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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Thursday, May 20, 1999 - Vol. 36 N° 17

Consultations particulières sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête de verglas de janvier 1998


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Table des matières

Auditions

Documents déposés

Remarques finales


Autres intervenants
M. Guy Lelièvre, président suppléant
Mme Manon Blanchet
M. Robert Kieffer
M. Stéphane Bédard
M. Rémy Désilets
M. Claude Cousineau
* M. Jean-Bernard Guindon, CUM
* M. Nelson Tochon, CUO
* M. Jean Bissonnette, municipalité régionale de comté de Papineau
* M. Mario Laframboise, idem
* M. Maurice Giroux, municipalité régionale de comté des Laurentides
* M. Pierre-Yves Guay, idem
* M. Denis Savard, idem
* M. Henri Massé, FTQ
* M. Robert Demers, idem
* M. Jean Lavallée, idem
* M. Jean Perreault, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Lelièvre): Alors, mesdames et messieurs, je vais déclarer la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Maintenant, je désire rappeler le mandat de cette commission qui est de procéder à des consultations particulières sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête du verglas de janvier 1998.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements ce matin?

La Secrétaire: Il n'y a pas de remplacements, M. le Président.


Auditions

Le Président (M. Lelièvre): Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Maintenant, ce matin, nous avons un premier invité, qui est la Communauté urbaine de Montréal. J'inviterais les représentants ou les représentantes de la Communauté urbaine à s'avancer et à prendre place.

Alors, si vous voulez bien vous identifier pour les fins de la transcription de nos débats.

M. Guindon (Jean-Bernard): Jean-Bernard Guindon, directeur du Centre de sécurité civile, Communauté urbaine de Montréal.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, au nom des membres de cette commission, il me fait plaisir de vous recevoir, et nous apprécions beaucoup que vous ayez répondu favorablement à l'invitation qui vous a été transmise. Maintenant, selon les règles que nous avons, vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire, et, par la suite, suivra une période d'échanges avec les membres de cette commission pour une durée de 40 minutes. Alors, M. Guindon, si vous voulez nous présenter votre mémoire.


Communauté urbaine de Montréal (CUM)

M. Guindon (Jean-Bernard): Alors, M. le Président, mesdames, messieurs, je tiens d'abord, au nom de la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Mme Danyluk, à remercier la commission de lui avoir donné l'opportunité de présenter ce mémoire. Nous apprécions de pouvoir être entendus à ce moment clé où se prennent des dispositions qui touchent des enjeux majeurs en matière de sécurité énergétique concernant la qualité de vie des Québécoises et des Québécois.

Lors de la tempête de verglas de janvier 1998, nous avons constaté l'ampleur de l'insécurité énergétique dans laquelle se trouvaient la population, les services publics, les entreprises et les autres infrastructures vitales. La question des priorités de rétablissement du courant s'est posée avec une acuité nouvelle. Nous avons compris notre dépendance collective à l'électricité et à d'autres sources d'énergie vitales.

Dans le rapport qui a suivi la tempête de verglas, la Communauté urbaine de Montréal a fait le bilan de ce sinistre majeur et a fait des recommandations à l'égard de la dépendance et de l'interdépendance énergétiques auxquelles nous sommes confrontés. Ces conclusions et recommandations ont été présentées à la commission Nicolet il y a un an presque jour pour jour. Et fort heureusement la commission Nicolet a fait écho à nos préoccupations sur le caractère crucial des infrastructures vitales surtout pour une agglomération de l'importance de celle de la Communauté urbaine de Montréal. C'est donc avec cette thématique que je me présente ici, devant vous, ce matin, assuré que vous saurez prêter une oreille attentive à des préoccupations fondamentales pour la sécurité de nos concitoyennes et concitoyens.

Compte tenu du très court délai que nous avons eu pour préparer ce court mémoire, nous sollicitons votre indulgence par rapport à certains raccourcis que nous avons dû prendre pour vous livrer notre message ce matin. Je tiens d'abord à souligner que je suis ici mandaté par la présidente du comité exécutif et le directeur général de la Communauté. Ils m'ont confié la tâche de vous présenter ce mémoire parce qu'ils partagent ardemment la préoccupation de sécurité des concitoyennes et concitoyens qui est mon lot quotidien comme directeur du Centre de sécurité civile de la Communauté.

Nous nous sentions quelque peu démunis pour présenter devant vous ce mémoire, n'ayant aucun spécialiste en question d'électricité à la Communauté urbaine de Montréal. De plus, nous éprouvons de façon générale quelques difficultés à obtenir toute l'information nécessaire de la part d'Hydro-Québec. Mais je reviendrai sur ce point.

En tout état de cause, la bonne foi de la Communauté ne peut être mise en cause. À preuve, l'approbation que faisait le conseil de la Communauté, le 19 août 1998, de deux avis de conformité aux objectifs du schéma d'aménagement donné au ministre des Ressources naturelles concernant la ligne 315 kV Aqueduc–Atwater–Viger et la ligne 120 kV souterraine Hadley–Atwater. Signalons que ces avis de conformité n'étaient pas des avis d'opportunité en ce sens qu'ils ne constituaient pas une approbation du projet d'Hydro-Québec ni une caution à son égard. Néanmoins, la Communauté a fait diligence pour faciliter cette réalisation jugée si importante par Hydro pour sécuriser l'approvisionnement du centre-ville en électricité.

Ceci étant dit, c'est maintenant beaucoup plus sous l'angle de la sécurité civile que je poursuivrai ma présentation. Précisons tout de suite que, pour nous, sécurité civile ne signifie pas que préparation par rapport aux sinistres éventuels ou interventions efficaces lors de ces sinistres, mais bien et surtout prévention des causes de ces sinistres et atténuation de leurs conséquences lorsque les causes sont incontournables. C'est dans cet esprit que, suivant la tempête de verglas, certains constats ont été faits.

Cet événement nous a placés devant notre ignorance des infrastructures vitales qui soutiennent notre vie personnelle, familiale, sociale et économique. Nous avons dû recevoir des cours d'électricité 101 durant la tempête de verglas, alors que cela aurait dû avoir été fait auparavant.

Cet événement nous a révélé la dépendance de tous à l'énergie électrique; nul besoin d'épiloguer là-dessus.

Le verglas et la panne majeure d'électricité constituent deux risques superposés dont les effets ne s'additionnent pas mais se multiplient en effet domino sur d'autres systèmes vitaux, comme on a pu le constater le 9 janvier avec la perte d'alimentation en eau potable, la perte quasi totale de fourniture de carburant, la perte de systèmes de communication, en Montérégie surtout, et les carences dans le système de distribution des aliments, les travaux publics alourdis et ralentis, l'incapacité de circuler sur la voie publique, etc.

Le syndrome du Titanic nous a surpris par sa ténacité. Cette vieille habitude de suffisance à l'égard des grands travaux de l'humanité a limité nos comportements de prévention et d'atténuation. C'est ce qui a conduit à la sous-estimation du risque tant du verglas que de la panne électrique majeure.

En matière de sécurité civile, les vieux schèmes de gestion d'un site de sinistre ont dû être remplacés par un cadre nouveau. Tout le territoire a été touché, comme s'il y avait eu un tremblement de terre ou un ouragan, ce qui veut dire que, lorsque les grands systèmes vitaux sont au coeur du sinistre, le site devient une portion de pays.

Enfin, nous avons résisté à la tentation de la chasse aux coupables. S'il y a des coupables, nous le sommes tous collectivement. Mais il vaudrait mieux parler de notre responsabilité collective à l'égard du type de société évoluée que nous nous sommes donné. Il semble que les investissements dans l'évolution technologique aient été inversement proportionnels à ceux que l'on a fait en matière de sécurité. Ce qui ne peut que conduire à une impasse, à moins qu'un bon choc de la nature ne vienne nous rappeler à l'ordre, comme le verglas s'en est chargé. Nous croyons que les développements en matière d'hydroélectricité n'ont pas échappé à cette règle. Il y a donc beaucoup de rattrapage à faire.

(9 h 40)

C'est à la lumière de ces constats que la Communauté urbaine de Montréal a fait ses principales recommandations, suite à la tempête de verglas, concernant les infrastructures vitales, et je cite:

«Procéder à des analyses de vulnérabilité sur l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Ces analyses doivent identifier les pires scénarios, elles doivent être basées non seulement sur les probabilités d'occurrence, mais aussi sur l'importance des conséquences engendrées par des sinistres sur les ressources essentielles pour la survie de la population, les organismes et leur environnement. De plus, les résultats de ces analyses devront identifier les mesures d'atténuation et de prévention en fonction des grands systèmes de support à la vie.

«Faire l'étude – c'est une deuxième recommandation – des grands systèmes publics de support à la vie et surtout de leurs interfaces afin d'identifier les liens critiques en cas de sinistre.

«Donner – troisième recommandation – une formation de base aux intervenants sur les caractéristiques les plus essentielles des technologies et des infrastructures de base utilisées sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Par exemple, le fonctionnement du réseau électrique, les conduites dangereuses, etc., et inversement donner une formation de base aux entreprises et aux industries sur le système de sécurité civile au Québec et à la communauté.

«Suivant les résultats des études de vulnérabilité – c'est la quatrième recommandation – et les scénarios de sinistres potentiels, définir les besoins matériels minima à assurer sur le territoire de la communauté urbaine et les services à sécuriser.»

Suite à ces recommandations, le Centre de sécurité civile a élaboré un plan d'action dont l'un des premiers éléments était l'étude des infrastructures vitales. Dès l'été 1998, le travail a commencé pour tenter d'ouvrir les portes afin d'obtenir cette connaissance de base des systèmes vitaux. Le travail se poursuit maintenant avec plus d'intensité. Toutefois, les constats sont assez peu encourageants.

Certains propriétaires de système ne disposent pas d'informations numériques qu'on peut traiter directement avec la géomatique. D'autres en ont mais ne l'ont pas encore partagé. C'est le cas d'Hydro-Québec. Il y a de l'ouverture verbale, il y a des offres de fournir des papiers mais pas de données numérisées, du moins jusqu'à maintenant. Nous ne pouvons que souhaiter obtenir l'information nécessaire dans de brefs délais.

C'est avec ce genre de base de données numérisées traitées en géomatique que l'on pourra étudier efficacement non seulement les systèmes en eux-mêmes et leur vulnérabilité intrinsèque, mais aussi et surtout les interfaces critiques entre ces systèmes, leurs points de vulnérabilité réciproques, comme ce fut le cas durant la tempête de verglas à l'usine Atwater ou à l'usine Des Baillets, l'usine de filtration de Montréal, complètement privées d'électricité le 9 janvier 1998, et cela, évidemment contre toute attente.

Prévenir, c'est d'abord bien connaître pour bien maîtriser. C'est aussi le pouvoir d'agir sur les causes afin de les éliminer ou sur les conséquences afin de les atténuer. C'est surtout bien identifier les interfaces critiques et soutenir les efforts de ceux qui investiront dans l'amélioration de leur robustesse. Nous croyons déceler chez Hydro-Québec une telle volonté, non seulement la volonté de bien servir la clientèle, mais aussi la conscience sociale des effets pervers sur d'autres systèmes vitaux de toute négligence découlant de défaillances de ses propres équipements. Nous aimerions mieux pouvoir partager ce progrès avec l'entreprise.

Mais ne soyons pas dupes de l'augmentation de la robustesse. Celle-ci, avec tout le discours rassurant de relations publiques qui l'accompagne, pourrait conduire à un nouvel endormitoire – je ne le sais pas, si c'est dans le dictionnaire québécois – nous amenant à revivre le syndrome du Titanic. L'illusion de la sécurité absolue nous guette. C'est pourquoi la Communauté préconise, dans ses recommandations d'après verglas, l'éducation des citoyens à la prise en charge individuelle et familiale, sur une base de trois jours, en cas de sinistre majeur.

En corollaire, beaucoup d'organismes font la promotion de moyens alternatifs d'alimentation en énergie. Nous préconisons aussi l'amélioration de l'éducation à la culture de la sécurité civile dans tout le système scolaire, de manière à ce que les femmes et les hommes de demain soient en mesure de mieux prendre les décisions collectives avec le critère de sécurité en tête, en plus des critères économiques, environnementaux et de création d'emplois.

L'illusion de sécurité pourrait aussi amener les dirigeants d'Hydro à revenir aux priorisations de rétablissement en cas de panne qui ne tiendraient plus compte des interfaces avec les autres grands systèmes vitaux comme l'alimentation en eau potable. J'ouvre une parenthèse pour dire que ce propos correspond à des choses entendues du genre: Bien, quand on sera sécurisé, on va revoir nos priorités comme elles étaient auparavant.

Il nous tarde donc de voir Hydro publier une liste officielle de priorités de rétablissement qui soit claire, officielle, largement partagée et publicisée, liste qui mettra au premier rang, en P-1 comme ils disent, le rétablissement des infrastructures vitales. Il nous tarde de voir Hydro vouloir partager ses préoccupations de sécurisation de la fourniture d'électricité aux Québécoises et aux Québécois avec les autorités en sécurité civile de manière à créer une synergie bénéfique aux deux parties. Les actions de l'une ne seront pas complètes sans celles de l'autre et inversement. Ce propos vaut aussi pour la sécurité civile du gouvernement du Québec.

En terminant, quoi de mieux que de citer notre propre rapport suite à la tempête de verglas. En parlant des problématiques que nous avons invoquées dans ce mémoire, celles-ci «dépassent beaucoup le seul cadre de la Communauté urbaine de Montréal et touchent toutes nos sociétés modernes, considérant les interrelations complexes existant entre l'omniprésence des systèmes technologiques qui deviennent de plus en plus essentiels et les changements climatiques ou écologiques». C'est la question de la complexité qui constitue notre défi pour l'avenir. Avec la concertation et l'ouverture nécessaire, nous éviterons de nous replier collectivement et de combattre après le fait plutôt que de tenter de prévenir et ainsi diminuer nos coûts collectifs. La Communauté urbaine de Montréal est prête à relever ce défi en partenariat avec Hydro-Québec et les autres fournisseurs de systèmes vitaux.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. Guindon, je vous remercie. Je céderai maintenant la parole à M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, je vous remercie et je suis prêt à remercier M. Guindon, de même que la présidente de la Communauté urbaine de Montréal à qui j'ai parlé cette semaine et qui vous a délégué, au nom de la Communauté urbaine de Montréal, M. Guindon, comme directeur des services de sécurité à la Communauté.

Ça m'apparaissait, et ça nous apparaissait, nous, tout à fait incontournable que la Communauté urbaine vienne s'exprimer devant cette commission, parce que, si on se souvient bien, même si ça commence à être un peu éloigné dans le temps... Mais on réussit quand même fort bien à se rappeler des événements. Il suffit d'ouvrir le rapport Nicolet, qui en fait une description et un historique exhaustifs, pour constater évidemment que l'île de Montréal, la ville de Montréal, le territoire de la Communauté urbaine de Montréal a été durement touché, durement frappé, très affecté par la tempête de verglas et que, on le sait – vous parliez tantôt d'approvisionnement en eau potable – on a même frôlé, on pourrait dire, la tragédie. Alors donc, le point de vue de la Communauté apparaissait tout à fait essentiel à cette commission. Je vous en remercie.

(9 h 50)

Ma première question porte évidemment sur les travaux qu'Hydro-Québec a entrepris sur l'île de Montréal, presque complétés, et aussi sur les travaux qu'elle envisage dans le but de sécuriser davantage l'approvisionnement d'électricité de tout le territoire de l'île de Montréal. C'est vrai que... Et d'ailleurs je dois signaler que – vous le dites très bien dans votre mémoire – la Communauté urbaine a bien collaboré, bien coopéré, selon ses compétences, entre autres en émettant des avis de conformité aux objectifs du schéma d'aménagement.

Et vous avez raison de dire que vous n'aviez pas à approuver les projets comme tels, mais, compte tenu de ce qui s'est fait... Vous le savez, vous connaissez les projets, vous connaissez les travaux: une ligne 315 kV entre Aqueduc et Atwater, également la ligne Duvernay–Anjou qu'on a finalement construite également après bien des années de cheminement; et puis aussi le projet demeure d'alimenter par un autre corridor le poste Hertel, qui joue un rôle essentiel également en matière d'approvisionnement du centre-ville de Montréal, pour qu'on puisse disposer de 2 000 MW, à Hertel, par plus d'un axe d'alimentation. Est-ce que vous reconnaissez, même si vous n'aviez pas eu, comme Communauté urbaine, à approuver les projets, que l'ensemble de ces travaux augmente de façon significative le niveau de sécurité d'approvisionnement en électricité de l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine de Montréal?

M. Guindon (Jean-Bernard): M. le ministre...

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): Oui. Je vous disais tantôt qu'on n'est pas, personne à la Communauté, spécialiste en matière d'hydroélectricité, de distribution électrique ou de transport, donc je serais un peu en peine de vous donner un avis officiel ou une opinion officielle de la Communauté à cet égard. Mais c'est bien évident que, si on s'est empressé de donner un avis de conformité, c'est que nous avions au moins, en toute bonne foi, confiance qu'Hydro-Québec faisait là des travaux pour améliorer cette sécurité et que, même si on ne pouvait pas juger de leur opportunité ou de leur valeur intrinsèque, on était moralement convaincu en tout cas que ça allait définitivement augmenter la sécurité. Et il suffit aussi d'observer – ce que j'ai personnellement fait en faisant la piste cyclable qui longe ces travaux – que la robustesse nouvelle est évidente, à sa face même. Je pense entre autres aux immenses pylônes...

M. Brassard: Tubulaires.

M. Guindon (Jean-Bernard): ...style poteaux, là...

M. Brassard: Oui.

M. Guindon (Jean-Bernard): ...je ne sais pas comment vous les appelez...

M. Brassard: Tubulaires.

M. Guindon (Jean-Bernard): ...tubulaires, voilà, et aussi à l'enfouissement de la ligne en sous-sol qui sont deux facteurs, à mon avis, qui ajoutent de la robustesse. C'est sûr aussi qu'au point de vue du bouclage du territoire – puisque ça, cette problématique-là, on l'a bien vue pendant la tempête de verglas – ça nous rassure. Mais on aimerait pouvoir effectivement disposer de plus de données pour mieux apprécier la chose et bien – comme je le disais dans le mémoire – visualiser les impacts par rapport à toutes les autres infrastructures vitales qu'on a sur le territoire.

On pense souvent à l'eau potable, vous savez, mais la crise du carburant a failli être aussi tragique. Les pétrolières de l'est, à un moment donné, n'avaient plus d'électricité, et la seule source de carburant qu'on avait, c'était une des pétrolières qui avait un réservoir par gravité qui nous permettait donc d'avoir un peu de pétrole. Et on se rend compte, quand on fait toute la chaîne, que, si on n'a pas le pétrole, on ne peut pas faire fonctionner les génératrices et que les génératrices ne peuvent pas alimenter les hôpitaux. Or, la priorité des hôpitaux devient à ce moment-là soumise à la priorité qu'on fait d'un système qui a l'air, en apparence, aussi secondaire que le carburant mais qui devient prioritaire.

Alors, dans ce sens-là, on aimerait mieux comprendre. Et notre perception, a priori, est que c'est le cas, que ça améliore la situation, mais on aimerait mieux comprendre davantage les liens plus techniques, sans pour autant rentrer dans des dimensions d'ingénierie ou de spécialistes, pouvoir apprécier la chose et pouvoir contribuer aussi, collaborer avec Hydro-Québec pour l'amélioration des interfaces, comme je le mentionnais dans le mémoire.

Le Président (M. Lelièvre): M. le ministre.

M. Brassard: Oui. Une petite anecdote, en passant, M. Guindon. Vous savez très bien, là, je ne veux pas vous entraîner dans ce débat-là, mais qu'il y a certains groupes qui se sont opposés à certains projets de la programmation et de la planification d'Hydro-Québec puis qui évidemment ont fait beaucoup et souvent les manchettes, encore cette semaine.

Mais on me disait, cependant... Puis ça, évidemment, on ne l'a jamais vu dans les journaux, ça n'a jamais fait l'objet d'un reportage télévisé. Mais vous parliez des pylônes tubulaires qui ont remplacé les pylônes conventionnels dans le corridor Atwater–Aqueduc. Il y a des habitations tout près. On me racontait que les familles, les habitants de ce quartier-là allaient féliciter les travailleurs qui étaient en train d'installer la nouvelle ligne parce qu'évidemment ça améliorait nettement leur vision, leur décor.

En fait, c'est simplement pour dire qu'il y a des opposants, sans doute, mais qu'il y a aussi du monde qui était très content de voir certains travaux se faire, particulièrement dans ce secteur de l'île de Montréal, entre Atwater et Aqueduc. Puis effectivement je l'ai survolée, la ligne, aussi, puis, ma foi, il faut dire que ce genre de pylône là, sur le plan esthétique, ce n'est pas si laid, ce n'est pas laid, même c'est très agréable à regarder. Ceci étant dit, ce n'est pas l'objectif principal évidemment que d'avoir un bon coup d'oeil, mais ça ne nuit pas quand ça peut s'intégrer dans un projet.

Ceci étant dit... Je vous le disais, c'était une anecdote en passant. Mais vous avez également mentionné dans votre mémoire des difficultés de relations entre la Communauté et Hydro-Québec. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage? Et qu'est-ce qui a manqué, quel genre de défaillance s'est produite dans vos relations? Parce que, dans une situation de crise et de gestion de crise, vous avez raison de mentionner que les communications, c'est capital, et elles doivent être, ma foi, je dirais, sinon parfaites en tout cas presque parfaites. Quel était le genre de défaillance qui est apparue dans vos relations avec Hydro-Québec et qu'est-ce que vous souhaiteriez qui se produise pour que vraiment les relations et les communications entre Hydro-Québec et la Communauté soient plus que convenables?

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): M. le ministre, je voudrais tout de suite corriger l'impression que j'aurais pu laisser en disant qu'il y avait des défaillances dans la qualité de nos relations avec Hydro-Québec. Je pense que la qualité de nos relations avec Hydro-Québec est excellente. Sur le plan interpersonnel, sur le plan des rapports humains, si je puis dire, elle est excellente. Elle l'était avant la tempête de verglas. Pendant la tempête de verglas, je dois dire qu'on a eu une collaboration exceptionnelle de la Direction du territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Nous avons eu un délégué permanent, même deux et trois à un moment donné, au centre d'urgence d'Hydro-Québec à Montréal et nous avons eu de la communication privilégiée tout au long de la tempête de verglas. Nous avons donc établi là d'ailleurs des liens exceptionnels en termes, je dirais, de qualité de relations.

Mais le côté un peu spécial de la situation, c'est que ces gens-là, on les rencontrait pour la première fois quand la tempête a commencé. Et, quand on avait tenté d'établir des liens avec les gens d'Hydro-Québec avant, on avait tenté de trouver des interlocuteurs qui, par hasard, n'étaient pas du tout les mêmes que ceux qui étaient les vrais interlocuteurs qu'on a eus au cours de la tempête de verglas. Et ça, c'est pour un point.

Après la tempête de verglas, on a eu encore affaire avec Hydro-Québec. Et, comme je disais assez ironiquement au dernier que j'ai vu, je disais: Encore quelqu'un de nouveau à Hydro-Québec. Est-ce qu'on va finir par avoir quelqu'un à qui on peut se rattacher, se relier de façon continue, et être sûr d'avoir des communications que j'appellerais suivies et consistantes? Parce que tout le monde est de bonne foi, tout le monde est même très collaborateur, très ouvert, mais on a de la misère à trouver l'interlocuteur.

Et les réponses que les gens nous font à ce genre de remarque, c'est de dire: Oui, on est beaucoup de monde à Hydro-Québec, puis les responsabilités sont très fragmentées, divisées, etc., et c'est une grosse entreprise, et, bon, on comprend que vous trouvez ça difficile. Mais, mon propos, dans le mémoire, n'était pas tellement pour évoquer cet aspect des choses, mais je suis content de pouvoir en parler suite à votre question. Donc, il n'y a aucun problème sur le plan de la qualité des relations, il n'y a aucun conflit, il n'y a aucune difficulté de ce côté-là.

Là où les difficultés se présentent... Et on avait tenté avant la tempête de verglas de commencer à établir un peu le portrait de toute la situation hydroélectrique sur le territoire de la Communauté. Fort heureusement, on avait au moins acquis cette compréhension du système de bouclage périphérique à l'île et des différentes entrées sur le territoire. Il y avait un minimum de choses qu'on savait. Mais, quand même, on en a appris beaucoup au cours de la tempête de verglas. Et ce que nous avions résolu, et suite à... Le rapport que je citais tantôt a été fait avec la concertation de tous les intervenants du territoire de la Communauté urbaine.

(10 heures)

Donc, ce n'est pas seulement nous, à la Communauté, comme interlocuteurs, mais la majorité des interlocuteurs des municipalités, des grands intervenants, qui souhaitent qu'on ait cette connaissance plus approfondie des systèmes. Même les maires, pendant les conférences téléphoniques que nous faisions lors de la gestion de la tempête de verglas, s'impatientaient quelque peu qu'on leur explique des choses sans qu'ils comprennent vraiment de quoi on parlait. Et je pense que tout le monde a besoin de plus de compréhension à cet égard.

Et, nous, on travaille, pour être efficace, avec la géomatique. Et la géomatique suppose d'avoir de l'information numérisée qu'on peut référencer d'une façon géographique et, avec les interfaces de couches, de pouvoir faire une analyse, évidemment, des systèmes les uns par rapport aux autres. Et c'est là qu'on rencontre certaines difficultés, c'est-à-dire que, du côté d'Hydro, on n'a pas de facilité à obtenir l'information dite numérisée. On nous offre du papier. On a accès à des cartes, à des choses qui ne sont pas directement utiles pour faire le genre de travail qu'on fait sans qu'on investisse énormément dans la transposition papier vers le numérisé pour pouvoir traiter cette information. Donc, c'est là qu'est plus notre point de difficulté et, tant qu'on n'a pas accès à des données numérisées qu'on peut traiter de façon compatible avec notre système géomatique, on est dans une position un peu difficile pour faire des études, compte tenu évidemment du peu de ressources qu'on peut consacrer à tout ça et d'une certaine rapidité qu'il faut avoir là-dedans.

On s'achemine vers le passage à l'an 2000. Il y a donc aussi une certaine préparation, même une préparation très certaine qu'on fait à cet égard, et ça fait partie des choses qu'on veut bien maîtriser par rapport à ce passage à l'an 2000. Et, même si Hydro-Québec nous dit qu'il faut être rassurés, que tout va bien aller, on doit prendre pour acquis qu'il y a des défaillances possibles quand même. Ce n'est peut-être pas de la part d'Hydro-Québec mais peut-être d'autres sources, et, au total, il faut se préparer. Donc, dans cet esprit-là, c'est là qu'est le point, M. le ministre. C'est vraiment sur de l'information numérisée qu'on peut vraiment utiliser pour travailler à mieux apprivoiser tout ça et mieux en parler.

Le Président (M. Lelièvre): M. le ministre.

M. Brassard: Oui, bien, je comprends très bien. Je pense que c'était important. Peut-être que j'avais mal interprété vos propos. Donc, ce n'est pas au niveau de la qualité des relations qu'est le problème, les relations sont excellentes avec Hydro-Québec, quoique vous souhaitiez peut-être que vos interlocuteurs soient plus permanents, plus stables, mais c'est sur le plan des informations mêmes, des échanges d'informations, des informations dont vous auriez besoin particulièrement sur le plan géomatique pour mieux connaître ce que vous appelez, dans votre mémoire, les systèmes d'infrastructures ou les infrastructures vitales. Vous utilisez cette expression-là. Au fond, c'est ça. Je pense que c'est sûrement un problème qui peut se résoudre par la bonne volonté de part et d'autre. Je vous remercie.

