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(Onze heures trente-neuf minutes)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'économie et du travail reprend ce matin ses
consultations particulières sur le projet de loi 119, Loi modifiant la
Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. D'abord,
je vais demander au secrétaire de la commission s'il y a des
remplacements.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gobé
(Lafontaine) est remplacé par M. Lemire (Saint-Maurice) et M.
Paré (Shefford) est remplacé par Mme Juneau (Johnson),
Le Président (M. Charbonneau): Je voudrais simplement
indiquer que le leader de l'Opposition et critique en matière de
travail, M. Chevrette, m'a indiqué qu'il serait quelques minutes en
retard et m'a prié de l'excuser et, d'autre part, je voudrais indiquer
aux gens qui sont dans la salle que, comme ils l'ont sans doute
constaté, ce n'est pas la plus grande des salles du parlement.
Malheureusement, la plus grande des salles dans laquelle on siégeait
hier est occupée ce matin. Alors, je demanderais à tous la
collaboration pour restreindre vos élans de fumeurs, d'une part, et
surtout je vous rappellerais que les délibérations se font ici
autour de la table et non pas à l'arrière. Cet après-midi,
on devrait normalement se retrouver au salon rouge.
L'ordre du jour pour aujourd'hui est le suivant: d'abord, nous allons
entendre l'Association des entrepreneurs en construction du Québec
jusqu'à 13 heures, et peut-être 13 h 10, pour se conformer au fait
qu'on lui avait accordé une heure trente. Par la suite, à la
reprise des travaux cet après-midi, à 15 heures, nous entendrons
la Fédération des travailleurs du Québec; par la suite,
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec.
À 17 h 30 ou aux alentours, on devrait entendre la
Confédération des syndicats démocratiques et on devrait
filer, par la suite, avec l'Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec vers 18 h 30, ce qui veut dire qu'il n'y aurait pas de
suspension. Cela permettra aux membres de la commission d'être
libérés autour de 20 heures. Je pense que cela va faire l'affaire
de tout le monde.
M. Daoust, président de l'Association des entrepreneurs en
construction, je voudrais vous souhaiter la bienvenue et vous demander d'abord
de présenter les gens qui vous accompagnent et vous rappeler que, comme
une période d'une heure trente a été prévue pour
votre organisme à la fois pour la présentation et la discussion,
vous avez d'abord vingt minutes pour présenter votre mémoire et
le temps qui reste est divisé à part égale des deux
côtés de la table pour les discussions et les commentaires sur vos
points de vue.
Sans plus tarder, M. Daoust...
Association des entrepreneurs en construction du
Québec
M. Daoust (Claude): Bonjour. Je suis accompagné de M. Luc
Letellier, à ma gauche, et de M. Robert Brown, à ma droite, qui
sont tous deux adjoints au directeur général à l'AECQ,
ainsi que de M. Jean Bédard, qui est notre directeur du contentieux. Je
ne sais pas s'il y a un lien avec votre Jean Bédard, mais, enfin, c'est
le même nom. Ne soyez pas surpris, à la période de
questions, si je transfère le micro à un de ces individus. Je ne
possède pas la vérité à 100 % ni toutes les
informations. Je n'aurai aucune hésitation à passer la question
à quelqu'un d'autre si cela est nécessaire.
Le Président (M. Charbonneau): Cela nous rassure de savoir
que vous ne possédez pas toute la vérité.
M. Daoust: Je ne me prends pas pour le bon Dieu, loin de
là.
Vous avez eu notre mémoire qui est quand même assez
volumineux. C'était bien évident qu'il n'y avait pas
possibilité de lire ce mémoire dans une période de 20
minutes. On a essayé de le résumer. Je vais être malin:
J'ai beaucoup d'avocats qui travaillent à l'AECQ. Les avocats aiment
parler et le résumé qu'ils m'ont donné a à peu
près 10 pages de moins que le document que vous avez eu. J'ai
passé une partie de la soirée, d'hier à essayer d'en
enlever; quand j'en enlevais, cela ne se tenait plus. J'ai alors
décidé de prendre le risque - et je vous demanderais, en
conséquence, d'être indulgents - de vous faire une
présentation "sur le bras" comme on dit. Je vais couvrir les points. Les
arguments sont certainement plus approfondis dans le document. Je vais
aussi être très franc. Je suis malin. Je vais essayer de
susciter votre intérêt, votre curiosité pour que vous
alliez fouiller là-dedans en fin de semaine. Je ne me fais pas
d'illusion, vous allez recevoir treize mémoires, si je comprends bien,
ou douze -parce que le syndicat de la Côte-Nord ne se présente pas
- et ce serait, je pense, rêver en couleur de penser que vous allez lire
les douze mémoires de la première à la dernière
page. Alors je vais certainement essayer de susciter votre intérêt
et votre curiosité.
Le Président (M. Charbonneau): Vous êtes bien
parti.
M. Daoust: Pour comprendre nos commentaires, il faudrait
commencer par identifier la sorte d'association que l'on est. L'AECG est une
association d'employeurs, strictement d'employeurs. Il ne faudrait pas
confondre employeurs et entrepreneurs. Un employeur est nécessairement
entrepreneur mais un entrepreneur n'est pas nécessairement un employeur.
Pour être employeurs il faut des employés. Il y a des
entrepreneurs qui donnent tout en sous-traitance et ils n'ont donc pas
d'employés. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous sommes
présentement la partie qui représente le patron au conseil de
l'OCQ. Le mandat de l'OCQ est l'administration du décret, des avantages
sociaux, choses qui relèvent de notre mandat d'après la loi. Ce
sont des problèmes d'employeurs et c'est la raison pour laquelle c'est
nous qui sommes au conseil d'administration de l'OCQ pour représenter
les patrons dans le moment.
On représente tous les employeurs en construction du
Québec: les petits, les gros, les moyens, les quatre secteurs, toutes
les régions. Il n'y en a pas un qui nous échappe à moins
d'être sur le marché noir. (11 h 45)
Nos statuts, la composition de notre conseil d'administration, c'est
formé de la même façon. Les commentaires qu'on va vous
faire sont des commentaires basés sur des politiques établies
dans le passé par l'association, sur différents sujets. Ce sont
donc des politiques qui viennent, justement d'un mélange d'entrepreneurs
de toutes les grosseurs, parce que la composition de notre conseil
prévoit que toutes les grosseurs doivent être
représentées, tous les secteurs doivent être
représentés et toutes les régions du Québec doivent
être représentées. Je pense que ce serait alors logique de
dire que c'est vraiment le pouls des employeurs en construction du
Québec. A ma connaissance, il n'y a pas un sujet ou une remarque qu'on
va vous faire aujourd'hui qui n'a pas été accepté à
un moment ou à un autre - je ne vous dis pas que cela est passé
au conseil d'administration la semaine dernière, le temps manquait, mais
à un moment ou un autre dans les deux dernières années,
probablement - qui n'a pas passé au conseil d'administration et qui n'a
pas été approuvé unanimement.
Comme je vous l'aï dit tantôt, je vais vous demander
d'être tolérant pour ma présentation parce que je suis
obligé de sauter des feuilles ici et là. Naturellement, nous
sommes très heureux de l'occasion que nous avons de venir vous faire nos
commentaires et de présenter la position de l'association.
Dans les mémoires, vous avez la première section qu'on a
intitulée. Structure de la CCQ, ou de l'OCQ, selon la décision
finale.
Premièrement, les commentaires que nous avons à faire sur
le projet de loi 119 en ce qui concerne la composition du conseil, c'est que le
gouvernement se qarde, selon nous, un peu trop de pouvoirs
représentatifs et décisionnels. Le pouvoir de
réglementation que le gouvernement se garde, selon nous, est
excessif.
En même temps - et c'est une des raisons qui m'ont amené
à faire une présentation verbale - c'est que, depuis hier matin,
j'ai entendu beaucoup de choses. Je ne suis pas plus idiot qu'un autre. Quand
j'entends une bonne idée, je saute dessus. Un entrepreneur, c'est fait
comme cela. Tu en voles un peu ici et là tu viens è bout de
survivre. Je ne dirais pas qu'on endosse la position de chaque association
syndicale ou patronale qui est passée jusqu'à maintenant, mais on
a quand même retiré des choses positives des différentes
présentations, des remarques et des questions qui ont été
posées par Ies membres de la commission.
On dit qu'on est contre le pouvoir réglementaire que le
gouvernement s'est gardé et le pouvoir décisionnel, dans certains
cas, au conseil d'administration de l'OCQ mais je suis conscient aussi des
remarques qui ont été faites: Si vous ne vous entendez pas,
qu'arrivera-t-il? Si vous discutez des règlements pendant quatre mois et
que cela n'aboutit pas, cela va durer combien de temps, combien
d'années? On va commencer par vous indiquer nos craintes et
peut-être la solution possible après.
Nos craintes sont que les règlements, le pouvoir de
réglementer... Les règlements, cela se change trop facilement.
C'est aussi clair que cela et je vais vous donner un exemple bien frappant: le
règlement de placement a été changé à chaque
année, je pense, au cours des quatre dernières années.
Cela se fait bien facilement. On va au Conseil des ministres, boum, boum, une
étampe et c'est fini.
Une loi, c'est un peu plus difficile. On s'en aperçoit, on a
maintenant une commission parlementaire. C'est discuté en Chambre et
tout le monde participe aux
discussions. Ce n'est pas du tout la même chose.
Nous sommes conscients qu'il doit y avoir un processus pour
débloquer la réglementation. Si j'ai bien compris, on est en
train de rédiger les règlements. Je ne sais pas pour combien de
temps vous en avez, parce que je ne suis pas dans le secret des dieux, loin de
là. Une fois ces règlements complets, nous suggérons un
mois d'étude par les parties. Si les parties ne s'entendent pas, c'est
bien évident qu'il faut que quelqu'un décide quelque chose. Je
suis d'accord avec les commentaires, on ne peut pas attendre ad vitam aeternam.
Au bout de cette période d'un mois - et je crois qu'un mois c'est assez
pour discuter de la réglementation - si on ne s'entend pas, je vois
très bien le gouvernement mettre en application les règlements
ainsi qu'il le jugera à propos en tenant compte, on l'espère, des
commentaires.
Une fois ces règlements mis en place, ils devraient être
incorporés à la loi et le pouvoir de modifier ces
règlements devrait disparaître. Â ce moment-là, cela
veut dire qu'à chaque fois que quelqu'un voudra apporter une
modification, il devra modifier la loi. C'est un peu plus difficile. Je crois
que cela nous donnerait les garde-fous dont on a besoin. J'ai toute la
confiance possible en la présente administration et je suis prêt
à croire que les administrations futures seront de bonne foi, mais
l'expérience du passé nous démontre, comme je vous l'ai
dit pour le règlement de placement, que cela se modifie très
facilement. On aimerait s'éloigner de ce principe.
La composition du conseil d'administration de l'OCQ. Si vous regardez
notre document, on vous présente deux choix. On croit que le conseil est
trop volumineux. Cela va amener des discussions très lentes et cela va
faire des consensus plus difficiles à obtenir que dans le
passé.
Je vous ferai remarquer que dans le moment les deux parties sont
représentées au conseil d'administration et cela fait presque
deux ans et demi, d'ailleurs. À l'époque, quand les deux parties
ont été nommées, des gageures ont été prises
par plusieurs individus des deux côtés et aussi par des
députés, enfin, par tout le monde concerné: Cela va durer
deux mois! C'est bien dommage, mais cela fait deux ans et demi et cela dure
encore. Â ma connaissance, il n'y a pas eu un dossier qui a
été mis de côté, parce que les deux parties ne
s'entendaient pas, en deux ans et demi. Il y a une réunion qui a
été remise d'une semaine ou d'une semaine et demie - ma
mémoire n'est pas exacte. C'était au moment des
négociations. Ce n'était pas parce qu'on avait des
problèmes dans les négociations; c'est parce qu'on avait des
rencontres de prévues pour les négociations. Donc, on a remis les
rencontres avec l'office d'environ une semaine, ce qui n'a pas retardé
la bonne marche de l'office. Il n'y a aucun effet qui se transmet des
négociations à l'administration. À ce jour, les deux
parties ont démontré qu'elles ont pu garder, les deux fonctions
complètement séparées, même si c'étaient les
mêmes individus qui étaient impliqués, M. Rivard et
moi-même.
Une des solutions que l'on propose, c'est de garder la structure
actuelle de l'OCQ et de simplement prendre avantage de l'article 80 du projet
de loi qui permet à l'office de faire de la formation. Autrement dit,
que l'on établisse une branche de l'office qui ferait de la formation
avec un pouvoir décisionnel pour les deux parties. Ceci aurait comme
avantage de libérer l'office de toutes sortes d'autres changements, y
compris le changement de nom, le changement de participation au conseil, avec
tout ce que cela peut amener, et de se concentrer sur le problème urgent
de la formation. Si, plus tard, c'est vraiment nécessaire de faire des
changements à un conseil d'administration, à un nom ou à
n'importe quoi de ce genre, il sera toujours temps de le faire, mais pourquoi
ne pas se concentrer sur notre problème immédiat, la
formation?
Je vous dirai que, si jamais le temps vient de changer le nom, c'est une
des questions que l'on se pose... Je me rappelle très bien, quand j'ai
débuté au conseil d'administration de l'AECQ en 1979, que
l'office avait une réputation qui n'était pas drôle.
C'était plus ou moins l'ennemi du patron. Il avait la réputation
de ne pas être impartial. Je suis obligé de reconnaître...
Cela me fait plaisir de reconnaître qu'il y a eu des changements
substantiels et que, en général, à part quelques individus
qui n'ont pas pu s'adapter aux nouvelles politiques de l'office, effectivement,
l'administration est impartiale. Je crois que l'on en a eu la
démonstration hier matin. Je dois féliciter M. Fournier, qui a
patiné à quelques reprises, je le reconnais, pour demeurer
impartial. C'était le mandat du conseil d'administration de l'OCQ et il
le suit à la lettre.
On reconnaît que l'office est beaucoup plus - je l'ai dit et je le
répète - impartial qu'il ne l'était avant. Pourquoi
changer quelque chose qui marche bien? Il y a un vieux dicton qui dit: Ce qui
n'est pas cassé, tu ne le répares pas. À ma connaissance,
l'office n'est pas cassé dans le moment, cela va bien. Le conseil
d'administration va bien. Alors pourquoi changer cela?
Deuxièmement, je vous ferai remarquer que, dans le moment, la
raison pour laquelle c'est nous qui sommes au conseil d'administration - je
parle de l'AECQ, du côté patronal - c'est que le mandat de l'OCQ,
c'est l'application du décret que les deux parties ont
négociée. La partie patronale, c'est l'AECQ. Il est inconcevable
qu'il y ait une représentation au conseil
d'administration qui pourrait avoir des influences sur
l'interprétation du décret, un exercice auquel ces gens n'auront
pas participé. Là-dedans, il ne faut pas lire des petites guerres
d'associations, loin de là. Il y a eu des rapprochements - pour
n'importe qui lisant les journaux - substantiels, énormes, depuis
quelques mois. Ce ne sont pas mes ennemis, loin de là. Je leur reconnais
beaucoup de pouvoir, d'intelligence, enfin, tout ce que vous voulez. Mais, dans
les relations du travail, je crois que, si ces négociations sont faites
par deux parties, alors l'administration devrait se faire par deux parties.
Je reconnais également que la formation, que ce soit dans une
structure ou une autre, les associations patronales traditionnelles doivent y
participer. C'est leur mandat, elles sont bien préparées pour
cela et je serais bien heureux qu'on ait de la formation, parce que cela fait
longtemps qu'on n'en a pas eu.
L'autre choix serait d'avoir un conseil plus ou moins selon les
structures proposées, mais en gardant la composition du conseil ainsi:
deux représentants patronaux de l'AECQ et deux représentants
syndicaux. Car, même avec le mandat de formation, on croît que 80 %
- si ce n'est pas plus - des opérations de l'office vont demeurer avec
l'application d'un décret. Donc, là encore, fidèles aux
mêmes principes, ce sont les deux parties qui devraient être au
haut de la ligne, à moins qu'on n'ait l'idée de créer un
organisme monstre, comme la CSST, avec des budgets de 60 000 000 $ ou de 100
000 000 $.
J'espère que la participation de l'office dans la formation du
personnel, comme dépenses, va quand même être la partie la
moindre de l'office. On nous a assuré que les subventions pour la
formation étaient encore disponibles via le ministère de
l'Éducation. Donc, je ne vois pas d'implication financière
là. Quant à la formation faite à l'extérieur de
l'école, si j'ai bien compris, le ministère du Travail offre la
possibilité de subventions à différents moments.
Donc, là encore, il ne devrait pas avoir d'implications
financières pour les parties. Il reste certainement l'administration
générale de la formation, mais je pense que ce n'est pas avec
cela qu'on va doubler le budget de l'OCQ, enfin, je l'espère, parce
qu'on parle d'un budget de 30 000 000 $ à l'OCQ. J'espère qu'on
ne construira pas une autre CSST.
La deuxième proposition, c'est donc le même conseil
d'administration que présentement avec des observateurs du gouvernement;
deux comités, tels que proposés: un comité des relations
du travail et un comité de formation professionnelle. Le comité
des relations du travail serait composé de deux représentants de
l'AECQ et de deux représentants syndicaux, plus un observateur du
ministère du Travail, naturellement.
La responsabilité et le pouvoir décisionnel sur le
décret, le budget du décret et ces choses-là
relèveraient du comité des relations du travail. En haut, c'est
strictement de l'administration pure. Avant de traverser de l'autre
côté de la table... Le comité mixte continuerait d'exister
sous sa présente forme avec le pouvoir décisionnel de faire
l'interprétation de décrets. Cela fait des années que le
comité mixte demande ce pouvoir décisionnel. Je ne suis pas
idiot, je comprends très bien qu'on devra prévoir un
système d'arbitrage si les deux parties ne s'entendent pas, parce que
cela arrive parfois qu'on ne s'entende pas.
Au comité de formation professionnelle, on demande la
présence de toutes les associations patronales et de toutes les
associations syndicales, sous une forme paritaire de représentation avec
les observateurs des ministères de la Main-d'Oeuvre et de
l'éducation. Ce comité aurait aussi le pouvoir décisionnel
de ce qu'ils veulent par la formation: les contenus de cours et ces
choses-là.
Il pourrait très bien avoir sous cela une commission de formation
professionnelle où l'ouvrage de boutique se ferait, comme on dit.
Là encore la représentation devrait être paritaire: sept
représentants patronaux et sept représentants syndicaux. Mais le
pouvoir décisionnel demeure toujours aux deux parties du comité
d'administration.
Je vais passer au financement de l'office. Je n'ai pas tenu compte de
l'heure à laquelle j'ai commencé, mais j'ai l'impression que je
vais manquer de temps. Il me reste cinq minutes, me dit-on.
Le financement, c'est simple. On pense que prévoir que le
financement pourrait passer de 0,05 % à 1 %, c'est élevé.
On parle d'un budget de 30 000 000 $ et de doubler la taxation ou le pouvoir de
taxation. La moindre chose qu'on pourrait exiger, c'est que toute augmentation
se fasse à la suite d'une volonté commune des deux parties. C'est
la moindre chose qu'on pourrait exiger.
Passons par-dessus le placement mais j'y reviendrai, c'est un sujet que
j'ai à coeur. Quant à la formation professionnelle, j'ai
parlé tantôt de la structure proposée. On est d'accord
qu'il devrait y avoir de la formation professionnelle. Cela fait des
années qu'il n'y en a pas. On est bien réceptif au projet de loi
119 et au fait que l'accès à la construction soit basé sur
la compétence. Donc, il faut faire de la formation et ce sont les deux
parties qui devraient la faire. D'ailleurs, le désir a été
exprimé conjointement. Quant au pouvoir réglementaire, je l'ai
abordé au début. Si vous fouillez là-dedans, vous allez
avoir d'autres éclaircissements.
(12 heures)
On parlait de transferts de juridiction en matières
pénales. Dans le moment, à ma connaissance - je reviens encore au
principe qui dit: Si ce n'est pas brisé, ne le répare pas - le
système fonctionne très bien. L'office a des représentants
dans les différentes régions, cela nous amène une
uniformité de dossiers, des décisions uniformes, cela nous permet
de prendre des dossiers clés et d'avoir une décision qui
s'applique dans toute la province. On voit ce qui se passe, on n'a qu'à
lire les journaux, je ne crois pas qu'on va être mieux servi par les
procureurs de la justice. Il faudrait beaucoup d'imagination pour penser que
dans le moment cela irait bien. En plus, cela amènerait une perte de
revenu à l'OCQ et naturellement on serait complètement contre
cela.
Je vous ferai remarquer que, à ma connaissance, tous les bureaux
que l'office utilise sont en place depuis au moins quinze ans, à part
peut-être deux. Je crois que, dans ces deux cas, c'est un changement de
nom simplement parce que les associés se sont divisés et se sont
reformés. Cela indique une continuité, cela indique une
satisfaction des deux parties, c'est certain; sans cela, dans les deux
dernières années, on aurait eu l'occasion de modifier les mandats
parce qu'ils devenaient échus.
Il ne me reste pas grand temps, je retourne... Deux minutes? Je vais
faire cela vite. J'aurais dû éliminer tout le reste et parler
seulement du règlement de placement. Je suis un entrepreneur, qui, par
la nature de son entreprise, structure d'acier, revêtement
métallique, chantier industriel, ce genre de chose, fonctionne au niveau
provincial. Il y a peut-être beaucoup de nos membres qui ne sont pas
touchés par le règlement de placement. Ils ont des
employés à l'année, ils ont deux, trois ou quatre
employés, cela ne change pas beaucoup, cela fait des années que
cela se passe entre eux, ce sont des petites affaires de famille, il n'y a pas
de problème et je respecte leur grosseur, la façon dont ils sont
structurés et tout.
Il faut reconnaître que la majorité des heures sont faites
par un groupe assez restreint d'entrepreneurs. C'est là que les
problèmes de mobilité apparaissent. Il est complètement
logique, et dans ce sens on est très réceptif au projet de loi
119, que cela nous prend des employés qui sont très
qualifiés. Où on est en désaccord, c'est que le
règlement de placement, avec la mentalité d'emploi
régional, demeure en place.
Il faut s'imaginer un entrepreneur qui a des pièces
d'équipement qui valent 500 000 $, 1 000 000 $, 1 500 000 $ à
l'occasion, c'est essentiel que cette pièce d'équipement soit
confiée à un homme clé qu'il connaît et en qui il a
confiance. Je reconnais que le projet de loi prévoit une mesure
transitoire, je crois, juqu'à la fin de 1987, je ne suis pas sûr
des dates, où le concept d'employés permanents demeure. Il n'y a
aucune disposition pour après. Il y a aucune assurance que cela demeure
en place, le concept d'employés clés, d'hommes clés.
Le critère d'heures des années passées pour
déterminer ce qu'est un employé clé, un employé
permanent est, encore là, complètement idiot. Cela n'a aucun
sens. Si j'ai quelqu'un à mon emploi, si cela fait deux, trois ou quatre
semaines, il est à mon emploi. C'est illogique de le mettre à
pied pour aller dans une autre région et engager quelqu'un !à. Le
choix que je devrai avoir à faire devrait être un choix
économique. Dans le décret, on a négocié des
conditions qui prévoient 230 $ par semaine de "frais de
déplacement; dans certains métiers, c'est plus que cela.
Cela, c'est de l'économie. Si je crois que je suis mieux de payer
230 $ par semaine pour amener quelqu'un avec moi, je vais faire face à
une compétition locale et c'est un problème d'entrepreneur, c'est
à moi de juger. Même les frais de déplacement
régional - 30 secondes? - à première vue on dirait: II n'y
a rien là, 6 $, 10 $, 17 $ par jour, cela dépend des millages.
Pensez-y, messieurs, 17 $ par jour, c'est 2 $ l'heure, c'est plus que la marge
d'administration -profit que la plupart des entrepreneurs mettent dans leurs
soumissions. C'est beau de dire: 17 $, il n'y a rien là. 10 $, c'est
1,25 $ l'heure. Là encore, c'est probablement l'équivalent des
frais d'administration.
C'est malheureux, j'aurais aimé parler pendant dix minutes de la
mobilité de la main-d'oeuvre parce que c'est quelque chose que j'ai
à coeur, mais j'espère que vos questions vont...
Le Président (M. Charbonneau); Je pense que vous n'avez
pas à vous inquiéter. Je suis convaincu qu'on va en reparler.
M. Daoust: Oui, je l'espère.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Daoust.
M. Daoust: Je m'excuse si j'ai dépassé
légèrement.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, il n'y a pas de
problème. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai une série de questions
et vous comprendrez que la première touche à la structure
même de l'organisme. Si on est pour parler du partage ou du
départage des pouvoirs en matière de réglementation dans
le domaine de la construction, il faut en arriver à une décision
sur l'organisme.
Vous me dites: Je siège à l'OCQ, cela
va très bien, etc. Moi, je prends les dispositions de la loi et
je regarde. Ils auraient pu, comme gouvernement nommer - parce que la loi les y
autorisait - cinq fonctionnaires à l'OCQ. On aurait pu prendre des
dispositions en vertu des nominations pour que les parties soient minoritaires
au conseil d'administation de l'OCQ et que la majorité soit
gouvernementale. C'était d'ailleurs le cas, jusqu'à tout
récemment, jusqu'à la nomination du président-directeur
général du Conseil provincial des métiers de la
construction. Les parties étaient minoritaires. Vous me dites que cela
fonctionnait bien. Je n'ai entendu personne encore me recommander que le
rôle des parties au conseil d'administration, en tout cas, que la
majorité ne soit pas garantie dans la loi. Je n'ai pas vu d'autres
intervenants me parler dans ce sens. Donc, je me surprends un peu quand vous me
dites: Ne touchez pas à cela, laissez cela comme ça. On sait que
dans la pratique - on a connu l'expérience dans le passé -
jusqu'au mois ' d'octobre ou novembre de cette année, les parties
étaient minoritaires au conseil d'administration. C'était
pratiquement le gouvernement, par ses nominations directes, qui
contrôlait le conseil d'administration.
On me dit - j'ai eu d'autres représentations: Si vous changez
quelque chose, assurez-vous que ce soit paritaire et que ce que vous pensez sur
le plan gouvernemental, les nominations des ministres du Travail, de
l'Éducation et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu, que ce soit fait avec des statuts d'observateur. D'un autre
côté, on se dit que, quand il n'y a pas d'entente, il faut
trancher. Cela prend quelqu'un. On se dit également qu'il faut impliquer
les gens des ministères si on veut que le ministère de
l'Éducation prenne son rôle au sérieux, si on veut que le
ministère de la Main-d'Oeuvre prenne son rôle au sérieux et
qu'on ne répète pas les situations qu'on a vécues quant
à la formation au cours des dernières années. En
suggérant le conseil d'administration dans la loi que j'ai
présentée, j'ai pris en considération qu'il y avait des
possibilités d'entente entre les parties. Je connais les
difficultés, par exemple. Il y a eu une entente à l'occasion de
la dernière convention collective, mais il y avait du suivi à
donner à cette entente, entre autres, quant aux heures de travail. On me
dit qu'il y a eu deux rencontres jusqu'à ce jour. Là, la partie
syndicale me demande d'intervenir.
Je me dis que, si la structure de la commission est bâtie de
façon que les parties, si elles s'entendent, ont numériquement le
contrôle pour prendre les décisions, tant sur l'aspect travail que
sur l'aspect formation, lorsqu'il y aura entente, ce sera l'entente des
parties. Lorsqu'il n'y aura pas entente, on ne sera pas obligé de mettre
en place chaque fois, dans ces cas qu'on regrette toujours, un mécanisme
qui vient de l'extérieur. Le mécanisme sera bien au fait des
dossiers, on ira siéger au conseil d'administration, les gens se
sentiront impliqués. Je n'ai pas une propension à nommer à
un conseil d'administration des fonctionnaires pour nommer des fonctionnaires.
Je ne fais pas cela par plaisir, mais je me dis qu'il me faut intéresser
l'Éducation et qu'il me faut intéresser la Main-d'Oeuvre
particulièrement. Comment réagissez-vous?
M. Daoust: Le problème d'intéresser les
fonctionnaires au rôle qu'ils doivent remplir, je ne veux pas être
cochon, mais c'est votre problème. Ne me demandez pas de réqler
la motivation d'un fonctionnaire simplement en lui donnant le droit de vote.
Depuis un an, je crois, les deux parties sont majoritaires au conseil
d'administration, parce qu'il n'y a que Guy Lapointe qui vient du gouvernement.
C'était le seul représentant gouvernemental depuis plusieurs
mois, depuis que M. Jacques Brûlé est employé de l'Office
de la construction du Québec. On n'a eu aucun problème...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le président.
M. Daoust: J'ai fait la remarque tantôt: le
président est très "patineux" et il se fait un point d'être
impartial. C'est à son crédit, il s'assure d'être
impartial. Je crois que vous êtes conscient, M. Paradis, qu'on a
suggéré que, s'il y avait deux représentants syndicaux, il
devrait y avoir deux représentants patronaux. Alors, à quatre,
même avec la composition actuelle de cinq, c'est bien apparent qu'on est
majoritaire.
Il n'y a pas eu de problème. Vous faites allusion aux
négociations. Il a fallu que le gouvernement participe par le biais des
médiateurs et ces choses-là. C'est parfait. D'ailleurs, c'est un
mécanisme prévu dans la loi. Mais les négociations ou les
manques d'entente qu'il y a eu à différents moments durant les
négociations ne se sont jamais traduits à l'administration du
conseil d'administration de l'OCQ. J'ai fait la remarque la semaine
dernière en conférence de presse. J'ai l'impression qu'à
l'intérieur d'un chef syndical il y a un patron qui essaie de sortir,
parce que quand on prend des décisions administratives c'est très
rare qu'on n'est pas d'accord. Dans l'administration il n'est pas question de
philosophie et d'orientation. C'est de la bonne administration ou cela ne l'est
pas. Alors, c'est très rare qu'il y ait des conflits d'opinion au
conseil d'administration.
Remarquez que, si la composition que vous avez suggérée
d'une représentation patronale de quatre était une
représentation de quatre membres de l'AECQ, je serais
peut-être moins volubile, parce que je maintiens encore que la
fonction principale de l'office, jusqu'à preuve du contraire, sera
l'administration du décret. Donc, l'administration devrait se faire par
les parties impliquées.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, je vais vous
reprendre. Si, après l'adoption du projet de loi, la fonction formation
à la commission ne prend pas un rôle aussi important dans
l'organisation, c'est que le projet de loi aura raté dans la pratique,
en tout cas en proportion, une partie importante de son objectif.
L'objectif du projet de loi vise à remettre majoritairement entre
les mains des parties tout cet aspect formation, cet aspect qui a
été décrié, je l'ai entendu, de la part de toutes
les centrales syndicales impliquées dans l'industrie de la construction
et de toutes les associations patronales. Si on voit l'OCQ d'après la
loi 119 comme l'OCQ d'avant la loi 119, on n'aura pas saisi dans son
application la volonté gouvernementale et il y aura des articles de loi
qui resteront lettres mortes si le conseil d'administration ne les applique
pas.
M. Daoust: Pour parler d'implications financières, M. le
ministre, si j'ai bien compris les commentaires qui ont été faits
à différents moments, les subventions pour les cours
donnés à l'école sont encore disponibles au
ministère de l'Éducation. C'est encore subventionné par le
gouvernement fédéral, si ma mémoire est bonne.
Alors, il n'y a aucune implication financière de ce
côté-là. Il reste l'implication financière pour les
cours donnés en dehors de l'école dont les parties
décideront du contenu. Là encore, si je comprends bien, il y a
déjà des subventions qui existent au ministère du Travail
pour différents genres de formation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est bien...
M. Daoust: On pourrait s'en servir, on pourrait les demander;
cela ne veut pas dire qu'on les aura, mais il y a au moins une
possibilité. Là il y a quand même un espoir que
l'implication financière ne soit pas trop substantielle. Alors, dans ce
sens-là, je ne parlais pas de l'importance du mandat, mais je parlais
d'implications financières.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. À ce
moment-là on s'entend pour le financement. Vous avez raison. Les
programmes de main-d'oeuvre qui sont administrés par le ministère
de la Main-d'Oeuvre seront accessibles à la commission et c'est d'autant
plus important que si la commission fait une réussite de ce programme de
formation, de cet arrimage entre l'Éducation, la Main-d'Oeuvre et le
lieu de travail, si cela fonctionne bien, s'il y a des résultats
positifs, ce n'est peut-être pas le seul secteur d'activité
économique qui sera orienté dans cette direction. Il s'agit donc
d'un projet pilote qui est très important pour le gouvernement
actuel.
M. Daoust: J'aimerais vous donner un exemple de pouvoir
gouvernemental, si vous me le permettez, et ce que cela amène. Il y en a
qui vont m'accuser de penser à mon portefeuille, mais ce n'est pas le
cas. Au conseil d'administration on avait une mesure qui prévoyait une
compensation pour les pertes de salaires des membres du conseil
d'administration, parce que les nominations sont faites à titre
personnel. Ce ne sont pas des associations qui y sont
déléguées, ce sont des individus. Alors, on
prévoyait une méthode de dédommagement, que ce soit par
des jetons de présence ou par remboursement de salaire perdu, cela n'a
pas d'importance. Je crois que les deux parties devraient avoir le loisir de
décider si elles veulent avoir une compensation ou non. Ce sont elles
qui paient la note. Tandis que, sur une décision strictement de
fonctionnaires ou du gouvernement, toutes ces possibilités, à ma
connaissance, ont été coupées. Cela fait cinq mois qu'on
s'informe si cela peut continuer et on nous dit non. Alors, on voit un exemple
stupide ou minime, si on peut dire, d'interférence gouvernementale dans
quelque chose qui ne le concerne pas du tout.
Je comprends bien que le gouvernement a décidé qu'il ne
veut plus compenser les pertes de salaire pour les comités qui
appartiennent au gouvernement et c'est son affaire. À l'office, ce n'est
pas vous qui payez, donc cela n'aurait pas dû être votre
problème. C'est simplement un exemple. Je suis malin, n'est-ce pas?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. J'écoutais et
j'étais en train de tenter d'éclaircir quelque chose avec le
député de Joliette qui avait déjà
déclaré en Chambre qu'un des derniers membres nommés avait
retiré des rémunérations. Je suis en train de lui dire
qu'il n'a jamais pu en recevoir, que depuis cinq mois c'est une décision
gouvernementale. Je tiens compte de vos arguments. (12 h 15)
Vous étiez présent hier lorsque le président de
l'office a mentionné des chiffres. Grosso modo, 120 000 permis de
travail sont détenus par des travailleurs dans l'industrie de la
construction: Beau temps, mauvais temps, il y a à peu près 60 000
travailleurs actifs par mois. Dans les meilleurs mois, lorsque la construction
est à plein rythme, on peut atteindre 80 000 travailleurs. Il nous reste
40 000 travailleurs qui détiennent des permis de travail. Pour
20 000 d'entre eux, c'est presque impossible de les identifier.
Malgré cela, au cours des deux dernières années, on a
ouvert le bassin en fonction de critères que l'on recherche toujours, du
côté gouvernemental. Lorsqu'on ouvrait le bassin sous
prétexte de pénurie réelle ou de pénurie
anticipée, dans quelque métier ou occupation que ce soit, est-ce
que vous avez été consulté, non pas comme membre du
conseil d'administration de l'OCQ, mais comme président de votre
organisme?
M. Daoust: II faut peut-être définir le mot
"consulter". Je connais la définition du mot "consulter", mais je crois
que le syndicat a été consulté dans le sens de dire:
Écoutez, on n'en a plus sur la liste. Est-ce que vous en avez que nous
n'avons pas sur la liste? Nous, on n'a pas de liste comme cela, on ne fait pas
de placement. Alors, on était plus informé que consulté
dans le sens de dire: II n'y a plus personne sur la liste. On est sur le point
d'ouvrir. Avez-vous des commentaires à faire? Il y avait ce genre
de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ma question portait sur une
consultation, qui requiert un accord ou un désaccord, avant
d'ouvrir.
M. Daoust: On nous disait qu'on était sur le point
d'ouvrir les bassins: Avez-vous des commentaires? On les faisait. Vous pouvez
vous imaginer qu'on n'était jamais contre. Quand on nous dit qu'il n'y a
pas de main-d'oeuvre, on n'est pas pour dire que l'on est contre le fait d'en
faire entrer. Ce sont les demandes de nos membres.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais être plus
précis pour que l'on se comprenne bien. Au mois de mai - c'est encore le
mois de mai, c'est le papier que j'ai, je ne l'ai pas choisi de façon
spéciale; on pourrait amener juin - quand on a ouvert, en fonction d'une
pénurie anticipée, les métiers de briquetier,
maçon, compagnon, à Montréal, on a requis l'accord... En
tout cas, il y a des gens qui ont donné leur accord; c'est bien
identifié. Est-ce qu'on vous a contacté et demandé votre
accord comme président de l'AECQ? Est-ce que dans chaque cas
-briquetier, compagnon, serrurier, bâtiment -on vous a appelé pour
solliciter votre accord?
M. Daoust: Je ne pourrais pas vous dire. Je sais que l'on
reçoit des appels, comme je vous l'ai dit, à la suite de
discussions avec le syndicat, pour voir s'il manque des travailleurs sur la
liste que l'office a. On nous contacte en disant: As-tu des commentaires
à faire? Es-tu d'accord? Es-tu en désaccord? Qu'est-ce qui
arrive?
On dit toujours que l'on est d'accord.
Maintenant, je ne peux pas vous dire que l'on est consulté
à chaque fois, je ne le sais pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au mois de mai, avez-vous
été consulté au moins une quinzaine de fols?
M. Daoust: Peut-être que M. Brown, directeur du bureau
régional, pourrait...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela va. M. Brown.
M. Brown (Robert): M. le ministre, comme le président le
mentionnait tantôt, ce n'est pas une consultation du même type que
celle que l'office peut faire auprès des centrales syndicales, tout
simplement parce que l'on ne détient pas une information quotidienne,
à savoir quelle est la situation dans le bassin - est-ce qu'il y en a de
disponibles ou non? - information que les centrales syndicales sont en mesure
de donner parce qu'elles ont des agences de placement syndical. Je ne peux pas
vous donner de date précise, mais je peux vous dire qu'en 1986 on a eu,
d'une façon très régulière, des communications du
service de placement de l'Office de la construction, qui nous informait de son
intention d'ouvrir les bassins parce qu'il y avait, d'une part, une
pénurie ou, d'autre part, une pénurie anticipée. On nous
disait: Est-ce que vous êtes d'accord? On est constant dans notre
position, à savoir que l'on ne doit pas avoir de contingentement de la
main-d'oeuvre. Donc, on né disait pas qu'on était en
désaccord avec l'ouverture du bassin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. Tantôt, vous avez
souligné que vous représentiez l'ensemble des employeurs qui
oeuvraient légalement. À partir de votre expérience et de
vos connaissances du marché, ce que l'on appelle le travail au noir ou
le braconnage - pour utiliser d'autres expressions que j'ai entendues hier -
est-ce qu'au cours... Je peux presque parler de3 dix dernières
années, la carte, le permis de travail étant en fonction depuis
1977 ou 1978. Est-ce qu'au cours des sept, huit dernières années,
d'après vous, il y a eu diminution du travail au noir dans l'industrie
de la construction, ou est-ce qu'il y a eu augmentation?
M. Daoust: À ma connaissance, je n'ai jamais entendu un
commentaire qui disait que cela avait diminué. Tous les commentaires que
j'ai entendus de n'importe quel entrepreneur - c'est mon opinion personnelle
aussi - c'est le contraire, que le marché noir aurait augmenté.
Il y a plusieurs facteurs. Il n'y a pas de doute que le permis
de travail a causé cela. Ceux qui perdent leur permis de travail,
naturellement, ils continuent à gagner leur vie. On ne se cache pas
cela. Il y a aussi une structure de salaire trop élevée dans
certains secteurs, comme le résidentiel. Des choses comme cela. Il y a
plusieurs facteurs, mais il n'y a pas de doute que le permis de travail a
contribué à cela, le contingentement a contribué à
cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le plan de la formation, vous
avez mentionné que vous avez éprouvé des problèmes
avec le système actuel. Des problèmes de quelle nature: en
nombre, en qualité, dans toutes les occupations, tous les
métiers.
M. Daoust: Vous pouvez parler, je pense, à n'importe quel
entrepreneur, la réponse qu'il vous fait immédiatement: II n'y en
a pas de formation. C'est peut-être charrier un peu, mais ce qu'il y a,
c'est aussi bien dire qu'il n'y en a pas. On embauche des jeunes... Je vais
vous donner un exemple de formation qui est simple. Dans la structure d'acier,
on fait ce qu'on appelle, nous, des bâtiments préfabriqués,
c'est une sorte d'ouvrage qu'on fait. On peut prendre un jeune apprenti qui a
une carte d'apprentissage. Il peut compléter ses heures d'apprentissage
sur ce genre d'opération, finir avec une carte de compagnon-monteur
d'acier et il n'est pas plus monteur d'acier que vous. Il connaît le
produit qu'il a installé, c'est tout. Ce n'est pas cela te métier
de monteur d'acier, c'est beaucoup plus complexe que cela. C'est
l'équivalent de dire qu'il n'y a pas de formation. On peut faire
l'inverse aussi. On peut avoir quelqu'un qui fait tout son apprentissage sur
des structures en hauteur; si on lui donne un bâtiment
préfabriqué, il n'y connaît rien et il ne veut rien savoir.
C'est un apprentissage qui est partiel, à son mieux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va.
Le Président (M. Théorêt): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, je vais commencer aussi par
l'organisme ou le nouvel organisme: la CCQ. La première question que je
poserai à M. Daoust est la suivante: M. Daoust, je voudrais reprendre ce
que le ministre a essayé de vous arracher, parce que vous n'avez pas
suffisamment répondu, à mon point de vue. Dans le nouveau
rôle de la CCQ, il n'y a pas, à mon point de vue, contrairement
à ce que vous avez affirmé, exclusivement l'application de
décrets, ou bien j'ai mal saisi ce que vous avez dit. Mais si on lui
fait jouer un rôle, effectivement, responsable... Remarquez bien qu'avec
l'article 85.4 sur ministère de l'Éducation on ne peut pas
conclure que vous êtes responsable de la formation, j'en conviens, ce
sont des avis que vous donnez au ministre de l'Éducation. Il n'en
demeure pas moins qu'en ce qui touche le ministère de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu, à l'article 85.3, le ministre
se garde le pouvoir de désaveu, mais aussi le pouvoir de
reconnaître le règlement s'il lui convient. C'est une dimension
complètement nouvelle.
Étant donné que l'AECQ est une structure plutôt
axée vers les relations du travail avec le mandat de négocier au
nom des employeurs et des entrepreneurs, ne croyez-vous pas que la proposition
de la fédération des maîtres tuyauteurs ou
électriciens - je crois plutôt que ce sont les électriciens
- qui a plutôt sugqéré, compte tenu de la nouvelle vocation
anticipée, que ce soit des représentations directement par les
associations patronales... À ce moment-là, comment justifiez-vous
toujours que ce soit exclusivement l'AECQ qui pourrait être
là?
M. Daoust: Ce que j'ai dit, à moins que ma mémoire
soit fausse, je n'ai pas dit que le mandat de l'office serait exclusivement
l'application du décret. J'ai dit que, selon les implications
financiaires, la grosseur de la boîte, la quantité de personnel,
si vous voulez, il devra, j'imagine, même en faisant de la formation,
substantiellement, majoritairement, s'occuper de l'application du
décret, les avantages sociaux, tout ce qu'il fait dans le moment. La
formation, si j'ai bien compris, va continuer d'être faite par le
ministère de l'Éducation. Ce sont strictement des comités
consultatifs, on espère avec pouvoir décisionnel, qui vont
être impliqués sur le côté de l'OCQ, plus quelques
employés. J'imagine que cela va prendre une certaine quantité
d'employés pour donner le soutien à cela, mais je ne vois pas 600
employés de plus pour faire la formation.
En ce qui concerne notre participation, on ne demande pas que le
comité administratif sur la formation soit formé par nous, au
contraire, on a dit qu'il devrait être formé des sept associations
patronales.
M. Chevrette: Personnellement, vous me permettrez un commentaire,
si j'ai bien compris la nouvelle structure, il y a un comité
administratif, mais il y a un comité sur la formation professionnelle et
un comité mixte. On a voulu disjoindre les fonctions au moins au
chapitre des comités - je ne parle pas du chapeau administratif - et on
a voulu identifier les vocations. Je ne crois pas, à partir de
là, que le comité mixte prenne la majeure partie des
préoccupations de la nouvelle structure. Je dirai plutôt qu'il va
prendre le quart ou le tiers. Â mes yeux, avec mes faibles connaissances,
je pense que ce ne serait pas exact que d'affirmer cela. Je ne veux pas...
M. Daoust: Est-ce que je peux faire un commentaire?
M. Chevrette: Oui.
M. Daoust: Je ne sais pas si j'ai bien compris. Vous avez dit que
la structure actuelle ou le mandat actuel de l'office va représenter,
dans la nouvelle structure, peut-être 25 %...
M. Chevrette: 33 %.
M. Daoust: ...ou 33 % de ces fonctions. On a dans le moment 600
employés. Me dites-vous qu'on va se retrouver avec 2000 employés?
J'espère que non, parce que là on vient de recréer la
CSST.
M. Chevrette: On peut dire, sur le plan administratif, comment
seront répartis les effectifs, à l'interne, avec les nouvelles
responsabilités.
Là où je vous suivais mieux, M. Daoust, c'est à
partir du principe: c'est nous qui payons, c'est nous qui conduisons. Sur cela,
je vous suis un peu plus, c'est un peu plus normal. Le gouvernement,
antérieurement, était peut-être plus justifié
d'imposer ses volontés parce qu'il était le bailleur de fonds.
Effectivement, vous devenez les bailleurs de fonds. C'était par des
subventions d'équilibre, mais on sait que... Au moment où on peut
vous taxer jusqu'à 1 %, je pense que vous devriez avoir un mot
décisionnel ou tout au moins de codécision, j'en conviens.
Je ne suis pas convaincu, cependant, de vos dires en ce qui a trait au
fait d'écarter a priori les associations patronales sectorielles.
À mon point de vue, leur argument a plus de poids qu'il pouvait en avoir
il y a quelques années à cause des nouvelles vocations.
Personnellement, c'est ainsi que je le vois.
M. Daoust: Est-ce que je peux...
M. Chevrette: Oui, vous pouvez tout le temps.
M. Daoust: Parfait! Avoir la présence de multiples
associations patronales au conseil d'administration, ce ne serait pas mauvais
à la condition que les deux comités administratifs en dessous de
cela aient les pouvoirs décisionnels dans chacun de leur domaine. Dans
le moment, les deux comités administratifs vont avoir les mandats que le
conseil d'administration jugera à propos de leur donner. Il n'y a aucune
garantie qu'il va y avoir des mandats clairs. C'est cela, la crainte.
M. Chevrette: J'ai l'impression, à ce moment que, juste
sur le plan de la cohérence administrative, vous créez, à
toutes fins utiles, trois orqanismes. Quand on confie des pouvoirs
décisionnels, à l'intérieur d'une structure, à deux
autres comités, on les met en pouvoir de décision donc
d'administration. S'ils décidaient que, dans leur secteur, ils engagent
tel budget - je vous l'avoue très honnêtement - je serais inquiet
en maudit. Je suis convaincu que le ministre hériterait d'une facture
à court ou à moyen terme. Si j'étais ministre, moi aussi
je serais inquiet à ce sujet, je vous l'avoue très
honnêtement. On pourra en discuter plus longuement, mais je ne
vous...
M. Daoust: C'est bien évident que, si le comité de
formation, par exemple, décide de dépenser 50 000 000 $ et que le
ministère de l'Éducation dît non, le pouvoir
décisionnel va vouloir dire ce qu'il veut dire.
M. Chevrette: "Décisionnel" veut dire
"décisionnel", cela ne veut pas dire décisionnel à
moitié. Si on leur donne le pouvoir de décision, on leur donne
les moyens de se brancher sur leurs outils, sur leurs façons de
fonctionner et sur leurs démarches.
Je ne veux pas faire un long débat philosophique sur le type
d'administration qu'on préconiserait de part et d'autre, mais à
mon point vue c'est difficilement concevable, je pense.
Il y a une chose dans votre mémoire que je voudrais aborder,
c'est la mobilité de main-d'oeuvre dont vous avez parlé. Je vous
avoue que je suis en faveur de la mobilité dans certains corps de
métier. Je pense à ceux qui font des grands travaux routiers. Par
exemple, chez les scalpeurs d'asphalte, il n'y a pas trop de main-d'oeuvre
régionale et, des mécaniciens d'ascenseur, je comprends qu'on
n'en trouve pas partout. II n'y en a sûrement pas en permanence à
Sept-Îles et pas nécessairement dans tout l'Abitibi. (12 h 30)
Pour certains métiers spécifiques, je pense que, si on
parlait à chaque association patronale et à chaque corps de
métier, ils pourraient nous établir qu'il y a
véritablement, dans plusieurs endroits, de la main-d'oeuvre en
quantité et en qualité suffisante pour répondre aux
besoins, j'en ai la conviction. Si vous y alliez d'une façon plus
spécifique en disant que la mobilité pourrait être
assurée dans certains types de métiers qui vont quasiment de soi,
là, je vous suivrais peut-être. L'association patronale et, je
pense, la Corporation des maîtres électriciens du Québec,
hier, nous parlaient même de la main-d'oeuvre locale; ils allaient plus
loin que la région, ils disaient "locale". On leur a fait
préciser cela pour finalement constater qu'ils voulaient dire la
région ou le périmètre. Je suis surpris de votre
allégation puisque vous dites parler au nom de tous les
employeurs et de tous les entrepreneurs. Vous me permettrez d'être
un peu surpris de votre approche sur la mobilité générale
"at large", illimitée.
M. Daoust, cela m'amène à vous poser une question. Vous
savez pertinemment que certains employeurs veulent amener leur main-d'oeuvre,
et je pense que c'est normal. Ils connaissent leurs employés, ils sont
productifs. Ils leur disent: Je te garde, mais à la condition que tu
endosses ton chèque pour les frais de déplacement et que tu me le
remettes. Vous savez que cela se fait, et vous ne vous gênez pas pour le
dire. D'après ce que j'ai pu comprendre, vous êtes d'une franchise
totale.
M. Daoust: C'est la nature même de l'entrepreneur
d'entreprendre. C'est aussi simple que cela.
M. Chevrette: Même des gestes illégaux.
M. Daoust: Vous adopterez les lois que vous voudrez,
l'entrepreneur le perçoit comme un challenge additionnel, c'est tout. Il
ne faut pas se conter de romance. Il faut savoir ce qu'est la construction. Il
faut aller sur un chantier de construction et le vivre.
M. Chevrette: Si vous saviez jusqu'à quel point je suis
content que vous me le disiez aussi franchement, parce qu'on le sait.
M. Daoust: Je l'espère!
M. Chevrette: II y en a qui ne le disent pas, il y en a qui se
camouflent. Vous n'oublierez pas une chose, c'est que vous venez candidement
d'affirmer que vous jouez dans l'illégalité avec un sourire aux
lèvres.
M. Daoust: Cela va toujours se faire, tant et aussi longtemps que
les lois ne permettront pas un marché compétitif que le client a
les moyens de payer. C'est aussi simple que cela.
M. Chevrette: Mais, automatiquement, vous êtes responsable
de la négociation des relations du travail dans l'industrie de la
construction. Ou c'est par décret - cela peut être conclu par
décret - ou c'est par convention négociée, comme vous
l'avez fait la dernière fois, vous avez accepté le "travel time"
ou les frais de déplacement. Vous dites allègrement, comme
négociateur patronal, que vous signez cela, mais que vous jouez
complètement dans l'illégalité et que cela se fera
toujours. C'est inquiétant pour un porte-parole qui est à la
table de négociations, qui doit négocier des conditions de
travail. Je vous avoue personnellement que je le savais, mais je ne savais pas
qu'on l'afficherait en commission parlementaire et qu'on le graverait dans les
annales du Parlement ad infinitum.
