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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Théorêt): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux
pour procéder aux consultations particulières sur le dossier -de
la sous-traitance d'Hydro-Québec.
Ce matin, le premier intervenant sera les représentants de la
Fédération des travailleurs du Québec - construction,
Fraternité provinciale des ouvriers en électricité -
Montréal et Québec,
Communication de la teneur de lettres de
l'ACRGTQ
Avant d'inviter les intervenants à procéder, je dois vous
faire lecture de documents additionnels et de réponses additionnelles
qui font suite aux demandes faites hier par les députés, et qui
ont été déposés, ce matin, au
secrétariat.
Alors de l'ACRGTQ, nous avons la lettre suivante qui est adressée
à la présidence et aux membres de la commission: "Messieurs, vous
trouverez ci-joint une étude préparée à la demande
d'Hydro-Québec par la firme Lalonde, Sullivan Inc., conseillers en
gestion, datée du 30 mars 1983 dont nous avons obtenu copie le 27
octobre 1987, en fin de soirée.
Nous considérons qu'il est essentiel que les membres de cette
commission parlementaire prennent connaissance de ce document car cette
étude corrobore et de façon scientifique cette fois-ci, les
données déposées par l'ACRGTQ en commission parlementaire
concernant la non-productivité de3 équipes d'Hydro-Québec.
Étude ACRGTQ, 65 % non-productifs, étude de Lalonde, Sullivan
Inc., 63 % non-productifs.
Espérant le tout à votre entière satisfaction, nous
vous prions de bien vouloir accepter, messieurs, l'expression de nos meilleurs
sentiments."
Copie a été ou sera distribuée à tous les
membres.
De la même association: "Messieurs, afin de compléter le
mémoire présenté le 27 octobre par l'ACRGTQ, nous
considérons qu'il est essentiel que vous preniez connaissance des
données apparaissant à la page 2, troisième paragraphe et
à la page 3, quatrième paragraphe du document ci-joint qui
corroborent la preuve présentée qui est essentielle au
déroulement complet des débats de la commission
parlementaire.
Le paragraphe deux mentionne que pour remplacer un monteur
d'entrepreneur, il faut compter deux postes de monteurs à
Hydro-Québec afin de réaliser les mêmes travaux et ce, pour
la raison suivante: Temps improductif, semaine plus courte, huit
jours-années, temps à pied d'oeuvre moindre, retour au quartier
général."
Finalement, un troisième ajout, toujours par la même
associations "En réponse à une question posée par un
député le 27 octobre 1987, à la suite de la
présentation du mémoire de l'Association des constructeurs de
routes et grands travaux du Québec devant la commission parlementaire de
l'économie et du travail étudiant te dossier de
l'élimination de la sous-traitance à Hydro-Québec, nous
vous fournissons, ci-joint, les détails pertinents. Espérant le
tout à votre entière satisfaction."
Ces documents sont déposés et sont conformes à
l'article 162 de nos règlements.
Documents déposés
Également, à la suite des questions des
députés de l'Opposition, du critique officiel et des
députés du côté ministériel qui avaient
demandé le nombre d'emplois permanents et d'emplois temporaires exacts
en 1986 et ceci concernant les employés de bureau et de divers
métiers, voici les chiffres, au 13 septembre 1987. Ils nous ont
été remis ce matin. En ce qui concerne les employés de
bureau permanents: 5055, 219 temporaires, pour un total de 5274 - je m'excuse,
219 c'est tellement bien écrit que je ne comprends pas - 5274 permanents
et 1598 temporaires et ceci pour les employés de bureau au 13 septembre
1987.
En ce qui concerne les métiers, 5611 permanents, 947 temporaires,
toujours au 13 septembre 1987. En ce qui concerne les techniciens, 1878
permanents et 13 permanents non syndiqués. Voilà, le
deuxième chiffre était pour les non-syndiqués. Donc, 13
autres permanents non-syndiqués, pour un total de 1891 et 203
temporaires.
En ce qui concerne les ingénieurs, c'était un total de
1376 permanents cotisés pour l'année 1987. Voici les documents
déposés.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements ce matin?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M.
Claveau (Ungava) est remplacé par M. Chevrette (Joliette); M.
Cusano (Viau) est remplacé par M. Gobé (Lafontaine).
Auditions
Le Président (M. Théorêt)?
Merci. J'invite donc les représentants de la FTQ et des autres corps
de métiers des électriciens, dans un premier temps, de bien
vouloir nous présenter les collègues qui vous accompagnent et
rappeler également que vous avez un maximum de 20 minutes pour faire
votre présentation. Alors, je vous cède la parole.
FTQ-construction
M. Rivard (Jean-Paul): Merci, M. le Président. Bonjour M.
le ministre et membres de la commission. Mon nom est Jean-Paul Rivard. Je suis
le directeur général de la FTQ-construction. Â ma gauche,
Carol Boucher, gérant d'affaires du local 1676 des monteurs de lignes de
la région de Montréal. Â mon extrême droite, Marc
Dupont, président du local 1675 des monteurs de lignes de la
région de Québec et le gérant d'affaires de la
région de Québec des monteurs de lignes, M. Paul Lebel.
Immédiatement à ma droite, M. Jean Lavallée,
président de la FTQ-construction et vice-président de la FTQ
auquel je cède la parole, pour commencer la présentation de notre
mémoire.
M. Lavallée (Jean): M. le ministre, M. le
Président, membres de la commission, le présent mémoire se
veut la prise de position de la FTQ-construction sur le phénomène
de la sous-traitance en général, à Hydro-Québec en
particulier.
Les problèmes soulevés par la philosophie depuis longtemps
exprimée par les syndicats industriels et du secteur public concernant
la sous-traitance découlent du fait qu'on n'a pas su faire la
différence entre deux sortes de sous-traitance. La première
souvent utilisée pour affaiblir la force de négociation
syndicale, non syndiquée et constituant un îlot de "cheap labour"
dans une entreprise syndiquée et souvent servant de moyen pour effectuer
ou prolonger des mises à pied. Ce genre de sous-traitance, je peux vous
dire qu'on a déjà fait le débat dans les instances de la
FTQ à laquelle nous sommes affiliés pour expliquer que nous
sommes d'accord qu'il n'y ait pas ce genre de sous-traitance.
Je m'explique. On pourrait donner l'exemple de la ville de
Montréal qui déciderait de donner en sous-traitance l'entretien
de ses camions à des petits garages du coin. Ceci risquerait de faire
perdre des emplois et aussi pourrait servir de moyen de pression lors des
négociations.
C'est le genre de sous-traitance avec laquelle nous ne sommes pas
d'accord.
On pourrait aussi élargir cela aux hôpitaux où on
pourrait décider de donner la buanderie en sous-traitance à des
petites buanderies du coin pour évincer ou mettre des pressions
lorsqu'on serait en négociation.
Donc, notre position est claire. Concernant ce genre de sous-traitance,
nous sommes absolument d'accord avec nos confrères du SCFPs on ne veut
pas ce genre de sous-traitance. Mais en ce qui concerne la deuxième,
celle exécutée par les travailleurs de la construction à
l'emploi d'entrepreneurs de la construction, en général,
limitée dans le temps et servant plus souvent qu'autrement pour
effectuer des travaux dont la nature ne permet pas de longs délais
d'exécution, elle permet ainsi à des entreprises de puiser dans
un bassin de maîn-d'oeuvre qualifiée sans devoir, dans plusieurs
cas, effectuer des mises à pied parmi le personnel régulier, les
travaux étant effectués rapidement. C'est de nous, travailleurs
de la construction dont il s'agit.
En fait, nous sommes là pour jouer notre rôle en cas
d'urgence, lorsque des travaux sont effectués notamment dans des usines
en marche. Lors de constructions neuves, nous sommes, à toutes fins
utiles, la main-d'oeuvre qualifiée disponible sur le marché.
Cela est tellement vrai que chaque fois qu'une nouvelle usine
démarre, plusieurs travailleurs des métiers de la construction
sont embauchés en permanence, afin d'assurer l'entretien de l'usine.
Nous n'avons pas à être modestes. Nous sommes la main-d'oeuvres
"prête à utiliser" la plus qualifiée existant au
Québec, à l'heure actuelle.
Je pense qu'on n'a pas à faire nos preuves dans ce domaine. On a
construit la Baie James. Je pense que tout le monde est fier de la Baie James.
C'est nous, les travailleurs de la construction, avec des entrepreneurs de la
construction, qui l'avons construite. Tout récemment, nous venons de
construire l'immense chantier de Pechiney dans la région de
Trois-Rivières, de la Mauricie.
On a fait des éloges encore des travailleurs de la construction
ayant réussi à arriver à respecter un
échéancier, en bas des coûts. Donc, ceci veut dire que nos
travailleurs, dans les industries de ce genre, sont aussi très
productifs. On a fait Bell-Helicopter; on a fait d'autres chantiers: la Domtar,
les usines à papier, etc. Je pense qu'on n'a pas à
démontrer devant cette commission la qualité du travail qu'on
peut faire ainsi que notre savoir-faire dans le domaine.
Notre formation. La formation des travailleurs de la construction du
Québec était d'une telle qualité à un moment
donné qu'ils étaient en demande dans tout le
continent. Encore aujourd'hui, des entreprises qui obtiennent des
contrats à l'étranger puisent leur main-d'oeuvre au
Québec, et ce, pour des raisons qui dépassent le seul cadre de la
langue de communication.
Encore une fois, je pense que tous sont au courant que nous avons des
travailleurs de la construction qui oeuvrent un peu partout dans le monde. Tout
récemment, nous en avions en Algérie. On en a eu en Afrique, au
Zaïre, au Zimbabwe. Je pense qu'on n'a pas à faire la
démonstration devant la commission que les travailleurs qu'on
représente ont une réputation mondiale et sont très
qualifiés. Nous sommes très fiers de pouvoir vous dire encore une
fois que nos travailleurs sont des gens très qualifiés.
Dans les années trente, nous avions nos écoles de
métiers dans presque toute la province et la qualité de la
formation, de l'apprentissage ainsi que des outils de formation était
telle que le gouvernement décidait de s'en emparer à la fin des
années soixante pour lui permettre de mettre en application la nouvelle
Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main
d'oeuvre.
Malgré tout, l'apprentissage, la formation et le recyclage ont
toujours fait et font encore partie du quotidien de l'industrie de la
construction. Ces travailleurs font des efforts immenses pour se tenir à
la fine pointe des changements technologiques, pour s'adapter à la
mécanisation, aux nouvelles méthodes de travail et aux
changements qu'apporte la préfabrication. C'est donc pourquoi ils se
sentent insultés quand certaines personnes de différents milieux
les assimilent à du "cheap labor" et les accusent presque de nuire
à la négociation de meilleures conditions de travail pour les
autres travailleurs.
Je pense que quand on parle de "cheap labor", ce n'est certainement pas
le cas des travailleurs qu'on représente ici, les monteurs de lignes. On
sait que ces gens-là, comparativement aux autres travailleurs de la
construction qui font à peine 1000 heures par année, eux,
réussissent quand même à faire une moyenne de salaire de 35
000 $ à 40 000 $, ce qui se compare avec les autres travailleurs qui
oeuvrent dans le domaine.
L'apport économique de la construction. Cela, on va le souligner
parce qu'il y a un vieil adage qui dit que quand le bâtiment va, tout va.
Cela est le cas présentement au Québec. Nous n'avons pas à
faire la preuve que l'industrie de la construction est d'une extrême
importance en tout temps et que son bon fonctionnement constitue le coeur et
les poumons de toute l'économie du Québec. Qu'il suffise de
savoir qu'en 1986, les investissements connus dans notre industrie ont
été de 15 575 000 000 $, que les heures de travail se sont
élevées à 87 000 000 et, là, on s'enligne vers les
100 000 000 $.
(10 h 30)
On s'était trompé. Tant mieux quand on se trompe dans ce
sens. C'est pas mal plus intéressant pour nous! Cela ne tient pas compte
de tous les investissements, heures de travail et salaires non
déclarés à la CCQ ou ailleurs. Bien que nous soyons
également dépendants de ces investissements, il n'en demeure pas
moins que toute l'économie y est directement ou indirectement
rattachée. Nous avons vu ce que la stagnation dans la construction a
fait au début des années quatre-vingt.
Nous ne pouvons non plus passer sous silence l'effort de relance
économique que constituait Corvée-habitation. Je pense que nos
confrères du SCFP l'ont mentionné hier. On a vécu une
période difficile et on a essayé de trouver toutes sortes de
moyens pour s'en sortir. On a décidé de prendre une partie de
notre fonds de pension pour investir dans la construction. Je pense que cela a
donné le ton. Aujourd'hui, on s'aperçoit que l'industrie de la
construction va bien. C'est dû à tout l'essor économique.
Mais, si on n'avait pas eu Corvée-habitation, on aurait eu des jours
encore plus sombres.
M. Rivard (Jean-Paul): Hier, l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec vous a fait un court historique du champ
d'application de la loi. J'aimerais aussi revenir là-dessus. Le 18
décembre 1968, la loi sur les relations du travail qui existe
aujourd'hui dans la construction était promulguée et elle donnait
enfin une définition au mot "construction" qui protégeait en
quelque sorte le travail des travailleurs de la construction. Elle leur donnait
presque une exclusivité sur ces travaux. À la suite de
démarches de plusieurs organismes, y compris certains syndicats
industriels et des secteurs public et parapublic, le 19 décembre 1970,
on adoptait ce qu'on appelait le projet de loi 68, qui est le chapitre 35 de la
loi, dans lequel on donnait aux communautés urbaines et
régionales, aux corporations municipales, aux entreprises
minières et forestières ainsi qu'à Hydro-Québec le
droit d'effectuer des travaux de construction qui relevaient des travailleurs
et travailleuses de la construction. C'était un début
d'érosion du champ d'application de la loi et de notre travail.
Le 1er juin 1973, un autre coup dur nous était donné avec
la loi 9 de l'époque. Le verre plat devenait régi par un autre
décret. On enlevait le verre plat de l'industrie de la construction et
c'est un autre décret qui venait régir les travaux de ce genre.
Les travailleurs n'ont pas subi de désyndicalisation mais ils ont des
conditions de travail qui sont beaucoup moindres que celles de la construction
aujourd'hui. Cela a été le mauvais côté des effets
ressentis.
Comme si cela n'avait pas été suffisant, encore une fois,
le 15 février 1979, la loi 110 de l'époque était
adoptée. On donnait encore une fois aux commissions scolaires et aux
collèges le droit de faire nos travaux de construction. La cerise mise
sur le gâteau à la même époque et dans le même
projet de loi fut la fameuse place que l'on faisait aux artisans dans
l'industrie de la construction. On sait que les artisans constituent maintenant
- on ne les accuse pas d'être des paresseux - un genre de parasitisme au
chapitre des avantages sociaux des travailleurs de la construction qui ne fait
que nous léser. Ils ont le droit, en vertu de la loi, de participer aux
avantages sociaux de l'industrie de la construction. Ils participent au minimum
d'heures requis pour avoir droit aux avantages sociaux. Ils
récupèrent 2,05 $ pour chaque dollar versé, tandis que les
travailleurs de la construction, qui financent en grande partie ce plan,
récupèrent 0,95 $ pour chaque dollar versé.
C'est donc pourquoi le ministre du Revenu, M. Yves Séguin, essaie
de combattre ce genre de travail au noir. Il a annoncé des mesures
à venir pour combattre ce travail au noir. On a également
d'autres suggestions à lui faire là-dessus. On lui en a
déjà fait lors de nos présentations à des
commissions parlementaires. C'est pourquoi nous faisons des recommandations
afin que l'article 19 de la Loi sur les relations du travail, la formation
professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la
construction soit modifiée pour limiter aux seuls employés
permanents des communautés urbaines et régionales et des
corporations municipales la possibilité d'effectuer des travaux de
construction, de canalisation d'eau, d'égout, de pavage, de trottoirs et
d'autres travaux du même genre.
Vous retrouvez cela dans les municipalités, dans les entreprises
minières et forestières, à Hydro-Québec
également. Ces entreprises peuvent embaucher n'importe qui, non pas
nécessairement des employés permanents, pour faire des travaux de
construction. On veut mettre fin à cela. On ne pense pas vouloir
empiéter sur le droit des autres en voulant protéger notre
juridiction. Elle subit déjà une érosion trop grande pour
qu'on laisse aller cela continuellement. On a eu diverses rencontres pour
essayer de s'entendre avec les syndicats concernés. C'est très
difficile. Ils ont toujours le système d'employés temporaires.
Ils sont sur des listes de rappel. Us sont disponibles pour effectuer le
travail demandé. À un moment donné, il va falloir
décider si notre formation, les cours suivis par les gens pour se
recycler, pour se tenir à la fine pointe de la technologie dans
l'industrie de la construction, si cela sert à quelque chose, si cela ne
sert à rien ou si n'importe qui peut venir empiéter sur notre
juridiction. Et, le projet de loi privé qu'on a présenté
à l'Assemblée nationale est un autre des exemples
d'empiétement sur notre juridiction où on va vouloir encore
essayer de faire faire tous nos travaux par n'importe quel genre
d'employés.
Dans les municipalités, y compris la ville de Montréal,
les travaux de construction que les travailleurs non permanents ou nouveaux
employés peuvent effectuer, se situent à partir du niveau du sol
en descendant. Cela veut dire: les travaux de canalisation d'eau,
d'égout, de trottoirs, de pavage. Ils ne peuvent pas aller dans les
édifices. Le projet de loi demandé aurait pour effet de leur
livrer les bâtiments et tous les autres ouvrages de génie
civil.
Nous voulons limiter aux seuls employés permanents
d'Hydro-Québec et pour la ligne de distribution seulement, la
possibilité d'effectuer des travaux de construction. Lors des nombreuses
rencontres que nous avons eues avec les syndicats, nos confrères
d'Hydro-Québec, nous avons soulevé le point des lignes de
transmission, les lignes de transport de force de 730 000 volts, si vous
voulez, et la construction originale des postes de transformation. Même,
s'ils disent qu'ils ne sont pas intéressés à cela, quand
on leur demande s'ils sont prêts à le mettre par écrit,
c'est une tout autre histoire. On ne livre pas la marchandise qu'on nous donne,
et on en a assez de ça. On veut que le champ d'application soit
amendé pour nous donner notre travail.
Et, on sait que la position qu'on prend aujourd'hui, est un peu
diluée par rapport à la position que nous avons prise en 1984,
à une autre commission parlementaire. Mais, nous essayons de
régler, nous essayons de satisfaire tout le monde. Nous essayons de
trouver un consensus général qui va permettre au
législateur d'intervenir sans froisser ou brusquer personne.
La sous-traitance à Hydro-Québec défraie
l'actualité du milieu depuis plusieurs années. À chaque
renouvellement de convention collective, le sujet revient dans le cahier des
demandes syndicales. En 1976, un accord intervenait entre Hydro-Québec
et le syndicat, à savoir que le total des contrats accordés aux
sous-traitants ne serait pas supérieur en dollars aux contrats
accordés en 1975, indexés au coût de la vie. Nous
étions satisfaits de cette entente car elle rassurait tout le monde.
D'une part, le syndicat des employés d'Hydro s'assurait que la
sous-traitance ne nuirait pas à la croissance de son effectif et,
d'autre part, nous étions assurés que notre part du
marché, notre part du travail, demeurerait la même ou presque.
En 1984, nous recevions un choc en apprenant qu'un nouvel accord
était intervenu, lequel aurait comme résultat, en 1988, de
réduire "drastiquement" le nombre d'employés des sous-traitants.
C'était la
nouvelle politique d'Hydro-Québec sur la sous-traitance et c'est
nous qui en subissions les effets. À la lumière de ce que nous
venons de dire et compte tenu du fait que nous reconnaissons les droits acquis
et, -entre guillemets, les divers groupes qui empiètent sur notre
juridiction, il nous apparaît moins que normal que la nouvelle politique
d'Hydro-Québec sur la sous-traitance, puisse avoir autant de
conséquences néfastes sur les travailleurs et travailleuses que
nous représentons.
Ces travailleuses et travailleurs, dont plusieurs ont jusqu'à 40
ans de service, ne comprennent pas l'ingratitude dont ils sont victimes de la
part d'une société de la couronne, qu'ils ont pourtant toujours
bien servie. Hydro-Québec pourra prétendre qu'elle est
liée par une clause de convention collective et que le syndicat de ses
employés en est responsable, mais nous savons tous qu'il faut être
deux pour danser. Le prix à payer par la population et les
conséquences financières et sociales pour des centaines de
travailleuses et travailleurs qui lui ont donné leurs meilleures
années, importent peu à cet État dans l'État. On
n'a même pas songé un seul instant à garantir les postes
qui se créeraient à ces travailleuses et travailleurs. On
rajeunit sauvagement et les principales victimes sont des gens qui ne
bénéficient même pas d'un régime de retraite
comparable à celui existant à Hydro-Québec et qui ne
pourront se trouver du travail ailleurs, à cause du fait que le seul
employeur dans le domaine en détient le monopole et a
décidé de les jeter à la rue. Je pense que c'est de la
répétition, ici, en disant: le monopole d'Hydro-Québec; le
ministre lui-même l'a soulevé, hier, et c'est exactement la
situation.
Loin de nous l'idée de contester le monopole détenu par
Hydro-Québec. Et, je dois dire que nous appuyons à 100 % la
position du syndicat là-dessus, et la position du ministre,
également, en ce qui concerne la non-privatisation
d'Hydro-Québec. Nous avons... Je pense que tous ici ont voté en
1962 en faveur de la nationalisation des compagnies d'électricité
et nous voulons que ce monopole demeure. Cependant, il appartient à la
société tout entière de veiller à ce que tant de
puissance concentrée dans si peu de mains ne mène pas à
des prises de décision irréfléchies quant à leurs
conséquences.
Le désir d'avoir la paix des dirigeants d'Hydro-Québec les
amène à prendre une position de fuite en avant qui ne tient pas
compte de l'angoisse et du désespoir qu'ils créent dans la vie de
centaines de travailleuses et travailleurs. Ils devront, à un âge
avancé, s'exiler pour tenter de décrocher un emploi aux
États-Unis ou dans une province où la lutte à la
sous-traitance n'aura pas dégénéré au point
où personne ne peut plus entendre les cris des victimes et encore moins
voir leurs blessures.
Nous assistons à une danse macabre qui doit prendre fin. Et,
là, on n'exagère pas. À l'heure actuelle, il y a plus de
200 travailleurs, 200 monteurs de lignes qui ont quitté le Québec
et qui travaillent ailleurs, parce qu'en 1988, cette nouvelle clause, l'article
34.03, va prendre effet. Et, on se retrouve dans des situations où,
parce que le programme PAQS est encore en vigueur, on peut encore avoir des
contrats pour les sous-traitants et nos membres. On se trouve dans des
situations où on manque de main-d'oeuvre pour accomplir ces contrats
potentiels qui sont là parce qu'on a une main-d'oeuvre qui est partie,
qui s'est exilée. On ne veut pas recommencer la chanson du Canadien
errant, mais on subit un exode de la main-d'oeuvre, des monteurs de lignes,
aujourd'hui, qui n'est peut-être pas dramatique pour le syndicat
d'Hydro-Québec mais qui est dramatique pour nous.
C'est donc pourquoi nous recommandons que le gouvernement amène
Hydro-Québec à tout mettre en oeuvre pour revenir à la
situation qui existait à la suite de l'accord de 1976. On pourra
peut-être dire: La position n'est pas tellement forte. L'autre position,
c'était de dire: On demande au gouvernement de passer une loi pour
abolir une clause de convention collective, et nous ne sommes pas
disposés à faire de telles recommandations.
Le syndicalisme à Hydro-Québec. Il serait souhaitable
également que le syndicat représentant les employés
d'Hydro-Québec s'ouvre les yeux sur le sort d'autres syndiqués
qui ont le malheur de ne pas être dans ses rangs. Peut-on se permettre de
lui rappeler les origines profondes du mouvement syndical? Peut-on lui rappeler
justement qu'une des plus grandes revendications de la classe ouvrière
était justement d'empêcher le genre de geste inhumain que se
prépare à poser Hydro-Québec et ce, avec sa
complicité, il faut bien l'admettre? Qu'a-t-il à gagner pour ses
membres? Ils ont quand même la sécurité d'emploi mur
à mur. Est-ce que ses membres sont lésés par notre
présence? Ne se souvient-il pas qu'en 1966, notre syndicat d'alors a
fait preuve de beaucoup plus d'altruisme pour favoriser son implantation
à Hydro-Québec?
Notre présence pour la sous-traitance à
Hydro-Québec ne date pas d'hier. En effet, la sous-traitance existe
depuis le début de l'électrification du Québec. Elle
existait lorsque Hydro-Québec a été créée,
elle était toujours là lors de la nationalisation des compagnies
d'électricité et elle est encore présente aujourd'hui et
ce, pour le plus grand bien de ceux qui en vivent et de la
société en général.
On ne peut nous accuser d'être du "cheap labour" car nos
conditions de travail
font l'envie de plusieurs et ont même déjà
été citées comme argument par le syndicat des
employés d'Hydro-Québec, un argument de négociation. Nous
sommes tous syndiqués et ne servons pas de prétexte à des
mises à pied de ses employés par Hydro-Québec. Au
contraire, l'effectif du syndicat à HydroQuébec était de
quelque 3500 à la fin des années soixante, d'à peu
près 4800 en 1976 et est approximativement 5600 aujourd'hui. Et
là, je cite des chiffres qui m'ont été donnés, je
ne les ai pas pris dans le mémoire d'Hydro-Québec, Si les
chiffres ne concordent pas, je tiens ces chiffres du président du local
1500 d'Hydro-Québec qui me les a donnés le 23 septembre 1987.
C'est encore récent. Alors je ne me suis pas basé sur les
chiffres d'Hydro-Québec. On voit une progression constante de l'effectif
et, d'ailleurs, lors de la présentation de son mémoire hier, le
syndicat a bien dit qu'il y aurait encore une augmentation de l'effectif
à cause de la fin du programme PAQS et de la diminution de la
sous-traitance. Il ne faut pas être bien intelligent pour comprendre que
ce sont nos jobs qui s'en vont là, en emplois permanents à
Hydro-Québec. Il s'agit donc d'une progression constante qui tient
compte de la croissance d'Hydro-Québec et ce, malgré la tendance
à la réduction de l'effectif dans d'autres secteurs, due aux
changements technologiques et à la modernisation des
équipements.
Quant à la sous-traitance que nous représentons, nous
sommes un marché stable qui s'est développé au cours des
années et nous n'empiétons pas sur les droits acquis des autres.
Notre nombre s'est toujours maintenu à un certain niveau, avec des hauts
et des bas, ce qui est le propre des travailleurs de la construction dont nous
faisons partie depuis 1968. L'expansion d'Hydro-Québec n'a pas fait
augmenter notre nombre comme ce fut le cas des employés
d'Hydro-Québec, à l'exception du programme PAQS qui l'a
augmenté temporairement. De plus, nous les avons toujours appuyés
lors de leurs conflits de travail, comme c'est la coutume dans le mouvement
ouvrier. C'est donc pourquoi nous comprenons difficilement l'acharnement de
certains à vouloir nous éliminer comme si nous étions des
bêtes nuisibles dans une société que nous avons pourtant
aidé à bâtir.
Un des prétextes pour vouloir notre disparition est le noble but
de créer des emplois permanents. Tout en débitant ce discours
attendrissant, on laisse HydroQuébec embaucher - pour exécuter,
dans plusieurs cas, le travail traditionnellement exécuté par
nous et c'est le cas du souterrain - des centaines et des centaines
d'employés temporaires et qui ne seront jamais autre chose que des
temporaires -tout comme nous d'ailleurs - à l'exception près
qu'il y a des temporaires à Hydro-
Québec qui le sont depuis sept ans. Peut-on alors se permettre de
douter de la générosité des intentions de ceux qui tentent
de nous reléguer au chômage ou à l'assistance sociale?
Présentement, les monteurs de lignes, les électriciens et
les opérateurs d'équipement lourd sont touchés et nous
savons que bientôt les lignes de transmission et les postes de
transformation seront également affectés. Cela affectera donc les
manoeuvres, les menuisiers, les ferrailleurs, les cimentiers-applicateurs, les
monteurs d'acier, les peintres ainsi que d'autres métiers,
spécialités et occupations.
Ici, j'aimerais passer la parole à mon collègue, Jean
Lavallée. (10 h 45)
M. Lavallée: Je pense que c'est un point...
Le Président (M. Théorêt): M. le
président, je m'excuse de vous interrompre. Je vous ai laissé
aller même si vous aviez déjà dépassé votre
temps de quelques trois minutes maintenant. Est-ce que vous en avez pour
longtemps encore, parce...
M. Lavallée: Non.
Le Président (M. Théorêt): ...que
déjà, vous êtes rendus à...
M. Lavallée: Très rapidement.
Cette partie du document est importante pour nous et, pour moi, en tant
que président de la FTQ-construction. Le débat se fait autour des
monteurs de liqnes, mais cela va plus loin. C'est qu'il n'y a pas uniquement
des monteurs de lignes qui travaillent à Hydro-Québec. Il y aussi
des électriciens, il y a aussi des peintres, il y aussi des gens
d'à peu près tous les métiers. Puis, lorsqu'on parle de
l'entente du programme PAQS, c'est que tout ce qui est souterrain a
été retiré. Beaucoup des travailleurs que je
représente oeuvraient dans ce domaine et on voit, dans l'entente, que la
pose et l'enlèvement des câbles souterrains et les travaux
électriques pour raccorder ces cables, ainsi que l'appareillage:
transformateurs, interrupteurs, boîtiers, fusibles, seront
effectués par les employés d'Hydro-Québec. Donc, d'un
côté, on disait: Vous, les monteurs de lignes, vous allez en avoir
un peu plus; par contre, le souterrain, on l'a perdu. On avait des gens qui
travaillaient dans les sous-stations, on avait des gens qui travaillaient dans
des centrales et, aujourd'hui, on en a de moins en moins, étant
donné que la politique veut de moins en moins de sous-traitance à
Hydro-Québec.
M. Rivard (Jean-Paul): Le syndicalisme à
Hydro-Québec peut-il se montrer sous un jour aussi insensible et donner
ainsi raison à
tous ceux qui ne prêtent au mouvement syndical que des motifs
corporatistes? Nos détracteurs auront beau jeu à l'avenir pour
assimiler nos prises de position à ia défense des travailleuses
et travailleurs à des intérêts bassement mercantiles.
Nous demandons donc au syndicat en question de cesser cette partie de
bras de fer et de prendre une seconde pour regarder dans ses mains qui il est
en train d'écraser. Il nous verra sûrement. Peut-être y
verra-t-il aussi le reflet terni de sa propre image ainsi que celle de sa
centrale, celle-là même qui a présidé à sa
naissance en 1966?
En conclusion, M. le Président, nous osons exprimer le voeu que
nos propos auront su toucher le coeur des hommes et des femmes qui
contrôlent cette structure colossale, qui tiennent le sort de tant de
personnes dans le creux de leurs mains.
Nous ne pouvons croire qu'on ne peut arrêter la course folle et
inconsidérée de cette machine qu'on appelle la lutte à ia
sous-traitance, d'une part, et la nouvelle politique de sous-traitance, d'autre
part.
Nous remercions les membres de cette commission de nous avoir entendus.
Nous espérons que nous les avons motivés à exercer des
pressions pour éviter le drame que nous allons vivre bientôt.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M, Rivard.
Je vais céder immédiatement la parole au ministre de
l'Énergie! et des Ressources.
M. Ciaccia: Je tiens à remercier la FTQ-Construction pour
l'exposé qu'elle vient de faire devant cette commission sur le
problème que lui pose la sous-traitance chez Hydro-Québec.
Permettez-moi de revenir sur ce que vous avez dit dans votre
mémoire. Je retiens tout d'abord que vous représentez un bassin
de main-d'oeuvre qualifiée. Celle-ci a su, en temps opportun, apporter
son coup de pouce à l'économie. Vous vous êtes en effet
personnellement impliqués dans Corvée-habitation, comme vous
l'avez mentionné. Vous opposez ce comportement à l'attitude
essentiellement corporatiste du syndicat chez Hydro-Québec. Vous
êtes actuellement inquiets des effets de la politique et des pratiques
à l'égard de la sous-traitance chez Hydro-Québec. Vous
nous formulez en conséquence des recommandations sur lesquelles
j'aimerais revenir.
Votre première recommandation veut que l'article 19 de la Loi sur
les relations du travail dans l'industrie de la construction soit amendé
afin de réduire la portée de l'exception concernant les travaux
de construction par Hydro-Québec. Votre deuxième recommandation
vise à ce que le gouvernement amène Hydro-Québec à
tout mettre en oeuvre pour revenir à la situation qui existait à
la suite de l'accord survenu entre Hydro-Québec et les sections locales,
les employés de métiers, de bureau et les techniciens. Soit
l'entente d'avant 1984. Par rapport à votre deuxième
recommandation, pourriez-vous préciser ce que représenterait un
retour à l'accord de 1976 en termes de valeur et de volume de contrats
ainsi qu'en termes d'emplois et ce, par rapport à la situation que vous
anticipez pour 1988?
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, concernant le volume de
contrats de 1975, je n'ai pas ces données et je doute fort
qu'Hydro-Québec me les aurait données. Cependant, je note que
dans le mémoire du syndicat d'Hydro-Québec, on fait
référence aux contrats de 1972 pour les opposer à la somme
des contrats de 1985. Je crois qu'il aurait été plus juste, dans
le contexte, de mentionner les contrats de l'année 1975, laquelle, selon
le syndicat lui-même, était une très bonne année.
Or, en 1976, le ministre du Travail est intervenu dans les négociations
à Hydro-Québec et il y avait eu une convention collective ou une
entente qui avait été signée disant qu'il n'y aurait pas
plus de sous-traitance accordée qu'en 1975, le montant en dollars,
indexé au coût de la vie. C'est l'information que nous avons.
Cela faisait notre affaire. On disait: Si nos salaires suivent
l'augmentation du coût de la vie, si le prix des matériaux
augmente en fonction de l'indice des prix à la consommation, on aura
toujours le même nombre d'hommes-années. Le résultat a
été que, grosso modo, on avait - Hydro-Québec le dit dans
son mémoire - 720 à 750 travailleurs qui travaillaient sur les
lignes, ce qui constituait notre marché maximum de 1975 où tous
nos membres étaient au travail. Il n'y avait pas un afflux de nouveaux
travailleurs ou de nouveaux membres chez nous. On avait tous nos membres au
travail, peut-être à l'exception de quelques accidents du travail.
En fait, tout le monde travaillait. C'était une bonne année.
C'est à cela que nous voulons revenir. À ce
moment-là, nous n'avons pas empêché le syndicat
d'Hydro-Québec de progresser dans son effectif. Il a toujours
progressé et nous sommes d'accord que des postes permanents soient
créés à Hydro-Québec. On connaît aussi les
problèmes qu'a créés le statut précaire de certains
travailleurs et travailleuses. Cela, nous ne le voulons pas. On ne discutera
pas des coûts. Il y a des coûts à payer pour des emplois
permanents. Nous sommes d'accord qu'il y en ait à Hydro-Québec.
Nous sommes d'accord que ces postes permanents ne soient pas à nous.
Nous faisons de la sous-traitance, nous avons fait notre vie là, nous
avons fait notre nid là. Nous sommes d'accord que les postes permanents
augmentent à Hydro-Québec,
mais pas à notre détriment. Tout ce que nous voulons,
c'est notre marché, nos jobs, conserver nos acquis, ce qu'on avait
avant.
M. Ciaccia: Si je vous comprends bien, si vous mainteniez votre
position de 1976 à 1983, cela n'impliquerait pas et cela n'implique pas
des mises à pied à HydroQuébec?
M. Rivard (Jean-Paul): Absolument pas, M. le ministre. Dans toute
convention collective - et j'en ai négocié plusieurs - une des
premières clauses qu'on allait chercher, c'est que tout travail en
sous-traitance ne pourrait affecter... L'unité de négociation ne
pourrait pas causer de diminution de l'unité de négociation ni
causer des mises à pied ou des licenciements. Il y avait
déjà cela dans leur convention collective et cela n'impliquerait
pas du tout cela. Si on retournait à la situation de 1976 à 1983,
cela n'aurait pas pour effet de diminuer le nombre d'emplois à
Hydro-Québec. Je crois même qu'avec la progression des clients
d'Hydro-Québec, l'expansion d'Hydro-Québec, on se retrouverait
probablement avec des emplois permanents en surplus à
Hydro-Québec, et nous sommes d'accord.
M. Ciaccia: Donc, si je vous comprends bien, l'équilibre a
été rompu avec l'entente de 1984.
M. Rivard (Jean-Paul): Effectivement, l'équilibre a
été rompu. On a beau dire ce qu'on voudra, M. le ministre,
Hydro-Québec va arriver avec des chiffres qui vont mêler tout le
monde autour de la table. Il reste une situation - et je n'ai pas besoin de me
traîner un dictionnaire en-dessous du bras pour comprendre cela - c'est
que le syndicat d'Hydro-Québec vient dire qu'on baisse à 500 et
eux vont augmenter de quelques centaines. Leur effectif a progressé
continuellement. Je n'ai pas besoin de grands discours pour comprendre, je n'ai
pas besoin de chiffres non plus pour savoir que quelqu'un se fait baiser
quelque part et c'est nous.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Ciaccia: II y en a sûrement qui vous comprennent autour
de la table.
À la page 17 de votre présentation, vous nous faites
remarquer que les travailleurs et travailleuses et je vous cite, "devront,
à un âge avancé, s'exiler pour tenter de décrocher
un emploi aux États-Unis ou dans une province où la lutte
à la sous-traitance n'aura pas dégénéré au
point où personne ne peut plus entendre les cris des victimes". Avant
que je vous demande de préciser votre perception sur la situation
ailleurs, je voudrais vous demander; Vous avez porté à notre
attention que 200 de vos travailleurs sont partis, ils ont quitté le
Québec...
