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(Neuf heures cinq minutes)
Le Président (M. Théorêt): À l'ordre,
s'il vous plaît! La commission de l'économie et du travail reprend
ses travaux afin de procéder à la consultation
générale en ce qui a trait à l'avant-projet de loi sur la
Régie du gaz naturel. J'invite maintenant les représentants de la
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec
à prendre place à l'avant, s'il vous plaît.
Alors, M. Bureau, les membres de la commission vous souhaitent la
bienvenue. Dans un premier temps, je vous demanderais de présenter vos
collègues. Je vous rappelle également que vous avez un maximum de
vingt minutes pour faire votre présentation, après quoi chaque
formation politique échangera des propos avec vous. Je vous cède
donc la parole.
Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec
M. Favre (Michel): Bonjour, M. le Président. Mon nom est
Michel Favre. Je suis directeur général de la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec. À ma
droite, M. Normand Bureau, président de la corporation; à sa
droite, M. Fernand Lavallée, entrepreneur de la région de
Montréal, et M. John White, conseiller juridique de la corporation.
M. Bureau (Normand): M. le Président, M. le ministre, MM.
et Mmes les membres de la commission. C'est avec plaisir, encore une fois, que
la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du
Québec s'associe au processus démocratique qu'est l'examen d'un
avant-projet de loi par une commission parlementaire. Créée
depuis près de 40 ans, la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec regroupe plus de 2200
entrepreneurs en mécanique du bâtiment. De ce nombre, plusieurs
sont qualifiés pour faire de l'installation, de la réparation et
du service sur tous les systèmes au gaz naturel. De plus, la loi qui
crée la corporation accorde à ses membres une juridiction
exclusive sur l'installation, la réparation et la modification de tous
les systèmes de chauffage, de même que des systèmes de
plomberie, y compris ceux pour l'alimentation au gaz, et des systèmes de
brûleurs au gaz naturel. La corporation et ses membres ont vécu,
au cours des dernières années, dans le cadre de différents
programmes de conversion des systèmes de chauffage et en particulier le
PCRP, un certain nombre de problèmes au sujet desquels elle a fait des
représentations et pour lesquels elle a suggéré un
ensemble de solutions. La corporation espérait retrouver dans
l'avant-projet de loi des solutions aux difficultés qu'elle avait
déjà soulignées. La corporation espérait
également que l'avant-projet de loi soit une réforme
complète de tout le régime relatif à la distribution du
gaz naturel. Cela ne nous apparaît malheureusement pas être le cas.
Ainsi, comme nous l'indiquions dans notre mémoire, il aurait fallu
retrouver des modifications au régime actuel en ce qui regarde la
formation et la qualification de la main-d'oeuvre en matière de gaz.
En effet, nous croyons que le gouvernement devrait s'assurer qu'il
existe une véritable formation des personnes faisant des installations
en matière de gaz; non seulement les personnes faisant des installations
devraient-elles être qualifiées mais également celles qui
font les inspections. Rien dans l'avant-projet de loi ne touche ni ne
règle ce problème. Déjà, en 1981, la corporation
faisait part à la Régie de l'électricité et du gaz
de ses recommandations quant à cette question. Entre autres, la
corporation recommandait que soit allongée la durée de
l'apprentissage pour la catégorie d'installateurs. Cette question est
importante car il y va de la sécurité du public consommateur.
Rien ne nous laisse supposer que des changements seront apportés
à court ou à moyen terme sur cette question.
Les plus grandes appréhensions des membres de la corporation se
retrouvent cependant surtout en ce qui a trait au monopole créé
par le droit exclusif de distribution. Ce régime existe actuellement.
Sous ce régime, nous avons vécu plusieurs problèmes.
D'ailleurs, le 21 août dernier, nous faisions parvenir au ministre une
lettre par laquelle nous indiquions que les agissements d'un distributeur
exclusif faisaient en sorte que l'on ne pouvait parler de concurrence et que
non seulement on créait un monopole de distribution mais
également un monopole quant aux installations, réparations et
modifications des appareils. Nous avions fait part également de nos
appréhensions au premier ministre, dans une lettre qui lui était
expédiée le 29 juillet dernier. Les entreprises distributrices de
gaz
naturel sont des entreprises de services publics. Présentement,
on leur accorde un monopole. L'avant-projet de loi consacre ce monopole, elles
ne doivent donc pas utiliser ni pouvoir utiliser de façon indue leur
monopole, soit pour se privilégier elles-mêmes, soit pour
privilégier quelques personnes. Elles ne doivent pas non plus, vu leur
monopole, croire qu'elles sont autorisées à exercer des pouvoirs
qu'elles ne détiennent pas. Le monopole que l'on accorde ne doit pas
amener la création d'autres monopoles. Nous croyons essentiel que les
activités d'une entreprise détentrice d'un droit exclusif de
distribution du gaz soient limitées et qu'en conséquence ces
entreprises, directement, indirectement ou par filiale interposée, ne
créent pas d'autres monopoles et permettent aux consommateurs d'exercer
leur libre choix. Il est nécessaire que cessent les abus que nous avons
connus au cours des dernières années et que soient
protégées la concurrence et la liberté de choix du
consommateur.
Dans un même ordre d'idées, il est pour le moins
étonnant que ce soit le distributeur qui doit inspecter les
installations qui sont faites. Ce n'est pas au distributeur de faire ces
inspections. C'est à un organisme indépendant de le faire. Ce
n'est pas Hydro-Québec qui fait l'inspection des installations
électriques, c'est un organisme gouvernemental qui le fait. Quoi de plus
naturel? Si c'est un organisme autre que le distributeur qui fait l'inspection,
cela aura pour effet d'éviter des conflits inutiles entre l'installateur
et le distributeur, comme cela a déjà été le
cas.
L'avant-projet de loi constitue donc une réforme
incomplète de tout le régime de la distribution du gaz naturel.
Nous sommes sûrs que les membres de la commission et le ministre
prendront note de nos représentations dans l'élaboration du
projet de loi et nous voulons remercier les membres de la commission et le
ministre de leur bienveillante attention. Merci.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie,
M. le président. Je vais immédiatement céder la parole au
ministre de l'Energie et des Ressources.
M. Ciaccia: Alors, je veux remercier M. le président pour
avoir déposé son mémoire. Je voudrais,
premièrement, l'assurer que le volet sécurité demeure une
préoccupation de notre gouvernement. Cependant, le transfert de
juridiction du volet sécurité de la Régie de
l'électricité et du gaz vers la Régie du gaz est
temporaire, car, dès que la Loi sur le bâtiment sera
promulguée, la sécurité passera sous la juridiction de la
Commission du bâtiment.
Vous avez mentionné dans votre mémoire que la loi
était incomplète parce qu'on ne prévoyait pas les
qualifications de la main-d'oeuvre, les qualifications des inspecteurs. Ces
sujets sont plutôt de la juridiction - je ne vous dis pas cela parce que
je ne veux pas en assumer la responsabilité, et je vais vous expliquer
pourquoi - du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, parce que
vous pouvez vous imaginer la confusion qui existerait au Québec si
chaque ministère faisait lui-même sa propre loi de la
main-d'oeuvre. S'il y avait une loi pour chaque catégorie de
travailleurs ou la qualification des inspecteurs, des travailleurs, si chaque
ministère imposait sa perception, cela pourrait causer une certaine
confusion. Alors, ces questions de qualification, de main-d'oeuvre, de
sécurité - disons de main-d'oeuvre - appartiennent proprement au
ministère du Travail et les qualifications et tous les aspects de
main-d'oeuvre seront promulgués ou seront déterminés par
le ministère du Travail. La sécurité, on l'a maintenant.
Comme je l'ai dit, c'est une question temporaire et cela va être la
Commission du bâtiment qui va s'en occuper. (9 h 15)
En ce qui concerne l'inspection, je pense que vous serez d'accord avec
moi que le premier intéressé à ce que les installations
soient sécuritaires, en plus du gouvernement, c'est le distributeur
gazier, car il semble que tout accident va être très
néfaste pour la vente du gaz; il a un intérêt principal
pour que cela soit sécuritaire. Alors, ne croyez-vous pas que le
distributeur gazier est peut-être le mieux placé et
peut-être même le plus compétent pour inspecter les
installations? Ce sont ses propres installations et, si quelque chose arrive,
il ne peut pas aller faire autre chose. Lui, il vend du gaz et il faut qu'il
augmente sa part du marché, au moins qu'il la maintienne. Il a plus un
intérêt à s'assurer que l'inspection et la
sécurité soient maintenues plutôt qu'une tierce personne
qui peut avoir cela à contrat. Je ne dis pas qu'il ne ferait pas un bon
travail, mais, en termes d'intérêt, ne croyez-vous pas que c'est
vraiment le distributeur qui a ce principal intérêt?
M. Bureau: M. le ministre, je crois que c'est là un mythe
que l'on a trop longtemps accepté, cette théorie que le
distributeur soit le principal intéressé. Que le ministère
ou que la régie prennent les dispositions nécessaires, parce que
j'ose imaginer que le gouvernement et la régie sont aussi
intéressés à la sécurité du public... Je
crois que ce mythe a déjà trop longtemps duré, que ce soit
la responsabilité du distributeur de s'assurer de la
sécurité des installations. Dans d'autres domaines, il y a des
dispositifs gouvernementaux ou neutres qui font des inspections et dont la
responsabilité est prise au sérieux dans ces inspections, telle
Hydro- 14 octobre 1987
Commission permanente
Québec dans l'électricité. On peut apporter autant
de sérieux dans les inspections d'installations de gaz naturel.
Autre chose, M. le ministre. Je ferai remarquer que lorsqu'un
distributeur à caractère exclusif est libre de faire
l'installation ou tente à peu près par tous les moyens possibles
de faire les installations lui-même, alors qu'il y a quelque 500 ou 600
entrepreneurs qui appartiennent à notre corporation et qui sont
qualifiés pour faire ces installations, je me permets de porter à
votre attention que ce n'est plus de la compétition loyale d'exercer le
monopole de distributeur, de s'attribuer ce monopole pour faire de
l'installation et de faire sa propre inspection. Alors, vous vous imaginez que
les concurrents, qui sont les membres de notre corporation, regardent cela d'un
très mauvais oeil. D'ailleurs, l'expérience a prouvé,
comme par hasard, et le hasard arrive trop souvent malheureusement, que dans
une même installation des concurrents se sont trouvés avec
beaucoup plus de défauts sur leurs installations que les
privilégiés de ces distributeurs exclusifs. Est-ce que vous ne
croyez pas qu'il y a conflit d'intérêts à faire de
l'installation et à faire inspecter son propre système?.
M. Ciaccia: On parle de différentes choses. Je parlais
d'inspection sécuritaire parce que la responsabilité civile, si
quelque chose arrive, ce n'est pas l'inspecteur qui va être responsable.
C'est Gaz Métropolitain. Et tous les dommages, tous les aspects de la
responsabilité civile tombent sur eux. Alors, la question de
l'installation - j'ai d'autres questions, on va y revenir - mais, sur la
question d'inspection et de sécurité, je pense que vous allez
admettre avec moi que c'est vrai, oui, que nous, comme gouvernement, avons une
responsabilité principale et un devoir de s'assurer que les lois soient
respectées. C'est pour cette raison que temporairement ce sera la
régie qui fera certains travaux mais après ce sera un autre
ministère. Mais, après le gouvernement, la responsabilité
principale tombe sur Gaz Métropolitain pour la question de
l'inspection.
En ce qui concerne les questions d'installation, en page 10 de votre
mémoire, vous recommandez que le distributeur de gaz n'ait pas le droit,
directement ou indirectement, d'exercer d'autres activités que celle de
fournir du gaz naturel. On entre dans un tout autre aspect de la question.
Premièrement, est-ce que vous pouvez me donner un exemple dans d'autres
endroits? Est-ce que cela existe ailleurs qu'un distributeur de gaz n'a pas le
droit d'exercer d'autres activités que celle de fournir du gaz?
Là, on s'en vient dans la question de marché libre.
M. Favre: Hydro-Québec, qu'il s'agisse d'installation ou
d'inspection... Vous ne pensez pas que la DGI, qui inspecte les travaux
d'électricité, a toute la compétence et l'expertise
nécessaires pour rendre les installations tout à fait
sécuritaires? Hydro, c'est pas mal plus gros que Gaz
Métropolitain ou qu'un autre distributeur de gaz. Mais vous ne pensez
pas que la même règle pourrait s'appliquer? C'est vous-même
qui appliquez cette règle chez Hydro-Québec. Pourquoi ne la
reconnaissez-vous pas chez Gaz Métropolitain ou un autre distributeur de
gaz?
M. Ciaccia: Mais dans d'autres endroits, par exemple, d'autres
distributeurs de gaz, en Ontario, en Alberta, quelle est la règle?
M. White (John): M. le ministre, nous ne pouvons pas apporter de
réponse à cette question. Nous ne le savons pas. C'est
très clair sauf que le mémoire, de la façon qu'il a
été conçu, c'est à partir du propre vécu des
membres de la corporation et des problèmes qu'ils ont eus, avec ce que
cela allait comporter dans le domaine de l'installation, de l'inspection, en
matière de gaz. De graves problèmes existent depuis de nombreuses
années. Or, c'est d'abord et avant tout cela. Nous n'avons pas
cherché à connaître ce qui existait en Ontario. Nous avons
déjà assez de problèmes au Québec pour tenter de
les régler.
M. Ciaccia: Oui, mais ce serait bien de voir comment dans les
autres endroits, si cela existe ces problèmes-là, ils sont
résolus. S'il y a des exemples que vous pourriez nous apporter,
peut-être que vous pourriez faire un peu plus de recherche dans vos
travaux et venir nous dire: Voici... Quand vous me donnez l'exemple
d'Hydro-Québec, c'est une société d'État. Quand
vous me donnez l'exemple de Gaz Métropolitain, vous parlez d'une
entreprise privée. La question que je vous pose: Dans notre
système d'entreprise privée, est-ce que vous connaissez d'autres
endroits où une loi empêche un distributeur de gaz, dans
l'entreprise privée, de limiter ses activités, de dire: Vous
allez seulement distribuer du gaz et vous n'allez même pas inspecter vos
travaux? Si vous pouvez me donner cet exemple-là, cela renforcerait
beaucoup votre cause.
M. White: M. le ministre, nous allons faire les
vérifications nécessaires et nous vous ferons part si
effectivement cela existe en Amérique du Nord.
M. Ciaccia: Très bien. On aime cela avoir les informations
nécessaires et, quand on est bien préparés, cela nous
permet de dire: Voici ce qu'on fait à tel endroit et les raisons pour
lesquelles on le fait. Dans le contexte actuel, imposer ce genre de
restrictions à l'entreprise privée, mais
pourquoi seulement Gaz Métropolitain? On pourrait dire à
Steinberg de ne pas vendre des moulins à café, de vendre
seulement des patates, et à Provigo de ne pas vendre de la pâte
à dent. Où arrête-t-on avec cela?
M. Favre: M. le ministre ce n'est pas Provigo qui inspecte ses
tomates, il y a des gens qualifiés pour cela, des gens objectifs.
M. Ciaccia: Écoutez, je ne parle pas de l'inspection, on a
fini l'inspection. On parle des ventes d'autres produits,
l'installation». Si le gouvernement empêche Gaz
Métropolitain de vendre des équipements, il va falloir que
j'empêche Provigo de vendre d'autres produits que l'alimentation.
Où arrête-t-on avec cela?
M. White: M. le ministre, je pense.
M. Ciaccia: C'est pour cela que, si vous pouviez me donner des
exemples que dans d'autres endroits cela se fait, cela pourrait nous aider un
peu à nous guider dans nos actions.
M. White: Mais, M. le ministre, je pense que ce qu'il est
important de bien comprendre dans la recommandation que l'on fait, c'est
d'abord et avant tout qu'on évalue exister 600 membres qualifiés
en gaz naturel, qui ont tous les licences nécessaires pour faire
l'installation de gaz naturel. Ce que font les sociétés qui ont
un droit exclusif de distribution, c'est qu'elles sont en train de se
créer, soit directement, soit indirectement, des petits groupes
privilégiés, ou elles sont en train de se créer une
filiale pour faire elles-mêmes l'installation. D'accord? Alors, ce qui va
arriver au bout de la ligne... Lorsque vous voulez avoir du gaz, vous appelez
le distributeur, vous n'appelez pas un plombier. Qu'est-ce que le distributeur
va faire? Il va dire: Je vais envoyer ma filiale pour faire l'installation et,
à ce moment-là, ce qui va arriver c'est que nos 600 membres ne
seront plus intéressés, ils n'auront plus de marché. Vous
allez vous retrouver au bout de la ligne avec Gaz Métropolitain ou
n'importe quelle autre compagnie qui vont envoyer toutes les installations,
tout le service, toutes les réparations à leur filiale ou
à deux ou trois entreprises. Les membres que nous représentons,
qui sont qualifiés, qui peuvent le faire et qui ont toutes les
qualifications requises, vont dire: Cela ne vaut pas la peine. Ils vont laisser
tomber et vous allez vous retrouver avec une ou deux entreprises qui vont
contrôler non seulement la distribution mais tout le secteur de
l'installation, de la réparation, de la modification au gaz naturel. Il
n'y en aura plus de concurrence à ce niveau.
M. Ciaccia: Oui, mais admettez avec moi que l'objectif premier
d'un distributeur gazier est de distribuer du gaz; c'est son objectif, c'est sa
raison d'être. Alors, pour ce faire, un distributeur s'appuie sur des
partenaires compétents. Personne ne peut tout faire en tout temps. Et,
en tenant pour acquise la compétence de vos membres, croyez-vous
vraiment qu'il a intérêt à ne pas travailler avec vos
membres?
M. White: Mais on va se poser des questions. Écoutez,
peut-être que M. Bureau ou M. Lavallée pourrait répondre de
façon plus adéquate, mais la situation que l'on vit
présentement nous laisse de grandes interrogations, je pense bien.
M. Bureau: M. le ministre, si on le souligne dans notre
mémoire, ce n'est pas parce qu'on l'a pris en l'air comme cela, c'est
parce qu'on vous souligne à quelques reprises...
M. Ciaccia: II n'y a aucun de vos membres...
M. Bureau: ...on l'a souligné auparavant, qu'on subit des
problèmes, on a des problèmes avec... On voit des compagnies
distributrices de gaz qui sont majoritaires dans une compagnie, une filiale, et
qui tentent d'obtenir les licences d'entrepreneur en installation de gaz
naturel pour installer elles-mêmes le gaz naturel. On ne prend pas cela
dans les airs, M. le ministre. Écoutez, moi je me pose la question, je
ne peux pas croire que le gouvernement du Québec manque d'imagination
à ce point que, pour régler un problème, il faut commencer
à faire le tour de l'Amérique du Nord pour voir de quelle
façon ils règlent leurs problèmes. Prenons-nous en main un
peu et regardons s'il existe un problème réel et laissons faire,
on n'est pas les derniers venus pour commencer à regarder toute
l'Amérique du Nord avant de régler un problème. Prenons
des initiatives, M. le ministre, pour régler nos problèmes. (9 h
30)
M. Ciaccia: Écoutez, ce n'est pas moi qui ai
suggéré l'Amérique du Nord, c'est votre avocat. Moi, je
vous ai demandé: Est-ce que vous connaissez d'autres endroits au Canada?
Il y a des régies de l'énergie ou de l'électricité
et du gaz dans d'autres endroits. C'est toujours bon de savoir ce que nos
voisins font, parce qu'il y a une question de compétitivité et de
concurrence.
M. Bureau: Vous l'enlevez aux autres concurrents, M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je ne vous ai pas demandé cela pour que ce
soit concluant de dire: Je vais faire seulement ce que les autres font. C'est
juste pour nous donner des exemples,
sur ce problème, parce qu'on touche à des secteurs assez
sensibles dans notre système d'entreprise privée. On parie
toujours de libre concurrence. On parle du système dans lequel on vit.
Avant de poser de telles restrictions, ce serait bon de savoir, juste à
titre d'information, s'il y a d'autres endroits qui interdisent la vente,
l'installation ou qui interdisent l'inspection par le distributeur même.
Je pense que ce serait bon à savoir.
M. Bureau: D'accord, M. le ministre. Écoutez, de par ces
lois, M. le ministre, est-ce que vous ne restreignez pas la libre concurrence?
C'est une question d'économie? Vous donnez des droits exclusifs à
un ou deux distributeurs de gaz naturel.
M. Ciaccia: Soyez réaliste.
M. Bureau: C'est une limitation cela aussi.
M. Ciaccia: Oui, mais soyez réaliste, il n'y a pas d'autre
façon de le faire pour distribuer le gaz.
M. Bureau: Alors, ce qu'on vous demande de faire, M. le ministre,
c'est de ne pas donner l'occasion à ces sociétés
distributrices d'élargir leur monopole de...
M. Ciaccia: On ne leur donne pas le droit exclusif de faire des
installations. Ils n'ont pas ce droit. Avez-vous fait des
représentations auprès des distributeurs ou auprès de la
régie? La régie a des audiences et les distributeurs sont
là. Je pense bien que leur porte est ouverte. Est-ce que vous avez fait
des représentations?
M. Bureau: Ah oui, quelques fois par année, M. le
ministre, on les rencontre, avec de très belles promesses, pour
s'apercevoir quelques semaines ou quelques mois après que le tout
recommence ici et là. Si on s'adresse à la commission
parlementaire, c'est qu'on a tenté, M. le ministre, de régler et
on a rencontré ces organismes auparavant sans avoir de conclusion
satisfaisante.
M. Ciaccia: On m'informe que mon temps est écoulé.
Juste deux autres petites questions. Est-ce que vous avez fait des
représentations à la régie et quelle a été
la réaction de la régie? Quel pourcentage de vos membres, quelle
part du marché vos membres ont-il dans les installations ou dans le
travail que Gaz Métropolitain accorde?
M. Bureau: Alors, à ma connaissance, non je ne me souviens
pas... Je n'ai pas de souvenance qu'on ait fait des représentations.
M. White: M. le ministre, concernant la représentation qui
a été faite à la Régie de
l'électricité et du gaz, il y a eu, lorsque ont commencé
les programmes au début des années quatre-vingt, des
représentations d'abord et avant tout quant à la question de la
formation et de la qualification de la main-d'oeuvre en matière de gaz.
Les autres représentations, ce fut, surtout des rencontres très
nombreuses à chaque année avec les entreprises
distributrices.
M. Ciaccia: Quel pourcentage du marché vos entrepreneurs
ont-ils?
M. Favre: Par rapport à quoi, M. le ministre?
M. Ciaccia: Par rapport aux travaux que Gaz Métropolitain
donne. Gaz Métropolitain, en termes d'installations, doit avoir X
millions de dollars par année. Quel pourcentage de ces travaux est fait
par vos entrepreneurs?
M. Favre: II est probablement assez substantiel en ce qui
concerne les installations.
M. Ciaccia: Assez substantiel en ce qui concerne les
installations?
M. Favre: Oui. Mais de plus en plus mitigé en ce qui
concerne l'entretien et la réparation.
M. Ciaccia: Pardon?
M. Favre: De plus en plus mitigé en ce qui concerne
l'entretien et la réparation. C'est-à-dire que c'est un
marché qui est grugé directement par le distributeur, notamment
dans la région de Montréal où le gaz...
M. Ciaccia: Quand vous dites une partie substantielle, cela
représente quoi, 51 %, 80 %? Vous devez avoir des chiffres?
M. Favre: Non, on n'a pas de chiffre.
M. Ciaccia: Je vous le suggère. J'aimerais avoir un peu
plus de détails dans cela. Si vous pouviez me donner des chiffres et
dire: Écoutez, sur 100 % du marché, Gaz Métropolitain en
fait 90 % et nous en laisse 10 %, ou bien, sur 100 % du marché, on en
fait 90 % et Gaz Métropolitain en fait 10 %, cela nous permettrait
d'évaluer un peu plus. Parce qu'on ne peut pas prendre des
décisions, nous autres, si l'on n'a pas toutes ces informations. Vous
êtes en meilleure position que moi pour fournir cette information.
M. White: M. le ministre, je pense avoir une réponse et
vous allez bien comprendre. Comme indiqué dans le texte
introductif dont le président vous a fait part, il existe une
juridiction exclusive à la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie pour de l'installation, non seulement de
systèmes de chauffage, mais également de tuyauterie, de
plomberie, entre autres, pour l'alimentation du gaz. Alors, dans le
système actuel, si quelqu'un n'est pas membre de la corporation,
techniquement, juridiquement parlant, il n'a pas le droit de faire
l'installation.
M. Ciaccia: Alors, vous avez un monopole là-dessus.
M. White: Techniquement, les membres de la corporation ont une
juridiction exclusive comme les membres du Barreau ont une juridiction
exclusive pour certaines fonctions. Mais il y a 600 entrepreneurs
qualifiés. Il n'y a pas un entrepreneur qui a le monopole parmi les
600.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Avec
regret, je dois avertir le ministre que son temps est terminé. Je
cède la parole au critique de l'Opposition, le député de
Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. J'ai cru un instant
que vous disiez: Je dois avec regret passer la parole au député
de Roberval Je me préparais à contester votre
autorité.
M. Ciaccia: Je me serais porté à votre
défense.
M. Gauthier: Vous vous seriez porté à ma
défense.
M. Ciaccia: Absolument.
M. Gauthier: Je sais que vous appréciez ma critique, M. le
ministre. D'ailleurs, je vous aide, en générai, à faire
des lois qui ont de l'allure. Ça me fait plaisir de saluer les
représentants de la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie. J'aimerais savoir, à titre de curiosité, vous avez,
évidemment, parlé beaucoup avec le ministre de la capacité
d'installer et d'entretenir les équipements nécessaires à
la distribution du gaz naturel. Mais, dans votre mémoire, à la
page 3, au début, vous dites, je vais vous citer: "Nous avions cru que
cet avant-projet de loi ferait en sorte de régler les différents
problèmes et les différentes situations conflictuelles ayant
existé au cours des dernières années et auxquels ont eu
à faire face non seulement les entrepreneurs mais également les
consommateurs."
J'ai l'impression, à lire ce paragraphe-là, que le
problème dont vous discutez depuis une bonne vingtaine de minutes avec
le ministre n'est pas le seul problème que vous auriez voulu que
l'avant-projet de loi corrige. Est-ce que je pourrais vous entendre sur les
autres aspects?
M. White: Le plus grand problème, M. le
député de Roberval, c'est ce que nous avons indiqué dans
le mémoire. Le problème, comment vous dire? nous sommes en
conflit d'intérêts avec Gaz Métropolitain ou avec
Gazifère, tout le temps. Nous sommes en conflit d'intérêts
parce qu'ils vont nous inspecter. C'est eux autres qui décident si
l'installation qu'on fait est correcte ou pas. Après cela, la
régie vient nous inspecter, en surplus. C'est pour le moins
étonnant. Il y a deux inspections pour la même installation»
Sauf que, l'entreprise de distribution, aussi, tente par tous les moyens de se
créer, et tous les moyens... On peut comprendre qu'au point de vue
économique c'est ce qu'ils tentent de faire. Nous sommes des grands
garçons. On peut comprendre que c'est ça qu'ils vont faire. Ils
essaient de créer des espèces... À Montréal, il a
été question, à un moment donné, des agents
autorisés. Il y avait 25 agents autorisés de Gaz Métro.
Gaz Métro affichait partout et on avait à Montréal,
à ce moment-là, 300 membres.
Qu'est-ce que vous voulez que les gens fassent quand ils voient "agent
autorisé"? Les situations conflictuelles, c'est là, d'abord et
avant tout, qu'elles sont. Il se crée un conflit d'intérêts
par la création du monopole entre Gaz Métropolitain et nos gens.
Je vous parle de Gaz Métropolitain, mais ça peut être tout
le monde. Ça serait quelqu'un d'autre, une autre entreprise qui serait
distributrice, et on se retrouverait exactement avec le même
problème. Eux, pour faire de l'argent, c'est sûr qu'il faut qu'ils
vendent le plus possible de gaz. Donc, ils vont essayer de réduire le
plus possible le coût des installations, etc.
C'est sûr que nous autres, qui sommes là pour faire du
travail, nous sommes là, également, pour faire des profits, comme
tout le monde. Le conflit, si vous voulez, il est là, il est latent, il
sera toujours là tant que Gaz Métropolitain ou une autre
entreprise de distribution détenant un droit exclusif ne fera pas que de
la distribution, ne pourra pas faire autre chose, beaucoup d'autres choses,
soit directement, soit indirectement. C'est d'abord et avant tout une question
de conflit d'intérêts. Il y a 20 ans, Gaz Métropolitain,
dans la région de Montréal, parlait des maîtres
mécaniciens en tuyauterie, des entrepreneurs comme étant ses
alliés, ses partenaires pour faire entrer le gaz. Je vais vous dire,
depuis ce temps-là, le discours a beaucoup changé. En
théorie, c'est ce qu'ils vont vous dire; lors de rencontres, ils vont
vous dire: Oui, oui, on va régler cela, oui, oui, on va régler
cela, mais ce n'est pas ce qui arrive.
Ce que M. Bureau disait tout à l'heure, c'est: Vous avez un
entrepreneur plombier qui va faire une installation de gaz dans une
résidence pour du chauffage, d'accord? Il faut, il y a des
équipements qui sont fournis par Gaz Métropolitain - je vous
parle de Gaz Métropolitain, ce sont eux qui ont le plus gros
réseau. C'est drôle mais, quand ce n'est pas quelqu'un des agents
autorisés ou du groupe sélect de Gaz Métropolitain ou des
quatre, cinq entreprises qui donneraient uniquement le service de Gaz
Métropolitain, c'est bien difficile d'avoir un compteur. Ah! Deux mois.
On ne peut pas vous le fournir avant deux mois, comme par hasard. Puis
l'inspection, il est prévu que le distributeur doit faire l'inspection,
quitte, après cela, que la régie la fasse. On nous dit: Ah! Pas
avant deux semaines, pas avant deux semaines, puis cela n'en finit plus, comme
par hasard. C'est cela la situation, le problème que l'on vit, que nos
gens vivent. D'abord et avant tout, c'est cela que l'on veut que vous
compreniez bien. Si on accorde à Gaz Métropolitain ou à
toute autre entreprise un monopole de distribution, eux, pour des raisons
économiques, ils vont se dire: On va faire des installations aussi, cela
va nous rapporter de l'argent, tout cela, tout cela. Vous allez faire en sorte
qu'il n'y aura plus d'entrepreneur autre que Gaz Métropolitain ou ses
filiales qui vont être intéressées à en faire. Par
cela, c'est très facile, l'équation suit très bien. Il ne
restera plus... Il va juste y avoir Gaz Métropolitain, Gazifère
ou une de leurs filiales qui vont faire l'installation, l'entretien et la
réparation.
M. Gauthier: Vous dites: Si vous accordez à Gaz
Métropolitain un monopole dans la distribution... Moi, je sympathise
beaucoup avec le problème que vous nous soumettez. Il y a
peut-être des moyens de le régler, mais je me dis: Est-ce
réaliste de penser qu'il peut y avoir plusieurs distributeurs dans le
domaine du gaz? La préoccupation, j'en suis certain, du gouvernement et
de l'Opposition, là-dedans, c'est le consommateur. Il faut s'assurer
qu'il y ait un service de qualité en tout temps. Cela, au départ,
c'est au meilleur compte possible. Cela prend des entreprises qui sont bien
structurées et qui sont capables de donner ce service-là. Je
comprends bien et j'écarte l'aspect de l'inspection, puis de votre
responsabilité là-dedans et je pense qu'il y a des moyens de
régler cela. Moi, je suis venu travailler ici sur l'avant-projet de loi
voulant créer une régie du gaz naturel et je me dis: Serait-ce
réaliste, dans cet avant-projet de loi, est-ce qu'on trouverait le
ministre bien sympathique s'il ne protégeait pas, d'une certaine
façon, des entreprises susceptibles de donner un véritable bon
service à l'ensemble des consommateurs du Québec? C'est dans ce
cadre-là que je vous pose la question. Pensez-vous que le gouvernement a
beaucoup d'autres choix que celui de consacrer en quelque sorte cette
espèce de monopole?
M. Bureau: M. le député, je crois que nous aussi on
comprend cette situation et on l'admet. Ce que l'on déplore c'est le
fait qu'il y ait quelques compagnies qui ont l'exclusivité - on comprend
la raison pour laquelle elles sont peu nombreuses - et par toute sorte de
moyens ces compagnies tentent d'élargir leur exclusivité, soit
aller dans l'installation des résidences ou des commerces. Cela n'a pas
besoin d'être pour protéger le public puis, au plan
économique, cela n'a pas besoin de devenir un monopole. C'est la
question, c'est le problème. (9 h 45)
On prenait l'exemple d'une épicerie tout à l'heure. On ne
peut pas empêcher un tel de vendre des tomates. Mais si vous donnez le
monopole de l'épicerie à Steinberg au Québec et que c'est
la seule à vendre des tomates, et que par hasard il y a un concurrent
qui s'approche et que c'est Steinberg qui va inspecter les tomates du
concurrent, cela n'est plus "fair", ce n'est plus logique.
M. Gauthier: Est-ce que... On le comprend bien et on revient au
problème qu'on discutait tout à l'heure. De façon
concrète, je comprends un peu la position du ministre et d'un peu tout
le monde dans cela. C'est difficile d'écarter quelqu'un d'un champ
d'activités. Maintenant, cela serait intéressant de pouvoir
protéger d'autres personnes aussi, qui sont vos membres. De façon
pratique, est-ce que vous avez pensé à des solutions quant au
partage ou quant à l'obligation que pourrait avoir un distributeur de
gaz, par exemple, de ne pas accaparer une partie du marché? Est-ce que
vous avez pensé à des moyens concrets? Je veux bien vous aider
comme porte-parole de l'Opposition et j'ai l'impression que le ministre veut
bien vous aider aussi, comme ministre. Tous les membres de cette
assemblée comprennent vos préoccupations et on comprend que cela
ne doit pas être facile de vivre dans le contexte que vous nous
expliquez. Concrètement, avez-vous songé à des choses
qu'il faudrait mettre en place, excluant ta solution qui est de bannir
complètement les distributeurs de gaz de cette possibilité de
faire des installations, de les inspecter, de les vérifier? Il reste
qu'il y a une responsabilité qui est là. J'avoue que si
j'étais le "boss" de Gaz Métropolitain et que, quand il arrive un
problème, c'est moi qui paie, j'aurais intérêt à
surveiller mes installations même si elles sont faîtes par des
professionnels. Je ne doute pas de la compétence de vos membres. Disons
que
j'aurais comme idée de vérifier quand même. Alors,
ce n'est pas sur cela. Il ne faut dénier cette responsabilité et
ce devoir qu'a Gaz Métropolitain ou l'autre distributeur. Est-ce qu'il
n'y a pas entre les deux des modifications? En général, les
groupes se présentent ici et disent: Écoutez, vous devriez
modifier votre avant-projet de loi ou, M. le ministre, quand vous allez
écrire votre projet de loi, inscrivez donc telle chose à tel
endroit, cela réglerait tel problème. Est-ce que vous y avez
pensé de façon aussi pratique que cela?
M. White: M. le député, d'abord, je voudrais vous
dire qu'il n'y a pas - je pense que le texte du mémoire vous dit
clairement ce qu'on veut - de moyen terme. Comment voulez-vous avoir un moyen
terme? On va leur donner 10 % et on va en garder 90 %? Comment fera-t-on un
article de loi qui va dire: Gaz Métro, le distributeur exclusif, a droit
a 10 % de l'installation et les autres ont droit à 90 %? C'est
très difficile. Je ne vois pas comment on peut quantifier de cette
façon. Où va-t-on arrêter? Est-ce que cela ne devrait pas
être plutôt 50 % - 50 % ou 49 %-51 %? On se retrouve exactement
dans le même problème. On est bien conscient que le ministre peut
avoir un problème avec cela. On en est très conscient. On est
conscient également que vous pouvez aussi avoir un problème avec
cela. On est dans une société de libre concurrence et dans une
société qui fait en sorte qu'au plan économique c'est
sûr que ce serait préférable que tout soit
intégré d'une certaine façon. Alors, vous donner un... Par
exemple, vous dire qu'on devrait ajouter l'article 16.1 à l'avant-projet
de loi qui se lirait comme suit, non, on ne peut pas vous en donner comme tel.
On pense encore que la meilleure façon de régler le
problème, c'est vraiment de limiter les activités d'un
distributeur à des activités de distribution. C'est-à-dire
qu'ils achètent le gaz naturel et qu'ils voient à assurer une
distribution.
Je voudrais également vous indiquer, M. le député,
pour les responsabilités... M. le ministre en a fait mention tout
à l'heure et vous avez rappelé cela dans vos propos. En ce qui
concerne les responsabilités, qui fait l'installation? Normalement,
c'est l'entrepreneur plombier. Si l'installation est mal faite, ce n'est pas la
faute de Gaz Métropolitain, de Gazifère ou de qui que ce soit
d'autre. La responsabilité n'est pas que la responsabilité de Gaz
Métropolitain. L'entrepreneur plombier a aussi sa responsabilité
civile, sa responsabilité professionnelle. Si l'installation est mal
faite et qu'on est capable de démontrer que c'est à cause d'une
mauvaise installation, l'entrepreneur plombier va d'abord et avant tout
être le premier responsable. Ce ne sera pas Gaz Métropolitain.
