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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Monday, April 28, 1997 - Vol. 35 N° 56

Étude des crédits du ministère des Ressources naturelles


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Table des matières

Ressources naturelles

Adoption de l'ensemble des crédits

Remarques finales


Autres intervenants
M. Normand Jutras, président
M. François Beaulne, président suppléant
M. Normand Cherry
M. Claude Boucher
M. Michel Côté
* M. Louis-Gilles Picard, ministère des Ressources naturelles
* M. Jacques Lebuis, idem
* M. Michel Clair, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quatorze heures dix minutes)


Ressources naturelles

Le Président (M. Jutras): Alors, on va commencer. Si vous voulez prendre place. Je déclare la séance ouverte et je rappelle le mandat de la commission. La commission de l'économie et du travail est ici réunie afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Ressources naturelles pour l'année financière 1997-1998.

Avant d'aller plus loin, est-ce que, Mme la secrétaire, il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gagnon (Saguenay) remplace M. Kieffer (Groulx).

Le Président (M. Jutras): Ça va. Alors donc, les programmes que nous avons à étudier et à adopter aujourd'hui, ce sont les programmes 5 et 6 et l'ensemble des crédits du ministère des Ressources naturelles.


Déclarations d'ouverture

Alors, est-ce qu'il y a une déclaration d'ouverture à faire?

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Jutras): Vous êtes prêt, M. le ministre?

M. Chevrette: Je suis prêt, M. le Président, comme un scout.

Le Président (M. Jutras): Alors, nous vous écoutons.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Donc, mesdames, messieurs, comme responsable de la gestion et de la mise en valeur du territoire québécois ainsi que des ressources énergétiques, forestières et minérales, le ministère des Ressources naturelles a pour rôle de s'assurer que cette richesse collective contribue au développement durable de toutes les régions du Québec. De fait, les industries du secteur des ressources naturelles sont directement responsables de plus de 10 % du produit intérieur brut. En tenant compte des activités de première transformation des métaux, dont l'industrie de l'aluminium, cette portion grimpe à 12 %. Sur l'ensemble des investissements privés et publics réalisés au Québec en 1995, une somme de 6 000 000 000 $, soit près du quart, provenait des industries de ce secteur. Je pourrais élaborer davantage sur l'importance de ce secteur d'activité pour l'économie du Québec, mais je m'en tiendrai aujourd'hui au sujet qui nous réunit, à savoir les crédits qui ont été alloués au ministère des Ressources naturelles en 1997-1998 dans ce secteur.

En 1997-1998, les crédits du ministère des Ressources naturelles se chiffrent à 304 200 000 $, ce qui inclut des crédits permanents de 2 600 000 $ attribués en vertu de la Loi sur les crédits forestiers et de la Loi sur l'exécutif. Ces crédits sont de 64 400 000 $ inférieurs à ceux qu'avait obtenus le ministère en 1996-1997. Cette diminution évaluée à 17,5 % découle d'abord de la non-récurrence de certaines dépenses. Et, ici, j'attire l'attention des gens de la commission, puisque vous allez voir que, dans les faits, le ministère des Ressources naturelles ne perd aucun moyen.

Contrairement à l'an dernier, nous n'avons pas eu à inscrire un montant de 9 300 000 $ pour répondre aux besoins de la Société nationale de l'amiante et nous n'avons pas eu à prévoir les 19 300 000 $ qui avaient été requis pour combattre les feux de forêt exceptionnels de l'été dernier. Donc, tout de suite, là, vous avez 28 600 000 $ qui n'avaient pas à être prévus. L'écart s'explique aussi par la contribution du ministère à l'effort gouvernemental de réduction du déficit. Les mesures à ce chapitre sont les suivantes. Tout d'abord, les programmes de départs assistés en 1996-1997 et les départs volontaires en 1997-1998 vont se traduire par des économies de 13 200 000 $. La poursuite de la mise en place d'un partenariat avec l'industrie forestière permet une diminution des crédits budgétaires de 11 600 000 $, compensée par une contribution équivalente de l'industrie à un fonds forestier. La révision du mode de livraison des produits et services, notamment en ce qui concerne les fonctions administratives, nous permet par ailleurs d'économiser une somme de 8 200 000 $.

Même s'il réduit ses dépenses de façon substantielle, le ministère maintient toute sa capacité d'intervention en faveur de la mise en valeur des ressources et du territoire québécois et il ne cesse d'accroître sa contribution au fonds consolidé du Québec. En effet, en 1997-1998, le ministère devrait obtenir des revenus de 332 000 000 $, soit des revenus trois fois supérieurs à ceux qu'il avait obtenus en 1992. Je le répète, le ministère conserve sa capacité d'intervention. Son action continue de s'articuler autour des grands enjeux, tels le développement économique, le développement durable, la conquête de nouveaux marchés de même que le développement des régions et des communautés autochtones. À ce chapitre, notamment, le ministère privilégie les activités de partenariat ayant pour but d'associer les représentants régionaux à la prise en charge d'outils de développement et la participation des communautés autochtones à la gestion des ressources naturelles et du territoire.

Pour amener son action à terme, le ministère doit compter sur l'ensemble de ses effectifs et travailler en fonction de ses programmes budgétaires. Au nombre de ceux-ci se trouve le programme 5, ayant trait au secteur de l'administration, dont nous étudions les crédits aujourd'hui. Ce programme a pour but d'assurer le support technique et administratif nécessaire aux unités opérationnelles, parmi lesquelles se retrouvent les activités de gestion des ressources humaines, financières, matérielles de même que les relations publiques. Ce programme chapeaute également les activités de concertation en matière de développement des ressources, les relations intergouvernementales et les relations avec les communautés autochtones. Enfin, c'est sous ce programme que l'on retrouve les crédits des services communs, c'est-à-dire les comptes ministériels touchant l'ensemble des secteurs du ministère.

Au cours de la dernière année, le ministère a implanté un comité ministériel sur l'organisation du travail auquel participent des représentants de la direction du ministère, des syndicats et des employés. Les travaux réalisés par ce comité au cours de l'année nous ont permis de constater que l'engagement et la participation des employés du ministère sont bien réels. Tous souhaitent trouver et mettre en oeuvre des solutions permettant, d'une part, une amélioration de la qualité de la gestion et des façons de faire et, d'autre part, une diminution des coûts.

Par ailleurs, le ministère a entrepris de réviser ses fonctions administratives afin de s'assurer que celles-ci soient plus performantes et mieux adaptées aux besoins actuels. Il a aussi entrepris d'alléger ses processus et d'adapter sa gestion aux particularités régionales, notamment par un regroupement de ses points de services, et il compte poursuivre ses efforts en ce sens en 1997-1998.

D'autre part, le ministère s'inscrit dans le processus gouvernemental de la révision de la réglementation et fait sa part dans la réduction de la paperasserie administrative. Les crédits affectés à la gestion et aux services communs du ministère connaissent cette année une baisse d'un peu plus de 10 000 000 $. Cette forte diminution s'explique par les économies que nous entendons réaliser grâce aux 7 400 000 $ générés par le programme de départs volontaires et les 3 600 000 $ économisés grâce à la révision de nos modes de livraison de produits et services.

Nous avons aussi pour mandat, aujourd'hui, d'étudier les crédits alloués au secteur énergie du MRN. Comme vous le savez, nous venons de vivre une année fort mouvementée dans ce secteur. Au terme d'un important processus de consultation, le débat public sur l'énergie a pris fin le 2 avril 1996 avec la présentation du rapport de la table de consultation Pour un Québec efficace . À travers quelque 200 recommandations, la table de consultation privilégie une approche équilibrée permettant de relever les défis de la déréglementation et de la mondialisation, tout en considérant de façon plus systématique les impacts environnementaux et sociaux des questions énergétiques.

La politique énergétique que j'ai rendue publique le 26 novembre dernier a donc des assises très solides. Cette politique, qui s'intitule L'énergie au service du Québec: une perspective de développement durable , est à la fois le prolongement et la suite logique de ce rapport. S'articulant autour de la notion de développement durable afin de respecter les générations à venir tout en tirant pleinement partie des changements en cours, cette politique nous permet de mettre véritablement l'énergie au service des Québécois. Elle a pour but d'assurer aux Québécois les services énergétiques requis au meilleur coût possible, de promouvoir de nouveaux moyens de développement économique, de respecter ou d'établir les équilibres environnementaux et de garantir l'équité et la transparence. En découle une série d'initiatives dont la création d'une Régie de l'énergie, une priorité à l'efficacité énergétique par le biais, notamment, de la création d'une Agence de l'efficacité énergétique ainsi qu'une réflexion globale sur l'ouverture des marchés de l'électricité.

La nouvelle politique énergétique tient compte d'un contexte profondément modifié, et, pour que notre industrie électrique et notre secteur énergétique puissent se maintenir et contribuer à se développer malgré la saturation de la demande d'énergie au Québec, un virage international s'impose. Par ailleurs, il serait irresponsable de négliger l'important défi que représente pour nous la restructuration des marchés de l'électricité présentement en cours à l'échelle de l'Amérique du Nord. Bien sûr, cette restructuration nous offre des occasions d'affaires prometteuses, mais il est fondamental d'en tirer partie sans remettre en question les acquis des cinq dernières décennies. C'est la raison pour laquelle je tiens à ce que le sujet soit débattu ouvertement dans le cadre d'audiences publiques menées par la future Régie de l'énergie. Présentement, le gouvernement n'a choisi d'ouvrir que le marché du gros, et il ne saurait être question de libéraliser le marché du détail sans que la Régie ne se soit préalablement prononcée sur la question et sans qu'elle n'ait été expliquée aux Québécois et aux Québécoises.

(14 h 20)

C'est le 19 décembre dernier que l'Assemblée nationale du Québec adoptait la Loi sur la Régie de l'énergie. Depuis, certains articles ont été mis en vigueur, et le processus de sélection des régisseurs a été mené à terme. Ceux-ci devraient être nommés au cours des deux prochaines semaines afin que la Régie soit pleinement opérationnelle pour cet automne. Les compétences de la nouvelle régie s'appliquent, selon des modalités variables, à toutes les filières énergétiques, y compris les produits pétroliers et les réseaux de vapeur. Par ailleurs, la Régie de l'énergie disposera des outils et de l'autorité nécessaires pour s'assurer que le coût total des choix énergétiques soit minimisé pour la société, conformément à la planification intégrée des ressources. La Régie se verra aussi confier des mandats particuliers au nombre desquels figure l'obligation d'aviser le gouvernement sur la pertinence, les conditions et les modalités de la libéralisation des marchés de l'électricité. Un deuxième volet de ce mandat d'examen portera sur les modalités d'établissement et d'implantation des tarifs de fourniture d'électricité pour un consommateur ou une catégorie de consommateurs. La mise en place de la Régie de l'énergie constitue une initiative majeure qui transformera profondément les conditions de fonctionnement du secteur énergétique québécois. Je suis particulièrement fier de son implantation.

Nous avons également pris l'engagement de créer une agence vouée à l'efficacité énergétique. Je suis heureux d'annoncer qu'un projet de loi en ce sens est présentement à l'étude et que nous espérons être en mesure de le déposer au cours des prochaines semaines également. Par la mise en place de cet organisme, le gouvernement entend réaffirmer l'importance qu'il accorde à l'efficacité énergétique et aux efforts consentis afin d'en assurer la réalisation. Dans notre esprit, la recherche d'une plus grande efficacité énergétique est une réponse positive à tous ceux qui se préoccupent des effets sur l'environnement de la production et de la consommation énergétique. C'est aussi l'un des principaux moyens qui s'offrent à nous pour améliorer notre compétitivité sur les marchés internationaux et pour nous assurer d'un développement économique durable.

Nous avons, par ailleurs, travaillé à la préparation d'un autre projet de loi qui devrait, lui aussi, être déposé sous peu. Ce projet de loi est le résultat d'une révision en profondeur du cadre législatif qui régit les activités relatives aux produits pétroliers et qui répond notamment aux demandes des intervenants de participer activement à la gestion des risques. Au cours de l'été 1996, le Québec a été le théâtre d'une guerre des prix de l'essence qui était sans précédent sur les plans de l'importance la baisse des prix, de l'étendue, également, géographique et de la durée même du phénomène. Ça a duré presque deux, trois mois. Devant cette situation, j'ai mis sur pied un comité spécial d'examen de la situation du marché de l'essence au Québec qui m'a remis un rapport à la fin de septembre. C'est à la suite des recommandations de ce comité que nous avons pris ici, tous ensemble, la décision de doter la Régie de l'énergie d'un pouvoir d'enquête et de surveillance du prix de l'essence ainsi que d'un pouvoir de fixation d'un montant à titre de coût d'exploitation d'un détaillant.

Quelles sont donc les perspectives pour 1997-1998? Ce sera, comme je l'indiquais précédemment, l'année de la mise en place de la Régie de l'énergie et de la création de l'Agence d'efficacité énergétique. Ce sera aussi l'année où l'industrie énergétique et, plus particulièrement, l'industrie des équipements électriques devra relever le défi du virage international et de la conquête de nouveaux marchés. Pour ce faire, elle doit pouvoir compter sur le soutien actif du gouvernement du Québec. C'est la raison pour laquelle j'ai effectué l'an dernier un voyage au Mexique en compagnie de représentants du milieu énergétique québécois. Ce déplacement a permis de conclure un certain nombre d'ententes prometteuses. Le Costa Rica a également fait l'objet d'une mission. Un accord-cadre devrait être signé entre le gouvernement du Québec et celui du Costa Rica dans les secteurs de l'énergie, des mines, de l'environnement, des forêts, des télécommunications et de la formation. Toujours dans le but de faciliter le virage international de notre industrie énergétique, je me suis rendu en Turquie et en Chine en compagnie, notamment, de représentants d'Hydro-Québec, de Gaz Métropolitain et de plusieurs industriels québécois.

En Turquie, Gaz Métro a finalisé les pourparlers relatifs à l'implantation d'un institut de formation des techniciens en gaz naturel à Istanbul. Les autorités turques ont par ailleurs démontré de l'intérêt pour la signature d'une entente de coopération de gouvernement à gouvernement dans le domaine énergétique. Une telle entente permettrait d'accélérer le processus de prise de décision dans différents projets d'investissement et de transfert technologique.

En Chine, toujours dans le secteur énergétique, j'ai eu le plaisir de signer des ententes préliminaires de coopération avec les provinces du Sichuan et de Jiangxi, qui conduiront sans doute à court terme à la signature d'un accord très formel de coopération, en plus d'avoir négocié la possibilité d'un portefeuille de 4 000 MW qui ne feront pas l'objet d'appels d'offres, mais qui seront des négociations de gré à gré. Nous avons donc, notamment, convenu de réaliser des installations de production hydroélectrique dans ces deux provinces de la Chine. L'entente prévoit une collaboration dans les domaines de l'efficacité énergétique également, de même que dans l'exploration, l'exploitation et l'utilisation du gaz naturel. Le marché chinois est convoité par l'ensemble des pays occidentaux en raison du gigantesque potentiel qu'il représente. Il faut aller là pour savoir que le potentiel est grand. Je peux vous dire que l'augmentation de la demande annuelle est de 17 000 MW, donc la moitié de tout notre parc hydroélectrique. Vous pouvez vous imaginer ce que ça représente. La signature de cette entente confirme que l'expertise québécoise dans le secteur énergétique est concurrente à l'échelle mondiale.

Par ailleurs, je tiens à signaler que, du 25 au 29 juin prochain, le Québec accueillera des représentants de l'Amérique latine dans le cadre du séminaire l'OLADE-Québec sur le développement et le financement des projets hydroélectriques en Amérique latine. L'OLADE, c'est l'Organisation latino-américaine de l'énergie. Plusieurs ministres de l'Énergie des pays membres seront présents ainsi que des présidents de sociétés du domaine de l'électricité.

Dans le secteur des produits pétroliers, outre le projet de loi que nous nous apprêtons à déposer, le ministère des Ressources naturelles travaille présentement à l'élaboration d'un nouveau règlement sur les produits et équipements pétroliers qui devrait entrer en vigueur dans un an, soit le 1er mai 1998. Nous souhaitons déréglementer le commerce des produits pétroliers et alléger les contrôles sur les équipements à risque réduit. D'autre part, nous souhaitons contrôler plus adéquatement les équipements pétroliers à risque élevé. Éventuellement, l'État pourra s'adjoindre les services du secteur privé pour vérifier la conformité de l'ensemble du parc d'équipements pétroliers au Québec à partir d'expériences, par exemple, comme la Société de l'assurance automobile du Québec qui a accrédité des gens pour faire les inspections. Ce sera dans le projet de loi. Vous avez une petite primeur là-dessus.

La mise en place de la Régie de l'énergie, la création d'une Agence de l'efficacité énergétique et la nouvelle réglementation en matière de produits et équipements pétroliers auront très certainement des répercussions sur l'organisation interne du ministère des Ressources naturelles. Le secteur de l'énergie du ministère devra donc revoir ses structures et son approche afin de mieux adapter son action à ce nouveau contexte et à ces nouveaux enjeux.

Avec 9 985 900 $, les crédits alloués au ministre des Ressources naturelles en 1997-1998 pour la réalisation de ses activités dans le domaine énergétique connaissent une légère baisse de 493 300 $. Cette diminution de l'ordre de 4,7 % s'explique par le transfert à la Régie de l'énergie d'une partie des responsabilités du ministère par le programme de départs assistés. Quant aux crédits affectés à la Régie du gaz naturel, ils sont de 587 500 $. Il s'agit essentiellement de crédits transitoires qui devront être modifiés en cours d'année, lors du démarrage de la Régie de l'énergie.

Comme vous pouvez le constater, le bilan de la dernière année, tant dans le secteur de l'administration que dans celui de l'énergie, est fort impressionnant, en tout cas pour celui qui l'a réalisé. Alors que ces deux secteurs ont contribué leur juste part au processus d'assainissement des finances publiques, le ministère a su adapter ses façons de faire et améliorer son efficacité. Nous en verrons le fruit au cours de la prochaine année alors que nous travaillerons à relever les défis ambitieux, certes, mais surtout réalistes que nous nous sommes fixés.

Sur ce, M. le Président, je vous remercie. Je suis disposé à répondre à toutes vos questions, en vous signalant que les officiers de mon ministère sont ici ainsi que ceux de la Régie du gaz.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Alors, M. le porte-parole de l'opposition, vous pouvez vous prévaloir du temps qui vous est alloué également pour des remarques préliminaires si vous le souhaitez.

M. Cherry: Non, je préfère faire les travaux au fur et à mesure.

Le Président (M. Beaulne): Passer aux échanges directs.

M. Cherry: Oui.

Le Président (M. Beaulne): Je vais demander aux collègues ministériels s'il y a des remarques préliminaires. Pas de remarques préliminaires. Bon.

(14 h 30)


Discussion générale

Alors, dans ce cas-là, M. le député, vous avez la parole pour amorcer vos échanges avec le ministre.


Développement de l'expertise québécoise dans le domaine de l'énergie éolienne

M. Cherry: Merci, M. le Président. En page 14 du document du ministère, dans Objectif général, c'est, bien sûr, «maximiser les retombées économiques liées à l'utilisation et à la mise en valeur des ressources naturelles du territoire». «Favoriser la création et le maintien d'emplois de qualité en établissant, avec l'aide de nos partenaires, des conditions économiques et sociales avantageuses.» Et, un peu plus loin: «Cet appui ce concrétisera par la promotion des produits québécois et par la défense des intérêts de la clientèle auprès de nos partenaires commerciaux.» Tenter de relier ce qu'il y a d'écrit là-dedans avec les commentaires que nous a faits le président d'Hydro-Québec en commission parlementaire dans le dossier des éoliennes, par exemple. Il disait que, suite... Puis là, évidemment, c'est l'interprétation qu'on a de ses propos. Le président d'Hydro-Québec indiquait qu'il y avait des pressions gouvernementales dans le dossier des éoliennes pour que ça aboutisse plus rapidement que prévu, en d'autres mots, pour que ce soit devancé en 1998 plutôt que 2002, et que, de ce fait, ça diminuait, selon ses dires et la compréhension qu'on en a, la possibilité de développement d'un contenu québécois pour cette technologie-là, et que, probablement, ça avait un effet sur la maximisation des retombées économiques. Alors, avec ces commentaires-là, faits par le président d'Hydro-Québec, et ceux qu'on retrouve dans le cahier, j'aimerais entendre le ministre sur ce point-là.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Chevrette: Bon, tout d'abord, il n'y a pas de cachette. Pour l'éolien, on a fait notre lit dans la politique énergétique, et Hydro-Québec avait été mise au courant de longs mois auparavant. Vous savez très bien que, quand on bâtit une politique énergétique, on doit travailler de pair avec notre société d'État. On n'a pas le choix. Il y en a un ministre, qui a déjà fait ça avant moi puis qui n'a jamais consulté Hydro-Québec, puis sa politique n'a pas fait vieux os. Vous chercherez, il n'est pas loin de vous. Donc, nous, on a consulté Hydro-Québec beaucoup. Hydro-Québec savait très bien qu'on avait un bloc de mégawatts de l'éolien pour asseoir une expertise québécoise. La politique ne va pas dans le détail de la mise en application. Je dis bien que c'est un bloc qu'on va développer. Hydro nous a fait valoir ce que M. Caillé a dit en commission. Il n'y a pas de surprise dans ça non plus, M. Caillé nous a dit: Si vous nous poussez trop fort dans le dos, on va être obligé de prendre l'expertise d'ailleurs puis de l'appliquer, alors que, si on prend le temps de se faire faire des propositions puis s'il y a un démarrage relativement lent, on va pouvoir installer, en même temps, possiblement, de la fabrication ou de la construction de palmes, par exemple, ici. Peut-être qu'on pourrait avoir du réseautage à partir des gens qu'on a sur place, des spécialistes dans les moteurs, dans les turbines.

J'ai dit: Bravo! On va en discuter. Il n'y a pas de décision de prise à ce niveau-là, sauf que c'est évident qu'Hydro est déjà liée par contrat avec un projet dans la Gaspésie, et celui-là, elle le reporterait de deux ans, alors que, nous autres, on ferait immédiatement l'appel de partenariat après pour bien permettre au Québec d'être campé. Il ne s'agit pas de bousculer. On est mieux de partir solidement, effectivement, dans ce secteur-là, mais de partir, parce que ça fait longtemps que c'est au menu, ça, l'éolien, au Québec. Moi, je me rappelle qu'on parlait de ça quand j'étais critique dans l'opposition. Mais il y a eu toutes sortes d'aventures, vous le savez. Il y a un groupe qui était lié avec Hydro-Québec et qui a fait faillite. Ça a été racheté par un groupe qui continue, à l'intérieur des délais légaux qui sont prescrits pour ce dossier-là, d'évoluer.