Le Président (M. Lelièvre): Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. M. Guindon, merci d'être ici. Je suis une députée de la région de Montréal qui a vécu une semaine à l'extérieur de la maison, puisque le quartier où j'étais, on a malheureusement finalement fini par perdre l'électricité. Et le rapport Nicolet, pour les régions urbaines dont Montréal, disait que ça pourrait être une initiative heureuse, d'avoir un programme d'enfouissement des fils du réseau et puis que ce programme en question là devrait être une initiative gouvernementale, mais toutefois en partenariat avec d'autres compagnies qui utilisent parfois les mêmes poteaux. Parce qu'à un moment donné c'est l'électricité, mais c'est le téléphone, c'est le câble, et tout et tout.

Alors, est-ce que la CUM a fait l'évaluation d'un tel programme qui pourrait être lancé? Puis évidemment est-ce que vous en avez fait l'évaluation, c'est-à-dire les avantages et les désavantages parce que évidemment il y a une question de coûts, ça en est aussi question dans le rapport Nicolet justement pour l'ensemble de vos municipalités qui sont membres de la CUM?

M. Guindon (Jean-Bernard): Comme je disais, je suis désolé de ne pas pouvoir vous répondre parce qu'on n'a pas le genre de spécialiste à la Communauté pour avoir fait le genre d'études que vous souhaiteriez.

On connaît les enjeux, par exemple, comme tout le monde, de ce que ça veut dire, l'enfouissement des fils, c'est-à-dire des coûts additionnels importants. Et ce que je peux dire, seulement, au niveau des élus de la Communauté, c'est que nous sommes en état de haute surveillance sur tout ce qui s'appelle des coûts au niveau municipal sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal; je pense que je ne vous apprendrai rien là-dessus.

Vous avez suivi comme nous les épisodes d'approbation du budget de la Communauté pour l'année 1999. Alors, je pense traduire la pensée de mes patrons, les élus, en disant qu'ils ont une haute sensibilité à tout ce qui s'appelle des dépenses importantes. Et je pense qu'on doit tenir compte de ce facteur, si jamais les municipalités ou la Communauté devaient être mises à contribution au niveau des coûts reliés à un projet d'enfouissement des fils.

Vous parlez essentiellement, je suppose, des fils électriques pour la distribution? Oui. Alors, c'est sûr et certain qu'il y a aussi dans les nouveaux projets des fils qui sont enfouis actuellement, mais pour refaire toute l'île ou des parties importantes de l'île, je ne peux vous dire rien sur le plan de l'expertise là-dessus parce que, encore une fois, je vous réitère qu'on ne l'a pas étudié. Mais je suis certain que l'enjeu de cette question, ça va être la question des coûts, si jamais il y en a qui sont impartis aux municipalités. Et, là-dessus, je pense que je n'ai pas de démonstration à faire sur la sensibilité des élus à cet égard.

Le Président (M. Lelièvre): Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Justement, par rapport à... Bon. Il y a déjà des municipalités, dont Montréal entre autres, qui... Il y a la Commission des services électriques de la ville de Montréal qui gère, en tout cas, sous une forme ou une autre, une espèce de programme comme celui-là. Et d'ailleurs il y a des quartiers de Montréal qui ont leurs fils enfouis. Entre autres, les gens de la commission Nicolet nous parlaient du nouveau développement dans le quartier Angus, où, bon, là, malheureusement, justement à cause des coûts, il y a une première phase qui, elle, a ses fils enfouis et une deuxième phase qui... ou la troisième phase, si je me souviens bien, qui, elle, ses fils sont aériens.

Mais justement est-ce que l'expertise de la ville de Montréal, ou de par sa Commission, ne pourrait pas aider à faire une bonne évaluation des pour et des contre, si les municipalités ou l'ensemble des municipalités ne devaient pas, à un moment donné, envisager un tel programme ou finalement prendre la décision de ne pas s'engager dans un tel programme?

M. Guindon (Jean-Bernard): Je suis très heureux que vous mentionniez la Société de développement Angus parce qu'on a ouvert les portes à une collaboration entre nous. Et je le dis aussi tout à fait... heureusement parce que cette corporation s'est adressée à nous à cause d'une préoccupation particulière non seulement par rapport à l'environnement, mais par rapport à la sécurité sur l'ensemble du site Angus. Et nous allons aborder d'ici peu cette collaboration-là de façon beaucoup plus concrète, dont les paramètres restent à déterminer, mais on veut... En tout cas, l'intention que nous avons dans cette collaboration, c'est de se baser sur une expérience comme celle du site Angus pour éprouver un ensemble de mesures de sécurité, autant passives qu'actives, qui pourraient servir de modèles ou de démonstrations par rapport à d'autres implantations, ailleurs.

Mais je pense que, au lieu de prendre le dossier impliquant la question d'enfouissement des fils mais toute autre mesure reliée à la sécurité, de prendre le dossier sur une base globale, c'est plus intéressant de partir avec une initiative comme celle de la Société de développement Angus qui a cette préoccupation au départ.

(10 h 10)

J'ai même reçu tout récemment la copie officielle de la politique qui vient d'être adoptée par le conseil d'administration de la Société de développement et qui préconise un certain nombre de principes qui vont favoriser, je pense, qu'on aille le plus loin possible dans des mesures qui vont servir sans doute de vitrine dans le futur, pour qu'on fasse la démonstration de l'équilibre entre les coûts et les bénéfices, pour l'ensemble des mesures de sécurité. Alors, on va aborder le dossier très bientôt avec eux, au début de juin, et je serai très heureux évidemment de faire part des résultats ou eux-mêmes de faire part des résultats de nos démarches, éventuellement.

Mme Blanchet: Merci.

Le Président (M. Lelièvre): Mme la députée de Crémazie, est-ce que vous avez d'autres questions?

Mme Blanchet: Non, c'est bien. Merci.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, je céderai la parole au député de Groulx.

M. Kieffer: M. le Président, merci. M. Guindon, bienvenue. Je le dis à tous et à toutes qui viennent nous rencontrer et je vous le répète: La commission de l'économie et du travail se penche sur la question de la sécurisation, à la fois, des réseaux et de la demande énergétique pour l'ensemble du Québec. Vous êtes un joueur important, évidemment. La Communauté urbaine de Montréal représente, à tout le moins, le tiers de la population québécoise. Votre participation et l'éclairage que vous nous apportez, même si vous n'êtes pas un spécialiste... Mais, moi, ça ne me dérange pas trop parce que je n'en vois pas beaucoup autour de la table, et c'est bon, de temps à autre, de pouvoir se parler autrement qu'à titre de spécialistes mais de gens qui ont vécu des expériences et qui ont des connaissances pertinentes.

Donc, votre participation à nos débats me confirme dans la nécessité de tenir cette commission et dans la nécessité pour les participants qui ont été affectés par le verglas de pouvoir y présenter leurs points de vue.

Première question: Du début à la fin, pour la Communauté urbaine, de la première panne au rebranchage de la dernière, ça a été combien de temps exactement?

M. Guindon (Jean-Bernard): Je me souviens du 16 janvier qui est une date fatidique pour nous parce qu'on a cessé les opérations, je dirais, d'urgence, mais il y a eu une reprise le 23 janvier. La semaine suivante, on a eu la panne causée par la ligne qui provenait du secteur des Laurentides. Je dirais que c'est dans cette semaine-là, mais vous dire le nombre de jours exacts, mais c'est dans cette semaine-là, à ma mémoire, qu'on a eu un rétablissement qui était,

à toutes fins pratiques, presque complet. Il restait peut-être des petits îlots à certains endroits qui n'étaient pas branchés.

Mais ce qui nous préoccupait, et c'est surtout ça qui est le point, c'est que, même si la majorité ou la presque totalité de tous les abonnés étaient rebranchés, on nous avait bien clairement informés que nous étions en déficit de kilowatts – et un déficit fort important – qui maintenait un état de fragilité qui faisait que, à n'importe quel moment, n'importe quel événement le moindrement dérangeant comme un froid intense suite à une température douce ou toutes sortes de facteurs autres pourraient créer des problèmes sérieux. On avait même demandé aux entreprises et aux industries qui pouvaient le faire d'économiser l'électricité.

Alors, de ce côté-là, je vous dirais qu'on a été, si ma mémoire est bonne, pendant un gros mois dans cette période d'insécurité, et ça, pour moi, c'était peut-être même plus préoccupant que de savoir qu'il y avait encore – c'est triste pour les gens qui sont concernés, là – quelques abonnés qui, pour des raisons x, y, vers la troisième semaine, pouvaient ne pas être encore branchés. Parce que ça voulait dire que des pans de quartier entiers pouvaient, à tout moment, tomber dans le noir, puis, avec l'incertitude que ça suppose, ça nous préoccupait énormément.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Groulx.

M. Kieffer: Merci, M. le Président. Donc, on peut facilement conclure que le blackout quasi total, c'est une semaine, mais la fragilité du système qui faisait qu'il pouvait tomber à tout moment, et je le répète, pour le tiers de la population du Québec – c'est 2 000 000 facilement et plus – vous l'évaluez facilement à un mois avant que les choses soient rétablies et qu'on puisse reprendre confiance dans la bonne marche des activités métropolitaines.

M. Guindon (Jean-Bernard): Exact.

M. Kieffer: C'est énorme. C'est énorme. Est-ce que la Communauté urbaine s'est penchée sur les pertes économiques qu'elle a subies, et ça, à tous les niveaux? J'ai posé la même question hier à la Chambre de commerce. Quelles sont vos évaluations des pertes économiques et financières subies par l'ensemble de ceux qui ont affaire à la Communauté urbaine de Montréal?

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): On a tenté une certaine évaluation de ça quand on s'est présenté devant la commission Nicolet. Remarquez que c'est tout à fait approximatif. On ne peut pas vous donner des chiffres absolument certains, mais je peux au moins vous donner un aperçu, si vous permettez.

Oui, j'ai un certain nombre de données, ici. Ce n'est peut-être pas celles que vous voulez entendre, mais j'en ai au moins quelques-unes. Le nombre de jours ouvrables pour les entreprises sur le territoire. Donc, il faudrait évaluer ce que ça veut dire en termes, là... C'est quatre à cinq jours, du jeudi 8 janvier ou vendredi 9 janvier au mercredi 14 janvier. Donc, on pourrait multiplier par le nombre d'employés et un calcul de salaire moyen pour connaître les pertes économiques qui s'ensuivent. Mais cette donnée-là, pour nous, c'est ce qu'on a pu contrôler.

Les coûts pour la Communauté urbaine et ses organismes ont été de l'ordre de 15 000 000 $. Je ne l'ai pas ici, dans le document que j'ai sous les yeux, mais j'avais, dans un autre document, aussi le total des pertes pour... agglomérées de la région de la Montérégie et de la région de Montréal qui étaient de l'ordre de 945 000 000 $ à peu près, et chiffre, je crois, qui a été plus ou moins repris par la commission Nicolet.

Alors, c'est sûr que c'est énorme. C'est sûr que les impacts indirects n'ont pas pu être évalués. Et, nous, on souhaite faire les recherches nécessaires pour qu'on puisse davantage – et je dis «nous», pas à la Communauté urbaine, mais avec la collaboration que nous avons avec les universités sur le territoire, puisqu'on en a déjà plusieurs, universités, qui collaborent avec nous pour des éléments de recherche – aller plus loin là-dedans pour vraiment analyser l'impact des dommages. Et ce n'est pas tellement l'impact en lui-même qui est le plus passionnant à trouver, c'est-à-dire le coût des dépenses encourues lors d'une telle situation, mais c'est de confronter ces coûts-là par rapport à ceux de la sécurisation, donc de la diminution éventuelle des dommages et des pertes pour les citoyens, et surtout des pertes économiques.

M. Kieffer: Dernière question, M. le Président, si vous me permettez.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Groulx, oui.

M. Kieffer: Et ça, ça m'amène évidemment à ce que je considère comme étant un des éléments les plus importants du réseau de sécurisation de la RMR, de la grande région métropolitaine, qui sera évidemment la ligne Hertel–des Cantons.

Vous en parlez dans votre texte – je l'ai souligné, d'ailleurs – à la page 2, vous dites: «Lors de la tempête de verglas de janvier 1998, nous avons constaté l'ampleur de l'insécurité énergétique dans laquelle se trouvaient la population, les services publics, les entreprises et les autres infrastructures vitales.»

Alors, ce n'est pas rien. Quand on dit «l'ampleur de l'insécurité énergétique», ça signifie, dans mon vocabulaire, que c'était quelque chose d'important, cette insécurité-là. Hydro-Québec a proposé, et la commission Nicolet aussi, un certain nombre de mesures dont, entre autres, pour ce qui est d'Hydro-Québec, la fameuse ligne Hertel–des Cantons.

Elle va apporter à Montréal quelque chose comme 2 000 MW de sécurité, hein, c'est clair, c'est ça que ça veut dire. Ce n'est pas 2 000 MW en surplus de ce qu'elle a actuellement, puisqu'elle reçoit tout ce dont elle a besoin par les lignes traditionnelles, sauf qu'elle va permettre, dans l'éventualité où il y a une ligne qui tombe quelque part, de pouvoir se raccorder de l'autre côté pour 2 000 MW. Est-ce que vous considérez que c'est trop, suffisant ou pas assez?

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon, le député de Groulx vous a donné un choix multiple. Ha, ha, ha!

M. Kieffer: J'aurais aimé vous donner le chiffre de la consommation totale – je l'ai demandé à mes fonctionnaires, il y en a peut-être qui le savent ici – le chiffre de la consommation totale d'énergie...

Une voix: Pour l'île de Montréal.

M. Kieffer: ...pour l'île de Montréal.

Une voix: ...dans la grande région, c'est à peu près la moitié de la consommation du Québec.

M. Kieffer: Donc, on peut parler de 15 000?

Une voix: Donc, 15 000 MW de puissance.

M. Kieffer: Bon. Donc, la consommation globale se situe à 15 000 MW, bon an, mal an, quotidiennement; 2 000, c'est-u trop?

(10 h 20)

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): Qui pourrait dire que c'est trop? Ha, ha, ha! Encore une fois, je ne voudrais pas tomber dans une analyse que nous n'avons pas faite. Mais, à sa face même, le bon sens dit que le maximum de redondance est requis si on veut sécuriser l'approvisionnement en électricité sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Et, sans que je tombe – et je m'en garderai bien, vous comprendrez aussi, d'ailleurs, de discuter de ce qui touche la ligne Hertel–des Cantons – dans cette discussion-là, je dois dire que, que ce soit la ligne Hertel–des Cantons ou toute autre ligne qui servirait à boucler et sécuriser le territoire de la Communauté urbaine pour le nombre de mégawatts maximum, ce sera considéré comme bienvenu par définition, mais, ceci dit, sans juger du mérite de tel ou tel projet ou des impacts autres que ceux dont on parle pour la Communauté urbaine de Montréal.

Donc, si la ligne Hertel–des Cantons, pour les fins de la discussion, on parlait d'une autre ligne qui passe du côté des Laurentides, pour dire quelque chose, et qu'il n'y avait pas eu de débat public comme celui qu'il y a eu de l'autre côté, on pourrait donner la même opinion, c'est-à-dire une opinion que le maximum de redondance est fort bienvenu et...

M. Kieffer: Donc, ce que vous nous dites, c'est que Hertel–des Cantons ou toute autre ligne – mais, en l'occurrence, il n'y a pas «toute autre ligne»; c'est Hertel–des Cantons – sa fonction de sécurisation du réseau hydroélectrique de Montréal, elle est effectivement là et c'est essentiel.

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): Moi, je ne suis pas en mesure, pour les raisons que j'ai exposées tantôt, de l'absence de données suffisantes pour avoir analysé ça dans le détail... Mais, avec ma compréhension de bon sens et de connaissances minimales dans le domaine de la distribution et du transport d'électricité, je dois comprendre que le bouclage est un processus qui, comme dans les télécommunications d'ailleurs ou dans tout autre domaine, est un processus élémentaire pour assurer la sécurisation de l'approvisionnement.

M. Kieffer: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Merci, M. Guindon. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui. Alors, M. Guindon, j'ai lu avec grand intérêt votre mémoire et j'ai retenu deux choses. Plusieurs choses, mais il y en a deux qui m'ont frappé. D'abord, le syndrome du Titanic, syndrome que je ne connaissais pas, mais j'ai trouvé l'expression bonne, celle de la fausse sécurité vécue. Et vous faisiez état, un peu plus loin, de la notion de sécurité par rapport aux ouvrages. Souvent, à complexifier les choses, on va rentrer plusieurs données, les données environnementales, les données, de même, purement esthétiques, on en oublie souvent l'essentiel. Et ça a pris, je crois, deux événements majeurs pour se rappeler qu'on est à la merci un peu des événements quand même et des conditions climatiques, peu importe, et que cette notion de sécurité là doit toujours revenir.

D'où ma première question un peu, c'est seulement à titre personnel. Vous êtes le directeur du Centre de sécurité civile de la Communauté urbaine de Montréal. Donc, c'est au-delà de 2 000 000 de personnes, j'imagine, à peu près? Combien avez-vous d'employés?

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): Nous sommes, incluant moi-même, cinq employés réguliers plus un certain nombre de contractuels ou de personnel d'appoint, et notre force consiste dans le travail que nous faisons en partenariat et en réseautage avec des chercheurs dans les différentes universités. Nous avons actuellement des rapports avec au moins quatre universités. Quand je dis des rapports, c'est plus que des rapports. On conduit des travaux, des études sur certains aspects d'analyse de risque.

Puis nous avons évidemment un réseau de concertation avec tous nos partenaires sur le territoire de la Communauté urbaine. Et j'ai fait une évaluation qu'il y avait, bon an, mal an, quelque part autour de 50 personnes qui travaillaient ou qui gravitaient autour du Centre de sécurité civile de la Communauté urbaine pour fournir des output par rapport aux objectifs qu'on poursuit, qui sont la préservation de la sécurité des citoyens sur le territoire. Et, nous, notre accent, je dirais, c'est: éléments d'analyse de risque et de concertation pour y arriver.

Donc, c'est bien sûr qu'à la petite équipe qu'on est, si on la regarde juste sous cet angle-là, nous sommes fort peu nombreux et que nous avons nécessairement besoin de beaucoup de partenariats, de beaucoup d'alliances pour pouvoir atteindre les résultats qu'on recherche.

M. Bédard: Merci.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui. Vous faites état, dans votre mémoire à la page 4, de certaines recommandations d'analyse et d'étude par rapport au grand système public. Je me demandais: Est-ce que vous avez donné un suivi à ça? Parce que j'imagine que ça, ces recommandations-là ont été faites lorsque vous avez présenté le mémoire à la commission Nicolet. C'est ça? Où est-ce que vous en êtes là-dessus? Est-ce que vous avez fait des démarches?

Le Président (M. Lelièvre): M. Guindon.

M. Guindon (Jean-Bernard): Oui. Dès l'été dernier – même si je n'avais pas un très gros budget et surtout pas un budget prévu pour ça parce qu'on était dans le cadre du budget 1998, donc après la tempête de verglas – j'ai pu engager une stagiaire étudiante à la maîtrise en environnement de l'Université de Sherbrooke pour commencer à faire un peu de débroussaillage du terrain. Mes employés géomaticiens et analystes de risques ont continué au cours de l'année, et là j'ai une nouvelle stagiaire qui est spécialisée en urbanisme, qui vient de terminer une maîtrise en urbanisme et qui poursuit le travail. Et on est relié, pour ce travail-là aussi, à des chercheurs de l'Université McGill qui, eux, travaillent davantage le dossier sous l'angle du tremblement de terre. Mais c'est fort intéressant de travailler sous l'angle du tremblement de terre parce que c'est l'hypothèse de destruction totale, ou, du moins, la plus totale qu'on puisse imaginer.

Donc, en faisant les scénarios du pire avec la perspective du tremblement de terre... Puis je pense que c'est connu que le risque de tremblement de terre est présent dans la région de Montréal. C'est sûr qu'il est davantage présent dans le coin de Charlevoix et du Saguenay, mais il reste tout de même que l'historique des tremblements de terre passés – quoi que ce n'est pas la chose la plus évidente dont on parle régulièrement – cet historique-là nous témoigne que nous avons là quelque chose d'important. Donc, on l'a pris sur ce biais-là et les études se poursuivent.

Et là on commence un projet bientôt d'analyse de tous les édifices publics du territoire pour leur résistance non seulement au point de vue structurel, mais au point de vue des infrastructures vitales dont ils sont les dépositaires. Et on oublie souvent cet élément-là, que, dans un édifice, par exemple, si vous avez une génératrice d'urgence – je donne un tout petit exemple – et que cette génératrice est déposée sur un plancher au lieu d'être ancrée, bien, ça fait toute la différence au monde si jamais il arrive un tremblement de terre parce que l'infrastructure de l'édifice se trouve à défaillir au moment où c'est peut-être la seule chose qui resterait pour notre survie. Alors, je donne un exemple comme ça pour illustrer le genre de recherches auxquelles on travaille.

Et, par l'impact vu sous l'angle du scénario du tremblement de terre, on sera en mesure de mieux apprécier la robustesse des systèmes des infrastructures vitales de toutes sortes, dont le système électrique, et, à ce moment-là, on pourra prévoir les mesures de sécurisation, de préparation des municipalités et les mesures d'atténuation, s'il y a lieu, et de prévention qui s'imposent pour faire face à cette situation-là.

Il y a d'autres grandes villes dans le monde d'ailleurs qui ont fait ce genre d'analyse et qui évidemment sont peut-être plus vulnérables, mais qui le font et le font avec succès et qui souvent, par des mesures extrêmement simples et peu coûteuses, peuvent aider à prévenir des sinistres fort importants. Quand je parlais, par exemple, d'un système d'ancrage tantôt, on ne parle pas de coûts épouvantables, mais on parle de résultats, par exemple, qui sont très, très sécurisants pour ceux qui prendraient de telles mesures. Alors, c'est le genre de travail qu'on va faire.

On poursuit, nous, à notre bureau, la cueillette des données sur les infrastructures vitales. Et c'est ce que j'évoquais quand je disais tantôt, dans le mémoire, les difficultés que nous pouvons avoir à obtenir l'information. Et vous savez que, là-dessus, il y a d'autres propriétaires d'infrastructures qui sont en assez mauvaise posture. Je ne voudrais pas citer une personne, mais il y a encore, en 1999, des propriétaires d'infrastructures vitales qui n'ont pas informatisé leurs données, et ça, c'est un sérieux problème.

M. Bédard: Une dernière question.

Le Président (M. Lelièvre): Rapidement...

M. Bédard: Oui, très rapidement.

Le Président (M. Lelièvre): ...pour donner la chance au député de Maskinongé de poser ses questions. Il avait demandé la parole également.

M. Bédard: Concernant la priorisation de rétablissement, bon, vous faites état que vous êtes dans l'attente de ce qui va être déposé par Hydro-Québec. Plus tôt, vous faisiez état de votre collaboration et de l'état des discussions que vous aviez avec Hydro-Québec. Est-ce que vous avez fait, j'imagine que vous avez fait des représentations auprès d'Hydro-Québec à cet effet-là?

(10 h 30)

M. Guindon (Jean-Bernard): On a obtenu, lors de présentations, par exemple, qui ont été faites par Hydro-Québec surtout dans le cadre de la préparation au passage de l'an 2000, l'assurance verbale que les infrastructures, surtout l'alimentation en eau potable, étaient P-1. Mais j'avais d'autres informations qui me laissaient croire qu'on pouvait, sinon douter, en tout cas être un peu dans l'ambiguïté à cet égard-là. Parce que, d'autres sources, j'entendais des gens d'Hydro-Québec dire: La première priorité, c'est le rétablissement des centres hospitaliers, pour donner un exemple. Or, ça, c'étaient les anciennes priorités qui avaient été établies avant la tempête de verglas et qui ont été changées au cours de la tempête de verglas. Je m'inquiétais – et je pense qu'il y en a d'autres qui partagent cette inquiétude à la Communauté – qu'on ait une position très claire, officielle, écrite là-dessus pour être bien sûr qu'il n'y ait plus d'ambiguïté.

Parce qu'il y a une chaîne incontournable dans cette priorisation-là, ce n'est pas rien que desservir des clients. Vu du point de vue d'Hydro, c'est sûr que ce sont des clients, tout le monde est des clients, mais, vu du point de vue de la sécurité des citoyens, c'est, d'abord et avant tout, une chaîne de priorisation qui a un effet domino. Donc, ce n'est plus rien que l'importance... Par définition, des personnes malades dans des hôpitaux, c'est sûr que c'est d'une importance vitale, mais, si on regarde toute la chaîne, c'est le premier maillon de la chaîne qui est le plus important pour que tout le reste tienne bien. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on défend l'hypothèse d'être sûrs que toutes nos infrastructures sont les plus absolument sécurisées.

L'hébergement de personnes, donner des secours de toutes sortes, c'est relativement facile à faire, mais, quand vous n'avez plus d'électricité ou d'eau potable, même dans les endroits où on héberge les gens, ça devient un enfer à vivre. Évacuer très loin des personnes parce qu'elles n'ont plus ce qu'il faut pour vivre... On l'a vu avec l'expérience de la Montérégie. On avait offert d'héberger des citoyens de la Montérégie, et il n'y a à peu près personne qui est venu se faire héberger sur le territoire de la Communauté. Pourquoi? Parce que les gens veulent demeurer proche de chez eux ou même le plus possible chez eux. Donc, il faut respecter, je crois, cette volonté des citoyens et plutôt travailler à la soutenir plutôt que de l'empêcher.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Merci, M. le Président. M. Guindon, vous parlez dans votre mémoire d'infrastructures vitales, puis vous en avez fait mention à plusieurs reprises, et, dans la commission Nicolet, on parle de lignes stratégiques. Pouvez-vous commenter? Pour vous, est-ce que c'est pareil, la nomenclature?

M. Guindon (Jean-Bernard): En fait, on utilise plusieurs expressions, mais la commission Nicolet utilise dans son rapport aussi l'expression «infrastructures vitales». Mais je pense que, pour peu que j'aie pu passer à travers le rapport Nicolet, parce qu'il était assez difficile à obtenir pour commencer, on parle de la même chose.

La commission Nicolet l'a divisé en cinq grandes catégories, si ma mémoire est bonne, et nous nous adressons à ces mêmes réalités, c'est-à-dire tout ce qui touche notre support à la vie, du matin jusqu'au soir, pour qu'on puisse fonctionner, donc: l'alimentation en électricité, en eau potable, les communications, la chaîne alimentaire, la chaîne de distribution d'aliments, la chaîne de distribution d'eau autre que celle par l'aqueduc, et le carburant. Et c'est ces systèmes-là actuellement que nous étudions et que nous voulons approfondir, à la Communauté urbaine.

M. Désilets: O.K. C'est beau. Ce n'était que ça, ma question. C'est beau.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. le député de Maskinongé, je vous remercie. M. Guindon, le temps qui nous était imparti est maintenant épuisé. Au nom de cette commission, je vous remercie de vous être présenté au nom de la Communauté urbaine de Montréal et de nous avoir fait part de vos constatations et de vos préoccupations passées, présentes et futures et des remèdes que vous entendez y apporter. Alors, je vous remercie.

La commission va suspendre temporairement ses travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 34)

(Reprise à 11 h 12)

Le Président (M. Lelièvre): Alors, la commission va reprendre ses travaux. Et j'inviterais les représentants de la Communauté urbaine de l'Outaouais conjointement avec la municipalité régionale du comté de Papineau, je crois, à s'avancer et à prendre place.

Alors, bonjour, M. Laframboise, vos compagnons pourraient-ils s'identifier, pour le bénéfice de cette commission, pour que nous puissions faire en sorte que les enregistrements et que la transcription soient conformes?

M. Tochon (Nelson): Bien sûr, M. le Président. Mon nom, c'est Nelson Tochon, de la Communauté urbaine de l'Outaouais.

M. Bissonnette (Jean): Jean Bissonnette, urbaniste à la MRC de Papineau.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, bienvenue devant cette commission. On vous remercie d'avoir répondu favorablement à l'invitation qui vous a été transmise pour que la commission de l'économie et du travail continue ses travaux et les enrichisse de votre participation concernant la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête du verglas de janvier 1998. Alors, M. Laframboise, je pense que vous êtes un des porte-parole. Je vous laisse la parole.


