blais : On ne les calcule pas.
• (20 h 40) •
M.
Turcotte :
On ne les calcule pas. Bon. Pas rassurant. Mais le ministre précédent... Moi,
j'aime beaucoup les faits, hein, M.
le Président. Je ne sais pas si vous êtes comme moi, là. Moi, j'aime beaucoup
les faits. Et, lors du dépôt du
projet de loi, là, sur le projet de loi, là, il y a un nom qui est écrit, là,
puis c'est... Ici, on l'a, le projet de loi, là, la copie, là. Bon. «Présenté
par», puis il y a un nom, là, «ministre du Travail, Emploi et Solidarité
sociale», puis ce nom-là, c'est le député
de Louis-Hébert. Bon, il savait ce qu'il faisait quand il a déposé son projet
de loi. Et à ce moment-là l'ancien ministre a mentionné que le projet de
loi allait permettre des économies de 50 millions de dollars. Ça a été
dit. Ça a été dit.
Là, ce que je
comprends, c'est que le ministre nous dit : Depuis qu'il est arrivé au
ministère, donc depuis qu'il est arrivé en poste, il a travaillé à
bonifier le programme Objectif emploi. C'est ce que je comprends. Je ne sais
pas si c'est vrai ou pas, je ne suis pas au
Conseil des ministres, moi. Mais ce
que je comprends, c'est que là il semble dire qu'il a mis davantage d'importance à la formation et
davantage d'importance, sinon de l'ajouter, le développement des habiletés sociales. C'est ce que je comprends.
Effectivement — effectivement — le
précédent ministre était beaucoup plus axé sur la recherche intensive d'emploi. Mais force est de constater, M. le Président, que c'est un pas dans la bonne direction. Et nous ne sommes pas
opposés à une bonification de la prestation
de base des gens de l'aide sociale pour qu'ils puissent faire une recherche intensive
d'emploi, formation et acquisition de
compétences, développement des habiletés sociales, nous ne sommes pas contre
ça. Ce n'est pas ça,
l'enjeu, actuellement. Le ministre présente toujours... comme si le programme est déjà, là, très bon, on
fait des bons pas, ça va être bon. Tant mieux! L'objectif, c'est faire
en sorte qu'il y ait moins de gens dans la pauvreté, qu'il y ait moins de gens à l'aide sociale, mais qu'il y ait plus de gens sur le marché du travail. Bravo! Nous sommes d'accord
avec ça.
Mais ce que
le ministre ne mentionne pas... du moins, il ne le met pas en
évidence, c'est le fait que, pour arriver à ce résultat-là, bien, il y aura
des sanctions. Puis même, tantôt, notre collègue le député de
Richelieu a posé différentes questions, puis ce
n'était pas clair, la réponse du ministre. Dans le cas de la recherche
intensive d'un emploi, calculer l'absence :
première absence, deuxième absence, troisième absence, quatrième absence...
mais, quand on voit à chaque fois que
c'est cinq jours, de voir l'intensité de la recherche en emploi, puis tout ça,
c'est très arbitraire. Quelqu'un qui recherche...
Parce que c'est «recherche intensive d'un emploi». Les
mots, là, sont là, là, «recherche intensive d'un emploi». Comment on fait pour savoir si quelqu'un
fait une recherche intensive d'un emploi ou une recherche modérée d'un emploi ou une recherche... je pourrais quasiment
dire : Paresseuse d'un emploi? À
un moment donné, là, on embarque dans
un gros débat.
Donc, moi, je
ne sais pas. On l'étudie — je
suis ici depuis quelques heures, là — le projet de loi, depuis quelques heures, depuis quelques jours, là... qu'il se réunit, qu'on a commencé à étudier le projet de loi. Je ne sais pas, comment... S'absente
pour plus de cinq jours. Le ministre
l'a dit, puis ça, c'est clair : En termes de formation, il a des cours, il
ne les suit pas. Ça, c'est clair. Les
développements des habiletés sociales, ce que je comprends, c'est qu'il a des
rencontres, des ateliers, je ne sais pas, des séances de groupes. Bon,
ça, ça peut être clair.
Recherche
intensive d'un emploi, c'est compliqué. Problème : objectif principal du
programme Objectif emploi, c'est la
recherche intensive d'un emploi. Puis c'est là que c'est peut-être plus difficile
à juger d'une absence ou pas, parce qu'à
ce compte-là le ministre pourrait ajouter des sanctions de manque de
motivation. La personne est là, mais elle n'est pas motivée. Ça ne marche pas. Donc, quand on embarque dans ce genre de
discussion là, on vient qu'à dire : Effectivement, il y a un
problème. Il peut y avoir différents types de sanctions. Mais là, quand c'est
des sanctions monétaires sur une allocation
spéciale, c'est une chose; mais des sanctions monétaires sur la prestation de
base de l'aide sociale, du 623 $, ou, dans le cas d'un couple, 965 $, puis on voit que, bien, le couple,
la famille, le ménage peut être affecté aussi, donc ça vient qu'à poser
des questions.
L'autre
élément que, M. le Président, j'aimerais aussi rectifier, c'est que le ministre
nous fait référence souvent, en
faisant le calcul de tout ça, bien entendu, en incluant le crédit d'impôt pour la solidarité et crédit TPS que des gens qui ne sont pas à l'aide sociale ont droit... c'est un autre élément, mais... puis il présente
ça, là, ça donne un montant annuel. C'est
parce que le programme Objectif emploi s'étale sur une période de 12 mois et
pourra, si le prestataire en a besoin pour
mener à terme ses démarches de formation, s'étendre jusqu'à un total de 24
mois. Donc, c'est un an, deux, maximum. Donc, de présenter ça comme un
montant annuel, c'est un peu gros.
C'est un peu gros. Ce n'est pas un montant
annuel. Ce programme-là, c'est ça.
Une voix : ...
M.