Moi, je pense qu'on va pouvoir négocier. J'y pense très sérieusement, parce que j'avais l'idée, moi, de tant de mégawatts par année. On me dit que le risque que l'on prend en faisant ça, c'est qu'on n'ait pas preneur. Il faut que ça soit, peut-être, plutôt de l'étaler dans le temps, peut-être réduire dans le temps, mettre plus de mégawatts. Voilà des hypothèses avec lesquelles on travaille présentement, puis il y aura une véritable négociation avec Hydro-Québec pour lancer ça, pour que ce soit solide et non pas farfelu. Avec la parution de certains rapports publics, je préfère la rigueur dans le fonctionnement, mais je pourrais peut-être vous faire part du plan d'action que l'on a.

Le Nordais, d'abord – le projet, vous le connaissez, celui-là – c'est en deux phases, et on le phase en deux pour augmenter précisément le nombre de composantes québécoises. Sans doute – je n'ai pas pu lire toutes les galées parce que je n'étais pas ici au moment de la commission parlementaire, les deux derniers jours – que ça, c'est en mars 1997 qu'on a reporté les dates contractuelles en contrepartie de retombées économiques accrues. Au niveau du Nordais, c'est ça qui a été décidé. Ensuite, inciter le fournisseurs de pales à s'implanter au Québec dans le cadre du Fonds d'investissement du secteur aérospatial. Construction et mise en service du premier parc en 1998. Construction et mise en service du deuxième parc en 1999. Réalisation d'un banc d'essai et d'expérimentation en 1997. Améliorer les composantes éoliennes, pour ça, on a des objectifs à moyen terme, en particulier une adaptation au climat froid, réduction du poids et du bruit, possibilité d'adapter le concept d'un... On a des idées, à part de ça, de se servir de certaines technologies de l'IREQ pour voir ce qu'est leur efficacité dans ce domaine.

Donc ça, c'est entre 1998 et 2005 qu'il va y avoir véritablement de la recherche et du développement pour améliorer l'expertise, parce qu'on a tout ce qu'il faut ici, avec des brevets dûment enregistrés, pour mettre à l'épreuve certaines technologies qui nous placeraient peut-être à l'avant-garde de l'éolien à travers le monde. Je n'ose pas aller trop loin dans le détail, mais je pourrais vous en parler. Parce que, si on va loin dans le détail, vous savez ce qui va se parler demain matin, là, dans les journaux: Ils ont changé de mission pour telle technologie, et autres. Mais il y a moyen de garder le cap sur une technologie puis de s'en servir de cette même technologie pour autre chose.

Ensuite, bien, on a quoi? Pour le programme de mesure des vents, on a de quoi de prévu en 1997. Ce n'est pas loin, ça, là. Hydro-Québec va travailler là-dessus. Également, en août 1997, on va installer des anémomètres supplémentaires en Gaspésie, puis, afin de ne pas retarder la réalisation des premiers parcs et du programme d'achat continu en énergie éolienne, il y a appel de propositions et programme d'achat continu. En 1997-1998, sélection. En 1999, on pense qu'on pourra faire l'intégration à l'industrie québécoise et au réseau de recherche et de développement, etc., avec un nombre de mégawatts pour le bloc qu'on a annoncé dans notre politique énergétique. Et il y a un cadre de gestion de la ressource éolienne. Eh bien, on commence nos travaux immédiatement puis on va essayer d'identifier beaucoup mieux les zones d'implantation des parcs éoliens au Québec. Et, enfin, on va avoir un programme d'alimentation en énergie éolienne et de tarification verte qui sera offert aux clientèles résidentielles et commerciales d'Hydro-Québec, tant au Québec que chez les marchés externes déréglementés. Ça, ça devrait se faire en 1998.

M. Cherry: O.K. Simplement, juste pour attirer l'attention du ministre sur le commentaire du président d'Hydro-Québec qui disait que, en procédant de la façon que vous venez de décrire, ça a comme conséquence de diminuer le contenu québécois de la technologie. Alors, je veux juste vous entendre là-dessus. C'est quoi, les efforts qui sont faits pour vraiment réconcilier les deux tout en maintenant le calendrier que vous indiquez à Hydro-Québec? Mais, en même temps, de quelle façon vous voulez vous assurer de maximiser les retombées de ça au Québec?

M. Chevrette: Non. C'est faux, ça.

M. Cherry: C'est faux?

M. Chevrette: Si on avait forcé Hydro-Québec, conformément au contrat avec le Nordais, à le faire d'une seule «shot» – ou d'un seul coup, pour un meilleur français – on aurait risqué de compromettre les retombées québécoises. Mais on accepte qu'ils le phasent en deux, donc ils n'auront pas à importer toutes les machines. C'est exactement pour répondre aux voeux d'Hydro-Québec que je vous ai exprimé mon point de vue. Ils vont être très heureux de lire les galées, de lire vos questions et surtout mes réponses.

M. Cherry: J'espère qu'Hydro-Québec n'a pas besoin de mes questions puis de vos réponses pour savoir où elle s'en va dans ce dossier-là, mais, si ça peut les aider, tant mieux, là.

(14 h 40)

M. Chevrette: Non, mais, pour me permettre que ça se répande, cette bonne nouvelle, c'est grâce à votre question que j'ai pu le faire.


Recherche et développement à Hydro-Québec

M. Cherry: Bon. Vous avez parlé d'une collaboration avec l'IREQ pour le dossier des éoliennes. Tout le temps, dans les deux jours où vous étiez absent, quand on a passé sur recherche et développement, dans les trois jours qu'on a passés, la lecture des galées vous confirmera que c'est probablement un des secteurs, recherche et développement, là, au niveau d'Hydro-Québec, où le président a constaté qu'il y a le plus à faire. Il faut redire ça en termes polis. Ha, ha, ha! Alors, souhaitons que cette collaboration-là se fasse forte des expériences qu'on vit dans d'autres domaines où on souhaiterait que la collaboration soit plus facile d'application que ce dont, malheureusement, on est trop souvent témoin. Alors, là-dessus, est-ce que vous nous indiquez que c'est quelque chose qui devrait débuter incessamment? C'est quoi, le calendrier dans ce dossier-là?

M. Chevrette: Oui, le président lui-même s'est donné des délais, un échéancier pour reconstituer une équipe qui se tient. On en a parlé souvent, vous avez raison de dire que ça a pris beaucoup de notre temps. Sans doute que vous avez été sollicités à peu près comme nous, vous aussi, pour vous faire expliquer tout ce qui s'est passé depuis, je dirais, trois à quatre ans en particulier. Les trois dernières années ont semblé difficiles, effectivement. Les chercheurs ont une version. Il y a eu une équipe disséminée. Vous avez raison aussi de le constater. Je pense qu'il faut réorganiser cela et qu'il faut donner des perspectives puis donner des balises puis des échéanciers. C'est quand même beaucoup de millions de dollars, annuellement, vous le savez, qu'on donne à la recherche. Je pense que c'est quelque chose comme... On est rendu à...

Une voix: 140 000 000 $ par année.

M. Chevrette: 140 000 000 $ par année en recherche et développement au niveau d'Hydro. C'est de l'argent, ça. Il faut avoir des perspectives d'avenir, des échéanciers, non seulement des lueurs d'espoir parce qu'on découvre des choses intéressantes en cours de route, mais je pense qu'il faut avoir un minimum, aussi, de vision de rentabilité, à un moment donné, de ces recherches-là, avec une perspective de connaître des retombées économiques pour les actionnaires que sont les Québécois et les Québécoises. C'était structuré au point qu'on ne savait pas qui faisait quoi si on écoutait à peu près tout le monde, puis, à un moment donné on apprend qu'il y a des démonstrations de faites à l'étranger sur des parties de technologies, qu'il y en a dont la propriété intellectuelle était mise en vente auprès d'autres pays. Moi, je vous avoue que j'ai très hâte que M. Caillé puis son équipe m'indiquent que la restructuration est faite, qu'il a reconstitué l'équipe, puis qu'on sait où on s'en va, puis qu'il y a des échéanciers, puis que ça serve aux Québécois et aux Québécoises qui injectent de gros sous dans ça.

Mais il y a un souci très sérieux. Moi, je veux qu'il y ait un souci sur la propriété intellectuelle, d'abord. Je veux qu'il y ait un souci de bâtir des programmes puis des échéanciers ensuite, puis que, lorsqu'on aura des découvertes assez fantastiques, comme ça a été le cas au cours des années avec l'IREQ, quand même, quand on regarde la technologie du captage des pertes sur les lignes à haute tension de 735 kV qui est devenue une technologie unique au monde, qui nous permet d'exporter ce savoir-faire puis de permettre aux Québécois de connaître des retombées intéressantes... Moi, je pense qu'il faut avoir une philosophie de gestion de ce centre de recherche là qui est payé par nous et qu'on puisse s'organiser pour que ce qu'on injecte quand on a des produits intéressants, des technologies extraordinaires, les Québécois qui ont payé puissent en bénéficier. Et ça, je dois vous dire qu'on en parle à chaque statutaire d'Hydro-Québec, de ça. Ça n'a pas été facile, parce que, quand la recherche est centralisée dans le cerveau d'une seule personne puis que l'équipe se décime, vous savez ce qui arrive.

Par contre, il faut que le réseau de vendeurs ait aussi des «guidelines» puis des balises dans sa façon de faire. Vendre la propriété intellectuelle d'une pile ACEP qui aurait pu peut-être faire l'objet de fabrication ici même avec tout ce qu'on a au Québec au lieu de la vendre exclusivement à l'étranger, je vous avoue qu'on a peut-être à apprendre. Les erreurs du passé vont sans doute nous aider dans l'établissement du présent.

M. Cherry: Toujours dans ce domaine-là, M. le ministre, les commentaires que nous a faits le président d'Hydro-Québec dans le domaine de la recherche-développement... Puis, comme vous avez soulevé l'Institut, ce qui me permet qu'on poursuive la discussion dans ce dossier-là, il nous a révélé en toute franchise – et je pense que ça a aidé à une meilleure compréhension – il nous a dit: Il y a des administrateurs de l'IREQ qui ne savaient pas ce que les chercheurs faisaient puis il y a des chercheurs qui travaillaient sur des affaires... Ça n'a quasiment pas de bon sens, on a tenté de vouloir faire préciser. Quand c'est un institut de recherche, où devrait être placée la priorité? «C'est-u» sur l'aspect administratif ou sur l'aspect recherche? Parce que, ce qui se produit dans le domaine de l'automobile, ça se produit dans d'autres secteurs aussi. On a réalisé que, dans plusieurs secteurs importants de la recherche, à l'IREQ, on retrouve le même résultat: il y a presque incompatibilité de fonctionnement entre les administrateurs et les chercheurs, avec le résultat que les équipes se déciment, que des gens quittent, et il y a bien sûr – et vous l'avez soulevé – le danger de la perte de propriété intellectuelle. Pouvez-vous élaborer un peu plus? Avez-vous une vision? Quel est le rôle que vous pensez que votre ministère va jouer? Ou est-ce que vous faites carrément simplement confiance à Hydro-Québec dans ce domaine-là?

M. Chevrette: Bien, notre ministère a un rôle, un peu, de chien de garde ou d'aviseur pour le ministre de tutelle, mais Hydro-Québec est une entité en soi qui doit répondre à des commandes de l'actionnaire. Par exemple, vous savez qu'on avait pris l'orientation d'aller lentement mais sûrement vers 2 %, à peu près, du budget en matière de recherche et de développement. On est à 1,7 %, et DF, en France, est à 2 %. On visait d'être comparable à de grandes entreprises énergétiques du genre. J'ai personnellement rencontré les administrateurs, j'ai rencontré les chercheurs, j'ai rencontré les représentants du syndicat de l'IREQ, et il y a eu beaucoup d'incompréhension. Il y a eu des contre-directives. Je pourrais vous donner les noms, mais ça ne donnerait rien. D'ailleurs, ces gens-là ont quitté Hydro-Québec depuis. Mais, manifestement, il y avait contradiction dans les décisions par rapport... Au bout de trois mois, il y avait des changements de cap.

Et il faut connaître un peu la mentalité de ces chercheurs-là. Ils n'ont pas à se soucier, eux, de l'aspect commercialisation. Il n'y a pas eu de mariage entre les deux. Il n'y a pas eu – comment dirais-je? – de communion de pensée à ce niveau-là. Les uns ne voyaient que l'aspect recherche, et, certains administrateurs ne voyant que la commercialisation, il y a eu des affectations à des individus, et les chercheurs ne voyaient pas d'un bon oeil ce qui se faisait, les expositions à l'étranger où des individus se sont quasiment attribué le fruit de ces recherches. Vous savez comment quelqu'un peut être chatouilleux quand il a découvert quelque chose? En fait, on a eu une belle petite guerre dans ça, là. Plus je les rencontrais, plus je découvrais que ce monde-là ne se parlait pas.

(14 h 50)

Et, moi, j'ai tout dit, j'ai tout rapporté ce que j'avais entendu à M. Caillé, et M. Caillé s'est donné un laps de temps pour réorganiser le secteur puis faire en sorte qu'on puisse avoir véritablement de la recherche, mais de la recherche en fonction de résultats un peu concrets. Sinon, si on fait de la recherche pour de la recherche et qu'il n'y a personne qui, à un moment donné...


Dossier du moteur-roue

Je vais vous donner un exemple. Vous pouvez avoir, je ne sais pas, 10 à 15 composantes dans la recherche, par exemple, d'une automobile électrique. Tu peux embrasser 10 composantes, puis, à un moment donné, tu te rends compte que tu as une technologie, parmi les composantes, qui est extraordinaire. Vas-tu attendre d'avoir le fruit des 15 composantes pour faire quelque chose avec la technologie que tu as découverte pour une? Exemple, le moteur-roue. Le moteur-roue, il pourrait être fonctionnel, il pourrait être fantastique, il pourrait être un peu lourd pour une automobile, par exemple, mais il pourrait être excellent appliqué dans d'autres projets. Bon, bien, on «va-tu» attendre que les 15 composantes soient réglées pour commercialiser, par exemple, une de ces technologies qui pourrait être très rentable pour le Québec? On peut avoir un convertisseur qui est rendu gros comme une disquette informatique puis qui va servir à quoi pour l'instant si tu attends que toutes les composantes d'une auto électrique soient terminées comme étude? Je pense qu'il faut avoir une dimension pratique puis qu'on marie cela avec les découvertes scientifiques pour venir à bout de faire quelque chose de bien. C'est ce qu'on cherche. Et ce mariage-là n'est pas fait au moment où l'on se parle, mais les fréquentations vont se faire.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent, je vais passer la parole au député de Johnson qui voulait intervenir. Allez-y, M. le député.

M. Boucher: M. le Président, j'avais justement une question à poser au ministre concernant le moteur-roue. J'ai lu un article récemment dans Le Devoir ou ailleurs, où on disait qu'on allait reconstituer l'équipe autour, justement, du chercheur principal qui a quitté. Je ne sais pas si vous avez des réponses précises par rapport à la reconstitution de l'équipe du moteur-roue.

M. Chevrette: Je ne sais pas quelles sont les démarches qui ont été faites pour reconstituer l'équipe autour du principal chercheur du projet. Je ne le sais pas. Je ne pourrais pas vous répondre de façon précise, mais je suis sûr qu'il y a des discussions. Quand M. Caillé s'est présenté en commission, on m'a dit que ça avait été débattu, cette partie-là.

M. Boucher: Mais on n'a pas eu de réponse par rapport à l'article du journal dont je vous parle où...

M. Chevrette: Ah non, mais ça, c'est possible. Écoutez, pour parler, vous savez qu'il y a des gens qui posent des conditions. Je prends l'exemple d'un chercheur qui aurait la sécurité d'emploi à l'intérieur d'Hydro puis qui la transférerait à l'IREQ pour faire telle étude puis qui, avec les conventions collectives, peut retourner à un travail autre. Là, c'est par conviction puis c'est par dialogue que tu peux reconstituer une équipe. Ce n'est pas sûr qu'on aura tous les mêmes équipiers, là. Il ne faut pas se faire d'illusions non plus. Une chose qui est certaine, c'est qu'une boîte de même, ça se gère. Il y en a des boîtes qui sont gérées. Ce n'est peut-être pas aussi volumineux, mais des boîtes de recherche, ça se mène ailleurs aussi, et en établissant les lignes d'autorité claires. C'est ça qu'il faut. Je pense que, à un moment donné, il y a des gens qui ont confondu certains rôles puis qu'il y en a d'autres qui ont voulu aller trop vite.

Je pourrais épiloguer longtemps là-dessus, sur ce que j'en pense. J'ai rencontré M. Pierre Couture au moins à trois reprises, je pense. J'ai rencontré le syndicat. J'ai rencontré le conseil d'administration. J'ai rencontré la directrice générale de M4 puis j'ai rencontré M. Biron, qui est le président de M4. J'ai rencontré des gens d'Hydro. J'ai rencontré des nouveaux gens d'Hydro. Puis c'est clair qu'il faut reconstituer l'équipe, fixer les règles du jeu, fixer, par directives le fonctionnement, les lignes d'autorité et leur indiquer, un peu comme on a fait, nous, quelles sont les pistes, la diversification. Dans la politique énergétique – je vous réfère aux pages 98 et 99 et même 100 et 101 – vous allez voir que, dans la politique énergétique, il y en a des pistes pour la recherche. Il y a une diversification qu'on demande. La planification des recherches devra prendre davantage en considération la possibilité de commercialisation, comme je vous disais tantôt. Quand on lit ces pages-là, on se rend compte qu'il y a tout un programme. Ça fait que, surtout si on vise le 2 % en recherche, c'est que ça donne de quoi à un moment donné.


Résultats de la restructuration d'Hydro-Québec

M. Boucher: Moi, M. le Président, j'ai deux questions plus générales à vous poser: une qui concerne la question des bénéfices qui ont été engendrés par la restructuration dont on a fait grand état et qui, normalement, a dû apporter des bénéfices au gouvernement du Québec et à la productivité générale d'Hydro-Québec. Est-ce que vous pourriez nous donner des informations sur cette question-là?

M. Chevrette: Bien, c'est-à-dire que, suite à notre fameuse commission où on était à peu près tous là – je remarque, autour de la table, que les visages n'ont pas changé depuis février dernier – tout d'abord, on avait logé des commandes très précises à Hydro. On avait logé des commandes sur les compressions budgétaires et sur les revenus ou les bénéfices nets sur l'avoir propre. Ils avaient une commande 198 000 000 $ de compressions et ils avaient une commande de 516 000 000 $ de bénéfices nets. Ils ont réalisé 520 000 000 $ de bénéfices nets. Quant aux 198 000 000 $, ça peut jouer, ça dépend, mais c'est récurrent, donc ça avait moins d'importance s'ils rencontraient les bénéfices nets. Je suis même allé vous présenter un amendement législatif que le député de Saint-Laurent a accepté spontanément, un petit projet d'un article pour permettre précisément d'étaler les programmes de départ, les fameuses primes de départ pour qu'on puisse réaliser pleinement le programme et je pense que ça va bien de ce côté-là.

Il y a eu restructuration qui, à mon point de vue, va également apporter des bénéfices récurrents additionnels. On est obligé, pour se conformer au FERC, de séparer les comptabilités, et ça aura un avantage marqué devant la Régie, parce que, on pourra le voir, la Régie a un pouvoir d'expertise, donc elle pourra voir si, véritablement, ce qu'on appelle les coûts réels de chacun des secteurs, par exemple le transport, la production, la distribution, la commercialisation... On pourra voir clair et encore toucher du doigt... Je suis sûr qu'il y a encore du gras, moi, à Hydro-Québec. Sans être devin, je suis convaincu qu'il y a certains secteurs où il y a du gras encore. Mais, avec cette séparation des comptabilités, avec une autorité qui sera moins diluée que c'était le cas avec 35, 36 vice-présidents, je suis persuadé qu'on pourra toucher du doigt les coûts réels et qu'on pourra contribuer à encore augmenter les bénéfices nets d'Hydro-Québec. Ils on encore une grosse commande pour l'an prochain. C'est au-delà de 700 000 000 $ l'an prochain, et, à l'aube des années 2000, ce sera 1 000 000 000 $ que ça devra rapporter en bénéfices nets. Je pourrais vous donner des chiffres plus précis, mais je me rappelle un peu de mémoire... Donc, sur les trois prochaines années, c'est 715 000 000 $ l'an prochain, 820 000 000 $ en 1998 et 1 030 000 000 $ en 1999. Et ça, c'est au bénéfice du Québec et des Québécois en général.

Le nombre de plaintes a chuté de façon radicale depuis la transformation d'Hydro-Québec, depuis les changements d'individus, aussi, de personnes. Le nombre de plaintes à mon bureau, moi, a fondu de je ne sais pas combien de pourcentage, mais c'est beaucoup plus que la moitié, et vous n'avez, pour vous en rendre compte, qu'à ouvrir le clipping de presse. Maintenant, il peut y avoir des problèmes, des articles négatifs, mais ce n'est rien avec ce qu'on a connu il y a un an, un an et demi, deux ans. Et ça, ça se reflète sur le climat de travail, c'est évident. Tu rencontres des gens aujourd'hui, puis... Hier, moi, dans la Beauce, j'étais avec un gars d'Hydro-Québec qui va prendre sa retraite grâce au programme assisté au mois de mai prochain, puis tu sens que le climat n'est plus le même. Ils te parlent. Ils ont été réticents au départ, ils ont eu peur de nous autres, là. Une commission parlementaire, là, c'est rare qu'un parlement, unanimement, se raidit.

(15 heures)

Mais ça prouve une chose, c'est qu'Hydro-Québec, c'est un joyau pour les Québécois. De quelque côté de la Chambre que tu sois, tu tiens à ce que ce joyau-là reprenne tout son tonus et toute sa vigueur au profit de l'ensemble du Québec. Moi, je suis très heureux de ce qui s'est fait. Si j'avais à faire un bilan, il y en a qui ont été vexés par nos styles, mais, moi, je leur demande de nous juger aux résultats.


Barrages hydroélectriques

M. Boucher: Une dernière question d'ordre général: En ce qui concerne la question de la politique des barrages, j'ai bien compris que la politique des petits barrages, au Québec, relevait de votre ministère, tandis que la construction des grands barrages d'Hydro-Québec, évidemment avec, j'imagine, une permission du gouvernement ou un accord du gouvernement...

M. Chevrette: C'est une façon de s'exprimer. C'est probablement la même expression que j'utilise souvent. Dans les faits, tous les barrages relèvent de nous. Mais, pour la construction, la production hydroélectrique, dans tout projet de 50 MW et plus, c'est Hydro-Québec; 50 MW et moins, c'est un programme du MRN, du ministère des Ressources naturelles.

M. Boucher: Ma question, c'est: Est-ce qu'il y a actuellement une volonté du gouvernement de... J'ai entendu parler de ça, notamment par le président d'Hydro-Québec lui-même, que l'impact de la construction de plusieurs petits barrages sur la faune, notamment, l'environnement, est beaucoup plus grave et a des conséquences beaucoup plus néfastes que la construction d'un grand barrage dans le Nord qui pourrait nous donner tous les mégawatts dont on a besoin.