Communauté urbaine de l'Outaouais (CUO) conjointement avec la municipalité régionale de comté de Papineau

M. Laframboise (Mario): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, nous tenons tout d'abord à vous remercier de nous avoir invités à ces consultations particulières sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec. Il s'agit d'une présentation et d'un mémoire conjoints, que je vous lirai, de la MRC de Papineau, que je représente aujourd'hui, et de la Communauté urbaine de l'Outaouais. Et sachez d'emblée que les autres MRC de l'Outaouais ont donné leur aval à notre présentation ainsi qu'à notre mémoire. Aujourd'hui, je vous parlerai donc au nom du monde municipal de l'Outaouais.

Nos responsables du Service de la planification et de l'aménagement du territoire, M. Tochon et M. Bissonnette, de la MRC de Papineau, m'accompagnent. Ils ont été nos représentants techniques lors des discussions avec Hydro. Et je me permettrai de les inviter à répondre si vous aviez des questions d'ordre technique à poser au terme de notre présentation.

Vous avez déjà reçu notre mémoire. Il est accompagné d'ailleurs du mémoire déposé lors des consultations de l'automne dernier sur le tracé du moindre impact d'Hydro-Québec. À ces documents est jointe notre requête en jugement déclaratoire. Je vous rappelle que cette requête a été déposée afin d'obtenir du comité gouvernemental, le comité Harvey, qu'il respecte sa juridiction sans remettre en cause le travail ardu qui a été accompli à l'égard de la détermination du tracé du moindre impact. Nous en ferons état plus loin.

Avant d'entamer à proprement parler la lecture d'extraits de notre mémoire, je vous livrerai deux brèves réflexions qui illustrent notre état d'esprit. D'abord, ce n'est pas parce que le grand verglas de janvier 1998 a sévi avec une moins grande intensité dans la région de l'Outaouais qu'il faut considérer acceptable la vulnérabilité actuelle de l'alimentation électrique de notre région. Et, deuxièmement, nous considérons que le gouvernement du Québec et sa société Hydro-Québec partagent la responsabilité d'assurer la sécurité du public et la sécurité de l'alimentation électrique des régions. Ce sont là des devoirs d'État.

Mesdames et messieurs de la commission, d'entrée de jeu, s'il est un élément prépondérant de la grande question du bouclage de l'Outaouais et des Laurentides, c'est bien la nécessité de faire traverser les territoires des MRC des Laurentides, de Papineau, des Collines-de-l'Outaouais et de la Communauté urbaine de l'Outaouais par une nouvelle ligne de transport hydroélectrique. Ce fait déterminant, les maires de l'Outaouais l'ont compris et accepté. La ligne de 315 kV qui reliera le poste Vignan de Gatineau et le poste Grand-Brûlé de Saint-Jovite, desservi déjà par deux lignes de 735 kV, assurera à la fois une disponibilité électrique à l'Outaouais mais également à la région des Laurentides et à d'autres régions québécoises, dont le Grand Montréal. Ce serait un lien structurant contribuant à la sécurité de l'alimentation électrique de toute la région sud-ouest du Québec.

Il est vrai que la nouvelle ligne construite l'an dernier, dans le même processus de sécurisation du réseau québécois, entre le futur poste de l'Outaouais et la province de l'Ontario vient conforter le réseau actuel, mais ce n'est pas suffisant. Il nous apparaît clairement que cette interconnexion ne saurait en aucun temps suffire à sécuriser l'alimentation électrique en Outaouais. Et la raison en est bien simple: la connexion avec l'Ontario se situe à la même latitude que l'alimentation actuelle de la région de l'Outaouais, c'est-à-dire dans un axe est-ouest sensible au verglas. Prétendre que cette connexion suffirait à sécuriser l'alimentation électrique de l'Outaouais en revient à soutenir que les intempéries ne traversent jamais la rivières des Outaouais. À ceux et celles qui seraient portés à défendre cette thèse, nous rappellerons que l'est de l'Ontario a également été touché par le grand verglas de janvier 1998. Voilà la preuve que le réseau de transport hydroélectrique ontarien ne peut dépanner l'Outaouais lors d'événements naturels majeurs.

La sécurisation de l'alimentation électrique de l'Outaouais implique donc nécessairement la construction d'une autre ligne d'alimentation prenant sa source à une autre latitude et reliant la région dans un autre axe. La seule solution viable pour nous et les citoyens que nous représentons est le projet qui relierait le poste Vignan de Gatineau et le poste Grand-Brûlé de Saint-Jovite. En somme, l'Outaouais n'est desservie par le réseau québécois que par deux lignes parallèles, une première de 120 kV et une seconde de 315 kV, longeant la rivière des Outaouais à partir de la grande région de Montréal, principalement du poste Chénier jusqu'au coeur de l'Outaouais.

La ligne projetée, qui prendrait sa source au poste Grand-Brûlé, un poste desservi déjà par deux lignes de 735 kV, viendrait sécuriser le réseau de l'Outaouais. Qui plus est, cette ligne, comme toutes les autres, serait réversible, c'est-à-dire que la sécurité qu'elle nous procurerait serait aussi une sécurité pour les autres régions, pour nos voisins. Ainsi, à l'aide du réseau de l'Outaouais, des barrages privés de l'Outaouais ou du réseau ontarien, il serait possible, en cas de bris, de desservir la région des Laurentides et d'autres régions québécoises, dont Montréal.

Nous avons toujours cru qu'Hydro-Québec profiterait de la présence de cette nouvelle ligne pour tenter d'exporter de l'énergie à la province voisine. Pour nous, il s'agit d'une décision d'affaires pour Hydro-Québec et son actionnaire, le gouvernement du Québec. Ce qui nous préoccupe davantage dans l'Outaouais, c'est la sécurisation de notre approvisionnement hydroélectrique avant tout débat d'exportation de l'électricité. Notre position tient d'ailleurs en une seule question: Comment pourrait-on faire accepter aux citoyens de l'Outaouais qu'ils devraient accepter la fragilité de leur alimentation électrique sous prétexte que la solution toute trouvée, la construction d'une nouvelle ligne de transport, pourrait aussi hypothétiquement servir à d'autres fins, dont l'exportation? Vous comprendrez tous que la poser, c'est y répondre.

Nous avons donc, en Outaouais, pris nos responsabilités: nous avons revu nos structures d'urgence, nous avons travaillé avec Hydro-Québec à l'établissement du tracé de moindre impact, selon les délais impartis et imposés par le gouvernement. Il reste maintenant au gouvernement à assurer la réalisation de ce bouclage qu'il a lui-même décrété pour l'Outaouais, pour les Laurentides et pour le Québec. En imposant une audience publique, sous l'égide du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, pour les trois bouclages, dont celui de l'Outaouais–Laurentides, dans l'objectif principal de répondre à certains mécontentements exprimés, le gouvernement retarderait indûment la construction de notre ligne qui fait l'unanimité quant à sa présence et sa nécessité, et ce, parmi l'ensemble de nos MRC, municipalités, organismes et citoyens.

Je voudrais maintenant brièvement traiter devant la commission des discussions qui ont mené à l'adoption du tracé de moindre impact. Dès le début des travaux d'Hydro-Québec, les MRC de Papineau, des Collines-de-l'Outaouais et la Communauté urbaine de l'Outaouais ont adopté une attitude positive et, bien qu'elles n'aient pas été entièrement enchantées de la présence d'une nouvelle ligne de transport d'électricité traversant leur territoire, elles ont considéré qu'il s'agissait néanmoins d'une nécessité, de sorte qu'il leur apparaissait important dans les circonstances de participer, de concert avec tous les intéressés, aux travaux permettant l'identification et le choix par Hydro-Québec du tracé du moindre impact.

(11 h 20)

Pour ce qui est de la concertation avec la Communauté urbaine de l'Outaouais, les discussions furent relativement rapides considérant que la future ligne sera essentiellement construite en parallèle à la ligne de 120 kV actuelle.

Pour la MRC des Collines-de-l'Outaouais, les discussions se sont bien déroulées, et ce, malgré le passage à travers des secteurs touristiques importants et des traverses de rivières, le tout dans le souci de la préservation de la qualité des paysages.

Pour la MRC de Papineau, les échanges furent plus importants considérant, entre autres, la distance parcourue par la ligne. Tout de suite après le verglas, mon conseil de MRC a adopté une résolution invitant la direction d'Hydro-Québec à débuter rapidement les échanges d'informations sur le projet de construction de la ligne de transport d'électricité. Dans les jours qui ont suivi, Hydro-Québec a communiqué avec les représentants de la MRC pour annoncer une proposition préliminaire de corridor au sud du territoire. Mais, comme Hydro-Québec ne pouvait justifier d'avoir exclu de son champ d'études une grande partie du territoire de notre MRC, le conseil des maires demanda à Hydro-Québec d'élargir le secteur d'études afin de trouver, sur tout son territoire, le tracé de moindre impact. De l'aveu même des représentants d'Hydro, ce premier corridor, dit sud, a été réalisé en trois jours, ne tenant pas compte des prérogatives de la région dont certains schémas d'aménagement révisés, alors en vigueur depuis quelques semaines, qui innovaient en instaurant de nouveaux objectifs et normes de gestion des paysages sensibles à même un outil unique, le cadre écologique de référence.

Les maires de Papineau désiraient donc que l'ensemble du territoire fasse l'objet de la recherche du tracé du moindre impact et non seulement un corridor d'environ 5 km de largeur situé au sud. D'autant plus que, dès le début, les travaux de recherche effectués alors par la MRC à même ses outils écologiques démontraient hors de tout doute que le tracé du moindre impact environnemental se situait plus au nord de son territoire. Par la suite, Hydro-Québec accepta d'étudier et d'analyser le corridor nord indiqué par la MRC en lui consacrant les mêmes ressources et en effectuant les mêmes recherches auparavant déployées pour le corridor sud. La MRC accepta parallèlement d'analyser plus en profondeur le corridor proposé au sud par la société d'État. Dès le mois de juin, Hydro annonça, à la suite de son étude de l'ensemble des informations à caractère environnemental disponibles, que le tracé du moindre impact était effectivement situé dans l'axe proposé par la MRC de Papineau, soit le corridor nord.

En somme, il est vrai qu'au début des échanges avec Hydro les discussions furent difficiles et que nous nous sommes opposés à la démarche alors imposée. Mais personne, ni Hydro-Québec ni le gouvernement, ne pouvait contrer la volonté des maires qui désiraient simplement qu'Hydro-Québec étudie un corridor le plus large possible afin de conclure à un réel tracé de moindre impact. Hydro-Québec l'a compris, a fait son travail et a conclu à un tracé du moindre impact qui, disons-le, est considérablement différent du corridor de départ. Hydro-Québec a agi en bonne entente avec les citoyens, les organismes et les représentants du milieu dans la recherche du tracé du moindre impact. Nous ne pouvons cependant en dire autant du comité formé par le gouvernement du Québec, appelé le comité Harvey.

Je prendrai maintenant quelques instants pour exprimer notre insatisfaction à l'égard de ce Comité. À compter de la publication de l'étude des répercussions environnementales d'Hydro, les informations diffusées publiquement relativement au projet de la société d'État ne portèrent que sur le corridor nord, c'est-à-dire celui retenu par Hydro-Québec, en accord avec nous, comme comportant le tracé du moindre impact.

Cependant, en cours de processus, le Comité, au-delà des pouvoirs qui lui avaient été conférés par le gouvernement du Québec, annonçait son intention de faire une proposition au ministère de l'Environnement en fonction du tracé modifié soumis par la MRC des Laurentides, tracé qu'il a lui-même qualifié dans son rapport, de «tracé de compromis politique». Ce n'était pas du tout dans son mandat. Le Comité aurait délibérément voulu attiser des querelles régionales qu'il n'aurait pas agi autrement. Nous ne pouvions accepter cela. Dès que la MRC de Papineau a constaté que le comité gouvernemental se substituait à Hydro-Québec en choisissant de retenir des parties de tracés modifiés sans disposer d'études techniques à son soutien et en demandant aux instances politiques de trouver un tracé de compromis plutôt que le tracé du moindre impact, et ce, après que les consultations publiques furent terminées, la MRC de Papineau a entrepris les procédures judiciaires nécessaires.

Le rapport du comité gouvernemental, sous une apparence d'objectivité et d'impartialité, a confondu l'objet des mandats, tant le sien que celui d'Hydro-Québec, a détourné le processus de consultations publiques et a tenté de discréditer l'examen environnemental du dossier et d'imputer le désaccord entre les autorités publiques concernées à la MRC de Papineau. En somme, il a surtout manqué à sa juridiction.

Dans sa requête, l'Outaouais veut s'assurer que les seules conditions auxquelles seront assujettis les certificats d'autorisation que devra délivrer le ministre de l'Environnement en vertu de l'article 22 de la Loi sur la qualité de l'environnement soient celles établies par les décrets même du gouvernement du Québec. L'Outaouais n'acceptera jamais qu'un tracé autre, voire même un petit secteur du tracé autre, que celui du moindre impact environnemental soit retenu par le gouvernement et imposé à Hydro-Québec. Comment le gouvernement qui a défendu l'urgence d'agir au point d'adopter des décrets pourrait-il aujourd'hui être cohérent avec lui-même en contestant le tracé présenté par Hydro-Québec?

Le bouclage de l'Outaouais et des Laurentides est un projet prioritaire qui répond à des impératifs de sécurité publique et de devoir d'État. On ne saurait le subordonner à des considérations de querelles de clocher. Les citoyens de l'Outaouais et les organisations qui les représentent ont compris cette nécessité.

Avant de conclure, je m'en voudrais de ne pas vous parler du partenariat Hydro-Québec–MRC de Papineau sur un important projet de gestion intégrée de la végétation aux abords du réseau de distribution électrique, votre commission ayant également comme mandat la sécurisation du réseau de distribution.

Depuis la tempête de verglas, les préoccupations reposent presque uniquement sur le réseau de transport, soit par les projets de bouclage soit par la solidité des pylônes. On a oublié trop rapidement que le verglas de janvier 1998 a aussi mis en évidence la vulnérabilité du réseau de distribution électrique aux conditions climatiques extrêmes. En Montérégie, dans le triangle noir, 24 000 poteaux du réseau de distribution se sont écroulés à cause du verglas; en Outaouais, seulement 200. Néanmoins, la mise hors service du réseau de distribution a été tout aussi considérable en Outaouais mais s'explique principalement par la chute des arbres à proximité du réseau.

Consciente de l'importance du réseau de transport et de la nécessité de réaliser des bouclages au Québec, la MRC de Papineau a eu un questionnement sur la fragilité du réseau de distribution, particulièrement en milieu boisé. Bien qu'essentielle, une nouvelle ligne de transport n'empêchera pas le réseau de distribution de s'effondrer à nouveau. Nos efforts seront vains si, à partir des postes électriques, les réseaux de distribution s'effondrent, ne nous permettant pas d'alimenter les hôpitaux, les centres de services, les résidences, les commerces, les industries et autres.

C'est sous un objectif de sécurisation du réseau de distribution que la MRC de Papineau a approché Hydro pour regarder de près la situation et tenter d'optimiser le programme actuel de maîtrise de la végétation de la société d'État. Au mois d'avril de l'année dernière, la MRC de Papineau et les dirigeants d'Hydro-Québec signaient la première entente spécifique à cet effet entre la société d'État et une MRC. Déjà, Hydro-Québec travaille sur la généralisation du projet à l'échelle de la province. Il en va d'ailleurs de sa responsabilité de mettre autant d'efforts sur le réseau de distribution trop souvent oublié, voire négligé, qu'il en met sur son réseau de transport.

En conclusion, la MRC de Papineau et la Communauté urbaine de l'Outaouais se prononcent fermement et résolument en faveur de la reprise immédiate des travaux de sécurisation des réseaux de transport et de distribution d'Hydro-Québec afin de protéger l'Outaouais contre une répétition à grande ou petite échelle des événements survenus en janvier 1998. Sous aucune considération, les citoyens de l'Outaouais ne sauraient tolérer une plus grande vulnérabilité de leur alimentation électrique. Il en va de leur sécurité et du devoir d'État du gouvernement du Québec et de sa société, Hydro-Québec.

Les MRC de l'Outaouais et la Communauté urbaine ont agi avec sérieux et détermination afin de protéger, dans les limites de leurs pouvoirs, la sécurité de l'alimentation électrique de leurs citoyens. Mais nous ne pouvons pas intervenir seuls sur la fiabilité du réseau de transport. Nous avons fait notre effort en concluant avec célérité et dans la reconnaissance de l'urgence un tracé de moindre impact ralliant tous les intervenants de la région et Hydro-Québec. Il serait politiquement inacceptable que votre commission parlementaire et le gouvernement du Québec fassent fi de la volonté commune des citoyens de l'Outaouais et de leurs organismes de représentation qui ont su transcender leurs préférences locales et personnelles pour le mieux-être du plus grand nombre.

Aussi, au nom des citoyens qu'elles représentent, la MRC de Papineau et la Communauté urbaine de l'Outaouais demandent à votre commission et au gouvernement du Québec de reconnaître le projet de bouclage Outaouais– Laurentides comme étant nécessaire, de reconnaître que la ligne projetée entre le poste Vignan de Gatineau et le poste Grand-Brûlé de Saint-Jovite est la seule solution réelle à la sécurisation de l'alimentation électrique de la région de l'Outaouais; de reconnaître le tracé de moindre impact d'un poste à l'autre tel qu'établi par Hydro-Québec et de donner les certificats d'autorisation en vertu de ce tracé du moindre impact dans les meilleurs délais; et enfin de supporter et promouvoir activement le seul projet de partenariat au Québec s'adressant directement à la sécurisation du réseau de distribution. Nous vous en remercions.

Le Président (M. Lelièvre): M. Laframboise, je vous remercie. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre.

(11 h 30)

M. Brassard: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais remercier la MRC de Papineau et la Communauté urbaine de l'Outaouais d'avoir répondu à l'invitation de cette commission pour venir exprimer leur point de vue sur cette question fondamentale pour l'ensemble des Québécois, qui est la sécurisation de l'approvisionnement électrique des populations touchées par la tempête de verglas, mais on peut dire aussi, je pense, de l'ensemble de la population du Québec.

Votre point de vue nous apparaissait requis, compte tenu que l'Outaouais a aussi été durement touché par... peut-être moins, dans une moindre mesure que la Montérégie par exemple, mais c'est une région qui a quand même été durement affectée par la tempête de verglas. Alors, votre présence est tout à fait intéressante pour les membres de cette commission.

Ma première question évidemment porte sur ce que Hydro-Québec a projeté ou planifié pour sécuriser davantage, augmenter le niveau de sécurité d'approvisionnement de la région de l'Outaouais. Il y a évidemment le bouclage, on en reparlera tout à l'heure, mais il y a aussi une interconnexion permanente avec l'Ontario.

Et, à cet égard, je comprends que ça ne vous satisfait pas, ce projet d'interconnexion, vous ne semblez pas y voir là un équipement qui augmenterait de façon notable le niveau de sécurité de l'Outaouais. Vous semblez plutôt y voir une infrastructure visant surtout à augmenter les échanges avec notre voisin immédiat, l'Ontario, ce qui ne vous indigne pas en soi. Vous ne trouvez pas ça, si je comprends bien votre mémoire, scandaleux en soi que ça puisse servir à augmenter les échanges ou ce qu'on pourrait appeler les exportations d'électricité vers l'Ontario, mais vous ne considérez pas que cette infrastructure est vraiment... que sa présence a pour effet d'augmenter le niveau de sécurité. C'est ce que je comprends. C'est ce qui fait que vous insistez davantage et que vous mettez toute la priorité en matière de sécurité d'approvisionnement sur le bouclage, c'est-à-dire une autre source d'alimentation, un autre axe d'alimentation entre le poste Vignan et Grand-Brûlé.

Mais pourquoi cette position? Parce que le rapport de la commission Nicolet, par exemple, oui, reconnaît que les bouclages, c'est une façon de faire et un moyen d'augmenter le niveau de sécurité, de sécuriser davantage, mais la commission Nicolet aussi, en plus, considère également que les interconnexions constituent un moyen tout aussi efficace et souhaitable, en tout cas, pour sécuriser l'approvisionnement en électricité des populations concernées. Autrement dit, la commission Nicolet considère que la sécurisation doit se faire par une combinaison de moyens. Le bouclage en est un, mais l'interconnexion est jugée tout aussi importante par la commission Nicolet. Et, dans votre mémoire, vous ne semblez pas considérer l'interconnexion avec l'Ontario, qui est projetée de façon permanente – là, il y en a une temporaire – comme étant une infrastructure qui vient augmenter sensiblement le niveau de sécurité de votre région.

M. Laframboise (Mario): Ce qu'on vous dit, M. le ministre, c'est que l'Ontario vit les mêmes problèmes au même niveau, au niveau de la latitude; leur réseau est parallèle au nôtre. Donc, l'interconnexion qui peut être efficace... Et ça, il faut donner quand même crédit à l'Ontario qui a quand même dépanné l'Outaouais dans la crise du verglas. Sauf que, dans une crise aussi importante qui aurait eu lieu en Outaouais, elle a eu lieu de façon plus importante dans le sud-est, mais, si on replace, si elle avait été plus centrée vers le sud-ouest, on pense que ça n'aurait pas été suffisant et qu'on aurait vécu, que l'Ontario aurait vécu les mêmes problèmes catastrophiques que le Québec.

Il faut donc développer une ligne qui n'a pas de distribution parallèle, qui n'assure pas le transport de façon parallèle à celle existante pour se donner plus de chances. Évidemment, c'est là-dessus qu'on base toute notre théorie et c'est sur cette base-là qu'on a défendu nos idées devant Hydro-Québec aussi face à une ligne qui passait plus au nord, qui assurait un autre axe de latitude pour éviter que les intempéries nous touchent tous de la même façon.

Donc, on n'est pas contre l'interconnexion, ça nous a bien aidés parce que effectivement l'Ontario, par le réseau temporaire, nous a quand même aidés dans le cas du verglas. Sauf que, vous le savez, l'Ontario n'a pas la même capacité avec Hydro Ontario qu'a Hydro-Québec, et on est toujours, quant à nous, plus sécurisés par la qualité des interventions et du potentiel hydroélectrique du Québec. Donc, c'est de là l'importance du bouclage. Mais vous semblez nous dire qu'on minimise l'interconnexion. On ne minimise pas l'interconnexion. Elle est bien, ça la prend, mais, dans une voie de sécurisation pour nos citoyens, c'est important qu'on ait une ligne qui, à une autre latitude, vienne desservir l'Outaouais, pour augmenter nos chances de réussite advenant une autre crise.

Le Président (M. Lelièvre): M. le ministre.

M. Brassard: Oui, je comprends. Ce que vous nous dites, dans le fond, c'est que l'interconnexion n'est pas inutile en soi. Sauf que votre argument, c'est que, comme ça se situe dans le même corridor géographique, s'il y a des dégâts ou des dommages qui peuvent, suite à un événement météo, apparaître dans l'Outaouais, il y a des bonnes chances que ça apparaisse également de l'autre côté de la rivière, donc en Ontario, ce qui effectivement a été le cas en janvier 1998.

Il faut cependant dire que cette interconnexion avec l'Ontario, aux dires même d'Hydro-Québec, ça ne vise pas uniquement à sécuriser la région de l'Outaouais, je pense qu'Hydro-Québec est très claire là-dessus. Cette interconnexion, par où on pourrait transiter quelque 1 200 MW, ça vise aussi à sécuriser, je dirais, l'ensemble du Québec. Parce que, s'il y avait des difficultés ou des problèmes sur les lignes de haute tension venant de la Baie James, de la rivière La Grande, du Complexe La Grande, donc venant du nord, il serait tout à fait utile de pouvoir faire entrer au Québec, pas juste pour l'Outaouais, mais pour l'ensemble du Québec, un 1 200 MW venant de l'Ontario par l'interconnexion permanente.

Alors, je pense qu'Hydro-Québec ne s'en est jamais cachée, que cette interconnexion permanente avec l'Ontario, ça ne visait pas seulement la sécurisation de l'Outaouais. Alors donc, je comprends votre point de vue, et c'est ce qui fait que, pour vous, la véritable sécurisation de la région de l'Outaouais, c'est vraiment le bouclage, c'est-à-dire un autre axe d'alimentation entre Grand-Brûlé et le poste Vignan.

(11 h 40)

Cependant, à cet égard, je pense qu'il y a eu des audiences publiques devant le comité présidé par M. Harvey. Il y a encore une controverse. En tout cas, il y en a certainement un tronçon qui est très controversé. On va sans doute s'en rendre compte cet après-midi quand on recevra des élus de la région voisine, de la région des Laurentides. Mais vous comprenez aussi que le processus va être repris, vous comprenez la situation dans laquelle se retrouve le gouvernement parce que les décrets qui ont autorisé ces projets-là ont été jugés illégaux.

Donc, oui, pour le gouvernement – ça, je peux vous le dire de façon très claire pour le gouvernement, pour Hydro-Québec aussi, je pense qu'il n'y a pas d'ambiguïté à cet égard – le bouclage de l'Outaouais nous apparaît une nécessité. C'était dans vos conclusions. Là-dessus, je vous le dis sans ambages: On se rejoint, le gouvernement, Hydro-Québec, la région de l'Outaouais. Oui, il faut boucler. Le bouclage est nécessaire. Mais, compte tenu de ce qui est arrivé devant les tribunaux, il faut reprendre le processus. J'espère et je souhaite qu'il sera moins long que ça aurait été le cas s'il n'y avait rien eu de fait entre-temps, s'il n'y avait pas eu de consultations, des audiences publiques. J'espère que le processus va être moins long, la durée va être moins longue, mais faut le reprendre.

Alors, vos positions, évidemment, je pense qu'elles sont connues, mais il faut que vous soyez conscients que vous aurez à les réexprimer devant le BAPE de nouveau, puisque nous avons été, compte tenu des décisions judiciaires, dans l'obligation de reprendre le processus pour ce qui reste à construire. Vous êtes bien conscients de ça.

Le Président (M. Lelièvre): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Vous dire, bien conscient... Vous nous le dites, on est vraiment conscient. Mais vous dire qu'on est bien satisfait, non.

M. Brassard: Ça, c'est une autre affaire.

M. Laframboise (Mario): Évidemment, si vous nous ramenez M. Harvey qui va présider le BAPE, c'est bien évident que, nous, on a défendu et on maintient qu'on a défendu un tracé du moindre impact environnemental. Vous aurez la chance, j'espère, de poser des questions à la MRC voisine qui, elle, n'a pas la même conception environnementale. Il suffit de regarder comment ils effectuent des constructions dans leurs plus belles montagnes pour voir qu'eux ont un schéma d'aménagement axé sur le développement touristique, alors que, nous, c'est toute une procédure de protection des montagnes et tout ça qu'on a sur le territoire de la MRC de Papineau. C'est pourquoi on a maintenu puis on a réussi à convaincre Hydro-Québec que le cadre écologique de référence est probablement l'outil le plus performant pour être capable de faire passer une ligne électrique aussi importante en protégeant les paysages.

Mais, par contre, nous, on n'a pas les mêmes objectifs dans nos schémas d'aménagement, et ça, on est même convaincus que notre tracé... même en utilisant nos outils sur leur propre territoire à eux, que c'est toujours le moindre impact qui a été choisi puis qui a été accepté par Hydro-Québec. Et, malgré les études récentes que le ministère de l'Environnement a fait faire par des firmes indépendantes, c'est toujours le tracé du moindre impact. Sauf qu'on fait affaire avec une MRC qui, elle, ce n'est pas la gestion des paysages qui l'intéresse, c'est le développement touristique, et là on va confronter les idéologies et c'est pourquoi M. Harvey nous propose un compromis politique. On n'acceptera jamais un compromis politique.