Je pense qu'il faut quand même replacer cela dans son contexte. Si
moi, consommateur, j'appelle un plombier pour dire; Écoute, je veux que
tu me fasses une installation de gaz, le contrat que je passe en tant que
consommateur, c'est avec mon plombier entrepreneur en gaz. S'il ne fait pas son
travail correctement, c'est lui qui va être responsable d'abord et avant
tout envers moi. Ce n'est pas Gaz Métropolitain. Peut-être que le
plombier pourrait dire; C'est la faute de Gaz Métropolitain, ils m'ont
fourni un mauvais compteur. Peut-être. Mais la première
responsabilité sur la ligne de feu, c'est l'installateur qui l'a
à ce chapitre. Je pense qu'il faut être conscient de cela aussi.
Je suis bien prêt à dire que Gaz Métropolitain ou une autre
entreprise peuvent avoir une responsabilité, mais c'est d'abord et avant
tout la personne qui fait l'installation incorrecte, si c'est la cause du
problème. Si la cause du problème est le réseau principal
de distribution, ce n'est même pas nous qui l'installons. Bon, qu'il y
ait Gaz Métropolitain, je comprends, mais il me semble que ma
responsabilité va être engagée si je fais une mauvaise
installation.
Pour terminer là-dessus, M. le député, nous n'avons
pas de moyen terme pour le moment à vous offrir. Que Gaz
Métropolitain continue à vendre des cuisinières au gaz,
comment vous dire, c'est un peu difficile de limiter la vente de
cuisinières au gaz. Je pense que vous avez bien saisi où
était d'abord et avant tout le problème. Je pense qu'au moment
où on se parle la seule véritable solution est vraiment
d'interdire aux distributeurs d'aller dans ce champ-là, le champ de
l'installation, de la réparation, de la modification. Je ne vois pas, au
moment où on se parle, d'autre solution. Je suis cependant d'accord
qu'elle n'est pas nécessairement plaisante et qu'on ne vous fait pas
nécessairement plaisir en vous en faisant part.
M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Alors, M. le
député, avez-vous des remarques?
M. Gauthier: Non, non, cela va aller.
Le Président (M. Théorêt): Me permettez-vous
une question, M. le député?
M. Gauthier: Bien sûr, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): Je vois, à
tout le moins, deux grandes contradictions dans vos interventions et j'aimerais
que vous m'éclairiez là-dessus. D'une part, au niveau
sécuritaire, vous dites que c'est dangereux, que le problème en
est un de sécurité. Vous vous retournez de bord et vous vous
plaignez
qu'il y ait deux inspections, une par Gaz Métropolitain et une
par la régie.
Au deuxième point, vous dites qu'on est en train de donner le
monopole à un ou deux Gaz Métropolitain ou Gazifère - de
l'installation, de l'entretien et de la réparation. Vous reconnaissez
cependant qu'il faut que l'installation et les réparations soient faites
par des gens qualifiés, dont vous avez le monopole. Vous reconnaissez
également, M. Favre nous l'a admis tantôt, que la grande
majorité des installations sont faites par vos membres.
J'aimerais bien comprendre. De deux choses, l'une. Ils se dirigent
carrément vers le monopole, donc ce ne sont pas vos membres qui
installent. En ce qui concerne la sécurité, je vois mal comment
vous pouvez reprocher qu'il y ait deux instances qui fassent des inspections,
alors que vous savez fort bien que, pour le consommateur et pour toute
l'industrie, il est plus sécuritaire d'avoir deux inspections faites par
deux instances différentes plutôt qu'une. J'aimerais que vous
m'éclairiez sur ce genre de contradictions qui me semblent très
flagrantes.
M. White: M. le Président, si vous me permettez. Si vous
tenez à ce qu'il y ait deux inspections, nous, cela ne nous fait rien
qu'il y en ait deux mais par le même organisme. Que le même
organisme vienne deux fois, je ne vois pas pourquoi cela devrait être Gaz
Métropolitain qui en fait une et après cela la régie qui
viendrait la faire. La contradiction que vous voyez c'est de dire:
Écoutez, c'est dangereux, donc, en ce qui concerne la
sécurité c'est une bonne chose qu'il y ait deux inspections. La
réponse que je vous donne là-dessus c'est qu'on est d'accord. Si
le gouvernement préfère qu'il y ait deux inspections pour le Gaz
naturel pour assurer une plus grande sécurité, on n'y voit pas
d'inconvénient mais que ce ne soit pas Gaz Métropolitain qui en
fasse une, c'est ce qu'on vous dit. C'est ce qu'on vous a dit dès le
début. On a été très clair, je pense,
là-dessus. M. le Président, est-ce que cela répond
à votre question?
Le Président (M. Théorêt): Honnêtement,
vous me posez la question, je vais dire non tout simplement parce que le
côté sécuritaire, c'est fait par deux instances
différentes et non pas par le même homme deux fois ou trois fois.
Ce qui me semble le plus sécuritaire c'est qu'effectivement les deux
inspections sont faites par deux instances différentes.
M. White: D'accord. Dans ce sens-là, M. le
Président, vous avez raison de dire que si ce n'est pas la même
personne, s'il y a quelque chose qu'on n'a pas vu, quelqu'un d'autre va le
voir; on peut être d'accord avec vous, mais le problème de
l'inspection faite par le distributeur je pense que vous avez bien saisi
où étaient nos craintes et ce qu'on a vécu. Cela fait en
sorte qu'on se retrouve dans une drôle de situation.
Écoutez, si vous préférez qu'il y ait deux
inspections, pourquoi pas? Il n'y a rien qui empêche cela. D'accord. Pour
ce qui est...
M. Bureau: Quant à l'autre question, M. le
Président, la contradiction que vous soulignez, peut-être que vous
aviez l'esprit ailleurs lorsque Me White l'a expliqué, mais le
prétendu monopole que vous dites que les maîtres
mécaniciens en tuyauterie détiennent est détenu par 500
rivaux. Ce n'est quand même pas le même monopole que celui
détenu par une compagnie distributrice de gaz.
Le Président (M. Théorêt): Vous avez
très bien saisi ma question, M. le président, c'était
que...
M. Bureau: C'est un monopole qui devient assez compétitif,
alors il n'y a pas de contradiction.
Le Président (M. Théorêt): ...pour engager
une personne qualifiée, un entrepreneur qualifié, il faut que
cela vienne de chez vous, il n'y en a pas ailleurs. C'est cela?
M. Bureau: Effectivement.
Le Président (M. Théorêt): Alors, c'est
très intéressant. Je vais demander maintenant...
M. Bureau: Comme pour avoir un diagnostic sur la santé, il
faut que j'aille voir un médecin qualifié qui détient un
monopole.
Le Président (M. Théorêt): Voilà! M.
le député de Roberval, pour la conclusion et les remarques
finales.
M. Gauthier: Pour prendre la parole en commission, il faut
demander au président. On n'a pas le choix!
Alors, il me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de vous
remercier de cette excellente collaboration que vous nous avez assurée.
Je pense que vous avez soulevé, il faut bien le dire, des questions qui
laissent songeur, des questions auxquelles on n'a pas de réponse
à ce moment-ci, mais je crois qu'il faudra tenir compte des points de
vue que vous avez exprimés ici et nous aurons l'occasion, je pense,
d'aborder à nouveau ce sujet. Gaz Métro vient cet
après-midi. On va certainement leur poser des questions à ce
sujet. Alors, si vous avez
l'occasion d'être dans la salle, vous pourrez constater la nature
des réponses, mais vous avez soulevé le problème sous un
angle nouveau, celui de votre corporation, et j'ai trouvé cela
extrêmement intéressant. Je vous en remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Roberval. M. le ministre.
M. Ciaccia: Alors, je veux remercier la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie de leur mémoire. Je
voulais faire juste quelques remarques. À la suite d'une question du
député de Roberval en ce qui concerne les installations, Me White
a plaidé en faveur de dire: Écoutez, cela justifie
l'entrepreneur, c'est lui qui est responsable aussi. Je pense que vous venez de
plaider en faveur de l'accréditation par Gaz Métropolitain. Il
est vrai que l'entrepreneur est responsable mais Gaz Métropolitain,
aussi, est responsable. Si moi j'étais Gaz Métropolitain, je
voudrais m'assurer que l'installation soit faite non seulement par quelqu'un de
compétent - parce que si vous êtes membre de l'association vous
êtes compétent - mais très solvable parce que la
responsabilité civile, cela comporte beaucoup d'argent pour payer les
dommages. C'est bien beau de dire que c'est l'entrepreneur qui est responsable
mais, s'il n'a pas les actifs pour répondre à une explosion,
à des dommages considérables, qui pensez-vous va payer? C'est Gaz
Métropolitain qui va payer. Alors, vous venez de faire une justification
pour l'accréditation par Gaz Métropolitain des entrepreneurs.
Le député de Roberval vous avait posé une
très bonne question. Il dit: Écoutez, que pouvez-vous faire?
Plutôt que de mettre quelque chose dans la loi, quelle est la solution de
rechange? Il me semble, après avoir entendu toute la discussion que la
solution - peut-être que cela va être difficile d'accepter cela et
peut-être que ce ne sera pas populaire que je vous le dise - c'est
d'être plus concurrentiel dans les prix. On est dans un système de
libre marché, de libre entreprise; tant et aussi longtemps qu'on est
dans la libre entreprise, vous ne pouvez pas jouer sur les deux tableaux. Vous
avez le monopole, c'est votre corporation qui doit faire le travail, mais vous
avez 600 membres. Même si Gaz Métropolitain veut donner tout le
travail, peut-être qu'ils ne peuvent pas garder 600 membres
occupés à plein temps. Voulez-vous qu'on crée du travail
pour garder tout le monde occupé à plein temps? Je pense que la
vraie solution, parce que moi si j'étais Gaz Métropolitain...
Vous dites que c'est un monopole. C'est un monopole comme vous autres. Les
courtiers peuvent "by-passer" - si je peux utiliser ce mot-là - peuvent
contourner Gaz Métropolitain. Les dépenses devront être
justifiées à la régie. Dans ce sens-là, vous
êtes deux monopoles. Je ne pense pas que la loi va pouvoir vous garantir
des profits. Je le regrette, ce serait bien plus facile pour moi de vous dires
Oui, je vais prendre en considération votre mémoire, mais je ne
vois pas de solution dans la loi pour votre problème. La solution que je
vois, c'est en dehors du projet de loi parce que je ne peux pas mettre dans la
loi... C'est pour cela que je vous ai demandés Est-ce qu'on peut
interdire à une compagnie de faire des achats ou de s'occuper d'autres
choses? On est dans un système de libre marché et,
malheureusement, je ne vois pas comment un projet de loi pourrait
résoudre votre problème. Je suis convaincu que ce problème
va être... Je sympathise, mais je pense qu'il va falloir que vous vous
assoyiez avec Gaz Métropolitain et que vous soyez plus concurrentiels.
Si cela coûte moins cher de faire faire le travail par vous que par leur
propre équipe, je vais vous garantir que Gaz Métropolitain va
venir chercher vos entrepreneurs. Merci pour votre mémoire.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. Messieurs, les membres de la commission vous remercient. Les travaux
de la commission sont suspendus jusqu'à 11 heures.
M. Bureau: Au nom des membres de la corporation, de mes
collègues ici, je désire remercier tous les membres, le
représentant de l'Opposition, M. le ministre et vous-même, M. le
Président, de votre bienveillante attention. Je peux vous assurer de
l'entière collaboration des membres de la corporation et de
l'exécutif pour tenter de trouver une solution équitable, avec le
ministre, au problème qui est soulevé aujourd'hui.
(Suspension de la séance à 10 h 4)
(Reprise à 11 h 7)
Le Président (M. Théorêt): Alors, la
commission de l'économie et du travail reprend donc ses travaux. Nous
avons déjà des représentants de Western Gas Marketing
Ltd.
Je voudrais vous demander, dans un premier temps, de vous
présenter. On nous a avisé également, on a avisé
les membres de cette commission que la présentation sera faite par M.
Barry Hulfe, strictement en anglais, mais que M. Leclerc, qui l'accompagne,
répondra à toutes les questions en français. Alors, je
vous cède immédiatement la parole, pour fins de
présentation et présentation du mémoire.
Western Gas Marketing Ltd
M. Leclerc (Louis-André): Permettez-moi de me
présenter, Me Louis-André Leclerc, de l'étude Lavery,
O'Brien. Comparaît avec moi, M. Barry Hulfe, directeur des ventes pour le
Canada de Western Gas Marketing. Je vais demander à M. Hulfe de faire
l'exposé de la compagnie sur la législation envisagée. Mr.
Hulfe.
M. Hulfe (Barry): I would like to thank the committee for a
chance to listen to our implement in such an important matter that you have
before you. I would just like to, once more, explain Western Gas Marketing Ltd.
We are an wholly home subsidiary of TransCanada Pipelines. We are formed in
respond to the irregulation scenario where the marketing arm should be separate
from the transmission company and we handle all the gas supply, all the gas
sales for TransCanada Pipelines in the United States and Canada.
We are associated with 750 producers, some 3000 contracts and we have
under contract, right now, about 25 TCF of gas in Alberta, wich is probably
good for 25 years of deliverability. There is one area that has been brought
up, which is called "Competitive Marketing Programm" or CMP's as they are
known. And their role is out of the October 31, 1985 Agreement, section 8,
which said: "Effective November 1st, 1985 competitive marketing programms,
CMP's, to meet special requirements, may be negociated with distributors, or
between distributors, shippers and producers reproviding the natural gas volume
associated with such programs.
Western gas marketing using the clause 8 embark upon the CMP's which in
effect is a discount given by our producers to us, to the distributors who
passes on this discount to end users. They are an alternative to direct sales
and an alternative to buy-sell. And we believe that the CMP programs should be
carried on. We have heard discussions that they should terminated but they
should be carried on they are the alternative to an end user to be able to buy
gas at a compared price. And nowhere in the agreement that they ever say that
CMP should certainly come to an end as some people are advocating.
They are supported in Ontario by the distributers as an alternative to
an end user to purchase gaz at a competitive price. And I just want to clarify
and let you know what the Competitive Marketing Programs are.
Le Président
(M. Théorêt): Thank
you
Mr. President. M. Leclerc est-ce que vous ajoutez ou si on passe
directement à la discussion?
M. Leclerc (Louis-André): On passe directement aux
échanges de propos, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): D'accord, alors,
je vais céder immédiatement la parole au minsitre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Vous avez fait
état des CMP qui ont été initiés à la suite
de l'entente de 1985. II y a eu deux intervenants à la présente
commission qui ont fait état de ces programmes et ils prétendent,
eux, que c'est de la concurrence déloyale qu'ils subissaient en vertu
des programmes dits CMP.
Je voudrais avoir vos commentaires sur cette affirmation ou cette
situation et sur cette concurrence supposément déloyale.
We have had representations from two groups who appeared before this
committee to the effect that it was an unfair competition if I could translate
"compétition déloyale". We would just like to have your comments
and what would your position be and what could we answer in response that type
of opposition.
M. Hulfe: Well, one aspect of the CMP's since it is system gas,
the gas is already there contracted. They are easier to put in place than a
direct sale and I believe administratively they are easier also. But it must be
kept in mind the discount comes from the producer and not the distributor. The
distributors has to pass on the discount and no money remains in his hands by
the way. Of a dollar value we agreed with the producers a discount to the
distributor to meet the competition and I think that all what we are trying to
do with CMP's is to meet the competition.
We have lost in the last year nearly 20 % of our sales which in one year
is quite a dramatic drop and the CMP's if they were eliminated, undoubtedly,
assistant producers would suffer and they be taken away one area competition
that the consumer needs in order to make a judgement as to whether he wants to
go by direct sale or CMP or a buy-sell route. We do not feel they are unfair
because we are competing against the direct purchaser or the direct seller.
M. Ciaccia: Quand vous parlez de concurrence, vous parlez de
concurrence dans l'industrie, vous ne parlez pas de compétitivité
avec d'autres formes d'énergie. When you are talking of competition you
are talking within the industry you are not talking of competition with other
forms of energy.
M. Hulfe: Well, CMP's are means to retain or get back market that
has gone through alternative energy. There is no doubt about it.
M. Ciaccia: Et, si je vous comprends bien ce n'est pas Western
Gas qui donne ces escomptes. Vous passez l'escompte que le producteur donne et
vous leur... Ce n'est pas Western Gas qui donne l'escompte. (11 h 15)
M. Leclerc (Louis-André): C'est exact, M. le ministre,
Western Gas agit en tant qu'agent des producteurs mais ce sont les producteurs
eux-mêmes qui consentent les escomptes. Nous ne croyons pas que les gens
qui suggèrent qu'il y a de la compétition déloyale aient
de quelque façon justifié cette suggestion. Ils se plaignent
essentiellement du fait que nous sommes en mesure d'offrir des prix qui sont
meilleurs que les leurs. Quant à nous, c'est justement la
déréglementation et le jeu de la concurrence.
M. Ciaccia: En vertu de la dernière décision
tarifaire de l'Office national de l'énergie, l'ordonnance RH-386,
l'office permet à Western Gas Marketing de faire des ventes directes sur
le marché des distributeurs canadiens. J'aimerais savoir si vous
entendez abandonner éventuellement votre programme de CMP et le
remplacer par des ventes directes?
M. Leclerc (Louis-André): II n'est pas dans notre
intention d'abandonner les CMP, parce que les CMP sont des mécanismes
qui permettent aux producteurs qui fournissent le gaz actuellement aux
distributeurs de concurrencer dans le cadre de leurs engagements contractuels.
Il n'y a aucune suggestion dans l'entente du 31 octobre indiquant que ces
arrangements contractuels doivent être terminés de quelque
façon que ce soit. C'est une nouvelle porte qui est ouverte. Il est fort
possible qu'on se serve des ventes directes, mais nous n'avons pas l'intention
d'abandonner les CMP.
M. Ciaccia: Alors même avec les ventes directes, vous
pourriez avoir les deux. Faire la vente directe et...
M. Leclerc (Louis-André): C'est exact.
M. Ciaccia: Vous allez avoir encore plus d'opposition, plus
d'objections.
M. Leclerc (Louis-André): Pas nécessairement, parce
que nous croyons qu'avec la mise en place de vente directe les producteurs, qui
sont sous contrat avec Western Gas Marketing, sont sur un pied
d'égalité avec ceux des ventes directes. La seule
différence est que les producteurs sous contrat avec Western Gas
Marketing ont des contrats en place et nous ne voyons pas pourquoi ces contrats
en place doivent être mis de côté. Cela n'a pas
été envisagé de quelque façon que ce soit dans
l'entente. Au contraire, je crois que si on regarde les articles 13, 14 et 15
de l'entente du 31 octobre, on peut voir que les parties avaient nettement
l'intention de continuer les arrangements, en prévoyant que si elles
étaient incapables d'en arriver à une entente quant au prix, il y
aurait un mécanisme d'arbitrage mis en place.
Quant à moi, c'est une indication claire qu'on n'avait pas
l'intention de mettre de côté les arrangements existants.
Évidemment, au fur et à mesure que le temps passe, on en a la
preuve aujourd'hui, les ventes directes pourront accaparer une plus grande
portion du marché si on ne réussit pas à concurrencer
suivant les termes du marché.
M. Ciaccia: Aux pages 11 et 12 de votre mémoire, vous
suggérez que le gouvernement, s'il le juge à propos, intervienne
auprès de la régie afin que celle-ci prenne les mesures
nécessaires pour assurer une protection du marché captif.
Seriez-vous plutôt favorable à ce que la régie ait un
rôle qui soit précisé dans la loi en ce qui a trait
à la protection des besoins québécois, compte tenu
notamment de la récente décision de l'ONE relative au calcul
d'excédent disponible à l'exportation?
M. Leclerc (Louis-André): Nous n'avons pas de
préférence pour l'un ou pour l'autre. Il nous a semblé
préférable de laisser à la régie de
déterminer quels seraient les meilleurs moyens de protéger ce
marché, de lui accorder une plus grande flexibilité pour
réagir aux situations du marché telles qu'elles se
développent. Si on l'enchâsse dans la loi, à ce
moment-là, pour réagir à une situation du marché,
il y aurait lieu de la modifier à nouveau. C'est dans ce sens qu'on a
fait ces suggestions, mais on n'aurait absolument aucune objection si vous
décidez qu'il est d'intérêt public de le faire, que le
mécanisme soit précisé dans la loi.
M. Ciaccia: Comme vous le mentionnez, une fois que c'est
figé dans la loi, si les conditions changent, c'est plus difficile
à modifier,
M. Leclerc (Louis-André): C'est beaucoup plus difficile de
l'amender, alors que si on laisse ce rôle à la régie, c'est
beaucoup plus flexible. C'est dans ce sens-là qu'on avait fait la
suggestion que la régie devrait avoir le rôle de s'assurer que le
marché captif est protégé. S'il est jugé
d'intérêt public, ce marché doit être
protégé.
M. Ciaccia: La régie pourrait avoir ce mandat sans
préciser les détails dans la loi.
M. Leclerc (Louis-André): Effectivement, l'article 63
permet au gouvernement de préciser les directives ou les grandes
orientations qu'il désire voir et, à ce
moment-là, de laisser à la régie la mise en place
des mécanismes appropriés, compte tenu de son expertise dans le
domaine.
M. Ciaccia: Justement, vous avez fait le point que j'allais
faire. C'est que vous venez de donner un autre argument, une autre raison pour
le principe de l'article 63, parce que, si on l'exige dans la loi, il faut
changer la loi, tandis que c'est quelque chose qui peut varier au cours d'un
mandat d'une régie et ce pourrait être un des
éléments dans l'orientation générale que le
gouvernement pourrait donner à la régie. Je vous remercie.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Oui, merci. Dans la version française, page
8, deuxième paragraphe, le ministre a questionné sur cela tout
à l'heure. Quand on parle de programmes de mise en marché, de
programmes favorisant une pénétration accrue du marché,
l'interprétation qu'on a donnée et qu'ont donnée d'autres
intervenants à ces programmes était dans le sens suivant: S'il
arrivait une entente entre votre firme et Gaz Métropolitain, par
exemple, pour privilégier des clientèles cibles, disons des
producteurs industriels qui ont un fort volume d'utilisation, le financement de
ces programmes serait assuré, sans que le consommateur ne le sache, par
une répartition, par une augmentation du coût sur l'ensemble des
volumes. C'était le sens, en tout cas, que j'ai compris de ce type de
programme et le rôle de la régie à ce moment-là
était en quelque sorte un rôle de protection des autres clients
non capables de s'organiser comme les gros clients industriels sont capables de
le faire. Dans le sens accordé à ce type de programme, est-ce que
vous êtes d'accord avec le fait que la régie puisse avoir une
sorte de droit de regard sur les activités, en tout cas, sur les "deals"
qui se passent entre le producteur et le distributeur? Est-ce que vous ne
croyez pas que ce soit sage pour le gouvernement de s'assurer que la
régie puisse avoir un oeil sur cela, afin d'éviter que les
critères soient déterminés par une entreprise plutôt
que normalement par le gouvernement?
M. Leclerc (Louis-André): Si je comprends bien votre
question, M. le député, vous émettez l'hypothèse,
d'abord, pour protéger le marché captif. J'en déduis que
pour tout ce qui n'a pas trait au marché captif, ce sont les
règles du marché qui s'appliquent, c'est-à-dire que le
producteur, que ce sait par notre entremise, un CMP, ou par l'entremise d'une
vente directe, peut négocier les termes et les conditions qu'il
désire. Je perçois que votre question a trait à la
protection du marché captif et nous suggérons que, dans le
contexte de la déréglementation, ce marché captif est
protégé de la façon suivante: Le distributeur n'est pas
nécessairement forcé de s'approvisionner auprès des
mêmes personnes, lorsque son contrat vient à terme et il cherche
à s'approvisionner pour le bénéfice des gens qui sont
captifs effectivement. Il a une multitude de choix pour s'approvisionner et
l'existence de cette multitude de choix fait en sorte qu'il obtiendra à
ce moment-là le meilleur prix possible pour ses clients captifs.
M. Gauthier: Là où le bât blesse... De
façon 'logique, votre explication va. Là où je suis
inquiet, au nom des consommateurs, c'est dans la situation suivante: Si
j'achète du gaz pour mon chauffage, mes besoins domestiques, donc, une
très petite consommation, de Gaz Métropolitain et que Gaz
Métropolitain, pour des raisons de développement d'affaires,
décide d'agresser davantage les marchés des papetières,
supposons et que Gaz Métropolitain, à la suite de ses
réflexions, prend la décision d'augmenter en quelque sorte le
tarif pour à peu près tout le monde en s'entendant avec celui qui
lui fournit. Je comprends que Gaz Métropolitain peut magasiner. Cela on
a tous compris cela, mais, Gaz Métropolitain peut dire: Écoute
bien là, moi je veux acquérir une part de marché plus
grande auprès des papetières, donc, je veux leur offrir un rabais
substantiel, alors tu vas me vendre une portion de gaz, une quantité de
gaz à rabats puis ton profit, tu vas le trouver en augmentant la facture
aux résidences.
Le libre marché, vous savez, il ne joue pas si facilement que
cela dans le domaine du gaz, on se comprend bien là; ce n'est pas tout
à fait comme dans les épiceries. Je peux vous dire une chose, il
nous préoccupe énormément que chacun y trouve sa
protection et principalement le petit consommateur et nous voudrions
éviter... Je pense que le droit de regard qui est donné à
la régie c'est pour éviter que ne se fasse à un haut
niveau des ententes en quelque sorte sur le dos des consommateurs parce que ce
n'est pas demain la veille du jour où, comme consommateur, je vais me
tourner de bord et je vais dire: Gaz Métropolitain, tu vends cela trop
cher, je vais aller voir si je ne pourrais pas négocier quelque part
pour l'avoir moins cher. Il ne faut pas se conter de peur, ce n'est pas de
cette façon que cela va marcher et c'était dans ce sens-là
que la protection était assurée. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
M. Leclerc (Louis-André): Ce que j'ai à dire
là-dessus, M. le député, c'est essentiellement la chose
suivante. Je fais d'abord une grande distinction entre ce que
Gaz Métropolitain peut faire concernant ses tarifs. Il y a les
tarifs de distribution et de livraison qui sont assujettis et continueront
d'être assujettis à la surveillance de la régie et les
tarifs approuvés par la régie ne pourront être
modifiés. Gaz Métropolitain, d'après ma
compréhension de ce qui se passe â l'heure actuelle, n'a pas le
pouvoir de modifier le prix de la denrée. Elle soumet ses contrats
d'approvisionnement à la régie qui les approuve et ce
prix-là est transmis directement aux utilisateurs. Il n'y a pas de
possibilité pour Gaz Métropolitain de faire des changements
à ce niveau-là. Ce sont les producteurs eux-mêmes qui, dans
le cadre d'un CMP, vis-à-vis certains groupes de clients se disent: Bon,
nous sommes prêts à faire une concession pour ces gens-là
mais c'est le producteur qui la fait, ce n'est pas Gaz
Métropolitain.
Deuxièmement, iî y a lieu de distinguer aussi les besoins
du petit consommateur par rapport au consommateur industriel. Il va de soi que
dans les conditions du marché, plus les volumes sont grands, plus le
producteur est en mesure d'offrir de meilleures conditions. Le fait que les
volumes soient peut-être interruptibles, alors qu'ils ne le sont pas pour
les petits consommateurs, nécessairement attire une prime. La
sécurité d'approvisionnement à long terme par rapport
à l'industriel qui ne peut être intéressé de ne
faire une vente que pour six mois, un an, deux ans, trois ans, le petit
consommateur lui, ce n'est pas cela son intérêt premier, c'est de
s'assurer son approvisionnement à long terme.
Évidemment, ces aspects ont un impact sur le prix. Je vous
réponds encore une fois que sa protection, en considérant ces
éléments-là, vient du fait que lorsque le distributeur va
chercher son approvisionnement, il doit tenir compte de ces facteurs-là
et obtient le meilleur prix. La suggestion qu'on puisse jouer sur le dos du
consommateur au profit de l'industriel ne se fait pas au niveau du
distributeur; elle se fait au niveau du producteur qui lui, doit le faire
souvent dans ses principes économiques de base. Évidemment, si un
industriel exige ou requiert des volumes substantiels, c'est évident
qu'il peut accorder une réduction qu'il ne pourrait pas se permettre
vis-à-vis le petit consommateur.
Le même principe s'applique à tout le monde. Ce ne sont pas
seulement les producteurs de Western Gas. Les gens qui font des ventes directes
vont exactement dans la même situation. Si c'était eux qui
offraient le gaz aux consommateurs, ils seraient exactement dans la même
situation. (11 h 30)
M. Gauthier: II y a une affirmation dans votre texte, au bas de
la page 8 - dans le texte français toujours - qui m'a un peu surpris.
J'aimerais vous entendre là-dessus parce que je pensais exactement le
contraire. Je suis peut-être dans l'erreur. Je suis possiblement dans
l'erreur mais je veux que vous me l'expliquiez.
On dit cecis "L'un des fondements de la concurrence orientée sur
le marché réside dans le fait que les termes et conditions qu'une
partie à un contrat est disposée à consentir à un
consommateur doivent être gardés strictement confidentiels et ne
doivent pas être divulgués aux compétiteurs de cette partie
dans le secteur énergétique." J'aurais cru, bien naïvement
peut-être, mais j'aurais cru que c'était le contraire.
C'est-à-dire qu'un des fondements de la libre concurrence,
c'était la très large information des consommateurs, des
conditions générales du marché et de ce qui se passe entre
les uns et les autres, ce qui permet de faire un meilleur choix; j'aurais cru
cela. Mais, ça, c'est le contraire de ce que vous avez écrit.
J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi je devrais vous écouter.
M. Leclerc (Louis-André): Ce qu'on veut dire par
là, M. le député, c'est qu'essentiellement dans un cadre
de marché libre, si une partie est prête à concéder
à un client certains avantages qui peuvent être à d'autres
niveaux que le prix - cela peut être une subvention pour un certain
équipement, cela peut être des avantages de prise en charge
à la gestion du contrat pour le client, etc. - si toutes ces
conditions-là sont rendues publiques par le biais de tarifs, etc.
l'adversaire ou le compétiteur qui veut percer le marché a toute
l'information à sa disposition, alors que celui qui est dans cette
situation-là, entre autres, les fournisseurs de Gaz Métro,
à l'heure actuelle, n'ont pas l'information équivalente pour les
ventes directes. C'est dans ce sens-là qu'on vous dit ça. C'est
de mettre les gens sur un pied d'égalité.
Les termes du projet de loi feraient en sorte, surtout l'article 6, que
les conditions que les producteurs liés aux distributeurs sont
prêts à offrir seraient rendues publiques, alors que ces
producteurs-là n'auraient pas accès aux informations
équivalentes pour le compétiteur. Il n'y a rien, aucune
disposition législative, ici, à ma connaissance, qui permette aux
producteurs liés aux distributeurs, d'obtenir ces informations. On
ferait une concurrence déloyale dans ce sens-là, du simple fait
que devant un producteur relié au distributeur, toutes les informations
de mise en marché qu'il est prêt à concéder au
client seraient rendues publiques. À ce moment-là, il serait
très facile pour le compétiteur de dire: Bon, telle chose, telle
chose, telle chose, moi, je suis disposé à t'offrir plus, alors
que de l'autre côté, on n'a pas cette information et elle ne nous
est pas accessible. C'est dans ce sens-là que, par le biais d'un
organisme réglementé, certaines
informations sont obligatoirement rendues publiques, alors qu'elles ne
le sont pas pour le compétiteur. C'est le fondement de
l'énoncé, si vous voulez.
M. Gauthier: Écoutez, il y a un autre aspect qui touche
à ce qu'on vient de discuter. Comment la régie pourrait-elle
porter un jugement - parce qu'on a parlé de l'importance pour la
régie de porter un jugement sur la qualité des achats faits par
Gaz Métro, par exemple, pour garder toujours cet important distributeur
- sur la qualité des achats en termes de prix, afin que le consommateur
en bénéficie de façon générale, si elle n'a
pas accès, même de façon confidentielle - parce que la
régie peut prendre des informations sur une base confidentielle - si
elle n'a pas accès à l'ensemble des contrats qui se
négocient?
En d'autres termes, comment moi, comme consommateur, puis-je savoir si
Gaz Métro n'est pas en train de m'en passer toute une, parce qu'elle
achète d'une de ses filiales à un prix exorbitant et qu'elle
justifie un prix énorme pour le produit qu'elle me vend, si la
régie n'est pas en mesure de dire à Gaz Métro:
Écoute, tout le monde dans le secteur est capable de négocier des
prix bien plus avantageux que celui que tu viens de négocier. C'est
toujours la question, vous comprenez, qui sous-tend mon... La question que je
vous pose, c'est toujours le problème de la protection de ceux qui n'ont
pas les moyens dans ce marché de se défendre. Puisqu'on confie,
en quelque sorte, des privilèges énormes à des
distributeurs, on veut bien s'assurer que le monde ne se fait pas organiser
pour autant.
Alors, comment voulez-vous que la régie porte un jugement, si
tout est confidentiel et s'ils ne peuvent pas avoir accès à ces
informations-là?
M. Leclerc (Louis-André): Au niveau d'une filiale,
évidemment, je partage votre crainte dans le sens suivant, qu'il doit y
avoir un mécanisme pour vérifier si les règles du jeu ont
bien été appliquées. Mais en ce qui concerne le
marché, en général, le fait qu'il y ait plusieurs vendeurs
qui veulent vendre et qui peuvent vendre à un certain prix qui ne peut
pas aller en-deça de leur coût marginal, devrait être une
protection suffisante. D'ailleurs, c'est le mécanisme du marché
dans toutes les autres denrées et la concurrence est la meilleure
façon, quant à nous, de protéger les clients, incluant les
petits. Dans le cas d'une filiale, je fais une distinction,
évidemment.
M. Gauthier: Merci.
M. Leclerc (Louis-André): J'aimerais ajouter à ce
stade-ci que, si jamais on envisageait le rôle de surveillance de la
régie à ce niveau, on aimerait réitérer notre
formulation à savoir que ces délibérations doivent
être gardées confidentielles pour les raisons que je vous ai
exposées tout à l'heure. Si l'un des groupes de
compétiteurs a accès à l'information et que les autres
n'ont pas l'information équivalente de leurs compétiteurs, on ne
peut pas avoir un marché de concurrence.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Oui, au sujet de la confidentialité dont vous
parlez, à la page 10 de votre mémoire, vous dites: "Nous
suggérons donc que la régie soit forcée de garder cette
information strictement confidentielle par le biais de l'introduction d'une
disposition additionnelle à cet effet dans le texte de l'avant-projet de
loi." Auriez-vous une suggestion à nous faire à cet effet?
Comment pourrions-nous obliger... Que devrait contenir le projet de loi
pour...
M. Leclerc (Louis-André): Nous n'avons pas formulé
de texte précis, mais, essentiellement, on pourrait ajouter à
l'article 2 que toute information ainsi obtenue par la régie doit
être tenue confidentielle.
M. Ciaccia: Est-ce que présentement, en pratique, dans les
faits ou les règlements de la régie, cette information n'est pas
tenue confidentielle?
M. Leclerc (Louis-André): À notre connaissance, la
régie a une politique de garder certaines informations confidentielles
dans le cadre d'une audience, après un débat entre les parties
à savoir pourquoi l'information doit être gardée
confidentielle. Mais elle a la latitude de décider si oui ou non elle
doit le faire et pour combien de temps elle le fait, sans tenir compte de
l'intérêt des parties, pourquoi une partie aurait la
nécessité de garder cette information confidentielle. En d'autres
mots, on permet à la régie, sans disposition, de divulguer des
informations dans un domaine qui, normalement, ne serait pas de sa juridiction,
car rappelons-nous que la régie est là pour réglementer le
distributeur, elle n'est pas là pour réglementer le marché
du gaz au Canada. Si elle obtient ces informations confidentielles et les rend
publiques, le dommage est causé et il n'y a plus aucun recours
possible.
M. Ciaccia: II y a eu une récente décision de
l'ONE. La pratique était d'avoir des tests de surplus et il y avait un
rôle de l'ONE qui exigeait des tests de surplus. Maintenant, ce n'est
plus le cas. Il y avait les tests de surplus, il y avait aussi la
surveillance des prix à l'exportation. À votre avis,
est-ce que cette décision pourrait avoir un effet à la hausse sur
les prix du gaz au Québec?
M. Leclerc (Louis-André): Est-ce que vous me permettez de
consulter M. Hulfe?
M. le ministre, nous ne voyons aucune raison pourquoi
l'élimination des tests de surplus aurait pour impact d'exercer une
pression à la hausse sur les prix du gaz. En y
réfléchissant, nous n'en voyons pas à l'heure
actuelle.
M. Ciaccia: Vous me permettrez de porter à votre attention
la justification que le ministre de l'Énergie de l'Alberta m'avait
donnée pour éliminer les tests de surplus. À son avis, les
tests de surplus obligeaient le producteur à financer le distributeur au
Québec. Alors, je présume que, si le producteur doit financer le
distributeur au Québec et si, maintenant, il peut vendre sur le
marché américain sans cette obligation, le rôle de l'ONE de
donner le permis sujet à la surveillance de ses prix, la surveillance va
être faite par le gouvernement de l'Alberta. N'y a-t-il pas un risque
pour nous, qui sommes au bout du tuyau, qui avons un marché captif, que
les producteurs, qui savent qu'on est obligé d'acheter cette
énergie, puissent exiger un certain prix? Ils vont pouvoir obtenir sur
le marché d'exportation toutes les ventes additionnelles, les prix
additionnels. Dans ce sens, il y a un marché captif ici et il y a une
ouverture du marché à l'exportation. Ce n'est pas vraiment... Si
on conjugue cela avec les permis d'exportation qu'a maintenant l'Alberta,
ça c'est un autre problème qu'il n'accorde pas pour maintenir le
prix. N'y aurait-il pas cette pression de hausser les prix au Québec? On
est au bout de la ligne et les prix vont être plus compétitifs sur
le marché à l'exportation.