J'ai entendu des choses comme ça, ces derniers temps. Est-ce que vous pourriez nous dire s'il y a une orientation du gouvernement qui est précise, par rapport à l'un ou l'autre des deux projets qui peuvent être mis sur la table?

M. Chevrette: Tout d'abord, la Régie aura un rôle à jouer, dorénavant. Il faut regarder si le nombre de mégawatts à développer, c'est raisonnable ou si ça ne l'est pas. Il va y avoir nécessairement une négociation avec Hydro-Québec aussi pour le programme des petites centrales. On va s'asseoir avec eux autres puis on va dire: Combien par année, en vertu de vos prévisions, vous nous autorisez à accepter? Ça, ça donne une chose, là, que les gens pensent que ça va être tout bordélique, ça, puis ça ne sera pas un promoteur qui va en avoir 10. S'il en a 10, il va être obligé de se résigner aux contraintes qu'on va lui mettre. Les retombées économiques pour les communautés locales et régionales, ça va être des balises, ça. Puis on va discriminer positivement ceux qui ont des projets où les communautés auront des retombées et non pas exclusivement le portefeuille exclusif des promoteurs. Ça, j'espère que c'est clair, ce que je dis.

Deuxièmement, il va y avoir des négociations serrées sur la valeur des projets. Je peux vous dire que j'en aurais signé, des barrages, moi, 10, 12, à 0,05 $ indexés du kWh. Il n'y a pas grand monde ici qui n'aurait pas pris le risque si on avait eu l'opportunité de s'en voir offrir. Si on n'avait pas été en politique, là, on aurait peut-être tous été des intéressés aux petits barrages, parce qu'il y en avait en Hérode qui étaient intéressés. En tout cas, si je me fie sur les pressions que j'avais, moi, aïe! il y en avait un joyeux paquet qui trouvaient que les petits barrages, c'était le fun. D'ailleurs, la commission Doyon évalue cette aventure à 75 000 000 $, dans son rapport.

Ceci dit, pour ce qui est du grand barrage versus des petits, il y a autant d'écoles de pensée dans ça, puis je ne suis pas sûr que la vérité soit dans un seul camp. D'abord, beaucoup de petits barrages, c'est des anciens barrages désaffectés qui demandent à être reconditionnés. Donc, là-dessus, ce n'est pas bien, bien grave. J'ai entendu un journaliste d'un très haut médium d'information – Le Devoir – qui répondait à mon attaché de presse que les citoyens ne connaissaient rien dans une classification de leurs rivières. Moi, je préfère faire confiance aux citoyens. La politique énergétique prévoit précisément que le ministère des Ressources naturelles devra procéder à la classification des rivières, en collaboration avec l'Environnement, naturellement. On va le faire, puis ça s'en vient, ça. On va être prêt à lancer une consultation très prochainement.

M. Boucher: Juste un commentaire au ministre, M. le Président. L'année passée, sur la rivière Saint-François, à la hauteur de Windsor, le propriétaire ou enfin le gestionnaire du barrage qui est là, à un moment donné, a ouvert ce qu'on appelle les ballons. Il y a des centaines de dorés qui sont morts. La rivière s'est asséchée complètement. Y a-t-il des moyens de contrôle? C'est la maire de Windsor, que vous connaissez bien, qui m'a sensibilisé à ce problème qui est survenu. Est-ce qu'il y a des conditions de gestion de l'eau dans les barrages... C'est un ancien barrage, comme vous disiez. C'en est un, ça, comme il y en a un à Bromptonville aussi, que la compagnie Kruger a mis en place. Est-ce que c'est surveillé? Comment c'est surveillé? Vous savez aussi que la gestion de ces barrages-là dans mon territoire, par exemple, occasionne à chaque printemps, parce que ce n'est pas coordonné, la gestion de l'ouverture des barrages, occasionne...

M. Chevrette: Vous parlez de barrages faits?

M. Boucher: Oui.

M. Chevrette: Construits?

M. Boucher: Oui, c'est ça. Mais je vous demande s'il y a des conditions là-dedans.

M. Chevrette: Bien, sans doute, parce que les débits minima, ça, c'est accroché à chaque contrat. Tu dois laisser un débit environnemental minimum. J'ai vu ça partout, moi. Il faut qu'il sorte au moins tant d'eau à l'autre bout même si tu fais un barrage. Puis rappelez-vous tout le débat douloureux qui s'est fait sur la Moisie par le détournement de la Carheil puis de la Pékans. Les gens disaient: Il faut garder le niveau d'eau acceptable pour la ressource saumon. Hydro-Québec a toujours dit qu'elle respecterait tous les débits environnementaux fixés puis qu'elle pourrait même mieux qu'avant assurer un débit constant par le contrôle des barrages. S'il y en a au Québec qui ne se conforment pas, c'est le ministère de l'Environnement qui a la responsabilité de voir à faire en sorte que les débits environnementaux soient respectés, ceux qui sont fixés dans les contrats. Est-ce qu'il y a des contrats antérieurs qui ne prévoyaient pas ces débits minima ou environnementaux minima? Je ne le sais pas. Je n'ai pas vu les contrats.

M. Boucher: C'est trop récent, celui-là.

M. Chevrette: Mais que le doré nage sur le cant, comme on dit en bon québécois, ça peut être dû à un niveau d'eau, mais ça peut être dû à d'autres contaminants. Il faut faire bien attention dans le jugement qu'on peut porter. Parce que j'ai vu des endroits où il y a beaucoup d'eau, puis le poisson flotte. C'est parce qu'il y a d'autres choses qui flottent.

M. Boucher: Je sais que vous êtes un amateur de pêche, mais...

M. Chevrette: Oui, puis je n'aime pas ça voir un poisson sur le cant.

M. Boucher: J'imagine, sauf si c'est un saumon dans la rivière.

M. Chevrette: J'aime mieux qu'il soit vigilant, vigoureux et capable.

M. Boucher: Bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent.


Dossier du moteur-roue (suite)

M. Cherry: M. le Président, je vais revenir à recherche et développement à Hydro-Québec. Au lendemain des deux derniers jours qu'on a eus en commission parlementaire avec les gens d'Hydro-Québec, il y a un journaliste, dans une émission du matin à Radio-Canada télévision, qui disait que, dans ses 25 ou 30 ans d'expérience journalistique, ce dossier moteur-roue auquel vous avez référé tantôt est probablement le plus nébuleux et le plus compliqué auquel il n'ait pas eu à faire face, et qu'on a bien de la difficulté à trouver la véritable histoire derrière tout ça, puis on n'a pas la prétention qu'on va l'obtenir aujourd'hui.

M. Chevrette: Mais vous avez tellement raison. Si vous êtes le seul qui pensez que c'est nébuleux, je voudrais vous apprendre que vous n'êtes pas le seul. Parce que, moi, s'il y a un dossier que j'ai travaillé, c'est lui. Mais il faut bien comprendre qu'Hydro-Québec a des employés qui travaillent pour l'IREQ, qu'il y a des filiales qui s'appellent M4, qu'il y a un conseil d'administration là qui a une certaine autonomie, qui tire son argent d'Hydro, puis qui est supposé gérer cette boîte-là en fonction, plus précisément, du moteur-roue ou des composantes pouvant faire partie éventuellement d'une auto électrique. Ça veut dire les convertisseurs. Ça veut dire les stabilisateurs. Ça veut dire le moteur-roue lui-même dans chacune des roues, dans un climat où il y a de la neige et où on étend du sel qui trempe dans une roue. Puis mettez toutes les composantes, mettez toute la complexité possible de ce qu'il peut y avoir. Puis il y a des gens dans ça qui disent: Bon, bien, oui. Mais ils ne commercialisent jamais rien. Oui. On en est rendu où? Le moteur est trop lourd? Il n'est pas assez lourd? Comme il n'y a plus un gros moteur dans le museau de l'auto, puis que ça s'en va sur quatre roues, est-ce que quelque chose d'aussi léger, sur une seule carrosserie, avec quatre moteurs dans quatre roues, ça assure la stabilité de l'auto?

(15 h 10)

Il y a toutes sortes d'essais qui sont faits. On est rendu au quatrième prototype qui va sortir, je crois. Je vous dis ça sous toutes réserves, mais il me semble que le troisième n'était pas suffisamment rodé pour permettre des essais sur un banc d'essai. Mais une chose est certaine, là, je vous dirai que... Vous vous rappellerez qu'en 1994, je pense... «C'est-u» en 1994 que M. Johnson avait annoncé que ça roulerait bientôt? C'était prématuré en Hérode, par rapport au rapport qu'on a aujourd'hui, c'est évident. Moi, je ne serais pas en mesure de vous dire quand est-ce que ça va se faire, mais une chose qui est certaine, c'est qu'on va bâtir un programme de recherche, on va asseoir ça dans un calendrier qui a de l'allure, puis on va savoir où est-ce qu'on s'en va. Ça fait quand même passablement d'argent qu'on met exclusivement pour ça. Il faut savoir où est-ce qu'on s'en va. Il faut regarder s'il n'y a pas des alternatives à cela, parce que tu peux chercher en fonction d'un objectif, mais, à un moment donné, tes découvertes te permettent de changer la nature même de ton objectif ultime. Supposons que, moi, je suis en faveur... Quand j'ai lancé tout ça, ce programme de recherche, supposons que mon objectif était de voir rouler toutes les automobiles du gouvernement puis des ministères, des petites voitures électriques. Bon, ça aurait pu être un maudit beau rêve, puis, moi, j'y crois encore. Si c'est possible, tant mieux. On a 44 000 000 $ de mis dans ça, me dit-on. Mais, à supposer que le moteur soit assez développé, puis qu'il puisse servir à autre chose, puis que ça rapporte pareil... C'est une technologie qu'on a découverte. Puis ce n'est pas nécessairement ce qui fitte, à court terme, dans la roue de l'auto. Ça «peut-u» aller ailleurs, ça? Je peux vous dire qu'il y a des idées là-dessus. Il y en a qui ont déjà pensé à des alternatives, si jamais... Mais il faut que ce soit dirigé – vous avez entièrement raison – avec une rigueur, avec un échéancier, puis un programme très serré, puis dire: Vous en êtes rendus où? Puis comment vous prévoyez de temps pour?

Je comprends que la recherche, ça ne se tranche pas au couteau, de même, mais, à un moment donné, il faut que tu te fixes des échéances, quand tu injectes continuellement de l'argent. Puis, si tu l'injectes en fonction exclusivement d'un seul objectif puis que tu échoues, tout est balayé, tout est balancé. Je pense qu'il faut qu'il y ait du monde alerte qui allie à la fois la connaissance de la recherche, mais aussi de la gestion des deniers publics, et l'imagination de se retourner de bord et de se servir à bon escient de certaines technologies, de certaines découvertes.

M. Cherry: Vous avez décrit, M. le ministre, votre ministère. Je vous demandais quel rôle vous preniez, comme ministère, dans ce dossier-là. Vous avez dit: On est un peu le chien de garde. Il faut surveiller comment ça fonctionne. Les derniers développements qui sont connus du public, c'est qu'Hydro-Québec a décidé de réunir une table, on dit neuf experts nord-américains, pour donner leur opinion sur l'évaluation. On en est, quoi, à l'état du moteur-roue tel qu'il est là, et, fort de ce rapport-là qui, selon ce que j'en ai lu, doit être rendu à son résultat durant le mois de mai, ça aidera Hydro-Québec à faire son choix. Il a été porté à mon attention qu'un des risques qu'on prend, quand on soumet une recherche de cette nature-là à l'analyse d'experts nord-américains, c'est que, en même temps, on expose le fruit de ce qu'on a à des gens qui pourront, à la fin de ces travaux-là, eux, utiliser les connaissances qu'ils viendraient de découvrir.

Donc, ce que j'essaie de dire, c'est que, quand on procède de cette façon-là, en règle générale, on a tendance à protéger au moins un minimum de quelque chose, là-dedans, qu'on ne met pas complètement à l'analyse des experts, pour nous assurer que ça n'aura pas, comme résultat ou comme conséquence, qu'on va s'être fait voler cette technologie-là. Alors, c'est pour ça que je dis: Est-ce que ça, ça a été fait? Puis, si vous me permettez un parallèle, M. le ministre, dans ma carrière antérieure, quand j'étais chez Canadair, vous vous souviendrez, quand Canadair a été mise en vente par le gouvernement canadien, sans aucune forme de balise, les premiers qui se sont déclarés intéressés à venir acheter Canadair, c'étaient les compétiteurs. Alors, ils sont arrivés accompagnés d'une équipe d'une trentaine qui, pendant trois semaines, un mois, quatre ingénieurs là, tant dans le marketing... puis ils sont allés découvrir toutes les forces et toutes les faiblesses de l'entreprise en se disant intéressés à se porter acquéreurs. Donc, ils voulaient savoir tout ce qu'il y avait dedans. Le résultat, c'est qu'ils ont décidé de ne pas s'en porter acquéreurs, mais ils avaient pris connaissance de la liste des clients potentiels, des forces et des faiblesses au niveau de la technologie, de l'engineering, avec la conséquence que ça a retardé la mise en marché. Ça a même retardé des démarches ou des conclusions qui étaient imminentes avec des clients.

Alors, je fais le même parallèle, dans le moteur-roue, puis je dis: Quand on prend, pour se protéger comme Hydro-Québec, on va soumettre ça à neuf experts nord-américains, est-ce qu'on s'est bien assuré que ça va vraiment servir pour les fins pour lesquelles Hydro-Québec le veut, soit faire confirmer ou infirmer ce qu'il y a là-dedans, mais que ça n'aura pas, aussi, comme possibilité que ça coule à l'extérieur et que, finalement, ça puisse jouer contre nous autres? Ça, c'est ma première question.

Le Président (M. Beaulne): Allez-y, M. le ministre.

M. Chevrette: Oui. J'ai moi-même soulevé ce danger. Je ne me souviens pas à quelle occasion, mais je sais que je l'ai fait. Mais je suppose, sans avoir vérifié, que les dirigeants ont pris la peine de faire prêter serment de confidentialité totale aux experts auxquels on a fait appel.

Le dilemme est le suivant, c'est qu'on n'a pas plus l'heure juste de notre monde. C'était vrai avant, pendant et après l'équipe qui a été conçue autour de M. Couture. Le dilemme, c'est qu'à un moment donné, quand ça te coûte 12 000 000 $ par année, tu as le droit de voir clair, comme vous dites, le droit d'être un peu le chien de garde de la gestion de ces argents-là. Puis c'est beaucoup plus pour avoir une évaluation scientifique.

J'en ai rencontré, des experts scientifiques, dont un, je pense, est sur le comité, d'ailleurs, et qui m'a dit: On n'a pas besoin d'avoir l'ensemble des brevets enregistrés pour juger d'une technologie en tant que commercialisation. Juste à avoir des données de chiffres, par exemple, tel poids dans chaque roue avec la disparition de tel poids dans le devant d'une voiture, on peut te dire carrément: Tu perds ton temps si ça reste de même. On est assez habitué, en recherche scientifique, pour apporter des jugements de valeur. J'ose espérer que c'est ça qu'on demande au comité d'experts. Parce qu'on fait fausse route en gardant le cap exclusivement sur un objectif précis, si ça ne nous permet pas de dire que telle technologie est assez avancée qu'elle pourrait, par exemple, servir, je ne sais pas, dans le domaine ferroviaire. On en parle de plus en plus. Vous rappelez-vous pour Sept-Îles, certaines formes de transport en commun, entre autres?

Est-ce qu'on va attendre d'injecter 100 000 000 $, 150 000 000 $ exclusivement en fonction de l'objectif automobile électrique ou s'il n'y a pas certaines technologies et certaines composantes qui sont mises à point présentement et qui peuvent servir dans d'autres secteurs? Moi, je suis sûr que oui. Puis je ne suis pas un spécialiste, mais j'ai assez jasé avec des spécialistes pour me faire convaincre qu'il y aurait des alternatives dans l'utilisation de certaines technologies déjà enregistrées.

M. Cherry: J'en suis convaincu. Évidemment, l'objectif de la miniaturisation, tant qu'elle n'est pas rendue à la fine pointe pour l'automobile, il y a d'autres formes d'application possibles, que ce soit dans le transport en commun, vous venez de le souligner, où la miniaturisation n'a pas le même objectif. Donc, il y a moyen de faire ça. Mais je veux vous entendre là-dessus.

Si on arrivait à la conclusion que, à cause de tout ce qui s'est passé avant, pour lequel personne ici n'est responsable – mais l'état de fait est celui-là – mais que, en même temps, on identifie qu'il y a là un potentiel certain, est-ce que vous iriez jusqu'à considérer la possibilité que, à ce moment-là, votre rôle de chien de garde pourrait dire: S'il n'y a pas moyen que ça fonctionne à l'intérieur d'Hydro-Québec, il faudra peut-être penser à le sortir de là et faire autre chose avec? Ou s'il doit vivre ou mourir, mais uniquement à l'intérieur d'où il est là?

M. Chevrette: Bien, on m'a dit qu'il y avait beaucoup de brevets enregistrés dans ça. Je peux vous dire qu'il y a eu des démarches pour intéresser des partenaires industriels avant même que j'arrive à la tête de ce ministère-là et avant même qu'on arrive au gouvernement, je pense. On a essayé, entre autres, à un moment donné, d'intéresser Bombardier qui n'a pas fermé la porte à tout, mais qui a suffisamment de connaissance de la chose pour dire: C'est peut-être prématuré dans tel secteur. On verra.

Je pense qu'avec une gestion ordonnée, clairvoyante, il y a possibilité d'intéresser certains industriels privés, d'abord pour injecter dans la recherche aussi, pour un certain type d'équipement et, automatiquement, se servir, comme vous dites, de ce qui a été fait au profit d'autres réalisations que celles qu'on a recherchées au départ. Moi, je suis sûr que oui. On a au Québec des industriels dans plusieurs secteurs, qui peuvent être d'excellents partenaires. On n'est pas obligé d'aller vendre exclusivement aux Japonais. On n'est pas obligé non plus d'aller vendre ces technologies-là à l'étranger sans en escompter des bénéfices pour ceux et celles qui ont payé pour cette recherche. Ce sont les Québécois. Donc, oui, moi, je pense que ce que vous affirmez, c'est tout à fait plausible.

(15 h 20)

M. Cherry: Croiriez-vous, M. le ministre, que, dans la réorganisation du conseil d'administration de l'IREQ ou des autres compagnies, ça pourrait être une formule intéressante que des partenaires potentiels puissent siéger au conseil d'administration? Ce qui, en même temps, serait un signal positif aux chercheurs qu'ils ne font pas ça uniquement pour leur plaisir, mais qu'il y a des gens qui y consacrent des énergies, qui veulent s'assurer d'un suivi. Il me semble que ça aiderait à donner la sorte de signal qu'on souhaite.

M. Chevrette: D'ailleurs, ça sera la politique. On n'engagera plus de fortes sommes dans des projets sans avoir un partenaire sérieux.

Le Président (M. Beaulne): Ça va, M. le député?

M. Cherry: Oui.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Drummond.


Crédits pour la lutte contre les incendies de forêt

M. Jutras: Oui. Moi, mes questions à M. le ministre sont d'un autre ordre. Je voudrais peut-être revenir aux crédits du ministère même. Vous nous avez expliqué, dans votre présentation, qu'il y avait une baisse de 64 000 000 $, ce qui représente environ 17,5 %. Par contre, il y a des montants d'argent qui ne sont plus nécessaires cette année. Je pense à la Société nationale de l'amiante.

Il y a une chose qui m'a frappé. Vous avez dit, au niveau des feux de forêt, que, l'an dernier, ça a été 19 000 000 $. Je dois donc comprendre de vos crédits que vous ne prévoyez pas de montant à ce sujet-là. Comment ça fonctionne au niveau des feux de forêt?

M. Chevrette: Ça, on a une société qui s'appelle SOPFEU. On a des crédits permanents de 2 500 000 $. Le Trésor nous a dit: Quand il y aura des feux comme il y en a eu, vous ferez appel au fonds consolidé à ce moment-là, point final. Au lieu de budgéter chaque année. Tu ne le sais pas s'il va y avoir une épidémie de feux ou s'il n'y en aura pas. Donc, ça nous enlève 19 300 000 $ sur 64 000 000 $, en partant. C'est déjà le tiers. C'est pour ça que je dis qu'on garde les mêmes pouvoirs d'intervention, parce qu'on ne le mettra pas dans les crédits, le 19 000 000 $.

C'était la même chose pour le 9 300 000 $ de l'amiante. On avait un engagement avec la Société nationale de l'amiante de tant de millions par année, puis ça a pris fin l'année passée. Donc, on n'a pas à le mettre cette année. Ça fait 28 600 000 $, les deux combinés. Je continue. Le plan de ressources, je pense que...

M. Jutras: Bien, peut-être avant d'aller plus loin, M. le ministre, concernant les feux de forêt, quand on parle, pour l'an dernier, de 19 000 000 $... Je sais qu'il y a eu beaucoup de feux de forêt, l'année dernière.

M. Chevrette: Ça a été une grosse année.

M. Jutras: Est-ce que c'est pas mal plus que les autres années? De quel ordre?

M. Chevrette: C'est pas mal plus que certaines années. La moyenne est de 7 000 000 $ à 8 000 000 $. Mais, l'an passé, les feux de foudre au mois de juin, ça a été épouvantable. Rappelez-vous, au mois de mai, dans l'espace d'une journée, je pense qu'il y a 150 feux qui se sont allumés, si ce n'est pas plus, à part ça, parce qu'on a monté le nombre, épouvantable. Si bien qu'on a dû faire appel à des avions-citernes de l'extérieur, à un moment donné. Il y a eu des feux de foudre de façon beaucoup plus nombreuse que les années antérieures.

Il y a des grosses années où tu as un immense feu. En acrage, ça peut se comparer d'une année à une autre. Il y a des feux hors contrôle, par exemple. Ça, ça peut ravager beaucoup de forêts. Ce n'est pas le nombre de feux, à ce moment-là, c'est le gigantisme d'un feu ou de deux feux. Mais, l'an passé, c'était le nombre.


Réduction des coûts de la main-d'oeuvre

M. Jutras: O.K. Et maintenant, relativement à l'effort que votre ministère fait dans le redressement des finances publiques, je voudrais savoir: Qu'est-ce qu'il en est de la réduction au niveau des coûts de main-d'oeuvre, chez vous? Parce qu'il y a une chose qui m'a frappé quand je regardais les crédits généraux. Je pense que, quand on regarde le nombre total d'effectifs, il y a une différence, d'une année à l'autre, de seulement sept personnes. Mais je suis convaincu que l'effort doit être plus grand que ça. Alors, comment ça évolue au niveau de l'évolution de vos coûts de main-d'oeuvre? En tout cas, quand on regarde vos effectifs totaux, c'est une différence de seulement sept personnes. Mais, évidemment, là on ne fait pas la distinction entre les temps-pleins et les temps-complets. J'imagine que la réponse doit être là-dedans.

