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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, February 25, 1998 - Vol. 35 N° 88

Examen du plan stratégique 1998-2002 d'Hydro-Québec


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Table des matières

Orientation n° 1: Maintenir les tarifs et la qualité de service au Québec

Orientation n° 2: Remettre l'entreprise sur le chemin de la croissance et d'un rendement raisonnable dans le respect de l'environnement de concert avec les communautés locales

Perspectives financières


Intervenants
M. Christos Sirros, président
M. François Beaulne, président suppléant
M. Guy Chevrette
M. Normand Cherry
M. John Ciaccia
M. Georges Farrah
Mme Cécile Vermette
M. Claude Béchard
M. Pierre-Étienne Laporte
M. André Chenail
M. Normand Jutras
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Robert Kieffer
M. Claude Boucher
Mme Monique Simard
*M. André Caillé, Hydro-Québec
*M. Yves Filion, idem
*M. Thierry Vandal, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures sept minutes)

Le Président (M. Sirros): On pourrait reprendre nos travaux. Alors, je pourrais déclarer la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte et vous rappeler que notre mandat, c'est de procéder à l'examen du plan stratégique 1998-2002 de la société Hydro-Québec.

Est-ce qu'il y a des remplacements ce matin, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ciaccia (Mont-Royal) remplace M. Benoit (Orford).


Orientation n° 1: Maintenir les tarifs et la qualité de service au Québec

Le Président (M. Sirros): D'accord. Comme hier, nous commencerons avec une présentation sur l'orientation 1: Maintenir les tarifs et la qualité de service au Québec, par Hydro-Québec, d'une durée maximale de 20 minutes ici, en vous rappelant que, si ça peut être raccourci, ça nous permettrait d'avoir plus de temps pour des questions. Alors, on commencerait tout de suite, sans plus tarder, et on procédera par la suite à des questions. M. Caillé.


Exposé d'Hydro-Québec

M. Caillé (André): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, la première orientation du plan stratégique vise à maintenir les tarifs et la qualité du service au Québec. Elle ne se trouve pas au premier rang par hasard. En prenant cette orientation, nous réaffirmons notre engagement à l'endroit de la clientèle québécoise, engagement dont il a été abondamment question lors de la dernière commission parlementaire. Cela implique que nous réitérons le pacte social québécois en matière d'électricité, un pacte fondé sur les acquis de la nationalisation. En conséquence, la propriété publique de l'entreprise n'est pas remise en question, quant à nous.

Bâtir sur les acquis, cela veut dire concrètement que nous conserverons des tarifs bas, stables et uniformes par catégorie de clients. Comment? Premièrement, nous avons annoncé un gel des tarifs jusqu'en l'an 2002, après une augmentation à l'inflation au 1er mai 1998 qui devait être d'un maximum de 1,8 %, et, comme le ministre l'a annoncé hier, c'est plutôt la formule de calculs qui s'applique et la réalité a montré que ces calculs conduisent à une augmentation de 1,6 % plutôt que le 1,8 % maximum prévu. Au moyen de cette stratégie tarifaire, nous comptons maintenir notre avantage concurrentiel sur le marché québécois de l'énergie. Notre tarif résidentiel compte déjà parmi les plus avantageux en Amérique du Nord. Nous améliorerons notre position concurrentielle, à cause du gel, bien entendu, vis-à-vis de tous ceux de nos concurrents qui augmenteront leurs tarifs.

(9 h 10)

En proposant un gel tarifaire jusqu'en l'an 2002, nous voulons ainsi donner un signal de stabilité et de prévisibilité – ce qui est rare dans le commerce de l'énergie – à notre clientèle, quant aux prix à notre clientèle. Nous l'avons fait aussitôt que possible et nous avons répété cet engagement durant la crise du verglas. Pour nos clients, particulièrement pour nos clients industriels qui utilisent beaucoup d'énergie dans leur processus de production, cette stabilité des tarifs facilitera leur planification et la préparation de leur plan d'affaires. De plus, ce gel tarifaire permettra de rassurer l'ensemble de nos clients sur l'ouverture des marchés de gros de l'électricité et de ses conséquences sur le prix de l'électricité au Québec. En conséquence, la stratégie tarifaire que nous proposons contribuera à stimuler l'investissement industriel au Québec et à accroître les ventes de l'entreprise.

Deuxièmement, nous assurerons également la continuité tarifaire en établissant le tarif de fourniture sur la base de ce qu'il est maintenant. Voyons comment se décomposent les tarifs. Le tarif total se compose, pour chaque catégorie de clients, d'un tarif de fourniture, c'est-à-dire l'électricité elle-même, plus le tarif de transport de cette électricité à haute tension, plus le tarif de distribution de cette même électricité. Le tarif de fourniture, il est donc égal au tarif L, le tarif de la grande entreprise, duquel on soustrait le tarif de transport. Pourquoi? Parce que les clients de la grande entreprise n'ont pas recours au tarif de distribution, n'ont pas recours à nos actifs de distribution. Ils sont directement alimentés par le réseau de transport haute tension. Vendredi dernier, nous avons déposé un tarif de fourniture, basé sur le prix calculé de la façon dont je viens d'indiquer, à la Régie de l'énergie.

Notre approche permet de mettre en place un mécanisme souple de réglementation. Il est important de noter que les différentes juridictions adoptent de plus en plus cette approche de réglementation fondée sur des seuils de prix dite, en anglais, «the price cap». Le but des organismes de réglementation, c'est d'éviter que les clients soient exposés aux risques pris par les actionnaires, comme c'est le cas dans la réglementation conventionnelle qui s'appuie sur les coûts.

Notre proposition permet en outre de réglementer la production et d'introduire des tarifs de fourniture sans modifier les tarifs en place pour toutes les catégories de clients. On passerait donc de l'ancien système au nouveau système réglementaire, sans changement de tarif pour quelque catégorie que ce soit. En effet, le tarif de transport, il a été établi, on le sait, par décret du gouvernement du Québec. Et pour obtenir, par exemple, le tarif pour les clients résidentiels, le tarif de distribution, on n'a qu'à soustraire de leur tarif actuel, celui qu'ils paient actuellement, on n'a à soustraire de ce tarif que le tarif de fourniture, qui est établi de la façon dont je vous l'ai dit tantôt, moins le tarif de transport qui, comme je viens de le dire, a été établi par décret du gouvernement. Nous assurons donc à tous nos clients une continuité tarifaire en passant au nouveau régime réglementaire.

Troisièmement, nous entendons également maintenir et améliorer la qualité du service conformément aux attentes de notre clientèle. La qualité et la fiabilité du service constituent, je le rappelle, un facteur déterminant de notre position concurrentielle et du degré de satisfaction de nos clients. Le taux général de satisfaction de la population à l'égard de l'entreprise, d'ailleurs, s'élève à quelque 94 %. Nous sommes fiers de ce résultat et nous souhaitons, bien entendu, le conserver. Toutefois, avec la tempête de verglas, la qualité et la fiabilité du service sont plus que jamais au coeur de nos préoccupations. C'est pourquoi le conseil d'administration a créé, dès le 29 janvier, un comité interne d'experts sous la présidence de Roger Warren, de la firme Rousseau, Sauvé, Warren, son mandat étant, comme on l'a dit hier, d'obtenir des avis concernant les critères de conception pour nos futures lignes de façon à ce qu'elles soient plus fiables que jamais, des avis également quant au renforcement des réseaux existants ainsi que sur un ensemble d'autres sujets, toujours dans le même but, celui d'améliorer la fiabilité et la sécurité de l'alimentation en électricité pour nos clients au Québec.

Mais ce n'est pas d'hier que nous déployons des efforts importants pour améliorer la qualité et la fiabilité du service. Ces dernières années, nos efforts en ce sens ont été importants. De 1990 à 1997, nous avons investi quelque 900 000 000 $ dans la maintenance des réseaux. Pour la période 1998-2002, des investissements, encore une fois, de centaines de millions sont prévus dans l'entretien du réseau. Si on regarde notre indice de continuité, faisant, bien entendu, exception de la période du verglas, le nombre d'heures d'interruption de service par année est passé, en 1993, de 3,27 heures à 2,3 heures par client en 1997, ce qui revient à dire que, depuis 1993, notre performance s'est améliorée et, d'ici l'an 2002, notre plan stratégique prévoit, vise une amélioration supplémentaire de 10 %.

En matière de qualité de l'onde, nous avons conclu une soixantaine d'ententes avec des grands clients industriels dans le but d'améliorer la compatibilité entre leurs équipements et la qualité de l'électricité qui leur est livrée. On sait que 80 % des pertes de production en industrie sont attribuables à des problèmes de compatibilité électromagnétiques.

Par ailleurs, nous procédons à l'implantation de nouveaux centres d'appel et à la formation de notre personnel dans le but d'améliorer la qualité de service, la qualité du contact de nos ressources humaines avec la clientèle.

Dans la poursuite de nos efforts auprès de nos clientèles les plus démunies, nous avons mis en place un groupe de travail sur le programme d'aide aux plus démunis qui sera réalisé en collaboration avec les ACEF ou tout autre organisme communautaire qui interviennent dans le milieu. Notre but, c'est d'améliorer l'application de notre politique d'interruption en cas de non-paiement des factures. Hydro-Québec ainsi que l'ensemble de la clientèle ont intérêt, bien entendu, à ce que les factures soient acquittées par chacun. En même temps, la majorité de nos clients souhaite que la politique d'interruption permette d'agir avec discernement. À Hydro-Québec, nous partageons très exactement le même sentiment.

Par ailleurs, nous réalisons bien que nous montrons, dans un autre domaine, des résultats qui sont à court de l'objectif dans le domaine de l'efficacité énergétique. Le résultat mesuré de l'ensemble des programmes conduits jusqu'ici est de 3 TWh par an par rapport à un objectif fixé il y a quelques années de 9,3 TWh. Qui plus est, les faits au plan économique sont que le coût des mesures que nous avons réalisées excède les bénéfices, notamment dans les secteurs résidentiel et commercial. Je dois dire toutefois que les coûts se rapprochent du 0,03 $ par kWh dans le cas du secteur industriel. Cela nous a empêchés de préciser l'objectif au chapitre des économies d'énergie dans notre plan stratégique, mais cela ne veut pas dire que nous renonçons pour autant au programme d'efficacité dans le domaine de l'énergie et à la réduction conséquente de la facturation de notre clientèle. Hydro-Québec a dans sa mission – et je l'ai dit hier – de promouvoir les économies d'énergie. Nous établirons notre objectif – parce qu'il y en aura un, objectif d'établi – lorsqu'on connaîtra, premièrement, les programmes de l'Agence de l'efficacité énergétique et lorsqu'on connaîtra, deuxièmement, la proposition de la Régie, le cas échéant, quant à la récupération des écarts entre les coûts et les bénéfices. La commercialisation d'un compteur intelligent permettant la facturation variable selon le moment précis de la consommation aidera grandement en indiquant à nos clients résidentiels et commerciaux quand ils peuvent économiser. En fin de compte, si les économies d'énergie sont rentables, Hydro-Québec a tout avantage à maximiser leur contribution. Les marchés extérieurs ou les autres marchés canadiens pourront absorber ce qui pourra être libéré d'une façon rentable. Merci de votre attention.

M. le Président, j'ai demandé – je ne sais pas si vous les avez déjà – qu'on distribue aux membres de la commission des tableaux montrant...

Le Président (M. Sirros): On l'a déjà.

M. Caillé (André): ...nos comparaisons de tarifs, de même que deux tableaux, je crois, montrant là où nous en sommes par rapport aux 9,3 TWh d'économies d'énergie, de même que les coûts des mesures qui ont été appliquées.

Le Président (M. Sirros): Je vous assure que tout ce que vous avez déposé a été distribué ou le sera incessamment.

(9 h 20)

M. Caillé (André): Parfait.


Période de questions

Le Président (M. Sirros): Alors, on peut donc procéder à la période des questions en commençant avec le député de Saint-Laurent.


Primauté du service aux résidents du Québec

M. Cherry: Merci, M. le Président. M. Caillé, tout le monde autour de la table, s'il y a une chose qui fait qu'on accepte de travailler ensemble même si on a des divergences dans d'autres domaines, c'est la place qu'on veut qu'Hydro-Québec occupe pour les Québécois. On ne doute pas que quiconque va venir nous parler au nom d'Hydro-Québec va le faire dans des termes comme vous venez de le faire. Ce qu'il y a d'important pour nous de la commission, c'est de nous assurer que les gestes qui vont suivre vont soutenir les propos qui sont tenus.

La préoccupation qu'on a – et il est important que je vous le dise au début ce matin, et c'est ce qui va guider nos travaux pour la journée d'aujourd'hui et de demain – il faut que, dans chacune des réponses qu'on va tenter d'obtenir de vous, nous ayons l'assurance qu'en tout temps, en toutes circonstances, la priorité numéro un, c'est le service et la fiabilité pour les Québécois. Il n'y a personne autour de la table qui a objection à ce que, quand on a des surplus, on les vende. Il n'y a personne. Il ne s'agit pas de se taper dans la poitrine et de dire: On n'est pas peureux puis on a... On a tous confiance et personne n'est peureux. Mais il est important pour nous que les travaux de cette commission conduisent à la réaffirmation qu'en tout temps la priorité numéro un – qu'il n'y ait même pas de questionnement – c'est que ça soit les Québécois qui vont d'abord être servis. Ça, c'est dans un premier temps.

Dans un deuxième temps – et je pense que les bulletins de nouvelles d'hier vous faisaient dire que, bon, il n'y a pas d'instructions qui sont données aux techniciens pour que du délestage soit fait pour les Québécois par rapport à l'exportation – la question, c'est: Est-ce que les systèmes sont structurés, peuvent fonctionner de façon à ce que, à chaque fois – on n'a pas besoin de donner d'instructions – c'est que le système fonctionne de façon à ce que, quand il y a un choix à faire, le choix soit prioritairement fait d'abord pour les Québécois? C'est ça qu'il y a d'important. Je pose la question. S'il y avait une ligne qui va directement aux États-Unis, pas besoin de donner d'instructions, pas besoin de parler aux techniciens, si la programmation est faite ou si la ligne est construite de façon telle. Vous avez raison quand vous dites que vous n'avez pas à donner d'instructions. Mais la préoccupation des Québécois, c'est si la ligne était construite de façon telle à ce que en tout temps la priorité soit donnée aux citoyens du Québec. C'est ça, la préoccupation qu'on va vous exprimer dans ces deux jours-là.

En d'autres mots, assurez-vous que vous trouverez des propos qui auront comme objectif de rassurer cette priorité-là autrement. Il est de notre responsabilité de vous harceler puis de vous pousser dans vos derniers retranchements parce qu'il y va de décisions et de conséquences extrêmement vitales pour les citoyens du Québec. Et ça, on a l'obligation de faire ça. Je vous l'ai dit hier, les Québécois ne vous regardent plus de la même façon, ne vous laisseront plus faire les choses de la même façon et ont besoin de sentir qu'à chaque fois... C'est pour ça qu'on l'a nationalisée, pour qu'elle nous serve d'abord. Et c'est pour ça qu'on a besoin d'obtenir de vous ce type d'assurance et de confort que nous allons rechercher. Alors, si vous voulez répondre à ça puis, ensuite, mon collègue de Mont-Royal enchaînera.

M. Caillé (André): Je voudrais, M. le Président, rassurer M. Cherry qu'on a très bien lu ici la mission et, lorsqu'on regarde les lois qui ont été passées par ce Parlement, il est très clair qu'Hydro-Québec a l'obligation de servir au Québec. Nous n'avons pas pareille obligation ailleurs. Ailleurs, on fait du marché; au Québec, on a l'obligation de servir. Et l'engagement d'Hydro-Québec, il a été dit par mes prédécesseurs, je l'ai entendu dans leur bouche, je le répète, l'engagement d'Hydro-Québec de servir les clients au Québec ici en priorité et avec un très haut standard de qualité, le plus haut standard de qualité possible compatible, saine gestion, etc.; pour ce qui est des tarifs, croyez bien, M. le député, que notre engagement, il est là puis il est très bien compris.

Peut-être vous voulez entendre un commentaire sur l'interruption, enfin je ne sais plus, au moment où Churchill Falls a cédé, ou ce n'est peut-être pas le moment de le faire...

Le Président (M. Sirros): Ce n'est pas le moment, parce que je sais qu'il y a d'autres questions qui vont...

M. Cherry: O.K. Je vous demanderais... peut-être pas que vous pouvez le faire immédiatement, mais je souhaiterais que vous répondiez avant que les travaux finissent. À chaque jour du verglas, combien d'énergie on a continué à acheminer en territoire américain, à chaque jour?

Le Président (M. Sirros): M. le député de Mont-Royal.


Impact des constructions sur les tarifs domestiques

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. On parle beaucoup d'exportation. On nous donne des chiffres sur les coûts de l'électricité dans différentes villes, différentes provinces, différents États américains. Est-ce que, dans les investissements que vous faites, vous allez faire de la construction, parce que vous avez des milliards et des milliards d'investissements au cours des prochaines années... est-ce que ces constructions vont être faites pour accroître l'exportation?

M. Caillé (André): Alors, le développement qui est prévu, le plan de développement, il va d'abord servir les Québécois, en ce sens que l'augmentation des ventes, M. le député, d'ici les années 2002, on estime que ce sera 20 TWh; 14 de ces 20 TWh là, c'est de la demande additionnelle au Québec. Il y a donc six de ces térawattheures-là qui vont se retrouver à l'exportation sur le marché canadien ou américain. Alors, en majorité, c'est pour le Québec.

M. Ciaccia: Alors, vous construisez... la différence, vous construisez pour de l'exportation.

M. Caillé (André): Le 6 MWh, il va se retrouver sur les lignes d'interconnexion, mais, par la suite, il va se retrouver au Québec au fur et à mesure que la demande au Québec va augmenter, bien entendu. Parce que, comme on l'a dit tantôt, comme je l'ai répété tantôt, ce que mes prédécesseurs avaient dit, c'est: On a l'obligation de servir au Québec – ça demeure – et on n'a pas la même obligation à l'extérieur.

M. Ciaccia: Mais est-ce que dans... Je vais vous dire, par exemple, dans le passé, on pouvait devancer certains travaux. Mettons qu'on avait besoin d'électricité, d'après les chiffres d'Hydro-Québec, pour l'année 2000, on pouvait devancer des travaux de quelques années, mettons 1995, et, de 1995, mettons, à l'année 2000, on avait des contrats pour l'exportation, mais la construction était faite toujours, pas en vue de l'exportation, mais en vue des besoins du Québec. Est-ce que vous nous dites maintenant que vous faites de la construction partiellement en vue des besoins du Québec, mais vous en faites aussi partiellement pour de l'exportation?

M. Caillé (André): Il y en a une partie du 8 TWh additionnel qui va être produit qui va se retrouver à l'exportation, vous avez raison. Mais les besoins prioritaires du Québec, enfin tous les besoins du Québec vont d'abord être servis.

M. Ciaccia: Je comprends que les besoins prioritaires... Alors, ça veut dire là, maintenant que... dans cette exportation, ce n'est pas des contrats fermes que vous avez.

M. Caillé (André): Non.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas 6 TWh de contrats fermes, dire: Je vais en construire 20; 14, on en a besoin au Québec; 6, j'en ai vendu; alors, je suis couvert pour les 20. Vous n'avez pas ça?

M. Caillé (André): Non. Il n'y a pas, dans le marché actuellement, de contrats à long terme. Il commence à y avoir des contrats à moyen terme, deux, trois ans, mais il n'y a pas des contrats à long terme comme il y avait.

M. Ciaccia: Alors, ça veut dire que c'est de la spéculation sur le marché international que vous faites par ces investissements?

M. Caillé (André): Ça veut dire...

M. Ciaccia: Peut-être, spéculation, c'est un... c'est un risque, de dire: Je vais faire ces constructions-là dans l'espoir de pouvoir vendre parce que les prix sont beaucoup plus élevés ailleurs.

M. Caillé (André): On va aborder, M. le Président, si vous me permettez, une question que je pensais aborder dans le dossier sur la croissance et la rentabilité. Mais je pense que la question est très bonne. Quant à moi, je préférerais y répondre tout de suite.

Le Président (M. Sirros): Je soupçonne que...

M. Ciaccia: Non, non, ce n'est pas ça.

M. Cherry: Non, non, non, les tarifs, là...

M. Ciaccia: Non, non.

Le Président (M. Sirros): Je soupçonne que le député veut faire la démonstration...

M. Cherry: ...s'ils se sont trompés dans l'évaluation, la facture vient ici.

Le Président (M. Sirros): À l'ordre, s'il vous plaît! Je soupçonne, et c'est pour ça que je ne l'interromps pas, qu'il fera la démonstration que ça peut avoir un effet sur les prix.

M. Ciaccia: Oui.

M. Cherry: Bien oui, sur les tarifs.

M. Ciaccia: C'est parce que je veux revenir...

Le Président (M. Sirros): Alors, on parle des prix.

M. Caillé (André): Ah! c'est ça.

M. Ciaccia: Je veux revenir sur la première orientation...

M. Caillé (André): Très bien.

M. Ciaccia: ...et aussi sur ce qui fait partie de votre orientation, de maintenir les tarifs, c'est de dire que la Régie va réglementer la production d'Hydro-Québec sur la base de son prix. Alors, il faut faire tous les scénarios possibles. Moi, j'espère que vous vendiez plus que... Mais il faut qu'on essaie de protéger le consommateur québécois.

(9 h 30)

M. Caillé (André): Très bien.

M. Ciaccia: Parce que, une fois que vous avez investi des milliards, ils sont investis puis il faut que vous payiez pour. Alors, si vous construisez pour de l'exportation et que, pour une raison ou une autre, vous ne vendez pas ce surplus-là, ça veut dire que les tarifs, quand vous allez aller devant la Régie, pour le consommateur québécois, vont augmenter, parce que la Régie, elle, va prendre votre réglementation ici et dire: Sur la base du prix... Et le coût que vous avez, c'est l'ensemble du réseau. Vous n'allez pas diviser ça en deux. C'est l'ensemble du réseau. Alors, ça va être le consommateur qui va être obligé de payer des tarifs additionnels si les ventes ne se font pas aux États-Unis, ou en Ontario, ou au Nouveau-Brunswick.

M. Caillé (André): M. le Président, je pense que les clients du Québec doivent être rassurés. C'est dans ce sens-là qu'on m'a demandé d'aligner nos réponses aujourd'hui. Alors, voici ce qui va se produire.

M. Ciaccia: Si vous me rassurez, les clients vont être rassurés.

M. Caillé (André): Et le député également, bien sûr.

Alors, le tarif de fourniture, celui qui est là aujourd'hui, celui qu'on a soumis à la Régie, de 0,0284 $, je crois, par kilowattheure, il correspond à un plan des ressources du distributeur qui a été Hydro-Québec. Qu'est-ce qu'un plan des ressources? Un plan des ressources, ça comprend de la production au Québec. Ça comprend la vente par services énergétiques au Québec, à Hydro-Québec Distribution, d'une certaine quantité d'énergie, d'une certaine quantité de puissance. Ça comprend également des achats d'énergie de Churchill Falls, Upper Churchill, la phase I. Ça comprend également, parce qu'il y en a qui ont commencé à produire, des achats d'énergie de production privée. Et tout ça, ça correspond, on le dit, à 0,028 $.

On continue dans mon exposé. Maintenant, supposons qu'Hydro-Québec construit un ouvrage additionnel pour exporter, dont la production est exportée, cette production exportée, aucun impact sur le plan des ressources, aucun impact sur le tarif de fourniture. Le risque est où? Alors, la question se pose: Qui prend le risque? C'est pour ça qu'un tarif de fourniture basé sur le prix, O.K., ça ne met pas les clients à risque, mais celui qui est à risque, c'est l'actionnaire. C'est l'actionnaire qui a à s'assurer à ce moment-là que les revenus anticipés de ces ventes additionnelles vont excéder les coûts. Et l'actionnaire, comme ça, va améliorer le rendement de l'entreprise sans avoir à augmenter le tarif de fourniture au Québec.

Pour ce qui est de la protection, elle est complète. Si on adopte ici, si la Régie adopte une tarification basée sur le prix à partir du plan des ressources que l'on a ici, les clients québécois, ils sont protégés contre quelque décision d'investissement que pourrait faire l'actionnaire pour faire quoi que ce soit. Par ailleurs, l'actionnaire, bien entendu, quand il prend sa décision, il va certainement vouloir comparer les revenus anticipés avec les coûts anticipés. Et il va le faire s'il y a un bénéfice. Et demain, on va pouvoir vous montrer que, ce faisant, on va faire des bénéfices et que le rendement de l'entreprise va augmenter sans qu'on ait, M. le Président, à augmenter le tarif au Québec.

Le Président (M. Sirros): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Attendez! Qui va payer pour le 6 000 000 000 $, le 2 000 000 000 $ de plus que vous allez... Parce que, quand vous construisez au Québec, c'est toutes les installations. Vous ne dites pas: Bien, LG 1 va aller aux États-Unis, puis je vais faire de la comptabilité pour LG 1. C'est tout le réseau, puis vous prenez, vous pouvez prendre n'importe où. Alors, c'est un réseau. Si vous dépensez 2 000 000 000 $ de plus et vous n'avez pas les revenus pour ces 2 000 000 000 $, qui va payer pour ça?

M. Caillé (André): Alors, supposons – je ne sais pas quelle rivière parce qu'on ne m'a jamais donné d'exemple précis, mais enfin, n'importe quel bassin – on fait un aménagement aujourd'hui. Le coût de cet aménagement-là ne sera pas supporté par les clients québécois, ne pourra pas l'être...

M. Ciaccia: Quel aménagement?

M. Caillé (André): Cet aménagement additionnel qu'on veut faire. Supposons qu'on construit un barrage additionnel quelque part, une dérivation partielle, ou autre chose, au Québec, on fait un aménagement...

M. Ciaccia: Alors, vous allez avoir deux sets de livres?

M. Caillé (André): Non, non, non.

M. Ciaccia: Vous allez avoir un set de livres pour le Québec puis vous allez avoir un set de livres pour les États-Unis?

M. Caillé (André): Non, non. Si vous me permettez, M. Ciaccia. Il n'y aura pas deux sets de livres. Il va y avoir un plan des ressources pour alimenter la clientèle québécoise si un ouvrage... Puis le tarif, là, c'est 0,028 $. Et il va falloir avoir une bonne raison pour aller à la Régie pour justifier que ce tarif augmente. Dans le moment, c'est 0,028 $. Évidemment, si la demande augmente au Québec, il va falloir ajouter des éléments, des contrats d'approvisionnement au plan des ressources, parce que, autrement, on ne pourra pas satisfaire la demande. Mais, s'il y a des excédents, les excédents dont on parle, ça ne vient pas dans le plan des ressources des Québécois. Les clients québécois sont protégés par rapport à ça. Alors, on va avoir un plan des ressources précis pour alimenter les Québécois, une chose bien définitive. On ne prendra pas les actifs actuels puis dire: C'est avec ça qu'on exporte, puis c'est les autres qui vont payer pour.

M. Ciaccia: Non, mais, si vous construisez, vous avez une comptabilité, vous avez vos ventes totales et vous arrivez à votre profit net. Si vous dépensez pour l'exportation, si vous construisez plus au Québec et vous n'avez pas les revenus pour, c'est qui qui va payer?

M. Caillé (André): C'est l'actionnaire.

M. Ciaccia: C'est tout le réseau entier, là.

Une voix: C'est l'actionnaire.

M. Ciaccia: C'est l'actionnaire.

Le Président (M. Sirros): Si je peux juste faire un commentaire au niveau de la procédure. Hier, on a dit que ce serait 15 minutes de part et d'autre. Nous sommes rendus aux 15 minutes. Je vous demanderais peut-être de raccourcir les réponses. Je ne veux pas non plus briser les échanges qui sont fort intéressants et qui peuvent continuer de l'autre côté. Alors, peut-être...

M. Caillé (André): Réponse très rapide.

Le Président (M. Sirros): ...une dernière réponse, puis on passera... on pourra revenir.

M. Caillé (André): S'il y a un excédent non utilisé au Québec, ce n'est pas les clients du Québec, des Québécois, les consommateurs d'électricité qui vont payer, c'est l'actionnaire, comme dans toute autre entreprise...

Le Président (M. Sirros): Mais, M. Caillé, l'actionnaire, c'est qui?

Une voix: C'est le gouvernement.

M. Ciaccia: L'actionnaire, c'est le gouvernement.

M. Caillé (André): L'actionnaire, c'est le gouvernement, et c'est pour ça que je disais...

M. Cherry: Ah bon!

M. Caillé (André): C'est pour ça, M. le Président, que je disais...

M. Cherry: L'actionnaire, c'est le gouvernement.

M. Chevrette: ...

Le Président (M. Sirros): D'accord. Est-ce que je peux passer la parole au ministre, s'il vous plaît?

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je vais essayer d'utiliser mes vieilles connaissances pédagogiques pour aider le député de Mont-Royal à comprendre et également peut-être à clarifier un peu la situation, parce que c'est ambigu, compte tenu qu'on travaille à la fois sur la première et la deuxième orientation, et c'est peut-être ce qui fait qu'il n'y a pas eu de présentation de la deuxième, de sorte que ça mêle un peu les gens.

Mais je dois commencer en disant que je suis heureux de voir que le 1 800 000 000 $ qu'on avait prévu sera réglé en deçà, ce sera 1 600 000 000 $, et qu'on ne remet pas en question, en plus, le gel tarifaire des trois prochaines années, voilà une deuxième chose très importante, indépendamment du verglas, puisqu'on peut, je crois, escompter une capitalisation plus longue, une immobilisation... c'est-à-dire, dans les livres, être capable de supporter sur une période plus longue les coûts du verglas, espérant également que le fédéral viendra à comprendre qu'un pylône au Manitoba ou un pylône à Terre-Neuve, c'est aussi comparable à un pylône au Québec et qu'on pourra avoir notre quote-part, notre juste part. Si on pense aux années 2000, ils pourront attendre à l'an 2000, comme les bourses, mais nous donner quelque chose en l'an 2000 pour les pylônes québécois.

Troisième chose, je voudrais réexpliquer ce que c'est que le risque que prend l'actionnaire par rapport au gel tarifaire pour les consommateurs. Il y a une différence fondamentale, et ça s'explique et ça se comprend. Je suppose qu'Hydro-Québec obtient l'autorisation, après avoir tout subi le test des mesures environnementales, obtient l'autorisation du gouvernement de passer à trois ou quatre projets totalisant 2 000 000 000 $ d'investissements, amortis sur 20 ans. Ça peut représenter, je ne sais pas... mettez-les, à la rigueur, à 200 000 000 $ par année. 200 000 000 $ par année. Ce que le président, le P.D.G. d'Hydro-Québec dit: On a gelé les tarifs pour trois ans, il n'est pas question de revenir là-dessus, puis il n'est pas question de faire absorber par le consommateur le risque que l'actionnaire veut prendre pour connaître de l'expansion à son réseau. Ce sera à même les bénéfices nets s'il y a quelque chose. C'est ça que ça veut dire concrètement. Si on a prévu 1 800 000 000 $ de bénéfices nets en 2005, ce sera 1 600 000 000 $ au lieu de 1 800 000 000 $, par exemple, mais ce n'est pas le consommateur qui en subirait les conséquences. C'est tout simplement ça, l'explication qui est donnée. Il y aurait moins de bénéfices nets, mais le consommateur n'en serait pas affecté, lui, dans ses tarifs d'hydroélectricité à 0,04 $ ou à 0,05 $ du kilowattheure.

Une voix: Tu me dis: C'est le ministre des Finances qui va avoir moins d'argent.

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'on peut garder l'ordre, s'il vous plaît?

M. Chevrette: Moi, je n'ai pas dérangé personne durant qu'ils ont parlé tantôt.

Le Président (M. Sirros): Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Chevrette: À un moment donné, il y en avait trois qui parlaient ensemble, puis là...

Le Président (M. Sirros): M. le ministre, vous avez la parole.

M. Chevrette: Merci, monsieur, merci. Donc, les bénéfices nets pourraient être baissés effectivement, mais c'est comme si on prenait pour acquis, et c'est ça que je trouve, pour une formation politique axée sur l'économie comme le Parti libéral... c'est de prendre pour acquis qu'on ne vendrait pas 1 kWh, c'est de prendre pour acquis que, à 0,02 $, on ne serait pas concurrentiels avec les autres sources énergétiques du continent nord-américain, c'est de prendre pour acquis qu'on ne vendrait pas à personne. Je suppose que, dans un marché qui s'ouvre – il n'y a pas personne d'ailleurs qui va arrêter ça, si fin soit-il – un marché qui sera de plus en plus ouvert, je suis persuadé, avec la licence ou l'autorisation de vendre aux Américains, comme on l'a obtenu par le FERC, qu'on est positionné, à 0,02 $ du kilowattheure, pour faire concurrence à n'importe qui.

(9 h 40)

Bien, il y a des gérants d'estrade qui vont dire: Non, non, non, non, vous risquez de ne pas vendre. Je suppose que ceux qui nous disent, par exemple, que l'énergie... Je prends le sénateur Kennedy, qui est contre la production hydroélectrique au charbon, qui est contre le nucléaire, qui est pour l'énergie propre, qui est contre les gaz à effet de serre, il va favoriser l'achat, à part de ça, de l'énergie la plus propre, la plus concurrentielle, la moins chère. C'est quoi? Moi, je préfère faire partie du groupe de ceux qui osent pour développer une économie, pour développer le Québec, que de ceux qui se rassoient et qui disent: Oup! j'ai peur, j'ai peur, j'ai peur, je ne prends pas le train. Puis, quand le train est passé, ils disent: Bye-bye, ti-gars, reste sur le quai. En tout cas, c'est ça, la théorie fondamentale.


Impact des constructions sur le rendement à l'actionnaire

On pourra le voir en deuxième, mais j'aimerais demander au P.D.G. d'Hydro-Québec si la perception qu'on a et les explications qu'on donne par rapport au risque que prendrait un actionnaire versus la protection du consommateur... la perception est-elle celle du député de Mont-Royal ou celle du ministre des Ressources naturelles?

Le Président (M. Sirros): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Pour éclairer le débat, M. le Président, ce que je voudrais dire en réponse à la question du ministre, c'est: Premièrement, parlons du risque pour le client. Le risque pour le client, il n'existe pas. Son tarif de fourniture, aujourd'hui, il est de 0,028 $; il va rester à 0,028 $ jusqu'à ce qu'une régie en décide autrement. C'est-à-dire, quand la demande va augmenter, il va y avoir des besoins additionnels, il va vouloir s'approvisionner, la Régie va vouloir s'assurer qu'on s'approvisionne au meilleur coût, etc. Je ne dis pas qu'il n'augmentera pas jamais, mais la Régie va surveiller ça.

Pour ce qui est du risque de l'actionnaire, vous avez raison, M. le ministre, et c'est pour ça qu'on dit qu'il ne faut pas s'engager dans des projets à plus de 0,03 $ par kilowattheure, quelle que soit la nature des projets, et c'est là que le risque commercial, M. Ciaccia, devient nul, parce qu'on va vous montrer demain que le prix de vente sur le marché à l'extérieur... On a canalisé comment font nos compétiteurs, quel calcul font ceux qui investissent dans des usines de cogénération, quel calcul font ceux qui investissent dans l'acquisition d'actifs de production thermique. Vous allez voir qu'Hydro-Québec va pouvoir vendre à un prix entre 0,049 $ et 0,057 $, et on va faire des bénéfices.

Là où on prend un risque, puisqu'il y en a un, le risque, c'est de ne pas construire, de perdre une opportunité à ce moment-ci qu'on ne retrouvera pas plus tard parce que c'est maintenant que le marché se restructure. Le 0,03 $ par kilowattheure, entre vous et moi, il est ultraconservateur et c'est pour éviter que la population du Québec, parce que le client, de toute façon, n'est pas concerné... mais c'est pour éviter que l'actionnaire, donc la population du Québec soit mise à risque. Peut-être que dans cinq ans dira-t-on: Vous auriez dû aller jusqu'à 0,04 $, parce que, après tout, les gens en cogénération, il y a deux semaines... deux semaines avant que vous soyez à Québec, ils ont annoncé une usine, 1 000 MW, 0,057 $; comment ça se fait que, vous, vous vous êtes limité à 0,03 $? Vous avez omis de développer la richesse hydroélectrique québécoise, et vous auriez dû le faire, et ainsi on a perdu en fonds d'héritage tant d'argent. Ça pourrait arriver.

Mais, à 0,03 $, nous, on a pris l'attitude, à Hydro, et c'est ça, le plan qu'on vous présente: pour les clients, pas de risque; pour l'actionnaire, pas de risque. Et si on veut prendre plus de risques, il faut faire bouger le 0,03 $ à la hausse; nous, on ne l'a pas fait jusqu'ici.

Le Président (M. Sirros): M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais revenir sur un point aussi – ça va peut-être faire plaisir au député des Îles-de-la-Madeleine – le principe de l'équité des tarifs. Il est réglé définitivement aux Îles. Je veux le confirmer parce qu'il y aura amendement du règlement qui gardait une ambiguïté, qui empêchait seulement les nouveaux clients de mettre le 5 000 $ en garantie. C'est réglé définitivement et le règlement sera amendé. C'est depuis qu'on a eu une statutaire à Hydro-Québec, et on avisera les autorités des Îles.

Ceci dit, je voudrais revenir au risque de l'actionnaire, puis vous avez raison de dire que c'est un risque; le risque, ce serait de ne rien faire. Mais je voudrais donner un exemple qui s'est déjà passé et qui peut faire comprendre le présent et le futur. Quand le Parti libéral du Québec a décidé que le programme des minicentrales, c'était du privé, puis qu'il avait fixé un seuil à 0,055 $ ou 0,056 $, peu importe, indexé à un minimum de 3 % pour 20 ans, c'était une décision de l'actionnaire qui amputait les bénéfices nets de l'entreprise. C'était une décision de l'actionnaire. On pourrait demain matin, nous, dire à Hydro-Québec: Les minicentrales, par exemple, au lieu d'être le profit, l'apanage exclusivement d'un secteur privé ou d'un propriétaire privé, c'est des communautés locales, puis forcer Hydro-Québec comme actionnaire... on peut forcer Hydro-Québec à faire des sociétés en commandite, à faire des «joint ventures», comme on dit en anglais, avec les municipalités puis l'entreprise privée, puis que les retombées économiques soient pour les régions, et c'est une décision de l'actionnaire de voir ses bénéfices nets baisser au profit de l'économie régionale. Par exemple, ça, c'est un choix de l'actionnaire. Comme l'actionnaire pourrait dire, demain matin, à Hydro-Québec: Tout projet en bas de 0,02 $ ou bien en bas de 0,03 $, fais-le en autant que tu as l'aval de toutes les... après avoir suivi toutes les mesures environnementales, respecté les études du BAPE, etc. Et on les fait parce qu'on a le grand avantage dans l'hydroélectricité de pouvoir stocker, de pouvoir faire du stockage, puis de prendre le bon moyen, le bon moment pour liquider des surplus, puis faire de l'argent au profit du Québec. C'est ça qu'on demande à Hydro-Québec, c'est une clairvoyance, puis de se comporter véritablement comme une entreprise agressive, et ne pas avoir de l'agressivité exclusivement quand c'est au profit de quelques-uns. C'est ça qu'on a demandé à Hydro-Québec. Et s'ils se comportent de cette façon-là, c'est de même qu'on va les supporter, mais on ne leur dira pas: Manquez le train par crainte, tout le temps.

Moi, j'écoute des émissions, je lis des articles. Il y en a qui ont peur d'avoir peur, puis la peur d'avoir peur fait que tu ne fais rien. Ça paralyse un cerveau, ça, la peur d'avoir peur. Tu ne peux plus penser quand tu as peur d'avoir peur. Mais, quand tu es audacieux, tu prends des précautions minimales, tu observes les mesures environnementales, tu le fais au moindre coût, puis tu veux véritablement te développer au profit des Québécois, je ne pense pas que ce soit un péché mortel, je ne pense pas que ce soit vu comme une honte, c'est plutôt comme une clairvoyance. Et des administrateurs comme vous autres qui vous êtes décrits pendant des années comme des grands comptables, vous devriez comprendre ça tout de suite, tout de suite, tout de suite.

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a un commentaire ou une réponse?

M. Caillé (André): Les risques, M. le Président, ils disparaissent à cause de la politique de 0,03 $ par kWh, si on veut résumer les choses. Rappelez-vous qu'au Québec – ça va rassurer le député Ciaccia – le plan des ressources actuellement, il fait que le tarif de fourniture est à 0,028 $ et quelque chose. Alors, quand on s'impose la discipline du 0,03 $, il y aura toujours l'option pour les Québécois d'obtenir, pour satisfaire leurs besoins additionnels, le 14 TWh dont j'ai parlé, quelque chose qui est dans l'ordre de grandeur du 0,03 $. Alors, il n'y a pas de risque là.

La discipline du 0,03 $, je vous le dis, elle est très différente des pratiques passées d'Hydro-Québec. Il s'est construit, il y a eu des décisions de prises pour construire des ouvrages au Québec en sachant que c'était plus que 0,05 $ le coût de revient par la suite. La discipline du 0,03 $, elle est très, très dure. C'est pour ça que j'essaie d'être le plus explicite devant vous, en ce sens que plus tard on pourrait ensemble se reprocher ou, enfin, se décourager, être déçu, se décevoir qu'on n'a pas construit des choses qu'on aurait pu et dû construire. Je vous rappelle que nos concurrents, ils construisent à 0,057 $ en ce moment. Nous, on dit 0,03 $. Alors, on se limite, on ne prend pas de risques. C'est le risque à peu près zéro, mais c'est 0,03 $.

Le Président (M. Sirros): Il reste encore trois minutes dans l'enveloppe de...

M. Chevrette: Les trois minutes, je vais les prendre tout de suite. Il y a d'autres explications que je voudrais donner.

Dans le cadre de la planification que vous faites, je voudrais aussi faire remarquer à cette noble assemblée qu'on ne vous a pas demandé de signer des contrats secrets, où on a 1 200 000 000 $ de manque à gagner présentement, et que tous les contrats que vous avez donnés hier, Magnola et compagnie, ça a été tout public, d'ordre public, ouvert et publiquement et conforme au tarif L.

La deuxième chose. Je me souviens du grand engouement pour l'exportation de l'hydroélectricité, avec un certain livre appelé L'Énergie du Nord , avec un certain barrage qui a été construit exclusivement pour de l'exportation. Ce n'est pas ce qu'on demande. Je pense également à SM 3, déclenché en pleine élection, sans aucun permis du fédéral, des rapports qui viennent à peine de sortir, à 0,053 $ du kWh, sans avoir attaché quoi que ce soit sur l'ensemble du projet. Ce n'est pas ce qu'on vous demande.

(9 h 50)

Ce qui est proposé dans le plan stratégique, c'est d'y aller de la façon la plus sécuritaire, au moindre coût, pour avoir une réserve nous permettant de faire de l'argent pour l'ensemble des Québécois, faire de l'argent, le réinjecter dans l'économie québécoise au profit de tous les Québécois. C'est ça qu'on demande, M. le président, c'est ce que je crois déceler dans le plan stratégique et c'est ce que je vais recommander personnellement au Conseil des ministres pour l'adopter.

Le Président (M. Sirros): Comme je n'ai pas vu de question, la parole va être brièvement au député de Mont-Royal et, par la suite, au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Ciaccia: Je veux juste porter à l'attention du ministre certains faits. Construire pour l'exportation quand il y a un contrat ferme, c'est une chose. Je vous donne un exemple. On avait un contrat avec l'État de New York pour 2 000 MW, un contrat de 15 000 000 000 $; on était pour construire Grande-Baleine. New York a cancellé ce contrat-là. Si on avait construit Grande-Baleine puis le contrat n'était pas là, qui, pensez-vous, aurait payé pour la construction de Grande-Baleine? C'est ça qu'on veut éviter. Premièrement.

Deuxièmement, il n'y a jamais eu, parce que c'est un réseau, il n'y a jamais eu de barrage pour lequel il a été dit: On va construire ce barrage-là pour l'exportation. Ça ne peut pas se faire dans le système actuel. Il n'y a jamais eu de barrage pour lequel il a été dit: On va le construire pour l'exportation. Ça devient partie de tout le réseau. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a devancé pendant certaines années, sachant que, à un moment donné, les besoins du Québec seraient rencontrés par les travaux. Ce n'était pas de la spéculation ad infinitum.

Et je vous soumets, M. le président, que, d'après vos propres règles, que vous avez mises dans votre plan de stratégie, sur la réglementation d'Hydro-Québec sur la base de son prix, la Régie... C'est vrai que vous dites que vous gelez les prix pour les premiers trois ans. Peut-être. C'est un engagement que vous avez pris, on l'accepte, et je pense que les consommateurs québécois vont être très heureux de le savoir. Mais, d'après les critères que vous donnez, la Régie, en fixant le prix, va pouvoir augmenter les tarifs, si Grande-Baleine était construite, puis il n'y a pas de contrat d'exportation. Il y a quelqu'un qu'il faut qu'il paie pour. Que ça soit le consommateur, que ça soit le gouvernement qui représente le consommateur, que ça soit les actionnaires qui sont les consommateurs, il y a quelqu'un qu'il faut qu'il paie pour.

Et la seule chose que je dis: Oui, prenez un risque, mais prenez un risque calculé, pas de pure spéculation et dire: Je vais construire parce que les prix sont de 0,18 $ à New York. Ils étaient toujours de 0,18 $ à New York. Mais, avec le prix de 0,18 $ à New York, ils ont cancellé un contrat de 2 000 MW. Le prix de l'électricité à 0,18 $, ce n'est pas le prix de l'énergie. Le prix de l'énergie, ils peuvent aller chercher du gaz thermique, ils peuvent aller chercher du pétrole, ils peuvent aller chercher toutes sortes d'autres choses. Et le sénateur Kennedy a toujours été contre le charbon, contre ça, mais ça n'empêche pas qu'il y a des usines thermiques, ça n'empêche pas qu'il y a des... Oui.

Alors, on ne réinvente pas la roue. Toutes ces conditions que vous venez de nous apporter ici, ça fait 20 ans que c'est de même, et ça fait 20 ans qu'on cherche à percer ces marchés-là. On réussit un peu, mais il faut le faire avec des risques calculés, et pas juste dire: Je m'en vais faire le spéculateur: c'est 0,18 $ à New York, je vais engager les deniers de la population puis on va voir ce qui va arriver. C'est sur ça qu'on dit du côté... C'est pour le bénéfice du... Non seulement l'électricité, il faut qu'elle soit pour le consommateur québécois, mais les tarifs, il ne faut pas qu'ils soient à risque par des investissements qui ne seront pas rentables si les contrats ne sont pas là. Puis, à moins que vous ayez des contrats fermes, les contrats interruptibles, c'est seulement à court terme; c'est seulement le devancement de travaux qui peut rendre ces contrats-là rentables pour le consommateur québécois.

Le Président (M. Sirros): Je ne suis pas sûr que j'aie vu de question là non plus, pas plus que je n'en avais vu dans celle du ministre, mais vous me semblez vouloir commenter.

M. Caillé (André): Si vous me permettez un éclairage qui pourrait être profitable à tous les parlementaires, ceux qui sont là depuis longtemps comme ceux qui sont arrivés ici. Dans le passé, construire vis-à-vis un marché fermé, ça prenait des contrats à long terme, parce que le marché était fermé. Ça voulait dire que, si tu n'avais pas de contrats, tu ne vendais pas. Le marché, il était fermé, on pouvait se faire bloquer à la frontière, ça restait là. D'où les initiatives du gouvernement à l'époque d'aller chercher des contrats à long terme.

Dans le moment, on construit pour un marché ouvert. Nous avons, nous, indépendamment de... Il n'y a personne qui peut nous en empêcher. Présentement, on peut aller vendre sur le marché américain. La question, c'est de savoir: À quel prix allons-nous vendre puis qu'est-ce que ça va nous coûter? Alors, commençons par le prix auquel on va pouvoir vendre, si vous voulez. On n'a qu'à regarder les transactions qui se passent sur le marché. Une centrale thermique aux États-Unis actuellement, son coût marginal, c'est 0,035 $. Ceux qui construisent des centrales de cogénération ou encore ceux qui achètent des centrales thermiques, c'est 0,057 $. Ça, les gens des centrales thermiques, ils n'ont pas le choix de... ils n'ont pas de capacité d'emmagasinage: ils produisent ou ils ne produisent pas. Hydro-Québec, on va vendre, nous, entre 0,049 $ et 0,057 $. C'est ça qui va arriver en pratique. Pourquoi? Parce que Hydro-Québec, on a des grandes capacités de réservoir. On a des interconnexions actuellement qui peuvent sortir 42 TWh par année. Il en est déjà sorti 25, d'ailleurs, dans certaines années, si je me rappelle bien, quand on exportait les surplus, 25.

Alors, nous, ce qu'il va falloir faire, puis c'est pour ça qu'on veut améliorer le niveau d'interconnexions, on va vendre dans la période de forte demande. Hydro-Québec, c'est le seul joueur dans le marché nord-américain – il y en a d'autres, mais c'est beaucoup plus négligeable pour eux – c'est le seul joueur qui peut vraiment choisir quand est-ce qu'il vend dans la mesure qu'on a les interconnexions. Alors, vous imaginez bien ce qu'on va faire: il y a la moitié du temps qu'on va acheter puis l'autre moitié du temps qu'on va vendre. Quand ça va être en bas de 0,049 $, on va acheter puis, quand ça va être en haut, on va vendre, puis on va faire un profit sans prendre de risques. Pourquoi? Grand réservoir hydroélectrique. On peut stocker ici plus que tout ce que l'État de New York consomme dans une année, 140 % en térawattheures de ce qu'ils consomment dans tout l'État de New York incluant la ville de New York. On a la flexibilité de faire ça; les autres ne l'ont pas. Alors, voilà pourquoi les changements sont arrivés. Le changement, il vient de fermeture-ouverture de marché.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.


Situation aux Îles-de-la-Madeleine

M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. Je serai très bref. Je sais que vous êtes dans des grandes discussions de milliards et de milliards et demi, mais il y a du petit monde aussi qui est préoccupé par des tarifs qui sont relativement élevés. Et la situation qui prévaut aux Îles-de-la-Madeleine... j'entendais le ministre tantôt, je suis content de l'entendre parler de la tarification aux Îles, compte tenu de ce qu'on a vécu au cours des dernières années.

Comme vous savez, compte tenu qu'on fait partie des réseaux autonomes, Hydro-Québec a décidé, il y a trois ans... Je me répète, je viens à toutes les commissions parlementaires en faire état, mais, compte tenu que la situation n'est pas réglée encore, je pense que, pour la défense de mes citoyens... faire en sorte surtout que les gens des Îles, qui sont des Québécois à part entière, soient traités sur le même pied d'égalité que l'ensemble des Québécois. Et, par conséquent, compte tenu que la centrale thermique, une centrale diesel chez nous, aux Îles, opère de façon déficitaire, compte tenu du coût du mazout, et ça a toujours été, alors Hydro et le gouvernement ont décidé, il y a trois ans, d'imposer une pénalité de 5 000 $ à ceux qui veulent chauffer électrique, constructions neuves avec chauffage électrique.

Bon, il s'en est suivi depuis trois ans des réunions de comités, la MRC, le ministre a été rencontré à plusieurs reprises, les gens d'Hydro-Québec également, pour arriver ultimement à une situation, que j'ai vérifiée ce matin au niveau de la MRC, très honnêtement, j'ai parlé aux gens d'Hydro aux Îles hier également, et tout ça, une situation où c'est la confusion la plus totale. Puis, si le débat de ce matin – puis je vous demande juste cinq minutes – peut faire en sorte de clarifier la situation puis sécuriser les gens de mon comté, bien, je pense que tout le monde pourra en bénéficier.

Le ministre nous a appris tantôt, il a dit qu'en termes d'équité, aux Îles, c'est réglé, les gens vont être traités sur le même pied que l'ensemble des consommateurs d'Hydro-Québec. Parfait, je suis très content. Sauf que, M. le ministre, dans une lettre que vous avez adressée à M. Caillé le 16 décembre dernier – je n'en ferai pas tout état – à la deuxième page, le paragraphe en haut, on dit: «Les frais de branchement de 5 000 $ doivent donc s'appliquer uniquement aux nouveaux branchements, c'est donc dire à une nouvelle construction qu'alimentent [...] de chauffage et [...] l'espace de l'eau», etc. Donc, par conséquent, si je comprends bien la lettre, c'est qu'une construction neuve aux Îles... je décide de me construire une nouvelle maison et je veux installer un système électrique, je dois payer 5 000 $ de pénalité alors que, si je le fais à Gaspé, si je le fais à Hull, si je me construis une maison à Repentigny, à Trois-Rivières, je ne le paie pas.

M. Chevrette: Oui.

(10 heures)

M. Farrah: Alors, là, vous me permettrez, M. le ministre, avec tout le respect que j'ai pour vous, de dire que votre principe d'équité, j'ai bien de la misère à le comprendre. Puis juste un exemple concret. Je reçois une lettre d'un de mes concitoyens, M. Jean-Charles Huet, le 22 février dernier. Juste un exemple comment concrètement ça peut s'appliquer, ça peut déranger des gens. C'est des petits cas, mais, pour ces gens-là, ça les affecte énormément. Alors, M. Huet, lui, l'été passé, il décide de faire des rénovations majeures sur sa maison. O.K.? Il fait venir un entrepreneur, et là ils ont décidé ensemble que la maison – c'est une vieille maison, c'est une maison qui datait peut-être de 60 ans – ils ont décidé qu'elle était tellement maganée – vous me permettez l'expression – ils ont dit: On va monter une nouvelle maison, en fin de compte, au même endroit, la même maçonne, la même fondation, on va monter une nouvelle maison, ça va nous coûter moins cher qu'essayer de rénover, puis tu trouves des surprises, etc.

Alors, le monsieur, évidemment, il part, parfait, pour le même prix à peu près, il monte sa structure sur la même fondation – et avant, il avait un chauffage électrique, là, situation de chauffage électrique – il monte sa maison. Quand sa maison est terminée, il reçoit une facture d'Hydro-Québec: 5 000 $ parce que c'est considéré comme une nouvelle maison. En plus, il a l'a isolée, sa maison. Au niveau énergétique, elle est encore plus efficace.

Alors, vous comprenez, et je peux comprendre, c'est des petits cas, c'est peut-être des cas isolés, mais c'est une situation qu'on vit, nous, sur le terrain, qui est totalement inacceptable. Alors, moi, je vous le dis encore, je viens pour la défense de mes concitoyens, dans un contexte économique que vous savez, qui est extrêmement difficile à cause de la pêche, puis tout ça. Moi, ce que je demande, je ne demande pas d'avoir de cadeaux pour les gens des Îles, je demande juste qu'ils soient traités en toute équité. Ça fait trois ans que je viens puis je vais persister parce que je considère qu'on est des citoyens à part entière, des Québécois à part entière.

Mais, là, quand vous me dites, M. le ministre: Inquiétez-vous pas, c'est réglé, et Hydro, ce qu'ils me disent, aux Îles... À la MRC – ce matin j'ai parlé au préfet – ils me disent: Écoute, Georges, on est tout mélangés, on ne sait plus ce qui se passe là-dedans. Hydro dit: On applique les mêmes directives qu'on a appliqué les trois dernières années. Vous me dites: Inquiétez-vous pas, M. le député, l'équité, c'est réglé, il n'y en a plus, de 5 000 $. Puis, dans votre lettre que vous envoyez au président-directeur général, à M. Caillé, vous dites que les frais de branchement persistent pour les nouvelles constructions. Alors, moi, je veux juste clarifier la situation, qu'on ait l'heure juste, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): M. le député, même si la question n'est pas adressée à nos invités, elle est adressée surtout au ministre, on va permettre qu'on puisse avoir cette réponse. M. le ministre.