Turcotte :
Je comprends que c'est annualisé, mais ce n'est quand même pas annuel. «Annuel»
peut vouloir dire «récurrent». Moi,
si je dis : Mon salaire annuel, c'est ça, bien, je sais qu'à moins que je
me fasse battre aux prochaines
élections l'année prochaine, bon, je devrais
avoir le même salaire, bon, à peu
près. Mais là ce n'est pas ça, ce
n'est pas de ça qu'on parle. Parce que,
si la personne, là, dans 12 mois, elle fait le programme Objectif emploi puis
ça ne fonctionne pas, elle ne s'en
est pas trouvé un, emploi, ou sa formation n'a pas été suffisante puis que finalement l'emploi n'a pas
été trouvé, elle va retomber à
623 $ par mois, fois 12, montant qu'on pourrait calculer sur une base
d'une année. Donc, ce n'est pas un
montant annuel, c'est pour un an ou deux, maximum. Puis le maximum, il est très
important parce que ça ne veut pas dire que c'est 24 mois automatique. Donc,
c'est ça.
L'autre
aspect aussi que j'aimerais revenir — M. le ministre en a parlé tantôt — 5 millions pour 90 ETC de plus. Le ministre, tantôt, nous a dit... Bon, sur le
fond, il n'était peut-être pas opposé avec notre amendement, mais, bon, il
trouvait que, bon, si c'était juste
ça, peut-être qu'on pourrait s'entendre, mais il sentait qu'il y avait d'autres
éléments qui faisaient achopper la négociation.
Moi, je crois
que, si le ministre veut lancer un message positif, il pourrait très bien,
lui-même, se donner l'obligation d'offrir
les services à la population. S'il prétend que le 5 millions supplémentaire
et qui représente 90 ETC de plus fait en sorte que ça, ça règle le
problème... Puis, même, il l'a dit : Ce n'est pas beaucoup de rencontres
par CLE, c'est deux, trois rencontres ici et
là, puis tout ça, bon, je ne sais pas, mais je pense que c'est un peu plus ça.
Il nous dit : Bon, on a une entente
avec les carrefours jeunesse-emploi. Il nous a aussi déposé une liste de tous
les organismes... Si le ministre nous dit
que les services sont là puis qu'il n'y en a pas, de problème, puis qu'il n'y
aura pas d'attente, moi, je n'ai toujours pas de confirmation, M. le Président, à savoir, dans le bloc sur les
développements des habiletés sociales ou dans le bloc sur la formation,
acquisition de compétences, s'il y a une liste d'attente pour une formation,
pour un D.E.P. ou peu importe... moi,
tantôt, j'ai donné l'exemple ce matin, éducation des adultes, liste d'attente,
la commission scolaire des Hautes-Rivières, chez nous, là je n'ai pas
les derniers chiffres, peut-être qu'il n'y en a plus, mais je sais qu'il y a un
an, un an et demi, il y avait une liste d'attente de 100 quelques, quasiment
200 élèves, futurs élèves, raccrocheurs.
Une voix : ...
M.
Turcotte :
Éducation des adultes. Donc, s'il y a une liste d'attente de quatre mois, deux
mois, peu importe, bien là, ça, là, le «meter» tourne, là, sur les 12
mois. Ou il ne tourne pas. Ça va être reporté? Il ne sait pas. Mais, si...
Une
voix : ...
M.
Turcotte :
Hein?
M. Blais :
...
M.
Turcotte :
Vous, vous le savez.
M. Blais :
...répondre.
M.
Turcotte : Vous pouvez répondre. Excusez-moi, M. le
Président. M. le Président, le ministre semble le savoir, il désire
répondre.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de...
Saint-Jean, je crois. M. le ministre, voulez-vous répondre à M. le
député de Saint-Jean?
M. Blais :
Bien, si je comprends bien la préoccupation de mon collègue, là... Si, par
exemple, quelqu'un veut suivre une formation
à la formation des adultes, il y a eu une entente avec son agent effectivement,
c'est une bonne idée, une bonne stratégie. Si jamais la formation n'est
pas disponible, là...
C'est à Saint-Jean,
ça, cette liste d'attente là, ou...
M.
Turcotte :
Oui, à la commission scolaire des Hautes-Rivières.
M. Blais :
Oui?
M.
Turcotte :
Oui, on va dire ça.
M.
Blais : Bien, c'est sûr que la personne est encore inscrite à Objectif
emploi, on peut regarder d'autres mesures, il y a peut-être d'autres possibilités, ça lui est complètement offert,
mais, si c'est vraiment son projet, vous comprendrez qu'on ne va pas le pénaliser pour ça, là. Il
faudra accepter la liste d'attente à ce moment-là, mais il n'y aura aucune
pénalité; bien au contraire, là, il va avoir sa bonification.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, dans ce cas-là, la
personne recevrait son chèque de base d'aide sociale jusqu'à temps
qu'elle débute la mesure?
M.
Blais : Elle va avoir plus que ça, mais aussi sa bonification, parce
que, dans le fond, là, cette personne-là, elle est volontaire, elle est dans un cheminement qu'elle désire, il semble y
avoir un problème, là, en termes de disponibilité puis il y a une période d'attente, bien, il n'y a
aucune raison de la pénaliser, là, cette personne-là. Elle a bien défini son
projet, elle est prête, donc on ne va pas la
pénaliser pour ça. Au contraire, on va l'encourager à attendre, s'il faut
attendre, ou à entreprendre d'autres mesures, qui sait, intérimaires.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
• (20 h 50) •
M.
Turcotte : Bien, vraiment, j'aime ce que le ministre mentionne, là, je trouve que ça, c'est
une bonne chose. Je ne suis pas si
sûr que ça que, dans l'application, ça va pouvoir se faire dans le sens où... Là, je
donnais un exemple, là, la formation.
On s'entend que c'est de base, le diplôme d'études secondaires, là. Puis là, en même temps, je ne sais plus les derniers
chiffres, là, ça fait un petit bout qu'on m'a transmis ça, puis je sais aussi
qu'ailleurs au Québec il y avait des listes d'attente en éducation des
adultes, mais, dans le...
M.
Blais : ...à Charlesbourg, à
Québec, là, c'est difficile, pour la formation des adultes, d'aller recruter. Donc, c'est
intéressant de voir que, chez vous, c'est comme ça.
M.