M. Chevrette: Oui, mais je vais vous faire répondre de façon plus précise que moi. Vous aurez remarqué que le gros impact a été les départs assistés, en 1996-1997. C'est pour ça que, par rapport à 1997-1998, ce n'est que le nouveau programme qui va s'appliquer chez nous.

Donc, je vais demander à notre spécialiste, en s'identifiant, de répondre de façon précise à votre question de l'évolution des effectifs.

M. Picard (Louis-Gilles): Louis-Gilles Picard, de la Direction générale des services à la gestion.

Il faut comprendre que les chiffres 1996-1997, tels qu'ils apparaissent au livre des crédits, tiennent compte du programme de départs assistés. Les gens ont quitté. Donc, ces chiffres-là tiennent compte du programme de départs assistés de l'année dernière. Alors, il y a 128 équivalents temps complet qui ont été soustraits de l'effectif qui apparaissait au livre des crédits de l'année dernière pour tenir compte de ce programme-là.

M. Jutras: Quand vous dites «l'année dernière», vous parlez de 1996-1997?

M. Picard (Louis-Gilles): Oui, 1996-1997. Donc, le programme qui a eu cours en juillet et août l'année dernière. Les chiffres qui apparaissent pour l'année 1997-1998, les crédits du ministère ont été soustraits de 7 400 000 $ pour tenir compte de ce nouveau programme alors que les effectifs n'ont pas été diminués, considérant qu'il était difficile d'identifier l'effet de ce programme-là sur nos programmes. Alors, c'est pour ça que les nouveaux chiffres ne tiennent pas compte des gens qui partiront en juillet.

M. Jutras: Est-ce qu'on peut prévoir pour le 1er juillet?

M. Picard (Louis-Gilles): Si on dit que, grosso modo, le 7 400 000 $, nous, selon nos estimés, on pense que, pour atteindre cette cible-là, il devra y avoir au moins 250 personnes qui devront partir. Si on fait la somme du programme des départs assistés de l'année dernière plus le nouveau programme de cette année, alors l'effectif du ministère va avoir diminué à peu près de 380 ETC, au cours des deux dernières années.

M. Jutras: Pour les deux ans. O.K.

M. Chevrette: Mais 128 l'an passé, le reste cette année.

M. Jutras: Mais, quand je regarde, comme à la page 49 du cahier explicatif où on voit l'effectif total pour 1996-1997, 3 487, pour 1997-1998, 3 481, ce qui fait une différence de six personnes, je comprends, quoi, que...

M. Chevrette: C'est 250, entre parenthèses, que vous devriez mettre vis-à-vis de ceux de cette année, et 250, normalement, pour rencontrer la cible de 7 400 000 $. C'est ça?

M. Picard (Louis-Gilles): C'est ça. C'est sûr que les crédits comparatifs pour 1996-1997, si vous allez vérifier dans le livre des crédits de l'année dernière, ce n'est pas le chiffre de 3 487 qui apparaissait. Le chiffre qui apparaissait, l'année dernière, c'est 3 603.


Augmentation des revenus du ministère

M. Jutras: Ça va. Maintenant, vous avez dit aussi, M. le ministre, dans votre présentation, qu'il y avait eu, depuis, je pense, trois ou quatre ans, une augmentation importante au niveau des revenus au ministère. Vous avez même dit, je pense, que ça s'était multiplié par trois depuis 1992.

M. Chevrette: On est rendu à 332 000 000 $, si ma mémoire est fidèle.

M. Jutras: Et cette augmentation-là est venue de quoi, principalement, au cours de ces années-là?

(15 h 30)

M. Chevrette: Principalement des droits de coupe. Parce que le prix du bois est très bon, des CAAF ont été octroyés, puis il y a eu une gradation dans les droits de coupe qui tenait compte du prix de vente du bois. Et, comme le bois a eu des bons prix depuis ces années-là, c'est la principale cause des revenus additionnels. Les ressources forestières, c'est 190 000 000 $ escomptés; les minières, c'est 11 000 000 $, 1 000 000 $ de plus que l'an passé. Les ressources hydrauliques, c'est à peu près 1 000 000 $ également; c'est assez gros, ça aussi. Les ressources hydrauliques, c'est 54 000 000 $ que ça rapporte. Les autres droits et permis, c'est 10 000 000 $. Puis il y a divers, des ventes de terres, quand on met en vente des lopins de terre, ça rapporte 14 786 000 $. Il y a des intérêts: 500 000 $; des amendes et des confiscations: 100 000 $; des recouvrements de dettes antérieures: 675 000 $. Pour un grand montant, comme je vous disais, de 300 000 000 $.

Une voix: Ça, c'est le net.

M. Chevrette: 282 000 000 $ au net. Brut, c'est 332 000 000 $.

M. Jutras: C'est ça. Effectivement, quand on regarde ça, on s'aperçoit que c'est au niveau des ressources forestières qu'il y a un gros changement, une grosse amélioration: ça passe de 125 000 000 $ à 190 000 000 $.

M. Chevrette: Exact.

M. Jutras: Vous nous dites que c'est au niveau des contrats de concession? C'est ça que je comprends.

M. Chevrette: C'est au niveau des droits de coupe. Il n'y a pas de cachette, quand l'industrie forestière augmente de 36 % ses profits, c'est parce que le bois d'oeuvre est bon. On l'a vu un peu aux forêts il y a trois, quatre jours. La détermination des droits de coupe est basée sur le prix de la valeur marchande. Donc, plus le bois d'oeuvre est payé à sa juste part, me direz-vous cependant, par les Américains ou par ceux qui en achètent, plus le droit de coupe augmente. Ce serait l'inverse si ça baissait, d'autre part, puisque le système est pensé, est ainsi fait que, si les prix baissent, les droits de coupe baissent et que, si les prix augmentent, les droits de coupe augmentent.

Mais on demeure malgré tout – et je me plais à le répéter – inférieur à l'Ontario de beaucoup, inférieur au Nouveau-Brunswick un peu et de beaucoup inférieur au Vermont. Donc, pour ceux qui nous entourent, quand on se compare, là... Et, ce matin, j'ai mis la main sur une autre compagnie qui se plaint énormément des droits de coupe. Je dois vous dire que, dans certains cas, ça représente moins de 1 % de leurs coûts de production, les droits de coupe. J'espère que la viabilité de leur entreprise ne tient pas qu'à 1 % du coût de production parce que, sinon, ça n'a pas une assise trop forte, ça, cette affaire-là. Il y en a d'autres qui se plaignent aussi de l'augmentation des droits de coupe, mais, du même souffle, ils font des demandes pour accroître leur CAAF puis ils achètent des scieries indépendantes. Ils pourraient acheter tout ce qui bouge comme scierie indépendante pour obtenir les CAAF. Ça commence à m'agacer un petit peu, les plaintes, les lamentations. Je suis à veille de le faire savoir publiquement. Bien à veille.

M. Jutras: C'est pas mal public, ici, vous savez.

M. Chevrette: Oui mais, aujourd'hui, il y a des élections partielles. Ça ne sortira pas.

M. Jutras: Ah bon! Ha, ha, ha!

M. Chevrette: On se reprendra un autre jour.

M. Jutras: Alors, à ce moment-là, ça veut dire que l'augmentation des revenus au niveau des ressources financières, à ce que je comprends, c'est dû au fait que le marché est bon présentement, que le prix est bon? Ce n'est pas nécessairement qu'il y a beaucoup d'autres...

M. Chevrette: Bien, ce n'est pas le cas dans les pâtes et papiers, par exemple. Pour être très honnête sur toute la ligne, les pâtes et papiers, c'est une perte de 25 %. Ça fait que ceux qui sont intégrés, d'autre part, peuvent perdre sur les pâtes et papiers puis ils peuvent gagner sur le bois d'oeuvre. Il y en a qui ont des grosses scieries puis qui mangent leurs propres copeaux. Mais, même si j'ai mis un comité d'experts pour le réévaluer, règle générale, à mon point de vue, on n'a pas un système si pourri que ça. Mais, s'ils se plaignent que ça augmente, est-ce qu'ils ne se réjouissent pas que les prix soient bons? Une minute, là! Tu ne peux pas manger à tous les râteliers exclusivement ce qui est bon. Si, moi, je fais de l'argent avec le bois d'oeuvre puis qu'on augmente les droits de coupe, mais que les prix demeurent très bons... Au contraire, ils s'améliorent de 36 %. On «peut-u» concevoir que les élus, ici, nous autres, on est responsables aussi des retombées pour les citoyens? C'est la ressource naturelle qui n'appartient à personne, ça. Ça appartient à tout le monde, ça. C'est les territoires publics.

(Consultation)

M. Chevrette: Cette année, oui, il y a peut-être une raison. 190 000 000 $ versus 125 000 000 $, là, il y a eu une augmentation du volume de coupe de 1 500 000 m³. Ça peut être aussi, accolées à ça, l'augmentation du droit de coupe plus l'augmentation du volume. C'est une combinaison du 1 500 000 m³ de plus... Couplée à ça l'augmentation des droits de coupe en général, ça fait la différence entre 125 000 000 $ et 190 000 000 $, donc 65 000 000 $.


Comités ministériels sur l'organisation du travail

M. Jutras: Toujours, M. le ministre, dans le cadre des efforts que votre ministère fait au niveau de la rationalisation, je prenais connaissance dans votre déclaration qu'il s'est créé chez vous un CMOT. On connaissait les CAMO. Là, il y a des CMOT, qui sont des comités ministériels sur l'organisation du travail. Alors, vous n'en parlez pas longtemps, mais ce que je comprends du peu qui est écrit là, c'est que ça a été une expérience heureuse chez vous.

M. Chevrette: Oui, puis il ne s'est pas créé un CMOT, chaque direction en a un, et il travaille conjointement avec les employés puis il cherche à améliorer la productivité puis à réduire les coûts dans chacune de nos directions. Et ça, c'est vrai que c'est peut-être un ministère qui avait la chance de le faire en plus, parce que, avec nos quatre secteurs, je veux dire, Mines, Terres, Forêts et Énergie, même sur le terrain, je vous donne des exemples, sur la même rue, à Val-d'Or, on peut retrouver un bureau des Terres puis un bureau des Forêts. La cohabitation, là, dans un même ministère, ça peut se faire. Puis, sans vouloir lancer de flèches à nos amis d'en face, l'aventure Albert Côté–Lise Bacon, en scindant les Forêts puis les Ressources naturelles, ça a coûté juste 32 000 000 $, cette bebelle-là. Une folie, là, on en fait une fois puis on vit... D'habitude, quand on est brillant, on bâtit mieux que les erreurs. On se sert des erreurs du passé pour les éviter dans l'avenir. Juste en regroupant nos services sur le plan régional, on économise 2 200 000 $ par an. Donc, vous voyez que je suis convaincu que je ne soulèverai pas l'ire de personne, mais le sourire.

M. Jutras: Peut-être que vous pourriez me répondre en me disant: Bien, vous poserez la question au président du Conseil du trésor, mais savez-vous si ça s'est fait dans d'autres ministères aussi? Est-ce que c'était général ou...

M. Chevrette: Bien, chaque ministère a sa façon propre de faire face aux compressions demandées par le Trésor, mais, moi, je pense que ça va devoir se faire de toute façon. Tu sais, ce n'est pas deux professionnels des Terres avec quatre, cinq professionnels de la Forêt... Ils sont très capables de vivre dans une même boîte avec un même équipement, un même «pool» de secrétariat puis une même téléphoniste-réceptionniste, voyons! La Xerox, elle ne demande pas: «Viens-tu des Terres? Viens-tu des Forêts?» quand elle imprime. Ça, là-dessus, l'ensemble du gouvernement, à mon point de vue, devra aller vers ce genre de rationalisation qui va de soi, d'après moi. En tout cas, moi, s'ils ne le font pas, on va se citer en exemple.

La Société immobilière, me dit-on, le demande à tous les ministères. C'est aberrant, par exemple, parce qu'on est pris avec des contrats de longue durée dans certaines locations, et il en coûterait plus cher de fusionner à court terme. On est obligé d'attendre quelques années dans certains cas.

M. Jutras: Ça va.

M. Chevrette: C'est le cas de Rouyn-Noranda, entre autres.

Le Président (M. Beaulne): On pourra revenir.

M. Jutras: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent.

M. Chevrette: Le climat est bon. Ne nous chicanons pas.

M. Cherry: Règle générale, c'est ça, le climat qui...

Le Président (M. Beaulne): À notre commission, c'est ça. Allez-y, M. le député.


Dossier de l'eau

M. Cherry: O.K. Merci, M. le Président. Depuis fort longtemps, on en parle au Québec, mais là ça a fait l'objet de communications et de déclarations publiques, la politique de l'eau. On vient de parler des revenus qui ont augmenté par rapport au bois de coupe, vous avez expliqué ça. Vous êtes où? Vous envisagez ça comment? Comment vous voyez ça? C'est quelque chose qui relèverait de votre ministère? Quelle est l'implication par rapport à une politique de l'eau? Je sais bien qu'on parle de la classification des rivières, qu'on parle, tu sais, des rivières patrimoniales, mais là je pense qu'on va plus haut que ça. Là, on parle même de la commercialisation, de la vente de l'eau, puis j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Chevrette: Bien, écoutez, il y a des comités de travail, effectivement, mais il est beaucoup trop prématuré de parler d'une politique de l'eau au Québec sans qu'il y ait un large débat là-dessus. Ça, c'est clair. Il y a eu des préoccupations. Tout d'abord, la dépollution industrielle ou urbaine, vous savez très bien que le Québec, en l'an 2000, aura 99 % de dépollution urbaine de faite. C'est tout à l'honneur du Québec. Ça a coûté plus de 6 000 000 000 $ pour le faire.

(15 h 40)

Il y a un engagement dans le budget, si ma mémoire est fidèle – je le dis sous réserve – il me semble que c'est 300 000 000 $ et quelques d'annoncés pour la dépollution agricole. Il y a une politique des eaux souterraines, parce que vous savez qu'il y a un problème là-dessus, les nappes phréatiques ou les puits artésiens. Un des dilemmes qu'on connaît – puis je vais vous l'expliquer 30 secondes – c'est que l'eau, en vertu, je pense, de nos lois, qui sont à peu près les plus vieilles au monde, appartient au propriétaire foncier, alors que la nappe phréatique ou un puits artésien peut être une immense nappe qui dessert bien plus que ton terrain. Et, si tu consommais à outrance, tu pourrais contribuer... Moi, je l'ai vu. Par expérience, à Saint-Charles-Borromée, dans ma paroisse, quand la municipalité s'est approvisionnée dans le puits artésien, ceux qui avaient des puits individuels ont tous vu leur puits asséché. Là, il y a une interdépendance là-dessus, mais il faut faire quelque chose quand même, je pense, à ce niveau-là pour voir à clarifier cette situation-là.

Quant à l'embouteillage de l'eau, il y a des débats qui se font, mais il n'y a aucune décision de prise. Est-ce qu'il doit y avoir, parce qu'il y en a un qui s'est permis d'annoncer qu'il y avait une taxe potentielle là-dessus... Ça n'a pas été décidé en nulle part, ça. Le débat n'est pas rendu assez loin, puis je pense qu'on doit attendre de faire un débat beaucoup plus global que ça pour annoncer quoi que ce soit en matière de politique des eaux en général, d'autant plus que, moi, j'ai vu des chiffres. Je vous donne un exemple de chiffres. Je crois qu'il en coûte, si ma mémoire est fidèle – je vais le dire de mémoire, j'espère ne pas me tromper – en tout cas moins cher... Je ne donnerai pas de chiffres, mais je suis sûr que c'est les deux tiers du coût de l'eau qu'on pourrait exporter, par exemple. De l'eau de source ou de l'eau traitée de très haute qualité qu'on enverrait ailleurs nous coûterait, supposons, 3 $ du 100 L. Bien, je peux vous dire que juste désaler l'eau dans ces pays-là, ça coûterait seulement 2 $. Puis il faut regarder la valeur du projet avant de se tirer en l'air, avant de dire qu'on devient les grands exportateurs d'eau. On va au moins regarder les possibilités, on va analyser cela et on va regarder l'impact sur les écosystèmes. On parle toujours de développement durable, donc on va y penser comme il faut avant de faire une politique de l'eau au Québec.

M. Cherry: Toujours sur la politique de l'eau, il y a quelque temps, il y a quelques semaines, le gouvernement du Québec, par la voie du ministre des Affaires municipales, a annoncé qu'il n'était pas question que les villes embarquent dans une aucune forme de privatisation des services de l'eau. Le 24 avril, dans une entrevue à La Presse , M. Robert Tessier, qui est l'homme de la diversification de Gaz Métro, lui – et je cite, là – disait: «On a tout ce qu'il faut en termes d'organisation administrative et financière pour gérer un autre type de compte ou de compteur pour la même clientèle.» Est-ce que je dois comprendre qu'une des choses qui pourraient être envisagées par le gouvernement du Québec, c'est d'étendre un système de compteur d'eau aux gens ou...

M. Chevrette: Bien, écoutez, encore là, avoir su, j'aurais apporté les chiffres qu'on m'avait donnés. Ça aurait été peut-être intéressant pour vous. J'essaierai de les retrouver puis de vous les faire parvenir. Ça fait à peu près 15 jours que j'ai eu la chance d'assister à un briefing là-dessus. D'abord, pour les quantités d'eau utilisées par le secteur domestique, il n'y a aucune crainte en la demeure sur le territoire québécois présentement. Il y a peut-être certains réseaux désuets, il y a peut-être des pertes du réseau, mais, quand on regarde la consommation par 1 000 habitants par rapport à des villes comparables comme Toronto ou ailleurs, on se situe très bien. L'usure de nos infrastructures, en général, c'est bon parce qu'il y a une injection permanente et constante dans le réseau. En tout cas, à ce moment-ci, moi, avec les chiffres qu'on m'a montrés, je ne vois pas d'empressement à se garrocher en peur dans des programmes sous prétexte qu'on a peur. La peur d'avoir peur, c'est dangereux, ça. Moi, je pense que, au contraire, les chiffres nous incitent à la modération et à la réflexion avant de poser des gestes quels qu'ils soient.

Par contre, M. Tessier, qui, véritablement, effectivement, a une expertise bien connue, qui offre ses services en termes de possibilité, ça, je trouve ça correct, moi, il a le droit. Mais je ne pense pas que ça se fasse dans un avenir très, très prévisible. Il va peut-être plutôt y avoir des règlements ou des législations pour raffermir les règles pour la conservation de la qualité. À court terme, c'est plus ça que vous allez voir venir, comme c'est le cas, par exemple, dans la dépollution agricole, les 300 000 000 $ et quelques qui seront injectés sur quelques années, comme ça pourrait être le cas pour le respect des nappes phréatiques, parce qu'on sait très, très bien qu'il y a certains centres d'enfouissement à proximité de nappes phréatiques importantes qui alimentent en eau potable des collectivités.

Mais parler de privatisation de l'eau à ce stade-ci, en arriver à installer des compteurs partout, je pense que c'est vraiment prématuré. En tout cas, moi, les chiffres que j'ai eu l'occasion de vérifier nous indiquent qu'on doit commencer à s'interroger, parce que, sur la planète, effectivement, on a une très grande portion de l'eau potable dont on hérite de par la nature des choses: on a 1 000 000 de lacs et plus, on a des sources souterraines extraordinaires, on a des rivières merveilleuses. D'ailleurs, on va procéder à leur classification. J'espère qu'on aura des rivières de type patrimonial où on arrêtera de penser qu'on veut les harnacher toutes et qu'on prendra les précautions pour conserver ces sources-là le plus correctement possible.

Mais, pour tout de suite, il est dangereux qu'on se crée des illusions puis qu'on ait l'air fou. Si les chiffres que j'ai vus sont vrais, il y a peut-être du monde qui, avant de penser à importer, va penser à traiter ses eaux. Remarquez bien que ce serait extraordinaire si ça devenait un revenu fantastique. Je le souhaite et je suis un de ceux qui y ont cru, mais pas sur une quantité monstre qui fait peur à tout le monde. Je pense que, déjà, nos eaux embouteillées, par exemple, à partir de nos sources naturelles, si ma mémoire est fidèle, c'est à peu près 78 000 000 L que nous exportons. Par rapport à ce que nous embouteillons, ce n'est pas beaucoup, à part de ça. La grande majorité est consommée ici, au Québec, au Canada et aux États-Unis, mais il me semble que, à l'exportation, en Amérique comme tel, c'est 78 000 000 L. Ce n'est pas une source inquiétante pour le moment non plus.

Mais tout ça, ça vient souvent du débat suivant: Chargez donc une taxe à ceux qui embouteillent. Ça, c'est pour partir. Donc, le débat part tout croche parce que c'est contre une taxe. On n'a pas à parler de taxe, on n'a même pas encore de politique de l'eau. On est peut-être mieux de voir ça avec une vision globale plutôt que de partir après l'un puis après l'autre puis d'indisposer tout le monde. On a de beaux exemples qui nous prêchent la prudence. On a des objectifs, puis on fait porter le débat sur la structure, puis on fausse tout le débat sur les objectifs. Moi, je l'ai vécu Montréal, sur les structures, et je ne veux pas en vivre deux. J'espère que la politique de l'eau, on va faire ça à partir d'objectifs concrets, précis et en toute connaissance des effets scientifiques, des effets sur les écosystèmes, sur la capacité: «C'est-u» correct? «C'est-u» un bon marché? «C'est-u» rentable? On «rêve-tu» en couleur? Il faut savoir ça avant de partir.


Efficacité énergétique

M. Cherry: O.K. Sur un autre sujet, M. le ministre. Vous avez mentionné – et ça apparaît dans le rapport – vous parlez d'un suivi sur la création de l'Agence de l'efficacité énergétique. Je voudrais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

(15 h 50)

M. Chevrette: Bien, on a déposé un projet de loi, effectivement. Dans un comité ministériel, vous savez comment ça fonctionne, on est à discuter fermement sur le contenu même du projet de loi. J'espère pouvoir le déposer d'ici quelques semaines. Il y a différentes hypothèses sur la table, des scénarios, et c'est ces scénarios-là qu'on a à étudier, notamment au comité ministériel de l'emploi et du développement de l'emploi et au Trésor, naturellement. Vous savez comment ça marche. Le deuxième gouvernement va s'exprimer certain. C'est une boutade, ça. Mais, dans la politique énergétique, là-dessus, je vous rappellerai qu'on a mis beaucoup d'emphase sur l'Agence de l'efficacité énergétique. Pourquoi? Parce que je suis persuadé que plus on fera de recherche, plus on aura de programmes, plus on aura de gens qui s'occuperont de l'efficacité énergétique, plus on se positionne avantageusement sur l'échiquier énergétique.