M. Rivard (Jean-Paul): 240 exactement.
M. Ciaccia: ...et vous avez mentionné que c'est
malheureux, c'est dramatique pour Hydro-Québec. J'ajouterais que c'est
dramatique aussi pour notre société et c'est dramatique pour les
individus concernés. Une personne ne se déplace pas d'un pays
à l'autre sans des raisons très sérieuses. Quelquefois,
ils ne le font pas de leur propre volonté, mais ils sont obligés
par les circonstances. Justement, vous avez fait référence au
passé. Au dernier sommet francophone, le gouverneur du New Hampshire
était présent. Il était présent parce que 25 % de
la population du New Hampshire vient du Québec. Ce que vous venez de
porter à notre attention a des conséquences non seulement pour
Hydro-Québec mais pour notre société. C'est très
malheureux si cela se produit. Pourriez-vous nous préciser -parce que
vous dites qu'ils sont partis ailleurs - votre perception sur la situation de
la sous-traitance ailleurs par rapport à ici?
M. Rivard (Jean-Paul): À la grandeur du Canada, certains
syndicats des secteurs public et parapublic font une lutte de tous les instants
à la sous-traitance. Jusqu'à un certain point, nous sommes
d'accord avec cette lutte à la sous-traitance parce que cela contribue
souvent à traiter des ghettos de "cheap labour". Cependant, nous avons
rencontré à maintes occasions le syndicat en question pour
essayer de lui faire comprendre que nous ne sommes pas du "cheap labour". Nous
ne nuisons pas à leurs conditions de travail» Nous sommes leurs
compagnons de travail. C'est ce que nous sommes. Malheureusement, malgré
les propos encourageants des représentants d'hier selon lesquels il y a
une centrale là pour encourager les discussions, les discussions que
nous avons eues à ce jour se sont soldées à rien et leur
mémoire est clair et net à la page 26. Ils ont des aspirations.
C'est qu'Hydro-Québec rapatrie tout le faire-faire. Cela veut dire
l'élimination de la sous-traitance à 100 %. Comment peut-on
continuer des discussions ou entreprendre des discussions dans un tel contexte.
On a beau vouloir mettre le couvercle sur la marmite pour ne pas qu'il saute,
essayer de tenir l'unité syndicale, je comprends tout cela. J'ai
travaillé pendant des années pour cela, mais, à un moment
donné, assez, c'est assez. C'est nous qui sommes dans la position et qui
mangeons des coups de bâton. C'est plus facile, pour ceux qui les
donnent, de tenir le silence que pour ceux qui les reçoivent.
M. Lavallée: M. le ministre, je pense aux monteurs qui
doivent s'exiler aux États-
Unis. C'est facile de comprendre qu'avec la fin du programme PAQS, ce
n'est pas au moment où l'on se parle qu'ils sont affectés, mais
ils ne veulent pas se retrouver dans une situation, dès la fin du
programme, où ils vont être en chômage. Donc, ils ont
décidé, ils ont paniqué. Ils ont dit: Bien, nous autres...
Plusieurs parmi eux avaient déjà travaillé aux
États-Unis et ont décidé de ne pas prendre de chance et de
s'en aller travailler aux États-Unis pour ne pas avoir à s'en
aller tout à l'heure sur le bien-être social. Car on sait fort
bien que la plupart de ces travailleurs ont un certain âge et, comme on
l'a mentionné, hier, ils ne pourraient pas se qualifier pour s'en aller
travailler comme permanents à HydroQuébec.
M. Ciaccia: Et vous êtes convaincu, si je lis votre
mémoire à la page 8 et à la page 16, que la sous-traitance
peut être éliminée. Cela est votre crainte et quel indice
avez-vous...
-
M. Rivard (Jean-Paul): C'est une crainte basée sur des
faits et des discussions que nous avons eues. Quand des personnes ne veulent
pas s'engager à faire conjointement une demande au gouvernement pour
amender le champ d'application de la Loi sur les relations du travail dans
l'industrie de la construction pour clarifier certains points, c'est parce que,
dans ma tête, il y a des intentions cachées qui sont de moins en
moins cachées dans le mémoire des syndicats
d'Hydro-Québec. Ce ne sont pas des. reproches que je leur fais, ils sont
assez francs pour le dire, à la page 26. Ils veulent rapatrier tout le
faire-faire. Ils veulent que l'effectif d'Hydro-Québec monte à 22
000; cela veut dire que c'est nous autres qui disparaissons.
M. Ciaccia: Mais, finalement, parce que je vous entendais, dans
votre exposé, vous avez dit: En 1984, cela a été un choc
pour vous quand vous avez appris la décision d'Hydro-Québec.
Est-ce qu'il y en a qui tentent ou qui essaient d'en venir à la
conclusion que c'était une chicane entre syndicats. Ce n'est pas
finalement un syndicat qui fait une revendication, un autre qui en fait une
autre, mais, finalement, c'est la décision d'Hydro-Québec que
vous venez de nous dire. C'est Hydro-Québec qui prend cette
décision-là et c'est la politique d'Hydro-Québec qui cause
la situation dans laquelle vous vous trouvez maintenant.
M. Rivard (Jean-Paul): Ce n'est pas une chicane entre deux
syndicats qui cause cela. C'est cela qui cause la chicane entre deux syndicat.
C'est le fait que deux syndicats se trouvent pris ensemble et se chicanent
à cause de cela. Ce n'est pas la chicane entre les deux syndicats qui
cause le problème, c'est le problème qui cause de la chicane et
Hydro-Québec nécessairement, c'est elle qui est maître de
sa gestion, de sa façon d'administrer et c'est elle qui est responsable
d'avoir signé des ententes dont elle n'a pas compris la portée
à un moment donné. Comme j'ai dit, Hydro-Québec veut
acheter la paix, bien ils l'ont achetée, la paix sur notre dos en ce qui
nous concerne.
M. Ciaccia: Essentiellement, la décision finale, ce
n'était pas la décision de la FTQ, ni la décision des
syndicats d'Hydro-Québec, c'était la décision du
management d'Hydro-Québec de faire cette entente. (11 heures)
M. Rivard (Jean-Paul): C'est Hydro-Québec qui a consenti
une clause comme celle-là. C'est elle qui avait le droit de refuser ou
d'accepter. Maintenant, à subir les moyens de pression qui s'ensuivent,
on ne les a jamais vus, on n'en a jamais entendu parler, on n'a jamais
été consultés non plus sur ce genre de clause qui est en
train de se signer et dans laquelle on jouait notre destin. On n'a jamais
été impliqués comme tierce partie là-dedans.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. Je vais maintenant céder la parole au député de
Roberval et critique officiel de l'Opposition.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. M. Rivard, merci pour
votre présentation ainsi qu'aux autres membres du syndicat. Des chiffres
qui nous ont été donnés par l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux, nous démontrent que
l'efficacité de leurs hommes, qui sont les gens que vous
représentez, était de 65 % supérieure à ceux
d'Hydro-Québec. Les employés d'Hydro-Québec, par ailleurs,
nous disent qu'effectivement les études comparatives portent à
faux puisqu'il y a des éléments de coûts qui ne sont pas
inclus quand on ne fait que comparer de personne à personne le travail
fait. Ma première question est de savoir si vous êtes d'accord
avec cette évaluation de la productivité faite par vos patrons
par rapport aux gars d'Hydro-Québec. Comme j'ai l'impression que votre
réponse sera "oui", je voudrais vous demander tout de suite, dans une
deuxième question, à quoi vous attribuez cette différence
d'efficacité aussi extraordinaire entre vos hommes - les hommes que vous
représentez - et les monteurs de lignes d'Hydro-Québec, entre
autres.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le député, je ne suis pas
un marchand d'esclaves. Des études ont été faites et des
chiffres sont
lancés et, tout ce que je peux dire. Ce que je rends responsable
du fait que, selon les études, il y aurait moins de possibilité
parmi les employés d'Hydro, c'est attribuable à la gestion de
l'entreprise. Je négocie les conditions de travail des monteurs de
lignes depuis 1973. J'ai participé à de nombreuses rencontres
avec les entrepreneurs nécessairement puisqu'on ne peut pas
négocier tout seul. Si on négocie tout seul, on a des
problèmes - et on a toujours insisté du côté des
entreprises è nous sensibiliser pour que nous sensibilisions nos membres
en assemblée à savoir que leur job tenait du fait qu'ils offrent
une bonne productivité.
Il n'y a pas d'esclavage, je ne suis pas marchand d'esclaves. Il n'y a
personne de fouetté chez nous. Les pauses-café sont
respectées. En 1973$ je suis intervenu dans le dossier et j'ai eu
à défendre en griefs plusieurs travailleurs qui étaient
poussés dans le dos - on pourrait dire presque fouettés -par des
contremaîtres d'Hydro-Québec et nous avons dû déposer
de nombreux griefs pour arrêter cette situation. Aujourd'hui, il n'y a
personne qui est fouetté chez nous, mais on a fait comprendre aux
travailleurs qu'il y a des conditions de travail qui sont accordées, il
y a des bons salaires; nos membres font quand même 35 000 $ par
année. On n'a pas à s'en vanter ni à en avoir honte, c'est
la situation et ce n'est pas du "cheap labour" comme j'ai dit. On a
sensibilisé nos membres à produire, à travailler pour le
nombre d'heures pour lequel ils sont payés. Cela veut dire qu'à B
heures du matin ils sont au poteau et ils effectuent les travaux qui leur sont
assignés par Hydro-Québec. Si la gérance
d'Hydro-Québec a démissionné devant la
productivité, je crois qu'on ne peut pas blâmer le syndicat ni les
travailleurs, personne excepté la gérance d'Hydro-Québec
parce que la gérance des entrepreneurs n'a pas
démissionné.
M. Gauthier: Sauf erreur, M. Rivard, ce que j'ai compris du
fonctionnement des sous-contrats, c'est que la gérance qui fait la
supervision de monteurs d'Hydro-Québec, ce sont eux aussi qui font la
supervision de vos hommes. On m'a dit que, sur chacun des contrats,
c'étaient les contremaîtres d'Hydro-Québec ou je ne sais
trop qui, les superviseurs d'Hydro-Québec qui prenaient le temps, qui
mettaient les hommes au travail, bref. Pouvez-vous nous éclairer sur ce
point-là?
M. Rivard (Jean-Paul): Sauf exception, M. le
député, les travaux sont supervisés par des
contremaîtres d'Hydro-Québec et les tâches sont
assignées par des contremaîtres d'Hydro-Québec.
M. Gauthier: Si je comprends bien, les contremaîtres
d'Hydro-Québec sont plus efficaces ou moins gênés avec les
gars de la construction qu'avec leurs propres employés, c'est à
peu près ce que vous me dites finalement.
M. Rivard (Jean-Paul): C'est votre commentaire, M. le
député.
M. Gauthier: Ce n'est pas mon commentaire, j'essaie
d'interpréter ce que vous me dites. Vous me dites: Si nos gars sont plus
productifs que les gars d'Hydro-Québec c'est parce que la gérance
fait mal sa "job" ou ne fait pas le travail qu'elle devrait faire. Or, c'est la
même gérance - à moins que je ne comprenne mal le terme
"gérance" - qui supervise les deux groupes de travailleurs.
Alors, la conclusion que j'en tire, c'est que la gérance serait
efficace dans votre cas et pas efficace dans l'autre cas. Ou est-ce à un
autre niveau que se situe le problème?
M. Rivard (Jean-Paul): L'information qui nous revient
là-dessus, M. le député, c'est que la haute gérance
d'Hydro-Québec ne supporte pas la gérance des
contremaîtres, si vous voulez. Lorsqu'il y des recommandations de faites,
des recommandations pour améliorer quelque chose, souvent, la haute
gérance recule devant les problèmes que cela peut occasionner,
alors que ce n'est pas le cas chez les entrepreneurs, parce qu'ils ont droit de
vie ou de mort, jusqu'à un certain point, parce que, lorsqu'un contrat
est terminé et qu'il y a une autre commande, ils peuvent faire des
pressions pour essayer d'éliminer certaines personnes et c'est là
qu'on intervient pour les placer ailleurs, où ils peuvent travailler
mieux avec certaines personnes plutôt qu'avec d'autres.
M. Gauthier: Soyez sûr qu'on va poser la question à
la haute gérance d'Hydro-Québec, cet après-midi. Il y a
une chose que j'aimerais savoir, M. Rivard. Dans la situation actuelle des
choses, si j'ai bien compris, vous n'êtes pas en accord - en tout cas,
votre demande ne va pas jusque-là pour ne pas que vous soyez
traité d'égoïste vous-même - avec la position de
l'AICQ qui, elle, veut encore plus de sous-traitance; elle veut qu'on en vienne
à faire beaucoup plus de sous-traitance, quitte à éliminer
des emplois à Hydro-Québec. Si je comprends bien, votre position
se situe quelque part entre les deux.
M. Rivard (Jean-Paul): Nous, on dit: On n'a pas à
défendre la position de l'AICQ ni à l'attaquer. Ce que nous
voulons, c'est notre marché traditionnel et on pense que, sur
l'entretien, sur le réseau, à certaines périodes, cela
peut être 30 % ou 35 % du travail qui s'effectue sur le réseau et
c'est ce que nous voulons conserver.
M. Gauthier: Dites-nous, M. Rivard, vous qui êtes en
quelque sorte assez rompu à ce genre de question, puisque vous
êtes dans le domaine du syndicalisme depuis de nombreuses
années... Hier, j'ai posé la question à l'AICQ, parce que
la meilleure façon que... Bten humblement, j'avais compris qu'on pouvait
déterminer le travail et que, pour être juste pour tout le monde,
il s'agissait de compter le nombre d'années-hommes.
Jusqu'à présent, les gens ont toujours compté cela
en années-hommes et à l'AICQ, on m'a quasiment dit que je passais
à côté de la "track", que ce n'était pas cela le
problème. Le problème, c'était de savoir dans quelle
orientation il fallait s'en aller.
Si je comprends bien, en termes d'orientation pour votre part, c'est
qu'il n'y a pas d'orientation. Il s'agirait de conserver un statu quo dans la
portion de marché pour votre syndicat. Pour le reste, ils
s'accroîtront s'ils le peuvent. Tant mieux. Sinon, au moins, qu'ils
protègent les emplois qui sont là.
Alors, pour vous, ce n'est pas une question d'orientation, c'est une
question de protection d'un marché. Est-ce qu'il y a'une autre
manière de calculer la protection de votre marché, ce que vous
appelez votre marché du travail, autrement que par des
années-hommes?' Y a-t-il une autre manière que
celle-là?
M. Rivard (Jean-Paul): Moi, je n'en connais pas. Il y en a
peut-être, je ne le sais pas. Mais, moi, je n'en connais pas. Ce que nous
savons, c'est que nous avons un nombre de membres déterminé et,
nécessairement, quand il y en a un qui prend sa retraite sur une
équipe, il faut un remplaçant. Donc, on n'augmente jamais le
nombre de membres et on effectue le travail dans certains secteurs
donnés en fonction de certaines "heures-années" de travail pour
les gens qui sont membres de notre région. C'est la seule façon
qu'on peut le compter.
M. Gauthier: Mais la balance de tout cela... Il y avait un
complément de réponse. Je m'excuse.
M. Lavallée: On a des droits acquis aussi. Comme je l'ai
mentionné tout à l'heure, il n'y a pas uniquement les monteurs de
lignes qui sont touchés. Il y a d'autres corps de métiers qui
sont acquis. Donc, ces droits acquis, on veut les maintenir. Je suis d'accord
avec la position de l'AICQ en ce qui a trait à la construction.
Si Hydro veut faire de la construction, il y a Hydro-services et
travaux. Qu'elle soit un entrepreneur professionnel, qu'elle engage des gars de
la construction comme elle le faisait - il y a déjà eu un temps
où elle embauchait des gars de la construction - et qu'elle soit
concurrentielle avec les employeurs de la construction.
Nous ne voulons pas prendre les jobs des gars d'Hydro. On dit aux gars
d'Hydro: Vous faites l'entretien et la réparation et on est d'accord
avec cela; c'est votre job. Cependant, on dit, Si vous avez des surplus
à faire, bien, nous sommes là pour pallier cela. On ne le fait
pas uniquement avec Hydro, on le fait aussi dans le cas des industries. Reed
Paper vient de faire une machine à papier, ici, à Québec
et c'est nous, les gars de la construction qui avons fourni 600 ou 700
personnes pour faire la machine, leur personnel régulier ne pouvant pas
faire cette machine à papier. Donc, nous disons à Hydro: De la
construction, si vous voulez en faire, faites-en. Mais faites-en sous les
mêmes conditions que les entrepreneurs de la construction avec des
salariés de la construction. C'est ce qu'on demande à Hydro de
faire.
M. Gauthier: Ma deuxième question s'adresse, encore une
fois, à M. Rivard. Relativement à ce qu'on a dit tout à
l'heure: Comment se fait le décompte des hommes-années? On s'est
entendu pour dire que c'était peut-être la meilleure
manière en établissant un barème afin que tout le monde
ait sa part du gâteau. On se comprend là-dessus. Mais comment se
fait le décompte?Se fait-il a posteriori par l'ensemble des
entrepreneurs ou dans un comité conjoint avec Hydro-Québec?
Comment se fait-il?J'en profite pour vous poser une autre question
là-dessus. Hier, les gars du syndicat d'Hydro-Québec nous ont
dit: Écoutez, on avait droit à 1000 hommes-années et cela
n'a jamais été beaucoup plus qu'environ 800. Je voudrais savoir
comment se fait le décompte? Pourquoi n'êtes-vous jamais
allés à plus de 800? Est-ce parce que tout votre monde
était à l'ouvrage? Est-ce parce que le chiffre de 1000
était trop élevé? Quel est le problème?
M. Rivard (Jean-Paul): Le décompte est fait par
Hydro-Québec, qui est tenue, en vertu de cette convention collective,
d'en faire rapport au syndicat, mais, traditionnellement, pour nous, ce qui
nous permettait de savoir que notre quota était respecté,
c'était que tel et tel contrat dans telle et telle région
était reconduit pour l'année en question, qu'il y avait tant
d'équipes dans cette région. Par hasard, si, dans une
région donnée, il y avait des prévisions de 60
équipes et qu'il n'y en avait que 40 ou 45 qui partaient, il y avait des
budgets qui se libéraient dans d'autres régions et qui
permettaient de mettre un nombre d'équipes plus élevé que
les soumissions des entrepreneurs. À ce moment-là, il y avait des
transferts de monteurs de lignes qui allaient dans toutes les régions
du
Québec. Il y avait une mobilité. Ils allaient combler les
besoins de certaines régions. C'est ce qui fait qu'à un moment
donné, on pouvait dire, au mois de mars peut-être: Tout notre
monde travaille. Les contrats étaient remplis partout. Parfois, cela
allait plus loin que le mois de mars. Cela pouvait aller au mois d'avril ou au
mois de mai, mais le travailleur peut avoir plusieurs mois de travail qui lui
permettent d'avoir un revenu qu'on estime décent dans les
circonstances.
M. Gauthier: M. Rivard, j'aimerais savoir comment on peut
faire... On a bien envie d'éviter des attitudes corporatistes, comme on
les appelle, d'un syndicat qui pourrait avoir l'idée, bien
légitimement remarquez-bien, de grossir le nombre de ses membres, mais
quand, dans la balance, il y a le travail des gens que vous représentez
et pour qui c'est le seul gagne-pain, je vous avoue que, pour notre part, on
est extrêmement sensibles à cela, tout en protégeant ce
qu'il y a à Hydro-Québec. Je regrette, mais je pense que vos
travailleurs méritent d'être protégés.
L'Assemblée nationale est peut-être l'endroit où leur cause
sera le mieux entendue.
J'aimerais savoir de votre part comment on peut, à ce stade-ci -
parce que, sauf erreur, l'entente fait partie de la convention collective -
améliorer la situation pour vos gens. Sinon par une ouverture ou une
intervention gouvernementale directement au chapitre de la convention
collective. Est-ce qu'il y a d'autres moyens de procéder, à votre
avis?
M. Rivard (Jean-Paul): C'est une question... Le baseball est fini
et les balles arrivent mouillées ou courbes... Il est assez difficile,
dans une situation où il y a une convention collective avec des
clauses... Ce n'est pas nous qui allons dire au gouvernement d'intervenir pour
faire reculer ou détériorer une convention collective. Je pense
que la commission parlementaire d'hier et d'aujourd'hui va peut-être
permettre à tout le monde d'être sensibilisé et de dire
qu'on allait peut-être trop loin avec notre affaire. On espère que
nos confrères d'Hydro-Québec vont le comprendre et que c'est la
position qu'ils prendront. Cela permettra peut-être de ne pas tenir
compte de l'application de cette clause de la convention collective jusqu'aux
prochaines négociations. Parce qu'on ne demande pas et on ne demandera
jamais l'intervention gouvernementale au chapitre de la convention collective.
Je pense que ce sont des instructions qui doivent être données
à Hydro-Québec pour les prochaines négociations.
À partir de là, je crois que de notre côté
également, comme travailleurs et travailleuses syndiqués, on
pourrait entreprendre un dialogue et réussir à sensibiliser les
syndicats d'Hydro-Québec qui seront en sous-traitance. Ce n'est pas si
mal que cela. Ce n'est pas si destructif que cela. La démotivation qui
existe chez les employés d'Hydro-Québec, d'après ce que
j'ai entendu hier, n'est pas causée par la sous-traitance. S'il y avait
une démotivation, elle serait causée par la campagne du syndicat
d'Hydro-Québec contre la sous-traitance. Il y a des grandes affiches
partout? "Dehors la sous-traitance!". Nos membres arrivent pour travailler le
matin et c'est devant eux: "Dehors la sous-traitance!"» Cela ne semble
pas les démotiver. Je ne sais pas ce qui pourrait démotiver les
employés d'Hydro. Je pense qu'il faut, comme travailleurs et
travailleuses, s'entendre ensemble et essayer d'agir humainement pour le
bien-être de tous. (11 h 15)
M. Gauthier: Vous dites - une dernière question à
la suite de ce que vous venez de dire - que vous ne savez pas ce qui peut
démotiver les travailleurs d'Hydro. J'avais un peu compris tout à
l'heure - peut-être ai-je fait de l'interprétation? - que ce qui
pouvait peut-être démotiver les travailleurs d'Hydro,
c'était l'évaluation négative de la productivité
causée par la démission de l'encadrement à
Hydro-Québec. J'avais compris un peu que ça pouvait être
cela. Là, vous nous dites que vous ne savez pas ce qui cause cela.
Est-ce que je vous interprétais tout à l'heure quand je
comprenais que la démotivation des travailleurs d'Hydro était due
essentiellement à la mauvaise perception, actuellement, qu'il peut y
avoir ou qui a pu être véhiculée dans cette commission?
 tort ou à raison, je ne me prononce pas là-dessus.
M. Rivard (Jean-Paul): Ce qui est dit reste dit. C'est que
j'ajoutais, je faisais un commentaire sur le mémoire des syndicats
d'Hydro-Québec qui dit à la page 25: Nous nous en voudrions de
terminer sans mentionner les problèmes que soulève la coexistence
d'une main-d'oeuvre interne de sous-traitants. Cela a pour effet de miner le
moral des travailleurs et travailleuses, en plus de créer une tension et
une insatisfaction néfastes pour l'entreprise. C'est de nous qu'on
parle.
On peut avoir le droit de se sentir insultés de se faire dire
qu'on ne se sent peut-être pas aussi bons que les autres et que notre
présence mine le moral des autres tavailleurs et travailleuses. Ce n'est
pas moi qui l'ai dit, c'est dans le mémoire, ici. Et je ne le prends
pas.
M. Gauthier: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Roberval. M. le député de
Saint-Maurice.
M. Lemire: M. le Président, M. Lavallée, M. Rivard,
messieurs les représentants des monteurs de lignes, moi, je voudrais
revenir sur la qualité du travail et, en conséquence, le service
à la population. C'est un sujet au coeur du débat que nous avons
actuellement, depuis hier. J'aimerais, par exemple, parler de ce que j'ai lu
dans le rapport, c'est-à-dire le mémoire du syndicat maison qui
mentionne la grande difficulté de contrôler la qualité du
travail des sous-traitants. En outre, on considère que la
productivité ne peut être supérieure chez les
sous-traitants puisque la notion d'économie d'échelle ne
s'applique pas. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Lavallée: Je pense, quant à la qualité du
travail, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, qu'on n'a pas
à essayer de démontrer nos compétences. On l'a
prouvé dans plusieurs pays. Je peux vous dire que même avant
qu'Hydro soit syndiquée, nous étions dans le domaine comme
travailleurs de la construction et nous avions des monteurs de lignes à
ce moment-là. Moi, je viens de la Mauricie, de Shawinigan, et on en
avait qui travaillaient pour la Shawinigan Water and Power. J'ai moi-même
oeuvré sur les chantiers de construction dans les années
soixante. Les travailleurs de la construction, moi, j'en suis convaincu, sont
très compétents dans le domaine. Je suis convaincu aussi que les
travailleurs d'Hydro, les monteurs d'Hydro, ont aussi de très bonnes
compétences, aussi bonnes que les nôtres. Ce n'est pas cela qu'on
remet en question. Je suis surpris, quand même, de cette
attitude-là.
Pour nous, quand on relie cela à la productivité - M.
Rivard en a parlé tout à l'heure - il y a peut-être
plusieurs facteurs qui font en sorte que les travailleurs sont plus productifs,
selon les études, que certains ou que Hydro. Mais c'est probablement
dû à la gestion du travail. On en discutait ce matin, nous, juste
entre autres la question des points de rencontre. M. Rivard disait que les
monteurs doivent être au poteau à 8 heures. Ça s'est
discuté avec les entrepreneurs lorsque nous avons fait la
négociation. On a des points de rencontre aussi et le matériel
est amené à ces points de rencontre, tandis qu'à Hydro,
ils ont des points de service, ce qui est différent.
Je pense que notre compétence n'est pas à
démontrer. On est très compétents. Je le disais tout
à l'heure, on a fait la Baie James. La Baie James, c'était le
plus gros chantier hydroélectrique du monde à un moment
donné. Ça, ce sont des travailleurs de la construction qui l'ont
fait. Dans ce sens-là, moi, je suis convaincu qu'on est très
compétents et que les gens d'Hydro sont très compétents.
Partout dans le monde, on est fiers de l'expertise qu'Hydro a. D'ailleurs,
Hydro aussi a des contrats un peu partout dans le monde pour la haute
technologie.
M. Lemire: J'aurais une autre constatation à faire.
Après avoir entendu, hier, les syndicats internes, section 957, 1500 et
2000, ils prétendent, dans leur mémoire, que les entreprises de
sous-traitance auraient mal planifié ou auraient oublié de
diversifier leurs activités commerciales. Pourriez-vous nous dire s'il
existe des possibilités, puisque pour nous éclairer, des monteurs
de lignes, ce ne sont pas des personnes qu'on peut affecter à beaucoup
d'autres endroits, d'autres jobs? Pour les entreprises où se trouvent
les travailleurs que vous représentez, qu'est-ce que vous pensez
qu'elles auraient pu faire ces entreprises-là dans le but de se
diversifier? Pensez-vous que c'est une bonne solution?
M. Rivard (Jean-Paul): Bon, la plupart des entreprises qu'on
connaît au Québec ne sont pas tellement diversifiées. Elles
sont dans un domaine. Nous travaillons pour des entrepreneurs en
électricité qui nous emploient pour travailler sur les lignes.
Peut-être que ces entrepreneurs-là auraient pu se lancer dans
d'autres genres de compagnies, satellites, si vous voulez, pour avoir d'autres
opérations mais il aurait fallu qu'elles embauchent quelqu'un d'autre
pour le faire, ce travail-là. Vous ne pouvez pas lancer des compagnies
de réserve, au garde-à-vous, qui attendent que le monteur de
lignes ait fini de descendre de son poteau pour aller poser de la brique sur un
édifice. Ce n'est pas de même que ça se fait. Alors, c'est
bien difficile. Je comprends la difficulté des entreprises de
diversifier leurs activités commerciales. Elles auraient peut-être
pu le faire pour sauver leur argent comme tel, leur investissement, investir
ailleurs dans d'autres choses.
Mais nous, comme travailleurs de la construction, on ne peut pas marcher
avec deux métiers de front. On ne peut pas marcher avec deux emplois de
front. Et quand une personne est rendue à 40, 45 ou 50 ans, comment
voulez-vous qu'on recycle cette personne-là pour qu'elle effectue un
autre métier? Éventuellement, il y a quelqu'un qui va la sacrer
dehors et elle perdra la "job" pour laquelle elle s'est formée toute sa
vie. Ce sont des choses qui ne tiennent pas debout.
M. Lemire: Merci beaucoup.
M. Lavallée: Il y a aussi l'équipement. Cet
équipement-là ne peut pas nécessairement servir à
d'autre chose. Comme Jean-Paul le mentionnait, c'est assez dur de
recycler un travailleur de 40 ou 45 ans dans un métier pour
lequel il y a trois ou quatre ans d'apprentissage. On a tous notre formation
professionnelle qui entre en ligne de compte. Mais à partir de
là, bien on dit à un travailleur qui est rendu à 45 ans;
Bien écoute, il n'y a plus d'ouvrage dans le domaine. Tu ne peux pas te
qualifier comme permanent à Hydro-Québec car tu ne réussis
pas à passer les équivalences. Il lui reste quoi, comme choix?
C'est là qu'il arrive que nos travailleurs doivent s'exiler aux
États-Unis.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Je vais
maintenant donner la parole au député de Joliette et leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, j'aurais tout d'abord un
commentaire et une couple de questions.
D'abord un commentaire. J'ai regardé les chiffres. Vous pariez
beaucoup de productivité - moins vous autres que d'autres qui en ont
parlé jusqu'à maintenant - puis je me suis mis à
réfléchir à ce que ça voulait dire ça, ce
que M. Pierre Roux disait hier: temps fait, temps payé. C'est
évident qu'il faudrait peut-être démystifier cette
partie-là parce que je me demande si an ne parle pas un peu dans le
désert. Quand on regarde les faits concrets, qu'est-ce qui arrive dans
les faits? Si j'engage un sous-traitant et j'ai un salarié qui a
travaillé six heures, je lui paie six heures. Si j'ai un permanent, il
va être payé pour la journée. S'il pleut, le sous-traitant
ne travaillera pas, il ne sera pas payé.
Dans la conjoncture actuelle, c'est ce que j'ai compris des
mémoires. Je voudrais savoir si j'ai bien compris. Je voudrais vraiment
suivre le processus pour en arriver à quelque chose que le monde peut
comprendre. Alors, si j'ai des employés permanents et qu'il pleut, je
les paie. Cela, c'est évident que ça fait partie de la
distinction ou de la différence entre ce que coûte un
sous-traitant ou un salarié d'un sous-traitant par rapport à une
main-d'oeuvre permanente que tu paies à la semaine ou à
l'année.
Ce que je ne comprends pas d'autre part, c'est que c'est
évident... Si on suivait la logique, par exemple, du syndicat
d'Hydro-Québec, et qu'on enlevait tous les sous-traitants,
qu'arriverait-il pour la construction urgente d'un petit édifice, par
exemple, et qu'ils n'ont pas la main-d'oeuvre suffisante? Ils seraient
obligés quand même de référer à la
sous-traitance. Qu'on le veuille ou non il y aurait une partie de
sous-traitance parce qu'Hydro-Québec ne se stockera jamais assez en
employés, parce que c'est une main-d'oeuvre permanente, pour
répondre aux urgences. Elle va dire: Vais-je me stocker en fonction
d'une urgence alors que ça me coûte des frais? Là-dessus,
je suis surpris qu'il n'y ait pas une partie qui ait fait valoir ce
point-là jusqu'à maintenant. Le décret de la construction
- je n'ai pas vérifié le dernier - ne doit pas prévoir,
à mon point de vue, le temps non travaillé payé. Je n'ai
pas vu ça encore nulle part dans le décret de la constructions
à moins que cela ne fasse partie du dernier. Il y a quelque chose
là qui me semble créer une ouverture à une discussion
entre deux syndicats. Je suis convaincu de cela.
Je vais vous demander, parce que vous avez ouvert la porte
là-dessus ce matin et je ne suis pas sûr que M. Chabot n'a pas
ouvert une porte hier, lui aussi, à la fin de son mémoire...
D'abord, je vous ai déjà vu plus agressif que cela, M. Rivard, je
vous ai déjà vu grimper dans les rideaux plus facilement que ce
matin. Je voudrais savoir de votre part, si vous êtes prêt à
poser un geste dans un délai raisonnable avec M. Chabot et son
équipe? Seriez-vous prêt à poser un geste et à nous
faire des propositions?
M. Rivard (Jean-Paul): Aujourd'hui, M. le député,
on est prêts à les rencontrer et discuter de cela en
espérant... Je sais qu'ils peuvent nous opposer le fait qu'ils n'ont pas
de mandat de leur assemblée encore, mais, en tout cas, on peut aller
chercher des mandats et quand un leadership est élu et
considérés je pense qu'il réussit à faire adopter
son point de vue quand il est sensé.
Pour répondre à autre chose, c'est vrai qu'il y aura
toujours de la sous-traitance. Ce qu'on essaie de trouver, comme le ministre
l'ai dit, c'est l'équilibre qu'il faut ramener. Vous avez toutes sortes
d'imprévus qui arrivent sur le réseau de distribution. Vous avez
le verglas, les arbres brisés, les autos qui vont frapper un poteau, les
tempêtes, les tornades, les mini-tornades et l'usure normale du
réseau qui arrivent et qui font qu'à un certain moment, il faut
plus de main-d'oeuvre. C'est vrai qu'Hydro-Québec n'osera jamais avouer
qu'ils ont tant de main-d'oeuvre en réserve qui ne fait rien pour
prévoir ces cas-là. C'est la sous-traitance. Ce sont nos membres
qui sont mis à pied plus facilement, qui font quelques mois de
chômage par année et qui sont là pour remplir ces trous et
qui en sont satisfaits. Ils en tirent un bon gagne-pain et ils sont satisfaits
de cette situation.
On ne peut pas réduire... On pense qu'avant, au moment où
il y avait des contrats d'entretien qui étaient donnés dans un
peu toutes les régions du Québec, il y avait de disponible, sur
place, ce nombre de travailleurs qui, en claquant des doigts, peuvent laisser
leur travail qui n'est pas urgent et aller courir à l'urgence. Je pense
que c'est le nombre qu'on avait avant qui faisait cela parce que cela s'est
développé ainsi et ce sont les besoins qui existaient qui
ont fait que le marché s'est développé ainsi. Cela
ne s'est pas développé ainsi parce qu'on voulait de la
sous-traitance pour réduire la force du syndicat d'Hydro-Québec.
On a toujours appuyé le syndicat d'Hydro-Québec. D'ailleurs, je
les en remercie car ils nous ont toujours rendu la pareille lors de nos
conflits. On allait dresser des lignes de piquetage et on ne nous passait pas
sur le corps avec les camions. Là-dessus, je les félicite. Cela
arrêtait là. Pour une, raison ou une autre, le camion ne repartait
plus. On s'est toujours entraidé. Aujourd'hui, on est rendu qu'on veut
essayer de nous éliminer et, des fois, sous le prétexte de
questions de sécurité. On veut tellement notre
sécurité qu'on ne veut plus nous voir là. On a de la
misère à comprendre. On ne comprend peut-être pas vite,
mais on a de la misère à comprendre cela.
En ce qui concerne le décret de la construction et le temps
payé, je suis très content pour Ies travailleurs
d'Hydro-Québec qui se présentent au travail, prennent le temps de
se lever, de s'habiller, de prendre leur voiture pour se rendre au travail et
qui, s'il pleut et qu'ils ne peuvent pas travailler, sont payés toute la
journée. C'est ce que nous demandons à chaque négociation.
Nous ne l'avons pas obtenu, mais à la prochaine négociation, nous
allons le demander encore. Cela fera partie des coûts de production. Que
voulez-vous? En ce sens-là, on n'a pas honte et on est très
content que le syndicat d'Hydro-Québec ait tracé la voie' et on
va essayer de l'obtenir.
Ce qui existe comme disposition dans le décret, à l'heure
actuelle, c'est que le travailleur qui arrive et dont le travail est
contremandé pour n'importe quelle raison, s'il reste à la
disposition de l'employeur et effectue à la demande de l'employeur des
travaux connexes à son travail - quand il pleut, il ne peut pas toucher
au courant - il sera payé. S'il s'en va chez lui, il n'est pas
payé. Alors, à la dernière négociation,
plutôt que d'obtenir les huit heures complètes pour la
journée, on a obtenu que ces quatre heures de présentation au
travail soient mobiles. C'est-à-dire que si vous avez travaillé
l'avant-midi parce qu'il n'a pas plu et que l'après-midi, il pleut, les
trois heures commencent là. Cela veut dire que les travailleurs sont
payés trois heures additionnelles dans l'après-midi. Alors, il y
a très peu de risques qu'ils perdent leur journée de travail. On
pourrait dire que pour la moyenne ou la grosse majorité des
interruptions de travail, nos membres ont été payés
presque pour leur journée complète.
