(Neuf heures trente-trois minutes)
Le Président (M. Jutras): Alors, si vous permettez, nous allons commencer nos travaux. Étant donné que nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle le mandat de la présente commission. L'objet de cette séance est de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.
Mme la secrétaire, voulez-vous nous dire s'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Mercier (Charlesbourg) remplace M. Bernard (Rouyn-Noranda? Témiscamingue) et M. Morin (Montmagny-L'Islet) remplace M. Blackburn (Roberval).
Le Président (M. Jutras): Je demanderais aussi, dès maintenant, là, à ceux qui ont un téléphone cellulaire, là, autant les membres de la commission que les gens qui sont dans la salle, de bien vouloir le fermer.
Je donne lecture de l'ordre du jour: à 9 h 30, nous entendrons Gaz Métro; à 10 h 30, ENvironnement JEUnesse; à 11 h 30, Option Transport durable. Nous suspendrons nos travaux à 12 h 30 pour les reprendre à 14 heures. À 14 heures, nous entendrons l'Association québécoise du gaz naturel; à 15 heures, l'Action pour la protection des forêts du Québec; à 16 heures, M. Jacques Dagenais; à 17 heures, M. Michel G. Bonin; pour ajourner nos travaux à 18 heures.
Auditions (suite)
Alors, les représentants de Gaz Métro sont déjà en place. Nous allons procéder à l'audition de Gaz Métro. Je vous rappelle les règles: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels et par après un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition.
Alors, si vous voulez, dans un premier temps, vous identifier, identifier les personnes qui vous accompagnent et procéder à la présentation de votre mémoire.
Gaz Métro
M. Tessier (Robert): Alors, merci, M. le Président. Alors, mon nom est Robert Tessier, je suis président et chef de la direction de Gaz Métro; à ma gauche, vous avez Mme Sophie Brochu, qui est vice-présidente, Vente, marketing, approvisionnement gazier et développement des affaires à Gaz Métro ? alors le titre en dit long sur l'importance de celle qui m'accompagne; et vous avez, à ma droite, Jean Simard, qui est vice-président, Communication, Affaires gouvernementales.
Alors, M. le Président, ça me fait évidemment grand plaisir de vous rencontrer. Je suis arrivé à Gaz Métro, à la direction de Gaz Métro, au moment de la mise en application, en début 1997, de la politique énergétique. C'était une époque très différente de celle que nous vivons. C'était un moment où le gaz naturel avait des prix très bas, c'en était de même que l'huile à chauffage. Et, l'électricité, personne ne se posait de questions sur les capacités non plus que sur les prix, puisqu'elle semblait être inépuisable, au point tel, M. le Président, qu'à cette époque Gaz Métropolitain, comme elle s'appelait, avait décidé de ne plus poursuivre de pénétration dans le résidentiel parce que tous ses efforts finalement étaient pratiquement nuls.
Alors, aujourd'hui, huit ans ont passé, beaucoup de choses se sont produites à l'échelle planétaire, qu'on songe strictement à la globalisation de l'économie, à l'importance qu'a prise pour les populations de la planète la perception de l'effet que pouvait avoir l'activité humaine sur le réchauffement climatique. Et, sur un domaine un peu plus proche du nôtre, dans le domaine de l'énergie, au cours des dernières années, on a vu un resserrement extrêmement significatif entre l'offre et la demande que ce soit pour le pétrole, le gaz naturel et ici, au Québec... mais on a vécu, vous le savez, une crise énergétique, l'hiver dernier, qui aurait pu avoir des conséquences sur l'intégrité de nos réseaux et de la desserte si ce n'avait été de mesures exceptionnelles qui ont été prises.
Alors, je suis ici, aujourd'hui, M. le Président, pour vous dire que nous représentons une industrie, le gaz naturel, et une compagnie, Gaz Métro, qui a certainement une contribution à faire dans les perspectives de développement durable. Vous dire, M. le Président, que le développement durable pour Gaz Métro, ce n'est pas un mot, ce n'est pas deux mots, ça fait partie de notre constitution, ça fait partie de notre philosophie fondamentale. Vous retrouvez, dans notre politique, les termes et, dans nos actions, tous les jours, M. le Président, un ajustement aux comportements qui sont induits de cette philosophie-là.
On a été la première utilité canadienne, peut-être même nord-américaine, à se qualifier à la norme ISO 14001, ce qui veut dire en pratique que l'ensemble des gestes de Gaz Métro sont marqués du respect de l'environnement. Nos pratiques de tous les jours font en sorte que l'on fait attention à la façon dont on traite nos déchets, à la façon dont on se comporte dans l'utilisation de notre réseau et par-dessus tout évidemment nous faisons une grande place à l'économie d'énergie. Nous avons, depuis plusieurs années déjà, des programmes extrêmement performants pour amener notre clientèle à réduire l'intensité de ses émissions ainsi, M. le Président, que même le volume du gaz qui est livré. Et pour nous donc c'est fondamental, disons, ce biais en faveur du respect de l'environnement.
Au point de vue économique, nous sommes une compagnie performante. On a une gouvernance qui est reconnue par plusieurs citations, une compagnie qui est très aimée, un très fort taux de satisfaction de nos clients et admirée, je dirais, au Québec. Alors, on a 1 500 employés qui travaillent. C'est des emplois bien rémunérés et c'est un climat de travail exceptionnel. Je pense que les gens aiment travailler à Gaz Métro, et ce n'est pas un accident parce que, d'une part, nous avons un bon produit et, aussi, je dirais, une qualité, je veux dire une philosophie d'excellence dans nos pratiques d'affaires.
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(9 h 40)
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Je voulais peut-être vous dire un mot sur les effets de nos politiques d'efficacité énergétique. Nos programmes, on en a deux catégories. On a nos programmes d'intervention sur les équipements comme tels et on soutient aussi, avec les partenaires, un fonds d'efficacité... à l'enveloppe des bâtiments. Sur les programmes que nous contrôlons, nous avons réussi à réduire, à toutes fins pratiques, les émissions de nos clients à peu près de l'équivalent des nouvelles installations que nous avons faites au cours des quatre dernières années. Alors, on a réussi à faire économiser, par nos clients en place, l'équivalent de ce qui est consommé par 21 000 résidences, hein? Je pense que c'est une performance exceptionnelle. On se retrouve, aujourd'hui, bien au-delà des objectifs qu'on s'était fixés pour Kyoto. Alors, à la fois une intensité des émissions de notre compagnie et les volumes que nous émettons à l'atmosphère sont moindres que ce que nous visions.
L'efficacité énergétique, on la pratique, et peut-être deux mots, M. le Président, pour vous dire évidemment qu'on soutient et on est très sensible à ce que cette pratique s'élargisse à toutes les formes évidemment de l'activité au Québec. On a, à cet effet-là... Dans notre giron, on soutient un centre de recherche, le seul qui existe au Canada incidemment sur les équipements de gaz naturel pour en augmenter l'efficacité et réduire, partant, les émissions.
L'efficacité énergétique, ça nécessite, je dirais, un effort continu d'information. Ce n'est pas quelque chose qui est facile à réaliser. Il faut convaincre, il faut être convaincant, il faut continuer de mettre, disons, une information soutenue et constante, et aussi, je dirais, M. le Président, que c'est important, et on en a fait l'expérience, d'avoir un bon signal de prix. Si vous avez une énergie dont le prix ne bouge pas, vous ne pouvez pas convaincre les gens qu'elle se fait rare. Ça veut dire, l'offre et la demande étant un phénomène bien connu depuis longtemps, c'est presque impensable d'amener des gens à croire que quelque chose se fait rare si le prix ne donne pas le bon signal.
À titre d'exemple, en 2001, on a eu une poussée très forte sur les prix du gaz naturel, et je dois vous dire que, cette année-là, nos programmes ont été particulièrement efficaces. On a réduit de près de 5 % la consommation de gaz naturel chez nos clients résidentiels, commerciaux, institutionnels, et, l'année suivante, M. le Président, les prix ont faibli, et on a constaté qu'une partie de cette économie était disparue: les gens avaient repris leur pratique antérieure. Donc, on soutient très fortement... Et on peut vous assurer que nous allons continuer, puisque nous avons une approche et une connaissance très précise de nos clients, les efforts que nous poursuivons comme compagnie dans ce domaine.
J'aimerais dire un mot maintenant sur les approvisionnements électriques. C'est sûr que, et je pense que des experts mieux qualifiés que moi sont venus vous dire qu'il fallait faire quelque chose pour le futur, on soutient évidemment les efforts qui seront faits. Et, même si on est des vendeurs d'énergie, on a toujours et j'ai toujours personnellement soutenu que le développement des énergies renouvelables, en particulier la chance que nous avons d'avoir des ressources hydroélectriques, devait être développé, et ça en va de même évidemment pour l'éolien.
Et par ailleurs, évidemment, ce qu'il faut tranquillement... mais, disons, être clair aussi auprès de la population que les nouvelles capacités qui vont s'ajouter ne seront pas aux prix des précédentes, et donc progressivement il va y avoir de façon incontournable des augmentations évidemment du prix de la facture de la desserte électrique.
Je voudrais dire qu'en ce qui concerne l'utilisation du gaz naturel dans la production d'électricité il est un secteur qui, nous croyons, doit être encouragé. Il y a déjà des percées dans ce secteur-là, mais ça devrait être davantage. Et je fais ici référence à la cogénération, c'est-à-dire cette capacité d'installer près des usines des capacités de production électrique dont la chaleur sert du même coup à fournir de la vapeur aux entreprises. Je dirais, M. le Président, que c'est une solution gagnant-gagnant parce que les efficacités de ce type d'installation peuvent être assez fortes. Et je vous dirais que ça a aussi un grand avantage parce qu'on a vu, avec l'augmentation des prix du gaz naturel et des prix plus bas du mazout lourd, l'huile n° 6, qui, vous le savez, pollue 40 %... c'est-à-dire pollue, non, c'est-à-dire émet des émissions plus fortes de CO2 et aussi émet des précurseurs du smog comme l'acide, comme le souffre et l'oxyde d'azote. En 2001, on a perdu 20 Bcf à l'huile lourde. Ça veut dire, à toutes fins pratiques, qu'il y a un demi-million de tonnes de CO2 depuis émis par nos grandes industries, et une partie de ça peut être récupérée par l'installation de cogénération, puisque le gaz naturel est beaucoup moins polluant. D'autre part, M. le Président, je pense que ces installations-là, dans le cadre d'industries qui sont... D'ailleurs, l'industrie en région, mais je pense en particulier aux pâtes et papiers, peut avoir un effet de support sur les économies régionales, et donc nous croyons que c'est une filière qui doit être encouragée pour les raisons environnementales, économiques que je viens de vous citer.
Je voudrais aussi vous dire qu'on est très fortement partisans, et on m'a entendu répéter cette ligne depuis des années, d'utiliser la bonne énergie à la bonne place, M. le Président. Québec est exceptionnel. On a 70 % de nos résidences qui sont chauffées à l'électricité. Si vous prenez le cas canadien, c'est 20 %, aux États-Unis, c'est du même ordre et en Europe aussi. Alors, on a un débalancement extraordinaire en faveur évidemment de la chauffe électrique. Et en pratique, je veux dire, ça crée évidemment des situations un peu spéciales où on utilise une énergie noble, une énergie qui peut servir au développement industriel, bien au développement de nos télécommunications, à notre informatique, à la lumière, à la force motrice, pour le chauffage, alors que le gaz naturel est tout indiqué.
M. le Président, du point de vue strictement environnemental, il faut remarquer que maintenant les équipements modernes de chauffe au gaz naturel sont à 95 % d'efficacité, pratiquement plus d'émissions. Et ça permet de libérer, dans une période qui est critique pour la desserte électrique, c'est-à-dire l'hiver, des capacités qui sont importantes. Alors, on pousse et on vous soumet qu'il serait utile que des mesures soient prises pour favoriser effectivement la pénétration plus forte du gaz naturel dans la chauffe résidentielle.
Des pistes de solution, je pense qu'il faut regarder à l'application du Code du bâtiment. Le Québec a adopté un code du bâtiment, mais qui n'est pas mis en application. C'est un code qui s'applique à l'échelle du Canada. Et je vous dirais ceci, c'est que, si ce code était en application, les caractéristiques quant aux entrées et aux sorties d'air feraient en sorte que le coût des installations de la plinthe électrique deviendrait à peu près équivalent à celui d'une installation de chauffage central, et donc ça permettrait, je pense, une incitation assez forte à l'installation de systèmes au gaz naturel.
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(9 h 50)
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D'autre part aussi, je crois qu'encore là le signal de prix, le bon signal de prix doit être envoyé quant à l'électricité. On ne préconise évidemment pas de choc tarifaire, c'est quelque chose qui doit se faire progressivement. Mais c'est une chose aussi qui est fatale. Le coût de l'électricité va devenir de plus en plus fort. On sait qu'aujourd'hui la production qui va entrer en ligne va être très loin du 0,0279 $ du kilowattheure, on va être plutôt dans l'ordre de 0,07 $, 0,08 $, 0,09 $. Alors, je pense que dégager des ressources, M. le Président, à l'électrique, ça va servir à la fois à notre économie et aussi, je dirais, à l'environnement.
Un mot pour les sources d'approvisionnement du gaz naturel. Tout le gaz naturel brûlé au Québec actuellement, autour de 200 milliards de pieds cubes par année, provient du bassin de l'Ouest et est transporté par un seul tuyau. Nous n'avons pas de doute quant à la capacité de servir, mais c'est toujours inquiétant de dépendre d'une seule source d'approvisionnement. Et on sait que la popularité du gaz naturel exerce sur la demande une pression qui est de plus en plus forte, année après année, et qui rend incontournable pour le Québec et pour l'ensemble, je dirais, de l'Amérique d'aller chercher maintenant du gaz sur les marchés mondiaux. Deux statistiques qui vont tout dire: l'Amérique du Nord consomme 30 % actuellement du gaz naturel consommé annuellement et a 4 % des réserves. Alors, je pense que ça amène très clairement l'urgence d'aller, pour ce continent, se brancher sur les sources pléthoriques, je dirais, qui existent au Moyen-Orient, en Russie et en Europe du nord. Alors, c'est ce qui explique notre participation à un projet de terminal méthanier, et je pense, M. le Président, que ce serait vraiment très dommageable pour le Québec de ne pas bénéficier d'un avantage comparé aussi fort qu'une voie maritime qui pénètre si profondément dans le continent, et aussi il faut savoir qu'on a la chance, au Québec, d'être assez proche ? et c'est assez surprenant ? évidemment, de l'Europe et de l'accès des ressources russes ou du Moyen-Orient. Donc, c'est quelque chose qui doit être fait, et avec «c'est urgent».
Finalement, M. le Président, je vous dirais que, dans le domaine de l'énergie, on parle ici d'investissements considérables qui se planifient sur du long terme, le juste-à-temps n'existe pas, et ce sont par définition des infrastructures qui sont dérangeantes. Des infrastructures qui... que ce soient des pipelines ou, encore plus difficile, des lignes électriques, des barrages ou... c'est quelque chose qui est dérangeant, et, aujourd'hui, évidemment, il y a des réactions très fortes qui s'expriment dans les populations. Les gens veulent les bénéfices mais sont plus réservés quant aux impacts possibles. On est très fortement supporteurs du fait que des promoteurs comme nous doivent être soumis à des règles strictes, pour assurer que ce que l'on fait ait le moins d'impacts possible, et aussi que ça garantit la sécurité et la santé des populations. Mais d'autre part il faut laisser au moins une chance à ces grands projets dérangeants de pouvoir se rendre jusqu'au terme, je dirais, des processus qui ont été mis en place.
Alors, M. le Président, juste pour vous dire en conclusion ? je pense que je ne suis pas loin de mon temps, avant que vous ne sonniez la cloche ? alors vous dire que donc nous représentons une industrie, le gaz naturel, qui mondialement est reconnue comme une solution dans le cadre des initiatives qui sont prises dans le cadre du Protocole de Kyoto et une compagnie qui ici, au Québec, je peux vous le garantir, est très fortement installée pour contribuer de plus en plus au développement durable. Alors, je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Vous êtes effectivement tout à fait dans votre temps. Alors, merci pour votre présentation. Je cède la parole maintenant à M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Tessier, Mme Brochu, M. Simard. Probablement que vous êtes rentré pile dans le temps par expérience. M. Tessier, puisque vous avez terminé votre présentation en faisant référence à l'approvisionnement, et notamment via l'implantation d'un terminal méthanier qui permettrait au Québec de disposer de nouvelles sources d'approvisionnement, j'aimerais avoir deux petites précisions de votre part. Comment vous voyez qu'un accès à cette nouvelle source d'approvisionnement pourrait contribuer au développement de l'industrie québécoise du gaz naturel et du développement... réalisation de projets de terminaux méthaniers et que recommanderiez-vous pour faire face à cette problématique?
M. Tessier (Robert): Alors, je vous remercie de ces deux questions fort pertinentes. Alors, d'une part, je vous dirais ceci, c'est que la contribution d'un terminal... il faut dire que celui que nous projetons va permettre dans le fond de brûler, au Québec, là, je veux dire, c'est des capacités suffisantes pour remplacer à peu près la totalité de ce que nous consommons actuellement. Donc, ce n'est pas une petite opération. L'avantage clé que nous allons avoir avec ce terminal, ça n'aura pas immédiatement un effet sur le prix de la molécule, parce que c'est un prix international, à toutes fins pratiques, mais l'ensemble des terminaux qui vont s'installer en Amérique du Nord, le nôtre faisant partie aussi de cet environnement, vont très certainement amener un soulagement de la pression qui existe actuellement entre l'offre et la demande, donc une stabilité des prix, et de descendre le prix général du gaz et limiter sa volatilité. Mais nous ne serons qu'un des éléments de cette démarche parce qu'il y a beaucoup actuellement de terminaux qui sont en projets de construction, il y en a deux autres... deux, un au Nouveau-Brunswick, un en Nouvelle-Écosse, et il y en a une trentaine, de projets, aux États-Unis.
Par ailleurs, ce que nous savons, c'est que nous allons faire des économies relativement importantes en coûts de transport, parce que le gaz naturel, vous avez le coût du gaz, la molécule elle-même, vous avez le coût de transport et ensuite le coût de distribution. En ayant un terminal ici, c'est sûr que nous allons faire des gains ? c'est la raison fondamentale ? sur son coût de transport, donc d'avoir du gaz naturel moins cher que, si, par exemple, M. le Président, on allait le chercher évidemment au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse avec des terminaux qui sont là, installés. Et on parle d'une différence qui peut amener une industrie à s'établir ici ou plutôt aller s'établir ailleurs. Alors, c'est dans cette perspective-là que je pense que les régions, en particulier nos grands consommateurs industriels dont plusieurs sont en région, que nous desservons à peu près tous, à l'exception de la Gaspésie, la Côte-Nord, sont évidemment très sensibles à cette réalité.
L'opposition, bien, je dirais, un terminal, je n'ose même pas prononcer le mot d'une raffinerie, là, parce que j'aimerais voir la réaction que pourrait entraîner l'installation d'une raffinerie, d'une ligne électrique, d'un... J'ai fait l'expérience aussi d'un projet de pipeline, ça entraîne toujours de la réaction. Et, dans le cas précis de ce qu'on vient de vivre, c'est encore plus spécial, parce que c'était un produit inconnu. Alors, c'est une réalité sur laquelle il n'y a pas de... disons, on finit par s'habituer à une ligne électrique, à un pipeline de gaz, mais ça, c'était inconnu. Et je vous dirais que le cadre réglementaire nous a amenés à présenter, à faire des portes ouvertes sur un projet que nous n'avions pas développé. Alors donc, on a été pendant... et j'ai employé l'expression: un peu comme des canards à l'ouverture de la chasse puis on n'avait pas d'ailes. Alors, disons que la période a été longue un peu pour nous. Et je vous dirais ceci, M. le Président: À partir du moment où, en janvier, on a présenté le projet, on a dit où est-ce qu'on s'installerait, on a montré à quoi ça ressemblerait et on avait des réponses, donc la perception et le support a changé considérablement. Alors, une chose qui doit être faite, je pense que c'est songer très sérieusement si cette période... ou si, dès qu'on a un concept, il faut l'annoncer et s'en aller en portes ouvertes, si c'est bien opportun, parce qu'effectivement on a fait démolir un projet qu'on n'avait pas présenté. Alors, ça a créé une très, très mauvaise... disons, ça a un goût assez amer.
M. Corbeil: Merci, M. Tessier. M. le Président, j'aurai une autre question, parce que, puisque vous parlez de perception, on est dans le monde des perceptions au départ, il y a des entreprises qui sont en compétition avec vous, qui caressent l'implantation d'un projet similaire et qui disaient que le cadre réglementaire au Québec était adéquat, satisfaisant et qu'ils s'en accommodaient et ils ont même qualifié de parmi un des meilleurs au monde. Vous avez l'air, vous aussi... Vous avez l'air, ce matin... Et vous avez déjà émis dans le passé des réserves là-dessus. On parle de perception également. Est-ce que vous pourriez nous expliquer cette différence, là, dans le ton ou dans le discours?
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(10 heures)
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M. Tessier (Robert): Oui. M. le Président, quand on avait regardé le projet Cacouna, en autant qu'on est concerné, et on savait qu'il y avait là une moindre résistance, c'est-à-dire on est moins proche des centres. Et donc ce que je peux vous dire d'expérience, c'est que, quand on a fait le choix de s'en aller dans la région de Chaudière-Appalaches, on savait qu'on aurait davantage de résistance. Ce que nous avons vécu, M. le Président, c'est d'être placés dans une situation de présenter un concept sans projet, et donc, pendant une période assez longue, d'être soumis à un tir de barrage, alors que nous n'avions pas eu le temps de développer le projet tel que nous l'avons présenté actuellement. C'est une question de concept, je présume que, si vous vous installez à un endroit où il n'y a pas de résistance, bien, je veux dire, le cadre est tout à fait adéquat. Je peux vous dire par ailleurs que je vis d'autres expériences, là, pour l'installation dans la région de Montréal, et là encore je peux vous dire qu'on a des petites difficultés relationnelles. Et peut-être que le cadre peut être valide dans certains contextes, dans d'autres moins. Alors, nous, je ne peux pas vous dire qu'on a trouvé l'expérience heureuse.
M. Corbeil: Merci beaucoup, M. Tessier. On va se projeter dans l'avenir. Il y a deux projets sur les planches à dessin, au Québec, présentement. Dans l'hypothèse où les deux se réaliseraient en ce qui concerne la distribution de ce volume de gaz, notamment dans la conduite Saint-Nicolas?Montréal, est-ce que vous prévoyez une congestion ou si les installations existantes sont suffisantes pour accueillir un tel volume?
M. Tessier (Robert): Je vous dirais ceci, M. le Président, d'abord je suis distributeur de gaz, d'abord. Et on est... Parce que je crois fortement, et on s'est impliqués, être un agent efficace pour aller implanter un terminal. Nous savons à quoi va servir notre gaz, on sait d'où il va venir puis, bon, on a un concept. Et le projet qui est arrivé plus tard de Cacouna, soit dit en passant, si des projets qui se... de terminaux, au Québec, un, deux, on ne se plaindra pas comme distributeur, hein? Le plus il va y avoir d'entrées, mieux ça va être pour tout le monde. Je ne connais pas, M. le Président, à quoi va servir... et quels sont les projets de vente, quelles vont être les clientèles, où va se diriger le gaz du projet de Cacouna, alors ça m'est très difficile de répondre à votre question parce que je n'ai pas les éléments pour.
M. Corbeil: Merci. Vous préconisez, comme plusieurs intervenants qui sont venus jusqu'ici devant la commission parlementaire, l'utilisation du gaz naturel pour le chauffage résidentiel. Quelles sont les mesures que vous préconisez afin de favoriser une substitution graduelle mais concrète de l'électricité par le gaz naturel, puis avez-vous estimé le potentiel de substitution et la capacité du réseau gazier à prendre cette nouvelle charge en période de pointe?
M. Tessier (Robert): Je laisserais la chance à Mme Brochu de répondre à cette question.
Le Président (M. Jutras): Mme Brochu.
Mme Brochu (Sophie): Alors, aujourd'hui, Gaz Métro, depuis 1997, a effectué un retour dans le marché résidentiel. On a du succès dans ce qu'on appelle le marché haut de gamme, où d'entrée de jeu les gens vont choisir un système de chauffage central et, dans ce marché-là, on a des taux de pénétration qui sont très élevés. Alors, pour vous donner un peu la sensibilité de la progression, quand on a fait un retour, en 1998, dans la grande région de Montréal, on avait un taux de pénétration d'à peu près 5 % de nouvelles constructions. L'année dernière, on était à 15 % et, s'il n'en tient qu'à nous, on sera à 20 % et à 25 % bientôt.
Pour que ça arrive par ailleurs, il faut que l'on puisse transgresser la perception de la population quant au prix de l'électricité, quant au prix futur, et transgresser aussi la barrière à la plinthe électrique. Alors, dans votre question, dans le fond, il y a deux marchés à servir: le marché de la densification, autrement dit la conversion d'équipements existants, donc des systèmes centraux, hein, qui peuvent être convertis au gaz naturel, et il y a le marché de la nouvelle construction. Alors donc, il n'y a pas de doute, comme M. Tessier disait, que, s'il y a un signal de prix, puis pas une affaire de fou, là, ça n'a pas besoin d'avoir des taux de progression très élevés, si le signal est lancé, si le discours du gouvernement est cohérent, si celui d'Hydro-Québec va dans le même sens, il va y avoir ce qu'on appelle en marketing, là, le trend du marché, puis ce qu'on appelle le «market pull», et les gens vont savoir que graduellement les prix d'électricité vont augmenter.
Puis, vous savez, aujourd'hui, si on regarde le prix du gaz naturel et de l'électricité vendus dans le marché résidentiel, on est presque pareils, hein? Sur une base annuelle, on est peut-être à 5 %, ou 6 %, ou 7 %. Donc, ça ne prend pas des corrections massives pour permettre au gaz naturel de rentrer dans un marché qui, aujourd'hui, subit une concurrence subventionnée du côté hydroélectrique. Donc, correction de prix, un discours cohérent, puis il n'y a pas de doute que, si le Code du bâtiment était implanté au Québec puis que les amenées d'air étaient telles que celles qui sont prévues au Code du bâtiment, comme ça se fait partout ailleurs au Canada, bien la plinthe électrique se verrait graduellement autodéplacée par des systèmes de chauffage central. Et là, à ce moment-là, le gaz naturel est capable de faire le travail qu'on attend de lui.
M. Tessier (Robert): Il y aurait peut-être un ajout là-dessus, parce qu'avec... vous savez les économies d'énergie que l'on vise en particulier sur l'enveloppe des bâtiments, si vous resserrez encore l'enveloppe des bâtiments, donc en restreignant les entrées d'air, il va se poser une question ici, au Québec, c'est parce que ce qui est unique, là: 70 % des résidences sont chauffées électriques. Si vous mettez du R-32, il va y avoir des problèmes, je pense, de qualité de l'air à l'intérieur des résidences. Alors, il y a quelque chose là qui doit certainement être une réflexion qui va être unique parce qu'on est dans une situation unique, au Québec, et je pense qu'il devient urgent, plus qu'ailleurs au Canada, de regarder très sérieusement toute cette question des circulations d'air à l'intérieur des résidences, M. le Président.
Mme Brochu (Sophie): Maintenant, pour ce qui est du potentiel, alors de quoi on parle? Quand on regarde sur une période de 10 ans, puis encore une fois s'il y a correction graduelle des tarifs électriques pour davantage refléter les coûts, s'il y a un bon discours gouvernemental, une bonne politique, s'il y a une action commerciale cohérente du côté d'Hydro-Québec, nous, on pense que, d'ici une dizaine d'années, on pourrait aller desservir l'équivalent dans le marché résidentiel de 4 TWh. Alors, 4 TWh, c'est quoi? C'est l'équivalent, et là ce que je vous parle, c'est à la fois en convertissant les équipements existants puis en allant chercher une part raisonnable du marché de la nouvelle construction, alors on pourrait aller chercher donc 4 TWh, c'est l'équivalent de la croissance prévue d'Hydro-Québec dans le marché de ce qu'ils appellent domestique et agricole. 4 TWh, quand on regarde les capacités d'importation, d'exportation, c'est beaucoup de jus. C'est beaucoup de jus. C'est l'équivalent du programme d'efficacité énergétique. Donc, c'est une contribution très tangible, très réelle pour laquelle on n'a pas besoin de mettre en place beaucoup de choses, simplement avoir les bons signaux, et les bons discours, et le bon code réglementaire.
M. Corbeil: Alors, vous n'avez pas nécessairement répondu à la question, à savoir: Est-ce que ce serait possible au réseau de prendre ou d'avoir la capacité de traiter cet accroissement de la demande surtout en période de pointe? Et j'aimerais que vous reveniez aussi sur la notion du Code national du bâtiment et de la section ventilation notamment, puisque vous faites référence à la qualité de l'air dans les édifices. J'aimerais aussi que vous développiez peut-être un peu sur la question de l'efficacité énergétique en rapport avec cette notion-là de Code du bâtiment.
M. Tessier (Robert): Alors, sur la capacité d'abord il faut vous dire, là, qu'on... 4 TWh, l'équivalent en Bcf de cette pénétration dans le résidentiel, c'est quand même très modeste. On vise 35 % des nouvelles constructions. Je vous signalerai, M. le Président, qu'en Ontario, c'est 90 %, dans la région de Toronto, des résidences qui sont branchées au gaz naturel. Ils en branchent une soixantaine de mille par année, puis ils n'ont pas de problème de desserte. On n'en aura pas plus.
Alors, on parle ici de quelque chose qui est relativement marginal. Si on le sait d'avance, si on est préparé, on va être capable de répondre à ça très facilement. Le gaz naturel est moins complexe, je dirais, que la desserte électrique. On a plus de mou un peu dans l'organisation de nos équipements. Et je laisserais Sophie répondre aux deux autres questions.
Mme Brochu (Sophie): Oui, sur le... Vous parlez... Il parle du Code du bâtiment...
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(10 h 10)
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M. Tessier (Robert): Bien, le Code du bâtiment, je pense que c'est fondamentalement ce que je signifiais, il y a un Code du bâtiment national qui a été adopté par le Québec. Par ailleurs, on a laissé, entre guillemets, un peu dans une zone floue l'application réelle pour des bâtiments résidentiels. Ça a été délégué aux municipalités mais sans obligation. Alors donc, ça reste un peu comme ça. Et nos experts en bâtiment ici, au Québec, au Canada d'abord et au Québec, ont jugé ? indépendamment du nombre... du type de chauffe, là, ça n'a pas rapport ? qu'il fallait une circulation minimum d'air. Ici, c'est encore plus critique parce que nous avons non pas des systèmes centraux qui par définition vont chercher une entrée d'air, là, pour que ça puisse fonctionner, mais on a des systèmes qui sont à la plinthe électrique sans entrée suffisante d'air, là. Il n'y en a pas. Alors donc, c'est avec plus d'acuité au Québec que l'application du code devrait se poser parce qu'il y a 70 % des résidences qui sont chauffées à la plinthe électrique. Alors, c'est une réalité avec laquelle on va devoir composer.
Et je vous disais: Quand vous allez voir les programmes d'efficacité énergétique, d'économie d'énergie, encore là ça va être beaucoup sur l'enveloppe des bâtiments, et donc ça va être pour restreindre encore la circulation d'air. Alors, on pense qu'il y a là, M. le Président, pour des fins tout simplement de santé puis de qualité de vie, une réflexion gouvernementale à faire. C'est ce qu'on vous laisse à votre...
M. Corbeil: Je vais laisser la place à des collègues.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Saint-Jean.
M. Paquin: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, bienvenue. Félicitations pour votre mémoire, là. C'est très bien fait, à la hauteur de votre entreprise, de votre compagnie.
J'aimerais qu'on revienne rapidement sur les questions de prix et de parts de marché entre l'électricité et le gaz naturel au Québec. Je crois comprendre qu'il y a une différence d'à peu près 8 %, 10 % de prix, si je vous ai bien suivi.
Mme Brochu (Sophie): On va parler... On a différents marchés. Alors, nous, on décompose le marché un peu à la manière d'Hydro-Québec, là. On a un marché résidentiel, un marché commercial puis le marché VGE. Alors, si on s'adresse, par exemple, dans le marché... Est-ce que c'est le marché résidentiel dont vous voulez parler ou le marché...
M. Paquin: Le marché résidentiel, oui.
Mme Brochu (Sophie): Le marché résidentiel. Bon. Le marché résidentiel, je vous dirais, toute chose étant égale par ailleurs, plus la consommation est importante, moins l'écart est grand, ça, en partant. De manière ponctuelle, Gaz Métro fait beaucoup d'efforts pour mitiger le coût de l'énergie livrée à ses clients en période hivernale. Alors, ça fait, ça, que, quand on regarde sur une période de 12 mois, par exemple, on va avoir un écart d'à peu près entre 4 % et 8 % entre le prix du gaz naturel livré et l'électricité. Et, si on regarde, exemple, ce matin, les deux énergies livrées sont presque nez à nez en termes de position concurrentielle, de prix livré énergétique.
Alors, c'est pour ça que la pénétration de Gaz Métro dans le marché résidentiel, au cours des dernières années, a été axée beaucoup sur le marché dit moyen et haut de gamme où les gens s'installent un système central. Alors, quand il y a un système central, le gaz naturel est très souvent privilégié.
M. Tessier (Robert): Je reviendrais peut-être... Dans le marché industriel, ça ne se pose pas, là. Il n'y a personne qui va chauffer son eau ou son air de l'électricité, là. Oubliez ça. La compétition qu'on a, c'est avec l'huile lourde n° 6. C'est un drôle de produit, cette affaire-là, parce que, même si le prix de l'huile monte, lui, il reste bas parce que c'est un sous-produit. Alors, on a une compétition là. Mais c'est ça, ce qui va faire... C'est pour ça qu'on pousse aussi si fort sur la cogénération, parce que c'est le moyen de déplacer de l'huile n° 6 avec ses effets sur à la fois le smog et le réchauffement.
Dans le marché institutionnel et commercial, si on est présent, les gens vont se mettre, disons, très fortement au gaz, on est moins cher, nettement moins cher, nettement moins cher. Alors donc, il nous reste le marché résidentiel et, comme je vous dis, actuellement on est à peu près nez à nez si ce n'est du problème des installations qui... C'est cette barrière, à l'entrée, qui actuellement est le frein de la pénétration du gaz naturel dans les résidences.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Mais, si vous voulez entrer dans le marché résidentiel, pour les nouvelles résidences, ça va bien, mais par contre, pour les résidences déjà construites et où il y a des plinthes électriques installées, ça veut dire que, là, ça implique l'installation d'un système central avec des conduits.
M. Tessier (Robert): C'est une très bonne question. D'ailleurs, dans nos statistiques, là, on ne vise pas ça du tout. Je veux dire, tout ce qu'on vise, c'est des systèmes... du déplacement sur notre réseau des gens qui sont installés à l'huile. Quand on parle de conversion, c'est là où il existe un système central à l'huile ou électrique, mais il n'y en a pas des tonnes. Ça, c'est faisable. Le déplacement de la plinthe, on travaille actuellement, je dois dire, à des solutions. On est en train de tester des équipements, mais c'est un peu particulier, là, parce qu'il n'y a pas personne au monde qui a ce genre de problème là. Alors, on ne peut pas dire... trouver sur le marché, en regardant les catalogues qu'on va trouver quelque chose. Alors, on se force les méninges actuellement, mais on n'a pas trouvé rien de brillant et d'économique pour le moment. Mais c'est une... disons, c'est quelque chose qui est sur notre radar, et un jour peut-être qu'on va trouver le moyen de faire une pénétration de ce côté-là.
Le Président (M. Jutras): Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci. Alors, messieurs, madame, bienvenue, bonjour. Dans votre exercice de vous forcer les méninges, là, juste pour ma gouverne ou la gouverne des membres de la commission, quel est le pourcentage de vos dépenses en recherche et développement par rapport à vos ventes, mais en excluant de vos ventes le coût de vos achats de gaz? Parce qu'effectivement ce sont des importations, là.
M. Tessier (Robert): Je dirais qu'on met... c'est relativement modeste, M. le Président, environ 3 millions de dollars par année pour soutenir les travaux de notre centre de recherche. On se sert de cet argent-là comme catalyseur parce que, comme on est le seul centre de recherche au Canada, on essaie de fédérer la recherche, d'amener les autres distributeurs à «pooler» dans le fond, c'est de la recherche coopérative, pour construire des projets de recherche avec du financement multiple. Et, une fois qu'on a cette base, là, bien, c'est d'aller chercher, auprès du gouvernement fédéral, les crédits complémentaires pour faire les études. Je pense que ça va être appelé à plus de développement avec évidemment ce qu'on a vu du récent budget fédéral. Alors, il y a certainement des besoins clairs là-dessus, on en a plus que n'importe qui parce qu'on a des problèmes, comme je vous disais, spécifiques. Alors, c'est ça.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, pendant qu'on continue, peut-être quelqu'un pourrait calculer ce que ça représente en pourcentage de vos ventes, pas nettes, mais vos ventes moins les achats.
Mme Brochu (Sophie): Le revenu distribution de Gaz Métro, c'est 450 millions, son bénéfice net, c'est 160 millions. Donc, 3 millions sur 160 millions de bénéfice, ça fait à peu près 1,5 % de nos bénéfices.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. C'est beau. J'aimerais ça, moi, aborder vos observations parce que vous avez énormément de recommandations qui sont toutes aussi intéressantes les unes que les autres. Mais, si vous avez pris soin de synthétiser dans des observations, c'est qu'elles sont sans doute plus importantes. Bon. Vous avez parlé, dans l'observation n° 1, d'un signal de prix et vous dites aussi qu'on doit corriger la situation par rapport au signal de prix que quelqu'un a qualifié de subventionner, là, de l'énergie électrique.
Alors, moi, je vous dirais là-dessus: À ce jour, les tarifs d'électricité ont toujours reflété les coûts moyens de production. Ce que vous nous dites, là, c'est de changer la tarification pour la baser sur des coûts à venir, les coûts marginaux. Je vous vois faire ça tous les deux, là. Alors, peut-être vous pouvez me corriger, là, corrigez-moi. Parce qu'effectivement l'industrie est venue nous dire ici ? et il y a quand même ...l'industrie est fortement consommatrice d'électricité au Québec, ça a été un de nos outils de développement ? que ces augmentations excessives, là, de trois fois depuis 15 mois, ont été très dures pour l'industrie, puis que là on se repose des questions sur un certain nombre de choix d'investissement. On nous a parlé de 5 milliards de projets, dans le pipeline, qui étaient retenus actuellement parce qu'on ne savait pas trop où allaient les prix.
M. Tessier (Robert): D'abord, ceci. Évidemment, on ne se fera pas les protagonistes, là, de vendre ça au prix marginal. Incidemment, le gaz est vendu au prix marginal.
Mme Dionne-Marsolais: Je savais que ça viendrait.
M. Tessier (Robert): Hein, non, non, mais c'est vrai qu'il est vendu au coût marginal.
Mme Dionne-Marsolais: C'est vrai, je suis d'accord avec vous. Je suis d'accord avec vous.
M. Tessier (Robert): Alors, l'huile aussi est au coût marginal. Je veux dire, si demain le prix mondial monte, ça monte, en tout cas c'est la vie. L'électricité est au prix moyen. On ne voit pas, demain matin, là, que ça passe sur la valeur marchande, l'électricité, au Québec, non plus qu'au coût marginal. Le coût marginal est quoi? Il serait autour de 0,11 $ aujourd'hui, là. Alors, vous savez, ce n'est même pas concevable.
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(10 h 20)
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En fait, ce qu'on dit, c'est ceci, c'est que ce qu'il faut faire... et notre point est double: d'abord, vous ne pouvez pas geler le tarif électrique, c'est donner un signal extrêmement mauvais, je veux dire, sur le plan de sa conservation au départ; deuxièmement, bien, je veux dire, c'est que vous empêchez des énergies de déplacer. On ne veux pas déplacer l'électricité pour la faire disparaître, là, mais, si on libère des capacités, je veux dire, ça va pouvoir servir à d'autre chose, donc éviter à terme, et, moi, je pense, éviter à terme un gros choc tarifaire.
Parce que, quand les nouvelles installations vont rentrer, vous le savez comme moi, vous avez été dans Hydro-Québec une partie de votre temps, là, vous capitalisez les dépenses puis, l'année ou ça rentre dans le portefeuille, si vous n'avez pas prévu quelque chose, vous risquez d'avoir un effet... Dans des bonnes années, on a déjà vu des augmentations d'Hydro qui étaient assez intempestives. Alors donc, c'est ça qu'il faut éviter, des chocs brutaux. Et les industries, c'est évident, vous vous préparez, vous passez ça dans vos coûts de production, mettez ça dans votre planification quand vous avez une idée comment est-ce que ça va progresser. Mais, si vous maintenez ça en dehors, je dirais, des tendances normales, tôt ou tard, il va y avoir un effet de choc en retour, et, là, ça, ça peut avoir des conséquences plus dramatiques.
Mme Dionne-Marsolais: Votre deuxième observation concerne la responsabilité du gouvernement «que l'information critique soit largement diffusée et accessible à la population de manière continue si l'on souhaite que les prises de position se fassent de manière éclairée». Et, un peu plus tard, dans votre mémoire, vous parlez aussi d'une meilleure connaissance des coûts et, sans vraiment référer à la loi n° 116, vous suggérez que la régie ait une connaissance plus pointue et plus réelle des données d'Hydro-Québec Production. Est-ce que vous iriez jusqu'à dire qu'il est important qu'elle soit assujettie, Hydro-Québec Production, à la juridiction de la régie?
M. Tessier (Robert): J'allais dire: C'est un débat, c'est une question à laquelle je n'ai pas réfléchi personnellement. Une chose est certaine par ailleurs, et on le dit dans le mémoire: il faut qu'il y ait un endroit où les données fiables soient colligées, analysées et présentées. Que ce soit régi ou non, c'est à mon avis secondaire par rapport au fait qu'on dispose, que les agents décideurs disposent de données avec lesquelles on peut évidemment mesurer la situation de sécurité énergétique, de l'évolution des prix, des capacités, tout ça, et ça nous manque actuellement.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, effectivement, si on ne veut pas créer d'autres organismes de régulation ou d'autres endroits, là, d'autres... on peut très sérieusement réfléchir à ce que la régie ait juridiction sur Hydro-Québec Production.
Votre troisième observation concerne l'efficacité énergétique et les usages performants, on en a parlé tout à l'heure. Vous dites que le gaz naturel se bat à armes inégales sur le marché. On a parlé des tarifs. Vous avez dit tantôt que vous ne vouliez pas remplacer le marché des plinthes. Mais on sait qu'au niveau de l'efficacité énergétique, pour fins de chauffage, le gaz a une efficacité de combien?
M. Tessier (Robert): 95 % dans les nouvelles capacités.
Mme Dionne-Marsolais: 95 %?
M. Tessier (Robert): Oui. 92 %, 95 %.
Mme Dionne-Marsolais: Bon. Et évidemment l'électricité, qui avait été un choix dans les années soixante-dix parce que nous en avions en quantité, parce qu'elle était produite chez nous et qu'elle évitait des déplacements de dollars vers l'étranger... Mais ce parc d'équipement là commence à vieillir, ces maisons que l'on a construites, je pense à Novelec, là, dans le temps, c'est un parc d'équipement qui doit avoir 30 ans, hein, certainement. Il va falloir le renouveler, ce parc d'équipement là. Vous avez mentionné tantôt que vous cherchiez des solutions. Est-ce qu il y a des solutions, à l'heure actuelle, pour intéresser des Québécois qui voudraient modifier leurs systèmes de chauffage, d'une part, est-ce que l'État peut faire quelque chose pour encourager ce changement-là? Je sais bien que, si on n'a pas une fournaise électrique, il faut installer des conduits, là, mais est-ce que vous avez des suggestions? Parce que votre commentaire est assez précis, puis, je me dis, connaissant Gaz Métro, vous avez sûrement dû faire une réflexion là-dessus.