M. Daoust: Je n'ai aucune hésitation. Je n'ai pas dit que
tous les entrepreneurs le faisaient, j'ai dit que c'était dans la nature
d'un entrepreneur d'entreprendre. Il y a certainement un nombre d'entrepreneurs
- je le reconnais, je n'ai aucun problème à admettre cela - qui
vont à côté du décret, qui le contournent de toutes
sortes de façons. Je pourrais probablement vous écrire un livre
de 500 pages sur la façon de le faire. Il n'y a rien là!
M. Chevrette: Sauf que, M. Daoust....
M. Daoust: Je ne pense pas que ce soit la majorité, je ne
suis pas prêt à admettre que ce soit la majorité.
M. Chevrette: Non, mais vous êtes président de
l'AECQ, vous en êtes le porte-parole officiel, et vous savez quelle
incidence cela peut avoir sur la concurrence. La dernière fois, cela a
été signé de bonne foi, quand même. Vous me direz
que la première fois qu'il y a eu des frais de déplacement,
ça a peut-être été par décret, mais la
dernière fois, cela a été signé, et vous voulez
précisément, par l'application du décret, éviter la
concurrence déloyale. À supposer que vous ne le fassiez pas,
votre compétiteur qui veut, lui aussi, avoir sa main-d'oeuvre
productive, efficace et qu'il connaît bien, s'il soumissionne en fonction
du respect du décret, qu'arrive-t-il par rapport à l'entrepreneur
qui entreprend sa soumission en disant: Moi, le "travel time", les gars, je
leur tords le bras, ils me remettent les chèques? Quelle est la
compétition possible, à ce moment-là, par rapport à
la légalité des choses dont vous êtes le porte-parole et le
signataire? Expliquez-moi cela.
M. Daoust: Premièrement, je pense qu'il y a deux raisons
de contourner le décret pour les frais de déplacement. Vous avez
les frais de chambre et de pension. On parle de 230 $ par semaine. Il y a
certainement - il faudrait être idiot pour penser le contraire -un
certain nombre d'entrepreneurs - je pense qu'il est minime - qui disent:
Endosse-moi le chèque. Ils paient le travailleur 230 $ de moins parce
que la pension, il faudra qu'il la paie de ses poches, il aura des
déboursés. Du jour au lendemain, il va gagner 230 $ de moins par
semaine. Je pense que c'est l'exception, et je pense qu'il y en aura
toujours.
L'autre est beaucoup plus générale. Le constructeur de
maison, l'électricien ou le plombier qui travaille dans un rayon de 50
milles de son bureau, qui fait du service, il ne faut pas s'imaginer qu'il va
commencer à payer des frais de déplacement. Ce n'est pas
vrai. Il a trois, quatre employés qui travaillent pour lui
à l'année; cela fait peut-être dix ans, quinze ans qu'ils
travaillent. Je serais l'homme le plus surpris du monde si on en payait.
M. Chevrette: À partir de votre argumentation, monsieur,
si vous dites que vous seriez surpris qu'on en paie, à mon point de vue,
votre attitude aurait dû être celle de négocier des
réalités plutôt que de signer des fictions, parce que vous
jouez carrément le rôle - en tout cas, à mon point de vue -
qu'on ne doit pas jouer dans cette industrie. C'est cela qui nous a
amenés à des chao3 précisément. C'étaient
des gars qui, sur le bras de certains employeurs, parce que cela faisait leur
affaire... Vous le savez, on essayait de tout leur mettre sur le dos.
Personnellement, je vous avoue que je ne suis pas loin d'être
scandalisé par de tels propos. Pas loin, parce que c'est cela qui a
amené l'enquête Cliche, n'est-ce pas? Vous le savez.
M. Daoust: Ce que vous proposez, M. Chevrette, c'est exactement
ce qu'on a essayé de faire aux négociations, de se mettre dans la
réalité du marché. Qu'est-ce que vous voulez? Vous
connaissez les résultats des négociations. Ce n'est pas moi qui
les ai décidés, malheureusement.
M. Chevrette: Maintenant, aux pages 6, 7 et 8 de votre
mémoire intitulé "Le Placement", dont vous n'avez pas pu parler
malheureusement à cause de la limite des 20 minutes, au bas de la page
6, tout d'abord, les deux derniers paragraphes: "Si le choix de la
main-d'oeuvre par un employeur n'incluait que la recherche d'une
compétence technique, la question n'aurait pas la même importance,
mais il y a plus. L'environnement, la compatibilité avec
l'équipe, la nature du travail, l'éloignement..." Vous auriez pu
ajouter: et le remboursement des frais de déplacement, si je suivais
votre logique. Page. 6, sur le placement, pour ceux qui cherchent. C'est bien
cela, c'est à la page 6?
M. Daoust: Oui.
M. Chevrette: D'accord. "L'environnement, la compatibilité
avec l'équipe, la nature du travail, l'éloignement, etc., sont,
parmi bien d'autres, des facteurs pouvant effectuer le choix de tel
salarié plutôt que tel autre." Et vous dites, au bas, au dernier
paragraphe: "Il n'existe pas beaucoup d'industries ou de secteurs industriels
où l'employeur n'a pas ce droit de gérance fondamental. Pourquoi
en serait-il autrement dans la construction en tenant compte que la
main-d'oeuvre représente un élément déterminant de
très haute importance dans les coûts de construction?" Au
préalable, vous dites bien que c'est le libre choix total de la
main-d'oeuvre, d'une façon plus explicite, une page ou deux avant.
J'ai donc compris que vous êtes contre toute forme de
contingentement. Étant contre toute forme de contingentement, vous allez
plus loin. Vous êtes contre toute forme de négociation d'une
sécurité ou d'une priorité d'emploi. En jouant même
sur la binette du gars, en jouant même sur le fait, comme vous l'avez dit
tantôt, que l'individu se fait tordre les bras et qu'il ne pourrait pas
se négocier quoi que ce soit comme groupe. Et vous comparez cela
à d'autres secteurs industriels. J'aimerais que vous me donniez les
types d'industries au Québec qui n'ont pas de clause d'ancienneté
pour les mises à pied ni de clause d'ancienneté pour les rappels
au travail.
M. Daoust: Premièrement, dans toutes les industries,
à ma connaissance, l'employeur a le choix de qui il engage au moins au
début de son emploi, chose qui n'a pas toujours existé avec le
règlement de placement. J'essaie de me rappeler le deuxième
aspect de votre question.
M. Chevrette: La liberté totale... M. Daoust: La
liberté totale.
M. Chevrette: ...de changer quand cela vous plaît.
M. Daoust: La liberté totale, il faut se comprendre parce
que le danger justement du genre d'exercice qu'on fait, c'est de prendre une
partie d'une solution ou une partie d'un commentaire et penser qu'on a
résolu tout le problème. Quand on parle de libre choix, c'est
à l'intérieur d'un système qui a assuré une
formation compétente, qui a assuré que les seuls travailleurs qui
sont présents dans le marché sont compétents. Ce
fait-là même va faire du contingentement.
Vous savez, j'aimerais poser une question. Je ne sais pas la profession
de chacun autour de la table. Je sais qu'il y a des avocats, je crois qu'il y a
un ancien professeur d'école, un notaire, enfin.
Une voix: II y en a d'autres.
M. Daoust: Il y en a d'autres aussi? Bon. J'aimerais vous poser
une question. Si, il y a cinq ans, dix ans, quinze ans, un fonctionnaire,
arbitrairement, avait décidé que vous n'aviez pas le droit
d'accès à votre profession, vous seriez où aujourd'hui?
C'est un droit fondamental que le jeune a de décider. C'est aussi
l'obligation du gouvernement, par le ministère de l'Éducation, de
mettre au courant les jeunes, comme il le fait d'ailleurs dans tous les autres
domaines.
Quand quelqu'un veut se lancer en science sociale, il y a quelqu'un qui
lui dit: Cela ne me fait rien, mais il y en a 5000 en chômage.
Peut-être qu'il se dirigera d'une façon différente. Ils ont
la même responsabilité de faire la même chose dans la
construction, mais c'est un droit humain pour le jeune de choisir s'il veut
travailler dans la construction, en étant conscient que peut-être
il n'aura pas d'ouvrage dans l'année. Mais c'est son choix.
M. Chevrette: M. Daoust, vous m'avez ouvert encore une
très belle porte...
M. Daoust: Parfait!
M. Chevrette: ...à un autre commentaire.
M. Daoust: On va peut-être être ici jusqu'à 15
heures. Allez-y.
M. Chevrette: II se fait moins de petits au Québec qu'il
ne s'en faisait. On est rendu à 1,2 ou 1,3 ou 1,4 au maximum par
famille. Il y a des professeurs qui sont libres d'étudier en
psychopédagogie. D'accord? Vous me trouverez un enseignant qui va aller
en "bumper" un autre parce qu'il a une meilleure fraise que l'autre? On leur a
reconnu le droit par le syndicalisme ou par la voix des relations du travail de
se négocier une priorité d'emploi. Ce n'est pas parce qu'on en
forme 120 par année à l'Université de Montréal,
qu'on en forme à Québec, qu'on en forme à Sherbrooke,
qu'on en forme à l'Université McGill et à
l'Université d'Ottawa, qu'ils ont une place dans l'enseignement pour
autant. Ceux qui sont à l'intérieur ont au moins une
priorité d'emploi, M. Daoust, et cela est clair. Mais, dan3 vos propos,
vous niez catégoriquement le droit précisément à
ceux qui y oeuvrent de pouvoir se négocier une priorité
d'emploi.
Vous dites: "Open bar". Formez-les. Ici j'en ai un avec qui il y a une
incompatibilité de caractère: Dehors. Je vais aller chercher
celui-là. C'est la négation même du principe des bonnes
relations du travail. Cela m'a surpris de votre part, parce que votre organisme
est précisément là, par sa vocation, pour négocier,
pour être les représentants du monde patronal en relation du
travail.
Je regardais les consensus des tables de travail à la suite de la
création du comité du ministre. Il y a des consensus à
plusieurs endroits et c'est toujours écrit: sauf l'AECQ. Partout
où l'on parle de consensus sur la notion quantitative comme étant
un élément important dans le contingentement, sauf l'AECQ, les
parties impliquées, les tuyauteurs, les électriciens
étaient d'accord pour dire que cela prend une forme de contingentement
et que l'on doit tenir compte de la notion de quantité en même
temps que de qualité. Vous qui êtes leur représentant et
qui devez faire cheminer les consensus au moins de votre monde, de vos
associations, vous vous opposiez à tous les consensus. C'était
inscrit "sauf l'AECQ". Vous étiez contre.
Vous êtes le grand responsable des relations du travail. En
relations du travail, il me semble que l'on doit être à la
recherche de solutions et non se braquer au départ, surtout quand on
sait qu'il y a des associations patronales qui arrivaient à des
consensus avec le monde syndical. Je vous demanderais de m'expliquer quel est
véritablement votre objectif parce que je ne le comprends plus.
M. Daoust: Je vais commencer par faire des commentaires sur les
consensus qui ont été faits. Il faut les prendre dans l'esprit
qu'ils ont été faits. Il n'y a pas un problème au monde
qui n'a qu'une solution. Ce n'est pas vrai. Il y a toujours quatre, cinq, six
ou dix facteurs pour résoudre le problème. Les discussions qu'il
y avait aux tables de travail, c'étaient des discussions qui devaient se
rattacher à un cadre global, alors simplement aller chercher un petit
consensus ici et là. Il y a très peu - une couple peut-être
-de consensus où les six associations patronales ont été
d'accord et où on était en désaccord. Pas beaucoup, la
plupart du temps, c'était deux ou trois.
M. Chevrette: Vous avez parlé spécifiquement du
contingentement, M. Daoust.
M. Daoust: Le contingentement, il faut le prendre à
l'intérieur de toute une méthode. Je vous disais tantôt
qu'il y a plusieurs solutions. On peut parler de contingentement, de
priorité d'emploi, de priorité régionale. Il y a toutes
sortes de choses qui rentrent dans les discussions. Ensuite, on essaie
d'arriver à une solution finale comprenant plusieurs facteurs. Ceci est
un facteur. Les parties se sont rassemblées. Pensez-vous que j'ai tordu
le bras de six présidents d'associations? On ne se parlait pas avant. Le
résultat de l'exercice, c'est qu'on se parle maintenant. Il y avait une
volonté de leur part. Il n'y a pas eu de tordage de bras. Alors,
pourquoi se sont-ils mis d'accord? Il faut se poser la question. Us ont
regardé l'ensemble. Ils se sont rendu compte qu'il ne pouvait pas y
avoir six ou sept règlements de placement modifiés ou non, qu'il
fallait en avoir seulement un. Ensemble, ils ont fait les compromis
nécessaires pour qu'il y en ait seulement un. Je trouve cela
complètement logique. (12 h 45)
M. Chevrette: Je n'ai jamais dit que
vous leur aviez tordu les bras là-dessus, que je sache. J'ai dit:
Comment m'expliquez-vous que vous, qui êtes le porte-parole du monde
patronal en matière de relations du travail, vous vous opposiez aux
consensus qui s'établissaient aux tables de travail entre les
travailleurs et leurs patrons les plus proches? C'est ce que j'ai posé
comme question.
M. Daoust: Je vous ai dit que ce consensus était une
unité de plusieurs mesures qui étaient nécessaires pour
régler les problèmes de construction. On ne peut pas isoler une
mesure et dire: Tu acceptes celle-là et tu n'acceptes pas les autres,
simplement. Cela ne se fait pas. C'est une partie du problème.
M. Chevrette: Je suis porté à croire que ce que
j'ai entendu au colloque de la FCQ et ce que j'ai entendu à moult
reprises du Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction, c'est qu'il serait avantageux de négocier avec les
sectoriels. Je suis porté à le croire devant les circonstances et
devant les faits qu'on me présente aujourd'hui.
M. Daoust: Je dois en conclure que vous suggérez que les
six autres présidents ont signé un document avec lequel ils
n'étaient pas d'accord.
M. Chevrette: Non, je ne me base pas sur un document ou une
lettre qu'ils envoient à un ministre. Ce qui compte en relations du
travail - vous le savez - ce sont les consensus qui s'établissent entre
les parties. Vous savez cela. Il y a eu des tables de travail à cette
occasion. Cela n'a pas été une lettre composée dans une
demi-journée. Ce fut le fruit d'un débat entre eux. Quand on
arrive à des consensus en relations du travail, c'est un peu comme des
relations humaines.
Si en négociation tu te braques au départ et si tu as la
même ritournelle pendant un mois, tu agaces l'autre. Je pense que le fait
d'établir des consensus en relations du travail, c'est ce qu'on doit
rechercher le plus possible, il me semble.
M. Daoust: Je suis bien content que vous ayez...
M. Chevrette: Votre attitude et vos écrits m'apparaissent
aller à l'encontre des consensus qui s'étaient
dégagés aux tables de travail. Ces comités qui avaient
été créés par le ministre, c'étaient
précisément des comités voulant lui aider dans
l'élaboration de sa loi. Ils les ont remis à la fin de mai. Ils
avaient été le fruit de dialogues entre syndicats et patronat. Je
trouvais cela le "fun" qu'il y ait eu des tables de travail. On n'est pas
obligé d'être toujours contre en principe, parce qu'on est dans
l'Opposition.
Je trouvais cela le "fun", des tables de travail. Je ne me gêne
pas de le dire. C'est le "fun" de voir que les parties puissent se parler. Je
n'ai pas honte de le dire quand je suis d'accord avec des choses. Quand ils
arrivent à des consensus écrits - je les ai lus - si vous me
dites que M. Leprohon a changé d'idée quand vous les avez
convoqués pour établir une seule lettre, je vous dirai qu'il a
changé d'idée. D'ailleurs, hier soir, je le lui ai dit.
M. Leprohon disait qu'il avait fait cela de son chef comme
président et que cela ne respectait pas le travail qui avait
été fait par son monde. Je n'ai pas dit qu'on lui avait tordu le
bras; je ne l'ai jamais accusé de cela. Mais je demeure convaincu d'une
chose, c'est qu'en relations de travail, c'est beaucoup plus la méthode
du consensus que la méthode du braquage, par exemple.
M. Daoust: Je suis content de voir que dans vos commentaires,
vous avez dit que c'étaient des études qui concernaient les
relations du travail. Je crois que par la nature des choses les relations du
travail concernent les employeurs et les employés. II serait
peut-être bon de faire l'étude - si vous avez les statistiques
nécessaires - pour savoir qui participait aux tables de discussions,
parce que c'étaient des tables de discussions.
Dans plusieurs cas, vous allez vous apercevoir que ce n'étaient
pas des employeurs, c'étaient des entrepreneurs. Je vous ai dit
tantôt qu'il y a une différence de base. Les relations du travail
impliquent des employeurs qui ont des employés. Il y avait beaucoup de
participants et je crois que cela explique la modification de position qu'on a
adoptée. C'est une mesure qui s'applique aux relations du travail, donc,
aux employeurs. Il y avait beaucoup de participants qui n'étaient pas
des employeurs. Alors, il ne faut pas être surpris qu'il y ait des
commentaires différents des employeurs; c'est bien logique; on a des
intérêts divergents.
M. Chevrette: Mais vous m'avez bien dit que vous
représentiez les deux.
M. Daoust: On représente tous les employeurs. Ce que je
viens de vous dire, c'est qu'aux tables de travail ceux qui étaient
envoyés par différents groupes n'étaient pas
nécessairement des employeurs. Alors, ils ont donné des opinions,
dans certains cas, d'entrepreneurs.
M. Chevrette: Est-ce qu'il se peut qu'à des tables de
travail il y ait eu également des employeurs?
M. Daoust: Ah! certainement!
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le
député de Vimont.
M. Théorêt: M. le Président, d'abord,
j'aimerais vous signaler que, vu l'heure présente, nous allons devoir,
si on veut allouer tout le temps nécessaire, dépasser l'heure
prescrite de 13 heures, et je veux vous informer que le côté
ministériel donne son consentement immédiatement pour les dix
minutes supplémentaires.
Le Président (M. Charbonneau): J'avais cru comprendre
tantôt, quand j'ai donné l'horaire de cet avant-midi, qu'il y
avait consentement.
M. Théorêt: Pour dépasser de dix minutes.
Merci, M. le Président. J'ai de la difficulté à comprendre
l'argument que vous avez donné au ministre tantôt, concernant la
formation proposée pour le prochain conseil d'administration. Vous
disiez que, dans le conseil d'administration actuel, cela va bien, il y a deux
représentants syndicaux, deux représentants du côté
patronal. Le gouvernement en a nommé un; donc, on a la majorité.
On contrôle. Dans la formation proposée, il y a quatre
représentants des syndicats et quatre représentants du
côté patronal, ce qui fait huit, et cinq, des représentants
du gouvernement. Donc huit sur treize. Dans mon livre à moi, c'est
encore le contrôle pour les gens du milieu.
D'autre part, à la page 4, sur la formation justement du conseil
d'administration, vous mentionnez: Nous avons beaucoup de difficulté
è assimiler la responsabilité des parties telle que
prêchée par le législateur et la présence de
représentants gouvernementaux à des comités
décisionnels, opérationnels ou même consultatifs.
J'aimerais comprendre en quoi la présence minoritaire de
représentants du gouvernement au sein du futur conseil d'administration,
s'il était dans sa forme proposée, peut vous gêner et en
quoi cela vous enlève le contrôle des décisions prises par
les milieux patronal et syndical? Pouvez-vous m'expliquer cela?
M. Daoust: Premièrement, si, à une réunion,
il manquait tout un groupe, tout un bloc, patronal ou syndical, cela n'a pas
d'importance, la réunion pourrait quand même se tenir, parce qu'il
n'y a aucune prévision à cet effet - le quorum, c'est simplement
une question de quantité - donc, il y des décisions qui
pourraient se prendre où les deux parties ne participent pas
nécessairement au débat. Cela, c'est une chose. Ensuite, je suis
d'accord que la formation va devenir extrêmement importante; je reconnais
que c'est probable- ment aussi important que l'administration du décret.
Je suis convaincu aussi que la quantité de personnel dans la
boîte, les énerqies, les dépenses de la boîte, cela
va continuer à être centré sur l'administration du
décret, à moins qu'on ne triple la grosseur. J'espère que
non. Si c'est vrai ce que je dis, qu'on n'a pas l'idée de tripler la
grosseur, à moins qu'on n'ait des gars à établir dans le
moment, ils vont continuer à remplir la fonction qu'ils tiennent
présentement. Je vais en conclure que, si on ne double pas ou on ne
triple pas, l'application du décret et des avantages sociaux, cela va
encore demeurer ce qui demande le plus de temps et le plus de dépenses
à l'office.
M. Théorêt: Mais, M. le président, huit sur
treize, quatre représentants du monde syndical et quatre du monde
patronal. Huit sur treize! Si vous décidez à vous huit, si vous
prenez une décision quelconque, vous êtes majoritaires au conseil
d'administration; comment les représentants du qouvernement
pourraient-ils renverser à cinq contre huit votre décision?
M. Daoust: Quatre et un, c'est le même résultat
aussi. Si on n'est pas d'accord, il y en a qui tranche.
M. Théorêt: C'est cela. Vous me dites que cela
allait très bien. Vous aviez le contrôle à quatre sur cinq.
Vous me dites qu'à huit sur treize vous perdez le contrôle. Est-ce
cela que vous me dites?
M. Daoust: C'est parce que vous mettez en place un organisme en
présumant qu'on ne se mettra pas d'accord. Cela fait deux ans qu'on se
met d'accord...
M. Théorêt: Ce n'est pas cela que je dis. Non, non.
M. le président, je m'en tiens juste aux chiffres, oubliez les
commentaires que j'ai faits. À huit sur treize, est-ce que vous avez le
contrôle aussi fort qu'à quatre sur cinq?
M. Daoust: C'est exact que, si on est d'accord, on aura le
contrôle.
M. Théorêt: Vous avez le contrôle, donc la
crainte que vous exprimiez au ministre ne semble pas fondée, dans le cas
du contrôle.
M. Daoust: Cela dépend complètement de la
composition des deux parties.
M. Théorêt: Quatre patronal, quatre syndical.
M. Daoust: Oui, parce que je vais vous référer au
comité mixte où les représentations sont multiples des
deux côtés. Il y a plusieurs participants qui viennent de
différents groupes, du moins du côté syndical. Les
positions sont très politisées. Ce ne sont pas des
décisions administratives, c'est très politisé à ce
moment-là. C'est ce qu'on craint à un niveau supérieur,
qu'avec une participation de différents groupes, cela ne devienne
politisé plutôt qu'administratif.
M. Théorêt: Même ces craintes-là.., Je
m'excuse de revenir là-dessus mais, pour moi, c'est fondamental. Vous
avez le contrôle chiffré et si vous avez le contrôle
chiffré, que ce soit un fonctionnaire, et dans le cas que vous soulevez
maintenant, que ce soit un conseil d'administration politisé, il n'y a
pas un fonctionnaire qui pourrait renverser ou cinq fonctionnaires qui
pourraient renverser la décision des huit représentants du
milieu. Êtes-vous d'accord?
M. Daoust: Si on est unanime, je suis d'accord.
M. Théorêt: Merci. L'autre inquiétude que
vous avez soulevée - ou comparaison -tantôt, c'est: II se pourrait
qu'à une assemblée d'un conseil d'administration donné
tous les représentants d'un groupe patronal ou syndical soient absents
ce soir-là. Donc, les décisions se prendraient quand tout un
secteur ne serait pas représenté. Êtes-vous sérieux
quand vous dites cela?
M. Daoust: C'est possible d'après le projet.
M. Théarêt: Est-ce que c'est déjà
arrivé que tout le monde syndical n'aille pas à une
assemblée, ou tout le monde patronal, et que l'assemblée ait lieu
quand même et que des décisions aient été
prises?
M. Daoust: Pas tout le bloc, mais parfois une bonne partie du
bloc.
M. Théorêt: Votre crainte est strictement... Parce
que vous mentionnez en toutes lettres: Tout le monde.
M. Daoust: Même une partie du bloc. Si j'ai bien compris,
les votes, c'est sur une base individuelle. Ce n'est pas un bloc qui vote et un
autre bloc qui vote.
M. Théorêt: En principe, vous admettrez que, que ce
soit le côté patronal ou syndical, on a la même opinion aux
tables.
M. Daoust: J'aimerais vous amener à des réunions du
comité mixte.
M. Théorêt: D'accord, mais vous ne m'avez pas
convaincu là-dessus. J'aimerais passer à la page 10, toujours
dans le même secteur. Vous dites: Le législateur prévoit
également que le budget entre automatiquement en vigueur le 1er janvier
s'il n'a pas été approuvé. L'AECQ ne peut
évidemment accepter une telle application qui vient confirmer
l'insignifiance de son intervention dans l'exercice du budget. S'il y a une
impasse, M. le président, expliquez-moi ce qui va arriver. Si vous ne
vous entendez pas sur le budget, qui décide?
M. Daoust: C'est bien apparent que l'office doit continuer
d'exister. Il n'y a-pas autre chose qui peut arriver. Cela ne peut pas fermer
du jour au lendemain.
M. Théarêt: Qu'est-ce que vous faites avec le
budget?
M. Daoust: Le budget n'a rien à voir avec... Enfin, je
pense qu'une boîte peut continuer à fonctionner sans que le budget
soit accepté. Cela veut dire que les discussions vont continuer. Mais
tout continue de la même façon. Si le budget, autrement dit,
prévoit 25 % pour une augmentation du personnel et qu'il n'est pas
accepté, l'office ne sera pas autorisé...
M. Théorêt: À faire les dépenses.
M. Daoust: ...à faire les dépenses.
M. Théorêt: Comment va-t-il fonctionner?
M. Daoust: II devra continuer de la même façon. Il
n'y a pas d'autre choix.
M. Théorêt: Si vous êtes président
d'une entreprise, M. le président, et que vous n'adoptez pas un
budget... Vous dites: On va fonctionner et que le diable emporte le budget.
Comment faites-vous pour approuver les dépenses, etc.? Il faut que vous
ayez un budget.
M. Daoust: On ne peut pas fermer du jour au lendemain. On se doit
de continuer de la même façon, sauf que les programmes
prévus dans un budget contesté ne se réaliseront pas tant
qu'il n'y aura pas accord, c'est bien apparent.
M. Théorêt: Je vais passer à la page 9 de
votre annexe, M. le président, paragraphe b, deuxième point: "Que
soit reconnue la qualification acquise en vertu du règlement 3 de tous
les salariés ayant exercé une activité dans l'industrie
mais qui ne possèdent pas de carte de classification. Cette
reconnaissance pourra toutefois, dans certains cas, être assortie d'un
processus de vérification de la compétence réelle
possédée par le candidat." Comment cette vérification se
fera-t-elle et par qui?
M. Daoust: Je crois, si je me rappelle bien - quelqu'un à
la table me corrigera si ma mémoire est fausse - que ceux qui
étaient visés là-dedans, c'étaient ceux qui, depuis
une certaine période de temps, n'ont pas travaillé à la
construction tout en détenant une carte de qualification de
métier. Il s'agirait de déterminer, avec les parties,
après quelle période critique il a perdu son expérience,
comme on peut dire, et ou c'est douteux peut-être. Et là, il devra
subir un autre examen pour prouver qu'il est encore apte à travailler
dans l'industrie de la construction. Si je me rappelle bien, c'était
l'idée.
M. Théorêt: Qui va faire cela? Ce sera fait par
qui?
M. Daoust: II va y avoir un comité pour la formation, cela
va faire partie de leurs fonctions.
M, Théorêt: Ce serait le comité qui aurait
à décider de quelle façon et par qui serait fait la
vérification de la compétence.
M. Daoust: Le comité paritaire. M.
Théorêt; Merci, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va*?
M. Daoust: Est-ce que je pourrais vous faire un très court
commentaire à la fin que j'ai oublié de faire au
début?
M. Théorêt: Bien sûr!
M. Daoust: Je crois que le projet de loi, dans son contexte
actuel, est un pas dans la bonne direction pour résoudre un
problème. J'ai dit tantôt que pour tous les problèmes il y
a plusieurs facteurs pour amener une solution. Si, avec le projet de loi
même modifié d'après les discussions qu'il y a eu ou non
modifié, il n'y a pas autre chose, on ne résoudra pas le
problème parce qu'on va former des jeunes et si on ne change pas, par
exemple, le ratio d'apprentis-compagnons, le jeune n'aura pas l'accès.
Si on ne change pas la structure salariale de l'apprenti, il n'y a personne qui
va l'engager parce qu'il coûte trop cher. Cela, c'est un départ,
mais ces deux autres facteurs doivent être examinés
prioritairement. Sans cela, malheureusement, tous les efforts auront
été sans résultat.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être un bref
commentaire, si vous me le permettez, pour vous dire que le gouvernement est
très conscient de ce que vous venez d'affirmer là. Mais le
gouvernement n'a pas voulu imposer les nombres. Cette responsabilité
appartiendra à la commission. (13 heures)
M. Daoust: Je vous suggérerais que, M. le ministre, si les
deux parties, après un délai qui devra être
prédéterminé, ne s'entendent pas, il devrait y avoir une
décision de quelqu'un, ce qu'on maintient également sur la
réglementation. Si on ne s'entend pas, réglez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut qu'il y ait des
décisions de prises là-dessus...
M. Daoust: II faut qu'il y ait des décisions de
prises.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et les mécanismes,
d'après nous, sont en place.
M. Daoust: À court terme.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. En principe, tout le
monde est d'accord que, quand on travaille dans un secteur donné, on
essaie d'avoir les meilleures compétences. C'est clair en partant.
Est-ce que je comprends bien ce que vous dites à la page 4 de votre
section sur le règlement de placement? Vous dites que la
compétence est assortie d'un certain nombre de critères. Est-ce
que vous distinguez précisément la qualification et la
compétence?
Est-ce que, pour vous, qualification ne signifie pas
nécessairement compétence?
M. Daoust: Vous parlez du système actuel ou d'un
système qu'on mettrait en place?
M. Claveau: Non, dans votre texte.
M. Daoust: Je crois qu'avec un système de formation que
les deux parties désirent, évidemment, s'il reçoit une
carte de qualification, il serait compétent.
M. Claveau: Mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi?
Vous me dites que, s'il a une carte de qualification, il est compétent.
Or, en page 6, vous dites qu'il y a d'autres éléments qui sont
à prendre en considération comme l'environnement, la
compatibilité avec l'équipement, la nature du travail,
l'éloignement, etc.
Vous avez dit, en page 4, que bien que la qualification soit,
règle générale, un élément important, ce
n'était pas le seul critère pour évaluer la
compétence. Est-ce que le simple fait d'avoir un papier qui dit "je suis
capable de faire tel travail" signifie que, dans l'application quotidienne,
journalière de ce travail, je vais avoir la compétence pour le
faire?
M. Daoust: Avec un système modifié qui ferait ta
formation propre, c'est bien apparent, ce serait l'équivalent. Mais ce
que je dis ou le message qu'on essaie de passer, c'est qu'il y a d'autres
critères que simplement la carte de compétence ou de
qualification - appelez-la comme vous le voudrez - qui détermineraient
qu'un employé est rentable ou non ou plus ou moins qu'un autre.
C'est bien apparent que, si quelqu'un d'une équipe de cinq
s'obstine et se bat avec tout le monde, l'équipe va souffrir; c'est bien
apparent. Il y a des facteurs.
M. Claveau: Vous allez m'expliquer quelque chose à partir
de cela. Si c'est vraiment la compétence que l'industrie de la
construction cherche, véritablement la compétence, pourquoi
va-t-on permettre à quelqu'un qui a plus de seize ans, pour autant qu'il
ait 500 heures garanties à l'intérieur d'une seule année,
d'entrer dans l'industrie de la construction, à partir d'un cours de
formation de base, certes, mais sans évaluation des autres
critères?
M. Daoust: Vous parlez des occupations ou des métiers?
M. Claveau: Je parle de l'article 33, entre autres, où on
parle d'apprentis; l'apprenti va arriver à un autre niveau où on
veut établir une compétence. Mais vous dites qu'on les entre dans
l'industrie de la construction pour autant qu'ils aient seize ans et qu'on leur
garantisse 500 heures d'ouvrage. À ce moment, ils vont
nécessairement arriver à la compétence. C'est ce que vous
noua dites?
M. Daoust: On a dit également qu'il doit satisfaire aux
critères d'accès. Autrement dit, je comprends très bien
que le comité de formation va s'asseoir et va dire: Pour un
électricien, cela prend - je ne veux pas avancer cela, parce que je ne
connais pas le métier d'électricien et je ne m'en cache pas - un
Secondaire V. Cela va être un critère d'accès.
Dans mon métier, monteur d'acier, le critère
d'accès va être que je vais peut-être faire marcher le gars
sur une planche à quatre pieds de terre. S'il ne tombe pas, il a des
chances de devenir un monteur d'acier. On va avoir différents
critères d'accès de base. Je simplifie cela, mais il va y avoir
des facteurs de base, des critères de base d'établis par le
comité de formation, c'est bien apparent, les deux parties.
M. Claveau: J'arrive mal à comprendre, d'abord, comment
depuis si longtemps les entrepreneurs ont pu réussir à survivre
avec de la main-d'oeuvre incompétente, parce qu'il semblerait que,
jusqu'à maintenant, la main- d'oeuvre ne soit pas compétente et
que c'est à partir de l'application de ce projet de loi qu'elle va
devenir tout à coup compétente du jour au lendemain.
De , la façon dont cela a été abordé
jusqu'à maintenant, on a l'impression qu'il n'en existe pas de
main-d'oeuvre compétente dans le domaine de la construction. On nous dit
souvent qu'il faut avoir de la compétence. Quand on dit qu'il faut en
avoir, c'est parce qu'on n'en a pas. L'industrie de la construction ne semble
pas se porter trop mal en termes de fonctionnement et, dans ce sens, il doit y
en avoir déjà de la compétence dans ce domaine.
M. Daoust: II y a une compétence. Ce que l'on
suggère, c'est que tous les travailleurs, dans tous les métiers,
soient plus compétents qu'ils ne le sont. Quel est l'effet de la
compétence? Si le produit se fait mieux, plus rapidement, plus
efficacement, les coûts sont réduits. Si les coûts sont
réduits, il y a plus de produits qui se vendent; c'est un cercle
vicieux. Si je suis capable de sortir, pas moi parce que je ne suis pas dans ce
domaine, mais quelqu'un de l'habitation peut sortir une maison à 1000 %
de moins, parce que les employés seront encore mieux formés
qu'aujourd'hui, le prix de la maison va baisser. Il y a peut-être des
couples dans le moment pour qui c'est marginal s'ils achètent une maison
ou non. Eux autres vont en acheter. On vient de créer des emplois.
M. Claveau: Ce que vous venez de dire là, M. Daoust,
à mon sens, confirme la thèse - que nous avons déjà
défendue d'ailleurs au moment où le ministre a
déposé son projet de loi - voulant que, si le projet de loi est
adopté tel qu'on le voit, on va assister à une diminution
générale du revenu moyen des travailleurs de la construction.
M. Daoust: Pas du tout, je crois que c'est l'inverse qui
arriverait.
M. Claveau: Vous venez de nous dire que, si on paie moins, cela
va coûter moins cher. Vous avez fait référence tout
à l'heure à la question des salaires des apprentis, vous dites
qu'ils sont trop élevés.
M. Daoust: Je crois que beaucoup de syndicats sont d'accord avec
nous aussi. Comprenez-vous que, si je peux réduire le coût d'un
produit, le coût d'une maison, je vais en construire plus? C'est aussi
simple que cela.
M. Chevrette: ... Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Daoust:: Là, vous présumez que les entrepreneurs
vont voler tout le monde.
M. Chevrette: C'est parce que la porte était toute grande
ouverte, M. Daoust, vous le savez bienl
Le Président (M. Charbonneau): D'accord. M. le
député de Rosemont.
M. Rivard: Le remplacement du système actuel par un
système qui est axé sur la compétence permettrait de
régler un autre problème qui s'appelle celui de la relève,
celui du vieillissement des travailleurs de la construction. Je pense que je
connais déjà votre réponse à ma question. Nous
avons des chiffres démontrant que la moyenne d'âge est
élevée. Cependant, hier, au cours de cette commission, nous avons
essayé de faire corroborer, d'une certaine façon, par une
centrale syndicale cette impression basée sur des chiffres que nous
avons. Nous nous sommes fait répondre que, de fait, depuis deux ans,
cela rajeunit de façon appréciable.
Vous représentez 15 000 employeurs. Vous avez donc une vision
générale, panquébécoise de cette question. À
votre avis, est-ce que l'on a un problème de vieillissement des
travailleurs? Est-ce que l'on a un problème de relève et est-ce
qu'il est urgent de s'attaquer à ce problème?
M. Daoust: Sans aucun doute. D'ailleurs, c'est un problème
qui existe dans d'autres provinces. J'arrive de Vancouver, du congrès du
CCA. Il y a des problèmes très semblables en Ontario. C'est un
problème qui est rendu critique. Je ne vous dis pas que tous les
métiers sont vieux. Il ne faut pas s'imaginer qu'en changeant le
système avec le projet de loi 119 modifié, il va y avoir 50 000
nouveaux apprentis demain matin; ce n'est pas vrai. Cela prend des
années pour les former. Ensuite, il va falloir qu'ils aient l'espoir
d'avoir un emploi avant de se lancer là-dedans; c'est certain. Cela va
permettre une relève.
Je vais vous donner un exemple bien typique. Il y a des métiers
qui, probablement, n'ont pas besoin de relève. Automatiquement, il n'y
en aura pas qui vont entrer parce qu'il y en a suffisamment dans le moment. Je
vais vous donner un autre exemple typique que je connais. Je vais vous demander
de vous dépeindre mentalement le portrait d'un monteur d'acier. Je vous
défie, vous avez tous le même portrait: c'est un gars qui monte
dans une colonne d'acier de 20, 25 ans, des bras gros comme cela, qui marche
sur un "beam", qui s'en va - je dis "beam" parce que c'est ce mot que l'on
utilise dans le métier - sur une poutre, les épaules larges comme
cela. Ce n'est pas cela que l'on a...
M. Rivard: Ne me dites pas que vous allez nous dire que c'est une
petite femme frêle?
M. Daoust: Non, c'est un homme de 47 ans en moyenne, le monteur
d'acier que l'on a dans le moment. Ce n'est pas du tout le portrait que vous
vous faites. Le résultat, c'est quoi? C'est que des projets sont
retardés et je n'exagère pas du tout. Je suis prêt à
donner des noms de compagnies que vous pouvez consulter. Les projets sont
retardés présentement parce qu'il n'y a pas d'équipe pour
les réaliser. Je ne parle pas d'une compagnie, je parle de l'industrie,
par exemple, un fabricant d'acier qui a des projets à donner pour
l'installation; c'est un de mes clients. Je ne suis pas le seul à faire
de l'installation pour lui, il a peut-être six, sept installateurs. Il
n'y a personne de disponible pour installer son produit.
M. Rivard: Ce vieillissement peut avoir des impacts particuliers
sur les grands projets, par exemple?
M. Daoust: Sans aucun doute. On pense aux connecteurs. Le gars
qui monte dans la colonne et qui se promène sur la poutre, on appelle
cela un connecteur. Ordinairement, c'est celui qui est le plus agile et qui n'a
pas peur des hauteurs. Moi, je vous assure -j'ai 49 ans - je ne veux pas parler
contre des personnes de 47 ans, loin de là. Mais, en moyenne, à
47 ans et à 50 ans, ce ne sont pas des monteurs d'acier; physiquement,
à quelques exceptions près, ce ne sont pas des monteurs d'acier.
C'est cela que nous avons. Il y a d'autres métiers comme cela et je vous
donne un exemple. C'est bien logique et je comprends très bien. Par
exemple, j'écoutais les électriciens hier; ils ont la moyenne
d'âge la plus basse.
M. Rivard: C'est 40 ans, 41 ans.
M. Daoust: C'est tellement facile à expliquer. Un bon
groupe d'électriciens sont contracteurs. En anglais ce sont des
"self-employed". Ils n'ont pas d'employés. C'est entre eux. Ils sont
deux, associés. Ils n'apparaissent même pas dans les statistiques
de l'office. Automatiquement, lorsqu'ils arrivent à un certain
âge, je ne sais pas, à 30 ans - ils ne se lancent pas en affaires
à 20 ans - ils se lancent en affaires, peut-être à 30, 35
ou 40 ans, alors cela réduit la moyenne d'âge. C'est logique.
M. Rivard: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? Alors, je pense
qu'on est rendu à l'étape des remerciements. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. M.
Daoust, je tiendrais à vous remercier pour le mémoire sur
lequel vous avez consacré beaucoup de travail, vous remercier
également pour votre participation au printemps, aux tables de travail.
Également, je veux vous dire que si nous vous avons reçus dans
cette salle plutôt que de vous recevoir au salon rouge cela ne
dépendait pas des décisions de quelque côté que ce
soit de la table; la présidence de l'Assemblée nationale avait
retenu les locaux ce matin. Mais nous vous avons écoutés aussi
attentivement dans des locaux un peu plus exigus qu'on ne l'aurait fait au
salon rouge.
M. Daoust: Ce devait être pour limiter l'accès
seulement à ceux qui sont favorables à ma position.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Je vous remercie.
Le Président (M. Charbonneau): Alors, messieurs, merci et
à la prochaine. Les travaux de la commission sont suspendus. On
reprendra à 15 heures au salon rouge.
(Suspension de la séance à 13 h 12)
(Reprise à 15 h 14)
Le Président (M. Charbonneau): Sans doute, le
député de Joliette viendra nous rejoindre dans quelques
instants.
La commission de l'économie et du travail reprend, cet
après-midi, ses consultations particulières sur le projet de loi
119, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction. Nous recevons cet après-midi la Fédération
des travailleurs du Québec. Par la suite, nous entendrons l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, ainsi que la
Confédération des syndicats démocratiques et, finalement,
l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du
Québec.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le député de
Vimont?
M. Théorêt: Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata) remplace M. Philibert
(Trois-Rivières).
Le Président (M. Charbonneau): Nous avons le consentement?
Oui? Bon, très bien! M. Rivard.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le Président, je voudrais vous
demander une couple de minutes parce qu'un de nos invités n'est pas
encore arrivé. Je l'entends qui monte l'escalier; j'ai l'oreille
fine.
Le Président (M. Charbonneau): C'est celui qui arrive en
arrière?
M. Rivard (Jean-Paul): On va commencer avec lui.
Le Président (M. Charbonneau): J'imagine que vous en
attendez un autre, celui que l'on connaît tous.
M. Rivard (Jean-Paul): On commence.
Le Président (M. Charbonneau): On commence? Cela va? M.
Lavallée, M. Rivard et les autres que je connais moins, je voudrais
d'abord demander à celui, parmi vous, qui est le porte-parole - je ne
sais pas si c'est M. Rivard ou M, Lavallée, je présume que c'est
M. Lavallée - de présenter les gens qui l'accompagnent. D'autre
part, je vous rappelle qu'une heure et demie vous est impartie pour la
présentation de votre mémoire, ainsi que pour les discussions qui
s'ensuivront. Donc, au départ, vous avez vingt minutes pour
présenter vos points de vue. Par la suite, le temps est
équitablement réparti de chaque côté de la table
pour les discussions qui vont suivre. Sans plus tarder, M. Lavallée.
FTQ-Construction
M. Lavallée (Jean): Merci, M. le Président.
J'aimerais vous présenter les personnes qui m'accompagnent. À mon
extrême gauche, Laurent Carrière, des charpentiers-menuisiers,
Norbert Henley, des manoeuvres, et Jean-Paul Rivard, directeur
général de la FTQ-Construction. Il y aura aussi Réal
Chastenay, du local 791, et notre confrère, Louis Laberge, de la
FTQ.
Le Président (M. Charbonneau): Un nouveau venu dans le mouvement
syndical.
M. Lavallée: Qui est un nouveau venu dans le mouvement
syndical. La présentation de notre mémoire va être faite
par Jean-Paul Rivard, ainsi que par moi-même, président. Quant
à l'argumentation, nous ferons à tour de rôle, mon
confrère Laberge, Jean-Paul Rivard et moi-même.
Le Présient (M. Charbonneau): D'accord. Alors,
allons-y!
M. Lavallée: M. le ministre, M. le Président, MM.
les membres de la commission, le présent mémoire vous est
présenté sous toute réserve, car la FTQ-Construction ne
démord pas de sa demande première, soit un moratoire d'une
durée d'un an afin de permettre aux parties d'étudier
plus profondément et de mettre en place le mécanisme et
les structures qui permettraient aux parties payeuses de vraiment prendre en
charge la formation et la qualification professionnelles des travailleurs de
notre industrie. Ce sont, d'ailleurs, les consensus exprimés aux tables
de travail formées sur le sujet. Je vous rappellerai que le ministre
avait formé trois tables de travail. On en a parlé amplement au
cours de cette commission parlementaire là. Plusieurs consensus qui se
sont dégagés à ces tables de travail ne sont pas apparus
dans le projet de loi. Je pense qu'au cours du mémoire on aura
certainement à en discuter, surtout de la table des
non-qualifiés.
De plus, nous croyons que les parties sont assez matures pour diriger
l'Office de la construction et le faire fonctionner efficacement sans
ingérence gouvernementale indue. Si le projet de loi 119 va aussi loin
qu'envisager la possibilité de doubler la note des travailleurs, il
faudrait donc que l'exclusivité des champs de décision soit
également doublée. Le présent mémoire vous
présente donc notre opinion sur les points du projet de loi que nous
trouvons déficients et qui motivent notre demande d'un moratoire.
Ces points sont notamment: la création de la nouvelle Commission
de la construction du Québec; la composition de la nouvelle commission
et le choix de son président-directeur général; les
comités administratifs; les pouvoirs de l'inspecteur et des
représentants syndicaux; les artisans; les amendes; les poursuites
pénales; le pouvoir de réglementer; le contingentement. Nous vous
ferons donc part de nos commentaires sur ces points en plus de commentaires
d'ordre général.
La création de la nouvelle commission. Nous ne pouvons absolument
pas comprendre qu'il faille encore une fois modifier de façon aussi
complète la structure et le nom de l'Office de la construction du
Québec. Lors de la réunion du comité sur la formation et
la qualification et sur l'abolition du certificat de classification, le 12
novembre dernier, le ministre a bien glissé sur le sujet en disant
à peu près ceci: Une commission se prête mieux au
rôle qu'on veut lui faire jouer qu'un office. À notre avis, cet
argument se défend mal, car dans les deux cas il s'agit d'une
corporation et elle possède donc les droits et pouvoirs que lui
confère la loi pertinente aux corporations et compagnies. Cela, en plus
des pouvoirs que lui donne ou des limitations que pourrait lui imposer le
projet de loi 119.
Nous croyons plutôt que ce changement de nom provient de la
propension du gouvernement à vouloir créer l'image du changement,
ne serait-ce que sur papier. Un pareil changement comporterait des coûts
énormes et nous croyons qu'il y a mieux à faire avec l'argent des
travailleurs et des employeurs de la construction. Nous demandons que le
ministre renonce à changer le nom de l'Office de la construction du
Québec.
La composition de la nouvelle Commission. De la construction du
Québec et le choix de son président. L'Office de la construction
du Québec fonctionne depuis 1975 et la composition de son conseil
d'administration n'a jamais, à ce que nous sachions, causé aucun
problème. Depuis déjà plus de deux ans, les parties sont
représentées à ce conseil et elles se sont
efforcées, dans le cadre restreint qui est le leur, d'administrer l'OCQ
en faisant abstraction de leurs provenances respectives. Nous ne voyons pas
pourquoi on gonflerait de cinq à treize les membres du conseil
d'administration, alourdissant ainsi tout le processus. De plus, le projet de
loi 119 donne au gouvernement la balance du pouvoir sur le conseil et nulle
part nous ne voyons la couleur de son argent. Il est donc facile de conclure
qu'avec un tel projet de loi le gouvernement accapare l'industrie de la
construction, tout en prétendant publiquement vouloir la remettre aux
parties.
Même si nous ne voyons pas l'utilité de changer le nombre
de personnes représentant les parties au conseil d'administration, nous
ne nous opposons pas farouchement à ce que ce nombre soit
augmenté puisque les associations d'entrepreneurs seront
dorénavant reconnues. Cependant, il n'y a aucune raison qui justifie que
quatre membres du conseil d'administration de l'office proviennent du
gouvernement. Le président, lequel devra être choisi par les
parties, tranchera lorsqu'il y aura désaccord. Une méthode de
résolution des désaccords pourra être trouvée
lorsqu'une partie s'opposerait à ce que le président tranche.
Nous demandons donc que le conseil d'administration soit formé seulement
de personnes représentant les parties et que le président soit
choisi par ces dernières.
Les comités administratifs. Nous ne voyons pas l'utilité
de ces comités. Ils serviront seulement à mobiliser des
énergies qui seront dépensées en double au conseil
d'administration. Rien n'empêchera le conseil de former des
comités ad hoc lorsque nécessaire pour débroussailler
certains dossiers et faciliter leur compréhension ou règlement
par les autres membres du conseil. Nous demandons que les comités
administratifs prévus à l'article 3 du projet de loi soient
retirés de ce projet et que seuls demeurent le comité mixte et le
comité sur la formation professionnelle. Pour nous, ce serait un
dédoublement de travail. Nous pensons que le grand comité devrait
avoir ces responsabilités, ensuite, le comité mixte et puis le
comité de la formation professionnelle. Donc, pour nous, rien
n'empêcherait le grand comité de se former
un comité administratif comme il en existe dans d'autres
domaines. Pour nous, c'est beaucoup de travail qui pourrait être
octroyé et qui pourrait être fait par le grand comité qui
en aurait la responsabilité,
M. Rivard (Jean-Paul): Les pouvoirs de l'inspecteur de l'office
et des représentants syndicaux. Nous croyons qu'il serait primordial que
le ministre examine sérieusement, tandis que l'occasion se
présente, la dimension extrêmement importante des pouvoirs que
détiennent les inspecteurs de l'Office de la construction et les
représentants syndicaux. Le travail au noir étant la plus grande
plaie de l'industrie actuellement, nous ne voyons pas pourquoi on
hésiterait à doter ces inspecteurs de pouvoirs leur permettant
d'effectuer leur travail de façon efficace et sérieuse. La
revalorisation de leur rôle qui en découlerait ne pourrait que les
motiver. C'est le contraire qui existe présentement et nous sommes
convaincus que plusieurs d'entre eux ferment souvent les yeux ou ne
pénètrent tout simplement pas à des endroits où ils
savent se trouver des travailleurs au noir.
L'article 22 du projet de loi ne fait que clarifier l'article 84 actuel
de la loi en ce sens qu'il impose de façon claire et nette l'obligation
au salarié d'exhiber son certificat. Dans le passé, on
procédait avec une accusation d'entrave au travail de l'inspecteur et
cela avait le même effet. Le projet de loi, il faut le dire, le rend plus
clair.
De plus, depuis plusieurs années, nous exigeons que les
représentants syndicaux soient investis du pouvoir de vérifier si
les personnes oeuvrant sur un chantier sont habilitées à le
faire. Nous ne voyons pas pourquoi nous n'aurions pas le droit de faire
respecter notre convention collective dans toutes ses dimensions, y compris
l'arrêt des travaux. Nous demandons que les inspecteurs de l'Office de la
construction du Québec soient dotés notamment du pouvoir
d'interpellation et d'arrestation. Nous demandons également que les
représentants syndicaux soient investis des mêmes pouvoirs de
vérification que les inspecteurs de l'OCQ, ainsi que du pouvoir
d'arrêter les travaux si l'employeur ne met pas fin à ses
activités illégales.