M. Chevrette: Je vais tenter d'y répondre. M. René Lévesque, en 1962, quand il a fait l'étatisation de l'électricité, il n'a pas parlé de la chauffe, nécessairement. Il a parlé de la fourniture de l'éclairage électrique. C'est ça qu'il disait aux citoyens du Québec. Ça, c'est la première des choses.

Pour votre information, aux Îles-de-la-Madeleine, en 1995, c'est 38 000 000 $ de déficit et, en 1996, c'est 40 813 000 $ de déficit. Ce qu'on a dit... C'est vrai... Si vous nous donnez l'exemple d'un monsieur qui se bâtit sur le même carré, qui a besoin d'électricité, c'est réglé, cette partie-là. La lettre du 16 décembre reflète exactement ce qui a été conclu définitivement avec Hydro, mais qui nous oblige à modifier le règlement en place.

Toutes nouvelles bâtisses, effectivement, qui ne voudront pas aller au mazout, qui coûtent moins cher que la chauffe électrique, devront mettre le 5 000 $. Aucun citoyen en place, d'autre part, ne sera pénalisé. Et même, plus que ça, pour des raisons humanitaires, quelqu'un qui devrait se convertir du mazout à l'électricité, quelqu'un qui est asthmatique, par exemple, puis qui a le certificat médical, on en a discuté de cela.

Il restait une zone grise. C'est le type qui a un motel de deux unités puis qui passe à 60 unités de motel. Est-ce qu'on va demander à l'ensemble des Québécois, qui paient déjà 40 000 000 $ de déficit par année, de ne pas avoir un incitatif ou un programme dissuasif pour ne pas se chauffer au mazout alors qu'ils le peuvent, à un coût moins cher pour l'ensemble des citoyens, parce que, autrement, il faudrait reconstruire ou agrandir une centrale thermique déjà existante puis qu'il n'y aurait plus de marge de manoeuvre sur l'île pour la nouvelle industrie, par exemple, qui viendrait s'implanter? C'est ça qu'on a discuté avec les autorités.

Et je voudrais dire au député des Îles-de-la-Madeleine que je lui ai écrit personnellement une lettre en lui demandant, s'il avait des suggestions concrètes, de me les faire. J'attends toujours sa réponse.

Deuxième chose. Je vous dirai que je pense qu'on sera responsable dans le dossier. Les citoyens en place ne seront pas pénalisés. On va prendre les mesures pour corriger le décret le plus rapidement possible. S'il y a eu des injustices de faites, elles seront corrigées, à part ça. Mais pour la partie désincitative aux nouvelles constructions, les Îles acceptent ça. Je suis surpris que le député n'en fasse pas part ici. L'ensemble des maires et des préfets ont donné leur aval à cela. Ils nous ont dit qu'ils acceptaient que les nouveaux branchements, ce soit à 5 000 $. J'ose espérer qu'il le sait. Il est proche de ses électeurs. Je suis convaincu que les autorités municipales lui ont dit qu'elles acceptaient cela. Parce que ça a été dit, ça.

J'ai rencontré je ne sais pas combien de fois des préfets. Je ne sais pas combien de fois ils ont rencontré nos employés. On a discuté à moult reprises avec Hydro-Québec, et la conclusion, c'est celle que je vous ai donnée avant même que vous preniez la parole: il n'y aura pas de pénalité pour les gens en place. S'il y a des cas particuliers qui vont de soi, on va les régler. Est-ce que le député vient me dire ce matin qu'il plaide à l'encontre du consensus qui a eu lieu aux Îles quant au nouveau raccordement? Si c'est ça, qu'il nous le dise, parce qu'on ne pourra plus se fier à personne. Je pense qu'on a joué...

Le Président (M. Sirros): Je ne voudrais quand même pas qu'on entame un dialogue sur un cas précis.

M. Chevrette: Bien, oui, mais il y a quand même eu une question et...

Le Président (M. Sirros): Mais c'est quand même une question qui est posée. Alors, juste vous rappeler d'essayer de...

M. Farrah: Juste en conclusion

Le Président (M. Sirros): ...raccourcir.

M. Farrah: ...moi, je peux vous dire que ma lecture à moi, ma compréhension du dossier et mes contacts... Mettre par écrit que les maires acceptent qu'on soit traités différemment, qu'ils sont d'accord pour le 5 000 $ pour les nouvelles constructions, donnez-le moi; moi, ce n'est pas ce qu'ils me disent, ce n'est pas ça qu'ils m'ont dit, aux rencontres. S'il y a un double langage, je ne le sais pas. Mais, si vous avez par écrit que les maires acceptent que, nous, on soit traités difficilement des autres Québécois, alors qu'Hydro-Québec nous dit et dit à tous les Québécois – dans votre publicité – que le meilleur chauffage, c'est le chauffage électrique, le plus propre, le plus efficace et le meilleur... Mais sauf aux Îles. Aux Îles, ce n'est pas bon, par exemple, mais, partout ailleurs, c'est bon.

M. le ministre, je pense que vous comprenez mon point. Moi, je veux faire en sorte... Je ne demande rien de plus que ce qui se passe ailleurs. C'est vrai, M. le Président, qu'au niveau de la centrale il y a un déficit. Mais ça n'a jamais fait l'objet d'un débat, au Québec, que les autres Québécois ne voulaient pas défrayer le coût des déficits de la centrale thermique aux Îles-de-la-Madeleine. Et je comprends également que, dans un souci de bonne gestion, Hydro doit faire en sorte de réduire son déficit au niveau de la centrale thermique ou la gérer de la façon la plus efficace possible pour qu'il y ait le déficit le moins élevé possible. Mais, ceci étant dit, pas au détriment de l'équité.

Malheureusement, je dois vous dire que la situation qui prévaut actuellement fait en sorte que nous ne sommes pas traités équitablement. Je vous le dis très humblement et très correctement et, à mon point de vue, parce que... À un moment donné, c'est que le même discours va venir pour l'hôpital. Un hôpital aux Îles coûte plus cher à administrer qu'il n'en coûte à Montréal, probablement, à cause des coûts, et c'est normal, une école, ou n'importe quoi. Si on ouvre une brèche parce que, dans une région du Québec... Et vous êtes ministre du développement régional. Alors, si on commence à ouvrir une brèche dans le sens que les coûts sont plus chers dans cette région-là parce que c'est éloigné, à ce moment-là, les gens vont écoper épouvantablement, et ça va s'étendre à toute la gamme des services offerts en régions. Et, à mon point de vue, c'est les gens des régions qui vont écoper.

M. Chevrette: Oui. M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Brièvement, M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, à peu près la même longueur de temps qu'il a prise, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Sirros): Bien, là, vous empiétez sur le temps de tout le monde. Alors, s'il vous plaît...

M. Chevrette: Je comprends, mais vous avez autorisé...

Le Président (M. Sirros): Brièvement, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Non, mais, après que vous l'ayez autorisé, je suppose que je peux répondre.

Le Président (M. Sirros): Brièvement.

M. Chevrette: Merci. Donc, moi, je voudrais dire au député des Îles-de-la-Madeleine qu'il est possible qu'il y ait eu des erreurs dans le passé. Exemple, le programme dont vous parlez, un programme d'économie d'énergie qui a été abandonné puis qui a été repris – je le sais, je suis allé aux Îles, je me suis fait tout expliquer ça – c'est une aberration. Je suis même d'accord avec vous.

Ceci dit, on peut considérer qu'à un moment donné il y a des limites. Prenez un exemple. À l'île d'Anticosti, c'est la même chose, il y avait un problème exactement de même nature. Ce qu'on a dit: Si on ne veut pas avoir, à court terme, à dépenser un 200 000 000 $ pour agrandir la centrale thermique des Îles-de-la-Madeleine, il faut absolument, tout en maintenant le principe d'équité pour tous ceux qui sont en place – là, je jugeait même les cas humanitaires – avoir quelque chose qui incite à ne pas avoir à injecter un autre 200 000 000 $ à court terme. C'est ça qu'on a dit.

Moi, en tout cas, je vous dis, j'ai rencontré un paquet de monde, et ils m'ont dit: Donne-nous l'équité pour tous les résidents des Îles, puis on peut comprendre que, tout ce qui va se développer dorénavant, il faut qu'il y ait un très grand désincitatif à la chauffe – pas à la fourniture d'électricité, à la chauffe – par l'électricité. C'est ça qui a été dit et c'est ça qui a été compris par les comités, puis c'est ce qu'on nous a dit, et je les ai rencontrés personnellement.

C'est pour ça que je voudrais bien qu'on s'entende. Je ne veux pas que les comités, ou des citoyens, ou des groupes de citoyens, ou des groupes d'élus viennent me dire: On achète le compromis ou le consensus, puis qu'après on le remette en cause. Moi, je ne parle pas des deux côtés de la bouche, puis je suis prêt à vous donner raison quand vous avez raison. Mais je suis prêt aussi à répéter ce qu'on m'a dit. Non, non, ce n'est pas ça que je dis.

Le Président (M. Sirros): Alors, on arrêterait avec ça. Mme la députée de Marie-Victorin, vous avez la parole.


Pertinence des objectifs en matière d'efficacité énergétique

Mme Vermette: Oui. Alors, je vous remercie, M. le Président. Je vais échanger un petit peu, en fait, sur un sujet: l'efficacité énergétique. Beaucoup ici sont venus nous dire qu'ils voulaient qu'Hydro-Québec en fasse une des priorités. L'efficacité énergétique, même si on a gagné certains gains, ça a été assez limité, ce qu'on a pu gagner par l'efficacité énergétique. La population s'attendait à ce qu'Hydro-Québec aille davantage vers cette orientation-là.

Et même, certains universitaires sont venus nous dire qu'Hydro-Québec était en conflit d'intérêts et qu'elle n'avait aucun intérêt, en fait, à s'en aller vers cette formule-là puisque ça l'empêchait de faire des profits. Donc, ça allait à peu près contre aussi un de ses objectifs. Même si elle a un pacte social, il faut qu'elle fasse aussi des profits. Et, finalement, c'était peut-être ce qui faisait qu'Hydro-Québec était moins intéressée à s'engager dans cette avenue-là.

Moi, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce que certains affirment par rapport à vos intentions et, d'autre part, voir si vous avez réellement l'intention de faire quelque chose de valable dans ce domaine-là.

(10 h 10)

M. Caillé (André): M. le Président, je suggérerais qu'on ait sous les yeux à ce moment-ci les deux dernières pages du document qu'on a distribué. C'est un tableau où il est indiqué... Le premier des deux, le titre en est: Objectif d'économie d'énergie à l'horizon 2002. Et le deuxième, c'est: Coûts des programmes d'économie d'énergie pour Hydro-Québec.

Alors, le premier tableau montre, je pense, des données qui, au total, reflètent ce que le ministre disait plus tôt ce matin, à savoir que, à date, au bas de la colonne de droite, on voit 3 TWh. C'est ça qu'on a réussi à faire, par rapport à un objectif qui a été établi en 1992, de 9,3 TWh. Nous sommes donc très à court, comme entreprise, comme vous le voyez, madame, de l'objectif qui a été fixé.

Si vous regardez le deuxième tableau, toujours colonne de droite, ça vous donne, en cents par kilowattheure, ce qu'il en a coûté pour chacun de ces programmes-là. L'avant-dernière colonne en donne le statut, à savoir que certains sont terminés puis d'autres sont toujours en cours ou d'autres encore sont en voie de démarrage. Vous voyez que, pour la clientèle résidentielle, on a des chiffres qui varient: 0,03 $, 0,018 $, 0,086 $. Ça, c'est des cents par kilowattheure. Je rappelle que le tarif de fourniture que paient les clients actuellement, c'est 0,028 $. Alors, 0,049 $, 0,076 $, 0,045 $, etc., voilà ce que cela coûte. C'est des faits également, M. le Président. On aimerait beaucoup, à Hydro-Québec, que ce soit moins, mais les faits sont que c'est ça.

Si vous regardez du point de vue commercial, vous voyez qu'il y a des chiffres qui varient. Ça varie selon les programmes de 0,02 $ à 0,049 $. Puis à la clientèle industrielle, il y en a quand même où ça va mieux, de 0,013 $ à 0,042 $. On vise ici un chiffre. Si l'actionnaire, si le gouvernement ne souhaite pas augmenter les tarifs, ici, il faut faire les projets qui sont à 0,028 $ ou 0,03 $. Plus que ça, on augmente les tarifs. C'est clair et net. C'est les comptables qui vont venir nous dire, après nos discussions, de combien il va falloir les augmenter.

Alors, face à ça, on a un résultat du tiers, 30 % de résultat, à date, puis on a des chiffres qui montrent que ça coûte plus, en général, pas toujours, que le fameux 0,03 $. Que ferons-nous? Première des choses, j'ai dit: Plutôt que de venir présenter devant vous que oui, oui, oui, nous atteindrons le 9,3 TWh, même si je ne sais absolument rien des moyens qui vont mener là, même si je suis incapable de vous dire ce que ça va coûter au niveau des tarifs, on a choisi dans le plan stratégique de ne pas le faire.

On a dit: On va faire deux choses. D'abord, il y a une agence d'efficacité énergétique qui a été créée, elle va développer des programmes, point un. Point deux, il y une régie qui va établir le tarif de fourniture, parce que les économies d'énergie, ça va faire partie des sources d'approvisionnement dans le tarif de fourniture, comme les autres. Et, comme j'entendais tantôt, on ne pense pas ici, si on veut protéger la clientèle dans ces tarifs, il ne faut pas mettre des choses dans le plan des ressources qui soient au-dessus du 0,03 $ par kWh; autrement, il va augmenter, puis ça n'aura rien à voir avec tout le reste.

Alors, moi, je me dis: on va aller à la Régie. La Régie, peut-être, va dire – parce qu'il y aura une discussion, un débat public devant la Régie – qu'un prix, finalement, de 0,05 $, de 0,06 $, de 0,07 $ est acceptable. Je ne le sais pas. Mais il n'appartient pas à Hydro-Québec de fixer ce prix-là toute seule; il me semble que ça devrait être après un débat public. Alors, supposons qu'on va à la Régie, la Régie, elle dit: C'est 0,07 $. Enfin, c'est un chiffre que je lance comme cela. Elle va aussi nous dire, la Régie, parce que c'est ça, un mode réglementaire conventionnel, de quelle manière, dans quel compte provisionnel – moi, j'appelle ça un compte provisionnel – on va accumuler les déficiences pendant les premières années jusqu'en l'an 2002 et de qui, à partir de 2002, on va récupérer les sommes.

Et je vous assure que, dans ce contexte, madame, Hydro-Québec est capable, est d'accord pour en faire autant que les gens vont vouloir en faire. Il n'y a aucune limite. Mais ce serait vous induire en erreur que de vous dire qu'on peut faire ça, très honnêtement, sans qu'il y ait augmentation de tarifs. Ça, ça ne se peut pas. Ça coûte plus cher que le 0,03 $. Mais ça ne veut pas dire qu'on n'en fera pas pour autant.

Mme Vermette: Ce que je comprends: en fait, vous n'êtes pas fermés à ça, mais, en autant que ça favorise la production à moindre coût. Ou, en tout cas, au point équivalent à ce que vous êtes capables de produire, vous y allez.

M. Caillé (André): C'est ça. Et, si ça coûte plus cher, on en fait un débat devant les consommateurs. Devant la Régie, il va y avoir des consommateurs, les ACEF, etc., qui vont dire ce qu'ils sont prêts à payer. Aussi, ils vont avoir leur propre opinion quant à combien ils veulent que les tarifs augmentent.

Mme Vermette: D'accord.

M. Caillé (André): Mais ce n'est pas à Hydro de faire ces choix-là, comme tel. Nous, on est des gestionnaires, on gère dans le meilleur intérêt de tous, mais ce n'est pas à nous seuls de faire ces décisions quant à ce que ça vaut.

Mme Vermette: Non, mais c'est parce que la plupart avaient l'impression, en fait, des gens qu'on a entendu ici, justement, qu'il y avait tellement d'économies à faire avec d'autres façons qui pourraient être tout aussi intéressantes, mais qu'on n'a jamais démontré réellement de l'intérêt pour ça parce que vous étiez en compétition avec votre propre production, plutôt que d'aller avec de l'économie d'énergie.

M. Caillé (André): C'est ça. Et j'ai essayé, en tout cas, depuis 15 mois, de ramener bon ordre à ça. Les leitmotiv, c'est: si ça coûte moins que 0,03 $, on en fait autant qu'il y en a, c'est dans l'intérêt de tous de le faire; si ça coûte plus que 0,03 $, il faut identifier qui paiera. Et, dans un contexte comme ça, on va en faire beaucoup.


Optimisation de la capacité des réseaux de transport et de distribution

Mme Vermette: D'accord. J'ai une autre question à vous poser. Dans votre plan, à la page 28, un de vos objectifs dans l'amélioration de l'efficacité de l'entreprise, c'était d'augmenter l'utilisation et le facteur de charge des réseaux de transport et de distribution. J'aimerais que vous m'expliquiez davantage de quelle façon vous voulez améliorer l'efficacité à ce niveau-là.

M. Caillé (André): Alors, une des façons, en distribution – on sait que plusieurs clients résidentiels utilisent beaucoup l'électricité, notamment pour le chauffage – c'est l'introduction du compteur intelligent. Ça serait vrai au résidentiel, et j'ajoute tout de suite, parce que je l'oubliais, au secteur commercial également.

Il y a beaucoup de coûts qu'Hydro-Québec encourt pour installer de la puissance, par exemple, qui tiennent au fait que, plusieurs utilisations, les clients, ils les font tous en même temps, au même moment de la journée, au même moment de la saison. Si on peut étaler ces utilisations, il y aura moins besoin d'installations de puissance, ça coûtera donc moins cher pour produire, ça va se refléter dans un plan des ressources à moindres coûts et ça va conduire à une vraie économie pour la clientèle.

Et ça, ça fait quoi? La même chose est vraie sur la production: meilleur coefficient d'utilisation. La même chose est vraie sur les réseaux de distribution et de transport. Mieux on peut les utiliser, mieux on va aider les clients à réduire leurs coûts. Mon collègue, ici, m'indique qu'il y a quelque chose qu'il voudrait ajouter pour vous sur ce sujet.

M. Filion (Yves): Oui. M. le Président, Mme la députée, je pense qu'un des objectifs qu'on s'est fixé aussi, au cours des prochaines années, c'est de réduire autant que possible nos investissements pour être capables d'améliorer notre efficacité globale. Et l'un des moyens qu'on a identifiés, c'est de mieux gérer l'optimisation optimale de la capacité de transport de notre réseau de distribution et de notre réseau de transport.

Donc, on va revoir comme il faut la répartition de la circulation d'énergie sur nos réseaux pour l'optimiser au complet et réaliser des projets qui visent à optimiser notre actif actuel avant de construire de nouvelles lignes. Alors, quand on construit une nouvelle ligne, c'est parce qu'on en a vraiment besoin et qu'on a optimisé l'actif actuel qui vise à réduire nos investissements sur le réseau. Alors, c'est aussi ce qu'on veut dire par ce qui est écrit ici.

Mme Vermette: Je suis contente de vous entendre dire ça, parce que plusieurs croyaient qu'un de vos objectifs, c'était de construire effectivement de nouvelles lignes, plus que de faire de l'économie par différents moyens. Alors, oui.

M. Filion (Yves): C'est bien.

Le Président (M. Sirros): Ça va?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Sirros): Il reste à peine une minute et demie.

M. Chevrette: Je vais la prendre.

Le Président (M. Sirros): Ha, ha, ha! M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Je vais vous comptabiliser.

M. Chevrette: Merci. Je reviendrai, d'ailleurs, dans un prochain 15 minutes, pour vous ramener un peu sur le plan de ressources. Mais je voudrais vous faire part d'un sondage de M. Lepage, qui a une grande crédibilité dans les sondages, en ce qui regarde le remboursement des frais par Ottawa. Ce sondage est très explicite. Qu'est-ce qu'il dit, à toutes fins pratiques? C'est que les Québécois, à près de 70 %, considèrent qu'Ottawa doit payer, exactement comme ils l'ont fait pour le Manitoba, et comme ils l'ont fait pour Terre-Neuve.

Dans les clientèles, ce qui est drôle, cependant – j'attire juste l'attention de mon collègue de Saint-Laurent – c'est que 83 % de la clientèle du Parti québécois est en faveur qu'Ottawa paie et seulement 56 % de la clientèle du Parti libéral. C'est assez explicite pour démontrer que... Même le chef de l'opposition, d'autre part, est pour qu'Ottawa paie.

Le Président (M. Sirros): Je ne voudrais pas vous interrompre inutilement, mais, tantôt... Je pense qu'on essaie de garder ça à un niveau de questions qui se rapportent quelque part avec le plan stratégique.

M. Chevrette: Oui, c'est exactement... Vous avez laissé aller le député de Mont-Royal.

Le Président (M. Sirros): Excusez-moi, M. le ministre.

M. Chevrette: Oui.

(10 h 20)

Le Président (M. Sirros): Effectivement, j'aimerais ça qu'il y ait un lien. À moins que vous me disiez qu'il y a un lien avec les prix...

M. Chevrette: Je vais vous le dire tout de suite.

Le Président (M. Sirros): Alors, allez-y, M. le ministre.

M. Chevrette: Si on est remboursé conformément à la volonté des Québécois, on a des chances de garder les tarifs beaucoup plus stables, M. le Président, vous savez bien ça. Si vous avez laissé aller le député de Mont-Royal sur sa question... Quand les Québécois, dans un sondage, nous disent: Un pylône manitobain ou un pylône québécois, c'est remboursable au même chapitre...

Le Président (M. Sirros): Est-ce que vous nous annoncez, M. le ministre – et votre temps est écoulé – que, si le fédéral ne rembourse pas, les tarifs vont augmenter?

M. Chevrette: Non, mais je donne un exemple...

Le Président (M. Sirros): Merci.

M. Chevrette: Non, mais vous allez me laisser finir, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Non, mais, franchement... M. le ministre...

M. Chevrette: Ce que je veux dire, c'est que...

Le Président (M. Sirros): M. le ministre, je veux vous...

M. Chevrette: ...nos tarifs ont de grandes chances...

Le Président (M. Sirros): M. le ministre!

M. Chevrette: Qu'est-ce qu'il y a?

Le Président (M. Sirros): Je veux vous arrêter.

M. Chevrette: Ne vous excitez pas. Respirez par le nez, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Je vais m'exciter tant et aussi longtemps que vous allez tenter, vous et d'autres ici, de déranger les travaux de la commission. Nous avons des invités qui doivent nous parler de leur plan stratégique. J'ai fait, c'est vrai, une première exception pour le député des Îles-de-la-Madeleine, mais ce n'est pas véritablement une exception, étant donné que ça parlait de l'effet sur sa clientèle au niveau des prix, etc. Mais je voudrais qu'on évite, à ce moment-ci, d'aborder des sujets qui, à leur face même, n'ont pas de lien direct avec le plan stratégique et qu'on revienne à nos travaux. Alors, ça étant dit, nous avons déjà dépassé le temps...

M. Chevrette: Est-ce que je pourrais vous demander une question d'information?

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le ministre.

M. Chevrette: Étant donné que c'est un tout, un plan stratégique... Vous avez permis même de commencer par le verglas, hier. Du verglas, aujourd'hui, on saute sur les tarifs. Vous avez permis d'aller à l'option 2 tantôt. C'est clair que c'est difficile de rester cloisonné dans un seul élément d'orientation du plan stratégique. Mais les remboursements des dépenses du verglas jouent énormément et peuvent influer sur les tarifs éventuellement. Ce que je voulais vous dire, c'est que les Québécois veulent que le fédéral considère qu'un pylône québécois et qu'un pylône manitobain ou terre-neuvien, c'est la même chose.

Le Président (M. Sirros): D'accord. Une question de directive, vous aussi, M. le député de Kamouraska-Témiscouata?

M. Béchard: Moi, j'aimerais savoir si les gens d'Hydro sont d'accord avec ce que le ministre vient de dire sur le niveau des tarifs qui dépend du remboursement d'Ottawa; et, à ce moment-là, comment on peut certifier que les tarifs ne bougeront pas si les contrats hypothétiques ne sont pas respectés?

Le Président (M. Sirros): Je ne suis pas sûr que c'est une question de directive à la présidence, M. le député. Mais, votre point étant fait également, je pense qu'on va revenir à l'ordre des interventions que nous avions déjà. Le député de Saint-Laurent, suivi du député d'Outremont.


Facturation des victimes de la crise du verglas

M. Cherry: Merci, M. le Président. Au début de mes remarques, ce matin, je pense que j'ai fait le point qu'une des qualités des travaux de notre commission, c'est qu'on a toujours tenté de tenir ça au-dessus de la partisanerie, et je souhaiterais que ça continue. Il y a d'autres tribunes pour faire ça, et il y aura probablement d'autres périodes prochainement pour le faire. Il me semble qu'à ce moment-ci on aurait intérêt à faire ça.

J'ai deux questions pour les gens d'Hydro-Québec. Quand vous êtes venus devant nous, au printemps, aux travaux de notre commission, un des documents que vous nous aviez donné, c'est celui qui apparaît dans votre plan stratégique en page 14. Et, quand des gens de la commission vous ont questionné là-dessus durant les audiences, vous avez reconnu, vous, les gens d'Hydro-Québec, que la carte des prix au détail qu'elle avait présentée ne pouvait pas servir à donner une impression juste de la position concurrentielle d'Hydro-Québec. Pourtant, c'est la même carte qu'on retrouve dans votre plan stratégique, sans aucune autre analyse étayant cette affirmation.

Alors, on ne demande pas mieux que de vous faire confiance, mais, peut-être, une des choses qui me distingue de mon collègue qui a la responsabilité ministérielle, c'est que, moi, dans toute ma carrière, j'ai préféré être assuré avant que consolé après. C'est pour ça que je pose des questions bien pointues là-dessus. Je préfère que vous me disiez d'avance ce qui va arriver que: Faites-moi un acte de foi, faites-moi confiance, dis-moi que tu n'es pas peureux, et les conséquences, après, si vous avez moins d'argent à donner au ministre des Finances, lui, il ne fait pas de neuvaine à Sainte-Anne, il envoie la facture à quelqu'un, et ce quelqu'un, c'est toujours le même actionnaire.

Et, en parlant de cet actionnaire-là, je veux juste vous rappeler qu'à cause du verglas vous n'avez pas pu faire la lecture des compteurs. Donc, vous avez décidé de prendre la période équivalente de l'an dernier et vous avez envoyé une facture à tout le monde, cette année, plutôt... Et là on dit: Les ajustements vont suivre après. C'est comme ça qu'on traite ses clients quand on a une clientèle captive. Parce que, quand on a du respect de la clientèle en fonction des épreuves à travers lesquelles elle vient de passer, on s'assure de lui donner un break au moment où elle en a le plus besoin. Parce que, au moment où notre clientèle a le plus besoin d'argent, c'est dans cette période-ci, à cause de ce qu'elle a dû traverser. Et, au moment où vous voulez lui donner son allégement, c'est la période où sa facture d'électricité est moins... En d'autres mots, vous vous faites faire du financement «off run», parce qu'il n'a pas le choix, il est dans vos mains puis il est obligé de se soumettre à ça. Mais, par notre voix, on a l'obligation de vous demander pourquoi vous avez agi comme ça.

Le Président (M. Sirros): M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, nos gens ont appliqué un règlement tarifaire existant dans toutes ses particularités. Je ne dis pas que ce règlement tarifaire est extraordinaire. Comme vous, vous vous mettez à la place des clients. Puis il y a des clients qui m'appellent puis qui me disent: Écoutez, vous ne trouvez pas que, compte tenu d'un événement comme celui-là, où on a été complètement sans services, carrément sans services... Alors, qu'est-ce qui devrait s'appliquer?

Je pense qu'on devrait avoir des améliorations à nos règlements tarifaires, qui prévoient des circonstances extraordinaires. Le règlement, tel qu'il est, fait face à 99 % des situations. Mais à cette situation-là, je dois dire... Puis ce n'est pas le matin où le cataclysme nous frappe, évidemment, qu'on doit y penser; c'est maintenant, puis améliorer le règlement tarifaire pour que nos gens puissent agir d'une façon uniforme et équitable pour tous. Il ne s'agit pas de passer une directive de dernière minute, puis là le traitement des uns et des autres est différent. Alors, on devra améliorer nos...

On a essayé de se rattraper, vous l'avez vu dans les médias, on a fait plusieurs publicités... pas des publicités, mais des campagnes d'information, parce que c'était vraiment de l'information, pour informer nos clients sur les façons de payer les factures d'électricité. Honnêtement, comme vous, je pense, je partage l'idée que ces situations-là on doit dans la mesure du possible, bien entendu, les prévoir avant, de sorte que, quand elles se produisent, les règles d'application sont connues. Ce n'était, hélas, pas le cas.

M. Cherry: Mais, M. le président, vous admettrez que, depuis la tempête du verglas, et ça a un effet direct de ça, vous avez invoqué les mesures d'urgence pour passer par dessus tout ça. Vous dites: Priorité n° 1, on va faire du bouclage; priorité, on va faire des lignes. Mais, quand vient le temps de décider si c'est urgent puis prioritaire, là vous décidez de charger le client d'abord. On pense que, si votre logique tient pour tout ce qui découle de la situation, vous auriez dû maintenir la même logique pour charger à la clientèle.

Non. Ce que vous avez fait, vous avez dit: Les frais de services, c'est 0,38 $ par jour; ça, votre 0,38 $ on va vous le redonner et, pour le reste, on va vous charger comme l'année passée, puis, si on vous charge trop, on vous le remettra dans quelques mois. Ça, je vous le dis au nom des gens qu'on représente, ils trouvent qu'ils ont un traitement injuste de la part d'Hydro-Québec.

M. Caillé (André): Alors, comme je vous dis, c'est durant la période de la crise. Les avis à la clientèle d'Hydro-Québec – vous devez les avoir vus dans les journaux, je ne reviendrai pas sur les détails – c'est quelque chose qu'on a mis, qu'on a développé durant la crise. Parce qu'il fallait se poser la question d'abord: Qu'est-ce qu'on dit aux gens?

Les bouclages sont arrivés avant. Ils auraient pu arriver après, etc., ce n'est pas comme ça que ça s'est produit. Alors, effectivement, comme vous, ça prouve une chose, c'est que, si ces choses-là, ces situations extraordinaires ne sont pas prévues avant, pendant, ça peut créer des situations inexplicables, enfin, difficilement explicables, en tout cas, à la clientèle.

J'ai vécu dans d'autres entreprises, dans une vie antérieure, avec des règlements tarifaires semblables, puis ça m'est arrivé aussi, même s'il n'y a jamais eu d'effet de verglas sur des conduites souterraines, de me retrouver dans des situations identiques, avec des règlements, finalement, qui ne s'appliquent que très mal.

Le Président (M. Sirros): Merci.

M. Caillé (André): Je voudrais peut-être, M. le Président...

Le Président (M. Sirros): Pardon. C'est terminé?

M. Caillé (André): Ah! Je pensais qu'il y avait un autre volet à... Peut-être une réponse à ce qui était posé.

Le Président (M. Sirros): Je m'excuse. Allez-y.


Comparaison des coûts de production

M. Caillé (André): C'est quand on revenait sur la question de risques, je crois, puis de tarifs aux États-Unis. Alors, je rappelle, et on vous fournira peut-être dans le courant de la journée les textes qui disent cela: une usine thermique, coût marginal, aux États-Unis, 0,035 $CAN par kilowattheure; une usine de cogénération neuve, 0,057 $; une usine thermique vieille acquise au cours de l'année dernière – c'est facile, hein, on a juste à suivre les transactions puis à faire le calcul sur quelle base les gens pensent vendre – même chose, évidemment, parce que celui qui a acheté une ancienne usine avait le choix d'en construire une neuve, alors il ne l'a pas payée plus cher, ça donne toujours le même 0,057 $. Ce qui montre bien que les tarifs de court terme vont osciller entre 0,035 $ et 0,057 $.

Pour quelqu'un qui n'a pas de capacité de stockage, ça va être entre 0,035 $ et 0,057 $, selon les matins. Pour quelqu'un qui en a, comme nous, on s'est dit – plan stratégique: On va vendre entre 0,049 $ et 0,057 $. Puis on a mis 0,049 $ au niveau de nos revenus. Par exemple, il est vrai...

(10 h 30)

Puis vous avez entendu, je pense, il y a deux semaines, ici, que des tarifs, ça existe, à 0,02 $. Je le sais que ça existe à 0,02 $; on en a acheté à 0,02 $ nous-mêmes sur le marché américain l'année dernière. Mais, par ailleurs, on aurait dû vous dire aussi qu'en plein été, c'était 0,10 $, et on va vous montrer – en français, je ne sais pas comment dire ça – les «forward curves» d'aujourd'hui et ça va vous montrer, je pense, que c'est 0,14 $ pendant deux mois, à l'été qui s'en vient. Alors, quelqu'un qui a la capacité de stocker va être capable de vendre à 0,049 $.

Alors, le risque – parce que vous parliez de risque – pour le client, je rappelle qu'il est zéro, parce que ça dépend d'une décision de la Régie sur le tarif de fourniture, donc le plan des ressources. Le risque pour l'actionnaire, donc pour l'ensemble des Québécois, il est zéro, parce que nous nous plaçons dans une discipline très sévère avec le 0,03 $; très, très sévère avec le 0,03 $.

Là où j'ai été critiqué – ce n'est pas ici, je n'ai pas entendu ça ce matin – c'est par des conseils économiques qui disent: Tu devrais aller plus haut que ça parce que là, ce que tu es en train de faire, c'est de ne pas développer aujourd'hui des projets que tu vas développer plus tard, qui vont te coûter plus cher, et tu vas te priver de la richesse créée entre aujourd'hui et ce plus tard. Ça, j'ai entendu ça. Mais je pense que c'est la discipline qui nous a été demandée, c'est: Pas de risques pour l'actionnaire et pas de risques pour le client. C'est le produit que vous avez devant vous.

Si votre commission, M. le Président, décidait qu'on devrait prendre certains risques – pas pour le client, parce que je pense que ça, c'est vrai, les gens, ils ne veulent pas et ils n'ont pas à en prendre – si, comme actionnaires, vous souhaitiez prendre des risques, dites-nous à combien plus haut que 0,03 $ on doit produire et on va vous dire ce que ça va donner. Mais dans le moment, c'est zéro.

Le Président (M. Sirros): Peut-être juste une question précisément sur ça qui me vient à l'esprit, si le député d'Outremont me permet. Vous parlez du prix marginal de 0,035 $ pour l'unité thermique aux États-Unis, vous parlez d'un prix marginal de 0,03 $ pour Hydro-Québec. Mais, ça, c'est la production sans livraison.

M. Caillé (André): Oui, oui, quand on tient des livraisons et de tout ça.

Le Président (M. Sirros): Mais, je veux dire, ça, c'est le prix de l'énergie à la frontière, donc? C'est ce que ça vous coûte de produire.

M. Caillé (André): Non. Notre 0,03 $, c'est la production, il faut ajouter ça à notre transport, et quand on arrive aux États-Unis, c'est plus transport au Québec, 0,01 $, donc 0,04 $ qui se comparent aux 0,049 $ que je dis qu'on va aller chercher, parce que l'Américain qui produit, il doit transporter aussi aux États-Unis, comme nous.

Le Président (M. Sirros): Et si c'est une unité thermique, elle aura beaucoup moins de transport parce qu'elle va être placée à côté de son marché, n'est-ce pas?

M. Caillé (André): C'est ses timbres-poste, comme nous, du reste, et c'est critiqué...

Le Président (M. Sirros): Pardon?

M. Caillé (André): Les tarifs de transport, plus souvent qu'autrement, c'est des timbres-poste. C'est-à-dire, comme une lettre, vous l'envoyez de l'autre côté de la rue, ça coûte le même prix que de l'envoyer à un endroit...

Le Président (M. Sirros): Oui, mais ma lettre que j'envoie outre-mer, elle me coûte le double de la lettre que j'envoie à l'intérieur du Canada.

M. Caillé (André): Non, ici, dans notre ensemble à nous.

Le Président (M. Sirros): Parce que vous avez le coût de transport, j'imagine, de La Grande, disons, à la frontière...

M. Caillé (André): Oui.

Le Président (M. Sirros): ...que l'Américain, lui, n'a pas; plus, vous avez le coût de transport que l'Américain doit avoir...

M. Caillé (André): Oui.

Le Président (M. Sirros): ...mais pas nécessairement le même coût de transport, parce qu'il peut avoir aussi des taux «gates», n'est-ce pas? Quand je prends la route pour descendre à Boston, si je commence ici, je paie trois postes de péage, disons; si je commence plus au sud, ça me coûte moins cher d'aller à Boston. Et c'est le même principe, d'après ce que je comprends, en électricité.

M. Caillé (André): Ça, c'est vrai, c'est vrai, et c'est pour ça qu'on est prudents.

Le Président (M. Sirros): Donc, plus on est loin, plus il y a un prix de transport augmenté. Donc, la comparaison doit se faire, pour qu'elle soit valable, pour qu'on puisse comprendre comme il faut, non pas sur la base de chiffres que nous avons ici, mais sur la base d'une «breakdown» analyse. Et d'ailleurs, c'est un peu ce que la commission vous avait demandé de nous fournir, les éléments pour qu'on puisse comprendre correctement. Alors, est-ce que vous pourriez les fournir, à un moment donné?

M. Caillé (André): C'est ça. Le 0,03 $. Évidemment, pourquoi le 0,03 $ plutôt que l'autre à 0,057 $, il y a des explications. Plutôt que 0,049 $. L'écart entre les deux, il y a une partie de ça – on va vous la donner – qui va au tarif de transport. Et ça dépend combien on va loin, bien entendu. C'est comme les postes de péage sur l'autoroute, ça dépend combien on fait de millage sur l'autoroute. Et si on va juste chez le voisin, on paie la même chose que lui; tous les États voisins, c'est la même affaire que nous.

Le Président (M. Sirros): Donc, l'unité thermique, elle, est plus flexible au niveau d'où elle va se positionner par rapport à son marché, n'est-ce pas?

M. Caillé (André): S'il vend juste dans ce marché-là. Mais quand il se rend captif d'un seul marché, d'habitude, il vend moins cher. Ce n'est jamais bon de se placer dans une situation...

Le Président (M. Sirros): J'ai empiété un petit peu sur le temps de mon collègue d'Outremont; je m'excuse, il lui reste trois minutes. Je ne sais pas s'il veut les prendre maintenant ou s'il voudra les prendre tout de suite après pour ne pas...

M. Laporte: C'est-à-dire que j'ai besoin de plus que trois minutes, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Alors, est-ce que je peux vous suggérer de les prendre après et peut-être de laisser les questions, s'il y en a, du côté de l'opposition?

M. Laporte: Oui, oui, oui, ça va.

Le Président (M. Sirros): Le député de Beauharnois-Huntingdon, qui avait une petite question...

M. Cherry: J'ai une petite question.

Le Président (M. Sirros): Bien...

M. Cherry: Non, ça ne sera pas long.

Le Président (M. Sirros): ...M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: Vu que le ministre a référé à un sondage et qu'il l'a fait distribuer à tout le monde excepté aux gens de ce côté-ci, on aimerait ça l'avoir, oui.

M. Chevrette: Ah, deux copies!

Le Président (M. Sirros): Alors, voilà, le ministre...

M. Chevrette: Pas une, deux.

M. Cherry: Juste une question.

Le Président (M. Sirros): Alors, rapidement, M. le député de Beauharnois-Huntingdon, puis on reviendra au député d'Outremont avec les prochaines questions.


Facturation des victimes de la crise du verglas (suite)

M. Chenail: M. le Président, M. Caillé, comme député de Beauharnois-Huntingdon, chez nous, on a une ferme et puis, si on décidait de ne pas payer notre compte d'électricité ce mois ici... Ça nous coûte à peu près 7 000 $ à 8 000 $ par mois. Puis, comme député, si je recommandais à mes gens de ne pas payer leur compte d'électricité parce qu'ils ne l'ont pas pris, ça serait quoi votre réaction?

M. Caillé (André): Une bonne question. Notre réaction serait la suivante face à des clients. Hydro-Québec ne facture pas, ne reçoit pas des argents pour de l'électricité non consommée. Les compteurs comptent tout, c'est vérifié par... je ne me souviens plus du ministère fédéral, enfin une organisation qui s'appelle Poids et Mesures, et c'est là-dessus qu'en définitive on sera payé. C'est ces montants-là qui sont exigibles. Maintenant, des fois, il y a des estimés de consommation, parce qu'on ne lit pas nécessairement les compteurs à chaque mois, à chaque facturation, et on a des modes de versements égaux. On pourrait faire ça, on offrirait à vos agriculteurs des modes de versements égaux, 12 paiements par année, puis on fait l'ajustement à la fin de l'année. Mais tout ça conduit toujours à la même place: ce qui est payé, ce qui est exigible, c'est ce qui a été livré et seulement ce qui a été livré.

M. Chenail: Nous autres, on ne veut pas financer Hydro-Québec. C'est ça qu'il faudrait que vous compreniez. On n'a pas eu d'électricité, on ne veut pas vous faire des avances...

M. Caillé (André): Écoutez...

M. Chenail: On n'est pas là pour financer, le consommateur, Hydro-Québec. Là, vous nous demandez, les sinistrés, de vous financer. C'est ça que vous nous demandez, puis vous nous avez fait un cadeau de 0,38 $ par jour pour nous dédommager.

M. Caillé (André): Dans le moment, ici, dans l'avis dont j'ai parlé tantôt, M. le Président, on a dit aux gens: Payez-nous 75 % de ce qui est demandé ou qui serait demandé autrement. Puis je le dirais pour tous les députés: S'il y a des clients d'Hydro-Québec qui préfèrent, parce que leur cas s'écarte de celui-ci – il y a toujours des cas moyens ici – ils peuvent s'adresser à notre service à la clientèle puis on va prendre entente.

Encore une fois, notre intention, ici, ce n'est pas d'essayer de se financer sur les contributions à l'avance de la clientèle, notre intention, c'est simplement d'en arriver à se faire payer ce qui a été effectivement livré; alors, on pourra prendre entente. À chaque fois qu'on fait des règles, les mêmes règles pour tout le monde en général, vous le savez, ça convient à un très faible pourcentage de la population: il y en a qui trouvent ça exagéré dans un sens, puis d'autres, exagéré dans l'autre sens. C'est le défaut des règles générales. Faute de mieux, c'est ce que nous avons fait ici.

Le Président (M. Sirros): Merci, M. Caillé. M. le député de Drummond.


Moyenne d'interruption de service

M. Jutras: Oui. Merci, M. le Président. Dans le chapitre dans lequel on est, où on parle de vos objectifs, du maintien de la qualité du service, dans votre plan stratégique – M. Frigon en a fait mention tantôt – on dit que d'ici 2002 vous visez un objectif de moyens d'interruption des services auprès de la clientèle de 2,65 heures par client. Et vous faisiez état de l'amélioration notable qui s'est faite depuis 1993. C'est-à-dire, de 1993 à 1996, l'indice d'interruption de service auprès de la clientèle est passé de 5,2 heures à 3,2 heures. Alors, effectivement, c'était une amélioration notable, et je pense que chacun d'entre nous, on l'a constaté, ça arrive moins souvent dans nos maisons, l'interruption d'électricité.

Cependant, il vient d'y avoir la tempête de verglas, et là, cette moyenne-là, je pense, en a pris un grand coup, là. Alors, je vais vous poser toutes mes questions d'un bloc. Ma première question, c'est: On parlait qu'on en était rendu à 3,2 heures d'interruption. Tenant compte de la tempête de verglas et de l'interruption qui a été passablement longue à certains endroits, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire, ce 3,2 heures est devenu quoi, là, maintenant? C'est ma première question.

(10 h 40)

Ma deuxième question, toujours ayant trait au maintien de la qualité du service. Suite à la tempête de verglas, vous nous dites: Bon, bien, il y a eu des mesures d'urgence qui ont été de l'ordre de 525 000 000 $, c'est ça, le renforcement du réseau qui est prévu, de 815 000 000 $, puis aussi des mesures de renforcement du réseau de 150 000 000 $. Et là, vous attendez un rapport d'un comité d'experts pour améliorer encore davantage. Alors, ma deuxième question à ce sujet-là, c'est: Quand vous attendez ce rapport de comité d'experts? Évidemment, ils vont vous faire des recommandations. Là, on peut prévoir encore, j'ai l'impression, plusieurs millions de dollars en plus. Ça, c'est ma deuxième question.

Maintenant, ma troisième question, et ce que les gens se demandent, on se dit, pour reprendre l'expression populaire: Ça coûte un bras, tout ça! Comment Hydro-Québec, finalement, peut-elle en venir à respecter ce qui est sur la table, à savoir une augmentation du tarif de 1,6 cette année et, après, un gel pour trois autres années, tenant compte de ce qui vient d'arriver, qui coûte très cher, qui n'était pas prévu, et quand même l'objectif du maintien des tarifs malgré ce qui est arrivé? Alors, comment Hydro-Québec va l'absorber? Je voyais, hier, dans votre présentation, certains éléments. J'ai l'impression qu'il va y avoir un élément d'amortissement, mais je voudrais que vous soyez plus explicite à ce sujet-là.

M. Caillé (André): Alors, la première question, je pense, c'était relatif, M. le Président, à la qualité du service, à combien le 3,2 heures...

M. Jutras: La moyenne d'interruption maintenant, tenant compte de la tempête de verglas.

M. Caillé (André): La moyenne d'interruption. La réponse, alors, c'est: Non, nous n'avons pas fait ce calcul. Pour vous donner une idée, par exemple, je pense que c'était 400 000 en Montérégie, ça a duré quatre semaines. Quatre semaines multiplié par sept, multiplié par 24, évidemment, ça donne un chiffre qui est complètement, complètement hors échelle et qui n'a plus de signification en termes de mesures. Je ne pense pas, par exemple, qu'en Californie ou qu'en Floride, quand c'est complètement dévasté, ils incluent ces mesures-là, ces interruptions dans le calcul de la qualité de service disant que: Voici, «Act of God».

Dans l'industrie, ces mesures-là font exception des interruptions consécutives à des cataclysmes. C'était vrai aussi à Osaka, dans la continuité du service gaz quand il y a eu un tremblement de terre il y a de ça maintenant trois ans, j'imagine.


Investissements requis pour l'entretien du réseau

Quant aux investissements, oui, il y a eu le 815 000 000 $, ou enfin il y aura le 815 000 000 $, puis il y aura le 150 000 000 $ dont vous avez parlé, additionnel. Il y aura possiblement d'autres investissements. Hier, j'ai déposé un document à cette commission, qui montre que les investissements du plan, suite à l'ensemble de tout ce que je viens d'indiquer, passeront de 13 000 190 000 $ à 13 000 930 000 $. Et ça, c'est l'ensemble des investissements, autant pour développer de nouveaux ouvrages hydroélectriques – transport et distribution inclus – que pour entretenir le système existant.

Si on se reporte aux chiffres du plan, mais seulement pour les investissements pour maintenir les systèmes existants opérationnels, dans le plan stratégique, il y en avait pour 4 500 000 000 $. Dans le nouveau plan, avec les chiffres qu'on vient d'indiquer, ça donne 4 817 000 000 $; une différence de 300 000 000 $, ici. Une différence comme celle-là, de 300 000 000 $ d'investissement, supposons qu'il s'en ajoute – mais, là, c'est de pure hypothèse, je ne connais pas les recommandations de la commission Warren – vous voyez que ça ne fait quand même que 300 000 000 $ sur des investissements de 13 000 000 000 $. Alors, changer de tout au tout le plan stratégique là, je ne pense pas; changer de tout au tout nos prévisions en ce qui concerne le bénéfice réalisé par l'ensemble des Québécois, non plus, je ne pense pas. Il va y avoir des modifications, le ministre en a parlé, mais on va être dans des modifications qui ne changeront pas du tout le sens des discussions qu'on pourrait avoir ici, aujourd'hui, concernant le pro forma, c'est-à-dire les résultats financiers d'année en année pour les cinq prochaines années d'Hydro-Québec.

La réponse, en fin de compte, ce que je suis en train de vous dire, c'est qu'Hydro-Québec, c'est vraiment une grande entreprise. Puis 815 000 000 $, c'est beaucoup d'argent. Malgré cela, c'est tellement grand que finalement ça a peu d'impact. Ça n'a pas un impact pour complètement chambarder le plan stratégique ou les pro forma financiers des cinq prochaines années.

M. Jutras: J'avais une autre question aussi là. Quand le comité d'experts doit-il faire son rapport à Hydro-Québec?

M. Caillé (André): Ah oui, la date. Alors, on a demandé au comité Warren de nous faire rapport le plus rapidement possible sur une question où il nous faut une réponse rapidement, c'est celle de savoir comment construisons-nous les nouveaux systèmes de transport haute tension. Parce que, vous savez, on commence maintenant, nous, à Duvernay-Anjou, on commence maintenant Sherbrooke–Saint-Césaire, pour prendre des noms connus. Et on commence maintenant aussi l'interconnexion. Alors, on a besoin des rapports à ces sujets-là avant qu'on construise. Puis, il faut construire cet été, il faut commencer à construire cet été parce qu'on veut avoir ça pour la prochaine saison de verglas, en place, une partie de ça. Alors, on a besoin de ça tout de suite. Je lui ai dit, à M. Warren. J'ai dit: Ça, c'est maintenant.

Maintenant, ils pourront prendre plus de temps pour nous dire, un petit peu plus de temps ou s'adresser, dans un deuxième temps, à la question de savoir ce qu'on devrait faire pour améliorer la solidité des réseaux de transport qui sont toujours en place parce qu'ils n'ont pas été affectés par le verglas, se trouvant ailleurs que dans la région affectée, ou même qui sont restés en place même s'ils étaient dans la région affectée. On a besoin de savoir ça assez rapidement aussi.

Et finalement, le troisième, moi, je crois à ce que l'on doit en arriver à la protection, au renforcement d'une façon spéciale de certains des corridors – pas nécessairement tous – que l'on va désigner comme étant des corridors stratégiques, ceux capables d'apporter, par exemple, de satisfaire 80 %, 90 % de la charge au Québec, de sorte que jamais plus dans la situation où nous étions. On s'est retrouvé, à des endroits, avec zéro approvisionnement; alors, ça a fait black-out. On s'est retrouvé, à d'autres endroits, à Montréal, avec 25 % de l'approvisionnement; alors, ça a fait interruption, ça a fait fermeture des commerces pendant une partie de l'avant-midi puis une partie de l'après-midi.

C'est ça qu'il faut changer, puis ça, ça va coûter de l'argent, de faire ça, c'est en entendu. Ça va coûter moins d'argent si on réussit à l'associer avec de nouveaux projets, parce que de nouveaux projets peuvent amener à de nouvelles lignes de transmission qui, elles, on construira de façon stratégique; on n'aurait donc pas à revenir sur les anciennes. Ces chiffres-là ne sont pas connus pour l'instant. Mais, quand bien même il y aurait des signes significatifs du même ordre de grandeur que ceux qu'on connaît déjà, là encore, ça ne changera pas du tout au tout les pro forma. Mais le ministre a raison, on ne dépense pas plus et que ça donne les mêmes bénéfices; ça, ça n'arrive pas, ça va baisser un peu, c'est certain. Il a été mentionné, je pense, ce matin une centaine de millions par rapport au 1 800 000 000 $ en l'an 2002.

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le député.


Délestage présumé au profit de clients américains

M. Jutras: Merci, M. le Président. Maintenant, ma deuxième question a trait à une nouvelle qu'on a entendue dans les 48 heures qui ont précédé ce moment-ci concernant le délestage qui aurait été fait, dont auraient été victimes, somme toute, des Québécois au profit d'Américains. Je ne pense pas que vous ayez à date été appelé à commenter cette nouvelle-là devant la présente commission. Je vous ai entendu à la télévision, disant qu'il n'y avait jamais eu de directive donnée à l'intérieur d'Hydro-Québec à l'effet que, bon, on maintient le service aux Américains au détriment des Québécois.

Et vous allez comprendre, M. Caillé, que cette nouvelle-là a d'autant plus d'importance quand on sait qu'Hydro-Québec veut faire davantage d'exportations vers les États-Unis. Alors, devant une nouvelle comme celle-là, les Québécois se disent: Bien, là, est-ce que ça veut dire que notre électricité, que, nous, les Québécois, nous produisons, il va y avoir un meilleur service aux États-Unis, chez les Américains, que chez nous et qu'on va être victimes, somme toute, de cette clientèle-là qu'on veut desservir, puis avec l'accent qu'on veut y mettre?

Et vous avez répondu: Il n'y a jamais eu de directive dans ce sens-là. Mais, par ailleurs, il semblerait, de ce qu'on sait du dossier à date, que, effectivement, il y a eu du délestage et le service a été maintenu vers les États-Unis. Alors, moi, j'aimerais savoir, puisqu'on est en commission parlementaire puis qu'on parle justement du maintien de la qualité du service, ce que vous dites là-dessus.

M. Caillé (André): Je vais répondre, pour une part, à cette question et je vais laisser à mon collègue – il est plus expert que moi en la matière – ici, le soin de donner les explications additionnelles.

Quand arrive un incident comme celui qui s'est produit au Labrador à l'automne 1997 – un fil de garde a fait court-circuit avec un des conducteurs – dans les fractions de secondes qui viennent, il faut qu'il y ait délestage. Parce qu'on vient de retirer d'un côté du plateau, du côté de la production, x milliers de mégawatts, il faut retirer immédiatement de l'autre côté du plateau, c'est-à-dire du côté des consommateurs, une quantité équivalente, au risque de briser complètement le système.

(10 h 50)

Ce système, il est automatique, parce qu'il faut que ça se fasse... Il ne peut pas être manuel. Alors, il y a une première opération qui est donc automatique et il y en a une deuxième qui est manuelle. Je reviens à celle qui est automatique. Celle qui est automatique, elle ne peut pas, pour des raisons techniques, par exemple, être appliquée à un réseau voisin qui n'est pas synchrone.

Il faut se rappeler que le réseau québécois n'est pas synchronisé avec celui de l'Ontario ou celui des États de la Nouvelle-Angleterre, le réseau ontarien l'est avec une grande partie des réseaux qui se trouvent au sud, aux États-Unis. Quant à la Colombie-Britannique et à l'Alberta, je pense, ils le sont, une grande partie, avec les États-Unis jusqu'à la Californie. Ces réseaux-là ne sont pas synchrones. Quand vient de faire le temps – puis là on est en fractions de secondes, on est en automatisme – la première chose qui se fait, c'est de retirer la charge pour amener le plateau égal, dans des fractions de secondes, en agissant avec des automatiques sur les choses que l'on connaît. Puis on sait où est-ce qu'elles en sont exactement, puis il faut que ce soit synchrone. Étape un.

Il y a une deuxième étape qui, elle, est manuelle. Appelons-la «manuelle». Ce sont donc des gens qui vont prendre des décisions et les exécuter. Ils ont les moyens, à partir d'un endroit qui est à Montréal, de poser les gestes qu'il faut. Alors, là, ils vont se mettre à travailler puis ils vont rétablir la charge. Là, ils peuvent faire ça de bien des manières: soit ramener Churchill Falls... Mais ça, ce n'était pas possible, il était toujours glacé. Il faut donc ramener la charge, la rééquilibrer. Certains qui avaient été interrompus ne le seront plus au profit d'autres, enfin, au désavantage d'autres, je devrais plutôt dire. Et c'est là, dans cette opération-là, parce qu'on est en connaissance de cause – on est en manuel – on peut réduire l'exportation. C'est très exactement ce qui est arrivé. Alors, dans la première fraction de seconde, puisqu'il n'y a pas moyen techniquement de faire autrement, peut-être on pourra regarder – parce que je pense que c'est ce que le député inférait là, que ça se fasse sans intervention humaine – si des systèmes... Puis là, ça pourrait coûter cher de se synchroniser avec les réseaux voisins, parce qu'il y a toutes sortes d'équipements qui font ça. On pourrait quand même regarder s'il y a des systèmes automatiques qui le font puis là on peut réduire uniformément.

