(Quatorze heures quatre minutes)
Le Président (M. Hardy) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 70,
Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Polo (Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Girard
(Trois-Rivières); Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par
M. Fortin (Pontiac); M. Bergeron (Verchères) est remplacé par Mme Lamarre (Taillon); M. Leclair (Beauharnois) est
remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); M. Therrien (Sanguinet) est
remplacé par M. LeBel (Rimouski).
Mémoires déposés
Le Président (M. Hardy) : Merci.
Avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose les mémoires que la
commission a reçus depuis la fin des consultations particulières.
Remarques préliminaires
Nous débutons avec les remarques préliminaires.
M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, vous disposez de 20
minutes.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je salue aussi, à mon
tour, tous les membres de la commission, les collègues, bien sûr, du
parti ministériel, nos collègues de l'opposition et je tiens à peut-être
présenter, si vous me permettez, là, les
personnes qui m'accompagnent plus spécifiquement pour nous aider dans nos
travaux : tout d'abord, le sous-ministre du Travail, de l'Emploi et
de la Solidarité sociale, M. Bernard Matte; Mme la sous-ministre associée
d'Emploi-Québec, Mme Johanne Bourassa; Mme la sous-ministre adjointe du secteur
des politiques, de l'analyse stratégique et
de l'action communautaire, Mme Chantal Maltais; et notre légiste,
Me Hugues Melançon. Ces personnes, bien entendu, sont également
accompagnées de leurs équipes respectives afin, encore une fois, de nous
appuyer dans notre travail.
M. le
Président, le Québec fait face à un phénomène de vieillissement de la
population et de rareté grandissante de la main-d'oeuvre. Cette situation a des répercussions directes sur les
possibilités de croissance de nos entreprises et, par le fait même, sur la santé économique du Québec. Nous
avons la responsabilité collective d'agir pour permettre à un plus grand nombre de chercheurs d'emploi et de
travailleurs d'intégrer le marché du travail ou de s'y maintenir. Pour ce
faire, nous devons nous assurer que la main-d'oeuvre actuelle et future soit en
mesure de répondre aux besoins de recrutement et des compétences des
entreprises d'ici.
Lors de son
dépôt, le projet de loi n° 70 a rapidement trouvé écho auprès de nombreux
groupes et associations. Nous avons pris note des commentaires et
suggestions qui nous ont été faits. Je rappelle toutefois l'importance de la collaboration de toutes les parties prenantes de
ce dossier. L'adéquation formation-emploi est un enjeu prioritaire pour
le Québec. Nous avons la responsabilité
collective de faire en sorte que le bassin de main-d'oeuvre fournisse des
candidats qualifiés pour les postes à
pourvoir et que les individus puissent trouver un emploi qui leur permette de
mettre en pratique leurs connaissances.
Le projet de
loi prévoit des modifications à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la
Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du
travail. Ces changements visent notamment à donner à la Commission des
partenaires du marché du travail un rôle stratégique accru en matière
d'adéquation formation-emploi en renforçant son
mandat à l'égard des politiques et orientations stratégiques en matière de
main-d'oeuvre et d'emploi, en lui ajoutant le mandat de définir les
besoins en développement des compétences de la main-d'oeuvre future en
adéquation avec les besoins des entreprises
et les perspectives du marché du travail en plus de continuer de s'occuper du
développement des compétences de la main-d'oeuvre actuelle, en lui
accordant le droit de formuler des recommandations aux ministères membres de la commission en vue de mieux répondre
aux besoins du marché du travail en matière d'acquisition et de développement des compétences. Les ministères
devront ensuite faire rapport à la commission des actions prises à la
suite de ces recommandations. Ces
modifications visent à permettre de dresser un portrait juste de la situation
du marché du travail et des besoins des employeurs
puis à favoriser la mise en oeuvre de solutions pour améliorer l'adéquation
entre les compétences de la main-d'oeuvre et les emplois disponibles.
Les services publics d'emploi et les services de
solidarité sociale demeureront des lignes d'affaires visibles et reconnues auprès du public et des institutions. Le
réseau du ministère est le plus décentralisé au gouvernement, et son action est primordiale. Nous voulons justement
miser sur sa présence en région pour améliorer la prestation de services
à la population.
Je vous
rappelle que la Commission de révision permanente des programmes a souligné,
dans son rapport d'août 2015,
l'importance de simplifier les rapports entre l'État, les citoyens et les
entreprises. À la suite du dépôt de ce rapport, le gouvernement a annoncé qu'il modernisera et
optimisera le modèle actuel de Services Québec. L'objectif est de
faciliter l'accès aux services gouvernementaux et de simplifier les démarches
des citoyens et des entreprises pour obtenir les services, tout en portant une
attention particulière aux régions.
• (14 h 10) •
Considérant la volonté gouvernementale de faire
de Services Québec la porte d'entrée principale des services gouvernementaux sur l'ensemble du territoire
québécois, il était requis de modifier notre loi constitutive afin de
reconfigurer la prestation de services publics ainsi que les champs de
responsabilité et d'imputabilité.
Nous proposons aussi de modifier la Loi
favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre. L'objectif de cette démarche
est d'élargir la portée de la loi en faveur de la participation active
des employeurs à la formation de la future
main-d'oeuvre en plus de celle des travailleurs en emploi. Cet élément
permettra ainsi de favoriser un meilleur accès
à la formation et au développement des compétences pour la main-d'oeuvre
québécoise.
Je vous rappelle que 50 % des postes à
combler au cours des prochaines années le seront par les jeunes d'aujourd'hui. Les employeurs, les représentants
des travailleurs doivent dès maintenant se préoccuper davantage de la
formation que les jeunes et les immigrants reçoivent s'ils souhaitent
bénéficier de candidats ayant les qualifications nécessaires.
Les modifications demandées à la Loi sur l'aide
aux personnes et aux familles permettront principalement de créer le programme Objectif emploi. Ce programme
obligatoire vise environ 17 000
personnes admissibles au Programme d'aide
sociale qui formulent une première demande d'aide financière et qui n'ont pas
accès... et qui n'ont pas, pardon, de contraintes
à l'emploi. Nous souhaitons leur offrir un accompagnement personnalisé sur
leurs besoins spécifiques afin de favoriser
leur intégration au marché du travail. Il est évident que l'intensité de l'aide
variera d'une personne à l'autre, le soutien
offert sera adapté à la situation
de chacun des individus. Nous sommes confiants que ce programme amènera
la grande majorité des participants à définir un projet d'intégration en emploi
réaliste correspondant à leur potentiel et à leurs intérêts — et
j'insiste beaucoup là-dessus, M. le Président — correspondant à leur
potentiel et à leurs intérêts.
Les personnes visées par le programme Objectif
emploi bénéficieront d'une entrevue d'évaluation et d'aide à l'emploi. Cette rencontre constitue un moment
privilégié nécessaire pour dresser avec elles le bilan de leurs
compétences, des forces et ressources
personnelles et sociales face à l'emploi tout en tenant compte des obstacles
qu'elles pourraient rencontrer en vue
de leur insertion en emploi. Nous conviendrons, avec les participants, d'un plan personnalisé d'intégration.
Encore une fois, j'insiste là-dessus, nous
conviendrons, avec les participants, d'un plan dans lequel les activités à
réaliser pour atteindre leurs objectifs
d'intégration en emploi seraient définies. Ainsi, selon la situation de la
personne, trois types de démarches
pourraient être entreprises : tout d'abord, la recherche active d'emploi; le développement des
compétences; ou encore, dans certains cas, le développement des habiletés
sociales, ce qu'on appelle la préemployabilité.
Tout au long de la démarche, le plan intégration
en emploi serait ajusté afin de tenir compte de l'évolution de la situation ou des difficultés que pourraient rencontrer les participants. Si une
personne n'a pas d'idée quant à l'emploi qu'elle voudrait occuper, qu'elle ne connaît pas son potentiel et ne
sait pas quelles compétences elle pourrait développer, le plan pourrait d'abord prévoir uniquement la
réalisation d'un bilan de compétences et d'une démarche d'orientation.
Par la suite, il serait bonifié en fonction des résultats de ces premières
activités. Les participants pourraient compter sur un accompagnement soutenu, personnalisé et axé sur leurs besoins offert par
le personnel d'Emploi-Québec et ses partenaires : les organismes en
développement de l'employabilité et les établissements de formation.
En plus d'une
prestation de base équivalente à celle accordée au Programme d'aide sociale,
une aide financière additionnelle serait accordée en fonction de la
démarche entreprise par le participant afin d'améliorer ses chances
d'intégration à l'emploi.
Au sujet des obligations
des participants, permettez-moi de rappeler que, selon l'Organisation de
coopération et de développement économiques, trois conditions doivent
être réunies pour assurer le succès d'une stratégie d'activation et
d'intégration au marché du travail : une incitation financière au travail,
une aide par des services publics d'emploi adéquats et une obligation de
recherche d'emploi pour les personnes aptes au travail en contrepartie de leur
droit à une prestation, assortie de sanctions modérées appliquées de façon
stricte dans le cas de celles qui manquent à leurs obligations, bien entendu. Plusieurs pays tels que la Suède, la Norvège, le Danemark,
l'Allemagne, la France approchent... appliquent,
pardon, cette approche préconisée par l'OCDE, de même que toutes les autres
provinces canadiennes, sauf Terre-Neuve-et-Labrador.
Le programme
Objectif emploi viserait les personnes qui sont en mesure d'entreprendre une
démarche menant à l'intégration du marché du travail. Cette démarche
tiendrait compte de la situation et des capacités du participant, et ce, tout au long du processus. Cette approche
individualisée s'appliquerait également à la question des manquements. Ceux-ci seraient analysés en tenant compte de la situation
de la personne et conformément à l'évaluation effectuée dans le cadre du plan d'intégration en emploi. Ainsi, si elles vivent des
difficultés, elles pourraient en discuter avec leurs agents et convenir
ensemble des moyens pour les surmonter. Dans une telle situation, aucune
diminution ne serait imposée, bien entendu.
Tous les Québécois et les Québécoises qui en ont la capacité doivent prendre
part activement à la société.
Notre
gouvernement souhaite aussi mieux soutenir les prestataires du Programme de
solidarité sociale en suggérant l'introduction d'une habilitation
permettant d'exclure des revenus provenant d'une succession. Cette proposition viserait, par exemple, à protéger des sommes
versées par fiducie testamentaire par des parents d'un enfant handicapé
afin de sécuriser son avenir. Cette proposition fait d'ailleurs suite à une
recommandation émise par la Protectrice du citoyen.
Enfin, nous croyons utile de modifier les règles
afin de permettre d'éliminer l'obligation pour les ménages prestataires d'aide sociale de produire une
déclaration relative à leur situation à tous les mois. Ce changement
contribuera à simplifier les démarches administratives liées aux déclarations
effectuées par les prestataires. Il permettra également d'assurer une meilleure
cohérence entre les différents processus en place.
En terminant,
j'ai la conviction, M. le Président, que ce projet de loi contribuera, à sa
façon, à la prospérité du Québec. Les
entreprises qui ont l'ambition de prospérer pourront trouver plus facilement
leur main-d'oeuvre plus qualifiée dont
elles ont besoin. Les personnes qui désirent occuper un emploi ou développer
leurs compétences pourront également le faire plus facilement.
Je m'inscris
en faux contre les interprétations véhiculées par certains qui laissent croire
que le projet de loi n° 70, s'il était adopté, encouragerait les
préjugés. Au contraire, il représente un moyen concret d'aider des gens à
sortir des filets de la pauvreté selon leurs capacités et leur rythme, bien
entendu. À mon sens, l'objectif d'intégrer un emploi ne discrimine pas les
citoyens et les citoyennes, mais contribue plutôt à combattre l'exclusion et à
élever le sentiment de dignité des individus.
Je suis
maintenant disposé, M. le Président, à entreprendre l'étude détaillée du projet
de loi n° 70 et à entendre bien sûr
les remarques de mes collègues des partis d'opposition. Je vous propose un
cadre d'étude basé sur la logique suivante : nous pourrions ainsi
débuter par un premier bloc qui regrouperait les mesures permettant une
meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi, en abordant les articles touchés par la Loi favorisant le
développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre;
dans un deuxième bloc, nous étudierions ceux liés à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la
Commission des partenaires du marché du travail; ensuite, nous
enchaînerions avec les mesures favorisant l'intégration en emploi, nous
verrions alors les articles de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.
Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Je
nous souhaite d'excellents échanges.
• (14 h 20) •
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Permettez-moi, à ce
moment-ci, de saluer tous les gens qui sont autour de la table. J'ai
omis de vous saluer tantôt. Ça fait que c'est fait. M. le ministre, bon
après-midi.
J'invite maintenant le porte-parole de
l'opposition officielle en matière d'emploi et d'économie sociale et député de
Saint-Jean à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de
20 minutes. À vous la parole.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Je vous salue, à votre tour, dans votre fonction, M. le
ministre, ainsi que toute l'équipe qui a été
présentée, les collègues du gouvernement, mes collègues du Parti québécois, la
députée de Taillon, le député de
Rimouski, ainsi que mon collègue de la CAQ, de Drummond—Bois-Francs, ainsi que son recherchiste,
notre recherchiste et toutes nos équipes respectives.
M. le Président, je ne pourrais pas dans ce
cas-ci mentionner que c'est avec plaisir que nous débutons l'étude détaillée du projet de loi n° 70, parce que
plusieurs questions demeurent encore sans réponse à ce stade-ci de nos
travaux.
Pourtant,
nous avons eu l'occasion d'entendre quelques groupes. Malheureusement, nous
n'avons pas eu l'occasion d'avoir des consultations générales comme nous
l'avions demandé et qui auraient permis aux nombreux groupes qui ont écrit des
mémoires... Vous l'avez même fait précédemment, déposé
un certain nombre de mémoires de groupes qui, suite à la fin des consultations,
ont transmis leurs mémoires. C'est plus de 80 mémoires qui ont été déposés
jusqu'à maintenant pour ce projet de loi là. Ça démontre, selon moi, M. le
Président, que c'est un projet de loi qui touche les organisations sur le
terrain, les organismes mais aussi des individus, des citoyens, parce que
certains citoyens nous ont transmis leurs mémoires, comme vous l'avez vu, M. le
Président.
Ce n'est pas
avec plaisir que nous débutons l'étude détaillée du projet de loi à ce
moment-ci, d'autant plus que nous avons
fait beaucoup d'interventions lors de l'adoption de principe pour justement
poser des questions dans l'espoir d'obtenir des réponses à nos
questions, parce que jusqu'à maintenant le projet de loi est très ambigu sur
certaines questions. Le ministre en a parlé
dans ses remarques préliminaires, toute la question d'Emploi-Québec, donc, de
la perte d'autonomie d'Emploi-Québec.
Nous, ça nous inquiète, ça nous questionne. La Commission des partenaires du
marché du travail, nous aussi, ça
nous inquiète, la perte de pouvoirs, si on peut dire, hein, d'autonomie de...
pas d'autonomie, mais la perte de pouvoirs
de la Commission des partenaires du marché du travail nous questionne.
Pourquoi? Est-ce que c'est parce que la commission ne fait pas bien son
travail actuellement? Est-ce que c'est parce qu'elle pourrait faire mieux? On
n'a pas eu encore de réponse claire sur cette question-là.
Le projet de loi vise principalement deux
aspects : on parle de l'adéquation entre la formation et l'emploi et
l'intégration en emploi. En termes d'adéquation entre la formation et l'emploi,
nous aurions aimé savoir ce qui est arrivé des recommandations, des pistes
d'action qui avaient été élaborées lors du forum de Lévis en 2011. Il y avait des actions qui avaient été mises en place à ce
moment-là qui avaient été déterminées par l'actuelle ministre du
Tourisme maintenant, qui était ministre de
l'Emploi et de la Solidarité sociale à l'époque, et Line Beauchamp, qui était
ministre de l'Éducation. Donc, qu'est-ce qui arrive avec ça?
Au fond, pourquoi je vous dis ça, M. le
Président? C'est que je me questionne, nous nous questionnons sur la plus-value de ce projet de loi là. Le ministre
mentionnait tantôt dans ses remarques préliminaires tout
l'accompagnement qui
sera offert aux gens : une rencontre, on va voir leurs forces, les
obstacles qui... Ça ne prend pas un projet de loi pour rencontrer des
gens, M. le Président. Moi, je crois qu'actuellement les gens qui sont dans les
centres locaux d'emploi aimeraient pouvoir
rencontrer les nouveaux demandeurs mais même, je pourrais dire, les demandeurs
d'aide sociale. Mais en ce moment ce
n'est pas possible, ce n'est pas possible parce qu'il y a de moins en moins de
gens qui travaillent dans les centres locaux d'emploi.
M. le Président, dans les dernières années,
on a vu une diminution de plus de 500 personnes dans les équipes d'Emploi-Québec.
Bien, plus de 500 personnes de moins, ça fait en sorte qu'il y a moins de gens
pour rencontrer les bénéficiaires. Moins de
centres locaux d'emploi. Il y a de plus en plus de régions qui n'ont plus de
centres locaux d'emploi. Juste en
Montérégie, là, Contrecoeur, Saint-Rémi, il n'y en a plus. Pointe-aux-Trembles,
il n'y en a plus. Je pourrais vous parler...
sûrement que mes collègues aussi en ont d'autres, il y en a d'autres qui ont
été aussi annoncés, là, qui seront fermés prochainement aussi. Même dans
ma circonscription, à Saint-Jean, il y a une centralisation des employés du
centre local d'emploi de Saint-Jean, qui
seront transférés en partie à Longueuil ou à Châteauguay. Il ne restera que
quelques agents seulement à
Saint-Jean. Mais pourtant il n'y a pas de transport en commun pour se rendre à
Châteauguay, puis il n'y en a pas à
Châteauguay, puis, à Longueuil, bien, il faut passer par Montréal. Ça devient
compliqué pour des gens qui justement vivent de la pauvreté.
Le ministre nous dit : Le projet de loi
n° 70, je me porte en faux contre les gens qui prétendent que le projet de loi n° 70 va augmenter les préjugés ou du
moins créer des préjugés à l'endroit des personnes les plus démunies.
Mais je m'excuse de le dire comme ça, M. le
Président, mais je ne partage pas son opinion. Le projet de loi n° 70 va
créer de la pauvreté, le projet de loi n° 70 s'attaque aux plus
démunis, M. le Président.
On l'a vu et
on l'a répété, et on n'a toujours pas de réponse à cette question-là : De
combien les gens seront coupés, pour
ceux qui ne peuvent pas participer au parcours d'employabilité, M. le
Président? L'ancien ministre nous parlait : Jusqu'à la moitié du
chèque d'aide sociale. Mais la moitié du chèque d'aide sociale, là, c'est plus
de 300 $ par mois de coupés sur un chèque de 623 $. Donc, je
regrette, mais je ne pense pas qu'aujourd'hui quelqu'un, au Québec, peut vivre
avec moins de 312 $ par mois — c'est impensable, M. le
Président — au
même moment où le gouvernement tient — puis je vais le dire comme je le pense — derrière des portes closes, dans le bureau
du ministre... pour le plan de lutte à la pauvreté et contre l'exclusion
sociale.
Moi, je crois
que c'est travailler à l'envers, M. le Président. Je crois que le ministre...
je comprends que ce n'est pas lui qui
était ministre à ce moment-là, c'était son prédécesseur, mais je crois que,
comme nouveau ministre — surtout qu'il a eu cette fonction-là de ministre de
l'Emploi et de la Solidarité sociale, il connaît quand même cette question-là — il aurait pu dire : Bien, écoutez, on va faire
les consultations sur le plan de lutte à la pauvreté, nous allons présenter
notre plan de lutte et, suite à ça, des
recommandations, des actions, des pistes de réflexion qui auront émané du plan
de lutte nous pourrons amener une
législature qui inclura certaines mesures dont le plan de lutte aura besoin.
C'est comme ça qu'on travaille, M. le Président.
Là, le ministre nous dépose un projet de loi
qui, selon nous et selon plusieurs, force est de le constater, va créer de la pauvreté, va augmenter la pauvreté.
Et, en même temps, le ministre ou... je dis «en même temps», ce serait
plutôt après, là, parce que le plan de lutte
va arriver après l'adoption du projet de loi sûrement... le plan de lutte va
arriver puis va peut-être aller à l'encontre du projet de loi
n° 70. On va être obligé de refaire un autre projet de loi puis de
modifier encore la loi. Ce n'est pas comme ça qu'on travaille, M. le
Président.
Au même
moment où le premier ministre — et là ce n'est pas n'importe qui, c'est
quand même le premier ministre qui
est ministre responsable de la Jeunesse — va déposer, dans les prochains jours, les
prochaines semaines, la politique jeunesse du gouvernement, on ne sait
pas vers où la politique jeunesse s'en va. Cependant, si on nous dit... mais je
comprends que le ministre doit avoir une
idée d'où la politique jeunesse du gouvernement actuel va, mais, s'il nous
dit qu'elle va en droite ligne avec le projet de loi n° 70, on a un gros
problème, on a un gros problème pour les jeunes du Québec, M. le Président.
On ne sait toujours pas où en est la politique
d'éducation des adultes et de formation continue. Lorsque le ministre actuel a été ministre de l'Éducation,
j'ai eu l'occasion de le questionner à ce sujet lors de l'étude des crédits.
Il m'a dit qu'il avait besoin d'étudier davantage, de peaufiner sa réflexion et
la pertinence d'avoir une telle politique. C'est à peu près les mots qu'il a utilisés, mais avec une expression qui est
propre à lui, là, les mots qui lui appartiennent, mais c'est à peu près, grosso modo, cette idée-là. Bon, si
c'est ça, c'est une chose, mais où en... Il a été quand même
pratiquement un an ministre de l'Éducation. Elle a évolué, sa réflexion. Le
nouveau ministre de l'Éducation, que fera-t-il avec la politique d'éducation
des adultes?
Pourquoi je
vous parle de ça, M. le Président? Parce que, on l'a dit, c'est l'adéquation
entre la formation et l'emploi. On
revoit le mandat de la Commission des partenaires du marché du travail. La
Commission des partenaires du marché du travail offre de la formation en entreprise, organise la formation en
entreprise, fait en sorte, dans le projet de loi, qu'on ajoute la main-d'oeuvre future dans le rôle et la
fonction, là, de travail, là, de la Commission des partenaires du marché
du travail. Bien, ça, ça a un impact sur la
formation continue, sur ce qui se passe en entreprise, mais aussi pour s'y
rendre. Quand on voit que pratiquement la
moitié de... 52 % de la population a des problèmes de lecture, des
troubles de lecture et d'écriture, ça a un impact sur l'emploi, bien
entendu, M. le Président.
Je pourrais
vous parler d'autres programmes plus spécifiques, qu'on a eu l'occasion
d'entendre, en commission parlementaire,
des groupes qui sont venus nous parler de différents programmes qui existaient
et qui se questionnent où on en est.
Par exemple, Ma place au soleil, on le voit dans plusieurs régions du Québec,
mon collègue de Rimouski va peut-être en
parler un peu, mais dans sa région, à Rimouski, on ne l'offre pratiquement
plus; en Gaspésie non plus. Sur la Côte-Nord il n'y en a quasiment plus.
• (14 h 30) •
Donc, c'est encore les régions du
Québec qui sont touchées quand on voit que le projet de loi même actuel, le
projet de loi n° 70, s'attaque aux
régions, parce qu'on ne met pas de distance pour un emploi convenable. Donc, on
va faire en sorte que quelqu'un qui habite la Gaspésie, ou Rimouski, le
Bas-Saint-Laurent, ou Chicoutimi au Saguenay—Lac-Saint-Jean, peu importe... M.
le Président, bien, ces gens-là, qui ne sont pas capables de se trouver un
emploi dit convenable... et on ne sait pas
c'est quoi, un emploi convenable, encore. C'est dans le règlement. Bon, bien,
ces gens-là vont être forcés de s'en
venir à Québec. L'ancien ministre l'a dit. Il me l'a
même dit, à moi, au salon bleu, M. le
Président. Il a dit : Vous le faites,
vous, Montréal-Québec. Si, vous, vous êtes capable de le faire,
les autres seront capables de le faire aussi.
Mais là, je m'excuse, M. le Président, ce n'est pas le même ordre d'idées, là. Moi, je
ne déménage pas à Québec, là, pas que je
n'aime pas la ville de Québec, mais ce n'est pas ma ville, là, je n'habite pas
ici. Moi, c'est Saint-Jean-sur-Richelieu, ma ville. Donc, M. le
Président, on se questionne beaucoup sur cette question-là.
Ma
place au soleil, ça aide qui? Ça aide les femmes principalement, ça aide les
familles, les mères monoparentales. Souvent,
on le sait, les familles monoparentales, malheureusement, c'est souvent
davantage les femmes qui sont le pilier familial. Mais qu'est-ce qui arrivera aussi aux femmes? Parce qu'on n'en parle pas
beaucoup, de ça, hein, dans le projet de loi. On parle qu'on va s'attaquer aux jeunes, mais on s'attaque aussi
aux femmes, on s'attaque aux femmes aussi, parce que, on l'a vu... Puis je pourrais vous parler des organismes en
employabilité féminins. La semaine passée, ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a posé une
question à la ministre de la Condition féminine à ce sujet-là,
1,2 million de dollars, M. le
Président, 1,2 million de dollars qui est coupé aux organismes
d'employabilité pour les femmes. Et pourtant ces organismes-là ont démontré qu'ils obtenaient des résultats plus qu'enviables — plus qu'enviables — pour faire en sorte que les femmes qui sont actuellement à l'aide
sociale puissent se trouver un emploi ou retourner sur le marché du
travail.
