(Onze heures trente-cinq minutes)
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, à l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de
l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 70, Loi visant
à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à
favoriser l'intégration en emploi.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par M. Turcotte
(Saint-Jean) et M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par M. LeBel
(Rimouski).
Auditions (suite)
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. Cet avant-midi, nous entendrons les organismes suivants : le
premier organisme, le Comité consultatif de
lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Ce sera suivi de la Table de
concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes.
Voilà.
Alors, comme
les groupes précédents, il y a quelques semaines, vous avez 10 minutes de
présentation, par la suite nous
allons passer à la période de questions. Alors, vous vous présentez et vous
présentez la personne qui vous accompagne, et les 10 prochaines
minutes vous appartiennent.
Comité consultatif de
lutte contre la pauvreté
et l'exclusion sociale (CCLP)
M. Gravel (Richard) : Alors,
bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre, mesdames messieurs de la
commission. Mon nom est Richard Gravel, je suis le président du Comité
consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Je suis
accompagné de Mme Jeannine Arseneault, secrétaire générale du comité.
Dans un
premier temps, le comité consultatif tient à remercier la Commission de
l'économie et du travail de l'avoir invité
et de nous donner l'occasion d'exposer notre point de vue et nos
recommandations quant au projet de loi n° 70.
Au niveau du
comité consultatif, le Comité consultatif de lutte à la pauvreté et l'exclusion
sociale est un organisme public
institué en vertu de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion
sociale et composé de 17 membres nommés par le gouvernement. Ce sont des hommes et des femmes venant de
plusieurs régions du Québec et représentant divers secteurs de la société, notamment des organismes
qui oeuvrent à la lutte contre la pauvreté, y compris des personnes qui vivent en situation de pauvreté. Le comité est
aussi composé de représentants des milieux patronaux, syndicaux, municipaux,
communautaires ainsi que de représentants de la fonction publique.
Le premier rôle du comité consultatif est de
conseiller le ministre responsable dans l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des actions entreprises
dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et
l'exclusion sociale. Le comité joue
également un rôle de vigie relativement aux politiques gouvernementales pouvant
avoir un effet sur la pauvreté et
l'exclusion. C'est dans ce cadre que s'inscrit le présent mémoire, aussi notre
analyse du projet de loi s'est principalement
attardée aux modifications proposées à la Loi sur l'aide aux personnes et aux
familles, plus spécifiquement à l'instauration du programme à
l'intention des primodemandeurs à l'aide sociale.
Tout d'abord,
il faut souligner que, de l'avis du comité, les objectifs visés par le
programme Objectif emploi sont louables,
et nous y adhérons. En effet, il est très important d'aider et d'accompagner
les personnes dès leur entrée à l'aide sociale
pour éviter que leur situation ne se détériore davantage. Le comité est
d'accord avec l'intention du soutien et de l'accompagnement des nouveaux
prestataires d'aide sociale afin de les aider à se sortir le plus rapidement
possible de leur situation. On le sait, plus une personne demeure longtemps à
l'aide, plus il devient difficile de s'en sortir.
Selon notre
analyse, toutefois, l'instauration de mesures obligatoires et de pénalités pour
le refus de participer à des mesures
peut avoir un effet négatif très important sur les personnes déjà en situation
de vulnérabilité. Le comité questionne l'efficacité de réduire une aide
financière qui est déjà insuffisante pour assurer la couverture des besoins de
base des personnes. Nous croyons qu'une
telle pénalité compromet leurs chances de s'en sortir et a un impact sur leurs
conditions de vie et de santé.
• (11 h 40) •
Le comité est aussi préoccupé par le niveau
actuel des ressources dans les centres locaux d'emploi. Il faut s'assurer que le nouveau service ne soit pas
offert au détriment d'autres personnes qui en ont aussi grandement
besoin. On pense aux personnes qui sont
présentement à l'aide sociale mais aussi aux personnes qui sont sans soutien de
revenu public.
Malgré le caractère éminemment social des difficultés d'intégration au
marché du travail de nombreux groupes de la population, on accorde
souvent plus d'importance aux causes attribuables aux caractéristiques et aux
lacunes des personnes qu'à celles qui
découlent du marché du travail. Les statistiques le confirment : plus les
taux de chômage baissent, plus le
nombre d'assistés sociaux diminue. En ce sens, s'il est vrai que les nouveaux
demandeurs sont en bonne partie des jeunes et des personnes immigrantes,
ne devrait-on pas d'abord se questionner sur leurs difficultés d'intégration à
l'emploi? Le taux de chômage des jeunes est le double de celui de la population
en général. Celui des personnes immigrantes arrivées il y a moins de cinq ans,
pour sa part, excède le double de celui des personnes nées au Canada.
Quant
aux jeunes issus de familles elles-mêmes de l'aide sociale, le comité est
d'accord qu'il est tragique de les voir ainsi commencer leur vie. Par contre, nous croyons qu'il y aurait lieu,
au lieu de parler de transmission de dépendance à l'aide sociale d'une génération à l'autre... Il
faudrait se demander si ces jeunes et leurs familles ont vraiment reçu le
support dont ils auraient eu besoin plus tôt dans leur vie. Les enfants pauvres
sont issus de familles pauvres.
Plus
spécifiquement, le comité tient à signaler qu'il s'oppose aux
mesures coercitives, et plus particulièrement aux pénalités qui y sont associées, parce que c'est
nier les droits humains fondamentaux. Nous croyons que de telles mesures
sont injustes, non nécessaires
et souvent peu concluantes en termes
de résultat. Elles risquent de
détériorer la situation de personnes déjà très vulnérables.
De telles mesures ne
sont pas nécessaires. Les statistiques l'attestent, les personnes veulent se
sortir de l'aide sociale et font des efforts, et ce, malgré des obstacles importants
qui leur barrent trop souvent la route. Pour preuve, année après année des dizaines de milliers de prestataires participent
volontairement à des mesures d'intégration en emploi. Emploi-Québec
rencontre ses cibles de participation de prestataires. En 2014‑2015, c'est
116 000 prestataires des programmes d'aide financière qui ont
participé à des mesures d'intégration en emploi. 21 000 étaient des jeunes
de moins de 25 ans. Par exemple, le programme Alternative jeunesse, un
programme pour les jeunes, un programme volontaire,
a à chaque année entre 5 000 et 8 000 jeunes qui se sont
inscrits de façon volontaire, c'est approximativement le nombre de
jeunes qui font une première demande d'aide sociale chaque année.
Ces mesures sont
aussi injustes parce qu'elles sont en contradiction totale avec le respect de
la dignité des personnes et de leur libre
choix. On préjuge que les prestataires choisissent librement l'aide sociale, on
reporte sur eux l'entière
responsabilité de leurs difficultés d'intégration et d'emploi. Dans les faits,
le principal facteur est le marché du travail
lui-même. Chaque année, environ 40 % des ménages qui deviennent
prestataires le font parce que leurs prestations d'assurance-emploi se
terminent, c'est des gens qui travaillaient, qui n'ont pas le droit aux
prestations d'assurance chômage, ou
strictement parce que leur revenu de travail est trop faible. On le voit, de
nombreux prestataires sont en fait des travailleurs pauvres à statut
précaire.
Les
mesures punitives sont souvent inefficaces. Selon plusieurs spécialistes, de
telles mesures n'ont pas tenu les promesses, notamment d'intégrer les
personnes dans des emplois durables. Plusieurs juridictions appliquent déjà des
mesures de contrepartie, mais il faut être
prudent en s'appuyant sur des comparaisons internationales.
L'environnement est très différent,
notamment en ce qui concerne nos règles du marché du travail, les pratiques des
employeurs, le niveau des salaires mais surtout le montant des
prestations accordées aux individus.
Au
Québec, des mesures obligatoires assorties à des pénalités ont déjà été
appliquées sans résultat probant, elles ont été abandonnées. Selon un
rapport datant de 2005, la ministre de l'époque expliquait que, malgré
l'existence d'obligation de parcours, les
jeunes, la plupart des participations continuaient de se faire sur une base
volontaire — donc, plutôt que d'aller dans les parcours
obligatoires, ils continuaient sur une base volontaire — que
les jeunes qui étaient assujettis aux
mesures obligatoires étaient souvent des mesures de moins longue durée et que
la participation correspondait moins aux besoins des jeunes. Il faut se
rappeler que présentement, en 2014‑2015, 60 % des jeunes prestataires qui
ont participé à des mesures d'emploi n'avaient aucun diplôme.
Le
comité est également préoccupé par l'impact d'une approche punitive sur la
qualité de l'accompagnement. Comment,
dans les conditions, une relation de confiance peut être établie entre l'agent
d'aide à l'emploi et la personne qu'il souhaite aider?
L'une
des clés de la réussite de l'intervention, c'est d'offrir aux personnes la bonne mesure et un accompagnement adéquat tant
et aussi longtemps qu'elles en ont besoin. Il faut aussi que le marché du
travail soit prêt à accueillir ces personnes.
Par ailleurs, tout plan d'intégration à l'emploi doit être convenu avec les
personnes concernées en tenant compte des particularités et de leurs
besoins mais aussi de ses intérêts, de ses aptitudes et de ses valeurs. Obliger
une personne à initier une démarche ou
d'accepter un emploi qui ne lui convient pas, c'est lui nier son droit à la
liberté de sa personne reconnu à l'article de la Charte des droits et
libertés.
Le Président (M.
Cousineau) : En conclusion.
M. Gravel
(Richard) : En conclusion, le comité réitère, dans le fond, dans ses
principales recommandations, de ne pas
mettre en application l'obligation des participants au programme Objectif
emploi et les pénalités qui en découlent, de mettre en oeuvre le volet accompagnement et soutien des demandeurs
d'aide sociale, d'investir davantage dans les mesures d'aide à l'emploi pour maintenir l'offre de services et de
réaliser des études d'impact sur la santé et le bien-être des personnes
visées relativement aux pénalités qui lui seraient imposées.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, merci...
M. Gravel
(Richard) : En conclusion, le comité réaffirme que le revenu décent
est un préalable à l'intégration en emploi. Tel que proposé dans son
avis sur les cibles d'amélioration des revenus...
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. Dufour. Vous pourrez
revenir sur ces points durant la période de questions.
Alors, voici la
ventilation du temps pour les questions : pour le gouvernement, M. le
ministre, 13 min 30 s, l'opposition officielle, huit minutes, la
deuxième opposition, 5 min 30 s, puis la députée indépendante,
trois minutes. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Blais :
D'abord, merci d'être là. Merci aussi pour votre présentation, qui est très
claire.
J'ai des questions
d'éclaircissement. Vous avez commencé, disons, très, très fort en disant :
On risque de stigmatiser, hein, davantage les gens dans le programme. J'aimerais
comprendre où est la stigmatisation exactement, où est le risque.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Dufour.
Une voix :
...
M. Blais :
Est-ce que j'ai parlé assez fort? Alors, j'aimerais vous entendre sur le risque
de stigmatisation, comment ça peut sa produire.
Peut-être,
pour vous donner une chance, je vous donne un exemple. Aujourd'hui, si
quelqu'un refuse, aujourd'hui, une
aide, un parcours quelconque, bon, il a le droit de refuser, est-ce qu'il est
plus stigmatisé aujourd'hui que si on lui demande d'adhérer à un parcours, de participer à une activité, à un
cheminement pour faire évoluer... J'essaie de voir exactement où est la stigmatisation, parce que
Dieu sait qu'il y en a déjà beaucoup. Donc, je ne vois pas vraiment, là,
par quel mécanisme il y a une stigmatisation qui est produite.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Dufour.
M. Gravel
(Richard) : M. Gravel.
Le Président (M.
Cousineau) : Excusez. M. Gravel? Ah bon! J'ai une erreur
ici.
M. Gravel
(Richard) : Ce n'est pas grave.
Oui,
bien, en fait, c'est sûr que... En fait, c'est beaucoup en lien avec les
pénalités qui peuvent être... qui seraient imposées. Alors, c'est clair, pour nous autres, que, pour pouvoir
entreprendre une démarche d'emploi, il faut avoir un minimum de revenu d'établi, pour pouvoir, dans le
fond, entreprendre de façon positive la démarche d'emploi. Le comité consultatif a déjà établi des cibles de revenus
qui devraient être admissibles, au niveau des cibles qu'on devrait
atteindre, et, dans le cadre des prestations
qui sont données présentement aux personnes, on n'atteint pas ces cibles-là.
Donc, dans ce cadre-là, on croit qu'il n'y a pas vraiment de marge où on
pourrait imposer une pénalité sans qu'il y ait un impact sur la qualité de vie
des personnes.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
• (11 h 50) •
M. Blais :
Et vous avez parlé de la question du choix, hein, donc ce n'est pas un choix
d'être à l'aide sociale. Qu'est-ce qui est un choix? Parce que ce n'est pas facile
à clarifier.
Je vous donne un exemple. Encore récemment, des
agents d'aide à l'emploi me disaient : Il y a des personnes
qui se présentent et qui nous disent d'avance : Il n'est pas question de
participer à quelque mesure que ce soit, «give me the money». O.K.? Est-ce
qu'elles font un choix, ces
personnes-là, quand elles refusent toute forme a priori, là, donc toute
forme... «just give me the money», hein? Est-ce qu'elles exercent un choix?
Le Président (M.
Cousineau) : M. Gravel.
M. Gravel (Richard) :
En fait, la question, si je comprends, là, le sens de votre question, c'est la
question : Est-ce que les personnes
font le bon choix au bon moment? Et est-ce qu'on préférerait que ces gens-là
fassent un autre choix, donc qu'ils
décident de participer à la mesure? Effectivement, on aurait tendance à croire
qu'on aurait avantage à ce qu'ils rentrent dans une mesure le plus
rapidement possible. Et, de façon claire, l'ensemble des intervenants qu'on a rencontrés, dans le cours des travaux qui ont permis
de rédiger ce mémoire-là mais aussi l'avis sur l'intégration à l'emploi...
et on a rencontré des agents d'aide sociale,
on a rencontré des agents d'aide à l'emploi, on a rencontré des
prestataires d'aide sociale, on a rencontré
aussi des gens qui travaillent dans des organismes d'employabilité, et ce qui
sortait de façon assez claire, c'est
que c'est clair qu'il y a des gens qui vont faire les mauvais choix. La
question, c'est : Est-ce qu'au moment où... Si on leur impose ce
qui, pour nous, est le bon choix, est-ce qu'on va avoir un résultat positif?
Et, quand on analysait l'objectif du projet
de loi, c'était de dire : Comment on peut accompagner plus de monde, être
le plus efficace possible?, et c'est
dans ce sens-là où on croit que toutes les démarches proactives... Et, quand on
parle d'être proactif, c'est d'aller au-devant des prestataires, leur offrir des services, regarder comment on
pourrait développer des stratégies pour les inciter, parce qu'on croit que d'intégrer, de participer à
des mesures, c'est encore le premier pas, dans le fond, pour les amener
vers le marché du travail. Et ça, on y croit très fort, et, dans ce sens-là, on
est d'accord.
La partie où on est
moins d'accord, c'est quand on impose une pénalité, que la personne vient de
façon... En fait, pour la personne pour qui la seule motivation est la peur de
perdre... la pénalité, est-ce que l'intervention va donner
des bons résultats? Ça, c'est une première partie. L'autre partie, c'est, comme
le risque de pénalité va être imposé à l'ensemble
des nouveaux prestataires, est-ce qu'il n'y a pas des prestataires qui vont
décider d'aller rapidement dans des
mesures... Et c'est un peu les conclusions qui avaient fait abandonner les
mesures obligatoires, c'est : Est-ce que les gens n'iront pas dans des mesures de réemploi peut-être plus rapides
et pas nécessairement la bonne mesure? Donc, est-ce que ce n'est pas une pression excessive à mettre aux personnes
qui de toute façon seraient allées dans des mesures pour essayer de rejoindre des personnes qui
effectivement... Et là il y a un problème, comment on fait pour motiver
les personnes à entrer dans les mesures,
mais pour pouvoir contacter ces personnes-là, et c'est dans ce sens-là où,
quand on fait l'analyse, on
dit : Bien, les mesures punitives, dans ce cadre-là, ne seront pas celles
qui vont donner les meilleurs résultats.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Donc, je pense que ce que vous avez dit, c'est qu'il ne faut
pas imposer un choix, hein, il me semble que vous avez dit ça, et, si on travaille avec la personne pour en arriver à
un plan... Parce que c'est ça, l'idée, hein, ce n'est pas... Certainement, on l'a mentionné la semaine
dernière, je le réitère, ce n'est certainement pas d'imposer des choses,
mais, si on veut faire en sorte que... on
définisse avec la personne un chemin qui le ramène vers sa priorité à lui,
priorité réaliste, qui sait, un retour aux
études, une qualification supplémentaire ou encore un retour à l'emploi quand
il sera prêt... Lorsque cette
personne-là a choisi, hein, puis l'a bien défini, on l'accompagne, on met les
ressources. Et, si la personne, et ce
qui arrive trop souvent, ne vient plus, abandonne, etc., on n'a plus aucun
moyen, hein, c'est ce que me disent les agents, on n'a aucun, aucun, aucun moyen. On a travaillé en amont avec eux, on a
mis des ressources à leur disposition, et, pour une raison inconnue, on ne les voit plus. On n'impose
pas un choix, là, hein, le plan avait été choisi, défini, etc., mais on
n'a pas aucun moyen pour faire en sorte que...
Parce que l'idée, ce n'est pas d'appliquer une pénalité, c'est d'avoir un
lien, là, disons, contractuel avec la personne.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Gravel.
M.
Gravel (Richard) : Oui, je
comprends. Écoutez, dans les consultations qu'on a menées, dans les
consultations qu'on a menées, la relance que
vous annoncez, là, qui serait sans doute une mesure intéressante, là, d'aller
au-devant des personnes, ne semble pas être fait de façon systématique,
et cette relance-là, qui pourrait être tout aussi faite de façon volontaire, là, dans le fond, de contacter les
personnes qui abandonnent, serait sans doute une des mesures qui
pourraient être envisagées, de relancer et
de, dans le fond, de questionner les personnes : Bien, pourquoi
tu as abandonné ta mesure? Est-ce que c'était mal adapté? Est-ce qu'on
peut te proposer... Dans le fond, l'idée, c'est comment on peut se mettre en position de relation d'aide plutôt qu'en
position de surveillance des individus, et ça, je pense qu'il y a du travail à
faire. C'est sûr que le ministère a à la fois à gérer le soutien du revenu, et
tout l'accompagnement à l'emploi, et toutes les ressources, ça fait une espèce
de dichotomie dans le travail. Ceci dit, je pense que ce n'est pas un défi qui
n'est pas relevable, mais je pense qu'il
faut qu'on se questionne sur nos pratiques quand on dit... bien, on relance les
personnes, dans quelle aptitude.
Nous autres, on a été beaucoup surpris, lors des
consultations, là, quand il y a eu les dernières réformes réglementaires
au niveau notamment des personnes qui
avaient au-dessus de 55 ans, auxquelles on avait offert un
accompagnement supplémentaire. Nous autres, on a questionné, au comité
consultatif, on a fait des travaux de suivi de
cette réforme réglementaire là, et une des choses où on est restés étonnés,
c'est que les prestataires étaient surpris de se faire relancer et proposer des mesures, et pas négativement,
positivement. Et c'est dans ce sens-là où, si la relance, si l'offre de
services du ministère, des agents d'emploi est faite de façon non associée à
une mesure punitive, il nous semble que ça va être plus efficace.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo :
...combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Cousineau) : Il vous reste 3 min 25 s.
M. Polo :
Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre exposé et vos
recommandations.
À
titre d'un des six élus pour la région de Laval, spécifiquement pour ma
circonscription, dans laquelle... Laval est de plus en plus une destination première pour les nouveaux arrivants,
O.K? De plus, ce que nous constatons également, pour une circonscription comme la mienne où près de 25 % à
30 % de la population est d'origine immigrante, vous l'avez mentionné, le taux de chômage, à la page 6 de
votre rapport, des personnes immigrantes de moins de cinq ans excède
du double celui des personnes nées au
Canada. J'ai retrouvé dans mes recherches un rapport de l'agence de santé et
services sociaux de 2012 qui mentionnait ou qui, en fait, partageait certaines
informations justement sur cette proportion du taux de... en fait des personnes prestataires de l'aide sociale sur le
territoire lavallois. De moins de trois ans ou de trois et moins, pour les personnes nées à l'étranger, il
s'agissait d'autour de 4,7 %, alors que la moyenne québécoise est
autour de 3,4 %. Et les personnes ayant
trois ans et plus, d'origine immigrante, nées à l'étranger, tournaient autour
de 28 %, alors que la moyenne québécoise est autour de 14,8 %.
Ma
question pour vous : En fonction de vos recommandations et dans le
contexte que je viens de vous présenter, comment, justement, vos moyens, les recommandations que vous partagez
permettraient de diminuer le recours de cette catégorie de la population
à l'aide sociale et ultimement à mieux intégrer le marché du travail? Parce que
vous faites allusion à une anomalie du
marché du travail principalement, c'est une de vos recommandations à même votre
rapport.
Le
Président (M. Cousineau) : M. Gravel.
M.
Gravel (Richard) : Bien, c'est clair qu'il y a des obstacles
structurels, et, dans ce sens-là, il y a des actions qui doivent être menées versus les entreprises. Je
pense qu'il faut sensibiliser les entreprises. Il y a encore, malheureusement,
des obstacles, il y a encore des employeurs
qui, sans que ce soit une volonté ferme de dire : On met des obstacles,
dans leur façon de recruter les personnes
vont, dans leurs questionnaires, éliminer certaines personnes, notamment au
niveau des personnes immigrantes, mais c'est vrai aussi dans d'autres
catégories d'individus. Et c'est dans ce sens-là où on dit... Et l'exemple est bon. C'est que, dans ce sens-là, on a avantage à travailler sur les déterminants du marché du travail pour permettre l'intégration. Ça donne... Si la
personne immigrante, elle est confrontée à aller chercher une... peut-être que ce n'est même pas sa responsabilité, là, pourquoi... À un
moment donné, tu arrives dans un
milieu, tu dis : Je suis scolarisé, j'ai fait des techniques de recherche d'emploi, mais qu'est-ce qu'on fait de plus si je n'arrive pas à trouver un emploi? Bien, il
faut aussi regarder quel est l'accueil du marché du travail.
• (12 heures) •
Le
Président (M. Cousineau) : Voilà. Alors, il reste 13 secondes, là, si... Donc, merci pour
cette présentation, pour ces
réponses. Je vais passer maintenant la parole à l'opposition officielle pour
huit minutes. M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Merci, M. le Président. Merci à vous de venir nous faire part de votre point de vue et merci pour la présentation
de votre mémoire, qui est très documenté, plusieurs éléments intéressants. Je vous écoute parler, je lis ce que
vous avez écrit, je vous écoute répondre aux questions du ministre, et plus je
vous écoute et plus je comprends que l'obligation est vraiment un problème, et
les sanctions qui en découlent. Au fond, si j'ai bien compris ce que vous mentionnez, vous n'êtes pas sûrs du résultat ou du
moins du maintien en emploi ou du maintien dans un programme de formation de personnes qui
auraient été obligées, sous peine de sanction, d'adhérer à un programme,
dans un premier temps.
Vous mentionnez aussi
qu'il y a des gens, des nouveaux demandeurs qui, pour vraiment ne pas perdre le
peu qu'ils ont... parce qu'il faut le dire,
puis vous le mentionnez, là, 623 $
par mois de chèque d'aide sociale, on s'entend, là, c'est vraiment peu, là, pour vivre, donc, de peur
de perdre la moitié de ce montant-là, vont embarquer dans un parcours un
peu tête baissée, sans vraiment qu'il y ait eu une analyse faite de vraiment
quelle est leur situation ou leur réel problème.
Parce que souvent, si quelqu'un se rend à l'aide sociale, ce n'est pas par
choix, là, c'est parce qu'il y a eu des difficultés soit personnelles,
professionnelles, de formation, peu importe, relationnelles, et cette
personne-là n'aura peut-être pas réglé ces
problèmes-là avant d'embarquer dans ce parcours d'employabilité là ou ce
parcours de formation là et pourrait subir un nouvel échec, un nouvel
échec, et faire en sorte qu'elle se retrouve encore plus bas qu'elle était au
préalable.
Est-ce que je
comprends bien vos interventions ou je vous mets des mots dans votre bouche que
vous n'avez pas mentionnés?
M.
Gravel (Richard) : Non, je pense que vous comprenez bien. Mais notre
souci est même un petit peu plus large dans
la mesure où on parle d'une population de primodemandeurs, donc des personnes
qui arrivent à l'aide sociale pour la première fois, et on va appliquer,
selon le projet de loi, des mesures, bien, punitives, coercitives à l'ensemble
de cette population-là. Ces gens-là,
présentement, sur une base volontaire, il y a un certain nombre, hein, assez
important de ces personnes-là qui
rentre de façon volontaire dans des mesures, et ils le font à leur rythme. Il y
a un certain nombre de ces personnes-là
qui sont aussi à l'aide sociale parce que c'est simplement un complément à un
revenu ou à un emploi qui ne leur
donne pas un revenu suffisant, donc ça, il y a une autre catégorie qui est là.
Et il y a sans doute un certain nombre de personnes qui refusent, disons-le, là, comme ça, pour les mauvaises
raisons, en fait qu'on pourrait juger qu'ils auraient tout avantage à
accepter une mesure d'emploi, mais qui ne le font pas parce qu'ils sont... en
fait parce qu'ils ne voient pas la pertinence.
Le danger, c'est que... La mesure punitive
va-t-elle avoir un impact sur ces personnes-là, qui sont une minorité — et là on est dans la gestion du
risque, là — comparativement
à venir changer la relation avec l'ensemble de la clientèle primodemandeurs?
Et, au comité, quand on faisait les discussions sur cette façon d'analyser là, bien
on arrive à la conclusion que de passer à
des mesures punitives ne donnera pas des avantages supplémentaires, mais qu'il y aura plus d'inconvénients, notamment par rapport à des clientèles qui n'ont pas
besoin d'avoir cette... qui participent aux mesures de façon volontaire.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Je vous entends, vous me parlez que les mesures
qui existent déjà... Vous avez parlé d'Alternative jeunesse, on pourrait parler de d'autres
programmes qui existent déjà, qui, à vos yeux, et selon les données qu'on
peut voir dans différentes études, démontrent que ces programmes-là ont amené
un certain résultat. Est-ce qu'on peut dire qu'il
y a aussi un plus grand taux, excusez-moi l'expression, de pérennité des gens
dans soit le marché du travail ou dans leurs projets éducatifs en
embarquant dans un tel projet qui est volontaire versus un projet qui est
imposé?
Le Président (M.
Cousineau) : M. Gravel.
M.
Gravel (Richard) : Bien, nous autres, on arrive à cette analyse-là,
effectivement, qu'il va y avoir une meilleure pérennité.
Ce qu'on souligne
aussi dans le mémoire, et ça, je pense que c'est important, vous savez, le
Québec était dans une situation où on était avec des taux de chômage élevés, la
situation de l'emploi s'est grandement améliorée. Les personnes, il y a de moins en moins de
personnes prestataires. Et, dans le bassin des prestataires, souvent il va y
avoir des personnes qui ont des
problématiques plus grandes. Par contre, il y a peut-être lieu de se
questionner à voir est-ce qu'on a adapté les mesures en fonction de ces
problématiques plus grandes là.
Quand
on a rencontré des agents, là, quand on travaillait sur l'aspect de notre avis
sur l'insertion en emploi, ce qui ressortait
beaucoup des agents qui travaillent là — on parle des agents des CLE — c'est la difficulté de référer, parce
que les clientèles ont des problématiques
plus importantes que l'offre de services, dans le fond, il y a beaucoup de
mesures de courte durée, et ça, ils
nous ont signifié qu'il y avait une problématique plus que la problématique de personnes
qui refusent de façon systématique des mesures d'emploi.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean, pour
1 min 40 s.
M.
Turcotte :
Ce que vous dites est très important, là. Malheureusement, on n'aura pas
beaucoup de temps d'échanger là-dessus, mais
c'est le bout le plus important qui a été dit, là, jusqu'à maintenant, je
crois. On est en train de tenter de mettre un plasteur, excusez-moi
l'expression, là, sur un problème.
Quand
on voit qu'il y a de moins en moins de gens à l'aide sociale au Québec, mais
que ces gens-là font face à des
problématiques beaucoup plus grandes que par le passé, ou du moins ceux qui
avaient des problématiques plus... soit ont embarqué en emploi, ou etc.,
est-ce que vous sentez qu'il y a vraiment, avec Objectif emploi, une aide qui
va être apportée pour régler ces problématiques-là plus lourdes, exemple
problèmes d'analphabétisme, problèmes sociaux, familiaux, de dépendance, etc.?
M.
Gravel (Richard) : Bien, moi, je pense que... Par rapport à Objectif
emploi, ce qu'on analysait, c'est que d'être proactif au niveau de l'ensemble des prestataires, pas primodemandeurs
mais de l'ensemble, est une démarche importante, tu sais, il faut être au-devant, proposer des alternatives. Vous savez,
la motivation des gens à entrer dans une mesure, ce n'est pas linéaire,
hein, il y a comme des opportunités. Et c'est un peu pour ça qu'on a des
difficultés avec l'aspect coercitif, parce que, dans le fond, c'est comment on
offre la bonne mesure à la bonne personne mais au bon temps, au moment où, lui,
c'est propice de pouvoir intégrer, pour avoir le meilleur résultat.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. Gravel. Je
vais passer maintenant la parole au représentant du deuxième groupe
d'opposition pour 5 min 30 s, M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Merci beaucoup, M. le Président. Juste avant,
j'aimerais préciser. Tout à l'heure, vous parliez du programme Alternative jeunesse et vous
mentionniez qu'il y avait entre 5 000 et 8 000 personnes qui
fréquentaient, qui avaient pris, en tout cas...
M. Gravel
(Richard) : Oui, annuellement, ça variait en...
M.
Schneeberger :
O.K. Et vous avez dit que c'est la majorité, si j'ai bien compris.
M. Gravel
(Richard) : En fait, ce qu'on dit, c'est que c'est le même nombre de
personnes qu'on vise à aller contacter présentement, à peu près.
M.
Schneeberger : O.K. Parce que, moi, les chiffres que le
ministère nous dit ou le ministre nous dit, c'était 25 % seulement.
Alors là, on n'est pas sur la même longueur d'onde, là, c'est pour ça que je
voudrais juste préciser ça. Je ne vous dis pas de... faire le procès
aujourd'hui là-dessus, mais j'aimerais quand même préciser, là, c'est
important.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Arseneault.
• (12 h 10) •
Mme
Arseneault (Jeannine) : Bien, je peux dire, c'est parce qu'en
fait, dans les statistiques officielles du ministère, on regarde, c'est 6 000 à 8 000 participants par
année. C'est sûr qu'il y en a qui peuvent être peut-être sur un an et
demi, tu sais, ce n'est pas nécessairement la première fois, là, ça fait que,
quand ils calculent le nombre de participants
une année, il y en a des nouveaux, mais il y en a qui sont de l'année
précédente aussi. Ce n'est pas des programmes
sur six mois, ça peut être plus long, là. Ça fait que c'est probablement pour
ça que les chiffres ne concordent pas tout à fait, là.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député.
M.
Schneeberger : O.K.
Vous parliez du terme d'obligation. En
tout cas, je ne veux pas revenir
là-dessus parce qu'on en parle presque tout le temps, l'obligation, pas
l'obligation. Par contre, quand vous dites : Il faudrait peut-être mieux
suivre les jeunes ou donner le besoin, vous parliez d'investir dans des programmes
ou mieux investir. C'est quelle suggestion que vous nous donnez? C'est quoi,
les suivis; la majorité, les besoins? Les gens qui vous parlent, où est le
besoin le plus important?