M. Tessier (Robert): Oui, il y en a, des solutions, mais elles sont très coûteuses. Pensez au plancher radiant. Les gens qui ont des lofts sur le Plateau Mont-Royal, qui ont les moyens, bien, je veux dire, ils remplacent la plinthe électrique par du plancher radiant chauffé avec... Bon. Alors, mais ça, ce n'est pas tout le monde qui peut se permettre ça. Alors, ce qu'on cherche, c'est quelque chose qui ressemble à de la plinthe électrique, qui est un système distribué le long des murs, sous forme de plinthe, mais avec de l'eau chaude qui circule au lieu de l'électricité. On travaille actuellement... on est en relation avec des firmes européennes qui ont ce genre d'équipement là, mais ce n'est pas encore tout à fait adapté. Mais c'est une piste de recherche et, si le gouvernement nous offre évidemment de mettre un programme spécifique à notre centre de recherche, on se fera un grand plaisir d'y participer.
Mme Dionne-Marsolais: Mais ce n'est pas si frivole comme commentaire, même si on sourit, parce qu'essentiellement il y a un parc tellement important, et c'est une utilisation qui est tellement peu optimale de l'électricité ? vous le mentionnez, c'est quand même une énergie noble ? peut-être qu'il y aurait intérêt à explorer cela de manière un peu plus agressive, en tout cas c'est un commentaire, là.
Votre observation 4, là, quand vous dites, ce que je comprends, on modifie nos consommations locales et puis on a plus de marge de manoeuvre pour exporter, et vous dites ici que l'exportation vers des territoires voisins permet de déplacer des formes de production plus polluantes. On nous a démontré que ce n'était pas nécessairement le cas parce qu'en période de pointe c'est là où la rentabilité de l'exportation est la plus forte, et ce que l'électricité déplace à ce moment-là, sur le marché limitrophe, ce n'est pas des centrales au charbon, mais c'est surtout des centrales au gaz. On a eu des démonstrations à cet effet-là, durant... je vous le dis, là, mais...
M. Tessier (Robert): Quand c'est une question compliquée, dans ce temps-là, je demande à Mme Brochu.
Mme Dionne-Marsolais: Non, ce n'est pas une question, c'est un commentaire, là. En théorie, ce que vous dites, c'est vrai, mais c'est plus ou moins vrai dans la réalité.
Mme Brochu (Sophie): Il y a une question de logique systémique aussi, hein? Si vous regardez, par exemple, l'Ontario. L'Ontario, elle a des centrales au charbon, puis l'Ontario dit: Je vais convertir mes centrales au charbon au gaz naturel. Alors, quand on regarde ça d'un peu plus près puis qu'on regarde ça de manière, quand même de manière systémique, là, est-ce que c'est fou de penser que le Québec pourrait utiliser le gaz naturel, avec 95 % d'efficacité, dans ses résidences, libérer les capacités hydroélectriques qui pourraient être vendues ? on parle des États-Unis, mais c'est vrai aussi sur l'Ontario ? plutôt que d'utiliser du gaz naturel en Ontario pour faire de l'électricité puis avec une efficacité moindre? Donc, c'est tout ce qu'on dit, ce qu'on dit, c'est que c'est logique d'utiliser le gaz dans la chauffe directe, l'électricité de la libérer.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Maintenant, j'aimerais ça parler des ports, du port, du ou des, parce que, dépendant de la partie dans votre mémoire, il est au singulier puis à d'autres endroits il est au pluriel. Bon. Vous, vous souhaitez avoir un port méthanier pour importer du gaz naturel liquéfié. Hier, on a eu des chiffres de TransCanada qui nous disaient que la demande, au Québec, en ce moment, c'était 600 millions de pieds cubes par jour. La capacité des ports méthaniers, c'est de l'ordre de 500 millions de pieds cubes par jour, si on en a deux, ça fait 1 000, donc... Et on dit que, d'ici 2015, la demande du Québec pourrait aller jusqu'à 800 millions de pieds... c'est les chiffres qui nous ont été donnés hier. Alors, je vous pose la question suivante: Est-ce qu'il y a de la place au Québec pour deux ports méthaniers? Et, si oui, qu'est-ce qu'on va faire avec les deux? Est-ce que ce serait un encouragement à développer davantage le marché ou est-ce que c'est... on a l'intention aussi... parce qu'on va être branché aussi sur d'autres réseaux, là, on pourrait l'exporter aussi, là.
Mme Brochu (Sophie): Bien, écoutez, d'un point de vue, je vais vous répondre avec mon chapeau d'approvisionnement gazier. Aujourd'hui, le Québec, il est au bout d'un système d'approvisionnement, hein, on est la dernière station de métro au bout de TCPL. La possibilité qu'a le Québec d'implanter un terminal méthanier dans le fond, c'est de se mettre en tête d'un système d'approvisionnement et de faire jouer un avantage concurrentiel pour le bénéfice de l'entièreté des entreprises. Alors ça, c'est l'objectif recherché.
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(10 h 30)
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Le terminal dans lequel nous sommes impliqués... Gaz Métro a été approché en fait par l'utilisateur du terminal pour pouvoir acheter du gaz naturel à la sortie du terminal, ça va être un terminal marchand, n'importe qui va pouvoir acheter du gaz naturel à la sortie de ce terminal-là. On sait, nous, que ce terminal-là va être de 500 000 Mpc par jour, donc à peu près la totalité de la consommation du Québec. Or, comme Robert le disait, on le sait où ce gaz naturel là va être vendu, hein, à partir de ce terminal-là. S'il y en a deux, il n'y a pas de doute que le Québec, demain matin, ne consommera pas 1 Bcf par jour, là, hein? On sait ça. Ce n'est pas parce qu'on ne consomme pas 1 Bcf par jour qu'on ne peut pas avoir le bénéfice de l'impact de 1 Bcf par jour par ailleurs sur les capacités de livraison. Mais à votre question est-ce qu'il y a un volume de gaz naturel qui va quitter le Québec? la réponse, c'est oui. Je veux dire, c'est physique, là, hein, c'est a plus b divisé par deux.
Alors, est-ce que le Québec a besoin... Je vous dirais, à la limite est-ce que l'Alberta a besoin de tant de gaz naturel dans son sous-sol? Elle ne consomme pas tout le gaz naturel qui est chez elle, l'Alberta en jouit, d'impact de prix. En fait, comme distributeur, je peux vous dire une chose, moi: quand j'ai plus qu'un fournisseur, par définition j'ai un meilleur prix. C'était vrai hier, c'est vrai à matin, puis ça va être vrai demain, tout le temps. Alors, s'il y a deux terminaux, bien ça va être bénéfique pour le Québec.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier.
M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour à vous. Merci d'être là. Vous avez répondu à pratiquement toutes mes interrogations, mais j'ai quand même deux aspects que j'aimerais qu'on discute. On en a parlé tantôt, puis j'ai posé la question, hier, à Énergie Cacouna, et je vais vous la reposer. On a parlé du cadre réglementaire. Hier, Cacouna nous disait que, bon, évidemment, eux autres, ils n'ont pas eu de contestation, alors c'est difficile de critiquer le cadre réglementaire. Vous avez tantôt un petit peu critiqué le cadre réglementaire. On ne peut pas faire deux cadres finalement, on se doit d'en faire seulement qu'un. On a l'annonce, on a les études, on a le BAPE. Qu'est-ce que vous conseilleriez? Comment que vous voyez ça, le cadre? Parce que, là, il semble qu'avant même d'avoir la fin des études on a des contestations. Vous l'avez critiqué tantôt. Comment qu'on pourrait faire évidemment pour corriger la situation, là? J'aimerais vous entendre sur ça.
M. Tessier (Robert): D'abord, il y a d'énormes progrès qui ont été faits, soit dit en passant, parce que le fait que maintenant il y ait une harmonisation des deux processus de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et du BAPE, ça a été formidable, ça. C'est un acquis incroyable, je veux dire, en termes de simplification.
La problématique et la seule, que je dirais, c'est cette période, je dirais, grise où le projet n'est pas encore défini. Alors, c'est de réfléchir sur l'utilité d'aller mettre... de tenir des portes ouvertes pour dire qu'on a un projet, mais on n'a pas d'idée encore où est-ce qu'il va se loger et on n'a pas encore tout le contour ni ses aspects visuels, puis on n'a pas les réponses. Parce que, quand vous êtes un promoteur et que vous ne pouvez pas dire n'importe quoi n'importe comment, là, on ne prend pas nos recettes dans l'Internet, hein, on est obligé de faire des études, et ça prend du temps. Alors, c'est cette période-là qu'on a trouvée discutable, là. C'est fondamentalement ça.
M. Légaré: Vous conseilleriez finalement de finir les études, de terminer vraiment les études avant même de commencer à étaler ça, à étaler le... comme on le voit présentement.
M. Tessier (Robert): Tout à fait. Alors, à partir du moment où vous avez un projet, vous avez des réponses. Les questions viennent, on a des réponses. Quand vous n'avez pas de projet, c'est difficile.
M. Légaré: Autre petite interrogation que...Tantôt, vous avez parlé de l'efficacité au niveau, bon, de la chauffe du résidentiel. Parlez-moi, on a abandonné le projet du Suroît il y a de ça quelques mois avec... Moi, j'ai trouvé parfait d'abandonner ça. Je veux vous entendre sur les grandes centrales thermiques, les grands projets comme 700, 800 MW. Qu'est-ce que vous pensez de ça, Gaz Métro? Êtes-vous en faveur de ça?
M. Tessier (Robert): Je dirais ceci, c'est qu'en pratique il y en a beaucoup de ça qui s'installent partout à travers... C'est ce qui fait d'ailleurs qu'il y a une pression sur le prix du gaz naturel. Ici, au Québec, on a la chance d'avoir de l'énergie renouvelable. Alors, je veux dire, même si on est un vendeur de gaz naturel, on est aussi implanté puis on a, je vous disais, la philosophie du développement durable, là. Ce n'est pas des vains mots pour nous. Donc, on ne peut faire qu'appuyer les orientations qui sont prises sur le développement des énergies renouvelables.
Par ailleurs, on dit et on pousse sur l'idée de la cogénération parce qu'il y a actuellement beaucoup de chauffe qui se fait à partir du bunker, de l'huile n° 6, et le moyen de déplacer ça, c'est avec des minis... des centrales en fait adaptées aux besoins de consommation de vapeur des entreprises. Et ça a l'avantage régionalement, je vous dirais, là, parce qu'on voit nos clients... Vous savez mieux que quiconque, étant donné votre position privilégiée, à l'Assemblée nationale, que les régions souffrent, les industries souffrent, les pâtes et papiers souffrent. Et, s'il y a moyen de leur donner un break en leur donnant de la vapeur à moins cher, parce que c'est ça qui arriverait, je pense que c'est gagnant-gagnant pour tout le monde.
M. Légaré: S'il y aurait un autre projet, finalement on se dirigerait peut-être plus vers les minicentrales que recommencer un projet à 700, 800 MW. C'est ce que je comprends?
M. Tessier (Robert): Bien, actuellement, c'est ce qu'on vise, là. Je veux dire, il y a déjà un appel de propositions pour 250 MW, 200 MW?
Une voix: ...
M. Tessier (Robert): 300 MW de cogen. On dit: Il devrait y en avoir plus, de ça. D'ailleurs, dans la directive européenne, vous voyez une très, très forte stimulation à l'utilisation de la cogen au gaz. C'était dans les têtes de liste des orientations pour rencontrer leurs objectifs de Kyoto. Alors, nous, on sait ? on est très, très fortement derrière ça ? que ça, c'est une bonne utilisation du gaz naturel.
M. Légaré: Un dernier petit point, vous en avez parlé aussi tantôt, le Code du bâtiment...
Le Président (M. Jutras): Si vous voulez conclure, là, parce que le temps est épuisé.
M. Légaré: Vous avez parlé tantôt du Code du bâtiment, on devrait uniformiser le Code du bâtiment. Pour mon intérêt personnel, dans les autres provinces, comment ça se passe au niveau du Code du bâtiment? Et puis est-ce qu'on est en retard?
M. Tessier (Robert): Oui, on est en retard sur l'adoption du code. Il y a une couple d'années de retard sur l'adoption du code. Puis l'autre affaire, c'est qu'il ne s'applique pas.
M. Légaré: Oui, uniformiser...
M. Tessier (Robert): Alors, je vous dirais, on est en retard puis on ne l'applique pas. Ça fait deux bonnes raisons.
M. Légaré: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, madame, messieurs, merci pour votre présentation.
Je demanderais aux représentants d'ENvironnement JEUnesse de s'approcher.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Alors, les représentants d'ENvironnement JEUnesse, si vous voulez prendre place, c'est à votre tour.
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(10 h 40)
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Bon. Nous souhaitons donc la bienvenue maintenant aux représentants d'ENvironnement JEUnesse. Alors, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Alors, je vous rappelle les règles: vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire; par la suite, 20 minutes d'échange avec le ministre et les députés ministériels; et, par après, 20 minutes d'échange avec les députés de l'opposition. Si vous voulez, dans un premier temps, vous identifier, identifier les personnes qui vous accompagnent et procéder à la présentation de votre mémoire.
ENvironnement JEUnesse inc. (ENJEU)
M. Frankland (Martin): Eh bien, merci beaucoup pour votre accueil. Merci de nous écouter aujourd'hui. Je me présente... enfin, je nous présente, on est d'ENvironnement JEUnesse. Et voici René Coignaud, qui est président de l'organisme; ainsi qu'Audrey Yank, qui est membre de l'organisme aussi; et moi-même, Martin Frankland, je suis administrateur à ENvironnement JEUnesse.
Donc, pour faire d'abord un bref survol de l'organisme, qu'est-ce qu'on fait à ENvironnement JEUnesse? Eh bien, c'est un organisme d'éducation relative à l'environnement qui existe depuis plus de 25 ans aujourd'hui. Donc, on travaille surtout en milieu scolaire avec des jeunes du secondaire et du cégep. On essaie de les informer et de les sensibiliser sur les problématiques environnementales et on les supporte aussi dans tous leurs projets environnementaux, que ce soit à l'école ou dans leur milieu, chez eux. Donc, il y a beaucoup de projets environnementaux qui sont supportés par ENvironnement JEUnesse, et des programmes de sensibilisation. On touche à beaucoup de thématiques, entre autres le transport, les changements climatiques, les enjeux alimentaires, la gestion des déchets, la gestion de l'eau et plusieurs autres encore. Donc, voilà un bref survol d'ENvironnement JEUnesse.
Donc, aujourd'hui, on vient vous parler de notre opinion sur l'énergie, l'avenir énergétique du Québec. Pour mettre un peu en contexte, il faudrait voir d'abord c'est quoi, les principes qui régissent notre pensée. C'est d'avoir des solutions qui sont d'abord efficaces pour répondre à la demande. Donc, on a un besoin d'énergie, on veut quelque chose qui répond à ce besoin-là. Ensuite, on veut essayer de minimiser les impacts négatifs, par exemple au niveau environnemental. C'est peut-être celui sur lequel on va insister le plus. Et on veut aussi quelque chose qui est durable, donc qu'on adopte des solutions, aujourd'hui, qu'on ne va pas regretter dans 50 ans, qu'on va pouvoir léguer à nos enfants, à nos petits-enfants, donc aux prochaines générations. Donc, ça, c'est les trois principes de base derrière nos recommandations.
Alors, plus spécifiquement, je vais faire, disons, une liste des propositions qu'on aime, et ensuite ce sera René qui va plutôt faire les aspects qu'on aime moins.
Alors, pour nous, il faut vraiment prioriser les économies d'énergie. On croit que c'est un dossier où le Québec a du retard et on peut faire beaucoup plus encore que ce qui est fait aujourd'hui au niveau de l'efficacité énergétique. Donc, ça, ça se fait à plusieurs niveaux, entre autres au niveau de la production d'énergie. Les procédés de production ne sont pas toujours mis à jour. Disons, ils n'ont pas les meilleures technologies disponibles pour avoir une production plus efficace, il y a beaucoup de pertes dans les centrales, et ça, ce serait quelque chose à améliorer pour avoir le plus possible de notre production.
Donc, il y a d'autres secteurs aussi où on a beaucoup d'économie d'énergie à faire, par exemple au niveau industriel, C'est un très gros consommateur, disons, dans le bloc d'énergie québécoise, le secteur industriel, et encore là il y a beaucoup de procédés industriels qui utilisent encore des technologies un peu désuètes ou qu'on peut faire, aujourd'hui, de façon beaucoup plus efficace, par exemple avec des moteurs mieux adaptés, avec de meilleures technologies. Et, au niveau commercial, institutionnel aussi, bon, le principal morceau là-dedans, c'est les coûts de chauffage, de climatisation, d'éclairage, et tout ça. Et, en termes d'efficacité énergétique, si on regarde, par exemple, le milieu résidentiel, il y a moyen de faire beaucoup mieux avec toutes les technologies des bâtiments verts.
Donc, présentement, si je pense, par exemple, à la certification LEED, qui est surtout en vigueur aux États-Unis mais qui est maintenant aussi au Canada, ça, c'est une certification pour les bâtiments verts qui a des critères de très haute performance en termes de rendement énergétique. C'est beaucoup au-delà du R-2000 qu'on a aujourd'hui et qui n'est même pas appliqué partout. Et c'est toutes des technologies qui sont faisables et qui sont rentables à long terme parce qu'évidemment ça réduit les coûts d'électricité et aussi d'entretien pour les bâtiments. Donc, pour nous, les bâtiments verts, c'est très important, et on recommande pour ça d'adopter des normes favorisant les bâtiments verts. Présentement, il n'y a pas vraiment de normes qui les favorisent, donc les constructeurs ne sont pas intéressés à construire des bâtiments verts, ou plus ou moins intéressés. Enfin, ça leur demande beaucoup de motivation. Donc, ce serait d'adopter des normes pour les bâtiments verts et aussi de donner une aide financière pour les projets qui vont dans ce sens-là.
Et c'est le même principe pour tout le reste aussi. Quand on parle d'efficacité énergétique, notre levier, c'est d'aider financièrement les projets qui visent à augmenter l'efficacité énergétique. Et vous allez dire: Mais comment est-ce qu'on finance tout ça? Bonne question. Bien, on propose l'approche carotte et bâton. Donc, on veut financer les projets qui font plus d'efficacité énergétique et, s'il le faut, taxer plus les projets qui ne répondent pas à ces normes-là. Donc, ça prend une bonne dose de chacun. Donc, ça, c'est l'idée de base, là. C'est sûr qu'on ne va pas dire que l'argent va venir comme ça. Mais, par exemple, des vieux bâtiments qui n'ont pas du tout des normes d'efficacité énergétique raisonnables coûteraient plus cher à faire.
Après l'efficacité, il y a aussi les énergies renouvelables. Disons, ça vient en deuxième dans notre liste de priorités. On entend parler beaucoup d'éolien, mais, nous, on aimerait d'abord faire un petit rappel sur la géothermie, qui semble un peu marginale parfois, mais en fait c'est une source très intéressante parce qu'avec des systèmes géothermiques il est possible de répondre à presque tous nos besoins de chauffage et de climatisation d'une façon qui est économique, qui est très peu dommageable pour l'environnement et pour laquelle la technologie existe aujourd'hui, en fait, et est assez mature pour être adoptée à grande échelle. Donc, on croit que le secteur géothermique a un avenir très intéressant. C'est pourquoi on recommande encore une fois d'aider financièrement les projets de géothermie pour accélérer leur développement. En fait, le principe, grosso modo, c'est des espèces de thermopompes qui vont chercher l'énergie dans le sol, et ça, ça sert à climatiser les maisons en été et à les réchauffer l'hiver de façon plus confortable et plus efficace que, par exemple, des calorifères ou un chauffage au gaz. Donc, ça, c'est pour la géothermie.
Il y a évidemment l'éolien. Là, on voit que le Québec prend cette direction-là. On est très satisfaits, très contents et on croit qu'il faut aussi un support gouvernemental. Si on a peur un peu que ce ne soit pas aussi rentable ou des choses comme ça, il faut quand même se souvenir que tous les secteurs énergétiques qui ont pris beaucoup d'ampleur ont toujours reçu un support de l'État. En fait, il n'y a pas un mode de production énergétique qui s'est imposé de lui-même sans aucune aide. Donc, l'éolien mérite, par toutes ses qualités, d'avoir un support aussi.
Et, au niveau de l'énergie solaire, il y a beaucoup de projets intéressants aussi, beaucoup de recherche à faire, et c'est une autre des énergies renouvelables qu'on trouve fort intéressante, le solaire sous toutes ses formes, que ce soit solaire passif, actif ou photovoltaïque. Donc, encore là on devrait supporter les projets d'énergie solaire ou d'énergie renouvelable en général et maintenant moins supporter et, disons, plus pénaliser la production d'énergie qui est beaucoup plus polluante et plus dommageable pour l'environnement. Alors, ça, c'était pour l'énergie renouvelable.
Troisième point pour nous qui est très important, le transport. On veut adopter des méthodes de transport durables. Présentement, notre obsession avec l'automobile ne peut pas continuer au rythme où on va là. Avec l'augmentation de la consommation et de la motorisation chez les Québécois, on ne peut pas garder ce rythme-là. Donc, c'est pourquoi pour nous il est essentiel, au niveau du transport, de supporter massivement le transport en commun pour les grands centres urbains comme Montréal, Québec et d'autres villes aussi qui ont assez de population pour avoir un bon système de transport en commun et aussi le transport actif, principalement le vélo, la marche aussi. Donc, c'est sûr que ce n'est pas le rôle du gouvernement québécois d'aller faire l'urbaniste comme tel, mais je crois que vous avez la possibilité de supporter ces projets-là, donc de pouvoir assurer un financement au transport en commun et donner une orientation claire comme quoi, au Québec, ça suffit, le motorisme à outrance, on s'en va vers le transport en commun, pour les grandes villes au moins. Donc, ça, vous avez la possibilité de le faire. Et même chose pour le développement des pistes cyclables, des réseaux cyclables fonctionnels, pas juste récréatifs, pour que les gens puissent aller au travail, à l'école en vélo et non seulement dans des sentiers champêtres.
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(10 h 50)
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Au niveau du transport, il y a aussi un autre point important, on réalise qu'on ne peut pas éliminer l'automobile. Ce n'est pas notre but. C'est sûr qu'il va toujours y avoir des automobiles, mais au moins on peut essayer de minimiser les dégâts en adoptant des technologies plus propres, donc que ce soient des moteurs plus efficaces qui consomment moins. Et pour nous une façon de financer ce genre de projets là, ce seraient les systèmes de redevance et de remise. En fait, c'est simplement de charger plus cher pour des véhicules qui polluent plus ou consomment plus et charger moins cher pour des véhicules qui consomment moins, et qui sont plus efficaces justement, et qui émettent moins de polluants. Parce qu'on rappelle quand même que le transport, c'est aussi un gros secteur en termes de consommation d'énergie et d'émission de gaz à effet de serre. Donc, on a tout intérêt à aller réduire ces impacts-là. Donc, c'est pour ça qu'on recommande l'adoption justement de remise d'argent à l'achat et à l'immatriculation de véhicules qui sont très performants au niveau énergétique et environnemental mais de demander des taxes finalement sur ceux qui le sont moins. Encore là, c'est un transfert.
Et finalement, dans le transport, il y a aussi pour nous... ENvironnement JEUnesse, on est un organisme très préoccupé par l'éducation des jeunes vis-à-vis des problématiques environnementales. Donc, on croit qu'un jeune conducteur qui est formé aujourd'hui devrait être sensibilisé par rapport aux impacts environnementaux de la conduite automobile. Parce que, si on regarde ce permis de conduire là, ici, que j'ai eu, en fait je l'ai eu en apprenant comment éviter de faucher un piéton finalement, mais je n'ai pas appris comment éviter de lui rejeter des tonnes de gaz nocifs au visage. Donc, à quelque part, si on veut vraiment faire des conducteurs responsables, ça inclut aussi de tenir compte des impacts environnementaux de la conduite. Donc, que ce soit un bon entretien des véhicules ou que ce soient aussi des trucs pour éviter la surconsommation et éviter la marche au ralenti des moteurs et ce genre de trucs là. Ce n'est pas un gros investissement, c'est juste de changer une petite section dans les examens de la SAAQ. La documentation existe déjà, il faudrait juste mettre une section sur les impacts environnementaux. Ce ne serait pas très cher à faire comme projet. Pour nous, c'est important au niveau éducatif. Maintenant, je cède la parole à René qui va parler des aspects qu'on aime moins dans la politique énergétique.
M. Coignaud (René): Donc, exactement, ce à quoi nous sommes plus opposés. Maintenant qu'on a exprimé l'aspect plus positif, malheureusement il y a des choses des fois qu'on aime un peu moins. Je vais commencer par la question des ports méthaniers qui m'avait échappée quand j'ai rédigé le mémoire. Évidemment, on a certaines inquiétudes par rapport à ces projets-là, le ou les projets qui semblent être sur la table. Donc, pour nous, ce qui est super important, c'est la stabilité du climat. C'est notre objectif ultime, de conserver un climat qui est favorable à la vie sur terre puis c'est clair que, dans la direction que l'on prend, si on ne change rien, on va causer des dommages qui sont irréversibles au climat, qui vont rendre difficile l'adaptation des sociétés. Donc, pour nous, c'est super important, l'objectif de stabiliser le climat. Et puis ça, évidemment il y a la première période d'engagement du Protocole de Kyoto, 2008-2012, mais c'est super important de regarder à beaucoup plus long terme et de se fixer l'objectif, dont parlent les scientifiques, de réduire de 60 % à 80 % les émissions de gaz à effet de serre si on veut vraiment limiter les dégâts.
Alors, évidemment, c'est un objectif qui est quand même gros, mais à notre avis il n'y a pas moyen de s'en sortir, parce que, quand le climat va être vraiment déréglé, de toute façon on va devoir changer. Les stocks de combustibles fossiles ne sont pas infinis, donc tôt ou tard on va devoir changer. Ce sur quoi on a un contrôle, c'est quand on va changer. Est-ce qu'on change dès maintenant puis on se permet de faire une transition qui est douce et qui est bien prévue ou est-ce qu'on va devoir changer en catastrophe quand il va être un peu très tard? Donc, pour nous, le Québec doit se fixer comme objectif de réduire de 50 % ses gaz à effet de serre d'ici peut-être 30 ans, et puis toutes les décisions de l'État doivent être prises dans cette logique-là. Est-ce qu'un projet contribue à la transition vers une économie à faible émission de gaz à effet de serre ou est-ce qu'elle va perpétuer notre dépendance aux combustibles fossiles? Donc, évidemment, construire des ports méthaniers, ça veut dire qu'on veut avoir plus de méthane, et ce n'est pas nécessairement la direction à suivre si on veut se diriger vers une société qui produit peu de gaz à effet de serre, qui a moins de dépendance aux combustibles fossiles. Donc, évidemment, on a certaines réticences assez importantes par rapport à cela.
Aussi, un aspect sur lequel on désire mettre beaucoup d'emphase, c'est la question de la réfection de la centrale Gentilly-2, la seule centrale nucléaire en fonction au Québec. Et pour nous le nucléaire n'est pas une voie d'avenir. Les promesses qui ont été faites par l'industrie d'avoir une énergie qui était sécuritaire, abordable n'ont pas été tenues. En fait, la centrale, en plus de ça, a une durée de vie beaucoup plus courte que ce qui avait été prévu. En fait, dans l'histoire de l'industrie nucléaire au Canada puis même au Québec, il y a tout le temps eu des dépassements de coûts assez importants. Donc, même au niveau économique, pour nous, on a des inquiétudes importantes. On est des écologistes, mais évidemment on n'est pas insensibles aux questions économiques. Donc, pour nous, la réfection de la centrale Gentilly-2 ne doit pas se faire, et puis la centrale doit être fermée au plus tard en 2013.
Et puis peut-être l'aspect économique de la chose, on n'est pas insensibles à ça. Donc, on pense que le gouvernement du Québec doit demander au gouvernement du Canada de démanteler la centrale Gentilly-1, ce qui créerait évidemment beaucoup d'emplois et qui créerait une expertise au Québec dans le démantèlement des centrales, puisqu'évidemment on aura démantelé toutes les autres centrales. Puis la centrale Gentilly-1, elle a fonctionné seulement 180 jours. Donc, c'est la moins radioactive de toutes. Alors, c'est une bonne centrale sur laquelle on peut développer l'expertise de démantèlement. Puis ça créerait une expertise et des emplois au Québec, et puis on n'aurait pas besoin de faire la réfection de la centrale Gentilly-2 pour des questions d'emploi. Donc, c'est un petit peu ce qu'on voulait amener par rapport à ça.
Bien sûr, la centrale au charbon de Tracy, c'est la forme d'énergie qui émet le plus de polluants atmosphériques. Alors, pour nous, c'est super important de la fermer le plus vite possible. Puis je crois que les gens de Tracy ne méritent pas de respirer du soufre puis tous les polluants du charbon.
La filière thermique au gaz, je pense que vous pouvez sans doute deviner notre opinion là-dessus. On a été super contents de la décision de mettre fin au projet du Suroît, on remercie le gouvernement là-dessus puis on... Par contre, en même temps, la même logique qui a mené à l'abandon de ce projet-là devrait aussi mener à l'abandon du projet de la centrale de Bécancour qui est équivalente aux deux tiers du projet du Suroît. Donc, si on utilise la logique et que l'on conclut que le projet du Suroît n'était pas nécessaire, n'était pas viable, n'était pas une bonne chose pour la population du Québec, à ce moment-là on croit que vous devez faire le même jugement par rapport à la centrale Bécancour pour les mêmes raisons. Donc, on espère que vous allez mettre fin à ce projet-là.
L'exploration gazière dans le golfe du Saint-Laurent, c'est dans la même logique. On doit vraiment... C'est tellement un gros défi. C'est un défi qui est enthousiasmant, mais c'est un défi qu'il est important de se diriger vers une économie à faible émission de gaz à effet de serre. Et ce n'est pas en allant explorer davantage de sources de gaz et de combustibles fossiles qu'on va atteindre nos objectifs. Donc, c'est très important pour nous de conserver le carbone ? deux minutes? ? qui est emprisonné dans le sol, puisque c'est là qu'il est le plus en sécurité. Puis, dès qu'on le met en circulation dans l'atmosphère, c'est beaucoup plus difficile de l'absorber. Donc, on a déjà suffisamment de stocks de combustibles fossiles, ce n'est pas nécessaire de faire de l'exploration dans le golfe du Saint-Laurent, je vous en prie.
L'hydroélectricité. On n'est pas fondamentalement contre l'idée de l'hydroélectricité parce que l'hydroélectricité a plusieurs avantages. Par contre, parfois on a tendance à esquiver les inconvénients en hydroélectricité, ce qui fait que pour nous c'est super important d'y aller en ordre, qu'est-ce qui est le plus enthousiasmant, le plus efficace et qui apporte les plus grands bénéfices à la population québécoise, et puis d'y aller en liste... Et on a bien assez de potentiel avec l'efficacité énergétique, les énergies renouvelables, dont mon collègue Martin nous a parlé, pour ne pas avoir à développer massivement l'hydroélectricité dans l'avenir. Alors, je vais arrêter là-dessus. Puis je vous remercie pour votre attention, puis on va être heureux de répondre aux questions. Merci.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, effectivement, nous allons passer à la période d'échange. Alors, M. le ministre.
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(11 heures)
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M. Corbeil: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, tout d'abord, j'aimerais apporter certaines précisions quant aux affirmations qui ont été faites en ce qui a trait à l'efficacité énergétique. Selon l'Alliance canadienne en efficacité énergétique, le Québec est une des juridictions au Canada qui a les plus belles fiches avec le Yukon, je crois. Alors, je pense que, déjà là, on va briser un mythe, là, en commençant, c'est-à-dire qu'on n'a pas fait grand-chose au niveau de l'efficacité énergétique. Non seulement on a une des plus belles fiches au Canada, mais il y a un plan global d'efficacité énergétique qui est à l'étude devant la Régie de l'énergie présentement et qui, à l'horizon de 2010, nous amènerait à avoir des réductions de 3 TWh, l'équivalent de 120 000 maisons toutes à l'électricité. Alors, c'est 500 000 personnes qui vont contribuer. Ça, c'est pour l'efficacité énergétique.
Maintenant, je vais traiter d'un certain nombre de sujets, mais je voudrais juste vérifier une chose. C'est que vous faites diverses recommandations visant à favoriser notamment le transport en commun urbain par rapport au transport par automobile et vous faites référence aux villes de Montréal et de Québec plus précisément comme étant des endroits où on devrait mettre l'accent davantage. Or, on constate un effet de progression du parc automobile au Québec, ce qui laisse voir que plusieurs jeunes passent, à un moment donné ou à un autre, à ce mode de transport. Quels sont, de votre point de vue, les facteurs les plus importants qui amènent les jeunes à utiliser l'automobile plutôt que le transport en commun et qui va à l'encontre de ce que vous préconisez qu'il advienne? Et là je pense que vous êtes dans la catégorie des jeunes, là, je n'ai pas besoin de vous demander si vous avez une auto.
M. Frankland (Martin): Non, j'ai juste le permis.
M. Corbeil: Ah bon! O.K.
M. Frankland (Martin): Alors, pour nous, il y a deux facteurs principaux là-dedans. En fait, d'une part on entend souvent dire que c'est surtout le martellement de la publicité. Je sais que c'est un facteur, mais je ne sais pas si c'est le plus important. Pour nous, il y a le facteur d'abord de l'efficacité du service. De façon purement pragmatique, un jeune qui a appris toute sa vie qu'être dans le transport en commun, ça veut dire être pris en sardines avec un paquet de monde à l'heure de pointe et avoir à attendre 45 minutes s'il a manqué son autobus, eh bien, peu importe ce que lui dit la publicité, il va se mettre à, disons, peu faire confiance au système de transport en commun. Donc, il y a une question de qualité du service. Il faut que les gens aient confiance dans leur service, qu'ils se disent: Je ne vais pas arriver en retard au travail, je ne vais pas avoir une panne puis manquer mon rendez-vous. Il faut qu'un jeune ait appris par son expérience que le transport en commun, c'est agréable, c'est efficace, ça répond à ses besoins de transport.
L'autre aspect maintenant, c'est peut-être les aspects un peu plus psychologiques, surtout au niveau de la publicité. C'est sûr que, là, on est effectivement martelés d'annonces de voitures. On apprend que vraiment être branché, être cool, être jeune, c'est avoir telle ou telle voiture. Pour les gens qui sont malades de puissance, il y a un paquet de modèles qui sont sortis à chaque année qui sont de plus en plus puissants, performants. C'est difficile de combattre ce phénomène-là. C'est sûr qu'il y a des gens qui vont toujours trouver ça très grisant d'avoir un moteur ultra performant. Disons qu'on va moins viser ce secteur-là, disons. Mais, pour la plupart des gens, avoir un très bon service, ce serait déjà une première réalité qui les ferait peut-être changer d'avis face au transport en commun. Donc, pour nous, c'est vraiment une question de qualité du service et de coût abordable. C'est sûr que ce n'est pas tout le monde qui est prêt à payer très cher pour une passe, surtout s'il n'est pas sûr de vouloir vraiment se déplacer en transport en commun. Donc, un bon service abordable.
M. Coignaud (René): ...ajouter l'importance du transport actif. Donc, il y a de cela, je crois, deux semaines, 18 de nos collègues sont partis de Montréal, Sherbrooke et Saint-Jean à vélo pour se rendre ici, à Québec, pour, entre autres, mettre l'accent sur l'importance du transport actif. En fait, les jeunes, plusieurs aiment être actifs, d'autres auraient intérêt à l'être davantage. Puis le vélo, c'est vraiment le mode de transport le moins dispendieux et qui permet, dans un mode de vie où ils sont assez sédentaires, de faire un peu d'exercice chaque jour. Donc, pour nous, c'est vraiment important que le gouvernement fasse davantage d'efforts pour promouvoir le transport actif. Entre autres, toutes les installations du gouvernement devraient être facilement accessibles en vélo. Toutes les infrastructures dans lesquelles le gouvernement investit devraient tenir en compte les besoins des cyclistes.
Et puis évidemment on applaudit les efforts du gouvernement au niveau du transport à vélo récréatif. La voie verte, c'est quelque chose qu'on trouve formidable et qu'on applaudit. Mais en même temps il faudrait aussi porter attention à l'aspect vraiment utilitaire du vélo pour les gens qui se transportent à vélo chaque jour et puis qui souvent n'ont pas toujours les infrastructures qui sont nécessaires ou les infrastructures ne sont pas tout le temps conçues pour les cyclistes. Et puis ça, c'est quelque chose qui coûte tellement peu cher en plus de ça. Alors, c'est quelque chose sur lequel je voulais mettre l'emphase.
M. Frankland (Martin): Je peux rajouter quelque chose?
Le Président (M. Paquin): Oui, allez-y.
M. Frankland (Martin): Oui. En fait, pour l'efficacité énergétique, pour les corrections effectivement j'avais oublié de mentionner: Quand on a vu l'adoption du plan d'efficacité énergétique québécois récemment, on s'en est fortement réjouis et on tenait à féliciter et remercier le gouvernement pour ça. Ça va exactement dans le sens de nos recommandations, quoique, selon les visions très optimistes, il y aurait moyen d'aller chercher 9 TWh d'ici 2010. Peut-être que c'est nous qui rêvons en couleurs, mais peut-être qu'il y a moyen de faire encore plus. Donc, on ne voulait pas faire une attaque par rapport à ce qui a été fait ou ce qui n'a pas été fait. Il y a des efforts, on le reconnaît. On voulait plus mentionner qu'il y a encore plus qu'on peut faire. Et on souhaite que ce sera fait, et on semble aller dans une bonne direction.
Le Président (M. Paquin): M. le ministre.
M. Corbeil: M. le Président, tantôt vous avez fait référence à la centrale de Tracy. Pour votre information, elle n'est pas au charbon, elle est au mazout. Et elle est de pointe, elle n'est utilisée que lorsqu'il y a de très grands froids et que la capacité hydroélectrique du réseau, ou d'importation, ou combinée de tout ça ne répond pas à la demande.
Ensuite de ça, vous avez parlé de la centrale de Bécancour. La centrale de Bécancour, elle est, dans l'étude de la Régie de l'énergie, nécessaire au bilan énergétique du Québec. C'est une usine de cogénération qui va produire de la vapeur et qui va fermer deux unités de production de vapeur qui fonctionnaient auparavant au mazout lorsqu'elle sera réalisée, avec un gain environnemental positif.
Aussi, pour ce qui est du nucléaire, vous avez dit: On a la centrale de Gentilly, on devrait développer l'expertise de démantèlement. Pour votre information, il y a quelqu'un, hier, qui nous a appris qu'en France il y a 56 centrales nucléaires qui produisent 78 % de l'électricité consommée en France. C'étaient les ingénieurs d'Hydro-Québec, le Syndicat des ingénieurs d'Hydro-Québec, qui nous disaient que c'est une technologie qu'on ne doit pas balayer du revers de la main.
Maintenant, ça m'amène à la question suivante. Vous parlez souvent ? et vous l'avez utilisé à quelques reprises ? de support gouvernemental, vous avez la possibilité de le faire, et, moi, j'aimerais vous entendre sur la responsabilisation des individus à faire leur part pour améliorer le bilan énergétique du Québec et du Canada. Quels moyens vous préconiseriez pour que les gens se conscientisent davantage à l'impact individuel de chacun et chacune d'entre nous dans ses activités quotidiennes? Vous m'avez parlé tantôt de transport actif. Je peux toujours prendre votre suggestion, M. Coignaud. Je reste à Val-d'Or, c'est 800 km de Québec, je vais passer mon temps sur un siège de bicycle, là. Alors, il faut quand même essayer de voir les choses en perspective. Mais quand est-ce qu'on va pouvoir entamer un processus ou une démarche collective de responsabilisation? Parce que j'en ai une autre question après qui va aller avec la réponse que vous allez me donner.
M. Frankland (Martin): Oui. En fait, je suis très content que vous posiez cette question-là parce que ça entre exactement dans le genre d'activités qu'Environnement Jeunesse fait, c'est-à-dire d'aller voir les gens, d'aller expliquer les problématiques, leur proposer des solutions qu'eux peuvent faire avant de commencer à se plaindre sur ce que les autres ne font pas. C'est exactement notre philosophie. Donc, nous, on travaille surtout sur la sensibilisation. Mais la sensibilisation toute seule, c'est malheureux, mais ce n'est pas très efficace, il faut toujours que ça vienne, disons, avec des solutions qui sont réellement avantageuses. On ne peut pas convaincre quelqu'un de faire quelque chose qui est désagréable, ou beaucoup plus cher, ou quelque chose comme ça. Donc, pour nous, c'est fondamental de responsabiliser effectivement l'individu pour ses actions, et, dans ce sens-là, c'est exactement pour ça qu'on favorise le principe du pollueur-payeur, incluant au niveau individuel, pas seulement au niveau des corporations ou toutes sortes d'entreprises. Un individu aussi, par ses impacts, ses activités, ses choix, va polluer, va avoir des impacts négatifs, par exemple, sur l'environnement, alors devrait, disons, payer plus à cet égard-là. Mais c'est sûr que, quand on parle de plus gros joueurs, c'est peut-être plus les entreprises qui sautent aux yeux. Mais le principe s'applique au niveau individuel aussi.
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(11 h 10)
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Là où on veut apporter la nuance, c'est qu'on croit qu'il faut responsabiliser les gens absolument, mais il faut au moins leur rendre les choses plus faciles, disons, plus agréables. Donc, c'est pour ça qu'on croit que, si on demande aux gens d'être responsables au niveau, par exemple, du transport et d'utiliser leur vélo ou l'autobus, le métro, bien c'est sûr qu'on ne peut pas les laisser filer en vélo à l'heure de pointe dans un gros boulevard qui n'a pas de piste cyclable ou tout ça. Il faut au moins juste donner la possibilité aux gens... donner le moyen de s'aider eux-mêmes, finalement. Ce n'est pas de faire les choses à leur place, c'est simplement de mettre en place les structures nécessaires pour que les gens puissent faire des bons choix. Si je prends un exemple qui va dans ce sens-là, au Manitoba, présentement, il y a des prêts pour changer le système de chauffage à un système géothermique. Et on trouve que c'est une super bonne initiative parce que justement ça touche le niveau individuel. C'est une personne qui va aller chercher ce prêt-là pour changer son chauffage dans sa maison, mais il y a quand même un support gouvernemental pour passer à l'action. C'est un peu dans ce sens-là qu'on l'envisage.
M. Corbeil: D'accord.
M. Coignaud (René): Puis, depuis 25 ans, chaque année, on rencontre des milliers de jeunes qu'on sensibilise, qu'on engage dans des projets d'action. On a des ateliers de réparation de vélos pour inciter les jeunes à faire du vélo, aller en communauté sensibiliser leurs pairs aux changements climatiques. On fait la promotion actuellement du Défi d'une tonne pour que les jeunes s'engagent à réduire les gaz à effet de serre. On fait la promotion du transport en commun. Donc, on est ici pour vous parler, mais, chaque jour, dans les communautés partout au Québec, les jeunes d'Environnement Jeunesse sont là pour sensibiliser leurs pairs, les engager dans l'action pour vraiment mettre en oeuvre ce que l'ont promeut.
M. Corbeil: Vous nous avez parlé d'énergie éolienne, géothermie et vous avez été à l'encontre du gaz naturel liquéfié, du nucléaire, centrales thermiques. Vous n'avez pas parlé nécessairement d'hydroélectricité qui, elle, est une énergie propre, renouvelable, verte et qui a contribué à l'excellent bilan d'émission de gaz à effet de serre du Québec. Pour votre information, la moyenne québécoise est 12 tonnes par habitant par année, et la moyenne canadienne, elle est de 24. Alors, on est à la moitié de la moyenne canadienne, et vous voyez que, par rapport à son importance démographique, 12 tonnes par habitant, on tire à la baisse la moyenne canadienne de façon significative. Vous n'en parlez pas, d'hydroélectricité. Est-ce que je pourrais avoir votre opinion là-dessus?