Pouvoir de réglementer. Dans la loi actuelle, l'OCQ, dans le
cadre de son mandat, a le pouvoir de réglementer. Ce pouvoir, bien que
soumis à l'approbation gouvernementale, laisse tout de même aux
parties la discrétion nécessaire pour décider ce qui est
bon pour ceux qui paient la facture. Dans le projet de loi 119, tout ce pouvoir
de réglementation fait partie des attributs gouvernementaux et c'est ce
qui nous fait dire qu'à toutes fins utiles le gouvernement fait main
basse sur l'Industrie.
Le 6 août 1984, les parties soumettaient au gouvernement de
l'époque un mémoire dans lequel elles demandaient que ce pouvoir
de réglementer ne soit plus sujet à l'approbation gouvernementale
en ce qui a trait au rèqlement sur les avantages sociaux. Ce
règlement avait causé plusieurs problèmes aux travailleurs
de l'industrie de la construction, en ce sens qu'avant qu'il soit adopté
par le gouvernement, cela prend des mois et des mois. Je pense qu'on est encore
en train de vivre une situation semblable. Des paiements d'augmentation de
rente n'étaient pas versés aux travailleurs, ainsi que des
paiements de réclamations d'assurance.
De plus, si les parties reprennent, selon les dires du ministre, la
formation professionnelle, il est donc normal que les pouvoirs définis
è l'article 24 aillent à l'Office de la construction du
Québec. Nous demandons que le pouvoir de réglementer dans le
cadre de son mandat demeure entre les mains de l'OCQ.
Les artisans. Pour nous, les artisans sont et demeurent un autre genre
de travailleurs au noir. Cependant, leur nombre est quand même assez
restreint, car la Régie des entreprises de construction en
dénombre 2238 dans son dernier rapport annuel. Ce
phénomène est attribuable, entre autres, à
Corvée-habitation qui interdisait l'utilisation des artisans. Ces
derniers se sont donc convertis, sur les conseils de leurs associations
patronales, en entrepreneurs spécialisés afin de pouvoir
continuer à saigner le système, tout en n'étant plus
régis par l'article 19 de la loi actuelle.
L'article 3 du projet de loi fait obligation à l'OCQ de veiller
à la formation des artisans. De même, l'article 13 consacre leur
droit d'en appeler d'une décision de l'OCQ. Il nous est donc permis de
croire, à moins de preuve du contraire, qu'on lui fait une place de plus
en plus qrande dans l'industrie, malgré que le programme du Parti
libéral lors de la dernière campagne électorale stipulait
que l'artisan serait confiné au secteur résidentiel. Nous citons
cette partie du programme. Vous devez probablement le connaître par
coeur, je n'ai pas à le lire. Je suis certain qu'ils l'ont vu.
Nos vues sur l'artisan n'ont pas changé. Il demeure un parasite
qui saigne notre industrie et contribue à fausser toutes les
données. Encore récemment, il retirait plus de 2 $ pour chaque
dollar payé dans le régime d'assurance des travailleurs de la
construction. Dans notre mémoire du mois d'août 1984, nous
traitions de ce sujet et la partie syndicale était d'accord pour exclure
du champ d'application, lorsqu'effectués par un artisan, "les travaux de
réparation et d'entretien effectués aux fins personnelles et non
lucratives d'une personne physique." Je voudrais vous rappeler ici que, parmi
les
centrales syndicales, nous n'avons pas changé d'idée sur
l'artisan et il n'est pas question pour nous de lui donner toute la
rénovation, la réparation, l'entretien, la modification des
édifices de quatre logements ou moins.
Il n'y a rien d'anormal ou d'antisocial au fait que nous voulions
exclure l'artisan de la construction. Dans toute autre entreprise en dehors de
la construction, il est normal qu'on signe des clauses qui défendent
à des travailleurs en dehors de l'unité de négociation de
venir effectuer du travail dans l'unité de négociation. Pourquoi
en serait-il autrement dans notre industrie?
Nous demandons que le projet de loi 119 soit modifié de
façon à exclure l'artisan du régime des avantages sociaux,
ainsi que de la formation professionnelle et que son travail soit limité
aux travaux de réparation et d'entretien aux fins personnelles et non
lucratives d'une personne physique.
M. Lavallée: Les amendes. Bien que l'article 22 du projet
de loi soit une disposition qui s'impose à cause du fait que la loi
actuelle change de nom pour agrandir son champ d'application (ou son champ
d'action) à la formation professionnelle, il n'en demeure pas moins que
le fait pour quelqu'un de violer une disposition de ce que serait le nouvel
article 119.1 de la loi serait encore moins coûteux qu'auparavant et
voici pourquoi: l'article 47 de la Loi sur la formation et la qualification
professionnelles prévoit des amendes minimales de 250 $, tandis que
l'article 120 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction prévoit pour un individu une amende minimale de 100 $. Or,
seulement les corporations et les associations verraient les amendes augmenter
un tant soit peu. Pour les individus, les artisans et les entrepreneurs non
incorporés, les amendes baisseraient. Nous vous référons
donc à notre mémoire du 6 août 1984 et aux modifications
proposées notamment à l'article 120. Nous reproduisons le
texte.
Notre société vit présentement une remise en
question des habitudes et des règles régissant cette vie en
société. H suffit de parler des amendements aux
différentes lois touchant les automobilistes, les chasseurs, les
braconniers, etc., pour comprendre que les amendes font partie des outils
d'application des lois. Les amendes inhérentes à ces lois, ainsi
que le prix des billets de contravention de toutes sortes ont été
indexés dans les dernières années afin de les rendre
compatibles avec le but recherché par le législateur.
Ce ne fut pas le cas des amendes prévues pour violation des lois
et règlements touchant la construction, à l'exception des amendes
prévues quant à la répression syndicale. C'est donc
pourquoi une révision de ces amendes s'impose. Nous demandons que le
projet de loi 119 soit modifié afin que les amendes prévues dans
la loi soient portées à des montants qui leur donneraient un
véritable effet de dissuasion. C'est un des points qui ont
été discutés hier, qu'il va falloir avoir des effets
dissuasifs si on veut arriver à assainir l'industrie. (15 h 30)
On parle beaucoup de travail au noir. J'ai un article ici qui a paru
dans le journal Les Affaires et qui dit que pour 500 000 000 $ de
travail au noir se fait au Québec. Si on veut corriger cela, il va
falloir que des formules soient mises de l'avant pour que ce soit incitatif
à arrêter cela. M. Bourassa a mis les Boubou macoutes après
les assistés sociaux, vous avez eu un bon résultat. On vous l'a
déjà dit: Maintenant, mettez-les donc dans la construction et
vérifiez les entrepreneurs. Vous allez voir que, juste avec le fait de
les mettre dans la construction, ils vont commencer à rapporter plus
d'heures. On a déjà fait des représentations aussi
auprès du ministère sous l'ancien gouvernement, et aujourd'hui
encore, en disant: Les entrepreneurs qui récidivent, enlevez-leur leur
licence, vous allez voir qu'ils vont arrêter de prendre du monde et de le
faire travailler au noir.
Vous avez toutes les amendes. On voit le ministre Picotte qui est en
train - et je suis d'accord avec cela, étant un chasseur non pas de
carrière, mais qui aime y aller de façon régulière
- de mettre des amendes et des peines d'emprisonnement pour les braconniers. La
corporation des électriciens, hier, pariait des braconniers dans la
construction. Pourquoi ne met-on pas des formules sévères pour
éviter cela? Je pense que c'est un débat qu'il va falloir faire
sur le fond. On est capable d'arrêter cela si le gouvernement y met du
sien aussi parce qu'il y a beaucoup d'argent qui n'est pas
récupéré par les contribuables et c'est une des causes qui
font qu'on paie plus de taxes.
Il y a eu un programme Loginove et, pour avoir droit aux subventions, il
fallait que tu présentes ta facture. J'imagine que ceux qui faisaient
faire des travaux de rénovation dans le cadre de Loginove exigeaient une
facture de l'entrepreneur. À partir de là, on était
réellement obligé de déclarer sur ses impôts le
travail qui avait été fait. Il y a toutes sortes de formules
comme cela que l'on pourrait mettre de l'avant.
Les poursuites pénales. Les poursuites pénales constituent
une source de revenus importante pour l'Office de la construction du
Québec. De plus, le fait que l'OCQ assigne lui-même des procureurs
aux dossiers fait en sorte que ces derniers sont motivés à gagner
la cause s'ils veulent continuer à représenter l'OCQ. Nous ne
pensons pas, malgré le respect que nous avons pour les
procureurs de la couronne, qu'ils feraient mieux ni même aussi
bien que les bureaux de pratique privée que l'OCQ utilise.
Encore là, nous ne comprenons pas la logique gouvernementale et
les travailleurs et employeurs devront encore une fois combler le manque
à gagner que cette disposition du projet de loi entraînera. On l'a
mentionné, il y a une perte à gagner. Hier, certains
mentionnaient 1 000 000 $. Il y a 2 000 000 $ au budget de I'OCQ, mais on sait
qu'il y en a une partie qui sert à payer... Mais, quand même, il y
aurait certainement entre 500 000 $ et 1 000 000 $ qui ne seraient pas
récupérés. Nous demandons que l'article 23 du projet de
loi 119 soit retiré, ainsi que toutes les concordances pouvant y exister
et que le pouvoir d'intenter des poursuites pénales soit laissé
à l'OCQ.
M. Rivard (Jean-Paul): Le contingentement. Là se situe la
pire attaque contre les droits acquis des travailleurs de la construction.
Depuis des années, le présent gouvernement - surtout lorsqu'il
était dans l'Opposition - s'est "peinturé dans le coin" à
force de vouloir se démarquer de la position gouvernementale de
l'époque. Bien que ce soit lui qui ait commencé à mettre
sur pied le présent règlement de placement, les impératifs
électoraux découlant, entre autres, de la présence de
nombreux chômeurs à la recherche d'un emploi dans le bureau de
comté de la plupart des députés des deux partis, ainsi que
les pressions exercées par les entrepreneurs ont fait en sorte que des
promesses ont été faites à ce sujet. C'est
également le même gouvernement qui a mis en vigueur plusieurs
recommandations de la commission Cliche, mais qui semble renier aujourd'hui ses
recommandations sur la sécurité d'emploi et du revenu. Nous la
reproduisons donc en annexe pour votre information.
En effet, il devenait tellement simple de dire que le problème du
manque d'emploi dans l'industrie se réglerait avec la disparition du
règlement de placement, changé depuis pour l'abolition du
certificat de classification. Nous avons expliqué plusieurs centaines de
fois que le problème n'était pas là. Le manque d'emplois
découle d'un tas d'autres facteurs et ce n'est pas en inondant
l'industrie de chômeurs potentiels que des emplois seront
créés. Cette inondation de notre industrie ne peut qu'accentuer
l'appauvrissement collectif de ceux qui y ont trouvé du travail en
moyenne 1000 heures par année en 1985. Sous le noble prétexte de
donner leur chance aux jeunes, on sacrifie une population de travailleurs
actifs qui seront laissés sur le carreau, l'un à cause de son
âge, l'autre à cause d'un handicap causé par un accident du
travail, l'autre parce qu'il refuse des conditions inférieures au
décret, et la liste des raisons s'allonge à l'infini.
Nous pourrions citer des chiffres et des chiffres qui démontrent
que le règlement de placement a permis à des milliers de jeunes
d'entrer dans l'industrie. Nous nous contenterons donc, encore une fois, de
dire qu'en 1985 11 297 nouveaux travailleurs ont fait leur entrée et, de
ce nombre, 7 017 étaient des apprentis, donc des jeunes. A la fin
d'octobre 1986, 14 193 nouveaux travailleurs avaient intégré
l'industrie, dont 11 187 étaient des apprentis; encore là des
jeunes. Quand on prend aussi les certificats de classification spéciale,
cela monte à 18 698 nouveaux travailleurs, dont 13 854 apprentis.
Cependant, il ne faudrait pas se laisser leurrer par ces chiffres. En
1985, 2496 de ces nouveaux travailleurs n'ont pas effectué une seule
heure de travail et 997 n'ont pas effectué 100 heures de travail, pour
un grand total de 3489 travailleurs. Pour 1986, ces chiffres sont
respectivement de 2151 et 769, pour un grand total de 2920 travailleurs. C'est
donc dire que le règlement de placement actuel convient amplement aux
besoins de l'industrie et que le seul problème réside dans le
trop grand nombre de personnes qui ne sont plus ou pas disponibles et qui
traînent encore dans le bassin de main-d'oeuvre. Une épuration
s'impose donc et rapidement. Sur cela, on prend notre part des
responsabilités et je pense que tout le monde, que les deux partis
devraient aussi prendre leur part de responsabilités dans cela, pour ne
pas avoir voulu épurer le bassin, pour avoir voulu reconduire
automatiquement les certificats de classification qui étaient
là.
Si les employeurs respectaient le règlement de placement, s'ils
avisaient l'Office de la construction quand il y a une embauche ou une mise
à pied, le bassin pourrait être un peu plus à l'ordre. Je
pense qu'il faut blâmer tout le monde pour cela et principalement les
entrepreneurs qui ne respectent pas le règlement de placement.
Nous nous opposons donc farouchement aux dispositions transitoires, qui
n'ont de transitoire que le nom, notamment le deuxième paragraphe de
l'article 32 et les articles 33, 35 et 37. On ne peut parler des mesures
transitoires sans faire ici un bref rappel concernant les trois tables de
travail qui ont été mises sur pied par le ministre du Travail en
mars 1986. Ces trois tables avaient pour but de faire des recommandations au
ministre concernant la formation et la qualification professionnelles en regard
du règlement de placement. Ces tables de travail ont travaillé de
façon intensive pour soumettre au ministre des recommandations qui
répondraient à la réalité de l'industrie.
Le ministre, sur demande spécifique de notre président, M.
Jean Lavallée, nous avait
confirmé que les recommandations de ces tables ne resteraient pas
sur une tablette et qu'elles serviraient de guide pour la rédaction du
projet de loi. On cherche encore cela dans le projet de loi. Je pense que la
façon de l'exprimer, c'est peut-être que la plume du ministre ne
suit pas sa langue. Le ministre avait l'intention non pas d'imposer sa
volonté gouvernementale, mais de respecter la volonté des
parties. Consultations, mon oeil!
La volonté des parties est simple et ne cadre sûrement pas
avec les buts visés par le gouvernement. Les parties se sont entendues
pour que la formation et la qualification professionnelles leur soient remises
entre les mains. De plus, tous se sont entendus pour que les nouveaux
mécanismes de formation et de qualification soient adaptés
à l'industrie et que ces mécanismes prévoient un
contingentement de la main-d'oeuvre.
Or, le deuxième paragraphe de l'article 32, ainsi que l'article
33 ouvrent la porte à tous les travailleurs qualifiés, ainsi
qu'à tous les jeunes qui aspirent à un apprentissage. Le
gouvernement ouvre l'industrie sans aucun contrôle quantitatif et, ce qui
est à notre avis aussi important, sans aucun contrôle qualitatif.
Ces mesures transitoires sont à l'encontre des consensus qui se sont
dégagés aux tables de travail des qualifiés et des
apprentis.
En ce qui concerne les manoeuvres, les mesures transitoires auront des
conséquences catastrophiques. L'article 35 du projet de loi permet
à n'importe quel travailleur d'obtenir un certificat d'occupation.
L'obligation de détenir une attestation d'avoir suivi un cours de
sécurité et la garantie de travail de 500 heures ne sont que des
conditions minimales -que toute personne peut rencontrer.
Devant l'absence d'obligation pour l'employeur de payer les 500 heures
ainsi garanties, toute personne pourrait facilement obtenir une telle garantie.
De plus, même si cette garantie était respectée, la
possibilité qui s'offre aux employeurs d'ignorer les travailleurs en
disponibifité et d'en recruter des nouveaux constitue à nos yeux
une aberration qu'on ne peut tolérer.
La table de travail des non-qualifiés a soumis des
recommandations unanimes au gouvernement et nous, nous n'avons pas
changé d'idée. Lorsqu'on parle d'unanimité, il semble que
cela doive refléter l'intention des parties tant patronales que
syndicales. Parmi les 25 consensus qui font l'objet du rapport, nous devons
vous rappeler le consensus premier qui se lit comme suit: "Maintien d'un
contingentement pour les non-qualifiés dans l'industrie de la
construction." Les employeurs ont pirouetté, nous ne pirouettons
pas.
L'article 35 va donc à l'encontre des recommandations de cette
table de travail.
Pour une fois que les syndicats et les patrons s'entendent, et ce sans
trop d'interventions, pourquoi ne pas respecter leur volonté?
Nous demandons que les dispositions transitoires s'appliquent
uniquemement à ceux qui détiennent une carte de classification.
En ce qui concerne les nouveaux critères d'émission du certificat
de compétence et d'apprentissage, ces critères devront être
déterminés par le comité de formation professionnelle. En
ce qui concerne les non-qualifiés, nous demandons que les
critères d'émission du certificat d'occupation soient ceux qui se
sont dégagés à la table de travail des
non-qualifiés et donc prioritairement le maintien d'un contingentement
afin de s'assurer d'un contrôle quantitatif et qualitatif.
Également, il faut s'occuper de la formation de ces manoeuvres, de ces
non-qualifiés par le biais de comités dans toutes les structures
réqionales afin de s'assurer que ceux qui vont entrer dans l'industrie
vont avoir une formation de base.
Le Président (M- Charbonneau): Le problème, c'est
qu'on vous a déjà accordé quelques minutes additionnelles
pour présenter le mémoire.
M. Lavallée: Nous allons conclure, M. le
président.
Le Président (M. Charbonneau): On pourrait tout
simplement conclure, quitte à ce qu'ensuite...
M. Lavallée: C'étaient nos remarques d'ordre
général. Pour conclure, nous aimerions réitérer
notre détermination de voir des choses changer dans notre industrie et
nous sommes disposés à y participer activement. Notre
mémoire vous donne toutes les indications nécessaires à
une bonne compréhension de notre position. Il serait malheureux que le
gouvernement s'entête à vouloir adopter ce projet de loi sans
tenir compte de la position de la majorité syndicale.
Je veux vous faire remarquer que nous avons eu une "manif" aujourd'hui.
Il y avait des gens de tout le Québec. Entre 8000 et 10 000 personnes
étaient ici, devant le parlement. Ce sont des gens inquiets. Ces gens
sont venus ici non pas simplement pour nos beaux yeux. Les travailleurs de la
construction sont inquiets. Nous avons soumis des propositions dans notre
mémoire et je pense qu'elles sont raisonnables. Nous vous demandons d'en
tenir compte pour maintenir le bon climat qui existe présentement dans
l'industrie de la construction. Nous espérons avoir pu jeter un peu plus
de lumière sur le dossier et nous vous remercions de votre
attention.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Lavallée.
M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, dans un
premier temps, je peux peut-être mettre à jour mon courrier. Le 17
novembre dernier, M. Lavallée m'avait adressé une lettre
importante concernant une question très pertinente. Je demanderais
à quelqu'un de vous livrer la réponse - ce n'est pas le
président du Conseil du trésor qui m'impose d'économiser
le timbre, je vous l'indique - pour que vous l'ayez le plus rapidement
possible. Une opinion juridique du ministère du Travail accompagne ma
réponse.
Vous soulignez qu'actuellement des travailleurs manifestent à
Québec. Au début des travaux de cette commission, j'avais
indiqué très clairement que je poursuivais deux objectifs en
invitant les parties les plus impliquées dans le domaine de la
construction à une dernière consultation sur le projet de loi
119. Le premier objectif était d'écouter les revendications - pas
de les entendre, mais de les écouter - car, sur le plan des
modalités, il était possible de bonifier ledit projet de loi.
Nous vous avons écouté, nous écoutons également les
autres et nous continuerons de vous écouter. Le deuxième objectif
était de s'assurer que les travailleurs qui sont inquiets aient une
information adéquate sur le projet de loi parce que c'est
inquiétant. En tout cas, je serais inquiet si j'étais un
travailleur de la construction. Je me fiais au contenu des textes que vous avez
imprimés avant le dépôt du projet de loi, à partir
d'un document de travail qui a "coulé". Ce n'est pas le ministère
ou le ministre qui l'a fait "couler". C'est peut-être le
ministère, mais, en tout cas, ce n'est pas le ministre. Moi aussi, je
serais inquiet.
Si je prends le document que vous avez publié, strictement sur
les chiffres... Je ne vous en tiens pas rigueur, je veux vous le dire, parce
que moi aussi, comme ministre, j'ai eu de la difficulté à obtenir
les vrais chiffres du nombre de travailleurs qui ont des permis de travail et
du nombre de travailleurs qui ont des certificats de qualification dans
l'industrie de la construction. Je ne vous tiens pas rigueur des chiffres que
vous avez publiés dans votre document, mais il y a de quoi
inquiéter un travailleur. Sauf que les derniers chiffres que j'ai
obtenus, signés par la plus haute direction de l'OCQ et par la plus
haute direction du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu ont des variantes très importantes avec
les chiffres que vous avez publiés. Juste pour vous mentionner la
variante totale peut-être, on a une différence, en termes
d'individus - on ne parle pas d'autre chose que des travailleurs de l'industrie
de la construction - de 38 891.
Je peux vous énumérer les plus importants métiers:
quant aux charpentiers menuisiers, vous dites que le nombre de personnes
détentrices d'une qualification selon la FTQ-Construction est de 35 870.
Je ne dis pas que vous avez tort, mais on m'indique, avec signature des plus
hautes autorités, qu'il y en a 30 614. Il y a donc 5256 individus qui
existent ou qui n'existent pas. Ou bien la FTO a raison ou bien l'OCQ et le
MMSR ont raison. Comme ministre, quand je vois une différence comme
celle-là, je suis inquiet. Quand on légifère et que l'on
parle de contingentement, il faut savoir à partir de quels chiffres de
base on légifère. Il faut être certain des chiffres que
l'on met de l'avant.
Dans le même document, vous parlez aux travailleurs de la
construction de leur ancienneté. On sait combien cette terminologie peut
être importante dans le domaine des relations du travail. Vous leur
parlez de perte d'ancienneté. Pas longtemps après, avec la
CSN-Construction, vous faites publier une annonce dans plusieurs journaux
peut-être; en tout cas, j'étais à Québec hier matin,
j'ai acheté Le Journal de Québec, du 4 décembre 1986. Vous
dites: "Dans [a construction, il n'y a ni ancienneté ni droit de rappel
au travail." On compare les deux et on se dit: Lequel est vrai'? Hier matin,
quand on a débuté les audiences avec le président de
l'OCQ, on a eu également des difficultés sur le plan des normes
et je ne vous en tiens pas rigueur, on en a. Vous en avez, la partie patronale
en a, l'OCQ en a et le ministre a des difficultés. (15 h 45)
On parle grosso modo de 120 000 individus qui détiendraient des
permis de travail, des cartes de classification. Nos statistiques - je pense
que tout le monde s'entend là-dessus - des heures
déclarées à l'OCQ, normalement, sont à peu
près de 60 000 travailleurs actifs par mois; dans les très
très bons mois, 80 000, ce qui laisse un bassin de 40 000 qui est
difficile à expliquer, très difficile à expliquer. Quand
on fait preuve d'un peu de laxisme dans nos explications, on en arrive à
20 000 qui sont inexplicables.
Au même moment, il y a des ouvertures de bassin dans à peu
près tous les métiers. On m'indique - j'ai des signatures
à cet effet - que chaque fois qu'on ouvre les bassins, c'est par
pénurie ou par pénurie anticipée de main-d'oeuvre. Je ne
dirai pas la FTQ-Construction, mais, dans chaque cas, une des parties est
consultée et donne son accord. 18 000 cette année et 12 000
l'année passée. Il y a des cas où on ne peut comprendre
pourquoi il y a pénurie. Hier, j'ai donné des chiffres dans le
cas de3 peintres, à Montréal, au mois de mai dernier: 2000
peintres détenteurs d'un permis de travail; il n'y en a pas 1000
à l'ouvrage et 250 se déclarent disponibles. On ouvre le bassin
et
la FTQ dit: Oui, on en manque. Je ne vous blâme pas, c'est
peut-être vrai qu'on en manque sur le terrain, c'est peut-être nos
données, les chiffres sur lesquels on s'est basé qui ne sont pas
bons. On a peut-être besoin, comme vous l'avez souligné dans votre
mémoire, d'une épuration de ces chiffres qui ont circulé
au cours des dernières années.
Je vous dirai que, sur le plan des principes, je n'ai pas trop de
difficulté avec vous autres, à moins que vous n'ayez
changé d'idée. Quant à la formation, vous la
réclamez. En tout cas, je ne pense pas avoir eu de rencontre avec M.
Laberge, M. Lavaliée, M. Rivard ou quelqu'un d'autre de la FTQ où
on ne m'ait pas mentionné l'importance de mettre en place un programme
de formation dans l'industrie de la construction, où on n'ait pas
exprimé le voeu que les ministères de l'Éducation et de la
Main-d'Oeuvre arrêtent de se chicaner, commencent à s'entendre et
surtout se connectent sur ce qui se passe sur les chantiers de construction, de
façon que les cours qui sont donnés à l'école et
les cours qui sont donnés sur le chantier correspondent aux besoins de
formation. Sur le plan de ce principe qui a été adopté
hier par l'Assemblée nationale, je ne pense pas qu'on se fasse une
grosse guerre, en tout cas, à moins d'avoir mal détecté
les messages parfois codés que vous m'envoyez.
Il y a un autre problème sur lequel j'ai un peu plus de
difficulté avec vous autres. Cette difficulté, je vous le dis,
est nouvelle. J'avais l'impression, à la suite des tables que nous
avions mises sur pied, qu'on avait partagé les mêmes orientations.
On peut différer d'opinion sur les modalités, mais pas sur le
plan des principes. J'ai ici les commentaires de la FTQ-Construction et du
Conseil provincial du Québec des métiers de la construction
(international) sur les rapports des tables formées par le comité
sur la formation et la qualification de la main-d'oeuvre et sur l'abolition du
certificat de classification dans l'industrie de la construction. Excusez, je
vais vous donner la date: le 4 juillet 1986. J'ai comme signatures au bas: Le
tout respectueusement soumis: Jean Lavaliée, président,
FTQ-Construction; Jean-Paul Rivard, directeur général,
FTQ-Construction; Maurice Pouliot, président-directeur
général, Conseil provincial du Québec des métiers
de la construction (international).
Page 5, je vais vous lire le paragraphe au complet en tentant de tenir
compte des nuances, sous le titre "Contrôle quantitatif de la
main-d'oeuvre par le biais de la formation et de la qualification. Le ministre
du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu nous
a informés que la compétence sera le principal critère
d'entrée sur le marché de la construction. Nous ne pouvons que
souscrire à cette règle. Il ne faut pas oublier pour autant une
autre règle tout aussi importante, soit celle du contingentement des
nouveaux travailleurs. Notre industrie, comme toutes les autres, a besoin d'un
certain nombre de nouveaux salariés pour assurer sa relève;
cependant, il ne faut pas gonfler indûment le bassin de main-d'oeuvre
disponible. Ne pas préserver ce fondement équivaudrait a accepter
un recul de plusieurs années."
Sur le plan des principes, que la compétence soit te
critère d'accès, on s'entend. Sur la nécessité de
la formation, on s'entend. Hier, vers la fin de l'avant-midi,
l'Assemblée nationale a adopté ces deux principes sur lesquels on
n'a malheureusement pas réussi à s'entendre avec l'Opposition.
Mais la majorité étant ce qu'elle est, la décision de
l'Assemblée nationale est rendue.
On est ici pour discuter des modalités. En ce qui concerne la
formation, je suis prêt à en discuter avec vous et quant à
ce que vous appelez le contingentement par le biais de la compétence, je
suis ouvert à toutes vos suggestions.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, j'avais hâte de
venir ici pour vous donner l'information qui semble vous manquer, que votre
ministère ne vous donne pas. Les informations qui apparaissent dans les
documents de la FTQ proviennent de vous -quand je dis vous, je veux dire le
ministère -et ce n'était pas un job commandé. On les a
prises comme cela, à froid. On n'avait pas demandé de
débâtir aucun document, comme le ministre semble avoir
commandé le job de débâtîr le document de la
FTQ-Construction.
M. Paradis (Brome-Missisquoï): Je...
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, laissez-moi continuer,
s'il vous plaît! Alors, je continue de croire...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai pas commandé de
débâtir des chiffres. Faites attention!
M. Rivard (Jean-Paul): ...M. le ministre, qu'il peut très
bien y avoir un certain nombre de personnes qui ne devraient peut-être
pas apparaître là. Il y a peut-être une épuration
à faire chez vous et que vous n'avez pas faite. Mais ne venez pas nous
blâmer d'avoir ces informations-là. Elles sont là de bonne
foi et on s'est fié aux documents qu'on nous a donnés. Même
l'Office de la construction du Québec peut vous les donner et les
signer, mais il les aura toujours de votre ministère et on ne peut pas
blâmer l'office de vous donner des chiffres erronés. S'ils
deviennent erronés à un moment donné, c'est la faute
du
ministère.
Alors, en ce qui concerne l'ancienneté dont vous avez
parlé...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous laissez entendre qu'ils sont
erronés? Non?
M. Rivard (Jean-Paul): Je ne sais pas si ce sont les vôtres
ou les nôtres qui sont erronés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela va. Vous êtes
sur le même pied que moi.
M. Rivard (Jean-Paul): Alors, il va falloir que quelqu'un
commande encore des chiffres, puis on va toujours changer de chiffres. Alors,
jusqu'à preuve du contraire, c'est un document qui est là. Il a
beau être signé par n'importe qui, il a eu l'information du
ministère. Moi aussi, je l'ai eue du ministère et je ne voulais
débàtir aucun document.
En ce qui concerne l'ancienneté des travailleurs de la
construction, c'est vrai qu'il n'existe pas dans le décret une clause
d'ancienneté. Vous êtes assez grand garçon pour savoir
cela. Vous connaissez peut-être assez le décret pour savoir cela.
On n'a pas négocié une clause d'ancienneté dans le
décret, mais le règlement de placement - et on le dit depuis des
années - constitue la clause d'ancienneté des travailleurs de la
construction, de même que le ratio compagnons-apprentis. Cela constitue
la clause d'ancienneté. C'est la seule ancienneté, la seule
priorité d'emploi que les travailleurs de la construction ont. Donc, on
ne veut pas que vous veniez jouer avec cela. Quand on dit qu'il n'y a pas
d'ancienneté, on dit qu'il n'y a pas d'ancienneté dans le
décret et que le règlement de placement, C'est cela la clause
d'ancienneté des travailleurs. On ne mêle personne. C'est facile
à comprendre.
Quant au bassin...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux vous poser une
question sur la clause d'ancienneté pour qu'on se comprenne bien? Est-ce
qu'un employeur a l'obligation, en vertu du règlement de placement tel
qu'il existe au moment où on se parle, de donner priorité
d'emploi è un travailleur qui a 15 000 heures de faites dans l'industrie
de la construction face à un travailleur qui en a 5000?
M. Rivard (Jean-Paul): Absolument pas. M. Paradis
(Brome-Missisquoi): Merci.
M. Rivard (Jean-Paul): La clause d'ancienneté qui
s'applique, elle s'applique au bassin de main-d'oeuvre. C'est là. On a
un bassin de main-d'oeuvre de formé et on ne veut pas trop jouer avec
cela. L'ancienneté s'applique au bassin de main-d'oeuvre. Tout le monde
sait cela. Arrêtons de tourner en rond. On tourne en rond comme si on
avait un pied cloué.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien non, ce n'est pas de
l'ancienneté, cela.
M. Rivard (Jean-Paul): Le bassin est de 40 000 travailleurs. Dans
les chiffres donnés par l'office, il y a 39 000 travailleurs qui n'ont
pas effectué d'heures de travail en 1986. Ce n'est pas dû au
règlement de placement. Peut-être, jusqu'à un certain
point, oui - on va prendre cela à rebours -parce que les gars qui ont
une carte ne se font plus "poigner" sur le chantier par les inspecteurs et
qu'ils ne se font pas clouer comme travaillant au noir parce qu'ils ont une
carte maintenant. Il y a un tas de cartes que peuvent obtenir des travailleurs
quand les bassins se vident et on trouve que ces gens-là travaillent
encore au noir. Il y a encore un entrepreneur qui ne veut pas respecter le
décret. Quand il y a un bassin qui s'ouvre, c'est à la suite de
consultations et je vois que vous êtes très informé que
cela marche par local. Vous avez l'air "plugé" sur une structure qui a
des locaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que j'ai les
signatures.
M. Rivard (Jean-Paul): C'est la façon dont on
procède. L'Office de la construction du Québec consulte - je
n'attendrai pas votre question - les locaux concernés et, quand il y a
acceptation, quand il n'y a plus personne dans les bureaux de placement
syndicaux et qu'il n'y en a plus à l'Office de la construction du
Québec de disponible, on ouvre le bassin et il vient encore de nouveaux
travailleurs. De ces travailleurs, il y en a une partie qui s'en va encore au
noir nécessairement. C'est comme cela que cela fonctionne, le
règlement de placement, M. le ministre, au cas où vous ne le
sauriez pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aimerais vous croire, M. Rivard,
mais je vais vous arrêter là. Je pensais que vous n'auriez pas
l'audace de prétendre sérieusement que c'est de même que
cela fonctionne.
M. Rivard (Jean-Paul): Je m'adonne à connaître le
domaine, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse, mais je vais prendre
mon cas. Il est connu. Cela fait trois fois que je le cite. Je ne prendrai pas
les autres cas du mois de mai. Je suis encore dans le mois de mai 1986. Je
pouvais demander à l'office de me
fournir les autres mois. Je viens de vous indiquer que, dans le mois de
mai 1986, dans la région de Montréal, il y avait 1984
salariés classifiés. Là-dessus, il y en avait 953
d'actifs. Il y en avait 204 qui se prétendaient disponibles et quelqu'un
ici - je n'ai pas mentionné de nom encore; si vous me le demandez, je
vais vous dire qui - de la FTQ qui a dit: II y a une pénurie
anticipée, on émet 24 nouveaux permis de travail. En fonction de
quels, critères?
M. Rivard (Jean-Paul): Mon cher monsieur, le mois de mai est le
mois où cela commence à reprendre dans la construction. Aux mois
de juin et de juillet, on sait ce qui se passe. S'il reste environ 200
personnes dans un bassin, à cette époque, on peut certainement
anticiper une pénurie. Cela fait partie des droits qui découlent
du règlement de placement, les possibilités d'anticiper une
pénurie de main-d'oeuvre. Vous-même, du gouvernement, dites qu'il
nous manque de la main-d'oeuvre, qu'il faut assurer la relève, qu'il
faut assurer tout cela. Soyez conséquents avec vos paroles.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Rivard, je vous dis que j'ai
1984 travailleurs qui ont des permis de travail et que j'en ai 953 qui sont
actifs. À partir de quels critères - non pas vous parce que je
peux indiquer que ce n'est pas votre nom qui apparaît en bas - un de vos
locaux a-t-il donné son autorisation?
M. Rivard (Jean-Paul): II a donné son autorisation... Il
faudrait peut-être le demander au local. Je n'étais pas là.
Je sais comment cela fonctionne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 99.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, quand le local a
donné son autorisation, c'est parce que tout le monde a donné son
autorisation que les bassins s'ouvrent. Il faut que tout le monde soit d'accord
pour que les bassins s'ouvrent. Une pénurie anticipée, n'essayez
pas de faire du millage avec cela; on est assez grands garçons et on
connaît assez le domaine. Vous nous donnez le droit en vertu de la loi
d'évaluer les besoins de l'industrie de la construction, les besoins de
main-d'oeuvre. Vous nous donnez cela. On peut donner des avis à la
nouvelle commission. Cela fait donc partie des prérogatives que l'on a
de prévoir des pénuries.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Rivard, je ne veux pas vous
arrêter, mais si les pénuries anticipées avaient
été prévues à partir de critères de
compétence ou d'autres critères, en tout cas des critères
connus, on n'aurait peut-être pas la difficulté des 40 000 que
l'on a présentement. Je vous soumets cela pour des fins de
réflexion. Au cours du mois de mai, ce n'est pas le seul, le peintre.
Vous avez donné des autorisations dans le cas des
briqueteurs-maçons, dans le cas des briqueteurs compagnons, dans le cas
des serruriers de bâtiment - juste pour le mois de mai - des carreleurs -
je peux vous dire par qui et par quel local - et encore un autre peintre, un
cimentier applicateur, un serrurier de bâtiment, etc.
On se retrouve avec un bassin faussé. On ne peut pas à la
fois prétendre que les critères en vertu desquels dans le
passé on a ouvert les bassins sont bons et admettre que l'on se retrouve
avec 40 000 individus de trop. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans
le raisonnement et aidez-moi à résoudre ce problème de
logique mathématique.
M. Rivard (Jean-Paul): Alors, je vais vous éclairer, M. le
ministre. Sur 19 700 nouveaux travailleurs qui sont entrés en 1986, il y
en a seulement - on dit "seulement", il y en a peut-être de trop - 2151
qui n'ont pas d'heures enregistrées. Donc, le besoin de main-d'oeuvre
était là. Ces gens ont travaillé. D'accord? Alors, ces
2151 qui n'ont pas travaillé, je dis qu'il y en a une proportion
importante qui va au travail au noir. La personne qui est assise à
côté de mot pourrait vous raconter que, quand les bassins se sont
ouverts, on a fait obtenir des cartes à quinze personnes et, deux
semaines plus tard, elles n'étaient plus sur le chantier parce qu'elles
revendiquaient des salaires. Ce sont les entrepreneurs, à un moment
donné, qui viennent fausser les données. Quand il y a un besoin,
une pénurie anticipée, on est assez grands garçons pour
savoir ce que c'est.
Quand vous parlez de la formation, tout ce que l'on va faire avec la
loi, ce sera donner des avis. Tout, ce que l'on fait depuis des années,
c'est de donner des avis aux CCR-Construction, à la Commission de
formation professionnelle. On donne des avis. On se rencontre, entrepreneurs de
la construction et travailleurs de la construction. On essaie d'évaluer
les besoins de main-d'oeuvre; on donne des avis. La seule et unique
différence que votre projet de loi fait, c'est que l'on va payer la
note, en plus, pour avoir le droit de donner des avis. Ces avis, le
ministère de l'Éducation pourra faire ce qu'il voudra avec parce
qu'en vertu de votre mémoire du 22 octobre toute la formation va
être financée, conçue, programmée par le
ministère de l'Éducation. Qu'est-ce qu'on va faire
là-dedans à part payer et donner des avis'? On est tanné
de donner des avis; on veut que l'on entende notre voix, c'est ce que l'on
veut, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne
veux pas...
M. Rivard: Quand vous parlez de compétence...
M. Paradis (Brome-Missisquoï): M. Rivard, si vous me le
permettez, c'est un point important. Si vous avez raison et que tout ce que
vous faites, c'est donner des avis et payer la facture, je comprends que vous
haussiez le ton. Tout le monde s'est fait leurrer et tout le monde a
été trompé. Ce que j'apprécie, c'est que vous avez
dit: À partir du mémoire du mois de septembre, non pas à
partir du projet de loi. Au moins, vous avez eu l'honnêteté
intellectuelle de reconnaître que ce n'était pas à partir
du projet de loi qui est devant nous aujourd'hui. (16 heures)
Je tiens à vous donner la position que j'ai comme ministre et qui
est dans le projet de loi. En ce qui concerne le ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, non seulement vous
donnez des avis, mais vous participez à toute la phase de
l'élaboration des coûts, et le seul pouvoir que s'est
conservé le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu est d'approuver ce que vous et ies patrons aurez à trouver
comme cours de formation, ce que j'appelle un pouvoir d'homologation.
En ce qui concerne le ministère de l'Éducation, vous avez
un peu plus raison -cela me fait plaisir de vous le dire - vous avez un peu
plus raison, parce que ce sont des avis que vous donnez et le pouvoir
décisionnel appartient encore au ministère de
l'Éducation.
En ce qui concerne le financement, par exemple, le ministère de
l'Éducation finance à 100 % ses cours. Au niveau du MMSR, vous
aurez le fardeau financier parce que vous allez prendre les décisions,
sauf qu'il y a des programmes de subventions en matière de formation que
l'on va vous donner et on va vous rendre admissibles en toute priorité,
parce que pour le gouvernement actuel, si cela fonctionne l'arrimage
Éducation MMSR et industrie, cela veut dire un projet pilote qui risque
d'entraîner des répercussions dans d'autres domaines de
l'activité économique au Québec.
M. Rivard (Jean-Paul); M. le ministre, je me
répète: Si votre plume suit votre langue, on est d'accord avec
cela. On est d'accord que ce soit nous qui décidions dans l'industrie de
la construction et ce n'est pas cela que le projet de loi fait. Le projet de
loi dit que c'est vous qui allez réglementer en totalité toutes
les activités de l'industrie de la construction et que la commission ou
l'office de la construction n'aura qu'à veiller à faire respecter
cette loi et ces règlements qui en découlent et que s'assurer de
la compétence des travailleurs de la construction sera en fonction des
politiques décidées par le gouvernement, des politiques de
main-d'oeuvre décidées par le gouvernement.
Je ne nie pas au gouvernement le droit de faire des politiques de
main-d'oeuvre, M, le ministre, ce n'est pas cela, mais, en ce qui concerne
l'industrie de la construction, avec le gâchis qui existe à
l'heure actuelle, on ne croit pas que le gouvernement, quel qu'il soit, ait
fait ses preuves et on est prêts à reprendre le
bébé. Donnez-le-nous. On est peut-être prêts à
défrayer certains coûts, mais pas tous les coûts, parce que
ta société doit aussi payer pour former sa main-d'oeuvre, comme
elle paie dans tous les secteurs. Ne venez pas nous repasser les coûts,
en plus de nous passer un tas de fonctionnaires du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, on va payer encore la
"shot". Je ne dis pas que ce ne sont pas des gens compétents, mais on
devrait décider qui on va embaucher.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M.
Rivard, concernant les besoins de formation, je vous ai expliqué
la façon dont cela fonctionnait. Je vous dirai que les pouvoirs au
niveau de la commission en ce qui a trait à la formation des nouveaux
travailleurs appartiennent à la'CCQ en ce qui concerne l'estimation et
la priorisation des besoins. Vous savez ce que cela veut dire? Les parties vont
pouvoir décider quel nombre de pupitres s'ouvrent au niveau du
secondaire. Quand vous parlez d'un contingentement par la compétence,
c'est ce que cela veut dire. La définition des programmes et des modules
de formation, la Commission de la construction, à laquelle vont
siéger des partenaires du gouvernement, oui, mais majoritairement des
employeurs et des travailleurs, la planification des programmes et des modules
de formation, le choix des lieux de formation, etc., cela va tout vous
revenir.
Là où j'accepte votre blâme, c'est quand vous dites:
À part la formation, dans les autres domaines, le ministre se garde des
pouvoirs de réglementation importants. Vous n'êtes pas le premier
à me faire cette remarque. Je vous dirai que j'y suis très
sensible, parce que je veux donner le maximum d'autonomie et de place aux
parties concernées et je n'exclus pas à ce niveau la
possibilité d'amendements qui fassent que les pouvoirs d'initiative
partent de la commission, que le ministre ait un rôle d'homologation de
la réglementation, qui aura été décidée par
une commission où les partenaires sont majoritaires, tout en - et
là, je l'ouvre pour discussion avec vous - souhaitant conserver,
à des fins d'intérêt public - je n'exclus pas la
possibilité, à un
moment donné, que les employeurs et les représentants des
travailleurs s'entendent et que le consommateur soit un peu laissé pour
compte, au bout de l'entente; cela se peut -un certain pouvoir d'initiative de
la part du ministre au cas où de telles circonstances arriveraient,
mais, à ce moment-là, il faudrait le justifier. La
réglementation serait ouverte à des modifications pour que cela
parte des parties, pour que cela parte des commissions. Est-ce un défi
que vous êtes prêts à relever?
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, je vais continuer à
relever les points de votre première intervention. Quand vous dites que
la compétence va être le principal critère d'accès
à l'industrie de la construction, nous sommes d'accord avec cela, mais
je pense que vous galvaudez ce mot compétence aux yeux du public, parce
que ce que vous dites dans le projet de loi, c'est que tous ceux qui ont des
cartes de compétence vont avoir une permission ou un certificat pour
travailler dans l'industrie de la construction. On ne va pas leur ôter
leur job, nous autres, dans les industries où ils sont. Ils ont une
liste d'ancienneté, ils ont une liste de rappel et ce sont eux qui ont
priorité d'emploi quand il y a une mise à pied et qu'il y a un
rappel. Quand il entre des nouveaux, il entre des nouveaux. C'est comme cela
que l'on veut faire une utilisation rationnelle de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la construction. On ne veut pas en faire un dépotoir
où on va verser le trop-plein de main-d'oeuvre qui existe dans tous les
autres secteurs, le trop-plein de main-d'oeuvre qui découle d'un manque
d'emploi, et ce n'est pas toujours le gouvernement qui est responsable de cela
parce qu'il y a des investisseurs qui décident eux-mêmes de venir
ici ou de ne pas venir.
Quand vous parlez du critère de compétence on est d'accord
avec cela. C'est de les former pour avoir des gens compétents qui vont
entrer dans l'industrie de la construction et c'est d'être capable de les
former de façon compétente quand ils sont apprentis.
Quand vous parlez des qualifications...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas vous arrêter,
je veux juste souligner que je considère que vous avez répondu
à ma dernière question. Maintenant, je ne veux pas que le reste
de la réponse soit cumulé, parce qu'il y a des règles
parlementaires, sur mon temps, mais vous êtes libre de continuer si le
président le cumule sur le temps de quelqu'un d'autre.
M. Rivard (Jean-Paul): J'ai un autre...
Le Président (M. Charbonneau): Un instant! De deux choses
l'une. Ou on engage une discussion avec des invités et on leur donne la
possibilité de répondre et à un moment donné...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis satisfait de la
réponse.
Le Président (M. Charbonneau): Je comprends mais il
faudrait faire des règles qui soient correctes pour tout le monde. Vous
ne viendrez pas dire que, parce que les gens en avant de nous vont continuer de
parler, maintenant cela ne compte plus sur le temps des ministériels et
que cela va compter sur te temps de l'Opposition.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): II faut s'entendre
maintenant. Si vous leur dites que vous en avez assez, cela va, on va passer
à un autre.
M. Paradis (Brome-Missisquoï): Je dis que je suis satisfait
de la réponse que M. Rivard m'a donnée. Merci.
M. Rivard (Jean-Paul): Je n'ai pas planté le clou assez
profondément.
Une voix: J'en avais un autre à donner moi aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'Opposition peut répondre,
mais quant à moi, ce qui m'intéresse c'est de conserver du temps
- je vous le dis comme tel - pour revenir à M. Lavallée et
à M. Laberge. Ce n'est pas parce que ce que vous me dites n'est pas
intéressant; on a eu un bon échange.
Le Président (M. Charbonneau): Très bien. Alors, M.
Rivard, vous avez entendu comme moi que le ministre considère qu'il en a
assez entendu pour le moment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non.
Une voix: M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): C'est ce que vous
dites.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je dis que ce n'est plus sur mon
temps.
Une voix: M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Ce n'est plus sur votre
temps, donc vous en avez assez entendu sur le temps de la question et de la
réponse qui allait avec et qui est comptabilisé sur le temps
des
ministériels. Dans ce cas-là, je vais passer la parole au
député de Joliette.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le Président, je déplore
seulement le fait que, quand le ministre est tanné de glisser, il serre
le traîneau et on est obligé d'arrêter de glisser nous
aussi.
M. Théorêt: M. le Président, est-ce que je
peux demander la parole pour 30 secondes?
Le Président (M. Charbonneau): Allez-y.
M. Théorêt: M. le Président, je veux
seulement porter à l'attention des représentants de la FTQ que
c'est un domaine qui intéresse la très grande majorité des
parlementaires qui travaillent à la commission aujourd'hui. Le fait que
le ministre vous ait dit qu'il était satisfait de la réponse va
nous permettre à nous également de pouvoir discuter avec vous sur
d'autres sujets. Si vous employez tout ce temps, malheureusement pour nous, on
ne pourra même pas échanger sur un seul sujet.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je veux tout d'abord
vous dire que la préoccupation du ministre depuis hier matin a l'air
d'être la vérification des chiffres. Cela ne semble pas être
d'entendre parler sur le fond des objectifs des articles de loi. Cela me frappe
énormément. D'ailleurs, quand il s'agit d'essayer de se justifier
par rapport à vous, il cite des bouts de phrases mais il ne cite pas
tout.
Je vais lui citer une partie de votre texte qu'il aurait pu citer, tout
au moins au moment où il devait justifier votre point de vue, tout en
lui disant que vous applaudissiez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Question de règlement, M.
le Président. J'affirme que je n'ai pas cité de bouts de phrases,
j'ai cité un paragraphe au complet.
M. Chevrette: Vous avez cité un paragraphe à
moitié. Vous vous êtes arrêté. Je vais citer l'autre
bout que vous n'avez pas cité et je vais citer l'autre paragraphe.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'affirme
de mon siège avoir cité un paragraphe au complet, à la
page 5 du mémoire, le paragraphe d'en haut. Il y a deux paragraphes dans
la page, un complet et l'autre à moitié. Si le
député de Joliette veut faire des affirmations tronquées,
qu'il le fasse à partir de sa parole, de son siège.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, M. le
ministre. Je crois que le député de Joliette indique qu'à
son point de vue il y avait d'autres parties de textes à citer. C'est ce
qu'il va faire, semble-t-il.
M. Chevrette: M. le Président, je me suis
arrêté. Je n'ai même pas dérangé le ministre.
Il a lui-même arrêté la FTQ-Construction et là il va
essayer de m1 arrêter? Si cela ne le dérange pas, il va
me laisser parler.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous dites la
vérité, vous pouvez y aller.
M. Chevrette: La vérité, la vérité!
Arrêtez donc de vous camoufler derrière les jeunes et la
compétence pour présenter une folie pareille. On va s'en parler
de la vérité.
La vérité, c'est que cela a été clair et je
vais le lire, le paragraphe, même s'il ne veut pas que je le lise: II est
impossible de ne retenir que le seul critère de compétence pour
contrôler l'entrée des jeunes travailleurs. Il ne l'a pas dit ce
bout-là, pourtant c'était écrit dans votre texte.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le même paragraphe?
M. Chevrette: Ce n'est pas dans le même paragraphe pour
votre information. Et votre siège, vous allez le perdre si cela
continue. C'est le deuxième paragraphe.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, l'autre.
M. Chevrette: M. le Président: il est impossible de ne
retenir que le seul critère de compétence pour contrôler
l'entrée des jeunes travailleurs. II faut absolument en limiter le
nombre. "Les nouveaux salariés ne devraient être admis qu'à
la condition expresse que l'activité de la construction puisse le
permettre, d'où l'importance d'une planification des travaux de
construction et de leur évaluation. L'industrie doit apprendre à
prévoir ces bassins en ressources humaines si elle ne veut pas redevenir
une jungle. C'est écrit textuellement et c'est signé par Maurice
Pouliot et par Rivard et Lavallée. "Pour ces motifs, il nous est
impossible de souscrire à la règle d'accessibilité
universelle réclamée par toutes les associations patronales. Cela
ne veut pas dire pour autant que nous sommes en désaccord avec le
consensus intervenu à la table des non-qualifiés visant à
maintenir un certain nombre de main-d'oeuvre disponible." Quand on veut faire
un portrait correct, on le fait sur toute la ligne, on n'en fait pas la
moitié pour se justifier.
Je disais donc que le ministre, depuis hier matin, fouille les chiffres.