M. Leclerc (Louis-André): La réaction serait la
suivante, M. le ministre, que la seule chose qui ferait exercer une pression
à la hausse sur la denrée, c'est si elle devenait très
rare. L'élimination des tests de surplus, si je ne fais erreur, a
été faite par l'Office national de l'énergie dans un cadre
où il y a abondance de la denrée. Dans un cadre pareil, je ne
verrais pas comment il pourrait y avoir une pression à la hausse sur le
prix. Évidemment, si la situation changeait, il y aurait effectivement
des pressions à la hausse sur le prix. Mais si on regarde l'histoire
dans ce domaine, les gouvernements, tant provinciaux que fédéral,
ont toujours accordé une préférence pour
l'approvisionnement canadien d'abord et si la situation en devenait une de
rareté, à ce moment-là, je suis convaincu qu'on
retrouverait des politiques similaires. Mais tant et aussi longtemps que la
denrée n'est pas rare, je ne vois pas quel pourrait être l'impact
sur les prix, à court terme.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval, vos remarques finales.
M. Gauthier: Je voudrais vous remercier de nous avoir
présenté ce mémoire, d'avoir répondu patiemment
à nos questions et vous assurer que notre collaboration la plus grande
sera accordée au ministre dans la rédaction de ce projet de loi,
et que nous tiendrons compte des informations que vous avez bien voulu
transmettre à cette commission. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je veux remercier les représentants de Western
Gas Marketing pour leur mémoire et je voudrais les assurer que nous
allons certainement tenir compte et prendre en considération les
recommandations et suggestions qu'ils ont faites.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Bon
voyage. J'invite maintenant le représentant de Northridge Petroleum Inc.
à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. (11 h 45)
M. Tourigny, les membres de la commission vous redisent bonjour.
Étant donné que vous connaissez les règles du jeu, je vous
demanderais de nous présenter ceux qui vous accompagnent et de
procéder immédiatement à la présentation.
M. Tourigny (Pierre): Oui, M. le Président. Je suis
toujours la même personne qu'hier, incidemment. À ma gauche ici,
à votre extrême droite, M. Mark Himmelspach, conseiller juridique
de Northridge Petroleum Inc. Immédiatement à ma gauche, M. Wayne
Minion, président du conseil de Northridge Petroleum Marketing Ltd.
Point d'intérêt, M. Minion a été la personne qui a
établi en 1974 et qui a présidé jusqu'en 1984 l'Alberta
Petroleum Marketing Board. En fait, un peu à l'inverse d'ici, c'est
plutôt la régie d'une part du coût de service du gaz dans la
principale province productrice, c'est-à-dire l'Alberta. Avant cela, M.
Minion avait "manage", si vous me permettez l'expression, un distributeur de
gaz pendant sept ou huit ans pour le compte d'Hydro, en Colombie britannique et
non pas ici. À ma droite, M. Luc Boulanger, directeur du marketing, pour
la province de Québec, de la même compagnie.
Un peu comme hier, M. Minion ne parle, malheureusement, que l'anglais et
la
présentation - je vais demander la patience des membres de la
commission - va être faite dans la langue de Shakespeare.
Le Président (M. Théorêt): Mr. Minion, as you
know, some of the questions will be directed to your colleagues in French by
the members of the committee. So, we are listening to you.
Northridge Petroleum Marketing Inc.
M. Minion (Wayne): Sir, I would like just to spend a few moments
explaining my thoughts on the gas business, because some people say that there
are different than what other people are. But the gas business in Canada
developed from the middle 1950's on the basis of long-term contracts and there
were long-term contracts between the producers, between the transportation
companies, that is the transmission companies and the distribution companies.
But it should be clear that there were never any long-term contracts between
the distribution companies and the customers or the consumers. And the reason
that this long-term contracts existed was the requirements of the investors or
the banks, that is the money could not be lent to build the facilities unless
there were long-term contracts and long-term supplies of gas in Alberta.
That situation is different today. The pipelines have been in existence
for a long period of time and the supplies of gas in Alberta are far more than
adequate to meet the market requirements. They can be removed from Alberta by
pipeline at this point in time. In fact, we had a parallel situation in the
United States where the pipeline industry grew up in the same manner and had
been under price regulations for a very long period of time. It was the price
regulation in the United States that brought on a shortage of gas in the United
5tates in 1977-1978 and at that point in time what happened was the United
States opened the market up and allowed newly found gas to be bought and sold
in the open marketplace and that then developed a surplus of gas in the United
States to the point where starting 3 years ago they developed an open market
for gas completely in the United States.
It followed then, because Canada was serving the US market, that the
Canadian market had to open up as well and we are now in a position where the
regulated prices, the prices which had been agreed to between the producing
provinces and the federal governments, as well an access to the marketplace, so
that with the agreement signed between the producing provinces and the federal
government on October 31, 1985, we had the recognition that it was the market,
the competitive market, which should determine the price of gas and not the
governments. Now, I appreciate the fact that that agreement in October 1985 was
not signed by Québec nor of by any of the consuming provinces, and there
are certain things which should be cleared about that agreement.
Firstly, it did not contemplate segmenting the market. It does not say
that this customer can buy his gas freely in the marketplace, but this customer
cannot. That agreement, in fact, says that all customers can go and buy their
gas in the marketplace; all customers are equal in that regard. It did not
contemplate the regulation of the pipeline part of the industry, that is all of
the regulatory controls related to the transportation systems, whether or not
they are of transmission or distribution, would stay in place. All it
contemplated was the deregulation of the commodity part of the market, that is
the buying and the selling of the natural gas itself. In that respect, the gas,
as a commodity, could be bought and sold on a market basis or what in the
agreement is described as market responsive pricing. And that was market
responsive pricing that was to be the driving force in the system of
competition which they were putting in place for the product that is the
commodity of natural gas.
There are some things about a market responsive system which are
mandatory if it is to work. The first thing is that you have to have many
buyers and many sellers. You cannot have competition betwen two monopolies. The
second thing is that you must have non discriminatory access to the
transportation networks, that is to the transmission system and to the
distribution facilities of the distributor. You must also have non
discriminatory access to the gas, that is the governments that control the
availability of gas have to make it available, that is the regulatory
approvals, the removal permits, etc., have to be freely available to whoever
wants to have access to gas supply.
I think that it is in that new context, that new role of the Canadian
marketplace that we see the new role of the régie. The régie
decides continuing to regulate the tariffs for the transportation of the gas
through the distributors system and regulate them of course on an equitable
basis and in the public interest. But the régie now has a new role, one
which I think is contained in the draft Bill. That new role is to assure the
government that an active competitive market for the sale of natural gas as a
commodity exists and, where it does not exist, that it regulate the price of
that commodity in the public interest. Better in that new role is the
requirement to promote the establishment of a competitive market.
Now, the régie, through the hearings
which Northridge has already attended, has started that process. But the
process, in my opinion, cannot be or is not finished until the passage of a
Bill which we have given you our comments on. I think that the draft Bill is a
good initial step certainly. Our suggestions for changes are not substantive
and Northridge believes that the passage of the Bill is necessary if you are to
have a competitive market for natural gas in the province of Québec.
I think, Mr. Chairman, that those are all of the preliminary comments
that I would care to make. I would be quite happy to answer any questions about
the submission which we have made or about any matter in the gas industry
itself.
Le Président (M. Théorêt): Thank you, M.
President. M. Tourigny, est-ce que vous avez des choses à ajouter
à l'exposé ou si on passe immédiatement aux
échanges?
M. Tourigny: Je crois que je devrais peut-être prendre
quelques minutes pour exposer les différences entre la
présentation de Northridge et une autre qui lui ressemble beaucoup que
vous avez eu l'occasion de voir hier. Je ne fais que les mentionner rapidement,
sans passer de grands commentaires là-dessus. D'une part, nous
mentionnons spécifiquement, ici, que la régie doit avoir le
pouvoir de fixer elle-même les tarifs et non pas seulement de les
approuver. Nous croyons aussi que le pouvoir devrait être donné
spécifiquement à la régie d'avoir un droit de regard sur
l'emmagasinage, bien qu'il soit fait ailleurs, non pas nécessairement
pour fixer les taux, mais pour s'assurer que ce que les Québécois
paient pour cet emmagasinage soit juste et raisonnable, eu égard,
évidemment, aux taux qui existent ailleurs. Ensuite, la compagnie
Northridge croit que le nombre de régisseurs devrait être de
trois, étant donné que le gouvernement a le pouvoir d'adjoindre
à la régie des régisseurs ad hoc, si voulez, des gens qui
peuvent être nommés pour des auditions spécifiques. De
plus, Northridge suggère que, comme les courtiers veulent avoir voix au
chapitre et pignon sur rue au Québec, la régie devrait avoir le
pouvoir de les contrôler d'une certaine façon, au moins de
s'assurer que certaines conditions financières, la solvabilité
des courtiers, par exemple, soient contrôlées par la régie.
Ce sont là, en fait, les seules différences qu'il y a entre les
deux présentations.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M.
Tourigny. Je vais immédiatement céder la parole au ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux remercier M.
Tourigny pour la présentation. Si vous me le permettez, avant de poser
des questions, je voudrais juste faire quelques commentaires à la suite
des commentaires de M. Minion.
M. Minion you .explained, I think, in a very concise and precise manner,
the reasons why deregulation and the free competive market producers is the
best method to assure production of natural gas and the best price.
Québec supported the agreement of October 1985. I think it is referred
to as the Halloween agreement, because it was signed on October 31st. I would
like to refer to it, because it is effective November 1st, perhaps as the All
Saints agreement. Because if it is the Halloween agreement, then there is a
trick or treat involved. The trick or treat seems to be the border price that
Alberta seems to want to go back to, which will take us all back to square one.
And if it is the All Saints agreement, perhaps the government of Alberta will
put into effect the spirit of the agreement, which was not to regulate the
price at any phase of the transportation or the selling point, but have a true
deregulation. I hope that we can take this message back. We support the
government of Alberta in its endeavours to obtain the best possible price, but
we do believe that going back to a border price is going to start the process
all over again.
If you allow me, in order that all the members of the Committee will
understand the questions, I will pose them in French and perhaps M. Tourigny
can translate them for us.
À titre de courtiers, vous souhaitez avoir un accès aux
services de transport en vue de vendre votre gaz à des consommateurs.
J'aimerais, tout d'abord, que vous m'indiquiez à quel type de
clientèle vos services s'adresseront. (12 heures)
M. Minion: Northridge, in looking for clients, does not
distinguish among any of the consumers. We serve large industrials, small
industrials, schools, hospitals or residential customers. The thing which you
may have to do in serving some of the smaller consumers or customers is to
group them in units which are large enough so that the administrative cost of
serving them does not become a burden. But there are simple means of doing
that. Northridge in Ontario has contracts with housing groups, apartment groups
and groups of small industrial customers and, in fact, with individual farmers.
As I said in my opening comments, we do not distinguish customers on the basis
of size or kind or anything else. The condition that the market puts on serving
a customer is that the customer needs to be big enough, either singly or in
conjunction or aggregated with other customers, to be able to stand the
administrative cost involved.
But the administrative cost, with the
sorts of proposals that are now being worked out with Gaz Metro, are
really quite small. It is amazing how small a customer you can serve and still
absorb the administrative cost.
M. Ciaccia: Thank you. Vu les facteurs de coûts
différents d'un consommateur à l'autre, comment entendez-vous
procéder pour assurer l'utilisation la plus efficace possible du
réseau de distribution?
M. Minion: There are two answers to that. One is a generic type
of answer and the other one is specific to Northridge. When you serve customers
through a distribution system, what is called the diversity of the customer,
that is the diversity of the load of the customer, the peak requirement is
different for different types of customers. That happens automatically. That
happens because of what the customer does. It does not happen because of the
system. So, when you put all of these customers together, you automatically get
some load diversity across the system and that is present at all times. It does
not matter whether Northridge serves part of it or somebody else serves some
other parts. That diversity exists simply because of how the customer
operates.
In the case of Northridge, what Northridge does, it does two things. It
tries to attract customers that have complementary patterns of use, so that a
customer who needs a lot of gas in the wintertime is offset by a customer who
needs a lot of gas in the summertime.
The other thing which we do is make use of storage. We actually have
storage in the Province of Alberta. We are in the process of finalizing
contracts for storage in Ontario, so that what we bring to the table is the
ability to use the diversity patterns of customers in Québec and Ontario
and Manitoba and Alberta to effect savings across the whole system, not just in
the Province of Québec. So, that is a plus which a company such as
Northridge brings as a marketer. Did I answer your question, sir?
M. Ciaccia: I think that you gave us an indication of the type of
customers and how you would...
M. Minion: Well, for example, we have cement plants which consume
gas in the summertime, but little gas in the wintertime. An offset against
those customers are customers who heat buildings such as this building, who use
a lot of gas in the wintertime and not in summertime. You put those two
customers together and you can make very effective and efficient use of the
pipelines and the systems.
M. Ciaccia: And the storage...
M. Minion: And the storage, then, becomes...
M. Ciaccia: ...facilities.
M. Minion: ...a factor as well. The storage has one other virtue
besides making efficient use of the system, it allows you to buy gas when it is
the cheapest - I may use that word - or the most economical to buy it. So, what
you do normally is you buy gas for storage in the summertime, when the gas is
the least costly; you put it in storage and you have it available to serve the
people in the wintertime.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre.
M. Ciaccia: Est-ce que j'ai encore du temps?
Le Président (M. Théorêt): Oui, oui.
M. Ciaccia: Comme vous le savez, le Québec s'est
doté d'un réseau de transport et de distribution qui est
relativement récent. L'une des préoccupations est
d'améliorer la pénétration du gaz naturel et ainsi baisser
le coût unitaire de ces réseaux et améliorer notre
sécurité d'approvisionnement. Je pense que vous vous y êtes
référé un peu, vous avez peut-être donné une
partie de la réponse. Sans entrer dans les détails de la
stratégie commerciale de vos entreprises, j'aimerais que vous
m'indiquiez comment vous entendez répondre à cette
préoccupation si la loi vous donnait un droit d'accès, comme vous
le souhaitez.
We have quite... The infrastructures are relatively recent and the
Government is interested in making sure that the natural gas increases its
sales so that the unit cost for the infrastructures will be reduced and will
allow a better price to the customer. If the law allows you to act as a
broker... I think that you have given indications partly in your previous
answer, but perhaps you could expand on it slightly: How do you respond to this
preoccupation of the Government to increase the penetration of natural gas if
our law gives you the right of access, as you wish it?
M. Minion: Well, the major driving force here, of course, is
price. I mean, the fact of the matter is that, as I have said, the prices which
have been mandated in Canada for the past ten years are above the market price.
And with a competitive market, you will see and we have already seen for
certain of your industrial accounts a significant reduction in price. There
should also occur, if the market is free for all customers, a noticeable and
significant reduction in gas price for the rest of them.
So, that is the first thing.
The second thing is that because you are, in effect, allowing innovators
into the market place, such as Northridge, we do, in fact, find other means of
making it more economical for customers to use gas rather than other types of
fuel.
The third thing is that I appreciate the fact that your infrastructure
is new, that it is still costly and you may, in fact, through the tarif setting
process of the "régie", have to have a bit of cost subsidization from
one class of customers to another, in order to attract more residential or
heating type of customers. Some of your distribution cost may have to be
handled by another class of customers. I think the "régie" already does
that; I think it is a practice which is in everybody's interest because it is
building the total market place.
The fourth thing is that Northridge does not object to a company such as
Gaz Metro undertaking a gas promotion campaign where the cost of that campaign
is recovered through an increment on the tarif, so we have no objections to the
general promotion of gas in that means.
M. Ciaccia: Thank you. À la page 8 de votre
mémoire, au troisième paragraphe, vous faites état d'un
avantage déloyal que procure le système de rabais appelé
le CMP. Pourriez-vous nous expliquer plus clairement votre compréhension
du fonctionnement des CMP et en quoi ce programme vous paraît
déloyal? We just had another presentation explaining to us the
advantages of the commercial marketing programs. You have a different point of
view, perhaps you could elaborate on it.
M. Minion: Let me repeat again that the only way that a
competitive system will function adequately is if all of the customers are able
to go out and have access to gas supply. If, for example, a significant part of
the market place, let us say the residential and small commercial market place,
does not have access to competitive gas and they pay a price which is higher
than the market price which is the case today, and if - I will just use some
figures to give you an illustration - the price paid for that gas at the
Alberta border was 2,50 $ a gigajoule at a time when the open or competitive
market price was, say, 1,25 $, then what happens is that for every gigajoule
that is sold at 2,50 $ by the monopolist, he can afford to give away one
gigajoule and still meet the average competitive price in the market place.
So, what is happening with CMPs is the fact that the captive market,
which is left with the distribution company, is at a price significantly higher
than the market place. That is a fact. The producers that are serving that part
of the market can now say: Because we have extra funds available, we will make
those funds available so that you can compete with companies like Northridge
who are trying to serve other customers in the market place. That is unfair to
begin with. But what is more unfair is the fact that the CMPs can be adjusted
customer by customer as the monopolist wants in order to meet competition; in
other words, the Chairman with his company may not be able to get the CMP that
you get for your company, there is no competition in that regard, so that what
we get among CMPs is a great variation in price which is at the discretion of
the people supplying the gas.
It has nothing to do with the market place for most of those people. The
market place only comes to work if one of you happens to get a bid from
Northridge; then you translate that customer back to Gaz Metro or Gaz Metro
marketing. Then, they will adjust your CMPs so that you are competitive with
me. But the rest of you people in the room will just take what they have to
offer.
M. Ciaccia: So there are different rules for different players.
Some sectors are saying they are really forceably subsidizing others.
M. Minion: That is exactly correct. And the point is that if the
residential customers are providing these funds, that is really who provides
the funds because it is always the customer that puts the money on the table.
The customer is providing the funds. My suggestion is that whatever funds are
available should then be divided equally among those customers who are
providing it. I mean, what other logic can follow?
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
député de Roberval. (12 h 15)
M. Gauthier: Merci. À la page 6, au quatrième
paragraphe, vous dites que le courtier doit par conséquent pouvoir
traiter directement avec le distributeur et bénéficier de tarifs
spécifiques au transport de son gaz. J'avais toujours compris que les
tarifs de transport devaient être fixes et semblables pour tout le monde,
pour l'utilisation des équipements. Pouvez-vous m'expliquer quel est
l'intérêt d'ouvrir une négociation individuelle l'un avec
l'autre. C'est toujours le distributeur, celui qui possède le
réseau qui négocie, d'une part, et négocier avec cinq, six
parties différentes, plutôt que de s'entendre sur un tarif
d'utilisation, que ce soit le même applicable à tout le monde,
quel est l'intérêt pour vous?
M. Tourigny: Je m'excuse, je comprends très mal votre
question.
M. Gauthier: Je vais vous la reposer différemment.
À la page 6, vous dites que le courtier devrait, par conséquent,
pouvoir traiter directement avec le distributeur et bénéficier de
tarifs spécifiques au transport de son gaz. J'avais compris qu'il serait
intéressant pour l'ensemble du marché que le tarif pour le
transport du gaz, pour l'utilisation des équipements de transport, soit
un taux identique pour l'ensemble des utilisateurs, puisque obligation est
faite de transporter le gaz - veux, veux pas - à celui qui a
l'équipement, que le taux soit unique. Cela coûte tant pour passer
du gaz dans les conduits. Je voudrais savoir quel intérêt vous
voyez, vous autres, à réclamer la possibilité de
négocier avec le distributeur ou, si ce n'est pas ce que vous faites,
j'aimerais que vous me clarifiiez ce point.
M. Tourigny: Non, en effet. En fait, je ne crois pas que
l'intention soit que les taux soient négociés. Quand on parle de
traiter directement avec le distributeur et bénéficier des tarifs
spécifiques au transport de son gas, il faut se rappeler que la
situation que l'on vit présentement fait qu'il y a des doutes, à
savoir si le courtier peut faire affaire directement avec le distributeur. Il
doit donc toujours agir comme mandataire et, en fait, la personne qui a
accès au service prévu par les tarifs, c'est bel et bien le
consommateur lui-même qui va passer par un mandataire ou un agent qui
sera le courtier. Ce que l'on dit ici, c'est que le courtier devrait, de son
propre chef, avoir le pouvoir d'aller signer des contrats au tarif
prévu. Non pas de négocier. Ce n'est pas ce qu'on voulait
dire.
M. Gauthier: Je m'excuse, il s'agissait vraiment d'une mauvaise
interprétation. J'avais l'impression que vous ouvriez la porte aux
négociations. Dans la même page, au dernier paragraphe, c'est
plutôt intéressant, vous faites état que le statut de
courtier devrait être connu, de fait, et il le sera, je pense, et devrait
obtenir un permis de vendeur de gaz accordé par la régie.
J'aimerais en savoir un peu plus sur le processus. Vous parlez de preuve de
solvabilité financière. Comment voyez-vous l'organisation de la
distribution d'un permis de courtier?
M. Minion: Firstly, I think that we need to understand that we
are in a transition phase from a system which is highly regulated into one
which is supposed to be competitive. So, it is critical that during this period
we not have any accidents.
M. Tourigny: Étant donné que nous sommes dans une
période de transition et qu'il est important que cette transition
s'effectue sans accident...
M. Minion: So, it is necessary for the "régie", because it
is protecting the public interest, to ask or set down some criteria for brokers
which say and look to: Can you in fact perform? Do you have an adequate gas
supply? What will happen in the event that you do not deliver your gas? What
sort of financial viability or protection do you offer the consumer in that
regard? Is the distribution company going to get paid for the service that it
renders? If it does not get paid, that becomes the burden of all other
customers. What happened in the Province of Ontario was that they held a
hearing, the Ontario Energy Board held a hearing at which the issue of giving
certificates, a pedlar's licence for brokers, was discussed and they said: We
will have a certificate, we will issue certificates and there will be certain
minimal conditions, one of which was financial integrity. It had to be
demonstrated that the company had a certain amount of assets or liquid cash or
things of that order. I think the purpose behind all of this is to make sure
that during the transition period, when we are all sort of amateurs, that
nothing untoward happens to defeat the change.
M. Tourigny: Ce que dit M. Minion, c'est que la régie
doit, pendant cette période de transition, pour éviter les
catastrophes, établir certains critères que devront respecter les
gens prétendant vendre du gaz ici, pour s'assurer, d'une part, que le
gaz qu'ils vendent leur est effectivement disponible et pour s'assurer d'une
certaine solvabilité, certains critères financiers aussi pour,
peut-être, des recours éventuels et aussi, surtout, pour assurer
que le distributeur, lui, on lui paie bel et bien le transport de son
gaz.
M. Minion nous souligne que la régie ontarienne a établi
certaines conditions minimales qui se traduisent surtout par des actifs, qu'ils
soient liquides ou non, mais des actifs.
M. Gauthier: Je vous remercie. Concernant les programmes de
commercialisation, vous dites à la page 2 que d'autres juridictions s'en
vont dans la direction de les éliminer complètement ou de les
baliser, de les mettre sous le contrôle de la régie. J'aimerais
savoir, selon votre expérience, à quel endroit est-il
éliminé, à quel endroit est-ce balisé, quel
traitement fait-on à ce type de programme ailleurs qu'au
Québec?
M. Minion: Well, there are two answers to that. In the Province
of Manitoba, they banned them. They did not allow the pass through of the CMPs.
In the Province of Ontario, they found them to be discriminatory but they
allowed them to
exist for an interim period, so that the system could adjust itself.
Now, I do not know whether or not that interim period ends on the 31st of
October in Ontario or not, that has not been decided.
M. Tourigny: M. Minion nous fait remarquer qu'au Manitoba on a
tout simplement défendu aux distributeurs d'offrir de pareils CMP ou,
enfin, PCMC, alors qu'en Ontario, bien qu'on les ait jugés
discriminatoires, ° on les a tolérés pour une période
intérimaire dont la date... Enfin, la fin n'est pas encore connue ou
établie sûrement.
M. Gauthier: D'accord, merci.
Le Président (M. Théorêt): Avec la permission
des membres, j'aimerais vous poser deux courtes questions. Vous reliez, aux
articles 22 et 44, ou vous associez, à tout le moins, le mot "courtier"
à "consommateur". Par exemple, dans l'article 22, vous dites: Dans ce
territoire, il doit en outre recevoir, transporter et livrer au consommateur ou
au courtier... Vous faites la - même référence à
l'article 44. Ma première demande sera de m'expliquer quelle est la
relation, dans ce contexte, entre "courtier" et "consommateur".
Ma deuxième question concerne l'amendement que vous
suggérez à l'article 57, qui est une approche pour aider au
financement de la régie et aux dépenses de la régie,
finalement. Vous dites que la régie peut imposer à toute personne
transportant du gaz sur le réseau de distribution un taux de - j'imagine
que c'est de base - base plus 0,02 $ le gigajoule de gaz. Première
question: Dans cet article, vous allez m'expliquer ce qu'est un gigajoule. La
deuxième serait: Est-ce que, finalement, coût
supplémentaire au distributeur ou à toute personne se
refléterait sur la facture du consommateur?
M. Tourigny: Si vous me permettez de répondre à
l'envers, d'une part, oui, il est évident qu'éventuellement il
faut que... L'argent vient toujours, finalement, de la même poche, celle
du consommateur, c'est évident. D'autre part, le gigajoule, c'est tout
simplement un quantum d'énergie; au lieu d'exprimer les quantités
de gaz en volume, on les exprime plutôt en quantités
d'énergie produite par, dans ce cas-ci, la combustion du gaz. C'est
l'équivalent des BTU anglais dont on a tous...
Le Président (M. Théorêt): Ah bon!
M. Tourigny: ...entendu parler, sauf que c'est en système
métrique, en fait, les gigajoules. C'est tout simplement cela.
Quelle était... Je m'excuse, M. le Président, je ne me
rappelle plus la première question.
Le Président (M. Théorêt): La première
question concernait la relation que vous faites aux articles 22 et 44...
M. Tourigny: Ah oui!
Le Président (M. Théorêt): ...entre le
courtier, que vous voulez placer sur le même palier que le consommateur,
puisque vous vous y référez, en disant: Le consommateur ou un
courtier.
M. Tourigny: D'une part...
Le Président (M. Théorêt): Pourquoi
suggérez-vous cet ajout, "le courtier"?
M. Tourigny: ,..le courtier devant être capable de
regrouper ses propres clients, il doit pouvoir vendre à ses clients -
c'est ce qu'on mentionnait hier, "plant gate" - à son usine ou à
son domicile, précisément là où il le consomme, de
sorte qu'il devra, d'une certaine façon, s'envoyer, si vous voulez, ou
s'expédier à lui-même sur le système le gaz qu'il
revendra à plusieurs personnes. Alors, ce que l'on veut aussi traiter
par cet amendement, c'est ce à quoi je faisais référence
plus tôt: au lieu de toujours passer par un peu la fiction juridique -
c'est un peu vrai parfois - du mandat et dire que le courtier n'est là
que pour agir que pour et au nom de son mandant qui est un consommateur, il
pourra lui-même aller signer le contrat pour son propre compte. Quand on
dit "commettant", c'est la traduction, et la seule, du terme "principal",
c'est-à-dire non pas comme mandataire,, mais bel et bien en son propre
nom, en somme.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Une dernière question, M. le Président.
Les commentaires de M. Minion sur la libre concurrence, je les trouve
très intéressants. Ils m'amènent à poser la
question suivante: Est-ce que vous trouveriez -souhaitable que la régie
ait un rôle formel, précisé dans la loi, pour lui permettre
d'enquêter, de temps à autre, sur l'état de la concurrence
et de soumettre ses recommandations au gouvernement en lui indiquant les
mesures législatives ou réglementaires qu'il faudrait adopter
pour permettre une saine concurrence?
I found your comments on the free market interesting, especially as to
how it affects the residential consumers. This leads me to ask you the
following question: Would you find it acceptable or desirable that the
"régie" had a formal role which could be specified in the law to allow
it to inquire,
to conduct an inquiry, from time to time, on the actual state of the
competitive situation and to submit its recommendations to the Government,
indicating to the Government whatever measures or regulations should be adopted
to allow a healthy competition?
M. Minion: Yes, I think that the Legislative Assembly has to have
a watchdog and that watchdog has to be the "régie". I think that it is
quite critical that they inform you, on some regular basis, as to how, as they
progress towards a competitive environment, the market is developing. I would
go even one step further: there may be some part of the market which is not
subject to access or the competitive part of the market and I think that it is
incumbent on the "régie" to tell the Government how that part of the
market can, in fact, receive competitive pricing. In other hearings that I have
been at, I have suggested that one way of doing that is where the distribution
company is serving a market as a monopolist, that is where other people do not
have access to it, the residential market for example, that the "régie"
order the distribution company to put a certain amount of the gas out to
tender, put it out to public bid, so that they can, in effect, determine what
the market value of the gas for that part of the market is. So, I quite agree
with your comment. I think it is quite mandatory that you have within this bill
a requirement for the "régie" to be the watchdog to see that the
competitive market is working and where it is not working, it can either
regulate the price or tell the Assembly how to make the market work.
M. Ciaccia: Thank you.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Alors, s'il
n'y a pas d'autres questions, pour les remarques finales, M. le
député de Roberval.
M. Gauthier: Je veux remercier comme on l'a fait hier,
d'ailleurs, et comme on le fait encore aujourd'hui, ceux qui prennent la peine
de venir déposer leurs remarques, leurs réflexions sur ce sujet
et vous assurer que nous tiendrons compte des discussions que nous avons
eues.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Pour ma part, je voudrais remercier Northridge
Petroleum Marketing, M. Minion et M. Tourigny, pour la présentation de
leur mémoire et pour les très intéressants commentaires et
recommandations que vous apportez. Je crois que ça va nous porter
à réfléchir sur plusieurs aspects du rôle de la
régie. Merci.
M. Tourigny: La contribution est plutôt positive, M. le
ministre, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): Alors, messieurs,
les membres de la commission vous remercient et les travaux de la commission de
l'économie et du travail sont suspendus jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 32)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président (M. Théorêt): La commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux. Nous invitons - je vois
que les gens ont déjà pris place - les représentants des
Chemins de fer nationaux du Canada et j'inviterais M. Pinsonnault à nous
présenter les gens qui l'accompagnent, dans un premier temps. Je vous
rappelle que vous avez un maximum de 20 minutes pour faire votre
présentation. Après quoi, les deux formations échangeront
des propos avec vous.
Chemins de fer nationaux du Canada
M. Pinsonnault (Edmond): Si vous me permettez, M. le
Président, j'aimerais vous présenter M. Yves Fortier, qui est
l'avocat qui va faire la présentation du mémoire des Chemins de
fer nationaux du Canada. M. Fortier est accompagné, à sa droite,
par M. Jean Clerk, qui est le directeur du service juridique des Chemins de fer
nationaux de la région du Saint-Laurent; à sa gauche, il y a M.
Jean Bertrand, qui est l'associé de M. Fortier, et, à ma gauche,
M. Joseph Trouvé, du service des recherches du Canadien National. Avec
votre permission, je demanderais à M. Fortier de bien vouloir faire la
présentation de la part des Chemins de fer nationaux du Canada.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie
et on vous écoute.
M. Fortier (Yves): Merci. M. le Président, MM. les membres
de la commission, nous sommes très reconnaissants de l'occasion qui nous
est accordée de venir commenter, ici, devant vous, cet
après-midi, l'avant-projet de loi sur la Régie du gaz
naturel.
Nous sommes ici au nom du Canadien National, à deux titres.
D'abord, en sa qualité d'un des plus importants transporteurs de
marchandises au Canada, le CN s'interroge sur l'étendue réelle du
champ d'application de cet avant-projet de loi. Deuxièmement, nous
sommes ici, le CN, en tant que propriétaire d'installations de
production de vapeur. Nous venons manifester notre appui à
l'avant-projet de loi. Nous venons également tenter de répandre
aux
objections, s'il en est, que certains pourraient soulever - on anticipe,
quoi - à l'encontre de l'exclusion de la vapeur de la juridiction de la
régie.
Alors, d'abord, au nom du Canadien National, M. le Président,
j'aimerais vous parler avec le chapeau du transporteur ferroviaire et routier
que vous connaissez bien. À ce titre, le CN s'est interrogé sur
le domaine d'application de l'avant-projet de loi. L'article 1 indique que ses
dispositions s'appliqueraient, entre autres choses, au transport et à
l'emmagasinage de gaz, pour autant qu'il peut être destiné
à être livré par canalisation à un consommateur.
Sauf lorsqu'il est livré dans son contenant, comme c'est le cas, par
exemple, d'une bonbonne de gaz propane,, un gaz est toujours emmagasiné
et livré à son utilisateur par un système de tuyaux et de
conduits. Ceux-ci, en l'absence de toute définition contenue dans
l'avant-projet de loi, peuvent être assimilés à la notion
de "canalisation". Ainsi interprétée littéralement, cette
disposition viserait l'emmagasinage de gaz, tant dans des wagons-citernes que
dans des camions-citernes, et l'acheminement de ceux-ci à un
distributeur qui, lui, serait situé sur le territoire
québécois. Vous reconnaissez, évidemment, que je viens de
décrire deux des volets d'activité du CN. Nous ne croyons pas
qu'il s'agisse là de situations que la législation devrait
englober.
De même, M. le Président, la lecture des articles 9, 17 et
23 de l'avant-projet de loi permet d'envisager certaines situations qui
pourraient être visées sans que cela n'ait été
l'intention des rédacteurs du texte. À titre d'exemple, l'octroi
d'un droit exclusif pour un territoire donné empêchera-t-il un
transporteur comme le CN d'acheminer du gaz par wagon-citerne sur ce
territoire? Je crois bien que la réponse est non, mais le texte,
d'après nous, n'est pas clair. Ce même droit exclusif
empêchera-t-il un établissement d'articles de plein air de vendre
du gaz propane pour les besoins domestiques de sa clientèle? Ce droit
aurait-il pour effet d'interdire à une station-service de
s'approvisionner en gaz propane chez le fournisseur de son choix, pour ensuite
le revendre aux automobilistes? Ce droit aurait-il pour effet d'interdire la
vente et la livraison de gaz en vrac pour des fins domestiques ou
industrielles? À toutes ces questions, je crois que la réponse
est non, mais une interprétation stricte des dispositions que nous
retrouvons à l'avant-projet de loi pourrait peut-être se solder
par une réponse affirmative. Nous affirmons, toutefois, que cela ne
devrait pas être le cas, puisqu'un si large champ d'application de la
législation n'aurait pour effet que de restreindre la saine
compétition dans ce domaine. Une pareille compétition ne peut
être que bénéfique pour tous les utilisateurs
d'énergie, en mettant à leur disposition une autre source
d'approvisionnement. Somme toute, M. le Président, le CN est
également d'avis que le champ de réglementation envisagé
par cet avant-projet de loi ne doit pas englober l'entreprise dont la fonction
se limite exclusivement à la vente. J'aurai l'occasion de revenir sur ce
point-là un peu plus tard. Cet aspect est d'autant plus important dans
la mesure où l'entreprise n'effectue aucune livraison,, si ce n'est par
véhicule spécialisé. Dans cette optique, nous vous
soumettons qu'il est nécessaire que le texte des articles 1 et 2 soit
précisé davantage, afin d'éviter toute
ambiguïté.
J'arrive maintenant au deuxième volet de la présentation
du CN. Comme vous savez peut-être... J'ouvre une parenthèse, il y
a peu de personnes au Québec qui sont au courant que, dans le cadre de
son entreprise de chemins de fer interprovincial, le CN exploite plus de
dix-huit centrales thermiques dans tout le Canada, lesquelles centrales
produisent de la vapeur. Six de ces centrales, dont la centrale thermique
Nazareth, sont situées au Québec. Essentiellement, cette
production de vapeur est destinée à combler les besoins du CN
pour ses opérations de chemins de fer. Le premier objectif de cette
vapeur, c'est alimenter le CN pour ses opérations de chemins de fer.
Dans certains cas, toutefois, comme celui de la centrale Nazareth à
Montréal, une partie de la chaleur engendrée par la vapeur
produite est utilisée par des utilisateurs autres que le CN. C'est
d'ailleurs à l'égard des activités reliées à
cette centrale Nazareth que le CN a été assigné par la
compagnie Trizec, anciennement de Montréal, maintenant de Calgary,
à comparaître plutôt cette année devant la
Régie de l'électricité et du gaz, qui procéda pour
la première fois à fixer les tarifs maximaux pouvant être
exigés par le CN pour la chaleur utilisée par ses clients.
L'ordonnance qui a été rendue en juillet dernier par la
régie fait présentement l'objet d'un recours en évocation
inscrit par ma cliente, le CN, en Cour supérieure. Évidemment, M.
le Président, par respect pour les tribunaux supérieurs, je
n'entends pas ici débattre le bien-fondé ou la validité de
cette ordonnance. Toutefois, je vais tenter de rester sur la clôture,
mais vous comprendrez que certains de mes commentaires sont formulés
à la lumière bien spéciale de la situation qui est propre
au CN. D'abord, dans la mesure où cet avant-projet de loi emporte la
déréglementation de la production de vapeur et de la vente de
chaleur, le CN signifie ici son approbation. Plusieurs motifs endossent cette
approbation.