M. Coignaud (René): Oui. En fait, je suis passé rapidement à la fin, donc ça va me faire plaisir de développer davantage. En fait, ce que l'on dit, on ne nie pas du tout les avantages de l'hydroélectricité et on apprécie les bénéfices qu'elle nous offre. Donc, c'est une source qui produit peu des gaz à effet de serre, quoiqu'elle en produit et qu'actuellement les gaz à effet de serre des réservoirs ne sont pas pris en compte dans le bilan de gaz à effet de serre de la province et qu'ils vont l'être éventuellement. Donc, ça, c'est clair qu'il va falloir y porter attention. Mais c'est une énergie qui évidemment est peu chère, et tout ça. Donc, ça, on ne le nie pas du tout et on l'apprécie très bien.
Par contre, ce que l'on dit, c'est qu'il y a aussi des inconvénients. Donc, c'est clair qu'un mégaréservoir a des impacts majeurs. C'est clair que d'inonder des terres qui appartiennent à des peuples autochtones, ce n'est pas quelque chose qu'on doit balayer du revers de la main comme impact. Donc, il y a quand même divers impacts qui sont importants. Des petites centrales qui modifient des rivières et qui ne produisent souvent pas énormément d'énergie, c'est des impacts qui sont quand même assez gros par rapport à l'énergie qui est produite.
Donc, on dit qu'il y a des impacts qui sont réels et qu'il y a des énergies qui produisent moins d'impacts et qui ont des bénéfices qui sont plus grands, comme la géothermie, comme l'éolien, comme l'efficacité énergétique. Donc, ce qu'on dit, c'est qu'on doit, d'abord et avant tout, mettre l'emphase sur les formes d'énergie qui nous offrent les plus grands bénéfices. Et, lorsqu'on aura pris avantage du plein potentiel de ces énergies-là qui offrent encore plus de bénéfices et qui offrent encore moins d'aspects négatifs, à ce moment-là on pourra envisager davantage de projets hydroénergétiques. On ne rejette pas du revers de la main la filière, on ne dit pas: C'est mauvais, c'est le diable, on n'en veut pas. On dit: Si on peut avoir davantage de bénéfices ailleurs, tant mieux.
Si vous me permettez aussi de revenir sur le nucléaire, le Québec a toujours refusé d'être le lieu d'enfouissement permanent des déchets nucléaires, je crois, à juste titre. Mais en même temps il faut être conséquent. Si on ne veut pas être le lieu d'enfouissement permanent des déchets nucléaires, c'est inacceptable de poursuivre la production de ces déchets-là. Si on accepte de produire ces déchets-là, en même temps il faut accepter de les enfouir. Et en même temps, par rapport à la réfection, les déchets de réfection sont des déchets d'un type tout à fait différent des déchets habituels, donc ça, il faut les stocker différemment. Et puis actuellement, en fait, on a compris qu'Hydro-Québec voulait les envoyer en Ontario. Et puis un de mes collègues d'un autre groupe écologiste a appelé Ontario Power Generation pour savoir si Ontario Power Generation accepterait de prendre ces déchets-là, et ce n'est pas du tout évident qu'Ontario Power Generation acceptera de prendre les déchets de la réfection de Gentilly-2. Donc, la question des déchets est vraiment centrale. Et puis on ne peut pas produire des déchets dont on ne sait pas comment gérer à long terme, et c'est un problème qui n'a pas été réglé depuis 50 ans. Alors, voilà. Merci.
Le Président (M. Paquin): M. le ministre.
M. Corbeil: Vous parlez d'éolien. Les experts nous disent qu'on peut accepter environ 10 % de la capacité de notre réseau en éolien. Avez-vous une opinion là-dessus? Avez-vous une proposition ou des suggestions?
M. Frankland (Martin): Oui. En fait, c'est ça, nous aussi, on l'évaluait effectivement à 10 %. Bien, par les mêmes sources que vous, finalement. Et on croit que... En fait, il y a deux facteurs, disons, qui peuvent mitiger un peu ça. D'une part, il y a le fait qu'on a des forts bassins hydroélectriques qui permettent de stocker en période de forts vents. Donc, on a cet avantage au Québec justement que, pendant les périodes de production d'énergie éolienne, on peut enfin laisser le niveau des barrages plus élevé pour stocker. Ça, c'est un avantage qui nous permet, c'est ça, de contrer un peu ce facteur-là.
Mais, comme vous mentionnez, le gros facteur limitatif pour l'énergie éolienne et pour plusieurs autres sources d'énergie renouvelable, c'est le stockage. Tant qu'il n'y aura pas des technologies de stockage très efficaces, les énergies renouvelables vont être limitées à une petite fraction de notre portefeuille énergétique, et ça, on trouve ça très dommage. Donc, c'est pour ça qu'en termes de recherche, s'il faut prioriser un secteur, c'est le stockage de l'énergie. Il y a des recherches qui se font avec de l'hydrogène, par exemple, ou d'autres vecteurs d'énergie. Tant mieux, mais présentement il n'y a pas de technologie de stockage très efficace. C'est très important si on veut pouvoir utiliser les énergies renouvelables à plus grande échelle.
D'autre part, il y a aussi justement une question d'échelle parce que souvent, au niveau énergétique, on a cette logique de: O.K. On a tant de demande, on va essayer d'aller chercher les plus gros morceaux possible de production pour remplir cette demande-là avec peu de morceaux. Mais il faudrait peut-être penser à une logique un peu plus décentralisée de la production énergétique parce qu'avec cette logique-là on peut se dire: Ah! Alors, on va aller chercher tous les petits gains possibles un peu partout de façon uniforme, ce qui est un peu l'idée des bâtiments verts, par exemple, en allant chercher le soleil pour chauffer ou la géothermie, des choses comme ça. Donc, avec une production très décentralisée, on peut aller chercher beaucoup de petits gains qui au total font une somme pas négligeable. Et c'est meilleur aussi en termes de sécurité, en termes de pertes pour le transport. Quand la production est plus locale, il y a moins de pertes pour le transport d'électricité. Dans ce sens-là, mettons des turbines au fil du courant d'eau. C'est des trucs qui utilisent l'eau comme source d'énergie mais sans endommager l'écosystème. Ça, c'est un exemple justement de production qui est très petite mais qui au moins a peu d'impacts. Donc, je crois qu'il faut vraiment adopter cette logique-là de production décentralisée pour donner plus de chances aux énergies renouvelables.
Le Président (M. Paquin): Merci. Rapidement, 20 secondes, Mme la députée de La Peltrie. 20 secondes, est-ce que vous avez le temps?
Mme Hamel: 20 secondes?
Le Président (M. Paquin): Oui.
Mme Hamel: Très rapidement. On reçoit plusieurs groupes ici. Il y a des gens des MRC ou des municipalités qui veulent accueillir des projets chez eux, là, soit de barrages ou autres. Il y en a d'autres qui ne veulent pas. Alors, vous, je voudrais avoir votre opinion. C'est sûr qu'on demande l'avis des communautés locales, mais est-ce qu'on devrait d'abord penser à l'intérêt supérieur du Québec, d'après vous?
Le Président (M. Paquin): Rapidement, s'il vous plaît, monsieur.
M. Frankland (Martin): On croit que les gens qui devraient être d'abord consultés, c'est ceux qui seront le plus affectés par les projets. Donc, on pourrait difficilement imposer une décision si vraiment ça affecte énormément une communauté locale. Mais, s'il y a une consultation avec eux et eux finissent par accepter un projet, ce qui est souvent le cas ? des fois, ils sont dédommagés d'autres façons ? alors ça devient acceptable.
Le Président (M. Paquin): Merci. Mme la députée de Rosemont.
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(11 h 20)
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Mme Dionne-Marsolais: Merci. Alors, messieurs, madame, bienvenue. Vous apportez un autre volet de réflexion fort intéressant, et je pense que dans l'ensemble les suggestions que vous faites sont intéressantes et apportent une autre dimension.
J'aimerais ça aborder la question d'abord du transport, parce que, je vous écoutais tout à l'heure, le transport, c'est quand même un des plus gros secteurs de consommation d'énergie au Québec, et partout d'ailleurs. Et c'est un peu difficile parce qu'on a un pays qui est quand même très étendu, très grand. Et, en milieu urbain, il y a un certain nombre d'initiatives qui sont possibles. On pense, entre autres, à celle que notre gouvernement avait mise de l'avant, là, au niveau du crédit fiscal pour la carte de transport en commun à Montréal. Ça, c'est une mesure qui peut être prise pour encourager les gens à prendre les transports en commun. Une autre mesure pourrait être ? vous en avez donné quelques-unes ? de donner des crédits, soit des exemptions de taxes ou autres crédits, pour l'acquisition d'équipement de transport à consommation moins dommageable pour l'environnement.
Avant vous, il y avait Gaz Métro ? vous étiez là tantôt, bon ? puis je n'ai pas eu le temps de poser des questions sur le transport. Parce qu'ils avaient dans leur mémoire une suggestion de favoriser les véhicules utilisant le gaz naturel, et j'étais un peu intéressée par ça parce que j'ai déjà vécu un certain temps à Toronto, et il y a beaucoup de véhicules au gaz naturel à Toronto. Et il me disait ? donc, je suis allée le voir, je lui ai demandé... ? le président me disait que, pour nous au Québec, comme on devrait modifier des équipements, ce ne pourrait être intéressant que pour les autobus, donc pour le transport en commun, même si ça coûterait cher. Mais c'est quelque chose qui est possible. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Frankland (Martin): C'est un projet intéressant, parce qu'effectivement, à ma connaissance, les véhicules qui fonctionnent au gaz naturel émettent beaucoup moins de pollution que ceux qui fonctionnent à l'essence ordinaire. Pour les autobus, bien en fait il y a quelque chose d'autre qui est intéressant, c'est les autobus hybrides. S'il y a moyen de faire quelque chose qui est hybride, électricité et gaz naturel, bien on combinerait les deux, et là tout le monde serait content. Parce qu'effectivement, pour les autobus, il faut faire quelque chose vraiment le plus vite possible parce que c'est un investissement qui se rentabilise très rapidement. Par exemple, si on change un autobus actuel en un modèle hybride, c'est en dedans de quelques années qu'on va repayer le coût grâce aux économies au niveau de l'essence. Donc, c'est un investissement qu'il faut faire. Et, si dans les technologies prometteuses il y en a au gaz naturel, on ne l'exclut pas parce que ce serait déjà une amélioration par rapport à la situation actuelle. Donc, c'est vraiment ça qu'on regarde, on ne peut pas être absolument utopistes. Si un véhicule au gaz naturel pollue moins qu'à l'essence, bien tant mieux.
Mme Dionne-Marsolais: Vous savez qu'il y a déjà eu une proposition de la part du gouvernement fédéral ? je crois que c'est l'année passée ? qui a été faite au gouvernement du Québec de financer ou de participer au financement de projets pilotes à Québec et à Montréal, je pense...
Une voix: À Hull.
Mme Dionne-Marsolais: À Hull? Les trois?
Une voix: Gatineau et Montréal.
Mme Dionne-Marsolais: Ah! Gatineau, Montréal, excusez. Je pensais que c'était Québec, là, on me corrige. Donc, Montréal et Hull pour justement faire des projets pilotes et développer une flotte pour valider et puis mesurer les conséquences de l'utilisation de ce type de véhicules, d'autobus hybrides, je crois, si ma mémoire est bonne, hein? Donc, peut-être qu'on pourrait demander au ministre de revoir s'il y a des projets qui sont encore possibles. On sait qu'au dernier budget fédéral le ministre des Finances a annoncé un fonds vert qui vise la réduction de production de gaz à effet de serre. Et, dans ces fonds-là, il a mentionné un certain nombre de projets, mais c'était très modeste. Mais les fonds sont importants, je crois qu'il y a 1 milliard là-dedans, là.
M. Coignaud (René): C'est 1 milliard.
Mme Dionne-Marsolais: Combien?
M. Coignaud (René): 1 milliard, en effet.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça, 1 milliard, excusez. 1 milliard, donc c'est quand même important, c'est quand même significatif. Dans l'hypothèse où le Québec... Je ne sais pas comment ils vont répartir ce fonds-là, mais mettons qu'on en a 22 %, l'équivalent de notre population, là, donc mettons qu'on a 200 millions, c'est quand même des fonds qui seraient disponibles pour tenter ce type de projet pilote là. Est-ce que vous pensez que des projets pilotes, ça présente un intérêt? J'aimerais ça avoir votre avis là-dessus parce qu'il y a beaucoup...
Je vais vous donner juste un peu d'histoire. Quand on a lancé le projet de l'éolienne pour Hydro-Québec, ça a causé beaucoup, beaucoup de travail au ministère des Ressources naturelles et à Hydro-Québec aussi parce qu'ils n'étaient pas du tout convaincus que les coûts auxquels on aboutirait seraient concurrentiels à leurs coûts. Enfin, on ne les connaissait pas tous, leurs coûts, mais eux les connaissaient. Et il y a quelqu'un du ministère des Ressources naturelles qui est allé faire une recherche pour la ministre dans le temps pour essayer de valider les hypothèses de coûts, et c'est à la suite de cette démarche-là, qui a été très exhaustive, que, là, on a apporté des documents et on a montré à l'Hydro l'intérêt de faire un projet pilote. Donc, on a dit: On va faire 1 000 MW... on n'a pas décidé 1 000 MW tout de suite, on a commencé à regarder quelle était une masse critique significative pour être capable d'arriver à certaines conclusions, que ce soient des conclusions de production ou des conclusions d'exploitation.
Alors, mon expérience, parce que, dans une vie antérieure, j'ai beaucoup travaillé sur ce genre d'exercice là, des projets pilotes, ça a beaucoup de sens et c'est très utile pas seulement pour démontrer la technologie, mais pour démontrer aussi les étapes suivantes pour l'économique de tout ça, la comparaison du choix d'investissement. Qu'est-ce que vous pensez de ça, vous?
M. Frankland (Martin): Oui. Pour nous, c'est en plein le genre de projet qui devrait être financé par le fonds. En fait, justement, comme on le disait, ça devrait financer les projets où on remplace, par exemple, des technologies vieillottes avec des meilleures technologies. Mais, comme on insiste beaucoup sur la recherche... Et donc ces technologies-là, c'est quelque chose qui est toujours en mouvement, on ne va jamais s'arrêter sur une technologie optimale. C'est toujours en mouvement, on fait toujours de la recherche. Donc, c'est très important qu'il y ait des fonds dédiés à la recherche, et les projets pilotes servent justement à venir valider les projets.
J'étais au courant de celui qu'il y avait eu à Montréal pour le biodiesel, je n'étais pas au courant de celui sur les hybrides. Mais c'est ça, pour le biodiesel, au moins ça a prouvé la faisabilité technique du projet, sauf que ça n'a pas montré encore si c'était rentable en termes de coûts.
Mme Dionne-Marsolais: On a eu ici les gens de l'industrie du biocarburant qui sont venus nous parler des résultats de ce projet-là, et ils ont vraiment attiré notre attention sur des résultats très significatifs, et notamment pour les parcs d'autobus. Et ils ont même fait des suggestions à la commission pour enlever, par exemple, la taxe sur les carburants dans le cas de biocarburants. Ils nous ont aussi... Enfin, là, ça m'échappe, là, mais ils ont fait deux, trois propositions qu'ils souhaitaient que l'on regarde pour favoriser davantage l'utilisation du biocarburant, pas seulement le biodiesel, mais l'éthanol et d'autres carburants intéressants, là, pour justement déplacer le pétrole dans le transport.
Le projet dont je vous ai parlé tout à l'heure, sur les autobus, il n'a pas été accepté par le gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec a refusé de participer à ça, ce qui est bien malheureux. Peut-être qu'ils pourraient revoir leur décision ou peut-être que c'est encore possible de reprendre ça. Mais, si on veut faire progresser la connaissance et améliorer nos façons de faire, il faut faire quelques essais, ce qui m'amène à l'activité... Vous dites que vous êtes intéressés à la recherche et au développement, est-ce qu'à votre avis le centre de recherche d'Hydro-Québec fait suffisamment de recherche dans d'autres applications que juste la production, le transport et la distribution d'électricité? Êtes-vous au courant de ça? Vous avez dû déjà aller visiter ça, l'IREQ, vous autres? Non?
M. Frankland (Martin): Pas personnellement.
Mme Dionne-Marsolais: Ah! Vous devriez, vous devriez.
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(11 h 30)
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M. Frankland (Martin): J'ai lu un peu là-dessus, mais je ne suis pas au courant de toutes leurs activités. Je crois que c'est eux qui développent le moteur-roue pour les automobiles.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, c'est ça. C'est eux qui l'ont développé. Ils l'ont développé.
M. Frankland (Martin): Ça, c'est un exemple de projet qu'on trouve fort intéressant. Donc, ça rend les véhicules carrément plus efficaces. Je ne sais pas s'ils devraient diversifier leurs activités. Ils en font déjà quand même des très bonnes. Mais c'est sûr qu'en termes énergétiques, oui, il y a beaucoup d'avenues différentes très intéressantes, que ce soit l'éolien, le solaire, les piles à combustible, tout ça. Ils font déjà du bon travail. Je ne suis pas spécialiste pour dire s'ils devraient diversifier ou non.
Mme Dionne-Marsolais: Non, ça va. Vous avez aussi parlé de la production décentralisée, puis j'étais contente de vous entendre parce que c'est sous-jacent à votre mémoire, mais elle n'est pas vraiment dedans. La production décentralisée, prenons l'exemple de la géothermie, par exemple, hein, ça pourrait s'inscrire dans la production décentralisée, ou l'autoproduction, là, dans un certain sens. Est-ce que vous pensez qu'il y aurait de l'intérêt de la part des Québécois pour ce type d'initiative ou de projet pilote? Est-ce qu'encore là ce ne serait pas intéressant de faire des projets pilotes là-dedans?
M. Coignaud (René): Je crois que oui. En fait, par rapport à la géothermie, je pense qu'on n'a même pas besoin de faire un projet pilote. On peut faire ce qui se fait au Manitoba: on peut avoir un prêt de 15 000 $ pour instaurer un système géothermique chez soi. À ce moment-là, je crois qu'il n'y a même pas... on peut aller directement au niveau du projet réel. Le projet pilote s'est déjà fait au Manitoba, donc on peut conclure que c'est les mêmes conditions qui s'appliquent, et puis, à ce moment-là, on peut aller vraiment de l'avant.
Mais est-ce qu'il y a beaucoup de gens... En fait, les gens, quand on leur offre la possibilité de faire quelque chose qui est enthousiasmant... Il n'y a pas personne qui est heureux de polluer. Donc, quand on leur offre la possibilité de faire quelque chose qui est nouveau, les gens sont super enthousiasmés. Puis souvent ils vont être fiers de pouvoir dire: Regardez, chez moi, j'ai un système géothermique ou bien j'ai installé un système d'énergie solaire. Ça fonctionne très bien. Puis les gens vont être contents. Quand on offre la possibilité aux gens de faire mieux, il n'y a pas personne qui va refuser.
Mme Dionne-Marsolais: Pensez-vous... Vous prenez l'exemple du Manitoba. Est-ce que c'est Manitoba Hydro qui finance ces projets-là? C'est eux, hein? C'est ça. C'est ça, la nuance. Et je trouve ça intéressant que vous nous apportiez l'exemple du Manitoba parce qu'ils ont fait beaucoup, beaucoup de... ils ont fait preuve de beaucoup d'imagination dans la mise au point de manières de faire en rejetant un peu l'initiative sur la population, en disant: Nous autres, ça vaut tant, puis on est prêts à vous donner un crédit de tant pour essayer telle chose. C'est à peu près ça, hein, qu'ils ont fait. Au Québec, où on ne connaît pas les coûts de production d'électricité, c'est plus difficile pour nous de faire des projets comme ça parce que vous savez qu'Hydro-Québec Production n'est pas assujettie à la Régie de l'énergie. Est-ce que vous pensez qu'elle devrait l'être? Est-ce que vous pensez qu'on devrait connaître les coûts de production d'Hydro-Québec?
M. Coignaud (René): Je crois que c'est évident. Pour nous, je crois que... Oui, je crois que...
Mme Dionne-Marsolais: Vous avez dit que c'est...
M. Coignaud (René): Je crois que c'est assez évident.
Mme Dionne-Marsolais: C'est évident?
M. Coignaud (René): Les Québécois devraient pouvoir savoir les coûts de production d'énergie qu'ils font. Pour des gens comme nous, qui nous intéressons ? comme, vous aussi, vous vous intéressez ? au secteur énergétique au Québec, c'est un aspect vraiment essentiel d'analyse, de savoir les coûts, parce qu'évidemment, si on veut pouvoir promouvoir autre chose, il faut savoir quelles sont les prémisses sur lesquelles on travaille. Et, quand on ne le sait pas, évidemment on peut moins faire notre travail, moins...
Mme Dionne-Marsolais: Vous avez raison, je partage votre avis. Vous avez aussi une recommandation, la recommandation n° 12, sur le transport. Est-ce qu'on peut comprendre de cette recommandation-là que vous n'êtes pas très favorables à l'extension de certaines autoroutes dont la 25?
M. Frankland (Martin): Oui, absolument. En fait, on fait partie de la coalition contre le prolongement de la 25, oui.
Mme Dionne-Marsolais: Vous pouvez arrêter de nous envoyer des courriels, on est convaincus, de ce côté-ci, aussi.
M. Frankland (Martin): O.K. Parce qu'en fait pour nous c'est que ça répond à très peu de demandes. Si on regarde tous les déplacements dans l'est de Montréal, les gens qui vont travailler là, il y a, quoi, il y a, je crois, 6 % de gens qui viennent de l'est de Laval. Ce seraient juste ces gens-là qui profiteraient réellement d'une jonction directe entre les deux, alors que présentement il y a des besoins criants en transport en commun dans tout l'est de la ville. Donc, pourquoi ne pas prolonger les trains de banlieue, les autobus, le métro éventuellement, quand on va avoir fini celui à Laval, mais, bon, on va penser à long terme. À plus court terme, effectivement, il y a beaucoup d'autres projets de transport en commun qui vont répondre à des demandes très réelles et offrir beaucoup moins d'impacts au niveau environnemental.
M. Coignaud (René): En fait, moi, je viens de Laval. J'ai passé une bonne partie de mon enfance et de mon adolescence à Laval. Donc, c'est clair qu'il y a moyen d'avoir un développement beaucoup plus dense, puis je trouve ça tellement dommage. Des fois, je prenais mon vélo, j'allais me promener dans ce coin-là, puis c'est un des endroits les plus beaux de Laval, qui reste encore le plus rural, où est-ce qu'il reste encore des terres agricoles, sur le rang Saint-François, tous ces rangs-là. Puis de penser qu'on va faire un pont puis que les promoteurs immobiliers vont se mettre là-dedans, ils vont faire des bungalows en rangée, je trouve ça vraiment dommage, puis on a tellement d'autres endroits où est-ce qu'on le fait déjà. Qu'on puisse préserver enfin certaines des meilleures terres agricoles qu'on a au Québec puis qu'on puisse vraiment favoriser, oui, des modes d'urbanisme qui sont beaucoup moins dépendants de l'automobile...
Parce que, tu sais, quand je restais à Laval, évidemment les autobus ne pouvaient pas passer souvent parce que la densité n'est pas très grande, puis c'est sûr... Tantôt, vous me parliez... Qu'est-ce qu'on fait pour que les jeunes favorisent, prennent les transports durables, les transports écologiques? C'est clair, s'ils n'ont pas d'accès à des transports qui sont efficaces parce que la façon dont la ville a été construite ne favorise pas le transport en commun, à ce moment-là c'est beaucoup plus difficile pour un jeune de prendre le transport en commun, puis la tentation d'avoir une voiture est beaucoup plus grande.
M. Frankland (Martin): En fait, notre recommandation 12, en deux mots, c'est ce qu'on appelle le «transit-oriented development», c'est toute une théorie d'urbanisme qui favorise les transports en commun, les échanges, disons, l'intégration des milieux résidentiels, commerciaux, institutionnels. Et donc toute cette façon de faire l'urbanisme, c'est exactement dans notre philosophie, le «transit-oriented development».
Le Président (M. Paquin): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Alors, madame, messieurs, bonjour. En page 15, vous parlez de l'hydroélectricité et vous dites: «Cependant, le fardeau que font porter les mégabarrages sur les populations autochtones et sur les écosystèmes ne doit pas être sous-estimé.» Je pense que ma collègue d'en face en a parlé tout à l'heure. Par rapport aux minicentrales, on a reçu des groupes autochtones de Betsiamites et de Uashat-Maliotenam, et ils nous parlaient qu'ils voulaient même être les promoteurs de minicentrales sur des rivières. Selon vous, est-ce que... Bien, il faut que ça fasse consensus au niveau des MRC, des municipalités, bon, autochtones aussi, c'est inclus. Est-ce que vous croyez que ça devrait être sous la juridiction d'Hydro-Québec si petits barrages il y a?
M. Coignaud (René): Bonne question. J'avoue que je ne me suis pas posé la question depuis un certain temps. Mais je crois que ce qui est vraiment important, c'est qu'il y ait un contrôle public, et que les gens puissent avoir une consultation de la population, que les gens sachent c'est quoi, les coûts, quels seront les impacts, que les communautés locales soient au courant des bénéfices que le projet va apporter mais aussi des aspects négatifs, et qu'ils puissent se bâtir une opinion complète, avec toute l'information nécessaire, puis qu'on soit attentifs aux préoccupations des gens, puis que n'importe qui au Québec... oui, si les Québécois mettent de l'argent là-dedans, si ça a un impact sur les Québécois, que les Québécois aient accès à l'information. Puis, si c'est par Hydro-Québec, tant mieux, si c'est ce qui permet de mieux faire le projet, d'avoir le plus grand bénéfice, tant mieux, si c'est par le gouvernement du Québec, tant mieux, mais, moi, j'ai tendance à croire qu'il y a plus de transparence éventuellement par le gouvernement du Québec que par Hydro-Québec, mais je n'ai peut-être pas raison. Donc, oui, c'est quelques réflexions, je sais que ce n'est pas tellement poussé comme réflexion, mais rapidement de même...
Le Président (M. Paquin): Ça va. Merci. Donc, mademoiselle, messieurs d'ENvironnement JEUnesse, merci de votre présence et pour la présentation de votre mémoire.
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(11 h 40)
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J'invite donc M. Réjean Benoit, d'Option Transport durable, à s'avancer pour nous présenter son mémoire.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Paquin): M. Réjean Benoit, d'Option Transport durable, bienvenue. Vous pouvez nous présenter votre mémoire, nous écoutons avec beaucoup d'attention.
Option Transport durable (OTD)
M. Benoit (Réjean): D'accord. Donc, Option Transport durable remercie la Commission de l'économie et du travail de nous permettre de présenter notre point de vue sur le document Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.
Option Transport durable est un organisme environnemental qui fait la promotion du transport collectif. Notre site Internet, transportdurable.qc.ça, est visité par plus de 4 000 internautes mensuellement. Parmi nos activités, on fait la promotion d'un autocollant qui s'appelle Affichez-vous pour Kyoto!, où on invite les gens à afficher le nombre de kilogrammes de gaz à effet de serre qu'ils émettent avec leur véhicule; le projet sera lancé sous peu.
Le mémoire a été rédigé avec MM. Jean-François Moisan et Pierre Dulong, malheureusement ils ne pouvaient pas être là pour faire la présentation avec moi, vu leur activité professionnelle.
Tel qu'indiqué par le gouvernement, cette consultation servira à élaborer une stratégie énergétique qui devra rejoindre les attentes de la société québécoise, contribuer à assurer la sécurité énergétique, dynamiser le développement économique et durable du Québec.
Donc, notre mémoire s'appelle Kyoto et épuisement des ressources pétrolières; préparer le Québec à faire face à l'avenir.
Les points de vue généraux d'Option Transport durable au sujet du document de consultation et de la stratégie énergétique. Pour nous, il est nécessaire de réduire la dépendance du Québec envers les importations de pétrole. Il y a un immense potentiel d'efficacité énergétique dans le transport. Le transport collectif est une mesure d'efficacité énergétique; de plus, il génère plus d'emplois que dans le domaine de l'automobile. Il faut créer un fonds Kyoto pour financer le transport collectif. Et finalement il faut rejoindre les attentes de la société québécoise.
Notre premier point de vue. Il est nécessaire de réduire la dépendance au pétrole. Le Québec importe plus de 135 millions de barils de pétrole annuellement, dont 75 millions uniquement pour le transport diesel et essence. En 1998, ce 135 millions de barils à 13 $US le baril ne coûtait que 1,7 milliard de dollars américains. En 2001, le prix a pratiquement doublé à 25 $ le baril, ce qui portait notre coût à 3,4 milliards de dollars. En 2005, aujourd'hui, en fait hier, le prix du baril, c'était environ 53 $, mais on s'attend que, pour l'année, ça devrait être environ 48 $US le baril, et ça nous coûtera 6,5 milliards de dollars.
Puis, pour le futur, il y a des gens qui nous parlent d'un «peak oil». Le «peak oil», c'est un sommet de production, et c'est le moment où est-ce que tous les pays producteurs ne pourront pas produire plus de pétrole, et, à partir de ce moment-là, la production devra décliner lentement. Ces chercheurs pensent qu'on va atteindre le sommet de la production pétrolière entre 2008 et 2020, il y a divers chiffres qui circulent.
Certains pays, dont la Grande-Bretagne, qui est un de nos fournisseurs ? qui était un de nos fournisseurs en 2002, les dernières années où est-ce qu'on a des chiffres ? cesseront sous peu d'exporter leur pétrole parce qu'ils n'en ont pratiquement plus. Au même moment, la consommation mondiale augmente et d'où là, à un certain moment, comme on disait, on va atteindre le sommet de la production pétrolière.
Le document soumis pour la consultation indique que les réserves prouvées de pétrole n'excéderont pas 40 ans et que les réserves seront de plus en plus sollicitées. Vous allez être surpris, on est des écologistes, on vous dit: Il va y avoir du pétrole au moins pour les 100 prochaines années. Sauf que ça va être fini, le pétrole à bas prix, et ça va être seulement les pays riches comme le nôtre qui pourront se permettre d'acheter du pétrole lorsqu'il sera à 100 $ le baril, et un jour ? il ne faut pas se demander si, mais plutôt quand ? le prix du baril de pétrole sera à 100 $.
Et 100 $ le baril, lorsqu'on en importe pour 135 millions de barils, ça nous coûte collectivement 13,5 milliards de dollars américains, c'est vers ça qu'on s'en va, au Québec. Donc, c'est une importante fuite de capitaux qui ne fera pas travailler des Québécois, loin de là, à part dans les raffineries et les stations-service, mais je ne pense pas qu'il y ait une grande capacité d'emplois là relativement à un montant de 13,5 milliards de dollars.
La Régie de l'énergie disait: «[On] considère que le projet du Suroît n'est pas indispensable à la sécurité [énergétique du Québec]; il est cependant souhaitable dans la situation actuelle de précarité et surtout de dépendance envers les importations.» Nous, on dit: La régie se trompe. Le problème n'est pas l'électricité, le problème n'est pas la dépendance envers les importations d'électricité. Le problème, c'est le pétrole, et ça va nous rentrer dedans un jour ou l'autre.
Mais il y a des solutions, on n'est pas ici pour parler seulement d'une façon négative et pessimiste, il y a un immense potentiel d'efficacité énergétique dans le transport. Des collègues à nous, de Transport 2000, publiaient dans Le Devoir récemment que les véhicules sport utilitaires consomment deux fois plus d'énergie que les automobiles compactes et sous-compactes. En milieu urbain, le conducteur seul d'une automobile compacte consomme quatre fois plus d'énergie que le passager d'un autobus rempli seulement à 50 %. Le conducteur seul d'un véhicule sport utilitaire consomme 45 fois plus d'énergie qu'un passager du métro à l'heure de pointe. De l'électrification directe par fil ou par rail permet de doubler ou même tripler l'efficacité d'un mode de transport. Je crois qu'on a des pistes de solution intéressantes.
Pour nous, la solution à l'insécurité énergétique du Québec, c'est d'investir dans le transport collectif. Ces investissements permettront de réduire la consommation de pétrole, réduire les gaz à effet de serre et nous rapprocher des objectifs du Protocole de Kyoto, améliorer la qualité de vie des Québécois. On pense que la qualité de vie est supérieure pour quelqu'un qui est assis dans son train de banlieue à lire son journal que quelqu'un qui est dans le trafic et qui se demande par quel chemin il va passer pour arriver à temps à son rendez-vous, à son travail. Et finalement on dit que ça stimule l'économie du Québec.
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(11 h 50)
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En contrepartie, investir dans l'automobile, en fait, via des ponts et des autoroutes, ça nuit à l'économie au Québec. L'analyste Richard Bergeron a publié L'économie de l'automobile. Il révélait qu'en 2002 le Québec dépensait 29 milliards de dollars pour l'achat de véhicules neufs, main-d'oeuvre, pièces, achat de carburant et accessoires. Puis, selon ses chiffres, 66 % de ce 29 milliards, donc environ 19 milliards, servaient à créer des emplois à l'extérieur du Québec. Puis de nombreuses personnes diront que c'est exagéré, c'est un écologiste sans voiture. Mais on a mis la main sur une autre étude de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, qu'on a fait distribuer, et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain indiquait que le taux d'importation était de 50 % pour l'automobile, soit cinq fois plus que pour le transport collectif, qui ne nécessite que 10 % d'importation de produits étrangers, notamment des moteurs pour les autobus et le carburant pour faire rouler les autobus.
Investir dans le transport collectif stimule l'économie du Québec. Toujours dans le même rapport de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il est indiqué qu'une dépense de 10 millions de dollars dans le transport collectif créait 70 % plus d'emplois que dans l'usage journalier d'une automobile, y incluant l'achat de l'automobile. Donc, on croit que c'est des données intéressantes pour la Commission de l'économie et du travail, savoir qu'on peut créer 70 % plus d'emplois dans un domaine que dans un autre.
Option Transport durable considère que le Québec est en position enviable s'il appuie clairement les nouvelles technologies et l'innovation pour développer ce secteur industriel. Bombardier Transport possède une importante usine à La Pocatière qui fabrique des trains de banlieue. Et pourquoi pas des tramways électriques nouvelle génération? Hydro-Québec est à développer, avec la française Dassault, un véhicule tout électrique utilisant le moteur-roue. Il semble que les véhicules ne seront pas construits ici, mais il y a sûrement des composantes qui pourraient être intégrées à des technologies à 100 % québécoises. Aussi, d'autres fabricants d'autobus, de véhicules électriques ou hybrides attendent le signal du gouvernement du Québec pour développer notre économie. On croit qu'il y a beaucoup de potentiel économique de ce côté-là.
En plus, si on regarde... Évidemment, quand on construit une route ou une autoroute, on crée de l'emploi, c'est indéniable, de l'emploi local. Mais, par le fait même, on encourage les gens à acheter une seconde voiture, une troisième voiture. Souvent, il y a beaucoup de familles qui ont trois et quatre voitures. Donc, c'est une solution gagnant-perdant. Quand on investit dans le transport collectif, c'est une solution gagnant-gagnant, gagnant parce qu'on investit dans le local comme on a vu, 90 % des dépenses pour faire du transport collectif, c'est au local, et la répercussion de ça, c'est des économies au niveau financier pour les familles, et les familles réinvestissent cet argent-là dans le local. Donc, on a vraiment une solution gagnant-gagnant versus une solution gagnant-perdant.
On a trouvé comme solution, pour financer le transport collectif, de créer un fonds Kyoto pour réduire l'importation de pétrole et développer l'économie et le transport public. Entre autres, on a mis la main sur une résolution de la Chambre de commerce du Canada qui indiquait, en 2002, que le Canada est le seul pays du G8 n'ayant pas de programme d'investissement national pour le transport urbain, et la chambre a demandé que le gouvernement fédéral établisse un fonds réservé uniquement au réseau de transport public. On le sait, on n'est pas devant le gouvernement fédéral, mais quand même il a été décidé, dans le dernier budget fédéral, qu'une part importante de la taxe sur l'essence, environ 600 millions, sera redistribuée dans les provinces. Nous, on dit: Une grande partie de l'argent qu'on va recevoir d'Ottawa, qui vient de la taxe sur l'essence, devrait servir au transport collectif et à développer cette industrie-là au Québec.
Que font nos voisins Ontariens? Le gouvernement McGuinty a annoncé en 2004 qu'une partie de la taxe provinciale ? on ne parle pas de la taxe fédérale, mais de la taxe provinciale ? sur l'essence sera consacrée à l'expansion et à l'amélioration du transport en commun dans 105 municipalités, soit 680 millions de dollars au cours des trois prochaines années. Pendant ce temps-là, au Québec, le gouvernement, enfin le ministère du Transport a fait un effort pour les sociétés de transport qui crient famine et leur a octroyé 20 millions de dollars en aide temporaire.
Et, nous, on arrive avec une solution pour trouver de l'argent pour financer le transport collectif. C'est créer un fonds Kyoto pour réduire les importations de pétrole puis pour améliorer l'efficacité énergétique des véhicules. Il y a un phénomène, c'est que les prix de l'essence fluctuent énormément. Lorsque les prix de l'essence voisinent le dollar ou les 0,99 $, comme on a vu ces derniers mois, il y a peu de gens qui vont se garrocher chez le concessionnaire automobile pour aller s'acheter le plus gros 4x4 ou demander le plus gros moteur et le plus puissant dans la catégorie de voitures qu'ils choisissent.
Sauf que le prix de l'essence joue au yoyo, et on en voit... Il y a quelques semaines encore, il était à 0,79 $. On pense que ça prend un message clair aux automobilistes comme quoi le prix de l'essence va monter tôt ou tard, et on vous demande d'imposer une taxe intelligente sur l'essence. Cette taxe dite intelligente serait imposée lorsque le prix du baril de pétrole sera à moins de 50 $. Donc, lorsque le prix du baril de pétrole international sera dans la fourchette de prix entre 45 $ et 50 $, 0,01 $ le litre serait demandé aux automobilistes en descendant comme ça jusqu'à 30 $ le baril de pétrole, où là il y aurait une taxe de 0,05 $ le litre d'essence. Au Québec, 0,01 $ le litre d'essence génère 80 millions de dollars de revenus additionnels au gouvernement, et on demande que ce soit vraiment une taxe dédiée que pour le transport collectif.
Le dernier point du mandat de la commission, c'était de rejoindre les attentes de la société québécoise. On le sait, la société québécoise est très intéressée au Protocole de Kyoto et de nombreux citoyens demandent des actions concrètes. Aussi, un sondage réalisé par la firme Léger Marketing pour la Coalition pour le transport en commun ? dont Option Transport durable fait partie tout comme ENJEU ? révélait, mardi dernier, il y a deux jours, que le problème de la mobilité dans l'est de la ville... En fait, 76 % de la population montréalaise privilégie le transport en commun plutôt que le prolongement de l'autoroute 25 et la construction d'un pont. Sauf que, lorsqu'on ne donne pas de choix aux citoyens puis qu'on dit: Est-ce que vous voulez avoir le pont et l'autoroute 25?, la majorité disent: Oui. Mais, lorsqu'on donne un choix à ces gens-là, on leur dit: On a le choix entre faire un pont ou faire un train de banlieue rapide vers Montréal, qui ne sera jamais bloqué dans le trafic, les gens choisissent majoritairement... en fait, à 76 %, on veut avoir du transport collectif.
Pour nous, pour conclure, nous dirons que, si le gouvernement souhaite augmenter la dépendance énergétique des Québécois envers les produits pétroliers, s'il souhaite augmenter l'inefficacité énergétique et les gaz à effet de serre, créer des emplois à l'extérieur du Québec, il faut investir 1 milliard de dollars dans l'autoroute 50 et dans le pont de la 25.
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(12 heures)
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Mais, si au contraire on veut un développement durable de l'économie québécoise et se préparer au prochain choc pétrolier qui viendra tôt ou tard, il faut prendre le virage du transport collectif et financer adéquatement l'augmentation de l'offre de service de transport pour que les gens le prennent. Parce qu'une grande partie de la population souhaite prendre le transport collectif, mais il est inadéquat pour l'instant et il sera inadéquat tant qu'on n'y mettra pas les ressources nécessaires. Je vous remercie, ça finit ma présentation.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci pour votre présentation. Maintenant, je cède la parole au ministre. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Benoit, vous recommandez dans votre mémoire la création d'un fonds Kyoto qui serait alimenté par ce que vous avez appelé une taxe intelligente provenant d'une taxe sur l'essence. Vous mentionnez que ça, ça servirait à financer le transport collectif.
La première question, parce qu'elle me préoccupe entièrement ? et pas juste moi, les gens des régions aussi ? c'est... Je pense que cette taxe-là toucherait vraisemblablement tout le monde, notamment et en particulier les gens, les automobilistes en région qui ont à se déplacer sur de grandes distances et qui ne pourraient pas se prévaloir du transport collectif parce qu'il est inexistant et qu'ils se trouveraient à financer quelque chose qu'ils ne pourraient pas utiliser. Alors, qu'est-ce que vous suggéreriez pour atténuer l'effet d'une telle taxe pour les automobilistes qui n'ont pas accès au transport collectif?
M. Benoit (Réjean): Dans notre présentation, on a parlé du gouvernement de l'Ontario qui finance le transport collectif dans 108 municipalités. Je ne sais pas combien il y a de municipalités, au Québec, qui ont le transport collectif, mais je suis convaincu qu'on est loin de la moitié de ce montant-là. En fait, il n'y a même pas 50 municipalités qui ont du transport collectif au Québec.
Les gens qui se préoccupent de l'augmentation de la taxe sur l'essence, moi, je regarde les véhicules qui roulent sur les routes du Québec, puis je ne vois pas ça. Des convois... les gens... J'ai travaillé sur le milieu de la construction, puis la fierté des gens, c'est d'avoir un véhicule puissant avec le plus gros moteur. C'est la principale préoccupation des gens. La consommation d'essence importe peu pour les gens.
En fait, quand on regarde les prix du baril de pétrole au fil du temps, au début des années quatre-vingt, quand on met cela en dollar constant de 2005, le prix du baril de pétrole, il était environ à 70 $ sinon 80 $ le baril de pétrole, et le litre d'essence dépassait le dollar. C'était l'époque où est-ce que la majorité des jeunes se promenaient en Renault 5. Aujourd'hui, la préoccupation des gens, ce n'est pas un véhicule qui consomme peu, c'est un véhicule puissant. Si on persiste à répondre aux gens qui trouvent que les taxes sur l'essence sont chères, on va payer économiquement lorsque les prix vont exploser. Comme on disait, le prix du baril a doublé à maintes reprises, passant de 13 $ à 25 $ à 50 $. La prochaine étape de doublement, c'est 100 $. Ils vont le payer. En fait, c'est un excellent message qu'on dit aux gens des régions en mettant une taxe quand le prix de l'essence est bas: Faites attention, le prix va monter éventuellement. C'est un signal important. Je crois que ça répond.
M. Corbeil: Bien, en fait, M. Benoit, vous répondez puis pas nécessairement entièrement, parce que c'est une question d'équité ici, là. Vous dites qu'il y a à peu près 50 municipalités au Québec, versus l'Ontario, qui ont accès à du transport collectif sur plus de 1 000 municipalités. Qu'est-ce qu'on va dire aux gens des 950 municipalités qui n'ont pas accès au transport collectif, qui vont devoir défrayer une taxe pour payer...
M. Benoit (Réjean): Quand on parle de transport collectif, on parle également de transport interville, il y a des autobus qui sillonnent les régions...
M. Corbeil: Oui, oui, allez-y. Répondez, là, même si mon collègue de Montmagny a des réserves.
M. Benoit (Réjean): Oui. Donc, il y a des autobus qui sillonnent les régions et probablement qu'il n'y en a pas assez. C'est vrai qu'il y a beaucoup de villages qui ne sont pas reliés. Mais en fait, nous, c'est ça qu'on souhaite... Auparavant, il y avait des autobus qui passaient dans pratiquement tous les villages du Québec, mais on a décidé de ne pas appuyer ce service-là dans les municipalités. Donc, c'est un choix politique qui a été fait de... Ce n'est pas grave qu'il y ait des lignes d'autobus qui tombent à Saint-Jérôme, ou à L'Anse-Saint-Jean, ou au Saguenay, ce n'est pas grave, ils vont acheter des voitures, ils vont se débrouiller. Nous, on dit que, les gens, ça leur coûte plus cher présentement à cause qu'il n'y a aucun service. La chambre de commerce l'indiquait clairement: il y a des économies importantes à faire pour toutes les familles lorsqu'il y a un service de transport disponible. Les gens qui sont dans des régions éloignées, leur souhait, ce n'est pas de payer une voiture à leur enfant lorsqu'il entre au cégep ou qu'il va à l'université. Ils aimeraient mieux l'envoyer en autobus, ça leur coûterait beaucoup moins cher. Ils vont être gagnants.