Le Président (M.
Cousineau) : M. Gravel.
M.
Gravel (Richard) : Oui,
bien, en fait, ce qui ressortait beaucoup, puis moi, je veux revenir là-dessus, le
volet proactif accompagnement, dans Objectif emploi, nous semble une clé qui est porteuse, ça,
je pense qu'il faut le dire, aller au-devant des personnes, leur offrir des services.
L'autre
élément, quand on parle de réinvestir, c'est que, d'une part, on ne veut pas
que dans un nouveau... l'ajout de ce programme-là
vienne faire du déplacement, parce
que le panier de services d'Emploi-Québec est quand même limité.
Et le
troisième élément qui nous apparaît important, c'est que, dans un contexte où on a des
clientèles qui ont des problématiques, mettons, plus importantes ou qui cumulent
des problématiques, on n'est plus simplement dans aider
les personnes à relever des problématiques d'employabilité, de faire des C.V., mais il faut avoir une intervention au niveau des comportements, au niveau de l'acquisition des
compétences, donc c'est des mesures qui devraient être de plus longue durée, là.
M.
Schneeberger : Merci. Selon
vous, c'est quoi, les garanties, au niveau du projet de loi, que
l'accompagnement... comme l'ancien
ministre ou le nouveau ministre l'a dit aussi, mais l'accompagnement au niveau
des personnes qui ont un besoin
supplémentaire, pas des personnes qui pourraient intégrer le marché du travail
demain matin, les personnes qui ont des
besoins particuliers, que ce soit au niveau psychologique ou autres? Moi,
actuellement, là, je n'ai aucune assurance à ce niveau-là. Pourquoi? Parce que c'est les organismes communautaires qui
rentrent en action dans ce domaine-là, puis ça, bien, il n'y a pas rien qui me dit que ça va se faire, là. Parce que je
crois en la bonne volonté du ministre, pas de problème, mais, une fois que la loi est passée, comment ça
va se mettre en marche, tout ça? Parce que moi, je parle à mes
organismes communautaires, puis actuellement ils ne peuvent pas nous le dire.
Le Président (M. Cousineau) :
M. Gravel.
M. Gravel
(Richard) : Bien, écoutez, moi, je pense qu'il y a des... au Québec,
on a quand même fait un choix de travailler
avec un réseau d'organismes en employabilité, d'organismes communautaires, vous
le soulignez. Ces organismes-là ont
une capacité, je vous dirais, peut-être d'adapter leurs mesures de façon plus
rapide, et je pense qu'ils sont capables de répondre à la demande dans la mesure où déjà ils signifient tous ces
changements-là, de voir comment on pourrait adapter les services puis
comment on pourrait donner des meilleurs résultats. Donc, dans ce sens-là, moi,
je pense qu'on a la capacité de le faire, notamment parce qu'Emploi-Québec a
fait un choix assez judicieux de travailler avec un réseau de partenaires bien
intégrés sur le terrain. Mais c'est sûr que c'est un chantier à regarder.
Le Président (M. Cousineau) :
Dernière question rapide, il reste 40 secondes.
M.
Schneeberger :
Oui. Bien, ce n'est pas vraiment une question. Vous pourrez compléter, étant
donné que c'est très court. Hier, moi, j'étais à mon carrefour jeunesse
local chez nous, à Drummondville, et ils me disaient : Emploi-Québec a
pris une initiative sur un projet, ils ont invité tous les nouveaux demandeurs.
Sur environ 300 demandes et quelques
qu'ils ont faites, seulement 30 ont répondu à l'appel. Eux, sur le même style,
principe, ils ont fait la même chose; ils
n'ont pas fourni à la demande. Pour quelle raison? Parce que le jeune qui va
chez Emploi-Québec, Emploi-Québec, l'agent, il est vu comme une police,
excusez l'expression, mais au carrefour jeunesse-emploi c'est un milieu de vie,
il y a un lien de confiance, et là ça marche. C'est ça qu'il faut faire.
Parfait.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord. Alors, merci, M. le député
de Drummond—Bois-Francs,
ça termine le temps qui vous était
alloué. Je passe pour les trois prochaines minutes la parole à la députée de
Gouin. Mme la députée.
Mme David
(Gouin) : Merci. Une belle intervention du collègue précédent. Madame
monsieur, bonjour. Merci pour un
mémoire où on rapporte, où, je dirais, on élabore certains principes, parce
qu'on en a besoin, de principes, dans ce dossier-là. Mais votre mémoire, il est essentiellement très factuel. On trouve dans ce mémoire des chiffres, des faits
qu'il est important de connaître, et je pense que plein de gens auraient
intérêt à le lire.
Vous nous
dites qu'au Québec «le montant des prestations est tellement
faible qu'il s'agit déjà d'une pénalité en soi», ça, c'est à la page 27 de votre mémoire. Je ne
peux faire autrement que d'être d'accord. Si on pense que, pour couvrir les besoins
essentiels, le ministère avait établi lui-même, en 1996, qu'une personne
devrait avoir 667 $ par mois, en 1996,
ça fait 20 ans, et qu'on en est encore à 623 $, donc, ce que vous
nous dites — ça,
c'est factuel, hein, ce sont des chiffres — c'est : Regardez, à 623 $, il y a
déjà une méchante pénalité que d'être à l'aide sociale, ce n'est peut-être
pas une bonne idée que d'ambitionner.
Vous nous
dites aussi : Budget 2015‑2016, diminution de 13 millions de dollars
dans les services d'intégration à l'emploi,
les centres locaux d'emploi, etc. Alors, évidemment, vous vous posez la
question de, bien, comment on va faire pour accueillir tous ces nouveaux
demandeurs, et pour leur offrir des services, et éventuellement leur donner des
pénalités s'ils n'acceptent pas de participer. Excellente question.
Mais moi,
j'en ai une, question, à vous poser, c'est la fameuse question de l'abandon. Le
ministre ne cesse de nous en parler.
Là, moi, j'ai demandé à avoir des chiffres, je commence à en avoir. Les
chiffres que j'ai, c'est que, pour le Québec,
on parle, pour la dernière année, d'un taux d'abandon de 13 %, pour
Montréal, 8 %, ce taux serait plus élevé chez les jeunes, mais on n'est pas dans des taux
d'abandon de 50 %. Je voudrais savoir si vous avez des chiffres sur les
taux d'abandon des mesures et si vous avez des données qui nous expliquent
pourquoi il y a des abandons.
M. Gravel (Richard) : Ce n'est pas
une donnée, dans le cadre de ces travaux-là, qu'on a regardée. Il faut voir... Mais je pense qu'il faut faire attention
c'est quoi, des abandons. Je reviens à l'idée de base de dire, ces
clientèles qui sont à l'aide sociale, en fait on retrouve
dans les clientèles une certaine catégorie de personnes qui vont avoir des problèmes multiples et que ces problèmes multiples
là sont souvent des causes d'abandon. Alors, on parle-tu d'un abandon parce que la personne a décidé d'arrêter la mesure
ou on parle d'un abandon parce que la personne avait eu un problème de santé mentale, elle a été hospitalisée,
elle a... incarcérée? Il y a plein de raisons. Moi, je pense qu'il y a
des travaux qui devraient être faits de
façon... parce qu'il y a les abandons liés à la décision de l'individu, il y a
les abandons liés aussi à des phénomènes extérieurs. Et, dans...
Le Président (M. Cousineau) :
M. Gravel, malheureusement, je dois vous arrêter. Alors, je vous remercie, M. Gravel, Mme Arseneault, pour votre présentation
et j'invite le prochain groupe à se préparer, à s'installer à la table.
Je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 18)
(Reprise à 12 h 20)
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Nous accueillons les gens de la Table de concertation des organismes au service des
personnes réfugiées et immigrantes. Alors, bonjour. Je vous demande de
vous présenter et puis de présenter les gens
qui vous accompagnent, puis par la suite, bien, vous avez 10 minutes de
présentation.
Table de concertation
des organismes au service
des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)
Mme Chanoux (Pascale) : Merci, M. le
Président. Donc, bonjour, M. le ministre, mesdames et messieurs. Effectivement,
je m'appelle Pascale Chanoux et je suis coordonnatrice des volets employabilité
et régionalisation de l'immigration à la TCRI. Et je suis heureuse de vous présenter
aussi deux autres personnes qui vont intervenir, nous serons trois à intervenir aujourd'hui : Nathalie Rech, qui est au Projet Genèse, qui est un
des membres de la table, et M. Pinto, qui est un des participants
au Projet Genèse. Donc, nous allons intervenir à trois.
Alors, je
suis heureuse de vous présenter le mémoire que nous avons produit sur ce projet
de loi. Et, pour rappel, je vous
dirais que la TCRI existe depuis 1979, et c'est actuellement
137 organismes communautaires à travers le Québec qui sont dédiés à
l'accueil, installation et intégration des nouveaux arrivants. Ces organismes
sont des acteurs de l'action communautaire autonome, des experts de l'approche
interculturelle et des agents de transformation sociale. Ils se reconnaissent
notamment — et
on y reviendra — dans
une vision bidirectionnelle de l'intégration qui partage la responsabilité
entre le nouvel arrivant et la société d'accueil.
Alors,
évidemment, le projet de loi nous interpelle à plusieurs titres. Nos membres
desservent quotidiennement et en
grand nombre des personnes réfugiées, immigrantes et sans statut dont certaines
sont déjà prestataires de l'aide sociale mais beaucoup plus en situation
de précarité, de pauvreté ou d'exclusion.
Nous savons
toutes et tous qu'il existe une surreprésentation des personnes nées hors du
Canada sur le programme d'aide
sociale, mais nous connaissons moins les caractéristiques de ces personnes, les
raisons pour lesquelles elles entrent sur
l'aide sociale et leur comportement, entre guillemets, une fois sur l'aide
sociale. Ces différents éléments les distinguent des prestataires natifs, particulièrement pour ce qui est des
travailleurs qualifiés, donc, issus de l'immigration prestataires. Ces derniers,
sélectionnés parce qu'ils ont des caractéristiques personnelles justement
susceptibles de faciliter leur intégration rapide et harmonieuse au marché du
travail, un nombre significatif d'entre eux aboutit pourtant à l'aide sociale. Pourquoi? Parce qu'ils rencontrent des
obstacles qui vont bien au-delà de leurs caractéristiques personnelles à
l'arrivée, il s'agit d'obstacles systémiques
qui sont très bien connus depuis une vingtaine d'années, alors je vous
citerai la non-reconnaissance de la formation, de l'expérience acquise à
l'étranger, le manque d'expérience québécoise, la discrimination systémique dans les entreprises. Il faut noter par
ailleurs que certains sous-groupes, telles les personnes racisées ou les femmes immigrées, font face à ces
difficultés spécifiques et à un cumul d'obstacles et que les personnes
réfugiées prises en charge par l'État sont inscrites dès leur arrivée à l'aide
sociale, des situations un peu particulières.
Ainsi, prendre en compte la réalité et les
difficultés d'intégration professionnelle de trop nombreux nouveaux arrivants permet de mieux comprendre la présence
sur l'aide sociale de beaucoup d'entre eux et que cette dernière nous parle essentiellement des ratés, si ce n'est de
l'échec de l'intégration. Et prévenir leur entrée sur l'aide sociale ne
pourra pas se faire sans que le gouvernement ne s'attaque sérieusement aux
obstacles systémiques qu'ils rencontrent.
En résumé,
les nouveaux arrivants nous démontrent bien à quel point il est faux de
considérer que l'intégration en emploi
d'un individu relève uniquement de sa responsabilité, de sa bonne volonté et de
ses caractéristiques personnelles. C'est pourtant une des prémisses très
importantes du projet de loi.
Nous sommes également très perplexes par ce qui
attendrait les personnes qui bénéficieraient du programme Objectif emploi. Il y a d'abord le fait que les
mesures actuelles ne sont pas ou peu adéquates ou adaptées aux besoins
des nouveaux arrivants en matière de
préemployabilité, employabilité, formation, soutien en recherche d'emploi,
notamment parce qu'elles n'adressent pas les
obstacles systémiques. Nous estimons aussi que les conditions du plan
d'intégration en emploi ainsi que la notion
d'emploi convenable vont plutôt conduire les participants vers des emplois
alimentaires qui feront d'eux des travailleurs pauvres et donc accentuer
les phénomènes de déqualification et d'appartenance des nouveaux arrivants à des taux de faibles revenus, ce qui
est très inquiétant étant donné la situation qui prévaut déjà
actuellement. Va-t-on institutionnaliser la déqualification?
Ce projet de loi semble viser à tout prix une intégration rapide à
l'emploi des nouveaux demandeurs d'aide sociale et une présence unique à l'aide sociale. Il ne
tient pas compte de l'existence d'obstacles systémiques qui vont
rallonger les parcours d'intégration et
empêcher parfois une primo-insertion au niveau attendu par la personne
immigrante. Il oublie également que l'intégration d'un nouvel arrivant est un
processus long et complexe et qu'une même personne peut avoir besoin d'un premier soutien d'Emploi-Québec et
d'un second soutien pendant cet emploi alimentaire ou, par la suite,
pour accéder à un emploi à la mesure de ses compétences.
À
nos yeux, la loi n° 70 apparaît donc comme une loi inadaptée qui ne
favorisera pas l'intégration en emploi des personnes réfugiées,
immigrantes et sans statut. Nous recommandons plutôt de prévenir l'entrée sur
l'aide sociale des nouveaux arrivants et de
permettre aux nouveaux arrivants de bénéficier véritablement de l'aide sociale, pour ceux qui y sont entrés, pour s'en sortir et en sortir, notamment
en bonifiant l'offre existante.
Puis là je vais rapidement
laisser la parole à Nathalie pour...
Le Président (M.
Cousineau) : Oui, Mme Rech.
Mme
Rech (Nathalie) : Oui.
Bonjour à tous et à toutes. Donc, je travaille pour Projet Genèse, c'est un
groupe de défense des droits qui est situé dans le quartier Côte-des-Neiges à
Montréal. Chaque année, on fait entre 3 000 et 4 000 interventions individuelles en personne avec des
personnes qui ont des difficultés à l'aide sociale, que ce soit pour une
demande ou pour des difficultés en cours de parcours sur l'aide sociale, et
environ huit personnes sur 10 qui viennent à Projet Genèse est née à
l'extérieur du Canada.
Tout
ça pour dire que nous connaissons très bien et la question de l'immigration et
la question de l'aide sociale et nous
sommes impliqués à différents niveaux sur ces dossiers-là. C'est pourquoi notre
demande, en venant ici aujourd'hui, c'est
que le projet de loi n° 70 soit purement et simplement retiré, pour
différentes raisons. La première, c'est que, selon nous, il ne devrait pas y avoir de contrainte pour
toucher un montant de 623 $, une aide de dernier recours. On parle
de personnes qui sont extrêmement démunies,
extrêmement vulnérables. Selon nous, que ça ne devrait pas être
conditionnel. On pense que l'approche obligatoire n'est pas efficace, mais, nos
collègues précédents l'ont mentionné, il y a déjà beaucoup de personnes qui sont volontairement sur des mesures. En fait,
si je me souviens bien, la... pas la commission mais la Protectrice du citoyen dévoilait des chiffres récemment, en
passant en commission parlementaire, du ministère selon lesquels 75 % des primodemandeurs et
75 % des jeunes de moins de 29 ans sont déjà sur des mesures de façon
volontaire, et ce, même sans avoir un incitatif financier.
Je
voudrais laisser la parole à M. Pinto qui nous accompagne. Il va
s'exprimer en anglais. J'espère qu'il aura le temps de livrer au moins
un petit peu de son témoignage.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Pinto.
• (12 h 30) •
M. Pinto (Nalawattage) :
Yes. I came to Canada in 1993 from Sri Lanka. I was sponsored by my wife,
she was working as a
sewing machine operator. I was 42 when I arrived. I had a lot of work
experience, but nobody recognized this. Everything you have done before
you came to Canada does not count, it is like being a newborn.
I went to French class for the first
year. After one year, our Government is not paying for the classes anymore, but, one year after, far from being enough to learn
language. This has caused me problems on the job market for 22 years.
During
six months, I was going to French class in the morning and I was working night
shift in a chemical company. They hired only
new immigrants because it was dangerous work, they can abuse us more easily
since we don't know our rights. They
only keep people for six months so they can organize. Laid off, I did not have
enough hours to get Employment Insurance.
In the following years, I had many
different jobs: bakery, hotels, restaurants, even construction. They hired me in construction because of my
dark skin. They think people with dark skin are stronger, so they only hire
people of colour. But I was 52 years old, now, it is not fitting
the position. I had short or bad work experiences.
We applied for welfare for the first time in 1994
because my wife and I, we both lost our jobs at the same time. It took months to get our
first check because of all the paperwork needed. After two months of welfare,
we both found a job again. We
received a letter from the welfare that we had to quickly repay benefits we
received while working in order not to get penalties, but we had
accumulated debts during the previous months, so it was not easy to pay back
welfare.
Le Président (M.
Cousineau) : Thank you, mister, thank you. M. le ministre, vous
avez 12 min 30 s.
M. Blais :
Alors, merci beaucoup pour votre mémoire. Première remarque, peut-être,
introductive, j'étais à ville Saint-Laurent
la semaine dernière, dans un centre
local d'emploi, je l'ai choisi parce
que c'est un centre local
d'emploi qui accueille beaucoup
d'immigrants, vous le savez, vous vous en doutez bien. J'étais avec les agents
d'aide à l'emploi et je leur posais la question sur la pertinence ou pas
du projet de loi n° 70. Alors, eux m'ont dit tout de suite : Mais ça,
c'est formidable parce que c'est sûr que,
pour les immigrants, ça va fonctionner très bien, il faut
leur donner rapidement des mesures, il faut
leur donner du temps, etc., pour les intégrer. Eux, ils n'avaient pas du tout
d'inquiétude par rapport au succès, là, d'intégration, là, quand on met plus
de mesures en place pour les personnes immigrantes, parce qu'en général, vous le savez bien, elles veulent s'intégrer, elles veulent faire les
efforts nécessaires. Donc, il y avait zéro inquiétude de leur
côté. On est passés rapidement
plutôt aux jeunes, aux jeunes Québécois, là, pour qui ils avaient une plus grande
inquiétude, parce que c'est beaucoup plus difficile de les mobiliser.
Donc, il y a
une distance importante, à moins qu'on ne parle pas des premiers demandeurs, entre
votre propos et ce que j'ai entendu là-bas, qui était d'une limpidité,
là, des agents d'aide à l'emploi qui étaient présents.
Mme
Chanoux (Pascale) : Je pense
que la question qui se pose, c'est la question
de l'adaptation aussi, parce
que... Qu'est-ce qui va être proposé aux
personnes, admettons, qui seront dans Objectif emploi, sachant que, si ces gens
sont sur l'aide sociale, ils ont rencontré, comme on le disait, un certain
nombre d'obstacles systémiques? Est-ce que...
M.
Blais : Oui, mais ils ne seront pas sur l'aide sociale, hein, on
comprend bien. C'est des premiers demandeurs, ils n'ont jamais été sur
l'aide sociale.
Mme Chanoux (Pascale) : Oui, mais
ceux qui rentreraient seraient dans le programme Objectif intégration. Le problème que ça pose, c'est que les réseaux
pour lesquels les gens auraient besoin d'un soutien de l'État se posent...
sont toujours présents, si vous voulez, une
fois que les personnes sont dans les CLE. Quand on parle d'obstacles
systémiques, on fait référence à, par
exemple, des gens qui sont extrêmement scolarisés et expérimentés, donc qui
vont, de fait, avoir des défis en
matière de reconnaissance de leurs formations et expériences acquises à
l'étranger. Est-ce qu'on va être capable, avec le projet Objectif emploi, de leur offrir, par exemple, une
reconnaissance des acquis et compétences? Est-ce qu'on va être capable de leur offrir une formation
d'actualisation, parce que dans beaucoup de cas le transfert des
compétences est partiel, les gens ont
certainement des compétences à actualiser ou des apprentissages à faire, ou on
va les presser à occuper un premier emploi qui ne correspond pas du tout
à leur profil socioprofessionnel? On a une énorme inquiétude par rapport à ça.
M.
Blais : ...j'ai fait une vérification en même temps que vous le
disiez. Donc, très clairement, la reconnaissance des compétences fait
partie des priorités, hein, des agents d'aide à l'emploi. Je ne dis pas que
c'est facile, hein, vous connaissez bien les
problèmes qu'il peut y avoir, surtout avec certains ordres professionnels, mais
très clairement ça fait partie de leurs priorités, de travailler sur la
reconnaissance de la diplomation.
Mme
Chanoux (Pascale) : J'irais
aussi sur, si vous permettez, un autre type d'obstacle, qui est... Si vous
regardez l'étude qui a été faite, conjointe,
entre le ministère de l'Éducation et votre ministère en 2010, on voit que, les
personnes, par exemple, au sein des cohortes
de nouveaux arrivants — c'est une étude entre 1996 et 2006, je pense, ou à peu près
ça, sur une dizaine d'années — il y a au sein des nouveaux arrivants des
personnes qui sont plus susceptibles de rentrer sur l'aide sociale, donc d'être des primodemandeurs, et on
voit que ces personnes sont notamment des gens du Maghreb. On sait très bien, tous et toutes, qu'il y a de la
discrimination et du racisme vis-à-vis de ces populations-là, donc des
populations... Je vous prends des gens du Maghreb, mais ça pourrait être
d'autres types de population, ce qu'on appelle des personnes racisées. Est-ce qu'on va intervenir à ce
niveau-là pour faire en sorte que ces obstacles-là soient adressés, soient
soulevés?
Je ne suis
pas sûre qu'Objectif emploi va être une réponse à ces problématiques, puis
elles se posent dans notre société.
Je veux dire, c'est dans ce sens-là où on se dit, bon, tous ces obstacles-là...
Je vous ai juste donné deux exemples,
là. Le monsieur, M. Gravel qui était là a parlé des pratiques RH aussi,
donc, des entreprises. Va-t-on faire évoluer ces pratiques RH pour qu'elles soient plus inclusives aussi de la
diversité culturelle? Je ne vois pas ça dans le programme que vous
proposez, M. le ministre.
M.
Blais : Mais, madame, il y a plusieurs fronts que vous évoquez, hein?
Moi, je suis bien d'accord à travailler
sur plusieurs fronts, là, dans la société québécoise, notamment sur la question
de l'accueil des immigrants et de la reconnaissance
de leurs diplômes, tous ces fronts-là sont importants, mais il me semble que ça
n'enlève rien à la valeur d'Objectif emploi. Parce que vous-même, vous
nous avez dit : Il faut faire en sorte d'éviter qu'ils entrent à l'aide sociale, et c'est exactement ça, c'est exactement
ça, Objectif emploi. On ne les fait pas rentrer dans le cheminement
normal de l'aide sociale parce que... Puis
là on s'en occupe, c'est-à-dire dès les premiers jours il y a une rencontre. Si
je me souviens bien, dans le cas du
CLE de Saint-Laurent, là, c'est très tôt, là, qu'il y a des rencontres et, si
possible, sur place, parce que dès
les premiers jours il faut regarder avec eux c'est quoi, leur projet de vie,
c'est quoi, leur passé, qu'est-ce qu'ils veulent faire et ensuite, bien sûr, s'assurer, là, qu'ils aient...
ce projet de vie là soit défini avec eux et puis qu'on le fasse
progresser ensemble.
Donc, c'est
vraiment... ça va assez près de la vision que vous avez d'éviter de les faire
entrer à l'aide sociale, pour toutes
les raisons que vous avez évoquées tout à l'heure, stigmatisation,
reproduction, etc., et donc d'aller vers un chemin qui est tout à fait
différent. Et, encore une fois, moi, j'ai commencé tout à l'heure en vous
disant que les gens du CLE Saint-Laurent me
disaient : Écoutez, ça, ça va marcher très, très bien parce que la
plupart, vous les connaissez aussi bien que moi, la plupart des
immigrants, les nouveaux arrivants, les premiers demandeurs, ils sont très
volontaires. Il y a des obstacles contre
lesquels vous vous battez, contre lesquels la société québécoise doit se
battre, mais ça n'enlève rien, je pense, à la valeur et aux premiers
pas, là, d'Objectif emploi.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Chanoux.
Mme Chanoux (Pascale) : Oui. On parlait, dans la loi n° 70, de considérer juste des mesures,
ou des programmes, ou des politiques
déjà existants. Donc, c'est sûr qu'on estime que ces politiques, programmes,
mesures n'adressent pas beaucoup les problématiques dont on vient de...
que je viens de partager avec vous. C'est clair qu'on le voit dans la recherche que j'évoquais tout à l'heure, que, les
gens, c'est entre le troisième et le sixième mois de leur arrivée au
Québec qu'ils rentrent sur l'aide sociale et, pour un certain nombre d'entre
eux, en sortent à l'intérieur de 12 mois. Donc, pour nous, c'est prioritaire et c'est urgent d'offrir aux nouveaux
arrivants des mesures adaptées, des programmes adaptés tels que... Je vais vous donner des exemples.
Rapidement, ce serait une des pistes, si vous voulez, pour justement
prévenir l'entrée sur
l'aide sociale, et non pas attendre que les gens soient mal pris pendant des
années ou occupent des emplois alimentaires,
donc, qui peuvent être, comment dire, des trajectoires culs-de-sac, d'une
certaine manière, parce que, quand on
occupe un emploi alimentaire, après, pour retrouver un emploi à la mesure de
son profil socioprofessionnel, ce n'est pas forcément évident.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : J'aimerais vous
entendre sur la question de la scolarisation, aller chercher un diplôme
ou une qualification. Parce que j'ai dit, là, disons, en arrivant en fonction,
qu'il fallait aussi voir Objectif emploi non pas simplement comme un emploi à
court terme, pris sous pression, qui n'est pas productif ni pour la personne ni
pour la société, à mon avis, mais aussi la
possibilité d'aller chercher des qualifications supplémentaires ou des
ajustements, compte tenu de la
qualification antérieure. Est-ce que cette approche-là de valoriser la
qualification et la diplomation, c'est une approche qui est réaliste
pour la clientèle, disons, immigrante?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Chanoux.
• (12 h 40) •
Mme Chanoux (Pascale) : Bien sûr que les gens, effectivement, ont besoin...
Moi, je pense, vous avez lu aussi un peu
le continuum, les étapes vers l'emploi que nous proposons, hein, dans le
document. Il est clair pour nous que, comme je le redis, les gens ont
besoin de reconnaissance de leurs acquis et compétences, que ce sont des gens
qui sont formés, expérimentés, ils ont besoin de formations d'appoint pour la
plupart.
Le problème est un problème d'offre aussi, parce qu'actuellement c'est beaucoup le réseau de
l'éducation qui serait susceptible, si
vous voulez, de faire à la fois... sauf, évidemment, pour les gens qui
appartiennent aux professions réglementées, là, ils s'adressent aux
ordres professionnels, ou certaines autres professions un peu particulières,
avec Emploi-Québec, et tout ça, ou la CCQ,
mais, pour la plupart, c'est vers le réseau de l'éducation qu'ils devraient se
tourner pour obtenir cette reconnaissance des
acquis et compétences et cette formation d'appoint, et actuellement le réseau
n'a pas une si grande flexibilité pour faire
plus du sur-mesure et pouvoir répondre rapidement, dans des délais
raisonnables, à des coûts acceptables à la fois cette reconnaissance et cette
formation d'appoint. Donc là, il y a un défi très important pour notre réseau
de l'éducation à l'heure actuelle.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Objectif emploi se situe à l'intérieur d'un cadre plus large,
là, qui est une loi plus générale sur l'adéquation formation-emploi,
notamment pour modifier notre approche d'adéquation formation-emploi de la loi sur la formation et la main-d'oeuvre, pour
permettre aux entreprises de faire des dépenses pour des personnes qui ne
sont pas en entreprise, notamment les étudiants qui viendraient faire des
stages en entreprise, notamment des immigrants aussi qui pourraient venir faire
des stages en entreprise, et, bien sûr, l'entreprise pourrait déduire ces
dépenses-là.
Est-ce
que vous vous êtes penchés un peu là-dessus, sur la possibilité pour plus
d'immigrants au Québec d'aller faire
des stages en entreprise, sur à la fois les avantages mais aussi peut-être les
inconvénients que vous aimeriez souligner?
Mme Chanoux (Pascale) : Oui, c'est sûr que la question... Souvent, les
stages, l'une des problématiques, ce sont des stages non rémunérés. Alors, ça, c'est sûr que c'est problématique,
parce que comment les personnes vivent pendant leurs stages?
M. Blais :
Donc, on n'est pas là du tout.
Mme Chanoux (Pascale) : Oui. Le stage peut être une formule intéressante,
pour la personne immigrante, parce que
ça lui permet, si c'est un stage qui est valable, là, qui est dans son domaine
et qui est d'une durée valable — on ne parle pas d'un stage d'un mois, là — d'avoir cette première expérience québécoise
qui lui est demandée par un certain nombre d'employeurs. Donc, ça peut
être une piste de solution intéressante.
Du
point de vue de l'employeur, ça peut être aussi intéressant, parce que les
employeurs, je pense, ont besoin, un certain
nombre, d'être rassurés aussi par rapport à la main-d'oeuvre immigrante. Et ils
les voient faire leurs preuves, faire la preuve de leur compétence dans un cadre qui n'est pas encore très
engageant pour l'employeur, parce que la personne est en stage, donc...
Le
Président (M. Cousineau) : Je dois vous arrêter parce qu'il y a
une autre question, puis il ne reste seulement qu'une minute.
Mme Chanoux
(Pascale) : Oui, d'accord.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme la députée de Fabre. Question rapide, s'il
vous plaît.
Mme Chanoux (Pascale) : Donc, pour nous, effectivement, en résumé, le
stage rémunéré, par exemple, peut être une piste porteuse.
Le Président (M. Cousineau) :
40 secondes.
Mme
Sauvé : Je vais être très
rapide. Alors, merci pour votre présentation. J'avais besoin de vous entendre.
Vous avez nommé des pratiques gagnantes
liées à l'accompagnement. On a parlé de la reconnaissance des acquis, le
ministre vous a confirmé qu'effectivement c'était une priorité. Vous avez parlé
de délais, on vient de parler des stages, pas de mur-à-mur. Est-ce qu'il y a
d'autres éléments qui doivent faire partie des pratiques gagnantes de l'accompagnement
pour favoriser l'intégration en emploi mais aussi le maintien en emploi?
Le Président (M. Cousineau) :
Rapidement, madame, il reste 10 secondes.
Mme
Chanoux (Pascale) : Oui, d'accord. Les employeurs, en fait, oui, effectivement, il y a un gros travail. Quand on parle d'intégration bidirectionnelle, on pense
à la personne immigrante, qu'on accompagne relativement bien, mais
on pense aux employeurs qui vont les
embaucher. Et je pense que ces employeurs, qui sont beaucoup
des PME, ont besoin non pas d'être sensibilisés, mais d'être outillés, c'est-à-dire,
de façon très concrète...
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Je vous bouscule, mais le temps... il faut quitter ici pour
13 heures. Alors, je passe la parole au député de l'opposition
officielle, M. le député de Saint-Jean, pour 7 min 30 s.
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Merci pour votre présentation. Thank
you, Mr. Pinto, for your presentation.
