(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Jutras): Alors, étant donné que nous avons quorum, nous allons débuter nos travaux, et je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle le mandat de la commission. Le mandat de la commission est d'examiner le rapport quinquennal 2000-2005 sur la mise en oeuvre de la loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce que vous avez des remplacements à annoncer?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Gaudet (Maskinongé) remplace M. Blackburn (Roberval) et M. Girard (Fabre) remplace Mme Richard (Duplessis).
Le Président (M. Jutras): Alors, je donne lecture de l'ordre du jour de la journée. Alors, nous allons commencer en entendant le Comité sectoriel de la main-d'oeuvre de l'industrie des plastiques et des composites. Par la suite, à 11 heures, nous entendrons la Société de formation et d'éducation continue. Nous suspendrons nos travaux à 11 h 45 pour les reprendre à 14 heures. À 14 heures, nous entendrons le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme. Par la suite, à 14 h 45, le Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec; à 15 h 30, le Conseil québécois des ressources humaines en culture; à 16 h 15, le Conseil régional des partenaires du marché du travail de Laval; à 17 heures, il y aura remarques finales des députés de l'opposition; à 17 h 15, les remarques finales du groupe parlementaire formant le gouvernement; pour ajourner nos travaux vers les 17 h 30.
Alors, avant d'aller plus loin, je demanderais à ceux et celles dans la salle qui ont un téléphone cellulaire, là, de bien vouloir les fermer.
Auditions (suite)
Alors, ont déjà pris place les représentants du Comité sectoriel de la main-d'oeuvre de l'industrie des plastiques et des composites. Alors, bienvenue, messieurs. Je vous rappelle la façon de procéder. Vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura un échange de 15 minutes avec la ministre et les députés ministériels, et par après un échange de 15 minutes avec les députés de l'opposition. Alors, je vous invite à procéder sans plus tarder. Je demanderais au principal porte-parole de s'identifier et de présenter les personnes qui l'accompagnent.
Comité sectoriel de la main-d'uvre de
l'industrie des plastiques et des composites
M. Guimont (Pierre): Alors, bonjour, M. le Président de la commission, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés et tous les participants qui sont dans la salle aujourd'hui.
Mon nom est Pierre Guimont, je suis directeur général de PlastiCompétences et accompagné, ce matin, de M. Bernard Marcoux, qui est président de PlastiCompétences et directeur des projets spéciaux chez Casmoplast, et aussi de M. Jocelyn Lavoie, qui est secrétaire du comité et conseiller en main-d'oeuvre à la CSD. Ces deux membres de notre comité ont accepté de se joindre à moi pour cette présentation, et nous sommes particulièrement heureux de pouvoir participer ce matin aux auditions de la Commission parlementaire sur l'économie et le travail.
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(10 h 20)
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Notre intervention cible des éléments qui sont étroitement associés aux réalités de l'industrie des plastiques et des composites mais aussi, nous l'espérons, à celles de l'ensemble du secteur manufacturier. Permettez-moi d'abord de vous présenter rapidement notre comité et son secteur.
PlastiCompétences a été constitué en 1996 et s'est donné pour mission de promouvoir et de coordonner la formation professionnelle et le développement des ressources humaines dans l'industrie des plastiques et des composites.
Au Québec, la plasturgie, c'est des livraisons annuelles de près de 3,5 milliards de dollars et une croissance supérieure à celle de l'ensemble du secteur manufacturier. C'est aussi un secteur qui compte près de 600 entreprises et 33 000 travailleurs, mais où 65 % des employeurs comptent moins de 50 travailleurs.
En matière de développement des ressources humaines, les données disponibles sur la participation des employeurs assujettis à la loi n° 90 démontrent assez clairement que l'effort de formation des entreprises de l'industrie a ralenti au cours des trois dernières années, alors que les plasturgistes démontraient, à la fin des années quatre-vingt-dix, au moment de l'adoption de la loi, les plus forts investissements en formation du secteur manufacturier.
Tel que mentionné précédemment, on reconnaît que la PME, qui compte pour 65 % des entreprises, est le plus important réservoir de main-d'oeuvre du secteur et qu'elle est un important sous-traitant de la grande entreprise. On reconnaît aussi que la grande entreprise est le moteur de notre secteur industriel et que la diminution de l'effort de formation pourrait compromettre la compétitivité de l'industrie qui est déjà en proie à de fortes pressions concurrentielles des pays asiatiques.
Alors, si les PME ne forment plus ou forment moins, la grande entreprise devient très vulnérable. Le constat qu'on pose est d'accorder une attention particulière donc à ces petits milieux de travail et de trouver ensemble des moyens pour favoriser une meilleure harmonisation des efforts de formation de toute la chaîne de valeurs du secteur.
Permettez-moi de discuter ou de parler un peu des organismes collecteurs. PlastiCompétences a entrepris, dans le cadre de l'expérimentation pilote des mutuelles de formation, une intéressante démonstration de cette complémentarité dont on vient de parler entre la grande et la petite entreprise au niveau des efforts de formation. Notre expérience démontre que les entreprises trouvent de nombreux avantages à se regrouper au plan de la formation à condition de leur soumettre une offre de formation qui soit concrète. Cette offre de formation, c'est le premier jalon qui permettra aux collecteurs ou aux mutuelles de formation de justifier leur action.
Pour la complémentarité dont je parlais tout à l'heure, elle vient du fait que la grande entreprise, dans un regroupement de formation, amène avec elle une masse critique de candidats pour former des groupes de participants à la formation. Sans ces gros joueurs, il est bien difficile de constituer des groupes de formation. Dans ce cas précis, la grande entreprise vient donc offrir une marge de manoeuvre pour assurer la formation des plus petits milieux de travail, particulièrement dans le cas des activités qui nous intéressent particulièrement comme comité, des activités à saveur un peu plus technique.
Notre expérimentation a donc permis de développer jusqu'à maintenant sept activités de formation, et on en a quatre autres qui sont en développement, et d'offrir plus de 555 jours-personnes de formation. Avec le prolongement des activités qu'on poursuit actuellement dans le cadre des projets de regroupement d'entreprises, c'est un total de près de 1 250 jours-personnes de formation qui ont été donnés aux travailleurs de l'industrie des composites au Québec dans les derniers 24 mois.
Pour PlastiCompétences les mutuelles présentent d'intéressantes perspectives de mise en commun de la formation et constituent une voie de développement qui est prometteuse. Pour favoriser ce développement, différentes formules incitatives devraient être offertes, comme un crédit d'impôt remboursable sur les versements réalisés à la mutuelle ou une bonification financière qui pourrait être variable, de 20 à 40 %, par exemple, sur le montant qui est versé par les entreprises à la mutuelle de formation. La révision de la loi pourrait aussi permettre d'intégrer comme dépense admissible la gestion du dossier de formation. Ainsi, les dépenses qui sont associées au diagnostic des besoins de formation, à l'évaluation du transfert des apprentissages, à la gestion même du dossier de formation ou à l'émission d'attestation de participation à une activité de formation deviendraient toutes admissibles si elles étaient réalisées par le biais d'une mutuelle de formation.
Parlons maintenant un peu des comités sectoriels. La connaissance du marché du travail jusqu'à l'implication dans le développement d'activités de formation, de la mise en oeuvre de nouvelles stratégies d'apprentissage en passant par la coordination globale d'activités de formation, de la prise en charge du développement d'un régime d'apprentissage en milieu de travail à la réalisation de campagnes de promotion des carrières, les comités assument de nombreux mandats et réalisent des projets d'envergure. Dans la réalisation de ces mandats, les comités peuvent compter sur un soutien financier provenant du Fonds de développement du marché du travail et du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre.
Actuellement, la mise en oeuvre du cadre général de développement et de reconnaissance des compétences est une des orientations prioritaires, on le conçoit, du plan d'affectation du fonds national. Si une portion importante des fonds qui sont destinés à l'intervention sectorielle est dirigée vers la mise en oeuvre du cadre général et des PAMT, une question demeure importante pour nous, soit: Que se passera-t-il lorsque les cotisations au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre ne seront plus suffisantes pour soutenir ces implantations? Il serait donc désolant qu'on ne puisse maintenir la dynamique sectorielle faute de fonds ou que les comités ne puissent lancer de projet de développement de la main-d'oeuvre s'ils ne cadrent pas tout à fait dans les orientations prioritaires qui sont établies par l'un ou l'autre des fonds qui ont été précédemment identifiés. L'intervention sectorielle présente un grand potentiel de structuration de la formation et devrait s'accompagner d'une enveloppe budgétaire plus importante. Il faut s'activer dès maintenant, trouver des sources de financement qui ne compromettront pas la mobilisation et les efforts qui ont été investis jusqu'à maintenant dans l'intervention sectorielle.
Quant au maintien ou à la modification de la loi, les 10 années d'application de la loi ont très certainement contribué à améliorer la qualification de la main-d'oeuvre par un plus grand effort de formation. La loi a aussi permis d'outiller les milieux de travail afin que s'installe une véritable culture de formation. Il faut se rappeler à quel point tout le processus de gestion de la formation était nébuleux il y a à peine 10 ans, pour comprendre tout le chemin parcouru depuis la mise en oeuvre de la loi. PlastiCompétences appuie donc le maintien de la loi, et cet appui, selon nous, devrait s'accompagner d'un allégement des procédures administratives qui visent à favoriser la réalisation des activités de formation dans les milieux de travail.
Cet appui s'accompagne également de certaines modifications, et, pour les éléments qui nous apparaissent plus préoccupants, nous suggérons donc, quant à la participation des employeurs qui sont assujettis à la loi: dans un premier temps, d'accroître les efforts de promotion de la formation dans les secteurs manufacturiers qui, comme celui des plastiques et des composites, semblent réduire graduellement leurs investissements en formation; d'identifier les entreprises qui cotisent au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre afin de les inviter à faire leurs versements à un organisme qui peut les appuyer dans leurs démarches de formation; de promouvoir les mutuelles de formation comme moyen d'investir en formation.
Et justement, quant aux organismes collecteurs ou aux mutuelles de formation: de réviser le règlement sur les organismes collecteurs pour intégrer un volet sur les mutuelles de formation ? ce volet sur les mutuelles pourrait permettre de développer une offre de formation qui est beaucoup plus significative pour les entreprises et la main-d'oeuvre de secteurs industriels donnés; de reconnaître les mutuelles de formation comme moyen d'investir en formation, comme on vient de le dire, sans pour autant en multiplier le nombre, afin d'éviter une trop grande fragmentation de l'offre de formation dans les secteurs industriels et une précarité de fonctionnement de ces mutuelles; d'établir un horizon de planification et des ressources suffisantes pour assurer une mise en oeuvre convaincante des mutuelles; de déployer des mécanismes et des incitatifs pour favoriser la participation des entreprises au sein même des mutuelles, que ce soient des crédits d'impôt qui seraient remboursables, que ce soient des mises de fonds qui sont supplémentaires ou tout autre mécanisme qui pourrait permettre d'en activer la mise en oeuvre; dans un souci d'allégement administratif, d'intégrer toute la gestion du dossier de formation qui est réalisée par la mutuelle au règlement, à l'intérieur du règlement sur les dépenses de formation admissibles; et d'autoriser finalement, jusqu'à concurrence d'un montant qui pourrait être de 10 %, les frais de gestion du dossier de formation des entreprises qui sont participantes à une mutuelle.
Quant à l'intervention sectorielle, on aimerait que soient reconnus, dans la loi, les mandats des comités sectoriels et la définition de leurs interventions en matière de qualification et de développement des compétences de la main-d'oeuvre; d'assurer un financement qui est plus important aux activités de formation et aux actions qui sont en amont de la formation, comme l'analyse des besoins de formation, le développement de contenus de formation à caractère technique ou l'élaboration même de plans de formation, et qui seraient prises en charge par les comités sectoriels dans le cadre de la constitution d'une mutuelle de formation ou de toute autre stratégie d'offre de formation; de soutenir et d'accompagner par une offre de services qui est axée sur l'objectif même de la loi les entreprises qui ne peuvent rencontrer leurs obligations réglementaires de formation; et finalement, d'identifier le plus rapidement possible de nouvelles voies de financement qui viendront compléter les priorités sectorielles de formation.
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(10 h 30)
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Et on s'est intéressé aussi au cas des petites entreprises, puisque le récent rehaussement du seuil d'assujettissement à la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre nous amène à proposer un mécanisme d'accompagnement pour que les petites entreprises s'investissent dans la formation de leur main-d'oeuvre. Ce mécanisme ferait le lien entre l'intervention sectorielle et les regroupements d'entreprises. Il prendrait la forme d'un accompagnement pour l'implantation de comités de formation et de plans de formation qui favoriseraient la prise en charge de contenus de formation à caractère technique par le développement de compétences internes de formateurs compagnons. Ces formateurs auraient ensuite à démultiplier les contenus de formation aux autres travailleurs d'entreprise et pourraient aussi implanter un régime d'apprentissage en milieu de travail, si tel est le souhait de l'entreprise.
Dans cette démarche, le comité sectoriel assumerait toute l'administration du dossier de formation de l'entreprise, moyennant un frais d'abonnement qui serait compensé en partie par la réalisation de formations regroupées. Il prendrait également en charge le développement et l'offre d'activités de formation à caractère technique. Nous croyons que cette façon de faire, qui veut alléger le fardeau administratif qui est souvent décrié quant à la loi, saurait plaire aux plus petites entreprises et qu'elle permettrait une appropriation graduelle de toute la gestion de la formation en milieu de travail.
Le coût exact de déploiement d'un tel mécanisme reste bien évidemment à évaluer; autofinancé en partie, il ne saurait être rentable dès les premières années. Et comme les entreprises visées ne sont pas assujetties à la loi, parce qu'on parle principalement des petites entreprises, nous sommes d'avis que le financement de cette mesure de soutien et d'accompagnement à la formation, dans les plus petits milieux de travail du secteur, ne devrait pas provenir du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre.
En conclusion, les décisions qui seront prises et les gestes qui seront posés doivent, à notre avis, consolider la stratégie d'intervention sectorielle et être conséquents avec la nature même de nos organisations, qui est de regrouper pour développer la main-d'oeuvre. Nous vous remercions de nous avoir entendus.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci pour votre présentation. Je cède la parole, sans plus tarder, à la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Madame.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Merci pour votre mémoire. Il est très complet, très détaillé, mais surtout vous êtes le premier comité sectoriel qui êtes devant nous, ce matin, et je suis contente ? je vais être très franche avec vous, très transparente ? que ce soit celui sur la plasturgie. On sait qu'il y a des besoins criants de main-d'oeuvre dans cette industrie-là à l'ensemble du Québec, dans certaines régions en particulier. On a vu dernièrement des employeurs prendre la parole publiquement pour dire qu'ils étaient vraiment à la recherche et en recrutement pour cette main-d'oeuvre-là, et je trouve que vos propositions sont intéressantes, apportent un éclairage complémentaire à ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant.
Et j'aimerais, là, vous poser quelques questions sur deux ou trois volets, si le temps nous le permet; c'est pour ça que j'irai droit au but. Un des premiers volets que vous abordez énormément, c'est l'intérêt des mutuelles, en disant, par contre, qu'il faudrait peut-être revoir certains mécanismes et soutenir différemment. Moi, ce que je voudrais savoir de vous, parce que... Est-ce que, et votre industrie est composée majoritairement de PME aussi, tout en regroupant... 600, c'est beaucoup, 33 000 travailleurs, c'est beaucoup aussi. Mais est-ce que, ces entreprises, est-ce que c'est difficile de les convaincre de se regrouper en mutuelle? Est-ce que c'est...
Vous parlez, dans votre mémoire, d'un délai d'à peu près de 18 mois de démarrage; est-ce que ce n'est pas long? Tout en sachant qu'il faut qu'il y ait le lien de confiance, qu'il faut convaincre, et vous avez tout bien éclairé ça dans votre document. Qu'est-ce qu'on peut faire pour possiblement accélérer le processus, dans la mesure où on se retrouve avec des besoins de main-d'oeuvre importants? L'entreprise, elle, elle ne peut pas nécessairement attendre 18 mois ou 24 mois. Comment voyez-vous... Comment pouvons-nous dynamiser ça et s'assurer que ça va plus facilement, avec plus d'efficacité, je dirais?
M. Guimont (Pierre): Je vais répondre à la question: 18 mois, c'est bien court quand il vient le temps de faire une démonstration de cette nature-là. En fait, dans le projet qu'on a réalisé, le 18 mois a passé très rapidement, et c'est les entreprises elles-mêmes qui nous ont dit à un certain moment de ralentir un peu la cadence, parce qu'elles trouvaient que ça allait très rapidement et que, dans le processus de soutenir l'effort de formation de tous ces travailleurs-là regroupés, ça amenait quand même des problématiques dans les milieux de travail.
Il faut concevoir, dans le projet qu'on a réalisé, que les travailleurs étaient sortis de la production, donc ils n'étaient pas dans l'entreprise. On les amenait dans un lieu de formation qui était celui d'un centre de formation professionnelle qui donnait l'option. Et, comme le secteur travaille déjà sous le plancher d'emploi qui serait normalement celui de l'entreprise, ça pose des problématiques qui sont importantes. Donc, à vouloir aller vite, on n'économise pas nécessairement sur la prestation, en tout cas la présence de l'entreprise ou l'implication de l'entreprise dans ce genre de projet là.
Et si... Je dirais, l'originalité de ce qui a été fait ou la réussite du projet qu'on a mené au niveau des mutuelles provenait du fait qu'on avait d'abord démontré que ces entreprises-là, dont certaines étaient des concurrents directes, avaient des besoins de formation qui au total étaient communs. Et ils savaient donc les rallier. Et c'est la première démonstration qui a mobilisé les entreprises dans l'effort de formation qui a suivi.
Ça fait qu'à vouloir aller plus rapidement, il y peut-être des choses où on risque de perdre en fait les joueurs. Et l'entreprise est d'abord là pour produire, et ça amène des complications si on veut aller trop vite.
Mme Courchesne: En fait, je comprends très bien ce que vous dites. Mais en même temps on est un petit peu dans un cercle vicieux parce qu'étant donné ce bassin qui est plus ou moins présent je comprends très bien que l'entreprise, elle, doit continuer à produire, donc ne peut pas se priver de certaines personnes à l'intérieur de l'entreprise. Et c'est dans ce sens-là que vous me parlez.
Mais en même temps on a besoin que ces gens-là soient formés puis en même temps on a besoin aussi d'attirer de nouvelles personnes pour combler les besoins. Le but de mon propos n'était pas de dire: On doit accélérer à tout prix. Ce que je peux comprendre à ce moment-là, c'est qu'on a les besoins en milieu de travail, la formation en milieu de travail, mais ce que vous dites aussi dans votre mémoire, c'est qu'il faut trouver le moyen de rendre attractif, attrayant ce métier-là pour des plus jeunes, par exemple. Parce qu'aussi, dans les écoles, on a de la difficulté à avoir ces niveaux d'inscription. C'est un peu ça.
Et est-ce que... Je vais vous dire tout de suite, moi, les comités sectoriels, j'y crois beaucoup. J'apprécie énormément le travail que vous faites, énormément. Je pense que c'est en partie ce qui fait avancer le Québec dans les différents secteurs d'activité, parce que vous êtes des praticiens.
Et, dans votre mémoire, vous semblez vouloir jouer un rôle accru, plus structurant. Moi, j'aimerais savoir comment et j'aimerais savoir si, de façon générale, vous avez des liens étroits avec les conseils régionaux des partenaires du marché du travail. Je vais terminer en vous demandant une troisième question: Est-ce que, dans les régions, il y a trop de joueurs? Est-ce que ça se passe bien? Est-ce que ces liens entre les partenaires et vous, et les entreprises, et les maisons d'enseignement, est-ce que tout ça, c'est fluide? Est-ce que c'est... Comment voyez-vous ça et comment pouvons-nous renforcer votre rôle ou structurer votre rôle de façon à ce que ça facilite votre tâche, mais de façon aussi à ce que vous ayez le sentiment que vous avez pleine contribution dans votre secteur d'activité?
M. Guimont (Pierre): C'est sûr que le comité veut s'investir beaucoup plus dans une réponse qui est encore là plus directe face aux besoins des entreprises. Actuellement, sur les ressources permanentes du comité, il y en a la moitié qui sont ici ce matin au niveau de la permanence du comité. On est quatre au total, mais les autres sont des ressources contractuelles, les deux autres.
Il y a un effort certain qui est fait, puis on cherche. Et les liens avec les entreprises sont constants, et c'est ça qui amène les comités à trouver des projets qui sont les plus mobilisateurs et les plus près des réalités des secteurs industriels.
Pour ce qui est des relations avec les conseils régionaux des partenaires du marché du travail, c'est sûr que nous autres, on s'abreuve en grande partie directement auprès des entreprises et de la main-d'oeuvre des secteurs. Il y a des contacts qui sont réguliers avec les directions générales, là où nos secteurs sont beaucoup plus présents. La semaine dernière, on était avec les gens de la Montérégie pour faire une présentation sur ce qu'est le secteur, ce que sont les dynamiques, ce qu'est actuellement l'état des lieux dans l'industrie des plastiques. Donc, il y a des rencontres comme celle-là qui se font pour assurer un partage et assurer que les préoccupations de l'un ou de l'autre ou même du milieu comme tel soient bien prises en compte dans chacune des régions.
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(10 h 40)
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Trop de joueurs, je ne croirais pas. On essaie de maintenir des liens avec l'ensemble des joueurs, que ce soient les institutions d'enseignement, pour ce qui est de la promotion des métiers et des carrières ou des problématiques de formation, que ce soient les entreprises, que ce soient des conseils même d'établissement. On est impliqués dans plusieurs conseils d'établissement au niveau des centres de formation qui ont nos options de formation professionnelle et technique, et c'est ce qui nous permet d'aller chercher réellement les préoccupations de l'ensemble du marché du travail et de l'ensemble des joueurs. On est en lien avec les associations patronales, qui siègent aussi chez nous. Il n'y a pas de... Et le comité a toute la reconnaissance, je pense, qu'il se doit, dans le secteur, au niveau de le formation et des mandats qui lui reviennent.
Tout ça fait en sorte, je pense, qu'on est en mesure de répondre le plus efficacement possible aux problématiques du secteur, mais c'est certain que, si on avait beaucoup plus de ressources, l'action serait beaucoup plus, je dirais, beaucoup plus sentie, parce qu'on a quand même deux secteurs industriels qui ont des préoccupations qui sont complètement différentes.
Mme Courchesne: Je vais être très rapide parce que je veux laisser la parole à un collègue. Vous semblez dire, dans votre mémoire, qu'effectivement il y a une partie de la contribution du 1 % qui peut-être pourrait vous être retournée de façon plus directe. C'est ça, j'ai bien lu, n'est-ce pas?
M. Guimont (Pierre): Oui.
Mme Courchesne: Parce que c'est vrai que les PME en bas de 1 million ne cotisent plus. Mais est-ce que c'est vrai de penser qu'avant ces petites entreprises cotisaient pour de la formation pour des plus grandes entreprises? Parce que de toute façon elles n'en faisaient pas toujours, de la formation. C'était plus facile de faire le chèque. Là, ce que vous nous dites: Pouvez-vous repenser le financement pour peut-être améliorer ce lien entre une cotisation ou entre un besoin de formation d'un secteur de PME et vous? C'est ça que j'ai bien compris, n'est-ce pas?
M. Guimont (Pierre): Oui. C'est sûr que ce serait l'idéal, hein? Pour nous autres, comme comité sectoriel, ce serait très intéressant qu'on puisse récupérer et qu'on puisse laisser dans l'industrie l'argent que l'industrie ne peut pas investir ou retourne au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. Dans le mémoire, ce que ça démontre, c'est que, comme comité sectoriel, on y serait perdants au change, parce que l'industrie retourne moins au Fonds national qu'elle en reçoit, du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. Mais on pense que ce serait une mécanique qui serait beaucoup plus... quand même efficace pour l'ensemble des comités qui pourraient répondre à des problématiques de formation.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Vos propositions au niveau de la petite entreprise m'ont semblé intéressantes. Pourriez-vous préciser? Parce que vous savez que, dans les petites entreprises ? j'en ai une moi-même de six à sept employés ? et la problématique, c'était souvent trop complexe. On allait chercher la formation très précise, mettons, au niveau de la commission scolaire, avec des buts bien précis. Mais j'aimerais que vous élaboriez un petit peu au niveau de votre proposition.
M. Guimont (Pierre): Bien, en fait, la proposition, ce qu'elle est dans la vraie nature des choses, c'est de gérer à peu près l'ensemble du dossier de la petite entreprise face à ses besoins de formation technique. On ne veut pas se substituer à des gens qui ont une expertise quelconque en matière de formation et on ne veut pas devenir un organisme formateur, mais c'est de prendre en charge le dossier de formation de l'entreprise de la gestion du dossier jusqu'à la réalisation de l'activité de formation et faire en sorte qu'on devienne ni plus ni moins qu'un organisme qui soit capable d'assumer dans le fond le dossier, l'ensemble du dossier et toutes les étapes du dossier de formation de l'entreprise, l'identification des besoins. C'est certain que c'est beaucoup d'ouvrage pour une petite entreprise que de gérer l'identification des besoins, la gestion administrative du dossier, et tout ça, et de consigner toutes les preuves qui sont nécessaires.
Ce genre de démarche là se fait déjà ailleurs dans le monde. Il y a déjà des organismes ailleurs qui s'occupent de ça et qui consignent à l'intérieur d'un fichier informatique qui est à l'extérieur de l'entreprise, dans une organisation, un organisme collecteur, par exemple, toute cette gestion-là administrative qui est un peu lourde, de sorte que, quand la vérification se fait, elle peut se faire à l'extérieur même de l'entreprise, parce que le détenteur de tout le dossier de formation est à l'extérieur de l'entreprise. Dans un monde idéal, ce pourrait être un beau modèle que pourraient assumer les comités sectoriels.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Vous avez aussi mentionné que le fonds ne devrait pas servir à ceux qui ne cotisent pas, mais, à l'inverse, ceux qui cotisaient, parce qu'ils n'avaient pas le temps ou c'était trop complexe, il servait à d'autres. Pourquoi pas l'inverse?
M. Guimont (Pierre): Pourquoi pas l'inverse.
M. Lavoie (Jocelyn): Bien, moi, je pense, en tout cas, si je peux... Moi, je pense que la formation, ça ne commence pas avec des entreprises qui ont 1 million ou plus, d'une part. Il faut développer au niveau de toutes les entreprises, que tu sois deux employés, que tu en aies 2 000, c'est ce réflexe de formation là où c'est avantageux pour l'entreprise.
Quant à est-ce que les gens qui ne sont pas assujettis à la loi devraient pouvoir bénéficier du fonds national pour pouvoir donner de la formation? Moi, je pense que ça ne devrait pas se régler de même. Je pense qu'il y a une loi qui existe pour des entreprises qui ont une certaine obligation, et il y a une loi... c'est-à-dire la loi également ne prévoit pas que les petites entreprises soient assujetties. Donc, il faut pour eux autres développer bien plus le sentiment que la formation, c'est avantageux pour eux autres. Ça fait que c'est pour ça que ceux qui sont assujettis peuvent bénéficier des entreprises qui sont délinquantes, entre parenthèses, qui ne veulent pas investir. Parce que, moi, je ne crois plus à ça bien, bien, là, je veux dire, ce mythe-là où on fait le chèque, puis on se débarrasse de ça, là; je ne suis pas sûr encore que c'est vrai, vrai, vrai, là. Mais peut-être que c'était plus vrai au début, là, mais je pense que ceux qui sont assujettis doivent bénéficier. Ceux qui ne le sont pas, il faut plus les amener à développer ce sentiment que la formation, c'est important.
Le Président (M. Jutras): Oui, avez-vous terminé? Oui?
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Non, peut-être, vous savez que les petites entreprises, on centre le besoin de formation, et ils savent, ils sont ciblés à leurs besoins de l'entreprise; donc, ils vont la chercher, et ce n'est pas très compliqué. On va la chercher, on a les commissions scolaires, on a bien des organismes qui sont prêts à répondre, c'est très simple. Simplement, des fois, il pourrait y avoir une aide du fonds pour justement les aider à aller chercher...
M. Lavoie (Jocelyn): On ne peut pas avoir le beurre puis l'argent du beurre dans la vie.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Non, je sais bien, mais les commissions scolaires, les vieux garçons, ils paient des taxes et puis ils fournissent à l'éducation. C'est peut-être simpliste, là, mais...
Le Président (M. Jutras): Alors, oui, oui, oui, l'exemple est bon.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Je n'ai peut-être pas le bon terme, mais... Merci.
Le Président (M. Jutras): Bon. Oui, bien, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Lavoie (Jocelyn): Non, je n'ai rien à ajouter. Je pense que le but de la loi, je veux dire, c'est quand même de développer la formation. Je veux dire, c'est pareil comme s'il n'y en avait pas, on est pour le maintien; s'il n'y en avait pas, peut-être, ce serait mieux, puis toutes les entreprises formeraient des gens.
Mais, vous savez, il y a quand même une loi qui existe ? ça fait je ne sais pas combien d'années, là, c'est avant mon temps pas mal ? il y a quand même une loi qui régit que si tu passes sur la rouge, tu paies. Puis on n'a pas arrêté malgré le fait que les gens sont tous conscientisés qu'on ne peut pas passer sur une lumière rouge, mais pourtant il y a des amendes importantes. Donc, la loi, c'est la même affaire: c'est pour essayer d'encadrer, je veux dire, les délinquants. Il faut que ça existe, puis il faut que ça prenne une... du calendrier à quelque part puis il faut la mettre.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Alors, maintenant, du côté de l'opposition, M. le député de Gouin.
M. Girard: Merci, M. le Président. M. Guimont, M. Marcoux, M. Lavoie, j'aimerais vous remercier pour votre présence à la commission. Je pense que votre présentation et votre mémoire nous ont permis, là, de bien comprendre le rôle que vous jouez afin de développer la formation dans l'industrie québécoise des plastiques et des composites.
Vous indiquez, dans votre mémoire, que vous craignez le fait que, bon, d'ici deux ans, le Fonds national de la main-d'oeuvre, il y ait une diminution importante des sommes qui sont dévolues au Fonds national de la main-d'oeuvre, puis vous posez la question: À quoi ça sert de structurer, de développer ce secteur d'activité si l'intervention sectorielle est amputée de moyens financiers extrêmement importants? Donc, j'aimerais savoir: De votre point de vue, où va-t-on aller chercher de nouvelles sources de financement pour vous permettre d'appuyer le développement de votre intervention sectorielle puis faire de la formation dans votre milieu?
Puisqu'on sait que ça a été la décision du gouvernement de soustraire 70 % des entreprises à la loi, donc est-ce que c'est une responsabilité partagée entre le gouvernement et les entreprises ou, de votre point de vue, c'est le gouvernement qui devrait investir des sommes additionnelles dans le fonds pour vous permettre d'en bénéficier?
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(10 h 50)
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M. Guimont (Pierre): Non, je pense, c'est une responsabilité qui est partagée. Des nouvelles sources de financement, si on avait la réponse, on les aurait identifiées dans le mémoire. Pour le moment, on n'a pas identifié ces sources-là parce que... c'est ça, je pense qu'elles sont difficiles à identifier. Il y a quand même de l'argent, il y a toutes sortes d'initiatives qui sont mises de l'avant, et on a des liens avec les conseils sectoriels canadiens. Il y a quand même des sources de financement au niveau canadien qui sont aussi importantes et qui justifient des projets de développement intéressants de la part des conseils sectoriels. Mais, à la base, je pense que ça demeure quand même une responsabilité qui est partagée, et il faudra trouver au plus court terme possible des sources de financement supplémentaires ou additionnelles parce que c'est certain qu'on ne pourra pas continuer le tempo qu'on aura là. S'ils le font, ça sèche, c'est certain.
M. Girard: Vous avez été financés pour des projets à quelle hauteur? Avez-vous des données là-dessus?
M. Guimont (Pierre): Oui. Comme comité, si on veut regarder ça sous cet angle-là et de façon très transparente, on a une enveloppe de fonctionnement de 250 000 $. On reçoit bon an, mal an 75 000 $ à 80 000 $, à 85 000 $, d'Emploi-Québec directement pour nos activités, et on finit l'année financière avec l'équivalent de 1 million de budget de fonctionnement et d'activités. Donc, il y a des fonds qui proviennent d'à peu près tous les endroits où on peut déposer des projets, et à peu près tous les ministères où on peut... qui sont en lien avec nos activités, tout autant que des entreprises qui sont celles de notre secteur industriel, que ce soient les plastiques ou les composites.
Donc, on tire des revenus, ou des sommes, ou des subventions d'à peu près tous les milieux possibles, et des entreprises aussi. L'année dernière, il y a l'équivalent d'à peu près 250 000 $ qui provient directement des entreprises, de l'industrie. Sur le million, ça commence à faire quand même pas mal.
M. Girard: Et vous estimez à combien les besoins pour pouvoir continuer à développer vos activités dans ce secteur d'activité là?
M. Guimont (Pierre): Bien, moi, je dirais que plus on en a, mieux c'est. Si on était capable d'ajouter des ressources permanentes au comité, ce serait idéal. Un demi-million supplémentaire, on n'en aurait pas de trop, c'est certain. Et, si ça pouvait concrétiser l'ajout de ressources, là... Parce que les ressources qu'on a sont toujours... en tout cas, pour la moitié des ressources qu'on a sont liées à des projets. C'est toujours un peu inquiétant de perdre cette expertise-là quand les projets finissent. Ça fait qu'il faut générer une activité, des nouvelles sources de financement, et rapides. C'est ça qui est souvent le problème, la rapidité avec laquelle on est capable de redémarrer des projets suite à la fin d'une activité quelconque.
M. Girard: Et vous nous dites, dans votre mémoire, qu'il y a 570 entreprises dans votre secteur d'activité, qu'il y en a 115 qui sont couvertes par la loi, puis 135 qui sont exclues, que donc, dorénavant, il y a plus de 50 % des entreprises de votre industrie qui ne sont plus couvertes par la loi. Donc, de votre point de vue, est-ce qu'il doit y avoir une certaine obligation pour les entreprises dans votre secteur d'activité, pour qu'elles s'investissent dans la formation?
Puis j'aimerais savoir également si, suite à la décision qui a été prise en 2003, là, de soustraire 70 % des entreprises à l'obligation d'investir un pourcentage de la masse salariale dans la formation, est-ce que le gouvernement vous a proposé, dans les jours qui ont suivi, dans les mois qui ont suivi, des alternatives, des nouveaux outils, des nouveaux moyens financiers pour vous permettre de maintenir vos activités dans votre secteur?
M. Guimont (Pierre): En fait, il y a des orientations du fonds qui ont changé. Comme on disait tout à l'heure, l'expérimentation pilote des mutuelles a fait place à des regroupements d'entreprises dans des conditions qui sont un peu différentes de celles de l'expérimentation pilote. Sinon, que les enveloppes qui sont liées au Fonds national, je ne crois pas qu'il y ait eu de nouvelle proposition financière.
Ceci dit, c'est certains que dans notre secteur industriel, comme vous dites, c'est plus de 50 % des entreprises assujettis qui se retrouvent non assujetties et qui laissent en plan des besoins de formation auxquels il faut répondre. Et je pense que c'est tout à fait le rôle du comité que de s'assurer qu'on soit capable de répondre à ça. Parce que des ressources de formation dans les deux familles de matériaux, autant plastiques que composites, il n'y en a pas beaucoup, et il faut s'assurer qu'on soit capable de les occuper si on ne veut pas qu'elles quittent les secteurs, et c'est déjà commencé. Et ça, c'est une préoccupation, nous autres, qui est prioritaire: de conserver les ressources, le peu de ressources qu'on a en matière de formation, les conserver dans le secteur.