Il s'interroge
sur les chiffres, II y a un trou béant dans son affaire, quelque
chose qu'il oublie de dire. Il parle de moratoire maintenant, parce qu'il a
senti une certaine résistance, mais il offre le moratoire pour trois ou
quatre mois. Il n'aura même pas dans trois ou quatre mois des
méthodes ou un programme de contingentement clair, il n'aura même
pas un programme de formation clair et entretemps, que fait-il? il rouvre
"bébêtement" et c'est ce qui nous est réclamé
concrètement par les parties syndicales, y compris par Maurice Pouliot
qui, tout en étant pour le projet de loi, est à peu près
contre tout ce qu'il y a dedans. Pour être franc, c'est cela la
vérité. Depuis hier matin qu'on entend celai II faut
arrêter de parler de moratoire et ouvrir les portes. Quand on est
sérieux et qu'on offre un moratoire aux gens, on dit: Temporairement, on
va au moins geler cela. Quand on aura des mesures concrètes, on
l'ouvrira.
Il me semble que ce serait une marque d'intelligence que de se
rapprocher des consensus des parties, surtout quand ils ont été
faits avec les patrons, indépendamment du fait que l'AECQ, à mon
point de vue, ait manqué complètement le bateau dans cette
question. Je pense qu'il faut être correct dans cela. On a réuni
du monde, on les a assis ensemble et on leur a dit de dégager des
consensus. Ils en ont dégagé, des consensus. On a fait fi des
consensus. On dit: Abolition de la carte, oui, abolissons-la. Rentrez tout ce
que vous pouvez rentrer et après cela, on contingentera, fort
probablement par la compétence. On met tout cela sous le couvert de la
compétence et des jeunes. Mon oeil! C'est de...
Il faut faire attention à mes termes, je suis au Parlement...
C'est contraire à la vérité, c'est emplir les gens
carrément que de faire cela de cette façon. Quand un ministre est
sérieux, il dit: Oui, je veux un critère de compétence,
établissez-le et c'est ce qui va s'appliquer après. Ne pas
appliquer une chose qui est contraire aux principes visés et ensuite
retourner aux critères qu'il désire. Cela, à mon point de
vue, c'est le monde à l'envers et c'est typique, malheureusement, de ce
gouvernement qui lance des "ballounes" et qui, après cela, est "pris
avec". Il les dessouffle et les resouffle un peu différemment. Il est
obligé d'amender. On vient d'assister à un projet de loi en
Chambre: 108 articles et après avoir entendu les gens, on était
rendu à 238 articles. Des travaux mal faits qui ne tiennent pas compte
des consensus qui, pourtant, émanent exactement du travail que
lui-même a commandé. C'est lui-même qui a créé
le comité au mois de mars dernier. C'est lui-même qui a
reçu le travail de ce comité et de ces tables de travail au mois
de mai. Ce ne sont pas les mêmes parties qui devaient être
convoquées, par exemple, pour être consultés par la suite
et qui ont élaboré le projet de loi. C'est le ministre avec une
équipe complètement différente, en oubliant
complètement un consensus qu'ils se sont établis. Il y a toujours
des limites à charrier du monde.
M. le Président, je considère que si le ministre veut
être sérieux, s'il veut vraiment mettre en place une structure, il
va décréter un moratoire tant et aussi longtemps que ces
structures de remplacement ne seront pas en place. Cela n'aurait aucun bon sens
"autrement. Ce serait mentir à la population, ce serait de l'hypocrisie
vis-à-vis les clientèles et en particulier des travailleurs. On
sait très bien quel est l'impact à court terme: c'est la
diminution du revenu moyen des travailleurs de la construction. Je m'en
souviens. J'ai vécu un événement que certains regrettent.
Qu'est-ce que c'était le salaire moyen à l'époque?
N'importe qui entrait n'importe quand par n'importe quelle porte. Il y avait
même des portes qui étaient ouvertes au "bunker", ici, avec deux
employés politiques qui se permettaient de faire du placement à
la Baie James, avec l'engagement d'un fonctionnaire politique, un nommé
Bergeron, pour ne pas donner de nom, qui s'occupait du placement à la
Baie James. Je m'en souviens un tantinet et si vous voulez avoir la liste de
ceux qui sont montés au "bunker", je vous l'apporterai. Il y a toujours
des limites pour faire croire aux vrais travailleurs de la construction qu'on
veut garantir leurs jobs. Mon oeil! On veut ouvrir le bassin. Vous allez
accorder un petit moratoire de trois ou quatre mais pour bourrer
complètement les effectifs, récompenser je ne sais qui. Cela n'a
pas de maudit bon sens. C'est mentir à la population et c'est jouer
à l'hypocrisie.
Ceci dit, M. le Président, je voudrais parler de la structure. Je
suis entièrement d'accord - et je vous félicite en passant - de
ne pas vous déclarer pour la loi quand vous êtes contre la
majorité des articles, à peu près. (16 h 15)
Ceci dit, je voudrais vous dire tout d'abord que, en ce qui concerne la
structure, il y a un principe de "no taxation, no représentation" et je
pense que vous avez absolument raison. Cela fait longtemps que l'on veut
revaloriser les parties, cela fait longtemps que l'on dit vouloir que les
parties se prennent en main et soient responsables... surtout que vous allez
payer. Je suis convaincu que, si on appréhende exclusivement les points
de divergence, vous ne vous entendrez jamais. Vous allez vous fier
exclusivement au ministère. Il y a bien assez que, quand le bordel sera
pris le ministre sera obligé de s'en occuper, au moins qu'il vous laisse
donc faire un bout de chemin pour voir si vous êtes capables de vous
entendre ou pas. Je pense que c'est voulu autant par les patrons que par
les
syndicats. Cela dépend, il y a des patrons qui changent
d'idée, selon qu'ils occupent le poste de président ou pas. Mais,
quant aux tables de travail, des consensus ont été
dégagés et je pense qu'on doit respecter ces consensus pour la
plus grande harmonie ou une meilleure harmonie dans l'industrie de la
construction.
Quant au moratoire, j'en ai parlé. Quant au braconnage, je vous
avoue que je ne suis pas trop surpris. Il y a même eu un
communiqué dans un journal à savoir qu'un député
avait engagé, comme par hasard, trois travailleurs: un seul avait une
carte et les deux autres étaient des bénévoles. C'est un
député de la majorité ministérielle. Je ne suis pas
trop surpris qu'il y ait du travail au noir et que ce soit encouragé.
Quand c'est rendu au niveau ministériel de se permettre cela, je trouve
cela drôle, merci!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pardon?
M. Chevrette: Si vous n'avez pas la plainte, je vous l'enverrai
et l'article de journal avec.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous m'enverrez la plainte, oui.
S'il y a quelque chose, dites-le; ne parlez pas à mots couverts comme
cela.
M. Chevrette: Non, non, je l'ai bien dit et cela a
été dans les journaux; il n'y a pas de mots couverts, vous lirez
votre "clipping" de presse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Accuser le monde que vous avez
accusé...
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, M. le Président,
j'insiste. Il y a eu une insinuation...
Le Président (M. Charbonneau): Àl'ordre!
M. Chevrette: Ce n'est pas une insinuation, c'est un article.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre,s'il vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, il y a eu
une insinuation, j'en fais une question de privilège.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, il n'y a
pas de privilège en commission parlemenaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas qui est visé
du côté ministériel.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, vous
connaissez très bien les règles.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a des accusations...
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministrel M. le
ministre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...d'illégalité et
le député va apprendre à soutenir ce qu'il avance.
Le Président (M. Charbonneau): M. te ministre, il n'y a
pas de question de privilège en commission, vous le savez très
bien. Vous êtes un parlementaire aguerri, redoutable même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-il répéter de
son siège qu'il y a de l'illégalité du côté
ministériel?
Le Président (M. Charbonneau): I! n'y pas de question de
privilège, il y a ici des opinions qui peuvent être
contradictoires; il peut même y avoir des débats, sauf que vous
avez un temps de parole qui va vous revenir et vous aurez donc la
possibilité de corriger des opinions ou des accusations ou des points de
vue qui ont été exprimés par le député de
Joliette ou par tout autre député. Cela vaut et pour vous et pour
le député de Joliette et pour n'importe quel membre de la
commission. D'abord, il n'y a pas de question de privilège ici et,
deuxièmement, je crois que l'ensemble du règlement doit
être respecté dans la mesure où on a aussi è
faire... Et je vous rappelle tous et toutes que le mandat de la commission est
de procéder à une consultation. On n'est pas à la
période du débat en deuxième lecture. Messieurs, on n'est
pas à la période du débat sur le principe du projet de
loi, cela a déjà eu lieu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant d'attaquer l'un des
membres...
Le Président (M, Charbonneau): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Théorêt: M. le Président, question,..
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre!
M. Chevrette: Je ne leur en voudrai pas non plus, est-ce
correct?
M. Théorêt: M. le Président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne m'énerve pas du tout.
Quand vous attaquerez un député, vous irez au bout et vous
mettrez votre siège en jeu.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'inviterais tout le monde à revenir au calme d'abord. Je
vous rappelle que le mandat de la commission est de procéder à
des consultations, ce qui veut dire que des gens viennent ici et on les
consulte.
M. Théorêt: M. le Président, seulement une
question de directive.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: Oui, juste une question de directive, M.
le Président. Voulez-vous dire que le règlement fait en sorte que
n'importe quel député qui assiste à cette commission peut
dire n'importe quoi, accuser n'importe qui, sans que la personne accusée
n'ait le privilège de demander des éclaircissements, des
affirmations ou des négations?
Le Président (M. Charbonneau): Le problème, M. le
député, c'est que, contrairement à l'Assemblée
nationale, il n'y a pas de question de privilège ici.
M. Théorêt: Donc, on peut accuser n'importe qui.
Le Président (M. Charbonneau):
L'article 66 s'applique, on y dit: 'Toute violation des droits ou
privilèges de l'Assemblée ou de l'un de ses membres peut
être signalée à l'Assemblée." Donc si,
éventuellement, le ministre considérait que le
député de Joliette a violé certains de ses
privilèges, il faudrait qu'il le signale à l'Assemblée
nationale.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai le droit de me lever pour
défendre les privilèges d'un député de
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Charbonneau): De qui que ce soit, dans la
mesure où il le fait selon les règlements de l'Assemblée
nationale. Vous savez très bien que c'est dans l'autre salle,
c'est-à-dire au salon bleu, que cela doit se rétablir et non pas
ici.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Pour le bénéfice du ministre,
malgré que j'en ai peur au point de trembler, je lui enverrai l'article
de journal. Je ne parle absolument pas à travers mon chapeau, c'est un
article de journal, une plainte écrite en bonne et due forme, un
accusé de réception de l'OCQ à part cela, comme quoi il
donne suite à la plainte et qu'il va s'en dccuper. Je m'excuse. Je ne
parle pas à travers mon chapeau et vous verrez que, dans cela, il y a un
employé certifié et deux bénévoles.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous voulez vous attaquer aux
privilèges d'un député, vous le ferez au salon bleu, M. le
député.
M. Chevrette: Je m'excuse, je cite un exemple.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous voulez vous attaquer aux
privilèges d'un membre de l'Assemblée nationale, de quelque
côté de la Chambre qu'il soit, vous le ferez en gentilhomme; vous
ne le ferez pas de façon sournoise et en insinuant des choses.
M. Chevrette: Je ne fais rien de façon sournoise; je ne
vous imiterai surtout pas, M. le ministre...
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que l'incident
est...?
M. Chevrette: ...en essayant de faire croire quelque chose avec
vos articles de loi.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Joliette, je vous prierais de
poursuivre plutôt le dialogue avec nos invités.
M. Chevrette: Qu'il arrête de m'interrompre. Il a
interrompu les invités tantôt et là...
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Mais, là,
je vous demande, à tous, votre collaboration.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, je vous
interromprai chaque fois que vous attaquerez la réputation d'un membre
de l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Charbonneau): Je vous demande, à
tous, votre collaboration, s'il vous plaîti
M. Chevrette: On vous a connu pendant six ans, vous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous arrêterai.
Le Président (M. Charbonneau): Bon.
Cela va? Merci.
M. le député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, je disais donc, en parlant
de braconnage, que c'est clair que ce projet de loi ne vient corriger en rien,
absolument en rien le travail au noir; il vient l'intensifier. C'est clair et
net. En grossissant le bassin de main-d'oeuvre et en diminuant le revenu moyen
indûment, la résultante est que le travail au noir va être
pire. C'est évident, d'autant plus qu'il n'y a pas de mécanismes
de contrôle, qu'il n'y a pas de pouvoirs additionnels donnés aux
inspecteurs de l'OCQ ou de la future CCQ, comme il n'y a aucun pouvoir de
contrôle, soit par le biais de certaines - comment dirais-je -
municipalités qui émettent des permis de construction. Il n'y a
aucune mesure concrète qui peut empêcher ou diminuer le travail au
noir. On va créer des appétits additionnels,
précisément parce que le revenu moyen des salariés va
baisser; c'est clair.
De plus, je pense que le ministre n'a pas encore compris la notion
d'ancienneté. Le seul type d'ancienneté qui existe dans la
construction, ce n'est pas une ancienneté pour permettre à des
individus d'être engagés ou non, c'est d'être capables de
travailler ou non. Il me semble que c'était bien clair; il me semble que
n'importe qui aurait compris cela. L'employeur n'est pas obligé de
prendre un gars de 40 ans ou un gars de 20 ans. Il peut prendre le gars qu'il
veut, on le sait. Mais, au moins, il y avait une notion qui protégeait
le gagne-pain de la masse qui était à l'intérieur du
bassin de main-d'oeuvre. Là, il n'y a plus aucun critère. Mais je
pense que les initiés ou les habitués de l'industrie de la
construction ont compris qu'il n'y avait aucune hérésie ou aucune
fausseté dans cela, sauf dans la tête du ministre; c'est
clair.
Sur la formation, j'ai quand même une question à poser. En
vertu des articles 85.1, 85.2, 85.3, 85.4, il me semble que pour ce qui est de
la formation qu'on veut mettre sur pied au ministère de la
Main-d'Oeuvre, on peut dire que le ministre laisse une initiative aux parties
mais il se garde le droit de dénoncer un règlement qui ne lui
conviendrait pas. Mais le vrai formateur, celui qui dispense les cours, celui
qui organise les cours, celui qui peut fermer ou ouvrir des options
professionnelles, lui, n'a aucun mot à dire si ce n'est d'émettre
un avis. C'est clair, il n'y a aucun contrôle et c'est à la
discrétion totale du ministère de l'Éducation. Notre
société n'a malheureusement pas fait le débat de fond sur
les contingentements possibles selon les métiers ou les professions. Je
pense qu'il y a seulement les médecins, au Québec, qui subissent
une forme de contingentement et, encore là, cela prend des
décrets annuels pour ratifier le nombre de places dans les
universités. Mais j'aimerais savoir quand vous dites...
Vous dites que vous voulez avoir la responsabilité de la
formation ou des besoins de formation. Comment verriez-vous cela, vous autres?
À cause de la conjoncture actuelle, !e ministre a dit, hier soir, si
j'ai bien compris, qu'il est allé le plus loin qu'il a été
capable d'aller dans ses pourparlers avec le ministre de l'Éducation.
S'il est allé le plus loin qu'il pouvait aller et que c'est un simple
avis, comment verriez-vous cela?
M. Lavallée: Je pense que notre position a
été claire et que c'est aussi la position de toutes les centrales
qui ont fait des interventions à venir jusqu'à maintenant. C'est
la raison pour laquelle on dit au ministre: Enlevez-vous de nos plates-bandes,
les parties veulent se prendre en main. Les articles 84 et 85, ce sont
simplement des avis; nous sommes comme consultants. Donc, pour nous, la
façon de pouvoir prendre en main la formation professionnelle, c'est
d'en avoir le pouvoir. Je me rappelle qu'en 1973, on avait produit un document
qui s'appelait La Commission de formation professionnelle de l'industrie de la
construction. C'est vrai qu'on a préconisé qu'en autant qu'on ait
le contrôle, on pourrait s'entendre et réussir à
contingenter la main-d'oeuvre. Mais, dans le projet de loi, le ministre se
donne tous les droits de faire ce qu'il veut. On pourrait lire les articles 123
et 124 et définir tous les pouvoirs que le ministre s'est donnés;
changer les ratios, faire tout ce qu'il veut. Donc, tout ça nous
amène à la question du moratoire. C'est la raison pour laquelle
on a demandé un moratoire d'un an. Je me rappelle, le 12 novembre,
lorsqu'on a eu la rencontre ici à Québec, l'intervention que
j'avais faite auprès du ministre concernant la position de la
FTQ-Construction sur le moratoire d'un an. J'avais félicité le
ministre pour l'effet catalyseur qu'il avait eu de réussir à
réunir les parties en l'espace de deux mois ou deux mois et demi -
février, mars, avril .- pour produire des rapports aux tables des
apprentis, des qualifiés et des non-qualifiés. J'ai dit: M. le
ministre, ça prenait seulement un gars comme vous pour réussir
à faire asseoir tout ce monde-là et produire des rapports que
j'ai ici en main, que vous avez tous, sur lesquels il y a eu plusieurs
consensus. Lors de la rencontre du 27 juin j'avais demandé au ministre
s'il y aurait d'autres consultations faites avec la table des 16. Le ministre
avait dit: Oui, ça fait partie du procès-verbal.
Finalement, on a une demande du ministre de nous rencontrer ici à
Québec le 12 juin pour nous dire qu'un projet de loi serait
déposé dans l'après-midi, qu'on l'aurait en main. C'est le
projet de loi 119 que vous avez ici. Donc, on a dit au ministre:
Écoutezl Ça n'a pas de maudit bon sens, vous n'avez pas
fait de consultationl J'ai dit: Je regrette d'avoir dit que vous aviez un effet
catalyseur parce que maintenant vous nous "bulldozez", vous êtes un
bulldozer. Les parties ont été "bulldozées". On a eu des
gars qui ont travaillé sincèrement aux tables avec les employeurs
qui ont produit des consensus. On nous a dit qu'on allait nous consulter. On ne
nous a jamais consultés après le 24 juin. La seule chose qu'on a
faite, le 12 juin c'est qu'on a dit: Voici le projet de loi, on le
dépose, c'est ça, le projet de loi 119. On a dit au ministre:
Donnez-nous un moratoire d'un an. Si on s'assoyait pendant un an, vous savez
que c'est très complexe de mettre tout ça en branle, probablement
qu'on réussirait à s'entendre et, à partir de là,
on n'aurait pas l'opposition qui se dégage ici présentement de la
part de tous les intervenants qui sont passés.
Pour nous, la formation professionnelle, c'est accessoire dans l'affaire
et c'est important de l'avoir, mais ce n'est pas juste la formation
professionnelle qu'on doit contingenter. On doit avoir des tables de
métiers, des tables de spécialités, des tables
d'occupations qui auront à regarder leurs besoins de main-d'oeuvre.
Même si on avait des amendes, ce n'est pas là qu'on va
réussir à tout régler. Il faut que les parties puissent
s'entendre sur le nombre de travailleurs dont elles ont besoin. On rentre des
jeunes. Vous nous dites qu'il ne rentre pas de jeunes dans la construction. On
vient d'en rentrer 11 000 dernièrement. Le ministre va peut-être
nous dire: Oui, mais ils ne sont pas jeunes, jeunes.
Le problème qu'on vit dans la construction, c'est qu'un jeune de
19 ou 20 ans qui sort d'un cégep va rentrer dans l'industrie. Si c'est
quelqu'un qui a à faire une période d'apprentissage de quatre
ans, étant donné la moyenne de travail de 1000 heures qu'on a, on
s'aperçoit qu'au lieu de prendre quatre ans pour réussir à
devenir compagnon ou qualifié, ça va lui prendre huit ans et neuf
ans. Pourquoi? Parce que les gens ne travaillent pas, ils ne travaillent que
1000 heures par année. Quand la quatrième année arrive,
là, ils gèlent sur le tableau, pour employer notre jargon. Les
entrepreneurs ne veulent pas avoir ceux de quatrième année. Avant
de faire sa quatrième année ça peut prendre trois et
quatre ans. Même avec tout ça, on a une moyenne d'âge chez
les apprentis de 28 ou 29 ans, en tout cas, de moins de 30 ans. Le rapport de
l'OCQ mentionne que 70 % des apprentis ont moins de 30 ans, si je me rappelle
bien.
Cela veut dire que c'est l'industrie de la construction qui a
récupéré le plus de jeunes. On laisse entendre qu'avec la
loi 119 ça va créer des jobs dans l'industrie de la construction.
Ça ne créera pas une maudite "job", ça va simplement
baisser le niveau de revenu des travailleurs.
Je parle du projet de loi actuel. Si le ministre a des amendements qui
bonifient et rendent le système actuel meilleur, soyez assuré
qu'on ne sera pas contre, mais on parle sur ce qu'on a devant nous autres. Je
peux vous dire que, si ce projet de loi était accepté comme tel,
les manoeuvres seraient noyés. Les qualifiés aussi. On dit que
tous ceux qui ont une carte de qualification vont pouvoir entrer dans
l'industrie de la construction. J'écoutais la corporation hier... Oui,
mais, M. le ministre, une lettre vient d'arriver et vous me dites que ce sont
seulement les cartes construction qui vont être appliquées. (16 h
30)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une opinion du contentieux
du ministère du Travail.
M. Lavallée: C'est une opinion du contentieux...
J'espère qu'elle sera maintenue jusqu'au bout. J'ai déjà
vu cela des opinions de contentieux qui, en cours de route, étaient
modifiées. Cela dépend de quel contentieux on parle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ministère du
Travail.
M. Lavallée: Cela couvre un groupe, à peu
près quatre qui sont couverts par cela, mais cela ouvre la porte
à tout le monde. Je vous donnais l'exemple des travailleurs qui ont une
clause d'ancienneté dans les usines. Si ces travailleurs étaient
mis à pied, cela voudrait dire qu'ils pourraient partir de leur usine,
pendant qu'ils sont mis à pied, pour venir travailler sur un chantier de
construction et prendre le travail des vrais travailleurs et des vrais gars de
la construction, et on ne veut pas cela. Le président mentionnait
aujourd'hui qu'on ne veut pas revoir les pompiers dans la construction et on ne
veut pas revoir les policiers. Ils ont leur job, qu'ils fassent leur job et,
nous autres, les professionnels de la construction, on va les faire, les jobs
de la construction.
Quand vous parlez de la qualification, on est d'accord d'avoir un
meilleur système, mais on a quand même des gens qualifiés
au Québec. Ce n'est pas une urgence d'adopter, demain matin, ce projet
à la vapeur. On a les meilleurs travailleurs, nous dit-on, parce qu'on
vient de faire Pechiney et la Baie James. On réussit à construire
en deçà des coûts et avant les échéanciers.
Ce sont les paroles qui ont été prononcées lors de
l'ouverture du chantier de Pechiney. Donc, il n'y a pas urgence d'arriver et de
dire: On chambarde tout. On n'a même pas de réglementation. On ne
sait pas ce qui va se faire en formation professionnelle. Les jeunes qui
sortent des cégeps sont capables et ils entrent dans le
système. On n'a pas de pénurie de main-d'oeuvre. Je peux vous
dire, au moment où on se parle, que, dans le métier que je
représente, l'électricité, il y a tout près de 2000
chômeurs au Québec, dans une situation où il y a beaucoup
de travail. Donc, il ne faut pas gonfler ces bassins-là. C'est la raison
du moratoire d'un an.
Qu'on s'assoie, qu'on regarde cela. Si cela prend six mois, cela prendra
six mois et, si cela prend huit mois, cela prendra huit mois, mais qu'on
s'assoie sérieusement et qu'on regarde tout cela avant d'adopter un
projet de loi à la vapeur. Je suis convaincu, M. le ministre, que, si ce
projet de loi est adopté tel quel, il y aura des troubles sur les
chantiers de construction. Les travailleurs ne l'accepteront pas. Ils ne sont
pas venus ici pour le "fun" aujourd'hui. Ils sont inquiets et ils veulent
réellement que leurs jobs soient protégés. On a des gars
qualifiés et on est fier de représenter les gars de la
construction.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, monsieur...
M. Lavallée: J'oubliais un point, M. le ministre, le
renouvellement de la main-d'oeuvre.
Une voix: Ah oui: je l'ai noté.
M. Lavallée: C'est une proposition qu'on avait faite. On
l'a déjà faite avec le président, on l'a
déjà faite avec Jean-Paul. On est d'accord pour renouveler la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Vous parlez de moyenne
d'âge. Ce n'est pas alarmant, 40 ans, 42 ans; j'ai 46 ans.
J'espère qu'on ne me considère pas comme un petit vieux. Il y en
a plusieurs ici, autour de la table, qui doivent avoir à peu près
cet âge-là. Ce n'est pas alarmant. On a dit: Si on veut absolument
renouveler la main-d'oeuvre et avoir une moyenne d'âge un petit peu plus
basse, peut-être, pourquoi ne prenez-vous pas l'initiative de mettre un
peu d'argent dans le fonds de retraite des gars de la construction? On en a mis
beaucoup, on y croit et on en met. Pourquoi le gouvernement ne dirait-il pas:
Comme formule incitative, un gars de la construction qui prendrait sa retraite
à 55 ans n'aurait pas de pénalité en vertu du
système actuel?
Mettre de l'argent dans le fonds de retraite pour inciter les gens d'un
certain âge - c'est difficile, travailler sur les chantiers de
construction - à prendre une retraite décente, si le gouvernement
y mettait un petit peu d'argent, au lieu de donner 300 $ par mois aux jeunes
assistés sociaux, s'il les mettait dans la construction pour faire
entrer des jeunes qui vont payer des impôts. On l'a mentionné
souvent et c'était accompagné d'une formule de réduction
des heures de travail et de sécurité du revenu. La commission
Cliche en parlait. Le problème dans la construction, c'est qu'il y a
trop de monde pour le peu d'heures de travail et on se bat pour les avoir.
Qu'on mette en place ce système dont on a déjà
parlé: sécurité du revenu, réduction des heures de
travail, incitation à la retraite, et vous allez voir que c'est
l'industrie de la construction qui va produire le plus d'ouvrage pour les
jeunes. D'ailleurs, cela l'est au moment où on se parle. M. le ministre,
les 11 000 ou 12 000 jeunes qu'on a rentrés, quand on a une moyenne
d'âge en bas de 30 ans... En tout cas, les jeunes, vous les appelez ainsi
quand ils ont en bas de 30 ans. Est-ce qu'on s'entend qu'on est jeune en bas de
30 ans?
Le Président (M. Charbonneau): M.
Lavallée, je vais maintenant permettre au ministre d'intervenir,
puisque c'est avec lui de toute façon que, semble-t-il, vous discutez.
Mais, puisque vous le faites sur le temps du député de Joliette,
de l'Opposition, je vais permettre au ministre d'embarquer dans le processus
pour qu'il mange un peu de son temps aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deux questions rapidement, M.
Lavallée. Tout le monde me parle d'un moratoire dans l'industrie de la
construction. Cependant - et là j'accuse puisque cela fait partie du jeu
d'accuser en politique - pendant tout le temps que l'ancien gouvernement
était là il n'a pas osé bouger au sujet de la formation et
aujourd'hui tout le monde s'en ressent un peu plus à chaque
journée qui passe. Pendant tout le temps qu'ils ont été
là ils n'ont rien fait en ce qui a trait à la formation et la
situation s'est envenimée.
Qu'on aime l'admettre ou non, la main-d'oeuvre a vieilli. La
relève n'est pas entrée par la voie de la compétence ni
par la priorité aux jeunes qui sortaient du cours secondaire etc. On a
eu des lacunes graves. Au mois de février dernier, lorsque le temps de
renouveler les permis de travail est venu, j'ai eu de la part de tout le monde
- je vous le dis et je pense que tout le monde l'a admis - des pressions pour
redélivrer toutes les cartes, à tout le monde, quelle que soit la
situation. Cela s'appelle le renouvellement automatique. C'est ce qui s'est
fait d'ailleurs, sauf en 1982, dans l'industrie de la construction et c'est ce
qui nous occasionne des problèmes d'évaluation de bassin
aujourd'hui.
On parle toujours de remettre à plus tard. Au mois de
février on m'a dit de remettre cela au mois de janvier. Au mois
de janvier on va me dire de remettre cela au mois de janvier de
l'année prochaine. J'étudie les statistiques. Chaque fois qu'il y
a eu des modifications importantes dans le règlement de placement ou
dans les critères d'accès, les gens de métier, sur le plan
quantitatif, n'ont à peu près pas été
affectés. Les apprentis, sur le plan quantitatif, n'ont à peu
près pas été affectés. Mais les manoeuvres, sur le
plan quantitatif, eux, ont été affectés très
sérieusement chaque fois que le règlement a été
modifié. Si vous voulez les chiffres pour chaque fois qu'il y a eu un
changement de réglementation, il me fera plaisir de vous les
communiquer.
Donc, je tente de m'appliquer le plus sérieusement possible
à ce changement-ci qu'on propose. Et le changement n'est pas important,
le règlement de placement est maintenu. Il n'y a pas de changement dans
les conditions de travail des travailleurs, dans le décret, dans les
fonds de retraite, dans les avantages sociaux. Il n'y a pas de changement. Le
seul changement qu'il y a c'est l'accès d'après la
compétence.
Et j'ai un problème avec la compétence. Hier, le
président-directeur général du Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction a comparu. Il s'appelle
Maurice Pouliot. Il m'a dit: J'ai un certificat de qualification comme plombier
mais ne me demande pas d'aller travailler demain, je ne suis pas capable. Cela
fait 20 ans que je n'ai pas travaillé. J'ai devant moi un certificat de
qualification. Je ne le fais pas méchamment parce que c'est vous qui me
l'avez envoyé, M. Lavallée. Électricien: Jean
Lavallée. On appelle cela un certificat de compétence.
Ma question est: si, demain matin, j'envoie un certificat de
compétence à Jean Lavallée, a-t-il besoin de recyclage ou
s'il peut aller travailler demain matin? Vous pourriez peut-être
m'adresser la même question comme avocat, M. Lavallée. Je veux que
cela soit clair. Et M. Chevrette, excusez, le député de Joliette
dit comme professeur...
M. Lavallée: Je pense, M. le ministre, qu'on va
arrêter de parler des chiffres. Comme vous le dites, on a certains
chiffres. On ne commencera pas nécessairement à détailler
si on en a 2000 de moins ou 2000 de plus. Votre question revient à toute
la question des bassins. On a eu des périodes de crise et Jean-Paul l'a
dit et on l'a toujours dit. Â un moment donné arrivait un
renouvellement et on ne voulait pas trop pénaliser par rapport à
la situation de chômage. On a essayé des formules comme dire pour
une place où il y a 15 % de chômage: est-ce qu'on pourrait
quantifier les heures? Finalement, il n'y a pas eu d'entente et on renouvelait
les certificats.
Vous parliez tout à l'heure de la question des bassins. Le local
99, ce sont les peintres. Quand vous dites le 99, je sais ce que cela veut
dire. Ce n'est pas nous qui faisons la pression pour ouvrir les bassins. Ce
sont les employeurs et l'office aurait dû le dire lorsqu'il a fait sa
présentation. Les employeurs se lamentent qu'ils n'ont pas de
main-d'oeuvre. Vous avez parlé du mois de mai, du mois de juin. Bon, ce
sont les périodes les plus actives de l'année. Donc, il est
arrivé qu'il y avait des manques. Il y en' a qui sont dans le
décor qui n'ont pas décidé d'aller travailler sur les
chantiers de construction. Ils apparaissent parmi les "120 000" - entre
guillemets -ou 122 000 travailleurs.
Ce n'est pas nous qui faisons la pression. Quand l'OCQ nous appelle et
que le local en question est vide, qu'il n'y a pas de chômeurs et que
l'OCQ en a peut-être mais pense que dans tant de temps il va y avoir un
manque de main-d'oeuvre, alors il n'appelle pas seulement la FTQ; il appelle
les autres centrales syndicales et quand il a l'accord de tout le monde,
à la suite des pressions des entrepreneurs et je ne suis pas prêt
a les blâmer et à dire que c'est faux, qu'il y a un manque de
main-d'oeuvre, on donne notre accord. Il ne faudrait pas nous blâmer pour
cela.
Donc, c'est effectivement le cas et on a donné notre accord.
Peut-être que nous aurions dû être bien sévères
et dire: Non, il n'en est pas question et se placer la tête dans le sable
et dire: II n'y en a pas de manque de main-d'oeuvre. Dans deux mois, il va y en
avoir de trop, au mois d'octobre et au mois de novembre. Pourquoi? Parce que la
construction a tendance à se faire du mois de mai jusqu'au mois
d'octobre. Quand on a eu Corvée-habitation, parce que dans
Corvée-habitation, les critères exigeaient que le solage soit
fait avant le 31 décembre, alors, cela marchait. Les constructeurs
travaillaient durant l'hiver et cela fonctionnait. Je pense que lorsqu'on parle
de planification des travaux, il faudrait étudier tout cela. C'est tout
un système. On a les idées. Je pense que du côté des
employeurs, il y a des idées et les autres centrales aussi. Mais ces
idées n'apparaissent pas dans le projet de loi qui est devant nous.
C'est de tout cela qu'on a besoin pour mettre le système en place. Le
règlement de placement est maintenu. Oui, il est maintenu. Bon, on
serait malhonnête de dire qu'il n'est pas maintenu. Par exemple, on voit
la position de certaines associations qui voudraient ne plus avoir de
règlement de placement. II faut faire sauter cela. Prendre n'importe
qui. On voit le rapport Scowen, aussi d'un de vos collègues, qui le dit
très clairement et aussi de désyndiquer le domaine domiciliaire.
En tout cas, cela s'en vient. Il est là, le règlement de
placement. Pour combien de temps?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je répondrai tantôt,
je vais céder mon droit de parole.
Le Président (M. Charbonneau): C'est un problème de
temps, semble-t-il, ici. Alors, Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: Merci, M. le Président. À la page 22 de
votre mémoire, vous dites que le règlement de placement actuel
satisfait les besoins de l'industrie, mais vous signalez qu'il y a un seul
problème, celui des personnes qui ne sont plus ou pas disponibles dans
le bassin de la main-d'oeuvre. Vous dites qu'une épuration s'impose.
J'aimerais que vous puissiez dire aux membres de la commission comment vous de
la FTQ, vous voyez de quelle façon on pourrait s'y prendre pour faire
cette épuration qui semble nécessaire. J'ai l'impression que tous
les mémoires qui ont été présentés en ont
parlé.
M. Rivard (Jean-Paul): Voici. Il existe à l'heure actuelle
et cela vient de loin, c'est-à-dire du rapport Gold dans les
années soixante-dix et de la commission Cliche où l'on devait se
baser sur un critère qu'on pouvait facilement vérifier, soit le
nombre d'heures de travail effectuées dans une période de
référence donnée. Je crois qu'on devrait garder ce
critère encore. Il y a 38 000 personnes qui n'ont pas travaillé
supposément en 1986, en tout cas qui n'ont pas enregistré
d'heures en 1986. Je crois qu'ils devraient tous partir et maintenant on va les
voir réappliquer, ceux qui travaillent au noir, pour essayer d'avoir
leur carte à nouveau à un moment donné, pour être
légalisés sur un chantier de construction. Alors, je pense qu'il
faut garder ce critère d'heures. Si on ne le garde pas, on pourrait
peut-être examiner d'autres critères, mais que ce soit les parties
dans l'industrie de la construction qui le décident, non pas toujours en
fonction des politiques du ministre.
Je pense que j'ai répondu à votre question, mais je vais
aller un peu plus loin. Quand le ministre dit qu'il nous donne à nouveau
la formation professionnelle, etc., c'est faux. Il nous donne la chance de
donner des avis, mais ce qui concerne la sanction des qualifications et de la
compétence demeure totalement dans les mains du ministère de
l'Éducation. On en a assez de cela. Prenons par exemple les examens. Il
y a un taux d'échecs épouvantable aux examens et pourquoi? C'est
parce que les examens ne sont pas conformes au vécu quotidien du
chantier de construction. Ils ne suivent pas les changements technologiques, la
mécanisation, la préfabrication et tout ce qui se passe dans
l'industrie de la construction à l'heure actuelle.
Pour vous donner un exemple. Il y a encore des endroits où on
enseigne à des étudiants mécaniciens à travailler
sur des moteurs avec ce qu'on appelle des "pointes" dans un distributeur. Plus
personne n'a cela, à part les Russes qui ont des Lada et ils en ont
encore. Alors, il faut vraiment que la formation professionnelle et la
qualification viennent dans nos mains pour que nous soyons capables de la
faire. M. Lemire disait que les petits entrepreneurs ont des problèmes
avec le travail au noir. Ce n'est ,pas vrai. Les petits entrepreneurs sont le
problème du travail au noir. Ce sont eux.
Quant à l'Office de la construction, on ne veut pas qu'il
devienne la bebelle du ministre, À l'heure actuelle, on a un
président qui a été choisi par les parties. C'est une
expérience heureuse, depuis 1982, qu'on veut continuer. On ne veut pas
que le président soit une créature du ministre. Quand j'ai
essayé d'avoir des informations et des statistiques à l'Office de
la construction, il y a eu une panique épouvantable, parce qu'ils
avaient donné des chiffres au ministre et ils ne voulaient pas me les
donner à moi, qui suis quand même le représentant de ceux
qui paient la facture a l'Office de la construction. L'Office de la
construction va devenir une bebelle du ministère ou du ministre. On n'en
veut pas de cela. On veut choisir notre président. On le paie. (16 h
45)
Mme Juneau: Je m'excuse, si vous me le permettez, j'ai d'autres
questions à poser.
M. Rivard (Jean-Paul): Je m'excuse d'avoir utilisé de
votre temps. Le ministre ne veut pas que j'"use" le sien.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Mme Juneau: Je ne veux pas vous arrêter, je veux juste vous
donner la chance de répondre è d'autres questions*
Vous avez souligné le problème de la
désuétude des outillages dans les cours de formation pour nos
jeunes. Il est exact que, dans les écoles, le matériel
utilisé est dépassé. En fait, on n'est plus en mesure
d'entrer sur le marché du travail de la façon dont vous le dites.
Je pense que nous sommes très conscients de cela. Vous avez
répondu à ma question. Je pense que c'est vrai que l'on doit
comptabiliser le nombre d'heures que la personne a à passer sur un
chantier pour dire si elle est qualifiée pour avoir à nouveau une
carte.
J'ai une autre question. À la page 23 de votre mémoire,
vous avez parlé aussi de l'absence de l'obligation pour l'employeur de
payer s'il procure éventuellement une possibilité de 500 heures
à un jeune ou à une personne pour aller dans l'Industrie de la
construction, que ce n'est qu'un papier et qu'il n'a pas à mettre de
l'argent au bout. En tant que représentant de la FTQ, pourriez-vous nous
expliquer de quelle façon
ou de quel montant ou comment s'y prendre? Premièrement, est-ce
que vous êtes d'accord pour qu'il y ait des amendes pour des personnes
qui signent sans y penser?
Le Président (M. Charbonneau): Le plus concisément
possible.
M. Rivard (Jean-Paul): Vous nous parlez des manoeuvres. Vous nous
dites: Est-ce que ce serait l'amende qui va régler le problème?
L'amende ferait partie, pour empêcher... Il faut que cela aille plus
loin. Il faut que tout le système de formation professionnelle soit mis
en place et il faut que la table des manoeuvres décide si oui ou non -
la table des manoeuvres, je parle du comité paritaire - elle a besoin de
manoeuvres dans l'industrie de la construction. Si on ne peut pas faire cela...
Supposons qu'il y aurait une amende de 5000 $ - je garroche un chiffre - si
l'entrepreneur ne respecte pas les 500 heures. L'entrepreneur sait fort bien
qu'il y a de l'ouvrage à faire pour 500 heures. Il va engager un gars,
comme cela, avec une garantie de 500 heures. Il va le faire travailler et quand
il aura fait ses 500 heures, il n'en aura plus besoin et il retombe dans le
système. Cela pourrait se faire par 2000, 3000, 4000, 5000 employeurs
qui pourraient faire entrer 4000, 5000 manoeuvres. Ils ont donné une
garantie d'emploi de 500 heures. Les manoeuvres ont travaillé pendant
500 heures. Il ne faut pas uniquement un critère d'amende. Il faut que
ce soit accompagné aussi d'une consultation à la table des
manoeuvres qui, avec les employeurs, décidera si elle a besoin de
manoeuvres dans l'industrie de la construction. Tout cela est relié
à la formation.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va?
Mme Juneau: Je vous remercie. Étant donné qu'il
nous reste seulement trois minutes, je vais donner la chance à mon
collègue, M. Chevrette...
Le Président (M. Charbonneau): J'aurais une question
seulement. Contrairement à l'habitude, je ne la poserai pas à nos
invités, je vais la poser au ministre. Ma question est la suivante. On a
beaucoup parlé de formation professionnelle. Il y a eu plusieurs
mémoires qui, depuis deux jours, nous ont parlé de l'importance
de cette question, d'une part. D'autre part, le ministre a invoqué
à plusieurs reprises des ententes ou de nouvelles relations avec son
collègue de l'Éducation. Je voudrais lui demander s'il serait
disposé, avant d'entreprendre l'étude ou à l'occasion de
l'étude détaillée, mais je pense qu'il serait plus utile
de le faire - prendre une heure ou une heure et demie -avant l'étude
détaillée du projet de loi, à demander à son
collègue de l'Éducation de venir à cette commission pour
discuter avec les membres de la commission, à la suite des discussions
que l'on aura eues depuis deux jours avec les différentes parties dans
cette industrie et les gens qui nous ont fait des représentations
à l'égard du problème de la formation professionnelle? Je
pense qu'il serait de mise que les membres de la commission, avant de s'engager
plus à fond, puissent au moins avoir l'occasion de discuter quelques
instants avec le ministre de l'Éducation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, quand on parle
d'estimation et de priorisation des besoins, cela me semble capital pour
l'industrie de la construction. Qu'il y ait une estimation - vous en avez
parlé - de la planification de chantier et que l'on prévoit ce
dont on aura besoin autant que c'est prévisible, avec une marge d'erreur
et peut-être même en prévoyant un peu plus pour être
sûr de ne pas en manquer, là-dessus, je pense que l'on n'a pas de
critiques à vous adresser. Quand on parle du travail relatif à la
définition des programmes et aux modules de formation, les partenaires
sont les mieux placés pour le faire. En tout cas, les systèmes de
l'Éducation et de la Main-d'Oeuvre ont eu leur chance et ils l'ont
manquée comme il faut dans les dix dernières années.
Planification des programmes et modules de formation, choix des lieux de
formation: je pense que les ministres concernés devraient se conserver
un pouvoir d'homologation. Plus les parties seront impliquées, plus la
formation répondra aux besoins du marché. Au MMSR -
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
- on s'est conservé un pouvoir d'homologation pour protéger
l'intérêt publie. C'est certain que si le monde de
l'éducation faisait cet autre pas - il en a un de fait - je pense que
cela apporterait aux parties concernées des garanties additionnelles. Je
ne suis pas ministre titulaire de l'éducation, mais je sais qu'il y a
dans l'appareil gouvernemental - et non pas au niveau du ministre, je tiens
à vous le dire - des réserves très grandes. Et je n'en
connais pas les motifs, il serait peut-être utile de les connaître.
Je ne vous donnerai pas une réponse tout de suite, mais au cours de la
fin de semaine, je vais y songer très sérieusement. Cela ne
pourra pas être au début parce qu'on commence l'étude
article par article lundi matin, mais en cours de route, il pourrait être
très important pour le déroulement de nos travaux que l'on
demande peut-être au ministre et même au sous-ministre de
l'Éducation de venir nous expliquer pourquoi ils ne veulent pas avoir
seulement un pouvoir d'homologation, qu'ils
veulent conserver un pouvoir de décision et de ne laisser aux
parties qu'un pouvoir de consultation. Je suis ouvert à cela.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Je n'ai pas entendu la voix du chef de la FTQ cet
après-midi. On a manqué sans doute quelque chose. Il ne me reste
pas beaucoup de temps mais je vais vous le laisser. Vous avez vécu,
depuis 25 ans, M. Laberge, passablement de problèmes dans la
construction et vous avez vu l'évolution à partir de 1968 en
particulier. Quels sont les effets appréhendés,
concrètement, selon vous, de la loi 119?
M. Laberge (Louis): M. le Président, il y a trois points
en particulier: Tout d'abord, le ministre semblait...
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. Laberge, on
conspire pour vous donner un peu plus de temps.
Une voix: Ha! Ha! Ha!
M. Laberge: Le ministre semblait avoir été
sensibilisé à cette question. Avec ce que le projet de loi 119
propose, le gouvernement deviendrait juge et partie et cela n'a aucun sens. En
ayant quatre représentants à la Commission de la construction du
Québec, ils vont participer aux décisions et quand cela va
accrocher quelque part, c'est le gouvernement qui doit trancher. Sur cela, je
pense que tout le monde est d'accord: à un moment donné, le
gouvernement doit trancher. Mais vous ne pouvez pas être juge et partie.
C'est un peu comme un joueur de hockey qui serait arbitre. Il me semble que
cela devrait vous sauter aux yeux, ceux qui ont une formation juridique.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Laberge: L'autre affaire, c'est qu'il faut que les
travailleurs de la construction soient convaincus que ce qui a
été rapporté -peut-être de façon
erronnée - un peu partout dans les médias d'information, soit
qu'il faut sortir le bonhomme pour faire une place au fils... il ne faut pas
que cela se passe parce qu'il y a des gars qui vont venir sortir les bonshommes
d'ici pour faire de la place à personne. Et on ne voudrait pas cela.
Les travailleurs de la construction sont très inquiets. Je n'ai
jamais senti cela bouillonner comme je le sens présentement. Ils ne
veulent pas s'opposer à tout changement parce que c'est un changement.
Absolument pas! Que l'on fasse de la place dans l'industrie de la construction
pour des jeunes, bien sûr! Mais il faut que les travailleurs de la
construction aient d'abord la garantie qu'ils ne seront pas tous dehors demain
parce qu'on veut rentrer des jeunes. On n'accorde pas encore une confiance
aveugle aux entrepreneurs de la construction. J'écoutais le ministre
l'autre jour, lors de la période de questions à
l'Assemblée nationale, parler de chiffres. Il disait: Je ne sais pas ce
que l'Opposition veut dire: 4-4-4; je ne vois pas comment le gouvernement a une
majorité. Je vous ai fait la remarque dans votre bureau: Quatre
employeurs et quatre représentants du gouvernement, cela fait quasiment
huit. Et quatre travailleurs... Mais, de toute façon, je pense que pour
l'affaire de juge et partie, vous êtes sensibilisé plus là
que autrement.
La troisième affaire, c'est qu'il faut absolument que le
comité paritaire - non pas tripartite mais paritaire: employeurs et
travailleurs - décide des besoins de main-d'oeuvre et décide
d'augmenter ou de diminuer les bassins. Enfin, il faut que cela soit mis en
place afin de pouvoir dire aux jeunes: Vous n'avez plus l'odieux des heures
travaillées. C'est facile de dire que cela prend 1000 heures pour
travailler, ou quelque chose comme cela, mais il n'y a pas un jeune qui sort du
cégep avec 1000 heures travaillées.
Évidemment, cela semblait odieux, sauf que ce n'est pas comme
cela que cela fonctionnait tout à fait. De toute façon, on est
d'accord que, s'il y a de la place, elle soit faite aux jeunes, selon les
besoins de l'industrie. En d'autres mots, et sur cela M. le ministre, je
n'insisterai jamais assez, les travailleurs de la construction sont très
inquiets. J'ai une appellation un peu familière pour ces gars-là,
je les appelle mes "boucaillous". Quand mes "boucaillous" sont inquiets, cela
m'inquiète, parée que, quand ils sont inquiets, ils ne
réagissent pas tout à fait comme d'autres. Je voudrais qu'ils
continuent de réagir calmement. Je voudrais qu'ils continuent de
travailler paisiblement. Vous savez, dans les gros chantiers au Québec
depuis quelques années, on a toujours réussi à construire
en deçà des coûts et avant les échéanciers.
Je voudrais que cela continue. Pour que cela continue, il ne faut pas que ces
gens-là soient inquiets. Encore une fois, si je m'inquiète quand
ils sont inquiets, vous devriez vous inquiéter vous aussi.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si nous n'étions pas
inquiets de la situation actuelle, il n'y aurait pas de projet de loi. Si nous
étions satisfaits qu'il n'y a pas de vieillissement dans l'industrie de
la construction et qu'il faut prévoir pour l'avenir, si nous
étions satisfaits comme gouvernement que les jeunes qui sortent de
l'école peuvent y avoir accès, si nous étions
satisfaits que le permis de travail actuel n'a pas contribué
à l'augmentation du travail au noir dans l'industrie de la construction,
si nous étions satisfaits de tout cela comme formation politique, on
n'aurait pas dépensé l'énergie de mettre ensemble les
tables de travail qu'on a mises ensemble au printemps passé sur
lesquelles vous avez apporté une collaboration exemplaire. On n'aurait
pas mis ensemble une équipe technique au cours de l'été
pour bâtir sur le plan technique un projet de loi. On ne serait pas
arrivé à l'Assemblée nationale avec un dépôt
et on n'aurait pas passé des heures et je ne dirai pas des jours, mais
je vais ajouter au moins une nuit, le tour de l'horloge au complet, à se
débattre entre parlementaires.
Sur le plan des principes je vous dirai qu'au moment où on se
parle je suis satisfait du travail qui a été accompli. Sur le
plan des modalités, je l'ai indiqué au début de ces
auditions, il y a de la place pour des améliorations, pour des
bonifications. Il n'y a personne de mieux placé que les gens qui
oeuvrent sur les chantiers de construction tous les jours sur le plan des
modalités pour nous dire et nous conseiller sur ces bonifications. Vous
le faites aujourd'hui publiquement et vous y avez fait référence,
on a aussi eu des rencontres où vous avez tenté d'apporter des
bonifications.
Je n'attendrai pas que le projet dans son aspect final, quand on aura
passé au travers article par article, au cours des prochaines semaines,
vous satisfasse complètement ou satisfasse les dirigeants syndicaux,
mais ce que je vise, c'est d'enlever cette inquiétude aux travailleurs,
parce qu'on n'est pas ici pour dire aux travailleurs compétents sur les
chantiers: Sacrez votre camp de là, demain matin on rentre des jeunes et
ils vont être compétents. Vous savez que ce n'est pas possible et
ce n'est pas vrai. Les jeunes qui sortent de l'école, les 1500 qui
sortiront au printemps, ils ont de l'apprentissage à faire avant de
devenir compétents, puis il y a un ratio compagnons-apprentis. C'est
vous qui allez le décider à la commission.
Je vais vous adresser une dernière remarque sur le 4-4-4. Vous
avez été généreux avec moi parce que c'est 4-4-5,
dans le fond: Quatre parties syndicales, quatre parties patronales et cinq
parties gouvernementales. Vous m'avez indiqué que 4-4 ou 5-4 cela
donnait la majorité au gouvernement et aux patrons. Je me souviens de ma
réponse spontanée: J'espère que cette majorité,
qu'elle soit syndicale, gouvernementale ou patronale, n'aura pas besoin
d'être exercée. J'espère, comme il y a eu des preuves au
cours de la dernière année dans le domaine de la construction,
tant au niveau de la négociation qui n'a pas été facile,
tant au niveau des tables qui ont été mises ensemble, que ce sera
4-4 et que les autres n'auront pas un mot à dire. Cela va faire 8 et ce
sera majoritaire. (17 heures)
C'est peut-être faire beaucoup confiance, mais à ce moment
si on ne s'entend pas - vous l'avez souligné vous-même - c'est le
gouvernement qui doit finalement trancher.
M. Laberge: II n'a pas le droit d'avoir deux votes en participant
aux débats et aux décisions? Vos représentants vont
participer et, ensuite, ils vont trancher? Mais c'est du bout de la merde!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous savez, M. Laberge, si je
veux, puis je me suis appliqué très sérieusement...