D'abord, le CN croit qu'une telle déréglementation ne peut
que profiter à tous les intéressés. Une franche
négociation entre les utilisateurs commerciaux et les
producteurs est le moyen le plus sûr de donner lieu à des
relations d'affaires où chacune des parties y trouvera son compte. Deux
facteurs principaux garantissent un pareil dénouement pour
l'utilisateur. D'une part, et contrairement peut-être, M. le
Président, au domaine du gaz, les consommateurs de chaleur sont pour la
plupart - en ce qui concerne ceux qui font affaire avec le CN, c'est la
totalité, il est très important de le souligner - des
corporations de taille très importante et très imposante,
capables de mener une telle négociation en assurant le respect de leurs
intérêts.
D'autre part, ces mêmes consommateurs peuvent avoir recours
à des sources d'énergie telles que l'électricité,
le mazout, le gaz naturel pour satisfaire leurs besoins calorifiques. Ils
peuvent, à la rigueur, facilement produire eux-mêmes la vapeur
dont ils ont besoin. Ces sources, comme vous le savez, sont très
concurrentielles et leur accessibilité est d'autant plus grande que
certaines sont parrainées par des programmes de subvention qui
facilitent la tâche aux consommateurs qui veulent s'y convertir. En
matière de vapeur, selon le CN, on ne saurait donc sérieusement
parler de monopole des producteurs, non plus que de consommateurs à la
merci de ces derniers. Tel que nous l'expliquerons un peu plus loin, nous
prétendons que c'est plutôt la situation inverse qui risque de se
produire dans cette industrie. Alors que les décisions imposées
par un organisme de réglementation risquent à tout coup de
laisser une des parties mécontente, sinon les deux, l'entente librement
négociée est dans les circonstances un gage de satisfaction de
toute part. C'est selon nous la meilleure façon d'assurer, d'une part,
un service adéquat à un prix concurrentiel pour les consommateurs
et d'autre part, les revenus nécessaires aux producteurs pour la
planification de leurs opérations et de leurs investissements. Cela est
mon premier point.
Mon second point, M. le Président, c'est que le CN, je le dis
bien respectueusement pour la régie qui est en place et les hommes et
les femmes qui participent au travail de la régie, croit que la
juridiction de la régie en matière de vapeur ou de chaleur n'a
pas sa raison d'être. Le caractère sporadique, sélectif et
non uniforme de l'exercice de la juridiction en ces matières par la
Régie de l'électricité et du gaz, depuis sa
création en 1975, démontre que l'existence d'une juridiction dans
ce domaine n'est pas souhaitable. Parmi la dizaine de propriétaires
d'installations de production de vapeur qui vendent de la chaleur ou de la
vapeur au Québec, seulement deux, au fil des années, ont vu leurs
tarifs fixés par la régie. Outre le CN, il y a la chaufferie de
Saint-Malo, ici à Québec, qui s'est vu imposer des taux
ordonnés par la régie.
Or, qu'en est-il des autres utilisateurs qui ont des ententes avec des
producteurs aussi importants que la ville de Montréal, la ville de
Québec, dont les taux sont d'ailleurs comparables à ceux du CN?
Est-ce qu'ils se comparent? Est-ce que ces utilisateurs se considèrent
satisfaits des taux qu'ils paient? La réponse est "probablement". (14 h
15)
Et quant aux autres, car il y en a d'autres, est-il normal qu'une
régie, qui a juridiction sur tous les producteurs, laisse des
différences substantielles de taux se développer sur le
marché québécois? Je vous invite à regarder, par
exemple, en annexe au rapport de la Régie de l'électricité
et du gaz, à la dernière page, la liste des vendeurs de chaleur
au Québec, ainsi que les taux qui sont exigés par ces derniers.
Rappelez-vous qu'il y en a seulement deux qui ont fait l'objet de
décisions par la régie.
Alors, lorsqu'elle a exercé son pouvoir de fixer les tarifs de
vapeur ou de chaleur, la régie, malheureusement, selon nous, a fait
preuve d'imprévisibilité, entre autres en variant sa
méthode de tarification. Dans le cas de la chaufferie de Saint-Malo, par
exemple, la régie a utilisé le montant de l'évaluation
municipale pour déterminer la juste valeur des investissements dans
cette entreprise. Lors de la fixation des tarifs du CN, plus tôt cette
année, la régie a indiqué que cette méthode de
procéder n'était plus reconnue, n'était pas admissible.
Comme je l'expliquerai dans quelques instants, la régie s'est
contentée de prendre le résidu non déprécié
de la valeur aux livres des actifs pour déterminer la juste valeur des
investissements. Ceci a eu pour effet de pénaliser, selon nous, le CN en
regard du montant des taux qui devenaient permissibles.
Le CN dit donc que les quelques précédents de la
Régie de l'électricité et du gaz en matière de
fixation de taux de vapeur et de chaleur militent en faveur d'une
déréglementation de ce secteur d'activité. Certains
rétorqueront que l'intervention de la régie dans Les dossiers de
la chaufferie Saint-Malo et du CN justifie le maintien de cette juridiction.
Nous croyons qu'un examen plus attentif de ces deux cas permet plutôt
d'en arriver à la conclusion contraire puisque l'on constate que cette
juridiction ne convient pas du tout aux besoins et contraintes de cette
industrie.
J'arrive à mon troisième motif, le CN soumet, à
cette enseigne, le fait que ni les pouvoirs actuels de la régie, ni ceux
qu'elle pourrait avoir en vertu de l'avant-projet de loi ne répondent
aux besoins des propriétaires d'installations de production de vapeur.
Il s'agit pour s'en convaincre d'examiner, à titre d'exemple, la
méthode de tarification utilisée par la régie. Dans le
mémoire, aux
pages 10$ 11, 12 et 13, vous allez voir comment nous développons
cette méthode de tarification utilisée par la régie et
qui, selon nous, rend un rendement juste et équitable, pour le
propriétaire de l'installation, absolument aléatoire. Comme vous
allez le constater - je vais vous dispenser de la lecture de ces quelques pages
- effectivement, les décisions de la régie sont une illustration
claire que les règles, telles qu'appliquées par la régie,
manquent de souplesse au point où elles sont incapables d'assurer au
producteur de vapeur - ma cliente, le CN - un rendement raisonnable. Dans cette
mesure, en se référant aux deux précédents, nous
mettons sérieusement en doute l'expertise de la régie pour fixer
les tarifs de vente de vapeur ou de chaleur.
J'arrive à mon quatrième et dernier point, il est le
suivant: Le CN soumet que les circonstances particulières dans
lesquelles se fait la vente de chaleur au client de la centrale Nazareth
justifient une attitude de non-intervention de (a part des mécanismes de
réglementation. Seule une telle attitude est en mesure d'assurer le
respect intégral des droits de chacune des parties impliquées.
À cet égard, la situation qui prévaut dans le cas de la
centrale Nazareth met en relief deux caractéristiques qui sont
fondamentales selon nous. Je vous invite à me suivre avec soin sur ces
deux éléments de la vente par le CN de chaleur à ses
clients corporatifs, comme Trizec.
En premier lieu, la fourniture de chaleur à tous les clients de
la centrale s'effectue dans le cadre d'un important développement
immobilier du centre de Montréal. Vous avez reconnu le
développement de Place Ville-Marie. La seule plaignante, effectivement,
devant la Régie de l'électricité et du gaz, dans l'affaire
qui a été mue plutôt cette année, était la
société Trizec, de Calgary, qui, comme vous le savez, est
propriétaire, successeur en titre à Place Ville-Marie
Corporation; elle est propriétaire de l'édifice cruciforme de
Place Ville-Marie. À l'exception de la Sun Life, les clients de cette
chaleur sont tous propriétaires d'édifices commerciaux qui ont
été construits grâce à des baux
emphytéotiques que le CN leur a consentis. En vertu de ces
différents baux emphytéotiques, le CN, en 1960, et le locataire
emphytéotique se sont récriproquement engagés pour 99 ans.
Parmi les obligations synallagmatiques contenues à ces baux, se retrouve
entre autres celle reliée à la chaleur. Le CN s'est engagé
à vendre toute la chaleur nécessaire au locataire qui, en retour,
s'est engagé à acheter du CN toute la chaleur dont il aura besoin
pendant la durée du bail, le tout selon les autres termes et conditions
dont les parties pouvaient convenir. Il y a un cas spécial au sujet de
la Sun Life, j'en parle dans le paragraphe qui suit. Je saute à la page
15.
Ces obligations reliées à la chaleur sont indissociables
de l'ensemble des obligations contenues aux différents baux
emphytéotiques. Je parle de contrats que plusieurs d'entre vous autour
de cette table connaissez bien, de plusieurs centaines de pages. Il y a, entre
autres, des dispositions qui parient de la vente de chaleur par le CN à
Place Ville-Marie Corporation, à Trizec. Il ne faut pas oublier toutes
les autres clauses qu'on retrouve à ces baux, C'est pourquoi je dis; On
ne peut isoler artificiellement les obligations reliées à la
chaleur et déterminer si la considération pour la chaleur
seulement est raisonnable. Ce faisant, on ignore une foule
d'éléments dont certains ont trait à cette même
considération. Dans l'analyse du caractère raisonnable du taux de
chaleur du CN ne doit-on pas considérer par exemple le faible niveau de
la rente emphytéotique de base convenue entre les parties en 1960? Or,
la régie, dans sa décision à l'égard du CN, a
reconnu que certaines obligations du bail emphytéotique qui pouvaient
paraître onéreuses pouvaient être compensées par
d'autres qui pouvaient paraître avantageuses. Toutefois, la régie,
au lieu de s'abstenir d'intervenir purement et simplement dans l'ensemble des
relations juridiques entre le CN et ses locataires emphytéotiques, a
préféré déstabiliser l'équilibre contractuel
en ne considérant qu'une partie de ces relations. Soyez assuré,
M. le Président, que le CN ne vient pas ici demander que
l'Assemblée nationale confère une juridiction qui ferait une
régie du logement, si vous voulez, de la régie en place
aujourd'hui, pour des espaces commerciaux. Bien au contraire, nous disons que
la vente de vapeur ou de chaleur qui s'inscrit comme accessoire à des
ententes plus importantes ne devrait être l'objet d'aucune intervention
réglementaire. C'est la loi dont ont convenu les parties. Il n'y a pas
d'intérêt public à protéger. Nous sommes pour la
protection de l'intérêt public mais dans le cas que je vous
décris, où le CN est vendeur de chaleur, il n'y a pas cet
intérêt public qui doit primer vos
délibérations.
Le deuxième aspect qui caractérise la vente de chaleur
produite par la vapeur de la centrale Nazareth est qu'elle est gouvernée
dans tous les cas par une entente librement négociée entre le CN,
par exemple, et Place Bonaventure, entre le CN et la Sun Life, entre le CN et
Trizec. Chacune de ces ententes est pour une durée équivalente
à celle du bail emphytéotique en vertu duquel elle a
été conclue. Le prix payé pour la chaleur est
déterminé en fonction de deux composantes. La première,
comme vous le savez, c'est la demande qui correspond à cette assurance
de pouvoir disposer d'une quantité de chaleur donnée à
tout moment et le prix de cette demande est payable par le client, qu'elle soit
utilisée ou non. Le prix
de la demande est ajusté annuellement selon certains indices
d'inflation publiés par Statistique Canada. La deuxième, c'est la
consommation qui correspond à la quantité réelle de
chaleur consommée par chacun des clients au cours d'une année. Ce
prix est ajusté annuellement pour tenir compte des variations du
marché en ce qui a trait au coût du combustible. Aujourd'hui,
qu'est-ce qu'on a? On a certains clients qui considèrent, comme Trizec,
qu'ils n'ont plus besoin de la totalité de la quantité de la
demande qu'ils ont exigée lors de la construction des installations en
1960. Ils estiment qu'ils ne devraient plus avoir à payer pour la
quantité de demande qui excède leurs besoins. Mais la quasi
impossibilité pour la centrale Nazareth de recruter de nouveaux clients
laisserait le CN dans une situation intenable s'il fallait accéder aux
revendications des clients. Au surplus - paragraphe extrêmement important
s'il en est un dans notre présentation - il ne faut pas perdre de vue
que le CN n'est pas une entreprise de distribution de vapeur. Elle permet
seulement à ses utilisateurs de venir chez elle prendre la vapeur sur sa
propriété pour, ensuite, utiliser les calories qui s'en
dégagent et la retourner au CN. Le CN ne distribue pas de chaleur, il ne
distribue pas de vapeur, il vend contractuellement de la chaleur. Le CN a
investi des sommes considérables en 1960 pour se doter d'installations
capables de répondre aux demandes exigées par les clients pour
toute la durée de l'entente. Aujourd'hui, Trizec et d'autres voudraient
que le CN absorde, sans aucune compensation, la perte de revenus et le
coût de construction des installations se rapportant à ce qui est
devenu une surcapacité.
M. le Président, il est absolument évident, selon nous,
que l'approche tarifaire de la régie ne tient pas compte de ces facteurs
souverainement importants. Elle fait totalement abstraction des conditions
contractuelles qui lient le CN et ses utilisateurs qui, eux, ont exigé
cette surcapacité. Il est à noter qu'aucun des utilisateurs n'est
tenu, dans le cadre de ces ententes, d'investir quelque somme que ce soit pour
défrayer les coûts du remplacement éventuel des
installations de production de vapeur. Cette responsabilité
échoit entièrement au CN sans pour autant qu'une augmentation du
prix de la chaleur en résulte. Encore une fois, la régie ne tient
aucunement compte de ce facteur dans sa détermination des taux
permissibles.
Il n'est pas surprenant de constater qu'une régie qui n'a
juridiction que sur une des nombreuses facettes d'un problème
s'abstienne de considérer le problème dans son ensemble, je le
comprends et nous le comprenons. Le CN ne propose pas ici d'étendre la
réglementation au domaine des baux commerciaux.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, le CN estime que la
réglementation de la vente de chaleur par la centrale Nazareth est non
seulement inutile mais inappropriée. Chacune des parties à ces
ententes a donné un consentement libre et éclairé à
toutes et chacune des conditions qui s'y retrouvent. Qui plus est, toute
intervention réglementaire n'aurait pour effet que de frustrer les
parties de leur droit de recourir au mécanisme d'arbitrage des
différends qu'ils ont expressément élaboré à
ces ententes mais dont ils ont préféré faire fi parce que
la clause comprornissoire n'en est pas une qui lie les parties de façon
obligatoire. Ce mécanisme leur permet d'avoir recours, si
nécessaire, s'il y a mésentente, aux services d'experts, etc.
Encore une fois, M. le Président, je termine en vous disant que
le CN donne son appui à cet avant-projet de loi dans la mesure où
il exclut, comme il se doit, la vapeur et la chaleur de la juridiction de la
régie. Je vous remercie. Nous sommes prêts à
répondre à toutes les questions que vous et vos collègues
voudrez nous poser.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie,
en portant à votre attention que je devrai écourter le temps qui
est alloué aux deux formations étant donné que vous avez
excédé un peu dans la présentation, mais, comme vos
arguments semblaient les plus importants dans les dernières pages, on
vous a laissé continuer. Je cède donc immédiatement la
parole au ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, je veux remercier Me Fortier
pour avoir présenté un mémoire qui nous permettra
d'évaluer s'il est nécessaire ou non de réglementer la
vapeur. Originalement, on l'avait exclue du projet de loi. Des
représentations nous ont été faites et nous avons
jugé bon de vous aviser qu'elles nous ont été faites et
vous inviter à présenter votre point de vue.
Avant de vous poser des questions, je voudrais soulever deux points.
Premièrement, je voudrais vous confirmer que le commerce, le transport
et la vente du propane ou des autres liquides de gaz ne devraient pas
être réglementés par la présente loi, de même
que la vente ou le transport du gaz naturel par fardier. S'il est
nécessaire de clarifier le projet de loi pour que ce soit clair, je
crois que les juristes vont apporter les modifications nécessaires.
Deuxièmement, je sais que vous avez déposé des
procédures en évocation devant la Cour supérieure et,
comme vous, par respect des tribunaux supérieurs, la commission n'entend
pas débattre le bien-fondé de l'ordonnance de la régie.
(14 h 30)
Je vais premièrement aborder le problème de
captivité des consommateurs de vapeur. Dans votre mémoire,
à la page 6, vous dites: "Ces mêmes consommateurs peuvent avoir
recours à des sources telles que l'électricité, le mazout
et le gaz naturel pour satisfaire leurs besoins calorifiques", ce qui signifie
que les consommateurs ne sont pas captifs et que vous ne jouissez d'aucun
monopole.
J'ai bien entendu les arguments que vous avez apportés en ce qui
concerne les conditions du bail. Mais, en ce qui concerne, pour le moment, la
captivité des clients, est-ce que vos clients ont signé des
contrats à long terme avec vous? Je sais que c'est inclus, comme vous
l'avez indiqué, dans le bail emphytéotique, mais est-ce qu'il y a
une formule dans le bail qui peut préciser le coût, comment le
coût de la vapeur sera déterminé? Est-ce que, dans cette
formule, il y a des éléments discrétionnaires de la part
du CN?
M. Fortier (Yves): M. le Président, M. le ministre,
d'abord, vous avez absolument raison de parler de captivité, mais c'est
une captivité relative, en ce sens qu'il y a différentes sources
d'énergie. Je vous souligne, par exemple, que devant la régie la
société Trizec a affirmé qu'elle pouvait fabriquer sa
propre vapeur. Laissons faire l'électricité, laissons faire le
gaz naturel. Trizec a déclaré devant la régie qu'elle
pourrait, par exemple, fabriquer sa propre vapeur.
J'ai utilisé le mot "relative" et j'ai utilisé le mot
"captivité", pour reprendre votre terme, M. le ministre. C'est une
captivité qui a été conclue entre... On ne peut pas parler
de lésion d'une partie contractante dans le sens dans lequel ce mot est
utilisé dans le Code civil. En 1960, dans le contexte du
développement immobilier que vous connaissez très bien à
Montréal, il y a eu des ententes synallagmatiques qui sont intervenues
entre le CN, d'une part, et ces grandes sociétés, d'autre
part.
Vous me demandez: Est-ce que les contrats sont des contrats à
long terme? Oui, M. le Président. Les contrats sont des baux
emphytéotiques de 99 ans et, à l'intérieur de chacun de
ces baux, se trouve une formule mathématique qui précise le
coût pour l'achat de la chaleur qui est générée
à la centrale Nazareth par le CN et vendue à la
société Trizec, par exemple. C'est une formule
mathématique qui ne laisse aucune place à la discrétion,
de la part du CN.
M. Ciaccia: Quand vous mentionnez que c'est une captivité
relative - vous parlez de centrales thermiques - est-ce que c'est
réellement possible de construire une centrale thermique au centre-ville
pour alimenter...
M. Fortier (Yves): Théoriquement, oui, M. le
Président. Il est possible de créer une centrale thermique. S'il
s'avérait, par exemple, que l'un des locataires du CN, locataire dans le
sens emphytéotique du terme, décidait de construire sa propre
centrale thermique, je vous pose la question, qu'est-ce qui arriverait au CN?
Parce que nous avons prévu, en 1960, un excédent -quant à
nos besoins - de vapeur.
Justement, dans les contrats, pour cet excédent dont une partie
allait faire l'objet d'une vente suivant la demande et une partie allait faire
l'objet d'une vente suivant la consommation, nous avons prévu que toute
la chaleur dégagée par la vapeur allait être en partie
utilisée par nous, en partie utilisée par nos clients, mais ce,
à l'intérieur - c'est extrêmement important - d'un bail qui
contient moult dispositions et dont il est absolument impensable qu'on en isole
une, par exemple, la clause qui prévoit comment va être
calculé le coût de la chaleur, parce que cela fait partie d'un
tout.
M. Ciaccia: Mais j'espère que vous ne nous apportez pas
comme argument que vous avez signé un bail emphytéotique et que,
maintenant, le loyer est relativement bas considérant les augmentations
du loyer qui ont eu lieu à Montréal et que, maintenant, vous
voulez vous reprendre sur le prix de la vapeur. Ce n'est pas cela, l'argument
que vous nous apportez.
M. Fortier (Yves): Ce n'est aucunement notre
prétention.
M. Ciaccia: Quand vous mentionnez tous les éléments
du bail... C'est pour cela que je vous ai demandé: Est-ce qu'il y a une
clause précise pour calculer le prix de la vapeur dans le bail? Ce n'est
pas discrétionnaire de la part de l'un ou de l'autre?
M. Fortier (Yves): La réponse est un oui
catégorique, M. le Président.
M. Ciaccia: Quand vous mentionnez que, maintenant, Trizec utilise
moins de vapeur, quelles sont les raisons? Est-ce qu'on a substitué
d'autres sources d'énergie?
M. Fortier (Yves): Évidemment, vous avez anticipé
ma réponse, mais te tout est fonction de ce qu'on a appelé "la
crise" dans les années soixante-dix, d'une consommation réduite
d'énergie.
M. Ciaccia: De l'économie d'énergie.
M. Fortier (Yves): Ni plus ni moins, c'est une économie
d'énergie.
M. Ciaccia: Quand vous mentionnez que la loi impose à la
régie le devoir d'autoriser des tarifs qui assurent un rendement sur ta
juste valeur des investissements dans l'entreprise, je dois vous avouer que ma
réaction sur cette formule en ce qui concerne le CN est un peu semblable
à la vôtre. Il est clair que ces installations ont
été mises en place il y a plusieurs années. Aujourd'hui,
avec les coûts dépréciés, c'est quasiment...
M. Fortier (Yves): II ne reste plus grand-chose.
M. Ciaccia: Éventuellement, vous allez être
obligé de donner la vapeur pour rien avec cela.
M. Fortier (Yves): Mené à l'absurde, vous avez
absolument raison.
M. Ciaccia: Mais si la nouvelle loi réglementait le
commerce de la vapeur, non pas sur la juste valeur des investissements mais sur
la valeur du service rendu - je ne vous demanderai pas si vous êtes
d'accord avec cette approche parce que je sais que vous êtes devant les
tribunaux sur ce même sujet - est-ce que cette formule serait plus
acceptable ou auriez-vous moins de crainte?
M. Fortier (Yves): Je réponds à votre question
comme suit, M. le ministre. D'abord, pour une distribution au grand public, je
dirais oui. Nous avons tenté de vous expliquer que le CN ne fait pas de
distribution de vapeur. Il ne fait que vendre de la vapeur et les clients
viennent la chercher chez nous. C'est un peu comme si vous étiez
propriétaire d'un duplex, M. le ministre, par exemple. Vous fabriquez de
la vapeur, de l'eau chaude effectivement. Vous vendez de l'énergie, de
la chaleur à votre locataire du dessous. C'est exactement ce que fait le
CN. Prétendez-vous, si vous avez négocié avec votre
locataire le coût d'achat de cette chaleur, qu'il devrait y avoir une
régie qui viendrait réglementer la considération que vous
avez le droit d'exiger de votre locataire? Je pense que de poser la question de
cette façon, c'est y répondre par la négative. Mais c'est
exactement ce que fait le CN avec ses clients.
M. Ciaccia: Quelle proportion de la production de la centrale
Nazareth du CN dessert les clients extérieurs et pour vos propres
besoins?
M. Fortier (Yves): On m'informe que ce sont plus ou moins 20 %,
soit 20 % pour le CN et 80 % pour les acheteurs.
M. Ciaccia: Donc, 80 % de la vapeur vont aux clients
extérieurs.
M. Fortier (Yves): Exactement, M. le ministre.
M. Ciaccia: Cela va pour le moment, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval et critique officiel.
M. Gauthier: Oui. Me Fortier, je vous remercie de votre
présentation. Â la page 4, vous dites que le CN exploite plus de
dix-huit centrales thermiques au Canada qui produisent de la vapeur. Il y en a
six qui sont situées au Québec; donc, douze à
l'extérieur du Québec. Ailleurs au Canada, est-ce que vos
centrales sont soumises à une réglementation quelconque ou
à des régies du type de celle qui nous intéresse?
M. Fortier (Yves): Aucune, M. le Président.
M. Gauthier: II n'y a qu'ici au Québec.
M. Fortier (Yves): II n'y a qu'au Québec que cela se fait.
On ajoute celle de Montréal parce que c'est seulement dans ce cas que la
société Trizec, de Calgary, a décidé de nous amener
devant la régie.
M. Gauthier: D'accord. Mais les autres sont quand même
soumises théoriquement...
M. Fortier (Yves): Théoriquement...
M. Gauthier: En fait, ma question ne va pas... Pour être
bien certain qu'on se comprenne, je ne vous demande pas si vous avez eu des
causes devant d'autres régies, je vous demande si les autres sont
soumises à la juridiction de...
M. Fortier (Yves): On m'informe que non, M. le
Président.
M. Gauthier: D'accord. J'avoue qu'il y a une information qui me
fatigue un petit peu dans le mémoire. C'est à la page 6. Le
ministre l'a abordé un peu tout à l'heure et je voudrais revenir
là-dessus. Vous dites, au 3e paragraphe - c'est la version officielle
corrigée, la dernière déposée: "D'autre part, ces
mêmes consommateurs peuvent avoir recours à des sources
d'énergie telles que l'électricité, le mazout et le gaz
naturel pour satisfaire leurs besoins calorifiques. Ils peuvent à la
rigueur facilement produire eux-mêmes la vapeur dont ils ont besoin."
Tout à l'heure, le ministre vous a demandé: Est-ce que c'est
exact qu'ils peuvent produire leur propre vapeur? J'ai le goût de vous
demander: Théoriquement, c'est peut-être vrai qu'ils ont
accès, comme tout le monde, à toute sorte de sources
d'énergie, mais,
pratiquement, est-ce que c'est faisable? Tantôt, vous avez
parlé d'une centrale, vous avez dit: Oui, mais s'il s'en construisait
une... J'ai cru comprendre: S'il se construisait une centrale thermique pour
faire de la vapeur, il y aurait des problèmes autres. Dans le bail ils
sont obligés de prendre la nôtre. On a grossi la nôtre pour
les fournir, etc. En d'autres termes, de façon pratique - ce n'est pas
une question piège -ils n'ont pas tellement le choix. Il n'est pas si
évident que cela qu'ils ont le choix.
M. Fortier (Yves): Je vais demander à Me Clerk, M. le
Président, de répondre à cette question.
M. Clerk (Jean): M. Gauthier, dans le cas qu'on a illustré
devant vous, qui est celui du CN, je pense qu'on est dans une situation un peu
particulière. Me Fortier vous a expliqué que le contexte de nos
relations avec nos clients - je mets clients entre guillemets, parce que nos
clients, ce n'est pas le public en général - cela s'est inscrit
dans le cadre d'un développement immobilier de nos terrains qui
partaient de la rue Cathcart à Montréal, qui descendaient en bas
de la Place Bonaventure. Ce sont des édifices qui, ultimement, au terme
d'un bail emphytéotique, doivent nous revenir. Il est évident
qu'on a branché cela sur notre propre système de chauffage. On ne
va pas avoir une multitude de systèmes de chauffage. Il est
évident que, dans le bail emphytéotique qu'on a consenti à
chacun des promoteurs immobiliers qui voulaient développer telle ou
telle des parcelles de terrain qui appartiennent au CN, il y avait cette
obligation qu'ils ont d'acheter, de se fournir en chaleur à même
une usine de production de chaleur qu'on a sur la rue Nazareth. Nous aussi
avons l'obligation de leur fournir. En 1960, ayant estimé leurs besoins
de chaleur, ils nous ont demandé de construire, d'ajouter à notre
centrale, qui existait depuis les années quarante, une capacité X
pour leurs besoins. On a mis une bouilloire, puis une autre, puis une autre.
S'ils se décrochent demain matin, nous restons pris avec quelque chose
qui ne serait pas utilisé. C'est une illustration extrême d'une
situation bien particulière, l'affaire du CN. C'est un des grands
complexes immobiliers qui se sont construits, qui font l'objet d'ententes
énormes entre les parties; la vapeur est un accessoire vraiment peu
important, eu égard à l'ensemble de l'affaire.
Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans la position du CN,
vous me permettrez de revenir un peu sur ce que Me Fortier disait. C'est en
annexe à votre question, dans le fond. Comme consommateur de gaz
naturel, le CN - le CN, pour fabriquer sa vapeur, utilise du gaz naturel - on
est bien intéressé à ce qu'il y ait une régie du
gaz naturel qui est spécialisée dans un domaine comme
celui-là et qui s'y connaît bien en matière de gaz naturel,
en réseaux de distribution de gaz naturel. Comme vendeur de vapeur - le
puits de pétrole, c'est notre usine de vapeur - on vous dit que dans
notre situation particulière on n'a pas besoin d'un organisme de
réglementation, dans notre seul cas. Si théoriquement vous
vouliez parler d'une situation où un producteur et distributeur de
vapeur au public s'installait ici et là - que ce soit à
Québec ou n'importe où sur notre territoire - et distribuait au
public en général, à l'intérieur d'un territoire
exclusif qu'on lui donnerait pour faire ses activités commerciales,
qu'on lui accorderait, si un tel producteur et distributeur au public existait,
qu'il soit réglementé par une régie
spécialisée dans une entreprise qui n'a rien à voir avec
celle du gaz, qui est complètement différente au point de vue
technique, au point installation, on serait d'accord qu'il y ait une
régie - cela pourrait être une division spécialisée
de la Régie des services publics - qui pourrait vérifier pour que
le consommateur, le public en général, le petit individu, ne soit
pas abusé par un distributeur public qui a un réseau exclusif. Ce
n'est pas le cas du CN. On voulait simplement monter un peu en épingle
que le CN n'a rien à voir avec une situation commerciale comme celle
qu'une régie, quelle qu'elle soit, doit réglementer. (14 h
45)
M. Gauthier: Si on revient au CN, est-ce que les utilisateurs, je
ne sais pas, comme Place Ville-Marie, par exemple pourraient trouver une
méthode alternative?
M. Clerk: Scientifiquement, oui. Juridiquement, avec les contrats
qu'ils ont là, j'espérerais bien que non.
M. Gauthier: C'est ça si...
M. Clerk: Parce que tout l'ensemble des aménagements
contractuels énormes qui ont été faits et les
investissements physiques des deux parties qui ont été faits ne
permettent pas une interprétation de cette nature-là.
M. Gauthier: Si je comprends bien, le cas de la centrale du
Canadien National, au centre-ville de Montréal, dont il est question
serait différent des autres producteurs de vapeur et même
possiblement de vos autres centrales...
M. Clerk: Les autres centrales servent exclusivement pour les
besoins internes, je pense, du CN, sauf peut-être à Ottawa
où on vend.
M. Gauthier: De ce que je comprends là, le cas est
particulier en ce sens que autant vos clients sont prisonniers de vous
comme fournisseur autant comme fournisseur vous êtes prisonnier de
vos clients.
M. Clerk: Exactement. Exactement. C'est un cas très
très particulier. On ne distribue pas. On ne fait pas affaire avec le
public. C'est simplement un appendice d'une vaste transaction d'immeubles qui a
permis le développement du centre-ville de Montréal. Mais si,
théoriquement, vous nous demandiez notre réaction face à
un distributeur public de vapeur qui aurait un réseau exclusif, si vous
me demandiez s'il devrait être réglementé de quelque
façon, la question se poserait autrement.
M. Gauthier: Je ne sais pas si votre recommandation va
jusque-là, mais, si le ministre décidait de régir d'une
quelconque façon la vente, le commerce de la vapeur, vous souhaiteriez -
si je me fais l'interprète fidèle de ce que vous demandez - que
ce cas particulier, compte tenu de la nature du contrat qui vous lie avec les
gens avec lesquels vous êtes liés dans cette histoire-là,
soit exclu de toute juridiction quelle qu'elle soit. Vous souhaitez que
ça puisse se régler entre parties contractantes devant une cour
de justice si, d'aventure, il y a des différends qui naissent.
M. Fortier (Yves): Dès lors, M. le Président, que
la distribution au public devient l'élément qui distingue la
vente de vapeur par le CN de celle qui serait faite par un distributeur qui,
comme vient de l'expliquer Me Clerk, dans un territoire bien défini,
aurait comme clientèle M. X, M. Y, M. Z., etc., et qui non seulement
vendrait, mais distribuerait jusqu'au domicile, jusqu'à la
résidence, jusqu'à la société, la chaleur dont il
est question, il pourrait y avoir selon nous, le cas échéant, une
réglementation.
M. Gauthier: Est-ce qu'il nous reste du temps?
Le Président (M. Théorêt): II reste du temps
au ministre et il vous en reste également à vous, sept à
huit minutes. M. le ministre. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: On va s'entendre. On s'entend d'ailleurs très
bien, M. le ministre et moi, depuis ce matin.
M. Ciaccia: C'est pour ça qu'on appelle ça une
Opposition loyale.
M. Gauthier: Je sens que ça achève, M. le ministre.
Enfin, j'aimerais revenir sur une chose...
M. Ciaccia: Au Nouveau-Brunswick ils n'ont même pas
ça.
M. Gauthier: Pardon?
M. Ciaccia: Au Nouveau-Brunswick ils n'ont même pas
ça.
M. Gauthier: Oui, je sais que vous souhaitez des situations comme
au Nouveau-Brunswick. Je sais que vous souhaitez ça, M. le ministre.
Le Président (M. Théorêt): Bon, je sens que
je vais reprendre la présidence. M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: Bon, ne soyez pas partial, M. le Président.
Laissez-moi m'exprirner au même titre que le ministre. Alors, à la
page 19 de votre mémoire, vous dites qu'il y a un mécanisme
d'arbitrage qui est déjà prévu au sein de votre
convention, de votre contrat qui vous lie...
Une voix: Oui.
M. Gauthier: Je ne voudrais être ni trop indiscret, ni
aller trop loin, mais est-ce que ce mécanisme-là, en tout cas
à ce qu'il me semble, ne semble pas donner satisfaction puisque vous
êtes en litige actuellement?
M. Fortier (Yves): Ce qui est arrivé, M. le
Président, comme je l'ai mentionné plus tôt, la clause dite
compromissoire en termes juridiques, la clause d'arbitrage, n'est pas une
clause obligatoire. Vous pouvez avoir au Québec une clause d'arbitrage
qui lie les parties. Vous pouvez avoir une clause d'arbitrage qui est
facultative pour les parties. Dans le cas du contrat intervenu en 1960 ici
entre le CN et ses locataires, la clause qui a été
rédigée est une clause d'arbitrage facultative et Trizec n'a pas
choisi d'y avoir recours. Comme cela prend deux parties pour aller à un
arbitrage, le CN ne pouvait pas y aller tout seul.
M. Gauthier: Une dernière question sur ce sujet. Vous avez
dit que votre client dont, on l'a vu, vous êtes captif, mais qui est
aussi captif que vous comme fournisseur, ne prenait plus les quantités
de vapeur pour lesquelles vous avez prévu des installations. C'est
strictement à titre d'information, mais vous pouvez choisir de ne pas
répondre. Est-ce que l'ordre de grandeur est important? Je ne sais pas
si vous pouvez répondre à cela. Est-ce une diminution de 50 %, de
20 %? C'est juste pour l'information de la commission.
M. Fortier (Yves): Mon collègue, Me Bertrand, qui a
plaidé l'affaire devant la régie mais qui ne parlera pas de la
cause comme telle, va vous donner la réponse.
M. Bertrand (Jean): On parle à peu près
d'un ordre de grandeur de 25 % jusqu'à maintenant. Trizec, au
cours des auditions devant la régie, a fait part de ses travaux et
projets d'aménagement afin d'être en mesure d'économiser
encore plus d'énergie. On nous a lancé des chiffres qui nous
laisseraient croire que cela irait jusqu'à 50 % de la demande originale
ou tout près de 50 %.
M. Gauthier: Je vous remercie.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Roberval. M. le ministre.
M. Ciaccia: Cela représente quoi en dollars, 25 % ou 50
%?
M. Bertrand: En termes de demande, j'ai fait des petits calculs
ce matin, juste en termes de demande pour Trizec, disons qu'ils ont
payé, en 1985 ou 1986, 380 000 $ pour une assurance qu'ils n'ont pas
utilisée, ce qui...
M. Ciaccia: Mais le chiffre global de...
M. Bertrand: Des millions, 3 000 000 $.
M. Ciaccia: Par année?
M. Bertrand: 3 000 000 $ par année.
M. Ciaccia: Alors 25 % représente 25 % des 3 000 000
$?
M. Trouvé (Joseph): Cela serait 25 % de la partie
consommation du contrat.
M. Fortier (Yves): Ce n'est pas la partie demande, c'est la
partie consommation, évidemment. La partie demande est garantie.
M. Bertrand: La consommation, ils ne paient que pour la
consommation. La consommation aussi a descendu, elle est rendue peut-être
à 60 %, 70 % de ce qu'elle a déjà été mais
la partie demande, qu'ils l'utilisent ou pas, ils paient pour. Cette
perte-là représenterait des montants de l'ordre de plusieurs
millions de dollars.
M. Ciaccia: J'ai appris que vous avez fait des achats directs de
gaz afin de diminuer la facture énergétique. Est-ce que,
d'après la formule dans le bail que Me Fortier a portée à
notre attention, les clients profiteront de la baisse du coût du gaz?
M. Clerk: M. le ministre, les clients, non seulement profiteront
mais ont profité de la baisse en question. Notre facture tient compte de
nos coûts de production. On leur a envoyé, je pense, un
remboursement substantiel de plusieurs centaines de milliers de dollars,
à la suite des ententes qu'on a conclues avec le producteur de gaz. Cela
nous a permis d'effectuer à tous nos clients de remboursements de
plusieurs centaines de milliers de dollars.