Quand on passe des outils aussi importants qu'une ligne électrique, il faut trouver le tracé du moindre impact environnemental. Si on a ça comme objectif, moi, je pense que vous aurez à constater et le BAPE aura à constater que le tracé proposé est celui qui convient pour cette ligne-là. Sauf qu'il faut être bien conscient que c'est l'environnement qu'on protège dans ça et non le développement touristique qu'il faut protéger. Et, comme je vous dis, on s'affronte depuis les tout débuts avec la MRC voisine qui, elle, n'a pas les mêmes priorités, et ça, c'est décevant pour tous ceux et celles qui veulent protéger les beaux paysages. Mais ça, c'est un choix que chacune des communautés fait.

Et là on s'oppose dans des philosophies et la commission essaie... en tout cas le comité Harvey a essayé d'être neutre en nous disant: Faites donc un tracé de compromis politique. Comment on peut, sur 80 % de notre territoire, défendre le tracé du moindre impact et, par la suite, dire au reste de notre population: Bien, là, à partir de tel point à tel point, ce n'est plus un tracé de moindre impact environnemental, c'est un tracé de compromis politique parce qu'il y a des développements futurs qui doivent se faire puis, plutôt que de passer des lignes, on va construire dans les montagnes? Moi, en tout cas, j'ai beaucoup de difficultés. En tout cas, j'espère que le BAPE sera bien encadré et ne débordera pas de sa mission.

Quand on passe des infrastructures aussi importantes, on est là pour trouver – et je suis d'accord avec toutes les orientations que les gouvernements ont faites par le passé – le tracé du moindre impact environnemental. Mais là j'espère qu'on en restera à ça et que le mandat que vous confierez au BAPE ne sera pas un mandat de compromis politique et où les philosophies de développement touristique se confronteront aux philosophies de protection.

Le Président (M. Lelièvre): M. le ministre.

M. Brassard: Oui. Bien, le comité Harvey aussi recommandait également que, pour le tronçon litigieux, il y ait une commission du BAPE qui tienne des audiences particulières. C'était ça, sa recommandation. Autrement dit, que la procédure d'évaluation environnementale s'applique pour le tronçon litigieux, c'était une des recommandations du comité Harvey.

De toute façon, comme on s'assujettit de nouveau aux procédures régulières en vertu de nos lois, particulièrement la Loi de la qualité de l'environnement, c'est sûr qu'on va se retrouver assez rapidement devant le BAPE. Le promoteur, Hydro-Québec, va faire des propositions. Et je pense que l'objectif – là-dessus, je suis d'accord avec vous – c'est toujours de déterminer le tracé de moindre impact. Une infrastructure de cette nature, ça a des impacts. Ça, c'est indéniable. C'est inévitable. Mais l'objectif, c'est toujours de trouver le tracé de moindre impact. Je pense que, là-dessus, c'est certainement le mandat de toute commission du BAPE.

Ça ne veut pas dire que ça va se conclure par des consensus unanimes. Hertel–des Cantons aussi, c'est un tracé de moindre impact. Et vous savez ce qui est arrivé avec ce projet-là. On en discutait hier avec l'UPA. Et l'UPA – c'est les producteurs agricoles qui sont directement concernés par une ligne comme Hertel–des Cantons – affirmait et a affirmé – ils étaient à votre place hier – que le tracé Hertel–des Cantons, c'est un tracé de moindre impact. C'est le tracé de moindre impact.

Malgré tout, vous savez ce qui est arrivé. Et la controverse persiste. Alors, oui, il faut rechercher le tracé de moindre impact. Mais ça ne veut pas dire qu'inévitablement l'unanimité va surgir d'un débat devant le BAPE, ce qui signifie à ce moment-là que ce n'est pas vraiment le BAPE qui a à... Le BAPE pourra faire des recommandations. Mais, à ce moment-là, c'est le gouvernement, c'est le Conseil des ministres, en vertu de la procédure, c'est le gouvernement, par décret, qui va devoir trancher et faire un choix. Et je pense que l'objectif, ça va être de trouver et de choisir le tracé de moindre impact.

Le Président (M. Lelièvre): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Je comprends, M. le ministre, qu'il y a toujours de toute façon des impacts, là.

M. Brassard: Ah! bien oui. Ça, c'est évident.

M. Laframboise (Mario): Ça le dit en lui-même: On cherche le moindre impact, donc il y a des impacts. Il y aura toujours des mécontents. La seule chose, c'est, quand on voit un comité dirigé par le président du BAPE lui-même qui recommande un tracé de compromis politique, j'ai beaucoup de difficultés avec ça. Je suis d'accord avec vous, si on y va avec un tracé du moindre impact, je suis bien confiant que l'outil qu'on a utilisé va faire que, comme d'autres organisations puis comme d'autres firmes indépendantes sont venues faire les analyses et ont reconfirmé ce qu'on dit... Finalement, quand tu recherches le moindre impact environnemental, bien, tu n'as pas des milliers de solutions. Donc, ça, on est conscient de ça. Sauf que, si on veut essayer de noyer ça dans un débat de compromis politique, c'est là où, nous, on n'embarque pas. Puis j'espère que vous aurez assez de sévérité dans le mandat que vous confierez pour qu'on s'en tienne à un tracé de moindre impact environnemental.

Et, par la suite, je suis bien d'accord. Que ce soit Hertel–des Cantons, si le tracé du moindre impact est choisi, là il reste au gouvernement ou à Hydro-Québec à imposer le tracé. Nous, en Outaouais, ce qu'on dit, c'est qu'on en a besoin. Une fois qu'on a dit ça, ça veut dire que ça va passer à quelque part. Donc, on vivra avec la responsabilité des gestes qu'on a posés. Puis, nous, la MRC, on est d'accord que cette ligne-là doit desservir. Même si on a peu de population puis que c'est surtout pour le centre-ville, nous, on est bien conscient qu'on doit subir cette ligne-là pour que le plus grand nombre d'habitants de l'Outaouais soient desservis en électricité. On est bien d'accord. Sauf qu'on espère... puis que ceux qui siégeront autant au BAPE... Comme on aurait espéré que le comité Harvey respecte son mandat, qui était clair, qui était celui de trouver le tracé de moindre impact environnemental, mais qui n'a pas eu le choix d'arriver en conclusion, de dire que ça prend un tracé de compromis politique. Et ça, on vous le répète: On est bien gentil, bien voulant, sauf qu'il y a des choses qu'on ne peut accepter. Et on n'acceptera pas de tracé de compromis politique.

M. Brassard: Merci, M. Laframboise.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Simplement, dans un autre ordre d'idées, la commission Nicolet recommandait l'enfouissement des lignes électriques dans les zones, les agglomérations urbaines ainsi que le réseau des lignes téléphoniques et autres. J'aimerais tout d'abord savoir, à titre d'élu, quelle est un peu votre vision là-dessus, mais aussi, advenant le cas que le gouvernement lance un programme de cette nature-là, quel devrait être, selon vous, le partage des coûts qui devrait être fait?

M. Laframboise (Mario): Je vais laisser répondre M. Tochon pour la Communauté urbaine.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. Tochon, vous avez la parole.

M. Tochon (Nelson): Bien, je dois vous dire, M. le Président, que, en tout cas, la Communauté n'a pas encore été invitée à participer à des débats de cette nature. Toutefois, je dois vous avouer que, compte tenu des bonnes relations, des bons contacts que nous avons tant avec Hydro-Québec qu'avec les autres intervenants des municipalités, c'est évident que la Communauté sera intéressée à regarder une étude de cette nature.

(11 h 50)

M. le député a parlé des coûts. À ce stade-ci, vous comprenez que ce serait peut-être un peu prématuré d'avancer quel genre de participation financière que la Communauté pourrait consentir. On n'en est pas là. On en a discuté effectivement, mais nous n'avons jamais eu une invitation formelle à siéger soit sur un comité ou à siéger sur un groupe de travail qui verrait à participer à une étude pareille.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Peut-être, en complémentaire...

M. Laframboise (Mario): Et, si vous me permettez...

Le Président (M. Lelièvre): Oui, M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): ...en complémentaire, je vais utiliser mon chapeau de représentant des élus municipaux du Québec. On a formé avec Hydro-Québec un comité de liaison pour discuter de différents points dont, entre autres, la question des enfouissements. Mais il n'est pas du tout question d'investissement, au moment où on se parle, de la part des municipalités.

On a assez participé à l'élimination du déficit de la province; on est toujours bien pas pour, tout de suite, commencer à participer à régler le problème d'Hydro-Québec. Chaque chose en son temps. Mais il reste qu'on a un comité de liaison qui est formé. Tout dernièrement, à notre congrès, on a annoncé la signature d'un protocole d'entente sur un comité de liaison qui discutera, entre autres, du dossier des enfouissements.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, merci, M. Laframboise. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui. Comme simple commentaire, je ne m'attendais pas à un pourcentage ce matin. C'est simplement advenant le cas, parce qu'on parle de sécurité évidemment, sécurité dans les villes. Je voulais simplement voir quelle ouverture il y avait. Parce que c'était une commission du rapport Nicolet que, moi, je trouvais intéressante, l'enfouissement, donc, qui résolvait une partie des problèmes de sécurité dans les villes. Mais, de toute façon, je vois que le programme n'est pas encore lancé, loin de là. Mais il y a quand même ouverture?

M. Laframboise (Mario): Ouverture aux discussions.

M. Bédard: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Merci, M. le Président. D'abord, je vous remercie pour votre rapport, le sérieux et l'amplitude aussi. Il est volumineux, mais il y a beaucoup d'informations à l'intérieur de votre mémoire.

Comme élu – et vous l'êtes aussi – vous remarquez qu'il nous manque des personnes dans la salle. Je suis déçu que, comme élu, il n'y ait pas l'ensemble des participants autour de la table ici. Je vous laisse ça en passant.

La question est plus d'ordre des priorités de rétablissement. Advenant le cas d'un autre verglas ou d'un autre problème qu'on pourrait avoir, chez vous, avez-vous établi un ordre de priorité de rétablissement?

Le Président (M. Lelièvre): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Oh! je dois vous dire, honnêtement, vous, là, si on décidait que... Non. Vous me demandez une réponse bien honnête. Il n'y a pas eu de comité de mis en place, exemple, pour la grande région de l'Outaouais pour savoir comment on prioriserait le rétablissement. Non.

M. Désilets: O.K. Seriez-vous...

M. Laframboise (Mario): Si c'est ça qu'est le but de votre question.

M. Désilets: Non, non. Il y a ça et aussi, en même temps, seriez-vous prêts à travailler avec Hydro-Québec ou d'autres organismes pour essayer d'établir un ordre de priorité de rebranchement?

M. Laframboise (Mario): Oui, et ça, je me dois de vous dire qu'on a formé ce qu'on appelle le COMUR chez nous, un comité des mesures d'urgence pour la MRC de Papineau, et je sais que la Communauté urbaine aussi a formé son comité. Et, là-dessus, l'un de nos partenaires, c'est Hydro-Québec et pourquoi on tenait à l'associer, c'est justement pour qu'on puisse établir l'ordre de priorité. Mais vous savez que l'ordre de priorité, ce qui est important pour nous dans le rétablissement, c'est factuel. C'est-à-dire, ce qu'on veut, c'est d'être capable, lorsqu'une crise survient, d'avoir notre mot à dire sur la priorité de rétablissement.

En tout cas, nous, dans le mémoire présenté à la commission Nicolet, ce qu'on a reproché à Hydro-Québec, c'est de ne pas avoir tenu compte de l'opinion du milieu dans la priorité de rétablissement. Parce que les élus savent beaucoup mieux que quiconque, si on avait à rétablir le courant, où on commencerait pour nos populations affectées, nos quartiers, nos secteurs, et tout ça. Et ça, là-dessus, je me dois de vous dire que le message a été lancé. En tout cas, pour nous, pour la Communauté urbaine, le message a été lancé à Hydro-Québec, et ces gens-là se sont montrés bien ouverts.

Mais travailler sur une procédure déjà prévue, nous, on pense que c'est plus factuel. Quand tu arrives dans une crise, l'important pour Hydro, c'est d'être toujours en contact avec les élus, ce qui a manqué dans la crise du verglas, évidemment, parce que c'était, quant à nous, la sécurité civile qui gérait ça puis elle a perdu le contrôle. Mais il reste que, à l'avenir, nous, on tient à ce que ce soit géré directement par le milieu avec la complicité d'Hydro-Québec pour qu'on puisse prendre les décisions rapidement puis y aller selon notre compétence qui, je crois, aurait aidé grandement Hydro-Québec et toute la communauté si on avait eu notre mot à dire.

M. Désilets: Mais vous ne pensez pas que c'est mieux de le régler avant, de céduler un ordre de procédure avant que d'improviser sur le tas?

M. Laframboise (Mario): Non, non, mais... Ce qui est important, c'est qu'on mette en place le comité de liaison, qu'il soit disponible tout de suite, c'est-à-dire notre comité des mesures d'urgence. Arrive un sinistre, on s'installe, Hydro-Québec est directement en contact avec nous et on enlève l'intermédiaire qui était la sécurité civile et qui deviendra un grand accompagnateur mais pas un intervenant direct. On peut déjà prévoir d'avance, s'il y avait une crise à la grandeur de l'Outaouais, où est-ce qu'on commence. Mais il reste qu'il faut qu'il y ait toujours, lors de la crise, un suivi interactif avec Hydro-Québec, ce qui n'était pas le cas la dernière fois.

M. Désilets: O.K. C'est bien.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Chicoutimi, vous aviez une complémentaire?

M. Bédard: Le député de Maskinongé l'a posée effectivement. Bien, je voyais aussi un intérêt de l'établir avant. Parce que c'est comme faire du cas par cas et on peut faire une erreur de jugement pendant une crise, alors que le problème peut se poser d'une façon théorique très simplement et arriver à une solution qui va être la même en situation de crise, sauf qu'on n'aura pas la crise pour prendre la décision. C'est pour ça que vous y allez à...

M. Laframboise (Mario): C'est parce que là... Je ne voudrais pas...

M. Bédard: Parce qu'on parle de sécurisation évidemment, mais le rétablissement en est un qui...

M. Laframboise (Mario): Oui, oui. C'est parce que je ne pensais pas qu'on arriverait dans les technicalités. C'est sûr que les secteurs où il y a les hôpitaux, et tout ça, c'est tout prioritaire. Ça va. Mais vous dire en premier, sur le terrain, ce qui a manqué, c'est simple: la communication avec les élus n'était pas là. Et je peux vous dire que, dans nos communautés, dans 80 % des cas, on n'aurait pas recommencé le branchement où Hydro l'a fait. Donc, il y a un problème en quelque part.

Mais vous dire qu'on peut le faire d'avance si c'est à la grandeur du territoire, mais ce n'est pas toujours à la grandeur du territoire, comprenez. Il y avait des endroits où il y en avait; il y en avait qui n'en avait pas, et tout ça. Où est-ce qu'on recommence le rebranchement? Qu'on ait une planification d'urgence, oui. Qu'on s'en donne une, oui. Mais il faut qu'il y ait aussi, lors de la crise, une interrelation directe avec Hydro et le comité des mesures d'urgence qui aurait été mis en place par la Communauté urbaine ou par la MRC pour être capable, tout le monde, de se mettre au même diapason.

Le Président (M. Lelièvre): M. le député de Maskinongé, brièvement.

M. Désilets: Très court parce que c'est vous relancer. Le rapport Nicolet parle de lignes stratégiques à prioriser, et, quand on parle de lignes, on doit rebrancher autour de cette ligne-là en premier.

M. Laframboise (Mario): Moi, je suis d'accord avec ça, moi.

M. Désilets: Vous êtes d'accord avec ça?

M. Laframboise (Mario): Ah, oui, oui!

M. Désilets: O.K. C'est beau.

Le Président (M. Lelièvre): Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. M. Laframboise, je parcourais votre document et puis il y a une copie d'une entente spécifique entre Hydro-Québec, le territoire des Laurentides et la MRC de Papineau concernant un partenariat pour une gestion intégrée de la végétation aux abords du réseau de distribution électrique. Semble-t-il, ça serait une première au Québec. Ma question est bien simple: En quoi consiste, dans les faits, un partenariat comme celui-là?

M. Laframboise (Mario): Je vais vous laisser mon ami légiste.

M. Bissonnette (Jean): Un petit peu qu'est-ce que M. Laframboise disait tantôt. Donc, contrairement au triangle noir, il y a eu beaucoup de pannes d'électricité dans l'Outaouais. Mais, dans l'Outaouais, il y a eu un remplacement de seulement 200 poteaux d'Hydro-Québec. Mais les lignes se sont autant effondrées, car ce sont les arbres, les boisés à proximité qui se sont courbés, qui se sont effondrés. Donc, sur les lignes, ce n'est pas les lignes comme telles qui se sont effondrées.

(12 heures)

Donc, c'est sûr qu'Hydro-Québec a certains pouvoirs au niveau de l'aménagement des boisés, l'aménagement forestier dans ses servitudes, mais ça allait au-delà de ça. Donc, concrètement, par exemple, ce n'est pas l'érable, ce n'est pas le chêne qui s'est effondré ou qui est tombé, qui s'est plié sur la ligne, ce sont les bouleaux, les trembles, l'ensemble des résineux. Et, en Outaouais, en milieu rural, ça a été ça, la cause du problème. Donc, il faut aller au-delà de la servitude; il faut faire de l'aménagement boisé, déboiser en bordure du réseau de distribution. Sans ça, une autre crise du verglas, on va avoir les mêmes problèmes. Donc, on a sensibilisé Hydro à cet élément-là.

Comme M. Laframboise disait, il y a peu d'efforts, peu d'énergie qui sont mis au réseau de distribution, et c'est un problème, donc, un problème qu'on a eu dans l'Outaouais et qui pourrait arriver dans n'importe quelle autre région du Québec. Donc, il faut aller au-delà de ça et voir avec les citoyens quel élément, quel projet, quel effort on peut prendre autant dans les servitudes, autant au-delà de la servitude, c'est-à-dire sur les propriétés privées.

Puis déjà on est sur deux petits territoires-pilotes et ça va relativement bien: il y a de l'aménagement forestier qui est fait, de la coupe forestière, il va y avoir plantation d'arbres moins à risques. Et, avec l'ensemble de ces expériences-là – c'est un projet-pilote – on va essayer d'extensionner le projet pour l'ensemble de la MRC. Et déjà Hydro-Québec pense à revoir ça, d'autant plus que le monde municipal a certains pouvoirs au niveau réglementation sur l'abattage d'arbres, sur la plantation d'arbres. Donc, ça peut aller jusqu'au-delà du projet et voir une certaine réglementation.

En Outaouais, puis c'est une expérience pour l'ensemble du Québec, il faut penser aux arbres à proximité du réseau de distribution. C'est ceux-là qui sont tombés sur les lignes et qui ont fait... en cause qu'il y a eu tant de pannes d'électricité en Outaouais.

M. Laframboise (Mario): Et, si vous me permettez, en complémentaire. Le rôle des élus municipaux est de convaincre leurs citoyens qu'il faut qu'ils permettent qu'il y ait un nouvel aménagement de la végétation qui va à l'extérieur de l'emprise ou des servitudes d'Hydro ou des emprises du ministère des Transports sur leur propriété puis que c'est pour leur sécurité. Et ça va bien, c'est-à-dire que les gens participent. Quand il y a des coupes, les bois leur sont remboursés pour ceux qui sont sur les propriétés, et tout ça. Donc, c'est tout un principe de gestion qui est un peu complexe, et les élus municipaux peuvent se permettre de vendre ça aux citoyens sans que, en quelque part, il y ait toujours des sommes faramineuses à débourser pour que ça puisse se réaliser. Donc, c'était notre objectif à nous et ça va très, très bien, puis une bonne participation des citoyens.

Le Président (M. Lelièvre): M. le ministre, vous aviez...

M. Brassard: Là-dessus, c'est parce que je trouve ça extrêmement intéressant, ce que vous nous dites là. Et ce projet de partenariat, ce projet-pilote, c'est expérimental, d'une certaine façon. Je trouve ça extrêmement intéressant parce que hier l'UPA a, d'une certaine façon, suggéré qu'on envisage en milieu rural... Parce que les producteurs agricoles évidemment, en cas de panne et de crise comme celle qu'on a connue en 1998, éprouvent des difficultés majeures qui sont de nature économique, qui se traduisent souvent par des pertes énormes, l'UPA évoquait l'enfouissement en milieu rural. La commission Nicolet n'en parle pas, parle surtout d'enfouissement en milieu urbanisé. Et l'UPA évoquait ou suggérait qu'on regarde l'enfouissement en milieu rural pour justement éliminer le genre de difficultés que les producteurs agricoles ont connues.

Moi, je trouve que l'expérience que vous êtes en train de vivre pourrait être très utile parce que, vous le signalez avec raison puis il y en a plusieurs qui nous l'ont dit, dans le fond, souvent les dégâts et les dommages causés au réseau de distribution – je ne parle pas du réseau de transport, le réseau de distribution – c'est très souvent provoqué par les arbres, les chutes d'arbres, de branches assez grosses qui tombent sur les fils, les cassent et provoquent ainsi la panne.

Alors, je trouve ça extrêmement intéressant. Je ne connaissais pas ce projet-là que vous aviez avec Hydro-Québec; ça mérite d'être suivi. Si je comprends bien, ça va jusqu'à recommander aux riverains de choisir des espèces d'arbres particulières qui sont plus solides, qui ont une plus grande solidité puis qui donc risquent moins de tomber sur les fils, sur le réseau de distribution, donc un aménagement végétation. Puis je comprends bien que ce n'est pas dans le corridor appartenant à Hydro-Québec, c'est sur leurs terrains privés.

Alors, moi, je vous dis que c'est peut-être dans cette direction-là qu'il faut davantage aller, c'est pas mal moins coûteux que d'essayer de regarder si on peut vraiment procéder à l'enfouissement des fils en région rurale. En tout cas, je suis content d'apprendre, moi, que ça existe, ce genre d'entente et de partenariat. Et ça mérite d'être suivi, en tout cas, puis d'en tirer peut-être des conclusions pour l'ensemble du Québec.

Le Président (M. Lelièvre): Des commentaires?

M. Laframboise (Mario): Non.

M. Brassard: Ça va bien, si je comprends bien. Mais ça fait combien de temps, cette entente...

M. Laframboise (Mario): Ah! ça va très bien puis il y a une très bonne participation des citoyens. Ils comprennent.

M. Brassard: Puis ça fait combien de temps que l'entente est conclue?

M. Bissonnette (Jean): L'entente a été conclue, on le dit dans le rapport, au début de l'été, avril, de l'année dernière. Comme de raison, il y a eu toute la question d'inventaire au niveau des propriétaires, l'approche, la signature de contrat avec chaque propriétaire parce que...

M. Brassard: La réaction des propriétaires est bonne, c'est positif.

M. Bissonnette (Jean): Oui, elle a été relativement bonne jusqu'à maintenant, oui. Puis on s'est assuré de faire plusieurs milieux, donc le milieu agricole, le milieu forestier, le milieu des villégiateurs. Et, jusqu'à maintenant, on fait nos frais parce qu'il y a quand même la vente de bois, donc, et le profit est retourné à certains propriétaires, ceux qui ont une plus grande propriété. Par exemple, tout est fait avec des chevaux, on a essayé de prendre les méthodes les plus écologiques, qui étaient plus acceptables au niveau de nos citoyens aussi, et, jusqu'à maintenant, disons qu'il n'y aurait pas de déboursés supplémentaires pour ce genre de travaux.

M. Brassard: En tout cas, c'est intéressant puis ça mérite d'être suivi. Ceci étant dit, M. le Président, je voudrais remercier les représentants de l'Outaouais... à moins que... Ah! Mme la députée, vous aviez quelque chose? Allez-y, je vous en prie.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Bien, un petit peu dans ce que vous disiez, M. le ministre. Justement, est-ce que c'est déjà fait ou est-ce que vous avez le projet d'exporter – sans mauvais jeu de mots, c'est un mot qui est à la mode ces jours-ci – cette idée-là en dehors de votre MRC, à d'autres municipalités qui, justement... Bien, disons, on parlait de la Montérégie tantôt, M. le ministre y faisait référence. Est-ce que justement ça ne pourrait pas être un projet qui pourrait se faire ailleurs?

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez...

Le Président (M. Lelièvre): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): ...nous, on le fait pour notre territoire. Évidemment, on est fier qu'Hydro-Québec veuille l'exporter. C'est-à-dire que finalement ça appartient à Hydro-Québec. Mais notre participation, nous, on est bien ouvert. Et on savait que, en faisant un projet-pilote, dès le départ, s'il y avait un intérêt puis que les citoyens participaient bien, pour Hydro-Québec, c'était exportable, et ça, on en est fier. Puis, nous, on aidera toutes les communautés, on leur dira comment ça fonctionne, tous ceux et celles qui voudront communiquer avec nous, ça va nous faire plaisir. Parce que le but finalement, c'est que nos citoyens soient sécurisés, puis je pense qu'ils le comprennent. Et les élus municipaux sont souvent mieux placés qu'une société indépendante qui, pour toutes sortes de raisons, souvent est aimée ou mal aimée. Tandis que, nous, on est capable de faire peser le pour et le contre à nos citoyens, puis je pense que... On est fier, en tout cas, ça va bien.

Mme Blanchet: Merci. C'est tout, M. le ministre.

Le Président (M. Lelièvre): Alors, M. le ministre, vous aviez amorcé...

M. Brassard: Bien, c'était simplement pour les remercier d'être venus échanger avec nous, avec les membres de cette commission, aujourd'hui, les représentants de la région de l'Outaouais, la Communauté urbaine, la MRC de Papineau. Votre contribution nous sera très utile, et je pense que votre message était on ne peut plus limpide.

M. Laframboise (Mario): Merci.

Le Président (M. Lelièvre): Également au nom de cette commission, nous transmettons nos remerciements, et nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 9)

(Reprise à 15 h 31)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mmes et MM. membres de la commission, nous allons donc reprendre nos travaux.

Cet après-midi, nous accueillons la municipalité régionale de comté des Laurentides. Je vois que vous avez pris place. Alors, vous savez que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et que, dans les minutes qui suivent, vous pourrez échanger avec les membres de la commission.

Alors, je pense que c'est M. Giroux qui est le porte-parole. Si vous voulez, M. Giroux, nous présenter les personnes qui vous accompagnent et faire votre présentation.


Municipalité régionale de comté des Laurentides

M. Giroux (Maurice): Merci, madame. Alors, à ma droite, à l'extrême droite, j'ai M. André Lord, qui est conseiller municipal à la municipalité d'Amherst; et M. Gilles Longtin, conseiller municipal aussi et promaire à la municipalité d'Amherst; le secrétaire trésorier et directeur général de la MRC, M. Denis Savard; et, à ma gauche, M. Pierre-Yves Guay, qui est urbaniste consultant en évaluation environnementale; et moi-même, Maurice Giroux, préfet de la MRC des Laurentides et aussi maire de la municipalité de Saint-Jovite paroisse où est situé le poste Grand-Brûlé.

Alors, merci bien de nous recevoir, Mme la Présidente, M. le ministre, M. le député. Naturellement, c'est un mandat de la MRC, du conseil des maires, de venir m'exprimer devant vous aujourd'hui. Alors, la MRC des Laurentides remercie très sincèrement la commission de l'économie et du travail de l'avoir invitée à présenter son point de vue sur la sécurisation du réseau d'Hydro-Québec dans la région touchée par la tempête de verglas de janvier 1998.

D'entrée de jeu, précisons tout de suite que la population de notre MRC ne fut heureusement pas sinistrée par cette tempête et par les conséquences pénibles subies par nos concitoyens des régions de Montréal, de la Montérégie et, très près de nous, par nos amis et voisins de l'Outaouais. Toutefois, la population et les milieux municipaux de la MRC des Laurentides furent, depuis un peu plus d'un an, particulièrement interpellés par l'éventuelle ligne à 315 kV Grand-Brûlé–Vignan, laquelle est l'un des trois volets du projet du bouclage du réseau Hydro-Québec en Outaouais.