M. Laberge: C'est difficile d'empêcher un avocat de faire
des avocasseries.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, ce ne sont pas des
avocasseries que je vous fais. Si je veux intéresser le ministère
de l'Éducation - on vient de soulever une question importante - dans un
rôle de participation, si je veux m'assurer que le ministère de la
Main-d'Oeuvre fasse la même chose... Le ministère du Travail l'a
fait un peu traditionnellement, parce qu'il est plus proche de vous autres et
des parties patronales dans ses activités quotidiennes. Moi, je dis que,
si je les implique, j'ai peut-être plus de chance qu'ils participent
vraiment. Si je ne les implique pas, j'ai peut-être moins de chance
qu'ils participent vraiment. On peut en discuter, je ne suis pas fermé
parce que le temps est fini. On peut en rediscuter de la formation de la
commission, mais je vous exprime publiquement les arguments qui m'ont
amené à suggérer dans le projet de loi une commission qui
soit majoritairement paritaire, mais pas purement paritaire.
J'ai deux représentants du ministère du Travail. J'en ai
peut-être assez d'un, sauf que je me mets dans un chiffre pair, si j'en
enlève un. Si j'ai un chiffre pair, le président va être
obligé de voter sur à peu près tout ce qui se passe, si
les parties ne s'entendent pas. Le président, quand il vote tout le
temps, des fois, il vote patronal et les syndicats le haïssent; s'il vote
syndical, les patrons le haïssent; s'il vote gouvernemental, les deux
parties le haïssent. C'est prévu dans le projet de loi qu'il votera
lorsqu'il y aura égalité des voix. Autrement, il ne votera pas,
parce que son rôle est celui d'être un grand conciliateur - je
n'utiliserai pas l'expression qui a déjà été
utilisée - pas "patineux", comme ils disent, mais conciliateur. Ramener
tout le monde ensemble; ce n'est pas facile cette fonction et c'est pour cela
qu'elle a été faite comme cela.
Maintenant, si j'en ai un de trop comme ministre du Travail, je vais en
retirer un, M. Laberge, vous me connaissez. Je ne m'entêterai pas
à en avoir deux du ministère du Travail, parce que probablement
que vous allez être encore président de la FTQ et, moi, je ne
serai pas ministre du Travail quand ce sera en application.
M. Laberge: C'est le souhait que j'ai! Des voix: Ha! Ha!
Ha!
M. Laberge: M, le Président, on ne peut pas partir sur une
boutade comme celle-là, même si c'est très agréable.
Mon cher ministre, je dois vous dire que, malheureusement, je ne pourrai pas
demain rassurer les travailleurs de la construction.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous le ferez lundi.
M. Laberge: J'aurais voulu le faire. Que vous enleviez l'affaire
des heures, dans certains cas, cela devenait odieux. On s'est rangé
à cela. On vous a dit: Parfait, regardons comment on peut faire cela
sans pénaliser les vrais travailleurs de la construction, sans permettre
aux pompiers et aux policiers et à tous les autres de revenir dans
l'industrie de la construction. Bien oui, rassurez-nous donc! Dites-le
carrément: Est-ce que le gouvernement va être juge et partie, ou
si le gouvernement va se réserver son rôle de juge pour trancher
quand les parties ne s'entendront pas? Cela me sernble essentiel. Même
l'AECQ vous a fait le même reproche. L'AECQ n'est pas toujours de notre
bord. Même Maurice Pouliot, je pense, vous a fait le même reproche,
et ce n'est pas un péquiste reconnu.
M. le ministre, je pense qu'il y a quelque chose d'essentiel dans cela.
Rassurez-nous donc! Le gouvernement a la responsabilité vis-à-vis
de ta population du Québec, nous sommes tous d'accord avec cela. Si cela
ne fonctionne pas entre les parties, que le gouvernement tranche, nous sommes
d'accord avec cela. Mais le gouvernement ne peut pas être juge et
partie.
Le Président (M. Charbonneau): Sur ce, M. Laberge, vous
avez eu, d'une certaine façon, le mot de la fin, parce que maintenant je
ne veux autoriser que des remerciements à votre endroit et è
l'endroit de vos collègues. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je tiens à remercier,
comme je l'indiquais tantôt, la FTQ-Construction de sa présence et
de son mémoire, de sa participation aux différentes tables. Vous
jouissez d'une expérience qui nous était, je ne dirai pas utile,
mais je vais dire indispensable. Vous nous avez soumis des arguments qui nous
portent à réfléchir. Le principe du projet de loi est
adopté à l'Assemblée nationale; l'étude article par
article commence lundi prochain. Vous serez à même - si vous ne
voulez pas le faire avant c'est un choix qui vous honore - de rassurer ceux et
celles qui pourraient conserver des inquiétudes lorsque vous verrez,
lors de l'étude article par article, les amendements qui seront
apportés pour être soumis en troisième lecture. Je pense
que l'on s'entend sur le fond, sur les principes. Sur les modalités, si
vous êtes satisfait, ce sera votre devoir d'en informer correctement vos
travailleurs. Si vous en êtes insatisfait, ce sera également votre
devoir de les informer.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le député de Joliette.
M. Chevrette: Je voudrais vous remercier également.
D'abord, je veux vous féliciter pour votre cohérence dans vos
prises de décisions. Ensuite, je voudrais vous dire que, comme membres
de l'Opposition, nous allons offrir deux possibilités. D'abord, la
possibilité au ministre d'être cohérent avec son discours
face aux jeunes et face à la compétence et également face
à la sécurisation à laquelle vous faites appel. Je pense
que nous allons offrir au ministre d'appliquer les consensus qui se
dégageaient ici et d'appliquer les consensus qui se sont
dégagés aux tables. Par nos amendements, nous allons
sûrement le faire.
Le Président (M. Charbonneau): Messieurs de la FTQ, merci
d'avoir participé à cette consultation particulière et,
sans doute, à la prochaine.
M. Lavallée: Est-ce que l'on peut dire au ministre que
s'il nous donne la formation professionnelle, Maurice et moi nous irons nous
recycler; mais qu'il nous la donne.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président (M. Charbonneau): En attendant, voici une
période de recyclage de dix minutes pour les membres de la commission.
Les travaux sont suspendus jusqu'à 17 h 15.
(Suspension de la séance à 17 h 7)
(Reprise à 17 h 25)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaîtï
Je demanderais aux membres de la commission de regagner leur
siège. Nous allons reprendre les travaux.
Je demanderais aux représentants de l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec de se présenter à
l'avant, s'il vous plaît.
Je crois que c'est M. Houle qui est président. C'est cela? M.
Houle, bonsoir, à l'heure qu'il est. Je voudrais d'abord vous indiquer
que vous avez une heure pour la présentation globale de votre point de
vue et pour la discussion avec les membres de la commission. Vous disposez de
quinze minutes pour présenter votre mémoire, le reste du temps
étant réparti à parts égales entre les membres de
la commission. Je voudrais, avant que vous commenciez votre
présentation, vous demander de présenter les personnes qui vous
accompagnent.
APCHQ
M. Rousseau (Orner): M. le président, M. le ministre,
messieurs les membres de cette commission parlementaire, mon nom est Omer
Rousseau. Je suis directeur général de l'organisation. Je vous
présente à ma droite, M. Serge Crochetière, conseiller
juridique, M. Armand Houle, président de l'organisation, nouvellement
élu en novembre, M. Gilles Doyon, conseiller juridique.
Voici de quelle façon nous entendons procéder, si vous
n'avez pas d'objection. Dans un premier temps, je vais faire une
présentation très sommaire de l'organisation. Dans un
deuxième temps, le président fera lecture du communiqué
inséré dans le mémoire, lequel résume l'essentiel
de nos recommandations. Par la suite, M. Serge Crochetière pourra
étoffer certaines de ces recommandations, après quoi nous
disposerons des questions à tour de rôle à la table.
L'APCHQ est une organisation volontaire. Elle est représentative
de plus de 7000 entreprises dans l'industrie de la construction,
particulièrement dans le secteur de l'habitation puisque ses membres
représentent à peu près 80 % de toute la production de
logements qui se fait au Québec. Elle est sectorielle, nous tenons
à vous le souligner, parce que le mémoire est orienté sur
les réalités du secteur et nous nous attendons que vous en teniez
compte dans nos représentations. Je demanderais à M. Houle, le
président, de faire la lecture du communiqué, qui est l'essentiel
de notre mémoire.
M. Houle (Armand): Le projet de loi 119: les constructeurs
d'habitation y voient une promesse de réforme. L'Association provinciale
des constructeurs d'habitations du Québec, comme porte-parole de
l'habitation au Québec et au nom de ses 7000 entrepreneurs membres en
construction résidentielle, présente ses recommandations à
la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi
119, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction.
L'APCHQ se dit d'accord avec le projet de loi, parce qu'il contient une
promesse de réforme valable, pour autant que cette position constitue un
premier pas dans l'établissement de mesures transitoires menant à
la définition d'un statut particulier pour le secteur de la construction
résidentielle.
Composition de la Commission de la construction du Québec.
L'APCHQ estime que la représentation patronale préconisée
au sein de la future Commission de la construction du Québec
reflète le profond malaise qui existe et auquel aucun législateur
n'a encore osé s'attaquer de façon significative au cours des dix
dernières années. C'est celui de l'absence de reconnaissance
officielle du secteur de la construction résidentielle jouxtée
à l'existence d'une négociation de conditions de travail qui
s'est toujours déroulée de façon historique sur la base de
la définition de métiers.
Le gouvernement a reconnu lui-même ce problème particulier
en créant un comité d'étude chargé d'examiner
l'ensemble de la législation et de la réglementation, en tenant
compte notamment des recommandations formulées dans le rapport Scowen,
des conditions applicables au secteur résidentiel et du statut de
l'artisan. De son côté, l'APCHQ a toujours dénoncé
ce problème de façon continue dans le temps. L'APCHQ
réclame donc l'insertion dans sa nouvelle loi de la reconnaissance du
principe que la future Commission de la construction du Québec devrait
être représentative des parties patronale et syndicale et, en
conséquence, la composition de la future commission devrait
reconnaître l'existence des quatre secteurs de l'industrie de la
construction, dont le secteur résidentiel. Cela correspondrait à
la volonté des entrepreneurs en construction du Québec, d'une
part, et à l'orientation exprimée dans le rapport Scowen, d'autre
part.
Émission du certificat de compétence. Bien que l'APCHQ
soit d'accord avec l'initiative du législateur d'ouvrir les chantiers
à une main-d'oeuvre compétente et d'abolir le certificat de
classification dans l'industrie de la construction, elle s'étonne de la
discrimination qu'on exerce envers les entrepreneurs habiles à
exécuter eux-mêmes des travaux relatifs à un métier
ainsi que les artisans. Ceux-ci devraient avoir un droit automatique, à
l'instar des salariés de l'industrie de la construction, à
l'émission du certificat de compétence.
Le libellé de l'article 32 peut avoir comme résultat de
réserver le droit d'exécuter des travaux aux
entrepreneurs-employeurs et aux salariés de l'industrie de la
construction, excluant les artisans et les
entrepreneurs habiles à exécuter eux-mêmes des
travaux. Une telle restriction ne tient pas compte de la réalité
économique du secteur de la construction résidentielle et
pourrait avoir comme conséquence de favoriser le travail au noir.
Formation et qualification professionnelles de main-d'oeuvre: Selon
l'APCHQ, ta formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre
doivent être assignées aux parties patronale et syndicale. En
aucun cas, la formation ne devrait relever de ministères ou organismes
gouvernementaux qui ne possèdent pas les connaissances pour
déterminer et répondre de façon efficace aux besoins des
divers secteurs de l'industrie de la construction. L'expérience des
années antérieures nous a prouvé que le gouvernement est
incapable d'assurer la formation adéquate d'une relève
compétente dans l'industrie de la construction. L'APCHQ recommande donc
que ce principe soit inséré dans la loi afin que seules les
parties patronale et syndicale soient responsables de la formation de la
main-d'oeuvre.
Quant à la question du ratio compagnon-apprenti, l'APCHQ
recommande qu'il soit ramené à 1-1 pour répondre
adéquatement aux besoins du secteur résidentiel. Il faut savoir
que le secteur de la construction résidentielle est essentiellement
composé de petites entreprises employant souvent moins de cinq
salariés. Ramener le ratio compagnon-apprenti à 1-1 pour le
secteur résidentiel permettrait aux entrepreneurs de participer
davantage à la relève et à la formation de la
main-d'oeuvre et d'éviter d'avoir à faire face à une
pénurie de travailleurs qualifiés pendant les périodes de
forte production. On sait pertinemment que le secteur de la construction
résidentielle est la porte d'entrée des travailleurs dans
l'industrie de la construction.
M. Crochetière (Serge): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs, je ne vais pas lire le mémoire au
complet. Je vais juste vous exposer dans quel esprit il faut percevoir notre
mémoire. Pour nous, de façon continue - c'est presque obsessif
selon certains - on réclame un statut particulier en maintenant que nous
sommes des producteurs différents des autres entrepreneurs de la
construction et ce, pour une foule de raisons. C'est à cette
lumière ou, plutôt, dans cette optique qu'on a analysé le
projet de loi qui nous était soumis. D'autre part, on s'est
prononcé en disant que le projet de loi semblait porter la promesse
d'une réforme valable, notamment à cause aussi de la
création du comité qui nous permettra de réviser le champ
d'application et le régime de négociation dans l'industrie de la
construction.
C'est en page 5 de notre mémoire où, en fait, dans un
premier temps, on introduit la notion de secteurs. On demande que le conseil
d'administration de la commission soit constitué de façon
à représenter les secteurs de la construction qui sont
déjà reconnus dans la loi et dans les statuts de l'AECQ.
Nous considérons aussi que cette prise de position constituerait
un premier pas dans l'établissement de mesures transitoires -parce que
pour nous, ce n'est qu'un premier pas - menant à la définition
d'un statut particulier pour le secteur de la construction
résidentielle. De plus, ceci correspondrait à la volonté
des entrepreneurs en construction du Québec et à l'orientation
exprimée dans le rapport Scowen.
Par la suite, quant à la composition du conseil d'administration,
de façon générale, nous aussi, M. le ministre, nous nous
objectons à ce que les représentants gouvernementaux y aient
droit de vote. Quant à nous, le consensus qui se dégageait aux
tables exprimait notre intention de pouvoir régler nos différends
ou de gérer notre industrie de façon paritaire avec la partie
syndicale. Dans notre mémoire, nous considérons que les
représentants gouvernementaux peuvent faire partie du conseil
d'administration, mais sans droit de vote cependant.
En page 7, pour être conséquents avec nous-mêmes,
quant au comité administratif sur les relations du travail, nous
demandons qu'un représentant du secteur de la construction
résidentielle siège à ce comité et nous
reproduisons la même demande, en page 9, quant au comité
administratif sur la formation professionnelle.
Ici, il faut aussi comprendre que nous demandons le rapatriement du
pouvoir de réglementation prévu aux articles 123 et 123.1 et,
conséquemment, à partir du moment où nous rapatrions le
pouvoir de réglementation à la commission, nous ne voyons plus la
nécessité de deux comités, c'est-à-dire le
comité administratif sur la formation professionnelle et l'autre
comité puisque, comme je vous l'exposais tantôt, les
représentants gouvernementaux n'auraient plus droit de vote. Donc, nous
aurions le pouvoir de réglementation et nous aurions la reconnaissance
sectorielle pour le secteur de la construction résidentielle.
Conséquemment, nous considérons qu'un seul comité sur la
formation professionnelle est nécessaire, sinon notre position ne serait
plus logique. Donc, un seul comité sur la formation professionnelle
devrait exister. Notamment, au bas de la page 12, M. le ministre, on dit ou on
exprime clairement notre volonté de voir le pouvoir de
réglementation rapatrié.
À la page 10, il s'agit d'un point très particulier, soit
les dispositions de l'article 4.1 du projet de loi. Nous craignons que le
libellé actuel n'amène le législateur ou un
gouvernement éventuel à confier à la commission
d'autres mandats que ceux uniquement liés à la
sécurité et à la formation professionnelle dans
l'industrie de la construction. On demande que ces notions soient incluses
à l'article 4.1 de façon qu'il se lise désormais comme
suit: "Le gouvernement peut charger la commission de voir à
l'application de lois ou règlements connexes aux relations du travail,
à la sécurité du travail et à la formation
professionnelle de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction."
À la page 13, cela revêt aussi une très grande
importance pour nous. C'est la juxtaposition d'un ensemble d'articles dans le
projet de loi, soit ceux contenus à l'article 85, à l'article 32,
deuxième paragraphe, à l'article 36 et à l'article 123. Je
m'explique.
À l'article 85, on prévoit que, quant aux entrepreneurs et
aux artisans, seuls ceux qui auront le certificat de compétence pourront
exécuter eux-mêmes les travaux de construction.
À l'article 32, on ne prévoit pas pour les entrepreneurs
ou les personnes habilitées à exécuter des travaux en tant
qu'entrepreneurs ou artisans, un droit automatique à l'émission
de ce certificat de compétence.
À l'article 36, on prévoit que, par le biais de l'article
123.1, on pourra déterminer les conditions d'utilisation des certificats
de compétence quant à l'application des articles 32 et 33 qui
sont transitoires et, à l'article 123.1, on prévoit qu'on pourra,
par règlement, déterminer les conditions d'obtention et de
renouvellement des certificats de compétence. On est très
craintifs parce qu'il y a souvent eu dans le passé des démarches
pour tenter d'exclure des chantiers les entrepreneurs qui n'avaient pas de
salariés. Encore aujourd'hui, les représentations des parties
syndicales qui souvent qualifient d'artisan quiconque est un entrepreneur,
pourraient mener jusque-là. Nous demandons que soit inscrit dans le
projet de loi, de façon irréfutable et de façon qu'on
n'ait pas à faire déterminer si c'est un droit acquis ou pas, ce
droit pour toute personne habilitée actuellement à exercer
elle-même des travaux sur un chantier. Pour tout entrepreneur ou tout
artisan qui est actuellement habilité à exécuter
lui-même des travaux de construction, que ce soit inscrit et que ce soit
automatique. Il est facile à ce stade-ci, de le vérifier au
niveau technique, parce qu'il s'agit des personnes habilitantes inscrites sur
les permis délivrés par la Régie des entreprises de
construction du Québec.
Un autre problème également est soulevé par cette
approche, M. le ministre, et c'est aussi à cause du programme du Parti
libéral et de la volonté exprimée par les syndicats.
L'orientation de vouloir scinder le marché résidentiel entre la
construction neuve, et la rénovation, donc, pour nous, entre le neuf et
l'existant. Ici, nous voudrions souligner que ce serait tout aussi nocif pour
les parties syndicales, parce que, s'il crée un secteur dévolu
à l'artisan dans la rénovation, un secteur qu'on ne pourra pas
concurrencer, on risque d'avoir moins de chantiers dans le neuf et, en plus de
cela, d'amener des entreprises à être obligées de
travailler au noir pour faire de la concurrence.
Cette fois, je vais vous lire un passage de notre mémoire qui
exprime davantage les craintes qu'on veut vous faire entendre. En page 15:
"Cette approche risque d'être d'autant plus préjudiciable aux
intérêts des entreprises de construction oeuvrant dans le secteur.
résidentiel puisqu'à cause du vieillissement et de la stagnation
démographique, la demande de construction neuve se
révélera beaucoup moins importante dans les années
à venir et ce jusqu'à l'an 2000 si l'on en croît les
analyses démographiques effectuées sur le sujet. Bien plus - et
on met cela en parallèle avec la levée du moratoire relativement
à la loi des logements locatifs - la levée du moratoire
permettant la transformation des immeubles existants en
copropriété divise est susceptible d'introduire une nouvelle
concurrence aux entreprises de construction oeuvrant sur le marché du
neuf. De façon bien claire, en levant le moratoire, beaucoup de gens
vont choisir des immeubles ou des logements déjà existants qu'ils
vont pouvoir transformer en copropriété divise et financer de
façon beaucoup plus facile. Si, en plus, on leur permet d'avoir
accès à une main-d'oeuvre à un coût réduit,
je pense qu'il y a beaucoup de familles ici qui choisiraient un logement
rénové en milieu urbain plus près des équipements
qu'un condominium neuf à un coût plus élevé et moins
près du centre urbain."
Cela va créer une concurrence, c'est indéniable. Il faut
absolument que vous en soyez conscients. Cette concurrence à armes
inégales sera favorisée par l'émergence de constructeurs
propriétaires qui pourraient, sous prétexte de rénovation
ou de réparation, transiger avec des artisans à des prix
nettement inférieurs à ceux qu'aurait à assumer
l'entrepreneur de construction qui voudrait travailler tant dans le secteur
résidentiel neuf que dans le secteur résidentiel existant.
Si c'est là la méthode qu'entend prendre le gouvernement
pour limiter la prolifération du travail au noir au Québec, nous
lui prédisons que cela aura l'effet contraire. Les forces
économiques en présence ne sauront être contenues à
l'intérieur d'un cadre aussi artificiel.
Cela aura aussi des conséquences importantes sur la structure
économique des entreprises qui, pour la plupart, n'arriveront plus
à se structurer correctement pour faire
face aux exigences de solvabilité de l'émission d'une
licence d'entrepreneur ainsi qu'à celles relatives à la
fourniture de cautionnements tout en continuant à offrir une
qualité de garantie et de service après vente, recherchée
et nécessaire à la protection des consommateurs. Il faut
être conscient ici que, malgré ce que les gens peuvent croire par
rapport aux entreprises de construction, les entreprises de construction qui
oeuvrent dans le secteur résidentiel sont souvent de petites entreprises
où l'entrepreneur - et cela apparaît dans les rapports financiers
soumis à la régie des entreprises - travaille pour gagner sa vie.
Ce n'est pas un spéculateur ni un investisseur. 11 fait 50 heures par
semaine et il arrive à bien vivre, mais uniquement à cela,
à bien vivre.
Nous demandons, encore une fois, que soit reconnu - en page 17 - que la
Commission de la construction du Québec délivre un certificat de
compétence à tout entrepreneur ainsi qu'à tout artisan
habilité à exécuter lui-même des travaux relatifs
à un métier, le 31 décembre 1986. Enfin -toujours dans ce
que nous considérons être notre logique quant à la
création d'un secteur - nous estimons que la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la construction et la définition des tâches ne sont
pas identiques pour tous les secteurs, pour tous les chantiers et que le devis
d'apprentissage devrait en tenir compte. C'est une des raisons pour lesquelles
aussi nous demandons que le secteur résidentiel soit présent au
comité de formation professionnelle et qu'un ratio particulier 1-1 soit
établi pour notre industrie.
Ce sont les recommandations du mémoire. Nous sommes prêts
maintenant à répondre à vos questions.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci de votre
présentation. Je remarque que, comme certaines autres parties qui se
sont présentées devant nous, vous nous posez des questions quant
à la composition du conseil d'administration et vous vous manifestez -
je ne dirai pas contre la présence - contre le droit de vote qui
pourrait être attribué aux personnes qui seraient nommées
par le ministre de l'Éducation, le ministre de la Main-d'Oeuvre ou le
ministre du Travail. (17 h 45)
J'ai eu l'occasion d'exprimer à d'autres parties - je pense que
vous étiez présent dans la salle - la raison qui m'amène
à suggérer que le ministère de l'Éducation, entre
autres, soit présent avec pleine participation même quant au vote
de façon à vraiment intéresser le ministère et
à ce que le ministère - je ne parle pas du ministre -
délègue quelqu'un en autorité avec des pouvoirs quasi
décisionnels. Même chose en ce qui concerne le ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, même chose en
ce qui concerne le ministère du Travail. Ce serait facile de dire, oui,
on retire tout cela. Mais ne pensez-vous pas qu'on pourrait retrouver la
situation qu'on a vécue pendant trop longtemps où les parties,
n'étant pas intéressées, n'étant pas
impliquées comme telles au plus haut niveau décisionnel, il se
forme des programmes de formation au ministère de l'Éducation, au
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
qui, comme vous le soulignez, ne répondent absolument pas ni aux besoins
des travailleurs, ni aux besoins des employeurs, ni aux besoins des
consommateurs?
J'hésite, au moment où on se parle - je n'ai pas
fermé la porte - à suivre cette recommandation qui me vient de
beaucoup de parties. Je serais déçu de retrouver dans cinq ou dix
ans un système où on n'aurait pas réussi à
intéresser activement ces ministères parce que, si on ne
réussît pas à les intéresser activement, ils vont
encore une fois se déconnecter du marché. Non?
M. Rousseau: Est-ce que c'est une question de vote qui va faire
que les fonctionnaires vont vouloir s'impliquer plus en ce qui concerne la
formation?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour vous répondre bien
franchement, les fonctionnaires sont comme vous. Vous autres, vous voulez
être là pour pouvoir voter afin de défendre votre champ
d'activité, vos intérêts, votre cercle d'influence, etc.
Les fonctionnaires sont comme vous.
M. Rousseau: Oui, mais, par contre, je veux simplement vous dire
que la raison majeure pour laquelle nous ne voyons pas la
nécessité, comme votants, décideurs ou partie avec nous en
ce qui concerne la formation, c'est parce que, dans le passé, ils
avaient le pouvoir effectivement de faire quelque chose en ce qui concerne la
formation et ils n'ont rien foutu. C'est aussi clair que cela. On pense que,
comme le passé est garant de l'avenir, on va retrouver encore le
même maudit processus.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le passé - si on peut
s'entendre, là - le ministère de l'Éducation avait dans
son secteur ces pouvoirs et il ne les partageait avec personne. Le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
avait son champ d'activité, ses pouvoirs et ne les partageait avec
personne. Les parties n'avaient pas de pouvoir et elles n'avaient rien à
partager avec personne en matière de formation.
Ce qu'on propose - là, je vous le dis à
nouveau - c'est la majorité des pouvoirs, huit sur treize entre
les mains des parties en ce qui a trait à la formation. Les gens qui ont
peut-être oublié de faire quelque chose dans les dix
dernières années sont quand même essentiels au
succès de l'opération. La participation du ministère de
l'Éducation est essentielle, la participation du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est essentielle. J'ai
entendu un principe qui a été émis par le
député de Joliette, qui est vrai: pas de taxation sans
représentation. Je vous dirai qu'en ce qui concerne le ministère
de l'Éducation, on va payer les coûts inhérents au
système d'éducation. Pour ce qui du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, par nos subventions en
matière de programmes de formation, j'ai l'impression que la part de la
représentation va également être payée. Il y a
peut-être le ministère du Travail, encore une fois, en raison de
sa pauvreté inhérente, qui aura une présence pour laquelle
il ne paiera pas complètement. Est-ce qu'on peut rationnellement prendre
la décision de les exclure complètement parce que, dans le
passé, ils avaient les pouvoirs et qu'ils ne les ont pas exercés
correctement?
M. Houle: Je me pose une question. S'ils ne voulaient pas
partager les pouvoirs à ce moment-là, est-ce qu'ils vont vouloir
plus les partager en étant minoritaires, si on suit votre raisonnement?
Si je prends le raisonnement de M. Laberge, pour faire une boutade aussi, il
disait: quatre fonctionnaires syndiqués du gouvernement. Moi, je dis:
quatre fonctionnaires syndiqués du gouvernement plus quatre
syndiqués de l'habitation ou autre, cela fait huit. Les patrons n'ont
plus le droit de parole, il y a une perte de pouvoir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous voyez que ce n'est pas
facile.
M. Rousseau: Faites donc l'expérience, M. le ministre.
Donnez les pouvoirs aux parties. D'ailleurs, c'est peut-être le plus beau
consensus que vous n'avez jamais eu. Cela fait des années d'ailleurs
qu'il existe. Les parties patronales et syndicales ont dit: Donnez-nous la
formation pour qu'on en fasse. D'ailleurs, si on a un problème sur la
question de la main-d'oeuvre, c'est effectivement parce que le ministère
de l'Éducation, le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, en tout cas, les chicanes de juridiction ont
fait qu'on n'a pas fait de formation. Les entrepreneurs disent: II n'y en a pas
de compétence. C'est vrai qu'il y a des salariés qui sont
compétents mais il y en a qui ne sont pas compétents. Or, faites
une chose. Donnez le pouvoir aux parties, mettez-les à l'essai et si
dans un an elles ne réussissent pas, vous pourrez dire: Maintenant on
vous enlève et on va mettre quelqu'un qui va décider.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsque je donne une
majorié à un conseil d'administration, 51 % et plus, 8 sur 13
pour prendre un exemple, est-ce que je ne donne pas le pouvoir aux parties si
les parties s'entendent?
M. Rousseau: Lorsque je suis actionnaire d'une compagnie si je ne
détiens pas 51 % dans mes poches mais si je le détiens avec 2 je
ne l'ai pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Alors, je vais vous
prévenir tout de suite, vous ne pourrez pas l'avoir parce que je ne
pourrai pas vous donner 51 % à vous et donner 51 % au syndicat. Cela va
me faire 102 % si j'additionne. Vous ne pourrez pas l'avoir. On part de cette
règle. Personne ne va partir, comme partie, avec le plein pouvoir; ce
n'est qu'en conjuguant la proportion qu'on a avec quelqu'un d'autre et je vous
dis que si vous conjuguez... Vous avez des intérêts communs
à plusieurs endroits avec les travailleurs à propos de la
formation. Les travailleurs sont intéressés, en tout cas,
d'après le langage qu'ils tiennent, à une meilleure formation et
à y participer et vous y êtes également
intéressés. Cela fait huit. Si vous ne vous entendez pas, vous
avez raison. Si à propos de la formation il y a une chicane
perpétuelle entre travailleurs et employeurs, vous avez raison
qu'à la fin le président aura à voter pour
départager tout cela. Peut-être même que les fonctionnaires
ne s'entendront pas. La preuve c'est que pendant les dix dernières
années le ministère de l'Éducation et celui de la
Main-d'Oeuvre ne se sont pas parlé. C'est la preuve qu'il peut exister
de la division même là.
M. Rousseau: Enfin, je répète ce que je disais tout
à l'heure. La raison de notre recommandation repose sur ce qui s'est
passé. Jusqu'à ce jour, on n'a rien eu. Alors, on met les chances
de notre côté, si on est tout seul on va peut-être
réussir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous comprends d'être
méfiants. Je ne ferme pas la porte à cet argument mais je vous
fais part de celui qui nous a amenés à introduire les chiffres
qu'on a introduits dans la loi.
Quant au pouvoir de réglementation, je pense que vous avez
entendu nos remarques. On a fait une ouverture de ce côté.
Toutefois en conservant pour des fins d'intérêt public un pouvoir
d'homoloqation et si possible un pouvoir d'initiative, cela donne des
casse-tête énormes à ceux qui sont là pour s'assurer
que la plume suive la langue du ministre.
M. Rousseau: On va travailler avec eux.
M. Paradis (Brome-Missisquoî): D'après votre
expérience, dans votre domaine et surtout peut-être dans votre
domaine, est-ce que le permis de travail, la carte de classification a permis
depuis 1977 de diminuer ou d'augmenter le travail au noir?
M. Houle: Le permis de travail dans l'habitation a sûrement
contribué à augmenter le travail au noir. Depuis que le permis de
travail existe qu'on le dit. S'il y avait toute forme de contingentement dans
l'habitation je pense qu'il contribuerait encore à l'augmenter.
M. Rousseau: Je pourrais peut-être ajouter quelque chose.
Pour le marché au noir, je pense qu'il faut aller à la source. La
cause première du marché au noir, ce n'est pas compliqué,
c'est le système de relations du travail, c'est la négociation
dans l'industrie de la construction qui est unique et qui effectivement
établit des conditions qui sont les mêmes pour tous les secteurs.
C'est de là qu'il vient le marché au noir. Actuellement dans la
région de Rimouski les salaires moyens sont quand même moindres en
général que dans la région de Montréal et les gens
sont obligés de payer le même salaire dans l'industrie de la
construction à Rimouski qu'à Montréal. Bon sens! Je n'ai
pas besoin de commencer à faire un grand exposé pour dire que les
gens n'ont pas la capacité de payer le même salaire qu'ils doivent
payer à Montréal.
Une voix: Cela va plus loin que cela.
M. Rousseau: C'est cela. C'est à la cause qu'il faut
aller.
M. Crochetière: En réalité, on est le 8eul
endroit dans le monde occidental à avoir une syndicalisation obligatoire
avec une définition de tâches par métier unique, un salaire
unique indépendamment de toutes les régions. Cela n'existe nulle
part ailleurs.
M. Rousseau: C'est le représentant de la CSN qui disait
hier qu'il craignait la frontière entre l'Ontario et le Québec.
Il disait qu'il y avait 20 % des syndiqués en Ontario qui gagnaient - je
ne sais pas -environ 14 $ ou 15 $ l'heure et il y en avait 80 % qui gagnaient 6
$ ou 7 $ l'heure. Il avait peur qu'effectivement ces gens s'en viennent au
Québec pour travailler. Si en Ontario on paie 6 $ ou 7 $ dans le secteur
de l'habitation, je ne vois pas pourquoi ici nous sommes si riches qu'on doive
payer des 14 $, des 16 $ et des 17 $.
M. Crochetière: En réalité, on ne le paie
pas non plus, M. le ministre, vous le savez pertinemment. Les gens engaqent un
voisin, un cousin ou le fils du concierge pour finir leur sous-sol et peinturer
leur balcon. C'est cela, la vérité. Personne n'y croit à
ce décret dans la construction résidentielle, quant à son
application intégrale.
M. Rousseau: D'ailleurs, nous, depuis des années, nous le
disons à ceux qui nous représentent en matière de
relations du travail: Donnez-nous des conditions particulières dans le
secteur de l'habitation. Qu'on dise que c'est nécessairement le permis
de travail qui augmente le marché noir, c'est une chose. Mais je pense
que depuis des années, les conditions de travail dans l'industrie de la
construction qui s'appliquent uniformément à tout ce beau monde
font augmenter le marché noir. Ce n'est pas plus compliqué que
cela. Alors, il faut aller à la cause; la cause directe, c'est cela,
c'est le système de relations du travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez entendu au cours des
deux dernières journées la question que j'ai adressée
à presque tous les organismes concernant l'ouverture des bassins de
main-d'oeuvre quant à une pénurie ou a une pénurie
appréhendée. Pour ce qui est du processus de participation ou de
consultation qui a lieu avec certains participants, est-ce que vous, comme
organisme, lorsqu'il y a ouverture de bassin de main-d'oeuvre, pénurie
ou pénurie de main-d'oeuvre anticipée, vous êtes
consulté?
M. Houle: On nous appelle. Il y a quelqu'un chez nous en
recherche technique... Cela arrive, c'est arrivé. Si on revient à
votre question des deux derniers jours, effectivement on a été
appelé. Comme on ne participe pas è la négociation et
qu'on n'a aucun moyen d'y participer, c'est un peu nous appeler pour le plaisir
de le faire. On leur dit d'ouvrir. Quant à nous, c'est ce qu'on veut "at
large". Mais quand ils nous appellent pour nous demander si on ouvre le bassin
ou si on engage des gens, on leur dit: Amènes-en du monde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Votre réponse est toujours
oui, autrement dit.
M. Rousseau: Bien, notre réponse est oui, parce qu'elle se
veut conséquente avec notre orientation, mais on a toujours
déploré que la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction
résidentielle soit particulièrement locale, et les employeurs
aussi demandent une main-d'oeuvre locale, ils ne peuvent pas aller la chercher
au niveau provincial.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Je vous trouve fort habile, messieurs, puisque vous
avez réussi à faire sortir le ministre même de l'objet de
la toi pour parler de deux ou trois autres lois et des règlements. Je
vais tomber dans le même piège que lui, parce qu'il y a des choses
que je voudrais comprendre. En particulier, dans un premier temps, votre
communiqué - vous l'avez avec vous - en date du 4 décembre 1986,
à la page 3, au deuxième paragraphe, se lit comme suit: "Le
libellé de l'article 32 peut avoir comme résultat de
réserver le droit d'exécuter des travaux aux
entrepreneurs-employeurs et aux salariés de l'industrie de la
construction, excluant les artisans et les entrepreneurs habiles à
exécuter eux-mêmes des travaux." Puisque vous avez au moins deux
conseillers juridiques, j'aimerais qu'on me fasse comprendre, à
l'article 32, ce que veut dire ce paragraphe.
M. Houle: Pendant que mon conseiller cherche ses notes, je vais
vous donner le point de vue de l'entrepreneur et l'avocat parlera du sien
après.
M. Chevrette: Ah! On va peut-être se comprendre plus vite
d'abord. N'en déplaise aux deux procureurs.
M. Houle: Je m'excuse pour mes deux amis.
M. Chevrette: Oui, d'accord.
M. Houle: Un entrepreneur en régions
particulièrement, peu importe le secteur où il oeuvre, c'est un
type qui travaille souvent seul, particulièrement en début de
saison. Au cours de l'été ou dans la période
d'activité majeure, que fait-il, s'il a un surplus d'ouvrage? Il engage
un ou deux ou trois bonshommes et puis, quand l'automne arrive, que fait-il? Il
remet ces gens-là à pied et il continue à sortir son
coffre d'outils et il travaille. C'est le genre d'individus que nous avons. Une
bonne majorité de nos membres font cela et nous en avons 7000 comme
cela. C'est 85 % de la population qui travaille chez des entrepreneurs qui est
comme cela. Du côté des chiffres et des lois, mon ami Serge.
M. Crochetière: Voici ce qu'on craint plus
particulièrement. La loi prévoit que même un entrepreneur
ou un artisan ne pourra pas exécuter lui-même des travaux sans
détenir le certificat de compétence prévu. Nous disons que
l'article 32, quant à son droit automatique, ne peut pas s'appliquer
à eux, parce qu'ils ne peuvent pas répondre aux exigences de
l'article 36 sur la Loi sur les relations du travail parce qu'il s'agit
obligatoirement de syndiqués. Les gens qu'on représente ne
peuvent pas avoir le droit automatique. (18 heures)
Dans un deuxième temps, on dit: La commission délivre sur
demande un certificat de compétence à toute personne visée
qui aurait le certificat de qualification. Par ailleurs, ce qu'on craint c'est
le pouvoir de réglementer pour limiter à ces gens l'accès
au nouveau certificat de compétence. On nous assure que cela constitue
un droit acquis. Pour notre part, on considère qu'on aimerait mieux
l'avoir de façon très claire dans la loi. Même s'il s'agit
d'un droit acquis, que faites-vous des entrepreneurs qui n'exécutent pas
actuellement des travaux, mais qui voudraient revenir et qui auraient pu ne pas
renouveler les anciens certificats, ou qui n'ont pas de certificat de
classification? Ils n'auront pas non plus de droits acquis.
Ce qui se produit aussi, souvent, c'est que les gens confondent artisans
et entrepreneurs qui travaillent seuls ou, parfois, avec des salariés
et, souvent aussi, avec des associés. Il ne faut pas le nier, c'est
l'une des façons légales de former ou de trouver une
main-d'oeuvre non syndiquée. Elle existe, on le dit, et elle est
légale. Elle n'est pas au noir, celle-là. Il faut que tous ces
gens qui constituent des tampons puissent automatiquement continuer à
travailler quand la loi sera mise en application.
M. Chevrette: Deux associations - vous me pardonnerez de ne pas
me rappeler lesquelles, nous en avons entendu un bon nombre en deux jours -
proposaient expressément d'enlever tout le décret de la
construction et même l'OCQ. À toutes fins utiles, les artisans
disent que, pour autant qu'on leur réserve le travail de
réparation ou de rénovation, ou, si j'ai bien compris, c'est
jusqu'à...
M. Crochetière: Quatre étages.
M. Chevrette: Quatre étages, exactement. J'ai cru entendre
de votre bouche tantôt que vous vous y opposiez. Est-ce à cause de
la concurrence exclusivement ou y a-t-il d'autres motifs?
M. Crochetière: Non, la concurrence? Ce que j'ai dit
tantôt, c'est que les syndiqués qui ont fait ces propositions
n'ont même pas mesuré eux-mêmes l'impact de ce qu'ils
venaient de dire. On est dans une situation... C'est vrai que, cette
année, on a de la belle construction, mais on a une population qui ne
grossit pas et qui vieillit. Toutes les analyses économiques
démontrent hors de tout doute que le besoin à satisfaire en
habitations d'ici l'an 2000 va décroître. Si vous créez un
secteur dans la rénovation qui est dévolu aux artisans qui ne
sont pas assujettis à certaines contraintes et que vous
nous laissez dans le neuf avec des contraintes, on ne peut plus
être concurrentiels. Dans un premier temps, où vont travailler les
salariés des syndicats pour continuer à vivre? Au noir?
Dans un deuxième temps, il y a eu un moratoire. On annonce la
levée du moratoire en milieu urbain pour les logements existants. Il
s'agit d'immeubles existants susceptibles d'être rénovés.
Tantôt, je demandais à chacun d'entre vous de
réfléchir sur le choix qu'il ferait, s'il pouvait par exemple -
je vais parler de Montréal, car c'est le milieu que je connais le mieux
-avoir un appartement de 1200 pieds carrés de surface,
rénové, quelque part sur le Plateau Mont-Royal qui est
très central, à un coût de rénovation qui n'est pas
contrôlé par rapport à un condo neuf. Il sera obligé
d'aller, en brique et bois, je parle toujours d'un immeuble de quatre
étages ou moins - pour suivre la logique de la représentation
syndicale. Et on va être obligé d'aller le mettre en
périphérie, parce que le terrain va coûter trop cher
à construire, sinon qu'il va peut-être avoir 960 pieds
carrés de surface habitable, qu'il n'aura pas nécessairement les
mêmes équipements et qui va se vendre 10 000 $ ou 15 000 $ plus
cher. Y a-t-il quelqu'un ici qui hésiterait longtemps? Nous croyons que
non. C'est ce que nous ne voulons pas.
Il n'est pas question pour nous d'admettre de quelque façon que
ce soit la scission entre le neuf et l'existant. Si on le fait, cela va
inévitablement amener les entrepreneurs du neuf à être
obligés de concurrencer l'existant avec du travail au noir. Cela ne se
peut pas autrement. Nier cela, je crois, serait faire preuve d'un certain
angélisme par rapport à nos propres membres. Ils ne le feront
pas. Ils ne se laisseront pas crever de faim comme cela.
M. Chevrette: Vous réapparaissez malheureux, pour ne pas
dire plus, du type de représentativité que vous pouvez avoir, du
peu de représentativité ou encore de l'absence de
représentativité...
M. Crochetière: Ce serait plutôt cela.
M. Chevrettes J'essaie de graduer mes propos.
M. Crochetière: Disons qu'avec "absence", on est
d'accord.
M. Chevrette: Puisque vous avez, à plusieurs reprises...
Par le passé aussi, mais cela m'a frappé plus
particulièrement au cours des discussions des derniers jours et à
la suite des lectures que j'ai faîtes. Vous semblez extrêmement
malheureux de la structure même des négociations. Je vais me
permettre d'en parler puisque le ministre nous a ouvert ta porte. Je pense bien
qu'il ne m'arrêtera pas là-dessus. Quand vous dites que vous
représentez 7000 entrepreneurs, est-ce que cela est compris dans les 15
000 que représente l'AECQ?
M. Rousseau: Pas nécessairement. Ce matin, M. Daoust
faisait une distinction entre entrepreneur et employeur de salariés. Par
contre, comme le mentionnait le président tout à l'heure, sur les
7000 entreprises avec lesquelles nous transiqeons, il y en a probablement 5000
qui sont vraiment de petites entreprises, c'est-à-dire que de temps en
temps, elles ont des salariés et de temps en temps, elles travaillent
seules ou avec des associés, comme l'expliquait M. Crochetière.
On représente aussi les gros entrepreneurs qui oeuvrent dans le secteur
de l'habitation et qui font de la qrosse production. C'est la raison pour
laquelle à peu près 80 % de tout ce qui se fait comme production
de logement est fait par nos membres.
M. Houle: Excusez-moi, M. Chevrette. Les 5000 dont M. Rousseau
fait mention et qui, occasionnellement, enqaqent un employédans l'année pendant un minimum d'une heure, font obligatoirement
partie de l'association d'employeurs à laquelle vous faites allusion;
donc, peut-être 5000 sur les 7000.
M. Chevrette: Vous représentez donc le tiers de
l'AECQ.
M. Houle: En nombre, mais non pas en cotiseurs, avant qu'on se le
fasse dire.
M. Chevrette: Je le savais. Je ne vous l'aurais même pas
demandé. Cette partie, je la connaissais.
Je sais que l'on a déjà parlé de vote, de
représentativité proportionnelle au chiffre d'affaires et "tout
le kit". Je sais que vos revendications se sont toujours inscrites dans le sens
suivant: des conditions particulières, une table sectorielle ou au moins
une sous-table, pour parler des cas spécifiques. Comment expliquez-vous
que cela ne se soit jamais soldé par une table spécifique?
Une voix: Moi...
Une voix: Bien...
Une voix: Vas-y. Tu as siégé à l'AECQ.
M. Chevrette: Allez-y tous les deux.
M. Houle: Par le passé, j'ai siégé au
conseil dont vous faites mention. D'après ce que l'on a entendu ici au
cours des derniers jours, on voit grand, on voit qros, mais on ne voit pas la
petite habitation et encore
moins les petits entrepreneurs que l'on a toujours appelés - je
ne donnerai pas de noms - des artisans ou des travailleurs au noir. Ce n'est
pas vrai; ils n'en sont pas tous. Ces derniers n'ont pas de place pour parler,
même avec les meilleures et les plus belles structures. Plus on complique
la structure, pire elle est pour se faire entendre. C'est pour cela que l'on
vous demande la reconnaissance d'un secteur vraiment pour les gens de
l'habitation. On ne veut pas parler pour les autres, cela ne nous
intéresse pas de parler pour les autres. On ne les connaît
peut-être pas ou, du moins, on ne veut se mêler de cela. On
souhaiterait qu'il en soit de même pour les autres parties.
M. Rousseau: En fait, il y a une autre raison - je pense qu'on
l'a toujours mentionnée - c'est que le secteur résidentiel sert
de tampon aux autres secteurs lorsqu'il s'agit de conditions de travail. Ce
n'est pas sorcier, notre "donneur d'ouvrage", nous, les entrepreneurs dans le
secteur de la construction résidentielle, ce sont les consommateurs.
Dans les autres secteurs, c'est le gouvernement et les gens qui ont des
commerces ou des industries. Ce n'est pas la même capacité de
payer. D'ailleurs, le rapport Scowen l'a reconnu, il va effectivement vers un
statut particulier. Il faut répondre à la réalité.
D'ailleurs, c'est une phrase que j'ai entendue ce matin, je pense, de votre
bouche. Il faut peut-être commencer à regarder la
réalité. Pourquoi ne négocie-t-on pas des conditions de
travail qui correspondent à la réalité? Je ne sais pas
à quel sujet cela avait été dit, mais...
M. Chevrette: Je parlais de vos consensus de table.
M. Rousseau: Ah bon! D'accord.
M. Chevrette: Je voudrais vous poser une question. Qu'est-ce que
vous répondez aux travailleurs de la construction dans le domaine de
l'habitation domiciliaire qui disent ceci... J'ai rencontré des
journaliers de la construction, des manoeuvres et même des
charpentiers-menuisiers qui me disent ceci: Le rapport Scowen propose de
scinder et d'abolir les décrets dans le domaine domiciliaire à
Montréal et à Québec pour commencer, comme première
étape. Ces travailleurs me disent: Écoute bien, mon Chevrette, tu
serais peut-être surpris, mais nous pensons que, parce qu'on travaille
perpétuellement avec le patron, on est dans de petites industries, on
travaille fort en mosusî On est productif à mort. On se
ramasserait, dans l'éventualité où il y aurait abolition
de décret... Je ne dis pas qu'il n'est pas question de
négociation. Oublions la négociation tout de suite et regardons
juste le décret et les salaires qui sont payés. Les
salariés me disent: Nous, qui sommes plus productifs, qui sommes
continuellement sous surveillance, on accepte cela car on travaille avec le
patron alors que, dans la grosse industrie, on peut vous démontrer
très facilement que les salariés peuvent être
compétents, mais que la pression n'est pas aussi forte que dans
l'industriel. Que répondez-vous à ces travailleurs qui me
semblent honnêtes dans leur évaluation?
M. Doyon (Gilles): Qui vous ferait accroire qu'on les paierait
moins? Je ne crois pas qu'on en ait fait mention nulle part, sauf que les
augmentations sont peut-être moins fortes, les conditions sont
différentes, la polyvalence de la main-d'oeuvre, des travaux... Ce n'est
pas sûr que... Pour poser du plâtre entre la brique en dessous des
châssis, on aurait besoin d'un gars pour poser la "forens" de bois, un
gars pour poser la latte métallique et un autre qui arriverait pour
poser le plâtre. Cela fait trois gars différents, trois
entrepreneurs qui viennent faire des travaux sur un bungalow où il y a
trois trous de châssis à faire. C'est cela, gérer notre
entreprise, notre secteur et le rendre compétitif. On n'a jamais dit
qu'on paierait les gars moins cher. Ce n'est pas cela. Je ne pense pas qu'il y
ait un entrepreneur dans le champ qui ait mentionné cela.
M. Rousseau: Ce qu'on mentionnait, d'ailleurs, déjà
dans le cadre d'une proposition au cours des années antérieures,
et c'était une proposition qu'on faisait à l'association
patronale qui représente les entrepreneurs pour fins de
négociation, c'est de tenter de négocier avec le monde syndical
un minimum ou un maximum. Le minimum aurait pu être établi, je ne
sais trop, à un taux de 8 ou 10, mais cela me surprendrait
énormément qu'un entrepreneur qui a une main-d'oeuvre
compétente s'organise pour payer moins cher. Inévitablement, le
salarié irait vers une autre entreprise dans un autre secteur.
M. Crochetière: C'est aussi l'idée qu'il y avait
dans cette proposition. Disons que le travail était, pour les autres
secteurs, payé 15 $ l'heure, par hypopthèse. On disait:
Négociez-nous un minimum de 10 $ avec un maximum de 15 $ où les
gens vont pouvoir aussi s'ajuster par région et en fonction des
périodes de la demande, soit par métier, soit par période
de l'année, pour que cela corresponde véritablement à ce
que ça nous prend pour pouvoir livrer le produit. On ne dit pas que
c'était la bonne solution. Cela n'a jamais été
étudié, nous semble-t-il, sérieusement.
M. Chevrette: C'est juste une réflexion
que je vais faire tout haut. Vous ne pensez pas que de tous les
salariés pour qui cela fait une quinzaine d'années qu'ils sont
dans l'industrie, le jour où vous abolissez le décret et que vous
voulez oeuvrer à l'intérieur d'une fourchette salariale comme
celle dont vous parlez, il n'y en a pas un qui, de son propre chef, va dire:
Oui, j'accepte de diminuer mon coût de vie?
M. Houle: Ce n'est pas sûr qu'il va dire cela. Dans
l'habitation, ce n'est pas sûr que ce sont des gars qui ont 15, 20 ou 25
ans. Ils sont tous devenus entrepreneurs. Les gens que M. le ministre cherchait
hier... Cette année, on en a ramassé 545 de ceux-là. Ce
n'est pas sûr... Peut-être que chez les briqueteurs ou d'autres
métiers il y a une moyenne d'âge.
M. Chevrette: Il en reste 38 000.
M. Crochetière: M. Chevrette, tantôt je vous faisais
état qu'une bonne partie de la main-d'oeuvre et c'est de cela dont se
plaignent aussi les syndicats, notamment, une bonne partie des travailleurs se
forment en société ou en corporation et s'associent parce qu'ils
sont conscients eux aussi que, sinon, il n'y a pas de travail. Ce ne sont pas
des étrangers qui constituent cette main-d'oeuvre d'entrepreneurs, ce
sont des anciens salariés.
M. Chevrette: Je continue sur la même veine. J'ai
remarqué dans ma propre ville qu'il y a beaucoup d'artisans ou de
salariés qui se sont regroupés, comme vous le dites, un ou deux
ou trois, qui se sont acheté un paquet de terrains, qui bâtissent
et, ensuite, revendent. Est-ce que c'est en train de se
généraliser?