Turcotte : Puis je
sais que, bon, on développe certaines stratégies, que ce soit à distance, bon,
par téléphone, Internet, etc., mais
moi, je crois que là c'est en question de mois. Si ça prend deux mois, mettons, pour une
liste d'attente, pour que cette formation-là
ou une autre, ou développement des habiletés sociales, je ne sais pas, si les
groupes sont pleins puis qu'on doit
attendre parce qu'il n'y a pas assez
de personnes pour partir un nouveau groupe, je ne sais pas, je donne des hypothèses... Je me questionne dans la
faisabilité : Est-ce que ces mois d'attente là qui, oui, ça va être une
bonification pour la personne à court
terme, mais ça peut avoir un impact de... elle va manquer de mois, en bout de
ligne, pour terminer son parcours. Je
comprends que le ministre dit : On peut étendre jusqu'à 24 mois, mais,
dans certains cas, ça se peut que, si elle
a à finir son diplôme d'études secondaires et par la suite aller faire un
D.E.P., en termes de mois, ça peut être un peu serré.
C'était mon
dernier commentaire sur la question, en disant que, dans l'application, ça peut
être compliqué. Le ministre nous a
amené quelques éléments de réponse, mais je crois aussi qu'il peut y avoir un
certain jugement qui peut se faire, là, de la part des agents, sur cette
question-là. Mais, bon, je vais m'arrêter ici, M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui. De toute façon, ça terminait votre temps, M.
le député de Saint-Jean, concernant votre
sous-amendement. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant le
sous-amendement du député de Saint-Jean? Oui. Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) : Il me reste
combien de temps, M. le Président? Je suis un peu mêlée.
Le Président (M. Cousineau) :
Ah! bien, vous commencez.
Mme David (Gouin) : Ah! je commence.
Le Président (M. Cousineau) :
Vous avez 20 minutes.
Mme David (Gouin) : O.K.
Excusez-moi.
Le Président (M. Cousineau) :
On est sur le sous-amendement de...
Mme David (Gouin) : 8 h 55, je
pense qu'il y a une petite fatigue un petit peu explicable.
M. le
Président, évidemment, je ne peux faire autrement que d'appuyer le
sous-amendement. J'ai écouté le ministre avec attention, j'aurais quelques remarques à lui faire. Premièrement,
oui, j'ai remarqué le cheminement du ministre : entre autres, en ce qui a trait à l'éducation et
aux mesures de préemployabilité. Et j'ose croire vraiment, là, qu'en ce qui a
trait à l'éducation des personnes le ministre va conserver le même cheminement.
Parce que ce que j'ai, moi, observé sur
le terrain, c'est que des personnes à l'aide sociale sont bien plus encouragées
à terminer des formations extrêmement courtes
et peu qualifiantes pour qu'elles diminuent les statistiques d'aide sociale
puis qu'on se dépêche de les envoyer sur
un marché du travail où elles vont avoir parfois à peine plus que le salaire
minimum, même quand ces personnes-là veulent terminer un secondaire.
Et là moi, je
ne parle pas ici de devenir astronaute, là, je parle de terminer son
secondaire, ce qui, en 2016, me paraît
un petit peu minimal pour l'immense majorité des gens, sachant qu'il y a des gens
qui ne feront pas de secondaire général.
Mais, quand les gens le veulent, quand ils ont la motivation pour le faire, en
tout cas, je crois comprendre, des propos du ministre, qu'il va
encourager cette motivation — j'espère, en tout cas — et,
si c'est ça, bien oui, voilà un cheminement
qui est intéressant. La même chose pour les mesures de préemployabilité, mais,
encore là, le diable est dans les détails, comme on dit.
Si on se met
à vouloir obliger bon nombre d'organismes communautaires, qui font partie de ce
qu'on appelle le réseau des
organismes communautaires autonomes, à recevoir des jeunes ou moins jeunes...
disons, des jeunes, là, à l'aide sociale,
dans les mesures de préemployabilité... L'autre jour, le ministre répondait à
une question que je lui posais... ou c'était
peut-être la question d'un autre, là, par exemple, apprendre à faire son
budget, là, le genre de question que je me pose, c'est le suivant.
Mettons que
les ACEF, parce que le ministre parlait des ACEF, sont conviées à donner un
coup de main et à aider des gens
effectivement à apprendre à faire un budget, est-ce que ça veut dire qu'à
partir de ce moment-là les ACEF vont devoir
indiquer au centre local d'emploi qu'une personne venue participer à des
rencontres, disons, à un moment donné, n'a
pas participé à une rencontre, les ACEF vont faire de la délation? Les ACEF
n'ont jamais fait ça de leur vie, là, depuis que je
connais les ACEF, puis ça fait pas mal longtemps.
Est-ce que Les Auberges du coeur vont devoir
indiquer au centre local d'emploi qu'un jeune, je ne sais pas, moi, est en fugue depuis trois jours puis qu'ils espèrent
bien gros qu'il va revenir? On n'est peut-être pas en fugue quand on a plus que 18 ans, remarquez, mais ça ressemble à ça un petit peu des fois. On est un peu dans la mélasse, là, puis on disparaît de la circulation, on réapparaît au bout de trois
jours, puis on est tout mêlés, puis ce que ça veut dire, c'est qu'on a des
problèmes, c'est ça que ça veut dire. Là, est-ce qu'il va falloir qu'à chaque
fois l'auberge du coeur contacte le centre local d'emploi qui a fait une entente avec lui, qui lui a confié...
bien, ce n'est pas le centre local d'emploi qui confie des jeunes, les jeunes viennent aux Auberges du coeur,
mais, bon, mettons qu'il y a des ententes de partenariat, alors là, l'auberge
du coeur, qui n'a jamais non plus fait ça de sa vie, va devoir s'adonner à la
délation?
En tout cas, moi, je me pose vraiment des questions
sur ce qu'on va demander à bon nombre d'organismes communautaires qui souffrent de sous-financement, qui peuvent être
tentés par des ententes avec Emploi-Québec parce qu'il y a de l'argent, mais, en même temps, qui vont vivre dans un
malaise profond à l'idée de devoir se mettre à dénoncer des gens. Parce que c'est ça que c'est, hein, dans
le fond. Ce n'est pas juste faire l'évaluation gentille, là, puis accompagner
les gens. À un moment donné, quand on sait qu'il y a une sanction, quand on
sait qu'il y a un aspect punitif et qu'on contacte
son centre local d'emploi, bien, on sait bien qu'il y a une conséquence au
bout, là. Or, s'il y a des organismes d'employabilité qui, eux, ont
décidé de le faire, ça leur appartient, mais il y a plein d'organismes communautaires
qui ne sont absolument pas dans cette
logique-là. Donc, moi, je comprends que le ministre a fait un cheminement, mais
je dis quand même que le diable est dans les détails.