M. Chevrette: Je dois interpréter, M. Rivard, les pages 10
et 11 de votre mémoire comme faisant partie d'un message
général à transmettre au gouvernement et à
l'Assemblée nationale plutôt qu'une demande expresse dans le
présent litige. Je vais vous expliquer pourquoi. C'est qu'aux pages 10
et 11, vous parlez du champ d'application et vous revendiquez un champ
d'application exclusif dans le domaine de la construction. Vous revendiquez
qu'on vous redonne l'entretien dans les hôpitaux, les rénovations
dans les hôpitaux et les écoles. Vous revendiquez une série
de choses qu'ils vous ont enlevées depuis 1966. Est-ce que je dois
comprendre que c'est un message général, mais que, dans le fond,
vous vous contenteriez de moins que cela dans le présent litige? (11 h
30)
M. Rivard (Jean-Paul): M. le député, c'est notre
demande minimale et cela ne concerne pas seulement Hydro-Québec. On le
dit à la première page, notre mémoire traite de la
sous-traitance en général et à HydroQuébec en
particulier. Donc, nous traitons, dans ces pages-là, de la
sous-traitance en général. On a le même problème
dans d'autres industries, notamment pour les moulins à papier. Il existe
une situation en Gaspésie, à l'heure actuelle, où
l'entreprise elle-même embauche les travailleurs de la construction et
fait effectuer des travaux de construction. Nous disons: Ils nous volent notre
travail. On veut que cette situation cesse. C'est pour cela qu'on dit de
limiter aux seuls employés permanents des entreprises minières et
forestières déjà en service la possibilité
d'effectuer des travaux de construction reliés à leur
exploitation -certains travaux de construction, non pas tous.
M. Lavallée: D'ailleurs, cette démarche a
été entreprise en 1984, à une commission parlementaire qui
a eu lieu ici. Ce n'est pas la première fois qu'on soulève toute
la question du champ d'application. C'est dans notre mémoire. De plus en
plus, on nous en enlève. Quand on parle de sous-traitance, si, dans le
secteur industriel - laissons les secteurs public et parapublic de
côté - on commence à nous sortir et qu'il n'y a plus de
sous-traitance, qu'est-ce qu'il va nous rester à faire, comme
travailleurs de la construction? Vous êtes certainement au courant, c'est
un débat qui se fait à l'échelle nationale, au moment
où l'on se parle. C'est effrayant comme on ne veut plus de
sous-traitance dans l'industrie. On a un débat à
l'intérieur de notre propre centrale pour essayer de s'entendre avec
notre secteur industriel pour pouvoir trouver la ligne entre les deux. Comme je
le mentionnais tout à l'heure, on ne veut absolument pas prendre le
travail des employés permanents. Mais, on ne veut pas que les
employés permanents fassent notre travail. La Gaspésie en est un
exemple flagrant.
M. Chevrette: M. Lavallée, vous ne pensez pas que le
débat se fait précisément parce qu'on a voulu recourir
à la sous-traitance au détriment de la sécurité
d'emploi de ceux qui l'avaient acquise.
M. Lavallée: Non.
M. Chevrette: Si la sous-traitance n'avait pas mis en
péril la sécurité d'emploi, est-ce que ce serait le
même débat?
M. Lavaliée: Nommez-moi un endroit, dans le domaine du
papier, où ils ont perdu des emplois à cause de la
sous-traitance. Ils ont la sécurité d'emploi.
M. Chevrette: Je prends les hôpitaux, à titre
d'exemple, pour essayer d'illustrer ce que je veux dire. Le jour où vous
faites nettoyer votre linge ailleurs alors que vous avez quatorze
employés permanents, vous ne pouvez pas les relocaliser et vous les
mettez en disponibilité.
M. Lavallée: Oui, mais on a...
M. Chevrette: Vous jouez donc avec la sécurité
d'emploi et, à mon point de vue, cela accentue les discussions. La
question que je veux poser, c'est que, dans le présent cas,
accepteriez-vous qu'il y ait des mises à pied à
Hydro-Québec dues votre demande?
M. Lavallée: J'ai pris soin de le mentionner, l'affaire
des hôpitaux, l'affaire des villes ou municipalités où on
voudrait, pour contrer des emplois permanents, donner du travail en
sous-traitance. C'est clair, nous ne voulons pas de ce genre de sous-traitance.
Je n'ai pas saisi l'autre question.
M. Chevrette: La question est: placez-vous dans la peau des
syndicats d'Hydro-Québec, nous assureriez-vous qu'il n'y aura pas de
mise à pied?
M. Lavallée: On est d'accord avec cela et on est
prêts, oui, à dire - on le dit dans notre débat - qu'on ne
veut absolument pas prendre l'emploi de personne. On dit tout simplement: Quand
vous ne pouvez pas faire un travail avec vos employés permanents dans
certains cas - ce n'est pas le cas d'Hydro-Québec - dans certains autres
domaines, vous donnez cela à des groupes non syndiqués. On dit:
Au moins ce travail que ce soient les gens de la construction qui le fassent,
avec les employeurs de la construction. On le vit présentement avec
Pratt et Whitney.
M. Chevrette: Cela va me permettre de faire un commentaire, M. le
Président. Si je comprends bien le mémoire et les explications
qu'on me donne de part et d'autre depuis hier, le syndicat
d'Hydro-Québec, hier, par la voix de M. Chabot, disait qu'il
était prêt à ouvrir une porte, mais que ce n'était
pas à lui, que c'était à Hydro-Québec. Le syndicat
qu'on a devant nous dit également: Nous sommes prêts à
discuter pour ne pas insécuriser les travailleurs d'Hydro-Québec,
mais c'est un tiers parti. À mon point vue, il y a une clé, mais
la façon la plus facile d'ouvrir la porte, à mon sens, cela
demeurerait quand même -même si Hydro-Québec demeure la
clé - si vous êtes deux partenaires, c'est très important
dans les circonstances, parce que vous représentez du monde, vous avez
les mêmes objectifs en ce qui concerne la sécurité d'emploi
ou le. gagne-pain de votre monde. On ne peut pas nier cela. Qui que ce soit ne
peut pas s'élever contre cela.
À mon point de vue, la seule façon dans la conjoncture
actuelle d'après ce que je peux voir, y compris dans les mémoires
puis les questions qu'on aura éventuellement à poser à
Hydro-Québec cet après-midi, il reste que vous êtes les
mieux placés pour faire pression sur Hydro-Québec, mais pas elle
toute seule, avec le syndicat d'Hydro-Québec. Ce n'est pas en vous
affrontant publiquement, mais en vous assoyant peut-être dans un
délai X pour trouver une formule. Je me souviens, j'ai
déjà été médiateur entre la CSN et la FTQ
dans la construction. Cela n'avait pas donné grand-chose, vous aviez
refusé le rapport.
Il me semble qu'il y a une possibilité, il y a une clé,
parce que vous avez quasiment les mêmes objectifs. Vous ne
réussissez pas à prendre l'initiative ni l'un ni l'autre. Moi, en
tout cas, je souhaite, M. le Président, que les deux syndicats,
c'est-à-dire pas les deux parce qu'il y en a trois syndicats
impliqués concernant Hydro-Québec, mais que le groupe
représenté par M. Chabot et le groupe représenté
par M. Lavaliée, s'assoient. Je suis convaincu que la commission serait
heureuse d'entendre une recommandation des deux groupes. Je me souviens qu'on a
déjà tenu une commission parlementaire - vous devez vous le
rappeler M. Lavallée - où on prenait un lunch au Café du
parlement un midi; on a réussi à asseoir Maurice Pouliot et vous
à la même table, puis vous avez fait une recommandation et elle a
été acceptée dans l'après-midi. Les parlementaires
à un moment donné, à part se picocher quand c'est le
temps... On ne demande pas mieux que le monde s'entende.
M. Lavallée: On le mentionnait, on est en discussion et on
veut bien, nous aussi, trouver un terrain d'entente. On n'est pas des ennemis,
ce sont nos confrères de la FTQ. D'ailleurs, on dîne ensemble
à midi. Je veux dire, on est capable de se parler sauf que les
écrits font en sorte que cela nous
inquiète. Là on est à un plancher, un maximum, un
quota de 500 et on se demande qu'est-ce que sera l'autre étape. Est-ce
que ce sera 300, 200? Je pense que ce débat entre nous, on va le faire,
on va définitivement essayer d'attacher tout cela ensemble pour
s'entendre. Le phénomène de la sous-traitance n'est pas
uniquement relié à HydroQuébec. C'est
généralisé, au moment où l'on se parle. C'est un
débat général qui se fait.
M. Chevrette: Je vous arrête. Là-dessus, je voudrais
qu'on fasse une distinction. Je pense qu'il y a une différence monstre
entre la sous-traitance à HydroQuébec et la sous-traitance dans
un hôpital. Tout le respect que j'ai pour vos arguments...
M. Lavallée: Je l'ai faite la différence. Ce n'est
pas de celle-là qu'on parle.
M. Chevrette: ...c'est le contraire qui s'est passé dans
le secteur public et parapublic. On parle de deux choses différentes.
Dans les hôpitaux, si vous voulez en parler, on va le définir une
fois pour toutes, pour ne pas mêler les deux aspects. On part de
l'étatisation complète pour revenir à la privatisation ou
à la sous-traitance alors qu'à Hydro-Québec on est parti
d'un ramassis de sous-traitants puis de petites compagnies pour en arriver
à l'étatisation. C'est différent. Je pense que ce n'est
pas le même point de vue parce que si vous aviez à me demander:
êtes-vous d'accord avec la sous-traitance dans le secteur public de la
santé, j'hésiterais en mosus, et je ne suis pas sûr que ma
réponse serait nuancée. Je vous dirais carrément
probablement non, tout de suite. Alors qu'à Hydro-Québec, cette
partie d'inverse, c'est parti de la sous-traitance avec des petites compagnies
pour en arriver à une| immense affaire, c'est là que mon coeur
balance en faveur des travailleurs. Ce n'est pas en faveur des structures,
c'est en faveur des travailleurs. Est-ce clair?
Pour ceux qui auraient le goût de me menacer dans les passages
comme ils ont fait hier parce que j'ai pris position, je ne l'accepterai pas
aujourd'hui. Je pense aux jobs des gars, qu'ils soient sous-traitants ou
à Hydro-Québec, je pense au gars qui gagne sa vie, est-ce clair?
C'est juste cela mon point de vue ici.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Joliette. J'aurais deux questions à vous poser,
M. Rivard ou M. Lavallé. M. Lavallée mentionnait tantôt que
vous répondiez toujours avec enthousiasme aux appels
d'Hydro-Québec quand ils étaient mal pris, dans les cas
d'urgence. Même que des fois, lorsque vous aviez des contrats dans des
régions données, vous délaissiez cela pour aller leur
donner un coup de main. Ce que j'aimerais savoir de vous: Dans le cas des
pannes que vous avez vécues durant les derniers mois, les
dernières années et compte tenu des délais plus ou moins
longs, pourriez-vous nous expliquer, vous autres comment vous avez vécu
ces pannes? A-t-on fait appel à vous ou utilisé vos services
d'une façon raisonnable dans ces cas-là? Y a-t-il eu, à
votre connaissance des cas, par exemple, dans des régions
précises, où le délai de réparation a
été beaucoup plus long parce qu'on n'a pas fait appel à
vos services?
Enfin, aurait-on pu, avec une meilleure planification des ressources,
éviter cette situation qui était grave dans certaines
régions?
M. Rivard (Jean-Paul): M. le Président, en effet, dans le
passé on avait recours à nos services à la planche, comme
on dit, quand il y avait des urgences. Nos membres étaient toujours
disponibles 24 heures sur 24. D'ailleurs, cela fait partie de leur travail et
cela implique du temps supplémentaire. Donc, en certaines circonstances,
c'était intéressant pour tout le monde, il ne faut pas se le
cacher. Dernièrement cependant il semble qu'une politique se
dégage - c'est dans la convention collective - que dans ces
circonstances on aura recours à la sous-traitance quand il n'y aura plus
de monteurs ou d'employés d'Hydro-Québec disponibles dans les
secteurs avoisinants. Des fois, dans le secteur avoisinant cela n'a pas
beaucoup de limite dans la province de Québec, cela voyage d'un bord
à l'autre. On a dû déplorer cela.
À Hull, lorsqu'il y a eu un verglas assez important, il y a une
couple d'années, où l'électricité a
été coupée dans certains cas jusqu'à sept ou huit
jours, on avait mis de côté ou presque totalement des
entrepreneurs. Les travailleurs, les employés d'Hydro-Québec
venaient d'un peu partout dans toute la province pour effectuer le travail. Et,
le problème que cela causait c'est qu'on avait à initier des
nouveaux venus qui venaient travailler là, des étrangers à
la région qui ne connaissaient pas le secteur et qui avaient donc des
difficultés à repérer les points de panne. Cela causait
certains problèmes pour la réparation des pannes. Pendant ce
temps, nos membres en place qui avaient toujours travaillé dans des cas
de pannes se trouvaient encore bénéficiaires
d'assurance-chômage et leurs services n'étaient pas requis,
excepté à la fin, pour quelques équipes
complémentaires, car il semblait qu'on n'en trouvait plus ailleurs.
Alors on a mal pris cela et on prend encore cela mal. Cela fait partie
de notre travail. On n'enlève pas le travail de quelqu'un qui reste
à Trois-Rivières et qui est venu travailler là; on ne
l'aurait pas mis
au chômage, il aurait quand même continué de
travailler à Trois-Rivières. C'est de là qu'on dit que des
injustices découlent de cela.
Dans son mémoire, à la page 22, le syndicat
d'Hydro-Québec dit que les inconvénients de la sous-traitance,
c'est que le donneur d'ouvrage n'a pas de contrôle sur la
sécurité des approvisionnements, sur la quantité, les
délais et les coûts. Je dis que c'est faux parce que le donneur
d'ouvrage dans le cas qui nous concerne c'est lui qui contrôle tout
l'approvisionnement. On installe son équipement, tout ce qu'il nous
donne comme approvisionnement et la preuve en a été faite par le
syndicat lui-même qui dit que le 14 juillet, il a manqué de
matériel. Donc, ce ne sont pas les entrepreneurs qui ont manqué
de matériel, puisque HydroQuébec contrôle la
totalité de l'approvisionnement, la quantité, les délais
et les coûts. C'est Hydro-Québec qui s'occupe de cela.
Le Président (M. Théorêt): M. Rivard,
à part le fait très grave d'enlever les emplois à vos
travailleurs dans la région où la panne existe, n'est-il pas
vrai, également, que déplacer des employés
d'Hydro-Québec provenant de régions aussi
éloignées, comme vous le mentionnez, que cela amène des
coûts supplémentaires tout à fait astronomiques pour les
mêmes réparations. Cela aurait pu être effectué
à un coût beaucoup moindre par vos gens, chez vous.
M. Rivard (Jean-Paul): Je ne veux pas parler de coûts.
Le Président (M. Théorêt): Je parle de frais
de déplacements, de repas, etc.
M. Rivard (Jean-Paul): Il est évident que si on
amène quelqu'un dans une région, on lui paie sa pension. Il faut
bien qu'il mange, le gars; il faut bien qu'il couche quelque part. Il ne
couchera pas dans son camion. Il est évident que si on prend quelqu'un
de l'extérieur et qu'on l'amène là, les coûts
diffèrent d'avec ceux des gens sur place. Bien oui. Ce n'est pas un
blâme que je fais au syndicat d'avoir donné ce travail. C'est
clair et net que si on prend quelqu'un de l'extérieur, cela coûte
plus cher.
Le Président (M. Théorêt): Si on prenait pour
exemple le cas qui est quand même exceptionnel du 14 juillet dernier,
qu'est-ce qui est arrivé dans ce cas-là pour les gens chez vous?
Est-ce que vous avez été appelés? Est-ce que vos membres
ont été appelés à travailler?
M. Rivard (Jean-Paul): On n'a pas été
appelés. Et, même si le syndicat dit qu'on était en
vacances, le système chez nous est tel que quand il y a des pannes,
même en cas de vacances, dans le temps de le dire, on a les
équipes nécessaires. Les travailleurs nous disent, avant de
partir en vacances, s'ils sont disponibles. On le sait. On connaît le
numéro personnel de tout le monde, on les rejoint dans le temps de le
dire et on peut mobiliser un tas d'équipes à une vitesse
incroyable. Mais, on n'a pas été demandés.
Le Président (M. Théorêt): Vous voulez
dire... Excusez. M. le ministre.
M. Ciaccia: Est-ce que j'ai bien entendu ce que vous me dites,
qu'à la suite des inondations du 14 juillet, on n'a pas fait appel
à vos services?
M. Rivard (Jean-Paul): On a fait appel à nous, mais
très peu.
M. Ciaccia: Et vous aviez des équipes disponibles pour
travailler?
M. Rivard (Jean-Paul): On aurait pu trouver des équipes,
en claquant des doigts.
Le Président (M. Théorêt): On n'a pas fait
appel à vous et on connaît des régions et des secteurs en
particulier, qui ont été jusqu'à trois et quatre jours
sans électricité?
M. Rivard (Jean-Paul): Exactement.
Le Président (M. Théorêt): Sept jours dans
votre comté, M. le ministre. Ma dernière question a trait
à l'article 19 où vous proposez un amendement. Vous dites dans
votre mémoire que vous proposez l'amendement suivant à l'article
19 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.
Celui-ci modifierait l'exception en regard de la construction des lignes de
transport exécutée par des salariés
d'Hydro-Québec.
Hier, les représentants de l'AECQ nous proposaient de rayer cette
exception. Pourriez-vous nous expliquer plus clairement la portée de la
modification que vous proposez et ce qui tomberait alors sous le
décret?
M. Rivard (Jean-Paul): À l'heure actuelle,
Hydro-Québec peut effectuer ses travaux et pas nécessairement
avec ses employés permanents. Elle peut embaucher pour effectuer les
travaux de construction de lignes de transport - les grosses lignes comme an
les appelle - et les lignes de distribution.
Ce que nous considérons comme un droit acquis - un droit acquis
entre guillemets, parce qu'il est question quand même de l'érosion
de notre champ d'application, de notre travail - et qu'on est prêt
à leur concéder, c'est le droit
d'effectuer certains travaux de construction sur les lignes de
distribution seulement.
L'amendement au champ d'application aurait donc pour effet de donner
exclusivement aux travailleurs de la construction, les travaux de construction
de lignes de transport et de postes de construction originale, de postes de
transformation, comme on le fait à l'heure actuelle.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie,
M. Rivard, M. Lavallée ainsi que vos autres collègues. Je pense
que les membres de la commission ont très bien compris votre message.
Nous vous souhaitons un bon retour chez vous.
Nous allons suspendre juste 30 secondes pour permettre à l'autre
groupe de s'installer.
J'invite l'Association des ingénieurs-conseils du Québec
à venir prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 48) .
(Reprise à 11 h 55)
Le Président (M. Théorêt): À l'ordre,
s'il vous plaît! Veuillez reprendre vos places. Nous reprenons les
travaux de la commission.
Nous recevons maintenant les représentants de l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec. Sachant fort bien que vous avez
assisté au déroulement de cette commission depuis le début
des travaux, je ne vous en rapellerai pas les règles. Je vous
demanderais quand même, M. le président Lalande, de bien vouloir
nous présenter ceux qui vous accompagnent, même si quelques
figures nous sont familières. '
Association des ingénieurs-conseils du
Québec
M. Lalande (François): M. le Président, je vous
remercie de l'occasion que vous nous donnez de nous exprimer devant votre
commission. Je vous présente à ma gauche immédiate, M.
Jean-Pierre Sauriol, vice-président de l'association; à sa
gauche, M. Martel, avocat; à ma droite, M. Préfontaine,
économiste. Au cours de la période de questions, chacun
interviendra à la mesure de sa compétence.
Je vais essayer d'être bref et précis. J'aimerais, avant
d'attaquer le vif du sujet, vous souligner qu'il y a plusieurs de nos firmes
qui sont représentées dans la salle. Qu'elles viennent de
Sainte-Foy, de Québec, de Laval, de Sherbrooke, de Montréal ou
d'ailleurs, les gens sont présents et sont conscients de la
situation.
L'AICQ représente la majorité des firmes de
génie-conseil au Québec. Elle représente également
la majorité des firmes de génie-conseil qui oeuvrent et font
affaires avec Hydro-Québec. Ces firmes représentent un ensemble
de PME réparties dans le territoire québécois. Ces firmes
jouent un rôle dominant dans leur économie régionale. Pour
la majorité de ces firmes, HydroQuébec est un partenaire
important et un client recherché.
De récentes consultations effectuées auprès d'un
certain nombre de nos membres nous fournissent des indications relatives
à la sous-traitance à Hydro-Québec. Ces indications nous
révèlent que certaines firmes pourraient éventuellement
être en péril. C'est pourquoi nous sommes aujourd'hui devant
vous.
Parlons des faits qui nous amènent à cette situation. De
1961 à 1986, soit 25 ans de sous-traitance, entre Hydro-Québec et
le génie-conseil, c'était une politique à succès,
tant pour le génie que pour Hydro-Québec. Pendant cette
période, le génie-conseil a acquis un "know-how" particulier et
reconnu. Cette sous-traitance a permis un transfert technologique avec
Hydro-Québec, et ceci dans les deux sens. Le génie-conseil
québécois est un atout important pour HydroQuébec, dans le
cas de l'obtention et de la réalisation de grands projets pour les
investissements étrangers faits au Québec.
Il s'agit de penser à Hyundai, Norsk Hydro, Pechiney et bien
d'autres. Le génie-conseil québécois est un partenaire
pour Hydro-Québec International, pour la réalisation de projets
à l'étranger. Malheureusement, ici se terminent nos 25
années de partnership. À la surprise de tout le monde, nous
arrive en 1986, et nous la constatons avec des chiffres en 1987... De 1986
à 1987, le génie conseil connaît une baisse importante des
montants facturés à Hydro-Québec. Cette baisse est de
l'ordre de 37 %, selon notre sondage. Alors que, pendant la même
période de 1986 à 1987, les investissements à
Hydro-Québec ont augmenté de 25 %.
Je vous présente un résumé - qu'ils n'ont pas
encore sur ce tableau - de la situation et ce sont à peu près les
seuls chiffres que je vais vous mentionner dans tout le rapport. En 1986,
Hydro-Québec investit 386 000 000 $ dans le secteur production. En 1987
c'est 409 000 000 $ soit une augmentation de 23 000 000 $. En transport, en
1986, 318 000 000 $ d'investis; en 1987, 530 000 000 $, une augmentation de 212
000 000 $. En distribution, en 1986, 522 000 000 $; en 1987, 586 000 000 $, une
augmentation de 64 000 000 $. La somme de ces trois augmentations M. le
Président, représente une augmentation d'environ 300 000 000 $
d'investissements par Hydro-Québec. Qu'est-ce que le
génie-conseil a fait dans ce système-là? En 1986 le
génie-conseil a rendu des services à Hydro-Québec pour une
valeur d'environ 40 000 000 $. Il s'agit de onze firmes, pas toutes les firmes.
Selon
le sondage que nous avons, 40 000 000 $ pour onze firmes. Ces
mêmes onze firmes, en 1987, ont réalisé 24 000 000 $ de
services, soit une baisse de 16 000 000 $. On a parlé
d'hommes-années - j'entendais M. le député de Joliette
tantôt parler des hommes-années - qu'est-ce que ça
représente 40 000 000 $ pour le génie-conseil? Cela
représente 800 hommes-années en 1986. En 1987 24 000 000 $
représentent 480 hommes-années, soit une diminution de 320
hommes-années, d'où notre inquiétude, M. Le
Président,
J'aimerais vous souligner, rapidement dans des tableaux, des tendances.
Tout le monde a sa copie.
Le Président (M. Théorêt): M. le
président, chaque membre a sa copie.
M. Lalande: M. le Président, la courbe supérieure
du tableau qui est indiquée en vert, ce sont des honoraires ou des
services rendus à Hydro-Québec sur la période 1981
à 1987. C'est un relevé de neuf firmes et non de onze firmes.
Comme on l'a vu tantôt, les chiffres ne sont pas les mêmes. Mais,
au moment où les graphiques ont été faits, c'est
l'information que nous possédions. Depuis ce temps-là on a
été capable d'ajuster le texte, mais non les graphiques.
Cependant, la courbe qui est en bas en rouge représente les
investissements d'Hydro-Québec. Sans vouloir faire une longue
discussion, vous voyez les deux tendances. La tendance des investissements
d'Hydro en 1981 part d'un seuil d'à peu près 2 700 000 000 $,
descend en 1986 à un seuil inférieur à 1 500 000 000 $ et
remonte à un seuil au-delà de 3 000 000 000 $ en 1990. La
tendance des services rendus par le génie-conseil à
HydroQuébec part d'un seuil de 30 000 000 $ en 1981 et descend à
un seuil inférieur à 20 000 000 $ en 1987. La question, M. le
Président: Où est-ce qu'on s'en va? Hydro monte, dépense,
engage. Nous on s'en va dans le trou. C'est ça le message.
Deuxième graphique. M. le Président, on a en rouge encore
la courbe des investissements d'Hydro-Québec et en vert la courbe de la
main-d'oeuvre d'Hydro-Québec. Sans vouloir faire un chiffre de
précision, je tiens pour acquis les informations qui nous sont soumises,
qui nous sont présentées et qui nous sont disponibles. M. le
Président, vous remarquerez qu'entre 1981 et 1984 la courbe de
main-d'oeuvre d'Hydro-Québec est relativement stable et horizontale
alors que les investissements chutent d'une façon dramatique de 700 000
000 $ mais, par contre, on a la même main-d'oeuvre. De 1983 à
1986, c'est une chute très importante des investissements et la
main-d'oeuvre se maintient encore à l'horizontale. M. le
Président, on est rendu en 1987. On ne connaît pas les chiffres
précis de la main-d'oeuvre en 1987. Mais, en présupposant que les
informations transmises par Hydro-Québec sont valables, la tendance se
maintiendrait à l'horizontale. Cependant, l'application des clauses 34
et des lettres afférentes aux clauses 34 nous portent à croire
que la main-d'oeuvre... et c'est notre crainte actuellement c'est qu'Hydro
engage dans des secteurs où nous avons des disponibilités.
D'autres syndicats, d'autres intervenants vous ont soumis les mêmes
craintes. L'important c'est qu'à partir de 1987, la courbe qui est
là, c'est une courbe qui était présentée par des
documents qui étaient disponibles. Ce n'est pas notre prévision
actuellement.
Si on prend le graphique 3, M. le Président, rapidement, la
première colonne dans les groupes de 3, la première colonne
représente le secteur privé; la deuxième, le secteur
public et la troisième, le secteur Hydro-Québec. Si on peut
imaginer une courbe, en prenant seulement les informations qui ont trait au
secteur privé, on se rend compte que le génie-conseil de 1981
à 1986 a augmenté son rôle dans le secteur privé.
Faisons abstraction des chiffres et des pourcentages, c'est l'image et c'est le
message qu'on veut rendre. Lorsqu'on prend, dans le domaine public, tout ce qui
est public à part Hydro-Québec, on se rend compte
également que le génie-conseil s'occupe de son affaire,
développe des marchés et l'importance du génie-conseil
dans le public est plus importante de 1981 à 1983 et encore plus
importante en 1986. Ce qui est curieux, c'est que quand on arrive à
Hydro-Québec, notre rôle diminue. C'est la raison pour laquelle
nous sommes ici aujourd'hui. Pourquoi tous les marchés, même dans
les périodes de crise économique - on les voit là-dedans -
même dans ces périodes, nos services sont demandés par
beaucoup, mais pas à Hydro-Québec.
Le dernier tableau, M. le Président -parce que je ne veux pas
prendre trop de temps pour les tableaux - la courbe qui est en vert, ce sont
des investissements d'Hydro-Québec. C'est la même courbe qu'on a
vue en rouge tantôt, mais sur échelle verticale un peu
réduite de façon à être capable d'intervenir aux
autres niveaux. La ligne rouge est la ligne de la main-d'oeuvre des
ingénieurs employés d'Hydro-Québec. Les chiffres qui sont
là-dessus sont les chiffres disponibles la semaine dernière. Vous
avez eu, depuis ce temps, d'autres informations. Il y aurait lieu de corriger
les graphiques en fonction de cela.
La troisième courbe, soit celle en bleu, la courbe qui est
inférieure est celle qui représente la main-d'oeuvre chez le
génie-conseil. On a vu qu'à cause de son efficacité
tantôt, le génie-conseil a développé des
marchés dans le secteur privé, dans le secteur public hors Hydro,
il a baissé sa
main-d'oeuvre mais il a augmenté sa rentabilité. De 1986
à 1987, vous remarquerez une augmentation très importante dans le
domaine du génie-conseil. C'est tout simplement parce que le
génie-conseil s'est développé des marchés. C'est la
facilité que nous avons de travailler dans d'autres champs d'action.
M. le Président, que nous réserve l'avenir face à
une telle réalité? Il y a bien sûr une baisse d'emplois
notable ! de 320 hommes-années comme on a vu tantôt, mais ce qui
nous inquiète davantage, c'est l'application et les retombées de
l'article 34 et ce qui va se passer dans l'avenir avec ces conditions. Cette
constatation de pertes d'emplois, en partie reliée à l'article
34, nous indique une tendance alarmante pour l'avenir du génie-conseil
au Québec. À quoi doit-on s'attendre pour l'avenir?
Depuis 25 ans, la sous-traitance s'est avérée rentable
pour le génie-conseil et Hydro-Québec. Pourquoi ne le serait-elle
plus aujourd'hui en 1987 et dans les années qui s'en viennent? La
sous-traitance évite d'avoir des surplus de main-d'oeuvre. Comme
Hydro-Ontario a pu le réaliser, comme Atomic Energy of Canada a pu le
réaliser avec des mains-d'oeuvres surspécialisées
très compétentes, mais qui ont manqué de projets à
confier à ces gens, il arrive un moment donné où on a une
saturation de projets. Comme les emplois sont garantis, on ne peut pas
libérer cette main-d'oeuvre. On est tenu avec cette main-d'oeuvre.
Par contre, le génie-conseil a |diversifié son travail, a
diversifié sa main-d'oeuvre grâce à la
variété de sa clientèle nationale et internationale. La
sous-traitance permet l'élaboration de solutions et de techniques
nouvelles. Pourquoi Hydro-Ontario adopte-t-elle maintenant une politique de
sous-traitance alors que, depuis toujours, elle a utilisé la politique
du faire au lieu de la politique du faire-faire? Comme j l'a bien
mentionné M. Ciaccia lors de ses remarques d'ouverture, le gouvernement
de l'Ontario a su reconnaître les avantages de la politique de
sous-traitance à Hydro-Québec qui a contribué à
l'émergence du génie-conseil. Hors les frontières
Hydro-Québec . dans les domaines hydroélectriques, que nous
réserve le futur?
De 1986 à 1989, Hydro-Québec prévoit augmenter ses
investissements de 110 %, soit afin de passer de 1 400 000 000 $ à 3 000
000 000 $ en 1989. Compte tenu de l'augmentation des investissements!
d'Hydro-Québec en 1986-1987, compte tenu de la baisse des montants
facturés par le génie-conseil à Hydro-Québec durant
la même période, soit une baisse de 37 % suivant notre
relevé, M. le Président, compte tenu de la baisse d'emplois
affectés à des travaux d'Hydro-Québec, soit un minimum de
320 emplois, compte tenu de l'augmentation du nombre d'ingénieurs et de
techniciens à Hydro-Québec, compte tenu de l'application de
l'article 34 de la convention collective d'Hydro-Québec, compte tenu des
tendances observées au cours des derniers mois dans plusieurs contrats
liant le génie-conseil à Hydro-Québec - on pourrait
revenir Ià-dessus pendant la période de questions - vous
conviendrez avec nous qu'il y a lieu de nous interroger sur la situation.
Les firmes de génie-conseil représentent un atout
important à Hydro-Québec, nous en sommes convaincus. L'expertise
des firmes permet de maintenir une masse critique qui assure de répondre
à des besoins ponctuels, soit en période de pointe, soit en
période de travaux spécialisés, une expertise forte et
vivante. Qu'on pense au programme de biénergie. C'est le
génie-conseil qui a contribué en partie à son
succès. C'est Hydro-Québec qui en retire les revenus et c'est
tout à fait correct. C'est cela un partnership. Chacun fait son travail
et l'économie s'en porte mieux.
La sous-traitance à Hydro-Québec a toujours
été pour le génie-conseil un stimulant à
l'efficacité. Chacun doit faire mieux que son concurrent s'il veut
être classé dans un dossier spécifique. La concurrence
génère la qualité, génère
l'efficacité, génère la rapidité. Le maintien de la
notoriété du génie-conseil québécois en
matière hydroélectrique est capital pour notre industrie. Notre
participation active dans la sous-traitance avec Hydro-Québec permet au
génie-conseil de conserver une expertise capable de répondre
à la clientèle privée dont les projets doivent être
réalisés dans des délais très serrés. Elle
permet également de représenter très bien les
investisseurs étrangers auprès d'Hydro-Québec et qu'on se
rapporte aux faits et aux compagnies que j'ai mentionnés tantôt.
Cette notoriété nous rend des partenaires très attrayants
dans nos "joint ventures" à l'étranger.
La sous-traitance à Hydro-Québec permet à notre
industrie de demeurer forte pour assurer le virage technologique dans les
secteurs industriels aussi variés que l'aérospatiale, la
biotechnologie et les systèmes experts. Cette notoriété
permet également à nos firmes des spécialisations
distinctes pour bien se positionner sur le marché national et
international, afin de pouvoir réaliser des projets dans d'autres
secteurs d'ingénierie.
Alors que les gouvernements fédéral et provincial sont
prêts à investir des centaines de millions pour créer de
toutes pièces des industries de pointe et de forte technologie, voici
que, du revers de la main, M. le Président, on est en train d'affaiblir
une industrie de 800 000 000 $ par année, répartie sur tout le
territoire québécois. Pourquoi affaiblir le génie-conseil
alors qu'actuellement l'industrie est dans une
concurrence telle, qu'on devrait tout mettre en oeuvre pour la
consolider davantage? Les firmes québécoises ont
émergé comparativement aux firmes ontariennes, en partie
grâce à la notoriété acquise par des travaux
d'Hydro-Québec et par leur aggressivité dans les
différents marchés. Hydro-Québec et Hydro-Ontario
échangeant leurs politiques, les firmes de génie-conseil
d'Ontario prendront bientôt la place des firmes de génie-conseil
québécoises.
Les mégaprojets se font de plus en plus rares. L'endettement des
pays en voie de développement limite la possibilité des
marchés étrangers. Devant une concurrence effrénée
sur ces marchés, même limitée, de tous les pays, y compris
les firmes de plus en plus présentes - par exemple, te Brésil, la
Corée du Sud et l'Europe de l'Est - une concurrence très forte
des firmes américaines et japonaises, allemandes, italiennes,
françaises dans les projets de contenu à haute technologie,
l'ouverture des marchés par le libre-échange - ce n'est quand
même pas vieux cette discussion - et les pourparlers du GATT qui vont
libéraliser les entrées de services et nécessiter une
industrie très forte, M. le Président, le maintien d'une
industrie forte est bénéfique pour le succès de
l'économie québécoise, en termes d'effets
d'entraînement et en termes de présence pour tout type de
clientèle. (12 h 15)
À titre de conclusion - et je termine là-dessus - en mars
dernier le président d'Hydro-Québec mentionnait à cette
même commission que la politique de sous-traitance pratiquée
depuis toujours par Hydro-Québec n'avait pas changé. Pourtant,
comme M. le ministre Ciaccia l'a bien dit dans ses remarques
préliminaires, les clauses 34, telles que modifiées n'auront plus
l'équilibre de cette politique de sous-traitance qui était
jusqu'alors assurée. Devant cette situation, nous vous demandons
d'aviser Hydro-Québec qu'elle doit, et je vous cite:
Premièrement, cesser immédiatement l'embauche de nouveau
personnel permanent et temporaire. Deuxièmement, ne plus ajouter,
à partir de maintenant, aucun nouveau nom sur la liste d'appel des
employés temporaires. Troisièmement, remplir sa mission - et on
parle à Hydro-Québec - de fournir l'électricité aux
Québécois dans le cadre d'une saine gestion financière
désarmais à l'aide de ses ressources humaines actuelles, tout
besoin additionnel devant être satisfait via la sous-traitance.
En un mot, il faut freiner au plus tôt l'application des nouvelles
clauses 34 et des lettres d'entente qui s'y rattachent. Cette solution nous
apparaît souhaitable parce que réalisable. Elle comporte les
avantages suivants. Premièrement, elle préserve dans leur emploi
tous les employés d'Hydro-Québec actuels. Deuxièmement,
elle permet la création d'emplois nouveaux dans l'industrie
privée. Troisièmement, elle assure l'efficacité et la
productivité essentielles à une saine gestion financière.
Quatrièmement, elle perpétue les transferts technologiques entre
les deux partenaires traditionnels que sont le génie-conseil et
Hydro-Québec.
À court terme, le moratoire devrait être remplacé
par une véritable politique du faire-faire à Hydro-Québec.
Cette politique reste cependant à élaborer. Pour être
clair, elle doit procéder, à notre avis, non pas à une
scission artificielle entre la construction et l'entretien, mais bien à
une analyse minutieuse des besoins, présents et futurs, de l'entreprise
en regard des ressources humaines disponibles. Le conseil d'administration
d'Hydro-Québec devra se livrer en toute priorité à cette
démarche afin que l'équilibre soit rétabli et que la paix
industrielle revienne à Hydro-Québec et chez ses partenaires.
Pendant ce temps, l'Assemblée nationale devra avoir abordé
et réglé le problème de l'article 45 du Code du travail.
Cet article doit être remanié pour tenir compte de la
réalité socio-économique actuelle. II ne devra plus
être un empêchement à la sous-traitance.
M. le Président, cette solution est un compromis important pour
l'industrie du génie-conseil, mais nous apparaît comme un
rapprochement souhaitable des positions diamétralement opposées
qui ont été exprimées devant cette commission. C'est par
ce seul cheminement qu'un nouveau partnership de 25 ans pourra être
réalisé.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. Lalande.
Sachant qu'il y a plusieurs parlementaires qui veulent intervenir, je vais donc
céder immédiatement la parole au ministre de l'Énergie et
des Ressources et vous demander d'être plus circonscis dans vos
réponses.