Ce
n'est pas ça, l'objectif du ministre, actuellement, de faire en sorte qu'il y
ait des gens qui ne sont pas sur le marché
du travail... retournent sur le marché du travail? Bien, ces groupes-là l'ont
démontré, ils le font bien, ils le font bien. Pratiquement les trois
quarts des participantes des programmes ont réussi à se trouver un emploi. Plus
de la moitié ont réussi à avoir un salaire,
un revenu mensuels plus élevés. Bien, si c'est ça, l'objectif du ministre,
actuellement, de faire en sorte qu'il
y ait moins de gens à l'aide sociale, qu'il y ait plus de gens sur le marché du
travail, bien, pourquoi, lui, sa collègue
à la Condition féminine et le gouvernement libéral s'attaquent aux organismes
d'employabilité féminins? C'est des organismes...
il en reste juste 16, M. le Président, 16, au Québec. Bon, bien, ces
organismes-là ont amené des résultats.
Je
pourrais parler des carrefours jeunesse-emploi, M. le Président, je pourrais
parler des carrefours. Les carrefours, le ministre actuel, lorsqu'il
était ministre, il y a de ça plus d'un an... bien, le ministre s'est attaqué au
modèle des carrefours jeunesse-emploi. Il a
fait en sorte de mettre de côté des jeunes. Il va me dire et il va me répondre
que, non, il n'a pas mis de côté des
jeunes qui sont actuellement à l'aide sociale ou des jeunes... Bon. Bien non.
Mais, de toute façon, le projet de
loi actuel ne touche pas des jeunes qui sont déjà, actuellement, à l'aide
sociale. C'est des nouveaux demandeurs. Donc, moi, ma lecture, M. le Président, si on aide des jeunes qui ne
sont pas actuellement sur l'aide sociale à se trouver un emploi ou à trouver un meilleur emploi, bien c'est
moins de jeunes qui vont faire éventuellement une demande à l'aide sociale. Donc, pourquoi le ministre a attaqué le
modèle des carrefours jeunesse-emploi, qui avaient des bons succès, qui
avaient amené des résultats, eux aussi? Bien, on le voit, les carrefours
jeunesse-emploi sont obligés, selon des régions — encore, c'est très arbitraire, mais,
bon... — selon
des régions, ils peuvent aider des jeunes qui sont aux études; dans d'autres régions, non. Dans des régions, ils
ne peuvent pas aider les 16-17 ans; dans des régions, ils peuvent les
aider. Bon, ça dépend des régions, encore
là, puis c'est souvent les régions les plus éloignées qui sont les plus
durement touchées par ce jugement arbitraire, si on peut dire, pour
l'aide aux jeunes.
M.
le Président, je n'ai pas parlé des pertes d'emploi, je n'ai pas parlé des
pertes d'emploi. Depuis l'arrivée du gouvernement
libéral, il y a des pertes d'emploi au Québec. On le voit à tous les mois. On
voit aussi que, depuis l'arrivée du Parti libéral au pouvoir, le nombre
de jeunes à l'aide sociale a augmenté. Avant, le nombre de jeunes à l'aide
sociale diminuait. Je comprends que, là, le
ministre va dire : Bon, vous voyez, il y a une raison pourquoi il faut
déposer le projet de loi n° 70,
il faut faire en sorte qu'il y ait moins de jeunes qui demandent leurs chèques
d'aide sociale. Puis ça, encore là, c'est
prendre le problème par l'autre bout. Moi, je crois que, si on aide les jeunes
qui ne sont pas à l'aide sociale actuellement ou qui sont sur le marché du travail mais avec un emploi précaire et
qu'on les aide à avoir un meilleur emploi ou à se trouver un emploi, ces jeunes-là n'auront pas besoin de
faire de demande d'aide sociale. Mais je comprends, M. le Président,
que, quand tous les gens... pas tous les gens, il ne faut pas généraliser,
mais, quand un certain nombre de Québécois ou de Québécoises — merci,
M. le Président — perdent
leur emploi, bien, ce n'est pas surprenant que ces gens-là cherchent des
emplois et que c'est les jeunes qui sont
pénalisés, effectivement, parce qu'ils ont moins d'expérience, moins de
formation que des gens plus âgés, donc, qui prennent les emplois.
On
ne parle pas des banques alimentaires, M. le Président. Le nombre de demandes
dans les banques alimentaires augmente.
Le ministre ne peut pas nous dire que le projet de loi ne touche pas les plus
démunis et que le projet de loi ne créera
pas de la pauvreté, M. le Président. On le sait, on le voit. Quand quelqu'un
devra vivre avec seulement 312 $, 313 $ par mois, bien c'est inévitablement...
inévitablement, ces gens-là n'auront pas d'autre choix que d'avoir davantage
recours aux banques alimentaires, qui débordent et... pas débordent de
nourriture, M. le Président, débordent de demandes.
Donc,
nous, M. le Président, nous considérons que le ministre et son gouvernement...
bon, on a espoir qu'il dépose encore
une politique économique, là, mais là ça, ça semble être... on va devoir
attendre un nouveau gouvernement pour le faire. Bon, on a espoir encore. Mais la politique jeunesse, le plan de
lutte à la pauvreté, le plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion
sociale, que nous attendons d'avoir de véritables consultations sur le plan de
lutte... Nous espérons, pour le projet de
loi n° 70 plus particulièrement, parce que nous devons commencer l'étude
du projet de loi, donc, obtenir des réponses sur la perte d'autonomie
d'Emploi-Québec, la Commission des partenaires du marché du travail. Qu'est-ce qui compose ce règlement-là, ce fameux
règlement-là, M. le Président? C'est quoi, un emploi convenable? C'est
quoi, les distances? C'est quoi, le nombre
d'heures, le salaire qui est accepté, les distances? Si je ne l'ai pas dit, je
le répète, parce que c'est important, M. le Président.
Donc,
beaucoup, beaucoup, beaucoup de questions. Je n'ai pas parlé de ce que ça veut
dire pour la main-d'oeuvre future. Ça
veut dire quoi, ça? On va payer des stages? On va payer des jeunes qui sont aux
études à... Ce n'est pas clair, là. Est-ce
que c'est en lien avec le modèle dual, ou le modèle allemand, en formation
professionnelle, que le ministre actuel voulait implanter lorsqu'il
était ministre de l'Éducation? Donc, c'est toutes des questions, M. le
Président, que nous attendons des réponses.
M. le
Président, je sais que mes collègues voudront aussi faire des remarques
préliminaires — parce
que chacun a une réalité dans sa
circonscription, dans sa région — et ont des questions aussi, sûrement, à
poser au ministre. Donc, nous espérons
que le ministre, au fur et à mesure, durant les travaux de la commission,
pourra répondre à nos questions, et peut-être que, dans certains cas, ça trouvera une voie de passage. Nous
avions déposé une motion de scission du projet de loi pour faciliter l'étude du projet de loi, pour
faire en sorte que ce qui pose moins problème ou ce qu'on... à l'heure
actuelle, ce n'est que quelques questions ou
des préoccupations, qu'on puisse l'avancer; dans d'autres cas, qu'on puisse
avoir plus de temps pour y réfléchir.
Le gouvernement a décidé de ne pas retenir notre proposition. Notre collègue de
Québec solidaire avait déposé aussi
une motion pour suspendre l'étude le temps de faire l'étude d'impact et
l'analyse différenciée selon les sexes, que nous n'avons toujours pas
eue, donc, qui demandera plusieurs questions.
Mais je veux
quand même vous aviser, M. le Président, qu'après les collègues... qu'ils
auront intervenu pour leurs remarques
préliminaires nous avons l'intention de déposer des motions en vertu de
l'article 244 pour faire en sorte qu'on puisse entendre quelques groupes. Donc, je vous en avise dès maintenant,
M. le Président, pour que vous puissiez me faire signe à ce moment-là,
mais je vais vous suivre quand même.
Donc, je vous remercie beaucoup, M. le
Président, et je souhaite que nous ayons des bons travaux.
• (14 h 40) •
Le Président (M. Hardy) : Merci, M.
le député. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'emploi et de solidarité
sociale et député de Drummond—Bois-Francs à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale de 20 minutes.
M. Sébastien
Schneeberger
M.
Schneeberger :
Merci, M. le Président. Alors, en partant, j'en profite pour vous saluer. Je
salue aussi le ministre et toute son équipe, aussi les collègues députés
ministériels, le député de Saint-Jean et ses collègues — je
vous salue — et
toute l'équipe qui participe aux... bien, à la commission aujourd'hui.
Nous avons
appuyé, la semaine dernière, le principe du projet de loi n° 70. En effet,
les deux volets du projet de loi sont, selon nous, des ajustements
législatifs nécessaires. Les modifications à la CPMT pour exclure les cours,
entre guillemets, je dirais, de rigologie
ou, comme on a vu, du giron de la loi du 1 % nous apparaissent
essentielles. Également, la pondération des formations est une voie
prometteuse.
Du côté de
l'aide sociale, il va sans dire qu'un programme d'accompagnement des nouveaux
prestataires dans une optique de
retour au travail nous rejoint. Seulement, comme plusieurs groupes sont venus l'expliquer, cet
accompagnement ne doit pas se faire à
l'aveuglette, il doit favoriser la participation la plus volontaire possible du
prestataire. Le plus gros problème du projet
de loi réside dans le fait que le règlement
d'application qui en constituera le moteur n'est pas
encore public. En effet, il y a fort à
parier que ce règlement est déjà conçu et prêt à être lancé sous réserve de l'adoption
de la loi et des amendements qui seront... qui y seront apportés, pardon. Le ministre
calmerait beaucoup de craintes et simplifierait d'autant nos
travaux en déposant dès aujourd'hui son projet de règlement.
Il y a
plusieurs éléments importants que nous souhaitons retrouver au texte du projet de loi au terme de cette étude. La
définition d'un emploi convenable établissant un critère de distance clair et
adapté aux prestataires en est un. Il y a également une série de
modifications, important à ajouter... importantes à ajouter, pardon, à la définition du plan
d'intégration à l'emploi pour en faire un processus concerté et
d'accompagnement. Nous veillerons ensuite à ajouter à la loi une bonification
des recours des prestataires ainsi qu'un processus de révision de la loi afin
d'en confirmer l'efficacité. Nous avons
l'intention de collaborer à la progression des travaux dans la mesure où le ministre
témoigne de son ouverture à nos idées et nos commentaires. Nous nous
réservons cependant le droit de rejeter le projet de loi au terme du processus
si le ministre persistait à imposer un texte où en omettrait les précisions
dont je viens de parler.
En terminant,
je voudrais aussi saluer tous les groupes et gens qui ont déposé des mémoires
afin de mieux nous diriger et je
souhaite évidemment que cette étude soit fructueuse pour tous les
gens, surtout pour les gens qui subiront les
conséquences de cette loi. Alors, merci, M. le Président.
Et là j'aimerais amener un commentaire qui est
très personnel mais qui peut peut-être aussi toucher d'autres personnes, qui n'est pas en lien avec le projet de loi. Nous avons été convoqués à cette audience aujourd'hui pas plus tard que vendredi,
3 heures. Il y a quelque temps, la ministre de la Condition féminine
faisait un beau discours sur la conciliation famille dans le but ici de nous dire : Il faut
avoir plus de femmes, surtout de
jeunes femmes, à venir postuler pour être députées. Moi, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus. Par
contre, quand on vient nous convoquer à 3 heures de l'après-midi pour un lundi qui est supposé être
une journée pour les travaux de député à l'intérieur de la
circonscription... Pour ma part, j'ai des
enfants en bas âge, et ce n'est pas toujours évident de concilier
travail-famille. Alors, je vous le dis puis je n'ai pas peur de le dire. Là, j'ai
quelqu'un aujourd'hui qui va me dépanner, parce que ma conjointe a aussi
une vie professionnelle et souvent elle en
profite le lundi soir pour prendre des rendez-vous avec... dans ses fonctions.
Alors, j'ai quelqu'un aujourd'hui qui
va faire 50 kilomètres pour recueillir mes enfants à l'école et les amener chez
nous, en attendant que ma conjointe revienne tard ce soir. Et c'est ça,
la réalité.
Alors,
j'aimerais ça qu'on ait au moins de la délicatesse quand on veut avoir une
commission le lundi. Puis je ne suis
pas ici pour faire brailler personne, là, pas du tout. Tout le monde, peu
importent les emplois confondus, on a tous cette problématique-là, mais, quand on fait un discours,
bien, essayez de suivre ce discours-là, puis au moins nous demander
quelques jours à l'avance si c'est possible de le faire. Merci, M. le
Président.
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Nous prenons en note votre
idée, que vous nous avez apportée, votre recommandation. Maintenant, y
a-t-il...
M. LeBel : ...des remarques
préliminaires aussi, M. le Président.
Le Président (M. Hardy) : Oui, je
suis rendu là, mon cher monsieur député de Rimouski.
M. LeBel : O.K. On est rendus à la
même place.
Le Président (M. Hardy) : Bon. Et
voilà. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques
préliminaires?
M. LeBel : C'est là qu'il faut que
je dise oui.
Le Président (M. Hardy) : M. le
député de Rimouski, à vous la parole.
M.
Harold LeBel
M.
LeBel : Oui. Merci, M. le Président. Bien, bonjour, tout le monde, en ce beau
lundi, et je reprends les paroles de mon
collègue, effectivement. Et, effectivement, les lundis, c'est très précieux pour les députés
dans leurs circonscriptions, puis
souvent aussi ça permet de faire un peu de conciliation famille-travail, c'est
bien clair. Et, comme whip, vous avez deviné
que j'ai souvent ce genre d'interventions, à mon bureau, de plein de députés qui disent qu'il y a de plus en
plus de commissions les lundis. Je ne jette pas la faute sur personne, parce
que c'est beaucoup aussi le... on fait beaucoup de consultations maintenant, on fait beaucoup de... On a un Parlement qui
est démocratique, on essaie d'écouter le plus de monde possible, ça fait que ça prend du temps et ça prend des heures,
mais il faudra éventuellement se pencher là-dessus pour voir comment on
peut encore mieux organiser tout ça.
Je suis
content de participer à cette commission. Pourquoi? Parce que le dossier de la
lutte à la pauvreté, ça vient me chercher beaucoup. Si je fais de la
politique aujourd'hui, c'est que j'ai deux ou trois éléments qui m'ont
motivé : le premier élément, c'est
l'indépendance du Québec, c'est la souveraineté, c'est bien certain; le
deuxième, c'est les régions, l'avenir
de nos régions; puis le troisième élément, c'est l'égalité des chances, qu'on
ait de moins en moins de monde qui vivent des situations de pauvreté qui
sont inacceptables puis qui frôlent l'injustice.
Ça fait que,
bref, c'est pour ça que je voulais venir travailler avec mes collègues, là,
puis essayer d'aller plus loin un peu dans ce projet de loi. Et je sais
que ce n'est pas... dans un certain sens, ce n'est pas une job... nos
sensibilités à la pauvreté, ce n'est pas que
partisan, c'est... Je le sais, ici, tous les députés, là, dans leurs bureaux de
comté, accueillent des gens qui ont
des difficultés, et chacun essaie de trouver des solutions. Je suis convaincu
que mon collègue de Jean-Lesage, pour
connaître un peu sa circonscription... je suis certain qu'il est très sensible
à ça, pour lui en avoir déjà discuté, puis je sais qu'il y a des cas
qu'il voit dans son comté puis il travaille comme un fou pour essayer de
trouver des solutions. À Trois-Rivières, c'est la même chose, à Trois-Rivières,
il y a plein d'organismes communautaires qui travaillent fort, il y a des comptoirs alimentaires dynamiques, il y
a des groupes communautaires. À Trois-Rivières, c'est comme... dans le communautaire au Québec, c'est un peu... Il y a
beaucoup de leadership dans le milieu, dans Trois-Rivières. Je connais bien du monde, là, qui sont... Au niveau de
l'éducation populaire, au niveau de l'action communautaire autonome,
c'est... Pour avoir travaillé dans le milieu
communautaire un bout de temps, je sais qu'à... on visait souvent Trois-Rivières
parce que c'étaient des gens qui nous amenaient encore plus loin.
Ça fait que je suis certain que ces députés-là
ont une sensibilité ou ils connaissent la situation au niveau de la pauvreté. Même chose dans la région de Laval ou
dans l'Outaouais, je suis convaincu aussi, c'est bien certain. Moi, j'ai
une soeur qui travaille dans la région de
Laval, qui travaille dans une maison de la famille, et des fois elle m'instruit
beaucoup sur l'image de la pauvreté dans cette région-là, qui est carrément
bien différente de ce qu'on peut vivre dans le Bas-du-Fleuve, avec les communautés culturelles, avec les besoins au niveau
du logement, au niveau... C'est une réalité que je connais moins dans ma
région mais qui est là, qui existe au Québec. C'est pour ça que ça nous
démontre aussi que, dans chaque région, quand on parle de pauvreté, le visage
de la pauvreté est différent de région en région.
Et je sais
que la façon de faire les commissions parlementaires, ce n'est pas... on a une
façon de procéder, mais des fois ce
serait bien de s'arrêter, puis de faire des tours de table, puis d'écouter
chacun des députés parler un peu de leur réalité dans leurs comtés. On
apprendrait beaucoup de choses. La façon de faire ici, des fois, nous empêche
de faire ça, mais c'est un peu dommage.
Dans les
années 2000, 2002, on avait adopté la loi pour lutter contre la pauvreté puis à
ce moment-là on avait laissé beaucoup
de place à l'ensemble de la députation pour s'assurer qu'on avance dans un
projet social pour lutter contre la pauvreté,
mais qu'on avance ensemble, ce qui avait fait que le projet de loi avait été
adopté à l'unanimité, et ça avait fait une avancée importante pour le
Québec.
Ça me permet,
quand je parle des régions, de dire que c'est peut-être un des problèmes de ce
projet de loi là, qui est un projet
de loi qui est très centralisateur, qui est un peu à l'image de ce que fait le
gouvernement depuis son entrée en fonction.
C'est un gouvernement qui a comme coupé les ponts avec les régions. Les
réalités de région, ça vient moins les chercher, on dirait, tellement qu'il y a deux
semaines ou... en réponse à un de mes collègues à la période de
questions, le ministre des Transports
disait : Si vous voulez parler de transport en Gaspésie, ce n'est pas en
Gaspésie que ça se fait, c'est ici, à Québec, c'est ici que les
décisions se prennent, c'est ici que ça se passe, à Québec.
• (14 h 50) •
Cette façon
de faire, cette façon de voir là, on la devine dans presque tous les projets de
loi qui sont faits. Beaucoup de
décisions qui sont prises par le ministre dorénavant... on se porte moins sur
la concertation régionale, on se porte moins sur des initiatives de région, on décide de Québec, on oriente à partir de Québec, et c'est ce qu'on voit dans ce projet de loi là. Puis c'est un projet de loi aussi qui... ça vient me chercher, c'est qu'ils mettent... on dirait
que la... si quelqu'un vit dans la pauvreté, bien c'est de sa faute, c'est de sa faute à cette personne-là.
Toute la pression est sur la personne. C'est à cette personne-là qu'on
s'adresse, on dit : Tu devrais... il faut que tu t'embarques dans un
cheminement, il faut que tu... On ne se pose
pas la question : Est-ce
que l'entourage, est-ce que
l'environnement de la personne est assez solide pour créer
de l'emploi ou intégrer cette personne-là?
On ne se pose pas cette question-là, on se dit : La personne est à l'aide sociale, la personne vit la pauvreté, c'est son problème, et il faut qu'elle s'en
sorte, et on s'en vient dans le coercitif, on essaie de mettre beaucoup
plus de pression sur la personne en se disant : C'est cette personne-là
qui doit s'en sortir.
Et là on va
sortir des arguments ou des slogans, dire : Chaque personne doit
participer à la richesse collective, chaque
personne, on ne doit pas recevoir de l'argent du public sans faire un effort, toujours
des mots qui laissent entrevoir que les personnes ne peuvent pas donner
des efforts. Le ministre a même dit à un moment donné : Nous, on offre des
services, mais, sur une centaine de personnes, il y en a juste deux ou quatre
qui sont venues nous rencontrer... qui ne viennent
pas nous voir, en laissant entrevoir que, les autres, bien, ça ne les intéresse
pas d'embarquer dans une démarche. On parle de plan personnalisé pour...
on va vous faire un... chacun, on va les prendre un à un puis on va faire un
plan personnalisé, mais on ne se pose pas la
question : Est-ce
qu'un plan personnalisé peut être
bien différent pour un jeune qui vient de Gros-Morne, en Gaspésie, ou
qui vient de Limoilou, à Québec? C'est pareil, c'est la même chose. Pourtant, on sait bien que ce n'est pas la même chose. Puis,
je le disais par rapport à la région de Laval, les jeunes qui arrivent
à l'aide sociale qui viennent des communautés culturelles ou d'ailleurs,
c'est bien différent du jeune qui vient de Trinité-des-Monts,
d'Esprit-Saint ou de Saint-Cyprien, ou de je ne sais pas... c'est bien
différent, et ça, on ne prend pas ça en compte. On ne prend pas en compte quand
je parle de l'entourage ou de l'environnement de la personne.
Un autre
élément important, c'est l'emploi disponible. Dans la Gaspésie,
dans les régions périphériques, on le voit, là, c'est sorti il y a une semaine ou deux, en Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, l'Abitibi, Saguenay—Lac-Saint-Jean, on l'a vu, il y a un solde migratoire négatif, ça veut dire que
les jeunes sortent de la région. C'est la première fois qu'on voit ça depuis des années. Les régions se vident, sont en
train de se vider. Pourquoi? Parce
que les emplois disponibles se
font plus rares. Et ça, on travaille pour
essayer de... on va sortir les jeunes de la pauvreté sans se soucier de ce qui
se passe à côté, sans se soucier que
le fédéral vient de changer l'assurance chômage. Le chômage saisonnier est plus
dur à aller chercher, puis on vit,
nous autres, en région, beaucoup d'emplois saisonniers. Il faut voir, là, la pêche
au crabe commence bientôt, c'est très bon, mais c'est des emplois
saisonniers. Il y a des réalités comme ça qu'il y a en région qu'on n'a pas
l'air à prendre en compte.
Le gouvernement fait des actions aussi. Récemment, le ministre de l'Agriculture
accueille un rapport, le rapport Gagné,
qui va déstabiliser toute l'industrie acéricole dans le Bas-Saint-Laurent, qui va
mettre en danger la vitalité, là, la survie
même de certains villages dans le Bas-Saint-Laurent. Bien, derrière ça, il y a
des individus, il y a des jeunes entre autres, qui travaillent dans l'industrie acéricole qui vont se retrouver, du jour au lendemain, déstabilisés ou
ils vont travailler peut-être dans leurs villages; probablement pas, pas d'emploi, et là on embarque dans ce processus-là
où on va déraciner la personne, probablement. Mon collègue parlait des
voyages Montréal-Québec. J'imagine qu'on va voir beaucoup de jeunes à l'aide
sociale, où on leur mettra de la pression pour s'intégrer à l'emploi, ça va
être encore de l'exode de nos régions, parce
qu'on fait ça, mais, d'une autre main, on ne crée pas de l'emploi en région...
et qu'on ne donne pas de place pour ces personnes-là en région.
Il y a des
façons de faire et il y a un comité intéressant qui a été mis en place dans le
cadre de la loi pour lutter contre la
pauvreté, qui s'appelle le Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et
l'exclusion sociale. C'est un comité qui fait des avis régulièrement, des mémoires mais qui ne
semble pas être très écouté par le gouvernement, mais il fait une bonne
job, à mon avis, quand tu prends le temps de
regarder ou de voir ce qu'il propose. Il y a déjà un an, il avait déposé un
mémoire, un avis sur l'intégration durable à
l'emploi, l'aide à l'emploi. Il faut vraiment prendre le temps de regarder cet avis-là puis voir le projet
de loi actuel. C'est vraiment le jour puis la nuit. On dirait que tout ce
qui... Tu sais, on disait qu'il ne fallait pas aller dans le coercitif, il
fallait travailler sur l'emploi, il fallait soutenir les initiatives locales
avec le Fonds québécois d'initiatives sociales.
Il y a plusieurs
éléments qui étaient dans cet avis-là qui, aujourd'hui, on dirait... je ne sais pas, ça s'est perdu dans l'année, je ne sais pas où, là, cet été ou
quand les ministres ont changé, dans des boîtes... peut-être qu'on a perdu des
papiers, je ne sais pas, mais on a perdu ce qu'on... Le projet de loi ne
ressemble pas pantoute à ce que le comité avait proposé. Le comité proposait, entre
autres, une vraie politique
de création d'emplois, des emplois, des bons emplois dans nos régions, dans les régions du Québec
pour faire en sorte qu'on puisse intégrer des jeunes dans ces emplois-là,
faire des plateaux de travail éventuellement et soutenir des emplois qui sont
collés aux réalités de nos régions. Est-ce que vous pensez qu'il y a une stratégie de création d'emplois au Québec actuellement? Non, il n'y en a pas, puis surtout pas en région, parce
que, comme je vous le disais tantôt,
l'avenir des jeunes en région, de création d'emplois en région, c'est de plus en plus sombre.
Le comité
parlait aussi d'accompagnement, s'assurer que les jeunes qui arrivent à l'aide
sociale puissent avoir accès à l'accompagnement.
Il me reste combien de temps à peu près?
Le Président (M.
Hardy) : Huit minutes.
M.
LeBel : Huit minutes? C'est
bon. Accès à un accompagnement. Un accompagnement, c'est quoi? C'est des
groupes communautaires, c'est des groupes Alpha, c'est des groupes qui
s'occupent de logements sociaux.
Qu'est-ce qui arrive avec les groupes
communautaires? Qu'est-ce qui arrive avec les groupes Alpha? Qu'est-ce qui arrive avec le logement social? Qu'est-ce qui
arrive avec nos comptoirs alimentaires, qui sont débordés? Bien, le
soutien à ces groupes-là a diminué encore. On parle d'accompagnement, on
voudrait que ces groupes-là accompagnent notre monde. Aïe! on coupe dans les groupes d'Alpha, il faut le faire, là! Si
on veut commencer à intégrer ou à soutenir notre monde, bien il faut
peut-être aussi aider les groupes qui aident à l'alphabétisation. C'est la base
de tout.