Il y a un autre détail qui n'est probablement
pas un détail, c'est que, si des jeunes se voient, bon, menacés de sanctions parce que, malgré des allocations
intéressantes, et mettons qu'on a les meilleures mesures possible, ils ont
décidé qu'ils ne veulent pas
embarquer dans cette galère-là, moi, j'ai parlé des risques d'itinérance, mais
on va se parler d'un autre risque, qui est celui du travail au noir. En
fait, je crains que certaines personnes, jeunes ou moins jeunes, hein, décident de s'adonner au travail au noir parce que
c'est bien moins compliqué que d'entrer à l'aide sociale avec toutes les
contraintes qu'on est en train d'imposer.
Alors, le travail au noir, à ce que je sache, ça n'est pas une option pour le
Québec. Que
l'on soit travailleur, travailleuse au salaire minimum ou que l'on soit riche
et célèbre, ce n'est pas une option, la société québécoise n'est plus
d'accord avec ça. Donc, moi, je considère que là il y a un risque qui est
important.
Ce que je veux dire aussi — troisième
chose — c'est
que le ministre dit : On a eu beau passer la loi contre la pauvreté et l'exclusion, adopter des plans
d'action, visiblement, on n'a pas réussi autant que peut-être on l'aurait
souhaité en 2002. Et il y a un
certain nombre de gens à l'aide sociale qui ne participent pas à des mesures
d'employabilité. Il y en a beaucoup
qui participent, hein, il y en a beaucoup qui participent, il y en a qui sont
en attente. Moi, j'entends parler de ça depuis 15 ans, les gens en attente, mais je voudrais souligner que,
là aussi, il y a des déficiences, tout n'est pas parfait dans le
merveilleux monde des mesures d'employabilité ou de préemployabilité ou de
formation, là.
Est-ce que ça
se pourrait que, parmi les raisons qui font que des gens abandonnent certaines
mesures, il y ait, par exemple, que
ces mesures-là ne correspondent absolument pas aux besoins des personnes?
Est-ce que ça se pourrait que, depuis quelques années, on envoie
beaucoup trop de gens se former en préposés aux bénéficiaires, alors que ce
n'est absolument pas ça qu'ils veulent faire
dans la vie puis qu'ils n'ont pas de... et elles, parce que c'est surtout les
femmes qu'on envoie faire ça, ne sont
pas motivées pour faire ce genre de formation, mais l'avantage, pour le
gouvernement, c'est que c'est court puis il y a des postes à combler.
• (21 heures) •
Tu sais, ce
n'est pas vrai, là, qu'on donne toujours le choix aux gens. En tout cas,
peut-être que le ministre, dans l'avenir,
veut effectivement donner une variété de choix. Mais moi, je peux vous dire
que, pour le moment, non, il n'y a pas
tant que ça de variété de choix. Alors,
ça, ça peut faire en sorte que des personnes disent : Bien, si c'est
comme ça, moi, ça ne m'intéresse pas. Puis je me mets à leur place, je
suis assez d'accord.
Je veux aussi
apporter un dernier élément, celui de la formation aux adultes. J'en ai
déjà parlé, mais là j'ai été prendre
plus de renseignements, je vais étayer un peu plus mon propos. Bonne
chose que la formation aux adultes, hein? Sans contredit. Par contre, tout
le monde sait qu'il y a
beaucoup, beaucoup trop de gens de 16 à 18, 19, 20 ans en formation aux adultes; ça n'avait pas été
conçu pour ça au début. Il y a plein de décrocheurs scolaires qui font finalement
la formation aux adultes et à peu près 75 %, 80 % des jeunes
finissent par avoir un secondaire V à l'âge de 20 ans.
Mais là il y
a un premier problème, j'espère qu'on va tous s'entendre là-dessus, c'est qu'on
n'arrive pas à faire finir l'école
secondaire à beaucoup de nos jeunes, garçons et filles, surtout garçons, mais
filles aussi, dans les temps prescrits. Alors, peut-être qu'on pourrait commencer par là, hein, avant de penser
aux jeunes adultes, là. Mais, bon, comme je me répète là-dessus, je le
dirai au ministre de l'Éducation, ce sera peut-être plus utile.
Mais je veux
dire quelque chose sur la formation aux adultes. Elle est certainement efficace
pour bon nombre de jeunes puisqu'on
arrive à en diplômer entre 75 % et 80 % à l'âge de 20 ans. Je
conviens avec le ministre, qui me l'a dit l'autre jour, que, oui, c'est efficace, donc, pour un certain nombre de
jeunes, mais, pour d'autres jeunes, ça ne l'est pas du tout.
Il y a un organisme, dans ma circonscription,
qui s'appelle Déclic, un organisme absolument remarquable qui récupère des jeunes de l'école de formation aux
adultes qui s'appelle Marie-Médiatrice. Et c'est en accord avec l'école, là;
tout ça, ça se fait en collaboration. Les
jeunes que Déclic récupère sont des jeunes qui ne manquent pas d'intelligence
ou de motivation, mais ce sont des jeunes
avec des difficultés importantes de consommation, de toutes sortes de choses,
de détresse psychologique, de familles
complètement dysfonctionnelles, bref, des jeunes en difficulté qu'il faut
accompagner avec presque du un pour
un, ou pour deux, ou pour trois, là, pas plus, jour après jour. Ça, là, il
faudrait le multiplier, parce qu'une
des explications du fait que tant de jeunes qui s'inscrivent en formation aux
adultes décrochent, le ministre nous le dit puis je le crois, c'est que ça n'est pas adapté, le système, tel
qu'il existe, n'est pas adapté à des jeunes en difficulté. Il est adapté
à des jeunes qui, somme toute, fonctionnent assez bien, et un bon nombre
réussit.