M. Ciaccia: Je vous remercie, M. Lalande, pour l'exposé
que vous venez de faire devant les membres de cette commission. Dans un premier
temps, vous nous avez fait voir les liens qui ont été
tissés avec le temps entre les ingénieurs-conseils et
Hydro-Québec. Ces liens ont permis aux firmes d'ingénierie
d'acquérir une expertise dans le domaine de
l'Hydroélectricité et une renommée mondiale. C'est
là un fait. Vous dites aussi, qu'à la suite de la dernière
récession, l'industrie du génie-conseil québécois a
fait preuve d'une grande capacité d'adaptation en réorganisant sa
clientèle, d'une part, et en contrôlant ses coûts, d'autre
part.
Toutefois, vous affirmez que les firmes de génie-conseil ne
peuvent survivre sans la sous-traitance, notamment celle d'Hydro-Québec.
D'après vous, la sous-traitance est
la seule solution viable qui permette à l'entrepreneurship
québécois d'atteindre son potentiel. C'est dans cette perspective
que vous nous décrivez les dispositibns des conventions collectives dont
nous parlons depuis deux jours. Elles pourraient avoir pour effet de
réduire le recours au service du génie-conseil. Vous dites
craindre en conséquence un recul des firmes d'ingénierie sur les
marchés interne et externe et quand vous nous dites que les firmes
ontariennes vont prendre la place des firmes québécoises, je peux
vous dire, pour le moins, que c'est inquiétant pour nous. !
Votre mémoire explique très jbien les positions de votre
association. On retient, entre autres, que vous auriez été ni
plus ni moins les seuls à faire les frais de la diminution des
investissements d'Hydro-Québec. Dans la recherche d'une position
d'équilibre, je crois que c'est là un élément
important. Je pense aussi que tout le monde sera d'accord avec vous pour dire
que l'industrie du génie-conseil doit pouvoir renouveler sa base
concurrentielle, comme vous le soulignez. Pour cela, elle doit pouvoir profiter
des outils disponibles sur le marché domestique. Hydro-Québec est
l'un de ces outils.
Je remarque que les intervenants favorables à la sous-traitance
que nous avons entendus jusqu'ici demandent des modifications plus ou moins
importantes à l'article 34 d'une prochaine convention collective avec
les employés d'Hydro-Québec, mais vous vous contentez, pour votre
part, d'exprimer des craintes quant à j l!avenir. Corrigez-moi, mais je
ne crois pas que vous recommandiez spécifiquement de retirer ou de
modifier les clauses portant sur le travail à forfait,
particulièrement celles qui concernent le syndicat des ingénieurs
professionnels d'Hydro-Québec. Pourriez-vous m'expliquer ce que cela
veut dire? Est-ce que, pour vous, cette nouvelle clause ne fait que susciter
des inquiétudes ou repr'ésente-t-elle un véritable
changement dans le partage du travail?
M. Lalande: M. le Président, j'aimerais, à ce
moment-là, demander à Me Martel de répondre à votre
question, parce que vous citez l'intérêt de la clause 34 et du
Code du travail et M. Martel est mieux placé que moi pour y
répondre.
M. Martel (Jean-François): Pour répondre
directement à votre question, M. le ministre, les clauses 34 telles que
modifiées lors de la dernière ronde de négociations
constituent effectivement un changement substantiel en ce qui a trait à
la possibilité pour Hydro-Québec d'avoir recours à la
sous-traitance ou non. Je pourrais vous en faire une démonstration
détaillée si besoin en est. Mais il faut tenir compte d'un
contexte, d'un engagement écrit et pris par Hydro-Québec dans le
cadre de conventions collectives conclues avec des syndicats
représentant ces employés. Ce que l'association vous dit, c'est
que, par conséquent, il faut freiner aujourd'hui, dès maintenant,
l'application de ces clauses. Freiner veut dire ne pas priver les
bénéficiaires de ces dispositions de ce qu'ils ont acquis depuis
qu'elles existent. Il faut arrêter notamment, parce qu'il n'y a pas que
la clause 34, il y a les lettres d'entente qui s'y greffent, notamment les
lettres d'entente 19, 20 et 21 qui parlent en termes exprès d'embauche
additionnelle, de création de postes permanents additionnels et de
l'établissement d'une liste de rappel d'employés temporaires.
Ces mouvements, il faut les arrêter maintenant. C'est ce que
prétend l'Association des ingénieurs-conseils du Québec.
C'est ce que l'on appelle moratoire. Pendant que le moratoire sera en effet, il
faudra que le conseil d'administration d'Hydro-Québec se penche sur
toute la question de la sous-traitance, détermine et élabore une
politique. Selon nous, la première étape de cette politique,
c'est un examen minutieux des besoins présents et futurs
d'Hydro-Québec en regard de la main-d'oeuvre, des effectifs humains
disponibles sur le marché interne comme externe.
Cela ne se fait pas, selon nous, à partir d'un principe que nous
qualifions d'artificiel: la construction d'un côté; l'entretien de
l'autre. La réalité à Hydro-Québec a toujours
été différente. D'ailleurs, elle a été
écrite différemment dans les conventions collectives où,
à l'article 34.03, par exemple, on ne parie pas de construction, on ne
parle pas d'entretien, on énumère des fonctions, des tâches
précises et c'est par ce biais-là que les parties à
HydroQuébec ont décidé de ce qui devait être interne
et ce qui pouvait être externe. Alors, ce processus-là, cette
première étape d'identification des besoins, le conseil
d'administration d'Hydro-Québec devrait s'y livrer, selon nous, et,
à partir de cet examen, de cette analyse, en élaborer une
politique. Cette politique, selon nous, devrait faire état d'un seuil
critique de masse de main-d'oeuvre interne, ce qui est requis à
l'interne à Hydro-Québec pour remplir sa mission.
D'autres intervenants vous ont dit à peu près la
même chose, mais en des termes différents. Quand, par exemple, le
Syndicat professionnel des ingénieurs-conseils d'Hydro-Québec
vous parle d'être un client averti des besoins nécessaires au
maintien d'un "know how" technologique à l'interne à
HydroQuébec, c'est une manière de traduire la même
réalité. Nous parlons d'un seuil critique de masse de
main-d'oeuvre à l'interne.
Une fois que ce seuil critique aura été
établi et déterminé à Hydro-Québec,
c'est cela qui sera la base de la politique de sous-traitance pour l'avenir.
Là, vous n'aurez plus besoin du moratoire, parce que vous aurez assis
solidement une politique de sous-traitance et elle devra se traduire dans les
nouvelles dispositions des conventions collectives à conclure plus
tard.
Le Président (M. Théorêt): M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je ne veux pas entrer dans un débat juridique
sur l'interprétation de la clause 34. Mais, hier, les ingénieurs
d'Hydro-Québec, à la suite d'une question que je leur avais
posée, ont répondu que c'étaient des objectifs, que ce
n'était pas une obligation légale. Est-ce que cela veut dire
qu'on pourrait maintenir, en ce qui concerne les ingénieurs-conseils,
l'article 34, mais que la gérance d'Hydro-Québec pourrait
décider quels contrats devraient aller aux ingénieurs-conseils et
quels travaux devraient être faits à l'interne?
Est-ce que c'est une décision d'Hydro-Québec ou est-ce
que, maintenant que l'article 34 a été adopté, maintenant
que les gestionnaires ont pris cette décision,, ils sont liés par
cela? Quelle est la situation, d'après vous?
M. Martel: Je ne partage pas l'interprétation soumise hier
par M. Potvin, le représentant du Syndicat professionnel des
ingénieurs-conseils d'Hydro-Québec sur les effets de la clause 34
qui a été ajoutée à leur convention collective. Il
nous ont dit qu'il s'agit maintenant d'une obligation morale, le texte
inséré dans la convention collective. On pourrait
prétendre qu'à l'époque de la coutume qui existait
auparavant, selon lui - puisqu'il nous dit que l'article 34 actuel ne fait que
réfléter une coutume établie auparavant - c'était
une obligation morale mais, aujourd'hui, puisque c'est écrit dans le
contrat collectif, on ne peut certainement pas prétendre, à mon
avis, qu'il ne s'agit que d'une obligation morale d'Hydro-Québec. Il
s'agit d'une obligation légale d'Hydro-Québec, quand c'est
couché en des termes aussi exprès dans la convention
collective.
M. Ciaccia: Maintenant qu'Hydro-Québec a pris la
décision d'inclure l'article 34 dans la convention collective, pour
arriver à ce que vous me dites, aux objectifs que vous cherchez, est-ce
que cela prend un changement à l'article 34 ou est-ce que cela peut se
faire à l'intérieur de l'article 34? (12 h 30)
M. Martel: Cela prend d'abord un moratoire sur l'application de
la clause 34. Un moratoire, cela implique qu'on n'efface pas ce qui s'est
passé avant, qu'on ne retire pas les emplois qui ont été
donnés à l'interne. C'est pour cela qu'on vous dit que, pour
nous, c'est un compromis énorme. On ne vous demande pas de renier le
contrat signé, il est signé. On vous dit: Cessez-en aujourd'hui
l'application. Qu'on cesse l'embauche. Qu'on cesse l'embauche d'employés
temporaires et le rappel à l'ouvrage en vertu des listes de rappel
nouvellement créées. Pour l'instant, qu'il y ait un
moratoire.
M. Ciaccia: Si Hydro-Québec prenait cette décision,
à la suite de la commission parlementaire où Hydro-Québec
ayant entendu tous les mémoires, toutes les représentations et
les conséquences de cette clause pour l'avenir, est-ce qu'elle est en
mesure de prendre cette décision? Juridiquement, est-ce qu'elle peut
décider qu'il va y avoir un moratoire sur la clause 34? Est-ce que les
ingénieurs ne pourraient pas dire: Écoutez, vous avez
signé la clause 34, il faut que vous la respectiez? Quelle est la
situation?
M. Martel: On est ici - et je pense que plusieurs membres de la
commission parlementaire l'ont souligné à juste titre,
d'ailleurs, hier et aujourd'hui - en commission parlementaire. On est ici dans
le seul forum qui puisse permettre de régler vraiment la question.
Devant un tribunal, on ne pourrait faire autrement que de plaider la convention
collective. Devant l'Assemblée nationale, devant une commission
parlementaire, on peut essayer de rechercher une solution profonde du
problème sérieux qui nous préoccupe tous. On peut, et
c'est ce à quoi les divers parlementaires se sont employés
jusqu'à maintenant, requérir dans cet exercice la collaboration
de tout le monde. Quand l'Association des ingénieurs-conseils du
Québec vous parie d'un compromis, on ne peut pas être seuls pour
danser. L'association est prête, elle, à faire son compromis. J'ai
entendu des syndicats qui ont été incités à faire,
eux aussi, un compromis, j'ai entendu des représentants d'autres
associations d'employeurs qui, eux aussi, ont été invités
à participer à un compromis. J'imagine que vous allez aussi
demander à Hydro-Québec de participer à un compromis
à un moment donné.
Le Président (M. Théorêt): M. le
ministre.
M. Ciaccia: Pendant quelques instants, je voudrais parler des
avant-projets. Est-ce que vous pourriez nous parler davantage des études
d'avant-projets réalisées par les firmes
d'ingénieurs-conseils au Québec? Est-ce qu'elles constituent un
élément important qui leur permettrait de prendre position sur
les marchés internationaux? Si c'est le cas,
pouvez-vous me donner des exemples? Que se passerait-il si les
études d'avant-projets n'étaient plus confiées à
des firmes d'ingénieurs-conseils? Parce qu'hier, à la suite d'une
question sur la clause 34 et les avant-projets, encore une fois, la
réponse qu'on m'a donnée, c'est que la situation n'a pas
changé. Les avant-projets qui leur ont été confiés
auparavant sont les mêmes qui leur seront maintenant confiés.
Est-ce que vous pourriez en expliciter la signification, l'importance et les
conséquences pour les firmes d'ingénieurs-conseils?
M. Lalande: M. le ministre, j'aimerais répondre sous deux
volets. Voici le premier volet: si Hydro-Québec, si les syndicats qui
sont partie contractante à la clause 34, si le gouvernement, si les
trois parties étaient d'accord pour enlever la clause 34, on
applaudirait tous bien fort. Mais cela ne règle pas le problème.
Il y a des engagements. On est des professionnels. On aime qu'un engagement
pris soit tenu. On va revenir là-dessus. Votre question sur les
avant-projets, M. le ministre et messieurs les membres de la commission
parlementaire, est fondamentale. C'est le nerf de la guerre. Si on ne fait pas
d'avant-projet, on ne fera pas de projet.
Sur le marché mondial, la concurrence se fait d'abord et avant
tout par l'avant-projet. Quand on forme un consortium, qu'on se cogne la
tête sur les murs pour trouver, premièrement, la solution
économique la plus plausible dans un projet donné, on fait ce
qu'on appelle un "jam session" pour sortir le jus des têtes de tout le
monde qui, éventuellement, va participer à cela. On forme des
équipes multidisciplinaires: économistes, avocats, comptables,
ingénieurs, recherchistes. On a beaucoup de monde. Il faut créer
l'attrait. Il faut vendre notre salade. L'avant-projet est l'étape
où l'on vend. Si on n'a pas d'avant-projet dans le marché mondial
actuellement, on dit qu'on repassera, qu'on attendra la prochaine occasion.
L'avant-projet est fondamental.
Dans un autre ordre d'idées, je ne peux pas m'imaginer quelqu'un
qui demanderait à un architecte de lui faire une esquisse et, une fois
que l'esquisse est faite, se tournerait de bord et irait en voir un autre en
lui disant de lui faire un plan de cette bâtisse-là. Il n'y a pas
de coordination. Il n'y a pas de continuité de i pensées,
d'homogénéité de raisonnement. Il manque quelque chose
dans la boîte à poux. C'est clair de même. Les avant-projets
sont fondamentaux. Ce sont le nerf de la guerre. Il faut qu'on en fasse au
Québec. Il faut qu'on maintienne notre base technologique. Il faut qu'on
participe à la décision. En même temps, le
propriétaire, le donneur d'ouvrage, que ce soit Hydro-Québec,
dans le cas présent, ou tout autre donneur d'ouvrage, va travailler
conjointement avec nous. On va l'informer de l'évolution du dossier. Le
donneur d'ouvrage va donner ses critères, ses besoins, il a les
données. Et c'est à partir de là qu'on va présenter
un avant-projet, une réalité possible et économique. Je ne
sais pas si cela répond à votre question, M. le ministre?
M. Ciaccia: Partiellement. Vous m'avez fait la
démonstration qu'il vous faut l'avant-projet pour pouvoir continuer dans
le projet, mais si vous avez développé une expertise
internationale, et vous avez certaines firmes d'ingénieurs-conseils qui
oeuvrent dans plusieurs pays, est-ce qu'avec l'expertise que vous avez
développée, vous pouvez aller chercher des avant-projets dans
d'autres pays? Est-ce qu'il y a un effet entre ne pas avoir l'avant-projet,
ici, et votre expertise internationale et vos contrats internationaux?
M. Lalande: Vous savez, M. le ministre, on ne peut exporter que
sa compétence. Nous, on vend de la matière grise, on vend ce qui
est entre les deux oreilles et en arrière des deux yeux. C'est ce qu'on
vend. De temps en temps, quand on est compétents un peu plus, on est
capable de réaliser le projet sur un bout de papier. Il faut,
nécessairement, pour vendre pleinement notre rôle
d'ingénieur, faire ici des avant-projets dont on pourra dire à
l'étranger: Voici, on a fait, des avant-projets et non seulement, on en
a fait chez-nous, mais à partir du moment où on nous a
confié un avant-projet, on nous a donné le projet à
réaliser et voici les photos de nos réalisations.
Je dois vous nommer quelques firmes qui ne sont pas les miennes. La
firme SNC, qui a été un élément dominant dans la
construction du barrage Daniel-Johnson. Au moment où SNC a eu ce mandat
elle n'avait peut-être pas la pleine compétence pour le faire.
Elle a eu la sagesse de s'associer à un gars plus compétent. Ils
ont réalisé ensemble, conjointement, ce travail gigantesque. Il y
a eu un transfert de technologie entre les Européens, qui étaient
ses partenaires, et la société SNC. Le transfert s'est tellement
bien fait que, depuis ce temps-là, depuis 25 ans et bien avant, parce
que SNC était connue avant cela, mais, au moins, depuis ce
temps-là, cette firme a vendu dans le monde des projets semblables, mais
elle a aussi vendu d'autres projets. Elle a vendu des projets nucléaires
qui n'ont rien à voir avec le barrage Daniel-Johnson. Mais, cela a
donné quoi? C'est que la société a acquis un "know-how",
une méthode, une façon de travailler qui a satisfait le client
qui a rendu des services pour lesquels elle était retenue. Le transfert
de technologie s'est fait entre les deux firmes, fières de cette
compétence. Cette firme-là est sur le marché mondial,
aujourd'hui. Elle dépend peut-être moins
d'Hydro-Québec. Elle est plus indépendante
d'Hydro-Québec. Mais, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier, c'est
que toutes les firmes au Québec, n'ont ni la grosseur, ni le potentiel
de SNC.
On va prendre Lavalin. Une autre firme qui est bien connue. Lavalin a
fait de grandes réalisations, elle a travaillé à la baie
James, dans les climats difficiles tels que les climats nordiques, avec des
masses de monde importantes, autant des ingénieurs que des techniciens,
autant des hommes de métier que des professionnels, des employés
du domaine de la santé, pour ne pas dire des écoles. Autrement
dit, il y a une ville complète, dont elle a été
gérante. Non pas seule, Hydro-Québec était
présente, soit par le biais des organismes de la Baie James, soit
d'elle-même, mais elle était présente et Lavalin
était là. Forte de cette réalisation, Lavalin a vendu
quand même un petit monument en Algérie qui valait quelques
milliards.
Ce n'est pas tout, on va parier encore de ces deux grosses firmes. On va
aussi dire que ces deux firmes-là, en compétition aussi
féroce qu'on peut les trouver, ont quand même eu le culot de
former, avec une troisième, un partnership pour aller travailler en
Chine, les trois gorges. Cela montre qu'à un moment donné,
même si aujourd'hui on peut se concurrencer d'une façon
très féroce, M. le ministre, on est quand même capable,
demain matin, de se réunir et de travailler. C'est ce qu'on appelle le
sens pratique du génie-conseil.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a eu une baisse des avant-projets
faits par marché externe depuis les deux dernières
années?
Une voix: Énorme.
M. Lalande: M. le ministre, je vous rappelle un tableau qui vous
a été présenté. Le génie-conseil
déplore malheureusement que la masse de travaux qui sont mis... Notre
responsabilité à Hydro-Québec diminue d'une façon
alarmante et je vais aller plus loin que cela et ce n'est reflété
nulle part, mais je vous ai dit tantôt qu'on reviendrait à une
partie et l'occasion m'en est donnée. M. le ministre, quand - et je vous
donne cela à titre d'exemple, cela ne se concrétise pas dans mon
bureau - on me dit: M. Lalande, vous avez un contrat et vous allez
réaliser des travaux pour 1 000 000 $ d'honoraires. Alors, on saute au
plafond. Tout le monde est heureux. On commence les travaux et, au bout de
trois, quatre ou cinq mois, on a terminé les préliminaires, les
plans et devis et on arrive à la réalisation. C'est là
qu'arrive notre grande déception. M. le ministre, on est engagés,
au départ, pour faire la réalisation complète des travaux
y compris la surveillance, mais au moment où on doit faire la
surveillance on reçoit une lettre d'Hydro-Québec: Restez chez
vous, je fournis les hommes, c'est mot qui fais la surveillance. M. le
ministre, vous n'avez rien à dire. C'est le donneur d'ouvrage qui
décide. Même s'il y a un contrat à l'origine qui vous dit
que vous allez réaliser ces travaux-là.
M. Ciaccia: Cette décision-là est prise par les
gestionnaires d'Hydro-Québec. Est-ce qu'ils sont obligés de la
prendre avec l'article 34.02? Est-ce qu'ils pourraient ne pas vous enlever la
surveillance? Qui prend cette décision-là?
M. Lalande: M. le ministre, je ne suis pas sûr.
M. Martel: Effectivement, les avant-projets sont l'un des points
énumérés à l'article 34.02 de la convention
collective du SPIHQ comme devant être ordinairement confiés
à son personnel technique, celui d'Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Mais la situation que vous venez de me
décrire, ce n'est pas pour l'avant-projet. C'est pour la surveillance
d'un projet déjà commencé. Qui a pris cette
décision-là?
M. Lalande: Cela, M. le ministre, c'est le donneur d'ouvrage. Il
y a l'autre phénomène. L'autre participation qui existe, c'est
qu'à un moment donné, vous êtes choisi par
Hydro-Québec pour votre compétence, pour la disponibilité
de votre personnel et pour les gens que vous allez destiner à un dossier
en particulier. Alors, vous êtes choisi pour toutes ces
considérations-là et vous attendez toujours, d'un moment à
l'autre, d'une journée à l'autre, d'une semaine à l'autre,
d'un mois à l'autre, de recevoir un mandat pour amorcer le contrat de 4
000 000 $, 5 000 000 $, 6 000 000 $ d'honoraires que vous venez d'avoir. Mais
le maudit téléphone, il ne sonne jamais et la lettre ne vient
jamais. Vous vous inquiétez et vous posez la question à
Hydro-Québec: Qui fait l'avant-projet?
M. Ciaccia: Non, mais ce que je veux savoir: est-ce
qu'Hydro-Québec fait ça pour appliquer la convention ou bien
est-ce que c'est une décision d'Hydro-Québec dans leur...
M. Lalande: Je pense, M. le ministre, je n'en ai pas la preuve
parce que je ne suis pas administrateur d'Hydro-Québec, que ce sont des
conséquences directes de l'application des contrats syndicaux. C'est mon
interprétation, M. le ministre.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. Je cède donc la parole au député de
Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président, M. Lalande, ses
collègues. M. le président, j'ai une question qui me
préoccupe depuis que vous nous avez présenté vos tableaux.
Ils sont fort bien faits, éloquents, très éloquents
même, mais quand je les compare avec certains chiffres
d'Hydro-Québec concernant le nombre d'ingénieurs, c'est là
que je commence à avoir un problème. C'est que, dans votre
graphique numéro 1, vous nous expliquez que, depuis 1981, le volume des
investissements d'Hydro-Québec a baissé jusqu'en 1986 et remonte
de façon sensible en 1986-1987 et 1988-1989. (12 h 45)
II y a une projection pour l'année prochaine jusqu'en 1990 et on
voit que votre situation, selon le graphique, se serait constamment - sauf une
légère hausse dans les années 1983, 1984, 1985 et 1986
où il y a une stabilisation positive, pour employer le terme parce qu'il
ne s'agit pas vraiment d'un pic donc, votre situation de 1981 à 1987
s'est nettement détériorée en termes d'honoraires
facturés à Hydro-Québec. Là où je comprends
moins bien la situation, et je compte sur vous pour me donner des
éclaircissements, M. Lalande, c'est qu'en 1981, quand je regarde le
nombre d'ingénieurs à Hydro-Québec - si l'ouvrage ne se
fait pas à une place, il se fait à l'autre, j'imagine - le nombre
d'ingénieurs entre 1981 et 1986 est sensiblement le même à
une couple de dizaines de personnes près.
On nous a expliqué hier qu'il s'agissait de certains cadres
d'Hydro-Québec reclassés ingénieurs, donc qui
étaient déjà dans la boîte mais qui n'étaient
pas dans le syndicat des ingénieurs. Alors, je me dis qu'il y a comme un
problème. Si l'ouvrage augmente à Hydro-Québec, si les
ingénieurs n'augmentent pas et si votre situation se
détériore, je me demande où va l'ouvrage. Peut-être
avez-vgus une explication là-dessus? C'est que, d'une part, ou bien les
ingénieurs d'Hydro-Québec sont rendus bien plus efficaces que
ceux de 1981, ce qui serait une bonne nouvelle avec tout ce qu'on a entendu sur
Hydro-Québec depuis le début de cette commission, ou bien vos
chiffres ne réflètent pas l'entièreté de la
situation, ou bien le volume d'affaires va dans d'autres firmes de
génie-conseil dont vous ne tiendriez pas compte. Pouvez-vous
éclairer ma lanterne à ce sujet? i
M. Lalande: Première constatation, c'est que sans
critiquer, on admet la courbe d'investissements à Hydro-Québec.
C'est complètement hors du contrôle de tout le monde ici. C'est
une décision administrative du passé qui se réflète
présentement et une projection dans le futur. Pour ce qui est de la
main-oeuvre d'Hydro, et je vous réfère à ce moment-ci au
diagramme 2 parce que la courbe d'investissements est la même, dans
celui-ci, j'ai attiré rapidement votre attention, je pense, en tout cas,
en vous disant que nos données sont bonnes jusqu'en 1986 pour ce qui est
de la courbe main-d'oeuvre. C'est la ligne horizontale qui fluctue un peu. Je
vous dis qu'une courbe horizontale, c'est 20 000, plus ou moins 1000. À
peu de choses près, on est là-dedans. Jusqu'en 1986, les chiffres
ne peuvent pas tellement se discuter. Apparemment, c'est basé sur des
statistiques.
J'attire votre attention, M. le Président, M. le ministre, qu'en
1987, 1938 et 1989, la ligne qui est tirée présentement n'est pas
le fruit de nos connaissances. Ce n'est pas nos projections à nous, ce
sont les projections d'Hydro. Cependant, nous avons un certain doute. Nous
n'avons pas la preuve, nous n'avons pas la connaissance du nombre
d'ingénieurs ou de techniciens ou de la masse des employés
à Hydro-Québec au moment où l'on se parle. On ne l'a pas,
on ne l'avait pas quand on a fait cela et on vous le dit tout simplement. Votre
question est d'autant plus importante, M. le député, que revenant
sur le graphique 1, la courbe supérieure qui est ce que j'appelle la
facturation à Hydro-Québec de la part de certaines
entreprises...
Je vous ai bien dit tantôt qu'on a fait un sondage auprès
de certaines firmes. On n'a pas fait toutes les firmes, nous sommes 185 firmes
membres. De façon que tout le monde comprenne le graphique 1, nous avons
une courbe descendante de 1981 à 1983 et légèrement
croissante de 1983 à 1986. Là, je rejoins la question du ministre
tantôt. C'est qu'à ce moment-là, on a deux firmes
principalement qui sont impliquées dans un gros projet, dans un gros
avant-projet sur des barrages et transmissions de centrales électriques.
Or, ces deux firmes, à cause de leur importance dans le sondage,
viennent fausser un peu l'allure de la courbe, mais je ne suis pas
gêné, je vous le dis. Cela représente un écart de 2
000 000 $ par rapport au point seuil de 23 000 000 $. On remonte à 25
000 000 $ en 1986. À partir de là, on descend et on ne descend
pas d'une façon normale, mais d'une façon dangereuse et
celle-là nous fait mal.
Quand on a commencé à voir les chiffres lorsqu'on a fait
notre étude en vue de la préparation de cela, je peux vous dire
qu'il y a des informations qui, pour nous, étaient des
révélations malheureuses. On n'est pas heureux de voir cela. On a
dit: on a été des partenaires pendant 25 ans, on a fait un
partnership, on a travaillé ensemble, on a vécu ensemble des
problèmes de construction, des problèmes d'administration, des
problèmes de réalisation. On les a vécus pour le bien de
tout le monde. On a eu notre part du gâteau, c'est vrai, mais on a
été des élé-
ments imp0rtants dans l'investissement d'Hydro-Québec. Pourquoi
nous coupe-t-on les ponts aujourd'hui, à une vitesse tellement grande
que la vie de certaines de nos firmes est mise en jeu?
Je voudrais parler un peu là-dessus. Tantôt on a
parlé des grosses firmes. Notre association n'est pas formée
seulement de grosses firmes. Chez nous, les grosses firmes sont l'exception. La
majorité de nos firmes ont moins de 40 employés. Où sont
ces firmes? Elles sont à Joliette, à Robervai, à
Sainte-Foy, à Chicoutimi, en Abitibi, à Hull, à
Sainte-Agathe, à Sherbrooke, à Laval. Elles sont réparties
sur le territoire. Ces gens-là travaillaient normalement avec
Hydro-Québec dans les régions. Aussi curieux que cela puisse
paraître, il y a des firmes qui sont bonnes pour faire des
bâtiments pour HydroQuébec. Elles en ont toujours fait un peu tous
les ans, cela faisait leur affaire et cela faisait l'affaire
d'Hydro-Québec. Tout d'un coup, pouf!, on leur coupe les ponts, il n'y
en a plus. Plus d'avant-projets, plus de réalisations locales. On
affecte tout le monde.
Notre sondage n'a pas couvert les 185 firmes: premièrement, nous
n'avions pas le temps, deuxièmement, nous n'avions pas non plus les
moyens financiers pour le faire, on ne se le cachera pas. Nous ne sommes pas
une institution étatique où nous pouvons puiser dans la fontaine
de jouvence jusqu'à aeternum, nous avons des moyens limités par
notre économie. Quand vous voyez des courbes semblables, vous voyez que
notre économie face à Hydro-Québec n'est pas des plus
roses au monde.
M. Sauriol (M. Jean-Pierre): Peut-être pour répondre
plus directement à la question qui a été posée. Il
faut bien comprendre que la baisse qu'on a sur le graphique, c'est en 1987. Les
chiffres qu'Hydro-Québec fournit ne vont pas jusqu'en 1987, sauf qu'on a
pu obtenir le nombre d'ingénieurs présents maintenant à
Hydro-Québec en 1987, c'est 1376, soit 100 de plus qu'en 1986. Quand
vous parliez tantôt de perte de productivité, ce n'est pas une
perte de productivité, on a augmenté le nombre
d'ingénieurs à HydroQuébec. Nous avons les chiffres pour
1987, alors qu'Hydro-Québec n'a pas les chiffres de 1987. On remarque la
tendance réellement en 1987. Il faudrait demander à
Hydro-Québec d'ajuster ses chiffres à 1987. La courbe des
employés d'Hydro-Québec, à toutes fins utiles - comme le
soulignait le président tantôt -c'est une projection à
partir de 1986. On n'est pas sûrs que c'est ce qui arrive en pratique,
compte tenu de la clause 34.
M. Gauthier: Vous nous dites, M. Sauriol, je m'excuse, pour
être sûr de bien comprendre, que vous avez maintenant les chiffres
de 1987 du nombre d'ingénieurs à
Hydro-Québec...
M. Sauriol: En effet.
M. Gauthier: C'est 1300...
M. Sauriol: 1376.
M. Gauthier: 1376. Soyez assurés que dès cet
après-midi, ces chiffres vont être vérifiés
auprès de M. Coulombe, pour qu'on sache exactement ce qui en est. 100
ingénieurs de plus, cela pourrait expliquer, dans une certaine mesure,
des choses. On comprend bien votre difficulté. D'ailleurs, on est en
commission parlementaire pour étudier ce genre de problème, la
diminution de la sous-traitance par Hydro-Québec. Il y a effectivement
une conjoncture qui n'est peut-être pas nécessairement favorable
pour les très grands travaux, quoi qu'on ait pu en dire à
certains niveaux au plan politique. Il y a quand même, depuis certaines
années, des prévisions de baisse d'investissements
d'Hydro-Québec, quand on demeure dans des perspectives réalistes
pour les prochaines années. J'étudie les plans
d'Hydro-Québec en commission parlementaire ici, je suis le responsable,
dans ma formation politique, depuis deux ans - maintenant, on se prépare
à faire la troisième année - et on prévoyait ce
genre de choses. Est-ce que, dans un contexte où les investissements
importants d'Hydro-Québec ont été appelés à
descendre et sont appelés à monter de façon graduelle...
Je voyais quelqu'un du service des relations publiques d'Hydro-Québec
qui disait - je crois que c'est hier - dans un communiqué de presse que
le peu de vente d'électricité à nos voisins du Sud,
compromettait même le plan d'équipement prévu depuis
quelques années et sur lequel on travaille; cela le compromettait et
allait retarder des projets qu'on avait prévu faire. La situation est
quand même difficile pour Hydro-Québec. On le conçoit et on
est tous d'accord avec cela. Est-ce que votre suggestion, dans cette
perspective, serait que la commission parlementaire prenne des moyens pour
faire partager ce peu de travail entre le syndicat des ingénieurs, les
employés de bureau et les ingénieurs-conseils ou encore de
simplement... En réalité, qu'est-ce que vous voulez qu'on y
fasse, dans le fond? Si le volume d'affaires baisse considérablement, on
peut bien essayer d'éviter qu'il y ait des hausses substantielles de
personnel technique et professionnel à Hydro-Québec, on pourrait
bien décider de faire cela en commission parlementaire, mais qu'est-ce
qu'on peut faire de plus?
M. Sauriol: II y a peut-être deux points qui sont
soulevés à l'intérieur de cela. En ce qui concerne le plan
de développement à Hydro-Québec, je pense que les courbes
le
démontrent très bien. Le génie-conseil s'est
toujours accommodé de cette situation. Bien entendu, idéalement,
on préférerait être toujours présent pour maintenir
la masse critique de "know-how", à toutes fins utiles. Même dans
les périodes creuses, il est important qu'on maintienne quand même
des éléments clés à l'intérieur du
génie-conseil.
Là où on est moins d'accord, par contre, c'est lorsqu'on
transfère des secteurs qui étaient traditionnellement
donnés en service externe et qu'on les conserve à l'interne.
C'est un peu ce qui nous inquiète. Actuellement, il y a des choses qui
étaient faites auparavant à l'extérieur et de plus en plus
qui sont - faites à l'intérieur. Cela aggrave davantage le cas
des ingénieurs-conseils. Pour s'accommoder avec le plan de
développement, comme je vous dis, on l'a toujours fait, tout ce qu'on
demande, c'est de maintenir une masse critique de "know-how", mais au sein des
firmes d'ingénieurs-conseils.
M. Gauthier: Je vous avoue, M. Sauriol, qu'effectivement, - sans
du tout mettre en doute votre parole, il n'en est pas question -je me suis fait
affirmer exactement le contraire de ce que vous me dites là par d'autres
groupes d'Hydro-Québec. Encore là, c'est une question, si vous
êtes parmi nous cet après-midi, qui méritera d'être
tirée au clair avec Hydro-Québec. Moi, on m'affirme que des
choses qui se faisaient auparavant à l'interne, maintenant, ne se font
plus qu'à l'externe. Vous me dites, il y a des choses qui se faisaient
à l'externe avant qui ne se font plus maintenant qu'à l'interne.
On va être obligé de jouer à "Qui dit vrai?" puis on va
tous vous asseoir en même temps à la même table pour savoir
lequel dit la vérité. Enfin, on essaiera d'éclairer cette
question, mais je veux que vous compreniez qu'on partage, dans une certaine
mesure, cette préoccupation qui est la vôtre.
Cependant, hier, les ingénieurs d'Hydro-Québec, je vous
avoue qu'ils m'ont ébranlé beaucoup. Ils m'ont dit qu'il est
extrêmement important pour la santé d'Hydro-Québec de
conserver au sein même de l'entreprise une expertise technique de premier
plan et de permettre aux ingénieurs d'Hydro-Québec d'être
de tous les projets et de toutes les innovations technologiques. Et ils nous
ont donné un exemple, en terminant, que j'ai trouvé absolument
éloquent: c'est celui du barrage Daniel-Johnson où la conception
n'a pas été faite et personne d'Hydro-Québec ou du service
technique n'a travaillé sur le barrage. Aujourd'hui, on a des
problèmes avec le barrage et les services techniques sont un peu
dépassés par la situation. On doit, à ce moment-là,
être à la merci de ceux... Si on les retrouve, parce que la
stabilité des ingénieurs n'est pas nécessairement la
même dans le privé qu'à Hydro-
Québec. On doit trouver des personnes qui ont suffisamment de
connaissances et d'expertise dans ces choses-là pour être en
mesure de faire des réparations et proposer des solutions.
Je vous avoue que l'exemple du barrage Daniel-Johnson... J'ai
posé des questions à Hydro-Québec, l'année
passée, en commission parlementaire, là-dessus.
Hydro-Québec ne savait que faire, vu que les solutions proposées
ne se ressemblaient pas tellement. Cela m'a convaincu, pour ma part. J'aimerais
que vous me disiez en quoi ce raisonnement n'est pas bon de la part des
ingénieurs d'Hydro-Québec. (13 heures)
M. Lalande: M. le député, une partie de
l'information est vraie. En tant que propriétaire, opérateur,
gérant d'un système, il faut être suffisamment
avisé. Il n'y a pas de danger pour cela, je pense qu'Hydro-Québec
est assez grande pour être capable de faire cela. La limite de
l'intervention est la suivante. Supposons que vous êtes à
l'université, que vous graduez en médecine, que vous
décidez de devenir un cardiologue, mais quelque chose qui est "au
boutte" là. Vous faites une opération à coeur ouvert et
vous la réussissez très bien. Fier de votre compétence et
de votre succès, vous vous en allez chez vous et vous attendez 25 ans
avant de faire la deuxième opération à coeur ouvert.
Posez-vous la question sur votre dextérité, sur votre
compétence, sur votre facilité à répondre aux
besoins d'une situation difficile.
Le génie-conseil existe justement pour cela. Ce sont des gars sur
la "job" tous les jours, qui voient des jobs partout dans le monde: des
barrages en voûte au Québec, on en a un. Quand allons-nous en
avoir un deuxième? Ce n'est pas mauvais d'avoir un gars dans la
boîte, mais que va-t-il faire demain matin, une fois qu'il aura
réparé le barrage? Quand on dit que Atomic Energy of Canada est
pris avec un surplus de main-d'oeuvre superqualifiée - et il ne faut pas
enlever un cheveu sur la tête de ces gars-là, ils sont
qualifiés - ils vont faire quoi demain matin s'ils n'ont pas de job pour
travailler? On ne peut pas leur faire arracher des dents, ce sont des
ingénieurs. Les ingénieurs-conseils sont là pour fournir
le surplus des besoins que vous n'avez pas et qui coûtent trop cher.
Chez nous, quand j'ai un document à imprimer, j'ai une imprimante
et quand j'ai le document à imprimer en 50 copies, c'est trop fort pour
ma poche, je le fais imprimer, cela me coûte meilleur marché. Je
ne suis pas obligé d'engager ou d'acheter une machine qu'on appelle
"high speed". J'achète la conventionnelle de bureau. J'ai besoin de 200
copies d'un document de 50 pages, je m'en vais chez l'imprimeur du coin, c'est
lui qui est compétent, ce n'est pas moi.