La nouvelle ligne projetée, d'une longueur d'environ 140 km, est destinée à relier le poste Grand-Brûlé situé dans la paroisse de Saint-Jovite, sur le territoire de la MRC des Laurentides, au poste Vignan, situé à Gatineau. Ainsi, le poste Grand-Brûlé pourrait éventuellement alimenter le poste Vignan et relayer le poste Chénier, situé près de Mirabel, s'il survenait un nouveau bris d'équipement sur l'actuelle ligne à 315 kV Chénier–Vignan. Cette dernière constituait la seule source d'approvisionnement externe de l'Outaouais au moment de la tempête de verglas. Deux de ses pylônes, situés près de la chute, ont alors failli.

Le projet de bouclage comprend aussi la construction du poste Outaouais, dans la municipalité de L'Ange-Gardien, et d'une ligne à 230 kV d'une longueur d'environ 14 km le reliant au réseau ontarien. Ainsi, en cas de défaillance technique sur les réseaux québécois, l'Outaouais pourra également être alimenté à partir de l'Ontario. La ligne ontarienne peut également acheminer en Outaouais l'électricité produite à la centrale de Beauharnois. Ces travaux d'interconnexion avec l'Ontario sont déjà opérationnels ou le seront incessamment. Le poste Outaouais est actuellement un poste temporaire de transformation. Il sera bientôt complété en un poste permanent de manoeuvre, de transformation et d'interconnexion.

En ce qui concerne notre principal sujet de préoccupation, soit la ligne Grand-Brûlé–Vignan, rappelons qu'Hydro-Québec débuta sa démarche de travail le 6 mai 1998 en nous soumettant le seul corridor prévu par le décret 86-98 pour ce projet de ligne, soit le corridor sud. Hydro-Québec nous persuada que ce corridor unique avait été déterminé après une longue et minutieuse analyse du territoire, très cartésienne, scientifique, et qu'il s'agissait incontestablement du corridor idéal au plan environnemental.

De bonne foi, nous avons accepté ces explications qui nous semblaient raisonnables. Nous avons donc accordé notre appui au projet, malgré les inconvénients inévitables qu'il occasionnerait sur notre territoire. Hydro-Québec nous assura alors que ce corridor ne pourrait jamais être remplacé par un autre qui, selon toute évidence, exercerait davantage d'impact sur notre milieu. D'ailleurs, on nous assura qu'il s'agissait du seul corridor autorisé par le décret 86-98.

Malheureusement pour nous, Hydro-Québec n'obtint pas le même appui au corridor sud de la part de nos amis et voisins de la MRC de Papineau. Pour des raisons qui lui sont propres et que nous respectons, la MRC de Papineau estima que ce corridor sud générait chez elle des impacts inacceptables. Elle élabora donc un corridor alternatif appelé corridor nord et exigea légitimement qu'Hydro-Québec examine ce nouveau corridor.

Le promoteur élabora donc des hypothèses de tracé dans les deux corridors, soit les hypothèses de variantes nord et sud et extrême sud. Selon ces hypothèses, la nouvelle ligne parcourait entre 19 et 35 km sur le territoire de la MRC des Laurentides. Contre toute attente, Hydro-Québec détermina finalement que la variante nord tracée dans le corridor proposé par la MRC de Papineau et dans son prolongement sur notre territoire correspondait au tracé de moindre impact environnemental. Il s'agit pourtant de l'hypothèse de tracé qui parcourt la plus longue distance à la fois dans la réserve faunique de Papineau-Labelle et dans la MRC des Laurentides, avec de lourdes conséquences pour ces territoires.

En ce qui concerne la réserve faunique de Papineau-Labelle, le tracé retenu est la seule hypothèse qui présente l'inconvénient de la traverser. Et cette traversée s'effectue sur une distance de 26,5 km. Bien que la réserve soit située dans la MRC de Papineau, nous croyons opportun de militer en faveur de sa protection.

En effet, comme le rappelle la SEPAQ, la vocation des réserves fauniques vise la conservation, la mise en valeur et l'utilisation de la faune, la diversification de l'offre d'activités récréatives par le développement de produits d'écotourisme et d'aventure douce, la préservation et la mise en valeur des richesses patrimoniales du domaine public pour en assurer la pérennité et maintenir leur caractère distinctif. La réserve faunique de Papineau-Labelle est l'une des seules zones presque vierges dans l'ouest du Québec. Bien entendu, une telle vocation environnementale est difficilement compatible avec la construction, l'entretien et la présence d'une ligne de 315 kV de 26,5 km.

En ce qui concerne plus spécifiquement le territoire de la MRC des Laurentides, le tracé retenu se présente à nos portes par l'ouest du territoire plutôt que par le sud, tel que c'était le cas pour le premier corridor soumis par Hydro-Québec. Le tracé retenu augmente donc de 19 à 35 km la distance à parcourir dans la MRC des Laurentides pour rejoindre le poste de Grand-Brûlé. De plus, ce parcours additionnel de 16 km, soit 60 % de sa traversée laurentienne, est entièrement situé dans la seule municipalité d'Amherst, ce qui quadruple la distance que la ligne devra y parcourir avec, bien entendu, les impacts environnementaux qui s'ensuivent. D'ailleurs, Hydro-Québec a reconnu, pendant les séances publiques tenues par le Comité d'information et de consultation publiques, appelé aussi comité Harvey, que le tracé retenu n'était pas celui de moindre impact sur le territoire de la MRC des Laurentides.

Toutes les municipalités des Laurentides ainsi que la MRC elle-même se sont très rapidement mobilisées afin de s'opposer à la section du tracé qui traverserait si maladroitement notre territoire. Les séances publiques tenues par le comité Harvey nous ont permis de faire la démonstration que le choix de la variante de tracé retenue par Hydro-Québec ne reposait sur aucune analyse comparative acceptable des hypothèses envisagées. En effet, l'étude des répercussions environnementales de la ligne Grand-Brûlé–Vignan déposée par Hydro-Québec ne respectait aucunement les critères et les paramètres d'une méthode d'évaluation rigoureuse ni même la propre méthode d'évaluation d'Hydro-Québec, soit la méthode d'évaluation environnementale lignes et postes.

(15 h 40)

Une étude de répercussions environnementales est un exercice ambitieux dont l'objectif est d'analyser un environnement d'accueil extrêmement complexe afin d'y insérer, avec le minimum d'impact et le plus harmonieusement possible, un équipement qui présente d'incontournables risques pour l'environnement biophysique et humain. La complexité de son objet et l'ambition qui la caractérise imposent une démarche d'analyse qui doit aspirer à la plus haute rigueur mais qui, en revanche, n'est jamais exempte de certaines lacunes méthodologiques. Toutefois, elles ne doivent jamais compromettre l'atteinte de l'objectif ultime, soit, dans le cas qui nous occupe, le choix d'un tracé du moindre impact environnemental pour la ligne Grand-Brûlé–Vignan.

Or, l'étude des répercussions environnementales déposée présente de nombreuses lacunes méthodologiques. Certaines sont particulièrement importantes et ont pu biaiser le choix du tracé de moindre impact environnemental. Ces lacunes concernent les règles de l'art en matière d'évaluation environnementale et les critères de rigueur scientifique les plus courants et reconnus par le milieu.

Parmi ces lacunes, relevons particulièrement: l'absence de pondération explicite des impacts; la non-reproductibilité expérimentale de l'analyse, puisque les critères utilisés par Hydro-Québec demeurent inconnus et donc invérifiables; la variabilité et l'inconstance des degrés de résistance attribués aux composantes environnementales affectées par les impacts de la ligne; le manque de considération pour les préoccupations et les valeurs environnementales de la population laurentienne; le traitement insuffisant de nombreux impacts importants posés par le tracé retenu, puisque ce site, dans un milieu forestier dense au relief accidenté, est à une altitude plus élevée que les autres variantes. Entre autres, ces impacts seraient générés par les moyens employés pour accéder au site, les méthodes d'entretien des entreprises et les risques de panne provoqués par le givre.

Pour notre part, nous avons refait l'exercice d'évaluation en lieu et place d'Hydro-Québec en appliquant systématiquement la méthode lignes et postes aux données factuelles inventoriées par Hydro-Québec elle-même afin de vérifier son choix d'hypothèse de tracé. Les résultats furent renversants.

En effet, du point de vue de l'environnement, le tracé choisi s'avère la pire de toutes les hypothèses envisagées. Le mémoire que nous avons déposé devant le comité Harvey fait abondamment état de la méthode d'évaluation environnementale d'Hydro-Québec, de l'analyse comparative que nous avons produite et des résultats obtenus. Entre autres, nous avons une copie du mémoire qu'on a présenté au comité Harvey. Si vous me permettez, tantôt, je vous en remettrai une copie même si vous en avez déjà pris connaissance antérieurement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il s'agirait de le déposer, M. Giroux, au secrétariat de la commission. Vous pouvez le déposer ici.

M. Giroux (Maurice): Parfait. Merci. Il est à cet égard significatif de constater que le comité Blanchette responsable des séances publiques dans le cadre du dossier de la ligne Hertel–des Cantons a, lui aussi, estimé que le tracé proposé par Hydro-Québec n'est pas à tous égards celui du moindre impact et que la participation importante aux travaux du comité témoigne de la nécessité d'une consultation publique par une entité neutre.

Comme dans le dossier de la boucle outaouaise, c'est la précipitation du promoteur à accomplir son travail d'évaluation environnementale qui semble être en cause. Le caractère prétendument urgent des travaux, s'il explique l'obtention de mauvais résultats d'analyse, ne les justifie absolument pas.

Dans le dossier de la boucle outaouaise, rappelons que le comité Harvey a, quant à lui, émis les constats et les recommandations suivantes: «C'est sur la base d'un traitement équitable entre les différents acteurs et par l'application rigoureuse d'une méthode d'évaluation environnementale à l'ensemble de la démarche que l'on peut attribuer à un tracé un jugement global de moindre impact;

«Deuxièmement, la liste des éléments sensibles touchés par le projet et retenus pour l'analyse comparative est demeurée à un niveau de généralités qui rend difficile le partage entre les variantes de tracé;

«Troisièmement, le promoteur n'était pas en mesure de faire un choix entre les variantes;

«Quatrièmement, l'argument d'Hydro-Québec à l'effet qu'une étude de répercussions environnementales n'est pas aussi précise qu'une étude d'impact ne constitue pas une excuse à l'absence de rigueur, cette rigueur étant à la base même de la crédibilité d'une évaluation environnementale dont l'objectif est d'atteindre un projet de moindre impact;

«Cinquièmement, à la suite de son examen, le Comité ne peut retenir le choix du promoteur, soit la variante nord, comme étant le tracé du moindre impact.»

En terminant, au sixième point: «La réalisation d'un projet qui implique plusieurs MRC nécessite d'être chapeautée par un mécanisme de coordination et de concertation.»

Dans le contexte d'une crise majeure comme celle générée par le grand verglas, l'ensemble de la collectivité est aux prises avec une situation d'urgence qui nécessite évidemment une action immédiate de la part des autorités publiques. Outre la nécessité d'offrir le maximum de sécurité physique et matérielle aux personnes sinistrées, il est absolument indispensable d'atténuer les impacts psychosociaux de la catastrophe et de rassurer l'ensemble de la collectivité en montrant que les responsables publics comprennent bien l'ampleur du sinistre en évaluant correctement les conséquences, gèrent adéquatement les mesures concrètes et efficaces de support collectif et individuel et surtout prennent les moyens nécessaires pour réduire la possibilité d'une reproduction éventuelle du sinistre.

En janvier 1998, les autorités québécoises et Hydro-Québec ont accompli ce mandat avec brio et ont ainsi évité que la situation ne dégénère en véritable chaos. En revanche, les effets pervers d'une opération d'envergure de gestion de crise ne sont jamais nuls. Comme chacun le sait, un tel contexte de crise est tellement anxiogène, tant au niveau individuel que collectif, qu'il exacerbe nécessairement les perceptions et peut facilement biaiser, voire distorsionner l'évaluation des risques réels imputables à la condition du moment, et ceci, particulièrement en ce qui concerne la possibilité d'une reproduction éventuelle de la catastrophe.

Une telle surévaluation des risques, conjuguée à l'incontestable nécessité d'apaiser les craintes du public, peut ainsi entraîner une véritable surenchère de l'éventail et de l'envergure des équipements de contrôle et de protection promis à long terme. Un tel effet pervers est encore plus probable lorsque l'un des acteurs en présence a précisément comme mission d'être le promoteur et l'opérateur éventuel de ces équipements.

C'est dans cette perspective, croyons-nous, qu'il faut comprendre la justification et la teneur des décrets soustrayant le projet de la sécurisation du réseau de la procédure habituelle d'évaluation environnementale prévue aux articles 31.1 et suivants de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Nous comprenons très bien que le grand verglas de janvier 1998 fut une terrible catastrophe qui a mis à rude épreuve nos concitoyens, les autorités publiques et Hydro-Québec. Personne ne souhaite qu'une telle situation se répète, et il est évident que la collectivité tout entière espère que les responsables publics prendront toutes les dispositions nécessaires pour prévoir et atténuer le mieux possible les conséquences désastreuses d'une semblable catastrophe naturelle. Cependant, il est toujours utile, voire nécessaire, de bénéficier d'un peu de recul temporel pour mieux apprécier les risques qu'une telle situation ne se reproduise et pour déterminer les mesures de sécurité à long terme qu'il convient de mettre en place.

À l'égard des équipements projetés par Hydro-Québec pour sécuriser le réseau, personne ne contestera que les opérations de bouclage augmenteront la fiabilité de l'approvisionnement. En principe, plus Hydro-Québec construira de lignes, de postes, de boucles, de centrales, renforcera et modernisera l'ensemble des équipements, établira des interconnexions multiples avec les réseaux voisins, doublera et triplera les équipements, plus le réseau sera fiable.

La question de la sécurité du réseau ne se pose donc pas en ces termes de sécurisation absolue, à moins que nous souhaitions élever l'infrastructure hydroélectrique au rang de notre seule et unique obsession nationale et lui consacrer l'ensemble de nos énergies humaines et financières. La question consiste plutôt à soupeser les risques réels d'une autre catastrophe, la nécessité de minimiser les impacts environnementaux générés par la présence des équipements hydroélectriques, les allocations financières requises pour réaliser ces projets et le bénéfice additionnel que la collectivité pourrait retirer en sécurisant encore davantage un réseau pourtant décrit comme l'un des plus fiables au monde.

Au chapitre des risques, nous pouvons raisonnablement avancer que, si les bouleversements climatiques planétaires qui s'opèrent sont extrêmement préoccupants, aucun d'eux ne semble entretenir de lien avec la superposition des couches thermiques d'air stagnant qui ont provoqué une tempête de verglas de si longue durée.

(15 h 50)

La situation et les caractéristiques géographiques et climatologiques de la vallée du Saint-Laurent sont propices au développement d'épisodes de précipitations verglaçantes. Toutefois, le désastre de janvier 1998 fut essentiellement le résultat du caractère stagnant et exceptionnellement stable des masses d'air impliquées, ce qui a engendré une période de précipitations extraordinairement longue. Rien ne permet de penser que les bouleversements climatiques planétaires, caractérisés au contraire par des conditions météorologiques instables et violentes, augmentent le risque qu'une telle situation ne se reproduise. Par ailleurs, si un second grand... Pardon?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Giroux, je tiens à vous mentionner qu'à ce moment-ci il vous reste à peu près 1 min 30 s. Alors, à moins qu'il n'y ait un consentement... Si les membres de la commission vous permettent de poursuivre, moi, je n'ai aucune objection, mais ça me prend ici, à ce moment-ci, un consentement pour que vous puissiez poursuivre. Consentement?

M. Brassard: Peut-être quelques minutes, oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord.

M. Giroux (Maurice): Merci. Par ailleurs, si un second grand verglas devait malheureusement survenir, il serait sûrement configuré différemment du précédent à la fois en localisation géographique, en étendue, en intensité et en durée. Les sinistres climatiques ne se répètent jamais de façon identique. L'erreur serait donc alors de prévoir des mesures de protection conçues en fonction du scénario hautement improbable d'une réplique exacte du seul épisode de tempête que nous ayons connu.

En somme, le moins que l'on puisse dire, c'est que, même en considérant le risque jamais totalement nul d'un autre grand verglas, le recul temporel nous place aujourd'hui très loin de la situation d'urgence créée par l'atmosphère de crise de janvier 1998. L'urgence de la situation de crise étant aujourd'hui révolue, rien ne peut justifier que la procédure habituelle d'évaluation environnementale ne soit pas respectée, tant en ce qui concerne l'obligation pour Hydro-Québec de réaliser une étude d'impact sur l'environnement en utilisant une méthode rigoureuse qu'en ce qui concerne le droit de la population de se prononcer sur ces projets lors d'audiences publiques, tel que ce droit est reconnu par la loi et les pratiques québécoises en la matière. Nous sommes donc persuadés que les travaux prévus par les projets de bouclage du réseau, si tant est qu'ils doivent être réalisés, ne doivent ni ne peuvent être soustraits à la pleine et entière procédure d'évaluation environnementale.

Au chapitre des coûts, nous nous limiterons à constater qu'en période d'austérité budgétaire il est curieux que cette question pour le moins délicate soit si peu abordée lorsqu'il est question de sécuriser un réseau qui, répétons-le, est présenté par Hydro-Québec comme l'un des plus fiables au monde. Rappelons que le coût de la seule boucle outaouaise est évalué à 372 000 000 $.

Enfin, la sécurité de l'approvisionnement en Outaouais semble déjà raisonnablement bien assurée par l'interconnexion avec l'Ontario, qui offre la possibilité de pallier une défection de l'approvisionnement en provenance du poste Chénier en alimentant la région en électricité produite en Ontario ou en transportant celle produite à Beauharnois. Ce bouclage par l'Ontario suffirait-il à lui seul à réalimenter instantanément et entièrement la région en cas d'une panne totale et prolongée semblable à celle de janvier 1998? Il est possible que non, car tout dispositif de sécurité a ses propres limites qu'un cataclysme plus puissant peut éventuellement outrepasser.

Même en ajoutant la ligne Grand-Brûlé–Vignan et en créant ainsi un double bouclage, la sécurité absolue ne serait pas atteinte, car une éventuelle tempête de verglas, advenant qu'elle soit davantage localisée sur l'Outaouais que sur la Montérégie, pourrait évidemment provoquer des pannes simultanées sur toutes les boucles qu'Hydro-Québec aurait pu construire. Ce scénario du pire, s'il était envisagé dans toutes les régions du Québec où un risque de conditions verglaçantes est présent, exigerait le déploiement d'un dispositif de sécurité à boucles multiples absolument disproportionné.

Qu'on nous permette l'analogie suivante. C'est comme si les Américains construisaient des abris souterrains pour tous les habitants du Midwest et du sud-est des États-Unis afin de leur offrir la protection maximale contre les ouragans et les tornades qui ravagent régulièrement ces régions et y font des morts et des dommages sans aucune commune mesure avec notre historique tempête de verglas. L'analogie n'a rien de caricaturale, car le risque réel d'une répétition de ces cataclysmes dans ces régions est bien plus élevé qu'en ce qui concerne le verglas. En fait, nous avons toute la certitude que les tornades et les ouragans continueront de sévir et de semer la mort aux États-Unis, ce qui n'est pas le cas en ce qui concerne une tempête verglaçante de l'ampleur de celle de janvier 1998.

Évidemment, le constat que la sécurité absolue soit impossible à atteindre ne doit pas servir de prétexte à l'inaction. Les autorités publiques doivent, bien entendu, appliquer les mesures de sécurité qui s'imposent dans les limites du raisonnable. Ainsi, en plus du bouclage par l'interconnexion avec l'Ontario, la sécurité de l'approvisionnement pourrait être considérablement augmentée en optimisant le potentiel de production des petites centrales situées sur la rivière du Lièvre, Gatineau et Outaouais ainsi que par la remise en état d'autres petites centrales locales qui furent abandonnées pendant les années soixante.

Les centrales locales, semble-t-il, pourraient satisfaire jusqu'à 50 % de la consommation régionale. Lorsqu'on y ajoute les bénéfices de l'interconnexion, est-il vraiment nécessaire de doubler la boucle ontarienne par l'addition d'une ligne de 140 km en provenance du poste Grand-Brûlé? Est-il vraiment nécessaire de perturber à ces fins les écosystèmes de la réserve faunique de Papineau-Labelle, les passages sensibles des Laurentides et de Papineau ainsi que de nombreux environnements récréotouristiques? Nous ne le croyons pas.

La sécurité de l'approvisionnement, tant en Outaouais que dans les Laurentides, nous semble maintenant raisonnablement optimale. À cet égard, nous partageons entièrement la conclusion du comité Harvey lorsqu'il écrit: «Le réseau de l'Outaouais sera bouclé avec le réseau ontarien dès l'hiver 1998-1999 [...]. Selon Hydro-Québec, ceci permet de répondre temporairement à l'objectif prioritaire du projet, soit de sécuriser l'alimentation en énergie électrique de la région outaouaise. L'interconnexion entre le poste temporaire Outaouais et le réseau ontarien pourrait satisfaire les besoins régionaux d'urgence pour un ou deux hivers à venir jusqu'à ce que la construction du poste permanent soit complétée.»

Le Comité estime aussi que, si les travaux d'interconnexion pouvaient s'avérer urgents, «cette urgence n'aurait pas dû s'appliquer à la réalisation du projet de la ligne Grand-Brûlé–Vignan». Par conséquent: «Le Comité propose que le gouvernement modifie les délais de réalisation de la ligne Grand-Brûlé–Vignan. Ce délai permettrait de compléter les études et les consultations afin de fournir un meilleur éclairage pour la décision.» Nous demeurons cependant convaincus que la nécessité de cette nouvelle ligne doit elle-même être remise en cause.

En guise de conclusion, voici les principaux éléments de notre propos. Considérant les très faibles risques en Outaouais et dans les Laurentides de la répétition d'une catastrophe naturelle de l'ampleur de la tempête du verglas de janvier 1998, la sécurisation du réseau est, à notre avis, complétée à un niveau optimal. La construction de la ligne Grand-Brûlé–Vignan nous semble déraisonnable considérant le trop faible bénéfice collectif à retirer d'une amélioration si peu significative d'une sécurité d'approvisionnement déjà excellente, les importants impacts environnementaux prévisibles et le coût élevé de construction et d'entretien.

Dans l'éventualité où le gouvernement du Québec déciderait malgré tout d'autoriser Hydro-Québec à construire la ligne Grand-Brûlé–Vignan, nous l'exhortons à respecter aussi pour ce projet l'esprit de la décision rendue le 23 février dernier par la Cour supérieure invalidant les décrets illégaux adoptés en janvier 1998 pour accélérer la construction de la ligne Hertel–des Cantons. Dans tous ces dossiers, nous croyons que le gouvernement doit maintenant obliger le promoteur à respecter les droits des citoyens et à suivre le processus normal d'examen et d'évaluation des impacts environnementaux tel que prévu à la Loi sur la qualité de l'environnement, ce qui implique une évaluation comparative rigoureuse de ces impacts par une méthode scientifique et que des audiences publiques soient tenues par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Nous sommes heureux que ceci corresponde d'ailleurs à une déclaration récente du ministre des Ressources naturelles. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Giroux. Alors, M. le ministre. Questions? Commentaires?

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Alors, je voudrais d'abord vous remercier, remercier la MRC des Laurentides d'avoir accepté de se présenter devant la commission pour nous faire part d'un point de vue on ne peut plus clair à la lecture de votre mémoire.

De façon générale, je commencerais d'abord par la dimension météorologique. Quand vous dites que «le désastre de janvier 1998 fut essentiellement le résultat du caractère stagnant et exceptionnellement stable des masses d'air impliquées, ce qui a engendré une période de précipitations extraordinairement longue», ce qui est vrai, mais je veux juste vous... Et, à partir de là, vous concluez ou vous extrapolez en disant que les chances sont à peu près presque nulles que ça se reproduise dans un temps prévisible. Mais c'est un débat qui a cours sur les changements climatiques.

(16 heures)

Mais je fais juste vous rappeler que, deux ans avant, en 1996, en juillet 1996, il y a eu des pluies torrentielles au Saguenay–Lac-Saint-Jean, avec les images que vous connaissez, assez dramatiques, deux ans avant. Et ça a été le même phénomène des masses humides qui sont demeurées stagnantes pendant presque trois jours. Et c'est ça, les précipitations qu'on a eues, c'est pour ça. Alors, quand vous dites que c'est exceptionnel et presque unique, je fais juste vous rappeler que, nous, dans notre région, on n'a pas vécu le verglas de 1998, mais on a vécu les pluies torrentielles, et c'est exactement le même phénomène météo.

Alors, c'est une question évidemment très considérable, qui fait l'objet de bien des débats, mais il me semble qu'il faut être prudent sur le retour à des fréquences plus courtes de phénomènes météo extrêmes. En d'autres termes, remarquez que, quand je dis que c'est un débat, c'est vrai que c'est un débat, puis je considère à ce moment-là, à la lecture de votre mémoire, que vous vous placez, je dirais, dans le camp des optimistes météorologiques. Vous faites preuve d'un certain optimisme. Remarquez que ce n'est pas une position qui... Peut-être que vous avez raison, mais il y a d'autres positions qui sont exprimées qui nous disent: Les changements climatiques, c'est devenu une réalité, et des phénomènes extrêmes, on va en connaître de façon plus fréquente.

Alors, dans des conditions comme celles-là, un gouvernement, une société d'État qui a à dispenser un service aussi essentiel que l'électricité se doit de faire preuve de prudence. Parce que, je dirais, toute votre thèse et votre position s'appuient sur ce postulat de départ: vous soutenez que cette tempête de verglas est tellement exceptionnelle qu'on peut presque dormir tranquille, ça ne se reproduira sans doute jamais. Je vous avouerais que je suis moins péremptoire que ça, compte tenu de ce qu'on a vécu dans notre région, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, deux ans avant. C'était l'été. Évidemment, ce n'était pas du verglas qu'on a eu, c'était l'été, mais on a eu de l'eau. Et c'est justement ce phénomène de stagnation de masse humide. Ça a pris la forme de verglas en janvier 1998 parce que c'était l'hiver. Alors, je serais porté à être plus prudent, moi, quant à vos postulats météorologiques. Je ne sais pas si vous avez des commentaires à faire là-dessus.

Une voix: M. Giroux.

M. Giroux (Maurice): En fait, je laisserais peut-être parler les experts, mais ce que je veux juste vous dire avant, c'est que c'est sûr qu'on ne vous souhaite pas ce qui s'est passé chez vous il y a deux ans puis on ne souhaite pas ce qui s'est passé dans la Montérégie et dans l'Outaouais l'an passé. C'est sûr que ce n'est pas à souhaiter. Alors, on est, comme vous dites tantôt, très optimiste. Et les probabilités sont peut-être moindres, mais, dans un esprit où on est d'accord que c'est... Écoutez, dans un mémoire tel qu'on l'a présenté, il faut garder le caractère optimiste. Par contre, on est très prudent parce qu'on dit que, oui, il y a sûrement des choses qu'il faut regarder, puis on n'est pas fermé à toutes ces idées-là.

Par contre, quand le projet a débuté, on veut tout simplement mentionner que le décret avait bien stipulé à un endroit, puis on a fait confiance sur toute la ligne. Puis, par la suite, on s'est fait un petit peu changer et puis il n'était plus question du tout du corridor qu'on nous avait imposé. On est allé complètement dans un autre corridor.