Ma première question,
concernant le comité consultatif que nous venons d'entendre précédemment, dans
leur mémoire ils mentionnent : «L'admission à l'aide sociale des personnes
immigrantes peut être due au fait que ces personnes, sélectionnées pour
leur formation et leurs compétences, voient trop souvent leurs diplômes et
expériences de travail non reconnus. Ils n'ont alors d'autre choix que de se
tourner vers ce soutien, surtout pour celles et ceux qui parlent le français
et qui n'ont donc ainsi pas accès à un soutien financier pour l'apprentissage
de la langue. Il faudrait s'assurer d'aider
ces personnes à réaliser leur projet professionnel original et non pas les
pousser vers des emplois qui ne correspondent pas à leurs qualifications
afin de les faire sortir le plus rapidement possible de l'aide sociale.»
Moi, ce que
j'aimerais savoir de votre part, vous avez déjà abordé la question
avec le ministre, mais, avec le projet de loi
que nous avons sur la table, on sent que le véritable objectif
du gouvernement, c'est d'économiser 50 millions de dollars. Donc, quand on voit
ça et que, là, vous nous faites une présentation, M. Pinto nous a parlé
de sa réalité aussi, est-ce que le gouvernement met vraiment les ressources
adéquates pour faire en sorte... Puis on
peut bien dire que la reconnaissance des acquis est une priorité, là, ça fait
plus de 10 ans qu'on entend ça. Puis
force est de constater que ce n'est pas le cas, là, en ce moment, hein, il y a encore un gros problème de
reconnaissance des acquis, sinon on n'aurait
pas les chiffres qui nous sont présentés en termes de population
immigrante à l'aide sociale. Est-ce que vous trouvez que l'aide qui est
offerte en ce moment par le gouvernement ou l'aide qui sera offerte par le gouvernement avec Objectif emploi sera suffisante pour régler la question
qui est mentionnée dans la présentation que je vous ai faite du comité
consultatif?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Chanoux.
Mme
Chanoux (Pascale) : Je pense
que, si on... — je
reviens là-dessus d'une façon importante, mais ça me semble
fondamental — si
on ne travaille pas ou on ne met pas de l'aide... Vous parliez de l'aide, là,
on ne va pas parler de chiffres, là, mais,
si on n'intervient pas, on ne met pas d'énergie, des fonds, des fonds publics
pour mieux préparer la société d'accueil,
en l'occurrence, là, on parle des employeurs, on risque d'avoir des chiffres,
des indicateurs socioéconomiques pour
les nouveaux arrivants qui vont stagner comme ils le font, puisqu'on met toujours... on se base sur les
caractéristiques... Selon moi,
beaucoup, derrière ce projet de loi n° 70, on met le focus sur l'individu,
sur ses caractéristiques personnelles, alors
que l'intégration, c'est une responsabilité partagée. Donc, les employeurs, en
l'occurrence, sur le marché de l'emploi, et les syndicats aussi, d'une
certaine manière, sont des acteurs incontournables qu'il faut davantage
accompagner aussi. On parlait beaucoup de
l'accompagnement des personnes, mais il faut aussi accompagner les principaux
acteurs du marché du travail, et je ne vois pas, pour l'instant, de fonds
publics importants sur ce banc-là.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
M. Boyer, Daniel Boyer, président de la FTQ, mentionnait, lors de la
commission parlementaire sur le projet de loi n° 70, en parlant des
Maghrébins ou de la communauté maghrébine : «...il y a de la
discrimination, du racisme, autant de la part des employeurs, autant dans nos
rangs, hein? Ce n'est pas simple, cette problématique-là. Les Maghrébins, ils sont scolarisés, ils sont bien
souvent francophones, donc pourquoi ils ne se trouvent pas d'emploi?
[Bien] parce qu'il y a une situation discriminatoire à leur égard.»
Donc, je
comprends qu'avec le projet de loi n° 70, comme vous le mentionnez, bien,
une personne qui vit cette problématique-là
sera pénalisée personnellement pour un problème qui est au-delà de sa personne
et de ses choix personnels.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Chanoux.
Mme
Chanoux (Pascale) : Oui,
effectivement, je pense qu'il faut faire la part des responsabilités, hein,
comme vous le dites. Et il y a des choses qui relèvent des apprentissages que
l'individu doit faire, les gens ont à faire des apprentissages, hein, quand ils arrivent dans la société québécoise,
donc moi, je vois que les gens font cet effort-là de faire beaucoup d'apprentissages, mais il y a des choses
qui ne relèvent pas d'eux. Donc, on ne peut pas résumer, si vous voulez,
la totalité de l'intégration à juste considérer les caractéristiques personnelles
des nouveaux arrivants.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député.
M.
Turcotte : Je vous
remercie beaucoup pour votre présentation.
Mme Chanoux (Pascale) : Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui, bien, écoutez, c'est tout? Vous n'avez pas d'autre question?
M.
Turcotte : Non.
Le
Président (M. Cousineau) : Bien, sur le temps du député, est-ce que
M. Pinto veut continuer sa présentation?
Mme Chanoux (Pascale) : Oui, bien
sûr. Bonne idée.
Le Président (M. Cousineau) :
Deux minutes. Two minutes.
• (12 h 50) •
M.
Pinto (Nalawattage) : OK. In 2001, I lost a job I had for a few
years in a factory, a candy factory. I was on
employment insurance, I went to the Emploi-Québec to see could I go back to school. Emploi-Québec told me they have... we have
excellent job opportunity in the cabinetmaking field, and I could get a job up
to $36 an hour. It
was very demanding. We had to punch a card, people who
were late or didn't attend lose their supplement or had... Emploi-Québec did not provide any help for... that I
knew. 70% of students did not find a job in the field. I had spent one
year and half in school, bought the tools,
which cost me half of my income at the time, and I dreamed about a new life,
and the job market did not need people like me, especially because I was
not bilingual. I was trained for a kind of job that not
really exists anymore. I had to apply again,
I go back to the dishwashing, and discouraging, everything, and I had to
apply again to welfare in 2012, March 2012.
June, I get my welfare check, it was only $330. I was sure that paperwork had
cost more than that. I...
Une voix :
Une minute.
M. Pinto
(Nalawattage) : OK. I
had a job at minimum wage since I've been in Canada. I also had a lot of
different moments when I was not working. I lost everything I could have in my
home country when I came here. Now, I don't
have a house, I don't have a car. I thought I would get all of this, coming to
Canada, as I was hoping to get professional
work. My wife has been on CSST for the past 12 years because she injured
herself overworking in clothes companies.
I am now 65. I did not achieve the dream that we had, coming to here. It's hard
to explain this to people of our home country, they think everything is
rich in Canada.
Trying
to escape the welfare system remained my job. I had... Painting a building,
there was scaffolding that was... stand very high above
the ground, but they did not provide us with proper harness. I was scared to
stand on the scaffolding, I couldn't do this
job. The welfare system is a lot like that, that didn't provide us any safety.
So, we feel that we cannot accept the job, we can't risk falling off the
scaffolding. The welfare system is dangerous for people, for their health or
their life expectancy. The Bill 70 is based on the idea it is a life
study, with the emergencies or surprises, which is not the case. Welfare is not
for the people who need help, it should be... provide this help. Thank
you.
Le
Président (M. Cousineau) : Thank you. Alors, pour les cinq
prochaines minutes, M. le député de Drummond—Bois-Francs, s'il vous plaît.
M.
Schneeberger : Oui.
Alors, merci, M. le Président. Bonjour à vous trois.
Premièrement,
c'est sûr que, là, on parle d'immigration. Vous, les groupes que vous
représentez, là, c'est autant les immigrants,
les réfugiés, c'est tout ça? O.K., parfait. Moi, je suis moi-même immigrant,
bientôt 30 ans maintenant, mais, bon,
c'est... Ça fait plusieurs années. J'ai passé par le processus, je m'en
rappelle, et c'est quand même assez ardu. Moi, il y a une chose, par contre, que je pourrais dire, c'est au niveau de
la reconnaissance des diplômes ou des acquis, et ça, là, il y a beaucoup
de travail à faire là-dessus au niveau du Québec, malheureusement. Et aussi,
les gens qui s'informent pour immigrer au
Canada, souvent on ne leur dit pas tout et parce qu'on veut les attirer :
Venez chez nous, venez chez nous, et finalement ici, tu sais, on a des
médecins qui conduisent des taxis, à Montréal, alors que, si on avait des
processus pour les intégrer au niveau de la médecine, qu'ils commencent, tu
sais, à progresser... Puis c'est ça, c'est là, un immigrant, c'est
l'intégration, apprendre la langue et autres. Ça, c'est important.
Si je reviens
au niveau du programme Objectif emploi, moi, je ne vois pas beaucoup de liens
avec ce que vous dites aujourd'hui
puis le programme Objectif emploi, c'est deux mondes parallèles, là, on est
loin de là. Alors, est-ce qu'il y a des choses, concrètement, qui pourraient être faites, de dire... Parce que,
là, vous touchez le point de l'immigration, qui n'est pas Objectif
emploi, mais c'est le tout, c'est global, là, tu sais.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Chanoux.
Mme Chanoux (Pascale) : Oui. Je
voudrais laisser un peu de temps à ma collègue aussi, à Nathalie, si vous
permettez, M. le Président. D'accord? Je vais répondre très rapidement puis je
vais laisser le temps à ma collègue.
Vous
pourrez regarder, monsieur, dans le mémoire qu'on vous a proposé, on a réfléchi
sur la base de recherches, je veux dire, ça ne sort pas de notre tête,
là, et de nos pratiques aussi, bien sûr, notre expérience d'accompagnement. On connaît les bonnes pratiques vers l'intégration professionnelle
des personnes immigrantes à la hauteur de leurs talents, on a bien
identifié les grandes étapes qui mènent justement à un emploi qualifié pour une
personne qui est scolarisée et expérimentée.
Je pense que notre demande est vraiment :
Sachant tout ça, là, arrêtons de tourner
en rond et mettons de l'énergie, de l'argent, des ressources
spécialisées, de l'expertise sur ces propositions que tous
les chercheurs, à la limite, qui travaillent dans le domaine de
l'intégration professionnelle des personnes immigrantes ont identifiées
et que nos intervenants et nos organismes aussi ont repérées. On parle du bilan
de compétences au départ, on parle de la reconnaissance d'acquis et compétences, on parle de la formation d'appoint, on parle
d'un stage rémunéré, on parle de
préparer les employeurs. Mettons déjà de l'énergie sur ces chantiers-là, qui sont des
gros chantiers pour notre société, et je pense qu'on va améliorer les
indicateurs socioéconomiques des nouveaux arrivants.
Je vais laisser...
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Rech, complément de réponse.
Mme Rech
(Nathalie) : Oui. En fait,
je voudrais revenir sur la question de l'offre de services actuelle d'Emploi-Québec.
Comme M. Pinto l'a exprimé, on voit beaucoup, beaucoup
de personnes, à Projet Genèse, qui sont passées par des services d'Emploi-Québec,
que ce soit après des périodes de chômage ou pendant qu'ils étaient à l'aide
sociale. Beaucoup de ces personnes se
retrouvent dans des situations similaires à la sienne, c'est-à-dire qu'après 10 ans, 20 ans de présence au Canada, malgré le fait qu'ils avaient des diplômes
parfois universitaires, qu'ils avaient de l'expérience de travail, ce qui était son cas, puisqu'il est arrivé et il avait déjà 40 ans,
ils se retrouvent à faire des jobs au salaire minimum dans des domaines qui n'ont absolument rien à voir
avec ni leur champ de compétence mais ni leurs intérêts, ce qui fait qu'au bout de 10 ans, 20 ans, pour eux,
c'est comme trop tard pour reprendre le cours de leur carrière laissée en plan
avec leur projet d'immigration.
Et on voit
énormément de gens que... Dans le fond, pour Emploi-Québec, c'est plus simple
de dire à une femme monoparentale, ingénieure, en provenance
d'Afrique : Vous devriez faire une formation pour devenir éducatrice en CPE, que d'essayer de lui trouver un
accompagnement vraiment soutenu pour lui trouver une job d'ingénieur ou
même de technicien dans son domaine. Et
c'est ça qu'on voit concrètement. Je parle du cas de femmes africaines. Je
comprends votre parcours d'immigrant, moi
aussi, j'ai été immigrante. C'est beaucoup plus facile quand on est Blanc et
francophone. Il ne faut pas se cacher qu'il
y a beaucoup de gens qui ont des difficultés du fait de leur couleur ou du fait
de leur manque de connaissance du français et de l'anglais.
Et, les
mesures de francisation, on en a parlé un petit peu avec l'exemple de
M. Pinto, mais elles sont extrêmement limitées en termes de temps. Quand le gouvernement nous paie
11 mois ou 12 mois de cours de francisation, après ça on n'a
plus accès à d'autres mesures...
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme Rech. Alors, j'ai
besoin d'un consentement pour dépasser de
deux minutes, s'il vous plaît, je veux avoir un consentement pour dépasser de
deux minutes 13 heures. Merci. Parce qu'il y a un caucus ici. Mme
la députée de Gouin pour trois minutes.
Mme David (Gouin) : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre mémoire et vos témoignages.
Un chiffre m'a frappée, hein, c'est au Québec
qu'il y a le taux le plus élevé de travailleurs à faibles revenus chez les immigrants, hein, 11 % versus
9 % en Colombie-Britannique, 8 % en Ontario. Ce n'est pas le genre de
chiffre qui nous fait plaisir.
Et
effectivement il y a le témoignage de Mme Diallo dans votre mémoire. Moi,
ce qui m'a frappée, c'est quand elle
dit : «Quand je demande à Emploi Québec de l'aide à la recherche de
l'emploi, l'agent met toujours l'accent sur mon expérience de travail
ici à Montréal», puis elle a fait toutes sortes de choses, mais pas son
diplôme. Et c'est ce que vous venez exactement de dire.
Alors, moi,
j'ai simplement envie de vous poser une question : Dans un contexte où le
Québec choisit quand même à peu près
60 % de ses immigrants, il les
choisit entre autres en fonction de leurs qualifications, comment ça se fait
que tous ces gens-là... non, pas tous ces
gens-là, un nombre trop élevé de ces personnes-là se retrouvent, une fois
arrivées ici, dans des situations abracadabrantes, sur l'aide sociale ou
autrement, petites jobs, salaire minimum, alors qu'on les a choisis entre
autres et fortement pour leurs qualifications? Qu'est-ce qui se passe?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Chanoux.
• (13 heures) •
Mme Chanoux (Pascale) : Oui. Il se
passe notamment, pour des francophones, que plusieurs employeurs exigent des compétences linguistiques en anglais,
c'est la réalité du marché du travail. Donc, c'est bien, le fait
français, etc., mais, je veux dire, c'est ça aussi, c'est la réalité qu'ils
rencontrent.
Il se passe
qu'il y a des employeurs qui n'ont pas l'habitude d'une main-d'oeuvre
immigrante et qui savent vraiment de façon très... là, je ne parle même
pas des préjugés et stéréotypes, là, de façon très concrète qui sont démunis
pour évaluer des formations et des
expériences faites à l'étranger chez des employeurs dont ils ignorent tout. C'est pour ça que je parlais d'outiller, tout à l'heure, les
employeurs, puisqu'on est rendu là, et particulièrement les PME, qui
constituent notre tissu économique
vivant aussi, là, qui embauche. Il se passe que c'est très long avant que les
gens puissent bénéficier de formations dans leurs domaines, donc, finalement,
il faut trouver une piste. Un plan B qui devient un cul-de-sac.
Donc,
il y a toutes sortes de choses, puis on le voit bien dans le parcours de
M. Pinto, à quel point c'est sinueux, hein, les parcours
d'adaptation et d'intégration. Donc, énormément d'éléments.
Le
Président (M. Cousineau) : Rapidement. Peut-être une petite observation de 20 secondes, Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Bien, donc, si je comprends bien, et à Montréal ça se pose de façon particulière à cause
du grand nombre de personnes immigrantes, du grand nombre de nouveaux arrivants,
il faut, oui, sûrement proposer des mesures
comme des stages en entreprise, tout
le monde va être d'accord
avec ça, mais il faut d'abord
et avant tout oser se poser la question, et
vous le faites, de : Comment ça se fait que le Québec
choisit un bon nombre d'immigrants, il les choisit pour leurs qualifications, et, une fois arrivés
ici, ils n'arrivent pas à avoir un emploi qui tient compte de leurs
qualifications?
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée de Gouin. Alors, Mme Chanoux, M. Pinto
puis Mme Rech, merci pour votre présentation.
Je suspends nos travaux jusqu'à 15 heures
cet après-midi. Ne laissez pas de choses sur les tables, il y a un caucus
après.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
(Reprise à 15 h 4)
Le Président
(M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre
la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi. Alors, cet après-midi, nous entendrons les
organismes suivants : l'Office des personnes handicapées du Québec,
le Regroupement des organismes spécialisés
pour l'emploi des personnes handicapées, le Collectif des entreprises
d'insertion du Québec et le Conseil du statut de la femme.
Alors donc, nous en sommes avec le premier groupe,
l'Office des personnes handicapées du Québec. Vous avez 10 minutes de présentation,
et par la suite nous passerons à une période d'échange avec les parlementaires.
Donc, la personne qui va s'adresser à nous en premier, veuillez présenter les
autres personnes. Merci.
Office des personnes
handicapées du Québec (OPHQ)
M.
Trépanier (Martin) : Merci, M. le Président. Je suis Martin Trépanier,
président du conseil d'administration de
l'Office des personnes handicapées. Je suis accompagné aujourd'hui, à ma
droite, de Mme Anne Hébert, notre directrice générale, qui assurera
une grande partie de la présentation de notre mémoire, ainsi que de
Mme Claudine Delvoye et madame ici, à ma gauche, Valérie Vanasse, qui ont
contribué de près à la rédaction de notre mémoire.
Donc, M. le
Président, M. le ministre, mesdames messieurs, membres de la commission,
d'entrée de jeu, bien sûr, l'Office est très heureux de pouvoir venir
partager avec vous les fruits de sa réflexion sur cet important projet de loi. Vous savez, chaque fois que l'Office se présente
dans une commission parlementaire, il se pose toujours, d'abord et avant
tout, une seule question, toujours la
même : En l'occurrence, est-ce qu'il y a, dans le projet de loi
n° 70, matière à favoriser la participation sociale des personnes
handicapées? Puis, pour répondre à cette question,
bien sûr, on vérifie si le projet de loi est en cohérence avec les priorités,
avec les décisions, avec les orientations déjà prises par le législateur et également par le gouvernement. Pour
être plus clair, donc, est-ce que le projet de loi n° 70 est en
cohérence avec la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées
en vue de leur intégration scolaire, professionnelle
et sociale, avec ce qui est édicté dans cette loi? Et est-ce qu'il est
également en cohérence avec la politique À part entière : pour un
véritable exercice du droit à l'égalité?
D'ores et déjà, je peux vous dire que sous de
nombreux aspects, notamment sous le plan de la formation, de l'emploi et également du soutien au revenu, il y a
beaucoup d'éléments très intéressants, dans ce projet de loi, pour les personnes handicapées. Donc, pour vous en faire
peut-être la démonstration, de ce que je viens de vous énoncer, M. le Président, si vous me permettez, je céderais la
parole à Mme Hébert, qui va vous faire part de nos commentaires
ainsi que de nos recommandations pour bonifier le projet de loi.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, Mme Hébert, la parole est à vous.
• (15 h 10) •
Mme Hébert
(Anne) : Oui, merci. Très
brièvement, d'abord, je voudrais parler un peu de notre organisation. On
est un organisme gouvernemental dont le
mandat est de conseiller et soutenir le gouvernement sur toute initiative qui
peut avoir un impact sur la participation
sociale des personnes handicapées. Notre organisation possède une fine
expertise, une fine compréhension des enjeux
qui concernent les personnes handicapées, tous types d'incapacité confondus,
tous types de domaine d'action. Cette
expertise-là provient à la fois du travail direct qu'on fait auprès des
personnes handicapées et de leurs
familles, des actions qu'on fait en coordination, en collaboration avec les
ministères, organismes publics, associations de personnes handicapées, le milieu municipal, le milieu communautaire,
de nos travaux d'évaluation et de recherche, et, bien sûr, provient de l'expertise de notre conseil
d'administration, qui est composé de parents et de proches mais
également de plusieurs membres de la société
civile, syndicats, patronat, ordres professionnels et, bien sûr, des
représentants du milieu associatif des personnes handicapées.
Nous sommes
très heureux d'avoir été invités à cette audience. Pour nous, cela témoigne de
votre préoccupation parlementaire sur
la participation sociale des personnes handicapées. Et d'emblée je vais
insister sur la spécificité de notre message.
Notre message porte sur deux enjeux importants : le soutien au revenu des
personnes handicapées et l'emploi.
Le premier
enjeu est le fait que les personnes handicapées sont fortement touchées par la
pauvreté. Un des leviers, outre
l'accès à l'emploi, c'est d'agir sur la condition de pauvreté, c'est la
bonification du soutien au revenu, et à cet égard l'office insiste pour saluer l'intention du projet
de loi d'assouplir certaines règles applicables aux prestataires du
Programme de solidarité sociale. Il s'agit
pour nous d'un pas très intéressant, dans le sens de la visée de la politique À
part entière, en vue d'améliorer le
revenu. Je pense qu'il y a peu d'organismes qui vous l'ont souligné, puis on
insiste pour souligner ce pas-là,
très intéressant de notre point de vue, et on vous invite à traduire cette
intention par une modification conséquente du Règlement de l'aide aux
personnes et aux familles.
Le deuxième
enjeu, l'emploi, sera au coeur de notre propos. Vous savez sans doute que les
personnes handicapées sont un des
groupes les plus sous-représentés sur le marché de l'emploi, du travail, leur
taux d'emploi est inférieur à la moyenne
de la population. Le taux d'emploi des personnes handicapées, là, pour vous
donner une image, c'est de 39 %,
en 2012, comparativement à 72,4 % pour les personnes sans incapacité, donc
c'est dire tout le chemin qu'il reste à faire.
Le législateur
et le gouvernement en reconnaissent d'ailleurs l'importance et ont fait des
choix clairs pour accroître la
participation sociale des personnes handicapées au marché du travail. Une
stratégie visant l'intégration et le maintien en emploi des personnes a été élaborée et déployée suite à une disposition
de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Cette vision d'emploi comme vecteur
de participation sociale est également présente dans d'autres lois,
entre autres dans la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi pour les organismes
publics, dans la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles et dans la Loi
visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, donc des choix très
clairs.
Et, dans
notre analyse du projet de loi n° 70, l'office s'appuie sur deux éléments,
donc, sur ces choix-là aussi pour vous
faire certaines recommandations. Le premier, bien sûr, le premier élément de
notre analyse, on a pris en considération que les choix étaient
clairement exprimés par le législateur et le gouvernement pour favoriser
l'emploi des personnes handicapées. Le deuxième élément qu'on a considéré se
retrouve dans la politique d'ensemble À part entière, c'est l'approche inclusive. C'est une approche qui est
préconisée, qui demande que, quand on conçoit des lois, des politiques
et programmes, il faut qu'ils soient sans
obstacle pour les personnes handicapées, c'est-à-dire qu'ils visent également à
réduire les obstacles pour les personnes
handicapées. C'est une approche où on dit : Il ne faut pas seulement des
mesures spécifiques pour les
personnes handicapées, mais également les mesures générales doivent contribuer
à réduire les obstacles que vivent
les personnes handicapées, puis cette approche, bien sûr, elle doit être
appliquée pour le projet de loi n° 70. Bien sûr, l'approche
spécifique, comme la Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en
emploi des personnes handicapées, est nécessaire et primordiale, mais ce qu'on
est venus vous dire aujourd'hui, c'est que, pour atteindre les objectifs de cette stratégie, elle doit être
complétée et soutenue par des politiques, des lois, des mesures générales
en emploi, en éducation et en formation,
pour atteindre l'objectif de cette stratégie-là. Et c'est le sens de nos
commentaires, l'essentiel de nos propos sur le projet de loi n° 70.
Donc, nous, on accueille assez favorablement le
projet de loi n° 70 puis on vous fait certaines propositions de
bonification. D'abord, le projet de loi
devrait être précisé afin que le plan d'action en matière de main-d'oeuvre
et d'emploi inclue chaque année des objectifs de résultat et de moyens à
l'égard des groupes sous-représentés sur le marché
de l'emploi, dont les personnes handicapées. Et, en cohérence avec cette
proposition, des ajouts et des précisions devraient être apportés à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la
Solidarité sociale et à la Commission des partenaires du marché du travail. Entre autres, le ministre, dans
le cadre de ses responsabilités en matière de main-d'oeuvre et d'emploi,
devrait accorder une attention particulière
aux besoins des groupes sous-représentés. Ce dernier ainsi que la
Commission des partenaires du marché du
travail devraient ainsi chercher à accroître la présence et la représentativité
de ces groupes, dont les personnes handicapées.
J'accélère.
Je vous souligne qu'actuellement aucun membre de la Commission des partenaires
du marché du travail ne représente les personnes handicapées. On fait
une demande d'ajouter deux membres, un membre votant et non votant, pour que la question de la
représentativité de ce groupe soit présente au cours des échanges de la
commission et des travaux de la commission.
Très
rapidement, sur le programme Objectif emploi, ce qu'on veut vous dire, c'est
sûr que la majorité des personnes handicapées,
d'après notre connaissance, sont plutôt prestataires du Programme de solidarité
sociale, mais on vous demande de ne
pas exclure des personnes handicapées qui sont prestataires de solidarité
sociale des mesures incitatives à
l'emploi. Certaines ne sont pas en mesure de travailler, mais certaines
souhaitent et pourraient travailler, si elles sont bien soutenues, donc on fait un appel à une ouverture pour
qu'elles puissent participer à ce type de programme là. Bien sûr, on
vous souligne également, là, que certains groupes qui ne sont pas prestataires
de solidarité sociale, certaines personnes peuvent avoir des incapacités et
faire face à certaines contraintes, puis on vous demande de tenir compte de
cette réalité-là.
En
conclusion, je vous dirais que l'office considère le projet de loi n° 70
comme ayant le potentiel pour accroître la participation sociale des
personnes handicapées, c'est notre propos, mais, pour ce faire, le projet de
loi doit inclure, dans une approche
inclusive, des dispositions favorisant la présence et la représentativité de
ces personnes sur le marché du
travail. Ces dispositions permettraient ainsi, en cohérence avec les choix du législateur et du gouvernement, de contribuer à l'atteinte des objectifs
qui ont été fixés de réduire l'écart entre le taux d'emploi des personnes
handicapées et celui de la population sans incapacité. Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, madame. Il vous restait trois
secondes. Alors donc, pour les 14 min 30 s suivantes, je passe
la parole à M. le ministre.
M. Blais : Bien, merci beaucoup. Bienvenue, d'abord, hein, à l'Office des
personnes handicapées du Québec.
C'est intéressant, votre exposé, parce que
ça permet d'élargir un petit peu, là, les horizons. On a débattu beaucoup ici, mais, dans le fond, vous
resituez un petit peu le projet de loi.
Le projet de loi, il
est déposé dans un contexte sociodémographique très particulier, celui où il va
y avoir des emplois disponibles. On n'aurait
pas déposé ce projet de loi, probablement, s'il y
avait 13 % de chômage au Québec, mais c'est plutôt bien loin de ça, là, ce qui nous
attend dans les prochaines années. Il y a une rareté de main-d'oeuvre,
et tout le monde est bienvenu à la table, là, pour apporter sa contribution.
Quand vous étudiez un
petit peu l'évolution du discours des personnes handicapées au Québec sur les 40 dernières années, il y a une évolution,
assez clairement, qui est favorable à l'intégration sur le marché du travail,
on n'est plus dans les années 70, on est quelque part ailleurs. Est-ce que
je me trompe?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert... ou M. Trépanier.
Mme Hébert.
Mme Hébert
(Anne) : Oui. Effectivement, il y a eu une augmentation de la
présence, de la diplomation des personnes handicapées, il y a une plus grande
présence sur le marché du travail, la situation a évolué positivement, et puis
il y a désir encore très fort de permettre d'accroître la participation au
marché du travail.
Mais
il y a deux défis par rapport au travail puis aussi à la pauvreté, là, qui sont
nommés dans la politique À part
entière, c'est... Il y a une volonté, il y a des objectifs clairs, il y a des
moyens clairs qui sont spécifiques, qui s'adressent aux personnes handicapées, mais il y a un défi très, très
important, là, que les politiques générales, que les services généraux s'occupent aussi de cette
clientèle-là. Ce n'est pas toutes les personnes handicapées qui ont nécessairement
besoin d'aller très rapidement vers des
mesures spécifiques, une approche spécifique, il faut voir ça en
complémentarité, tu sais, il faut aussi que
les mesures générales soient adaptées, accessibles à ces personnes-là. Puis
certaines personnes, là, pourraient accéder facilement au marché du
travail, là, sans passer nécessairement par des réseaux spécifiques ou des mesures spécifiques. Il y a un défi là pour
les services mais aussi pour les politiques générales, de toujours
anticiper : Est-ce que ça crée ou
réduit des obstacles? On évite d'en créer, mais il faut que ça contribue à en
réduire. Donc, c'est un peu l'essentiel de notre propos, une invitation
que le projet de loi n° 70, dans des mesures générales, se préoccupe de
cette perspective-là.
Je ne suis pas
certaine d'avoir bien compris toute votre préoccupation, mais il y a aussi une préoccupation qui est peut-être nouvelle qui
apparaît. En dehors de tous les efforts qui se font et qui vont continuer à
se faire, on l'espère, d'une manière plus
concertée et soutenue par les mesures générales pour l'intégration au travail,
il reste qu'il y a des personnes
handicapées qui n'auront pas accès au marché du travail parce qu'ils ne peuvent
pas travailler, et là il y a tout un
défi de réflexion qui nous attend sur comment on peut offrir à ces personnes-là
des meilleures conditions de vie. Et donc il y a un débat, c'est des
préoccupations qui sont émergentes actuellement, et c'est pourquoi...
M.
Blais : Est-ce qu'il y a aussi une évolution, par exemple, du point de
vue d'Emploi-Québec, du point de vue des agents d'aide à l'emploi?
Est-ce que vous entendez des histoires positives ou des histoires négatives par
rapport à des personnes, là, qui se
présentent, qui disent : Écoutez, moi, j'aimerais contribuer; oui, j'ai un
handicap, oui, mais j'aimerais contribuer? Est-ce que la réception est
positive chez Emploi-Québec? Est-ce que les programmes sont satisfaisants, bien
alignés sur les besoins, et est-ce qu'on les offre aussi à la clientèle?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert, M. Trépanier.
• (15 h 20) •
Mme Hébert (Anne) : Je vais commencer, puis M. Trépanier veut compléter. C'est clair,
il faut être prudent, là, dans ce
qu'on entend, ce n'est pas nécessairement représentatif de toute la réalité,
mais ce qu'on entend, c'est que peut-être il y a une réception générale
positive, mais il y a peut-être une tendance à aller rapidement vers des
mesures très spécifiques puis de ne pas utiliser toutes les mesures générales
qui sont offertes à l'ensemble de la population, pour les personnes handicapées, puis que ce serait intéressant... je ne peux pas dire... on n'a pas fait l'étude détaillée, mais
de regarder les mesures générales
d'employabilité, d'accès à l'emploi, de regarder combien de personnes
handicapées en bénéficient. Mais on pense qu'il y aurait un effort
supplémentaire à faire du côté des mesures générales pour qu'elles soient davantage
utilisées par les personnes handicapées.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Trépanier
(Martin) : Bien, j'allais simplement... Excusez. Je peux y aller, M.
le Président?
Le Président (M.
Cousineau) : Peut-être Mme la députée de Fabre.
Mme Sauvé :
...pour votre présentation, merci beaucoup. J'avais deux questions. Combien de
temps je...
Le Président (M.
Cousineau) : Ah! il vous reste 9 min 3 s.