Pourquoi Hydro-Québec ne fait-elle pas la même chose? Cela
prend un minimum de connaissances à l'intérieur et on est
d'accord avec cela. Je ne pense pas que ce soit tous des bouffons dans le
syndicat d'Hydro-Québec. Il y a des gars bien compétents
là-dedans. Je peux vous l'assurer, j'ai travaillé dans d'autres
dossiers et j'ai pu constater qu'il y avait des gars compétents., Mais
pourquoi se plaindre qu'il manque une compétence dans un problème
technique pour lequel l'information est disponible au Québec dans
l'entreprise privée? Pourquoi jalouser et vouloir accaparer cette
technologie-là pour laquelle il n'y a pas d'autres projets à
court terme qui sont prévisibles pour un barrage en voûte?
Remarquez bien, on pourrait en discuter bien longtemps.
M. Gauthier: Oui, mais étant donné que vous parlez
sur mon temps, arrêtez-vous là.
Des voix: Ha! Ha!. Ha!
M. Gauthier: Ceci dit, M. Lalande, c'est une boutade. Ne sortez
pas tout de suite. Restez avec nous encore quelques minutes, on n'a pas fini de
vous torturer.
M. Lalande;:D'accord, cela va.
M. Gauthier: M. Lalande, j'aimerais avoir votre point de vue sur
les conditions qui nous ont été données hier par les
ingénieurs d'Hydro-Québec, conditions sous lesquelles le recours
aux ingénieurs-conseils devrait être permis. Je vous les livre en
vrac. Si c'est trop rapide, on les reprendra une à une.
Une des premières conditions qui supposent qu'on devrait faire
appel aux ingénieurs-conseils, c'est de faire en sorte
qu'Hydro-Québec réalise les conditions de sous-traitance ou non,
faire en sorte qu'Hydro-Québec réalise elle-même les
activités dont dépendent ses décisions
stratégiques. C'est le premier point. Les ingénieurs
d'Hydro-Québec disent: Quand ce sont des décisions
stratégiques, c'est nous qui devons faire cela. Deuxième
condition: assurer un savoir-faire suffisant pour qu'Hydro-Québec
demeure un propriétaire averti. C'est un peu ce que l'on expliquait tout
à l'heure, la capacité de réparer, d'entretenir et de
superviser. Troisième condition: permettre à Hydro-Québec
d'exercer un leadership technologique. Alors, les ingénieurs nous
disent: On n'a pas d'objection qu'il y ait de la sous-traitance,
peut-être même à travailler avec des gens de
l'extérieur qui font de la sous-traitance, mais ces trois conditions
devraient être respectées. J'aimerais avoir votre point de vue
là-dessus.
M. Lalande: En ce qui concerne la stratégie, il n'y a
personne qui va enlever à Hydro-Québec son rôle
d'investisseur, son rôle de donneur d'ouvrage, son rôle de
planificateur. C'est sa raison d'être: planifier pour donner un service.
Hydro-Québec est dans le système pour donner de
l'électricité aux Québécois avec une administration
saine.
Pour ce qui est de ta compétence, il faut que les
ingénieurs à l'intérieur d'Hydro-Québec
acquièrent une certaine compétence. On ne mettra pas un gars en
structure à surveiller un changement de transformateur. Cette
compétence, Hydro-Québec l'a actuellement. Les gars
d'Hydro-Québec ne sont pas tous... J'ai beaucoup de respect pour
beaucoup d'ingénieurs d'Hydro-Québec; il n'y a pas de cachette
là.
En ce qui concerne le "leadership" technologique, j'ai une certaine
hésitation pour la bonne raison qu'Hydro n'a pas, dans son travail
quotidien, à entrer en compétition contre ou avec d'autres
semblables. Hydro, c'est un monopole. Elle pense, elle décide, elle
agit. Pour ce qui est du reste, je ne le sais pas; mais elle fait cela.
L'ingénieur-conseil fait cela, mais en plus de cela, il doit
être alerte, il doit être éveillé, il doit être
un vendeur, il doit chercher des marchés. Je vous ai parlé
tantôt de la biénergie. Il y a de nos membres qui ont fait du
porte-à-porte, comme les vendeurs Familex autrefois qui vendaient des
produits. Ils vendaient de la biénergie. Cela faisait l'affaire d'Hydro;
on vendait des surplus d'énergie. Je trouve cela étonnant,
très bon; c'est cela, un partnership. Chacun y met du sien et, maudit,
en fin de compte, cela marche.
C'est quoi le problème aujourd'hui de vouloir enlever au
génie-conseil sa part efficace, rentable? C'est fait dans le temps.
C'est fait dans des conditions contractuelles connues de tout le monde. Nos
ingénieurs-conseils, nos membres, mes confrères, ont rendu
à Hydro des services. Pour ce qui est de la question de leadership
technologique, je ne pense pas que nos ingénieurs-conseils soient si en
arrière que cela. On devance la technologie, on ne la suit pas.
M. Gauthier: C'est ma dernière question, M. Lalande. Hier,
j'ai abordé avec les ingénieurs d'Hydro... Cette
préoccupation de rester à la pointe, technologiquement parlant,
je pense qu'on la comprend. Ce sont des professionnels. Je ne souhaite pas
connaître de professionnel qui ne veuille pas rester à la pointe
dans son domaine.
M. Lalande: Bien non.
M. Gauthier: Je ne vous demanderai pas, comme ingénieur,
de nous dire que les autres ingénieurs sont comme cela, c'est
évident. Je voudrais simplement savoir, M. Lalande, si le
problème ne se situe pas
i plutôt sur une façon de faire les choses pour
Hydro-Québec? Je m'explique. Si Hydro - peu importe le nombre
d'ingénieurs qu'elle garde à l'interne - confie à ses
ingénieurs des travaux, disons, de routine sur ! le plan technologique
et ses travaux un peu "hot", intéressants pour un scientifique et un
homme qui s'intéresse à ces choses-là, elle les donne en
sous-traitance, on peut comprendre une frustration. Même s'ils
étaient 15 000 ingénieurs à Hydro-Québec, ils
seraient frustrés quand même sur le plan professionnel.
Est-ce que les ingénieurs-conseils seraient ouverts davantage
à une espèce de coopération plus étroite sous forme
de prêt de services ou autrement - je ne sais pas -pour permettre que
votre monde et les contrats que vous effectuez puissent profiter de l'expertise
des gens d'Hydro et que votre expertise profite aux gens d'Hydro pour que ces
gens se sentent constamment à la fine pointe?
Ce n'est pas obligatoire qu'il y ait 25 ingénieurs d'Hydro qui
travaillent à un projet pour que ce soit intéressant pour le
département d'ingénierie. Peut-être que deux ou trois
personnes peuvent collaborer avec le privé. Est-ce qu'il n'y a pas des
avenues à regarder dans ce sens-là?
i
M. Lalande: Pour votre information - et cela me surprend que cela
n'ait pas été dit jusqu'à maintenant - cette façon
de travailler existe tous les jours. Il y a eu un transfert de technologie; on
ne travaille pas en vase clos. Les gars d'Hydro viennent chez nous. On va
à Hydro; on va présenter notre technologie. On la discute en
totalité.
On ne transfère pas l'énergie comme on transfère un
achat d'automobile où vous avez à l'intérieur du "package"
de l'automobile tout un paquet de technologies que vous n'êtes pas
obligé de comprendre pour faire fonctionner l'automobile. Par contre,
à Hydro-Québec, quand l'ingénieur-conseil travaille, il le
fait en toute connaissance de cause d'Hydro-Québec. Les
ingénieurs d'Hydro-Québec sont nos partenaires. Nous osons croire
que nous sommes aussi des partenaires d'Hydro-Québec. C'est un
échange, c'est donnant, donnant. Si le gars est intéressé,
monsieur, à la fin du {projet, il connaît le projet comme
l'ingénieur-conseil. S'il n'est pas intéressé, il va
suivre la "job".
M. Gauthier: II y a juste un commentaire que je veux faire en
terminant, M. le Président, parce que je veux laisser un peu de temps
pour mon collègue de Joliette. Je veux simplement dire qu'à la
page 16 du mémoire du Syndicat professionnel des ingénieurs
d'Hydro-Québec, on dit - je me permets de citer - "L'entreprise pourrait
par exemple inclure dans les contrats alloués à l'externe des
clauses de transfert de technologie. Hydro-Québec doit maintenir sa
compétence à un niveau suffisamment élevé pour ne
pas être à la merci de quelques firmes, si compétentes
soient-elles." Je le fais en commentaire. Encore là, je pense que c'est
Hydro-Québec qui va avoir à trancher la question cet
après-midi. Pour ma part, je vous remercie d'avoir répondu aux
questions.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Roberval. M. le député de Rosemont.
M. Rivard (Rosemont): M. Laiande, de façon tout à
fait éloquente et fort convaincante, vous nous avez fait part de vos
inquiétudes. Vous avez élargi le débat à sa juste
mesure. Jusqu'à maintenant, nous avions davantage concentré notre
attention sur le sort réservé aux monteurs de lignes et à
certaines entreprises privées du Québec. À la limite, vous
nous amenez, vous et d'autres intervenants, à croire qu'il pourrait
même y avoir chez Hydro-Québec une politique inavouée qui
tendrait à faire diminuer le faire faire en provenance de cette
entreprise publique. D'ailleurs, certains syndicats que nous avons entendus
hier vont nettement dans ce sens et l'expriment d'une façon très
claire. Ils parlent même des effets pervers de toute sous-traitance.
Votre histoire, comme firme d'ingénieurs-conseils, a
été amplement rappelée ici. On a rappelé les
succès à l'occasion des grands travaux de la Baie James. Tout
à l'heure, le député de Roberval parlait d'investissements
et de perspectives réalistes. De ce côté-ci de la table, il
y a au moins un membre très en vue de notre gouvernement qui parle avec
enthousiasme et éloquence d'une Baie James II. La chose n'est pas
impensable, compte tenu de certaines déclarations d'hommes d'État
américains que nous avons entendus récemment. Ma question est la
suivante: Est-ce que vous avez l'impression que cette tendance,
présumée pour l'instant, de repli d'Hydro-Québec sur
elle-même pourrait, à l'occasion de grands ou de très
grands travaux, amener Hydro-Québec à moins vous associer
à de tels travaux? Une sous-question à laquelle vous avez
déjà répondu, je pense, c'est: Est-ce que vous avez
l'impression que, si cela continue de la façon dont nous l'annoncent ces
graphiques, vous seriez moins en mesure de répondre à de tels
grands travaux?
M. Lalande: Merci de l'occasion que vous me donnez de clarifier
une situation. M. le député, le génie-conseil est inquiet
de la masse d'investissements d'Hydro-Québec. Ce n'est pas du service
social que l'on fait. Ce n'est pas un soutien social que l'on fait. On fait de
la "business". Quand Hydro-Québec dépensera 1 500 000 000 $, on
sera des
partenaires à 1 500 000 000 $. Quand elle dépensera 2 500
000 000 $, on sera des partenaires à 2 500 000 000 $. On ne demande pas
de faveur. On demande d'être partenaires dans la mesure où on est
capable de rendre les services pour lesquels on sera payé.
Deuxièmement, le génie-conseil est capable de relever des
défis. Il en a relevé dans le passé. On est passé
à travers bien des crises. On a des bureaux qui ont 75 ans. On a des
bureaux qui ont 50 ans. On a beaucoup de bureaux qui ont 25 ans. On a des
bureaux qui ont 10 ans et on a des bureaux qui ont 2 ans. Tout le monde ne
travaille pas chez Hydro-Québec. Par contre, je pense que tout le monde
voudrait travailler chez Hydro-Québec. C'est un bon partenaire,
Hydro-Québec. Quand vous avez Hydro-Québec dans votre carnet de
commandes, c'est le "fun". Ce n'est pas comme le gouvernement mais presque.
On veut être des partenaires compétents. On veut être
à la fine pointe de la technologie. Pour ce faire? il faut que l'on
demeure présent. Quand je dis présent, c'est que si on est des
partenaires aujourd'hui, on sera des partenaires demain et après-demain.
On n'est pas des partenaires une fois à tous les cinq ans. Cela fait des
sauts de crapaud. On a des chances de s'enfarger. On a des chances de perdre
notre technologie. On a des chances de perdre notre personnel qualifié.
Comment allons-nous entretenir ces gens-là? Contrairement à
Hydro-Québec, on a l'avantage d'engager et de retenir du personnel. On a
aussi le moyen de le libérer quand on n'a pas d'ouvrage, ce qui n'est
pas vrai de l'autre côté de la clôture. (13 h 15)
Si, en période de croissance d'investissements
d'Hydro-Québec - et je lance un chiffre en l'air - il y a 1 300
ingénieurs - on est en période de croissance - et qu'on investit
1 000 000 000 $ de plus, l'année prochaine, si, pour investir 1 000 000
000 $ de plus, il faut que j'engage 150 ingénieurs de plus, disons que,
pour les fins de la discussion, on accepte le principe, mais, quand j'ai fini
d'investir mon 1 500 000 000 $ par année, je retombe en bas de ma
courbe, comme cela s'est passé en 1983. De 1983 à 1987, pendant
quatre ans, il y a eu 300 ingénieurs de trop. Vous, en tant
qu'administrateurs, vous allez prendre quelle décision? Ce n'est pas du
bien-être social. Il faut être des administrateurs
compétents. C'est le message.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Rosemont. M. le député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, moi aussi, j'ai
remarqué l'éloquence du porte-parole, mais cela n'a pas
réussi à me convaincre de certaines choses. Apparemment, en tout
cas, à la lecture du mémoire que vous avez résumé
succintement, on fait face à un problème plus complexe en ce qui
regarde les ingénieurs-conseils qu'en ce qui a trait, par exemple,
à la position du syndicat de la construction. Vous allez loin, dans
votre mémoire, à la page 41, vous ne demandez pas de geler, si
j'ai bien compris, non seulement... Vous demandez un moratoire sur la clause 34
et vous demandez aussi un amendement législatif au Code du travail
québécois. À moins que je ne lise mal: "En
conséquence, l'association recommande à l'Assemblée
nationale de légiférer pour amender les dispositions de l'article
45 du Code du travail, selon les modalités précisées en
annexe - j'ai lu votre annexe - du présent mémoire.
En fait, vous faites une réclamation globale face au Code du
travail, en ce qui regarde la sous-traitance au Québec, dans toutes ses
dimensions. Je pense avoir compris cela. Ceci dit, c'est beaucoup plus
complexe, parce que je prétends que si vous allez en fonction de
l'article 45, qui est un amendement au code... J'écoutais votre avocat
tantôt, il n'en a pas parlé. Il s'en est tenu à la clause
34, dans le contexte, mais votre mémoire est là. Ordinairement,
les mémoires, on les soutient. Vous l'avez effleuré dans votre
conclusion mais vous ne l'avez pas défini aussi bien qu'il est
défini dans votre mémoire. Vous faites face à des
syndicats, non pas accrédités en vertu de la loi 290 de la
construction, vous faites face à des syndicats accrédités
en vertu du Code du travail, mais soumis à la loi 55 dans le cadre des
négociations. C'est beaucoup plus complexe qu'un simple amendement
législatif, ce que vous demandez, à mon sens.
Si vous parlez de l'article 45, je suppose que c'est parce que vous
êtes affectés par ce dernier.
M. Lalande: Drôlement.
M. Chevrette: Je suppose que c'est parce que vous avez six
plaintes devant le Tribunal du travail.
M. Lalande: Au moins.
M. Chevrette: Je suppose que cela vous crée des
problèmes.
M. Lalande: Sûrement.
M. Chevrette: Par contre, les gestes posés par le
syndicat, en vertu de l'article 45, sont tout à fait légaux, non
pas en vertu de la convention, mais en vertu de la loi de portée
générale. Est-ce qu'on se suit bien?
M. Lalande: On vous suit très bien.
M. Chevrette: Je fais mon petit avocat. C'est parce que j'ai eu
la chance de travailler dans ce domaine, un petit peu. Ceci dit, vous y allez
sur les deux plans. Amender l'article 45 du code, je vous avoue qu'à la
lumière des événements qui se sont produits au Manoir
Richelieu, qui relèvent de l'article 45, au sujet desquels, le ministre
du Travail disait qu'il devait s'appliquer alors que le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche n'a pas cru bon d'inclure à l'entente,
vous avez vu dans quelle situation on pouvait se retrouver au Québec
quand on ne fait pas respecter scrupuleusement certains articles. L'article 45
n'est pas là pour le plaisir d'être là. Je me souviens
quand on a amendé l'article 45, je vous avoue que c'était toute
une discussion à l'interne autant qu'à l'externe.
Le gros point d'interrogation que j'ai, c'est: pour porter plainte en
vertu de l'article 45, c'est parce qu'il y a des gens qui sont allés
dans le champ d'application de la convention, parce que vous ne pouvez pas
porter plainte en vertu de l'article 45 si votre champ d'action n'est pas
menacé, d'une certaine façon ou simplement vous seriez
débouté sur-le-champ, à mon point de vue.
Je vais vous poser une question. Je n'avais pas l'information hier, et
c'est dommage qu'on ne puisse pas rappeler les gens à la barre, parce
que je leur ferais expliquer, peut-être encore plus clairement que moi,
ce que je tente de démontrer. Mais quand un technicien - pour prendre un
exemple - de la firme Sauriol, s'en va travailler sur les planches à
dessin d'Hydro-Québec et qu'Hydro-Québec - je ne sais pas moi -
n'a pas comblé le poste de deux techniciens qui sont partis, soit en
préretraite, soit en congé de maladie de longue durée,
qu'est-ce que vous feriez si vous étiez chef syndical et que vous aviez
ce cas?
M. Lalande: Bonne question. J'ai un avocat. Je pense qu'il est
plus...
M. Chevrette: J'ai pensé que vous lui passeriez le
crachoir.
M. Lalande: De temps en temps, c'est pour cela qu'on est une
équipe.
M. Martel: D'abord, vous êtes conscient que
l'Assemblée nationale a ses privilèges et que les tribunaux aussi
les ont. La cause à laquelle vous faites référence est
actuellement pendante. De fait, elle se poursuit demain matin devant un
commissaire du travail et se poursuivra encore longtemps selon l'agenda qui est
déjà fixé entre les parties. C'est difficile de
répondre à certaines des affirmations contenues dans votre
question, sans faire référence à la preuve qui s'est
déjà faite devant le tribunal et qui va se faire devant le
tribunal. Ça limite énormément ma réponse.
M. Chevrette: Je voudrais préciser que l'objet, ce n'est
pas d'entrer dans la preuve. Je voudrais vous faire comprendre que votre cas
est beaucoup plus complexe que cela peut sembler l'être, par exemple, par
rapport aux travailleurs de la construction qui ont un champ d'action
encadré par toutes sortes de lois. À un moment donné, il y
a eu la loi 68, la loi 19. Dans le cas précis d'une accréditation
syndicale, tu peux, par convention collective, élargir ton champ
d'action, parce que c'est le droit de gérance que tu as le droit de
négocier. Mais, par exemple, quant au transfert des fonctions, c'est la
loi directement qui est impliquée et non pas le contenu de la convention
collective. Dans vos recommandations, vous l'avez senti. Vous ne l'avez pas
exprimé clairement, ce matin, mais vous avez senti que dans vos
recommandations, pour que vous ayez porte ouverte et entière, cela vous
prenait non seulement un moratoire sur la clause 34 mais un amendement à
l'article 45.
M. Martel: Disons simplement à ce sujet-là que
l'expérience en témoignait, c'est-à-dire qu'avant que la
clause 34 soit modifiée, déjà des recours en vertu de
l'article 45 avaient été exercés par l'un des syndicats,
SCFP, représentant les employés de bureau d'Hydro-Québec.
C'était clair que, quel que soit le résultat des prochaines
conventions collectives sur la clause 34, la question de l'article 45
demeurerait. La position qui est exprimée à l'annexe B de notre
rapport, le développement, n'en est pas - je pense que vous vous en
êtes rendu compte dès la lecture - de dire qu'il faut abolir
l'article 45 du Code du travail. Pas du tout.
Il ne s'agit pas non plus d'abolir les acquis - on le souligne dans
notre mémoire -durement acquis de tout le mouvement syndical
québécois. Ce qu'il s'agit de faire, c'est de prendre une
disposition qui existe déjà depuis un certain temps et de la
moderniser, de la rendre parfaitement compatible, en harmonie, avec la
réalité socio-économique actuelle. L'article 45 du Code du
travail a été instauré - et la substance est la
même, depuis ce temps-là -sous le numéro 10a de la Loi sur
les relations ouvrières de l'époque, à la suite d'un
jugement rendu par la Cour d'appel dans l'affaire Brown, en 1959. Ce n'est pas
d'hier.
Le contexte social et économique de cette époque n'est
plus le même aujourd'hui. Le Québec a évalué - je
pense que tout ie monde s'en félicite - et nos lois aussi doivent
constater cette évolution-là et s'harmoniser aux faits sociaux.
Ce que nous soumettons dans l'annexe B du mémoire, c'est que l'article
45 - et, par voie accessoire, l'article 46 - devraient refléter
cette évolution. Il n'est pas question de l'abolir. Il est
question de l'améliorer.
M. Chevrette: Ceci dit. J'ai droit à une seule question,
je suppose? Je suis sûr que le ministre va me consentir une
dernière question.
Le Président (M. Théorêt): Oui. Je veux juste
faire remarquer ceci. Je ne sais pas si on a des coupures
d'électricité, mais il faudrait terminer pour 13 h 30.
Une voix: Vous n'avez pas payé votre compte?
M. Chevrette: Non, c'est parce que c'est un sous-contrat.
N'ouvrez jamais votre porte comme cela à un politicien. Bon, blague
à part. La dernière question... J'ai écouté, M. le
Président, plaider sur la façon serrée d'administrer. J'ai
eu un réflexe. Je suppose que je suis président
d'Hydro-Québec - cela va être la première fois que je
défends Hydro-Québec, surveillez-vous bienl -et que, j'ai des
ressources à ma disposition; comme bon administrateur, j'évite
d'aller en sous-traitance, et j'utilise d'abord au maximum mes ressources avant
de confier des contrats à l'extérieur. Autrement, on reprocherait
à Hydro-Québec... Ne pensez-vous pas qu'on reprocherait à
Hydro-Québec ce que vous reprochez vous-mêmes, du fait qu'on
n'administre pas d'une façon serrée? Dans les circonstances,
est-ce qu'au plan technique concernant les techniciens, le bureau par exemple,
même concernant les ingénieurs... Cela ne m'apparaît pas
incompatible qu'Hydro-Québec, à un moment donné, puisse
connaître une courbe d'investissements à la hausse, et que,
à cause de la nature des travaux, elle n'ait pas nécessairement
besoin d'un appel aussi pressant à l'extérieur. Est-ce que vous
pensez que cela se plaide une affirmation du genre?
M. Lalande: Certainement que cela se plaide. Non seulement cela
se plaide, mais vous avez dit: Si vous étiez président
d'Hydro-Québec et je vous en félicite.
M. Chevrette: Bien, vous en feriez un pas pire. Vous avez l'air
vendeur.
M. Lalande: Si vous étiez président
d'Hydro-Québec, à partir d'un certain recul, vous auriez
pensé, en tant qu'administrateur, à engager les gens dont vous
avez besoin pour la tâche que vous avez à accomplir et non pas
à engager des gens qui, éventuellement, rempliront des
tâches qu'on leur trouvera. Il y a un monde entre les deux.
M. Chevrette: Mais, à la décharge
d'Hydro-Québec - je termine là-dessus M. le Président - il
faut quand même dire que, quand arrivent des périodes de crise, et
que le gouvernement, pour favoriser des investissements, commande à
Hydro-Québec de devancer des travaux, et qu'elle peut avoir besoin d'une
masse plus abondante de gens... Je me souviens un peu des discussions qui se
font. Je ne voudrais pas passer pour le défenseur d'Hydro-Québec
dans ce dossier, mais quand ils ont un petit point sur lequel ils semblent
avoir un peu d'allure, il faut bien leur dire...
M. Lalande: Je suis d'accord avec vous là-dessus. Si le
gouvernement donne à HydroQuébec un mandat d'exécuter,
deux ans, trois ans, quatre ans avant que l'échéancier normal de
ces travaux ne se réalise, il est normal qu'Hydro-Québec se serve
de sa main-d'oeuvre pour les réaliser, c'est normal. Si elle ne l'a pas
dans sa main-d'oeuvre, elle va aller à l'extérieur, elle va aller
en sous-traitance, puis elle va l'exécuter. Cela c'est un mandat bien
spécifique,, Mais, dans la normalité des choses, qu'on regarde la
courbe de 1983 à 1986, quant à la masse des employés
à Hydro-Québec versus la masse des investissements, elle est
inquiétante pour le moins.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie,
M. Lalande. Je vais donner la parole à Me Martel, qui a fait part de son
désir de donner une réponse complémentaire la plus courte
possible. Je vous avise immédiatement que je vais reconnaître
ensuite le député d'Iberville puisqu'il nous reste quatre
minutes. La question devra être brève et la réponse, autant
que possible, aussi brève. Me Martel.
M. Martel: J'ai une réponse additionnelle à la
question posée par M. le député Joliette. Il est bon de
noter que l'article 34, sauf exception dans le SPIHQ, où on a vu que la
coutume était établie -mais, dans toutes les autres conventions
collectives... - prévoyait déjà qu'Hydro-Québec ne
pouvait pas mettre à pied de ses employés à cause de
l'octroi de contrats de sous-traitance. Le génie conseil
québécois ne s'est pas plaint de cela et ne se plaint pas de cela
ici. Ce dont il se plaint, c'est de l'embauche additionnelle en vertu des
dispositions de l'article 34 additionnées à celles-là qui
font qu'on va réduire la sous-traitance. Alors c'est vrai, comme vous le
dites, que c'est normal qu'Hydro-Québec fasse d'abord appel à ses
effectifs pour faire ses travaux. Cela, personne ici ne l'a jamais
contesté.
Le Président (M. Théorêt): Merci Me Martel.
M. le député d'Iberville.
M. Tremblay (Iberville): Oui. Merci, M. le Président.
J'aurais juste une question à poser à M. Lalande.
Un des présidents des grandes firmes du Québec m'a
déjà laissé entendre qu'Hydro-Québec était
un grand concurrent des autres firmes à l'échelle du monde et que
sa situation était plus particulière parce que les coûts
s'opèrent dans l'ensemble de l'organisation... Je n'irai pas plus loin
dans les détails. Est-ce que la diminution de la sous-traitance et
l'augmentation du travail interne peut avoir une influence sur l'avenir des
grandes firmes québécoises à l'échelle
internationale?
M. Lalande: Réponse rapide: oui.
M. Tremblay (Iberville): D'une façon tangible.
M. Lalande: Réelle. Mesurée.
M. Tremblay (Iberville): Donc, à moyen terme, cela a un
effet très négatif sur l'obtention des contrats.
M. Lalande: Cela en a et cela en a toujours eu un. Le rôle
d'Hydro-Québec à l'interne et le rôle d'Hydro-Québec
à l'externe, c'est un rôle important dans notre genre de travail.
À l'interne, si HydroQuébec ne nous confie plus d'avant-projets
ou de projets, on diminue notre personnel qui va travailler pour
Hydro-Québec, on diminue notre masse critique. On essaie de compenser
à l'externe. Théoriquement, on a encore Hydro-Québec, qui
est notre concurrent, dans les jambes, mais, en principe, à part le
signe de piastre et le drapeau qui sont capables de passer, au point de vue
concurrentiel, on est là et on n'en a pas peur.
M. Tremblay (Iberville): Merci.
Le Président (M. Théorêt): M. Lalande, je
vous remercie de vos explications. Messieurs les membres de la commission vous
remercient et vous souhaitent un bon retour chez vous. Je suis certain que
c'est à la fin de la journée puisque vous allez être parmi
nous cet après-midi.
Les travaux de la commission sont suspendus jusqu'après la
période de questions, c'est-à-dire vers 16 heures....
(Suspension de la séance à 13 h 32)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M. Charbonneau): La commission de
l'économie et du travail reprend ses consultations particulières
sur la sous-traitance à Hydro-Québec. Nous accueillons maintenant
les représentants d'Hydro-Québec qui sont des habitués de
la commission. Alors, messieurs, bienvenue à la commission. Cette
fois-ci, la discussion va se faire de la façon suivante. Il y a d'abord
une vingtaine de minutes de présentation de votre mémoire ou de
Vos points de vue, et, par la suite, le reste du temps est réparti de
part et d'autre pour les discussions avec les membres de la commission.
Alors, M. Coulombe, pour le Journal des débats, si vous vouliez
présenter les personnes qui vous accompagnent et immédiatement
engager la présentation.
Hydro-Québec
M. Coulombe (Guy): Alors, merci, M. le Président. À
ma droite, M. Benoît Michel qui est vice-président
exécutif, équipement. À ma gauche, M. Claude Boivin qui
est vice-président exécutif, exploitation, et M. Jean Houde qui
est vice-président, ressources humaines. Et, avec votre permission,
peut-être que, s'il y a des questions un peu plus complexes, je me
permettrai de faire appel à d'autres experts qui nous accompagnent et
que je pourrais vous présenter au fur et à mesure.
Vous venez de nous offrir vingt minutes pour un peu résumer notre
mémoire. Comme nous venons à la fin d'une longue séance de
cette commission où plusieurs intervenants sont venus présenter
leur position, avec votre permission, je ne prendrai juste que trois ou quatre
minutes pour résumer un peu notre point de vue, afin de laisser le
maximum de temps aux membres de la commission pour poser les questions qui,
d'après ce qu'on m'a dit, se sont accumulées tout au cours des
deux derniers jours. Et ça nous fera plaisir d'y répondre le plus
précisément et le plus clairement possible.
Le Président (M. Charbonneau): Ce que nous ne pouvons
refuser.
M. Coulombe: Que vous ne pouvez pas refuser?
Le Président (M. Charbonneau): Voilà.
M. Coulombe: Bon, parfait. Merci. Premièrement, il y a
juste trois points que je voudrais souligner. Comme premier point,
évidemment, les nombreux mémoires qui ont été
présentés soulèvent une foule de questions. Ce soir, il
aurait été possible de reprendre chacun des mémoires et de
vous dire: Nous sommes d'accord avec ceci, nous sommes d'accord avec ça,
ou nous sommes en désaccord avec ceci, nous sommes en désaccord
avec cela. Mais, comme je viens de le dire, je pense que ce qui est le plus
important, c'est que la commission puisse exprimer vraiment les
inquiétudes qui peuvent surgir à la lecture de tous ces
mémoires. Je ne pense pas que ça vaille beaucoup la peine
d'insister vis-à-vis des membres de cette commission sur le fait que, je
ne sais pas, les ingénieurs-conseils ont recommandé
qu'Hydro-Québec ait un exécutif au sein de leur conseil
d'administration. Il serait un peu inutile de vous rappeler que
l'exécutif existe depuis quatre ans et qu'il siège toutes les
trois semaines depuis les quatre dernières années. Ils ont
suggéré aussi d'avoir des ingénieurs-conseils comme
membres du conseil d'administration,, Je tiens pour acquis que c'est le
gouvernement qui va s'en occuper, mais il y avait une petite note après
qui ajoutait "avec juste rémunération". Cela j'avoue que nous
sommes aussi d'accord avec ce principe-là.
Ce serait inutile aussi d'insister sur le fait que l'association des
grands travaux a toujours soutenu que nous ne l'avions pas avertie de toutes
les conséquences du programme PAQS. Nos gens disent qu'ils ont
été avertis et, eux, ils disent qu'ils n'ont pas
été avertis. On pourrait s'étendre très longuement
là-dessus, mais on pourra peut-être y revenir tantôt, s'il y
a lieu.
Notre propre syndicat du SCFP soutient qu'il faut rétablir la
vice-présidence du groupe équipement. On trouve cela tout
simplement un peu bizarre, parce que, dans la vice-présidence du groupe
équipement que M. Michel préside, il y a environ 1300 personnes.
C'est donc assez difficile de la rétablir puisqu'il s'y trouve
effectivement 1300 personnes.
On a aussi mentionné, d'après ce qu'on m'a dit, que les
monteurs s'arrêtaient au bout de huit heures lorsqu'il y avait des
pannes, alors que c'est universellement connu qu'il y a un premier "shift" de
huit heures, après lequel cela va à seize heures et
qu'après seize heures, pour des raisons de santé et de
sécurité, il fallait arrêter. C'est la même chose
chez les entrepreneurs.
Je n'insisterai pas non plus sur le caractère scientifique de
l'étude d'un autre groupement basée sur une filature d'individus.
Je pourrais en relever plusieurs semblables, mais je pense que ce serait faire
perdre le temps de la commission. Tout ce que je veux dire, c'est que nous
avons l'intention, à Hydro, de rencontrer toutes ces associations, parce
qu'on n'a pas eu le plaisir de le faire avant tout simplement parce que son
mémoire a été remis à la commission et qu'on
n'avait pas les autres mémoires en main. On a l'intention de leur
demander une rencontre, de discuter en profondeur de leur mémoire ainsi
que du nôtre, parce que nous pensons que ce sont des partenaires
indispensables dans ce qu'Hydro-Québec fait au Québec et que ces
mémoires mériteraient d'être discutés à fond
avec nous. Vous n'avez pas toujours le temps d'être les témoins de
ce genre de discussions. Alors, nous avons l'intention, au cours des prochaines
semaines, de les rencontrer et d'en discuter à fond.
Le deuxième point que je voudrais souligner, c'est que l'objet de
la discussion, c'est franchement la sous-traitance à
Hydro-Québec. Notre position globale là-dessus, c'est que la
sous-traitance à Hydro est une réalité. Faire faire
plutôt que faire est certainement une réalité depuis le
début des années soixante. J'avoue que de 1944 à 1963 ou
1964, je serais incapable de vous en parler, car je n'étais pas
là, et il y a peu de gens à Hydro qui y étaient dans ce
temps-là et qui peuvent me raconter ce qui se passait» Mais,
depuis le début des années soixante, le problème de la
sous-traitance existe. De vieux employés d'Hydro, car je n'y
étais pas personnellement, m'ont même raconté que la
première décision de M. Lesage au début des années
soixante avait été de demander à Hydro d'arrêter de
donner des travaux au barrage de Carillon à la sous-traitance et
d'engager du monde à HydroQuébec pour faire ces
travaux-là. Cela a été l'une des premières
décisions du gouvernement d'alors. Depuis ce temps, beaucoup de choses
se sont déroulées; beaucoup d'eau a coulé sous les
barrages qui ont été construits depuis ce temps-là. Le
problème de la sous-traitance a toujours été dans une
espèce d'équilibre toujours contesté par
l'intérieur, toujours contesté de l'extérieur.
Aujourd'hui cela n'a pas changé. Si vous me demandiez un
diagnostic, on pourrait en parler longuement. Tantôt, la question a
été posées Est-ce que, actuellement, il y a un
déséquilibre dans le domaine de la sous-traitance à
Hydro-Québec? Nous vous répondrions que non. Sur une longue
période il n'y a pas de déséquilibre. S'il y en avait un
déséquilibre, ce serait en faveur de la sous-traitance externe
sur une longue période. Je m'explique. On pourra vous donner des
chiffres tantôt dans le domaine de la construction et dans plusieurs
autres domaines. Graduellement, Hydro-Québec s'est retirée d'un
certain champ d'activités pour les confier à la sous-traitance,
à l'externe.
On pourra en reparler un peu plus précisément
tantôt. Par contre, je ne nie pas que, dans certaines périodes ou
sous-périodes pendant quelques années, il y a eu des bas ou des
hauts dans certaines catégories d'emplois. On assiste
présentement, actuellement... et c'est l'objet de plusieurs questions
auxquelles on pourra répondre tantôt, dans le cas des
entrepreneurs en distribution, au point de vue des monteurs. D'une façon
globale, depuis le début des années soixante, l'équilibre
général, non seulement s'est maintenu mais une certaine forme
d'analyse pourrait nous permettre de penser que c'est en faveur de la
sous-traitance externe que l'équilibre s'est rompu.
Après avoir dit cela, je pense quand même que s'il y a une
commission parle-
mentaire, il y a une inquiétude de nos partenaires du
génie-conseil, des entrepreneurs en construction et de plusieurs autres
groupes aussi. Il y a donc une inquiétude et c'est une inquiétude
que nous partageons en grande partie parce que nous sommes au coeur de cette
tension qui existe entre l'interne et l'externe.
Vous avez pu vous rendre compte à la lecture de tous les
mémoires qu'autant la direction d'Hydro se fait - excusez l'expression -
engueuler de l'interne autant c'est le même phénomène
vis-à-vis de l'externe. Quelqu'un qui a le sens de l'humour pourrait
dire que c'est tellement à l'opposé que le milieu est dans la
vérité, mais je n'oserais pas dire cela. Il y a une
inquiétude, elle est réelle, nous la partageons et nous pensons
qu'au point de vue de la sous-traitance, cette réflexion a sa place,
nous voulons la partager et s'il y a des rectifications à faire
éventuellement, nous sommes prêts à les faire.
Nous avons dans nos négociations avec nos syndicats refusé
certains concepts, de plancher d'emploi et des choses semblables et nous sommes
prêts à regarder ce problème. C'est un problème,
d'ailleurs, qui nous renvoie à la gestion d'Hydro-Québec et
à la productivité à Hydro-Québec. Là-dessus,
notre mémoire, je pense, est assez clair sur la productivité
globale d'Hydro-Québec. Depuis les dernières années - je
vous renvoie à la page 11 de notre mémoire - si vous consultez
les cinq ou six variables qui font la raison d'être de notre entreprise,
c'est-à-dire nos immobilisations, la construction de nos lignes de
transport, de répartition, de distribution. L'augmentation du nombre de
nos clients et la livraison de nos kilowattheures, ce qui fait le sens
même d'Hydro-Québec, regardez les pourcentages d'augmentation et
regardez les pourcentages d'augmentation de la main-d'oeuvre permanente
à Hydro-Québec. Je pense que les chiffres sont éloquents.