M. Ciaccia: Merci.
M. Clerk: Nos factures sont automatiques. C'est relié au
coût de l'énergie qu'on acquiert. Autrefois, c'était du
charbon, ensuite c'était du mazout et maintenant c'est le gaz naturel
qui est notre source d'énergie. Donc, c'est relié au coût
de ce que cela nous coûte pour produire. Puis il y a une autre partie qui
n'a rien à voir avec le coût de l'énergie comme tel, si
vous voulez, une police d'assurance, ce qu'ils se sont réservé
comme capacité de production. Ils nous ont dit: Maintenez-nous une
espèce de petite usine de vapeur à tant le kilolivre. Pour cela,
ils paient un coût d'abonnement, si vous voulez. C'est comme au Nautilus,
vous payez tant par année et, après, chaque fois que vous allez
jouer au squash.
M. Bertrand: Si vous n'y allez pas, cela coûte cher.
M. Clerk: Si vous n'y allez pas, cela' coûte plus cher.
Une voix: C'est cela.
M. Ciaccia: C'est pour cela qu'ils sont devant la
régie.
M. Fortier (Yves): Entre autres.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
député de Roberval, pour les remarques finales.
M. Gauthier: Bon, je voudrais simplement remercier les
représentants du Canadien National qui nous ont instruits, il faut bien
le dire, d'une situation qui est un petit peu complexe pour cette commission
parlementaire. Nous aurons l'occasion de continuer cette discussion. Je pense
que tout à l'heure on va avoir une autre face de la médaille sur
ce même problème. Quoiqu'il en soit, l'objectif d'une commission
parlementaire n'est pas évidemment de trancher ce genre de litige mais
bien d'essayer de comprendre, et c'est là notre objectif, si oui ou non
on devrait faire en sorte que le commerce de la vapeur qui s'effectue entre
différentes parties au Québec puisse être régi ou
non. C'est ça notre préoccupation. Si nos questions ont
semblé, à un certain moment, déborder un peu de ce
sujet-là,
c'est qu'on essayait de comprendre la nature des choses. Je vous suis
reconnaissant, au nom de ma formation politique, d'avoir bien voulu accepter de
répondre avec autant d'ouverture et nous en tiendrons compte,
évidemment. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Alors, je veux vous remercier pour votre
présentation et, peut-être la seule chose que je peux vous dire
pour le moment, c'est qu'il y a matière à réflexion.
Merci.
M. Fortier (Yves): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie
et je vous souhaite un bon retour. Avant de suspendre pour deux minutes,
j'inviterais les représentants de l'Association des propriétaires
et administrateurs d'immeubles de Montréal à prendre place.
Les travaux de la commission sont suspendus pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 14 h 56)
(Reprise à 15 h 3)
Le Président (M. Cannon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous avons le plaisir d'accueillir l'Association des
propriétaires et administrateurs d'immeubles de Montréal Inc.
Est-ce que votre représentant, votre porte-parole aurait
l'amabilité de... Est-ce qu'on pourrait avoir de l'ordre, s'il vous
plaît, en arrière, parce qu'on a un petit peu de misère
à se comprendre? Je demanderais donc au représentant de bien
vouloir s'identifier et d'identifier ses collègues. Je crois que c'est
M, Préfontaine, c'est cela?
Association des propriétaires et
administrateurs d'immeubles de Montréal
M. Préfontaine (Guy): M. le Président, dans un
premier temps, je voudrais vous présenter, à mon extrême
droite, Jacques Métivier, directeur principal, exploitation des
immeubles de la société Trizec ltée pour la région
de l'Est; à sa gauche, M. William Brock, de l'étude bien connue
Phillips & Vineberg de Montréal, et, à ma droite, M. Jean
Richard, vice-président principal pour la région de l'Est de
Trizec ltée. Si vous me permettez, M. le Président, je ferais une
brève entrée en la matière, et M. Richard et M.
Métivier poursuivraient le dossier.
M. le Président, MM. les membres de la commission, mieux connue
sous le nom de BOMA, pour Building Owners' and Managers'
Association, l'Association des propriétaires et administrateurs
d'immeubles de Montréal, l'APAI, dont le soussigné est
président, est une coporation à but non lucratif fondée en
1927 puis incorporée en 1931, membre affilié de BOMA
International et regroupant aujourd'hui la quasi-totalité des
propriétaires et administrateurs des principaux édifices au
Québec. L'investissement immobilier des membres de l'APAI est de l'ordre
de 7 000 000 000 $, soit le plus important du genre au . Québec. La
corporation Place Desjardins Inc., dont le soussigné est
vice-président et directeur général, est membre
régulier de l'APAI.
L'APAI ayant comme mandat de conseiller et de représenter ses
membres pour toute matière susceptible d'affecter la qualité de
la gestion de leurs immeubles, c'est avec grand intérêt que nous
avons pris connaissance de l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la
Régie du gaz naturel ayant entre autres objets de retrancher la vapeur
du domaine de la réglementation visée par la Loi sur la
Régie de l'électricité et du gaz qu'il remplace.
Cet avant-projet de loi, s'il est adopté intégralement,
aura un impact négatif sur la gestion énergétique des
immeubles de plusieurs de nos membres. La gestion de l'énergie chez nos
membres et son économie sont des préoccupations majeures à
l'APAI qui, le 26 mars 1987, honorait pour une quatrième année
consécutive ses membres les plus performants en matière
d'économie d'énergie, le tout en présence de M. John
Ciaccia, ministre de l'Énergie et des Ressources.
La présente a donc pour objet d'exprimer à cette
commission notre conviction profonde qu'il est dans l'intérêt
public que la Régie de l'électricité et du gaz conserve
juridiction sur cette forme d'énergie couramment utilisée qu'est
la vapeur. Nous allégerons qu'il y a d'énormes avantages et peu
d'inconvénients à ce que la régie conserve et exerce cette
juridiction sur la vapeur, compte tenu de l'importance de cette forme
d'énergie dans une province nordique comme la nôtre, de
l'expertise et de l'expérience acquises par la régie en la
matière, du caractère monopolistique par nature des distributeurs
de vapeur, du fait que la vapeur deviendrait l'une des formes d'énergie
non soumise à un organisme de contrôle spécialisé
et, finalement, des faibles coûts engendrés par l'exercice par la
régie de sa juridiction. M. le Président, je vous remercie.
Je passe maintenant la parole à Jean Richard.
M. Richard (Jean L.): M. le Président, M. le ministre, MM.
les députés membres de la commission, comme on vous l'a dit, je
suis responsable de l'exploitation des
propriétés de Trizec dans la région de l'Est du
Canada, c'est-à-dire Toronto, Montréal, Québec et Halifax.
Je vous suis reconnaissant de l'occasion qui nous est offerte de venir vous
faire part des sérieux soucis que nous avons par rapport à
l'avant-projet de loi sur la Régie du gaz naturel.
Vous comprendrez que nous sommes parmi les plus gros consommateurs de
vapeur au Québec et que nos soucis se rapportent au projet de
déréglementation de la production de la vapeur et de la vente de
la chaleur. Cette proposition nous semble mal à propos, surtout
qu'après des années d'attente et de procédure, la
Régie de l'électricité et du gaz vient, en vertu de
l'ordonnance V-45, de juger les taux exigés par notre fournisseur pour
la vapeur que nous utilisions comme étant abusifs.
Évidemment, nous sommes intéressés, mais c'est
aussi notre conviction profonde qu'il est dans l'intérêt public
que la régie en question conserve juridiction sur cette forme
d'énergie couramment utilisée qu'est la vapeur. Nous ne cherchons
pas une nouvelle réglementation, mais simplement le maintien du statu
quo. Comme M. Préfontaine l'a mentionné, il y a la question de
l'importance de cette forme d'énergie, l'expertise et
l'expérience acquises par la régie, le caractère
monopolistique et notre souci de l'égalité, ainsi que le fait que
cette juridiction n'entraîne que de faibles coûts dans son
exercice.
Laissez-moi vous donner quelques chiffres sur la question de
l'importance de l'énergie. Vous les trouverez dans le mémoire.
Selon nos estimations, plus de 80 000 Québécois travaillent tous
les jours dans des immeubles dont la vapeur est la source de chauffage. Le
coeur du centre-ville de Montréal, environ dix millions de pieds
carrés, est particulièrement affecté et les gens
touchés sont les locataires plus que les propriétaires. Si vous
me permettez quelque digression, j'aimerais réagir à quelques
propos que j'ai entendus juste avant. C'est effectivement
d'intérêt public, cela touche nos locataires et les locataires
d'autres propriétaires. Cela touche le centre-ville, le coeur de la
ville comme tel. Cela impose un fardeau excessif, à notre avis, et
affecte donc l'attrait que peuvent avoir Montréal et le centre-ville de
Montréal comme lieu d'implantation.
Dans notre cas, le récent jugement de la régie nous
indique que nos locataires de Place Ville-Marie souffrent d'un
désavantage annuel de l'ordre de 0,50 $ le pied carré. Vous
pouvez y penser un peu comme une taxe qui vient subventionner
l'inefficacité de notre fournisseur et, à partir de taux
trouvés abusifs par la régie, de lui fournir un rendement annuel
d'environ 126 %, toujours d'après la régie.
Autre réaction à la proposition: notre contrat de bail
emphytéotique comporte des clauses qui, après une révision
de 20 ans, devraient être acceptables. En fait, on dit là-dedans
que la vapeur se vend "at a price related to cost of production and including a
fair margin of profit". C'est cette question de rendement raisonnable
"including a fair margin of profit" que nous avons eu à débattre,
mais, pour des raisons de fait et d'expérience, nous nous sommes
trouvés dans l'impossibilité d'avoir satisfaction sur une base
équitable selon le bail emphytéotique et selon le contrat de la
vapeur.
La question de l'expertise acquise par la régie est, je crois,
d'une évidence vu la composition et la fonction de la régie. Si
cet avant-projet de loi se concrétisait, il aurait comme
conséquence de forcer les producteurs et les consommateurs de vapeur
à recourir aux tribunaux de droit commun, qui, en soi, n'ont pas
nécessairement juridiction, ne sont pas conçus pour exercer les
fonctions de supervision propres à un organisme réglementaire et,
de ce fait, n'ont pas les ressources nécessaires pour effectuer le
contrôle permanent des entreprises d'utilité publique imposant
ainsi aux consommateurs de vapeur le fardeau démesurément lourd
d'exercer ce contrôle.
Notre mémoire fait référence à ce fardeau
disant qu'il est presque impossible à relever pour les consommateurs
puisque c'est le producteur qui détient la preuve technique et comptable
dont les consommateurs ont besoin pour prouver leurs allégations. Par
son pouvoir d'enquête inhérent et ses ressources humaines et
techniques qualifiées, la régie peut obtenir l'information
désirée plus facilement offrant ainsi aux consommateurs un
contrepoids à la position privilégiée dans laquelle se
trouve le producteur. Il s'agit là précisément de
l'objectif poursuivi par l'instauration d'organismes de contrôle.
Aussi avons-nous un souci d'égalité. En fait, nous sommes
préoccupés par l'inégalité qui résultera de
l'avant-projet de loi. Si l'avant-projet de loi est adopté, la vapeur
deviendra la seule source d'énergie importante nécessaire
à la vie et produite par des intérêts privés qui ne
sera pas sous l'oeil attentif d'un organisme de contrôle comme la
régie. Si l'avant-projet de loi est adopté tel que
présenté, les consommateurs de vapeur seront grandement
désavantagés vis-à-vis des consommateurs des autres formes
d'énergie puisqu'ils ne pourront plus compter sur la présence
d'un organisme de contrôle, ne serait-ce que pour laisser planer sur les
producteurs et distributeurs la menace du recours à la régie si
ceux-ci s'avèrent déraisonnables. De même, les producteurs
et distributeurs de vapeur ne bénéficieront plus de la
régie qui leur garantit un rendement raisonnable mais constant.
C'est un contrôle peu coûteux. La régie
fait un travail utile et efficace, et vous constaterez dans notre
mémoire qu'entre 1980 et 1985 moins de 0,5 % du temps de la régie
fut consacré à la vapeur. La cause récente qui a
duré 2'3 jours entre le Canadien National et nous fait exception. Par
contre, la nécessité de la régie est réelle, ne
serait-ce que pour laisser planer cette menace de recours devant la
régie si les parties s'avèrent déraisonnables.
Il y a la question du caractère monopolistique. J'aimerais
demander à mon collègue, M. Jacques Métivier,
vice-président de l'Association des propriétaires et
administrateurs d'immeubles de Montréal, d'en parler, mais permettez-moi
de donner tout de même une position. On me rapporte que M. Lucien Mouton,
comptable agréé à la régie, a
présenté un mémoire et que, lors de cette
présentation, il a conclu que, nous, consommateurs de vapeur, sommes les
plus captifs. Outre le fait qu'une conversion à d'autres sources de
chaleur soit difficile, si on enlève le pouvoir de surveillance de la
régie en matière de vapeur, y a-t-il un autre tribunal qui aura
juridiction? Je pense que ce sont des points très graves et j'aimerais
appuyer à 100 % la thèse que nous sommes captifs - Jacques vous
en parlera - et qu'une conversion peut effectivement être très
difficile. Merci. Je demanderais à Jacques de conclure. (15 h 15)
M. Métivier (Jacques): M. le Président, M. le
ministre, messieurs les députés, mon intervention va se limiter
essentiellement à quelques thèmes et quelques commentaires pour
enchaîner sur les propos de M. Richard et aussi pour répliquer
à certains propos qui ont été tenus par les
représentants du CN.
Le premier thème est la libre négociation. Je pense
qu'à ce chapitre on devrait apporter comme réplique que l'aspect
physique des installations, c'est-à-dire la bouilloire qui est
détenue ou qui est sous le contrôle du producteur,
m'apparaît assez évident pour souligner le fait qu'on peut
difficilement négocier librement lorsque l'installation,
l'infrastructure appartient à quelqu'un d'autre. Une autre limite aussi
de la libre négociation, c'est un contrat d'une durée de 99 ans,
qui est lié à un bail emphytéotique, on le
reconnaît. Cela nous oblige à nous approvisionner en vapeur au CN.
Il contient une demande historique qui est valable pour la durée du bail
emphytéotique ou la durée du contrat, soit 99 ans. Ce qui veut
dire qu'au moment où on atteint une pointe ou une demande, cette pointe
demeure valable pour 99 ans pour le reste du bail. Je fais
référence ici à certains extraits du contrat qui sont dans
notre mémoire, onglet 5, je pense, pages 60 et suivantes.
Comment se fait-il que Trizec et l'Association des propriétaires
et admi- nistrateurs d'immeubles de Montréal aient accepté de
représenter les membres propriétaires devant cette commission?
Premièrement, parce que l'expérience de la libre
négociation fut tout autre; plus de dix ans de démarches
infructueuses, qui se sont intensifiées, soit dit en passant, durant les
trois dernières années, ce qui correspond, à tout hasard,
au dépôt de la requête devant la Régie de
l'électricité et du gaz. Plus de deux ans de guérilla
juridique, 23 jours d'audiences pénibles et longues - je le sais, j'ai
assisté à chacune des journées. Le résultat de tout
cela, pour reprendre un peu les propos d'un représentant du CN: cela
laisse le CN prisonnier d'un rendement raisonnable de 126 %. C'est la
conclusion qu'on en a tirée.
Deuxième argument en ce qui concerne le recours à d'autres
sources d'énergie. Je reviens à mon exemple de tantôt. Il
est difficile pour un utilisateur de vapeur qui n'a pas prévu au tout
début l'installation d'une chaudière ou une installation
électrique prévoyant la transformation d'énergie en source
de chaleur, de l'installer après coup. Il est toutefois possible. La
technique actuelle nous permet probablement d'espérer qu'on puisse le
faire, mais, dans les faits, ce n'est pas le cas et ce n'était pas
l'idée de départ. Le contrat, de toute façon, nous
empêche d'utiliser d'autres sources d'énergie. Il faudrait quand
même s'approvisionner au CN, il faudrait quand même respecter les
bases mêmes du contrat avec la pointe telle qu'elle est. Donc, nous
devons nous approvisionner à ses conditions.
En ce qui a trait à l'aspect dépréciation des
actifs qui pourrait tendre vers zéro, je pense qu'encore là la
réalité est un peu différente. En ce qui concerne
l'énergie aujourd'hui, je pense que toutes les installations
requièrent des réinvestissements constants. La preuve, c'est
qu'on sait très bien que le CN vient d'investir à peu près
2 000 000 $ dans sa centrale, ce qui fait que c'est à peu près
impossible de penser que cet investissement pourrait être réduit
à zéro. Il y a du réinvestissement constant lorsqu'on a
une centrale en exploitation.
Les autres aspects en ce qui touche le rendement, ce qui semblait
inquiéter les représentants du CN. Premièrement, je pense
que l'application d'un rendement relève essentiellement de la
régie, c'est-à-dire que, jusqu'à présent, elle a
fait quand même un exercice assez important et assez en profondeur pour
établir sur quelle base devait être considéré ce
rendement.
Deuxième point, l'aspect dépréciation. On pense que
cette dépréciation permet à l'investisseur de reprendre
son investissement. Je pense que l'analyse qui a été
déposée devant vous n'en tient pas compte.
Troisième point, ce qui a été mentionné
à l'intérieur de l'ordonnance V-45 semble
tout à fait équitable en raison d'une application
universelle, c'est-à-dire qu'on applique le coût historique
déprécié plutôt que le coût de remplacement
déprécié. On a vu cette application dans d'autres
territoires, à l'exception de la Caroline du Nord. Autre point
important, c'est que s'il n'y a aucune intervention de la part de la
régie, cela laisse les usagers ou les utilisateurs de vapeur avec un
tarif qui peut être de 30 % à 40 % plus élevé que ce
qu'on peut trouver sur le marché.
Il y a un autre point en ce qui a trait aux restrictions de l'expansion
du réseau en raison des limites imposées par la technologie. J'ai
parlé tantôt de la technologie qui nous laisse espérer
à peu près n'importe quoi, surtout en ce qui a trait à
l'énergie, parce que le rendement peut y être assez facile. Mais
l'autre point plus important, c'est une question de choix du producteur. On n'a
pas pu percevoir jusqu'à présent un effort concret d'ouvrir le
marché, c'est-à-dire qu'on n'a pas vu, nous, le CN faire des
représentations pour vendre sa vapeur à d'autres
utilisateurs.
On regarde actuellement la tendance européenne en ce qui concerne
les réseaux de chauffage urbain. Il y a transformation, de plus en plus,
de ces réseaux en réseaux d'eau chaude et ce qu'on pense pouvoir
anticiper ici, c'est que, si cette centrale est transformée en
réseaux de chauffage urbain utilisant l'eau chaude, on pourrait,
à ce moment-là, ouvrir les portes à l'exploitation de
cette centrale, et cette centrale ne serait pas réglementée. On
pourrait étendre beaucoup plus le champ d'action.
En conclusion, ce qu'on demande, c'est l'application du contrat. On a
fait référence largement à cela, mais je pense que c'est
important. On pense à l'application du contrat avec un taux ou un
rendement raisonnable. On ne demande pas l'ajout d'une loi, comme y faisait
référence tantôt mon confrère, mais on demande le
maintien de cette loi. Je pense que maintenir la situation telle qu'elle est
décourage l'investisseur en ce qui a trait aux mesures d'économie
d'énergie.
À la toute fin, j'aimerais vous rappeler ou vous ramener au
mémoire qu'on a déposé, à l'onglet numéro 5.
Le premier point, c'est page 79. J'aimerais en faire lecture ici, au bas de la
pages "Une rémunération annuelle de 1 724 854 $ sur un
investissement de 1 365 963 $ représente un rendement annuel d'environ
126 %." J'y faisais référence tantôt.
Le deuxième point, page 87, nous apparaît important:
"L'intimée réclame que ces 122 927 $ en se basant sur une
allocation des coûts de la gestion des achats du CN établie en
fonction du montant impliqué dans chaque achat." C'est un montant requis
pour le CN pour traiter une facture, entre autres, qui était la facture
du gaz.
Je m'excuse, j'avais un paragraphe auparavant. Fin de la page 86: "Dans
ces circonstances, la régie accepte avec réserves les allocations
de frais indirects proposés par l'intimée, à l'exception
de la charge indirecte de 122 927 $ pour la gestion des achats de gaz naturel
qui nous paraît nettement abusive." J'ai passé un paragraphe
tantôt, je m'excuse.
Les deux derniers points...
Le Président (M. Théorêt): Est-ce que vous en
avez encore beaucoup, monsieur, parce que c'est terminé?
M. Métivier: Deux autres.
Le Président (M. Théorêt): D'accord.
M. Métivier: Page 63f maintenant, au premier
paragraphe. On parle d'une révision de 20 ans: "Pour les motifs
exposés à la section 4.5.2, la régie considère que
cet engagement n'a pas été respecté. Quant à sa
juridiction réglementaire, la régie est en accord avec le
principe, reconnu dans ledit bail ainsi que dans le contrat de vapeur, à
l'effet que le prix facturé par le CN doit être basé sur
les coûts de production plus un profit raisonnable", pour reprendre les
mêmes propos.
À la même page, au paragraphe du milieu: "Pour les raisons
énoncées à la section 4.5.2, la régie juge que les
taux exigés par l'intimée pour la vapeur qu'utilise la
requérante sont abusifs."
Le Président (M. Théorêt): Merci, M.
Métivier. Je vais maintenant céder la parole au ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Merci. Ce n'est pas un problème facile que
vous nous apportez. Je ne sais pas si je devrai vous remercier pour votre
mémoire ou vous demander de sympathiser avec nous. J'ai posé
cette question au représentant du CN et je voudrais vous poser la
même question. On fait référence au bail et c'est une
entente que les parties ont signée librement en 1960, je crois. Est-ce
que dans le bail il y a une formule pour fixer le prix de la vapeur par le CN
aux clients? Est-ce que c'est une formule mathématique, qui n'est pas
laissée à la discrétion du fournisseur?
M. Métivier: Je vais laisser Me Brock répondre
à cette question.
M. Brock (William): M. le ministre, si je peux répondre
à votre question, premièrement, j'ai écouté la
réponse de Me Fortier. En tout respect, je ne suis pas d'accord. Si vous
allez à la page 59 du jugement de la
régie, à l'onglet 5, vous verrez que, dans le bail
signé en 1958, la seule stipulation concernant la vapeur est à
l'article 18 cité au haut de la page 60: "at a price related to cost of
production and including a fair margin of profit". C'était la seule
formule fixée par le bail. C'est vrai qu'après le bail les
parties ont signé un contrat en 1962, je pense, un amendement en 1964 et
une version finale en 1966 où il y avail une formule très
spécifique qui n'était pas discrétionnaire. Cette formule
non discrétionnaire a été appliquée seulement entre
1966 et 1986. Il y a une autre clause dans le contrat de vapeur qui est
citée à la page 62 du jugement, c'est-à-dire à
l'article 5 - je ne suis pas certain que ce soit 5, c'est peut-être 9 -
qui explicite cette intention en prévoyant la révision tous les
20 ans du mode de calcul du prix, étant entendu que ce prix: "shall be
related to the cost of production and include a fair margin of profit".
C'est-à-dire qu'il y avait une discrétion à la fin des 20
premières années, soit à compter du 1er juillet 1986.
C'est cette discrétion et cette obligation d'ajuster le prix et de faire
une révision que la régie a trouvé que le CN n'avait pas
respectées. Je pense maintenant que c'est pas mal
discrétionnaire.
M. Ciaccia: Je ne voulais pas aller dans les détails, je
voulais juste avoir votre réaction. D'après vous, la formule est
discrétionnaire. En général... M. Brock, M.
Métivier, M. Préfontaine ou un autre intervenant pourra me
répondre. En général les consommateurs de vapeur, est-ce
qu'ils peuvent avoir accès à d'autres formes d'énergie ou
à d'autres producteurs de vapeur?
M. Métivier: À d'autres formes d'énergie, en
principe, oui, sauf que, comme je l'expliquais tantôt...
M. Ciaccia: Tous les consommateurs de vapeur aujourd'hui...
M. Métivier: Les consommateurs d'aujourd'hui.
M. Ciaccia: ...peuvent avoir accès à d'autres
formes d'énergie.
M. Métivier: En principe. Pourquoi je dis en principe,
c'est que vous ne détenez pas chez vous l'installation pour transformer
l'énergie en chaleur. À titre d'exemple, on peut parler du
bâtiment qui nous concerne, mais je pense que c'est le cas de Place
Bonaventure, du 800 Dorchester, et de la Sun Life. Elles n'ont pas de
bouilloire. Alors, elles peuvent, moyennant un investissement majeur et un
travail au niveau de l'infrastructure, sûrement en installer une.
M. Ciaccia: Les autres utilisateurs de vapeur, par exemple,
Saint-Malo et tous les autres exemples que vous nous donnez, est-ce qu'ils sont
dans la même situation que...
M. Métivier: Je pense que, de façon
générale, le distributeur détient l'équipement, son
client ne l'ayant pas. Lui, il est strictement branché sur un tuyau qui
lui donne la chaleur dont il a besoin.
M. Ciaccia: Mais, par exemple, le Château Champlain, dans
votre mémoire, à l'annexe 2, je note que le Château
Champlain ne s'approvisionnera plus en vapeur du CP. Quelle est son
alternative? (15 h 30)
M. Métivier: D'installer sa propre bouilloire transformant
de l'énergie.
M. Ciaccia: Alors, tous les autres consommateurs pourraient...
Peut-être que ce serait plus difficile à Place Ville-Marie, mais
ne parlons pas de Place Ville-Marie pour le moment, les autres utilisateurs
pourraient faire la même chose?
M. Métivier: Ils pourraient investir dans une centrale,
s'installer eux-mêmes une centrale, oui.
M. Ciaccia: Si certains de vos membres achètent de la
vapeur du CN, qu'arrivera-t-il si le CN décide unilatéralement de
se départir de ses installations à cause du faible revenu qu'il
retire depuis la dernière décision de la régie? Disons que
le CN décide qu'il n'est plus payant de vous vendre de la vapeur. Il ne
vous en vend plus, disons, qu'allez-vous faire? Qu'arrivera-t-il?
M. Métivier: II faudrait investir, comme je le disais
tantôt, s'installer une bouilloire électrique, ou une bouilloire
au gaz, ou une bouilloire à l'huile à l'intérieur du
complexe.
M. Ciaccia: Physiquement, est-ce possible?
M. Métivier: Physiquement, on a fait des études
très sommaires. Il y avait certaines limites aux études parce
qu'il fallait demander encore là, dans certains cas, des permissions au
CN pour le passage du tuyau de gaz ou du réservoir d'huile, ces
contraintes-là. Nous ne sommes pas allés jusqu'à ce point.
Physiquement et techniquement, c'est toujours possible effectivement.
M. Ciaccia: À la page 7 de votre mémoire, vous
dites que "la vapeur deviendra la seule source d'énergie importante
nécessaire à la vie et produite par des intérêts
privés qui ne sera pas sous l'oeil attentif d'un organisme de
contrôle comme la régie". Préconisez-vous que le
commerce
du mazout, lourd et léger, soit aussi réglementé?
Présentement, votre affirmation à la page 7 n'est pas tout
à fait exacte quand vous dites que la vapeur est la seule source
d'énergie qui n'est pas réglementée. L'huile à
chauffage n'est pas réglementée. Le mazout brut et le mazout
iéger ne sont pas réglementés.
M. Richard (Jean L.): On ne préconise pas vraiment de
réglementation additionnelle, M. le ministre. Il y a beaucoup de
réglementation dans le domaine de l'énergie
pétrolifère. Je ne m'y connais pas assez. Vraiment, comme on le
disait dans notre présentation, on ne cherche pas de
réglementation additionnelle, on cherche simplement le statu quo.
M. Métivier: On fait surtout référence, par
opposition aux deux grandes sources, l'électricité et le
gaz...
M. Ciaccia: Vapeur, gaz, électricité...
M. Métivier: Vapeur, gaz, électricité, de
façon générale...
M. Ciaccia: Ces trois sont maintenant réglementées.
Le projet de loi enlèverait la réglementation sur la vapeur, mais
il y a d'autres sources d'énergie qui ne sont pas
réglementées.
M. Métivier: Si on aborde le champ d'application des gros
utilisateurs, ce n'est plus de notre domaine, je pense.
M. Richard (Jean L.): La réglementation n'est
peut-être pas locale dans certains cas, mais il y a aussi
possibilité de changer plus facilement de fournisseur. Il y a une
concurrence ouverte dans le marché qui n'existe pas. Nous sommes
réellement très captifs, comme on l'a expliqué.
M. Ciaccia: J'essaie de comprendre votre notion de
captivité, parce qu'on me dit qu'il est possible que les consommateurs
puissent installer une autre forme d'énergie. Vous, vous me dites que
vous êtes captifs. Lequel des deux?
M. Métivier: C'est toujours à cause de la
bouilloire. Dans votre résidence, par exemple, vous n'avez pas de
bouilloire du tout. Vous n'avez qu'un tuyau qui entre chez vous. C'est en ce
sens qu'on est très captifs. Si on n'a pas prévu au début
de la construction de votre résidence ou d'un bâtiment quelconque
l'installation d'une centrale productrice de vapeur ou d'eau chaude, vous
n'avez pas du tout d'espace pour le faire par la suite. Cela demande une
modification assez fondamentale à votre structure.
M. Ciaccia: Supposons un instant que la régie n'ait pas
juridiction, auriez-vous d'autres possibilités de vous
référer... Vous avez des différences
d'interprétation sur le fond, vous avez un litige avec le fournisseur.
Avez-vous d'autres moyens d'en arriver à résoudre vos
différends? Qu'est-ce que le contrat... soit dans le contrat ou par
d'autres moyens que vos conseillers auraient pu porter à votre
attention...
M. Brock: Si je peux répondre, M. le ministre, c'est une
question assez compliquée. J'ai fait une certaine recherche sur cette
question et je ne suis pas certain qu'il y ait une autre cour ouverte à
Trizec ou à Boma dans les circonstances, en ce sens que les tribunaux de
droit commun n'ont pas le droit de surveillance statutaire qui existe
maintenant pour la régie.
M. Ciaccia: Avez-vous une opinion différente sur
l'interprétation? On avait mentionné qu'il y avait une clause
d'arbitrage dans le bail. Est-ce quelque chose que vous ne songez pas à
utiliser?
M. Brock: Je ne suis pas certain que ce soit une divergence
d'opinions. Je pense que, dans le contrat, CN a une certaine discrétion.
Il est possible qu'il y ait un recours à un tribunal de droit commun,
mais ce n'est pas clair. Chose certaine, le seul tribunal à avoir un
droit de surveillance est la régie. C'est très important; ce
droit de surveillance n'est pas seulement une juridiction très ad
hoc.
M. Ciaccia: Je ne veux pas entrer dans les interprétations
juridiques même s'il y a beaucoup d'avocats dans la salle, mais,
d'après l'interprétation que je peux voir, j'essaie de comprendre
pourquoi vous allez devant la régie. Corrigez-moi si je me trompe, il
semblerait qu'il y ait une différence d'opinions sur le "fair margin of
profit". Est-ce que je me trompe en disant que l'utilisateur a une
Interprétation du terme "fair margin of profit" et que le CN en a une
autre?
M. Brock: J'ai assisté avec Me Jean Bertrand à 23
journées d'enquête devant la régie. Comme le
député de Roberval l'a dit hier, les tribunaux de droit commun ne
sont pas très bien placés pour exercer une juridiction comme
cela. Je pense qu'il serait difficile de plaider cette question de rendement
raisonnable devant un tribunal de droit commun parce que ce tribunal n'aurait
pas les experts, les analystes et le "support staff" nécessaires. C'est
possible en théorie de faire appel à la Cour supérieure ou
à une autre cour pour un jugement déclaratoire, mais je pense que
c'est très spécialisé et que c'est vraiment un cas qui
fait appel à
un tribunal spécialisé comme la régie qui a une
expertise.
M. Ciaccia: Qu'arrivera-t-il si la régie examine les
documents, examine votre position et celle du fournisseur, et décide que
la seule clause qu'elle doit déterminer, c'est le "fair margin of
profit" et qu'elle le détermine à 13 %, comme elle le fait pour
Gaz Métropolitain? Elle donne 13 % et laisse tout le reste ensemble.
Elle ne va pas à tous les éléments pour déterminer
le coût de la vapeur, le coût des investissements... Si le seul
élément que la régie détermine est le "fair margin
of profit" et qu'elle donne 14 % ou 15 %, qu'arrivera-t-il? Serez-vous
satisfaits d'une telle approche?
M. Brock: Pas vraiment parce que ce n'est pas seulement une
question de déterminer le taux de rendement, c'est plutôt une
question de déterminer la base sur laquelle on doit appliquer ce taux de
rendement, M. le ministre.
M. Ciaccia: Mais la base n'est pas déterminée dans
le bail?
M. Brock: Non. Il est dit seulement: "a fair margin of profit",
et, selon nous, c'est 13 % ou un chiffre semblable appliqué sur l'actif
utilisé, sur l'investissement utilisé par le CN.
M. Ciaccia: Vous avez différents chiffres sur l'actif
utilisé ou pas utilisé. Vous en utilisez moins et eux vous
facturent plus d'après le bail?
M. Brock: Comme Me Audet le faisait remarquer hier...
M. Ciaccia: Écoutez, je ne veux pas me transformer en
régie. C'était parti pour ça. J'essayais juste de
comprendre les...
M. Brock: Vous avez soulevé une très bonne question
et je pense qu'elle souligne l'importance de la régie. Nous ne sommes
pas ici la régie. C'est la régie qui a l'expérience et qui
peut décider de ces questions. Je pense que ce serait une situation
très difficile si un juge de la Cour supérieure devait trancher
cette question sans les gens nécessaires pour...
M. Ciaccia: Mais l'article 63 donne au gouvernement le droit de
donner une orientation à la régie. Je pourrais dire à la
régie: Vous allez déterminer ce qu'est le "fair margin of profit"
et laisser le reste d'après les conditions du bail.
M. Brock: Oui.
M. Ciaccia: Est-ce que vous seriez satisfaits de cela?
M. Brock: Franchement, non. Des voix: Ha! Ha! Ha! M.
Ciaccia: D'accord.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Tout le monde sait que le ministre a des
appétits très développés quand il s'agit de faire
des profits. C'est évident, je comprends la réponse qu'on ne se
satisferait pas d'une marge de profit déterminée comme cela.
Ma question est plutôt complexe, mais je vais la simplifier. Je
vais vous demander de me donner une réponse la plus claire possible.
Vous avez parlé tantôt d'un rendement. D'abord, les gens du CN qui
ont comparu avant vous se sont déclarés extrêmement captifs
de vous et vous vous déclarez extrêmement captifs d'eux. J'ai
compris - j'ai l'impression, comme les membres de la commission - qu'il n'y
avait pas moyen de vous séparer. Le problème concerne le prix et
vous dites: C'est épouvantable, le CN a fait 127 %. Le CN nous
déclarait qu'il avait des problèmes parce que ce n'était
pas vraiment payant, que vous ne preniez pas toutes les quantités. En
plus, le rendement qu'il avait sur ses investissements n'était pas
suffisant. Les 127 % dont vous avez parlé - vous avez mentionné
ce chiffre tantôt - sur quoi sont-ils basés? J'avoue que 127 %,
j'investirais peut-être à ce taux-là; cela me tenterait un
peu. Je voudrais savoir sur quoi ce taux est basé. Sur quoi vous
basez-vous? C'est votre chiffre, d'abord, les 127 %? D'où vient ce
chiffre?
M. Métivier: C'est pour faire référence
à l'ordonnance de la régie. Les extraits ou les chiffres qu'on a
mentionnés tantôt viennent de l'ordonnance de la régie.
M. Gauthier: D'accord.
M. Métivier: Je ne veux pas non plus interpréter,
mais on a certains extraits ici. La régie a dit: Vous avez le droit de
récupérer vos dépenses. Alors, il a fallu faire une
analyse des dépenses réelles de la centrale et il a
également fallu établir le rendement sur le capital investi. Le
gros point était de savoir sur quel genre de capital, quel était
le capital investi par le CN. Cela a été le débat. C'est
pour cela qu'on parle beaucoup de valeur dépréciée ou de
valeur actuelle. Il a fallu faire l'analyse des comptes. Les experts-comptables
et les experts de la régie ont fait l'analyse des comptes pour
établir quels étaient les coûts
qui devaient être exigés, c'est-à-dire les
coûts de l'industrie qu'on dit réglementés et qui devaient
être exigés aux clients du CN, et, de plus, établir la
valeur de l'actif de cette centrale. Tout cela a fait qu'on est arrivé
avec un chiffre x qui a établi, d'une certaine façon,
comparé avec le chiffre ou les entrées de fonds actuelles, le
rendement que le CN pouvait donner. Mais c'est vraiment issu du document ou de
l'ordonnance de la régie.
M. Gauthier: Je veux bien vous croire, mais j'ai de la
difficulté à comprendre que les gens du CN soient si gourmands
que cela.
M. Ciaccia: Le gouvernement fédéral. M.
Gauthier: Le gouvernement fédéral? Des voix: Ha! Ha!
Ha!