Mme Sauvé : Ça va être beaucoup moins long que ça. Je
voulais... Évidemment, avec la réalité du marché du travail, il
y a évidemment des possibilités,
des opportunités par rapport à des entreprises qui sont, entre autres, dans des secteurs d'activité où il y a de la pénurie de main-d'oeuvre.
Alors, je voulais vous entendre un peu... Tantôt, M. le ministre posait la question
sur l'évolution un peu, je veux vous entendre de façon plus précise sur
l'ouverture des entreprises. Est-ce que
ça a évolué avec le temps? Est-ce que vous sentez que les entreprises accueillent de
façon plus avantageuse qu'avant? Ça, c'est ma première question.
Puis la deuxième question,
c'est par rapport à votre propos sur la présence de représentants à la Commission
des partenaires. Il y a présentement un représentant du communautaire, je
voulais connaître un petit peu votre lien. Puis là je ne suis pas en train
d'évaluer, de vouloir évaluer le lien, mais est-ce que vous avez la possibilité
de vous concerter avec ces représentants-là, que ce soit dans les conseils
régionaux ou à la Commission des partenaires?
Le Président (M.
Cousineau) : M. Trépanier.
M.
Trépanier (Martin) : Un peu comme avait dit Mme Hébert tantôt, il
y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits au niveau du gouvernement pour intégrer les personnes handicapées sur le
marché du travail, le taux de diplomation au niveau collégial a été
multiplié par trois et le taux au niveau universitaire, de diplomation au
niveau universitaire, par deux. Mais il ne
semble pas que ça a fait une différence sur le taux de l'intégration en emploi.
Donc, on se dit, suite à ça, il va falloir parler... L'accueil des entreprises,
je pense qu'il va falloir encore beaucoup travailler sur les représentations sociales, tant au niveau des employeurs et même au
niveau des personnes handicapées. Mais la solution globale à ça, oui, il
faut rajouter dans des programmes des
solutions qui marchent, hein, on a des entreprises adaptées qui vont très bien,
il faut investir, on a un programme CIT qui
est très utilisé, il faut investir, mais ce qu'il faut par-dessus tout pour
arriver à se rendre un peu plus loin, je crois, bien c'est s'assurer
d'une action concertée. Oui, les personnes handicapées vont rentrer dans le
centre local d'emploi, ensuite on va peut-être être référé dans un service
d'aide à l'emploi, un service spécialisé de
main-d'oeuvre, mais il faut que le monde de l'éducation, le monde de l'emploi,
de la réadaptation, tout ça, que ça travaille ensemble. Et, lorsque
Mme Hébert disait dans son allocution, au tout départ, que ça prend des orientations précises dans le plan d'action
national, on aura beau penser le plus beau plan d'action national et la plus
belle philosophie, qui est nécessaire, il
faut que ça ait des répercussions régionales, et, au niveau régional, bien il
faut que ça ait des répercussions
également, les actions, au niveau local, parce que, veux veux pas, on a beau
tout penser au national, une société, ça se modèle par le travail sur le
terrain, et c'est là que ça va se réaliser.
Je
ne sais pas si ça répond à votre question, mais je vais laisser Mme Hébert
pour ce qui est de la représentation de l'office au niveau de la
Commission des partenaires.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Hébert
(Anne) : Au niveau de la Commission des partenaires, on demande deux
représentants, un représentant, là, après
consultation des milieux représentatifs des personnes handicapées et l'office
comme représentant gouvernemental. On insiste parce qu'on souhaite que
ce soit très présent, tu sais, au coeur des préoccupations de la commission. Je
ne dis pas que ce ne l'est pas, que c'est absent, mais on veut que ce soit
renforcé, très présent.
Et
on pense que l'expertise peut être complémentaire, c'est-à-dire que... Et c'est
important d'avoir une perspective intersectorielle,
un peu dans la perspective que disait M. Trépanier que, oui, il y a la
question de l'emploi, mais c'était lié aux questions de la formation,
c'est même lié parfois aux questions de transport, etc., d'avoir une vue
d'ensemble pour... Quels sont les obstacles
sur lesquels on peut agir pour vraiment permettre aux personnes d'accéder au
marché du travail? Ça veut dire aussi
une formation plus adéquate. Aussi, il faut penser à la transition entre les
milieux de formation puis l'emploi, des programmes de développement de
l'employabilité, tout ça.
Donc,
on souhaite qu'il y ait une représentation assez forte pour amener une vue plus
globale sur la question de la participation sociale des personnes
handicapées. Je ne sais pas si ça répond...
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
Moi, je comprends bien dans les propos qu'il y a une demande, dont la solution
n'est peut-être pas encore connue, là, mais il y a
une demande pour qu'on revoie un peu certaines catégorisations à l'aide sociale, hein? On a une catégorisation
«contraintes sévères» qui est assez large. Ce que vous me dites, c'est qu'à
l'intérieur de ça il y a vraiment des personnes handicapées qui ont un
potentiel, qui ont une volonté, et il s'agit simplement de mettre à leur disposition les outils, les possibilités en termes
d'emploi, mais il y en a un autre groupe où, là, l'état des contraintes
est tellement important, ne serait-ce que des problèmes de santé mentale graves
ou autres, là. Comment vous voyez les solutions? Comment vous voyez... C'est
quoi, le modèle que vous proposez, là, pour sortir du dilemme?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Hébert (Anne) : Bon, O.K., on n'a pas un modèle très précis à proposer, on est en début
de réflexion. Dans le cadre de la
mise en oeuvre de la politique À part entière, on a pris un engagement de
pousser plus loin notre réflexion sur la bonification du soutien au
revenu avec le ministère de l'Emploi et Solidarité sociale, puis on accueille
aussi très positivement le futur chantier sur le revenu minimum garanti dans
cette perspective-là.
Mais, dans un
mémoire qui avait été déjà déposé à une précédente commission parlementaire, ce
qu'on disait, c'est qu'il faudrait peut-être... il faut faire, oui, ces
distinctions-là, puis, pour les gens qui ont des contraintes sévères mais qui souhaitent travailler, qui ont des possibilités, il
faut qu'il y ait un traitement différencié puis peut-être des assouplissements
qui peut-être parfois leur permettent de travailler à temps partiel, de faire
certains passages, d'avoir certains revenus, d'investir dans la formation, donc
des assouplissements dans les règles actuelles.
C'est sûr, le
grand défi de la réflexion, là, où il y a certaines hypothèses qui sont
envisagées puis sur lesquelles on n'a
pas fini notre réflexion, c'est pour les personnes qui ne peuvent pas accéder
au marché du travail. Est-ce qu'on les garde
dans un programme de solidarité sociale, on pense à un autre régime pour eux?
Quelles sont les conséquences? La difficulté
d'identifier ce groupe de population là très clairement, sans... Parce qu'une
fois qu'ils sont identifiés les passages ne sont plus possibles. Ça pose un certain nombre de questions, ces
questions-là nous préoccupent, on est conscients de ça, mais on
voudrait, avec le ministère, pousser plus loin ces réflexions-là.
Mais on n'a
pas encore abouti notre réflexion pour vous proposer un modèle, mais, vous
voyez, ce qu'on dit, c'est qu'il faudrait que ce soit plus souple pour
les prestataires de solidarité sociale qui peuvent et qui veulent travailler.
Et souvent on leur offre peut-être un emploi
à temps plein, mais le temps partiel, là, c'est une solution qui pourrait être
très intéressante pour bon nombre de ces
prestataires de solidarité sociale. Mais ça suppose aussi certains
accommodements.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre, il reste 1 min 30 s.
M.
Blais : Oui. Vous avez commencé en disant, bon : Il y a un
progrès important, c'est la possibilité d'avoir un revenu de fiducie, là, qui n'est pas, disons,
coupé, là, sur un chèque de prestataire. Je pense que c'est une demande
que vous faisiez depuis longtemps.
Vous avez eu
l'occasion d'y réfléchir aussi, aux bénéfices nets mais aussi peut-être à
certains inconvénients en termes d'employabilité ou d'incitation au
travail. Comment vous voyez cet aspect-là des choses?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert. Une minute.
Mme Hébert (Anne) : Je cherche
comment je vais résumer ça en une minute. Mais c'est ça, je comprends la préoccupation, c'est qu'il ne faut pas mettre ces
personnes-là dans une situation où il n'y a pas d'intérêt, il n'y aura
pas de gain à aller sur le marché du
travail, hein, mais il faut les aider... Là, je ne suis pas très claire dans ma
réponse, mais l'idée, c'est à la fois
de réduire certains obstacles, certains obstacles dans la capacité d'accéder à
l'emploi, mais aussi de leur permettre
d'avoir quand même une certaine sécurité financière, parce que, prendre un
emploi à temps partiel, la sécurité n'est
pas toujours là, là. Il ne faut pas les mettre dans des situations difficiles,
ils vivent déjà certaines situations difficiles. Donc, c'est essayer de trouver des solutions qui permettent à la fois
d'assurer une certaine stabilité, sécurité mais d'avoir des incitatifs
puis un soutien suffisants pour permettre ce passage-là.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme Hébert. Alors, je passe maintenant
la parole au représentant de l'opposition officielle, le député de Saint-Jean.
M. le député, vous avez 8 min 45 s.
• (15 h 30) •
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Merci à vous de venir nous présenter votre point de vue et
votre mémoire.
Je vous écoute parler, vous n'êtes pas le
premier groupe à venir nous dire qu'effectivement il faut avoir une certaine ouverture pour les personnes handicapées.
À première vue, on pourrait penser que ce n'est pas intéressant ou ils
ne désirent pas être partie prenante du programme Objectif emploi, mais, quand
on y réfléchit, effectivement, un grand nombre
de personnes handicapées au Québec veulent contribuer, désirent apporter leur
contribution. Et c'est là que toute la question
de l'adaptation pas juste physique des lieux de travail mais aussi des
horaires, des tâches, de la façon de faire... Les nouvelles méthodes de travail, on le voit maintenant avec Internet,
avec les communications, bien du travail peut être fait aussi même de la maison, ne serait-ce que
juste de la correction de textes, de la traduction, peu importe. Souvent,
ces gens-là ont une connaissance très
pointue des technologies, dû à leurs handicaps ont dû développer des habiletés,
etc., donc, effectivement...
Mais je
comprends de votre recommandation, du moins une des dernières recommandations
de votre mémoire... Vous mentionnez que vous ne souhaitez pas que les
nouveaux prestataires du Programme de solidarité sociale soient automatiquement
assujettis au programme. Vous souhaitez une certaine ouverture, cependant, pour
que ceux qui le désirent, donc pas d'obligation, mais ceux qui le désirent
puissent en faire partie et bénéficier du programme Objectif emploi. C'est ce
que je comprends?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
Mme Hébert
(Anne) : Tout à fait. La
nuance qu'on ferait, c'est qu'on fait le constat, là, par rapport aux
enjeux qui se sont dits sur ce programme-là...
Nous, là, c'est moins un enjeu pour notre population, parce qu'on pense que la
majorité des personnes handicapées sont
prestataires de la solidarité sociale, donc ils vont être un peu exclus de
l'obligation de participer. Ce qu'on vous dit, c'est que certaines
d'entre elles souhaiteraient bénéficier de mesures incitatives, et il ne faudrait pas les exclure. Surtout les nouveaux
prestataires, on devrait leur offrir des mesures incitatives pour
participer au marché du travail.
M.
Turcotte :
La recommandation suivante que vous mentionnez, vous proposez que «les
prestataires du programme d'aide sociale
ayant un enfant handicapé à charge ainsi que ceux agissant à titre de proches
[aidantes] — de proches
aidants, mais c'est souvent proches aidantes, malheureusement — et étant considérés comme ayant des
contraintes temporaires
à l'emploi puissent également être exemptés du programme Objectif emploi pour
la durée de leur contrainte». Est-ce
que c'est ça que vous mentionniez tantôt, que vous avez un peu effleuré, quand
vous dites qu'il y a des gens qui actuellement ne sont pas reconnus
ayant des contraintes ou des contraintes sévères mais qui devraient être
considérés comme tels? Vous avez effleuré un
peu la question lors de la réponse au ministre, j'aimerais que vous clarifiiez,
là-dessus, sur votre position.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Hébert (Anne) : Quand on parle, là, de la situation des parents qui ont un enfant
handicapé à charge ou un proche
aidant, là, c'est sûr que ce ne sont pas des personnes handicapées elles-mêmes,
mais, pour nous, compte tenu du besoin
de soutien, surtout dans les premiers mois, dans la première année de
l'arrivée, c'est important qu'on considère ces contraintes-là, ces personnes-là n'ont pas la même disponibilité pour
participer à un programme d'employabilité. Donc, on voulait sensibiliser à cet état-là. C'est une
situation assez... c'est une question émergente, là, il y a beaucoup de
parents d'enfants handicapés qui nous disent : On a besoin d'être soutenus
dans la prise en charge, et donc on fait appel à la considération de cette
situation particulière.
Par contre, ce que
j'ai effleuré tout à l'heure, c'est que, sans que ce soient nécessairement des
personnes handicapées, bien il y a des personnes qui ont des incapacités, qui
pourraient être des nouveaux prestataires de l'aide sociale, qui ne sont pas nécessairement, tu sais, la population, là,
couverte par nos responsabilités, mais il faut aussi, dans l'évaluation des contraintes, dans la participation
au programme Objectif emploi, tenir compte que, quand il y a un certain
type d'incapacité, même si elles ne sont pas significatives et persistantes, ça
demande certaines considérations, ça amène une certaine forme de contrainte,
puis on faisait juste un appel à bien évaluer l'ensemble de leur contexte.
M.
Turcotte :
Est-ce que vous avez des exemples de ça?
Mme Hébert (Anne) : Pas très précis, parce que, comme je vous dis, ce n'est pas tout à fait
la population avec laquelle on transige, mais je vais vous donner un
exemple qui... porté à mon attention dernièrement, une personne malentendante dont le niveau d'audition est quand
même satisfaisant, la personne peut se débrouiller. Elle a des services. Elle ne serait pas nécessairement reconnue au
sens de la loi comme une personne
handicapée, mais elle a quand même des incapacités. Et ces
incapacités-là, qui ont peut-être été corrigées, vont amener quand même
certaines difficultés puis certaines
contraintes, il y a parfois une certaine réserve d'embaucher des gens
qui ont des difficultés d'audition, il y a comme un peu une réticence parfois des employeurs, il faut
les sensibiliser. Il peut y avoir aussi besoin d'une certaine forme d'accommodement dans les outils de travail, dans les outils de
transaction avec les collègues de travail, donc ça demande une volonté
d'accommoder puis des moyens. Bien, c'est cette population-là qui est un peu
entre deux qu'on souhaite qu'on prenne en compte leur contexte.
M.
Turcotte : Il y a une question de délai aussi dans
l'application du programme, un certain nombre de temps qui peut être alloué dans les parcours soit
d'employabilité, etc. Je vous écoute. Moi, ma grand-mère est pratiquement
aveugle. À l'époque, elle était productrice
agricole, elle était sur la ferme, elle faisait le train à tous les matins, à
tous les soirs avec mon grand-père,
même si elle était pratiquement aveugle, parce qu'elle avait développé des
réflexes et des habiletés pour être capable de se situer, de se rendre à
la ferme, dans la ferme où est-ce que les choses étaient, etc. Ça prend du
temps, cependant, pour développer ça, ce qui
n'est pas nécessairement le cas si on y va rapidement ou à la hâte. Peut-être
qu'elle aurait pu être considérée comme apte
au travail, parce qu'elle avait toutes les autres habiletés pour l'être, mais,
dans un cas où on lui impose un
certain délai pour... si tu ne termines pas ton parcours d'employabilité ou si
tu n'es pas en maintien en emploi,
peu importe, bien tu seras pénalisé... Est-ce qu'on peut aussi avoir une
réflexion sur la durée de ces programmes?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Hébert (Anne) : Peut-être, là, je suis un peu prudente dans mes propos, parce que ce
n'est pas tout à fait la population
qu'on vise, hein, par nos commentaires, là, des gens qui ont... Mais, si c'est
une personne aveugle, par exemple, elle aurait des bonnes chances d'être
prestataire de la solidarité sociale, de l'aide sociale.
M.
Turcotte :
Je comprends, mais avec... Vous avez mentionné certaines...
Mme Hébert
(Anne) : Mais il y a des gens qui vivent... Ce qu'on veut vous dire,
certains types de difficultés associées, oui, dans la souplesse, dans les
accommodements, la durée pourrait être prise en considération.
M.
Turcotte :
Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Cousineau) : Il vous reste 1 min 13 s, M. le
député, le temps d'une question.
M.
Turcotte :
O.K. En ce moment, est-ce que tous les gens qui devraient être reconnus ayant
des contraintes sévères sont reconnus? Est-ce qu'il y a, selon vous, une
mauvaise évaluation ou une non-reconnaissance de cas qui devraient être
reconnus?
Mme
Hébert (Anne) : Je vais être
très franche, ce serait très prétentieux de la part de l'office de statuer sur
la qualité des évaluations actuellement sur
les prestataires, mais les échos généraux qu'on en a, c'est qu'en général on
tient compte, là, des gens qui ont des incapacités importantes, on tient compte
de leur situation, puis ils sont prestataires de
la solidarité sociale. Mais il se peut qu'il y ait certains cas particuliers,
comme on a évoqué, là, qui échappent à tout ça puis qu'il y ait certaines difficultés, là, on fait appel à l'ouverture.
Mais ce qu'on entend surtout, c'est que les gens qui sont prestataires de la solidarité sociale ne
veulent pas être oubliés, ça, on l'entend beaucoup, puis je peux l'affirmer
très fortement, qu'il y a un effort à faire pour permettre à ces gens-là
d'accéder au marché du travail, de les accommoder.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, madame.
M.
Turcotte : Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, maintenant, je vais passer la
parole au représentant du deuxième groupe d'opposition, M. le député de
Drummond—Bois-Francs,
pour 5 min 45 s.
M.
Schneeberger :
Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, je voudrais vous souhaiter la
bienvenue, parce que c'est un organisme qui est dans mon comté, alors on
les connaît très bien.
J'aimerais
tout d'abord peut-être un petit peu ventiler. Vous parliez de chiffres tantôt,
là, si j'ai bien compris, 39 %, mais, admettons, si on prend tous
les gens qui ont un handicap, il y en a qui ont des handicaps sévères, il y en
a plus légers, le 39 %, là, ça inclut tout le monde?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
• (15 h 40) •
Mme Hébert
(Anne) : Si je me rappelle
bien des chiffres, là, tout le monde, ça veut dire de 15 à 65 ans, là,
ça exclut les personnes de plus... oui, quel
que soit le type, la sévérité de l'incapacité. Mais la sévérité de l'incapacité
ne doit pas être le seul facteur pris
en compte, parce que parfois une incapacité de même sévérité, la formation, la
personnalité, d'autres facteurs, le contexte social, jouent, puis, tu sais, il
faut faire attention de trop faire l'équation «incapacité» égale «incapacité de travailler», il y a d'autres
éléments qui jouent. Mais, pour répondre précisément à votre question,
dans le 39 %, c'est quelle que soit la gravité de l'incapacité.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger : Là,
j'ai bien compris, là, avec les conversations avec le ministre, la première opposition,
de dire : Nous, là, on veut faire
partie intégrante, ce n'est pas parce
qu'on a un handicap sévère que, tu
sais... On pourrait être... on
voudrait aussi pouvoir faire partie du programme, si on le veut, et autres. O.K. Ça,
c'est accepté, admettons, le ministre est de bonne foi, on y va. Une fois cela dit, une
fois que la personne a fait tout son processus, est rendue au marché du travail, c'est quoi, les problématiques? Parce qu'on s'entend, il est là, le... Là, c'est d'arriver à
une compagnie, peu importe, là, de le
prendre comme employé, avec les problèmes, bien, les problématiques... oui, c'est des problématiques, là, tu sais, de chaise roulante ou autres. C'est quoi, les mesures actuellement qui sont en place? Puis qu'est-ce
qui devrait être amélioré aussi pour
justement permettre à ces gens-là... Là, tu sais, je connais les problèmes de
transport, premièrement, pour se rendre au travail. Ça, on le sait. Mais
outre ça?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
Mme Hébert
(Anne) : Je vous disais
qu'il y avait une stratégie d'intégration et de maintien en emploi qui
avait été élaborée puis déployée, puis là on approche d'une deuxième phase de
mise en oeuvre de cette stratégie-là. Puis cette stratégie-là avait soutenu des
programmes qui sont très intéressants au Québec, le contrat d'intégration au
travail, les entreprises adaptées, qui sont
des programmes, là, une forme... c'est varié, là, ils ne répondent pas tout à
fait aux mêmes clientèles, mais une
forme d'accommodement, qui peuvent permettre aux personnes handicapées
d'intégrer le marché du travail et de
s'y maintenir. Ça, c'est des mesures extrêmement intéressantes. Puis il y a au
Québec aussi une expertise assez variée dans l'intégration qui doit être
mise à profit dans tous ces travaux-là, qui l'est, puis on incite l'ensemble
des partenaires à continuer de faire leurs efforts. Moi, je pense, tout le
réseau des services spécialisés de main-d'oeuvre, il y a beaucoup d'expertise
au Québec par rapport à l'intégration au travail, mais il faut continuer les
efforts.
Je rappelle
mon message. Tout ça est très bien, l'expertise est là, mais je rappelle le
message qu'on a voulu vous dire sur
le projet de loi n° 70 : On espère que les mesures générales soient
aussi plus ouvertes aux personnes handicapées. On a une très bonne base dans l'approche spécifique, et je ne dis pas
qu'il n'y a pas des défis, puis c'est les défis auxquels va s'attaquer la deuxième phase de la stratégie,
on s'est déjà prononcés, on a déjà émis un certain nombre de commentaires
au ministère sur les défis de la deuxième
phase, là, par rapport, entre autres, à des leviers particuliers, mais ici on
est surtout venus vous dire : Il faut que les mesures générales,
que les services de première ligne, je dirais, les mesures générales soient aussi ouvertes aux personnes handicapées
dans un esprit de complémentarité, il faut que tout ça se tienne, se
renforce et soit complémentaire. J'essaie de
vous dire... Ça, c'est un défi important, puis on ne le répète pas assez. Juste
miser sur les mesures spécifiques...
c'est important, puis on veut que ce soit consolidé, mais on veut aussi que cet
aspect-là... Parce que ce n'est pas
toutes les personnes handicapées qui ont besoin nécessairement d'utiliser ça,
puis il ne faut pas, je dirais... Pour donner plein potentiel aux
mesures existantes, comme les entreprises adaptées, le contrat d'intégration au
travail, il faut que
ce soit la bonne population, qui a besoin de ces mesures-là, qui les utilisent,
et parfois peut-être que l'utilisation des mesures générales aiderait à un plus grand déploiement des mesures
spécifiques. C'est pour ça qu'on insiste que, dans le projet de loi n° 70, là... les plans d'action
et des objectifs de mesure puis de réalisation pour venir compléter,
consolider, soutenir les efforts qui vont se faire dans le cadre de la
stratégie nationale.
Le Président (M. Cousineau) :
Une petite question rapide, il reste 30 secondes.
M.
Schneeberger : Oui.
Est-ce que vous pensez qu'on devrait investir au niveau de l'acceptabilité
sociale? C'est-à-dire, tu sais, tout le
monde va dire : Ah oui! je vais engager un immigrant, mais finalement ils
ne se font pas engager. Tout le monde va dire : Ah! bien oui,
j'engagerais un handicapé, mais finalement ça ne se fait pas. Tu sais, devant
la caméra, on le dit, mais derrière la
caméra ce n'est pas la même chose. Est-ce que vraiment on devrait investir là-dedans
pour démontrer, oui, ce n'est pas parce
qu'on a un handicap que finalement on ne peut pas être productif puis qu'on ne
peut pas avoir de bonnes idées puis aller de
l'avant, là? Peut-être, oui, il y a des contraintes, certainement, mais, tu
sais, je veux dire, c'est parce que ces gens-là, ils veulent se rendre
disponibles pour la société, là.
Le Président (M. Cousineau) :
Réponse très rapide, Mme Hébert, s'il vous plaît.
Mme Hébert
(Anne) : Les mesures de sensibilisation sont toujours
intéressantes, bienvenues, intéressantes, il faut toujours
qu'elles soient renouvelées, mais elles ne sont pas suffisantes à elles-mêmes.
C'est-à-dire, si elles ne sont pas soutenues, complétées par des mesures d'accommodement,
d'accès à des services... L'employeur, souvent, il a bonne foi, mais il
ne sait pas comment faire, comment... Donc, il faut qu'il y ait accès aux
services.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, madame. Merci, Mme Hébert. Alors, moi, je dois tenir le
temps, là. Mme la députée de Gouin pour les trois prochaines minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Bonjour. Donc, si je vous comprends bien — je vais faire du pouce sur ce que dit mon collègue — il ne saurait être question de geler ou, encore
pire, diminuer les fonds alloués à tous les programmes d'intégration au
travail qui permettent justement à des employeurs d'adapter le milieu de travail à
l'embauche de personnes handicapées?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
Mme Hébert
(Anne) : C'est les propos
qu'on a tenus dans le conseil
d'administration, même émis dans
certains documents, là, dans le cadre de la stratégie nationale. Cependant,
puis j'insiste pour le dire, c'est que ces mesures-là elles-mêmes, même si on les consolide, même si on investit beaucoup,
ne suffiront pas, il faut les optimiser puis il faut bien qu'elles soient centrées sur l'objectif, sur ce
qu'elles visent. C'est pour ça... D'où l'importance — je
vais le répéter parce que c'est un message,
pour nous, très important — que les mesures générales soient aussi accessibles aux
personnes handicapées puis adaptées, parce
qu'elles vont peut-être permettre à plus de personnes handicapées
d'accéder à des mesures, parce qu'il y a des personnes qui n'auront pas à les
utiliser, si elles ont accès par le marché du travail par d'autres mesures.
Mais là, pour
vous donner un ordre de grandeur, tout ça, dans tout ça, on ne sait pas, mais
l'idée, c'est... Ce sont des mesures importantes, des mesures spécifiques,
il faut les consolider, mais il faut regarder aussi une optimisation de
l'ensemble des moyens, il faut que ce soit complémentaire.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la députée.
Mme David
(Gouin) : Je pense que nous sommes tout à fait d'accord avec le fait
que l'intégration, ça passe aussi par le fait d'être intégré aux mesures
générales, si on veut être sérieux.
Mais je vais quand même vous poser une question
spécifique. Il existe encore aujourd'hui un programme qui s'appelle PAAS
Action, que vous connaissez certainement, qui a vécu de nombreuses coupures et
de nombreuses restrictions quant à son
utilisation, ce qui fait, par exemple, que, dans mon comté, un organisme comme
Compagnons de Montréal a des places
littéralement vides, alors que ces places seraient vacantes pour accueillir des
personnes, par exemple, ayant une
légère déficience intellectuelle, qui pourraient travailler une vingtaine
d'heures-semaine, et qui reçoivent, je pense,
quelque chose comme 130 $ ou 150 $ de plus par mois pour ce faire. On
s'entend que ce n'est pas la fin du monde, mais ça donne à ces personnes-là une valorisation intéressante.
Pensez-vous que ce type de programme doit se poursuivre?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
Mme Hébert (Anne) : Oui, là, je suis
un peu prudente, je ne connais pas, tu sais, tout le détail autour de ce programme-là, mais on a une très grande
préoccupation, ce qu'on appelle, sur le soutien aux activités
socioprofessionnelles, là. Là, on ne parle
pas d'emploi, dans ce cas-là, mais on parle d'activités valorisantes, on parle
aussi de transition entre la fin de
la scolarisation... La scolarisation se termine à 21 ans. Qu'est-ce qu'on
fait pour les personnes qui ne pourront pas accéder au marché du
travail? Donc, il faut qu'il y ait des activités qui leur permettent de se
développer, de développer leur potentiel, de
développer leur réseau social. Donc, c'est sûr que ce programme-là est
intéressant, mais on travaille dans certaines régions avec des organismes
communautaires pour voir qu'est-ce qu'on pourrait développer comme
modèle, comment ça pourrait être soutenu pour qu'il y ait plus d'activités
socioprofessionnelles.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme Hébert.
Alors, je vous remercie, Mme Hébert, Mme Delvoye,
M. Trépanier et Mme Vanasse. Merci de votre participation.
Je suspends
pour quelques instants et je demande au prochain groupe de s'installer
rapidement, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 15 h 51)
Le Président
(M. Cousineau) :
Donc, nous recevons le Regroupement des organismes spécialisés pour l'emploi des personnes
handicapées, alors Mme Ferland et M. Giulione. Alors donc, vous avez
10 minutes de présentation, et puis par la suite nous passerons à la période
de questions.
Regroupement des
organismes spécialisés pour
l'emploi des personnes handicapées (ROSEPH)
M. Giulione (Joseph) : Merci, M. le
Président. M. le ministre, membres de la commission. Premièrement, j'aimerais dire... «Hang on a second. I have to speak in French, so... I'm sorry.» Je vais vous parler en français.
Donc, pour commencer, j'aimerais dire merci de la part de ROSEPH de nous
inviter à présenter notre mémoire.
D'une part,
qui est le ROSEPH? Le ROSEPH est un regroupement de 24 organismes de services
spécialisés de main-d'oeuvre qui couvrent toutes les régions du Québec.
«Basically», nous, notre rôle est très simple, on aide des personnes
handicapées à intégrer et se maintenir en emploi. La majorité de nos membres,
c'est des organismes qui existent de plus de
30 ans, on a développé une
expertise à ce niveau-là, et je vous dirais que notre mode de
fonctionnement nous permet de bien répondre à la clientèle qui nous fréquente.
Nous, au
ROSEPH, on accueille à peu près 10 000 personnes par année.
Là-dessus, la chose que je peux vous dire, c'est qu'on a une offre de services qui est assez variée, y inclus
qu'est-ce qui est traditionnellement vu dans les organismes de main-d'oeuvre, donc l'évaluation,
l'orientation, la recherche d'emploi, l'aide au choix professionnel, mais on
ajoute à ça toute la dimension de services
d'intégration et maintien en emploi. Ça, ça veut dire autant du soutien à
l'employé, une fois qu'il est en
entreprise, et le soutien à l'employeur pour faciliter cette transition-là. La
grosse partie, la grande partie de notre
clientèle, c'est des personnes quand même qui ont des limitations
fonctionnelles assez importantes, mais ça n'empêche pas qu'elles ont une
place dans le marché du travail, et les résultats qu'on a d'année en année
montrent que c'est des personnes qui peuvent être très productives et très...
des bons contributeurs au niveau de la société et au niveau de l'emploi. Mais
j'aimerais quand même souligner que les personnes qui viennent chez nous, c'est
des travailleurs qui ont des handicaps, donc qu'est-ce qui est... avant tout
c'est des travailleurs, et c'est cette partie-là qui est vendue aux entreprises
et c'est ça que les employeurs achètent chez nous, ils achètent des employés,
ça veut dire que c'est des personnes qui
viennent répondre à leur manque de main-d'oeuvre. Il n'y a pas d'acte de
charité, c'est un échange de services tout le temps.
J'aimerais quand même vous donner quelques
petits... pas des statistiques vraiment, mais qu'est-ce qui est important, chez nous, c'est de savoir qu'on
dépasse tous les objectifs qu'Emploi-Québec nous fixe, autant au niveau
de l'admission que de placement en emploi.
C'est quand même important de souligner que près de la moitié des
personnes qui sont admises dans nos services,
c'est des prestataires de la sécurité du revenu. Oui, l'office ont bien
mentionné qu'il y a beaucoup de personnes handicapées qui ont des
contraintes à l'emploi, mais il y a une bonne partie aussi que c'est des
prestations de sécurité du revenu comme tous les autres, et, pour nous, c'est
important que ces personnes-là ont droit à
tous les services qui sont disponibles par le biais du panier de services
d'Emploi-Québec. Et en général ça va assez bien à ce niveau-là, mais il
y a toujours place à l'amélioration.