C'est ce que j'appellerais la productivité globale. Quant à la
productivité par secteur, par groupe d'employés, par individu,
nous sommes prêts à admettre que, malgré certains efforts
qui ont été faits, il reste beaucoup à faire. Nous le
disons à nos syndicats, nous leur disons qu'il faut travailler
là-dessus et nous sommes prêts à continuer à
travailler là-dessus. À ce point de vue, je pense qu'un exemple
assez éloquent qui a été fourni - je ne sais pas qui
exactement a déposé le rapport - je crois que c'est le rapport
Sullivan.
Ce rapport semble démontrer que la productivité de nos
monteurs est à 63 % alors qu'on a amené les chiffres de 65 %, 20
%, 10 %. On pourra clarifier tout cela tantôt. Je veux prendre le rapport
Sullivan parce qu'il a été déposé.
Voici un rapport qui a été fait à la demande de la
direction d'Hydro-Québec dans un secteur où nous avions des
problèmes, pensant que la productivité n'était pas assez
haute. L'enquêteur fait son travail et remet ses conclusions. J'aimerais
qu'on en parle un peu plus, tantôt, parce que je pense que c'est
exemplaire de ce qu'on essaie de faire; peut-être pas de ce qu'on
réussit toujours, mais de ce qu'on essaie de faire. Le résultat
de cette étude-là a conduit à des transformations. Cela a
été fait en 1983. Tout ce que j'ai à vous dire, c'est que
la direction - et quand je parle de la direction, je ne parle pas
nécessairement du président, je parle des vice-présidents
régionaux, des directeurs de service, etc. - a pris des mesures. Je veux
juste vous en indiquer une, à titre d'exemple: sur 22 cadres qui
étaient là, à ce moment-là, 16 ont
été remplacés dans le secteur, 16 ont été
remplacés.
Voici une étude sur la productivité interne qui a servi de
jalon pour changer des choses et on les a changées. Est-ce qu'il en
reste beaucoup à changer? Oui, il en reste beaucoup et on est les
premiers à le dire à nos syndicats et nos syndicats sont les
premiers à essayer de "fighter" avec nous pour savoir que la
productivité, ce sont des problèmes d'emploi et ainsi de suite.
Vous savez comment ces problèmes se situent. Tout ce qu'on veut dire,
c'est que la gestion d'Hydro-Québec...
Les grandes caractéristiques d'Hydro-Québec au point de
vue de la productivité -et les chiffres sont là, non seulement
dans les rapports financiers, mais dans ses chiffres de productivité...
Nous ne voulons pas dire que notre productivité est ce qu'elle devrait
être; il y a beaucoup de choses à faire, nous le
répétons, et nous sommes prêts à continuer à
le faire. Il y a de la résistance, c'est normal. Rappelez-vous qu'il y
avait 20 000 personnes dans l'entreprise, il y a deux ans, et il y en a 18 400,
à l'heure actuelle, et rappelez-vous qu'avant, cela fonctionnait
à un rythme d'augmentation de la main-d'oeuvre de 2,4 % par
année. Nous l'avons diminué.
Après avoir dit cela, je le répète, nous sommes
conscients qu'il y a une inquiétude; sans cela, il n'y aurait pas de
commission parlementaire. Nous partageons cette inquiétude. Nous ne
pensons pas avoir la vérité absolue. Nous sommes prêts
à discuter avec nos partenaires. Dans notre esprit, quand on isole
Hydro-Québec comme une catégorie spéciale, je pense qu'on
fait fausse route. Ceux qui dirigent Hydro-Québec ont exactement les
mêmes objectifs globaux que nos partenaires. Hydro-Québec ne peut
pas réaliser sa mission sans ses partenaires et ses partenaires ne
peuvent pas réaliser leurs objectifs sans qu'Hydro-Québec soit
une entreprise efficace, rentable, où il y a une direction qui a les
coudées franches pour gérer.
La gestion n'est pas de couper en
morceaux tout ce qui se passe dans une entreprise et de dire: Je prends
ce morceau et le reste je ne m'en occupe pas. Je pense que la gestion, c'est
global. Il faut regarder la gestion d'une entreprise globalement et, comme l'a
dit notre syndicat: Si cette gestion n'est pas satisfaisante, il y a des moyens
pour pallier cela. Sinon, je pense que prendre cela par morceaux ou par
catégorie d'emplois et par groupe d'employés, c'est un
cul-de-sac.
C'est l'introduction que je voulais faire» Je m'arrête
là, parce que je pense qu'il y a beaucoup de questions que les
députés veulent poser et cela nous fera plaisir d'y
répondre.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Coulombe. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je vous remercie, M. Coulombe, d'avoir
été parmi nous, aujourd'hui, afin d'exprimer le point de vue
d'Hydro-Québec sur la question de la sous-traitance. Votre exposé
nécessite de ma part quelques commentaires. Je ne nie pas que la
sous-traitance soit un élément important dans l'organisation des
ressources d'une entreprise de la taille d'Hydro-Québec. Je ne nie pas
non plus que la sous-traitance soit un enjeu de relations du travail et il est
normal qu'il soit soulevé lors des négociations des conventions
collectives de vos employés. Cependant, les considérations de
relations du travail ne doivent pas mettre en péril la performance
d'Hydro-Québec. J'en conviens. Par ailleurs, la sous-traitance comporte
aussi des enjeux économiques et, je dirais même, des enjeux
sociaux, qu'il ne faut pas négliger.
Vous nous dites que, fondamentalement, les objectifs ou la philosophie
d'Hydro-Québec, en matière de sous-traitance, n'a pas
changé dramatiquement, au cours des dernières années. Par
contre, je constate que la manière dont ces objectifs s'expriment ou
semblent s'exprimer concrètement s'est modifiée et il n'est pas
évident que ces changements, premièrement, soient acceptés
par tous ceux qui sont affectés, ni qu'ils soient, d'après les
mémoires, les exposés qui nous ont été
présentés, nécessairement dans les meilleurs
intérêts des citoyens. En effet, après deux jours
d'audience, je dois constater que les nouvelles modalités d'application
de votre politique de sous-traitance, inscrites aux articles 34 de vos
conventions collectives - et vous l'avez admis vous-même - suscitent
beaucoup d'inquiétude chez certains de vos partenaires
économiques. Et cette inquiétude me semble justifiée
à certains égards.
Dans le cas précis des monteurs de lignes, la lettre d'entente de
1984, sur le programme PAQS n'est pas sans causer des problèmes concrets
de viabilité à certains entrepreneurs. C'est ça qu'ils
nous ont présenté dans leur mémoire, à la suite des
questions qu'on leur a posées et à la suite des
représentations qu'ils ont faites. Et je vous avoue que, malgré
toutes les explications qu'Hydro-Québec est venue nous donner et qui
sont contenues dans le mémoire, je demeure préoccupé. En
effet, comment ne pas l'être, lorsqu'on considère le sort
réservé aux travailleurs impliqués dans cette industrie,
en regard de l'embauche par Hydro-Québec dans ce secteur
d'activité? On est venu porter à notre attention, ce matin, que
plus de 200 monteurs de lignes ont été obligés de quitter
le pays pour se trouver des emplois ailleurs parce que l'effectif a
chuté de 720 - il avait monté à 900 et est redescendu -
à 500 et ils voient qu'il n'y a pas d'avenir pour eux.
À ce stade des audiences, je vous avoue qu'une question
importante est, quant à moi, restée sans réponse
satisfaisante, et ce, malgré l'excellent mémoire
déposé par votre société et les explications et la
présentation que vous nous avez faites. (16 h 30)
Vous nous avez dits Le problème existe depuis les années
soixante. Il a toujours été en équilibre. Aujourd'hui,
rien n'a changé. Est-ce en déséquilibre maintenant? Non.
Ça, c'est dans votre présentation. Dans votre mémoire,
vous dites: Les orientations de base d'Hydro-Québec à
l'égard de l'utilisation de la sous-traitance n'ont pas changé au
cours des dernières années. À la page 36: "Les clauses
portant sur la soats-traitance dans les conventions collectives explicitent la
politique et les pratiques d'Hydro-Québec à cet
égard."
Alors, je ne comprends pas pourquoi Hydro-Québec - vous pouvez
peut-être nous l'expliquer - a cru bon, si rien n'a changé,
d'introduire dans ses conventions collectives le libellé actuel de
l'article 34. L'ancien libellé comportait-il des inconvénients
majeurs? Dans quelle mesure le nouveau libellé a-t-il aplani ces
inconvénients? Parce que si rien n'a changé et si on fait la
même chose aujourd'hui qu'on faisait avant, je me demande comment il se
fait que tout ce monde-là est venu devant nous? Ils se plaignent de
l'article 34 et des lettres d'entente, et ils disent que cela a changé?
Vous pourriez peut-être nous expliquer cela.
M. Coulombe: II y a deux aspects, M. Ciaccia. Le premier, c'est
que, quand je dis que depuis le début des années soixante, non
seulement il n'y a pas eu de déséquilibre en faveur de l'interne,
mais s'il y a eu déséquilibre, c'est en faveur de l'externe. Je
vais vous citer quelques chiffres. Ça, c'est global. Parce que tous ceux
qui sont venus ici depuis deux jours n'ont pas parlé simplement des
monteurs. Le génie-conseil a généralisé le
problème. Notre propre syndicat des ingénieurs l'a aussi
généralisé, et ils
n'ont pas de responsabilité vis-à-vis des monteurs. Donc,
si je parle des ingénieurs-conseils, ils ne parlent pas des monteurs,
ils parlent du phénomène de sous-traitance en
général à Hydro-Québec.
M. Ciaccia: C'est parce qu'on est limité dans le temps. Ce
qu'on examine ici, ce sont les monteurs de lignes, la sous-traitance des
contracteurs généraux et les ingénieurs-conseils.
M. Coulombe: Exact. Exact. Et l'association des grands travaux
est venue expliquer sa philosophie, et l'association des entrepreneurs du
Québec est venue expliquer sa philosophie. Si on lit ces
mémoires, je ne reviendrai pas là-dessus, mais je veux juste
souligner de nouveau qu'Hydro-Québec, depuis le début des
années soixante, a quitté le domaine de la construction et que,
de plus en plus, c'est assumé par l'entreprise privée.
Hydro-Québec a construit des barrages avec ses employés, et le
dernier grand travail qui a été fait par Hydro-Québec,
c'est Gentilly 2. M. Michel le sait fort bien parce qu'il était en
charge des travaux à ce moment-là. C'a été fait par
des employés d'Hydro-Québec. Cette époque est
terminée. Tous ces travaux sont maintenant faits à
l'extérieur. Il s'agit donc d'un changement remarquablement important,
considérant que ce qui est de plus "capital-intensive", ce sont les
grands travaux de production et de transport. C'est fait à
l'extérieur et, à l'avenir, ça va être fait à
l'extérieur. C'est donc un changement fondamental dans l'orientation
d'Hydro qui favorise l'externe.
Par contre, dans le cas des articles 34, nous pensons que se sont
accumulés... Et je voudrais que M. Boivin parle un peu plus
précisément de l'article 34. Je voudrais tout simplement vous
signaler qu'une de nos priorités, c'est qu'il y a des choses qui
étaient obscures. Il y a des choses qui n'étaient pas claires
dans l'interprétation entre nos syndicats, nous et l'extérieur.
Cette non-clarté allait bien lorsque l'argent était
distribué partout dans beaucoup de travaux. Les gens passaient en douce
sur ces ambiguïtés. Les gens ne travaillaient pas trop à se
demander pourquoi ceci et pourquoi cela, tout simplement parce qu'il y avait
beaucoup d'argent qui se donnait dans les travaux. Lorsque cet argent est
devenu un peu plus rare, lorsque les travaux sont devenus un peu plus rares -
le mot est là -je pense que chacune des dimensions de ce problème
a été plus regardée par tout le monde. Les syndicats nous
ont fait, à l'interne, des représentations sur l'obscurité
de certains travaux concrets dans le champ. Les entrepreneurs nous ont fait la
même chose. Et, à un moment donné, il a fallu clarifier
certaines choses.
Ce que je vous dis, c'est qu'au moment où l'on se parle, nous
sommes en négociation avec nos syndicats pour clarifier d'autres choses
qui sont obscures. Par exemple, je vous ai mentionné à la
dernière commission parlementaire l'obscurité qu'il y avait
concernant la zone grise entre construction et entretien. On a une zone grise
très précise qui est le mot "remplacement". Est-ce qu'un
remplacement, c'est de l'entretien ou de la construction? On est en train de
négocier et de discuter avec les syndicats. J'ai promis aux
entrepreneurs qu'à un moment donné, on les rencontrerait et qu'on
leur expliquerait ce qu'on entend par remplacement. Ce sont des choses qui
s'éclaircissent.
Il y a dix ans, ce problème-là ne se posait pas,
aujourd'hui il se pose, cela évolue et nous sommes en pleine discussion
à l'heure actuelle là-dessus. Et probablement qu'à un
moment donné, il va falloir faire une entente avec nos syndicats et,
peut-être, je n'ai aucune objection, même avec les entrepreneurs
pour s'entendre et clarifier les mots "qu'est-ce qu'un remplacement". Quand on
remplace un appareil, est-ce que c'est de l'entretien ou si c'est de la
construction? Cela a l'air byzantin pour ceux qui ne vivent pas cela tous les
jours, mais je vous garantis que, quand on dépense des dizaines et des
centaines de millions et que les employés internes et externes voient
ces travaux se faire, cela a de l'importance. On est en train d'en
discuter.
Quand vous me demandez ce qui n'était pas clair avant et ce qui a
nécessité cela, je vous le dis, c'était l'obscurité
de ces travaux, l'obscurité de définir clairement qui fait quoi.
Avant cela, c'était moins grave, parce que tout le monde était
servi. Là, c'est moins le cas. Il y a moins de travaux. On espère
de plus en plus rationaliser nos travaux pour ne pas être obligés
de mettre autant d'argent que cela pour maximiser le prix du kilowattheure.
Donc, on est encore en discussion, et probablement qu'il va falloir, dans les
mois et les années qui viennent, clarifier ce genre de choses.
Maintenant, plus précisément pour les monteurs, pour
l'article 34, je pense qu'il faut le considérer dans son ensemble.
Peut-être que Claude Boivin pourrrait donner plus d'explications.
M. Boivin (Claude): Écoutez, il n'est pas dans mon
intention de minimiser ou de nier les faits qui font qu'avec la fin du PAQS, la
lettre d'entente qu'on avait signée avec notre syndicat amène
à une réduction du nombre de monteurs entrepreneurs à 500
personnes-années. C'est un fait. D'ailleurs cette lettre d'entente est
connue de tout le monde. À mon point de vue, il faut regarder encore
là le problème dans son ensemble, pas nécessairement dans
l'ensemble de l'Hydro-Québec, mais au moins l'isoler aux
activités
du réseau de distribution. Quand on a lancé le PAQS, il y
avait des raisons précises. Dans la période des grands travaux de
la baie James, on avait pris du retard, parce que les capacités
financières à Hydro-Québec étaient
étirées à peu près à leur maximum pour
réaliser les travaux de production et de transport du complexe La
Grande, et on avait négligé jusqu'à un certain point
certaines activités de rénovation de notre réseau de
distribution On a lancé le programme PAQS, qui, soit dit en passant, ne
couvrait pas uniquement le réseau de distribution. Il couvrait
également le réseau de transport, le réseau de
répartition et le réseau de distribution parce que, globalement,
c'était un programme de près de 1 000 000 000 $ dont environ 350
000 000 $ à 400 000 000 $ étaient consacrés à la
distribution. On a discuté à ce moment-là...
M. Ciaccia: C'était pour combler les retards le programme
PAQS?
M. Boivin: ...c'est-à-dire pour remettre en ordre
justement...
M. Ciaccia: Pour remettre en ordre.
M. Boivin: ...notre réseau de distribution qui avait
été négligé au cours des derniers dix ans pendant
la phase de construction des travaux du complexe La Grande. Il est
évident, en fait, que c'était un programme de trois ans et qu'il
fallait trouver des moyens avec nos partenaires externes et nos partenaires
syndicaux...
M. Ciaccia: Excusez, je voudrais juste revenir... Avec le
programme PAQS, avez-vous devancé des travaux qui devaient être
faits plus tard ou avez-vous comblé des retards?
M. Boivin: On a surtout reconstruit des portions de
réseaux de distribution qui étaient rendues
désuètes. On a également fait des améliorations
pour assurer une meilleure continuité de service, qui auraient
possiblement été faites de toute façon plus tard mais
qu'on a décidé de faire maintenant, tel le bouclage
d'artères qui permet de rétablir plus rapidement le service en
cas de panne. Alors, il y a eu différentes actions comprises dans le
programme PAQS.
Maintenant, si on regarde le réseau de distribution dans son
ensemble et nos activités de distribution, parce que, là, on met
le focus sur les monteurs de lignes, mais l'exploitation d'un réseau de
distribution, ça veut dire des monteurs de lignes, ça veut dire
également des opérations de plantage de poteaux, ça veut
dire également des opérations d'élagage,
d'émondage, en fait, pour contenir la végétation qui
pousse le long de nos lignes...
M. Ciaccia: Oui, mais, excusez, quand vous parlez de construction
et d'entretien, le réseau étant maintenant construit,
l'interprétation de vos syndicats, c'est de dire que maintenant, c'est
de l'entretien. Et ils se servent de l'article 34 pour dire que c'est seulement
eux qui peuvent le faire, et, d'après l'article 34, vous leur avez
accordé cette clause-là. Est-ce exact ça?
M. Boivin: En partie, M. le ministre, parce que effectivement, la
distribution est couverte dans notre convention collective par la lettre
d'entente du PAQS et non pas par l'article 34. Elle est couverte en partie,
mais la façon de gérer présentement les activités
de distribution est selon la lettre d'entente PAQS. Et il faut dire que, dans
nos conventions collectives, depuis 1976, pour le réseau de
distribution...
M. Ciaccia: Mais après... Excusez, après 1988,
c'est l'article 34 qui va régir, qui...
M. Boivin: Après 1988, on verra dans la prochaine
convention collective...
M. Ciaccia: Mais...
M. Boivin: ...parce que la convention collective actuelle se
termine à la fin de 1988o
M. Ciaccia: Vous m'excusez, vous m'excusez si je vous
interromps...
M. Boivin: Non, je vous comprends...
M. Ciaccia: ...parce qu'on a très peu de temps, puis, au
fur et à mesure que vous soulevez certaines questions...
M. Boivin: Correct. Alors tout simplement d'abord pour aller le
plus rapidement possible, je voudrais vous citer certains chiffres. Quand on
prend les activités de distribution totales, tant construction
qu'entretien et exploitation du réseau, incluant les activités au
réseau souterrain, il faut mentionner dès maintenant que, du
côté souterrain, les travaux de génie civil pour les
canalisations sont entièrement confiés à l'externe, alors
que les travaux électriques sont réalisés à
l'interne. En 1983, au total, on avait dans ces activités-là 1291
personnes-années d'entrepreneurs, réparties en 693
préposés à la construction et au plantage, 242
préposés à l'élagage...
M. Ciaccia: Excusez, M. Boivin, je ne veux pas vous interrompre,
mais le problème que j'ai, c'est que vous me donnez beaucoup
d'informations et - ça ne me ferait rien, si
vous me l'envoyiez par la poste - j'ai seulement vingt minutes, si vous
pouviez... Est-ce que ça serait possible - je vais vous la poser d'une
autre façon, la question - peut-être d'y répondre un peu
plus brièvement. Autrement, on ne pourra plus vous poser d'autres
questions et on va manquer d'information. Je pense qu'un des buts de la
commission parlementaire, c'est d'avoir de l'information d'Hydro-Québec
pour tous ceux qui nous écoutent.
M. Boivin: On est là pour cela.
M. Ciaccia: On parlait de 34... M. Coulombe a dit que c'est de la
clarté; il y avait de la confusion avant et maintenant... Mais à
la page 26 de votre mémoire, vous nous formulez une politique qui
clarifie la répartition des tâches. Pourtant, vous admettez
à la page 26 que les nouvelles clauses ont soulevé des
problèmes d'interprétation et d'application, donc, la confusion.
J'en conclus que ces nouvelles clauses n'ont toujours pas réglé
le problème de confusion. Je voudrais savoir si cela valait vraiment la
peine de les introduire. Est-ce que dans les circonstances, les coûts de
la clarté qu'on ne semble pas avoir aussi bien à l'interne
qu'à l'externe ne sont pas trop élevés par rapport aux
bénéfices que cette clarté apporte? Si vous nous dites que
c'est la même chose maintenant qu'avant, est-ce que vous nous dites qu'on
pourrait enlever l'article 34 et que ce serait la même chose?
M. Boivin: Ce que je peux dire, c'est qu'on a peut-être
manqué notre coup en ce qui a trait à la clarté de
l'article 34, mais cela a quand même aidé à clarifier
jusqu'à un certain point une situation qui était encore plus
ambiguë auparavant.
M. Ciaccia: Oui, cela l'a clarifiée.
M. Boivin: Maintenant, il est resté des zones grises,
notamment en ce qui concerne l'interprétation du mot "remplacement",
comme le disait M. Coulombe.
M. Ciaccia: Cela l'a clarifiée dans l'esprit de plusieurs
à tel point qu'on en est aujourd'hui avec une commission parlementaire.
Je voudrais vous poser juste une autre question. J'ai considéré -
et je pense que c'est partagé par plusieurs - que la formule
qu'Hydro-Québec avait, c'était une formule gagnante
spécialement envers les ingénieurs-conseils. Les
ingénieurs-conseils sont très préoccupés par,
encore une fois, la clause 34. Est-ce que les modifications apportées
à la convention collective ont pour effet de restreindre le type de
travaux qu'on pourrait confier aux ingénieurs-conseils?
En d'autres termes, est-ce que la formule gagnante qui a toujours
existé à Hydro-Québec a été modifiée
par l'article 34?
M. Michel (Benoît): La politique de base qui est la formule
gagnante, comme vous le dites, M. le ministre, n'a pas changé. Cette
politique existe depuis 1980 et a fait l'objet d'une recommandation au conseil
d'administration ou à la commission du temps. Cette politique est
inchangée. D'ailleurs, je crois que le représentant du Syndicat
professionnel des ingénieurs hier a admis que la politique
d'Hydro-Québec en matière de génie-conseil était
inchangée.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez entendu les
représentations des ingénieurs-conseils? Ils nous ont
donné des chiffres à l'appui, et ils avaient leur avocat. J'ai
dit: Écoute, on n'est pas devant un tribunal. Ils ont dit qu'avec
l'article 34, ils ne peuvent pas faire les mêmes choses qu'ils faisaient
avant et ils ont cité l'article 34. Comment expliquer cela? (16 h
45)
M. Michel: J'ai vu les chiffres avancés par le
génie-conseil, je suis d'accord avec ces chiffres. Essentiellement,
Hydro-Québec -je parle du groupe équipement qui est le principal
employeur de génie-conseil - a toujours été à un
niveau à peu près stable de contrats de services professionnels
à l'exclusion de la période de 1983 où on a dû,
d'une part, arrêter un paquet d'avant-projets et, d'autre part, rayer des
livres des avant-projets qui étaient déjà
capitalisés et prendre le groupe équipement, quant au nombre
d'ingénieurs, et le passer d'environ 550 à 325.
La situation s'est rétablie depuis. Cependant, l'Association des
ingénieurs-conseils vous montre des chiffres qui sont en
décroissance pour l'année 1987. Cette situation est strictement
conjoncturelle et je m'explique. L'année 1987 va subir, pour autant que
mon groupe est concerné, une diminution de services professionnels de
génie-conseil de l'ordre de 8 000 000 $. L'an dernier, on avait
donné pour environ 28 000 000 $ de contrats de services professionnels.
Cette année, nous prévoyons un total de 20 000 000 $, diminution
de 8 000 000 $ strictement due à deux facteurs: premièrement, le
ralentissement de travail des ingénieurs d'Hydro-Québec membres
du Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec, parce
que, comme on vous l'a expliqué, les ingénieurs d'Hydro oeuvrent
dans la planification des équipements, des études
préliminaires et des avant-projets. Le génie-conseil, en
général, se réserve l'ingénierie
détaillée. Bien sûr, si un ralentissement de travail
s'étend sur quelques mois et si les projets, les avant-projets et les
études préliminaires sont retardés, cela
va se répercuter éventuellement sur les heures
d'ingénierie détaillée. C'est le phénomène
auquel on fait face maintenant».
M. Ciaccia: Excusez-moi. Durant cette période où il
y a eu une décroissance des travaux, comme vous le mentionnez, et moins
de travaux aux ingénieurs-conseils, avez-vous augmenté le nombre
de votre effectif à l'intérieur d'Hydro, le nombre
d'ingénieurs? Avez-vous augmenté pour la sous-traitance, durant
la dernière année, le nombre des monteurs de lignes?
M. Michel: Le nombre total d'ingénieurs à
Hydro-Québec depuis 1980, à une ou deux têtes d'homme
près, se situe entre 1095 et 1098. Le syndicat a annoncé le
chiffre de 1100 hier, on ne fera pas de chicane avec ce chiffre. Le nombre
global est constant. Cependant, le nombre du groupe équipement, comme je
vous le disais tout à l'heure, a diminué de presque 60 % à
75 % et il est passé de 550 à 325. Bref, on a dû se
réajuster, au groupe équipement, pour faire face à une
situation de travail en décroissance.
M. Coulombe: Je voudrais peut-être insister
là-dessus, M. le ministre. C'est un exemple concret de la gestion
d'Hydro-Québec. Le groupe équipement fait moins de travaux, a
besoin de moins d'ingénieurs. On n'a mis personne à la porte. On
a tout simplement dit aux ingénieurs présents: Écoutez, on
a un effort gigantesque de marketing à faire. On a de la
réorganisation à faire au plan de l'exploitation et de la
décentralisation à faire pour rapprocher cela de la
clientèle. Êtes-vous prêts à faire autre chose que ce
que vous faisiez depuis les dix dernières années? Plusieurs, un
grand nombre, puisqu'il y en a 200 de moins à l'équipement et 200
de plus et que le nombre total n'a pas changé, et on n'a presque pas
engagé de personnel depuis cinq. Donc, ils se sont
réajustés et ils se sont rééquilibrés dans
des tâches qui étaient de nouvelles tâches à Hydro.
Je pense que c'est une capacité d'adaptation tout à leur honneur
et aussi à l'honneur de la gestion d'Hydro d'avoir mieux utilisé
son personnel sans avoir de drame ni personnel ni collectif pour les
réutiliser. C'est un exemple concret de la réadaptation qu'on a
faite.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le
député de Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer M.
Coulombe et les autres membres de la haute direction d'Hydro. Il me fait
plaisir qu'ils aient pris la peine de venir nous rencontrer en commission
parlementaire parce qu'il s'est dit beaucoup de choses depuis deux jours ici;
on nous a même donné énormément de chiffres qui ne
concordent pas toujours les uns avec les autres.
J'aimerais qu'on puisse tirer au clair, d'entrée de jeu,
certaines données. D'abord, une première question qui me vient
à l'esprit, et monsieur vient de la soulever, concerne le nombre
d'ingénieurs. J'ai lu attentivement votre mémoire et, à la
page 9, les chiffres d'Hydro-Québec me donnaient 1273 ingénieurs
pour 1986 et vous venez de parler de mille quelque chose, sans se chicaner, un
peu moins que 1100...
M. Michel: 1100.
M. Gauthier: II y a certainement une explication et j'aimerais la
connaître.
M. Houde (Jean): Ah oui! Et facile aussi. Je vais vous la donner
M. Gauthier.
Il y a 1098 ingénieurs syndiqués à
Hydro-Québec, au moment où on se parle. Il y en avait en 1981,
1095. La différence, c'est que vous en avez un certain groupe qui sont
des ingénieurs chercheurs, qui travaillent surtout dans notre centre de
recherche. Ce groupe-là a crû de 35 au cours des dernières
années. Si vous additionnez les deux - c'est le total des deux que vous
avez dans le chiffre du mémoire - vous trouvez votre total.
M. Coulombe: Cela correspondait d'ailleurs à une
priorité du plan de développement de mettre l'accent sur la
recherche et le développement de nouveaux produits et on a engagé
des chercheurs puis des ingénieurs pour l'ensemble de l'entreprise. Il y
a eu un transfert de responsabilités, il n'y a pas eu d'engagement ou
très peu par rapport au départ.
M. Gauthier: Les chiffres que vous nous donnez dans vos tableaux
s'arrêtent à 1986. Évidemment, on est en cours
d'année 1987, on comprend cela, sauf qu'on est rendu au mois de
novembre. Peut-être que le vice-président aux ressources humaines
possède ces données-là, il a l'air tout fin prêt
à faire feu. Est-ce que je pourrais avoir les données concernant
les différents corps principalement, entendons-nous, les corps de
métiers pour 1987? Le dernier chiffre dont on dispose, et je pense que
dans les corps de métiers, il y a les monteurs de lignes, entre autres
personnes, c'est 5489. Est-ce que vous avez le chiffre pour 1987 ou en tout
cas...
M. Houde (Jean): Je vais vous les donner dans une minute. Je vais
revenir dans une minute, si vous le voulez.
M. Gauthier: D'accord, je peux continuer à questionner
quand même. M. le président, le problème qui s'offre
à nous
aujourd'hui n'est pas mince, dans le sens que les gens qui travaillent
pour les sous-traitants d'Hydro-Québec nous indiquent, avec le plus
grand sérieux du monde - on a tendance à les croire d'autant plus
que c'est corroboré d'une certaine manière par les
employés du syndicat des monteurs de lignes, du syndicat des
métiers - qu'au cours des prochaines années, quoique les chiffres
ne sont pas très éloquents, on s'attend à une augmentation
du personnel de métier à l'interne. Tout le monde a l'air de
d'entendre pour dire que cela devrait s'accentuer au cours des prochaines
années. D'autre part, puisque vous voulez qu'on prenne le
problème globalement, il y a des gens qui viennent nous dire: on va
descendre de 700 à 800 emplois à 500 emplois à partir
d'une clause qui est signée. Je pense que vous comprenez bien le
problème devant lequel on se trouve comme parlementaires. Il nous
apparaît qu'il y a là une certaine inéquité, je le
prends sous toutes réserves, du fait qu'il y a une apparence de
transfert d'activités en quelque sorte ou d'emplois entre des gens qui
sont pour le privé, des sous-traitants j'entends, et des gens qui sont
à Hydro-Québec. Vous avez certainement un commentaire d'ordre
général à donner là-dessus, à moins que vous
ne vouliez mettre ma question sur la glace, M. le président, de
permettre à M. Houde de nous donner...
M. Houde (Jean): J'ai vos chiffres. Vous les voulez par
catégorie d'emplois?
M. Gauthier: Oui.
M. Houde (Jean): Allons-y. Il n'y a pas tellement de
catégories. Bureau?
M. Gauthier: Oui.
M. Houde (Jean): Paie du 13 octobre, si vous voulez une
référence précise, 5274. Métiers, 5611;
techniciens, 1891; ingénieurs, 1270, 13 octobre; constables, 116;
spécialistes, 2596; cadres, 1962 pour un total de 18 720.
M. Gauthier: Je vous remercie, c'est très
précis.
M. Coulombe: J'avoue que je suis un peu surpris parce qu'il n'y a
définitivement pas d'ambiguïté dans certaines choses.
L'entente sur le PAQS qu'on a signée est nette, claire et précise
c'est-à-dire, qu'en 1988, les entrepreneurs, dans cette
entente-là, ont 500 années-personnes. Il n'y a pas
d'ambiguïté là-dedans, c'est clair, précis et
signé.
Sur le nombre total d'employés à Hydro-Québec,
c'est aussi clair et précis. À chaque année, en commission
parlementaire, on vous dépose le nombre total et même le nombre
prévu dans les trois prochaines années. Tous ces chiffres sont
publics, sont discutés en commission parlementaire et sont clairs.
Je reviens sur le PAQS. Notre hypothèse dans ce temps-là,
je pense qu'il faut bien la comprendre, sans cela, il n'y a vraiment rien
à comprendre si on ne s'entend pas là-dessus. Lorsqu'on a dit
qu'on allait reprendre le retard, on s'est dit qu'on ne voulait pas engager des
employés permanents à Hydro-Québec pour faire cela. On
s'est dit: On est conscient que dans certaines régions du Québec,
on dépense beaucoup trop d'argent dans l'entretien tout simplement parce
qu'il faut reconstruire le réseau. Dans certains rangs, il y a des
conducteurs qui datent de 30 ans, il y a des poteaux qui sont pourris, il y a
ceci et cela. Il faut absolument refaire cela parce que sans cela, cela nous
cause des problèmes d'entretien épouvantables. On va refaire
cela. Maintenant, on n'a pas l'intention d'engager des employés
permanents pour faire quelque chose qui se fait dans deux ou trois ans. C'est
un "peak".
Fidèles au principe de base d'Hydro-Québec - on l'a dit,
on n'engagera pas de monde pour faire ce travail - on est allé trouver
les syndicats et on leur a dit: Nous voulons faire cela. Êtes-vous
d'accord que c'est illogique d'engager 300, 400 ou 500 personnes pour faire ce
travail et de leur dire: Messieurs, on n'a plus d'ouvrage pour vous, parce que
l'ouvrage est fini. C'est illogique. On va demander aux entrepreneurs de le
faire. C'est ce qu'on a fait. On a averti les entrepreneurs qu'on leur donnait
pendant trois ou quatre ans un surcroît d'ouvrage, un "peak".
C'était cela la philosophie de base.
Deuxièmement, on s'est dit: Si on répare ces poteaux, si
dans des rangs complets on fait des poteaux neufs, des fils neufs, tout ce que
vous voudrez, jamais je croirai qu'on va être obligés de refaire
cela au bout de trois ou quatre ans. Cela nous semblait d'une certaine logique.
Si c'est neuf, on va être capable de passer quelques années sans
être obligés de refaire cela. C'était cela
l'hypothèse de base. Ce n'est pas terriblement compliqué. Il n'y
avait rien de machiavélique là-dedans. Voici un réseau
qui, dans certaines parties, devait être refait. On ne fera pas cela avec
nos employés permanents, on n'engagera pas de monde pour cela. On va
demander aux entrepreneurs de le faire. Les entrepreneurs le feront et quand
ils l'auront fait, on ne recommencera pas l'année suivante. C'est
complètement stupide. Donc, il va y avoir une diminution de ce genre de
travaux, puisqu'on va les avoir faits en groupe, d'une façon plus
intense.
C'était notre philosophie de base. Cela nous semble parfaitement
logique et compatible avec la philosophie de base
d'Hydro-Québec. Dieu sait que cela n'a pas été
facile de convaincre nos syndicats. Ils nous ont dit toutes sortes de choses.
Il y en a qui ont dit dans leur mémoire qu'ils nous ont
soupçonnés d'attendre pour faire des travaux, que plus on attend,
plus cela favorise les entrepreneurs. L'ironie de l'affaire, c'est que les
entrepreneurs nous disent la même chose. Plus on attend, plus cela va
donner la même chose. Notre raisonnement est assez simple. On est en
retard; on reprend le retard. Quand on reprend le retard, une fois que c'est
fait? on n'est pas pour recommencer. Donc, cela va demander moins de monde.
Par contre, notre clientèle augmente de 2 %, 3 % ou 4 % par
année. On a de 80 000 à 90 000 clients de plus. Il faut s'en
occuper, il faut entretenir le réseau. Il me semble normal d'augmenter,
alors que depuis 1982, l'effectif d'Hydro-Québec a diminué. Il
n'a pas augmenté, il a diminué. Donc, il nous semblait normal
d'avoir une marge de manoeuvre pour augmenter un peu l'effectif
d'Hydro-Québec, puisqu'on s'était donné une marge de
manoeuvre en éliminant presque 2000 postes.
Cela ne s'est pas fait comme un coup de baguette. On n'a pas reçu
de félicitations de personne, ni des ingénieurs-conseils, ni de
personne. On a restreint. On a augmenté la productivité
d'Hydro-Québec. Cela a laissé de la place. On avait d'autres
objectifs avec nos syndicats. Ils le savent, s'ils sont ici dans la salle, on
avait comme objectif de diminuer, dans nos conventions collectives, la
rémunération globale de nos employés, de la rendre plus
conforme à notre marché de comparaisons. L'avance qui avait
été prise depuis 20 ans, en termes de rémunération,
on voulait la baisser, c'était notre objectif numéro un. On a
réussi, on l'a diminué d'au-delà de 50 %, cette
avance.
Comme on s'était donné une marge de manoeuvre au point de
vue des postes qu'on avait diminués de 2000, cela nous a donné la
possibilité, avec nos syndicats, de donner un peu de répit de ce
côté-là. C'est tout simplement la stratégie des cinq
dernières années. On l'a expliqué d'ailleurs souvent aux
syndicats et à tout le monde, je ne vois rien de mystérieux et je
ne vois rien d'incongru en termes de chiffres. Les chiffres se tiennent. Je
vous donnerai un dernier chiffre que M. Boivin voulait donner tantôt:
L'utilisation de la main-d'oeuvre d'Hydro-Québec par rapport aux
entrepreneurs, si vous le prenez au point de vue de l'exploitation, oublions la
construction, oublions tout cela. Au point de vue de l'exploitation, l'effectif
d'élagage - ce sont les mêmes compagnies qui font tout cela, ou
d'autres petites compagnies, plus le génie civil dans notre souterrain,
comparé à notre effectif monteurs, élagueurs et jointeurs,
c'est la même catégorie de personnes - la relation entre
l'effectif entrepreneurs et l'effectif total était de 0,38 en 1982. En
1990, on estime qu'elle va être de 0,40, c'est-à-dire exactement
la même proportion. Sauf, qu'il va y avoir probablement - selon ce qu'on
connaît actuellement, mais qui peut changer dans un, deux ou trois ans,
selon les circonstances - un peu moins de monteurs, beaucoup plus
d'élagueurs et plus de génie civil. (17 heures)
Je ne fais pas appel à la construction et à la Baie James,
je parle d'exploitation. La relation entre les deux est 0,38. C'est un vrai
chiffre. Vous viendrez voir nos livres. On prévoit, dans l'état
actuel de nos données, qu'en 1990, cela va être 0,40. De quoi
parlons-nous? Je suis conscient que de 720 à 500, il y a 220 personnes.