Des groupes
qui luttaient contre le décrochage scolaire, eux autres aussi, ils sont coupés,
ils sont coupés partout, et ils
essaient de s'arracher la vie d'année en année... À Rimouski, j'ai un groupe
qui s'appelle Je raccroche. À chaque année, ils sont obligés de se battre, couper du personnel, essayer de repousser
les attentes. Les jeunes qui ne sont pas là, là, qui ne réussissent pas à faire leur session, là, avec le
groupe Je raccroche, faute d'argent, ces jeunes-là se retrouvent dans la
rue, souvent. Et on a besoin de cet
accompagnement-là. Et là on met la pression sur la personne, mais on déglingue
tout ce qui pourrait être à côté des groupes qui pourraient aider.
Le comité
disait que, s'il y a une affaire qu'il ne fallait pas faire, c'est de couper
dans le revenu, couper à l'aide sociale
ou mettre de la pression sur la personne en disant : On va couper dans ton
chèque d'aide sociale si tu ne participes pas. On met de la pression.
Pour eux autres, le comité, c'était l'affaire qu'il ne fallait pas faire.
Pourtant, on s'en va là-dedans. Ils disaient
qu'il ne fallait pas faire ça, parce que la pauvreté gèle. Tu ne peux pas
demander à quelqu'un qui est déjà
sous le seuil de la pauvreté, qui a déjà de la difficulté à arriver... tu ne
peux pas dire : Regarde, tu embarques là-dedans, sinon on va te couper. Il y a une base à quoi on
ne peut pas toucher, et le gouvernement va jusqu'à toucher à cette
base-là, et ça ne permet pas aux jeunes de
s'en sortir. C'est sûr que ça ne permet pas au jeune de s'en sortir, ça ne fait
que lui mettre de la pression sur lui.
Il y avait des projets aussi qui étaient
soutenus par des régions, qui allaient chercher ces jeunes-là, qui étaient soutenus par le Fonds québécois d'initiatives
sociales, qui intervenaient autour de la CRE, dans les régions du
Québec, on appelait ça les alliances.
Beaucoup de projets, beaucoup d'initiatives ont été pensés, réfléchis en
région, concertés avec les commissions scolaires, avec les entreprises,
avec les municipalités, avec des groupes communautaires, avec le milieu de la
santé, aussi, des travailleurs de rue; des rencontres, des fois, des pièces de
théâtre pour lutter contre la pauvreté. Il y
avait plein de choses qui bougeaient dans nos régions, qui venaient aider et
venaient sortir de l'isolement, qui venaient aider des gens qui étaient isolés dans leurs milieux, les sortir de là et
les embarquer dans un processus qui était communautaire, un processus
communauté, pas un processus qui nous venait d'en haut, de l'État, avec des
cubicules de fonctionnaires qui disaient : Vous allez venir nous
rencontrer. C'était : on embarquait les gens.
Quand je
parle de cubicules de fonctionnaires, ce n'est pas négatif, parce que je sais
que ces gens-là, en région, travaillent
comme des fous pour accueillir le monde, puis, des fois, ce n'est pas facile.
Et eux autres aussi sont coupés dans les services auprès des gens, et on
ne fait, par le projet de loi, que leur mettre de la pression.
• (15 heures) •
Bref, je pense que ce projet de loi aurait dû,
comme la normalité des choses l'exige... C'est-à-dire, on a une loi-cadre, une loi-cadre qui existe depuis 2002,
qui vient lutter contre la pauvreté et
l'exclusion, puis le mot «exclusion», ce n'est pas naïf, là-dedans. Il faut lutter contre la pauvreté mais tout
ce qu'on appelle exclusion sociale. Cette loi-là aurait dû, à mon avis, après dix ans, aurait dû être étudiée
par les parlementaires. On aurait dû réinviter les gens pour faire un
bilan, parce que c'était une loi qui était
adoptée d'une façon non partisane, une loi qui était issue de la communauté. On aurait dû avoir la sensibilité de remettre la loi un peu au
jeu puis de voir qu'est-ce que... On s'était donné des cibles il y a dix
ans. Est-ce qu'on a atteint nos cibles? Si oui, pourquoi, quels éléments qu'on
a atteints puis qu'est-ce qu'il faudrait aller plus loin? Sinon, pourquoi on
n'a pas réussi?
Et, selon le
comité, dans cette loi-là il y a eu des éléments-phares qui nous ont permis
d'avancer sur la lutte à la pauvreté, entre autres la régionalisation
puis la décentralisation de nos actions.
On aurait peut-être
pu prendre du temps, on aurait peut-être pu aller en région écouter notre
monde, voir un peu qu'est-ce qui a
été bien fait dans chacune des régions. Je pense qu'on aurait pu avancer un peu
là-dedans. Mais on n'a pas fait ça,
on est allé assez rapidement là-dessus, et non seulement on n'a pas fait ça,
mais on s'en va sur un plan d'action avec une loi-cadre qui nous dit comment on pourrait faire pour lutter contre
la pauvreté. On ne fait pas de bilan, on s'aligne sur un plan d'action,
on n'a pas de nouvelle cible, mais ce n'est pas grave, on s'aligne sur un plan
d'action, on fait des consultations un
peu... en tout cas, je ne peux pas dire le mot, là, mais on fait ça pas très
ouvert, là, mettons, on pourrait dire ça comme ça, et on ne sait pas
trop où est-ce qu'on s'en va avec le plan d'action et on s'aligne sur une
réforme de l'aide sociale. Il me semble qu'on aurait pu aller autrement, on
aurait pu revoir un peu notre action de lutter contre la pauvreté à partir de la loi. À partir de ça, on
aurait pu refaire un peu un plan d'action, sachant mieux où est-ce qu'on
s'en va, puis, à partir du plan d'action,
voir quelle sorte de programme qu'on met en place qui correspond au plan
d'action et à la loi-cadre. Mais, non, ce n'est pas comme ça qu'on s'en va.
Puis, en
plus, pour rajouter un peu à tout ça, bien, le premier ministre nomme un
nouveau ministre et lui dit : Vous pourriez... Le ministre a demandé aussi de regarder qu'est-ce qu'on
pourrait faire sur un revenu minimum garanti. Bref, on s'aligne dans une grande patente, et en même temps
il y a un mandat qui est pendant, qui est là, qu'on dit : On
pourrait-u tout revoir ça avec un revenu minimum garanti?
Bref, on ne
sait pas où est-ce qu'on s'en va avec ce gouvernement-là, et tout ce qu'on
sait, c'est qu'on s'aligne sur un
projet de loi qui met toute la pression sur la personne, sur l'individu, sans
se soucier de son environnement, sans se soucier des réalités
régionales. Et je pense qu'on fait fausse route en faisant ça. On aurait dû
faire plus confiance aux gens en région, à la communauté en leur donnant des moyens pour lutter
contre la pauvreté, puis accompagner nos jeunes en région, faire en
sorte qu'on continue à prospérer dans nos régions du Québec. Merci.
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y
a d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Mme
la députée de Taillon, à vous la parole pour 20 minutes.
Mme Diane Lamarre
Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, je transmets également mes salutations les plus sincères à tous. Je suis nouvelle au sein de ce
comité et je suis très contente de me joindre à vous et de côtoyer de
nouveaux députés — M.
le ministre, c'est notre premier contact plus direct au niveau d'échanges
parlementaires — ainsi
que tous les fonctionnaires, qui sont si importants dans le travail des
députés. Je salue également mon collègue député de Drummond—Bois-Francs,
de la CAQ, et bien sûr mes collègues du Parti québécois : M. le député de
Rimouski et le député de Saint-Jean, Richelieu.
Alors, d'abord, au niveau du titre du projet de
loi, la Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser
l'intégration en emploi, il reste qu'on aurait bien aimé que ces deux sujets
puissent faire l'objet d'une scission et
qu'on puisse en discuter de façon distincte, parce que je crois que sous ces
paroles, sous ses titres, qui sont...
dans le fond, qui témoignent d'une très bonne intention, je pense qu'il y a des
enjeux très différents dans chacun
des deux éléments qui sont visés comme moyens pour atteindre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi ainsi que favoriser
l'intégration en emploi.
D'abord, je
veux juste dire que pour un projet de loi je pense qu'il faut que les enjeux
soient vraiment de nature sociétale
et tantôt j'ai été un peu surprise de voir... d'entendre, en fait, le
commentaire de mon collègue de la CAQ, le député de Drummond—Bois-Francs,
dire qu'une partie des objectifs de ce projet de loi visait à exclure, par
exemple, des cours inadéquats en rigolothérapie. Je dois vous dire que,
ce genre de mesure là, je pense que ça caricature beaucoup, beaucoup... médiatiquement, peut-être que ça donne
un message qui rend les gens sympathiques
à la cause, mais je pense que, si on n'a pas les moyens actuellement au sein
de notre gouvernement pour baliser, contrôler, mieux gérer la nature des
cours sans passer par un projet de loi, on a un problème.
Alors, je
pense qu'on doit faire référence davantage à des mécanismes de contrôle
adéquats et qu'à chaque fois que l'État
consacre de l'argent ou reçoit de l'argent d'un employeur qui doit être dédié,
par exemple, à la formation on doit s'assurer
que c'est bien fait. Il y a des façons préalables de le faire. Dans des
organisations, on va demander que les gens fassent confirmer l'objet de leur formation avant de l'autoriser. Je
pense qu'il pourrait y avoir un mécanisme. En même temps, je nous mettrais en garde, parfois le titre
d'une formation est un titre qui justement crée une certaine attraction
auprès de certaines populations qui sont
peut-être moins mobilisées par des formations avec des terminologies
scientifiques, mais, dans le contenu,
il reste qu'on atteint très souvent certains objectifs. Et donc je ferais
attention à ce genre d'amalgame, où, sous
un titre qui a l'air justement facilement dénonçable, on peut parfois retrouver
des informations ou des formations qui sont pertinentes.
Et je nous
mets aussi beaucoup, beaucoup en garde par rapport au fait que, si on veut
vraiment favoriser l'insertion et
l'intégration à l'emploi, c'est seulement des cours de nature technique qui
vont être nécessaires. Et j'ai aimé tantôt que le ministre évoque la notion d'accompagnement, parce
que je crois que les gens qui actuellement n'ont pas accès au marché du travail, ce ne sont pas seulement des gens qui ont
des difficultés ou des lacunes au niveau d'une formation technique, ce
sont des gens qui, dès leur enfance, ont vécu énormément d'atteintes à leur
estime de soi, qui ont été victimes d'abus, de violence, de traumatismes, qui ont été victimes de dénigrement, qui
n'ont pas eu accès aux mêmes chances que tous, et ces éléments-là ne se reconstruisent pas simplement
par des formations techniques, ce sont des éléments qui mettent des
années, des années à être reconstruits. Et
je vous citerai tantôt un exemple qui permettra peut-être de mieux saisir...
parce que j'ai, dans ma circonscription, des gens qui sont venus
témoigner de leurs difficultés à ce niveau-là.
Alors, on a
deux grandes parties dans ce projet de loi. La première partie... et, là
encore, je suis très contente que le ministre
ait cité les pays scandinaves en référence par rapport à des politiques
d'intégration à l'emploi, mais je ne peux pas m'empêcher de faire un parallèle entre ce projet de loi et le projet de
loi n° 10, auquel... je vois certains de mes collègues qui ont
assisté à certaines périodes du projet de loi n° 10 — également
du côté de l'aile gouvernementale — où on a vraiment choisi de
centraliser, et, quand je lis la première partie de ce projet de loi, il y a
clairement une volonté de centralisation des
décisions, centralisation qui, par elle-même, éloigne la proximité avec les
caractéristiques locales, qui fait perdre
certaines caractéristiques locales. Et je peux vous parler de ma
circonscription, de Taillon, qui est à Longueuil, où le revenu moyen est tout à fait dans la moyenne du
Québec, mais où j'ai quelques poches de... en fait, quelques zones qui
sont très, très privilégiées et de
nombreuses poches de pauvreté importante et de pauvreté, je vous dirais,
profonde qui ne se régleront pas simplement par le fait d'avoir un
emploi et pour lesquelles la crainte d'avoir la perte de cet emploi et une détérioration
de leurs conditions, qui les mettent déjà dans un haut niveau de vulnérabilité,
bien, ça crée encore davantage d'anxiété, d'angoisse et de préoccupations.
• (15 h 10) •
Donc, je veux
vraiment qu'on soit très sensibles au fait que plus on éloigne les décisions en
ce qui concerne les éléments de pauvreté, plus on les éloigne du centre,
de la proximité du lieu où les gens la vivent, plus on s'expose à être décalés
par rapport à la réalité que ces gens-là vivent. C'est vrai en emploi, c'est
vrai en éducation, c'est vrai en santé
aussi, il y a des réalités différentes, il y a des raisons différentes. J'ai
fait une tournée, cet été, avec les policiers de la circonscription de Longueuil, un vendredi soir. Je peux vous dire qu'il y a
des secteurs où c'était la prostitution à Longueuil qui était
prévalente; à d'autres, c'était la violence; à d'autres, c'était la
toxicomanie.
Alors, il y a des enjeux différents,
et je pense que, quand on centralise tout ça, ça devient très
difficile pour les gens de pouvoir apporter des solutions plus précises
à des contextes qui sont vraiment plus sous-régionaux et, parfois, même
sous-locaux.
Donc,
dans cette première partie, je trouve que la centralisation amène une zone de
préoccupation qui est tout à
fait justifiée. En ce qui concerne l'ensemble de notre préoccupation... et, pour illustrer tout ça, bien je vous dirais
que, dans cette première partie, le
fait que les membres issus des milieux communautaires et éducatifs perdent de
leur importance dans les comités
régionaux et que la présence de représentants, par
exemple, du ministère de l'Enseignement et de
l'Éducation supérieure, dans le même
esprit... également le fait qu'on abolisse la présence de membres du ministère
de l'Immigration, de la Diversité et
de l'Inclusion, c'est préoccupant. C'étaient des membres qui étaient non
votants, mais c'étaient quand même
des membres qui témoignaient de certaines populations avec des besoins
distincts, des besoins particuliers et qui, au niveau de l'accès à l'emploi, ont des caractéristiques particulières
auxquelles il faut pouvoir prêter oreille attentivement. Et là, vraiment, on élimine, on évacue des voix qui
avaient leur raison d'être, des voix qui traduisaient des besoins de
nuancer et d'améliorer nos besoins et surtout les besoins de la population,
parce qu'on est là pour ces personnes.
Alors,
je voudrais également qu'on soit très attentifs — et j'y reviendrai un peu plus tard — mais à l'opinion des gens qui côtoient au quotidien ces personnes qui
ont de la difficulté à accéder à l'emploi. Ma réalité de pharmacienne
m'a amené à me dire : On est dans un
milieu parfois qui est un peu plus favorisé ou un milieu qui ne prend pas
toujours le pouls juste de ce que la
population vit sur le terrain. Je vous dirais par contre que, comme
pharmacienne communautaire, le fait d'être
au contact, pendant plus de 20 ans, avec le public, avec la population,
avec la population vulnérable, ça m'a permis d'entendre, de recevoir la
dure réalité de ces gens-là. Je vous dirais qu'une dame que je trouvais qu'elle
prenait... une dame âgée de 72 ans qui
prenait trop de médicaments pour dormir et à qui je disais : Non, je ne
peux pas renouveler vos médicaments
pour dormir à tous les mois, parce qu'elle était toujours huit, 10 jours,
parfois davantage, en avance, ça m'a pris
des mois avant de pouvoir réaliser que, si elle revenait rapidement, c'est
qu'elle avait un fils qui était en libération conditionnelle les fins de
semaine qui revenait chez elle et qui lui volait ses médicaments et que, si
elle ne les lui donnait pas, il la battait.
Alors, ce sont des situations comme celle-là que les gens qui sont vulnérables
vivent, et je pense qu'avant de
porter un jugement il faut être très proche. C'est pour ça que je crois qu'on a
le devoir, comme représentants du gouvernement, d'entendre tous les
groupes qui sont très proches de ces gens-là, qui les côtoient au quotidien,
parce que notre perception n'est pas leur réalité.
Et, dans ce contexte, je prends exemple du mémoire
de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, que, malheureusement, la
commission a refusé, jusqu'à maintenant, d'entendre, et je constate que ces gens-là, qui sont sur le terrain, des gens
qui, dans leur quotidien, 35, 40, probablement 50 heures, parce que
plusieurs d'entre eux font encore plus de temps que leur travail rémunéré...
bien, ces gens-là, leur lecture, c'est qu'il y a moins de 10 % des
prestataires sans contraintes sévères à l'emploi qui sont en mesure d'intégrer
le marché du travail sans un accompagnement important.
Alors, attention, on
peut donner l'impression que les prestataires de l'aide sociale sont, en
majorité, des gens qui devraient retourner
au travail facilement si on leur trouvait du travail. Et ça, ce n'est pas ce
que les gens qui les côtoient au quotidien nous disent, qu'ils nous
écrivent et qu'ils veulent nous expliquer. Et je crois que nous devons — nous devons — sincèrement porter une attention importante
à cette statistique : moins de 10 % des prestataires sans
contraintes sévères à l'emploi sont en
mesure d'intégrer le marché du travail sans un accompagnement important. Alors,
est-ce que ce projet de loi vise ce
10 % de prestataires? Est-ce que c'est seulement celui-là qui va être
touché par notre projet de loi? Je pense que nous avons un devoir de
grande vigilance à cet endroit-là.
Je
continuerais en voulant parler de la deuxième partie du projet de loi, deuxième
partie qui a suscité, au niveau de ma
circonscription, énormément de réactions, des réactions, encore une fois, de
groupes qui côtoient au quotidien ces personnes,
qui sont vulnérables et qui n'ont peut-être pas eu toute la même chance que
certains autres dès leur naissance, et je vais prendre deux
sous-groupes.
Alors,
le CAP Longueuil, le comité d'action politique, regroupe plusieurs organismes,
a émis un communiqué, mais plusieurs organismes communautaires de
Longueuil ont voulu donner l'alerte, ont voulu nous dire : Attention à ce
que vous vous apprêtez à faire. Et je vais en citer seulement quelques-uns,
mais ils sont nombreux — j'en
ai plus d'une dizaine — mais
je vais prendre deux témoignages qui regroupent probablement des sous-groupes
de patients particulièrement visés.
L'organisme
D'un couvert à l'autre. Alors, D'un couvert à l'autre est un organisme qui
accueille, depuis 15 ans, une
centaine de patients atteints de schizophrénie et qui leur donne un petit
travail, un travail modeste mais qui fait en sorte que ces gens-là ont un rendez-vous quotidien avec d'autres
personnes, qu'ils ont un encadrement et qu'ils ont une forme de dignité
à travers tout ça. Il y avait, pour ces gens-là, des repas communautaires qui
étaient offerts, il y avait 150 personnes
qui y allaient et qui y participaient depuis plusieurs années. Or, les coupures
aux organismes communautaires ont
fait en sorte que ces repas ont été supprimés. Et, en l'espace d'un mois, il y
a deux patients qui ont été hospitalisés d'urgence. Probablement qu'il
aurait pu y en avoir un certain nombre aussi, mais ces patients étaient stables
depuis longtemps, sauf que le fait de ne
plus avoir un rendez-vous quotidien, de ne plus avoir un repas garanti, eh
bien, ça a amené deux hospitalisations. Et, juste parce qu'on doit être
conscients de l'argent, et j'en suis consciente aussi, une journée d'hospitalisation pour ces patients correspond à
1 600 $, 1 600 $. Avec ce montant, on pouvait donner un
repas 365 jours par année à ces
personnes. Alors, on a des choix à faire et, parfois, on pense économiser, et
l'impact final n'est vraiment pas celui qu'on souhaitait.
Donc,
des patients schizophrènes, atteints de schizophrénie, alors, je ne sais pas,
dans la politique, est-ce qu'on vise ce type de patients ou s'ils sont
systématiquement exclus. On sait que ces patients-là ont des périodes où ils
sont relativement
stables et puis d'autres périodes où, vraiment, ils sont en décompensation.
Alors, est-ce qu'ils entrent dans le 10 %
que l'Ordre des travailleurs nous indique ou bien s'ils sont ailleurs? Alors,
ça, ce serait important de rassurer les gens.
Le deuxième groupe est vraiment un groupe qui
représente principalement des patients, des personnes... le Centre des femmes de Longueuil, le Carrefour pour
Elle, L'Entraide chez nous, des lieux qui accueillent des gens qui sont vraiment défavorisés, des femmes qui ont été
victimes de violence ou tout simplement qui ont eu la malchance de
naître dans un contexte qui est défavorable pour elles.
• (15 h 20) •
J'ai
accueilli six de ces femmes-là la semaine dernière à mon bureau de
circonscription, et une d'entre elles me disait qu'elle avait une grande fille de 18 ans — et 18 ans, c'est un âge fatidique — une jeune fille de 18 ans avec un
lourd handicap, un lourd handicap mental,
donc elle devait prendre soin de cette jeune fille, et elle-même était
prestataire de l'aide sociale. Alors,
elle se demandait si elle serait visée par le projet de loi parce que,
de toute évidence, elle sentait qu'elle devait prendre soin de sa fille de 18 ans à
la maison, que socialement on avait mis fin au soutien qu'elle pouvait
avoir. Et elle se disait : Mettons que
je suis considérée apte au travail — parce que, si on regarde son contexte, c'est sûr qu'elle était apte au travail — mais
est-ce que je vais devoir accepter un
emploi qui pourrait me conduire à plusieurs dizaines de kilomètres de la maison? De quelle façon je vais
me trouver une gardienne? Est-ce que c'est avec 623 $ par semaine
que je vais devoir en plus payer une
gardienne pour ma fille de 18 ans? Et, une fois que j'aurai un travail, que
j'aurai un emploi, est-ce que, cet emploi-là, je serai tenu de
l'accepter, peu importe le contexte dans lequel j'y travaillerai? Est-ce que l'employeur que j'aurai saura faire la
distinction? Est-ce qu'il ne profitera pas de ma vulnérabilité dans ce
contexte-là? Et je vous avoue qu'il y
avait énormément de détresse dans son message, et ça nous donne la mesure de la
complexité des gens qui actuellement
sont prestataires de l'aide sociale, et qui n'ont pas nécessairement d'emploi
et qui pourraient être considérés à
première vue comme aptes au travail mais dont l'ensemble du contexte social
fait en sorte que ces gens-là rendent service à la population, jusqu'à
un certain point, nous rendent service parce que, si sa jeune fille de 18 ans
avec un lourd handicap mental devait être mise en institution, ça nous
coûterait finalement beaucoup plus cher que la prestation d'aide sociale que le
gouvernement lui verse à ce moment-ci.
Alors, je me
fais un peu la voix des organismes communautaires. Et ils sont très inquiets
sur le stress chronique des femmes en
situation de pauvreté, autant au niveau physique que mental. Ils trouvent que
cette mesure peut amener des difficultés
pour la conciliation travail-famille et ils trouvent également que, dans
certains cas, certaines femmes pourraient être mises en situation de grande vulnérabilité, ne serait-ce qu'au
niveau du transport, mais aussi au niveau du fait que, si, pour une raison
ou pour une autre, elles devaient quitter cet emploi soit parce qu'il y a un
harcèlement au niveau du travail... eh bien,
qu'elles seraient doublement pénalisées, puisqu'on a prévu, dans le projet de
loi, des pénalités pour les femmes et les hommes qui quitteraient leur
emploi alors qu'elles feraient l'objet de ce projet.
Le Président (M. Hardy) : Merci, Mme
la députée de Taillon. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des
remarques préliminaires? Alors, s'il n'y a pas d'autre membre... M. le député
de Saint-Jean.
(Consultation)
Le Président (M. Hardy) : Ah! vous
voulez déposer la motion.
Une voix : C'est ça.
Le Président (M. Hardy) : Ah! O.K.
M. le député de Rimouski...
Une voix : On va finir par se
comprendre.
Le Président (M. Hardy) : ... — oui — vous
avez une motion préliminaire à déposer.
M. LeBel : Je ne comprends pas vite,
hein? Ça fait juste deux ans que je suis député puis j'ai encore de la misère,
des fois, à savoir quand est-ce qu'il faut déposer les motions. Mais ça va
finir par y arriver, je suis certain.
Oui, je voudrais déposer une motion en vertu de
l'article 244, s'il vous plaît. Je vous lis la motion? C'est ça que je fais?
Le Président (M. Hardy) : Oui, s'il
vous plaît.
Motion proposant d'entendre Action populaire
Rimouski-Neigette
M.
LeBel : «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos
règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne,
avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant
à permettre une meilleure adéquation entre
la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des
consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que
possible l'Action populaire Rimouski-Neigette.»
Le Président (M. Hardy) : Donc, on
va prendre votre motion. Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 24)
(Reprise à 15 h 27)
Le Président (M. Hardy) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Merci. Je vous rappelle que vous avez, à titre d'auteur, M. le député de Rimouski, 30 minutes pour nous la présenter, ensuite les représentants des groupes parlementaires ont aussi
30 minutes, finalement les autres intervenants ont 10 minutes. Je
vous rappelle que ce temps de parole est pour une seule intervention. À
la fin des interventions, nous mettrons la motion aux voix.
M. le député de Rimouski, à vous la parole.
M. Harold LeBel
M. LeBel : Merci, M. le Président.
C'est ça, j'essayais de voir si on pouvait...
Des voix : ...
M.
LeBel : Qu'est-ce que j'ai
fait encore? Le ministre me trouve drôle, ça va bien, ça va bien se
passer. Non, mais, sérieusement, ce
que j'essaie de voir... je suis très content de ce qui se passe dans notre
région au niveau de la mobilisation, des gens qui s'impliquent, puis, comme je viens un
peu de ce milieu-là aussi, de l'action communautaire,
je pense qu'on aurait intérêt à
entendre le travail terrain, des gens qui sont sur le terrain, qui rencontrent
du monde qui vivent la pauvreté, qui sont quotidiennement avec eux
autres puis qui essaient de défendre leurs intérêts.