Donc, bravo
pour le Québec, c'est quand même bien. Mais ceux et celles qui ne réussissent
pas, là, c'est justement ceux et
celles qu'on va retrouver à l'aide sociale. Puis là le ministre va s'étonner
parce qu'ils vont en formation aux adultes, mais ils ne finissent pas. Bien non, ils ne finissent pas parce qu'ils
ont trop de problèmes. Et, tant qu'on ne multipliera pas des initiatives comme Déclic, bien, ça ne
marchera pas. Et je pense qu'au total ça va prendre plus que 5 millions
pour tout le Québec, pour toutes les
personnes en difficulté, là, pour arriver à garder des jeunes décrocheurs de 18
ans et plus, là, aux études.
Moi, j'ai été
extrêmement impressionnée quand j'ai été visiter cet organisme, parce qu'eux,
ils y arrivent. Pas en quelques mois,
là, souvent, en un an minimum, là, des fois, deux ans, pour finir l'entièreté
du secondaire. Puis après ça, bien,
moi, j'ai vu des jeunes qui étaient rendus au cégep, puis j'en ai vu une qui
était à l'université. Mais le travail que ça a pris, par exemple, pour se rendre là! Puis on n'a pas eu besoin de
sanctions, là. On a eu besoin d'un organisme qui a pris soin des jeunes, c'est
tout. Ça coûte des sous, oui. Ils font beaucoup de levées de fonds aussi, mais,
oui, ça coûte des sous.
Est-ce qu'on
est prêts à ça, comme société québécoise? Est-ce que le gouvernement est prêt à
investir là-dedans? Moi, s'il me dit
oui, là je vais trouver qu'on fait quelque chose de sérieux. Mais, sinon, je
pense, malheureusement, malgré certainement
des bonnes intentions, qu'on n'y arrivera pas. Il y a des problèmes, sur le
terrain, là. Je comprends que le ministre
rencontre des agents, que les gens sont dévoués, puis ça, je n'en doute pas une
seconde, d'ailleurs. Mais, quand on
n'a pas suffisamment de moyens, quand un autre groupe de ma circonscription,
Perspectives Jeunesse, court après l'argent tout le temps, alors que son travail, dans la vie, organisme
communautaire, c'est de garder les jeunes à l'école secondaire publique du quartier, il faudrait multiplier tout ça, parce que
ces jeunes-là, s'ils terminent leur secondaire grâce à l'aide de cet organisme, on ne les retrouvera pas à l'aide sociale à 18 ans, qu'ils viennent ou non d'une famille à l'aide sociale. C'est ça qu'il faut faire, M. le Président.
Mais comment
ça se fait que ça fait tellement de temps que des gens comme moi et bien d'autres
s'époumonent à dire ce genre de chose
puis que pourtant, oui, il y en a, des organismes communautaires au Québec,
oui, il y a des carrefours
jeunesse-emploi, oui, il
y a des perspectives Jeunesse, il y en a
des milliers, d'organismes, mais on ne cesse de dire à quel point c'est insuffisant
et qu'il faut donner plus de moyens aux groupes pour s'assurer qu'à 18 ans, effectivement, on retrouve le moins
possible... il y en a toujours, j'imagine, mais le moins possible de jeunes à l'aide sociale? Moi, si c'est ce que le ministre
veut faire puis que son gouvernement est prêt à mettre tout l'argent nécessaire,
on va arrêter de parler de sanctions, on
va éliminer ça du vocabulaire puis on va travailler sérieusement, dès la petite
enfance, à l'école secondaire, dans les quartiers, avec les organismes
communautaires. Et moi, je pense que les problèmes soulevés par le ministre,
qui sont réels, je n'en disconviens
pas, ces problèmes-là ne vont pas disparaître à 100 %, pas par magie, là, mais, au bout d'un an
ou deux, on va s'apercevoir qu'il y a
une diminution notable de jeunes et de moins jeunes qui ne participent pas à
des mesures. Il faut commencer par améliorer les mesures et mettre de
l'argent là-dedans.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.
M.
Blais : Deux choses. Sur l'obligation de délation, là, comme le disait
la collègue de Gouin, bien sûr, quand il s'agit d'organismes
communautaires, je pense que l'exemple, c'étaient les...
Mme David (Gouin) : Les ACEF.
M. Blais : ...les ACEF, hein? Il me
semble, oui...
Mme David (Gouin) : ...
M.
Blais : Oui, bien sûr. Donc, il n'y a aucune obligation de révéler.
Tout dépend de la nature de la relation d'aide, hein? Il y a des organismes qui peuvent considérer que c'est une... Il y
a beaucoup d'organismes qui travaillent déjà avec les CLE, hein, et les agents
d'aide sociale. Alors, les organismes définissent leur relation d'aide puis ce
qu'ils veulent travailler ou pas, jusqu'à quel point, quelles informations ils
veulent divulguer, mais il n'y a aucune obligation, bien sûr, s'ils ne
veulent pas, là.
L'autre élément, sur la question du travail au
noir, le travail au noir, en particulier à l'aide sociale, on réussit parfois à évaluer le travail au noir dans certains
secteurs d'activité économique. On le fait de façon très indirecte, hein?
Donc, c'est des évaluations sommaires, mais
qui peuvent... Dans le cas de l'aide sociale, c'est très difficile d'avoir des
chiffres sur l'importance de la fréquence du
travail au noir. Ça existe, là, comme ailleurs. Ce que les agents nous disent
cependant, ce qu'ils peuvent... en tout cas,
ce que j'ai entendu, là, peut-être pas tout le monde, mais j'ai déjà dit que
les agents, un des éléments qu'ils
aiment dans Objectif emploi, c'est l'idée d'un suivi systématique, parce qu'ils
considèrent aujourd'hui qu'il y a
trop de gens qui ont des contraintes, qui ont des problèmes de santé mentale et
qui ne sont pas considérés comme tels
au Programme d'aide sociale et qui devraient l'être. Alors, bien sûr, les
rencontres systématiques permettent de déceler ces personnes-là puis les
changer de catégorie carrément, et aussi leur conseiller de consulter, là, si
nécessaire.