On ne parle pas de stratégie, on ne parle pas de grande théorie,
on parle de 220 personnes qui, je l'admets, peuvent avoir des
difficultés dans les prochains mois ou dans les prochaines
années.
D'abord, je tiens à dire une chose: c'est que dans l'entente
PAQS, il est dit là-dedans qu'en 1988, ça va être 500
personnes, sauf choses exceptionnelles; panne, "bad luck". À ce
moment-là, on pourra augmenter ce nombre en 1988. Cela fait partie de la
convention collective qui se termine à la fin de 1988. Il va y avoir une
renégociation. Qu'est-ce qui va arriver avec cet article-là? Je
ne peux pas vous le dire, parce que ce serait vous dire notre stratégie
de négociation et, honnêtement, je ne le sais pas. On a encore
plusieurs mois pour la définir.
M. Gauthier: On va venir à cela, M. Coulornbe.
M. Coulombe: Mais, je tiens à dire une dernière
chose, que dans les...
M. Gauthier: C'est parce que...
M. Coulombe: On a engagé à HydroQuébec une
soixantaine de personnes qui viennent directement des entrepreneurs. Je ne dis
pas que c'est la solution. Je ne dis pas qu'on va engager les gens des
entrepreneurs et les amener à Hydro. C'est complètement ridicule.
Si j'oublie le problème général - parce que je l'ai
expliqué dans nos chiffres - on se sent en sécurité. Si on
regarde les individus, je comprends, M. le ministre a attaché beaucoup
d'importance aux individus. Je suis d'accord qu'il y a un problème
là. On en a engagé 60 et on est prêts à en engager
plus. Si notre syndicat veut s'asseoir avec nous pour discuter de certaines
règles de la convention collective, on est prêts à donner
un coup de main au maximum afin de passer ce mauvais cap qui peut durer un an,
un an et demi ou deux ans
et qui peut être modifié dans deux ou trois ans, selon les
circonstances, selon la charge de travail ou ainsi de suite. C'est ça le
problème du PAQ5. Il faut distinguer entre la stratégie et la
question des individus.
M. Gauthier: Oui. Je suis bien conscient de tout cela, mais il y
a un chiffre qui est quand même un peu surprenant. On ne parle pas d'un
nombre énorme d'employés. On nous a dit que c'est aux environs de
720 à 750. Les entrepreneurs trouvaient leur compte. On vise à
les ramener à 500, c'est-à-dire qu'on a 200 à 220 postes
de jeu. Je constate dans les chiffres que M. Houde nous a donnés tout
à l'heure qu'on a - c'est peut-être très justifié,
remarquez bien - 120 postes, en gros, de plus en 1987 qu'en 1986. La
différence qui nous préoccupe aujourd'hui, entre l'insatisfaction
des travailleurs hors Hydro-Québec et la réalité des
choses, c'est 250 postes. J'ai comme l'impression? à moins que je ne
compte bien mal, qu'il y a la moitié du problème qui serait
réglée si le chiffre de 1987 et le chiffre de 1986 étaient
à peu près semblables, c'est-à-dire s'il n'y avait pas
d'augmentation de postes à Hydro. C'est la moitié du
problème, si j'ai bien compris les chiffres et, si je ne les ai pas
compris, je voudrais bien qu'on me les explique.
C'est quand même important. Je veux bien croire que, globalement,
on peut bien dire à Hydro-Québec: le programme PAQS, on avait
averti les entrepreneurs. On va revenir d'ailleurs, tantôt, sur les
engagements que ceux-ci ont pris dans certains cas et dont ils nous ont
parlé. Seulement à compter les employés de métier
entre 1987 et 1986, 1987 étant des chiffres temporaires, je le
concède, il y a la moitié du problème dont on parle depuis
deux jours. Il y a peut-être une explication à cela, remarquez
bien.
M. Coulombe: Si vous parlez en ces termes-là, je suis
d'accord avec vous. J'irais même jusqu'à dire: Écoutez, sur
un budget de 5 000 000 000 $, sur 18 000, mais à partir de ce
principe-là, on s'en va où? Je pense que dans les chiffres que
vous mentionnez, il y avait une stratégie précise de
réengager du monde, parce que, depuis cinq ans, on a gelé
l'emploi. Et, dans la stratégie globale de nos relations avec nos
employés, c'était important de poser des gestes dans de tels
domaines. Je vais vous dire une chose puisqu'on m'a parlé
d'ambiguïté tantôt: nos garages... On avait des installations
construites depuis ides années dans lesquelles on avait des choses pour
entretenir nos automobiles. Ce n'était pas clair ce qu'on faisait avec
cela, etc. Il y a des garages qui étaient remplis d'individus, d'autres
qui ne l'étaient pas, etc. On a réglé le problème
une fois pour toutes. Lorsqu'on a immobilisé de l'argent dans les
garages, on a dit: On va mettre les gens pour s'en servir. C'est stupide
d'avoir des immobilisations qui ne servent à rien. Donc, on n'en
construira plus. On a averti le syndicat: On n'en construira plus. Dans nos
centres régionaux, il n'y aura plus d'installation, on va aller dans
l'entreprise privée. Voici ce que j'appelle une clarification. Alors,
ça, c'était ambigu. On ne le savait pas et on l'a clarifié
une fois pour toutes. On va engager du monde pour remplir les garages lorsqu'on
en a, mais on n'en construira plus. Donc, il faut engager du monde pour remplir
cela. Avant cela, c'était une patte en l'air et on avait des
immobilisations qui ne servaient à rien. Voici ce que j'appelle la
clarté.
M. Ciaccia: Je ne veux pas vous interrompre. Pourrais-je, juste
pour une clarification, que monsieur...
M. Gauthier: Oui, oui. Sur votre temps, il n'y a pas de
problème.
M. Ciaccia: Oui. Vous avez donné une clarification. Vous
dites: On n'en construit plus, de garage.
M. Coulombe: Exact.
M. Ciaccia: Ça, c'était une clarification en faveur
de la sous-traitance.
M. Coulombe: Exact.
M. Ciaccia: Est-ce que l'article 34 est une clarification en
faveur de faire, à l'intérieur d'Hydro-Québec, quand vous
baissez de 720 à 500...
M. Coulombe: La discussion tout simplement n'est pas
terminée parce que, dans l'article 34, il reste encore une
ambiguïté qui n'est pas réglée, qui est en discussion
et qui n'a rien à voir avec le nombre de monteurs de 700 à 500,
qui est le problème que vous avez expliqué tantôt,
c'est-à-dire tout le problème du remplacement. Et cela a à
faire, d'une façon générale, au-delà des monteurs,
avec tous les autres entrepreneurs et, je vous le dis: On a un problème.
On en a un problème, à l'heure actuelle, qui est en discussion
avec les syndicats. J'espère que cela va bien se terminer. Là, on
a un problème au point de vue de la sous-traitance.
M. Ciaccia: Oui, parce qu'on peut...
M. Coulombe: Mais cela n'a rien à voir avec les 700 ou les
500.
M. Ciaccia: Oui, parce qu'on peut interpréter. De la
façon que vous l'expliquez, vous avez fait une clarification dans un
endroit, mais la clarification que vous avez
faite, ici, n'était pas en faveur de la sous-traitance. Vous avez
clarifié qu'il va y avoir moins de sous-traitance et c'est pour cela
qu'on a la commission parlementaire. Je ne veux pas interrompre le droit de
parole.
M. Coulombe: Non, je ne voudrais pas que vous
m'interprétiez mal. Si vous voulez me faire dire que c'est possible de
régler dans une clause de la convention collective 25 ans de relations
du travail, je suis d'accord avec vous. On ne l'a pas réglé
définitivement. Tout ce que je dis, c'est qu'on a essayé de
l'améliorer. On l'a amélioré; dans certains cas
précis; c'est réglé et c'est clair. Dans d'autres cas, ce
n'est pas clair. Mais cela ne l'était pas avant. Là, on est rendu
au coeur du problème et on en discute. Cela nous cause des
problèmes, cela cause des problèmes aux entrepreneurs et ils le
savent. Cela n'a rien à voir avec les 700 et les 500, ce sont d'autres
types de problèmes qu'on a à l'heure actuelle: les travaux en
retard, ne sont pas tous faits parce qu'on n'a pas fini de négocier avec
nos syndicats. C'est un problème, je l'admets. Mais si vous me demandez
comment il se fait qu'on n'a pas réglé tous les problèmes
en suspens depuis 25 ans, je vais vous dire: Je m'incline, on n'est pas
capables.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval, pourrais-je vous demander, et à M. Couiombe, ainsi
qu'à vos collaborateurs, s'il y avait moyen de condenser un peu les
réponses parce que le temps file et j'ai une liste de
députés qui veulent intervenir et, à ce rythme, il va y
avoir des députés frustrés en fin de séance. Alors,
M. le député de Roberval.
M. Gauthier: J'aimerais revenir, M. Couiombe, sur la
dernière question que je vous ai posée et à laquelle vous
m'avez répondu: Écoutez, si on regarde cela sous cet
angle-là, on ne va nulle part sur un budget de plusieurs milliards, cela
n'a pas tellement d'importance. C'est justement cela le problème dont on
nous a parlé depuis deux jours, ici. C'est qu'on nous dit constamment
qu'Hydro-Québec est tellement gigantesque que le moindre de ses
mouvements, finalement, dans un sens ou dans l'autre, peut avoir des
répercussions extrêmement graves sur les petits bureaux de
génie-conseil, sur les petits entrepreneurs, sur différentes
personnes, dont le principal gagne-pain, dans bien des cas, est
Hydro-Québec. Alors, c'est sûr que cela vous apparaît
peut-être une façon bien terre à terre de regarder les
choses. J'en conviens. Mais je vous avoue que tous ceux qui sont passés
ici, malheureusement ou heureusement, ont regardé cela de façon
très terre à terre comme cela. Ils nous disent, je vous
répète: le problème dont on nous a parlé
essentiellement depuis le début, en gros, c'est de 250 jobs en disant:
Quand Hydro-Québec prend une orientation dans un sens donné,
même si, pour elle, ce n'est pas un gros mouvement, pour nous autres,
c'est le tiers de nos effectifs, c'est le tiers du monde qui reste chez lui.
C'est pour cela que je considère, je prends les chiffres sur 250 et je
dis que les 100 et quelques qu'on a là, c'est peut-être bien un
petit problème qu'on a. Tant mieux, on va le régler. Mais c'est
la moitié, en termes d'hommes, du problème qu'on a»
M. Coulombe: Non, je n'ai pas dit que c'était un petit
problème, j'ai dit qu'au point de vue humain, pour les 250 personnes,
c'est un problème très grave et très important. Je ne veux
pas m'étendre longuement, je vais juste répondre très
rapidement. Ce que vous me dites, les syndicats nous le disent. Lorsqu'ils
regardent nos chiffres, il nous disent; On avait des élagueurs avant
à Hydro-Québec, on en avait 64. Expliquez-nous pourquoi on est
rendu à 17. Il y avait 226 entrepreneurs en élagage, ils sont
rendus à 370. Expliquez-nous pourquoi vous nous enlevez nos jobs et vous
donnez cela aux entrepreneurs? C'est ce que j'appelle l'équilibre. Il y
en a plus d'un bord et moins de l'autre.
M. Gauthier: C'est sûr que c'est une évolution
à laquelle on s'attend sauf que globalement, on s'attend aussi que ce
jeu des proportions puisse se faire, en tout cas en faisant le moins de
difficultés possible. Et vous l'avez dit vous-même en commission
parlementaire l'année passée, c'est évident qu'un
mouvement au moment où les immobilisations sont moins importantes fait
plus mal; cela, on le conçoit, d'où l'importance d'être
plus attentif. Je ne voudrais pas passer tout le temps là-dessus, parce
que déjà cela passe pas mal vite.
Il y a une chose dont je voudrais vous parler. Cela nous a
été dit par vos ingénieurs et par les
ingénieurs-conseils, ce matin, qui ont des points de vue tout à
fait opposés. Vos ingénieurs nous disent: Ce qui est de valeur
dans notre histoire, c'est que nous, les ingénieurs, on ne soit pas
associés suffisamment aux projets intéressants sur le plan
technologique et on souhaiterait qu'il y ait davantage de transferts de
technologie quand c'est donné à l'entreprise privée. Et
l'entreprise privée répondait à la question que j'avais
posée à partir de ce que vos ingénieurs nous disaient: Mon
cher M. Gauthier, il n'y a aucun problème. Les transferts
technologiques, il n'y a que cela. C'est dans nos clauses quand on signe les
contrats et on les fait avec les ingénieurs. Moi, je leur ai promis aux
deux que je vous demanderais ce qu'était la vérité entre
les deux. Pourriez-vous nous le dire, s'il vous
plaît?
M. Coulombe: La vérité n'est-elle pas entre les
deux justement?
M. Gauthier: Bien là, je vous ferais remarquer que c'est
moi qui pose la question et c'est vous qui répondez.
M. Coulombe: Ha! Ha! Ha! Je vais laisser Benoît Michel y
répondre mais fondamentalement, c'est là. C'est la tension entre
ces deux volontés, nos ingénieurs à l'intérieur
veulent parfaire leur "know how", y participer davantage et les
ingénieurs-conseils veulent la même chose.
M. Gauthier: Je vais être plus...
M. Coulombe: L'idée fondamentale, c'est d'avoir un
équilibre et d'essayer que les deux soient également, j'oserais
dire, contents. Mais comme ce n'est pas le cas, eh bien, au moins
également mécontents.
M. Gauthier: Je vais être plus clair dans ce cas-là.
Y a-t-il ou non des clauses qui prévoient dans les contrats que vos
ingénieurs reçoivent les informations et que le transfert
technologique se fait quand un projet est fait au privé? Y a-t-il des
clauses qui prévoient cela?
M. Coulombe: Avant de laisser la parole à Benoît
Michel, je ne voudrais pas faire de farce parce que le temps passe, mais je
vous dis que sur l'échange d'informations entre les
ingénieurs-conseils et nos ingénieurs et à peu près
tout le monde sur ce qui se passe à Hydro-Québec, il n'y a
vraiment pas de problème. Au point de vue échange d'informations,
cela circule très très bien.
M. Michel: Je n'ai pas grand-chose à ajouter
là-dessus. D'ailleurs, on a dit tantôt qu'on avait une recette
gagnante. Donc, nos ingénieurs sont dans une position stratégique
pour faire les grands choix technologiques de l'entreprise et la planification
de l'entreprise. L'ingénierie détaillée est en
général confiée au génie-conseil, cela n'a pas
changé et cela continue. Il y a cependant un volet dont on parlait
tantôt quand on parlait de la masse, en 1987, des services de
génie-conseil qui, en apparence, diminuaient. C'est que bon an mal an,
les proportions en dollars qu'on dépense en services ne sont pas
toujours constantes, et je m'explique. Il peut arriver des années
où, en dollars, on va dépenser plus en génie-conseil et
d'autres années, comme c'est le cas pour l'année 1987, moins
d'argent en génie-conseil directement et plus en équipement. Je
fais référence notamment aux grands projets qui nous
préoccupent à Hydro, parce que la SEBJ, c'est autre chose, c'est
complètement dévolu aux firmes externes, les deux grands projets
dans le groupe équipement d'Hydro-Québec, c'est la sixième
ligne en courant continu et c'est Manic 5 puissance additionnelle, pour
lesquels le montant du contrat est très important.
Par contre, il y a un point que je veux vous signaler pour
démontrer qu'on a toujours le bien-être du génie-conseil
québécois présent à l'esprit. À titre
d'exemple, dans le contrat Asea qui est le contrat pour la sixième
ligne, qui est un contrat majeur, c'est un des plus gros contrats au monde, 315
000 000 $, la firme Asea avait besoin d'un ingénieur-conseil pour faire
l'ingénierie détaillée des composants, pour
intégrer le tout pour nous. On exige dans nos contrats
présentement que cela soit confié... Quand un manufacturier,
soit-ii Québécois, Américain ou Européen, nous
fournit des services comme ceux-là où il y a un "input"
génie-conseil à fournir, on exige que ce soit un
ingénieur-conseil québécois qui soit présent. Dans
ce cas-là, c'est une firme du Québec. (17 h 15)
II y a d'autres cas patents. Comme on étudie présentement
l'alimentation des Îles-de-la-Madeleine, cela sera un contrat de
fourniture et installation du câble et des convertisseurs. On exige la
présence d'un ingénieur-conseil québécois pour
faire ces travaux-là.
Donc, en ce qui a trait aux sommes qu'on débourse, dans les
courbes qui vous ont été fournies par l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec, les montants que nous
dépensons directement pour les ingénieurs-conseils, il peut
arriver qu'ils soient en apparence plus bas mais, qu'en réalité
à partir d'un sous-contrat qu'eux obtiennent d'un fournisseur qui
consacre une masse, plus grande qu'avant, de dépenses pour le
génie-conseil québécois. C'est le cas dans les exemples
dont je vous parle.
M. Gauthier: Je vous remercie. Il y a une autre question - bien
il y a plusieurs autres questions - je vais essayer de faire vite. On a
parlé plus tôt de la productivité et, M. Coulombe, vous
avez fait référence au rapport Sullivan en disant qu'il y avait
eu bien des changements à Hydro-Québec depuis ce temps-là.
Ce matin on nous a également remis une note interne
d'Hydro-Québec aux gérants de secteurs, aux gérants de
services - je ne cannais pas exactement leur rôle -où on fait
état - c'est daté de 1987, le 29 juillet 1987 - ce n'est pas
vieux, et où on fait état d'un problème en disant que pour
remplacer un monteur-entrepreneur il faut combler deux postes de monteurs
d'Hydro-Québec afin de réaliser les mêmes travaux et pour
les raisons suivantes - et là on justifie un certain nombre de raisons,
d'aucunes sont bonnes, d'autres moins. Est-ce
que ce genre de note-là fait l'objet actuellement d'un travail de
votre part pour modifier ces choses-là ou est-ce vrai finalement que le
problème de productivité est énorme?
M. Coulombe: Non, non. D'ailleurs le fait que vous ayez ou que
quelqu'un ait eu, que quelqu'un ait pu déposer une telle note prouve ce
que je viens de vous dires c'est qu'il n'y a pas de problème
d'information à Hydro-Québec. La moindre note de n'importe quel
chef de service, vous pouvez avoir ça n'importe quand.
Deuxièmement, c'est qu'il s'agit d'une étude d'une note de
service qui indique l'état non pas de productivité, mais
l'état de disponibilité de nos monteurs. Et, c'est
évident, nos monteurs ont des vacances qui sont plus
considérables. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Si on veut
recommencer la convention collective... Comme je vous l'ai dit tantôt: si
on veut refaire les 20 dernières années, moi je n'ai pas de
problème, mais vous allez passer une loi. On ne négociera pas
ça article par article de cette façon-là. Alors, c'est une
étude sur la disponibilité. Alors ils additionnent tout le temps
des vacances, des ci, des ça, il y a plus de congés de maladie,
plus de ci, plus de ça et ils disent: Bien au nombre de... - je ne sais
pas si c'est en heures ou en ça, je pense que c'est en heures - bien,
c'est moins qu'un entrepreneur qui n'a pas les mêmes
caractéristiques dans sa convention collective.
C'est ça qu'elle dit la note. Il n'y a aucun problème
là-dessus. C'est rigoureusement exact. Quoiqu'on pourra toujours se
chicaner quand ils disent qu'il y a des heures qui sont soustraites de nos gens
parce que lorsqu'il pleut ou ainsi de suite... Quand il pleut, il pleut pour
tout le monde. On n'en est pas là-dessus. C'est tout simplement une
étude de disponibilité du temps, à partir des
caractéristiques des conventions et des temps libres, des vacances, des
ci, des ça. Ce n'est pas une étude de productivité.
M. Gauthier: D'accord. Je pense que ça méritait
d'être clarifié puisque cela a été
déposé ici. L'autre question c'est concernant les
équipements. Des entrepreneurs nous ont fait état du fait qu'ils
avaient dû - je vous le dis sous toutes réserves - se procurer des
équipements supplémentaires pour faire face aux commandes
d'Hydro-Québec dans le programme PAQS. Effectivement, vous nous avez
déjà dit en commission parlementaire que vous faisiez ce
programme-là - les entrepreneurs étaient au courant du
caractère temporaire du programme - est-ce qu'il peut y avoir eu, dans
certains cas, des pressions d'exercées sur des entrepreneurs pour qu'ils
s'équipent outre mesure pour faire face à des situations
temporaires ou est-ce que c'est simplement un problème d'une autre
nature, un problème de planification ou de communication à partir
de leurs propres boîtes?
M. Couiombe: Je pense que là, il y a eu un problème
de communication. Nos gens nous disent que tous les entrepreneurs ou enfin
leurs représentants ont été avertis clairement de la
nature du problème. Les entrepreneurs nous disent? Ce n'est pas vrai.
Là c'est vraiment blanc et noir. Là j'avoue -et même les
entrepreneurs ne nous croyaient pas, à tel point qu'ils nous ont
poursuivis. Là ils viennent d'annuler leur poursuite. Mais, il y a un
problème de communication à la base. Je ne suis pas capable de
vous répondre. Nos gens nous disent blanc et les autres disent noir. Je
ne suis pas capable de trancher. Sur le fond du problème, au point de
vue des sommes impliquées, Claude Boivin peut répondre.
M. Boivin: C'est évident, en fait, que la flotte
d'entrepreneurs a pris de l'importance avec le programme PAQS et, à
titre d'exemple, j'ai les chiffres disponibles. En 1984 les entrepreneurs
avaient à leur disposition 145 nacelles. Ils en ont en fin de 1986, 292.
Par contre il y a eu un transfert parce qu'ils avaient 241 grues
tarières et cela a baissé à 183. Ils avaient 99 camions
réguliers et cela a baissé à 28. Ils se sont
transformés, ils ont ajouté des nacelles et ont diminué
d'autres types d'équipement. Je suis convaincu que le résultat
net, global pour les entrepreneurs a été une addition de
matériel roulant.
M. Gauthier: D'accord, je vous remercie. Selon l'alternance, on
va passer de l'autre côté.
Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Dans le programme PAQS de 1983 à 1988, vous
avez un programme d'investissement de 500 000 000 $ dans lequel, en 1988,
finalement, on retrouvait peut-être 1000 monteurs à
l'extérieur, si j'ai bien lu vos graphiques, pour descendre cette
année à 500. Dans le réseau de distribution
régulier pour les cinq prochaines années, quel est votre taux
d'investissement?
M. Boivin: On les a dans le mémoire, c'est certain que je
vais vous donner des chiffres exacts, mais cela se maintient aux environs de
350 000 000 $. Si vous me donnez deux minutes - parce que j'ai quelqu'un en
arrière - je vais vous donner les chiffres exacts. Cela se maintient aux
environs de 350 000 000 $, mais je ne voudrais pas vous induire en erreur.
M. Théorêt: M. le Président, étant
donné qu'on ne voudrait pas que ces deux minutes-là soient
utilisées en attente, si vous voulez passer à l'alternance, on
n'a pas d'objection.
M. Ciaccia: Je voudrais seulement comprendre la dernière
phrase, parce que M. Boivin ne parlait pas dans le micro. M. Boivin, avez-vous
dit que cela se maintient à environ 500 000 000 $?
M. Boivin: J'ai le chiffre exact de nos prévisions
actuelles. Pour 1988, 446 000 000 $, pour 1989, 404 000 000 $, pour 1990, 421
000 000 $.
M. Ciaccia: Alors, cela s'est maintenu à un certain
montant.
M. Boivin: Maintenant, cela se maintient à peu près
comme je vous le dis et il peut y avoir une fluctuation. Dans le cas de la
prévision faite aujourd'hui pour 1990, je suis le dernier à vous
garantir qu'elle sera exacte à 1 % près, mais c'est notre
prévision actuelle.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Saguenay, cela va? M. le député de Joliette.
M. Chevrette: Je vais partir de celà, M. le
Président, avec quelques | questions rapides en espérant des
réponses assez courtes pour que j'aie le temps de poser mes
questions.
À partir du fait que vous maintenez en 1988, 1989, 1990 à
peu près les sommes équivalentes actuellement, la
résultante n'est-elle pas, à ce moment-là, que si vous
diminuez le nombre des sous-traitants, il y aura augmentation pour
Hydro-Québec.
M. Boivin: II faut reconnaître, M. le député,
que les chiffres que je vous donne sont des chiffres pour la fonction de
distribution globale. Présentement, et c'est un phénomène
qui a commencé il y a quelques années, il y a graduellement un
accroissement des activités et des demandes du côté du
réseau souterrain. De ce côté, je vous ai mentionné
tantôt que les travaux de génie civil sont confiés à
l'externe et les travaux électriques réalisés à
l'interne et, grosso modo, il y a 50 % du coût des réseaux
souterrains qui concernent les travaux de génie civil.
Alors, il y a un déplacement graduel qui fait que lorsqu'on dit
que les investissements demeurent à peu près constants, cela ne
veut pas dire que l'effectif de catégories d'emploi doivent
nécessairement rester constants ou s'accroître.
M. Chevrette: J'aurais un commentaire avant de vous poser
d'autres questions. À vous écouter, il n'y a pas grand
problème chez vous, sauf quelques éclaircissements. Je me demande
bien ce qu'on fait ici depuis deux jours? D'ailleurs, à la
dernière question que j'ai posée ce matin, c'est ce que j'ai
pensé, c'est parce que vous êtes d'excellents administrateurs
qu'il n'y a pas de problème. C'était la dernière question
que je posais au génie-conseil, ce matin. Vous me voyez un peu perplexe.
M. Coulombe, ma question s'adresse directement à vous, comme
président d'Hydro. Quand vous avez signé la lettre d'entente en
1986, est-ce que vous l'aviez prévue en fonction d'une planification
d'Hydro-Québec bien arrêtée, sachant que les 720 monteurs
de lignes passaient à 500, que cela ne créait pas d'emplois
additionnels à Hydro-Québec et ne faisait que tenir compte de la
réalité, les 500 que vous deviez donner aux sous-traitants?.
M. Coulombe: D'abord, on a signé l'entente en 1984 et
quand on l'a signée, c'était dans l'esprit que vous
mentionnez.
M. Chevrette: Mais, quand vous avez signé?
M. Coulombe: C'est cela, vous avez raison, quand on a
signé, je l'ai expliqué tantôt, c'était dans
l'esprit où on rattrapait un retard, le retard rattrapé, cela
continuait comme avant.
M. Chevrette: Donc, vous étiez conscients, quand vous avez
signé, que cela n'augmentait pas l'effectif d'Hydro-Québec?
M. Coulombe: Cela ne devrait pas augmenter pour ce qui est du
type de travail correspondant. Lorsqu'il y a des employés de plus, il y
en a au niveau des métiers. Lorsqu'on engage des métiers, il y en
a chez les monteurs, il y en a chez les jointeurs, il y en a chez les
employés de garage, il y a toute une foule de métiers
impliqués là-dedans. Comme je vous l'ai dit, on s'était
donné une marge de manoeuvre parce que depuis 1982, on avait maintenu
cet effectif constant au lieu de l'augmenter comme il augmentait avant. Donc,
on avait une marge de manoeuvre avec laquelle on pouvait jouer pour gagner
d'autres points de la convention, ce qu'on a fait.
M. Chevrette: Vous n'aviez reçu aucune directive pour
signer cette dite convention?
M. Coulombe: Directive de la part de qui?
M. Chevrette: De la part de politiciens. M. Coulombe:
Non.
M. Chevrette: Est-ce que te Conseil du trésor vous
aurait...
M. Coulombe: Le Conseil du trésor avait approuvé,
comme il le fait depuis les deux dernières conventions» depuis
qu'on est soumis à la loi - je ne me souviens plus du numéro -
...
M. Chevrette: 55.
M. Coulombe: ...55, il approuve l'enveloppe globale,
c'est-à-dire nos structures de salaires, notre marché de
comparaisons et les grandes sommes impliquées par l'aspect marginal. En
d'autres mots, la rémunération globale est approuvée comme
structure, mais on n'a pas présenté au Conseil du trésor
et on n'a pas présenté au gouvernement les sujets dont on parle.
Cela a été fait à Hydro-Québec.
M. Chevrette: Le fait de maintenir 720 employés dans le
secteur de la sous-traitance aurait-il un effet de mise à pied chez vos
permanents?
M. Coulombe: Le fait de maintenir à 720? Écoutez,
je pense que la vraie question, c'est: Est-ce qu'il y a du travail pour 720,
plus ceux qu'on a?
M. Chevrette: Oui, c'est cela.
M. Coulombe: S'il y a du travail pour tout le monde, non., S'il
n'y a pas de travail pour tout le monde, il va falloir qu'il y ait moins de
monde à l'une des deux places.
M. Chevrette: Bon. Je suis heureux que vous me répondiez
ainsi, pour une fois. On va s'enligner clairement.
S'il y a de l'ouvrage pour les deux, qu'est-ce qu'il arrive de la lettre
d'entente que vous avez signée?
M. Coulombe: Je vous l'ai expliqué tantôt. C'est
très clair. Cette lettre d'entente se termine en 1988. Si vous la lisez,
c'est: En 1988, il y aura cela, sauf exception. S'il y a des pannes majeures ou
des bris, on peut en engager plus. Cela, c'est en 1988.
Là, vous me demandez ce qui va se passer en 1989-1990 en termes
d'emploi du personnel et ce qui va se passer dans la négociation de la
convention collective sur cette clause-là. Je vous réponds
aujourd'hui que je n'en sais rien pour une raison très simple: la
stratégie de négociation de la convention collective n'est pas
arrêtée et c'est un article parmi - j'ai demandé le nombre
de pages - 400 pages dans la convention.
M. Chevrette: Mais, M. Coulombe... Je m'excuse, mais on ne signe
pas une clause en pensant qu'on va la soustraire comme cela. Ordinairement,
quand on signe un....
M. Coulombe: Je n'ai pas dit qu'on allait la soustraire.
M. Chevrette: Je m'excuse mais je vais finir ma question, s'il
vous plaît. Ordinairement, quand on signe un contrat collectif, on est
bien conscient qu'on vient de créer un acquis pour les syndiqués.
D'accord? On ne pense pas tout de suite à une stratégie pour 1988
qu'on va démolir. J'ai fait du syndicalisme et j'ai rarement
signé une clause en espérant qu'elle serait bannie à la
convention suivante. Vous avez vous-même dit tantôt - ce sont vos
propres propos -qu'il faudrait une loi s'il fallait qu'on vous demande
d'enlever certaines choses.
M. Coulombe: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Chevrette: Donc, à partir de là, à partir
du fait que vous savez que, quand on donne de l'acquis, c'est drôlement
important et je pense bien que c'est tout à fait humain et normal qu'un
syndiqué dise: Moi, je veux conserver mon acquis. Je trouve cela tout
à fait normal. Mais vous m'avez dit que vous aviez fait cela en toute
planification. Je suis surpris de voir que cette planification ne
prévoyait pas l'éventualité d'une mise à pied de
200. Vous auriez bien pu concéder cet article et la lettre d'entente en
disant: Ce n'est pas grave, il y aura de l'argent pour faire travailler presque
tout ce beau monde.
M. Coulombe: Non. Je pense que ce n'est pas ce que je vous ai
dit. Il y a deux points. Le premier, c'est lorsque vous dites que quand on
signe quelque chose, c'est pour la vie, je suis...
M. Chevrette: Je n'ai pas dit pour la vie, mais ordinairement, ce
sont des concessions.
M. Coulombe: ...convaincu que vous avez beaucoup plus
d'expérience que moi là-dedans. Tout ce que je veux vous dire,
c'est que les syndicats avaient signé une proportion qui donnait environ
720. On est allé les trouver et on leur a dit: II faut augmenter ce
chiffre à 1000.
M. Chevrette: Oui, oui.
M. Coulombe: Et après beaucoup de discussions avec les
syndicats, nos syndicats, ils ont accepté de passer à 1000. Et ce
n'était pas ce qu'il y avait de plus gai de dire: Bien, c'est
signé; ils auraient pu dire: Non, on ne veut pas en entendre parler. Les
travaux ne se seraient probablement pas
faits, parce qu'on n'aurait pas engagé des gens à long
terme là-dessus. Oonc, on a négocié. Je ne dis pas que
c'est toujours possible, mais c'est possible de négocier. Le preuve,
c'est qu'ils ont accepté que le nombre d'entrepreneurs monte à
1000 et cela, c'est arrivé.
Deuxièmement, vous faisiez 'remarquer qu'il fallait une loi pour
changer cela; ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit: S'il faut changer toute
la convention collective pour éviter tous les problèmes que cela
pose, parce que vous dites qu'on semble ne pas avoir de problèmes, je
vous dis qu'on en a, des problèmes, et j'en ai mentionné
plusieurs. L'interprétation de la clause 34 en est un et il y a des
travaux qui ne se font pas à cause de cela. Donc, on en a, des
problèmes. Tout ce que j'ai dit, c'est, si on veut changer toute la
convention, là il va falloir plus qu'une négociation. (17 h
30)
Troisièmement, lorsqu'on a signé cela, on était
fort conscients qu'il y en avait 220 de moins. On en était conscients.
Sauf que l'hypothèse qu'on a faite, c'est, d'abord, qu'est-ce qui va
arriver à l'avenir, en 1989, 1990, 1991 et 1992, au point de vue
travaux? Personne ne le sait. On s'en doute, on a des chiffres, mais il peut
arriver bien des choses. De plus, d'autres entreprises se sont
réadaptées. Hydro-Québec s'est adaptée dans
certaines circonstances. On n'a plus d'ouvrage pour les ingénieurs en
génie civil, on ne fait plus de construction. On leur a dit: Messieurs,
êtes-vous d'accord pour aller faire de la vente? Il y en a qui n'ont pas
dit oui tout de' suite. Cela a pris des mois avant de les convaincre. Cela a
pris des fois un cours de neuf mois avant de les convaincre à faire de
la vente Ils se sont réadaptés. J'admets que pour les 220
monteurs - et les entrepreneurs nous l'ont dit - c'est beaucoup plus difficile
de se réadapter pour devenir des jointeurs ou des élagueurs.
C'est plus difficile.
J'admets que l'âge moyen est plus élevé. C'est pour
cela qu'au point de vue humain, on en a engagé 60 dernièrement.
Donc, on ne parle plus de 220 si on en a engagé 60. Et, si nos syndicats
s'entendent avec l'autre syndicat, on est prêts à modifier les
règles du jeu - si notre syndicat est d'accord au point de vue
ancienneté etc. -pour favoriser, au point de vue humain, ces
gens-là. Donc, on est très conscients, on sait qu'il y a un
problème. On s'est dit, il y a une possibilité de
réadaptation de ces compagnies et si ce n'est pas possible, bien,
essayons de limiter les dégâts au point de vue humain.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais faire un
dernier commentaire. Il m'apparaît, moi, quand une société
d'État ou qu'une entreprise a de l'argent à investir, c'est
facile de rouvrir une convention collective quand tu sais que cela ne
t'enlève aucun travailleur. Quand on augmente les immobilisations par un
programme spécial, c'est assez facile d'aller négocier parce que
tu vas offrir quelque chose, la possibilité que les deux groupes
obtiennent un morceau du gâteau. Cela m'apparaît tout à fait
facile. L'inverse n'est pas vrai cependant. C'est difficile d'aller rencontrer
un syndicat en disant: là je voudrais bien t'en arracher et je n'ai rien
à te donner, surtout si tu ne leur dis pas que c'est la garantie
d'emploi absolue pour ceux qui sont là. Il y a une clé, là
aussi, M. Coulombe qui est à regarder pour un administrateur et un
planificateur à long terme. Cela est premièrement.
Deuxièmement, il y a aussi un autre côté qu'il faut
regarder. Je vais demander à du monde de s'équiper pour faire
face à la musique. Une responsabilité au moins du gouvernement,
si ce n'est pas celle d'une société d'État, c'est de ne
pas demander à des tiers de faire face à la musique pendant X
temps pour ensuite, au bout de deux, trois ans, dire: Tu t'es bien bien
équipé, mets cela en vente, par exemple. Cela est une
responsabilité qui m'apparaît quand même importante
vis-à-vis ceux qui investissent dans le capital de risque en
équipement. Je pense que c'est au moins une responsabilité.
Troisièmement, une société d'État, à
mon point de vue, doit avoir plus de sensibilité sur le
côté humain concernant les travailleurs qu'un simple entrepreneur
dans l'entreprise privée qui est soumis à une concurrence
constante. Je prétends qu'une société d'État a un
devoir de planifier beaucoup plus que l'entreprise privée qui remplit
des contrats dans le temps voulu, puis qui fait face à la libre
concurrence, constamment. Là-dessus, je suis surpris
qu'Hydro-Québec n'ait pas discuté avec ses syndicats pour leur
offrir ces occasions dont vous parliez tantôt en disant: On aurait
probablement besoin de monteurs de lignes, par exemple, et certains de vos
collègues seront mis à pied. Est-ce que vous ouvririez la porte
à une priorité d'emploi? Je suis surpris que vous ne soyez pas
allés dans ce sens-là si vous aviez cette sensibilité
extrême sur le côté humain, surpris qu'il n'y ait pas eu
d'ouverture de votre part. L'ouverture a été faite par le
président, M. Chabot, hier, si j'ai bien compris et non pas par
Hydro-Québec. Là, aujourd'hui, je viens d'entendre de ces paroles
sensibles, bien sûr, qui prouvent que vous êtes sensibles, mais
cela ne s'est pas reflété au niveau de la négociation.
