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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Wednesday, March 22, 2000 - Vol. 36 N° 51

Consultations particulières sur le rapport concernant l'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
Mme Denise Carrier-Perreault, présidente
M. Stéphane Bédard
M. Rémy Désilets
M. Guy Lelièvre
*Mme Vera Danyluk, CUM
*M. Michel Sarrazin, idem
*M. François Landry, idem
*M. Lorrain Audy, ADPQ
*M. Jacques Brisebois, UMQ
*M. Richard Montpetit, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quinze heures vingt-trois minutes)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): L'ordre de la Chambre étant maintenant donné, nous pouvons donc ouvrir la séance. Je vous rappellerai donc que la commission de l'économie et du travail se réunit aujourd'hui pour procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le rapport concernant l'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux.

Alors, Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: Il n'y a pas de remplacements, Mme la Présidente.


Remarques préliminaires

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, nous en sommes donc aux remarques préliminaires. Comme vous le savez, selon l'ordre, nous avons 15 minutes qui nous sont allouées pour des remarques préliminaires. Alors, je vous proposerai donc à chacun 7 min 30 s. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Je salue les membres de la commission, je salue aussi nos premiers invités avec qui nous aurons l'occasion d'échanger après ces premières remarques.

Rapidement, j'expliquerais, je voudrais revenir sur le contexte de cette étude, de cette consultation sur le rapport concernant l'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux. Je vous rappelle que, le 20 juin 1996, le Parlement a adopté des modifications au Code du travail qui remaniaient les règles relatives à l'arbitrage de différend chez les policiers et les pompiers municipaux, qui demandaient d'ailleurs... À ce moment-là, cette disposition-là comportait une exigence à l'effet de déposer un rapport devant l'Assemblée nationale. C'est donc l'exercice que nous faisons à ce moment-ci.

Je rappellerais qu'il y a toujours eu, dans le Code du travail, depuis 1964, depuis son adoption, des règles, des clauses particulières au sujet de l'arbitrage de différend chez les pompiers et les policiers municipaux; qu'il y a eu, au fil des années, des modifications, les plus substantielles étant arrivées en 1993 où, à ce moment-là, il a donc été introduit dans le Code du travail une phase obligatoire de médiation préalable au différé, à l'arbitrage; la constitution d'une liste d'arbitres de différend; une reformulation des critères indicatifs à partir desquels les arbitres devaient rendre leur sentence.

En 1996, la loi qui a modifié le Code du travail a, quant à elle, introduit cinq changements importants. D'abord, ces modifications ont rétabli le caractère volontaire de la médiation; ces modifications ont reconnu le droit des parties d'opter pour la médiation–arbitrage ou soit pour l'arbitrage. On a aussi reconnu, à ce moment, le droit des parties de s'entendre sur le choix d'un arbitre inscrit à la liste particulière qui est préparée à cet effet. Les amendements de ce moment ont aussi rendu impératifs – et ça, c'est un changement majeur – les critères décisionnels sur lesquels doit s'appuyer l'arbitre. Finalement, non seulement on a rendu ces critères impératifs, mais on en a ajouté un, soit un critère à connotation, à couleur économique, obligeant l'arbitre à considérer la situation et les perspectives salariales et économiques du Québec.

Depuis ce temps, il y a eu deux autres législations qui ont visiblement – et on aura certainement l'occasion d'échanger avec les participants de cette consultation – probablement eu aussi de l'influence sur le résultat de la rémunération des policiers et pompiers municipaux. Je rappelle, en 1993, la loi 102 et, en 1998, la loi n° 414. Mais je pense que c'est un échange qu'on pourrait avoir avec les participants.

Nous avons, avant cette consultation, déposé un rapport dont je rappellerai les faits saillants très rapidement. D'abord, je rappelle qu'il y a environ 9 900 policiers municipaux au Québec, dont la plupart, 4 160, sont à l'emploi de la Communauté urbaine de Montréal. La majorité des policiers municipaux, c'est-à-dire 89 %, est syndiquée. Nous avons constaté durant l'étude, donc de 1996 à maintenant, qu'il y a eu environ 140 corps policiers qui ont modifié leurs conditions de travail, dont la plupart, c'est-à-dire 120, leurs conditions de travail ont été modifiées suite à une négociation directe, c'est-à-dire sans avoir recours à l'arbitrage de différend.

L'étude et le rapport que nous déposons concernent donc 22 sentences arbitrales qui ont été émises depuis juin 1996. En gros, et on pourra y revenir... Évidemment, ça, c'est un défi parce que le nombre, 22 sentences arbitrales sur à peu près 140 conventions collectives renouvelées, c'est quand même un petit nombre. Il s'agirait de savoir si les tendances qui se dégagent de ces sentences arbitrales sont des tendances qui risquent de se cristalliser. Ça, c'est un défi, étant donné le petit nombre. Mais il reste que ça donne quand même certaines indications. Notamment, on peut tirer la conclusion que les taux de croissance salariale sont légèrement inférieurs lorsqu'ils sont déterminés suite à une sentence arbitrale que lorsqu'ils le sont par négociation directe.

Il y avait deux objectifs importants au moment de cette loi adoptée en juin 1996. Un, responsabiliser les parties en favorisant la négociation de conventions collectives. Je pense qu'on peut se dire que cet objectif a été atteint dans une certaine mesure. Il y a encore évidemment des défis à relever, mais on peut constater qu'il y a eu des progrès en la matière. Par ailleurs, il fallait aussi rétablir la crédibilité de l'arbitrage. Et le fait d'avoir rendu des critères décisionnels impératifs a probablement contribué à ce que l'arbitrage soit vu comme un mécanisme plus adéquat pour les parties.

Je vais terminer – il ne doit pas me rester beaucoup de temps, j'imagine...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il vous reste deux minutes, Mme la ministre.

(15 h 30)

Mme Lemieux: ...deux minutes – en disant qu'on a fait un relevé – on aura l'occasion d'échanger avec les gens là-dessus – un peu à savoir comment les arbitres ont interprété les critères d'équité interne, d'équité externe et le critère économique. On pourra y revenir. C'est un critère nouveau qui a été considéré, mais d'une manière plutôt limitée. En général, on a considéré l'indice des prix à la consommation, mais pas vraiment autre chose. On a constaté aussi une absence inquiétante, je pense, de preuves déposées par la partie patronale, par les municipalités. Enfin, ça soulève un certain nombre d'interrogations.

Finalement, on a constaté, au niveau des arbitres, qu'il y avait peut-être une tendance dangereuse qui pouvait se dessiner à l'effet non pas de se baser sur les critères prévus à la loi, mais d'accorder des augmentations mitoyennes entre l'offre et la demande. Or, des augmentations mitoyennes entre l'offre et la demande, ça ne veut pas nécessairement dire des augmentations fondées sur les trois critères d'équité interne, externe et des critères économiques.

Alors, je soumets donc ce rapport à la consultation. Je pense que ça va être important d'entendre les parties là-dessus pour pouvoir statuer sur la suite des choses. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme la ministre. Alors, je suis prête à reconnaître le porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Oui. Alors, merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, à moi aussi, de saluer bien sûr Mme la ministre, les membres de cette commission parlementaire, les fonctionnaires qui accompagnent, aussi mes collègues de mon côté et bien sûr les gens qui vont venir. On aura l'occasion de vous saluer tout à l'heure, Mme la présidente de la Communauté urbaine.

Alors, cette commission fait suite, comme la ministre l'a expliqué, au projet de loi qui avait été adopté en 1996, et je me souviens, étant à l'époque déjà le porte-parole de l'opposition en ce qui concerne le ministère du Travail, c'était une disposition que nous avions convenue avec le ministre Matthias Rioux de l'époque, qui est celui qui a initié ce projet de loi.

Suite à des discussions, une commission parlementaire, des rencontres avec les différents intervenants, un certain nombre de questions avaient été soulevées quant à la bonne idée ou aux bons moyens que nous prenions pour essayer de limiter l'augmentation du coût des salaires et des dépenses pour les pompiers et les policiers, et nous avions donc convenu que, après quelques années, nous ferions un examen de ce qui s'est passé. Je pense que c'est très sage parce que ça nous permet, ça va permettre aux députés de cette commission de voir vraiment, dans le concret, après quelques années, si ce genre de législations portent vraiment des fruits et rejoignent les objectifs pour lesquels nous les votons.

On doit dire que, au premier abord, en ayant lu le rapport, ça semble un peu mitigé. Il semble y avoir quelques améliorations, mais il y a eu d'autres facteurs qui sont venus en cours de route, en particulier les compressions dans les secteurs public et parapublic par le gouvernement, qui ont certainement eu un impact aussi sur les autres négociations.

La ministre a parlé bien sûr de la loi n° 414 en disant – on aura l'occasion d'en parler – que ça a été une loi qui a eu certainement un impact. Je crois que oui, mais on se souviendra que la loi n° 414 est la loi par laquelle on a institutionnalisé les clauses orphelin dans les municipalités. Parce que vous vous souviendrez que cette loi, par un de ses articles – et, si je me souviens bien, c'est l'article 18, mais ça peut être un autre, on me reprendra si je me trompe d'article – est le projet de loi qui disait que les municipalités devaient réduire de 6 % leurs coûts de fonctionnement, mais qu'en aucun cas – et c'est nommément dans le projet de loi – on ne devait toucher au salaire et aux avantages sociaux des gens qui étaient déjà à l'emploi des municipalités.

Donc, autant vous dire qu'il y avait là un carcan qui était mis en place, qui faisait en sorte qu'on ne pouvait pas négocier ou baisser quoi que ce soit dans ces conventions collectives et qu'au contraire ça obligeait les gens, pour retrouver, pour rejoindre cet objectif de 6 %, à avoir recours à une nouvelle formule d'organisation du travail. Et c'est ce qu'on a appelé les «clauses orphelin», soit les clauses discriminatoires qui ont permis d'engager des travailleurs – particulièrement des jeunes et, dans certains cas, beaucoup de jeunes – à des conditions salariales et de travail inférieures à celles de leurs collègues en place déjà pour faire le même travail dans le même temps, dans la même définition de tâches. Alors, je ne sais pas si c'est une référence qu'on peut apporter avec ça, d'autant plus que le gouvernement s'est empressé d'essayer de légiférer pour corriger ça depuis la fin de l'année dernière.

Alors, moi, je pense qu'on pourrait parler longtemps, on a quelque sept minutes pour parler. Je crois que ce que j'ai hâte d'avoir, moi, c'est ce que, vous, les gens qui avez dû vivre avec, vous avez à nous dire. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce que ça a été bon pour vous? Est-ce que ça a été quelque chose qui vous a permis d'atteindre les objectifs que vous vous étiez fixés? Car, rappelons-nous-le, ce n'est pas pour faire plaisir au gouvernement qu'on a passé cette loi-là, c'est pour donner, à l'époque, un outil, parmi les outils demandés par les unions municipales, par les villes du Québec, par les communautés urbaines et les autres organisations du monde municipal, pour pouvoir réduire ou contrôler leurs coûts d'opération afin d'arrêter cette spirale toujours grandissante de la taxation municipale vers le citoyen. D'accord?

Alors, est-ce que nous avons fait la bonne chose? Est-ce que le gouvernement a fait la bonne chose? Je me souviens de l'opposition, nous avions un certain nombre de questions critiques, à l'époque. Les chiffres semblent, comme je vous dis, peut-être un peu mitigés, mais peut-être que maintenant, avec les audiences publiques que nous allons obtenir, nous pourrons dégager une vue d'ensemble et voir s'il y a lieu toujours de maintenir cette loi-là dans sa forme actuelle ou de trouver d'autres correctifs.

En terminant, je rappellerai qu'une des demandes traditionnelles des municipalités était une révision globale du Code du travail afin de regarder différentes dispositions de ce Code pour faire en sorte de leur donner des outils pour pouvoir mieux gérer, mieux administrer, dans l'intérêt toujours de maximiser les services et de donner au public le plus pour moins de taxes, hein. Parce qu'on sait que les Québécois sont déjà, au niveau municipal, surtaxés, comme ils le sont au provincial et au fédéral, d'ailleurs ne nous en cachons pas.

Alors, malheureusement, on a vu, depuis, des orientations qui ont été déposées par Mme la ministre du Travail en ce qui concerne des changements au Code du travail, et on n'y retrouve malheureusement pas ces demandes qui venaient des unions municipales et des municipalités à l'effet d'assouplir les articles 45, en particulier, 46 du Code du travail pour permettre d'avoir des meilleurs outils.

Aussi, il y avait des demandes, comme un droit de lockout et autres demandes de la part des municipalités, dont on n'a pas entendu parler. Alors, peut-être n'est-ce pas là le forum idéal, mais peut-être qu'on entendra vos opinions là-dessus. Et il nous fera toujours plaisir d'en tenir compte dans l'analyse globale de ce que nous avons fait. Alors, merci de vous être déplacés, à ceux qui sont venus puis ceux qui vont venir, et c'est avec plaisir que, moi, maintenant, je suis prêt, avec mes collègues de l'opposition, à vous écouter.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, cet après-midi, comme vous avez pu le constater, nous rencontrons trois groupes, il s'agit de la Communauté urbaine de Montréal, de l'Association des directeurs de police du Québec et de l'Union des municipalités du Québec. Le temps qui a été alloué, c'est 45 minutes de discussions, d'échanges avec chacun des groupes, à raison de 15 minutes pour que le groupe puisse présenter sa position et, par la suite, 15 minutes de chaque côté, soit 15 minutes pour le parti ministériel et 15 minutes pour l'opposition officielle, d'échanges.


Auditions

Alors, je voudrais souhaiter la bienvenue, bien sûr, à notre premier groupe, qui a déjà pris place. Alors, Mme Danyluk, bienvenue à cette commission, merci d'avoir été patiente avec votre monde. C'est sûr qu'on a des règles et qu'il nous faut les respecter. Alors, là-dessus, madame, je vous demanderais si possible de nous présenter les gens qui vous accompagnent.


Communauté urbaine de Montréal (CUM)

Mme Danyluk (Vera): Oui, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. membres de la commission, tout de suite, je vous présente les gens avec moi. J'ai, à ma droite, M. Michel Sarrazin, qui est le directeur du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal; à sa droite, il y a M. François Landry, qui est chef de la Division des ressources humaines et des relations de travail du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal; et, à ma gauche, M. Jean-René Marchand, qui est conseillé au bureau du président à la Communauté urbaine de Montréal.

Tout d'abord, Mme la Présidente, permettez-moi de remercier tous les membres de cette commission d'avoir permis à la Communauté urbaine de venir aujourd'hui et de vous entretenir pour quelques minutes sur notre point de vue sur ce sujet-là, sur l'arbitrage des différends, qui est vraiment important pour nous, même si on n'a pas fait appel à ce mécanisme dernièrement. Mais, quand même, l'application de cette loi sur l'arbitrage des différends est vraiment importante pour nous.