J'écoutais ce matin mon collègue de l'autre MRC, M. Laframboise, qui disait que c'était une étude qui avait pris deux à trois jours. Je ne pense pas que le gouvernement puis Hydro-Québec aient mis seulement deux ou trois jours pour statuer sur un corridor qu'ils avaient établi comme corridor sud. Probablement que le corridor avait été analysé et que le trajet a été fait en deux, trois jours, possiblement, mais pas le corridor en tant que tel. Mais c'est eux autres, ils ont changé d'idée probablement dans l'espace de quelques jours sur un autre corridor où il n'y avait pas eu d'analyses vraiment concrètes de faites. Ils n'ont pas prouvé que c'était le corridor du moindre impact. Alors, c'est dans cet esprit-là. Je ne sais pas si mon collègue ici, à côté, pourrait répliquer un peu à la probabilité des tempêtes ou des sinistres qu'on a pu avoir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Guay, c'est votre nom? M. Guay?

M. Guay (Pierre-Yves): Oui, c'est ça.

M. Giroux (Maurice): M. Guay.

M. Guay (Pierre-Yves): Sur notre postulat météo, j'aimerais simplement préciser qu'en fait le mémoire ne cherche pas à avancer l'idée selon laquelle il n'y aura pas d'autre verglas ou il n'y aura pas d'autre grand déluge ou de choses du genre. Cependant, bon, il n'y a personne ici, enfin de la MRC des Laurentides, ni moi-même qui sommes spécialistes en météo, mais, comme tout le monde, on a suivi ce que les scientifiques disaient sur la scène publique à l'époque du grand verglas, à l'époque du déluge, et tout. Et ce qu'on en sait, c'est que les bouleversements climatiques qui sont inquiétants au plan planétaire et qui engendrent des conditions extrêmes semblent être reliés à l'effet de serre et à ce genre de phénomènes qui produisent effectivement des masses d'air instable et du temps violent. Or, autant le déluge que le grand verglas ne semblent pas répondre à cette cause-là. Évidemment, ils ont des causes. Ces deux catastrophes qui nous ont touchés de façon si près l'une de l'autre ont sûrement des causes, et peut-être que la cause est commune. Mais cette cause-là ne semble pas être reliée, selon ce qu'on entend des scientifiques, aux changements climatologiques globaux qui affectent la planète.

Donc, quelles sont les causes en question? Parce qu'on ne le sait pas, parce qu'on ignore tout à ce sujet-là, on peut raisonnablement avancer qu'effectivement il est possible qu'on ait joué de malchance et qu'on ait eu deux catastrophes rapprochées. Si on avait eu des catastrophes du type de celles qu'on évoque et que nos voisins américains subissent, là, les tornades, les ouragans, et tout, alors, là, voilà des phénomènes climatologiques qui, semble-t-il, peuvent être reliés à l'effet de serre, au réchauffement de la planète et à l'instabilité des masses d'air. Et on a la certitude que ça va continuer à augmenter aux États-Unis. Cependant, évidemment, on a renoncé à sécuriser de façon maximale les villes, les villages contre les tornades et les ouragans parce qu'évidemment c'est impossible de le faire, c'est impraticable. Bon.

Ce qu'on dit dans ce mémoire, c'est qu'il ne faut pas renoncer évidemment à sécuriser le réseau d'Hydro-Québec, mais il y a, à la fois, peu de chance que les mêmes phénomènes se reproduisent de façon identique. À supposer que le déluge et le verglas aient eu la même cause, la même impulsion, et que cette cause se répète dans l'avenir, probablement que l'effet sera différent. On aura peut-être un troisième type de catastrophe qu'on n'a pas encore connu. Et cette catastrophe-là se produira peut-être dans une région qui n'a pas connu les deux premières.

D'ailleurs, il faut remarquer que les deux premières catastrophes se sont manifestées de façon différente dans des régions différentes. En fait, les cataclysmes naturels ne se répètent qu'extrêmement rarement de façon identique d'une fois à l'autre. C'est ce qui fait que les tornades ne passent jamais au même endroit, parce que, si c'était le cas, évidemment ça serait facile de déplacer les populations.

Alors, face à ça, ce qu'on dit, c'est que, bien sûr, il faut sécuriser le réseau mais dans les limites du raisonnable. On ne peut pas prémunir toutes les régions à risque de verglas ou à risque d'inondation totalement contre les effets de tels cataclysmes. Il faut nécessairement faire des choix. Bon. Le choix du bouclage est sans doute un bon choix. La sécurisation du réseau, c'est une option qu'il faut envisager. L'interconnexion avec l'Ontario semble être un pas suffisant, d'après nous, pour l'instant. Et, quant à la ligne Grand-Brûlé–Vignan, on serait porté à croire qu'elle n'est pas nécessaire.

Cependant, évidemment, on n'est pas des experts en hydroélectricité mais en évaluation environnementale et en aménagement du territoire de la MRC des Laurentides. Ce qu'on dit, c'est que, si la preuve est faite que la ligne Grand-Brûlé–Vignan est absolument nécessaire et que le gouvernement décide d'aller de l'avant pour sa construction, eh bien, qu'on prenne le temps d'étudier comme il faut le territoire pour trouver effectivement le tracé de moindre impact, ce qui n'a pas été fait étant donné l'urgence qui a été invoquée dans la première étape. Alors, c'est essentiellement l'esprit de notre mémoire.

(16 h 10)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.

M. Brassard: Oui, j'ai bien compris votre position. D'abord, effectivement, s'il y a un phénomène aussi extrême que celui qu'on a connu, il se pourrait bien que ça se produise ailleurs. Mais, si ça se produit ailleurs et qu'ailleurs le bouclage existe, bien ces régions-là touchées seront mieux en mesure d'affronter un pareil événement.

Mais, ceci étant dit, je comprends votre position. Puis je ne veux pas nécessairement dire que j'y adhère, mais je comprends votre position. C'est important qu'on la connaisse. C'est que, selon vous, l'interconnexion avec l'Ontario – qui va devenir permanente, parce que pour le moment elle est temporaire – lorsqu'elle deviendra permanente, ça vous apparaît, dans un horizon prévisible, suffisant pour sécuriser l'Outaouais. Quoique, quand vous dites: Un phénomène extrême pourrait se produire ailleurs, oui, c'est vrai, mais supposons, par exemple, qu'il se produise plus au nord et qu'il y ait des dégâts majeurs sur les lignes en provenance du Complexe La Grande par exemple, à ce moment-là, là, c'est votre région qui serait touchée.

Et, dans la perspective où il y aurait un bouclage, ce n'est pas l'Outaouais qui pourrait être alimenté par le bouclage, ce serait votre région, à ce moment-là. Ça joue dans les deux sens, d'une certaine façon. En d'autres termes, le bouclage peut être à la fois utile à l'Outaouais bien sûr, mais c'est réversible, le bouclage, ça peut être aussi, dans d'autres circonstances, utile à la région des Laurentides.

Mais, ceci étant dit, vous l'avez signalé en tout début, je vous le reconfirme, l'un des éléments de la déclaration ministérielle que j'ai prononcée de l'autre côté, à l'Assemblée nationale, le 11 mars dernier, l'un des éléments de la décision gouvernementale, c'est de faire en sorte que, à partir du 11 mars, pour tous les travaux qui restent à faire, pour les projets ou les parties de projets qui ne sont pas encore réalisés, nous revenons aux procédures régulières.

Alors, je pense que ça, ça répond à un de vos voeux et à une de vos revendications, je dirais. On revient aux procédures régulières, ce qui signifie – je pense que c'est important que ce soit bien clair – que et le projet d'interconnexion permanent avec l'Ontario et la ligne bouclage Vignan-Grand-Brûlé sont assujettis aux procédures régulières. Ça veut donc dire, comme vous le dites dans votre mémoire – c'est l'article 31 entre autres de la Loi de la qualité de l'environnement: Si le promoteur, qui est Hydro-Québec, pour des raisons sans doute tout à fait acceptables, compréhensibles, considère que le bouclage constitue toujours un projet nécessaire, le promoteur, en l'occurrence Hydro-Québec, devra se soumettre aux procédures régulières, donc, par conséquent, à toute la procédure qu'on connaît: évaluation environnementale, avis de projet au ministère de l'Environnement, étude d'impact cette fois-ci – non pas étude de répercussions environnementales mais étude d'impact – et audiences publiques devant le BAPE, avec rapport du BAPE.

Alors, je vous le confirme de nouveau, c'est ce qui va se produire, c'est ce qui va arriver: Les projets qui restent à faire, qui ne sont pas faits présentement, les parties de projet qui restent à faire... Je pense entre autres, au sud, à Saint-Césaire–Hertel, le poste Montérégie, il y a encore des travaux à faire dans Montréal et puis il y a surtout, évidemment, le bouclage Outaouais–Laurentides et l'interconnexion permanente avec l'Ontario. Tout ça désormais, à partir de maintenant, c'est assujetti aux procédures régulières des lois pertinentes dont la Loi de la qualité de l'environnement.

M. Giroux (Maurice): M. le ministre...

Une voix: M. Giroux.

M. Giroux (Maurice): Excusez. M. le ministre, vous pouvez être persuadé que la MRC des Laurentides, advenant le cas où le gouvernement décide tout simplement d'aller de l'avant avec le projet et qu'on va par les étapes normales, va contribuer, va travailler dans le même sens. Et on va regarder les analyses, puis, quand on démontrera vraiment les besoins... que l'étude d'impact sera faite, et le besoin de le faire, écoutez, on regardera, et on participera, et on sera là pour aider le projet en question.

M. Brassard: Je suis sûr que vous ne serez pas silencieux et que vous allez apporter votre contribution, comme vous l'avez fait d'ailleurs devant le comité, en fait ce qu'on a appelé le comité Harvey. Vous l'avez fait, et je suis convaincu que vous le ferez aussi dans le cadre de la procédure normale et régulière d'évaluation environnementale. Et c'est ça qui va arriver là.

Je pense que c'est important qu'on se voie et qu'on échange cet après-midi là-dessus pour qu'il n'y ait pas d'équivoque possible, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté possible. Si le promoteur décide d'aller de l'avant avec le projet de bouclage Outaouais–Laurentides, c'est assujetti, c'est soumis aux procédures régulières. Donc, tous les intervenants intéressés – et au premier chef sans doute la MRC Laurentides – vont être en mesure de participer à la consultation, de s'exprimer, auront le temps requis pour préparer des mémoires, examiner attentivement l'étude d'impact d'Hydro-Québec, la faire examiner par des experts, s'ils le jugent à propos. C'est comme ça que ça va se passer.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Guay.

M. Guay (Pierre-Yves): Merci. M. le ministre a souligné à juste titre que, dans notre mémoire, on se félicitait presque de l'interconnexion avec l'Ontario. Ça nous semblait, l'interconnexion avec l'Ontario, quelque chose d'urgent à accomplir. Non seulement on ne le conteste pas, mais ce qui ne transparaît pas peut-être assez du mémoire, c'est qu'on s'en félicite. Et on pense que, dans ce cas-là, de l'interconnexion avec l'Ontario, c'était la façon la plus rapide et la plus efficace pour assurer un bouclage effectivement de l'Outaouais par l'Ontario en cas de défaillance du poste Chénier. Donc, c'était tout à fait approprié. Et le caractère urgent des travaux s'appliquait tout à fait à cette interconnexion.

Là, il s'agit d'une deuxième boucle, d'une boucle via les Laurentides. Et on pense que, dans ce dossier-là, il faut prendre le temps de bien faire les choses. Hydro-Québec a une méthode d'évaluation environnementale très sophistiquée, très avancée, qui lui permet effectivement de déterminer des tracés de moindre impact environnemental dans des délais relativement courts, parce que les inventaires environnementaux qui sont en possession d'Hydro-Québec couvrent à peu près tout le territoire québécois déjà. Ça fait une vingtaine d'années qu'ils travaillent à monter ces inventaires. Alors, quand on arrive puis qu'on applique la méthode lignes et postes à un territoire d'étude, on arrive assez rapidement à dégager des corridors de moindre impact et ensuite des tracés de moindre impact.

Et c'est avec quoi on avait l'impression de faire affaire lorsque Hydro-Québec au début nous a présenté le corridor sud en nous disant: Voici le résultat de nos travaux, qui se sont échelonnés depuis plusieurs années, en termes de choix de corridors, et là, maintenant, on a élaboré un tracé là-dedans et on pense que c'est le tracé de moindre impact. On a regardé. Ils nous ont dit: C'est avec la méthode lignes et postes. On a fait confiance et on a dit: Très bien, on va aller avec ce tracé-là.

Par la suite, il y a eu des pressions de faites par nos voisins pour faire modifier ce tracé, pour faire modifier ce corridor, pour qu'Hydro-Québec prenne en considération un autre corridor. On ne conteste pas non plus les préoccupations légitimes de la MRC voisine. Comme le comité Harvey l'a démontré, quand on a à évaluer la valeur de l'environnement et qu'on a à comparer plusieurs hypothèses de tracé, évidemment, une perturbe davantage la forêt, d'autres perturbent davantage les paysages, les deux perturbent les étangs de grenouilles, une troisième va perturber des chevreuils, une quatrième va perturber des milieux urbains ou un terrain de camping. Laquelle est la meilleure? C'est très compliqué.

(16 h 20)

Alors, la méthode lignes et postes résout ce genre de problème là avec des pondérations. On attribue des scores aux différents impacts. Et on en arrive à la fin à dire: Bien, globalement, voici celle qui nous apparaît comme étant de moindre impact environnemental. Bon, évidemment, les poids ou les scores, si vous voulez, qu'on attribue à chacune des composantes affectées par les différentes hypothèses de ligne doivent être ajustées selon les valeurs de la région dans laquelle on cherche à implanter la ligne hydroélectrique. Ce principe-là est même exprimé dans la méthode lignes et postes d'Hydro-Québec. Donc, si dans une région on accorde davantage d'importance au paysage, alors que dans une autre on en accorde davantage au développement urbain ou que dans une troisième on en accorde davantage à la forêt, bien, les scores sont ajustés en conséquence. C'est l'ajustement de la méthode selon les valeurs environnementales du milieu. Dans le jargon du métier, c'est comme ça que ça s'appelle.

Alors, le premier scénario qui nous a été soumis par Hydro-Québec, avec le corridor sud, utilisait les scores typiques d'Hydro-Québec. Parce que Hydro-Québec, au fil des années, s'est dit: Dans telles circonstances, habituellement ça fait l'affaire des gens puis ça correspond à la structure des valeurs régionales lorsqu'on utilise tel genre de pondération. Alors, c'était la pondération standard qu'ils avaient utilisée pour déterminer le corridor sud, et ça nous convenait.

Papineau leur a dit: Nous, on privilégie davantage le paysage, on ne veut pas voir de ligne traverser notre milieu agricole, par exemple, et nos paysages champêtres, ce qui est tout à fait légitime de leur part. Et ils ont donc dit: Lorsqu'on applique nos propres valeurs via nos propres outils, nous, à la MRC de Papineau, on en arrive à la conclusion que le tracé de moindre impact, il est dans la forêt, il est dans la réserve Papineau-Labelle. À ceci, nous, nous répondons: Ce qui est important de préserver au premier chef, c'est les éléments biophysiques: c'est la faune, c'est la flore, c'est les composantes qu'on retrouve dans une réserve faunique.

Alors, c'est ce qu'on a fait valoir devant le comité Harvey, en disant: Finalement, lorsqu'on applique les valeurs mises de l'avant par la MRC de Papineau, ils ont probablement raison: leur tracé peut être, chez eux, le tracé de moindre impact. Mais, lorsqu'on applique nos valeurs chez nous, c'est-à-dire la protection de la forêt, la protection des écosystèmes, là on arrive à un résultat tout à fait différent: le meilleur tracé était le premier suggéré par Hydro-Québec. Et ça, la distinction entre les deux, là, c'est chirurgical, ça dépend effectivement des valeurs qu'on décide d'appliquer lors de l'étude d'impact. Et c'est justement le rôle du BAPE, de départager ce genre de valeurs là et de voir comment on peut, au mieux, appliquer les valeurs qui sont celles de la population régionale au choix du meilleur tracé.

Alors, ça n'a pas été fait, à venir jusqu'à présent. Et maintenant qu'on a l'assurance que ça va être fait étant donné qu'on aura à suivre la procédure régulière, bien, nous, effectivement, c'est notre principale revendication, c'est ce qu'on fait valoir depuis le début, et on vivra avec les conséquences, même si on ne croit pas nécessairement à l'opportunité ou à l'absolue nécessité d'avoir un double bouclage dans le cas de l'Outaouais. On pense qu'effectivement le premier est probablement suffisant pour toujours, il est sûrement suffisant pour l'instant.

M. Brassard: Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, j'ai une demande du député de Bertrand. Cependant, M. le député de Bertrand n'est pas membre de la commission, donc je requiers un consentement des autres membres de la commission pour lui céder la parole.

Une voix: On va y penser.

M. Cousineau: Mme la Présidente, merci beaucoup, mais je n'aurai pas besoin...

Une voix: On va y réfléchir.

M. Cousineau: Je n'aurai pas besoin du consentement des membres de la commission, parce que, dans l'exposé de M. Guay, qui a duré quelques minutes, il a donné la réponse que je voulais avoir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, quand ce serait seulement pour avoir dit ça, M. le député, je pense que c'était utile d'avoir un consentement. Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Dans votre mémoire, à la page 16, vous parlez du bouclage par l'interconnexion avec l'Ontario et vous dites que les approvisionnements pourraient être considérablement augmentés en optimisant le potentiel de production des petites centrales qui sont situées sur les rivières du Lièvre, Gatineau et de l'Outaouais et la remise en état d'autres petites centrales abandonnées. Maintenant, est-ce que vous avez fait une analyse? Parce que j'aimerais avoir un peu d'informations là-dessus, à savoir, bon: Celles qui sont en opération produisent combien, jusqu'à combien on peut aller avec ça, en termes de sécurité des approvisionnements? D'abord, celles en opération, ensuite on pourra regarder les autres qui sont désuètes ou qui sont fermées ou abandonnées.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Giroux.

M. Giroux (Maurice): Mme la Présidente, si vous me permettez, je vais laisser répondre M. Guay, c'est beaucoup plus technique.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Guay.

M. Guay (Pierre-Yves): Bon, ma réponse ne sera pas nécessairement plus éloquente que celle qu'aurait pu donner M. Giroux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Guay (Pierre-Yves): Cette hypothèse ou cette idée de remettre en fonction les petites centrales de l'Outaouais est une idée qui est reprise par le rapport du comité Harvey et qu'un certain nombre d'intervenants ont fait valoir devant le comité Harvey, et des intervenants de l'Outaouais que je ne connais pas, que je n'ai pas rencontrés. Mais, en lisant les rapports d'audiences publiques, on voit qu'un certain nombre de gens ont identifié des centrales qui ont été abandonnées dans les années soixante, d'autres qui fonctionneraient encore présentement mais avec un rendement réduit, parce qu'on ne les pousse pas au maximum. Et, d'après les propos qu'ont tenus ces intervenants et qui ont été repris par le comité Harvey, on pourrait atteindre, avec ces centrales, en les remettant en fonction, quelque chose de l'ordre de 50 % de la consommation régionale, l'autre 50 % pouvant être fourni par l'interconnexion ontarienne. Alors, en cas de panne, il semblerait que ça comblerait 100 % des besoins.

Est-ce que c'est exact? J'entends des gens derrière moi qui disent: Jamais, c'est impossible. Moi, je n'ai pas d'information technique et, évidemment, je ne suis pas un électrotechnicien. Je ne le sais pas. Mais c'est les chiffres qui sont repris par le comité Harvey et qui ont été tenus par un certain nombre d'intervenants dans l'Outaouais lors des audiences publiques.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Donc, on pourrait, à la lecture de ces documents, comprendre les propositions, connaître les détails des coûts, j'imagine. Est-ce que vous savez que, dans ce rapport-là, on parle des coûts également pour...

Une voix: Non.

M. Lelièvre: ...remettre en état les centrales qui ont été abandonnées? Il n'y a pas d'études techniques qui ont été faites ni d'études de coûts. Même, dans ces rapports-là, il n'y a eu aucune référence...

M. Guay (Pierre-Yves): Si vous permettez, je pourrai essayer...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Guay. Je dois vous nommer pour les transcripteurs.

M. Guay (Pierre-Yves): Excusez-moi. C'est parce que j'ai peu l'habitude. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ce n'est pas un problème. C'est juste ça.

M. Guay (Pierre-Yves): J'ai le rapport avec moi. Pendant le temps que d'autres personnes interviennent, je pourrai chercher si effectivement on a des références exactes sur ce genre d'intervention.

M. Lelièvre: Cet aspect-là m'intéresse parce que, bon, on sait que ça peut être une alternative. La petite hydraulique, on en parle, comme en Gaspésie on parle, par exemple, d'utiliser l'éolien. Donc, c'est des alternatives qui pourraient permettre d'avoir des approvisionnements.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je pense que M. Savard, si vous permettez, avait quelque chose à ajouter sur la question précédente.

M. Savard (Denis): En fait, oui, sans que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Savard.

M. Savard (Denis): Merci, madame. Sans que ça soit une réponse précise à votre question, quand on le mettait là, nous autres, c'est un peu une alternative, c'est un peu des hypothèses de travail. Comme on disait, on n'est pas des spécialistes, mais on met ça dans notre mémoire pour peut-être soulever la question auprès d'Hydro-Québec. Parce que eux autres ont regardé ça, ont envisagé la possibilité, au lieu de tracer une ligne complète, de, on dit, augmenter la sécurisation à cet endroit-là par le biais de petites centrales.

Exemple: Moi, j'ai assisté aux présentations, mardi matin, d'Hydro-Québec, la commission Nicolet, tout ça, où on parle du principe de bouclage. Je pense que ça, c'est reconnu, et M. Brassard, ce matin même, disait aussi: Il y a aussi l'interconnexion ou des interconnexions. On parle... au Nouveau-Brunswick et en Gaspésie, il y a des interconnexions. Il n'y a pas toujours des bouclages à la grandeur du Québec pour autant, quand il y a moyen de faire autrement, des fois à des coûts moindres, et puis peut-être une satisfaction quand même.

Donc, on se dit: Peut-être que ça, ça peut être une opportunité à étudier et peut-être qu'Hydro-Québec, dans ses scénarios possibles, peut regarder aussi ce côté-là. C'était dans ce sens-là qu'on l'avait mis dans le mémoire aussi.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Guay, pour la question suivante.

M. Guay (Pierre-Yves): En consultant le rapport du comité Harvey, on voit qu'il y a eu cinq ou six interventions: le 30 septembre, le 25 septembre, le 28, bon, ces dates-là. Il y a eu cinq ou six interventions où des gens se sont avancés au micro en disant, eux, être assurés que la remise en état des petites centrales sur les rivières et tout... et en maximisant le potentiel, on réussirait à combler peut-être la moitié des besoins; l'interconnexion, l'autre moitié. Mais je comprends que c'est une question cruciale à laquelle, nous, on n'a pas de réponse, mais c'est sans doute la question à laquelle Hydro-Québec devrait répondre, si on voulait effectivement statuer sur la pertinence de la ligne Grand-Brûlé–Vignan.

S'il s'avérait que la remise en état des petites centrales ou en poussant leur rendement dans les limites du raisonnable, jumelé à l'interconnexion, on satisfait, disons, 80 % des besoins de la région, ne serait-ce que 80 %, c'est déjà une belle garantie de réapprovisionnement en cas de panne de la source d'approvisionnement principale. Si, par contre, on n'atteint que 30 %, bien ça vient justifier la nécessité d'une autre boucle.

Alors, ça me semble être une question technique à laquelle il est primordial de répondre avant qu'on puisse effectivement s'avancer avec une réponse définitive sur la nécessité de la boucle Grand-Brûlé–Vignan.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, le temps passe très vite. Une toute petite question, M. le député de Gaspé. Ce sera la dernière.

(16 h 30)

M. Lelièvre: Bien, étant donné qu'éventuellement il y aura peut-être des études d'impact, ce serait bien de pouvoir déterminer si ça sera un apport, je dirais, une source d'appoint au lieu d'une alternative, parce que, lorsqu'on parle de la Gaspésie, cette semaine, Hydro-Québec et la commission Nicolet, concernant les méthodes de déglaçage, et non pas le bouclage parce que le bouclage, ils ne l'ont pas exclu, mais ils disent: On va essayer d'autre chose avant, puis il y a des méthodes alternatives, donc le déglaçage. Et la commission Nicolet nous disait aussi qu'il fallait des méthodes ou des équipements technologiques, mais ils ne sont pas tout à fait au point. Ça peut prendre encore plusieurs années. Donc, on fait des choix, là. Est-ce qu'on sécurise les approvisionnements ou on se croise les doigts que ça n'arrive pas chez nous? On aime mieux être en support qu'être des victimes. Alors, ça serait très intéressant de voir l'évolution que ça va suivre chez vous. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Giroux, pour un dernier commentaire.

M. Giroux (Maurice): Merci, Mme la Présidente. Je voudrais juste passer la parole à M. Savard. Il aurait une question pour le comité, la commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ah bon! c'est assez rare qu'on reçoit les questions de ce côté-là. M. Savard, vous pouvez vous exprimer.

M. Savard (Denis): O.K. Merci. C'est une question, bien, je pense qu'elle est relativement simple, mais c'est un peu pour comprendre le processus parce que, bon, M. Brassard l'a dit, il y a eu différentes choses depuis la tempête, finalement. Il y a eu beaucoup d'autres choses. Mais c'était pour comprendre un peu. Tantôt, M. Brassard mentionnait: Le promoteur décidera. En fait, on va prendre les quatre principaux bouclages qui étaient mentionnés dans son projet mardi matin. Est-ce que ça revient au promoteur de décider ça, quel projet on soumet au BAPE ou si, en fait, ça revient à la commission dans son rapport qui décidera de dire, un petit peu, la sécurisation du réseau... Je dirais, si on rejoignait notre position, à nous autres, dans le cas du bouclage de l'Outaouais, on dirait: Bon, bien, la commission dit à Hydro-Québec: Cette sécurisation-là est atteinte, on n'a pas à aller devant le BAPE avec ce bouclage-là. Dans ce cas-là, est-ce que le BAPE a à se prononcer sur la nécessité du réseau ou du bouclage ou c'est carrément environnemental au sens qu'on l'entend d'habitude? C'était ça; c'était le cheminement peut-être au niveau de la commission.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre, une précision sur vos propos. Ce que je comprends.

M. Brassard: Quand il y a des projets qui sont assujettis à la procédure d'évaluation environnementale et qui nous conduisent à des audiences publiques devant le BAPE et que le BAPE fait un rapport, le BAPE a pour mission et mandat, en vertu de sa loi, d'examiner les impacts environnementaux, mais, à ma connaissance, dans presque tous les cas, il aborde aussi la question de la justification du projet. Les intervenants qui défilent devant le BAPE, très souvent, s'expriment sur la justification du projet et pas uniquement ou de façon exclusive sur les impacts à caractère environnemental du projet. Ça fait partie du rapport du BAPE.

Mais vous connaissez aussi la suite. Le BAPE, ce n'est pas une instance décisionnelle. Quand il y a un projet qui est examiné en vertu de la procédure d'évaluation environnementale prévue à l'article 31 de la Loi sur la qualité de l'environnement, l'instance décisionnelle, c'est le Conseil des ministres, par décret. Alors, évidemment le BAPE est un outil essentiel, ses recommandations apportent un éclairage qui n'est pas négligeable pour la prise de décision, mais la prise de décision, c'est le gouvernement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je dois vous interrompre, en quelque sorte, mais on se doit d'arrêter nos travaux.

Alors, je voudrais vous remercier, au nom des membres de la commission, d'être venus échanger avec nous.


Document déposé

Et, pour ce qui est du rapport que vous nous aviez dit déposer, est-ce que vous le déposez maintenant?

Une voix: Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, on va le prendre au niveau du secrétariat pour en faire bénéficier les membres de la commission. Merci bien. On va suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 34)

(Reprise à 16 h 40)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission reprend donc ses travaux.