M. Gauthier: M. le ministre, c'est vous qui l'avez dit. Je vous
en laisse la paternité. J'imagine que les gens qui nous écoutent
et qui ne sont pas des experts doivent se dire: II y a certainement quelqu'un
des deux parties - je ne veux pas faire l'arbitrage entre les deux - qui
exagère quelque part. Proportionnellement à d'autres formes
d'énergie, est-ce que la vapeur, c'est beaucoup plus cher, beaucoup
moins cher? Comment cela se compare-t-il? D'abord, est-ce que cela se
compare?
M. Métivier: Je n'ai pas de chiffres. C'est
peut-être un peu plus dispendieux, effectivement, à la base, parce
qu'il y a quand même un réseau de distribution, il y a des pertes
de chaleur parce que vous transportez la vapeur dans les tuyaux, vous parcourez
une certaine distance, contrairement à l'eau ou
l'électricité, ou bien des fois vous avez votre circuit à
l'intérieur de votre boîte. Je ne pourrais pas vous dire à
ce moment-ci quelle est la proportion. Est-ce que c'est 5 % ou 10 % de plus que
cela pourrait coûter comparativement à une autre source
d'énergie? Je n'ai pas de chiffres entre les mains. Mais ce ne serait
pas plus que cela.
M. Gauthier: Le coût actuel auquel vous avez à faire
face en raison des exigences du CN et de la décision de la régie,
cela vous mettrait à des coûts à peu près
comparatifs à d'autres formes d'énergie?
M. Métivier: On a comparé avec d'autres
producteurs. Par exemple, la gare Windsor produit. On a une liste de centrales
qu'on a pu analyser, de qui on a pu obtenir les chiffres. À toutes fins
utiles, cela nous place, avec ce que la régie a décidé
aujourd'hui, à peu près au même niveau que d'autres
centrales.
(15 h 45)
M. Richard (Jean L.): J'aimerais juste préciser, M. le
député, que ce n'est qu'avec le jugement de la régie
appliqué que cette réponse s'applique comme cela. La situation
antérieure, la situation que nous avons vécue ces
dernières années, c'est qu'il y a un tarif de 30 % à 40 %
plus élevé.
M. Gauthier: Si je comprends bien, cela veut dire - si j'accepte
vos données - que ce n'est pas demain la veille qu'on va voir quelqu'un
investir dans un système de production de vapeur pour chauffer quelque
installation que ce soit. Si les chiffres dont vous me parlez sont exacts? un
rendement sur une valeur qui est extrêmement
dépréciée, d'après ce que je comprends, un
rendement intéressant, mais sur une valeur
dépréciée, cela donne une forme d'énergie qui
coûte un peu plus cher déjà que d'autres énergies
plus répandues. Cela veut dire que, si on pense à des
investissements nouveaux qui devraient être faits pour produire de la
vapeur et fournir de l'énergie, probablement que le problème ne
se posera pas parce qu'il n'y a personne qui va investir là-dedans, si
je comprends bien.
M. Richard (Jean L.): Je pense que je ne tirerais pas cette
conclusion. En Europe, les réseaux de chauffage urbain se multiplient.
Le décalage de 30 % ou 40 %, c'est entre les taux qu'on nous appliquait
et le jugement de la régie. Cela fait une différence
énorme. Il y a aussi, probablement, des améliorations à
apporter tels les investissements que vient de faire le CN pour
améliorer la centrale. Non, la façon de livrer l'énergie
comme telle peut être tout aussi efficace. La différence de 30 %
ou 40 %, c'est la différence de tarif qu'on nous appliquait. D'ailleurs,
si on se basait sur des tarifs d'autres centrales de chaleur à partir de
la vapeur, ce serait aussi 30 %, 35 %, 40 % moins coûteux que le tarif
qu'on payait.
M. Gauthier: Écoutez, il y a un argument qui nous a
été donné par le CN tout à l'heure et auquel je
suis quand même sensible. Même si on considère que les
tribunaux n'ont peut-être pas toujours le "staff" nécessaire pour
fouiller ces questions, le CN dit: Écoutez, vous avez affaire là,
et j'avoue qu'on est un peu sensible à cela, vous avez affaire à
une entente, à un contrat signé entre deux parties qui sont
captives l'une de l'autre. D'après ce qu'on peut comprendre, vous n'avez
pas le choix, vous d'être pris par le CN et le CN d'être pris par
vous. Donc, M. le ministre, MM. les députés, l'Etat n'a rien
à voir avec cela. C'est un contrat privé, c'est une entente entre
deux parties. Il y a dans notre société, pour un paquet de
problèmes tout aussi
complexes et parfois bien plus complexes, il existe un système
judiciaire qui répond à cela.
Je sais que vous allez peut-être me répondre: Oui, mais les
tribunaux ne sont peut-être pas équipés pour évaluer
les taux de rendement, calculer toutes ces affaires-là. J'avoue que la
tentation est grande pour les hommes politiques de dire: Dans le fond, c'est un
peu vrai cette affaire-là. Avez-vous des arguments à nous
redonner qui seraient de nature à nous faire changer d'idée si,
d'aventure, notre opinion était faite comme celle que je viens de vous
dire?
M. Métivier: Je pense que tantôt on a fait
référence à l'étendue, en fait, de l'utilisation de
la vapeur au niveau... limitée au centre-ville de Montréal, c'est
quand même assez important. C'est un des points, un des facteurs que je
trouve important.
Pour en revenir à l'entente et pour en revenir au contrat qui
nous lie, je reviens à ce que je disais tantôt, c'est que, nous,
on se dit: Ce n'est pas vraiment l'application du contrat en tant que tel, il y
a une notion à l'intérieur de cela qui dit: "fair margin of
profit" et on aimerait que ce soit appliqué avec une marge raisonnable.
La régie - et on était très heureux de la façon que
cela fonctionnait, on ne demanderait pas de changement là-dessus -
était le tribunal qui avait les ressources techniques et
financières pour établir ce que c'est ce fameux... pas
nécessairement le "fair margin of profit", mais l'ensemble des
coûts d'une industrie qui est réglementée.
Tenant compte du fait qu'on est vraiment attaché au maximum,
tenant compte du fait qu'on a eu presque au moins au minimum une dizaine
d'années de démarche qui n'ont pas fonctionné, on se dit
au bout du compte qu'il y a au moins un tribunal qui peut nous entendre et la
régie a pu remettre le jeu à sa place. C'est vrai qu'on a
peut-être un parti pris là-dedans, mais on a eu un jugement qui
nous paraît juste et équitable.
L'autre point qui est impartant - je veux juste répliquer
à votre argument de tantôt - l'investissement dans les centrales
énergétiques, il n'y a rien qui empêche d'ouvrir
l'exploitation des centrales ou des réseaux de chauffage urbain. Comme
je l'ai mentionné tantôt, c'est un choix du fournisseur.
Deuxièmement, je pense qu'il n'y a rien dans le jugement de la
régie ni dans nos concepts à nous qui empêcherait de
réinvestir dans la centrale. On est les premiers heureux à voir
les gens réinvestir dans la centrale et fournir le rendement raisonnable
sur ce réinvestissement pour rendre la centrale encore plus
compétitive. C'est un concept sur lequel on est d'accord.
En ce qui concerne les primes à payer, parce que c'est
peut-être un petit peu moins efficace que les autres, on est prêts
aussi à payer cette prime, parce qu'on se dit que c'est propre, qu'on
n'a pas l'installation chez nous, mais qu'on jouit quand même d'un
certain avantage. C'est une excellente installation, soit dit en passant. De
sorte qu'on veut avoir un arbitre, un juge entre les deux, une personne qui,
techniquement, connaît les données de l'entreprise
réglementée et peut appliquer les concepts qui se donnent
ailleurs, ici, au Québec. D'un autre côté, on veut
éviter que l'exploitation de cette centrale devienne une exploitation de
chauffage urbain qui, elle, n'est pas réglementée, à
toutes fins utiles. Je pense que cela aussi pourrait nous nuire à nous
et à d'autres en même temps. C'est le chapeau de Trizec et le
chapeau de BOMA, de l'autre côté, en tant que propriétaires
d'immeubles.
M. Richard (Jean L.): J'aimerais ajouter l'aspect du
réseau fixe que représente un réseau de vapeur comme
celui-là. C'est un peu comme un réseau de gaz naturel, c'est de
la tuyauterie qui est en place, qui est fixe et les gens sont liés. Si
vous faites une projection et que vous dites que Gaz Métropolitain a
installé une centrale thermique à base de gaz naturel, mais qu'en
fait elle ne fabriquerait que de la vapeur à distribuer dans des tuyaux
aux industries ou au domicile des gens, il y aurait encore cette situation
monopolistique. C'est un parallèle qui peut se faire entre le gaz
naturel comme tel et le réseau de vapeur avec lequel nous vivons, parce
que ce sont des investissements importants qu'il faudrait faire pour essayer de
s'en sortir et il y aurait probablement des difficultés techniques en
plus. Il y a cet aspect de monopole qui vient jouer. Ce n'est pas seulement
chez nous. II y a d'autres gens qui... Nous-mêmes, cela nous a pris un
certain temps à trouver le mécanisme- II y a d'autres gens qui
pourraient être touchés et qui, sans doute, jouissent du fait que
la régie est là et qu'elle a juridiction.
M. Brock: Si je peux ajouter deux choses, s'il vous plaît,
aux commentaires de M. Richard et de M. Métivier. Premièrement,
ce n'est pas seulement Trizec qui était devant la régie.
Chauffage Saint-Maio a fait plusieurs représentations devant la
régie et a demandé l'assistance de la régie pour la
fixation de ses tarifs comme fournisseur de vapeur. Je pense que c'était
important pour Chauffage Saint-Malo. Deuxièmement, je pense que le
meilleur argument en faveur de la régie, c'est le travail et le jugement
de la régie. Celle-ci a jugé que, si elle n'a pas respecté
ses engagements, le tarif était abusif. C'est seulement à cause
de la juridiction de la régie et du jugement de la régie que le
CN doit maintenant respecter ses engagements, que le CN ne peut et ne
doit pas exiger un tarif qui soit abusif. Je pense que c'est le meilleur
argument en faveur de la régie. L'existence de la régie est la
seule raison pour laquelle, sous réserve, évidemment, de la
requête en évocation, nous avons un tarif raisonnable, juste et
équitable. C'est la seule chose qu'on veut.
M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député et M. le ministre. M. le député de Roberval,
en conclusion.
M. Gauthier; C'est déjà à moi?
Le Président (M. Théorêt): Vous étiez
bien parti.
M. Gauthier: Je vous remercie tout simplement de ce substantiel
mémoire que vous avez déposé, avec ce grand nombre de
chiffres susceptibles de nous éclairer. Je vous avoue cependant que
l'ordre dans lequel vous deviez être entendus en commission parlementaire
fait en sorte que les questions qu'on pose à l'un et à l'autre ne
sont pas nécessairement les mêmes. On aurait bien aimé
pouvoir poser d'autres questions à d'autres intervenants. De fait, on
n'est pas ici pour régler les différends - je pense que vous
l'avez compris - même si nos questions ont pu paraître aller dans
ce sens, mais, on est ici pour essayer d'avoir un éclairage sur
l'éventuel râle de la régie ou, plutôt, sur le
rôle de l'éventuelle régie, savoir si cela devrait oui ou
non s'étendre à la fourniture de vapeur. On va essayer de tenir
compte de tout cela. Il y aura certainement des recommandations à faire
au ministre au moment où il procédera à
l'élaboration de son projet de loi définitif. Nous aurons
également à intervenir au moment où le ministre aura
déposé le projet de loi et il faudra le travailler à la
commission parlementaire. Nous tiendrons compte de ce que vos
prédécesseurs nous ont dit et de ce que vous avez dit. On
essaiera de trouver là-dedans, au meilleur de notre connaissance, une
position qui soit juste et équitable pour tous. Je vous remercie.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Ciaccia: Je voudrais remercier les représentants qui
nous ont présenté ce mémoire, pour tous les
éléments qu'ils ont portés à notre attention. On va
étudier la question, on va regarder le rôle de la régie, le
but et tout ce qui entoure la question de la vente de la vapeur. On va
tâcher de trouver la meilleure formule possible.
M. Richard (Jean L.): Merci.
Le Président (M. Théarêt): Merci, messieurs.
Bon retour chez vous. J'invite maintenant les représentants de Gaz
Métropolitain inc. à prendre place à l'avant, s'il vous
plaît.
M. Caillé, MM. Gourdeau et Normand, les membres de la commission
vous souhaitent la bienvenue. Je pense que vous connaissez tous les
règles du jeu. Pour les fins, quand même, de l'audition, est-ce
que vous pourriez faire la présentation officielle de ceux qui vous
accompagnent?
Gaz Métropolitain inc.
M. Caillé (André): Bien sûr. Merci, M. le
Président. Alors, les personnes qui m'accompagnent sont à ma
gauche, M. Michel Gourdeau, qui occupe le poste de vice-président
principal, approvisionnements énergétiques et
développement industriel à Gaz Métropolitain; à ma
droite, M. Robert Normand, qui est vice-président principal, finances et
réglementation. Je voudrais maintenant présenter rapidement
l'entreprise Gaz Métropolitain, pour dire d'abord que c'est une
entreprise de services publics qui est impliquée dans la mise en
marché du gaz naturel, de même que dans la distribution du gaz
naturel sur le territoire québécois, essentiellement dans les
principales régions québécoises.
Deuxième élément important à souligner par
rapport à notre entreprise, c'est qu'elle a connu, depuis 1980, une
croissance très intense et pour l'illustrer, disons qu'en i960 l'actif
de l'entreprise était approximativement de 300 000 000 $ et
qu'aujourd'hui l'actif se chiffre à plus de 1 000 000 000 $. Cette
croissance-là s'est faite dans le territoire de la région
métropolitaine de Montréal, au nord et au sud, on doit dire, pour
350 000 000 $ additionnels au cours des sept dernières années. De
même, cette croissance s'est faite par l'acquisition d'autres
entreprises, notamment Gaz Inter-Cité Québec et Gaz provincial du
Nord. (16 heures)
Le nombre de nos clients s'élève à 170 000. En
volume, nos ventes sont de 15 % au secteur résidentiel - pour des fins
de simplicité, je l'appellerai par la suite le secteur petit
débit - et dans ce segment de marché on trouve - c'est un chiffre
très important - 145 000 clients. En volume, toujours, les ventes aux
secteurs commercial, institutionnel et petit industriel s'élèvent
à 20 % du volume de nos ventes et on trouve dans cette catégorie
23 000 clients. Finalement, dans le secteur grand débit, on parle ici de
grandes industries, on parle du secteur de l'aluminium, des pâtes et
papiers, de la métallurgie et de ta pétrochimie, incluant les
raffineries, 65 % des volumes vont à ce
marché et ce sont 2000 clients. Donc, un pourcentage, un nombre
très petit de clients qui consomment la majorité du gaz qu'on
distribue dans le territoire où est notre franchise.
Dernier point en ce qui concerne la présentation de l'entreprise:
Gaz Métropolitain est une filiale à 100 % de Noverco, laquelle a
des actions ordinaires transigées sur les marchés de la Bourse de
Montréal et de celle de Toronto. Et on peut dire que 84 % environ des
actions de Noverco sont détenues par environ 30 000
Québécois. Voilà pour ce qui est de la présentation
de mes collègues et de notre entreprise. Cela donne en chiffres l'image
de la réalité d'aujourd'hui, en termes concrets.
Au point de départ de notre présentation, on voudrait
faire reconnaître qu'il y a eu une évolution considérable,
très importante, du domaine de l'énergie au cours des mêmes
années, c'est-à-dire depuis 1980. On pourrait faire une longue
présentation là-dessus et énumérer plusieurs
facteurs qui ont changé. Mais j'attire votre attention, j'attire
l'attention de la commission, M. le Président, sur deux points
particuliers.
Le premier est que le domaine de l'énergie est devenu un domaine
beaucoup plus compétitif. La compétition du gaz vis-à-vis
de l'électricité, vis-à-vis des produits
pétroliers, donc, des pétrolières, est une chose
omniprésente, une réalité quotidienne pour une entreprise
comme Gaz Métropolitain. C'est un changement très important; ce
n'est pas une situation qui était vécue au cours des
années soixante-dix. Le deuxième point très important dans
cette évolution, c'est la déréglementation du prix de la
marchandise gaz, déréglementation qui est advenue plus
récemment, en 1985, à la suite d'une décision du
gouvernement fédéral.
Toujours avant de passer à nos recommandations précises,
M. le Président, je voudrais proposer aux membres de la commission les
deux principes de base qui doivent être retenus pour guider la
réflexion et la révision qui s'ensuit au niveau de la loi. Le
premier est que la loi doit être révisée, ajustée,
pour faire en sorte que chaque client ou chaque groupe de clients
bénéficie du meilleur prix possible. C'est le premier principe.
Deuxième principe: que les avantages ou que les gains obtenus par
certains clients ou par certains groupes de clients ne doivent jamais
l'être au détriment de l'ensemble de la clientèle. Je
m'explique un peu sur ce deuxième principe. Il faut comprendre que, pour
des raisons économiques qui prévalent non seulement au
Québec, mais également en Ontario, partout au Canada et
essentiellement partout aux États-Unis, il ne peut pas y avoir deux
réseaux de distribution de gaz. Ce ne serait pas logique au plan
économique. Tout le monde paierait plus cher de cette façon. Par
voie de conséquence, la réglementation de la distribution comme
telle est une chose nécessaire et partant, on se trouve à
créer une situation où un ensemble de clients -dans notre cas,
comme je l'ai dit, 170 000 clients - sont regroupés dans une
communauté de clients ou, si vous voulez, une communauté
d'intérêts.
Cette communauté d'intérêts possède des
choses tangibles. Il y en a trois. Quand on va vouloir modifier la loi pour
profiter au maximum des changements qui sont intervenus depuis 1980, c'est sur
ces éléments-là qu'il va falloir réfléchir
pour faire en sorte que l'ensemble des clients ne soit pas
pénalisé par rapport à un qui fait des gains.
Ces éléments qui constituent la communauté
d'intérêts sont premièrement un ensemble de services de
distribution. Cela comprend des constructions de conduites, l'entretien de
conduites, des services de ventes, de marketing, de publicité, etc.,
tous les services qu'un distributeur rend de façon traditionnelle
à son marché pour le voir croître. Tous les clients ont
droit à ces services.
Le deuxième élément qui constitue cette
communauté d'intérêts, cela, on le voit moins souvent,
c'est un service de stockage. Pour nous, Gaz Métropolitain, les clients
n'ont pas une consommation uniforme au cours de l'année. Il faut stocker
en été pour desservir en hiver essentiellement, et des services
de stockage, des aménagements de stockage, on en a sous contrat en
Ontario et on en a également à Montréal, dans l'est de la
ville de Montréal. Le service de stockage offert à tous fait
partie des éléments de la communauté
d'intérêts.
Troisième élément. C'est le droit contractuel qui
est détenu actuellement par Gaz Métropolitain et à long
terme, sur la capacité de transport du réseau interprovincial de
TCPL, TransCanada PipeLines. Ce droit contractuel assure, finalement, une
garantie de livraison de gaz sur le territoire de notre franchise parce que,
pour avoir du gaz sur notre franchise, il y a deux conditions qui doivent
être remplies: premièrement, il doit y avoir des réserves,
deuxièmement, il doit y avoir de la place sur l'autoroute,
c'est-à-dire le pipeline, pour amener le gaz jusqu'à nos
territoires, à notre franchise. Le fait d'avoir, nous, à Gaz
Métropolitain, un engagement contractuel à long terme sur une
partie de la capacité de ce réseau-là, évidemment,
c'est un actif pour l'ensemble de la clientèle de Gaz
Métropolitain.
Ce préambule, donc, ces deux principes de base, je les rappelle
parce que je les trouve très importants. Premièrement, la loi
doit être ajustée ou révisée pour faire en sorte que
chaque client ou groupe de clients ait le meilleur prix possible et que,
deuxièmement, tout cela ne doive pas être fait à
l'avantage d'un client puis au détriment de l'ensemble des autres
clients.
Je passe maintenant à nos recommandations en les regroupant. Je
ne passerai pas à travers tout notre mémoire puis toutes les
recommandations qui ont été faites, mais je vais les regrouper en
quatre catégories.
Première recommandation. Maintien du droit exclusif de
distribution. Je dois dire à cet égard que nous sommes
complètement d'accord avec l'orientation du projet de loi. Ce que nous
recommandons, de fait, ce sont des précisions au niveau du
libellé du projet de loi pour lever toute ambiguïté ou, en
tout cas, limiter toute possibilité d'interprétation future.
Pourquoi cette recommandation-là? Bien, c'est facile à comprendre
si on se base sur les deux principes que j'évoquais. Si un client se
trouve actuellement à 100 mètres d'une conduite de transport
interprovincial, il est évident que, si la possibilité lui est
offerte de se connecter, de se rattacher directement à cette conduite
qui va lui en coûter moins cher que s'il fait partie de l'ensemble de la
clientèle... Il est à 100 mètres. Par ailleurs, il est
tout aussi évident que, si on permet la chose, l'ensemble de la
clientèle, tous les autres clients vont devoir payer pour
l'économie qui est faite par le premier. Donc, on dit: Cela ne devrait
pas être possible. À cet égard, c'est nécessaire, et
je voudrais faire remarquer que le tracé des conduites de transport
interprovincial a toujours eu plusieurs options. Si on se souvient, par
exemple, entre Trois-Rivières et Québec, on aurait pu passer sur
la rive nord comme on aurait pu passer sur la rive sud. Il arrive que le
tracé a été fait sur la rive nord. Les clients de la rive
nord n'ont pas eu des sommes à débourser pour s'assurer de la
proximité de ladite conduite à l'époque. Ils n'ont pas de
droit qui est relatif à la proximité de ladite conduite, il n'y a
jamais eu de sommes qui ont été versées pour assurer que
ce soit plus proche d'un utilisateur plutôt que d'un autre. Les choix
avaient été faits complètement sur d'autres principes, sur
lesquels je ne voudrais pas rentrer ici. Notre première recommandation
est celle-là.
Notre deuxième recommandation, c'est qu'il faut faire une
distinction nette entre le prix de la marchandise gaz et le coût de
distribution. Là, il y a une chose qui doit être dite puis dite
aussi clairement, c'est qu'en corollaire de ceci cela veut
nécessairement dire qu'on va devoir accepter - ce qui n'était pas
le cas jusqu'ici - que le prix de la marchandise pour un client ou pour des
groupes de clients pourra être différent d'autres clients ou
d'autres groupes de clients. Cela fait partie de la situation qui est
créée à partir du moment où l'on fait cette
distinction nette. Alors, pourquoi est-ce qu'on devrait le faire, croyons-nous,
parce que c'est bien cela qu'on recommande? C'est parce qu'en vertu du premier
principe que j'énonçais il faut créer des conditions dans
la loi, soit le droit de permettre à chaque cirent ou à chaque
groupe de clients d'aller chercher le meilleur prix possible. Si on donne ce
droit, c'est cela qui va arriver, on va permettre d'obtenir le meilleur prix
possible. Cela ne peut pas être fait de n'importe quelle façon,
évidemment. Il faut que ce soit fait - et on pense que c'est possible
que ce le soit - sans nuire à l'ensemble de la clientèle et sans
que, pour autant, pour l'ensemble de la clientèle, le prix soit
élevé ou plus élevé qu'il ne l'aurait
été autrement. Pour cela, il y a des mécanismes qui sont
possibles. Certains gros clients peuvent acheter directement leur gaz en
Alberta' parce que leur consommation est telle que cela leur donne un pouvoir
de négociation. Il y a des mécanismes qui exigent... On appelle
cela l'achat-revente à la frontière; ils vont faire en sorte -
c'est le mécanisme que nous privilégions - que Gaz Métro
va conserver le lien contractuel à long terme - on parle donc de
sécurité d'approvisionnement - sur le réseau de TCPL, sans
que Gaz Métro ou n'importe quel autre distributeur
québécois puisse faire une marge de profit sur la marchandise.
Alors, la chose est donc possible. Il y a des précautions à
prendre, c'est cela qu'on veut dire.
Si cela est vrai pour les gros clients, ce n'est pas
nécessairement vrai pour tous les clients. Par exemple, un petit client
résidentiel n'a pas le même pouvoir de négociation que
celui d'une grande entreprise industrielle pour acheter son gaz en Alberta;
c'est l'évidence. D'autre part, le même petit client
résidentiel n'a pas le même attrait pour des producteurs ou pour
des courtiers qui vendent du gaz qu'un gros client industriel parce que les
volumes ne sont tout simplement pas les mêmes.
Ce qu'on dit par rapport à cela, c'est qu'il va toujours rester
un marché de base; d'aucuns appellent cela un marché captif,
j'appelle cela un marché de base. Pour ce marché de base, le
distributeur, croyons-nous, est le mieux placé pour représenter
ce client auprès des producteurs, pour aller chercher le meilleur prix
possible pour lui. Rappelons-nous le premier principe: Tous les clients ou
chaque groupe de clients devraient avoir le meilleur prix possible. Cela inclut
ce petit client résidentiel. Le producteur étant en mesure de
regrouper leur demande, nous croyons que c'est lui qui est en meilleure
position pour aller chercher les meilleurs prix possible au chapitre du
gaz.
Tout cela pour dire qu'encore dans ce cas-ci, en ce qui concerne la
distinction entre le prix de la marchandise et le coût de distribution,
nous sommes d'accord avec
l'orientation générale du projet de loi, sauf qu'on va
plus loin. On va plus loin à deux égards. Premièrement, on
pense qu'il devrait y avoir une obligation de faite au distributeur de
transporter le gaz directement acheté en Alberta, à la condition
qu'il n'y ait pas perte du lien contractuel à long terme sur le
réseau de transmission. La chose est possible. On pense que cela
pourrait être fait. Deuxièmement, possiblement, il devrait y avoir
une obligation de faite au distributeur de fournir la marchandise aux clients
du marché de base, formé de clients qui n'ont pas des
consommations très élevées; cela reste encore à
définir. Mais, en corollaire à ceci, un pouvoir devrait
être accordé à la régie d'approuver les
dispositions, sinon les modalités générales. J'utilise
deux termes ici: dispositions, ce serait dans la mesure où on pourrait
avoir des contrats sur de longues périodes parce qu'on vise des contrats
à long terme, des dispositions précises en ce qui concerne le
prix. Ce n'est pas très réaliste d'envisager la chose de cette
façon. On va plutôt arriver à des modalités
concernant des règles pour fixer le prix, et nous sommes d'accord pour
les soumettre à l'approbation de la régie.
Également, un pouvoir devrait être accordé à
la régie pour dispenser le distributeur de transporter du gaz pour
certains clients qui, par le fait qu'ils décideraient de ne plus faire
partie de ce marché de base, pénaliseraient l'ensemble de la
clientèle. Toujours dans le même esprit: Allons chercher le
meilleur prix possible pour chacun, mais jamais au détriment de
l'ensemble. (16 h 15)
J'arrive à notre troisième série de recommandations
et, en préambule, je reviens sur la question d'un marché de
l'énergie qui a beaucoup évolué et qui est devenu
très concurrentiel, où la concurrence de
l'électricité et des produits pétroliers est
omniprésente. À ce sujet, ce que nous disons, c'est que nous
sommes d'accord. Notre compréhension de la politique
énergétique en ce qui concerne les prix, c'est: Laissons faire et
favorisons le plus de concurrence possible. Nous acceptons ces règles du
jeu, mais nous voulons bien les jouer avec les mêmes outils. On ne peut
pas accepter les règles et avoir la moitié des outils de nos
compétiteurs. Ce dont je parle ici, la règle, c'est la
nécessité dans ce marché de disposer, d'une part, de
programmes commerciaux - il en existe chez nos concurrents - et, d'autre part,
de programmes qu'on pourrait qualifier de commerciaux également, mais je
les distingue ici parce que ce dont je veux parler plus
précisément, ce sont les programmes de transferts technologiques
pour améliorer l'efficacité chez nos clients et retenir de ce
fait nos clients parce qu'en améliorant l'efficacité le
coût énergétique s'en trouve diminué.
Ici, je fais seulement une petite parenthèse pour signaler que,
dans le monde actuellement - ce n'est même pas complètement au
monde, c'est au Japon, aux États-Unis, en France et en Grande-Bretagne -
il se dépense annuellement 533 000 000 $ US en
recherche-développement pour les transferts technologiques.
Considérant cela, à Gaz Métropolitain inc, on a pris
l'attitude de mettre la priorité sur les transferts technologiques.
Qu'est-ce que cela veut dire, les transferts technologiques? Cela veut dire
qu'on a pris entente avec plusieurs distributeurs gaziers - enfin, c'est
fixé avec Gaz de France de même qu'avec Osaka Gaz au Japon - pour
assurer et faciliter les transferts de technologie du Japon ou de la France
vers le Québec plutôt que d'importer des produits. On importe des
licences et on fait fabriquer les appareils au Québec qui sont
disponibles pour notre marché, a meilleur coût, ce faisant.
Actuellement, jusqu'ici on a considérablement augmenté les fonds
qu'on alloue à cela. J'estime qu'en ce moment on a investi 9 000 000 $
par année, mais c'est principalement dans les transferts technologiques
et les programmes d'amélioration de l'efficacité. Enfin, c'est 6
000 000 $ dans les programmes d'amélioration de l'efficacité et 3
000 000 $ dans l'activité technique comme telle. On veut voir
croître cela au cours des prochaines années, notamment avec une
entente avec d'autres distributeurs canadiens de 3 000 000 $ additionnels par
année. Voilà pour ce qui est du premier point.
Ici, ce qu'on dit, c'est qu'on recommande que ce soit clair dans la loi,
que des programmes commerciaux existent, de même que des programmes de
transferts technologiques. Nous recommandons aussi que les investissements
faits dans ces programmes soient reconnus comme des investissements acquis en
bon père de famille parce que, lorsque nous faisons ces programmes
commerciaux, c'est soit qu'on maintient de la clientèle qu'autrement on
perdrait ou qu'on n'acquiert pas de nouvelles clientèles qu'autrement on
acquerrait. Quand on acquiert plus de clientèles dans une entreprise
comme la nôtre, la conséquence pour l'ensemble de la
clientèle, les 170 000 dont j'ai parlé au tout début,
c'est de réduire le coût de service. C'est donc à
l'avantage de l'ensemble.
II y a un autre élément dont je veux parler, c'est celui
de la flexibilité. Cela a fait l'objet d'une proposition précise
dans notre mémoire. C'est en ce sens que les tarifs soient mis en
application au moment même de leur dépôt à la
régie et, donc, avant que la régie ait pris une décision
à leur égard. Je voudrais préciser...
Le Président (M. Théorêt): Je m'excuse de
vous interrompre. Pour notre information, étant donné que vous
avez déjà dépassé le temps alloué, est-ce
que vous en avez encore pour longtemps?
M. Caillé; Cinq minutes. Je peux le faire très
rapidement si vous le voulez, en moins de cinq minutes, disons.
Le Président (M. Théorêt): Parfait,
continuez.
M. Caillé: Merci, M. le Président.
Alors, deux objectifs: On voudrait que les tarifs rentrent en vigueur
dès leur dépôt à la régie parce qu'on
voudrait que nos clients sachent à quel prix ils achètent le gaz
au moment où ils consomment, et éliminer les effets de
rétroactivité. On voudrait aussi ne plus se voir placés
dans des situations où il faut faire pression sur un tribunal pour
obtenir une décision rapide en étant dans la situation où
on doit justifier qu'une bonne décision est une décision rapide.
Tout ce que je viens de dire, ce n'est pas une critique pour la régie
actuelle. Au contraire, on pense que, s'il y a eu des délais, c'est
à cause d'un manque de ressources.
Finalement, j'arrive à mon dernier point au niveau des
interventions gouvernementales. À cet égard, on diffère
d'opinion en ce qui concerne le projet de loi et l'article 63 qui dit qu'il y a
un pouvoir d'intervention par décret pour énoncer des
orientations générales en ce qui concerne l'établissement
des tarifs. La raison de notre recommandation, c'est qu'on est convaincu qu'une
telle situation va faire en sorte que notre coût en capital va augmenter
du fait que les marchés financiers vont reconnaître un risque
additionnel. Ce n'est pas une question de notre appréciation en ce qui
concerne l'usage qu'en ferait le gouvernement. On parle ici de
l'appréciation qu'en feront les marchés financiers qui vont
parler et concevoir un risque additionnel et, par conséquent, une cote
moins intéressante en ce qui concerne notre cote financière. Il y
a eu une augmentation du coût en capital et, finalement, une augmentation
du coût de service pour l'ensemble de la clientèle.
Je termine là-dessus, M. le Président; je m'excuse d'avoir
été un peu plus long que le temps qui m'était imparti.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M.
Caillé. Je vais donc céder immédiatement la parole au
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Merci, M. Caillé. Je tiens d'abord à
vous féliciter pour votre excellente présentation, même
s'il a fallu la résumer en 20 minutes; je sais qu'il y a beaucoup de
points à couvrir. En premier lieu, comme vous le savez, la
déréglementation du prix du gaz modifie les règles du jeu
au niveau de la sécurité de l'approvisionnement et des prix. Je
pense que vous y avez fait référence en ce qui concerne les
différents secteurs et spécialement le petit consommateur.
J'aimerais que vous explicitiez le rôle que la régie
devrait jouer dans ce domaine pour les différentes classes de
consommateurs et plus spécifiquement aussi pour le petit
consommateur»
M. Caillé: D'accord. Pour le petit consommateur, je pense
- je le disais dans le mémoire - que nous devrions avoir l'obligation de
fourniture de gaz dans un premier temps. On va donc rechercher, incidemment,
comme cela a été demandé très fortement par les
ministres du gouvernement fédéral de même que par le
ministre de l'Alberta, à s'entendre avec nos producteurs
réguliers. L'annonce de la déréglementation a
été conditionnelle. On nous demandait fortement de nous entendre.
On va donc chercher à faire cela. On va obtenir, finalement, de nos
producteurs réguliers, si les choses se produisent comme on le pense, un
produit gaz pour - et ce qu'on cherche, c'est sur une longue période de
temps - la sécurité d'approvisionnement pour la même
période qui apparaît dans nos contrats présentement; on
parle d'une quinzaine d'années. D'une part, donc, la
sécurité d'approvisionnement à long terme; d'autre part,
on cherche également un prix qui serait le meilleur possible pour cette
clientèle du marché de base. En fin de compte, c'est une
représentation que nous faisons auprès de ces fournisseurs pour
qu'ils nous disent quels produits ils ont à mettre sur la table,
finalement, quels produits ils ont à offrir pour ce marché de
base. À la fin de cette opération, on connaîtra un produit,
un prix et une durée ou un mécanisme d'établissement d'un
prix, au cours de ces quinze années, tout au moins. C'est à ce
moment-là qu'on pourra définir quel est ce marché de base.
C'est très difficile de définir un marché avant de
connaître le produit. On sait que les marchés existent, que les
clients à petit débit et résidentiels sont là, mais
encore faut-il connaître le prix avant de dire à quel
marché cela peut s'adresser. Quand on connaîtra cela, notre
intention est de nous présenter devant la régie, donc, on
n'acceptera rien des producteurs réguliers autrement que
conditionnellement à l'approbation de la régie. Et en se
présentant devant la régie, on entend que la régie
pourrait à ce moment-là statuer pour dire: Très bien, pour
le marché de base que je définis de telle manière et qui
va correspondre à tel volume, ce sera ce produit qui va lui être
destiné.
Pour arriver à faire cela, finalement, ce que cela va devoir
vouloir dire, c'est qu'il y a un seuil de consommation annuelle. À ce
moment-là, selon moi, la régie traite au moins des
éléments suivants, soit un seuil de consommation
c'est-à-dire que, si on est en deçà de telle consommation,
on fait partie du marché de base. Deuxièmement, il va falloir
traiter de la question d'un regroupement parce que plusieurs petits se
regroupant, cela peut dépasser le même seuil. Il y a
peut-être plus de points que ceux-là, mais sur le plan
réglementaire, cette question pourrait être débattue.
Je dois vous dire ceci, M. le ministre, si vous me permettez de
poursuivre quelques instants. Il se peut également qu'on ne soit pas
satisfaits ou que la régie ne soit pas satisfaite de la proposition
faite par des producteurs réguliers, ce qui fait qu'on aurait deux
tâches. D'abord, on s'est acquitté de la première, celle
qui nous a été demandée par le gouvernement
fédéral au moment où il a institué la
déréglementation, à savoir de faire "tous les efforts de
bonne foi". C'était son expression dans le texte de l'entente, "tous les
efforts de bonne foi". Par la suite, on pourra s'adresser à d'autres
producteurs, après avoir fait "tous les efforts de bonne foi" et en
même temps au même gouvernement lui faisant des
représentations dans le sens que la déréglementation est
possible, même s'il n'y a pas eu d'entente formelle avec des fournisseurs
réguliers en ce qui concerne le prix, la durée ou les
règles d'arbitrage du prix. Ce que je réponds, M. le ministre,
à...
M. Ciaccia: Oui, mais je voudrais savoir, parce que vous avez
mentionné le nombre de petits consommateurs...
M. Caillé: Cent quarante-cinq mille.
M. Ciaccia: ...résidentiels, si je puis dire. Quant au
nombre et au volume, est-ce que vous avez une politique corporative
spécifique?