Une des raisons pour lesquelles on a insisté aujourd'hui pour être ici avec vous, c'est sûr que nous avons participé, avant les modifications en juin 1996, aux audiences, à ce moment-là, pour donner notre point de vue, et il nous semblait tout à fait naturel et normal qu'on soit ici encore cette fois-ci pour faire la suite et faire le suivi des choses dans cette question sur le sujet d'arbitrage des différends.

Je dois vous dire que, moi, j'ai la tâche la plus facile aujourd'hui parce que je peux très rapidement passer la parole à mes gens qui sont les experts dans le domaine. M. Sarrazin.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Sarrazin.

(15 h 40)

M. Sarrazin (Michel): Merci beaucoup. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, mesdames, messieurs de la commission, c'est avec beaucoup de plaisir qu'on est ici aujourd'hui. Même si notre mémoire est très court et très succinct, nous tenions quand même à répondre à votre invitation pour une raison évidente, c'est que le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal compte plus de 4 100 policiers et, par conséquent, nous devons... et nous sommes des plus intéressés par l'application d'un mécanisme susceptible d'avoir des répercussions très importantes et sur la masse salariale du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal et aussi sur les conditions de travail qui pourraient avoir un impact direct sur notre efficacité opérationnelle. Alors, c'est la toute première raison pour laquelle on a accepté l'invitation.

Mme Danyluk vous disait tantôt qu'au cours des dernières années nous avons pu régler avec la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal, par le biais des négociations, les conventions collectives. Par contre, nous avons tout de même certaines préoccupations en ce qui regarde ce qui s'est passé depuis 1996 dans l'application des décisions arbitrales, et c'est un peu ce de quoi on veut vous entretenir aujourd'hui.

Alors, je laisse la parole à la personne, chez nous, M. François Landry, qui traite de ce dossier régulièrement, qui négocie aussi avec le syndicat des policiers chez nous, pour qu'il puisse vous faire part de nos réflexions, de nos préoccupations à ce sujet. Et, par la suite, nous serons évidemment disponibles pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Sarrazin. M. Landry.

M. Landry (François): Merci beaucoup. Comme on l'a souligné, la Communauté urbaine de Montréal a quand même un historique de règlement avec ses policiers, ce qui ne nous empêche pas aussi, évidemment, d'être assez vigilants par rapport à un système qui peut avoir des répercussions importantes au niveau financier pour la Communauté urbaine de Montréal.

Il est évident que les amendements qui ont été apportés en 1996 avaient été salués, je pense, avec beaucoup d'intérêt par la Communauté, parce que ça répondait en grande partie aux préoccupations qu'on avait toujours véhiculées devant les différentes commissions ou les différentes tables de concertation qui nous demandaient de nous exprimer à cet égard-là.

Les objectifs qui ont été rappelés tantôt en termes de responsabiliser les parties, d'une part, et de rétablir la crédibilité de l'arbitrage, c'est sur ces éléments-là qu'on vous entretient très brièvement. Évidemment, par rapport à la responsabilisation des parties, et c'est la bonne nouvelle du rapport, c'est qu'en fait on a 22 sentences arbitrales sur l'ensemble des négociations, sur l'ensemble des conventions collectives qui avaient à être conclues. Il y en a donc plus d'une centaine qui ont été réglées, et c'est un élément, je pense, qu'il faut saluer avec intérêt.

Donc, sur ce point-là, sur la responsabilisation des parties, favoriser la négociation, on est d'avis... évidemment, avec le peu d'échantillons qu'on a, parce que c'est quand même une courte période. Il reste qu'évidemment l'impact des lois a amené certains... c'est venu jouer un peu sur les négociations entre les parties un peu partout, mais il n'en reste pas moins que, sur ce point-là, il nous apparaît qu'on est dans la bonne direction.

Pour ce qui est de la crédibilité de l'arbitrage, encore une fois, c'est une courte période, nous, on ne s'est pas présenté en arbitrage depuis ce temps-là. Mais il reste que, à la lecture des différentes sentences arbitrales qui sont là, on s'aperçoit aussi que le fait d'avoir intégré des critères impératifs de décision a amené... évidemment, nous, on dit une amélioration du système. D'autres parties peuvent arriver avec d'autres conclusions, mais ça a, semble-t-il, ajouté un peu de crédibilité au système. Ça s'inscrit aussi dans nos revendications historiques.

L'objet de notre préoccupation – et vous allez le retrouver dans le bref mémoire qu'on vous a soumis – est plutôt au niveau de la modulation, si on peut dire, avec laquelle... la rigueur que les arbitres ont amenée à décider, utiliser et appliquer les différents critères. Et on est bien conscient – on l'avait déjà dit devant la commission Boivin ou devant d'autres commissions – qu'une sentence arbitrale va toujours rester un exercice où il y a une personne qui va porter un jugement à partir, oui, de la preuve soumise, nécessairement qui doit influencer. Ça ne peut pas être un exercice mécanique où on rentre une foule de données dans un ordinateur, on pèse sur un piton, puis il y a une sentence arbitrale qui sort. On en est très conscient.

Par contre – et je pense que c'était de bon droit tantôt que la ministre soulignait que c'était une modification majeure du Code du travail, d'intégrer des critères impératifs de décision – si on désire que cet amendement-là soit toujours considéré comme majeur après plusieurs années d'exercice, il va falloir suivre de très près l'application qui en est faite par les arbitres. Et c'est ce point-là qu'on a souligné dans notre mémoire, qui était une préoccupation de notre part, et plus particulièrement par rapport aux sentences où les arbitres ont à toutes fins pratiques dérogé ou n'ont pas cru bon de traiter des critères dans leur décision. Et, sur ce point-là, comme on l'a souligné, évidemment, il est trop tôt pour dire: Bien, il faut apporter d'autres amendements, il faut apporter... il faut changer la loi, etc. Non. Je pense qu'il faut laisser vivre un peu ces modifications-là.

Mais, si c'est une tendance – comme on l'a souligné tantôt – qui risque de se cristalliser, c'est qu'à toutes fins pratiques ça viendrait annuler les amendements de l'époque en faisant en sorte que les arbitres, pour toutes sortes de raisons qui seront bien justifiées, s'écartent des critères et ne les appliquent pas. Donc, on aurait des critères impératifs qui – au nom, peut-être, de l'équité et de la bonne conscience pour certains, et au nom d'autres critères ou d'autres raisons – feraient en sorte que les arbitres se conféreraient une marge de manoeuvre très grande en matière d'application, ce qui pourrait revenir à dire à ce qui existait avant, où les critères étaient indicatifs. Bon.

On est conscient qu'il peut y avoir des cas d'espèce. Est-ce qu'il y a des éléments en particulier? Évidemment, on n'était pas là, à l'arbitrage. On n'a pas vu ce qui s'est passé, on a juste lu la sentence. Mais il n'en demeure pas moins que c'est un élément qui, pour nous, est très préoccupant, si jamais la tendance s'accroît en ce sens-là. Ce qui reviendrait à dire – comme je le disais tantôt – que les amendements de 1996 sur ce point-là, en tout cas, au niveau des critères, se trouveraient un peu annulés ou se trouveraient un peu amoindris, nuancés par l'application qu'en font les arbitres.

Alors, dans l'ensemble, c'est un peu les commentaires qu'on voulait vous faire. À ce moment-ci, s'il y a des questions, on pourra y répondre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Landry. Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Oui. Alors, Mme Danyluk, je vous salue, ainsi que les gens qui vous accompagnent, M. Sarrazin, M. Landry, M. Marchand. Je vous poserais une première question. D'abord, vous dites, dans votre texte, dans vos commentaires, deux choses qui m'apparaissent intéressantes. La première, c'est que la négociation – je ne me souviens plus de votre formulation, mais... Nous réitérons que la négociation se doit d'être la voie privilégiée du renouvellement de la convention collective. Et je comprends que, dans votre cas, fort heureusement, vous avez pu régler la dernière convention collective par voie de négociations.

La question que je vous poserais, c'est: Le simple fait de savoir que ces amendements de 1996 existaient, que, maintenant, si vous aviez été devant un arbitre, un arbitre aurait dû – «aurait dû», pas «aurait pu», «aurait dû» – y penser, considérer trois critères tels que décrits à 99.5, le fait de savoir que ça existait, est-ce que ça a changé quelque chose dans la négociation? Parce que c'est un dernier recours, hein, c'est quand la négociation échoue, que c'est une voie de sortie pour tout le monde.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme Danyluk.

Mme Danyluk (Vera): Il y a plusieurs commentaires que je voudrais faire. Premièrement, c'est sûr que, nous, à la Communauté urbaine, nous avons été très heureux lorsque les modifications dans la loi ont été faites. C'est sûr que c'est rassurant qu'il y ait quelque chose dans la loi qui nous permette, en dernier recours, comme vous dites... Si jamais on avait à faire appel à un arbitre, au moins on savait que, effectivement, il y avait ces critères impératifs qui viendraient peut-être atténuer ce qui existait auparavant et assurer l'employeur d'un traitement qui soit juste. Mais ça n'a pas changé, en général, l'attitude de la Communauté urbaine, dans le sens que, pour nous, les négociations, vraiment, sont encore le lieu privilégié pour régler les conventions collectives.

(15 h 50)

Un point ou un commentaire que je voudrais ajouter à nos commentaires que nous avons faits dans notre mémoire, qui porte sur une partie de votre document que vous avez produit pour cette consultation que vous faites sur l'application de la loi. S'il pouvait y avoir une amélioration dans ces critères impératifs... Et j'étais très, très heureuse de voir, dans le document, dans les motifs, les raisons données par les arbitres pour leur décision.

Il y en a au moins trois qui ont fait référence à la rémunération globale. S'il y a un domaine où on pouvait améliorer ou renforcer tout l'aspect économique et l'aspect de l'équité, je pense que, pour la Communauté urbaine, un des points les plus importants serait effectivement qu'en arbitrage on devrait tenir compte de la rémunération globale et pas juste de l'aspect des salaires des policiers. Ça fait que, comme commentaire le plus important que je voudrais avancer aujourd'hui, c'est ce point-là.

Comme je vous dis, effectivement, pour répondre à votre question, je pense que les changements, les modifications de la loi ont permis vraiment aux employeurs d'avoir plus confiance dans ce recours qu'on pouvait avoir à un arbitre. Et, en passant, je dois vous dire, comme ancienne mairesse de ville Mont-Royal, quand j'ai vu la décision arbitrale pour ville Mont-Royal pour les pompiers, j'étais très heureuse qu'il y ait eu des modifications dans la loi en 1996. Je ne devrais pas le dire parce que, là, je ne parle pas pour la ville, mais effectivement je pense que là on voit que les changements, les modifications dans la loi ont eu quand même des résultats positifs, surtout dans un cas comme ça. Et là je ne sais pas, François, voudrais-tu répondre...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Landry.

M. Landry (François): Bien, peut-être brièvement, comme le dit Mme la présidente, compte tenu de l'historique chez nous, où on a eu très peu recours à l'arbitrage au cours des années, même alors qu'on était dans les années soixante-dix, quatre-vingt, quatre-vingt-dix, peut-être souligner que, même si ça n'a pas changé notre attitude par rapport à la négociation puis à l'obsession qu'on a, en fait, de régler en tenant compte des priorités qu'on s'est fixées en début de négociation, j'émettrais l'hypothèse que ça a peut-être modifié un peu l'attitude du syndicat qui, lui, face à ça – même si on fait face à un syndicat qui aussi recherche la conclusion d'une entente, parce que ça ne se fait pas tout seul, il faut que les deux parties concourent à l'objectif – ça a peut-être eu, et on peut émettre cette hypothèse-là par certaines discussions qu'on a eues avec le syndicat en cours de négociation, que, évidemment, le côté rassurant pour la Communauté urbaine était peut-être un côté moins rassurant pour le syndicat sur cet aspect-là.

Donc, ça a peut-être amené un certain équilibre dans le rapport de force. Évidemment, il va falloir voir comment dans l'application ça va se maintenir, puis tout ça. Ça va être ça, la vraie réponse à la question. Mais les amendements comme tels ont sûrement amené les parties et peut-être la partie syndicale, en tout cas, chez nous, à réfléchir aussi avant de s'engager dans un processus qui les amènerait en arbitrage. Et ça, là-dessus... Mais, de notre côté, je pense qu'on ne peut pas dire que ça a été majeur comme changement en termes d'attitude de négociation. On a toujours travaillé d'abord et avant tout à essayer de régler nos conventions collectives.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la ministre.

Mme Lemieux: C'est une belle obsession, l'obsession de vouloir négocier, là. C'est dur de négocier. Des fois, c'est plus facile de faire appel à un tiers, mais des fois on n'a pas le choix pour toutes sortes de raisons. Mais je pense que c'est une valeur importante avec toute la complexité que ça suppose et la responsabilité que chacun doit y mettre pour pouvoir arriver à une convention négociée.

Je voudrais revenir sur... Vous parlez quand même assez longuement de... Enfin, vous exprimez des inquiétudes tout en reconnaissant que le nombre... On n'est pas trop sûr de la tendance, il ne faut pas non plus tirer des conclusions définitives, mais, bon, vous exprimez quand même des inquiétudes sur l'importance qu'a pris le critère économique.

En tout cas, je voudrais vous rappeler que d'abord, c'était la première fois... Si on compare avec le texte de 1993, il y a deux choses qui se sont passées. D'abord, les critères n'étaient pas impératifs. On disait «l'arbitre peut» – ou quelque chose du genre – c'est maintenant «doit», et il y avait à ce moment-là – je fais un petit résumé, là – les critères d'équité interne, d'équité externe, mais le critère économique n'était pas là. Donc, c'est la première fois qu'il est introduit.

Et ce qu'on a constaté... Je n'arrive pas nécessairement à la même conclusion que vous. Vous dites: Il n'a pas été beaucoup utilisé. Moi, je dirais qu'il a été utilisé, mais de manière plutôt limitée. Ce qu'on constate, par exemple, c'est que ce critère-là, étant nouveau, a été examiné par les arbitres, mais c'est limité souvent au facteur de l'indice des prix à la consommation. Il n'y a pas beaucoup d'autres choses qui ont été introduites dans l'espace de ce critère-là, économique. Par exemple... En tout cas, il ne semble pas, pas à notre connaissance. Les sentences arbitraires ont été analysées, mais on n'a pas vu, par exemple, de partie qui aurait soumis à un arbitre les taux de chômage, le salaire horaire moyen du secteur municipal ou de la région ou... Il n'y a pas beaucoup de choses qui ont été avancées sur ce critère-là.