M. Girard: Au terme de la commission parlementaire, en lisant votre mémoire, si j'ai bien compris, vous, vous souhaitez qu'il y ait des améliorations, des bonifications à la loi du 1 % et que le gouvernement vous donne de nouveaux outils financiers pour vous permettre de continuer à développer la formation dans votre secteur d'activité, si j'ai bien compris?
M. Guimont (Pierre): Oui, exactement.
M. Girard: Je veux revenir aussi sur les mutuelles de formation. Vous en parlez abondamment dans votre mémoire. Quel est, vous, le bilan que vous tracez des expériences pilotes? Et vous faites référence au fait, également dans votre mémoire, que, dans votre secteur d'activité, il y a des besoins de formation communs plutôt que des besoins de formation qui sont spécifiques. Et à ce moment-là, quelle sorte d'outils devrait-on mettre de l'avant pour favoriser l'investissement dans ce secteur d'activité là, pour favoriser l'investissement de la part des entreprises? Est-ce que vous pensez, vous faites référence à un incitatif financier ou à des crédits d'impôt? Pourriez-vous élaborer un peu plus là-dessus?
M. Guimont (Pierre): Bien, en fait, le bilan qu'on en fait, il est très positif. D'ailleurs, on continue sous cette formule-là avec les activités qu'on avait et on travaille actuellement à développer le modèle au niveau des activités autant qu'à développer l'approche régionale de ce modèle-là, donc à rouler le projet de mutuelle dans d'autres régions. Actuellement, on a en cinq, projets de regroupement qui ont fait place aux mutuelles, qui sont en opération, et ça regroupe l'équivalent de 23 ou 24 entreprises pour le moment. Et on est à étendre le modèle dans l'autre famille de matériaux parce qu'on l'avait réalisé surtout dans les composites; on le fait maintenant dans les plastiques, on devrait le commencer sous peu. On attend toujours le contrat comme tel du fonds national. Mais, nous autres, le bilan est très positif, très prometteur.
Quant aux mécanismes, aux incitatifs, c'est certain que ce serait pour nous autres une façon d'accélérer. On parlait tout à l'heure... Mme la ministre la ministre disait: Oui, mais comment on peut faire pour accélérer? C'est sûr que l'incitatif pour nous autres devient un argument de vente qui est, je dirais, intéressant pour les entreprises qui ne sont pas familières avec le modèle. Déjà, on peut leur proposer des économies de coûts face à ce que serait le coût normal de la formation, mais, si on avait un incitatif financier, ce serait encore mieux, plus rapide à mettre en oeuvre et plus convaincant dans la mise en oeuvre.
Le Président (M. Jutras): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, MM. Guimont, Marcoux, Lavoie, merci pour votre mémoire.
En page 7 de votre mémoire, vous parlez que: «Pour la petite entreprise, l'intérêt de développer les qualifications de la main-d'oeuvre est largement compromis par le roulement de la main-d'oeuvre.» Ça, plusieurs intervenants nous l'ont dit la semaine dernière, au niveau de la petite et moyenne entreprise. Mais vous signifiez aussi que le «taux de roulement est amplifié par la vigueur du marché de l'emploi et les caractéristiques des nouvelles générations de travailleurs». Vous voulez dire quoi par «caractéristiques des nouvelles générations de travailleurs»?
Et, dans votre document, une deuxième question, une formation à la mesure de vos ambitions, vous parlez de programmes d'apprentissage en milieu de travail, les PAMT, bon, ça permet la formation compagnon, apprenti. Mais vous avez un témoignage d'un travailleur qui a fait un D.E.P. au niveau de techniques en matériaux composites. Alors, est-ce que c'est un congé d'études? Est-ce que c'est un congé qui est financé? Et quel est votre point de vue sur les congés études autofinancés?
M. Guimont (Pierre): Le travailleur qui est là, c'est un travailleur qui avait une formation, un D.E.P., donc qui avait sa formation sa formation fort probablement avant l'entrée dans le milieu de travail comme tel.
Si je reviens un petit peu en arrière, sur les caractéristiques des nouvelles générations de travailleurs, c'est sûr que la main-d'oeuvre actuellement sur marché de l'emploi est très mobile, pas nécessairement géographiquement mais d'une entreprise à l'autre. Et les nouvelles... Les travailleurs, plus ils sont jeunes, plus ils sont mobiles professionnellement, donc ils vont changer d'emploi pour toutes considérations.
L'industrie étant ce qu'elle est, l'industrie des plastiques, on est un milieu industriel qui travaille 24 heures, sept jours. Pour certaines générations de travailleurs, ça peut présenter un désavantage certain. Et ils ont le libre choix actuellement que de changer de secteur, l'emploi est quand même assez fort.
Alors, voilà, je perds le sens, là, de la dernière partie de votre question.
M. Dufour: Bien, les congés d'études autofinancés, quel est votre point de vue?
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(11 heures)
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M. Guimont (Pierre): Oui. Les congés d'études, je peux difficilement me prononcer. Je ne sais pas jusqu'où ça servirait notre secteur industriel, qui est actuellement déjà en pénurie de main-d'oeuvre de façon assez importante. C'est certain que, si on a... Et c'est pour ça qu'on adhère de plus en plus aux programmes d'apprentissage en milieu de travail, pour que cette formation-là se fasse, ou les compléments de formation soient dispensés directement dans les milieux de travail. En fait, si on perd la main-d'oeuvre parce qu'elle retourne aux études, bien on y gagne sur un point, mais ça cause aussi énormément de problèmes pour un secteur qui est déjà fortement handicapé, là, sur ce plan-là.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et je vais demander sans plus tarder aux représentants de la Société de formation et d'éducation continue de s'avancer et de prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Société de formation et d'éducation continue. Je vous rappelle quelles sont les règles: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes d'échange avec la ministre et les députés ministériels et, par après, 15 minutes d'échange avec les députés de l'opposition. Je demanderais au principal porte-parole du groupe de s'identifier et de nommer les personnes qui vous accompagnent, et procéder à la présentation de votre mémoire.
Société de formation et d'éducation
continue (SOFEDUC)
M. Fortin (Louis): M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, dans un premier temps, j'aimerais vous remercier d'avoir invité la Société de formation et d'éducation continue à présenter la version des entreprises privées et publiques en formation, c'est-à-dire les fournisseurs de services. Mon nom, c'est Louis Fortin, je suis président de la SOFEDUC et vice-président de la firme de formation CFG. À ma gauche, M. Jacques Lalanne, qui est vice-président de la SOFEDUC et président de la firme Actualisation; et à ma droite, M. Maurice Boivin, qui est conseiller pour la SOFEDUC et professeur à la retraite pour l'Université du Québec à Trois-Rivières.
Notre présentation va se faire en trois étapes. Dans un premier temps, je vais présenter la SOFEDUC, qui on est, d'où on vient; et par la suite, M. Lalanne va vous présenter les objectifs et perspectives qu'on a dans le mémoire; et finalement, M. Boivin va vous faire les recommandations que nous amenons à la commission et que nous espérons, bien entendu, que certaines d'entre elles seront bien reçues.
Donc, la SOFEDUC est l'organisme officiel qui accrédite les institutions, les écoles, organismes et services de formation pour l'émission d'unités d'éducation continue, communément appelées les UEC. Elle s'assure que ses membres respectent les critères de qualité tant pédagogiques qu'administratifs qui s'inspirent de ceux mis de l'avant aux États-Unis par l'International Association for Continuing Education and Training. La SOFEDUC regroupe les institutions les plus prestigieuses du secteur de la formation continue et de la formation en entreprise. On a des membres au niveau universitaire, notamment les HEC Montréal, l'École d'administration publique, l'ENAP, l'Université du Québec à Montréal, l'Université de Sherbrooke. Au niveau collégial, la SOFEDUC est présente sur l'ensemble du territoire du Québec, notamment avec des membres comme le cégep Saint-Laurent, Marie-Victorin, Bois-de-Boulogne, de Maisonneuve ainsi que l'Institut de technologie agroalimentaire, pour ne nommer que ceux-là. La SOFEDUC a aussi comme membres des ordres professionnels ? on pense à l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'Ordre des chimistes, l'Ordre des comptables ? des associations et des regroupements, centres jeunesse-emploi, centres hospitaliers du Québec, l'Association des directeurs municipaux des municipalités du Québec ainsi que de nombreuses firmes de formation reconnues, notamment le Groupe Conseil CFC, l'Actualisation et CFG, ainsi que beaucoup de membres individuels et toutes les personnes qui sont intéressées, de loin ou de près, par la formation privée en entreprise.
Fait important, c'est que la SOFEDUC est une organisation à but lucratif qui préconise la promotion et le développement de la formation continue ainsi que les reconnaissances des apprentissages par le biais d'un système d'éducation d'unités continues. Elle est responsable d'accréditer ses membres institutionnels, fournisseurs de services de formation continue et de veiller au respect des normes de qualité dès qu'il y a émission d'UEC. Depuis près de 20 ans, la SOFEDUC assume cette mission auprès de ses membres, des organismes de formation publics, parapublics ou privés, dispensant des cours crédités à une clientèle adulte.
Quelque chose d'intéressant, c'est que les membres de la SOFEDUC paient une cotisation volontaire de plus de 450 $ par année, qu'ils doivent se soumettre tous les cinq ans à une visite d'agrément et en payer les frais d'administration ou de gestion de plus de 350 $.
Lorsqu'un ordre professionnel, une entreprise, ou une organisation, ou un service de formation présente une demande d'adhésion à la SOFEDUC, il lui en coûte 100 $ pour l'ouverture du dossier et 350 $ pour la visite d'accréditation. Mais malgré toutes ces exigences monétaires et le processus rigoureux des critères de qualité, la SOFEDUC compte une centaine de membres, et une centaine de membres dont les plus grosses entreprises de formation au Québec, qu'elles soient privées ou qu'elles soient publiques.
C'est donc dire que la SOFEDUC a acquis une solide réputation et une compétence reconnue, que l'on ne saurait ignorer lorsqu'on traite de reconnaissance des compétences de qualité et de formation. Depuis sa création en 1988, la SOFEDUC a présenté plusieurs mémoires à diverses instances gouvernementales, portant sur les moyens d'assurer la qualité de la formation continue. La société collabore et participe à des projets avec plusieurs organismes gouvernementaux pour promouvoir la formation des adultes et favoriser la reconnaissance des acquis extrascolaires.
La qualité en formation, c'est le coeur et la raison même de la SOFEDUC, et, depuis 18 ans, la mission de la SOFEDUC consiste à promouvoir la qualité de la formation non créditée, à promouvoir la reconnaissance des apprentissages par les unités d'éducation continue, les UEC, et à assurer à travers nos normes le respect des critères d'émission.
Maintenant que j'ai présenté la SOFEDUC, M. Lalanne va vous présenter nos objectifs et perspectives du mémoire.
Le Président (M. Jutras): M. Lalanne.
M. Lalanne (Jacques): Merci. Alors, nous sommes des partenaires de la formation et considérons qu'il y a comme quatre partenaires dans le développement de la formation de la main-d'oeuvre: les employeurs, les employés, le gouvernement et les formateurs, que nous représentons. Nous croyons que, pour atteindre cet objectif, nous devons travailler sur trois plans: l'attitude, la quantité et la qualité.
L'attitude face à la formation continue, pour moi, se résume en une phrase très simple: La formation, c'est continue. Alors, on doit développer le réflexe chez tous les travailleurs, tous les employés, que, tout au long de leur carrière, ils auront constamment à se perfectionner, à prendre de la formation.
Là-dessus, la loi du 1 %, comme plusieurs l'appellent, a eu un effet bénéfique, mais ça a pris, d'après nos observations, environ trois ou quatre ans avant qu'elle commence à avoir ces effets-là. Après trois ou quatre ans, on a constaté que certaines entreprises et certaines personnes qui auparavant ne participaient pas à des formations ont commencé à participer à des formations.
Ensuite, la nouvelle règle voulant que seules les entreprises ayant une masse salariale de 1 million et plus soient assujetties à cette loi a eu un effet nuisible sur le développement de la formation continue. J'étais dans une entreprise l'an passé, et ces bonnes gens étaient réunies en équipe pour faire leur plan de formation pour l'année. Et ils étaient dans leur troisième année de formation continue, c'est-à-dire l'année précédente et l'autre année avant, et ils avaient participé à de la formation et se demandaient: Qu'est-ce qu'on fait comme formation cette année? Ils disaient: Bien, l'année passée, on a fait telles choses, l'autre année avant, on a fait telles choses; cette année, on aura besoin de développer quelles compétences? Tout à coup, il y a un membre de l'équipe qui a dit: Mais on n'est plus obligés de faire de la formation. L'autre a dit: Non, on n'est plus obligés, mais non, on n'a pas de masse salariale de 1 million. Ah bien! si on n'est pas obligés... Tout le monde a dit: Bon, ça va; si on n'est pas obligés, on laisse faire. Et ils ont laissé tomber. Alors, ils commençaient à développer ce réflexe et ils l'ont perdu.
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(11 h 10)
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Deuxième facteur: pour que la formation continue soit efficace, il faut qu'il y en ait une quantité suffisante. Des études rigoureuses nous démontrent que les entreprises performantes consacrent 4,5 % de leur masse salariale à la formation. Ces études, ces enquêtes confirment la même chose et au Québec et en Amérique du Nord. Le 1 % est vraiment un seuil, si je peux dire, où on devient de plus en plus incompétents d'année en année sans s'en rendre compte.
De plus, sur la quantité, on constate que les cadres participent à beaucoup de formation et que ceux qui sont au bas de l'échelle, pour employer cette expression, en ont beaucoup moins et en ont en quantité insuffisante. Si on veut une vision plus claire, 4,5 %, ça veut dire 10 jours de formation par année. Pour maintenir et développer leurs compétences, tous les travailleurs devraient avoir 10 jours de formation par année durant toute leur carrière.
Parlons maintenant du dernier facteur, la qualité. L'agrément, pour Emploi-Québec, pour qu'un formateur soit autorisé, disons, à faire de la formation continue a des critères quantitatifs. Alors, on demande à ces personnes qu'elles aient un certain nombre d'heures de formation personnelle ? professionnelle, bien sûr ? et qu'ils aient aussi un certain nombre d'heures d'expérience dans ce domaine. Et, dans le milieu des ressources humaines, les gens, les professionnels trouvent en général que ces critères-là sont insuffisants, sont même quelquefois considérés comme risibles. Plusieurs personnes disent: Bien, moi, je suis un formateur agréé. Les autres disent: Bien oui, mais ça ne prend pas grand-chose pour être agréé. Alors, pour avoir des critères de qualité, ce serait nécessaire que non seulement on constate qu'est-ce que les gens ont fait avant de commencer de faire de la formation, combien d'heures de ceci et de cela, mais qu'on ait des critères spécifiques d'évaluation de qu'est-ce qu'ils font, comment ça se fait, et ainsi de suite. Et c'est ce que la SOFEDUC fait, et c'est pour ça que nous allons vous offrir notre collaboration, ce que vous allez voir dans les recommandations, maintenant.
Le Président (M. Jutras): M. Boivin.
M. Boivin (Maurice): Merci, M. le Président. Alors, on a un certain nombre de recommandations qui concernent la mission même de la SOFEDUC, c'est-à-dire s'assurer de la qualité de la formation. Et ensuite, bien, comme nous sommes préoccupés par la qualité de la formation en général, nous avons quelques recommandations concernant l'ensemble de la préoccupation au niveau de la culture de la formation continue.
Alors, dans le premier groupe de recommandations, nous en avons deux qui ont été presque tout le temps soumises aux différentes instances de consultation, c'est-à-dire que l'unité d'éducation continue, l'UEC, devienne la norme québécoise de reconnaissance de la formation continue non créditée, la créditée étant reconnue par les normes du ministère de l'Éducation.
Deuxième recommandation, que la SOFEDUC soit mandatée pour appliquer les normes de qualité en formation continue et pour accréditer les organisations aptes à émettre des UEC, conservant ainsi au ministère de l'Éducation un rôle de reconnaissance formelle par ses unités et ses crédits.
Troisième recommandation, qu'Emploi-Québec et ses composantes ? nous définissons ce que nous entendons par les composantes d'Emploi-Québec dans le mémoire même ? reconnaissent la SOFEDUC comme organisation représentant tous les formateurs reconnus par le MEQ et agréés par Emploi-Québec. Dans cette perspective, nous recommandons que la SOFEDUC soit invitée à collaborer étroitement à l'agrément des formateurs du Québec, qu'ils proviennent du secteur public ou du secteur privé.
Quatrième recommandation, qu'Emploi-Québec et ses composantes, notamment le Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, revoient à la hausse les critères pour l'agrément des formateurs, des organismes de formation et des services internes de formation des entreprises et exigent un minimum de scolarité et de formation en formation, c'est-à-dire en transfert des compétences, de la part des personnes faisant l'objet d'un agrément. Nous recommandons aussi qu'Emploi-Québec et ses composantes, notamment le Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, mettent en place des mécanismes rigoureux et efficaces de contrôle de la qualité en utilisant l'expertise et les outils de la SOFEDUC, qui ont été éprouvés et validés depuis plusieurs années.
Cinquième recommandation, nous recommandons qu'Emploi-Québec et ses composantes, notamment le Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, mettent sur pied, en collaboration avec la SOFEDUC, un système de représentation des formateurs autant reconnus par le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport qu'agréés par Emploi-Québec aux diverses instances centrales, dans un premier temps, notamment la Commission des partenaires du marché du travail, le Fonds national de formation de la main-d'oeuvre et des comités sectoriels, et un système de représentation régionale et locale auprès des directions régionales d'Emploi-Québec, et des centres locaux d'emploi, et des conseils régionaux des partenaires du marché du travail.
Et, pour mettre en oeuvre cette recommandation, nous recommandons que les fonds nécessaires à cette représentation et à l'établissement d'une permanence centrale afin d'assurer la coordination et la représentation des formateurs auprès d'Emploi-Québec et de ses composantes centrales ainsi qu'à l'établissement de bureaux régionaux dans chacune des régions du Québec afin d'assurer la coordination régionale et la représentation des formateurs auprès des directions régionales d'Emploi-Québec et des centres locaux d'emploi, pour que cette représentation se fasse à tous les niveaux, autant central que régional et local. D'autres recommandations maintenant concernant la culture de formation continue en général. Nous recommandons qu'Emploi-Québec et ses composantes prennent tous les moyens appropriés pour construire, mettre en place, faire émerger une réelle culture québécoise de la formation continue en entreprise. Dans le rapport, on indique qu'il faudrait passer d'une comptabilisation de la formation à l'application de l'esprit de la loi du 1 %, qui est de favoriser l'émergence d'une culture.
Septième recommandation. Nous croyons que le temps est venu de mettre sur pied les états généraux de la formation continue en entreprise afin d'identifier les ressources en formation dont dispose le Québec et de faire en sorte que ces ressources puissent collaborer de façon cohérente au développement d'une culture de la formation continue, tant dans les entreprises du Québec que dans la population en général. Nous recommandons donc d'organiser des états généraux de la formation et de l'apprentissage continu. Merci.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et je cède la parole à la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Messieurs, soyez les bienvenus. Merci d'être là parce que vous abordez un sujet qu'on n'a pas encore abordé encore. Et c'est pour ça qu'existent les commissions parlementaires, hein, c'est pour être capable de faire le tour de la question. Alors, j'apprécie que vous soyez là.
Ce que je comprends, c'est que vous êtes plutôt critiques à l'égard des formateurs et de la façon dont on les agrée. Et je voudrais vous entendre plus à fond là-dessus. D'abord, je vais vous poser une première question: Est-ce que vous faites une différence entre les formateurs externes et les formateurs internes? Quand je dis: Est-ce que vous faites une différence?, c'est: Est-ce que, par exemple, les critères d'agrément pour des formateurs, est-ce qu'ils seraient différents? Lesquels seraient les mêmes? Lesquels seraient différents?
Et là, bien sûr que je parle autant en termes de quantité que de qualité, c'est-à-dire tant en termes de critères qualitatifs que de critères quantitatifs. Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Fortin (Louis): Le constat qu'on en fait au niveau de la SOFEDUC puis aussi en tant que, si on veut, responsables d'entreprises privées de formation et d'entreprises publiques, le débat n'est pas autant à savoir si les formateurs internes dans les entreprises ou les formateurs externes aux entreprises ou les formateurs venant du privé ou public sont meilleurs, mais surtout s'assurer qu'il y ait une certaine accréditation.
Présentement, de la manière qu'on voit ça dans l'industrie, c'est que quelqu'un arrive et il va dire: Bien, moi, je veux être formateur chez vous et, bon, bien, pour être formateur agréé, tu dois avoir tes 200 heures d'enseignement. Est-ce que tu peux me les prouver, tes 200 heures? Là, ils vont nous amener finalement une feuille. Ça va être marqué où il a fait ses heures. Nous, si on a le temps, on va valider, mais c'est plutôt au niveau d'Emploi-Québec de valider pour l'accréditation.
On va envoyer la feuille des 200 heures, mais à ce niveau-là finalement il n'y a aucune validation qui est faite. Et c'est là qu'on dit qu'ils devraient avoir une plus grande crédibilité. Si on veut que la formation passe d'une dépense à un investissement...
Mme Courchesne: Le sens de ma question, M. le Président, serait le suivant. Je veux savoir: Est-ce que, dans l'ensemble du portrait de la formation de la main-d'oeuvre en entreprise, certaines vont faire appel à des formateurs externes, d'autres, à des formateurs internes.
Est-ce que, dans les critères... Oubliez, là, ce qui se fait actuellement. Je comprends très bien ça. Moi, je veux savoir comment vous, vous... Est-ce que, en termes de qualité, vous voyez une différence dans ce qu'on doit exiger d'un formateur externe ou d'un formateur interne? Ou je peux poser ma question autrement: Le formateur interne peut... Bien, en fait, c'est ça. C'est une question importante parce que, tant qu'à moi, les deux formules peuvent être valables et répondre à des besoins spécifiques.
Mais je veux quand même comprendre: Dans des critères objectifs pour mesurer la qualité d'un formateur, est-ce qu'il y a une distinction dans votre esprit sur ce qu'on devrait exiger d'un formateur externe par rapport à un formateur interne? Je voudrais avoir plus de spécifications là-dessus.
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(11 h 20)
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M. Lalanne (Jacques): Dans mon esprit, il n'y a pas de distinction, c'est-à-dire qu'il y a certaines compétences fondamentales que tous les formateurs doivent posséder, qu'ils soient internes ou externes. Maintenant, selon les spécialités, il y a des adaptations à faire. Et actuellement, il y a une tentation pour une entreprise de prendre un formateur interne: ça va être plus vite, ça va coûter moins cher, ça va être moins compliqué. Et, hélas, souvent, la personne qui est mandatée à ce moment-là n'a pas les compétences suffisantes. Je ne dis pas qu'elle ne pourrait pas les avoir, parce qu'une des choses que nous faisons assez souvent, c'est de la formation de formateur. Une des choses que les formateurs privés ou publics font, c'est de former les gens qui sont à l'interne à avoir les compétences nécessaires pour vraiment transmettre leurs propres compétences à leurs collègues. Et c'est cette marge-là qui n'est pas toujours remplie à l'interne.
Mme Courchesne: Mais est-ce que ce n'est pas là une solution efficace de faire en sorte que les entreprises... et c'est comme ça... parce que vous faites une recommandation pour créer une culture de formation continue à Québec. C'est peut-être une bonne façon de créer cette culture-là, c'est en ayant des formateurs internes qui ont déjà été formés possiblement par des formateurs externes. Mais, si on a quelqu'un de bien identifié dans l'entreprise, qui a ces capacités, ces compétences, et qui est capable de faire le lien avec les besoins de l'entreprise, vous ne pensez pas que ça peut être efficace?
M. Lalanne (Jacques): Nous sommes très favorables à cette formule-là, mais, pour qu'elle soit appliquée, il faudrait que les critères de qualité des formateurs actuels soient augmentés.
Le Président (M. Jutras): Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: En complément, M. le Président, si vous permettez. Nous allons recevoir, cet après-midi, un groupe qui s'appelle le Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec, et, au niveau des formateurs, ce regroupement-là demande à la ministre que la reconnaissance des pairs comme formateurs... reçoivent des mandats de la mutuelle. Et, de façon plus précise, ils trouvent que d'avoir entre 90 et 135 heures d'heures en formation au niveau de la pédagogie, c'est une entrave importante, et j'aimerais avoir votre opinion sur ce sujet-là. Eux souhaitent, considérant, là, que certains travailleurs ont, bon, des horaires atypiques, principalement si on pense à l'industrie du cinéma et ils ont un changement d'employés, il y a un roulement d'employés qui est vraiment très grand, comment... J'aimerais avoir votre opinion sur la demande que va nous faire, cet après-midi, cet organisme.
M. Fortin (Louis): Qu'est-ce qui est un peu spécial quand on parle de formateurs en formation, c'est de toujours chercher à baisser les critères d'évaluation. On ne demandera pas à un C.M.A., à un c.a. ou à un c.g.a. de dire: Non, tes 2 000 heures, tes deux ans que tu dois faire comme apprenti, dans le fond, on n'a pas le temps, on a des horaires atypiques, passons à autre chose, baissons le nombre d'heures que ça prend pour devenir un c.a. La clé de la formation va résulter dans une analyse des besoins qui est bien faite, dans un processus de formation adéquat, mais aussi, beaucoup et énormément, dans la qualité du formateur qui va être là.
On peut baisser la formation, dire: Non, bien, 150, 200 heures, c'est trop pour la formation des formateurs. Mais, dans le fond, on va avoir des formateurs qui vont être très compétents mais qui ne seront pas nécessairement bons pour faire un transfert d'apprentissages. Le transfert d'apprentissages, c'est des compétences.
On connaît tous de monde qui sont très, très compétents, et, quand il vient le temps de nous expliquer quelque chose, de faire un transfert d'acquis, ils n'ont pas les compétences pour le faire. Mais cette compétence-là, comme à peu près n'importe quel métier ou n'importe quelle profession, ne s'invente pas, elle s'acquiert par la pratique, elle s'acquiert par la formation, et c'est ça. Moi, je ne pense pas que ce soit une bonne chose de baisser le nombre d'heures pour la formation des formateurs.
Mme Courchesne: Si vous me permettez, j'aimerais ça aller... parce que vous m'avez lancé un bon message, messieurs, je vous le dis tout de suite. Vous nous avez vus nous activer, c'est parce que j'ai compris un message dans votre présentation, et il est bien enregistré dans mes remarques de clôture, vous verrez qu'est-ce qu'il en est par rapport à ça. Mais vous avez soulevé une question importante, et je dirais qu'il y a un travail à faire à cet égard-là.
Mais je voudrais revenir sur votre sixième recommandation parce que, dans votre mémoire, cette sixième recommandation-là, elle est très, très large, elle est très vaste. Alors, j'aimerais ça si vous pouviez me préciser votre pensée, parce que vous dites: Il faut faire émerger une réelle culture québécoise de la formation continue en entreprise. Puis vous dites: Il faut qu'Emploi-Québec et ses composantes prennent tous les moyens appropriés pour y arriver. C'est large comme ça, là. J'aimerais ça... Est-ce que vous avez des idées plus précises et qu'est-ce que ça regroupe exactement?
M. Lalanne (Jacques): J'en ai une très simple, c'est que les professionnels de la formation, les formateurs, devraient faire partie de toutes les instances décisionnelles concernant le développement de la main-d'oeuvre. Je te passe le micro, Louis.
M. Fortin (Louis): Dans le fond, qu'est-ce qu'on dit, c'est qu'il y a beaucoup de décisions qui sont prises, mais qu'on oublie en amont de tout ça qu'à la base de la formation, pour qu'il y ait une culture, ça prendrait des formateurs des entreprises de formation publiques ou parapubliques qui siégeraient sur les différents comités pour en faire une culture de formation. C'est ça que...
Une voix: Ça va?
M. Fortin (Louis): C'est que la culture de formation, si on y va... O.K. Une culture de formation, au Québec, c'est d'arriver et de ne pas dire finalement: La formation, on la fait parce qu'il y a 1 %. Que la culture de formation, comme le sport, ce soit quelque chose qui soit de base, qui soit imprégné, qui soit dans nos moeurs, que la formation, c'est ce qui va faire qu'une société comme la nôtre va évoluer. On est une société qui évolue dans le domaine tertiaire, dans le domaine secondaire, puis si on veut continuer à évoluer, tout dépend de la formation, et c'est là qu'elle devrait entrer dans les moeurs des compagnies, sans aucune obligation.
Mais à défaut d'avoir cette culture de formation là, on est obligés de vivre avec des lois, des lois qui, selon nous, dans une culture de formation, pourraient être majorées de 1,5 %, 2 %, jusqu'à 4 %.
Le Président (M. Jutras): M. Lalanne, oui.
M. Lalanne (Jacques): Je vous donne des exemples concrets que l'on rencontre dans le travail de tous les jours entre des entreprises où il y a une culture de formation et des entreprises qui n'ont pas de culture de formation, et c'est cette culture-là qu'on veut favoriser.
Dans les entreprises de culture de formation, ces gens-là, à chaque année, ont un plan de formation. L'entreprise avec la direction des ressources humaines, avec les employés, prennent des décisions, ils examinent sur le plancher quels sont les problèmes qu'ils rencontrent le plus souvent, quelles compétences ils ont besoin d'acquérir, et ça fait partie de leur travail. Ça fait partie de leur travail aussi... les gens savent que, pendant l'année, ils vont aller en formation, comme je le disais, environ 10 jours par année, habituellement par blocs de deux jours à la fois, espacés, pour qu'ils puissent appliquer sur les lieux du crime qu'est-ce qu'ils apprennent dans l'atelier de formation.
Ces gens-là aussi, les journées où ils sont en formation, ils considèrent que ces journées-là sont aussi importantes que des journées de travail, et ils sont là ponctuellement. La formation commence à 8 h 30: à 8 h 20, tout le monde est là, et ils sont très actifs. Ces gens-là aussi, pendant la pause, ils reçoivent un appel sur leur téléphone cellulaire et ils répondent rapidement, puis ils disent: Bien, je vais te rappeler plus tard parce que j'ai une formation, et ils reviennent aussitôt que la pause est finie.
Ces gens-là aussi font des suivis: la direction des ressources humaines fait des évaluations pour savoir: Est-ce que ça a amené une amélioration après un mois, après six mois, après deux mois? Les autres entreprises, ils prennent la formation parce qu'ils sont obligés, ils arrivent en retard; s'ils prennent un téléphone pendant la pause, ils reviennent trois quarts d'heure plus tard parce que, dans leur entreprise, la formation, c'est considéré comme quelque chose qu'il faut faire, parce qu'on oblige, et non quelque chose qui est important pour qu'eux mêmes restent compétents pendant leur carrière.
Mme Courchesne: Si vous me permettez, avant de conclure, j'adhère tout à fait à ce que vous venez de dire, mais êtes-vous d'accord avec moi que ça, pour avoir cette approche, créer cet environnement-là, il faut habituellement être une entreprise d'importance? Ce qu'on a entendu depuis plus d'une semaine, c'est toute la problématique des petites et moyennes entreprises où il n'y a pas de service de ressources humaines, parce que c'est tout petit, petit. La très grande majorité des entreprises au Québec sont de très petites entreprises. Ce ne sont même pas des entreprises moyennes, ce sont des très petites entreprises.
Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que, pour créer ce climat-là, ça prend un minimum de ressources à l'intérieur même de l'entreprise? Qu'est-ce qu'on fait avec la majorité de nos entreprises qui sont plus petites?
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Boivin.
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(11 h 30)
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M. Boivin (Maurice): Je pense que, pour les petites entreprises, les très petites entreprises, il faudrait être proactif, et je pense que demander aux petites entreprises d'être elles-mêmes proactives et de pouvoir développer une culture de formation, c'est beaucoup leur demander effectivement. On sait que les petites entreprises ont des problèmes de gestion, des problèmes... Donc, ils ont de la misère autant à gérer qu'à comptabiliser la formation, même s'il s'en fait, de la formation, dans les petites entreprises.
Mais, moi, je pense qu'effectivement ? pour reprendre les points de vue de mes collègues ? si on était proactifs et si on utilisait les compétences qui sont disponibles, les formateurs agréés et les formateurs reconnus par le ministère de l'Éducation pourraient à la limite devenir des démarcheurs, des personnes, des compétences, des experts qui pourraient approcher les PME et les aider dans autant la gestion de la formation que dans la promotion de cette fameuse culture de formation qui doit être une culture individuelle dans un premier temps mais aussi une culture partagée à l'intérieur d'une entreprise puis à l'intérieur aussi d'une collectivité. Donc, ça pourrait être des bons porteurs que ces personnes reconnues, agréées qui pourraient être proactives, là, dans les petites entreprises.
En passant, le fait qu'on est passés de 250 000 $ de masse salariale à 1 million, comme le collègue Lalande le disait...
Une voix: Lalanne.
M. Boivin (Maurice): ...Lalanne l'a dit, on a eu l'impression que c'était un signal à l'effet que ce n'était pas important pour les PME, la formation. C'est dommage parce qu'au fond, l'objectif, c'était bien plus d'enlever de la paperasse et de l'administration aux PME qui ont de la misère de toute façon à ce point de vue. Mais il fallait aussi... Et c'était important de signaler que même une petite entreprise doit faire de la formation.
Le Président (M. Jutras): Oui, rapidement, monsieur. J'ai compris que votre nom, c'est Lalanne.
M. Lalanne (Jacques): Lalanne.
Le Président (M. Jutras): Lalanne. Alors, monsieur, rapidement, parce qu'on va passer du côté de l'opposition.
M. Lalanne (Jacques): O.K. Oui, une phrase. La loi, au début, a imposé aux PME de faire de la formation. Et, les premières années, ils le prenaient comme une obligation et, après quelques années, ils le font par goût. Et il faut laisser cette obligation-là parce qu'à un moment donné le goût se prend, et ça fait partie de la culture alors.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Nous allons passer du côté de l'opposition. M. le député de Gouin.
M. Girard: Merci, M. le Président. Alors, M. Fortin, M. Lalanne et M. Boivin, j'aimerais vous remercier de la part de l'opposition officielle pour votre présentation aujourd'hui en commission parlementaire, pour la qualité également de votre mémoire. Puis je veux revenir à votre dernière intervention où vous... parce qu'à la page 7 de votre mémoire, vous invitez dans le fond le gouvernement à faire en sorte que la loi qui favorise le développement de la formation de la main-d'oeuvre et sa réglementation soient maintenues, mais que toutes ces dispositions, là, législatives et réglementaires soient renforcées dans le but d'assurer la qualité de la formation continue dans les entreprises du Québec. Puis vous nous proposez même, dans votre mémoire, de ramener à son niveau précédent de 250 000 $ le seuil d'assujettissement de la loi en s'assurant d'offrir une aide adéquate aux entreprises. Donc, si je comprends bien votre point de vue, c'est que vous avez l'impression qu'on a envoyé un message négatif aux entreprises en modifiant la loi et que, de votre point de vue, le gouvernement pourrait en partie réparer cette erreur en revenant à la formule initiale de la loi du 1 %. C'est bien le sens de votre intervention?