Donc, au
niveau de la situation
des personnes handicapées sur le marché
du travail, comme vous avez
entendu de la part de Mme Hébert avant
nous, il y a quand même une stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en
emploi des personnes handicapées, parce
que l'écart entre les personnes au niveau du taux d'emploi, des
personnes avec incapacité vis-à-vis
des personnes qui n'ont pas d'incapacité, est près de 30 %. On a eu une
stratégie qui visait à réduire ce facteur-là par 50 %. On n'a pas
atteint cet objectif-là, mais il y a toujours espoir. Si vous vous souvenez, la
stratégie, elle était supposée d'être qu'on
va atteindre l'objectif de 50 % pour l'année 2018, donc il nous en reste
quand même deux ans et même un petit
peu plus. Donc, à ce niveau-là, ça va bien, mais on pense qu'on peut faire
beaucoup mieux. Et pourquoi que les personnes handicapées ne sont pas en
emploi, bien en même temps on a besoin de mesures, on a besoin de s'assurer que la personne qui veut aller
travailler peut avoir les accommodements nécessaires pour faciliter pas juste
son intégration mais surtout son maintien en emploi.
J'aimerais passer quelques commentaires et faire
des recommandations au niveau du projet de loi n° 70. Je parle très vite.
Donc, pour nous, «you know», on ne pourra jamais
être contre une loi qui veut inciter le monde et faciliter l'intégration à l'emploi, ça, c'est évident. D'entrée de jeu,
nous tenons quand même à souligner qu'on n'est pas très forts sur l'idée d'obliger le monde de faire
des choses, donc on pense que ce serait bien qu'il y ait une certaine
dimension qui est, je dirais, volontaire. Si on regarde les conditions, pour
nous, une condition gagnante, ce serait... le programme
doit être volontaire et ne doit pas comporter de
disposition punitive visant l'appauvrissement des participants. Il y a une couple de raisons pour ça, mais, comme
le gouvernement va procéder par voie réglementaire pour préciser ses
intentions concernant les dispositions punitives, il est, à ce stade-ci,
difficile de commenter, puisque le projet de loi soulève davantage de questions que de réponses. Donc, on ne sait pas
trop, trop où est-ce que vous voulez aller avec tout ça. Mais une chose est claire : quand
on parle de dispositions punitives parce qu'il y a un bris au niveau du plan d'intégration, exemple, mais, quand quelqu'un...
Une personne handicapée, si ses symptômes sont plus intensifiés pendant la période de son plan d'intégration, est-ce qu'on
va commencer à punir une personne handicapée à cause de son handicap? Ce
serait, à notre avis, une forme discriminatoire. C'est parce que ce n'est pas
parce qu'ils ne veulent pas participer, c'est que par moments ils ne peuvent
pas participer, c'est aussi simple que ça.
Nous, notre
façon de fonctionner, c'est que le plan d'intégration qu'on fait, il permet à
la personne d'avancer et de reculer, mais surtout qu'on s'en va toujours
vers le même but. Le but, c'est l'emploi. Le but, ce n'est pas de l'occupationnel, mais des fois, pour se rendre, ça
prend différentes étapes, et il faut donner la chance au coureur, et il
faut surtout lui donner de l'espace pour respirer quand la maladie fait qu'il
n'est pas aussi fonctionnel qu'il devrait être. Ça arrive. Il y a des hauts
puis des bas. «All right?»
Donc, pour
nous, ce serait important que toute la notion de la loi, au niveau de
l'application, il y ait une certaine souplesse qui est adaptée aux
incapacités de la personne. Ça nous permettrait de travailler avec plus de
monde.
On a aussi un
problème au niveau de qui qui est visé par la loi. Quand on parle de premiers
arrivants sur l'aide sociale, bien un
premier arrivant sur l'aide sociale peut être une personne qui a travaillé
pendant 30 ans, qui a perdu son emploi,
qui a passé son assurance chômage et qui tombe sur l'aide sociale, c'est
malheureux, ça arrive, mais ça peut être aussi la personne qui est un
jeune qui a un trouble, qui a des incapacités et donc qui est en centre
jeunesse à partir de l'âge de 12 ans,
il frappe l'âge de 18 ans puis il sort du centre jeunesse, il a son
premier chèque. Avec cette clientèle-là, ça prend une adaptation assez importante, ça prend une flexibilité, ça
prend la possibilité de laisser la personne fonctionner à son aise et avancer puis reculer. Des fois, pour
atteindre le marché du travail, il faut être capable de prendre un pas
en arrière, et, avec des jeunes en
difficulté, c'est plus facile si la mesure est flexible. Et, si on pense qu'il
va rentrer dans un cadre
prédéterminé, malheureusement, nous, on craint que ces personnes-là vont tomber
dans les craques puis ils vont se ramasser dans une situation pire
encore qu'être sur l'aide sociale.
Une voix : ...
• (16 heures) •
M.
Giulione (Joseph) : «OK, I'm going now.» Pour nous, la deuxième
condition gagnante demeure que, oui, inciter
le monde à aller travailler, c'est important; ça prend des outils. Vous en avez
entendu parler, il y a quand même des mesures intéressantes ici, au
Québec, pour faciliter l'intégration en emploi des personnes handicapées. Les
personnes handicapées ne doivent pas être
limitées juste aux mesures pour personnes handicapées, elles devraient avoir
accès à toutes les mesures. C'est
toujours la notion de la bonne personne pour la bonne mesure, peu importe si
elle est handicapée ou non.
À ce niveau-là, il y a quand même
quelque chose qui est un petit peu inquiétant. Quand nous, on
voit, exemple, que, sur les 400 000, au-dessus de 400 000 personnes
handicapées de l'âge de travail au Québec, il y a à peine 10 %, à
peine 5 % qui vont être dans des
mesures ou dans des activités vers l'emploi, ça laisse quand même beaucoup de
personnes qui ne sont pas dans des
mesures vers l'emploi ou qui ne sont pas en emploi. Je pense qu'il y a quelque
chose à changer là-dedans.
Il y a aussi
le fait que nous, on vit une réalité, au niveau du ROSEPH, pas juste qu'on
dépasse qu'est-ce qu'Emploi-Québec
nous demande au niveau des admissions, on a plusieurs membres qui doivent
travailler avec des listes d'attente, donc... «OK, I'm going to go
really quick.» Donc, à ce niveau-là, je veux vous dire que, pour nous,
qu'est-ce qui est prioritaire, c'est essayer
d'offrir des services au plus de monde possible, donc peut-être il
faudrait regarder à augmenter les cibles,
et augmenter les places, et surtout augmenter les investissements au niveau de
mesures d'accommodement dans le milieu de
travail comme le contrat d'intégration au travail que l'office a déjà parlé,
donc je ne vais pas vous faire le portrait.
Et, en
troisième lieu, j'aimerais parler aussi du fait qu'au niveau de
l'article 83.3 on parle d'un plan, que chaque personne doit avoir
un plan d'intervention. Avec l'expertise qu'on a et qu'est-ce qui se passe au
niveau... je ne suis pas convaincu qu'au
niveau des CLE les agents sont en mesure de travailler et faire une bonne
évaluation des besoins de la personne. Ce serait bien que les plans
d'intégration, bien, sont faits par des experts qui travaillent au niveau des
personnes handicapées. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, vous pourrez
poursuivre lorsqu'on va vous poser des questions, vous allez sûrement
avoir l'occasion de placer des éléments de votre mémoire. Alors, M. le ministre
pour les 14 prochaines minutes.
M.
Blais : Bienvenue, d'abord, et merci beaucoup pour la présentation. Je
pense que vous ajoutez un point de vue très
intéressant, là, c'est-à-dire à la fois la réussite, parce qu'on peut bien le dire,
là, il s'agit d'une réussite dont on parle, là, plusieurs contrats
d'intégration au travail qu'on... et je vais revenir là-dessus pour dire quel
est le prochain pas.
Mais avant je
voudrais faire quand même un commentaire ou une correction, là, sur ce que vous avez dit.
Vous avez dit : Il faut surtout éviter,
avec une personne handicapée, là, d'avoir des mesures coercitives alors que la
personne n'est pas elle-même
capable de surmonter son handicap, là, pour différentes raisons. D'abord, Objectif
emploi ne s'adresse pas directement, vous le savez, aux personnes handicapées, il s'adresse à des personnes aptes sans
contraintes. Cependant, et je vous
rejoins, cependant même une personne apte, prenons un jeune, par exemple, un premier demandeur jeune, peut avoir des difficultés
multiples qui fait en sorte qu'il n'est pas en mesure d'être employable tout de
suite, il a des problèmes de consommation, il sort d'un centre
jeunesse, a eu des problèmes
récemment, une jeune femme qui aurait eu des problèmes récemment avec la
prostitution, donc un réseau de prostitution. Donc, il faut bien comprendre
qu'Objectif emploi, l'objectif, c'est l'emploi, et le chemin pour y
arriver, puis je pense que vous pouvez en témoigner, le chemin pour y arriver peut être parfois long, et il y a
parfois un travail de préemployabilité sur le savoir-être, sur le savoir-faire,
ne serait-ce que s'assurer que la personne a un logement pour habiter
avant de penser à un emploi ou à un retour aux études.
Donc, ce que je veux vous dire, c'est que, dans
notre approche, il ne s'agit pas, hein, de forcer la note, il faut s'assurer que toutes les étapes, que vous
connaissez très bien, hein, les étapes soient remplies. Et on sait
aussi qu'il y a des reculs, que, pour des progrès, il y a
parfois aussi des reculs, et un recul, ça ne signifie pas qu'il y a
une sanction, hein? Un recul, quand la personne est encore de bonne foi,
quand la personne est volontaire, quand elle veut continuer son cheminement, il n'y a aucune raison de
faire une sanction, mais en autant, bien
sûr, que le cheminement soit encore
là, que la personne se présente et qu'il y a
un travail de fond qui se fasse. Donc, ça, je veux vraiment
essayer de clarifier notre vision des choses. Je pense qu'elle est assez
près du travail terrain que vous faites.
Maintenant,
sur les contrats d'intégration au travail, quelle est la prochaine étape? À
l'origine, c'est fait pour, disons, une
expérience, une expérience assez substantielle, et on voit par la suite que les
gens ont besoin de continuer là-dessus,
hein, que l'intégration à un emploi, disons,
régulier est difficile. Est-ce qu'il
y a eu une évolution là-dessus?
Est-ce que vous êtes plutôt optimistes qu'il y a une évolution
vers les emplois réguliers ou il restera toujours une situation où on aura
des contraintes d'intégration au travail, là, disons, dans des cadres assez
particuliers?
Le Président (M. Cousineau) :
M. Giulione.
M. Giulione (Joseph) : Avant de
parler du CIT, je vais quand même revenir... Il y a une bonne partie des
personnes handicapées qui vont être sur l'aide sociale régulière parce que leur
handicap, leur incapacité ne fait pas d'eux
des personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi, et je pense que c'est
important qu'on voie la personne handicapée...
la diversité des personnes. Donc, autant qu'il y en a qui ont des limités
fonctionnelles importantes, qui vont être
contraintes sévères... Et je vous dirais que, comparé à toutes les autres
provinces, on a quand même une structure, pour ces personnes-là, qui est au-delà de qu'est-ce que sont les attentes, et
c'était, je vous dirais, une évolution intéressante au niveau de la Loi de la sécurité du revenu, mais ça
demeure qu'il y a beaucoup de personnes handicapées qui n'ont pas de contraintes,
qui donc vont faire partie de la loi n° 70.
Et, quand je
faisais allusion aux jeunes dans les centres jeunesse, bien je faisais surtout
allusion aux jeunes qui ont des difficultés, donc c'est des personnes
handicapées selon la loi, qui sont suivies en pédopsychiatrie, «whatever», et donc c'est une clientèle spécifique dans les
centres jeunesse. Et je parle surtout d'eux parce que c'est la clientèle
qu'on va voir dans le ROSEPH. Il y a
d'autres clients dans les centres jeunesse, mais il y a des carrefours, il y a
d'autres choses, il y a d'autres mesures pour ces personnes-là. Là, je
parle plus de la clientèle qui se ramasse chez nous.
Mais, cela dit, quand je reviens au niveau du
contrat d'intégration au travail, premièrement, c'est une mesure d'accommodement. Nous, quand on regarde nos
statistiques, à peu près 10 % des intégrations en emploi qu'on a se
font avec le CIT. Il y avait un temps où
est-ce qu'il y en avait à peu près 20 %. La raison qu'il y en a moins,
c'est parce qu'il y a moins d'argent
disponible pour les contrats, les demandes initiaux. Et une des raisons pour
ça, c'est parce que, depuis la fin du premier cinq ans, on voit que le
budget CIT, bien, il n'augmente pas comme il a été prévu.
Mais, en
arrière de tout ça, la majorité du monde que nous, on intègre en emploi sont
intégrés sans subvention. Donc, les
personnes handicapées, elles n'ont pas besoin nécessairement d'une subvention
pour intégrer le marché du travail, mais,
ceux qui en ont besoin, actuellement il y en a qui pourraient être en emploi
qui ne le sont pas parce qu'on ne peut pas négocier des accommodements
pour eux dans leur milieu de travail.
Donc, actuellement, c'est ça, l'enjeu, et je
trouve que... Cette mesure-là au niveau de l'accommodement, c'est sûr que ça dépend toujours du besoin de
l'accommodement dans le milieu, ce n'est pas une subvention salariale,
et, comme n'importe quel travailleur, une personne handicapée peut évoluer dans
son milieu, et ça se peut qu'à un moment donné
elle n'en ait plus besoin ou elle change d'emploi puis elle n'a pas besoin
d'accommodement dans ce milieu-là. C'est du cas par cas, ce n'est
vraiment pas une mesure... Ce n'est pas la solution à tout, mais c'est une très
bonne mesure pour nous permettre de rentrer dans des entreprises et négocier
des accommodements pour cette personne-là dans une entreprise spécifique.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo : Merci. Merci beaucoup, M.
le Président. Je ne sais pas si le ministre avait d'autres... Parfait.
J'ai pris
connaissance notamment de certaines statistiques que vous nous partagez à même
votre mémoire, qui permettent d'être
optimiste, notamment par rapport au taux de placement en emploi réalisé par les
organismes affiliés à votre
regroupement. Bien, en fait, vous nous expliquez que la cible établie par
Emploi-Québec est de 52 %, et au
cours des trois dernières années, là, jusqu'à l'année 2014‑2015, on parle de
64 %, 61 % et 59 %, donc largement dépassé à ce
niveau-là.
Ce que je
voulais savoir et ce qu'il serait intéressant de savoir, c'est, une fois ces
personnes placées sur le marché du travail,
quelle est en moyenne la longévité, O.K., la... Parce qu'une chose, c'est de
les placer, puis après ça une autre chose, c'est de faire, si on peut dire, la rétention. Donc, ces gens-là ne sont
pas... Parce que, bien sûr, vous parlez, là, des fois de subventions ou de financement d'appoint,
justement, pour faciliter ce placement, mais, une fois qu'ils sont placés, de
quel type d'emploi on parle, de quel genre
d'emploi, à ce niveau-là? Est-ce que c'est contractuel? Est-ce que c'est
permanent? Peut-être élaborer un peu plus sur cet élément-là.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Ferland ou M. Giulione, comme vous voulez.
M.
Giulione (Joseph) : Bien, premièrement, c'est une grosse question.
Nous, d'habitude, au niveau des statistiques
qu'on tient, on regarde la rétention après trois mois, si la personne est
toujours en emploi, et en fin de compte je pense que... je ne l'ai pas tout de suite, mais je pense que c'est à peu
près dans les environs de 60 quelques pour cent, là. Et c'est sûr qu'il y aurait place à faire une...
Moi, je pense, si on veut vraiment explorer ça, ça prendrait une étude où
est-ce qu'on est capable de voir jusqu'où qu'on peut aller.
Si je vire un
petit peu plus au niveau de l'expérience chez nous, le taux de maintien en
emploi est quand même assez intéressant, et c'est à cause du soutien
qu'on offre en emploi une fois que la personne commence à travailler et que le soutien est disponible en autant que la
personne est en emploi. Une chose qu'on trouve aussi qui est très bien appréciée par les employeurs, c'est la présence,
c'est le fait que, quand ils ont des questions, il y a une personne-ressource qui répond, et ce n'est pas pour une période
temporaire. Le soutien, il est offert en autant que la personne est en
emploi, et ça fait que ça nous permet de démystifier et ça permet aussi
d'adapter le milieu pour que la personne peut être mieux performante.
Ça fait longtemps qu'on aimerait faire faire une
étude à ce niveau-là, mais, honnêtement, là, je trouve qu'au niveau du maintien en emploi qu'est-ce qui manque
actuellement, c'est des données probantes. Et la raison qu'on n'a pas la donnée probante, c'est parce
qu'il n'y a pas d'étude de faite, mais on serait très intéressés à
collaborer à ce niveau-là.
• (16 h 10) •
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la députée de Fabre.
Mme
Sauvé : Bonjour. Alors,
bienvenue. Merci pour votre réflexion, votre mémoire. Je connais bien
l'action à Laval, entre autres, d'un de vos membres.
Alors, je
veux vous poser une question, puis ça fait un peu la suite à la réponse que
vous venez de donner à mon collègue.
Évidemment, dans l'accompagnement personnalisé des personnes handicapées, et on
parle des personnes aptes dans le
cadre de la loi, vous avez évidemment développé cette expertise-là très de
proximité avec les employeurs, vous venez
de le nommer. Moi, à mon avis, il y a matière là à explorer un peu ça, parce
que vous êtes porteur de bonnes pratiques en matière d'adéquation, vous travaillez très près avec l'entreprise,
vous êtes même en accompagnement jusqu'à un certain point... même pas jusqu'à un certain point, vous êtes aussi
en accompagnement de l'entreprise. Alors, j'ai le goût de vous entendre un peu sur cette pratique
gagnante que vous avez de proximité entre le chercheur d'emploi, qui est
le chercheur d'emploi handicapé, et l'entreprise, ce qui fait que c'est gagnant
pour tous et ça favorise même le maintien en emploi.
Le Président (M. Cousineau) :
M. Giulione, Mme Ferland.
M. Giulione (Joseph) : «I'll go. You want to go?» Je vous dirais que le service aux
entreprises, c'est la pierre angulaire
de qu'est-ce qu'on fait, parce qu'en fin de compte rentrer dans une entreprise,
s'asseoir avec un employeur, la majorité
des compagnies avec qui on fait affaire, c'est des petites et moyennes
entreprises, donc le fait de s'asseoir avec eux, regarder, on est en
mesure de vraiment voir quelle place que l'employé, notre client, peut occuper
pour que ça fonctionne et pour qu'il garde son emploi.
Qu'est-ce qui
est intéressant, c'est que ça aide autant l'employeur que l'employé, parce que
l'employeur, il en apprend, des
affaires, aussi. Des fois, c'est juste des affaires aussi niaiseuses qu'au lieu
de mettre la personne dans le bout d'une
ligne d'assemblage... de la mettre dans le milieu. Ça fait que l'accommodement
qu'il y a, c'est qu'il a juste à suivre le rythme de la personne à côté
de lui, et il n'y a pas de panique, et il est capable de le faire, puis on n'a
pas besoin de quoi que ce soit au niveau
d'aide financière pour l'entreprise. Tu le mets à la fin de la ligne, il voit
toutes des boîtes arriver, tout à
coup il panique, et ça commence à tomber, là, il panique puis il quitte sa job.
Donc, étant sur place, on est capables d'identifier
c'est quel poste que la personne peut occuper, et, à ce niveau-là, bien, dans
ce temps-là, on va suggérer puis on va travailler avec l'employeur pour
que la personne peut occuper son poste.
Je vous dirais
qu'en général l'entreprise privée est très accueillante de la personne... bien,
je ne peux pas parler pour toutes les
personnes handicapées, mais ceux qui passent... avec qui nous, on fait affaire,
en général, les entreprises privées
sont très accueillantes parce qu'on vient de régler un problème chez eux, là.
On va viser, exemple, des employeurs, des
entreprises qui ont des roulements de personnel très élevés, et nous, on vient
stabiliser ce problème-là chez eux. Et
en fin de compte, oui, peut-être l'employé va fonctionner à 80 % au lieu
d'un autre employé à 100 %, mais 80 % à tous les jours au lieu
d'un 100 % quand ça lui tente, c'est pas mal plus rentable pour
l'entreprise, donc eux autres sont acheteurs.
Et c'est intéressant parce que, pour eux, c'est une entente d'affaires. On
règle un problème de main-d'oeuvre, c'est ça qu'on fait, là.
Et c'est ça
que je pense qu'il est important de comprendre, c'est qu'une personne
handicapée, ce n'est pas une personne qui a des incapacités, qui n'est
pas capable de fonctionner. Une personne qui a un handicap est capable de fonctionner, c'est juste qu'il y en a certains qui
doivent être dans un cadre spécifique pour être bien et fonctionner
comme il faut. Et ça prend quelqu'un qui est capable de faire ce lien-là, et
c'est ça un petit peu, notre rôle.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre. Une minute.
M.
Blais : Vous êtes membres de
la Commission des partenaires du
marché du travail. Je ne vous ai pas
beaucoup entendus sur les changements à venir. Est-ce que vous êtes en parfaite
harmonie avec ce que propose le projet de loi?
Le
Président (M. Cousineau) : Mme Ferland.
Mme
Ferland (Danielle) : Bien,
en fait, on est membres de la coalition et, à ce titre-là, on les a laissés, dans le fond, exprimer, là, ici la position à ce niveau-là.
Nous, on s'est concentrés sur le programme Objectif emploi parce
qu'on se sentait assez interpellés, comme on le disait tantôt, on se sent
interpellés par notre clientèle directement dans ce programme-là, parce que, comme on le mentionnait, il y a à peu près
75 % de notre clientèle qui n'est pas prestataire du Programme
de solidarité sociale, donc c'est 75 % de notre clientèle qui pourrait
être premier demandeur à l'aide sociale. On a à peu près... 35 %, c'est des clientèles qui est sans soutien
public de revenu, donc qui pourraient arriver à l'aide sociale.
Alors,
on s'est concentrés sur ce programme-là, hein, qui est axé sur l'emploi. Alors,
c'est pour ça qu'on a moins examiné, là, les autres enjeux du projet de
loi.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord. Merci, Mme Ferland.
Je dois maintenant passer la parole au représentant de l'opposition
officielle, M. le député de Saint-Jean, pour 8 min 30 s
M.
Turcotte :
Bien, tout d'abord, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui pour nous faire
part de vos recommandations. Étant des gens qui êtes sur le terrain, vous
apportez un éclairage intéressant, bien entendu.
J'aimerais... Étant
donné que je ne sais pas si je vais avoir le temps de poser toutes mes
questions, je vais commencer par la
dernière, comme ça, ça va faire changement. À la page 9 de votre mémoire,
vous rappelez l'article 9, 3.2, sur
les frais exigibles ou possiblement exigibles, selon la volonté du ministre.
Votre recommandation, vous mentionnez : «Aucun frais ne devrait
être prévu par règlement pour l'utilisation d'un service offert à une personne
par le ministère en matière de main-d'oeuvre
et d'emploi.» Vous n'êtes pas le premier groupe à me sensibiliser ou nous
sensibiliser sur cette question-là.
Effectivement, un organisme que j'ai échangé avec eux dernièrement, là, LASTUSE
de Jonquière, qui auraient aimé
pouvoir être ici pour se faire entendre, qui n'ont pas pu, se sont fait refuser
l'accès, m'avaient sensibilisé à cette question-là.
J'aimerais
vous entendre sur votre interprétation de cet article-là et vos craintes par
rapport à d'éventuels frais qui pourraient
être chargés, si on peut dire, à des gens qui veulent embarquer dans un parcours,
avoir des services d'employabilité.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Giulione, Mme Ferland.
Mme
Ferland (Danielle) : Oui,
j'avoue que c'était, pour nous, difficile à interpréter. Tout simplement, on présume que par règlement, naturellement, ça va être
précisé.
Alors,
à défaut d'avoir plus de précisions, on a tout simplement fait une recommandation dans ce sens-là parce qu'on ne comprenait pas, là, cette notion-là d'exiger
des frais, là, honnêtement. Alors, je ne peux pas plus vous en dire, là,
que l'énoncé du...
M. Giulione
(Joseph) : Je peux peut-être ajouter.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Giulione.
M.
Giulione (Joseph) : C'est
des services publics, il ne devrait pas y avoir des frais pour des services
publics. Déjà que des fois, des personnes
handicapées, quand elles vont chercher des services, on leur demande de fournir
le certificat médical, qu'elles
doivent payer... Déjà, ça, ça cause problème parce que,
quand elles sont sur la sécurité du revenu, elles n'ont pas nécessairement
le 40 $ pour payer le rapport médical pour avoir accès à une formation,
exemple, ou une mesure. À ce niveau-là, ça
arrive des fois, c'est exceptionnel, mais juste le fait que ça arrive, c'est
quelque chose qui doit être corrigé, à mon avis.
Mais «services
publics», le mot le dit, on n'est pas supposé de payer pour des services
publics.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député
• (16 h 20) •
M.
Turcotte : Effectivement, il y a beaucoup d'éléments... C'est un des éléments, là, mais il y a plusieurs éléments que nous ne pouvons pas
juger, dans le projet de loi actuel, parce que c'est dans un éventuel règlement.
Donc, je comprends votre inconfort de commenter ça, parce qu'on ne le sait pas,
mais dites-vous que vous n'êtes pas les seuls non plus à ne pas le savoir, du
moins pour l'instant.
Vous avez mentionné, l'article 5...
la recommandation 5, pardon : «Les ententes de service convenues avec
Emploi-Québec ne doivent contenir aucun
quota quant à la clientèle à desservir.» Est-ce que je dois comprendre
qu'il y a actuellement... Bon, dans un premier temps, je comprends qu'il peut y
avoir des quotas actuellement, là, de ce que je comprends. Comment ça fonctionne en ce moment, votre recrutement? C'est
des gens des centres locaux d'emploi
qui vous réfèrent des gens, qui vous envoient? Vous avez droit à du recrutement
direct, donc vous recrutez la personne
puis vous la faites reconnaître par Emploi-Québec pour que ses services soient reconnus? Comment ça
fonctionne? Puis, en termes de quota, qu'est-ce que vous voulez dire par cette
affirmation-là?
M.
Giulione (Joseph) : Si je
peux me permettre, premièrement, nous, on est un service d'aide à l'emploi
financé dans un cadre où est-ce que
tous nos organismes sont en recrutement direct. La grande majorité de nos
clients viennent directement du réseau de la santé ou de la
réadaptation, et une autre partie, une bonne partie, vient de l'éducation.
Les
centres locaux d'emploi, les personnes handicapées n'ont pas tendance à aller
au centre local d'emploi pour obtenir
des services, donc ce n'est pas des gros référents, et donc nous, on ne dépend
pas des centres locaux d'emploi pour
la clientèle. Au contraire, comme je vous dis, la majorité vient des réseaux,
où est-ce qu'on est déjà
établis.
Il ne faut pas oublier que ça fait des...
«look», ça fait depuis les années 70, fin des années 70, début des
années 80, qu'on fonctionne. On fonctionnait dans un temps où que, «you
know», la personne handicapée, c'était un deuxième...
le travail, «it was an aftertought», comme on dit en anglais. Là, maintenant,
là, ils ne sont plus en arrière, ils sont
en avant, mais sauf que ces liens-là qui ont été établis depuis des années se
maintiennent, et ça fait que les personnes handicapées se mobilisent de plus en plus vers l'emploi. Et donc on n'a
pas... bien, on n'a pas besoin... on a des sources de référence assez établies puis assez
diversifiées pour être capables d'aller chercher de plus en plus de monde à ce
niveau-là.
Puis au
niveau... Quand on parle de quota, nous, je pense que c'est plus... c'est parce
que c'est plus avoir accès à certaines
mesures ou services selon les sources de revenus. Et malheureusement c'est des
choses qu'on voit des fois, et on aimerait...
Nous, on est forts sur l'idée de bonne personne, bon service, qui est quand
même quelque chose qu'on voit, qui est
quand même une approche, avec Emploi-Québec, qui est répétée souvent. On
aimerait être sûrs qu'une personne qui a besoin de services reçoit le service qu'elle a besoin, et ce n'est pas
une question d'est-ce que sa source de revenus le permet, ou son sexe,
ou «whatever». Bon service, bonne personne.
M.
Turcotte :
Donc, vous voudriez qu'il y ait une certaine ouverture dans les règles
d'admissibilité à certains programmes
en fonction... Parce que, vous mentionnez, bon, en termes de salaire ou de
revenus de la personne, elle peut être pénalisée actuellement, mais dans
les faits elle a autant besoin qu'une autre personne du service.
Mme Ferland (Danielle) : ...
M.
Turcotte : Mais je
comprends que c'est ça?
Mme Ferland (Danielle) : Oui, c'est
ça.
M.
Turcotte : Parce
que j'ai une autre petite question, rapidement.
Mme Ferland (Danielle) : Oui, O.K.
M.
Turcotte :
Est-ce que vous avez en ce moment des listes d'attente, des gens qui aimeraient
avoir vos services qui ne peuvent pas
avoir vos services parce que vous n'avez pas assez de places disponibles pour
pouvoir les aider, pas tant sur le plan physique, là, des locaux, puis
tout ça, mais parce que l'enveloppe budgétaire qui vous est allouée par
Emploi-Québec vous limite dans le nombre de personnes que vous pouvez aider?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Ferland.
Mme Ferland (Danielle) : Tout à
fait. Actuellement, globalement, au niveau du ROSEPH, on accueille plus de gens que les cibles d'admission qui sont
convenues avec Emploi-Québec, et en plus plusieurs de nos organismes ont
des listes d'attente. Alors, c'est un petit
peu dans le sens du quota qu'on mentionnait aussi tantôt, c'est l'idée que,
dans un contexte où plusieurs ont des
listes d'attente, on veut pouvoir être capables de desservir toute notre
clientèle, peu importe sa source de
revenus, si elle est sans soutien public ou prestataire de l'aide sociale, on
veut pouvoir accueillir tout le monde dans leurs démarches d'emploi.
Alors, nous,
l'enjeu, ce n'est pas un manque de clientèle, une fois que la clientèle est
admise, c'est beaucoup plus d'avoir les
moyens pour la placer en emploi, parce que du monde, il y en a. On en a parlé
tantôt, il y a un bassin de 400 000 personnes au Québec, hein,
qui sont avec incapacité. Nous, on dessert 10 000 par année, donc c'est 2,4 %. Alors, la clientèle, elle est
là, et, nous, ce que ça nous prend, maintenant, c'est des moyens pour les
prendre en charge en totalité mais surtout pour les placer en emploi.
Le Président (M. Cousineau) :
Dernière question rapide, M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Ça veut
dire quoi, avoir les moyens pour les prendre en charge?
M.
Giulione (Joseph) : Bien, ça prend des ressources, parce qu'on
aimerait voir plus de monde, mais ça prend des conseillers pour les voir, ça prend des ressources pour les voir. Au
niveau des moyens, c'est évident que, pour nous, on revient toujours au fait qu'un investissement au
niveau des contrats d'intégration au travail, ça pourrait aller beaucoup
plus loin. Des accommodements dans certaines
mesures pour faciliter, ça existe déjà, là, mais sauf que ce serait
intéressant qu'on peut les mettre en application, exemple des mesures de
formation, des mesures comme des subventions salariales, et tout ça, s'assurer
que la personne handicapée est bien desservie dans ces mesures-là aussi et...