J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que vous exprimez quand même un certain nombre de craintes. Le texte est quand même assez clair. On dit: «Sous réserve, l'arbitre doit, pour rendre sa décision, tenir compte de l'équité interne, de l'équité externe – et on termine sur – ainsi que de la situation des perspectives salariales et économiques du Québec.» Honnêtement, pour renforcer ça, je ne saurais pas trop quoi faire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Danyluk.

Mme Danyluk (Vera): Écoutez, moi, je dois vous dire que, premièrement, malgré le fait qu'on a exprimé une certaine réticence, Mme la ministre, en général, il faut dire que nous avons vu qu'effectivement les tendances démontrées dans les 22 cas... ou finalement, c'est les 19 cas, je pense, qui ont été réglés avant que le document soit publié, je pense que, quand même, les tendances démontrent qu'il y a un résultat positif. Ça, je pense que c'est très clair, malgré le fait qu'on a dit: L'échantillonnage est petit. Il y a eu certains cas où les arbitres ont détourné un peu ou contourné des critères impératifs.

Mais effectivement, pour le moment, comme je vous dis: Moi, si j'avais à suggérer quelque chose pour tenir compte de tout l'aspect économique à la Communauté urbaine, pour nous, ce qui serait important, c'est toute la question de rémunération globale. Parce que ça touche tout l'aspect de l'équité externe pour nous. Parce que, effectivement, quand on prend le Service de police de la Communauté urbaine puis on se compare avec tous les corps de police ici, au Québec, je pense qu'on est 18e, à peu près, en termes de salaires.

C'est sûr que, aussitôt qu'on tient compte de la rémunération globale, on est rendu – aidez-moi, s'il vous plaît – ...

Des voix: Premier ou deuxième.

Mme Danyluk (Vera): ...premier ou deuxième. Effectivement, sur l'aspect économique, pour nous, pour tenir compte de la capacité de payer de nos citoyens, pour tenir compte de nos municipalités qui sont membres de la Communauté urbaine, pour tenir compte de la compétitivité de notre territoire sur l'île de Montréal avec le reste du Québec et avec Toronto, Boston, New York, et tout le reste, c'est sûr que, nous, ce qui entre en ligne de compte, c'est tout ce concept-là de rémunération globale, parce que c'est ça qui va nous rendre, effectivement, à donner à la Communauté urbaine la possibilité quand même d'offrir un bon service, mais qui est sur un «level playing field» avec les autres corps policiers au Québec et avec les autres agglomérations avec qui nous sommes en compétition.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Moi, j'ai deux députés qui m'ont demandé la parole pour poser des questions. Je pense qu'il reste deux minutes à peine. Alors, M. le député de Chicoutimi, d'abord. On va voir où est-ce qu'on peut aller.

M. Bédard: Je vais tenter au moins de faire rapidement. Simplement, c'est par rapport au processus de nomination des arbitres. Vous avez fait état de votre inquiétude quant à l'application, par les arbitres, des critères dans l'avenir. Bon. Dans l'ensemble, c'est le cas, là, mais, à la lecture de certaines sentences, on voyait qu'il est arrivé à certaines occasions que ce n'était pas appliqué de la façon peut-être dont vous le souhaiteriez.

(16 heures)

On a un mémoire ici qui fait état, un mémoire de l'Association des chefs de services, qui, lui, mentionnait ce qui suit: «En effet, la liste des arbitres qui possédaient une crédibilité établie est en train de se faire épurer. Des regroupements ont intentionnellement fait exclure de la liste des arbitres de différends parce que ceux-ci ont appliqué les critères mentionnés à l'article 99.5.» Et là ils demandent certaines modifications à ça. J'aimerais savoir... Comme, vous, il arrive à l'occasion que vous avez affaire, évidemment, avec le processus d'arbitrage, si vous avez une opinion relativement... Parce qu'il y a une sélection qui se fait spécialement dans ce cas-là par rapport à une liste. Et, vous, est-ce que vous avez des recommandations à faire à ce niveau-là?

M. Landry (François): Peut-être au niveau du mode de sélection.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Landry.

M. Landry (François): Oui, je m'excuse. Je me souviens que, lors de la première fois où c'est entré au niveau du Code du travail, on était une partie impliquée dans la nomination des arbitres, donc on avait participé au processus de nomination, on avait, évidemment, certaines préoccupations qu'on a fait valoir, on était présent, donc, avec certains autres représentants des employeurs pour ça.

Lorsqu'il y a eu une révision de la liste, j'ignore par quel artifice, mais on n'a même jamais été informé que ce processus-là avait cours. Donc, qui a parlé à ce moment-là au nom des employeurs? Je l'ignore. Comment ça s'est fait? On est aujourd'hui devant le fait accompli à notre niveau. Alors, peut-être qu'il va falloir que, dans le processus comme tel, on identifie un peu plus quelles sont les parties intéressées et habilitées à se présenter devant le ministère du Travail pour traiter de cette question-là et décider de la liste des arbitres, comme ça l'était, de toute façon, lors de la première fois. Parce que, effectivement, il y a, je pense, une très grande importance au processus de nomination des arbitres.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. le député, c'est malheureusement tout le temps qui était disponible pour la partie ministérielle. Alors, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, merci, Mme la Présidente. Mme Danyluk, bonjour, M. Sarrazin, ainsi que les gens qui vous accompagnent, il me fait plaisir de vous accueillir ici.

Dans votre mémoire, à la page 4, vous semblez faire un peu un exposé, un échantillonnage un peu des décisions qui ont été rendues, particulièrement en ce qui concerne le critère économique. Et vous dites un peu plus loin, là, vous écrivez: «Six arbitres ont appliqué ces critères avec rigueur; 11 arbitres ont appliqué ces critères avec moins de rigueur; deux [...] ont dérogé à l'application de ces critères.»

Bon. Tout semble nous indiquer – et vous le dites un peu plus loin – que les arbitres, même s'ils sont tenus par la loi de tenir compte de ces critères, semblent avoir une certaine latitude pour ce faire et décident d'eux-mêmes de l'appliquer avec une certaine latitude ou pas de latitude du tout, même de quasiment pas l'appliquer ou de déroger à l'application de ces critères.

Alors, qu'est-ce que vous suggérez pour éviter ça? Parce que à quoi bon, à ce moment-là, avoir une loi qui définit les critères si les gens décident de s'y soustraire? Est-ce qu'on devrait changer le projet de loi, le Code du travail et faire en sorte que, impérativement, l'arbitre doive s'y soumettre sous peine de nullité de sa sentence arbitrale?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Landry.

M. Gobé: Je vous pose une question, hein?

M. Landry (François): Oui, oui, ça serait une possibilité. Il est évident qu'on n'était pas au dossier dans les deux décisions dont il est question où les arbitres ont dérogé, on n'était pas au dossier. Peut-être qu'il y avait lieu de déposer une requête en révision judiciaire, une requête en mandamus, je l'ignore. Il m'apparaît évident, par contre, que – et peut-être aussi est-ce la preuve qui a amené les arbitres à agir comme ça, on l'a dit tantôt – l'arbitre est aussi influencé par la preuve.

Mais prenons pour acquis que la preuve permet à l'arbitre de traiter du critère économique puis il ne le fait pas, je pense que, effectivement, il faudrait une disposition qui permette, entre guillemets, d'en appeler, à défaut, pour un arbitre, de tenir compte d'un critère. Et, quand on parle de tenir compte d'un critère, c'est qu'il peut l'écarter pour raisons, pour motifs. Mais ce qui nous apparaît dangereux – puis évidemment c'est une très faible minorité des sentences arbitrales, Dieu merci, qui présente cette position-là – c'est là-dessus qu'on voulait attirer l'attention, je pense, de la commission... Faire en sorte qu'il ne fallait pas que ce soit cet aspect minoritaire là qui, graduellement, prenne de l'ampleur.

M. Gobé: Vous avez raison parce que, lorsqu'on regarde les trois critères, on va tenir compte de la situation salariale des autres salariés de la municipalité concernée, tenir compte des conditions de travail dans les municipalités semblables ou dans les circonstances similaires. Ça fait que, si l'arbitre commence à écarter dans un certain nombre de décisions les critères économiques, bon, bien, les autres arbitres vont se baser tout le temps sur ces mêmes municipalités en disant: Il faut que je me base, pour prendre mes décisions, sur les autres; donc, dans les autres, il prévaut telle situation, indépendamment si la situation prévaut parce qu'on a écarté le critère économique, et là on retombe dans la spirale qui était celle qui existait.

M. Landry (François): Il y a un effet d'entraînement.

M. Gobé: C'est ça, oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Landry.

M. Landry (François): C'est évident que, s'il y avait une disposition... Et encore on l'a souligné, puis je pense que ça, on le réitère: À ce stade-ci, il est trop tôt pour déjà en arriver à des amendements législatifs. Il faut laisser vivre, je pense, ces modifications-là. Mais, si la tendance, cette tendance minoritaire là, se maintient, si on peut ainsi dire, il va falloir prévoir un processus pour éviter qu'on ait à se présenter en Cour supérieure pour faire appliquer une juridiction à un arbitre.

Parce que ça, ces dossiers-là sont excessivement difficiles pour les requérants. Des requêtes en révision judiciaire, on connaît les critères qui ont été établis par la Cour suprême en matière de relations de travail, c'est très, très exigeant et surtout dans un contexte où l'arbitre peut décider en équité et bonne conscience parce que, encore là, ça devient encore un fardeau beaucoup plus grand. Or, il s'agira peut-être d'en arriver... Mais à ce moment-là on fera des représentations beaucoup plus précises, si malheureusement on en arrive là puis s'il y a une autre commission, pour faire en sorte qu'il y ait un mécanisme pour faire en sorte que la loi s'applique.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. C'est parce qu'on peut considérer aussi à ce moment-là que, si les arbitres appliquent les critères d'une manière assez rigoureuse, eh bien, il y aura de moins en moins d'arbitrage parce que les gens vont savoir que, de toute façon, lorsqu'ils vont aller en arbitrage, c'est ces critères-là qui vont prévaloir. Donc, on peut présumer qu'ils pourraient régler avant de se retrouver en arbitrage et non pas attendre et se retrouver encore... Comme ça prévalait antérieurement, ce qu'on attendait avant, il y avait la médiation, on allait; après ça, on disait: On va aller en arbitrage puis ça va se régler à notre avantage. C'était un peu ça, le système, avant.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Landry.

M. Landry (François): L'effet, de toute façon – et je pense que cet objectif-là de la loi était très important – c'est de faire en sorte que les parties, il y a soit une pression ou une volonté de régler et que le recours à l'arbitrage soit un recours vraiment de dernier recours, si on peut dire. Alors, n'importe quelle modification, n'importe quelle application qui fait en sorte que les parties subissent une pression pour régler, bien, tant mieux.

M. Gobé: Peut-être que je vais avoir deux autres questions à vous poser, une en particulier: Vous, si vous deviez maintenant recommander d'autres améliorations ou des changements à cette loi-là – là, on a le rapport qui nous dit des choses – des changements assez rapides ou assez à court terme et à moyen terme, est-ce qu'il y en a d'autres qu'on ne voit pas dans votre mémoire et dont vous aimeriez peut-être nous entretenir ici?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Landry.

M. Landry (François): Je crois qu'on l'a dit tantôt. Lorsqu'on parle de tenir compte de la rémunération globale, en fait, on pourrait prétendre que c'est sous-jacent à d'autres critères qui sont là, mais, en tout cas, il y a très peu d'arbitres qui se sentent obligés d'en tenir compte. C'est un peu l'état de la jurisprudence actuelle. Mais il y aurait sûrement cet élément-là qu'il conviendrait d'ajouter, à titre de précision peut-être aussi, de critère impératif.

M. Gobé: Est-ce qu'il serait bon d'ajouter – peut-être que je le dis d'une manière différente de ce que ça peut être écrit – un critère de capacité de payer de la municipalité? Parce qu'on tient compte des autres municipalités, mais chaque municipalité a quand même une capacité de payer différente, qui peut varier même d'une période à l'autre, hein? Des fois, elles peuvent être en meilleures affaires, dépendant du parc industriel qui fonctionne bien, dépendant d'un accroissement de population ou d'une baisse de valeurs, comme on a pu le voir sur l'île de Montréal, du rôle d'évaluation. À ce moment-là, est-ce qu'on ne devrait pas avoir un quatrième critère qui serait celui de la capacité de payer des citoyens de cette municipalité?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Landry.

M. Landry (François): Il faut faire attention avec ce critère-là, de la capacité de payer, parce que, même si dans certaines périodes on peut prétendre que la capacité de payer est plus grande dans une municipalité – en fait, on se référerait à certains choix budgétaires – est-ce que cet excédent-là, si on parle d'excédent, doit être automatiquement appliqué à une masse salariale qui vise les policiers et les pompiers? Il y a beaucoup d'autres choix, beaucoup d'autres préoccupations qu'une municipalité peut avoir en termes d'utilisation de sa capacité de payer.

(16 h 10)

L'autre aspect, c'est une certaine forme d'inéquité qu'on pourrait constater à travers les différents corps policiers et de pompiers. Capacité de payer, ça veut dire qu'une ville très riche pourrait payer ses policiers à 80 000 $ par année et une ville moins riche mais qui peut-être a une criminalité beaucoup plus grande et où le travail est beaucoup plus dangereux, elle aurait une capacité moindre. Je pense qu'on ajouterait beaucoup de distorsion dans la façon de déterminer les conditions de travail, alors que, lorsqu'on parle, nous, de rémunération globale, ce que ça veut dire, c'est de tenir compte de l'ensemble de ce qu'on paie pour nos policiers.

On paie des régimes de retraite, on paie des bénéfices accessoires, au niveau de la convention collective, qui vont bien au-delà du salaire. Lorsqu'il y a une comparaison qui se fait uniquement sur le salaire, ça ne tient pas compte de tout ce qu'on paie pour les autres éléments qui font aussi partie d'une négociation. Les régimes de retraite, c'est négociable. Or, toute l'évolution des parties, en termes de relations de travail, qui tantôt font des choix à certains niveaux pour améliorer ou non certaines parties de leurs conditions de travail, lorsqu'on limite, après ça, uniquement sur l'aspect salaire, on vient de faire fi de tout l'historique des négociations entre les parties.

Alors, c'est pour ça que, nous, on parle de rémunération globale depuis toujours et qu'il est important d'en tenir compte, et pas juste sur les salaires, parce que c'est une partie importante de la masse salariale de nos policiers.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, j'en suis avec vous et je pense que tout le monde veut bien accepter ce principe-là, ce critère-là. C'est évident que les avantages peuvent être différents d'une municipalité à l'autre. Les pompiers de Montréal-Est ont peut-être des fonds de pension différents de ceux des pompiers de Montréal, je présume même que ça existe, et il faut comparer les pommes avec des pommes, c'est évident.