M. Corbeil: Bien, en fait, c'est parce que vous préconisez aussi, dans votre mémoire, d'étendre des droits supplémentaires aux grosses cylindrées et vous le ciblez pour des véhicules qui ont plus de 10 ans. Il y a une mesure qui vient d'être introduite, qui a été introduite dans le budget 2004 et qui prend effet depuis le 1er janvier, pour une augmentation des droits d'immatriculation pour les véhicules de quatre litres et plus, je crois, et qui est graduelle, là, tout dépendant de la cylindrée du véhicule. Et justement, dans les régions où ces véhicules-là sont principalement utilisés à des fins de déplacement pour se rendre sur les lieux de travail, notamment en forêt, dans les secteurs miniers, donc forestiers et miniers, ces gens-là sont comme pénalisés parce qu'ils ont besoin de ce genre de véhicule là pour se rendre au travail avec l'équipement qu'il doive, au quotidien, transborder. Ils clament haut et fort que c'est inéquitable à leur endroit ? je comprends ici que vous visez des véhicules qui peut-être sont moins performants sur le plan énergétique parce que vous parlez de 10 ans et plus ? mais versus aussi des véhicules qui seraient utilisés dans une perspective d'avoir un gros moteur sous le capot, là. Je pense que là... Comment on ferait cette distinction-là?
M. Benoit (Réjean): Nous, on est convaincus que... On a vu les représentations d'une chambre de commerce, je crois, au Lac-Saint-Jean, qui disait que c'était inéquitable effectivement pour eux. C'était leur affirmation. Moi, je serais curieux de voir avec quoi se véhiculent les gens qui font ces représentations actuellement. Est-ce que c'est vraiment nécessaire qu'il y ait des véhicules aussi immenses? Pourquoi...
Là, présentement, on voit une explosion de la taille du parc automobile. Mais la taille au niveau du poids de chaque véhicule... Pourquoi qu'en 2005 on a besoin d'un véhicule plus puissant et plus gros que ce qu'il y avait de disponible il y a 15 ans? Je n'ai pas réussi à comprendre ça, puis on n'a pas eu vraiment une indication de la chambre de commerce comme quoi les besoins... Est-ce que les gens sont plus gros parce qu'ils font moins d'efforts, parce qu'ils marchent moins, parce qu'ils sont tout le temps en voiture? Je n'ai pas la réponse. Sauf que, moi, je pense que les moteurs, les véhicules sont plus puissants et consomment plus qu'auparavant et qu'il doit y avoir un signal, puisque les gens ne s'en préoccupent pas.
M. Corbeil: M. Benoit, vous mentionnez que le fonds de Kyoto développera le nouveau tramway à Québec et à Montréal et que ce moyen de transport électrique diminuera considérablement la consommation de pétrole. J'aurais juste des questions de précision. Est-ce que vous avez estimé à combien est la diminution de la consommation de pétrole découlant de l'application d'une telle mesure? Est-ce que vous avez aussi une idée de l'évaluation du coût de ce type de projet là? Quelle importance accordez-vous au coût dans le choix de projet à privilégier, celui-là ou n'importe quel autre? Et est-ce que le tramway est une mesure à privilégier compte tenu du fait notamment, à Montréal, que le métro couvre déjà une bonne partie du centre-ville?
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(12 h 10)
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M. Benoit (Réjean): Bon. Nous, on a pris une position, notre organisme, contre tout nouveau projet de développement de métro. On pense que c'est un coût trop dispendieux. Parce qu'on l'a vu, le métro de Laval coûte environ 800 millions de dollars pour 5 km, c'est environ 160 millions de dollars le kilomètre, alors que les projets de tramway... les prix varient entre 20 et 60 millions, c'est probablement deux à trois fois moins cher de faire un tramway électrique que de prolonger le métro. Donc, on aurait pu faire 15 km de tramway plutôt que 5 km de métro, ça aurait été peut-être plus intéressant. Donc, c'est important, les coûts, effectivement.
Dans bien des cas, on peut penser que les autobus hybrides qui s'en viennent à grands pas, puis même des autobus électriques qui fonctionnent, qui montent le Montmartre à Paris, seraient sûrement des choix moins dispendieux que le projet de tramway. Sauf qu'avec la majorité des projets de tramway qui ont eu lieu dans le monde, ça venait avec des projets de redéveloppement urbain et de rénovation des infrastructures. À Montréal, on sait que les infrastructures souterraines sont vraiment déficientes et doivent être refaites à quelques endroits. Il serait peut-être intéressant de faire un nouveau tramway en même temps que l'on refait les infrastructures souterraines. Mais les coûts sont importants, puis il faut y aller au plus efficace si on veut avoir le plus de développement possible.
M. Corbeil: Puis vous n'avez pas d'évaluation préliminaire au niveau de l'estimation de ces coûts de...
M. Benoit (Réjean): À part les chiffres qui ont été publiés par Transport 2000, dans Le Devoir, je pense qu'on a quand même une bonne indication que, quand quelqu'un... le métro, un véhicule électrique, probablement comparable à un tramway électrique, quand celui-ci... quand une personne consomme 45 fois moins d'énergie que dans un SUV, je pense qu'on a une indication qu'on peut réduire considérablement nos importations de pétrole grâce à ça.
M. Corbeil: Merci, M. Ménard. M. le Président, je ne sais pas s'il y a des collègues qui ont des questions.
Le Président (M. Jutras): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, M. Benoit, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vais y aller un peu dans la poursuite que le ministre a faite par rapport aux régions. Je vous dirais qu'on a été catalogués, nous ? je proviens de la Côte-Nord, comté René-Lévesque, qui est assez grand en soi ? comme étant les grands bâtisseurs d'eau, mais on est aussi une terre, une terre d'accueil, parce qu'on se développe par rapport aux loisirs, la chasse et la pêche.
Remarquez, je pourrais dire qu'on a un défaut, mais ce n'est peut-être pas un défaut, on a le défaut d'être sur 1 372 km de long par 50 pi de large, ça veut dire qu'on longe la 138, et, dans le coin de ma collègue Lorraine Richard, il y a des places qu'il n'y a même pas de chemin, là. Alors, je vous dirais que, pour ce qui est des grosses cylindrées... Puis je veux revenir là-dessus parce que, nous, comme Côte-Nord, c'est vrai qu'on est pénalisés par rapport à ça. On a de la grande entreprise, Abitibi Consolidated, on a Kruger, on a les grandes industries qui ont des gros véhicules.
Je vous donne l'exemple de moi, là, je ne me servirai pas des autres, là, j'ai une grosse cylindrée à aller parquer ici, à l'Assemblée nationale. J'ai un camion Dodge Ram 1500 HEMI 5,7. Savez-vous pourquoi j'ai ça? Parce que j'ai une motoneige, parce que j'ai un quatre-roues, puis aussi parce que je me sens plus en sécurité quand je viens à Québec l'hiver, comprenez-vous? Il y a, je vous dirais... À Baie-Comeau même, et c'est sur la Côte-Nord, là, je pense qu'il n'y a pas une cour qu'il n'y a pas un camion 4x4, parce qu'on appelle ça des voitures utilitaires, ça nous les prend, un, pour aller dans le bois, pour aller à la chasse, pour aller à la pêche. Alors, je vous dirais que, par rapport à la taxe qui vient d'être mise en branle le 1er janvier 2005, la Côte-Nord va payer beaucoup.
Alors, dans votre deuxième recommandation, qui touche la nouvelle taxe sur les grosses cylindrées, vous demandez que les véhicules de plus de 10 ans soient aussi assujettis. Le problème qu'on y voit, c'est que les personnes qui ont acheté à l'époque ne le savaient pas au moment de l'achat, donc il s'agit d'une taxe rétroactive. Dans une région comme la nôtre, quel retour du balancier on va avoir par rapport à une taxe comme ça? Puis d'après vous à quoi cet argent devrait servir?
M. Benoit (Réjean): Comme on disait, on a vu les représentations des chambres de commerce, puis j'avoue que ça nous a laissés perplexes. Et on sait que présentement, concernant les taxes sur l'essence, il y a déjà des mesures spéciales, un dégrèvement pour les régions éloignées et pour les régions frontalières. Je ne dis pas que l'histoire pour les grandes cylindrées... peut-être que ça pourra être applicable, cette mesure-là, pour votre région, je vous le concède. Mais, pour la taxe sur l'essence qu'on demande, la taxe dite intelligente, nous, on pense que c'est un bon message à faire aux concitoyens de... Il y a des gens qui ont acheté le plus gros 4x4 qu'il y avait sur le plancher lorsque le prix de l'essence était à 0,69 $, là. Ils ont jappé fort, ces gens-là, là, lorsque c'était à 0,99 $. Puis ils ont eu des problèmes comme ça d'ailleurs en Europe où est-ce que les routiers bloquaient les routes parce que les prix de l'essence montaient trop en flèche.
M. Dufour: C'est arrivé chez nous, ça.
M. Benoit (Réjean): Je pense qu'il faut anticiper ces problèmes-là, et c'est pour ça que, nous, on dit: Il faut y aller, il faut agir lorsque le prix de l'essence est peu élevé. Puis même on peut se demander: Aujourd'hui, à 50 $ le baril, est-ce qu'on peut considérer qu'il est peu élevé par rapport à qu'est-ce qu'on va avoir dans cinq ans? Donc, je vous le concède pour le problème de la surtaxe à l'immatriculation. Je ne vois pas pourquoi qu'on a limité ça, par exemple, à 10 ans, parce que les gens ne le savaient pas il y a 10 ans. Donc, à 10 ans, ça nous amène en 1995 ou en... Ces gens-là se rappelaient quand même des hausses de taxes qu'il y avait eu à l'époque... pas de taxes, mais du baril de pétrole, puis, quand on achète un véhicule, il faut être conscient comme quoi le prix du baril de pétrole fluctue et double dans certains cas.
M. Dufour: Et l'argent, il va servir à quoi, là?
M. Benoit (Réjean): Oui. Donc, projets de transport collectif, évidemment, mais il y a aussi autre chose, là, pour l'efficacité énergétique. Il y a une compagnie de Sherbrooke qui a fait des travaux avec l'Agence de l'efficacité énergétique pour installer des machines, des chaufferettes autonomes en énergie pour faire chauffer les camions semi-remorques. Je regardais récemment, il y a une possibilité d'économiser 2 000 litres par année pour les grands transporteurs routiers longue distance. Il y a des technologies disponibles. Puis, dans notre mémoire, on disait que ça ne devrait pas servir uniquement au transport collectif, mais à plusieurs technologies permettant d'aller chercher des économies d'énergie autant chez le particulier que dans l'industriel, au niveau transport, que chez les urbains.
M. Dufour: Croyez-vous que le gouvernement fait suffisamment sa part en matière de transport en commun? Parce que, si vous avez des suggestions ou un message à passer, je pense que vous avez la meilleure tribune pour le passer. Parce que le gouvernement réfléchit à cette question, alors qu'on avait promis une consultation publique il y a un an. Alors, avez-vous une opinion là-dessus, par rapport au transport en commun?
M. Benoit (Réjean): Nous, la semaine que le Protocole de Kyoto a été adopté, il a été adopté le 16 février, on aurait cru que le gouvernement serait arrivé en nous disant: Bon, bien, on va faire des trains de banlieue, on a une gare qui a été construite aux frais des contribuables à Saint-Jérôme, on va mettre le train en branle, puis, dans un an, deux ans, les gens vont prendre le train à partir de Saint-Jérôme. Et il y a d'autres projets. On s'attendait à une annonce de projets de plusieurs centaines de millions de dollars disant que, nous, on prend ça au sérieux, le Protocole de Kyoto, et il faut investir dans le transport collectif. En plus, ça paie au niveau de l'économie du Québec. On a été un peu déçus de l'annonce de l'autoroute 50, annonce qui dit environ 330 millions, puis l'autoroute ne sera pas terminée. C'est pour ça qu'on dit que le coût total de l'autoroute sera sûrement de 500 millions de dollars. La veille de l'annonce de l'adoption du Protocole de Kyoto, on a été un peu déçus, effectivement.
M. Dufour: Au niveau de l'efficacité énergétique, en page 6 de votre document, vous parlez qu'«il est important de rappeler que les faibles prix de l'électricité en vigueur au Québec ne sont pas de nature à favoriser l'efficacité énergétique». Ça, c'est votre opinion là-dessus, vous pensez que des prix plus élevés feront en sorte que le monde vont économiser l'énergie.
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(12 h 20)
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M. Benoit (Réjean): Oui. Il y a plusieurs mesures d'efficacité énergétique qui sont rentables dans des pays européens, en Asie, dans certains États américains, puis, quand on arrive au Québec, le taux de retour sur investissement est trop long, puis les mesures ne sont pas prises. Augmenter les tarifs de l'électricité, les gens feront plus attention et probablement prendront des mesures qui feront qu'au bout du compte ça ne leur coûtera pas tellement plus cher.
Mais, nous, on voulait focusser sur la question pétrolière, on fait... Pourquoi qu'en Europe on retrouve autant de petites voitures? La Smart, qui nous vient d'Europe... Le parc de véhicules européen est beaucoup plus bas qu'en Amérique du Nord. C'est à cause des taxes sur l'essence. Pourquoi le parc automobile du Québec est plus petit que partout ailleurs en Amérique du Nord? C'est à cause qu'on a plus de taxes sur l'essence au Québec que partout ailleurs. Grâce à ça, on a les véhicules les plus économes; des Honda Civic, là, il ne s'en vend pas autant en Amérique du Nord qu'au Québec, là, on est vraiment une société distincte grâce à ça, là. Ça n'a pas juste des effets négatifs. Quand les prix de l'essence vont exploser, ça nous fera moins mal ici, moins d'écart grâce aux taxes sur l'essence. Mais le signal de prix est une bonne méthode pour convaincre les gens d'économiser.
M. Dufour: O.K. La grande entreprise est venue passer un message à cette commission parlementaire par rapport au tarif L, les blocs patrimoniaux. C'est sûr qu'ils veulent avoir une prévisibilité au niveau des hausses tarifaires pour être capables de faire de grands investissements au Québec. Même, on parlait d'investissements de 5 milliards qui sont en attente actuellement. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?
M. Benoit (Réjean): Nous, on n'a pas fait de position sur l'électricité dans notre document, mais on sait que le tarif... C'est au niveau particulier en fait, au niveau du consommateur, et non pas au niveau industriel. Je crois que les entreprises font plus attention à leur consommation d'énergie que le citoyen individuel, et je ne suis pas convaincu qu'il faut vraiment donner un signal de prix pour les convaincre d'économiser au niveau de la grande entreprise, contrairement au consommateur. Mais, pour revenir à ça, versus grande entreprise et petite entreprise, les compagnies de flottes de camions, eux, se préoccupent beaucoup plus des coûts du carburant lorsqu'ils achètent un véhicule que le consommateur individuel. Donc, il y a une distinction, je crois, à faire entre l'industriel ou le grand consommateur versus l'individu, le citoyen ordinaire.
M. Dufour: O.K. Alors, une dernière question, M. le Président. En août dernier, notre formation politique a proposé au gouvernement qu'il instaure des crédits d'impôt sur les véhicules automobiles hybrides. Ça fait de cela huit mois qu'on n'a pas eu de réponse au moment où on se parle. Quelle est votre opinion là-dessus?
M. Benoit (Réjean): J'ai fait des appels chez Honda, où ils ont un véhicule, le Honda Accord, qui est offert en modèle régulier ou hybride, et le même véhicule est offert dans les deux versions, et c'est un surcoût de 7 000 $ à 8 000 $. Puis, nous, qu'est-ce qu'on calcule là-dedans, c'est que, à cause que la personne a une conscience environnementale et consent à payer, disons, 8 000 $ de plus, elle doit payer 7 % de ce 8 000 $ là, et elle est pénalisée au niveau gouvernemental. Quelle forme devrait être le crédit? Probablement de cet ordre-là, là, environ, en calculant le surcoût versus le modèle régulier, là.
M. Dufour: La TVQ peut-être?
M. Benoit (Réjean): Oui, au niveau de la TVQ, là, évidemment, un retour de TVQ sur le surcoût qu'entraîne ce genre de véhicule.
M. Dufour: Ça va.
Le Président (M. Jutras): Alors, M. Benoit, nous vous remercions pour votre présentation.
Alors, les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 14 heures, cet après-midi, dans cette même salle.
(Suspension de la séance à 12 h 25)
(Reprise à 14 h 8)
Le Président (M. Paquin): Bonjour. Bienvenue. Je constate qu'on a quorum, donc je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Permettez-moi de rappeler le mandat de la commission. L'objet de cette séance est de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.
Madame, messieurs du groupe Association québécoise du gaz naturel, bienvenue. Permettez-moi, avant de débuter votre mémoire, de vous rappeler la façon que ça fonctionne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Par la suite, on a une période d'échange, 20 minutes pour débuter du côté ministériel avec le ministre et, en dernier, un autre 20 minutes du côté de l'opposition de période d'échange. Donc, si vous voulez bien vous présenter, présenter les collègues qui vous accompagnent et nous présenter votre mémoire, on va vous écouter avec beaucoup d'attention.
Association québécoise du gaz naturel (AQGN)
M. Mongeon (Serge): Merci, M. le Président. Mon nom est Serge Mongeon, je suis président de l'Association québécoise du gaz naturel et je suis aussi entrepreneur en chauffage, climatisation et ventilation; à ma droite, j'ai Mme Ginette Gamache, la directrice générale de l'association; et, à ma gauche, M. André Gougeon, ingénieur et aussi président de la compagnie Rosemex, un manufacturier d'équipement de chauffage. Merci.
Le Président (M. Paquin): Nous vous écoutons.
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(14 h 10)
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M. Mongeon (Serge): Merci à la commission. Merci, mesdames et messieurs. La situation énergétique du Québec est préoccupante pour le gouvernement et la population en général. Aux termes du document de réflexion à la base de la présente consultation, le gouvernement fait état d'une situation énergétique précaire, d'un déséquilibre entre l'offre et la demande d'électricité et de la nécessité de diversifier les formes et les sources d'énergie. Croyant foncièrement que le gaz naturel constitue une solution à retenir aux termes de la politique énergétique devant découler du présent exercice, l'Association québécoise du gaz naturel salue l'initiative du gouvernement dans la réalisation de la présente consultation dont elle veut profiter pour présenter les attributs du gaz naturel et les possibilités de développement de son industrie.
Seul regroupement québécois uniquement dédié au gaz naturel, l'Association québécoise du gaz naturel est une jeune association en plein essor dont les membres, répartis sur l'ensemble du territoire québécois, représentent plus de 10 000 emplois. Sa mission est de promouvoir l'industrie du gaz naturel au Québec et le développement de ses membres. Pour ce faire, elle favorise la coopération entre les secteurs d'activité de l'industrie.
À cet effet, l'AQGN regroupe des représentants de l'ensemble des secteurs de l'industrie du gaz naturel, dont les manufacturiers et les distributeurs d'équipements gaziers, les installateurs, les firmes d'ingénierie, les entreprises qui transportent et distribuent le gaz naturel ainsi que les fournisseurs et les constructeurs de réseaux de distribution et de transport de la molécule. Ses membres sont issus de la grande entreprise et de la PME dans des proportions respectives de 55 % et 45 %.
L'AQGN prône l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place, et, en ce sens, elle encourage une plus grande utilisation du gaz naturel en faisant valoir ses nombreux avantages et ses multiples applications. De plus, l'AQGN partage les valeurs et principes suivants: la valorisation des ressources énergétiques dans une optique de développement durable; la promotion de l'efficacité énergétique; l'offre d'un choix énergétique élargi pour le consommateur à des prix compétitifs; et le développement du secteur énergétique québécois comme facteur d'enrichissement collectif.
À titre de porte-parole de l'industrie du gaz naturel, l'association participe activement aux différents forums de discussion relatifs au gaz naturel, notamment dans le but de faire connaître, de mettre en valeur et, dans certains cas, de démystifier cette source d'énergie encore trop peu utilisée au Québec.
Le contexte énergétique québécois s'est passablement modifié depuis le dépôt de la politique énergétique, en 1996. L'évolution des facteurs démographiques et économiques, alliés ponctuellement aux facteurs climatiques, a exercé une pression sans précédent sur la demande d'électricité. De plus, la préoccupation environnementale est maintenant présente, et pour cause, dans tous les débats de société, surpassant même parfois la préoccupation économique et sociale.
Seule province canadienne à utiliser majoritairement l'hydroélectricité pour la chauffe des bâtiments, le Québec entrevoit maintenant la possibilité de diversifier ses sources d'énergie pour sécuriser ses approvisionnement d'électricité et s'interroge même sur la pertinence de recourir à d'autres sources d'énergie alternatives pouvant se substituer à l'électricité.
Dans ce contexte, l'AQGN croit essentiellement que le gouvernement québécois retienne le gaz naturel comme la source d'énergie devant être prioritairement utilisée en substitution de l'électricité. Une telle diversification en faveur du gaz naturel aurait plusieurs avantages: premièrement, l'exploitation des attributs spécifiques de chacune des sources d'énergie, et notamment la chauffe des bâtiments et de l'eau par le gaz naturel et l'éclairage et la force motrice pour l'électricité; deuxièmement, la vente des volumes excédentaires d'électricité comme source potentielle d'enrichissement collectif pour le Québec à travers l'exportation; troisièmement, l'établissement d'un climat de saine concurrence dans le secteur de l'énergie au Québec; et, quatrièmement, le renforcement de la sécurité énergétique sur tout le territoire québécois.
Dans une perspective de développement durable, l'AQGN recommande donc au gouvernement, à l'instar des experts entendus lors de la première partie de la consultation, de privilégier l'utilisation du gaz naturel en substitution de l'électricité pour le chauffage résidentiel.
Depuis son implantation au Québec, en 1957, l'utilisation du gaz naturel se développe lentement mais sûrement. Actuellement, il occupe environ 14 % du bilan énergétique québécois. Cette source d'énergie, traditionnellement utilisée dans les secteurs commercial, industriel et institutionnel, dont les hôpitaux, les écoles, les pénitenciers, les centres commerciaux, etc., connaît présentement au Québec un grand succès auprès de la clientèle résidentielle, généralement acquise à l'électricité. En effet, le consommateur, découvrant les nombreux avantages, bienfaits et applications du gaz naturel, choisit maintenant de plus en plus cette forme d'énergie pour alimenter de ses appareils ménagers, de ses périphériques et pour chauffer sa résidence. Le gaz naturel, dont les tarifs sont régulés et l'approvisionnement sûr, présente plusieurs qualités: économique, il est la source d'énergie la plus avantageuse à utiliser pour chauffer l'espace, comme le démontre d'ailleurs sa popularité dans le chauffage des espaces commerciaux et institutionnels; flexible, il s'adapte facilement aux procédés industriels; performant, il offre à tous ses utilisateurs une très grande gamme d'équipements à haute efficacité en chauffage; polyvalent, il répond aux usages de tous les secteurs de l'activité économique: résidentiel, commercial, institutionnel, industriel et agricole; propre, il est de loin le combustible émettant le moins de gaz à effet de serre et de polluants dans l'atmosphère, moins que le charbon, le mazout, le gaz propane et le bois; utilitaire, il peut répondre à tous les besoins domestiques en chauffage, alimentation de périphériques ? chauffe-piscine, foyers intérieurs, foyers extérieurs ? et d'appareils ménagers tels que ceux utilisés dans la cuisson des aliments; sécuritaire, son réseau de distribution souterrain n'étant pas affecté par les intempéries, tempêtes de pluie, de neige ou de verglas, vents violents, etc., le gaz naturel offre à ses utilisateurs une autonomie énergétique unique par le biais d'une alimentation fiable et constante; efficace, son rendement énergétique est de 95 % dans le cadre d'une utilisation résidentielle avec des équipements de dernière génération et de près de 90 % dans le cadre d'une utilisation industrielle.
Considérant les attributs de cette source d'énergie, nous croyons que, si le gaz naturel avait bénéficié des mêmes avantages structuraux que ceux dont a bénéficié l'électricité, entre autres par l'application des tarifs domestiques, le gaz naturel occuperait, à l'heure actuelle, une place significativement plus grande que celle qu'il occupe présentement dans le bilan énergétique québécois.
Les enjeux. Tenant compte des avantages et inconvénients que présente chacune des sources d'énergie, le gaz naturel s'impose comme une source d'énergie de choix, en particulier pour la chauffe résidentielle. Dans une optique de développement durable, il représente, tant sur le plan social qu'économique ou environnemental, une solution à la situation de précarité énergétique à laquelle le Québec fait face actuellement.
Une plus grande utilisation du gaz naturel contribuerait au développement social, d'abord en générant sur l'ensemble du territoire québécois plusieurs emplois de qualité, bien rémunérés, stables et souvent dotés d'une formation continue.
Par ailleurs, il faut souligner l'aspect de sécurité publique qu'offre le gaz naturel à ses utilisateurs. En effet, le réseau souterrain de transport et de distribution assure une alimentation énergétique continue qui s'est avérée capable de répondre aux besoins de la clientèle sans égard à la température.
Une plus grande utilisation du gaz naturel contribuerait aussi au développement économique en offrant au consommateur résidentiel, commercial, institutionnel, industriel et agricole une alternative économique constituant un atout pour le Québec au chapitre de la compétitivité.
De surcroît, les travaux d'allongement et de densification des réseaux de transport et de distribution du gaz naturel sur une large partie du territoire québécois favoriseraient le développement régional par le biais des investissements requis pour la construction de même que pour la mise en service et l'entretien des infrastructures gazières. Par ailleurs, on doit aussi considérer les investissements importants que représente la réalisation de grands projets liés à la diversification des approvisionnements énergétiques québécois comme les terminaux méthaniers ou encore la construction de centrales en cogénération.
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(14 h 20)
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De plus, une utilisation accrue du gaz naturel contribuerait également au développement d'un meilleur environnement, si l'on considère les avantages suivants liés à l'utilisation du gaz naturel: sa vaste gamme d'équipements à très haute efficacité énergétique; l'absence d'impact visuel de ses infrastructures de transport et de distribution comparativement aux autres formes d'énergie; et surtout son potentiel de réduction d'émission de gaz à effet de serre et de polluants à l'échelle continentale dans l'éventualité où le Québec choisirait de bénéficier de l'exportation des surplus d'électricité libérés par l'utilisation du gaz naturel pour la chauffe résidentielle. À tous ces enjeux s'ajoute la possibilité pour le gouvernement de rétablir la justice entre les consommateurs d'énergie au Québec, car tel l'écrivait Jean-Robert Sansfaçon, le 1er octobre dernier, dans le quotidien Le Devoir: «Choisir d'augmenter les impôts de 2 milliards au lieu de majorer les tarifs d'électricité serait profondément injuste pour ceux qui chauffent au mazout et qui devraient absorber des hausses d'impôts pour épargner les consommateurs d'électricité. La rente générée par Hydro-Québec appartient à tous, pas seulement aux consommateurs d'électricité.» Les défis de l'industrie. Dans l'éventualité où le gouvernement ferait le choix avantageux de favoriser l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place et offrirait au gaz naturel les moyens d'élargir sa part de marché, notamment dans le domaine du chauffage résidentiel, la demande québécoise de gaz naturel subirait une augmentation significative, et notre industrie, de fortes pressions.
Afin de pouvoir répondre à une telle demande, notre industrie devra relever plusieurs défis, dont: former une main-d'oeuvre compétente en nombre suffisant pour offrir un bon service ? considérant le rythme actuel du développement immobilier, la formation des travailleurs qualifiés devient un élément prioritaire du développement de notre industrie; poursuivre la recherche dans le but d'innover et de développer de nouvelles technologies toujours plus performantes, ceci afin de toujours augmenter l'efficacité énergétique de nos équipements et la fonctionnabilité de nos installations; allonger et densifier nos réseaux de transport et de distribution du gaz naturel ? actuellement, les réseaux de transport et de distribution de gaz naturel desservent les localités situées en bordure du fleuve Saint-Laurent et des centres régionaux tels que l'Abitibi, le Saguenay et le Lac-Saint-Jean; maintenir un prix de vente compétitif au niveau du gaz naturel et offrir aux consommateurs des programmes et des incitatifs concurrentiels, ceci afin de rendre plus attrayants économiquement nos systèmes de chauffage et de mieux faire connaître toutes les applications domestiques du gaz naturel; assurer la diversification et la fiabilité de nos sources d'approvisionnement en gaz naturel en obtenant l'appui des autorités gouvernementales, des acteurs économiques et de la population en général relativement à la construction de terminaux méthaniers.
Les recommandations de l'industrie. Dans un contexte de forte croissance de la demande anticipée, l'industrie du gaz naturel devrait pouvoir compter sur l'appui du gouvernement afin de mieux gérer et satisfaire cette croissance. L'AQGN propose donc les actions suivantes afin d'assurer le succès d'une substitution bénéfique de l'électricité par le gaz naturel.
À titre d'information, de la culture tout électrique des Québécois résulte une méconnaissance des autres sources et formes d'énergie, incluant le gaz naturel. À titre d'exemple, une large proportion de la population québécoise confond le gaz naturel avec le gaz propane ou encore ignore qu'un foyer au bois est plus polluant qu'un foyer au gaz naturel. C'est d'ailleurs ce qui justifie le rôle d'éducation populaire que partagent tous les intervenants de notre industrie afin de démystifier le gaz naturel auprès des consommateurs.
De plus, l'information est à la base de la réussite de projets tels que l'allongement du réseau de transport du gaz naturel, la construction d'un terminal méthanier ou encore de centrales de cogénération. Ces infrastructures étant un élément nécessaire à toute action portée dans le but de favoriser le développement du marché du gaz naturel au Québec, une information adéquate et pertinente sur les enjeux en cours devrait être communiquée à la population.
Cela dit, le gouvernement doit informer objectivement la population des avantages et inconvénients de chacune des sources d'énergie disponibles au Québec afin qu'elle puisse exercer son jugement et faire des choix énergétiques, individuels et collectifs, libres et éclairés.
L'Association québécoise du gaz naturel recommande donc au gouvernement de prendre les moyens nécessaires afin de diffuser une information complète et pertinente sur les enjeux liés au dossier énergétique québécois, ceci dans l'intérêt du public.
Un juste prix. L'information et les recommandations des experts en faveur du gaz naturel ne suffiront pas à le substituer à l'électricité sans une politique de juste prix pour l'ensemble des sources d'énergie, et particulièrement pour l'électricité. Notre industrie ne peut être compétitive dans les conditions actuelles du marché. C'est pourquoi, afin notamment de rétablir l'équité envers l'ensemble des consommateurs d'énergie au Québec et entre les intervenants du secteur de l'énergie, nous recommandons que les tarifs d'électricité soient majorés au juste prix. L'Association québécoise du gaz naturel recommande l'augmentation des tarifs d'électricité à un niveau favorisant l'efficacité énergétique ainsi que l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place.
Un climat de saine concurrence. Au-delà du juste prix de l'électricité, chaque industrie du secteur de l'énergie doit pouvoir évoluer dans les marchés selon les règles, des normes et des conditions équitables, dont:
Une réglementation équivalente tant au niveau des normes d'installation des systèmes de chauffage qu'à celui des exigences de qualification de la main-d'oeuvre et de ses travailleurs. À titre d'exemple, les exigences de formation et de qualification des travailleurs du gaz propane et du gaz naturel diffèrent au détriment des travailleurs de notre industrie, ce qui a pour effet de nuire à son développement.
Un partage équitable des fonds gouvernementaux dédiés à la création et à la promotion des programmes incitatifs en faveur du gaz naturel afin de faciliter le transfert de la clientèle de l'électricité au gaz naturel.
Une allocation juste et équitable des subventions à la recherche et au développement des procédés, de technologies et des équipements plus performants afin de répondre adéquatement aux besoins des différents types de consommateurs d'énergie.
Un appui public, financier et réglementaire, le cas échéant, afin de supporter notre industrie dans ses démarches et ses projets d'allongement et de densification des réseaux de transport et de distribution de même que dans ceux de la diversification des sources d'approvisionnement en gaz naturel.
En fait, l'AQGN souhaiterait que la politique énergétique à venir aille dans le sens d'un rétablissement de l'équité interindustrielle dans le secteur de l'énergie de manière à permettre à chacune des industries d'évoluer dans un climat de saine concurrence dans le respect des principes du développement durable. L'Association québécoise du gaz naturel recommande l'établissement et le maintien, aux termes de la politique énergétique devant résulter de la présente consultation, d'un climat de saine concurrence dans le secteur énergétique québécois.
En conclusion, pour différentes raisons, tous les experts entendus en première partie de la consultation sont d'avis que le prix de l'électricité doit augmenter pour différentes raisons: créer une richesse collective québécoise; éviter le gaspillage de l'énergie; faire un meilleur usage de l'électricité; réduire les impôts; rétablir la justice entre les consommateurs d'énergie; augmenter la fiabilité du réseau électrique; augmenter la valeur du parc de production hydroélectrique; refléter la vraie valeur de l'électricité.
À la suite de cette consultation, le gouvernement devra déposer une politique énergétique ayant comme prémisse le développement durable. Aux termes de cette politique, il devra indiquer aux Québécois ses orientations, ses choix, et des stratégies, et les actions qu'il entend mettre en oeuvre pour les réaliser.
La solution que propose l'industrie du gaz naturel est simplement d'utiliser la bonne énergie à la bonne place en permettant au gaz naturel de se substituer à l'électricité pour le chauffage résidentiel. Une telle stratégie aurait comme avantage de maintenir le statut de moteur québécois du développement économique, social et environnemental de l'hydroélectricité par le biais de l'exportation tout en garantissant à la population la sécurité énergétique à laquelle elle a le droit grâce à la diversification des sources d'énergie en faveur du gaz naturel. Merci.
Le Président (M. Paquin): M. Mongeon, merci beaucoup. On débute notre période d'échange du côté ministériel. M. le ministre, à vous la parole.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci de votre présentation, M. Mongeon. À plusieurs endroits, vous intervenez pour qu'on puisse vous aider à prioriser le gaz, mais vous ne parlez pas nécessairement beaucoup de la question de l'approvisionnement. Est-ce que vous ne pensez pas que, si on mettait l'accroissement de la demande avant la sécurité des approvisionnements, on aurait un petit décalage qui serait difficile à surmonter?
n(14 h 30)nM. Mongeon (Serge): Je pense, M. le ministre, qu'on doit travailler ça parallèlement. Si la politique gouvernementale va dans le sens de favoriser le gaz naturel, au même moment, présentement, on est capable de répondre à une certaine demande et, au même moment, on doit favoriser l'alimentation aussi ou l'approvisionnement du gaz naturel. Je pense que ça va de pair, on ne peut pas avoir un sans l'autre, on doit travailler parallèlement les deux situations.
M. Corbeil: D'accord. Comme plusieurs intervenants qui se sont présentés devant cette commission jusqu'ici, votre association préconise l'utilisation du gaz naturel pour le chauffage résidentiel. Avez-vous des mesures concrètes à proposer afin de favoriser une substitution graduelle de l'électricité par le gaz naturel dans le chauffage résidentiel?
M. Mongeon (Serge): Actuellement, dans tous les projets résidentiels où on a un système centralisé, il est facile de faire le transfert entre la source d'énergie électrique et la source d'énergie au gaz naturel. Par contre, à d'autres endroits où il n'y a pas un système centralisé, c'est plus difficile. Il y a beaucoup de recherche qui est faite présentement pour pouvoir substituer l'électricité avec le gaz naturel, mais les recherches ne sont pas complétées et les équipements ne sont pas encore disponibles.
Par contre, si on avait une réglementation peut-être plus ferme au niveau du Code de bâtiment qui obligerait le système de ventilation à l'intérieur d'un bâtiment, ce serait facile, à ce moment-là, d'adapter un système de chauffage centralisé et sans changer les coûts dans un immeuble... d'une manière très peu sensible pour un immeuble résidentiel.
M. Corbeil: Merci beaucoup. Dans votre mémoire, vous faites référence à un aspect qui n'a pas nécessairement jusqu'ici été tellement développé, du moins depuis que je suis ici, à savoir la formation d'une main-d'oeuvre compétente et en nombre suffisant. Pouvez-vous élaborer davantage sur cette problématique-là reliée à la disponibilité d'une main-d'oeuvre qualifiée dans votre domaine et aussi aux moyens, aux mesures qui pourraient être envisagées pour relever ce défi-là?
M. Mongeon (Serge): M. le ministre, actuellement les entreprises qui oeuvrent dans le secteur de la construction au niveau du gaz naturel ont une préoccupation d'installation de gaz de l'ordre d'à peu près de 45 % de leurs travaux effectués dans leurs entreprises. Si le gaz naturel obtenait une pénétration plus grande, ces entreprises-là se rallieraient rapidement pour développer peut-être 75 %, 80 %, 90 % de leur travail au niveau du gaz naturel. Il serait aussi facile de ramener les gens qui travaillent dans des secteurs énergétiques comparables, tels les gens qui travaillent dans le mazout... de les former pour les amener dans l'industrie du gaz naturel. Je pense que l'industrie du gaz naturel serait capable de suivre la progression du gouvernement et de la charge énergétique pour que la main-d'oeuvre soit adaptée. Nous avons des écoles qui sont en fonction actuellement, il s'agit juste d'avoir un signal clair dans l'industrie pour que les gens s'y rallient, et puis prennent le temps, et y mettent les énergies nécessaires pour venir s'affilier au réseau de l'industrie du gaz naturel.
M. Corbeil: O.K. Vous soulignez aussi à la page 9 de votre mémoire, là, que l'information, c'est à la base de la réussite de projets tels que le prolongement du réseau de transport de gaz naturel, construction de terminal méthanier ou encore de centrales de cogénération. Selon vous, comment le gouvernement devrait-il aborder la problématique reliée à l'acceptation et à l'acceptabilité sociale des projets énergétiques reliés au gaz naturel notamment mais aussi de d'autres natures?
M. Mongeon (Serge): Je vais passer la parole à M. André Gougeon qui va pouvoir vous répondre.
M. Corbeil: Merci.
M. Gougeon (André): Disons qu'un élément important quand on parle de projets, c'est... À date, ce qu'on constate depuis une vingtaine d'années, c'est la méconnaissance du produit. On n'explique pas assez aux gens que ce soient les projets d'infrastructures qui ont été réalisés ou les projets dont on a parlé, par exemple, de cogénération. Donc, il y a une explication, il y a de l'information qui est à donner au grand public, bien expliquer le fond des choses. Et, quand vous regardez au niveau du GNL, par exemple, ce matin, on faisait mention justement de toute la dynamique de «pas dans ma cour», c'est une énergie qui n'est pas différente des énergies pétrolières ou l'électricité. Chaque énergie a ses risques associés, chaque énergie aussi a ses infrastructures, et le gaz naturel liquéfié, par exemple, est un gaz naturel qu'on liquéfie, bon, à moins 162 °C, mais c'est une énergie qui est bien contrôlée, qui est sécurisée. Vous regardez, par exemple, la France, le grand portfolio énergétique ou la sécurité énergétique passe par l'approvisionnement GNL. Donc, comment ça été expliqué, c'est ça qu'il faut faire. Donc, il y a un élément important d'information.
Je vous rappelle aussi, il y a eu des projets d'infrastructures dans les années quatre-vingt-dix, début 2000. C'est un peu la même chose, d'expliquer aux gens que, quand vous avez une conduite de gaz naturel, bon, bien, quels sont les risques associés. Il faut faire les comparaisons, les bonnes comparaisons. Donc, je vous dirais, pour amener l'implantation des infrastructures, il faut prendre le temps de démontrer les gains, démontrer aussi les risques mais faire la comparaison et peut-être monter l'hélicoptère un peu pour que la population comprenne bien ce qu'il en est, là.
M. Corbeil: Merci, M. Gougeon.
Le Président (M. Paquin): M. le ministre.
M. Corbeil: M. le Président, vous soulignez que les usages du gaz naturel sont multiples et peuvent permettre des gains importants tant au niveau économique qu'environnemental. Or, la façon traditionnelle d'interpréter les concepts de développement durable et de protection de l'environnement met en opposition l'utilisation des hydrocarbures à ces concepts de développement durable et de protection de l'environnement. Selon vous, quelle est la place du gaz naturel dans une démarche visant à favoriser justement le développement durable et la protection de l'environnement?
Le Président (M. Paquin): M. Mongeon.
M. Mongeon (Serge): Serge Mongeon. Si on regarde l'utilisation du gaz naturel pour la chauffe résidentielle, on a des équipements pour la chauffe résidentielle qui dépassent les 95 % d'efficacité. Donc, les rejets dans l'atmosphère sont très, très minimes. Si on était capables de déplacer au Québec beaucoup d'énergie de chauffe résidentielle, cette énergie électrique là pourrait être exportée. Et puis, si on regarde mondialement, si on exportait cette énergie-là qui est produite à partir de l'hydroélectricité, et qu'on vendait de l'électricité en Ontario, et qu'on vendait de l'électricité aux États-Unis, ces gens-là n'auraient pas à produire de l'électricité avec une autre source d'énergie et seraient de là moins polluants dans l'environnement, et je pense que le bilan de pollution continentale serait de là diminué.
M. Corbeil: Bon. Merci. C'est des aspects intéressants. Maintenant, question que vous soulevez qui est passablement délicate, c'est que, page 10, «l'Association québécoise du gaz naturel recommande l'augmentation des tarifs d'électricité à un niveau favorisant l'efficacité énergétique ainsi que l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place».
Présumant que je sois entièrement d'accord avec votre dernière affirmation, la bonne énergie à la bonne place, j'aimerais vous entendre sur le niveau favorisant l'efficacité énergétique parce que vous ne l'évaluez pas. Et, au fur et à mesure qu'il y a des ajustements des tarifs d'hydroélectricité, on a un petit problème d'acceptabilité, là. C'est quoi pour vous un niveau favorisant l'efficacité énergétique?
Le Président (M. Paquin): M. Mongeon.
M. Mongeon (Serge): Nous pensons actuellement que l'électricité est à un prix un petit peu trop plancher, un peu trop bas, et que le consommateur lui-même, en ne payant pas de l'électricité au prix réel du marché, est porté à la surutiliser, à peut-être ne pas la conserver de la bonne façon. Si le prix était juste, tel qu'il devrait être payé, je pense que le consommateur serait encore plus efficace, ferait beaucoup plus attention à ses utilisations énergétiques électriques et, par le fait même, diminuerait la charge sur le réseau et augmenterait la valeur ajoutée du Québec. Puis, en utilisant le gaz naturel, ça donnerait encore plus d'espace pour utiliser l'électricité pour la vraie source d'énergie.
M. Corbeil: M. Mongeon, vous avez passé d'un prix estimé à un niveau favorisant à un prix juste et vous ne l'avez pas encore tellement, tellement bien campé. Est-ce qu'il serait utile que je vous rappelle que la Régie de l'énergie a donné à Hydro-Québec l'autorisation de hausser ses tarifs de 3 % pour l'année 2003-2004, de 1,4 % pour l'année 2004-2005 et tout récemment de 1,2 % pour l'année 2005-2006?