Le
Président (M. Cousineau) : Voilà. Alors, je dois maintenant
passer la parole au deuxième groupe d'opposition, au député de Drummond—Bois-Francs,
pour 5 min 30 s.
M.
Schneeberger : Merci,
M. le Président. Bonjour à vous deux.
Premièrement, je voudrais y aller avec deux questions quand
même assez rapides. On parle d'une
durée, dans le projet de loi, de 24 mois, des mesures de réinsertion. Je
sais que, pour vous, dépendamment des clientèles, ça vous touche plus ou moins, là, mais quelle est votre approche de ça? Est-ce que ça devrait être
plus une mesure, là, dans le sens que, si la personne va bien, il ne faudrait pas avoir une séquence temporelle,
mais, c'est-à-dire, une séquence de... elle a atteint des grades, puis tant mieux, puis on continue sur le programme,
peu importe si ça fait déjà 28 mois, mais c'est parce que c'est positif? C'est-u de quoi qui est important
pour vous ou, le 24 mois, là — c'est
12 mois, renouvelable 12 mois, là — ce n'est pas quelque chose qui vous touche beaucoup?
Le Président (M. Cousineau) :
Monsieur...
M. Giulione (Joseph) : Bien, c'est quelque
chose qu'on fait déjà. Donc, ça dépend toujours du besoin de la personne. Honnêtement, si la personne nous... Parce qu'effectivement il y a des suivis qu'on peut faire qui vont
s'étirer sur 24 mois, il y en a
d'autres qui vont durer trois semaines, «you know». Mais, si la personne a
besoin, il faut qu'on est là pour les
aider, mais en général, une fois que la personne est bien dans son milieu, il faut
qu'on se retire, parce qu'il ne faut pas
créer non plus un genre de relation de dépendance, là. Tu sais, l'idée, c'est
qu'au niveau de la durée, la durée, ça dépend du besoin de la personne. Et donc, si la personne a besoin d'une durée
prolongée, on doit être en mesure de lui offrir, mais, si la durée est
plus courte, bien tant mieux, là, tu sais, c'est un petit peu ça.
Moi, j'ai un
petit peu de difficultés à déterminer combien de temps qu'on devrait
faire quelque chose parce que je travaille avec une clientèle
qui est toujours sur la frise, ce n'est pas «mainline», tu sais, je travaille
avec une clientèle qui est toujours à l'extérieur des normes. Donc, des normes,
pour moi, c'est difficile, parce que, quand je norme la clientèle, ils ont tendance à ne pas être capables de fitter, «you
know». Donc, quand tu travailles à l'extérieur des normes, tu as
tendance à avoir... Non, je vais le dire autrement : Quand la clientèle
est à l'extérieur des normes, on fonctionne à l'extérieur des normes, tout en
respectant les règles, en passant. «It's a delicate balance.»
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Oui. Étant donné que vous siégez sur la CPMT, je
voudrais vous entendre là-dessus. On n'en parle pas souvent parce que ce
n'est pas le gros volet du projet de loi n° 70. Par contre, au niveau de
la nomination, actuellement, on procède par
recommandation, et le nouveau projet de loi ferait en sorte qu'il y a des
consultations, puis finalement c'est
le ministre qui nomme les personnes. Voyez-vous un problème là-dessus? Vous
souhaiteriez que ça reste comme c'est actuellement?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Ferland.
M.
Schneeberger : Je ne sais pas si... Peut-être
vous n'avez pas de point de vue. Parce
que vous avez dit que vous
étiez sur la table.
Mme
Ferland (Danielle) : Non,
c'est ça, je vous avoue. On s'est plutôt concentrés, comme je le disais tantôt,
plus sur l'enjeu du programme Objectif emploi, là, qui est... Donc, on a moins
examiné cet aspect-là.
M.
Schneeberger : O.K.
Parfait.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger : Tout à
l'heure, vous nommiez que vous aviez
des personnes autant qui avaient des
handicaps physiques, intellectuels et aussi, je pense, des problèmes de maladie
mentale, que vous représentez de tout.
M. Giulione (Joseph) : ...en fin de
compte, toutes les capacités selon la loi.
M.
Schneeberger : O.K., c'est ça. Et vous disiez que ce n'est pas tous
vos gens que vous représentez qui sont en contraintes sévères. Parmi les contraintes, admettons, ceux qui sont
classés aptes à l'emploi, est-ce que c'est beaucoup des personnes qui
ont des problèmes de maladie mentale?
M.
Giulione (Joseph) : Pas nécessairement.
Ce n'est pas le diagnostic ni la maladie qui rend la personne apte ou non, c'est plus une évaluation médicale, et donc
ça peut être quelqu'un en santé
mentale comme ça peut être quelqu'un
qui a un handicap physique, ou de surdité, ou «whatever». Donc, ce n'est pas vraiment...
je ne ferais pas un lien entre un diagnostic
et une situation au
niveau de l'aide sociale, je ferais
le contraire, plus la sévérité du handicap ferait où qu'il va être situé
au niveau de contraintes sévères, contraintes temporaires ou sans contraintes.
Ce n'est pas vraiment...
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger : O.K.
J'avais, il y a quelques journées... là, je ne me rappelle plus exactement du
titre exact des personnes qui étaient représentées, là, mais c'étaient des gens
qui représentaient les petites et moyennes entreprises, et je leur avais
demandé si eux, justement, ils étaient mieux outillés, étant donné, souvent,
que c'est des entreprises
qui vont être plus souples à accueillir des personnes avec des capacités
réduites, et ils m'ont dit que oui. Par contre,
c'est toujours dépendamment de l'aide, bien sûr,
qu'ils ont autour. Et vous, vous me dites justement que vous
travaillez beaucoup avec des petites et moyennes entreprises. C'est quoi, les
plus grandes problématiques que vous rencontrez, là, concrètement à tous les
jours, là, pour l'intégration de ces personnes-là?
Le Président (M. Cousineau) :
En 30 secondes.
• (16 h 30) •
M.
Giulione (Joseph) : Honnêtement, ce n'est même pas une question d'entreprise. Le plus gros problème qu'on a, c'est que le monde qui viennent nous voir, ils ont
peur de perdre leur aide sociale. Donc, quatre questions sur cinq,
pendant la première rencontre, est basé sur c'est quoi, l'impact sur mon
chèque, au lieu de... C'est rare qu'ils nous parlent du marché du travail puis de leurs incapacités face au travail; au
contraire, le travail, il a l'air de les stimuler. Oui, ils sont craintifs puis ils ont peur comme n'importe qui qui va commencer un emploi, il
y a des craintes, il y a des peurs,
mais, quand on regarde la situation vraiment, les questions principales,
c'est : Qu'est-ce qui va arriver avec mon chèque? Est-ce que je vais avoir mon carnet de réclamation? Qu'est-ce qui va
arriver si ça ne marche pas? Je peux-tu retourner sur l'aide sociale?
Donc, c'est un cadre plus... c'est la partie administrative, la peur de perdre
le peu qu'ils ont qui est le handicap face au travail.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord. Alors, merci. Je dois
maintenant passer la parole à la députée de Gouin pour les trois
prochaines minutes. Mme la députée.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Vous nous annoncez quand même une
bonne nouvelle, là, c'est qu'en cette
période où on nous dit que le marché du travail a des pénuries de
main-d'oeuvre, vous, vous nous dites : Mais il y en a, de la main-d'oeuvre, au Québec, des personnes qui ont
certaines limitations mais qui avec de l'aide pourraient parfaitement combler un certain nombre d'emplois.
Moi, je trouve que c'est une excellente nouvelle. Mais évidemment, pour
ça, vous avez besoin de l'aide que vous demandez.
Je veux vous
dire que, depuis une couple d'années, j'ai eu l'occasion de rencontrer à
quelques reprises soit des personnes
ou soit des groupes de personnes représentant des jeunes sortis de l'école, du
cégep, de l'université, donc là on parle de gens qualifiés, scolarisés
mais avec un handicap, donc personnes qui ont un trouble de l'autisme, syndrome
d'Asperger, syndrome de la Tourette, et la
difficulté, même scolarisé, même qualifié, c'est de trouver un emploi,
parce que les employeurs sont réticents
devant des personnes que j'appellerais tout simplement différentes mais qui ont
des capacités. Qu'est-ce qu'il faut faire pour aider ces jeunes-là?
M.
Giulione (Joseph) : Il y a différentes philosophies, hein, face à
l'intégration en emploi. Moi, je suis un vieux de la vieille, là. Et, oui, on peut montrer au monde
comment se vendre, mais, ceux qui ne sont pas capables de se vendre,
c'est bien plus facile de juste aller les
vendre. Et en fin de compte je pense que c'est ça. Tu sais, des fois, là, ça
prend juste un accompagnement au
niveau de l'entrevue, au niveau de comment vendre sa salade, excusez
l'expression, pour faciliter le maillage.
Une des plus
grosses publicités, chez nous, c'est le fait qu'à chaque fois qu'on passe un
employé cet employé-là fait que l'employeur nous rappelle pour en avoir
d'autres. Donc, c'est la personne handicapée qui fait la promotion de
l'embauche des personnes handicapées, parce qu'ils montrent au monde qu'ils
sont capables de travailler.
Et, quand je
reviens au fait que... exemple, quand vous donniez l'exemple d'un jeune
étudiant Asperger, s'il n'a pas les habiletés sociales pour se vendre,
si la limitation fonctionnelle de sa maladie, c'est qu'il ne les aura jamais,
ces habiletés-là, là, soit on cogne sur un
clou puis on essaie de lui montrer ou on le vend, on vend pour lui. Si vous
allez dans une compagnie, ce n'est
pas tout le monde qui est vendeur, mais, si le vendeur vend, bien le reste va
suivre. Bien, c'est ça un petit peu
des fois qu'ils ont besoin, ces jeunes-là, juste un petit coup de pouce, mais
c'est cette vente-là. C'est un petit peu cru comme exemple, là, mais...
«I'm sorry about that.»
Le Président (M. Cousineau) :
D'accord. Mme la députée. Dernière réflexion, peut-être.
Mme David (Gouin) : Pour combien de
secondes, M. le Président?
Le Président (M. Cousineau) :
À peu près 20 secondes.
Mme David
(Gouin) : Mais, si j'en parle, M. le Président, c'est que j'ai
vraiment côtoyé des jeunes extrêmement intéressants,
prêts à travailler, qualifiés mais, par exemple, qui ont des difficultés
relationnelles, effectivement. Donc, je comprends très bien, vous nous
dites : Bien, on va l'aider à aller se vendre, mais est-ce qu'il y a un
geste de plus à poser, d'après vous, pour que l'employeur, lui, soit convaincu
que, malgré ces difficultés-là, on vient de lui amener un excellent employé?
Le Président (M. Cousineau) :
Une réponse très rapide.
M.
Giulione (Joseph) : Au moment qu'il se met à travailler puis il
produit, l'employeur, il va être convaincu.
Mme David (Gouin) : Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. Giulione,
Mme Ferland. Merci bien pour votre présentation.
Je suspends pour quelques instants et j'invite
l'autre groupe à se préparer rapidement, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 16 h 34)
(Reprise à 16 h 36)
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Alors, je salue les gens du Collectif des entreprises d'insertion du Québec,
M. Gravel puis Mme Beaulieu. Comme le groupe précédent, vous avez
10 minutes de présentation, et par la suite nous passerons à la période de
questions.
Collectif des
entreprises d'insertion du Québec (CEIQ)
Mme
Beaulieu (Agnes) : Merci.
Alors, bonjour. Je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui. Je suis Agnes Beaulieu, je suis présidente du conseil
d'administration du Collectif des entreprises d'insertion du Québec, et je suis
accompagnée de Richard Gravel, qui est
directeur général du collectif. Alors, je connais d'ailleurs
certains et certaines d'entre vous et
je sais que plusieurs d'entre vous avez la chance d'avoir des
entreprises d'insertion dans leurs comtés, dans leur entourage, donc je
pense que nous sommes en terrain connu.
Alors, rapidement,
je voulais vous dire, vous présenter un peu qui nous sommes. Donc, le Collectif
des entreprises d'insertion, c'est le
regroupement de 50 entreprises d'insertion à but non lucratif qui sont des
organisations en économie sociale qui
ont comme mission première de former et d'intégrer au marché du travail des
personnes qui sont en situation d'exclusion, donc qui font partie vraiment
de ce qu'on appelle les clientèles marginalisées, les clientèles éloignées du marché du travail. Nous sommes implantés dans
14 régions du Québec, nous représentons 50 entreprises et nous
accueillons environ 3 000 personnes par année. Nous les accueillons
dans un parcours de formation qui est très intensif, qui dure six mois, et qui
est une formation en milieu réel de travail à raison de 35 heures-semaine,
et cette formation-là, elle vient avec un accompagnement individualisé,
personnalisé, un appui dans la recherche d'emploi et un suivi qui dure ensuite deux ans. 50 % des personnes que nous
accueillons sont des prestataires de l'aide sociale. L'autre 50 %, ce
sont des personnes qui sont également en difficulté importante face à l'emploi.
On parle donc en général, prestataires, non-prestataires,
de monoparentalité précoce, de jeunes décrocheurs, d'ailleurs près de 75 %
de nos participants ont moins de 35 ans. On parle de personnes
immigrantes qui sont en difficulté d'intégration, de personnes qui ont des
problèmes personnels, sociaux, des problèmes de santé mentale à l'occasion, en
fait, donc, toutes sortes de personnes qui ont besoin d'un accompagnement, d'un encadrement qui est sérieux, qui est
professionnel. Bon, alors, ce sont des gens qui ont vécu des échecs
répétés, et nous voulons leur éviter, évidemment, de vivre d'autres échecs.
Nous sommes,
je pense, sans vantardise, des experts, par rapport au marché du travail, de
l'intégration de personnes qui sont
très éloignées et nous connaissons aussi très bien les besoins des employeurs
parce que nous sommes nous-mêmes des
employeurs, en économie sociale, mais aussi parce que nous travaillons
étroitement avec les partenaires du marché du travail.
Bon,
d'ailleurs, à ce niveau-là, je voulais quand même intervenir, comme premier
point, sur la question du rôle de la Commission
des partenaires du marché du travail, d'abord vous dire que nous sommes en
accord avec le fait d'élargir un peu
le mandat de la Commission des partenaires pour lui permettre de formuler des
recommandations à d'autres ministères en
vue d'une meilleure adaptation, d'une meilleure, je dirais... d'une meilleure
intégration, là, des besoins du marché du travail. Nous croyons aussi que c'est une bonne chose d'accroître le
rôle de la CPMT à la main-d'oeuvre future, ce qui peut aussi amener une
meilleure adaptation.
Par contre,
nous souhaitons maintenir le rôle actuel du ministre de l'Emploi et de la
Solidarité et de la CPMT au niveau de leurs responsabilités dans la
rédaction du plan d'action annuel et dans l'approbation des plans d'action régionaux, pour éviter de réduire le rôle des
partenaires du marché du travail et de les amener un peu à un rôle de
comité aviseur. Nous souhaitons qu'ils gardent quand même leur importance, ils
connaissent bien les besoins régionaux.
• (16 h 40) •
Nous voulons aussi nous assurer que cette
approche partenariale qui fait vraiment la fierté du Québec entre les ressources externes et Emploi-Québec ne soit
pas diminuée par le fait qu'Emploi-Québec perdrait un peu son rôle, là, je dirais, d'agence autonome. Donc, pour nous,
c'est important de ne pas diminuer cette approche partenariale et de ne
pas non plus diminuer l'importance des services d'aide à l'emploi dans, en
fait, la structure de Services Québec.
Maintenant, je vais aborder le sujet du
programme Objectif Emploi, qui est très important pour nous, en fait. D'abord, je tiens à répéter que nos membres
croient que le travail, ce n'est pas qu'une source de revenus, c'est
vraiment quelque chose qui est très important,
c'est une source de valorisation, d'insertion sociale, de citoyenneté au sens
plus large. Donc, nous croyons
beaucoup à l'importance d'intégrer les gens et de les accompagner vers le
marché du travail, donc, en ce
sens-là, nous saluons le fait d'offrir aux gens un parcours et de leur offrir
des services d'accompagnement professionnel qui correspondent à leurs
besoins.
Par contre,
nous sommes en désaccord avec cette idée d'une approche coercitive. Nous
croyons qu'une approche proactive, qui est concertée, avec la personne
en difficulté, correspond davantage à une efficacité et à ce que nous recherchons au Québec. Je pense que notre
connaissance des clientèles éloignées du marché du travail nous porte à
croire que la motivation est vraiment l'élément
le plus important, donc le caractère coercitif ne fonctionnera pas. Et
d'ailleurs il y a une étude qui a été faite
par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui montrait que la
détresse psychologique et un faible niveau de motivation étaient les deux principaux
indicateurs d'abandon des mesures. Donc, je pense que ça dit assez bien
ce que ça a à dire.
Je pense aussi que
les gens qui font une demande d'aide sociale sont dans un état, quand même, de
stress important. Il n'y a personne qui a
envie de vivre avec 623 $ par mois, en tout cas aucun d'entre nous. Et ces
gens-là, donc, ils ont besoin d'être
accompagnés, mais ils ne peuvent pas être menacés. On pense qu'ils ne sont pas
dans la situation idéale pour réagir
rapidement et qu'ils ont peur du système, évidemment, donc on pense qu'il faut
au contraire leur proposer un accompagnement professionnel et leur
offrir des choix.
On
pense également que ces choix-là ne devraient pas s'adresser qu'aux
primodemandeurs mais bien à l'ensemble des
personnes qui sont à l'aide sociale et à l'ensemble des personnes qui
présentent le même type de caractéristiques, donc qui sont des clientèles sous-représentées au sein
du marché du travail. On parle de personnes immigrantes, de personnes avec des handicaps, de jeunes décrocheurs, donc
toutes ces personnes-là qui ont aussi besoin d'aide. Et on pense que,
pour cela, il faut pouvoir leur offrir des
services suffisants, compétents et adaptés, donc pas uniquement aux
primodemandeurs.
Alors,
on pense également qu'il faut voir des adaptations pour les jeunes qui n'ont
jamais travaillé et qui ont besoin d'une approche progressive, non pas
de menaces mais bien d'un accompagnement pour intégrer progressivement le
marché du travail.
J'aimerais
parler rapidement de l'adéquation formation-emploi, qui est un sujet qui nous
intéresse beaucoup parce que nous
sommes très interpellés par le défi qui attend le Québec, ce défi de pénurie de
main-d'oeuvre, mais également cette quantité de gens qui ont envie de
travailler, qui ont besoin de travailler mais dont les compétences ne sont pas nécessairement ajustées. Donc, pour ces
personnes-là, nous croyons que ça prend des programmes qui sont adaptés,
qui sont d'une durée suffisante, qui mettent
l'accent sur le développement de compétences réelles, donc de compétences
d'emploi mais aussi de compétences
génériques qui vont leur permettre d'intégrer vraiment le marché du travail de
façon durable. Donc, ça, on croit
qu'il y a différents programmes qui existent dans les ressources externes,
qu'il y a une reconnaissance des
compétences qui peut être faite avec les milieux scolaires et que cela
permettrait d'adapter vraiment la main-d'oeuvre. Il y a beaucoup de gens
qui souhaitent travailler et qui peuvent travailler, mais il faut y mettre
vraiment les ressources et les moyens pour développer les structures adéquates.
Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, madame. Alors, vous aviez
encore 1 min 30 s, mais nous allons passer immédiatement
à la période de questions. Alors, M. le ministre, pour
13 min 30 s.
M. Blais :
Merci beaucoup. C'était très intéressant. Je sais que l'apport que vous avez
est assez important en termes... pour la réinsertion sur le marché du travail,
là, je pense que vous l'avez démontré par le passé.
Peut-être une discussion un peu de principe, là. On se
comprend bien que quelqu'un qui participe à un parcours chez vous
reçoit une bonification, hein, donc...
Une voix :
...
M.
Blais : ...un salaire,
pardon, oui, c'est ça, donc c'est une nette bonification. Vous comprenez que la
notion de volontaire et involontaire devient
assez floue, hein, parce qu'ils y vont aussi pour la bonification. Je ne suis
pas certain que, si on leur disait : Écoutez, on a quelque chose à
vous offrir en termes d'expérience, mais on ne vous offre pas ce salaire-là...
je ne suis pas certain que vous auriez le même succès, vous auriez un succès
différent. Est-ce qu'on est d'accord là-dessus?
Mme
Beaulieu (Agnes) : On pense que le salariat est non seulement un élément
motivant, mais c'est également quelque chose qui relève de la
citoyenneté. Donc, de vivre une expérience de travail salariée, c'est quelque
chose de positif dans la vie.
M.
Blais : Alors, moi, je suis d'accord avec vous, hein, mais c'est toute
la notion de volontaire et involontaire; parfois on s'y perd, hein, dans tout ça. D'une certaine façon, les gens
y vont, ils sont volontaires, mais ils sont volontaires parce qu'il y a un incitant financier. Et parfois
ils le perdent et ils peuvent demeurer, ils peuvent rester là où ils sont
ou changer de voie. Donc, la notion de volontaire, involontaire est un peu
difficile à suivre par moments.
Je
vous donne un exemple. Il y a des gens qui rentrent dans un processus qui sont
involontaires, qui y vont un peu par
incitant quelconque, ça ne leur tente pas d'aller chez vous, mais, bon Dieu,
ils vont avoir un salaire et ils vont y aller, et vous réussissez, j'en suis certain, à les capter, à capter leur
intérêt puis à faire faire un cheminement. Ils sont rentrés involontaires parce que tout ce qui les
intéressait, c'était d'améliorer leur sort économique, plus que ce que vous
avez à offrir, parce qu'ils ne voyaient pas
bien ce que vous aviez à leur offrir, et ils sont devenus plus intéressés, plus
volontaires. Est-ce que vous me suivez bien là-dessus?
Mme Beaulieu
(Agnes) : Je vous suis, même si je ne suis pas certaine d'être
d'accord avec vous.
M.
Blais : Bien, faites un effort, ça vaut la peine, parce que, dans le
fond, hein, ce qui est en jeu, il me semble, là, c'est que toute cette
notion de volontaire et involontaire peut devenir un peu compliquée à suivre.
Il y a des gens qui commencent une démarche
qui sont involontaires et qui progressent vers le volontariat. Il y a des gens
qui sont volontaires, malheureusement, et qui deviennent involontaires,
et qui abandonnent, hein?
Vous
rejoignez 3 % de la clientèle d'Emploi-Québec, ce n'est pas beaucoup, vous
travaillez avec la pointe de l'iceberg. Et
vous dites : Écoutez, c'est formidable, ce que l'on fait, hein, ce qu'on
réussit à faire, mais c'est 3 %. Si on pouvait en amener 4 %
ou 5 %, ce serait un progrès.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu
(Agnes) : Écoutez, nous, on ne souhaite que ça, avoir une croissance
du nombre de places disponibles. On a des listes d'attente, on a beaucoup de
gens qui cognent à notre porte.
Est-ce
qu'ils viennent pour le salariat? Je ne pense pas uniquement. Je pense qu'ils
viennent aussi parce qu'on leur offre
une première expérience de travail positive, une formation qui leur permet
vraiment de surmonter leurs difficultés.
Et
la force de l'intervention des entreprises d'insertion, et d'ailleurs ça a été
démontré dans une étude qui a été faite par votre ministère, repose sur
la motivation des personnes qui y viennent, parce que c'est très exigeant. On
parle de 35 heures-semaine, on parle
d'un travail sur soi, on parle d'un horaire qui est strict, de conditions
réelles de travail, donc ça prend quand même une très forte motivation
interne.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
Mais ce qu'on recherche, bien sûr, c'est qu'il y en ait davantage, hein?
Mme Beaulieu
(Agnes) : Nous, on le souhaite.
M.
Blais : Et là vous êtes avec 3 % puis vous nous dites :
Écoutez, là, il ne faut pas toucher du tout à la prestation, il ne faut
pas montrer d'intérêt plus fort, il ne faut pas inciter davantage, hein, il
faut que ce soit volontaire, même si je vous
dis que la notion de volontariat, c'est une notion assez vague, parce qu'il y a
beaucoup de gens, dans ces 3 % là, qui n'iraient pas chez vous s'il
n'y avait pas l'incitant financier. Ils y vont à cause de l'incitant financier,
tant mieux, et ensuite ils gravissent les échelons dont vous nous avez parlé
pendant votre présentation.
Je
veux juste faire... La petite distinction que je veux faire entre vous et moi,
là, hein, ce n'est pas de parler en termes de coercition et même en
termes de volontariat. Les volontaires aujourd'hui vont peut-être être
involontaires demain, et vice et versa. Ce
qui est important, c'est que le chemin se poursuive et qu'on prenne tous les
moyens, là, qui sont, bien sûr, corrects pour y arriver.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu
(Agnes) : D'accord. Bien, écoutez, moi, je suis ravie d'entendre qu'on
trouve que 3 %, c'est insuffisant et qu'on souhaiterait élargir cette
proportion de personnes qui participent aux entreprises d'insertion, parce que
c'est vraiment ce qu'on souhaite le plus profondément.
M. Blais :
C'est le but de...
Mme Beaulieu
(Agnes) : Et on n'a pas de problème de recrutement, je vous rassure
tout de suite.
M. Blais :
C'est le but du projet de loi, madame, c'est d'augmenter, hein, donc, la
participation.
Mme
Beaulieu (Agnes) : Mais on souhaite que les personnes viennent de
façon volontaire parce que c'est un travail qui est exigeant sur
eux-mêmes et au niveau des apprentissages.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
• (16 h 50) •
M. Blais :
Oui, mais beaucoup n'y vont pas volontairement, en ce moment, mais vous
réussissez à les capter ensuite, j'en suis sûr, parce qu'il y a un incitant qui
est positif.
Sur
la CPMT, hein, vous dites, bon, que c'est une bonne chose qu'on ait ouvert,
disons, aux futurs travailleurs, donc pas uniquement à ceux qui sont
dans les organisations mais à ceux qui ne le sont pas. Comment vous faites la
jonction entre ce que vous faites et les possibilités que ça va ouvrir en
termes de stages ou autre chose, là, que cette modification à la loi sur la
formation de la main-d'oeuvre?
Le Président (M.
Cousineau) : Oui, M. Gravel.
M. Gravel
(Richard) : Oui. En réponse à votre question, dans le fond, nous
autres, on travaille beaucoup en partenariat avec les entreprises pour le
placement après. C'est sûr que la clientèle qui vient en entreprise d'insertion
sont, je vous dirais, en grande majorité du monde qui sont sous-scolarisés,
même souvent fortement sous-scolarisés. L'avantage pour nous, quand on regarde
la proposition de s'adresser à la clientèle future, c'est que les finissants
des entreprises d'insertion pourront avoir
accès à des mesures de formation, des programmes de reconnaissance des
compétences qu'ils ont acquises, et dans ce sens-là on trouve que c'est une
bonne chose.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Avant j'ai ma collègue qui avait une... Oui.
Le Président (M.
Cousineau) : Oh! Mme la députée de Fabre.
Mme Sauvé :
Oui. Bonjour, M. Gravel. Mme Beaulieu, bonjour. Je sais que dans
votre mémoire vous avez beaucoup parlé de la situation des jeunes, mais, bien
sûr, votre action, et que je connais bien d'ailleurs, votre action vise à accompagner les personnes qui sont
sous-représentées et qui sont éloignées du marché du travail. Ma question,
dans le fond, c'est de vous entendre
davantage parler de toute votre action, votre rôle d'accompagnement auprès des
personnes immigrantes. On a souvent entendu
parler, dans cette commission, en vue d'évidemment viser l'intégration et de
viser le maintien en emploi, des stages. Les
entreprises d'insertion sont porteuses de pratiques et d'expériences de travail
valables pour l'intégration. Quand on parle
d'obstacles pour les personnes immigrantes, la méconnaissance du marché du
travail au Québec qui est un obstacle majeur, je sais que vous jouez un rôle
clé, alors j'aimerais ça vous entendre un petit peu davantage là-dessus.
Mme Beaulieu
(Agnes) : Oui, je vais y aller. Oui...
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Beaulieu
(Agnes) : Vous permettez? Oui. Alors, plus de 40 % des personnes
que nous accueillons sont d'ailleurs des
personnes immigrantes, dont plusieurs assez récentes. Alors, oui, ces
personnes-là vivent des difficultés, difficultés
parce qu'il y a une adaptation, évidemment, linguistique, il y a une adaptation
aux codes culturels, il y a souvent des
diplômes qui ne sont pas reconnus ou des expériences qui doivent vraiment être
transférées. Donc, le fait d'intégrer une entreprise d'insertion, ça permet de vivre une expérience réelle de
travail mais tout en étant accompagné, supervisé dans ces apprentissages-là. Et la force des entreprises
d'insertion, c'est d'être vraiment dans une intervention qui est concrète.
On est sur le plancher. On ne dit pas à la
personne : Plus tard, tu devras faire telle chose, on le pratique, on est
en situation réelle. Et ensuite la
personne, elle a quelque chose à mettre dans son C.V., elle a une expérience
québécoise, elle a des références, elle a un accompagnement, et c'est ça
qui est gagnant.
Donc,
effectivement, on serait en mesure d'accueillir beaucoup plus de personnes
immigrantes, et c'est dans ce sens-là qu'on souhaitait une augmentation
du nombre de places, parce qu'on sait que c'est gagnant.
Mme Sauvé :
Merci pour votre réponse.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre, il reste
4 min 30 s.
M. Blais :
Oui. Pour revenir un petit peu sur l'échange de tout à l'heure, sur volontaire
et involontaire, donc, en tout cas, dans ma
compréhension, il y a des gens qui vont vers vos mesures parce qu'ils sont
intéressés par les mesures, ils
comprennent ce que ça peut leur donner; il y en a qui ne sont pas intéressés,
puis qui y vont pour le salaire, puis qui vont peut-être gagner, bien
sûr, dans l'expérience, c'est ça qu'on souhaite.
Vous
comprenez que le gouvernement, avec Objectif emploi, ne va peut-être pas tout à
fait dans la même direction que ce que vous recherchez, mais vous allez
accepter quand même les gens qui viennent d'Objectif emploi dans vos mesures,
hein, vous ne serez pas choqués de les accepter.
Mme Beaulieu
(Agnes) : Nous, on va accueillir toutes les personnes qui démontrent
une volonté réelle de prendre leur vie en
main, de se former, de se préparer au marché du travail. Alors, en ce sens-là,
c'est sûr qu'on va devoir vérifier le niveau d'intérêt, de motivation
et, je dirais également, si la personne est prête, parce que, vous savez, une
personne peut ne pas être officiellement inapte mais être dans une situation de
détresse psychologique, familiale ou sociale
qui fait en sorte qu'elle n'est pas capable, à ce moment-là, d'intégrer une
mesure aussi intensive de préparation au marché du travail qu'une
entreprise d'insertion.
M. Blais :
...parce qu'il y a des hauts et des bas, hein, il y a des périodes où ça va
bien, il y a des périodes où c'est plus
creux, où ça va moins bien, où l'intérêt n'y est plus autant,
l'intérêt pour lequel on est venu n'y est pas autant, etc., donc il faut
maintenir cette volonté-là tout au long d'un processus, qui est quand même...
qui est assez long.
Donc,
vous allez les prendre quand même? Ça, ça
va? Oui... Non, mais je ne veux pas...
Vous n'êtes pas obligés, vous n'êtes pas obligés, là, hein, si...
Mme Beaulieu
(Agnes) : Comme je vous disais, on va prendre toute personne qui a
envie de se former.
M. Blais :
D'accord. Très bien. C'est une bonne nouvelle.
M. Gravel
(Richard) : Peut-être juste en complément.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Gravel.