Mme Danyluk, vous avez abordé – parce que je suis certain que ça vous intéresse – le problème de la Communauté urbaine de Montréal, de l'île de Montréal, et, comme vous n'êtes pas sans le savoir – vous le savez très bien, d'ailleurs – actuellement le gouvernement amène ou propose certaines réformes de structures municipales, et, même si ce n'est pas encore tout à fait très clair, on peut voir se dessiner un certain nombre de choses.

Est-ce que vous pensez que, dans le but ou de façon à améliorer les services, bien sûr, d'incendie et de policiers, mais aussi la négociation des conventions collectives, des avantages, enfin, de ces groupes-là, il serait de l'intérêt public de faire en sorte que ça soit des négociations regroupées pour l'ensemble des mêmes corps ou unités de salariés de la même région? Prenons par exemple la grande région de Montréal, la nouvelle commission, la nouvelle...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme Danyluk.

Mme Danyluk (Vera): Merci, Mme la Présidente.

M. Gobé: Je sais que ça vous intéresse. C'est pour ça que je vous pose la question.

Mme Danyluk (Vera): Ça m'intéresse; c'est sûr que ça nous intéresse, nous tous. Mais peut-être qu'il y a comme deux façons différentes dont je pourrais vous répondre à votre question. C'est sûr que le Service de police de la Communauté urbaine est déjà le plus grand service de police au Québec en termes de nombre de policiers. Et, pour cette raison-là, déjà, dans la réforme proposée, on nous dit que le Service de police ne serait pas comme fusionné avec les autres services de police au niveau de la région métropolitaine, la RMR, et peut-être pour de bonnes raisons.

Parce que, effectivement, on a eu une rencontre avec M. Ménard, qui nous a parlé de ce problème d'élargir le Service de police de la Communauté urbaine. Parce que, effectivement, aussitôt qu'on élargit, ça veut dire qu'il faut intégrer les autres services de police ou, du moins, avoir des ententes avec les autres services de police pour offrir un service qui est harmonisé et coordonné pour toute la grande région.

Mais, aussitôt qu'on fait ça, comme vous dites, le danger, c'est que, si on commence les négociations conjointes, ça veut dire qu'à un moment donné tous les corps de police de la grande région métropolitaine vont demander les mêmes conditions de travail, les mêmes fonds de pension. Ça fait que c'est sûr qu'il y a un danger de ce côté-là.

Ça fait que, d'après ce que je comprends, c'est un peu ça, cette question que vous posez, c'est la réponse à ça qui, effectivement, fait en sorte que, dans la réforme proposée pour la grande région métropolitaine, cette réforme-là ne s'appliquerait pas au niveau du Service de police. Même si la Communauté urbaine pouvait être remplacée par une autre structure métropolitaine, le Service de police de la Communauté urbaine va rester comme tel, avec la carte policière qui va demeurer, elle aussi, la même qu'à présent, d'après ce qu'on entend dire.

M. Gobé: Alors, c'est parce que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, deux minutes, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, Mme la Présidente. C'est parce que, voyez-vous, on va se retrouver, à ce moment-là, dans la même unité administrative puis on va avoir des travailleurs, des policiers, des corps de police qui, faisant le même travail, ayant à déborder même les frontières administratives – il n'y aura plus de frontières administratives comme telles – vont être avec des conventions collectives et des salaires différents.

Alors, lorsqu'il va y avoir arbitrage, parce que, quand même qu'on ne les unifie pas d'eux-mêmes, il va y avoir arbitrage à un moment donné, ils vont demander d'aller en arbitrage en fonction des critères qui sont définis, et je ne veux pas présumer de sentences arbitrales, mais les spécialistes des relations de travail de la CUM pourraient peut-être nous expliquer qu'est-ce qui pourrait arriver dans ce cas-là. D'abord, si ça va arriver et qu'est-ce que pourraient être les résultats.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Très rapidement, s'il vous plaît, M. Landry.

M. Landry (François): Moi, je vous dirais très rapidement que, sur cette question-là, si jamais on intégrait au Code du travail un critère impératif qui tient compte de la rémunération globale, on pourrait se reparler de cette éventualité-là. En attendant, je pense que ça pourrait créer un certain effet à la hausse parce que je vous souligne que, chez nous, au niveau de la Communauté urbaine de Montréal, si on compare avec tous les – pas tous mais évidemment une bonne partie – corps de police de la couronne nord, sur le plan du salaire, ils sont en avant de chez nous. Alors, c'est là que le critère de rémunération globale devient très important pour justement éviter ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci...

M. Gobé: Et vous voyez... Madame, permettez que j'aie une conclusion parce qu'on a des gens...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le député de LaFontaine pose une dernière question?

Des voix: ...

M. Gobé: Ah bon! O.K. ...même poser la question, mais je voudrais savoir s'il y avait des coûts d'incidence à la hausse sur les budgets, mais je présume que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, je pense que... Alors, écoutez, je suis désolée. Il faut quand même faire respecter nos enveloppes respectives. Alors, Mme Danyluk, M. Sarrazin, M. Landry, M. Marchand, merci d'être venus échanger avec nous à cette commission.

Je vais suspendre pour quelques instants à peine, le temps de l'échange des groupes.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

(Reprise à 16 h 21)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Nous allons donc reprendre les travaux, et nous accueillons l'Association des directeurs de police du Québec. Alors, M. Langlais – je pense que vous êtes le porte-parole principal – si vous voulez, bien sûr, nous présenter la personne qui vous accompagne, vous rappelant que vous avez 15 minutes pour nous présenter le mémoire qui circule présentement, que les membres de la commission vont pouvoir avoir à leur disposition, et pour passer à l'échange par la suite. Alors, M. Langlais.


Association des directeurs de police du Québec (ADPQ)

M. Audy (Lorrain): Mme la Présidente, je vous présente la personne qui m'accompagne, Me Lili-Pierre Trottier-Lapointe, qui est conseillère juridique à notre Association; et je me présente, parce que mon nom, c'est Lorrain Audy, je suis le directeur général de l'Association. Le président, Daniel Langlais, n'a pas pu être présent cet après-midi. Il vous fait ses excuses, et je représente l'Association. Mon nom, c'est Lorrain Audy.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, M. Audy, je suis désolée de vous avoir confondu, mais est-ce que vous pourriez me répéter le nom de la personne qui vous accompagne? Malheureusement, je n'ai pas bien entendu.

M. Audy (Lorrain): C'est Me Lili-Pierre Trottier-Lapointe.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Me Trottier-Lapointe?

M. Audy (Lorrain): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, vous pouvez y aller, M. Audy.

M. Audy (Lorrain): Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, l'Association vous remercie de l'avoir invitée à venir faire ses commentaires mais peut-être plus à répondre à vos questions. Dès 1991, nous avions rencontré le Groupe de travail, le comité Lemieux. Nous avons aussi participé aux travaux, rencontré M. Gabrièle, à l'époque, qui avait précédé le projet de loi 74. Quand le projet de loi 74 a été présenté en commission, nous nous étions abstenus de participer à l'invitation de M. Cherry, parce que, dans les remarques qu'on avait faites autant au comité Gabrièle qu'aux autres membres, nous avions soutenu que l'Association des directeurs de police était toujours et avait toujours été contre le droit de grève et le droit de lockout. Et, dans le projet de loi 74, ce droit de grève n'apparaissait pas. Donc, nous avions convenu de ne pas nous présenter en commission mais plutôt d'y assister en compagnie de l'Union des municipalités à l'époque qui, au niveau des salaires, de la rémunération, a son mot à dire, et non pas l'Association des directeurs de police.

Nous avons rencontré le comité Boivin en 1995. Nous lui avions fait part de nos remarques à l'époque. On peut peut-être vous dire au départ que l'Association est ici aujourd'hui pour représenter les directeurs de police, et non pas les directeurs de pompiers. On est dans le processus de changer notre appellation, qui était celle des chefs de police et de pompiers du Québec, pour devenir les directeurs de police seulement. Alors, c'est le volet police qui nous intéresse ici aujourd'hui. On n'a pas les connaissances et les compétences du milieu pompier pour le faire.

On représente aussi les directeurs de police de 130 services de police, peut-être un ou deux de moins – Mme la ministre parlait de 140 tout à l'heure, ça diminue de mois en mois et, avec ce qui s'en vient, peut-être beaucoup plus – et on est une association qui compte 75 années d'expérience.

Comme nous avions accepté de rencontrer le Groupe de travail sur l'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux – le groupe Boivin – en novembre 1995, c'est la raison pour laquelle nous revenons ici aujourd'hui, parce qu'on a naturellement suivi ce qui s'est produit dans les négociations de conventions collectives. Les directeurs de police, on est souvent entre l'arbre et l'écorce, alors, quand ça ne va pas très bien dans les relations de travail, on en subit souvent les conséquences quand on pense aux moyens de pression.

Alors, on s'était présenté devant le comité Boivin, encore une fois, pour parler du droit de grève parce que, dans l'invitation qu'on nous y faisait, on voulait avoir nos commentaires sur le droit de grève et de lockout, également sur l'arbitrage, sur les titulaires de la fonction arbitrale et de l'arbitrage selon la formule de la dernière offre.

Alors, nos représentations au comité Boivin se sont limitées, encore une fois, au droit de grève et de lockout. Et ce que nous disions à ce moment-là, c'est qu'on s'objectait parce que, selon nous, faire la police, la police elle-même est en réalité un service essentiel et c'est la présidente du Conseil des services essentiels qui nous en avait rappelé l'importance quand elle s'était prononcée en disant: «Il me semble, d'une part, difficile d'imaginer associer des salariés qui ne souhaitent pas qu'on leur accorde le droit de grève à une démarche d'identification des services à maintenir en cas de conflit. D'autre part, compte tenu de la nature des services en cause, je crains qu'il soit nécessaire de maintenir en poste un grand nombre d'effectifs simplement pour parer aux imprévus, avec la conséquence que plus personne ne sera en arrêt de travail effectif.»

Alors, on est satisfait aujourd'hui, autant dans les modifications qui ont été apportées en 1996 que dans le rapport qu'on a vu, de voir que ce fameux droit de grève là, que l'Union des municipalités qui nous suivra réclamait tant à l'époque, n'est pas revenu et je ne pense pas que, de la part de l'Union des municipalités, avec ce qui s'est passé au cours des dernières années, on revienne avec ce projet de droit de grève ou de droit de lockout.

Alors, quant aux autres volets du projet de loi 74, comme je vous le disais tout à l'heure, on ne s'était pas présenté en 1973, et, en relisant, en revoyant le rapport qui nous a été soumis, que vous nous avez envoyé concernant les modifications qui ont été faites aux articles 94 à 99.11 du Code du travail, vous en arrivez à la conclusion que les objectifs de 1996 ont été atteints. Vous êtes passés de 85 % des renouvellements de conditions de travail qui se font par la négociation à 88 %. Je pense qu'il y a là une évolution rassurante. Ça va vers le haut, tant mieux.

De plus, on note un ralentissement marqué de la tendance à l'augmentation jadis rapide du salaire des policiers municipaux – j'en suis sorti, j'en suis fort aise, que cette diminution-là ou ce ralentissement-là soit arrivé. Alors, ce qui est appréciable aussi, c'est en regardant vos tableaux où on dit que les policiers ont obtenu 2,2 % grâce à la négociation par rapport à 1,4 % en moyenne, soit, dans ce dernier cas, le même niveau d'augmentation que celui obtenu par les autres employés municipaux en négociation. L'arbitrage de différend a donc donné des résultats proches du taux d'inflation et même parfois en deçà de ces taux.

Finalement, vous nous rappelez que le projet de loi n° 102, en 1993, avait pour effet de prolonger de deux ans la durée des conventions collectives et une réduction de 1 % des dépenses reliées à l'application des conventions collectives et que la loi n° 414, en 1996, visait des mesures d'économie à prendre pour réduire les coûts de main-d'oeuvre des municipalités d'au plus 6 %. Ces deux lois ont eu des incidences sur le traitement de l'arbitrage. Je vous écoutais tout à l'heure dans les discussions que vous aviez avec la Communauté urbaine de Montréal et le Service de police. C'est le constat qu'on faisait aussi.

Comme – peut-être pas par hasard – le rapport Gabrièle est arrivé en 1992, le projet de loi 74 en 1993 et, immédiatement après, la loi 102 qui a gelé les salaires pour un an avec une diminution même de 1 %, on est tombé un petit peu plus tard avec la loi n° 414 qui a servi à diminuer la masse salariale de 6 %, alors ça s'est comme tout suivi, ça se tient un peu tout ensemble, ces mesures-là. Et ce qui ressort de tout ça, pour l'ensemble des directeurs de police, c'est que, si ça a servi à diminuer ou ralentir les augmentations, tant mieux pour les employeurs, mais tant mieux aussi pour nous, parce que, dans le domaine policier municipal, les relations de travail sont mieux à ce niveau-là qu'elles ne l'étaient.

(16 h 30)

L'Association est donc heureuse de constater que les amendements apportés au Code du travail en juin 1996 semblent favoriser de meilleures négociations de conventions collectives, parce que, habituellement, quand il n'y a pas d'entente, ce sont les cadres policiers qui se retrouvent entre l'employeur, soit la municipalité, et les policiers syndiqués.

À cet effet, tous se rappellent les moyens de pression qui ont suivi l'adoption de la loi 102, en 1993. En 1993, ça a pris un mot d'ordre de la Fédération des policiers du Québec pour faire en sorte que, pendant deux mois, il n'y ait à peu près aucun service policier ou aucun policier municipal au Québec qui émettait des contraventions sur nos routes, nos rues, dans les municipalités. Alors, quand ce genre de moyens de pression arrive là, les moyens de pression suivaient la loi 102, on en vit les conséquences, comme, je présume, ça doit se vivre à la direction de la Sûreté depuis quelques mois.

Injonctions, requêtes, griefs patronaux – ce sont toutes des mesures qu'on a dû prendre au niveau municipal pour réclamer ce qui n'avait pas été fait au niveau de la sécurité routière pendant ces deux mois-là – donc, qui ont été intentés par les municipalités avec l'accord et la participation des directeurs de police ont contribué à détériorer les relations de travail entre les cadres et les policiers syndiqués. Et ça prend des années, quand ça arrive, ces choses-là, à y remédier.

Les relations professionnelles tendues entre les gestionnaires policiers et les autorités syndicales de même que le principe de l'indépendance policière dont doit jouir un directeur de police face à son conseil municipal sont deux enjeux que l'Association a soulignés récemment dans son mémoire devant la commission qui regardait la nouvelle Loi de police.