Il y a des mandats très précis, vous vous rappellerez: tout d'abord, c'est l'établissement du savoir-faire reconnu et crédible; un appui à la Régie de l'énergie en matière d'efficacité parce que ça va sûrement aider la Régie; la diffusion de l'information; la sensibilisation des différentes clientèles; la coordination de la formation parce qu'on veut former des gens dans chacun des milieux; le soutien à la recherche et au développement dans des technologies d'efficacité énergétique; l'identification de mesures législatives et réglementaires qu'ils vont nous suggérer; la conception de programmes spécifiques. Puis le tout devant faire partie d'un plan d'action qui serait rapidement efficace. Et je vous rappellerai que c'est un des grands consensus de la table de consultation sur l'énergie.

Donc, moi, mon travail au niveau de mon ministère, il est assez avancé. Il y avait trois options. Je peux toujours vous dire les trois options. Je ne peux pas présumer de la décision. On avait une Agence de l'efficacité énergétique qui était constituée en unités autonomes de services du ministère. C'est ce dont on avait parlé un petit peu, vaguement, en commission. La deuxième option, c'est que l'Agence de l'efficacité énergétique prenne la forme d'un organisme mandataire du gouvernement relevant du ministère des Ressources naturelles. Puis la troisième option, c'était que l'Agence d'efficacité ait le statut d'une corporation privée à but non lucratif dont le ministre des Ressources naturelles serait le tuteur. Donc, c'est un peu les trois options qu'on a présentées pour fins de discussion.

Le cadre du projet de loi, il est fait. On attend de voir quelle est l'option qui sera nuancée. Ça peut être une combinaison de deux. J'aimerais beaucoup qu'on introduise du partenariat dans ça. Donc, vous voyez un peu où je me dessine, là, je vais essayer de trouver une formule pour qu'il y ait un partenariat et que ça ne soit pas exclusivement ministériel. Dès que l'option est choisie par le Conseil des ministres, quelques jours après, je le dépose en Chambre, parce que je pense que c'est attendu, effectivement.

M. Cherry: Toujours dans le domaine de l'efficacité énergétique, je reviens à la présence du président d'Hydro-Québec lors de nos travaux récents. Il a reconnu que – toujours en recherche et développement, parce que je reviens à cet aspect-là – c'est un des domaines où ils ont tendance à faire des recherches quand c'est pour Hydro-Québec elle-même – vous avez parlé, là, quand il se perd de l'énergie, puis tout ça – mais il a reconnu lui-même qu'un des points faibles, c'étaient les méthodes pour faciliter la protection de la consommation des clients et il dit que, là-dessus, on reconnaît qu'on n'est pas fort. Je reviens toujours à votre terme parce que...

M. Chevrette: Mais j'aime mieux une réponse de même, M. le député de Saint-Laurent, qu'une réponse... Quand on se fixait des 9 % à 20 h 15, le soir, puis, rendu à 21 heures, c'était rendu à 2 %... Personnellement, j'aime mieux une réponse claire en disant: Écoutez, nous, on a des mégawatts à vendre. Notre rôle, c'est de produire puis de vendre, puis le consommateur, s'il n'en prend pas trop, je suis obligé de me chercher constamment des débouchés pour vendre ce que j'ai. Donc, c'est pour ça que, dans la politique énergétique, on a voulu sortir l'Agence de l'efficacité énergétique d'Hydro-Québec. On leur a dit, d'autre part: Pour fins de commercialisation, on va vous laisser l'opportunité d'avoir des programmes d'efficacité énergétique qui vont vous placer en concurrence avec d'autres sources énergétiques. De sorte qu'Hydro pourrait être appelée à injecter des fonds dans certains programmes qui lui plaisent à cause, je ne sais pas, moi, de ses débouchés ou ses contrats qu'elle pourra obtenir sur le marché externe. Ça ferait son affaire qu'on économise 1 TWh ou 2 TWh, bien, tant mieux! Je pense que c'est plausible de voir Hydro participer avec l'Agence dans plusieurs dossiers.

Mais il y a trois sortes d'économies d'énergie: ce qui est rentable pour le producteur, puis c'est ce que je viens de vous dire; ce qui est rentable pour le consommateur et non pour le producteur, parce que, si on arrive avec des programmes qui sont rentables pour le consommateur, l'Agence va pouvoir y aller à fond de train là-dedans; puis ce qui est rentable également pour l'ensemble de la société québécoise, parce qu'il peut y avoir des programmes qui sont drôlement rentables pour l'économie du Québec. Moi, je ne suis pas certain qu'on n'en arrivera pas à discarter les gadgets floridiens au profit de programmes d'efficacité énergétique typiquement québécois et qui vont créer de l'emploi au Québec. Par exemple, un programme d'isolation dans certaines régions du Québec où le climat est extrêmement sévère, ça peut être excellent pour les consommateurs. Ça peut être une économie de mégawatts qu'on pourra vendre également sur le marché externe. Donc, moi, j'ai hâte. Je pense que l'efficacité énergétique va devenir une petite industrie au Québec. Ça, c'est mon rêve.

M. Cherry: Bien, M. le ministre, vu qu'on rêve dans ce domaine-là, il m'a été fait une présentation récemment, en me disant qu'il y a un projet qui va se faire sur la planète, en quelque part puis qui va permettre, avec des capteurs solaires, que ça soit à partir du toit de la maison, même quasiment l'ensemble de la construction de la maison, avec une batterie... Parce que le problème du capteur solaire, c'est qu'on ne pouvait pas l'emmagasiner. C'était ça qui faisait qu'on n'allait pas aussi rapidement. Mais là on me dit qu'on anticipe des progrès à ce point rapidement là-dedans que les capteurs sur une maison – ça peut aussi bien être les fenêtres, le toit, les murs, et tout ça – pourraient être emmagasinés et qu'une résidence pourrait quasiment devenir autosuffisante avec la création de batteries en conséquence de ça. Alors, plus on va dans ce domaine-là, on pourrait penser que, à court terme, Hydro-Québec aura moins d'électricité à vendre à son consommateur québécois, mais qu'en même temps ça lui en laisse plus pour envahir les marchés nord-américains qu'on se plaît à décrire comme un potentiel incroyable. Alors, dans ce sens-là, il me semble qu'on a intérêt, mais qui va faire les arbitrages? Ça va être où le juste milieu là-dedans? Et comment voyez-vous le rôle de votre ministère puis de cette Agence-là?

M. Chevrette: Bien, nous, on va être les promoteurs de ces nouvelles technologies. Je sais qu'il existe une technologie, par exemple, pour les chauffe-eau grâce au soleil. Ils le captent puis ils réussissent à chauffer leur eau très facilement à part ça. Je l'ai même vue de mes yeux, celle-là. Qu'on ait un souci de l'économie répandu, entre vous et moi, puis qu'on puisse véritablement former du monde puis sensibiliser du monde, développer le réflexe de l'efficacité énergétique, de l'économie de l'énergie. Plus on va réussir dans cela, plus on est cohérent et conséquent avec nos allégations de développement durable, nos discours sur le développement durable. J'espère qu'on va retrouver la notion du gros bon sens, du G.B.S. Moi, je me rappelle nos vieux. Mon père m'a dit ça, moi – il a 83 ans – que, eux autres, ils bâtissaient leur maison en fonction du vent dominant puis du soleil qui pénétrait dans la cuisine le jour. Puis ça, c'était clair, tu n'avais pas gros de fenêtres sur le vent dominant parce que c'étaient des ouvertures au froid l'hiver. Par contre, tu avais les rayons de soleil qui rentraient dans la cuisine, là où tu es la majeure partie de ton temps.

(16 heures)

Aujourd'hui, on fend une terre en deux, puis on se sacre bien des vents dominants, puis on se fout éperdument de l'énergie solaire, c'est clair. Je suis surpris, même, que ça ne revienne pas puis que même nos architectes ne soient pas formés. Ou ils l'ont, la formation, mais qu'on ne l'utilise pas à bon escient en fonction de cela. Je vous le dis, j'ai peut-être rêvé en couleur, ça ne m'arrive pas souvent, je suis plutôt pragmatique, mais il me semble que tôt ou tard, dans la vie, le gros bon sens... Regardez les petits puits qui alimentent les villages en eau potable. Ordinairement, ils vont chercher l'eau en haut et elle descend par gravité. Aujourd'hui, on va chercher l'eau en bas et on la repompe en haut. Ça coûte bien plus cher, une station de pompage. Ça fait un gros projet bien plus intéressant. Les honoraires sont bien plus gros. On repompe l'eau. On refoule également les déchets domestiques. On refoule ça, au lieu d'essayer de trouver des endroits avec une pente naturelle, ce que le gros bon sens nous indiquerait.

Moi, je vous avoue qu'on a beaucoup de millage à faire là-dessus en sensibilisation, en formation, en information. Je crois à ça, moi. Il va y avoir un juste retour des choses, j'en suis convaincu. Parce que les moyens de payer se rétrécissent, diminuent. Il va falloir que quelqu'un dorénavant dise: On va se payer ce qu'on est capable. Et c'est là que notre imagination et notre créativité entrent en jeu. Tant que c'est trop facile, que ça ne coûte pas cher, ce n'est ordinairement pas les gros projets de gros bon sens qui triomphent. C'est ordinairement chromé. J'ai même vu des usines d'épuration avec du marbre à l'entrée. Il y a des maudites limites. Il est temps qu'on réagisse. Je trouve qu'il est temps qu'on réaligne notre tir.

Est-ce qu'on peut suspendre cinq ou 10 minutes? Voulez-vous?

Le Président (M. Beaulne): On va faire une pause de cinq minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 2)

(Reprise à 16 h 12)

Le Président (M. Beaulne): C'est le député de Johnson qui avait demandé la parole, mais, comme il n'est pas là...

M. Jutras: On peut y aller. Il a juste une question, puis je pense que ça va pouvoir se greffer à une question de M. Cherry.

Le Président (M. Beaulne): Alors, continuez, M. le député de Saint-Laurent.


Enfouissement des fils électriques

M. Cherry: Merci, M. le Président. Je pense qu'on va fermer le chapitre de l'efficacité énergétique. Selon les informations que j'aurais eues, c'est qu'il y aurait quelque chose qui serait dans le processus législatif pour des possibilités d'amendements à l'article 30 de la Loi sur Hydro-Québec. Ça concerne l'enfouissement des fils puis certaines demandes de municipalités.

M. Chevrette: Oui, on a eu des demandes, mais ça ne s'est pas encore matérialisé dans un projet de loi. Je vais vérifier auprès de M. Côté; on va le faire entrer. Mais, si ma mémoire est fidèle, ce n'est pas encore déposé. Ça, je suis sûr que je n'ai pas encore signé le mémoire d'amendements.

Mais il y a des pressions pour parachever certains bouts, par exemple, comme à Saint-Jérôme, entre autres. C'est un exemple où le maire disait: Bien, je fais des travaux de telle nature; si ça se faisait en même temps, nous éventrerions nos rues une seule fois. Ce qui n'est pas fou. Ça a été plutôt de la négociation au lieu d'un amendement législatif là-dessus. Ça a été une négociation entre Hydro et Saint-Jérôme. Je ne sais pas comment ça s'est soldé.

(Consultation)

M. Chevrette: Ce n'est pas encore prêt pour la machine législative.

M. Cherry: Parce qu'on m'avait dit que c'était dans le processus.

M. Chevrette: C'est en route, c'est en préparation au niveau du ministère, mais ce n'est pas encore signé. Mon mémoire au Conseil des ministres n'est pas encore signé.

M. Cherry: Est-ce que ça a des impacts pour Hydro?

M. Chevrette: C'est une législation, c'est évident que ça a un impact sur Hydro. Mais Hydro, ordinairement, elle-même a son programme d'enfouissement. Il s'agit d'asseoir ça, là. Il y a certains problèmes juridiques pour le clarifier, en particulier, mais ça ne vient pas bouleverser les investissements d'Hydro. Ça vient donner des assises juridiques plus claires.

M. Cherry: Ça a un impact sur le coût, bien sûr, mais, comme vous dites, il y a des prévisions.

M. Chevrette: Il y a même un programme d'enfouissement dans le milieu urbain qui a été commencé, d'ailleurs... Je ne suis pas sûr si ce n'est pas sous votre règne...

M. Cherry: Donc, ce que vous me dites, c'est que...

M. Chevrette: C'est en particulier dans les milieux fortement urbanisés, à haute densité de population. C'est dans ce temps-là qu'Hydro bâtit un programme et négocie avec les villes, pour les temps, les moments les plus propices. Est-ce qu'ils peuvent agencer ça avec des travaux d'autre nature? C'est dans ce sens-là, mais l'amendement législatif n'est pas déposé.

M. Cherry: Je suis convaincu que le ministre est bien au courant de ses dossiers. Loin de moi l'intention de lui apprendre des choses. Mais, en tout cas, les informations que j'en ai, c'est que ça semble plus avancé que ce que le ministre décrit.

M. Chevrette: C'est avancé au ministère, mais je n'ai pas... Parce que j'ai compris la question: Est-ce que ça va être déposé? Moi, je n'ai pas encore signé le mémoire parce que je n'ai pas reçu le projet de législation. Quand il arrive sur mon bureau, soyez assuré que ce n'est pas long. Je suis au courant que ça se prépare. Je suis au courant. J'ai même eu des villes qui m'ont appelé. Donc, je suis très au courant de ce qui se fait.

Mais les amendements législatifs seront probablement déposés avant juin, mais adoptés, je ne sais pas, vous me le direz. Si vous avez le goût de l'adopter, vous me le direz, on peut faire ça rapidement.

M. Cherry: O.K. Oui, ça va. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Avant de changer à l'autre sujet, le député de Drummond avait demandé la parole. Allez-y, M. le député.

M. Jutras: Bien, ce n'était pas par rapport à ça.

Le Président (M. Beaulne): De toute façon, on change de sujet.


Prix de l'essence

M. Jutras: Oui. O.K. Bien, écoutez, moi, c'est peut-être juste au niveau de la guerre des prix de l'essence. M. le ministre, l'été dernier, on a vécu quelque chose d'assez exceptionnel. Les consommateurs en ont bénéficié dans un sens parce qu'ils n'ont vraiment pas payé cher leur essence. Cependant, on a l'impression que ça recommence. En tout cas, moi, quand j'ai fait le plein en partant de Drummondville ce matin, je n'ai pas payé cher, j'ai payé 0,55 $, je pense...

M. Chevrette: Mais, que vous ayez payé 0,55 $, ça peut respecter en tous points la lettre et l'esprit de la loi, c'est-à-dire le prix au port de New York plus les coûts de transport. Tant et aussi longtemps que les deux critères, pour l'instant, sont observés... Les taxes, le prix de l'essence au port de New York, les taxes fédérales-provinciales plus le transport, ça, c'est en vigueur présentement. Ce qui n'est pas en vigueur, c'est la marge, comment je dirais...

M. Jutras: Des coûts d'exploitation.

M. Chevrette: Les coûts d'exploitation, ça, c'est la Régie qui aura le pouvoir là-dessus. Mais, pour l'instant, s'ils se conforment à ces trois critères-là, ils respectent la loi. On m'informe, moi, qu'il y a quelques baisses ici et là, mais que la loi est respectée.

M. Jutras: Oui. Puis, finalement, les coûts d'exploitation, ça, ça va être déterminé par la Régie?

M. Chevrette: Pardon?

M. Jutras: C'est la Régie qui va déterminer ça, le...

M. Chevrette: La marge des frais d'exploitation, oui.

M. Jutras: C'est ça.

M. Chevrette: Mais, actuellement, je peux vous dire que ce n'est pas si mal. Je comprends que ça peut varier de 0,64 $ à 0,56 $, si j'ai bien compris ce que je regarde. Parce que je regarde ça beaucoup depuis que je suis ministre des Ressources naturelles, devant chaque station... À Joliette, je peux même te dire celles qui varient. Mais, dans l'ensemble, quand tu regardes le prix au port de New York, plus les taxes, plus les coûts de transport par rapport à l'éloignement, tu remarques qu'ils sont véritablement dans les coûts. Je pense que les folies furieuses qu'on voulait voir disparaître, c'est que ce soit inférieur au prix de gros. Ça, je ne pense pas qu'on puisse dire actuellement, malgré une variation de certaines régions à d'autres, qu'ils ne respectent pas la loi. En tout cas, j'ai eu une couple d'appels. J'en ai eu un de La Tuque, à un moment donné, puis je leur ai dit: Écoutez, la loi est là, vous n'avez qu'à vous en prévaloir si vous avez la conviction que ce n'est pas ça. Mais ce n'est pas le ministère qui va aller poser les gestes juridiques. Ça, j'espère qu'on a compris ça. Mais, pour l'instant, ils ont un outil législatif, un outil juridique à leur disposition. Mais je ne crois pas, en tout cas, à part deux cas qui nous ont été soumis depuis décembre, je ne pense pas qu'il y ait de problèmes à ce niveau-là. Je ne le souhaite pas non plus, je «peux-tu» vous le dire?

M. Jutras: O.K. Là, en fait, ce n'est pas tellement que j'étais inquiet, mais je me posais des questions, vu la tendance à la baisse depuis quelques jours. Mais, en autant que les règles soient respectées, je n'ai pas... Parce que, finalement, c'est un règlement qui a fait l'affaire, qui a été bien reçu puis qui a été bien appliqué.

(16 h 20)

M. Chevrette: Oui, parce que, si vous regardez, les deux taxes, c'est à peu près 0,24 $, grosso modo; le prix au port de New York, c'est à peu près 0,23 $, ça varie entre 0,23 $ et 0,25 $. Si vous comptez le tout – puis ça dépend des régions; il y a des régions où ça peut être 0,03 $ ou 0,01 $ le transport – ça n'a pas baissé, à ce que je sache, en bas de 0,56 $. Donc, ça semble être respecté. Puis il y a la taxe spéciale, à Montréal, de 0,01 $ point quelque chose, pour l'Agence métropolitaine de transport. Si vous regardez ça, quand on fait le calcul, à l'oeil, quand on passe devant une station d'essence puis qu'on voit 0,57 $, 0,58 $, tu te mets à calculer vite avec ces points de repère. Mets-les à 0,25 $ plus 0,24 $, ça fait 0,49 $, plus... mets 0,03 $, 0,04 $ pour le transport, au pire, ça rentre dans les prix.

M. Jutras: Alors, c'est ça, en autant que ces prix-là, on puisse parler aux alentours de 0,50 $ du litre, finalement?

M. Chevrette: Avec certaines régions, un peu plus. Parce que certaines régions, pour aller mener le pétrole, ça peut être un peu plus cher que ça du litre. Mais, en règle générale, c'est dans ces chiffres-là.

M. Jutras: Moi, c'étaient les seules questions concernant la guerre de l'essence. Je pense que vous en aviez aussi? Non?

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Le ministre a sûrement reçu, lui aussi... Une des pétrolières qui avaient été presque accusées d'avoir été celles qui avaient déclenché la guerre des prix m'a fait parvenir un rapport qui a été rendu public récemment, qui déclarait que, finalement, il n'y avait personne à blâmer et que c'est quasiment comme si on s'était énervé un peu pour rien, tout le monde, que c'est une guerre, comme vous avez dit tantôt, qui a duré deux mois. Le rapport dit que ça a duré deux ou trois semaines. Comme si on s'était tous excités absolument pour rien, puis, si on avait laissé le marché continuer comme ça allait, tout ça se serait rétabli puis on serait à peu près où on est aujourd'hui.

Fort de l'expérience des mois qui se sont écoulés depuis ce temps-là, vous commentez quoi, là-dessus, dans un premier temps? Puis, après ça, je vais vous demander par rapport à la situation de la Basse-Côte-Nord.

M. Chevrette: Tout d'abord, le rapport, ce n'est pas du tout cet aspect-là qu'il touchait. C'était le Bureau de la politique de concurrence du Canada qui disait qu'il n'y avait pas eu de collusion. On ne les a jamais attaqués. Je n'ai jamais entendu ni un député de l'opposition ni ministériel dire qu'il y avait collusion pour faire disparaître les petits. C'est ça qu'il dit, c'est son rôle, le Bureau de la politique de concurrence du Canada; il n'a pas d'autre chose à dire que ça. On n'a jamais dit, nous autres... Donc, ce rapport-là ne peut pas servir de base pour justifier ce qui s'est fait l'an passé. Quand on s'est excité, ce n'est pas nous autres qui nous sommes excités, c'est les citoyens puis les détaillants indépendants qui sont venus nous voir. Si ça a duré juste trois semaines, bien, on ne vit pas sur la même planète; il y en a qui sont en retard, puis ils ne viennent même pas des Maritimes. Pour dire «deux ou trois semaines»... C'est plutôt deux ou trois mois; on le sait, ça. Donc, là-dessus, je vous dirai que, si le Parlement a légiféré, puis à l'unanimité, c'est parce qu'on avait un problème sous les yeux, c'était clair.

Je vous rappellerai qu'au 23 avril 1996 le prix du gros, au port de New York, était de 0,244 $, les taxes provinciales, de 0,19 $, les taxes fédérales, de 0,14 $, le transport, de 0,004 $, la part du détaillant, on l'évaluait à 0,04 $, la part de la pétrolière, à 0,019 $, pour 0,639 $. C'était l'an passé, au 23 avril. Donc, c'est juste pour vous donner une idée de l'ordre de grandeur.

Moi, je crois qu'à date on respecte passablement le cadre juridique qu'on a fixé et, Dieu merci, si ça peut rester de même, tout le monde y gagne au change. Ce n'est pas le rapport du Bureau de la politique de concurrence qui a à justifier ce qui s'est passé en juin, juillet, août l'an passé. Ce n'est pas vrai, ça. Il n'y a pas eu de collusion, soit. Il y a eu des folies, oui. Qui en a fait? Vous le savez.


Approvisionnement en pétrole de la Basse-Côte-Nord

M. Cherry: O.K. La deuxième partie de ma question – ça apparaît à la page 157 – c'était concernant l'intervention du gouvernement relativement à l'approvisionnement en produits pétroliers pour la Basse-Côte-Nord qui s'articulerait autour de deux axes: d'une part, le ministère assurerait un suivi des derniers travaux de mise aux normes des installations pétrolières et, d'autre part, en collaboration avec SOQUIP et le fiduciaire, identifier une structure de gestion permanente pour cette desserte.

M. Chevrette: Là, vous voulez savoir ma position? Je vais vous lire exactement ce qu'on avait préparé, puisqu'on avait anticipé la question.

Tout d'abord, mon ministère, dans ce dossier, en collaboration avec Hydro-Québec et SOQUIP, via sa filiale SOQUIP Atlantique, a fait en sorte que l'approvisionnement pétrolier de la Moyenne et Basse-Côte-Nord a pu être maintenu depuis qu'Ultramar a décidé d'abandonner cette desserte, en 1994. Par ailleurs, en confiant la gestion des installations à une fiducie, le gouvernement a fait en sorte qu'un programme de réfection des dépôts soit entrepris rapidement et de façon à les rendre conformes à la réglementation et sécuritaires. La réfection des installations pétrolières s'est poursuivie, tel que prévu, au cours de l'été 1996.