M. Houle: Ce ne sont plus des artisans, parce qu'ils ne peuvent
plus correspondre à la définition. Ils deviennent des
entrepreneurs. Si c'est en train de se généraliser, je ne
pourrais pas vous le dire. Je n'ai pas de données. Il reste quand
même que le coût d'acquisition de terrains, le financement
d'infrastructure est rendu tellement élevé que cela ne peut pas,
à l'oeil, se généraliser tellement. Ce qui peut cependant
se produire, c'est que les salariés deviennent des entrepreneurs qui
commencent à monter leur entreprise en sous-traitance. C'est une
nouvelle voie d'accès en industrie et il ne faut pas le nier, c'est
comme cela. (18 h 15)
M. Rousseau: II ne faut pas se leurrer non plus. Quand on a
analysé la question du marché au noir, on a regardé tout
le phénomène de l'autoconstruction. On s'est rendu compte,
évidemment, que, dans la région de Montréal, le
phénomène de l'autoconstruction pouvait correspondre à un
pourcentage d'environ 20 % à 25 %; il me semble, en tout cas, ce n'est
peut-être pas tout à fait juste en termes de chiffres. Plus on
s'éloignait, plus on allait dans les milieux ruraux, le
phénomène de l'autoconstruction allait jusqu'à 70 % de la
production. Or, l'autoconstruction, ce ne sont pas les entrepreneurs qui
l'exécutent, c'est le propriétaire qui engage le salarié
de la CSN, de la FTQ, de la CSD et quî s'entend avec lui pour les samedi
et dimanche et les soirs. On laisse même son travail avec son
entrepreneur pour prendre ce travail et se faire payer en dessous de la table
à 10 $ et 12 $ l'heure, et c'est cela. Alors, le marché noir, il
va falloir commencer à le jauger un peu pour vraiment lui donner une
bonne définition.
M. Chevrette: Je suppose que ces gens font partie des 38 000 que
le ministre cherche.
M. Rousseau: Je ne le sais pas. De toute façon, les
statistiques par rapport à l'OCQ, le nombre de travailleurs, je n'ai pas
tellement cru à cela, ces histoires. Je sais qu'il y a sûrement un
bon nettoyage à faire dans cela. J'ai l'impression que, même parmi
les travailleurs, on devrait être en mesure de les identifier comme
entrepreneurs aujourd'hui.
Le Président CM. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: Oui, M. le Président.
Tantôt, vous avez fait part d'une inquiétude. Je n'ai pas bien
saisi le numéro de la loi, mais cela concernait la délivrance
d'un certificat de compétence à un salarié syndiqué
seulement.
M. Houle: C'était le premier alinéa de l'article 32
qui dit que c'est automatique à quiconque détenait un certificat
émis en vertu de l'article 36 de la loi. Or, cela se
réfère à des gens qui ont enregistré des heures
pour pouvoir voter ou faire un choix d'allégeance syndicale.
Automatiquement, cela exclut les entrepreneurs qui travaillent eux-mêmes
sur leurs chantiers, puisqu'ils n'ont pas d'allégeance syndicale.
M. Théorêt: Entre-temps, je pense que tout le
monde... En tout cas, pour ceux qui ne sont pas initiés comme moi
à la construction, on sait fort bien que c'est dans le domaine
domiciliaire, parce que nos voisins, nos amis, etc., voient ce fameux
marché au noir de la construction. Dans l'éventualité
d'une restructuration ou d'un secteur d'habitation bien défini, comment
voyez-vous cette structure? Vous dites: On va séparer le commercial et
l'industriel de l'habitation, mais qui en ferait partie? Quand
vous parlez d'habitation, est-ce que ce sont simplement les
résidences?
M. Rousseau: En fait, lorsqu'on parle du secteur de l'habitation,
on parle de quatre étages et moins.
M. Théorêt: Quatre étages et moins.
M. Rousseau: Par contre, on fait une certaine distinction
lorsqu'il s'agit de structure de béton ou autre.
M. Houle: C'est-à-dire qu'on parle de quatre étages
et moins pour la construction neuve, parce que, généralement,
c'est ce qui correspond, en raison des normes de construction, à des
bâtiments à ossature de bois. Cependant, pour les
réparations dans des structures de béton qui n'affecteraient pas
la structure... Si vous changez vos armoires de cuisine dans une
copropriété divise au douzième étage, on
prétend que cela aussi devrait faire partie de la définition du
secteur qu'on recherche. On ne prétend pas aller monter des "high-rises"
en béton de douze étages au centre-ville à des conditions
différentes. À ce moment-là, non, cela pourrait être
les taux du décret qui s'appliquent.
M. Théorêt: On voit de plus en plus que ceux qui ont
pignon sur rue ont deux ou trois étages, avec le premier étage
commercial. Comment cela entrerait-il dans votre structure?
M. Rousseau: On avait déjà avancé que
l'édifice serve essentiellement à l'habitation,
principalement.
M. Moule: Nous, notre définition, on l'a prise à
partir de la définition de la catégorie 4041 de la Régie
des entreprises en construction du Québec...
M. Théorêt: Résidence seulement.
M. Houle: ...qui parle d'utilisation principale à vocation
résidentielle, mais vous pourriez aussi faire référence
à la loi nationale sur l'habitation qui dit qu'il faut au moins que 80 %
de l'utilisation soit domiciliaire. On ne veut pas exclure le dépanneur
au sous-sol. On ne veut pas aller faire du commercial, on ne veut pas aller
construire des garages.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va?
M. Théorêt: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: J'aurais une question à vous poser qui
concerne plutôt les milieux fermés et isolés ou un petit
peu éloignés des centres. Dans la question des 500 heures, je me
demande si le problème d'obliger 500 heures de travail garanties pour
engager un apprenti, c'est vraiment une solution au problème. Par
exemple, vous avez un petit entrepreneur résidentiel, qui existe
là-dedans, qui vit dans un milieu où il y a environ 10 000
habitants et qui ne peut pas sortir de là. Il a besoin d'apprentis
briqueteurs. Comment va-t-il faire, dans la mesure où il faut que
l'apprentissage se fasse aussi dans le secteur dans lequel il est inscrit,
comment va-t-il faire pour être capable de garantir 500 heures, alors
qu'il a peut-être trois maisons à briqueter durant
l'été?
M. Rousseau: Oui, et fort possiblement que la majorité des
unités qui vont se construire dans ce coin-là, c'est de
l'autoconstruction.
M. Claveau: Mais je ne vois pas, à ce moment-là,
comment on pourrait se servir de cette clause de l'article 33, entre autres,
pour ouvrir le marché de la construction dans ces
conditions-là?
M. Houle: C'est parce qu'on présumait aussi que, dans ces
conditions, le bassin actuel de travailleurs faisait en sorte qu'on avait
peut-être moins besoin de faire entrer de nouveaux apprentis. Si vous
considérez le consensus qui s'était dégagé quant
à l'ouverture du bassin d'apprentissage pour l'habitation, il
était bien prévu que, même si un jour il y avait des
bassins, quant à nous, nous n'avions pas de limitation là-dessus.
C'était notre perception des choses.
M. Claveau: En tout cas! Peut-être pourrais-je poser une
autre question? Oui? Tout à l'heure, il y en a un d'entre vous qui
affirmait qu'il était obligé d'aller chercher quelqu'un pour
faire le plâtre, un autre pour poser la tôle et un autre pour poser
le calorifère sous les fenêtres. Il a probablement raison, mais je
pense aussi qu'il y a une donnée qu'il ne faut pas oublier et qui
pourrait peut-être aider aussi le ministre à trouver les 38 000
qui lui manquent, c'est que, dans le secteur résidentiel, si je ne
m'abuse, il y a beaucoup de travailleurs qui ont des cartes de
compétence dans différents secteurs et qui peuvent cumuler les
travaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand on parle du nombre, on parle
d'individus. On est conscient qu'il y en a qui ont jusqu'à cinq cartes
de qualification. Mais on parle du nombre d'individus. Cela ne m'aiderait pas
mathématiquement. Je vous remercie de l'effort!
M. Houle: Pour éclairer le député d'Ungava,
je pourrais peut-être lui dire que le gars qui est compagnon aujourd'hui
et qui aurait toutes ces cartes-là serait mauditement vieux! Cela prend
un minimum de 5000 heures dans le cas d'un charpentier-menuisier pour avoir sa
carte, cela prend 5000 heures pour pouvoir poser la latte, 5000 pour poser le
plâtre, si on dit que la moyenne d'heures est de 800 ou de 1000 - c'est
ce que j'ai entendu dire cette semaine - la moyenne d'âge peut bien
être élevée!
M. Claveau: Personnellement, je connais des gens de la
construction qui ont toute une panoplie de cartes pour travailler dans
différents secteurs.
M. Houle: Je ne suis pas sûr de cela.
M. Claveau: Pas plus que cela... Cinq, oui.
M. Chevrette: Si on dit 25 000 heures, cela fait dix ans,
ça!
M. Houle: C'est peut-être aussi parce que le
député fait référence à un marché
plus captif. Mais ici, la main-d'oeuvre s'inscrit traditionnellement dans une
spécialité et ensuite se cherche du travail là-dedans. Il
y a moins d'obligations de changer. Le charpentier-menuisier, normalement, va
travailler comme charpentier-menuisier et c'est assez rare que le poseur de
systèmes d'Intérieur va être à la fois poseur de
systèmes d'intérieur et charpentier-menuisier.
Le Président (M. Charoonneau): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Fortin: Depuis les deux dernières années, on a
vu des augmentations de prix d'environ 25 % ou 30 % dans certaines
régions, surtout dans le résidentiel. À votre avis,
pensez-vous que le fait que les bassins de main-d'oeuvre
spécialisée soient vides a contribué, en partie, à
ces augmentations?
M. Houle: Parlez-vous de la construction neuve ou de la
construction existante?
M. Fortin: Je parle de la construction neuve»
M. Houle: Dans la construction neuve, il est évident que,
si la main-d'oeuvre est plus chère, cela a un impact. Mais il faut aussi
considérer qu'il y a les matériaux. Je vous ai aussi parlé
tantôt des coûts d'acquisition des terrains, des coûts de
financement, des coûts de financement des infrastructures, Vous dire que
les 30 % d'augmentation ne tiennent qu'aux bassins de main-d'oeuvre, cela
serait faux. Cependant, c'est certain que cela a un impact, parce que c'est un
des éléments du coût.
M. Rousseau: II y a un impact qu'on a ressenti cette année
lors de la petite "grèvette" du mois de juin. On a aussi connu un
impact, parce qu'il y a eu une grosse demande. Il fallait faire la livraison
pour le 1er juillet et, compte tenu évidemment des impératifs
syndicaux de ce temps, il fallait effectivement terminer ces maisons.
On doit vous dire qu'il y a eu une surenchère à un certain
moment donné. L'entrepreneur général qui avait
débuté avec certains prix avait beaucoup de difficulté
à les garder lorsqu'il accordait des sous-contrats. Il y a eu une
pénurie de main-d'oeuvre dans te domaine des briqueteurs, d'ailleurs, le
ministre l'a mentionné ce matin. C'est vrai. C'est un fait. On l'a subi.
Au niveau du coffrage, c'était la même chose. Encore actuellement,
dans ces domaines, les employeurs ont beaucoup de difficulté à
obtenir de la main-d'oeuvre. Ce n'est plus 300 $ le mille, c'est 700 $ ou 800 $
le mille. C'est aussi clair que cela.
M. Fortin: Le travail des artisans à l'intérieur de
ces chantiers vient-il aussi diminuer, certains impacts ou auraient-ils
tendance, à l'ouverture des bassins, à vouloir adhérer
à cette main-d'oeuvre?
M. Houle: II faut bien définir ce qu'on entend pas
artisan, car il y a beaucoup de confusion. Le véritable artisan est la
personne seule qui travaille sans associé, avec ses propres outils. On a
cité le chiffre de 2200 artisans; alors, leur venue comme telle a
évidemment de l'importance, mais pas l'importance significative qu'on
voudrait lui donner. Là où vraiment - et, encore une fois, on l'a
dit tantôt - on peut parler d'un tampon, c'est lorsque les entrepreneurs
eux-mêmes s'associent. A moment-là, ils vont prendre des contrats
plutôt que d'avoir des paiements à l'heure, permettant de
réduire les coûts.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le
député? Je pense qu'on est rendu à l'étape des
remerciements. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, M, Houle,
M. Rousseau, M. le directeur qui êtes là depuis longtemps, on vous
remercie du temps que vous avez pris. On a pris plus de temps avec vous qu'avec
d'autres pour jaser de choses qui n'étaient pas nécessairement le
contenu du projet de loi devant nous. Nous avons retenu vos remarques quant au
contenu et nous prenons bonne note de vos remarques relativement à ce
qui n'est pas dans le projet de loi, mais qui fera l'objet de discussions dans
les
semaines qui viennent.
Vous avez soulevé et resoulevé des problèmes qui
causent, à vous et à vos membres, des problèmes
sérieux et qui peuvent en causer également aux consommateurs et
aux travailleurs. L'attitude que nous avons prise, c'est de chercher le maximum
de consensus, et dans le projet de loi devant nous - on sait combien c'est
difficile - et dans les autres qui suivront à la suite des deux tables
que nous avons mises sur pied. On ne retrouve que très rarement
l'unanimité. On la recherche tout le temps, mais les consensus sur les
principes et un certain nombre de consensus sur les modalités pourront
permettre d'améliorer une situation qui demeurera perfectible. Nous vous
remercions, en tout cas, quant aux principes, de l'appui que vous nous accordez
et, quant aux modalités, nous prenons bonne note de vos suggestions.
Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Je vous remercie. On aura sans doute l'occasion de
discuter d'autres sujets.
M. Rousseau: ...comme mot de la fin, je remercie le ministre du
Travail d'avoir invité toutes les associations patronales à se
prononcer. On espère que, lorsqu'il s'agira de relations du travail, on
aura aussi la même invitation.
Le Président (M. Charbonneau): Messieurs, merci de votre
participation. Oui, M. le député d'Ungava?
M. Claveau: Est-ce que je pourrais me permettre une petite
rectification? Tout à l'heure, j'ai dit que cinq cartes étaient
possibles. Celui qui a fait 2500 heures par année pendant dix ans, qui a
commencé à 18 ans peut avoir ses cinq cartes à l'âge
de 28 ans.
Une voix: Bravo!
Le Président (M. Charbonneau): Merci, messieurs, et bon
retour. Nous allons maintenant inviter les représentants de la Centrale
des syndicats démocratiques. (18 h 30)
Messieurs. Bonsoir M. Carey. Je vous demanderais d'abord de
présenter les gens qui vous accompagnent, d'une part. D'autre part, je
vous rappelle qu'on a un bloc d'une heure pour, à la fois la
présentation de votre mémoire et la discussion avec vous. Pour
commencer, vous avez quinze minutes pour la présentation de votre
mémoire ou autour de, comme on a dit tantôt.
Sans plus tarder, M. Carey.
M, Carey (Raynald): M. le Président, je vous remercie.
J'allais justement demander un verre parce que, si le ministre est aussi
agressif qu'il l'a été avec Jean-Paul Rivard, on va prendre de
l'eau.
Des voix: Ha! Ha! Ha! Une voix: Ah! Ah! Ah!
M. Théorêt: Je pensais que vous alliez être
aussi agressif que M. Rivard. Ha! Ha! Ha!
M. Paradis (Brome-Missiquoi): Je m'ajuste à mon
interlocuteur.
Confédération des syndicats démocratiques
M. Carey: M. le Président, je tiens à vous
présenter les gens qui m'accompagnent. D'abord, M. Claude Ginqras,
vice-président de la CSD. C'est lui qui va présenter le
mémoire. M'accompagnent aussi à ma gauche M. Raymond Lortie,
secrétaire de la CSD-Construction, et M. Ernest Lévesque en est
le vice-président. M. Gingras va vous présenter le
mémoire. On va essayer de le faire en quinze minutes. Cela pourrait
prendre seize minutes ou, comme je l'ai mentionné, une minute et demie
de plus, mais on va essayer de respecter le plus possible les directives que
vous nous avez données. Lorsque le mémoire sera
présenté, on espère être capable de répondre
aux questions que vous voudrez bien nous poser.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Ne vous
inquiétez pas pour le temps, à condition que cela se fasse selon
des normes acceptables. Allez-y.
M. Carey: Merci.
M. Gingras (Claude): M. le Président, M. le ministre,
messieurs et madame, membres de la commission parlementaire. Nous aurions
souhaité, bien sûr, être devant vous pour défendre de
nouveaux droits pour les travailleurs plutôt que de lutter pour maintenir
des acquis.
Le Syndicat des travailleurs de la construction du Québec (CSD)
et la centrale abordent le projet de réforme du gouvernement à
partir d'une critique et soumet 18 recommandations précises. La CSD
propose une réorientation majeure du rôle de l'État et des
parties dans la solution des problèmes graves de l'industrie. Notre
intervention ne se limite pas à la carte de classification, mais se
situe dans le cadre des questions de main-d'oeuvre prises dans leur ensemble.
C'est pourquoi notre mémoire traite de trois aspects particuliers: le
qualitatif, le quantitatif et les structures.
Vu par un travailleur de la
construction, l'aspect qualitatif touche essentiellement les
compétences: c'est la formation professionnelle qui est en cause. Le
projet de loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de
la construction accorde une place importante à la formation
professionnelle. Nous abordons le sujet de manière globale et, ensuite,
nous traiterons du financement.
Le syndicat et la CSD reconnaissent que la formation professionnelle est
indispensable pour assurer une main-d'oeuvre compétente et polyvalente,
mais le projet de loi ne répond pas à nos attentes ni à
celles du milieu.
Les changements proposés sont trop bureaucratiques.
Structurellement, ils ne changent pas l'essence de l'ancien régime. En
effet, le projet de loi maintient toujours une responsabilité
prédominante aux fonctionnaires des ministères de
l'Éducation et du Travail par rapport aux parties. Il y a là une
confusion entre la responsabilité de l'État et celle des
institutions gouvernementales. Nous ne nions pas la responsabilité de
l'État, mais nous n'acceptons pas que les institutions du travail et de
l'éducation détiennent toute la responsabilité, ne
reléguant aux parties qu'une participation insignifiante dans la
conception et la mise en oeuvre de l'ensemble de la formation professionnelle.
C'est cette distorsion qui empêche la satisfaction des besoins des
employeurs et des salariés, dans la situation actuelle.
L'expérience des 20 dernières années nous a
démontré que la qualité de la formation professionnelle
s'était dégradée, parce que les institutions scolaires
étaient inadaptées aux besoins des employeurs et des
salariés de l'industrie. On ne peut nier que le contrôle des
ministères sur la formation et la qualification professionnelles soit
une évidence et une expérience stérilisante. Pire encore,
il a produit un écart considérable et irréparable sur la
compétence de la main-d'oeuvre, parce que les exigences des institutions
gouvernementales sont disproportionnées par rapport aux besoins requis
par l'évolution technologique et les réalités du
marché du travail.
Malgré la structure consultative existante par la loi, les
institutions ont conduit les destinées de la formation à
l'impasse actuelle sans tenir compte de l'expression du milieu, que ce soit
à l'école pour la formation de base et à
l'éducation des adultes pour le perfectionnement, que ce soit au
ministère du Travail pour le contrôle de la compétence. Les
changements proposés par le projet de loi ne modifient pas ces
règles de jeu fondamentales.
Les amendements proposés en cette matière donnent
l'illusion que les parties seront responsables de la formation. C'est une
illusion parce que le changement ne porte pas sur le fond du problème,
c'est-à-dire sur la capacité des parties de gérer la
qualité de la compétence, mais plutôt sur la structure de
regroupement des parties. En effet, on propose aux parties de s'exprimer
désormais dans un autre cadre juridique et consultatif sans qu'elles
détiennent une autorité quelconque sur l'ensemble. Cette
dépendance des parties face aux ministères est d'autant plus
grave que le ministère de l'Éducation a déclenché
le processus de changement éducatif dans la formation professionnelle au
secondaire. Qu'est-ce que les parties ont eu à dire dans son plan
d'action qualitatif, entre autres dans sa décision de couper
péremptoirement 50 % des programmes de formation professionnelle tant
à l'école que dans le perfectionnement? Quelle sera la
responsabilité des parties dans le choix et la définition des
nouveaux programmes adaptés aux besoins du public? La formule des avis
au ministère n'offre aucune garantie aux parties d'intervenir avec
efficacité sur la qualité des nouveaux programmes. Les
éléments constitutifs de la compétence professionnelle ne
peuvent se définir dans les officines de la bureaucratie
gouvernementales. Ils doivent avoir leur origine dans le milieu et être
assumés par les parties. C'est ainsi que la conciliation entre les
besoins institutionnels et les besoins du marché peut être le
mieux servie. L'institution gouvernementale doit être au service du
milieu au lieu d'en être le pontife.
Le projet de loi comporte des lacunes au niveau du concept de la
formation, du contrôle de l'acquisition de la compétence et de la
lourdeur administrative dans la structure de regroupement des parties. Le
projet de loi ne définit pas la formation professionnelle et
néglige d'aborder la filière d'acquisition de la formation.
Comment les parties pourront-elles assumer la plénitude de leurs
responsabilités à l'égard de la formation de base à
l'école, de l'apprentissage, du perfectionnement et du recyclage? Est-ce
que l'acquisition de la compétence dans les 23 métiers
réglementés se fera par deux filières, soit par
l'école et ou par le cheminement de l'apprentissage? Est-ce que tout le
monde a les aptitudes pour travailler dans l'industrie? Ce sont des lacunes
majeures qu'on ne réglera pas en confiant seulement des
responsabilités consultatives au comité de formation en stipulant
qu'il a la tâche "d'élaborer des programmes relatifs à la
formation professionnelle, de même que de donner des avis sur toute
question dispensée... dans les établissements d'enseignement".
Quant à la lourdeur administrative, elle s'exprime principalement par la
création du comité administratif qui est un intermédiaire
entre la commission et le comité de formation. Par ce comité, on
ne raccourcit pas les
délais. Il y a une autre lourdeur par la disposition de l'article
85.3 par lequel on confie une responsabilité particulière
d'élaborer... après consultation du comité sur la
formation. Pourquoi compliquer par ces divers irritants alors qu'on a la
possibilité de simplifier?
Nos recommandations. Nous souhaitons qu'on définisse la formation
professionnelle en y insérant quatre éléments
constitutifs: la formation de base dispensée dans les
établissements scolaires, l'apprentissage, le perfectionnement et le
recyclage; que la formation professionnelle soit obligatoire pour tous les
métiers réglementés; qu'on procède à une
sélection des candidats par l'orientation professionnelle tant pour
accéder à un emploi dans l'industrie que pour le recyclage; que
la formation professionnelle soit confiée à la
responsabilité des parties de l'industrie; que le comité de
formation professionnelle soit l'organisme mandaté à cette fin;
que toutes les parties syndicales et patronales reconnues par la commission
soit habilitées à y participer automatiquement et que l'on
attribue, finalement, au comité toute l'autorité pour agir et
qu'à cette fin l'article 83.5 soit considéré comme une
fonction du comité de formation; que l'article 3.12 soit aboli et que sa
fonction soit dévolue au comité de formation; enfin, que les
critères de sélection soient sous sa juridiction de même
que la détermination des moyens de contrôle pour déterminer
les compétences de l'ensemble des métiers.
L'article 15 du projet de loi 119 porte à 1 % le plafond du
prélèvement effectué sur la rémunération des
salariés pour l'administration du décret en vigueur dans
l'industrie. Il en est de même pour la contribution des employeurs.
Actuellement, ces prélèvements sont de 0,05 % pour le
salarié et la même chose pour l'employeur. Le syndicat et la CSD
croient que cet article n'a pas sa raison d'être. Nous voulons
éviter que les travailleurs de la construction du Québec aient
à payer spécifiquement pour leur formation. Sur la base des
prévisions de l'OCQ pour l'année 1987, nous estimons que les
sommes en cause sont de l'ordre de 17 000 000 $ dont la moitié est
payable par les salariés. Il s'agit donc de sommes annuelles
importantes. Nous ne voyons pas pourquoi les vrais travailleurs de la
construction auraient à financer la formation servant à occuper
des emplois en dehors des chantiers.
Actuellement, au Québec, la formation professionnelle est
financée à même l'assiette globale des taxes, impôts
et autres revenus provinciaux, incluant, bien sûr, les transferts
fédéraux. Nous ne voyons pas pourquoi les travailleurs de la
construction auraient un traitement différent en payant
spécifiquement pour leur formation professionnelle. Comme l'article 15
du projet de loi demeure imprécis sur l'utilisation des sommes
recueillies grâce au nouveau plafond de 1 %, nous le considérons
inacceptable. Nous suggérons, bien sûr, que cet article soit
abrogé.
L'aspect quantitatif. Comme on le voit, le syndicat et la CSD proposent
sur l'aspect qualitatif un changement majeur dans le système de
formation professionnelle pour les métiers de l'industrie de la
construction. Mais un tel changement est incomplet en soi. Quel que soit le
secteur économique en cause, la valeur d'un système de formation
professionnelle dépend largement de la capacité de prévoir
les besoins à venir en termes de main-d'oeuvre. Forcément,
l'aspect qualitatif nous amène au quantitatif: les besoins. On aura beau
avoir le meilleur système de formation professionnelle pour la
construction, si on est incapable de prévoir les besoins futurs de
l'industrie, on n'est guère plus avancé. Pour traiter de ce sujet
il faut distinguer les trois composantes qui déterminent la
capacité de prévoir plus ou moins bien les besoins futurs de
l'industrie de la construction. Ce sont, entre autres, le contrôle du
bassin de la main-d'oeuvre, la connaissance de l'ouvrage à faire et
l'évolution technologique.
Nous touchons ici un des points majeurs du projet de loi 119, soit
l'abolition du certificat de classification. Le Syndicat des travailleurs de la
construction du Québec (CSD) et la CSD dénoncent l'intention du
législateur d'abolir le système de classification en vigueur dans
l'industrie de la construction au Québec: c'est de Pantiprévision
de maln-d'oeuvre, c'est de l'antiformation professionnelle.
Premièrement, il faut bien saisir l'ampleur de l'impact. Tous les
travailleurs de la construction seront affectés, autant les gens de
métier que les salariés de travail général, en
fait, les manoeuvres et les occupations diverses. Au milieu de novembre 1986 le
nombre de travailleurs de la construction était de 126 045; cela fait
énormément de monde quand on connaît les emplois
disponibles. Il faut rectifier une impression qui, semble-t-il, est l'une des
sources du projet d'abolition. On entend dire souvent que l'actuel
système de classification ferme les portes de l'industrie de la
construction. Pour nous, c'est faux. Voici une série statistique
tirée des rapports de l'OCQ qui indique le nombre annuel de certificats
de classification émis depuis 1978; c'est, en quelque sorte, la mesure
du nombre annuel de nouveaux arrivants dans l'industrie de la construction.
Vous avez le tableau des chiffres sur huit ans.
Depuis l'entrée en vigueur du règlement de placement, cela
représente 45 872 nouveaux travailleurs pour remplacer les
retraités et les départs, pour répondre à une
conjoncture économique favorable, bref, pour ajuster le bassin de
main-d'oeuvre aux
besoins des "donneurs d'ouvrage", parce qu'il faut considérer
que, durant cette période-là, H y a eu aussi une période
de crise économique où l'entrée était quand
même beaucoup moindre.
Par rapport à la totalité des 126 045 travailleurs
recensés à la mi-novembre, cela représente une proportion
de 36,4 %. C'est nettement significatif. Cela démontre que la carte de
classification permet un renouvellement significatif du bassin de
main-d'oeuvre. Les portes sont ouvertes! En y regardant de plus près, on
constate de plus que, depuis 1984, les nouveaux arrivants se sont
multipliés. De 1978 à 1983 il y avait en moyenne 2605
travailleurs par année. Depuis 1984 la moyenne s'est multipliée
par 3,9 % passant à 10 081 travailleurs, c'est-à-dire que le
système de classification s'est adapté à la reprise
économique, particulièrement depuis 22 mois. Les travailleurs de
la construction passent un maximum d'environ 40 ans de leur vie dans
l'industrie, soit de l'âge de 20 ans à l'âge de 60 ans.
C'est donc dire, par hypothèse, que cela prend 40 ans avant que le
bassin de main-d'oeuvre se soit complètement renouvelé. (18 h
45)
Avec la carte de classification, il est entré 45 872 travailleurs
en neuf ans. Â ce rythme, la main-d'oeuvre sera renouvelée
totalement en 25 ans, ce qui correspond à la réalité du
secteur. Cet aspect indique sans équivoque la nette capacité de
renouvellement que permet la carte de classification. Bref, il est faux de
prétendre que la carte de classification bloque l'entrée dans
l'industrie. La carte s'adapte à la conjoncture et permet un
renouvellement significatif du bassin de main-d'oeuvre.
Troisièmement, le Syndicat des travailleurs de la construction du
Québec et la CSO ne voient pas l'urgence d'une telle réforme du
système de classification. Comme on vient de le voir dans les
dernières années, le système a permis l'entrée d'un
nombre record de nouveaux travailleurs. De plus, le projet ignore un consensus
récent intervenu à l'une des trois tables de travail
formées par le ministre Paradis sur l'abolition du certificat de
classification. En effet, dans le rapport de la table de travail des non
qualifiés publié en mai dernier, le consensus se Ht comme suit:
Maintien d'un contingentement pour les non qualifiés dans l'industrie de
la construction. De même, dans notre esprit, la réforme que nous
vous proposons en matière de formation professionnelle est nettement
plus urgente. On veut ouvrir la porte toute grande, alors que la qualité
de la formation professionnelle est en pleine dégradation. Il serait
plus logique de faire la réforme que nous proposons en matière de
formation professionnelle et donner du temps pour que les résultats se
concrétisent avant d'aborder le système de classification.
Quatrièmement, le législateur doit absolument être
informé et conscientisé des risques et dangers d'un tel
chambardement de la classification. La réforme de la classification
contenue dans le projet de loi 119 comporte des effets négatifs dont
l'ampleur risque sérieusement d'ébranler la paix sociale et le
développement économique de l'industrie de la construction du
Québec, et Dieu sait qu'on peut s'en passer!
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que vous pouvez me
dire, à ce moment-ci, M. Gingras, de combien de temps vous avez besoin
pour compléter?
M. Gingras: Environ sept, huit minutes.
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que ça
va?
Des voix: Consentement.
Le Président (M. Charbonneau): Consentement. Ils demandent
sept, huit minutes.
M. Carey: On va couper des bouts, parce qu'on veut vous donner le
meilleur. N'oubliez jamais que les derniers rapports sont les meilleurs. Ce
sont ceux-là que vous allez retenir. Il faut les écouter comme il
faut.
M. Théorêt: Je voulais juste porter à votre
attention qu'il y a une heure au total. Donc, si vous prenez une demi-heure, il
reste une demi-heure pour les deux formations.
M. Carey: Je suis ici depuis hier matin et on a vu cela, mais il
est arrivé à des occasions que cela a pris un peu plus de
temps.
Une voix: On vous écoute.
Le Président (M. Charbonneau): Allez-y!
M. Gingras: Selon son expérience, le Syndicat des
travailleurs de la construction du Québec prévoit les
conséquences suivantes: En augmentant systématiquement le nombre
de travailleurs, le projet gouvernemental réduira les heures de travail
annuelles travaillées en moyenne par un travailleur de la construction.
En 1984, cette moyenne fut de 971 heures, ce qui représente environ la
moitié d'une année normale de travail à peu près
dans tous les autres secteurs.
Pourquoi réduire encore plus cette moyenne déficiente au
départ? Cette diminution aura pour effet de créer de la
concurrence sauvage entre les travailleurs, ouvrant la porte à des actes
inacceptables:
violence, "racket de placement", pots-de-vin, etc. En particulier,
l'effet de la concurrence sauvage atteindra les travailleurs de 50 ans et plus,
c'est-à-dire les plus âgés, usés dans certains cas,
ou accidentés; bref, les travailleurs moins compétitifs, comme le
disent certains employeurs. Faut-il rappeler qu'en 1985 l'âge moyen des
travailleurs était de 38,7 ans dans l'ensemble et de 42,8 ans dans le
cas spécifique des gens de métier? Cela confirme qu'il est
réaliste de prévoir des dangers à ce niveau.
L'abolition de la classification est un affront pour les travailleurs de
la construction. On détruit la seule mesure répondant à un
minimum de règles d'ancienneté. En diminuant les heures
travaillées pour chacun, l'abolition de la classification réduit
le revenu annuel moyen -des travailleurs de la construction causant des
problèmes d'appauvrissement et de dépendance sociale. À
remarquer que ceia ne touche pas uniquement le salaire, on attaque, entre
autres, l'accessibilité à des avantages sociaux où un
minimum d'heures est obligatoire pour y avoir droit: entre autres, l'assurance
collective incluant l'assurance-maladie, l'assurance-salaire et l'assurance-vie
des travailleurs. Dans le cas des travailleurs âgés, cet
appauvrissement s'accentuera à la retraite. L'abolition de la
classification risque en outre d'empirer le problème du travail au noir.
Cette abolition ne créera pas' d'ouvrage; elle risque plutôt de
créer des attentes non comblées qui viendront grossir les rangs
du travail au noir, c'est-à-dire le travail illégal face au
décret, au placement, aux normes de sécurité, de
qualité, de compétence, face à la fiscalité.
L'abolition de la classification risque nettement de ralentir la
productivité de l'industrie; noyés par une vague de nouveaux
arrivants issus d'un système de formation déficient, les
chantiers ressentiront nettement une baisse de productivité. L'abolition
de la classification risque en outre d'introduire le patronage des "jobs". Les
bureaux de députés deviendront-ils les nouveaux centres de
main-d'oeuvre du Québec pour l'industrie de la construction? Poser la
question, pour nous, c'est y répondre.
Appauvrissement, chômage accru, frustration quant à
l'ancienneté, compétition sauvage entre travailleurs, violence,
patronage, tout est en place avec le projet de loi 119 pour déstabiliser
sérieusement la paix sociale et le développement
économique dans l'industrie de la construction.
La connaissance des besoins de notre industrie. En définitive,
l'actuel système de classification permet le renouvellement du bassin de
la main-d'oeuvre ainsi que son adaptation à la conjoncture
économique dans l'industrie. Le système de classification permet
aussi de rendre possible et de faciliter notre capacité de
prévoir les besoins, élément essentiel à un
système efficace de formation professionnelle. Mais ce n'est pas
suffisant. La prévision des besoins nécessite qu'on soit capable
d'estimer le volume d'ouvrage à venir. Il faut planifier la
réalisation des travaux de construction et dégager de cette
planification les besoins requis en main-d'oeuvre.
Sur ce point, la situation québécoise est paradoxale.
D'une part, il ne se fait pratiquement pas de planification des travaux.
Pourtant, d'autre part, les institutions et organismes publics et parapublics
jouent un rôle fondamental dans la conjoncture et le développement
de l'industrie. L'Etat possède des outils précieux de
planification des travaux mais il ne se sert absolument pas de ces outils.
L'Etat ne prend pas ses responsabilités à ce niveau; nous vouions
que cela change. Parmi les outils que nous préconisons, vous en avez une
liste: les organismes ont quand même un mandat très important
vis-à-vis des investissements.
Bref, le syndicat et la CSD croient que l'État possède les
moyens requis pour débloquer la question de la planification des
travaux. Le syndicat et la CSD réitèrent une proposition qu'ils
préconisent depuis pratiquement cinq ans: la création d'un
secrétariat à la planification des travaux de construction. Dans
notre esprit, nous avons établi un fonctionnement de ce
secrétariat...
Pour compléter notre capacité de bien prévoir les
besoins de l'industrie, il est essentiel de se pencher sur les changements
technologiques qui s'y produisent. L'évolution technique et
technologique emprunte différentes formes dans l'industrie de la
construction: introduction de nouveaux matériaux, de nouveaux
équipements, de nouveaux procédés, accroissement de la
préfabrication. Il est essentiel de se pencher sur cette question afin
d'adapter continuellement le contenu de la formation professionnelle et afin
d'assurer la concordance qualitative entre le bassin de main-d'oeuvre et les
besoins de l'industrie.
Par nos remarques et positions, nous visons essentiellement un double
objectif: alléger les structures et limiter l'ingérence politique
dans le fonctionnement des organismes. Ce sont nos remarques par rapport aux
structures.
Suivant l'article 3.2 du projet de loi 119, le pouvoir
discrétionnaire du ministre serait pratiquement entier dans la
désignation des membres du conseil d'administration de
l'éventuelle CCQ. Pour le syndicat et la CSD, c'est abusif et
inacceptable. Les parties sont limitées à un rôle
consultatif secondaire dans le projet.
Le Syndicat des travailleurs de la construction du Québec (CSD)
est une association représentative. Cette réalité est
reconnue, notamment à l'article 17 de la loi.
Rappelons que cet article reconnaît comme représentative
une association regroupant au minimum 5 % des salariés de l'industrie.
Cet article s'applique actuellement à la désignation des
représentants syndicaux au comité mixte de la construction.
En vertu de cette reconnaissance, le syndicat CSD n'a pas à
quémander sa place au ministre. C'est un droit reconnu. Nous voulons que
l'article 17 de la loi actuelle s'applique intégralement à la
désignation des associations syndicales représentatives
appelées à siéger au conseil d'administration de
l'éventuelle CCQ.
Concernant la création d'un comité administratif sur les
relations du travail, notre position est la même que celle prise au
début du présent mémoire dans le cas du projet du
comité administratif sur la formation professionnelle.
Sur la question des relations du travail, il existe actuellement une
structure appelée le comité mixte de la construction. Nous ne
voyons pas la nécessité de doubler la structure en créant
un comité administratif. Nous croyons que ce comité administratif
proposé n'a pas sa place et que l'actuel comité mixte est en
mesure d'assumer la responsabilité dévolue au comité
administratif prévu au projet de loi 119.
Alors, voilà en gros, messieurs et mesdames les membres de la
commission parlementaire, les recommandations que la CSD formule face au projet
de loi 119, qui, à notre avis, est un net recul pour les travailleurs de
l'industrie de la construction.
Le Président (M. Charbonneau): Alors, messieurs, merci. M.
le ministre,
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je vous remercie pour votre
excellent mémoire. Je vous dirai qu'en ce qui concerne l'argumentation
je partage et je vais identifier les propos que vous nous avez tenus. Sur un
autre plan, je ne les partage pas et je vais tenter de vous expliquer pourquoi,
en vous laissant la chance peut-être de me convaincre. Il n'est pas
encore trop tard. Ce n'est pas terminé. J'ai été aussi
attentif à votre mémoire qu'à ceux de toutes les autres
parties qui sont venues devant nous.
Sur le plan de la formation, en ce qui concerne le langage, nous nous
entendons. Dans le passé - je ne fais pas un blâme gouvernemental,
on peut remonter à plus de dix ans s'il faut, je ne veux pas que ce soit
de la partisanerie politique - le ministère de l'Éducation et le
ministère de la Main-d'Oeu-vre n'ont carrément pas fait le
travail qu'ils auraient dû faire quant à la formation des
travailleurs dans l'industrie de la construction. Là, où je peux
avoir des problèmes c'est quand vous nous dites que le système
proposé ne change rien. Quand on regarde les fonctions de la commission
en ce qui concerne la formation des travailleurs, l'influence que la commission
aura à partir de la rédaction actuelle du projet de loi et
à partir de l'estimation des besoins, le nombre de pupitres dans les
écoles... C'est à titre consultatif, vous avez raison. Je ne
prétendrai pas le contraire. Vous l'avez bien indiqué. J'ai
également indiqué aux autres parties que ce serait
peut-être souhaitable que ce soit davantage, mais pour le moment c'est
cela, en ce qui concerne l'école.
 titre non pas consultatif, mais à titre de participant et
de décideur en ce qui concerne la main-d'oeuvre, la formation sur les
chantiers, avec le rôle d'homologation strictement au ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécunté du revenu - il faut bien se
comprendre - à ce titre là, la commission n'a pas simplement un
rôle consultatif, mais un rôle plein et entier. Le ministère
ou le ministre ne s'est conservé qu'un rôle d'homologation. Je
saisis que vous êtes en demande - et je vais vous poser la question
rapidement, en souhaitant une réponse rapide - afin que le
ministère de l'Éducation fasse la même chose que le
ministère de la Main-d'Oeuvre. Est-ce que je vous comprends bien?
M. Gingras: C'est exact. C'est ce qu'on préconise.
Antérieurement, si vous regardez la formation professionnelle qui se
faisait dans l'industrie de la construction - on est obligé ici de
remonter à plusieurs années - il y avait un réseau
d'établi à partir de ce qu'on appelle les anciennes
définitions de décrets qui existaient à ce moment et des
centres d'apprentissage qui existaient dans cette industrie. C'était la
profession qui déterminait le contenu de la compétence de
l'apprentissage, qui faisait l'évaluation des personnes en formation et
qui émettait des certificats de compétence pour attester de la
compétence des gens du milieu. Le gouvernement, à ce moment,
n'agissait que comme soutien et comme appoint, si vous voulez, en termes de
formation pour remplir des besoins financiers, bien sûr, et remplir aussi
des besoins qu'on appelle législatifs en termes de
réglementation. C'était constamment à partir de ce que les
parties décidaient. Le ministre n'était pas impliqué comme
vous semblez vouloir le faire. Il n'était pas impliqué
nécessairement dans le processus de décision par rapport à
la réglementation, mais il était là pour sanctionner, s'il
trouvait qu'il était d'intérêt public de sanctionner cette
réglementation.
C'était la même chose pour la formation, quand on parle de
l'aspect qualitatif. Sous cet aspect, on avait nos propres centres de formation
professionnelle où on dispensait nos propres cours de formation
professionnelle, sans avoir à les faire accepter par le ministère
de l'Éduca-
tion, d'aucune façon. Cela nous permettait d'innover en
matière de techniques de formation dans l'industrie de la construction
pour adapter continuellement cette formation aux véritables besoins de
l'industrie, ce que nous ne pouvons pas faire avec le ministère de
l'Éducation. Cela semble être une chasse gardée de la part
du ministre de l'Éducation d'assurer quand même à
l'ensemble de sa clientèle la possibilité d'avoir accès
à toute la gamme des programmes de formation qui sont à la
disposition du public. Dans ce sens-là, cela ne nous permet pas
d'assumer un contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre à former et
cela ne nous permet pas d'assurer un contrôle qualitatif de la formation
à dispenser. (19 heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je partage votre opinion
jusqu'à un certain point. Vous n'avez pas ou les parties n'ont pas -
parce qu'elles sont majoritaires à la commission - de pouvoir de
décision quant au ministère de l'Éducation, si je peux
utiliser cette expression, mais sur le plan quantitatif, quelqu'un en
autorité au ministère de l'Éducation et siégeant
à la commission... Je peux me tromper, mais que celui qui ne s'est
jamais trompé me lance la première pierre, comme on dit:
lorsqu'il y aura des estimations de besoins qui seront faites par les parties,
supposons que les parties en viennent à la conclusion que, dans trois ou
quatre ans, les estimations des besoins sont de tant de milliers de
travailleurs, de 1500, 2000 ou 2500 nouveaux travailleurs mais que pour ouvrir
le nombre de pupitres, le ministère de l'Éducation se fout de la
recommandation de la commission et décide d'en ouvrir 15 000, il va y
avoir quelqu'un qui aura des explications à fournir sur la place
publique, quelque part. Je me demande ce qui va les amener à faire cela.
Je ne vous dis pas que ce ne serait pas plus rassurant, sécurisant si ce
n'était pas un pouvoir décisionnel qui appartenait au
ministère de l'Éducation, mais un pouvoir d'homologation pour les
travailleurs. Je ne dis pas que vous n'avez pas raison de le réclamer;
je vous dis que j'ai pris un système où le ministère de la
Main-d'Oeuvre et celui de l'Éducation ne se parlaient pas, où
aucun des deux ne parlait aux parties, avec les résulats qu'on a connus.
Je fais des efforts...
M. Carey: Cela part d'où, la formation professionnelle,
pour vous? Nous vous demandons...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Où se fait-elle?
D'où part-elle?
M. Carey: ...de dire d'abord aux parties dans votre projet de loi
ce qu'est la formation professionnelle. On pensait qu'ensemble on aurait pu
décider ce que c'est. Quant à nous, cela part de l'école.
Notre intention est celle-là. Mais si celle du ministre est que cela
part de l'école, donnons une définition de la formation
professionnelle. D'abord, dans la loi, on saura où cela commence, parce
que l'ancienne loi sur la qualification professionnelle ne parlait pas de
formation ni de cours à l'école, mais d'apprentissage. On a
commencé par l'apprentissage, il y a une distinction. Vous comprendrez:
on a lu le mémoire qui nous a été présenté
par votre collègue, le ministre de l'Éducation. Il dit qu'il y a
252 programmes et que, dans cinq ans, il veut les réduire de 50 % et que
tout est en marche. On a aussi lu cela. Les gens qui sont là-dedans
donnent les cours et sont habilités à faire de la formation. Il y
a des professeurs ici, qui n'aimeront peut-être pas cela, ce qu'on peut
penser. Mais on a l'impression que les gens qui vont être
transférés pour donner les cours ne seront pas capables de les
donner, exactement comme vos fonctionnaires ne sont pas capables de passer les
examens de qualification. Il y a un problème quelque part. J'ai
vécu cela.
Je pourrais vous conter une belle expérience. J'ai fait passer
des examens de qualification lorsqu'on faisait de la formation professionnelle,
je sais ce que c'est.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas m'obstiner avec
vous là-dessus. Sur les carences et les problèmes, je pense qu'on
partage le même avis. Sur les solutions, vous avez une approche qui dit:
M. le ministre, cela n'a pas marché, le ministère de
l'Éducation et celui de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu, Ôtez-moi cela de là et laissez les parties, elles vont
faire l'ouvrage et mettez cela simple, pas trop structuré, pour qu'on se
comprenne bien. C'est le message que vous me lancez.
M. Carey: Oui, sauf qu'on...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne dis pas que votre message
n'a pas de bon sens. Je vous dis strictement que le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu -je prends
peut-être un ancien ministre à témoin - ne peut pas aller
légiférer dans le domaine de l'éducation.
M. Carey: Je voudrais seulement vous dire en toute
simplicité, M. le ministre, ce qu'on demande. D'abord, on voudrait que
les petits comités administratifs ne soient pas là. Concernant le
comité de formation professionnelle, on demande qu'il ait un pouvoir de
décision comme l'Office de la construction, c'est-à-dire le
comité mixte de la construction, en a un vis-à-vis des avantages
sociaux. On ne veut pas que ce
comité de formation professionnelle se fasse - je ne sais pas le
mot exactement - virer, changer, triturer ses recommandations par le conseil
d'administration. On dit que c'est un comité' exactement comme le
comité mixte et qu'il devrait avoir un pouvoir de recommandation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, j'ai un
problème; vous êtes le deuxième qui m'en parlez, je vais
vous donner la même réponse qu'au premier. Si le comité
mixte ou le comité des relations du travail ou le conseil consultatif de
la main-d'oeuvre ou le comité administratif de la main-d'oeuvre a des
pouvoirs de décision, ce que je fais, je crée cinq organismes et
vous allez être le premier à revenir en commission parlementaire
accuser le ministre du Travail d'avoir créé une affaire bien
compliquée. À ce moment-là, quand c'est autonome, que cela
a des pouvoirs décisionnels à tous les niveaux, cela s'appelle un
organisme gouvernemental ou paragouvernemental. Au ministère du Travail
comme dans plusieurs autres ministères, à un moment donné,
il y en a trop. On tente d'en avoir moins. Cela va dans le sens contraire des
orientations gouvernementales. Je ne peux pas créer un organisme qui
s'appelle comité mixte et un organisme qui s'appelle comité
consultatif avec des pouvoirs décisionnels, des comités
administratifs avec des pouvoirs décisionnels et une commission de la
construction avec des pouvoirs décisionnels. Si j'additionne, j'ai cinq
organismes avec des pouvoirs décisionnels, donc j'ai cinq organismes
gouvernementaux créés soit en vertu d'une loi à cinq
volets de création ou de cinq lois différentes à
l'Assemblée nationale du Québec. Cela ne rejoint pas trop les
principes de simplification.
M. Gingras: Je m'excuse, mais ce n'est pas du tout le sens de
notre recommandation. Quand on recommande des pouvoirs décisionnels
relativement à la formation professionnelles on ne veut pas que cela
devienne un nid, un fourre-tout où l'on discutera de n'importe quoi en
dehors de ce que l'on appelle l'aspect professionnel, qui est quand même
un mandat très important pour l'industrie de la construction. On pense
que les personnes les plus aptes à prendre la quasi-décision en
matière de formation professionnelle, ce sont celles qui
siégeront au comité de formation professionnelle et qui
transmettront - probablement à la commission le résultat de leurs
travaux pour faire le cheminement requis avec le ministère du Travail.
Ce n'est pas le conseil qui va tout triturer, qui va tout changer sans avoir
des motifs. Il devra justifier les travaux de ce comité; c'est dans ce
sens et dans cette perspective.
C'est la même chose au chapitre des relations de travail. Quand on
va discuter des relations de travail au comité mixte, on ne veut pas se
faire renvoyer la balle et être obligé de la retourner au conseil
d'administration continuellement, sur le même sujet, après avoir
pris des décisions. On veut que cette commission assure le suivi,
d'autant plus qu'elle a une responsabilité, quand même, beaucoup
plus large que ces deux aspects. Il y a de la gestion à faire, il y a
des choses à faire en dehors de tout cela. Il est, quand même,
important de souligner que les structures ne doivent pas être uniquement
des structures consultatives dans cet appareil; elles doivent être des
structures quasi décisionnelles, avec ce que cela comporte. Si on ne
veut pas donner suite à leurs recommandations, que l'on ait au moins la
décence de justifier pourquoi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que vous comprenez ma
marge aussi. Si je donne des pouvoirs décisionnels, je suis
obligé de créer des organismes. C'est le sens de votre
recommandation. Il faut que je donne les pouvoirs les plus décisionnels
possible sans multiplier les organismes.
M. Gingras: Sans multiplier les organismes, c'est exact. Je
voudrais revenir à une partie de ce que vous mentionniez tout à
l'heure. Vous disiez qu'on ne se parlait pas au ministère de
l'Éducation et au ministère du Travail dans le cadre de la
formation professionnelle. Je peux vous dire, pour avoir suivi le débat
depuis quelques années, qu'il y a quelques années que l'on se
parle, mais on ne s'écoute pas. C'est toute la différence. C'est
pour cela que l'on vous dit: Ne nous proposez pas une autre structure pour se
parler et ne pas s'écouter; on ne marche pas, c'est cela. On va tout
simplement poursuivre exactement le même exercice dans lequel on est
impliqué depuis douze à quinze ans.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous me
concédez, au moins, le fait qu'en ce qui concerne le ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, ce sont des
pouvoirs d'homologation en matière de formation qui sont
conservés et que les responsabilités pleines et entières
sont remises au conseil d'administration et au comité de...
M. Carey: Je dois vous dire que depuis hier matin je vous ai
entendu répéter cela continuellement, mais j'ai de la
difficulté à le trouver aussi clairement exprimé que cela
dans le texte.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va y aller au texte.
M. Carey: Je suis allé à la même école
que les autres qui sont passés avant moi et ils vous ont tous dit
cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va y aller au texte. S'il y a
une difficulté, on va prendre le temps. Je vais vous
référer au chapitre VII.l, "Formation professionnelle", du projet
de loi. C'est à la page 14, l'article 85.3: "La commission - on pourrait
ajouter de la construction du Québec - élabore des programmes
relatifs à la formation professionnelle après consultation du
Comité sur la formation et les soumet à l'approbation du ministre
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu." Si ce n'est pas
cela un pouvoir d'homologation... Tout ce qu'il fait, c'est qu'il reçoit
des programmes de la commission et il les approuve ou il ne les approuve
pas.