M. Fortin (Louis): Oui. Et j'irais plus loin, le fait d'augmenter à 1 million, c'est comme si on avait décidé de faire deux catégories de travailleurs: une catégorie de travailleurs qui est dans la moyenne entreprise 1 000 employés et plus et qui, elle, a le droit ou a des obligations des employeurs de former les employés; et les entreprises malheureusement qui ont une masse salariale de moins de 1 million, bien essayez donc d'aller soutirer de l'argent de votre employeur pour avoir de la formation et, si vous en voulez vraiment, bien allez dans les firmes de 1 million, eux, c'est important d'avoir la formation. Moi, c'est un peu comme ça que je vois la loi quand on a décidé de la monter à 1 million.
Toutes les entreprises, qu'elles soient des entreprises d'une masse salariale de 10 000 $, de 20 000 $ ou de 100 000 $, mais j'exagère à 10 000 $... Mais pour dire: il ne devrait pas avoir de seuil minimum pour la formation en entreprise. C'est comme... C'est un peu aller contre la culture de la formation. Une entreprise... Puis on a tous du monde dans nos entourages qui ont débuté des petits bureaux, et ils ont quand même fait de la formation. C'est ce qui a fait que ces entreprises-là sont devenues de plus en plus performantes. Et on devrait continuer à obliger l'ensemble des entreprises québécoises à investir 1 % de leur masse salariale en formation.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Lalanne.
M. Lalanne (Jacques): Merci. Actuellement, la loi est conçue comme on oblige l'employeur à former son employé, et l'employé est un peu passif comme ça. Il attend que son employeur lui dise: La semaine prochaine, tu vas aller en formation. Ha! Mais s'il faut y aller, je vais y aller. Il y a des pays qui ont placé la situation autrement: ils ont considéré que la formation continue est un droit de l'employé, est un droit du travailleur, et c'est le travailleur qui a un compte en banque de sommes qui lui sont dues pour sa formation. Et ces sommes-là s'accumulent avec son salaire, à chaque année, et c'est lui qui a son mot à dire dans la décision de comment il va prendre cette formation-là. Il peut décider d'aller participer à une semaine de perfectionnement dans les nouvelles technologies de l'information, apprendre un nouveau logiciel, ou il peut laisser s'accumuler aussi cet argent-là et prendre, à un moment donné, un six mois ou même une année pour aller faire un certificat complet d'études.
Si on disposait, d'une certaine façon, ce crédit de formation, on donnerait le signal que c'est important pour chacun de se perfectionner. Celui qui a un emploi actuellement qui exige de lui, disons, tout simplement un cours secondaire, dans dix ans, s'il a seulement son cours secondaire et aucun perfectionnement, il n'aura pas la compétence pour avoir un emploi équivalent. Alors, c'est donc cette formation continue qui doit lui être assurée.
M. Girard: Donc, au fond, ce que vous nous dites, c'est que, au niveau de la loi, on devrait davantage permettre, favoriser l'initiative individuelle au niveau des travailleurs.
M. Lalanne (Jacques): Impliquer les travailleurs et les employés dans la gestion de cette formation-là et sentir que c'est leur sort qui est en jeu, c'est leur avenir qui est en jeu et non qu'ils sentent ça comme le poids d'une obligation qu'on leur met. Bien que l'obligation souvent, au départ, c'est ce qui met le moteur en marche.
M. Girard: Certains sont venus nous dire, au cours de la commission parlementaire, que le modèle demandé aux entreprises de consacrer un pourcentage de leur masse salariale à la formation, c'était un concept ou un modèle unique, que le Québec était le seul État en Amérique du Nord qui avait ce modèle-là. Même la représentante du Conseil du patronat du Québec est venue nous dire qu'à part le Québec et la France c'était dans les pays sous-développés où on avait ce genre de politique. Que pensez-vous de cela? Est-ce que vous partagez ce point de vue là?
M. Lalanne (Jacques): Il y a beaucoup de pays européens, il n'y a pas juste la France, qui en ont, et l'Allemagne en a beaucoup plus que la France, les pays scandinaves et bien d'autres pays. Et l'important, ce n'est pas de se cantonner dans une formule; là, on a discuté de la formule 1 % de 1 million de masse salariale. L'important, c'est de trouver une formule où tous les travailleurs et, par ricochet, tous les employeurs vont avoir des personnes compétentes dans l'avenir. On sait qu'actuellement, au Québec, il y a des centaines de milliers d'emplois qui ne trouvent pas preneurs parce que c'est la compétence qui manque, mais ce n'est pas le potentiel qui manque chez les travailleurs, c'est la formation.
M. Fortin (Louis): Et, à l'inverse, il ne faudrait pas aller dans un modèle de formation où toute la décision reviendrait tout simplement à l'individu. Ça prend un modèle qui va permettre autant à l'entreprise de répondre à ses besoins de formation tout en donnant satisfaction aux employés.
M. Girard: Vous dites même dans votre mémoire, là, que vous considérez que le 1 % de la masse salariale consacré à la formation, c'est un minimum. Vous, vous souhaiteriez même qu'on aille plus loin?
M. Fortin (Louis): M. Lalanne, quand il parlait tantôt des objectifs et perspectives, mentionnait que, pour maintenir nos niveaux de compétence, le seuil était de 1 %. À 1 %, on va maintenir nos compétences et même, à long terme, on va diminuer nos compétences, on va en perdre, on va être de moins en moins compétents. Et quand on regarde les grandes entreprises performantes et les pays performants, on parle plus d'un investissement de l'ordre de 4,5 % au niveau de la formation corporative, la formation dite «en entreprise». Donc, il pourrait avoir... peut-être pas se rendre à 4,5 % dans un premier temps, mais entre le 1 %, l'abolir, et le 4,5 %, nous, on serait plus à l'aise avec une formule autour de 3 % qui permettrait de développer, encore une fois, une vraie culture, de mettre en place des processus réels pour la formation en entreprise.
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(11 h 40)
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M. Boivin (Maurice): Je pense beaucoup aux petites entreprises ? à Trois-Rivières, on a un préjugé favorable envers les petites entreprises ? et c'est pour ça que la recommandation, la cinquième recommandation, on propose qu'il y ait des structures qui viennent faire en sorte que les formateurs, autant les reconnus par le ministère que les agréés par Emploi-Québec, puissent faire du démarchage, aident les petites entreprises de façon à ce qu'elles puissent faire autant de formation que les grandes entreprises puissent le faire.
C'est sûr que les grandes entreprises qui sont le moindrement dans l'économie du savoir investissent 4 à 5 % et plus, le Mouvement Desjardins parle de 5 ou 6 %. Donc, dans les grandes entreprises, le problème ne se pose pas. C'est bien plus lorsqu'on va vers les petites entreprises que là le problème se pose, et c'est là qu'on pense qu'il devrait y avoir un effort pour aider et devenir proactif pour faire en sorte qu'il y ait une certaine égalité dans le service à donner aux personnes.
M. Girard: Je veux revenir à votre...
Le Président (M. Jutras): M. Lalanne.
M. Lalanne (Jacques): Il y a une partie du drame des entreprises qui ferment actuellement dans le papier, dans le textile qui est due au manque de formation. Ces gens-là ont travaillé pendant 20 ans, 30 ans, dans des entreprises et n'ont pas eu de formation. S'ils avaient eu tout au cours de leur formation, par exemple, de l'initiation au mode informatisé de travail, ils seraient beaucoup plus facilement recyclables actuellement.
M. Boivin (Maurice): Et nous avons connu, à Trois-Rivières, des cas d'espèce très graves de pertes d'emplois à la centaine à la fois. Et c'est sûr que, si, dans ces entreprise-là, il y avait eu cette culture de formation et cette habitude de former les employés, on n'aurait pas eu les problèmes qu'on a eus à essayer de recaser ces personnes-là dans d'autres emplois.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Gouin.
M. Girard: Oui. Dans votre mémoire, vous nous invitez à mettre sur pied des états généraux de la formation continue en entreprise. Dans le fond, vous nous dites qu'il faut peut-être qu'il y ait une mise en commun des ressources, une meilleure collaboration. Vous jugez à l'heure actuelle qu'il y a des difficultés importantes et vous pensez que la tenue d'états généraux pourrait être un outil intéressant pour une mise en commun des ressources?
M. Fortin (Louis): Les entreprises de formation, c'est pour ça, au début, je mentionnais un peu, je parlais du privé, du public, des agréés, et il n'y a pas vraiment d'association très forte qui va les regrouper ensemble pour pouvoir parler finalement d'une même voix, ce qui serait bénéfique, finalement, pour l'industrie de la formation au Québec.
Présentement, ce qu'on peut voir, c'est qu'il y en a une, association, qui se démarque de plus en plus, c'est la SOFEDUC avec ses 20 ans, et c'est à peu près la seule qui va regrouper autant l'entreprise privée que l'entreprise publique. Et des fois ce n'est pas toujours évident de faire fonctionner les deux ensemble, mais on y réussit. Malheureusement, on ne regroupe pas l'ensemble de l'industrie et on croit que ce serait le temps, si on croit vraiment que c'est investir en formation et non dépenser en formation, bien investissons dans le savoir, puis faisons des états généraux sur l'éducation et la formation pour voir, au niveau corporatif, qu'est-ce qui en ressort réellement.
M. Boivin (Maurice): Et la mission de la SOFEDUC, elle est précisément sur la qualité de la formation. Donc, elle a un regard qui n'est pas nécessairement global par rapport à l'ensemble des activités de formation. Alors que si on avait les états généraux, là on pourrait regarder l'ensemble de la problématique et faire en sorte, par exemple, que l'on développe une espèce de cohérence dans l'offre de formation et dans l'analyse aussi de la problématique de la formation.
C'est intéressant ce qui a été fait par Emploi-Québec par le fonds national, parce qu'il y a eu des réflexions très puissantes, très solides de faites, mais on se rend compte que le fait de ramasser autour des états généraux l'ensemble de ces réflexions là serait un plus pour le Québec.
M. Girard: Qu'est-ce que vous pensez... puis certains nous ont suggéré d'aller de l'avant ou de continuer évidemment avec des mutuelles de formation. Est-ce qu'à votre avis c'est une bonne façon de mettre en commun des ressources et de favoriser la formation dans les petites et les moyennes entreprises?
M. Boivin (Maurice): Si vous permettez, encore une fois, les mutuelles, c'est une idée que j'avais lancée à M. Morissette, qui venait justement du secteur de la CSST, et c'est un peu le modèle que j'avais imaginé qu'on pourrait prendre. Parce que la mutuelle de prévention, c'est une chose extraordinaire au niveau de la CSST, alors comme M. Morissette venait de ce secteur-là, j'ai dit: Pourquoi vous ne prendriez pas le concept puis ne le transféreriez pas dans la formation?
Je dis que c'est une expérience pilote qui a été tentée, je ne suis pas au courant de l'évaluation qu'on en a fait, mais, moi, je pense que ce serait une avenue extraordinaire pour les PME que de pouvoir, par exemple, se réunir autour d'un certain concept de la formation.
Je sais que les fameux organismes collecteurs n'ont pas levé. Ça aurait été intéressant, ça aussi, ce concept-là, peut-être parce qu'il y avait trop d'exigences bureaucratiques autour de ça. En tout cas, il y aurait peut-être une évaluation à faire là aussi. Mais le besoin des PME, c'est la concertation, c'est l'entraide, et je pense que ce concept-là devrait, à mon avis, être poussé un peu plus. Mais ça prend des leviers, ça prend des personnes qui vont faire le démarchage et qui vont se payer... bien, se taper le boulot, comme on dit en France, et là ça prend des gens qui... Parce que ce n'est pas payant d'aller faire de la formation dans une entreprise de 10 employés. C'est bien plus payant d'aller prêter ses services à une entreprise où il y a plusieurs employés, puis là où on a la loi du grand nombre pour soi, puis c'est plus facile à organiser, il y a déjà des partenaires, il y a des interlocuteurs, et tout, mais dans les PME, ça n'existe pas.
Donc, c'est du bénévolat, ça, ou presque, là, de l'apostolat, si vous permettez l'expression, alors qu'il faudrait imaginer quelque chose, des formules qui fassent en sorte que les PME qui sont actuellement délaissées, bien, puissent avoir leur part du gâteau et participer à la culture générale.
Le Président (M. Jutras): M. Lalanne.
M. Lalanne (Jacques): Il y a les ordres professionnels qui font partie de la SOFEDUC, et qui est une forme de regroupement. Il y a des associations professionnelles aussi, comme par exemple l'Association nationale des éditeurs de livres, dont je fais partie, qui ont aussi le comité de perfectionnement et de formation continue.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, merci, messieurs, pour votre présentation.
Nous suspendons nos travaux, nous reprendrons à 14 heures. Et j'informe les parlementaires qu'on ne peut pas laisser ici nos documents parce qu'il y a une rencontre à l'heure du dîner.
(Suspension de la séance à 11 h 47)
(Reprise à 14 h 1)
Le Président (M. Jutras): Alors, nous avons quorum. Je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Nous reprenons donc nos travaux. Nous accueillons, dans un premier temps, cet après-midi, le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme, et je rappelle rapidement, là, cet après-midi, les groupes que nous allons entendre: par la suite, ce sera le Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec; par après, le Conseil québécois des ressources humaines en culture; et, à la fin, le Conseil régional des partenaires du marché du travail de Laval; pour terminer avec les remarques des députés.
Alors donc, bienvenue aux représentants du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme. Je vous rappelle rapidement les règles, la façon de procéder: vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire. Par après, il y aura un échange avec les députés ministériels pour une période de 15 minutes et, par après, un échange avec les députés de l'opposition pour une période de 15 minutes.
Alors, bienvenue à cette commission. Je demanderais au porte-parole principal de s'identifier et de présenter l'autre personne.
Conseil québécois des ressources
humaines en tourisme (CQRHT)
M. Legault (Yves): Bonjour, mon nom est Yves Legault, je suis délégué par mes administrateurs du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme. À la blague, j'ai dit que j'étais le volontaire désigné puisque je dois excuser l'absence de nos deux coprésidents qui auraient été avec nous la semaine dernière, si la date avait pu tenir, le 16 février était initialement prévu. Alors, Mme Michèle Beauchemin, qui est notre présidente, et M. Jean Lortie, coprésident, sont retenus, d'une part, à l'extérieur du pays, et ailleurs, pour des tâches professionnelles.
Je vous présente ma compagne pour aujourd'hui, pour cette présentation, Mme Adèle Girard, qui est la directrice générale du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme depuis une bonne dizaine d'années et qui sera avec nous pour, en particulier, la période de questions.
Le Président (M. Jutras): Ça va, allez-y.
M. Legault (Yves): D'abord, merci de l'invitation. Pour nous, c'est important d'être ici puisque travailler dans l'industrie touristique, c'est travailler beaucoup avec la petite entreprise. Et, vous l'avez vu dans les présentations antérieures, la problématique des petites entreprises dans le domaine de la formation est quelque chose qui est important. Je voulais vous dire quelques mots de l'industrie touristique.
D'abord, le Comité sectoriel d'intervention dans l'industrie touristique, vous connaissez nos liens avec Emploi-Québec, vous connaissez nos liens aussi avec la Commission des partenaires. C'est dans ce cadre-là que nous avons regroupé, depuis une dizaine d'années, des employeurs et des employés pour travailler ensemble à la résolution des différents problèmes, des différentes situations qui peuvent se présenter dans notre industrie. C'est une industrie qui est particulière pas parce que c'est dans ce domaine-là que nous intervenons, mais parce qu'elle est très semblable et est un peu un microcosme de l'ensemble de l'industrie au Québec.
Notre industrie est composée de 319 000 employés, 319 000 personnes y travaillent; c'est près 9 % de la population active du Québec qui intervient dans l'industrie touristique. C'est plus de 26 000 entreprises, et 96 % de ces entreprises qui sont dans notre secteur sont des petites et moyennes entreprises. Si on fait le parallèle avec l'ensemble de l'économie québécoise, on voit rapidement qu'on parle, dans l'ensemble du Québec, de 95 % d'entreprises qui ont moins de 50 employés. Donc, l'ensemble des entreprises dans le domaine touristique sont très proches de ce qu'on peut retrouver dans l'ensemble de notre économie.
Dans notre rapport, on vous fait rapidement un portrait de l'ensemble des huit sous-secteurs de l'industrie, les attraits touristiques, l'aventure écotouriste, les événements et les congrès, tout simplement pour vous démontrer que ce n'est pas un domaine dans lequel il est simple d'intervenir; beaucoup de petites entreprises, mais aussi beaucoup de variété dans les entreprises avec lesquelles nous travaillons.
Ce que nous voulons vous dire aujourd'hui, je le séparerais en trois secteurs. On veut d'abord vous expliquer pourquoi le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme appuie le maintien de la loi n° 90. On veut vous ? et c'est là le coeur de notre intervention, on va probablement d'ailleurs se diriger très rapidement vers ce deuxième point; vous ? faire quelques propositions pour la mise en place de nouveaux mécanismes d'encouragement aux initiatives de formation dans les petites entreprises. C'est un domaine, vous l'avez vu, qui préoccupe beaucoup des gens qui sont passés devant la commission. Et finalement, le CQRHT appuie le soutien au développement de l'intervention sectorielle et le soutien aux mutuelles de formation.
Je passe très rapidement sur la question de la grande entreprise, sinon pour vous dire que le CQRHT pense qu'il y a eu un bilan positif, que nous faisons un bilan positif des dernières années dans l'implantation de la loi, et nous croyons qu'elle doit être maintenue. Je pense qu'il faut être clair là-dessus, pour les grandes entreprises, 1 million de masse salariale et plus, nos intervenants sont d'accord avec le maintien de cette loi-là, pour plusieurs raisons, mais en bonne partie pour l'ordre que cette loi-là a permis de mettre dans l'ensemble des dispositifs qui étaient reliés au domaine de la formation. Qu'on pense simplement à la question du règlement sur l'agrément et la déontologie des formateurs, qui ont permis de discipliner un domaine où régnait une certaine anarchie. N'importe qui pouvait faire de la formation. Ce n'est plus le cas. Même si certains, et on l'a vu ce matin, là, voudraient plus de rigueur de ce côté, nous, on croit qu'on a déjà fait un grand bout de chemin de ce côté, et n'intervient pas qui veut dans ce domaine, en ce jour. Donc, maintien de la loi pour les grandes entreprises.
Peut-être deux domaines sur lesquels on pourrait vous demander d'insister un peu, c'est la question des initiatives structurantes. Donc, vous le verrez dans le rapport, on croit qu'il y a des domaines dans lesquels on pourrait concentrer nos énergies, et en particulier pour la section du tourisme. Sur notre programme d'apprentissage en milieu de travail, qu'on a identifié comme un type PAMT, programme d'apprentissage en milieu de travail, pour nous, c'est un domaine qui est porteur et qui permet de structurer les entreprises de l'industrie touristique. Et le deuxième qui nous préoccupe beaucoup, c'est les programmes d'entraînement à la tâche, des programmes qui seraient structurés à partir de référentiels de métier, donc des descriptions d'emploi très précises et qui permettraient d'accompagner des gens, de les encadrer par une personne-ressource à l'interne pour permettre d'accompagner ces gens. À ce titre-là, je vous soulignerais que nous avons, au cours des 10 dernières années, formé des moniteurs en entreprise qui jouent ce rôle. Les moniteurs en entreprise, 1 400 ont été formés, au cours des dernières années, par le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme.
Je vous amènerais tout de suite à la deuxième partie du mémoire, dans laquelle nous avons traité des plus petites entreprises. Et, en passant, je ferais peut-être une distinction qui nous est apparue importante, on ne peut pas être petite et moyenne en même temps, hein? Une entreprise est soit petite et soit moyenne, et on confond souvent ces deux catégories d'emplois qui ne vivent pas... d'entreprises, plutôt, qui ne vivent pas toujours la même réalité. 96 %, je vous le disais tantôt, de nos intervenants à nous sont dans la petite entreprise, c'est pourquoi nous avons tenté de vous présenter quelque chose, aujourd'hui, qui se centre vers ce type d'entreprise là.
Je passe rapidement sur la présentation, là, de ce que c'est que c'est la petite entreprise, M. Garand vous en a fait un bel exposé un peu plus tôt, la semaine dernière. Je vous amènerais plutôt sur les propositions que nous vous faisons.
Le CQRHT propose la mise en place d'un mécanisme d'encouragement et d'enregistrement volontaire des entreprises dont la masse salariale est de moins de 1 million de dollars. Ça, c'est quelque chose de nouveau, mais on pense qu'il y aurait lieu d'encourager les gens, sur une base volontaire, à s'enregistrer comme étant une entreprise apprenante. L'entreprise qui s'inscrirait dans ce mécanisme devrait être en mesure de déclarer des investissements en formation utilisant une approche structurée et des moyens bien ciblés, comme ceux définis précédemment à la section 1.2. En guise d'encouragement, l'entreprise justifiant un tel investissement verrait ensuite cette somme doublée jusqu'à concurrence de 1 % de sa masse salariale, et la façon de doubler serait par un type de chèque-formation.
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(14 h 10)
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Comment ça fonctionnerait? C'est l'entreprise qui est en mesure de dire: Bien, moi, j'ai investi 30 000 $ dans mon entreprise en formation... est appelée à fournir les éléments de preuve accompagnant cette dépense-là et pourrait recevoir en retour un chèque-formation qui lui permettrait de faire de nouvelles acquisitions de formation, donc de doubler son effet comme élément incitateur et comme élément motivateur. Ce chèque-formation pourrait être utilisé par les entreprises pour leurs employés et pour d'autres services ou programmes de formation structurants. Il serait ensuite encaissé par le fournisseur de services auprès d'un organisme mandaté pour gérer le système. Il pourrait être, par exemple, le réseau d'Emploi-Québec, celui des caisses populaires. Ça prend quelque chose de simple; ça prend quelque chose qui permettrait à l'ensemble du domaine de la formation de se rapprocher du domaine, de se rapprocher du client.
Un des gros problèmes que nous avons actuellement, c'est que formation, dans le contexte de la Loi favorisant le développement de la main-d'oeuvre, on est relié au ministère du Revenu, à Revenu Québec. Et, s'il y a quelque chose qu'un entrepreneur n'aime pas voir dans ses affaires, c'est bien les gens de Revenu Québec. Alors, ce qu'on croit, c'est que, si on pouvait sortir cette notion de financement de la formation du lien avec Revenu Québec, on se rapprocherait du client, notre client ici étant l'entrepreneur dans sa réalité et dans les difficultés qu'il rencontre.
D'ailleurs, on a parlé beaucoup de culture de formation. Nous, on pense que l'enjeu est beaucoup plus de développer une culture de gestion à l'intérieur des entreprises, surtout dans les petites entreprises, de leur apprendre, de les accompagner sur des éléments de gestion, la formation étant un outil dans la gestion et dans la recherche de solutions aux difficultés rencontrées par l'entreprise.
De l'avis du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme, le financement du programme d'encouragement proposé ici devrait être assuré au moyen des mesures de formation du Fonds de développement du marché du travail afin de préserver l'utilisation des sommes décroissantes du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre au maintien de ces programmes actuels les plus structurants. Si on utilise le Fonds national de formation pour cette nouvelle idée, il ne faut pas perdre le levier que nous avions actuellement pour des programmes structurants dans les entreprises.
Enfin, pour compléter ces mécanismes de soutien aux initiatives structurantes, le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme recommande aussi le maintien des crédits d'impôt auxquels le programme de stage et le programme d'apprentissage en milieu de travail... et ce, à hauteur de 40 % pour toutes les entreprises.
La deuxième idée qu'on vous soumet, c'est celle de valoriser publiquement les entreprises qui sont performantes. L'idée tourne autour de ce résumé ici, c'est-à-dire qu'on souhaiterait que les entreprises puissent faire partie d'un registre publié d'entreprises apprenantes, d'entreprises dans lesquelles la formation est valorisée. Et nous croyons que, dans un contexte où il y a une rareté de la main-d'oeuvre, une pénurie de main-d'oeuvre qui est en tain de s'installer, qui est très présente, une telle visibilité pourrait aider à faire du recrutement.
Une entreprise qui se préoccupe de la formation, c'est intéressant pour un employé lorsqu'il a à choisir dans quelle entreprise il voudra éventuellement travailler. Donc, une visibilité, une vitrine à fournir ou à bien étaler pour les gens qui sont performants au niveau de la formation.
Le troisième point, l'appui au secteur de l'intervention sectorielle et l'appui aux mutuelles de formation. Bien, ça ne vous surprendra pas que nous soyons d'accord, au Conseil québécois des ressources humaines, avec l'intervention sectorielle. C'est le coeur de nos actions et de notre structure. Nous croyons, au cours des 10 dernières années, avoir fait preuve qu'il est possible, en mettant des entreprises et des travailleurs ensemble, d'être performants dans ce domaine-là. 22 000 personnes ont suivi un programme de services à la clientèle qui s'appelle Le Client Plus, 1 500 moniteurs en entreprise ont été formés, 500 personnes ont été reconnues dans nos programmes de reconnaissance professionnelle, et 1 500 gestionnaires dans le domaine de la restauration et de l'alimentation ont également suivi un programme de formation avec nous.
Donc, nous croyons que l'approche sectorielle... Et ça, à peu près tout le monde qui s'est présenté, tous les organismes qui se sont présentés à cette commission l'ont souligné. C'est un domaine, c'est un secteur qui est porteur, et nous croyons qu'il est intéressant de poursuivre l'investissement dans ce secteur.
Une note que nous vous avons placée là, une revendication particulière de l'industrie touristique, et ça rejoint la question de la souplesse des systèmes. Nous faisons appel à un ajout de souplesse, à une façon plus simple de gérer et d'analyser les besoins des différentes organisations. Nous avons une particularité chez nous. Le programme des normes de compétences que nous avons développé, nous travaillons beaucoup avec le secteur canadien, avec les autres provinces canadiennes qui ont déjà développé des choses. Et on ne souhaite pas réinventer ce qui est bien fait, mais plutôt de l'adapter et de l'utiliser. Et actuellement le programme de reconnaissance, le programme que nous avons à présenter n'est pas accrédité ou n'est pas reconnu par le Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. Alors, nous souhaitons que cette rigidité-là puisse être assouplie.
La question des mutuelles. L'intervention sectorielle peut aussi conduire à une étape de concentration encore plus ciblée grâce aux mutuelles de formation. Le problème des mutuelles, c'est qu'il y a une durée nécessaire, il y a un temps requis, il y a des difficultés de démarrage sur lesquelles nous avons à travailler, ça prend du temps. Il ne faudrait pas qu'après une année, deux années, trois années d'expérimentation on conclue trop rapidement que ça ne doit pas être maintenu. Nous, on pense qu'en bas de cinq ans dans ce domaine, ce serait trop rapide d'arriver aux conclusions.
Actuellement, c'est encourageant, il y a des difficultés à soulever ou à corriger, mais 75 entreprises participent à la mutuelle en tourisme, et nous croyons que ces gens-là sont contents, ou trouvent leur compte dans la façon dont les choses se passent. On n'a pas mutualisé tous les fonds, les gens ont leur compte à eux, mais quand même l'idée de mettre en commun les préoccupations et les outils permettent d'arriver à des choses intéressantes.
Je vous amène donc à la conclusion, trois choses en particulier sur lesquelles je reviens en conclusion. CQRHT appuie le maintien de la loi pour les grandes entreprises de 1 million et plus. Le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme propose un nouveau mécanisme d'encouragement, c'est-à-dire qu'on va travailler, on souhaite travailler davantage dans un contexte plus positif que coercitif. D'ailleurs, ça va avec le nom même que vous avez choisi pour la loi, hein: c'est la Loi favorisant le développement de la main-d'oeuvre, et non pas la loi obligeant le développement de la main-d'oeuvre. Donc, on trouve qu'il y aurait intérêt à pousser sur cette terminologie-là dans les actions et dans la façon dont les choses sont articulées.
Et finalement, nous proposons que les partenaires du marché du travail s'associent pour la valorisation publique des petites et des grandes entreprises dont les efforts de formation seront reconnus dans le cadre des propositions précédentes. Globalement, c'est une approche qui se veut positive, avec des solutions concrètes pour aider les petites entreprises dans ce domaine très porteur, mais très difficile.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci pour votre présentation. Je cède la parole maintenant à Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Mme Girard et M. Legault, merci pour votre présentation. D'entrée de jeu, je tiens à excuser la ministre qui, vraiment pour des raisons majeures, ne peut être ici pour vous entendre cet après-midi. Je tiens à vous dire que: Soyez assurés que nous serons les oreilles, la prise de notes, et que tout ce que vous nous avez dit et les questions auxquelles vous répondrez seront transmises... ça va être transmis de façon très rigoureuse à Mme la ministre. Je sais que vous auriez souhaité la rencontrer en tant que personnes de Laval, très impliquées dans la région même de la ministre, et je souhaite que vous ayez l'occasion de la rencontrer tout à l'heure, elle se joindra à nous vers 16 heures.
Vous nous avez démontré de façon très concrète ce en quoi consiste l'industrie touristique. Je dois vous dire que, dans mon comté, j'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup d'entreprises, de petites, de moyennes et de moyennes entreprises qui ont un impact majeur au niveau du développement économique de la région. Et vous, à juste titre, vous mentionnez que 96 % des entreprises touristiques sont des entreprises qui ont moins de 50 employés. Je pense que c'est une caractéristique importante de ce secteur d'activité, et ça explique aussi pourquoi vous souhaitez que les règles, lois et toutes les mesures qui touchent ce secteur d'activité soient souples.
J'aimerais, à ce titre, que vous m'expliquiez comment vous pensez, dans ce souci de souplesse... comment proposez-vous que soit faite la déclaration de l'investissement en formation pour les entreprises de moins de 1 million de dollars de masse salariale qui souhaiteraient s'enregistrer volontairement, là, dans le processus que vous nous avez expliqué, considérant que c'est un irritant majeur pour ces petites entreprises, là, quand on fait face à une paperasse et à une complexité au niveau des comptes à rendre? Alors, s'il vous plaît, expliquez-nous ça pour que concrètement, là, ce soit très clair pour nous.
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(14 h 20)
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M. Legault (Yves): Peut-être une petite précision à apporter avant de passer la parole à Mme Girard, sur quelque chose de concret, là, pour vous répondre. Il y a déjà chez nos petits entrepreneurs... et ça, on le sait, des études que nous avons faites et du travail dans lequel on les a accompagnés au cours des 10 dernières années, nous savons qu'il y a, bon an, mal an, 30 % de nos entrepreneurs qui, malgré le fait qu'ils ne seraient pas obligés, seraient actifs, seraient performants au niveau de la formation et seraient soucieux de ce domaine-là. Ce que, nous, on propose avec l'approche qui est dans le mémoire qui est proposé ici, c'est: travaillons d'abord avec ces gens-là, ceux qui veulent, ceux qui sont actifs, ceux qui sont convaincus. Ils ne sont pas obligés, mais ils sont convaincus qu'il y a quelque chose à faire. Soutenons-les, valorisons-les, donnons-leur des mécanismes, comme vous le soulignez, qui sont à leur portée dans leurs difficultés de gestion et dans leurs difficultés de petits entrepreneurs. Donnons-leur des outils qui leur permettraient... Et nous sommes convaincus qu'en travaillant avec une base de 30 % de ceux qui sont déjà des convaincus, la base pourrait s'élargir assez rapidement. C'est des gens qui travaillent en réseau, qui se parlent; quand ils font des bons coups, ils ne s'en cachent pas. Et ça permettrait donc aux gens de développer de la confiance. Toute cette approche-là est basée sur un développement de confiance, de relations de confiance entre les entrepreneurs et l'État, d'une part, et sur les résultats à tirer de la formation.
Quant aux outils, Mme Girard.
Mme Girard (Adèle): Peut-être savoir que... Puis M. Garand vous a parlé beaucoup des entrepreneurs et, par hasard, j'écoutais ça à la télé, pur hasard, mais je vous le dis. Et ça m'a frappé comment toute la question de l'entrepreneur qui est importante. Un entrepreneur, ce n'est pas un gestionnaire, et M. Garand a beaucoup insisté. Je peux vous dire que l'expérience de 10 ans sur le terrain avec les entreprises me confirme cette situation-là.
Mais l'entrepreneur, il veut toujours savoir: «What's in it for me?» Qu'est-ce qu'il y a pour moi là-dedans? L'approche qu'on propose a deux choses essentiellement pour eux qu'ils apprécient. La première, on reconnaît que c'est une de leurs responsabilités, mais c'est une responsabilité partagée. Comment vous voulez qu'on fasse croire à une entreprise de l'industrie touristique qui a un taux de rotation de 30 % de son personnel que c'est sa responsabilité unique de former sa main-d'oeuvre? C'est une responsabilité partagée qui est vrai qui appartient aux entreprises, qui appartient aux employés mais aussi aux partenaires sociaux puis à l'État. Parce qu'on est prêts à investir 10 000 $ pour former un étudiant de D.E.P. lorsqu'il est en continuum de formation, mais comment sommes-nous prêts à investir pour quelqu'un qui a appris son métier en cuisine par l'apprentissage? Ça ne coûtera jamais 10 000 $, mais ça ne se fera jamais à coût zéro. Ça, c'est de l'utopie. Donc, comment on fait... On dit: On est en solution, en décision partagée. Donc, il y a une partie qui revient à lui, il a une responsabilité mais une responsabilité partagée. Et l'entrepreneur, c'est du gros bon sens sur deux pattes, et ça, il comprend ça.
L'autre élément qu'il comprend, c'est la visibilité: Qu'est-ce qu'on me donne comme image? Si on dit que, moi, Adèle Girard, gestionnaire d'une entreprise touristique dans la région des Cantons-de-l'Est ? excusez-moi, c'est ma région d'origine, c'est là que je travaillais comme gestionnaire de l'industrie touristique. Et, dans cette région-là, si on dit que je suis une gestionnaire responsable, que l'endroit que je gère est bien géré et que je m'occupe de mes employés, ça va m'aider à recruter de la main-d'oeuvre. Il y a quelque chose pour moi là-dedans.
Actuellement, c'est gardé comme un secret d'État, à savoir qui fait de la formation de façon efficace au Québec parce que c'est géré par le Revenu, puis, quand c'est géré par le Revenu, c'est un secret d'État. Ça devrait être un secret partagé par tout le monde qui en fait bien, qui travaille bien. Mais c'est un secret qui devient... parce que c'est géré par le Revenu. Donc, c'est ce genre de mécanisme-là qui peut devenir positif et qui permet d'avoir des résultats.
À savoir la mécanique, la quincaillerie, comment ça devrait être fait? bien, excusez-nous, nous autres, on n'a pas la compétence pour dire comment ça devrait être fait. Par contre, pour vous donner des caractéristiques: si c'est simple, si c'est flexible, si c'est accessible, si c'est... Puis c'est pour ça qu'on a donné l'exemple des caisses populaires. On a des réseaux partout au Québec puis, au Québec, à chaque fois qu'on a une nouvelle idée, la première affaire qu'on fait, ce n'est pas de faire l'idée puis de passer au client, c'est de créer la structure qui va gérer l'idée plutôt que de se demander quelle structure existante pourrait s'en occuper. On passe notre vie à investir notre argent dans les structures plutôt que dans le service au client. Et notre objectif à nous, c'est de dire: On n'a pas voulu créer une nouvelle structure, et c'est pour ça qu'on a donné l'exemple des caisses populaires puis qu'on a fait le lien avec des chèques de formation parce que si, l'entreprise, elle donne 10 000 $, elle est capable de dire: Je mets 10 000 $, bien, que la caisse donne un autre 10 000 $, ça lui fait 20 000 $ pour faire de la formation. Et ce 20 000 $ là, il doit être dédié à la formation parce qu'il doit être utilisé avec des fournisseurs de formation. Il y en a des...