Je demanderais à nos prochains invités de prendre place. Il s'agit de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. M. Massé, vous êtes le porte-parole, je présume? Alors, vous savez très bien, vous connaissez le déroulement. On a 20 minutes qui vous sont allouées pour faire la présentation de votre mémoire, et, par la suite, il y aura échanges avec les membres de la commission pour une durée de 40 minutes. Alors, si vous voulez bien, M. Massé, j'apprécierais que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent.


Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)

M. Massé (Henri): Oui, il y a d'abord M. Jean Perreault, qui est de la FIPOE, le Comité interprovincial des ouvriers en électricité, monteurs de lignes; Jean Lavallée, vice-président de la FTQ, secteur construction; et Robert Demers, qui est au service de la recherche à la FTQ.

On vous remercie de nous laisser l'opportunité de se présenter devant vous sur un sujet qu'on trouve fort important pour l'ensemble du Québec et les travailleurs qu'on représente et je vais demander à Robert Demers de lire le mémoire de la FTQ.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Demers.

M. Demers (Robert): Merci. Mmes et MM. de la commission, la FTQ n'entend pas venir devant vous à titre d'expert en sinistre, en ingénierie ou en climatologie. Nous ne prétendons pas non plus poser en juristes et surtout pas en moralistes de la chose publique. Nous sommes cependant convaincus qu'au-delà de toutes ces dimensions dont nous devons tenir compte pour juger de la sécurisation actuelle et future du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec, il s'agit bien ici de décisions d'abord et avant tout politiques. Elles l'ont été lors de l'adoption des mesures d'urgence par décret et elles le seront également lorsqu'il faudra établir le degré de sécurisation que nous voudrons collectivement atteindre.

En ce sens, à titre de représentants de près de 500 000 travailleurs et travailleuses de toutes les régions du Québec et de toutes les sphères d'activités, nous croyons avoir notre mot à dire et peut-être amener un peu de gros bon sens dans le débat actuel. Le jugement Rousseau a placé le gouvernement dans une situation qui s'apparente à l'histoire du pauvre Jos, comme on l'a soulevée à l'Assemblée nationale au mois de mai. Le pauvre Jos, pour reprendre cette allégorie-là, saute à l'eau pour sauver un enfant tombé du quai et reçoit, avec les félicitations du maire, une contravention pour baignade interdite. Ça se résume à ça.

Quelle était l'urgence d'agir et l'adoption des décrets de 1998. Nous étions ici, en février 1998, devant cette même commission, pour vous présenter nos commentaires sur le plan stratégique d'Hydro-Québec qui, on se rappellera, lui aussi, a été adopté par décret dans la même foulée que ceux visant à adopter des mesures d'urgence pour remettre en état le réseau. À cette occasion, nous avions terminé notre présentation par une mise en garde qui est toujours d'actualité. Permettez-nous de vous en citer quelques extraits.

Nous avons tous et toutes été ébranlés par la tempête de verglas. Des mesures d'urgence s'imposaient et nous y souscrivons. Il ne faudrait pas cependant qu'une fois cette épreuve passée nous continuions à cultiver ce culte de l'urgence pour justifier un mode de gestion de la chose publique fondé sur l'adoption de décrets. Il y va d'une crédibilité du processus de consultation et de décision qui pourrait être difficilement rétabli si le cap se maintient. Nous vous pressons de revenir rapidement à une gestion plus ouverte du dossier de l'énergie et de l'environnement, au risque d'un bris de confiance.

Nous n'avons pas changé d'avis. L'appréciation de l'urgence est une décision qui appartient au politique. Que l'adoption par décret soit entachée ou pas d'irrégularités, que ça n'ait pas été la meilleure voie ou que ça puisse être juridiquement invalidé, cela ne change rien au fond de l'affaire. Il fallait rapidement faire quelque chose pour remettre en état le réseau et le sécuriser. Sur le fond, il me semble que tout le monde devrait s'entendre.

L'urgence passée cependant, et là-dessus aussi tout le monde semble s'entendre, il faut remettre la machine au mode normal. Peut-être où il y a divergence, c'est sur ce qui pourrait être soumis au mode normal: tout le tracé Hertel–des Cantons, par exemple, ou seulement la portion des travaux à compléter y incluant dans cette hypothèse la possibilité d'un démantèlement des installations déjà en place. C'est pour nous un secret de Polichinelle que les tenants de l'unicité du projet Hertel–des Cantons veulent principalement voir le BAPE se prononcer sur un aspect du dossier qui n'est pas de son ressort, soit celui de la justification du projet, qui deviendrait condamnable si on le soupçonnait de servir éventuellement à l'exportation. Il va falloir que le chat sorte bien du sac un de ces jours. Et, pour nous, si l'unicité semble faire bon sens, à notre avis, ça milite plutôt en faveur de sa complétion la plus rapide possible.

D'abord, y a-t-il un honnête chrétien qui puisse endosser une éventuelle démolition des installations déjà construites, alors qu'encore une fois tout le monde s'entend sur la recommandation principale de la commission Nicolet, la mise en chantier sur 20 ans d'un vaste programme de sécurisation de nos approvisionnements? Nous endossons donc pleinement l'adoption d'une loi conservatoire et nous nous réjouissons de l'intention du gouvernement de soumettre le reste des travaux à compléter aux exigences de consultation des lois sur l'environnement, la protection du territoire, et l'aménagement et l'urbanisme.

Quant au niveau de sécurité et à la fiabilité du réseau, à peu près tout le monde s'entend également pour dire que l'état actuel de restauration du réseau, conjugué avec une probabilité somme toute modeste de récidive d'une autre catastrophe à court terme, peut nous prévenir de risques immédiats. L'urgence de catastrophe n'est plus dans le décor, mais, là encore, si un tel événement devait se reproduire aujourd'hui, on parle encore de l'éventualité que plus de 1 000 000 de personnes seraient touchées pour une période d'environ 18 mois.

Une voix: C'est 18 jours.

M. Demers (Robert): Cela demeure inadmissible socialement, économiquement et politiquement.

Cependant, pour en arriver à un renforcement complet du réseau, il faudra y investir des milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Ce grand chantier a été décrit dans le rapport Nicolet. Il pourrait nous amener à une reconfiguration de tout le réseau par de nouveaux bouclages et de nouvelles interconnexions sur des lignes renforcées du point de vue structural et par un programme d'enfouissement des réseaux dans les agglomérations urbaines et autour des installations dispensant des services essentiels à la population.

Nous vous rappelons encore une fois que, lors de notre présentation en février 1998, nous avions déjà présenté l'enfouissement des fils et la poursuite des programmes de recherche et développement pour offrir une alimentation plus sûre et fiable en hydroélectricité. Là-dessus non plus, nous n'avons pas changé d'idée.

Parmi les facteurs de sécurisation qu'on semble avoir un peu négligés, à l'arrêt des travaux ordonné suite au jugement Rousseau, c'est plus de 2 200 travailleurs du secteur de l'installation et de la production de matériel électrique qui se sont retrouvés à la rue. Des investissements à venir, prochains, de plus de 500 000 000 $ ont été gelés. Des fournisseurs, pourtant déjà largement mis à contribution en toute urgence durant le coeur de la crise, se voient aussi forcés d'interrompre une partie de leurs activités.

Ici, le maintien d'une main-d'oeuvre experte, d'une industrie en bonne santé financière nous semble aussi une des conditions majeures de sécurisation du réseau, bien au-delà de calculs de prévision ou de calculs de risques acceptables. Hydro-Québec, d'un côté, discute également avec des entrepreneurs d'indemnités pour les coûts découlant de la démobilisation des chantiers. Mais qu'en est-il des travailleurs? Il est important que la reprise des travaux se fasse le plus rapidement possible.

Et, où on signale un effet pervers qui revient constamment quand ils s'opposent, les travailleurs ou les environnementalistes, c'est qu'à cause de cet imbroglio politico-juridique actuel il résulte une fausse opposition entre des travailleurs qui veulent gagner leur vie et des citoyens qui utilisent des moyens légitimes, légaux pour faire connaître leurs droits, alors que nous désirons tous et toutes que le développement économique et la création d'emplois se fassent dans le respect de l'environnement et du droit à la consultation pour les citoyens et citoyennes.

Des solutions pour demain. Nous croyons qu'il faut rétablir rapidement la crédibilité d'Hydro-Québec comme fournisseur sûr d'énergie de qualité. C'est d'ailleurs là une des raisons qui avaient motivé le gouvernement à faire adopter par décret son plan stratégique l'an passé. Il faut également assurer à d'éventuels investisseurs l'accès à une fourniture d'énergie sûre et fiable, autant en Montérégie que dans l'ensemble du Québec. L'incertitude a un prix aussi.

Nous demandons à ce que les processus d'évaluation et d'autorisation des projets en complétion du réseau se fassent le plus rapidement possible. Le promoteur unique, Hydro-Québec, a déjà fait ses devoirs et des miniconsultations du BAPE ont déjà été menées. Pour le tronçon Hertel–Saint-Césaire, tel que présenté par Hydro-Québec, il n'y a pas encore d'alternative valable identifiée d'un moindre impact. Même réalisé tel quel, il ne nécessiterait tout au plus que l'expropriation ou le déplacement maximum de 20 résidences, selon le rapport du Comité d'information et de consultation d'octobre 1998.

Parmi d'autres objections qui sont parfois soulevées, le niveau de sécurisation actuel serait suffisant pour la Montérégie et rendrait inutile la poursuite de travaux qui ne serviraient finalement qu'à l'exportation d'hydroélectricité. Mais, comme l'ensemble du réseau est intégré, tout peut servir à l'importation comme à l'exportation de l'électricité. Dans cette logique, il faudrait renoncer à la pièce maîtresse de la sécurisation qui est l'interconnexion avec des fournisseurs et des clients à l'extérieur du Québec. Et, pour financer ce grand chantier de sécurisation, y a-t-il quelque chose de vraiment honteux à utiliser les avantages de l'hydroélectricité en l'exportant? Par sa capacité d'emmagasinage en réservoirs et sa disponibilité variable selon des pointes d'utilisation saisonnières, nous pourrions ainsi en acquitter la facture.

Nous, à la FTQ, nous avons toujours répété à chaque occasion que le Québec avait une chance unique de devenir une plaque tournante de l'énergie pour le nord de l'Amérique, mais, pour ce faire, il va falloir que certains groupes d'influence abandonnent l'esprit de clocher qui les anime présentement. C'est bien beau de dire que ce sera suffisant pour la Montérégie ou suffisant pour ma région, mais le pauvre monde de Montréal là-dedans? Il n'y a pas beaucoup de poêles à bois et de foyers à combustion lente dans un troisième étage de la rue Panet. Un certain partage social des inconvénients et des avantages de notre mode de vie et de consommation ne doit pas se faire à sens unique.

(16 h 50)

Nous voulons aussi une reprise rapide des travaux. Même si l'état actuel du réseau, grâce aux travaux réalisés depuis janvier 1998, semble nous offrir une relative sécurité, il n'en demeure pas moins urgent d'entreprendre rapidement les travaux de construction de l'ensemble du réseau, selon les pistes qu'a dégagées la commission Nicolet. Les projets de loi présentés en annexe du projet de loi n° 42 doivent être, pour les uns, protégés et, pour les autres, réalisés en priorité, soit les tronçons Hertel–Saint-Césaire, Outaouais–Ontario, Grand-Brûlé–Vignan, Jacques-Cartier–Mauricie et centre-ville de Montréal.

Au-delà de l'aspect juridique – au-delà de l'aspect juridique – il nous semble que nous avons collectivement la responsabilité de s'assurer que plus jamais 3 000 000 de Québécois et de Québécoises ne revivent un cauchemar comme celui de l'hiver 1997-1998. Nous encourageons le gouvernement à continuer dans le même sens, puis ça, pour nous, ce n'est pas du bidon. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Demers. Alors, M. le ministre. Questions? Commentaires?

M. Brassard: D'abord, je voudrais remercier la FTQ d'avoir accepté notre invitation et de s'être présentée en commission pour qu'on puisse échanger sur un problème à la fois grave et important, celui de la sécurisation de l'approvisionnement en électricité de plusieurs millions de personnes.

Je dois vous dire que je trouve votre court mémoire direct et rafraîchissant parce qu'il y a là-dedans le gros bon sens. Ha, ha, ha! Dans le fond, ce qui caractérise votre prestation cet après-midi, c'est le gros bon sens. On peut bien poursuivre les querelles à caractère juridique, là, mais il reste que... Et votre dernière phrase est, ma foi, on ne peut plus révélatrice et marquée par la sagesse: Il nous semble que nous avons collectivement la responsabilité de s'assurer que plus jamais 3 000 000 de Québécois et de Québécoises ne revivent le cauchemar de la tempête de verglas. À cet égard, je constate que, pour la FTQ, les interconnexions et les bouclages constituent des moyens efficaces appropriés pour augmenter de façon significative la sécurité d'approvisionnement des millions de personnes qui vivent dans les régions affectées. N'est-ce pas?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Massé.

M. Massé (Henri): Exactement.

M. Brassard: Est-ce que je comprends aussi que, pour ce qui est des exportations... Il y a une phrase tout à fait intéressante dans votre mémoire quand vous dites que «le réseau est intégré et tout peut servir à l'importation ou à l'exportation d'électricité». C'est vrai. Il y a quelqu'un qui est venu hier, je pense, devant nous – et je ne me souviens plus qui – qui a dit exactement la même chose: Un réseau intégré. C'est sûr qu'il se pourrait bien que la ligne Hertel–des Cantons achemine de l'électricité qui va, par les interconnexions existantes, se rendre aux États-Unis, mais l'inverse est aussi vrai. Mais ce que vous nous dites, au fond, c'est qu'exporter de l'électricité, une fois que les besoins des Québécois ont été comblés, satisfaits, ça n'a rien de scandaleux. Ce n'est pas plus scandaleux que d'exporter de l'aluminium, ou du bois d'oeuvre, ou du papier.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Massé.

M. Massé (Henri): On a été beaucoup plus loin que ça. Sur le plan, en décembre l'an passé... Comment on l'appelait, le plan à Hydro-Québec?

Une voix: Plan stratégique.

M. Massé (Henri): Le plan stratégique. On a demandé à ce que le Québec devienne la plaque tournante au niveau de l'énergie hydraulique, au niveau du marché de l'électricité en Amérique du Nord. Je pense qu'il n'y a pas un État américain, il n'y a pas une province canadienne qui est aussi bien situé que le Québec, qui n'a pas autant de ressources hydroélectriques. Et, à chaque fois, on a demandé d'aller plus loin. On a demandé de développer Eastmain. On sait qu'il y a du travail qui se fait. On a demandé de continuer à travailler dans ce sens-là tout en respectant au maximum l'environnement.

À la FTQ, on a toujours été très, très préoccupé par les questions d'environnement. Dans nos milieux de travail, à tous les jours, les produits dangereux, tout ce qui peut toucher à l'environnement, on a du monde qui travaille à travers tout le Québec. Mais, en même temps, je pense qu'il faut faire attention aux faux débats dans la société.

Il est bien évident que, quand on développe une ville, on fait du développement économique, il y a toujours des changements quelconques qui sont apportés à la nature. Il faut regarder à l'équilibre de tout ça, mais, en même temps, je pense qu'il faut aller de l'avant. Et c'est pour ça qu'on est très clair d'ailleurs dans ce mémoire-là.

Je me souviens, moi, des lignes ouvertes, des émissions de T.V. durant la crise du verglas. On a tellement reproché au gouvernement du Québec et à Hydro-Québec, et c'était pratiquement unanime, de ne pas avoir prévu ça, toute cette crise-là. Puis on dirait, oups, une couple de mois après, là, c'est un peu comme si on oublie tout ça puis il n'y en a plus, de danger. Il y a eu la crise du verglas de l'an passé, mais il y en avait eu une dans la région de Joliette l'année d'avant – j'avais été pris dedans, moi.

Et j'étais, moi, en Argentine avec Jean Lavallée l'an passé et le même phénomène se répercute dans le sud de l'Argentine qui n'avait jamais eu de crise de verglas dans les autres années auparavant, puis dans les trois, quatre dernières années – en tout cas, eux autres ils appellent ça «El Niño», le réchauffement de la planète, Dieu sait, je ne sais pas si c'est vraiment ça – ils ont été pris avec un phénomène semblable. Ça fait qu'on aimerait bien ça que ça ne se reproduise pas, mais en même temps on est conscient qu'il faut renforcer le réseau pour y faire face. D'ailleurs, la commission Nicolet, qui a siégé pendant des mois, vient dire à peu près la même chose. Bon. Je pense que c'est assez clair.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.

M. Brassard: Je comprends bien que vous en profitez pour redire une des orientations majeures de la FTQ, c'est-à-dire que le choix de l'hydroélectricité, qui n'est pas un choix récent, qui est un choix de société depuis une quarantaine d'années, finalement, c'est un choix auquel vous adhérez encore pleinement, ce qui explique évidemment votre revendication de reprise des grands travaux d'aménagement hydroélectrique. Ça a des impacts environnementaux, j'en conviens, construire des barrages, c'est sûr, mais, quand on pense aux gaz à effet de serre qui sont produits par d'autres façons de produire de l'électricité à partir du mazout, du charbon, je pense que les avantages l'emportent très nettement sur les inconvénients.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Demers.

M. Demers (Robert): Peut-être, pour prendre une caricature, on a souvent comparé les opposants au projet de sécurisation à David contre Goliath, qui est Hydro-Québec. J'ai l'impression que, ce coup-ci, David est en train de se tirer dans le pied, parce qu'on a une occasion unique de profiter d'une conjoncture où on a besoin de refaire notre réseau de connexions, notre réseau de lignes qui connectent avec l'extérieur.

Dans un contexte où l'Ontario, du côté ouest, par exemple... L'Ontario aura bientôt 20 centrales nucléaires qui vont être déclassées vers 2005, 2010. Ils vont la prendre où, l'électricité? Les États de Nouvelle-Angleterre, les États du nord des États-Unis déclassent des centrales thermiques. Ils vont la prendre où, l'électricité? Il y a énormément de potentiel pour nous qui sommes hydroélectriques. On a, en plus, l'avantage d'être capable d'emmagasiner de l'électricité sous la forme d'eau, la forme la moins chère au monde. Je pense qu'il faut en profiter comme un avantage de ça, profiter du malheur qui nous est arrivé pour en sortir grandis. Puis je pense que c'est dans ce sens-là que, nous, on voit que toute cette histoire-là peut connaître une issue heureuse si tous les gens sortent de leur chapelle puis regardent le développement économique du Québec comme étant une perspective réalisable.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.

M. Brassard: Oui, mais une dernière remarque que je dois faire, compte tenu des revendications de la FTQ en cette matière, c'est que, une fois que la loi n° 42 aura été adoptée – c'est encore un projet de loi; j'espère que ça arrivera avant l'ajournement de la session – c'est clair qu'il y a des travaux qui vont pouvoir être repris assez rapidement, à Montréal par exemple, à Québec. Les autres – bien, vous comprenez, on en parlait tout à l'heure avec la MRC des Laurentides – seront assujettis aux procédures régulières prévues dans nos lois. Mais, comme il y a déjà eu, en particulier sur le tronçon Saint-Césaire–Hertel – vous le signalez avec raison – un comité, il y a déjà eu consultation, il y a déjà eu analyse des impacts, il y a déjà eu négociation avec l'UPA, bien, en fait, j'ose espérer que, même en assujetissant ces projets-là à la procédure régulière d'évaluation environnementale, compte tenu de ce qui s'est fait, j'ose espérer que ça va quand même aller plus rapidement que ce n'est le cas lorsque rien n'a été fait, lorsqu'on commence à neuf.

Alors donc, il y a des travaux qui vont reprendre plus rapidement. À Montréal, c'est sûr, dans la région de Québec également, du côté du poste Jacques-Cartier, et puis on va aussi enclencher le processus pour les autres projets.

(17 heures)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lavallée.

M. Lavallée (Jean): Oui, c'est clair que, pour nous, le groupe de la construction qui a présenté un mémoire ici, il y a 2 000, 2 500 personnes qui sont sans travail. On est en discussion. Les employeurs sont en discussion avec Hydro pour une compensation, mais, comme on l'a mentionné dans notre document de la FTQ, les travailleurs, eux, n'ont pas de compensation. Certains n'ont même pas le droit à l'assurance-emploi.

Donc, pour nous, ces retombées-là... Et ça faisait partie du mémoire que la coalition a présenté, que des travaux qui avaient déjà eu certaines approbations ne puissent pas traîner en longueur, qu'on fasse un «fast track» pour immédiatement aller de l'avant avec ces travaux-là, ce qui ferait en sorte de compenser un peu pour l'arrêt des travaux qui, du jour au lendemain, a fait que tous les travailleurs oeuvrant dans le secteur des lignes chez nous ont été sans emploi. Puis on sait que, depuis les derniers cinq ans, il n'y a quasiment pas eu d'ouvrage dans les lignes.

Donc, pour nous, le fait de revenir à d'autres projets comme la Grande-Baleine, comme l'enfouissement des câbles, il y a certainement des projets qui pourraient aller de l'avant qui ne causent pas de problèmes à l'environnement. On pourrait commencer par des alternatives pour se préparer, si on y va avec le vaste programme qui était soumis par la commission Nicolet. Mais, pour nous, c'est important qu'on puisse remettre ce monde-là à l'ouvrage puis sécuriser en même temps le réseau.

On ne parle pas uniquement pour notre poche, mais c'est un ensemble qui va faire en sorte que, quand le temps va devenir propice à exporter, on soit prêt à cause que... Que ça soit construire un barrage ou... Un barrage, ça prend sept ans à construire, ça. Il faut commencer si on veut arriver à un moment donné où les centrales nucléaires vont fermer en Ontario – parce qu'on sait qu'elles vont fermer – qu'on ait l'électricité disponible à fournir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre.

M. Brassard: Je pense que le message est très clair au fond. Je comprends très bien qu'on peut considérer comme importante la dimension juridicolégale, puis c'est peut-être légitime de considérer ça comme important. Ce que vous nous dites aussi – puis ça, je pense que ça mérite votre venue devant nous, si elle n'avait que cet effet, ce serait déjà beaucoup – c'est que – ce qui nous intéresse comme commission – ça signifie aussi du monde qui travaille, du monde qui travaille, qui gagne sa vie. Ça aussi, c'est important. La dimension juridique, bon, c'est peut-être bien passionnant de faire des débats devant des tribunaux, mais je pense que concrètement il est important que des intervenants viennent nous dire que tout ce dont on parle, ça veut dire aussi du monde qui travaille et qui gagne son pain.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Massé.

M. Massé (Henri): Là-dessus, M. le ministre, permettez-moi d'aller un petit peu plus loin quant à la question du dédommagement que les gens soulevaient. Hydro-Québec est en train de dédommager les entreprises, et les travailleurs, ils n'ont rien. Je sais que ça ne sera pas la question la plus populaire à soulever ici, mais, quand il y a eu des crises, par exemple, à Oka ou sur la Restigouche l'année dernière, il y a eu des programmes de dédommagement.

Là, on est dans une situation où les travailleurs qui étaient sur ces chantiers-là n'ont rien à voir. Poursuites juridiques contre le gouvernement, bon, on reproche d'avoir été par décret au lieu de par une loi. Donc, on est dans une situation où notre monde a un prix très élevé à payer. Je pense qu'il devrait y avoir des programmes de dédommagement de regardés. Mais vraiment, mais vraiment, ce qui presse, c'est qu'il y a d'autres travaux sur la tablette à Hydro-Québec. On a vu l'amorce du grand chantier Nicolet. Ils nous ont fait une série de suggestions. Il y a des études qui seront faites. Je suis convaincu qu'on peut partir ces travaux-là très, très, très rapidement dans certains cas, puis on n'est pas pris avec le 40, 50 ou 60 jours du BAPE, là. Hydro-Québec peut prendre une décision si le gouvernement a une volonté politique pour lui faire prendre, et ça, on pense que c'est très important de le faire et au PC. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Saint-Hyacinthe, vous avez demandé la parole, et, comme de raison, j'ai besoin du consentement des autres membres de la commission, consentement qui, je vois, vous est accordé. Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Je vous remercie, Mme la Présidente. C'est sûr que je suis ce débat-là le plus possible parce que j'ai eu l'occasion d'y goûter, l'hiver 1998, et j'ai aussi eu l'occasion de me rendre compte à quel point – il faut le dire, on ne le dit pas assez, je pense qu'il faut le dire encore une fois même si ça a été dit, je pense qu'on ne le dit pas assez – on a été servis par des travailleurs qui ont travaillé quasiment jour et nuit, pendant des mois, pour nous reconnecter, nous remettre dans le courant. Alors, ça, je pense que c'est une chose qu'il faut rappeler de temps en temps. On est très fier de ça, très fier des travailleurs qui ont fait ça.

Je suis très heureux d'avoir eu la chance d'entendre le mémoire du bon sens. Ça s'adonnait à être celui de la FTQ, comme par hasard. Mais je pense que, d'un côté, tout le monde est d'accord que la sécurité absolue, ce n'est pas possible et encore moins dans des questions climatiques que d'autres choses. Le degré de sécurité qu'on est capable d'avoir, ça dépend du prix et de tout ça, mais je pense que, quand on ramène ça à certaines valeurs fondamentales, c'est relativement plus simple.

Vous avez parlé de la stabilité des entreprises. C'est sûr que, quand il y a un besoin de sécuriser le réseau, ça suscite une remise en place d'entreprises ou, en tout cas, le développement d'entreprises. Là, les entreprises ont perdu des contrats et Hydro va les dédommager. Les employés, même s'ils ont de l'assurance-chômage, ils n'en ont peut-être pas, d'autres en ont peut-être. Il reste que c'est un coût que ça représente pour eux. S'ils ont de l'assurance-chômage, c'est un coût aussi que ça représente pour eux et pour toute la société parce que les compensations qui vont être apportées aux entreprises, les compensations qui iront chez les travailleurs, tout ça, ça se répercute tôt ou tard en coûts pour la société. Ça se répercute en impôts, ça se répercute en tarifs, ça se répercute en toutes sortes de choses. Ce n'est pas vrai que tous ces droits-là n'ont pas de prix, ils ont un prix et ils ont un coût.

Alors, c'est pour ça que vous avez répondu en bonne partie à la question que j'allais vous poser, mais je vous la pose autrement. C'est: Qu'est-ce que c'est... Là, on a des délais qui sont imposés par des choses qu'on accepte parce qu'il faut les accepter. Mais qu'est-ce que c'est, le délai qui est acceptable pour une société comme la nôtre, actuellement, alors que tout est prêt, tout est en... Qu'est-ce que c'est qui est acceptable comme délais, comme coûts sociaux, comme coûts économiques pour aller soupeser des choses qui sont peut-être fondamentales et peut-être pas?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Massé.

M. Massé (Henri): Écoutez. J'entendais le ministre dire tantôt qu'on irait devant le BAPE. On est d'accord avec ça aussi à la FTQ, mais on pense qu'il faut que ce soit la procédure accélérée. On ne peut pas passer cinq, six mois devant le BAPE. Encore une fois, les études ont été faites. Et, nous, ce qui nous fait peur à ce moment-ci, c'est qu'on perde un trois, quatre, cinq semaines juste à justifier le projet, alors que ce n'est pas le rôle du BAPE. Quant à nous, ce n'est pas le rôle du BAPE. Le rôle du BAPE est là pour mesurer les impacts environnementaux. Dans cette crise-là, à cause de l'urgence du renforcement du réseau, puis tout ça, moi, je pense qu'il ne devrait pas y avoir de longs débats là-dessus.

Ce qui nous énerve un peu aussi, c'est qu'il y a des groupes là-dedans qui l'ont dit très clairement que ce n'est pas les impacts environnementaux qui nécessairement les préoccupaient, c'est de mettre fin carrément au projet, qu'il n'y en ait pas, de projet. Et là, si on s'enfarge dans des discussions à n'en plus finir... En tout cas, nous, on fera ce qu'on aura à faire sur la place publique et on va être très clairs là-dessus. Mais on espère qu'il y aura beaucoup de positions qui seront prises dans le même sens, dans l'urgence d'accélérer les travaux.