Je peux vous dire qu'à cet égard j'ai songé... Enfin, je suis intéressé à ce qu'on se développe une clientèle industrielle interruptible aux États-Unis. Une grande clientèle industrielle interruptible aux États-Unis, on pourrait la relier par fibre optique, comme le reste, puis peut-être la mettre sur système automatique de délestage. De sorte que je vous rappelle – vous voyez, tout ça, c'est plus technique qu'autre chose, l'explication, je le sais bien – en même temps que l'objectif, ce n'est pas de... Les Québécois ne seront pas de deuxième classe ici; les Québécois, ils sont de première classe, ici. Puis il n'y en a pas d'autres parmi la première classe, il y a juste nous autres. Puis, c'est clair, la loi est comme ça. Je suis un humble exécutant de la loi; la loi fait une obligation de servir ici puis pas partout ailleurs, nulle part ailleurs.

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'on peut passer...

M. Jutras: Bien, il y avait M. Filion qui devait rajouter autre chose.

Le Président (M. Sirros): J'ai comme l'impression que...

M. Filion (Yves): Bien, au niveau technique, ça va.

Le Président (M. Sirros): Ça va?

M. Filion (Yves): Écoutez, M. le Président, je pense que l'explication que M. Caillé a donnée est tout à fait correcte. J'ajouterais simplement une chose, c'est que, historiquement, nous avons toujours assuré la fiabilité au niveau du Québec. Par exemple, en période de pointe – je vais vous donner cet exemple-là – chaque année, nous réduisons toujours les exportations pour garantir la fiabilité d'alimentation au Québec et avoir les marges de manoeuvre qui assurent cette fiabilité d'alimentation. Ça fait partie de nos règles de conduite et c'est comme ça qu'on fonctionne et qu'on exploite le réseau.

Le Président (M. Sirros): Merci.

M. Caillé (André): C'est un point, M. le Président...

Le Président (M. Sirros): Rapidement.

M. Caillé (André): ...parce que, de plus en plus, la pointe chez nos voisins, heureusement, ne sera pas en même temps que nous. Eux, ils vont être en été à partir de Boston. La pointe d'été devient plus grande avec les années sur un territoire qui s'étend de plus en plus vers le nord. Eux étant à l'été, nous étant à l'hiver, on aurait un système complémentaire où finalement ni les uns ni les autres ne devraient être trop touchés par des incidents de ce genre.

Le Président (M. Sirros): Merci. Je dois juste aviser les membres que nous terminons ce volet à 11 h 30. Donc, ce que je vais faire, je vais diviser le temps qui reste en deux, en commençant avec le député d'Outremont et la députée de La Pinière pour l'opposition, et on finira avec le côté ministériel. M. le député d'Outremont, vous attendiez patiemment, alors, c'est votre tour.

M. Laporte: Merci, M. le Président. Je veux revenir sur cette question-là parce que je ne suis pas convaincu. O.K. là? Le président d'Hydro-Québec invoque dans les journaux ou ailleurs les circonstances techniques, il tient un discours de technicien savant là-dessus. Je pense que je n'ai pas de difficulté à suivre ce discours savant là, mais je pense qu'il y a d'autres considérations qui doivent être apportées.

Il nous affirme d'une façon péremptoire – il l'a fait hier soir, il le fait encore ce matin, et c'est très pertinent pour notre discussion sur l'orientation n° 1 – qu'il n'y a pas de conflit entre l'électricité définie comme un service public essentiel et l'électricité définie comme une marchandise, n'est-ce pas? Il n'y a pas de conflit là-dedans. En situation normale, on peut en convenir. En situation de crise, comme on l'a vécu maintenant, je suis loin d'être convaincu que la gestion d'Hydro-Québec est telle qu'il n'y en ait pas, de conflit entre ces deux objectifs fondamentaux de la compagnie. L'électricité bien collectif essentiel, on en a besoin même pour se laver les dents, n'est-ce pas, et l'électricité marchandise, bien qu'on exporte sur le marché international pour s'insérer dans un processus de formation de capital – et je n'ai rien contre ça, O.K.? – mais encore faut-il qu'on en arrive à comprendre et à voir beaucoup plus clair dans cette question de savoir s'il n'y a pas de conflit entre ces deux missions et quelles conditions faudrait-il établir pour qu'il n'y en ait pas, de conflit.

Moi, je pense que dans la situation qu'on a vécue – et c'est très pertinent du point de vue de la qualité de service – il y a un «trade-off» qui a été fait, et ce «trade-off» a été fait au désavantage des Québécois et à l'avantage des Américains. J'aimerais qu'on fasse jouer le reportage de M. Morin au téléjournal de l'autre jour. On va le revoir.

(Présentation audiovisuelle)

(10 h 56 – 11 heures)

Le Président (M. Sirros): On peut le fermer, s'il vous plaît.

M. Laporte: C'est d'autant dans la pertinence, parce que le président d'Hydro-Québec nous a dit hier que les niveaux des réservoirs, il ne pouvait pas nous les communiquer parce que ça le plaçait dans une position difficile du point de vue de la concurrence internationale. Mais, si j'ai compris des communications que j'ai eues avec des collègues américains, ces niveaux de réservoirs, ils sont publics aux États-Unis. Alors, s'ils sont publics aux États-Unis, voulez-vous me dire qu'ils ne sont pas publics au Québec? Vous nous dites que, évidemment, si vous vous mettez à acheter des «futures» sur le marché de l'énergie, les investisseurs vont réagir et vous allez vous retrouver dans une position... Mais c'est la même chose pour Enron, c'est la même chose pour les grandes compagnies d'utilités américaines.

Mes informations sont peut-être inexactes, mais, si mes informations sont inexactes, les sénateurs américains, le public américain a accès à ces données de niveaux mensuellement aux États-Unis. Et c'est sûr que tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas accès à ces niveaux de données mensuelles, on va se retrouver pris avec une incapacité de questionner toute votre argumentation, tout votre argumentaire à l'effet que finalement, ce sont des circonstances techniques qui ont fait que ce «trade-off» a été fait. Ce n'est même pas un «trade-off» dont vous vous sentez responsable puisque vous dites que ça a été fait par le recours à un dispositif automatique, mais, tout de même, les ordinateurs sont programmés en fonction d'un certain nombre de priorités. D'autant plus qu'en lisant le communiqué que vous avez publié hier, j'apprends que c'est la cinquième fois qu'une situation pareille se présente, de «trade-off», et que c'est la cinquième fois qu'on se fait «trade-offer» au désavantage du Québec et à l'avantage de clients extérieurs.

Donc, mes questions, c'est d'abord – écoutez, M. Morin nous l'a dit en partie – ceci: Combien de gens ont été touchés? Combien ça a duré de temps? Il nous l'a dit en partie. Mais aussi, qu'est-ce que vous avez l'intention de faire pour prévenir que dans l'avenir une situation comparable se reproduise? Et surtout, est-ce que fondamentalement l'examen de ces faits troublants ne remet pas en cause votre conviction à l'effet qu'il n'y en a pas, de conflit, entre, d'une part, l'électricité entendue comme un service essentiel, comme un bien essentiel, comme un bien collectif, et l'électricité entendue comme une valeur marchande à partir de laquelle on fait des calculs de rentabilité et de formation de capital? Je ne suis pas convaincu et je ne pense pas que le grand public québécois, malgré tous les sondages – mais c'est une question très complexe et, sur ça, il ne faut pas s'en remettre aux sondages – accepte complètement l'argumentaire du président d'Hydro-Québec là-dessus.

M. Caillé (André): M. le Président, mon collègue va ajouter la partie de l'information qui était demandée tantôt.

Le Président (M. Sirros): D'accord, en indiquant simplement qu'il reste à peu près neuf minutes à l'ensemble de l'enveloppe de l'opposition. Oui.

M. Filion (Yves): M. le Président, M. le député Laporte, j'aimerais d'abord vous dire que ce qu'on a entendu dans le reportage – je reprends les mots – qu'on aurait coupé le courant au Québec pour continuer à exporter aux États-Unis, ce n'est pas du tout pour cette raison qu'on l'a fait. Et la première raison, c'est que nous l'avons fait pour éviter une panne générale au Québec. Je pense que c'est important qu'on comprenne pourquoi nous avons développé et implanté au Québec un automatisme de télédélestage de charge. Cet automatisme est en place depuis environ trois ans. Si on avait été il y a trois ans, on aurait probablement eu une panne générale d'électricité au Québec, tout le Québec dans le noir. C'est pour cette raison que nous avons un système de télédélestage de charge, pour protéger les clients québécois et pour améliorer la fiabilité de l'alimentation électrique au Québec.

Maintenant, une fois que l'automatisme a agi, bien sûr, nous devons, comme M. Caillé l'a expliqué tout à l'heure, rétablir un nouvel équilibre. Ce nouvel équilibre, nous l'avons rétabli en fonction de nos moyens, en coupant les exportations, en remettant des groupes en service à Hydro-Québec, des groupes de production qui sont prêts à rentrer et en rééquilibrant la charge de façon graduelle. Ça a duré en tout une heure. Alors, c'est un processus que nous appliquons de façon régulière et qui est, avant tout, pour assurer une fiabilité d'alimentation au Québec et non par rapport aux exportations. Alors ça, je tiens à vous donner, en tout cas, personnellement une garantie là-dessus, ce ne sont pas les exportations qui dominent sur la fiabilité de l'alimentation électrique au Québec, c'est clair. Et je pense que c'est important que ça soit comme ça et c'est important que vous ayez la conviction que c'est comme ça aussi.

M. Laporte: M. le Président, on n'est pas là pour...

Le Président (M. Sirros): Très rapidement, M. le député, parce qu'il y a votre collègue aussi qui doit...

M. Laporte: Je vais terminer là-dessus. Nous ne sommes pas là pour faire des actes de foi à l'égard de la présidence d'Hydro-Québec et de ses vice-présidences. J'aimerais qu'on dépose en commission parlementaire le rapport dont M. Morin fait état dans son reportage et qu'on ait aussi les données, qui sont très probablement dans ce rapport, sur le délestage qui s'est fait jour après jour, heure après heure, durant cette période-là. Quand on aura ces données-là – et si on avait les données de niveaux, évidemment on serait encore plus favorisés, mais M. le président d'Hydro-Québec nous dit que pour des raisons de gestion financière ces données-là ne sont pas disponibles, ce que je questionne parce qu'elles le sont ailleurs, n'est-ce pas – on pourra passer de l'acte de foi qu'on nous demande de faire à l'examen rationnel qu'il faut faire de cette question-là.

Et je répète que c'est très pertinent du point de vue de l'orientation n° 1 parce que c'est une orientation qui porte sur la qualité de services, sur ce que le président d'Hydro-Québec appelle l'obligation, le contrat social, et ma question porte précisément là-dessus parce que, à mon avis, il se fait des «trade-off», des échanges, des calculs d'échanges, d'équilibrage, lorsqu'on se retrouve dans des situations de crise, et je ne suis pas convaincu que ces «trade-off», que ces calculs de rééquilibrage ou d'équilibrage sont conformes à la priorité qui est affirmée ici dans l'orientation n° 1. Donc, il faut qu'on ait les données, il faut que vous nous déposiez les données en commission parlementaire pour qu'on puisse les examiner et tester, évaluer l'affirmation que vous venez de faire, M. Filion.

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Je pense que la demande de dépôt a été faite. On reviendra par la suite, si besoin est. Mme la députée de La Pinière, vous avez le temps, je pense, pour une question.


Fiabilité des réseaux en Montérégie

Mme Houda-Pepin: Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Puisqu'on parle de qualité des services et de fiabilité, hier, on a parlé des conséquences du verglas notamment sur la Montérégie; aujourd'hui, on apprend qu'hier il y a eu des pannes électriques en Montérégie qui ont affecté plus de 12 000 abonnés spécialement dans cette région-là. Et, ce qui est assez étonnant, on lit dans l'article que, du côté d'Hydro, on n'était pas vraiment en mesure d'expliquer ce qui s'était passé, si ce n'est de supputer que les vents, dont la vitesse variait de 30 à 50 km/h hier soir, pourraient avoir joué un rôle.

Hier, dans la présentation que vous nous avez faite, M. Caillé, vous avez dit que la raison pourquoi le réseau d'Hydro en Montérégie s'était écroulé durant le verglas, c'était parce qu'on avait des quantités de verglas insoupçonnées, de l'ordre de 75 mm. Donc, c'était une situation exceptionnelle. Aujourd'hui, on apprend qu'il y a des pannes parce qu'il y a des vents de 30 à 50 km/h. Est-ce que vous pouvez nous rassurer sur la fiabilité du réseau? Parce que la qualité du système et la qualité du service sont intimement liées à la fiabilité du réseau.

Le Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. Caillé.

M. Caillé (André): Deux éléments de réponse, M. le Président. Hier, j'ai également dit que le réseau de transport en Montérégie avait retrouvé une fiabilité à 65 % de ce qu'elle était avant la panne. Alors, voici qu'un fort vent vient faire ce qui était redouté, à savoir, prive un nombre important de clients de service. Je n'ai jamais dit qu'en Montérégie on avait recouvré 100 %, on est à 65 %.

Je veux rassurer la députée à l'effet que ce qu'on a annoncé ou ce dont on a parlé hier, à savoir le réseau de bouclage, d'une part, à très haute tension, le bouclage dit de la Montérégie, de même que le parachèvement des travaux sur les lignes 120 kV avec des critères de solidité plus grands, c'est parce que le 120 kV, il n'a été rétabli qu'à moitié, et c'est ce qui explique le 65 %.

(11 h 10)

D'ailleurs, chaque poste dans une ville – je prends le poste de Richelieu parce que je sais que c'est celui de Saint-Jean-d'Iberville – il y a une ligne à 120 kV qui arrive au poste de Richelieu. Avant le verglas, il y avait deux lignes à 120 kV qui arrivaient à Richelieu; la deuxième n'est toujours pas reconstruite. La moindre défaillance sur une ligne amène les conséquences que vous vivez ou que les gens ont vécues hier. Quand on aura reconstruit la deuxième ligne, que nous allons reconstruire avec des critères de solidité plus grands, ça sera plus solide, on reviendra non seulement à 100 % de ce que c'était avant, mais à 100 % plus, et on connaîtra moins de ces situations comme celle que la population de votre région a vécue hier.

Mme Houda-Pepin: Étant donné que... Le temps est terminé?

Le Président (M. Sirros): Merci beaucoup, Mme la députée, je dois malheureusement vous arrêter là, le temps de parole de l'opposition est terminé, l'enveloppe est terminée. Je vais retourner du côté des ministériels. C'est M. le ministre qui a la parole.


Délestage présumé au profit de clients américains (suite)

M. Chevrette: Merci. M. le Président, j'aurai deux questions. La dernière, dans les dix dernières minutes, je voudrais parler du plan de ressources... dont vous avez fait une demande à la Régie vendredi dernier, mais je voudrais qu'on clarifie ce que le député de Laporte vient de dire.

M. Laporte: D'Outremont.

M. Chevrette: Je m'excuse de cette insulte majeure.

M. Laporte: Non, ce n'est pas une insulte, mais, tout de même, j'ai droit à mon identité et, dans cette commission parlementaire, on m'identifie toujours comme le député de Laporte.

Le Président (M. Sirros): C'est le député Laporte, d'Outremont.

M. Chevrette: C'est le député d'Outremont, qui s'appelle Laporte, et qui vient de Joliette. Bon! Ceci dit, M. le P.D.G. d'Hydro-Québec, je voudrais qu'on lave complètement cette question de «trade-off» et je voudrais qu'Hydro-Québec, non seulement dépose des rapports, s'ils en ont et dès qu'ils les auront, mais, plus que cela, qu'ils fassent la lumière, non pas avec n'importe qui là, mais avec des scientifiques. Parce que ça peut revirer en une accusation formelle contre la qualité du service aux citoyens québécois, et je suis convaincu, moi, qu'on se doit de faire la lumière là-dessus. Pas faire la lumière avec des gérants d'estrade, faire la lumière avec des scientifiques qui connaissent comment fonctionne un réseau, comment ça fonctionne, les lignes à courant continu par rapport aux délesteurs automatiques, par rapport aux délesteurs manuels. Moi, je ne suis pas un spécialiste, et je ne veux surtout pas m'improviser spécialiste, et je ne voudrais surtout pas donner des explications, personnellement, qui risqueraient de mêler les gens. Il y a des gens qui sont scientifiquement connaisseurs et non pas des gens qui sont scientifiquement pseudo-connaisseurs.

Moi, j'ai écouté des «hot lines» hier et c'était épouvantable, ce qui se passait. C'était rendu que les Américains avaient le jus, non pas seulement une heure, mais à la journée longue. Et il n'y avait pas de délesteurs automatiques, et il n'y avait pas de ci, et il n'y avait pas de ça. Je veux que ce soit des scientifiques qui disent au public québécois exactement comment fonctionne notre réseau en cas de panne majeure, qui sont les premiers privilégiés, par des rapports, mais aussi, profitons du groupe scientifique, profitons de la commission Nicolet. Mais n'essayons pas de faire les gérants d'estrade, ceux qui scientifiquement ne connaissent pas cela, pour le mieux-être des citoyens québécois, pour la crédibilité de notre réseau et de notre système à part de ça. Je demanderais à ceux qui ont une tendance à faire les ti-Jos-connaissant de faire comme moi, d'attendre les rapports scientifiques.

M. Caillé (André): M. le Président, je voudrais rassurer ici l'ensemble de la députation, l'ensemble des membres de cette commission quant à notre bonne foi. On vous répond très exactement c'est quoi, la situation, et comment est vécue, la situation, à Hydro-Québec.

M. le ministre, vous avez raison, ces questions sont des questions techniques très pointues. J'ai ici un rapport de M. Camus et M. Armstrong, deux spécialistes qui se parlent du même événement, visiblement qui n'a pas obtenu l'affichage public d'autres rapports. Je suis prêt à déposer cela de même qu'à déposer tous les documents relatifs à la gestion du réseau. Vous allez en recevoir – on ne veut insulter personne – des caisses. Ce que je suggère, qui serait constructif, c'est que toute la députation, M. le Président, qui s'intéresse à la manière dont on gère un réseau de transport, on pourrait organiser, nous, Hydro-Québec, une séance d'information qui pourrait durer le temps que ça a besoin de durer où on informera les gens sur tout, comment ça se passe, avec toutes les données, tous les rapports à l'appui. Alors, je dépose d'abord celui-ci qui est à la source du communiqué de presse émis par l'entreprise hier.

M. Chevrette: Je voudrais ajouter certains éléments. C'est vrai qu'on peut, en un reportage de qui que ce soit, semer un discrédit épouvantable s'il n'y a pas un contrepoids scientifique. C'est tout à fait vrai. J'ai même vu, durant la politique du verglas, apparaître des pylônes montables et démontables dans quelques secondes; donc, on peut s'attendre à tout dans un reportage. C'est scientifiquement que je veux avoir vraiment des réponses à la question qui est posée par le député d'Outremont. Et je pense que scientifiquement on a suffisamment... Il y a le groupe Warren, il y a également le groupe Nicolet, il y a des spécialistes qui travaillent sur ce réseau, qui sont des ingénieurs temps plein qui travaillent dans ce type d'opération, qui pourront nous dire la vérité absolue, pas un reportage de 30 secondes basé sur une fuite calculée ou ayant des objectifs très particuliers dans des contextes de discussions publiques. C'est scientifiquement qu'il faut qu'Hydro retrouve ses lettres de noblesse là-dessus.

M. Laporte: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Beaulne): Oui, M. le député d'Outremont.

M. Laporte: J'ai participé suffisamment à des commissions parlementaires pour savoir de quoi je parle, mais je ne peux pas vous dire le numéro de l'article. Si le ministre, le député de Joliette, adresse ses propos à des journalistes, ça va, mais il ne faut pas qu'il me les adresse à moi. Qu'il ne me fasse pas passer pour un pseudo-savant, un pseudo-machin.

M. Chevrette: Non, non, je n'ai pas passé par vous.

Le Président (M. Beaulne): Un instant, un instant, un instant!

M. Laporte: Non, mais il faut que ça soit très clair. C'est loin d'être «désambiguïsé», vos propos, là.

M. Chevrette: Non, non, j'ai considéré que vous étiez sur...

M. Laporte: Non, non, je comprends, mais c'est «on the record», cette affaire-là.

M. Chevrette: Je considère que vous êtes sur le même pied que

moi.

M. Laporte: Non, non, mais... Non, parce que ce n'est pas à nous, les parlementaires, d'agir comme des savants, des scientifiques.

M. Chevrette: C'est vrai. C'est exact.

M. Laporte: En tant que parlementaires, c'est notre responsabilité de parlementaires de poser des questions comme ça qui sont des questions d'intérêt public.

Le Président (M. Beaulne): M. le député.

M. Laporte: Je voudrais que ça soit absolument non ambigu.

Le Président (M. Beaulne): M. le député d'Outremont.

M. Chevrette: Je voudrais rassurer le député d'Outremont, je ne le visais pas du tout, je considère qu'il est arrangé comme moi. Puis, ce n'est pas pour rien qu'on veut aller devant une régie, pour contre-expertiser dorénavant, je veux très clairement dire que c'est des scientifiques qui doivent nous le dire. J'abonde dans son sens.

M. Laporte: Attendons les scientifiques.

M. Chevrette: Et je suis convaincu que, si on attend les scientifiques de part et d'autre...

M. Laporte: J'espère qu'on pourra avoir un droit de choix, d'ailleurs, sur ces scientifiques-là, si c'est possible.

M. Chevrette: Oui, puis j'espère qu'il ne se traînera pas de ragots d'ici ce temps-là. Vous avez raison.

Le Président (M. Beaulne): Bon, un instant, là.

M. Chevrette: Ceci dit, j'ai mon temps de questions jusqu'à et demi.

Le Président (M. Beaulne): Oui, mais, M. le ministre, un instant, là. Un instant! On est ici pour des échanges avec le président d'Hydro-Québec. Le temps file. On a des questions très pointues. Je pense que le point d'ordre qu'a fait le député d'Outremont a été bien noté dans les transcriptions. Je ne pense pas que personne autour de la table ici ait interprété les propos du ministre comme visant ni le député d'Outremont ni aucun des membres de la commission. Alors, je vous demanderais de mettre fin à cet échange. Et, M. le ministre, poursuivez.


Plan de ressources du distributeur

M. Chevrette: Merci. Donc, M. le Président, vendredi passé, Hydro-Québec déposait devant la Régie un avis sur le plan de ressources, les tarifs de fourniture. Je voudrais savoir exactement, quand vous parlez des ressources du distributeur, un plan des ressources du distributeur, qu'est-ce qu'Hydro-Québec entend par ça, «plan de ressources du distributeur»?

M. Caillé (André): M. le Président, ce sont l'ensemble des moyens utilisés pour satisfaire à la demande québécoise. Bien sûr, il y a le réseau de production hydroélectrique québécois qui est propriété d'Hydro-Québec. On peut faire des achats de réseaux voisins. On a des contrats, par exemple, avec la firme Maclaren de même qu'avec la compagnie Alcan, vous le savez, pour faire des acquisitions. On fait des achats d'énergie également d'une entreprise qui s'appelle CFLCO, qui est l'entreprise qui opère les installations de Upper Churchill, au Labrador. On peut faire également et on fait un certain nombre de transactions avec plusieurs producteurs privés qui, depuis le début des années quatre-vingt-dix, ont construit, ont mis en opération des centrales de production. Bref, voici un ensemble d'engagements que l'entreprise de distribution a pris pour satisfaire la demande exprimée en térawattheure de l'ensemble de la clientèle québécoise. Voici le plan des ressources.

(11 h 20)

Si vous me permettez, M. le Président, je pourrais faire un parallèle avec le plan des ressources de Gaz Métropolitain, dont je connais la nature également pour les raisons que vous savez. C'est en tous points identique: même loi, même système. Le plan des ressources de Gaz Métro, c'est le Gaz acheté à Houston, le gaz acheté à Calgary, le gaz d'échange acheté de certains producteurs dans le Midwest, etc. C'est un ensemble de sources d'approvisionnement qui est jugé nécessaire pour satisfaire la demande qui vient. Ce plan des ressources, un ensemble de contrats – ils ne sont pas tous au même prix, ils ne sont pas tous aux mêmes conditions – aboutit à un prix moyen. Ce prix moyen, c'est 0,028 $ et quelque par kilowattheure. Voilà ce qu'est le tarif de fourniture d'Hydro-Québec. Voilà ce que nous avons soumis à la Régie. Comment évoluera ce plan des ressources dans le futur? Hydro-Québec pourrait se présenter devant la Régie puis dire: Il y a un besoin additionnel ici de 5 TWh, de 14, incidemment, pour prendre un chiffre qui va vous dire quelque chose, d'ici l'an 2000. Puis la Régie va dire: Où prenez-vous ça et à quel prix? Si ça se passe comme on le dit, c'est comme si on met en oeuvre notre plan stratégique, ce 14, ça va être à 0,03 $ par kWh par rapport au 0,028 $, 0,04 $ ou 0,07 $ par kWh, ça va s'ajouter. Peut-être pas tout, peut-être partie, on verra, enfin, au cours des années, comment ça s'ajoute, et la Régie va statuer que le tarif est telle chose.

La Régie pourrait dire, si on n'a pas d'autres moyens: On a trouvé quelque chose à 0,052 $. D'ailleurs, un jour, elle devra statuer sur Sainte-Marguerite à cet égard, et là dire: Bien... Enfin, quand j'étais au gaz naturel, si on achetait du gaz à une fois et demie le prix, ils auraient pu dire: Vous n'avez pas agi en bon père de famille, votre prix n'est pas reconnu, votre coût n'est pas reconnu et votre tarif de fourniture demeure le même, et vous conservez, bien entendu, l'obligation de servir, donc vous perdez de l'argent. Si on a la discipline dont je parlais, à 0,03 $, il n'y a pas de problème; si on n'a pas cette discipline-là, on pourrait se retrouver devant une régie qui considère qu'on fait des ajouts au plan des ressources d'une façon non prudente. Et ça, Hydro n'est pas traitée ici différemment de n'importe quel autre distributeur au Québec et n'est pas traitée différemment, de par la loi que vous avez adoptée à l'automne dernier, de n'importe quel distributeur que je connais en Amérique du Nord. C'est les mêmes règles partout.

M. Chevrette: Mais est-ce que je comprends bien que le plan de ressources du distributeur ne comprend pas les équipements du producteur?

M. Caillé (André): Non, pas équipement par équipement, ce qu'ils comprennent, c'est: Voici, on va prendre tant d'énergie, tant de térawattheures. C'est la plus grande partie, forcément, du réseau de production d'Hydro-Québec, et c'est à tel prix. C'est ça que ça comprend, plus les autres contrats qu'on a avec plusieurs autres.

M. Chevrette: Mais c'est qui, dans le processus, qui va examiner la justification énergétique des équipements de production?

M. Caillé (André): Ce que la loi dit à cet égard, ce que la politique énergétique dit, c'est qu'Hydro-Québec, avant de construire un nouveau projet, d'abord, il y a toutes les études qu'il faut faire, etc.; ensuite, il faut soumettre aux autorisations du Bureau d'audiences publiques de l'environnement, enfin, aux études, plutôt, qui est le Bureau d'audiences publiques, qui va faire des recommandations au gouvernement. On sait qu'il y a des cas où ça se fait par des commissions d'audiences conjointes avec le gouvernement fédéral, dans le cas où il y a des zones navigables, etc. Nous allons proposer, Hydro-Québec, au gouvernement: Voici un projet, on veut le réaliser. On vous a dit 0,03 $. On va vous dire: Voici, ça se fait à 0,03 $, voici comment c'est calculé, voici comment c'est analysé, voici quand ça deviendra disponible. Et ça, c'est le gouvernement, l'actionnaire qui va prendre le risque et le bénéfice. Parce que, si le 0,03 $ est vendu 0,057 $, il y a un bénéfice. Dans la vie, ça fonctionne toujours comme ça: c'est celui qui a pris le risque qui va aussi prendre le bénéfice.

Et c'est ça qui est dans notre plan. Nous, on a fait l'hypothèse que le bénéfice, il serait pris par le gouvernement. Écoutez, comment voulez-vous qu'il en soit autrement? C'est comme ça qu'on fait passer le bénéfice de 700 000 000 $ à 1 800 000 000 $. Ce n'est certainement pas en prenant le bénéfice puis en l'appliquant contre des baisses de tarif parce que, là, le bénéfice n'augmenterait pas. Mais, nous, la loi que vous avez adoptée dit: Il faut que vous alliez chercher 11 % à 12 % de rendement. Bien, c'est ça qu'on a fait. Alors, on dit que c'est l'actionnaire qui, un, va décider, deux, va prendre le bénéfice, puis ça va se traduire en bénéfice annuel puis en dividendes, etc. Mais ce ne sera pas les clients. Les clients, eux autres: plan des ressources. Ils n'auront pas l'avantage non plus, là. Mais ils partent déjà à 0,028 $, ça fait que ce ne sera pas un gros désavantage de 0,03 $.

M. Chevrette: Oui. Est-ce que vous êtes conscient, avec la procédure... pas la procédure, mais la demande que vous avez faite à la Régie, dépendamment des avis que la Régie nous donnera, pourrait nous conduire jusqu'à la modification législative.

M. Caillé (André): Oui, on m'a dit, d'abord, que la loi prévoyait qu'on déclenchait un processus, vendredi dernier, en soumettant le tarif de fourniture, que ce processus était de six mois et que, d'ici six mois, la Régie devait non pas approuver ou désapprouver mais faire une recommandation au gouvernement pour décision. Alors, j'imagine que, selon la recommandation de la Régie, s'il est recommandé ce que nous proposons, ça pourrait signifier des changements législatifs. Lesquels exactement, je ne saurais pas vous dire, mais on m'a dit que, oui, ça pouvait supposer des changements législatifs.

M. Chevrette: Alors, c'est à l'article 167, si ma mémoire est fidèle, dépendamment des avis que nous donnera la Régie, mais je voulais savoir si vous étiez conscient de cela.

M. le Président, moi, même s'il nous restait cinq minutes sur ce bloc, pour permettre à l'autre...

Le Président (M. Beaulne): D'enclencher.

M. Chevrette: ...d'enclencher l'exposé d'Hydro-Québec sur sa deuxième orientation, d'une demi-heure, parce qu'ils ont un exposé d'une demi-heure potentielle, ça nous permettra d'avoir plus de questions pour le deuxième bloc également.


Orientation n° 2: Remettre l'entreprise sur le chemin de la croissance et d'un rendement raisonnable dans le respect de l'environnement de concert avec les communautés locales

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Alors, M. Caillé, nous allons passer maintenant à l'examen de l'orientation n° 2: Remettre l'entreprise sur le chemin de la croissance et d'un rendement raisonnable dans le respect de l'environnement de concert avec les communautés locales. Vous avez demandé un temps de présentation de 30 minutes. Si – je dis bien «si» – il y a moyen d'abréger, ça va être d'autant plus apprécié par les parlementaires que nous touchons là à un des coeurs de nos échanges.


Exposé d'Hydro-Québec

M. Caillé (André): Alors, merci, M. le Président. M. le ministre, mesdames et messieurs, l'environnement d'affaires, tant dans les marchés du Québec que hors Québec, est très favorable à Hydro-Québec. Nous entendons saisir les opportunités qui s'offrent sur ces marchés pour remettre l'entreprise sur le chemin de la croissance et d'un rendement raisonnable, comme le stipule la loi.

Que signifie «croissance»? Premièrement, une augmentation significative des ventes d'électricité sur l'ensemble de nos marchés. On se fixe pour objectif de réaliser d'ici l'an 2002 des nouvelles ventes, des ventes additionnelles de 20 TWh. Contrairement à ce que l'on croit et à ce qu'on dit généralement, 70 % de ces nouvelles ventes, soit 14 TWh, seront réalisés au Québec. La croissance moyenne anticipée pour le marché québécois est de 1,9 % dans notre plan, une croissance anticipée, M. le Président, qui est inférieure à la croissance réalisée par Hydro-Québec de 1992 à 1997: 1,9 % dans le plan, 2,5 % réalisés sur une même durée de temps dans le passé.

Elle se répartit, cette croissance, de la façon suivante: 2,5 TWh pour une croissance moyenne de 0,1 % identique à la croissance enregistrée de 1992 à 1997 aux secteurs domestique et agricole – encore une fois, on compare des prévisions avec du réel, du passé, ce qui s'est vraiment passé; 0,7 TWh, pour une croissance moyenne de 0,1 % inférieure, celle-là, à la croissance de 1,3 % des cinq dernières années aux secteurs général et institutionnel; finalement, 10,9 TWh, pour faire le total de 14, à l'industriel, pour une croissance de 3,3 % inférieure, celle-là aussi, à celle enregistrée dans le réel des cinq dernières années, laquelle était de 4,6 %.

Si on prend en considération, en plus de ça, que, premièrement, le carnet de commandes du secteur industriel correspondant à des contrats négociés représente 5,2 TWh du 10,9 TWh, c'est-à-dire 50 % des contrats déjà négociés à l'industriel; deuxièmement, si on prend en considération que le carnet de projets identifiés – pas encore négociés, mais des projets identifiés – représente quant à lui, ce carnet, de 4 à 5 TWh à l'horizon de l'an 2000, on peut qualifier nos prévisions sur le marché québécois de réalistes et prudentes en ce qui concerne le marché domestique.

(11 h 30)

Nos prévisions de ventes sur les marchés voisins sont quant à elles limitées, très honnêtement, beaucoup plus par notre capacité de produire que par la demande du marché, surtout aux prix qui vont prévaloir. Nous prévoyons – c'est un point très important ici – que le prix de vente sur les marchés voisins déréglementés – marchés ouverts, déréglementés – oscillera de 0,035 $CAN, période de faible demande, à 0,057 $CAN, en période de forte demande. Le 0,035 $CAN, ça correspond au coût variable d'une centrale au mazout; le 0,057 $CAN, ça correspond au coût d'une turbine à gaz ou encore au coût d'une usine thermique acquise au cours de l'année dernière. On a procédé à l'analyse de toutes les transactions effectuées en Nouvelle-Angleterre au cours de l'année dernière, et le prix d'acquisition correspond à un coût pour l'électricité de 0,057 $CAN.

Rappelons – c'est important, ici – que le prix réglementé moyen actuellement, avant déréglementation, aux États-Unis, est de 0,069 $. Et on peut comprendre, avec 0,035 $ et 0,057 $, pourquoi les gouvernements des États voisins déréglementent, c'est parce qu'ils savent qu'ils obtiendront un prix meilleur. Mais ça veut dire que ça reste pour nous que ça sera entre 0,035 $, faible demande, à 0,057 $, forte demande.

Quant à notre capacité unique de stockage et à des interconnections améliorées, grâce à cela, nous prévoyons réaliser nos ventes à un prix variant de 0,049 $ à 0,057 $. Il n'y a pas de mystère, ici. À partir du moment où on a la capacité de stocker, c'est sûr qu'on attend que le prix soit bon, que ça soit dans des périodes de forte demande plutôt que d'aller vendre dans des périodes de faible demande. Au contraire, dans les périodes de faible demande, on va acheter pour stocker, pour en avoir plus à vendre dans les périodes de forte demande.

Par ailleurs, nous n'excluons pas, notre plan le dit, l'acquisition ou la participation d'Hydro-Québec à des projets thermiques. Très honnêtement, nous n'avons pas en ce moment d'opportunité en vue qui porte suffisamment de synergie pour justifier les coûts d'acquisition, 0,057 $, ou de construction, toujours 0,057 $, qui prévalent jusqu'à ce que les choses se présentent plus favorablement; si jamais les prix baissaient, ça veut dire. Tant que ça ne sera pas arrivé, on va se limiter, nous autres, à acheter pour revendre, purement et simplement, sans investir dans des actifs. Et, dans les achats-ventes de cette façon, compte tenu de la capacité de nos réservoirs, 140 % de la consommation de l'État de New York, il y a un arbitrage de prix à faire là que nous estimons être de 40 000 000 $ par année.

La demande additionnelle du marché, de 20 TWh d'ici l'an 2002, elle va pouvoir être satisfaite en partie à partir des ouvrages existants parce que, à l'hydraulicité moyenne, ils devraient fournir 12 TWh; 12, ce n'est pas 20. Alors, pour la croissance, ça signifie également qu'on doit poursuivre la mise en valeur du potentiel hydroélectrique québécois. On doit poursuivre. Notre plan prévoit des projets de développement qui accroîtront de 8 TWh – pour faire l'équilibre entre le 20 de la demande et le 20 de l'offre – notre capacité de production à l'horizon 2002, laquelle se traduira par 19 TWh, évidemment, au fur et à mesure que les projets viendront en opération dans les cinq années qui suivront. 8 TWh à un coût n'excédant pas 0,03 $ par kilowattheure, discipline du marché oblige.

Nous avons opté pour une position beaucoup plus conservatrice que nos voisins en ce qui concerne les risques commerciaux. Je rappelle que les investisseurs dans les projets de cogénération ou dans l'acquisition de centrales thermiques existantes prennent un risque commercial qu'ils doivent forcément expliquer à leurs actionnaires. Ils prennent un risque commercial en faisant l'hypothèse d'un prix de 0,057 $CAN. Nous ne le faisons pas. Par contre, évidemment, je le disais plutôt, on pourrait rétorquer que nous prenons un risque, ici, et c'est le risque de perdre des opportunités d'affaires.

Nos projets comprennent l'installation de capacités additionnelles de puissance associées à de nouveaux réservoirs; deuxièmement, l'installation de capacités additionnelles de puissance à des centrales existantes; de même que, troisièmement, la dérivation partielle de cours d'eau, de façon à accroître la production d'énergie.

Les projets seront réalisés à trois conditions. Ils devront être économiquement faisables; je me répète, 0,03 $ par kilowattheure. Deuxièmement, ils devront être environnementalement acceptables. Et, troisièmement, ils devront être accueillis favorablement par les communautés locales.

Au plan de l'environnement, il importe de rappeler que l'hydroélectricité est une source d'énergie renouvelable qui contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le développement hydroélectrique appartient de plain-pied à la catégorie du développement durable. Je voudrais rappeler ici qu'Hydro-Québec n'a jamais été responsable d'une catastrophe écologique. Nous allons prendre les moyens, bien entendu, pour faire en sorte que cela demeure vrai.

M. le Président, après avoir investi des centaines, littéralement des centaines de millions pour connaître nos cours d'eau, nous avons les connaissances requises pour non seulement éviter les désastres, mais également pour contribuer à la mise en valeur des ressources écologiques du patrimoine québécois. Pour favoriser l'acceptation des nouveaux projets, nous avons mis de l'avant une nouvelle approche de partenariat.

Par l'entremise de sociétés en commandite, les SOCOM, les communautés locales pourront investir à titre de commanditaire aux côtés d'Hydro-Québec, donc participer directement à l'élaboration et à la réalisation des nouveaux projets et, d'autre part, elles pourront partager les bénéfices en proportion de leur participation au capital de ces sociétés.

Par ailleurs, la croissance, ça implique le réengineering de la filière, c'est-à-dire repenser la manière de construire. Discipline 0,03 $, cela signifie que nous devons adhérer aux normes et standards internationaux – on ne peut pas faire n'importe quoi, non plus – de façon à être plus efficace et à réduire les coûts ainsi que les délais, surtout à réduire les délais de construction. Ce qui coûte très cher au Québec dans l'hydroélectricité, c'est le financement temporaire durant la construction. Les délais nous coûtent extrêmement cher.

Pour assurer la croissance de l'entreprise, nous devons tirer des revenus de nouvelles activités. Nous nous fixons pour objectif de réaliser des bénéfices, avec ces nouvelles activités, de 600 000 000 $ sur la période 1998–2002, liés au développement et à la commercialisation de nouveaux produits. Cela comprend les services d'achat-vente-stockage d'énergie, j'en ai parlé tantôt. Que ce soit de l'électricité ou du gaz, incidemment, on a depuis une année déjà des activités de courtage en gaz naturel. Ça nous fait faire des bénéfices puis, en même temps, ça nous aide à faire une meilleure offre à d'éventuels investisseurs québécois parce qu'on peut offrir à la fois gaz et électricité sans avoir à faire des compromis sur les tarifs L d'électricité.

Les services multiénergie, c'est une autre source de revenus additionnelle. La commercialisation de nos capacités excédentaires en télécommunications et en géomatique. Nous avons plus que ce que nous utilisons. On mettra en commun avec d'autres au sein de filiales. Comme ça, on va faire plus de revenus avec les mêmes actifs, donc on va faire plus de bénéfices. Et, comme ça aussi, sur ces actifs-là, on va essayer d'aller chercher le plus rapidement possible des rendements de 11 % à 12 %. Il y a également d'autres revenus qui viendront des produits de services qui, ceux-là, seront axés sur la performance, l'efficacité énergétique et sur la qualité de vie au foyer.

En terminant, M. le Président, j'aimerais dire que, pour ce qui est de remettre l'entreprise sur le chemin de la croissance de la rentabilité, ça aura des avantages pour tous. Pour nos clients, parce que c'est ainsi qu'on va pouvoir continuer à offrir des tarifs bas, stables et uniformes et un rendement plus grand à l'actionnaire, sans avoir à augmenter, justement, les tarifs.

Pour nos partenaires, parce que la croissance d'Hydro-Québec, ça veut dire aussi la croissance de plusieurs autres entreprises québécoises, de nombreuses entreprises québécoises, équipementiers, ingénieurs-conseils, architectes, etc., qui sont partie de plain-pied de l'industrie de l'hydroélectricité. Ce sont des Hydro-Québécois et des Hydro-Québécoises, tout comme les 20 500 qui sont à Hydro-Québec.

Finalement, ça va avoir des avantages pour nos employés, parce que la croissance permet de maintenir les niveaux d'emploi et offre au niveau de l'international en particulier des perspectives nouvelles du point de vue de cheminement de carrière.

Finalement, ça va permettre à notre actionnaire non seulement de faire un rendement juste, non seulement de faire un rendement raisonnable, et ça, c'est sans compter les revenus qui seront engendrés inévitablement pour le gouvernement, ici, du fait de la création d'emplois.

(11 h 40)

M. le Président, avec votre permission... Je ne sais pas si on est prêt pour le faire. Dans nos projets – j'en ai énuméré trois, ici – il y a les fameux projets de dérivation partielle, un concept qui n'est pas très bien compris par l'ensemble de la population. On a fait une simulation pour démontrer ce que ça veut dire, une dérivation partielle par rapport au détournement. Les gens utilisent toujours le détournement de rivière et voient Hydro-Québec: on bouche la rivière, puis on dérive l'autre de l'autre côté...

Le Président (M. Sirros): Si je comprends bien, vous voulez qu'on passe aux vues encore.

M. Caillé (André): Voilà. C'est bien ça.

Le Président (M. Sirros): Alors, allons-y.

(Présentation audiovisuelle)

(11 h 41 – 11 h 48)

Une voix: Avec son potentiel hydroélectrique aménageable à prix compétitif, Hydro-Québec a la capacité de satisfaire à la fois les nouveaux besoins énergétiques québécois et de profiter du contexte d'ouverture des marchés. Pour y arriver, une des possibilités qu'étudie Hydro-Québec: accroître la production de ses centrales hydroélectriques existantes en y acheminant plus d'eau grâce à la dérivation partielle de rivières.

Voici une rivière typique, comme on en trouve beaucoup au Québec. Elle coule au creux d'une vallée, d'une cuvette inclinée plus ou moins profonde. On y trouve des tronçons à débit rapide encaissés et à forte pente et des tronçons à débit plus lent et à pente faible. On y trouve également un certain nombre d'affluents, c'est-à-dire de petites rivières secondaires ou encore des ruisseaux, qui coulent du sommet des versants de la vallée vers la rivière principale. Tout le territoire ainsi drainé est le bassin versant de la rivière, c'est-à-dire que chaque goutte d'eau qui s'y trouve s'écoule naturellement vers la rivière.

Si on souhaite procéder à l'aménagement hydroélectrique de ce bassin versant, il nous faut d'abord bloquer le cours de la rivière au moyen d'un barrage. Contenue par le barrage et un certain nombre de digues, l'eau s'accumule et forme un réservoir. Le but de ce réservoir est surtout de créer une hauteur de chute, qu'on souhaite la plus élevée possible. Au point le plus bas de cette chute, ici, au pied du barrage, on construit une centrale qui est alimentée par l'eau du réservoir. L'eau entraîne des turbines et produit l'électricité. C'est l'hydroélectricité, l'eau qui agit comme source d'énergie, une énergie propre, renouvelable, celle qui contribue le moins à l'effet de serre. C'est ce type d'aménagement qui, en majorité, produit de l'électricité, au Québec.

Maintenant, si, dans un bassin versant voisin se trouve une autre rivière suffisamment importante, il est possible de dériver une partie des eaux de cette rivière vers le bassin déjà aménagé. Ici, par exemple, un des affluents de la rivière voisine est particulièrement près de la ligne de partage des eaux des deux bassins versants. Alors, si on bloque le cours de cette seconde rivière à l'aide d'un nouveau barrage et qu'on aménage un passage, un canal ou un tunnel pour réunir les deux bassins versants à l'endroit le plus approprié, les eaux du bassin versant voisin sont acheminées vers le réservoir de la rivière déjà aménagée. Voilà le principe de la dérivation de rivière.

Lorsqu'il y a dérivation, les eaux d'un bassin versant s'écoulent vers un autre bassin versant. De telles dérivations comportent un avantage majeur pour la production d'électricité. Elles permettent de produire plus d'énergie sans avoir à investir des sommes considérables dans la construction de nouvelles centrales. Lorsqu'il y a dérivation, c'est le débit d'eau moyen annuel qui passe à la centrale concernée qui est sensiblement augmenté. Donc, on produit davantage d'énergie avec la même centrale simplement en en faisant tourner les turbines plus souvent et plus longtemps.

Cependant, une dérivation partielle réduit le débit de la rivière à partir du point de coupure. Pour y remédier, il est possible, à l'aide d'un ouvrage régulateur, par exemple, de maintenir et d'assurer un débit réservé dans le lit de la rivière, c'est-à-dire un débit minimum garanti après le point de coupure. Plus on s'éloigne du point de coupure, plus la rivière est alimentée par ses affluents et, donc, plus les effets de la dérivation s'atténuent.

Sur les tronçons à faible pente, il est par ailleurs possible de sauvegarder l'aspect naturel de la rivière grâce à la construction de seuils, à certains endroits, formant des plans d'eau et recréant en partie le profil naturel de la rivière, grâce aussi à des mesures de correction telles que de l'ensemencement et du reboisement sur les rives partiellement asséchées de la rivière. Il est à noter que les différents chemins d'accès qui ont été nécessaires à la construction de la dérivation peuvent aussi être empruntés par la suite par les communautés locales.

Hydro-Québec dispose actuellement d'un parc considérable de centrales hydroélectriques réparties sur un vaste territoire. Plusieurs de ces centrales pourraient accroître sensiblement leur production grâce à un volume d'eau supplémentaire provenant de la dérivation partielle de rivières. C'est le cas notamment des centrales aménagées sur la Grande-Rivière, sur les rivières aux Outardes et Betsiamites, sur la Saint-Maurice, ainsi que du futur aménagement de la Sainte-Marguerite.

Hydro-Québec examine actuellement certains projets de dérivation partielle. Mais c'est après étude seulement et selon des lignes directrices bien précises qu'elle ira de l'avant. Ces projets devront être rentables et ils devront être acceptables du point de vue de l'environnement, et ils devront être accueillis favorablement par les communautés locales. C'est uniquement dans cet esprit qu'Hydro-Québec entend réaliser ses objectifs et utiliser l'abondance et la puissance de l'eau au Québec comme leviers de développement économique.


Période de questions

Le Président (M. Sirros): Alors, je pense que les vues sont terminées. On peut donc passer aux questions. M. le ministre.


Implication des communautés locales et régionales

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord je remarque qu'il y a trois conditions à des projets de dérivation éventuelle. Je voudrais ajouter certains éléments de la politique énergétique, également, qui peuvent, comme éléments, encadrer éventuellement certains projets. Je pense à la classification des rivières, processus qui est entamé présentement par trois ministères, même quatre, parce qu'on a ajouté un quatrième ministère qui est le Tourisme. C'est une opération qui devra être tenue en compte également dans le cadre de ce processus-là.

(11 h 50)

La question qui me vient, à ce moment-là, est assez simple: Quelles sont vos alternatives dans l'éventualité, par exemple, où l'environnement – parce que vous vous soumettez à tout le processus environnemental – s'y objecte de façon formelle ou encore qu'il y ait les communautés locales – parce que je vais utiliser les mêmes critères – ou qu'on arrive à une classification? Est-ce qu'il y a des voies alternatives dans votre plan de relance, de reconstruction? Est-ce qu'il y a des alternatives qui sont déjà sur votre planche de travail puis que vous préférez garder ou qu'on peut rendre publiques?

M. Caillé (André): M. le Président, il y a des projets qui sont connus, comme Betsiamites. Il y en a un autre aussi qui était du domaine public depuis de nombreuses années, je crois, c'est Eastmain. Dans le premier cas, on a rendu public puis on a commencé un processus qu'on appelle table de concertation. Avant même toute autre étape, nous souhaitons rencontrer les populations locales, avant d'annoncer des projets, avant d'entreprendre des travaux visant les autorisations environnementales, etc., rencontrer les communautés locales pour identifier si on peut ou si on ne peut pas en faire des partenaires. Si on passe cette étape-là, je pense que, par la suite, on va trouver que les mécanismes que nous avons pour protéger l'environnement, tous les mécanismes, les processus administratifs qui représentent beaucoup d'étapes à franchir vont être beaucoup plus facilement franchis puis, surtout pour l'entreprise, pour Hydro-Québec puis la société québécoise, je devrais dire, d'une façon beaucoup plus harmonieuse.

Quant au projet Eastmain, vous le savez, il était de notoriété publique avant même mon arrivée à Hydro-Québec. Il est sûr que le projet, dans sa forme initiale, par exemple, ne rencontre pas le critère de 0,03 $. Ça, on sait ça aussi. Alors, un projet qui a tout passé les processus, plus que 0,03 $ – discipline – non, on ne fait pas ça.

Alors, il faut travailler avec nos partenaires, les populations locales. C'est ce qu'on souhaite faire avec elles, travailler pour trouver des solutions pour ramener ça à un coût économique au voisinage de 0,03 $. Et, par la suite, on aura un projet qu'on pourra réaliser. Pouvoir réaliser, après ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire enclencher, s'il y a des modifications, tout le processus environnemental. Parce qu'il y a déjà une première partie de ce projet-là qui avait été étudiée d'un point de vue environnemental. Ça, c'est au niveau de l'hydraulique. Alors oui, il y a des projets.

Par ailleurs, si on pousse les choses à l'extrême – puis je pense qu'il ne faut pas aller là – les centrales thermiques, vous le savez, c'est 0,057 $. Ce plan ne tient pas, avec des tarifs stables et uniformes au Québec, avec une alimentation venant de la cogénération. On a besoin de 14 TWh ici, et les tarifs ne resteront pas là où ils sont. C'est indépendamment de la volonté de nous tous, qu'est-ce que vous voulez, ça coûte 0,057 $. Ça ne coûte pas 0,03 $, ça coûte 0,057 $. D'ailleurs, aux États-Unis, les gens construisent sur la base de 0,057 $. Et des alternatives à ça, d'autres types de sources d'énergie... Enfin, je le dis comme je le pense, oui, on n'ose pas penser au nucléaire. Après, il reste quoi, comme possibilité? Je ne le sais pas.

Probablement que le meilleur compte, ça serait peut-être d'acheter, ce qui n'est pas sûr, parce que les gens construisent, là-bas, à 0,057 $, de la cogénération, je veux dire, aux États-Unis. Ou on va avoir de la production thermique nouvelle, en Ontario; ça va être cher. Puis, le 14 TWh, ou on décidera qu'on ne le développe pas, ou on va décider qu'on va l'importer. Et on l'importera, si on s'en va à ces extrêmes. Très honnêtement, on peut évoquer ces extrêmes-là, comme les grands risques, puis tout ça, mais je ne pense pas que c'est là que nous allons.

Moi, je pense qu'on va trouver une façon de travailler avec les populations locales, autochtones ou autres. Puis je pense aussi qu'on va réussir à démontrer qu'on est capable non seulement de ne pas faire des catastrophes écologiques, non seulement ne pas faire des dommages à l'environnement, mais, au contraire, qu'on est capable de mettre en valeur l'environnement.

Je rappelle qu'il n'y a pas d'autres entreprises au Québec, ça n'existe pas, une entreprise, quelque organisation que ce soit, qui a les connaissances du milieu qu'a Hydro-Québec. Ça fait des centaines de millions de dollars investis dans toutes sortes d'espèces, d'écosystèmes, etc. On a la connaissance. On va l'utiliser, cette connaissance-là plus que jamais pour faire les choses au mieux. Et c'est ça qui va se produire. Moi, ma conviction, c'est que c'est le développement hydroélectrique qu'il y a ici qui va se faire et pas ces autres possibilités. Il n'y en a aucune qui se rapproche, en termes d'avantages pour nous autres, aucune. Il n'y en a aucune de comparable. C'est celle-là qui est la meilleure. Les autres, c'est tout beaucoup plus loin, dans un ordre qu'on pourrait se donner entre des choix à faire.

Je l'ai dit, je ne changerais jamais – c'est une question tout à fait hypothétique – les ressources gazières et pétrolières de l'Alberta contre les réserves hydrauliques qu'on a ici. On a la meilleure chose en Amérique du Nord, voisins de clients qui ont les moyens de payer, avec un prix pour nous autres qu'on pourra toujours conserver, dans tous les avantages du pacte social du début des années 1960. On est en très, très bonne position. Et ce n'est pas pour rien d'ailleurs... Moi, je vous dis ça, mais il y en a d'autres qui le disent aussi, ils nous trouvent choyés. Nos voisins, c'est ça qu'ils trouvent: choyés.

Regardez-les, au Nouveau-Brunswick, Pointe Lepreau. Vous avez vu les journaux la semaine passée, voyez ce qui est arrivé à Hydro Ontario: «Negative equity», 5 000 000 000 $ qu'ils sont rendus avec des oreilles dans l'équité. Ils sont sur la «credit watch» actuellement. Et regardez au Sud, ils ferment des usines. Les usines nucléaires en Ontario ne sont pas pires que celles des gens au Sud, c'est toutes des affaires semblables. Ils vont fermer aussi. On a une occasion extraordinaire et on a le bon produit et, qui plus est, on a la connaissance comme jamais on ne l'a eue pour bien faire.

M. Chevrette: Je suis heureux de vous entendre parler des communautés locales et régionales parce que, personnellement, je trouve ça un peu timide dans votre plan stratégique. Je considère que les communautés locales doivent de plus en plus être impliquées dans le développement de leurs ressources, de leur patrimoine régional. Même si c'est un patrimoine collectif québécois, il reste qu'il y a des collectivités locales, il y a des communautés autochtones aussi. Et je voudrais me réjouir du fait que vous en faites allusion ce matin parce que, à mon point de vue, il faut en tenir de plus en plus compte, et au niveau même des études préliminaires de certains projets.