On peut garder ça simple, et c'est pour ça qu'on ne s'est pas embarqués dans une explication de comment ça pourrait être géré parce que tout le monde nous dirait: Bien, ça, ce n'est pas légal, ça ne respecte pas la loi sur la confidentialité, il faut que ça passe par un... Bien là, on n'a pas embarqué là-dedans parce qu'on aurait eu, en partant, des objections sur le mécanisme qu'on aurait développé plutôt que de s'occuper de l'intention et des objectifs poursuivis.
Le Président (M. Jutras): Oui.
Mme Gaudet: En complément, j'aimerais que vous m'expliquiez, par exemple, les entreprises participent à des mutuelles de formation. Est-ce qu'il y en a une, mutuelle de formation, au niveau du tourisme? Et est-ce que cette participation-là à une mutuelle de formation ne devrait-elle pas être suffisante? Est-ce qu'on doit ajouter ce que vous proposez, là, comme formation, comme investissement supplémentaire ou comme investissement? Est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir un pont entre ce que vous proposez et les mutuelles de formation?
Mme Girard (Adèle): Dans notre texte, on vous a expliqué comment on faisait le pont. On dit que la mutuelle est une méthode où on peut investir notre chèque-formation, donc le lien est là. Pourquoi ça ne peut pas être la mutuelle pour tout le monde? Dans notre industrie, la mutuelle, elle est intéressante dans les secteurs où il y a une problématique d'offre.
Je m'explique, il y a une problématique d'offre de formation dans le secteur du ski. Je vais vous donner un exemple. Dans le ski, si vous voulez développer un contenu de formation pour le travail en hauteur, c'est très pointu, c'est très spécialisé, il n'y a aucune entreprise du ski qui peut le faire elle-même, à part probablement Tremblant et trois, quatre grosses stations de ski. Donc, il y a une obligation de se regrouper pour être capables d'avoir l'accessibilité.
Donc, c'est souvent... Je reprends, la mentalité de l'entrepreneur. L'entrepreneur va choisir un moyen le plus simple pour lui. Dans un secteur, par exemple, comme l'hébergement, l'hôtellerie, il y a des formations qui sont disponibles à peu près partout au Québec, dans toutes les régions. La nécessité de mutualiser n'est peut-être pas là. Il n'y a rien de pire que de penser à un moyen unique pour tout le monde, et c'est toujours la manie qu'on a. Il faut être capable d'offrir un certain nombre de moyens disponibles et que, parmi ces moyens-là, l'entrepreneur puisse choisir celui qui correspond le mieux à ses besoins.
Dans le secteur de... Les cinq sous-secteurs de l'industrie touristique qui ont accepté de se pencher sur la mutualisation, je vais vous les nommer, puis je vais vous dire: par exemple, il y a eu le secteur du ski, secteur des événements, le secteur des attraits. Vous voyez, on est dans le spécialisé, le secteur de la pourvoirie qui s'est retiré quand la loi n'a plus été obligatoire pour les 1 million et moins, parce qu'il n'y avait aucune raison de les convaincre d'embarquer dans une mutualisation. Parce que les pourvoiries auraient probablement embarqué dans un contexte où il y avait une obligation.
Après ça, il y a le cinquième secteur qui était présent, c'est les ATR, les associations touristiques régionales, qui jouent le rôle de... mais ce n'est pas pour leurs membres, pour eux comme entreprise, comme organisation; à 20, il y avait un besoin particulier pour leur réseau, et ils sont embarqués. Et dans notre industrie, pourquoi les gens ont embarqué? C'est parce que, nous, comme comité sectoriel, on a décidé d'utiliser la somme qui nous était donnée pour gérer les mutuelles, on l'a divisée par deux: on a gardé la moitié pour gérer, et l'autre moitié, on l'a donnée aux entreprises pour faire l'équivalent du 1 $, un pour un, qu'on parle. Parce que s'il n'y a pas de... Si on ne les aide pas, si on ne leur donne pas une justification d'une responsabilité partagée, les gens n'y croient pas. Pourquoi c'est la responsabilité de l'entreprise?
Le Président (M. Jutras): Est-ce que vous voulez intervenir?
M. Legault (Yves): Oui. Vous devez savoir que, dans les 75 entreprises qui participent à la mutuelle dans l'industrie touristique, la très, très grande majorité sont de petites entreprises qui n'ont pas de budget important à mutualiser, d'où l'intérêt de trouver un autre moteur pour les amener à investir, c'est-à-dire d'avoir une contrepartie quelconque qui puisse être motivante, qui puisse être un levier pour actualiser cette mutualisation.
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(14 h 30)
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Mme Girard (Adèle): Et peut-être aussi, pour compléter avec la mutualisation, dans le ski, c'est les gros acteurs qui ont mutualisé. Mais savez-vous pourquoi ils ont mutualisé? Parce que, s'il y a un accident dans le ski, tout le monde est pénalisé au niveau de la réputation. Ça fait que les gros ont accepté ensemble de mettre de l'argent pour rendre la formation accessible aux petits, qu'eux autres paient à la pièce.
Vous voyez comment il faut combiner les deux? Il faut absolument qu'il y ait une combinaison. La présence d'une mutuelle permet que les groupes peuvent assurer un leadership et que les petits peuvent profiter de ce que les gros ont mis en place. Ça fait qu'il faut arrêter de penser: les petits, les gros; c'est chaque sous-secteur.
Nous autres, le fait d'avoir huit sous-secteurs nous oblige à penser totalement différent. Les gens de l'hébergement, de la restauration, du ski, du golf, des agences de voyages, c'est des mentalités différentes et qui ont des besoins différents, et c'est pour ça qu'on insiste toujours pour la flexibilité des moyens. L'important, c'est les résultats.
On met trop d'accent à travailler sur les moyens plutôt que... C'est quoi, l'objectif visé? Une approche client, qu'est-ce qu'on veut que le client... c'est quoi qu'on veut retirer pour ça? Comment vous allez être capables de convaincre un entrepreneur qu'il est responsable de la formation, par exemple, de son employé en cuisine qui va travailler trois mois pour lui? En tout cas, si quelqu'un est capable de m'expliquer, moi, là, qui est une excellente vendeuse, comment je peux faire pour faire ça, je vous le dis, c'est impossible.
Donc, il faut que vous nous outilliez, que vous donniez des moyens, de façon à ce qu'on confirme que c'est une responsabilité tripartite. L'employé, il a une responsabilité à se former, l'employeur, il a une responsabilité à le supporter, puis l'État a à reconnaître que les gens qui ne sont pas en continuum de formation, ce n'est pas une raison pour ne pas supporter leur formation.
Le Président (M. Jutras): 30 secondes. Peut-être, Mme Girard, peut-être vos réponses plus brèves pour permettre plus d'échange.
Mme Girard (Adèle): Oui.
Mme Gaudet: Moi, j'aimerais... Ce matin, on a reçu un groupe, SOFEDUC, qui nous a parlé de rehausser les critères au niveau des formateurs. Alors, tout à l'heure, vous nous avez parlé rapidement, là, de la formation en entreprise, la formation sur le terrain, de formateurs qui viennent de l'entreprise, alors j'aimerais vous entendre par rapport aux qualifications des formateurs et vos liens avec l'école d'hôtellerie et de tourisme du Québec.
Le Président (M. Jutras): Rapidement, madame, parce que le temps est épuisé, là.
Mme Girard (Adèle): Oui, j'y vais rapidement. Je pense que c'est des mandats complémentaires encore une fois. Il y a certaines formations en entreprise. Je vais donner un exemple rapide. Est-ce que vous préférez avoir un guide de chasse et de pêche formé sur le terrain ou formé dans une école? Vous avez votre réponse.
Par contre, il y a certaines activités, certaines compétences où le développement s'apprend mieux à l'école. Moi, je rêve du temps où on va arrêter d'opposer l'école, les entreprises, et dire qu'ils ont des mandats complémentaires. Des formateurs en entreprise dans certaines fonctions techniques, je préfère faire former des femmes de chambre par des formateurs en entreprise, et je préfère faire former des vendeurs par des gens du milieu scolaire, parce que le vendeur a ses compétences de base, parce qu'on va le reconnaître sur ses attitudes, et l'école va lui donner une forme de technique qui va éviter qu'ils tombent tous dans le même panneau.
Le Président (M. Jutras): Alors, maintenant, du côté de l'opposition, M. le député de Gouin.
M. Girard: Merci, M. le Président. J'aimerais vous remercier pour votre présentation et pour votre mémoire. Vous nous avez indiqué, dans votre présentation et également dans le mémoire qui nous a été transmis aux parlementaires, votre préoccupation à l'égard de la loi, notamment au moment où le gouvernement a procédé à un changement de la loi du 1 % qui avait pour effet de soustraire de l'application de la loi les entreprises dont la masse salariale était de moins de 1 million, et vous nous indiquez, dans votre mémoire, qu'à ce moment-là votre conseil d'administration a réclamé une vaste consultation.
Moi, ce que j'aimerais savoir plus précisément, c'est, depuis 2003, à partir du moment où le gouvernement a modifié la loi du 1 %, est-ce que le gouvernement est venu en appui pour vous proposer des stratégies nouvelles, des moyens financiers supplémentaires pour vous permettre de faire face à cette nouvelle réalité sur le plan législatif, entre 2003 et 2005?
Mme Girard (Adèle): C'est une belle question piège. Simplement vous dire... Par contre, ce qui m'apparaît important de dire, c'est que les entreprises de l'industrie touristique étaient très contentes de l'abolition de la loi, parce qu'elles trouvaient que ça ne rencontrait pas... je pense que les gens ne s'objectaient pas à la loi mais s'objectaient au contrôle qui ne rencontrait pas les objectifs. Donc, a priori, les...
Par contre, effectivement, qu'est-ce qui a été mis entre, je dirais que toute la lignée du développement, le support au développement des normes de compétence en entreprise et la reconnaissance de cette façon de faire qui est venue via la Commission des partenaires du marché du travail, je dirais, s'est avérée la piste la plus porteuse des deux dernières années et qui, nous espérons, nous permet de mieux implanter ce que, nous autres, on avait avec les programmes de reconnaissance des compétences qu'on travaille avec nos collègues canadiens. Mais je vous dirais qu'effectivement c'est... Mais on a... Si vous nous demandez si on a l'argent pour faire tous, tous les projets qu'on a sur nos bureaux, je vous répondrai que non.
M. Girard: Et qu'est-ce que vous attendez donc au sortir de cette commission parlementaire? Est-ce que vous souhaitez qu'il y ait des modifications législatives ou qu'on annonce des mesures supplémentaires pour vous permettre de remplir vos objectifs en termes de formation? Je pense notamment qu'il y a une baisse au niveau des fonds qui sont disponibles dans le Fonds national de la main-d'oeuvre, que ça... nécessairement c'est un outil qui est intéressant pour vous. Est-ce que vous souhaitez que le gouvernement annonce des mesures supplémentaires pour vous aider puis pour stimuler la formation dans votre industrie?
M. Legault (Yves): La réponse est oui, on souhaite qu'il y ait des mesures supplémentaires. Je pense que le mémoire en fait une bonne présentation. J'insisterais sur peut-être quelques mots, là, qu'on retrouve et qui résument dans le fond bien notre position. Ce qu'on souhaite, c'est des ressources, mais qui vont surtout permettre aux gens de s'investir dans ce domaine-là de façon volontaire, avec des modalités simples d'application. Et, s'il y a des retouches qui sont faites à la loi, on souhaiterait qu'elles soient dans ce sens-là, travailler sur la flexibilité et sur l'accessibilité pour toutes les petites entreprises à des ressources qui leur permettraient de devenir plus performantes dans ce domaine. Dans la refonte de la loi, c'est l'axe, là, que nous souhaitons, et les propositions que nous vous faisons aujourd'hui vont dans cette direction-là.
M. Girard: Vous nous proposez, à la page 8, là, de votre mémoire, un nouveau mécanisme d'encouragement auquel vous venez de faire référence dans votre réponse, puis vous faites allusion également d'explorer l'idée de mettre en place l'émission d'un chèque-formation, et vous indiquez que c'est en place dans certains pays européens, notamment en Belgique. J'aurais aimé vous entendre là-dessus, sur cette expérience-là, si, à votre avis, cela est... on pourrait l'implanter au Québec, si, à votre avis, c'est une expérience qui serait intéressante, qui pourrait donner des résultats.
Mme Girard (Adèle): On pense que c'est une expérience qui... en tout cas qui mérite d'être analysée. C'est toujours embêtant de prendre des expériences de d'autres pays avec des cultures et des pratiques différentes puis de penser qu'on prend ça puis ça marche de façon parfaite au Québec. Mais il y a sûrement une réflexion à y avoir, parce que l'avantage, c'est qu'elle permet de répondre aux questions qui ont été posées, ça permet de supporter des initiatives individuelles, ça permet de supporter des initiatives d'entreprises puis ça peut permettre de supporter, dans certaines régions, des initiatives de certains employés à travers plusieurs entreprises. Donc, il y a une réflexion à ce niveau-là que ça répond plus à une approche uniquement centrée sur la responsabilité de l'entreprise. C'est l'outil qui nous permet de répondre aux trois objectifs: employeur, employé puis gouvernement.
M. Legault (Yves): Puis j'ajouterais peut-être qu'il y a des moyens imaginatifs à trouver pour gérer ça. On en discutait hier, et il nous est venue l'idée de comparer un peu le système. Il y a des points Air Miles, par exemple, qui sont ramassés sur des petites cartes, il y a des points Esso, il y a des points La Baie, il y a des... Donc, il y a des façons, avec les systèmes que nous avons, informatiques, aujourd'hui, de, par une injection quelconque, d'avoir un retour qui soit cumulé en quelque part et utilisable dans un autre réseau ou dans une autre occasion pour pouvoir faire fructifier, là, l'investissement de départ. C'est l'entreprise commerciale, les grands magasins ont compris ça pour fidéliser leur clientèle, c'est peut-être une ressource intéressante à regarder pour fidéliser la formation dans nos entreprises.
M. Girard: Mais, de votre point de vue, l'expérience en Belgique, est-ce qu'elle a donné des résultats intéressants? C'est pour ça que vous souhaitez l'appliquer au Québec?
M. Legault (Yves): On n'a pas fait de recherche exhaustive sur cette expérience-là. On sait que ça se fait, on sait que ça se fait dans les pays scandinaves aussi. Ce qu'on souhaiterait, c'est qu'il y ait un examen approfondi qui soit fait d'un secteur ou d'une idée comme celle-là de façon à ce qu'on puisse juger de son importation. Mais on sait qu'elle existe, on sait qu'elle a été utilisée et qu'elle l'est encore, reste à voir comment, nous, au Québec, on est capables d'utiliser cette idée-là et de la rendre active dans nos entreprises.
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(14 h 40)
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M. Girard: Vous faites référence aussi, dans votre mémoire, là, je veux revenir sur la question des mutuelles de formation. Si ma mémoire est bonne, dans le document, vous indiquez qu'il y a environ 75 entreprises, je pense, qui ont participé à la mutuelle de formation. Vous nous indiquez que... Bon. Je comprends des propos que vous avez tenus tout à l'heure en commission qu'il y a un certain nombre de petites entreprises avec lesquelles vous avez peut-être un petit peu de difficultés, les inciter à, si vous voulez, à se joindre au projet de mutuelles de formation, compte tenu des changements, des changements à la loi, puis vous nous proposez que le gouvernement s'engage à soutenir le démarrage de ces mutuelles-là sur une période de cinq ans.
Pourquoi vous nous proposez que le gouvernement donne un soutien sur une période de cinq ans? Puis votre point de vue, si on ne va pas de l'avant avec des mesures structurantes ou un appui financier, quel impact ça va avoir sur la survie des mutuelles de formation?
Mme Girard (Adèle): Pourquoi cinq ans? Moi, je vous disais que, quand j'ai été embauchée au CQRHT, j'ai dit en entrevue que je voulais fermer le CQRHT dans 10 ans.
Une voix: On l'a engagée pareil.
Mme Girard (Adèle): Parce que, moi, j'étais convaincue parce que ce que j'entendais des gens, c'était une problématique d'outils. Mais pas de problème, on va donner des outils, on va les créer, puis, quand les gens vont les avoir, bien on n'aura plus besoin de travailler, puis ils vont s'en servir. Mais je peux juste vous dire, vous regardez sur le site Web du CQRHT, des outils, en voulez-vous? Il y en a, il y en a en masse. On s'adresse à des changements de mentalité. On parle de changements systémiques, et on ne peut pas faire des changements systémiques en trois ans, on est... Il faut faire de la sensibilisation, de l'expérimentation, de la réalisation, puis de la performance, et on demande toujours de faire ça dans trois ans: c'est impossible. Et arrêtons de structurer les projets par trois ans. On peut-u prendre une idée puis la garder pendant 10 ans, puis tenir les deux mains sur le volant, puis s'assurer qu'on sait où ce qu'on s'en va? Et ça, c'est important parce qu'on fait du changement de mentalité, on n'est pas dans le changement cosmétique.
On demande aux entrepreneurs de devenir gestionnaires des changements, et que les ressources humaines soient une ressource de l'organisation. La problématique est moins dans les petites, petites; quand tu as cinq employés, tout entrepreneur comprend que ces cinq personnes-là, c'est les personnes clés. Mais, quand on est dans des secteurs où il y a de la saisonnalité, un fort taux de rotation, ça nécessite des approches totalement différentes. Et c'est pour ça que, quand, ce matin, on parlait des entreprises performantes en formation, on donnait des exemples où il y a des professionnels de ressources humaines. Le secteur touristique, c'est le secteur où il y a le moins de professionnels de ressources humaines dans tous les secteurs industriels confondus. C'est important de travailler avec les gens où ils sont et pas où ce qu'on voudrait qu'ils soient.
Donc, c'est pour ça qu'on parle de cinq ans et peut-être que... mais, au moins, on s'arrête, on fait le bilan, puis on regarde, puis on ajuste. Mais, des fois, on fait des projets de deux ans, puis on évalue pendant six mois, puis après on recommence, ça fait qu'on recommence à zéro.
M. Girard: Je veux revenir aussi sur une revendication particulière à laquelle vous faites référence dans votre mémoire. Vous nous indiquez que vous avez implanté, depuis quelques années, un programme de reconnaissance professionnelle, et vous nous indiquez que, parce que ces normes-là n'ont pas été développées dans le contexte spécifique, là, du cadre général de développement et de reconnaissance des compétences, vous ne pouvez pas avoir accès au fonds national. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi et un peu quels sont les impacts, puis qu'est-ce que vous souhaiteriez qui puisse changer?
Mme Girard (Adèle): On a accès au Fonds national. La différence, c'est qu'on n'est jamais dans le bon programme, dans le sens que ce que c'est ce que j'expliquais par les petites cases et l'absence de flexibilité. Le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme travaille avec le Conseil canadien des ressources humaines en tourisme; on a déjà 40 normes de compétence, on en a 26 qui font l'objet d'un programme de reconnaissance professionnelle. On est rendu à l'étape de l'implantation, d'aller sur le terrain, de soutenir et de supporter des entrepreneurs dans les choix de la Commission des partenaires, et on respecte ces choix-là, mais on est à l'étape de développer des normes. Et nous, là, on n'en a pas de norme à développer, on ne veut pas gaspiller notre argent en en développant des nouvelles. Ce qu'on veut, c'est du soutien pour implanter puis travailler avec les entreprises, et ça, ça prend du temps, et ça prend de l'argent, ça ne se fait pas par l'opération du Saint-Esprit.
Donc, ce qu'on dit, c'est qu'il faut être capable que les enveloppes qui sont réservées à l'intervention sectorielle soient plus flexibles de permettre que c'est le secteur qui détermine ses priorités, puis qu'on puisse faire des choix. Dans le fond, c'est les éléments... On ne dit pas qu'on ne serait pas accessible à développer une norme; on a développé la norme moniteur avec les argents du fonds national, puis ça va très bien, mais c'est une norme qui n'existait pas. Donc, maintenant la norme de moniteur est rendue une norme canadienne, on l'a fait transférer au niveau canadien.
Le Président (M. Jutras): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Alors, vous m'avez intrigué tout à l'heure quand vous avez parlé du ministère du Revenu ou le ministère des dépenses, là, vous allez peut-être me l'expliquer davantage, probablement par rapport à la papeterie. Et parlez-moi donc un petit peu plus à fond, là, des entreprises apprenantes, là, au niveau des accréditations volontaires, là. Vous parlez d'un genre de ISO-Formation, là. J'aimerais vous entendre plus là-dessus.
Mme Girard (Adèle): Ce que, nous autres, on dit, puis ça, c'est les gens des grandes entreprises ? là, on est dans les grandes entreprises ? nous disent que, même si on est en grande entreprise, il y a quand même un certain nombre d'entreprises récréotouristiques qui sont des grandes entreprises, puis ils trouvent que l'énergie ne devrait pas être mise ? et là-dessus je pourrais vous dire ce qui a été dit dans le mémoire de la Fédération... non, le MEQ, les manufacturiers exportateurs du Québec, c'est exactement la même position. Mettre en place un processus avec un ISO, avec un contrôle externe pour faire en sorte que les entreprises puissent être certifiées comme étant des entreprises qui s'occupent... et une fois qu'on a fait ça puis qu'on rencontre un processus, c'est ce les entreprises trouveraient beaucoup plus simple que de faire des rapports où on met uniquement du quantitatif puis on n'a pas de préoccupations... On a mis en place cette formation-là pour résoudre quel problème? Dans notre industrie de la formation, on parle souvent de répondre à des besoins. Avec des entrepreneurs, les entrepreneurs n'ont pas de besoins de formation. Ils ont des problèmes à régler. Quel problème on veut régler? On a mis en place telle mesure, tel programme, ça a-tu réglé le problème qu'on voulait? C'est ça, une approche qui est plus centrée sur des résultats avec des objectifs.
Le Président (M. Jutras): Ça va. Alors, merci madame, merci monsieur.
M. Legault (Yves): ...vous remercier du temps que vous prenez pour nous écouter, nous et les autres. Vous faites un travail que je ne connaissais pas, c'est ma première présence à une commission parlementaire. Alors, j'en suis très heureux et j'en profite pour vous remercier pour ce bout-là.
Le Président (M. Jutras): Alors, bon retour chez vous. Et je vais demander au Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec, les représentants de bien vouloir s'avancer et de prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Alors, vous êtes M. Dubois. Je souhaite donc la bienvenue au Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec, qui est représenté par M. Benoît Dubois. Alors, je rappelle les règles: 15 minutes pour la présentation de votre mémoire, 15 minutes d'échange avec le parti ministériel et 15 minutes d'échange avec l'opposition. Alors, je vous cède, sans plus tarder, la parole pour la présentation de votre mémoire.
Regroupement pour la formation
en audiovisuel du Québec (RFAVQ)
M. Dubois (Benoît): Merci, M. le Président, distingués membres de la commission. Merci d'avoir invité le RFAVQ à cette commission. Alors, au risque de paraître redondant pour ceux et celles qui ont déjà lu le mémoire, je vais quand même le relire, mais tout en sautant parfois des petits bouts puis en en complétant parfois, puis je vais respecter mes 15 minutes.
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(14 h 50)
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Alors, le Regroupement pour la formation en audiovisuel du Québec a été mis sur pied conjointement, en décembre 2002, par l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec, l'APFTQ pour les intimes, et le syndicat de la télévision, qui est l'Association des professionnels de la vidéo du Québec, ainsi que le Syndicat des techniciens et techniciennes du cinéma et de la vidéo du Québec. Ces deux derniers syndicats ont fusionné en octobre dernier pour devenir l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son, donc l'AQTIS.
Bon. Je saute le mandat du RFAVQ. Vous aurez compris qu'on est une mutuelle de formation. Donc, notre mandat, c'est principalement de recueillir les contributions des employeurs assujettis, dresser des plans, concerter, coordonner et financer l'offre de formation continue à l'intention des travailleurs du secteur de la production indépendante. Il faut spécifier que c'est la production indépendante et non pas la production qui est faite chez les télédiffuseurs.
En mars 2003, le regroupement a signé un protocole d'entente avec Emploi-Québec par lequel il se voyait accorder une subvention de 272 850 $ du FNFMO pour trois ans, dans le cadre d'un programme de projets pilotes devant soutenir la mise sur pied de mutuelles de formation.
Le RFAVQ a cependant débuté ses activités régulières à la mi-août. C'est là qu'ils m'ont engagé, août 2003, donc. Il faut signaler ici la contribution majeure du CQRHC, qui est le Conseil québécois des ressources humaines en culture, sans lequel je ne serais pas là pour vous parler. La mututelle a également pu bénéficier du soutien d'une firme-conseil indépendante, soit DBSF, pour l'élaboration de ses grandes orientations stratégiques.
Bon. Il faut rappeler que le Syndicat des techniciens du cinéma, le STCVQ, à l'époque, était lui-même organisme collecteur. Donc, dès 1995, 1996, était organisme collecteur, et que le STCVQ a mis sur pied un programme de formation qui est le programme de perfectionnement professionnel, le PPP, à ne pas confondre avec le «Puerto Panama Plan».
Parce que, oui, c'est vrai. Il faut dire que, dans notre secteur, il y a les producteurs étrangers qui automatiquement envoyaient leur argent soit au fonds national... Mais, dans ce cas-ci, dans l'organisme collecteur qu'avait mis sur pied le STCVQ. Bon. Là, il faut que je reste au texte, sinon je vais en oublier... Contributions qui iront désormais s'ajouter à celles que feront les producteurs québécois au nouvel organisme collecteur, lequel est désormais paritaire et juridiquement autonome. Ça, c'est important, parce que l'organisme collecteur du STCVQ n'avait pas, à son conseil d'administration, des représentants des employeurs et n'était pas non plus autonome juridiquement du syndicat. Donc, c'était un des prérequis, là, pour que les producteurs adhèrent à la mutuelle, c'est qu'elle se détache du syndicat.
Donc, afin d'en arriver à un premier plan de formation, on a procédé à des études de besoins. Bon, je vous épargne les détails. On a aussi fait des «focus groups» et, dans le cadre de ces «focus groups», en plus des besoins de formation, il y a des métiers stratégiques qui ont été, comment dire, ciblés ou identifiés comme étant prioritaires. On a parlé, par exemple, des directeurs de production ou des directeurs de postproduction, qui est un secteur qui est train de prendre de plus en plus d'expansion.
Vous avez juste à regarder les émissions à la télé, vous allez voir qu'il y a beaucoup d'effets. Alors, la postproduction... Alors, il y a des métiers stratégiques comme ça qui ont été identifiés et qui méritent un soutien particulier de la mutuelle. Donc, puisque la mutuelle n'est pas elle-même un organisme formateur, des appels d'offres ont été lancés auprès de centres de formation présélectionnés au nombre de quatre.
Suite au dépôt des offres, un comité s'est penché... Bon. Il y a eu des grilles d'analyse, systèmes de pondération, etc. Enfin, il y a eu trois organismes qui ont été retenus pour développer l'offre de formation. Donc, on s'entend, la mutuelle n'organise pas elle-même de formation. Moi, je suis tout seul dans mon bureau. J'ai une adjointe qui s'occupe de la comptabilité une journée par semaine. Donc, on délègue des activités auprès d'organismes qui sont dûment reconnus par le milieu. Donc, je vais les nommer.
Le PPP, je l'ai nommé tantôt, du STCVQ, qui est maintenant l'AQTIS; l'INIS, qui est l'Institut national de l'image et du son, qui est installé juste à côté de la Cinémathèque à Montréal, donc qui est aussi une créature du milieu, qui a été mis sur pied par le milieu au début des années quatre-vingt-dix et qui fait de la formation postinitiale ou même postuniversitaire, là. Ce sont des gens qui travaillent dans le milieu qui veulent se recycler, donc qui ont des programmes courts, là, de quatre mois. Et, depuis peu, ils développent un volet de perfectionnement, de formation continue. Donc, c'est dans ce cadre-là que les activités du regroupement se donnent.
Il y aussi Parlimage, qui est un centre de formation privé qui existe depuis 1978, donc qui a développé une expertise assez impressionnante. C'est ainsi que près d'une soixantaine de formations ont pu être développées et offertes cette année-là, destinées à une clientèle potentielle de plus de 5 000 travailleurs. Donc, l'AQTIS, qui est le syndicat des techniciens, maintenant a 3 500 membres. L'APFTQ compte près de 140 compagnies, des maisons de production qui sont membres mais qui emploient... Il n'y a pas un décompte réel qui a été fait des membres, mais ce qu'il faut retenir, c'est que souvent les maisons de production ont peut-être quatre, cinq, six permanents et c'est quand ils s'embarquent dans une production que, là, le «payroll», comme on dit, explose littéralement.
Donc, je fais référence ici à une mobilité de la main-d'oeuvre. Je pense que je vais y revenir plus tard, mais il faudra qu'on s'en reparle. Donc, le PPP est un service de formation continue qui a été mis sur pied par le syndicat, je l'ai dit. Le RFAVQ a travaillé durant le projet pilote à la reconnaissance officielle du PPP à titre d'organisme formateur pouvant recevoir des mandats du RFAVQ. La direction du FNFMO lui a accordé d'abord une reconnaissance... Bon, ça, c'est des détails.
De plus, dans le respect de l'entente signée entre les membres de la mutuelle lors de sa mise sur pied par laquelle on s'engageait à maintenir les façons de faire développées au syndicat... Donc, ce que ça dit, ce paragraphe, c'est que, quand les producteurs et le syndicat se sont mis ensemble, ils ont signé une petite lettre d'entente en novembre 2002, par laquelle on s'engageait à respecter l'historique de pratique qui avait été développée au syndicat depuis 1995. On s'était dit: Bon, on va réserver une place spéciale pour le PPP, tout en allant chercher un peu de compétition à l'externe pour des formations qui n'existaient pas, là, au sein du PPP. Donc, le PPP il est comme spécial, faut retenir ça.
O.K. Donc, avant même qu'on commence nos activités, moi, je suis arrivé, j'avais déjà de l'argent dans le compte qui m'attendait, ça, c'était bien agréable. Ce qui indique donc que les producteurs, ce sont eux-mêmes qui ont décidé de mutualiser, parce qu'ils se sont rendu compte, à un moment donné, que beaucoup, pour ne pas dire la majorité, envoyaient leur 1 % non dépensé directement au FNFMO. Donc, là, ils se sont dit: Bien là, organisons-nous ? parce que, comme je disais tantôt, comme c'est des petites boîtes qui souvent ont quatre, cinq... là, j'exclus Pixcom puis Zone3, là, mais en général ce sont des petites boîtes qui ont des petites structures. Ils n'ont pas d'historique de développement de ressources humaines ou de perfectionnement professionnel ? ils se sont dit: Bien là...
D'autant plus que c'est une industrie qui est grande consommatrice de, comment dire, de formation de par les grands bouleversements technologiques, là, qui ont un impact non seulement sur les fonctions ou les tâches, mais sur la structure organisationnelle, le «work flow»; tout est en train de changer, il y a des nouveaux métiers qui apparaissent. Et comme ces employeurs-là font appel à un bassin de travailleurs qui bougent, qui se déplacent d'une production à l'autre, donc il fallait absolument que le milieu s'organise, donc d'où l'idée de la mutuelle.
Où suis-je rendu? Oui, donc, j'avais de l'argent dans le compte qui m'attendait, 67 000 en 2003; 447 000... pour 2003; en 2004, j'ai eu une petite chute, on est descendus à 275 000 parce que, comme vous le savez, il y a eu comme une grosse baisse des tournages étrangers. Bon an mal an, les Américains nous laissaient un beau cadeau d'à peu près un quart de million, donc le ratio, là, c'est à peu près 250 000 $ US pour les producteurs étrangers. Puis les producteurs québécois ont commencé à cotiser, là, ça varie entre 100 et 150 000. Cette année, j'ai déjà 150 000 $ en contributions confirmées, on n'est pas rendus encore au 28 février, ça fait que je pense que je vais améliorer mon score cette année. Donc, pour un total de 800 000 $ qu'on a réunis durant le projet pilote, là, sur les mutuelles.
Les contributions sont complètement mutualisées, il n'y a pas de comptes clients. La confiance règne complètement vu la grande mobilité des... donc, les producteurs ne sont pas jaloux, là, de leurs employés, ils savent que ça passe, que tout ça, c'est une grande famille, une grande commune, si je peux dire.
O.K., ça, les producteurs étrangers, j'en ai parlé. O.K. Enfin, puis là, je devrais aborder peut-être les recommandations, je vais sauter tout de suite. Bien, je dois dire aussi que RFAVQ est présent, là, aux côtés du CQRHC et l'AQTIS dans des programmes d'apprentissage en milieu de travail. On a un PAMT éclairagiste, et on est aussi sur le comité pour le programme d'évaluation et de reconnaissance des compétences des personnes en emploi. Donc, le fait que la mutuelle est paritaire, là, je suis toujours présent à ces réunions-là.
Et je suis en train de développer un gros projet avec une initiative fédérale qui est l'ICMT, c'est un 125 millions sur trois ans, là, un gros projet qui est à la fois du «learning», une vigie technologique, des communautés d'apprentissage par métier, donc un concept, là, assez intéressant. Sauf que, depuis l'avènement des conservateurs, ce programme-là est comme mis sur la glace, mais disons qu'on avait été ciblés comme étant, comment dire, en peloton de tête.
Commentaires du RFAVQ sur le... là, je fais lire dans le texte pour que ça aille un petit peu plus vite. Les membres du RFAVQ ? donc, je suis à la page 3, premier paragraphe en bas; les membres du RFAVQ ? soit l'APFTQ et l'AQTIS, considèrent que la loi du 1 % ? on va l'appeler comme ça ? doit être maintenue puisqu'elle répond à un besoin grandissant de formation. En effet, on considère que les bouleversements technologiques que l'on connaît aujourd'hui ont un impact majeur ? bon, ça, je l'ai dit.
Ces changements se font sentir dans chacun des métiers, par conséquent bouleversent l'organisation du travail. Comme il s'agit de s'adapter à un environnement en continuel changement, ce sont évidemment les travailleurs présentement en emploi qui doivent s'ajuster. On ne parle pas de formation initiale, là, c'est des gens qui sont là depuis 20, 30 ans, là, qui doivent dealer avec des nouvelles machines, d'où la nécessité d'un instrument comme la loi du 1 %.
O.K. Bon, la mobilité des travailleurs, ça, j'en ai parlé. Sur le plan opérationnel, le RFAVQ recommande que soit tout au moins maintenu le niveau de 10 % de frais de gestion, excluant la préparation et la mise en oeuvre des plans de formation. On pourrait aller jusqu'à 15 %. Et là on tient à souligner aussi l'importante ? je l'ai déjà fait, mais je le redis encore; l'importante ? contribution du comité sectoriel, le CQRHC, qui est vraiment un incontournable pour nous.