Maintenant que la menace des droits de grève et de lockout est disparue, l'Association continuera à suivre l'évolution des négociations de conventions collectives, laissant aux employeurs le soin de commenter l'atteinte de l'objectif fixé en... il me semble que c'est en 1995 plutôt que 1992, par le CRM, le Centre de ressources municipales en relations de travail et de ressources humaines de l'UMQ, soit le plafonnement à leurs coûts actuels des conventions collectives des policiers et pompiers du Québec.

Comme dernière remarque, Mme la Présidente, peut-être vous dire qu'un des constats qui sont faits dans votre rapport, puis qui est l'état de situation, le tableau nous démontre qu'il y a eu au cours des années un rattrapage des petits services de police au niveau des salaires, par rapport au Service de police de la Communauté urbaine, qui, il y a 25, 30 ans, était à la tête du peloton.

Il y a eu un rattrapage et, à mots peu couverts, on dit dans le rapport qu'une des raisons est peut-être la faiblesse des employeurs au niveau des négociations de conventions collectives, la faiblesse du renseignement qu'il y avait, des méthodes de collecte d'informations, par rapport à la Fédération des policiers qui, elle, est bien équipée en conseillers, procureurs, et tout ça. Et je pense que cette chose-là est corrigée en grande partie avec, justement, le CRM, bureau qu'a mis sur pied l'Union des municipalités pour un peu aider les municipalités dans leurs négociations. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Audy. Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, M. Audy, que je suis heureuse de revoir dans un autre contexte – on s'est connu, Mme la Présidente, dans mes anciennes fonctions – Mme Trottier-Lapointe, je vous salue.

Vous avez une situation, comme directeur de corps policier, effectivement, vous le soulignez, assez particulière. Mais, en même temps, je présume que vous êtes aussi dans une situation d'observateur, puis il y a quelques remarques dans votre présentation qui témoignent bien de ça, où vous observez, dans le fond, un peu la qualité ou certains phénomènes dans les relations de travail entre les municipalités et leurs policiers syndiqués.

J'aurais deux questions. D'abord, vous dites que vous constatez, en lisant le rapport, que ces amendements de 1996 semblent favoriser une meilleure négociation de conventions collectives parce que, habituellement, quand il n'y a pas d'entente, ce sont les cadres policiers qui se trouvent entre l'employeur et les policiers syndiqués, ce qu'on pourrait dire, d'une manière plus directe, en sandwich entre les deux, finalement. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Parce que vous avez entendu – je sais que vous étiez présents – la présentation de la CUM, où on nous disait que la négociation était quand même la voie privilégiée. Bon. Ça se peut, des fois, qu'on n'y arrive pas par voie de négociations. C'est la voie privilégiée, mais, quand on n'y arrive pas, bon, vous observez évidemment des situations, vous êtes au coeur de situations qui sont difficiles. Je ne sais pas si vous pouvez témoigner du fait que, par exemple, peut-être qu'il y a eu certains de vos directeurs de corps policiers qui ont été dans des corps de police où la municipalité ou, enfin, ils ont eu recours à la sentence arbitrale. Est-ce que, en termes de dynamique, ça a changé quelque chose?

L'autre question que j'aimerais vous poser, parce que vous terminez là-dessus en disant... Dans le fond, vous posez la question: Est-ce que l'objectif, quant à la rémunération des policiers, pompiers, ne devrait pas être le plafonnement à leurs coûts actuels? J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que, que le point de départ ou le point d'arrivée soit le plafonnement des coûts de main-d'oeuvre, en général, ça n'aide pas beaucoup, ça, à des négociations. Il y a quand même trois critères qui ont été inclus dans la loi: de tenir compte de l'équité à l'intérieur, à l'extérieur – j'en fait un résumé, là – des considérations économiques. Est-ce qu'il faut fixer une barre comme celle-là de plafonner les coûts? Je vous lance la question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Audy.

M. Audy (Lorrain): Je ne le sais pas. Ce qu'on voit, ce que le rapport Gabrièle a amené, le projet de loi 74 – puis ça a été corrigé après ça par les modifications qui ont été apportées en 1996 – ce dont doit tenir compte l'arbitre... Bon. En lisant les différentes décisions qui ont été rendues, on voit que, oui, on le respecte, mais avec certains petits écarts. Mais ça n'existait pas autrefois et c'était peut-être la menace qui faisait en sorte que, dans le cas de plusieurs municipalités, supportées par le directeur de police qui les conseillait de temps en temps dans ce domaine-là, s'entendaient en négociation... Et ce sont des arbitres qui nous l'ont rappelé. Souvent les négociations permettaient à certaines municipalités ou à certains syndicats policiers d'aller se chercher des avantages beaucoup plus forts qu'ils auraient obtenus en arbitrage.

Donc, moi, je pense que ce qui a été fait nous amène là, après quatre ans ou cinq ans, avec des critères qui sont, sinon obligatoires, au moins des bons indices. C'est peu, 19 modèles sur lesquels ils peuvent se fier pour dire: Pour l'avenir, on a un enlignement, mais c'est après prendre forme.

Peut-être sans devancer une question, mais, tout à l'heure, j'écoutais les réponses qu'on faisait à l'opposition quant à ce qui s'en vient dans les prochains mois ou années, de la communauté métropolitaine, j'ai appris en écoutant Mme Danyluk – qui est beaucoup plus proche du ministre de la Sécurité publique qu'on peut l'être à l'Association – que ça serait un modèle différent, que la Communauté urbaine demeurerait sur son territoire et qu'il y aurait probablement un plus gros service de police autant sur la couronne nord que sud. Bon. Je l'apprends ici aujourd'hui.

Alors, c'est évident que le regroupement de ces services de police là va nous amener, et c'est peut-être, si j'avais un message à laisser à la commission ou aux membres du gouvernement, de voir venir ça là, ce qui s'en vient là. Vous n'avez peut-être pas de difficulté d'après votre rapport, mais ce qui s'en vient, c'est une étape très importante. Prenez le cas de Saint-Jérôme qui a fusionné quatre conventions collectives, il y a cinq ou six ans, c'est à peine réglé. La Régie de police des riverains, qui regroupait Beauharnois, Valleyfield et ces villes-là, est en difficulté très évidente parce qu'on ne réussit pas à s'entendre avec des conventions collectives différentes.

Alors, ce qui s'en vient ne sera pas facile. J'ai appris aujourd'hui que peut-être on regroupera différemment les services policiers de la Communauté urbaine de ceux de la rive sud et la rive nord. Dites-vous une chose: dans les négociations de conventions collectives, si la Communauté urbaine voulait qu'on tienne compte de la rémunération globale sans le demander, ce que le syndicats vont faire, c'est d'essayer de l'obtenir pour les prochains 30 ans. Si les salaires sont à peu près tous pareils mais que la CUM est première par rapport au fonds de pension et toutes ces choses-là, c'est certain que les autres syndicats vont essayer indirectement d'aller le chercher.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Non. Pour moi, ça va aller.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon. J'ai le député de Maskinongé. M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui, merci. Concernant les critères que vous avez compris tantôt avec la Communauté urbaine de Montréal, les critères concernant l'arbitrage et puis la rigueur, avez-vous le même commentaire par rapport à la rigueur?

(16 h 40)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Audy.

M. Audy (Lorrain): Bien, je voudrais amener un commentaire puis je l'exprime un petit peu dans le mémoire. Nous, on veut laisser ça aux employeurs, ce genre de commentaire là, dans le sens où on est observateurs. On est dans les négociations, l'Association, et nos directeurs de police se retirent quand vient le temps de parler de la rémunération parce que ce n'est pas nous qui payons, ce sont les municipalités et c'est elles qui négocient. Donc, c'est difficile pour nous de se prononcer. En plus, comme Association, on a 130 conventions différentes, négociateurs différents, donc on n'a pas, comme l'Union des municipalités peut avoir, des gens qui ont une vue réelle de ce qui se passe dans les négociations.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui, mais c'est justement pour ça. Moi, je trouve que c'est important, l'endroit où vous vous situez. Vous êtes entre l'arbre et l'écorce et vous ne voulez pas vous mouiller de rien, mais par contre vous voyez tout ce qui se passe. Vous voyez les deux côtés de la médaille, et ce que je vous propose, c'est: Comment voyez-vous ça? Quelle analyse vous en faites puis comment on peut essayer d'améliorer les choses? Puis là vous me dites: On veut rester neutre.

M. Audy (Lorrain): Bien, je peux vous répondre d'abord en me référant à votre rapport, le rapport que vous nous avez soumis. Et le constat qu'on fait que les critères qui ont été ajoutés, si vous voulez, avec les modifications qui ont été faites à l'article 99.5...

M. Désilets: Oui.

M. Audy (Lorrain): Le fait de tenir compte de l'économie du Québec par rapport à la municipalité qui négocie me semble être un critère qui est valable et qui a fait ses preuves. Quand on regarde le résultat, ce qui se donne en augmentations de salaire depuis trois, quatre ans suit l'indice des prix à la consommation quasiment à la ligne. Donc, ça me semble être raisonnable.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Audy. Alors, d'autres questions, M. le député de Maskinongé?

M. Désilets: Non, ça va.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pas pour l'instant. Alors, écoutez, je suis donc prête à reconnaître le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, Mme la Présidente. Messieurs, madame, bonjour. Au nom de l'opposition, il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission.

Alors, c'est avec un certain intérêt qu'on a pris connaissance de votre mémoire, de ce que vous y dites. En effet, quand on le lit, on comprend que vous vous mettez au-dessus, un peu comme observateurs, de la mêlée, mais, quand même, vos remarques sont fort pertinentes et vous tirez une certaine conclusion. Bon. Vous dites que les objectifs ont été atteints; vous êtes d'accord avec ça. Vous dites qu'on assiste à une baisse significative de la spirale de l'augmentation des salaires. Par contre, vous nous mentionnez aussi que les autres lois qui ont été appliquées ont certainement eu un impact non négligeable dans cet objectif, ce qui fait qu'on peut certainement relativiser l'objectif qui est atteint comme étant le seul résultat de l'effet des amendements au Code du travail, mais quand même. Alors, c'est fort intéressant.

La question que je posais à Mme Danyluk tout à l'heure et à son directeur des ressources humaines, son négociateur, vous l'avez reprise, et j'en suis fort aise parce que je crois que c'est quelque chose qui va nous toucher très rapidement et à laquelle, je pense, on a peu donné de lumière, en tout cas. C'est des choses dont a très peu parlé.

Mme Danyluk nous a fait part, en particulier, de ce qu'elle savait comme étant la nouvelle organisation de la police, probablement les pompiers la même chose, dans le territoire de la nouvelle agglomération – appelons ça comme ça – montréalaise, la grande région. Et son responsable des négociations, qui est un homme d'expérience, nous a laissé entrevoir bien sûr que ça ne serait pas sans avoir des effets sur les municipalités, sur l'augmentation de leur masse salariale dans les corps de police et bien sûr de pompiers.

Est-ce que, vous, vous pensez à ce moment-là qu'il ne serait peut-être pas plus intéressant de faire une négociation collective pour l'ensemble, régler ça une bonne fois pour toutes ou alors laisser des arbitres décider au fur et à mesure d'un processus qui est quelquefois laborieux? Parce que, si on ne le fait pas tout de suite, ils vont tous vouloir aller en arbitrage. Ça me semble l'évidence la plus logique et ils vont s'appuyer sur les critères, et, lorsqu'on lit les critères, vous savez...

Prenez, à titre d'exemple, ils vont prendre un exemple comme critère qui est la Communauté urbaine de Montréal, qui a un seul corps de police. Tous les policiers, qu'ils soient de Pointe-aux-Trembles, de Sainte-Anne-de-Bellevue, ont le même salaire parce qu'ils font le même travail sur le même territoire. Pourtant, ils ne sont pas dans les mêmes postes puis ils ne sont pas dans les mêmes municipalités. Un policier de la CUM qui travaille à ville d'Anjou ne dépend pas de ville d'Anjou, c'est-à-dire qu'il a le même salaire que ceux de ville Mont-Royal qui est une municipalité différente.

J'ai l'impression que ce critère-là ou cet argument-là va pouvoir être invoqué par les parties syndicales pour dire: Bien, c'est vrai. Nous, nous ne sommes pas dans Laval, nous ne sommes pas dans Montréal, mais nous sommes dans Repentigny et il n'y a pas de raison pour que nous gagnions 10 % ou que notre rémunération globale soit de 10 %, 15 %, 20 % ou 7 % inférieure au gars qui est dans Pointe-aux-Trembles ou à celui qui est dans Laval.

Donc, on va certainement se retrouver dans une situation, très rapidement, où les arbitres vont devoir trancher. Tout porte à croire qu'ils pourraient trancher dans ce sens-là. Donc, il va y avoir un processus, là, qui pourrait devenir difficile. Alors, est-ce que vous pensez que, d'abord, ça peut arriver, comme les gens de la CUM semblent penser? Puis, deuxièmement, croyez-vous, à ce moment-là, qu'une des solutions serait une négociation globale pour l'ensemble? Puis, troisièmement, je vous la poserai après.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Audy.

M. Audy (Lorrain): Je vais vous répondre par le deuxièmement, et ce que je vais vous dire... Bon. Je parle en mon nom personnel, ça fait 38 ans que je suis dans le milieu policier.

M. Gobé: Oui, mais vous avez dit que vous étiez un observateur, ça fait qu'on prend ça pour venant de l'observateur.

M. Audy (Lorrain): Et je ne m'attendais pas à ce genre de question là, mais je vais vous répondre selon ce que je pense et la commission en fera ce qu'elle voudra.

Moi, je pense qu'on est rendu à ce point-là. Moi, je pense que, si on regarde l'évolution des services policiers au Québec, si on regarde les quelques commentaires qu'on a eus par rapport au rapport Harel ou à la volonté du ministre de la Sécurité publique de regarder la nécessité, l'obligation de regrouper les corps policiers autant au niveau de l'efficacité que de l'économie, on est sûrement rendu à un moment crucial où il faut peut-être penser à un salaire uniforme pour les policiers au Québec, les conditions de travail qui se négocient une fois, partout, pour l'ensemble des policiers, par un négociateur des municipalités et versus la Fédération, qui, elle, dans le fond, négocie peut-être individuellement, un à la fois, mais avec les mêmes données pour l'ensemble des corps policiers.

C'est vraiment, mettons, comme observateur, personnel. Ce n'est pas mon Association qui pense ça ou qui a réfléchi à ça, mais on le fera sûrement à partir des prochaines modifications à la carte policière qui s'en viennent.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, de toute façon, tel qu'on voit les choses, on va y être entraîné, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas.