Les efforts ont été faits pour maximiser les retombées économiques dans la région concernée. Même si l'approvisionnement en produits pétroliers de cette région est actuellement assuré, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit là d'une solution temporaire. Au cours de la prochaine année et en collaboration avec SOQUIP et le fiduciaire, le MRN devra identifier une structure de gestion permanente pour cette desserte. Tous les dépôts ont été approvisionnés de façon à disposer de produits pétroliers en quantité suffisante pour répondre aux besoins de la population locale jusqu'au mois de juin 1997. Les derniers travaux d'aménagement seront complétés au cours de l'été 1997. Dans quelques jours, je pense, on rencontrera le fiduciaire expressément pour refaire le point.

M. Cherry: O.K.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de La Peltrie.


Projets de cogénération

M. Côté: Merci, M. le Président. M. le ministre, la nouvelle politique énergétique du gouvernement a été rendue publique l'automne dernier, en novembre 1996, où on fait état qu'il y a des nouvelles filières qui devront être exploitées, puis il faudra faire le choix des filières qui pourront être les plus susceptibles d'être développées. Ça disait aussi qu'il est essentiel d'introduire plus de flexibilité dans la mise en oeuvre de différents moyens utilisés pour répondre à la demande électrique.

Alors, depuis le dépôt de cette nouvelle politique, on parle beaucoup d'énergie éolienne, on parle d'énergie solaire aussi. D'ailleurs, on en a parlé durant les séances au niveau de l'étude des crédits. On parle aussi d'énergie qui peut provenir soit de la construction de petites centrales ou encore de la remise en opération des petites centrales existantes.

Mais, en ce qui a trait à la cogénération, on sait que, dans les années 1992, 1993 et 1994, on a parlé beaucoup de l'implantation d'usines de cogénération au Québec. Entre autres, ici, à Québec, il y a un projet qui a reçu le feu vert du BAPE, au niveau des audiences publiques. Alors, qu'est-ce qu'il en est dans le dossier de cogénération? Est-ce que vous pourriez nous en parler un petit peu?

M. Chevrette: Oui. Ce qui est arrivé, c'est que la politique énergétique établit des priorités au niveau de la cogénération. La priorité serait donnée à la biomasse. Tout producteur privé qui voudrait le faire au gaz naturel, par exemple, peut le faire, mais le seul marché qui lui est ouvert, pour l'instant, c'est le marché externe. Donc, il pourrait se servir de nos lignes de transport, payer un tarif de transit et vendre ces kilowattheures qu'il produit à l'extérieur du Québec. Pour l'instant, c'est ça qui a été décidé dans notre loi parce qu'on confiait. La déréglementation éventuelle du marché interne, ce serait confié à la Régie et non pas...

Le seul marché qui a été ouvert, ici, au Québec, c'est le marché du gros. C'est donc 2 %, et ce sont les neufs réseaux indépendants, les villes, plus la coopérative de Saint-Jean-Baptiste-de-Rouville, puis ça suppose à peu près un chiffre d'affaires, à supposer qu'ils achètent tout de l'extérieur, de 155 000 000 $ ou de 2 % du potentiel énergétique québécois. C'est le seul marché qui est ouvert à l'interne, ici, au Québec, de l'externe, puis c'est en gros...

Donc, tous les projets de «cogen» qui peuvent voir le jour, actuellement, s'ils voient le jour, puis s'ils répondent à toutes les études environnementales, puis qu'ils ont le O.K., ils ne s'attendront pas à ce que ce soit Hydro-Québec qui achète les kilowattheures à tant du kilowattheure pendant 20 ans. C'est clair, ça, c'est non. D'ailleurs, ça ne se fait plus, ça.

(16 h 30)

M. Côté: Alors, s'ils arrivaient avec leur projet en disant qu'on a la possibilité d'en vendre tant de kilowatts ou que notre production supplémentaire sera vendue aux États-Unis, ils pourraient aller de l'avant avec un projet de «cogen»?

M. Chevrette: Ils pourront se prévaloir des tarifs de transit, se servir des lignes de transport d'Hydro, d'un certificat d'autorisation préalable d'Environnement. Oui, ça, c'est à la base. Pour partir, ça lui prend ses certificats de l'Environnement. Il pourra avoir le O.K. pour bâtir son projet. Puis c'est lui qui vendra son électricité. Ce n'est pas nous autres qui allons la vendre, c'est lui-même. Nous, on a l'obligation de lui transporter en autant qu'il paie un tarif de transit à l'extérieur du Québec.

M. Côté: Donc, les projets qui avaient été avancés il y a un an...

M. Chevrette: L'appel d'offres d'Hydro-Québec de – il y a je ne sais pas combien de temps – 1991, en ce qui regarde la cogénération, il n'y a pas de suite. Il y a des indemnités, d'ailleurs, qui sont offertes à ces compagnies-là qui, de bonne foi, ont dépensé des sous pour présenter des projets de «cogen». Mais ils sont encore en banque, en plus. Il y en a qui ont préféré demeurer dans la banque plutôt que d'en sortir avec une indemnité.

M. Côté: Est-ce qu'il en reste présentement...

M. Chevrette: Dans la banque, oui.

M. Côté: ...des projets, dans la banque? Est-ce que celui de Québec est dans la banque?

M. Chevrette: Si ma mémoire est fidèle, c'est oui. En tout cas, il n'y a pas de règlement dessus. Ça, je suis sûr.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Beaulne): M. le député de Saint-Laurent.


Commission d'enquête sur la politique d'achat par Hydro-Québec d'électricité auprès de producteurs privés

M. Cherry: Oui, M. le Président. Je suis convaincu que le ministre a pris connaissance, comme nous tous, de la lettre qui a été publiée par une de ses prédécesseurs au dossier de responsable de l'Énergie et d'un article, sous la plume de Michel David, concernant la commission Doyon. Je suis convaincu que le ministre s'attendait à ce qu'on échange là-dessus.

Dans un premier temps, ma référence sera l'article du journaliste qui faisait état de... Le texte qui a été publié disait que Mme Lise Bacon exigeait des excuses pour avoir provoqué sans raison valable la tenue d'une enquête publique qui a laissé planer des doutes sur son intégrité pendant un an et demi. Et il commente en disant: «Elle a parfaitement raison. M. Chevrette ne devrait pas être fier non plus des allégations totalement dépourvues de fondement à l'effet que l'ancien chef de cabinet de Robert Bourassa, John Parisella, aurait touché un pot-de-vin de 10 000 $.»

Et je continue l'article: «La semaine dernière, à l'Assemblée nationale, le premier ministre Bouchard était visiblement mal à l'aise. Je ne veux pas revenir sur les origines de la commission, je ne suis pas au courant des délais.» Et là il fait une référence au rapport, il dit: «Dans le rapport, c'est tout juste si les commissaires eux-mêmes n'accusent pas le gouvernement péquiste d'avoir monté une opération purement partisane.» Et là il cite un passage de la note au sujet d'Hydro-Québec, préparée par un adjoint de M. Chevrette et transmise ensuite au premier ministre Parizeau, qui faisait état des contributions aux caisses électorales.

Et je continue l'article: «Le gouvernement Parizeau s'était livré à un véritable "build-up". Le 27 mai, l'actuel président de l'Assemblée nationale, Jean-Pierre Charbonneau, parlait d'une affaire aussi grave que le scandale du gaz naturel. Et cette citation avait été reprise en manchette, on s'en souviendra, à l'époque. Trois jours plus tard, M. Parizeau évoquait lui-même la commission Cliche sur l'industrie de la construction et la Commission d'enquête sur le crime organisé qui avaient fait tout un boucan, au milieu des années soixante-dix.»

J'aimerais entendre le ministre sur cette publication-là. Je ne l'ai pas questionné en Chambre, je savais qu'on se verrait ici. J'aimerais ça l'entendre et qu'il profite de l'occasion pour commenter.

M. Chevrette: Je voudrais vous remercier, ça va me permettre de vous lire ma réponse que j'ai faite à Mme Bacon. J'espère que La Presse aura la même condescendance, et Le Devoir également, qu'ils ont eue envers Mme la sénatrice.

Je commence ma lettre comme suit: «Certains d'entre vous pourraient croire, après voir lu les commentaires de l'ex-ministre des Ressources naturelles du Québec, Mme Lise Bacon, publiés ces derniers jours dans les principaux quotidiens du Québec, que j'ai eu la conscience fragile en tentant d'éclaircir les faits qui m'avaient été rapportés et qui ont donné lieu à la commission Doyon.

«La conscience fragile? Eh bien, soit! Je préfère qu'il en soit ainsi, quitte à heurter quelques sensibilités. La crédibilité des hommes et des femmes publics, dont Mme la sénatrice semble se soucier au plus haut point, ne peut qu'en sortir grandie.

«Si Mme Bacon avait entendu certaines allégations ou lu certaines affirmations sur des coûts prohibitifs ou des façons de faire nuisibles à l'intérêt des citoyens et des citoyennes du Québec, aurait-elle hésité un seul instant avant d'en faire part au premier ministre? Et, si oui, au nom de quoi? Ne pas nuire à un adversaire politique, comme elle semble m'en attribuer le motif? Je préfère croire que non.

«Les informations dont on me faisait part m'apparaissaient trop lourdes de conséquences pour que je n'agisse pas. D'ailleurs, si je ne l'avais pas fait, sans doute me l'aurait-on reproché. À titre d'exemple, certains dirigeants d'Hydro-Québec m'avaient indiqué qu'ils avaient été forcés d'appliquer le programme des petits barrages. Qui aurait pu garder cette information pour lui?

«Par ailleurs, ces programmes ne généraient pas de retombées économiques pour les populations régionales ou locales et n'avaient pas été négociés avec les autorités d'Hydro-Québec pour tenir compte des besoins de l'offre et de la demande. Mme Bacon prétend qu'il s'agissait pour moi de nuire à des adversaires politiques en période préréférendaire. C'est une présomption qui ne correspond en rien aux faits.

«La différence entre la légalité et la moralité. J'accepte les conclusions du rapport de la commission Doyon. Cela ne m'empêche pas de m'interroger sur les rapports entre la légalité et la moralité. À l'époque, il m'apparaissait anormal que la société d'État répare un barrage au coût de plus de 3 000 000 $ et s'en départisse à moins de 400 000 $. Encore aujourd'hui, je me pose la question: Est-ce moral parce que c'est légal?

«Est-ce normal qu'un promoteur puisse posséder cinq, six, sept ou huit minibarrages avec une garantie d'achat pour 20 ans à un prix dépassant tous les coûts de production normaux de la société d'État? C'est peut-être légal, mais est-ce moral?

«Est-ce normal que l'exploitation d'une richesse naturelle ne génère aucune retombée pour les populations locales et régionales?

«Est-ce moral que l'on n'ait pas négocié avec la société d'État, qu'on lui ait imposé l'achat de kilowattheures dont elle n'avait pas besoin pour répondre à la demande? C'est peut-être légal, mais est-ce moral?

«Et faut-il se surprendre, dans un tel contexte, que les bénéfices nets aient constamment chuté, alors que le gouvernement du Parti libéral était au pouvoir, pour passer de 7,2 %, au 31 décembre 1993, à 3,3 %, au 31 décembre 1995?

«Le coût de la tenue d'une commission d'enquête. Il est vrai que 4 000 000 $ pour tenir une commission d'enquête, c'est une grosse somme. Mais 4 000 000 $ pour mettre fin à des aberrations qui en ont coûté 75 000 000 $, je pense que c'est de l'argent bien placé. Investir dans une commission d'enquête a souvent l'avantage d'éviter des pertes monétaires beaucoup plus importantes. Mme la sénatrice Bacon est bien placée pour savoir qu'il est du devoir de l'État de faire la lumière sur les questions qui ont un impact sur la saine gestion des finances publiques.

«À titre d'exemple, la commission Cliche, qui a siégé en 1974 et 1975, a coûté 1 000 000 $, ce qui était une grosse, grosse somme pour l'époque... Mais elle a conduit à 20 ans de paix dans l'industrie de la construction et fait épargner des centaines de millions de dollars à la société québécoise.

«Les recommandations de la commission Doyon entraîneront une plus grande rigueur et une meilleure cohérence dans la gestion des programmes gouvernementaux touchant l'énergie. Cela est difficile à comptabiliser, mais ce n'est pas rien.

«Je tiens aussi à souligner que certaines recommandations du rapport de la commission Doyon sont conformes à certains éléments contenus dans la politique énergétique adoptée par le gouvernement, en novembre 1996. Le programme des minicentrales sera donc appliqué de façon cohérente de manière à ce que l'ensemble des régions du Québec puissent en bénéficier et non pas seulement certains promoteurs. En outre, c'est par voie de négociations avec Hydro-Québec que nous allons bâtir le programme, comme nous l'avons fait dans le secteur de l'éolien. Aucun promoteur ne pourra parler d'un système qui constitue une mine d'or...

«J'aurais pensé que Mme la sénatrice aurait profité de l'occasion pour répondre aux passages du rapport de la commission qui la mettaient en cause, notamment concernant le projet de la firme Janin inc. – et on peut lire, dans le rapport, ceci: "C'est plutôt la décision des fonctionnaires et de la ministre de soutenir un projet manifestement mort-né qui s'avère problématique."

(16 h 40)

«Ou alors, à la suite de la lettre au ton acerbe qu'elle écrivait à M. Richard Drouin, le 13 décembre 1993, ces commentaires des commissaires: "Il est vrai qu'il peut être opportun d'assurer des investissements et de favoriser le développement économique régional au moyen du programme de construction et d'exploitation de petites centrales, mais pas à n'importe quel prix."

«Ou encore cette autre remarque des commissaires: "Il est [...] un domaine où l'empressement et l'insistance de Mme Bacon ont pu avoir des impacts particulièrement négatifs: la coordination des divers ministères impliqués dans la politique d'octroi, tel que cela a été démontré précédemment."» Vous retrouverez ces commentaires aux pages 347, 453 et 550 du rapport de la commission Doyon.

«Mais Mme la sénatrice a préféré attaquer mon honnêteté et ma probité intellectuelle. C'est son choix. Je préfère vivre avec la conscience fragile qu'elle m'attribue et continuer à travailler avec le plus de rigueur possible à la gestion des deniers publics et de l'intérêt collectif. Les actionnaires d'Hydro-Québec que sont les Québécois et les Québécoises nous demandent de le faire non seulement dans la légalité, mais aussi dans le respect de la moralité publique.

«Malgré les embûches et le contexte économique difficile, après seulement 14 mois, Hydro-Québec a retrouvé la voie de la rentabilité. Faudrait-il s'en excuser?»

Ceci est ma réponse à Mme la sénatrice.


Document déposé

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, il s'agit là, bien sûr, d'un document d'intérêt public. Auriez-vous objection à le déposer à la commission?

M. Chevrette: Je l'ai envoyé à La Presse et au Devoir . Je ne vois pas pourquoi je ne vous le donnerais pas.

Le Président (M. Beaulne): D'accord. Alors, on va le distribuer aux collègues. Allez-y, M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: M. le Président, vous comprendrez que, suite à la réponse que vient de nous donner le ministre, il serait important d'en prendre connaissance, bien sûr, et à partir de laquelle il y aura d'autres occasions où on pourra échanger. Personnellement, je pense bien qu'il n'y a personne qui peut reprocher au ministre d'avoir posé des gestes. Peut-être que des gens soulèveront: Est-ce que les gestes qui ont été posés étaient ceux qui auraient dû l'être? Est-ce qu'on n'aurait pas pu prendre d'autres précautions?

M. Chevrette: Oui, mais je voudrais vous prendre à témoin, M. le député de Saint-Laurent. Vous connaissant depuis 25 ans, si vous aviez lu de vos yeux des textes vous indiquant qu'il pouvait y avoir quelque chose de louche et si ça vous était soumis par quelqu'un en autorité, votre premier devoir, c'est au moins d'en informer votre chef. D'autant plus que la presse écrite et parlée savait que j'avais eu accès à des lectures. Et en ne faisant même pas rapport à M. Parizeau, à l'époque, j'aurais passé pour un gars qui voulait camoufler des choses. J'ai trouvé ça suffisamment grave. C'est vrai que j'ai peut-être la conscience fragile, mais j'ai beaucoup moins de gêne – je n'en ai pas du tout – d'avoir fait rapport, puis j'aurais eu honte à mort s'il avait fallu que ce soit vrai et que je ne l'aie pas dit. Ça, c'est la première des choses.

La deuxième des choses, je continuerai à trouver immoral en tout temps et en toute saison, comme dit la chanson, qu'une société d'État, quelle qu'elle soit, dépense des millions de dollars et, à peine quelques mois après, se départisse de cet ouvrage pour des pinottes. Qui a payé ça? C'est mon père. C'est ton père. C'est tes frères. C'est tes soeurs. C'est tout le monde. C'est les actionnaires que sont les Québécois et les Québécoises. Et je continue à trouver ça immoral et, personnellement, je vous dis que j'aurais aimé ça trouver ce jugement de valeur dans le rapport de la commission, personnellement. J'en ai fait une commission d'enquête, moi. On n'a pas parlé exclusivement de légalité, vous le savez très bien, dans le rapport Cliche. On a parlé de gestes indécents, inconcevables, immoraux. Et, pour moi, quelqu'un qui se retranche exclusivement derrière la légalité pour juger des gestes ou des actes de quelqu'un, ça ne fait pas des consciences très, très à l'écoute des citoyens. Parce que c'est légal, tu dilapiderais des biens publics? Parce ce que c'est légal, tu permettrais n'importe quelle maudite folie? Moi, je m'excuse, je ne suis pas fait de même. J'espère ne jamais devenir sénateur.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. M. le député, voulez-vous enchaîner?

M. Cherry: J'ai déjà indiqué au ministre, M. le Président, qu'à partir de la lecture du document qu'il a rendu public, à partir de la réponse qu'il vient de donner, il aura d'autres occasions de le soulever.

Personnellement, je demeure convaincu qu'on aurait pu atteindre les objectifs qui étaient visés sans peut-être nécessairement.... Mais, là, c'est au niveau des moyens, puis après, des fois, c'est peut-être plus facile à passer, ces commentaires-là. Mais c'est sûrement quelque chose qui... Après la réplique d'aujourd'hui, dans un premier temps, et celle qui sera publiée dans les journaux, comme le souhaite le ministre, il y aura sûrement un suivi qui sera donné à ce texte-là et à ces propos-là, M. le Président.

Alors, le ministre, à moins qu'il ne souhaite revenir...

Le Président (M. Beaulne): Voulez-vous revenir là-dessus, M. le ministre, sur l'échange que vous avez eu?

M. Chevrette: Bien, tout ce que je peux dire, c'est: Écoutez, chacun a sa conscience. Mais, pour moi, les élus, ici, autour de cette table, on n'est pas des enquêteurs, nous autres. Ce n'est pas à nous de faire des enquêtes publiques. Quand on s'improvise enquêteur puis qu'on joue au Don Quichotte, c'est grave. Il y a des mécanismes de prévus, dans nos législations, précisément quand il y a des allégations.

Je pourrais vous distribuer, ici, tout ce qui sortait dans les journaux, à l'époque, une après l'autre: Petite centrale, grosse faillite , La ruée vers l'eau a de quoi inquiéter , Les eaux troubles d'Hydro-Québec, une affaire troublante , Le pouvoir politique est en cause . Ce n'est pas moi qui ai dit ça, là. C'était tout écrit dans les journaux, à l'époque. Ça sortait à tour de bras, là. Les «clippings» de presse en est pleines.

Il aurait fallu qu'on s'ingère, qu'on dise: Non, non, on ne fait rien. Non, non, ce n'est pas grave qu'il y ait une faillite. Non, non, ce n'est pas tellement grave qu'il ait circulé 30 000 000 $ dans une petite centrale de 300 000 $. Non, ce n'est pas grave.

Je ne suis pas en mesure d'enquêter, moi. Je ne suis pas en mesure de juger de la véracité des enquêtes. Il y a un mécanisme dans nos lois qui est d'instituer des enquêtes publiques, précisément parce que ce n'est pas nécessairement axé exclusivement sur le criminel. C'est des pratiques. C'est des façons de faire, des façons d'agir. C'est du laxisme dans la gestion, mais c'est un mécanisme qui est admis dans nos lois. C'est ce qu'on a fait. Puis tant mieux s'ils ne les ont pas pris maintenant. Tant mieux pour eux autres. C'est clair.

Je ne suis pas là pour condamner quelqu'un, mais 75 000 000 $ de pertes, ça fait assez sérieux, ça, quand on voit péricliter, depuis 1993, les bénéfices nets d'Hydro-Québec à 3,3 %, alors que des sociétés comparables ont du 9 %, du 10 % puis du 11 % de rentabilité sur leur avoir propre. Il était temps qu'il se fasse quelque chose.

Moi, je ne regrette rien. Puis mes excuses... s'il vous plaît. Je n'ai pas à m'excuser d'avoir été logique avec moi-même, cohérent avec moi-même puis fidèle à mes principes de rigueur dans la gestion publique. Au contraire, ils me donnent l'occasion de me glorifier.

Le Président (M. Beaulne): Ça va, M. le député? Je pense que le député de Johnson avait une question, lorsqu'il nous a quittés, qui se greffait un peu à ce qu'on disait avant. Mais allez-y avant qu'on avance trop dans nos échanges.


Mesures pour contrer l'utilisation frauduleuse d'électricité

M. Boucher: Bien, ça concernait la question des fraudeurs. Je rencontrais récemment quelqu'un, dans mon milieu, qui me disait comment il réussissait à diminuer de moitié et des trois quarts son compte d'électricité. Ça m'a rappelé que ce phénomène-là existait. Ça m'a rappelé qu'il a déjà été évoqué comme problème, ici, en commission parlementaire, et lorsque vous avez pris, d'ailleurs, le ministère, M. le ministre.

Je voudrais savoir s'il y a des mesures concrètes qui ont été prises, suite aux intentions du gouvernement, et si ces mesures-là s'avèrent efficaces, de sorte que des gens branchés illégalement commencent à être débranchés et que des gens qui sautent les compteurs, comme on dit dans le jargon québécois... D'ailleurs, on m'a offert de le faire pour le mien, mais, comme je suis député, je ne peux pas; ça ne se fait pas. Mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boucher: ...je me suis dit que d'autres l'auraient accepté, sans doute.

Alors, M. le ministre, est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont les mesures concrètes et les effets de ces mesures-là sur la question des fraudeurs, s'il vous plaît?

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est une bonne question, ça.

(16 h 50)

M. Chevrette: Et, si ma mémoire est fidèle, l'an dernier, quand Hydro-Québec s'est présentée devant la commission, c'était 56 000 000 $. Je le dis de mémoire. C'est un estimé, parce que Hydro évalue à 0,7 %, 0,8 % ou 0,9 % ou 1 % les pertes à cause de gens qui se branchent illégalement. Il y en a qui se branchent directement sur les poteaux, effectivement. Il y en a d'autres qui, par toutes sortes de moyens détournés, s'alimentent clandestinement. C'est une somme assez prohibitive. Il y a des moyens de pris, cependant, énormes. Il y a même une sécurité, à Hydro, une police d'Hydro, si vous me permettez l'expression, qui, sur une base régulière, surtout par délation ou bien par d'autres moyens de détection, réussit à en pincer un bon nombre. Ça se répète... C'est assez énorme, 56 000 000 $, en une année. Ça, je me souviens, parce qu'ils l'ont évalué à 56 000 000 $ il y a deux ans, je crois. C'est assez gros, merci.