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(15 heures)
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2. Les taxes. Depuis que Revenu Québec a décidé que les contributions à des mutuelles sont considérées comme étant des avances sur achat, nous, ça nous cause un problème, notamment avec nos partenaires américains, là, qui doivent prévoir de payer les taxes. Puis en tout cas c'est bien compliqué pour moi parce qu'il faut que j'aille chercher les permissions à Los Angeles. Puis là: Comment ça c'est taxable puis au fonds national ce n'est pas taxable? Bien là, envoyez ça au fonds national? Donc, pour eux autres, c'est vraiment pas clair puis, pour moi, ça me cause des problèmes parce que, là, je dois retourner en arrière. En tout cas, c'est vraiment... Et ça ne donne rien au gouvernement, le net-net, c'est zéro. Donc, nous on trouve que c'est une interprétation qui ne tien pas, d'autant plus que, comme il s'agit d'un pool de travailleurs, on ne peut pas dire que l'employeur qui contribue 10 000 $ en a vraiment pour 10 000 $. Donc, de faire vraiment, comment dire, l'adéquation entre ce qu'il contribue et ce qu'il reçoit en services, ça ne tient pas debout, à nos yeux.
Reconnaissance des pairs comme formateurs pouvant recevoir des mandats de la mutuelle. Si j'avais à faire une seule recommandation avant de mourir, ce serait celle-là. Nous, dans notre milieu, souvent il y a une personne au Québec qui détient une expertise parce qu'elle est allée la chercher à Los Angeles, et cette personne-là ne peut pas donner de formation parce qu'elle n'a pas fait les 135 heures de pédagogie, là, ou 90 heures selon la formule, là. C'est sûr que ces gens-là ont souvent plus que trois... pas souvent mais ont tous plus que trois ans d'expérience. C'est des sommités. Moi, j'ai organisé une formation en coproduction internationale, le monsieur, ça faisait 35 ans qu'il faisait ça, puis il était capable de dire: Au Liban, c'est comme ça que ça marche; au Maroc, c'est comme ça. Il n'y a pas personne d'autre qui pouvait donner cette formation-là. Or, moi, il a fallu que je fasse des pieds et des mains pour pouvoir l'engager tout en étant conforme. Ça, pour nous, c'est un problème majeur. et je crois que le CQRHC a adopté la même position. O.K.
La clientèle non assujettie et les travailleurs atypiques. Dans notre cas, les travailleurs sont souvent en compagnie, ils sont incorporés; donc, leurs cachets ne sont pas assujettis au 1 %, mais, nous, on les dessert quand même. Pour l'instant, tant qu'il y a de l'argent, ça va, mais, la minute où il va y en avoir moins, peut-être que les gens qui reçoivent des T4 vont grincer des dents un petit peu en voyant que des gens en compagnie se voient offrir l'accès à des formations.
La formation, les formateurs étrangers. Donc, c'est important pour nous que l'accès la formation à l'étranger ? oui, O.K., j'accélère ? soit garantie parce que, chez nous, comme je le disais tantôt, des fois, l'expertise, elle existe à l'étranger seulement.
Ventilation des contributions versées au fonds national par secteur d'activité. Moi, je trouve ça dommage que je perds beaucoup de temps à courir après mon argent, alors que je pourrais prendre ce temps-là puis vraiment développer des activités de formation, sensibiliser les producteurs. Donc, on a une recommandation qui est un peu peut-être utopiste, mais, si ça pouvait être appliqué, ça serait vraiment génial. Ce serait que, si, dans un secteur d'activité, il y a une mutuelle, bien que toutes les contributions qui viennent de ce secteur-là versées au fonds national soient redirigées automatiquement à la mutuelle qui est dans ce secteur-là. Pour nous, là, ça nous libérerait d'une grosse tâche de collecte d'argent, puis on pourrait vraiment se concentrer sur notre job principale, qui est de, comment dire, faire en sorte que le milieu soit plus performant.
Voilà, ça, c'est pour ma présentation. Je remercie beaucoup les membres de m'avoir invité et je suis disponible à vos questions.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, merci, M. Dubois. Et je cède la parole à Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Merci, M. le Président. M. Dubois, bienvenue et merci pour votre présentation. Veuillez excusez la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui, pour des raisons incontrôlables, ne peut être présente. Elle aurait beaucoup apprécié vous entendre, sûrement qu'on va lui transmettre de façon rigoureuse et précise vos commentaires, vos recommandations.
D'entrée de jeu, j'aimerais revenir à votre seule recommandation, si vous n'aviez qu'une seule recommandation à faire, qui soit d'assouplir les conditions d'agrément pour les formateurs terrain. Vous nous avez parlé, vous nous avez donné un cas très précis. Cependant, ce matin, on a entendu un groupe, la SOFEDUC, qui nous demandait de rehausser les critères au niveau de la pédagogie de façon à s'assurer que les compétences du formateur, bien, soient à ce point importantes au niveau de la pédagogie, là, pour s'assurer du transfert de compétences entre le formateur et les formés ? si vous me prêtez cette expression-là.
Alors, qu'est-ce que vous répondez à cet argument et comment de façon plus précise, là, pouvons-nous actualiser votre proposition et s'assurer que vos formateurs sont de très grande qualité au niveau pédagogique?
M. Dubois (Benoît): Moi, je n'ai vraiment pas d'inquiétude à défendre la compétence de nos formateurs terrain à titre de pédagogues. Avant de venir ici, j'ai demandé à une de mes institutions partenaires, là, l'INIS, de me finaliser ses rapports d'évaluation, parce qu'à chaque formation le participant et la participante remplissent une... et le taux de satisfaction à l'égard des formateurs s'élevait à 95,8 % de satisfaction, autant au plan pédagogique que maîtrise du sujet, que capacité d'écoute ou d'adapter son activité au niveau des participants. Donc, je n'ai vraiment pas d'inquiétude à ce chapitre.
Bon, quitte à heurter quelques sensibilités, c'est sûr que, bon, il y a des gens dont le gagne-pain, c'est d'offrir de la formation, et qui sont déjà comme reconnus, et qui sont dans les ligues majeures, ils vont prôner pour leur propre... ils vont défendre leur propre chasse gardée, si je peux utiliser l'expression. Sauf que, nous, on n'est pas contre de travailler avec les institutions scolaires ou académiques, là ? je le fais, moi, avec l'INIS ? sauf que, comme je vous dis, pour nous, là, moi, je vais défendre corps et âme, là, l'importance de faire appel aux experts terrains parce que ce sont eux qui sont vraiment... quitte à avoir de la misère à les bouquer parce que, d'une semaine à l'autre, le téléphone peut sonner, ils peuvent avoir un travail, mais, moi, je tiens à faire appel aux meilleurs parce que ce sont eux autres qui soit qu'ils ont... comme je disais, ça fait 30 ans qu'ils sont dans le métier. Ce n'est pas parce que tu travailles dans une université... Quand ça fait 10 ans que tu travailles dans une université, tu n'es pas nécessairement ? avec tout le respect que je peux avoir pour eux autres, là ? à l'avant-garde ou à la fine pointe des récents développements.
Mme Gaudet: Merci. Vous rejoignez à ce sujet, je crois, une recommandation qui nous a été faite tout à l'heure par le Conseil québécois des ressources humaines en tourisme.
Ma deuxième question m'amène à vous demander de préciser quels sont vos liens entre le ministère de l'Éducation et les organismes, là, auxquels vous demandez de donner de la formation à vos entreprises. Et au niveau de la certification et de la reconnaissance, là, de la formation, quel parallèle ou quelle passerelle pouvez-vous faire avec ce qui est offert par le ministère de l'Éducation?
M. Dubois (Benoît): Bonne question. On n'a pas de relation formelle ou officielle avec le ministère de l'Éducation, sauf que je suis conscient qu'elle a beaucoup de ressources, puis je suis conscient, bon, à travers quelques comités sur lesquels j'ai eu le plaisir et l'honneur de siéger, il y avait des gens des cégeps, puis j'ai réalisé qu'au Québec effectivement il y a beaucoup de ressources, là, pas qui dorment, mais en tout cas qui sont redondantes aux cégeps, mais il n'y a pas vraiment de lien.
Mais si je regarde, par exemple, à l'étranger, au Royaume-Uni, il y a un excellent modèle qui s'appelle «skill set», où c'est que les milieux institutionnels sont mis à contribution. Il ne faut pas oublier qu'on parle de perfectionnement et non pas de formation initiale. Le RFAVQ s'occupe de perfectionnement, quoique, dans notre milieu, ça peut être problématique parce qu'il y a certains métiers où il n'y a pas de formation initiale, donc la définition est un petit peu, pas boiteuse, là, mais il n'y a pas d'école pour former les directeurs de production, alors que c'est le métier qui est, autant chez les syndicats que... les producteurs se sont dit: Bien là, il n'y a personne qui s'occupe des directeurs de... Il n'y a pas de lien. Donc, pour répondre à votre question, il n'y en a pas vraiment pour l'instant.
Mme Gaudet: Très, très rapidement, avant de laisser la parole à mon collègue...
Le Président (M. Bachand): Allez-y, Mme la députée.
Mme Gaudet: Vous suggérez de créer des incitatifs pour encourager les employeurs assujettis à soutenir leur mutuelle de formation. Quels seraient ces incitatifs?
M. Dubois (Benoît): Il faut surtout, dans notre industrie... c'est surtout parce que, depuis le rehaussement du seuil d'assujettissement, il y a une bonne partie des producteurs qui ne sont plus assujettis, donc il y a une clientèle qui a été un peu laissée pour compte. Les statistiques officielles font état, vous le savez autant que moi, de 70 % des employeurs qui maintenant ne sont plus obligés de former leurs personnes.
Or, il faut signaler que, dans notre industrie, il y a une particularité: c'est que, même si Pixcom, ou Zone3, ou un producteur peut paraître gros, chaque production fait l'objet d'une incorporation, donc d'un numéro d'employeur. Donc, si, mettons, je ne sais pas, moi, Un homme mort fait... C'est que chaque production est incorporée, donc fait... et souvent ils n'ont pas 1 million, alors que tu sais que la boîte au complet, s'ils font huit shows, c'est sûr qu'ils ont plus que 1 million. Alors... Là, j'ai oublié votre question.
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(15 h 10)
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Mme Gaudet: Quels seraient les incitatifs pour...
M. Dubois (Benoît): Oui. Ah, bien, du un pour un, ou... Je ne sais pas, là, on n'a pas vraiment réfléchi à la chose. Mais c'est sûr qu'à notre sens, si le gouvernement a décidé de rehausser, donc d'exclure des employeurs, il faut compenser par autre chose, parce que là il y a un paquet de travailleurs, dans cette industrie... pas seulement dans cette industrie-là, mais qui sont laissés pour compte. Il faut que ce soit compensé par autre chose.
On est en 2006. Ailleurs, en Allemagne, on est rendu à du 2 % puis 3 %. En France, je parlais récemment à une tête grise, là, qui était invitée dans le cadre des Rendez-vous du cinéma, c'est du 1,5 % puis 1,7 %. Au Royaume-Uni, c'est du... c'est quasiment 1 %, mais c'est 1 % sur le budget de production, donc c'est comme deux fois plus qu'ici.
C'est sûr qu'il faut qu'il y ait des ressources publiques qui soient mises là-dedans, là, mais je n'ai pas la... Il faudrait que j'y réfléchisse puis que je vous revienne là-dessus, là, mais... Pardon.
Mme Gaudet: Merci.
Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la députée de Maskinongé. M. le député du magnifique comté de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Je ne sais pas si ça va dans la ligne de ce qu'on vient de parler, mais j'aimerais avoir une précision. Vous favorisez sans équivoque ni réserve le maintien de la loi et vous recommandez de maintenir admissibles au fonds les entreprises ayant une masse salariale de moins de... de 250 000 $ à 1 million. Pouvez-vous m'aider dans cet argumentaire-là? Ça me plaît, ça.
M. Dubois (Benoît): Bien là, c'est parce qu'en ce moment il y a un petit surplus, puis, pour faire ? passez-moi l'expression; pour faire ? passer la pilule, ils ont décidé que, pour une période transitoire de deux ans, que ces gens-là allaient être admissibles, là, à des programmes de subvention du Fonds national, mais, après ça, nous, on s'inquiète qu'est-ce qui va arriver après ça, là, tu sais. Donc ça, c'est une grosse inquiétude, c'est une grosse inconnue pour nous, là. Donc, c'est sûr que...
Là, présentement, je fonctionne avec le 1 %, je suis soutenu par le fonds national. L'année passée, j'ai reçu 100 000 $, donc ça correspond à peu près à 25 % de mon budget. Je suis quand même fier de dire que je m'autofinance, avec le 1 %, à 75 %, mais je ne pourrais pas survivre longtemps sans le fonds national. En tout cas, il faudrait que je diminue mes activités de formation substantiellement, s'il fallait que le surplus du fonds national... qu'il n'y ait plus d'argent dans le fonds pour cette clientèle non assujettie, là. Mais je n'ai pas de réponse.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci.
Le Président (M. Bachand): Oui, M. le député... Mme la députée de Maskinongé, bien sûr qu'il vous reste du temps.
Mme Gaudet: Il reste combien de temps?
Le Président (M. Bachand): Deux minutes. En avez-vous assez?
Mme Gaudet: J'aimerais vous entendre sur les travailleurs autonomes. Vous nous avez parlé d'une partie importante de votre clientèle qui touche les travailleurs autonomes, alors comment participent-ils à vos activités de formation? Quelles formes de financement qu'ils vous offrent? Expliquez-moi, s'il vous plaît.
M. Dubois (Benoît): Bien, le conseil d'administration de la mutuelle a décidé de... On a longtemps réfléchi à la gratuité, bon, tout ça, mais on s'est finalement arrêté à la position suivante: de charger 15 % du coût total de la formation, divisé par le nombre de places. Ça fait que souvent une formation qui autrement coûterait 600 $, 700 $ dans une école privée, revient, là, à peut-être 50 $ pour le participant. Et il n'y a pas de sélection, que tu sois T4 ou incorporé, en compagnie, travailleur autonome, il n'y a pas de distinction. Comme je disais tantôt, tout le monde est bienvenu. On est toute une grande famille.
Mais c'est sûr qu'il y a peut-être une avenue, une piste de solution pour cette clientèle-là, mais mon C.A. n'a pas voulu que je rentre là-dedans parce que c'est comme un panier de crabes, là, mais, moi, à mon sens, mon avis personnel, là, c'est qu'il faut s'occuper de cette clientèle-là aussi, là, pas juste les employeurs non assujettis, mais les travailleurs autonomes; ce qu'on appelle les travailleurs atypiques, là, dans notre business, il y en a beaucoup.
Mme Gaudet: Vous avez également parlé de formation, c'est-à-dire de métiers ou de volets, là, de certaines exigences au niveau de vos entreprises où il n'y a pas de formation de base. Pouvez-vous nous dire comment ces gens-là que vous avez parlé, je crois, les éclairagistes ou... comment ils s'inscrivent et qu'est-ce que vous leur offrez?
M. Dubois (Benoît): Bien, souvent c'est le syndicat qui va prendre l'initiative. Le syndicat a des ententes de collaboration avec la CST, la Commission supérieure technique de France, par exemple, qui a développé une nouvelle caméra pour le HD ou le 4K, là. Donc, souvent, dans le cadre d'un festival, comme je disais tantôt, il y a quelqu'un de France qui s'en vient ici, puis là on fait de ateliers, des ateliers de maîtres. Ça fait que, là, tu vois les directeurs photo, ils sont tous là, là, tu sais. Récemment, on avait une nouvelle console d'aiguillage qui nous arrivait de Los Angeles, il y avait juste Télé-Québec qui l'avait puis peut-être TVA. Donc, là aussi c'est important, là, d'offrir des activités. Souvent, c'est juste deux ou trois personnes qui vont rentrer dans la cabine, mais ce sont des postes... C'est des aiguilleurs, c'est comme des contrôleurs aériens. Donc ça, c'est super important qu'on ait ces gens-là.
Donc, il n'y a pas vraiment de passerelle automatique. Il faut les inventer à chaque fois, aller chercher l'expertise, savoir d'abord où la trouver puis, après ça, s'organiser pour la faire venir. Voilà.
Mme Gaudet: Vos liens avez TELUQ, rapidement.
M. Dubois (Benoît): Ah, TELUQ, ça, c'est un beau projet. C'est développer une... Comme, dans ce milieu-là, les gens sont très mobiles, ont des horaires assez débiles, ils ne sont pas toujours... ils peuvent venir à une formation une semaine, la semaine suivante, ils ne peuvent pas parce qu'ils ont un tournage, ça cause vraiment un problème.
Donc, on s'est dit: Est-ce qu'ils ont vraiment besoin physiquement d'être là tout le temps? On sait qu'aujourd'hui la technologie nous offre tellement de possibilités au niveau du e-learning ou de l'apprentissage en mode virtuel, pardon, on s'est dit: Ça, c'est une avenue vraiment capitale pour nous. Je vois très bien quelqu'un, qui est en attente entre deux prises de vue sortir son «laptop» puis continuer son petit cours de Excel ou son petit cours de colorimétrie, tu sais, la théorie des couleurs pour le directeur photo ou «whatever», tu sais. Donc, pour nous, ça, c'est...
Et TELUQ a été identifiée comme étant le foyer d'expertise majeur, là. Donc, on s'est associés avec la TELUQ pour développer un projet qu'on voudrait déposer éventuellement au fédéral, dans le cadre de la mesure ICMT. Puis je pense que la Commission des partenaires du marché du travail aussi, pas je pense, mais est dans le coup également. Sauf que là, comme je disais, avec l'avènement du nouveau gouvernement, c'est comme... le deuxième dépôt ou le deuxième appel de projets est suspendu, là, jusqu'à une période indéterminée. Mais à mon sens, ça, ça pourrait être un beau projet pour les travailleurs de notre industrie.
Parce qu'il y a aussi un volet veille stratégique. Par exemple, bon, tu sais, on voit un gros tournage arriver où c'est qu'ils vont avoir besoin de 40 peintres scéniques, mais il y en a juste 25 au Québec. Ça fait que, là, la veille stratégique va dire: Bien là, les gars, revirez-vous vite puis organisez-vous une formation, là, Spielberg s'en vient avec ses camions-remorques. Donc, c'était comme un enchevêtrement entre le e-learning, la veille technologique, des communautés d'apprentissage aussi, parce que les comptables ou les directeurs de prod, souvent, ils sont tout seuls dans leur coin, donc ils sont très généreux. Quand ils se voient, ils s'échangent beaucoup de choses. Sans qu'il y ait nécessairement un prof en avant, là, il y a comme là un beau concept d'apprentissage.
Le Président (M. Bachand): Ça va? Merci, Mme la députée de Maskinongé. M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière de solidarité sociale.
M. Girard: Merci, M. le Président. M. Dubois, merci beaucoup pour votre présentation, je pense que vous nous faites connaître davantage les besoins de votre industrie.
M. Dubois (Benoît): ...
M. Girard: Je voulais revenir sur les projets pilotes, les mutuelles de formation. Il y a combien d'entreprises qui ont participé et il y a combien de travailleurs qui ont pu bénéficier de cette mutuelle de formation?
M. Dubois (Benoît): L'APFTQ, il y a 140 membres en compagnie, là, mais, bon an mal an, j'ai à peu près 20, 25 chèques qui rentrent, là, et ça totalise, là, ça varie entre 275 000 $ et 440 000 $, 275 000 $ et 440 000 $ par année. Cette année, je pense, à cause de la baisse des tournages américains, là, si je vais chercher 275 000 $ encore, là, ça va être beau. Et on dessert à peu près 500, 600 personnes par année, mais là ça fait trois ans que la mutuelle est sur pied, là, puis donc je suis en train de développer tout un volet pour les gestionnaires de production, qui n'étaient pas desservis par le syndicat à l'époque, donc... Et mes cours sont toujours pleins, je pourrais faire des reprises; il y a de la demande, et je n'ai pas vraiment besoin de tordre des bras à des gens. À moins que ce soient des matières un peu plates, là, comme la santé et la sécurité, mais ça, il ne faut pas écrire ça. Donc, à peu près 500 à 600 personnes, là, techniciens...
Mais il faut dire que le syndicat aussi a un volet de formation de base. Pour devenir membre du syndicat, là, ils rejoignent à peu près 800, 900 personnes aussi, mais ça, ce n'est pas ma clientèle. Moi, c'est vraiment le volet perfectionnement.
M. Girard: Et il y en a combien, à votre avis, qui ne sont pas rejoints, entreprises ou travailleurs qui auraient besoin d'acquérir une formation supplémentaire? Parce que vous me dites que déjà, quand vous offrez des cours, la formation est complète. Avez-vous un estimé des besoins de l'industrie?
M. Dubois (Benoît): Bien, j'ai fait mes études de besoins il y a deux ans, j'ai fait mes «focus groups», mais sauf que c'était qualitatif, là, je n'ai pas eu de données quantitatives, là, à savoir, là, je serais capable de rejoindre 300 comptables, 500 assistants comptables. Mais je commence à connaître un petit peu, là, les personnes qui travaillent dans l'industrie, là, puis je me rends compte qu'à vue de nez, là, j'en rejoins peut-être à peine 10, 15 %, là, en ce moment, là, du côté des gestionnaires de production, là.
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(15 h 20)
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Parce que ce dont je n'ai pas parlé aussi, c'est qu'on a accordé un mandat de gestion à la direction du programme de perfectionnement du syndicat, donc qui fait un peu ma job au sein du syndicat en vertu de l'entente, là, qui a mené à la mise sur pied de la mutuelle à laquelle je faisais référence tantôt, là. On dit: On va respecter ce que vous faites depuis 1995. Donc, on délègue une partie, là, du travail de planification, de gestion, d'évaluation des besoins, et tout ça, à la directrice, là, du PPP au sein du syndicat. Mais le syndicat, c'est 3 500 membres, ils en rejoignent chaque année, dans leur volet de base, 800, 900 personnes. Moi, sur les 500, 600 personnes qu'on dessert, il y en a les trois quarts, c'est des techniciens. Donc, tu sais, si je rejoins 100 gestionnaires de production, là je parle des comptables ou les directeurs de production, les coordonnateurs, ce n'est pas beaucoup, là, 100 quand il y a 140 membres à l'APFTQ, qui emploie chacun 400 personnes sur une base permanente et encore plus de pigistes quand les productions sont lancées. Est-ce que ça répond?
M. Girard: Oui. Il y a certains groupes qui sont venus nous rencontrer au cours de la commission parlementaire qui souhaitaient que nous ayons un fonds sur une période de financement de base, sur une période de cinq ans, pour favoriser le démarrage des mutuelles. Ils expliquaient que... ces gens nous ont expliqué que ce n'était pas toujours facile, le démarrage des fonds, qu'il y avait une sensibilisation à faire pour certaines auprès d'entreprises et que parfois, après deux ans ou trois ans, c'était difficile d'évaluer les résultats. Est-ce que vous partagez ce point de vue là?
M. Dubois (Benoît): J'ai été distrait, je n'ai pas entendu toute votre question. Pouvez-vous la répéter?
M. Girard: Bien, au niveau des mutuelles, il y a des organismes qui sont venus...
M. Dubois (Benoît): O.K. Le cinq ans, le soutien, oui.
M. Girard: Oui, c'est ça, est-ce que vous pensez que c'est une avenue qui serait intéressante pour votre industrie, qu'il y ait un financement? Parce que vous-même, dans le cadre de votre présentation, vous nous avez dit: Bon. On a des besoins qui sont importants en termes de formation, il y a un financement qui nous est accordé via le fonds national. Mais vous avez indiqué que vous n'aviez pas des fonds suffisants, et vous souhaiteriez avoir un financement plus substantiel pour atteindre vos objectifs.
M. Dubois (Benoît): Même si le RFAVQ est cité souvent comme étant un «success story», on parle, dans le rapport, de se pencher et s'intéresser un petit peu plus au «success story», ce n'est pas dû à mon travail mais à cause des conditions qui prévalaient à l'origine. Alors, même si le RFAVQ est souvent considéré comme étant un exemple pour les mutuelles, c'est sûr que, nous, comme je disais tantôt, si le fonds, les surplus au fonds disparaissent, moi, j'ai un gros travail de sensibilisation à faire. Les producteurs, avant de se mutualiser, ont développé des pratiques, comme on dit, ils ont développé des... ils sont très créatifs pour dépenser le 1 %. Moi, quand je suis arrivé, par trois chemins différents, j'ai fait un estimé du potentiel que je peux aller chercher. L'INIS aussi à l'époque ciblait cet argent-là et avait fait faire une étude indépendante. Moi, je suis arrivé à peu près à 1,3, 1,5 million; l'INIS, elle, à 2 millions comme étant du 1 % potentiel, mais ça, c'est avant la hausse du seuil d'assujettissement.
Moi, donc, je suis conscient que... et là la hausse du seuil, à vue de nez, de la présidente, la P.D.G. de l'APFTQ, elle a dit: On a peut-être perdu 15 % de l'argent, finalement, là, mais... Donc, entre ce que je recueille auprès des producteurs québécois et ce que je pensais être capable d'aller chercher, il y a quand même... la marche est haute, ce qui fait que je pense que je vais avoir besoin du temps encore pour pouvoir sensibiliser les... Parce que je le remarque, cette année, les producteurs réagissent favorablement ? j'en suis à ma deuxième brochure, d'ailleurs j'en ai des copies de tout le monde si ça peut intéresser. Quand ils ont vu ça arriver, ils ont dit: Oh, wow! c'est ça que j'ai pour mon 1 %.
Donc, je vois et je le sens, il y a comme une volonté, là, ça s'en vient sauf que c'est vrai que deux ans, trois ans même, ce n'est pas assez. Moi, c'est sûr que si j'avais un petit peu d'aide, mettons, sur cinq ans au total, c'est sûr que je pourrais faire un terrible de beau travail.
M. Girard: Vous nous avez indiqué aussi dans votre mémoire qu'il y a une clientèle... bon nombre de travailleurs qui avaient été laissés de côté, puis qui se retrouvent dans le fond orphelins, pour reprendre vos termes, avec la modification à la loi du 1 %. Avez-vous des estimés du nombre de travailleurs qu'on a laissés orphelins avec la modification de la loi?
Puis vous nous dites également que vous pensez qu'il y a des mesures compensatoires que le gouvernement devrait mettre de l'avant pour venir appuyer les travailleurs qui oeuvrent dans les petites et les moyennes entreprises. J'aurais aimé ça vous entendre là-dessus.
M. Dubois (Benoît): C'est dur à dire dans notre secteur. Comme il y a un découplage entre le bassin des travailleurs et les employeurs... Tu sais, même si une compagnie, bon, tout d'un coup, est désassujettie ? pardon, je devrais y arriver pourtant ? c'est dur de dire c'est qui les travailleurs, sur les 3 500 membres de l'AQTIS ou les 5 000, si on inclut les employés potentiels pigistes aussi qui engagent les maisons de production chez elles, les gestionnaires, c'est difficile parce qu'il y a un découplage. Donc, à mon sens, dans notre industrie... et je pense que j'adhère à l'école de ceux qui disent: Bon. Il faudrait qu'il y ait des mesures adaptées par secteur d'activité. Parce que, dans un écosystème, ce qui fait que ça fonctionne, c'est que tu regardes en dessous d'une roche, il y a une bibite, tu regardes en dessous de l'écorce dans l'arbre, il y a une autre bibite. Alors, l'écosystème est tellement complexe qu'on ne peut pas avoir des mesures mur à mur comme ça, là, tu sais, ce qui fait que ? bon, j'essaie de répondre à votre question ? c'est dur à évaluer, le nombre d'orphelins parce que, comme je vous dis, c'est une grosse commune, cette affaire-là; il y a 3 500 personnes qui sont... une journée qui travaillent pour Pixcom, la semaine d'ensuite vont travailler pour Zone3 ? je vais arrêter de nommer juste ces deux-là, là ? mais c'est difficile, je ne peux pas répondre. Mais il y en a, c'est sûr que... si je regarde juste du côté des employeurs et des désassujettis, il y en a beaucoup en termes numériques, même si je disais tantôt que c'est peut-être 15 % de la masse salariale, mais, en termes de personnes, de travailleurs, c'est considérable. C'est ça qu'il faut regarder, ce n'est pas juste les contributions.
M. Girard: Est-ce que je dois comprendre que vous auriez souhaité qu'il n'y ait pas de modifications législatives et qu'il y ait peut-être plus d'avantages, des...
M. Dubois (Benoît): Je ne peux pas dire, non.
M. Girard: Sur le plan administratif, qu'il y ait peut-être davantage de souplesse et qu'il y ait des mesures différentes pour venir en aide...
M. Dubois (Benoît): Je ne peux pas répondre en faveur de ça parce que, moi, je suis paritaire. Alors, j'ai le patronat d'un bord, moi, puis qu'il me fait dire: Bien là, regarde, on veut juste maintenir la loi. Ça, ça j'ai consensus là-dessus. Pour ce qui est de revenir sur le seuil d'assujettissement, je ne peux pas répondre à ça.
M. Girard: Bien, merci, merci. Je veux revenir également sur la question de l'usage de formateurs étrangers ou la formation de formateurs à l'étranger, les dépenses qui sont admissibles. Vous nous dites qu'actuellement l'usage de formateurs étrangers n'est pas admissible au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre puis qu'on aurait avantage à tirer enseignement de l'expérience de ces formateurs à l'étranger, qu'il n'est pas possible non plus pour des travailleurs d'avoir accès à de la formation à l'étranger. Qu'est-ce que ça pose comme problème pour votre industrie? Et quel genre de changements vous souhaitez qu'on puisse apporter?
M. Dubois (Benoît): Je dois mettre une réserve sur cette affirmation que j'ai faite parce qu'il aurait fallu peut-être que je vérifie parce que, moi, je suis comme assujetti à deux systèmes de critères, là: il y a le règlement sur les organismes collecteurs et il y a aussi les conditions qui sont émises par les programmes du FNFMO. Ça fait que peut-être que Mme Pruneau pourrait... peut-être qu'elle va me dire: Bien non, Benoît, chez nous c'est admissible, là... Il y a deux comme régimes, là, et je ne sais pas... je sais qu'il y en a un des deux pour lequel les formateurs étrangers ou si, moi, j'envoie quelqu'un à Las Vegas, au NAB, il y en a un des deux régimes qui ne me permet pas ça, là. Donc, je ne peux pas tout à fait répondre à votre question. Je m'en excuse.
Mais, c'est sûr que, pour nous, comme je disais, déjà l'accès à l'expertise étrangère, c'est capital et c'est même... surtout pour les producteurs... Entre autres pour les producteurs, parce que j'essaie aussi de développer une culture de formation continue même auprès des producteurs, et, dans les quelques «focus groups» où j'avais quelques gros producteurs, j'ai été content de constater que ces gens-là ont aussi des besoins, mais qui se situent peut-être à un niveau un peu plus... un peu plus haut, comment dire? Et cette formation-là, souvent, ils vont la chercher à l'étranger ou ça prend la forme de conférence ou de «master class» ou comment mieux travailler avec un compositeur; de voir un scénariste travailler avec un compositeur, un producteur va s'intéresser à ça, tu sais. Donc, ce n'est pas tout à fait le même genre de formation que ça leur prend, eux autres.
Le Président (M. Bachand): Quelques instants encore.
M. Girard: Donc, je voulais vous remercier pour votre présentation. Puis, visiblement, à la lumière du document que vous nous avez présenté puis les efforts qui ont été faits dans ce secteur-là, on comprend mieux pourquoi les travailleurs québécois dans cette industrie-là ont une réputation internationale et pourquoi plusieurs producteurs de cinéma viennent faire leurs productions au Québec. Alors, félicitations pour le bon travail que vous faites.
n(15 h 30)nM. Dubois (Benoît): Merci. Si je peux me permettre juste une petite anecdote. C'est effectivement un secteur important. À Montréal, quand on a vu ? et je terminerai là-dessus, deux minutes, M. le Président; à Montréal, quand on a vu ? les tournages étrangers disparaître à un moment donné, le milieu s'est organisé, on a voulu consolider le Bureau du cinéma de Montréal qui s'est fusionné avec les régions avoisinantes, et tout ça, le maire Gérald Tremblay a suivi la mise sur pied de ce bureau-là et il a été, comment dire, estomaqué de réaliser que c'est un secteur aussi important que l'aéronautique. C'est 35 000 jobs, là, c'est 1,4 milliards de dollars, là, au Québec et, à Montréal, il y a des années où on va chercher 250 millions, 350 millions de dollars américains; c'est pas mal plus important que la Formule 1, ça. Alors, M. Tremblay a réalisé la chose, et je pense que c'est un secteur qui mérite qu'on s'y intéresse.
Ha! C'est la culture, tu sais, on prend ça souvent à la légère, mais c'est un secteur qui fait travailler des gens et qui nous fait rayonner à l'international de plus en plus. Et je pense qu'il faut le soutenir. Et la formation continue, c'est une des actions qui nous permet de le faire. Merci pour l'invitation.
Le Président (M. Bachand): C'est nous qui vous remercions, M. Dubois. Merci pour votre présentation, merci de vous être rendu à la commission. Je vous souhaite un bon retour chez vous. Soyez prudent. Merci infiniment.
Je vais demander dans l'immédiat le Conseil régional des partenaires... Non. Plutôt le Conseil québécois des ressources humaines en culture. Si vous voulez bien prendre place, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Bachand): Je suspends les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 31)
(Reprise à 15 h 33)
Le Président (M. Bachand): Nous allons reprendre nos travaux. Donc, Mme Boucher, je présume?
Mme Boucher (Louise): Tout à fait.
Le Président (M. Bachand): Bonjour, Mme Boucher. Bienvenue chez nous au Conseil québécois des ressources humaines en culture. Vous êtes la bienvenue ici, bien sûr. Je vous rappelle les règles. Elles sont très simples. Vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire. Puis il y a 15 minutes de période pour comprendre un peu mieux votre présentation de la part de l'opposition puis de la part aussi du côté ministériel. Donc, sans plus tarder, nous vous écoutons.
Conseil québécois des ressources
humaines en culture (CQRHC)
Mme Boucher (Louise): Alors, MM., Mmes les commissaires, bonjour. Je vous transmets les salutations de notre président, Michel Laurence, qui a été retenu à Montréal. Et je me permets deux mots pour vous décrire un peu qui est le Conseil québécois des ressources humaines en culture.
Nous sommes un des 30 comités sectoriels soutenus par la Commission des partenaires du marché du travail, et notre univers est l'univers culturel. Pour vous donner une image simple, facile à retenir, je vais vous parler d'un système solaire à huit planètes où chacune des planètes a un mode d'organisation du travail assez particulier.
Mon collègue et ami Benoît Dubois vient de vous parler de l'audiovisuel, le secteur cinéma. Alors, nous, on représente tous les travailleurs culturels. Il y en a 100 000 au Québec. On reconnaît huit domaines professionnels: les arts visuels, l'audiovisuel ? le seul endroit où il y a une mutuelle de formation qui existe, vous en avez entendu parler ? le secteur danse, musique, théâtre, cirque, le spectacle vivant, la muséologie, le patrimoine, les métiers d'art, les spectacles variétés, la littérature, enregistrements sonores.
Je vous disais que c'est un secteur où il y a 100 000 travailleurs. Au CQRHC, on regroupe les associations. C'est un milieu très structuré. On regroupe les associations, les regroupements disciplinaires, les conseils régionaux de la culture qui ont à chacune de leurs capacités, ils regroupent toutes ces clientèles-là. Et on prétend qu'on en représente 50 000, donc un travailleur culturel sur deux présentement à notre comité sectoriel.