M. Audy (Lorrain): Sûrement, oui.

M. Gobé: Alors, ma troisième question, c'était la suivante: Étant donné qu'on va certainement se retrouver au moins par région, d'accord, avec ces conditions de travail et des rémunérations globales de pompiers et de policiers qui vont être harmonisées, uniformisées, est-ce que vous ne croyez pas qu'on va se diriger, par là, vers un corps de police qui deviendrait quasiment une police municipale nationale, comme on retrouve dans certains autres pays? Pensez-vous qu'il y a là danger d'une trop grande concertation...

Une voix: ...concentration.

M. Gobé: ...concentration? Excusez-moi, j'ai un décalage horaire un peu encore. En plus, on a fini à 4 heures ce matin ici, en Chambre, alors, vous comprendrez que les deux, des fois, on est peut-être...

Alors, est-ce qu'il n'y a pas là danger de concentration d'une force policière municipale et que, à ce moment-là, ça risquerait de peser dans les négociations suivantes, faisant en sorte de dire: Bien, voilà, on peut paralyser le Québec, on est une force incroyable? Parce qu'il n'y aura plus de critère d'arbitrage, là, avec le policier d'à côté ou la municipalité. Le critère, ça va être quoi? Ça va devenir le rapport de force de ce corps ou de ces organismes de police, hein, uniformisés vis-à-vis de l'État. Donc, ça devient un pouvoir politique de négociation.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Audy.

M. Audy (Lorrain): Bien, si vous avez terminé à 4 heures, là, je vais essayer de ne pas vous traîner toute la nuit.

M. Gobé: Allez-y, M. Audy. Non, non, allez-y. Ha, ha, ha!.

M. Audy (Lorrain): J'espère que vous n'avez pas voté sur la clarté de la question?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: Non, on a voté sur...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: On a voté, M. Audy, sur un projet de loi pour augmenter le salaire des juges et les fonds de pension.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On s'égare un peu. Alors, M. Audy.

(16 h 50)

M. Audy (Lorrain): Peut-être que, là-dessus, Me Lapointe pourrait vous répondre, mais... Oui, je pense que ça, c'est préoccupant. Je pense que ça préoccupe le gouvernement, autant pour les ministres du Parti libéral autrefois que les ministres qu'on a connus depuis que le Parti québécois est là.

Reste quand même que, regardez l'exemple qu'on a actuellement, il y a des moyens de pression de la part des policiers de la Sûreté du Québec depuis bon nombre de mois, et on n'a pas vu le même effet que ça avait fait en 1993 quand la loi 102 est arrivée. Donc, il y aura peut-être deux employeurs, le gouvernement et les municipalités. Par contre, évidemment que, si on parle de conditions de travail égales, il faudrait maintenir pour les policiers le même refus au droit de grève qui existe actuellement et le droit de lockout. Je pense qu'en enlevant le droit de grève...

Quand je regarde aussi ce que le Conseil des services essentiels avait émis dans le cas des policiers de la Communauté urbaine, en 1995, qui avaient fait des moyens de pression et qui ont répété en 1998, leur ordonnant de cesser immédiatement les moyens de pression à cause de la sécurité du public, je pense que, dans ce contexte-là, je serais moins craintif quant à la sécurité de l'État par rapport aux conditions de travail des policiers.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Pour l'instant, j'en ai fini, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je pense qu'il n'y a plus de questions de part et d'autre. M. Audy, Mme Trottier-Lapointe, merci de votre participation à cette commission. Je vais donc suspendre pour quelques instants les travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

(Reprise à 16 h 53)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission va donc reprendre ses travaux. Nous accueillons l'Union des municipalités du Québec. C'est M. Brisebois, je pense.

M. Brisebois (Jacques): C'est ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous êtes le porte-parole principal.

M. Brisebois (Jacques): C'est ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il n'y a personne qui vous accompagne? Oui?

M. Brisebois (Jacques): Il y a deux personnes qui vont m'accompagner: Aline Laliberté...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. C'est parce qu'ils n'avaient pas...

M. Brisebois (Jacques): ...et Richard Montpetit, qui va arriver d'une minute à l'autre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, oui, oui. M. Brisebois, est-ce que la personne qui vous accompagne est arrivée ou si...

M. Brisebois (Jacques): Oui, oui, oui, il est juste allé au petit coin, Ha, ha, ha!

Une voix: ...

M. Brisebois (Jacques): Enfin, c'est ça, la vraie vie, hein.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On va suspendre quelques instants. Oups!

M. Brisebois (Jacques): Il arrive, il arrive.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, je remarque que vous nous déposez un mémoire, le mémoire de ce que vous allez nous donner ici, en commission. Je vous rappellerai tout simplement que vous avez 15 minutes pour présenter votre argumentation. Par la suite, ce sera les échanges. Alors, M. Brisebois, si vous voulez recommencer la présentation, s'il vous plaît, qu'on prenne en note le nom des gens qui sont avec vous.


Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Brisebois (Jacques): Oui. Donc, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de l'invitation à l'Union des municipalités de contribuer aux travaux de la commission sur le rapport.

Avant de débuter, donc, à ma gauche, M. Richard Montpetit, directeur du Centre des ressources municipales, le CRM, à l'UMQ; et Mme Aline Laliberté, conseillère en politique de main-d'oeuvre, également à l'UMQ.

Donc, avec ses 275 municipalités membres comptant pour 5 millions de citoyens et gérant 77 % des budgets municipaux, l'Union des municipalités du Québec est le seul regroupement à représenter le monde municipal dans toute sa diversité. Elle est aussi l'une des rares organisations dont le poids et la légitimité lui permettent d'intervenir dans le débat public au nom de 70 % de la population du Québec.

Depuis sa formation, il y a 80 ans, l'Union joue un rôle de premier plan dans la promotion et la défense des intérêts des municipalités et de leurs contribuables. Elle est aussi un promoteur inlassable d'une reconnaissance réelle de l'autonomie politique et financière des municipalités québécoises.

Le monde municipal constitue un employeur important au Québec. Un peu plus de 80 000 travailleurs sont à l'emploi d'une municipalité ou d'un organisme de transport en commun. Leur rémunération s'établit à 3,8 milliards de dollars annuellement, soit plus de 42 % des budgets municipaux qui, eux, sont évalués à près de 9 milliards de dollars. Les municipalités ont à leur emploi les deux-tiers des policiers du Québec et les budgets affectés au service de sécurité publique représentent près de 1,3 milliard de dollars.

Au cours des dernières années, l'UMQ a mené d'intenses représentations qui ont conduit le législateur, en 1993 et 1996, à modifier les dispositions du Code du travail relatives à l'arbitrage des policiers et des pompiers municipaux. En 1996, une clause crépusculaire avait été introduite afin que le ministre fasse rapport au gouvernement de l'impact des modifications apportées au régime d'arbitrage de différend.

Or, même si elles sont plus raisonnables que celles consenties antérieurement, les augmentations salariales obtenues depuis ce temps par les policiers et les pompiers en arbitrage de différend sont encore supérieures aux augmentations consenties aux policiers et pompiers en négociation. Elles sont aussi supérieures aux augmentations salariales octroyées aux autres employés des municipalités concernées. De plus, les augmentations obtenues par les policiers ont été supérieures à l'indice des prix à la consommation, contrairement à ce qui s'est produit avec les autres groupes d'employés.

Comme pour tout employeur, la définition de la politique de rémunération d'une municipalité repose sur certains principes fondamentaux. Parmi les plus importants, on retrouve un souci d'équité, le sens de la justice et la capacité de payer de la municipalité et de ses contribuables. Pourtant, chaque fois qu'une cause se retrouve devant le tribunal d'arbitrage de différend, les municipalités doivent défendre leur politique de rémunération et démontrer qu'elles sont des employeurs équitables.

Chers amis, les élus municipaux ne sont pas différents de vous, ils ont la même attitude responsable. Il est d'ailleurs intéressant de rappeler certains propos du ministre de la Sécurité publique que rapportait La Presse du 1er mars dernier, dans le dossier du renouvellement de la convention collective des policiers de la Sûreté du Québec: «Que les policiers de la SQ se le tiennent pour dit, ils n'obtiendront pas plus que les autres employés de l'État, c'est-à-dire une augmentation salariale de 9 % étalée sur quatre ans. Nous pourrions être d'accord, mais il y a un seul point sur lequel un désaccord est fondamental et sur lequel nous ne bougerons pas: les policiers n'auront pas plus que le reste des employés de la fonction publique, ce qui serait faire une injustice.»

La question se pose donc: Pourquoi en serait-il autrement pour les municipalités? Et, fait assez révélateur, un représentant du Conseil du trésor déclarait en février dernier qu'il n'est pas question que le différend entre les policiers de la SQ et le gouvernement soit déféré en arbitrage, car le gouvernement ne mettra jamais sa politique salariale entre les mains d'un arbitre.

Depuis de nombreuses années, les élus municipaux ont décrié ce régime, qui met dans les mains d'un tiers la politique salariale de leur municipalité. L'arbitrage de différend se substitue à la négociation collective comme moyen de détermination des conditions de travail. Avant l'adoption, en 1996, des modifications législatives qui ont obligé l'arbitre à tenir compte de critères décisionnels obligatoires, les arbitres ont nié accorder trop d'importance à la comparaison entre des corps policiers de municipalités considérées similaires et en faire le motif principal ou unique de leur décision.

Pourtant, quand on regarde les faits, il semble que la compréhension des arbitres est d'assimiler l'équité externe à la parité des conditions de travail avec les policiers des autres municipalités, à croire que toutes les municipalités ont les mêmes moyens. Or, l'équité externe est un facteur qui, à notre avis, ne devrait pas avoir d'impact sur la rémunération offerte aux employés municipaux, incluant les policiers et pompiers. Ce facteur ne devrait pas être considéré par les arbitres de différend, puisqu'il n'est pas, dans le contexte actuel, un déterminant important dans l'établissement des conditions de travail. La capacité de payer d'une municipalité est tributaire de l'activité économique locale et régionale. D'une région à l'autre, des différences importantes se vivent et viennent moduler les possibilités offertes à l'employeur.

Aussi, lorsqu'une municipalité établit sa politique de rémunération, elle désire l'appliquer équitablement à l'ensemble de ses groupes d'employés et non pas accorder des augmentations salariales différentes parce que la nature du travail est différente. D'ailleurs, lorsqu'il s'agit de ses propres policiers, c'est également ce que semble penser le ministre de la Sécurité publique: accorder aux policiers de la SQ des augmentations qui ne dépassent pas celles consenties aux autres employés de l'État. Pourquoi les policiers municipaux devraient-ils obtenir un traitement spécial?

Dans le dossier de ma propre ville, Mont-Laurier, en 1996, l'arbitre a d'ailleurs mentionné que les amendements apportés au Code du travail, et plus particulièrement à l'article 99.5, font en sorte qu'un policier est d'abord et avant tout un employé municipal, un salarié au même titre que les salariés pompiers, cols bleus et cols blancs avec, bien sûr, les particularités qui les distinguent les uns par rapport aux autres.

Les augmentations consenties aux ingénieurs qui oeuvrent dans les municipalités, par exemple, sont-elles différentes de celles octroyées aux autres catégories de salariés municipaux? Non. Ces derniers ont acquis une compétence particulière, font partie d'un ordre professionnel, mais, lorsque l'employeur municipal définit sa politique de rémunération, il applique une politique uniforme à tous ses employés.

(17 heures)

À Montmagny, l'arbitre a aussi confirmé l'imputabilité des élus en disant que c'est à eux, les élus municipaux, et non à la Fraternité, de décider de ce qui convient le mieux à la capacité de payer des citoyens. Il faut rappeler que l'arbitre, dans ce dossier, n'a accordé aucune augmentation de salaire aux policiers, il s'est appuyé sur la politique applicable aux autres catégories d'emplois de la municipalité. La Fraternité a déposé une requête en révision judiciaire, soutenant que cette décision faisait en sorte de retourner 50 ans en arrière.

Quand un arbitre respecte la politique salariale d'un employeur, sa décision fait l'objet d'une contestation par la partie syndicale. Il nous apparaît donc évident que les arbitres doivent appliquer de façon systématique et uniquement le critère de l'équité interne. Les conditions de travail des autres travailleurs de la municipalité sont déterminées par la négociation des conventions collectives à l'intérieur de paramètres fixés par l'employeur.

Les augmentations salariales accordées aux policiers et pompiers municipaux, comme celles accordées aux autres groupes de travailleurs, doivent refléter les éléments pris en considération par l'employeur municipal dans l'élaboration de sa politique de rémunération. Ces éléments visent à respecter la capacité de payer des citoyens et à refléter les conditions économiques du milieu, que ce soit le salaire industriel moyen payé sur le territoire de la municipalité ou dans la région – et qui constitue le véritable marché de référence – les indices de richesse foncière, d'effort fiscal et le taux d'endettement.

L'objectif poursuivi par les employeurs municipaux lors des modifications législatives de 1996 était que l'arbitre respecte leur politique de rémunération. Il reste du chemin à faire, car les augmentations salariales consenties en arbitrage ont été supérieures à celles consenties par la voie de la libre négociation. Oui, moins importantes que par le passé, mais néanmoins supérieures.

Si le gouvernement ne veut pas se faire imposer par arbitrage des conditions de travail des policiers de la SQ et se faire appliquer une politique salariale qui ne serait pas la sienne, pourquoi faudrait-il que les élus municipaux soient satisfaits du régime d'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux? Le rapport sous étude au ministère du Travail révèle que, dans près de deux cas sur trois, depuis 1996, les décisions arbitrales ont fait l'objet d'interprétations moins rigoureuses que celles où les arbitres ont appliqué plus strictement le message passé par le législateur.

L'objectif recherché étant de revaloriser la négociation, il est impérieux que les deux parties voient un avantage à la négociation. Si l'arbitre est encadré par un seul critère possible, soit l'équité interne, il devra départager les deux positions qui lui sont présentées et accorder un compromis acceptable en fonction de la politique de rémunération de l'employeur. Il doit agir comme facilitateur pour amener les parties à conclure une entente.

L'utilisation par l'arbitre de la politique de rémunération, seul facteur équitable pour tous les employés d'une même municipalité, inciterait fortement les syndicats des policiers et des pompiers municipaux à négocier de bonne foi avec l'employeur. Mais, si les parties doivent s'en remettre au régime de l'arbitrage de différend, elles doivent pouvoir compter sur un véritable tribunal de nature administrative. Aujourd'hui, cet appareil est de plus en plus judiciarisé, tant les auditions sont longues et les preuves volumineuses et on utilise des moyens dilatoires.

Ce qu'il faut rechercher, c'est un tribunal administratif simple et expéditif. Le but escompté est de faire en sorte que les policiers et les pompiers municipaux reçoivent un salaire raisonnable relié à la politique de rémunération de l'employeur. Les policiers utilisent le système d'arbitrage comme levier de négociation pour augmenter leur rapport de force. D'ailleurs, selon nos données, les demandes d'arbitrage proviennent, dans la très grande majorité des cas, de la partie syndicale. Ils doivent y voir une voie plus payante que la négociation.