Alors, pour trois ans, composé, là, ça fait 5,7 % arrondi, 5,7 % pour trois ans. De 1998 à 2006, sur huit ans, l'hydroélectricité a augmenté de 5,7 % sur huit ans. En dollars constants, ou dollars ajustés, ou je ne sais pas c'est quoi, l'expression économique juste, là, c'est comme si elle avait baissé de 10 % en réalité, là. Et ça, quand c'est survenu, on se le fait servir abondamment et on se le fait répéter constamment. Puis là vous parlez de prix juste. C'est jusqu'où on va aller?
n(14 h 40)nM. Mongeon (Serge): ...du Québec, les gens qui consomment de l'électricité n'ont pas à être subventionnés indirectement versus les consommateurs d'une autre source d'énergie. Je pense qu'on doit être juste et équitable pour la collectivité québécoise. Et, si l'électricité vaut x sous le kilowatt, tout le monde va le payer le même prix sans être subventionné, et chacun devra faire la part des choses de son utilisation d'énergie. Je pense qu'actuellement le consommateur d'électricité bénéficie indirectement de subventions ou de rabais que le consommateur d'une autre source d'énergie ne bénéficie pas.
M. Corbeil: O.K. Je ne sais pas si mes collègues ont l'intention de poser des questions.
Le Président (M. Paquin): ...M. le député de LaFontaine.
M. Tomassi: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, et ça me fait plaisir de vous rencontrer. Vous savez, le gaz naturel, oui, c'est un beau moyen de chauffer. Et j'avais appelé justement Gaz Métro pour savoir si ma résidence pouvait être chauffée au gaz, malheureusement les conduits s'arrêtent à deux coins de rue de ma maison. Alors, vous avez perdu un client, mais j'espère que, dans un avenir rapproché, on va pouvoir être votre client.
Il y a un article qui est paru le 28 février ? je ne sais pas si vous l'avez lu, là ? dans le Economist, qui parlait du «natural gas explosion», qui disait que, d'ici 2025, la consommation totale mondiale du gaz naturel passerait à plus de 25 %. Nécessairement, une des raisons qu'ils disent, c'est le gaz naturel liquéfié. Et le coût du pétrole actuellement fait en sorte que ça revient quasiment plus abordable, le gaz naturel liquéfié, les techniques, que ce soit dans le transport, dans les usines où est-ce que le gaz est remis à l'aspect gazeux.
Ma question à vous: On a eu des experts qui sont venus nous parler au mois de décembre, je crois, la première section, qui parlaient du potentiel, au Québec, d'avoir des ressources gazières dans le fleuve Saint-Laurent et un peu partout. Et cet article-là parle aussi d'un aspect où est-ce qu'ils disent: Un des avantages du gaz naturel, au contraire du pétrole, c'est que «it's spread» à travers le monde beaucoup plus que le pétrole, qui est dans des secteurs... en Arabie ou, au Canada, en Alberta. Alors, vous, en tant que société qui distribuez actuellement le gaz, vous êtes, je crois, un partenaire dans un des ports méthaniers, mais avez-vous déjà pensé... Parce que, là, c'est des investissements majeurs, là. Je regardais ici, là, au Qatar, ils parlent d'un investissement de 7 milliards de dollars et un autre de 12 milliards de dollars. Il n'y a pas un genre de partnership qui pourrait être fait avec ces sociétés-là pour explorer un peu plus?
M. Mongeon (Serge): Je voudrais juste, M. le Président, clarifier une situation. Nous représentons l'industrie du gaz naturel et nous ne sommes pas le distributeur ni l'explorateur. Donc, ça m'est difficile, pour moi, de répondre à cette question.
M. Tomassi: O.K. O.K. Ça marche. Parfait, c'est correct.
Le Président (M. Paquin): C'est complet?
Une voix: ...
Le Président (M. Paquin): Oui, oui, il vous reste... il y a du temps, mon cher ami. Six minutes, M. le ministre.
M. Corbeil: Bon. Justement, ce matin et hier, on a eu des gens qui sont venus nous parler de projets de ports méthaniers. La consommation actuelle du Québec est un peu en deçà de 700 millions de pieds cubes annuellement, et on l'évalue, on l'estime à un peu plus de 800 millions à un horizon de 2015, je crois. Les deux projets de ports méthaniers viendraient amener en approvisionnement, chacun, à peu près 500 millions de pieds cubes de gaz naturel. Et, hier, on entendait qu'on peut utiliser ces installations-là entre 80 % et 90 % de leur capacité installée pour toutes sortes de raisons, là, de production, donc ce qui ramènerait à peu près entre 800 millions, 900 millions. Donc, il va y avoir, selon les estimés, une autosuffisance prévisible et peut-être même une capacité additionnelle de disposer d'un excédent, là, de peut-être une centaine de millions de pieds cubes.
Selon vous, les installations de distribution actuelles, notamment le pipeline installé entre Saint-Nicolas et Montréal, je crois, pourraient-elles absorber ce volume-là ou s'il faudrait envisager faire des additions ou utiliser d'autres moyens de transport?
Le Président (M. Paquin): M. Mongeon.
M. Mongeon (Serge): Je pourrais difficilement vous répondre. Par contre, M. le Président, je vais passer la question à M. André Gougeon qui est plus familier avec le réseau.
Le Président (M. Paquin): M. Gougeon.
M. Gougeon (André): Oui. Merci, M. le Président. Alors, vous donner que le réseau de transport, sans connaître la capacité... vous dire quand même que, la façon que c'est fait actuellement, au fur et à mesure de la prévision des besoins, le réseau est adapté. Donc, soit qu'il y a des lignes qui sont construites et/ou des compresseurs, donc des stations pour élever le niveau de l'énergie pour le transport. Les lignes actuelles au Québec, dans le transport, c'est certain que ça a été planifié sur un horizon à long terme. La ligne de Saint-Nicolas, bon, c'est un diamètre qui est quand même avec une bonne capacité. Je vous dirais qu'au niveau de ces capacités-là je ne vous répondrai pas parce que je n'étais pas partie prenante, là, des calculs, mais vous dire qu'il y a une faisabilité. Si je vous parle par contre du réseau de distribution de Gaz Métro, c'est un réseau qui est de première qualité en Amérique. C'est un réseau qui a été complètement remplacé en matériaux très neufs, donc peu de pertes au niveau environnemental, peu de pertes de CH4, là, la molécule de méthane. Et c'est un réseau qui est extrêmement solide et peu utilisé.
Donc, vous regardez les capacités de ces lignes-là dans le réseau de Gaz Métro, pour y avoir travaillé, on parle des fois des lignes de 20 %, 25 %, une sécurité d'approvisionnement, un réseau qui est en très bon état et une possibilité énorme de raccordement. Donc, pour les ports méthaniers, c'est certain que la ligne de Saint-Nicolas, bon, le projet de Beaumont est à proximité de la ligne. Si vous parlez du projet de Gros-Cacouna, bien, évidemment, il y aura peut-être une infrastructure à implanter ou à faire là-dessus, oui.
M. Corbeil: Mais ce qui est installé présentement est sous-utilisé, mais par contre il est sécuritaire, il est fiable, il est moderne, c'est-à-dire d'installation récente et...
M. Gougeon (André): Oui. Gaz Métro a remplacé son réseau de fonte au cours des années quatre-vingt, début quatre-vingt-dix, donc vous avez un réseau de première qualité qui est en polyéthylène. Vous avez un réseau qui est maillé, donc ça augmente la sécurité d'approvisionnement et la capacité de desserte du client. Et, pour ce qui est des lignes de transport, c'est des lignes en milieu contrôlé, donc une servitude bien déterminée. Et la flexibilité est là pour doubler certaines canalisations, pour mesurer la capacité, s'assurer qu'on peut desservir à moyen et long terme. Mais la prévision évidemment, quand vous installez votre tuyau, vous pensez toujours à moyen et long terme en faisant des prévisions. Donc, c'est un peu ce qu'on disait, il faut toujours envisager ce qui s'en vient dans les cinq, 10, 15 prochaines années.
Donc, il y a quand même une belle planification. Je peux vous assurer qu'à date, pour y avoir travaillé, là, le réseau, en distribution, c'est aucun problème, puis le réseau de transport non plus, là. On a fait une ligne, par exemple, il y a quelques années, qui était le PNGTS, la ligne qui traverse le fleuve pour s'en aller jusqu'au États-Unis, et cette ligne-là a été prévue pour des capacités supplémentaires, là. Donc, il y aurait moyen d'avoir ces effets-là pour... si vous avez une capacité excédentaire, de la retourner ou la vendre, vendre le surplus de capacité en Ontario par déplacement ou peut-être d'inverser les flots et d'envoyer le gaz aux endroits où vous en avez besoin, là.
M. Corbeil: D'accord.
Le Président (M. Paquin): C'est complet, M. le ministre?
M. Corbeil: Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Paquin): Oui. D'accord. On va poursuivre nos échanges du côté de l'opposition. Mme la députée de Rosemont, on vous écoute.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, madame, bonjour. Votre association représente plus de 10 000 emplois. Ce sont des emplois directs, ça, des emplois de vos membres?
M. Mongeon (Serge): Des emplois directement reliés à l'industrie du gaz, les entrepreneurs, les gens qui font de la fabrication, les gens qui installent les réseaux. Tous les gens qui sont reliés directement à la distribution, ou à l'installation, ou à la fabrication d'équipement de gaz naturel.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Vous avez combien de membres?
M. Mongeon (Serge): Actuellement, l'association regroupe 300 membres.
Mme Dionne-Marsolais: Qui sont à la fois...
M. Mongeon (Serge): Dans toutes les...
Mme Dionne-Marsolais: Toute la chaîne...
M. Mongeon (Serge): Toute la chaîne de l'industrie, on...
Mme Dionne-Marsolais: ...de la filière.
M. Mongeon (Serge): Exactement, oui.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Bon. Vous parlez de la diversification des sources d'approvisionnement et vous dites que vous souhaitez l'établissement d'un climat de saine concurrence dans le secteur de l'énergie et de privilégier l'utilisation du gaz naturel en substitution de l'électricité pour le chauffage résidentiel. Je suis à la section 2.
On a eu devant nous les gens de l'industrie du gaz propane qui, eux, considèrent que, vous, vous avez été privilégiés parce que le gouvernement précédent avait financé, avait aidé au financement de l'extension du réseau gazier. Vous vous en rappellerez. Ce programme-là est terminé maintenant. Je ne sais pas s'il reviendra, mais... Et donc, à ce moment-là, l'objectif était justement d'accroître l'accès au gaz naturel dans certaines régions, vous vous en rappellerez sûrement. Vous avez aussi profité, je dirais, de certaines subventions... en fait, de subventions pour l'extension de ce réseau-là. Non?
n(14 h 50)nM. Mongeon (Serge): Il y a eu des subventions sur le réseau, je ne les connais pas, je ne peux pas vous dire. Je ne suis pas le distributeur. On regroupe l'industrie qui travaille au travers de ça. Sauf que la progression du réseau a fait qu'on a utilisé plus de gaz naturel dans la province de Québec, et puis, par ce fait, on est capables dans... Les régions éloignées ont été distribuées avec du gaz. Et puis ce n'est qu'un début, il faut aller encore plus loin. On a encore plus de chemin à faire, donc il faut être encore favorisés. C'est de l'infrastructure. C'est la différence avec le mazout et le propane, on doit créer de l'infrastructure souterraine pour pouvoir alimenter les régions. Ça fait que c'est sûr que ça prend... c'est des argents qui doivent être investis, qui durent longtemps, qui sont sous terre.
Mme Dionne-Marsolais: Une des raisons pour lesquelles le gouvernement avait appuyé l'extension du réseau gazier, c'était essentiellement pour rendre accessible cette forme d'énergie à certaines industries et au secteur de l'agriculture, pour favoriser justement l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place pour certaines applications. Donc, je pense que c'est important de le souligner et surtout d'indiquer que, quand on favorise un secteur industriel, bien il y en a un autre qui va réagir, qui va dire, lui, qu'il n'est pas favorisé. Évidemment, il y a eu des conséquences sur l'industrie du propane qui ont entraîné une modification aussi de ce secteur industriel là.
Vous dites aussi que vos tarifs sont régulés et que l'approvisionnement est sûr. Vous dites ça à la page 5, hein? Bon. Les tarifs d'Hydro-Québec aussi sont régulés maintenant et ils sont assujettis à la Régie de l'énergie qui en étudie les composantes avant d'autoriser l'augmentation de tarifs. Non? Et évidemment les coûts de production ne sont pas connus, ce n'est pas comme beaucoup d'approvisionnements qui, eux, doivent être dévoilés. À cet égard-là, est-ce que vous êtes d'avis que les coûts de production de l'électricité devraient être aussi connus ou disponibles... devraient être, je devrais dire, régulés par la Régie de l'énergie à votre avis pour établir ce climat de saine concurrence? Je ne sais pas qui, là.
M. Gougeon (André): Oui, je peux répondre. Oui. Alors, moi, je vous dirais que oui. Ce serait d'avoir l'information complète pour être certains qu'on puisse faire les comparables.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Vous dites que l'approvisionnement est sûr. L'approvisionnement est sûr, mais ça ne le rend pas moins coûteux. Parce que, quand on regarde, si on se projette dans l'avenir, la seule chose dont on peut être à peu près tous sûrs, c'est que le pétrole va coûter très cher. Et, si le pétrole coûte très cher, le gaz naturel va coûter très cher. Alors, si les projets de ports méthaniers se concrétisent ? et je vous souhaite qu'ils se concrétisent, je nous souhaite qu'ils se concrétisent ? ça ne baissera pas le prix du gaz naturel.
M. Gougeon (André): Je vous apporterais peut-être un élément. Le gaz naturel, dans sa distribution, actuellement a trois composantes: la molécule, le transport et la distribution. Quand vous mentionnez au niveau du contrôle, il reste quand même que le distributeur gazier, l'industrie, là, au Québec est en moyen de contrôler la portion qui est la desserte de distribution. Au niveau du transport, effectivement, on engage ou Gaz Métro, le distributeur, engage pour des volumes sur le long terme, donc peut sécuriser avec une prévision qui peut être cinq ans, 10 ans.
Il y a l'aspect de la molécule qui représente quand même, aujourd'hui, probablement 40 % du coût unitaire qui est vendu au client. Alors, quand vous parlez des ports méthaniers, il y a un élément, un effet qui est positif d'avoir cet aspect de fourniture là qui est plus qu'avoir l'Ouest canadien seulement, qui crée une offre nouvelle et puis qui ferait en sorte aussi qu'on pourrait, sur la portion de la molécule, avoir des prix plus compétitifs ? donc, ça, ce serait excellent ? qui pourrait faire en sorte aussi qu'il y aurait un déplacement, par exemple, des contrats de transport qui viennent de l'Ouest, un balancement entre l'Ouest puis l'Est. Donc, on ouvrirait une certaine forme de compétition aussi pour le transport. Donc, comme tous les marchés, bon, effectivement, ça évolue, ça va monter, mais en même temps, si le Québec peut faire en sorte d'avoir différents leviers pour contrôler... Donc, on parlait de la distribution, son transport puis la molécule, je pense que ça peut être intéressant. Ça va faire un élément de contrôle en tout cas dans le temps, là, donc...
Mme Dionne-Marsolais: Oui, je suis d'accord avec vous. Sauf que le prix de la molécule, on n'a vraiment pas d'influence là-dessus, en tout cas pas à ce jour.
M. Gougeon (André): Non, mais, dans la mesure où vous avez la flexibilité pour aller chercher des molécules un peu tout partout à travers la planète pour les apporter avec des méthaniers, il reste que ce sera des éléments intéressants pour négocier et se retrouver avec, dans votre réservoir, des molécules qui viennent peut-être, je ne sais pas, moi, d'un autre pays, mais vous avez au moins le loisir de magasiner sur le marché international, là.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Donc, en les mettant en compétition, vous présumez que vous allez avoir un petit jeu. Ce ne sera quand même pas gros, mais ça va exister. Vous dites aussi que vous souhaitez que le gaz naturel bénéficie des mêmes avantages structuraux que ceux dont a bénéficié l'électricité. J'imagine qu'à cet effet-là vous faites référence à la gestion tarifaire. Ou vous faites référence à quoi, là, quand vous parlez de ces avantages structuraux?
M. Gougeon (André): C'est au niveau de la tarification, là.
Mme Dionne-Marsolais: Au niveau de la tarification.
M. Gougeon (André): Dans le fond, ce qu'on mentionne dans ça, c'est tout l'aspect un petit peu... l'aspect des coûts associés à la production d'électricité. Donc, il y a un patrimoine qui est en place, le patrimoine a été identifié à 165 TWh. Maintenant, au marginal, quand vous achetez sur le marché actuellement qui est ouvert pour la production, vous vous retrouvez dans une situation où le vrai prix est identifié. Donc, il y a un écart entre la valeur moyenne du patrimoine, qui est à 0,0279 $, et le prix du marché. Je pense qu'il y a un écart qui est important à ce niveau-là. Donc, il y aurait peut-être moyen de faire un travail pour ramener ça pour que les vrais coûts soient là et, comme on le mentionnait, que les gens comprennent que la richesse qu'on possède, l'hydroélectricité, il y a un coût associé à ça. Il y a un coût de remplacement aussi. Donc, actuellement, on base ça sur un coût de production qui est très bas, mais ça ne reflète peut-être pas le vrai coût par rapport au marché, là.
Mme Dionne-Marsolais: Évidemment, si on connaît mieux le coût de production, on va avoir une information additionnelle. Mais en toute justice Hydro-Québec Distribution, maintenant qu'on a atteint le seuil de la disponibilité ou de l'approvisionnement d'énergie patrimoniale, elle va faire des appels d'offres hors d'Hydro-Québec, et donc là ces coûts-là vont être intégrés à son coût de vente, à son tarif de la même façon à peu près, là, que dans votre cas. Donc, il y a quand même... Et là évidemment il y a des petites nuances. Le ministre nous a dit, tout à l'heure, que, pour 2005-2006, l'augmentation qu'on aurait se limiterait à 1,2 %. J'en suis fort heureuse, ça veut dire qu'il doit avoir l'assurance qu'Hydro ne retournera pas devant la régie avant le 1er avril 2006. Ça me fait bien plaisir d'entendre ça, c'est une belle nouvelle.
Et, cela étant dit, si on regarde les augmentations de tarifs qui ont été demandées, vous savez que l'industrie, grande consommatrice d'électricité, se plaint aussi de ne pas connaître ces augmentations-là, de ne pas les avoir vues venir et qu'il y a beaucoup de démarches qui sont faites actuellement pour une stabilité du prix. Je ne sais pas si, dans votre cas, la question se pose au niveau de la stabilité des prix par rapport à l'industrie. Est-ce que c'est un enjeu aussi important pour vos clients, pour les clients...
M. Gougeon (André): Pour le distributeur, là, je ne pourrais pas vous répondre, mais je peux vous dire que c'est sûr que, pour nos clients, ils suivent ça, là. Les gens qu'on représente font un suivi. Ça a sûrement des impacts au niveau des tarifs de Gaz Métro, là, mais je ne serais pas en mesure de vous donner le détail, là.
Je voulais peut-être juste vous donner une information. Tout à l'heure, vous mentionniez que le distributeur a atteint son niveau de patrimoine, 165 TWh. Il reste que la pondération de la masse de 165 par rapport à 1 ou 2 TWh à la valeur du marché, si vous faites le calcul pondéré, il reste que ça détache un peu du 0,0279 $ qui est identifié à peut-être 0,0290 $, 0,03 $. On est encore loin d'un partage moitié-moitié entre la valeur coûtante du libre marché et la valeur patrimoniale, là. Donc, ça va prendre quelques années avant d'atteindre ça.
n(15 heures)nMme Dionne-Marsolais: Oui. Vous avez raison là-dessus, vous avez tout à fait raison. Mais vous savez aussi que l'électricité a toujours été, jusqu'au passé récent ? je devrais dire jusqu'à la dernière élection ? un outil de développement économique québécois très important, et les gouvernements qui se sont succédé jusqu'à aujourd'hui... bien, jusqu'à il y a deux ans, avaient comme approche de garder le patrimoine que représentait Hydro-Québec pour fins de développement industriel sur tout le territoire du Québec. Puis il y avait une raison pour ça. Hydro-Québec étant une société d'État, elle ne paie pas d'impôts, donc il y a une partie de ces argents-là que les Québécois ne reçoivent pas dans les coffres de l'État que l'on consentait ? c'était implicite, mais c'était là ? pour permettre des tarifs avantageux de façon à assurer le développement des régions du Québec, en somme, ce qui a permis à plusieurs régions de se développer. Je regarde mon collègue parce que, dans sa région en particulier, la région est liée à la disponibilité d'électricité et à l'utilisation de l'électricité comme facteur d'implantation industriel.
Aujourd'hui, on semble modifier, bon, la stratégie de développement industriel du gouvernement ? moi, je ne la connais pas, mais elle va finir par aboutir ? mais je ne suis pas sûre... à date, elle ne traduit pas cette même philosophie, elle est plus axée sur la mise en valeur accélérée du marché d'exportation. Bon. Est-ce que ce sera réalisé? Je pense que c'est encore en discussion, et cette commission-ci va sans doute apporter des réflexions là-dessus. Mais vous ne pensez pas, vous qui êtes des personnes d'affaires, que, quand on a un atout comme l'électricité pour fins de développement, on doit s'en servir à des fins de développements régionaux?
M. Gougeon (André): Oui, tout à fait, vous avez raison à ce niveau-là, mais je pense aussi que le gaz naturel peut faire un très bon effet aussi dans le développement au niveau industriel. Donc, quand on mentionne qu'on veut avoir plus de place au niveau du gaz naturel, particulièrement dans le résidentiel, un n'empêche pas l'autre, là. Donc, c'est de replacer aux bons endroits l'utilisation des combustibles, combustibles fossiles, l'énergie qu'est l'électricité. Mais, comme je vous dis, le facteur que vous mentionnez, c'est vrai, c'est juste que le gaz fait aussi cet effet-là, et le gaz, dans certaines utilisations, est extrêmement recherché. Quand vous parlez par exemple au niveau de l'utilisation dans les industries, c'est reconnu que les industriels préfèrent prendre le gaz naturel plutôt que l'électricité, vous n'en trouverez pas, plusieurs utilisations donc.
Évidemment, l'électricité, l'électron, quand il est utilisé dans le procédé, c'est autre chose, mais, dans la chauffe, le chauffage, de la vapeur, les combustibles, les liquides, c'est certain que vous préférez toujours avoir du gaz naturel, et en «back-up» vous allez avoir par exemple des combustibles de moindre qualité, comme l'huile ou le bunker. Mais je pense que le gaz naturel a son effet de levier, en région aussi, pour développer un marché. Vous avez moins de pollution avec le gaz aussi, si vous comparez dans vos usines. De prendre du bunker, c'est très polluant, c'est un hydrocarbure qui est extrêmement difficile à brûler, alors que, quand vous oxydez une molécule de CH4, c'est une molécule qui est la plus près de l'hydrogène, vous avez une facilité à libérer votre énergie en faisant le moins de pollution possible.
Mme Dionne-Marsolais: Je crois que plus on parle du gaz naturel comme forme d'énergie favorisant le développement industriel, plus on comprend, mieux on comprend et plus ça devient intéressant. Si on décidait, par exemple, de suivre votre approche et de généraliser ou d'accélérer le développement du... l'extension du réseau gazier, parce que, sur la Côte-Nord, il n'y en a pas, en Gaspésie, il n'y en a pas, puis, dans d'autres endroits du Québec, il n'y en a pas, comment est-ce qu'on pourrait se servir du gaz naturel comme outil de promotion industriel? Parce qu'on va toujours le payer au prix international, on n'aura jamais d'avantages comparés par rapport à d'autres régions. Si, par exemple, on est en compétition pour une usine, là, qui serait ici ou au Vermont, on n'aura aucun avantage de plus que le Vermont, au niveau énergétique en tout cas. Est-ce que je me trompe?
M. Gougeon (André): Bien, quand vous dites ça, en fait il faudrait faire la comparaison sur la même base. Ici, quand vous mentionnez par exemple au niveau du Vermont, évidemment vous avez des problématiques... ou ailleurs, là, le point est que vous avez certaines contraintes, des contraintes de réseau, des contraintes d'alimentation, alors qu'ici, comme on le mentionnait tout à l'heure, il y a beaucoup d'infrastructures qui sont en place, vous avez sûrement une facilité... ou vous auriez à faire les vraies bonnes comparaisons. Il y a le coût, c'est vrai, c'est important, c'est un facteur important, mais on parlait de sécurité d'approvisionnement, facilité d'accès, par exemple, aux marchés internationaux pour le distributeur, qui permet d'avoir un prix plus compétitif. On pourrait en faire une liste très longue, mais qui ferait en sorte que, malgré tout, on y gagnerait, là.
Mme Dionne-Marsolais: Parce que vous parlez de sécurité d'approvisionnement, il ne s'est jamais fait d'exploration gazière au Québec... enfin, ou très peu, alors on ne contrôle même pas l'approvisionnement. C'est vrai que cet approvisionnement existe, il est accessible, mais on ne peut pas assurer à un consommateur cette sécurité d'approvisionnement, on n'en a pas chez nous.
Alors, j'essaie vraiment, moi, là, de voir comment je peux utiliser... si votre raisonnement... Parce que, dans certaines applications, je suis tout à fait d'accord avec vous, le gaz naturel est préférable, et de beaucoup, au bunker ou à l'huile n° 6, puis, si on veut faire notre effort pour la réduction des gaz à effet de serre, ça peut être un outil extrêmement intéressant. Mais j'essaie de voir comment on peut avoir le même impact, sur le plan du développement régional, avec le gaz naturel qu'avec l'électricité.
M. Gougeon (André): Écoutez, je vous dirais que le produit gaz naturel est continental, au moins, la source, la matière première est au Canada dans certains cas, on a le bassin de l'Ouest qui est utilisé. De cette démarche, Gaz Métro justement regarde à avoir d'autres sources d'approvisionnement. Je pense que le projet du GNL était dans cet esprit-là. Alors, forcément que, je veux dire, ça a été de tous les instants, depuis la création de Gaz Métro, une recherche pour s'assurer en tout temps d'avoir la capacité de desservir les demandes futures. Et puis le distributeur s'est équipé en conséquence, donc a solidifié ses liens de transport, ses approvisionnements moléculaires, a mis même des outils financiers pour lisser le prix de la molécule, pour éviter justement... comme on a vu en 2001, il y a eu des montées de prix parce que la demande américaine était importante. Il reste qu'il y a des outils de contrôle qui sont mis en place.
Ça s'inscrit très bien, le GNL, dans cet aspect-là. Le réseau pipelinier est aussi en place pour être développé. Donc, en tout temps, on pourrait avoir des approvisionnements de différents endroits, donc c'est ça qu'il faut développer, étant à l'extrémité est effectivement du réseau. Le réseau hydroélectrique est quand même en place, s'est développé depuis les années quarante, ce n'est pas d'hier. Alors, le gaz naturel s'en va dans la même direction. Le souci d'avoir, pour les consommateurs de demain, tout l'aspect, dans cinq ans, dans 10 ans, d'avoir ce que ça prend pour bien desservir les demandes de la clientèle.
Mme Dionne-Marsolais: Ça coûte combien du mille, un pipeline de distribution, un réseau de distribution?
M. Gougeon (André): Écoutez, je vais vous dire le prix que je me souviens, là, on parle... je pense que c'était...
Mme Dionne-Marsolais: En kilomètre.
M. Gougeon (André): Ah! Oui, je vais vous le dire en kilomètre: 1,4 million de dollars par kilomètre, là, si je ne me trompe pas. Alors, ça, c'est, en 1997, les prix pour le pipeline de PNGTS, mais c'était une ligne de... la grosseur, là, c'était 24 po, là.
Mme Dionne-Marsolais: 24 po.
M. Gougeon (André): 610 mm, là.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. O.K. Et la dernière question, parce qu'il me reste très peu de temps, peut-être: Est-ce que vous avez une idée de comment on pourrait favoriser l'exploration gazière sur le territoire du Québec, ce qui nous aiderait peut-être à assurer nos approvisionnements?
M. Mongeon (Serge): Oui. C'est parce que ce n'est pas vraiment dans notre ligne, de regarder pour l'exploration.
Mme Dionne-Marsolais: Non?
M. Mongeon (Serge): C'est plus au distributeur gazier ou à l'explorateur lui-même, là, de... celui qui pourra faire une recherche puis en trouver, du gaz naturel, il pourra en vendre sur le marché puis ça va être avantageux pour lui. Mais, pour nous, comme association, ce n'est pas vraiment notre ligne de conduite.
Mme Dionne-Marsolais: Mais vous n'avez jamais soulevé cette question-là?
Une voix: On n'a pas eu à soulever cette question-là.
Mme Dionne-Marsolais: Je vous remercie.
M. Mongeon (Serge): Merci beaucoup.
Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Rosemont. Mme Gamache, M. Mongeon, M. Gougeon, l'Association québécoise du gaz naturel, merci pour la présentation de votre mémoire.
Des voix: Merci.
n(15 h 10)nLe Président (M. Paquin): J'invite maintenant les gens de l'Action pour la protection des forêts du Québec à prendre place pour présenter leur mémoire.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Paquin): Madame, monsieur de l'Action pour la protection des forêts du Québec, bienvenue à l'Assemblée nationale. Permettez-moi, avant de débuter, de vous rappeler un peu les règles de fonctionnement: vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Par la suite, on poursuit avec 20 minutes d'échange avec vous et le ministre et les députés ministériels, et on termine avec un autre 20 minutes du côté de l'opposition officielle.
Donc, si vous voulez bien vous présenter et présenter ? M. Béland, je crois ? la personne qui vous accompagne, et on va écouter votre mémoire avec beaucoup d'attention.
Action pour la protection
des forêts du Québec (APFQ)
M. Béland (Sébastien): Donc, la personne qui m'accompagne, c'est Marie-Élaine Rouleau, donc, qui agit en tant que secrétaire de l'Action pour la protection des forêts du Québec. Et mon nom est Sébastien Béland, porte-parole de l'organisme.
Le Président (M. Paquin): D'accord. Vous pouvez présenter votre mémoire.
M. Béland (Sébastien): Donc, je vais commencer par une courte présentation de notre organisme.
Le Président (M. Paquin): D'accord.
M. Béland (Sébastien): Donc, l'Action pour la protection des forêts du Québec est un regroupement de citoyens et de citoyennes et d'organismes qui promeut une gestion responsable et une utilisation diversifiée des forêts québécoises. L'APFQ tente de sensibiliser la population ainsi que les acteurs politiques et socioéconomiques à l'importance de miser sur le développement durable ? dans le vrai sens du terme et non comme dans le sens que le gouvernement Charest l'entend ? en ce qui concerne la gestion forestière et à la problématique de la déforestation excessive qui a présentement cours au Québec.
En plus d'appuyer la création d'un vaste réseau d'aires protégées au Québec, l'APFQ soutient la protection de l'environnement de façon générale. L'APFQ compte parmi ses objectifs la diversification et la viabilité économiques des différentes régions du Québec. On ne représente donc pas l'intérêt d'une quelconque industrie, mais celui de la population québécoise dans son ensemble. L'APFQ fut formée officiellement le 22 octobre 2002, à Gatineau, en Outaouais, suite au triste constat que nos forêts étaient en péril.
L'intérêt que l'APFQ porte à la protection des rivières est indissociable de ses intérêts envers les forêts et l'environnement en général, puisque les écosystèmes sont interreliés et en relation directe avec l'être humain. Les forêts, ne l'oublions pas, traversent nos rivières. Par conséquent, même si l'objet de la présente consultation générale ne relève pas directement des compétences de l'APFQ, cette dernière considère néanmoins primordial de faire valoir son point de vue citoyen. En ce sens, le présent mémoire doit être perçu par les membres de la Commission de l'économie et du travail non pas comme un document scientifique, mais bien comme un plaidoyer pour une vision tournée vers l'avenir et la qualité des générations futures. Donc, je prends pour acquis que les membres de la commission ont tous et toutes lu notre mémoire dans son intégralité. Donc, je ne vais pas vous en faire la lecture, mais peut-être un simple retour, un simple résumé.
Donc, le point central de notre mémoire est le suivant, c'est qu'on désire l'arrêt immédiat de toute la construction de barrages hydroélectriques, que ce soient de grands projets ou de petits projets privés. Donc, ce point central là tourne autour de deux axes: dans un premier temps, la diminution de la consommation globale de l'énergie au Québec et, dans un deuxième temps, la mise en place d'un plan national d'efficacité énergétique.
Pour y arriver, nous proposons plusieurs points: le gel de la quantité d'électricité exportée, c'est-à-dire que ce qu'on désire avoir, c'est que le niveau d'électricité exporté, à l'heure actuelle, devienne le plafond des niveaux d'exportation pour les 10 prochaines années. Nous demandons un gel des tarifs résidentiels, car, à la lecture que, nous, on fait ? puis la question, elle a été abordée souvent à l'intérieur de la commission ? c'est que la hausse des tarifs résidentiels ne réduit en rien la consommation d'énergie. Au contraire, on a remarqué que c'est surtout les plus démunis de la société qui écopent lorsqu'il y a des hausses de frais de scolarité... Pardon?
Mme Rouleau (Marie-Élaine): ...pas de scolarité...
M. Béland (Sébastien): Oui. ...Et puis... Est-ce que j'ai dit scolarité?
Mme Rouleau (Marie-Élaine): Oui.
M. Béland (Sébastien): Ah! Il faut dire que les étudiants, aujourd'hui, sont en grève, hein, je fais une petite parenthèse pour les appuyer. C'est pour ça que je me suis trompé avec le gel des tarifs. Donc, on parle des gels des tarifs résidentiels électriques, évidemment. Donc, c'est souvent les plus démunis qui écopent lorsqu'il y a des hausses de ces tarifs, puis, pour ce point-là, moi, je vous référerais à l'excellent mémoire d'Option Consommateurs qui a développé davantage sur cette question-là.
Donc, nous demandons aussi l'abolition des tarifs préférentiels accordés aux différentes industries. Nous trouvons injuste que la société québécoise soit appelée à faire d'énormes sacrifices en matière d'efficacité énergétique et de diminution de consommation d'énergie, puis qu'elle subisse depuis quelques années... tantôt, M. Corbeil parlait de hausse de quoi, de 5,8 % en huit ans, je crois, là, des hausses des tarifs résidentiels? Donc, on trouve ça aberrant que la population soit appelée à faire de tels sacrifices, alors que les industries profitent de tarifs préférentiels qui nous apparaissent carrément délirants donc dans la situation actuelle.
Donc, nous demandons également la nationalisation des installations hydroélectriques privées. En 1962, il y a eu une élection référendaire, donc un vote populaire, où la population québécoise s'est penchée sur la question de la propriété publique ou privée de l'hydroélectricité. Et, depuis ce temps, aucune autre consultation publique n'est venue défaire celle-ci, ce qui fait en sorte que plusieurs entorses ont été faites au désir collectif de garder le caractère public à l'hydroélectricité.
Donc, pour arriver également à la baisse de la consommation d'énergie et au plan national d'efficacité énergétique, nous proposons également le développement des filières vertes, c'est-à-dire des énergies solaire et éolienne. Nous demandons également la reconnaissance du caractère patrimonial de l'ensemble des rivières du Québec, chose qui est dans le discours politique depuis plusieurs années, mais force est d'admettre qu'on n'a toujours pas de réseau bien établi de rivières patrimoniales, au Québec, à l'heure actuelle.
Par ailleurs, nous déplorons le manque de considération de l'actuel gouvernement envers la population. M. Charest, lors d'un caucus... non, pas d'un caucus, mais lors du congrès de son parti, en novembre dernier, a annoncé clairement la décision de son gouvernement de relancer les grands projets hydroélectriques. Ce qui nous apparaît étrange, c'est qu'ensuite fut déclenchée l'actuelle consultation publique sur l'avenir énergétique, donc ce qui nous fait croire que les dés sont pipés d'avance, que le gouvernement sait déjà où il s'en va, et ce, avant même de consulter la population du Québec.
Puis ce n'est pas la première fois, hein, que le gouvernement actuel fait ce genre de chose là. Quand il est arrivé au pouvoir, le gouvernement Charest a lancé sa fameuse réingénierie de l'État, mais la population, après seulement quelques mois au pouvoir, voulait déjà destituer le gouvernement Charest. Il y a même eu une pétition de plusieurs centaines de milliers de noms qui a été signée à cet effet. Si vous ne vous rappelez pas de la pétition, ça s'appelait: la destitution de Patapouf. Et puis, même les ingénieurs n'en voulaient pas, de la réingénierie de l'État. Donc, le gouvernement Charest a décidé de changer ça de nom. Pour essayer de duper un peu la population, on a appelé ça la modernisation de l'État, mais ça n'a pas pogné, ça non plus. Donc, qu'est-ce qu'ils ont fait, le gouvernement? Donc, on a décidé d'aller en consultation avec une espèce de forum des générations. Là non plus, la population n'a pas embarqué, les faux consensus qui en sont sortis n'ont pas permis de justifier le démantèlement total de l'État québécois.
Donc, devant toute cette tentative de tourner à droite, le gouvernement est désespéré, a décidé de changer son fusil d'épaule et d'appeler la réingénierie la modernisation, ou tout le tralala, d'appeler ça le développement durable, terme qu'il a récupéré politiquement. On est très loin du développement viable comme la commission Brundtland l'avait si bien défini.
n(15 h 20)n Donc, dans la même veine, l'APFQ s'inquiète grandement du déficit démocratique qui entoure, à l'heure actuelle, les décisions relatives à la gestion des rivières au Québec. Le Code civil est clair à cet effet: l'eau, au Québec, les cours d'eau, les plans d'eau sont un bien public et collectif, c'est donc une propriété collective, un patrimoine inestimable, que des référendums locaux ne peuvent en aucun cas venir saborder un concept qui attribue à l'ensemble de la population une propriété sur ses richesses naturelles. Donc, aucun gouvernement n'a l'autorité ni la légitimité de privatiser nos rivières, de les saccager et de miner l'héritage qu'on pourrait laisser aux générations futures.
Donc, pour revenir aux référendums locaux, plus souvent qu'autrement, on se rend compte que, pour avoir l'aval soit du BAPE ou du gouvernement, un projet n'a besoin que d'une espèce d'accueil généralement favorable de la population locale pour aller de l'avant. Or, dans un contexte d'exode rural, dans un contexte où la majorité de la population vit en région urbaine, on peut se poser certaines questions quant à la légalité de tels référendums ou de telles façons de procéder, c'est-à-dire de s'en remettre uniquement à la question de l'acceptation générale globale, qui est un concept un peu flou mais qui permet à des projets d'aller de l'avant avec une seule apparence d'accueil favorable au niveau régional.
Il y a même des députés qui ont déjà dit publiquement que les gens de l'extérieur, entre guillemets, en parlant des gens de Montréal, ou de l'Outaouais, ou de la région de Trois-Rivières, ou de Québec, ne devaient pas leur dire comment faire en région pour gérer leurs ressources naturelles. Or, ces richesses naturelles là appartiennent à l'ensemble de la population québécoise, et c'est vrai également pour les rivières. Le cas de la rivière Trois-Pistoles est éloquent à cet effet, cas où on a pu voir la démocratie bafouée au plus haut point, un référendum qui aurait dû carrément être annulé par le gouvernement du Québec, ce qui n'a pas été fait.
Donc, on se rend compte également qu'au niveau local un des arguments qui reviennent souvent du côté gouvernemental pour approuver certains projets se base sur l'acceptation des élus régionaux. Or, je vais prendre un cas que je connais, c'est-à-dire la rivière Gatineau qui passe dans ma ville, où la compagnie MacLaren a offert 3 millions de dollars à la MRC Vallée-de-la-Gatineau si la MRC acceptait la construction d'un petit barrage privé sur sa rivière. Donc, devant une telle façon de faire, comment s'étonner que les préfets, les maires et les élus locaux se laissent acheter de cette façon soit par le gouvernement ou, dans ce cas-ci, par les compagnies privées?
Donc, on s'interroge également sur la viabilité économique de la relance de grands barrages. En 2001, le gouvernement du Québec relançait des grands projets, entre autres sur la rivière Péribonka, et on avait ici un article, dans le journal Le Devoir, qui est paru le 27 septembre 2001, où on regarde les coûts pour la construction d'un barrage. On parle de 1 milliard de dollars. C'est étrange, parce que, récemment ? puis ça, c'est 1 milliard de dollars qui devraient s'échelonner de 2004 jusqu'à environ 2009, 2010 ? on entend partout les élus nous répéter qu'on manque d'argent au gouvernement, qu'on a des budgets serrés, et puis tout ça, et puis, d'un autre côté, on se lance dans la construction d'un barrage qui va coûter 1 milliard puis qui va produire 450 MW sur la rivière Péribonka, alors qu'il existe d'autres filières moins coûteuses et tout aussi génératrices d'énergie et plus viables au niveau environnemental.
Donc, sur la question du budget, ce matin, j'avais toute une surprise quand j'ai vu que notre ministre Audet décidait de ne plus faire la lutte au déséquilibre fiscal en endossant ? hein, si on peut dire ça comme ça ? la théorie de Ralph Goodale comme quoi le déséquilibre fiscal était une pure invention. Bien, on se retrouve ici avec la même situation que Richard Desjardins quand il avait tourné le film L'Erreur boréale, et la ligne ministérielle, à l'époque, du Parti québécois était de dire: Ah! Bien, c'est de la pure machination, ça a été fabriqué, c'est des images envoyées en l'air. Bon. Bien, Ralph Goodale joue un peu le même jeu, c'est-à-dire on nie le problème, puis Michel Audet, notre ministre, notre nouveau ministre des Finances, endosse cette théorie et change le fusil d'épaule du gouvernement. Il y avait pourtant un consensus à ce moment-là.
Donc, c'est 50 millions par semaine qu'on perd avec le déséquilibre fiscal, puis là Jean Charest nous dit: On va construire des barrages pour faire de l'argent parce qu'on a besoin d'argent, parce que nos coffres sont serrés. Bien, il y a quelque chose que je ne comprends pas, là. Il va falloir que... Peut-être que vous pourriez m'expliquer.
Le Président (M. Paquin): M. Béland.
M. Béland (Sébastien): Oui.
Le Président (M. Paquin): Si vous me permettez, j'apprécierais beaucoup que vous vous teniez au sujet de l'énergie. Vous avez fait la demande pour présenter un mémoire sur l'énergie, et on est en commission parlementaire, ici, à l'économie et au travail, et on parle d'énergie. J'apprécierais beaucoup que vous ne sortiez pas de ce sujet-là. Je vous ai laissé aller un bout de temps, là, mais le principe, c'est de parler du sujet qui est l'énergie.
M. Béland (Sébastien): O.K. Bien, excusez-moi, M. le Président, mais il m'apparaît important, dans un contexte où on s'apprête à saccager des rivières, nos dernières grandes rivières au Québec, et que l'argument du gouvernement, c'est: Il faut faire plus d'argent au même titre que l'Alberta, parce qu'on manque d'argent, supposément, bien, dans un contexte de déséquilibre fiscal où on perd environ 50 millions de dollars par semaine, il m'apparaît important d'en parler, parce que, si on allait chercher cet argent-là, peut-être qu'on n'aurait pas besoin de saccager nos rivières. Donc, ça m'apparaît primordial. Donc, je vais terminer là-dessus ma présentation puis je vais laisser les membres de la commission me poser des questions ici, là.
Le Président (M. Paquin): Parfait, merci. On poursuit avec une période d'échanges. M. le ministre.
M. Corbeil: Juste pour ma curiosité, M. Béland, est-ce que vous pourriez m'expliquer, en ce qui concerne votre association, mouvement, regroupement pour l'Action pour la protection des forêts du Québec, d'où vous proviennent vos sources de financement?
M. Béland (Sébastien): De nos membres.
M. Corbeil: Alors, strictement la cotisation de vos membres vous permet de faire fonctionner votre secrétariat, vos... C'est ça?
M. Béland (Sébastien): Oui.
M. Corbeil: On parle d'un budget annuel de combien?
M. Béland (Sébastien): 500 $, 600 $.
M. Corbeil: O.K.
M. Béland (Sébastien): Est-ce que ça répond à votre question?
M. Corbeil: Bien, O.K. Non, mais...
M. Béland (Sébastien): On n'est pas aussi riches que le Gaz Métropolitain, mais on finit par se débrouiller avec ça.
M. Corbeil: O.K. C'est parce que vous avez, en tout cas, répété un certain nombre de clichés. D'abord, je pourrais peut-être corriger une perception ou affirmation que vous avez faite. Quand vous avez parlé de l'abolition des tarifs préférentiels et que vous avez associé les hausses de tarifs à une catégorie d'utilisateurs, je tiendrais à rappeler que les hausses tarifaires qui ont été autorisées par la Régie de l'énergie sont les mêmes pour toutes les catégories de tarifs, il n'y a pas de privilège là-dedans.