Alors, on est très heureux de participer à cet exercice. Il est important. Vous avez vu, notre avis est structuré en cinq sections, alors: un petit préambule sur le caractère structurant de la loi; un commentaire sur les constats que vous avez dressés dans le rapport quinquennal; une petite réserve ou une inquiétude sur la proposition d'inclure, dans la loi, les responsabilités liées au cadre général de développement et de reconnaissance des compétences; on voudrait appuyer l'ouverture que vous avez manifestée à une définition plus nuancée de la qualité des formateurs lorsqu'il est difficile de répondre aux exigences actuelles d'agrément des formateurs et, vous allez comprendre, c'est en appui à la mutuelle de formation en audiovisuel; et finalement un commentaire ou une attente quant aux pistes de solution. Vous avez évoqué la mutualisation volontaire des entreprises pour stimuler les investissements en formation à l'égard des travailleurs non assujettis.
Alors, en termes de préambule, je ne suis certainement pas la première à avoir souligné le caractère structurant de la loi depuis maintenant 10 ans. Tout le monde reconnaît qu'il y a un effet positif pour le développement d'une culture de formation continue au Québec bien sûr en sensibilisant les entreprises et les partenaires à l'importance de la formation. On peut même dire que cette prise de conscience est mesurée. Il y a un taux d'entreprises et une comptabilisation des dépenses admissibles dans ce domaine.
La Commission de l'économie et du travail se penche, aujourd'hui, sur la pertinence et le bon fonctionnement de la loi et de sa réglementation, selon les constats et les pistes de solution contenues dans le rapport quinquennal. Vous incluez l'impact du rehaussement du seuil d'assujettissement. Vous soulevez la question qu'il devient légitime de se demander par quels moyens la loi et sa réglementation peuvent-elles favoriser l'atteinte de résultats concrets et mesurables en ce qui a trait à l'amélioration de la qualification de la main-d'oeuvre québécoise. Et cette phrase nous est très chère: «La préoccupation de soutenir les petites entreprises en matière de formation s'ajoute à ce questionnement. À cet égard, il est nécessaire que le gouvernement et la Commission des partenaires du marché du travail unissent et maintiennent leurs efforts dans la recherche de solutions.» Alors, au CQRHC, on s'intéresse vivement à ces questions, car la période qui retient notre attention est marquée par un engagement majeur de la part du gouvernement du Québec: l'adoption de la politique gouvernementale et ce qui vient avec, le plan d'action en matière de l'éducation des adultes et de formation continue. Je vais l'appeler la politique pour faire plus court. Alors, cette politique situait bien sûr la loi comme un outil structurant dans tout le chantier de l'apprentissage tout au long de la vie. La politique anticipait aussi des améliorations d'allégements administratifs et la révision périodique des règlements afférents. Mais, à notre esprit, la politique visait forcément à stimuler l'ensemble de la population active à valoriser l'apprentissage tout au long de la vie.
Donc, la loi et la politique colorent un des mandats prioritaires d'un comité sectoriel comme le nôtre. Alors, dans nos mandats, on a la responsabilité de développer la formation continue de la main-d'oeuvre, notamment en participant aux objectifs de la loi, notamment en mettant en oeuvre le cadre général de développement et de reconnaissance des compétences, en révisant le développement et les programmes de formation de la main-d'oeuvre avec le ministère de l'Éducation et en désignant, dans notre secteur, les professions pour lesquelles il serait souhaitable de développer des programmes d'apprentissage en milieu de travail.
Alors, aujourd'hui, on résume la situation ainsi: la loi a un impact réduit avec la modification du seuil d'assujettissement. La politique, à notre avis, elle s'en trouve amoindrie, appauvrie, car la loi est un outil pour un bassin d'entreprises relativement marginales. À notre avis, la politique mériterait une mise à jour pour prendre en compte l'ampleur des solutions qui sont encore nécessaires pour stimuler la formation continue pour l'ensemble de la population active dont une majorité d'entreprises n'est plus assujettie et n'oubliant pas la main-d'oeuvre atypique laissée pour compte depuis l'origine de la loi. Pourtant elle est nécessiteuse de formation continue. Alors, ces travailleurs atypiques, bien sûr on a les travailleurs artistes, ils ont des lois pour déterminer leur statut de travailleurs autonomes, et il y a une quantité importante de contractuels. Donc, ils n'ont jamais de sécurité d'emploi, ils travaillent sur des bases et des durées déterminées.
Comme d'autres observateurs, le CQRHC reconnaît que la loi conserve un caractère structurant pour les entreprises dont la masse salariale est de plus de 1 million, eu égard aux pratiques et aux dispositifs qu'elle a mis en place. Nous croyons que la loi favorise et assure le maintien de bonnes pratiques à l'égard de la prévision budgétaire de la formation pour les personnes en emploi. C'est un poste de dépenses qui est assez vulnérable dans l'exercice financier d'une entreprise; il est même menacé dans des périodes d'incertitude économique.
n(15 h 40)n Un deuxième point. Nous croyons que la loi amène avec elle un ensemble de dispositifs, d'outils et de repères qui sont de précieux acquis à préserver, étant donné l'anarchie qui pouvait régner auparavant. Les mécanismes d'application de la loi sont bien connus, et les entreprises qui sont assujetties ont bien adapté leur système comptable à cette réalité.
Dans les améliorations à apporter concernant la réglementation afférente, le CQRHC veut exprimer son adhésion à une piste que vous nous soumettez, qui est la reconnaissance des formateurs. On va en parler un petit peu plus loin, et ça nous semble un outil assez majeur pour la mutuelle de formation en audiovisuel.
Concernant la portée de la loi pour notre main-d'oeuvre du secteur culturel, on est obligés de dire qu'elle a eu une assez faible portée, étant donné la prépondérance des travailleurs autonomes et des très petites entreprises, dont une majorité d'organismes à but non lucratif, pour tout le secteur artistique. Donc, c'était... Vous vous rappelez un peu, dans mon système solaire, j'ai des planètes entières qui sont des travailleurs autonomes qui ont une relation avec un producteur, un éditeur, un donneur d'ouvrage, et, dans certains cas, comme les arts de la scène, vous avez des organismes qui ont une partie de personnel salarié, et, pour la production des spectacles, c'est une série d'ententes ou de contrats, de cachets, donc toutes sortes d'autres modes de rémunération qui sont appliqués pour les professions artistiques et les professions de concepteur.
Donc, l'impact de la loi dans le secteur culturel est minime à cause de ces caractéristiques de notre main-d'oeuvre. Le volume d'entreprises est marginal en raison de la prépondérance des travailleurs autonomes et de nos petites entreprises de 10 employés et moins. La loi n'a pas vraiment stimulé directement la culture de formation dans notre secteur, sauf qu'elle a envoyé un signal, et nous y avons répondu, parce que ça fait 10 ans que la concertation de main-d'oeuvre existe dans le secteur culturel, et, depuis cinq ans, vous allez... on va en parler un petit peu tantôt, on a vraiment pris une initiative qui porte des fruits.
Nous avons donc trouvé d'autres solutions ? on va en parler ? et on a accompagné le développement du seul organisme collecteur qui existait dans notre secteur, c'était le Syndicat des techniciens cinéma et vidéo, qui a évolué vers la mutuelle de formation paritaire sous l'impulsion du projet pilote de mutuelle de formation. Il y a eu, dans ce projet pilote de mutuelle de formation, quatre autres tentatives du secteur culturel, mais elles n'ont pas pu déboucher faute de bassin d'entreprises à cotiser, avec le changement du seuil d'assujettissement.
Même si la loi a une portée assez faible à cause des caractéristiques de notre main-d'oeuvre, le CQRHC a, comme comité sectoriel, sollicité avec succès les ressources du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre chaque fois que nous avons pu démontrer la pertinence des besoins de notre main-d'oeuvre culturelle et, de temps en temps, surmonté les écueils latents que contiennent les critères d'admissibilité, car, avouons-le, ils sont encore fortement colorés par le modèle dominant d'un emploi salarié et d'un employeur unique. Notamment, on a participé au cadre général de développement et de reconnaissance des compétences. On est en train de travailler fort à développer deux programmes d'apprentissage en milieu de travail, dont un pour le secteur de l'audiovisuel, pour les éclairagistes de plateau, et l'autre pour les libraires.
Donc, on connaît très bien, d'une façon très pratique, la détermination de la Commission des partenaires du marché du travail à atteindre les objectifs de résultat dans l'esprit de la loi, c'est-à-dire rehausser les compétences et la qualification des personnes en emploi.
La deuxième section rassemble un commentaire sur les constats que vous nous exposez dans le rapport quinquennal. Alors, à notre point de vue, voici ce que ça rappelle. Ça rappelle le retard du Québec par rapport aux autres provinces. Ça rappelle l'effort plus élevé qui est requis dans les plus petites organisations qui n'ont pas de spécialiste de gestion de ressources humaines à l'interne. Ça rappelle l'importance de rechercher des moyens d'accroître l'accès à la formation pour des travailleurs en situation d'emploi atypique. Ça rappelle l'importance de s'intéresser davantage aux effets de la formation, ce que vous avez appelé l'obligation de résultat, par comparaison ou contrôle de la conformité, ou ce que vous avez appelé l'obligation de moyen. Bien sûr, ça rappelle l'importance de considérer la formation en cours d'emploi et la formation structurée pour développer les compétences des personnes en emploi. Et nous retenons bien sûr la préoccupation de soutenir les petites entreprises en matière de formation, qui s'ajoute au questionnement de l'impact optimal des moyens et de l'esprit de la loi.
Donc, si on est ici, c'est qu'on encourage tous les efforts qui sont faits par la Commission des partenaires et par le gouvernement pour trouver des solutions et tout mécanisme incitatif pour créer, maintenir, développer une culture de formation continue auprès de l'ensemble de la population active, et particulièrement pour les travailleurs atypiques.
La troisième section de notre avis, c'est une réserve, je vous disais, d'entrée de jeu, une inquiétude, peut-être que vous allez nous dire, en quittant cet après-midi, que c'est une inquiétude qui n'est pas fondée. Parmi les pistes de solution que vous évoquez figure l'intégration à la loi des paramètres du cadre général de développement et de reconnaissance des compétences. Ça vient renforcer un levier qui est déjà présent dans la loi, les dispositions reliées à l'intervention sectorielle, attendu le rôle des comités sectoriels dans le développement des programmes d'apprentissage en milieu de travail ou d'autres stratégies qui découlent d'une norme professionnelle.
Bien sûr, on reconnaît l'opportunité d'intégrer dans une seule loi les dispositifs qui concernent et encadrent la formation et la reconnaissance des compétences en milieu de travail. Ces changements viendraient soutenir davantage l'effort collectif au regard de l'objectif d'améliorer la qualification de la main-d'oeuvre.
D'une façon pragmatique, on constate que cette proposition vient rendre conforme à l'esprit de la loi l'orientation déjà existante au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, qui finance toute l'instrumentation utile au cadre général de développement et de reconnaissance des compétences. Notre seule crainte, c'est que l'inscription des paramètres du cadre dans la loi pourrait avoir un impact restrictif sur l'admissibilité des métiers, et tout ça en relation avec le statut des cotisants au Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. Si on se retrouvait à devoir justifier qu'on développe une norme professionnelle et une instrumentation pour un métier à la condition que ce métier soit exercé dans les entreprises qui ont des masses salariales importantes, bien entendu, vous comprenez qu'on serait rapidement évacués de la patinoire.
À l'heure actuelle, l'accès aux outils et aux ressources financières demeure possible pour des métiers qui ne sont pas exercés dans le modèle traditionnel de l'emploi salarié ni pour un employeur unique. Bien entendu, dans tous les documents prescriptifs qui sont destinés au comités sectoriels, on est très vigilants à faire remplacer les termes «travailleur en emploi dans l'entreprise» par une petite paraphrase qui est «travailleur en situation ou en lien d'emploi», pour nous permettre d'être inclusifs à la réalité de plusieurs professions du secteur culturel.
Quatrième section de notre avis, la définition plus nuancée que vous laissez planer pour la qualité des formateurs lorsqu'il est difficile de répondre aux exigences actuelles de l'agrément des formateurs. Alors, je crois que Benoît Dubois vous a bien expliqué la situation, et je sais que vous allez entendre l'AQTIS, qui est le Syndicat des techniciens en image et son. Tout simplement vous dire qu'on appuie l'idée d'avoir une définition plus nuancée. La formation par les pairs, c'est une stratégie qui est très importante, et, quand on dit qu'on fait appel aux pairs, le métier d'enseignant, ce n'est pas leur premier métier, et de devoir répondre aux critères de l'agrément tel que c'est fixé, c'est un frein, et ça oblige même, dans certains cas, à se priver de certaines activités parce que les personnes qui vont agir comme formateurs ne répondent pas à ces critères-là. C'est d'ailleurs un impact assez stratégique du Conseil des ressources humaines en culture que de faire reconnaître que les experts de notre domaine sont des formateurs de première importance dans toute cette culture de formation continue.
Je ne voudrais pas passer sous silence un autre impact important, c'est que, quand on fait la formation par les pairs et qu'on met en présence des seniors et des personnes qui sont encore en situation d'améliorer leurs compétences, on favorise le réseautage, l'entraide, le soutien par les pairs, et ça, c'est quelque chose qui compte énormément dans un secteur d'emploi où le recrutement ne se fait pas comme dans d'autres secteurs d'emploi. Souvent, c'est le bouche à oreille, c'est le réseautage, c'est des cooptations, des auditions, c'est de la sous-traitance, donc il faut que les gens se contactent, il faut que les gens se connaissent, et, par les activités de formation continue, on atteint ce deuxième objectif, et ce n'est pas banal.
Le Président (M. Jutras): En conclusion, madame.
Mme Boucher (Louise): Oui. Alors, mon dernier sujet, c'était par rapport aux pistes de solution. Vous évoquez la mutualisation volontaire des entreprises. Nous, on croit que la réflexion peut être un petit peu plus large, un petit peu plus asymétrique, et qu'en consultant différents comités sectoriels comme le nôtre, on peut se rendre compte qu'il y a des solutions qui consistent non pas à regrouper des entreprises pour qu'elles se développent un portefeuille ensemble, mais regrouper des clientèles pour leur donner un service avec une cohérence, avec une constance dans la qualité.
n(15 h 50)n Et, dans le cas de la culture, on a eu la chance d'avoir le soutien d'Emploi-Québec et de la Commission des partenaires pendant... c'est la cinquième année, ça s'appelle encore un projet pilote, et là on cherche très fort à essayer de lui donner une formule stable. Ce qu'on a fait, c'est qu'on regroupe ces clientèles-là. C'est facile, il y a des guichets naturels dans notre secteur, ce sont les associations, là où il n'y a pas de mutuelle possible, bien entendu. Et tout ce que ça prend, c'est qu'on partage une ressource humaine ensemble, qui est un coordonnateur à la formation continue, qui fait le travail de contacter ces travailleurs-là qui sont souvent isolés, de connaître leurs besoins et de préparer une offre de formation continue qui leur convient bien.
Je veux aussi faire allusion à...
Le Président (M. Jutras): C'est parce qu'il ne vous reste plus de temps, là.
Mme Boucher (Louise): Oui.
Le Président (M. Jutras): Peut-être une minute en conclusion, là. Parce qu'il y a les échanges qui vont suivre.
Mme Boucher (Louise): Parfait. Alors, je crois que vous allez avoir... Je vais avoir l'occasion de vous glisser ces informations-là dans les échanges. C'est les trois regroupements qui ont essayé de partir une mutuelle de formation. Quand ils ont terminé, ils ont fait des rapports écrits à la Commission des partenaires.
Et, dans leur cas, pour chercher des solutions alternatives, puisqu'il n'y avait plus de bassin d'entreprises cotisantes, ils auraient besoin, je crois, d'une aide de financement de base pour pouvoir faire de la promotion et aller chercher peut-être une mutualisation volontaire.
Le Président (M. Jutras): Alors, nous allons procéder maintenant avec l'échange avec les députés ministériels. Je cède la parole à Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Merci, Mme Boucher, pour votre présentation. Je vous rappelle que je m'excuse au nom de la ministre, là, de son absence due à des circonstances incontrôlables. Soyez assurés que vos commentaires et vos recommandations seront transmis fidèlement.
J'aimerais vous entendre sur des propos que vous avez tenus puis peut-être pour préciser, pour les bienfaits de la commission, entre autres sur la symétrie des solutions que vous proposez. Vous dites que le CQRHT fait état de l'expérimentation d'un modèle de regroupement des clientèles ? vous l'avez abordé dans votre présentation ? pour coordonner une offre de formation continue grâce à un arrimage sectoriel régional avec les conseils régionaux de la culture.
C'est un thème qui est très cher à la ministre, et j'aimerais que vous précisiez, que vous nous en disiez un peu plus sur le sujet.
Mme Boucher (Louise): Alors, quand on a créé le comité sectoriel, c'était déjà dans la politique d'intervention sectorielle, l'arrimage sectoriel régional. Puis, dans toute la constellation des associations et des regroupements, on l'avait, ce modèle-là, chez nous, parce que les conseils régionaux de la culture, il y en a un par région administrative. Disons que c'est un ancien découpage; ça relève de l'époque du ministère des Affaires culturelles.
Mais, bon, ça nous convenait bien parce qu'on avait un leader dans chaque région qui connaissait bien toute la variété des emplois culturels. Donc, ils sont membres chez nous. Quand on a démarré le projet pilote de formation continue, on s'est assuré que c'était notre partenaire central de coordination de la formation continue. Ils sont en lien avec la direction régionale d'Emploi-Québec.
Donc, dans le projet pilote bien sûr on travaille avec la mesure de formation, puisqu'il était destiné aux travailleurs non assujettis à la loi du 1 %. Ce qu'on fait, c'est qu'on s'assure, parce qu'on connaît tous les coordonnateurs, on les fait travailler ensemble, on leur fait faire des planifications croisées. Donc, tout le monde connaît la planification de chaque région.
Les associations qui ont des membres partout au Québec donnent leurs priorités parce que cette année, par exemple, peut-être qu'on veut travailler sur deux ou trois compétences pour les acteurs ou pour les musiciens. Tout ça est communiqué aux conseils régionaux de la culture, et on s'assure de faire des programmations une année d'avance pour à peu près couvrir nos huit domaines d'activité culturelle et s'assurer qu'on répond à des besoins partout en région.
Donc, on s'est donné cette responsabilité de faire fonctionner l'axe sectoriel régional. Ça fait cinq ans que ça dure et que ça réussit. Je crois qu'on a réussi à démontrer qu'on n'avait pas fait de dédoublement d'activités. On n'est pas trois régions à offrir la même activité avec chacun un problème de recrutement. Ça ne s'est pas produit parce qu'on fait cette liaison-là des coordonnateurs.
Donc, on a un bel exemple, et je pense que tout le monde souhaite que ça continue parce que cette culture de formation continue, elle s'est installée. Les clientèles appellent et s'attendent désormais à un service. On croit qu'on a relevé le pari qu'Emploi-Québec nous avait lancé à l'époque qui était de l'aider à mieux faire fonctionner ses services.
Et une preuve de ça, c'est qu'on est en train de rendre souvent les formules, de l'aide... du un-pour-un, qu'on appelle. C'est-à-dire que les artistes appellent, ils ont besoin d'une formation et ils sont tout seuls à en avoir besoin; le coordonnateur est capable de l'organiser et d'expliquer à Emploi-Québec les choix qu'il a faits.
Vous savez, il y a une particularité dans le domaine des arts et de la culture. C'est que souvent l'artiste ou quelqu'un qui a une profession artistique, il doit être unique, il doit être désirable, il doit être le meilleur au bon moment. Donc, on ne peut pas facilement attendre d'avoir 10, 12, 20 personnes en même temps qui ont besoin de la formation, il faut être capable d'agir avec souplesse. Donc, les coordonnateurs ont mis au point toutes sortes de formules comme du coaching, des rencontres avec des maîtres, et on a peu à peu établi avec Emploi-Québec une façon de travailler, de justifier ces coûts-là.
Mme Gaudet: Merci. Merci, Mme Boucher. Maintenant, j'aimerais vous entendre sur les experts auxquels vous avez recours, et comment on pourrait avoir de la souplesse au niveau de faire en sorte que, certains experts qui ne sont pas agréés, vous puissiez avoir recours à ces experts, comment faire pour s'assurer qu'au niveau des critères de sélection ou d'agrément de ces experts, comment on peut assouplir ces règles pour qu'on soit certain que ces gens-là aient la compétence requise et reconnue.
Mme Boucher (Louise): Il y a au moins deux pistes assez simples, c'est qu'étant donné que tout ça participe chez nous de la reconnaissance des pairs par les pairs, il y a toujours quelqu'un qui est choisi, l'expert du domaine, pour lui confier l'activité de formation ou de perfectionnement à donner. Je crois qu'en marge du système d'agrément des formateurs il faudrait être capable de reconnaître la responsabilité d'une association ou de la mutuelle, parce qu'il en existe une en audiovisuel, que, quand l'association, elle travaille toujours dans une, je dirais, structure démocratique avec un comité formé du C.A., des consultations des membres... Alors, quand l'association choisit, ou le Conseil de la culture choisit un expert du domaine, il a la charge de démontrer qu'il est compétent, donc il a un C.V., il a un portfolio qui est à l'appui. Donc, ça, je crois que, si on reconnaît cette responsabilité-là à l'association, on a un bon garde-fou.
Deuxième dispositif, c'est peut-être de demander des enquêtes ou des fiches de satisfaction. Dans le cas du projet pilote, on a pris cette initiative, tous nos coordonnateurs font compléter des fiches d'évaluation par les participants à la fin des ateliers. Bien sûr qu'une des questions principales qu'on leur adresse, c'est la compétence, la qualité, l'appréciation du formateur qui a été choisi. Parce que l'association, si elle a besoin de le redonner dans deux ans, bien sûr elle va reprendre contact avec cet expert-là s'il a été satisfaisant. Et ça, c'est un des plus beaux taux de satisfaction de l'évaluation gouvernementale qui a été faite de notre projet pilote; la satisfaction des formateurs, c'est de 97 % comme taux de réponse.
Donc, je pense que ces deux leviers-là, de reconnaître la responsabilité d'une association ou d'un conseil de la culture, ou d'une mutuelle, parce que ces décisions-là ne sont pas prises à la légère, elles sont toujours prises avec des comités d'élus. Puis deuxièmement, peut-être d'exiger une évaluation ou une fiche, ou une façon de mesurer la qualité et l'appréciation du formateur.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Suite à ce que vous venez de nous dire, si je vous dis ? puis vous me direz si j'ai bien compris ? que la proposition que vous venez de nous faire mérite probablement d'être regardée en fonction de la révision du règlement sur les organismes collecteurs... que sur celle du règlement sur l'agrément. Me trouvez-vous intelligent ou est-ce que ça a de l'allure?
Mme Boucher (Louise): Ce serait plutôt pour celui des formateurs, l'agrément des organismes formateurs et des formateurs?
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Mais, si je vous dis qu'on a regardé ça en fonction de la révision du règlement sur les organismes correcteurs, vous n'êtes pas d'accord avec moi?
Mme Boucher (Louise): C'est-à-dire que, si vous révisez le règlement, le règlement continue d'être attaché à la loi, puis la loi, elle couvre un bassin. Si vous assouplissez au sens où, de temps en temps, vous acceptez que les pairs puissent être les bonnes personnes pour donner des formations, vous répondez à une belle souplesse. Je pense à mon collègue de la mutuelle, l'audiovisuel, il en a besoin, de cette souplesse-là. Si vous me dites que vous cherchez des solutions pour l'ensemble de la population active, je vous dis: Cette souplesse-là, elle va être requise, elle va être nécessaire parce que, dans notre secteur, c'est la première qualité de la formation, c'est d'être donnée par des pairs, par des experts du domaine.
n(16 heures)n Et j'irais même un peu plus loin ? ce n'est pas dans le mémoire écrit, alors c'est à titre personnel que je l'avance ? si l'idée des chèques-formation fait son oeuvre, fait son chemin, il y a des exemples de chèques-formation aux individus, il y a des exemples de chèques-formation aux entreprises. Ça va devenir important que la formule chèque-formation aux individus soit retenue ou jumelée à celle des entreprises, sinon, encore une fois, on va avoir oublié le bassin des travailleurs atypiques. Mais qui dit chèque-formation dit qu'il faut, à quelque part, avoir un répertoire, ou une banque, ou un agrément des formateurs. Alors, on va avoir le même problème pour notre secteur culturel, c'est: Qui va pouvoir être reconnu et inscrit dans cette banque de formateurs? Si on prend des critères aussi restrictifs que ceux qui ont été édictés dans le règlement sur les organismes formateurs, on va avoir un problème. Si on accepte que, de temps en temps, il y ait des pairs ou des experts du domaine qui soient choisis, même si ce n'est pas leur premier métier, là, on aura notre couple de solutions: le travailleur atypique et la formation par les pairs.
M. Morin: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Ça va. Oui, Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Le groupe précédent nous a parlé d'une association qu'ils ont faite avec TELUQ pour répondre aux besoins précis des travailleurs atypiques. Alors, est-ce que c'est envisageable, pour répondre aux besoins de vos travailleurs atypiques, d'avoir une association avec TELUQ ou avec un autre organisme qui pourrait être plus disponible ou qui pourrait répondre aux besoins de ces travailleurs qui ont besoin de formation peut-être dans des temps où la formation elle-même n'est pas disponible?
Mme Boucher (Louise): Alors, quand Benoît faisait référence à TELUQ, c'était pour un projet en apprentissage virtuel, et je sais très bien quel argument il évoque en parlant de ces mécanismes-là, parce que la personne peut y consacrer le temps libre au moment où elle a le temps libre. On n'en a pas développé dans les cinq dernières années, pour une raison très simple: on voulait tellement bien utiliser chaque dollar formation qu'on avait qu'on n'a pas investi dans aucune quincaillerie. On a essayé au contraire de trouver les formules, de les offrir en fin de semaine, en soirée pour réussir à rejoindre les travailleurs atypiques. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas une solution qui nous intéresse, qu'on peut regarder à l'avenir.
Je vais vous parler d'un autre mécanisme que les coordonnateurs ont de mieux en mieux adopté pour répondre à cette problématique-là. C'est que les formations génériques qui sont offertes à plusieurs reprises à l'année, soit par les commissions scolaires ? je parle de bureautique, informatique, des cours de gestion des ressources humaines ? qui sont les mêmes partout, là. Ce n'est pas parce qu'on gère une équipe dans le secteur culturel qu'on n'applique pas les mêmes fonctions de développement organisationnel ou de ressources humaines. Ce que les coordonnateurs ont fait, c'est qu'au lieu d'essayer de structurer des groupes puis d'avoir un quota à remplir, c'est qu'ils trouvent un lieu, par exemple, le Centre Saint-Pierre, qui est bien habitué de donner ces formations-là pour des organismes à but non lucratif, et on laisse les participants s'inscrire à la session qui fait leur affaire. Et le Centre Saint-Pierre, lui, en offre un bassin assez élargi parce qu'il s'occupe de plusieurs clientèles.
Donc, il y a un effort de ce côté-là pour laisser la réponse la plus souple possible, mais ma réponse est toute bête: c'est qu'on n'a pas investi dans des mécanismes, des structures d'apprentissage virtuel à ce jour, on a plutôt misé sur la rencontre entre les pairs. Les gens, ce qu'ils nous disaient, c'est: Il faut qu'on maintienne notre bassin de contacts, il faut qu'on se fasse connaître, il faut qu'on ait les avis des experts de notre domaine pour voir où est «the state of the art». Donc, ça se fait de personne en personne. Les gens misent beaucoup là-dessus encore.
Le Président (M. Jutras): Ça va. Du côté de l'opposition, M. le député de Gouin.
M. Girard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Boucher, pour votre présentation. Je veux revenir sur la problématique des travailleurs atypiques parce qu'on a l'occasion, dans notre rôle de député, dans nos circonscriptions, de rencontrer régulièrement des gens qui oeuvrent dans le domaine culturel et qui viennent souvent solliciter les députés ou plusieurs partenaires dans nos quartiers, nos arrondissements respectifs, pour des problématiques de financement. Et on se rend compte qu'au-delà, par exemple, de la conception ou de la production d'une pièce de théâtre, il y a derrière ça... se profile toute une série de responsabilités de gestion des ressources humaines, de recherche de financement.
Et qu'est-ce que vous pouvez faire ou qu'est-ce que vous pouvez offrir comme soutien à ceux et celles qui oeuvrent dans ce domaine-là? Leur offrir en tout cas une formation ou un appui qui va leur permettre de leur donner des outils supplémentaires pour pouvoir atteindre leurs objectifs. Parce qu'on se rend compte que souvent ils manquent d'outils et de moyens pour pouvoir avoir une formation adéquate qui leur permet d'atteindre leurs objectifs en termes de financement, notamment.
Mme Boucher (Louise): Alors, votre constat est tout à fait juste, puis j'ai envie de dire que, dans le CQRHC, il y a deux C; il y en a certainement un pour créativité puis il y en a certainement un autre pour courage parce que souvent, pour développer, on est en marge et on est en situation sans filet.
Je vais d'abord faire un constat de lucidité sur ce qu'on a réussi et ce qu'on n'a pas réussi encore puis vous parler d'une belle ouverture qui s'en vient pour ces compétences-là qui est gestion des affaires, financement, levée de fonds, viabilité, bon, le département des miracles.
À l'heure actuelle, dans les... On s'est mis d'accord tout le Québec, alors tous les conseils régionaux de la culture et toutes nos associations, sur neuf champs de formation stratégiques. Il y en a un qui s'appelle Gestion des organisations culturelles. Il y en a un qui s'appelle Gestion des entreprises parce qu'on a du but lucratif et de l'entreprise privée. Puis on en a un qui s'appelle Gestion de carrière, quand la personne est toute seule maître de son bateau.
À l'heure actuelle, on s'explique mal pourquoi les deux champs de formation Gestion des affaires et Gestion des organismes culturels sont nos deux champs de formation les moins populaires. Peut-être parce que c'est difficile de regarder ces problèmes-là, peut-être parce que c'est difficile d'y répondre, mais, après avoir obtenu une évaluation gouvernementale, on a constaté ça, et c'est un défi qu'on se donne pour les prochaines années. Donc, on est lucide. On n'a pas bien réussi dans ces deux champs-là par rapport aux compétences plus artistiques, techniques, mondialisation, donc ce qui allume vraiment les artistes et les compagnies.
Par contre, l'autre ouverture que je trouve intéressante d'examiner au moment où on est situé, nous, le CQRHC, c'est que c'est un milieu qui dépend beaucoup de l'aide publique officielle, y compris les petits coups de pouce que peuvent donner les députés à l'occasion. Et ce qu'on s'aperçoit, c'est que les bailleurs de fonds sont très conscients de cet équilibre-là. On est en train de prendre un virage qu'on appelle la santé organisationnelle, c'est-à-dire que les bailleurs de fonds disent: Tu as des projets artistiques fabuleux. C'est incroyable. Je sais où tu t'en vas, sauf que je me demande si tu as la capacité au niveau de l'équipe, au niveau des ressources financières, au niveau de la trésorerie, pour y arriver.
Donc, désormais, quand on va évaluer les projets, on va s'assurer d'un équilibre entre ces deux-là. Ce que ça veut dire pour l'organisme, c'est qu'il faut qu'il apprenne, lui, à faire un diagnostic de sa situation. Là, on travaille sur ces outils-là. Est-ce que ça va avoir un impact dans trois ans? Je l'espère. Mais présentement on est en train de leur donner des outils pour qu'ils fassent ce bilan-là, pour qu'ils ne soient pas démunis quand ils vont présenter leur projet pour la prochaine année, parce que maintenant les bailleurs de fonds ont des nouvelles exigences.
Au Québec, avec la ministre Beauchamp, il y a un outil important qui s'appelle Placements Culture, où on va encourager les organismes à faire de la levée de fonds avec un niveau d'expertise. Et ce qui est important... On a envoyé un signal, et je suis très contente parce qu'il a été capté au vol par... C'est le Conseil des arts et des lettres qui gère Placements Culture pour toute la clientèle culturelle au nom de la ministre, et ils se sont aperçus qu'il fallait, oui, de l'expertise pour faire ça. Ils ont donc structuré une série de sessions de formation et ils ont une personne experte qui est disponible pour accompagner les demandes. Et je regarde ça, et présentement ça fait partie de notre réflexion sur l'avenir, sur le modèle durable. Et je me dis: Peut-être qu'il y a un partage des rôles qu'on devrait mieux établir entre ce qu'on fait, nous, au comité sectoriel, avec les associations, et ce que les bailleurs de fonds peuvent faire aussi parce qu'ils veulent provoquer des changements. Ils ont aussi la responsabilité de les accompagner, ces changements-là, quand ça demande des nouvelles compétences. Et ça, c'est en train de se passer. Donc, je trouve que c'est un horizon qui est très stimulant, là, pour les prochaines années.
M. Girard: Parce que c'est la problématique d'offrir à ceux et celles, par exemple, qui gèrent des troupes de théâtre... Ils viennent souvent nous rencontrer, ils nous présentent des projets qui sont extraordinaires; certains même méritent des prix. Au gala des Masques, j'ai eu l'occasion d'en rencontrer dans ma circonscription, et je pense qu'ils ont besoin en tout cas d'outils pour leur permettre d'amasser du financement, d'avoir la survie de leur troupe de théâtre sur une plus longue, sur une plus longue période.
Puis je voulais savoir si ? parce que, moi, je représente un comté qui est montréalais, un comté urbain; si ? les mêmes problématiques, les mêmes problématiques quant à des besoins en termes de formation pour la recherche de financement, de gestion des ressources humaines, vous les vivez aussi dans différentes régions du Québec, avec d'autres troupes de théâtre ou d'autres partenaires qui oeuvrent dans le milieu culturel. Et est-ce que les conseils, les conseils régionaux des partenaires du marché du travail vous offrent, dans les régions respectives, des outils pour vous aider à développer une formation spécifique pour la clientèle qui oeuvre dans le domaine de la culture?
Mme Boucher (Louise): Je crois sincèrement que ces problématiques-là sont partagées partout. Les liens avec les commissions régionales de partenaires du marché du travail sont assez, assez faibles, pour ne pas dire inexistants parce que, comme je vous expliquais, notre partenaire naturel, nous, c'était le Conseil régional de la culture. Donc, on s'est connecté aux conseils régionaux.
n(16 h 10)n Et je ne crois pas que les CRC soient beaucoup impliqués dans les commissions régionales de partenaires du marché du travail. S'ils y étaient, je crois qu'ils demanderaient une chose assez importante, ce serait du soutien pour la création d'emplois parce qu'on parle de compétence mais, ce qu'il faut dire, c'est qu'il manque des mains, il manque des personnes dans ces organismes-là qui ont le profil de l'emploi pour faire des tâches assez importantes, là, quand on parle de développer des publics, de commercialiser, même d'envisager de la diffusion à l'international. Et ça, c'est, bon, c'est le constat typique du secteur culturel, c'est que les fonctions artistiques sont bien pourvues, des gens très motivés, mais, quand on regarde l'équipe qui est autour...