À un moment donné, j'avais parlé... à une certaine
époque, il n'y a pas très longtemps, j'étais critique de la lutte à la pauvreté, et c'était le même ministre
qui était devant moi, toujours aussi gentil, et on avait discuté
ensemble, entre autres, d'action
communautaire avec le SACAIS dans l'étude de crédits — je ne sais pas si vous vous souvenez — puis
je disais que c'était important d'avoir des
groupes de défense de droits. Des fois, c'est un peu fatigant parce qu'ils
viennent devant les bureaux puis ils font du
bruit, mais... surtout quand tu es au pouvoir; à l'opposition, ils viennent
moins souvent.
Une voix : ...
M. LeBel : On les encourage à aller
chez vous.
Des voix : Ha, ha, ha!
• (15 h 30) •
M.
LeBel : Mais c'est des groupes qui sont importants parce qu'ils
défendent vraiment les intérêts des personnes, ils les renseignent sur
leurs droits, sur les services qu'ils pourraient avoir accès. Puis c'est des
renseignements que tu n'aurais pas ailleurs. C'est organisé par la communauté,
c'est des gens qui se sont pris en main.
Je me
rappelle, le ministre avait dit à l'époque... il m'avait dit ça d'une façon
très correcte, là, mais il dit : Vous ne trouvez pas, des fois, que ces groupes-là, peut-être, ils ont tendance à
monter la tête des gens sur... C'est sûr que, quand on essaie de
défendre les droits des personnes puis quand les personnes décident de
s'impliquer dans un processus pour défendre
leurs droits, bien là ça peut être fatigant, parce qu'il faut que tu trouves
des réponses puis il faut que tu cherches un peu la justice là-dedans, mais, ces groupes-là — le groupe que je propose d'entendre, Action
populaire Rimouski-Neigette, c'est un groupe comme ça — il y
en a partout.
Récemment, j'étais avec mon collègue de
Saint-Jean, on était à Chicoutimi — un adon, pourquoi qu'on était
à Chicoutimi?, on passait par là — on est allés à Chicoutimi pour... et on a
rencontré des groupes là-bas qui... entre autres, une table qui s'appelle la Table de lutte contre
la pauvreté de Chicoutimi, et, juste pour vous montrer ce qu'ils peuvent
produire, des affichettes comme ça qu'ils
installent un peu partout pour lutter contre la pauvreté, comme : maladie,
faillite, fermeture d'usine, divorce,
harcèlement, accident, on est tous à l'abri de la pauvreté, le croyez-vous?, pour
montrer que ce n'est pas vrai, que tout le monde... il n'y a personne
qui est à l'abri, un jour ou l'autre, à partir d'une maladie, d'une faillite, de vivre la pauvreté. Donc,
l'affichette, c'est : «La pauvreté dans une famille, c'est héréditaire, le
croyez-vous?» Ça aussi, on entend souvent ça, que l'aide sociale, des
fois, c'est de génération en génération puis qu'il faut casser cette affaire-là
au plus sacrant.
Ça fait que
c'est des préjugés, et ce groupe-là travaille pour lutter contre les préjugés à
Chicoutimi, c'est la même chose pour
ce qui est d'Action populaire Rimouski-Neigette, puis il y en a dans toutes vos
régions, là, des groupes comme ça,
qui sont financés en partie, parce qu'ils sont souvent sous-financés, parce
que, la défense de droits, on ne reconnaît pas ça facilement. On reconnaît beaucoup les groupes qui interviennent en
santé directement par des services, mais la défense de droits, c'est un peu plus difficile parce qu'on
finance des gens qui peuvent être tannants éventuellement puis on trouve
ça plus difficile, ce qui fait que les groupes de défense de droits sont
souvent... déjà que les groupes communautaires en général sont sous-financés, les groupes de défense de droits sont encore
plus sous-financés et sont en queue de peloton.
Mais actuellement je peux vous dire qu'ils ont
beaucoup, beaucoup de pression sur eux autres, beaucoup de demandes, entre autres, au niveau de l'aide
sociale, parce que c'est une loi qui est hypercompliquée. Le
sous-ministre — parce
que c'est le même sous-ministre qui y était
quand j'étais là aussi — avait dit à un moment donné en commission, parce que je posais la question... Des fois, tu veux
t'informer sur un élément de la loi, je ne sais pas, moi, la vie maritale ou...
tu as plein de choses qui sont un peu
compliquées à comprendre, là, puis tu as plein d'affaires, c'est une loi assez
compliquée. Et le sous-ministre avait
dit : La loi est compliquée tellement que, dans le ministère, maintenant
tu as des réseaux, tu as des spécialistes de parties de loi. Ça fait
que, si tu appelles, je ne sais pas, moi, au CLE à Rimouski puis tu parles d'un
élément de la loi, ça se pourrait qu'il n'y ait personne à Rimouski qui peut te
répondre parce que c'est une partie plus spécialisée, il faut qu'ils t'envoient à un centre
d'appels à Mont-Joli ou ailleurs au Québec où, là, tu vas tomber sur un
spécialiste de cette partie de loi d'aide sociale.
C'est juste
pour montrer que la loi, année après année puis réforme après réforme, la loi
s'est compliquée puis ça s'est, oui...
je ne dirai pas le mot, là, mais ça s'est vraiment pas mal compliqué, mettons,
et ce qui fait que les gens sur le terrain,
les gens en région, les gens qui vivent des situations de pauvreté, qui n'ont
pas voulu ou qui sont là à défendre leurs droits, bien ils se virent de
bord puis ils vont... première réaction, c'est d'aller vers ces groupes-là.
Il y en a
deux à Rimouski que je connais bien, là. Le Comité logement, qui donne de
l'information sur le droit au logement,
les baux, favorise les échanges, défend les personnes plus vulnérables, dont
les femmes et les enfants qui vivent des problématiques avec leurs
propriétaires, il accompagne les personnes lorsqu'elles doivent se rendre à la
Régie du logement. En passant, la Régie du
logement, chez nous, on vient de couper la seule personne qui travaillait là.
Il y a une personne à temps partiel
qui travaille entre Rivière-du-Loup, Rimouski puis, des fois, Matane, parce
que... en tout cas, ils n'ont pas
réussi à remplacer un congé de maternité. Je dis ça, là, mais ça fait partie
encore un peu de... quand je dis qu'il faut comprendre les réalités
région par région, c'est des réalités qu'on doit savoir ou qu'on doit... En
décentralisant un peu nos actions, on permet que ces actions-là justement
soient un peu plus collées aux réalités de nos régions.
L'autre groupe, celui que je vous propose
d'entendre, c'est Action populaire Rimouski-Neigette, qui est un organisme travaillant à l'amélioration des
conditions de vie et à la défense des droits des personnes assistées
sociales, des sans-emploi et des personnes
économiquement défavorisées. Par exemple, il informe sur les procédures de
l'aide sociale, offre de l'aide pour
remplir les formulaires et défend les personnes qui se retrouvent dans des
circonstances problématiques. Les
agents d'aide sociale ne sont pas toujours disponibles, il est donc important
qu'un organisme puisse accompagner les personnes
dans leurs démarches, sinon les procédures peuvent être mal suivies, et les
documents, remplis incorrectement, ce
qui peut entraîner des accusations de fraude portées contre les bénéficiaires.
Et ça, on l'a vu souvent, des gens... pas pour mal faire, mais la loi
est tellement compliquée que, dans leurs déclarations, certains oublis... puis
je suis certain que, les autres députés, vous avez vu ça aussi dans vos comtés,
parce qu'ils viennent dans nos bureaux de comté aussi, ces gens-là, et on
réussit à intervenir pour corriger la situation, mais des fois il est trop
tard, et les gens sont pris avec des pénalités à payer et qui ne font que les
renfoncer encore davantage dans la pauvreté.
Un groupe
comme Action populaire Rimouski-Neigette pourrait nous donner des éclairages différents sur l'impact du projet
de loi n° 70 et pourrait aussi
nous... Oui, je vais faire une parenthèse là-dessus avant d'aller là.
Quand je parle de problématiques
régionales, tu sais, quand on... Tantôt, j'expliquais qu'est-ce qui arrive avec les acériculteurs. Tu
sais, ça ne vient pas du champ gauche, là,
ce n'est pas un élément qui ne touche pas la réalité économique puis qui ne
touche pas la réalité du projet de loi que vous déposez.
À un moment
donné, le ministre m'avait dit aussi qu'il fallait comme resserrer... Ça,
c'était l'autre ministre, ce n'était
pas vous, c'était le député de Louis-Hébert. Il m'avait dit que ce projet de
loi là, c'était aussi pour éviter le travail au noir, puis là je prenais l'exemple de quelqu'un qui est au Témiscouata
qui pourrait aller travailler au Nouveau-Brunswick puis revenir puis... parce qu'il... de l'autre
côté de la frontière. Tu vas à Edmundston, puis tu reviens, ce n'est pas
bien, bien compliqué. Je me demandais
comment ce projet de loi pourrait éviter tout ça, puis là il y avait toute une
procédure qu'il m'expliquait. Mais c'est sûr que, demain matin — dans
le Témiscouata, là, c'est 250 acériculteurs, des producteurs acéricoles — tu déstabilises ces entreprises-là, c'est
sûr que c'est moins de jeunes qui travaillent dans ces industries-là,
c'est sûr que c'est des jeunes qui avaient
accès à certains revenus qui ne pourront pas avoir accès à ces revenus-là dans
cette région-là, c'est sûr que c'est des
jeunes qui, avant d'arriver à l'aide sociale, ils vont se débrouiller, parce
que c'est des gens qui se
débrouillent chez nous, ils vont trouver des façons de... et on ne peut pas
faire abstraction de tout ça. On ne peut
pas faire abstraction de municipalités dévitalisées qui sont comme... avec la
fin des CLD puis des CRE, qui n'ont plus accès à des moyens pour
développer leur économie, développer des petits commerces, faire des petites
productions agricoles. Tu dévitalises ça, tu
donnes moins à l'organisation, à ces gens-là, bien c'est moins d'entreprises
dans ces régions-là, moins de monde qui travaille.
Les gens qui
travaillent en forêt, en forêt privée, c'est du monde qui travaille très fort.
Bien, souvent, les revenus qui vont
là, qu'est-ce que ça leur permet, ça permet à engager des gens dans leurs
communautés pour faire de l'entretien, pour la machinerie, pour faire... ça fait rouler. Tu coupes dans la forêt
privée, tu coupes dans les emplois, c'est des gens qui vont perdre ces emplois-là. Ils ne peuvent plus engager
du monde dans leurs municipalités, c'est de l'argent de moins dans leurs
municipalités, c'est des gens qui ont moins accès à des emplois. Et, à un
moment donné, avec les nouvelles règles de chômage,
qui sont de plus en plus compliquées, bien, comme disait l'affichette de
Chicoutimi, c'est que ce n'est pas de ta faute, là, ce n'est pas parce que ton père, ton grand-père puis ton
arrière-grand-père est à l'aide sociale... ça n'a aucun rapport, c'est que la situation économique te
pousse vers ça, et là vers... d'aller jusqu'au bout du rouleau, le
chômage, l'aide sociale. Et là c'est quoi, à
l'aide sociale? Qu'est-ce que tu fais à l'aide sociale quand tu vis à... je ne
sais pas, moi, tiens, je vais parler
de mon village à Squatec, dans le Témiscouata? Tu sais, avec ce projet de loi
n° 70 là, la seule façon, ça va être de sortir de là, d'aller
ailleurs, retourner en ville ou je ne sais pas trop quoi.
Ça fait que
ce n'est pas très encourageant et ce n'est pas très motivant pour les jeunes de
chez nous de participer à ça. Ils
vont essayer de se trouver d'autres façons de gagner leur vie pour essayer de
rester dans leurs villages, rester proche de leurs parents, rester proche de leur réalité. C'est des gens fiers.
Ça fait qu'on ne peut pas faire abstraction du peu de vision que le
gouvernement a sur l'économie puis du peu de vision que le gouvernement a sur
l'économie locale et régionale. Tu sais,
quand l'ancien ministre de l'Économie disait que c'est sûr que ça fait mal, une
entreprise qui part dans le village,
parce que c'est le roi du village qui fait faillite, c'est sûr que c'est dur
pour son orgueil... Quand tu es parlementaire puis tu es régionaliste,
là, ça a beau venir de n'importe qui, tu... ça ne passe pas, là, ça reste un
peu de travers dans la gorge, tu dis :
Voyons donc! Ces rois du village là, pendant des années, c'est eux autres qui
ont fait vivre le village, puis il y
a une difficulté économique — puis, entre autres, dans le bois de sciage,
on a vu ça souvent — et là le
gouvernement, de haut,
il dit : Ah! c'est le roi du village, c'est sûr que ça doit être dur pour
l'ego, mais aïe! aïe! au bout de ça, là, c'est du monde, c'est des pères
de famille qui perdent leurs jobs, c'est des familles, des jeunes qui vont
déserter du village, c'est l'école qui va fermer.
• (15 h 40) •
Quand je
parle d'environnement de la personne, c'est ça, puis c'est ce qu'on ne voit
nulle part, là. On prend la personne
à l'aide sociale comme une personne qui est la même personne. Qu'il vienne de
la Gaspésie ou de l'Abitibi, ou de
Laval, ou de Trois-Rivières, ou de Québec, du comté de Jean-Lesage, c'est la
même personne, c'est la même affaire, c'est
le même individu qu'on prend de la même façon, puis qu'on va encadrer de la
même façon, puis qu'on va analyser de la même façon, puis qu'on va
essayer de suivre ou d'aider de la même façon.
Ce que les
gens d'Action populaire pourraient nous amener, c'est cette vision différente,
parce que, je le répète, là, dans les
régions, là, cette année, c'est la première fois qu'on voit des gens... un
solde migratoire déficitaire dans
toutes les régions périphériques, pas juste
une ou deux, là, dans toutes les régions périphériques. On coupe
les services de transport dans les
régions. Tout ce qu'on mettait dans des fonds pour aider la concertation, entre
autres, du milieu scolaire, la santé, les groupes communautaires, les
municipalités pour lutter contre la pauvreté, pour faire des actions, pour
soutenir des plateaux de travail, aider nos
jeunes de chez nous, qu'on connaît bien, ça transitait par la CRE, cette
concertation-là, on abolit tout ça. On abolit toutes ces structures-là,
où on pouvait se parler en région puis avec des moyens. On abolit la Commission jeunesse, qui avait un peu d'argent,
qui avait un petit montant d'argent, chez nous — je pense que c'était 500 000$ — pouvait
soutenir des projets jeunes dans des municipalités, une patinoire, refaire, tu sais, la vie, la vie
dans nos communautés, essayer d'aider. Ça aussi, on décide qu'on coupe, on
sabre là-dedans, puis après ça on se dit : Aïe! comment ça se fait que la région se vide? Comment ça se fait que des
gens à l'aide sociale, ça augmente dans les régions? Comment ça se fait que les jeunes se cherchent de
l'emploi autant? Bien, c'est parce
qu'on a tout dévitalisé autour, on a tout déglingué ce qu'il y avait
comme soutien autour de ces jeunes-là. Dans les écoles, les coupes dans les
commissions scolaires... quand on coupe les
orthopédagogues, quand on coupe... c'est des jeunes qui décrochent, qui se
retournent, là. Puis là je parle du
gouvernement du Québec, mais à Ottawa, avec les conservateurs, c'était aussi
pire, là, sinon pire. J'ai hâte de
voir, avec le gouvernement libéral, si on va comme corriger la situation. Mais
tout ça, ça crée un paysage social puis économique en région qui n'est
pas beau, ce n'est pas jojo, et qui fait qu'on échappe des gens puis on
échappe, entre autres, nos jeunes.
Ça fait qu'il faut les aider au niveau de
l'intégration à l'emploi, il faut les soutenir, il faut leur donner des formations. Pour ça, il faut arrêter de couper
dans les commissions scolaires. Pour ça, il faut aussi soutenir les CPE.
Tu en as encore aussi dans les centres de la
petite enfance qui viennent lutter contre la pauvreté. On vient aussi comme
désorganiser ces réseaux-là. Et il y
avait beaucoup de jeunes femmes qui travaillaient dans ces réseaux-là. Ce qu'on
me dit, c'est que la formation, entre
autres, pour les... il y avait beaucoup de jeunes femmes qui s'inscrivaient, au
cégep à Rivière-du-Loup, pour la
formation en services de garde. Je peux-tu vous dire qu'actuellement ça les
intéresse un peu moins? Quand elles regardent ce qui se passe avec les
CPE, elles se disent : Y a-tu de l'avenir là? Pas sûr. Ça fait que les
inscriptions baissent.
C'est des
réalités vécues en région que les gens d'Action populaire Rimouski-Neigette
pourraient peut-être venir nous
expliquer, puis on pourrait comparer à ce qui est fait dans les autres régions
du Québec, parce qu'il y a des groupes comme
ce groupe-là dans d'autres régions du Québec. Ce qu'ils ont fait, disons...
pour le retrouver, ce qu'ils ont essayé de faire, ces gens-là... C'est que c'est des gens qui accueillent des gens
à l'aide sociale. Ça fait qu'ils ont fait un exercice qui est assez intéressant — je vais essayer de vous retrouver ça — où ils ont comparé, ils ont pris une
situation puis ils se sont dit :
Qu'est-ce que ça ferait s'il y avait le projet de loi n° 70, qu'est-ce que
ça viendrait changer? C'est un genre d'étude de cas fictifs, mais c'est
intéressant de voir un peu comment ça pourrait se faire. Je vais vous en lire
quelques-unes, ça vaut la peine.
Un
exemple — puis ça,
c'est un exemple qui existe pour de vrai, là, qui est arrivé dans leur
groupe : Nous pensons ici à
l'histoire vécue d'une femme début quarantaine ayant une faible scolarité — secondaire non terminé — et deux enfants d'âge scolaire. Une rupture survient dans son
couple, puisqu'elle a décidé de quitter son conjoint, qui avait des
comportements nocifs — violence,
etc. Cette femme n'a pas travaillé au cours des 10 dernières années,
puisqu'elle s'est occupée de ses enfants et de sa mère malade — proche
aidante. Son ex-conjoint travaille au salaire minimum et versera, donc, une faible pension pour les
enfants. Le couple a toujours été en union libre, et madame n'a pas son
nom sur les biens matériels acquis par le
couple durant leur relation — auto, meubles, etc. Elle se retrouve donc
sans ressource financière et matérielle.
De plus, elle n'a pas droit à une pension alimentaire, puisque le couple vivait
en union libre. Cette femme doit nécessairement faire une première
demande d'aide sociale.
Difficultés
ajoutées par le projet de loi n° 70 à la situation de la personne, selon
le groupe : stress supplémentaire dans une situation de vie déjà
extrêmement stressante; qu'est-ce qu'un emploi convenable pour elle, qui n'a
pas de secondaire V, qui n'a pas été
sur le marché du travail au cours des 10 dernières années? Possibilité de
devoir déménager loin de son réseau
social et de sa mère malade pour accepter un emploi ailleurs, sinon elle sera
pénalisée sur le montant reçu. Elle
doit aussi s'occuper de sa mère
vieillissante et de ses enfants seule, le père ayant des problèmes
de consommation, mais manque de temps
pour le faire. Beaucoup de stress pour les enfants également.
Devront-ils déménager de leurs milieux, si leur mère ne trouve pas un emploi, changer d'école... L'impact dans la communauté : augmentation des problèmes
liés à la santé mentale de la femme;
augmentation de l'utilisation des services sociaux et des ressources
communautaires du milieu; augmentation
du stress et des besoins de la mère vieillissante; augmentation de
l'utilisation des services du réseau de la santé et des services sociaux ainsi que des organismes communautaires afin de
répondre aux besoins de la mère vieillissante. C'est un cas d'une personne qui, on le voit, vient... le projet de loi
n° 70 ne viendrait pas aider ce cas-là en tant que tel.
On en donne
un autre : Pierre, un nom fictif, mais un cas réel. Pierre a 20 ans.
Depuis son jeune âge, il vit dans une famille
dysfonctionnelle. Il a subi la violence, la maltraitance physique et
psychologique. Son frère a développé à son endroit une violence peu commune à tout lui passer
sur le dos. Il a un TDAH qui l'empêche à être à ses affaires à l'école
ou ailleurs. Il a complété sa sixième année primaire. Il a été pris en charge
par la DPJ et le centre d'accueil avec des différentes
expériences non adaptées à ses besoins. Sorti du centre d'accueil à 18 ans, il
décide de se faire justice, refuse toute
aide gouvernementale — consommation, vol, itinérance. Il développe une personnalité
antisociale. Présentement, il a
rencontré une personne significative, un intervenant différent, et il décide de
reprendre sa vie en main. Si le projet de loi n° 70 était appliqué, en faisant sa première demande d'aide
sociale, il ne pourrait répondre aux exigences de participation à une mesure d'employabilité. Comment faire pour reconnaître
ses grandes difficultés au niveau de sa santé mentale, sa consommation
et sa tendance antisociale? Pas de contraintes temporaires possibles à court
terme. Son agent d'aide à l'emploi ne
pourrait pas, en une seule rencontre, établir un plan d'intégration adapté
réellement à sa situation si la personne n'expose pas clairement sa
situation, ce qui est fréquent. Oui vers l'emploi, mais d'abord vers une
rééducation. Quel soutien concret lui offrir
dans l'offre de services sur son territoire? S'il va vers un organisme en
toxicomanie, quelle est la possibilité
d'aide financière pour l'hébergement? Comment lui proposer un programme de
réinsertion sociale? Son stress, ses
blessures passées, ses problèmes de santé mentale, de consommation et de
comportement ne peuvent être servis par des objectifs d'intégration en emploi uniquement. Devant l'impasse des
menaces de coupures, qui augmente sa détresse au lieu de stimuler sa
motivation, cela aura des conséquences financières sur le système de santé et
au judiciaire.
Je pourrais vous en lire plein et je pense que
ça serait pertinent qu'un groupe comme eux autres puisse venir témoigner, témoigner de ces exemples-là, parce que
je suis convaincu que la meilleure façon de sortir quelqu'un de la pauvreté, la meilleure façon d'aller chercher les
gens puis de briser leur isolement, c'est par une action communautaire, avec des groupes communautaires puis une action
régionalisée, c'est-à-dire avec des façons de faire qui sont conformes
aux réalités de la région. C'est ce qu'on
faisait avec les projets des alliances à la pauvreté, là. Puis, comme je vous
rappelle, le Comité consultatif arrivait à
la conclusion que, si on était arrivés à avancer dans la lutte à la pauvreté,
c'est beaucoup à cause de ces
alliances-là, c'est beaucoup à cause de ces interventions-là, interventions
faites sur le terrain, à partir de gens qui se connaissent. Parce que c'est un peu ça aussi, hein? En région, on
connaît notre monde. Dans les quartiers, c'est la même chose, les
quartiers en ville, on connaît le monde puis on est capables d'aller les
chercher, de les mobiliser. Ça fait deux ans que je fais ça.
Je vais à un
groupe qui s'appelle Je raccroche, un groupe qui soutient peut-être une
quinzaine de jeunes, peut-être même
plus que ça, des jeunes, là, qui sont vraiment loin du marché du travail. Le
gars qui s'occupe de Je raccroche, c'est un moyen «buddy», là, c'est quelqu'un qui s'amuse avec les jeunes, qui va
les chercher et qui leur donne des orientations, des indications. Il va les aider, mais c'est un
compagnon de route pour eux autres, là, c'est quelqu'un qui travaille avec
eux autres puis qui est fier de leurs
démarches puis que... chaque matin, il arrive à la salle de... parce qu'il y a
un genre de salle, eux autres, là, à
la commission scolaire. Ça fait qu'il arrive là, il les rencontre, puis, s'il
sent que ça ne va pas bien, s'il y en a deux ou trois qui sont en
détresse de quelque chose ou que... tu sais, il peut s'ajuster, tu sais.
• (15 h 50) •
Ça fait deux
années que je vais. Et ils me demandent de discuter avec eux autres un peu de
c'est quoi, la passion, c'est quoi, qu'est-ce qui va... Ils ont plein de
questions sur la politique, sur la vie en général, mais c'est une façon de travailler avec eux autres. Là, on leur donne
confiance. Quand j'y vais, moi, je les rencontre un en arrière de l'autre,
puis je leur parle, puis j'essaie de voir
puis de... je leur parle de ce qu'on fait ici puis comment... puis je pense que
ça leur donne... ils ont impression
que je ne viens pas... il n'y a pas de jugement, on travaille avec eux autres
pour leur permettre de s'en sortir. C'est ça, l'action des groupes
communautaires.
Ce groupe-là,
Je raccroche, était financé par le fédéral, et, à un moment donné, les
conservateurs ont lâché, et là ils sont
tombés dans le creux de la vague, ils ne pouvaient plus accueillir personne. La
pression était tellement forte dans la région,
parce que les jeunes qui allaient là, dans ces groupes-là, ils ne se
retrouvaient nulle part, bien c'est Emploi-Québec... c'est Québec qui a
pris la relève, qui a réussi à trouver un peu d'argent pour financer
l'organisme — je
remercie le gouvernement d'avoir fait
ça — mais ce
n'est pas récurrent. Ça fait que, là, encore l'année prochaine, on ne sait pas
trop où est-ce qu'on s'en va.
Il y avait
deux autres groupes qui s'appelaient... un qui s'appelait Les Maraîchers du
coeur. C'est des jeunes qui allaient
travailler, puis qui cultivaient la terre avec d'autres, puis qui faisaient des
légumes, puis tout ça. Ils cultivaient, en même temps ils discutaient
de... tu sais, ça les sortait de l'isolement, ils pouvaient discuter un peu de
leur situation. Il y avait un peu, là,
d'argent qui venait avec ça. Ils se mobilisaient, puis ça donnait un peu un
genre de tremplin pour faire d'autre
chose, pour aller ailleurs, tu sais. Bien, ça, Les Maraîchers aussi, ça a été
comme coupé. Ça fait que ces jeunes-là... puis là le gars qui est de Je raccroche m'avait dit : L'année où
ils ont été obligés un peu de décrocher, ils ont été... ce qui est arrivé, c'est que, les jeunes qui allaient là, ils
les ont retrouvés où? Dans la rue, dans la rue, la dope, la désolation. Ça
fait qu'on a besoin de ces réseaux-là, on a besoin de ces réseaux-là pour se
mobiliser.