M. Béland (Sébastien): Mais, si je comprends bien, les tarifs préférentiels demeurent pareil, c'est-à-dire...
M. Corbeil: Ils ont monté...
M. Béland (Sébastien): ...qu'on se retrouve avec la même marge entre les industries...
M. Corbeil: ...ils ont monté de 3 %, plus 1,4 %, plus 1,2 %, comme les autres.
M. Béland (Sébastien): Mais on se retrouve quand même avec un tarif préférentiel. Les industries continuent à payer moins cher l'électricité que les citoyens, puis ça, c'est inacceptable.
M. Corbeil: J'ai parlé de toutes les catégories de tarifs: les tarifs grande puissance, les tarifs moyenne puissance, les tarifs résidentiels, les tarifs de toutes catégories.
n(15 h 30)n Quand vous parlez des grandes rivières, selon le ministère de l'Environnement, au sud du 50e parallèle, on serait en présence de 130 000 cours d'eau. On parle ici d'une définition qui est très large où on parle d'écoulement continu de l'eau des fleuves, des rivières et des ruisseaux. Puis, si on est un petit peu plus restrictif, on peut ici dire que, de ces 130 000 cours d'eau, il y a 4 500 rivières. Ça, c'est un énoncé qui est dans la politique de l'eau du ministère de l'Environnement. Il y en a 3 965 qui ont un nom qui a été attribué par la Commission de toponymie du Québec. Il y en a 525 qui constituent une rivière à potentiel hydroélectrique répertorié, selon la politique énergétique du ministère des Ressources naturelles, de 1996. Savez-vous comment qu'il y en a d'harnachées sur 4 500, 3 965 qui ont un nom et 525 qui ont un potentiel hydroélectrique répertorié? Il y en a 65 qui sont harnachées.
M. Béland (Sébastien): C'est beaucoup trop, parce que c'est les plus belles puis les plus potentielles pour le développement écotouristique.
M. Corbeil: Alors, devant votre position, qui a l'air on ne peut plus catégorique, et devant le fait que vous déniez la valeur de la démarche, je ne poserai pas de question supplémentaire, M. le Président.
Le Président (M. Paquin): Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté des députés ministériels?
M. Béland (Sébastien): Est-ce que je peux intervenir?
Le Président (M. Paquin): Pardon?
M. Béland (Sébastien): Est-ce que je peux intervenir?
Le Président (M. Paquin): Je ne vous entends pas.
M. Béland (Sébastien): Est-ce que je peux intervenir?
Le Président (M. Paquin): Bien, vous pouvez intervenir, si vous voulez, certain.
M. Béland (Sébastien): O.K. C'est intéressant de voir qu'il y aurait 130 000 cours d'eau, qu'on compte les ruisseaux comme des cours d'eau. Notre spécialité... Oui. Puis ça, c'est dans le sud du Québec, en plus. Donc, notre spécialité, c'est les forêts. On n'est pas venus ici en tant que spécialistes des rivières, mais on vient représenter un point de vue citoyen. Donc, ce qu'on vient dire ici, c'est qu'on n'en veut pas, de barrages. On n'en veut pas plus, il y en a suffisamment.
Si vous lisez notre mémoire... j'imagine que vous l'avez lu, puis là vous essayez de jouer sur ma crédibilité, mais ça se joue à deux, la crédibilité, M. le ministre. Je vous rappellerai qu'il n'y a pas si longtemps, devant la face du monde, donc au Congrès forestier mondial, vous êtes venu dire, à la face du monde entier, qu'il ne se faisait plus de coupes à blanc au Québec, situation qui avait soulevé beaucoup de boucliers. Même l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec avait émis un communiqué de presse, le lendemain, pour démentir vos propos. Selon Statistique Canada, il se fait 85 % des coupes à blanc qui sont... les coupes qui se font au Québec sont des coupes à blanc, puis vous avez nié ça pendant des années. Donc, si vous essayez de jouer sur la crédibilité de notre organisme en disant: Bien, vous êtes un petit organisme avec quelques centaines de dollars seulement de budget, vous ne connaissez rien. Vous pouvez jouer cette carte-là.
Je ne suis pas venu ici, moi, pour me pavaner et épater la galerie. Je suis venu dire ce que la population pense. Vous avez entendu des groupes, vous avez entendu des gens de l'industrie. Puis j'ai écouté tantôt, puis je trouvais que vous avez été pas mal plus sympathique envers l'industrie du gaz que vous l'êtes envers les environnementalistes, mais ce n'est pas quelque chose qui me surprend beaucoup.
Mais, sur les rivières dont vous avez parlé qui sont harnachées, moi, je vais vous dire, je suis un canoteur puis j'en fais beaucoup, de rivières, puis, dans toutes les rivières que vous avez nommées, il y a des rivières qui sont considérées puis elles ne mesurent même pas 10 km, qui ne seraient pas intéressantes de toute façon à être harnachées. Mais, pour les canoteurs... Je vais vous donner un exemple. Moi, je parcours des grandes distances. Je pars, l'été prochain, pour une longue période d'environ deux mois en canot et puis je parcours plusieurs grandes rivières. Et puis je peux vous dire que, quand on planifie des trajets de cette nature-là, il est difficile de trouver des rivières intéressantes. La Côte-Nord est particulièrement affectée, et ça vient de plus en plus difficile de faire des activités de plein air.
Et, dans ce sens-là, on trouve que le problème, c'est que le gouvernement est en train de miner la possibilité de diversification économique des régions. On s'en va vers un gouffre. Vous connaissez la question forestière, pour avoir été ministre délégué aux Forêts pendant un bout de temps. Vous avez pris... J'imagine que vous allez agir, à un moment donné, avec le rapport de la commission Coulombe. On tient actuellement les régions du Québec dans une dictature économique, et puis je pense qu'il est temps que les gens en sortent et puis qu'on diversifie les économies des régions. Il est temps qu'on arrête de dire aux gens... qu'on arrête de leur faire peur en leur disant: Le seul moyen que vous avez de vous développer, en région, c'est de détruire la nature, c'est d'exploiter les richesses naturelles. Il existe d'autres modes de développement économique en région. Dans la région de l'Outaouais, il y a beaucoup d'initiatives en ce sens, mais c'est souvent bloqué parce que les gouvernements ont une vision à court terme, électoraliste, qui empêche toute possibilité de développer davantage d'autres créneaux industriels autres que les coupes à blanc et puis le harnachement des rivières.
Donc, ce qu'on demande tout simplement, c'est qu'une politique, une véritable politique énergétique fasse consensus au Québec et tienne en compte les différents points de vue des citoyens, et puis ça, c'est un point de vue qui se vaut autant que le point de vue d'un autre citoyen. Vous avez le choix d'en prendre ou pas en compte. On n'est pas dupes, on sait que le premier ministre Charest a déjà pris la décision, avant même la consultation publique, de relancer les gros barrages, mais il doit s'attendre à une levée de boucliers. Puis les écologistes, on va être là, on va être présents sur la scène publique puis on va se faire entendre très fort.
Puis je ne représente pas seulement, hein, les 200 quelques membres de notre organisme ainsi que les dizaines d'organismes qui sont membres, je représente aussi un courant de pensée qui prend de plus en plus d'expansion dans la société, et puis on vous demande d'en tenir compte dans l'élaboration de la politique énergétique.
Le Président (M. Paquin): D'accord. M. le député de René-Lévesque, vous aviez des questions, je crois?
M. Dufour: Oui.
Mme Dionne-Marsolais: Je veux juste...
Le Président (M. Paquin): Madame, oui, allez-y.
Mme Dionne-Marsolais: Bonjour. Je vais passer la parole à mon collègue ou je reviendrai après. Mais je remarque que finalement, vous, par rapport aux exportations d'électricité, vous n'êtes pas contre. Vous dites: On les gèle, on arrête à peu près à ce qu'on a fait au niveau des quantités exportées à ce jour, puis on gèle ça pour 10 ans. Mais vous n'êtes pas contre.
M. Béland (Sébastien): Dans la mesure où il y aurait supposément une crise appréhendée de l'énergie, il faudrait peut-être effectivement se poser la question si crise il y a, hein, parce que ça n'a pas été prouvé encore. Et je pense qu'avant de répondre à cette question-là il faudrait se faire une réflexion: Est-ce qu'il y a une crise ou il n'y en a pas? Donc, si on demande... Le gel: Pourquoi on propose un gel? C'est spécifiquement pour s'opposer à la volonté de Jean Charest de construire des nouveaux barrages uniquement pour exporter.
La réflexion pour l'exportation, c'est qu'à un moment donné, dans son document pour préparer la présente commission, l'ancien ministre des Ressources naturelles, Sam Hamad, avait déclaré, à un moment donné, qu'on risquait, au Québec, de se retrouver dépendant des importations. Donc, si on est à devenir dépendants des importations, pourquoi qu'on exporterait? Donc, il y a peut-être une balance à faire peut-être au niveau des exportations, mais je pense que c'est précipité pour l'instant. Ce qu'on prétend, nous, c'est qu'il ne faut pas construire des nouveaux barrages. Premièrement, on s'y oppose puis on s'y oppose encore plus si c'est dans un contexte d'exportation uniquement.
Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Alors, on comprend que construire pour des exportations, ce n'est pas une bonne voie. On maintient le statu quo, en fonction de votre recommandation. Je vais passer la parole à mon collègue de Baie-Comeau.
Le Président (M. Paquin): M. le député de René-Lévesque, vous avez la parole.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, M. Béland, Mme Rouleau. Est-ce que vous me connaissez, M. Béland?
M. Béland (Sébastien): Oui.
M. Dufour: Marjolain Dufour, député, comté René-Lévesque, sur la Côte-Nord?
M. Béland (Sébastien): Oui.
M. Dufour: C'est parce que vous avez dit un élément, tout à l'heure, qu'il y avait certains députés qui disaient qu'il y avait des... ce n'est pas des gens de l'extérieur qui vont venir dicter à la région quoi faire?
M. Béland (Sébastien): Oui. Je sais que vous êtes un de ceux-là.
M. Dufour: Oui, effectivement, puis je le redis encore, parce que...
M. Béland (Sébastien): Bon. Bien, vous avez le droit, mais c'est des propos...
M. Dufour: ...je le redis, au nom de la collectivité chez nous.
M. Béland (Sébastien): Ah bon!
M. Dufour: Et je vais vous expliquer pourquoi, O.K.? L'île René-Levasseur, ça vous dit quelque chose?
M. Béland (Sébastien): Oui.
M. Dufour: Bon! Alors, j'ai dit ça dans le cadre de l'île René-Levasseur, parce que, chez nous, on a ce qu'on appelle un conseil d'administration pour la réserve de la biosphère des monts Groulx, incluant l'île René-Levasseur. Alors, on a l'ensemble des acteurs socioéconomiques, autant la mine, forêts, paysage, qui sont sur le conseil d'administration. Alors, nous, ce qu'on dit, par rapport à ce conseil d'administration là, c'est qu'on peut faire certaines choses sur la Côte-Nord, mais pas n'importe comment et de façon de développement durable. O.K.? C'est ce que j'ai dit. Alors, on est capables, nous, de se prendre en main, comme région, par rapport à notre développement régional. Ça, c'est le premier morceau.
n(15 h 40)n Le deuxième morceau, c'est concernant votre recommandation 3 ? vous avez dû suivre un peu la commission parlementaire depuis son début, j'ose croire en tout cas: «Que le gouvernement abolisse les tarifs d'électricité préférentiels accordés aux industries énergivores ainsi que les déductions fiscales auxquelles elles ont présentement droit.» Je vais vous donner l'exemple de la modernisation d'Alcoa à Baie-Comeau. La modernisation d'Alcoa à Baie-Comeau fait en sorte que, un, on règle les problèmes de gaz à effet de serre parce que c'est la vieille méthode Söderberg et on s'en va sur la méthode Pechiney. Alors, dans un premier temps, on règle ce morceau-là. On règle aussi le fait qu'on consolide 1 500 emplois puis on le multiplie par trois au niveau des emplois indirects.
Alors, ce que je veux vous dire, c'est que la grande industrie est venue nous voir, et il est clair que, s'il n'y a pas de tarif préférentiel, ce qu'on appelle le tarif L, le tarif... la loi, puis elle suit les hausses tarifaires bien entendu... c'est que, s'ils n'ont pas ces tarifs-là, ils s'en aillent à l'extérieur du Québec. De là vient le fait que, dans les années cinquante, il y avait des contrats qu'on appelle cachés parce que tu ne voyais pas la teneur des contrats pour qu'on soit capable de garder cette industrie-là ici, pour ne pas qu'elle s'en aille ailleurs. Alors, dans une région comme la nôtre, je vous parle de Baie-Comeau ou la Côte-Nord, parce que je la connais, si je n'ai pas ça, je perds comme 5 000 emplois.
Vous répondez quoi, au niveau du remplacement de ces emplois-là? Je l'ai dit à une personne, hier, à ma connaissance. Il est clair que, quand j'ai posé la question à un groupe, ils m'ont dit: Bien, on fera une corvée habitation. Mais il est clair que, si je perds 5 000 emplois à Baie-Comeau, je peux vous dire que ça fait mal à l'ensemble de la collectivité, et il n'y aura pas grand corvée habitation là, là. Alors, c'est important que j'aie votre point de vue là-dessus, parce que la Côte-Nord, avec la grande industrie, parce que ça a été l'industrialisation, alors il est important que ces industries-là restent, par rapport à l'occupation du territoire.
Et je prends en remarque ce qui avait été dit, à un moment donné, à La Part des choses. Il y avait un M. Landry ? qui n'est pas parent avec Bernard Landry, soit dit en passant ? qui gère des portefeuilles pour une compagnie à Montréal, et il était avec le maire Ivo Di Piazza à La Part des choses, et, lui, il répond que, si les régions ont besoin de subventions, on a juste à fermer, mettre les cadenas après la porte puis déménager sur l'île de Montréal. Alors, si on ferme toutes les régions au Québec, l'île ne sera pas assez grande pour nous recevoir. Il faut se comprendre aussi, là. Alors, quelle est votre vision là-dessus?
Le Président (M. Paquin): Oui, M. Béland.
M. Béland (Sébastien): Bien, je vais parler, dans un premier temps, de la question... Oui?
Le Président (M. Paquin): Allez-y.
M. Béland (Sébastien): Je vais parler, dans un premier temps, de la question du déficit démocratique parce qu'elle m'apparaît primordiale. Puis je vais prendre un cas de la Côte-Nord, puisque vous m'avez amené sur la Côte-Nord.
Donc, récemment, il y a eu un BAPE, donc un Bureau d'audiences publiques, sur un projet d'aménagement hydroélectrique privé sur la rivière Magpie, sur la Côte-Nord ? donc, il y en a qui appellent ça, la rivière «Magpie», mais, après vérification, j'ai compris que ça s'appelait Magpie ? donc, où on dit tout simplement, dans la lettre que... le président du BAPE dit tout simplement, la lettre de M. Mulcair, bon, écoutez: Le projet a l'autorisation du BAPE puis il bénéficie d'un accueil généralement favorable, régional. Or, il y a plusieurs groupes, au niveau national, même international parce qu'il y a même des Américains qui sont venus dire qu'ils voyaient un intérêt à protéger cette rivière-là, donc il y a même un intérêt international à protéger la rivière. Donc, en donnant raison aux écologistes, aux amateurs de plein air et aux groupes qui défendaient la protection de la rivière, le Bureau d'audiences publiques a malgré tout donné son aval au projet, en soulignant l'importance de protéger la rivière. Et puis, tout le long du document, on peut voir que c'est l'argumentaire des promoteurs qui prime. On voit même, de temps en temps, l'argument revenir en copié-collé dans les recommandations du BAPE.
Donc, première chose d'inquiétante, au niveau de la façon de fonctionner du BAPE. Parce que, bon, pour des projets hydroélectriques de cette envergure-là, il y a souvent des bureaux d'audiences publiques puis, souvent, bien, les promoteurs vont dire: Bien, on va se soumettre au bureau mais... Sauf que le BAPE, il y a plusieurs problèmes avec le BAPE. Dans un premier temps, le gouvernement vient de nommer un certain William Cosgrove, un illustre fervent des privatisations, tout sauf un défenseur de l'environnement, donc c'est inquiétant. C'est inquiétant pour des groupes comme le nôtre.
Donc, il faut revenir au projet de la rivière Magpie. Toutes les interrogations écologiques qu'on pouvait avoir, c'est le point de vue des promoteurs qui revient, même qu'on s'en remet aux promoteurs pour faire des études biologiques et environnementales. Il y a plusieurs réserves qui ont été émises, et puis on se retrouve avec un barrage, sur une rivière, qui ne reçoit pas l'aval de la population, sauf peut-être une apparence, là, comme pour dire, pour reprendre les mots, là, d'André Harvey, qu'il se ramasse avec un accueil généralement favorable. Concept un peu flou, là, c'est-à-dire que, bon, en général, les gens de la Côte-Nord sont favorables au projet, puis... sauf que juste cette apparence-là est suffisante pour que le projet aille de l'avant.
Donc, on vient de saccager une des 10 plus belles rivières mondiales simplement parce que quelques promoteurs ont su convaincre des gens puis leur faire peur en disant: Bien, si on ne construit pas de barrage, ça ne créera pas d'emplois, vous allez être sur le chômage. Puis là vous avez fait allusion à l'île René-Levasseur. On sait la campagne que Kruger fait sur la Côte-Nord, à l'heure actuelle: Alors, on va fermer toutes les usines, là, de la Côte-Nord, là, on va fermer quatre usines, puis là c'est le désastre si on protège un peu notre environnement.
Donc, nous, ce qui nous inquiète, c'est le déficit démocratique. Comme je disais tantôt, les richesses naturelles du Québec appartiennent à l'ensemble de la population, et puis on ne peut pas décider de harnacher une rivière, de la saccager à tout jamais. Parce que c'est ce qui arrive une fois qu'un barrage est construit. On va noyer des hectares et des hectares de forêt, on va assécher la rivière, on va polluer l'eau, on va détruire les écosystèmes riverains, on va réchauffer la température de l'eau et on va empêcher le cycle naturel de l'eau. Donc, ça a des conséquences environnementales considérables. Et puis, pour les générations futures, il faut en tenir compte.
Donc, ce n'est pas pour rien que le titre de notre mémoire s'appelle Pensons à nos enfants. Donc, devant cette façon de procéder là, nous, on dit qu'on est devant un déficit démocratique important, parce qu'étant donné que les rivières appartiennent à la majorité... ah! bien, pas à la majorité, mais à l'ensemble des Québécois, là c'est juste une minorité qui est appelée à se prononcer sur l'avenir d'une ou deux rivières. Par exemple, dans le cas de la rivière Magpie, les groupes nationaux ont carrément été écartés du débat, dans le rapport.
Et puis, quand on regarde surtout les projets de petits barrages privés, vous avez parlé d'emplois tantôt, une fois le barrage construit: deux emplois permanents, des retombées économiques minimes, presque invisibles pour la région. Est-ce que ça vaut la peine de détruire des rivières pour des petits barrages privés comme ça qui ne rapportent pratiquement rien à la population locale, qui ne créent pratiquement pas d'emplois?
Donc, au niveau du déficit démocratique, ce qui nous fait peur également, c'est la décentralisation des pouvoirs vers les régions puis la déconcentration. Donc, on est très conscients qu'il y a une volonté, au Québec, de régionaliser les décisions. On n'est pas contre, sauf qu'au niveau des richesses naturelles, entre autres au niveau des forêts et des rivières, on s'y oppose vertement. Parce que les forêts et les rivières appartiennent à l'ensemble de la population, et, s'il y a des secteurs qui sont touchés et qu'il y a des décisions à prendre, le consensus doit être national et non juste local. Je suis d'accord que les gens de la Côte-Nord ont leur mot à dire, mais les gens de Montréal au même titre et les gens de Gatineau au même titre. Moi, les rivières de la Côte-Nord, elles me tiennent à coeur, je les aime, je les descends en canot, je vais dépenser de l'argent sur la Côte-Nord à chaque année. J'ai mon mot à dire aussi. Puis, quand même je n'irais pas, j'ai quand même mon mot à dire, elles m'appartiennent, en tant que citoyen aussi, ces rivières-là.
Donc, pour les tarifs préférentiels, je suis d'accord avec vous qu'on est pris avec un sacré problème, au Québec, on est pris encore à l'époque du duplessisme où on est prêt à vendre ou presque à donner nos richesses naturelles pour des pinottes. À l'époque de Duplessis, hein, on vendait le fer 0,01 $ la tonne, le minerai de fer. Aujourd'hui, c'est nos arbres qui sont donnés. Tous les arbres de 9 cm et moins de diamètre sont donnés gratuitement aux compagnies forestières. Les arbres plus gros, bien on les donne pratiquement avec une moyenne, au mètre cube, d'à peu près 11 $ le mètre cube, trois fois moins qu'aux États-Unis puis à peu près six fois moins qu'en Europe. C'est une vraie blague. L'eau: les compagnies qui viennent embouteiller ici ne paient pas un sous.
Donc, au niveau de l'énergie, on se retrouve avec la même problématique où des compagnies viennent carrément saccager nos rivières, puis elles nous tiennent dans des dictatures économiques où elles menacent de tout fermer si jamais on décide d'être plus égal, d'avoir une équité sociale...
Le Président (M. Paquin): M. Béland, je vais vous inviter à conclure, parce que le temps file.
M. Béland (Sébastien): O.K. Bien, je suis d'accord avec vous. Donc, ce qu'on dit, c'est que, pour les tarifs préférentiels, oui, les compagnies vont vous faire des campagnes de peur, mais on est habitués à ça, au Québec. En tant que Parti québécois, vous avez vu Bombardier, hein, durant la campagne référendaire, en 1995, Laurent Beaudoin qui avait dit: On va partir, on va partir si le Québec devient un pays indépendant. Puis, une semaine avant le référendum, il s'est rétracté. Puis là qu'est-ce qu'on voit? Le Parti québécois puis le Bloc québécois qui courent après Bombardier pour des subventions fédérales, puis tout ça.
n(15 h 50)n Donc, on est habitués, au Québec, de faire face à des compagnies qui nous font peur comme ça.
Je peux peut-être vous faire le parallèle avec la foresterie. En foresterie, hein, Port-Alfred, ils n'ont pas attendu que le rapport de la commission Coulombe soit appliqué, hein, pour fermer la shop. Ils mettent des chômeurs... Ils se foutent carrément, ces compagnies-là, des familles. Leur seul but, c'est la maximisation des profits. Puis ce que le gouvernement fait en leur mettant des tarifs préférentiels, c'est leur dire: O.K., on joue votre jeu. Puis je pense que vous jouez bien le jeu, hein, deux partis néolibéraux, que ce soit le PQ ou le Parti libéral. Michel Chartrand disait quelque chose d'intéressant à ce niveau-là, hein? Il disait: Le Parti québécois puis le Parti libéral, c'est comme une paire de fesses, puis l'ADQ, c'est le trou de cul.
Excusez mon écart de langage, M. le Président, mais ces campagnes de peur là, je pense qu'elles peuvent être déjouées avec...
Le Président (M. Paquin): M. Béland.
M. Béland (Sébastien): Oui.
Le Président (M. Paquin): Je vous ai invité à conclure.
M. Béland (Sébastien): Oui. Mais je vais conclure. Laissez-moi terminer ma phrase. Donc, ces campagnes de peur là des grandes entreprises...
Le Président (M. Paquin): Rapidement, s'il vous plaît.
M. Béland (Sébastien): ...il s'agit tout simplement d'être créatif. Puis, s'ils veulent partir, bon Dieu, qu'ils partent. On créera d'autres emplois. Hein? C'est Bernard Landry qui disait au référendum: Bien, s'il y a des grandes compagnies qui partent, bien ça va créer un vide puis on investira puis on créera des compagnies québécoises.
Actuellement, le Québec est à vendre. Les compagnies forestières sont toutes en train d'acheter les compagnies québécoises. Les compagnies américaines...
Le Président (M. Paquin): M. Béland, le temps...
M. Béland (Sébastien): Donc, on se retrouve devant...
Le Président (M. Paquin): M. Béland!
M. Béland (Sébastien): Oui.
Le Président (M. Paquin): Le temps est écoulé.
M. Béland (Sébastien): Parfait.
Le Président (M. Paquin): Donc, je vous remercie, Mme Rouleau aussi, de votre présence. Les gens de l'Action de la protection de la forêt, merci d'avoir présenté votre mémoire cet après-midi.
J'invite M. Jacques Dagenais à s'avancer et à prendre place pour présenter son mémoire.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Paquin): Bon. Bien, M. Jacques Dagenais, bienvenue à la Commission parlementaire de l'économie et du travail. Bien, je vais vous rappeler un peu les règles: 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, 20 minutes de questions...
Une voix: ...
Le Président (M. Paquin): ...20 minutes pour la présentation de votre mémoire; 15 minutes d'intervention du côté ministériel avec le ministre et les députés ministériels; et 15 minutes d'intervention du côté de l'opposition. On vous écoute quand vous êtes prêt, M. Dagenais.
M. Jacques Dagenais
M. Dagenais (Jacques): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mme la porte-parole de l'opposition, Mmes, MM. les députés, membres de la commission. Mon nom est Jacques Dagenais. Je suis un intervenant privé, actif dans le dossier de la filière atomique de Gentilly-2 depuis 1999.
Je vous remercie de me permettre de vous présenter mes observations sur le plus grand risque environnemental au Québec: la centrale atomique de Gentilly-2, et sur la filière atomique en général, et plus particulièrement sur le projet de construction d'un nouveau réacteur atomique, opération que l'on baptise de réfection.
Je suis un dirigeant d'entreprises multinationales à la retraite. J'ai oeuvré pendant près de 30 ans, au Québec et en Europe, en financement de la haute technologie et en développement de solutions de relève informatique en cas de désastre. J'ai été amené à m'intéresser à la filière nucléaire lors de l'accident sévère survenu dans un complexe nucléaire au Japon, à l'automne 1999. Jusque-là, les accidents dans les centrales atomiques de Three Mile Island et Tchernobyl avaient été mis sur le compte de normes insuffisantes aux États-Unis, corrigées depuis, et sur une technologie déficiente en URSS. Mais l'accident au Japon, pays en plein contrôle des grandes technologies, m'a amené, comme beaucoup d'autres, à m'interroger sur la situation du nucléaire, tant à l'échelle mondiale qu'au Canada, et plus particulièrement ici, au Québec. Et ce que j'ai trouvé était assez terrifiant pour que je décide de suivre ce dossier à fond.
J'ai découvert d'abord que la plupart des pays du monde occidental abandonnaient cette filière, à l'exception de la France, qui n'a pas le choix, comme l'ont répété à plusieurs reprises leurs ministres responsables de l'énergie. J'ai découvert également qu'il n'existait aucune solution acceptable en vue, à l'échelle de la planète, pour la gestion des déchets de combustibles irradiés. J'ai découvert qu'au Canada les CANDU, que l'on croyait plus fiables, vieillissaient très mal, huit réacteurs ontariens devant fermer 10 ans avant terme, ruinant du coup Hydro Ontario.
n(16 heures)n J'ai découvert que l'organisme fédéral de contrôle supposé nous protéger et assurer l'opération sécurité à des centrales atomiques au Canada n'avait pas l'indépendance nécessaire face au pouvoir fédéral, actionnaire d'Énergie atomique du Canada, promoteur des centrales. Il a fallu l'intervention de consultants américains pour faire fermer les centrales ontariennes que la CCEA du temps, qui est la Commission de contrôle d'énergie atomique qui est devenue la CCSN maintenant, la commission de contrôle de sûreté nucléaire, qualifiait alors de sécuritaires encore à la veille de leur fermeture.
J'ai découvert qu'ici, au Québec, des rapports, qu'on appelle là-bas d'audit, ont mis en lumière l'opération de plus en plus erratique de la centrale, qui opère depuis 1999 avec un système de contrôle de qualité inacceptable et non conforme aux normes de l'ACNOR, et que l'on accumule, sur le bord du fleuve, dans sa partie la plus étroite, 2,3 tonnes par semaine de combustible irradié dans des sarcophages temporaires, sans protection adéquate. Ce combustible contient des produits de fission hautement radioactifs pour plusieurs milliers d'années, incluant 1 % de plutonium, soit suffisamment pour produire quelques bombes atomiques de la puissance d'Hiroshima, et ça, à chaque semaine. Il n'existe aucune solution à long terme pour ces 2 500 tonnes accumulées actuellement qui représentent un passif éventuel non comptabilisé à Hydro-Québec de près de 2 milliards de dollars.
J'ai donc présenté au BAPE récemment un mémoire sur le plan de réfection qui propose de prolonger la vie de la centrale jusqu'en 2035, que je vous présente également aujourd'hui, le mandat du BAPE étant assez ambigu et son rapport, dû lundi prochain, risque de ne porter que sur l'agrandissement de l'aire de déchets. Ce mémoire rappelle que la centrale atomique Gentilly-2 arrive à la fin de sa vie utile dans quelques mois, à cause du vieillissement prématuré du réacteur, comme tous les autres réacteurs CANDU canadiens qui rendent l'âme 10 ans avant terme, et à cause surtout aussi du remplissage à pleine capacité de l'aire de déchets radioactifs.
Un projet de construction d'un nouveau réacteur au coût de 1 milliard, qualifié de réfection, est présentement proposé par le personnel de la centrale, avec un support assez peu marqué, il faut le dire, de la haute direction d'Hydro-Québec. Ce projet est mentionné brièvement à la page 27 de votre document de consultation qui fait l'objet de cette commission parlementaire. Une commission du BAPE vient de tenir des audiences publiques dans un contexte ambigu, car seulement une infime partie du projet, soit l'agrandissement et la modification des aires de déchets radioactifs de 86 millions, serait soumise à une révision environnementale. Les réfections, comme on appelle les travaux qui doivent être faits à la centrale, pour 1,2 milliard, ne sont pas, selon la loi, du ressort du BAPE. La commission a quand même entendu des représentations sur l'ensemble du projet et doit faire rapport au ministre de l'Environnement le 8 mars. Il faut souligner cependant qu'ils se questionnaient encore sur l'étendue de leur mandat après les audiences, dans une lettre qu'ils ont fait parvenir au ministère de l'Environnement, le 21 décembre, demandant quelle était la portée de leur mandat. Parce que la réfection n'était pas en fait soumise en fonction de la loi de l'environnement.
La Société de gestion des déchets nucléaires, créée par une loi fédérale, doit, d'ici la fin de 2005, soumettre une recommandation quant à la méthode de gestion à long terme des déchets de combustible irradié.
Ce mémoire affirme que la filière nucléaire, au Québec, doit être abandonnée immédiatement, comme elle l'a été récemment par beaucoup de pays, à cause des risques importants liés à l'opération de cette technologie complexe et dangereuse, mais surtout à cause des insolubles problèmes des déchets de combustible irradié.
En plus des risques liés à l'opération et à la gestion des déchets de combustible irradié, mon mémoire rappelle tous les autres risques qui dépassent de beaucoup les minces avantages que procure au Québec cette filière fournissant à peine 2 % de son électricité. Les risques reliés à la réfection elle-même sont énormes et sans aucune garantie de résultat. Une telle opération en Ontario a connu des dépassements considérables en temps et en argent ? on parle du triple dans le seul qui a été le fait d'une réfection à date ? et le nouveau réacteur a déjà présenté des problèmes importants dans la première année d'opération suivant sa réouverture. La réfection va de plus créer une troisième catégorie de déchets hautement radioactifs. Tout ce qu'on va remplacer dans le réacteur, qui devait y rester pendant 30 ans, sera retiré, et pour l'instant on prévoit l'enfouir alors que ce sont des... du matériel aussi radioactif ? pour une courte période quand même, pour 500 ans au lieu de 1 200 ans ? que des matières de fission les plus radioactives. Je rappelle également les risques reliés à la santé et à la sécurité.
Depuis le 11 septembre 2001, de nombreuses études ont démontré la vulnérabilité des installations atomiques, et le Canada l'a avoué, n'a pas les ressources militaires pour assurer une protection adéquate comme on le fait, entre autres, en France et aux États-Unis.
Les risques reliés aux coûts sont considérables. Déjà, le coût de l'électricité produite depuis 20 ans a été sous-estimé d'au moins 1,7 milliard de dollars. Si l'on tient compte seulement des coûts astronomiques de gestion du combustible irradié et de la centrale au mazout voisine qui assure la sécurité du réacteur et qui n'est pas comptabilisée, on voit que cette énergie est de loin la plus chère du réseau. Les chiffres annoncés de 0,06 $ du kilowattheure pour le nouveau réacteur seront d'au moins 50 % plus élevés et probablement du double quand on aura disposé des 2 500 tonnes de combustible irradié actuelles et des 2 500 autres à venir si on allait de l'avant avec le projet.
Finalement, mon mémoire propose des alternatives pour pallier aux faibles effets économiques d'une fermeture immédiate et pour réassigner les 300 employés mis en disponibilité: le travail à distance, la création d'un centre de recherche sur les nouvelles énergies renouvelables et propres et une participation à l'industrie du déclassement des 100 centrales atomiques nord-américaines, au coût de 2 milliards de dollars chacune, peuvent remplacer l'apport économique actuel de la centrale dans la région.
Des solutions sont aussi proposées pour libérer rapidement le sol québécois des 2 500 tonnes de combustible irradié, à savoir un transfert en Ontario, tel quel ou après retraitement en France. L'Ontario gère déjà plus de 40 000 tonnes de déchets de combustible irradié dans des endroits plus sécuritaires et à moindres coûts. Le Québec pourrait offrir, en contrepartie de cet effort environnemental, de construire des lignes d'interconnexion de l'Outaouais qui permettraient de leur fournir plus d'électricité. Pour superviser cette opération de démantèlement, qui va s'étaler sur une période de 30 ans, et voir à ce que cela se fasse de façon sécuritaire et en fonction des intérêts du Québec, une structure légère, un secrétariat atomique québécois devrait être créé. L'organisme de contrôle fédéral, la nouvelle CCSN, n'a pas l'indépendance nécessaire face au gouvernement fédéral, actionnaire unique d'Énergie atomique du Canada, promoteur des centrales atomiques, et le ministère québécois de l'Environnement avoue ne pas avoir la compétence voulue pour agir dans ce domaine.
Le mémoire conclut donc que cette centrale atomique représente et de loin le plus grand risque environnemental au pays. Aucune autre machine non militaire créée par l'homme n'a cette capacité de destruction et de contamination pouvant affecter l'ensemble de la population du Québec dans un seul accident ou attentat et de ruiner toute son économie. Le Québec n'a pas besoin de prendre de tels risques, vu l'abondance d'autres sources d'énergie propre et infiniment moins dommageables. Il faut mettre un terme immédiatement à cette aventure désastreuse et abandonner la filière nucléaire dès maintenant, comme le prévoit la politique énergétique actuelle du gouvernement du Québec, définie, en 1996, par l'ancien gouvernement du Parti québécois qui avait également décrété, dès 1976, un moratoire sur la construction de tout autre réacteur atomique. C'est ce que prévoient également les programmes électoraux du Parti libéral du Québec et du Bloc québécois.
Il faut rappeler, en terminant, que, si l'on décide de procéder à cette réfection de la centrale Gentilly-2 et de prolonger sa vie de 30 ans, le gouvernement du Québec doit également accepter de garder sur son territoire ses déchets hautement radioactifs pour toujours. Comme la problématique des déchets de combustible irradié a été cachée par les experts du fédéral au début des années soixante-dix, quand le Québec a été amené à construire une centrale atomique, le gouvernement est encore justifié aujourd'hui, comme il l'a fait dans sa politique établie en 1989 par le gouvernement Bourassa, d'exiger qu'aucun déchet de combustible irradié ne soit enfoui sur son territoire ou près de ses frontières. Mais, si on décide de poursuivre cette production de déchets de combustible irradié maintenant que le problème est bien connu, et que le gouvernement fédéral s'en lave les mains, et qu'un des trois scénarios étudiés par la SGDN, la Société de gestion des déchets nucléaires, est l'entreposage permanent sur site, le Québec doit donc accepter aussi de vivre avec la menace de contamination du fleuve par ces déchets hautement radioactifs pour au moins 10 000 ans.
À tous les membres du lobby nucléaire qui tentent de défendre l'indéfendable, il faut rappeler ces paroles d'Hubert Reeves quand il rappelle les dangers importants du nucléaire, et je cite: «Je me suis souvent dit que le nucléaire n'est pas une technique pour des hommes mais pour des anges, c'est-à-dire pour des êtres qui en principe ne font jamais d'erreur.» Alors, je vous remercie de m'avoir écouté et je suis prêt à répondre à vos questions.
Le Président (M. Paquin): Merci, M. Dagenais. M. le ministre, vous avez des questions?
n(16 h 10)nM. Corbeil: Oui. M. Dagenais, merci de votre présentation. Dans l'avant-propos de votre mémoire, vous affirmez que l'entreposage des déchets nucléaires dans les sarcophages temporaires sans protection adéquate sur le bord du fleuve Saint-Laurent, dans sa partie la plus étroite, constitue le plus grand risque environnemental au pays. Voudriez-vous nous exposer sur quelle analyse vous basez cette affirmation-là?
M. Dagenais (Jacques): D'abord, l'entreposage du combustible irradié, quand il sort du réacteur, à chaque semaine, s'en va dans une piscine qui, elle, n'est pas protégée par le dôme...
M. Corbeil: ...protégée par?
M. Dagenais (Jacques): ...n'est pas protégée par le dôme qui, lui, protège le réacteur, est dans un immeuble à côté. Et ça, c'est le plus grand risque environnemental de la centrale.
Après un certain temps, quand normalement cette piscine-là avait une capacité pour à peu près 15 ans, en 1995, quand on a vu que la solution que le gouvernement fédéral devait amener, au début des années 1990, n'était pas là ? la commission Seaborn, en 1998, a dit que ce n'était pas acceptable, l'enfouissement dans les zones géologiques ? alors on a décidé de transporter ce matériel-là temporaire dans les sarcophages en béton sur le bord du fleuve. Alors, et la piscine et le sarcophage sont, à l'heure actuelle, le seul... Et ces sarcophages-là ont une durée de 50 ans, alors que le combustible irradié sera dangereux pour 12 000 ans minimum, quand on parle du plutonium, là. Et il y a 89 autres produits de fission qui sont inclus dans ces déchets-là qui ont une vie dangereuse entre 500 et 12 000 ans. Bon. Alors, les sarcophages sont sur le bord du fleuve.
Et, dès septembre 2001, il y a eu des... Parce qu'avant ça, moi, j'avais déjà, en 1999, soulevé l'absence d'interdiction de survol aérien et de navette maritime pour protéger la centrale comme telle. Et on m'avait dit: Bah! Finalement, ça a pris deux mois à la commission... Ottawa a pris deux mois à trouver la réponse et il nous a répondu qu'Hydro-Québec avait fait une étude, en 1993, et que les chances que ça arrive, un avion tombe sur un truc comme ça, c'était négligeable et que les conséquences étaient négligeables également.
Alors, après septembre 2001, aux États-Unis, la panique a pris partout et la même chose en France. Et là, contrairement à ici, avant... On a commencé des études, mais, avant de commencer les études, on a mis des batteries anti-aériennes sur tous les dispositifs, on a mis des interdictions de vol et on a assuré... et après ça on s'est mis à étudier. Ici, à Ottawa, comme on nous a dit qu'on n'avait pas les moyens, alors on a mis des études, et tout ce qui a été fait à date à Gentilly, ça a été d'arrêter les visites, de mettre des barrières.
Alors, moi, je suis allé en France, à La Hague, la plus grande usine française, et on m'expliquait, il y a un an, qu'un Cessna, comme ceux qu'on a vus la semaine dernière, quand il y a eu des problèmes de sécurité, aller se promener ici, au-dessus de Gentilly, un Cessna qui est arrivé à 10 km, l'usine de La Hague avait deux Mirage derrière lui et il ne se serait pas rendu au-dessus de la centrale. Alors, ici, j'ai posé la question, on m'a dit: Bah! Au Canada, on n'a pas ces moyens-là. Alors, on n'a pas les moyens.
L'autre protection, c'est par le fleuve et par l'autre côté du fleuve. Le fleuve est étroit, alors je ne veux pas m'embarquer dans des problèmes de sécurité plus... ou donner des idées à des êtres malveillants, mais je peux vous dire que c'est... vous passez à Champlain en face et vous avez tout ça devant vous. Alors, vous avez devant vous le plutonium... Un microgramme de plutonium émis dans l'atmosphère et aspiré va causer des cancers, alors un microgramme, c'est pas grand-chose, c'est plus petit qu'un grain de cigarette.
Et la piscine, donc, aux États-Unis, on a donc produit, depuis septembre 2001, des analyses qui disent que... Dans la piscine, il y a certains endroits, on a essayé de dire que, si l'avion tombe sur les structures de béton... il y a des simulations qui sont faites. Mais, dans la piscine, il n'y en a aucun, argument contre ça, il n'y a aucune protection, tellement que, lors des audiences du BAPE, j'ai posé la question aux gens d'Hydro-Québec et on m'a répondu... Et, quand ils ont mis leurs diapositives montrant le World Trade Center et la centrale, ici, disant: Ce n'est pas la même perception, j'ai posé la question: Mais la piscine, qu'est-ce qui arrive? On nous a dit: Ah! Ça devient maintenant un secret d'État, on ne peut pas publier ça. Alors, j'ai déposé au BAPE des brochures sur la centrale où la piscine est bien en évidence. Alors, le domaine de sécurité à ce niveau-là...
Alors, la piscine, ce qu'on a dit dans des rapports, ici, que j'ai déposés devant le BAPE, qui est disponible sur le site du BAPE, que j'ai ici, qui a été publié dans le USA TODAY, en décembre 2001, est qu'un feu, un feu qui serait causé dans la piscine par un objet qui tombe dedans... Pas nécessairement un avion, hein? Il n'y a pas longtemps, pendant les... audiences du BAPE, il y a eu une explosion à l'usine d'hydrogène tout près, et il y a un immense bloc de moteur qui a revolé à quelques centaines de mètres de la centrale atomique. Si, pour quelque raison que ce soit, un instrument important, un avion ou quelque chose d'autre défonce le toit de la piscine et fait éclabousser cette piscine-là, le feu qui serait occasionné, à ce moment-là, causerait des retombées radioactives, selon des études qui ont été faites aux États-Unis, de cinq à 10 fois plus grandes que celles de Tchernobyl. On ne parle pas de choses abstraites, là, c'est là, c'est dans la piscine. Alors, la piscine, c'est le point faible, mais les sarcophages de béton sont là. Et, moi, j'ai posé la question: Qu'est-ce qu'on fait dans 50 ans? Mais là on fait des études parce qu'on pense qu'ils vont peut-être durer 75 ans. Mais je dis: Oui, on en a pour 12 000 ans, eh bien, on dit: On en fera d'autres, on les transférera.
Mais il n'y a pas de solution. On en cherche, en France, depuis 10 ans. En France, on retraite le combustible, on réduit le problème de 95 %, mais, même le 5 % qui reste, on ne sait pas quoi faire avec parce que... Et là ils le solidifient dans des cubes de verre. Alors que, ici, le problème, c'est que ça sort du réacteur, ça n'a pas été prévu pour ça, ça n'a pas été prévu pour être enfoui. Alors, les pastilles de combustible ont été endommagées dans le réacteur. Alors, ce qu'on dit, et pourquoi le coût devient astronomique, c'est qu'à chaque fois qu'il y a une étude environnementale, à chaque fois que les gens se sont opposés, pendant 10 ans, au projet d'enfouissement, c'est qu'on trouve un nouveau problème. Et, pour le problème, c'est qu'on met une couche protectrice, on rajoute du béton. À chaque fois qu'on rajoute du béton puis qu'on rajoute une couche sur les dispositifs, on rajoute des millions, d'accord? Alors, on est rendu à 1 million de dollars la tonne comme évaluation.