Vous savez, il y a moins de 40 % des organismes à but non lucratif qui sont soutenus au fonctionnement. Ça, ça veut dire qu'une partie de leur fonctionnement de base est assuré. Les autres, ils bricolent, à chaque année, des budgets de projets, incluant ce qu'ils vont solliciter à droite et à gauche, incluant ce qu'ils sont capables de collecter en revenus autonomes. Donc, c'est difficile pour eux de structurer des équipes vraiment compétentes. Ils vont miser sur la polyvalence, ils vont mesurer sur quelqu'un qui croit tellement à la mission de l'organisation qu'il est prêt à faire deux, trois fonctions de travail. Donc, c'est un enjeu qui est de taille, essayer de leur donner...
On pense qu'avec l'idée de santé organisationnelle, on va arrêter... On va mettre quelque chose au clair. C'est que, présentement, on cache les ressources humaines dans le garde-robe. Vous savez, vous êtes soutenus pour un mission artistique, pour un calendrier de programmation, vous êtes soutenus pour le nombre de produits que vous allez livrer, personne ne vous pose la question de qui est derrière pour travailler et les faire. Quand le Conseil des ressources humaines en culture s'est structuré, on a insisté pour avoir le ministère de la Culture à notre table. Il y a un délégué du ministère de la Culture qui assiste à toutes nos réunions du conseil d'administration parce qu'on a demandé au ministère de la Culture de prendre le virage ressources humaines. On a demandé à Emploi-Québec de prendre le virage culturel, il l'a très bien pris. Il a assoupli toutes sortes de conditions, il a reconnu notre façon de regrouper les clientèles, mais on travaille fort à faire prendre le virage ressources humaines parce que c'est encore malheureusement la réalité de «the show must go on». Une fois qu'on a développé la belle idée et qu'elle a été reconnue, il faut le faire à tout prix, dans n'importe quelles conditions, puis, bien souvent, on n'a pas les gens qui ont les compétences pour toutes ces fonctions de travail là.
On pourra faire un bout en termes de développer des compétences. On va s'adresser à des personnes qui occupent déjà deux, trois fonctions de travail, on va essayer de les rendre plus performantes, mais idéalement ce serait bien qu'il y ait un investissement ou une reconnaissance de la bailleur des fonds pour ces fonctions de travail là. Ça s'en vient.
M. Girard: Également, je voulais revenir sur les mutuelles de formation. Est-ce qu'à votre point de vue il pourrait avoir d'autres projets de mutuelles de formation dans le domaine de la culture? On en a eu dans le secteur audiovisuel, on a eu une présentation tout à l'heure, mais est-ce qu'il y a d'autres projets qui sont en préparation, d'autres idées qui seraient pertinentes dans votre secteur d'activité?
Mme Boucher (Louise): Alors, je peux vous parler des deux projets qui étaient les mieux avancés dans les projets pilotes de mutuelles: il y avait celui de l'Association des libraires et il y avait celui des professionnels en audio. Dans les deux cas, ils étaient en train de réfléchir à une façon de demander une contribution volontaire des entreprises, mais ce qui fait défaut, c'est un minimum de financement de base pour être capable, à chaque année, de refaire une programmation, de reprendre le bâton de pèlerin, de convaincre de nouveau chaque entreprise de s'intéresser au plan et de verser sa contribution. Donc ça, c'est là que, dans les deux cas, les choses se sont arrêtées à la fin du projet pilote. Je crois que même une des deux avait fait la tentative de demander la prolongation d'une année pour avoir le temps de faire un petit plan de sensibilisation et de mise en marché. Et, dans ces deux milieux-là, je crois qu'il y a une partie de la solution qui serait assez simple étant donné tout le travail qui est fait. Et, heureusement, les études de besoins qui ont été faites, la sensibilisation des secteurs, elle est là, elle n'est pas perdue, mais ce qu'il faut pour l'association, c'est un minimum de ressources pour rester stable dans le temps, pour faire ce travail-là, c'est un travail de vente et de conviction.
M. Girard: À ce moment-là, est-ce que vous partagez le point de vue de d'autres groupes qui sont venus nous rencontrer dans le cadre de la commission parlementaire et qui ont réclamé un financement pour une période minimale de cinq ans, pour l'implantation ou le développement de mutuelles de formation sectorielles ou territoriales? Est-ce que ça ne serait pas une façon, pour vous, de vous aider à les développer puis d'élargir le champs des mutuelles dans le secteur de la culture? Est-ce que c'est une avenue que vous envisagez?
Mme Boucher (Louise): Pour les deux exemples que je viens de vous donner, je suis certaine que ce serait un cadeau du ciel. Ailleurs, je ne suis pas sûre qu'on aurait les conditions pour essayer d'en structurer, parce que l'appel était très stimulant à l'époque des projets pilotes de mutuelle de formation. On a travaillé à faire une rencontre de tous les coordonnateurs, on avait eu des ressources, des personnes-ressources du fonds national qui étaient venues expliquer ce que c'était, une mutuelle, comment ça devait fonctionner, puis on n'a pas réussi à détecter d'autres sous-secteurs culturels qui pourraient le faire. Mais, pour ces deux-là, je suis convaincue que ce serait une condition très intéressante.
M. Girard: Et le bilan que vous tracez jusqu'ici des mutuelles de formation est très positif, dans ces deux secteurs d'activité là que vous nous avez présentés?
Mme Boucher (Louise): La seule qui existe, c'est celle de l'audiovisuel. Dans ces deux-là, l'expérience qu'ils ont faite avec le projet pilote, c'est important, parce qu'ils se sont donné une étude de besoins, ils ont pu rassembler, parler avec les entreprises et les travailleurs de leur secteur, et ça, je pense qu'ils ont bien préparé le terrain. Mais les deux ne sont pas opérationnelles, là, pour les libraires et l'enregistrement sonore. Il y a seulement celle de l'audiovisuel qui fonctionne. Oui.
Le Président (M. Jutras): Alors, ça va? Alors, merci beaucoup, madame, pour votre présentation.
Mme Boucher (Louise): Merci.
Le Président (M. Jutras): Et bon retour chez vous.
Et je vais demander sans plus tarder au Conseil régional des partenaires du marché du travail de Laval de bien vouloir s'avancer et prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Je souhaite la bienvenue aux représentants et représentantes du Conseil régional des partenaires du marché du travail de Laval. Alors, je vous rappelle les règles: vous avez 15 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, il y aura un échange de 15 minutes avec les députés ministériels et, par après, un échange de 15 minutes avec les députés de l'opposition.
Le principal porte-parole ou la principale porte-parole, c'est... C'est vous, madame? Alors donc, si vous voulez vous identifier en premier effectivement, après présenter les personnes qui vous accompagnent et procéder à la présentation de votre mémoire.
Conseil régional des partenaires du marché
du travail de Laval (CRPMT-Laval)
Mme Sauvé (Monique): M. le Président, merci. Mmes les députées, MM. les députés, bonjour. Merci de nous avoir permis d'être ici, aujourd'hui. Alors, je me présente, Monique Sauvé, présidente du Conseil régional des partenaires du marché du travail de Laval. Et également je porte un autre chapeau dans mon quotidien, je suis directrice du Carrefour jeunesse-emploi de Laval. Donc, j'aimerais vous présenter les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, M. Michel Cournoyer, directeur régional d'Emploi-Québec; et à ma droite, Mme Caroline Pilon, qui est conseillère aux entreprises.
Alors, je suis ici avec mes collègues pour représenter l'ensemble des partenaires du marché du travail et profiter de cette occasion pour vous présenter en fait un témoignage, une expérimentation. Si notre présentation est fort simple, je vous dirais par contre qu'elle traduit une réalité et un défi fort complexes, et cette expérimentation-là, elle est en termes de projet de francisation pour travailler et nous aider à travailler, au conseil régional, à une de nos grandes priorités, qui est l'intégration réussie des clientèles immigrantes.
Alors donc, sans plus tarder, l'objectif que poursuit ici le Conseil régional des partenaires du marché du travail est effectivement de témoigner de l'expérience de l'application du programme de subvention pour la francisation en milieu de travail dans sa région et de faire part des constats observés.
Le programme de subvention pour la francisation en milieu de travail s'inscrit dans le plan d'affectation des ressources du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. Ce plan résulte d'une consultation menée par la Commission des partenaires du marché du travail sur les orientations à retenir pour l'affectation des ressources provenant de l'application de la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre. Les ressources financières affectées à la réalisation de projets de formation répondant à des besoins régionaux étaient de l'ordre de 8 millions en 2004-2005 et en 2005-2006.
n(16 h 20)n En créant le programme de subvention pour l'intervention régionale en matière de formation de la main-d'oeuvre en emploi, la Commission des partenaires du marché du travail souhaitait répondre à des besoins en formation de base, en francisation et en recyclage de la main-d'oeuvre en emploi. Les données du dernier recensement confirment l'importance des besoins en francisation et en formation de base à Laval. Une caractéristique démographique importante est la forte concentration d'immigrants sur son territoire. En effet, en 2001, près d'une personne sur six a ce statut. Entre 1996 et 2001, la croissance de la population immigrante est estimée à 9,8 %, comparativement à 3,8 %, au Québec. Dans le contexte du vieillissement de sa population et du recul de sa croissance démographique, l'augmentation de la population immigrante sur le territoire est certainement un avantage. N'eût été effectivement de l'immigration, la population lavalloise ne serait pas en augmentation depuis déjà au moins deux ans.
Cependant, cet accroissement se traduit notamment par des besoins accrus de formation en francisation. En 1996, 23,9 % des immigrants ne connaissent pas le français; pour les autres, le niveau de maîtrise du français parlé ou écrit n'est pas comptabilisé. Une étude réalisée par Emploi-Québec en 2001 sur le portrait statistique de la population immigrante de Laval atteste que la méconnaissance du français constitue une des importantes difficultés auxquelles doivent faire face les immigrants. En emploi, cette difficulté se traduit en termes d'intégration en entreprise, de cheminement de carrière et d'efficacité.
Si on regarde une étude qui a été faite par Emploi-Québec, en 2001, sur l'intégration des immigrants au marché du travail à la région de Laval, on nous disait et on nous citait, dans cette étude-là, que «la connaissance du français est devenue une compétence extrêmement importante à tous les niveaux de l'organisation, et ce, peu importe la taille des entreprises, et sa méconnaissance peut constituer un des principaux obstacles à la mobilité professionnelle et à l'obtention d'un meilleur emploi».
Également, dans une étude de Statistique Canada qui date de septembre 2004, Statistique Canada observait que la rémunération des travailleurs immigrants en 2004 est moindre que celle des travailleurs nés au Canada, et que cet écart salarial est attribuable en partie à la méconnaissance du français ou de l'anglais.
En novembre 2004, le conseil régional des partenaires du marché du travail dépose donc à la commission un plan d'action proposant la réalisation d'activités de formation en francisation et en formation de base, deux activités priorisées par le programme. Il est convenu d'adopter une stratégie en étapes, en débutant avec la francisation, notre priorité. Le principal objectif du plan d'action est de répondre au besoin de formation des employeurs en utilisant pleinement l'enveloppe budgétaire octroyée, c'est-à-dire d'atteindre le maximum de participants possible.
Trois recommandations sont émises alors quant au choix des participants, advenant le cas où, l'offre étant trop populaire, un contingentement s'imposerait. Donc, les trois recommandations sont les suivantes, soit de favoriser la participation aux cours de francisation en milieu de travail, de privilégier une représentation équitable d'hommes et de femmes, et d'encourager la participation de candidats qui autrement n'auraient pas accès à des cours de francisation ? bonjour, Mme la ministre.
La mise en oeuvre du projet de francisation et les résultats sont présentés dans la prochaine section. Une rétrospective des enseignements de cette expérience conclut ce mémoire. Je cède maintenant la parole à M. Cournoyer.
M. Cournoyer (Michel): Bonjour.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Cournoyer.
M. Cournoyer (Michel): Laval disposait, en 2004-2005, de 399 000 $ pour l'application de son plan d'action. Selon les estimations, la pleine utilisation de l'enveloppe budgétaire permettait la participation d'une dizaine d'entreprises et de 75 participants. Une consultation auprès du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles et de l'Office québécois de la langue française confirme les besoins des entreprises en francisation. Le programme de formation recommandé est de quatre heures par semaine pendant 20 semaines. Cependant, le programme contient des incitatifs très importants, et cela ne laisse aucun doute à l'esprit du conseil sur l'atteinte des objectifs de participation. La subvention permet aux entreprises le remboursement du salaire des employés participants en plus des frais associés aux activités de formation. Ainsi, les contenus adaptés à une formation en milieu de travail sont développés, et la campagne promotionnelle, lancée en mars 2005. La stratégie publicitaire comporte notamment la tenue d'une conférence de presse de lancement, deux points de presse et une vingtaine de publicités diffusées dans les hebdomadaires locaux. Les entreprises ayant une masse salariale supérieure à 250 000 $ pour l'année civile 2003 sont ciblées, tous secteurs confondus. Emploi-Québec Laval s'adjoint la collaboration de ses principaux partenaires dans le recrutement des entreprises. 82 entreprises sont contactées entre le mois d'avril et septembre 2005.
L'activité de francisation suscite beaucoup d'intérêt, mais cet intérêt tarde à se manifester en participation d'employés. L'approche par groupe constitue un obstacle; la taille minimale de huit participants par groupe est un critère restrictif. Le besoin des entreprises est souvent moindre, et aucune proposition de jumelage entre deux entreprises n'aboutit. L'approche est impopulaire. Pour des motifs particuliers, les employeurs sont réfractaires à regrouper leurs employés avec ceux d'autres employeurs.
Des facteurs de concurrence dans le recrutement et de concurrence technologique semblent en cause. De plus, la coordination des besoins de formation, des horaires de formation, des horaires de travail entre deux entreprises est difficile. En septembre 2005, une seule entreprise et ses 19 participants bénéficient du programme, entraînant la péremption de près de la moitié de l'enveloppe octroyée pour 2004-2005, ces argents n'ayant pas été engagés au 31 mars 2005. Au même moment, la région de Montréal dépasse ses objectifs en francisation. L'importation de ses façons de faire permet de constater une réalité différente. Le marché du travail de Laval se compose majoritairement de petites et moyennes entreprises dans lesquelles on ne retrouve pas un grand nombre d'employés immigrants. À Montréal, une seule entreprise participante en forme plus de 90.
Le plan d'action 2005-2006 déposé cet automne reprend l'objectif de desservir le mieux possible les besoins de formation des entreprises en utilisant pleinement l'enveloppe budgétaire accordée. Compte tenu des conditions de mise en oeuvre du programme et de l'expérience avec l'activité de francisation, l'engagement avant le 31 mars 2006 des sommes nécessaires pour la réalisation d'activités de formation de base est jugé improbable. Il est donc proposé de prioriser la poursuite d'activités en francisation, tout en réalisant une formation en gestion de la formation et en offrant d'autres formations admissibles répondant aux besoins identifiés par les entreprises. Afin de tenir compte de la réalité lavalloise, la composition des groupes de formation de moins de huit participants sera justifiée au fonds national. Le conseil régional propose également de s'impliquer directement dans le recrutement d'entreprises et de participants.
Aujourd'hui, cinq entreprises et 55 participants bénéficient actuellement de la formation. Les résultats permettent de mettre en lumière un autre constat, malgré l'intérêt manifesté par les entreprises, les employés démontrent un faible niveau d'engagement.
De façon générale, les entreprises ne considèrent pas avoir une responsabilité dans la formation de leurs employés en francisation et n'ont donc pas comme pratique de les rémunérer durant la formation. Et pour ne pas créer de précédent, les entreprises ne se prévalent pas de la subvention permettant le remboursement des salaires. Cela n'incite pas les employés à manifester leur intérêt, surtout pour un programme aussi prenant. J'aimerais ici citer M. Yvan Deschamps, de l'entreprise Cheminées sécurité internationale ltée. Ouvrons la parenthèse: «Notre entreprise est disposée à soutenir ce genre de projet et d'initiative, mais sa réalisation dépend avant tout de la réelle volonté des individus ciblés à suivre ce genre de formation» ? fermons la parenthèse.
Très intéressée par la formation, l'entreprise Cheminées sécurité a tenté d'en faire bénéficier ses employés, mais aucun des 25 immigrants d'origine asiatique ne s'est manifesté. Le mémo rédigé en cambodgien faisait part de l'importance du français pour se prévaloir des opportunités de promotion à l'interne, de l'offre de formation gratuite, du local mis à leur disposition par l'entreprise et de l'horaire. Estimant que l'entreprise n'avait pas à subir de pertes de temps de travail, la formation aurait eu lieu le samedi, sur le temps des employés.
Revenons aux résultats d'ensemble, 19 des 55 participants sont rémunérés. Les engagements par conséquent représentent actuellement 35 % du budget de francisation, alors qu'autrement, si les employés avaient été rémunérés, les engagements pourraient représenter 50 % du budget. Le remboursement des salaires n'est pas suffisant, selon le témoignage de plusieurs entreprises. Les employés ne veulent pas se franciser dans certains cas, qu'ils soient payés ou non.
Malgré les difficultés rencontrées, les besoins en francisation sont présents, et le conseil régional souhaite bénéficier de davantage de temps pour permettre à un maximum de participants de se prévaloir de cette opportunité.
n(16 h 30)nMme Sauvé (Monique): En résumé, la présentation de ce mémoire n'a d'autre prétention en fait que de vous témoigner de façon importante d'une expérience vraiment terrain de l'application du programme de subvention pour la francisation en milieu de travail à Laval et de vous faire part des constats observés. Le principal enseignement que l'on retient de cette expérience est que le développement d'un savoir-faire dans l'organisation d'une intervention de francisation en milieu de travail prend du temps. Sa réalisation en nécessite également beaucoup. Un projet de cette envergure commande une bonne planification et un effort concerté des principaux partenaires du milieu. L'expérience a permis de constater autre chose, c'est que les décisions prises dans les milieux de travail sont fondées, même lorsqu'on ne les comprend pas. Et l'intérêt des immigrants à se franciser, il est très variable et peut parfois dépasser notre cadre d'intervention.
Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit là d'un besoin prioritaire au conseil régional, et on remercie à cet effet, le Conseil régional des partenaires du marché du travail, la Commission des partenaires ainsi que la ministre du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale pour avoir mis à sa disposition un tel programme, qui est une réelle opportunité pour nous. Nous souhaitons donc que le programme soit maintenu et que ses modalités d'application reconnaissent pleinement le temps requis pour sa mise en oeuvre, et je me permettrais d'ajouter toute la souplesse et l'adaptation qui est nécessaire de façon régionale pour en faire un succès. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, mesdames, merci, monsieur. Je cède la parole à la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Merci. Merci, Mme Sauvé, M. Cournoyer et Mme Pilon, pour la présentation de votre mémoire. Vous nous présentez une expérience qui s'est déroulée dans le comté de la ministre...
Une voix: Dans la région.
Mme Gaudet: ...dans la région de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Cependant, je pense que ce qu'on doit comprendre, là, de votre mémoire, c'est que ça n'a pas fonctionné à la hauteur de vos attentes et de l'investissement en énergie que vous y avez mis. Vous nous dites que la région de Montréal a atteint ses objectifs, alors que votre région n'a pas atteint ses objectifs.
Et j'aimerais que vous nous expliquiez: Est-ce que c'est parce que vous considérez que les conditions à Laval ne sont pas réunies pour faire en sorte que vous atteigniez les objectifs attendus? Qu'est-ce qui pourrait faire en sorte que ça marche mieux?
Mme Sauvé (Monique): Alors, je vais vous répondre, Mme la députée. Écoutez, votre question est très légitime. Moi, je vous dirais que, comme Mme la ministre le sait, les gens de Laval sont très positifs, donc je vais plutôt aller vers une approche positive de la chose. Je vous dirais que la démonstration n'est pas de faire en sorte que ça a été difficile. Oui, il y a eu des défis, il y a eu des obstacles, mais je pense que la conclusion qu'on doit en tirer, c'est de se dire qu'il y a une expérimentation là et il y a un défi important parce qu'il s'agit de travailler avec des petites entreprises, des moyennes entreprises, qu'il y a là, dans chacune de ces entreprises-là, un petit volume d'employés immigrants, alors un autre élément de défi.
Alors donc, il y a une réalité très particulière lavalloise qui fait en sorte qu'au fur et à mesure où l'expérimentation s'est faite on a eu à s'adapter, on a eu à revenir au conseil, on a eu à regarder ensemble comment on module les choses. Et je vous dirais que c'est un peu ça. Dans le fond, on n'a pas d'autre prétention aujourd'hui, en venant vous présenter ça, qu'en vous disant: Merci, c'est merveilleux, il faut nous laisser cette marge de manoeuvre là d'intervenir, de moduler les choses d'étape en étape, parce qu'on ne lâchera pas cette priorité-là qui est de franciser ces clientèles-là. Alors, c'est un peu le message qu'on veut... la rétro-information qu'on veut vous donner. Alors ça, je pense que c'est important.
Puis, par rapport à Montréal, effectivement, Montréal fait en sorte que les volumes d'employés représentant des clientèles immigrantes dans les entreprises sont un volume tel qu'on peut intervenir d'une tout autre façon. Nous, pour avoir un seul groupe qu'on veut franciser, il faut quelquefois aller vers deux entreprises avec deux réalités de petite entreprise différentes. Ça devient fort complexe. Puis en même temps l'entrepreneur qui a à faire face à ce défi-là à Laval, bien c'est très clair qu'il y a la notion de productivité, le volume de clientèle immigrante qui est un petit ratio de l'ensemble de ses employés, la notion de performance, productivité de son entreprise. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'il faut s'adapter presque d'entreprise à entreprise pour que ça marche, mais on va continuer à le faire.
Le Président (M. Jutras): Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mme Sauvé, ça fait plaisir de vous voir ici, à Québec, de même que Mme Pilon, M. Cournoyer. Vous voyez, je n'ai rien manqué.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Courchesne: Écoutez, je me rappelle très bien, si ma mémoire est bonne, ça faisait à peine quelques mois, je dirais, écoute, tout au plus trois mois que nous étions élus qu'on a annoncé ce programme-là. Je me rappelle, c'est une des toutes premières annonces qu'on avait faites, puis j'étais à l'Immigration, à ce moment-là. Mais c'est un programme d'Emploi-Québec. C'est ça, hein? C'est la même...
Mme Sauvé (Monique): Oui.
Mme Courchesne: On parle du même...
Mme Sauvé (Monique): Tout à fait.
Mme Courchesne: Et on parle beaucoup, à Laval comme dans d'autres régions du Québec, de difficultés de recrutement. On peut dire que, chez nous aussi, il y a ces immenses affiches: Nous embauchons. On les voit partout dans le parc industriel. Donc, on comprend qu'il y a ce besoin de main-d'oeuvre. Ce qu'on comprend aussi, c'est qu'il y a, je pourrais dire, un débordement des nouveaux arrivants sur Laval parce qu'à Montréal, dans la partie nord, ville Saint-Laurent, Cartierville, Ahuntsic, déjà c'est, bon... Alors, chez nous, il y avait encore un boum de construction résidentielle et plusieurs deuxièmes générations aussi viennent s'installer à Laval. Ce que vous nous dites donc, c'est qu'il y aurait à faire ce lien entre les besoins de main-d'oeuvre pour nos entreprises et la capacité de bien intégrer les nouveaux arrivants dans leur emploi. C'est un peu ça que vous nous dites? Et que, nous, à Laval, on a choisi d'accentuer et d'accélérer le volet de la francisation. Puis, ce que je crois comprendre, c'est qu'on a des difficultés avec nos employeurs qui n'y voient pas, eux, une telle nécessité.
J'essaie de comprendre la cohérence par rapport... si en même temps ils ont des difficultés à recruter, pourquoi ce bassin de population ne serait pas... Est-ce que c'est seulement la francisation ou il y a d'autres enjeux qui font qu'à Laval on n'arrive pas à retrouver cette facilité d'embauche par rapport à ces clientèles-là? Puis est-ce que la problématique est liée uniquement à la clientèle de l'immigration ou s'il y a d'autres types de problématiques qui se présentent à nous?
Mme Sauvé (Monique): Je me permettrai de répondre peut-être en partie ou totalement, mes collègues pourront me... Moi, je vous dirais que c'est très clair que l'expérimentation permet aussi de se rendre compte qu'il y a effectivement un travail à faire d'éducation, de sensibilisation auprès des employeurs et auprès des clientèles aussi, à voir de part et d'autre l'importance de ce processus de francisation là. Donc, c'est ce qui prend aussi du temps. Ça, c'est un élément qui est très réel.
En même temps, effectivement, vous avez tout à fait raison, il y a un besoin réel de recrutement de main-d'oeuvre. Et je pense qu'il y a une population intéressante, dans les entreprises, de la clientèle immigrante. Mais ce n'est somme toute jamais une proportion si importante par rapport à la masse des employés d'une même entreprise.
Mme Courchesne: Mais est-ce que vous retrouvez cette même problématique là pour d'autres types de formation en entreprise? Est-ce que c'est une caractéristique de nos employeurs d'être plus réticents à encourager la formation? Est-ce que c'est quelque chose, là, qui... Oublions un petit peu la clientèle immigrante, et puis est-ce qu'il y a une problématique particulière au niveau de l'accessibilité à la formation chez nos employeurs lavallois?
Mme Sauvé (Monique): Je peux répondre encore en partie, peut-être que Mme Pilon ou M. Cournoyer pourront compléter. Je pense qu'une corde sensible que j'ai, évidemment ce sont les jeunes. Et je vous dirais que cette clientèle-là aussi... Quand on parle de la formation, je vous dirais, il y a formation et intégration aussi, hein, dans les entreprises. Et je vous dirais que, nous, au Conseil régional des partenaires du marché du travail, si on a priorisé la clientèle immigrante? Effectivement. Je pense que ça se reflète aussi pour d'autres types de clientèles dont les jeunes, où il y a le processus d'intégration, d'accueil qui fait en sorte que ces clientèles-là dans les entreprises n'intègrent pas seulement un emploi mais le maintiennent. Alors, je pense que, ça, il y a un travail. Au conseil régional, on est sensibles à ça, on est en train d'essayer même de promouvoir les pratiques d'intégration et des clientèles immigrante et des jeunes dans les entreprises. Mais c'est un travail, je vous dirais, qui est particulier, entre autres parce qu'à Laval il y a beaucoup de PME. Et la PME n'a pas tout le soutien, toutes les ressources humaines nécessairement pour prévoir tous les programmes de formation, pour les planifier, les organiser et prévoir aussi l'accueil réussi, là, des clientèles qui nécessitent un accompagnement particulier.
n(16 h 40)nMme Courchesne: Bien, à ce moment-là, si on procédait par mutuelle ou par regroupement, est-ce que ça ne serait pas plus facile? Est-ce qu'on n'aurait pas là un levier pour mieux convaincre de se tourner vers la formation parce que j'imagine que le problème de compétitivité est aussi vrai chez nous qu'ailleurs? Donc, est-ce que ça, ça peut être envisagé? Est-ce que le conseil peut jouer un rôle dans ce sens-là, d'essayer?
Puis j'ai compris, M. Cournoyer, vous avez dit: Il y a un peu de réticence parce qu'on est entre compétiteurs. Mais, en même temps, à Laval, il y a deux semaines, j'ai fait une belle annonce de formation pour tous les gens qui étaient dans les réseaux de câblage structurés, dans l'installation. Je ne sais pas, là, il me semble... puis on en a beaucoup parlé, nous, ici depuis deux semaines, est-ce que ça, ça peut être envisageable?
Mme Sauvé (Monique): Bien, je pense que c'est une avenue qui pourrait être effectivement envisagée, même si, dans l'expérimentation, on l'a tenté et que ce n'est pas facile, mais je pense que c'est une avenue où il faut aller plus loin. Moi, je pense que... Je ne sais pas si mes collègues veulent intervenir là-dessus.
M. Cournoyer (Michel): Oui, certainement. Je dirais par ailleurs que ce qu'on constate, ce qu'on a observé ne vaut que pour la formation en francisation. Si on observe par exemple la réponse des employeurs dans d'autres volets du volet régional, comme on a mis en application le volet de formation des formateurs, la réponse a été pratiquement instantanée. Donc, c'est l'observation qu'on fait quant aux difficultés de recruter des participants. Ça vaut principalement, je dirais, pour la francisation.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui. Mon intervention est très terrain. En Chaudière-Appalaches, nous, ce serait du côté anglicisation parce qu'on est 100 % français et on n'a pas beaucoup d'immigration, mais je vois que le programme d'intervention régional soutient également la formation de base: activités de recyclage, formation en gestion de formation. Chez nous, on attire les mouches avec du miel. Donc, si vous adaptiez les activités de recyclage qui est à la mode à la francisation, ce ne serait pas une approche qui pourrait être...
Une voix: Bonne question.
M. Cournoyer (Michel): Je dirais que le conseil régional a souhaité prioriser la francisation même malgré le degré de difficulté, compte tenu que, pour le fonctionnement du marché du travail, l'intégration des immigrants paraissait aux yeux du conseil comme un élément très important. Le conseil a choisi de travailler à lever des obstacles et puis d'en faire quand même sa priorité plutôt que d'aller dans des formations effectivement où on aurait pu observer plus de facilité à mettre en oeuvre, là.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui, je comprends, mais ce n'est pas ça que je veux dire, c'est que se servir de l'activité de recyclage pour faire apprendre le français par les termes de recyclage, le cours se donne en français. Vous comprenez ce que je veux dire? Non?
Le Président (M. Jutras): Oui, est-ce que vous répondez?
M. Cournoyer (Michel): On n'a certainement pas envisagé cette option-là.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): C'était juste une idée que j'avais, là.
Mme Sauvé (Monique): Bien, je trouve ça intéressant comme piste. Moi, je retiens, on retient ça certainement.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Parce que là, ils vont apprendre des termes au niveau du recyclage si tout le monde... l'environnement, le développement durable c'est à la mode et, moi, j'attirerais ces gens-là par cette activité de formation.
Mme Sauvé (Monique): On retient. Merci beaucoup du commentaire. Merci.
Le Président (M. Jutras): L'enrichissement va dans les deux sens. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Ça va? Du côté de l'opposition, M. le député de Gouin.
M. Girard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous remercier pour la présentation de votre mémoire qui nous éclaire sur une problématique qui est importante, la francisation en milieu de travail. D'ailleurs, on le sait qu'au Québec le défi pour le développement de la langue française, le principal défi, c'est la question de la francisation en milieu de travail. D'ailleurs, lorsqu'il y avait eu la commission des états généraux sur la langue, le rapport Larose avait clairement démontré que le principal défi, c'est la francisation dans le milieu de travail. Lors de la commission parlementaire, on a eu l'occasion d'entendre notamment les représentants syndicaux qui siègent à la Commission des partenaires sur le marché du travail qui nous ont rappelé qu'entre 2000 et 2004, sur 1 500 projets de formation qui ont été étudiés par la direction du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre, il y a eu simplement 16 projets en francisation qui ont été financés alors que les besoins sont immenses, vous l'avez vous-même rappelé pour la région de Laval où il y a une croissance importante de la population immigrante.
J'aurais aimé savoir quel est le taux de chômage au niveau de la population immigrante à Laval par rapport à celui du chômage chez les Blancs, je ne sais pas si vous avez ces statistiques-là.
Mme Sauvé (Monique): On ne les a pas avec nous, à jour, malheureusement, mais ce serait des données importantes, oui.
M. Girard: Parce qu'on sait ? puis c'est une problématique large que tout le monde connaît au Québec ? on sait qu'il y a des problématiques aussi plus larges de discrimination qui existent dans les entreprises. On sait qu'il y a des taux de chômage qui sont plus élevés chez les immigrants, on le sait au niveau de la communauté algérienne, la communauté marocaine, la communauté noire. Et je me demandais si, au niveau de la région, vous notez qu'il existe en entreprise des problématiques aussi de discrimination à l'égard de la population immigrante, si vous avez pu faire ces constats-là, comme ils existent, et ils ont été chiffrés sur l'île de Montréal, dans plusieurs entreprises et dans plusieurs organisations.
Mme Sauvé (Monique): Je me permettrais de répondre, je pense que c'est une question très importante. Je pense que, tantôt, quand on parlait, dans notre intervention, d'approcher les employeurs dans une approche d'éducation et de sensibilisation, je pense qu'il faut jouer ce rôle-là. Je pense que c'est important pour un projet comme celui-là, et les préjugés peuvent exister, hein, on est dans une réalité qui est celle-là. Et je pense que de pouvoir travailler avec les employés... les employeurs ? pardon ? à comprendre les réalités culturelles, je pense qu'il y a un travail à faire à ce niveau-là, effectivement, qui est important.
Alors, on a, nous, à Laval... évidemment, quand on regarde les populations immigrantes qui sont à Laval, encore là, il y a des communautés qui sont plus présentes, donc on est à même, là, de pouvoir travailler avec les employeurs à regarder. Mais je vous dirais qu'effectivement, là, on ne se le cachera pas, c'est des réalités qui existent; je pense, de ne pas les admettre, ce serait de faire un faux pas, et puis... Donc, il y a un travail d'éducation, mais, plutôt que de regarder les préjugés, on préfère intervenir sur l'ouverture à avoir, c'est évidemment le type d'intervention qui est priorisé.
M. Girard: Pour ma gouverne, quelle est la répartition de la population immigrante à Laval? Quelles sont les principales communautés?
Mme Sauvé (Monique): Alors, il y a la communauté asiatique, la communauté haïtienne. C'est très localisé, hein, entre autres, par quartier, je ne nommerai pas les quartiers parce qu'évidemment ce n'est pas tout le monde qui connaît la carte de Laval, et je vous comprends. Mais il y a, bon, la communauté haïtienne, la communauté asiatique, Europe de l'Est, et puis Afrique, aussi, du Nord, donc marocaine, comme vous disiez tantôt, et puis évidemment, la communauté grecque qui est très importante également, là, à Laval. Je pense que ça fait le tour.
M. Girard: Je sais que vous n'avez pas les statistiques, là, mais ça aurait été... ce serait peut-être intéressant d'avoir les taux de chômage dans les différentes communautés, voir s'il y a des disparités entre différentes communautés. Et, de votre point de vue, quels sont les gestes qu'on doit poser très rapidement pour augmenter le nombre d'activités de francisation dans les entreprises, pour faire en sorte que les employeurs et les employés soient davantage intéressés à participer à ces activités-là? Quel plan de match vous vous donnez pour la région, puisque vous semblez nous dire que ce n'est pas pleinement utilisé, et pourtant que les besoins sont fort importants? Puis vous connaissez une problématique, comme plusieurs autres régions du Québec, de vieillissement de la main-d'oeuvre, de faible taux de natalité, donc comment faire face à cette réalité-là puis quel plan d'action vous vous donnez? Parce que vous avez besoin d'un soutien et d'un appui supplémentaire de la part de certains ministères pour vous permettre d'atteindre vos objectifs.
Mme Sauvé (Monique): Bien, dans un premier temps, j'aimerais vous dire que malheureusement on n'a pas les données avec nous, mais on les a, Emploi-Québec, ils les ont. Donc, on pourrait très facilement vous les faire parvenir; je pense que ce serait une information effectivement utile. Pour ce qui est... la suite de votre question, rappelez-moi juste...
Une voix: Les conditions facilitantes.