C'est la même
chose dans nos villages. Quand je dis à des gens : Quand tu interviens sur
un projet de maintien d'activité
sociale pour des jeunes, tu sais, la patinoire du village, c'est des petits
montants d'argent, mais souvent ça va permettre
à des jeunes, entre autres, de rester dans le village puis se mobiliser, puis
se motiver puis d'embarquer sur des projets qui vont leur permettre de
s'en sortir, de prendre confiance en eux autres.
Puis, comme
je dis, ça, c'est ce que je vis, là, à Rimouski. Puis, il y a une trentaine
d'années, j'étais animateur social
dans le bout de Rivière-du-Loup puis je voyais la même chose, là. Quand tu vas
dans une soupe... j'ai déjà animé des soupes populaires, bien, tu le
vois. Quand tu animes la soupe populaire, les gens viennent manger, tu les
vois, là, tu vois la personne, là, arriver, tu vois s'il y a un stress ou il y
a une détresse. Comme animateur, là, tu le devines et là tu peux intervenir.
C'est des actions qui semblent, des fois, pas très gouvernementales mais qui
amènent plus de succès, souvent, qui
permettent d'aller voir, de sortir le monde de l'isolement, puis de les
reconnaître puis de travailler avec eux autres.
Ce
groupe-là, avec d'autres, à Rimouski ont parti un genre de pièce de théâtre
pour lutter contre les préjugés. Je suis allé à leur représentation. Ils font le tour des écoles, ils font
d'autres présentations, puis les acteurs, c'est des gens qui étaient à l'aide sociale, là, qui ont embarqué dans ce
processus-là puis qui viennent... puis, à travers la pièce, font valoir un
peu leur situation. Ça aussi, c'est des...
Puis les gens qui vont là se reconnaissent là-dedans, puis ça crée une
dynamique qui fait qu'on permet à du
monde de se réintégrer. C'est des initiatives populaires, des initiatives
communautaires, citoyennes qui sont
encouragées par l'ensemble de la communauté, et tout ça, avec la fin, là, des
CRE puis des CLD puis... tout ça est laissé à l'abandon.
Un groupe
comme Action populaire Rimouski-Neigette, comme j'ai dit, il y en a partout
ailleurs, pourrait venir nous
témoigner puis nous expliquer cas par cas, individu par individu, les cas les
plus parlants qu'ils peuvent rencontrer et nous expliquer un peu l'impact... Parce qu'ils ont fait un maudit beau
travail, là. Il faut voir leur mémoire, là. Je ne sais pas si le ministre a eu le temps de le lire, parce
qu'il a été quand même envoyé... c'était... Il faut voir ce que c'est, là,
pour ces gens-là, là. C'est des gens à
l'aide sociale. Avec un animateur ou deux, ils ont assis tout le monde ensemble
puis ils ont décidé de voir comment
écrire ce mémoire-là. Ce n'est pas rien. Puis, à un moment donné, je suis allé
les rencontrer puis j'ai décidé de... il me reste deux minutes, je vais
l'expliquer, j'ai décidé de... Ils voulaient que je fasse un discours...
Le Président (M. Hardy) : ...
M. LeBel :
2 min 33 s. Ils voulaient que je fasse un discours.
Écoutez bien
ça, M. le ministre, ce que j'ai fait. J'ai décidé de faire l'Assemblée nationale, ça criait un peu moins fort, je vais vous dire. Mais j'ai placé les gens,
ceux qui vivaient la pauvreté. J'ai nommé un ministre dans la gang, je
l'ai mis de l'autre bord, j'en ai mis deux,
trois autour, puis je me suis placé comme président de l'Assemblée puis j'ai donné des règles de
l'Assemblée, j'ai dit : Vous avez, chacun, tant de
minutes pour poser la question, le ministre doit répondre en tant de minutes, vous avez des complémentaires. J'ai
sorti mes cravates, j'avais une dizaine de cravates. J'ai mis une
cravate à un : Toi, tu es le député de,
le député de... Ça fait que, là, je me suis levé, j'ai dit : Vous, vous
êtes le député de la cravate jaune, posez votre question au ministre. Et
il a posé la question au ministre. Ça fait que chacun, la cravate barrée, la cravate... chacun a posé sa question
au ministre. C'était assez intéressant de voir les questions, puis le ministre
était pas pire aussi, il répondait en
disant toujours que c'était la faute du PQ, ça fait qu'il avait
trouvé la ligne, ça fait que, là... mais c'était bien, et j'ai pris ces questions-là,
j'ai pris ces questions-là et j'ai transmis ça au feuilleton, et vous avez
répondu aux questions, je ne sais pas si c'était vous ou c'était l'autre
ministre, là, et j'ai ramassé les dizaines de réponses et j'ai redonné ça au
groupe.
Et juste
cette façon de faire là, ça les a mobilisés, ça leur a dit : On est
capables, on est capables de défendre nos droits, on est capables de poser des questions au ministre, on est
capables d'avoir certaines réponses. Et c'est ce qu'ils ont fait par ce mémoire qu'ils vous déposent actuellement. C'est des gens de coeur qui ont des réalités différentes, et je pense qu'on
devrait être capables de les entendre et voir avec eux autres les conséquences
directes du projet de loi sur la réalité des individus, sur la
réalité du monde concrètement, cas par cas. C'est ce qu'ils font dans le
mémoire. Je vous invite au moins à le lire, je pense
qu'il y a quelque
chose là à comprendre. Puis, si on
n'a pas ce monde-là, si on n'a pas ces gens-là qui réfléchissent, qui accueillent ces gens, les gens qui vivent la
pauvreté, si on n'a pas ces gens-là sur le terrain, je vais vous dire...
n'importe quel gouvernement aurait un meilleur programme de lutter contre la
pauvreté, si on n'a pas des gens mobilisés sur le terrain, des gens de coeur
qui travaillent pour lutter contre la pauvreté, on n'y arrivera pas. Ça fait
qu'on devrait les entendre...
Le Président (M. Hardy) : En
terminant.
M.
LeBel : ...de temps en
temps, on devrait prendre le temps de les entendre. Et je vous garantis que,
prendre le temps d'entendre Action
populaire Rimouski-Neigette, vous reconnaîtrez beaucoup de groupes de vos
régions là-dedans. Merci.
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Rimouski. Avant de poursuivre la discussion sur la
motion du député de Rimouski, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 58)
(Reprise à 16 h 4)
Le Président (M. Hardy) : Donc, à
l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons la discussion sur la motion du député
de Rimouski. M. le ministre, la parole est à vous pour 30 minutes.
M. François Blais
M. Blais : Oui. Alors, merci, M. le
Président, de me donner autant de temps que ça, vous êtes bien généreux, mais
je n'en aurai pas besoin autant. J'ai écouté mon collègue d'en face. Ça
m'apparaît très, très évident, là, qu'il y a beaucoup de méprise sur... je n'ai pas dit «de mépris»,
mais de méprise sur la nature même du projet
de loi, sur la portée, ceux qui pourraient être affectés et de quelle
façon ils le seraient. La seule façon de mettre à plat ces méprises-là,
c'est de progresser, d'aller vers l'étude article par article. Ensuite, vous verrez bien qu'il y a beaucoup
de choses qui ont été dites, hein, qui inquiètent le collègue
mais qui n'ont aucune raison de l'inquiéter, parce que les choses ne vont
pas du tout se passer de cette façon-là et ça ne fait même pas partie du
projet de loi.
C'est pour ça, là, que je ne donnerai pas mon consentement
à la proposition, là, qu'il nous fait aujourd'hui.
Le Président (M. Hardy) : C'est
tout?
M. Blais : C'est tout.
Le
Président (M. Hardy) : C'est
tout. Bien, merci, M. le ministre. Maintenant, je vais passer la parole au député de Drummond—Bois-Francs.
À vous la parole.
M. Sébastien Schneeberger
M.
Schneeberger : Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors,
bon, j'ai écouté ce que le député de Rimouski, dans son
long verbatim... c'est surtout au
niveau du discours sur les régions,
ce qui est toujours très plaisant à entendre, puis c'est vrai
qu'il y a des réalités régionales qui sont vraiment très différentes.
Par contre, ici, la motion est portée sur un
groupe qui voulait... ce que je peux dire, qui voulait venir déposer son mémoire ici public en commission, qui n'a pas été
pris. J'ai, moi aussi, des groupes qui ont été refusés, là, dans mon comté. Par
contre, ce que j'ai fait, c'est que
j'ai été les voir, puis je me suis assis avec eux puis je les ai écoutés. Puis,
par les amendements qu'on amène, c'est un peu... selon ce que notre formation politique veut avancer, mais c'est un peu ce qui est un peu des chapitres
ou des bouts de ces personnes-là que j'ai rencontrées que je dépose en amendements,
c'est leur voix que je dépose.
Moi, je pense
que j'ai un groupe similaire, qui est le RDDS, à Drummondville, qui vient vraiment
en défense au niveau des personnes assistées sociales et je peux vous
dire qu'ils font mais un très bon travail et oui, malheureusement, c'est un petit organisme que... moi, je peux le
dire, là, qu'il est vraiment sous-financé, qu'ils font des miracles. Et
souvent, justement, ça peut aider ces gens-là, parce que,
la problématique de ces gens-là, souvent ils sont mal informés. Et,
quand ils ont une meilleure information, souvent ils s'en sortent plus facilement.
Puis, des fois, et malheureusement, on a un système qui est loin
d'être parfait mais qui a des lacunes, puis ça fait en sorte que des fois ces
gens-là tombent dans des failles.
Maintenant, je reviens à la motion. Je ne sais
pas quelle est l'approche de l'opposition officielle. Maintenant, s'ils décident de déposer motion pour motion pour
faire du temps, c'est leur choix, je
veux dire, c'est l'approche,
c'est tout à fait leur droit de le faire. Moi, par contre, j'aimerais...
M. LeBel : M. le Président.
Le Président (M. Hardy) : Oui, M. le
député de Rimouski.
M.
LeBel : Il y a
une différence entre dire qu'on veut faire du temps et vouloir écouter les
gens. Moi, je vais vous dire, l'idée, c'était d'écouter ces gens-là.
M.
Schneeberger : Non,
mais écoutez-moi, à la fin.
Le Président (M. Hardy) : Veuillez
poursuivre, M. le député.
M.
Schneeberger : Maintenant,
bon, avec nos systèmes
parlementaires, c'est tout
à fait leur droit de le faire.
Puis, par son intervention, et s'il en profite pour souligner des lacunes,
c'est tout à fait leur droit de le faire.
Dans ce cas-ci, je vais appuyer la motion, parce
que je pense que c'est des groupes qui, pour moi, m'ont aidé beaucoup.
Maintenant, c'est sûr que, s'il y aurait d'autres motions
comme ça qui s'éternisent, je n'appuierai plus... O.K., je veux être solidaire là-dessus. J'aurais peut-être
préféré m'abstenir, mais moi, j'ai toujours dit qu'un député qui s'abstient est un député qui ne fait pas sa job. Alors, il faut
prendre une décision. Alors, pour ce cas-ci, je vais appuyer la motion.
Et puis je souhaite qu'on passe au vif du sujet. Merci.
• (16 h 10) •
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. La parole est maintenant au député de Saint-Jean pour une période
de 30 minutes.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Moi, je trouve ça
très intéressant, ce que le
député de Drummond—Bois-Francs
vient de mentionner, parce qu'effectivement on a tous des organismes comme
l'organisme Action populaire Rimouski-Neigette qui oeuvrent dans nos circonscriptions,
qui nous sensibilisent, qui sensibilisent la population mais qui nous sensibilisent aussi comme représentants de la population.
C'est important aussi d'être sensibilisés, parce qu'on en
a beaucoup.
Comme députés, avant d'être députés, on a chacun
nos professions, on a nos métiers, on est spécialistes dans notre domaine, mais, comme députés, on est un peu,
hein, des généralistes et on a la responsabilité de connaître et d'oeuvrer dans tous les domaines, et ce n'est pas toujours
nos champs d'expertise. Donc, d'avoir des organismes comme Action populaire
Rimouski-Neigette, dans le cas de notre collègue de Rimouski...
non, mais je vois qu'il le sensibilise régulièrement — moi
aussi, dans ma circonscription, j'en ai, bon, les autres en ont tous — donc,
je trouve ça assez intéressant, assez intéressant qu'on les entende, parce
qu'on n'a pas vraiment entendu d'organismes.
Nous, on
aurait aimé avoir des consultations générales, on l'a mentionné, M. le
Président, mais on n'a pas entendu beaucoup d'organismes qui sont
directement sur le terrain, dans une région. On a entendu beaucoup de groupes nationaux, ce qui est très bien, parce qu'ils
représentent des groupes des différentes circonscriptions, des différentes
régions et nous arrivent avec un arrimage
intéressant, mais je crois qu'il y a quand même quelques oublis, là, de
certains groupes qui auraient dû être entendus pour justement, pour
justement, pas juste qu'un... parce que nous aussi, on les rencontre
individuellement, ceux qui n'ont pas été entendus, puis j'espère que le
ministre en fait autant, mais d'entendre ici... premièrement, que ce soit enregistré, hein, que les citoyens puis les
autres personnes puissent entendre ce que les groupes ont à dire, parce qu'un mémoire, c'est une chose,
mais, quand on a la période d'échange, des questions et réponses à la
fin, c'est intéressant parce qu'on peut approfondir certaines réflexions,
certains commentaires, puis, on l'a vu, certains groupes avaient une position dans un mémoire mais ont pu raffiner
davantage leurs opinions en posant des questions, puis finalement on a
trouvé des consensus ou des terrains d'entente, si on peut dire ça ainsi.
Donc, je
trouve ça quand même important et intéressant, surtout que, dans le cas de cet
organisme-là, franchement, M. le Président, si vous n'avez pas eu
l'occasion de regarder leur mémoire, là... c'est quand même un document de 49 pages puis ce n'est pas écrit sur le coin d'une
table, là, on s'entend, là, c'est vraiment avec des études, avec des
références et aussi un travail, là, de
recherche. Donc, dans ce cas-ci, je crois que c'est un organisme qui peut
effectivement nous amener un éclairage intéressant.
M. le
Président, je vais juste mentionner quelques extraits, là, du mémoire pour être
sûr qu'on... comme ça, les gens qui
ne l'auront pas entendu pourront au moins entendre ça, parce qu'on a entendu
que le ministre ne voulait pas les inviter en commission. Donc, au moins, ça restera dans le débat, ça restera dans
le débat pour l'étude détaillée du projet de loi.
Donc, à la
page 8 du mémoire, ils mentionnent : «[La] réflexion autour [des]
statistiques et résultats d'une étude internationale.»
Très intéressant, très important, cette section-là, parce que ça parle,
justement... mais, je vais en mentionner, là, mais sur le nombre de gens à l'aide sociale, qui diminue, et les
fameux jeunes, hein, les fameux jeunes qu'on veut aider à se sortir de l'aide sociale. Donc : «Les
chiffres du [ministère] de novembre 2015 montrent qu'il y a d'année en
année une baisse du nombre d'adultes
prestataires. En novembre 2014, le Québec comptait 347 490 adultes
prestataires d'aide sociale, alors que [le] nombre est passé à
339 405 l'année suivante. Pourquoi mettre en vigueur une loi punitive
lorsque le nombre de prestataires est en baisse?»
C'est une
bonne question. Bon, le ministre pourra peut-être mentionner que le nombre de
jeunes à l'aide sociale, en ce
moment, augmente, mais, dans l'espace-temps, ce n'est que depuis le retour au
gouvernement du Parti libéral. Dans les tribunes médiatiques et à l'Assemblée nationale, l'ancien ministre a
répété que sa réforme visait à aider les jeunes issus de familles ayant
déjà reçu des prestataires d'aide sociale et briser le cirque... pas le cirque,
le cycle de la dépendance intergénérationnelle. On l'a entendu tantôt, on en a
parlé, de ça.
«Le nombre de
jeunes prestataires serait de 6 200 sur [...] 17 000 nouveaux
demandeurs. Toutefois, il nous semble qu'il manque une analyse
approfondie des causes réelles menant à une première demande d'aide sociale des
jeunes. A priori, le ministre ne cible
qu'une seule caractéristique : le fait que son parent ait déjà eu recours
à l'aide sociale. Ainsi, il nous semble disproportionné que l'ensemble
des 6 200 jeunes par année fassent une demande dans une dynamique intergénérationnelle de dépendance à l'aide
sociale. Certains parents ont eu recours à l'aide sociale de façon très
transitoire, et nous sommes d'avis que
plusieurs de ces jeunes sont des travailleuses et des travailleurs victimes de
l'insuffisance de l'emploi qui en auront recours aussi de façon
temporaire.»
Ce qu'il est important de mentionner... puis je
pourrais faire référence à la lettre, M. le Président, que Serge Petitclerc, qui est porte-parole du Collectif pour
un Québec sans pauvreté, a parue ce matin dans les médias, qui
explique... puis je l'ai mentionnée lors du
débat de l'adoption de principe aussi, cette argumentation-là, et j'aimerais ça
que le ministre puisse nous en faire part, de ce qu'il pense de cette
analyse-là.
Dans la vie courante, une personne qui est sur
le marché du travail qui a un enfant, aussitôt l'anniversaire de 18 ans du jeune ou de la jeune en question... bien, si le jeune ou la jeune n'a pas d'emploi et est à la maison sans
être aux études nécessairement, bien, le parent ou les parents vont continuer à subvenir aux besoins
dudit jeune. Si les parents sont à l'aide
sociale ou si la mère ou le père
d'une famille monoparentale est à l'aide
sociale, bien, le jeune, dès ses 18
ans, devra s'inscrire à l'aide sociale, parce que sinon il y aura une sanction sur le chèque d'aide sociale de ses parents ou de son parent, soit son père ou sa mère. Et est-ce
que c'est normal, est-ce que
correct?, on pourra faire le débat un jour, mais il y a donc une obligation, si on peut dire ça ainsi, institutionnalisée que le jeune, dès le jour de ses 18 ans, s'inscrive à l'aide sociale, à moins qu'il se trouve un emploi ou se rende aux études. Bon, s'il se
rend aux études... bon, il l'est peut-être déjà, en train de faire son secondaire ou, du moins, de tenter de le terminer, mais, s'il
se trouve un emploi, bien, ce n'est pas la journée de ses 18 ans qu'il
faut s'en occuper.
Et c'est là
que je reviens avec la réforme des carrefours
jeunesse-emploi qui a été faite par
le ministre. Actuellement,
ce jeune-là en question, il a 16 ou 17 ans, il n'est donc pas à l'aide sociale,
parce qu'il n'a pas 18 ans, et dans plusieurs régions, bien, il ne peut pas être aidé par un carrefour jeunesse-emploi. Donc, comment on peut faire en sorte pour
que ce jeune-là soit retourne aux études ou se trouve un emploi avant d'arriver
à l'aide sociale? Donc, il y a, selon moi,
une mauvaise décision de la part du ministre d'avoir mis en place cette réforme des carrefours jeunesse-emploi. Donc, vous
pourrez lire la lettre de Serge Petitclerc, ce matin, sur LeHuffington Post, qui était très intéressante, dans
ce sens-là. M. le Président, moi, j'aimerais... puis d'ailleurs, dans
leur mémoire, Action populaire Rimouski-Neigette mentionne et fait une très bonne analyse par rapport aux carrefours
jeunesse-emploi et les impacts de la
réforme du ministre actuel
dans ce dossier-là.
M. le Président, je vais
passer aux recommandations de l'organisme, comme ça nous aurons en tête ce que
l'organisme a recommandé dans son mémoire : annuler l'obligation
d'adhésion à l'emploi convenable et au plan d'intégration en emploi suivi de la
pénalité financière; hausser les allocations et favoriser l'accès aux mesures
de préemployabilité, la création d'emplois adaptés et le soutien au maintien en
emploi; offrir la possibilité de bénéficier de
l'aide sociale tout en étudiant à temps plein aux personnes qui
souhaitent terminer leur secondaire et faciliter la poursuite des études postsecondaires; étendre la tenue statistique du ministère du Travail, de
l'Emploi et de la Solidarité sociale pour recueillir des données à long
et moyen long terme sur le parcours qualitatif d'employabilité des
participantes et des participants — autres facteurs que
l'intégration en emploi suivant la mesure; considérer les véritables causes de
la précarité d'emploi ou de l'insuffisance
de revenus; tenir compte des données scientifiques et faire des études
d'impact approfondies avant de mettre en place des lois punitives et de couper
dans les services publics; prioriser la création d'emplois et la stabilité des emplois afin de diversifier les
opportunités d'emploi de qualité; s'assurer de la qualification de la main-d'oeuvre, l'accès à l'éducation postsecondaire et
les mesures favorisant le raccrochage scolaire... soient prioritaires pour soutenir l'ensemble des personnes sans
emploi, travailleuses et
travailleurs; favoriser les concertations régionales en lien avec le développement socioéconomique et en
assurer la représentativité démocratique au sein de la Commission des partenaires du marché du travail; décentraliser le
pouvoir du ministre concernant les besoins de main-d'oeuvre; favoriser
la collaboration entre le... ça doit être le ministère de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, qui a maintenant
changé de nom, et le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité
sociale sans subordonner un à l'autre.
• (16 h 20) •
Réinvestir
dans les centres de la petite enfance et l'école publique afin d'assurer la
qualité des services éducatifs et l'accessibilité
pour toutes et tous, sans surcharge du corps enseignant, avec des ressources
adaptées pour les jeunes en difficulté;
offrir la possibilité de bénéficier de
l'aide sociale tout en étudiant à temps plein aux personnes qui
souhaitent terminer leur secondaire;
faciliter la poursuite des études postsecondaires; rendre accessibles les services
d'aide à l'emploi à toutes les
personnes sans emploi; valoriser la mise en place de programmes et
d'interventions de longue durée permettant une aide adaptée et souple en fonction des besoins existants et
souscrivant à un soutien dans toutes les sphères de la vie de la personne afin de maximiser les chances de
réussite de son insertion professionnelle; rendre obligatoire la collaboration
avec les différents ministères impliqués
dans la réinsertion en emploi; réduire la lourdeur administrative et les cercles
vicieux qui en découlent; faciliter l'accès
au travail et permettre aux prestataires d'avoir plus de gains de travail;
faciliter l'accès à l'aide sociale ou
à un revenu minimum universel garanti; étendre la couverture des soins de santé
accessibles... admissibles, pardonnez-moi,
aux prestataires, après deux ans, à l'ensemble de la population;
évaluer la pertinence d'abolir les catégories en rapport à l'existence
de la contrainte à l'emploi et le faire en analysant les impacts en termes de
coûts dans les différents ministères, pas seulement en termes d'économies de
prestations.
Pour les
jeunes spécifiquement, maintenir les services des carrefours
jeunesse-emploi, respecter leurs missions et leurs particularités régionales; favoriser l'implantation des meilleures
pratiques préventives dans l'ensemble des carrefours jeunesse-emploi du Québec;
réinvestir dans les centres de la petite enfance et l'école publique — je
l'ai mentionné tantôt, ils le répètent, ça
doit être important, réinvestir dans l'école publique; offrir la possibilité de bénéficier de
l'aide sociale tout en étant étudiant à temps plein aux personnes — ça
aussi, on l'a mentionné.
Donc,
quelques éléments importants de leurs recommandations. Donc, M. le
Président, je pourrais mentionner beaucoup d'autres éléments, je sais
qu'il me reste pratiquement 15 minutes, mais l'objectif, ce n'est pas d'étirer
le temps, hein, c'est de faire entendre un
organisme. Je comprends que, dans ce cas-ci, le ministre souhaite ne pas les
entendre. Peut-être qu'à la lumière de ce
qui a été dit par mon collègue de la CAQ, et ainsi que ma... par mon ajout, ma
modeste contribution, peut-être que le
ministre va réviser sa position, ce que nous souhaiterions, mais on va le
laisser prendre sa décision en conséquence. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions sur la motion déposée par le député de
Rimouski?
Une voix : ...c'est fini.
Le Président (M. Hardy) : C'est
bien. Il n'y a pas d'interventions? Oui.
M.
Turcotte : ...vous
allez passer au vote, un vote nominal.
Mise aux voix
Le Président (M. Hardy) : Oui. S'il
n'y a pas d'intervention, nous allons mettre aux voix la motion.
Le Secrétaire : Donc, sur la
motion, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte : Pour.
Le Secrétaire : Mme Lamarre
(Taillon)?
Mme Lamarre : Pour.
Le Secrétaire :
M. LeBel (Rimouski)?
M. LeBel : Pour.
Le Secrétaire : M. Blais
(Charlesbourg)?
M. Blais : Contre.
Le Secrétaire : Mme Sauvé
(Fabre)?
Mme Sauvé : Contre.
Le Secrétaire : M. Girard
(Trois-Rivières)?
M. Girard : Contre.
Le Secrétaire : M. Fortin
(Pontiac)?
M. Fortin (Pontiac) : Contre.
Le Secrétaire : M. Drolet
(Jean-Lesage)?
M. Drolet : Contre.
Le Secrétaire : M.
Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger : Pour.
Le Secrétaire : M. Hardy
(Saint-François)?
Le Président (M. Hardy) : Abstention.
Le Secrétaire : La motion est
rejetée.
Le Président (M. Hardy) : La motion
est rejetée. Donc, est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires?
Motion proposant d'entendre l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec
Mme
Lamarre : Oui. J'aimerais déposer une motion, s'il vous plaît, M. le
Président. Donc, la motion, en vertu de l'article 244 : «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244
de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi
ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières
et qu'à cette fin, elle entende dès que possible l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.»
Le Président (M. Hardy) : Merci.
Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 16
h 24)
(Reprise à 16 h 28)
Le
Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Mme la députée de Taillon, qui êtes l'auteur de cette motion, vous avez
30 minutes pour nous la présenter.