M. Caillé: Oui, on a fait... La démarche que je
viens de décrire est déjà amorcée par nous
auprès de nos producteurs réguliers. On devait le faire au cours
de l'année. Ce que nous avons fait. On a déposé chez nos
producteurs réguliers non pas une offre, mais une possibilité
leur disant: Voici en quels termes vous pourriez démontrer qu'un produit
existe. Là, on a établi un seuil, etc. Cela couvre
évidemment les 145 000 clients résidentiels dont on parle, de
même qu'une partie des clients du moyen débit. En termes de
ventes, le total est de 80 BCF environ sur 180, soit 43 % du volume. Mais ce ne
sont pas seulement les petits résidentiels parce que les petits
commerces comme les restaurants, etc., sont pas mal dans la même
situation.
M. Ciaccia: À la page 16 de votre mémoire, vous
proposez que la loi permette aux distributeurs de déterminer leurs
tarifs et qu'ils soient en vigueur dès leur dépôt à
la régie. Vous l'avez mentionné dans votre présentation.
Ne croyez-vous pas que les consommateurs dans un tel cas pourraient être
pénalisés par ce processus? Parce que si Gaz Métropolitain
inc. sait d'avance que ce sera automatiquement en vigueur, il pourrait y avoir
une tendance à demander un peu plus qui serait immédiatement
exigible. Le consommateur ne verrait pas comme tout à fait acceptable le
fait de se faire imposer cela. Cela mettrait également une pression sur
la régie, si elle n'accepte pas vos tarifs. Ces gens vont être
obligés d'essayer d'obtenir un trop-perçu du consommateur.
Autrement dit, du point de vue du consommateur, cela peut causer des
problèmes, mais aussi du point de vue de la lourdeur administrative de
la régie.
M. Caillé: Nous sommes conscients de ces problèmes
de même que de l'impact négatif, dont vous parlez, auprès
de notre clientèle. D'ailleurs, notre objectif fondamental - j'ai
dû passer rapidement là-dessus tantôt - n'est pas tellement
une formule plutôt qu'une autre. Notre objectif, d'une part, c'est que
les clients, au 1er octobre de notre année financière, quand
notre année financière commence, connaissent le prix qu'ils vont
payer le gaz qu'ils sont en train d'acheter. Deuxièmement, qu'il n'y ait
pas de possibilité de rétroactivité.
D'ailleurs, c'est ce qu'on proposait dans notre formule. Si la
régie disait que les prix devraient être inférieurs
à ceux qu'on a proposés et mis en vigueur, nous serions
évidemment d'accord pour rembourser capital et intérêts
à la clientèle. Mais nous sommes conscients que ceci ne change
pas complètement l'effet négatif auprès de notre
clientèle.
Quant à nous, l'objectif réel est d'avoir des tarifs qui
sont connus de nos clients au moment où ils consomment. Si on peut
trouver d'autres méthodes ou d'autres façons de le faire au
chapitre des ressources ou de la constitution de la régie, nous serions
très satisfaits d'avoir des tarifs non seulement déposés,
mais approuvés le 1er octobre de chaque année. Nous serions
très heureux de la situation. (16 h 30)
M. Ciaccia: Oui. Je comprends votre désir d'éviter
l'incertitude, d'une part, et la rétroactivité, d'autre part.
Est-ce qu'un moyen ne serait pas de prévoir des dates fixes pour le
dépôt d'un dossier complet? Autrement dit, si vous devez avoir une
réponse pour le 1er octobre, prévoir que le
distributeur doit déposer son dossier avant telle date pour
permettre la décision...
M. Caillé: On n'aurait pas d'objection fondamentale
à la chose.
M. Ciaccia: Autrement dit, ce n'est pas une formule fixe que vous
avez, c'est plutôt le..»
M. Caillé: Exactement, nous...
M. Ciaccia: Le but, c'est d'éviter le retard et la
rétroactivité.
M. Caillé: Notre proposition, dans sa forme, n'est pas une
affaire exigée comme telle, où la seule chose à laquelle
on peut penser, la chose à retenir, c'est l'objectif de la date.
D'ailleurs, en ce moment, M. le Président, on prépare
déjà nos mémoires, nos documents pour notre conseil
d'administration parce qu'ils doivent être soumis à la
régie. Â quelle date? Si vous le permettez, je vais passer la
parole à mon collègue ici, à M. le président, qui
va compléter ma réponse.
M. Normand (Robert): Donc, vers le mois de mai ou juin, en vue
d'audiences ou de décisions rendues pour le 1er octobre de l'an
prochain. Donc, un décalage d'environ deux à trois mois entre le
dépôt et la date à laquelle doivent entrer en vigueur les
nouveaux tarifs.
M. Ciaccia: Alors, il y a moyen d'évaluer les dates et le
temps qui est nécessaire pour que la régie puisse rendre sa
décision dans... Autrement dit, si on peut évaluer que cela va
prendre de trois à quatre mois pour rendre une décision, alors,
les délais pourraient être fixés en conséquence pour
donner la décision à temps pour votre,..
M. Normand: Nous le croyons, M. le ministre.
M. Ciaccia: C'est possible. Vous soulevez, aux pages 12 et 13 du
mémoire, la question du droit exclusif des distributeurs et du
problème potentiel des déviations, communément
appelées en France le by-pass. Ne croyez-vous pas, comme d'autres
intervenants, que nous devrions laisser à la régie le pouvoir de
juger s'il y va de l'intérêt public d'accepter des
déviations? Vous avez mentionné dans votre exposé que
Ça ne serait pas dans l'intérêt public, parce que cela va
causer des augmentations de tarif à d'autres usagers, utilisateurs. Ce
ne serait pas mieux de dire: Bon, on va laisser ce pouvoir à la
régie, on va permettre les déviations et vous allez
comparaître devant la régie et si vous démontrez
qu'effectivement une déviation ou plusieurs sont contre
l'intérêt public, vous faites votre preuve? La régie, je
croîs bien, n'est pas intéressée, elle non plus, à
faire augmenter le prix des autres et de donner une décision à
l'encontre de l'intérêt public. Ce ne serait pas une meilleure
façon, plutôt que de l'éliminer dès le
départ?
M. Caillé: C'est que je suis convaincu, au point de
départ, que tout client qui ferait une telle demande y verrait son
avantage» Oui, c'est vrai, tous ceux qui sont à 50 mètres
de la conduite ou 100 mètres - je le mentionnais tantôt - ont
certainement un avantage et dans tous les cas et à 100 %, ça
serait toujours au désavantage de l'ensemble de la clientèle.
Alors, ce serait reporter à plusieurs décisions une
décision qu'on peut prendre et qui ne change rien au fait, à la
situation finale. Parce que, en fin de compte, cela voudrait dire que, dans
l'intérêt de l'ensemble de la clientèle, des by-pass, il ne
peut pas y en avoir. J'exclus la possibilité, ici, d'un client qui
demanderait l'autorisation d'obtenir un by-pass et, si sa demande était
accordée, il lui en coûterait plus cher après qu'avant.
J'exclus cette possibilité-là. Il me semble que cela, ça
ne pourrait pas se produire.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Oui, quelques questions seulement. J'aimerais savoir
ceci, M. le président. Vous dites à la page 19 de votre
mémoire - c'est ça? - que Gaz Métropolitain n'est pas une
entreprise d'État dont la mission et les orientations doivent servir
d'instrument de politique économique du gouvernement. Ça, je
comprends cela. Vous dites aussi qu'on devrait pouvoir tenir compte des
coûts des programmes de commercialisation dans les tarifs. Nous autres,
on veut être en mesure, que la régie nous autorise à dire
aux consommateurs: Tu vas payer un peu plus parce que Gaz Métro a
décidé qu'il ferait de la commercialisation. Alors, je veux bien
croire que Gaz Métro n'est pas une entreprise gouvernementale, je veux
bien croire aussi qu'on puisse autoriser Gaz Métro - ça se
comprend, ce n'est pas phénoménal, ce que vous demandez là
- à inclure des coûts de commercialisation dans le tarif, mais
vous ne pensez pas que, compte tenu du fait que vous avez quand même un
monopole de distribution sur le territoire, le gouvernement puisse avoir au
moins quelque chose à dire ou des balises à mettre à des
pouvoirs comme ceux que vous réclamez? Qu'est-ce qui...
En d'autres termes - j'explique ma question pour que vous compreniez
bien -d'abord, le gouvernement a des objectifs. C'est son rôle de
développement économique, de pénétration
d'électricité, de gaz, de différentes formes
d'énergie. D'ailleurs, je
pense que le développement phénoménal, je ne dirais
pas dont vous avez été victimes, mais dont vous avez fait l'objet
au cours des dernières années est lié à cela. Les
gouvernements ont un rôle de développement des sources
d'énergies.
J'imagine que ce rôle doit au moins permettre au gouvernement un
certain -comment dire? - un certain droit de regard sur les politiques
commerciales que vous mettez de l'avant pour pénétrer
différents secteurs, différentes régions,
différents marchés, je ne sais trop, d'une part. D'autre part,
j'ai l'impression que cela prend des balises quelque part sur les sommes
d'argent que vous allez décider d'affecter à des programmes de
commercialisation. Parce qu'un de vos concurrents directs, c'est
Hydro-Québec aussi, qui a de gros moyens. Il faut bien se le dire.
Si d'aventure vous décidez de vous lancer dans une vraie guerre
de marchés avec Hydro-Québec pour certains marchés
particuliers, cela peut coûter cher, vos politiques de commercialisation.
Qui va mettre un stop à cela?
M. Caillé: Je vais vous répondre, si vous me
permettez, en prenant deux exemples. On va commencer avec l'exemple d'un client
potentiel. Il y a un client, il y a un projet passible techniquement pour
raccorder ce client au gaz. Ce client est à l'huile présentement
et il est également approché par Hydro-Québec. S'il y a un
programme commercial Gaz Métro à tel niveau, sans entrer dans les
détails, il pourra faire contrepoids à plusieurs programmes
commerciaux d'Hydro-Québec et amener ce client au gaz naturel.
Je pense que votre question est: Quand est-ce qu'on devrait dire oui,
quand est-ce qu'on devrait dire non?
M. Gauthier: À peu près.
M. Caillé: Là, je me ramène à mon
second principe. On ne fera jamais quelque chose pour un en particulier qui va
être au désavantage de l'ensemble. Il y a moyen d'établir
des critères dans la loi ou autrement, ou ailleurs, pour faire en sorte
qu'on puisse faire ces calculs, se poser la question et trouver la
réponse. Avec cette subvention, ce programme commercial qui est
accordé à ce client, l'ensemble des 170 000 paieront-ils plus
cher ou moins cher? Dans le cas où la réponse serait "moins
cher", on devrait dire oui. Dans le cas où la réponse est "plus
cher", on devrait dire non, selon moi.
Deuxième exemple. D'ailleurs, la vie est toujours un peu plus
complexe. On a des clients... C'est l'exemple d'un client qui est actuellement
au gaz approché par HydroQuébec avec un programme de subvention
pour convertir à l'électricité, la biénergie ou
autre chose. On peut mettre en place un programme d'aide à
l'amélioration de l'efficacité, les transferts technologiques
dont on parlait plus tôt. Si on le fait, cela coûte. On se pose la
question. Si on ne le fait pas et qu'on perd le client, qu'est-ce que cela
coûte à l'ensemble de la clientèle? Si on le fait et qu'on
garde le client, qu'est-ce que cela coûte? Dans les deux cas, cela va
coûter quelque chose. Il y aura un avantage pour le client parce que
l'amélioration de l'efficacité veut dire réduction de la
facture énergétique. Il faut réaliser cela.
Il est possible qu'il vaille mieux faire le transfert technologique et
faire le programme d'assistance pour contrer un programme semblable
d'Hydro-Québec vis-à-vis de l'ensemble de la clientèle. Ce
que je veux dire, c'est que cela peut être pire pour l'ensemble de la
clientèle de ne rien faire que de faire quelque chose. Quand c'est mieux
pour l'ensemble, on devrait le faire. Quand c'est négatif pour
l'ensemble, on ne devrait pas le faire.
M. Gauthier: D'accord. Je pense qu'on se...
M. Caillé: Ce n'est pas juste en fonction des
critères. C'est parce que pour l'entreprise, pour nous-mêmes, face
à notre conseil d'administration, les mêmes règles
s'appliqueraient. On va faire des choses pour autant que c'est bon pour
l'ensemble de l'entreprise, pas si c'est bon seulement pour le client. Ce ne
sont pas des cadeaux.
M. Gauthier: Oui. D'ailleurs, je pense qu'on se comprend. Donc,
ces programmes devraient être soumis à l'approbation de la
régie, tout de même, pour que cette évaluation dont vous
parlez, si c'est bon, on le fait; si ce n'est pas bon, on ne le fait pas...
Vous admettez que cela devrait être fait par la régie.
M. Caillé: Oui, que quelqu'un ait droit de regard
là-dessus, que la régie ait droit de regard là-dessus.
Pour faciliter les choses et le travail de tous, si on avait certains
critères à l'exemple de ceux que je viens
d'énumérer, si c'est bon pour l'ensemble, cela devrait être
acceptable, si c'est cela, le critère, on pourrait, comme dans d'autres
domaines, dans nos investissements concernant des conduites, acquérir ou
faire les déboursés en tant que "bon père de famille" -
l'expression classique entre guillemets - quitte à ce que cesdits
programmes soient acheminés à la régie du gaz pour
approbation. On n'aura pas de difficulté avec cela.
M. Gauthier: Ce matin, M. le président, il est venu un
groupe de maîtres mécaniciens, de tuyauteurs, etc. qui
interviennent dans un champ de juridiction qui dépend un peu
beaucoup de vous. Vous n'étiez pas là, évidemment; on vous
a peut-être rapporté cela. Ils n'étaient pas très
élogieux à votre endroit. Je ne veux pas me faire le porte-parole
ou le défenseur de leur cause. Je veux simplement obtenir de votre part
ou vous donner au moins la chance de présenter un point de vue
différent.
Ils nous ont dit bien clairement - on va être franc - que vous
aviez un monopole, que vous tentiez de l'élargir et qu'on vous
permettait de le faire - je les cite le mieux possible, on s'entend - que vous
aviez un monopole que vous tentiez d'élargir en devenant
vous-mêmes des installateurs de compteurs, de tuyauterie et de toute la
quincaillerie nécessaire à votre distribution.
En plus, ce qui est encore plus grave, c'est qu'ils ont dit: Ils
privilégient un très petit nombre d'installateurs autres que
nous-mêmes, des filiales ou des trucs du genre. Il y a même du
danger que Gaz Métropolitain devienne l'installateur unique d'à
peu près tout ce qui doit s'installer dans ce domaine et, plus encore,
quand nous, nos membres maîtres tuyauteurs, on essaie d'en installer
quelque part, Gaz Métropolitain ne veut pas nous fournir les compteurs,
retarde l'inspection et nous fait la vie extrêmement dure.
Je vous avoue que je n'étais pas fier de vous à ce moment.
Mais j'ai dit: II doit y avoir une explication à un comportement comme
celui-là et j'aimerais vous permettre, vous donner la chance de nous
présenter votre point de vue à cet égard, parce que j'ai
l'impression que ce n'est ni tout noir ni tout blanc dans ce
dossier-là.
M. Caillé: Je remercie la commission, M. le
Président, de m'en donner l'occasion. Premièrement, une chose
doit être claire: Gaz Métropolitain n'est pas, au moment où
l'on se parle, impliquée dans l'installation de nouveaux
équipements. C'est toujours confié à des
intermédiaires.
Par ailleurs, nous avons une filiale où nous sommes un des
actionnaires, qui s'appelle Consulgaz, qui, elle, regarde ou considère
actuellement la possibilité de s'implanter dans le domaine des
installations. On ne parle pas des installations domiciliaires. On ne parle pas
nécessairement des mêmes; on parle plutôt des installations
à moyen et à plus grand débit, non pas des installations
chez des clients à petit débit. Alors, il n'y a pas
carrément un conflit, peut-être dans certains cas, mais pas
carrément un conflit; premier point à éclaircir.
Second point à éclaircir: II est vrai que Gaz
Métropolitain s'implique dans l'entretien des équipements. On a
une politique chez nous et c'est une politique de service à la
clientèle. Quand un client appelle Gaz Métropolitain et demande
le service, nous y allons et nous y allons le plus rapidement possible, sans
poser toutes sortes de questions quant à savoir si c'est le moteur, le
carburateur, quelle partie de l'équipement ou autre chose. Nous y allons
immédiatement et, effectivement, nous faisons la réparation s'il
y a une réparation qui doit être faite. Il en va de la
qualité du service à la clientèle.
M. le Président, on a souvent dit à cette commission que,
de l'énergie, c'est un produit de consommation générale.
Il n'y a pas de facteur qualitatif, toute la question, c'est le prix. Ce n'est
pas tout à fait juste. Les utilités publiques aux
États-Unis l'ont reconnu, ont mis en place des programmes. Nous l'avons
fait et je pense que les autres utilités publiques au Canada vont
emboîter le pas. (16 h 45)
Cette qualité du service à la clientèle, c'est une
chose importante. En fin de compte, juste pour l'illustrer, cela ne tient pas
debout d'entrer chez un client et de dire: La courroie de transmission du
moteur de telle pièce d'équipement est brisée. J'en ai
dans mon camion; je ne peux pas la réparer; je dois partir. Tu dois
appeler ton plombier pour qu'il vienne dans trois heures, ce n'est pas en fin
de semaine et puis moi, je ne puis pas le réparer, je ne touche pas
à cela, au revoir, madame. Alors, un service de cette qualité
pour tout client, pour tout consommateur honnête, c'est un service
pourri. Il ne le qualifiera pas autrement. On ne fait pas cela. L'ordre est
donné à nos employés, effectivement, que la qualité
du service est importante et que, quand tu as une réparation à
faire, on la fait. C'est vrai aussi qu'on facture pour le service. Ce n'est pas
un service qui est offert dans la distribution du gaz comme telle.
Il faut dire également que nos responsabilités quant
à la sécurité et la distribution du gaz, cela
s'arrête généralement aux fondations de la maison, quoique
certains compteurs sont à l'extérieur, ce n'est pas aussi clair
que cela, mais disons aux fondations de la maison et qu'à
l'intérieur, comme je le disais tantôt, ce sont les entrepreneurs
qui font les nouvelles installations. On fait une inspection de la chose. Notre
responsabilité légale quant à la sécurité,
c'est de nous assurer qu'avant d'ouvrir la valve de gaz pour alimenter les
équipements et appareils ce soit selon les normes. On s'assure de cela.
C'est notre responsabilité. Mais vous comprendrez également que
la perception des 170 000 clients dont on parlait tantôt, c'est que cette
responsabilité-là moins la responsabilité morale va plus
loin que cela. C'est la raison quand on parle de service de qualité
à la clientèle. Si un appel téléphonique d'un de
nos clients nous demande notre présence, nous y serons et s'il y a
quelque chose à réparer, nous le réparerons et il n'aura
pas à
attendre la fin de semaine au froid pour que quelqu'un d'autre vienne
faire la réparation.
Ceci étant dit, je conviens avec vous que les relations avec les
maîtres mécaniciens ne sont pas des meilleures. On a fait des
choses qui ne sont pas dans un état souhaitable parce que nous, on veut
travailler avec des intermédiaires. On a fait des choses dans le
passé en choisissant, je veux dire qu'on a des valeurs dans notre
entreprise concernant les différents publics; notamment en ce qui
concerne nos intermédiaires, on leur a dit et
répété qu'on ferait affaire avec eux et qu'on les
choisirait selon leur capacité à être les meilleurs. Cela a
été dit en 1983. De ce fait, on a choisi des agents
autorisés. C'est de là que vient le point qu'ils vous ont
mentionné, à savoir qu'on fait affaire avec un nombre plus
limité. C'est juste. Cela fait partie de nos valeurs, d'une politique
qui vise à donner une qualité de service à nos clients.
Des clients nous appellent, nous demandent de les convertir au gaz naturel. On
dit: On ne fait pas ce travail-là parce que ce sont les maîtres
mécaniciens en machines fixes qui le font, on va vous en recommander un.
On ne peut pas recommander quelqu'un qu'on n'aurait pas choisi nous-mêmes
parce qu'on n'y ferait pas confiance. C'est malhonnête envers la
clientèle. Quand on leur dit: On va vous choisir sur la base de votre
capacité à être les meilleurs, c'est ce que cela veut dire
et c'est bien cela qu'on fait. On recommande ceux qui sont tes meilleurs. Je ne
sais pas si je réponds, M. le Président, complètement aux
questions.
M. Gauthier: Oui. Juste un aspect que vous n'avez pas
traité, puis je suis sûr que c'est par oubli. On s'est plaint
également ce matin - et j'aimerais que vous en parliez -du fait qu'il y
aurait, au-delà du fait que vous ne les trouviez pas les meilleurs,
etc., comme un boycott de votre part pour fournir du matériel, mettons
des compteurs, ou pour faire l'inspection parce que vous avez à faire
une inspection après coup. Ils nous ont dit: Écoutez, quand c'est
une autre personne qui installe, Gaz Métropolitain retarde l'inspection
et fait en sorte que le monde ne soit pas tellement satisfait que ce soit fait
par nous. Est-ce que vous avez des commentaires là-dessus?
M. Caillé: Les délais d'installation des compteurs,
je n'ai pas vérifié, mais je suis sûr qu'ils ne sont pas
les mêmes dans tous les cas. Il doit y avoir certains clients où
c'est plus long qu'ailleurs. Ce que je dois dire, c'est qu'un client soit le
client d'un agent qui ne fait pas partie des agents autorisés, parce que
ce sont des agents autorisés, le groupe qu'on a choisi, on leur fait
confiance... À partir du moment où un client a
décidé de convertir au gaz avec un agent autorisé ou non,
la politique de la maison, c'est de donner le meilleur service possible. Ces
problèmes d'installation de compteurs surviennent
généralement surtout à ce temps-ci de l'année parce
que les gens veulent avoir le compteur installé au plus tôt parce
qu'il commence à faire froid et ils ont besoin de chauffage. Il n'y a
pas deux catégories de clients chez nous, une chez qui les installations
ont été faites par des agents autorisés et une autre, par
des agents non autorisés. On n'empêche pas les autres de faire
affaire non plus. La directive de l'entreprise est qu'il faut donner une
qualité de service à la clientèle. Que cela ait
été converti par l'un ou par l'autre, les gens ont besoin de
chauffage à ce moment-ci de l'année. Il faut donc qu'il y ait des
compteurs le plus rapidement possible. Il n'y a pas de directive
discriminatoire pour favoriser les uns au détriment des autres.
M. Gauthier: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Théorêt): Si vous me le
permettez, M. Caillé, j'aimerais vous poser une question, toujours dans
la même veine des représentations qui ont été faites
ce matin par la Corporation des maîtres mécaniciens. Vous venez
d'établir clairement qu'au moment où l'on se parle Gaz
Métropolitain ne fait pas d'installation...
M. Caillé: Oui.
Le Président (M. Théorêt): ...mais qu'en ce
qui concerne l'entretien et la réparation des équipements, ce qui
n'est pas fait par l'interne est fait à l'extérieur par des
agents autorisés que Gaz Métropolitain a
sélectionnés. Donc, à moins que je ne me trompe, il serait
normal de dire que ce sont eux qui font presque exclusivement le travail, selon
les recommandations de Gaz Métropolitain, laissant de côté
les quelque 500 autres - je ne sais pas combien il y a d'agents
autorisés - qui sont membres de la corporation.
Ma question est la suivante: D'une part, est-ce que vous pourriez nous
dire quel est le pourcentage actuel de l'installation des équipements
faite par les agents autorisés versus les autres non autorisés?
D'autre part, quel est le pourcentage des réparations et entretien faits
par l'interne de Gaz Métropolitain versus les agents autorisés et
est-ce qu'il y a effectivement de l'entretien et de la réparation faits
par d'autres entrepreneurs que vos agents autorisés?
Troisièmement, est-ce que, d'une façon ou d'une autre, les agents
autorisés chez vous doivent payer à Gaz Métropolitain des
frais d'inscription ou participer à une publicité ou à une
ristourne quelconque?
M. Caillé: Oui, M. le Président. J'aimerais d'abord
apporter une précision en ce qui concerne les nouvelles installations.
Quand on reçoit l'appel d'un client pour une nouvelle installation ou
une conversion de l'électricité ou de l'huile au gaz, nous ne
faisons pas l'installation. Ce sont toujours des maîtres
mécaniciens. D'accord?
Le Président (M. Théorêt):
Autorisés?
M. Caillé: Nous les référons aux agents
autorisés pour maintenir le lien de confiance avec notre
clientèle. En ce qui concerne l'entretien, il n'est pas fait
exclusivement par nous, il est également fait en partie par les
maîtres mécaniciens. Quant à la question à savoir si
nous faisans de l'entretien, la réponse est oui, quand on va chez un
client qui nous a appelés. Pour plusieurs, le diagnostic est fort
simple. Il dit: Mon système de chauffage ne fonctionne pas. Ce n'est pas
relatif à telle ou telle chose.
Si nos gens peuvent faire l'opération d'entretien, ils le font,
il en va d'une question de qualité de service à la
clientèle. Cela est pour éclaircir la question. Quel pourcentage
des conversions est fait par les maîtres mécaniciens de machines
fixes? La conversion est faite presque en totalité, à moins qu'il
n'y ait des exceptions que je ne connaisse pas, par les maîtres
mécaniciens. Nous n'en faisons pas nous-mêmes.
Quant à savoir quel pourcentage des réparations est fait
par nous versus les mêmes maîtres mécaniciens en machines
fixes, je m'aventurerais si je vous donnais un chiffre, M. le Président,
je ne le connais pas. Si vous me le permettez, je pourrais consulter un
collègue qui n'est pas à cette table-ci et je pourrais vous
donner une réponse précise aujourd'hui.
En ce qui concerne la conversion, c'est la presque totalité dans
le marché petit débit. Dans le marché commercial,
généralement on ne réfère même pas de
plombier parce que les clients ont déjà leur plombier.
D'ailleurs, c'est vrai généralement, on ne réfère
un plombier, un agent dit autorisé, que dans la mesure où le
client n'a pas déjà son plombier à qui il fait confiance.
Il n'est pas obligé de suivre notre recommandation. Le client peut aussi
faire affaire avec le plombier de son choix.
En ce qui concerne les chiffres approximatifs relatifs à
l'entretien, nous faisons présentement, en pratique, sur les
équipements de nos clients - on parle du petit débit - 90 % du
travail. Quand on n'est pas en mesure de livrer le service à cause du
nombre d'appels, parce que ce sont toujours des phénomènes de
pointe de travail, la façon dont le travail est distribué, soit
au cours d'une journée, soit au cours des saisons, on leur demande
d'appeler un plombier, leur plombier s'ils en ont un. S'ils n'en ont pas, on
les réfère à un agent autorisé inscrit dans notre
banque de données.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Une
dernière question. Combien comptez-vous de membres autorisés dans
votre banque de données?
M. Caillé: 25.
Le Président (M. Théorêt): 25?
M. Caillé: 25.
Le Président (M. Théorêt): 25 entrepreneurs
recommandés par vous sur quelque 500 ou 600. Est-ce que c'est cela?
M. Caillé: C'est cela. Il faut mettre toutes les choses en
perspective. À un moment donné, il y avait 10 000 nouveaux
clients par année en 1960, 1981, 1982 et 1983, 10 000 nouveaux
raccordements par année. En ce moment, ils sont de l'ordre de 1500.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M.
Caillé.
M. le ministre.
M. Ciaccia: Vous avez parlé de la position de votre
entreprise concernant le pouvoir d'orientation du gouvernement à
l'article 63. Si je me rappelle bien, il y a quelques mois votre entreprise et
un certain nombre de consommateurs se sont plaints de la complexité des
grilles tarifaires. Il aurait peut-être été utile d'avoir
un pouvoir d'orientation. D'abord, ce n'est pas un pouvoir de directive, c'est
un pouvoir d'orientation générale. Si, comme l'a
suggéré l'Association des consommateurs industriels de gaz, on
pouvait baliser ce pouvoir avant de le donner ou d'adopter un décret,
avant que ce soit rendu public, en consultation avec le milieu, quelle serait
votre réaction à une telle mesure?
M. Caillé: Le baliser, dites-vous, ce pouvoir
d'intervention par décret, à la suite d'une consultation
publique.
M. Ciaccia: II faudrait qu'il y ait une consultation dans les
milieux affectés, par exemple, si cela affecte Gaz Métropolitain,
si cela affecte les usagers. Ce pourrait être une commission
parlementaire ou je ne sais sous quelle autre forme, mais le rendre public,
faire une consultation, avoir des balises, des restrictions, considérant
que c'est un pouvoir d'orientation générale. Cela ne va pas dans
le sens d'une directive de faire ceci ou de faire cela.
M. Caillé: Je pense tout haut, M. le
Président, et la possibilité de baliser ce pouvoir, de le
rattacher à certains éléments plutôt qu'à
d'autres, cela pourrait certainement, sous réserve d'analyses
subséquentes...
M. Ciaccia: L'améliorer. (17 heures)
M. Caillé: ...réduire la possibilité
d'impact que cela aurait sur notre coût en capital, que je
décrivais au tout début. On serait certainement
intéressés, M. le Président, à participer à
une telle consultation pour voir s'il y a moyen, à cet égard,
d'améliorer ou de faire un projet qui tienne compte de toute la
réalité pour le meilleur fonctionnement futur de l'ensemble. Je
dois dire qu'il est vrai, M. le Président, que Gaz Métropolitain
est intervenue auprès du gouvernement quant au déroulement
d'activités. Il est aussi vrai que la conviction de l'entreprise que je
représente ici aujourd'hui, au point de départ, c'est de faire
confiance. On réalise qu'on a un droit exclusif, que d'aucuns appellent
monopole, sur la distribution du gaz. On réalise qu'en corollaire
à ce droit il y aura réglementation. Troisièmement, si on
veut être actif - c'est vrai pour n'importe quel individu dans ce domaine
- dans ce domaine il faut faire confiance aux différents
intervenants.
M. Ciaccia: Je ne veux pas laisser sous-entendre que vous ne
faisiez pas confiance à la régie. Au contraire, vous avez
mentionné que vous aviez confiance à la régie, que les
décisions de la régie avaient été dans le sens de
donner plus de capacité à une pénétration du
marché de Gaz Métropolitain. Effectivement, vous connaissez les
chiffres, cela a augmenté de - je ne sais pas - 7 %, 8 % à 15 %.
Alors, cela a été fait à la suite des décisions de
la régie. Je ne voulais pas insinuer que vous n'aviez pas eu confiance
à la régie, pas du tout.
Le Président (M. Théorêt): Très bien.
Merci, M. le ministre. Pour les remarques finales, M. le député
de Roberval.
M. Gauthier: Mes remarques finales. Merci d'être venus nous
présenter votre point de vue et soyez assurés que nous serons
extrêmement sensibles aux propos que vous avez tenus devant nous et ce au
moment où nous ferons nos recommandations au ministre. Merci beaucoup
à toute votre équipe, d'ailleurs, qui s'est
déplacée pour pouvoir nous fournir toutes les informations
demandées.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: De ma part, je voudrais remercier les
représentants de Gaz
Métropolitain. Sûrement, nous allons étudier
attentivement vos recommandations. Vous êtes un intervenant assez
important. Je ne veux pas minimiser l'importance des autres, mais il faut
apporter une attention particulière, je crois, aux
représentations que vous nous faites. C'est dans cet esprit que nous
allons examiner votre mémoire et possiblement on pourra inclure dans le
projet final quelques-unes ou plusieurs de vos recommandations. Merci.
M. Caillé: M. le Président, je vous remercie, de
même que tous les membres de cette commission, de nous avoir
entendus.
Le Président (M. Théorêt): Merci, messieurs,
et bon voyage de retour. J'invite maintenant M. J. Jacques Hamel à
prendre place, s'il vous plaît. M. Hamel, les membres de la commission
vous souhaitent la bienvenue. Vous savez que vous avez un maximum de 20 minutes
pour faire votre présentation; après quoi, les membres
discuteront avec vous. Je vous cède immédiatement la parole.
M. J. Jacques Hamel
M. Hamel (J. Jacques): Je suis un particulier. Je suis seul et je
me sens seul aussi. J'étais un régisseur de la Régie de
l'électricité et du gaz jusqu'au 15 juillet 1987. Le projet de
loi avait été mis en circulation avant cette date et j'y avais
apporté beaucoup d'intérêt, de sorte que j'avais pris un
certain nombre de notes. J'ai donc décidé de présenter un
mémoire - on peut l'appeler ainsi, mais ce sont des
considérations générales - après avoir lu cet
avant-projet de loi. Je crois que les commissaires ont pris connaissance de mes
propos. Je ne sais pas si je devrais raccourcir ma présentation. Enfin,
est-ce que je devrais répéter tout ce que j'ai dit ou si on aime
mieux me poser certaines questions?
Le Président (M. Théorêt): Écoutez,
libre à vous. Si vous voulez résumer votre présentation
et, après, on pourra échanger avec vous et vous interroger.
M. Hamel (J. Jacques): Alors, j'y vais rapidement. J'ai
procédé, d'abord, à la définition de la
régie. Je remarque que, dans l'avant-projet de loi, il n'y a pas de
définition de la régie. On dit tout simplement "un organisme" et
ça finit là. Dans le chapitre R-6, la définition de la
régie c'était "un organisme de surveillance et d'arbitrage" et
non pas un organisme de direction, si vous voulez. On était là
pour surveiller, voir à ce qu'il n'y ait pas d'excès,
protéger tant le distributeur que l'usager. Je pense que c'est l'essence
même de la fonction d'un organisme comme la Régie de
l'électricité et
du gaz l'était à l'époque et comme la nouvelle
régie devrait l'être.
Je dis aussi en passant, que cela devrait être
présidé, comme les régies l'étaient toutes
autrefois, par quelqu'un qui a une compétence légale.
J'ai parlé aussi du réseau de distribution dont on
retrouve la définition au chapitre D-10, à quelques mots
près. J'en ai conclu, d'après l'ensemble des dispositions de cet
avant-projet de loi, que les investissements dans l'entreprise' étaient
ces actifs-là et que cela se limitait à cela, un peu en
parallèle avec les actifs physiques qu'on retrouve dans la section
"électricité", dans le chapitre R-6, qui sont les centrales, les
barrages, enfin, toutes ces choses. Je pense que cette définition n'est
pas complète, parce qu'on oublie, par exemple, de mentionner le fonds de
roulement, les frais de premier établissement qui, à mon point de
vue, sont des investissements. Mes prédécesseurs ont parlé
des programmes de subventions; j'en parlerai peut-être tout à
l'heure, j'ai mes idées là-dessus.
J'ai parlé aussi, un peu plus loin, des investissements. Tout
cela se rattache un peu de façon générale à ce
qu'on doit entendre par investissement. Je pense qu'une définition
devrait être faite dans la loi. Qu'est-ce qu'un investissement? Est-ce
qu'un programme de subvention quelconque est un investissement ou une
dépense? Si on ne fait pas cela, je dois dire - malheureusement, je
n'étais pas toujours d'accord avec mes collègues - que le
principe qui a été émis à la régie, il y a
cinq ou six ans, à savoir que tout déboursé doit
être rémunéré, est faux, parce que vous n'avez plus
d'investissements. Dépenses, investissements, toute sortie d'argent
devient un investissement sur lequel on doit donner un rendement raisonnable,
le rendement de la base de tarification. Cela veut dire qu'on n'a même
plus besoin de base de tarification, c'est du "cost plus". Alors, on
dépense, on dépense, on dépense et on va chercher nos 13 %
ou 14 %. Je pense qu'il est très important que le mot "investissement"
soit clairement défini dans la loi.
Le rendement raisonnable, je l'associe un peu à la valeur du
service rendu et non pas à un rendement sur les investissements dans
l'entreprise, ce qui deviendrait, à mon point de vue, un des
éléments de la fixation de la valeur du service. À ce
sujet, je déborderai un peu de ce que je vous ai soumis. La valeur du
service, d'après moi, pourrait être conçue en
considérant les éléments suivants: le coût de
service, évidemment, l'investissement pour rendre ce service, la
compétition et aussi, un autre facteur qui peut s'appliquer au petit
usager, le facteur social, comme cela se fait dans certaines commissions aux
États-Unis, où on considère le facteur social.
J'ai glissé quelques mots sur la question de la
dépréciation. Le peu de notions comptables que j'ai me fait dire
qu'amortissement et dépréciation sont deux choses
différentes. L'amortissement, c'est le remboursement, sur une certaine
période, d'un montant d'argent qui est versé pour un actif
quelconque. La dépréciation, c'est l'état physique, la
dégradation physique de l'actif. Ainsi, par exemple, la tuyauterie, au
bout d'un certain nombre d'années, va se détériorer et se
déprécier de sorte qu'il va falloir la remplacer. Est-ce la
même chose que de dire: Le montant que cela a coûté pour ce
tuyau, on va l'amortir sur une période donnée?
J'ai fait la suggestion suivante dans mon mémoire: Plutôt
que de prendre un rendement raisonnable sur les investissements non amortis,
autrement dit ce qui en reste, qu'on ne s'occupe plus de l'amortissement, qu'on
prenne les actifs et puis qu'on dise: Ce distributeur-là a, disons, 100
000 000 $ d'actifs utiles et en usage qui servent à desservir une
clientèle donnée. Ces actifs, qu'ils aient 10 ans, 20 ans ou 30
ans, tant et aussi longtemps qu'ils sont aptes à rendre le service,
à ce moment-là, je dirais: On évalue le service avec les
installations en place. Si l'une des installations vient à manquer,
à ce moment-là, on remplace l'installation dans la base de
tarification et on enlève l'installation qui n'est plus bonne, qui est .
défectueuse. De la sorte, on n'arrivera pas à une conclusion
comme celle à laquelle on est arrivé dans le cas de Chauffage
Saint-Malo, qui, à un moment donné, avait des actifs
dépréciés à 90 % ou à peu près et
puis qui demandait un rendement raisonnable sur ses investissements dans
l'entreprise.