Mme Sauvé (Monique): Les conditions facilitantes, je vous dirais qu'on a déjà cheminé dans notre expérimentation, et, dans le fond, oui, effectivement, on pourrait être ici dans un processus de demande ou de soutien additionnel, mais je vous dirais qu'on veut plutôt faire la démonstration que ça nous a pris du temps, on travaille encore, on module les choses, on travaille à nuancer notre intervention auprès des entreprises, et ça donne déjà des résultats. Et donc je pense que les objectifs, on va les atteindre peut-être pas dans les délais qu'on s'était donnés, mais on va les atteindre dans une intervention plus nuancée.
n(16 h 50)n L'autre aspect. Un des éléments du plan d'action qui a été effectivement très intéressant, la mobilisation du Conseil des partenaires du marché du travail a été intéressante. Je vous dirais qu'on a eu des beaux gestes d'implication, entre autres, des représentants syndicaux, la FTQ, la CSN, qui ont participé de façon très, très active au recrutement, en toute subtilité, je dirais, à travailler avec les entreprises pour justement, là, faire valoir l'importance et la priorité. Ça fait que je vous dirais que, ça, c'est un élément du plan d'action, là, qui va, je pense, on est à voir les résultats de ça, mais il y a eu là une action concrète intéressante.
Donc, tout ça pour vous dire que je pense qu'on va y arriver avec les moyens que nous avons, mais en se donnant plus le temps de faire les choses en documentant nos pratiques puis en se permettant aussi d'analyser quant aux... Mme la ministre tantôt disait: Bon, qu'est-ce qui peut expliquer, qu'est-ce qui peut expliquer? Nous aussi on observe ça. Qu'est-ce qui peut expliquer? On essaie de trouver jusqu'où vont les éléments de contexte, c'est quoi les raisons de tout ça.
Nous, on le fait dans notre environnement de Laval. C'est sûr que toutes les analyses qui nous permettront de valider certaines tendances à d'autres niveaux puis dans d'autres régions pourraient être intéressantes, mais, nous, on a ce souci-là de continuer l'analyse en même temps qu'on expérimente les choses. Mais il y a déjà des résultats concrets de ce qu'on a modifié dans nos approches.
Mme Pilon (Caroline): Si je peux me permettre, quand on parle de l'importance du temps dans la mise en oeuvre d'un tel projet, ça peut se manifester, par exemple, par, dans une entreprise, un groupe d'employés qui a décidé effectivement de suivre la formation, et qui finalement termine la formation et qui, donc, permet un effet d'engouement et incite d'autres employés qui avaient des réticences peut-être ou certaines craintes par rapport à la formation et avoir un peu plus de temps, permet donc à davantage d'employés de manifester leur intérêt.
Mme Sauvé (Monique): L'effet multiplicateur.
Mme Pilon (Caroline): L'effet multiplicateur n'est pas à...
Une voix: Sous-estimer.
Mme Pilon (Caroline): Merci.
Une voix: Est-ce que ça répond à votre question?
M. Girard: Oui. Vous nous dites également qu'il y a un certain nombre d'employés d'origine immigrante qui semblent plus ou moins intéressés à suivre des cours pour favoriser la francisation. Vous expliquez ça comment? Est-ce que c'est parce que, de leur point de vue, ils ont l'impression qu'ils peuvent vivre dans la société québécoise sans nécessairement connaître ou sans l'apprentissage du français? Est-ce que... ou il y a peut-être un manque d'éducation qui leur est donnée pour leur expliquer à quel point c'est important d'apprendre la langue française pour pouvoir bien s'intégrer à la société québécoise puis avoir des promotions pour pouvoir progresser dans une entreprise?
Mme Sauvé (Monique): Toutes ces réponses et bien d'autres, je vous répondrais. En fait, quand je disais qu'il faut regarder, c'est un peu une réalité individu par individu. Il y en a qui n'y verront pas l'importance pour les raisons que vous donnez, il y en a d'autres ce sera simplement la réalité conciliation travail-famille, l'horaire de travail, poursuivre les cours, qui ne convient pas. Donc, c'est tous ces aspects-là. Alors, c'est pour ça que, la tendance généralisée, il n'y en a pas qu'une seule raison. Et c'est pour ça qu'il faut intervenir à différents niveaux et faire en sorte que différentes avenues soient proposées. Le plus on pourra travailler, effectivement, je retiens les commentaires qui sont intéressants, par regroupements, par d'autres avenues, faire en sorte qu'on peut offrir le plus d'avenues aux clientèles immigrantes pour suivre des cours qui répondent vraiment, là, aux besoins aussi de tous et chacun, bien je pense... Mais on a toujours la notion du volume qui est problématique et qui fait qu'on ne peut pas s'adresser à chaque fois à un grand nombre d'individus. Donc, il faut être attentifs aux réalités de chacun.
Mme Pilon (Caroline): En fait, même, si je peux me permettre, afin de répondre pleinement à la question, une étude serait intéressante afin de comprendre tous les facteurs qui motivent l'intérêt ou non d'un employé à se franciser. On avait le mandat de mettre en application un programme, mais ça se limite à ça, c'est-à-dire on n'a pas fait une étude approfondie sur le sujet. Ce serait intéressant d'avoir les réponses à ça.
M. Girard: Vous avez soulevé une des raisons peut-être qui constituent un obstacle à la participation à des cours sur la francisation, la conciliation famille-travail. Est-ce qu'on ne devrait pas penser à des formules de congés de formation, des congés pour la francisation, qui permettent à ces gens-là d'avoir accès à des cours. Puisqu'on sait que quelqu'un qui n'est pas en emploi peut avoir accès à un certain nombre de programmes de francisation, mais, dès qu'il tombe en emploi, il y a moins de possibilité, moins d'ouverture, moins de temps, moins d'espace pour réussir la francisation.
C'est un élément qui est quand même central et important, parce que, dans une période de ralentissement économique où on va couper des postes dans une organisation, il est possible que cette clientèle-là, qui a peut-être... qui n'a pas appris le français va peut-être être la première qui va perdre son emploi.
Mme Sauvé (Monique): Je pense que c'est une recommandation fort pertinente. Encore là, il faut voir à combien d'individus ça s'adresse. Alors, l'employeur qui module des choses et qui adapte des choses, pour combien de personnes dans une réalité d'entreprises. Mais effectivement, je pense que le plus d'éléments ou coffres à outils qu'on pourra offrir aux employeurs...
Puis je pense que ça, les gens du service aux entreprises, les formateurs, tout ça, travaillent très fort à être à l'écoute. Ça commence par ça, être à l'écoute puis permettre aux employeurs de trouver des façons de faire.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors donc, merci pour votre présentation. C'était bien intéressant. Et bon retour chez vous.
Mme Sauvé (Monique): Merci beaucoup.
Le Président (M. Jutras): Nous en sommes rendus aux remarques finales.
Mémoire déposé
Mais, avant les remarques finales, je voudrais déposer le mémoire du Conseil régional des partenaires du marché du travail Saguenay?Lac-Saint-Jean. Ils devaient venir devant cette commission. Ils n'ont pas pu en raison de circonstances hors de leur contrôle, mais nous avons leur mémoire. Nous allons donc le déposer devant la commission.
Remarques finales
Cela étant fait, nous sommes donc maintenant rendus aux remarques finales. Dans un premier temps, nous allons entendre le député de Gouin, qui est porte-parole en matière d'emploi et solidarité sociale.
Et par la suite nous entendrons la ministre. Alors, je cède la parole au député de Gouin.
M. Nicolas Girard
M. Girard: Alors, merci, M. le Président. Lors de cette commission parlementaire, on a eu l'occasion d'entendre plusieurs organismes qui sont venus nous faire le bilan de la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre, qui a maintenant 10 ans.
D'ailleurs, la majorité des groupes que nous avons entendus en commission parlementaire ont tracé un bilan qui était somme toute très positif de la loi. Et on peut dire sans se tromper qu'il se fait plus de formation en entreprise qu'il y a 10 ans. Et je pense qu'également il y a une meilleure sensibilisation quant à l'importance de faire de la formation pour les entreprises.
On sait également que, depuis la mise en oeuvre de cette loi-là, il y a eu une consolidation des comités sectoriels de main-d'oeuvre, qui jouent un rôle clé dans leur champ respectif. On en a abondamment parlé dans le cadre de la tenue de cette commission parlementaire. Il y a également eu une consolidation également des conseils régionaux des partenaires du marché de travail. Nous avons eu l'occasion d'en entendre quelques-uns dans le cadre de cette commission. Il aurait été intéressant d'en entendre davantage. Peut-être qu'on aura d'autres occasions de le faire.
Puis on a également pu constater que la loi a permis d'établir un meilleur partenariat entre les syndicats et les patrons, que le Québec avait beaucoup de retard au niveau de la concertation et que la mise en oeuvre de cette loi-là a permis de mettre en place, par le biais de la Commission des partenaires du marché du travail, un mécanisme de concertation qui a donné d'excellents résultats et qui fait l'envie d'autres provinces et de d'autres États en Amérique du Nord. Donc, je pense qu'il un coup de barre qui a été donné, mais le travail est loin d'être terminé.
Le rapport quinquennal 2000-2005 nous a permis de faire une analyse des forces et des faiblesses de la loi du 1 %, et c'est l'occasion, je pense, d'apporter les correctifs nécessaires afin d'augmenter l'offre de formation pour les travailleurs et pour les entreprises, plus particulièrement au niveau des petites et des moyennes entreprises.
n(17 heures)n Je pense que cette commission a mis en lumière le défi que pose la formation de la main-d'oeuvre dans les petites et les moyennes entreprises et pour les travailleurs. Dans ce contexte-là, M. le Président, on s'explique mal, du côté de l'opposition officielle, la décision du gouvernement d'avoir soustrait 70 % des entreprises à la loi du 1 % en décembre 2003. Cette commission-là nous a démontré que la décision du gouvernement ne s'inscrivait pas dans une stratégie gouvernementale visant à appuyer les efforts de formation des PME. Il est clair que la décision qui a été prise par le gouvernement était une décision purement idéologique. Absolument rien de notre point de vue ne justifiait une telle décision deux ans avant d'avoir pu faire une évaluation complète des forces et des faiblesses de la loi. C'était, de notre point de vue, prématuré. Rien n'aurait empêché la ministre ou le gouvernement d'attendre la tenue de cette commission parlementaire qui nous a permis de faire un bilan exhaustif de la loi du 1 % à travers le rapport quinquennal avant de modifier la loi. Le gouvernement a plutôt choisi de précipiter les choses.
D'ailleurs, lors de la commission parlementaire, le professeur de relations industrielles Jean Charest l'a illustré de manière éloquente. Il a indiqué, et je le cite: «Ça a été une mauvaise décision, je vais vous dire pourquoi: essentiellement parce qu'on n'a pas mis d'autres dispositifs en remplacement, puis il n'y avait pas d'alternative qui était proposée. On a tout simplement à mon avis lancé un mauvais message aux employeurs en leur disant: Écoutez, à partir de 1 million et moins, ce qu'on vous dit, c'est que la loi ne s'applique plus. Qu'on prenne cette décision-là dans un contexte d'évaluation, ça aurait déjà été une chose, mais qu'on la prenne aussi dans le contexte où on aurait eu quelque chose d'autre à mettre sur la table en termes de proposition, il me semble que ça aurait été un signe plus positif qui aurait été lancé aux employeurs.» Est-ce que la modification de la loi du 1 % s'inscrivait dans un plan d'ensemble visant à soutenir les PME dans leurs efforts de formation? Malheureusement, non. Au moment d'annoncer la modification réglementaire à la loi du 1 %, votre prédécesseur avait indiqué que l'allégement de la loi ne signifiait pas, et je le cite, «un congé de devoirs au chapitre de la formation». Il indiquait également être conscient que les petites et moyennes entreprises ont besoin d'être aidées dans leurs activités de formation, car elles rencontrent plus de difficultés à planifier et à organiser de telles activités. Deux années plus tard, où en sommes nous? Qu'a fait le gouvernement pour aider les petites et moyennes entreprises? Quel leadership a-t-il exercé sur cette question? Quel plan de match a-t-il mis de l'avant pour les PME? Aucun, si ce n'est la tentative du ministre du Développement économique qui a présenté un plan qui, disons-le, n'a pas reçu un accueil très chaleureux du milieu des affaires.
Nous avons entendu près d'une quinzaine de groupes au terme de cette commission. J'ai eu l'occasion de relire avec attention les remarques préliminaires de la ministre à l'ouverture des travaux de la commission. J'ai tenté en vain de trouver le début d'une stratégie, d'un plan de match visant à soutenir les petites et les moyennes entreprises. Malheureusement, je n'ai rien trouvé, si ce n'est que la ministre a rappelé, dans ses remarques préliminaires, les défis démographiques auxquels le Québec est confronté à cause notamment du vieillissement de la population et d'un faible taux de natalité.
Vous avez rappelé avec justesse, et je cite: «Que cinq ans, c'est très court, que cinq ans, c'est demain matin.» Je partage tout à fait votre point de vue. Vous avez raison, mais votre gouvernement a soustrait de la loi plus de 25 000 entreprises il y a deux ans à peine. Qu'a-t-on fait pour stimuler la formation dans ce milieu? On a perdu deux ans, M. le Président, et ils serait temps, du point de vue de l'opposition officielle, d'agir pour mieux soutenir, mieux appuyer les petites et les moyennes entreprises. Il en va, de notre point de vue, de la compétitivité des entreprises face à la concurrence internationale. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, d'autres organisations patronales qui sont venues en commission l'ont rappelé. Le Québec ne peut pas se permettre d'accumuler du retard en termes de formation. Nous avons collectivement une obligation de résultat pour les PME, pour les travailleurs, pour l'économie québécoise.
Au cours de la commission parlementaire, des conseils régionaux des partenaires du marché du travail vous ont interpellés sur le soutien à donner aux PME et leur inquiétude quant à la diminution du Fonds national de la formation de la main-d'oeuvre. Je pense notamment à celui de la Capitale-Nationale. Dans son mémoire, le conseil régional indiquait, et je cite: «Plus le fonds diminuera, moins les possibilités de support pour la formation seront notables. Notons que ce bassin de PME a vécu en peu de temps le retrait de son assujettissement à la loi ainsi qu'une diminution des subventions et des programmes offerts pour le développement économique.» Fin de la citation. Le conseil ajoute dans son mémoire: «Nous pouvons émettre comme hypothèse qu'en retirant à l'assujettissement à la loi des entreprises de 1 million de dollars et moins de masse salariale, les effets positifs escomptés sur l'investissement en formation ne seront pas au rendez-vous pour cette catégorie d'entreprises.» Quant au conseil régional des partenaires du Saguenay?Lac-Saint-Jean, que nous n'avons pas pu entendre aujourd'hui, dans le cadre de cette commission, il indiquait dans son mémoire, et je cite: «L'impact du désassujettissement des entreprises de moins de 1 million de dollars de masse salariale peut être très important par rapport à la vulnérabilité des entreprises de notre région.» Le conseil ajoutait, dans son mémoire, «l'importance de développer rapidement des stratégies pour continuer de soutenir l'effort de formation des PME régionales».
Donc, c'est plusieurs, M. le Président, plusieurs conseils régionaux des partenaires du marché du travail qui sont inquiets de la décision du gouvernement de soustraire 70 % des entreprises à la loi du 1 % et qui lancent un appel au gouvernement, à la ministre. Et je suis convaincu que, si nous avions eu l'occasion d'entendre davantage de conseils à l'occasion de cette commission parlementaire, d'autres auraient lancé le même message. Donc, il y a plusieurs conseils régionaux dans les régions du Québec qui lancent un appel à votre gouvernement et qui, à mon avis, doit être entendu.
Ils pressent, M. le Président, la ministre d'agir pour le développement de la formation dans les PME, dans les régions. La formation de la main-d'oeuvre, j'en conviens, n'est pas l'unique responsabilité du gouvernement, mais une responsabilité partagée avec les employeurs, avec les travailleurs. Mais, convenons-en, le gouvernement doit assurer un leadership.
Par ailleurs, M. le Président, nous avons entendu, au cours de la commission, de nombreuses propositions visant à bonifier la loi du 1 % et pour donner des outils supplémentaires afin d'aider les entreprises, et en particulier les PME, à offrir davantage de formation. Je pense notamment aux mutuelles de formation, auxquelles plusieurs partenaires du marché du travail ont fait référence dans le cadre de la commission parlementaire.
Plusieurs groupes ont réclamé, pour une période minimale de cinq ans, un financement pour l'implantation, pour le développement de mutuelles de formation sectorielles ou territoriales. Nous avons eu l'occasion, encore aujourd'hui, d'avoir d'autres groupes qui sont venus réclamer un soutien, un appui de la part du gouvernement, un financement pour favoriser l'implantation de mutuelles de formation. Ceux et celles qui ont participé à l'implantation des mutuelles ont souligné les bénéfices d'une telle approche. En même temps, ils ont souligné que le démarrage des mutuelles est plus long que prévu et qu'il semble que... Il me semble, de mon point de vue, que les recommandations de ces groupes-là sont pertinentes et que le gouvernement devrait songer sérieusement à offrir un financement stable de cinq ans pour l'implantation puis le développement de mutuelles de formation sectorielles ou territoriales.
D'autres groupes qui sont venus nous voir en commission ont également suggéré à la ministre d'augmenter la formation de base des travailleurs, qui est un défi majeur dans le contexte de vieillissement de la main-d'oeuvre, donc de favoriser davantage l'initiative individuelle. Certains ont soulevé le congé de formation, d'autres nous ont parlé d'alternatives travail-études-formation. Il me semble qu'il y a là des éléments fort intéressants pour le gouvernement, pour agir pour augmenter la formation et l'appui aux travailleurs et aux travailleuses.
Les besoins en formation de base sont fort importants et également au niveau de la francisation. J'ai eu l'occasion, à l'ouverture des travaux, de parler des taux d'analphabétisme fort importants au Québec, et je pense que le gouvernement doit agir sur cette question-là; pas uniquement le ministère de l'Emploi, le ministère de l'Éducation également. Il doit y avoir une bonne collaboration.
n(17 h 10)n Et d'ailleurs, lors de la présentation de la présidente de la Commission des partenaires du marché du travail, on nous indiquait que seulement 4 % des activités des entreprises se fondent sur les besoins en formation de base et de francisation. Cela nous apparaît comme étant insuffisant. Il y a souvent des travailleurs qui sont... ces travailleurs-là sont souvent sous-scolarisés, sont souvent laissés pour compte quand vient le temps de financer de tels projets. Les centrales syndicales nous ont proposé qu'au niveau du plan d'affectation du fonds national, au niveau du financement de la formation de la main-d'oeuvre, que l'on puisse financer davantage la formation de base pour des activités d'alphabétisation pour permettre l'acquisition d'un premier diplôme, et je pense que c'est un défi majeur pour la société québécoise et pour le gouvernement.
Donc, en résumé, M. le Président, nous avons eu l'occasion d'entendre de nombreux partenaires, qu'ils soient du milieu communautaire, du milieu syndical ou de la part du patronat, des entreprises. En somme, nous avons eu l'occasion de constater que la loi du 1 % nous a permis de faire des bonds de géant et des progrès très significatifs en termes de formation.
Cependant, il y a encore des défis importants à relever pour le Québec. De notre point de vue, il y a certainement une mise à jour de la loi qui est nécessaire, et il y a aussi, et je l'ai répété au début de mon intervention, un appui supplémentaire aux petites et aux moyennes entreprises. Des initiatives comme les mutuelles de formation doivent être étudiées par le gouvernement.
Si je résume mon intervention, M. le Président, le gouvernement a bougé beaucoup trop rapidement en modifiant la loi en 2003 et aurait pu, au terme de cette commission parlementaire, procéder à des améliorations de la loi du 1 %, mais il a préféré procéder unilatéralement, sans consulter la Commission des partenaires du marché du travail. De notre point de vue, c'est une erreur, et rien ne justifiait cette décision précipitée. Au terme de cette commission qui a été fort instructive, où nous avons entendu des groupes provenant de différents milieux, nous avions tous les éléments en main pour poser un certain nombre de gestes pour améliorer la loi du 1 %.
Maintenant, le gouvernement a une obligation de résultat, il a choisi de modifier unilatéralement la loi en 2003, il a l'obligation dès maintenant d'annoncer des mesures, un plan d'action spécifique pour venir en aide aux petites et aux moyennes entreprises. Plusieurs organisations l'ont réclamé au cours de cette commission. On s'attend de la part du gouvernement que très rapidement la ministre nous indique les intentions de son parti, de son gouvernement pour venir en aide aux travailleurs, venir en aide aux petites et aux moyennes entreprises. Merci.
Le Président (M. Jutras): 15 minutes exactement. Merci, M. le député de Gouin. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
Mme Michelle Courchesne
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi de vous témoigner toute ma satisfaction à l'égard des échanges que nous avons tenus au cours des deux dernières semaines. Et j'aimerais d'emblée remercier tous ceux et celles qui se sont présentés devant nous et avec une qualité de mémoires extrêmement intéressante et qui nous apporte effectivement, et j'en conviens avec le député de Gouin, des propositions de solution ou de nous permettre d'aller plus avant dans ce dossier si important pour le Québec.
Je peux très certainement, comme vous, dire qu'effectivement tous ceux et celles qui se sont présentés nous ont fait valoir le progrès accompli, nous ont fait valoir un bilan positif de cette loi-là, et je partage encore une fois le constat du député de Gouin à cet égard-là. Et je l'ai déjà dit, M. le Président, cette loi-là, dans notre esprit, elle est là pour rester, bien évidemment. Mais bien sûr que la formation constitue le facteur clé de la compétitivité dans les économies développées, puis je dirais dans les économies sujettes maintenant à cette mondialisation qui change toute l'organisation du travail, et que, dans ce sens-là, c'est certainement, et je l'ai dit en début de commission, je le répète, un des plus grands défis de la société québécoise maintenant et pour les toutes prochaines années.
J'ai senti aussi, durant cette consultation-là, une grande mobilisation, une grande mobilisation puis un climat très positif d'échange et de discussion de la part de ces intervenants socioéconomiques, et cela dans toutes les régions du Québec. Bien sûr que nous avons aussi, en toile de fond, les enjeux qui sont liés bien sûr à la croissance économique, mais je veux faire le parallèle aussi avec le développement social, parce qu'on a fait part aussi de qui étaient ces travailleurs qui ont besoin de cette formation et de leurs besoins grandissants pour être capables de maintenir cette qualification auprès de ces entreprises.
Et, tout de suite, M. le Président, je veux rassurer le député de Gouin. Nous entendons continuer d'assumer un leadership solide et dynamique parce que, oui, nous avons la ferme conviction de l'importance d'accroître ces compétences-là et de mieux qualifier notre main-d'oeuvre encore une fois, dans chacune des régions du Québec. Bien sûr qu'il faut réaffirmer, il faut se le dire entre nous, il faut poursuivre dans notre capacité de convaincre, il faut réaffirmer le caractère hautement stratégique de la formation comme facteur de succès.
Mais là, M. le Président, bien sûr, j'ai beaucoup entendu le député de Gouin, au cours de ces récents jours, nous parler des amendements de 2003. Il vient de le faire, il a son opinion, c'est une opinion que je respecte, que ne partage pas en totalité. Il faut bien comprendre, M. le Président, que les PME du Québec nous ont vivement demandé de modifier cette loi-là. Pourquoi ils nous ont demandé de modifier cette loi-là? D'abord, parce qu'ils l'ont réitéré devant nous, il y avait, et il y a toujours une lourdeur administrative qui est vraiment trop grande, et je dirais, à la limite de l'acceptable, pour des petites et moyennes entreprises et, on nous l'a dit, qui ont très peu de ressources. Alors, au lieu de remplir des tonnes de papier, pourquoi ne pas focusser sur véritablement l'enjeu de la formation comme telle? C'est pour ça qu'ils nous ont demandé ça.
Puis ils nous ont demandé ça aussi, M. le Président, pour une autre raison, ils avaient le ferme sentiment qu'ils subventionnaient à fort prix la formation des plus grandes entreprises parce qu'il y avait tellement de difficultés dans la mise en oeuvre, pour eux, de cette loi-là, qu'il était plus facile de faire le chèque de 1 % qui, lui, servait à former, à subventionner la formation des plus grandes entreprises. C'est pour ça, M. le Président, qu'on a apporté la modification de 2003. Maintenant, ça ne veut pas dire qu'on doive arrêter là. Je conviens avec le député de Gouin, M. le Président, qu'on a encore du travail considérable devant nous, et c'est dans ce sens-là que nous allons continuer à travailler.
Mais je veux aussi dire au député de Gouin qu'il est faux de prétendre qu'on n'a rien fait depuis 2003. D'abord, il y a des mesures qui existent, puis il le sait très bien, le député de Gouin, M. le Président, qu'il y a des mesures qui existent spécifiquement pour favoriser l'investissement dans les petites entreprises, pour la formation de leur personnel. Et, depuis 2003, il y a plus de 86 millions de dollars, ce n'est pas rien, 86 millions de dollars ont été accordés essentiellement pour le soutien à la PME dans sa volonté de poursuivre la formation, parce que le fonds continue à donner des sommes d'argent à de la petite et de la moyenne entreprise.
Aussi, ce que le gouvernement précédent avait oublié de faire, M. le Président ? et je le dis en toute simplicité ? avait oublié d'élaborer des normes professionnelles. Alors, depuis 2003, nous sommes passés, en ce qui a trait au chantier de la reconnaissance des compétences, de quatre à 20 normes professionnelles dûment approuvées. C'est quand même un travail imposant qui a été réalisé en bonne partie par les comités sectoriels. Et je salue très haut le travail de ces gens-là parce que je pense qu'ils font un travail très structurant, là aussi, pour le développement des économies. Et ça, ça se fait ? oui, vous avez raison ? en concertation avec les partenaires du marché du travail, et c'est dans cet esprit de concertation, de synergie, qu'on a réussi en si peu de temps, en deux ans, de pouvoir bien solidifier 20 nouvelles normes professionnelles au Québec.
M. le Président, je vais tout de suite rassurer le député de Gouin parce que je veux être sûre que je peux tout dire à l'intérieur de mon 15 minutes, mais je peux vous dire qu'avant de nous prononcer sur l'opportunité de modifier la loi, il y a des travaux qui doivent être réalisés, et je souhaite que ces travaux-là soient réalisés dans un très court laps de temps. D'abord, il faut améliorer la portée de la loi en fonction du développement et de la reconnaissance des compétences et non plus comme objectif uniquement de dépenser ? parce que c'est comme ça que ça a été perçu ? 1 % de la masse salariale. Bien sûr qu'on est d'accord que ce n'est pas une dépense, c'est d'abord un investissement, mais je pense qu'il faut recentrer cet objectif-là. n(17 h 20)n Ensuite, il faut renforcer le rôle et les responsabilités des comités sectoriels de la main-d'oeuvre et toute l'approche sectorielle dans son ensemble. Il faut reconnaître le caractère structurant et moteur du cadre général de développement et de reconnaissance des compétences afin d'améliorer les niveaux de qualification. Et ça, ce sont nos partenaires qui l'ont fait, donc il faut qu'on puisse s'en servir plus adéquatement.
Alors, voici ce que je propose, M. le Président. Je mandate aujourd'hui, devant vous, la Commission des partenaires du marché du travail pour que, d'ici le 15 septembre, ils nous donnent des recommandations précises qui se traduiront dans un plan d'action pour les objets suivants: optimiser l'utilisation du Fonds national de formation et de main-d'oeuvre en fonction d'objectifs structurants pour l'économie du Québec et de la nécessité de soutenir les petites et moyennes entreprises, y compris au moyen des regroupements, dont les mutuelles de formation.
Aussi de travailler sur l'allégement de la réglementation qui découle de la loi avec l'objectif de faciliter la vie aux entreprises, notamment celle sur les exemptions ou les dépenses admissibles, en fait tout le volet réglementaire de la commission doit, à mon avis, être revu.
Ensuite, de pouvoir nous dire, ce que je mentionnais tout à l'heure, comment on va mieux intégrer le cadre général de développement et de reconnaissance des compétences.
De nous formuler des recommandations très précises sur le renforcement du rôle des comités sectoriels de main-d'oeuvre, de même que les façons les plus appropriées pour mieux arrimer leur travail, leur action avec la préoccupation des conseils régionaux des partenaires du marché du travail. Alors, il faudra bien sûr tenir compte des orientations gouvernementales en matière de régionalisation puis renforcer cette approche région par région. Je pense que c'est ça, la voie de l'avenir, et la solution très concrète sur le terrain, c'est qu'on soit capables de se donner des outils régionaux pour être capables d'affronter cette concurrence.
Qu'on puisse aussi... bien, vous l'avez mentionné, je suis tout à fait d'accord qu'il y a une voie d'avenir au niveau des mutuelles. Je veux savoir comment on peut non seulement les activer, les renforcer, les intensifier, mais rendre ça plus facile, que le démarrage soit plus accommodant et qu'on puisse trouver des façons où ça va être utilisé. Il y a tout un travail de sensibilisation, mais je voudrais que la commission nous dise précisément comment nous allons y arriver.
Ce matin, j'ai été réjouie qu'on nous parle de l'agrément des formateurs. Alors, je veux que la commission puisse aussi nous formuler des moyens très concrets pour avoir une meilleure adaptation, possiblement une amélioration de l'agrément des formateurs tant internes qu'externes, adaptée aux réalités nouvelles du marché du travail. Qu'on puisse aussi nous parler de l'instauration de comités consultatifs à l'intérieur des entreprises pour justement établir ce véritable climat de formation au sein des entreprises. Il y a peut-être quelque chose à faire avec les comités de consultation. Et je ne rejette pas l'idée, je ne la rejette pas, de mieux explorer, à travers des initiatives individuelles, une façon adéquate d'impliquer davantage les employés puis qu'ils soient partie prenante.
Le gouvernement devra aussi, par les actions suivantes, examiner les divers aspects de ses lois fiscales qui visent les entreprises afin de proposer les allégements qui vont dans le sens des commentaires formulés. Et il y aura un comité qui est déjà à l'oeuvre, MESS et ministère du Revenu du Québec, qui devra nous dire exactement comment on va faire tomber cette lourdeur administrative d'ici l'été 2006.
On devra aussi examiner les moyens à mettre en oeuvre pour accroître les efforts consentis en matière de formation de base, d'alphabétisation, de francisation, tant dans les milieux de travail qu'auprès des chercheurs d'emploi. Donc, le ministère que je dirige, le ministère de l'Éducation, en collaboration avec la commission des partenaires et les organismes communautaires aussi qui oeuvrent dans ces chapitres-là devront, dans une perspective d'équité de cette main-d'oeuvre peu qualifiée et à risque d'exclusion dans une économie de plus en plus basée sur le savoir, ce comité devra très rapidement, au cours des prochains mois, nous dire qu'en est-il, qu'allons-nous faire, comment allons-nous agir sur ces moyens?
De la même façon qu'il faut favoriser l'obtention de progrès rapides dans le domaine de la reconnaissance des acquis et des compétences, avec mon collège de l'Éducation, toujours en collaboration avec la commission des partenaires, on va activer toute cette question des passerelles entre la formation offerte en établissement scolaire et celle acquise en milieu de travail. Encore une fois, le rôle du cadre général devient très important, mais ça devra être abordé par les membres de ce comité-là pour qu'une plus grande synergie, une plus grande cohérence, une plus grande complémentarité puissent rapidement voir le jour pour que la formation professionnelle et technique à travers les réseaux de l'éducation... Parce qu'on en a peu parlé des réseaux de l'éducation mais ils sont aussi interpellés dans ce volet-là. Donc, qu'on puisse se donner... En fait, c'est un peu aussi la suite de la formation continue, mais que, là, on puisse voir réellement des résultats; ce comité-là devra rendre des comptes rapidement.
Intensifier la mobilisation des intervenants des établissements d'enseignement et des régions pour mieux répondre aux besoins de la main-d'oeuvre qualifiée en s'appuyant sur la relance des tables régionales interordres. Et ça, c'est amorcé déjà, mon collègue de l'Éducation a fait cette annonce-là la semaine dernière à la Table Québec-Régions: nous allons y participer activement. Parce qu'en même temps, vous savez, une loi, ça peut obliger, mais une loi, ça doit aussi favoriser l'adhésion des intervenants du milieu. Alors, nous allons créer justement ces rencontres pour favoriser l'adhésion des milieux d'enseignement à nos réalités des besoins du marché du travail.
Mandater le ministère que je dirige pour renforcer le rôle stratégique de nos services aux entreprises de manière à soutenir et conseiller les employeurs relativement à la gestion des ressources humaines. Nous allons aussi mandater le ministère, l'Éducation, le ministère des Finances et la commission des partenaires pour qu'on fasse une réflexion approfondie sur le financement de la formation de la main-d'oeuvre puis évaluer si les moyens incitatifs, bien sûr, comme le crédit d'impôt, sont possibles et souhaitables. On a beaucoup parlé du crédit d'impôt, ça peut être ça, mais ça peut être autre chose aussi. Je pense qu'il y a une réflexion plus large à faire sur le financement comme tel.
Et je suis d'accord, M. le Président, cette réflexion-là, elle interpelle le gouvernement, les entreprises, les syndicats, les individus. On est d'accord, c'est une responsabilité partagée, c'est une responsabilité collective, puis c'est une responsabilité qu'on doit se donner pour les générations futures aussi. Les jeunes, c'est maintenant. Donc, dans ce sens-là, nous allons réunir ces gens autour d'une table et on va aussi arriver avec des solutions concrètes pour l'ensemble du financement.
Et puis, bien évidemment, nous allons poursuivre les discussions, M. le Président, avec le gouvernement fédéral pour renforcer les moyens, renforcer les mesures de soutien pour la formation de la main-d'oeuvre parce que c'est déjà amorcé aussi, mais ça fait partie de l'ensemble de cette réflexion que nous devons intégrer pour y arriver. Donc, pour moi, oui, il faut revoir ces travaux-là dans le cadre de l'inspiration du rapport quinquennal, de ce que ceux et celles qui sont venus devant nous nous ont soumis, et il faut donc pousser beaucoup plus loin.
Mais, je suis d'accord, il faut être dans un mode d'action, il faut être dans un mode de leadership, il faut être dans un mode dynamique pour continuer à profiter de cette mobilisation de l'ensemble des interventions dans toutes les régions du Québec. Et c'est ce que j'entends faire, M. le Président, avec des échéanciers très courts. Certains seront pour l'été, certains seront pour au plus tard le 15 septembre 2006. C'est beaucoup de travail, mais j'ai bonne confiance que nous allons y arriver parce que, dans plusieurs des cas, c'est amorcé, mais cette commission nous donne l'occasion de dire: Il faut donc accélérer, le faire correctement par contre. Il faut le faire pour les bonnes raisons, il faut le faire en complémentarité.
Et, M. le Président, je peux vous assurer que notre gouvernement a un seul objectif: c'est renforcer la compétitivité de nos entreprises, mais c'est surtout de permettre à tous les travailleurs, à toutes les travailleuses du Québec d'avoir accès à une formation de qualité qui leur permettra de poursuivre une carrière fructueuse, qui leur permettra de continuer de contribuer à faire en sorte que notre économie soit une économie forte, moderne, dynamique, mais surtout très prometteuse pour les générations futures. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci...
Mme Courchesne: Merci à tous les collègues, merci d'avoir été présents, collègues, de nous avons soutenus, merci au député de René-Lévesque et au porte-parole officiel pour cette excellente collaboration. Merci beaucoup.
Le Président (M. Jutras): Merci, Mme la ministre. Les travaux de la commission sont donc ajournés à demain matin, mercredi 22 février, à 9 h 30. On va discuter à ce moment-là... Ah, c'est le Bureau d'évaluation médicale, c'est ça.
(Fin de la séance à 17 h 29)