Alors, quand je vous dis qu'il y a un passif, à l'heure actuelle, à Hydro-Québec, de 2 milliards, si vous regardez aux états financiers de 2003, pour le déclassement total de la centrale, il y a 203 millions à date, et ça, ça comprend pour s'occuper de la centrale et des combustibles. Et on l'augmente de 28 millions par année. Alors, si vous calculez, on produit 100 tonnes par année à 1 million de dollars la tonne, on est à 100 millions par année. Alors, vous voyez que, vous multipliez ça par 2 500 tonnes, vous arrivez à 2,5 milliards. Je prends le chiffre de 2 milliards pour laisser de la place à ceux qui vont m'argumenter parce qu'il y a des gens qui sont à 500 000 $, donc à...
Moi, je suis allé en France, je suis allé poser des questions: Combien ça coûte pour retraiter? On regarde ce qui s'est fait aux États-Unis, il y a 8 milliards d'investis, à l'heure actuelle, dans les Yucca Mountain pour essayer d'enfouir le combustible irradié, et on est encore à au moins 10 ans d'enfouir la première tonne de combustible parce que tous les gens s'opposent, et il y a des poursuites devant les tribunaux puis dans tous les États où ça doit traverser. Alors, c'est le plus grand risque environnemental...
M. Corbeil: Qu'est-ce que vous proposez, M. Dagenais, comme solution?
M. Dagenais (Jacques): D'abord, la première solution, c'est qu'on n'a pas besoin au Québec... Les Français n'ont pas d'autre solution.
M. Corbeil: Avec ce qu'on a, là.
M. Dagenais (Jacques): Alors, à l'heure actuelle, je propose, moi, de négocier d'abord s'il y a de l'argent à faire avec ça. Je propose de négocier d'abord... d'abord, de fermer la centrale, on arrête d'en produire. On vient de régler le problème, on vient de sauver 1 million par semaine dans ce passif-là, on vient d'éliminer le risque parce qu'à chaque fois on en ajoute. Et, à partir du moment où on arrête de produire, on doit tenter de se débarrasser rapidement de ce matériel-là. Alors, la façon de celui qui est déjà dans les sarcophages... celui qui est dans la piscine doit y rester au moins deux, trois ans, mais celui qui est déjà dans le sarcophage, il y a deux façons de faire: soit... Il va y avoir une proposition à l'automne, là, mais on sait ce que ça va être, ça va être de l'enfouir puis tout simplement dans le Bouclier canadien, comme ça a été proposé depuis 1978, puis ça a été refusé par toutes les commissions à date. Mais il n'y a pas d'autre solution.
D'abord, ce que je propose, c'est de dire aux Ontariens: Vous avez déjà 40 000 tonnes. Nos 2 000 tonnes, ça ne changera pas grand-chose. Alors, par contre, ça prend les mêmes infrastructures de base que vous en ayez une tonne ou 40 000. Alors, ils peuvent le faire avec une économie d'échelle beaucoup plus grande que nous. Ils ont besoin de beaucoup d'énergie, nos amis ontariens. Alors, nous, on nous demande de faire un effort environnemental pour construire les lignes d'Outaouais si on veut augmenter l'électricité qu'on leur vend parce que le BAPE a dit: On n'en a pas besoin au Québec.
Alors, je pense et je propose de faire l'effort environnemental de construire les lignes avec l'Outaouais et d'offrir à nos amis ontariens de prendre la gestion chez eux temporaire de ce matériel-là. À ce moment-là, on débarrasserait le fleuve immédiatement du plus grand risque qui existe, on met la centrale en dormance, comme ça devait être, pour 30 ou 40 ans. Et là ce n'est plus... il y a des éléments radioactifs, là, c'est quand même moins dommageable si c'est à l'intérieur du dôme, et on peut vivre avec ça 40 ans. Et, dans 40 ans, on essaiera de trouver une solution pour la fermer, la radioactivité sera quand même baissée. C'est, je pense, la seule solution.
n(16 h 20)n Si ça ne fonctionne pas, la deuxième solution qui existe, qui est encore dans les mêmes prix et qui est le bon temps de le faire, c'est d'appeler la COGEMA, la Compagnie générale des matières atomiques de France, qui, à l'usine de La Hague ? la seule usine de retraitement avec celle qu'il y a en Angleterre ? fait du retraitement civil. Alors, pour 1 million de dollars la tonne, ils vont venir chercher tout ce qu'on a ici, ils ont des bateaux pour ça, ils sont équipés pour ça, ils vont s'en aller chez eux, ils vont le retraiter. Et là il y a deux cas de figure: on récupère d'un côté l'uranium... Parce que, quand vous récupérez le combustible irradié, il reste encore 96 % à peu près d'uranium, 1 % de plutonium et 3 % à 4 % d'autres matières de fission qui sont des déchets, et ça, ce sont des déchets dangereux et qu'on doit traiter. Alors, deux cas de figure: on prend l'uranium, on prend le plutonium, on fait du MOX et on peut le revendre en Ontario ou à d'autres que le Canada accepterait, selon ses ententes internationales, de faire, et, à ce moment-là, on peut même récupérer une portion. Et le 4 % qui reste, ils vont nous le remettre vitrifié, qu'on pourra, à ce moment-là, envoyer en bloc vitrifié, quand il y aura une solution, dans le reste du Canada pour l'enfouir où, à ce moment-là, le problème sera quand même de 3 % de ce qu'il est maintenant. Il faut trouver, si jamais il n'y a pas de solution au Canada, une solution au Québec pour l'enfouir, parce que la France n'acceptera pas d'enfouir nos déchets. Puis c'est les deux seules solutions qui existent: la solution de faire retraiter en France et d'enfouir ici est la seule solution québécoise; la solution canadienne, c'est avec l'Ontario, d'envoyer notre combustible pour être entreposé là avec ou sans traitement, selon le cas.
Le Président (M. Paquin): M. le ministre.
M. Corbeil: En fait, on parle d'un seul sujet. Est-ce que vous avez une opinion sur les autres formes d'énergie, l'efficacité énergétique, le gaz naturel liquéfié, ou si vous voulez qu'on s'en tienne à l'essence de votre mémoire concernant les risques des centrales nucléaires?
M. Dagenais (Jacques): Disons qu'à ce niveau-là je suis l'homme peut-être d'une seule cause. Mais, si vous demandez mon...
M. Corbeil: Non, non, mais je ne veux pas...
M. Dagenais (Jacques): ...si vous me demandez mon opinion, oui, définitivement je pense que le but de votre commission, ici, c'est probablement de trouver une façon de concilier ce que les gens vivent à l'heure actuelle, le coût de l'énergie qui doit rester bas au Québec, parce que je pense que c'est là-dessus qu'a été basé notre développement économique depuis les 40 dernières années, qui assure... Parce qu'il ne faut pas oublier qu'on est la seule, la seule, seule société occidentale développée qui vit avec les climats qu'on vit.
Alors, on ne peut pas prendre de risques ici. Ce n'est pas des risques avec l'électricité. Notre seule indépendance, c'est l'hydroélectricité. Donc, je pense qu'il faut continuer dans ce domaine-là. Je ne pense pas qu'il faut aller au chauffage au gaz. C'est disponible, mais on n'en a pas. Donc, seule indépendance... On ne peut pas prendre de chance avec notre indépendance, ici. Dans d'autres endroits, ça va arrêter leur développement économique, mais, nous, on a vu, en 1998, c'est quoi quand on manque d'électricité, c'est notre vie qui est en danger, hein? Alors, le développement économique du Québec repose sur l'électricité, donc je pense qu'il y a moyen de trouver une façon de concilier l'augmentation des coûts... qui doivent rester bas. C'est l'avantage que les Québécois ont, qui est le plus grand avantage économique.
Quand on vient nous dire qu'on est les plus taxés en Amérique du Nord, moi, j'ai fait l'étude puis, je regrette, si on oublie les Américains, parce que, dans nos taxes, c'est la santé qui est le plus gros montant, si on se compare à ceux à qui on doit se comparer, c'est l'Ontario, ce qu'on sauve en électricité, c'est plus grand que la différence en impôts avec ce que les Ontariens paient de moins que nous. Alors, c'est faux de dire qu'on est les plus taxés, si on tient compte de l'ensemble de l'électricité.
Alors, l'électricité, c'est un de nos avantages. Je pense que la façon, moi, de concilier le bas coût d'électricité avec l'économie d'électricité, c'est probablement d'avoir deux niveaux de coûts, tu sais, de coûts, de tarification, c'est-à-dire d'établir, au niveau domestique, un tarif très, très confortable, mais, quand je dis très confortable, selon certains critères, qui pourrait être jusqu'à 1 000 pi², 2 000 pi² puis au-dessus de 2 000 pi², et... au-dessus d'une quantité d'électricité très confortable, hein, aux tarifs très bas, comme on disait ce matin, qui ne doivent jamais être gelés ? les gels de coûts, à n'importe quel niveau, ce n'est jamais bon, puis, quand vient le rattrapage, on a toujours des problèmes ? mais que ce soit fait graduellement sur le tarif de base, mais que, sur le tarif de luxe ? on pourrait l'appeler comme ça ? à ce moment-là, ça, ce soit taxé ou tarifé à plus haut niveau. Je pense que ça équivaudrait à ce qu'on a toujours vécu dans le téléphone, je veux dire, le système de base n'était pas cher, puis les gens faisaient attention parce que les coûts d'interurbain, ça coûtait de l'argent. On faisait attention, là, aux interurbains qu'on faisait. Alors, je pense que ce sera la même chose.
Si les gens, on leur procure ici un bon confort... tout en laissant aussi le libre marché. Ceux qui veulent prendre le gaz naturel le prendront. Mais, dans d'autres endroits, on vient nous dire, et c'est vrai, que c'est plus efficace de chauffer au gaz naturel, mais on n'en a pas. Et les Québécois ont fait le choix. Ils avaient le choix entre les deux, ils ont fait le choix du confort que l'électricité leur a donné, et des bas coûts, et du bon train de vie que ça nous a donné. Il ne faut pas oublier qu'on vivait sur une terre de roche en haut du continent où il fait le plus froid, là, puis on s'est donné un des plus hauts niveaux de vie au monde, grâce surtout à l'électricité.
Alors, faisons attention avant d'aller toucher à ça, je pense. Et c'est une des raisons qui m'amènent aussi à parler du nucléaire parce que cette centrale, à Gentilly, risque de tout ruiner cette belle chose là qu'on a construite depuis 40 ans ici, puis ce beau train de vie qu'on s'est donné là, en un coup. Alors, on n'a pas besoin de prendre ces risques-là.
Le Président (M. Paquin): Rapidement, M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Corbeil: Mais vous semblez dire que la seule existence d'une seule centrale, alors qu'en France on a appris, hier, par les ingénieurs d'Hydro-Québec, qu'il y en a 56, ça compromettrait tout l'avenir du Québec, comme ça?
M. Dagenais (Jacques): Vous pouvez voir, sur le site du BAPE, un document qui a été déposé et qui était publié dans USA TODAY, là: Could nuclear plants be terrorists' next target? Et, quand on vous dit, là... L'exemple que je peux vous donner, c'est: imaginez, de chaque côté du fleuve, qui est quand même très étroit, qu'il est contaminé, condamné pour 30 ans. C'est la voie maritime qui est... Et, si on prend, ici, la zone première de contamination de Tchernobyl, on nous dit que c'est quatre à cinq fois plus grand, ce qui pourrait arriver si un objet tombait dans la piscine et faisait déclarer un feu à ce moment-là, alors, si on met l'épicentre, ici, de Tchernobyl, sur Gentilly-2, ça nous amène la zone la plus contaminée, là, de la rue Saint-Laurent jusqu'à l'île d'Orléans. Alors que présentement on distribue, à 8 km autour, des pilules d'iode qui ont comme objectif, en cas de désastre pas trop grand, de bloquer la thyroïde pour que les gens aient le temps de se sauver, alors, moi, je vous dis: Si vous décidez, M. le ministre, d'autoriser ça, vous devez en même temps autoriser qu'on distribue des pilules d'iode au moins de la rue Saint-Laurent jusqu'à l'île d'Orléans, et ce ne serait pas mauvais qu'on en ait ici, aujourd'hui.
Alors, quand vous dites qu'en France ils en ont 58, il faut quand même aussi... 56, il faut quand même... c'est 78 % à peu près de l'électricité. Comme je vous dis, chacun des ministres en France, il ne faut pas... quand ça a été fait, ça a été décidé, ça a été fait au moment de la guerre froide et la seule chose... de gaz venait de l'URSS à ce moment-là, et ils ne pouvaient pas prendre de risque. Mais ils ont fait quand même ce qu'il fallait. Ils ont 58 de la même technologie. Ils ont acheté la technologie Westinghouse du temps, ils l'ont modifiée, et, quand ils ont... parce qu'à chaque fois qu'il se produit un événement on doit intervenir, et ça, c'est des millions. Et ça prend des ressources qu'on n'a pas avec une centrale. Eux, il y a 58 centrales, quand il arrive un problème, ils peuvent, à ce moment-là, répartir les coûts du règlement du problème sur 58 centrales. Alors, c'est la première chose qu'ils ont faite. Donc, ils ont des économies d'échelle qui leur permettent d'opérer avec assez de sécurité.
Deuxième chose qu'ils ont faite, ils ont fait ce qui devait être fait, c'est-à-dire que ces déchets-là normalement... Ce n'est pas normal qu'on fasse une industrie puis qui produit des déchets pour lesquels il n'y a pas de solution. La solution théorique, c'était: quand ça sort, on retraite le combustible irradié, on récupère le plutonium, on le remélange avec l'uranium, et là on roule ça dans une deuxième série de réacteurs qui sont des surgénérateurs Superphénix. Mais là ce qui est arrivé, d'abord, un, les usines de retraitement aux États-Unis, ça a été bloqué dès 1980 par Carter qui ne voulait pas distribuer du plutonium dans l'entreprise privée, donc ça a tué l'industrie aux États-Unis. En France, l'usine a coûté des fortunes parce qu'et les problèmes de sécurité et de technique sont tellement grands, ça a coûté une fortune, donc le coût du MOX était rendu inaccessible face au coût de l'uranium qui, lui, est disponible de plus en plus.
Mais la troisième étape, c'est qu'ils ont construit aussi ce supergénérateur-là, Superphénix qu'ils appelaient, et, lui, il a coûté encore plus, ça a coûté, si je me souviens, dans les 10 ou 12 milliards de francs, et ils n'ont jamais pu atteindre un niveau de sécurité. Il a été refermé en 2001, je pense, oui, ou vers les années 2000. Alors, à partir du moment où on a enlevé... C'est parce que ce Superphénix là devait générer suffisamment de plutonium, c'était presque la panacée universelle. C'est qu'à la fin du traitement il sortait plus de plutonium qu'on en mettait dedans. Donc, on pouvait continuellement retraiter et on avait théoriquement de l'énergie pour 50 000 ans. Mais ça n'a pas fonctionné parce qu'on n'a pas été capable de mettre de la sécurité dedans, les risques sont trop grands et les coûts étaient astronomiques.
n(16 h 30)n Donc, à partir du moment où on a enlevé ce bout-là, on se retrouve avec les déchets, eux les retraitent, les conditionnent de façon sécuritaire et ils ont réduit le problème. Mais il n'en existe pas, de solution, on va les mettre sous... Pensez-y, on veut enterrer ça à 1,3 km, donc 1 300 m sous terre, mais la radiation, là, si moindrement... Puis on ne connaît pas les propriétés physiques, dans 5 000 ans, de ce matériel-là. Et c'est pour ça que toutes les sociétés où on veut les enfouir... Le plus bel exemple, c'est aux États-Unis, c'est à Las Vegas, à 80 milles de Las Vegas. Quand on a commencé ça, c'était un petit village, on enfouissait tout ce qui se passait d'armement nucléaire dans le Nevada. Mais là le plan des Yucca Mountains où on veut envoyer ça, là, le traitement civil, c'est à 80 milles de Las Vegas. Ils n'en veulent plus, Las Vegas s'est développée, c'est rendu une grande ville aux États-Unis. Et là le Nevada, même si le président des États-Unis a signé un ordre pour mettre en place le réceptacle, le Nevada s'y oppose. Mais surtout qu'il n'y a pas d'usine nucléaire à l'ouest du Mississippi, alors tous les États qui vont être traversés... Parce qu'il y a du transport pour transporter ce matériel-là, là. C'est une...
Le Président (M. Paquin): M. Dagenais, je dois malheureusement vous arrêter. On va aller du côté de l'opposition officielle.
M. Dagenais (Jacques): D'accord.
Le Président (M. Paquin): Vous pourrez continuer votre conversation. C'est très intéressant, mais on a des petits temps restreints malheureusement. Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, M. Dagenais, bonjour. Ce n'est pas la première fois que je vous lis, et vos réflexions sont toujours passionnantes. Vous avez mentionné que c'est à la suite d'un passage au Japon que vous avez été attiré par cette réflexion-là et que vous avez commencé... bon, l'accident qui était sur une centrale. Quel est le pourcentage de production nucléaire dans la production japonaise d'électricité?
M. Dagenais (Jacques): Je ne le sais pas. Je ne peux pas vous répondre.
Mme Dionne-Marsolais: Vous ne vous souvenez pas.
M. Dagenais (Jacques): Non, je sais que, depuis 1999, ils ont mis un frein. Ils étaient à construire une usine de retraitement. C'est dans ce cadre-là qu'est arrivé le problème, et ils retraitaient en France. Alors, je sais, là, qu'ils ont réactivé le retraitement, mais, en termes de pourcentage, j'essaie de me souvenir, je sais que la France, c'était 78 %, c'était le plus haut. Alors, le Japon est en bas de 50 %, je pense. J'oserais dire 30 %, parce qu'il me semble qu'il est au même niveau que l'Allemagne qui vient de se retirer complètement du nucléaire, comme vous le savez, là.
Mme Dionne-Marsolais: Le Japon aussi utilise la filière américaine, hein, qui a des caractéristiques un peu différentes de notre technologie CANDU. Et récemment on constate, dans les revues spécialisées, la renaissance de l'intérêt pour l'énergie nucléaire. Pouvez-vous nous en parler? En tout cas, moi, c'est ce que je lis, là. On recommence à en parler de manière très attentive pour des raisons de réduction de gaz à effet de serre, pour toutes sortes de raisons, essentiellement environnementales. Et bien sûr on ne parle jamais de la question du combustible irradié, ça, c'est vrai.
M. Dagenais (Jacques): Alors, c'est vrai qu'on en parle, mais, à chaque fois qu'on en parle, quand on regarde bien, on dit: Oui, mais on ira quand le problème du combustible irradié sera réglé, alors c'est en... Et même le président de l'organisme mondial à l'heure actuelle, dans une de ses dernières présentations, le disait: Notre industrie va aller mieux quand on aura réglé le problème, mais il n'y a pas de solution en vue. Alors, si on regarde aux États-Unis, le président Bush a été élu il y a cinq ans maintenant la première fois et, dès ses premiers temps, avec le vice-président Cheney, a annoncé qu'il allait relancer le nucléaire et mettre des centrales à tous les coins de rue. Alors, je peux vous dire qu'il n'y a même pas une seule demande de permis à date qui a été faite.
Deuxième aspect, on essaie de faire, comme on fait ici, des réfections, c'est-à-dire que, plutôt que de construire de nouvelles centrales, toutes celles qui sont en train de mourir... Parce que n'oubliez pas que, eux, quand leurs piscines sont pleines, là, il y a des États où ils n'ont pas de permis pour entreposage à sec comme on fait ici. Donc, ils voient venir la fin de la centrale, ils doivent la fermer. Alors, ce qu'on essaie de faire, c'est de prolonger le permis d'opération, construire une deuxième piscine et essayer d'opérer. Mais encore là il n'y a pas eu de permis d'émis encore. Alors, on parle depuis six ans. Et s'il y en a un... Q'on regarde ici, on demande un permis pour faire ça en 2010. Alors, la durée, là, pensez-y, c'est aberrant de penser qu'on va dépasser 10 ans pour définir, construire un réacteur qui va opérer pendant 20 ans, parce qu'on voit maintenant que c'est 20 ans et non pas 30 ans, et qu'on doit ensuite prendre 70 ans de planification pour se débarrasser des déchets que ça nous laisse. Est-ce qu'on a besoin de ça?
Il y a des endroits... La France, ils n'ont pas de choix pour l'instant. Malgré que maintenant ils en ont et, même en France, ils vont passer au... Je vous dis: À moyen terme, là, il ne faut pas se conter d'histoires, à moyen terme, c'est le gaz naturel qui va combler les besoins d'énergie en Amérique du Nord et en Europe de l'Ouest. À plus long terme, toutes les nouvelles... avec l'éolien qui commence à bien aller, il a encore des preuves à faire, il y a de la stabilisation... Je pense que l'éolien ici, en tout cas, au Québec, est notre meilleur espoir de venir compléter l'hydraulique, surtout que les zones de vent sont sur nos lignes de transfert, sur nos belles autoroutes de l'énergie. Quand on se promène au Québec, il y a des gens qui trouvent ça laid, moi, je trouve ça beau. Quand je vois descendre les millions, je me dis que c'est avec ça qu'on a bien vécu, alors je trouve ça beau.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, tous les ingénieurs trouvent que les lignes de transport, c'est bien beau.
M. Dagenais (Jacques): Quand elles sont bien placées.
Mme Dionne-Marsolais: C'est les seuls, d'ailleurs.
M. Dagenais (Jacques): Moi, je ne suis pas ingénieur, je suis comptable. Je compte les sous qui en sortent.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Mais vous savez qu'ici le syndicat des employés... des ingénieurs d'Hydro-Québec est venu il y a deux jours... ou hier, je ne me souviens plus, là, il y a tellement de monde...
M. Dagenais (Jacques): Hier.
Mme Dionne-Marsolais: C'était hier.
M. Dagenais (Jacques): ...
Mme Dionne-Marsolais: Vous les avez écoutés, c'est ça? Et, eux, ils prétendaient qu'il fallait maintenir cette expertise-là au Québec. Ça n'a pas l'air d'être votre avis.
M. Dagenais (Jacques): Non, et, si on regarde, ceux qui sont venus devant le BAPE soutenir le nucléaire ne sont que les gens qui y ont un intérêt direct, hein? Le syndicat, puis, même dans leur présentation, je l'ai vu, ils ont passé... Ils s'étaient engagé à le faire devant le BAPE, de venir défendre devant vous cette position-là. Mais, si on regarde, dans leur présentation, ça a été quand même bref, parce qu'ils représentent l'ensemble des gens à Hydro-Québec, mais ils représentent aussi les ingénieurs de la centrale, il y en a un certain nombre qui travaillent là.
Mais, moi, je peux vous dire que j'étais aux audiences de la Régie de l'énergie quand il a été question du Suroît, et il y a toujours eu, à chaque jour, un président d'une des divisions d'Hydro-Québec qui était sur place, soit M. Vandal, soit les gens de Distribution, soit les gens... Il n'y en a pas eu un ni même un vice-président qui est venu pendant les six jours d'audiences du BAPE à Gentilly. Alors, si on regarde dans tous les documents, les rapports, tous les plans stratégiques d'Hydro-Québec, les quatre derniers qui ont sorti, il y a une ligne des fois, deux lignes sur... Et, moi, j'ai posé la question à M. Vandal, j'ai dit: Pourquoi vous investissez... Parce qu'il a fait deux à trois fois une référence devant la Régie de l'énergie qu'il était possible qu'on perde la centrale, à Gentilly, en 2006. On parle de 2006, c'est la vraie réalité. Quand on parle de 2010 dans les documents, là, c'est pour ne pas faire de peine à personne, mais c'est 2006 qui est la date. On va fermer bientôt. Alors, il m'a dit: C'est loin d'être sûr qu'on va la faire, cette réfection-là.
Alors, la seule raison que le projet fonctionne maintenant, c'est que c'est Hydro-Québec et non pas une autre entreprise, parce que ça ne peut pas aller devant le BAPE à moins que ce soit un projet. Mais c'est un projet qui, à l'heure actuelle, n'est même pas approuvé par le conseil d'administration d'Hydro-Québec. C'est pour ça qu'on l'appelle un avant-projet et c'est la seule façon qu'on a pu dégager une quarantaine de millions, à l'heure actuelle, là, pour permettre que cette étude-là se fasse. Et, quand on lit les 3 000 pages de texte qu'il y a, on défriche puis il n'y a pas grand, grand substance. Et surtout les raisons qui sont données, les raisons qu'on vous donne maintenant, là, pourquoi il faudrait faire ça: la centrale stabilise le réseau près des grands centres. Vous venez d'autoriser une centrale, où il y a la même puissance, à côté, au gaz naturel. Et le réseau est beaucoup plus stable qu'il ne l'a jamais été parce qu'on a investi beaucoup dans le réseau. Alors, l'utilité de la centrale atomique pour stabiliser le réseau, ce n'est plus là.
Puis, si les 600 MW... D'abord, ils ont fonctionné 119 jours de moins l'année dernière, il y a déjà 30 jours de moins. Alors que ça fait 18 mois après cette fermeture-là, on a déjà 30 jours de fermés en 2004. Alors, elle ne fonctionne pas souvent. Ça prend en plus... Alors, l'autre raison qu'on vous dit: c'est 63 %... en 2003. Alors, bien, dans les derniers deux ans, là, c'est 149 jours qu'elle a été arrêtée. 119 jours en 2003 et ce qui devait permettre de sauter complètement 2004. Et, en 2004, elle a fermé quand même 30 jours de plus, et au moins 149 jours... et ça fait un petit bout de temps que je n'ai pas vérifié.
Alors, autre raison: garder la technologie. On n'a aucun intérêt, c'est mort partout. Il n'y en aura pas une autre au Québec, on n'a aucun intérêt à garder l'expertise. On n'a aucun intérêt à faire ça.
Autre coût, on vous dit: 0,06 $ du kilowatt. Très bon coût, l'électricité. Alors, malheureusement, pendant les audiences du BAPE, on a posé la question: Pouvez-vous nous détailler les 0,06 $, comment vous êtes arrivés... Est-ce que les coûts du combustible irradié à l'heure actuelle... Parce qu'on a sorti les états financiers, il y a 200 millions, puis il y en a pour 2 milliards de coûts. Comment vous avez provisionné le coût pour se débarrasser du combustible irradié? Il n'y a pas eu de réponse. Alors, les commissaires du BAPE ont posé la question par écrit avec une série de sept autres questions, et il n'y a pas eu de réponse avant... le chat est sorti du sac le 23 décembre. Toutes les autres questions ont été répondues par écrit. Le 23 décembre, il y a la question... et finalement il a fallu que j'y réponde après la date maximum où les commissaires avaient demandé...
Et là je peux vous lire un petit peu, si vous voulez, la réponse d'Hydro-Québec, parce que, moi, c'est la question... Le calcul pour arriver à 0,06 $, c'est facile: le coût de construction, le coût de déclassement, peut être divisé en deux parce que la première portion des premiers 20 ans, on peut le diviser sur ce qui a été fait à date, alors le coût d'opération pour les prochains 25 ans et le coût pour se débarrasser du combustible irradié qui sera produit, c'est ça qui est la façon de diviser par le nombre de kilowatts qui sera produit, et c'est à ça qu'on arrive, à 0,11 $. Est-ce que c'est comme ça qu'on est arrivé aux 0,06 $? Je vais vous lire: «Le prix de revient de l'ordre de 0,06 $ le kilowatt est établi par analyse différentielle des flux monétaires actualisés liés au scénario de réfection par rapport au scénario d'arrêt de la centrale à l'horizon 2011.»n(16 h 40)n
Avez-vous compris, madame, qu'on vient de dire: Je prends le déficit actuel de 1,7 milliard, là, puis je l'envoie dans 35 ans, parce que, si je n'ai pas besoin de me débarrasser aujourd'hui de mon combustible irradié, je le mets dans 35 ans. Donc, je fais la différence, c'est de même que j'arrive à 0,06 $. Je regrette. Moi, je maintiens... Je n'ai pas fait... Et je n'ai pas eu le temps... C'est bénévole, ce que je fais là, moi, il n'y a personne qui me paie pour faire ça. Mais l'analyse rapide que j'ai faite, j'arrive minimum à 0,09 $. Et, si j'avais à parier l'héritage de mon petit dernier, je dirais 0,12 $. Alors, on n'a aucun intérêt à payer ça.
La seule chose qui reste: il y a du personnel, là, qualifié. Ce sont des ingénieurs. On a grossi un peu. On dit qu'il y a 700 personnes, mais en fait il y en avait 600 avant qu'on parle du projet. On parle de 600, et, dans l'analyse qui a été faite par Hydro-Québec, présentée dans son document par... ? j'ai cité le groupe ? après quatre ans de fermeture, il y a en fait 300 personnes à mettre en disponibilité, des gens très qualifiés. Alors, c'est pour ça que je vous propose, dans mon mémoire, une façon d'utiliser ces gens-là. Justement, Hydro-Québec a avoué que, dans l'éolien, ils n'ont pas la technologie. Alors, on peut facilement réorienter ces gens-là.
Alors, les pertes locales, on dit: 100 millions que ça produit par année, la centrale. Moi, je vous dis: Les déchets équivalent à ça: 1 million la tonne, 100 000 tonnes par année, 100 millions. Donc, il n'y a aucun avantage économique à garder ça. Les avantages économiques indirects: 13 millions. 13 millions, madame, je suis sûr qu'on peut trouver une façon en utilisant les locaux, là, Hydro-Québec, un, et en gardant le personnel sur place, les affectant à d'autres opérations, de générer 13 millions d'avantages économiques dans la région de Trois-Rivières sans aucun problème. Alors, il n'y a pas de raison de garder ça.
Mme Dionne-Marsolais: Mais j'aimerais ça que l'on revienne un peu sur l'aspect de la sécurité parce que vous l'avez mentionné puis effectivement c'est préoccupant pour bien du monde. Et, dans votre mémoire, à la page 17, vous faites référence aux événements du 11 septembre. Si je comprends bien, ce que vous nous dites, c'est qu'en matière de sécurité c'est la piscine avec le combustible irradié qui repose dans la piscine qui est la principale préoccupation, et vous dites: La menace, dans l'hypothèse où, sur le terrain, tout est bien... Je dis «l'hypothèse» parce qu'on ne le sait pas. Mais, si, par les airs, il y avait une intervention ciblée, on n'a pas, certainement pas au Québec et visiblement pas au Canada, les moyens d'intercepter cela dans quelque condition que ce soit. Est-ce qu'on pourrait envisager une interdiction de vol au-dessus et est-ce qu'on peut envisager être capable de l'appliquer?
M. Dagenais (Jacques): Oui, je suis persuadé que c'est faisable. Je suis allé à Bagotville, puis je suis allé discuter avec les gens de l'armée là-bas, et je dis: On voit décoller des F-18 à toutes les 20 minutes. Alors, à la vitesse où circule un F-18, ça ne coûterait pas très cher de changer le plan de vol de deux F-18 pour en avoir toujours un à peu près du côté de Québec, et un à l'est, et un à l'ouest de la centrale en permanence. Ça coûterait quelques sous, mais, écoutez, c'est la sécurité. Et on pourrait, à ce moment-là, intervenir, et le journaliste, là, il n'aurait pas eu le temps de se rendre au-dessus de la centrale. Parce qu'il n'y a pas plus de protection sur cette centrale-là qu'il n'y en a au-dessus de votre maison, hein? Le journaliste s'est tenu à 1 000 pi, comme toutes les règles. Alors, ça, c'est la première partie. Le survol, c'est possible de le faire, ils l'ont fait en France, ils le font à La Hague, et on a les moyens. Moi, je ne le crois pas quand on dit qu'on n'a pas les moyens. On a des F-18 qui ne font rien ici, là, ils décollent, alors on pourrait facilement changer leur plan de vol, à la journée longue, pour en tenir toujours deux, un vers Montréal, un vers Québec, de sorte qu'on peut réagir, à la vitesse où ça va là, contre tout avion qui n'est pas supersonique, en temps voulu.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que...
M. Dagenais (Jacques): Je veux juste terminer.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, excusez.
M. Dagenais (Jacques): L'autre gros point, c'est quand même aussi le fleuve, c'est du fleuve, c'est à dire. Alors, il y a définitivement aussi... Ça, on dit que c'est encore à l'étude. La dernière fois, on m'a dit, à Ottawa: C'est à l'étude. Bien, ça fait un an et demi. Et, la dernière fois, devant le BAPE, on a dit: C'est encore à l'étude, on pense plutôt mettre des jetées pour empêcher les bateaux de se lancer vers ça, mais ce n'est pas tellement de là... Des petites navettes fluviales pourraient avoir deux utilités: protéger, les gens qui voudraient attaquer par l'eau, mais aussi... Le gros danger, je n'aime pas ça en parler, mais là vous m'amenez là-dessus, le gros danger: pensez, là, qu'un simple petit lance-truc à l'épaule, là, de l'autre côté du fleuve, à Champlain, ça se rend dans la piscine en quelques secondes. Avec une navette fluviale, on peut, avec les trucs antimissiles nécessaires, réagir à ça. Et ça, ça ne coûte pas cher. Ça ne coûte pas cher, ça existe, et c'est là. Alors, quand on pense... Ça, ça existe. Et je pense que c'est un ensemble de sécurité qui peut facilement être mis en place, mais le gouvernement fédéral ne veut pas le faire, puis, pour l'instant, ce n'est pas fait.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que, à votre connaissance, Hydro-Québec est sensible à cette réalité-là et est-ce qu'ils ont fait des démarches pour que le fédéral les appuie dans cette mesure de protection?
M. Dagenais (Jacques): Écoutez, d'abord, moi, je fais toujours une différence quand on me parle, là. Hydro-Québec, moi, j'ai beaucoup d'admiration pour cette entreprise-là, là, c'est notre... Alors, je fais beaucoup de différence quand on parle de la centrale atomique et d'Hydro-Québec. S'il y a des gens qui disent qu'Hydro-Québec est un État dans l'État, moi, je peux vous dire qu'à l'expérience la centrale atomique est un État dans l'État dans l'État parce que c'est un groupe qui est à part, qui parle un langage hermétique, etc., et c'est assez dur de voir. Alors, leur réaction a été plutôt de nier depuis toujours...
Mme Dionne-Marsolais: De nier?
M. Dagenais (Jacques): ...de nier le risque, et même devant le BAPE. On nous a présenté des diapositives où on mettait le World Trade Center et, à côté, la centrale toute petite. Alors, on met en perspective, d'accord? Alors, on disait: Comment un avion peut venir frapper ça? Alors, moi, j'ai demandé, j'ai dit: Est-ce qu'on peut remettre la photo de la centrale sur le bord du fleuve et non pas le montage? Et là on voit ça exposé comme ça. Et, malheureusement pour eux, la semaine précédente, un pilote d'Air Transat bien connu, M. Piché, à qui on posait la question: Comment un pilote peu formé peut arriver à rentrer dans un truc comme la tour? Alors, il a dit: Monsieur, écoutez, n'importe quel petit pilote de Cessna avec deux GPS, tout ce qu'il avait à faire, c'est de déposer un GPS dans la tour, un autre GPS dans l'avion et s'enligner dessus. Alors, c'est un truc d'enfant. Alors, à partir du moment où on vient me dire que c'est impossible, tu sais, d'aller frapper une cible...
Alors, deuxième argument, c'est: Le dôme peut réagir. Il y a des simulations qui sont faites ? c'est la deuxième réponse que je donne ? on fait des simulations, et le dôme pourrait probablement supporter l'écrasement d'un 767; peut-être pas un 747 mais un 767. Mais là c'est là que j'ai posé la question: Mais et la piscine? Et là on s'est retourné vers le président de la commission puis on a dit: Bien, là, ça, on n'indique pas où c'est, c'est un secret, tu sais, ça, c'est du domaine de la sécurité, d'indiquer où c'est. Alors, malheureusement, c'est disponible sur un site Internet et sur toutes les brochures de la centrale.
Alors, ils nient, ils ont mis en place ce que la... Il ne faut pas oublier aussi que leur réponse, c'est: Nous faisons ce que dit la Commission canadienne de sûreté nucléaire qui, elle, n'a pas intérêt trop, trop à grossir le problème, parce qu'ils sont pris avec l'actionnaire qui est leur patron aussi. Alors, s'ils grossissent trop le problème... Alors, ce qu'ils ont mis en place, ce sont des barrières, ils ont coupé des visites et ils ont mis des moyens de sécurité pour vérifier de plus en plus le personnel et les gens qui rentrent. Et on discute parce que le gros problème, à l'heure actuelle, c'est non seulement par l'eau, mais c'est aussi les prises d'eau, parce que, si vous n'avez pas d'eau, si on réussit à bloquer la prise d'eau, vous n'avez pas d'eau pour refroidir votre réacteur, quels que soient les trois beaux systèmes de sécurité du CANDU ? qui ont déjà fait défaut, je vous ferais remarquer ? ils ne pourraient pas fonctionner parce qu'ils prennent l'eau du fleuve pour inonder en cas de dommages importants.
Mme Dionne-Marsolais: Mais ça ferait juste l'arrêter, ça.
M. Dagenais (Jacques): Pardon?
Mme Dionne-Marsolais: Dans le cas de la filière CANDU, si vous n'avez pas d'eau, la filière... la centrale arrête.
M. Dagenais (Jacques): Non, non, c'est dans le cas de problème, on inonde le réacteur, mais, si vous n'avez pas d'eau pour l'inonder...
Mme Dionne-Marsolais: Non, non, mais, dans la filière CANDU, là, si vous arrêtez l'alimentation d'eau, vous arrêtez la réaction nucléaire. La réaction de fission ne se fait pas, ça arrête.
M. Dagenais (Jacques): Oui, oui. Mais ce n'est pas de cette eau-là, ce n'est pas de cette eau-là que je vous parle.
Mme Dionne-Marsolais: Vous parlez de quelle eau?
M. Dagenais (Jacques): Moi, je vous parle de l'eau de sécurité, celle qui sert à...
Mme Dionne-Marsolais: Celle de la piscine?
M. Dagenais (Jacques): Non, non, celle qui sert, dans le système de sécurité, en cas de désastre. Je ne vous parle pas de l'eau, là, l'eau, c'est de l'eau lourde qui est à l'intérieur, qui circule, qui sert de canaux portables, mais l'eau, la seule eau du fleuve qui servirait dans ce cas-là, et on a un problème... c'est en cas de problème, on doit inonder le réacteur. Alors, le système de sécurité, qui, espérons, ne partira jamais, est branché sur de l'eau qui vient du fleuve pour inonder rapidement, en cas d'un grave problème, la centrale. Et ça, si on bouche cette entrée d'eau là puis qu'on fait sauter la centrale, bien, là, à ce moment-là, c'est un double problème. Là, ce n'est pas seulement un problème, c'est trois fois Tchernobyl, hein?.
Mme Dionne-Marsolais: Vous suggérez un comité, bon, vous suggérez donc de la démanteler et vous suggérez, pour les raisons qu'on vient de discuter, la création d'un secrétariat atomique québécois. Pourquoi vous suggérez ça? Parce que je ne suis pas sûre de saisir ce que ça va donner d'avoir ça, là. Parce que, si on décide... on arrête la production ? je ne pose pas de jugement là-dessus, là ? vous dites: Ça ne mettra pas fin aux risques du nucléaire au Québec, et là vous suggérez ce secrétariat.
n(16 h 50)nM. Dagenais (Jacques): O.K. Alors, ce qui m'a amené à cette recommandation-là, c'est d'abord quand je me suis rendu compte, et encore plus maintenant, là, dans les derniers gestes qui ont été posés par la commission de la sûreté nucléaire, là, qui réagit réellement en protectrice de l'industrie avec toutes les attaques qui existent à l'heure actuelle... Alors, face à ça, il y a des tas de décisions qui devront être prises, et devront être prises dans l'intérêt du Québec. Alors, il n'est pas sûr que la SGDN, en septembre, va proposer une solution pour le combustible irradié qui va être dans l'intérêt du Québec. Il y a 30 ans de décisions à prendre, là. Je ne suggère pas un gros truc, là, hein, trois personnes, quelque chose de léger mais qui va être capable de prendre... et de conseiller le gouvernement et les parlementaires sur les bonnes décisions à prendre parce que c'est des décisions majeures. Tu sais, si on doit décider d'aller en France ou ici, ça va être important, et il est possible que la solution qui advienne ne soit pas la solution québécoise.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Bien, je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée. M. Dagenais, merci de votre présence, de votre présentation. C'était très, très intéressant.
J'invite donc M. Michel G. Bonin à s'avancer pour se préparer à nous présenter son mémoire.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Paquin): Donc, nous poursuivons. Nous recevons maintenant M. Michel G. Bonin. M. Bonin, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je me permets de prendre quelques secondes pour simplement vous rappeler les règles. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Après ça, nous poursuivons avec une période d'échange de 15 minutes du côté ministériel et le 15 minutes du côté de l'opposition. On vous écoute, M. Bonin.
M. Michel G. Bonin
M. Bonin (Michel G.): Bonjour, et je me permettrais peut-être de vous dire bonsoir. Je suis le dernier de la journée. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de m'accueillir à cette commission. Ça me fait grand plaisir de venir présenter mes idées que je trouve novatrices. J'ai suivi les débats de mes prédécesseurs et je dois avouer que j'ai encore peut-être l'exclusivité de mes idées.
Je dois dire que j'ai décidé de présenter un mémoire à la toute dernière minute, avant la période des fêtes, le 23 décembre donc, et le mémoire a été déposé un peu tardivement. Donc, il y a peut-être des petits écarts d'orthographe et de syntaxe, et je m'en excuse. Mais les idées sont encore les mêmes, et je pense qu'elles valent la peine d'être discutées profondément. Et je vous inviterais à poser toutes les questions que vous désirez et, dans la mesure du possible, je vais y répondre le plus rapidement possible et le plus précisément possible. Je couvre beaucoup de territoire et il y a peut-être des choses qui vont m'échapper, mais, que voulez-vous, c'est la vie. Merci.
Introduction. Dans la seconde moitié du XXe siècle, nous avons, au Québec, connu la mise en place fulgurante de l'infrastructure de production hydroélectrique et de transport d'une façon qui a impressionné le monde entier. De ces exploits épiques, nous tirons encore une certaine fierté. Le temps a passé et la demande d'énergie a crû plus rapidement que l'eau de nos réservoirs. Aujourd'hui, nous sommes à la croisée des chemins économiques et écologiques. Il n'est plus en effet possible de rechercher le profit sans en considérer les conséquences environnementales. Au XXIe siècle, l'énergie doit être produite de façon durable et écologique.
Bien sûr, avant tout, on se doit d'intensifier les programmes d'économie d'énergie afin de réduire les besoins de nouvelles installations. Une fois l'approvisionnement minimal requis assuré, on peut regarder comment développer cette nouvelle industrie verte de façon optimale et responsable.
Énergie thermique. L'énergie électrique produite avec du gaz naturel n'est plus considérée comme étant écologique, au Québec, dans le contexte global des changements climatiques. Même en considérant la cogénération à l'aide de turbines à gaz, avec des taux d'efficacité d'au-delà de 50 % à 60 %, il serait écologiquement encore plus acceptable si le carburant était moins polluant que le gaz ou le mazout léger. Le biocarburant issu de plantes oléagineuses peut représenter une alternative fort intéressante, fort appropriée dans un contexte de recherche de nouveaux marchés pour les agriculteurs québécois.
n(17 heures)n Mais résumons d'abord les principaux objectifs visés: éviter la réponse «pas dans ma cour» en ayant 80 % de la population concernée en faveur d'un projet de centrale thermique; profiter du faible coût d'installation du mégawatt de puissance et d'un délai très raisonnable variant de deux à quatre ans pour la réalisation d'une centrale turbine à gaz; évidemment, Protocole de Kyoto: substitution du gaz naturel ou du mazout léger par un biocarburant; éviter la production massive additionnelle de CO2, évidemment reconnu comme gaz à effet de serre; éviter la pollution causée par la combustion du gaz naturel et du mazout léger en utilisant du méthyle ester, communément appelé biodiesel; éviter la concentration en des lieux géographiques de la pollution et les gaz à effet de serre; récupérer l'énergie thermique des gaz de combustion de diverses façons économiques; augmenter le rendement thermique de la cogénération au-delà de 70 % ou même de 75 %; au-delà de la cogénération, aller vers la trigénération; éviter de consommer des ressources fossiles importées et non renouvelables, tels le gaz naturel ou le pétrole importé dans le contexte du Québec; éviter l'importation de ces carburants, gaz ou mazout léger, qui représentent près de 80 % des coûts d'exploitation d'une centrale turbine à gaz; éviter évidemment les hausses de prix; à l'aide de turbines à gaz, optimiser l'utilisation de produits énergétiques dans un réseau local de distribution, en particulier de la chauffe, de l'eau chaude; répartir sur le territoire du Québec, près des agglomérations principales, une capacité de production d'électricité et une source thermique pour les industries, le chauffage des grands édifices et pour tout autre utilisateur de chaleur à faible température; maximiser et pérenniser les retombées économiques régionales au-delà de celles générées par la construction et l'exploitation; réduire la consommation de mazout des chaudières vieillissantes des édifices, dispositifs généralement trop peu efficaces.