Je vous rappelle que, dans la politique énergétique, on en tient compte. Collaboration avec les autochtones, à la page 73 de notre politique énergétique: «Jusqu'ici, la politique énergétique du Québec n'a jamais traité de la question autochtone. Ce ne sera pas le cas de la nouvelle politique...» C'est ce qu'on écrivait dans notre politique énergétique. Et on ajoutait, à la page 75: «Le Québec doit faire une place aux nations autochtones à titre de partenaires du développement énergétique. D'ici là, le dialogue doit être poursuivi au moyen d'ententes particulières conclues lors de la réalisation de projets, mais également par le dépôt de propositions de développement préparées par les nations autochtones en tenant compte de leur réalité.»

Je voulais le souligner parce que, souvent, on ne parle pas de nos bons coups – un bon coup ne fait pas une bonne nouvelle – mais c'est extrêmement important dans l'application de la nouvelle politique énergétique, comme c'est aussi important pour certaines communautés régionales de pouvoir participer soit dans une société en commandite soit dans une société mixte, appelons ça comme on voudra. Je pense que c'est important. Et, vous le dites, l'aval des communautés constitue un des éléments clés de la relance. Moi, je m'en réjouis personnellement.

Je voudrais corriger une information que j'ai donnée tantôt, et de toute bonne foi, quand j'ai parlé des projets de l'APR-91, à 0,05 $, en 1991. C'est inexact. C'est aujourd'hui que c'est 0,05 $ et plus. En 1991, c'était 0,04 $. Donc, je voulais le corriger pour ne pas induire la population en erreur. Je voulais le corriger à l'intérieur de ce bloc d'information.


Cheminement typique d'un projet

J'aurais une autre question. Vous avez des propositions concrètes d'études présentement. Ça demande un décret gouvernemental. C'est souvent interprété comme ayant l'aval du gouvernement. Est-ce que vous pourriez expliquer le cheminement? Parce que je voudrais bien que même la presse comprenne le cheminement d'un projet. Parce que, quand on signe un décret autorisant à faire des études, ça ne veut pas dire qu'on accepte le projet. On a la chance d'être télévisés présentement, on a la chance d'avoir la presse en général. Voulez-vous expliquer exactement le cheminement d'un projet, pour qu'on sache très bien qu'on se respecte et qu'on ne se prête pas d'intentions, qu'on ne charrie pas n'importe quoi?

M. Caillé (André): Alors, un projet, à Hydro-Québec, premièrement, il y a une première partie très limitée d'examen, d'analyse, qui se passe dans nos murs à partir de cartes. On n'est pas sorti à l'extérieur encore. Ce n'est pas mauvais de faire ça, mais ça permet de tracer un tableau très, très général seulement.

(12 heures)

La seconde étape, avant de l'enclencher, dans l'état actuel des choses, ça prend un décret. C'est pour aller sur le terrain. Nous, à Hydro-Québec, on ne peut pas aller mesurer l'épaisseur de l'eau dans un cours d'eau sans avoir un décret. Alors, le problème que j'ai déjà évoqué par rapport à ce décret, c'est que, pour la population locale, ce décret, c'est l'autorisation donnée à Hydro-Québec de construire un ouvrage alors que, pour le gouvernement, ce décret, c'est l'autorisation donnée à Hydro-Québec d'étudier avant de lui faire une proposition de projet. Et là il y a méprise. Les gens ont vu dans le passé... parce que je me suis interrogé: Pourquoi les gens voient-ils Hydro-Québec comme le bulldozer quand elle arrive? C'est parce que, Hydro-Québec ne pouvant pas se déplacer sans détenir dans sa poche de droite un décret, eh bien, ça fait très autoritaire, un décret: J'ai mon décret. Alors, ça fait imposant, je suppose. Et les gens, ils ne le perçoivent pas comme c'est l'intention du gouvernement.

L'intention du gouvernement, c'est d'autoriser Hydro-Québec, encore une fois, à faire un projet. L'intention perçue par les gens de l'intention du gouvernement, c'est que le gouvernement a autorisé un projet, et ça, ça crée un problème. Ça crée un problème qu'on veut corriger, notamment avec nos partenaires, les populations autochtones, qui disent en même temps: Hydro-Québec, on voudrait être partenaires avec vous, soit, mais partenaires depuis le début. Alors, un partenaire qui arrive avec un décret ou qui donne l'impression qu'il a déjà décidé de faire le projet, ça commence à être difficile de convaincre l'autre partie qu'on n'a rien pensé encore, qu'on commence, que c'est la première journée. On se promène avec un décret.

Alors, j'ai suggéré au gouvernement que ces études-là... Bien sûr, je n'ai aucune objection à soumettre la liste des endroits, je ne sais pas comment on pourrait le faire, des endroits où on fait des études, mais ce n'est pas nécessaire que ce soit couvert par un décret. On n'a pas besoin de cette autorité-là pour faire des travaux sur le terrain. D'ailleurs, ça nous permettait de nous présenter à nos partenaires en disant: Voilà, on a regardé des choses dans nos bureaux, ce que ça donne; est-ce qu'on ne pourrait pas regarder ça ensemble?

Vous savez ce que je me suis fait dire très souvent par des autochtones: On connaît le territoire, on connaît ça probablement autant sinon plus que plusieurs de vos spécialistes. Puis, selon moi, ils ont raison parce que – qu'est-ce que vous voulez? – ils ont fait des activités de chasse et de pêche sur ces territoires-là pendant des années; ils les connaissent, ces territoires-là. Ils ne les connaissent pas peut-être dans les mêmes termes, puis ils ne s'expliquent pas avec les mêmes critères, paramètres biologiques et autres, mais ils les connaissent.

Alors, la première chose qu'on va tenter de faire, si on peut s'asseoir puis dire: On va devenir partenaires; maintenant, on va regarder ensemble, puis, oui, on va... Des partenaires, ça regarde le contenu des projets. Tu ne fais pas un projet puis, après, tu cherches un partenaire. Tu fais un projet avec un partenaire. Et là, moi, je pense que les choses se dérouleraient de façon beaucoup plus harmonieuse, en tout cas de façon certainement plus respectueuse pour les populations locales. En passant, ça serait la même chose... pour autochtones ou autres, c'est les mêmes situations qui se répètent.

M. Chevrette: Il me reste seulement une minute. Donc, pourriez-vous, d'ici la fin de la commission, déposer un rapport où vous en êtes sur le 500 MW du sommet économique engagé dans le soutien à des développements industriels? J'apprécierais qu'on ait un bilan, comme commission parlementaire, de l'utilisation de ce 500 MW qui était pour promouvoir l'emploi au Québec.

M. Caillé (André): Très bien. On va faire la mise à jour d'un document qui a déjà circulé. On vous le déposera, j'espère, aujourd'hui ou, en tout cas, le plus tôt possible.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député de Saint-Laurent.


Implication des communautés locales et régionales (suite)

M. Cherry: Merci, M. le Président. Votre présentation, bien sûr, nous amène ça dans une situation idéale, puis, dans le fond, vous l'avez dit, c'est pour permettre de comprendre puis de faciliter. O.K. Vous avez mis la liste des trois conditions et, parmi celles-là, vous avez insisté: comme priorité 1, les populations locales. Vous avez dit: Ça ne sert à rien qu'on aille plus loin si, au départ, on est reçus de façon hostile puis si les gens nous disent: Ne venez pas ici. Si je vous ai bien compris: On ne parlera pas des études environnementales puis du reste si, au départ, les populations locales nous disent: «There's no way about it»; on ne veut pas vous voir ici, vous êtes déjà trop, vous nous avez assez endommagés, on ne veut plus en entendre parler. Est-ce que j'ai bien compris que ça, c'est la première des préconditions pour qu'on fasse quelque chose?

M. Caillé (André): Vous avez raison, M. le député. Il faut qu'il y ait un minimum de consensus. Si on va à un endroit où la majorité sinon la totalité de la population dit non, si on va à la recherche d'un partenaire parmi des personnes qui ne veulent pas être partenaires, alors, il n'y aura pas de partenariat – il faut conclure – puis, à ce moment-là, il faudra aller jusqu'au bout, à savoir leur dire: Ça ne sert pas à grand-chose de faire bien des études ici parce que, de toute façon, on n'y arrivera pas.

M. Cherry: O.K. Maintenant, est-ce qu'il est possible que, le long d'un cours d'eau qu'on veut dériver, il y ait plusieurs populations locales, que certaines pourraient s'exprimer favorablement et d'autres moins favorablement, pour ne pas dire carrément hostiles...

M. Caillé (André): Contre. Bien oui!

M. Cherry: ...parce qu'il y aurait un effet sur chacune de ces populations-là? On traitera ça comment dans un cas comme celui-là?

M. Caillé (André): C'est vrai que ça peut arriver. Au Québec, de la façon dont la population est répartie sur le territoire, il peut y avoir plus d'un, mais c'est rare qu'il va y avoir 20 groupes différents aussi, ça reste quand même limité, mais, vous avez raison, votre exemple est bon, il peut y avoir plus d'un groupe. À ce moment-là, nous, on fait la même proposition à tous. On va devoir, par ailleurs, discuter, entreprendre ces discussions-là d'une façon séparée, distincte, parce qu'ils l'ont demandé, avec les populations autochtones d'avec les populations blanches. Alors, on se mettra donc au centre, il y aura deux rencontres plutôt qu'une, quoi, et on va définir les termes de partenariat avec les uns et avec les autres. Mais l'offre, finalement, pour nous, en termes de valeur, elle sera la même.

Vous vous souviendrez certainement du programme PMVI, le Programme de mise en valeur intégrée, adopté par le gouvernement, qui consistait à verser des sommes pour atténuer les effets sur l'environnement ou encore pour assurer le développement économique des collectivités touchées. Les mêmes montants et les mêmes méthodes de répartition seront utilisés. On essaie de faire partenaire. Et puis, quand on essaie de devenir partenaire avec quelqu'un, ça veut dire qu'il faut avoir de l'écoute; la première étape, c'est d'avoir de l'écoute avec les uns et les autres, parce que ça sert à peu de chose – enfin, de ce que j'ai vu en affaires, moi – ça sert à peu de chose de décrire les obligations, les exigences que nous avons au point de départ. Il y a des premières étapes qui sont celles surtout caractérisées par l'écoute. Il pourrait arriver que l'une dise oui et l'autre dise non. Là, nous, on pense qu'il devrait se trouver des façons de sortir un consensus. Mais, si on a la moitié d'une population locale contre, on est déjà en difficulté, d'après moi.

M. Cherry: O.K. Vous avez, et j'utilise les termes que vous utilisez pour faciliter ma compréhension, vous dites: On va traiter avec la population blanche locale puis les autochtones. Il est fort possible que la population blanche locale y voie la nécessité de l'implantation d'une entreprise qui nécessite beaucoup d'énergie. Donc, pour elle, il y aurait une volonté commune, locale: Ça va créer des emplois, ça va être bon. Mais le besoin énergétique pour répondre à ça va affecter des populations qui, elles, n'y retrouvant pas les mêmes intérêts ou les mêmes avantages, s'y opposent. Vous dites: On va se placer entre les deux et on va essayer de trouver un consensus qui va rallier tout le monde, au départ; sinon, on ne fait pas ça. Est-ce que, un, je vous ai bien compris là-dessus?

M. Caillé (André): Oui. Les uns et les autres auront quelque chose en commun; ici, c'est de participer aux bénéfices de l'entreprise, de l'activité en question. Alors, que ce soit la population autochtone ou une autre population, ou une autre population autochtone, parce qu'il peut y en avoir deux, chacun va avoir en commun un avantage ici, c'est celui de l'avantage économique, parce qu'ils vont participer à l'élaboration – j'ai oublié de le dire tantôt, c'est un bon point – du projet – je pense qu'il faut qu'ils soient là – participer aussi dans les bénéfices, donc participer dans les sociétés en commandite, détenir des vraies unités de la société en commandite donnant droit à un pourcentage du bénéfice réalisé à chaque année. Alors, ça, ça va être vrai pour tous.

Alors, il y en a qui, malgré tout ça, vont dire non; bon, ça veut dire qu'on ne le fera pas là. Puis il y en a qui vont dire oui, puis ça veut dire qu'on le fera avec ces gens-là. Tenter d'imposer des choses, je ne pense plus que ce soit dans les meilleures façons. Ça a peut-être été fait comme ça dans le passé, puis je ne veux pas critiquer le passé, donc je n'en parlerai pas, mais l'avenir me paraît plutôt dans le sens de la création de véritables partenariats dans la conception, dans la réalisation et dans le bénéfice, dans l'attrait d'un bénéfice. Le bénéfice d'une société en commandite pour ces populations-là, ça va être un flux financier constant année après année qui va venir dans les coffres du groupe, des revenus communautaires.

M. Cherry: Est-ce qu'il me reste du temps ou si mon temps...

Le Président (M. Sirros): Oui, il vous reste encore neuf minutes.

(12 h 10)

M. Cherry: O.K. Donc, ce que vous nous dites, c'est: Priorité 1, première précondition, il faut que tout le monde soit, au départ, unanime. Ça, c'est facile, mais on sait qu'il pourrait y avoir des populations pour qui ce serait carrément de trancher: oui, on embarque ou, non, on n'embarque pas. D'autres pourraient vous dire, puis je pense qu'il y a des expériences qui témoignent de ça: À ce moment-ci, on se garde un droit de dire non plus tard, dépendamment de l'évolution de. Mais ça, ça veut dire que, si on embarque dans un procédé comme celui-là, on fait des investissements, on fait des dépenses, et si, à la fin, la partie qui s'est retenu le droit de dire non fait ça, on a investi de l'argent dans quelque chose. Ce que vous nous présentez, ça, c'est de façon idéale, mais, dans la vraie vie, là, avec les sortes de partenaires, sur les territoires où on a à aller, je pense qu'on a suffisamment d'exemples pour qu'on puisse soulever une hypothèse comme celle-là. Mais une condition comme celle-là, on traiterait ça comment?

M. Caillé (André): D'abord, au niveau des conditions, si c'est plus que 0,03 $, ça ne donne rien de se parler longtemps parce que, discipline du marché oblige, on n'y va pas nous-mêmes. Alors, c'est un non-projet, alors il n'y a rien à discuter. Et si ça rencontre le critère du 0,03 $, et puis, c'est vrai, vous avez raison, on peut engager des sommes importantes dans des études, il faut, avant de s'engager dans des sommes très importantes – on a tiré les leçons du passé ici – avant de s'engager dans des sommes, je dirais même très importantes – c'est déjà trop grand – significatives – je me rassurerais plus – là il faut qu'on établisse le partenariat.

Il y a un moment donné où le partenariat doit être établi, qu'on fait cela ensemble. On veut bien ensemble prendre le risque, les autres risques peut-être de construction ou risque d'obtenir ou de ne pas obtenir un permis environnemental, mais on ne se lancera pas dans des études, la centaine de millions pour découvrir plus tard que, bien, coudon, peut-être, on n'a pas de partenariat. On va l'établir avant ça. Je pense que je comprends ce que vous voulez dire puis je pense à quel cas vous vous référez. Ça, ça n'arrivera plus.

M. Cherry: Parce qu'une autre des préconditions, c'est le coût.

M. Caillé (André): Oui.

M. Cherry: Donc, ça veut dire que si, pour avoir l'adhésion des partenaires, leur part de contribution aux bénéfices avait comme résultat que ça dépassait le coût du 0,03 $, on n'y va pas.

M. Caillé (André): On n'y va pas.

M. Cherry: Donc, on vient de donner le signal à ceux qui veulent s'objecter à tout crin qu'ils n'ont qu'à faire ça et, sur leur territoire, on ne fera jamais rien.

M. Caillé (André): C'est ça. C'est ça que ça va faire. Puis ceux qui veulent, bien, ils vont adopter une attitude différente, puis on fera avec eux.

M. Cherry: O.K.

M. Ciaccia: Mais le coût d'un nouveau barrage...

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le coût d'un nouveau barrage, c'est beaucoup plus cher que le coût des barrages il y a 10 ans, 15 ans. Comment allez-vous figurer le rapport sur le retour sur l'investissement? Parce que le prix, que vous dites ici, de fourniture, 0,028 $, ça, c'est la moyenne. Quand vous construisez un nouveau barrage, ça peut être 0,04 $, 0,05 $, 0,06 $, si vous prenez seulement ce barrage-là. Comment allez-vous faire le partenariat? Avez-vous pris le prix de ce barrage-là ou vous avez donné l'«average», la moyenne de tous les...

M. Caillé (André): Non. Je vais vous rassurer, M. le député, on ne prendra pas... Le 0,03 $, ça ne veut pas dire la moyenne du parc existant avec ce qu'on vient d'ajouter. La moyenne, ça veut dire sur ce que nous ajoutons excluant... sans prendre en considération l'existant. Vous avez raison de le dire, j'ai vu plusieurs projets à Hydro, c'est 0,04 $, 0,05 $, 0,06 $, 0,07 $. Alors, tout ça, c'est un x dessus, il faut faire un x.

M. Ciaccia: Celui de Churchill est à combien? Si on prend juste Churchill, le nouveau, à combien il va donner?

M. Caillé (André): Vous savez, je vais vous mettre en garde ici. Pour la bonne conduite de nos affaires avec Churchill, je suis mieux de ne pas commenter. Mais, si vous me posez la question pour Churchill, je pourrais vous dire tout de suite ce que je peux vous dire sans brimer l'intérêt d'Hydro-Québec ou de la communauté québécoise. Je reviendrai, si vous voulez, peut-être là-dessus puis je vais continuer avec un autre exemple.

Alors, supposons un autre projet, Eastmain, la forme originale, 0,05 $ et quelque chose, O.K.? Ou prenons Grande-Baleine, ça aussi, c'est... je pense que c'était 0,056 $. Ça, dans cet état-là, c'est non. Il n'y a ni pourparlers ni discussions, rien à faire. À moins que quelqu'un – prenons Eastmain – trouve une solution pour ramener ce coût de, je pense que c'était 0,052 $, à 0,03 $, auquel cas, voilà, on a une hypothèse de projet. Mais c'est ce projet-là, là, ce n'est pas le projet initial, c'est ce projet-là qui est sur la table. Maintenant, avant d'aller plus loin, conception ou autre, il faut faire avec les partenaires, voire même... Quand on va passer du 0,052 $ au 0,03 $, il faut faire ça avec les partenaires éventuels avant de se lancer dans des grandes études qui vont nous coûter des millions puis, après, pour découvrir qu'on n'a pas de partenaires.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a des projets, des nouveaux projets que vous pouvez faire à 0,03 $?

M. Caillé (André): Oui. Oui, il y a des nouveaux projets. Je vais vous dire, les dérivations partielles, vous savez, c'était... Je pense que vous avez été impliqué directement en tant que ministre à cette époque-là. Quand on a construit de la surcapacité à certains ouvrages de production, ça veut dire que la capacité est déjà là. Alors, tout ce qu'on fait, c'est qu'on apporte de l'eau. C'est évident que ce n'est même pas 0,03 $, ça.

M. Ciaccia: Ce n'est pas vraiment des nouveaux projets.

M. Caillé (André): Enfin....

M. Ciaccia: Vous ajoutez de la capacité à des projets actuels.

M. Caillé (André): C'est de l'énergie...

M. Ciaccia: Mais je parle de nouveaux projets, là.

M. Caillé (André): Ça, c'est de l'énergie additionnelle.

M. Ciaccia: Oui, oui.

M. Caillé (André): Il y a deux facteurs: l'énergie et la puissance. Ça, c'est seulement de l'énergie additionnelle. Il y a d'autres projets, comme Eastmain, qui seraient à la fois énergie et puissance additionnelles. L'ensemble de ces nouveaux projets là, pas le passé... le passé, là, c'est à l'avantage des Québécois puis il reste aux Québécois. Les nouveaux projets, 0,03 $; risque commercial, zéro. Si on s'avance plus loin par rapport à ça, bien, il y a quelque part, quand on est rendu à 0,057 $, qu'on prendrait le risque que les Américains prennent, puis là il faudrait faire les calculs que le président nous invitait à faire tantôt, et il faut tenir compte des coûts de transport également. Alors, voilà où on est. On a adopté ici, c'est ce qu'on vous présente, la discipline rigide du 0,03 $.


Répartition des investissements selon les marchés

M. Ciaccia: Vous avez parlé que vous aviez la croissance de 20 TWh et, sur ce 20, 14 étaient pour la consommation locale. C'est quoi, l'investissement pour tout le 20 TWh? Je n'ai pas les chiffres devant moi. Ça représente un investissement de combien?

M. Caillé (André): Mon collègue va vous faire rapidement ce calcul.

M. Vandal (Thierry): On prévoit investir...

M. Ciaccia: Grosso modo.

M. Vandal (Thierry): Sur l'ensemble du 13 000 000 000 $ qu'on prévoit investir sur les cinq prochaines années, environ la moitié du 13 000 000 000 $ se trouve à être investie dans le domaine de la production, donc de l'ajout aux installations, mais cette moitié-là comprend elle-même des investissements significatifs en production pour la pérennité des équipements installés. Alors, je peux vous dire que, grosso modo, on parle d'investissements qui sont de l'ordre de grandeur de peut-être 3 000 000 000 $ pour les opportunités économiques, les ajouts à une installation.

M. Ciaccia: Non, ce que je voulais savoir... Le 20 TWh, c'est la croissance; 14, c'est pour consommation locale; 6, c'est pour exportation. Alors, ça veut dire quasiment deux tiers, un tiers. Alors, ça veut dire que un tiers de tous les investissements, c'est pour l'exportation.

M. Caillé (André): Alors, voici. Pour le 20 TWh, d'abord, si on regarde du côté production, il y en a 12 qui viennent de l'hydraulicité moyenne parce que, quand on planifie pour cinq ans, on prend l'hydraulicité moyenne. Évidemment, on ne fait pas ça comme ça pour le budget de l'année suivante, mais prenons une affaire de moyen terme, on prend l'hydraulicité moyenne. Alors, ça fait 12 TWh. Il en manque huit; le huit, c'est les chiffres que Thierry vient de vous donner.

Le Président (M. Sirros): Pour les fins du Journal des débats , le monsieur qui parlait avant, c'est M. Thierry Vandal. Si vous voulez ajouter votre titre pour les fins du Journal des débats .

M. Vandal (Thierry): Thierry Vandal, vice-président, planification stratégique et développement.

Le Président (M. Sirros): Merci.

M. Ciaccia: La raison pour laquelle je voulais avoir ces chiffres, c'est parce que, d'un côté, on sait que le marché local, c'est des ventes garanties. On sait que les exportations, à moins qu'on ait des contrats à long terme, c'est un risque. Est-ce que vous avez préparé différents scénarios? Moi, j'espère... parce que je vous trouve très bon vendeur, vous étiez toujours un bon vendeur, puis vous vendez bien votre salade, et, moi, j'espère que vous êtes capable, à l'extérieur de la commission parlementaire, à tous les clients, vendre les 6 TWh. Il n'y a rien qui me ferait un plus grand plaisir. Mais, à titre de parlementaire, pour protéger la population, il faudrait que j'aie différents scénarios pour dire: Si les 6 TWh, je ne les vends pas tous, c'est quoi l'investissement, puis c'est quoi l'effet sur les autres, sur les tarifs? Puis, si vous dites qu'il n'y a pas d'effet sur les tarifs, il va y avoir des effets sur le gouvernement, il va y avoir des effets. Il faut que quelqu'un paie pour ça. Alors, c'est quoi, ce risque-là?

(12 h 20)

Dans le passé, par exemple, on devançait certains travaux et, durant le temps de devancement, on pouvait prendre le risque sur ce montant-là pour le vendre. Mais on savait qu'à un certain moment donné c'était garanti que tous ces montants-là seraient utilisés par le Québec. Votre 20 TWh, si vous ne vendez pas à l'exportation, à quelle année la croissance du Québec va être telle qu'ils vont pouvoir acheter tout le 20 TWh? Combien d'années de plus?

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député.

M. Vandal (Thierry): Il y a plusieurs questions, M. le député, dans votre question. Je vais essayer de les décomposer, si vous permettez.

Premièrement, il y a le niveau d'investissement. Vous posez la question: Quel est le niveau d'investissement associé à ces 6 TWh de ventes additionnelles que l'on entend réaliser de 1998 à l'année 2002 sur les marchés d'exportation? Je vous donnais le chiffre de 6 000 000 000 $, grosso modo. La moitié du 13 000 000 000 $, 6 500 000 000 $, c'est de la production. Le reste, c'est du transport et de la distribution, de l'international, enfin, tous les autres éléments qui sont dans le plan stratégique. Donc, la moitié du 13 000 000 000 $, c'est de la production. Dans cette moitié-là, il y a une partie significative, la moitié encore, qui est nécessaire pour maintenir les actifs existants, ceux qui servent l'ensemble des Québécois, dans un état de fonctionnement, un état d'efficacité optimale. Donc, ça, c'est des investissements qu'on appelle de pérennité. Il reste donc quoi? Il reste, grosso modo, 3 000 000 000 $ pour ajouter à notre capacité de production, pour saisir les opportunités économiques auxquelles André Caillé référait. Et si on prend des chiffres – encore là, on y va de façon macro – sur l'ensemble des ajouts de ventes, il y en a 70 % qui sont pour les marchés québécois et 30 % pour les marchés hors Québec. Donc, je pourrais vous suggérer que, du 3 000 000 000 $, il y en a 30 % qui, en principe, est associé de façon assez directe aux marchés d'exportation. Ça vous donne une idée du niveau d'engagement additionnel que l'on peut concevoir pour servir l'ensemble de nos marchés, et, à l'intérieur de l'ensemble de nos marchés, il y a une composante hors Québec.

La question posée maintenant: Quel serait... si les marchés hors Québec ne se réalisent pas? Je vous dirais que, dans ce contexte-là, il faut voir la perspective qui se présente à nous par rapport à une perspective qui a pu exister par le passé. Par le passé, on s'est retrouvé souvent dans une obligation d'assurer des ventes fermes, des ventes sur des contrats de long terme où on était pris dans des négociations, souvent de gouvernement à gouvernement, des négociations qui exigeaient des engagements de très long terme par des utilités publiques ou leurs actionnaires. Ce monde-là n'existe plus. On est maintenant dans une perspective où, comme dans la plupart des autres commodités, l'électricité peut se transiger sur des marchés qui sont de libre accès, d'où l'intérêt d'ouvrir notre réseau de transport en 1997, des marchés de libre accès où, essentiellement, à tous les jours, à toutes les heures, à toutes les minutes, on a la capacité, dans la mesure où on est compétitif, de placer notre production. Et Hydro-Québec, l'ensemble des Québécois à titre d'actionnaires ont des outils qui sont uniques quant à leur intérêt pour jouer dans un marché comme celui-là: la capacité de stockage, la capacité d'interconnexions sur des marchés qui nous entourent, qui sont des marchés où, un, les gens ont les moyens de payer les prix et, deux, les ressources disponibles sur ces marchés-là sont relativement moins favorables que les nôtres: le nucléaire et ses problèmes, l'absence de ressources locales. Donc, on a à la fois les outils et les marchés pour jouer dans un contexte où on n'a pas besoin d'attendre ici la signature d'un contrat de long terme, un contrat de 20 ans, pour enclencher la réalisation de nos ouvrages. On doit être convaincus de la compétitivité de nos ouvrages, et c'est là où la règle de 0,03 $, qui est une règle parmi les trois, prend toute sa signification.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député, je dois vous interrompre. On a déjà dépassé le temps.

M. Ciaccia: Je vais revenir.

Le Président (M. Sirros): Alors, ça va être au député de Groulx, puis il restera, à la fin, une quinzaine de minutes pour l'opposition. M. le député de Groulx.


Tarifs exigés des États du Nord-Est américain

M. Kieffer: Alors, M. Filion, M. Vandal, bonjour. Rebonjour, M. Caillé. Vous connaissez évidemment mes liens étroits avec les parlementaires américains et les préoccupations de ceux-ci. Ces deux dernières années, je vous avoue que l'élément essentiel des discussions tourne autour de la déréglementation, comment ils vont gérer cette déréglementation, qu'est-ce qu'ils vont faire avec l'atomique. Je pense, entre autres, au Connecticut, à l'heure actuelle, où à la fois la représentante et la sénatrice s'arrachent les cheveux parce que le nucléaire, ça s'éteint dans les quatre, cinq prochaines années, gros maximum. Je pense à Long Island où il y a un plan atomique tout neuf qui a coûté 12 000 000 000 $ et qui ne partira jamais. Il ne partira pas, là. Il est neuf. Ils ne le mettront pas en marche. Il y a des explications à ce phénomène-là, et je pense que vous les avez soulevées tantôt en disant que le Québec, évidemment, était gracié par le ciel d'avoir en main propre des sources énergétiques particulièrement abondantes et surtout non polluantes, qui est une préoccupation majeure dans le Nord-Est des États-Unis. Lorsqu'on a rencontré les groupes, il y a 10 jours, cet aspect-là de votre plan stratégique, évidemment, a provoqué beaucoup de réactions. Je vais donc vous poser une série de questions, les plus pointues possible, parce que j'ai besoin d'avoir des réponses précises et chiffrables.

Une des remarques qu'on nous a souvent faite réfère à la page 32, le dernier paragraphe du plan stratégique, où vous dites: «Hydro-Québec entend réaliser, dans l'ensemble des marchés hors Québec, des ventes annuelles de 20 TWh en 2002, soit 6 TWh de plus qu'en 1997, une augmentation de plus de 40 %.» Ça, ça va jusqu'à maintenant. Là où ça pose problème: «L'entreprise prévoit que ces ventes seront réalisées à un prix moyen, en 2002, de 25 % supérieur à celui de 1997.» Ça, ça a causé de très sérieux problèmes, surtout, surtout que cette hausse se situe dans un processus de déréglementation dont l'objectif est de baisser les tarifs. Alors, j'apprécierais que vous m'expliquiez comment est-ce qu'on peut en arriver à une hausse de 25 % des tarifs dans le Nord-Est d'ici 2002.

M. Caillé (André): M. le Président, je pense que c'est une question cruciale. J'aimerais déposer, si ça n'a pas déjà été fait, un document que mon collègue tient ici.

Le Président (M. Sirros): Oui, c'est déjà fait.

M. Caillé (André): Vous l'avez? Tant mieux.

Le Président (M. Sirros): Ce document est intitulé Tendance des prix de l'électricité de base .

Une voix: C'est ça, oui.

M. Caillé (André): Exactement. Si vous regardez, sur le tableau, l'année 1997... Puis on va tenter de réconcilier les dires des uns et des autres aussi, en même temps – je parle des parlementaires américains. Vous voyez que le prix de gros, pour le marché, pour l'électricité, en 1997 – le prix de gros, on est sur le marché court terme, ici – est de 0,029 $ à 0,032 $ et que le prix de détail pour tout ça, 0,069 $, pour la production. D'accord?

La transition, là, ça veut dire l'ouverture des marchés et la déréglementation. Il n'y a plus deux sortes de prix. Il n'y a plus un prix réglementé puis un prix non réglementé. Là, il va y avoir rien qu'un seul prix résultant de tout ça et qui va varier dans le temps, selon l'offre et la demande. En pointe, ça va être élevé; en période de faible demande, ça va être bas.

Je le vous disais, regardez, le marché déréglementé aux États-Unis, à l'extrême droite, 0,035 $; ça, c'est le coût marginal d'une centrale thermique. Je suis propriétaire, un matin, d'une centrale thermique, mon capital est investi, tout est là. Pour produire, mon coût marginal, ça me coûte 0,035 $. Donc, à 0,035 $ et plus, j'allume les feux, en quelque sorte. D'accord? En bas de ça, je n'allume pas parce que je perds de l'argent. Et ça, ça va jusqu'où? Jusqu'à 0,057 $, qui est le prix de qui? Ça, c'est le prix de celui, par exemple, qui, il y a deux semaines, s'est engagé à construire une usine de 1 000 MW en utilisant du gaz naturel canadien, prix de l'Alberta plus transport, plus transport sur Iroquois aux États-Unis, vers la Nouvelle-Angleterre. Lui, il est à 0,057 $. D'accord? Alors, le prix chaque jour, dépendant de la demande, il va donc osciller entre 0,035 $ et 0,057 $.

(12 h 30)

Qu'est-ce que fera Hydro-Québec? À Hydro-Québec, nous, on a la capacité de stocker. On n'est pas obligé de vendre. Incidemment, les gens comme Enron, qui déclarent les capacités additionnelles, ils déclarent les capacités installées parce que, des réservoirs, ils n'en ont pas. Ils ne sont pas comme nous. La capacité installée, ça ne change pas du jour au lendemain, c'est toujours la même chose. Quand tu es dans le thermique, tu ne peux pas dire, un soir, que tu as tant et, le lendemain, que tu as moins. C'est fixe, ça, puis c'est fini, puis tout le monde sait ça. Mais, quand on est dans l'hydraulique, la quantité d'énergie en arrière, ça dépend du niveau de l'eau qu'il y a dans le barrage, on sait tous ça ici. Alors, nous, avec des interconnexions, est-ce qu'on va les utiliser à 100 % tous les jours, les interconnexions? Non. On va les utiliser juste quand ça va être des prix en forte demande, à 0,049 $ et plus. C'est le 0,049 $ qui représente le 25 % de plus que le marché, comme ils le voient aujourd'hui.

On est en transition. L'année dernière, Hydro-Québec avait... La première année que je suis arrivé, c'était donc 1996. En 1996, le prix sur le court terme avait été de 0,025 $. L'an passé, on a fait 0,035 $. On voit que... Puis cet été... Le plus révélateur, c'est de regarder ce que les gens offrent pour le futur, parce qu'il y a un marché du futur aujourd'hui. Et là ça montre, au mois de juillet 1998, 0,40 $...

Une voix: 0,04 $.

M. Caillé (André): 0,04 $, oui. 0,04 $US multiplié par...

Une voix: 0,056 $.

M. Caillé (André): 0,056 $, 0,057 $. Qui fait ça, cette offre-là? C'est celui qui a bâti une offre, qui a une usine de cogénération au gaz naturel.

M. Kieffer: Donc, si je comprends bien...

M. Caillé (André): Puis il y a quelqu'un pour l'acheter. C'est...

M. Kieffer: C'est ça. Si je comprends bien – et là je veux avoir un oui ou un non – votre prévision de 25 % est basée sur une politique volontariste qui dit qu'en bas de 0,049 $ on ne vend pas, on achète – mettons, ça pourrait aller aussi loin que ça – et en haut de 0,049 $ on vend parce que c'est là qu'on va réaliser ce profit ou cette croissance de profit de 25 %. C'est bien ça?

M. Caillé (André): Bien, oui, c'est ça. La réponse est oui.

M. Kieffer: Donc, c'est un peu le même principe qui encadre vos coûts de production. Vous avez dit qu'en haut de 0,03 $ il n'y en a pas, en bas de 0,03 $ on construit.

M. Caillé (André): C'est ça.

M. Kieffer: C'est beau. O.K. Quelles ont été, l'an dernier, les ventes qui ont été réalisées aux États-Unis, en termes de térawattheures? Combien vous avez vendu de térawattheures aux Américains l'an dernier?

M. Caillé (André): Quatorze.

M. Kieffer: Quatorze.

M. Caillé (André): Prix moyen canadien, 0,04 $.

M. Kieffer: O.K. Ça fait à peu près 20 ans qu'on vend aux Américains. Donc, dans les derniers 20 ans, quelles ont été les meilleures années? Et combien de térawattheures on a vendus?

M. Caillé (André): Probablement qu'on a déjà exporté... M. Ciaccia est probablement plus avisé que moi sur la question. Il me semble que ça a déjà été jusqu'à 25 TW.

M. Kieffer: On me dit 29.

M. Caillé (André): Vingt-neuf? C'est possible, mais ça peut prendre 42. Si on décidait: On sort tout le temps, ça va sortir à 42 TW.

M. Kieffer: Notre capacité est de 42 TW.

M. Ciaccia: En argent, donnez donc ce chiffre-là pour que...

M. Caillé (André): En argent? À quel prix on vendait?

M. Ciaccia: Non, non, le prix total, les exportations totales.

M. Kieffer: M. le Président, est-ce que je puis avoir le temps qui m'est alloué?

M. Caillé (André): M. le Président, Yves Filion.

Le Président (M. Sirros): Oui, vous avez raison, M. le député. Alors, M. le député de Mont-Royal, ne demandez pas les chiffres en argent. Laissez le député demander ce qu'il veut bien.

M. Caillé (André): Excusez-moi d'avoir brimé les...

M. Ciaccia: Excusez-moi! Il ne veut pas avoir ça en argent.

M. Kieffer: Donc, les meilleures années, c'est 29. Une capacité absolue, c'est 42. L'an dernier, on était à 14. En quelle année on a atteint ce 29 là?

M. Filion (Yves): M. le Président, sans donner une date précise, je dirais que c'est probablement en 1987, où on a une pointe dans la vente. Et nous avons connu une très bonne année en 1995, où nous avons 25 TWh. Et, en 1995, ça représentait 800 000 000 $ de revenus.

M. Kieffer: O.K. Vos objectifs pour 2002, c'est?

M. Caillé (André): Vingt.

M. Kieffer: Alors, on est encore très loin des sommets qu'on a atteints à certains moments donnés dans cette histoire de la croissance de nos ventes aux Américains. En d'autres mots, il n'y a rien, il n'y a rien de particulièrement révolutionnaire ou de transformation fondamentale quant aux quantités d'énergie. Après ça, on parlera des facteurs. Mais, quant aux quantités d'énergie, là...

M. Caillé (André): Le vrai changement, c'est l'ouverture. Quant aux quantités...

M. Kieffer: J'y arrive. Et je vais donner satisfaction au député de Mont-Royal. Ces 20 ans, là... Et ça, c'est une question qui est revenue souvent, il y a beaucoup de gens qui prétendent que ce n'était pas rentable, qu'on a perdu de l'argent. Il y a du monde qui nous ont dit: Vous avez perdu de l'argent. Avant la déréglementation – parce qu'on parlera de la déréglementation après – Hydro-Québec vendait à rabais, en dessous du coût de production, du coût de transport son électricité aux Américains. Ça, ça me préoccupe particulièrement.

M. Caillé (André): Mon collègue va vous donner la réponse.

M. Filion (Yves): Écoutez, je pense qu'on a fait allusion tout à l'heure aux ventes sur les marchés voisins et aux surplus et aux risques qu'on encourait. Nous avons vendu sur les réseaux voisins, en 1995, entre autres, des quantités assez importantes parce que, à ce moment-là, avec la mise en service des centrales de La Grande phase II, qui se sont terminées à peu près en 1995, 1996, nous avions des surplus qu'il fallait écouler sur les marchés. Alors, nous avons donc vendu pour réduire l'impact financier négatif sur Hydro-Québec au niveau de ses surplus.

Quand on parlait tout à l'heure... Je veux revenir peut-être à la question qui a été posée antérieurement parce que je pense qu'il y a des liens. Aujourd'hui, en 1997, avec la capacité installée à Hydro-Québec, nous avons un surplus de 12 TWh actuels, à hydraulicité moyenne. Alors, ce 12 TWh là, au cours des cinq prochaines années, va surtout servir à satisfaire la croissance de la demande au Québec, qui est, elle, de 14 TWh. Mais, pour les cinq prochaines années, elle ne sera pas suffisante. Donc, ça veut dire qu'il va falloir entreprendre d'autres projets de construction pour ajouter au moins un 8 TWh additionnel, dont deux vont servir, d'ici 2002, pour répondre aux besoins du Québec. Les six autres, nécessairement, sont pour être vendus sur le marché américain. Mais, si jamais on se trompait, en dedans de deux ans et demi, trois ans, ça serait requis pour la demande au Québec, ce qui constituerait, à ce moment-là, un surplus moindre que le surplus que nous avons aujourd'hui, à hydraulicité moyenne.

M. Kieffer: Sur 20 ans, on «a-t-u» fait de l'argent ou on n'en a pas fait?

M. Filion (Yves): Nous avons, avec les Américains, actuellement, des contrats long terme qui sont très payants. Nous avons un contrat avec le Vermont, par exemple, qui est très payant. Nous avons un contrat aussi, long terme, avec la Nouvelle-Angleterre, qui a été rentable.

Sur le marché court terme, là, je dois admettre qu'on doit, à ce moment-là, regarder le marché qui existait au début des années quatre-vingt-dix. Un marché de surplus, véritablement un marché de surplus parce qu'il y a eu une demande réelle d'électricité inférieure à ce qui avait été prévu. Et là les prix ont été bas. On a vu des prix à 0,02 $ le kilowattheure. Maintenant, depuis deux ans, ces surplus-là sont en train de fondre, avec la fermeture des centrales nucléaires, avec la croissance de la demande et l'ouverture des marchés, et là le prix, maintenant, le prix de base, qui était très élevé, diminue. Le prix court terme, lui, augmente et il va arriver au prix qu'on vous a présenté sur le tableau de tout à l'heure. C'est notre lecture de la situation, qui est relativement conservatrice.

M. Caillé (André): M. le Président, ça, c'est un point très important à comprendre pour comprendre l'évolution des prix. Avant, quand c'était réglementé... Mettons-nous dans la position d'un producteur américain. Il a une usine qui est là pour produire – supposons que c'est une usine thermique – et là il va aller à sa régie – c'est réglementé – puis il va dire: Tous mes coûts fixes, ici, doivent être absorbés par mes clients, tous mes coûts fixes jusqu'au dernier. Alors, il faisait payer tous ces coûts-là, y compris des coûts d'entretien que d'aucuns auraient pu qualifier de coûts marginaux. Mais on en mettait, on en mettait jusqu'au maximum. Alors, les clients de ces utilités publiques là, révoltés aujourd'hui, payaient tout. Ça laissait un coût marginal, pour l'électricité, très faible, donc un coût sur le marché du court terme où Hydro-Québec ne pouvait pas, avec des projet à 0,05 $, faire des bénéfices. Puis il y a eu des chiffres avec des oreilles, dans mon langage, qui se sont dégagés des États, n'est-ce pas.

Voyons, maintenant, après ouverture. Il n'y a plus de prix pour le marché réglementé ou un autre prix, il y a un prix. Ça veut dire que notre même producteur, il est obligé d'affecter toute la partie de ses coûts à toutes ses ventes. Voyez-vous? Puis il y a une partie de ses coûts qui était indéfinissable, marginale, et pas marginale, enfin sur la ligne; bien là il est obligé de les mettre dans le marginal, autrement il n'est plus capable de vendre quoi que ce soit parce qu'il n'y a plus de clients captifs à qui passer le 0,069 $. C'est facile, il n'y en a plus, de ça. Alors, comme il n'est pas capable de faire ça, il faut qu'il passe à plus de clients, ce qui fait en sorte que quoi? Ce qui fait que vos collègues parlementaires, aux États-Unis, ils vont être contents parce que ça va baisser le prix, ce qui fait que des gens comme nous vont avoir une opportunité. Parce que nous qui avions le prix, ici, en bas, puis on s'en va vers un prix moyen, on ne peut qu'augmenter; on partait du plancher. Lui, il partait du plafond; nous, on partait du plancher. On se rencontre. Nous, on gagne; lui, bien... Ça fait des «stranded costs», puis tout ce que vous savez.

M. Kieffer: Une petite remarque et une dernière question. Au Vermont – pour le bénéfice de la commission – à l'heure actuelle, l'hydroélectricité vendue par Hydro-Québec à l'État du Vermont et considérée comme un «stranded cost». Ça veut dire quoi, concrètement? Ça veut dire qu'il paie très cher. C'est ça que ça veut dire, hein?

M. Caillé (André): Au-dessus du prix du marché.

M. Kieffer: Au-dessus du prix du marché. Voilà. Alors, c'est difficilement compatible avec des pertes. Pour moi, c'est la conclusion que j'en tire, pour ce qui est du cas du Vermont.

M. Caillé (André): C'est vrai.

M. Kieffer: Une dernière question. Vous avez participé au projet de déréglementation du New Hampshire de vente au détail. Vous aviez un projet-pilote. Il y a un des groupes qui est venu ici, qui est Option consommateurs, qui, dans son mémoire, à la page 6, déclarait la chose suivante – et je lis textuellement: «À titre d'exemple, dans le cadre du projet-pilote auquel participe Hydro-Québec dans l'État du New Hampshire, les prix typiques de production étaient d'environ 0,025 $US le kilowattheure, alors que les autres frais payés – parce que le New Hampshire est à, quoi, 0,11 $US, 0,12 $US ou a peu près – par les consommateurs ensemble comptaient pour près de 80 % du coût total de la facture du consommateur.» O.K.? Bon, ils essayaient de dépecer la facture. Vous avez, à la page 27 du plan stratégique, une décomposition entre les fonctions fourniture, transport et distribution.

Une voix: À quelle page?

M. Kieffer: Page 27. Et, quand on fait le calcul de la portion occupée par la production versus la portion occupée par le transport et la distribution, on arrive, grosso modo, au fait que le transport et la distribution représentent à peu près 49 % du coût de la facture.

(12 h 40)

Moi, je leur ai posé la question. Je leur ai dit: Écoutez, on a à peu près les mêmes fils ici qu'aux États-Unis, on a à peu près le même réseau de distribution, il n'y a pas de différences technologiques majeures entre la façon dont on produit et dont on distribue et dont on transporte ici versus le New Hampshire. Vous nous dites que les coûts autres que les coûts de production représentent 80 % de la facture, alors qu'Hydro-Québec, elle, elle nous dit que ça représente 49 %. Moi, je veux bien qu'on erre un peu sur deux, trois, cinq, mais pas 40 % ou pas 35 %. Êtes-vous capables d'expliquer la différence entre l'évaluation que fait Option consommateurs de l'expérience à laquelle vous avez participé au New Hampshire et ce que vous dites dans votre plan stratégique? Parce que...

M. Caillé (André): Mon collègue de droite va vous donner une partie de la réponse. Il s'agit de...

Le Président (M. Sirros): ...question, M. le député.

M. Kieffer: Tout ça pour vous dire que plus tu situes les coûts de production bas, plus ta capacité de vendre aux Américains va baisser, évidemment.

M. Vandal (Thierry): Il y a deux écueils à éviter. Premièrement, c'est de tirer des conclusions un petit peu héroïques à partir d'un projet-pilote portant sur quelques milliers de clients où, essentiellement, tous les commerçants nord-américains ont mis du focus pour aller tirer, puiser une expérience qui pourrait être profitable lorsque ces mêmes possibilités-là s'ouvriraient en Californie, au Massachusetts, etc. Donc, être bien prudent de tirer des conclusions de l'expérience-pilote portant sur quelques milliers de clients au New Hampshire. Le New Hampshire, vous avez tout à fait raison, les tarifs se situent au-delà de 0,10 $. Or, transporter et distribuer les fils auxquels vous référez au New Hampshire, en termes d'ordre de grandeur, ce n'est pas significativement différent de ce que ça peut être au Québec; voire même, certains pourraient penser qu'au Québec, étant donné les distances, le transport est un peu plus coûteux.

Mais, si on parle d'une comparaison relative, on parle de 0,03 $. Il y a peut-être un 0,03 $ qui est là pour transport et distribution, ce qui veut dire que, dans leur 0,10 $ et plus, il y a une partie importante qui est là pour la production, au même titre que, pour nous, il y a 0,03 $, dans la moitié du 0,06 $, pour de la production. Alors, le 0,07 $, qu'on y arrive en regardant les transactions qui se sont faites sur des actifs – et ça, c'est la loi du marché qui en fait la preuve, on est à 0,057 – qu'on y arrive en déduisant les tarifs existants, le 0,03 $ pour le transport et la distribution, par tous les chemins, on arrive à une conclusion qui est celle, inéluctable, qu'on va profiter de l'ouverture et que, malheureusement, certains Américains vont perdre au change.

M. Kieffer: Ce que vous me dites...

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député, je dois vous...

M. Kieffer: Une dernière remarque, M. le Président. Ce que vous me dites, c'est que, lorsqu'on fixe à 0,02 $...

Le Président (M. Sirros): Si vous permettez, hein?

M. Kieffer: ...les coûts de production US au New Hampshire, on se trompe, il y a un problème sérieux. Merci.

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Je veux faire la remarque suivante à tous les députés. Il arrive un moment où, effectivement, le temps est écoulé. Je comprends bien que vous voulez ignorer la présidence puis procéder comme si de rien n'était, mais ça va soulever des questions de règlement, de l'autre côté. Alors, dorénavant, s'il vous plaît, de part et d'autre, si je vous annonce que votre temps est écoulé, ça veut dire que c'est écoulé à ce moment-là.

M. Kieffer: ...reproche?

Le Président (M. Sirros): C'est un commentaire général à tout le monde. Alors, M. le député d'Outremont, s'il vous plaît, il vous reste 15 minutes.


Implication des communautés locales et régionales (suite)

M. Laporte: M. le Président, j'aimerais aborder la question du «de concert avec les communautés locales» qui, si j'ai bien compris, est très chère au député de Joliette, parce qu'il s'est prononcé d'abondance là-dessus. «Accroître l'accessibilité des projets pour les milieux hôtes», le point 1 de la page 35. Le président d'Hydro-Québec a fait un commentaire fort intéressant là-dessus – une chance que c'est enregistré parce que c'est un commentaire fort important – quand il nous a dit qu'il serait peut-être opportun d'examiner le processus de gestion des projets du point de vue des communautés locales. Il nous a dit que la gestion de projets par décret, ce n'est pas une gestion qui est très compatible avec l'établissement des partenariats, que, pour y arriver, il faut avoir une gestion qui est plus conforme à ce que Michel Crozier, un sociologue français, appelle la gestion par négociation ou par participation. Donc, sur ça, évidemment, je ne peux pas être plus d'accord qu'avec le président d'Hydro-Québec. Mais j'ai trouvé que les propos du président d'Hydro-Québec demeuraient un peu ambigus là-dessus.

Et ma question, c'est la suivante: Est-ce que le président d'Hydro-Québec est en train de dire à cette commission parlementaire et, indirectement, au ministre que ce qu'il faut modifier, c'est la perception qu'on a du processus au sein des communautés autochtones ou s'il faut modifier la structure, la nature du processus? Et, si le président d'Hydro-Québec est d'accord pour que soit modifiée la nature du processus – je ne sais pas exactement quelle est son opinion là-dessus – ma deuxième question, c'est de lui demander: Comment il réconcilie son attitude là-dessus avec la décision qui a été prise récemment à Rivière-des-Prairies et que mon collègue le député de LaFontaine s'évertue à dénoncer...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laporte: ...qui ne me paraît pas être un modèle de gestion partenariale, de négociation et de participation, mais qui me paraît être vraiment un modèle de gestion par décret? C'est mes deux questions, M. le Président.

M. Caillé (André): M. le Président, quand je répondais à la question du ministre, la question qui était posée, enfin, celle à laquelle j'ai tenté de répondre, c'est de savoir: Est-ce qu'il faut un décret pour faire des études? Moi, je pense que non, qu'Hydro-Québec ne devrait pas avoir à demander un décret pour faire des études, parce que ça dessert Hydro-Québec quand on les obtient, on a l'air trop «rouleau compresseur».

Quant au décret concernant Rivière-des-Prairies, je voudrais rappeler ici au député – moi, j'ai été au ministère de l'Environnement dans une vie antérieure – que tout le processus in extenso avait été suivi, qu'il y avait eu recommandations que j'ai lues et pu voir, d'ailleurs des recommandations du Bureau d'audiences publiques, et que, quant à moi, le rôle que j'y ai joué, c'était de rappeler au ministre – puis c'était avant le verglas – qu'ici il allait manquer pour 150 MW de puissance à un moment donné et que je me préparais à faire une liste des clients pour les interrompre, le cas échéant, si ça devenait nécessaire. Et j'ai aussi dit que cette ligne-là, j'en avais besoin maintenant et j'en avais besoin pour satisfaire l'est de Montréal et renforcer l'alimentation de Montréal. Et je lui ai recommandé, oui, d'adopter le décret. Pour le reste, le président d'Hydro-Québec n'adopte pas lui-même de décret.

M. Laporte: Non, mais, ma question, M. le président, c'est: Est-ce que le président d'Hydro-Québec, du point de vue de la perception sociale, est d'avis que le processus qui a été suivi, à ce moment-là, et la décision qui a été annoncée en cours de crise est conforme à ce qu'il semble nous affirmer comme étant le modèle auquel il souscrit, à savoir un modèle plus basé sur le partenariat avec les communautés locales, la participation des communautés locales. Il me paraît y avoir une contradiction, ici.

M. Caillé (André): Oui. Je n'ai pas précisé un point. C'est qu'il faut comprendre que, dans un projet donné, il y a un décret pour étudier et il y a d'autres décisions en cours de route pour faire toutes sortes d'autres choses et ça finit par un décret pour construire. Bref, le nombre d'autorisations, d'étapes qu'on doit franchir sont nombreuses. Ce que j'ai dit, moi, c'est que je n'ai pas besoin de me présenter devant une population locale avec un décret pour entreprendre des discussions en vue d'obtenir un partenariat. Quant aux autres décrets, M. le député, ils vont demeurer, je suppose... En tout cas, il n'a jamais été question de soustraire Hydro-Québec à quelqu'autre décret que ce soit.

(12 h 50)

M. Laporte: Bien, là, je vais poser ma question à un niveau plus élevé encore. Ce que je veux savoir du président d'Hydro-Québec, compte tenu de l'orientation de la page 35, je veux savoir s'il considère ce modèle de gestion, qui me paraît être le modèle toujours prédominant chez lui, à savoir un modèle de gestion par décret – pas seulement pour obtenir des autorisations de recherche, pour prendre des décisions qui engagent le sort des communautés locales – je veux savoir si ce modèle de gestion par décret, vous vous y ralliez plutôt que de vous rallier à un modèle de gestion qui est plus basé sur la négociation, la consultation et la participation, ce qui ne me paraît pas avoir été un modèle de gestion appliqué dans le cas de la décision de Rivière-des-Prairies. C'est ça, ma question, moi. Où est-ce que vous vous situez là-dessus monsieur?

M. Caillé (André): Pour ce qui concerne la consultation à Rivière-des-Prairies, je pense même que la consultation s'est faite avant ma nomination à Hydro-Québec. Alors, je n'en étais pas. Et ça a suivi un processus normal, quant à moi, en tout cas celui que je connais et qui a été établi au temps où j'étais sous-ministre de l'Environnement. En ce qui concerne les autres projets, il y aura toujours des décrets, je pense, pour ne pas qu'on... Il n'a jamais été question, en tout cas, de nous soustraire de l'application de décrets pour faire un barrage, de nous soustraire de l'application de décrets pour décider de ces choses-là, ce qui n'empêche pas, à mon sens...

M. Laporte: Oui, je suis bien d'accord.

M. Caillé (André): Ce n'est pas parce que l'exercice se termine par un décret nous autorisant à construire que ça empêche la consultation avant. Tout ce que j'ai dit ici, M. le député, c'est qu'il me semble qu'au moment de faire des études, quand il s'agit de mesurer des débits dans des cours d'eaux, ce n'est pas nécessaire qu'Hydro-Québec ait l'obligation d'obtenir un décret. C'est tout ce que j'ai dit.

Le Président (M. Sirros): Qu'est-ce qui vous empêche, M. Caillé, de demander un décret pour faire les études, une fois que vous aurez convenu avec les communautés locales que c'est le site qui vous intéresse? Est-ce que je comprends bien que vous ne voulez pas avoir de décret pour autoriser les études? Et, si c'est le cas, comment tout le reste de la population, à ce moment-là, va savoir qu'il y a des études en cours pour une possibilité éventuelle de telle chose?

M. Caillé (André): Il y a deux choses. Premièrement, le décret, ça donne, dans l'esprit des populations locales, une décision plus forte que celle que le gouvernement a décidé, et ça, ce n'est pas...