M. Boucher: Il n'y avait pas une forme de compteur, de débrancheur, de mesure que...

M. Chevrette: Ah! ils avaient découvert toutes sortes de technologies. Il y en a qui se branchent directement; donc, il n'y a pas de compteurs pantoute...

M. Boucher: Non, non.

M. Chevrette: ...ce n'est pas les compteurs. Il y en a qui dérèglent les compteurs à l'aide, je dirais, de... Ils font sauter le petit cadenas et il y en a qui jouent dans le compteur. Il y en a d'autres qui dérèglent le compteur, ils le referment. il y en a d'autres qui se branchent chez le voisin et le voisin ne le sait pas. Il y en a d'autres qui se branchent après les poteaux et Hydro ne le sait pas. Il y a toutes sortes d'aberrations, dans ça.

Je dois vous dire qu'on prend des mesures annuellement parce qu'on sait que c'est assez gros. On prend des mesures. Ils en ont découvert beaucoup. Je peux vous dire que, dans certaines fermes de cultivateurs, par exemple, il y en a aussi qui s'étaient branchés illégalement. Il y a certaines situations cocasses, d'ailleurs. Hydro a même perdu un procès dernièrement, me dit-on, parce que ça a été prouvé que c'est le boeuf qui avait encorné le compteur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Mais, ceci dit, c'est sérieux comme pertes.

M. Boucher: Mais on ne peut pas mesurer l'impact des mesures qu'on a prises concrètement, actuellement?

M. Chevrette: Non. C'est toutes les utilités, ça. On retrouve des fraudeurs dans toutes les catégories. Par exemple, on sait qu'une ferme, maintenant, ne peut pas... Il y a deux ou trois catégories. Ta maison peut être sur un type de tarif et ton entreprise agricole...

M. Boucher: Oui.

M. Chevrette: ...peut être sur un autre type. Il y en a qui se sont branchés illégalement sur la partie domestique, qui était moins chère. Il y a eu toutes sortes de problèmes. Mais Hydro en découvre sur une base régulière. Parce que, moi, j'en reçois. Le gars qui m'arrive à mon bureau et qui dit: Écoute, j'ai fauté, mais peux-tu effacer le compte?

M. Boucher: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Bien, tu as fauté? Trop tard. Quand tu as posé ton geste, il est trop tard pour te retenir, c'est fait.

Le Président (M. Beaulne): Là-dessus?

M. Côté: C'est dans le même ordre. Oui, là-dessus, si vous voulez.

Le Président (M. Beaulne): O.K.

M. Côté: En supplémentaire, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Oui, allez-y.

M. Côté: Est-ce que vous avez des données concernant le résidentiel par rapport à l'industriel, en termes de fraudes?

M. Chevrette: Bien, ça, les...

M. Côté: Est-ce que...

M. Chevrette: C'est tout l'interfinancement. Je n'aborderai pas ça aujourd'hui, parce qu'on n'est pas sortis du bois. Je dois vous dire qu'il y a toutes sortes de thèses là-dessus. Moi, je me souviens qu'on a eu en commission parlementaire... ceux qui s'en rappellent, les plus âgés, on avait discuté longuement là-dessus: Qui est-ce qui rapporte et qui est-ce qui ne fait pas ses frais ou qui fait moins ses frais? Dans l'ensemble, toutes les clientèles sont positives, c'est évident, mais il y a des clientèles qui rapportent moins, par rapport au taux de consommation, par rapport à d'autres. Ça, c'est évident.

Par contre, quand on regarde la tarification depuis 1982, on se rend compte que les tarifs ont augmenté de... Je vais vous donner, par exemple, les parts des ventes. Dans le domestique, c'est 41 % des parts de ventes et la marge bénéficiaire est très faible. Dans les petites puissances, c'est 10 % de la part de ventes et ça rapporte beaucoup; dans les moyennes puissances, c'est 17 %, ça rapporte beaucoup; dans les grandes puissances, c'est 32 % de la part de ventes et ça fait à peu près son rendement normal.

M. Côté: Et, au niveau des cas de fraude, est-ce que c'est à peu près proportionnel?

M. Chevrette: Ah! ça, ça doit être partout.

M. Côté: Il y en a de partout.

M. Chevrette: Tu n'as pas le droit de voler, mais il y a des voleurs.

M. Côté: Au fond, ce n'est pas plus dans le résidentiel que dans le...

M. Chevrette: Il y en a qui découvrent des trucs dans tous les... D'ailleurs, si...

M. Côté: Parce qu'on entend parler plus souvent...

M. Chevrette: ...on pouvait les décompter, on vous ferait une statistique juste.

M. Côté: On en entend parler plus souvent au niveau résidentiel.

M. Chevrette: Mais ça a l'air d'être un marché au noir.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, M. le député de Saint-Laurent, vous avez à nouveau la parole.


Remplacement de réservoirs souterrains de produits pétroliers

M. Cherry: Merci, M. le Président. M. le ministre, je vous ramènerais à la page 158 du cahier explicatif. L'avant-dernier paragraphe dit: «Le ministère a poursuivi ses activités relatives au programme de remplacement des réservoirs souterrains non protégés contre la corrosion visant les commerçants et les utilisateurs de produits pétroliers. Il a amorcé la phase visant les réservoirs ayant moins de 15 ans, chez les commerçants. Cette phase représente plus de 50 % de la clientèle visée par le programme [...]. Quant aux utilisateurs, 600 sites sont visés par le programme.»

C'est quoi, l'état de la situation au moment où on se parle aujourd'hui? Il en reste encore combien? Et je vais vous indiquer immédiatement le suivi de ma préoccupation. Comme il est question de transférer des responsabilités aux MRC, il va y avoir des compagnies de transport scolaire là-dedans qui ont, elles, leurs réservoirs. C'est quoi, l'état? Est-ce qu'on a une ventilation de ça? Si on transférait ça, c'est quoi, l'état des précautions qu'on a prises? Est-ce que ça pourrait représenter des charges additionnelles aux municipalités? C'est ça, le but de l'exercice. C'est pour ça que je vous soulève ça, M. le ministre.

M. Chevrette: Voici, je vais demander à M. Lebuis de vous répondre, mais je vous dirai que le programme est en vigueur jusqu'en 2002 et qu'il y aura une loi – je l'ai annoncé dans mon exposé de départ – qui vous sera déposée, je crois bien, au début de la semaine prochaine parce que tout est adopté.

Le Président (M. Beaulne): M. Lebuis, pourriez-vous vous identifier, pour les fins de la transcription?

M. Lebuis (Jacques): Jacques Lebuis, sous-ministre associé à l'Énergie. En fait, le programme de remplacement des réservoirs devrait se poursuivre jusqu'en l'an 2001 à peu près. Les réservoirs qui sont remplacés le sont par des réservoirs de nouvelle fabrication avec des normes de fabrication qui les rendent plus étanches.

Maintenant, en ce qui concerne un transfert de responsabilités aux MRC, comme vous avez dit, dans le projet de loi qu'on va présenter bientôt, il n'est pas question d'un transfert de responsabilités comme tel, c'est plutôt de reconnaître des inspecteurs agréés par le ministre qui vont faire l'inspection plutôt que d'avoir des inspecteurs gouvernementaux qui vont faire toutes les inspections. Alors, c'est ça, le transfert de responsabilités qui est en train de...

M. Chevrette: Il n'est même pas nécessairement dans les MRC.

M. Cherry: Je m'excuse, M. le Président, c'est peut-être moi qui ai mal communiqué ma question à ce moment-là. Merci de me permettre de la reprendre: Comme, parmi les transferts de responsabilités qui font maintenant l'objet de discussions avec les municipalités, il est question du transport scolaire et il y a de ces compagnies-là qui font du transport scolaire qui ont leurs propres réservoirs, est-ce que, au ministère, vous savez dans quel état se situent leurs réservoirs à eux? Et est-ce que, en les transférant, il pourrait y avoir des coûts additionnels prévus ou non prévus?

M. Lebuis (Jacques): C'est-à-dire qu'on a des statistiques. On sait qu'il y a à peu près le quart des réservoirs installés qui ont des malfaçons ou ils sont mal montés, donc ils sont susceptibles d'avoir des fuites. Maintenant, la nouvelle loi, elle va responsabiliser les propriétaires des équipements.

En termes de coûts additionnels pour les flottes d'autobus, on a peut-être des données là-dessus, mais je ne les ai pas avec moi aujourd'hui. C'est certain qu'en transférant les responsabilités, en voulant responsabiliser davantage les propriétaires des équipements ou les propriétaires des réservoirs, bien, s'il y a des problèmes de fuites, c'est eux qui vont être responsables.

Je ne sais pas, il n'y a pas de lien avec les changements de responsabilités en transport scolaire. C'est-à-dire que les réservoirs qui appartiennent aux propriétaires de flottes d'autobus sont là de toute façon et c'est ça qui est visé par le changement de la loi, strictement. Ça n'a rien à voir avec le transfert de responsabilités en matière de transport scolaire comme tel.

(17 heures)

M. Cherry: De la même façon, on a parlé de possibilité de transfert d'équipements scolaires. Il y a là aussi des réservoirs. Avez-vous des informations qui pourraient nous être utiles? Jusqu'à quel degré les installations scolaires qui pourront faire l'objet de transferts ont subi les transformations pour rendre les normes plus étanches?

M. Chevrette: Parlez-vous des propriétés des commissions scolaires antérieurement? C'est plus récent, ça.

M. Clair (Michel): Si vous permettez, Michel Clair, sous-ministre aux Ressources naturelles. L'inventaire qui a été fait des réservoirs, que ce soit le réservoir souterrain de tout propriétaire ou encore les réservoirs qui sont des réservoirs hors terre, cet inventaire-là, il a été fait en fonction du programme. Maintenant, qu'il y ait un changement de responsabilité à l'égard du transport scolaire ou dans la réorganisation des commissions scolaires ou autres, ça ne change rien aux obligations. Les données sont celles qui existent présentement, puis, normalement, les propriétaires connaissent tous le programme. On a des données là-dessus, tant pour les réservoirs souterrains des stations d'essence, des stations-service. On a également des chiffres dans les grandes institutions, dans les grands réseaux, que ce soit le réseau hospitalier, scolaire ou autre. Maintenant, ça ne change pas par rapport à la loi sur les produits pétroliers.

M. Cherry: Donc, ces chiffres-là, vous les avez au ministère? Ils sont disponibles et pourraient nous êtres communiqués?

M. Lebuis (Jacques): Oui. Sans doute que, lors de l'étude du projet de loi, ça serait une information à communiquer, oui.

M. Cherry: C'est quelque chose qui pourrait nous être déposé? L'exercice qu'on fait là, suite à ça, c'est quelque chose que vous pourriez nous faire parvenir? Oui?

M. Chevrette: On vous donnera les inventaires. On va les faire parvenir à la commission.

(Consultation)


Élaboration d'un scénario de prévision de la demande d'énergie

M. Cherry: Je vous ramène à la page 148, toujours du même document, à Études et statistiques. Le ministère disait que les éléments détaillés de ce scénario devaient être rendus publics en avril 1997. On est rendu le 28 aujourd'hui, ça «va-tu» être retardé un tout petit peu?

M. Clair (Michel): Vous êtes à quel paragraphe?

M. Cherry: Page 148.

M. Clair (Michel): Oui, mais à quel paragraphe?

M. Cherry: Cahier explicatif, Études et statistiques, le tout premier paragraphe de...

(Consultation)

M. Chevrette: M. Lebuis va vous répondre.

M. Lebuis (Jacques): Effectivement, on avait fait des études prévisionnelles pour la préparation de la politique énergétique. Les principaux chiffres ont déjà été mentionnés dans la politique énergétique, mais, d'ici quelques jours, on va sortir un rapport qui fait état de l'ensemble des prévisions et des méthodes qui ont été utilisées pour établir les prévisions. Ce document-là devrait être disponible d'ici quelques semaines au plus tard. Moi, j'ai déjà vu le premier jet. Actuellement, il est à la révision de textes et ensuite à l'impression.

M. Chevrette: Et vous l'aurez.

Le Président (M. Beaulne): La commission en prend bonne note. Alors, continuez.


Vente d'électricité aux États-Unis

M. Cherry: Merci, M. le Président. Le ministre l'a invoqué dans une réponse au tout début – et je l'avais dans mes notes, je devais y revenir – on sait qu'on attend la décision de la FERC concernant Hydro-Québec au mois de mai. On attend ça incessamment. En commission parlementaire, le président d'Hydro-Québec a été bien clair, il a dit: Oui, on fait application. Notre objectif, c'est d'être reconnu comme grossiste. Mais, à partir de ça, il a dit: Il y a des gens qui ont peur. Alors, il ne s'agit pas d'avoir peur, il s'agit d'informer les gens que notre volonté, c'est d'être reconnu comme grossiste, mais que, s'il n'y a pas de bonnes affaires à faire aux États-Unis, on ne fera pas d'affaires. Ce n'est pas parce qu'on sera reconnu comme grossiste qu'on vendra. Mais je suis convaincu que M. Caillé – et le ministre qui nous écoute – est conscient que, une fois qu'on est reconnu comme grossiste, si après on découvre qu'il n'y a pas de bonnes affaires à faire, on ne fera pas d'affaires. Mais, du fait qu'on est reconnu comme grossiste, ça veut dire que notre frontière est ouverte. Est-ce que c'est possible, dans les visées du ministre, qu'il n'y ait pas de bonnes affaires à faire sur le marché américain, mais que des Américains puissent voir des possibilités de marché en sol québécois?

M. Chevrette: Ce qui est ouvert présentement, je vais le répéter, c'est que, en échange d'un marché de gros québécois, le marché de gros américain nous sera ouvert. C'est 24 000 000 000 $ de potentiel de marché américain – je ne dis pas qu'on va aller chercher 24 000 000 000 $ – contre 155 000 000 $ ou 2 %, le marché québécois. C'est ça qui est ouvert pour l'instant. La Régie obtient un mandat de nous fixer des balises. Elle a six mois à l'intérieur de la loi qu'on va voter au mois de décembre prochain pour nous conseiller et fixer les règles du jeu et nous les soumettre. C'est ça, puis il y aura un large débat public. Je le dis dans mon texte, il y aura un large débat public avant que ça s'officialise. Mais, pour l'instant, c'est ça. Ce n'est pas autre chose.

M. Cherry: O.K. Bien, je suis convaincu que, quand le ministre aura l'occasion de faire la lecture du témoignage du président d'Hydro-Québec, les chiffres de 24 000 000 000 $ que vous venez d'utiliser ont été ramenés à une expression... Puis je ne veux pas dire que ce n'est rien, là, il a dit que le potentiel maximum, tu sais, c'était 20 % par région. Il n'y a pas un des secteurs qui est cible qui voudra s'exposer à ce qu'il puisse être obligé de dépendre d'un fournisseur exclusif pour 20 %. Au-delà de ça, ils commencent à questionner. Donc, le 20 % du 25 000 000 000 $, c'est 5 000 000 000 $. Loin de moi de vouloir minimiser l'importance de 5 000 000 000 $, mais je pense que continuer à utiliser 24 000 000 000 $ ne correspond pas aux exigences du FERC parce qu'aucune des cibles dans les trois marchés visés ne permet ou, en tout cas, commence à être questionnée au-delà de 20 %. Parce qu'on nous a répondu que c'était à cause d'un élément de sécurité. Ils ne veulent pas être dépendants de...

M. Chevrette: Oui, mais je voudrais vous rappeler que le marché américain de l'électricité avoisine les 200 000 000 000 $ par an, dont 55 000 000 000 $ dans les États du Nord-Est seulement. Depuis dix ans, nos ventes qui ont été comptabilisées, c'est 3 600 000 000 $. Ce n'est quand même pas des pinottes. Je n'ai pas dit qu'on irait chercher 20 000 000 000 $, je me suis même trompé dans mon évaluation du marché, et c'est encore plus haut que ce que j'ai dit. Donc, je suis resté modeste. Nord-Est: 55 000 000 000 $. Prenez un seul pour cent, et ça ferait 550 000 000 $ par année.

On «peut-u», avec une énergie la moins chère – en tout cas, selon nous – la plus propre, selon nous, toujours, espérer plus que 1 % par année? On «peut-u» penser être agressif dans nos ventes? On «peut-u» penser qu'il y a un virage international qui se fait? On «peut-u» penser qu'on va en faire de la publicité nous autres aussi là-bas? On «peut-u» penser qu'on va se vanter un peu? On «peut-u» penser qu'on peut être concurrent? On veut devenir la plaque tournante puis, avec l'achat de Noverco, on a deux façon de pénétrer le marché américain: par le gaz naturel, par l'électricité. Puis on va tout faire pour augmenter ça. C'est ça qu'on dit, pas plus que ça, pas moins que ça.

Mais je suis persuadé que, avec la volonté démontrée par Hydro-Québec, présentement, de percer le marché externe, on va réussir, on va se structurer en conséquence. Je «peux-tu» vous dire ça aussi? S'il faut engager des vendeurs, on va en engager des vendeurs. On a un produit, on est en équilibre énergétique, nous autres, on a même des surplus de puissance installés de 3 400 MW, pourquoi ne pas en bénéficier? Pourquoi ne pas en faire bénéficier les actionnaires québécois? On est prêt. C'est vrai qu'il y en a qui ont peur, qu'il y en a qui ont plus peur que d'autres. On a ouvert au marché de gros. Le potentiel, chez nous, il est, je l'ai dit, 2 %, 155 000 000 $. On va faire des débats très clairs entre nous. Il y a une certaine prudence à y avoir. C'est ce qu'on a décidé tous ensemble, d'ailleurs, en donnant un mandat à la Régie, de ne pas ouvrir «at large». Mais qu'il y ait des gens qui soient désireux de foncer puis qui nous poussent dans le dos, c'est sain pour une société, puis le rôle des élus, bien, c'est de décider à travers tout ça ce qui nous apparaît correct. Et je peux vous dire une chose, c'est qu'on va faire le débat à la Régie, on va faire un débat public, soyez sans crainte de ça. On va suivre l'échéancier qu'on s'est fixé. Puis qu'Hydro veuille se montrer agressive sur les marchés externes, bravo!

Moi, j'ai été accompagné par Hydro-Québec au Costa Rica, j'ai été accompagné au Mexique, j'ai été accompagné en Turquie puis en Chine, puis je «peux-tu» vous dire que les technologies que l'on a et l'expertise d'Hydro-Québec sont reconnues mondialement? Donc, si on a atteint un équilibre énergétique, c'est évident que les grands projets sont moins à portée de vue qu'ils auraient pu l'être si on n'avait pas été en équilibre énergétique. Donc, entre-temps, si on veut conserver le génie québécois puis si on veut vendre notre expertise et nos technologies à l'étranger puis faire travailler du monde au profit de l'économie du Québec où les bénéfices pourront être réinjectés, on serait bien fous de ne pas le faire, parce que, quand tu as regardé passer le train, il est trop tard pour le prendre. On n'a pas l'intention d'être spectateurs, on a l'intention d'être acteurs.

(17 h 10)

M. Cherry: Je suis convaincu que le ministre est bien au fait que, bien sûr, à date, il n'y a que la province de l'Alberta qui, elle, a été acceptée selon les exigences du FERC. La Colombie-Britannique a subi un refus, et, au moment de la commission, des travaux qu'on a faits avec Hydro tout récemment, il y a eu une décision qui a également été défavorable à la demande de l'Ontario. Alors, on est les quatrièmes à date. Il n'y a que l'Alberta, mais l'Alberta a accepté toutes les conditions requises, avec une bourse, puis tout. Alors, je veux simplement profiter de l'occasion pour dire que la Colombie-Britannique, qui était convaincue que, elle, elle avait un bon dossier puis qui se l'est vu refuser, vient de nommer un gourou dans ce domaine-là qui va présider la commission qui va analyser tous les pour et les contre pour voir s'il y a vraiment avantage pour les gens de la Colombie-Britannique de le faire. Les gens de l'Ontario viennent d'être refusés il y a quelques semaines, qu'est-ce qui nous assure que notre présentation est à ce point différente de celle de ceux qui ont été refusés pour croire que, pour nous, c'est... Parce que la façon dont on nous présente ça, c'est presque un automatisme, là, tu sais. C'est comme si les Américains étaient à genoux pour qu'on aille leur vendre notre produit. Il y a quand même des gens qui s'y objectent. Il ne s'agit pas d'avoir peur pour avoir peur, il s'agit d'être prudent, et je pense qu'on préfère être rassuré avant que consolé après. Alors, je pense que c'est dans ce sens-là qu'il faut faire l'approche.

M. Chevrette: D'ailleurs, je dois vous dire que le Nord-Est américain, c'est là où l'électricité se vend à peu près le plus cher: c'est 0,11 $ du kWh. Nous, on pense que, à 0,04 $, on est pas mal des concurrents de taille. Puis on va tout analyser ça, ça va sortir. Puis on a créé une régie, nous autres, qui va analyser, à part ça, pour la déréglementation en ce qui regarde le marché. Puis nos voies... Il fallait bien s'y attendre, le député sait très bien ça que tu ne peux pas continuellement penser à exporter, avoir des «one way» pour l'exportation puis ne pas revirer ça en autoroute à un moment donné. Sauf que, quand on se compare, les tarifs moyens, là, je vais vous en donner: Québec, 0,036 $, tarif moyen; le Maine, 0,101 $; le Connecticut, 0,105 $; New York, 0,111 $; New Jersey, 0,111 $; le Michigan, 0,071 $. Je pense qu'il y a des gens qui parlent...

M. Cherry: Est-ce que le ministre, vu qu'il vient de citer ces chiffres-là, pour ne pas qu'on s'embarque dans une bataille de chiffres, mais qu'on tente de bien se comprendre... Quand on fait la comparaison du 0,035 $ d'Hydro par rapport au 0,10 $ puis au 0,11 $ ailleurs, le ministre «peut-u» nous ventiler la composition du 0,10 $? «C'est-u» exactement comme le 0,03 $ ou s'il y a d'autres frais là-dedans qui font qu'on se rend à 0,10 $?

M. Chevrette: C'est la même base de calcul. C'est les mêmes composantes pour le calcul. Le tarif moyen.

M. Cherry: O.K.

M. Chevrette: Toutes catégories confondues.

M. Cherry: Et là ça veut dire que, quand, nous, on exportera aux États-Unis – supposons qu'on y trouve un marché intéressant – notre 0,035 $, ça inclut les frais de transport qu'il nous faut maintenant comptabiliser de façon séparée. Nous, on arrive à 0,035 $, et, eux, ils arrivent à 0,11 $. C'est ce qu'on dit, là?