M. Carey: Pourquoi ne dit-on pas que la commission prépare
ses règlements et les fait accepter par le ministre de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce ne sont pas des
règlements, ce sont des programmes de formation. Si c'étaient des
règlements, on pourrait l'écrire.
M. Carey: Ils vont conduire à des règlements.
Une voix: Oui, c'est exact.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous pouvez consulter vos avocats.
J'ai consulté...
M. Carey: II n'y a pas d'avocats chez nous. On est assez
mêlés comme cela.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Gingras: M. le ministre, sur cette partie, il est sûr
que vous tentez d'interpréter l'article 85.3 par un pouvoir
d'homologation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Gingras: Quant à nous, ce n'est pas dit comme cela et
ce n'est pas aussi précis que vous le dites. Cela ne transparaît
pas dans le texte. On a vu des textes pratiquement identiques par rapport
à d'autres règlements, par rapport à d'autres questions.
Quand on parle d'approbation du ministre, cela signifie que le ministre a
à peu près tous les droits, celui de ne pas donner suite, celui
de donner suite...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, je vais...
M. Gingras: ...celui de changer...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous donner...
M. Gingras: ...celui d'interpréter.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...l'exemple de ce que vous dites.
C'est l'article suivant.
M. Gingras: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est l'article 85.4. Vous allez
voir comme c'est différent de l'article 85.3. "La commission donne au
ministre de l'Éducation des avis sur toute question relative à la
formation professionnelle dispensée dans des établissements
d'enseignement après consultation du Comité sur la formation."
C'est exactement ce que vous venez de dire.
M. Gingras: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ministre peut faire, une fois
qu'il a reçu l'avis, ce qu'il veut. Mais l'autre avant, ce
n'était pas cela. L'autre avant, c'est: "La commission élabore
des programmes..." et tout ce que le ministre peut faire, c'est les
approuver.
M. Gingras: Oui, mais là-dessus, on ne s'entend pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a une grosse
différence de rédaction.
M. Gingras: On ne s'entend vraiment pas sur
l'interprétation. D'ailleurs, on vit dans le milieu réglementaire
depuis, quand même, assez longtemps pour savoir ce qu'on peut faire avec
les règlements. Si vous aviez inclus dans l'article 85.3 que, si le
ministre ne donne pas suite au projet présenté par les parties,
il doit justifier sa position, à ce moment, cela équivaudrait
peut-être à une espèce...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Il ne pourra pas.
M. Gingras: ...de pouvoir d'homologation. Mais, si vous ne
faites...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est ouvert.
M. Gingras: ...pas cette démarche, à ce
moment-là, pour nous, c'est exactement ce qui se passe par rapport
à tout autre règlement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est ouvert à un
amendement dans ce sens-là. Cela va?
M. Carey: On va vous accorder une heure. Il n'y a pas de
problème.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes bien gentils. Dans
ma minute, je vous dirai que, sur le plan quantitatif, je vais vous le dire le
chiffre de 45 000 que vous avez cité - je comprends que vous l'avez pris
à l'OCQ - apparaît, à sa face même, comme un chiffre
valable, sauf qu'à partir des 99 codes subdivisés dont je vous ai
parlé hier, considéré comme un nouveau certificat, c'est
quelqu'un qui passe du code 98 au code 94. C'est une "réentrée".
À ce moment-là, vos données sont complètement
faussées et cela fausse toutes les données jusqu'au
renouvellement plein et complet de la main-d'oeuvre. Je ne veux pas faire une
guerre de chiffres avec vous, mais je vous indique qu'à travers les 99
codes d'entrée... Je vous le souligne, je ne veux pas
révéler nos conversations, mais quand on s'est rencontré,
vous pensiez qu'il y en avait environ 40. Il y en avait environ 99. Cela passe
d'un à l'autre et c'est considéré comme un nouveau. Ce
n'est pas un nouveau. Quand on base une discussion à partir d'un chiffre
comme cela, le reste de la discussion dérape et on ne s'entendra
jamais.
M. Carey: On ne nous avait pas dit, M. le ministre... Je pensais
qu'il y en avait 47. Je ne savais pas qu'il y avait un code pour les 80 ans et
plus et pour ceux de nous de 15 ans, sauf que j'ai aussi parlé avec des
gens de l'OCQ, depuis que je vous entends poser cette question. On va les
mettre en boîte pour qu'ils se confessent tout à l'heure. Ils vont
nous dire les mêmes choses qu'à tout le monde. Apparemment, c'est
l'identification de travailleurs, ce ne sont pas des codes d'entrée.
Après que les gens sont entrés, ce sont des codes qui les
identifient. Il y en a peut-être un qui dit que vous avez le petit doigt
coupé, il y en a peut-être un autre qui dit une autre affaire. Il
y a 97 ou 99 identifications d'individus après qu'ils sont
entrés. C'est ce qu'on m'a expliqué. Vous comprendrez qu'on ne
nous donne pas la clé de la machine qui donne tous les chiffres à
l'OCQ.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne l'ai pas, non plus.
M. Carey: C'est parce que je n'ai pas le monopole syndical
encore.
M. Gingras: Cela n'enlève pas, M. le ministre, que, par
rapport au contrôle quantitatif, nous croyons fondamentalement que, si on
n'applique plus aucun contrôle quantitatif sur la main-d'oeuvre, c'est
qu'on ne remplit même pas notre mission et notre obligation en termes de
formation professionnelle. Cela inclut aussi les travailleurs qualifiés.
Or, qu'on perfectionne le contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la- construction, on n'est absolument pas contre cela.
D'ailleurs, on dénonce actuellement certaines carences de l'application
du système quantitatif. Ce n'est pas en abolissant le contrôle du
bassin à sa base même qu'on va régler ces problèmes.
On va les multiplier. C'est cela, notre prise de position par rapport au
contrôle quantitatif. (19 h 15)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Juste en réplique
très brève. II n'y a pas d'abandon du contrôle quantitatif.
C'est le critère qui est changé. Je pense qu'on peut comprendre
cela quand on le lie à la formation, quand on parle des estimations des
besoins, du nombre de pupitres dans les écoles, du nombre de
travailleurs qu'on forme, etc. Si on veut apporter des amendements à
cela, ce sont des amendements sur les technicités, mais sur le principe
de laisser le bassin ouvert à tout le monde...
M. Gingras: Quand vous préconisez l'émission de
cartes...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai lu cela et, si j'étais
un travailleur, je serais inquiet.
M. Gingras: Oui, mais quand vous préconisez la
possibilité que tout détenteur d'un certificat de qualification
entre sur le marché du travail, à qui pensez-vous ouvrir la
porte?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Prenez les chiffres, en tout cas,
les chiffres qu'on m'a donnés, signés par les plus hautes
autorités, parce que je n'ai pas la clé du MMSR, le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
ni de l'autre ministère, mais vous ouvrez la porte... Vous pouvez faire
vos calculs, vous avez 98 000 individus - parce que certains en ont plusieurs -
qui détiennent des certificats de qualification au niveau du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
et, là-dedans, vous pouvez en soustraire un peu pour certaines raisons.
Au niveau du ministère du Travail, de l'OCQ, vous avez 120 000 permis de
travail. Il y a une Interrelation entre les deux. Si vous tenez pour acquis que
ces chiffres sont exacts et que vous ne tenez pas compte des 40 000 sur
lesquels on s'est entendu pour dire qu'ils posent des difficultés, vous
parlez d'à peu près 30 000, alors qu'on en a laissé entrer
18 000 cette année à partir de quels critères?
M. Gingras: Sauf que cela inclut les
travailleurs non qualifiés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, 22 000.
M. Carey: M. le ministre, une des préoccupations qu'on a
entendues ici dans les remarques que vous avez faites aux autres associations -
cela a l'air d'être préoccupant - c'est que la moyenne d'âge
des travailleurs de la construction augmente. Je vais prendre deux minutes pour
essayer de voir ce que cela veut dire. Deux minutes, M. le ministre! Est-ce
qu'on peut s'entendre pour dire qu'un travailleur de la construction entre sur
le marché à 20 ans? Est-ce qu'on peut s'entendre pour dire qu'il
va sortir du marché à 60 ans? La moyenne, c'est 40 ans. S'ils
sortent avant 60 ans, c'est parce qu'on les a "maudits" dehors avant. La
moyenne est là. Vous m'avez fait une petite grimace tout à
l'heure quand on a dit qu'on renouvellerait la main-d'oeuvre dans 25 ans, tel
qu'on le préconise avec le système actuel. C'est encore trop.
Qu'est-ce qu'il va arriver aux travailleurs? On va en parler de cela pour
l'entrée, pour arriver au quantitatif, parce que cela m'inquiète.
Que va-t-il arriver des travailleurs de 50 ans qui sont ceux qui ont les
meilleures mains dans la construction? Des gens qui ont des mains comme les
miennes. Ce n'est pas pour me vanter, mais ce sont de bonnes mains. Des gens
qui ont appris leur métier dans le meilleur temps où se faisait
la formation professionnelle. On va les laisser de côté. Que
vont-ils faire? Ils vont aller travailler pour un plus petit salaire, mais pour
plus d'argent dans leurs poches. Il ne faut pas oublier cela. Un plus petit
salaire, mais plus d'argent dans leurs poches! Cela veut dire tous les
impôts qu'on ne paie pas et ainsi de suite.
On vous a parlé des problèmes que cela pouvait poser quant
à la formation. Qu'est-ce qu'on va faire par rapport à cela?
Est-ce que le Parti libéral, dans son programme, a pensé à
diminuer l'âge de la retraite pour les travailleurs de l'industrie de la
construction? Si on n'a pas pensé è diminuer l'âge de la
retraite, si on n'a pas une formule pour diminuer l'âge de la retraite...
J'ai eu envie de pleurer quand j'ai entendu M. Daoust parler de ses monteurs
d'acier de 47 ans et dire qu'ils étaient trop vieux pour être
monteurs d'acier. Mais maudit! Qu'est-ce qu'ils vont faire après 47 ans
s'ils ne sont plus capables d'être monteurs d'acier? M. Daoust, avec son
AECQ, qu'est-ce qu'il fait pour dire quelle orientation on prend avec les gars
de 47 ans? Je vais faire un petit exercice très rapide ici. Vous
êtes une quinzaine de parlementaires. Mettez-moi donc votre moyenne
d'âge sur la table et, si vous dépassez 40 ans, on vous remplace!
Quand on parle de 40 ans, c'est la moyenne entre 20 ans et 60 ans!
M. Chevrette; On est seulement trois en haut de 40. Il y a Damien
qui est dans les 70 ans.
Des voix: Ha! Ha!
M. Carey: C'est la moyenne entre 20 ans et 60 ans. L'Association
de la construction de Montréal, M. le ministre, la première
association d'employeurs qui a passé, nous a parlé d'une moyenne
d'âge qui allait jusqu'à 57 ans. J'ai fait une farce, j'ai dit: Ce
n'est pas possible, ils sont trois avec la tête blanche, il n'y en a
qu'un qui a la tête grise et ils nous disent que les gars de 40 ans sont
trop vieux! Mon doux, qu'est-ce qu'on fait avec ce monde-là?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M.
Carey, le langage que vous tenez là est un langage que j'ai
déjà entendu, mais il y a un reportage qui m'a frappé et
je ne sais pas si les gens de l'autre côté ont eu l'occasion de le
voir. Quand le projet de loi a été déposé, il y a
un journaliste qui est allé sur un chantier de construction et qui a
interrogé des travailleurs dont un qui semblait avoir -je ne veux pas
dire son âge - plus de 50 ans. Il lui a dit: Cela ne vous énerve
pas, vous, ce que les leaders syndicaux disent, que cela va être le fils
qui va remplacer le père? Le travailleur lui a répondu: Pas du
tout! Cela va prendre quelqu'un pour leur montrer à ces
jeunes-là. Moi, je suis encore bon pour leur montrer. Cela a
été sa réponse. Je ne vous dis pas qu'il a raison ou qu'il
n'a pas raison, que vous avez raison ou que vous n'avez pas raison, mais, sur
le plan quantitatif, cette année,-78 000 travailleurs sont entrés
dans l'industrie. Était-ce basé sur des critères de
compétence? Est-ce qu'on a laissé entrer des jeunes et combien?
Vous, vous les avez laissés entrer. À partir de quels
critères? Parce que vous avez donné votre "O.K." à tous
ceux qui sont entrés.
M. Carey: Je vais revenir sur cette partie. M. le ministre, on
est dans le jus du contrôle quantitatif actuellement. Je pense que c'est
le meilleur point parce que c'est cela que vous voulez faire disparaître.
Pour les autres, on pourrait peut-être s'accommoder davantage. Les
travailleurs de la construction... En enlevant la carte de classification telle
qu'elle est et en donnant la permission à tous ceux qui ont des
certificats de compétence dans leur poche... Je ne vous donnerai pas de
chiffres parce que vous avez des chiffres différents des miens.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous incluez les
hors-construction quand vous me dites cela?
M. Carey: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'avis que j'ai remis à M,
Lavallée, cela me fera plaisir de voua en remettre une copie. Les
hors-construction ne sont pas inclus, en vertu du projet de loi.
M. Carey: Non, il y a deux ou trois métiers hors
construction. Il y a des travailleurs de la construction qui ont des cartes de
qualification de construction, qui ont travaillé partout et qui ne sont
pas dans la construction actuellement. On leur permet de revenir. Si on leur
permet de revenir avant que notre mécanique de formation professionnelle
soit en place, on va augmenter l'âge moyen des travailleurs, on va
l'augmenter. Ne laissons pas entrer ceux-là - je vais prendre ce que
j'ai entendu de M. Chevrette à une émission de
télévision -laissons entrer les jeunes, mais non les jeunes qui
n'ont pas été à l'école, les jeunes qui sortent de
l'école formés, par exemple.
Je vais vous donner une autre réponse à cela. Si vous
voulez bien, je vais vous expliquer des choses qui se passent.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M.
Carey, peut-on s'entendre sur quelque chose? Pour ce qui est des
compagnons, ce que vous dites n'est pas vrai parce qu'il n'y a pas de 500
heures, il n'y a pas de ci et il n'y a pas de cela. Au sujet des apprentis,
à moins que le ratio ne soit changé, cela ne pourra pas rentrer.
Pour les manoeuvres, ce que l'on a fait, c'est qu'on a annoncé des
intentions de moratoire.
M. Carey: Pourquoi dites-vous qu'en ce qui concerne les
compagnons ce n'est pas vrai?
M. Paradis (Brome-Missïsquoi): Ce n'est pas si mal.
M. Carey: Pourquoi ce n'est pas vrai?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que tu ne deviens pas
compagnon du jour au lendemain.
M. Carey: Tous ceux qui ont des cartes de compétence dans
leur poche?
M. Paradis (Brome-Missïsquoi): Qui sont-ils, ces "tous
ceux"? On va retomber dans nos statistiques.
M. Carey: II y en a 50 000.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va repartir soit des chiffres
que la FTQ a rendus publics, soit de ceux que l'OCQ vous acommuniqués, soit de ceux que l'OCQ m'a communiqués, soit de
ceux que le ministère de la Main-d'Oeuvre m'a communiqués.
M. Carey: Les gens qui étaient dans l'amiante, les gens
qui sont sur les puits d'huile qui ferment; il y en a des paquets de
travailleurs qui détiennent des certificats de qualification pour aller
dans la construction.
M. Paradis (Brame-Missisquoi): Quand on dit "des paquets", M.
Carey, je veux que l'on soit responsable quand on avance des chiffres. "Des
paquets", c'est facile à dire. On s'est entendu sur des chiffres
maximaux. Si vous ne les partagez pas, dites-le-nous. L'Office de la
construction du Québec me parle exactement de 117 000 et quelque, 120
000 pour faire un chiffre rond. Le ministère de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu, en ce qui concerne la qualification, me
parle d'un maximum de 98 000 personnes et, de ce nombre, au moins 5000 sont en
haut de 65 ans. Ce sont les certificats émis et non
vérifiés depuis 1971, Si vous me dites qu'il y a une
épuration à faire, je vais vous suivre, mais quand on parle de
"paquets", les gens ont dans la tête 100 000, 200 000, 250 000, 300 000;
tout le monde panique, tout le monde a peur,
M. Carey: Rassurez-nous, faisons un moratoire. Je n'ai pas une
idée du temps, mais donnez-nous toute cette épuration.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Janvier, février, mars,
avril, dans l'industrie de la construction, ce ne sont pas les gros mois dans
la province de Québec. Mai, juin, cela commence, mais janvier,
février, mars, avril, à cause de la saison, ce n'est pas dans ces
mois-là que les gens se "garrochent", si je peux utiliser l'expression,
pour entrer dans l'industrie de la construction. Sur le niveau des ratios
compagnons-apprentis, c'est la commission qui va décider. Si elle ne le
change pas, il ne peut pas y avoir plus d'apprentis qui entrent. Pour les
manoeuvres, il est là, le moratoire.
C'est le dernier blâme que je vais vous adresser: j'ai lu votre
publicité...
M. Carey: C'est quoi pour les manoeuvres? Vous m'avez dit: Pour
les manoeuvres, il est... Quoi?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le moratoire.
M. Carey: Le moratoire, d'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai lu votre publicité et
je dois vous dire qu'elle m'a choqué. Généralement, vous
dites ce qu'il y a à dire, mais quand vous dites: "Le projet de loi
prive les travailleurs des avantages sociaux", éclairez-moi.
M. Gingras: Je vais vous expliquer -pourquoi. C'est qu'un
travailleur de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce qu'on ne- touche pas aux
conditions de travail, on ne touche pas au décret, on ne touche
même pas au règlement de placement, sauf en ce qui concerne...
M. Gingras: Mais en touchant à la moyenne d'heures d'un
travailleur de l'industrie de la construction, vous touchez à
l'accumulation de son fonds de pension, vous touchez à l'accumulation de
ses heures pour les avantages sociaux, vous pouvez, dans plusieurs cas, les
rendre inadmissibles à l'assurance-salaire, à l'assurance-groupe
et c'est la situation. Il ne faut pas se la cacher. Vous allez diviser ta
même tarte entre plusieurs personnes et, en faisant cette division, vous
allez rendre inaptes ceux qui auraient été aptes, à un
moment donné, à bénéficier de ces avantages d'une
façon accrue. Vous allez les rendre inaptes à en
bénéficier et, en plus, l'autre qui vient partager l'assiette
devient, lui aussi, inapte à en profiter.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À ce moment-là, ne
dites pas cela comme cela. Dites que les travailleurs n'auront plus d'emplois.
On est aussi bien d'aller au bout du raisonnement, tant qu'à y
être, tant qu'à faire de la publicité dans ce
sens-là.
M. Gingras: Non, non. Il ne faudrait pas que vous charriiez, M.
le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis certain que les
travailleurs comprennent que le décret n'est pas touché, que les
conditions salariales ne sont pas touchées, que les avantages sociaux ne
sont pas touchés, que le règlement de placement n'est pas
touché, sauf en ce qui concerne les cartes de classification.
M. Carey: Dans les principes, vous avez parfaitement raison, dans
les principes.
M. Gingras: Sur cela, vous avez parfaitement raison, qu'on ne
touche pas aux acquis en ce qui a trait aux conditions de travail
établies et déjà listées dans les conditions du
décret. On vous accorde cela, M. le ministre, sauf qu'en
décertifiant les travailleurs de l'industrie de la construction, en
ouvrant le bassin, vous diluez l'application de toutes ces conditions de
travail à un tel point qu'il y en a qui vont se retrouver dans des
situations plus désastreuses qu'ils ne le sont maintenant, alors qu'ils
estiment être en situation désastreuse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Une question: Vous avez consenti,
vous autres, à son ouverture cette année... M. Carey:
Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...au mois de mai. J'ai vos
consentements.
M. Carey: Vous devez voir ma signature souvent.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): En vertu de quels
critères?
M. Carey: En vertu d'une responsabilité qu'on a: il faut
faire en sorte que l'employeur ne manque pas de main-d'oeuvre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le travailleur, l'avez-vous
entré sur un critère de compétence?
M. Carey: On n'a pas de formation, baptê... Excusez-moi.
Ecoutez, M. le ministre, il n'y a pas de formation, alors, on les entre
comment? On les forme comme cela fait 20 ans qu'on les forme, les travailleurs.
Je vais vous dire une autre affaire et cela va être important. Par
rapport à l'âge des jeunes, vos 27 ans pour les apprentis, c'est
vieux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 28 ans.
M. Carey: Savez-vous, quand un employeur - écoutez-moi
bien - appelle au bureau de placement syndical - c'est pareil, j'en suis
convaincu, dans tous les bureaux -et qu'il me demande: As-tu des gens
disponibles dans un métier? Je lui dis: Oui, j'en ai, j'ai un petit gars
qui a 17 ans et qui a une carte de classification d'apprenti. Il dit: A-t-il de
l'école? Non, il n'a pas d'école parce que cela ne se fait pas,
il ne faut pas mentir, il n'y en a pas. Il me dit: En as-tu un de 28 ans ou de
29 ans? II prend celui de 28 ans ou de 29 ans avant de prendre celui de 17 ans.
Je pense qu'il faut considérer cela. Or, en ayant l'autre
système, quand ils sortiront de l'école, on va passer les petits
gars de l'école et on va rabaisser la moyenne d'âge.
Les 57 ans de nos briqueteurs; c'est cela qu'on a dit, 54 ans, nos
briqueteurs. Qui devient briqueteur, d'après vous, demain matin? Ce sont
les manoeuves qui ont manoeuvré la brique pendant un certain temps, qui
ont pris des connaissances et qui, un jour, sont devenus apprentis et
après sont devenus briqueteurs. Quand on aura de la formation, on pourra
prendre des petits manoeuvres de 20 ans qui sortiront de l'école, ils
auront appris à faire de beaux foyers et des affaires bien faites, non
pas comme ce qu'on montre dans les polyvalentes, faire des cabanes à
moineaux; ils font cela sur l'asphalte avec des tennis et
puis, après cela, vous les envoyez dehors et ils ne peuvent pas
même traîner des bottines avec des "caps" d'acier. Je veux dire
qu'il faut leur montrer où on travaille à ces gens-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci. J'ai déjà
ambitionné sur le temps.
M. Carey: Non, j'aime cela.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, je vais
passer maintenant la parole au député de Joliette. Vous avez pris
assez de temps pour prouver que, finalement, peut-être, quand on
reçoit les grandes centrales syndicales, il faut plus de temps. M. le
député de Joliette.
Des voix: Ah! Ah!
Le Président (M. Charbanneau): Effectivement,
c'était le débat fondamental. Je pense que les questions du
ministre...
Une voix: M. le Président, cela ne marche pas.
Le Président (M. Charbonneau): Alors, le même temps
de parole sera accordé à l'autre côté...
M. Chevrette: 32 minutes.
Le Président (M. Charbonneau): ...32 minutes. M. Carey,
vous allez avoir le temps de continuer.
M. Chevrette: Vous allez être de ceux qui auront
été ici le plus longtemps.
M. Carey, tout d'abord, je voudrais vous féliciter pour la
qualité du mémoire. D'abord, votre propre définition de ce
que c'est la formation, à mon point de vue, c'est la vision la plus
globale et la plus totale que j'ai vue dans tous les mémoires, qu'on
pense au recyclage, qu'on pense à l'apprentissage, en tout cas, s'il y
en a d'autres qui y ont touché, ils n'y ont pas touché d'une
façon aussi structurée avec une vision aussi complète que
vous le faites dans votre mémoire. Je partage beaucoup de vos points,
mais, avant de les toucher, je voudrais aussi faire la démonstration que
dans ce que vous venez de discuter avec le ministre, il y a quelque chose qui
ne clique pas quelque part. Ou bien vous êtes dans les carottes
complètement, et moi aussi parce que j'ai ta même perception que
vous, ou bien c'est lui qui a raison. On va partir de son texte. On ne peut pas
se baser sur un moratoire qui va venir, on ne sait pas quelle forme de
moratoire on aura. Il y a des mesures transitoires dans cela et c'est cela
qu'il faut regarder. II faut constater les faits et c'est de cette façon
que je veux juger.
À l'article 32...
M. Carey: En passant, M. Chevrette, il y a des mesures
transitoires qui peuvent être transitoires en permanence aussi. (19 h
30)
M. Chevrette: Oui, elles peuvent être transitoires
longtemps, je suis d'accord avec vous. D'ailleurs, vous verrez nos amendements
là-dessus.
M. le Président, je dis donc qu'à l'article 32...
Voyons-le. Il existe X milliers de compagnons actuellement dans l'industrie de
la construction qui reçoivent automatiquement, en vertu de l'article 32,
un certificat de compétence. Je continue toujours à l'article 32.
S'ajoutent à cela d'autres compagnons d'ailleurs qui n'ont pas besoin de
garantie d'heures, mais qui, par précaution, voudraient avoir un
certificat de compétence pour la construction. Je suis pompier, j'ai ma
carte de plombier et, au cas où cela me dirait d'y aller, je n'ai pas
besoin de garantie de 500 heures. Je suis pompier, j'ai ma carte de plombier;
donc, je peux avoir mon certificat de compétence.
Une voix: Allez à l'OCQ.
M. Chevrette: Je suis enseignant, j'ai ma carte
d'électricien. Donc, au cas où cela me tenterait d'aller
travailler durant les vacances, je vais chercher mon certificat de
compétence.
Une voix: Absolument.
M. Chevrette: Combien de centaines ou de milliers de travailleurs
vont faire cela? Combien de cultivateurs ont des cartes de plombier ou des
cartes d'électricien? Je ne sais pas combien, mais il y a une porte
ouverte pour aller chercher sans aucune condition - c'est l'article 32 qui dit
ceci: La commission...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À combien...
M. Chevrette: Je m'excuse. Je ne vous ai pas
dérangé 30 secondes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais M. le
député, vous n'avez pas le droit de parler de 100 000 comme
ça et un paquet.
M. Chevrette: Je n'ai pas parlé de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous ne le savez pas,
dites-le.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, M. le
ministrel
M. Chevrette: J'ai dit "de centaines ou
de milliers".
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.
M. Chevrette: J'ai dit "de centaines ou de milliers".
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. Je vous avais mal
compris. Je m'excuse.
M. Chevrette: Je ne vous ai pas dérangé 30 secondes
dans votre plaidoirie.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse. J'avais mal compris.
J'avais compris des centaines de milliers, parce que c'est cela que vous avez
dit en Chambre.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, M. le
ministre! À l'ordre!
M. Chevrette: Non, j'ai dit "combien de centaines, de
milliers".
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que c'est cela que vous
aviez dit, de l'autre côté, à l'Assemblée
nationale.
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre! M, le
ministre, vous qui êtes un habile et rusé parlementaire, n'obliqez
pas le président à élever le ton.
M. Chevrette: Mais, de toute façon, il ne
m'empêchera pas de faire ma plaidoirie. Je vais la faire quand
même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Faites-la quand même.
M. Chevrette: Donc, le paragraphe 2 de l'article 32 ne dit pas
que cela -prend un minimum d'heures garanties. Il ne dit pas que, dans le temps
fort de la construction, il y aurait peut-être des chômeurs parmi
ceux qui ont oeuvré dans la construction et que ce serait d'autres qui
seraient là. C'est cela qui est manifesté comme crainte et le
ministre ne l'accepte pas, mais c'est cela, la réalité. Je le
sais. On va revenir à l'avant-règlement de placement...
M. Carey: II ne dit pas qu'il est jeune aussi.
M. Chevrette: Non, et ça on va s'en reparler en plus.
Donc, à l'article 32, voilà une porte ouverte. Combien
s'ajouteront? Je ne le sais pas, mais je sais, par exemple, qu'il va y en
avoir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...maximum.
M. Chevrette: II y en a des vites qui "tchèquent" cela. Et
vous le savez. D'autant plus qu'il y en a qui ont la chance de faire leur
semaine de travail en trois jours - vous le savez - dans certains corps de
métiers. Qu'est-ce qui arrivera à ce moment-là? Ils
viendront dans la construction prendre la place de gars qui n'ont pas
nécessairement la période d'été pour travailler.
Ils travailleront à l'automne et à l'hiver et ils arriveront
à l'été et ils seront "bumpés". C'est clair, et
ça le ministre ne veut pas le reconnaître, mais c'est une
réalité.
Le deuxième article, l'article 33. Le ministre dit, à
l'article 33: Je donne à tous les apprentis qui sont là un
certificat. Donc, cela en fait une "batch". Cela rentre dans les 120 000.
S'ajoutent qui? S'ajoute à cela -le paragraphe 1 d'abord - toute
personne qui en fait la demande, est âgée d'au moins 16 ans et est
titulaire d'un certificat de fin d'études. II y a 19 % de jeunes
chômeurs de 25 ans et moins. Combien y en a-t-il, d'abord, parmi les
diplômés, qui n'ont pas de job? Il y en a un certain nombre.
Combien de centaines? Je ne le sais pas, mais il y en a sûrement un bon
nombre. Cela fait encore un ajout. Continuons. Au deuxième paragraphe,
c'est 16 ans. Ce ne sont plus des diplômés. La personne pourrait
avoir arrêté en première année. S'ajoutent à
cela ceux qui ont 16 ans avec une garantie de 500 heures. Combien de centaines?
Combien de milliers? Je ne le sais pas. Combien vont offrir des garanties
d'emploi de 500 heures? C'est tellement facile que j'en ai eu une la semaine
passée pour un gars de chez nous. C'est facile en bon Dieu!
Une voix: Combien de jeunes vont payeri
M. Chevrette: II n'y a aucune obligation, après, de suivi.
Imaginez-vous la preuve du suivi à faire sur la garantie de 500 heures.
Aie, mon oeil! C'est qu'il y a plusieurs centaines, pour ne pas dire plusieurs
milliers. Continuons.
L'article 35. L'article 34 avant. Non, c'est l'article 35; j'avais
raison. Prenons les manoeuvres maintenant, le groupe peut-être le plus
vulnérable. Il en donne à tout le monde qui est là. Cela
comble les 120 000. Qui s'ajoute à cela? S'il y a une place où
cela peut être facile d'avoir une garantie de 500 heures, ce sera encore
plus là qu'au niveau des apprentis. Combien de centaines? Combien de
milliers, là? On ne le sait pas. Mais comptez tout cela et vous arrivez
à peu près à un décor peut-être pire qu'avant
la commission Cliche. C'est mon évaluation personnelle.
Le ministre rit de cela. Il rit de cela. Mais je pourrais vous donner
des exemples. Mosus, je vais me retenir! Je pourrais vous démontrer
combien il sera très facile, surtout pour les manoeuvres, de tasser les
gars qui oeuvrent depuis dix ou quinze
ans. Combien il sera facile, surtout à ce niveau-là. Quand
ce n'est pas le neveu, c'est le petit-cousin. Quand ce n'est pas le
petit-cousin, c'est le fils de mon oncle. Et vous savez comment cela
fonctionne. Ils vont entrer par centaines et par milliers.
Je suis surpris que le ministre ne se rende pas compte qu'il ne doit
appliquer aucune de ces mesures, quelle que soit la catégorie de
salariés, tant et aussi longtemps que le système de formation ne
sera pas en place, qu'on n'aura pas les programmes de formation, qu'on n'aura
pas, bien sûr, entre les parties, une analyse des besoins réels et
qu'on n'aura pas fait une épuration du système actuel. Cela
réapparaîtrait logique, responsable et cohérent. Vous avez
absolument raison.
Remarquez bien que je suis content que vous ayez tenté de le
faire en tout cas. Je ne pense pas que cela me donne quoi que ce soit
vis-à-vis de lui de tenter de le refaire non plus. Mais, au moins,
j'étais heureux, car je me dis que je n'étais pas le seul
à comprendre ce qui est écrit là. Si le ministre a des
intentions et qu'il plaide à partir de ses intentions, c'est une autre
paire de culottes. S'il voulait qu'on parle de ses intentions d'amendements,
c'était à lui de les déposer avant même de vous
interroger. Il me semble que cela aurait été plus logique.
Il a un moratoire dans la tête. On ne sait pas si c'est trois mois
ou quatre mois. On ne sait pas non plus si son moratoire va toucher les
apprentis et les manoeuvres. On ne sait pas si son idée sur les
compagnons est faite et définitive. On ne sait rien. Mais il me semble
que le ministre doit avoir le sens des responsabilités et qu'il doit
faire en sorte qu'on puisse se parler d'un projet de loi. S'il veut qu'on parle
d'un autre projet de loi, qu'il en imprime un autre. C'est aussi clair que
cela. S'il avait voulu que vous parliez sur autre chose, c'était
à lui de vous présenter autre chose que ce projet de loi.
Il a l'air bien intentionné, mais il a accouché
d'intentions qui font fi des consensus qu'il y a eu aux tables de travail. Ce
n'est pas ma faute et ce n'est pas ta vôtre non plus. On doit constater,
en tout cas, qu'on en fait une lecture assez uniforme quant aux
possibilités.
M. Carey: M. le député...
M. Chevrette: II vous a oubliés à part cela. Ce
sont ceux de l'Ontario qui vont entrer à Ottawa.
M. Carey: M. le ministre...
M. Chevrette: Oui, vous avez raison, je suis l'ex-futur
ministre.
M. Carey: Oui, c'est cela.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Carey: M. le député, le ministre nous a
démontré aujourd'hui qu'il pouvait avoir une oreille un peu plus
sensible que l'autre quant aux gens qui ne possèdent pas de certificat
de qualification, mais il ne maintient pas de contingentement quand même.
Tout ce qu'on dit là-dedans, c'est: On va vous remettre cela, les
parties. Regardez bien cela, on va vous remettre cela, les parties. Un petit
cours de 20 heures en sécurité, un petit cours de 40 heures pour
balayer l'environnement - je ne sais pas comment il a appelé cela,
l'environnement des chantiers de construction - une petite manipulation
d'outils. On peut regarder ces affaires-là.
M. le ministre, un manoeuvre de construction, on ne le forme pas en lui
faisant des dessins autour d'un chantier. Cela s'acquiert sur un chantier de
construction. C'est de cette façon qu'on fait un manoeuvre dans
l'industrie de la construction. Il acquiert son expérience sur le
chantier. Donc, il n'a pas d'autre choix que celui d'être
protégé par un quantitatif, c'est-à-dire par des heures de
travail.
M. Chevrette: Je continue. Je pense...
Une voix: Tais-toi.
M. Carey: Je ne vous ai pas... oui?
M. Chevrette: Non, non, ce n'est pas grave. J'aimerais vous
entendre parler des âges durant quelques minutes. Vous en avez entendu
des vertes et des pas mûres ici sur les âges. Vous m'avez
énormément ébranlé tantôt par votre
argumentation sur les âges. Effectivement, la moyenne d'âge au
Parlement est de 43 ans. Elle est plus élevée que dans la
construction. La moyenne d'âge dans la construction est de 38,5 ans,
selon les chiffres de l'OCQ, si le ministre ne le conteste pas.
Parlant de l'OCQ, une réponse a été donnée
hier. Ce n'est pas vrai que c'est 99 codes. Vous vous rappellerez du monsieur
qui a répondu par la suite que c'étaient 25 codes, qu'il y a
effectivement eu 99 cotations pour venir à bout de classifier
l'individu, mais c'étaient 25 codes. Cela a été
très bien dit par M. Fournier hier. Toutefois, il garde les bouts qu'il
veut bien garder. C'est ce qu'on appelle du charriage. Un correctif a
été apporté à la réponse après avoir
parlé de 99 codes, mais le ministre n'en parlera sûrement pas. Il
faut qu'il mette cela au pire. Il faut qu'il complexifie. Il faut qu'il en
mette et, après cela, il reproche aux autres d'être incapables de
dire un peu ce qu'ils pensent. Ce n'est pas grave, on est habitué
à cela. Parlez-moi donc des âges.
M. Carey: Je vous disais tout à l'heure, en vous
lançant un défi, que j'étais convaincu que vous
dépassiez 40 ans, si vous preniez votre moyenne en tant que
parlementaires. On semble dire que c'est vieux, 40 ans. Je reprends une phrase
que j'ai dite: Si on entre dans l'industrie à 20 ans et qu'on en sort
à 60 ans, quelle est la moyenne, si elle n'est pas de 40 ans, M.
Chevrette? Elle devrait être de 40 ans. À mon point de vue, c'est
la base même, c'est le centre même de l'âge moyen des
travailleurs de l'industrie de la construction; cela devrait être 40 ans.
Il est peut-être un peu plus élevé actuellement de quelques
années. Je peux accepter quelques années, si on fait la moyenne.
Il faut penser que, dans les années où il n'y a pas eu de
construction, en 1982, 1983, 1984, il n'est presque pas entré de
nouveaux salariés dans l'industrie de la construction. Quand la reprise
s'est faite, ce ne sont pas seulement les petits gars qui sortent de
l'école qui sont entrés. Tout le monde les ignore les petits gars
qui sortent de l'école parce que, dit-on, ce n'est pas de la formation
professionnelle qu'ils ont apprise, ils ont appris à faire des cabanes
à moineaux; on n'a pas besoin de cela dans la construction, ils ne sont
pas prêts pour cela. On a pris qui? On a pris des manoeuvres de la
construction, on a pris des gens qu'on a recyclés parce que leurs
travaux ont changé, on les a envoyés se chercher des cartes
d'apprentis. Je vais vous dire une chose: si toutes les associations pouvaient
croire autant que je crois à la polyvalence des travailleurs de la
construction, au lieu de faire entrer souvent beaucoup de jeunes, nos
travailleurs seraient beaucoup plus polyvalents et l'âge ne baisserait
pas. Mais, partons avec les âges que nous avons, M. Chevrette, mettons le
système en place et ne gardons pas cela pour le "mon oncle" qui sort de
la mine qui vient de fermer, gardons l'entrée pour le petit gars qui
vient de finir ses cours, qui aurait été sous le contrôle
des parties, même si c'est dans le ministère de M. Ryan...
M. Chevrette: Pour le comité de formation professionnelle,
vous dites: "Que le comité de formation professionnelle soit l'organisme
mandaté à cette fin." Je suppose que vous parliez de la formation
professionnelle, qu'elle soit confiée aux deux parties et au
comité paritaire dont vous parliez.
M. Gingras: Non. Dans le projet de loi, le ministre propose, en
fait, d'établir un comité de formation professionnelle où
toutes les parties représentatives de la construction seront...
M. Chevrette: De quinze membres...
M. Gingras: ...présents.
M. Chevrette: ...dont le président de la CCQ nomme le
président.
M. Gingras: ...sauf qu'on s'aperçoit que ce comité
a un rôle très consultatif, qu'il va faire des recommandations
à une commission. Cette commission va décider ensuite d'envoyer
cela à un comité administratif. Le comité administratif
peut lui retourner; ils peuvent se renvoyer cela; ils peuvent consulter
à nouveau le comité consultatif. Ils vont jouer comme cela. Nous,
on dît qu'il ne faudrait pas que ce soit un comité consultatif,
mais un véritable comité de la formation professionnelle à
l'intérieur de la structure de la commission et que ce comité
ait, comme je le disais tout à l'heure, un pouvoir quasi
décisionnel, qu'il achemine ses décisions à la commission
dans le but d'assurer le suivi, s'il s'agit de réglementation, s'il
s'agit de commandes de programmes, etc., que cela devienne pratiquement une
structure décisionnelle dans le sens que ceux qui refuseront l'une ou
l'autre de ces commandes auront à justifier pourquoi ils ne peuvent pas
accéder à la demande. Qu'on ne crée pas deux ou trois
organismes qui vont se renvoyer la balle; qu'on crée tout simplement une
structure efficace, expéditive et qui apporte les résultats qu'on
espère sur le plan de la participation à la formation
professionnelle.
M. Carey: M. le Président, me permettez-vous un court
commentaire sur ce qui a été avancé par l'association qui
nous a précédés? On nous a dit que cette association
représentait 7000 petites entreprises. Je veux bien me faire comprendre.
Si je me trompe, vous me corrigerez. Ils veulent sortir ces gens-là de
l'industrie de la construction. On nous a dit qu'ils font exclusivement de la
construction domiciliaire de quatre étages et moins. Moi, j'ai compris
que c'est partout où il n'y a pas d'ascenseur; ils doivent à peu
près tout faire. On nous a dit que sur les 7000, il y en a 5000 qui
doivent payer une contribution à l'AECQ, parce que, de temps en temps,
ils ont un homme. Je pense que je fais un cheminement... Les autres travaillent
presque tous seuls. Ma question est celle-ci: 20 % des travaux de construction
sont faits par le domiciliaire; ils ont 5000 employeurs qui embauchent un homme
ou deux quelques mois par année. Qui bâtit le reste des autres?
Ils travaillent pour qui? Où est le travail au noir? Avez-vous compris
ce petit bout? Il est "dret" là.
Une voix: Oui. (19 h 45)
M. Carey: L'autre chose qu'on nous a mentionnée, l'autre
note, la dernière par
rapport à cela: C'est épouvantable, le salaire en
Gaspésie, être capable de payer les gars de la construction en
Gaspésie. Que je sache, quand on envoie nos médecins là on
les paie un petit peu plus cher. Que je sache, les avocats gagnent le
même prix. Que je sache, les enseignants gagnent le même prix et
que je sache, le fermier vend son lait le même prix. C'est quoi, cette
affaire-là, d'être obligé d'aller le faire là-bas?
Ils sont capables de faire meilleur marché là-bas quand ils vont
frauder le système fiscal. Cela a toujours été. S'ils
fraudent le système fiscal, ça coûte toujours moins cher.
C'est ça, On n'a pas parlé des garanties. On vous a parlé
seulement d'amendes, on aime ça nous autres aussi. Les amendes les plus
justes possible pour empêcher que ces affaires-là se fassent.
M. Chevrette: Vous vous déclarez d'abord heureux de la
suggestion que vous faites, qui fait suite à une des recommandations du
rapport Cliche, la planification des travaux. Effectivement, ce n'est
peut-être pas un cadeau, il y a des hauts et des bas, et je pense qu'avec
les grandes villes, en particulier, cette planification pourrait se faire. Je
trouve votre suggestion intéressante. Je ne sais pas si c'est dans sa
forme, mais je pense que ce serait un début d'amélioration de la
situation pour ne pas connaître des pics et ensuite des creux
épouvantables. Je vous félicite pour cette suggestion. Je
considère que c'est d'ailleurs le seul groupe qui en a fait sur la
planification des travaux. Peut-être un autre, mais pas sous cette forme
aussi précise de créer et de prendre le leadership, par le
Québec, tant au niveau de l'Union des municipalités que du
fédéral. Je trouve ça intéressant comme suggestion
en tout cas.
M. Carey: Mais, M. Chevrette, c'est dans le cadre d'être
capable de prévoir la main-d'oeuvre à former aussi.
M. Chevrette: C'est exact.
M. Carey: Je pense bien qu'on comprend cette nuance.
M. Chevrette: Pour, la désignation des sièges des
associations syndicales, à votre recommandation 16, vous dites que la
désignation' des sièges des- associations syndicales
représentatives appelées à siéger au conseil
d'administration de l'éventuelle CCQ se fasse selon la règle
décrite à l'article 17 de l'actuelle Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction. Vous demandez, d'autre part, la
parité à la nouvelle structure en ce qui regarde le conseil
d'administration. Vous excluez le gouvernement de la table de décision
du conseil d'administration.
M. Carey: Je m'excuse, vous n'avez pas vu le mémoire de la
CSD où on a exclu quelques personnes du gouvernement des tables de
décision. On s'y est arrêté, on a réfléchi
là-dessus....
M. Chevrette: J'ai mal lu, d'abord. M. Carey: ... et on ne
l'a pas exclu.
M. Gingras: On ne parle que du partage des sièges en
termes de représentants des associations syndicales. Quand on parle des
associations syndicales, on ditî au lieu que ce soit laissé
à la discrétion du ministre, de bien vouloir ou pas nous accorder
un représentant pour aller appliquer nos conditions de travail ou de
décider en matière de formation professionnelle, on dit que
ça devrait être systématiquement établi qu'au niveau
des parties reconnues qui ont un degré de représentativité
de plus de 5 %, c'est ce que prévoit la loi actuellement au niveau du
comité mixte, qu'on étende ce critère à la
désignation aussi au niveau de la commission, en ce qui a trait aux
associations syndicales, et qu'on l'étende au comité de formation
professionnelle.
M. Chevrette: En d'autres mots, que les quatre des associations
représentatives suggérés dans la loi ne soient pas
nommés par le ministre après consultation, mais que ce soit vous
autres qui les désigniez en fonction de la
représentativité que vous avez.
M. Gingras: C'est ça.
M. Carey: Je tiens à souligner que, sur ce point, la CSN
retient exactement la même suggestion que la CSD. Vous comprendrez, M. le
député, vous avez déjà été ministre
vous aussi... Nous autres, nous sommes allés vous rencontrer de temps en
temps. Il n'y a rien de pis que d'aller dans un bureau de ministre et de se
mettre à genoux pour solliciter un emploi qui nous revient de droit.
C'est frustrant.
M. Gingras: D'autant plus que vous considérez... Je ne
sais pas si on pourrait s'entendre sur le fait qu'une association syndicale qui
représente 10 000 travailleurs, ça fait une bonne convention
collective quand même, ça fait un nombre important de travailleurs
à qui on doit répondre. Si on ne peut même pas avoir une
assurance qu'on va être là dans l'application des conditions de
travail au niveau de la structure conçue par la loi, si on n'est pas des
participants à part entière à cette structure, qu'est-ce
qu'on vient faire dans le domaine des relations du travail? Il faut se poser la
question. Je pense que se la poser, c'est y répondre. Je pense qu'on ne
doit pas avoir une loi qui
donne la possibilité qu'on ne soit pas là, pour une raison
ou l'autre, ou qu'une ou l'autre des associations représentatives
à un degré important ne soit pas présente dans le
cheminement de l'application de leurs conditions de travail quand on
connaît l'énormité du mandat que remplit l'office par
rapport à l'application des conditions de travail dans le secteur de la
construction.
D'autant qu'on y ajoute la dimension de la formation professionnelle. Je
pense que toute cette question regarde autant les 10 000 membres qu'on
représente que l'ensemble des 100 000 travailleurs qui composent
l'industrie de la construction, et c'est le même cas pour l'ensemble des
autres associations représentatives.
M. Carey: Pour nous, M. le ministre et M. le député
de Joliette, il y a un point qu'on n'a pas touché et je ne voudrais pas
entrer à l'intérieur, parce qu'il ne fait pas partie du mandat.
Tout le fouillis de chiffres, les gens qui travaillent et qui sont où?
Qu'on cherche. Si on avait écouté la recommandation de la
commission Cliche, si on avait écouté tous les mémoires
qui ont été présentés par la CSD, il y aurait un
organisme central pour le placement. Il y aurait un endroit de placement et on
saurait où est tout ce monde. Vous savez, il faut faire attention dans
certaines choses. Je sens que je suis rendu à la fin. Les petites choses
me défoulent un peu.
Le travail au noir, je vais vous donner un autre point de vue. J'ai eu
l'occasion de siéger au conseil d'administration du programme de
Corvée-habitation. Ils en ont entendu parler en maudit du travail au
noir à ce niveau. J'ai dit aux gens qui étaient là: Ce
serait donc simple de régler cela. Comme c'est subventionné - on
subventionne du Loginove - n'importe quoi qu'on va subventionner, au lieu de
subventionner la "job", subventionnons donc les travaux, les salariés.
Tu ne paies que les gens qui travaillent conformément aux
critères et aux obligations.
On aurait tout. Mais non, on donne cela. Notre système, on le
fait en fonction et on se plaît là-dedans.
M. Gingras: Si on subventionnait les heures de travail
effectuées dans les programmes Loginove et autres, je vous jure une
chose, c'est que les heures seraient publiques. Ce ne serait pas du travail au
noir.
M. Chevrette: Quand vous dites à l'article 7, dans votre
recommandation 7, M. Carey, "l'article 83 soit considéré comme
une fonction du comité de formation".
M. Careys M. Chevrette, vous voulez dire un peu comme les
pouvoirs que le comité mixte a, en fonction de l'administration, des
avantages sociaux. On disait que le comité de formation professionnelle
devait avoir une équivalence de ces pouvoirs.
M. Chevrette: Non, c'est parce que je veux relire l'article 85.3,
c'est celui de la main-d'oeuvre où le ministre se donne un pouvoir
d'homologation. La commission prépare des programmes relatifs à
la formation. Vous, au lieu d'avoir "une commission", vous auriez "le
comité", si je suis. Que l'on attribue audit comité consultatif
sur la formation, je suppose. Les pouvoirs qui sont au ministre, de les mettre
au comité? C'est cela?
M. Gingras: C'est cela. Ceci est prévu à 85.3 en
termes de responsabilité de la commission. On ne le voit pas comme
responsabilité de la commission, nous autres. Cela devrait être
une responsabilité du comité. Que la commission soit
chargée peut-être de faire édicter les règlements,
assurer le suivi et tout cela, et faire l'application, cela peut aller. Mais,
en fait, quand on vous parlait d'un rôle quasi décisionnel du
comité en matière de formation professionnelle, c'est qu'on pense
que la préparation des programmes, qui était une
responsabilité de la commission, doit être une
responsabilité du comité et que c'est à la suite de leur
consultation que la commission transmettra au ministre de la Main-d'oeuvre et
de la Sécurité du revenu le résultat de ses travaux.
Par la suite, si celui-ci ne le retenait pas, comme on vous
suggérait en amendement, tout à l'heure, il devra justifier
pourquoi.
M. Carey: C'est la même chose concernant la qualification.
Cela devrait partir de là. Je ne suis pas pour faire passer les examens
sur les pelles à câble. On peut faire cela aussi.
M. Chevrette: Comme vous ne contestez pas, vous autres, la
présence gouvernementale au sein du conseil d'administration, c'est ce
qui justifie votre demande, je suppose, de l'abrogation de l'article 15.
M. Carey: Je vais vous donner une opinion sans engager ma
centrale syndicale. Je vais vous donner une opinion de bonhomme qui vit dans
ces milieux depuis longtemps et qui a siégé au sein de
comités paritaires. C'est le "fun". On veut prendre en main nos
affaires. Mais, j'ai toujours appris que lorsque le paritarisme était
total, il y a des difficultés d'application et même on peut
bloquer le système. Je pense qu'on peut bloquer la machine.
Il m'apparaît qu'une structure comme
celle-là a fait en sorte que les parties patronales et syndicales
ont intérêt à se brasser le derrière pour arriver
à des recommandations unanimes, en tout cas, pour ne pas se faire
planter par les fonctionnaires. Alors, c'est motivant.
M. Paradis, n'êtes-vous pas d'accord avec cela?
M. Gingras: Je voudrais ajouter quelque chose en ce qui a
trait...
Le Président (M. Charbonneau): Ne lui ouvrez pas la porte,
il n'a plus le droit de parler.
M. Gingras: Pardon?
Le Président (M. Charbonneau): II n'a plus le droit de
parler.
M. Gingras: Je voudrais ajouter quelque chose à
l'intervention...
M. Carey: Je ne sais pas si son sourire est sérieux.
M. Gingras: ...du confrère Carey en ce qui a trait
à la présence du gouvernement, en ce qui a trait à la
centrale. C'est que, pour nous, cela ne pose pas nécessairement de
problème majeur. Qu'on en mette un pour décider, qui est le
président, que vous désignez de toute façon à un
moment donné pour trancher les litiges; qu'on en mette cinq, s'il n'y a
pas accord des parties, on pense que, de toute façon, il y a quelqu'un
qui va décider et cela ne changera pas grand-chose en ce qui concerne la
règle du jeu. On trouve quand même, en termes de présence,
qu'elle est très importante. On doit vous souligner qu'elle est
très importante, et on ne voit pas l'utilité qu'elle soit aussi
importante.