M. Dion: Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui. Merci, Mme la Présidente. D'abord, votre mémoire, moi aussi, je l'ai trouvé très rafraîchissant. Mais, en ce qui concerne mon point d'intérêt, ça concerne surtout la restructuration des marchés et puis la déréglementation face aux Américains, parce qu'on a un marché là puis, eux autres aussi, ils ont un marché ici. Puis je voudrais savoir: Pour vous, dans la démarche qui est en cours en Amérique du Nord, est-ce qu'on a notre place et puis à quelle mesure puis où il faut faire attention? En gros, ça se résume à ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Massé.

M. Massé (Henri): J'étais en train de parler avec... Pourriez-vous répéter?

(17 h 10)

M. Désilets: Je vais répéter vite. Dans le processus de déréglementation et puis d'élargissement des marchés, des frontières, le débat qui a lieu à l'heure actuelle avec Hydro-Québec et les Américains, on a-tu notre place? Ou à quoi il faut faire attention avec l'ouverture des marchés?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Demers.

M. Demers (Robert): Il faut peut-être replacer les choses parce que, quand on parle de mots comme «déréglementation du contexte de l'énergie nord-américain», il y en a qui, dans la même bassine, vont parler de «privatisation d'Hydro-Québec». Alors, il faut faire bien attention dans les termes qu'on utilise là-dedans parce que souvent ils sont galvaudés à côté d'autres termes.

La déréglementation, en soi, ce n'est pas un gros problème si elle se fait dans le respect des acquis des Québécois, c'est-à-dire d'avoir une société d'État qui leur appartient puis dont les bénéfices leur reviennent. Que les règles du marché soient différentes, en autant que ça revienne et que ça parte de la même poche, on n'a pas de problème avec ça. Il peut y avoir des problèmes de déréglementation, par exemple, si on devait fractionner Hydro-Québec en trois ou peut-être même quatre constituantes, si on devait commencer à permettre, comme certains le souhaitent quasiment, l'établissement de petites centrales quasiment de village pour être capable de s'autoalimenter, et tout ça. Ou, à un moment donné, imaginez si on avait eu le verglas puis on avait été avant la nationalisation de l'électricité. Il aurait fallu qu'une vingtaine de petites compagnies productrices de petits barrages, de moyens barrages et de gros barrages se coordonnent entre elles pour réagir à une situation comme ça. Je pense que la déréglementation, pour les règles du marché, ça peut aller, en autant qu'on conserve les acquis de la nationalisation de l'hydroélectricité.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui. Un peu dans le même ordre. Est-ce qu'on doit aller plus loin dans les normes d'Hydro face à la déréglementation avec le marché? Mais est-ce qu'on doit avoir des normes plus sévères à Hydro?

M. Massé (Henri): Des normes de?

M. Désilets: Les normes de protection ou les normes de... lorsqu'on revoit la charge, mais un peu partout là. Parce qu'on a des normes, à Hydro-Québec, concernant les circuits. Est-ce qu'il faut être plus prudent que pas assez ou...

M. Perreault (Jean): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Perreault.

M. Perreault (Jean): Oui, vous parlez sur les équipements, les lignes de transport d'Hydro-Québec. Les normes étaient déjà supérieures aux normes fédérales, je pense, le jour de la crise du verglas. Les constructions qui ont été faites, entre autres, des Cantons–Saint-Césaire, ça a été rebâti, je pense, pour accepter un poids de 65 mm, si c'est... Je ne suis pas sûr de qu'est-ce que j'avance, mais, si on avait la même crise qu'on a eue l'année passée, elles tomberaient pareil. Les normes, à un moment donné, c'est du côté ingénierie. Je suppose qu'il y a un poids mécanique maximal à avoir, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Maskinongé, est-ce que ça va?

M. Désilets: O.K. Oui, ça va.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va? Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Merci, Mme la Présidente. Dans votre document, M. Massé, vous faisiez part du fait que, lors de votre présentation ici même en février 1998, vous aviez, entre autres, parlé de l'enfouissement des fils et de la poursuite de différents programmes de recherche et développement. Malheureusement, n'étant pas encore élue, je n'ai pas eu l'occasion de pouvoir prendre connaissance de ça. Est-ce que vous pourriez nous rappeler un peu quelle était votre évaluation de ce type de programme-là, si c'était faisable? Et j'imagine que vous avez évalué les coûts, les pour et les contre de tout ça. Alors, je voulais savoir si c'était possible d'avoir quelques détails là-dessus.

M. Massé (Henri): Sur l'enfouissement des fils?

Mme Blanchet: Précisément, oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Massé.

M. Massé (Henri): On n'a pas de coûts. On sait, à l'heure actuelle, que ça coûte passablement cher, mais, en même temps, si ça coûte cher, c'est parce que je pense que, dans le passé, on l'a mal fait.

Si on prend Montréal, par exemple, la Commission hydroélectrique, souvent il y a eu de l'enfouissement des fils d'Hydro, mais les tunnels qui ont été faits n'ont jamais été utilisés par Gaz Métropolitain, n'ont jamais été utilisés par les compagnies de câble, n'ont jamais été utilisés par toute autre compagnie qui pourrait enfouir son réseau, n'ont même pas été utilisés par les réseaux d'éclairage municipal, parce que ça coûte pas mal moins cher à la ville de mettre son lampadaire dans le haut du poteau que de refaire un nouvel éclairage puis de se brancher direct dans le poteau électrique que de venir se brancher dans le sousterrain. Ça fait qu'il y a des coûts un petit peu pour tout le monde. Mais souvent, même à Montréal, à l'heure actuelle, il y a, je pense, une vingtaine ou une quarantaine de kilomètres d'enfouissement de fils, de tunnels de béton qui ont été faits qui n'ont jamais été utilisés.

Donc, s'il n'y a pas une volonté politique, au départ, de la part du gouvernement d'amener le monde à utiliser ces réseaux-là puis à en partager les coûts, je pense qu'on ne passera jamais à travers. Mais, si ça, c'est fait puis on travaille un peu sur de la nouvelle technologie, nous, on pense qu'il y a moyen de faire. En Europe, on n'en voit pas, de ces fils-là, dans les grandes villes d'Europe un peu partout. C'est laid.

Deuxièmement, je ne sais pas combien de fois, combien de fois, à Montréal, par exemple, on rouvre le réseau routier. Nous, c'est une vraie farce. On avait notre bureau sur la rue Papineau puis il y avait la rue Ontario, au côté, juste dans le bas, je pense qu'ils la rouvraient à peu près quatre, cinq fois par année. Ils étaient toujours en train de la rouvrir. Le gaz passait, ils coupaient la rue puis, après ça, ils refermaient ça. Ensuite, c'était l'Hydro puis ensuite, c'était un autre; ça n'en finissait plus. Mais ça, je pense, ça va prendre une volonté politique de la part des gouvernements pour dire: Il faut que ça se fasse comme ça, et, à partir de ce moment-là, les différents utilisateurs possibles des tunnels bétonnés vont devoir interréagir. On est convaincus, nous autres, qu'il y a quelque chose à faire là-dedans.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Juste une dernière petite question. Donc, avec ce que vous me dites, vous allez dans le même sens qu'une des recommandations du rapport Nicolet, à savoir que ça devrait être une initiative gouvernementale mais en partenariat, justement, avec les différents utilisateurs, le gaz, les télécommunications, et tout ça.

M. Massé (Henri): Exactement. Il faut qu'il y ait un peu de forçage de bras là-dedans.

Mme Blanchet: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lavallée. Excusez-moi.

M. Lavallée (Jean): Il y avait déjà eu des discussions dans le cadre des infrastructures: Qu'est-ce qu'on devrait faire avec l'enfouissement des câbles? On parlait d'un programme d'environ 3 000 000 000 $. Je suis convaincu que les gens du gouvernement en ont certainement entendu parler, mais on ne parlait pas uniquement des câbles. Comme Henri vient de le mentionner, on te fait une belle rue en asphalte, on a passé des fils, on a posé des lampadaires. Une semaine après ou un mois après, op, là, c'est un câble de téléphone. Six mois après ou quatre mois après, bien là c'est un tuyau qui a pété en quelque part puis il faut ouvrir la rue, puis finalement, un an après, la rue est toute coupée en morceaux.

Mais, dans le cadre du plan d'enfouissement, on faisait dans ça aussi que, quand tu ouvres une rue, tu poses le gaz, puis tu poses tes égouts, puis tu fais tes infrastructures pour l'eau, puis tu fais tes communications, puis tu y vas de A à Z. Ça, c'est une partie, c'est clair, du rapport Nicolet qu'on peut endosser sans hésitation à cause que ça crée de la richesse aussi, se donner des infrastructures solides. À cause que, si on ne les met pas en place et si on ne rend pas notre réseau d'électricité solide, tout à l'heure il va être en décrépitude, puis il vient un temps où on n'est plus capable de remonter la côte. Ça fait que c'est clair que, pour nous, c'est un projet intéressant puis très important qui a déjà été discuté voilà déjà plusieurs années.

Mme Blanchet: Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je vous remercie. Il y a d'autres... Oui, M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Juste un petit commentaire simplement pour me joindre un peu... M. Brassard le disait tantôt, la FTQ est renommée pour être pragmatique. Dans ce cas-ci, je pense que c'en est un bel exemple. M. le ministre tantôt parlait de gros bon sens. Moi, j'ai lu le document d'un bout à l'autre. C'est un exercice de gros bon sens, c'est clair, c'est précis, sans ambiguïté.

J'ai relevé trois points tout d'abord où vous prenez position. Souvent, l'ambiguïté est source d'indécision; dans votre cas, c'est clairement orienté. Et vous dites les choses telles qu'elles sont là. Sur la sécurisation, oui, c'est important, le bouclage et, en même temps, on joint le nécessaire à l'agréable: on crée des emplois aussi en même temps. En fait, on fait travailler nos gens.

Vous soulignez aussi le formidable instrument que constitue Hydro-Québec au niveau du développement économique. Je pense que ça doit être dit. On parle de sécurisation, mais je pense que c'est des choses qu'il faut souligner. On a tendance à critiquer nos institutions, alors que, dans ce cas-ci, moi, je pense... Vous avez parlé d'exportation, vous avez parlé aussi de développement au niveau d'Hydro-Québec, et j'ai trouvé ça intéressant. Et ce que je trouve encore plus intéressant, c'est sur la confirmation des lignes existantes. Soit on n'entend rien ou on entend tellement d'ambiguïtés là-dessus. Dans votre cas, c'est clair et c'est précis.

Et ce que vous nous dites finalement dans ce cas-ci, c'est que l'immobilisme est sûrement le pire des scénarios, l'absence de décision. Donc, d'agir, d'agir rapidement. Agir, c'est prendre peut-être le risque de se tromper, mais, dans ce cas-ci, il faut agir. Alors, c'est ce que j'ai retenu. Et je peux vous dire que, pour convaincre, j'en prendrai sûrement de longs extraits. Alors, je tenais à vous remercier là-dessus.

M. Lavallée (Jean): Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce qu'il y a un commentaire de votre côté? Ou une réponse?

Des voix: Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Tout a été dit? Alors, ce que je vois, c'est qu'il n'y a pas d'autres questions ou commentaires. Au nom des membres de la commission, j'aimerais aussi vous remercier bien sûr de votre participation, d'avoir accepté l'invitation et d'être venus échanger avec nous.

Là-dessus, je vais suspendre quand même les travaux de la commission pour permettre à nos invités de se retirer.

(Suspension de la séance à 17 h 20)

(Reprise à 17 h 24)


Documents déposés

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On peut reprendre nos travaux. En fait, on les reprend pour terminer. Avant de laisser la parole à M. le ministre pour les remarques finales, j'aimerais déposer, pour insérer dans notre procès-verbal de commission et bien sûr pour le bénéfice des membres de la commission, des lettres d'appui qui nous sont parvenues de différents groupes. En fait, quand les gens se donnent la peine de nous envoyer des documents par écrit, des lettres d'appui, je pense qu'il faut en tenir compte.

Alors, c'est des lettres d'appui concernant la sécurisation, les projets de sécurisation entrepris par Hydro-Québec. Nous avons celui de la MRC des Collines-de-l'Outaouais, de la municipalité de L'Ange-Gardien, celui de la Chambre de commerce et de l'industrie de la Rive-Sud, de l'Institut de développement urbain du Québec, les Industries Davidson inc., Makibois inc. et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Alors, on dépose donc le document.


Remarques finales

Là-dessus, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Je vous remercie, Mme la Présidente. Au début de cet exercice, j'avais indiqué dans mes remarques préliminaires que ce que nous voulions faire et l'objectif que nous voulions atteindre, c'était essentiellement et très simplement de comprendre, de comprendre toute cette problématique parfois complexe que constitue la sécurité d'approvisionnement en électricité des Québécois et des Québécoises.

Je pense que nous avons atteint notre objectif. Après avoir entendu et échangé avec plusieurs intervenants au cours de ces trois jours, nous comprenons mieux d'abord ce qu'Hydro-Québec et le gouvernement souhaitaient faire. Et nous constatons aussi – et ça, ce n'est pas négligeable – qu'il y a, on peut dire, unanimité sur la nécessité de sécuriser davantage les populations touchées et aussi, on peut dire, l'ensemble du territoire québécois. Il y a unanimité chez tous ceux qui ont répondu à notre invitation, unanimité pour davantage assurer la sécurité d'approvisionnement en électricité. Ça m'apparaît évident.

Mais aussi il y a de larges consensus qui apparaissent quant aux moyens à prendre pour sécuriser l'approvisionnement en électricité. Je ne parlerai pas d'unanimité dans ce cas-là. Mais je peux, je pense, me permettre de parler de consensus très large, consensus très large sur le bouclage pour sécuriser davantage, consensus très large sur le recours aux interconnexions également pour mieux assurer la sécurité d'approvisionnement des Québécois et des Québécoises.

Et ce qui est intéressant, ce qui est apparu aussi dès la fin de la première journée, lorsqu'on a entendu Hydro-Québec en matinée et la commission Nicolet en après-midi, il y a convergence entre Hydro-Québec, le promoteur, le responsable au Québec d'assurer, de combler les besoins en électricité des Québécois et des Québécoises, et la commission Nicolet, commission d'experts, commission scientifique qui a analysé en profondeur toute cette question de la sécurité d'approvisionnement, convergence des deux. Sur des détails, il y a peut-être des différences qui ne sont pas des différends. Mais il y a vraiment convergence parce que M. Nicolet nous a confirmé lui aussi que, si on veut sécuriser davantage l'approvisionnement en électricité, le bouclage est un moyen tout à fait approprié, le recours aux interconnexions aussi.

Mais évidemment il ajoute également d'autres éléments qui doivent être pris en considération sans aucun doute et par le gouvernement et par Hydro-Québec, et on en a discuté longuement. Entre autres, je pense à l'enfouissement comme moyen de sécuriser davantage, le recours à des lignes et à des corridors stratégiques, toute la question également du rehaussement des normes de conception et des critères de conception.

Alors, cette convergence me réconforte, d'une certaine façon. Je suis sûr que ça réconforte également mes collègues membres de la commission parce qu'on se rend compte que, au fond, la planification ou le projet, la programmation d'Hydro-Québec pour mieux sécuriser les populations touchées par la tempête de verglas ont reçu, d'une certaine façon, l'aval ou ont été validés par la commission Nicolet, commission scientifique et technique, qui avait justement pour mandat d'examiner cette question-là. Alors, je pense que c'est, d'une certaine façon, réconfortant, satisfaisant.

(17 h 30)

Moi, j'ai trouvé ça extrêmement intéressant. Quand on regarde ou quand on prend connaissance de l'ensemble des mémoires qui nous ont été déposés, on se rend compte que les Québécois et les Québécoises sont vraiment préoccupés par leur niveau de sécurité d'approvisionnement en électricité, surtout ceux et celles qui vivent dans les régions qui ont subi la tempête de verglas, et qu'ils souhaitent ardemment non seulement qu'un tel événement ne se reproduise pas, mais également qu'ils puissent être dans une situation ou dans des conditions de plus grande sécurité quant à la satisfaction de leurs besoins en électricité.

Que ce soit l'UPA, par exemple, l'UPA aussi... Tout à l'heure, on parlait de la FTQ qui exprimait le gros bon sens, la sagesse concrète, un pragmatisme que j'ai qualifié de rafraîchissant, Mme la Présidente. Mais pensons à l'UPA aussi, à la coalition qui souhaite la reprise des travaux, aux élus municipaux qui sont venus échanger avec nous. Tout le monde, au fond, se dit: Si on veut s'assurer du bien commun – c'est peut-être un vieux concept mais qui est encore tout à fait valable dans les circonstances – de l'intérêt collectif, il faut entreprendre des travaux et les compléter. Et ce sont des travaux essentiellement de bouclage et ce sont des travaux d'interconnexion, des travaux, donc, de sécurisation de l'approvisionnement en électricité.

Je voudrais quand même en profiter pour corriger aussi une perception qui n'est pas fondée. Les opposants ont évidemment très souvent et très largement véhiculé l'idée que, parce que le gouvernement avait choisi de fonctionner par la voie du décret, tout s'était fait sans consultation et sans implication des intéressés.

Je pense qu'il faut rétablir les faits. C'est vrai qu'on n'a pas eu recours, à cause du contexte d'urgence, à la procédure habituelle d'évaluation environnementale. C'est vrai. Mais ce n'est pas vrai qu'il y a eu absence de consultation, et d'implication, et de coopération, et de concertation des intéressés. Je pense que ce que le groupes sont venus nous dire, c'est tout à fait le contraire.

Il y a eu, dans le cas de l'Outaouais, un comité issu du BAPE. Il y a eu, dans le cas de Saint-Césaire– Hertel et poste Montérégie, un comité semblable, de même nature, qui a tenu des audiences publiques. Il y a eu aussi de la concertation et de la négociation. L'UPA est venue nous le dire aussi, très clairement, qu'Hydro-Québec a entrepris des négociations non seulement avec l'UPA, mais également avec les producteurs agricoles, pour en arriver à faire le choix du tracé de moindre impact.

Alors, oui, le gouvernement avait décidé de se soustraire aux procédures habituelles parce que, de bonne foi, on pensait que le contexte d'urgence nous y autorisait. Mais, encore une fois, ça ne signifie pas qu'il n'y a pas eu concertation et implication des citoyens, des intéressés, des MRC, des municipalités, des producteurs agricoles. Il y en a eu. Et je pense que ça a été très clairement mis en lumière à l'occasion de nos travaux de cette semaine.

Même dans le cas du tronçon très controversé de des Cantons–Saint-Césaire, il y a eu, dans ce cas-là, négociation, concertation, des assemblées d'information dans le milieu, de multiples assemblées d'information, des rencontres, des pourparlers avec les MRC. Rappelons entre autres que c'est la MRC du Val-Saint-François qui a demandé à un consultant de déterminer un tracé de moindre impact et que c'est ce tracé de moindre impact, déterminé, identifié par un consultant mandaté par la MRC du Val-Saint-François, qui a été choisi. C'est des choses qu'il faut rappeler, je pense, à la population puis qui sont largement et malheureusement ignorées par la population.

Il y a une légende aussi qui en a pris pour son rhume à l'occasion de ces consultations, c'est la légende portant sur les exportations. Ça, c'est une fable qui en a pris pour son rhume. D'abord, je pense qu'Hydro-Québec a été on ne peut plus claire, limpide. Les interconnexions qui existent actuellement sont suffisantes pour maintenant et, je dirais, pour longtemps – on pourrait dire, comme un des humoristes issus de ma région: Pour 25 ans minimum – dans l'avenir. Donc, M. Caillé a été très clair: Hydro-Québec n'a pas besoin de nouvelles interconnexions, elle n'en a pas besoin. Celles qui existent déjà ne sont même pas utilisées à 40 % de leur capacité. Et, même dans l'éventualité où on construirait Churchill Falls II, les interconnexions existantes suffiraient encore.

Alors, là, la légende des exportations ou du sombre dessein qu'Hydro-Québec avait machiné pour exporter davantage d'électricité ne tient plus. En tout cas, en ce qui a trait aux interconnexions, ça m'apparaît évident. Et il me semble que la preuve a été aussi faite que le bouclage montérégien, c'est essentiellement pour sécuriser l'approvisionnement en électricité non seulement de la Montérégie, mais aussi de Montréal, parce que c'est par Hertel que Montréal est approvisionnée en électricité. En tout cas, au sortir de cette commission, Mme la Présidente, je pense qu'on a mieux compris quels étaient le sens et la signification des projets mis en oeuvre par Hydro-Québec.

Je dirais qu'il y a eu manquement en droit. C'est vrai, le tribunal en a décidé ainsi. Mais je répète de nouveau, comme je l'ai dit au début de cette commission: Il n'y a pas eu de mauvaise foi ni de la part du gouvernement ni de la part d'Hydro-Québec. Dans le contexte difficile où on se trouvait à l'époque et dans le contexte où également le gouvernement et Hydro-Québec prenaient conscience, et une conscience très vive, dramatique même, qu'il y avait une vulnérabilité de l'approvisionnement d'électricité qu'on ne connaissait pas, on peut dire, avant cet événement de la tempête du verglas, je pense que, de bonne foi, à partir de là et agissant de façon responsable, Hydro-Québec comme le gouvernement ont voulu faire des efforts le plus rapidement possible et entreprendre des travaux le plus vite possible, le plus rapidement possible pour accroître le niveau de sécurité, qui nous est apparu brutalement insuffisant en matière d'approvisionnement d'électricité.

Et je voudrais également remercier les membres de la commission, Mme la Présidente, vous d'abord, bien sûr, mais remercier aussi les membres de la commission. Je pense que ça a été un exercice fort intéressant, passionnant même à certains égards, et qu'on a mené ensemble, tous les membres de cette commission. Je les remercie de leur participation précieuse et fort utile à cette commission.

(17 h 40)

Je ne peux conclure sans rappeler de nouveau l'attitude déplorable des libéraux, du Parti libéral du Québec, qui, on le constate maintenant à la suite d'un certain nombre d'articles et d'éditoriaux – je pense à celui de La Tribune signé par M. Morin, je pense à celui, aujourd'hui également, le commentaire de M. Michel Auger, dans Le Journal de Québec et Le Journal de Montréal ... Il n'y a pas que nous, maintenant, qui pensons, il n'y a pas seulement le parti ministériel qui pense aujourd'hui que le Parti libéral du Québec, en adoptant l'attitude qu'il a adoptée, c'est-à-dire de se retirer purement et simplement des travaux de cette commission... Il n'y a pas seulement nous qui pensons qu'il s'agit là d'un manquement grave au devoir d'un parlementaire.

Je le répète de nouveau: Le devoir d'un parlementaire, le devoir d'un élu, c'est de participer pleinement et en tout temps aux travaux du Parlement. On est élu pour ça. C'est notre mission, c'est notre mandat, c'est notre devoir. Et faire ce qu'a fait le Parti libéral, c'est manquer à son devoir. Ils se font durement critiquer ces jours-ci, et je pense qu'ils vont devoir se rendre compte qu'ils ont fait un mauvais choix, un très mauvais choix.

Ils ont fait un mauvais choix aussi en adhérant de façon exclusive aux vues et à la vision d'un seul groupe qui est le groupe de Val-Saint-François. Et on se rend compte, après avoir vu défiler tous les groupes et les intervenants au cours de ces trois jours, qu'il y a d'autres intérêts qu'il faut défendre aussi: les intérêts de tout le monde. Je ne trouve pas illégitime qu'on prenne en considération les intérêts d'un groupe comme celui de Val-Saint-François. Mais, quand ça devient une défense exclusive, quand on ne prend en compte exclusivement que ces intérêts-là puis que, de ce fait, on laisse de côté et on ignore les intérêts de tout le monde, de toute la population, je pense qu'on fait fausse route et qu'on manque aussi à ce moment-là à notre devoir d'élus dans une démocratie.

Et au fond, ce que tout le monde est venu nous dire, que ce soit l'UPA, la FTQ, les MRC, ce qu'ils sont venus nous dire, c'est qu'il n'y a pas seulement un petit groupe de Val-Saint-François dont il faut s'occuper et se préoccuper, il faut s'occuper et se préoccuper de tout le monde, de toute la population. Là, ça veut dire des millions de personnes. C'est ça que les intervenants sont venus nous dire. C'est ça que l'UPA est venue nous dire, que la FTQ, le dernier intervenant de cet exercice, est venue nous dire. Il faut prendre en compte le bien commun, l'intérêt collectif des millions de personnes. Et à ce moment-là je pense que l'hypocrisie et le mensonge sont peut-être ailleurs qu'ici. Et je tiens à dire aussi à la porte-parole du groupe de Val-Saint-François que les membres de cette commission n'ont pas compté les tuiles au plafond. On a travaillé très sérieusement puis on a échangé très sérieusement avec les intervenants puis on a approfondi de façon responsable une problématique majeure qui est celle de la sécurité d'approvisionnement des populations, des Québécois et des Québécoises.

Les Québécois vont juger l'attitude de l'opposition, l'attitude du Parti libéral. Et déjà on peut le voir par les observations, les remarques qu'on retrouve dans certains journaux de cette semaine, déjà je pense qu'on peut présumer ou anticiper que le jugement sera sévère. Ils y penseront à deux fois la prochaine fois avant de pratiquer la politique de la chaise vide au Parlement, dans une Assemblée nationale qui est l'institution démocratique par excellence. La politique de la chaise vide, ce n'est pas la bonne politique. Ce n'est pas une bonne politique. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le ministre. On avait 15 minutes de chaque côté, en fait, d'interventions. Bien sûr, vous avez pris le temps de votre formation politique, M. le ministre. Maintenant, s'il y avait quand même consentement, comme on l'a fait dans d'autres situations, compte tenu de la situation où on est, il y a le député de Saint-Hyacinthe qui aurait aimé ajouter une phrase ou deux.

Une voix: Il faut consentir. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, c'est pour ça que je vous demande s'il y a consentement.


M. Léandre Dion

M. Dion: Mme la Présidente, merci beaucoup. Je me sens un peu dans une situation de privilège.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il faut remercier vos collègues, qui ont donné leur consentement, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Oui, certainement. Merci, chers collègues, du travail extraordinaire que vous avez fait et du consentement que vous donnez une fois de plus. Il n'est pas coutume que l'on adresse la parole après le ministre qui conclut ces délibérations-là. Si j'ai sollicité ce privilège-là, c'est parce que les gens de chez nous, après ce qu'ils ont vécu, sont très sensibles à ce qui se passe ici.

Ils ont suivi avec attention cette commission-là. Pour eux, c'est important. L'issue de cette commission-là, c'est important. Et c'est pour ça que c'est en leur nom que je voudrais faire un grand discours éloquent pour dire mes sentiments, mais je résumerai tout ça en un seul mot, M. le ministre: Merci.


Mme Denise Carrier-Perreault, présidente

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, écoutez, nous autres, c'était la première fois – moi, en tout cas, à titre de présidente de cette commission – qu'on faisait des consultations, qu'on avait des invités lors de cette Législature et je dois vous dire que je suis très contente, malgré une situation toujours un peu particulière. Je pense que vous y avez fait référence tout à l'heure.

Moi, je voudrais remercier bien sûr mes collègues, les membres de la commission qui ont participé, qui ont assisté puis qui sont venus échanger avec les groupes. Je suis persuadée aussi que ça a été fort instructif pour ceux qui ont pu avoir cette chance d'échanger avec les participants, qu'on a une meilleure connaissance du dossier. Ça ne fera pas de nous des spécialistes dans le domaine, j'en suis convaincue, mais il n'en reste pas moins qu'on a appris beaucoup. On a une meilleure connaissance du dossier, et surtout ça nous a donné aussi le pouls, je pense, d'une bonne partie de la population.

Alors, là-dessus, puisque nous avons terminé notre mandat, j'ajourne donc les travaux sine die tout en vous souhaitant une bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 17 h 47)


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