Mme Diane Lamarre
Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le
Président. D'abord, je vous remercie d'accepter, là, de recevoir mes commentaires sur cette motion en vertu de l'article 244, qui vise finalement
à élargir le nombre d'organismes que nous recevons dans le cadre de nos travaux. Je dois vous dire que nous
l'avons déjà utilisée dans le cadre de l'étude du projet
de loi n° 20, où nous avions
demandé à entendre la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec en lien
avec le dépôt du projet de loi
n° 20, qui visait finalement à améliorer l'accès au système de soins, et
que le fait d'entendre quelques organismes
supplémentaires — dans ce
cas-ci, on avait entendu la FMOQ — avait apporté un éclairage très
constructif.
Le
dépôt de ma motion — et je le
dis vraiment très sincèrement — dans un projet de loi qui porte comme
titre Loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en
emploi, un projet de loi dont toute la
deuxième partie vise les prestataires de l'aide sociale... eh bien, qu'on
exclue... ou qu'on ait jugé non pertinent d'entendre l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, ça
m'étonne, ça m'étonne beaucoup, et j'espère qu'on aura l'occasion d'entendre
les motifs qui justifient... Tantôt, le ministre
nous a dit qu'il avait des explications à nous fournir. Bien, j'aimerais bien
entendre les motifs qui justifient le refus d'entendre un ordre
professionnel.
• (16 h 30) •
Et, je le
redis, là, l'Ordre des travailleurs sociaux... bien, d'abord, les travailleurs
sociaux, ce sont les gens qui côtoient
les gens qui ont des problèmes sociaux, et, de toute évidence, les prestataires
de l'aide sociale sont des gens qui vivent des difficultés au niveau
social.
Et l'autre
groupe, toujours sous cet ordre-là, c'est l'ordre des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec, et, là aussi, on
sait qu'il y a énormément de problèmes qui se concluent par finalement la
mise... je vous dirais, le fait d'avoir accès à des prestations d'aide sociale qui relève de problèmes
conjugaux, de problèmes familiaux, d'antécédents familiaux et de contextes conjugaux difficiles. Alors, il
m'aurait vraiment paru, et je le crois encore et j'en fais encore une
demande très, très sérieuse et très formelle
au ministre, que, d'entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des
thérapeutes conjugaux et familiaux du
Québec, il me semble que ces gens-là auraient eu une contribution particulière,
d'autant plus qu'ils ont une mission
qui reflète, justement, cette pertinence d'être un peu, jusqu'à un certain
point, des conseillers de l'État tout en étant au service de la protection de la population et qu'ils ont une
expérience très intense et une analyse, également, de par leur formation, une analyse des facteurs qui
contribuent à ce que les gens soient bénéficiaires de cette aide sociale,
mais aussi des enjeux sociétaux qui
conduisent la population à être dans une situation comme celle-là. Et je
redis — je
regarde sur leur site, là — les valeurs : le respect de la dignité
de tout être humain, des droits des personnes, des groupes et des
collectivités, du principe d'autonomie de la personne, du droit de tout
individu en danger de recevoir assistance et protection selon ses besoins, ainsi que les principes de justice
sociale. Il me semble que tous ici, dans cette salle, on a ce désir, cette
volonté, par nos différentes actions — et le projet de loi n° 70 ne fait pas
exception à ça — de
travailler à une meilleure justice sociale mais en même temps de bien
tenir compte de l'environnement.
Et tantôt j'entendais le ministre favoriser
l'autonomie de la personne. Moi aussi, je crois qu'on doit favoriser
l'autonomie de la personne. C'est juste que l'action qui est préconisée par le
projet de loi n° 70 m'apparaît arriver au moment d'un parcours de vie où il y a déjà beaucoup de cicatrices qui
ont été enregistrées et où ce n'est pas simplement la recherche d'un emploi qui va faire la différence
et que même le fait d'occuper un emploi pendant un an ne nous donne pas
les garanties que les gens vont vraiment retrouver une confiance en eux et une
estime de soi qui va leur garantir la pérennité
au niveau de cet emploi-là — ou, en tout cas, le goût de continuer — la confiance en soi pour pouvoir
garder un emploi, pour pouvoir accéder à des promotions, pour pouvoir
finalement améliorer leur autonomie.
Alors, je
pense que l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec a vraiment quelque
chose à nous apporter. Je voudrais vraiment comprendre pourquoi on a...
comment, sur quels motifs on a pu exclure la représentation de ce
groupe-là.
Dans les
valeurs de cet ordre, il y a aussi la croyance en la capacité humaine
d'évoluer, de se développer. Alors, moi,
je pense que c'est exactement... le projet de loi n° 70 s'inscrit, je
pense, dans une volonté d'aider les gens, et peut-être que, sous cette
volonté-là, le moyen choisi n'est pas le bon, ou est peut-être perfectible, ou
doit peut-être être complété par des mesures
en amont et des mesures en aval de ce qu'on a prévu, et donc que l'éclairage de
l'Ordre des travailleurs sociaux serait certainement pertinent. Et, la
reconnaissance de la nécessité de percevoir et de comprendre l'être humain en tant qu'élément de systèmes
interdépendants et potentiellement porteurs de changements, eh bien, là
aussi, je pense que nous avons tous des
formations et des expériences de vie mais qu'il y a des gens qui ont une
certaine expertise dans cette
capacité de comprendre l'être humain, et les systèmes indépendants, et la façon
dont nos systèmes de soutien sociaux ont leur influence, l'impact qu'ils
ont sur l'être humain et sur une meilleure compréhension des impacts.
Alors, je ne
doute pas de la bonne foi de nos travaux et de ce que nous espérons faire, mais
je pense qu'il y a des gens qui ont des compétences plus avancées que
nous comme parlementaires et je pense qu'on doit absolument entendre ces gens-là et recueillir le fruit de leurs expériences, de leur travail
au quotidien, mais aussi... et je crois sincèrement que, dans ce domaine-là
aussi, il y a des données scientifiques, il y a
des données probantes, il y a des données qui ont été évaluées, il y a
des expériences qui ont été tentées ailleurs et il y a des expériences qui ont
porté fruit, il y en a d'autres qui ont été moins réussies.
Et donc, dans
ce contexte-là, je suis convaincue qu'on aurait intérêt à accueillir l'Ordre
des travailleurs sociaux. C'est une heure, en général, les
présentations, ce n'est pas très long, et il me semble qu'on se prive d'un
éclairage tout à fait pertinent.
Alors, je
vais donner quelques éléments de leur mémoire en espérant peut-être...
tantôt, j'en ai donné un dans ma première présentation, mais je veux vraiment
en donner quelques-uns. Il n'y en a pas beaucoup, il y en a six, mais je crois qu'en les lisant on voit très bien toutes
les compétences et également le vécu que ces personnes, ces
professionnels ont avec ces groupes de personnes chez qui on veut favoriser
l'emploi.
Donc, leur
premier thème précise : Un projet de loi qui fragilise davantage des
personnes déjà vulnérables. Je suis sûre que ce n'est pas ce qu'on souhaite, personne, mais je pense que,
quand un ordre professionnel nous donne cette alerte-là, on a un devoir de l'écouter et de l'entendre.
Alors, parmi les éléments, l'individualisation d'une problématique
sociale... Et je crois qu'on a... moi, ça
m'a pris un certain temps, je vais vous dire, avant de réaliser
qu'effectivement la pauvreté n'était
pas un choix que les gens faisaient, que c'était vraiment la somme de contextes
sociaux dans lesquels ils arrivaient, dans lesquels ils naissaient, dans
lesquels ils grandissaient, et je crois qu'on a, on le voit actuellement...
Souvent, on va dire qu'on vit dans une société qui est
plus individualiste. Alors, je crois qu'on a à faire une démonstration et une éducation de notre responsabilité collective, de
l'importance de la justice sociale si on veut amener l'égalité des
chances.
Et j'ai
beaucoup aimé tantôt quand le ministre a cité les pays scandinaves. Je pense
que ce sont des modèles de pays où on
affirme clairement, régulièrement la valeur ajoutée de la mise en commun, la
valeur ajoutée du bien commun. Et, je vais vous dire, un des éléments
qui m'apparaît me faire craindre, c'est qu'actuellement nous ne sommes pas dans
un contexte de croissance économique, nous sommes dans un contexte où nous
gérons une décroissance, où nous avons de
l'austérité. Alors, il y a des mesures qui, lorsqu'elles s'installent dans un
contexte qui est favorable, où on a tous un peu plus d'argent, bien on peut penser, au niveau d'une société, qu'on va
avoir des conditions gagnantes pour faire que la mesure d'accompagnement
qui est prévue dans le projet de loi n° 70 va vraiment arriver dans des entreprises
qui, ayant une certaine croissance, vont
faire une part pour finalement diminuer l'injustice sociale et favoriser
l'égalité des chances. Par contre,
dans une période où on n'est pas dans une période de croissance, là on peut un
peu se questionner parce que... et le mémoire
de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux
du Québec nous dit «attention», parce
que, dans une période de décroissance, on n'a pas de place, chaque entreprise
veut le candidat le plus performant, veut le candidat idéal. Et donc
toute cette solidarité sociale, qu'on souhaite tous, elle risque d'être encore
plus difficile à obtenir dans un contexte où les entreprises subissent
elles-mêmes des contraintes à différents niveaux.
• (16 h 40) •
Donc, dans
leur mémoire, on dit : «...la pauvreté et l'insuffisance de revenus
constituent un déterminant majeur de la
santé physique et mentale, et il importe de considérer les dépenses pour les contrer comme un investissement social. Il est donc inconcevable de chercher à
faire des économies sur le dos de ces personnes, [qui sont] déjà lourdement
fragilisées.»
Alors, le
contexte économique dans lequel le gouvernement travaille actuellement fait en sorte que... et, je dirais, le contexte économique... ou, en tout cas, l'austérité qu'il choisit
d'imposer, cette austérité, déjà, plusieurs l'ont qualifiée de sélective. On n'est pas sûr qu'on vise vraiment
les plus riches dans l'application de l'austérité comme elle est imposée aux Québécois
depuis deux ans. Or, clairement, ce que l'Ordre des travailleurs sociaux nous
indique, c'est que ce n'est pas le bon endroit, faire des économies — d'abord,
ça risque d'être des économies de bouts de chandelles, ce n'est pas des montants significatifs — sur
le dos de gens qui sont déjà fragiles dans un contexte où les entreprises qui
vont les accueillir, elles aussi ne
sont pas dans un contexte optimal pour bien les recevoir. Pour illustrer ça,
bien, dans le mémoire, l'Ordre des travailleurs sociaux dit que «ce qui retient d'abord notre attention est
le fait que le projet de loi fait porter sur les épaules des personnes visées une problématique sociale, économique et politique»
qui dépasse largement leur seule responsabilité et que le marché du
travail, donc, comme je l'ai dit tantôt, est peu accueillant pour les personnes
qui ont une certaine vulnérabilité. On cite
également un rapport d'Oxfam International qui sonne l'alarme en observant que
«1 % des plus riches posséderont plus que le reste de la population
en 2016».
Alors, dans
cette politique, est-ce qu'on est sûr que les gens qu'on surveille et qu'on
contrôle sont vraiment ceux qui contribuent
le plus à ce que le gouvernement essaie de réduire au niveau de son déficit? Moi, je
crois qu'on a actuellement des choix
qui sont faits qui ne ciblent pas nécessairement les bonnes personnes, et que,
dans notre société, on a certainement un
travail à faire sur le 1 % des plus riches, et qu'actuellement d'essayer
de serrer la vis à des gens qui ont déjà énormément de difficultés, bien c'est beaucoup plus risqué,
et tout ça dans un environnement, parce que, dans ma circonscription...
mais aussi on en entend parler, mes
collègues l'ont évoqué, dans un contexte où on coupe en santé publique, où on
coupe au niveau des organismes
communautaires, où on coupe des centres de désintoxication, où on réduit la
lutte au décrochage scolaire — on espère que le budget
amènera certaines bonnes nouvelles — où on coupe dans les centres
de la petite enfance, écoutez, ce sont tous
des instruments qui gravitent autour de ces personnes et qui sont autant de
points d'ancrage pour les aider à
sortir de leur pauvreté. Et là non seulement on dit : On va faire un
projet de loi puis on va avoir une approche qui est un peu, comme j'ai dit tantôt, mécanique, une personne
prestataire, un emploi, avec un petit accompagnement, on en convient,
mais on voit qu'en même temps on atténue, on coupe dans tous les points
d'ancrage de ces personnes plus vulnérables
au niveau de la santé publique, la prévention du tabagisme, qui est un
déterminant fondamental pour ces gens-là, le contrôle de l'obésité, les
mesures pour la prévention des infections transmissibles sexuellement.
Les
organismes communautaires, qui sont vraiment des parrains, dans certains cas,
qui se substituent à la famille de ces
prestataires de l'aide sociale là, bien, on coupe dans ces organismes
communautaires. La semaine passée, j'ai rencontré un
organisme qui fait de l'aide à des proches aidants de patients qui sont très
vulnérables, et ils avaient un budget de 300 000 $
et ils se le font amputer de 130 000 $. Alors, c'est énorme. Et, des
fois, ce n'est pas nécessairement directement la mesure du gouvernement, c'est un effet de cascade. C'est qu'en coupant
dans les hôpitaux, en coupant au niveau de la santé, en coupant au niveau des services sociaux, en
coupant du côté... parce qu'il y a des choix qui sont faits aussi au
niveau de Centraide, bien, il y a des
conséquences qui finalement cumulent toutes au niveau des organismes
communautaires, qui se retrouvent
avec des budgets nettement affaiblis. Alors, encore une fois, dans ce
contexte-là, est-ce que c'est le bon moment, est-ce que c'est la bonne chose à faire que de dire : Il faut que,
pour le 10 % seulement des gens qui sont prestataires de l'aide sociale et qui sont peut-être ceux qu'on
devrait viser... Est-ce que le projet de loi, avec les mesures qui sont
prévues en particulier dans sa partie II, est vraiment le bon outil?
Et, en tout cas, moi,
j'aimerais bien entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux, ils ont peut-être
d'autres éléments aussi sur lesquels on pourrait certainement intervenir, et
certainement qu'on pourrait bonifier
notre projet de loi. Il est certain que, dans leurs recommandations au niveau
de leur mémoire, le programme des CPE
et les coupures dans le programme de CPE, ça m'apparaît être... amputer
l'avenir, clairement, et je vais vous
le dire, parce que, d'une part, pour ces personnes qui pourraient être en
situation d'emploi où on leur imposerait un emploi, il est certain que,
à tout le moins, de savoir que les enfants de ces personnes-là se retrouvent
dans un centre éducatif, que, s'ils ont
certains déficits de langage, certains déficits au niveau de leur évolution, au
niveau... bien, il faut qu'ils soient dans un milieu non pas juste où on les garde, mais dans un
endroit où au moins ils vont avoir des services éducatifs qui vont aider à faire en sorte que ces enfants-là arriveront
à l'école avec le maximum de potentiel, qu'ils ne seront pas déjà pénalisés parce qu'on n'aura pas su
corriger ces déficiences, qui sont autant de handicaps qui conduisent au
manque de l'estime de soi, au manque de
confiance de soi, mais aussi aux échecs scolaires, et ensuite au décrochage
scolaire, et parfois, malheureusement,
à la délinquance, à la toxicomanie. Alors, il y a une progression prévisible
dans beaucoup de ces paramètres-là.
Et donc, au moment où on coupe dans les CPE, qu'on établisse aussi une mesure
aussi contraignante pour des parents, c'est très, très... en tout cas,
moi, ça me préoccupe énormément.
Imaginons,
là, qu'on aurait décidé d'investir dans les CPE, qu'on aurait dit : On
fait la promotion... on augmente les CPE,
on les favorise parce que ça joue sur nos 0-5 ans, et ça, on pense que c'est
l'avenir. Moi, je vous certifie que, quand on joue et qu'on investit dans les 0-5 ans, bien, d'ici 15 ans, quand
ces enfants-là vont avoir 18 ans, on va avoir moins de prestataires de l'aide sociale, c'est certain. On
va contribuer à donner un meilleur départ à ces enfants-là. Et
l'Association des économistes québécois,
dans un article de La Presse de la fin de semaine dernière,
clairement, dans les recommandations qu'elle faisait en prévision du
budget du gouvernement, disait... il y avait un paragraphe complet sur l'importance
d'investir dans les CPE, l'importance
d'investir dans la jeunesse, et c'était la meilleure façon pour eux de diminuer
le décrochage scolaire, d'améliorer la
persévérance scolaire, mais également on parlait même de qualifications
d'emploi, on parlait de qualifications
d'emploi. Alors, je pense qu'on est exactement où on veut être, mais, au moment
où on coupe dans les CPE, on a ces
exigences-là pour les prestataires de l'aide sociale, je vous avoue que c'est
très déroutant et que je pense qu'à
travers tout ça il y aura des conséquences où on handicape l'avenir à court,
moyen et long terme plutôt que d'investir,
et, clairement, l'Association des économistes disait que c'était un
investissement que d'investir dans les CPE.
• (16 h 50) •
L'autre
dimension, c'est toute la dimension des emplois, de la création d'emplois dans
les régions ressources en particulier.
Là encore, le contexte économique est difficile, dans toutes les régions il y a
migration des gens et il y a des pertes
d'emploi significatif. Je vous donne en exemple, là, dans le domaine de la
santé, la centralisation, qui a fait en sorte que, par exemple, dans la région du Lac-Saint-Jean, il y a
70 emplois de cadres qui ont été perdus... de cadres en santé. Alors,
c'est sûr que ce n'est pas un contexte qui favorise l'emploi et la création
d'emplois intéressants ou d'emplois stimulants pour une société. Donc, on gère
de la décroissance.
Donc,
le critère de distance, c'est un élément majeur, et mon collègue député de Saint-Jean, à plusieurs occasions,
il a demandé au ministre de dire ce serait
quoi, une distance raisonnable, une distance raisonnable pour qu'un emploi
soit trouvé — peut-être que, si le ministre nous le disait déjà, ça
nous aiderait, ça nous aiderait, peut-être que ça apaiserait certaines de nos préoccupations — mais
certainement la distance mais aussi la compréhension du
circuit. Je vais vous donner très concrètement... et les groupes qui
m'ont remis leurs documents pour la Montérégie, pour Longueuil font référence à une femme qui demeurerait à
Saint-Hubert et qui devrait occuper un emploi à Brossard. Ce n'est pourtant
pas très loin, mais les moyens de transport,
les mécanismes de transport public ne communiquent pas du tout entre Saint-Hubert
et Brossard, il faut revenir au métro Longueuil, il faut repartir, et donc
c'est des délais très, très importants et c'est vraiment, donc... même dans
des régions urbaines comme Longueuil mais, imaginons, dans des régions plus
éloignées où on peut avoir des distances importantes
à parcourir. Et, très souvent, bien,
ces candidats à un emploi, bien, ils ne possèdent pas de véhicule, et le réseau de transport est
souvent déficient ou inexistant. Alors, là aussi, peut-être que le ministre
pourrait nous permettre d'avoir un peu plus de détails éventuellement sur
comment on va réussir à faire ça, mais j'aurais aimé qu'on puisse permettre à l'Ordre des travailleurs sociaux de nous donner
d'autres exemples de comment, sur le terrain, certaines choses qui nous
semblent assez évidentes se traduisent par des obstacles insurmontables pour
l'accès à un emploi et pour le maintien à un emploi lorsqu'on est un
prestataire de l'aide sociale.
Un
des éléments qui est également soulevé, ce sont les mesures d'accompagnement,
et je sais que le ministre a certainement
l'intention... il en a parlé, qu'il y aurait des mesures d'accompagnement. Moi,
je veux juste donner l'exemple de l'ampleur, de l'importance de
certaines mesures d'accompagnement.
J'ai
rencontré, dans un organisme qui est dans ma circonscription, qui s'appelle les
Batifoleries, une dame qui correspond, je crois, aux personnes qu'on
veut aider, une dame qui était à la troisième génération comme prestataire de l'aide sociale et qui avait dit à sa petite
fille de six ans : On va s'en sortir, on va changer. Cette dame, elle
était, depuis six mois, dans cet organisme de réinsertion sociale, qui
offre, entre autres, des cours de couture mais qui offre aussi beaucoup de formation sur la valorisation et sur,
bon, une façon d'aborder les femmes qui va leur permettre d'avoir plus confiance en elles, et cette dame a réussi à
obtenir un emploi dans un Tim Hortons. Et elle m'a raconté comment elle
avait été fière d'avoir cet emploi-là, et,
donc, ça faisait six mois qu'elle était dans cet organisme d'accompagnement...
mais trois générations de prestataires de l'aide sociale, et comment elle était
fière de porter son uniforme de Tim Hortons et
de pouvoir dire à sa fille qu'elle avait un emploi et qu'elle se sortait de ça,
et je pense que c'est ça qu'on recherche, mais, dans la réalité, elle
s'est retrouvée, au jour 3 de son emploi, laissée toute seule dans le Tim
Hortons et elle a... c'était une plus petite
boutique, là, ce n'était pas un gros magasin, mais elle est restée là, et, son
manque de confiance en elle, pour
toutes sortes de raisons, quand elle m'en a parlé, elle s'est mise à pleurer et
elle m'a dit : Écoutez, je le voulais tellement, cet emploi-là, mais je n'ai pas été capable de le garder, et,
quand je suis revenue à la maison, ça faisait un échec supplémentaire
dans ma vie, ça faisait une situation supplémentaire. Et donc elle avait besoin
de plus que six mois.
Alors,
moi, je veux juste dire que l'accompagnement, c'est un accompagnement soutenu qui peut prendre plus qu'un an, qui peut prendre plus que deux ans, parce que
souvent c'est 30 ans de discrédit, d'abandon que ces femmes ont vécu ou que des hommes vont avoir vécu et dans un
contexte où souvent il y a des enfants dont on doit prendre soin, en
plus. Donc, la durée suffisante, selon les besoins, et,
malheureusement, le projet de loi n° 70, en tout cas, dans la version
qu'on a, ne garantit aucunement comment
l'État va garantir que la durée d'accompagnement va être suffisante. Et je ne
pense pas qu'on puisse la déterminer de façon... c'est quelque chose qui
doit être individualisé, cette durée d'accompagnement là, qui doit être modulé
en fonction de chaque prestataire, de chaque personne qu'on souhaite aider.
Je
vous dirais — j'essaie
de terminer — les
prestations insuffisantes... déjà, vous savez, la menace de se faire
couper sa prestation, il faut savoir
qu'est-ce qu'on peut vivre... comment on peut vivre avec 623 $ par mois
actuellement au Québec, quel loyer on peut avoir, comment on peut
espérer faire une épicerie. Moi, dans Longueuil, je vais vous dire, on a 10 000 personnes qui ont besoin d'avoir
recours à des banques alimentaires. Ces gens-là sont triés, il faut qu'ils
présentent des preuves, ils doivent donner
10 $ pour avoir accès à un panier qui en vaut 200 $ dans lequel on
donne des aliments des quatre groupes
alimentaires. Alors, il y a quand même une vigilance, mais c'est une réalité
actuellement. Alors, comment on peut
laisser planer sur la tête de ces personnes le fait qu'on puisse couper leurs
prestations? Et, encore une fois, on ne parle pas de contrôler des abus. Il y a toujours des gens qui sont prêts à
frauder. Or, les fraudeurs, il faut les trouver. Mais c'est une minorité de fraudeurs. Et actuellement, dans
le projet de loi n° 70, on ne voit pas cette insistance pour
sanctionner, et surveiller, et contrôler
l'approche de gens qui veulent vraiment abuser du système, on ne le départit
pas de ceux qui sont victimes du système, de ceux qui n'ont pas eu le
bon jeu de cartes, au départ, dans leur vie. Alors, je pense qu'on doit être très, très vigilants. Et la mesure du
panier de consommation, eh bien, c'est un indicateur minimal et
largement reconnu de la pauvreté du Québec,
et donc, si on coupe la prestation d'aide sociale... et déjà, actuellement, les
prestations qui sont données, quand elles
sont complètes, ne permettent pas de rencontrer les besoins définis par la
mesure du panier de consommation.
Alors, pour toutes ces raisons, j'espère avoir
convaincu le ministre qu'il y aurait pertinence... ce serait une heure bien
investie de recevoir l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Hardy) : Merci, Mme
la députée de Taillon, pour votre intervention sur votre motion préliminaire.
Maintenant, je cède la parole à M. le ministre.
M. François Blais
M.
Blais : Alors, je remercie ma collègue pour sa suggestion. C'est un
organisme que je connais assez bien à cause de mes anciennes fonctions, notamment M. Leblond, que vous avez
probablement fréquenté aussi, vous, madame, pour vos anciennes fonctions. Donc, l'ordre a déjà déposé
un mémoire ici, je pense qu'on a eu l'occasion de le lire. Vous avez eu l'occasion de le lire aussi. Moi, je conseille,
là, que, si jamais il y a des arguments qui sont importants pour le projet
de loi, on puisse les utiliser nous-mêmes, ou encore nos collègues d'en face.
J'ai remarqué que, pour l'essentiel, là, de ses
remarques, ma collègue a beaucoup interpellé le projet de loi lui-même. Elle a dit : Écoutez, j'espère
qu'il y aura cet élément dans le projet de loi, j'espère que telle chose sera
là, ou ceci nous inquiète, on a hâte
de voir, etc. Donc, elle a interpellé à plusieurs reprises le projet de loi, et
la seule façon d'y voir clair, hein,
c'est, bien sûr, de procéder, de commencer, là, article par article, et on
pourra répondre, à ce moment-là, aux préoccupations,
là... dont je reconnais la légitimité, et j'ai même très hâte de pouvoir lui en
parler, là, aux préoccupations de ma collègue. Donc, je n'accorderai pas
mon consentement, là, à la motion.
Le
Président (M. Hardy) :
Merci, M. le ministre. Maintenant, je laisse la parole au député de Drummond—Bois-Francs.
M. Sébastien
Schneeberger
M.