Je vais me permettre une suggestion à la fin. Je sais que notre
temps est limité. Il me semble qu'Hydro-Québec a un rôle
à jouer. D'abord, sécuriser ses salariés, cela est le
premier rôle fondamental; je pense qu'Hydro-Québec a une
responsabilité
première vis-à-vis ses propres salariés, je suis
d'accord avec cela. Cela peut s'expliquer. Si Hydro-Québec se fait
sécurisante vis-à-vis ses employés, ils seront
peut-être beaucoup plus ouverts à une discussion face aux autres
travailleurs qui veulent envahir leur champ. Si vous ne comblez pas 100 postes
vacants, par exemple, et qu'ils voient des sous-contrats se donner à la
tonne, là je comprends qu'ils puissent se plaindre du
rétrécissement de leur champ. C'est cela un peu qu'ils nous ont
passé comme message. On comprend le trouble des autres travailleurs,
mais on comprend difficilement qu'Hydro-Québec ne comble pas, au moins,
des postes autorisés tout en signant une lettre d'entente, d'autre part,
comme quoi elle veut diminuer le nombre de sous-traitants.
Il y a des ambiguïtés, vous avez raison. Il y a des zones
grises, vous avez plus que raison. C'est quasiment inexplicable de constater la
situation. On disait la même chose hier. Vous avez dit tantôt qu'il
n'y avait aucun problème, que vos ingénieurs avaient toute
l'information. Ils sont venus dire hier soir qu'ils aimeraient avoir toute
l'expertise pour la garder à Hydro-Québec d'une façon
constante. Je trouvais cela correct. Vous dites qu'il n'y a aucun
problèmes Circulation de l'information "at large", il n'y a pas de
problème. Les techniciens sont tenus me dire: Quand on rencontre dans
nos bureaux des gars sur la planche à dessin - pas nécessairement
du génie-conseil - ils viennent prendre notre place comme
techniciens.
Il y a vraiment des ambiguïtés, vous avez raison. Il me
semble que ce n'est pas trop sorcier, si on constate qu'il y a un
problème concret; qu'il y a 250 personnes potentielles et une douzaine
d'entrepreneures avec un champ d'application X dans la construction, il me
semble que ce n'est pas trop sorcier de clarifier le champ d'application de la
clause 34.02. Il me semble que vous pourriez être un des animateurs.
Le Président (M. Charbonneau):
Normalement, M. Coulombe, le député de Joliette a pris
tout le temps, la réponse serait sur son temps...
M. Chevrette: Je n'ai pas pris de chance, quand je le laisse
aller, il ne lâche pas.
Le Président (M. Charbonneau): Sauf que, comme vous
êtes les invités de la commission, néanmoins, je vais vous
permettre de répondre ou de faire des commentaires si vous voulez.
M. Coulombe: Non, comme le député a touché
la plupart des points qui ont été touchés avant, on pense
avoir donné les réponses. Ce que j'ai à dire, c'est que
faire un rond carré, cela va rester difficile. Je pourrais reprendre
chacun des points, mais je pense que notre mémoire, notre argumentation
de base... Et si vous placez le problème du point de vue humain, nous
sommes tout à fait d'accord et si on nous reproche de ne pas être
humains, qu'on regarde le management tel qu'il s'est passé dans les cinq
dernières années, les transformations qu'on a faites sans mises
à pied, sans problèmes majeurs. On est prêts à
mettre notre gestion sur la table.
Dire qu'il n'y a pas de problème, c'est faux, je ne l'ai jamais
dit. Dieu sait s'il y a des problèmes à Hydro-Québec, sauf
qu'il ne faut pas "zoomer" sur une catégorie d'emplois, lorsqu'il y en a
18 000, lorsque qu'il y a des séries de problèmes. Lorsque vous
nous répétez que les entrepreneurs ont été pris au
dépourvu pour s'acheter des équipements et ainsi de suite, nous
vous répétons que nous sommes convaincus de les avoir avertis, de
les avoir mis en garde, de leur avoir dit: Gardez vos camions et "toffez-les
deux ou trois ans de plus. Ils nous disents Non, ce n'est pas vrai. Qu'est-ce
que vous voulez que je vous dise? Nous avons des notes, on a tout ce que vous
voudrez. Eux disent: Non. C'est un cul-de-sac. C'est tellement un cul-de-sac
qu'ils nous ont poursuivis et ils viennent d'enlever leur poursuite. Ils
voulaient parler librement, donc parlons-en librement. C'est un cul-de-sac, que
voulez-vous que je vous dise?
Ce que je veux vous dire, c'est que l'ouverture de ce front n'est pas
nouvelle, il prend une allure particulière. Lorsque les
ingénieurs-conseils ou tout le monde sont inquiets, ce n'est pas de ce
qui se passe actuellement à Hydro-Québec - je mets au défi
tous ceux qui sont ici de le répéter -ce n'est pas à cause
de ce qui se passe, c'est à cause de l'inquiétude qu'ils ont que
la situation empire, que cela devienne plus grave à l'avenir. Nous
partageons cette inquiétude et nous sommes convaincus qu'il ne faut pas
que cela s'élargisse trop. Il va falloir s'asseoir avec nos syndicats
pour qu'ils comprennent cela. Je vous dis que le véritable
problème, ce n'est pas ce qui se passe à Hydro-Québec,
c'est l'inquiétude qu'ils ont que, tranquillement pas vite, cela se
détériore et qu'ils perdent de plus en plus soit des emplois,
soit des contrats et ainsi de suite. C'est le véritable
problème.
Là-dessus, nul n'est prophète et on ne peut pas vous
garantir que dans les prochaines années... Vous dites: C'est facile de
négocier certaines choses. J'admire votre facilité à dire
que c'est facile. Moi, j'ai trouvé cela dur. Je ne garantis pas que les
négociations vont satisfaire tout le monde, dans les prochaines
années. Tout ce que je vais vous dire, c'est qu'on va essayer de
négocier, qu'on partage l'inquiétude
générale et qu'on va essayer de passer au travers. C'est tout ce
qu'on peut dire. Comme on a dit, il y a cinq ans, qu'on allait diminuer nos
dépenses d'exploitation et on l'a réussi. Regardez les chiffres.
Ce qu'on vous dit, c'est qu'on va essayer. On ne peut pas vous en dire plus
actuellement.
Le Président (M. Charbonneau): Une chance que vous n'aviez
pas beaucoup de commentaires à formuler, M. Coulombe. Ha! Ha! Ha!
M. Coulombe: J'en aurais beaucoup plus, je vous prie de me
croire.
Le Président (M. Charbonneau): Je vais céder
maintenant la parole au vice-président de la commission, le
député de Vimont.
M. Théorêt: M. Coulombe, vous avez fait dans votre
présentation d'ouverture, une déclaration retentissante. Vous
avez déclaré que, chez Hydro-Québec, la politique, au
moment où l'on se parle, est une politique de faire faire plutôt
que de faire et que c'était une réalité. Je ne vous
cacherai pas que cette déclaration en a fait sursauter plusieurs dans
cette salle, dont moi. Mais, quand vous avez ajouté à cela que,
finalement, il n'y a pas de déséquilibre et que s'il y en avait
un, il serait en faveur de l'externe, donc des travaux faits à
l'extérieur, je ne vous cacherai pas que si je n'avais pas
été assis sur ma chaise, je serais tombé parce que, tout
simplement, tous ceux qui sont passés devant cette commission, à
l'exception des syndicats d'Hydro-Québec, sont venus nous dire
exactement le contraire. L'Association des constructeurs de route et grands
travaux du Québec; l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec, la FTQ-construction, l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec sont venues justement nous dire que
ce n'est pas ce qui se passe et qu'ils sont inquiets.
L'Association des ingénieurs nous a dit que la facturation des
travaux effectués par ces gens-là avait chuté de 37 %, ces
dernières années, alors que les investissements chez
Hydro-Québec avaient augmentés de 25 %. M. Lavallée, de la
FTQ, nous dit: Écoutez, ce ne sont pas seulement les 250 employés
monteurs de lignes qui vont perdre leur emploi, mais également, ils ont
rapatrié à l'interne les peintres - l'ouvrage qu'on faisait - et
d'autres métiers. Dans le cas des travaux d'avant-projet, on nous dit
qu'avant, ils étaient effectués à l'externe, surtout en ce
qui concerne les centrales et Les équipements de production, alors qu'il
semble maintenant que la volonté et la politique d'Hydro-Québec
sont de faire exécuter ces travaux à l'interne.
Vous comprendrez donc que ces contradictions majeures ne peuvent pas
résulter d'une simple mésentente et incompréhension des
textes, elles doivent résulter, je l'espère, de faits. Et,
étant donné que je voudrais avoir la possibilité de poser
toutes mes questions, je vais vous les poser et vous demander de ne
répondre qu'après. Alors, si vous voulez bien en prendre note,
parce que j'en ai quatre à vous poser.
La première concerne l'affirmation et les chiffres que votre
collègue a donnés dans le plan de développement des
années futures, alors qu'il parlait de 440 000 000 $ par année de
moyenne. J'ai, ici, votre plan de développement, Horizon 1996, où
l'on parle, pour la distribution, en 1987, de 586 000 000 $5 en 1988, 523 000
000 $; en 1989, 553 000 000 $. Ce sont vos propres chiffres. Donc, j'aimerais
bien que vous m'expliquiez l'écart assez important, quand même,
avec ce qui nous a été apporté. J'aimerais aussi, lorsque
vous répondrez, qu'on m'explique comment, alors qu'en 1983, pour 283 000
000 $ - je pense que c'est le député de Joliette qui l'a
soulevé - on avait 720 monteurs de lignes que, en 1987, en
sous-traitance toujours, on dise qu'on peut descendre ce nombre maintenant
à 500 monteurs de lignes.
Ma deuxième question: les travaux de la ligne 6, qui les fait?
Est-ce à l'interne ou à l'externe?
M. Coulombe: La ligne 6? (17 h 45)
M. Théorêt: Oui. Ma troisième question: dans
votre mémoire, en pages 8 et 9, vous indiquez tous les efforts faits par
HydroQuébec pour réduire le personnel. Pourtant, maintenant, nous
voyons que vous employez de plus en plus de main-d'oeuvre. Enfin, en 1985, et
encore là je me sers de vos chiffres, vous aviez 18 208 employés;
en 1986, 18 470; en 1987, au 13 octobre seulement, 18 720. J'aimerais bien,
encore là, qu'on m'explique comment on peut concilier ces
chiffres-là. D'autant plus qu'on nous a dit, pas plus tard qu'hier, que
l'objectif visé était d'augmenter encore le personnel à 22
000 employés. M. Coulombe, est-ce qu'on peut parler vraiment de saine
gestion?
La philosophie de l'article 34, et c'est mon autre question, est la
suivante: lorsque le niveau d'activité augmente, vous augmentez votre
personnel; mais lorsque le niveau d'activité diminue, l'effectif demeure
le même. Est-ce que, dans des conditions comme celles-là, vous
n'admettrez pas avec moi qu'on peut conclure que l'appel à la
sous-traitance diminuera a moyen terme, compte tenu que le nombre
d'employés d'Hydro-Québec est appelé à augmenter et
non pas à diminuer?
Vous avez très bien compris que si je vous ai posé mes
questions à tour de rôle,
c'est que je voulais m'assurer d'avoir le temps de les poser toutes. Je
vous écoute et nous vous écoutons attentivement.
Le Président (M. Charbonneau): Alors, M. Coulombe.
M. Coulombe: Les deux premières question sont en train de
mijoter.
Le Président (M. Charbonneau): Elles sont en
arriére.
M. Coulombe: Pardon?
Le Président (M. Charbonneau): Les deux premières
sont en arrière.
M. Coulombe: Les deux premières s'en viennent. Quant
à la question de la ligne 6.
M. Michel: La sixième ligne est tout à fait
réalisée conformément aux procédures
d'Hydro-Québec. C'est-à-dire que les gens d'Hydro-Québec
font la gérance du projet et l'administration de l'ingénierie.
Pour ce qui est de l'ingénierie détaillée,, à titre
d'exemple, si on prend les pylônes, nous avons fait un concours, parmi
deux firmes spécialisées du Québec, pour arriver avec une
conception de pylône la plus économique possible. Ce sont des
firmes de génie-conseil du Québec qui ont fait
l'ingénierie détaillée des pylônes. On est
allé en appel d'offres pour l'acier et on a acheté de l'acier
pour la fabrication des pylônes. L'installation des pylônes est
faite par appel d'offres. On a brisé la ligne de 1100 kilomètres
en divers segments, parce qu'on ne veut pas tout donner cela aux mêmes
personnes. On va en appel d'offres et on donne les contrats d'installation des
pylônes. Les câbles, l'acier étaient achetés en
partie de l'Alcan, en partie de Reynolds et installés par les
mêmes entrepreneurs. C'est tout à fait conforme à nos
façons de faire historiques.
M. Théorêt: Étant donné qu'on attend
pour les autres réponses de toute façon, est-ce que vous pouvez
me dire, en pourcentage, les travaux effectués par l'interne et
l'externe sur la ligne 6, en particulier?
M. Michel: Je ne peux vous fournir les chiffres, je ne les ai pas
au moment où l'on se parle. Je pourrais vous fournir les chiffres.
M. Théorêt: Avez-vous une idée?
M. Michel: On fait la gérance du projet. On a un directeur
de projet, un administrateur d'ingénierie et on a des chefs de chantier
qui gèrent les bouts de projet. C'est peut-être un chiffre, sous
toute réserve, de 10 % ou 15 %.
M. Théorêt: C'est à l'interne?
M. Michel: À l'interne. Je vous ai parlé
tantôt d'un fournisseur, Asea, qui a un contrat de 315 000 000 $ sur ce
projet, qui, lui, sous-traite avec des entrepreneurs québécois la
réalisation de même que l'ingénierie. Vous avez une
question sur les avant-projets, c'est tout à fait conforme. La
réalisation des avant-projets est faite à l'interne comme cela se
fait depuis tout le temps.
M. Théorêt: Avant l'entente de 1984, ce
n'était pas fait par...
M. Michel: Absolument pas. M. Théorêt:
...l'externe?
M. Michel: Vous avez fait référence tantôt
à un document qui a été approuvé le 17
décembre 1980 et qui s'intitule "Politique d'Hydro-Québec de
recours au service d'ingénieurs-conseils". Si vous me permettez, on dits
"Les travaux suivants sont ordinairement réalisés par le
personnel d'Hydro-Québec: les travaux de recherche développement,
normalisationj les études préliminaires et les avant-projets des
aménagements hydroélectriques, des postes complexes et des lignes
de transport." J'arrête là, mais c'est pour répondre
à votre question.
M. Théorêt: Alors, est-ce que vous voulez nous dire
que lorsque l'Association des ingénieurs-conseils nous dit qu'avant, au
sujet des centrales en particulier, les travaux sur les centrales et les
équipements de production étaient faits par l'externe et que,
maintenant, c'est fait par l'interne, que cela n'est pas vrai?
M. Michel: Écoutez, cela dépend de ce dont on
parle. On fait des études préliminaires entre plusieurs
rivières pour décider laquelle on va aménager de
façon globale et pour avoir une idée de priorité. C'est
suivi d'un avant-projet, un avant-projet normalement fait à l'interne.
Il est arrivé et il arrive encore que des firmes de génie-conseil
y travaillent, dans des pointes de travail. La preuve, c'est que, dans le
document du Syndicat des ingénieurs-conseils d'Hydro-Québec, ces
derniers se sont plaints que, dans le cas de Chelsea et Farmers, ce sont des
firmes externes qui ont fait une étude d'avant-projet. Cela peut
toujours arriver en cas de pointe de travail. En général, notre
politique n'est pas changée. Quand l'avant-projet est terminé, on
a une estimation des coûts, un calendrier, on procède à
l'étape du projet et l'ingénierie détaillée en
très grande mesure - historiquement, ce n'est pas changé - est
faite par l'externe. D'ailleurs, si vous me permettez
30 secondes de plus...
M. Théorêt: 30 secondes.
M. Michel: ...on met le focus sur l'année 1987 comme
étant une année catastrophique et on dit: C'est cela qui va
suivre à l'avenir. J'ai des projections ici qui me montrent, pour ce qui
est des centrales, quand on va enclencher les projets LG 1, Laforge}
Brisay, Sainte-Marguerite, Ashuapmushuam, que la masse de travail s'en va en
augmentant. Pour ce qui est des lignes, cela varie, c'est plus fluctuant mais
la politique n'est pas changée.
M. Théorêt: Alors, c'est ma deuxième
réponse, il m'en reste deux autres.
M. Boivin: Pour ce qui est de votre première question,
vous avez mentionné une incohérence entre les chiffres que je
vous ai donnés pour la distribution et ceux qui apparaissaient au plan
de développement, l'explication est qu'à la page 61 du plan de
développement, les chiffres sous la rubrique "distribution" incluent
également la fonction de répartition. Je vais vous expliquer
rapidement. On a le transport à très haute tension...
M. Théorêt: Je sais ce que vous voulez dire par
répartition. Je ne suis pas un spécialiste, niais je comprends
très bien cela.
M. Boivin: D'accord. Alors, les chiffres que je vous ai
donnés tantôt représentent exclusivement la distribution
sans la réparti' tion.
M. Théorêt: Alors, étant donné que
vous dites que la différence, c'est la répartition, est-ce que la
répartition, qui encore une fois était fait par l'externe
auparavant, est maintenant faite par l'interne ou l'externe?
M. Boivin: Les travaux de répartition en construction sont
exclusivement fait par l'externe, par des entrepreneurs.
M. Théorêt: Externe, merci. Ma quatrième
réponse pour terminer»
Une voix: Je m'excuse, la quatrième c'était...
M. Théorêt: La quatrième, c'est que vous
disiez dans votre mémoire, aux pages 8 et 9, qu'Hydro-Québec
faisait tous les efforts nécessaires pour réduire le personnel,
alors que nous nous apercevons et selon vos propres chiffres, que vous n'avez
cessé d'augmenter votre personnel depuis 1985 - et je vous ai
cité, année par année, vos propres chiffres - et qu'on
parle même, chez ceux qui sont venus nous rencontrer, d'une perspective
d'augmenter à 22 000 emplois. Alors, ma question était la
suivante: est-ce qu'on parle d'une saine gestion quand on augmente le personnel
et que la philosophie même de l'article 34 est qu'on augmente le
personnel lorsque le niveau des travaux augmente et qu'on ne diminue pas le
personnel lorsque le niveau des travaux diminue?
M. Coulombe: Bien, je pense que la meilleure réponse,
c'est de mettre les pages 8 et 9 en relation avec la page 11. En 1982, il y en
avait 19 959 et, en 1986, il y en avait 18 470. C'est donc une diminution nette
et si vous regardez à la page 11, vous y remarquez une augmentation de
la clientèle, des lignes de transport, des lignes de distribution et des
actifs qui ont été mis en exploitation. Alors, comparez entre les
deux. Cela, c'est de la productivité.
M. Théorêt: J'ai l'impression, M. Coulombe, que vous
vous référez aux statistiques qui font votre affaire quand vous
parlez de diminution du personnel, alors que quand je vous parle des trois
dernières années, où il y a une augmentation constante,
vous dites: Bien, non. Il y a eu une augmentation.
M. Coulombe: Oui, mais ce que je vous dis, c'est qu'à un
moment donné, il faut regarder cela sur une période un peu plus
longue. On a 100 000 clients de plus. On a signé, dans te domaine de la
biénergie et des chaudières, des contrats à tour de bras.
Il faut donc du monde pour s'en occuper. Il y a une augmentation du volume
d'activités. Même si on ne construit plus de barrage, il y a une
augmentation considérable du volume. Vous l'avez là: 2,8 % par
année d'augmentation pour les abonnements; 5 %, par année, pour
l'énergie livrée; 4,5 % pour la longueur des circuits. Il faut
s'en occuper. Donc, il y a une augmentation du volume d'activités. Il
faut par conséquent engager du monde. Cela me semble normal. Mais si on
regarde cela dans une perspective un peu plus longue - ce ne sont pas les
chiffres qui font mon affaire - je dis qu'on a eu un "peak" de 19 959 et que
six ans après, il va y avoir moins de monde à Hydro-Québec
qu'il y en avait dans ce temps-là. J'appelle cela une diminution de
main-d'oeuvre.
M. Théorêt: D'accord. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce qu'il y avait
d'autres questions? Alors, on est rendus aux remarques finales. Avant de
procéder aux remarques finales, je voudrais, au nom de tous les membres
de la commission, vous remercier, M. Coulombe
ainsi que vos collaborateurs, d'avoir participé à cette
consultation particulière et sans doute que, comme vous êtes un
abonné presque régulier de la commission, nous aurons l'occasion
de nous revoir dans quelques semaines ou dans quelques mois. Alors, à
bientôt et à la prochaine.
Alors, M. le député de Robervai, vous avez maintenant la
parole pour les remarques finales.
Remarques finales M. Michel Gauthier
M. Gauthier: M. le Président, le problème qui nous
confronte aujourd'hui et depuis deux jours touche finalement 220
employés de petits entrepreneurs, une trentaine, m'informe-t-on, au
total, dont peut-être une quinzaine plus importants, et ces
employés sont répartis dans toutes les régions du
Québec.
M. le Président, dans une période de ralentissement des
investissements importants dans le domaine hydroélectrique, il est
toujours plus difficile évidemment d'accepter, quel que soit le point de
vue où on se place, une réduction d'activité, puisque cela
signifie du travail de moins, cela signifie évidemment des mises
à pied - c'est la conséquence directe « cela signifie des
affaires moins bonnes, qu'on soit un bureau d'ingénieurs ou un
entrepreneur, cela signifie, bref, que la pilule est difficile à avaler
non pas par la faute des autres, mais davantage par la faute du contexte
économique ou du contexte énergétique, de vrais-je
plutôt dire.
M. le Président, le ralentissement fait d'autant plus mal que des
gens s'attendaient qu'on puisse se trouver, en 1987-1988, dans une
période d'activités extrêmement fébriles sur le plan
des investissements hydroélectriques, puisqu'on a véhiculé
un certain temps, dans tout le Québec, l'idée que les
mégaprojets,, dans le domaine de l'énergie
hydroélectrique, prendraient leur deuxième souffle et on a
soulevé ainsi des attentes extraordinaires, dans le secteur privé
particulièrement.
M. le Président, on a constaté aussi
qu'Hydro-Québec est un géant dont sont captifs en quelque sorte -
et le terme "captifs" n'est pas toujours péjoratif bien au contraire -
plusieurs gens: des entrepreneurs, des ingénieurs-conseils et surtout un
groupe d'ouvriers, d'employés - 220, 225 personnes -environ - qui sont
susceptibles d'être affectés très sérieusement, sur
le plan humain, par la perte de leur emploi et la difficulté de se
recycler, si ce géant qu'est Hydro-Québec décide de poser
des gestes qui ne vont pas nécessairement dans le sens de leur
intérêt immédiat.
Cependant, on constate, M. le Président, et on l'a toujours
accepté, qu'Hydro-Québec doit prendre des décisions
quotidiennement, qu'elle doit se donner des orientations parce que ce n'est pas
le genre de boîte qu'on peut diriger au jour le jour. Mais il faut, je
pense, être conscients, et la commission parlementaire, là-dessus,
nous aura éveillés davantage à la réalité,
que ces mouvements peuvent faire mal.
M. le Président, qu'on parle de protection d'emploi absolue des
gens de métiers d'Hydro-Québec, nous en sommes. Qu'on parle
même de permettre à ces gens d'accroître, dans une certaine
mesure, le nombre de leurs syndiqués, nous en sommes, puisqu'il s'agit
là d'individus, de Québécois et de
Québécoises, qui se trouveront un travail. Qu'on parle
également de la protection du nombre des ingénieurs à
Hydro-Québec, nous en sommes. Qu'on nous dise qu'on doit s'assurer que
les ingénieurs d'Hydro-Québec aient l'occasion de travailler sur
des projets de technologie avancée, des projets intéressants au
plan professionnel, nous en sommes et je pense que ces objectifs sont
partagés par bien des gens ici. Mais, lorsqu'on parie du partage du
travail, du partage du gâteau entre des ouvriers qui ont cette protection
et cette possibilité d'accroître le nombre de leurs
collègues et, d'autre part, avec des personnes qui ont, il faut bien le
dire, peu de chances, considérant les impératifs des conventions
collectives, considérant la manière dont on procède dans
le monde du travail et souvent, considérant leur âge et leur
expérience bien particulière, nous sommes d'avis qu'il doit y
avoir place pour des ajustements. (18 heures)
II ne s'agit pas, et c'est le point de vue de notre formation politique,
de tout remettre en question et de procéder, par mesure
législative ou autrement, par mesure coercitive, pour intervenir,
interférer dans le processus normal des choses, dans le
déroulement normal des négociations, dans le déroulement
normal de la gestion quotidienne de l'entreprise comme Hydro-Québec et
dans les discussions qu'elle a avec ses employés. Mais il nous
apparaît, et je pense que cela a été mis suffisamment en
lumière au cours des deux derniers jours, qu'une ouverture comme celle
dont a déjà fait preuve le Syndicat des employés de
métiers d'Hydro-Québec, une ouverture de la part d'autres
personnes aussi, de la direction d'Hydro-Québec, une ouverture aussi de
la part des entrepreneurs privés et des firmes
d'ingénieurs-conseils - et j'apprenais à cette fin, avec beaucoup
de plaisir, qu'Hydro-Québec se prépare à rencontrer et
à rediscuter de tous ces problèmes avec ces gens-là -
qu'avec une certaine ouverture de la part de tout ce monde-là et avec la
maturité que nous connaissons, autant aux syndiqués
d'Hydro-Québec qu'aux syndiqués de la FTQ-construction, aux
entrepreneurs, aux
ingénieurs-conseils, aux ingénieurs d'Hydro-Québec
et à l'administration d'Hydro-Québec, nous croyons qu'avec cette
maturité, ce désir de s'ouvrir à une perspective qui est
peut-être un peu dure pour certaines de ces parties, nous croyons qu'il y
a possibilité de trouver un terrain d'entente. Nous souhaitons que tout
cet exercice n'ait pas été inutile dans le sens où il
pourra permettre d'ouvrir davantage le dialogue entre les parties et que
chacun, et je pense là principalement aux ouvriers qui sont
affectés, puisse trouver sa juste part, comme je pense que c'est le
normal des choses que des députés, des représentants
à l'Assemblée nationale puissent s'occuper.
Nous souhaitons que ce partage se fasse au mieux, dans le respect des
choses qui sont déjà sur la table, mais aussi avec ouverture,
maturité et conscience sociale. Je pense que tous les groupes qui sont
passés ici ont fait preuve de ces qualités nécessaires
à une entente. Donc, une négociation est possible, à notre
avis. Des concessions de part et d'autre sont possibles et on pourrait
peut-être atteindre un seuil de fonctionnement qui soit
intéressant pour chacun et chacune qui sont venus ici. Je voudrais en
terminant remercier bien sûr, tous ceux et celles qui nous ont fait
l'honneur de déposer leurs réflexions sous la forme de
mémoires ici, tous ceux et celles qui ont accepté de venir
écouter et suivre nos travaux avec beaucoup d'attention au cours des
deux jours qui viennent de s'écouler. Je veux aussi remercier mon
collègue, le député de Joliette, mon collègue, le
député de Bertrand qui a suivi aussi les travaux de la
commission, le personnel de l'équipe de l'Opposition ainsi que les
députés ministériels, évidemment M. le ministre,
à tout seigneur, tout honneur M. le ministre, et l'équipe de
soutien qui encadre tous ces gens.
Cela n'a pas été une commission parlementaire facile, je
vais le dire, mais combien elle s'est révélée
intéressante en ce qui nous concerne. Nous vous remercions.
Le Président (M. Charbonneau): Merci M. le
député de Roberval. M. le ministre.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Si vous me le
permettez, je voudrais tenter de résumer un peu les
éléments essentiels de nos discussions des deux derniers jours.
Je tiens à souligner avant tout le caractère constructif de cette
commission qui, grâce à des mémoires de qualité et
à une implication très positive de nos collègues de
l'Opposition que je remercie, nous a permis d'accomplir des progrès
réels, je crois, au cours de deux derniers jours. Je veux remercier mes
collègues pour la part qu'ils ont faite à la commission et pour
les travaux de la commission. Je veux remercier les intervenants et les
équipes de soutien, les fonctionnaires qui ont préparé
toute la documentation.
Parmi les réalités essentielles que nos débats ont
mises en lumière, je retiens, quant à moi, les suivantes:
l'introduction du nouveau libellé des articles 34 des conventions
collectives d'Hydro-Québec, bien qu'il ait été fait avec
une préoccupation de continuité, n'en soulève pas moins
des inquiétudes justifiées de la part des entrepreneurs qui
sous-traitent chez Hydro-Québec. En effet, il m'apparaît que ce
nouveau libellé a introduit, dans le partage des travaux, entre
l'interne et l'externe, une dimension nouvelle qui a pour effet de restreindre
la place de la sous-traitance dans certains secteurs d'activité.
La lettre d'entente du 29 juin 1984, sur le programme PAQS, pose dans
son application des problèmes réels de viabilité aux
entrepreneurs concernés. De plus, l'impact sur la main-d'oeuvre est
inacceptable. Cette entente contribue à réduire, de façon
permanente, l'importance de la sous-traitance dans la construction et
l'entretien du réseau de distribution d'Hydro-Québec. La
recherche de solutions devra tenir compte d'une réalité
concrète, soit l'existence de conventions collectives intervenues entre
Hydro-Québec et ses employés.
D'autres éléments soulevés au cours de cette
commission méritent d'être relevés et nécessiteront
des discussions plus approfondies, à court terme. Je pense
principalement aux études de productivité d'Hydro-Québec
qui peuvent avoir un impact sur les tarifs. Dans un document
rédigé par Hydro-Québec au mois de février 1987,
cette société admettait un écart de 15 % à 20 %. 5i
on applique cet écart, par exemple, à des travaux, mettons, de
400 000 000 $, cela peut représenter 80 000 000 $, soit à peu
près un quart de l'augmentation des tarifs. Nous, comme gouvernement,
avons une responsabilité à examiner cela. Peut-être que
cela a été amélioré. Peut-être que
l'écart a été réduit, mais je crois, tant pour le
bénéfice d'Hydro-Québec que pour le bénéfice
des consommateurs et de ceux qui entendent la commission, peut-être que
cela vaudra la peine de faire une étude pour établir la vraie
situation. Aussi, à la suite des représentations qui ont
été faites en ce qui concerne les pannes - on n'a pas eu
malheureusement la chance de poser ces questions à Hydro-Québec,
il nous manque du temps - à mon avis, je crois qu'on a eu des
informations, des points de vue qui portent à croire qu'il y aurait
peut-être quelques éléments d'amélioration dans la
gestion des urgences qui mériteraient sûrement d'être
examinés de plus près avec Hydro-Québec.
J'indiquais dans mon allocution d'introduction, qui marquait le
début des travaux de cette commission, que la sous-traitance chez
Hydro-Québec devait refléter un équilibre entre, d'une
part, la bonne gestion qui permet à Hydro-Québec de bien remplir
sa mission et, d'autre part, le rôle de levier économique qui a
toujours été imparti à cette société
d'État.
Par le passé, la sous-traitance chez Hydro-Québec n'a pas
soulevé de débat dans notre société. C'est bien
beau de dire qu'on a toujours eu des problèmes, mais on n'a jamais eu le
genre de problèmes auxquels on fait face aujourd'hui. C'est signe que
l'on s'en tenait à une politique d'équilibre qui permettait
à chaque groupe d'intérêt d'y trouver une place pour se
développer harmonieusement. Alors, cette commission aura montré
qu'au cours des récentes années, cet équilibre s'est
détérioré. Dans les deux cas, les entreprises qui oeuvrent
dans le réseau de distribution subiront des contrecoups majeurs.
Quant aux firmes de génie-conseil qui constituent un
élément important pour relever le défi technologique, leur
développement futur risque d'être remis en cause. Et, j'entendais
les représentations disant que rien n'a changé. Si rien n'a
changé, pourquoi l'article 34? Si rien n'a changé, pourquoi la
préoccupation des ingénieurs-conseils? Ce sont des
professionnels, et ils ont porté des faits à notre attention.
Alors, je crois que cela mérite un examen. La dernière chose que
je voudrais voir arriver, c'est, comme on a dit, qu'au plan international, au
plan de la sous-traitance, au plan de quoi que ce soit, que des firmes
ontariennes remplacent les firmes québécoises.
Je crois que la formule gagnante que nous avions dans le passé,
était une bonne formule que les autres veulent copier et que nous devons
garder. Il est important de souligner que le développement
hydroélectrique du Québec a permis l'émergence d'une
expertise de pointe, tant chez Hydro-Québec que chez nos
ingénieurs-conseils. Cette formule a été
bénéfique pour le Québec et nous n'avons pas les moyens,
aujourd'hui, de priver cette expertise, ni Hydro-Québec, ni nos firmes
de génie-conseil. Chacun a son rôle à jouer.
Que l'on me comprenne bien, la sous-traitance doit, comme par le
passé, continuer d'occuper chez Hydro-Québec, une place qui lui
permette de jouer son rôle dans notre économie. Il n'est pas plus
de notre intention de mettre fin à la sous-traitance que de privatiser
Hydro-Québec. J'invite donc les parties intéressées
à collaborer pour prendre les mesures nécessaires volontairement
pour résoudre le problème. Il me semble que nous avons tous
vraiment les mêmes intérêts. On ne veut pas congédier
personne, on ne veut pas causer des problèmes internes chez
Hydro-Québec, mais on veut conserver les emplois pour, je le
répète, les 200 qui ont été obligés de
quitter le Québec. Mais encore, pour toute la question de la
sous-traitance, l'expertise, la part économique que cela nous a
apporté, on en bénéficie tous.
Il me semble que toutes les parties intéressées ont cet
intérêt commun. Je les inviterais à se réunir et
à apporter une solution à ce dossier volontairement de leur part.
Quand la bonne volonté existe, les solutions se trouvent. Le but de la
commission était de trouver, d'entendre les mémoires et de voir
quels étaient les vrais problèmes et pourquoi ils existaient. Je
crois que la commission a entendu des mémoires et a porté
à notre attention des problèmes réels. Je ne peux pas
croire qu'on n'est pas assez humains de part et d'autre pour ne pas
régler ces problèmes volontairement.
Je suis disponible et je vais me rendre disponible pour rencontrer tous
les intéressés, si cela peut aider à apporter une
solution. Quoi qu'il en soit, c'est de ma responsabilité et je souhaite
grandement qu'une solution soit apportée par les parties. Je suis
convaincu qu'avec de la bonne volonté, c'est possible de le faire. On
parlait des investissements d'Hydro-Québec. Ils sont en croissance. En
1986, c'était 1 500 000 000 $; en 1987, il y a eu une augmentation de 21
000 000 000 $ et, pour apaiser les inquiétudes du député
de Roberval quant aux projets de la baie James, ils vont se faire, ne vous
inquiétez pas.
Dans cette atmosphère, je crois et je suis convaincu qu'il est
possible pour toutes les parties de trouver des solutions à l'amiable,
ensemble, parce que nous avons les mêmes intérêts. Mais quoi
qu'il en soit, il est de ma responsabilité, à titre de ministre
tuteur d'Hydro-Québec, de veiller à ce qu'une solution acceptable
apparaisse. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. Sur
ce, je pourrais ajouter que, de l'interprétation que je fais des propos
du député de Roberval et des propos que vient de tenir le
ministre, les travaux de la commission vont en rester là pour le moment
en ce qui concerne ce sujet. Il n'y aura pas de recommandation ou de rapport
particulier de la commission ni au gouvernement ni aux parties
concernées. La commission aura surtout été le forum
permettant aux différents intervenants dans ce dossier de
s'écouter mutuellement et de faire en sorte que, finalement, les uns et
les autres assumeront par la suite leurs responsabilités. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Est-ce que le ministre me permet une question?
Compte tenu du fait qu'il y a un appel du ministre à une
négociation et compte tenu du fait qu'il a
bien précisé à la fin de son exposé qu'il
était le ministre tuteur et qu'il avait la responsabilité de
trouver une solution, est-ce que je pourrais demander au ministre s'il
conviendrait, avec les membres de la commission, de nous indiquer - si ce n'est
pas aujourd'hui, dans les prochains jours -l'échéancier qu'il se
donne? Deuxièmement, avant toute décision ministérielle,
advenant une incapacité d'en arriver à une solution, est-ce qu'il
accepterait de revenir en commission parlementaire devant nos collègues
pour nous faire part de sa décision?
M. Ciaccia: Je sais que les suggestions du député
de Joliette sont faites dans un esprit positif dans le but de susciter et
inciter toutes les parties à arriver à une solution à
l'amiable. Je peux assurer le député de Joliette que je vais
réfléchir sur ses propos. Cela me fera un grand plaisir de le
tenir au courant des développements qui pourront se produire dans cette
situation. Sûrement, on pourra s'en reparler.
Le Président (M. Charbonneau): Pour que cela soit bien
clair, en particulier pour les premiers groupes qui pensaient que
l'intervention qu'ils faisaient à la commission amènerait la
commission éventuellement à proposer une solution
particulière, je pense que ce n'est pas tout à fait comme cela
que cela va se dérouler. La commission aura surtout été le
forum pour permettre aux gens de s'exprimer et d'enclencher, peut-être,
un nouveau dialogue des plus serrés qui va peut-être arriver
à déboucher sur une solution qui sera acceptable à tout le
monde. Alors, cela met fin au mandat que nous avions à l'égard de
la sous-traitance à Hydro-Québec et les travaux de la commission
parlementaire de l'économie et du travail sont ajournés sine
die.
(Fin de la séance à 18 h 16)