À chaque fois, les parties doivent débourser des sommes énormes pour préparer et présenter leurs preuves. Qu'une municipalité ait à son emploi 10 policiers ou 100, le coût de préparation est le même. Pourtant, la capacité de payer de la municipalité, elle, peut être très différente. Des sommes astronomiques sont investies auprès des cabinets d'actuaires, de conseillers juridiques, d'économistes, de spécialistes en rémunération, et ça, c'est l'argent de nos contribuables. Plusieurs municipalités ont dépensé des sommes variant entre 100 000 $ et 300 000 $ lors d'un arbitrage de différend.

Si le gouvernement veut permettre aux municipalités de mieux contrôler la rémunération des employés municipaux, et particulièrement celle des policiers, il doit leur en donner des moyens et revoir au plus tôt le régime actuel d'arbitrage de différend. D'ailleurs, un rapport de l'Institut de la statistique du Québec démontrait, en 1999, que la rémunération globale des emplois repères des municipalités de 10 000 à 25 000 habitants était en avance de plus de 15 % sur celle de l'administration québécoise. En 1999 également, selon une autre étude de l'Institut, la rémunération globale de la fonction publique québécoise accusait un retard de plus de 29 % sur celle de l'administration municipale des villes de 25 000 habitants et plus. Toutefois, dans ces deux cas, on n'a pas comparé la rémunération versée aux policiers et pompiers municipaux, puisque ces emplois sont exclus des secteurs d'étude.

En conclusion, les municipalités recherchent un rééquilibrage du rapport de force pour contraindre les parties à négocier. Ce rééquilibrage, les municipalités ont voulu l'obtenir en revendiquant l'octroi des droits de grève et de lockout pour les policiers et les pompiers municipaux, assortis d'un droit de retrait. Elles pourraient obtenir – et c'est une piste qu'on vous lance – un pouvoir habilitant pour leur permettre, par règlement, de décréter les conditions de travail de tous leurs employés régis par une convention collective ou une sentence arbitrale en tenant lieu. Ce pouvoir pourrait être exercé avec l'assistance d'un arbitre et de citoyens. Ce règlement pourrait être approuvé par les personnes habiles à voter conformément aux dispositions de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.

Donc, à défaut d'obtenir ces moyens... Dans le fond, le sens de l'intervention que j'ai faite, c'est que, si on n'obtenait pas ces moyens-là, ce qu'on vous suggère, le dernier recours qu'il nous reste si on reste dans le système d'arbitrage de différend, c'est de faire de l'équité interne le seul critère obligatoire retenu par les arbitres. Sans ça, on va rester dans le modèle qu'on connaît, qui, je pense, est vicié, parce qu'il n'y a plus de rapport de force, malgré, je pense, qu'il y a eu des améliorations, j'en conviens. Mais c'est loin, très loin d'obtenir satisfaction pour les employeurs municipaux. Donc, voilà, c'était l'intervention qu'on voulait faire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Brisebois. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, M. Brisebois, bonjour, merci de votre présentation, Mme Laliberté, M. Montpetit. Avant de poser les questions, je voudrais avoir un éclaircissement important. Vous avez des tableaux dans votre document. Évidemment, on vient de recevoir votre document, donc c'est difficile de saisir tout. Mais vous avez des tableaux, notamment à la page 14 et à la page 16. Au bas de ces tableaux-là, vous dites: «Rapport concernant l'arbitrage de différend chez les policiers et pompiers municipaux». Je considère donc que vous avez pris les données... Parce que ce ne sont pas des tableaux qui apparaissent dans notre propre rapport.

M. Brisebois (Jacques): Oui. Je vais demander à Richard Montpetit de...

Mme Lemieux: Je veux clarifier ça, je veux savoir où vous avez pris l'information, parce que, écoutez, je regarde le tableau de la page 14, et on n'a pas lu le même rapport. Alors, moi, là, j'en fais une question de rigueur.

C'est un dossier qui est délicat et complexe – la preuve, c'est que le législateur est intervenu en 1993, en 1996 là-dessus – et, si on veut évoluer là-dedans, il faut au moins se donner de la rigueur. Alors là vous écrivez que la source, c'est le rapport du ministère. Alors, je vous dis que ce tableau-là ne vient pas du rapport du ministère. Alors, je veux une explication et je pense que ça va être important qu'il y ait des correctifs s'il y a lieu, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Richard Montpetit pourra compléter. Mais ce qui est clair, c'est que ces données-là viennent du CRM, O.K. C'est la mise en page, ce qu'on m'explique, mais c'est très clair, et, à la page 13, le dernier paragraphe identifie clairement que c'est le CRM.

Une voix: Oui, c'est ça.

M. Brisebois (Jacques): Oui, Richard, si tu veux compléter.

M. Gobé: Ce n'est pas le ministère, c'est votre centre de...

M. Brisebois (Jacques): On n'a jamais prétendu que c'étaient les données du ministère.

Mme Lemieux: Là, M. le député de LaFontaine...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, mais là, un instant, s'il vous plaît! Là, c'est M. Montpetit qui va prendre la parole?

M. Montpetit (Richard): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Montpetit.

Mme Lemieux: D'où viennent les tableaux?

M. Montpetit (Richard): Oui. Effectivement, Mme la ministre, pour la même période, nous avons analysé toutes les conventions collectives qui ont été renouvelées durant cette période-là et nous avons aussi analysé toutes les sentences arbitrales qui ont été rendues durant cette période-là. À la suite de ces analyses-là, nous en venons à la conclusion, effectivement, que la moyenne salariale accordée, pour chacune des années qui sont présentées dans le tableau, est supérieure dans le cas des arbitrages de différend par rapport aux négociations de conventions collectives.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la ministre.

Mme Lemieux: Bon. Écoutez, on ne fera pas un débat de chiffres, là. Mais, si vous avez la même source d'information que les nôtres – et je dois considérer qu'on doit avoir bien... au ministère du Travail, les sources doivent être hyperfiables – vous tirez des conclusions beaucoup plus marquées que ce qu'on en tire. Je ne comprends pas pourquoi vous arrivez à cette conclusion aussi nette, aussi claire, de manière aussi affirmative à l'effet que les sentences arbitrales donnent des résultats, en termes d'augmentations salariales, plus substantiels que ce qu'on compare avec des conventions collectives négociées.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Montpetit.

M. Montpetit (Richard): Merci. C'est l'analyse des différentes conventions collectives, comme je vous ai dit tantôt, par rapport aux augmentations salariales qui ont été consenties par les employeurs suite à des négociations. On a fait la moyenne annuelle de l'ensemble de ces conditions-là et on les a comparées avec la moyenne annuelle de l'ensemble des sentences arbitrales qui ont été rendues, et on arrive... Nos chiffres nous indiquent, effectivement, que les sentences arbitrales ont été plus généreuses dans l'augmentation salariale que par la voie de la négociation.

M. Brisebois (Jacques): Il y a peut-être une explication aussi, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): C'est 1999, je pense, Mme la ministre, qui vous fait peut-être sursauter. C'est qu'il y a une sentence arbitrale, celle de Coaticook.

Mme Lemieux: Ah!

M. Montpetit (Richard): C'est ça, oui.

M. Brisebois (Jacques): Ha, ha, ha!

(17 h 10)

M. Montpetit (Richard): On a pris strictement les sentences qui ont été rendues durant cette période-là.

M. Brisebois (Jacques): Est-ce que ça vous éclaire, Mme la ministre?

Mme Lemieux: Enfin. Non, ça ne m'éclaire pas, honnêtement.

M. Brisebois (Jacques): Ha, ha, ha!

Mme Lemieux: Enfin, je vais arrêter là sur cet aspect-là. Mais, moi, je vous mets en garde, là. On manipule de l'information, on traite l'information, c'est des sujets difficiles, il faut être rigoureux, il faut dire la vérité aux gens. En tout cas, écoutez, vos tableaux, je ne les comprends pas, mais je ne vais pas m'obstiner avec vous sur la méthodologie, mais je pense qu'il y a un gros problème de méthodologie. Et je trouve ça un petit peu dommage, parce que...

Alors là je vais arriver un peu à ma question. Moi, la conclusion, puis c'est un peu la conclusion du rapport, peut-être que j'ai tort... D'abord, il y a eu, sur à peu près – on ne va pas reprendre tous les chiffres – plus ou moins 130 conventions collectives, 22 sentences arbitrales. On doit convenir – je ne sais pas si vous faites un peu de recherche – que 22 – c'est sur une période de quatre ans et quelque – ce n'est pas un nombre extrêmement significatif, mais, quand même, ça nous donne des indications.

Alors, moi, je pense qu'il y a une prudence de dire – et c'est l'attitude que j'ai par rapport à ce rapport-là: On peut parler de tendance. Mais une tendance, ça ne veut pas dire que c'est ça qui va se cristalliser, qui va prendre forme de manière finale dans le temps. C'est une tendance. Ça doit nous parler, ça doit nous questionner. Alors, moi, là-dessus, vraiment, on a un écart important, mais on peut échanger là-dessus.

Une des constatations qu'on a faites par ce rapport-là, quand on analyse – je n'ai pas les chiffres par coeur – quand on regarde un des objectifs... Vous vous rappelez la formulation, à l'époque c'était la responsabilisation des parties. Il y avait un objectif, peut-être qu'il n'était pas exprimé clairement, mais un objectif d'essayer de donner un espace correct aux municipalités, notamment, qui, lorsqu'elles se retrouvent dans le cadre d'un dernier recours, comme une sentence arbitrale... de leur donner les instruments qu'il faut, les poignées, si vous me permettez l'expression, qu'il faut en introduisant des critères, en les rendant obligatoires.

Et on se rend compte – malheureusement, je n'ai pas les chiffres, je pourrais les trouver – que plusieurs municipalités, pour toutes sortes de raisons – mais je voudrais les comprendre – n'ont pas toujours déposé de la preuve auprès de l'arbitre, justement, sur l'équité interne, les données qu'il faut de comparaison, et, moi, j'ai lu, dans les résumés de sentences, plusieurs fois, des arbitres qui disaient: Je n'ai pas eu ces éléments-là. Pour moi, il y a une clé là, beaucoup, dans comment les municipalités abordent ces questions-là. Plus elles sont loin, elles sont éloignées de ça, évidemment, moins ça risque d'être équitable.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Oui. Mme la ministre, d'abord, je vous dirais qu'on va vous fournir les éléments à la base de...

Mme Lemieux: La méthodologie.

M. Brisebois (Jacques): ...la méthodologie. Oui, il n'y a pas de problème, ça, on s'engage à le faire.

Mme Lemieux: Merci.

M. Brisebois (Jacques): Effectivement, on constate une tendance. Je suis d'accord avec vous, ce n'est pas... 22 sentences. Mais, quand on regarde le nombre de corps policiers au Québec, c'est quand même un pourcentage, je pense, important. Donc, je pense qu'on peut voir la tendance.

Quant à votre question, moi, je pense qu'il y a une question de culture, effectivement. On a mis sur pied le CRM ça fait quatre ans maintenant. Donc, il faut habituer les municipalités davantage à se re-responsabiliser par rapport aux relations de travail, ce n'est pas nécessairement évident. Mais je vous dirais qu'il n'y a pas seulement les employeurs. Les arbitres, là, quand on regarde sur les 22, les deux tiers ont été beaucoup moins rigoureux que l'autre tiers par rapport au message du législateur, et le reproche ou, en tout cas, ce que vous constatez de la part des municipalités, je pense, se constate dans l'ensemble du système.

Il y a aussi tout un découragement, je pense, par rapport à ce système-là, qui date, là. Je veux dire, la spirale inflationniste, on l'a vécue, elle s'est installée, elle n'est pas modifiée encore, quant à moi, sur le fond. Et, quand on regarde les efforts qu'il faut déployer en termes d'énergie, d'argent pour en arriver finalement à des conclusions semblables, ça n'incite pas tellement les employeurs municipaux à mettre beaucoup d'efforts. Il y en a qui le font, je peux vous dire, je vous ai parlé de chez nous. Je pense qu'il y a, de plus en plus, des municipalités qui le font.

D'ailleurs, je vous ai apporté, ici, le travail qu'on a fait faire par Sobeco, Ernst & Young sur l'équité interne quand on a eu notre arbitrage en 1996. On commence effectivement à se donner des moyens davantage. Ce n'était pas dans la culture nécessairement il y a quelques années, c'est en train de se faire, je pense. Mais ça ne se fait pas ou ça ne se change pas du jour au lendemain, c'est évident. Je ne sais pas si, Richard, tu veux compléter.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Brisebois, ce que je comprends, c'est que vous allez faire parvenir la méthodologie?

M. Brisebois (Jacques): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, j'apprécierais qu'on fasse parvenir la méthodologie, justement, sur laquelle s'appuient vos...

M. Brisebois (Jacques): Oui, madame.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...au Secrétariat des commissions pour que les membres puissent en bénéficier.

M. Brisebois (Jacques): Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Montpetit, vouliez-vous ajouter quelque chose à ça?

M. Montpetit (Richard): Oui, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

M. Montpetit (Richard): Vous savez, Mme la Présidente, Mme la ministre, que le système d'arbitrage, actuellement, c'est un mécanisme qui est très lourd, qui est très lent, qui prend parfois des mois et des années avant de se conclure, qui, aujourd'hui, avec les critères additionnels, demande des preuves complexes et parfois colossales, qui demande des personnes-ressources, que ce soit en termes de conseillers juridiques, en termes d'économistes, en termes de spécialistes en ressources humaines, en termes d'actuaires et d'autres types de spécialistes à l'intérieur pour venir faire la démonstration à l'arbitre que l'employeur municipal, dans sa politique de rémunération, est tout à fait équitable et que l'offre qu'il propose aux policiers municipaux est tout à fait acceptable. C'est beaucoup, beaucoup demander.

Les municipalités qui passent par le système d'arbitrage de différend, ça leur demande beaucoup de détermination pour passer à travers ça, et pas toutes les municipalités ont les ressources disponibles pour être capables de faire face à un mécanisme aussi lourd et aussi contraignant que le système d'arbitrage actuellement. Nous, on pensait que le système d'arbitrage pouvait être un système qui était relativement simple, un système de dernier recours, un système qui pouvait être expéditif, qui pouvait venir départager des positions entre deux parties. Mais là c'est des preuves très colossales que les municipalités doivent faire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Dans le rapport...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il reste trois minutes, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Deux minutes. Dans le rapport...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Trois.