M. Gravel (Richard) : Oui. En fait,
juste pour revenir sur le processus de sélection et toute la question du
volontariat, qui est une question qui est extrêmement complexe, hein, parce
que, quand on parle... Quand la personne est volontaire, qu'est-ce qui la motive? Est-ce
que c'est une motivation interne? Est-ce que c'est une motivation
externe? C'est sûr que, dans le processus de
sélection, dans les entreprises d'insertion, un candidat qui ne viendrait que
pour la question salariale ne serait pas retenu. Si le participant vient
dire : Moi, je ne veux pas changer des comportements, qu'il n'a pas fait un certain constat, qu'il n'a
pas une prise de conscience et une volonté de modifier des
comportements, on ne le retiendra pas pour l'entreprise d'insertion, parce qu'on sait que les probabilités qu'il passe à
travers son parcours sont moindres.
Puis on a une responsabilité de s'assurer, quand on dit à quelqu'un : On va t'aider puis on va t'amener sur le marché du travail, qu'il n'y ait pas une interruption en cours de parcours,
parce que, là, à l'inverse d'aider la personne, dans le fond,
on travaille à l'encontre de ça, on va lui faire vivre, dans le fond, un nouvel échec. Et la clientèle qu'on accueille chez nous, souvent, pour ne pas dire à 90 % du temps, c'est des personnes qui ont fait
plusieurs petits boulots un mois, deux mois, ils ont essayé, mais ils
ont été confrontés à des échecs.
Alors, quand on parle de la motivation, dans ce
contexte-là, il faut s'assurer, dans le fond... Et c'est vrai que certaines
motivations externes, de l'ordre financier, peuvent être un plus, mais, s'il
n'y a pas une motivation interne, si on
n'est pas capables de travailler... Puis là, une motivation interne, moi, je
vous dirais, s'il n'y a pas une base sur laquelle on est capables de
travailler sur la motivation interne de la personne, donc la volonté de
l'individu de changer, les probabilités d'avoir des succès sont beaucoup
moindres.
Le Président (M. Cousineau) :
Petite question rapide, M. le ministre. Il reste 30 secondes.
M. Blais : En conclusion,
finalement, ce sont des variables qui sont difficiles à distinguer, hein? Donc,
je comprends qu'à la fois les motivations
externes et les motivations internes... il y a des moments où les externes sont
plus importantes, il y a d'autres moments, vous avez raison, où les motivations
internes font foi.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci. Donc, je passerais la
parole maintenant à l'opposition officielle, au député de Saint-Jean,
pour huit minutes.
M.
Turcotte :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup à vous d'être parmi nous
aujourd'hui. J'ai eu le plaisir,
effectivement, de visiter quelques-unes de nos entreprises d'économie sociale
au Québec, d'insertion sociale, dans votre cas, qui sont quand même un
fleuron important, notamment Formétal, avec le chef de l'opposition officielle,
l'automne dernier, et M. LeChasseur, à ce moment-là, le directeur, nous
avait clairement identifié un voyant rouge sur
la question de l'obligation et des sanctions qui peuvent être mises suite à un
non-respect d'une obligation. Lors de cette
visite-là, M. LeChasseur nous a expliqué... Puis on a rencontré aussi des
gens, parce que c'est bien, hein, d'aller sur le terrain, des fois, de sortir de notre bulle parlementaire de Québec,
hein, de l'Assemblée nationale puis d'aller sur le terrain, puis même de traverser des fois le pont Champlain
puis se rendre sur l'île de Montréal, et de rencontrer des gens, d'aller
dans nos régions, et de voir ce qui se fait. Et, si on visite une entreprise
comme une des vôtres, on peut voir plusieurs choses,
mais, moi, ce que j'ai compris, c'est les impacts que ça peut avoir sur les
autres participants, sur les autres employés, sur l'ambiance de travail, sur le climat, l'esprit d'équipe, d'avoir
quelqu'un qui est là uniquement par obligation, sous peine de sanction. Puis il faut le dire, là, en ce
moment on ne le sait pas trop, là, mais le dernier ministre nous a
mentionné que ça pouvait aller jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale...
Le
Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît, M. le député, je
vais être obligé de suspendre pour quelques minutes parce que nous avons
un vote au salon bleu. Donc, les députés doivent se déplacer vers le salon
bleu, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre où nous sommes,
faites-vous-en pas, le temps est bien compté.
Je suspends pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 18)
Le
Président (M. Cousineau) : ...où nous en étions, mais auparavant j'apprécierais avoir un consentement pour déborder 18 heures
d'à peu près 16 minutes. Alors, ça me prend un consentement. Consentement?
Parfait.
Donc, nous étions avec le député de Saint-Jean.
Il vous reste 6 min 12 s, M. le député.
M.
Turcotte : Merci
beaucoup, M. le Président. Donc, comme je mentionnais, on peut voir les impacts
que l'obligation, sous peine de sanction... Parce que,
disons-le, là, couper, comme le précédent ministre le mentionnait,
jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale, donc quelqu'un qu'il lui reste 300 $,
311 $ à peu près, ça peut avoir un impact, effectivement. Il va
dire : Oui, je vais y aller, mais quelle ambiance que ça peut amener?
Et des fois
ce n'est pas que la personne ne veut pas, mais c'est peut-être que la personne
ne peut pas ou n'est pas dans une
condition optimale au moment où... parce qu'il n'y a pas personne qui arrive à
l'aide sociale par choix, là, à part les
préjugés qui peuvent être véhiculés dans notre société. Quand on se rend aussi
bas que l'aide sociale, là, les gens, ils veulent s'en sortir. Donc, vous permettez de les aider, de les reprendre
d'où ils sont rendus, puis des fois ils sont rendus très bas, très creux, puis de leur donner des ailes
puis de pouvoir s'en sortir, parce que votre objectif, ce n'est pas de les
garder ad vitam aeternam puis de maintenir...
L'enjeu de la rétention de la main-d'oeuvre n'est pas un enjeu chez vous.
Vous, aussitôt que la personne est prête à aller dans une autre entreprise ou
dans un autre milieu, vous êtes là.
Donc, j'aimerais vous
entendre sur la question des impacts que ça peut avoir pour la façon de faire
de vos entreprises puis le principe même qui est à la base de vos entreprises
versus l'obligation, d'imposer une clientèle. Le ministre vous a dit tantôt : Est-ce que vous allez les prendre?
Est-ce que vous allez les prendre? Il a dit la même chose, là, pour les carrefours jeunesse-emploi, est-ce que
vous allez les aider, à l'époque, là. Bon, bien, est-ce que vous allez
les prendre? Vous allez les prendre mais
dans quelles conditions? Puis comment ça peut amener comme ambiance de
travail?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Beaulieu.
• (17 h 20) •
Mme
Beaulieu (Agnes) : Oui, bien, écoutez, comme mon collègue Richard le
disait, il y a tout un processus qui est très précis, qui est très élaboré, pour le recrutement des personnes,
pour s'assurer, un, que la personne est vraiment prête, pour ne pas lui faire vivre un échec encore une
fois, mais également pour constituer des groupes qui sont harmonieux, où
on va pouvoir compter... Vous savez, dans
une entreprise d'insertion, on est dans un contexte réel d'entreprise, donc il
y a de la formation, mais il y a
également de la production. Il y a des liens avec le public dans certains cas,
il y a des entreprises de service,
les gens apprennent un métier, que ce soit être cuisinier, serveur, donc les
personnes doivent être prêtes à faire le travail et à le faire
convenablement et de leur mieux.
C'est évident
que, si on est dans un groupe où il y a des personnes qui ne souhaitent pas y
être, qui le font de façon forcée, en faisant toujours le minimum, en ne
respectant pas les règles de l'entreprise, ça va être difficile, et on peut s'attendre, un, à des taux d'abandon importants,
mais on peut aussi s'attendre à ce que la réussite ne soit pas au
rendez-vous en termes de placement en
emploi. Notre objectif, c'est le placement durable en emploi. Donc, je pense
que c'est aussi l'objectif des
employeurs de recevoir des gens qui ont été formés, qui sont prêts à
travailler, qui ont envie de travailler et qui ont développé les comportements et les attitudes nécessaires. Donc, pour
ça, ça exige de la motivation, comme on le sait.
M.
Turcotte :
Est-ce que vous allez jusqu'à dire que ça peut avoir un impact sur la santé et
la sécurité au travail des autres employés de vos entreprises, s'il y a
non-motivation, et que la personne rentre, si on peut dire, quasiment en bougonnant à chaque matin, puis que le niveau
d'attention, en termes de sécurité, est moins élevé? Est-ce que vous
allez jusqu'à dire ça?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu (Agnes) : Écoutez, ça
pourrait faire partie des conséquences, je ne peux pas m'avancer jusque-là. Je
pense que les entreprises vont évidemment mettre en place les mesures
nécessaires pour s'assurer que la formation
soit de qualité et que la sécurité soit assurée. Mais c'est certain que, dans
une entreprise d'insertion, ce n'est pas positif d'avoir des personnes qui ne sont pas là sur une base
volontaire, c'est vraiment la force des... C'est un modèle, comme je
disais, qui est unique, qui est efficace et qui repose beaucoup sur le
développement de la motivation des personnes.
Et, pour ça, ça veut dire de l'aider à traverser les étapes. La motivation,
comme le disait M. le ministre, n'est pas toujours égale, mais c'est
important quand même qu'il y en ait une à la base pour pouvoir travailler, et
mener la personne à l'emploi, et la mener à
la qualification, parce qu'en entreprise d'insertion on travaille sur la
qualification, on prépare des gens pour des métiers, donc il faut que la
personne soit prête à s'investir dans ce cheminement-là.
M.
Turcotte :
Quand vous parlez que vous avez des craintes par rapport à la perte d'autonomie
d'Emploi-Québec, d'une entité indépendante actuellement à l'intégration
au ministère, vous mentionnez que vous avez des craintes par rapport aux impacts, à la complémentarité des
services et du partenariat avec les ressources externes. Concrètement,
ça pourrait avoir l'air de quoi pour vous?
Le Président (M. Cousineau) :
M. Gravel.
M. Gravel
(Richard) : Oui, bien, en fait, quand on a lu le projet de loi puis
qu'on constatait qu'il y a un changement
de structure... Nous autres, on n'est pas nécessairement contre les changements
de structure, mais on veut s'assurer...
Parce que le modèle à Emploi-Québec est quand même un modèle qui est efficace,
qui a été démontré, même cité en exemple, hein, on se souvient, voilà
pas si longtemps, par rapport à la formation, le programme de formation
canadienne pour l'emploi, hein, on a souligné le fait qu'Emploi-Québec était
une agence autonome, on l'a mis de l'avant. Donc, on trouve que c'est un modèle
qui est intéressant et qui est basé sur un partenariat, un partenariat à deux niveaux, je vous dirais, un partenariat au
niveau de la Commission des partenaires du marché du travail qui... tout
au long du plan d'action travail dans les orientations, dans les cibles, d'une part,
et au niveau du volet opérationnel, où l'interface avec les organismes en
développement de l'employabilité, les ressources externes permettent d'avoir
une rétroaction sur ce qui se passe sur le terrain.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. Gravel. C'est tout le
temps que nous avions pour cette partie. Alors, je passerais maintenant la parole au deuxième groupe
d'opposition, au député de Drummond—Bois-Francs, pour 5 min 30 s.
M.
Schneeberger :
Merci beaucoup. Bonjour à vous deux. Bien, premièrement, merci d'être là.
J'aime beaucoup votre mémoire et puis
moi, personnellement, je connais un bon organisme dans mon coin qui... pas dans
mon comté mais qui chapeaute une
partie, qui est Parvélo. Alors, j'aime bien ça. C'est sûr que mon amour est biaisé, c'est dans le domaine du vélo, alors c'est sûr que... Ceux qui me
connaissent, ils savent l'amour que j'ai pour le monde du vélo. Mais
j'aime beaucoup les résultats, je pense qu'ils ont de très
bons résultats, puis j'aime beaucoup ce qu'ils font. De quoi à refaire peut-être
dans le coin de Drummondville.
Vous parliez
tantôt... Suite à la lecture de votre mémoire... En
tout cas, je vais y aller directement : Craignez-vous que la CPMT
devienne un organisme de figuration? Selon ce que vous dites, là, vous avez, tu
sais, là, le... C'est un peu fort, là, le mot, mais...
M. Gravel
(Richard) : Oui. Bien, moi, je pense
que oui, effectivement, on n'allait pas si loin que ça. Je pense que, dans le fond, les
interrogations qu'on amenait, tant au
niveau de la structure d'Emploi-Québec,
de l'agence autonome, mais le rôle de
la CPMT dans la rédaction des plans d'action, l'interaction avec les conseils
régionaux, pour nous autres, est un acquis important. Et le danger,
quand on lisait le projet de loi, et ce pourquoi on amenait des
interrogations, c'est : Est-ce qu'il
n'y a pas un risque d'antagoniser, de mettre en opposition la CPMT, si on lui
met un rôle où ils vont avoir à réagir sur un plan d'action?
Vous savez,
moi, je siège au groupe 150, là, le groupe qui travaille sur toute la mise en
place, les priorités du plan d'action,
et c'est intéressant, dans les travaux, de voir comment l'ensemble des
partenaires du marché du travail viennent bonifier le plan d'action. Et,
quand on lisait le projet de loi, bien on se dit : Est-ce que, dans cette
façon de voir là, on n'arrive pas avec une
CPMT qui vient comme en bout de ligne... En fait, ça, c'est le risque qu'on
voit, en bout de ligne, venir faire
des recommandations par rapport à un plan d'action qui aurait été développé
plus en vase clos, et c'est là-dessus qu'on voulait sensibiliser la
commission.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger :
O.K., parfait. Bon, ça fait qu'au niveau de la nomination, tout ça, vous voyez
une problématique, là, ce que le ministre, après consultation...
M. Gravel (Richard) : Vous savez,
nous autres, on est des organismes communautaires, les organismes communautaires
ont toujours eu une nomination de la part du ministre. Ça touche plus le
patronat et les syndicats, on va leur laisser leur position.
M.
Schneeberger :
O.K. On va parler de coercition, de volontariat. Vous représentez des
organismes où est-ce que justement,
bon, bien la personne arrive chez vous puis elle a un cheminement, un
cheminement de vie, cheminement personnel,
au niveau de l'emploi aussi, c'est assez large. Et j'aime beaucoup la
discussion que vous aviez avec le ministre parce que, dans votre cas à vous, si la personne dit : O.K., moi,
j'embarque, là, c'est correct, j'y vais, et puis qu'après un certain
temps, là, pour x raisons, moi, je ne veux plus rien savoir de ça, commence à
mener le trouble chez vous, nuit aux autres,
là, à un moment donné, vous, vous n'avez pas le choix de dire : Regarde,
ça va faire, on ne peut plus te... rester ici. Emploi-Québec, lui,
l'oblige. Il se passe quoi?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Beaulieu.
Mme Beaulieu (Agnes) : Vous touchez
un excellent point, parce que c'est effectivement la force de notre
intervention, comme je disais, c'est toujours de travailler avec la personne.
Donc, actuellement, dans une entreprise d'insertion,
si une personne ne respecte pas les consignes, refuse de travailler autant sur
son plan d'action personnel que sur plan d'action professionnel, ne fait
pas le travail, elle peut être congédiée, c'est effectivement une mesure qui
est, malheureusement, utilisée. Il y a une série de sanctions, on peut
l'utiliser.
Une voix : ...
Mme
Beaulieu (Agnes) : Oui, oui, mais elle a... Par contre, on va essayer
de la référer à une autre ressource plus appropriée, parce que ce que ça
signifie, c'est que la personne, elle n'était probablement pas prête à intégrer
cette mesure-là, qui était probablement trop
intensive ou trop difficile, et on avait dû faire une erreur de recrutement,
sans doute, ou la personne pensait qu'elle était prête et elle ne
l'était pas. Donc, on va essayer de la référer à une autre ressource.
Le Président (M. Cousineau) :
Dernière question, M. le député.
M.
Schneeberger :
O.K. Oui. Bien, à ce moment-là, sur le même point, maintenant, vous devez
sûrement déjà vivre des cas comme ça,
à un moment donné, que pour x raisons ça ne marche pas. Qu'est-ce que faites,
actuellement? Est-ce que vous le référez à
un autre organisme qui a une autre approche différente qui va convenir mieux à
ses besoins ou... Qu'est-ce qui se passe actuellement?
Mme
Beaulieu (Agnes) : Vous savez, généralement, quand la personne ne
réussit pas comme ça, qu'elle est en échec,
c'est parce qu'il y a d'autres problèmes dans sa vie qui surgissent. Ça peut
être des rechutes de toxicomanie, ça peut être des problèmes familiaux, de la violence, toutes sortes de choses
qui peuvent survenir. Le passé, parfois, rattrape les personnes que nous accueillons. Donc, c'est
souvent une référence qui va être de ce type-là, vers des ressources
d'aide à la désintoxication, des ressources d'hébergement, des ressources en
santé mentale. C'est souvent cela qu'on va faire.
• (17 h 30) •
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, madame. Alors, pour les trois prochaines minutes, je passerais
maintenant la parole à la députée de Gouin. Mme la députée.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Et donc — je
continue — est-ce que cette personne-là, en
général, pour les quelques cas qui arrivent,
que vous allez référer, va continuer ou va avoir droit à recevoir un chèque d'aide sociale?
Mme
Beaulieu (Agnes) : Si elle
était prestataire avant, oui, s'il
s'agit effectivement d'un problème
de ce type-là.
Mme David (Gouin) : O.K. Deuxième question :
Avez-vous des listes d'attente?
Mme Beaulieu (Agnes) : Oui.
Mme David
(Gouin) : Donc, si je comprends bien, oui, on pourrait multiplier les entreprises d'insertion, si
les ressources existaient, et vous pourriez accueillir plus de personnes que
vous le faites actuellement.
Mme Beaulieu (Agnes) : Certainement.
Mme David
(Gouin) : O.K. Je
voudrais aussi dire que j'ai deux entreprises d'insertion dans ma circonscription, je les connais très bien, Pro-Prêt,
Imprime-Emploi... reçoivent en
particulier des jeunes, et je
voudrais juste... Peut-être
pour que ce soit clair pour tout le monde, des jeunes en difficulté, hein, les gens que vous recevez, ce n'est pas
des gens qui ont tout eu dans la vie,
là, ils ont des difficultés. Mais vous nous dites : Ils sont quand même
motivés. Ils ont fait un bout de chemin, ils sont rendus à un point où
c'est possible de les aider. Donc, je voulais simplement établir ça.
Mais j'ai une
autre question sur l'adéquation formation-emploi. Là, vous nous
expliquez qu'il faudrait
ajouter à l'offre des services d'employabilité longue durée. Vous avez une
phrase intéressante, c'est : «Ce type de formations qualifiantes permet
aux individus d'accéder à un emploi durable et devrait être privilégié à une
approche de mise à l'emploi rapide et de
court terme», chose que nous voyons beaucoup en ce moment. Vous touchez un
point, là. Qu'est-ce qui devrait être fait?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Beaulieu, M. Gravel. Mme Beaulieu.
Mme
Beaulieu (Agnes) : En fait, on pense qu'on doit s'intéresser aux
personnes qui sont sous-scolarisées et qui sont souvent un peu les laissés-pour-compte dans cette démarche-là. Et
on pense qu'effectivement une mise à l'emploi, un appariement rapide entre il y a un emploi
disponible et il y a une personne, généralement ça va vers un échec quand
la personne n'est pas prête, quand il n'y a
pas un accompagnement adéquat. Donc, on se dit, il faut privilégier des
mesures qui mènent à de la compétence, au
développement de la compétence, autant les compétences génériques que des
compétences d'emploi, parce que sinon on va
avoir les portes tournantes, on va avoir une personne qui va effectivement être
employée mais très rapidement va être mise à
pied, on est toujours dans des emplois précaires. On sait qu'il y a des
besoins dans les entreprises, on parle
d'entreprises de service, on parle dans la restauration, il y a énormément de
postes qui vont être disponibles,
mais il faut que les gens soient bien préparés, et en ce sens-là on pense qu'il
doit y avoir de la formation de métier
qui est donnée de façon alternative et qui mène à de la véritable compétence.
Et ça, ça ne se fait pas en un mois, ça ne se fait pas en quatre
interventions dans un bureau.
Mme David (Gouin) : Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, merci beaucoup, Mme Beaulieu et puis M. Gravel.
Je suspends
pour quelques instants et j'invite les gens du groupe suivant à se présenter à
la table, s'il vous plaît, les membres du Conseil du statut de la femme.
(Suspension de la séance à 17 h 33)
(Reprise à 17 h 35)
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, nous reprenons nos travaux et nous accueillons le Conseil du statut de la femme.
Mme Miville-Dechêne, présidente, vous allez nous présenter les gens qui
vous accompagnent. Et puis vous avez 10 minutes comme les groupes
précédents.
Conseil du statut de la
femme (CSF)
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Oui.
Alors, excusez ma voix, j'ai un petit mal de gorge. Donc, à ma droite, Nathalie Roy, chercheure, c'est elle qui a écrit
notre mémoire que vous avez en main, et, à ma gauche, Christian Dubois,
qui est notre directeur des communications.
Donc,
étant donné notre mission, nous nous préoccupons particulièrement de l'impact
sur les femmes du projet de réforme proposé par le gouvernement. Pour
nous, étant donné les conséquences de la pauvreté des femmes, il est impératif de se
préoccuper de la qualification des jeunes femmes afin d'avoir le maximum de
chances de les sortir de la pauvreté.
Parmi les adultes prestataires d'aide sociale, 46 % des femmes n'ont pas complété leurs études secondaires,
et les autres ont tout juste un diplôme
d'études secondaires. Plus inquiétant encore, les deux tiers des femmes
monoparentales qui sont hors du marché du
travail depuis trois ans n'ont pas complété leur secondaire. Pour le conseil, il est donc essentiel que ces femmes terminent leurs études pour obtenir une
formation qualifiante, on en parlait tantôt. C'est la clé pour sortir de la pauvreté, car les femmes sans diplôme ont un taux
d'emploi de seulement 23 %,
contre 38 % pour les hommes. Et en ce moment, malgré les progrès énormes faits par les femmes dans les études
supérieures, celles, et elles sont majoritaires, qui ne font pas
d'études supérieures — on
oublie trop souvent qu'à peu près deux tiers des femmes ne font pas d'études supérieures — celles-là choisissent encore des formations
professionnelles traditionnellement féminines, donc, en général, moins bien payées : coiffure, esthétique,
assistance aux personnes en établissement de santé. Malheureusement, ces
choix ont des conséquences. 94 % des
femmes qui n'ont pas leur secondaire gagnent moins de 40 000 $, alors
que c'est le cas pour 69 % des
hommes — c'est
une différence impressionnante — ce qui signifie que l'absence de diplôme est
pénalisante pour tout le monde mais particulièrement pour les femmes. C'est
donc cette toile de fond qui a guidé notre réflexion.
Qui
sont ces fameux primodemandeurs d'aide sociale? Ils sont plutôt jeunes, l'âge
moyen est de près de 31 ans, le ministre
l'a dit, mais il y a aussi plus d'hommes que de femmes, 53 % versus
47 %, et 19 % d'entre eux ont déjà à charge au moins un enfant. À Emploi-Québec, on nous a dit
que beaucoup de ces femmes primodemandeurs sont enceintes. Le conseil considère donc qu'un effort supplémentaire doit
être fait par l'État pour s'assurer que ces primodemandeurs d'aide
sociale, particulièrement ceux de moins de
25 ans, s'engagent dans un processus de qualification qui améliorera leurs
conditions de vie. Pourquoi y a-t-il urgence
pour les jeunes femmes et hommes de 18 à 25 ans? Là-dessus, nous
rejoignons l'analyse de l'économiste
Pierre Fortin dans un rapport publié en 1996, je le cite : «Les premières
années de l'âge adulte constituent la phase
la plus cruciale de vie du point de vue de l'orientation, de la formation et de
l'intégration en emploi. L'expérience montre
que, si ce passage à la maturité est raté, les chances de rattrapage par la
suite sont minces et les chances de passer le reste de sa vie active
dans la pauvreté et la dépendance sont fortes.»
On peut voir, donc,
cet engagement automatique que nous préconisons comme une forme de prolongement
de l'obligation scolaire, dans le cas des
jeunes adultes qui ont besoin d'un soutien de l'État pour survivre. En ce
moment, d'ailleurs, on entend des voix
s'élever pour réclamer l'éducation obligatoire de quatre à 18 ans, donc un
an de plus du côté de la maternelle
et deux ans de plus de 16 à 18 ans. Vous le savez peut-être, mais en
Ontario il est interdit de quitter l'école sans diplôme avant 18 ans,
afin de lutter contre le décrochage. Ce n'est pas le cas au Québec, et je dois
vous dire que c'est une proposition qui semble avoir un certain sens.
Une étude nous a
particulièrement frappés. Des chercheurs calculent que seulement 52 % des
prestataires qui participent à des mesures volontaires de formation de la
main-d'oeuvre complètent leur parcours. En plus, le taux d'abandon des études
secondaires est de plus de 70 % pour ces mêmes prestataires. Alors, les
auteurs estiment que le système scolaire ne
répond pas aux attentes de ces jeunes assistés sociaux. Il est donc trop facile
de blâmer les prestataires par manque
de persévérance. C'est là qu'il faut mettre en place un encadrement plus
important pour ces jeunes vulnérables.
• (17 h 40) •
Et il existe des
programmes modèles que l'on devrait offrir plus largement aux jeunes mères, le
programme notamment... ou aux jeunes pères,
le programme qui s'appelle Ma place au soleil, introduit en 2000, mais qui
n'est, selon les personnes à qui on a parlé chez Emploi-Québec, pas
assez offert de façon générale. Il est destiné aux chefs de famille monoparentale peu scolarisés. C'est un programme, donc, qui essaie de donner une
première qualification à ces femmes mais
aussi qui tient compte de la complexité des réalités et des difficultés vécues
par les jeunes adultes prestataires d'aide sociale, que ce soient les problèmes sociaux, les abus, la toxicomanie,
la désorganisation, parce qu'on comprend ici qu'il peut y avoir un ensemble
de problématiques, que l'idée de s'occuper de la qualification n'est pas
forcément la seule chose dont on doit s'occuper.
Notre réflexion nous
a donc amenés à considérer, pour les jeunes demandeurs d'aide sociale, un engagement
automatique dans un parcours de formation
comme une deuxième chance d'apprendre un métier ou des connaissances
pour les jeunes qui ont décroché de l'école
trop tôt. Étant donné leur âge, ces jeunes ne sont pas encore trop loin de
leurs années de banc d'école, et nous croyons qu'il faut leur donner
toutes les chances possibles d'acquérir les outils nécessaires pour avoir des
emplois décents.
Toutefois,
et j'insiste là-dessus, le conseil ne peut appuyer l'idée qu'on réduise
la prestation d'aide sociale des personnes
qui ne se conformeraient pas aux exigences du programme, étant donné que cette
aide de dernier recours est deux fois
plus basse que le seuil de faibles revenus. Cette approche punitive a été
appliquée en Ontario sous le gouvernement
Harris, qui obligeait les prestataires à
travailler au moins 17 heures par semaine. Oui, on a eu moins d'assistés
sociaux en Ontario, mais les différentes études que j'ai lues n'imputent pas forcément
cette diminution au programme, qui a été, comme vous le savez, largement
critiqué. On est revenu, en Ontario, à une approche facilitante où on doit
suivre un programme de formation, c'est ainsi inscrit dans les directives, mais
où les sanctions ne sont pas au rendez-vous.
Il
est clair cependant qu'un parcours obligatoire pour les jeunes demandeurs
d'aide sociale devrait s'accompagner d'un investissement supplémentaire
du gouvernement dans la quantité et la qualité des services offerts. C'est un
peu ce que disait Pierre Fortin dans son
étude, c'est que, si on en demande plus à la personne, si on lui demande une
plus grande participation, il faut aussi que l'État mette à son service
un meilleur encadrement, parce que les deux vont de pair. Le conseil juge que les jeunes de 25 ans et
moins qui font une première demande d'aide sociale méritent un surcroît
d'effort public pour qu'ils puissent s'inscrire dans un processus de formation
et de qualification et réussir leur intégration. Cette période de transition
entre une situation de dépendance à l'égard des parents et l'autonomie
économique est particulièrement importante pour intervenir efficacement auprès
des premiers demandeurs d'assistance sociale.
Par ailleurs, on s'oppose
à l'obligation d'occuper un emploi pour les personnes prestataires d'aide
sociale, particulièrement lorsqu'il implique un déménagement, ce qui peut nuire
grandement à la stabilité ou à la situation financière des ménages.
On trouve
aussi que l'obligation d'occuper un emploi peut placer le jeune dans une
situation difficile dans une entreprise, carrément de chantage dans les
pires cas. Si on prend l'exemple du Danemark, les prestataires d'aide sociale ont l'obligation d'entreprendre une
démarche de formation jusqu'à l'âge de 30 ans mais pas d'occuper un
emploi. Alors, on aime toujours citer les pays scandinaves. Dans ce cas-là, il
n'y a pas d'obligation d'occuper un emploi.
L'effort
public de soutien à l'intégration en emploi des jeunes primodemandeurs d'aide
sociale doit également comprendre un
volet de diversification professionnelle chez les jeunes femmes. Évidemment,
vous le savez, le conseil insiste
toujours pour que les filles puissent se faire parler des options autres que
les options traditionnelles, qui tournent souvent autour du ménage. On entendait récemment qu'on offrait beaucoup
à ces jeunes femmes d'être des préposées aux bénéficiaires, et effectivement il nous faut beaucoup de préposés aux
bénéficiaires, dans cette société qui vieillit, mais, si elles travaillent pour des OSBL, ce seront des
emplois au salaire minimum. Alors, soit on relève ces emplois-là et on
les paie à leur juste valeur — ça, on dit beaucoup ça, au conseil — soit
on leur ouvre les yeux sur les autres possibilités où on est mieux payé.
Alors, c'est
pour ça que... Deux dernières remarques. Il me reste une minute, ça va bien.
Deux questions nous inquiètent dans
les nouvelles orientations du dossier de la main-d'oeuvre féminine. Le terme
«discrimination systémique» est
évacué, on se demande pourquoi, parce que, par exemple, si on veut poursuivre
les efforts pour intéresser les filles aux métiers non traditionnels
plus payants, il faut comprendre que les choix de carrière ne sont pas
seulement une question individuelle, que ces choix sont faits dans un contexte
de société où les stéréotypes font que les filles s'en vont plus vers certains métiers que vers d'autres. Il y a des groupes
spécialisés, en ce moment, dans le retour à l'emploi des femmes,
notamment 16 groupes qui en font une spécialité. Si on finance moins ces
groupes et qu'on donne à tous les groupes communautaires et aux agents d'aide
sociale cette responsabilité de diversification, le problème, c'est qu'on risque de diluer les efforts. Parce qu'on l'a vu,
je vous donne un exemple facile. En éducation
sexuelle, on a arrêté, il y a huit ans, de faire des cours d'éducation sexuelle, et tout le monde était responsable de l'éducation sexuelle dans l'école, et ça
a fini que personne ne l'enseignait. Donc, voilà. Et, pour ce qui est des changements à Emploi-Québec, disons que, nous, ce qu'on veut, c'est que les services soient
conservés, sinon augmentés. Sur les structures, on n'a pas d'opinion là-dessus.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, merci, Mme Miville-Dechêne. Je vais maintenant passer la parole au ministre
pour 13 min 30 s.
M.
Blais : Merci beaucoup, madame, pour votre présentation. Bravo pour votre voix, je vois qu'il
en reste encore un petit peu, là, on va pouvoir commencer les échanges.