Schneeberger :
Merci, M. le Président. Lors de la motion précédente, j'avais appuyé cette
motion pour les raisons que j'avais signifiées, surtout parce que je
pense que chaque groupe a le droit de venir plaider ou déposer un mémoire, là,
et exprimer ses commentaires, et j'avais aussi eu une crainte dont je ne peux
répéter, malheureusement, sur la motion elle-même, là, le but, peut-être.
Avec les
informations que j'ai actuellement... vous savez, quand on fait un projet de
loi, il y a toujours les groupes qu'on reçoit, chaque parti amène des
groupes ou convoque les groupes qu'il souhaite, et, avec les informations que
j'ai jusqu'à présent, les deux groupes mentionnés n'ont fait aucunement partie
des discussions.
Alors, moi,
j'aurais une demande du côté de l'opposition officielle : Pour quelles
raisons que ces groupes-là ne figuraient
pas parmi vos discussions avec le leader du gouvernement? Alors, pour ça, je
n'appuierai pas cette motion-là.
• (17 heures) •
Le Président (M. Hardy) : Merci, M.
le député de Drummond—Bois-Francs.
Maintenant, je cède la parole au député de Saint-Jean.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte :
Merci, M. le Président. Bien, moi, je vais aviser le député de Drummond—Bois-Francs qu'effectivement l'Ordre des
travailleurs sociaux est un groupe que nous avons demandé, hein, et nous avons
fait des démarches. Nous avons même fait une
conférence de presse avec ma collègue députée de Gouin justement pour faire
entendre ce groupe-là ici, à l'Assemblée
nationale, en commission parlementaire. Donc, ce n'est pas d'hier qu'on
demande que l'ordre soit entendu plus
particulièrement ici, en commission parlementaire sur le projet de loi
n° 70. Pourquoi? Bien, ma collègue députée de Taillon l'a mentionné
avec éloquence, c'est des gens qui sont sur le terrain mais qui ont une
approche différente.
On ne dépose
pas des motions pour déposer des motions ici aujourd'hui, on a choisi des
groupes qui sont très pertinents et
qui apportent une approche différente. Donc, dans le cas de mon précédent
collègue, le député de Rimouski, il a amené une motion pour un organisme d'une
circonscription en région qui a fait un mémoire très étoffé, qui aurait
pu nous amener une lecture, une appréciation très régionales et très locales du
projet de loi et faire en sorte qu'on puisse bonifier
le projet de loi au mieux en fonction des recommandations qui... eux, ont à
côtoyer des gens et des organisations sur
le terrain. Dans le cas de ma collègue députée de Taillon, l'ordre, bien, c'est
des gens qui sont sur le terrain d'une autre façon, c'est des gens qui sont dans des CLSC, dans les hôpitaux, qui
sont un peu partout, qui sont dans des organismes aussi, dans certains cas, dans des institutions
publiques en santé et en services sociaux mais aussi qui travaillent peut-être
même à leur compte, dans certains cas, ou
qui ont un passage, un passé... par le passé, côtoyé des gens et qui, dans le
cas des travailleurs sociaux et des travailleurs conjugaux... donc, qui vivent
les réalités des familles.
On l'a
mentionné tantôt, que pour les familles ça a un impact, ce projet de loi là. On
l'a vu pour les enfants mais aussi
pour les conjoints et conjointes. Dans le cas où un conjoint... les deux sont à
l'aide sociale mais que le conjoint, pour plein de raisons, ne peut accepter l'emploi dit convenable, bien, qui
sera pénalisé? Parce que le montant d'aide sociale est recompté si c'est
un couple. Ce n'est pas un chèque individuel, là, il y a une comptabilité de
couple à l'aide sociale, donc, ce qui fait
en sorte que, dans ce cas-ci, ce serait la femme qui serait aussi pénalisée sur
le fait que l'homme ne peut pas accepter
l'emploi pour x raisons. Ou, inversement, si la femme ne peut accepter l'emploi
dit convenable parce que ça ne fonctionne pas avec les horaires pour les
enfants, parce qu'elle n'a pas de place en centre de la petite enfance, pour plein de raisons ou elle n'a pas les moyens
d'aller en garderie privée, donc, ça a un impact sur le couple, M. le
Président.
Donc,
d'entendre l'ordre en question, moi, je crois que ça amène une touche
différente au projet de loi, et nous n'avons pas, à moins que... moi,
j'ai assisté aux mêmes consultations que tous, mais je n'ai pas entendu de
groupes parler de ces réalités-là. Pourquoi?
Parce que le meilleur groupe pour en parler, dans ce cas-ci, c'est l'ordre des
travailleurs sociaux et conjugaux du Québec.
M. le
Président, je pourrais mentionner quelques éléments de leur mémoire brièvement,
parce que l'objectif, c'est de faire
entendre ces groupes d'une façon ou d'une autre, donc, pour faire en sorte que
leurs recommandations, leurs points de vue
soient ici entendus à l'Assemblée nationale et que ça soit enregistré pour
faire en sorte qu'on puisse y référer, parce que les paroles s'envolent, mais les écrits restent. Donc, tout ce qu'on
dit ici est enregistré, et ça permet, dans l'analyse du projet de loi
maintenant mais aussi dans un futur, lorsque nous aurons à valider la loi,
bien, que tout le monde puisse avoir entendu ce que nous avons dit ici.
Donc, M. le
Président, l'ordre mentionne,
bon : «...[le] projet de loi va à contresens de l'esprit et de la lettre
de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, pourtant adoptée
à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 2002.» Ça, on en a parlé, là, beaucoup
durant l'adoption de principe, c'est un aspect important. Il faudra que le ministre
nous explique comment il voit que le projet
de loi n° 70 ne va pas à
l'encontre de la loi n° 112, donc, la loi qui vise à lutter contre la pauvreté et l'exclusion
sociale. Bon, eux prétendent que «le ministre fait fausse route avec [le] projet de loi,
qui non seulement ne permettra pas d'atteindre les objectifs
qu'il s'est donnés, mais plongera encore plus profondément les personnes visées dans la pauvreté — avec
tout ce que cela comporte au plan humain et psychologique — alimentera
les préjugés à leur égard et accentuera le fossé des inégalités sociales toujours
en croissance au Québec». Comme ma collègue l'a mentionné, puis il faut le
mentionner, le rappeler, dans leur mémoire, ils mentionnent que «la pauvreté et
l'insuffisance de revenus constituent un
déterminant majeur de la santé physique et mentale et il importe de
considérer les dépenses pour les contrer comme un investissement social».
Donc, le
précédent ministre... pas le ministre actuel, mais le précédent ministre
a mentionné qu'avec Objectif
emploi le gouvernement allait économiser 50 millions de dollars. Donc, si
tel est le cas, bien, on peut supposer qu'avec cet élément-là il y aura une augmentation des coûts de santé et de services sociaux, donc
ça ne serait pas une vraie économie. Et il faut savoir : Est-ce
que c'est vraiment
l'objectif de faire économiser pour économiser ou d'aider
les citoyens du Québec? Donc, toute la question se
pose, M. le Président.
«Ce qui
retient d'abord notre attention — toujours l'ordre qui parle — est le
fait que le projet de loi fait porter sur les épaules des personnes visées une problématique sociale, économique
et politique qui pourtant les dépasse largement. En effet, le projet de loi n° 70 laisse entendre que les personnes
visées ne font pas suffisamment "d'efforts" pour intégrer le marché du travail, passant ainsi sous silence les
responsabilités de l'État face à ces citoyens. Or, cette opinion ne
tient pas compte du fait que le marché du travail est peu accueillant pour les
personnes ayant une certaine vulnérabilité.»
Un peu plus loin : «Cela dit, nous sommes
d'avis que le projet de loi n° 70 contribue au rétrécissement des responsabilités de l'État envers les personnes
plus vulnérables et s'ajoute à toutes ces mesures déjà annoncées et en
vigueur depuis les dernières années :
effritement de l'offre générale de services sociaux, mesures d'austérité et
coupes budgétaires, réduction du financement en santé publique et au
niveau des organismes communautaires, fermeture des centres de [désintox],
réduction de la lutte au décrochage, coupes dans les centres de la petite
enfance, etc.»
Le «etc.»,
là, on l'a mentionné précédemment, hein, on pourrait parler des centres... des
groupes d'employabilité féminins, on
pourrait parler des carrefours jeunesse-emploi, on pourrait parler même... si
on étire la sauce un peu, on pourrait parler des forums jeunesse, qui,
en abolissant les FRIJ, les fonds régionaux d'investissement jeunesse, avaient
des programmes, avaient des activités, des
éléments structurants pour aider les jeunes justement dans les communautés,
et cet argent-là pouvait faire en sorte qu'on puisse restimuler des jeunes et
qu'on évite qu'ils se rendent à l'aide sociale.
Donc,
l'ordre estime que «le projet de loi n° 70 fait fi des constats
scientifiques». Et, bon, une citation ici qui nous est faite : «Jamais, depuis l'existence de
l'aide sociale en 1969, un gouvernement n'est allé aussi loin dans le
"workfare" et [dans] la négociation des droits fondamentaux des plus
pauvres de notre société. [...]Il faut mettre en parallèle les coupes de 50 millions de dollars à l'aide
sociale et les centaines de millions offerts aux médecins.» Je l'ai mentionné,
ça, tantôt... pas l'histoire des médecins,
ça, on en a parlé beaucoup en période de questions, on y reviendra aussi, mais,
dans le cas du 50 millions, la question se pose. «Pourtant, il existe des
exemples, au Québec, [des] mesures efficaces pour progresser dans la lutte
contre la pauvreté; nous pensons aux mesures de soutien aux familles et au
programme de garde en
petite enfance, lesquels ont eu des effets mesurables sur le revenu des
familles, plus particulièrement les ménages monoparentaux.» On pourrait
ajouter à ça Ma place au soleil, M. le Président, j'en ai parlé précédemment,
un beau programme mis en place par le Parti
québécois à l'époque et qui aujourd'hui est de moins en moins recommandé
dans les centres locaux d'emploi, si on peut
dire ça ainsi, M. le Président, parce que, bon, les ressources ne sont pas là,
sur le terrain.
Donc, je pourrais
aussi dire : «Il importe également de prendre en compte le contexte
économique dans lequel s'inscrit le projet de loi n° 70, un contexte où le
Québec vit une stagnation au niveau de la création d'emplois, particulièrement
dans les régions ressources.»
Donc, M. le
Président, je pourrais continuer la... il y a plusieurs autres bons arguments
dans leur mémoire, le mémoire de l'ordre,
mais je terminerais sur la question de... ils mentionnent, et à juste titre, et
je l'ai mentionné, l'importance de
tenir de véritables consultations sur le plan de lutte contre la pauvreté et
l'exclusion sociale, qui se fait actuellement en parallèle du projet de loi n° 70. Mais pourtant le projet de loi
n° 70 aura des impacts significatifs sur la pauvreté, et ces
impacts-là ne seront pas nécessairement positifs, mais ils seront négatifs, si
vous avez bien suivi mon intervention, du moins selon notre lunette, M. le Président.
Donc,
pour toutes ces raisons, nous aurions aimé, au Parti québécois, que le
gouvernement accepte d'entendre l'Ordre
des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.
J'ai compris de l'intervention du ministre
que le ministre n'était pas favorable à cette motion. Donc, M. le Président, à
moins que le ministre ait changé d'idée,
j'ai dit tout ce que j'avais à dire. J'aurais pu en dire plus, mais, dans
l'objectif de pouvoir poursuivre les travaux, je vais m'arrêter ici pour
l'instant.
• (17 h 10) •
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il
y a d'autres intervenants concernant la motion présentée par la députée
de Taillon?
Mise aux voix
Il
n'y a pas d'autre intervenant, donc nous allons procéder aux voix pour cette
motion. Est-ce que cette motion est adoptée?
M.
Turcotte :
Est-ce qu'on peut faire un vote par appel nominal?
Le Président (M.
Hardy) : Oui, on va faire un vote par appel nominal.
Le Secrétaire :
Donc, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Girard (Trois-Rivières)?
M. Girard :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Fortin (Pontiac)?
M. Fortin
(Pontiac) : Contre.
Le Secrétaire :
M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Hardy (Saint-François)?
Le Président (M.
Hardy) : Abstention.
Le Secrétaire :
Rejeté.
Le Président (M. Hardy) : Rejeté. La
motion est rejetée.
Une voix :
...
Le Président (M. Hardy) : M. le
député de Saint-Jean, vous avez une autre motion à nous présenter?
M.
Turcotte : Oui.
Le Président (M. Hardy) : Si vous
voulez la lire, s'il vous plaît.
Motion proposant d'entendre le Collectif autonome
des carrefours jeunesse-emploi du Québec
M.
Turcotte : M. le
Président, «il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de
procédure, la Commission de l'économie et du
travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi
n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la
formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des
consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le
Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec».
Le
Président (M. Hardy) : Donc, nous allons suspendre quelques instants
pour en faire des photocopies. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 13)
(Reprise à 17 h 15)
Le Président (M. Hardy) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux.
Des voix : ...
Le
Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je cède la parole à M.
le député de Saint-Jean. Comme vous le savez, à titre d'auteur, vous
avez 30 minutes pour nous la présenter.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Donc, nous demandons, aujourd'hui, à ce moment-ci, d'entendre
le Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec.
Nous avons
entendu le Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec et, lors de cette
présentation-là, nous avons eu, donc, une présentation de la vision du
réseau. Dans la structure des carrefours jeunesse-emploi au Québec, il y a une autre organisation, qui est le
Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec, qui regroupe
quand même un certain nombre important de
carrefours, environ 25 membres maintenant — donc, sur 110 carrefours, un peu moins que le quart des carrefours
jeunesse-emploi — et qui
sont, bon, de différentes régions et qui ont déposé un mémoire assez
intéressant, avec des pistes de réflexion.
Pourquoi que nous avons ciblé cet organisme-là?
C'est, bien entendu, parce que le ministre... pas tant le ministre actuel plutôt que le précédent ministre a
beaucoup mentionné, a beaucoup mentionné que c'était pour les jeunes que ce projet de loi là était présenté, donc,
parce qu'il voyait, dans les 6 200 jeunes, là, qui sont actuellement des
nouveaux demandeurs par année, donc, comment
on pouvait les aider. On a aussi cru bon de rencontrer ce groupe, cette
organisation-là, parce qu'à plusieurs
occasions tant le précédent ministre que le ministre actuel ont fait référence
justement au fait que les carrefours
jeunesse-emploi n'étaient... ou autres organismes, là, n'étaient pas capables
d'atteindre les objectifs qu'on leur
fixait, dans le sens où ils n'étaient pas capables de recruter les gens, les
nouveaux demandeurs à l'aide sociale et faire en sorte que ces gens-là
puissent avoir l'accompagnement voulu par Objectif emploi.
Donc, après
avoir entendu à plusieurs reprises le ministre actuel et l'ancien ministre
sur : Oui, mais comment, vous, les organismes, vous pouvez faire
pour rejoindre ces gens-là... on vous soumet une liste de 100 jeunes, il y en a
juste deux sur les 100, jeunes, qui
acceptent la rencontre, ça ne pas d'allure, ça fait que c'est pour ça qu'il
faut les obliger... donc, embarquer,
là, dans un parcours, dans un processus et dans Objectif emploi. Donc, c'est
comme ça que ça s'appelle. Donc, étant donné que le collectif des
carrefours jeunesse-emploi, dans son mémoire, et, bon, dans toute la
littérature entourant le mémoire, a développé une approche intéressante et a
développé, justement, des pistes de réflexion qui pourraient alimenter le ministre et qui pourraient faire en sorte que le
ministre et le gouvernement pourraient atteindre les mêmes objectifs, donc l'objectif de faire en sorte
que le plus grand nombre de jeunes possible ne se rendent pas à l'aide
sociale, donc, pas parce qu'on les empêche, mais parce que ces jeunes-là
pourraient avoir trouvé un emploi ou avoir retourné aux études, finir leur
secondaire ou avoir un diplôme d'études professionnelles, etc., M. le
Président...
Donc, dans
leur mémoire, le collectif mentionne... bon, disons, ils rappellent un sondage
récent qui a été mené pour le compte
de la Fondation Lucie-et-André-Chagnon qui a démontré que 50 % des
Québécois considèrent qu'ils sont pauvres ou ont peur de le devenir. Ça, c'est la moitié de la population, M. le
Président. Le même sondage révélait que la majorité des Québécois, 61 %, croient que la
prévention de la pauvreté est d'abord une responsabilité collective et
67 % considère que, collectivement, nous n'en faisons pas assez à
ce sujet.
Quand
on parle des banques alimentaires — j'en ai parlé, M. le Président, précédemment — bien, on parle de ça, là, hein, de comment prévenir la pauvreté, mais aussi
comment la guérir, et aussi, je pourrais même dire, des fois, on a
toujours l'image qui nous revient, là, donc,
d'enseigner aux gens à pêcher plutôt
que de leur donner le poisson. Donc, comment on fait pour les aider?
Bien, ça, M. le Président, pour les jeunes, bien, les carrefours
jeunesse-emploi font un excellent travail à ce sujet-là. Ça, il n'y a pas
personne ici, je pense, qui peut remettre en question le travail des carrefours
jeunesse-emploi dans ce domaine-là.
• (17 h 20) •
Ce sondage
établit clairement que la pauvreté constitue une préoccupation réelle de la population québécoise.
Il ajoute aussi : «Car, si ce programme vise au premier chef la réduction
du nombre de prestataires d'aide sociale — on parle d'Objectif emploi — l'objectif social qui est poursuivi est de
réduire la pauvreté en faisant en sorte que le plus grand nombre
possible de personnes puissent acquérir leur autonomie financière, brisant
ainsi le cercle vicieux de l'aide sociale.»
On a souvent parlé de ça, là, hein, que de père en fils ou de mère en fille,
là, de génération en génération, les gens se retrouvaient sur l'aide sociale. Donc, comment on fait pour briser ça
si c'est vraiment le cas, si ça existe pour... il y a des chercheurs qui se questionnent là-dessus. Sûrement
que le ministre a sa propre lecture de cette analyse-là, bien
évidemment.
«Les
carrefours jeunesse-emploi du Québec constituent un formidable instrument pour
agir de façon concrète en prévention
de la pauvreté. En effet, il est généralement reconnu que de donner accès à un
emploi constitue la manière la plus efficace, la plus durable et la plus
productive de sortir quelqu'un de la pauvreté.»
Ça,
là-dessus, le ministre est tout à fait d'accord avec cet élément-là, je
suppose, parce que c'est l'objectif d'Objectif emploi de faire en sorte que les gens se trouvent un emploi. La
meilleure façon de lutter contre la pauvreté : se trouver un
emploi. Le ministre hésite un peu, là, mais il aura le temps, il a 30 minutes
pour intervenir suite à mon intervention.
«Cela est
d'autant plus vrai que les clientèles âgées entre 16 et 35 ans, puisque c'est à
cet âge que l'on acquiert les aptitudes et l'expérience nécessaires à la
mise en place des conditions qui favoriseront la poursuite d'une carrière stimulante et productive et qui permettront de
bien gagner sa vie et celle de sa famille. Depuis leur création en 1995,
les carrefours jeunesse-emploi du Québec ont démontré qu'il était possible, en
offrant des services flexibles et adaptés aux
réalités du milieu local, d'agir de façon efficace auprès des jeunes pour les
soutenir dans l'acquisition [des attitudes] et les accompagner sur le
chemin de l'emploi.»
Ça aussi, M.
le Président, c'est important. On en a parlé lorsque nous avons entendu le
Regroupement des Auberges du coeur du Québec. Ils ont mentionné, bon,
les fameux jeunes qui arrivent avec leurs sacs verts, etc. Ils sont rendus à un certain moment de leur vie où, ces jeunes-là,
malheureusement, même si on les accompagne, là, sur le plan personnel,
là, puis un à un pour se trouver un emploi, ils ne sont peut-être pas rendus, à
ce moment-là de leur vie, aptes ou... la tête
à se trouver un emploi. Ils ont plutôt la tête à régler des problèmes, donc,
peut-être, toxicomanie, dépendance, jeu, etc. Je sais que le ministre va dire : Oui, dans Objectif emploi, on
parle de l'accompagnement pour la recherche d'emploi, on parle de l'accompagnement pour la formation et on
parle d'autres types d'accompagnement. M. le Président, moi, je crois qu'on n'a pas besoin d'un projet de loi pour
accompagner nos jeunes à s'en sortir. On a des organisations, il y a les
centres locaux d'emploi, il y a les carrefours jeunesse-emploi, il y a les
organismes communautaires. Si tout le monde était financé justement et
correctement pour respecter sa mission... Parce que, dans ce cas-ci, on en
parle. Les carrefours jeunesse-emploi n'ont
plus de financement à la mission. Donc, c'est en fonction des jeunes qui sont
ciblés ou que le centre local
d'emploi réfère aux carrefours jeunesse-emploi qu'ils sont aidés. Donc, les
autres jeunes ne peuvent pas être aidés, M. le Président.
«Les causes qui font en sorte que ces jeunes
"échappent au système" sont diverses : [de divers] enjeux de
persévérance scolaire, difficultés d'intégration, soutien familial insuffisant,
problèmes de santé physique ou mentale, troubles d'adaptation, etc.»
Bien, c'est
sûr qu'avec toutes les coupes que nous avons eues en éducation ce n'est pas
surprenant que ce problème-là
s'aggrave et que, nous le verrons... parce que les, conséquences des coupures
en éducation, M. le Président, on ne les a pas vues encore. Ce sera plus tard que nous allons les voir, parce que
ça prend quand même quelques années. Ces jeunes-là, là, qu'on a mis de
côté, bien, on va voir les conséquences, et il faudra y voir et agir en ce
sens.
«Or, pour prévenir efficacement la pauvreté et
réduire le nombre de personnes qui reçoivent de l'aide sociale, notre expérience démontre qu'il faut certes
travailler avec les prestataires, mais aussi en amont auprès de tous les
jeunes, afin d'éviter que ceux-ci ne se rendent au dépôt d'une première
demande.»
Donc,
conditions gagnantes découlant de l'expérience des carrefours jeunesse-emploi : accueil universel de tous les jeunes dans un espace neutre et rassurant dans
lequel les jeunes se reconnaissent, se sentent valorisés et surtout non
jugés. Ça, là-dessus, là, j'ai... on l'a revenu beaucoup dans le débat de la
réforme des carrefours jeunesse-emploi, là, mais c'est important que, le jeune qui se présente dans un carrefour,
la seule question qu'on peut lui poser, c'est : Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour t'aider? Donc, moi, je crois,
M. le Président, beaucoup, beaucoup en ça. Puis, malheureusement, là, ce n'est plus le cas, bon, ils doivent passer
par le centre local d'emploi. On a vu que tous les... pas tous les jeunes
sont au fait de l'existence des centres locaux d'emploi. On a vu la fermeture de certains centres locaux d'emploi. Donc, la distance à parcourir est plus
grande avant de pouvoir avoir accès à leurs carrefours jeunesse-emploi.
Un autre
point : la flexibilité des mesures d'accompagnement et la capacité à
offrir un encadrement personnalisé. Ça
aussi, c'est important, la flexibilité. Même si les centres locaux d'emploi font un travail extraordinaire, et je leur
lève mon chapeau, M. le Président, ils n'ont pas la même flexibilité que les carrefours
jeunesse-emploi pouvaient avoir ou aimeraient pouvoir avoir.
La mise en
place de stratégies visant l'acquisition des compétences préparatoires à
l'emploi comme la ponctualité, l'assiduité, l'alphabétisation,
l'acquisition d'expériences, tout ça, là, M. le Président, on en a parlé
précédemment, faire en sorte que le jeune,
bien, qu'il soit capable... Puis, pour nous, ça semble être évident que, le
matin, on doit se lever à l'heure, puis se
préparer, puis avoir une attitude positive, puis tout ça, mais, pour certains,
là, de ces jeunes-là, pour plein de raisons, là, bien ce n'est pas acquis
encore. Puis, bien, les carrefours pouvaient permettre de faire ça.
Capacité d'innover localement en mettant en
place des projets adaptés aux réalités du milieu qui diffèrent passablement d'une région à l'autre en raison des
facteurs économiques, sociaux et territoriaux. Bien là, ça aussi, M. le Président, une de nos craintes que nous avons dans la perte
de pouvoirs... dans la perte de l'autonomie d'Emploi-Québec : Est-ce
que chaque région va pouvoir garder
sa couleur, hein, et sa saveur? Ça, on l'a dit, les carrefours jeunesse-emploi ont ça, mais est-ce
que les centres locaux d'emploi vont pouvoir continuer à le faire?
Le travail en concertation avec les autres organismes
du milieu, par exemple, en matière de santé, de logement, d'intégration culturelle. Quand on n'a plus de
financement à la mission pour les carrefours jeunesse-emploi, bien,
c'est difficile de faire de la concertation
avec d'autres organismes, surtout quand il ne reste plus grand organismes
locaux et régionaux, il n'y a plus de CLD, il n'y a plus de forums
jeunesse, les groupes d'employabilité féminins, il en reste juste 16, puis, bon, ils sont menacés — on pourrait faire la liste, là... — les CRE — conférences régionales des élus — les
FQIS n'existent plus... ou pratiquement plus. Donc, ça pose problème. Et la
mobilisation des jeunes autour de projets attrayants
et stimulants afin de favoriser la participation libre et volontaire des jeunes
aux mesures d'intégration à l'emploi.
Donc, M. le
Président, plusieurs éléments qui ont été mentionnés. Je pourrais mentionner...
bon, il ajoute, là, des éléments à
souligner, je vais terminer là-dessus, M. le Président. Bon, certains éléments
du programme énoncés dans le projet
de loi méritent d'être soulignés, en particulier : bon, la durée de la
participation du programme à 12 mois — bon, il se questionne là-dessus; adapter la situation aux
participants, donc faire en sorte que le plan d'intégration à l'emploi
soit adapté à chacun des jeunes — le ministre, précédemment, dans ses
remarques préliminaires, a parlé d'une rencontre, il a parlé d'une rencontre pour établir les forces, les
faiblesses de chacun, puis tout ça, moi, je crois que ce n'est pas en
une rencontre qu'on va pouvoir arriver à cet
objectif-là, M. le Président; la mise en place de mesures incitatives à la
participation sous la forme d'allocations à la participation et en permettant
le remboursement des dépenses liées à la participation au programme, ce qui est
susceptible de stimuler la participation volontaire au programme; plusieurs
autres éléments.