Mais, sur la
question du travail au noir, ils nous disent que, dans certains cas, là,
lorsqu'on essaie de rencontrer les
personnes qui ne sont pas disponibles le jeudi matin, mais peut-être vendredi
après-midi, etc., ils se rendent compte qu'il y a des gens qui travaillent au noir carrément, qui ne sont pas
disponibles pour des rencontres, quel que soit le temps, là, sauf la fin de semaine, et ils trouvent
qu'Objectif emploi pourrait permettre et... mais c'est très empirique, on n'a
pas du tout de mesure de ça, alors
c'est peut-être anecdotique, c'est peut-être plus important, mais ils
considèrent qu'Objectif emploi, en
donnant des contraintes de participation à quelque activité que ce soit, bien,
a un effet dissuasif sur le travail au noir, simplement parce que les
personnes sont obligées de participer à ces mesures-là plutôt que continuer.
Le travail au noir est un problème social, comme
le disait la députée, mais c'est aussi un problème pour les individus qui l'exercent. Parce que, bon, c'est
peut-être intéressant à court terme, mais il faut se rappeler que les personnes
qui travaillent au noir n'ont presque aucune
protection sociale, hein? Donc, à long terme, vous ne construisez pas, disons,
un patrimoine très important, là, en travaillant au noir, sauf peut-être des
individus qui ont un double emploi.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Oui, Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) : Merci, M. le
Président.
• (21 h 10) •
Le Président (M. Cousineau) :
Il vous reste 5 min 25 s.
Mme David
(Gouin) : Oui, merci. Je veux juste souligner que, quand je parlais du
risque d'aller vers le travail au
noir, ce n'était pas dans le sens de ce que vient de dire le ministre, là,
c'était plutôt dans le sens suivant. Un jeune, mettons, là, qui n'a pas
nécessairement envie de se faire dicter sa conduite tous les jours ou alors qui
considère qu'il n'est pas en état de
suivre un programme ou une formation, puis il sait que là... tu sais, il n'a
peut-être pas vu le graphique, là, mais il a quand même compris tout ce qu'il devait faire et, s'il ne le fait pas,
qu'est-ce qui va arriver. Moi, j'ai quand même une crainte : c'est qu'il y ait des jeunes, ou
des moins jeunes, qui se disent que finalement, là, travailler au noir, c'est
bien moins compliqué. Et je suis tout à fait d'accord avec le ministre que ça
n'est pas un projet de vie, le travail au noir, parce que très souvent, d'abord on est extrêmement
sous-payé, il faut quand même le dire, puis deuxièmement on n'a aucune protection sociale. Tout ça, c'est absolument
vrai, mais je soumets au ministre que c'est un risque qui, à mon avis, n'est
pas évalué quand on parle de sanctions.
Mais j'ai une question pour le ministre — juste
pour être bien claire. Quand le ministre dit : Non, non, les organismes,
là, ils vont pouvoir décider, dans le cadre de leur relation d'aide, de ce
qu'ils disent, ou ne disent pas, ou comment ils le disent, ou jusqu'à quel point ils
le disent au centre local d'emploi, moi, j'aimerais comprendre mieux, là.
On va se ramener au graphique. Quand on voit qu'il y a une première absence...
Et puis là c'est écrit en bas, entre deux
carreaux, là, mettons entre 10 et 12 ou entre 10 et 14, entre 14 et 16 :
«Refus de rencontrer l'agent de centre local d'emploi ou CJE.» Et on voit, dans les carreaux 9, 11, 13 et 15, que la
personne va être relancée par l'organisme qui dispense le service.
L'organisme
qui dispense le service peut être peut-être directement le centre local
d'emploi, quoique j'en doute un peu.
Je pense que ça va être plus l'école, la formation aux adultes, le carrefour
jeunesse-emploi, un groupe communautaire quelconque, puisqu'il est question d'habiletés sociales. C'est ça,
l'organisme qui dispense le service. Donc, cet organisme doit relancer... disons le jeune, parce qu'on
parle beaucoup des jeunes ici. Bon, une fois que l'organisme l'a relancé, à
quoi est tenu l'organisme? Est-ce que l'organisme peut choisir de ne
rien dire? C'est une question précise, là, que je pose.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Quelle est la dernière
partie de la question, je m'excuse?
Mme David
(Gouin) : J'ai simplement dit : L'organisme — c'est écrit dans votre graphique, là — doit relancer la personne qui s'est absentée une première fois ou cinq jours ou plus
de cinq jours. Bon, à chaque fois, là, c'est écrit : «Sera relancé
par l'organisme qui dispense le service.» Cet organisme peut être de toute
nature.
À partir du
moment où l'organisme a relancé la personne et a parlé avec la personne et,
bon, effectivement, la personne a
expliqué pourquoi elle était absente, cet organisme, là, est-ce qu'il a le
choix d'en rester là puis de, je ne sais pas... peut-être que la personne va revenir, tout simplement, puis ça va
en rester là? Ou est-ce que l'organisme doit prévenir le centre local d'emploi qu'il y a eu, par
exemple, déjà un premier manquement, une première absente? Est-ce qu'il doit?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Très bien. Dans le fond, le tableau qui était là... Je pense
qu'on l'a dit, mais peut-être pas suffisamment ou peut-être pas clairement. Ce tableau-là prenait un exemple, hein? Il
prend l'exemple tout simplement d'une participation puis d'un encadrement par les carrefours
jeunesse-emploi. Les carrefours jeunesse-emploi, comme les 200... les 400
organismes...
Une voix : ...
M.
Blais : ...399 organismes qui ont des ententes avec nous ont aussi
des... ça existait avant, ça va exister avec Objectif emploi, là, hein, des obligations de tenir au courant, là, des progrès,
là, par rapport à des démarches sur lesquelles on s'est entendus. C'était le cas avant, c'est encore le cas. Les
organismes communautaires qui n'ont pas du tout d'entente et qui desservent différentes clientèles, pas
uniquement la clientèle à l'aide sociale, n'ont pas ces obligations-là. On ne
peut pas dire qu'il n'y a pas un travail qui se fait mutuel, mais ça varie
selon les organismes. Puis, encore une fois, la définition de la relation d'aide, comment ils définissent la relation
d'aide, là, et comment ils collaborent
ou pas avec les centres locaux
d'emploi là-dessus...
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : M. le Président, je poursuis mon questionnement, là, pour être certaine de bien comprendre.
Je comprends que les carrefours jeunesse-emploi avaient déjà des ententes avec les centres locaux d'emploi, puis certainement qu'il y
avait un aller-retour d'informations, je veux juste signaler quand
même que ça n'avait pas d'impact
sur la prestation de base, hein, puis là la donne risque de changer quand même
passablement.