Le Président (M. Sirros): Oui, mais vous pouvez toujours le demander après avoir convenu avec les communautés.

M. Caillé (André): Non, on...

Le Président (M. Sirros): Je veux comprendre si vous demandez au gouvernement de retarder le moment de l'émission du décret pour l'autorisation d'études ou si vous demandez l'abolition.

M. Caillé (André): Alors, ce que je dis, c'est qu'il y a des démarches qu'on a à faire. On a à connaître les projets et, des fois, à aller sur le terrain avant pour savoir de quoi on parle nous-mêmes, parce qu'il faut établir un minimum de connaissances avant d'engager... Dans le moment, on fait toute une série de décrets pour nous autoriser à faire ça. Ça implique des délais et ça crée une perception qu'on a déjà décidé, que le gouvernement a déjà décidé, perception qui est négative sur les gens.

Le Président (M. Sirros): Je ne suis peut-être pas très clair dans ma question. Je veux juste que...

M. Caillé (André): Je voudrais vous rassurer, M. le Président, que je n'ai aucune objection à ce qu'Hydro-Québec révèle tous les endroits où on fait des études...

Le Président (M. Sirros): Non, ce n'est pas ça, la question. Qu'est-ce qui vous empêche, avant d'aller sur le territoire pour faire les études, d'aller voir les communautés locales puis de leur dire que c'est de votre intention, si ça les intéresse, d'aller sur le territoire examiner la possibilité de... puis, si elles se mettent d'accord avec vous d'aller demander le décret, à ce moment-là, pour que vous ayez l'autorisation pour les études?

M. Caillé (André): Moi, j'ai vu quelques projets, M. le Président, où on passe par cette procédure, et ils ont été retardés quatre, cinq, six mois. En plus, il y a un retard. Et vous savez que, dans ces projets, l'économique, à cause des frais financiers... On a réussi, par exemple, à Sainte-Marguerite, parce qu'on va capter une crue additionnelle, à engranger, à créer une richesse additionnelle pour les Québécois de 50 000 000 $. Tout ce que je dis, moi, c'est que, si la chose est possible, si le gouvernement peut considérer que ce n'est pas d'une absolue nécessité, ce décret, auparavant, qu'on le fasse, et ça va simplifier les procédures. Mais, si on veut communiquer à tout le monde qu'on fait des études à des endroits, je n'ai aucun problème.

Une voix: Est-ce que vous me permettez...

Le Président (M. Sirros): Oui, peut-être, parce que je ne suis pas sûr d'avoir eu... En tout cas, il y a le député d'Outremont qui a toujours le droit de parole.

M. Laporte: ...la parole pour transmettre au ministre, au député de Joliette, disons, la question suivante, à savoir: Compte tenu de la valorisation de la concertation avec les communautés locales qu'il vient de proclamer, est-ce que lui, il trouve que le processus de décision par décret soit pour obtenir des études ou l'ensemble du processus de décision qui est vraiment inspiré par cette mentalité décrétale là, est-ce que lui, le député de Joliette, il trouve que c'est satisfaisant, que c'est optimal et que c'est conforme aux valeurs qu'il proclame ou bien s'il a des commentaires à faire là-dessus puis des modifications à apporter?

Le Président (M. Sirros): ...commentaires sur les deux points, pour qu'on puisse conclure à 13 heures.

M. Chevrette: Je remercie le député d'Outremont de me poser la question. Je vais répondre. Un, c'est la pratique qui a été utilisée, à cause de la Convention de la Baie James, d'avoir des décrets au niveau des études. Ça, je suis convaincu que M. le député de Mont-Royal est au courant. Ça part de là. C'est à partir de la pratique utilisée lors de la Convention de la Baie James. Première chose.

Deuxième chose. Il est vrai qu'on a fait une discussion, nous, en ce qui regarde l'accélération du processus. Parce que, quand tu passes un décret pour aller faire une étude, aller voir le débit d'une rivière au printemps, tout le monde s'imagine que le projet est adopté. Puis il y en a qui écrivent ça: C'est fait, les jeux sont pipés. Ce n'est pas vrai. L'environnement, tout doit être suivi, tout le processus environnemental doit être suivi. Mais c'est vrai que. dans la tête des gens, ça donne l'impression de...

Personnellement, moi, qu'Hydro-Québec aille discuter avec une communauté, entre vous et moi, avant qu'il y ait un décret d'étude, ce n'est pas moi qui va les empêcher, jamais de ma vie; puis je l'ai dit très clairement au président. Puis je pense qu'il peut aller voir les communautés locales avant même de demander un décret d'étude. Et ça, ça ne me ferait absolument rien, je n'en souffre pas. Au contraire, je pense que ça serait même sain que ça se fasse. Donc, il n'y a aucun problème là-dessus. Mais cette pratique qui existe, pour l'information du député d'Outremont, c'était la pratique lors de la signature de la Convention de la Baie James, qui a été généralisée à l'ensemble des projets.

Le Président (M. Sirros): Question de privilège, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Dans l'entente de la Baie James – excusez-moi, juste pour répondre – le décret s'était fait avec le consentement des communautés locales. Ce n'est pas la même chose que...

M. Chevrette: On ne dit pas qu'il n'y a pas eu consentement...

M. Ciaccia: Il y a eu du décret.

M. Chevrette: On a dit que c'est une pratique qui a été étendue par la suite. C'est ça que...

M. Ciaccia: Oui, mais on ne peut pas faire la comparaison Baie James et La Prairie, parce qu'à la Baie James, oui, et ça a été exigé comme décret, mais avec le consentement des communautés locales.

M. Chevrette: Vous avez parfaitement raison sur ce fait, pendant neuf ans de pouvoir. Puis c'est ça que je vous dis. Mais cette pratique-là a été étendue, n'a jamais été revue. Je suis d'accord avec vous qu'on pourrait très bien modifier...

Le Président (M. Sirros): Comme on parle de pratiques, il est de pratique, à 12 h 58, d'arrêter pour le lunch. Alors, on va se revoir ici à 14 heures, cet après-midi. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 14 h 8)

Le Président (M. Sirros): Alors, je peux constater que tout le monde est là, que nous avons quorum, et on pourrait reprendre nos travaux, parce que chaque période de temps qu'on retarde, ça nous amène plus tard dans l'après-midi, et on a quand même une limite, à 18 heures. Alors, on pourrait continuer. Je pense qu'on était rendu au point où le ministre avait la parole pour les prochaines 15 minutes... ou le côté ministériel, plutôt, et je pense que c'est le député de Johnson qui va, au nom du...

M. Chevrette: Je vais le laisser aller tout de suite.

Le Président (M. Sirros): Oui, c'est ça. O.K. Alors, M. le député de Johnson.


Négociations avec les autochtones

M. Boucher: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, au cours de l'avant-midi, M. le président d'Hydro-Québec, on a parlé du partenariat avec les groupes locaux, notamment les Amérindiens. Nous avons reçu il y a une dizaine de jours, ici, les gens de Betsiamites. Ils ont parlé évidemment des frustrations qu'ils vivaient au niveau du processus de consultation qui était actuellement en cours, ce qu'on leur proposait comme type de démarche, contre laquelle ils s'insurgeaient, et ils souhaitaient un partenariat... plus véritablement un partenariat. À ma grande surprise d'ailleurs, dans les jours qui ont suivi, vous savez qu'ils ont intenté une poursuite de 500 000 000 $ contre Hydro-Québec. J'aimerais que vous nous disiez, puisque ce projet-là de dérivation partielle d'une ou de plusieurs de leurs rivières est important pour les projets d'Hydro-Québec, quels sont les contacts que vous avez actuellement avec cette communauté-là et comment vous pensez pouvoir régler ce litige-là pour aller de l'avant avec ce projet-là.

(14 h 10)

M. Caillé (André): Alors, il y a deux choses que nous allons faire. D'abord, M. le Président, les populations autochtones souhaitent, puis on va se rendre à ce souhait, négocier face à face avec Hydro-Québec, et avec Hydro-Québec seulement. Ils ne souhaitent pas que, par le processus de table de concertation, on réunisse tous les intéressés, qu'il s'agisse de populations autochtones ou d'autres populations. On va leur donner raison là-dessus, c'est-à-dire qu'on aura toujours... on va continuer le processus de table de concertation, mais il y en aura deux. Il y en aura une avec les autochtones puis une autre avec les autres populations. Parce qu'ils ne souhaitaient pas négocier... ou discuter, plutôt, en même temps.

En ce qui concerne la poursuite intentée par les Montagnais, disons qu'elle est intentée, d'abord, contre le gouvernement et Hydro-Québec. Évidemment, je rêve, enfin, j'espère qu'avec le temps on va en arriver à distinguer une relation d'affaires avec Hydro-Québec – une entreprise, entre guillemets, j'espère, traitée comme les autres, par exemple, comme une minière – de la question des droits territoriaux, laquelle question ne peut pas être négociée par Hydro-Québec. C'est une question qui relève d'une négociation qui doit avoir lieu entre le gouvernement du Québec et les populations autochtones.

Hydro-Québec, en la matière, ne peut rien de plus que ne le pourrait n'importe quelle autre entreprise, n'importe quelle autre corporation. Alors, on va essayer de faire la distinction. Elle n'est pas toujours faite, je le sais. Très souvent, puis on le voit dans la poursuite, on poursuit à la fois le gouvernement et Hydro-Québec, mais pas en même temps les autres sociétés, minières et autres. Alors, ce que je souhaite, c'est, avec le temps, arriver à une situation où Hydro-Québec sera traitée comme une autre corporation. Et c'est pour ça que souvent vous me voyez, M. le Président, intervenir publiquement pour dire: «Hydro-Québec comme une autre corporation». Quand on fait d'Hydro-Québec une corporation qui est une extension du gouvernement, on place Hydro-Québec dans des problématiques qu'elle n'a aucun moyen de résoudre. On n'a pas de mandat de la part du gouvernement pour résoudre les questions territoriales.

Alors, quand, pour discuter d'un partenariat d'affaires, on soulève en même temps la question territoriale, nous voici nous retrouvant à une table où nous n'avons pas les moyens de résoudre. Alors, deux actions, deux tables de concertation, dont une table spécifiquement avec les autochtones, et tenter, avec le temps, de séparer ces deux questions comme elles doivent l'être, je crois: la question d'un partenariat économique avec Hydro-Québec de la question des négociations concernant les droits territoriaux.

M. Boucher: Donc, si je comprends bien, vous poursuiviez vos négociations avec les autochtones sur une base d'affaires – c'est ce que je peux comprendre actuellement – et, pour ce qui est de la question territoriale, vous me dites: Bien, on essaie d'écarter ça des négociations. Est-ce qu'il y a un accueil du côté des autochtones actuellement dans cette vision-là que vous avez des ententes futures?

M. Caillé (André): Un accueil, je ne sais pas comment je pourrais qualifier... Je pense que les gens comprennent qu'on n'a pas de mandat pour négocier les questions territoriales. Mais les rapports que j'ai eus, par exemple, il y a de ça, quoi, trois ou quatre semaines, quand j'ai été à Sept-Îles, sur la Côte-Nord, avec les chefs des nations montagnaises... de la nation montagnaise là-bas, des rapports cordiaux où on a pu très bien s'expliquer, et nous n'avons pas, et il ne m'a pas été demandé non plus de négocier des questions de droits territoriaux. On a discuté, par ailleurs, de partenariat d'affaires. Alors, les choses font leur chemin. Ça n'a pas empêché que...

M. Boucher: Mais il me semble qu'il y a un lien assez évident entre la perception qu'on a de sa propriété d'un territoire et le résultat d'une négociation sur une base d'affaires.

M. Caillé (André): Nous, on négocie sur une base d'affaires. Quant à un projet précis d'aménagement, on négocie ça: on sera partenaire ici; on va créer une société en commandite, cette société-là, elle va avoir tant... il y aura tant d'unités de participation dans la société en commandite; vous en détiendrez tant, nous en détiendrons tant, et nous allons avoir des actifs ici, qui seront ces actifs-là qu'on va produire; les résultats des ventes, ce sera telle chose, on va les calculer de telle manière; les coûts, ce sera telle autre chose. C'est strictement une affaire, des affaires, une entreprise, dont on parle.

La question des droits territoriaux puis toutes les problématiques qui s'y rattachent ne sont pas discutées. Nous, on n'a pas les compétences, non plus que le mandat, non plus que la responsabilité de discuter de ces questions. Quand on en vient à des projets précis, ça se fait relativement bien. Mais ça n'empêche pas que... dans les médias, par exemple, ça ne me surprend pas quand je vois, traités sous le même chapeau, gouvernement et Hydro-Québec. Mais, moi, je vais faire... on va faire, à la direction d'Hydro-Québec, tout ce qu'il faut pour faire une distinction. Hydro-Québec, c'est une corporation, une corporation comme les autres. Elle doit être traitée comme les autres à cet égard.


Achat d'électricité des petites centrales

M. Boucher: Je vous remercie. Une autre question, M. le Président. Il y a une dizaine de jours, nous avons rencontré des représentants des constructeurs de petites centrales au Québec, puis je sais que, dans mon comté notamment, il y en a quelques-unes, petites centrales, dans le comté de Johnson, notamment une à Bromptonville, où vous achetez l'électricité de la compagnie Kruger autour de 0,05 $, je pense, du kilowatt. On m'a expliqué, en tout cas ce que j'ai pu comprendre, c'est que, finalement, il y avait une différence entre le coût de production puis le coût de transport, puis, comme il n'y a pas de coût de transport, puisque la centrale est reliée directement à l'usine, vous pouvez donner ce... puis il y a des augmentations sur 20 ans.

Moi, ce que je veux comprendre... c'est que votre projet actuellement, ou vos prévisions, c'est de construire et de produire de l'électricité à 0,03 $, et dès qu'un projet dépasse ça, il n'est pas question de le faire. Est-ce que, ceci étant dit, il n'y aura plus de petites centrales au Québec, à moins qu'elles soient capables de vous produire de l'électricité à ce prix-là?

M. Caillé (André): Alors, concernant, M. le Président, la question des petites centrales et des tarifs uniformes, moi de même, j'ai eu la visite de plusieurs producteurs indépendants pour voir quel était le programme d'Hydro-Québec pour acheter de l'électricité à 0,05 $, 0,06 $, enfin le montant exact n'est pas évoqué. On sait que dans le passé, par APR-91, je pense que ça s'appelait, un appel d'offres qui avait été fait, c'était 0,05 $ et quelques. À partir du moment où le gestionnaire de votre entreprise, l'entreprise qui appartient à tout le monde ici peut obtenir à 0,03 $ un produit, il n'est pas de son pouvoir d'acheter à 0,05 $. Alors, je réponds à tous ces gens-là: Bien, à 0,03 $, on va en acheter autant que vous pourrez en produire. À plus que 0,03 $, eh bien là, il faut s'adresser... pour la production. À plus que 0,03 $, je les invite à s'adresser à la Régie, laquelle pourra statuer sur quel prix on devrait payer. Et je vous rappelle que ça, ça va être un contrat qui va s'ajouter à d'autres contrats dont j'ai parlé ce matin, que l'on retrouve dans le plan des ressources, et qu'on va passer la facture à l'ensemble des clients, forcément. Rien ne se perd, rien ne se crée.

Alors, là, on avance, on dit: Oui, mais ça, ça ne va pas bien parce qu'il n'y a pas de transport dans le cas des petites centrales, parce qu'une petite centrale, ça se trouve directement dans les zones de production. Ma réponse est celle que l'ensemble, une très grande majorité, je pense, de la population suggère, une réponse qui m'a été rappelée ici, en commission parlementaire, la dernière fois, à savoir que le pacte social résultant de la nationalisation de l'électricité, c'est des tarifs uniformes.

Alors, c'est uniforme partout, les tarifs, en ce qui concerne la distribution et le transport. Ça ne dépend plus, depuis la nationalisation, de la distance du consommateur de la région de production. Vous savez comment c'est fait: quand le dentiste Hamel, natif et habitant de cette ville... ils payaient plus cher, eux autres, ici, l'électricité parce qu'ils étaient plus loin des centres de production... il a dit que ce ne serait plus comme ça au Québec. Il n'a pas eu raison en son temps, mais, quelques décennies plus tard, on a dit: Fini! nationalisation, tout le monde pareil, tout le monde le même tarif de fourniture, tout le monde le même tarif de transport, tout le monde le même tarif de distribution. On ne peut pas maintenant venir voir en disant: On va respecter le pacte social, mais pour vous, monsieur, ce sera différent, puisque vous avez une petite centrale à Brompton, ou ailleurs. Là, ou bien on a des tarifs uniformes, ou bien on n'en a pas. Mais le pacte social, selon moi, ce qu'il dit, c'est des tarifs uniformes.

(14 h 20)

Alors, quand y aura-t-il de la production de petites centrales? Quand ce sera à 0,03 $, on va en acheter autant qu'il y en a, pas de limite. Quand c'est plus que 0,03 $, je suggère à tous les promoteurs de s'adresser à la Régie pour obtenir... lui justifier des raisons pour lesquelles on devrait payer plus que 0,03 $ pour la production – ne parlons pas de distribution puis de transport – pour la production. Il y a peut-être des bonnes raisons, enfin il faut les faire valoir devant la Régie. Si la Régie accepte, on va l'ajouter à notre plan des ressources, et la Régie, en même temps, comme elle le fait pour Gaz Métropolitain dans nombre de dossiers, va créer un compte dans lequel vont s'accumuler jusqu'en l'an 2002, puisque les tarifs sont gelés, les écarts entre ce que nous paierons et 0,03 $, puis, en 2002, la Régie va statuer maintenant, aujourd'hui, à qui on va envoyer la facture, puis, comme ça, on va en faire autant que les gens voudront en produire, il n'y a pas de limite.

M. Chevrette: Est-ce que le député de Johnson peut me permettre une remarque? Ici, étant donné que ça fait partie de la politique énergétique, le programme des minicentrales, l'actionnaire pourrait – et je veux bien dire ça aux autorités d'Hydro – l'actionnaire pourrait demander à Hydro-Québec de réaliser l'achat de x mégawatts par année, 25, 30, je ne sais pas, l'actionnaire peut faire ça, en sachant très bien que la Régie pourrait fixer un prix à 0,04 $, par exemple, exclusivement pour donner un taux de rendement très minimal, mais pour développer l'économie régionale dans le sens que le député de Johnson l'a dit. Ça pourrait être un choix de l'actionnaire, ça.

Les modalités de facture, je m'en balance, moi, mais l'actionnaire, lui, comme développeur des régions en même temps que développeur au niveau de l'économie globale, pourrait faire un choix et dire qu'une minicentrale placée dans une région, par exemple, peut rapporter x centaines de milliers de piastres par année, par exemple, non pas à un promoteur privé, là, à une collectivité régionale. Dans la politique énergétique, le programme des minicentrales relève du ministère des Ressources naturelles, en bas de 50 MW, et moins, et ça pourrait être un choix de l'actionnaire de dire à Hydro: Veuillez acheter tant de mégawatts à un prix fixé cependant par la Régie, raisonnablement. Mais ça pourrait être un choix pour ne pas induire...

Je comprends que, comme développeur ou comme mandat de mener à bien les destinées d'Hydro-Québec pour en fournir le plus possible à l'actionnaire, ça, c'est un devoir que vous avez, mais il y a un autre devoir à celui qui est actionnaire, c'est un devoir de développer, s'il le veut, sa région... ces régions du Québec, et de faire ce choix-là. Je voulais faire cette mise au point pour ne pas donner l'impression que le programme des minicentrales est anéanti, loin de là. Il y a des pourparlers avec Hydro-Québec en ce qui regarde des actifs sur certains sites, mais le programme des minicentrales sera resoumis très prochainement à l'Exécutif, d'ici trois semaines, un mois maximum. C'est une remarque que je voulais faire.

Le Président (M. Sirros): Alors, avec cette précision, le temps est presque écoulé, du côté des ministériels. Je tiendrais peut-être à en profiter, moi aussi, pour faire remarquer au ministre que c'est à peu près le même principe qui a été déjà utilisé pour, par exemple, dire à Hydro-Québec, comme actionnaire, à un moment donné: Allez-y de l'avant avec la Sainte-Marguerite sans détourner la Moisie, même si ça coûte un peu plus cher, parce que c'est une décision de développement des régions, et puis on aura besoin de l'électricité pareil. C'est pas mal semblable comme raisonnement, puis je trouve ça des fois... Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Je «peux-tu» vous dire, M. le Président, que... Vu que vous vous êtes permis, je vais me permettre...

Le Président (M. Sirros): Oui, voilà. Alors, je ne peux pas vous le refuser.

M. Chevrette: Je «peux-tu» vous dire que, si Hydro-Québec avait eu le choix de bâtir Sainte-Marguerite, ils ne l'auraient jamais fait à 0,053 $, ils vous auraient plutôt... en tout cas, les dirigeants actuels. Deuxièmement, le programme des minicentrales, tel qu'il est pensé dans la nouvelle politique énergétique, ce n'est pas un programme de minicentrales qui s'adresse à un producteur privé...

Le Président (M. Sirros): Ni Sainte-Marguerite.

M. Chevrette: ...en fonction, c'est une collectivité locale...

Le Président (M. Sirros): En tout cas...

M. Chevrette: ...et c'est très différent de faire bénéficier une collectivité locale par rapport à un seul propriétaire privé.

Le Président (M. Sirros): Bien, Sainte-Marguerite n'est pas à un propriétaire privé. Mais, de toute façon, cela étant dit...

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Sirros): ...il reste à peu près 30 secondes au député de Johnson. Je vous les donne, parce que j'ai...

M. Boucher: Ha, ha, ha! Merci, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Je vais vous donner même une minute et demie. Ha, ha, ha!

M. Boucher: Non, non. Merci.

Le Président (M. Sirros): Alors, allez-y.

M. Boucher: C'est parce que tout ce qui nous a été dit ce matin, de 0,03 $, et puis, vous savez, c'est à ce coût-là, point... tout ça est ombragé un peu par le fait que ça peut être plus élevé, selon une décision de la Régie et selon la politique des minicentrales. Ça doit avoir un impact, j'imagine, sur vos coûts, tout ça, hein. Mais, ça, vous n'êtes pas responsables de ça.

M. Caillé (André): Ça a un impact. Si on achète à plus cher que ce que j'ai dit, 0,03 $, ça ne fera pas les mêmes résultats.

M. Boucher: C'est ça.

M. Caillé (André): Les bénéfices, c'est la différence entre les revenus puis les coûts.

M. Boucher: Je vous remercie.

Le Président (M. Sirros): Alors, M. le député de Saint-Laurent.


Gestion des barrages selon l'évolution des marchés

M. Cherry: Oui, merci, M. le Président. M. Caillé, vous avez évoqué de nombreuses fois l'explication que, quand on vendra, c'est parce que ça va faire notre affaire, c'est un bon prix, sinon on laisse l'eau derrière les barrages puis on l'accumule, puis on fait du stockage, puis, quand ça sera le temps et que le prix sera bon, on vendra. On vient de passer à travers une période éprouvante pour la collectivité québécoise et pour Hydro-Québec. À un moment donné, je me souviens, une question a été posée au ministre des Finances: Écoutez, est-ce que ça va affecter de façon négative la contribution d'Hydro-Québec – sa contribution – dans votre budget, pour l'équilibre annoncé? Et puis il a dit: Non, ça ne changera rien. Alors, on était heureux de l'apprendre, puis là il nous a donné toutes sortes d'explications.

Mais, vous, si je suis votre raisonnement, c'est qu'à chaque fois que ce n'est pas un bon deal d'affaires, vous gardez l'eau derrière les barrages jusqu'à temps que ce soit payant de la vendre. Si on arrive dans la situation où le ministre des Finances, lui, a besoin d'une entrée de capital qui soit plus élevée que celle pour laquelle vous vous êtes engagé ou qui décide de combler le manque à gagner que vous... vous avisez que, finalement, vous ne pourrez pas rencontrer les objectifs et vous décidez d'en vendre sur le spot. Ça «peut-u» expliquer pourquoi ça permettrait des revenus supplémentaires au gouvernement du Québec. Mais ça «pourrait-u» expliquer pourquoi on se ramasse avec des niveaux de barrages qui, maintenant, doivent rester secrets, parce qu'on ne veut pas en révéler les niveaux? Je pose la question. C'est ça, le but d'une commission parlementaire.

M. Caillé (André): M. le Président, je vais rassurer le député en disant que l'approche de gestion des barrages: produire, pas produire, etc., toutes les décisions qui entourent la gestion des barrages, elles sont prises à partir de l'état de la situation. Quand on regarde cinq ans, quand on regarde loin en avant, on peut dire: Il y aura des précipitations moyennes ici, ça va faire le 12 TWh dont on a parlé ce matin.

Quand on regarde à court terme, M. le Président, on négocie ça en temps réel. Il y a trois moments dans l'année, et c'est seulement ça qui prévaut sur nos décisions de produire ou de ne pas produire, ou d'acheter des options pour vendre ou d'acheter des options pour acheter. Il y a le mois de novembre; au mois de novembre, on connaît à peu près un cycle hydrologique et on établit un budget. On passe l'année, on laisse passer les premiers mois; il y a des opportunités qui se présentent, les premières opportunités de pointe se présentent à l'hiver évidemment, puis là on regarde les options, on va comparer les options sur le futur avec des ventes aujourd'hui, pour toujours – c'est facile – contre... Dans ce métier-là, c'est contre un risque... Ce qu'on achète, c'est des options. On ne se trompe jamais que, pour effacer un risque, d'acheter des options, c'est le bon système.

Alors, en juillet, bien là, on a un hiver de passé. On sait comment il y a eu de précipitations de neige, etc. On révise la situation. Il y a une première révision par rapport à un budget qui, lui, est établi en novembre, décembre, approuvé en décembre parce qu'il y a une période de temps que ça prend pour l'approuver, mettons en décembre. En juillet, il y a une révision.

En septembre, on connaît l'impact de la fonte parce que, dans le nord, ça continue à fondre après le mois de juillet, et on connaît donc l'apport d'eau de la fonte. Ce n'est pas parce qu'il y a beaucoup de neige que nécessairement... Ça peut varier, la quantité de neige avec la quantité d'eau; il n'y a pas de relation directe, ça dépend comment la neige fond. Alors, on s'amène au mois de septembre, on connaît les précipitations de l'été, et c'est là qu'on regarde encore une fois qu'est-ce qu'il dit, le marché des futurs – en français, le marché des futurs – sur les marchés, puis là on fait les décisions pour fermer l'année.

Mais, à chaque fois, nous, par exemple, à partir de juillet, on va commencer à s'intéresser au printemps de l'année suivante. Au niveau de l'eau du printemps, cette année, ça va être printemps 1999. Alors, on gère toujours avec précaution parce que – on l'a répété souvent ici ce matin – obligation de service au Québec – on n'a pas d'alternative – et puis obligation de service au moindre coût. Alors, ça dépend donc de ce qui a tombé, de ce qu'on pense qui va tomber, puis de ce qu'a l'air le marché des futurs. Et puis on prend la décision comme ça dans le temps.

(14 h 30)

Je n'ai pas eu, très honnêtement – ça fait 15 ou 16 mois que je suis à Hydro-Québec – je n'ai jamais eu d'appel du ministère des Finances pour nous dire: Produis plus ou moins ou autre chose. Rien de tout ça.

Maintenant, en ce qui concerne 1998, c'était la première partie de votre question, je pense, l'impact du verglas, etc., bien, vous avez vu, c'est déjà public, je pense, en tout cas c'est du domaine public, notre réclamation, nous, comme corporation... je réponds encore de la même façon que je répondais tantôt: Hydro-Québec, on essaie de ramener ça – ce n'est pas facile parce que je sais bien que ce n'est pas le cas – comme comportement au comportement d'une corporation. Alors, on a fait nos réclamations au gouvernement du Québec, comme toute autre entreprise québécoise qui a subi des dommages lors du verglas, et ça s'est soldé par... Il y a deux montants: un de 235 et un de 200. Un des deux, je ne me souviens plus lequel, c'est pour les mesures d'urgence; le deuxième, c'est pour l'amortissement sur une période de 10 ans, comme nos règles le prévoient, l'amortissement des actifs non amortis qui ont été détruits par la tempête. Voilà la situation.

On est en train de réviser le budget. De fait, il n'y aura pas grands changements. On aura possiblement des changements, mais pas des changements du tout au tout, là, en ce qui concerne le budget 1998, qu'on va rétablir et qu'on doit présenter à notre conseil d'administration, la première autorité en la matière en ce qui nous concerne, le mois prochain, à moins que je ne m'abuse. C'est ça, c'est au mois de mars.

Une voix: Avril.

M. Caillé (André): Au mois d'avril, pardon.

M. Cherry: O.K. Une autre question, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Allez-y, M. le député.


Contrat avec Alcan Aluminium

M. Cherry: On a été obligé d'accepter, pour les fins de la discussion, qu'il y a certaines informations que vous ne pouvez pas nous donner sur des activités à venir, mais il y a celles qui sont déjà passées, et là je vous amène directement au contrat qui vient d'être signé entre Hydro-Québec puis Alcan Aluminium. Je vois que, dans la Gazette officielle , Hydro-Québec et Alcan ltée, prévoyant la vente par Hydro-Québec de 350 MW au tarif grande puissance, basé sur un facteur d'utilisation de 100 %. Donc, il est prévu pour la durée de ce contrat-là – dites-moi si je comprends bien – que le tarif est établi comme si Alcan va utiliser 100 % des 350 en tout temps.

M. Caillé (André): C'est le tarif établi sur un CU de 100 %. C'est le coefficient d'utilisation...

Une voix: Un facteur.

M. Caillé (André): Un facteur d'utilisation, en bon français. Merci, cher collègue. Un facteur d'utilisation, s'il devait être moindre, évidemment les tarifs peuvent varier. Puis ça existe, ça, dans le tarif qui est publié, le tarif qui est disponible à toutes les entreprises grande puissance, au même tarif.

M. Cherry: Donc, selon ce que je comprends, et c'est le but de l'exercice, si Alcan utilisait moins, utilisait, je ne sais pas, 85 % uniquement, est-ce que ça a un impact sur... En d'autres mots, si j'utilise 100 % en tout temps, est-ce qu'il y a un prix qui est différent que si j'en utilise moins? En d'autres mots, me vendriez-vous plus cher si je n'en utilisais que 80 %? Est-ce que ça diminue le prix si j'en utilise 90 %? Puis est-ce que j'ai un prix encore meilleur marché au kilowatt parce que j'en utilise 100 %?

M. Caillé (André): C'est vrai. C'est ça que ça ferait.

M. Cherry: Donc, ce que ça dit, c'est que vous allez me charger le tarif comme si j'en utilisais en tout temps 100 % même si j'en utilisais moins?

M. Caillé (André): Non, non. C'est le tarif L pour Alcan comme pour tout le monde, mais le tarif... Si vous vous référez à un chiffre donné, c'est le tarif... Pour donner un chiffre, il faut donner le coefficient d'utilisation... le facteur d'utilisation, pardon. Si c'est moins, bien c'est moins, c'est-à-dire, le tarif devient plus élevé. Vous voyez pourquoi? C'est facile à comprendre.

Par exemple, vous êtes une très grande entreprise, vous souscrivez 750 MW. Si vous le prenez toute l'année, on peut mettre, pour vous fournir, une turbine de 750 MW qui va fonctionner toute l'année à plein régime. Autrement, si vous me dites que vous allez prendre seulement 75 %, on est obligé de construire la même turbine parce qu'il y a un moment donné dans l'année où vous allez faire la demande pour 100 %. Le restant de l'année, on continue à payer les frais financiers et tout ce qui entoure cette fameuse turbine. C'est pour ça que plus votre facteur d'utilisation est élevé, plus votre tarif est bas. C'est comme ça pour tous les grands clients industriels. Puis ça, ça dépend de la charge de quelqu'un, mais c'est...

Ce qui est approuvé par la Régie, en passant, ce n'est pas un tarif, c'est une grille tarifaire. Alors, c'est un ensemble. La grille, par exemple, elle tient justement compte des facteurs d'utilisation qui peuvent varier d'un client à l'autre. Mais c'est la même comptabilité des coûts pour tout le monde. Mais tout le monde n'a pas puis tout le monde ne peut pas avoir le même facteur d'utilisation. Il y en a qui ont des opérations saisonnières, alors, ils ne peuvent pas avoir un facteur d'utilisation équivalent à une entreprise, par exemple, comme une fonderie d'aluminium qui, elle, peut espérer fonctionner presque à 100 % toute l'année.

M. Cherry: O.K. Donc, ce que je comprends, c'est que, si jamais, pour des raisons x, l'entreprise n'utilisait pas le nombre de kilowatts sur lequel le tarif est établi, à ce moment-là, elle devra payer plus cher...

M. Caillé (André): Par kilowattheure.

M. Cherry: ...selon la grille, et ça s'appliquera...

M. Caillé (André): Même tarif pour Alcan que pour les autres.

Par ailleurs, dans le même contrat – pour compléter la réponse – si on veut parler du contrat d'Alcan puis voir son équité – je pense que c'est ça, la question – par rapport au contrat de n'importe quelle autre entreprise... Dans le cas d'Alcan, nous avons acheté d'Alcan, par la même transaction commerciale, de la puissance d'Alcan que, là, on a payé au prix du marché, de la puissance de pointe, parce que Alcan, également, a des installations. Et j'ai offert, nous avons offert, Hydro-Québec, la même chose à n'importe quelle autre aluminerie qui aurait de la puissance, quelque énergie à nous vendre ailleurs, pas nécessairement au Québec. Et là, ce serait l'intérêt de l'ouverture des marchés. Supposons une entreprise d'aluminerie aux États-Unis, eh bien, s'ils peuvent nous vendre de la puissance aux États-Unis, on va faire le même, même contrat – c'est ce que j'ai dit à ces gens-là – qu'on a fait avec Alcan. Pas de différence.

M. Cherry: Maintenant, vous venez d'utiliser les mots «la puissance de pointe». On sait tous que la puissance de pointe, ça coûte bien plus cher parce qu'il y a des choses pour lesquelles, pour assurer un maximum de pointe, ça coûte bien plus cher, mais, comme ça ne fonctionne pas bien, bien longtemps, c'est ça qui nous permet de. Alors, le prix auquel vous achetez ça, vous l'achetez à l'équivalent de la puissance de pointe, l'équivalent du taux normal, la basse, à quoi? C'est quoi, votre barème qui fait que ce que vous achetez d'Alcan... le prix que vous payez?

M. Caillé (André): Oublions la quantité d'énergie. On achète de la puissance, on paie de la puissance. Il y a un marché pour ça, la puissance, comme pour les autres éléments dans notre métier. Et on a acheté ça au prix du marché, d'Alcan. On n'a pas fait de faveur à Alcan quand on a acheté sa puissance. Elle aurait pu la vendre elle-même sur le marché, elle aurait obtenu la même chose.

Le Président (M. Sirros): Ça va?

M. Ciaccia: Je veux juste comprendre.

Le Président (M. Sirros): Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Est-ce que le tarif que vous avez dans ce contrat-ci, auquel mon collègue vient de référer... le tarif est basé sur 100 % d'utilisation. D'après le libellé de ce décret, est-ce qu'elle va avoir le même tarif? Alcan va payer sur la base de 100 % d'utilisation même si elle n'utilise pas 100 %? Parce que c'est ça que le décret dit, à moins que le décret se trompe.

M. Caillé (André): On vérifie ça, M. le Président, puis on vous donne la réponse.

M. Ciaccia: Vous allez vérifier?

M. Caillé (André): Oui.


Programme général des dérivations partielles

Le Président (M. Sirros): Peut-être, si vous permettez, il reste à peu près trois, quatre minutes du côté de l'opposition, je pourrais en profiter pour poser une question sur la question qui touche un peu la dérivation des rivières, que vous avez présentée en vidéo. Hydro-Québec a un comité aviseur ou consultatif environnemental?

M. Caillé (André): Oui.

Le Président (M. Sirros): Avez-vous soumis cette question à votre comité aviseur?

M. Caillé (André): Le plan stratégique a été soumis à ce comité aviseur... bien, à une réunion où j'ai assisté, moi – c'est pour ça que je m'en souviens. Mon collègue, qui est plus près du comité, l'a peut-être rencontré à cet égard-là, je ne sais pas. Il vous donne une réponse additionnelle ici.

M. Filion (Yves): Écoutez, M. le Président, le comité consultatif en environnement existe depuis plusieurs années à Hydro-Québec. Il existe encore aujourd'hui. L'automne dernier, il y a eu une présentation du plan stratégique. Par la suite, il y a eu aussi présentation du programme général des dérivations partielles et, à ma connaissance, il y a eu aussi présentation particulière des projets de détournement de la Bersimis.

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'à ce moment-là le comité aviseur a étudié la question? Est-ce qu'ils ont produit un rapport?

M. Filion (Yves): Ils ont donné des avis à Hydro-Québec, comme ça se fait habituellement. C'est un comité aviseur, c'est un comité consultatif. Donc, ils ont donné des avis qui ont été tenus en compte par les gestionnaires responsables du développement des projets.

Le Président (M. Sirros): Est-ce que je peux vous demander de déposer ces avis à la commission? Est-ce que ce serait possible, par exemple, de les avoir peut-être même pour demain pour qu'on puisse les regarder et profiter du fait que vous êtes encore ici au cas où on voudrait poser des questions?

M. Caillé (André): On peut certainement mettre la main dessus. Puis, à partir du moment où ils existent, ils sont publics.

(14 h 40)

Le Président (M. Sirros): Merci. Mme la députée de La Prairie.


Prévision de la consommation domestique et industrielle

Mme Simard: Merci, M. le Président. M. Caillé, je voudrais revenir sur quelque chose. Évidemment, votre plan stratégique est essentiellement fondé sur deux choses: d'abord, qu'il va y avoir une augmentation de la demande en énergie, ici et aussi ailleurs, et, ailleurs, il y a une déréglementation, une ouverture du marché, donc il y a des occasions qui se présentent aujourd'hui qui ne se présentaient pas avant. Et je pense que c'est les deux éléments qui fondent toute l'élaboration du plan stratégique et les choix qui sont faits.

Il y a 15 jours, lorsqu'on a tenu les audiences pour entendre un certain nombre de groupes, plusieurs ont questionné la façon dont Hydro-Québec évaluait justement l'augmentation de la demande – ce n'est pas la première fois, évidemment, que vous le faites – et certains sont venus nous dire: Quand on regarde en rétrospective comment Hydro-Québec faisait ses prévisions à l'époque, eh bien, souvent elle s'est trompée dans ses calculs, et c'est le scénario le plus faible – je pense que c'est ça, l'expression consacrée – qui était celui qui s'était effectivement réalisé et non pas le moyen ou l'optimal, le supérieur. Dans le plan stratégique, vous n'en avez qu'une, prévision – on en a discuté ce matin – je pense que c'est 10 TWh pour l'industriel, 4 TWh pour les plus petits, les moyens et les petits consommateurs. Moi, je voudrais savoir – et je sais bien que vous allez avoir à faire d'autres présentations à la Régie, et tout ça – en quoi la façon dont vous faites cette prévision aujourd'hui... est-ce que ça se distingue des façons antérieures qu'utilisait l'entreprise qu'est Hydro-Québec? Ça, c'est ma première question.

Et, particulièrement, je voudrais qu'on revienne aussi sur le secteur industriel. Parce que, si j'ai compris ce que vous avez dit ce matin, notre prédiction est faite à partir de... 50 % de notre prévision est déjà assurée, parce qu'il y a des contrats qui sont signés. J'aimerais ça savoir lesquels et si vous êtes capable d'en nommer quelques-uns. Parce que, encore là, il y a eu questionnement sur un certain nombre de projets industriels ici, au Québec. Un questionnement: Oui, ces projets existent, mais est-ce qu'ils seront en demande d'énergie supplémentaire dans une proportion aussi grande? Ça, c'était à questionner. Ensuite, je reviendrai.

M. Caillé (André): Alors, M. le Président, en ce qui concerne la méthode de prévision, elle est, ici, différente de celle des années dernières. On l'a voulue conservatrice, conservatrice, sachant que justement l'expérience passée montrait que les scénarios prévus, retenus n'étaient pas nécessairement ceux qui se réalisaient. Alors, ici, très honnêtement, on a fait comme je faisais dans une entreprise où j'ai travaillé antérieurement. Alors, la bonne façon de faire, c'est – le passé étant garant de l'avenir – qu'on regarde ce qui est arrivé dans le passé, et c'est pour ça que... Et je n'ai pas de raison de croire que, au niveau résidentiel, les cinq prochaines années seront très différentes des cinq dernières années. Alors, on a dit: C'est un 0,1 %. On est loin, en passant, des chiffres de prévisions qui ont pu vous être soumis, il y a plusieurs années possiblement de ça, de 5 % puis de 6 %, là; 0,09 %, hein, 0,1 %. Même chose que les cinq dernières années.

Au secteur commercial et institutionnel – c'est les hôpitaux, les écoles, etc. – on a dit: Ici, il y a concurrence du gaz, etc., etc.; soyons conservateurs. On se dit que ça va augmenter de 0,5 % seulement, même si, dans les cinq dernières années, ça a augmenté de 1,3 %, malgré toute cette concurrence, a-t-on dit, du gaz naturel. On a pris juste moins que la moitié, moins que la moitié de croissance par année.

Dans le cas de l'industriel, vous avez raison, c'est fort simple, la façon de prévoir. On a mis 11 TWh, puis on sait qu'on a 5 TWh déjà en carnet de commandes: c'est Alcan – on en parlait à l'instant – c'est Magnola, c'est Karbomont, c'est Sol Plastique, Spexel, Tye-Sil, CCR-Noranda, QIT et Alcools de commerce. Alors, tout ça, ça fait 4,4 TWh, et il y a 1,8 TWh qui vient de la reprise par nous de clients qui appartenaient à Alcan et qui sont Abitibi-Alma, Alliance-Dolbeau, de même que Abitibi-Kénogami. Alors, là, ce n'est pas peut-être, c'est 5,2 TWh, c'est déjà là.

En plus de ça – puis là je ne pourrai pas vous donner les noms parce que c'est confidentiel; enfin, il faudrait que je leur demande, à eux, s'ils veulent que publiquement leur nom soit connu – il y a des carnets en discussion de 4 TWh à 5 TWh. Supposons que c'est 4 TWh qui se réalisent, on a 10,2 TWh de vendus déjà – on a 5,2 TWh plus 5 TWh, ça fait 10,2 TWh – et on dit ici 10,9 TWh. Les chances sont ici, très honnêtement, les probabilités, c'est qu'on va excéder ça. Qu'est-ce qui va arriver? Bien, il y en aura moins à exporter. Supposons maintenant qu'on s'est trompé et que c'est le contraire – on ne pourra pas s'être trompé de beaucoup, de 1 TWh ou 2 TWh, supposons – bien, ça serait un surplus qu'on va exporter en plus. Alors, ces prévisions sont conservatrices. Il n'y a aucune espèce d'effet de sensibilité ici sur les résultats... les résultats ne sont pas sensibles à ces prévisions-là, puisqu'elles ont été faites très, très, très à la baisse. Il n'y a pas de prévisions faites par Hydro-Québec – enfin, c'est ce que mes collègues me disent – semblablement à comment ça pouvait se faire dans le passé. Il n'y a plus de gros chiffres ici. En termes de demande, pour cinq ans, au niveau du bénéfice, le risque qu'on voit, nous autres, c'est plus 85 000 000 $ de bénéfices ou moins 85 000 000 $ sur quelque chose qui cumulativement est 1 350 000 000 $.

Mme Simard: Mais vous comprenez, M. Caillé, que, puisque par le passé il y a eu surévaluation, il peut y avoir un certain scepticisme. Moi, je vous pose la question parce que ce qui est demandé...

M. Caillé (André): Je comprends.

Mme Simard: ... – et là je ne pose pas de jugement du tout – est fondé sur une prévision qui, là, vous nous dites – il faut que ça soit clair – est la plus conservatrice possible. C'est ça qu'on doit comprendre?

M. Caillé (André): Oui, oui. Je veux vous rassurer et je veux, à travers vous, rassurer la population québécoise: Voici des évaluations conservatrices.

Mme Simard: Pour revenir au secteur industriel, si je comprends bien, vous dites: Pour l'équivalent de la moitié, c'est réglé, et tout ça. Si je comprends bien, chaque entreprise fait une commande. Au fond, elle dit: Nous aurons besoin de ça en telle année. C'est déjà chiffré. C'est elle qui fait sa propre commande et ce n'est pas vous qui... Comment est-ce que ça fonctionne? J'aimerais ça comprendre. Il y a certains de ces projets-là qui sont des agrandissements d'usine.

M. Caillé (André): Aussi.

Mme Simard: Bon. Comment est-ce que ça fonctionne quand il y a un agrandissement d'usine ou un nouveau projet d'usine, leur rapport avec vous pour établir leurs besoins?

M. Caillé (André): En général, tous les grands clients industriels ont un vendeur attitré et, à chaque année, l'évaluation de la demande pour l'année suivante est discutée. Et les contrats, d'ailleurs, sont pris... parce qu'il y a des pénalités quand les gens ne prennent pas tout, etc. Alors, les contrats sont ajustés de façon à ce que le risque du côté du client soit minimal de payer des primes sans devoir utiliser. Maintenant, quand il y a des projets d'agrandissement ou des nouveaux projets, c'est tout inclus dans le 5,2 TWh, ça. Vous avez raison. On considère comme une nouvelle vente le fait qu'une entreprise, par exemple, comme QIT, je pense que c'est leur cas, agrandit, parce que ça fait plus de demande d'électricité.

Mme Simard: Donc, à ceux qui disent qu'il y a une surévaluation, déjà des projets annoncés, ceux que vous avez énumérés, certains sont venus nous dire: Il y a une surévaluation que vous faites déjà. Ce que vous dites, c'est que la méthode de calcul ne peut donner aucun risque de surévaluation.

M. Caillé (André): Bien non... enfin, on discute directement avec le client.

Mme Simard: C'est ça, c'est parce que...

M. Caillé (André): C'est un faible risque. Les gens peuvent toujours se tromper, mais les gens sont de bonne foi, tant l'acheteur que le vendeur.

Mme Simard: Bon, très bien. Une dernière chose. Vous avez tout à l'heure mentionné – je pense que c'est cet avant-midi – qu'il y a eu des années où vous avez exporté plus, notamment en 1995.

M. Caillé (André): Oui.

Mme Simard: Vous avez dit qu'on avait beaucoup, beaucoup de surplus; ça s'est présenté, ça a fait notre affaire. Bon. J'aimerais ça que vous nous expliquiez quand ça se produit, ces situations de surplus comme ça, dans quelles circonstances. C'était dû à quoi qu'il y ait eu tant de surplus?

(14 h 50)

M. Caillé (André): L'hydraulicité au Québec peut faire facilement en sorte que ça peut varier de plus ou moins 10 TWh à chaque année. Il peut tomber plus d'eau et il peut tomber moins d'eau. Par exemple, pour vous encourager, je peux vous dire – et vous comprenez mon intérêt à avoir été vérifié – je me suis posé la question il y a quelques mois: El Niño, la dernière fois, ça a fait quoi? Alors, j'étais très heureux de constater que ça avait fait plus 30 TWh. C'est énorme en termes de valeur ce que ça a fait. Ça date de 1983-1984. Alors, évidemment, j'ai très bien dormi ce soir-là, ça, c'est sûr. Par ailleurs, vous voyez dans notre plan, on vous montre à la fin, c'est à la page... je ne suis pas capable de le lire d'ici, c'est cette page-là, c'est la page... on vous montre le risque par rapport aux bénéfices. C'est à la page 53. Vous voyez? Le plus grand risque d'Hydro-Québec, c'est le risque de l'hydraulicité, selon qu'il tombe plus ou qu'il tombe moins d'eau. Ici, est-ce qu'on a fait un plan en anticipant qu'il va tomber plus d'eau parce qu'il en aurait tombé moins, ou moins parce qu'il en aurait tombé plus? Non. On a mis ça à hydraulicité moyenne.

Ce qu'il va falloir faire ici, puis on a prévu de le faire, c'est d'atténuer ces risques-là pour l'actionnaire. Alors, on va se créer des comptes. Advenant que El Niño nous comble, comme je le laissais entendre à l'instant, il va falloir mettre des sommes en réserve, dans des fonds, se créer des fonds d'autoréserve pour les années où il tombe moins d'eau, de sorte que le revenu, le bénéfice pour le gouvernement s'en trouve nivelé. Dans l'industrie du gaz, ils ont pareil mécanisme de nivellement, eux, pour la température. Alors, ils ne gagnent pas plus ou moins selon qu'il fait très froid ou très chaud. Ça donne très exactement la même chose. Il y a des mécanismes comme ceux-là qui peuvent être mis en place pour stabiliser, finalement, pour protéger l'actionnaire contre une très, très faible hydraulicité un jour. Mais il faut dire que rien ne se perd, rien ne se crée, c'est aux dépens des années où l'hydraulicité serait très forte – c'est comme une police d'assurance qu'on s'achète – puis on nivelle les revenus, et ça, après nivellement, ça nous amène toujours au 1 800 000 000 $, parce que, nous, on a planifié sur hydraulicité moyenne.

Mme Simard: Est-ce que ça s'est déjà produit qu'il y ait une baisse de la demande du secteur industriel de façon significative?

M. Caillé (André): Au Québec?

Une voix: Conjoncturel oui, mais très conjoncturel.

Mme Simard: La baisse du secteur industriel, est-ce que ça s'est déjà produit? Parce que, bon, si je comprends bien, le résidentiel, c'est... le monde est dans leur maison. Mais du secteur industriel?

M. Caillé (André): Je pense, M. le Président, que le secteur le plus sensible, ce doit être le secteur des pâtes et papiers, dépendant qu'on sort ou qu'on rentre dans un cycle. On les connaît, il y a un cycle de prix dans l'industrie des pâtes et papiers. Actuellement, ce que je sais d'eux, c'est qu'ils se trouvent dans le bas d'un cycle. Donc, en allant vers un haut d'un cycle, j'imagine qu'ils vont consommer plus puis que vous pourrez nous dire que nos prévisions étaient trop conservatrices, mais bien malin est celui qui est capable de dire exactement quel est le cycle de prix de la pâte ou encore du papier. Celui qui pourrait le faire, évidemment, deviendrait très, très riche parce qu'il pourrait transiger sur les marchés futurs puis faire beaucoup d'argent. Personne ne sait ça exactement. Mais, oui, ça peut fluctuer ça, d'année en année. Si ça baisse une année, l'industrie des pâtes et papiers étant ce qu'elle est, ça veut dire que, un autre plus tard, ça va recommencer puis ça va être plus fort.

Mme Simard: Évidemment, c'est toujours pour revenir à la même chose. Ce qui est proposé exige des investissements qui sont somme toute assez considérables, fondés sur vos prévisions. Alors, effectivement, vous avez tenté de nous rassurer en disant: Bon, les risques sont quand même... il y a des risques; on essaie qu'ils soient les plus petits possible, mais encore faut-il les vérifier.

Au fond, ce que vous dites, c'est que, par rapport à la prévision que vous faites pour les prochaines années, c'est une prévision qui est plus conservatrice, si je comprends bien, que celle qui a été faite dans les années qu'on vient de passer. Mais est-ce que c'est la plus conservatrice encore que ce qui a pu être fait depuis 20 ans, ou 15 ans, ou 10 ans?

M. Caillé (André): Mon collègue ici, à ma gauche, dit que oui. Honnêtement, moi, je n'y étais pas, mais j'ai déjà vu des prévisions d'Hydro-Québec beaucoup plus optimistes que ça – ça, c'est vrai – à l'époque où j'étais dans une autre entreprise. Alors, c'est conservateur. Moi, depuis que je fais ce métier, j'ai toujours préféré avoir des prévisions conservatrices et les dépasser que des prévisions optimistes et arriver à court. Vous me direz: C'est chacun son style et chacun son choix à cet égard. Moi, j'ai toujours préféré le premier.

En passant, tout cela, à partir du moment où on développe à 0,03 $ et qu'on a des voisins... Mais il faut bien comprendre ça: on développe à 0,03 $ discipline, nos voisins développent à 0,057 $, on prend un risque zéro ici, Mme la députée. Mais, si on a un risque qu'on prend, c'est le risque de perdre des opportunités que d'autres générations pourraient nous reprocher plus tard. Mais, à part ça, des risques, il n'y en a pas.

Mme Simard: Merci.

Le Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. le député de Mont-Royal.


Nouveaux projets économiquement rentables

M. Ciaccia: M. le Président, merci. Je voudrais avoir certaines clarifications sur certaines des déclarations et sur les coûts que vous nous avez fournis. Vous mentionnez toujours que les projets à 0,03 $, vous êtes prêts à acheter ça. Connaissez-vous, dans les futurs projets d'Hydro... Est-ce que vous pourriez nous en mentionner? Quels projets vous pouvez construire aujourd'hui à 0,03 $?

M. Caillé (André): J'en ai mentionné indirectement quelques-uns ce matin en vous parlant de Betsiamites. C'est évident que la dérivation partielle de Carheil-Pékans se classifie là-dedans facilement: c'est moins qu'à 0,02 $, c'est 0,01 $ et quelques. Je vous ai parlé ce matin d'un projet qu'il y a à amender, en vous parlant d'un projet à la fois en puissance et en énergie, en vous parlant de Eastmain, puis du domaine public.

M. Ciaccia: Mais est-ce que vous parlez de nouveaux projets...

M. Caillé (André): Nouveaux. Oui, oui, nouveaux projets.

M. Ciaccia: ...que vous pouvez construire en bas de 0,03 $?

M. Caillé (André): Je parle... Oui, les projets que nous construirons seront des projets en bas de 0,03 $. Je viens d'en énumérer trois qui compteraient, selon moi, dans cette catégorie-là. Ils ont besoin d'être travaillés, notamment dans le cas du projet de Eastmain, parce que, dans sa forme originale, le projet à Eastmain ne rencontre pas ce critère-là.

M. Ciaccia: Excusez, je ne sais pas si j'ai compris. Vous dites que Eastmain peut se faire à 0,03 $?

M. Caillé (André): Non, je dis que Eastmain, dans sa forme originale – le projet, je pense qu'il avait deux turbines et un aménagement sur la rivière Eastmain – il ne rencontre pas notre critère, donc ne serait pas fait dans sa forme originale. De la façon dont on travaille, M. le Président, à Hydro-Québec en ce moment, c'est qu'un projet qui n'est pas rentable, on ne dit pas simplement: On l'abandonne. On continue à travailler pour voir quelles sortes de variantes, quelles variantes on pourrait apporter à ça pour en faire un projet rentable. Parce que, si on est pour proposer des projets aux populations locales, autochtones ou autres, et puis partager les bénéfices économiques, il faut qu'il y ait bénéfices économiques; et, on l'a dit, nos affaires sont faites sur la base de 0,03 $.

M. Ciaccia: Pour arriver à votre coût de production, maintenant, est-ce que vous ne prenez pas tous les coûts de production de l'ensemble du réseau, qui arrivent à ça?

M. Caillé (André): Non. Non, non.

M. Ciaccia: Par exemple, vous avez Churchill Falls à 0,01 $.

M. Caillé (André): Non, non.

M. Ciaccia: Comment, d'abord, arrivez-vous à un coût de production de 0,028 $?

M. Caillé (André): Par rapport à il y a quelques années, bien sûr, le coût de capital est beaucoup moins élevé. C'est ce que me souffle à l'oreille mon voisin ici. C'est vrai, parce que je vous ai dit hier: Aujourd'hui, 10 ans à 6 %, ça peut se faire. Ce n'était pas comme ça il y a quelques années. Et puis il y a le «reengineering», on fait le «reengineering» de la filière. On a demandé aux gens: Vous partez de ces coûts-là... Je ne me souviens plus ce que ça donnait, Eastmain, dans sa forme originale. Supposons 0,04 $ ou près de 0,05 $, j'imagine.