Donc, je
pourrais continuer la nomenclature, parce que c'est des inquiétudes et c'est
des éléments qui questionnent beaucoup le collectif, notamment tout ce
qui est la politique de «workfare», qu'on a parlé quand même à plusieurs occasions.
Le ministre prétend que ce n'est pas de type «workfare», son projet de loi.
Nous aurons
l'occasion de débattre de ça dans l'étude détaillée du projet de loi que nous
commençons, mais quand même, M. le
Président... puis je vais terminer là-dessus pour vrai, parce que le collectif
des carrefours jeunesse-emploi du Québec,
c'est une expérience concrète, c'est des solutions qui nous sont amenées, intéressantes, et surtout, M. le Président, surtout parce que le projet
de loi vise principalement les jeunes, hein, le retour des jeunes sur le marché du travail ou, du moins, l'entrée des jeunes sur le marché du
travail, dans ce cas-là, et pour toutes les raisons que j'ai mentionnées ici,
mais que j'ai mentionnées lors de l'adoption
de principe, que mes collègues ont mentionnées, mais aussi que j'ai
mentionnées dans le débat de la réforme des
carrefours jeunesse-emploi, toute la question que c'est différent d'une région
à l'autre, que les 16-17 ans ne sont pas aidés dans une région puis ils
sont aidés dans une autre.
Je pourrais
parler des jeunes qui sont aux études qui ne sont pas aidés dans... M. le
Président, vous savez, il y a très
peu de régions au Québec que tous les jeunes, sans exception, peuvent être
aidés, hein, très peu. J'en ai quelques-unes en tête, là, des régions,
il y a l'Outaouais, il y a Laval. Je ne suis pas sûr qu'il y en ait bien, bien
d'autres, là, M. le Président... peut-être
une ou deux autres, mais, pratiquement, peu d'autres régions au Québec ont cet
avantage-là. Je dis «avantage», parce que, pour les régions qui ne
peuvent pas aider les 16-17 ans ou qui ne peuvent pas aider des gens qui ont un emploi précaire mais qui voudraient
avoir un meilleur emploi... ou des jeunes qui sont aux études mais
qu'ils voulaient avoir un emploi, bien,
inévitablement, ces jeunes-là, bien, s'ils ne sont pas aidés par le carrefour
jeunesse-emploi, bien,
inévitablement, risquent de se retrouver sur l'aide sociale. Et là le ministre
va dire : Bien, il faut les aider. Si on les aide en amont, bien on
n'aura pas ce problème-là.
Donc, M. le
Président, sur ce, je vais terminer là-dessus et en souhaitant que le ministre
accepte d'entendre ce groupe ici, en commission parlementaire.
• (17 h 30) •
Le Président (M. Hardy) : Merci, M.
le député de Saint-Jean. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre.
M. François Blais
M.
Blais : Merci, M. le Président. Donc, je voudrais rappeler à mon
collègue, là, qu'il y a déjà eu une rencontre, en commission
parlementaire, avec le réseau québécois des carrefours jeunesse, c'est quand
même 80 %, hein, de tous les carrefours jeunesse, là, au Québec.
Une voix : ...
M.
Blais : Autour de 80 %, je crois, ou à peu près. C'était
d'ailleurs une rencontre qui était assez intéressante. Moi, je m'en souviens bien parce que, dans l'échange,
on a pu voir qu'il y avait vraiment des zones de rapprochement possible,
là, avec le projet de loi n° 70 une
fois que j'ai eu l'occasion de clarifier certains points. On demeure, nous, au
ministère, en contact avec les deux
organisations qui représentent les carrefours jeunesse-emploi, d'autant plus
qu'on essaie de voir jusqu'à quel point, là, ils peuvent collaborer avec
nous éventuellement, là, dans le cadre du projet de loi n° 70.
Donc, pour
ces raisons-là — donc, on
a essentiellement déjà rencontré un groupe, on a pu avoir le mémoire
aussi comme dans les autres cas, on a pu
lire le mémoire, là, du second groupe — je ne donnerai pas mon consentement.
Puis je voudrais rappeler à mon collègue qu'il a terminé un peu ses propos en
disant qu'il faut intervenir en amont, ce avec quoi je
suis entièrement d'accord. Le principe d'Objectif emploi, parce que finalement
ici on ne parle que d'Objectif emploi,
là — je pense
que le Parti québécois a des difficultés avec Objectif emploi — le principe, c'est vraiment d'agir en
amont, hein? Si on voulait, du jour au
lendemain, réaliser les mêmes mesures pour l'ensemble de la clientèle de
l'aide sociale, je pense qu'on aurait plusieurs difficultés puis on pourrait
s'entendre assez facilement ensemble sur ces difficultés-là.
Mais là c'est vraiment d'agir en amont, parce que c'est des personnes qui, en
principe, là, n'ont jamais été à l'aide
sociale et qui ont une capacité d'employabilité qui est très élevée... de
retourner en emploi, plutôt, qui est parmi les plus élevées.
Donc, pour
toutes ces raisons, parce qu'on revient toujours sur... le fond étant qu'il y a
les préoccupations de la part de nos
collègues du Parti québécois, la seule façon de progresser dans la discussion,
bien sûr, c'est de regarder ce projet de
loi article par article, et on verra bien, là, si ces préoccupations-là sont
légitimes ou pas. Moi, je pense qu'on peut éclaircir beaucoup de choses mais en commençant, bien sûr,
nos travaux et en mettant fin, là, au retard, là, sur lequel on
s'applique pour le moment.
Donc, je ne donnerai pas mon consentement à
cette motion, M. le Président.
Le Président
(M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je passe la parole à
M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger :
Aucun commentaire, M. le Président.
Le Président (M. Hardy) : Vous ne
prenez pas votre droit de parole? Parfait.
Mise aux voix
Donc, est-ce
qu'il y a d'autres interventions, intervenants sur cette motion? S'il n'y a pas
d'autre intervention...
M.
Turcotte : Bien,
j'aimerais passer au vote.
Le Président (M. Hardy) : Oui.
M.
Turcotte : Vote par
appel nominal.
Le Président (M. Hardy) : Vote
nominal?
M.
Turcotte : Oui.
Le Président (M. Hardy) : Parfait.
Donc, M. le secrétaire.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte : Pour.
Le Secrétaire : M. Blais
(Charlesbourg)?
M. Blais : Contre.
Le Secrétaire : Mme Sauvé
(Fabre)?
Mme Sauvé : Contre.
Le Secrétaire : M. Girard
(Trois-Rivières)?
M. Girard : Contre.
Le Secrétaire : M. Fortin
(Pontiac)?
M. Fortin (Pontiac) : Contre.
Le Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet : Contre.
Le Secrétaire : M.
Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
Le
Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?
Le Président (M. Hardy) :
Abstention.
Le Secrétaire :
La motion est rejetée.
Le Président (M.
Hardy) : La motion, elle est rejetée.
Est-ce qu'on a
d'autres motions préliminaires? M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Est-ce qu'il y a un problème? Je n'ai pas le droit de déposer des motions?
Le Président (M.
Hardy) : Non.
M.
Turcotte :
J'ai comme entendu une réaction, là.
Le Président (M.
Hardy) : Non, non, c'est correct.
Motion proposant d'entendre le
Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec inc.
M.
Turcotte :
O.K. Bon. Bien, moi, j'ai une autre motion, M. le Président :
«Il
est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi
visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations
particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le Syndicat de
la fonction publique et parapublique du Québec...»
Le
Président (M. Hardy) : Donc,
nous allons suspendre quelques instants pour distribuer les feuillets de la
motion.
(Suspension de la séance à
17 h 36)
(Reprise à 17 h 39)
Le
Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci de votre dépôt de motion préliminaire, M. le député de Saint-Jean. Je vous
rappelle que vous avez 30 minutes pour nous la présenter. À vous la
parole.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte :
Merci, M. le Président. Donc, ce n'est pas sans surprise que nous avons déposé
cette motion. Comme je l'ai dit, durant
l'intermission, si on peut appeler ça comme ça, la
pause, hein, la suspension, au ministre, nous avons
fait un point de presse avec notre députée,
la collègue... ce n'est pas la nôtre, là, et elle appartient à tout le
monde, là, surtout à ses citoyens de sa circonscription, mais la députée de Gouin,
et nous avons demandé d'entendre un certain nombre de groupes.
Donc,
on considère que certains groupes auraient dû être entendus dès le départ puis finalement
on aurait peut-être eu... Si on les
avait entendus dès le départ, on aurait passé moins de temps à répéter ça et à
faire ces motions-là. Mais on veut au moins avoir... pour l'occasion qui
nous est présentée selon le règlement de l'Assemblée nationale, qu'on puisse
débattre de la pertinence ou non d'entendre ces groupes-là.
Dans le cas qui nous
occupe, de cette motion-ci, M. le Président, c'est le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec. Pourquoi? Parce que nous avons entendu
pratiquement toutes les centrales syndicales du Québec, hein? Nous
avons entendu la CSN, la FTQ et la CSQ, mais nous n'avons pas entendu le Syndicat de la fonction publique du Québec.
Pourtant, M. le Président, le syndicat de la fonction publique du Québec et
parapublique, bien, représente, parmi leurs membres, des agents qui auront à
appliquer le projet de loi n° 70 et qui vivent la réalité, au quotidien, du projet... bien, qui vivront au
quotidien le projet de loi n° 70 mais, du moins, auraient pu nous amener
des éclairages nouveaux et intéressants,
tellement que le ministre l'a lui-même mentionné. Il a dit, dès son arrivée
comme ministre... bien, son retour comme
ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, il nous l'a mentionné ici, à
l'Assemblée nationale, qu'il rencontrait,
qu'il visitait des centres locaux d'emploi pour rencontrer des agents de...
bon, socioéconomiques, là, le nom exact. Bon, c'est des agents d'aide
sociale, on s'entend, là.
• (17 h 40) •
M. Blais :
D'aide à l'emploi.
M.
Turcotte : Bien ça, d'aide à l'emploi, c'est le volet plus
emploi, mais vous, vous rencontrez des agents d'aide à l'emploi, c'est
que je comprends. Donc, ils sont quand même représentés par le Syndicat de la
fonction publique, là, le point est le même.
Et donc, ces agents-là, le ministre les
rencontre pour avoir leurs lumières et leur son de cloche sur le terrain, comment, bon, ça pouvait s'articuler, etc. Donc,
moi, je me suis dit : Si le ministre rencontre des agents, on peut
rencontrer les nôtres
dans nos circonscriptions. Moi, comme porte-parole... mon collègue de la
Coalition avenir Québec peut rencontrer un peu partout à travers le Québec... on est porte-parole, hein, de
l'opposition ou de la deuxième opposition, on peut faire ce travail-là.
Mais on aurait trouvé pertinent que le syndicat puisse venir ici pour nous
présenter, justement, ce qu'ils entendent de leurs membres et eux comme
syndicat.
Si on n'avait
pas entendu aucun syndicat, c'est une chose, mais là on en a entendu trois qui
sont touchés par une partie du projet
de loi, qui est la Commission des partenaires du marché du travail. Donc,
comment le ministre peut justifier qu'un autre syndicat touché par un
autre volet du projet de loi, lui, il ne peut pas être entendu ici, en
commission parlementaire? D'autant plus que, les trois centrales, on les a
entendues, pas ici, dans cette salle-là, mais l'autre côté, dans l'autre salle, La Fontaine, et elles
étaient, toutes les centrales, toutes en même temps, là. Et on a eu plus de
temps qu'à l'accoutumée, là, au lieu d'avoir
45 minutes, nous avons eu, là, une heure quelques... là, je pense que c'était,
bon, le double du temps, au fond, puis on a eu même deux fois des tours
de parole, là. On a fait un premier tour, après ça on a eu un deuxième tour de... moi, je n'avais jamais vu ça,
là... trois mandats que je suis ici, là... je n'avais jamais vu ça, mais
on l'a fait pour trois centrales syndicales.
Pourquoi
qu'on n'a pas ajouté une quatrième chaise à côté pour ajouter le Syndicat de la
fonction publique du Québec? Je ne
sais pas, je ne sais pas. Pourtant, le mémoire du Syndicat de la fonction
publique du Québec est très éloquent, très
éloquent, aborde plusieurs aspects. Je pourrais vous parler de la question, du
fait que... pas l'autonomie, je n'aime pas ça dire... bien, aborde la question de l'autonomie d'Emploi-Québec, ça,
c'est une chose, bon, ça, ils abordent la question, ils effleurent la question de la Commission des
partenaires du marché du travail, mais plus ou moins. Mais c'est sur, au
fond, le fait que pour les agents il y
ait... j'essaie de me rappelle le terme exact, là, M. le Président, qu'il y a
une certaine... comment qu'on dit...
bien, ça va me revenir en le disant, en l'expliquant, là... faire en sorte que
les agents actuellement ont un pouvoir discrétionnaire — discrétionnaire, j'aurais dû y penser, c'est
la période des discrétionnaires au ministre actuellement — mais donc le pouvoir discrétionnaire des agents qui auront une possibilité
pour eux d'évaluer si l'emploi est convenable ou les raisons que la personne a manqué une rencontre,
pour... enfant malade, tempête de neige, bon, il n'avait pas les bottes
pour l'hiver, bon, peu importe, puis tout
ça, ce qui fait en sorte que ça laisse beaucoup de place au discrétionnaire, et
les agents, bon, se questionnent comment ils vont gérer ça et comment ça
va être appliqué, cette question-là. Donc, ça, ça aurait pu être intéressant.
Ils abordent
toute la question de... j'en ai parlé beaucoup,
là, mais je vais le citer, tant qu'à l'avoir sous les yeux, là, de Ma
place au soleil, que j'ai parlé à plusieurs occasions. Ils le mentionnent à la
page 12 de leur mémoire, ce n'est pas
moi qui l'invente, là. On a entendu un groupe, dans les consultations particulières, qui ont mentionné ça, et le ministre
avait comme paru surpris que ce programme-là n'existait pas. Bon, il avait
demandé au sous-ministre exactement qu'est-ce qu'il en est. Peut-être que,
lorsqu'on commencera l'étude détaillée, nous pourrons avoir des réponses à ce moment-là... ou, peut-être, après mon intervention
ici, le ministre voudra clarifier certains éléments sur Ma place au
soleil, mais ils le mentionnent, eux :
«Ce programme, destiné principalement aux jeunes mères chefs de famille
monoparentale, a été mis en place en
2000 — bon,
sous un gouvernement du Parti québécois, ça, c'est moi qui l'ajoute. L'approche
était au départ basée sur une démarche de réinsertion par la formation qui
prévoyait "un accompagnement soutenu durant la formation, [et] la mise en commun des ressources gouvernementales,
institutionnelles et, dans certains cas, communautaires".
L'intervention des agentes et des agents est réalisée dans une perspective
globale qui tient compte des "obstacles systémiques — comme
la garderie et le transport — et des difficultés personnelles"
auxquels les personnes sont confrontées.
Cette mesure, appréciée des participantes, est unanimement reconnue comme un
bon programme. Malheureusement, un
tel programme est en voie de disparition au Québec. Par exemple, en Gaspésie et
au Bas-Saint-Laurent, ce programme
n'est pratiquement plus offert. Au CLE de Baie-Comeau, le nombre de personnes
participantes est passé de 30 en 2011
à huit en 2015. Un peu partout, nos membres d'Emploi-Québec observent que les
programmes et mesures axés sur
l'accompagnement sont en recul au profit des mesures à plus court terme et
orientées vers l'intégration rapide en emploi.»
Ça, c'est un
bout important, M. le Président, la dernière phrase, là, «l'intégration rapide
en emploi». «Intégration rapide en emploi» ne signifie pas «une
intégration durable en emploi».
Donc, M. le
Président, pour toutes ces raisons — vous pourrez lire le mémoire — nous aurions aimé entendre le
Syndicat de la fonction publique, d'autant plus que nous avons entendu d'autres
centrales syndicales et pas celle-ci, et
celle-ci, elle est principalement touchée... du moins, certains membres du
Syndicat de la fonction publique sont touchés par le projet de loi et auraient pu nous amener un éclairage différent,
d'autant plus que le ministre nous a même avoué qu'il en rencontrait,
là, en visitant des centres locaux d'emploi, lui-même. Donc, ça doit être
effectivement pertinent, ce qu'ils ont à dire. Donc, sur ce, j'aimerais
entendre la réponse du ministre.
Vous êtes surpris, hein?
Le Président (M. Hardy) : Eh oui,
parce qu'il vous reste encore 21 minutes.
M.
Turcotte : Oui,
oui, mais on s'en garde pour les autres.
Le Président (M. Hardy) : Bon.
Parfait. Ça fait que je cède la parole à M. le ministre.
M. François Blais
M. Blais : Merci, M. le Président.
Ça va être à peu près les mêmes types de commentaire que j'ai faits plus tôt. On a déjà rencontré les grandes centrales
syndicales là-dessus, sur plusieurs éléments du projet de loi, on a eu
accès aussi à des mémoires. Ces mémoires-là,
là, sont déposés. Tous ici autour de la table, on peut aller puiser un
argumentaire.
Je rappelle qu'aussi dans ce que j'ai
entendu de mon collègue, encore une fois, le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec avait un certain nombre de craintes par
rapport au projet de loi. Je pense qu'on peut très bien disposer d'un certain nombre de ces craintes-là, là, en le
présentant, mais pour ça il faut progresser, il faut qu'on puisse
déposer le projet de loi et l'étudier article par article. On aura l'occasion
de dissiper ces craintes-là. Donc, je vais m'opposer, là, à la proposition, à
la motion.
Le Président (M.
Hardy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au
député de Drummond—Bois-Francs.
M. Sébastien Schneeberger
M.
Schneeberger :
M. le Président, le député de Saint-Jean émet beaucoup de commentaires
pertinents, bien entendu.
Moi,
de mon côté, j'ai rencontré quand même plusieurs groupes et puis je peux vous
dire des points qu'il faudrait améliorer, puis ça, c'est vraiment de
quoi qu'on pourrait regarder, approfondir, c'est les délais.
Quand une personne
qui est sur l'aide sociale demande de revoir son statut, pour peu importent les
raisons que ce soient, les délais sont
interminables — on
parle, des fois, des délais d'un an, 18 mois — et ça, malheureusement, ça, c'est des points vraiment qu'on pourrait se
pencher, parce que ces gens-là, durant cette période-là, malheureusement,
vivent avec un chèque de 623 $ par mois,
alors que, dans certains cas, probablement ces gens-là devraient avoir un chèque... ou ce qu'on appelle des contraintes temporaires et même, des fois,
permanentes. Et, durant ces mois qui passent, ce sont des personnes qui
continuent à vivre dans l'extrême pauvreté. Et, actuellement, tous ces gens que
j'ai rencontrés sont pas mal unanimes là-dessus,
c'est vraiment ces délais-là qu'il faudrait vraiment
remédier, et ça, je pense, ce seraient des bonnes discussions à avoir là-dessus.
Alors, c'était mon point.
Maintenant, pour ce
qui est de la motion, nous n'appuierons pas cette motion. Merci.
• (17 h 50) •
Le
Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Est-ce que nous avons d'autres interventions sur cette motion?
Mise aux voix
Si nous n'avons pas d'autre
intervention, je vais mettre la motion aux voix. Est-ce que cette motion est adoptée?
M.
Turcotte :
M. le Président, j'aimerais qu'on passe au vote par appel nominal.
Le Président (M.
Hardy) : Nous passons au vote par appel nominal.
Le Secrétaire :
Donc, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
Le Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Girard (Trois-Rivières)?
M. Girard :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Fortin (Pontiac)?
M. Fortin
(Pontiac) : Contre.
Le Secrétaire :
M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
Le Secrétaire : M. Hardy
(Saint-François)?
Le Président (M.
Hardy) : Abstention.
Le Secrétaire : La motion est
rejetée.
Le Président (M. Hardy) : Cette
motion est rejetée. Est-ce qu'on a d'autres motions préliminaires? M. le député
de Saint-Jean, vous avez une autre motion.
Motion proposant d'entendre le Réseau Solidarité
Itinérance du Québec et le Réseau d'aide aux
personnes seules et itinérantes de Montréal inc.
M.
Turcotte : M. le
Président, j'aimerais déposer la motion suivante :
«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de
nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entendre l'étude détaillée
du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure
adéquation entre la formation et l'emploi
ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières
et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le Réseau Solidarité
Itinérance du Québec (RSIQ) et le Réseau d'aide aux personnes seules et
itinérantes de Montréal ([le] RAPSIM).»
Le Président (M. Hardy) : Donc,
cette motion est déposée. Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 52)
(Reprise à 17 h 55)
Le
Président (M. Hardy) : Donc,
à l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Saint-Jean,
je vous rappelle que vous avez, à titre d'auteur, 30 minutes pour
nous présenter votre motion.
M. Dave Turcotte
M.
Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, cette motion inclut
deux organismes : un qui est
national, Réseau Solidarité
Itinérance du Québec, le RSIQ, communément appelé; et l'autre organisme, le
RAPSIM, qui est le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal.
Bon, le
RAPSIM, c'est sûr qu'effectivement, étant à Montréal, bon, ils vivent cette
réalité-là davantage. On le voit, on
le constate. Même, bon, mes collègues aujourd'hui... le député de Rosemont et
d'autres collègues ont fait une conférence de presse aujourd'hui — vous l'avez peut-être vu passer, là — pour demander un fonds d'urgence aux
organismes en itinérance, parce qu'on
le voit, qu'il y a de plus en plus de problématiques et de... la réalité, on le
voit qu'elle est criante, à Montréal.
Mais nous tenions quand même, oui... tenions quand même et aussi à entendre un
groupe qui est d'envergure nationale,
donc qui couvre la région de la Capitale-Nationale, qui couvre d'autres
régions. On le voit, hein, à la période de l'automne, habituellement, les nuits, il doit y avoir des sans-abri un
peu partout au Québec : à Longueuil, à Rimouski, etc. Bon, bien,
c'est parce qu'on voit une itinérance qui est de plus en plus présente dans
différentes régions du Québec, sous différentes formes.
Je pourrais longuement aborder cette
question-là, mais le groupe que mon collègue de Rimouski a mentionné précédemment lors de sa motion, Action populaire
Rimouski-Neigette, avait un bout de leur mémoire justement sur la forme de l'itinérance à Rimouski, comment c'est différent
qu'à Montréal, donc, bon, vie dans les autos, etc. J'ai rencontré des groupes aussi à Saint-Rémi, en Montérégie, bon,
bien, ce n'est pas la même chose qu'à Montréal, mais c'est une forme différente. Et nous croyons qu'il y aura une
hausse des cas d'itinérance s'il vient que le gouvernement à appliquer...
parce qu'on ne le connaît pas, le règlement.
Tout ça, là, on n'aurait peut-être pas passé autant de temps à ces questions-là
si on avait eu le règlement ou des
éléments du règlement puis avoir, bon, les distances, etc., mais aussi la
hauteur de la sanction.
Donc, quand
l'ancien ministre parlait d'une sanction de plus de la moitié du chèque d'aide
sociale... bien, inévitablement, la personne ne sera même pas capable de
se payer un loyer. Si elle n'est pas capable de se payer un loyer, bien elle sera à la rue. Si elle est à la
rue, elle est une itinérante. Donc, d'entendre deux groupes qui oeuvrent
sur le terrain, qui ont une expérience terrain des choses.
Je pourrais
vous parler du RSIQ. Dans leur mémoire, ils mentionnent : «Paradoxalement,
alors que le ministre s'apprête à
mettre en place un programme d'employabilité coercitif, des programmes
volontaires et mieux adaptés aux personnes en situation ou à risque
d'itinérance tels qu'Alternative jeunesse et PAAS Action sont abolis ou
réorientés. Rappelons que l'année dernière
une personne assistée sociale sur trois a participé volontairement à de tels
programmes, et ce, en dépit des compressions et restrictions dans ces mêmes
programmes.»
Donc, ça
démontre qu'il y a une volonté, quand même, des gens de se reprendre en main,
d'embarquer dans le marché du
travail, de faire un retour... ou d'y entrer, mais ça prend une véritable
volonté ou, du moins, une aide présente de la part du gouvernement, donc
financer les organismes communautaires, etc., mais aussi la proximité des
services.
Donc, nous considérons, M. le Président, que ces
deux organismes-là pourraient nous apporter un éclairage différent, parce
qu'ils n'ont pas été entendus, malheureusement, mais dans leurs mémoires
beaucoup d'éléments permettaient, là, justement, là, sur la question du
logement... On n'a pas beaucoup parlé du logement, de la question du logement, la salubrité
des logements, M. le Président, mais ça a un impact. Les tarifs d'électricité,
l'alimentation, les vêtements, l'hygiène personnelle, tout ça, là, ça a
un coût, puis, avec le chèque actuel d'aide sociale, c'est difficile d'arriver
à ça.
Donc, M. le Président, c'est pour ça que nous
avons fait cette motion pour entendre le RSIQ et le RAPSIM.
Le Président (M. Hardy) : Merci, M.
le député de Saint-Jean. Compte tenu de l'heure...
Une voix : ...
Le Président (M. Hardy) : La parole
au ministre. Il reste une minute, M. le ministre.
M. François Blais
M. Blais :
Oui. Donc, je ne donnerai pas mon consentement, pour des raisons que j'ai déjà
invoquées. On a déjà le mémoire, puis tout ça, on connaît déjà leur
argument. Donc, les collègues pourront l'utiliser. Je pense qu'on devrait
procéder à l'étude article par article.
Le Président (M. Hardy) : Merci, M.
le ministre. Bien, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux
sine die.
(Fin de la séance à 18 heures)