Mais ne
parlons pas des carrefours
jeunesse-emploi, étant donné qu'il y a une semaine, je pense, le ministre
avait mentionné, mettons, les ACEF, puis je ne veux pas mettre les ACEF
dans le trouble, là, mais disons que, comme développement des habiletés sociales, l'agent du centre local d'emploi recommande que la personne nouvelle... demandeur
à l'aide sociale, homme ou femme, jeune ou moins jeune, aille
participer à, je ne sais pas, moi, trois rencontres dans son ACEF locale. À partir du moment où l'ACEF locale
accepte de recevoir cette personne, qu'elle va recevoir comme toute autre
personne, si cette personne manque une rencontre, est-ce que,
oui ou non, l'ACEF est tenue d'en informer le centre local d'emploi?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Donc, je comprends,
là, on est plus dans le parcours, disons, préemployabilité, habiletés sociales,
là, ici, là. Donc, l'ACEF n'est pas
tenue d'en informer... Cependant, c'est sûr que la préemployabilité a ceci de
particulier qu'on peut imaginer des
passages plus courts ou des passages plus longs. Parce que
je ne veux pas me tromper sur le type de travail que les ACEF font avec ces gens-là, là, qui ont recours à leurs
services, mais je suppose que c'est des rencontres qui durent un certain
temps, là, j'imagine quelques semaines, deux soirs par semaine, alors imaginons
un cas comme celui-là. Ce qui va être important
pour l'agent, si le problème a été défini et ensuite la solution, c'est une participation, c'est, oui, bien sûr,
que la personne puisse montrer qu'elle a participé à ces activités-là,
bon, sur la bonne foi, je suppose... Ou
encore, s'il y a une relation plus étroite avec l'ACEF, les ACEF
pourront en discuter avec eux, mais, encore
une fois, il n'y a aucune obligation de divulgation, ce sera sur la
bonne foi des uns et des autres.
Le
Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin, il vous
reste 1 min 30 s.
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Donc, est-ce
que j'en comprends que, pour toute la
section qui s'appelle développement des habiletés sociales, il
n'y aura aucune obligation, de la part des organismes communautaires qui font partie du réseau des organismes
communautaires autonomes, de signaler des absences au centre local d'emploi,
même si c'est le centre local d'emploi — ou le carrefour jeunesse-emploi, hein, un ou
l'autre, mais, mettons, le centre local
d'emploi — qui a
référé une personne à une ACEF ou qui a suggéré à un jeune d'aller dans une
auberge du coeur parce que ce jeune n'a pas de logement, en fait, tu sais, il
est dans la rue, et donc on va lui dire : Il me semble qu'il serait bon pour toi, là, d'aller dans une auberge
du coeur? Le jeune y va, mais là, bon, avec l'auberge du coeur, il essaie
de commencer des démarches, mais il
trébuche, c'est difficile, etc. Donc, l'auberge du coeur — je lâche les ACEF un peu, là — ne sera pas tenue de dévoiler, par exemple,
une absence du jeune ou le fait qu'il ait disparu pendant trois jours.
La réponse du ministre, concrètement, clairement, c'est non. Est-ce que j'ai
bien compris?
M. Blais :
Oui.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la députée de Gouin. Maintenant, toujours
sur le sous-amendement, est-ce
qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Richelieu.
• (21 h 20) •
M. Rochon :
Oui. Merci, M. le Président. Alors, le programme Objectif emploi se
décline en parcours possibles, trois parcours : recherche intensive
d'un emploi, développement des habiletés sociales et formation et acquisition
de compétences. C'est intéressant, là. Ce projet de loi n'a pas que des défauts, là, hein? Nous, ce qui
nous fait beaucoup tiquer, et
c'est l'objet du sous-amendement de mon collègue et, plus tôt, de l'amendement de la députée de
Gouin, c'est le fait qu'on puisse, à
cause des pénalités qu'il prévoit, finir par diminuer le revenu d'une personne
ou d'une famille sous le niveau de la
prestation de base reconnue à l'article 56 du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles. Et ça,
ça veut dire 623 $ pour un
adulte seul ou une famille composée d'un seul adulte, et 965 $ pour une
famille composée de deux adultes. C'est ça qui nous fait
particulièrement tiquer.
Mais
revenons au programme Objectif emploi. Le ministre a un intérêt
particulier pour le parcours dit formation
et acquisition de compétences. J'ai compris
ça, tantôt, dans une des réponses qu'il a faites à mon collègue
de Saint-Jean. J'aimerais
qu'il m'éclaire quant à l'éventail de formations possibles. C'est important. C'est important.
Il n'est pas démontré que, lorsqu'on
offre des programmes de formation ou de retour au travail peu intéressants pour les prestataires, qu'ils vont y vivre beaucoup d'enthousiasme. Or, y a-t-il un éventail de formations
aptes à déclencher chez eux, chez une variété de prestataires, un peu
d'enthousiasme?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Bien, tout d'abord, l'enthousiasme, ça dépend un
petit peu de leurs projets, hein,
puis ça dépend d'eux. Il y a ceux qui ont vécu des expériences assez
compliquées à l'école, assez difficiles. Donc, si on veut faire l'éventail rapidement, et je ne veux pas me tromper, donc je vais regarder parfois à ma droite,
là. Ah! on les a ici. Donc, merci. Donc, ça va de l'alphabétisation, bien entendu; la francisation des personnes immigrantes — je sais que vous êtes sensible à cette question; la formation générale
préalable à la formation professionnelle et technique; la formation dans les
métiers semi ou peu spécialisés; la formation professionnelle au
secondaire; et la formation technique au collégial.
M. Rochon :
Alors, professionnelle, technique, semi-spécialisée — là,
je cite de mémoire, là.
M. Blais :
Oui, semi ou peu spécialisée, oui.
M. Rochon :
Oui, semi ou peu spécialisée.
M. Blais :
Francisation, alphabétisation et formation générale.