S'il y avait 10 000 000 $ dans son entreprise et qu'il y en avait 9 000
000 $ de partis par l'investissement, d'après la loi, on devrait donner
strictement un rendement sur le 1 000 000 $ qui reste. C'est loin de valoir la
valeur du service rendu aux usagers. Alors, il y aurait peut-être quelque
chose à regarder dans ce sens-là, de ce
côté-là. Je ne dis pas que c'est la formule idéale,
mais c'est une formule qui n'a certainement pas plus d'inconvénients que
la formule actuelle.
J'ai parlé aussi de certaines expressions que, je pense, on
pourrait peut-être modifier. On parle souvent de tarif, on parle de tarif
partout. Je pense que le mot "règlement tarifaire" devrait être
plus approprié. Un tarif, c'est un ensemble de prix ou de taux
applicables à une catégorie d'usagers: le tarif 5, le tarif 2, le
tarif résidentiel ou des choses comme ça. Mais le
règlement tarifaire, c'est l'ensemble avec des considérations
générales. Je pense qu'il y aurait peut-être lieu de
mentionner dans la loi "règlement tarifaire", partout où il y a
lieu de le faire, plutôt que tarif.
Il y a certaines choses particulières,
aussi, quand j'ai regardé les droits et obligations du
distributeur. L'article 22 parlait de la capacité de fournir le gaz du
distributeur. Je pense qu'il faudrait spécifier que le distributeur peut
être forcé à fournir du gaz, pour autant qu'il a la
capacité de le faire. Autrement, on le forcerait à faire de3
investissements. Ce serait peut-être une raison, pour lui, de dire: Je ne
suis pas capable de fournir ce gros client-là, parce que mes
installations ne me le permettent pas. Je pense que je rajouterais: à
condition qu'il ait la capacité de fournir, de transporter ou enfin, de
livrer.
J'ai regardé aussi l'examen des contrats d'approvisionnement.
Dans les contrats d'approvisionnement, dans le moment, je pense qu'on regarde
surtout ceux qui sont entre compagnies affiliées. Mais je pense que,
même si le gaz lui-même, la marchandise est
déréglementée, on devrait donner à la régie
le pouvoir de regarder les contrats - peut-être que cela surprend un peu,
ce que je dis là - parce qu'il faut que la régie s'assure que le
distributeur fait judicieusement ses démarches pour obtenir les
meilleurs prix. Dans certaines causes, on a vu aux États-Unis, par
exemple, qu'on a demandé au distributeur de rembourser des clients,
parce que le gaz qu'il leur a fourni, ils auraient pu l'avoir d'un autre
fournisseur à un meilleur coût. Alors, tout cela, c'est pour
protéger, évidemment, l'usager. C'est une suggestion que je fais,
en passant. (17 h 15)
II y a bien des choses aussi qui étaient un peu du ressort
légal, par exemple, le défaut d'autorisation par la régie
dans le cas de... Attendez un peu. Il y avait certaines choses dans les
contrats, si je ne me trompe pas. L'article 26 du projet. Alors, pour le
transfert d'actions et d'obligations, est-ce que le législateur
prévoit une nullité relative ou nullité absolue
là-dedans? Parce que, si c'est une nullité relative, cela veut
dire qu'on peut faire n'importe quoi et, tant et aussi longtemps qu'on ne nous
attaquera pas, cela sera bon. Si on veut que cela soit une nullité
relative, je pense qu'il faudrait ajouter un certain délai et dire: Si
personne n'attaque cette transaction dans les 30 jours ou dans les 60 jours,
enfin le délai imparti, à ce moment-là, cela devient
valable.
Alors, l'article 47, évidemment, j'en ai parlé un peu
indirectement tout à l'heure, quand je disais ce que je
considérais comme les éléments du prix du service rendu
à l'usager. Je dis qu'on devrait tenir compte de la situation
économique générale. On doit tenir compte aussi des
différentes classes d'abonnés, du facteur social. J'en ai
parlé un peu tout à l'heure. On peut simplement, si on veut
mettre quelques titres, ajouter les mots "entre autres", parce qu'il y a
d'autres considérations que ce qu'on dit dans l'article 47.
J'ai parlé aussi des frais - c'est secondaire - qu'on peut payer
aux intervenants. Je dois dire qu'en fin de compte ces frais sont payés
par l'usager, de toute façon. Alors, cela revient toujours à lui.
C'est toujours lui qui fournit et qui en met dans le sac tout le temps.
À ce sujet-là, je fais un aparté qui n'est pas
mentionné ici, La régie a un budget, je pense, d'environ 1,500
000 $. Les redevances présentement, si mes informations sont bonnes,
pour l'année écoulée étaient de 4 000 000 $.
 ce moment-là, il y a un écart assez considérable
et qui pourrait être augmenté. Et c'est ici que je veux faire ma
parenthèse. Je crois que c'est le décret 1365, en 1984, qui
parlait des redevances payables par les distributeurs. À ce moment, on
nommait toutes les ventes directes. Elles ne sont pas touchées,
d'après moi, par le décret. Toutes les ventes directes. Parce que
ce sont les distributeurs qui paient des redevances sur les volumes qu'ils
vendent. À ce moment-là, le gouvernement perd des redevances
qu'il pourrait obtenir si on mettait cela sur la vente du gaz en
général. Toutes les ventes directes seraient taxées.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M.
Hamel.
M. Ciaccia: Je vous remercie, M. Hamel, d'avoir
présenté un mémoire. Je suis heureux que vous ayez
décidé de l'expliquer plutôt que de juste nous demander de
réagir au mémoire en vous posant des questions. Je crois que vous
avez porté beaucoup de points, beaucoup d'éléments
à notre attention. Je pense que vos suggestions, qui sont le fruit d'une
grande expérience, c'est très évident, permettront
d'améliorer le projet de loi.
Quand vous avez dit que nous n'étiez pas toujours d'accord avec
vos collègues, ne vous excusez pas pour cela. C'est pour cela qu'il y a
plus qu'un régisseur.
M. Hamel (J. Jacques): Je ne l'ai jamais pris pour une excuse,
M. le ministre.
M. Ciaccia: Non, non. Je voulais juste vous assurer que j'avais
interprété cela comme un genre d'excuse. C'est pour cela qu'il y
a plus qu'un régisseur, pour avoir différents points de vue pour
arriver à une décision équitable.
Plusieurs des recommandations que vous nous faites sont très
intéressantes et nous allons les étudier. En ce qui concerne, par
exemple, "organisme de surveillance", vous vaudriez qu'on inclue dans le projet
de loi une définition. Des fois, moins on en dit dans les projets de
loi, mieux c'est. Je ne dis pas que dans ce cas-ci, cela peut porter... Il
faudrait qu'on ait vraiment une raison et une bonne définition. Par
exemple,
si on a une définition qui pourrait être
interprétée d'une certaine façon, cela peut ouvrir la
porte à une contestation, à savoir que la régie n'a pas
juridiction. Alors, on va examiner cela. Peut-être que cela va
améliorer le projet de loi; si réellement cela l'améliore,
on y sera sûrement favorable.
Quand vous mentionnez... Votre suggestion d'examiner des contrats
d'approvisionnement, je trouve cela très intéressant, non
seulement pour les compagnies affiliées, mais aussi pour les autres.
C'est un bon point. C'est vrai parce que, si je suis un distributeur et que je
sais qu'il faut que je surveille mon marché, que je vende mon produit,
bien, si j'ai un rendement garanti, cela pourrait être dangereux, mais
cela pourrait aussi inciter à une meilleure négociation. C'est
quelque chose qui mérite d'être examiné.
En ce qui concerne les frais de représentation, s'ils sont
payés par l'usager, c'est vrai; mais, à la suite de ces frais de
représentation, si on peut en arriver à un meilleur tarif pour
l'usager concerné, peut-être que ce serait un bon investissement
pour l'usager.
Au cours de vos dix ans passés à la régie, vous
avez sans doute constaté que le nombre d'intervenants était
très restreint. Ne croyez-vous pas qu'il serait avantageux d'augmenter
la participation des consommateurs aux audiences, lesquels sont historiquement
absents? On pourrait faire cela en défrayant une partie des coûts
des interventions pour améliorer les preuves au dossier. Je voudrais
avoir votre point de vue sur cela.
M. Hamel (J. Jacques): À ce sujet-là, je dois dire
que, lorsque l'actuel président est arrivé à la
régie, il a fait des tentatives très louables de pressentir les
associations de consommateurs; il y a différentes personnes avec qui on
a communiqué. On leur a demandé: Pourquoi ne venez-vous pas
devant la régie? On leur disait de venir pour essayer de protéger
surtout les petits résidentiels parce qu'ils ne sont jamais
présents. Par contre, la régie, en vertu d'un pouvoir de
surveillance, faisait un peu ou devait faire fonction de cette surveillance et
de cette protection envers les petits usagers.
Maintenant, s'ils sont intéressés par une subvention
quelconque ou s'ils ont un procureur pour les représenter,
peut-être que cela pourrait aider. La tentative a été faite
et il n'y a pas eu de réponse dans le temps; je dois dire cela.
M. Ciaccia: Vous avez parlé des investissements. Vous
semblez vouloir énumérer uniquement les actifs physiques;
peut-être que j'ai mal compris votre suggestion. Est-ce que cela signifie
que les programmes commerciaux ne devraient pas être inclus dans la base
de tarification? Est-ce qu'ils devraient être inclus...
M. Hamel (J. Jacques): Je l'attendais un peu, celle-là.
D'abord, quand j'ai fait la référence, je faisais
référence à l'avant-projet de loi; il parle des actifs de
réseau qui sont définis dans le D-10, à l'article 3, si je
ne me trompe pas, les conduites, les tuyaux, etc., sauf que cela coupe à
l'entrée pour desservir le client. Autrement dit, tous les
équipements de service du client n'entrent pas dans le réseau. On
ne parlait pas d'autre chose, si je prends l'ensemble du projet; on se limite
à cela. J'ai dit: Ce sont les investissements pour desservir le
client.
Les programmes de subvention, je dirai d'abord que le distributeur est
une compagnie, une entreprise privée, que ce n'est pas une entreprise
gouvernementale. Ces gens sont là pour faire de l'argent. II ne faut pas
se le cacher, ils sont là pour cela. II faut qu'ils en fassent aussi
pour pouvoir rendre le service.
M. Ciaccia: Il faut que quelqu'un fasse de l'argent.,.,
M. Hamel (J. Jacques): Qui doit investir...
M. Ciaccia: ...pour payer les dépenses du
gouvernement!
M. Hamel (J. Jacques): II y a cela aussi, mais c'est une autre
question que l'on pourra débattre un peu plus tard, mais c'est plus
politique un peu.
Qui doit investir dans l'entreprise? Est-ce que c'est l'usager ou
l'actionnaire? Cela est la question de base. Qui doit investir? Dans le moment,
celui qui investit tout le temps, tout le temps, c'est l'usager. On fait des
programmes, envoie donc dans les tarifs! II y a environ - à moins que je
ne me trompe - pour 75 000 000 $ de ces programmes qui sont dans la base de
tarification et pour lesquels il y a un rendement de donné. Maintenant,
ce que j'ai constaté - je ne sais pas si je vais faire plaisir à
tout le monde en disant cela - c'est que, lorsqu'il y a un programme, c'est
vrai que celui-ci doit être présenté et approuvé par
la régie. On approuve le programme, mais cela ne veut pas dire qu'on
approuve les résultats du programme. Malheureusement, il est
pratiquement impossible d'avoir quelque chose... Quand un programme comme
celui-ci est mis en place, la régie n'a jamais été capable
dans les causes de savoir si cela a été rentable ou non à
la fin du programme. On ne sait pas si c'est un investissement qui a
été rentable ou non. C'est mis dans le paquet.
M. Ciaccia: C'est comme celui qui
fait de la publicité. Il dit: La moitié de mes annonces ne
sont pas bonnes, mais je ne sais pas quelle moitié. C'est un peu dans ce
sens. Vous ne savez pas si les 75 000 000 $ ont rapporté ou non.
M. Hamel (J. Jacques): On ne le sait pas. Qui paie, en fin de
compte? C'est toujours l'usager. Alors, cela vient à un point que le
distributeur - je ne veux pas lancer de pierre à qui que ce soit, mais
c'est la nature humaine - va lancer un programme et cela virera comme cela
voudra, cela va dans le tas. Puis, on va avoir nos 14 % sur cela.
M. Ciaccia: Vous les élimineriez, d'abord, comme...
M. Hamel (J. Jacques): Non, pas nécessairement, mais je
les mettrais dans des dépenses reportées et je ne les
récompenserais pas, peut-être,, au même taux que la base de
tarification, au même taux que les vrais investissements qui servent
à l'usager directement.
M. Ciaccia: Ne pas donner 13,5 % pour 75 000 000 $.
M. Hamel (J. Jacques): Non.
M. Ciaccia: C'est de l'argent, cela!
M. Hamel (J. Jacques): Maintenant, je dois vous faire part d'une
petite expérience qui a été faite à la
régie; évidemment, j'étais là dans le temps.
Demandez à l'actionnaire de fournir 50 % du programme, il va retirer sa
requête en courant. On a eu quelque chose à peu près du
même genre. On a dit: Bien, vous allez en payer une partie. Là,
cela a coupé l'intérêt de plusieurs. Maintenant, il y a une
autre chose aussi. Ces programmes, on se dit: Est-ce qu'ils sont dans
l'intérêt général de l'usager? On parlait tout
à l'heure des by-pass. Moi, le by-pass, je ne suis pas trop contre parce
que ces gens vont payer pour leurs propres investissements pour se desservir
eux-mêmes. Puis, ils n'auront pas à supporter ces fameux
programmes qui ne leur donnent absolument rien. Les programmes peuvent
être pour une classe particulière, mais tout le monde va payer
pour. Alors, ce n'est pas cela qu'on appelle l'intérêt public, si
je parie de l'intérêt public, dans le sens de l'ensemble des
usagers de l'entreprise.
M. Ciaccia: Là, on peut faire un programme pour attirer
des industriels, des compagnies et des gros usagers et cela se peut que ce soit
le petit résidentiel qui paye une partie du programme.
M. Hamel (J. Jacques): C'est justement, tout le monde va payer
pour. Maintenant, il y a d'autres façons d'attirer la clientèle.
Avec la petite expérience que j'ai, par exemple, à
Hydro-Québec, à moins que je ne me trompe, on a donné des
subventions à des gens, mais on a dit: On va vous faire des
réductions de tarifs durant tant d'années pour rembourser.
À ce moment, ce n'est pas l'usager qui paie pour cela. Il y a
peut-être d'autres façons, mais la façon facile, c'est de
dire: Donnez-nous 20 000 000 $ sur ce programme, on met cela dans la base de
tarification, donnez-nous 14 % là-dessus et cela tournera comme cela
voudra. C'est cela qui se passe dans le moment, c'est malheureux à dire
mais c'est cela. Je vais peut-être avoir une action en dommages. Est-ce
que je suis protégé ici?
M. Ciaccia: Non, non. C'est très intéressant. C'est
malheureux que nous ayons seulement une heure pour le mémoire. Seulement
une autre petite question, si vous me le permettez. Vous parlez d'un rendement
raisonnable sur les actifs physiques qui ne seraient ni amortis, ni
dépréciés. Ne craignez-vous pas que, si on permet cela et
si on donne un rendement raisonnable sur certains actifs, le distributeur va
être tenté de maintenir dans la base de tarification des actifs
qui ne sont plus utiles afin d'augmenter son rendement? Est-ce que cela pourra
signifier que la régie devra accroître son contrôle?
M. Hamel (J. Jacques): C'est exactement le rôle de la
régie de voir à cela. Elle se doit d'examiner la base de
tarification, de voir que les actifs soient utiles et en usage, de rayer les
actifs si, à un moment donné, la preuve est faite que ces actifs
ne sont plus serviables ou ont été remplacés, d'enlever
l'actif remplacé et de rentrer le nouvel actif. Vous savez, le rendement
raisonnable, je l'ai toujours considéré non pas comme un taux,
mais comme un montant pour récompenser le distributeur du service rendu
à l'usager. Peut-être que la loi ne le disait pas comme cela, mais
je l'ai toujours considéré comme cela. (17 h 30)
Si on considère cela de cette façon, je me dis: Cela ne
sert à rien de dévaluer les actifs, de les amortir parce que
l'amortissement va causer, je pense, une dégradation de la
récompense du distributeur si on marche par un taux. Cela ne
paraît pas beaucoup dans Gaz Métropolitain parce qu'elle investit
beaucoup, encore plus que ce qu'elle sort. Mais on l'a vu tragiquement, je
dirais, dans le cas de... On a parlé tout à l'heure de Chauffage
Saint-Malo à Québec dont les actifs étaient tous
dépréciés et c'était un distributeur de vapeur qui
distribuait sa vapeur à tout le monde de la même façon
qu'il y a quinze ou vingt ans avec les mêmes actifs. Ils étaient
tous amortis. Cela veut
dire qu'il aurait fallu ne rien donner dans la loi actuelle. Encore
là, j'étais dissident, malheureusement. Ce qu'on a fait, c'est
qu'on a réévalué les actifs au coût de
l'évaluation municipale et on recommence, pour pouvoir justifier un
rendement raisonnable sur les investissements dans l'entreprise. À ce
moment-là la loi ne rendait pas le service qu'elle aurait dû
rendre. Si on s'était dits C'est la valeur du service, à ce
moment-là, cela n'a pas d'importance. Si j'ai un taxi et que je le garde
pendant trois ans, je vais transporter les passagers de la même
manière la troisième année qu'à la première
année, quoique mon taxi soit déprécié. C'est une
autre façon de voir les choses. C'est une suggestion que je fais bien
humblement parce que je suis maintenant un pauvre retraité et je pense
encore à cela. Ha! Ha! Ha!
M. Ciaccia: Une dernière petite question; Quel serait,
d'après vous, le rôle que devrait jouer le service de soutien de
la régie lors des audiences, par exemple, les comptables et les
analystes?
M. Hamel (J. Jacques): Le service de soutien a deux approches.
Vous avez, d'abord, le service qui devient, je dirais, autonome et qui prend
part aux causes, comme un intervenant, si vous voulez. Vous avez ce qui existe
actuellement, le service de soutien qui est là pour aider les
régisseurs à déblayer un dossier et à rendre leurs
décisions. Dans la deuxième partie de l'alternative, je ne pense
pas que ces gens-là devraient être mis en pâture dans une
cause parce qu'ils sont pratiquement avec nous. Autrefois, quand je suis
arrivé à la régie, quand on délibérait,
souvent, il y avait des gens des services avec nous. On leur posait des
questions, on travaillait avec eux. Alors, je ne nous vois pas, après
cela, prendre ces gens-là et les mettre dans la boîte pour qu'ils,
soient questionnés. Parce que là ils seraient placés dans
une position un peu contradictoire, je dirais, presque intenable. Est-ce que
les services qu'ils nous rendent ne devraient pas être confidentiels, en
ce qui nous concerne? Je peux demander au directeur des services techniques de
faire des recherches sur tel ou tel point pour mes propres fins dans
l'étude d'une cause. Devrait-il être questionné
là-dessus? Alors, un service de soutien ou service autonome, comme il y
en a dans certaines régies, qui devient partie prenante, qui peut
être questionné de part et d'autre, mais qui ne fait pas
directement partie de la régie.
M. Ciaccia: Merci beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je remercie
également le ministre de m'avoir laissé au moins une ou deux
questions. M. Hamel, des gens sont venus ici nous dire que la nouvelle
régie devrait conserver un pouvoir quant au domaine de la vapeur. Des
gens sont venus ici nous dire que la nouvelle régie ne devrait plus
s'occuper de la vapeur. Une saprée bonne question!
M. Ciaccia: Je te l'ai laissée.
M. Hamel (J. Jacques): J'ai l'impression que c'est moi qui vais
la ramasser.
M. Gauthier: Je voudrais connaître votre avis concernant le
rôle de la nouvelle régie. Le ministre, évidemment, a
choisi de lui donner, pour le moment, dans l'avant-projet de loi, un rôle
qui se limite au gaz. Quelle est votre opinion, vous qui avez eu à
intervenir même dans des dossiers qui... Vous avez parlé de
Chauffage Saint-Malo tout à l'heure.
M. Hamel (J. Jacques): Pour Chauffage Saint-Malo, en fait, il n'y
avait pas de problème parce que c'était un distributeur
dont...
M. Gauthier: Non, je comprends. Je ne veux pas que vous me
parliez de 5aint-Malo, mais, comme vous êtes déjà intervenu
comme régisseur dans des dossiers relatifs à la vapeur,
j'aimerais savoir si, à votre avis, on devrait maintenir ce secteur
comme champ de juridiction pour la nouvelle régie.
M. Hamel (J. Jacques): Au départ, il ne faudrait pas
prendre la cause de Trizec et CN comme prototype parce qu'elle remonte à
trop loin. Il y a eu des changements de loi qui ont été faits
depuis nombre d'années, au point qu'on s'est demandé, quand ces
contrats ont été faits, qui avait juridiction. Est-ce qu'il y
avait une juridiction quelconque sur leur vapeur ou non? De mémoire, je
ne pourrais pas vous le dire. Il faudrait que je regarde encore mes dossiers
pour vous faire l'historique de tout cela. Mais, il y a eu, à un moment
donné, des changements de loi d'une à l'autre. Cela a
été à la Régie des services publics; c'est venu
à la Régie de l'électricité et du gaz. Cela a
été fait en 1974, si je ne me trompe pas, juste avant que
j'arrive à la régie. On se demande si ces contrats étaient
sujets à des approbations quelconques dans le temps.
Mais, de façon générale, il faut considérer
la vapeur comme des réseaux plutôt minuscules, à cause du
fait qu'on ne peut pas transporter de la vapeur à 50 milles de la
source, parce que c'est trop restreint. Alors, ce sont des petits distributeurs
qui, à mon point de vue, peuvent devenir captifs. Quand je dis captif,
je ne veux pas dire
captif étouffé, mais captif au point que vouloir changer
d'énergie, ce serait des coûts exorbitants qu'on ne pourrait pas
absorber. Cela coûterait peut-être trop cher pour changer.
M. Gauthier: Oui, je comprends cela, M. Hamel, mais le sens de ma
question, ce n'est pas cela. Le sens de ma question, c'est, de façon
très large et générale - je ne veux pas que vous parliez
des causes spécifiques sur lesquelles vous avez travaillé -
d'après vous, devrait-on garder, oui ou non, une juridiction sur le
domaine de la vapeur à la Régie de l'électricité et
du gaz qui deviendra peut-être juste la régie du gaz, je ne sais
trop?
M. Hamel (J. Jacques): Je serais porté à croire que
oui, parce que c'est une énergie comme une autre. Même, je vois
que M. le ministre, dernièrement, à propos du pétrole, a
dit: On va le surveiller de plus près. Comme je vous le dis, ce sont de
minuscules réseaux. Saint-Malo avait une vingtaine de clients. Alors,
c'est 20 industries alentour de cette forme d'énergie, qui, à un
moment donné, peuvent se sentir prises et elles n'ont de recours nulle
part.
Comme on l'a dit un peu plus tôt, je pense que ça prend un
tribunal ou un organisme qui est spécialisé, jusqu'à un
certain point, dans ces questions. Je ne vois pas un juge de la Cour
supérieure, avec tout le respect que j'ai pour eux, se mettre à
débattre et à regarder la question des renvois de vapeur et des
pertes de vapeur. Enfin, il y a tellement de choses là-dedans: les
thermies, les retours et toutes ces choses-là.
Je pense que cela devrait rester, d'autant plus que la vapeur, de plus
en plus... La ville de Montréal, avec ses dépotoirs, se sert des
déchets pour faire de la vapeur et elle est à se former un
réseau. Maintenant, il y aurait peut-être lieu de mettre des
barèmes, enfin, de baliser cette chose-là, parce que, selon la
loi comme elle est là, je disais toujours: Le petit "valet service" du
coin de la rue, qui produit de la vapeur, devrait relever de la régie,
parce qu'on parlait de production, vente et distribution. Du moment que j'en
produis, je deviens sujet à la régie. Alors, cela n'avait pas de
sens. Évidemment, on n'est jamais allé jusque-là.
M. Gauthier: J'imagine!
M. Hamel (J. Jacques): Parce que cela aurait pris plusieurs
autres régisseurs.
M. Gauthier: Me basant sur cette expérience très
riche qui est la vôtre, j'aimerais connaître votre point de vue.
Hier, M. Mouton, qui est aussi un homme d'expérience, a prétendu
qu'au cours des dernières années la régie n'avait pu
remplir adéquatement ses devoirs de surveillance et de contrôle,
parce qu'il y avait un problème de ressources humaines, à tout le
moins, à la régie et peut-être de ressources
financières aussi.
J'aimerais savoir si, à votre avis, le jugement que M. Mouton
porte sur la régie ou sur l'état des choses dans les
années antérieures, vous le partagez ou si vous divergez
d'opinion avec lui là-dessus.
M. Hamel (J. Jacques): Là, vous me faites entrer un peu
dans une question d'administration de la régie et j'ai toujours eu comme
principe de ne pas me mêler d'administration, d'aucune manière.
Maintenant, au point de vue des besoins, je pense que, de plus en plus, depuis
cinq ou six ans au moins, à tous les ans, il fallait couper de tant pour
cent. Il fallait couper. Évidemment, plus on coupe, plus la charge est
lourde. Les services sont tellement limités en ce moment qu'ils sont
débordés par différentes causes dans différents
domaines qui arrivent toutes ensemble; ils sont obligés d'en mettre une
de côté. Je pense qu'il y aurait peut-être
amélioration de ce côté-là.
M. Gauthier: Cela va. Je vous remercie. Vous avez répondu
à ma question, entre autres, sur les programmes de commercialisation. Je
pense que cela va aller pour le moment. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Comme
d'habitude, depuis quelque temps, M. le député de Roberval, je
vous redonne la parole pour la conclusion.
M. Gauthier: Je voudrais prendre la peine de remercier M. Hamel
qui a attendu patiemment jusqu'à maintenant pour nous présenter
ses remarques fort intéressantes. D'ailleurs, je pense que
l'échange de vues qu'on a eu sur l'exposé ne rend pas justice
complètement à la substance du mémoire
présenté.
Je dois vous dire, M. Hamel, que nous apprécions
particulièrement ce que vous nous avez dit parce que cela repose sur une
longue expérience. Cela a une valeur. C'est surtout, je pense,
désintéressé, dans ce sens que vous n'oeuvrez plus
maintenant dans ce domaine sauf que vous y êtes resté
manifestement attaché. C'est ce qui donne du poids, je pense, et de la
valeur à votre témoignage. Nous en tiendrons compte avec tout le
respect que ce témoignage mérite.
M. Hamel (J. Jacques): Merci.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je veux remercier M. Hamel pour ses remarques. Vous
pouvez être assuré, M. Hamel, que nous allons apporter une
attention particulière aux suggestions que vous nous avez faites. J'ai
trouvé vos remarques intéressantes et rafraîchissantes. Je
trouve que votre mémoire et vos remarques font une bonne conclusion aux
travaux de cette commission. Je vous remercie.
M. Hamel (J. Jacques): Merci, M. le ministre. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Théorêt): M. Hamel, les
membres de la commission vous remercient et vous souhaitent un bon voyage de
retour à la maison.
M. Hamel (J. Jacques): Merci.
Le Président (M. Théorêt): Les travaux de la
commission...
M. Gauthier: Les remarques finales.
Le Président (M. Théorêt): Oh! Pardon! C'est
vrai, oui. Je m'excuse. M, le député de Roberval. Nous passons
maintenant aux remarques finales. Tantôt, j'étais en avance et,
maintenant, je suis en retard. Je cède la parole au député
de Roberval et critique officiel de l'Opposition.
Conclusions
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Mes premiers mots, lors de ces remarques finales,
seront pour remercier le personnel, l'équipe de fonctionnaires, les gens
du cabinet du ministre, les gens de nos services de recherche, de même
que tous ceux et celles qui ont pris la peine de suivre nos travaux depuis le
début.
Ce n'est pas un exercice facile. C'est un exercice plutôt exigeant
sur le plan physique que de suivre l'ensemble des travaux d'une commission
parlementaire, mais c'est enrichissant. Cela permet surtout à plus de
gens de comprendre le sens de l'exercice qu'on fait dans ce Parlement
principalement lors de l'étude d'un avant-projet de loi, parce qu'il ne
s'agit pas encore d'un projet de loi au moment où l'on se parle.
Je voudrais également remercier, comme je l'ai fait, d'ailleurs,
chaque fois, ceux et celles qui ont présenté des mémoires
substantiels, des mémoires bien articulés qui nous ont
donné beaucoup d'idées et matière à
réflexion, et surtout qui ont confirmé certaines
appréhensions qui pouvaient être les nôtres au moment
où cette commission a commencé.
M. le ministre, je vous adresserai également mes remerciements et
les remerciements de l'Opposition pour avoir procédé par
avant-projet de loi. Cela évitera très certainement des erreurs
qui sont habituellement inévitables quand on procède par
législation. Cela nous aura permis de recevoir des témoignages
éclairants sur le contenu de cet avant-projet de loi.
Nous souhaitons, M. le ministre, que les devoirs que vous aurez à
faire à compter de maintenant soient bien faits. C'est toujours le voeu
que nous exprimons en terminant une commission parlementaire. Mais vous savez
que la loyale Opposition, M. le ministre, peut se permettre des commentaires
tout aussi loyaux pour que les gens du Québec soient mieux servis par la
mesure législative que vous vous proposez d'adopter. Je me permettrai
donc de vous indiquer que nous avions raison, d'une certaine façon, au
début des travaux de cette commission, d'exprimer des craintes quant
à certains aspects qui étaient soit passés sous silence,
soit insuffisants dans le projet de loi. Je me permettrai de vous les rappeler
quelque peu. (17 h 45)
Prenons, d'abord, la question du mandat de la régie. Plusieurs
personnes ont indiqué, M. le ministre, leur inquiétude. Plusieurs
personnes, que ce soit d'expérience ou que ce soit parce qu'elles ont
été des usagers de la régie, ont exprimé
l'intention qu'au moins le secteur de la vapeur, dont il a été
abondamment question aujourd'hui, puisse se retrouver quelque part afin que
tout ce secteur-là ne soit pas laissé pour compte, ne soit pas
laissé dans le décor sans que personne ne s'y intéresse.
Vous aurez donc, M. le ministre, au moment où vous ferez vos devoirs
pour les remettre officiellement à l'Assemblée nationale,
à tenir compte de cet aspect. Je sais que parfois vous avez de la
difficulté à prévoir les choses, mais, cette
fois-là, je pense que vous avez été bien averti. Vous
n'aurez pas d'excuse. Vous devrez prévoir toute intervention possible
pour le secteur de la vapeur avant de modifier la loi.
Deuxième chose, on s'est inquiété sur le nombre de
régisseurs, M. te ministre. Trois régisseurs, selon nous, ce
n'était pas beaucoup. Des gens sont venus le dire ici, que ce soit parce
qu'ils voyaient au sein de la régie même possiblement un
mécanisme d'appel, de révision de décisions ou que ce soit
pour jouer pleinement le rôle que la régie doit jouer; surtout
dans le cadre de la déréglementation, il peut y avoir un volume
de plaintes ou de cas déposés à la régie qui soit
supérieur à ce qu'on a connu dans le passé. Je vous
demanderais donc, M. le ministre, d'être vigilant là-dessus et
d'essayer de prendre en compte les différentes plaidoiries qui nous ont
été présentées ici.
Quant à l'échéance du mandat des
commissaires, quant à la procédure de remplacement, je
crois que les devoirs n'ont pas été faits du tout. Vous devrez
tenir compte du fait que des gens d'expérience vous ont affirmé
dans la salle que, pour faire un bon régisseur, cela prenait environ 16
mois de formation. Il ne faudrait pas qu'un mandat d'un commissaire qui prend
18 mois à temps plein, et je veux bien croire les gens
d'expérience, soit tellement court qu'au moment où il commence
à être efficace on le remplace, d'une part. D'autre part, je ne
voudrais pas que la commission se voie délester de ses ressources de
régisseurs au même moment. Vous aurez donc à prévoir
toute une mécanique.
Il y a aussi des gens, M. le ministre, qui sont venus confirmer notre
appréhension concernant le pouvoir très large, non balisé
et irraisonnable, à notre point de vue, que vous vous attribuez par
l'article 63 de l'avant-projet de loi. Je pense que vous vous montrerez
davantage raisonnable, compte tenu de ce qui vous a été dit, et
que vous modifierez substantiellement cet article pour baliser ce pouvoir.
Je termine là-dessus, je ne veux pas être très long,
M. le ministre. Il y a des aspects de l'avant-projet de loi dont nous n'avons
pas traité dans cette commission parce que personne de ceux qui sont ici
n'a abordé le sujet, pas que c'était sans intérêt,
loin de là, mais davantage parce que leurs préoccupations se
centraient ailleurs. Je pense, entre autres, aux modifications que vous faites
à la Loi sur Hydro-Québec. Je dois vous dire que, même si
au moment de l'étude de l'avant-projet de loi, nous ne sommes pas
intervenus là-dessus puisqu'il n'y avait personne qui était venu
nous présenter de mémoire, cela ne veut pas dire, pour autant,
que nous achetons globalement et totalement ces articles-là. Nous aurons
à faire une analyse poussée au moment où vous
déposerez un projet de loi et nous ferons, lors de l'étude
article par article, les commentaires à propos, de même
qu'à l'Assemblée nationale en deuxième lecture et en
troisième lecture, si votre projet de loi se rend là.
Cela m'a fait plaisir, M. le ministre, de collaborer avec vous au cours
de cette commission et nous vous surveillerons pour que vos devoirs soient bien
faits, soyez-en sûr.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
député de Roberval.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Bien, je voudrais, pour ma part, remercier les
membres de la commission, le personnel qui a travaillé sur le dossier.
Je voudrais remercier aussi tous ceux qui ont présenté les
mémoires et je veux remercier aussi le député de Roberval,
de l'Opposition officielle.
Cela a été une approche plutôt positive en termes de
questions, d'inquiétudes ou de préoccupations. Certainement, vous
aviez, comme vous l'avez mentionné, certaines craintes sur certains
aspects de la loi. C'est ça, le but d'un avant-projet de loi. Nous
aussi, nous avions des questions sur certains aspects. C'est pour cela que nous
avons procédé par un avant-projet pour obtenir plus
d'éclaircissements, pour faire une consultation dans le milieu et
obtenir, autant que possible, les recommandations de ceux qui seront
affectés par le projet de loi, et voir exactement les suggestions qu'ils
pourraient nous faire. Avec ce mandat, je pense que nous avons réussi
à atteindre nos objectifs. Nous avons obtenu différentes
interventions, différents mémoires des gens qui "opèrent"
ici ou en dehors, qui sont affectés par la régie.
On a touché plusieurs aspects fondamentaux de la loi: le
rôle de la régie, la question du "by-pass", la
sécurité des approvisionnements, les activités des
courtiers. Je ne ferai pas un résumé des questions qui restent
à être résolues dans tous ces domaines. C'est juste pour
donner un exemple ou une liste des sujets sur lesquels nous devons nous
pencher. Nous devrons revoir et examiner le taux de rendement, l'approbation
des grilles tarifaires, le rôle de la régie, le remboursement des
trop-perçus.
En ce qui concerne l'article 63, on comprend qu'il y a eu des
suggestions de clarifier, de modifier cet article, quoique, dans plusieurs cas,
les interventions et les problèmes qui ont été
soulevés nous portent à croire qu'il faut avoir quelque chose
comme l'article 63. Pas nécessairement le libellé tel quel, mais
le principe qui est convenu dans l'article 63. Pas seulement un, mais plusieurs
intervenants et non seulement les propos de ceux qui se sont prononcés
favorablement, mais les choses qui ont été dites par d'autres
intervenants nous portent à croire que cela peut être un article
très utile, si on le modifie correctement et si on répond aux
attentes et aux questions qui ont été soulevées au sujet
de l'article 63.
En ce qui concerne la vapeur, bien, c'est une question sur laquelle on
va se pencher. On va examiner plus précisément les
représentations qui nous ont été faites et les opinions.
Nous avons entendu des intervenants dans tous les domaines que j'ai
énumérés. Nous avons pu apprécier, avec plus de
justesse, la portée des modifications envisagées.
J'en profite aussi pour souligner la pertinence des mémoires
soumis et des présentations des intervenants. Je crois qu'ils
ont porté à notre attention des problèmes
très spécifiques, très réels. Je peux assurer tant
l'Opposition que les intervenants que nous allons examiner d'une façon
très particulière toutes les recommandations qui nous ont
été faites. Nous espérons que nous pourrons revenir avec
un projet de loi -certainement qu'il va y avoir des modifications - qui va
pouvoir répondre aux questions qui ont été
soulevées et aux besoins du milieu. Merci.
Le Président (M. Théorêt): Alors, je voudrais
remercier de leur excellente collaboration avec la présidence tous ceux
et celles qui ont participé aux travaux de la commission.
La commission de l'économie et du travail, ayant
complété son mandat qui était de procéder à
une consultation générale en ce qui a trait à
l'avant-projet de loi sur la Régie du gaz naturel, ajourne donc ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 17 h 55)
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