Une voix: 0,04 $.

M. Caillé (André): 0,04 $. Alors, je dis: Ça, ça ne va pas, on ne fera pas ça. Alors, il faut trouver les moyens.

Le moyen le plus efficace, en général, c'est de raccourcir le temps de construction parce que ça apporte des revenus une année plus tôt. En termes de valeur présente, ils ont beaucoup plus de poids que les revenus 20 ans plus tard. Alors, ça, ça aide déjà beaucoup à la rentabilité et ça réduit du même coup, puisqu'on le réalise sur une moins longue période de temps, les frais financiers durant la construction, qui sont énormes dans le cas de l'hydroélectricité. Parce que c'est des projets qui se réalisent sur trois, quatre, cinq ans, alors, ils sont énormes. Si on peut réduire les coûts, voilà toujours le meilleur moyen.

Si on peut ajouter à ces projets-là... Je ne dis pas que c'est le cas pour l'un ou pour l'autre, mais si on peut ajouter à ces projets-là plus d'eau, donc plus d'énergie pour les mêmes types d'investissements, donc une dérivation partielle acceptable d'un point de vue environnemental, eh bien là, c'est l'ensemble de ces moyens-là qui finissent par faire qu'on va arriver à trouver des projets qui vont se faire à 0,03 $. Il y a des fois qu'on va réussir, il y a des fois qu'on ne réussira pas. Quand on ne réussira pas, on ne le fera pas, on déclarera que ce n'est pas possible. Et c'est là-dessus, en passant, que je compte beaucoup sur la collaboration des populations locales, notamment autochtones, pour trouver les moyens pratiques de réduire ces coûts.

M. Ciaccia: La raison pour laquelle je pose cette question, c'est parce que la politique des petites centrales, ce n'est pas le gouvernement qui l'a commencée. Ça avait été suggéré par Hydro-Québec; on l'avait acceptée comme politique. Le raisonnement qu'Hydro-Québec nous faisait était de dire: Écoutez, les petites centrales peuvent être exploitées plus économiquement et développées plus économiquement par le secteur privé que par nous, parce que, tu sais, le «overhead», et tout le restant... Alors, ils nous ont suggéré et on a accepté. Mais, maintenant, les petites centrales, à ma connaissance – à moins que vous puissiez me corriger – je n'en connais pas qui peuvent se faire à 0,03 $, c'est toutes 0,04 $, 0,05 $.

M. Caillé (André): Il y en a deux...

(15 heures)

M. Ciaccia: Alors, j'essaie de concilier ce que vous venez de me dire, que vous pouvez faire des projets à 0,03 $, et l'origine du programme de petites centrales, de le donner au secteur privé parce qu'il pouvait le faire plus économiquement. Mais ils ne peuvent pas le faire pour 0,03 $.

M. Caillé (André): Oui. Vous avez raison quand vous dites que l'économique des grands projets est très différent de l'économique des petits projets. Mais il y a deux petits projets que je connais, qui sont des sites appartenant à Hydro-Québec, où on est allés en appel d'offres en demandant aux partenaires, pour construire, de nous donner toutes les garanties que ce qui avait été avancé allait se faire. Alors, on les a attachés au résultat. Et, effectivement, il y en a deux, deux sur un très grand nombre, qui peuvent se faire pour un coût qui est de 0,03 $ le kilowattheure. Est-ce qu'on le fera ou est-ce qu'on ne le fera pas? Je ne sais pas. Mais, en tout cas, on a sous les yeux deux projets, ce n'est pas des grosses centrales. Ça se fait pour 0,03 $. Mais il y en a plusieurs autres, puis là je serais de votre avis, et je doute, moi, personnellement, à ce moment-ci – j'espère que les gens me surprendront, puis que ce sera le contraire – qu'ils puissent se faire pour 0,03 $, très honnêtement.

M. Ciaccia: Et, dans le plan de développement ou le plan de ressources, est-ce que c'est possible d'identifier les projets qui peuvent vous coûter...

M. Caillé (André): Oui.

M. Ciaccia: Est-ce que ces informations sont dans le plan?

M. Caillé (André): Non. Elles ne sont pas dans le plan parce qu'elles ne sont pas là quand il s'agit de projets où le partenaire n'a pas été informé, où il n'y a pas eu d'approche encore avec le partenaire potentiel. On a souvent vu... Puis, vous savez, il y a une couverture médiatique d'Hydro-Québec très grande, et on tient à ce que les premières approches soient faites par nous pour avoir une chance de dire l'histoire telle qu'elle est, sinon, autrement, on ne fait que réagir à des communications qui ont été faites par d'autres, et ça, à chaque fois, ça s'est avéré assez négatif, malheureusement.

Mais il y en a, comme Betsiamites, Carheil-Pékans, dont je peux vous parler, puis c'est des projets qui coûtent 0,03 $, même moins que 0,03 $. Carheil-Pékans, chacun le sait, il me semble que c'est 0,012 $. Peut-être que je me trompe, ici, mais c'est 0,01 $ et quelque chose.

M. Ciaccia: Et combien de mégawatts ils ont, ces projets-là?

M. Caillé (André): Il n'y a pas de mégawatts là-dedans. C'est de l'énergie. Alors, c'est 1,2 TWh. Regardez, le calcul...

M. Ciaccia: O.K. Ça, c'est de l'énergie. Mais je parle de projets qui vont produire des mégawatts.

M. Caillé (André): Ah! Eastmain, ça produit des mégawatts. Mais Carheil-Pékans, ça n'en produit pas.

M. Ciaccia: Alors, ceux qui vont produire les équipements, les mégawatts, est-ce que vous pouvez les faire, ceux-là, pour 0,03 $?

M. Caillé (André): Oui, il y en a. Eastmain, avec modifications, ça se fait pour 0,03 $. Les deux petites centrales dont je vous ai parlé tantôt, ça implique l'installation de centrales de puissance, des mégawatts, de la puissance installée, et ça se fait pour 0,03 $, avec des partenaires attachés.

M. Ciaccia: Pas juste pour l'énergie, la puissance aussi.

M. Caillé (André): Oui, oui, la puissance.

Le Président (M. Sirros): Je n'ai pas saisi. Les autres projets sont tous des projets de dérivation?

M. Caillé (André): Non, non. Il y a d'autres projets que je n'ose pas indiquer parce que, si je les indique, c'est la même chose que, demain, être dans une situation où on doit informer le monde sur autre chose qui s'est dit, etc. On va d'abord parler aux partenaires. Puis, quand on aura parlé avec les partenaires, ce sera rendu public dès qu'ils vont être d'accord.

M. Ciaccia: Vous m'aviez donné ce matin, je crois, des chiffres, grosso modo, sur le coût de construction. Est-ce que je pourrais vous demander de nous fournir le coût de construction des 20 TWh, le coût de construction pour les 6 TWh pour l'exportation? Et est-ce que vous pourriez nous dire si vous pouvez avoir différents scénarios? Supposons un scénario où il n'y a pas d'exportation ou très minime, à quelle année les besoins du Québec peuvent augmenter pour utiliser tout le 20 TWh? Et aussi, est-ce que vous pourriez nous dire: Sur le 6 TWh que vous voulez exporter, si vous en exportez seulement deux, qui va payer pour les quatre autres?

Parce que, ce matin, vous avez fait référence à Hydro Ontario. Je suis persuadé qu'à, Hydro Ontario, quand ils ont fait leurs prévisions, ça devait être aussi rose puis aussi beau, et sûrement, eux, ils ne voyaient pas qu'ils étaient pour avoir des déficits de milliards de dollars. Alors, peut-être que, dans leur scénario, ils n'ont pas pris de «back-up». Je ne suggère aucunement qu'on est dans la situation d'Hydro Ontario; je ne fais pas cette comparaison.

M. Caillé (André): Ce n'est pas pareil.

M. Ciaccia: C'est juste le principe de dire: On est confiant qu'on va vendre à l'exportation. Mais ça, ça va être le scénario – Hydro, ce n'est pas nouveau, vous avez toujours fait ces études-là – maximum, si vous le vendez, un scénario moyen et le pire scénario... Parce que, quand vous parlez des montants, des prix de l'électricité dans les autres juridictions comme la Nouvelle-Angleterre, ça a toujours été plus haut. Et la déréglementation, un des effets de ça peut être – parce que la capacité est là – de réduire le prix que Consolidated Edison va charger aussi. Parce que, avec la déréglementation, ils avaient... Ils ne laisseront pas leur capacité à rien faire parce que vous vendez moins cher; ils vont faire de la compétition. Alors, c'est pour ça que j'aimerais ça voir un scénario où les ventes à l'exportation ne sont peut-être pas aussi encourageantes qu'elles pourraient l'être, pour savoir le risque que le gouvernement et que l'actionnaire va prendre.

M. Caillé (André): Mon collègue va vous répondre, M. le député.

M. Vandal (Thierry): M. le Président, si vous me permettez de revenir sur les chiffres qu'on a évoqués ce matin. On a parlé ici d'une augmentation des ventes de l'entreprise sur la période 1998-2002, donc à l'année 2002, de 20 TWh. Ce dont il est question, c'est des moyens qui vont permettre de satisfaire cette augmentation de 20 TWh. Pour satisfaire une partie de ce 20 TWh là, on a aujourd'hui les moyens de production existants, qui permettent de satisfaire 12 TWh. Donc, on a aujourd'hui, à hydroélectricité moyenne, 12 TWh. Ce qui manque, c'est donc 8 TWh pour se remettre à un équilibre. Dans le 8 TWh, on a déjà, en voie de construction – donc, il n'y a pas d'incertitude là-dessus – et c'est une construction qui est même en voie d'être accélérée, le projet Sainte-Marguerite, pour environ 2 TWh. Donc, ce dont il est question, c'est 6 TWh de projets faisant partie d'un ensemble portefeuille, qui devront être mis de l'avant et disponibles à l'année 2002. Et c'est ces projets-là qui doivent faire l'objet d'abord de discussions avec des partenaires avant de pouvoir être engagés. M. André Caillé a évoqué certains de ces projets potentiels, mais, bien sûr, ce n'est que dans la mesure où il y aura partenaires et où on aura confirmé la rentabilité sur la règle du 0,03 $ et la faisabilité du point de vue environnemental qu'on va aller de l'avant.

M. Ciaccia: Excusez, je ne veux pas vous interrompre, mais il me semble que le but d'une commission parlementaire, c'est qu'avant que vous négociiez avec vos partenaires ça serait bon d'étaler ici à la commission parlementaire ces projets, ce que ça implique. Je ne pense pas que, si vous nous arrivez avec le projet tout fini, tout accepté, puis là, vous dites: Voici le projet... Parce que, nous, on veut avoir les informations pour que la population ait les informations pour qu'elle puisse être protégée, encore une fois, pour éviter des scénarios peut-être trop encourageants et qu'il s'avère que ça ne pourra pas arriver à ça. Parce que la Régie, elle, dans les coûts, je ne veux pas me répéter, mais ça va être ou le consommateur ou le gouvernement ou la population qui va payer pour. Je comprends que vous devez négocier avec vos partenaires, mais je pense qu'avant de négocier avec vos partenaires ça serait bon d'étaler les projets ici puis de voir ce que vous voulez faire.

M. Caillé (André): Alors, je peux vous dire qu'il n'y a aucun projet qui ne peut être réalisé, voire même la réalisation amorcée avant qu'on ait obtenu des autorisations gouvernementales. Les autorisations gouvernementales concerneront à la fois l'environnement et l'économique des projets. Ils vont tous être rendus publics avec toutes les données requises, certainement avant qu'on commence à construire. Puis le système, enfin, la procédure administrative, au Québec, veut que ce soit ainsi.

(15 h 10)

Vous aviez raison de signaler, par ailleurs, que le risque n'est pas celui du client, parce que, avec le tarif de fourniture qu'on a proposé, le risque n'est pas celui du client. Ça ne veut pas dire qu'il est... Le risque, il est sur les épaules de quelqu'un. Alors, le risque, il est sur les épaules de l'actionnaire, et c'est pour ça que c'est l'actionnaire qui aura à décider s'il le fait ou ne le fait pas. En plus, l'actionnaire, comme il s'agit du gouvernement, il va prendre, comme la loi est, en considération la question environnementale également. Alors, voilà où nous sommes. Et 0,03 $, on s'arrête à 0,03 $, ici.

Le Président (M. Sirros): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, d'entrée de jeu, on m'avait promis, à l'ouverture, cet après-midi, un certain détail du 500 MW qu'on devait déposer, ce que j'avais demandé ce matin. Si vous pouviez le faire – parce que j'ai même vu qu'il existait, on me l'a montré – pour l'ensemble des gens ici...

M. Caillé (André): Alors, M. le Président, je peux déposer un document qui répond à la demande du ministre: Projet de développement industriel 500 MW.

M. Chevrette: C'est ça.

M. Caillé (André): Ça donne également le bilan, en termes de création d'emplois, des mêmes projets, où on en est dans les emplois créés.

M. Chevrette: Merci.


Document déposé

Le Président (M. Sirros): Si vous le laissez là, on va aller le chercher puis on va s'arranger pour le distribuer.

M. Caillé (André): Très bien.

M. Chevrette: Merci. M. le Président, sur la lancée du député de Mont-Royal, je voudrais poser une question additionnelle. Hydro-Québec, vous planifiez en fonction de combien d'années d'avance?

M. Caillé (André): Cinq ans. Je pense que c'est la loi qui fait...

M. Chevrette: Non, mais vos perspectives de développement par rapport à la courbe de développement, par rapport à la courbe, supposons, de la volonté de percer les marchés américains. Est-ce que vous planifiez sur 10, sur 15 et cinq ans?

M. Caillé (André): Le plan stratégique a été fait sur la base de cinq ans comme le veut la loi, je pense. Puis on regarde également un horizon de 10 ans.

M. Chevrette: Oui, mais il est révisable ou réamendable aux deux ans. À toutes fins pratiques, donc, il me semble que c'est...

M. Caillé (André): Il y a une mise à jour, à tout le moins une mise à jour, sinon un changement fondamental à tous les deux ans. Mais, à chaque plan qu'on fait, on regarde les cinq prochaines années. Et, nous, on regarde également dans 10 ans ce que ça donne. Ça répond aux préoccupations des gens qui... Parce que c'est vrai aussi, elles existent, les préoccupations plus loin...

M. Chevrette: Pour répondre à l'interrogation des 6 TWh, ce qui a l'air de préoccuper le député de Mont-Royal, à supposer que le Québec se développe économiquement à un rythme qui va gober les 6 TWh, qu'est-ce qui serait le plus payant pour Hydro-Québec? Est-ce que c'est le développement économique local pour pallier à... pas local ou régional, national... Mais, je veux dire, si les 6 TWh étaient complètement gobés par le développement économique et industriel québécois, est-ce que ça serait plus payant, beaucoup plus payant ou moins payant que la vente, par exemple, sur les marchés spot ou le marché ouvert, comme celui qu'on va connaître dans les prochains mois ou les prochaines années?

M. Caillé (André): Voyez-vous, si on regarde, M. le ministre, un prix aux États-Unis de 0,049 $, si on soustrait 0,012 $ pour le transport, ça donne 0,037 $. Le tarif L au Québec, c'est 0,035 $. Ça fait qu'on est dans les mêmes eaux, si vous me passez l'expression.

M. Chevrette: Ce serait correspondant.

M. Caillé (André): Alors, pour nous, en d'autres mots, c'est quasiment neutre. Par ailleurs, s'il s'agit d'exporter beaucoup plus loin puis qu'on rencontre trois postes de péage en route, ça peut être plus avantageux de le vendre au Québec.


Capacité d'attirer des entreprises énergivores

M. Chevrette: Par le passé, on a toujours cru qu'en signant des contrats particuliers c'était très rentable pour le développement économique du Québec. On a eu l'expérience de 13 contrats à partage de risques, qui s'est soldée, parce que c'était basé surtout sur les coûts des produits, par un manque à gagner par rapport au tarif L, si ma mémoire est fidèle... En tout cas, la dernière fois que j'ai pu le constater, c'était encore 1 200 000 000 $. Quelle est la position du Québec ou d'Hydro-Québec présentement, par rapport à ce qu'on connaît dans le domaine des prix de l'énergie, au point de vue capacité d'attirer des grandes industries dites énergivores?

Je vous pose la question pour les motifs suivants. Il y a beaucoup de gens qui pensent que, signer des contrats à partage de risques, avec des coûts inférieurs au tarif L, ça nous permet d'attirer des grandes industries. À court terme, on est éblouis par le nombre d'emplois que ça peut créer ou le temps de construction, l'argent que ça peut rapporter. Mais je regarde ce qui se fait en Amérique du Nord, puis on est à peu près les seuls à avoir signé ou à signer des contrats à très, très long terme. C'est du quatre, cinq ans, maximum, quand on regarde les alumineries, ce qui s'est signé avec certaines grandes sociétés d'État dans le domaine de l'énergie aux États-Unis. C'est quatre, cinq ans, pas plus que ça. On ne s'engage pas plus que ça. Quelle est la position du Québec ou d'Hydro-Québec pour attirer des compagnies, si on se compare à d'autres sociétés similaires ou d'envergure comparable?

M. Caillé (André): En ce qui concerne l'attraction du Québec, prenant en considération les tarifs d'électricité à l'aluminium, notre compétition, elle se situe au Brésil, où il y a d'importants potentiels hydroélectriques à être développés. Elle se situe également en Afrique du Sud ainsi qu'en Chine.

Si on prend en considération l'ensemble des facteurs qui vont guider l'investisseur, je crois que le Québec est nettement favorisé. Parce que, en Chine, enfin, du point de vue électricité, lors de notre dernier séjour, vous avez pu, comme moi, constater que, quand on parle du prix de l'électricité, leur tarif de fourniture, il est plutôt à 0,05 $US que 0,03 $CAN. Alors, ce n'est certainement pas à cause du tarif d'électricité ou des coûts de production d'électricité en Chine que les alumineries iraient en Chine. Ça n'empêchera pas des investisseurs dans le secteur de l'aluminium d'aller en Chine à cause d'un rapprochement par rapport à la demande du marché qui, je l'imagine, dans le secteur de l'aluminium comme dans tous les autres, va bondir juste en prenant en considération la population chinoise puis le degré de croissance de l'économie de la Chine.

En Afrique du Sud, c'est des gens chez qui on pourrait perdre ou gagner des contrats. Au Brésil, ça reste à être développé dans un contexte risque, évidemment, qui n'est pas le même qu'ici, dans le sens que, pour nous en tout cas, on connaît moins les précipitations, on connaît moins les régimes hydrauliques qui prévalent. La meilleure région du Brésil, c'est la région près de São Paulo, vers l'intérieur du pays, vers l'ouest à partir de São Paulo. Donc, c'est au sud-est du Brésil que ça pourrait être.

On a fait faire des examens de cette situation-là par des gens, par des spécialistes, par des analystes qu'on a recrutés aux États-Unis. Enfin, c'est les gens – on peut le dire, je pense – de Mackenzie qui nous ont fait les analyses, pour conclure que nos tarifs d'électricité standards, le fameux tarif L, au Québec, est un tarif qui est suffisant pour attirer... On n'est pas défavorisé, au Québec, par rapport à quiconque pour attirer du développement en production en termes d'aluminium. Bien sûr, il y a tout un ensemble de facteurs qui jouent.

L'autre grand secteur industriel québécois, c'est le secteur des pâtes et papiers. De fait, nos tarifs industriels, je vous ai donné des tableaux. J'ai déposé des tableaux montrant notre position concurrentielle actuelle, quand on parlait des tarifs, de bâtir sur les tarifs au Québec, qui montrent que le Manitoba, l'Alberta, le Kentucky et la Virginie – ça ne montrait pas le Kentucky, mais je sais que le Kentucky, c'est la même chose – des endroits où soit la ressource charbon est présente à quelques pieds sous terre ou encore où c'est l'hydraulique – c'est le cas du Manitoba – c'est concurrentiel, ça, c'est des tarifs meilleurs qu'ici. Par ailleurs, sauf exception, ce n'est pas des endroits susceptibles de supporter des activités papetières, des moulins de papier, etc. Aussi, au Texas, c'est meilleur marché, pour les mêmes raisons, l'énergie est rapidement disponible. Mais la ressource forestière, hélas pour eux, l'est pas mal moins, comme on le sait, de sorte que...

M. Chevrette: Mais il fut un temps où on pensait trouver je ne sais pas combien de milliers de mégawatts à travers le Québec. On sait qu'il y a des sites qui sont potentiellement harnachables, mais à des coûts probablement prohibitifs, inconcevables.

À la page 23 de votre plan stratégique, vous dites qu'il y a un certain nombre de mégawatts qu'on peut aller chercher à des prix relativement raisonnables. Est-ce que vous pouvez quantifier ce nombre-là pour nous donner un aperçu de ce qui peut être développable mais à un coût relativement acceptable?

(15 h 20)

M. Caillé (André): C'est 8 000 MW, 40 TWh.


Programmes dans le secteur commercial

M. Chevrette: O.K. Dans un autre ordre d'idées, vous parlez de vouloir percer le marché commercial par des programmes commerciaux plus agressifs, de conserver des créneaux à l'intérieur des commerces plus rentables. J'aimerais vous entendre un peu parler de cela, parce que, si j'ai bien compris, il y a eu une concurrence assez forte entre le gaz naturel et l'hydroélectricité dans le domaine commercial. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, vous expliciter, parce que vous l'effleurez à peine. Vous allez être pris pour vous parler, dans votre vie antérieure. J'aimerais vous entendre.

M. Caillé (André): Il faut que j'aie une pensée en même temps que je vous réponds, M. le ministre, pour les transcripts de commissions parlementaires antérieures.

M. Chevrette: C'est ça.

M. Caillé (André): Vous avez raison.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Sirros): Comme pour le filet mignon.

M. Caillé (André): Mais disons que, oui, les programmes, je les vois de deux natures. Le premier, le plus fort, le plus définitif, c'est le gel des tarifs. Je vais vous expliquer pourquoi. Notre compétition, les gens qui livrent des produits pétroliers, de même que notre compétition, le gaz naturel – enfin, c'est la moitié d'une compétition, comme on le sait – ce sont des gens qui ne sont pas intégrés verticalement, de sorte qu'ils ne connaissent pas le prix de la marchandise dans le futur. L'outil le plus fort, et c'est pour ça que j'y ai tenu autant, l'outil le plus fort d'Hydro-Québec, c'est de dire: Voici les tarifs, voici les tarifs pour cinq ans. Il n'y a pas de distributeurs de produits pétroliers, il n'y a pas de distributeurs de gaz qui sont capables de tenir un langage comme ça, parce que, c'est le gros avantage de l'hydroélectricité, nos coûts, nous les connaissons. Leurs coûts, ils ne les connaissent pas.

Alors, à partir du moment où on a dit ça, je savais – je le savais, oui – que la compétition du gaz naturel serait bien moins forte. C'est facile à comprendre. Plaçons-nous dans la position du client qui reçoit un vendeur. Il reçoit un vendeur, puis il dit: Voici le prix du gaz naturel ou le prix de l'huile n° 2, aujourd'hui. L'an prochain, on ne sait pas trop, la crise du Golfe, on ne sait pas trop ce qui arrive aux marges de raffinage, etc., alors peut-être que ça devrait être ça. Et le coût pour passer de l'électricité à l'huile n° 2, supposons que c'est une dizaine de milliers de dollars. Est-ce qu'il y en a plusieurs, vous pensez, des clients qui vont investir 10 000 $ pour peut-être..., avec toutes sortes de menaces sur le «peut-être»?

Je sais très bien que ça, c'était la meilleure arme commerciale, c'était que ce que nous avions – parce qu'on ne peut jamais offrir au marché ce qu'on n'a pas, hein – c'est notre connaissance des prix futurs, et c'est ça qu'on a mis sur le marché. Puis on l'a répété une autre fois pendant la crise du verglas, puis on l'a répété plutôt rapidement que lentement, parce que, Hydro-Québec, ce n'est pas juste... À vocation commerciale, ça veut dire faire du commerce à chaque jour, ça. Puis c'est à chaque jour qu'on parle, à chaque jour qu'on a quelque chose à dire aux clients. Alors, c'est ça qu'on a fait. Ça, c'est le premièrement.

Maintenant, il y a d'autres types de programmes. Je les appellerais, je les mets dans la catégorie «programmes facilitateurs». Alors, c'est des arrangements pour faire en sorte qu'on va financer l'équipement. Des programmes d'efficacité énergétique, par exemple, ça pourrait nous aider dans le secteur commercial, c'est des programmes facilitateurs. On va faire des déboursés, puis ça va apporter un temps de recouvrement, ça va amener le temps de recouvrement de l'investisseur plus court, puis ça va lui faire prendre la décision de rester à l'électricité plutôt que d'aller au gaz, etc. Alors, voilà! Mais il n'y a pas grands changements. Il n'y a plus grands mouvements sur la scène, dans la répartition du bilan énergétique.

Le Président (M. Sirros): Dans 30 secondes, M. le ministre.

M. Chevrette: Oui. Je veux introduire le sujet dont je vais vous parler tantôt, parce que j'ai seulement 30 secondes. Moi, je veux vous parler de l'éolien et à quel taux Hydro-Québec entend le développer, en sachant que la politique énergétique vise à développer cette filière énergétique au Québec. L'éolien. Donc, préparez-vous mentalement, parce que mon dernier bloc va être là-dessus.

Le Président (M. Sirros): Alors, on va revenir sur le vent. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Acquisition de Gaz Métropolitain

M. Béchard: M. le Président, merci. Je pense que le ministre a abordé le sujet sur lequel je voulais aller, c'est-à-dire le gaz naturel. À vous entendre parler du gaz il y a quelques minutes, on peut se poser la question pourquoi vous vous êtes portés acquéreurs de Gaz Métropolitain, d'une partie de Gaz Métropolitain. Et vous savez sans doute que cette participation-là, dans l'esprit et dans la perception de plusieurs personnes, donne l'impression qu'Hydro-Québec veut un peu mettre la main et monopoliser ce qui se fait en énergie, les sources énergétiques au Québec. J'aimerais vous entendre un peu sur ce qu'est, justement, le rôle du gaz naturel dans le développement d'Hydro-Québec, le pourquoi de cette acquisition-là et quand on parle de ce que le gaz vient faire dans la vocation et dans le développement de l'entreprise Hydro-Québec.

M. Caillé (André): Alors, la convergence au niveau gaz et électricité, je l'ai dit avant l'acquisition et je le dis évidemment après, il n'est pas question pour Hydro-Québec, non plus que pour Gaz Métro, du reste, que pour les dirigeants de Gaz Métro non plus – les nouveaux dirigeants, j'entends – de s'asseoir et de fixer des prix ou enfin, de faire quelques manoeuvres de ce... D'ailleurs, c'est interdit par la loi, comme vous le savez. Et ce n'est certainement pas pour éliminer la compétition sur le marché de la distribution entre gaz et électricité qu'on a fait une intervention dans Gaz Métropolitain. Les vraies raisons, elle sont tout autres, c'est qu'il y a convergence entre gaz et électricité chez des grands clients industriels, et ça, ça a déjà effet.

Nos gens de Services énergétiques, Hydro-Québec Services énergétiques offre maintenant à des clients et le service d'électricité et le service gaz. On est, Hydro-Québec, courtier en gaz, présentement. On fait ça. On conduit des opérations de courtage sur le gaz. Ça nous permet de faire une meilleure offre à des clients industriels, notamment de faire une meilleure offre, par exemple, à des investisseurs qui voudraient s'installer ici. On peut, nous autres, optimiser les approvisionnements en contrôlant les deux côtés des sources, en contrôlant les deux sources. Alors, voilà pourquoi on s'est impliqué dans le gaz.

Également, on a bien senti que, chez les voisins, là où on veut être actif, dans le marché de l'Ontario, par exemple, de même que dans les marchés des États-Unis, il y a le même phénomène de convergence qui s'est établi et qu'on pourra faire des meilleures affaires dans le futur. Vous savez que notre présence dans Gaz Métropolitain, c'est une présence à travers Noverco. Vous savez qu'on a intéressé IPLE à Noverco. Vous savez que IPLE contrôle 100 % de Consumer's Gas Toronto, le plus grand distributeur de gaz au Canada, incidemment, lequel a une filiale pour faire la mise en marché de quoi? De l'énergie gaz et électricité. Alors, vous voyez le lien qu'il y a du côté de l'Ontario – il y a des liens semblables que je pourrais vous décrire avec d'autres noms, aux États-Unis – pour faire la mise en marché de notre électricité avec du gaz sur le marché de l'Ontario. Et, en passant, au prix où c'était, je savais que c'était une bonne affaire. Et les derniers 12 mois nous ont donné raison, on a fait un bénéfice. On est entré à 17 et on est à 19. Enfin, on a fait un bénéfice. Et on a mis de l'argent aussi sur du papier, qui est une vraie valeur pour faire des transactions, de nos jours.

M. Ciaccia: Quand vous étiez dans un autre rôle, est-ce qu'il n'y avait pas, à ce moment-là, plus d'opportunités pour le consommateur de concurrence? Par exemple, un consommateur pouvait décider, ou même une industrie, d'après les prix, si ça pouvait être... et vous, comme président de Gaz Métropolitain, essayer d'être plus concurrentiel avec les prix d'Hydro pour aller vous chercher plus de la part du marché. Et le fait est que ça n'augmentait pas vite, la part du gaz, mais ça a augmenté substantiellement.

(15 h 30)

Maintenant, en étant la propriété d'Hydro-Québec, est-ce que ça cause un désavantage au consommateur, dans le sens qu'il y a moins d'intérêt ou moins de... Si c'est contrôlé par Hydro-Québec, Gaz Métropolitain, peut-être, ne pourra pas faire la même concurrence à Hydro-Québec non seulement dans le domaine résidentiel, parce que c'est assez limité, mais dans le domaine industriel. Parce que la vraie concurrence au Québec... Le pétrole, ce n'est pas vraiment la concurrence parce que le pétrole, c'est dans le domaine du transport. Alors, on ne peut pas alimenter des automobiles... Il y en a avec du propane, mais ce n'est pas vraiment... Et on n'a pas des automobiles électriques. Alors, ce n'est pas là.

Quand on dit que 41 % des besoins énergétiques du Québec sont fournis par l'électricité, quand vous considérez tout le domaine des transports, dans certains secteurs, c'est 70 %. Alors, est-ce qu'il n'y a pas un danger pour le consommateur d'être très restreint et que ce soit contrôlé vraiment par le monopole d'Hydro-Québec, en contrôlant les deux compagnies?

Le Président (M. Beaulne): M. Caillé.

M. Caillé (André): M. le Président, il faut bien se rappeler ici que l'industrie du gaz, Gaz Métropolitain, le distributeur, est réglementé par la Régie en ce qui concerne ses tarifs de même qu'en ce qui concerne ses programmes commerciaux, tout comme, du reste, Hydro-Québec le sera à terme, voire même à très court terme. Donc, ce n'est pas le président, ce n'est pas l'équipe de direction d'Hydro-Québec qui peut influencer directement sur l'offre que peut faire Gaz Métropolitain ou l'offre que peuvent faire nos gens à Hydro-Québec. D'ailleurs, je me suis toujours bien gardé de faire ça. Ces choses-là se décident plus devant les régies. Je suis d'accord avec vous que la concurrence au niveau résidentiel, elle est quand même assez limitée, compte tenu des coûts pour faire la conversion, etc., l'économique, je sais, que vous connaissez très bien.

Dans le secteur commercial, par ailleurs, c'est différent, vous avez raison. Dans le secteur commercial, à une autre époque, ils y avaient vu une opportunité pour le gaz naturel – vous vous souviendrez de nos discussions – puis ça avait fait... Il y a des gens qui étaient assis à ma place, à l'endroit où je suis assis aujourd'hui, puis qui trouvaient qu'il s'en faisait beaucoup, je pense; enfin, c'est ça qui m'a été rapporté. Mais c'est une concurrence.

Alors, moi, j'ai dit aux gens à Hydro-Québec: On concurrence. Et la meilleure façon de concurrencer, dans ce métier-là, c'est qu'il faut se servir des atouts de la source d'énergie qu'on a. Puis l'atout, c'est de dire les prix à l'avance, c'est d'être capable...

M. Ciaccia: Vous avez souligné, et c'est vrai, qu'à un moment donné celui qui était assis à votre place, il trouvait que Gaz Métropolitain lui donnait plus de concurrence. Même, il venait nous voir et il disait: Écoutez, il faudrait appliquer certains règlements. On a dit non, parce qu'une de nos politiques, nos objectifs de politique, c'était d'encourager la concurrence pour le consommateur. Comme vous dites, ça visait non seulement le résidentiel, mais ça visait aussi le commercial.

Quand vous dites que c'est la Régie, bien, d'une certaine façon oui et non. Si Gaz Métropolitain demandait trop, des tarifs trop élevés, ce n'était pas dans son intérêt, la Régie pouvait le lui dire. Mais, si Gaz Métropolitain voulait faire une concurrence, elle avait seulement la peine de ne pas demander tellement d'augmentation devant la Régie et, dans ce cas-là, elle pouvait faire une plus grande concurrence à Hydro. Alors, je pense que cette situation-là n'existe plus maintenant.

M. Caillé (André): C'est ça. Et c'est pour ça que Gaz Métropolitain, vis-à-vis ses actionnaires, doit donner un rendement raisonnable, le fameux 11 % à 12 %, et nous de même. Alors, le gaz et l'électricité se retrouvent sur la même ligne de départ, en ce qui concerne ce marché commercial.

J'aimerais ajouter que la véritable concurrence du gaz naturel au Québec, ça demeure les produits pétroliers dans le secteur industriel évidemment. Et 60 % – en tout cas, les derniers chiffres que j'ai vus – des ventes de Gaz Métro, ça se fait dans le secteur industriel, grandes bouilloires, pour alimenter de grandes bouilloires. Et la concurrence, c'est l'huile n° 6, c'est surtout là que ça se passe. Et on leur souhaite évidemment, à cet égard, beaucoup de succès, puisque leur succès sera le nôtre.

Le Président (M. Beaulne): Mme la députée de La Pinière, malheureusement, il ne vous reste que cinq minutes.


Prévision de la consommation domestique et industrielle (suite)

Mme Houda-Pepin: Désolée, M. le Président, mais je vais essayer de faire vite. M. Caillé, dans un discours que vous avez fait devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain le 25 novembre dernier, vous avez défini ce que vous entendez par la croissance. Vous avez dit: La croissance parce qu'elle est possible, la croissance parce qu'elle est rentable, la croissance signifie – c'est là où j'en arrive – une augmentation de 25 % des ventes d'ici 10 ans. Elle signifie, selon vous, le développement de la production additionnelle requise. Elle signifie 13 000 000 000 $ d'investissements d'ici cinq ans. Elle signifie une amélioration de la rentabilité, notre rendement passant de 6 % à près de 12 % dès la cinquième année.

Est-ce que vous avez des études qui démontrent ce que vous avancez comme hypothèse ou est-ce que le chemin de la croissance, qui, selon vous, passe par le virage commercial et plus particulièrement par l'ouverture du marché nord-américain, c'est une interprétation qui vous rassure et qui vous assure, en tout cas, que ce que vous avancez et que vous avez avancé dans votre discours, c'est quelque chose du domaine du réalisable?

M. Caillé (André): Je crois effectivement que ce que je disais est réalisable. C'étaient des extraits du plan stratégique, comme vous savez. Effectivement, si on regarde sur cinq ans, on vous parle de 20 TWh, si on parle de 10 ans, on vous parle de 40 TWh, ce qui confirme la croissance de 25 %, puisque, en ce moment, on livre 160 TWh. Alors, le quart de 160, c'est 40; ça donne 200 TWh. Sûrement seulement par un hasard de circonstances, quand je suis arrivé à Gaz métropolitain, ça vendait 160 BCF, et on s'était donné pour objectif pour les prochains 10 ans d'en vendre 200. Les chiffres, en unités, sont très exactement les mêmes, seulement les unités changent. Comme quoi c'est un éternel recommencement.

Et quant à d'où viendront ces chiffres, les études dont vous parlez, il y en a deux, études. Je connais le 14 TWh de demande additionnelle ici au Québec, je peux l'extrapoler et dire... Regardez, les cinq années qui suivront, ils ont continué à avoir du développement au Québec. Et, par ailleurs, je sais ou je savais déjà, à cette époque-là de l'ouverture du marché aux États-Unis, que, les prix, on compétitionnait déjà. On a fait plusieurs études pour acquérir des centrales thermiques ou essayer de trouver des façons de produire de l'électricité avec du gaz et on n'est jamais arrivé à mieux que 0,057 $ par kWh, très exactement les prix, par la suite, qu'on a vus, auxquels les usines se sont construites ou encore auxquels les actifs existants se sont transigés. Alors, pas de surprise nulle part, c'est bel et bien 0,057 $, le coût de la production additionnelle aux États-Unis.

Je connais le niveau des interconnexions avec les États-Unis, je sais comment il peut être amélioré. Je sais qu'on pourrait aller chercher facilement notre 20 TWh avec un coefficient d'utilisation sur les interconnexions relativement bas, c'est-à-dire en ne vendant qu'en pointe, essentiellement en pointe, et on n'aura pas de difficulté à faire le 0,049 $ et mieux. Si c'est mieux, l'actionnaire et tout le monde s'en découvriront contents. Mais on a pris là, à cet égard-là aussi une position conservatrice.


Implication des communautés locales et régionales (suite)

Mme Houda-Pepin: J'ai une dernière question, très rapidement, concernant le partenariat avec les communautés locales. Vous y faites référence, dans plusieurs de vos documents, notamment dans un document de publicité, où vous dites que «pour être réalisés, tous les projets devront cependant répondre aux trois conditions suivantes: être économiquement viables, être environnementalement acceptables et être accueillis favorablement par les communautés locales». Nous avons eu l'occasion d'entendre le Grand Conseil des Cris, ici, en consultations. Je voudrais savoir si vous avez consulté les communautés locales. Et quel pouvoir ces communautés ont-elles dans les décisions ou dans le partenariat qui est à entreprendre avec Hydro-Québec?

(15 h 40)

M. Caillé (André): Oui, il y a eu des consultations, enfin des rencontres avec les représentants en autorité des communautés locales, incluant la communauté crie, la population crie, la nation crie, les Montagnais, et avec plusieurs chefs de bande de l'une et l'autre de ces deux nations. Nos rapports sont cordiaux. C'est des gens que je connais, il faut dire, depuis de nombreuses années; ça remonte à l'époque où j'étais sous-ministre à l'Environnement. On a établi des relations qui nous permettent de discuter dans un contexte respectueux les uns pour les autres. On peut se parler maintenant dans un contexte respectueux pour les uns comme pour les autres. Ça ne signifie pas, ce que je viens de dire là, qu'on a aplani toutes difficultés, loin de là. On sait qu'il y a des questions importantes, tant pour nous que pour les populations locales, qui ne sont pas résolues au moment où nous nous parlons et qui devront être résolues. La clé du succès, comme j'ai répondu plutôt, me semble être du côté de la séparation entre ce qui est la mise sur pied d'un partenariat d'affaires entre Hydro-Québec et les communautés locales d'une autre problématique, qui est celle des droits territoriaux, problématique, cette dernière, qui doit être discutée entre le gouvernement et les populations autochtones, Hydro-Québec n'ayant ni mandat, ni compétence, ni juridiction en la matière.

Le Président (M. Beaulne): Merci. Maintenant, j'invite le ministre des Ressources naturelles à poursuivre.


Développement de l'énergie éolienne

M. Chevrette: Je vais annoncer le bon sujet. Je dois, d'entrée de jeu, dire que ce n'est nullement une surprise que, dans la politique énergétique, il y ait un chapitre sur l'éolien, d'abord parce que, au Québec, on est dans une situation géographique où l'éolien, dans certains coins du Québec en particulier, constitue une valeur intéressante.

On sait qu'Hydro-Québec a déjà un contrat ou, en tout cas, est sous contrat avec un groupe pour une centaine de mégawatts, ou 120 MW. On sait également que la politique énergétique publiée en novembre 1996 parle également d'un certain nombre de mégawatts au niveau de l'éolien.

Si je vous en parle, c'est à cause du coût d'implantation. C'est évident qu'une nouvelle filière énergétique, par rapport à vos exigences de base pour produire des kilowattheures à 0,03 $, ce serait utopique. Donc, comment vous conciliez le plan stratégique avec la volonté exprimée également de développer l'éolien? Dans un premier temps, comme première question.

M. Caillé (André): De la façon suivante, M. le Président. Je suis d'accord avec les prémisses énoncées par le ministre, d'abord, à savoir, et on le sait tous, que de l'éolien à 0,03 $... Quoiqu'il y a des gens qui parlent que ça pourrait être 0,03 $. Mais, enfin, à ma connaissance, la majorité des spécialistes de l'éolien ne proposent pas un prix qui soit de 0,03 $ le kilowattheure... plus élevé que cela.

Alors, ma suggestion pour résoudre la situation et faire en sorte qu'on puisse démarrer dans un tel programme, c'est de soumettre à la Régie – je pense que ça a déjà été fait – une demande à l'effet qu'on évalue – enfin, qu'on détermine plus qu'évaluer – et qu'on détermine un prix pour l'éolien, un prix qu'on devrait être prêt à payer pour l'éolien.

Encore une fois, notre engagement pour geler les tarifs est là et il demeure. Il faudra donc que l'écart entre ce prix, qui reste à déterminer, et 0,03 $ soit accumulé dans un compte jusqu'en l'an 2002 et qu'on détermine maintenant à qui on va envoyer la facture en 2002. De cette façon-là, tout le monde sera bien traité, puis il n'y aura de mauvaises surprises pour personne.

Après avoir considéré tout ça, j'imagine que la Régie a une autre tâche, c'est celle de déterminer, après avoir écouté les différentes parties, incluant les gens représentant les clients... Ils vont dire: On en veut pour x milliers ou centaines de mégawatts. Et, nous, Hydro-Québec, on va faire très exactement cela. Les difficultés du passé tiennent...

M. Chevrette: Je vous arrête 30 secondes. Faites-vous la distinction entre le nombre de mégawatts pour lesquels Hydro-Québec est liée depuis deux, trois ans – je ne sais pas – par rapport au nombre de mégawatts additionnels prévus dans la politique énergétique? Parce que votre facture que vous rappelez régulièrement, elle commence à me chatouiller. Parce que le contrat qu'Hydro-Québec a signé il y a trois ou quatre ans, suite à l'APR-91, ce n'est pas... Si, entre vous et moi, vous n'aviez pas été liés par ce contrat-là, j'aurais agi probablement comme ministre responsable, et le gouvernement aurait agi de façon très différente, il aurait dit: 200 MW dans l'éolien, appel d'offres, tous ceux qui peuvent venir.

Là, on est pris avec un contrat pour lequel vous êtes liés par rapport à une volonté du gouvernement de voir l'éolien se développer à l'intérieur de la politique énergétique. La facture ne serait pas tout à fait la même chose. Je comprends que, si l'actionnaire vous oblige à mettre 100 MW de plus, par exemple, l'actionnaire pourrait peut-être se priver des bénéfices nets, alors que vos engagements antérieurs, normalement, c'est réparti sur votre budget antérieur. On se «comprend-tu»?

M. Caillé (André): Oui. Alors, il n'y a pas de doute qu'on va demander que ce compte comprenne également la différence de coût entre le Nordais, s'il est évidemment réalisé, et le 0,03 $ qui s'accumule comme le reste. C'est juste une question d'équité pour tous. Parce que, derrière l'actionnaire, il y a tous les actionnaires québécois, n'est-ce pas, c'est toute la population québécoise. Alors, c'est ce qu'on va demander. Mais, nous, on est là pour demander. C'est la Régie qui dispose, n'est-ce pas, ce ne sera pas nous. Moi, je pense... Excusez-moi.

M. Chevrette: J'ai hâte de voir l'avis, effectivement, de la Régie là-dessus. Mais, entre vous et moi, un des problèmes que nous vivons, c'est que la population en général ne croit pas Hydro-Québec en ce qui regarde le développement de l'éolien. Parce que, moi, ça fait 21 ans que je suis dans le Parlement, puis je pense qu'on en parle – dans le temps, c'étaient les plans de développement – on en a toujours parlé, puis il y a eu très peu de fait. Et véritablement, cette fois-ci, on veut qu'il y ait des aires de démonstration puis qu'il y ait des retombées puis qu'on puisse lier ça à l'implantation, ici, au Québec, d'une usine de fabrication, parce que...

Prenons une supposition. Supposons que ça coûte 0,06 $ du kilowattheure – puis tant mieux si c'est 0,05 $, tant mieux si c'est 0,04 $, je donne un chiffre théorique – même à 0,06 $ ici, si ça conduisait à la création d'une usine de fabrication de palmes ou de moteurs pour faire fonctionner cela à des temps x, on pourrait peut-être le vendre à 0,09 $ ou 0,10 $ à certains endroits où les kilowattheures se vendent 0,15 $ ou 0,16 $. Ce n'est pas impossible d'exporter une technologie qui pourrait nous être propre, ici. Est-ce que c'est la visée véritable d'Hydro-Québec dans sa collaboration pour la réalisation de la politique énergétique?

M. Caillé (André): C'est vrai que ça pourrait être plus... Il y a des pays, par exemple, où ça se produit, en Allemagne et au Danemark. Il ne faut pas se surprendre, je pense que l'électricité, c'est 0,12 $ ou 0,14 $, et le coût de production c'est 0,08 $. Alors, ça fonctionne, ça va bien, puis on n'a pas rien à se surprendre du fait qu'Allemands et Danois – enfin, certaines parties de l'Allemagne, en tout cas – favorisent le développement de l'éolien. Mais, quand on a de l'hydroélectricité à 0,03 $, c'est sûr que c'est beaucoup plus difficile de compétitionner.

Quant à la perception des promoteurs face à Hydro-Québec, c'est vrai pour les petites rivières comme c'est vrai pour l'éolien, du reste, j'ai bien vu l'attitude dans mon bureau, la confiance, ce n'est pas au maximum, ils savent très bien eux-mêmes qu'ils sont en train de discuter avec quelqu'un dont l'alternative est 0,03 $. Si j'étais à leur place, je trouverais que j'aurais une grosse vente à faire, effectivement. Mais je pense que, pour en sortir et... Moi, je trouvais ça favorable aussi pour Hydro-Québec. Que la Régie établisse combien on va en faire de ça, à quel prix, puis qu'elle nous dise qui va payer, puis la réputation d'Hydro-Québec va devenir très belle parce qu'on va s'exécuter.

Le problème qu'on a toujours eu, c'est de ne pas reconnaître que ça coûtait plus cher puis de ne jamais indiquer qui allait payer. Alors, il manquait au moins deux réponses. Parce qu'il y a trois questions. Et, tant qu'il reste deux questions dans les airs, sans réponse, ça se promène tout partout, ça va des uns aux autres, puis il ne se produira jamais rien. Si on veut qu'il arrive quelque chose, c'est: Combien? À quel prix? Qui paie la différence? Ça va être très facile, très, très facile.

M. Chevrette: Voilà un bel exemple d'un choix que peut faire l'actionnaire. Si l'actionnaire dit, par exemple, pour développer une région en difficulté financière et économique... Par exemple, prenons la Gaspésie, qui est, d'autre part, une région où les vents sont constants, permanents. J'ai l'impression qu'on peut réaliser de grandes choses dans le domaine de l'éolien en Gaspésie. Il se peut que le Québec, qui paie déjà des sommes compensatoires, par exemple, pour toutes sortes de programmes – vous le savez très, très bien, on peut avoir toutes sortes de programmes saisonniers en particulier – si on réussit à développer une industrie dans ce domaine, pour l'actionnaire, il y a peut-être des bénéfices nets un peu moindres, en ce qui regarde les retours d'Hydro-Québec, mais, pour l'État c'est quelque chose qui devient égal. Parce que ce que tu ne paies pas en programmes de toutes natures, ça compense pour la diminution d'une partie des bénéfices nets qu'il peut avoir. Et ça, l'État, comme actionnaire, a le droit, je pense... Je sais que vous partagez ce point de vue là, mais c'est pour essayer d'expliquer à des gens qui, des fois, peuvent se surprendre que l'État fait des choix précisément en fonction d'un développement économique des communautés locales ou régionales dont on parle.

(15 h 50)

Moi, ça m'a toujours chatouillé, le fait qu'on pense exclusivement au gros chiffre global, mais on oublie bien souvent qu'on en donne par une autre porte de façon inconsidérée et que les deux peuvent arriver au même taux de rendement pour l'État, mais tu as aidé une communauté locale à s'en sortir de façon magistrale, de façon, en tout cas, qui donne de la fierté même à ces gens-là.

Il y a de l'espoir au niveau de l'éolien, puis je voulais le souligner. Il y a de l'espoir pas seulement en Gaspésie, il y a de l'espoir également dans une région comme la Basse-Côte-Nord, où il y a d'autres sites. On est, en Amérique du Nord, un des endroits où il y a un potentiel extraordinaire. Et, si on ne commence jamais à développer une expertise, les coûts du kilowattheure vont toujours nous miroiter comme étant très exagérés. Mais le jour où on développera une expertise, où on développera une technologie, sans doute que, là, on pourra envisager quelque chose de rentable pour le Québec.

C'est plutôt un message que je veux passer qu'un questionnement, parce que, je le sais, j'ai déjà fait la discussion avec Hydro-Québec. J'ai hâte que l'avis de la Régie sorte et qu'on puisse véritablement commencer concrètement à faire les appels d'offres pour lancer cette technologie au Québec, cette expertise qu'on doit aller chercher. C'était un message.


Risques liés au taux de change

J'aurais une petite question, pour terminer sur le bloc, parce qu'on doit finir à 16 heures, d'après ce que j'ai compris. À la page 53 du plan stratégique, vous avez un tableau où vous avez traité exclusivement de l'hydraulicité. Tantôt, vous y avez fait référence, etc. Et il n'y a pas de pourcentage, c'est des indices.

Par exemple, le taux de change. Vous parlez des risques négatifs puis des risques positifs. J'aimerais vous entendre, par exemple. Au pis aller, sur une période de quatre, cinq ans, quel est le risque négatif, par exemple, sur les taux de change? On est à 0,69 $ présentement? 0,70 $? Vous l'avez calculé sur combien?

M. Caillé (André): Pour un an, l'impact du taux de change, c'est pour un écart de...

M. Chevrette: Pourriez-vous expliquer l'ensemble pour que je puisse... ou demander à quelqu'un de me l'expliquer?

M. Caillé (André): Je vais demander à mon collègue de vous expliquer chacune des lignes, ici, une par une.

M. Chevrette: C'est parce que c'est important, ça...

M. Caillé (André): Oui, très important.

M. Chevrette: ...pour évaluer le positif et le négatif et dire quels risques l'on court.

M. Caillé (André): J'aurai quelque chose à rajouter, M. le Président, quand il vous aura expliqué le contenu de cela et ce qu'on fait quant à cette situation-là.

M. Chevrette: C'est beau.

M. Vandal (Thierry): Alors, on est à la page 53, à l'analyse de sensibilité.

M. Chevrette: Exact. En bas.

M. Vandal (Thierry): Exactement, dans le bas. Et je vais répondre sur la base de la question posée sur le taux de change. Ce qu'on a fait, ici, c'est qu'on a couvert des plages de probabilité d'un écart type dans le domaine des probabilités, 68 % des probabilités sont couvertes. Du côté négatif de ça, on est à moins 89 000 000 $. Ça, c'est à l'an 2000. Si le scénario d'un écart type, c'est-à-dire un déplacement négatif sur le taux de change couvrant une plage de probabilité de 68 %, est atteint, on a 89 000 000 $ négatifs sur le bénéfice net d'Hydro-Québec. Alors, si c'était récurrent, si la même situation se reproduisait en 2001 et en 2002, vous multipliez essentiellement...

M. Chevrette: En cents, ça donne quoi?

M. Vandal (Thierry): On pourrait vous le donner en pourcentage. Je n'ai pas le chiffre ici, à portée de la main, mais, en termes de pourcentage sur le taux de change, on pourra vous donner – ou en cents – le chiffre. C'est une plage assez large. On parle de probabilités qui deviennent assez faibles. Ça veut dire qu'il y a juste 16 % de probabilité que ça soit pire que ça. Donc, 16 %, ce qui est assez faible. Si c'était récurrent...

M. Chevrette: Et, sur 1 800 000 000 $, par exemple, de bénéfices anticipés à l'aube des années 2000?

M. Vandal (Thierry): On parle de 89 000 000 $ pour l'année 2000. Si c'était récurrent en 2001, 2002, multipliez par trois...

M. Chevrette: Ça veut dire 4 %, ça.

M. Vandal (Thierry): Et ça, c'est pour un scénario qui n'a des chances de récurrence que de 16 %. Alors, on est dans des probabilités extrêmement faibles. Et c'est la même chose pour les autres: taux d'intérêt, prix de l'aluminium, température, demande, hydraulicité. Ce qui vous montre clairement que le risque structurel le plus important auquel Hydro-Québec fait face, c'est celui de l'hydraulicité.

M. Chevrette: Si je vous demandais c'est combien de térawattheures, par exemple, le moins 495 en hydraulicité?

M. Vandal (Thierry): Une moyenne de moins 20 TWh... C'est 20 TWh.

M. Chevrette: C'est 20?

M. Vandal (Thierry): 20 TWh. D'ici à l'an 2000, 495, on parle de 20 TWh, grosso modo.

M. Chevrette: Merci.

M. Caillé (André): Alors, face à cette situation, M. le Président, mon collègue Jacques Ménard, s'il était ici, vous dirait qu'on a mis sur pied un comité du conseil d'administration pour la gestion du risque. Tous ces risques qui ont été évalués vont être pris en considération dans une approche qui va se donner pour objectif de niveler le rendement pour l'actionnaire. C'est-à-dire que les bonnes années au niveau hydraulicité ne devraient pas être utilisées simplement pour donner plus de bénéfices à l'actionnaire; elles devraient être utilisées pour faire des mises de côté pour faire face à d'autres années qui sont mauvaises d'un point de vue hydraulicité, de sorte que, pour la population en général puis pour les finances publiques, le revenu d'Hydro-Québec serait nivelé.

La même chose est possible vis-à-vis le taux de change. La même chose peut être faite vis-à-vis la température plus ou moins froide. Il fait froid, Hydro-Québec fait beaucoup de bénéfices. Il fait chaud, on fait moins de bénéfices, et puis là les équilibres du gouvernement sont déplacés en raison de cela. À Gaz Métropolitain on appelle ça un compte de nivellement. Il y a un compte de nivellement de la température: chaud ou froid, il fait toujours la même chose parce que le système anticipe qu'il va toujours faire une température moyenne. Les années froides sont utilisées pour compenser les années chaudes.


Programme général des dérivations partielles (suite)

Le Président (M. Sirros): Peut-être, avant de passer la parole à l'opposition, une des choses qui me chicotent dans cette discussion et surtout, encore une fois, par rapport aux dérivations partielles des rivières... Ce que j'aimerais comprendre, c'est que, quand les barrages ont été construits, ils ont été, j'imagine, construits en fonction de retenir les eaux d'un bassin versant de la rivière, et ça aurait été complet, à ce moment-là, complet dans le sens de tenant compte d'une réserve puis tenant compte d'une variation de l'hydraulicité.

Pour qu'on soit aujourd'hui capable d'envisager des dérivations additionnelles dans le bassin de ce qu'on a construit, ça me laisse supposer que les niveaux des barrages sont très bas et qu'on peut déverser de l'eau des rivières et qu'on va avoir, à ce moment-là, un taux d'utilisation ou une facture d'utilisation du roulement des turbines plus élevé pour pouvoir maintenir l'ensemble de ces eaux. Ou, initialement, les projets avaient été construits en tenant compte des éventuelles possibilités de déversement d'autres bassins. Pouvez-vous me clarifier un peu cette préoccupation que j'ai?