M. Rochon :
Je sors, en raison d'un mandat d'initiative sur les conditions de vie des
adultes hébergés en CHSLD, d'une
tournée d'un certain nombre de CHSLD au Québec, où j'ai rencontré un certain
nombre de préposés aux bénéficiaires qui ont suivi une formation qui
pourrait se retrouver, là, dans la nomenclature faite par le ministre, alors
maintenant employés d'un CHSLD, préposés aux
bénéficiaires, et qui se rendent compte qu'ils ne sont pas nécessairement là à
leur place, hein? Ils ont suivi cette
formation dans l'espoir de s'en sortir, d'améliorer leurs conditions de vie,
mais ils se rendent compte que ce fut
une décision un peu rapide. Leur décision a été un petit peu rapide, et j'ai
bien peur que certaines d'entre elles quittent leurs fonctions, après cette
décision bien trop rapide qui ne leur a pas rendu service à elles, ces
personnes, pas plus d'ailleurs
qu'elle n'a rendu service aux gens dont elles doivent prendre soin. C'est pour
ça que je pose la question au ministre sur l'éventail de formations
offert aux prestataires d'aide sociale.
M.
Blais : En tout cas, l'exemple que vous donnez est parlant, là, je
n'ai pas beaucoup de commentaires à faire là-dessus. Moi, j'ai connu des professeurs d'université qui n'étaient
pas heureux dans leur travail. Pourtant, c'est à peu près le plus beau métier ou les meilleures
conditions de travail, le plus de liberté possible et, curieusement, ils
étaient...
M.
Rochon : ...
M.
Blais : ...curieusement, oui, ils étaient malheureux. Ce qui est
important, encore une fois, c'est sûr, sur le fond, là, les gens choisissent les meilleures choses. Et
parfois, parfois, bon, il y a des personnes qui ont vécu beaucoup d'échecs
et qui veulent en finir, disons-le comme ça,
en finir avec l'école. C'est un peu cru, mais... Alors, dites-moi ce que je
peux faire, dites-moi où je peux me
trouver un emploi. Bien, as-tu pensé à être préposé? Bon, tu es syndiqué, tout
ça, dans un milieu de travail qui peut quand même être intéressant, si
tu aimes les relations humaines. Et puis il saute là-dessus. Je vois très bien le parcours. Mais ils sont dans
une bien meilleure situation que s'ils étaient encore à l'aide sociale. Ça,
vous allez le reconnaître avec moi. Mais ils
n'ont peut-être pas encore terminé leur cheminement, comme moi d'ailleurs
et comme bien d'autres aussi.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui. Je saisis bien ce que le ministre me dit, mais est-il bien conscient que
non seulement ces personnes dont je
lui parle ne sont pas heureuses d'un choix un peu rapide qu'elles ont fait,
mais, en raison de cette vocation qu'elles
découvrent ne pas avoir, de s'occuper du bien-être physique d'autres personnes,
qui peut mettre ces autres personnes dans
des situations qu'on ne souhaiterait pas voir nos vieux parents vivre?
Saisit-il bien qu'il y a un risque à conduire des prestataires d'aide sociale, à cause d'un
programme auquel ces personnes sont obligées d'adhérer, je pense aux
primodemandeurs, aux premiers
demandeurs obligés, sans quoi elles n'auront, ces personnes, aucune subvention,
aucune prestation, qu'on peut pousser des gens à prendre de pas très
bonnes décisions ni pour elles ni pour celles qu'elles serviront?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : À mon avis, le monde n'étant pas parfait, il y a plus de
chances qu'elles prennent des bonnes décisions si elles sont bien encadrées. On revient aux carrefours jeunesse-emploi,
donc il y a quand même une bonne expertise au niveau... il y a des conseillers en orientation qui sont là, qui peuvent
les aider à définir un peu leur... je pense qu'elles ont beaucoup plus de chances de trouver leur voie si
elles sont bien conseillées. C'est ça que je pense qu'il manque aux gens
quand ils font des choix, c'est d'être bien
conseillés, donc là au moins on s'assure d'un encadrement. Sera-t-il suffisant,
sera-t-il parfait? Bon, en tout cas, je pense que c'est bien mieux que, comme
je le dis souvent, de rester à la maison.
M. Rochon :
Alors, M. le Président, si je ne m'abuse, il ne nous reste que deux ou trois
minutes à notre séance de ce soir?
Le Président (M.
Cousineau) : Si je ne m'abuse, il nous reste trois minutes. Il
ne faut pas se fier à ce qui est derrière moi.
M. Rochon :
Parfait.
Le Président (M.
Cousineau) : Allez-y, poursuivez.
M. Rochon :
Alors, non, je veux juste, en terminant, me raccrocher, là, au sous-amendement
de mon collègue de Saint-Jean qui
devait et doit nous occuper pour les prochains instants et à l'amendement qui
l'a précédé de la collègue de Gouin,
et redire à quel point je pense, et nous sommes nombreux à penser, de ce
côté-ci de la table et chez les organismes communautaires qui se dévouent quotidiennement pour venir en aide aux
Québécoises et aux Québécois les plus démunis, que, comme le libelle le sous-amendement, il ne faudrait qu'aucune
disposition de ce projet de loi — le sous-amendement dit «du présent chapitre», parce qu'il réfère
à un article précis — ne
puisse avoir pour effet de diminuer le revenu d'une famille sous le niveau de la prestation de base
reconnue à l'article 56 du Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles.
On ne réglera rien avec des mesures aussi
sévères que de refuser une prestation à un jeune ou un moins jeune Québécois
parce qu'il refuse, pour toutes sortes de
raisons, d'adhérer au programme Objectif emploi. On ne risque que de mener
tout droit cette personne-là vers l'itinérance.
Je
ne doute pas, là, de la volonté du ministre à l'effet d'améliorer les
conditions humaines, les conditions de vie des Québécoises et des Québécois, là, qui reçoivent des prestations
d'aide sociale, mais je ne crois pas qu'il s'y prenne de la bonne façon.
Évidemment, parfait pour les allocations, là, additionnelles...
Le Président (M.
Cousineau) : Monsieur...
M. Rochon :
...pour quelqu'un qui s'inscrit aux parcours au programme Objectif emploi.
Mais...
Le Président (M.
Cousineau) : Sur consentement, on peut faire une demi-heure de
plus, si vous voulez.
Des voix :
...
Le
Président (M. Cousineau) : Non. Alors, compte tenu de l'heure,
la commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 30)