Deuxièmement, concernant la partie de la nécessité
que le ministre de l'Éducation et que différents
ministères soient là comme intervenants décideurs, sans
nécessairement que ce soit une objection de fond, pour nous, cela ne
représente pas nécessairement des acquis que ce rôle va se
transformer automatiquement en respect des besoins que l'industrie peut avoir,
que ce soit en ce qui concerne les relations du travail, que ce soit en
matière de formation professionnelle. Ce ne sont pas des acquis. La
personne qui sera là, on sait ce qu'elle va faire. Si c'est à
l'éncontre de la politique du ministère de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu, elle va s'abstenir de voter dans certains
cas pour réserver au ministère la décision. Ce sera la
même chose pour l'Éducation. On siège actuellement au sein
d'un organisme où la présence d'autres ministères existe.
C'est habituellement la procédure utilisée. On ne voit pas
beaucoup de quelle façon cela peut nous arrêter de fonctionner, et
on ne voit pas non plus comment cela peut nous aider. C'est un peu pour cela
que nous ne sommes pas intervenus sur la question de façon très
précise. Mais, comme je vous le disais, on trouve qu'il y a quand
même beaucoup de monde de la partie gouvernementale, et cela prête
un peu à confusion quand on pense qu'on essaie de faire avec cela un
organisme paritaire chargé de l'application. Cela peut prêter
à confusion.
M. Chevrette: Je pense que cela fait le tour des questions.
Est-ce que vous auriez un point à toucher, parce qu'il me reste quand
même deux ou trois minutes de mon temps? Est-ce que vous aimeriez toucher
à un point en particulier?
M. Carey: Si vous me permettez un point. Je suis obligé de
le refever à partir non pas de notre mémoire, mais de choses qui
ont été dites. Il y a des gens qui ont demandé une
juridiction exclusive pour les manoeuvres. Je ne vous amène pas une
étude faîte d'une façon très approfondie chez nous,
mais on pense à cela aussi.
Je veux vous mettre en garde contre cela. D'abord, je vais vous poser la
question: êtes-vous prêts à subir, comme l'entreprise, comme
l'industrie... à en assumer les coûts? On nous a dit qu'il y avait
15 000 employeurs dans l'industrie de la construction et, s'il y a une
juridiction exclusive, il va falloir que chaque employeur ait au moins un
manoeuvre parce que, lorsqu'un gars travaille, il est obligé de faire
des travaux avec des hommes qualifiés, même si ce sont des travaux
non qualifiés. Qu'on en ajoute un, je pourrais ne pas être contre
si je veux avoir du nombre. Sauf que si on ajoute des manoeuvres de cette
façon, il faut que ce soient des manoeuvres à temps partiel. Je
suis contre cela. On va essayer, avec nos travailleurs, de faire des
travailleurs qui vont être capables d'exécuter les travaux en
faisant le plus grand nombre d'heures possible durant l'année.
Je voudrais donner l'exemple suivant pour me faire comprendre. Si,
à Victoriaville demain matin, il manque un manoeuvre et qu'il y a trois
briqueteurs qui sont disponibles et deux opérateurs de machinerie lourde
qui ont du travail pour quinze jours, j'aime mieux qu'on prenne le qars qui a
sa carte de compétence dans ses poches pour le faire travailler ces
quinze jours comme manoeuvre, pour faire le travail, que de rentrer un
manoeuvre, de le faire travailler quinze jours et de le traîner deux ans
dans notre industrie de la construction. Je pense que cela est important. Nos
manoeuvres ce qu'ils veulent, c'est d'avoir une sécurité, cela
est par le quantitatif pour être capables de faire le plus d'heures
possible. Pas rentrer le plus grand nombre possible, mais faire le
plus d'heures possible pour ceux qui sont là. Sur les grands
chantiers, c'est vrai, les manoeuvres sont les hommes clés. Vous
connaissez la réparation, on a parlé de toutes les autres
constructions. Alors, on comprend et on connaît aussi les conflits de
compétence qu'il y a entre certains métiers. Alors, il faudrait
être très prudent, si on parle d'une juridiction exclusive,
à un moment donné, concernant les manoeuvres.
Le Président (M. Charbonneau): Avec cette réponse,
M. Carey, cela met fin à votre comparution. Le terme est un peu
exagéré. C'est plutôt votre présence et votre
collaboration à la consultation particulière que la commission a
tenue. Je dois d'abord demander au ministre de vous remercier.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Carey ainsi que tous les
membres de votre équipe, je tiens à vous remercier pour votre
mémoire. Je tiens à vous remercier pour votre participation, tout
au long du printemps, aux tables. Je tiens à vous remercier
également pour l'expérience pratique ou le côté
pratique que vous nous apportez. Sur l'élément qualitatif, je
pense qu'on n'est pas tellement loin en tout cas, il s'agit de bien comprendre
ce que les textes veulent dire, etc. Sur le plan quantitatif, on ne se comprend
pas encore, on ne parle pas des mêmes chiffres et on a des
difficultés sérieuses à ce sujet. Je ne pense pas que ce
soit de mauvaise foi de part et d'autre. On part de chiffres différents,
quelquefois obtenus de la même place. Je reste sensible à vos
préoccupations. J'ai mentionné que les chiffres que j'ai eu
à consulter comme ministre dans le passé m'indiquent qu'en ce qui
concerne les compagnons et les apprentis, quels qu'aient été les
changements, il n'y a pas eu de changements draconniens. Il faut quand
même être prudents. En ce qui concerne les manoeuvres, les
changements ont amené des changements draconiens et là-dessus, il
faut une double prudence. C'est dans ce sens que je consacrerai mes
énergies au cours de la semaine prochaine, article par article, pour
nous assurer que nous atteignons les meilleurs résultats possible pour
l'industrie.
M. Carey: J'ai compris que votre prudence nous donne du temps
pour être capables de le faire. Donc, il faut faire un moratoire
raisonnable.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On fait pas mal d'heures par jour,
ici, de ce temps-ci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Oui, je voudrais vous remercier pour la
qualité de votre mémoire. Soyez assurés qu'on va piloter
plusieurs amendements qui vont aller dans le sens de votre mémoire,
dès la semaine prochaine. Nous serons prêts lundi matin. Cela
permettra au ministre de prouver tous les bons sentiments qu'il a à
votre égard et envers toute l'industrie. On va essayer de lui permettre
d'être cohérent avec son discours.
M. Gïngras: Alors, nous vous remercions de nous avoir
entendus. Nous souhaitons surtout que le ministre, s'il y a des adaptations
à faire au contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre, fasse des
adaptations, mais qu'il ne fasse pas disparaître la limitation du
bassin.
Le Président (M. Charbonneau): Messieurs, merci.
Une voix: Gardons notre industrie proprel
Le Président (M. Charbonneau): Merci, bonsoir et bon
retourl J'invite maintenant les représentants de l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Les travaux sont
suspendus pour trois ou quatre minutes. Le temps que le tout s'ajuste.
(Suspension de la séance à 20 h 5)
(Reprise à 20 h 7)
Le Président (M. Charbonneau): Messieurs, madame, bonsoir.
Je vous rappelle ce que le secrétaire vous avait indiqué, je
crois, que, normalement, on a une heure pour la discussion. J'entends
déjà des commentaires. Néanmoins, on va essayer
d'être équitable. Vous avez d'abord quinze minutes pour
présenter votre mémoire et le reste du temps sera réparti
de part et d'autre pour la discussion. Je ne sais pas quel M. Richard - en
fait, il y a deux M. Richard sur ma feuille - sera le leader du groupe. En tout
cas, je lui demanderais de présenter les gens qui l'accompagnent, pour
les fins du Journal des débats, et de se présenter
lui-même. Ensuite, on commencerait.
Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec
M. Richard (Gabriel): M. le Président, M. le ministre,
madame et messieurs les membres de la commission, je vous présente,
à mon extrême droite, M. Yves Mailhot qui est membre du conseil
d'administration de notre association, à ma droite, M. Claude Giroux qui
est vice-président du conseil et, à ma gauche, Me Gisèle
Bourque qui est la
conseillère juridique de notre association. Mon nom est Gabriel
Richard, je suis le directeur général de l'association.
L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec, incorporée en 1944, regroupe sur une base volontaire
quelque 600 entrepreneurs oeuvrant dans le domaine des travaux de génie
civil, de voirie et de transport d'énergie dont ils exécutent
environ 90 % du volume total octroyé au secteur privé.
Parmi les donneurs d'ouvrage importants, notons Hydro-Québec, le
ministère des Transports, le ministère de l'Environnement, celui
de l'Agriculture, la Société québécoise
d'assainissement des eaux, les communautés urbaines, les
municipalités, etc. La grande majorité des contrats obtenus par
les entrepreneurs le sont par le biais des soumissions publiques et sont
exécutés, dans la totalité des cas, selon des plans et
devis approuvés par des ingénieurs et des architectes.
Une des préoccupations fondamentales du monde patronal est de
disposer dans toutes les régions, pour tous les métiers et
emplois, d'une main-d'oeuvre suffisante et compétente pour
l'exécution des travaux de construction, compte tenu des
caractéristiques particulières de notre industrie. Afin
d'atteindre cet objectif, nous considérons que trois critères
doivent être respectés, à savoir: l'accessibilité
universelle à l'industrie, la compétence des salariés et
l'élimination des priorités régionales.
Les commentaires que nous formulerons relativement aux correctifs
pouvant être apportés au projet de loi 119 ont comme objectif de
permettre de le bonifier et de répondre de façon plus
adéquate aux critères plus haut nommés.
À l'article 3.2, en ce qui concerne la composition du conseil
d'administration de la commission, notre association déplore le fait que
la présence des quatre représentants gouvernementaux ainsi que du
président constitue une ingérence gouvernementale trop forte et
inappropriée, parce qu'elle lui confère le contrôle de la
CCQ.
Afin que le conseil d'administration demeure sous le contrôle des
représentants des associations d'employeurs, d'entrepreneurs ainsi que
des représentants d'associations représentatives, l'association
suggère que le nombre des représentants de chacun de ces groupes
soit porté à sept.
Nous comprenons que, si des sièges sont accordés à
des représentants des ministères, ces derniers seront des
observateurs.
Article 3.3. L'association considère qu'en ce qui a trait aux
employeurs, entrepreneurs et associations représentatives, un mandat de
cinq ans est excessif pour ceux qui siègent à la fois au conseil
et aux comités administratifs. Nous considérons qu'un terme
maximal de trois ans serait raisonnable.
L'article 3.7 prévoit que les membres du conseil
d'administration, autres que le président, ne sont pas
rémunérés, sauf dans les cas, aux conditions et dans la
mesure que le gouvernement peut déterminer.
Notre association considère que les membres du conseil faisant
partie du comité administratif sur les relations du travail et du
comité administratif sur la formation professionnelle auront à
consacrer un nombre d'heures considérable pour remplir
adéquatement les fonctions desdits comités et devraient, en
conséquence, être rémunérés à des
conditions que le gouvernement déterminera, te tout conformément
au pouvoir qui lui est dévolu par ledit article.
Le paragraphe 3 de l'article 3.8. Cette disposition prévoit que
tout membre du conseil qui a un intérêt direct ou indirect dans
une entreprise qui met en conflit son intérêt personnel et celui
de la commission doit, sous peine de déchéance de sa charge,
dénoncer par écrit son intérêt au président
et s'abstenir de siéqer au conseil et de participer à toute
délibération ou décision lorsqu'une question portant sur
son entreprise est débattue.
L'association considère que des situations peuvent se
présenter ou la question partant sur l'entreprise dans laquelle un
membre du conseil d'administration est débattue est susceptible d'avoir
des répercussions au niveau de l'ensemble de l'association
représentée. En conséquence, pour le bien-être de la
collectivité, ce membre devrait avoir l'occasion de faire valoir son
opinion et de débattre ses prétentions sens pour autant
participer à une délibération ou à une
décision.
L'article devrait être amendé en ajoutant, à la fin
du troisième paragraphe, les termes suivants: "Cependant, lorsque la
question débattue est susceptible d'intérêt commun pour
l'ensemble des entrepreneurs, des employeurs ou des associations
représentatives, le membre aura l'opportunité de siéger
audit conseil, sans pour autant participer à la
délibération ou à la décision."
Pour ce qui concerne les fonctions et pouvoirs de la commission,
à l'article 4.1, à notre sens, cet article, en édictant
que le gouvernement peut charger la commission de voir à l'application
des lois ou règlements connexes au domaine de la construction,
confère au gouvernement un pouvoir discrétionnaire trop vaste et
ce, sans qu'il ne soit tenu de nous faire part de quelque changement que ce
soit qui nous serait préjudiciable.
Le terme "connexes" au domaine de la construction est très vague
et, en conséquence, l'application de certaines lois ou règlements
pourrait être confiée à la Commission de la construction du
Québec, alors que les parties intéressées croiraient
que ce geste n'est pas fait dans l'intérêt de l'industrie
de la construction et qu'il alourdirait le système existant.
Nous suggérons que cet article soit retranché tel que
rédigé. Si, par ailleurs, le gouvernement désire attribuer
une fonction additionnelle à la commission, il devrait amender la loi,
permettant aussi aux intéressés de faire valoir leurs
prétentions, s'il y a lieu, et c'est ce que nous faisons
aujourd'hui.
Pour le Comité sur la formation professionnelle dans l'industrie
de la construction, l'article 18.4 fait état de sa composition. Nous ne
comprenons pas que ce comité soit dispensé de la présence
d'un représentant du ministère de l'Éducation, du
ministère du Travail ainsi que du ministère de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu, alors qu'au chapitre VII.I traitant
de la formation professionnelle, à l'article 85.2, une disposition veut
que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
élabore et propose au gouvernement les politiques et mesures relatives
à la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et à
l'article 85.3, une autre stipule que la commission élabore des
programmes relatifs à la formation professionnelle après
consultation du comité sur la formation et les soumet à
l'approbation du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu.
L'association considère que le comité sur la formation
professionnelle, tel que formé à l'article 18.4, ne
possède pas toutes les compétences nécessaires permettant
de donner des avis adéquats au niveau de la formation professionnelle et
nécessiterait l'addition de représentants des ministères
du Travail et de l'Éducation qui, du reste, sont impliqués dans
le domaine de la formation tel qu'en font foi les articles 85.2 et 85.3 plus
haut nommés, ainsi que de représentants de l'Ordre des
ingénieurs et de l'Ordre des architectes, ceux-ci pouvant constituer un
atout fort appréciable par leur apport relatif aux nouvelles
méthodes de construction.
La proposition que nous formulons pour corriger cette situation au
niveau de la composition du comité est la suivante: sept membres des
associations d'entrepreneurs et d'employeurs, cinq membres des associations
représentatives, un représentant du ministère de
l'Éducation, un autre du ministère du Travail, un
représentant de l'Ordre des ingénieurs et un représentant
de l'Ordre des architectes.
À la suite de la proposition relative à la modification de
la composition du comité, l'article 18.9 faisant état du quorum
devrait être corrigé.
L'article 18.10 stipule qu'un avis du comité sur la formation
professionnelle doit être approuvé à la majorité et
que le président siège sans droit de vote.
Compte tenu de la possibilité d'égalité des voix
des membres constituant le comité et considérant que le
président n'a pas droit de vote, on peut facilement présumer
qu'il y aura difficilement approbation d'un avis à la
majorité.
Afin de permettre au comité sur la formation professionnelle
d'être en mesure de remplir les fonctions pour lesquelles il a
été créé, c'est-à-dire donner des avis
à la commission, il y aurait lieu d'accorder un droit de vote au
président.
L'article 26 remplace l'article 124 de la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction et se lit comme suit: "Les
dispositions du Code du travail, de la Loi sur les décrets de convention
collective et de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles
de la main-d'oeuvre ne s'appliquent pas dans l'industrie de la construction,
à moins d'une disposition expresse à l'effet contraire."
Notre association croit que des donneurs d'ouvrage puissent
prétendre que certains employés d'un entrepreneur
embauchés dans le cadre de l'exécution d'un contrat
spécifique ou encore engagés de façon permanente à
titre d'ingénieur, par exemple, mais faisant à l'occasion des
études de faisabilité, de surveillance de travaux ou autres, ne
sont pas visés par cette exception et que, partant, sont assujettis aux
dispositions du Code du travail et doivent adhérer à la
convention collective existant au sein de l'entreprise du donneur
d'ouvrage.
À titre d'exemple, citons le cas problématique de
l'article 45 du Code du travail en vertu duquel le syndicat d'un important
donneur d'ouvrage a intenté des procédures judiciaires contre des
entrepreneurs au motif que certains ingénieurs, pour les services
desquels ils ont eu recours, ne sont pas couverts par l'article 124 de la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et sont, en
conséquence, soumis à l'application dudit article 45 et sont
liés par la convention collective déjà existante au sein
du syndicat des employés du donneur d'ouvrage, à titre de nouvel
employeur.
Afin d'éviter des litiges éventuels de ce type, nous
suggérons fortement que le texte ajoute cette précision: Les
dispositions du Code du travail, de la Loi sur les décrets de convention
collective et de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles
de la main-d'oeuvre ne s'appliquent pas dans l'industrie de la construction, ni
aux entrepreneurs, ni à leurs employés dans l'exécution de
travaux connexes à l'industrie de la construction, à moins d'une
disposition expresse à l'effet contraire.
Concernant les dispositions diverses et transitoires, d'abord le
paragraphe 3 de l'article 33. Cet article stipule que la Commission de la
construction délivre un certificat d'apprentissage à une
personne.
"1°, qui en fait la demande, est âgée d'au moins 16 ans
et est titulaire d'un certificat de fin d'études secondaires
accordé pour un des métiers de la construction et
délivré par une institution reconnue par le ministère de
l'Éducation; 2° âgée d'au moins 16 ans, pour laquelle
un employeur enregistré à la Commission de la construction du
Québec formule une demande de main-d'oeuvre et fournit à son
égard une garantie de travail d'une durée d'au moins 500 heures
échelonnées sur une période d'au plus une
année.1"
Notre association considère que l'âge minimum requis pour
la délivrance d'un certificat d'apprentissage est trop bas et est
préjudiciable, tant en ce qui concerne le travailleur qu'en ce qui
concerne l'entrepreneur.
En effet, d'une part, nous croyons qu'il s'agit là d'un incitatif
pour les jeunes à abandonner l'école pour aller joindre le
marché du travail par le biais alléchant de l'industrie de la
construction, y travailler quelques mois et être admissibles par la suite
aux prestations d'assurance-chômage.
D'autre part, l'embauche de ces trop jeunes travailleurs fait peser sur
l'entrepreneur un lourd fardeau de responsabilité en ce qui a trait
à la sécurité devant régner sur le chantier, car le
niveau de maturité de ces travailleurs n'est sûrement pas
suffisant pour assurer le respect de toutes les mesures de santé et de
sécurité que doit implanter l'entrepreneur.
Pour toutes ces raisons, nous suggérons fortement que l'âge
minimum requis pour l'obtention du certificat d'apprentissage soit de 18
ans.
En ce qui a trait à la deuxième condition permettant
l'obtention d'un certificat d'apprentissage, nous préconisons
l'abolition du minimum garanti de 500 heures à l'égard du nouveau
travailleur qui débute à l'âge minimum car cela constitue
pour celui-ci une incitation à ne travailler annuellement que durant ces
500 heures qui le rendent automatiquement admissible à recevoir les
prestations de la Régie de l'assurance-chômage.
Par ailleurs, l'élimination du projet de loi 119 de ce minimum
garanti d'heures de travail obligera l'entrepreneur à offrir une
durée d'emploi suffisante pour intéresser les nouveaux
salariés et les inciter à accepter de travailler pour eux et de
cette façon le but recherché par cet article sera quand
même atteint.
Les articles 34, 35 et 36. Ces trois articles traitent de la
délivrance du certificat d'occupation et l'article 35, plus
particulièrement, spécifie que le certificat de
compétence, le certificat d'occupation et le certificat d'apprentissage
doivent indiquer la région du domicile de son titulaire, ce qui nous
amène à traiter du concept de la priorité
régionale.
Nous ne nous insurgeons point contre la protection de la main-d'oeuvre
régionale qui, du reste, s'avère être la règle
générale prévalant partout, principalement à cause
du coût de déplacement de la main-d'oeuvre provenant d'une autre
région; ce que nous désirons mettre en relief est qu'il existe
certaines situations où l'entrepreneur doit, dans le cadre de
l'exécution particulière d'un contrat, pour des raisons de
compétence spécifique et de productivité ou
d'opération adéquate et fiable d'équipements complexes et
dispendieux, avoir recours aux services de main-d'oeuvre de ses employés
permanents, qu'il connaît et en qui il a confiance.
D'autant plus que, pour certains entrepreneurs et travailleurs, il
s'agit d'un droit acquis qui leur a été conféré par
le règlement sur le placement.
Nous recommandons donc que soit totalement éliminé le
concept de priorité régionale et ce, pour toutes les
catégories de salariés.
En conclusion, l'association veut, par ce mémoire, bien faire
connaître sa position sur le projet de loi dans son ensemble et sur
certaines dispositions particulières. Certaines représentations
sont des suggestions à cette commission et au ministre. Elles sont
identifiées comme telles. D'autres peuvent être qualifiées
de primordiales pour les membres de notre association.
Voilà pourquoi, même si nos membres reconnaissent dans le
projet de loi un effort louable pour améliorer la loi existante, ils ne
pourront accorder leur appui sans réserve tant et aussi longtemps que le
législateur n'aura pas inclus des dispositions pour tenir compte des
représentations que nous considérons comme essentielles et que
nous vous présentons dans ce mémoire.
Nous remercions les membres de la commission de nous avoir donné
l'occasion de présenter ce mémoire et nous sommes à votre
disposition pour répondre aux questions qu'il a pu susciter.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci beaucoup. Je vais avoir deux
questions à vous poser dont une que vous avez entendue à
répétition, que j'ai posée à peu près
à l'ensemble des organismes qui se sont présentés devant
nous: Dans le cas où il y a eu ouverture des bassins pour pénurie
anticipée de main-d'oeuvre, est-ce que votre association a
été consultée?
M. Richard (Gabriel): Notre association n'a pas été
consultée comme telle pour savoir si nous étions d'accord ou non.
Nous sommes avertis régulièrement par l'Office de la construction
qui nous envoie chaque mois
des documents nous renseignant sur la situation et il nous ouvre la
porte pour faire les représentations que nous jugeons
nécessaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoî): Vous êtes les premiers
à aborder le sujet de l'âge de 16 ans pour le jeune qui pourrait
se retrouver sur le marché de la construction et vous apportez des
arguments qui sont intéressants. Je vais tenter de vous expliquer
pourquoi on s'est arrêté au chiffre de 16 ans. C'est l'âge,
en fin de compte, en fonction duquel il y a une obligation de
fréquentation scolaire. Avec les transformations que le ministère
de l'Éducation s'apprête à faire pour l'obtention d'un
certificat d'études professionnelles au niveau du secondaire ou d'un
diplôme d'études professionnelles - on parle de secondaire IV, de
secondaire V et même de secondaire V prolongé dans un secondaire
VI, lorsque le jeune sortira, de façon pratique, il sera
âgé entre 17 et 19 ans, plutôt 19 ans. On n'a pas voulu
apporter d'autres critères d'âge que ceux-ci, mais de façon
pratique, ce sera 18 ou 19 ans. Je ne vous dis pas qu'il n'y aura pas
d'exception: un jeune très talentueux qui aura sauté des
années au cours de son primaire, même au cours de son secondaire,
qui n'arrivera pas sur le marché à l'âge de 16 ans, s'il
choisit la construction, sera admissible. De façon pratique, vous ne les
aurez pas à 16 ans, à cause de la formation qui est requise au
niveau secondaire. Je ne sais pas si cela vous satisfait... Si c'est un jeune
génie de 16 ans qui choisit la construction.
M. Richard (Gabriel): II ne choisira pas cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...on ne veut pas lui enlever la
possibilité de le faire.
Une voix: II va devenir avocat.
M. Richard (Gabriel): Si c'est un jeune génie, il ne
choisira pas d'être journalier ou menuisier, il va choisir de poursuivre
son cours. Moi, je serais bien plus satisfait si 18 ans était inscrit
dans la loi, parce qu'il faut savoir que la décision d'aller sur le
marché de la construction va se prendre par un jeune qui a 15 ans, alors
il est en secondaire IV. Je suis persuadé qu'un jeune de 15 ans n'est
pas capable de prendre cette décision. Je ne voudrais pas que....
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne peut pas l'obliger, d'un
autre côté, à moins de changer la loi concernant le
ministère de l'Éducation, à la fréquentation
scolaire après l'âge de 16 ans. Maintenant, pour celui qui voudra
entrer comme apprenti, il y a des critères quand même: avoir 16
ans au plus, être titulaire d'un diplôme du programme de certificat
d'enseignement professionnel ou diplôme d'enseignement professionnel.
Cela lui donne, normalement, 18 ou 19 ans. Là où il peut
s'insérer, c'est à 16 ans ou plus, quand il a réussi des
cours spécialement conçus pour les manoeuvres. À ce
moment, il pourrait possiblement s'insérer, mais on ne peut pas changer
l'obligation de l'âge scolaire, donc, que fait-il entre 16 et 18 ans, si
on interdit, à ce moment, à ce jeune d'entrer? On a l'obligation
de la fréquentation scolaire qui s'arrête à 16 ans. Est-ce
qu'on peut le discriminer à ce moment?
M. Mailhot (Yves): M. le ministre, on voudrait attirer votre
attention sur l'aspect sécurité de la question. Nos
employés, comme vous le savez, sont très souvent ou presque
toujours, dans le cas des opérateurs d'équipement, appelés
à travailler sur des équipements complexes, très
dispendieux surtout, et...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, là, vous ne parlez
pas des manoeuvres, vous parlez de vos employés qualifiés ou de
vos apprentis.
M. Mailhot: C'est cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on vous dit, en fonction de
vos qualifiés, je pense que vous n'avez pas besoin de vous
inquiéter. S'ils commencent comme apprentis à 19 ans, ils
arriveront qualifiés, selon le module de qualification à 20 ou 21
ans, selon leur spécialité. La seule possibilité qui
pourrait rester, ce seraient les manoeuvres. Dans les grands travaux
d'asphalte, j'ai déjà vu des jeunes derrière les camions,
ils étendaient l'asphalte avec un petit râteau, ils se
"maganaient" un peu, mais ils faisaient l'ouvrage.
M. Richard (Gabriel): II reste quand même, M. le ministre,
qu'à 16 ans un jeune ne trouve pas grand-chose dangeureux. Il est
prêt à faire n'importe quoi. Il risque de se blesser et ce sont
des blessures qu'il va garder toute sa vie.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est pour cela que, s'il a 16
ans, sa seule porte d'accès c'est comme manoeuvre et le premier cours
est un cours de santé et de sécurité, non pas des cours
qu'on donne présentement, mais des cours qui seront établis par
la commission.
M. Richard (Gabriel): Mais pour bien comprendre ces cours de
sécurité, il faut absolument avoir une maturité suffisante
et je pense que les jeunes de 16 ans ne l'ont pas. Il y a aussi des gestes
dangeureux qui
sont posés dans le domaine de la construction. Ils
résultent d'un manque de concentration et c'est bien typique de jeunes
adolescents.
M. Chevrette; On a une discussion sur l'éducation. Le
secondaire professionnel court, par exemple, avec une option - le petit cours
raccourci du secondaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a arrimage entre le
ministère... Vous devriez prendre connaissance à fond du document
qu'a rendu public M. Ryan sur les modifications concernant le secondaire et son
système. Il y a le certificat qui mène au minimum à un
secondaire IV, et il y a le diplôme qui mène au maximum à
un secondaire VI, si je peux utiliser l'expression.
Une voix: Cela pourrait nous faire un autre bon sujet de
discussion.
M. Claveau: Ce ne sera pas applicable au 1er janvier.
Une voix: Septembre.
M. Claveau: Alors, un moratoire d'un an.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. (20 h 30)
M. Giroux (Claude): Pour enchaîner là-dessus, M. le
ministre, on pourrait en déduire que pour un étudiant de 16
ans... On brûle un peu les étapes et à 16 ans et demi, il
est admissible à travailler dans la construction. Cela est
peut-être un peu jeune. Dans les particularités de notre
industrie, on sait qu'il y a beaucoup d'équipements lourds. Je ne suis
pas certain qu'un étudiant de 16 ans soit apte à travailler
régulièrement sur un chantier de construction. C'est
peut-être la seule crainte qu'on peut avoir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être dans les grands
travaux au dans le type de travaux que vous faites, mais je pense qu'on ne peut
pas l'exclure de l'ensemble de la construction. Vous parlez du type de travaux
dans lesquels vous êtes impliqués et vous voyez une application
pratique beaucoup plus difficile que les autres. Les autres ne nous ont pas
souligné cela.
M. Chevrette: II y a la CSD qui trouvait cela jeune, mais sans
que ce soit aussi précis dans son mémoire. Elle a exprimé
une réserve sur l'âge aussi.
M. Giroux: C'est probablement à cause d'une
particularité de notre industrie qu'on souligne le fait.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va.
M. Chevrette: Moi, je veux parler surtout de la mobilité
de la main-d'oeuvre. J'ai des amis qui sont constructeurs de routes et je sais
qu'il y a de la machinerie spéciale, très sophistiquée qui
fait en sorte que la main-d'oeuvre locale ou régionale, on ne la trouve
pas nécessairement. Je comprends votre approche sur la question de faire
sauter la priorité régionale et la priorité locale. II y a
des patrons qui sont même venus demander la priorité locale au
cours des audiences. C'est bien sûr que cela dépend sans doute des
corps de métiers, etc. N'y aurait-il pas moyen de faire votre approche
de deux façons? Vous avez quand même une main-d'oeuvre très
spécialisée dans la machinerie ultradispendieuse, pour ne pas
dire plus. On peut vous brûler un "grader" en deux jours; c'est facile.
Un scalpeur d'asphalte ou autre machinerie du genre, je suppose que cela
coûte quelques sous aussi. Mais quand on parle de manoeuvres, prenez, par
exemple, ceux qui ont les fameux petits drapeaux rouges le temps que vous
faites des travaux ou encore celui qui a le râteau, ce n'est quand
même pas une main-d'oeuvre spécialisée. Est-ce que vous
n'accepteriez pas, c'est une question que je vous pose... Il y a deux volets
dans l'approche que vous présentez. Vous dites que, pour la
main-d'oeuvre spécialisée - et je pense qu'il faut le
reconnaître - on ne lance pas n'importe qui, ce n'est pas un jouet, ce
n'est pas un Tonka. Ne pourrait-on pas envisager, sans la main-d'oeuvre
spécialisée, une mobilité de main-d'oeuvre plus grande,
dans votre cas et, pour ce qui est de la main-d'oeuvre qu'on appelle les
manoeuvres, qu'il y ait une certaine forme de priorité régionale?
Parce que vous y gagnez, il me semble, de ne pas emmener un gars qui va avoir
le "flag" dans les mains, entre vous et moi, en Abitibi. Même si vous
alliez en Abitibi, à Val-d'Or ou à Mont-Laurier, de toute
façon, vous n'emmèneriez pas un gars pour tenir le "flag" au prix
du décret. Est-ce que ce n'est pas plutôt cela que vous voulez
dire? Car tel que stipulé, vous demandez la mobilité
entière et totale.
M. Giroux: Je pense qu'on ne peut pas faire autrement
qu'être d'accord avec ce que vous avancez. Il est évident qu'un
entrepreneur n'a pas intérêt à prendre un travailleur...
Par exemple, moi, je suis de la région de la Beauce et, si je travaille
dans la région de Sherbrooke, je n'ai pas intérêt à
traîner avec moi le gars qui va travailler comme manoeuvre, payer les
frais de déplacement, de chambre et pension alors que je peux l'avoir
localement. Par contre, quand on parle d'opérateurs d'équipements
lourds, je pense que vous venez de cerner le problème assez bien. On a
tout intérêt à essayer d'emmener nos opérateurs
principaux pour des questions d'ordre économique, de
production et pour toutes sortes de raisons. Je pense qu'au niveau des
manoeuvres on n'aurait pas d'objection.
M. Richard (Gabriel): On peut ajouter aussi que c'est ce que nous
faisons couramment, tous les jours, depuis que le règlement de placement
existe. Tout ce que nous voulons avoir, c'est la main-d'oeuvre
nécessaire pour protéger notre équipement et notre
productivité. Quant aux autres, c'est plus économique d'utiliser
la main-d'oeuvre locale et c'est ce que nous faisons.
M. Chevrette: L'expression anglaise qu'on emploie toujours, c'est
que l'employeur peut emmener ses "key men". C'est l'expression qui était
utilisée lors de la commission Cliche, je m'en souviens, des hommes
clés. Cela pouvait vouloir dire un contremaître qui s'y
connaissait bien; cela pouvait vouloir dire aussi l'individu
ultraspécialisé dans un type d'équipement plutôt
rare. Bien sûr, si vous me dites que le rouleau d'asphalte est
ultraspécialisé, je ne suis pas certain de cela. J'en ai
roulé un moi-même cet été et je ne suis pas un
opérateur de machinerie lourde. Cela ne s'apprend pas...
Une voix: Avez-vous votre carte? Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Chevrette: Non, c'était dans la cour chez nous que je
l'ai fait faire. Cela ne prend pas nécessairement un homme qui a de
grandes compétences, entre vous et moi, en machinerie lourde. Quand je
pense è vous autres, je pense toujours aux machines sophistiquées
qu'on voit sur le boulevard Métropolitain ou sur les grandes routes
quand vous faites de la récupération en asphaltage. II y a sans
doute quelques machines aussi -je pense aux "graders" - sur lesquelles on ne
prend pas n'importe qui. J'ai vu des opérateurs de "grader"...
Uniquement l'angle, les fossés sont remplis, ce n'est pas long. Si tu
n'as pas le tour, ça creuse plutôt que de se déverser et on
sait ce qui arrive. Je pense que, pour la machinerie lourde dite usuelle,
à peu près dans toutes les régions du Québec, on
pourrait être moins sévère pour cette
catégorie-là que pour l'ultraspécialisation.
M. Maîlhot: M. Chevrette, il y a une autre dimension
à laquelle il faut faire attention. On a peut-être tendance
à penser que, dans notre industrie, les entreprises sont toutes grosses,
les chantiers tous importants. Il y a une foule de petits et de moyens
entrepreneurs qui se promènent au Québec et qui ont de
très petits chantiers. Ceux qui font de l'asphaltage, en
général, vont asphalter trois ou quatre jours à une place,
une semaine; il y a beaucoup de contrats pour lesquels un employeur va se
déplacer pour une semaine, deux semaines, trois semaines, un mois. Je
pense qu'il ne sera pas question, chaque fois qu'il change de région,
qu'il soit obligé de changer ses opérateurs de "grader", ses
opérateurs de rouleaux, etc. Je pense qu'il faut faire attention
à cette dimension-là.
M. Richard (Gabriel): II faut aussi ajouter les entrepreneurs qui
construisent des lignes de transmission. Il y en a peut-être douze ou
quatorze, au Québec, qui montent des lignes de transmission. Comme vous
le savez, celles-ci sont généralement longues et elles font
souvent plus qu'une région. C'est un travail de spécialiste. Les
gens qui veulent assurer leur productivité ont besoin d'utiliser la
main-d'oeuvre qu'ils connaissent et en laquelle ils ont confiance. C'est la
même chose dans le domaine des conduites souterraines: qu'on pense aux
intercepteurs ou aux conduites d'électricité, etc. On a
parlé d'ascenseur à la commission. Il y a beaucoup
d'entrepreneurs qui ont des spécialités et qui doivent les
exécuter partout en province pour vivre et la seule manière de le
faire, c'est avec leurs hommes permanents.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: M. le Président, dans le fond,
est-ce que ce n'est-pas ce qui se passe? Priorité régionale ou
locale ou non dans la loi... Vous partez avec vos experts et vous allez faire
le job. C'est ça?
M. Richard (Gabriel): C'est exactement ce que nous faisons
actuellement, mais nous croyons qu'il y a un danger qu'avec la nouvelle loi et
à cause de mesures transitoires ceci soit changé pour forcer les
entrepreneurs à employer des gens locaux à 100 %. Nous vous
disons que ça ne peut pas se faire.
M. Théorêt: Vous demandiez à votre conseiller
juridique si, légalement, on peut faire ça.
M. Richard (Gabriel): Je n'ai pas besoin de le lui demander,
parce que je sais que vous ne pouvez pas le faire, mais dans un an vous pourrez
peut-être le faire.
M. Chevrette: Autrement dit, vous ne connaissez pas
l'éventuelle façon de contingenter ou de contrôler. Je
comprends.
Par le fait que le ministre dise qu'il maintient le règlement de
placement actuel, si le règlement de placement actuel vous le permet,
c'est juste la carte qui n'est pas là. Je comprends votre argumentation.
Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce qu'il y a d'autres
questions de ce côté-ci? M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Je voudrais parler justement de la question des
grands travaux qui intéresse particulièrement ma
région.
Une voix: Je ne comprends pas pourquoi.
M. Claveau: Vous avez donné un très bel exemple en
parlant des lignes de transmission. Il reste que, si on parle d'un monteur de
lignes, de tout ce qui s'appelle structure des tours, je suis d'accord qu'il y
a des spécialisations qu'il faut respecter là-dedans, mais, quand
on met quelqu'un sur un "loader", si on prend, par exemple, une région
comme la mienne où il y a peut-être 10 % des gens qui savent
travailler avec un 950 ou un 980, c'est facile de vérifier dans le
bassin avant pour savoir s'il y a des gens dans le milieu qui peuvent
opérer ça et qui ont aussi des compétences. La même
chose pour les ancrages de tours, des foreurs pour les ancrages de tours. J'ai
des cas bien spécifiques où, dans un milieu donné, des
mineurs qui sont des foreurs expérimentés, en fonction des
articles de la nouvelle loi, pourraient s'engager pour forer sur des ancrages
de tours. La tendance actuelle est, même s'ils sont disponibles, de les
laisser de côté pour amener des foreurs d'ailleurs. Je l'ai
vécu personnellement dans mon milieu. Il me semble qu'il devrait y avoir
moyen de vérifier avant pour savoir s'il y a effectivement dans le
milieu de la main-d'oeuvre vraiment compétente pour le faire. Un
"grader", je suis bien d'accord que c'est une machinerie qui vaut 300 000 $ ou
350 000 $, mais il reste que les compagnies minières, les chantiers
forestiers, ils en ont tous, des opérateurs de "grader" qui sont souvent
peut-être même plus compétents que des travailleurs de la
construction eux-mêmes.
M. Giroux: Je comprends un peu votre objection et je comprends
aussi que vous êtes familier avec l'équipement par la nomenclature
des équipements que vous avez faite quand vous avez parlé des 950
ou des 966. II faudrait peut-être dire là-dessus que chaque
entrepreneur a un peu sa façon de travailler. C'est évident que
les opérateurs de "loader" ou de pelle hydraulique, il y en a autant
dans la région de Sherbrooke que dans la région de Québec
ou la région de Montréal. Il s'agit bien souvent de changer un
opérateur sur un équipement. Par exemple, sur une équipe
de pose d'aqueduc et d'égout, si vous arrivez avec un nouvel
opérateur qui ne connaît peut-être pas la façon de
fonctionner, vous allez ralentir la production de votre équipe
peut-être pour une période donnée parce que les qars sont
habitués de travailler ensemble. C'est plutôt dans ce
sens-là qu'on le voit. C'est évident, on est d'accord que des
opérateurs, il y en a de disponible, un peu partout, mais il reste qu'on
a des gars clés, comme M. Chevrette le mentionnait tout à
l'heure, ceux qu'on peut appeler nos "key men", et on tient à les
garder. Pour les garder, il faut les amener dans les régions où
on va travailler. Si on laisse ces gars-là de côté pendant
une certaine période et qu'on emploie d'autres travailleurs, ces
gars-là vont nous laisser ou vont aller travailler ailleurs. C'est un
peu dans ce sens-là qu'on fait la démarche de la mobilité
de la main-d'oeuvre dans les diverses régions.
M. Claveau: Par exemple, je pourrais vous donner des situations
bien concrètes. Sur des équipes d'opérateurs de "loader",
de "grader", etc., supposons que votre homme clé, votre personne
clé, comme vous dites, est malade, doit s'absenter, part en vacances ou
prend congé. Dans les grands travaux, souvent on fonctionne par
périodes, 10-10, 6-8, comme le fait Hydro-Québec. Durant les
périodes où la personne est absente, si vous savez que vous
pouvez identifier des gens dans le milieu qui peuvent la remplacer, je ne vois
pas pourquoi on ferait monter des remplaçants d'en dehors.
M. Giroux: C'est évident que, dans un cas comme celui-ci,
on peut prendre un employé local. Quand vous parlez de quart de travail
ou de période de vacances, il faut dire que des gars à l'emploi
d'une entreprise qui fait des travaux d'envergure moyenne ne prennent pas trop
de vacances au cours de l'été. D'ailleurs, nous, aux routes et
grands travaux, on n'arrête même pas pour la période des
vacances. Nos qars travaillent pendant la saison, du mois de mai au mois de
décembre, et ils sont là toutes les semaines, à moins,
évidemment, que quelqu'un ne soit malade et qu'on doive le remplacer. En
général, ce sont les mêmes opérateurs qui font toute
la saison.
M. Claveau: Je peux vous dire que, personnellement, je comprends
vos revendications par rapport à certaines catégories de
machinerie très spécifiques. Si vous avez un 85 tonnes qui vous a
coûté à peu près 1 000 000 $, je suppose que vous
avez toute la latitude possible de mettre un opérateur là-dessus
que vous avez formé, que vous connaissez bien. Mais, dans l'ensemble,
règle générale, par rapport aux travaux qu'il y a à
faire, je pense que la machinerie vraiment sophistiquée, hautement
spécialisée, la masse de main-d'oeuvre là-dedans est quand
même très limitée et, dans l'ensemble, je crois que la
priorité régionale ou même locale pourrait s'appliquer
autant dans les
grands travaux que dans n'importe quel autre corps de travail ou secteur
d'intervention.
M. Richard (Gabriel): Je pense que c'est ce que nous faisons
actuellement dans le domaine. S'il y a des ouvriers spécialisés,
des foreurs dans la région, je pense que, de façon
générale, les entrepreneurs les embauchent. Ceux que les
entrepreneurs ne veulent pas embaucher, ce sont les métiers
extrêmement spécialisés, des techniques
particulières qui appartiennent aux entrepreneurs, à leurs
méthodes de construction, et ils ont besoin de ces gars-là pour
faire le travail dans le temps qu'ils ont dit pour le montant d'argent qu'ils
ont estimé. Chaque fois qu'il y a des gens disponibles dans les
régions et qu'ils sont capables de faire te travail de la même
manière que les autres, les entrepreneurs, à leur avantage, parce
qu'ils évitent de payer les frais de déplacement, embauchent ces
gens-là.
Le Président (M, Charbonneau): Cela va? Mme la
députée de Kamouraska-Témis-couata.
Mme Dionne: Je voudrais continuer sur le sujet des
régions, parce que je viens de la région de
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Effectivement, j'ai vu des travaux faits
pour la Société d'assainissement des eaux où les
entrepreneurs venaient... Je pense même qu'on amenait l'équipe de
manoeuvres. Dans ce sens-là, il est certain, quand on regarde les gens
en régions où on n'a pas la chance d'avoir des entrepreneurs,
disons, de grands travaux, qu'il y en a qui viennent peut-être plus de la
Beauce, de Québec ou de Montréal. Il est certain que nos
travailleurs doivent faire deux semaines pour un entrepreneur, trois semaines
pour un autre, pour accumuler leurs dix semaines de chômage pour l'hiver.
Lorsqu'on voit arriver les entrepreneurs de l'extérieur, je vous
garantis que ce n'est pas facile pour les gens qui ont leur carte de voir
travailler des gens de l'extérieur pour qui on paie des frais de
déplacement, tandis que, si on épargne les frais de
déplacement, je pense qu'avec ce petit coup, peut-être, financier
pour de la formation, on est regagnant en tant que tel.
Ces gens - en tout cas, je pense aux miens - sont vaillants et veulent
travailler. À ce niveau, je pense qu'on ne peut pas dire de façon
générale que tous les entrepreneurs choisissent des gens des
régions avant d'autres travailleurs, avant les leurs qu'ils
amènent avec eux. On l'a vécu dans ma région. (20 h
45)
M. Mailhot: C'est ce que je vous disais tout à l'heure: la
différence entre les gros travaux et les petits travaux.
Mme Dionne: Je veux dire...
M. Mailhot: Quand il y a une grosse "job", quelqu'un s'en va
là pour l'été, c'est une affaire. Ils s'organisent sur
place. Mais si je travaille dans la région de Saint-Hyacinthe et si je
prends un travail à Sherbrooke pour deux semaines, je ne suis pas pour
mettre tous mes gars dehors à Saint-Hyacinthe et dire: Je vais embaucher
des gars de Sherbrooke pour deux semaines. Quand je vais revenir, mes gars ne
seront plus là. C'est sûr qu'on amène notre monde avec
nous.
Mme Dionne: Certainement. Là, je reviens aux manoeuvres.
Il y a peut-être des travailleurs pas aussi spécialisés que
ceux dont parlait le député de Joliette. Mais il reste que c'est
un fait qu'en régions, deux semaines pour un entrepreneur ou deux autres
semaines, ce sont des moments importants. Dans ce sens, il est certain que je
n'étais pas tout à fait d'accord quand vous parliez d'enlever
complètement le domaine régional, parce que c'est important.
C'est un peu la survie des travailleurs du coin. Il y a un autre point que je
voulais ajouter. Vous parliez de l'âge tout à l'heure, 16 ou 17
ans. Disons que je ne partage pas tout à fait votre point de vue quand
vous dites qu'à 16 ans peut-être qu'il y a un peu de manque de
maturité face à des équipements très
sophistiqués. Il est certain qu'un entrepreneur ne mettra pas un jeune
de 16 ou 17 ans comme apprenti ou comme manoeuvre sur une machine
sophistiquée. Par contre, je sais fort bien qu'un jeune de 16 ou 17 ans,
qui a décidé de s'en aller dans la construction, à mon
avis, a une certaine maturité. Je ne le trouve pas quand même si
jeune que cela. Il y a des jeunes de 16 ou 17 ans qui en ont peut-être
plus même que les gens de 40 et 50 ans. Je veux dire...
M. Giroux: Je pense que vous n'avez pas complètement tort
quand vous dites cela. Sauf que l'étudiant de 16 ans...
Mme Dionne: Je m'excuse.
M. Giroux: Je voudrais simplement ajouter qu'un travailleur de la
construction qui vient sur un chantier, même s'il n'est pas un
opérateur, si on l'utilise dans les tranchées, par exemple,
connaît quand même un niveau de risque assez élevé.
Je pense que cela prend un bonhomme qui a quand même une certaine
maturité et qui peut être capable de réaliser le danger. Le
fait d'être manoeuvre, de poser des conduites dans une tranchée de
dix ou douze pieds de profondeur, c'est quand même un risque assez
élevé. Je ne suis pas certain et, à vrai dire, je suis
convaincu qu'un étudiant de 16 ans n'a pas la maturité pour faire
face à
tous ces dangers. À 16 ans, en tout cas, c'est mon opinion.
Mme Dionne: On retrouve dans l'agriculture ou dans d'autres
secteurs d'activité des jeunes avec des équipements qui valent 40
000 $, 60 000 $. Ils ont cet âge et sont même parfois bien plus
jeunes. On pourrait en faire un débat.
M. Chevrette: 30 secondes. C'est vrai qu'il y a des jeunes de 16
ans qu'on peut retrouver sur un équipement assez sophistiqué,
mais très souvent cet équipement appartient à papa. Quand
c'est un entrepreneur, cela n'appartient pas à papa. C'est cela qui est
la grande différence.
M. Giroux: C'est ce que j'allais dire. Le jeune qui travaille sur
la ferme familiale avec son père et sa mère n'agit pas de la
même façon qu'un étudiant qui arrive sur un chantier de
construction. Ce dernier arrive pour la première fois et, là, il
voit le milieu et il veut s'intégrer au groupe. Bien souvent, il prend
des chances inutiles. Je ne pense pas que ce soit pertinent d'avoir un jeune de
cet âge sur un chantier de construction.
Le Président (M. Charbonneau): Moi, j'aurais seulement une
question à poser à l'égard de l'article 33. Dans votre
mémoire, à la page 15, vous préconisez l'abolition du
minimum garanti de 500 heures à l'égard du nouveau travailleur
pour le certificat d'apprentissage. Nous, nous trouvons que déjà,
ce n'est pas suffisant. C'est une porte toute grande ouverte. J'ai l'impression
que ce que vous proposez vous, c'est de l'ouvrir vraiment, non seulement
d'ouvrir la porte, mais de l'attacher de chaque côté pour qu'on
soit sûr qu'elle va rester ouverte. Ne trouvez-vous pas que c'est un peu
exagéré?
M. Richard (Gabriel): Nous disons cela parce que nous relions 500
heures à 16 ans. Nous disons que si nous promettons aux jeunes de 16 ans
une garantie de 500 heures au taux qui est payé dans le domaine de la
construction, nous lui disons qu'en 500 heures il fait le même salaire
annuel qu'un autre qui travaille toute l'année au salaire minimum. En
plus, on lui permet d'aller sur l'assurance-chômage. Alors, avec des
mesures aussi généreuses, comment peut-on inciter les jeunes, qui
souvent - et il y en a beaucoup -ne veulent plus aller à l'école,
à rester à l'école?
Le Président (M. Charbonneau): Si on augmentait
l'âge comme vous le préconisez, est-ce que, néanmoins, on
ne se retrouverait pas avec le fait que... C'est un peu ce qu'on trouvait de
trop facile. En ce qui concerne les garanties d'emploi, on sait comment il peut
y avoir des garanties de complaisance qui feraient en sorte qu'on contournerait
l'objectif qu'on avait. C'est évident que cela dépend des
sanctions, mais le problème est que, pour que ce soit efficace, il va
falloir que vous ayez des contrôleurs. Ce n'est pas comme cela que vous
allez réduire la bureaucratie. Autrement dit, dans la mesure où
vous mettez en place des mécanismes où cela va prendre des
contrôles, pour que les contrôles soient efficaces, cela prend des
contrôleurs. Or, le problème, c'est qu'on trouve qu'en faisant
cela, dans le fond, vous ouvrez la porte à trop de monde. Même si
on mettait cela à 18 ans ou même à 20 ans, juste 500
heures, sans compétence autre... En tout cas, j'ai l'impression
qu'à cet égard je ne suis pas sûr qu'on défende
votre point de vue lorsqu'on va arriver à cet article en commission
parlementaire.
M. Richard (Gabriel): Écoutez, M. le Président.
C'est sûr qu'à 18 ans notre argument est moins fort qu'à 16
ans. De toute façon, l'étudiant est majeur à 18 ans et il
a le privilège de prendre les décisions qu'il veut concernant le
restant de sa vie. Mais à 16 ans, c'est le père qui doit prendre
la décision.
Le Président (M. Charbonneau): D'accord. Je comprends que,
finalement, à cet égard, votre argumentation est plus avec la
logique de l'âge qu'avec le fait que c'est une porte d'entrée plus
facile dans l'industrie de la construction et que cela ouvre plus grand le
bassin éventuellement.
M. Richard (Gabriel): C'est cela.
Le Président (M. Charbonneau): D'accord. On se
comprend.
S'il n'y a pas d'autres questions, il ne me reste qu'à vous
remercier. Je vais demander au ministre et au critique de l'Opposition de le
faire également.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous remercie de la
présentation de votre mémoire qui, soit dit en passant, est
très bien structuré. Vous l'avez fait dans les limites de temps
qui étaient imparties. C'est une discipline qui n'est pas facile
à respecter en commission parlementaire. Vous êtes le dernier
groupe que nous entendons. Nous vous remercions de votre patience parce que
vous avez sans doute suivi les travaux depuis hier matin. Ce n'est pas parce
que vous êtes les derniers que nous prêterons moins d'attention
à vos recommandations. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, messieurs et mesdames. Bonne chance.
Le Président (M. Charbonneau): Messieurs et mesdames,
bonsoir et à la prochaine.
Le mandat ayant été exécuté, les travaux de
la commission sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 20 h 53)