M. Lelièvre: ...qui vous a été soumis, le rapport sur l'application de la section II du chapitre IV, l'arbitrage de différend par le ministère du Travail, on y lit, à la page 7, que les syndicats sont très bien organisés puis les municipalités sont mal organisées, autrement dit semblent très divisées, ne fournissent pas de preuves aussi pertinentes que les syndicats. Comment vous expliquez ça? Parce qu'on dit que vous êtes divisées. Il n'y a pas de...

M. Brisebois (Jacques): C'est l'essence même du...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Excusez, Mme la Présidente. C'est l'essence même du monde municipal. C'est un monde éclaté, très individualisé comme structure, ce n'est pas nécessairement évident. Il y a beaucoup trop de municipalités, d'abord. Ça, moi, là-dessus, je suis tout à fait de cet avis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On s'entend.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est enregistré, là.

M. Lelièvre: Ha, ha, ha! Je comprends que c'est un message. Ha, ha, ha!

M. Brisebois (Jacques): Tout à fait de cet avis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Attention.

Une voix: Est-ce que l'enregistrement fonctionne, là? Oui. Ha, ha, ha!

M. Brisebois (Jacques): C'est une des sources de notre faiblesse, moi, je pense, très sérieusement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Attention, s'il vous plaît, là, parce que les gens qui font la transcription doivent avoir de la misère à nous suivre. Alors, M. Brisebois, s'il vous plaît.

Une voix: Nous, on le suit, par contre.

M. Brisebois (Jacques): Oui. Très sérieusement, je pense que c'est une partie de la réponse, quand même. Ce n'est pas évident. Moi, je vous dis, on a travaillé énormément sur la question de l'arbitrage de différend de 1988 à 1996, pour réussir à obtenir des petites modifications. On ne me fera pas accroire qu'on a changé le système, là. On a obtenu de petites modifications qui ont donné quelques résultats intéressants, mais qui ne changent pas fondamentalement le rapport de force en faveur de la partie syndicale.

Mais pourquoi les municipalités... On réclame la formule Rand, nous aussi, depuis un certain nombre d'années, et eux ont ça depuis longtemps. Ils se sont organisés parce qu'on leur a donné les moyens de s'organiser aussi. On a travaillé avec le ministère des Affaires municipales pour que, éventuellement, le CRM devienne un centre patronal obligatoire pour toutes les municipalités; actuellement, c'est sur une base volontaire. Nous, on pense que c'est une piste intéressante, effectivement. Il faut qu'on se donne davantage de moyens, on en convient parfaitement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors...

M. Lelièvre: Je vais m'arrêter là, Mme la Présidente. Même si j'avais d'autres questions, je m'arrête là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Bien, c'est que là, c'est... Alors, M. le député de LaFontaine. C'est quand même rapide comme...

(17 h 20)

M. Gobé: Merci, Mme la Présidente. Alors, messieurs, madame, bonjour. Alors, moi, je suis un peu, aussi, surpris par vos graphiques, sauf que je ne les mets pas en doute forcément, parce que ce n'est pas parce que quelque chose ne nous plaît pas qu'on doit le questionner sur sa méthodologie et, de suite, prendre pour acquis qu'il ne serait pas bon. Moi, je présume que l'UMQ, depuis son existence, a toujours démontré son sérieux, sa bonne foi et, généralement, sa rigueur dans les présentations qu'elle fait. Ça peut peut-être faire rire quelques personnes, mais, moi, je pense que c'est là juste vous rendre justice, de ne pas présumer que, lorsque vous venez devant les parlementaires, c'est avec des documents qui seraient pour manipuler, ai-je cru entendre, l'information.

Mme Lemieux: J'ai-tu dit ça, moi, là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Écoutez, vous savez que c'est les mêmes règles ici, M. le député, quand même.

M. Gobé: S'il vous plaît, on ne commencera pas, là. On a le droit à la parole dans cette commission parlementaire. S'il y a des choses qui déplaisent, elles vous déplaisent. Vous me laisserez les dire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Non.

M. Gobé: Si vous trouvez que le mot «manipuler» est antiparlementaire, vous le référerez à la présidence.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine, il n'est pas question de vous enlever votre droit de parole, vous savez que vous avez toute la latitude.

M. Gobé: Alors, laissez-moi parler.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Par ailleurs, M. le député de LaFontaine, vous connaissez les règles et vous les connaissez très bien. Alors, moi, j'ai la tâche de faire respecter le règlement ici, et c'est ce que j'ai l'intention de continuer de faire. Vous pouvez poursuivre, monsieur.

M. Gobé: Alors, comme je disais, je ne présume pas, moi, que, lorsque les gens viennent devant les parlementaires, c'est avec des méthodologies qui ne correspondent pas, dans le but d'influencer des remarques ou des réponses différentes avec de l'information qui ne serait pas correcte et de manipuler les chiffres ou de faire quelque manipulation que ce soit. Au contraire, je crois que vous venez ici de bonne foi, vous venez ici comme des professionnels que vous êtes et comme vous avez toujours été. Ça, c'est la première des choses, et, nous, à l'opposition, on reconnaît ça.

Alors, ce que j'aimerais, c'est que vous nous expliquiez: Comment se fait-il que les arbitres aient rendu des décisions qui sont plus généreuses que la négociation? Qu'est-ce qui explique ça, selon vous? Est-ce que c'est parce que les trois critères ne sont pas suffisants, ne sont pas appliqués, ou est-ce que c'est les critères qui ne correspondent pas à une application du principe qu'on a voulu faire, qui était de permettre un arrêt de cette spirale ou de cette inflation qui avait lieu dans les négociations des salaires des policiers?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Nous, ce qu'on prétend, Mme la Présidente, c'est que les arbitres se sont fait leurs propres critères malgré tout, là. O.K. Par exemple, quand on parle d'équité externe, l'équité externe, nous, on convient que, dans nos politiques de rémunération municipales, on tienne compte de l'équité externe. Sans ça, on se créerait un marché complètement débalancé et on ne pourrait pas obtenir, dans certaines municipalités, des gens si on avait des écarts épouvantables.

Donc, nous, on dit: On en tient compte, de l'équité externe. Il ne faut pas mêler l'équité externe avec la parité, là. Ce que, nous, on semble détecter de certains arbitres, c'est qu'ils font effectivement une espèce de court-circuit entre l'équité externe et la parité, et c'est différent, là. Également, la tendance de suivre, par exemple, l'indice des prix à la consommation, c'est un critère qu'eux ont déterminé, ce n'est pas nécessairement le critère déterminé par l'ensemble des municipalités. Le système fait en sorte que, dans le fond, ils sont tributaires d'un pouvoir qui dépasse, quant à nous, les politiques de rémunération des municipalités.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, votre suggestion, que vous pouvez faire à cette commission? Étant donné que, selon vos chiffres, ça n'a pas fonctionné – et je n'ai pas de raison de les mettre en doute – qu'est-ce qu'il faudrait faire? Qu'est-ce qu'il faudrait que les parlementaires suggèrent comme modifications à cet article du Code du travail ou à d'autres pour que vous puissiez arriver au résultat équivalent pour tout le monde?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Donc, Mme la Présidente, dans le fond, ce que, nous, on vous dit, c'est qu'il faudrait que le seul critère obligatoire retenu, ça soit l'équité interne, si on reste dans ce système-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, un instant. J'ai le temps. Un instant, on n'est pas à l'école, là. Vous avez pu entendre comme moi les gens que j'ai vus dans la salle, en arrière, aussi bien Mme Danyluk que le secrétaire de l'Association des directeurs de police, suite aux questions que j'ai pu poser en ce qui concernait la nouvelle organisation municipale et la nouvelle donne que ça créerait en ce qui concerne la négociation des corps policiers et des pompiers qui vont être répartis dans cette nouvelle structure et des effets que ça va créer. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus? Avez-vous une réflexion déjà? Après ça, on verra pour la prochaine question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Mme la Présidente, c'est certain que, si on arrivait à une détermination des conditions de travail et salariales des policiers sur l'ensemble du Québec, moi, je pense qu'on est aussi bien d'enlever aux municipalités la responsabilité de la sécurité publique, là. Alors, je pense que, si on a la responsabilité, on doit aussi avoir la responsabilité de définir les conditions de travail et les conditions salariales de nos employés. Moi, je ne pense pas qu'il faille en arriver à un nivellement. Au contraire, on a combattu ça, c'était la principale demande qu'on avait par rapport aux changements de 1993 et de 1996, et on ne reviendra pas en arrière là-dessus. Nous, au contraire, on voudrait ouvrir davantage la négociation. Donc, il faut que ça demeure au niveau municipal.

M. Gobé: Mais est-ce que vous ne pensez pas que, dans ces nouvelles structures, les gens vont vouloir aller en arbitrage? Et, avec les critères tels qu'ils sont définis dans l'article 99.5 du Code du travail actuel, les arbitres vont avoir une tendance à s'enligner sur les voisins, en tenant compte du critère des autres villes aux alentours qui font les mêmes services dans la même agglomération – et même une nouvelle agglomération, ce n'est pas forcément la même ville. Mais, on le sait, dans la CUM, par exemple, où c'est une agglomération, un regroupement de villes qui forment une agglomération, tous les policiers ont le même salaire.

Alors là, même s'ils ne sont pas tous forcément dans le même corps de police, ils seront quand même dans la même agglomération, un peu sur le même modèle, et, lorsque l'arbitre va avoir à trancher, il va devoir prendre, premièrement, ça en considération. Deuxièmement, on parle, bien sûr, de facteurs économiques. Mais, dans la même agglomération, quel facteur économique on va prendre? On va prendre celui de la ville ou celui de l'agglomération? Encore là, voyez-vous, est-ce que vous ne croyez pas qu'on va donc, de facto, se retrouver avec une harmonisation des salaires et des conditions de travail, de la rémunération globale, disons, des corps de police dans ces nouvelles structures métropolitaines ou, enfin, régionales?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): Mme la Présidente, peu importe qu'on demeure ou non... Si on demeure dans le même système d'arbitrage, on va avoir les mêmes conclusions, on va tirer les mêmes conclusions dans quatre ans, ça fait qu'on va voir la tendance se poursuivre. Nous, c'est ce qu'on prétend.

Qu'on le fasse au niveau des agglomérations... Puis, moi, personnellement, ce n'est pas nécessairement l'opinion de tout le monde à l'UMQ, mais je ne suis absolument pas fermé à l'approche d'agglomération; au contraire, je pense qu'il faut penser de plus en plus en termes d'agglomération. Qu'on règle la question sur la base d'agglomération, ça m'apparaît tout à fait logique, c'est évident.

Mais ce n'est pas ça, le problème, c'est le rapport de force qui n'existe pas, contrairement à ce qui se passe avec les cols bleus et cols blancs. Ce n'est pas nécessairement toujours facile, mais, au moins, on a les conditions beaucoup plus standard de la négociation. Donc, c'est à ça qu'il faut revenir, c'est à reproduire un rapport de force qui rencontre l'équité.

M. Gobé: Comment vous le reproduiriez?

M. Brisebois (Jacques): Nous, ce qu'on vous suggère... C'est sûr que la position de base de l'UMQ, c'était le droit de grève et le droit de lockout avec pouvoir de retrait et droit de retrait. On dit: O.K., on peut comprendre et convenir qu'il y a des difficultés et que ça peut causer des torts irréparables à certains citoyens. Je pense qu'on est capable aussi de voir ça facilement.

Mais il y a une piste qu'on a soulevée: le pouvoir habilitant à la municipalité de décréter, comme le gouvernement le fait lui-même dans la rémunération de ses employés... Nous, on dit, on peut convenir, encore là, qu'il y a peut-être moyen d'encadrer ça, de baliser ça, il y a peut-être une partie du système d'arbitrage qui pourrait s'appliquer. Mais on aimerait ça, voir des citoyens, nous, des gens de l'agglomération ou de la localité être associés à cette démarche-là, et on n'exclurait pas la possibilité de soumettre tout ça au référendum et que ça soit la population qui soit juge de l'ensemble de la démarche.

Nous, ce qu'on dit, c'est: Il faut remettre le pouvoir là où ça doit se retrouver, pas donner, dans le fond, notre politique de rémunération entre les mains d'une tierce partie sur laquelle on n'a aucun pouvoir. Je veux dire, on a tenté, puis, je pense, de bonne foi de part et d'autre... Et je conviens parfaitement qu'il y a eu des modifications qu'on a réussi à obtenir à travers le temps, on est en train d'en voir les résultats. Même si c'est court comme laps de temps, il reste qu'on a une tendance qui ne change pas fondamentalement les choses. Nous, on voudrait trouver une solution qui aille un peu plus loin que ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de LaFontaine.

(17 h 30)

M. Gobé: Oui. Alors, je suis, en fait, avec vous quand vous dites: Il faut remettre le pouvoir à ceux qui sont élus pour, premièrement; deuxièmement, à ceux qui ont à décider du niveau de taxation que les citoyens doivent payer. Là, on donne à un arbitre le rôle de décider si on augmente les taxes, dans certaines municipalités, ou si on les baisse, ou si on ne les augmente pas. Ça, je suis tout à fait d'accord avec vous.

Vous n'êtes pas sans savoir qu'il va y avoir... La ministre tient des consultations actuellement privées, mais, un peu plus tard, il y aura des consultations publiques aussi sur une réforme du Code du travail. Pensez-vous que ça serait peut-être l'occasion d'arriver avec des mémoires ou des suggestions dans ce débat qui va se faire? Et entendez-vous le faire, si vous pensez que c'est une bonne idée?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Brisebois.

M. Brisebois (Jacques): C'est évident qu'on sera présent lors des audiences publiques sur le sujet, c'est clair.

M. Gobé: Alors, messieurs, madame, je vous remercie. Je pense qu'on va donc réserver nos commentaires pour cette étape peut-être plus pointue sur le Code du travail. Personnellement, je pense que votre mémoire a l'avantage de nous éveiller à des réalités différentes de celle qu'on nous présente. Ce n'est pas la première fois, des fois, que des rapports gouvernementaux montrent une vue d'une situation et que d'autres rapports montrent une vue différente. Je crois que, lorsqu'on aura la méthodologie que vous nous avez promise, elle sera à la hauteur de la rigueur à laquelle vous nous avez habitués. Ça nous obligera, à ce moment-là, à nous requestionner sur la qualité de ce rapport et à voir pourquoi, si ça s'avère exact, un rapport nous montre une réalité, alors qu'elle n'est pas celle qui existe vraiment. Alors, je vous remercie.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Brisebois, M. Montpetit, Mme Laliberté, merci d'être venus échanger avec nous à cette commission.

Là-dessus, on sait qu'on n'a pas terminé notre mandat, mais, pour ce qui en est pour aujourd'hui, la commission ajourne donc ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 32)


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