M. Chevrette: Si ça inclut le transport?

M. Cherry: Oui.

M. Chevrette: C'est le tarif moyen. Ça comprend toutes les composantes.

M. Cherry: O.K. C'est parce qu'on était informé du contraire. Le but de travaux comme ça, c'est de nous permettre de...

M. Chevrette: Bon, bien, en tout cas, c'est possible, mais, moi, je vous dis que c'est en cents US, puis ce sont nos chiffres officiels. D'ailleurs, pour permettre à certains groupes de comprendre, je vais publier très prochainement un glossaire de la restructuration des marchés de l'énergie, parce qu'il y en a la moitié qui ne savent pas ce qu'ils disent. Puis on va produire le glossaire, et je pourrais même, parce que vous êtes les premiers intéressés, même s'il est préliminaire, vous en faire distribuer des copies.

M. Cherry: O.K. Good!

M. Chevrette: Les gens vont savoir au moins de quoi on parle, parce qu'il y en a qui s'improvisent spécialistes, là. Y «a-tu» moyen de faire distribuer ça?

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre...

M. Chevrette: Ça vous fait un autre... Il sera peut-être plus complet un peu, mais...

M. Cherry: O.K.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, je suis sûr que, évidemment, les collègues de la commission qui ont participé aux échanges avec le président d'Hydro-Québec juxtaposent certaines de vos réponses avec ce qu'on a entendu. Bon. Il y a une question que je vais vous poser que, sûrement, les autres se posent aussi. Jusqu'ici, les échanges que vous avez eus avec le porte-parole de l'opposition se limitent à dire que les visées d'Hydro-Québec étaient de se comporter essentiellement comme un grossiste. C'est ce qui est ressorti des échanges, bon, que c'était la politique à l'heure actuelle. Alors, la question que plusieurs se posent, et particulièrement suite à l'affirmation que vous avez faite qu'Hydro-Québec avait fait 3 600 000 000 $ de profits, je pense, avec ses...

M. Chevrette: De ventes.

Le Président (M. Beaulne): De ventes aux États-Unis. Alors, la question est la suivante, très, très directe: Comment Hydro-Québec a-t-elle réussi à vendre pour 3 600 000 000 $ aux États-Unis comme grossiste sans avoir à obtenir une permission spéciale du FERC, alors que, si on veut se limiter à ce rôle de grossiste à l'heure actuelle, il faut demander une reconnaissance ou une permission au FERC? Ça, je pense que c'est un peu ambigu dans nos esprits. On a pu vendre pour 3 600 000 000 $ sans autorisation spéciale du FERC, et, maintenant, on nous dit: On veut continuer à jouer notre rôle de grossiste, on se sent équipé concurrentiellement, mais il faut demander la permission. Alors, qu'est-ce qui a changé dans le portrait?

M. Chevrette: Bon. Premièrement, il y avait des contrats fermes de vente – il en reste un, si ma mémoire est fidèle – et on pouvait vendre à la frontière. C'était un peu différent. Là, le marché n'était pas ouvert. Il se signait une entente entre deux gouvernements, puis on vendait à la frontière. Là, les marchés vont être ouverts. C'est très différent, ça. On va pouvoir jouer même à la journée sur le marché spot. Mais là ça nous prend l'ouverture, à ce moment-là, de leur marché. Comme eux, s'ils voulaient vendre chez nous, ça leur prendrait l'ouverture de notre marché. On a dit: Pour l'instant, c'est le marché du gros. Ça, c'est clair. Puis, au Québec, la seule opportunité que vous avez, c'est ce que j'ai dit au début de mon exposé. La Régie devra étudier le reste puis nous en faire des recommandations très précises. Mais, s'ils ont vendu pour 3 600 000 000 $ sur 10 ans, ça, vous regardez le contrat ferme, d'abord, qui existe... Je ne me souviens pas c'est combien, là.

Une voix: C'est à peu près 1 200 MW.

M. Chevrette: C'est à peu près 1 200 MW. 1 200 MW, ça doit être la grosse partie du 3 600 000 000 $ sur 10 ans, ça, parce que le reste, c'est du marché spot un peu, mais à la frontière. Puis n'oublions pas qu'il y a des ententes bilatérales: je te donne du courant l'hiver, puis tu m'en donnes l'été pour ma climatisation. Donc, il y a des contrats à sens inverse qui existent entre des sociétés puis Hydro-Québec. Mais ce n'était pas un marché déréglementé, eux autres non plus. Là, si on peut oeuvrer sur leur territoire comme eux pourront oeuvrer sur notre territoire en payant les tarifs de transit, nous, on pense qu'on est bien positionné avec les moyens que je vous ai donnés tantôt.

M. Cherry: Toujours sur le même dossier, vous avez dû prendre connaissance – je pense que c'est la semaine dernière – d'un projet de la Maclaren qui voudrait utiliser, c'est son objectif, sa prétention, ses surplus d'électricité à même les trois barrages – je pense que c'est trois qu'elle a sur la rivière Gatineau– pour devenir un grossiste et la vendre directement aux États-Unis. Est-ce que ça, c'est quelque chose qui sera permissible ou est-ce qu'elle devra transiger, d'abord, par les lignes d'Hydro? Je présume, il n'y a qu'Hydro qui a des lignes. Donc, on devra lui charger un coût de transport. Dans un premier temps, là, je vois votre acquiescement de la tête, mais je veux vous entendre là-dessus.

(17 h 20)

M. Chevrette: Bien, c'est-à-dire que, si je comprends bien, il va falloir qu'elle demande un permis de grossiste, d'abord, pour vendre de l'électricité à l'extérieur. Deuxièmement, elle va utiliser les lignes d'Hydro-Québec, elle va payer son tarif de transit puis elle va vendre à la frontière. C'est ça?

Une voix: Ou, avec un trader américain, vendre en gros.

M. Chevrette: Ou vendre dans le gros avec un négociant américain.

M. Cherry: O.K. Parce que, avant la publication de cet article-là, j'ai eu l'occasion d'échanger avec les gens de Maclaren – c'est de Maclaren dont on parle – et eux disaient que leur objectif, c'était que, en échange d'une garantie de fourniture de pâtes de là-bas à ici, eux les assuraient de leur fournir de l'énergie. En d'autres mots, pour s'assurer une source d'approvisionnement en pâtes qui vient des États-Unis, du troc: Je vous envoie l'électricité, mais, par contre, la production de ça, vous nous l'envoyez chez nous, ici. Est-ce que c'est quelque chose qui va être possible?

M. Chevrette: Je vais demander à M. Lebuis, qui les a rencontrés également, d'élaborer.

M. Lebuis (Jacques): Oui, effectivement, Maclaren est en train de développer des stratégies pour vendre l'énergie qu'elle produit elle-même sur la rivière du Lièvre, et c'est possible que la stratégie que vous évoquez puisse être retenue par l'entreprise. Nous, on avait aussi discuté avec la Maclaren, qui est une filiale de Noranda, pour qu'elle puisse transiter de l'énergie dans les usines, peut-être, de Noranda, dans les fonderies ou les affineries. Tout ça veut dire qu'ils sont en train, effectivement, de réfléchir à des stratégies pour exporter, pour transiter leur énergie sur les lignes d'Hydro-Québec.

M. Cherry: O.K. Donc, découlant de cette situation-là, s'il y a d'autres entreprises situées en sol québécois qui possèdent des barrages, qui ont des surplus d'électricité, est-ce qu'elles pourront développer la même approche?

M. Chevrette: Ça dépend des contrats qu'elles ont, des contrats existants, parce qu'on ne connaît pas toutes les clauses. Il peut y avoir des clauses différentes, mais, théoriquement, à votre question, c'est oui, elles pourront transiger via les lignes de transport d'Hydro en payant le tarif de transit.

M. Cherry: O.K. La raison pour laquelle je le soulève, c'est que, quand j'ai questionné M. Caillé et qu'on avait fait référence aux surplus que pourra avoir l'aluminium, l'Alcan, il a dit: On a un contrat blindé. Tous les surplus qui proviennent des barrages de l'Alcan sont directement mis, placés dans le réseau d'Hydro-Québec. C'est l'Hydro qui le fait.

M. Chevrette: Mais mon IBM a fonctionné dès que vous avez ouvert la trappe pour dire... Vous avez remarqué que j'avais pris la précaution de vous dire: Ça dépend des contrats. Dans le cas de l'Alcan, c'est exactement ce que mon IBM m'a dit quand vous avez posé la question. Il faut que je dise que ça dépend du contrat parce que je sais qu'il y a des contrats qui ne peuvent pas permettre le «wheeling-out», parce que, précisément, les contrats sont signés à l'effet que les surplus énergétiques sont intégrés au réseau intégré d'Hydro.

M. Cherry: O.K. Je poursuis. Donc, on se comprend bien, mais est-ce qu'il serait possible, si Alcan trouvait preneur pour le même genre de troc ou d'échange que je viens de décrire pour Maclaren, on puisse invoquer que, au moment où j'ai signé l'entente qui me lie exclusivement à Hydro-Québec, c'est parce qu'à l'époque ça n'existait pas qu'on pouvait faire affaire outre frontière, et que, maintenant que c'est changé, que je peux être reconnu comme grossiste, je voudrais briser ça?

M. Chevrette: Bien, là, je m'excuse, un contrat, ca ne se brise pas tout seul. S'il y a ouverture, il y aura réouverture, il y aura négociation puis on verra. Mais c'est comme les contrats secrets, ça. Je suis bien obligé de les respecter même s'ils ne font pas mon affaire. Je veux dire, un contrat, c'est un contrat. Ils ne pourraient pas invoquer à sens unique. C'est vrai que tu ne sais jamais ce qui te pend au bout du nez. Mais, au moment où ils ont obtenu ces contrats-là, il y avait une situation qui les avantageait pour le moins puis qui avantageait également Hydro. Et ça s'est signé de bonne foi, et un contrat, ça a une valeur juridique. Donc, il faut être les deux consentants pour rouvrir un contrat, sinon il y a respect du contrat. Et le contrat, en particulier le dernier contrat d'Alcan, on a publié par un communiqué de presse l'entente qu'il y avait eu entre Hydro-Québec et l'Alcan de sorte que ça s'est fait au vu et au su du monde, sans cachette.

M. Cherry: Et il y a des gens qui m'ont soutenu, après la publication de l'article de Maclaren, que les avantages qui ont pu être donnés à cette papetière-là à l'époque, c'était pour lui permettre de s'installer dans la région, de créer des emplois et de générer ça. Est-ce que c'est – je reprends un terme que vous avez utilisé tantôt – moralement correct de permettre que des surplus d'électricité qui appartiennent à la collectivité québécoise puissent maintenant être transigés, vendus puis échangés?

M. Chevrette: Pour utiliser votre propre argumentaire, M. le député de Saint-Laurent, vous avez dit que ça leur assure justement un approvisionnement plus «safe» en pâtes qui contribue à créer de l'emploi au Québec. C'est donc que c'est mutuellement avantageux.

M. Cherry: Donc, ce que vous me dites, pour toujours être...

M. Chevrette: Mais je ne connais pas le contrat de Maclaren, là, pour être honnête. Je ne sais pas comment ils sont liés, mais, théoriquement, s'il n'y a pas de clause de réserve dans le contrat puis qu'ils ont vraiment des surplus, puis qu'ils voudraient les vendre en échange de pâtes, comme vous dites, puis qu'il n'y a pas de contraintes, comme c'est le cas d'autres papetières que je connais – là, à ce moment-là, ils ne pourraient pas – s'il n'y avait pas de réserve, ils pourraient, effectivement.

M. Cherry: O.K. C'est parce que j'applique le même raisonnement que tantôt. L'Alcan pourrait invoquer – puis je ne lui prête pas d'intentions – que ça lui assurerait un débouché sur ces marchés aux États-Unis si elle pouvait y vendre un surplus d'électricité. Est-ce qu'elle ne pourrait pas invoquer le même raisonnement, le même argumentaire que le fait Maclaren? C'est juste ça que je veux vous soulever.

M. Chevrette: Oui, mais je vous réfère à l'article 120 de la loi que nous avons adoptée. «L'article 6.1 de cette loi est remplacé par le suivant – c'est la Loi sur l'exportation de l'électricité – Tout contrat d'exportation par Hydro-Québec de puissance et d'énergie dont elle ne peut interrompre unilatéralement la livraison doit être soumis à l'autorisation du gouvernement, dans les cas et aux conditions que ce dernier peut alors déterminer. Hydro-Québec ne peut, sans cette autorisation, soumettre une demande en vertu du paragraphe 6° de l'article 73 de la Loi sur la Régie de l'énergie.» On a adopté ça en décembre pour se couvrir aussi.

M. Cherry: O.K. Mais là, si j'ai bien compris, vous venez d'en faire la lecture, vous dites dans le cas d'Hydro-Québec. Maclaren n'étant pas Hydro-Québec, elle se trouve à être exclue de ce que vous venez de décrire.

M. Chevrette: Mais rappelez-vous que l'esprit de cet article-là a été transposé aux producteurs privés.

M. Cherry: Toujours au même document, la référence dans le bas de la page 150: «Des travaux visant l'obtention des autorisations gouvernementales requises en vue de la réalisation éventuelle de projets majeurs par Hydro-Québec ont été réalisés dans le cas de la ligne Duvernay–Anjou à 315 kV et du programme de stockage à sec du combustible irradié à la centrale Gentilly-2.» Je voudrais avoir des explications sur...

M. Chevrette: Ça, c'est la ligne sous-fluviale... pas sous-fluviale, mais, en tout cas, sous l'eau, à Duvernay dont vous parlez?

M. Cherry: C'est ça. C'est Duvernay-Anjou, là.

M. Chevrette: Il y a une étude qui a été faite par le BAPE. Ses recommandations, je ne sais pas si elles sont connues. Il y a l'évaluation des coûts qui devra être faite après l'évaluation du BAPE, parce que le BAPE peut avoir une étude, puis il y a une question de coûts et de conjoncture. Donc, je ne peux pas vous en dire très long parce que je ne sais pas exactement quand le BAPE rendra public son rapport là-dessus. Moi, je ne l'ai pas eu, en tout cas. Quant à Gentilly – monsieur va vous en parler – c'est du stockage des déchets nucléaires de Gentilly. Donc, je vais lui laisser la parole.


Stockage de déchets radioactifs à la centrale Gentilly-2

M. Lebuis (Jacques): En fait, c'est le ministère de l'Environnement qui a fait l'analyse, et, nous, on assiste souvent, on accompagne le ministère de l'Environnement quand il y a des dimensions environnementales à des dossiers économiques, énergétiques, et, dans le cas de Gentilly, bien, on a examiné l'impact économique des propositions qui étaient faites pour le stockage des déchets radioactifs.


Déréglementation des marchés de l'énergie

M. Cherry: De façon générale, qu'est-ce qui a été fait en matière de déréglementation au ministère cette année?

M. Chevrette: Pour l'énergie?

(17 h 30)

M. Cherry: Les responsabilités qui relèvent du ministère, tu sais, là. Je sais que, tout le monde, on regarde ça, mais qu'est-ce qui a été fait de façon particulière?

M. Chevrette: Au niveau de la déréglementation?

M. Cherry: Oui.

M. Chevrette: Bien, dans le produit pétrolier, vous allez le voir la semaine prochaine, là, il y en a beaucoup, beaucoup. Dans le domaine de la forêt, il y a eu les agences de forêts privées qui vont alléger les procédures au niveau du ministère. La Forêt habitée, qui s'en vient, va confier des responsabilités à un autre niveau, de sorte que ça va alléger également les procédures au niveau central. Au niveau minier, il me semble qu'il y a eu quelques amendements, mais la loi va être modifiée, déposée.

Ce que je peux faire, M. le député, c'est de prendre l'engagement de vous envoyer le bilan de la déréglementation globale, puis qu'on vous l'envoie aux membres de la commission. On va le faire secteur par secteur au ministère. Ça doit être fait déjà. Il s'agit de le compiler puis de vous le donner.

M. Cherry: O.K. Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, simplement...


Construction d'une ligne à haute tension entre Duvernay et Anjou

M. Chevrette: Pour revenir à Duvernay 30 secondes, il y a quatre scénarios qui avaient été étudiés par Hydro-Québec et qui, à cause des coûts, avaient été écartés.

Il y avait le scénario A: du point Anjou au poste de Duvernay sur 8,5 km en souterrain. C'était 217 000 000 $.

Le B, c'était ligne souterraine en zone urbaine à Montréal, sousfluviale sous la rivière des Prairies et ligne souterraine en zone urbaine à Laval. Solution préconisée par le BAPE, 5,5 km, 162 000 000 $.

Le scénario C: ligne souterraine en zone urbaine à Montréal, ligne souterraine pour la traversée de la rivière des Prairies et 3,5 km en souterrain de l'autre côté, 126 000 000 $.

Il y a le scénario D: ligne souterraine pour la traversée de la rivière des Prairies, 1,2 km en souterrain. C'était 89 000 000 $.

Qu'est-ce qui sortira de ça? Je ne le sais pas.

M. Cherry: Y a-t-il un échéancier prévisible?

M. Chevrette: Bien, il y a un échéancier. C'est toujours qu'on attend le rapport du BAPE puis on verra tout de suite comment Hydro va se positionner devant et comment l'État va... Le gouvernement, lui aussi, sera appelé... Qu'on le veuille ou pas, vous savez bien ce qui va se produire, on sera obligé de trancher entre deux dilemmes. Par contre, on entrevoit du délestage, vous le savez très bien, s'il n'y a pas quelque chose qui se fait pour ce secteur-là.

M. Cherry: En parlant de choses à trancher, je présume que le ministre devrait prochainement nous annoncer quelle décision il a prise concernant le siège social de la nouvelle Régie.

M. Chevrette: Ça sera très bientôt, en même temps que je vais annoncer les régisseurs, vous avez raison.

M. Cherry: Prochainement. Certains souhaiteraient que j'insiste pour savoir l'endroit, mais...

M. Chevrette: Moi, je vous trouve très sage de ne pas insister.

M. Cherry: Prochainement, c'est ça. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaulne): Ça va, M. le député?

M. Cherry: Ça va.

M. Chevrette: Pour aujourd'hui, en tout cas.


Francisation du vocabulaire de la vente d'électricité

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, une petite question technique. On vient de nous distribuer le glossaire de la restructuration des marchés, et ça va nous être très utile.

M. Chevrette: Préliminaire.

Le Président (M. Beaulne): Préliminaire, bon. C'est parce que les termes français utilisés ici... Je pose la question pas pour être facétieux, mais c'est parce que nous aurons, nous, à déposer un rapport sur nos échanges avec M. Caillé, et, évidemment, la plupart des termes qui ont été utilisés rapidement étaient des termes anglais. Alors, on veut s'assurer qu'on va avoir les bons termes. Je regarde, par exemple, «wheel-through», «transport à travers». Quand on lit la définition, il y aurait peut-être une meilleure traduction qui pourrait être appliquée.

M. Chevrette: Il y a «wheel-through», «wheel-in», «wheel-out».

Le Président (M. Beaulne): Oui, c'est ça. Alors, la question – je ne veux pas toutes les faire, là – est la suivante: Est-ce que l'appellation ou le mot français qui est ici a été vérifié ou a été validé avec des experts dans le domaine ou si c'est...

M. Chevrette: Si on a mis le mot «préliminaire», dans le coin, à droite...

Le Président (M. Beaulne): Non, mais c'est pour ça que je pose la question.

M. Chevrette: ...c'est parce qu'on n'a pas tout à fait fini.

Le Président (M. Beaulne): Je pose la question parce que, effectivement, à la lecture des mots français, ça fait un peu drôle.

M. Chevrette: Oui, mais il y a des choses très difficiles à traduire, d'autre part. C'est parce que vous savez très bien que toute la déréglementation s'est produite dans le monde anglo-saxon. On est un peu à la remorque pour la définition, là. Mais il y a des expressions mieux trouvées, vous avez raison. Moi aussi, je l'ai lu en diagonale.

Le Président (M. Beaulne): Même, je donne un exemple avec l'informatique, les mots «intrant» et «extrant», c'est devenu d'appellation courante. Il a fallu les inventer ou les franciser même si toute la technologie avait été également développée en anglais. Alors, la question que la commission se pose... Parce que, pour nous, comme je vous dis, ça va être important pour la rédaction de notre rapport, il faut qu'on s'entende sur l'utilisation des termes français appropriés qui vont avoir été validés avec ceux qui sont des experts dans le domaine. C'est la question que je posais.

M. Chevrette: Non, mais c'était pour vous démontrer qu'il y avait un effort de fait, quand même, pour permettre aux citoyens, au moins, un peu, de se retrouver, parce qu'il y en a qui mêlent «wheeling-in», «wheeling-out», «wheeling-trough». On essaie, au moins, de clarifier pour ceux qui ont à en parler le plus souvent possible. Pour connaître les concepts puis voir les expressions, on va travailler avec l'Office de la langue française là-dessus.

Le Président (M. Beaulne): Alors, on apprécierait recevoir la version finale lorsqu'elle aura été complètement traduite.

M. Chevrette: Bien sûr, je ferai sans doute une petite conférence de presse et je vous remettrai ça.

Le Président (M. Beaulne): Alors, M. le député, ça va?

M. Cherry: Ça va.


Adoption des crédits

Le Président (M. Beaulne): Il n'y a plus d'autres interventions. Alors, s'il n'y a plus d'autres interventions, on va passer à l'adoption des crédits.

Est-ce que les programmes 5 et 6 du ministère des Ressources naturelles sont adoptés?

Des voix: Adopté.


Adoption de l'ensemble des crédits

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'ensemble des crédits alloués au ministère des Ressources naturelles sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Alors, ceci met fin à nos travaux...

M. Chevrette: Est-ce que je pourrais vous parler 30 secondes?

Le Président (M. Beaulne): Oui.


Remarques finales

M. Chevrette: Je voudrais profiter de l'occasion, d'abord, pour remercier les membres de la commission dans un premier temps, mais aussi, puisque ce sera sa dernière apparition à mes côtés, mon sous-ministre en titre, M. Clair, qui occupera des fonctions à Hydro-Québec à compter du lundi 5 mai. Je voudrais lui dire merci au nom de notre formation politique pour le travail accompli avec beaucoup de rigueur depuis qu'il occupe ce poste et également remercier a priori, parce qu'il assure l'intérim, M. Jean Giroux qui est ici, à qui on n'a pas posé de question, qui a présidé les destinées de la Régie du gaz depuis un bon bout de temps et qui a fait un excellent boulot également. Donc, je voudrais remercier ces deux dignes serviteurs de l'État et leur souhaiter bonne chance dans les réorientations qu'ils auront. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. D'ailleurs, les collègues de la commission se joignent à moi pour offrir nos remerciements et nos voeux de bon mandat à M. Clair.

Et, sur ce, nous ajournons nos travaux jusqu'à demain, 9 heures, à la salle 1.38.

(Fin de la séance à 17 h 38)


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