Solutions proposées. Le thermique biologique. La production d'électricité par une centrale munie d'une turbine à gaz est un des choix préférés des utilités. Elles sont peu chères, rapides à construire, et le carburant ? gaz naturel ou mazout léger ? est encore grandement disponible, bien qu'à prix très variable. Sa combustion émet une pollution notable ainsi qu'un gaz à effet de serre, le CO2. La cogénération ? bientôt la trigénération ? augmente le rendement au-delà de 50 %.
Nous ne possédons pas encore de ressources gazières ou pétrolières suffisantes au Québec. Et, même si nous les possédions, leur prix suivrait probablement les cours mondiaux. Il existe plusieurs carburants de substitution aux dérivés du pétrole et au gaz naturel qui peuvent être fabriqués à partir de matières biologiques: l'éthanol, le méthanol et un autre moins bien connu, le méthyle ester. J'ai choisi méthyle ester, ce pourrait être ester méthylique, communément appelé biodiesel. Ce dernier ressemble au diesel pétrolier, mais ses sources biologiques sont les gras d'animaux et les huiles végétales. Il est communément appelé biodiesel.
En Europe, les gras animaux sont utilisés à leur maximum, et la production d'huile extraite des plantes oléagineuses comme le colza, dans le contexte européen, essaie de suivre la forte croissance du volume de vente du méthyle ester. Au Canada, la production et la consommation est encore minime. Partout dans le monde, le prix des huiles végétales provenant des grandes cultures commerciales propulse le prix du méthyle ester au-delà de celui du diesel. Le pétrole, aujourd'hui, a franchi le cap des 53 $US le baril. L'utilisation de ce méthyle ester comme combustible pour le chauffage des locaux n'en est qu'à ses débuts. La pollution des véhicules diesel est réduite d'approximativement 50 %, et, sur son cycle de vie, ce méthyle ester a un bilan CO2 neutre.
Les turbines à gaz sont des moteurs à combustion interne qui peuvent utiliser ce carburant pour fonctionner. Cependant, peu d'expériences ont été réalisées, puisque le gaz naturel domine dans le monde de la production d'électricité. Les grands turbiniers ont comme marché principal les turbines pour l'aviation qui carburent aux mélanges de kérosène. Les caractéristiques optimales nécessaires d'un méthyle ester thermique pour une turbine à gaz ne sont pas encore connues.
Au Québec, la production de soya et de canola est axée sur la production d'aliments pour les animaux et pour les marchés d'exportation. Les infrastructures de traitement sont inexistantes. Il s'exporte des fèves entières et s'importe du tourteau et de l'huile. L'agriculture est en difficulté, et les revenus nets des agriculteurs sont constamment à la baisse dans toutes les exploitations. Une production massive d'oléagineuses énergétiques serait certainement bienvenue. Le marché interne québécois serait ainsi assuré par la demande de méthyle ester pour les turbines à gaz.
Pour fabriquer celui-ci, il faut cultiver des variétés d'oléagineuses à haut rendement en huile et fournissant idéalement un tourteau comestible pour les animaux. Beaucoup de recherche est à faire pour trouver les plantes adaptées aux besoins et qui ne sont pas liées au marché des commodités. Un financement à la production énergétique est requis, et un prix équitable devrait être payé à l'agriculteur. La transformation peut se faire artisanalement chez l'agriculteur ou de façon industrielle localement. La machinerie de production des méthyles esters est disponible majoritairement sur le marché européen et débute en Amérique du Nord. Ceci représente une opportunité pour l'industrie manufacturière québécoise.
La production décentralisée d'électricité avec des turbines à gaz en cogénération, et préférablement en trigénération, près des grands centres permettrait de répondre à la demande locale d'électricité et de fournir de la chaleur et du froid commercial. Les serres de culture sont un marché idéal pour une chaleur rendue à basse température et autrement difficilement récupérable économiquement. Par ailleurs, l'utilisation de méthyle ester pour l'équilibrage d'un petit parc éolien est tout à fait réalisable afin de permettre de maintenir un niveau de production d'électricité constant et ferme. Une industrie locale de trituration des graines et de fabrication du méthyle ester émergerait alors préférablement là où se trouve la centrale turbines à gaz. Tout est à faire.
Énergie éolienne. L'énergie éolienne est fort intéressante sous plusieurs angles. Elle est propre et facilement implantable à peu près partout. À ce jour, sa capacité demeure cependant limitée, et sa production est variable. Il est possible de remédier à ce problème en considérant des machines plus puissantes couplées à des turbines hydroélectriques. Il s'agit certes là d'une approche audacieuse, mais les bénéfices peuvent être importants à plusieurs points de vue.
Les objectifs énumérés ci-après tentent de dessiner une perspective envisageable: permettre d'intégrer au réseau, à un coût minimal, de l'énergie éolienne au-dessus du seuil des 10 % à 20 % de la puissance maximale produite en couplant des éoliennes aux turbines hydrauliques; éviter les flux monétaires hors Québec; faire preuve d'audace et de vision pour dynamiser et développer en accéléré l'éolien, que 80 % de la population québécoise considère comme l'énergie la plus verte; canaliser au Québec l'expertise privée internationale pour la propulser vers de nouveaux seuils adaptés au contexte québécois; cesser de dépendre de technologies étrangères et de développer la nôtre, ainsi créer des emplois spécialisés en recherche et développement; éviter les conséquences désastreuses sur notre économie d'une sécheresse sévère ou prolongée et les effets sur notre mode de vie de plus en plus dépendant de l'électricité à prix modique; passer de leader en matière d'achat à un chef de file incontestable en production et en fabrication de centrales éoliennes complètes, adaptées à notre contexte; avoir une vision à long terme de l'éolien dans un contexte réel de coûts minimaux de fabrication, de construction et de production, dépourvu de subventions, de rabais, de crédits d'impôt, de crédits de CO2 ou de ristournes aux producteurs et aux acheteurs; cesser de constater avec regret que les mâts sont fabriqués en Corée du Sud ou ailleurs, que les nacelles de grande production, y compris leurs éléments mécaniques, électriques et électroniques, sont fabriquées et assemblées soit au Danemark, en Allemagne ou aux États-Unis d'Amérique; réaliser le couplage éolien-hydraulique comme économiseur d'eau partout où il serait rentable.
Solutions proposées. Force est de constater que les récents prix annoncés de l'électricité produite par des centrales éoliennes privées sur des sites de bon potentiel avec des machines de grande série sont compétitifs avec d'autres modes de production. L'intégration au réseau à partir de sites éloignés des corridors électriques de capacité suffisante et l'équilibrage augmentent le coût à l'acheteur actuel, HQ Distribution. Lorsqu'il n'y a pas d'équilibrage requis et l'intégration au réseau est minimale, le prix est celui du producteur. L'industrie internationale de l'éolien prévoit que, vers 2008, le prix de l'électricité sera compétitif, sans subvention quelconque, à toutes sources, sauf l'hydroélectricité. La production de grande série de puissantes nacelles amènera, vers 2010, le prix à peu près à 0,03 $US du kilowattheure.
Plus les machines sont puissantes, plus les coûts unitaires baissent, puisque les infrastructures de production sont mieux utilisées, que les études préparatoires sont les mêmes et que l'exploitation n'est pas trop différente. De plus, la combinaison production éolienne d'électricité et gestion des réservoirs hydroélectriques patrimoniaux d'Hydro-Québec est idéale, puisqu'elle transforme une production variable dans le temps en électricité ferme ou constante. Afin de ne pas être limités par ces 10 % à 20 % intégrables dans le réseau et de permettre une capacité de production éolienne supplémentaire, il serait opportun de coupler la production éolienne en l'intégrant directement à des groupes turbines-alternateurs avant même le réseau de transport. En plus, être physiquement situé près des centrales, c'est-à-dire «on shore or near shore», ou dans les réservoirs existants, «in land, off shore», permet de maximiser les infrastructures en place et de réduire les coûts d'intégration.
n(17 h 10)n Ce couplage hydro-éolien ne permettrait pas d'emmagasiner plus d'eau au cours d'une année mais résulterait en des réservoirs avec des niveaux plus élevés sur de plus longues périodes. La limite pratique d'intégration directe à une centrale hydroélectrique est à déterminer. Cette eau est bel et bien une ressource naturelle, mais elle a conservé son potentiel énergétique dans les réservoirs par le biais d'une transformation éolienne non patrimoniale excédant ou pas les 165 TWh. Le potentiel énergétique de cette eau est fort probablement non patrimonial et peut faire l'objet de vente suite aux demandes commerciales d'électricité, pour le court ou long terme, d'HQ Distribution, d'exportation d'Hydro-Québec. Mais à qui appartient cette nouvelle eau emmagasinée dans un réservoir et quelle est sa valeur commerciale? Au patrimoine général d'Hydro-Québec, à HQ Production ou au producteur éolien? Logiquement, si Hydro-Québec Production achète la production éolienne, elle lui appartiendra.
L'eau, ressource naturelle, se trouvant en quantité et, selon sa position géographique, a, à une altitude donnée, un potentiel énergétique. La production hydroélectrique que nous connaissons en est totalement dépendante. Nous aménageons les rivières et parfois en dérivons pour maximiser leur potentiel naturel, accumulons l'eau afin de disposer des débits requis au moment opportun pour répondre à la demande électrique, et, si tout va bien, il y a des surplus variables. Que se passe-t-il avec cette eau qui n'a plus cette énergie et poursuit son parcours vers la mer? Côté énergétique, rien, et elle perd son statut de ressource naturelle québécoise de premier choix. En quantité limitée pour l'eau douce ou illimitée pour l'eau de mer, celle-ci pourrait avoir une seconde vie énergétique.
Les éoliennes en production commerciale actuellement dans le monde sont de type HAWT, de puissance maximale d'environ 5 MW, et à l'horizon pointent des 7 MW. La majorité, soit 80 %, sont munies d'un multiplicateur de vitesse avec génératrice asynchrone, et 20 % tournent à des vitesses rotor avec génératrice synchrone. Qu'est-ce qui limite la puissance des éoliennes? Plusieurs facteurs: fiabilité de l'électronique de puissance, la hauteur et le montage des nacelles, la capacité, disponibilité des grues, enfin beaucoup de choses.
Toute la technologie et la production des éoliennes est étrangère. Selon diverses sources, pour qu'une industrie s'implante solidement, il faut une demande consolidée de marché variant entre 50 000 à 70 000 MW. Mais, avec la future demande chinoise et ses bas coûts de fabrication en série, le défi de détrôner la Chine peut sembler insurmontable. Comme dans bien des domaines, l'innovation technologique, l'exclusivité des idées sont souvent gage de succès. Citons, par exemple, Bombardier avec ses diverses inventions et produits mis en marché, Pratt & Whitney avec son moteur PT6 et, à la fin des années soixante, Boeing avec son 747, et maintenant Airbus avec son A380.
Le défi éolien québécois souhaitable n'est pas d'essayer de faire ce que les autres font déjà très bien mais de faire ce qui ne se fait tout simplement pas, de l'éolienne à plus de 7 MW. La première étape de la stratégie serait de concevoir, fabriquer et assembler les composantes d'éoliennes au Québec, de construire et d'exploiter des parcs couplés aux centrales hydroélectriques et ainsi déterminer l'équilibre optimal de puissance éolienne versus la puissance d'accueil pour obtenir une bonne fiabilité et des coûts de production intéressants. Hydro-Québec pourrait ainsi mettre en place, au rythme jugé approprié, une infrastructure de capacité suffisante ? mâts inclus ? pour accueillir des générations d'éoliennes de plus en plus puissantes. Ainsi, au début, s'il est opportun, et pour la période de temps de désuétude économique ou technologique des machines, il serait aussi possible de produire de l'électricité en louant crédit-bail ou en achetant et en revendant des éoliennes d'autres manufacturiers.
De plus, il serait peut-être opportun d'inviter des manufacturiers sérieux à installer leurs plus grosses éoliennes sur des mâts d'Hydro-Québec et produire pour une période limitée. Il serait aussi possible d'installer des éoliennes appartenant à de gros consommateurs industriels d'électricité. D'autres défis sont bien sûr à surmonter pour concevoir et construire les infrastructures d'accueil, entre autres des mâts de plus de 150 m, préférablement en béton. Il me reste combien de temps?
Le Président (M. Paquin): C'est terminé, si vous voulez conclure rapidement.
M. Bonin (Michel G.): Oui, certainement. Stratégie de mise en oeuvre. Au Québec, nous avons choisi de nationaliser les compagnies d'électricité depuis plusieurs décennies. Pour se distinguer durablement dans le secteur des énergies vertes, renforcer la mission première de notre véhicule le plus précieux, Hydro-Québec, il faudrait créer une division à l'instar de Pétrole et gaz à Hydro-Québec, que j'ai baptisée Nouvelles énergies vertes. Quels seraient les défis de cette nouvelle division? C'est de produire avec toutes les sources d'énergie qui ne sont pas utilisées actuellement à Hydro-Québec, c'est-à-dire avec de l'éolien et d'autres sources, peut-être l'hydrogène. C'est tout?
Le Président (M. Paquin): Oui. Merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.M. Corbeil: M. le Président, M. Bonin, j'en suis à mes tout débuts dans le cadre des travaux de cette commission. En fait, c'est la troisième journée, et il y a un mot sur lequel je voudrais que vous développiez davantage parce que je ne l'ai pas lu ou entendu jusqu'ici, c'est trigénération. J'aimerais que vous m'expliquiez ça un petit peu plus.
M. Bonin (Michel G.): O.K. Disons, la première génération, dans une centrale turbines à gaz, ce serait évidemment l'électricité. La cogénération, ce serait un produit comme la vapeur. Et la trigénération...
M. Corbeil: Ça, ça va.
M. Bonin (Michel G.): La trigénération, en troisième production, c'est soit le froid pour la réfrigération ou la congélation. Et voilà. Et il pourrait y avoir une quatrième utilisation, c'est-à-dire des...
M. Corbeil: Comment vous passez de la vapeur au froid, là?
M. Bonin (Michel G.): Oui, c'est ça, il y a des systèmes de réfrigération et de congélation avec des sels, entre autres, en solution, du lithium, brome et de l'ammoniac. Entre autres, l'ammoniac peut descendre à des températures de moins 60 °C pour faire autant de la réfrigération que de la congélation, principalement de produits alimentaires.
M. Corbeil: C'est quoi, le lien continu avec votre... L'électricité, vapeur, ça, ça va, mais, quand vous passez de la vapeur au froid, là...
M. Bonin (Michel G.): Mais c'est ça, c'est le procédé des solutions où ça prend de la chaleur pour faire évaporer et le processus de condensation. Et, si vous avez un certain endroit dans le cycle où il se fait du froid, eh bien, vous avez votre source de froid. Ça fait quand même assez longtemps. Ce n'est pas très généralisé, c'est pour de grosses opérations de réfrigération. Donc, tout le marché agroalimentaire peut se servir de ces services de réfrigération. À la place d'avoir un compresseur avec un moteur électrique, vous avez de la congélation, de la réfrigération faite avec ce procédé-là.
M. Corbeil: Merci, M. Bonin, d'avoir éclairé ma réflexion sur le sujet. Maintenant, vous amenez l'idée de mettre en place progressivement un nouveau type de production d'électricité de puissance garantie et déterminée dans le temps en jumelant des mégaéoliennes et des centrales pompées d'eau douce ou d'eau de mer, selon le cas. Et vous pensez que certaines régions, à cause de leur topographie, se prêtent un petit peu plus à ça pour faire des réservoirs économiquement aménageables. Pouvez-vous nous apporter des précisions additionnelles concernant ce type de production d'électricité, notamment au niveau du potentiel et des besoins de développement? Puis avez-vous estimé les coûts de telles installations?
M. Bonin (Michel G.): Pour l'estimation des coûts, je ne l'ai pas faite, je ne me suis pas rendu jusque-là. C'est une tâche colossale, je n'ai pas eu le temps de faire ça. Et je pense que je n'ai pas toute l'expertise qu'il faut pour me rendre jusque-là, du côté coûts.
n(17 h 20)n Du côté principe, il y a un projet qui a été mis de l'avant à la fin des années soixante-dix par Hydro-Québec qui s'est appelé la centrale pompée de Delaney. Je ne sais pas s'il y a des gens qui ont déjà suivi ce projet-là, c'est une centrale pompée ici, sur la rivière Jacques-Cartier, qui a été abandonnée pour je ne sais trop quelles interrogations, peut-être économiques. Je n'ai pas l'histoire de l'abandon de ce projet-là.
Mais grosso modo ce qui est à faire, c'est de... Évidemment, la source primaire d'électricité, ce sont des mégaéoliennes, comme j'ai dit, de très grande puissance donc avec infrastructures faites par Hydro-Québec. C'est-à-dire que vous présentez une attache à un manufacturier, et il vient littéralement mettre son éolienne, sa centrale éolienne, sa nacelle avec son rotor sur un mât qui appartiendrait à Hydro-Québec Nouvelles énergies vertes. Lorsque le vent souffle et que vous avez... Par exemple, on prendrait un parc de 1 000 MW. Si le vent souffle à 500 MW et vous voulez toujours produire 1 000 MW, bien vous avez la source éolienne qui est à 500 MW et vous allez puiser à partir de votre réservoir avec des turbines tout à fait... pas tout à fait standard mais des turbines-pompes, et vous allez puiser 500 MW, par exemple, pour faire des chiffres ronds, d'énergie hydraulique à partir de la réserve que vous avez. Donc, vous avez une énergie qui est ferme, une puissance ferme de 1 000 MW en tout temps.
Évidemment, la grande question, c'est: Quel va être le volume du réservoir? Et combien ça me coûte pour l'aménager? Par exemple, côté géographique, vous pourriez aller puiser de l'eau à même le Saguenay, qui est de l'eau douce mais qui est presque au niveau de la mer, avec des dénivelés, et faire un réservoir tout près, et faire votre centrale à même le massif rocheux. Vous pourriez faire exactement la même chose sur la Côte-Nord mais directement à partir de l'eau de mer. Donc, vous ne dérivez aucune rivière, vous ne prenez aucune rivière, vous avez de l'eau illimitée à partir de la mer. Et il s'agit de savoir quelle serait la puissance requise en mégaéolienne pour avoir une énergie et une puissance ferme tout au long de l'année. Est-ce que ça répond?
M. Corbeil: Oui. Vous parlez des éoliennes de grande puissance. On parle ici de 5 MW, et à l'horizon pointent des 7 MW. D'expérience, plus on augmente la puissance, plus on a des formats appropriés, là. En fait, je pense que probablement, dans le 3 MW, au moment où on se parle, on est «off shore» ou 5 MW, là, on commence à être assez... Est-ce que vous avez une idée de format de ces équipements de 5 MW et possiblement de sept? Est-ce qu'il y a des projections de faites là-dessus?
M. Bonin (Michel G.): Oui, oui, c'est connu. Il va se construire un parc dans la Manche par les Belges, ils vont avoir des machines de 3,6 et de 5 MW. Le centre de l'éolienne va être à 80 m au-dessus du niveau de la mer, et, bon, les rotors vont avoir entre 75 et 125 m de diamètre. Il ne faut pas se le cacher, c'est des monstres. Ça ne se place pas dans une cour, ça se place à des endroits où le visuel a de la latitude. Donc, c'est pour ça que je dis: Il faudrait idéalement les placer, pour réduire les coûts, tout près des réservoirs hydroélectriques et évidemment tout près des centrales hydroélectriques pour le couplage. Est-ce que ça répond?
M. Corbeil: Oui. Oui, c'est parce qu'à l'heure actuelle les 3 MW, là, on parle de 80 m de haut pour le centre de la...
M. Bonin (Michel G.): Le centre du «hub».
M. Corbeil: Et 45 m de pale au niveau de...
M. Bonin (Michel G.): Ça dépend toujours de la densité de votre vent, de vos vitesses, c'est...
M. Corbeil: Et là vous dites que finalement le mât serait encore à 80 m, mais la pale pourrait aller à 65.
M. Bonin (Michel G.): Oui, oui, et plus. Et là, si on a une perspective, admettons, quelle sera la technologie, quelle est la limite de la technologie, quelle technologie? La limite, c'est 10, 20. Personne ne le sait. Donc, c'est de la recherche à faire et c'est un créneau où personne n'est parce que souvent la demande n'est pas grande. On regarde un A380 d'Airbus, la demande, ce n'est pas évident, et la même chose pour les grosses éoliennes.
M. Corbeil: O.K. Une autre question aussi concernant... Vous proposez une solution thermique biologique avec laquelle le méthyle ester serait utilisé pour la production d'électricité au moyen de turbines thermiques. Vous suggérez également d'utiliser des biocarburants comme le biodiesel, l'éthanol ou le méthanol comme carburants pour le transport. Le coût de ces biocarburants étant plus élevé que celui du diesel ou du gaz naturel, le coût de transport ou de production d'électricité sera donc augmenté de façon probablement proportionnelle.
Alors, ma question est à deux volets: Selon vous, qui devrait supporter les coûts supplémentaires occasionnés par l'utilisation de ces biocarburants? Et à votre avis les bénéfices sur le plan de l'environnement et de l'énergie justifieraient-ils ces coûts additionnels?
M. Bonin (Michel G.): Premièrement, je ne touche pas à l'aspect transport, j'ai évité ce sujet-là complètement. Il y a des gens qui en ont traité ici. Le Conseil québécois du biodiésel, je pense, en a touché une partie pour les autobus urbains. La problématique du biodiesel, les gens du Conseil québécois du biodiésel, eux, ont mis de l'avant la source des gras d'animaux pour faire du biodiesel, et ça, c'est parfaitement adapté pour des moteurs à combustion comme le moteur diesel. Ils ont un indice de cétane plus élevé. Et cette ressource-là, que ce soient des huiles de friture ou que ce soient des gras d'animaux, il y a une quantité limitée, disons, de disponible.
Par contre, les oléagineuses, le défaut qu'elles ont actuellement, c'est que... Bon. Souvent, on a parti de grandes cultures en Europe comme le colza, le tournesol, et ici, bien, on se tourne vers le canola et le soya. Le défaut de ces cultures-là, c'est qu'elles sont des marchandises commerciales. C'est une commodité, et les cours sont variables. Donc, le brut pétrolier et les commodités, des fois ça fluctue de façon bizarre. Donc, pour avoir de très grands volumes de biodiesel, leur source, c'est les huiles végétales. Il ne faut pas s'en cacher, un coup qu'on a, excusez l'expression, bouffé tout ce qu'on avait à bouffer de gras animal et d'huile de friture, il y a une limite, et les quantités sont astronomiques. Donc, s'attaquer au marché du diesel de transport, c'est des milliards de litres, et on n'a pas les ressources pour toucher à ça.
Du point de vue prix, il faut absolument dissocier les huiles qu'on produirait au Québec du marché des commodités, c'est-à-dire développer de nouvelles variétés adaptées à notre climat, et rendre à l'agriculteur disponibles ces variétés-là pour qu'il les plante, et lui donner un rendement équitable, c'est-à-dire ses coûts de production. Le défi est là. C'est-à-dire que vous avez des graines qui vont vous donner 20 % d'huile, comme dans le cas du soya. Dans le cas du canola, vous allez avoir à peu près 40 %. Et, dans d'autres cas, vous allez avoir 60 %, comme du Jatropha curcus, qui se récolte au Mexique, en Amérique du Sud et en Amérique centrale. Et vous en avez à l'année, il n'y a pas de cycle. Donc, il y a toute une recherche à faire du côté agriculture. Les agriculteurs, les économistes agricoles devraient déterminer le coût. À titre d'exemple, actuellement l'équivalent gaz naturel et biodiesel, ça s'établirait à peu près à 0,21 $ du litre. Donc, le défi est là.
Les gens du Conseil québécois du biodiesel sont venus dire: Bon, écoutez, on est à peu près à coûts équivalents au pétrole dépendant du cours du pétrole, du diesel, et ça nous prend un rabais de taxes. Dans ce cas-ci, aucune taxe à part la TVQ et la TPS, mais c'est en fin de compte un produit qui est détaxé. Est-ce que...
Le défi, c'est d'aller chercher une huile qui n'est pas sur une commodité, qui est, excusez l'expression, pondue pour le Québec ou même pour le Canada. Et j'irais même plus loin, si on pousse, on pourrait, avec d'autres pays des Amériques, développer des huiles, et avec les complémentarités de saisons. Par exemple, l'Argentine a deux saisons de récolte, nous, on en a juste une, le Brésil en a trois, et il pourrait y avoir des échanges Nord-Sud pour des volumes... L'Argentine, par exemple, a 25 millions d'hectares en culture et en a 140 quelques millions en... pas en «pasture», comment on dit ça en français? En broutage, excusez l'expression.
M. Corbeil: En jachère ou en...
M. Bonin (Michel G.): Non, pas en jachère.
M. Corbeil: En friche.
M. Bonin (Michel G.): En pâturage, excusez. Merci.
M. Corbeil: Ah! En pâturage.
M. Bonin (Michel G.): En pâturage. Donc, c'est beaucoup plus que le Québec et... Bon. Et voilà la magie du Nord-Sud.
Le Président (M. Paquin): Ça va, M. le ministre? Mme la députée de La Peltrie.
Mme Hamel: Merci, M. le Président. Bonjour, monsieur. À la page 3, bien c'est dans la veine, je pense, de ce que vous venez d'expliquer, là, vous parlez au troisième paragraphe: «Au Québec, la production du soya et du canola est axée sur la production d'aliments pour les animaux...» Ensuite, vous mentionnez: «Les infrastructures de traitement sont inexistantes.» Et vous parlez aussi de la situation de l'agriculture qui est en difficulté. Est-ce que je lis là une forme de... Bon. Mettons, on trouverait par des recherches une certaine plante, là, qui serait acclimatée à nos conditions au Québec, qui pourrait être produite par nos agriculteurs, on installe à proximité une usine de transformation, puis vous y voyez là tout un cycle finalement, là, si je comprends bien.
n(17 h 30)nM. Bonin (Michel G.): Oui. Donc, actuellement, vous pouvez utiliser du canola à 40 %. Évidemment, pour maximiser, vous allez aller vers quelque chose qui va vous donner plus d'huile, donc un rendement à l'hectare plus élevé. Donc, c'est dans cet esprit-là, augmenter l'utilisation du territoire et évidemment des rendements à l'agriculteur. Mais, demain matin, vous pouvez utiliser de l'huile de canola ou même d'autres huiles qui sont cultivées à travers le Canada. Il y a différentes variétés de tournesol qui sont disponibles, à plus haut rendement que le tournesol qu'on connaît.
Vous avez raison, donc ça pourrait être, contrairement à l'Europe, où la fabrication des esters méthyliques, d'huile végétale, comme ils appellent en France, où c'est vraiment commercial, donc c'est une grosse raffinerie... Ici, au Québec, on pourrait faire quelque chose qui est dans le milieu du modèle américain, où un entrepreneur va décider de faire du biodiesel à coups de 1 million de gallons par année, et en Europe, des extrêmes, avec des 100 millions, 200 millions de gallons ou de litres, dépendant de l'unité de mesure que vous prenez. Donc, au Québec, on pourrait avoir un agriculteur qui récolte ses fèves, et qui en extrait l'huile, et qui, avec ses voisins, fait une usine locale de biodiesel à coups de 10 millions de litres, 20 millions de litres, 30 millions de litres. Et l'huile utilisée dans la turbine à gaz, cette huile-là transformée en biodiesel, serait un produit local, avec une industrie locale et avec, dépendant de la fève qui est utilisée, du tourteau pour alimenter les animaux. Il y a des tourteaux qui sont comestibles, il y en a d'autres qui ne le sont pas. Est-ce que ça répond à votre question?
Le Président (M. Paquin): Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Merci. Je veux juste, avant de commencer avec mes questions... Du méthyle ester, c'est quoi?
M. Bonin (Michel G.): C'est un anglicisme. On devrait dire «ester méthylique d'huile végétale».
Mme Dionne-Marsolais: Ah! C'est de l'huile végétale, tout simplement.
M. Bonin (Michel G.): Non, non. C'est de l'huile végétale transformée. Donc, il y a un procédé où... Par exemple, un des procédés, vous utilisez une partie de méthanol, 10 parties d'huile avec un coréactant ou un catalyseur, dépendant comment vous le prenez, dans ce cas-là ça peut être de l'hydroxyde de potassium ou de l'hydroxyde de sodium, et, avec de la chaleur, vous avez un produit qui est le biodiesel et de la glycérine en coproduit. Donc, cette glycérine-là, dépendant de votre procédé, peut avoir un degré de pureté très bas ou très haut. Donc, la glycérine, il y a des...
Mme Dionne-Marsolais: Donc, ça implique une certaine transformation qui, elle, va coûter quelque chose aussi.
M. Bonin (Michel G.): Exactement. Oui, ça implique de la machinerie, de la main-d'oeuvre. Et, dépendant des volumes que vous avez besoin pour votre turbine à gaz, c'est des volumes qui seraient développés localement.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. D'accord, d'où votre suggestion, là, de fabriquer ce méthyle ester thermique et le processus qui s'ensuit au niveau de la culture, etc.
Moi, je trouve que votre mémoire est assez clair, là, il y a des petites choses que j'aimerais clarifier qui m'apparaissent... Il y a des nuances, là. Vous dites, si je comprends bien, qu'en termes de développement de l'éolien... Est-ce que je comprends bien que vous souhaiteriez que ce soit Hydro-Québec qui développe ça?
M. Bonin (Michel G.): Exact.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Donc, ce serait produit et vendu par Hydro.
M. Bonin (Michel G.): Exact.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Et en même temps vous dites que vous voulez permettre aux municipalités de profiter des retombées monétaires récurrentes de la production d'électricité éolienne sur leur territoire. Vous pensez à quoi quand vous dites ça?
M. Bonin (Michel G.): Écoutez, les municipalités... Par exemple, la municipalité de la Baie-James est assez grande, et, dans le cas où il y aurait un parc éolien majeur qui serait, par exemple, aux alentours de LG 2, la municipalité pourrait peut-être avoir des retombées économiques et des redevances. Et en plus, à moindre échelle, parce que ces mégaéoliennes-là... Je pense aussi aux éoliennes un peu plus petites où les municipalités pourraient avoir des redevances.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Donc, Hydro-Québec demeure le maître d'oeuvre, mais, parce qu'elle construit ou elle monte des éoliennes un peu partout, elle redonne à ces municipalités-là une certaine compensation. C'est ce que vous voulez dire?
M. Bonin (Michel G.): Oui, ça pourrait être le cas.
Mme Dionne-Marsolais: Ce n'est pas que les municipalités soient elles-mêmes promoteurs et productrices?
M. Bonin (Michel G.): Ça n'empêcherait pas ça parce que la particularité du biothermique, c'est de le coupler aussi aux petits parcs d'éolien. Donc, si une municipalité voudrait faire un parc de 25 MW d'éolien, en énergie ferme, une turbine à gaz de 25 MW pourrait faire l'affaire. C'est-à-dire en période d'accalmie, c'est la turbine à gaz qui fournit les 25 MW mais de façon ferme.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Donc, vous avez toujours votre éolienne... Cet exemple-là se fait de l'éolienne avec une centrale biothermique.
M. Bonin (Michel G.): Dans les petites...
Mme Dionne-Marsolais: Pour les municipalités...
M. Bonin (Michel G.): Pour les municipalités et tous les autres promoteurs qui veulent vendre de l'énergie saine, que ce soit X, Y, Z qui fasse un parc d'éolien, par exemple, de 100 MW et qui dit à Hydro-Québec Nouvelles énergies vertes: Es-tu capable de m'appuyer dans la fermeté de mon parc? C'est-à-dire qu'Hydro-Québec irait en complément à ce parc d'éolien là de 100 MW. Si vous produisez 50, Hydro-Québec, avec sa centrale turbines à gaz biothermique, fournirait les 50 autres et, en cas d'accalmie, fournirait les 100 MW.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, en fait, Hydro-Québec s'impliquerait comme producteur d'éolien mais n'en aurait pas le monopole.
M. Bonin (Michel G.): C'est exact.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Je comprends.
M. Bonin (Michel G.): Mais aurait le monopole à Hydro-Québec, par contre, Nouvelles énergies vertes.
Mme Dionne-Marsolais: Bien, c'est elle. C'est sûr qu'elle a le monopole chez elle, c'est elle. Ce que vous voulez dire, est-ce que vous voulez dire qu'elle aurait le monopole au niveau de l'achat de l'énergie, de son transport et de sa distribution jusqu'au consommateur ultime?
M. Bonin (Michel G.): Non, absolument pas. Ce serait Distribution qui s'en occuperait. Dans mon idée à moi...
Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais la distribution, à ce jour, ça, c'est Hydro-Québec qui l'a. Est-ce que c'est dans votre idée, ça?
M. Bonin (Michel G.): Oui. Mon idée, c'est d'avoir des mégaéoliennes tout près des centrales hydroélectriques...
Mme Dionne-Marsolais: Qui appartiennent à Hydro.
M. Bonin (Michel G.): ...qui appartiennent à Hydro Nouvelles énergies vertes et qui vendent la production. Et, dans les cas où ce sont des petits parcs, avoir des turbines à gaz avec biocarburant pour appuyer en fermeté les parcs, qu'ils soient de producteurs privés ou qu'ils soient de municipalités ou même à la rigueur de Nouvelles énergies vertes.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Donc, en fait, quand vous dites qu'Hydro-Québec s'implique dans l'éolien, elle peut s'y impliquer, selon votre interprétation, de différentes manières, pas nécessairement dans son statut de monopole, si je peux utiliser cette expression-là.
M. Bonin (Michel G.): Exactement.
Mme Dionne-Marsolais: Il y a de la place pour tout le monde.
M. Bonin (Michel G.): Le soleil brille pour tout le monde.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Deuxièmement, dans cette hypothèse que plusieurs intervenants viennent participer à la production d'électricité à partir de différentes sources très décentralisées finalement mais toujours couplées avec une base pour stabiliser la production éolienne, est-ce que... Ultimement, il faudra que le consommateur consomme ça. Donc, il faudrait qu'il l'achète. Est-ce que vous pensez que, dans le cas où Hydro-Québec est producteur, l'activité Hydro-Québec Production devrait être assujettie à la Régie de l'énergie pour que le consommateur ultime ait vraiment la connaissance des coûts réels?
M. Bonin (Michel G.): Si on crée les réservoirs avec les centrales pompées, donc ce sont des réservoirs artificiels qui seraient sous la juridiction de Nouvelles énergies vertes, la division d'Hydro-Québec, à ce moment-là Nouvelles énergies vertes pourrait balancer son système comme c'est fait actuellement avec Hydro-Québec Production. Dans le cas où on n'est pas là ou que ça coûte trop cher, évidemment le réservoir de production devra balancer comme toutes les autres productions éoliennes.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais ma question, c'est: Est-ce que cette production-là doit être assujettie à la régulation de la Régie de l'énergie? Autrement dit, est-ce que le consommateur a le droit de savoir combien ça coûte, cette production-là? C'est ça, ma question.
M. Bonin (Michel G.): O.K. La production de Nouvelles énergies vertes, je dirais non parce qu'éventuellement, dans mon idée, c'est que cette production-là pourrait s'en aller vers le secteur commercial de très grande puissance électrique. C'est-à-dire, par exemple, les alumineries, à la rigueur, pourraient être détachées du système qu'on connaît actuellement, d'Hydro-Québec Production, et s'en aller strictement sur des éoliennes avec des réserves pompées. Évidemment, on ne sait pas quand exactement. Si le prix... «if the price is right», on pourrait prendre la consommation des grands utilisateurs d'électricité et l'envoyer sur Nouvelles énergies vertes. Et, à ce moment-là, les réservoirs de production seraient ? comme vous le posez souvent comme question ? assujettis à votre loi n° 116.
Mme Dionne-Marsolais: À ma loi. Ce n'est pas loi n° 116.
M. Bonin (Michel G.): Excusez-moi, là, la loi n° 116, là, je ne sais pas...
n(17 h 40)nMme Dionne-Marsolais: Oui. Pour votre information, quand le projet de centrale à réserve pompée sur la rivière Jacques-Cartier avait été soumis ? je m'en souviens très bien parce que j'étais jeune économiste dans le temps ? ce projet-là avait été rejeté pour toutes sortes de raisons, dont l'opposition locale, mais aussi les coûts étaient quand même assez importants. Parce que le coût d'une centrale à réserve pompée, ce n'est pas donné, hein? Je ne suis pas sûre d'ailleurs que ce n'est pas plus cher qu'une éolienne, évidemment toutes choses étant égales par ailleurs, là, par rapport à la capacité et tout.
Mon autre question... Ça, c'est un petit commentaire gratuit.
M. Bonin (Michel G.): Est-ce que je peux me permettre?
Mme Dionne-Marsolais: Ah oui! Bien sûr.
M. Bonin (Michel G.): Oui, je suis conscient de ça, je sais que ça va coûter plus cher faire une centrale réserve pompée, mais l'espoir là-dedans, c'est vraiment de diminuer les coûts de l'éolien. Et ça, on ne se trompe pas. Si on diminue les coûts du kilowattheure éolien de toutes les manières, on va peut-être pouvoir se permettre un système où on va avoir de l'énergie ferme.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, bien, j'ai de la misère à vous suivre, parce que, si l'éolien est plus élevé, disons... Bien, mettons que l'éolien est à 0,065 $, comme on l'a vu, et puis que vous devez avoir une centrale à réserve pompée à côté qui, elle, est encore plus chère, bien, là, je ne sais pas comment on fait pour baisser le coût de l'éolien.
M. Bonin (Michel G.): Non, non. À ce moment-là, ça ne fonctionne pas. Le but de...
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Il y a beaucoup d'hypothèses dans votre...
M. Bonin (Michel G.): Le but de l'affaire, c'est de diminuer à son plus bas coût l'éolien et, après, regarder ce qu'on est capable de faire. La première chose, c'est de diminuer ces coûts-là. Un, avoir des retombées industrielles au Québec puis avoir une industrie qui fait des éoliennes que les autres ne font pas, réduire ce coût-là. Et le meilleur coût, évidemment c'est d'économiser l'eau dans nos réservoirs actuellement. C'est la première priorité.
Mme Dionne-Marsolais: Alors, votre message, c'est une nouvelle génération d'éoliennes à puissance plus élevée.
M. Bonin (Michel G.): Exactement, à puissance plus élevée.
Mme Dionne-Marsolais: Parce que le cinq, six, sept, ça commence à être gros, là.
M. Bonin (Michel G.): Et plus. On ne sait pas jusqu'où ça va aller. C'est pareil comme les moteurs d'avions: ça a commencé voilà 40 ans, et, aujourd'hui, on a des machines qui développent presque 150 000 livres de poussée.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. C'est votre principal message, ça, je l'ai bien compris. Vous aussi, vous parlez beaucoup... Parce qu'avec ce message-là vient un effort de recherche et de développement, hein, puis tout un effort articulé. Est-ce que cet effort de recherche et de développement et de mise au point, à votre avis, ça doit être fait par l'Institut de recherche d'Hydro-Québec ou ça doit être fait par des tiers?
M. Bonin (Michel G.): Je dirais par tout le monde, que ce soit...
Mme Dionne-Marsolais: Bien, tout le monde, là, chez nous, c'est personne.
M. Bonin (Michel G.): Je dirais: Tous les intervenants qui ont vraiment des connaissances de pointe. Par exemple, il y a des universités qui se spécialisent dans l'éolien comme l'Université du Québec à Rimouski. Il y a des gens fantastiques à cet endroit-là, il y a des compétences là. Il y en a à l'IREQ et il y en a à Hydro-Québec aussi. Il y en a un peu partout. Donc, est-ce qu'on est capable de dire exactement à quel endroit sont ces gens-là? Moi, ce que je dis, c'est de faire une équipe et d'aller chercher ces gens-là. Est-ce que c'est au sein d'Hydro-Québec Nouvelles énergies vertes? Est-ce que c'est ailleurs? Je n'ai pas tellement réfléchi à cette chose-là.
Mme Dionne-Marsolais: La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que ce que vous proposez, c'est un effort majeur de recherche qui nécessite une gamme de compétences. Et donc, pour le réaliser, il faut que quelqu'un le paie. Alors, qui va le payer, qui va le financer, cet effort de recherche là?
M. Bonin (Michel G.): O.K. La première étape qui serait la plus simple, c'est de commencer à produire avec qu'est-ce qui existe, avec des volumes qui attirent un manufacturier sérieux d'éoliennes. Par exemple, des éoliennes de 5 MW, on sait que GE en fait. Donc, ce n'est pas tout à fait tablette, mais ça l'est quasiment. Donc, pour générer les revenus, on peut commencer à faire de l'éolien grande puissance aux alentours des barrages et de coupler directement avec le groupe turbine-alternateur cette puissance-là, la vendre à Hydro-Québec Production et ainsi générer des revenus. Et ces revenus-là vont servir à payer la recherche, et évidemment il y aura peut-être une partie d'Hydro-Québec ou d'autres sources d'argent pour venir encourager cette recherche-là. Donc, ce n'est pas d'aller quémander, mais il faut produire de la richesse et il faut... D'après moi, le meilleur moyen de générer de l'argent, c'est de produire quelque chose.
Mme Dionne-Marsolais: Je vous remercie. Je vous comprends très bien, je suis d'accord avec vous, sauf qu'il faut un effort de mobilisation. Parce que, même si on dit: Aujourd'hui, on a une vision puis on veut faire ça, s'il n'y a pas un intervenant qui prend la direction de cette vision-là avec les moyens qu'il faut, on va tous parler de la vision puis, dans 10 ans, on va être encore ici, puis elle ne sera pas faite.
M. Bonin (Michel G.): Mais je dois ajouter qu'il y a un intervenant qui est passé ici, et il s'appelle M. Reid, qui vous a expliqué assez clairement...
Mme Dionne-Marsolais: Le potentiel, oui.
M. Bonin (Michel G.): ...les coûts de l'éolien. Ça tourne aux alentours de 0,04 $ à 0,05 $, dépendant où est-ce que vous êtes, dépendant de votre vent, dépendant de ci, dépendant de ça. Et ça, c'est porteur parce qu'actuellement le privé est à six point quelque chose avec les charges additionnelles d'équilibrage et de réseau, et donc il y a un profit à faire là, qu'on la vende à Distribution ou qu'on la vende à Production, même à des alumineries...
Mme Dionne-Marsolais: Bien, là, les alumineries, ça m'étonnerait parce qu'en termes de coût, là, vous ne baisserez jamais ça à 0,02 $ du kilowattheure.
M. Bonin (Michel G.): C'est un grand défi.
Mme Dionne-Marsolais: Ce qu'ils nous ont dit qui était leur coût de référence. Cela dit, je vous remercie beaucoup. Moi, je n'ai plus d'autre question, M. le Président.
Le Président (M. Paquin): Merci, Mme la députée de Rosemont. M. Bonin, merci beaucoup de votre présence ici. Merci de votre mémoire, c'était très, très, très intéressant.
M. Bonin (Michel G.): Je vous remercie.
Le Président (M. Paquin): J'ajourne donc les travaux à mardi 8 mars, 9 h 30. Et les travaux vont se poursuivre mardi à la salle du Conseil législatif. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 46)