M. Caillé (André): Mon collègue va vous donner la réponse, M. le Président.

M. Filion (Yves): Oui, M. le Président. Je pense que c'est une question qui nous amène à expliquer les critères de conception que nous avons utilisés dans le passé pour concevoir nos ouvrages et comment aujourd'hui nous prenons avantage de ces critères de conception là. Les raisons ont changé, mais la situation est la suivante. Quand nous avons conçu nos barrages, dans le passé, nous les avons conçus en fonction du profil de charge de la clientèle québécoise, tenant compte nécessairement du chauffage à l'électricité, qui amène une période de pointe de charge importante, l'hiver. Ce qui fait que nous avons dû concevoir nos installations avec une capacité de production beaucoup plus élevée que la moyenne, que la consommation moyenne en énergie durant l'année de la clientèle québécoise. Donc, en général, nous avons conçu un facteur d'utilisation d'environ 60 %.

Alors, avec l'ouverture des marchés, ce que nous avons maintenant comme opportunité, c'est que cette puissance-là qui existe, qu'on utilise pour nous en période de pointe et qu'on va continuer à utiliser pour nous en période de pointe, elle a une valeur durant le reste de l'année. Alors, pour optimiser la valeur de cette capacité-là durant le reste de l'année, il faut donc amener plus d'eau dans les réservoirs, faire fonctionner, comme vous le dites bien... Vous avez raison de dire que nos turbines vont fonctionner davantage pour produire plus d'énergie, mais sur la moyenne des 12 mois, pour pouvoir profiter des marchés à l'extérieur du Québec.

(16 heures)

Le Président (M. Sirros): Donc, les dérivations sont des dérivations en fonction des exportations?

M. Filion (Yves): Les dérivations sont surtout en fonction des exportations. Mais il ne faut pas oublier une chose, c'est qu'aussi nous avons une possibilité d'entreposage dans nos réservoirs qui est multiannuelle. Donc, nous pouvons également jouer sur la gestion de nos réservoirs sur plusieurs années, donc également avoir une meilleure, je dirais, gestion ou possibilité de la gestion énergétique et de la fiabilité énergétique pour les besoins du Québec.

Le Président (M. Sirros): Je ne suis pas sûr d'avoir compris le dernier bout, mais...

M. Filion (Yves): Au niveau de nos réservoirs, nos réservoirs sont conçus pour emmagasiner les crues sur plus qu'un an, donc sur plusieurs années.

Le Président (M. Sirros): Correct.

M. Filion (Yves): Ce qui fait...

Le Président (M. Sirros): Mais en fonction de la rivière qu'on a barrée.

M. Filion (Yves): Oui.

Le Président (M. Sirros): Mais là vous allez dériver d'autres rivières.

M. Filion (Yves): Exact.

Le Président (M. Sirros): Et si, en plus, il y a de la pluie, il faut nécessairement que ça sorte quelque part.

M. Filion (Yves): Ah! Bien sûr!

Le Président (M. Sirros): Alors, je répète. Donc, les dérivations sont conçues en fonction des exportations, parce que, n'eut été pour les exportations, les barrages qu'on avait déjà construits seraient remplis en fonction de l'hydraulicité puis, l'utilisation, en fonction de la demande québécoise. On n'aurait pas besoin de déverser.

M. Filion (Yves): C'est l'ouverture des marchés qui permet d'optimiser l'actif que nous avons actuellement, qui est notre capacité d'entreposage.

Le Président (M. Sirros): À la question de mon collègue, qui vous posait la question: Combien des coûts des ouvrages sont reliés aux exportations? ce n'est pas juste en fonction des 6 TWh supplémentaires, c'est pas mal de... Vous dites que nous avons déjà la possibilité de faire face à 12 TWh, si je comprends bien, pour la demande québécoise, avec ce que nous avons.

M. Filion (Yves): Je tiens à préciser, M. le Président, qu'il n'y a pas d'investissement additionnel à faire du côté de la capacité. La capacité de production, elle existe déjà. Les turbines sont en place. Donc, il n'y a pas d'investissement additionnel à faire.

Le Président (M. Sirros): Correct. Mais il y a des investissements additionnels à faire au niveau de...

M. Filion (Yves): Les investissements additionnels à faire sont uniquement pour apporter plus d'eau dans les turbines. Mais les turbines sont déjà en place.

Le Président (M. Sirros): Pour le commun des mortels, ça revient à la même chose. On va barrer des rivières pour déverser leur bassin dans le bassin qui existe...

M. Filion (Yves): Exact.

Le Président (M. Sirros): ...sans ajouter de turbines. La différence, c'est qu'on ne mettra pas de turbines auprès des barrages, on va juste barrer.

M. Filion (Yves): Oui, exact.

Le Président (M. Sirros): O.K. Alors, pour le commun des mortels, c'est un investissement, ça.

M. Caillé (André): Vous vous souviendrez, M. le Président, et tous ceux qui ont été dans ce domaine-là depuis plusieurs années, qu'il y a eu des programmes de suréquipement des barrages. Il y a eu le suréquipement de LG 2, le suréquipement de plusieurs installations. À l'époque, c'était considéré, je pense, comme du devancement, enfin, une façon de stimuler l'industrie de l'hydroélectricité au Québec, c'est-à-dire d'amener de la fabrication de turbines en usine, pour le dire clairement. Et c'est ce suréquipement-là, maintenant, qui permet d'acheminer les quantités d'eau additionnelles.

S'il n'était pas là, évidemment, ça ne serait pas possible. Et ça explique en même temps à plusieurs d'entre vous, probablement, pourquoi c'est possible de le faire sur une base de coût marginal à 0,01 $, 0,02 $. C'est parce que la turbine, elle a déjà été installée pour d'autres raisons. Et ça, c'est à l'avantage de tous et ça explique en même temps pourquoi, plus avec des interconnections additionnelles pour aller chercher la pointe, on va être capable de vendre à 0,049 $. Et c'est ça qui est... Enfin, c'est attacher tous ces morceaux-là de l'explication qui semble être difficile pour...

Le Président (M. Sirros): J'ai l'impression qu'on pourra continuer, parce qu'on arrive aux perspectives financières de l'entreprise. Alors, peut-être qu'on pourrait sauver même les cinq minutes qui restent dans ce bloc-là, si l'opposition n'a pas d'objection, passer directement à la présentation que vous avez à faire au niveau des perspectives financières de l'autre bloc, et on poursuivra par la suite.


Contrat avec Alcan Aluminium (suite)

M. Caillé (André): Avec votre permission, M. le Président, on pourrait maintenant, comme on pourrait le faire plus tard, apporter une réponse au député de Mont-Royal concernant le contrat d'Alcan, une question qui a été laissée en plan tantôt. On peut le faire maintenant ou on peut le faire plus tard, si vous voulez.

Le Président (M. Sirros): Faites-le tout de suite, puis on finira ce bloc-là et on ira directement à l'autre bloc.

M. Filion (Yves): Alors, pour préciser votre question, M. le député Ciaccia, sur le contrat d'Alcan, le contrat est basé entièrement sur le tarif L, donc le tarif de la grande entreprise. Maintenant, considérant le fait qu'Alcan possède déjà des installations de production pour alimenter ses besoins, nous avons établi avec elle une clause pour remplacer l'obligation de puissance qu'il y a normalement dans les contrats des grandes entreprises par une obligation d'acheter de l'énergie. Ce qui fait qu'Alcan, même si elle a ses propres installations, dans le contrat que nous avons négocié avec elle, elle est obligée d'acheter au moins 1 TWh par année, même si elle n'en a pas besoin. Par contre, ils ne peuvent pas en demander plus que trois. Et la moyenne du contrat, sur la période de 22 ans, est basée sur 2,2 TWh par année. Et, quand on fait la moyenne de ça sur la période, ça correspond à l'alimentation tarif L qui est offerte à la grande industrie, à tous nos clients industriels, au même tarif.

Le Président (M. Sirros): Ça va, M. le député de Mont-Royal? Une question de clarification? Allez-y.

M. Ciaccia: Le contrat est basé sur l'utilisation à 100 % de...

M. Filion (Yves): C'est-à-dire que le contrat est basé sur une consommation moyenne de 2,2 TWh, sur la période de 22 ans.

M. Ciaccia: Il y a un minimum.

M. Filion (Yves): Exact.

M. Ciaccia: Mais, si le tarif à 100 % d'utilisation...

M. Filion (Yves): Le tarif à 100 % d'utilisation, comme on peut le retrouver dans un contrat de puissance au niveau des autres clients, n'existe pas. Il a été remplacé par une obligation en achat d'énergie, même si Alcan, par exemple... Je vais vous donner un exemple précis. Si Alcan se retrouve en surplus d'hydraulicité forte, là, elle pourrait dire: Écoutez, Hydro-Québec, nous n'avons pas besoin de vous. Alors, on leur dit: Ah! C'est bien de valeur, mais vous avez l'obligation d'acheter au moins 1 TWh; même si vous n'en avez pas besoin, vous nous le payez. Vous comprenez?

M. Ciaccia: Oui.

M. Filion (Yves): Alors, ça permet, à ce moment-là, de donner à Hydro-Québec une garantie de rendement sur le contrat, même si, au niveau hydraulicité, Alcan, une année donnée, n'a pas besoin de notre énergie.

M. Ciaccia: Si l'utilisation à 100 %... Combien de térawattheures devraient être utilisés à 100 %?

M. Filion (Yves): Le contrat est basé sur une moyenne de 2,2 TWh par année, sur la durée du contrat, 22 ans. En réalité, on ne peut pas vraiment dire «100 %» parce que, comme vous le savez, Alcan a déjà sa propre production. Donc, Hydro-Québec vient fournir seulement une partie de la consommation totale d'Alcan. Alors, le 100 %, à ce moment-là, vous comprendrez qu'il n'est pas applicable comme pour un autre client industriel dans une usine donnée.

M. Ciaccia: Peut-être qu'on va regarder ça. Mais la question que je me pose, c'est: S'il n'est pas applicable, pourquoi inclure cette clause-là dans le contrat? Parce qu'il doit y avoir un tarif pour 100 % avec un minimum de... Mettons, on lui dit: Vous pouvez l'utiliser à 100 %, mais vous ne pouvez pas aller plus bas que 2,2 TWh ou 47... le nombre de térawattheures. Alors, il doit y avoir une raison pour que vous mentionniez 100 %. Autrement, pourquoi le mentionner? Ça doit établir un certain tarif, l'utilisation à 100 %.

M. Filion (Yves): Oui, oui. Mais, en réalité, le contrat équivalent à 100 % est basé sur une consommation de 2,2 TWh par année, sur la durée du contrat, pendant 22 ans. C'est ça qu'est la référence.

M. Ciaccia: Et combien de térawattheures doit utiliser Alcan?

M. Filion (Yves): Sur la moyenne du contrat, c'est 2,2 TWh par année.

M. Ciaccia: Alors, ils doivent utiliser le 100 %.

M. Filion (Yves): Oui, tout à fait. La rentabilité du contrat est basée sur cet élément-là. Et, si, à un moment donné, ils consomment moins, l'autre année, ils doivent consommer plus. Donc, ça doit donner, sur la période du contrat, 2,2 TWh par année pour assurer pour nous la rentabilité du contrat, à l'équivalent du tarif L.

M. Ciaccia: Vous nous dites que, si quelqu'un utilisait 100 %, ça veut dire utiliser toute l'énergie à l'année longue, ça serait 2,2 TWh?

M. Filion (Yves): Exact. C'est ça.

M. Ciaccia: Ça, c'est le maximum qui pourrait être...

M. Filion (Yves): C'est équivalent à ça.

M. Ciaccia: Alors, ce n'est pas juste le minimum, c'est le maximum aussi.

M. Filion (Yves): À l'intérieur d'une année, il peut y avoir des variations. Mais, sur la moyenne, ça équivaut à un contrat de 2,2 TWh par année, à 100 % d'utilisation.

M. Chevrette: Et, sur 22 ans, c'est 47 TWh...

M. Filion (Yves): Je pense que oui.

M. Chevrette: ...avec un minimum et un maximum de 66. C'est ça, les vrais chiffres.

M. Filion (Yves): Si vous comptez, je crois que c'est 2,25 TWh par année par 22 ans, ça doit donner probablement exactement ce que vous dites, M. le ministre.

M. Ciaccia: Alors, vous nous dites – juste pour que je comprenne – que vous avez fixé à 100 %, et il faut qu'ils utilisent 100 %.

M. Filion (Yves): Sur la période.

M. Caillé (André): C'est prendre ou payer.

M. Chevrette: C'est ça, c'est sur la période.

M. Ciaccia: Et, s'ils utilisent 85 %, il faut qu'ils paient pour 100 %?

M. Filion (Yves): Il faut qu'ils reprennent une autre année.

M. Chevrette: Une autre année.

(16 h 10)

M. Caillé (André): Mais, à la fin de la période, il faut que ça soit ça.


Perspectives financières

Le Président (M. Sirros): À la fin, s'il y a un déficit, il faut qu'ils comblent. Donc, est-ce qu'on peut présumer que c'est terminé, cette question-là? On est arrivé pile, parce qu'on avait commencé à 14 h 10, après le lunch. Alors, on pourrait passer peut-être à l'autre étape, la dernière pour cet après-midi: les perspectives financières de l'entreprise.


Exposé d'Hydro-Québec

M. Caillé (André): M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, la stratégie de croissance et de rentabilité mise de l'avant au cours de la période 1998-2002 se traduit par une amélioration notable de la situation financière générale d'Hydro-Québec, tout particulièrement, évidemment, comme on le sait, de sa rentabilité.

Le bénéfice net consolidé d'Hydro-Québec passe de 760 000 000 $ en 1997, soit l'estimation la plus récente, à quelque chose qui est de l'ordre de 1 850 000 000 $ en 2002. Cette progression du bénéfice net est principalement attribuable à la croissance des ventes au Québec, à 70 % de croissance des ventes au Québec, de même qu'à des ventes hors Québec.

Les volumes de vente d'électricité sur l'ensemble des marchés augmentent de 12 %, sur la période. Les deux éléments expliquent la plus large part de l'augmentation du produit des ventes, qui passent de près de 8 000 000 000 $, en 1997, à 10 000 000 000 $ en l'an 2002.

L'entreprise stabilise ses charges d'exploitation annuelle à 160 000 000 $, de 1998 à l'année 2002. On sait que, l'année dernière, nettes d'un contrat de location résilié, elles étaient, ces charges d'exploitation, de 1 550 000 000 $. Demain, quand on parlera de la contribution des ressources humaines, je vous ferai un exposé des contributions qui ont été faites par nos employés syndiqués pour faire suite très directement, j'espère, aux travaux de cette commission en février 1996.

L'augmentation sensible de la rentabilité de l'entreprise entraîne une amélioration de l'ensemble de ses ratios financiers, au cours de la période 1998-2002. Le rendement sur l'avoir propre passe de 6 % en 1997 à 11,8 % en 2002, de quoi satisfaire, je l'espère, les attentes exprimées par cette commission toujours en février 1996, ceci étant, comme je l'ai dit plusieurs fois depuis deux jours, considéré comme un rendement raisonnable pour notre secteur d'activité.

La couverture des intérêts, facteur très important, progresse de 1,2 à 1,51 en 2002. Ces résultats consolidés permettent d'entrevoir le versement à l'actionnaire de plus de 3 300 000 000 $ de dividendes sur la période du plan stratégique, selon la politique de dividendes proposée par notre plan, donc proposée par l'entreprise. Ça n'a pas été demandé par le gouvernement, ici, c'est une politique que nous avons proposée, qui est, elle, également conventionnelle, c'est-à-dire qu'elle se trouve présente dans la très grande majorité des entreprises qui assument des tâches de services publics.

Au terme de la période, le taux de capitalisation d'Hydro-Québec sera de 31,1 % par rapport à 25,1 %, taux qui a été atteint en 1997. Sur l'ensemble de la période, M. le Président, les activités d'exploitation dégagent des liquidités de plus de 13 700 000 000 $ – des liquidités de plus de 13 700 000 000 $ – après versement du dividende, grâce en bonne partie à la progression sensible du bénéfice net.

Ces liquidités permettent de financer l'ensemble des investissements prévus par Hydro-Québec, investissements dans des nouveaux équipements comme investissements pour conserver en bon ordre les investissements existants, le total de tous ces investissements étant de 13 200 000 000 $, qui se comparent avec des liquidités de 13 700 000 000 $. Donc, ça permet de consacrer des liquidités de l'ordre de 500 000 000 $ à la réduction de la dette.

Les activités de financement se soldent par un remboursement net de dettes. En effet, les rachats de dettes à échéance, de l'ordre de 11 800 000 000 $, excèdent les émissions prévues, qui, elles, sont estimées à 11 200 000 000 $. Le taux d'autofinancement pour l'ensemble de la période se situe à 55 %, un niveau stable par rapport à 1996 et 1997.

Au cours de la période 1998-2002, la valeur des immobilisations franchit le cap des 50 000 000 000 $, sur un actif total de 55 200 000 000 $ en 2002. Pour ce qui est du passif, la dette à long terme diminue de plus de 2 400 000 000 $ entre 1997 et 2002, principalement sous l'effet du raffermissement du dollar canadien, qui entraîne un ajustement à la baisse de la valeur de la dette libellée en dollars américains.

L'avoir de l'actionnaire augmente de plus de 3 200 000 000 $, sur la période. L'avoir de l'actionnaire, donc de tous les Québécois va passer de 12 900 000 000 $ à 16 100 000 000 $ en 2002, ce qui porte le taux de capitalisation, comme je l'indiquais il y a quelques instants, à 31,1 %.

Parmi les éléments conjoncturels les plus susceptibles d'influer sur l'évolution du bénéfice net de l'entreprise, il faut retenir la variation des taux d'intérêt – on en a parlé – vu l'importance de sa dette, et la variation de l'hydraulicité, qui est le facteur le plus important.

Je vais m'arrêter ici, à ce moment-ci, M. le Président, pour laisser à mon collègue, qui est le vice-président en charge du financement, le soin de vous résumer les opérations financières qui sont attendues durant la période. Yves.

M. Filion (Yves): Écoutez, je n'ai pas beaucoup de choses à ajouter. Principalement, j'aimerais mentionner que, bien sûr, la situation financière d'Hydro-Québec s'est améliorée beaucoup depuis un an. Elle a permis, entre autres, de franchir un des déclencheurs financiers pour permettre un paiement de dividendes à son actionnaire, donc un taux de capitalisation de 25 %, ce qui fait qu'avant la fin de mars de cette année Hydro-Québec versera à son actionnaire un dividende de 357 000 000 $. Et, également, au cours des prochaines années, la situation financière continue de s'améliorer, ce qui, finalement, présente un intérêt important.

M. Caillé vous a présenté tout à l'heure l'évolution des principaux indices. Les investissements sont faits sur une base de critères de rentabilité qui assurent l'obtention d'un taux de rendement qui va évoluer jusqu'à 11,5 % à l'horizon 2002. Donc, en gros, ce sont les principaux éléments que je souhaitais ajouter. Merci.


Période de questions

Le Président (M. Sirros): Merci. Si ça complète votre présentation, on pourrait passer directement aux questions. On va commencer avec le député de Saint-Laurent.


Sujets divers

M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans les mémoires et les conversations qu'on a avec les gens qui suivent votre plan stratégique, vous allez comprendre que, depuis que vous l'avez déposé, en octobre... Bien sûr, ça va sur la durée du plan stratégique, cinq ans. En bas de la page 52, vous dites qu'un des facteurs – c'est le tableau 4 – le taux de change du dollar canadien par rapport au dollar américain passe de 0,731 $ à 0,794 $. Il y a des gens qui prétendent maintenant que ce que vous exposez ici comme prix plancher, 0,731 $, un maximum pour faire une moyenne, peut-être que ce que vous avez comme prix plancher a plus de chances d'être le maximum sur la période de cinq ans. Et, si oui, comme premier item, quelle sorte d'impact ça a sur la situation financière de l'entreprise?

M. Caillé (André): Comme ceux qui sont venus ici – il y a deux semaines, je crois – je crois que nos prévisions pour l'an 2002 sont plus sûres maintenant que nos prévisions pour la première année du plan ici. Quand on a déposé ce plan, c'était en octobre, novembre, le 21 octobre dernier. Alors, ce qui est arrivé au dollar canadien est arrivé, comme vous le savez, au mois de novembre et au mois de décembre par la suite. Alors, ce que j'anticipe ici, c'est que, en bout de piste, on pourrait, ici, être près de la situation en l'an 2002, mais que, vraisemblablement, dans les premières années, on a des choses à réviser ici. Puisque l'occasion va nous être donnée, pour d'autres raisons, de réviser le plan, on va certainement réviser à la baisse, ici, nos estimés quant au taux de change, à tout le moins pour les premières années, les années 1998, 1999, 2000.

M. Cherry: Ça, c'est le premier. Vous avez, en page 53, une série de raisons qui ont un impact sur votre situation financière. La première, je viens de l'invoquer, c'est le taux de change. Vous invoquez également les taux d'intérêt. Est-ce que vous êtes toujours aussi confortables, même si c'est pour une longue période, ou vous prévoyez que la marge que vous vous êtes donnée atteindra l'objectif par rapport à l'impact que ça peut avoir sur ça?

(16 h 20)

M. Caillé (André): Oui. Les marchés financiers, du point de vue de dette obligataire, sont très intéressants – je le disais ce matin – je pense, très favorables. Du 10 ans, à 6 %, ça ne s'est pas vu depuis pas mal d'années, chez Hydro.

M. Cherry: Tantôt, on parlait du contrat avec Alcan et on a vu que c'est étalé sur une période de 22 ans, et qu'à la fin ils devront acquitter une facture de 2,2 pour l'ensemble, donc le 47 kW. Donc, ça, c'est sur une longue période comme ça, à cause de la nature de cette industrie-là. Et là on voit ici que vous additionnez, bien sûr, le prix de l'aluminium comme un des facteurs.

M. Caillé (André) Oui, ça, c'est les contrats, comme on les appelait, à risques partagés, à partage de risques. C'est des contrats où on a acheté de l'aluminium selon le prix qu'ils nous ont amené, à toutes fins utiles, à acheter de l'aluminium, selon les anticipations de prix de l'aluminium. Les hypothèses que nous avions, au mois d'octobre, ça pouvait aller de moins 60 à plus 195. Le marché de l'aluminium, il y a des spécialistes pour dire qu'on va voir des remplacements de capacité surtout à cause qu'il y a de nouvelles technologies pour produire de l'aluminium, mais il n'y en a pas beaucoup pour dire qu'ils vont parler de grands raffermissements quant aux prix. Ici, je pense que c'est l'hypothèse qu'on a retenue, nous. À la page 58, vous allez voir qu'on n'attend pas de miracle quant à l'évolution du prix de l'aluminium. On serait bien heureux, évidemment, si les prix de l'aluminium retrouvaient des valeurs qui étaient comparables à celles qui avaient été anticipées. Mais ici on n'a pas anticipé ça. On pense qu'on est réalistes.

M. Cherry: La température, évidemment, c'est un autre facteur. Disons que vous avez ici une prévision à l'intérieur de cinq ans. Et on a vu hier que vous avez de la difficulté à donner l'alarme 24 heures à l'avance. Mais j'espère que là-dessus vous êtes plus confiants que la performance que vous avez faite durant le verglas.

M. Caillé (André): Mais ça, ici, c'est la température en degrés, évidemment, qui fait appel au chauffage ou pas au chauffage. Je vais recommander au comité de gestion du risque, le comité du conseil, qu'on devrait, ici, avoir un compte de nivellement pour la température, comme pour l'hydraulicité, je crois, pour stabiliser le revenu. Tout le monde serait mieux servi, y compris l'actionnaire, plutôt que de connaître des grandes fluctuations, des très bonnes nouvelles un jour, pour en avoir de très mauvaises un autre jour. Je pense que les finances publiques qui dépendent de nos résultats seraient mieux servies, si on nivelait ces deux facteurs-là.

Ces deux-là le sont, parce que les prévisionnistes peuvent nous établir des mécaniques qui vont faire en sorte qu'avec le temps on n'accumulera pas beaucoup d'écart. Il ne s'agit pas non plus de transférer des factures à des générations futures, de faire l'hypothèse ici qu'il pleut tout le temps beaucoup pour nous, mais que c'est seulement pour les autres qu'il ne pleuvra pas, ou l'inverse.


Utilisation de la sous-traitance

M. Cherry: O.K. Toujours concernant la situation financière, à mon avis, probablement, il n'y a pas de meilleurs temps, pour moi, pour soulever ce qui aurait été une sensibilité, mais là qui a été une évidence. Dans la tempête du verglas, une des raisons pour lesquelles on n'a pu réagir aussi rapidement, c'était la disponibilité du secteur privé, les gens de la sous-traitance, à qui on a pu faire appel, qui ont pu mettre leur équipement, leur personnel, leur personnel retraité. On est tout allé chercher ça. Il y en a dont les cartes étaient échues. On a tout fait ça pour dépêcher... Donc, ça, ça nous a donné une force.

Également, sur une gestion financière, partout, depuis hier, vous nous expliquez qu'il faut comparer, il faut être compétitif, il faut protéger ce secteur-là. Si on ne l'est pas, on n'y va pas. Dans une première question, est-ce que vous ne pensez pas que, si votre plan stratégique avait tenu compte d'une partie d'utilisation de la sous-traitance... On sait que, dans certains secteurs, ça a été deux tiers, un tiers. Le temps a fait que ce tiers-là a disparu, c'était celui d'Hydro. Là on m'informe que dans des secteurs comme le transport, où Hydro ne s'est jamais mis le nez avant, elle décide de commencer à regarder ça sérieusement. Alors, vous ne pensez pas que vous auriez mieux protégé Hydro-Québec si vous aviez prévu dans votre plan stratégique qu'une partie de votre activité doit se diriger vers la sous-traitance, ne serait-ce que pour maintenir une saine compétition de l'interne à l'externe, plutôt que de vous retrouver dans quelques années avec une situation captive?

M. Caillé (André): Alors, au niveau du transport, de la transmission sous haute tension, la très grande majorité des travaux est confiée en sous-traitance. Au niveau de la distribution, ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas, pour des raisons traditionnelles. Ce n'est pas le cas non plus...

Puis il faut reconnaître l'évidence qu'on a sous les yeux. Il y a un contrat de travail à Hydro-Québec qui dit que nous nous sommes engagés avec des employés qui oeuvrent à Hydro-Québec, qui font carrière à Hydro-Québec, qui ont contribué d'une façon extraordinaire. Je leur ai donné la note de 10 sur 10, durant la tempête du verglas. Alors, je considère que l'on doit respecter ses engagements. Puis on doit s'assurer, bien entendu, que le travail est fait avec les ressources que l'on a engagées, puis qu'on paye, de toute façon, qu'on les utilise ou qu'on ne les utilise pas. Voilà où on en est au niveau de la distribution. Ce serait faux de vous dire qu'on a ici les flexibilités ou qu'on pourrait avoir ici les flexibilités entre faire ou faire faire. Je parle au niveau de la distribution.

Une situation semblable – bien qu'on n'ait pas encore convenu d'une convention collective avec ce groupe d'employés – avec les ingénieurs. Il y a un certain nombre d'ingénieurs, à Hydro-Québec, qui ont été embauchés et à qui on a dit: Vous avez la sécurité d'emploi par contrat. L'optimisation des coûts maintenant exige que... On peut déchirer le contrat, évidemment, mais ça, ce n'est pas très réaliste. On pourrait souhaiter déchirer le contrat, mais ce n'est pas très réaliste. Alors, le rationalisme, ici, exige dans toute la mesure du possible et à chaque fois que c'est possible qu'on ait recours à ces ressources que l'on doit rémunérer de toute manière. Alors, c'est vrai dans l'ingénierie, c'est vrai dans la distribution, c'est beaucoup, beaucoup moins vrai en transmission.

Mais je voudrais ajouter un commentaire. Puis là vous avez raison, on a été bien contents de pouvoir compter sur des gens venant du secteur privé, au Québec, qui étaient dans ces domaines-là, quand est venu le moment de remonter et de reconstruire nos réseaux. On l'a fait, comme vous le savez, en faisant appel à des gens de l'extérieur également, largement, voire à l'armée. Alors, la mobilisation totale, c'est ça que ça a voulu dire. Puis on n'a pas hésité à aller jusqu'au maximum. Et ça s'est fait, en passant, dans de bons termes, de bonnes relations avec – je dois le dire parce que c'est à leur crédit – les syndicats d'Hydro-Québec. Il n'y a personne à Hydro-Québec qui a dit: Non, n'ayez pas recours à la sous-traitance. Tout le monde a dit: Ici, il faut se relever, puis il faut faire le plus rapidement possible.

M. Cherry: Donc, j'en profite pour soulever, pendant qu'on est sur le sujet...

Le Président (M. Sirros): ...

M. Cherry: Pardon?

Le Président (M. Sirros): En terminant.

M. Cherry: Oui. On me dit qu'au maximum de leur contribution ils étaient environ 1 500, ces gens-là, sur l'ensemble du territoire, mais que, s'il avait fallu que l'accident du verglas nous arrive quelques années plus tard, avec le démantèlement de nombreuses de ces entreprises-là, la situation de recrutement, un, n'aurait pas pu être là et ça aurait obligé à réquisitionner du monde qui vient des États-Unis ou d'ailleurs.

Alors, je reviens à la charge en vous disant... Je comprends, là. S'il y en a un qui est placé pour comprendre la difficulté de la flexibilité des conventions collectives... Mais là on a décidé que le virage d'Hydro-Québec, c'était un virage d'affaires. Puis partout, ce qu'on fait, il faut que ça coûte le moins cher, puis c'est le meilleur partout, parce que les prix d'Hydro-Québec sont reflétés sur ma facture. Là, si vous me dites que, parce que vous êtes prisonniers de... vous avez des coûts qui feraient que, si vous pouviez faire autrement, ça nous coûterait moins cher, si c'est ça que je comprends, j'ai besoin de précisions de votre part.

M. Caillé (André): Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit, c'est que nous avons des employés par contrat, avec la sécurité d'emploi, chez nous, et que nous allons faire pour les utiliser au maximum. Puis quand ça c'est fait... Puisqu'ils sont déjà là et disponibles – eux aussi consacrent leur temps à Hydro-Québec – puis qu'ils sont qualifiés, puis dont on est content de la performance, des connaissances, puis de l'expertise, etc., ils font du bon travail, quoi, on va les utiliser à 100 %, mais, s'il y avait des demandes additionnelles, oui, on pourrait aller à l'extérieur, si on parle de réseau de distribution. En transport, on n'a pas la même problématique, je l'indiquais. En ingénierie, on a en partie la même problématique que celle où on a beaucoup de gens à notre emploi.

(16 h 30)

M. Cherry: O.K. Je soulève deux exemples. Le premier, vous faites la distinction dans la distribution. Un entrepreneur communique avec moi, puis me dit: Depuis 14 ou 15 ans, moi, je plante des poteaux pour Hydro-Québec puis, avec mon équipement et mon personnel, moi, je charge 30 $ du poteau pour planter ça, à Hydro. À un moment donné, j'apprends qu'Hydro-Québec a du personnel en formation à une école pour apprendre à planter des poteaux. Il me dit: Moi je fais ça. À Hydro-Québec, ça coûte plus cher. Alors, je remonte la filière et j'essaie de trouver pourquoi. Et l'explication qui m'a été donnée par les gens d'Hydro-Québec, ils disent: De toute façon, ce monde-là, il faut les payer à ne rien faire; on est aussi bien de leur montrer quelque chose puis on les utilisera. Mais, si je compare le coût qu'un entrepreneur de l'extérieur pourrait faire à Hydro-Québec par rapport au coût à l'interne, là... Depuis que vous avez pris le virage affaires, c'est le genre de questions qu'il faut vous poser. Là, maintenant, vous avez décidé que, si ça ne rapporte pas, on ne le fait pas. Mais là, moi, je suis obligé de vous dire comme consommateur: Si ça me coûte plus cher comme ça qu'autrement, il faut que je vous le dise, enlevez-moi ça sur ma facture.

M. Filion (Yves): Si vous permettez...

M. Caillé (André): M. Filion va vous donner un complément de réponse.

M. Filion (Yves): M. le Président...

Le Président (M. Sirros): Rapidement.

M. Filion (Yves): ...M. le député, j'aimerais vous dire aussi un élément d'information additionnel. Lors de la signature de notre convention collective, à l'automne 1996, nous avons établi avec nos syndicats un contrat social sur une période d'environ cinq ans dans lequel on s'est engagés à maintenir et à développer l'emploi à l'intérieur de l'entreprise. Une des manières que nous avons établies pour concrétiser ce contrat-là, nous avons établi un mécanisme d'étude au niveau de la sous-traitance, et je dirais que c'est tout à l'honneur de nos syndicats, ils ont accepté de le faire sur la base de la compétitivité. Donc, nous regardons des domaines d'activité et nous comparons entre réaliser des travaux à l'interne et réaliser des travaux à l'externe et, lorsqu'on peut être compétitifs, nous avons convenu de favoriser de le faire à l'interne. Alors, pour nous et pour nos syndicats, je dirais, il y a acceptation de la compétitivité et d'être capables de faire des travaux en compétition avec ce qui existe sur le marché.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député...

M. Cherry: À ça, je dis: Bravo! Mais on va vous suivre à chaque pas que vous allez faire dans ce domaine-là. Vous comprenez bien ça, là? Merci.

Le Président (M. Sirros): On va sûrement suivre, M. le député. Merci beaucoup. M. le député de Marguerite-D'Youville.


Résultats de 1997

M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Alors, avec cet échange sur les perspectives financières, nous abordons un des thèmes les plus importants de ces trois jours d'échanges, au même titre probablement que le thème précédent sur l'ouverture des marchés. De la même manière que mes collègues ont exprimé les questions et le scepticisme que certains groupes sont venus manifester quant aux prémisses sur les projections de la demande pour l'électricité de même que sur les projections de l'évolution d'écart des prix de l'électricité entre le Québec et les États-Unis, je pense que ces mêmes préoccupations là s'expriment au niveau des perspectives financières.

Dans son engagement de performance 1997, Hydro-Québec s'était engagée à produire un bénéfice net de 715 000 000 $ – ça, c'est à la page 17 – et à verser un dividende de 357 000 000 $ au gouvernement en début de cette année, en début de 1998. Dans le plan stratégique, qui remonte au mois d'octobre dernier, vous envisagiez déjà, sur la base de vos prévisions financières d'avril 1997, un bénéfice net supérieur à cet engagement, soit 760 000 000 $ au lieu de 715 000 000 $, et un dividende conforme à l'engagement initial, c'est-à-dire 357 000 000 $. Alors, pourriez-vous nous indiquer à ce moment-ci, même si votre rapport annuel n'a pas été encore déposé officiellement, si les résultats de l'année 1997 vont être à la hauteur des prévisions que vous aviez indiquées?

M. Caillé (André): Alors, M. le Président, le rapport annuel n'a pas encore été approuvé par le conseil d'administration d'Hydro-Québec, donc on ne peut pas en parler comme quelque chose de définitif. Les chiffres vérifiés que j'ai pour le bénéfice sont de 786 000 000 $ au lieu du 760 000 000 $ pour l'année se terminant le 31 décembre.

M. Beaulne: Bon, c'est encore mieux.

M. Caillé (André): Ainsi, on sera passé, en passant, de 390 000 000 $, je pense, à 520 000 000 $ et à 786 000 000 $, si vous regardez les trois dernières années.

M. Beaulne: Maintenant, pour un peu continuer dans la discussion que vous aviez abordée tout à l'heure avec le député de Saint-Laurent, pouvez-vous nous indiquer si vous allez être en mesure de livrer au gouvernement les 357 000 000 $ prévus en dividendes, même en dépit de l'évolution défavorable des taux de change, quand le dollar canadien a clôturé l'année à 0,699 $US au lieu de 73,08 $, comme vous l'aviez prévu?

M. Caillé (André): La loi prévoit qu'un dividende peut être déclaré au gouvernement dans les mois qui suivent l'adoption par le conseil d'administration du rapport annuel, ce qui n'est pas encore fait, et, dès que ça pourra être fait, oui, je peux confirmer, compte tenu que le bénéfice est plus grand que celui qui avait été budgété, que le dividende qui avait été prévu pourra être versé.

M. Beaulne: Donc, si je vous comprends...

M. Caillé (André): Mais il ne peut pas être déclaré avant que le conseil...

M. Beaulne: Je comprends. Donc, si je décode bien, les chiffres que vous allez nous dévoiler sont supérieurs même aux engagements que vous aviez pris.

M. Caillé (André): Oui, c'est ça. On a des meilleurs résultats.


Baisse prévue du coût de la dette et du taux de change

M. Beaulne: Bon, bien, c'est une bonne nouvelle pour le gouvernement, ça.

Maintenant, au tableau 1 du plan stratégique, à la page 54, vous projetez une baisse graduelle des intérêts et des pertes de change après l'année 1999. Pouvez-vous nous indiquer ce qui sous-tend cette évolution?

M. Filion (Yves): Ce qui sous-tend cette évolution, c'est que, d'ici l'an 2002, d'abord, comme on vous l'a dit tout à l'heure, les nouveaux investissements d'Hydro-Québec seront financés par les bénéfices d'exploitation. Donc, les nouveaux emprunts que nous allons faire d'ici 2002 seront pour refinancer des emprunts qui viennent à échéance. Ces emprunts-là ont été généralement contractés à des taux d'intérêt supérieurs aux taux d'intérêt du marché d'aujourd'hui, ce qui nous permet de réduire le poste Intérêts et pertes de change. Donc, le refinancement de cette dette va se faire à un taux d'intérêt plus faible que le taux d'intérêt appliqué aux emprunts qui arrivent à échéance, ce qui nous permet de réduire les dépenses sous ce titre.

M. Caillé (André): Un complément d'information, M. le Président, si vous le permettez.

M. Vandal (Thierry): À ce sujet-là, vous voyez bien au tableau 1, à la page 54, le taux moyen du coût de la dette qui apparaît à la dernière ligne, qui traduit ce que mon collègue Yves Filion vient de vous décrire.

M. Beaulne: Tout à l'heure, en réponse partielle à la question du député de Saint-Laurent, vous avez parlé de vos révisions à la baisse du taux de change. Maintenant, de quelle manière allez-vous ajuster vos prévisions? Vous avez à peine effleuré, là, mais de quelle manière vous allez revoir à la baisse vos prévisions de ce taux de change là?

M. Filion (Yves): Au bilan de l'entreprise, je dirais que... L'impact principal de la variation du taux de change a un impact sur l'évaluation de la dette, principalement la dette libellé en dollars américains. Pour des raisons comptables, nous devons convertir notre dette libellée en dollars américains en dollars canadiens. Donc, lorsque le taux de change est plus bas, bien, nécessairement, ça a pour effet de gonfler la dette pour la fin nécessairement de présentation des états financiers. Par contre, au niveau du bilan, ça a moins d'impact à ce moment-là parce qu'il s'agit de présenter le coût réel de couverture des intérêts et pertes de change et parce que c'est un risque que nous gérons. Je pense que ce qu'il faut bien indiquer ici, c'est que c'est évident que le taux de change présente un risque. Vous l'avez très bien vu, on a fait des hypothèses dans le plan stratégique ici, de variation du taux de change, mais c'est un risque que nous gérons sur une base journalière à toutes fins pratiques. C'est un des éléments qui fait qu'Hydro-Québec a pu aussi diminuer son coût d'intérêts et pertes de change. Donc, nous faisons une gestion active de la dette et nous faisons une gestion active de nos risques financiers. Il y a trois principaux risques financiers: les risques de variation des taux d'intérêt, de variation du taux de change et de variation du prix de l'aluminium. Alors, je tiens à vous mentionner qu'on ne demeure pas inactifs par rapport à ces risques-là, on les gère de façon précise et nous visons à atténuer ces risques-là autant que possible.

M. Beaulne: Ça, vous avez tout à fait raison. On ne met pas en doute ici votre sagesse et votre prudence à gérer le risque. La seule chose qu'on veut savoir, pour le bénéfice des députés ainsi que de l'ensemble des groupes qui sont venus aux audiences, c'est: Jusqu'à quel point ces prévisions que vous faites, et qui sont incluses dans le plan stratégique, et qui sont une partie importante, puisqu'un des objectifs sous-jacents, même, pas juste sous-jacents, évidents dans le plan stratégique, c'est l'élément rentabilité... Alors, vous comprendrez que, pour nous, c'est très important de vérifier la fermeté de vos prévisions pas seulement en matière de ventes d'électricité, mais en matière de prévisions financières.

(16 h 40)

Je vous pose une autre question pointue. Étant donné que, d'ici l'an 2002, on se questionne sur la possibilité que le taux de change aille bien au-delà de 0,73 $ ou 0,75 $US, quel serait l'impact sur le cadre financier que vous proposez et qui est sous-jacent au plan stratégique si les taux de change devaient évoluer à 0,05 $ plus bas que les prévisions sur lesquelles vous avez présenté le plan stratégique?

M. Filion (Yves): M. le Président, si on avait une variation, disons, qui pouvait aller jusqu'à 0,05 $, répartie d'ici à 2002, ça représenterait, en 2002, environ 130 000 000 $.

M. Beaulne: Ça veut dire que vous auriez une perte de 130 000 000 $ par rapport au...

M. Filion (Yves): Oui, exact. Mais je tiens à vous répéter que ça, c'est sans considérer la gestion du risque que l'on pourrait faire, parce que c'est un risque qui se gère, par des options entre autres.

M. Beaulne: Oui, je comprends. Oui, d'ailleurs, il y a des techniques pour le faire...

M. Filion (Yves): Tout à fait. S'il n'y avait pas de gestion du risque...

M. Beaulne: ...mais c'est quand même important de situer l'ampleur de la perte.

M. Filion (Yves): Exact.

M. Caillé (André): Excusez, M. le Président, c'est un 150 000 000 $ qui ne se produira pas parce que nous gérons, de fait. On n'a pas pris l'option ici de ne pas gérer le risque. Nous gérons le risque.

M. Beaulne: Maintenant, pour ceux qui suivent ces questions-là et puis pour nous donner la possibilité de suivre un peu plus et d'ajuster davantage vos prévisions – on a parlé de l'impact de 0,05 $ – pouvez-vous nous indiquer quel est l'impact sur les intérêts et les pertes de change au cours des cinq années qui sont couvertes par le plan ici d'une variation de 0,01 $ du taux de change? Ça, c'est facile à suivre, de 0,01 $ du taux de change.

M. Filion (Yves): Du taux de change ou des intérêts, M. le député?

M. Beaulne: Du taux de change.

M. Filion (Yves): Du taux de change. Donc, pour 0,01 $?

M. Beaulne: Puis des intérêts aussi. Ça s'applique, la même chose, aux intérêts.

M. Filion (Yves): Disons qu'une variation de 0,01 $, en 1998, du taux de change, ça représente environ 20 000 000 $.

M. Beaulne: Puis une variation de 1 % du taux d'intérêt?

M. Filion (Yves): 1 % du taux d'intérêt, ça représente environ une centaine de millions de dollars.


Prévisions financières comparées

M. Beaulne: Bon. Alors, maintenant, si on regarde la perspective temporelle des cinq prochaines années, on parle ici de prévisions de taux d'intérêt, de taux d'inflation, de taux de change. Les prévisions que vous faites, les projections que vous faites, de quelle manière s'apparentent-elles à celles de ceux dont c'est le métier de faire ce genre de prévisions? Je parle, entre autres, des six grandes banques à charte canadiennes, et en particulier de la Banque du Canada, de la Banque centrale dont c'est l'objectif et le mandat n° 1 de gérer le taux de change, le taux d'intérêt, le taux d'inflation.

M. Filion (Yves): Effectivement, nous comparons ces données avec plusieurs organismes qui font de telles comparaisons...

M. Beaulne: En d'autres mots, là où je veux en venir, c'est: Si vous pouviez nous démontrer que les prévisions financières que vous faites s'appuient sur des prévisions semblables à celles que fait, entre autres et en particulier, la Banque du Canada dont c'est le métier de faire ces projections-là, bien, là, on se sentirait en terrain plus solide.

M. Caillé (André): On va vous trouver la page – je ne trouve pas la page, M. le Président – où on a les comparaisons avec les grandes institutions financières qui font de pareilles prévisions, comme la Caisse de dépôt, la Banque du Canada, etc.

M. Beaulne: Mais vous comprenez la question?

M. Filion (Yves): Mais c'est certain que nous faisons ce genre de comparaison, M. le député, c'est bien sûr.

M. Beaulne: Oui, mais la question que je vous pose...

M. Caillé (André): C'est comment.

M. Beaulne: Je ne doute pas que vous le fassiez. La question que je vous pose, c'est: Vos projections parallèlement à celles de la Banque du Canada pour les trois variables dont je vous ai parlé, qui sont les trois variables essentielles et les composantes principales des perspectives financières, comment se comparent-elles aux mêmes prévisions de la Banque du Canada pour la même période de temps, les mêmes cinq prochaines années?

M. Filion (Yves): On va vous fournir cette information, si vous permettez.

M. Beaulne: Alors, pourriez-vous la déposer à la commission?

M. Filion (Yves): Oui.

Le Président (M. Sirros): Si le député le permet. De façon générale, êtes-vous plus optimistes, moins optimistes ou identiques à la Banque du Canada, par exemple?

M. Filion (Yves): Je dois vous admettre que, de façon générale, les variations sont très faibles et les prévisions, comme vous le savez, varient souvent. Donc, en gros, ce qui est important, c'est de se retrouver à peu près dans la moyenne et nous nous trouvons généralement dans des hypothèses relativement conservatrices.

M. Vandal (Thierry): Un exemple de ça, c'est l'IPC, en 1997, qu'on avait prévu à 1,8, qui s'est révélé être 1,6. Donc, on avait été conservateur pour l'IPC, en 1997.

Le Président (M. Sirros): Il vous reste encore un peu de temps.

M. Beaulne: Oui. Maintenant, toujours à la page 54, au tableau 1, vous prévoyez une croissance de votre bénéfice net consolidé de 760 000 000 $ à 1 850 000 000 $ sur la base des cinq ans, ce qui représente une augmentation de 143 % sur la période, ou à peu près de 19,5 % par année en moyenne. Alors, ma question est la suivante: À quoi attribuez-vous principalement un taux annuel de croissance aussi important?

M. Filion (Yves): Bien sûr, je dirais que c'est dû à la croissance des produits, donc à la croissance des ventes. C'est le principal élément. Mais la croissance des ventes est aussi compensée par une stabilisation de nos charges d'exploitation, ce qui est aussi un facteur extrêmement important, parce qu'on pourrait très bien croître dans nos ventes mais augmenter aussi nos dépenses dans la même proportion, ce qui fait que le bénéfice net ne serait pas au rendez-vous. Mais, comme vous le voyez ici, à la page 54, c'est que nos produits augmentent beaucoup, mais les charges d'exploitation demeurent relativement stables.

M. Beaulne: Et comment se ventilent ces ventes-là? Quel pourcentage...

M. Filion (Yves): C'est le 20 TWh dont on a parlé. Majoritairement, c'est le 20 TWh dont on a parlé tout à l'heure, plus d'autres revenus additionnels provenant de nouveaux produits et services qui représentent environ 150 000 000 $.

Le Président (M. Sirros): Dernière question, peut-être.

M. Beaulne: Oui. Alors, encore une fois, selon le graphique que vous avez à la page 51 du plan stratégique, le bénéfice net progresse de façon assez régulière d'année en année. Par contre, le bénéfice net de l'année 2001 semble reculer d'à peu près 150 000 000 $ par rapport à une croissance plus régulière qui aurait dû l'amener aux environs de 1 600 000 000 $. Alors, pouvez-vous nous expliquer quels sont les facteurs qui expliquent ce léger repli du bénéfice que vous anticipez en l'an 2001?

M. Filion (Yves): Je dirais que le principal facteur qui explique ça, c'est que... On vous a parlé tout à l'heure que, dans les 20 TWh de ventes additionnels, il y a un bloc de 6 TWh qui reste à développer, qui n'existe pas encore aujourd'hui. Alors, ce 6 TWh, à toutes fins pratiques, ne sera disponible qu'en 2002. Donc, en 2002, il y a donc une quantité importante d'énergie additionnelle disponible sur le marché, principalement sur le marché d'exportation, ce qui explique la croissance importante du bénéfice net en 2002.

M. Beaulne: Est-ce qu'il y a encore du temps?

M. Chevrette: Y en «reste-u»?

Le Président (M. Sirros): Peut-être un petit peu parce qu'on avait dépassé tantôt, 30 secondes.


Calcul du taux de rendement

M. Beaulne: Alors, ici, toujours au tableau 1, à la page 54, vous projetez une croissance du taux de rendement sur l'avoir propre qui va passer du niveau de 6 % atteint en 1997 à un rendement de 11,8 % en l'an 2002. Les taux de rendement d'Hydro-Québec ont fluctué. D'année en année, ils n'ont pas été stables. D'ailleurs, ils ont quand même fluctué de façon assez importante, entre 17 % et 22,9 %. C'est quand même une variation assez importante au cours des années 1984 à 1986 et dans les années subséquentes. Alors, malgré les fluctuations que vous avez vécues à ce chapitre-là, pouvez-vous nous expliquer l'importance de ce ratio financier dans les perspectives financières d'Hydro à long terme en tenant compte des taux de rendement qui sont généralement accordés à des organismes semblables au vôtre, à l'industrie, comme on dit couramment?

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député.

M. Caillé (André): Vous voulez parler des taux de rendement sur des entreprises comparables, des entreprises de services publics?

M. Beaulne: Oui, c'est ça.

M. Caillé (André): Voyez-vous, avec la décision que vous avez prise au moment où vous avez adopté la législation – c'est en décembre 1996 – concernant la réglementation, par la création d'une régie de l'énergie, etc., il a été établi que, pour Hydro-Québec, ce serait le rendement raisonnable, comme pour Gaz Métropolitain, du reste. Je vous disais – dans le discours d'ouverture, je pense que c'était – qu'il y a trois méthodes pour faire cette évaluation.

(16 h 50)

Il y a la prime de risque, c'est-à-dire qu'à ce moment-là les commissaires, sur une commission de la Régie, ils vont tenter d'estimer quelle est la prime de risque pour un investisseur d'investir dans Hydro-Québec plutôt que d'acheter des obligations à long terme du Canada. Et ça, ça donne à peu près 400... ça dépend des années, c'est 400, 450 points de base; ça a déjà été 380. Ça peut varier, ça. Il y a une tendance là-dessus.

Après, il y a le taux de rendement des comparables. Les comparables, ça, c'est une autre méthode. On prend des entreprises qui ont un risque comparable au risque d'Hydro-Québec puis là on dit: Les actionnaires de ces entreprises qui sont comparables font telle sorte de rendement, l'actionnaire d'Hydro-Québec devrait faire la même sorte de rendement.

Et, finalement, on fait l'actualisation des flux financiers de quelqu'un qui achèterait aujourd'hui une part d'Hydro-Québec puis qui dit: Voici ce que je vais obtenir dans le temps; en valeur présente, ça vaut telle chose; le marché se contente de x, y, z. Puis là on dit: C'est ça, le rendement.

Alors, il y a des méthodes. C'est très précis, c'est fait par des spécialistes. Ça se fait depuis 1949, je crois, en Angleterre. C'est eux qui ont inventé ce système-là. C'était pour établir des tarifs de transport de chemins de fer, qui était détenus à l'époque par des entreprises privées. C'est le premier bouquin que j'ai pu lire sur la théorie qu'il y avait derrière ça. Alors, 11 % à 12 %. Nous, on a dit: 8 % plus 4 %, ça va faire 12 %. On est entre 11 % et 12 %. Pour un rendement raisonnable, voici l'affaire et voici l'obligation que vous nous avez faite en votant la loi. C'est comme ça que ça s'est passé.

Le Président (M. Sirros): Merci beaucoup.

M. Beaulne: M. le Président, j'aimerais quand même, avant de passer la parole aux collègues, réitérer ma demande, si c'est possible de déposer...

Le Président (M. Sirros): Les tableaux comparatifs.

M. Beaulne: ...les tableaux comparatifs pour qu'on puisse en prendre connaissance avant la fin de nos échanges demain.

Le Président (M. Sirros): Je pense que c'est bien noté. Il y a une autre demande qui a été faite dans ce sens-là concernant les études et les avis du comité consultatif. On espère les avoir.

M. Caillé (André): Oui, c'est vrai.

Le Président (M. Sirros): Alors, M. le député d'Outremont.


Projet souverainiste et perspectives financières

M. Laporte: M. le Président, j'aimerais poser au président d'Hydro-Québec une question claire, mais, pour pouvoir la poser, il faut que je la contextualise parce qu'elle repose sur une problématique d'évaluation de risque qui n'est absolument pas envisagée, qui n'a pas été envisagée jusqu'ici. Et je dois bien dire que ce n'est pas une question de comptable, c'est une question de parlementaire.

Vous êtes sûrement au courant, M. le président, de ce que, au lendemain du référendum, l'ancien premier ministre du Québec, M. Jacques Parizeau, nous a fait connaître relativement à ce qu'il appelait le plan O. J'ai devant moi un article de L'actualité , de Jean Chartier, dans lequel ce plan O est décrit en détail. Je ne voudrais pas m'étendre trop là-dessus, faute de temps, mais disons que M. Parizeau avait prévu que des agents importants du Québec: Hydro-Québec, la Caisse de dépôt, des banques, le ministère des Finances... avait prévu une réserve d'environ 17 000 000 000 $ qui devrait servir dans l'éventualité où nous nous retrouverions dans une situation d'incertitude politique devant générer des effets prévisibles sur les marchés financiers. Le gouvernement du Québec aurait donc la capacité financière de racheter les obligations pour éviter, évidemment, leur dégradation, quitte à soutenir tout l'édifice financier du Québec.

Si vous voulez imaginer de quoi ça a l'air, un scénario comme ça, vous pouvez prendre votre téléphone, appeler le président Suharto, de l'Indonésie, qui, lui, dernièrement, a vécu d'une façon assez violente les décisions des spéculateurs financiers, en particulier celui de George Soros, et qui a dû gérer une situation où les réserves lui ont manqué, ce qui a entraîné une dégradation de sa devise. Évidemment, dans le cas du Québec, ce serait un peu différent mais assez catastrophique.

M. Parizeau, l'ancien premier ministre, prévoyait qu'au chapitre d'Hydro-Québec une marge de crédit d'environ 3 200 000 000 $ serait réservée pour gérer l'opération de rachat des obligations sur les marchés financiers. Je vous rappelle que les obligations du Québec sur les marchés financiers sont possédées à peu près à 40 % par des institutions québécoises, à peu près à 10 % par des institutions canadiennes d'autres provinces et à peu près à 40 % par des institutions étrangères, en particulier des institutions américaines, des institutions japonaises et des institutions suisses.

La raison pour laquelle c'est très pertinent, cet exercice de politique-fiction, c'est que, en vous écoutant tantôt, j'ai compris une chose qui me paraît extrêmement importante, et vos exposés sont toujours extrêmement éclairants et extrêmement utiles à écouter. Vous nous avez dit, en fait, que l'avantage stratégique distinctif d'Hydro-Québec réside dans sa capacité de prévoir avec certitude le prix de sa marchandise et de pouvoir s'engager sur le long terme à offrir cette marchandise à ce prix à ses clients, et en particulier à ses clients industriels. Ça, c'est vraiment un avantage stratégique énorme sur le marché de l'énergie, comme vous l'avez décrit tantôt. Les prévisions financières 1990-2000, si j'ai bien compris, reposent en bonne partie sur cet avantage stratégique, c'est-à-dire sur cette capacité que vous avez de me dire à moi, qui suis un de vos clients: Écoutez, pour les prochains 20 ans, votre prix sera tel. Donc, on peut, à ce moment-là, faire des prévisions assez précises.