Sur la question
des sanctions, c'est une question complexe, parce qu'il faut savoir quel
sera le modèle, hein, on aura des
débats là-dessus, quel sera le modèle qui sera adopté
par le gouvernement. En ce
moment, au Canada,
huit provinces sur 10 ont des
sanctions, l'Ontario ont des sanctions. Je ne veux pas défendre un
mois complet sans aucune prestation, hein, donc... Et ça peut être renouvelé. Et là j'ai une liste de pays ici. Le
Danemark, bien sûr, obligation de recherche d'emploi, obligation
d'accepter les offres d'emploi et les offres d'activation. Les Pays-Bas, bon,
ça, je connais un peu, très sévère, l'Allemagne
encore plus. La Finlande, Norvège, très sévère. Je pense qu'il faut
que le Québec trouve sa voie dans tout ça. Et ça vaut la
peine de regarder ça avec attention et précaution, là-dessus, là, je peux vous
dire qu'on va être prudents et intelligents.
L'OCDE nous recommande d'y aller de
façon mesurée, pour différentes
raisons. Donc, on aura l'occasion d'éclaircir ça, mais on fera un autre
débat là-dessus.
Vous avez
commencé, disons, assez fort, en disant : Dans le fond, Objectif emploi,
ça devrait peut-être s'appeler
Objectif études, hein, il y avait un petit peu de ça, hein, c'est-à-dire que...
parce que...
Mme Miville-Dechêne (Julie) : ...une
meilleure façon de le présenter.
M.
Blais : On ne changera peut-être
pas le nom, parce que, si c'est Objectif études, c'est éventuellement pour occuper
des emplois bien qualifiés, bien rémunérés, c'est ce que nous recherchons, mais
je l'ai mentionné dès le départ ici que probablement que dans le message, pas
dans le projet de loi mais dans le message, il fallait insister sur la scolarisation, la fin de scolarisation pour les
garçons aussi et pour les filles, pour les raisons que Pierre Fortin
invoque très bien, c'est-à-dire c'est une période critique en termes de développement
de capital humain. Et c'est parce que
c'est une période aussi critique, aussi importante que dans les
débats, là, sur ces questions-là on ose parfois parler de sanction de
façon intelligente, pour s'assurer vraiment qu'on atteint ces objectifs-là.
Donc, je veux
vraiment clarifier notre volonté là-dessus, ce n'est pas, certainement pas de dire aux gens : Acceptez le premier emploi qui est à côté de chez vous,
alors que vous avez un potentiel pour terminer vos études. Cependant,
ce qu'on nous dit aussi, de l'autre côté, du côté des agents d'aide à l'emploi,
c'est que, dans certains cas, plusieurs ont abandonné les études depuis
quelques années, ils ont un mauvais souvenir des études. Donc, ou bien on
trouve une formule qui est différente de ce qu'ils ont connu, ou bien il y a
une expérience de travail qui éventuellement pourrait se retourner vers une
expérience d'études, là. Il faut être réaliste sur cet objectif.
Sur la question de l'encadrement plus important,
ça, j'aimerais vous entendre là-dessus. Vous pensez à quoi exactement comme
encadrement plus important pour atteindre ces objectifs de renforcer leur
capital humain pour le reste de leur vie?
• (17 h 50) •
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Miville-Dechêne.
Mme
Miville-Dechêne (Julie) :
Alors, nous ne sommes pas des spécialistes de la question, mais ce que je
vous dirais, ce que je comprends, pour avoir étudié le programme emploi au
soleil... Ma place au soleil, c'est qu'on peut difficilement s'occuper uniquement
de la question des études ou de la question de l'éventuel emploi.
Je suis assez
d'accord avec vous sur le fait qu'il faut
faire une évaluation sérieuse, parce que c'est vrai qu'il y a des
jeunes qui préfèrent une formation qualifiante plus rapide que d'autres. Il ne
faut pas, toutefois, les envoyer directement là-dedans sans voir s'ils ne veulent pas finir leur secondaire. Je pense
que l'idée d'éliminer complètement l'idée qu'ils peuvent finir leur
secondaire parce que c'est trop long, je n'irais pas là.
Mais, pour ce
qui est de l'encadrement, l'idée serait de voir tout ce qui, autour, peut
nuire. C'est pour ça qu'on dit oui à
un engagement automatique — on préfère le mot «automatique» au mot «obligation» — une espèce de poursuite de l'école, mais en même temps, s'il y a des blocages,
il faut être capable de les aider. C'est-à-dire que, si la personne est désorganisée et a de la difficulté à
s'organiser, c'est un signe qu'il peut y avoir d'autres problèmes à la maison,
il peut y avoir des problèmes
dans la vie familiale, qu'il peut y avoir eu des abus, qu'il peut y avoir,
comme on a dit tantôt, de la
toxicomanie. Donc, essentiellement, ça prend... Toutes les études que j'ai lues
montrent que ça coûte plus cher de bien encadrer des jeunes pour qu'ils retournent à l'emploi que de leur payer
de l'aide sociale. Donc, c'est plus cher de faire un bon encadrement, tu sais, vous ne pouvez pas faire ce plan de façon
sérieuse pour vouloir économiser de l'argent, parce que l'encadrement
coûte cher. Et là, évidemment, je me demande où on s'en va en termes
d'encadrement, parce que, nous, les chiffres
qu'on a, c'est qu'on a déjà moins d'agents d'aide sociale, et c'est eux qui
souvent les premiers doivent rencontrer les futurs prestataires. Si on
fait un téléphone, même, plutôt qu'une rencontre, s'il n'y a pas de rencontre
face à face, il n'y a pas quelque rencontre très structurante, bien ça pose
déjà un problème. Alors, il y a vraiment une nécessité d'avoir assez de
personnel et des personnes qui peuvent faire autre chose que de donner les directives
et les règlements, quelqu'un qui peut saisir les problématiques.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Les agents d'aide à l'emploi que j'ai rencontrés sont tous des
intervenants sociaux au sens le plus noble du terme, ils essaient
vraiment d'avoir la vue la plus large possible sur la situation de la personne.
Je voudrais aller sur un autre terrain. Nous
avons des organismes d'employabilité — c'est plutôt l'exception, mais ça existe — qui travaillent davantage avec la clientèle
féminine, et les recherches ne sont pas très, très, très claires sur le fait que ça prend absolument, disons, ce degré
de spécialisation pour avoir une efficacité que... En d'autres mots, on
peut aller vers d'autres formes, d'autres
types d'emploi qui ne ciblent pas, par exemple, les femmes et on peut avoir des
taux de réussite aussi bons. Est-ce que vous avez une conviction là-dessus?
Mme
Miville-Dechêne (Julie) :
Bien, j'ai lu la même étude que vous, qui a été commandée d'ailleurs, je
crois, par Emploi-Québec, et
effectivement cette étude disait que les femmes qui passaient... On parle d'à
peu près 16 groupes communautaires qui
sont dédiés à la formation des femmes. Donc, les prestataires, les clientes,
hein, je n'aime pas le terme «clientes»,
mais en tout cas les femmes qui sortaient de là se disaient très satisfaites
des services qu'elles avaient reçus.
Mais ce que
je comprends de l'étude, c'est que l'étude n'a pas été capable de faire la
différence entre la portion obligatoire que tous les organismes de
formation donnent et la portion spécifique qu'on donne aux femmes, alors effectivement on a un problème. Je dois vous dire
que ce n'est pas le seul cas où on a un problème à évaluer de façon très
systématique si tel programme ou telle façon
de faire fonctionne, c'est assez fréquent, dans nos programmes, qu'on
n'a pas une reddition de comptes qui regarde
qualitativement ce que ça donne. Alors, je trouve que l'idée de mettre fin à
cette expérience sans avoir vraiment fait
une étude qui montre si au moins ça aide... me semble un peu prématurée,
d'autant plus, comme je vous l'ai dit, que,
s'il n'y en a plus, d'organismes comme ça, qui va essayer d'aider les filles à
diversifier leurs choix professionnels? Parce que tout le monde est pris dans
les stéréotypes, vous savez. Et moi,
évidemment, j'apprécie beaucoup le travail de tous ceux qui travaillent
là-dedans, mais, quand vous avez toute une liste de directives et de choses à respecter, est-ce que vous allez vraiment
vous préoccuper aussi de cette question de métiers qui sortent un peu de l'ordinaire? Parce qu'il y a
de la résistance et de la personne qui est devant vous, et en général
les stéréotypes sont très, très forts.
Alors, c'est
pour ça que ce n'est pas si facile de mesurer, je dois vous dire, comment dire,
l'effet à moyen terme de ces groupes-là, mais il faudrait effectivement
faire des recherches plus poussées.
M.
Blais : La question, ce n'est certainement pas de les éliminer ou...
La question, c'est de savoir, évidemment, si comme organisme vous avez
une position là-dessus. Mais je comprends que vous êtes encore à l'écoute...
Mme Miville-Dechêne (Julie) : On a
une position, on a une...
M. Blais : ...et puis les meilleurs
moyens seront ceux qui devront être retenus, et c'est tout, finalement.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Mais on a une position certainement sur le fait
que, dans tous les domaines où il y a
des différences importantes entre l'intégration des femmes et l'intégration des
hommes, l'idée d'avoir une approche spécifique
pour les femmes, en théorie, est la bonne approche. Parce
que les femmes, par définition, sont
encore celles qui s'occupent plus que
les hommes des enfants, des tâches familiales, de tout cela, alors, bien sûr,
tout ça pèse plus lourdement sur les femmes quand elles se cherchent un emploi.
Alors, par définition, je veux dire, tant qu'on n'aura pas une société parfaitement
égalitaire, où les hommes, les prestataires d'aide sociale ou autres, en feront
autant que les femmes à la maison et par rapport à... Et, tu sais, même quitter le travail, ce sont les femmes qui, en
général, sont absentes du travail pour s'occuper
des enfants malades. Alors, vous comprenez que ce sont des choses différentes,
ce sont des parcours différents, et c'est pour ça que leur intégration
ne peut pas être tout à fait la même que quelqu'un qui n'a aucune responsabilité
ou qui en a moins.
Donc,
oui, évidemment, en principe, on est d'accord
avec ces approches, mais je ne peux pas prétendre ici que l'étude que
vous avez faite montre autre chose que ce qu'elle montre.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Sur la reproduction
des stéréotypes, est-ce que vous avez, là-dessus, des constats que
vous avez faits, ne serait-ce que par les interventions... Que ce soit
de reproduction intentionnelle ou pas, ça n'a pas d'importance, mais, que ce soit par le type d'intervention qu'Emploi-Québec peut faire ou que ce soit le type de programmes qui sont
offerts, est-ce que vous pensez que l'effort est bien réel, est
suffisant pour essayer de combattre un peu les stéréotypes? On parle de
stéréotypes d'emploi, bien entendu, là.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Bien non. C'est-à-dire que c'est un des
domaines les plus difficiles. J'ai parlé à plusieurs personnes impliquées
dans ces questions-là, des groupes, des femmes très militantes et
qui disent à quel point les choses
changent lentement. On le sait pour la construction, mais c'est vrai aussi dans
d'autres métiers. Donc, oui, il faut que ce soit fait par des campagnes,
par de l'éducation, même par les professeurs dans les écoles.
Pour
reparler des pays scandinaves, il y a certains pays, je pense que c'est la Suède,
mais je ne mettrais pas ma main au feu, où les garçons suivent des cours
de cuisine à l'école et les femmes suivent des cours de menuiserie. Bon, ça a
l'air un petit peu cliché, mais l'idée du cours de menuiserie, c'est que ça
donne aux filles le spatiotemporel qui leur manque
tant pour aller vers les métiers masculins. Et, tu sais, on ne fait pas ça,
nous. Je sais qu'il y a des fois des foires, qu'on essaie de convaincre les filles, mais les
efforts ne sont clairement pas suffisants, étant donné ce qui se passe,
parce qu'on ne peut pas, quand même... Comme société, il n'y a rien qui empêche...
Tu sais, pourquoi est-ce qu'on se contenterait de dire : De toute façon, c'est parce
que les filles ne veulent pas le
faire? C'est un peu facile, parce que vous le savez, à quel point, tu sais, être
serveuse, debout toute la journée, c'est des métiers épouvantablement
fatigants, souvent.
Alors,
il y a des métiers spécialisés qui sont davantage masculins, où on est
mieux payé, où il y a des... Tu sais, c'est quand même, pour
nous, une des voies pour sortir les femmes de la pauvreté.
Et
l'autre voie, c'est que ce n'est pas normal que les métiers qui sont liés au
«care» soient payés ce qu'ils sont payés.
Tu sais, c'est vrai que, dans la fonction
publique, c'est vrai que, dans les
CLSC, les auxiliaires familiales sont beaucoup mieux payées, mais, dans
les OSBL, c'est le salaire minimum.
Le Président (M.
Cousineau) : Dernière question rapide, il reste
30 secondes.
M. Blais :
Oui. Peut-être madame veut terminer, là.
Le Président (M.
Cousineau) : ...terminer, Mme Dechêne?
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Oui. Alors, ce que me montre effectivement...
ce qu'on dit dans notre avis là-dessus, c'est que les organismes qui s'occupent spécifiquement de l'emploi féminin cherchent à identifier les intérêts de la personne et à trouver la voie qui concorde avec
ses intérêts, mais là on parle des... Excusez-moi. Chez les groupes qui
ne sont pas des groupes spécifiques
d'employabilité pour les femmes, il y
a rarement une approche proactive
pour encourager la personne à considérer un plus large éventail de possibilités,
et ça, c'est le CIAFT qui dit...
Le Président (M.
Cousineau) : Merci. Je dois passer maintenant à l'opposition
officielle. M. le député de Saint-Jean, pour huit minutes.
M.
Turcotte :
Merci, M. le Président. Merci à vous de venir nous présenter votre opinion par
le biais de votre mémoire.
Pour qu'on se comprenne
mutuellement, et si je comprends bien, vous êtes pour un parcours obligatoire
d'employabilité ou de formation pour les personnes de moins de 25 ans,
donc les jeunes, une partie des jeunes, mais, si la personne ne s'inscrit pas
ou ne participe pas à ce parcours obligatoire, vous êtes opposés à ce que le ministère,
le gouvernement touche la prestation d'aide sociale.
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Dechêne.
• (18 heures) •
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Oui, absolument. Et on ne pense pas que c'est
contradictoire.
M.
Turcotte :
Moi, je ne pense pas que c'est contradictoire, mais c'est votre opinion que je
veux entendre.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Je
pense que l'idée, c'est qu'une fois qu'on le dit automatique, qu'on le dit
obligatoire — puis
on aime mieux le mot «automatique» — on sent que, dans la volonté
de la personne qu'on essaie d'aider et dans les efforts qui seront consacrés à cette personne... on
a l'impression qu'on va pouvoir limiter le décrochage, limiter l'abandon dans la formation qu'on constate
jusqu'à maintenant, mais ça demande clairement une mobilisation du milieu. Mais on pense qu'à ce moment-là... On voit
ça... C'est pour ça qu'on le décrit comme une continuation de l'école, comme une continuation de l'obligation scolaire,
parce que clairement on met l'emphase sur le fait que ces jeunes-là ont d'abord et avant tout besoin de compétences pour
pouvoir intégrer le milieu du travail. Mais évidemment, le chèque étant ce qu'il est, là, 616 $, le couper de moitié, comme l'avait
mentionné M. Hamad, nous semble impensable, on est déjà à la moitié du seuil de la pauvreté
avec le chèque actuel.
M.
Turcotte : Vous
mentionnez la question des compétences, donc de la formation, faire en sorte
que notre population, notre monde soit mieux formé. Tantôt, avec le ministre,
vous avez eu un certain échange sur une éventuelle modification du nom Objectif emploi, là on
embarque dans les détails, mais pour avoir en tête la question de la
formation. On parle souvent de la formation
avant d'entrer sur le marché du travail, pour se trouver un emploi, mais il
faut aussi avoir en tête l'importance
d'avoir de la formation pour le maintien en emploi et faire en sorte qu'une
personne qui a un emploi d'un certain
niveau puisse, par sa formation, améliorer son sort et inévitablement améliorer
le sort de notre société, parce qu'il faut aussi libérer des postes
peut-être un peu plus bas que les nouveaux qui arrivent dans le marché du
travail...
Vous avez
mentionné la question des métiers non traditionnels. En ce qui a trait aux
métiers non trads, il y a des formations qui sont admissibles par
Emploi-Québec, par les centres locaux d'emploi. On nous dit, puis on l'entend, dans certaines régions, certaines formations sont
admissibles; dans certaines autres régions, elles ne sont pas, en
fonction des réalités ou des besoins de
main-d'oeuvre des régions concernées. Puis, bon, on nous dit aussi que des fois
ce n'est pas toujours arrimé vraiment
puis qu'il n'y a pas une très bonne adéquation parce qu'il y a un certain
retard, peu importe, on n'embarquera pas là-dedans, ce n'est pas mon
point.
Est-ce que vous considérez que les formations
pour les métiers non trads sont suffisamment mises de l'avant, je ne parle pas tant des métiers non trads, mais
que les formations... Et est-ce qu'elles sont vraiment admissibles?
Parce qu'on nous a dit aussi que, dans un centre local d'emploi, bien on va
faire une évaluation de la personne puis on va dire : Ah non! toi, tu n'as pas de chance de finir ta formation,
donc on ne te paiera pas cette formation-là, on te voit plus dans tel
métier parce que, cette formation-là, tu vas plus avoir de chances de la
réussir. Donc, votre argument, de dire : Bon,
c'est une femme, elle veut une formation de plombier, d'électricien, puis de dire :
Bien, est-ce qu'elle va vraiment finir puis se mettre en emploi, parce
que c'est un milieu d'hommes, puis tout ça... Est-ce qu'il y a un impact?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Dechêne.
Mme
Miville-Dechêne (Julie) :
Bien, pour répondre à votre question, il faudrait que je sois dans la tête des
agents d'aide sociale.
M.
Turcotte : ...vous,
ce que vous voyez.
Mme
Miville-Dechêne (Julie) :
Mais ce qui est clair, c'est qu'on ne peut pas juste penser à la façon la plus
rapide d'amener cette personne sur le marché du travail, parce qu'il faut aussi
qu'elle fasse un travail, tu sais, intéressant, enfin, tout au moins qui pose un défi. Donc, faire le choix en disant
que, tu sais, c'est trop risqué de l'envoyer dans telle, telle formation
parce qu'il y a trop d'hommes, tu sais, et ça peut être... à mon avis, ce n'est
pas une bonne idée, parce qu'on ne sait pas
toujours comment les gens vont réagir. Puis, oui, ce sont des milieux
difficiles, mais ce sont des milieux aussi
qui peuvent représenter un défi très intéressant pour des femmes, de travailler
dans un milieu manuel où les heures sont comptées, où le salaire est
meilleur, où elles développent une estime d'elles puis une fierté dans le
travail bien fait, donc...
Mais je
comprends par ailleurs que ce n'est pas si simple d'orienter quelqu'un, et
peut-être que ça doit être fait à l'école
d'abord et avant tout, peut-être que, quand on commence à 18, 20 ans, il
est déjà tard. Mais on vit dans une société de stéréotypes. Et moi, je
dois vous dire que, depuis je suis au conseil, c'est ça qui est le plus
incroyable, c'est quand j'entends des gens
dire : Mais voyons, pourquoi une femme? J'étais dans un taxi, l'autre
jour, puis, tu sais... Pourquoi une femme
voudrait devenir mécanicien? Ça, c'était mon chauffeur de taxi qui me disait ça,
puis clairement, pour lui, c'était impensable. Et je lui dis : Bien...
Alors, on est en 2016, et on dit encore ça beaucoup.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Turcotte : On parle
des organismes d'employabilité qui oeuvrent auprès des femmes. Quoi qu'on peut
en penser, c'est beaucoup
plus difficile pour une femme de 45, 50 ans et plus, de se trouver un
emploi, qu'un homme. On voit qu'il y
a de moins en moins d'organismes qui accompagnent les femmes à se
trouver un emploi, donc de répondre à cette situation-là. Est-ce que vous
avez des données ou une analyse, une réflexion sur... Je ne parlerais pas des
préjugés mais des limitations, parce que, rendu à un certain âge, c'est sûr
que ce n'est pas la question d'avoir des enfants en bas âge, puis tout ça, là, mais, en termes peut-être de formation ou le nombre d'années qu'elles ont occupé des fonctions à
la maison, elles n'ont pas pu gagner
en expérience, donc d'arriver au même échelon, je ne sais pas. Est-ce que vous
avez une réflexion sur cette question-là? Parce que, comme députés, on
reçoit beaucoup de femmes qui ont cette réalité-là puis qui sont sensibilisées à cette question-là, elles nous
interpellent, puis j'aimerais ça voir si vous, vous sentez ça aussi, cette
réalité.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Bien...
Le
Président (M. Cousineau) : En 50 secondes.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : O.K. Alors, c'est pour ça qu'on a divisé, qu'on a
dit : L'obligation pour les moins de 25 ans, parce que, de notre point de vue, les
problématiques pour les personnes... les femmes plus âgées, les hommes aussi, sont différentes. Surtout quand on a passé
un grand bout de temps et qu'on n'a pas été sur le marché du travail, le raccrochage est vraiment plus difficile.
Et,
pour les femmes particulièrement, si elles sont restées à la maison, ce n'est pas parce qu'elles n'ont rien fait d'intéressant, on fait plein de choses quand on
est à la maison, on travaille fort, mais ce n'est pas une expérience
reconnue. Et c'est une expérience qui diminue énormément l'estime de soi des
femmes, parce que la société ne reconnaît pas cette forme de travail sur le
même plan que les autres.
Alors,
je dois terminer ici, mais, bref, vous avez raison de dire que le retour sur le
marché du travail est difficile.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, madame. Je vais
maintenant passer la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le
député de Drummond—Bois-Francs,
pour 5 min 30 s.
M.
Schneeberger :
Merci. Bonjour à vous. Je voudrais revenir... J'avais déjà posé ça, cette
question-là, à d'autres groupes, puis là,
vraiment, ça s'adresse vraiment au niveau des femmes. Au niveau du projet de
loi, on parle de la durée, là, au
niveau d'Objectif emploi, de 12 mois, qu'on allonge un autre 12 mois.
On sait tous que chez les femmes, généralement,
on peut voir des métiers où est-ce qu'on va avoir un salaire qui va être... que
j'appellerais convenable, souvent c'est des métiers qui vont plus... de
l'ordre du collège ou universitaire. À ce moment-là, bien là on parle de
périodes de trois ans minimum. Est-ce que le
programme, justement, devrait pouvoir se prolonger? Je parle surtout de
personnes... Je parle d'une femme
monoparentale, un retour aux études. On s'entend que, quand on a des jeunes en
bas âge, là, comme on dit, c'est de
la peau, à la maison le matin, la préparation, c'est de la course. Alors,
j'aimerais pouvoir vous entendre là-dessus, là. C'est quoi, votre...
Quelle est votre opinion?
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Oui. Mon opinion, c'est qu'il devrait y avoir une
flexibilité, qu'évidemment ça devrait
être évalué, si le programme est sérieux, si la personne est tout à fait...
Parce que, si on veut les retourner à l'emploi, et si l'emploi en question prend trois ans, bien c'est beaucoup mieux,
donner une année ou deux années de plus, que de penser que cette femme va rester à l'aide sociale autrement. Donc,
absolument, il faut être prêt, de mon point de vue, à faire du cas par
cas et à s'assurer que la formation est prolongée, si nécessaire.
Et
je dirais la même chose pour le cours secondaire. Certains avaient l'air de
dire que la réforme empêcherait les prestataires d'aller au secondaire
parce que ça ne donne pas d'emploi à la sortie du secondaire, mais je pense que
de dire ça, c'est aussi empêcher les
personnes d'acquérir des connaissances générales qui peuvent servir à toutes
sortes de choses dans la vie avant de se spécialiser, et on n'est pas
d'accord, au conseil, là-dessus non plus. C'est vrai que tous les
primodemandeurs ne veulent pas aller au secondaire et le finir, mais ça doit
faire partie des possibilités.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député.
• (18 h 10) •
M.
Schneeberger : O.K. Quand on parle d'établir un plan, là,
d'intégration, est-ce qu'à ce moment-là on devrait justement tenir
compte de la réalité de la personne, étant donné ça?
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Bien oui. Bien oui, puis c'est pour ça...
M.
Schneeberger :
Parce qu'aussi ce n'est pas faire de la discrimination, c'est juste de tenir
compte de son contexte, à la personne, qu'elle vit.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Mais
bien sûr. Mais je crois... D'après ce que je comprends, il y a déjà une
certaine flexibilité des agents d'aide sociale là-dessus, c'est ce que je
comprends, mais peut-être pas tant que ça. Mais il faut effectivement tenir compte de
ces personnes-là, parce que, si le but, c'est de l'aider, bien, elle vient avec
un certain bagage, et c'est ça qu'il
faut justement évaluer pour voir à quelle vitesse, dans quel
secteur, quel genre de formation. Tout ça, ça prend du temps. Et, de notre point de vue, c'est là qu'est la clé pour
pouvoir bien orienter cette personne-là et que ce ne soit pas juste quelque
chose de vite fait, un téléphone. Il faut qu'en tout cas tout ça se passe face
à face.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député. Deux minutes.
M.
Schneeberger : O.K.
Bon, ce n'est pas une question, c'est peut-être
juste un commentaire. Bon, on entend souvent le discours que vous faites, là, je
pense qu'il y a un effort énorme qui a été fait, mais moi, je peux vous dire, je rencontre souvent des groupes de jeunes
étudiants sur des programmes spéciaux et autres, et aujourd'hui, je peux vous dire, je
m'inquiète beaucoup plus au
niveau des gars que les filles, parce
que souvent c'est juste des filles qui participent, puis les gars ne sont plus là. Alors, je pense que
vous avez fait un travail énorme, et puis moi, je peux juste vous
féliciter. Puis, s'il y a encore des vieux dinosaures qui ne comprennent pas,
bien, tant pis pour eux autres.
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Est-ce que je peux répondre?
Le Président (M. Cousineau) :
Vous pouvez répondre. Sûrement, Mme Miville-Dechêne. Allez-y.
Mme Miville-Dechêne (Julie) : Alors, loin de moi l'idée de nier l'importance et la gravité du décrochage
scolaire des garçons, et c'est vraiment un
problème qui me touche profondément. Je vous dirais toutefois qu'il ne faut pas
non plus oublier que, les filles, dans les statistiques que je vous ai données
au début, c'est quand même un peu affolant que, les filles qui ne finissent pas
leur secondaire, il y a 94 % des filles qui ne finissent pas leur
secondaire qui gagnent 40 000 $ et
moins et 68 % des hommes qui gagnent 40 000 $ et moins. Alors,
reste que, malgré cet énorme décrochage, puis il y a quand même eu des améliorations récemment, pour celles qui
ne vont pas à l'école, il y a aussi des conséquences. Parce que, là, on ne parle pas de celles qui vont
à l'université, parce qu'on a toujours cette espèce d'oeil braqué sur
les filles qui vont à l'université, et c'est
vrai que, là, il y a eu un progrès énorme, mais moi, je vous parle des autres,
celles souvent que j'appelle les oubliées du féminisme.
Le Président (M.
Cousineau) : Voilà. Alors, merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs.
Je passe maintenant la parole, pour les trois prochaines minutes, à la députée
de Gouin. Mme la députée.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, bonjour.
Tellement d'accord avec votre dernière intervention, Mme la présidente.
C'est
sûr que vous n'avez pas beaucoup besoin de me convaincre des mesures
spécifiques pour les femmes, de l'importance
des organismes, etc., mais je veux quand même vous poser une question parce
qu'il y a quelque chose que je ne
trouve pas encore tout à fait clair, malgré votre réponse à mon collègue le
député de Saint-Jean. Il me semble que vous dites deux choses en même
temps, puis je voudrais juste comprendre.
Vous
dites, page 35 de votre mémoire, que, pour les 18-25 ans, il doit y
avoir une forme d'engagement automatique dans un programme, etc. Plus loin, vous parlez de parcours obligatoire.
Mais vous avez tout de même dit à mon collègue de Saint-Jean : Non, il ne peut pas y avoir de
coupe dans le chèque. Mais alors, si le parcours est obligatoire, et si
l'engagement doit être automatique, la
question que je vous pose, c'est : Qu'est-ce qui arrive si une jeune femme
de 22 ans, pour toutes sortes de
raisons, qui ont souvent été expliquées ici, d'ailleurs, dit : Moi, pour
le moment, là, je ne suis pas prête, je ne veux pas faire cet engagement
automatique, je ne veux pas suivre ce parcours obligatoire? Qu'est-ce qui
arrive avec elle?
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Alors, je vous réponds ce que j'ai répondu.
Je vais essayer d'être plus claire, peut-être que je ne l'étais pas
suffisamment.
De
notre point de vue, si on accroît l'encadrement de ces personnes-là et qu'elles
ont le sentiment que c'est un peu la poursuite des études, et donc on
les remet en selle pour finir leurs études, il nous apparaît que la possibilité
de décrocher de ces programmes de formation
va être moins grande. Mais, si tous les efforts ont été faits de part et
d'autre et qu'on comprend qu'elle n'est pas
capable, bien nous, comme Conseil du statut de la femme, on ne peut pas être
d'accord avec une coupe du chèque, qui est déjà à la moitié du seuil de la
pauvreté. Donc, je vous répète ça. Et, bien sûr, je comprends qu'il y a comme
une relation, tu sais, obligation-sanction, mais je pense que les choses
peuvent être faites un peu différemment.
Le Président (M.
Cousineau) : Dernière question, Mme la députée.
Mme
David (Gouin) : Oui, merci, M. le Président. J'ai lu, parce que vous
en parliez dans votre mémoire, un article fort intéressant d'Ysabel Provencher et Daniel Turcotte. Il y a beaucoup
de chiffres là-dedans. Quelque chose qui m'a énormément frappée, c'est qu'on parle souvent ici d'abandon des programmes,
et l'un des endroits où il y en a le plus, d'abandons, c'est dans la formation générale secondaire qui se passe à
l'éducation aux adultes. Vous n'êtes probablement pas sans savoir comment ça se passe dans les
classes d'éducation aux adultes. On est très, très loin de
l'accompagnement dont vous parlez, on est avec des jeunes qui ont un cahier à
remplir, enfin, bon, je l'ai déjà expliqué ici. Si je vous comprends bien, il
faudrait absolument intervenir dans ce domaine-là.
Mme
Miville-Dechêne (Julie) : Oui, parce que je l'ai dit assez
clairement : Quand on pense que 70 % des prestataires d'aide sociale abandonnent leurs études, bien on peut bien
dire que c'est leurs problèmes individuels, mais c'est un peu court. Je
pense qu'il y a vraiment un problème, justement, d'encadrement et
d'accompagnement, ils ne se retrouvent pas dans ces classes d'éducation aux
adultes.
Alors,
malheureusement, je n'ai pas la solution magique à vous proposer, mais c'est
clair qu'il y a des problèmes là. Puis
52 % des jeunes abandonnent les programmes volontaires de formation aussi.
Donc, c'est important, ça, on ne le nie pas.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, Mme Miville-Dechêne, Mme Roy,
puis M. Dubois, merci pour votre présentation... Un instant, ce n'est pas
terminé. Merci pour votre présentation.
Mémoires déposés
Alors, avant de
terminer, je dépose les mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors
des aditions. Il s'agit de plus de 54 mémoires.
La commission, ayant
accompli son mandat, ajourne ses travaux au jeudi le 18 février 2016,
après les affaires courantes, donc demain, où elle poursuivra un autre mandat
sur le projet de loi n° 75 sur les régimes de retraite des universités.
Alors, voilà.
(Fin de la séance à 18 h 17)