La première question qui est préalable à l'autre question que je veux vous poser, c'est: Quels sont les facteurs déterminants de cette capacité de prévision de son prix, d'Hydro-Québec?

M. Caillé (André): Le facteur, M. le Président, évidemment, tient au fait qu'Hydro-Québec, premièrement, est une entreprise intégrée. Nous produisons, nous transportons et nous distribuons le produit électricité, par opposition à d'autres entreprises qui ont un risque plus grand parce qu'elles ne sont pas intégrées; par exemple, celles qui sont seulement dans la distribution sans être dans le transport et la production, ou qui sont simplement dans la production sans être dans le transport et la distribution. Alors, le premier facteur, c'est que nous sommes une entreprise intégrée.

Deuxièmement, nous sommes, ici, dans l'hydroélectricité, un métier que ceux qui sont mes contemporains, mais un peu plus âgés que moi, ont développé à un degré extrêmement poussé, qui ont développé des connaissances et un savoir-faire extrêmement poussés, puis, vous le savez, ils ont appartenu à l'une et l'autre de vos formations politiques, puis il y en a bien d'autres aussi qui ont travaillé à Hydro-Québec, donc des connaissances et un savoir extrêmement poussés qui ont fait de nous, qui ont fait de cette entreprise, Hydro-Québec, une entreprise des plus performantes dans son domaine, dans son domaine à elle, l'hydroélectricité. Faire des équipements, construire des équipements de production, construire des équipements de transport et de distribution, on sait très bien faire ça au Québec, puis je pense que c'est dans ces murs ou dans les murs voisins que, finalement, tout ça a pris naissance.

Alors, on est intégré et on sait très bien ce que l'on fait. On contrôle l'ensemble des coûts de la filière. Alors, c'est un avantage par rapport à plusieurs autres compétiteurs de nous qui ne contrôlent pas l'ensemble des coûts de la filière. Il reste toujours pour eux des inconnues. Ils sont obligés de se protéger, d'être conservateurs, de faire des estimés conservateurs quant au coût du pétrole brut qu'ils vont acheter pour savoir comment détailler la gazoline ou l'huile à chauffage, etc. Alors, c'est les grands avantages. Et, en termes commerciaux, je vous assure. J'ai travaillé dans deux de ces industries, et la première où j'étais, l'incapacité d'être capable d'indexer ou de prévoir le prix, elle était là, parce qu'on ne savait pas quel était le prix du gaz naturel l'année suivante avec assurance. Ça n'existe pas dans l'électricité. Sans parler de la connaissance, comme je viens de le dire. C'est ça, l'atout, le gros atout commercial, le gros atout stratégique que l'on met en... Ça compte, d'avoir un atout stratégique, à la condition de l'utiliser, n'est-ce pas? On peut en avoir beaucoup, des atouts stratégiques, dans sa valise, mais, si on ne les utilise pas, ça ne sert pas à grand-chose.

Le Président (M. Sirros): M. le député.

(17 heures)

M. Laporte: M. le Président, je voudrais revenir à ma question sur le plan O. La question que je veux poser au président d'Hydro-Québec, ce n'est pas celle de savoir ce que le président d'Hydro-Québec pense du plan O. Ça, je pense que c'est son opinion personnelle. Il peut penser ce qu'il voudra. Je ne veux pas non plus savoir comment, lui, comme président d'Hydro-Québec, il s'y est pris pour gérer le plan O. À mon avis, dans l'éventualité où il aurait été là, il aurait fait probablement de son mieux. Ce que je veux savoir du président d'Hydro-Québec, c'est si, à son avis, l'option politique du Parti québécois, dans l'éventualité où elle soit actualisée, pourrait nous placer dans une situation d'incertitude irréductible. Et ce que je veux savoir, c'est si le président d'Hydro-Québec est d'avis que tout le bel édifice de prédictions financières qui est contenu dans ce plan stratégique ne repose pas, finalement, sur ce que le juge Brandeis appelait «an unarticulated premise», c'est-à-dire une présomption non articulée – c'est très important de désarticuler les présomptions lorsqu'on essaie de déconstruire des discours, comme celui-là – laquelle prémisse est à l'effet qu'au cours de l'exercice qui est prévu ici il n'y aura pas de rupture radicale du régime.

M. Chevrette: M. le Président, j'aurais une question de directive à vous demander, s'il vous plaît. Une question de règlement.

M. Laporte: Donc, si vous permettez... C'est une question de règlement?

Le Président (M. Sirros): Sur une question de règlement.

M. Chevrette: Je voudrais le faire très calmement. Le plan EAU, ici, qu'on a à discuter, c'est E-A-U. Le plan O du ministre Parizeau...

Le Président (M. Sirros): M. le ministre...

M. Chevrette: ...le lendemain du référendum, n'a aucun lien avec le plan stratégique actuel.

M. Laporte: Là, au contraire.

Le Président (M. Sirros): Un instant, là, un instant. Un instant, du calme, tout le monde. Du calme, tout le monde. Si je comprends bien la question de règlement, c'est une question sur la pertinence. Le député a bien structuré son argumentation à l'effet de parler des effets sur les perspectives financières. C'est son point de vue. Il a le droit de poser la question. Alors, M. le député, votre question est posée.

M. Laporte: Parce qu'il ne faut tout de même pas oublier non plus, M. le Président... Je me rappelle que c'était à la campagne, probablement autour du mois de novembre ou peut-être au mois d'août 1997, que je lisais une déclaration de l'actuel premier ministre Lucien Bouchard qui prévoyait que la rupture politique aurait lieu l'année suivant... la première année de ce qu'il appelait le millénaire. Donc, on n'est pas dans la politique fiction totale, on est devant un imaginaire politique qui est d'autant plus vraisemblable et d'autant plus pensable qu'il nous a été annoncé par le premier ministre.

Et, ma question, je la répète, la question que je pose au président d'Hydro-Québec, c'est que tout ce bel édifice, ici, est-ce que ça serait modifié dans l'éventualité où on se retrouve, du point de vue politique, face à gérer, dans la période 1998-2000, un scénario de rupture du régime ou de transformation – disons, je n'aime peut-être pas le mot radical – mais de transformation importante du régime politique canadien? Je pense que...

Le Président (M. Sirros): M. le député.

M. Laporte: Je termine là-dessus. Ma question, c'est: Le succès de ce plan ne suppose-t-il pas que le régime continue et que finalement l'option du PQ ne soit jamais mise en oeuvre?

M. Caillé (André): M. le Président, tout d'abord, je voudrais remercier le député pour deux choses: Il a qualifié mes propos devant cette commission de précis et...

M. Laporte: Très utiles, très éclairants.

M. Caillé (André): ...de très utiles et très éclairants, voilà. Deuxièmement, il a qualifié le plan de nouvel édifice extraordinaire. Quant au troisième volet, je ne suis pas un politicien et, si j'ai accepté un emploi à Hydro-Québec, c'est parce qu'on m'a demandé de le faire dans un contexte où ce n'était pas politique. On m'a demandé de gérer l'entreprise sur une base d'affaires, le plus près possible d'une base d'affaires, entre guillemets, pour ce que cela veut dire. Il est donc bien entendu que je ne m'immiscerai pas dans des débats qui me semblent être ceux qui ont généralement... à ce sujet, des débats qui ont normalement cours dans cette... Enfin, d'habitude, quand je vous vois parler de ça, le salon est bleu, lorsque je vous écoute à la télévision.

Le Président (M. Sirros): Ça étant dit, il reste encore du temps au député d'Outremont, qui a l'intention de reposer une question.

M. Laporte: Alors, ça sera peut-être le ministre qui répondra, M. le Président. Tout ce que je dis, c'est que dans l'éventualité où la demande de marge de crédit de 3 200 000 000 $, qui avait été faite par l'ancien premier ministre dans le plan O, et faite probablement à partir de concoctions qui étaient, disons, fiables – parce que M. Parizeau, comme on le sait, est un grand économiste et un homme fort intelligent – dans l'éventualité où la marge de crédit serait une marge de crédit qui serait exigée d'Hydro-Québec dans la période dont on a convenu ici, la question que je pose, c'est: Qu'est-ce qui arrive de la validité de tout ce bel édifice de prévisions financières? Est-ce que c'est «business as usual» ou si on se retrouve devant une situation de crise où toutes ces prévisions-là sont remises en question et baignent dans l'incertitude? Parce que – et je termine là-dessus vraiment cette fois-ci – je reviens à la question d'internationalisation d'Hydro-Québec. Avant une internationalisation intensive, Hydro-Québec ne courait pas un risque que pourrait lui faire encourir un scénario de crise politique, que Kennedy appelle le phénomène du «strategic overstretched». Étant donné que là vous seriez déployés à l'échelle internationale, dans une situation de crise politique, vous vous trouveriez dans une situation de «strategic overstretched» qui serait vraiment réelle. Vous n'auriez pas simplement à gérer des rapports qui seraient des rapports stratégiques avec votre clientèle du Québec, mais vous auriez à gérer des rapports stratégiques à l'échelle mondiale.

Et, je vous le dis, la question se pose compte tenu de l'éventualité et de l'éventualité d'autant plus éventuelle que le premier ministre nous l'a déjà annoncé dans un discours qu'il a fait au mois d'août. Qu'est-ce qui arriverait de toutes ces prévisions s'il fallait qu'on s'en aille dans une situation de crise comparable à celle qu'avait imaginée M. Parizeau et pour laquelle, d'ailleurs, il avait à ce moment-là pris des dispositions qu'on connaît dans le plan O et dont on s'était fait informer par Stéphane Bureau et par Jean Chartier dans l'article d'actualité que je viens de mentionner?

Donc, la question se pose, M. le Président. Pour un parlementaire, la question se pose, et j'ai bien hâte de voir si certains de mes collègues d'en face, et en particulier le ministre... Parce que le président d'Hydro-Québec nous dit que ce n'est pas de son affaire, peut-être que le ministre pourrait essayer de nous donner là-dessus quelque lumière. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Sirros): Merci. Moi aussi, M. le député, je trouve que la question se pose. Maintenant, quant aux réponses, ce n'est pas à la présidence ou non de les donner.

M. Chevrette: Non, mais... Il a dit qu'il allait répondre.

Le Président (M. Sirros): Le président d'Hydro-Québec a déjà dit qu'il ne voulait pas répondre. Alors, la parole est au ministre...

M. Chevrette: C'est sur mon temps régulier, si j'ai bien compris?

Le Président (M. Sirros): ...sur son temps régulier.

M. Chevrette: Merci. M. le Président, hier, ou ce matin, on m'a reproché de parler des pylônes manitobains puis des pylônes terre-neuviens. On a dit que c'était partisan que de demander au fédéral de payer pour des pylônes suite au verglas. On est en train, dans un autre forum, de parler d'un référendum positif. Je suis heureux, par exemple, qu'ils pensent qu'il peut y en avoir un positif. Je reconnais que c'est tout à fait pertinent. J'espère qu'il sera positif, le prochain. Il y a une évolution.

Le Président (M. Sirros): Gardez toujours votre calme, s'il vous plaît, tout le monde.

M. Chevrette: Il y a au moins une évolution dans les pensées.

M. Laporte: Dans le domaine des tractations politiques...

Le Président (M. Sirros): S'il vous plaît. À l'ordre!

M. Chevrette: Mais je vous ai laissé aller à vos élucubrations, puis je n'ai pas dit un mot.

M. Laporte: Un politicien responsable fait preuve d'imagination.

Le Président (M. Sirros): M. le député d'Outremont. Écoutez, je ne veux pas qu'on en arrive au point de suspendre nos travaux. Alors, s'il vous plaît, reprenons dans le calme. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Chevrette: Mais vous aurez remarqué que je n'ai rien dit dans toutes les envolées.

Le Président (M. Sirros): La parole vous appartient, M. le ministre.

M. Chevrette: Merci. Donc, M. le Président, le député Laporte est en train de vouloir faire un débat qui serait des suites positives à un référendum. Je ne crois pas effectivement que c'est la place. Le plan EAU, ici, c'est E-A-U, je le répète, c'est un plan stratégique qu'on a à étudier comme mandat. Comme mandat, c'est un plan stratégique qu'on a à étudier. On doit demander à Hydro-Québec si son plan stratégique est conforme à des orientations que l'on veut comme gouvernement ou comme Assemblée nationale. C'est ça qu'on a à dire ou à demander à Hydro-Québec. Qu'on puisse s'amuser une fois aux deux heures en entendant le député d'Outremont, ça me fait plaisir, parce que ça détend, mais, ceci dit, par exemple, on ne se laissera pas entraîner sur une piste qui est tout à fait hors contexte et j'espère qu'on va dire... S'il vous plaît!

Le Président (M. Sirros): Tout le monde, s'il vous plaît, gardez le silence. Il y a une personne qui a la parole, c'est le ministre.

M. Chevrette: Bon. On va questionner sur le plan stratégique, c'est ça qui est notre rôle ici, et j'ai deux questions, en disant au député d'Outremont qu'il retrouvera bien ses réponses en temps et lieu. Mais je voudrais le remercier de voir que son esprit évolue vers un référendum positif.


Charges d'exploitation

Ceci dit, j'ai deux questions. La première. Vous aviez, en 1997, parlé d'une réduction des charges d'exploitation. Tantôt, j'écoutais M. Filion parler de stabilisation des charges d'exploitation. Si ma mémoire est fidèle, c'était de l'ordre de 1 380 000 000 $ ou 1 400 000 000 $, quelque chose du genre, alors que vous parlez de 1 600 000 000 $. J'aimerais savoir quel est cet écart de 220 000 000 $. Comment vous l'expliquez?

(17 h 10)

M. Caillé (André): Bien. Alors, je voulais le faire demain, je crois, en parlant de la contribution de nos employés. Pour moi, c'est un sujet très important à traiter devant vous parce que, quand je suis arrivé à Hydro-Québec, c'était après la commission parlementaire de février 1996 et que, dans l'entreprise, j'ai constaté très rapidement qu'il y en avait plusieurs – pas tous, là, ce serait mentir de le dire de tous, ce serait exagéré plutôt – qui avaient perdu confiance. J'ai compris très rapidement qu'il fallait que nous nous penchions, que je me penche, moi d'abord donc, à mettre en place une nouvelle direction, une nouvelle équipe de direction, ce qui a été fait en dedans d'un mois, et qu'ensemble, cette nouvelle direction, nous nous penchions sur la situation pour être en mesure de nous donner un plan pour partir sur un nouveau pied à l'intérieur de l'entreprise, ce que nous avons fait, M. le Président.

Et il y avait des commandes précises qui avaient été passées par le gouvernement. J'ai multiplié les rencontres à l'intérieur de l'entreprise, M. le Président. Je me suis rendu dans tous nos bureaux régionaux, j'ai rencontré les gens des syndicats, j'ai rencontré les cadres, j'ai rencontré tout le monde en leur disant ceci: Nous allons établir un plan. Nous allons le mettre en place, ce plan, le plus rapidement possible, et je m'engage – et c'est là que j'arrive à aujourd'hui – à présenter le résultat de ce plan en commission parlementaire et à demander aux parlementaires s'ils sont satisfaits de l'effort d'Hydro-Québec, s'ils sont donc satisfaits de la contribution des employés d'Hydro-Québec à la réalisation des objectifs financiers du gouvernement. Alors, je vais donc faire ça maintenant, puisque vous posez la question.

Alors, ça s'est présenté comme ceci. Premièrement, les employés syndiqués, à l'exception d'un syndicat où on n'a pas signé de convention collective encore, mais tous les employés syndiqués, on a réussi à réduire les salaires de 5 %. Il y a donc eu pour nos employés réduction...

M. Chevrette: Les masses salariales ou les salaires?

M. Caillé (André): Ça, c'est les salaires, pardon, de 4,5 %; la masse salariale, quant à elle – tout ce que ça coûte – de 9,2 %. Alors, on a réduit les salaires de 4,5 %. On a réduit le nombre de cadres, le nombre d'employés cadres; je n'ai pas le chiffre ici, mais, pour les effectifs totaux, on l'a réduit de 2 904 personnes, dont 2 389 permanents et 515 temporaires.

On a réduit les masses salariales, je le disais, de 9,2 %, mais, dans les conventions, c'est 4,5 %, plus toutes sortes d'autres facteurs comme l'aménagement du temps de travail, comme la rationalisation de certaines primes dont il avait été, m'a-t-on dit, abondamment question lors de ladite commission parlementaire, tant et si bien que le 9,2 %, par exemple, ça équivaut à 141 000 000 $ par année. Au niveau des cadres, je n'ai pas le chiffre exact ici, mais la réduction en termes de pourcentage de cadres, le nombre de personnes, je crois que ça a été de 26 %.

Tout cela nous amène à un chiffre, en ce qui concerne les dépenses d'exploitation, de 1 550 000 $ qu'il faut comparer avec le 1 380 000 $. Maintenant, il y a d'autres gestes qui vont être posés et qui n'ont pas pu, malgré ce que je disais, M. le Président, plus tôt, être actualisés parce qu'ils tiennent de l'implantation de nouvelles technologies, comme les centres d'exploitation de réseaux, les centres d'appels téléphoniques. C'est des choses qu'on a décidées mais qu'on n'a pas mises en place encore, parce que ça prend un certain temps pour mettre ça en place si on ne veut pas...

M. Chevrette: Mais, M. Caillé, au niveau des ressources humaines, demain, on pourra regarder ça. Ce n'est pas...

M. Caillé (André): Ce n'est pas ça?

M. Chevrette: ...un jugement de valeur que je portais sur l'effort, j'essayais uniquement de comprendre: par rapport à l'engagement de performance de 1997, les chiffres de 1997 par rapport aux chiffres projetés...

M. Caillé (André): Alors, je vous donnerai...

M. Chevrette: ...dans le présent plan stratégique ne correspondaient pas de 220 000 000 $. Mais je ne nie pas l'effort, je n'essaie pas de remettre en question ce qu'Hydro a fait. Ça, on en parlera au niveau du plan de ressources humaines demain.

M. Caillé (André): Très bien. Alors, on se reprendra demain à cet égard-là. Moi, encore, ma présentation a pour but de m'acquitter d'un engagement qui est pris, de vous le présenter, et d'un engagement...

M. Chevrette: D'accord.

M. Caillé (André): ...que j'ai pris de vous demander si c'est satisfaisant. Voilà pour le point 1. Vous posez la question entre le 1 550 000 $ versus le 1 380 000 $. Alors, ça veut dire qu'on n'a pas complété. Il y a des choses comme les centres d'exploitation de réseaux, les centres d'appels, un SAP – un système de gestion administratif à l'intérieur – de même que – parce qu'on a trouvé d'autres moyens – la téléphonie et la géomatique où on va faire des filiales avec les actifs que nous avons, on va aller chercher plus de revenus. Ce que je considère plus de revenus: être équivalents à des réductions de coût. Aussi bien atteindre les mêmes objectifs en gardant les gens en emploi plutôt que simplement couper des gens. Et on devrait être très près de votre 1 380 000 $. Enfin, c'est demain. Je me réserve le temps, demain, je vais vous poser la question: Est-ce que la mission a été accomplie? Alors, je la reposerai demain.

M. Chevrette: Une petite question. Au tableau 3A de la page 56, vous présentez un actif qui passe de 53 700 000 000 $ à 55 200 000 000 $. Et la partie Immobilisations représente à elle seule près de 90 % de cet actif-là avec 47 100 000 000 $ en 1997, puis 50 400 000 000 $ en 2002.

Moi, je voudrais que vous m'expliquiez que les immobilisations croîtront de seulement 3 300 000 000 $ malgré une injection de 12 000 000 000 $ en investissements. Je comprends mal.

M. Caillé (André): L'amortissement. Yves, monsieur, va vous répondre.

M. Filion (Yves): Disons que ce que vous avez ici comme chiffre, au total des immobilisations nettes, c'est le coût des immobilisations pour Hydro-Québec moins la valeur déjà amortie, plus la construction en cours. Donc, il y a deux phénomènes qui viennent jouer: il y a nos investissements et nos mises en service qui ajoutent au coût des immobilisations, et il y a l'amortissement qui continue à s'exercer, qui diminue la valeur. Donc, la différence des deux donne un total de 3 000 000 000 $. Mais, bien sûr, il y a un amortissement qui réduit cette valeur.

Le Président (M. Sirros): Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.


Politique de versement de dividendes

M. Beaulne: Oui. Au tableau 1, toujours à la page 54, le plan stratégique projette des dividendes susceptibles d'être déclarés, pour les cinq prochaines années, d'un total de 3 300 000 000 $. D'année en année, ces dividendes représentent la moitié du bénéfice net annuel et constituent une concession de la part de l'actionnaire, c'est-à-dire de la part du gouvernement par rapport à ce que permet la Loi sur Hydro-Québec. Simplement pour les fins de la discussion, la Loi sur Hydro-Québec permet en réalité au gouvernement d'aller chercher l'ensemble du surplus moyennant certaines dispositions, aussi, pour un coussin de 25 %.

Ma question est la suivante: Si le gouvernement ou l'actionnaire principal, comme vous l'appelez, ne limitait pas la contribution d'Hydro-Québec à 50 % de son bénéfice net, à combien se chiffreraient les dividendes, le total des dividendes sur cinq ans?

M. Caillé (André): D'abord, mon collègue va vous donner cette réponse. Si on se limitait à 25 % d'équité, c'est votre question?

M. Beaulne: Oui.

M. Caillé (André): Alors, ici, ce qui a été proposé au gouvernement, c'est une politique de dividendes semblable à ce que l'on retrouve dans les entreprises de services publics. Nous, c'était comme ça, à Gaz Métro, quand j'y étais. Au moment où on était une corporation, on payait 50 % du bénéfice en dividendes. Donc, rien de spécial ici et toujours dans la même philosophie qui consiste à gérer Hydro-Québec sur la base d'une corporation, sur la base d'une entreprise. Cela permet, cela, évidemment... Vous allez voir que l'équité augmente jusqu'à 31 %. Ça solidifie la structure de capitalisation, c'est bien entendu. Ça va permettre de faire, les Anglais disent... Enfin, on dit: diminuer les écarts au niveau de nos taux par rapport à des comparables, nos taux au niveau de la dette. Alors voilà.

Maintenant, pour connaître le chiffre exact de ce que ça donnerait, c'est un calcul assez sophistiqué. On pourrait le faire durant la soirée puis vous le donner demain matin. Ça donnerait évidemment beaucoup plus.

M. Beaulne: De toute façon, vous avez quand même abordé un peu le deuxième volet de ma question: Quelles sont les politiques de versement de dividendes auprès des compagnies d'utilités publiques, comme Hydro-Québec, par rapport à leurs actionnaires?

(17 h 20)

M. Caillé (André): Si vous parlez de compagnies, de sociétés d'État traitées comme telles ailleurs, les rendements ne sont pas comme ce qu'on trouve dans les corporations privées. Ici, ce que nous avons fait, les principes dont nous nous sommes inspirés, ce sont des principes de gestion qui existent dans les entreprises commerciales. Des politiques comme celle-là, de 50 % de versement du dividende, ça existe. Mon collègue me fait remarquer évidemment qu'une politique de dividendes doit tenir compte des potentiels de croissance de l'entreprise. En général, l'actionnaire a intérêt, quand il a des bons projets, à renoncer à son dividende pour voir son dividende réinvesti. Ça veut dire investir dans l'entreprise au coût, avec des projets qui sont plus que rentables, c'est-à-dire des projets à 0,03 $ quand on sait qu'on va vendre à 0,049 $. C'est l'avantage de l'actionnaire.

M. Beaulne: Mais, à votre connaissance, est-ce que c'est de l'ordre de 50 %, 60 %, 70 %, 20 %? Une idée d'une moyenne d'ordre de grandeur.

M. Caillé (André): Compte tenu de la croissance qu'on a, compte tenu de notre potentiel de croissance, 50 % de dividendes, c'est ce que vous trouveriez...

M. Beaulne: C'est une bonne moyenne, ça?

M. Caillé (André): ...dans n'importe quelle entreprise qui se trouverait dans des conditions similaires.

M. Beaulne: Bon, mon bloc se termine vite, alors juste une question rapide. Au cours des 20 dernières années, Hydro-Québec n'a jamais connu une couverture d'intérêts supérieure à 1,26, ce qui était en 1988. Or, le plan stratégique annonce une montée importante de ce ratio financier. D'une couverture de 1,20 en 1997, on passerait à une couverture de 1,51 dans cinq ans d'ici, en l'an 2002. Alors, pour le bénéfice des députés puis également de ceux qui nous écoutent, pouvez-vous nous indiquer quelle est l'importance de ce ratio de couverture d'intérêts pour les marchés financiers? Et puis quel est le message que vous voulez envoyer à la communauté financière en faisant passer ce ratio de couverture d'intérêts de 1,20 à 1,51?

M. Caillé (André): Premièrement, on renforce de cette façon la situation financière, on réduit le risque pour les détenteurs d'obligations et on s'attend à ce que l'écart, le «spread», en bon québécois, rentre, c'est-à-dire diminue. On s'attend donc de leur part à un coût de dette inférieur à ce qu'il serait autrement. La différence évidemment allant directement, comme on dit toujours au Québec, sur la ligne du bas.

Le Président (M. Sirros): Merci beaucoup. Oui?

M. Ciaccia: J'ai le droit de parole?

Le Président (M. Sirros): Bien, c'était Mme la députée de La Pinière. Avant?

M. Ciaccia: Non, c'est moi avant.

Le Président (M. Sirros): O.K. Alors, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Juste quelques instants.

Le Président (M. Sirros): Allez-y.


Interfinancement entre catégories d'utilisateurs

M. Ciaccia: Est-ce qu'il existe encore l'interfinancement entre les différentes catégories d'utilisateurs d'Hydro-Québec?

M. Caillé (André): La réponse, M. le Président, à cette question, c'est oui, selon les études de répartition du coût de service qui existent jusqu'ici. Elles existent et il existe, cet interfinancement, principalement entre la clientèle commerciale et la clientèle résidentielle, très peu de la clientèle industrielle à la clientèle résidentielle, contrairement à ce qui est dit en général.

Par contre, on n'en aura le coeur net de cette question que lorsque l'allocation du coût de service aura été faite selon les règles de l'art. Et c'est une opération à laquelle tout office de réglementation se prête régulièrement, c'est-à-dire ils font une première étude de l'allocation du coût de service et ils la révisent progressivement dans le temps. Je suis sûr que la Régie de l'énergie voudra faire cela avec les actifs de transport, par exemple, de distribution d'Hydro-Québec. Donc, ce que je viens de vous dire pourrait changer.

Moi-même – je pense que ça fait 17 ans dans ce métier – je me suis toujours posé des questions sur les méthodes d'allocation du coût de service quand on ne prenait pas en compte, par exemple, le fait qu'un client résidentiel représente un client d'une loyauté extraordinaire, dont la consommation ne changera pas au gré de la situation économique, dont la consommation ne changera pas rapidement parce qu'il n'a pas la flexibilité d'autres clients de passer d'une source à une autre source. Quelle est la valeur de cette loyauté et comment on en tient compte quand on alloue le coût de service? Je n'ai jamais eu de réponse très précise à cela. Mais c'est sûr que la Régie posera les mêmes questions et à ce moment-là on verra pour les chiffres exacts.

M. Ciaccia: Il y a toujours eu des pressions, je pourrais dire, de la part d'Hydro-Québec de vouloir égaliser, de dire: Il ne devrait pas y avoir cet interfinancement. Peut-être pas de votre part à vous, mais certains de vos prédécesseurs, et les gouvernements ont résisté parce que, comme vous l'avez mentionné, c'est un marché captif, le résidentiel. Alors, de s'attendre à avoir le même rendement, le pourcentage, sur le résidentiel et le commercial, l'industriel, où ils ont des choix... Il y a des raisons. Mais la question que je me pose, c'est que, quand je lis votre rapport sur la réglementation de la production d'Hydro-Québec sur la base de son prix, vous ouvrez la porte ici... Il n'y a pas de question d'interfinancement, c'est la fourniture. Alors, ça va aller sur la définition que la fourniture, c'est la fourniture sans interfinancement.

Non seulement la porte est ouverte, mais il semble être clairement dit ici qu'il n'y aura pas d'interfinancement. Alors, je pense que pour les prochains trois ans, vous allez geler les tarifs, mais deux choses vont arriver: premièrement, l'interfinancement n'existera plus – d'après ce que je lis ici, ça peut être interprété qu'il n'y en aura pas – deuxièmement, ce qui peut ajouter encore, mais ça n'a rien à faire avec l'interfinancement, c'est le coût de rendement si, dans les exportations – ça, c'est un autre sujet qu'on a discuté – si les investissements pour les exportations ne rapportent pas les ventes voulues.

Mais pour le moment, mon inquiétude principale, c'est sur la question de l'interfinancement pour le résidentiel, ça veut dire que dans trois ans il va falloir qu'il y ait des augmentations, que je pourrais dire, assez brutales pour ramener le rendement pour le résidentiel au même niveau que le rendement pour les autres usagers commerciaux, industriels.

Le Président (M. Sirros): Merci, M. le député.

M. Caillé (André): Pardon?

Le Président (M. Sirros): Non, je remerciais le député pour sa question, pour vous donner la parole.

M. Caillé (André): Alors, M. le Président, en fin de compte, avec notre approche, à la Régie, de continuité tarifaire, après réglementation par une régie au même tarif qu'avant – parce que c'est ça que ça va donner si notre proposition est acceptée – donc il faut conclure que tout interfinancement qui existait continuera d'exister exactement selon les mêmes niveaux, quelle que soit l'analyse qu'on puisse en faire, et ce, quant à Hydro-Québec. C'est notre position. Elle a probablement changé, si j'ai bien compris ce que vous disiez tantôt, à savoir: Ce n'est pas notre intention, nous, à Hydro-Québec – et je l'ai fait savoir aux industriels – d'aller à la Régie, de se présenter à la Régie pour faire redresser la situation du point de vue d'un interfinancement hypothétique qu'ils voient, eux, de l'industriel en faveur du résidentiel.

Alors, ça, ça a été dit de ma part. C'est une situation qu'ils connaissent quant à la position d'Hydro-Québec. Donc, nous n'irons pas... Mais ce qu'on ne peut pas empêcher dans le nouveau système, c'est que de requérants devant la Régie il n'y aura pas qu'Hydro-Québec. Il n'y a rien qui empêche tout citoyen, je pense, il n'y a rien qui empêche toute entreprise, toute association de se présenter à la Régie avec une cause. Il y a une chose certaine que nous ferons – vous le faisiez remarquer et je partage votre avis là-dessus – il faut faire attention comment on conduit ces études d'analyse du coût de service. Il y a beaucoup de subjectivité dans ces choses. Mais enfin, on verra, si jamais ils viennent à la Régie. Mais, nous, Hydro-Québec, on n'ira pas à la Régie pour faire ça.

Le Président (M. Sirros): M. le député, en avez-vous encore pour longtemps?

M. Ciaccia: Non, non, le dernier commentaire.

Le Président (M. Sirros): Le dernier. Alors, s'il vous plaît.

M. Ciaccia: Je ne doute pas de votre bonne foi, que vous ne voulez pas y aller, mais entre ce que sont vos intentions aujourd'hui et ce qui pourrait se produire, il peut y avoir des changements. Moi, j'aimerais voir, dans votre plan de stratégie, que vous allez maintenir le principe d'interfinancement pour les consommateurs résidentiels. Parce que, présentement, la seule chose que vous dites, c'est qu'il va y avoir un gel jusqu'à l'année 2002, mais, après ça, c'est la réglementation puis le principe d'interfinancement n'est pas dans la réglementation.

(17 h 30)

M. Caillé (André): Alors, vous lisez bien – c'est ce sur quoi, M. le Président, je voulais attirer l'attention du député – en page 25, on dit: Gel des tarifs, gel de tous les tarifs là où ils sont. Et il a raison également de dire que ceci ne dit rien, est muet en ce qui concerne l'année 2003, par exemple, après ce plan.

Je vais vous dire franchement, quand on a dit ici «bâtir sur les acquis», l'idée nous est venue après notre dernière visite à cette commission parlementaire où il avait été surtout question, dans le contexte, de déréglementation, etc., que la priorité pour les Québécois, c'était de maintenir, de conserver tous les acquis de la nationalisation, de tenir intact le pacte social établi au moment de la nationalisation. Et ça, ça voulait dire des tarifs bas, stables et uniformes. On l'a exprimé ici sur une période de cinq ans parce que la loi dit qu'il faut faire un plan sur cinq ans. Quant à moi, c'est ce que je pense qui est toujours fondamental, et je serais surpris – ça pourrait arriver, mais je serais surpris – qu'une majorité de la population au Québec change d'opinion quant à ce pacte social, même sur un horizon de cinq ans.

Le Président (M. Sirros): Merci.

M. Ciaccia: Donc, c'est la Régie, finalement. Ce n'est pas une opinion, c'est la Régie. Et le principe d'interfinancement n'est pas inclus dans votre plan. Et, si c'est votre intention, je vous invite à modifier votre plan stratégique pour inclure ce principe d'interfinancement pour donner la garantie au consommateur.

Le Président (M. Sirros): Merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Je présume que vous allez me permettre de revenir pour compléter ma série de questions, j'espère. M. Caillé...

Le Président (M. Sirros): Nous avons 15 minutes pour l'opposition. Votre collègue en a pris huit, il vous en reste sept. Puis on retournera de ce côté-ci. Puis, normalement, on va jusqu'à 18 h 15, si tout le monde veut.


Fluctuation des tarifs après 2002

Mme Houda-Pepin: Très bien. J'apprécierais, M. le Président. M. Caillé, vous avez dit tantôt que vous étiez un gestionnaire et non pas un politicien, ce qui est, en fait, votre rôle. Nous avons entendu des groupes qui sont venus il y a quelques jours, entre autres l'Association des industries forestières du Québec qui, comme vous le savez, est un partenaire majeur d'Hydro-Québec, puisque les papetières québécoises achètent environ 12 % de la production d'Hydro-Québec. Et, dans leur mémoire et dans leur présentation, sur le plan financier en particulier, par rapport au plan stratégique d'Hydro-Québec, ils ont affirmé que les enjeux étaient risqués, que les enjeux exprimés dans le plan stratégique étaient trop risqués et que, à la lumière de ce plan stratégique, ils avaient plus de questions que de réponses.

Il y a également la Chambre de commerce du Québec qui est venue présenter son mémoire. Ils questionnaient, en fait, la logique d'affaires d'Hydro-Québec telle que formulée dans le plan stratégique. Entre autres, on s'inquiétait pour les objectifs très ambitieux d'Hydro en ce qui a trait aux prévisions. Et un des points que je trouve très pertinents à relever dans ce mémoire de la Chambre de commerce du Québec est en rapport avec l'investissement de 1 200 000 000 $ sur cinq ans, sans contribution à son bénéfice net consolidé. La Chambre de commerce questionne cette ambition-là et elle se demande quel serait l'effet au niveau de la facture additionnelle sur les tarifs par rapport au contribuable québécois.

Donc, la boucle est bouclée. Si les objectifs financiers sont très ambitieux et que, par après, on se casse finalement les dents sur les marchés internationaux, est-ce qu'il n'y a pas de risque qu'il y ait un retour de balancier pour que la facture soit transférée au contribuable?

Et, si je vous ai bien compris, hier, vous avez dit que, s'il y a des pertes ou s'il y a des risques, c'est l'actionnaire qui doit y faire face. Dans le contexte actuel de restrictions budgétaires, l'actionnaire étant le gouvernement, s'il n'a pas les ressources financières, cela va se traduire fort probablement par une augmentation de tarifs au-delà de 2002, puisque c'est la date butoir pour le gel des tarifs, tel qu'exprimé. Alors, je voudrais que vous répondiez à cette interrogation-là, tel que formulé par la Chambre de commerce du Québec.

M. Caillé (André): Alors, les gens, les uns et les autres sont venus me voir, également, autant l'Association de l'industrie forestière que ceux de la Chambre de commerce, à deux reprises plutôt qu'une. La première fois que je les ai vus, c'est au début de mon mandat à Hydro-Québec, où on me demandait de réaliser une promesse prise par un de mes prédécesseurs, à savoir de geler les tarifs. Aussitôt les tarifs gelés, ils ont demandé une baisse de tarifs. Mais je comprends les gens de l'Association forestière. Il y a des choses qu'ils vous ont dites, incidemment, quant à la possibilité d'acheter de l'électricité aux États-Unis en période hors-pointe à 0,02 $, ce qui est vrai, parce que nous-mêmes, on en achète.

C'est vrai également qu'au Manitoba, en Alberta et au Kentucky, c'est-à-dire là où les producteurs d'électricité utilisent des sources thermiques non seulement à proximité, mais... Quand on dit à proximité, ça veut vraiment dire à proximité. Ils sont littéralement construits en surface, au-dessus des ressources, charbon ou pétrole – plus souvent charbon. C'est le cas au Kentucky et c'est le cas dans le Nord-Ouest de l'Alberta, par exemple, il y a des tarifs qui sont compétitifs, voire qui sont meilleurs que ceux d'Hydro-Québec, au plan industriel.

À Houston également, les tarifs d'électricité sont plus bas. Si quelqu'un opérait une papetière à Houston, par exemple, ça coûterait moins cher. Le malheur, évidemment, c'est qu'à Houston il n'y a pas beaucoup de forêts et au Manitoba non plus. Par ailleurs, dans le Nord-Ouest de l'Alberta, ça se trouve. Et ça se trouve également en Colombie-Britannique.

Alors, on ne dit pas, ici, qu'on a le meilleur tarif toute catégorie au Québec. Et c'est bien pour ça qu'on dit: Il faut geler les tarifs. Quand on dit geler les tarifs, ce n'est pas juste pour faire plaisir ou pour remplir une promesse prise par des prédécesseurs. Il y a une nécessité de bien contrôler nos tarifs industriels. Et à cet égard, on est du même avis que les papetières.

On s'interroge quand certaines papetières – pas toutes – nous disent: Les prix sont élevés, trop élevés, au Québec, vous devriez baisser, mais, en même temps, vous devriez acheter la cogénération que nous produisons à 0,05 $, mais 0,035 $ de tarif L, c'est trop élevé, ce qui est un incitatif, n'est-ce pas, à faire des pertes, carrément. Parce qu'il n'y a personne qui peut faire le miracle d'acheter à plus cher pour vendre à moins cher puis de faire des bénéfices. Ça, ça n'arrive pas.

Ceci étant dit, nos relations avec l'industrie de la forêt, l'industrie papetière, de même qu'avec tous ses membres sont plutôt bonnes. On a des bonnes relations, parce que certains produisent, on peut faire des échanges de productions, etc. Je leur ai dit que, bien entendu, on pourrait possiblement améliorer leur situation sans leur faire de cadeau, sans leur faire de cadeau par rapport au tarif L, un peu comme on l'a fait avec Alcan, parce qu'on pourrait acheter de la puissance en pointe pour faire des échanges d'énergie, etc., puis, comme ça, on pourrait optimiser leur situation. Mais, quant à acheter de l'énergie d'eux à plus cher qu'on ne la revend, finalement, je leur ai dit que j'avais probablement plus que des objections à la chose.

Au niveau des remarques de la Chambre de commerce, elle dit, nos activités à l'international, 12 %: Qui prend le risque là-dessus? Le risque, là-dessus, on l'a dit de par le fait que HQI, c'est une entreprise distincte, elle va avoir ses propres états financiers, puis qu'il n'y a pas de recours sur Hydro-Québec qui, elle, est responsable de produire, de transporter et de distribuer au Québec. Alors, il n'y a pas d'effet. Alors, s'il y a des effets sur quelqu'un, ça serait sur l'actionnaire.

Et là, incidemment, j'aimerais que vous vous rappeliez que, si jamais, dans une autre commission parlementaire, on vient vous dire: Pourquoi ne pas baisser les tarifs au Québec, puisque vous faites des bénéfices à l'extérieur? ce jour-là, il faudra répondre: L'actionnaire a pris le risque pour faire les activités à l'extérieur, il est normal que l'actionnaire ait les bénéfices et non pas ceux qui ont dit qu'ils ne voulaient pas prendre le risque. Voyez-vous? Alors, je leur ai dit ça. Je leur ai dit: On ne peut pas l'avoir des deux façons: si on gagne, on gagne, puis, si vous perdez, nous, on ne perd pas, ça ne peut pas être comme ça. Alors, toutes ces précisions-là leur ont été apportées.

Quant à la Chambre de commerce du Québec comme telle, je le sais, ils étaient là le premier jour où on a présenté le plan stratégique et ils ont trouvé beaucoup de choses favorables, beaucoup d'éléments à appuyer dans le plan stratégique. Et je considère normal qu'ils nous – vous – mettent en garde contre les risques qu'il pourrait y avoir. Puis le fait qu'ils ne veulent pas supporter ces risques-là, je trouve ça tout à fait exact. Mais, encore une fois, M. le Président, plus tard, il faudrait leur rappeler que, quand les bénéfices seront produits, les bénéfices comme les risques iront là où les risques ont été pris, c'est-à-dire à l'actionnaire. Il ne faudra pas, ce jour-là, faire autre chose.

Le Président (M. Sirros): D'accord, un genre de partage des bénéfices et des risques. Mais, Mme la députée, si vous avez une courte question, avec une courte réponse, on pourrait l'entretenir.

(17 h 40)

M. Caillé (André): Je vais essayer.


Sécurité des investissements à l'étranger

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, toujours en rapport avec cette logique d'affaires, hier, vous nous avez exposé vos projets de développement au niveau international, notamment les investissements dans les nouveaux pays dans lesquels vous projetez investir à titre de partenaire industriel. Donc, il y aura un investissement.

Or, quand on regarde cette carte et la présentation qui nous a été faite, la plupart des pays où vous projetez investir sont des pays dans les pays du Sud, donc des pays qui sont généralement endettés et des pays qui n'ont pas beaucoup de marge de manoeuvre sur le plan financier. De plus, ce sont des pays qui font face à des problèmes de stabilité politique. Je regarde, par exemple, parmi les pays que vous avez sur votre carte, où vous projetez un partenariat industriel, il y a le Kazakhstan. Le Kazakhstan, c'est le sable mouvant, sur le plan politique. Vous avez la Turquie, qui est un pays en ébullition. Quelle garantie avez-vous, au plan de la stabilité politique, au plan de la solvabilité financière, que les projets que vous allez entreprendre dans ces pays-là vont être bénéfiques pour Hydro?

Le Président (M. Sirros): ...être rapide et courte, s'il vous plaît.

M. Caillé (André): Courte. Alors, il n'y a rien qui peut être fait par nous pour assurer la stabilité politique de ces pays-là. Ce qui peut être fait par nous, c'est de prendre la décision en tenant compte de la situation, ne pas tenter de chercher du 25 % de rendement pour compenser une instabilité présumée, faire du 12 %, si on se contente des situations qui prévalent. Parce que, essayer de faire des projets à 25 %, c'est dépenser pour rien. Il n'y a personne qui va acheter ça, de nos jours.

Le Président (M. Sirros): Ça va? Merci. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais tout d'abord revenir sur une question que j'ai posée antérieurement et demander une réponse demain. Je vais vous expliquer le sens de ma question. Quand M. le P.D.G., tantôt, a commencé à me donner la réponse sur la différence du 220 000 000 $ quant aux charges d'exploitation, les 800 employés ça représente à peu près 64 000 000 $, 65 000 000 $. On a une deuxième partie sur les différents services en région. J'aimerais que vous me décortiquiez le 220 000 000 $ dans une réponse plus globale, le 220 000 000 $ de différence qu'il y a entre le 1 600 000 000 $ et 1 380 000 000 $. J'aimerais qu'on me décortique la réponse. Je ne vous le demande pas instantanément. Vous m'avez donné une partie, mais j'aimerais qu'on...

M. Caillé (André): On l'aura demain matin. Ça, c'est ce qui reste à faire pour atteindre l'objectif que vous aviez, je pense, établi à ce moment-là. C'est ce qu'on m'a dit.

M. Chevrette: Ça ne présume pas des efforts compensatoires. Je veux juste avoir une réponse sur la réalité par rapport à l'engagement de performance de 1997.

M. Caillé (André): Ça va. Très bien.

M. Chevrette: Et j'aurais une petite question. Le plan de départs assistés... On va le voir demain, ça ne sert à rien. Ça fait partie des ressources. Demain. Donc, je vais laisser la parole à mon collègue.

Le Président (M. Sirros): Alors, M. le député de Marguerite-D'Youville.


Charges d'amortissement et achat de combustible et d'électricité

M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Nous sommes loin des longues envolées oratoires parce que, quand on parle de perspectives financières, ça ne se prête pas tout à fait à de la rhétorique, si on veut être précis. Pour revenir encore une fois au tableau 1, en fait à la page 54, qui résume les perspectives financières et l'état des résultats consolidés, on note, à la rubrique Autres charges, que cette rubrique-là va augmenter de 243 000 000 $ en 1998, passant de 2 600 000 000 $ en 1997 à 2 900 000 000 $ en 1998, ce qui représente une augmentation de 9,2 % en un an.

Ma question est la suivante. Pourriez-vous nous indiquer quelles sont les causes de cette croissance pendant une période où il ne semble pas y avoir de mises en service importantes à prévoir chez vous, ni en production, transport ou distribution, et d'autre part, dans un contexte où, en tout cas, à ma connaissance, il n'y a pas de modifications à prévoir au régime des taxes s'appliquant à Hydro-Québec?

M. Caillé (André): Alors, il s'agit, M. le Président, d'augmentation des charges d'amortissement – parce qu'il y a quand même d'autres projets, comme Sainte-Marguerite, qui viennent en opération pendant ce temps-là – du déclassement de certains actifs, de même que de l'augmentation des taxes et des achats d'électricité. Dans les achats et reventes d'électricité, la partie achats appartient à cette ligne; l'électricité et le gaz naturel, puisque nous sommes courtiers de gaz naturel, on met les deux ensemble, ici.

M. Beaulne: Maintenant, à la page 51 du plan stratégique, vous dites que l'augmentation de 950 000 000 $ des autres charges qu'on vient de mentionner se divise à peu près également entre les achats d'électricité et de combustible et la charge d'amortissement et de déclassement, soit à peu près 475 000 000 $ pour chacun de ces postes.

Comme le budget de 1997, que vous avez présenté à l'engagement de performance, prévoyait des achats d'électricité et de combustible de l'ordre de 345 000 000 $ pour l'année dernière, ça représente, si on se fie aux chiffres qui sont ici, une augmentation des achats sur cinq ans de 138 %, c'est-à-dire un taux annuel de 19 %.

Pouvez-vous nous expliquer si cette croissance des achats est due principalement à l'achat de gaz naturel et de mazout, puis, si oui, quelles sont les quantités, les produits et la marge bénéficiaire prévus? Troisièmement – je vous énumère ça, vous pouvez y aller – est-ce que le gaz naturel sera vendu au Québec seulement ou une partie de celui-ci sera-t-elle exportée à l'extérieur du Québec? Alors, il y a trois petits volets.

M. Caillé (André): Alors, il y a l'achat et la revente d'électricité. En stockage, cette année, de mémoire, on a fait quelque chose de l'ordre, en bénéfice net, de 7 000 000 $. Ça ne vous donne pas les quantités, mais ça vous donne une idée que... C'est juste pour comparer avec 40 000 000 $ qui étaient anticipés à compter de l'année 1998. Donc, on va acheter beaucoup plus d'électricité pour en revendre. Ça explique l'augmentation des autres dépenses, si c'est d'autres dépenses d'achat d'électricité sur les marchés. Il y a également, vous l'avez signalé, la partie gaz naturel. Je n'ai pas le chiffre ici. On pourrait peut-être vous fournir ultérieurement le chiffre en ce qui concerne le gaz naturel.

Alors, pour l'année 1998 les achats, c'est 43 000 000 $... Les achats d'électricité: 312 000 000 $ allant jusqu'à 511 000 000 $ – je vous donne les détails – les achats de gaz vont passer de 43 000 000 $ à 293 000 000 $, les achats de combustible pour les centrales thermiques, c'est à peu près la même chose, ça ne change pas.

M. Beaulne: Pourriez-vous déposer ce document-là pour le bénéfice des députés?

M. Caillé (André): Oui, bien sûr. Le plus simple, ce serait de le déposer.


Sujets divers

M. Beaulne: Alors, une autre petite question technique. Toujours au tableau 1, à la page 54 – encore, toujours le même tableau – on voit que le taux moyen du coût de la dette va augmenter graduellement de 8,6 % en 1997 à 9,2 % en l'an 2001 puis redescendra à 8,9 % en l'an 2002. Alors, quand on sait que les émissions de dettes d'Hydro-Québec pendant toute la période envisagée, c'est-à-dire sur cette période de cinq ans, portent intérêt principalement au taux des obligations à long terme d'Hydro-Québec, ma question est la suivante: Comment expliquez-vous que le coût moyen de la dette d'Hydro-Québec ne diminue pas à l'horizon de 2001, puis même, qu'il continue à monter jusqu'à cette date?

M. Caillé (André): M. le Président, il s'agit essentiellement de l'effet des pertes de taux de change. On pourrait, à cet égard comme à celui qu'on vient de discuter à l'instant, vous fournir des tableaux plus détaillés qui vous permettent de voir les différentes composantes, si la chose convient.

Le Président (M. Sirros): Ça convient.

M. Beaulne: Moi, ça va.

Le Président (M. Sirros): Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le ministre.

M. Chevrette: Non. Je pense qu'on va s'arrêter là parce qu'il y a des réunions de convoquées, si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a des intervenants du côté de l'opposition?

Mme Houda-Pepin: Est-ce qu'on me permettrait de poser deux petites questions?

Le Président (M. Sirros): Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci. M. Caillé, hier, je vous ai posé une question en rapport avec le plan de communication d'Hydro-Québec et je n'ai pas eu de réponse. Je vous avais demandé s'il était possible de nous le déposer. Est-ce que, maintenant qu'on a le temps, vous pouvez répondre à cette question?

M. Caillé (André): D'accord. Alors, il y a le plan de communication en cas de crise, je pense que c'était ça qui vous intéressait, comme au moment du verglas, ou si c'est le plan de communication...

(17 h 50)

Mme Houda-Pepin: Non. Le plan d'Hydro-Québec...

M. Caillé (André): Il a été déposé il y a deux semaines sur une base... J'aimerais, ce genre de documents, vous les déposer sur une base confidentielle, si la chose est possible, parce que ça contient des éléments stratégiques qui pourraient, si publics, nuire et coûter même...

Mme Houda-Pepin: Très bien.

M. Caillé (André): Sur une base confidentielle, je pourrais le déposer à Mme la députée, je n'ai aucune difficulté.

Mme Houda-Pepin: Très bien, on accepte qu'il soit déposé sur une base confidentielle et qu'on puisse en disposer.

Dernière petite question. En réponse à une question qui vous a été posée sur les contrats avec Alcan, j'ai cru entendre le ministre dire que tous les contrats que vous avez mentionnés vous-même hier, ces contrats-là étaient d'ordre public. Est-ce exact ou si c'est seulement le contrat d'Alcan qui est d'ordre public, et les autres n'ont pas encore été rendus publics?

M. Caillé (André): Non, des contrats cachés, ça n'existe plus. Alors, les contrats sont d'ordre public, ils sont publiés dans la Gazette officielle . Il y a un décret et ils sont...

M. Chevrette: Les résumés de contrat font partie du décret.

M. Caillé (André): C'est ça.

M. Chevrette: Et le décret est dans la Gazette officielle .

M. Caillé (André): Et tout ce que la loi oblige à ce que ce soit public est public.

Mme Houda-Pepin: Celui d'Alcan est dans la Gazette officielle . Je voudrais savoir...

M. Chevrette: Le décret est la Gazette officielle , le décret adopté.

Mme Houda-Pepin: O.K.

M. Chevrette: Écoutez, il y a des...

Le Président (M. Sirros): M. le ministre.

M. Chevrette: Ce qu'il est important de savoir, c'est que le tarif hydroélectrique est le tarif L. Il y a, d'autre part, des données dans un contrat qui sont de nature commerciale, qui ne sont pas connues, tout le monde sait ça. Mais, quant au tarif d'hydroélectricité, les clauses contractuelles liant la compagnie et Hydro, c'est le tarif L, ce n'est plus des contrats à partage de risques, et la puissance également. QIT, Alcan, Magnola, il y en a cinq ou six, c'est le tarif L, ça. Sauf que des compagnies qui possèdent un pouvoir hydroélectrique peuvent avoir un contrat d'échange d'énergie. Ça s'est toujours fait, ça. À un moment donné, vous nous donnez de la puissance, on vous en retourne ou, si vous n'utilisez pas... Mais c'est le tarif L.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Caillé (André): Très juste. Et il y a des informations dans ces contrats que, probablement, nos clients ne voudraient pas, eux, qu'on rende publiques. Quant à nous...

Le Président (M. Sirros): Avant qu'on aille plus loin, j'ai cru comprendre tantôt que la députée vous a demandé de déposer quelque chose sur une base confidentielle.

M. Caillé (André): Le plan de communication.

Le Président (M. Sirros): Juste une clarification. Ce genre de dépôt n'existe pas, en commission parlementaire.

Mme Houda-Pepin: O.K.

M. Caillé (André): Non? Ah!

Le Président (M. Sirros): Alors, c'est ce que je lis, ça n'existe pas. Donc, s'il y a une entente entre vous deux...

Mme Houda-Pepin: Oui, très bien.

Le Président (M. Sirros): ...arrangez-vous comme ça.

Mme Houda-Pepin: Et merci.

Le Président (M. Sirros): Ça va?

M. Chevrette: D'habitude, un plan de communication, dans une société d'État, est d'abord déposé au gouvernement.

Mme Houda-Pepin: Une dernière question, M. le Président, s'il vous plaît.

Le Président (M. Sirros): Un instant, M. le ministre. À l'ordre, s'il vous plaît, qu'on puisse terminer. Mme la députée de La Pinière, une dernière question, rapidement, s'il vous plaît.

Mme Houda-Pepin: Oui. Merci, M. le Président. Ma dernière question à M. Caillé: Quel est l'impact sur l'emploi du plan stratégique?

M. Caillé (André): Mon collègue, ici, qui a fait de brillantes études à cet égard, va vous donner la réponse. Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: Parce qu'il y a des gens qui s'inquiètent que, finalement, cette stratégie, avec l'exportation, et tout ça, ça puisse amener des emplois au bout du fil et non pas ici au Québec.

M. Vandal (Thierry): La clé se situe au niveau des investissements, bien sûr. Les 13 000 000 000 $ d'investissements conduisent à soutenir 90 600 emplois sur la période de cinq ans, de 1998 à 2002. Vous avez, à la page 59, un tableau qui décrit bien ça. Ça s'ajoute, il faut dire, aux emplois soutenus par l'exploitation des installations d'Hydro-Québec. Et, pour ces installations-là, donc ce qui existe, il y a 95 000 emplois qui sont soutenus à l'échelle du Québec. Donc, lorsqu'on ajoute ces emplois soutenus par l'exploitation de ce qui existe aux emplois soutenus par les 13 000 000 000 $ qu'on investit et quelques autres éléments, on arrive à un total, sur cinq ans, de 194 000 emplois...

M. Caillé (André): C'est ça.

M. Vandal (Thierry): ...qui est fort significatif.

Mme Houda-Pepin: O.K.

Le Président (M. Sirros): Merci. Alors, si je n'ai pas d'autres intervenants, on va ajourner nos travaux à demain matin, 9 heures.

(Fin de la séance à 17 h 55)


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